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Full text of "Faune des vertde la Belgique"

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FOR  THE  PEOPLE 

FOR  EDVCATION 

FOR  SCIENCE 

LIBRARY 

OF 

THE  AMERICAN  MUSEUM 

OF 

NATURAL  HISTORY 

FAUNE 


DES 


r  r 


VERTEBRES  DE  LA  BELGIQUE 


SERIE  r>ES  OISBA.XJX 


o 


FAUNE 


DES 


mlEfflS  M  LA  II 


1 


Alphonse     DUBOIS 

DOCTEUR    EN    SCIENCES, 

CONSERVATEUR    AU    MUSÉE   ROYAL    d'hISTOIRE    NATURELLE    DE    liELGIQUE, 

CHEVALIER   DE    l'oRDRE    DE    LÉOPOLD, 

MEMBRE  DU  COMITÉ    ORXITHOLOGIQUE    INTERNATIONAL  ET  PERMANENT, 

MEMBRE    HONORAIRE,    CORRESPONDANT    OU    EFFECTIF    DE    PLUSIEURS    SOCIÉTÉS    SAVANTES. 


SERIE    DES    OISEAUX 
TOME  II 

(ISST  -   1894:) 


BRUXELLES 

A  LA  LIBRAIRIE  C.  MUQUARDT,  TH.  FALK  S' 

rtuo  dot*   t*arois4sions,    1 8-*-i<)-*.2S 


1894 

TOUS  DROITS  RÉSERVÉS 


F.KS 


OISEAUX  DE  I.A  BELGIQUE 


ORDRE    V 


L.KH  <^>ii/iLXi:uitH  ou  i*i<i:i:oi%H 


(Jdrddrrrs.  -  lifîs  l'ij^coiis  ont,  lo  coijiS  rainass<';,  lo  cou  court  ot 
la  f<Ho  ]Hîlil<î,  mais  bien  conform^o.  Leur  bec  est  court,  g^iiiôraloment 
faiblo  cX  mou  à  la  baso,  corné  seulement  h  son  (îxtiYMnit*'!  «jui  est 
bomb<jC  et  j>lus  ou  moins  crochue  à  la  pointe  ;  la  base  de  la  mandibule 
sup('irieure  est  garnie  d'une  membrane  (la  cire)  plus  ou  moins  cartila- 
gineuse et  pins  ou  moins  n'nll«''e,  dans  laquelle  s'ouvrent  les  narines  ; 
celles-ci  sont  {^'•éncralement  en  /orme  de  fente  lonjjitiidinale.  Les  ailes 
sont  formées  de  rémiges  foites  et  solides  dont  la  deuxième  est  la  plus 
longue;  la  (jueue  est  com|)osée  de  douze  rectrices,  exceptionnellement 
de  (juatorze  ou  de  sfîize;  elle  est  généi'alement  courte  ou  de  longueur 
moyenne  et  arrondie,  (jucdcpiefois  longue,  é(agéeetconi<jue.  Les  tarses, 
rarement  plus  longs  que  le  doigt  médian,  sont  couverts  d'écaillés 
court,e8,(!n  réseau  à  la  l'acte  suj)érieure,  disposées  transversabunentàla 
face  postéri(!ure  ;  les  doigts  sont  toujours  au  nombre  de  quatre  :  trois 
antérieurs,  libres  ou  reliés  les  nns  aux  autres  à  la  base  par  une  petite 
membrane  ;  le  pouce  (îst  libn;  ;  les  ongles  sont  fc>rts,  mais  courts  et  un 
I)eu  recourbés. 

Le  plumage  do  ces  oiseaux  est  serré  au  corps  et  la  base  des  plumes 
est  garni(;  de  duvet.  Les  sexes  difU'îrent  peu  ou  i»oint  enti-e  eux,  mais 
les  jeun(!S  sont  parfois  très  dilfi'Mejits  des  adultes. 

Tmmk  II.  —    IHS7. 


-  2  — 

L'œsophage  présente  un  jabot  dont  les  parois  s'épaississent  au 
moment  de  l'incubation.  A  cette  époque,  la  surface  interne  de  cet 
organe  présente  un  système  de  plis  et  de  glandules  disposés  en  réseau; 
elle  est  fortement  injectée  et  sécrète  un  liquide  d'apparence  lactée,  qui 
est  la  première  nourriture  des  petits.  Cette  particularité  distingue  les 
Pigeons  de  tous  les  autres  oiseaux. 

Les  genres  qui  composent  cet  ordre  ont  un  faciès  tellement  caracté- 
ristique, qu'il  est  impossible  de  les  confondre  avec  des  oiseaux  d'un 
autre  groupe. 

Hah,  —  On  rencontre  des  Pigeons  presque  sous  toutes  les  latitudes 
et  dans  toutes  les  parties  du  monde,  mais  c'est  l'Océanie  qui  nous 
fournit  les  espèces  les  plus  brillantes. 

Mœurs.  —  Les  Pigeons  sont  ordinairement  de  mœurs  sociables  et 
douces,  et  surpassent  bien  des  oiseaux  sous  le  rapport  des  facultés 
physiques  et  intellectuelles. 

Us  marchent  en  général  bien  et  longtemps,  quoique  leurs  pattes 
soient  très  courtes;  ceux  qui  paraissent  maladroits  à  terre,  sont 
d'autant  plus  agiles  sur  les  arbres  et  dans  l'espace.  La  plupart  ont  un 
vol  puissant  et  rapide;  ils  peuvent,  tout  en  volant,  se  détourner  brus- 
quement. Brehm  dit  avoir  vu,  en  Egypte,  des  Pigeons  nager; 
Naumann  assure  que  plusieurs  d'entre  eux  savent  plonger  en  cas  de 
nécessité. 

Leur  voix  est  le  plus  souvent  un  roucoulement  qui  ressemble  plus 
ou  moins  à  celui  de  nos  diverses  races  domestiques;  quelques-uns 
font  entendre  des  sons  tremblotants;  quelques-uns  hurlent;  d'autres 
rient;  il  y  en  a  qui  grognent  d'une  façon  désagréable  ;  d'autres,  enfin, 
produisent  des  sons  harmonieux  et  soutenus. 

Ces  oiseaux  ont,  en  général,  la  vue  excellente  et  l'ouïe  fine;  l'odorat 
et  le  gotlt  doivent  aussi  être  assez  développés.  Ils  sont  prudents  et 
craintifs,  mais  ne  paraissent  pas  pouvoir  distinguer  un  danger  réel 
d'un  danger  apparent. 

Depuis  les  temps  les  plus  reculés,  on  a  fait  des  Pigeons  l'emblème 
de  toutes  les  vertus,  et  cela  à  cause  de  leur  grâce,  de  leur  douceur  et. 
des  témoignages  de  tendresse  qu'ils  se  prodiguent  entre  eux.  Mais 
leur  fidélité  conjugale  n'est  pas  à  l'abri  de  tout  soupçon,  car  il  n'est 
nullement  prouvé  que  les  couples  restent  unis  durant  toute  leur  vie. 
Dès  qu'on  les  trouble,  certaines  espèces  abandonnent  leurs  œufs  et 
même  leurs  petits,  ce  que  la  plupart  des  passereaux  ne  font  pas  ;  ils  ne 
sont  pas  toujours  non  plus  compatissants  pour  leurs  semblables  ;  bref 


—  3  — 

ils   sont  loin   d'avoir  toutes  les   qualités   qu'on  leur  a   attribuées. 

Les  Pigeons,  à  peu  d'exceptions  près,  vivent  dans  les  bois  et  sont 
arboricoles;  très  peu  d'espèces  se  tiennent  sur  les  rochers,  mais  toutes 
recherchent  le  voisinage  de  l'eau.  Les  Pigeons  qui  habitent  les  con- 
trées du  Nord  émigrent  en  automne  ;  les  autres  sont  sédentaires  ou 
errants.  Leur  nourriture  se  compose  principalement  de  graines,  de 
baies,  de  fruits  et  autres  substances  végétales  ;  quelques-uns  prennent 
aussi  des  vers,  des  larves,  des  chenilles  et  des  petits  mollusques  ; 
ils  boivent  en  général  beaucoup. 

Reproduction.  —  Ces  oiseaux  construisent  leur  nid  sur  les  arbres, 
dans  les  buissons,  dans  les  arbres  creux  ou  dans  les  fissures  des 
rochers,  mais  rarement  à  terre.  Leur  nid  est  grossièrement  fait  de 
ramilles  sèches  lâchement  entrelacées.  Ils  ont  tous  plusieurs  couvées 
par  année,  mais  chaque  couvée  ne  se  compose  que  de  deux  œufs,  d'un 
blanc  pur,  que  les  parents  couvent  ensemble.  L'éclosion  a  lieu  au  bout 
de  quatorze  à  vingt  jours  suivant  les  espèces.  Les  petits  naissent 
faibles,  informes,  aveugles  et  couverts  d'un  rare  duvet  jaunâtre  ;  ils  ne 
quittent  leur  nid  que  quand  il  savent  voler.  Les  parents  leur  donnent 
d'abord  la  substance  laiteuse  que  sécrètent  les  parois  de  leur  jabot, 
puis  des  graines  ramollies,  enfin  des  semences  dures. 

Classification.  —  L'ordre  des  Pigeons  se  divise  en  quatre  familles, 
savoir:  L  les  Tréronidês,  2,  les  Colombidés,  3.  les  Gouridés,  4.  les 
Didunculidés.  La  seconde  famille  seule  a  des  représentants  en  Eu- 
rope. 


FAMILLE  DES  COLOMBIDES. 


Car.  —  Bec  de  longueur  moyenne,  faible,  corné  seulement  à  sa 
[lOinlc,  mou  à  la  base  qui  est  recouverte  d'une  membrane  cartilagi- 
neus*'  ou  cire;  naiinos  ouvertes  vers  le  milieu  du  bec  ;  ailes  allongées; 
queue  arrondie  ou  tronquée  à  angle  droit,  rarement  allongée  et 
étagée,  formée  de  douze  rectrices  ;  tarses  courts,  scutellés,. plus  ou 
moins  emplumés. 

C'est  à  cette  famille  qu'appartiennent  tous  les  Pigeons  indigènes, 
tant  sauvages  que  domestiques. 

Ihih.  —  (yC  groupe  est  représente  dans  les  cinq  parties  du  monde 
et  il  r()iiij)ivn(l  ])lus  d'espèces  que  les  trois  autres  familles  ensemble. 


__  4  - 

GENRE    XCIII 

COLOMBE.  —  COLUMBA. 

Colomba,  Rriss.  Ornitli.  I.  p.  80  (1760). 
Palumbus,  Kaup.  Nat'àrl,  Syst.  p.  107  (1829). 
Palumbœna,  Bp.  Cat.  Parz.  p.  9.  (1856). 
Trocaza,  Bp.  Comiit.  rend.  XLllI,  p.  837(1856). 

Car.  —  Bec  médiocre,  droit,  comprimé,  renflé  et  arrondi  à  l'extrémité  ; 
narines  étroites,  allongées,  horizontales,  surmontées  d'une  membrane  carti- 
lagineuse très  bombée;  ailes  allongées,  aiguës;  queue  ample,  arrondie  sur 
les  côtés  ou  rectiligne;  tarses  aussi  longs  ou  plus  courts  que  le  doigt  médian» 
plus  ou  moins  emplumés  au-dessous  de  l'articulation  ;  ongles  courts,  mais 
robustes. 

Hah.  —  Les  espèces  de  ce  genre  sont  répandues  en  Europe,  en 
Asie,  en  Afrique  et  en  Amérique. 


167.  —  La  Colombe  ramier. 
COLUMBA    PALUMBUS,    Briss. 

(PI.    167.) 

CoLUMBA  PALUMBUS,  Briss.  Omith.  1.  p.  89  (1760), 

Columba  palumbes,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  1.  p.  563  (1811). 

CoLUMBA  TORQUATA,  Leach.  Syst.  cat.  M.  B.  Br.  Mus.  p.  26  (1816). 

Columba  pinetorum,  Brm.  Isis.  1830,  p.  985. 

Palumbus  torquatus,  Bp.  Cat.  Par::,  p.  9(1856). 

Palumbus  excelsus,  Bp.  Compt.  rend.  XLIII,  p.  836  (1856). 

Columba  trocaz,  Morel,  Hist.  nat.  Açores,  p.  84  (1860). 

Palumbus  palumbus,  Gr.  Haml-Ust,  II,  p  233  (18^70). 

Die  RiNGELTAUBE,  en  allemand. 

The  ring-dove,  en  anglais. 

De  wouDDUiF,  en  flamand. 

Var.    Ca  ktis. 

Palumbus  torquatus,  var,  Blytli,  Cat.  B.  as.  Soc.  233  (1849). 

Palumbus  casiotis,  Bp.  Consp.  yen.  ai\  II,  p.  42  (1857). 

Columba  palumbus,  Adams,  Proc.  zool.  Soc.  1859  p.  187. 

Columba  palumbus  himalayana,  Schl,  Mus.  P.-B.  (Coltcmhœ)  p.  66  (1873). 

rmï^e:  0'",40;  ailes  0,253. 

Description  du  mdle  et  de  la  femelle  adultes.  —  Tète,  cou,  croupion 
et  sus-caudales  d'un  gris  bleuâtre,  plus  pâle  au  croupion;  tlos  et  ailes  cendrés  ; 
partie  inférieure  du  cou  orLée,  de  chaque  côté,  d'une  giande  tache  transver- 


—  5  — 


sale  blanche  avec  de  légers  reflets  rosàtres  et  verdàtres,  visibles  seulement 
sous  certain  jour;  celte  tache  est  entourée  d'une  teinte  verdâtre  à  reflets 
bleu  et  rose  violacé;  parties  inférieures  de  couleur  vineuse,  plus  sombre  et 
à  reflets  métalliques  sur  le  devant  du  cou;  ventre,  flancs  et  sous-caudales 
d'un  gris  bleuâtre  pâle;  bord  des  ailes  blanc  ;  rémiges  primaires  et  leurs  cou- 
vertures noirâtres,  bordées  extérieurement  de  blanc;  queue  d'un  cendré 
bleuâtre  foncé  en  dessus,  passant  au  noir  à  son  extrémité;  dessous  de  la 
queue  noirâtre  avec  une  large  bande  transversale  d'un  blanc  grisâtre.  Bec 
couleur  chair  avec  le  bout  jaunâtre  ;  la  cire  blanche  ;  iris  jaune  pâle;  pattes 
rouges;  ongles  bruns. 

La  femelle  diffère  peu  du  mâle  :  la  tache  blanche  du  cou  est  moins  étendue 
et  les  reflets  métalliques  sont  moins  prononcés. 

Jeune.  —  Sans  tache  blanche  sur  les  côtés  du  cou  et  sans  reflets  métal- 
liques; pour  le  reste,  assez  semblable  à  l'adulte,  mais  les  teintes  plus 
rembrunies;  l'extrémité  des  plumes  est  encore  plus  ou  moins  garnie  de 
filaments  jaunâtres.  Ce  n'est  (ju'environ  un  mois  après  la  sortie  du  nid  que 
les  plumes  blanches  du  cou  commencent  à  se  montrer. 

La  var.  Casiotis  ne  difl"èro  du  type  européen  que  par  la  couleur  des  taches 
blanches  du  cou  (jui  sont  d'une  teinte  isabelle. 


Hab. 


[pûfÔKÔtMWOl»»»!»" 


La  Colombe  ramier  habite  presque  toute  l'Europe  ;  elle  est 

assez  généralement  répandue  en 
Scandinavie  jusqu'au  61"  ou 
65''l.N.(6V/y^6?errt//)et  en  Russie 
jusqu'à  la  côte  méridionale  de  la 
mer  Blanche  [Meves).  Elle  est 
assez  commune  et  plus  ou  moins 
sédentaire  en  Belgique. 

Dans   le    midi    de   l'Europe, 
cette  espèce  est  plus  abondante 


en  hiver  qu'en  été;  il  en  est  de  même  en  Asie  Mineure  {KyOper)  et  en 
Palestine  [Tristraiu).  Elle  habite  également  le  nord-ouest  de  l'Afrique 
[Brake,  Loche),  les  Açores  {Godman)  et  les  iles  Baléares  {co)i 
Hnmojer)  ;  elle  est  de  passage  à  l'île  de  Malte  i^Wrighf).  On  l'observe 
accidentellement  dans  la  Sibérie  occidentale  [Finsch) 

La  var.  Casiotis  a  pour  patrie  la  Sibérie  occidentale  [Finsch],  le 
Turkestan  [Screi-tzoïc),  le  Caucase  [Radde)  et  l'Himalava  (5fA/<'r/r/). 

Mn'in-s.  —  Les  rigueurs  de  l'hiver  obligent  cette  esi»èce  à  quitter 
les  contrées  du  Nord,  d'où  elles  émigrent  par  troupes  de  ((uiiize  à  vingt 
sujets  et  même  parfois  par  bandes  composées  de  ciiiqnant»'  à  rrni 
individus,   voyageant  souvent  en  plein  jour.    Haiis   \e  mkI  (!<>   l'Ail»'- 


—  6  — 

magne  et  en  Belgique,  il  n'est  pas  rare  de  rencontrer  de  ces  Colombes 
durant  tout  l'hiver,  quand  celui-ci  est  peu  rigoureux;  mais  ce  sont 
ordinairement  des  oiseaux  venus  du  Nord  qui  viennent  remplacer 
ceux  qui  ont  niché  dans  nos  contrées.  Ceux-ci  nous  quittent  en 
octobre  et  reviennent  en  mars,  parfois  à  la  fin  de  février. 

La  Colombe  ramier  vit  dans  les  forêts  et  dans  les  bois,  surtout 
dans  les  parties  boisées  des  montagnes  où  les  conifères  sontabondants. 
Dans  les  plaines,  on  l'observe  partout  où  il  y  a  de  grands  arbres, 
dans  les  parcs,  les  avenues  et  les  jardins,  et  surtout  dans  les  localités 
où  des  parties  boisées  alternent  avec  des  champs.  A  l'époque  des 
migrations,  ces  Colombes  se  tiennent  plus  particulièrement  dans  ces 
derniers,  parce  qu'elles  y  trouvent  plus  facilement  leur  nourriture  ; 
mais  dès  qu'elles  sont  rassasiées,  elles  vont  se  percher  au  sommet  des 
grands  arbres,  se  cachant  volontiers  au  milieu  du  feuillage,  où  elles 
restent  parfois  des  heures  entières.  C'est  également  sur  les  branches 
supérieures  de  vieux  arbres  qu'elles  passent  la  nuit. 

La  Colombe  qui  nous  occupe  en  ce  moment,  est  un  oiseau  robuste, 
agile,  prudent  et  craintif;  du  haut  de  son  observatoire  elle  peut  voir  le 
danger  de  loin  et  l'éviter  à  temps.  A  terre,  elle  marche  pas  à  pas  en 
inclinant  la  tête  et  en  tenant  le  corps  horizontal.  Son  vol  est  vigoureux, 
rapide  et  gracieux,  mais  bruyant  à  son  début.  Elle  est  moins  sociable 
que  la  plupart  de  ses  congénères  et  ne  recherche  la  société  de  ses 
semblables  qu'en  dehors  de  l'époque  de  la  reproduction.  Chaque 
couple  vit  dans  une  union  parfaite,  mais  témoigne  peu  d'attachement 
à  sa  progéniture. 

Cette  espèce  a  une  vie  très  régulière,  et  voici  comment  elle  est 
racontée  par  Bj'ehm,  père  :  «  A  la  tombée  de  la  nuit,  le  mâle  et  la 
femelle  se  rejoignent  au  voisinage  de  leur  nid.  Avant  le  lever  du  soleil, 
ils  s'éveillent  et  le  mâle  va  se  percher  sur  son  arbre  Favori.  Il  y  com- 
mence à  roucouler;  sa  voix  est  plus  forte  (|uo  celle  du  Pigeon  des 
champs;  on  peut  la  rendre  ^^^.v  rouchouchouck  et  kouhnuhou  ou  rou- 
koukou  koukou.  11  est  à  ce  moment  perché  sur  une  branche,  le  cou 
gonflé.  Son  cri,  qu'il  répèle  tiois  ou  quatre  fois  do  suite,  est  d'aiiiant 
plus  rapide,  qu'il  csL  lui-même  plus  excité.  Les  autres  mâles,  attirés 
par  ce  cri,  viennent  se  percher  sur  des  arbres  voisins  et  tous  roucoulent 
à  l'envi.  11  est  à  noter  que  trois  mâles  se  font  généralement  entendre 
à  la  fois,  rarement  deux,  jamais  quatre.  Tous  sont  perchés  sur  des 
arbres  élevés,  souvent  à  L'extrême  sommet.  Une  fois,  je  vis  un  mâle 
posé  à  terre  et  roucouler  ainsi  devant  sa  femelle  ;  j'en  vis  aussi  un  autre 


voler  au-dessus  de  moi,  tout  en  roucoulant.  La  femelle  arrive  à  son 
tour  et  se  pose  près  du  mâle,  qui  cesse  de  roucouler,  mais  pousse  de 
temps  à  autre  ce  petit  cri  :  pouh  ou  houh  ;  c'est  l'indice  d'un  grand 
contentement  ;  il  semble  par  là,  vouloir  célébrer  sa  victoire  sur  les 
rivaux  qui  l'entourent.  C'est  le  matin,  par  une  chaude  journée,  que 
les  Ramiers  roucoulent  le  plus;  je  les  ai  cependant  entendus  par  des 
temps  de  pluie  et  même  de  neige  ;  ils  roucoulent  surtout  au  moment 
où  ils  se  préparent  à  une  nouvelle  couvée. 

«  A  sept,  huit  ou  neuf  heures  du  matin  (ce  temps  est  variable),  le 
mâle  se  tait,  et  si  sa  femelle  n'a  ni  œufs,  ni  petits,  il  va  avec  elle  cher- 
cher sa  nourriture.  A  dix  heures,  il  recommence  à  roucouler,  mais 
plus  faiblement  et  durant  peu  de  temps.  A  onze  heures,  il  gagne 
l'abreuvoir,  puis  se  tient  caché  pendant  le  milieu  du  jour  dans  le 
touffu  d'un  arbre.  A  deux  ou  trois  heures,  il  se  met  de  nouveau  en 
quête  de  nourriture  ;  à  cinq  ou  six  heures,  parfois  plus  tôt,  parfois  plus 
tard,  il  roucoule  encore,  et,  après  s'être  abreuvé,  il  se  livre  au  repos. 

'<  Au  printemps  et  en  été,  on  voit  d'ordinaire  les  Colombes  ramiers 
par  paires,  rarement  en  société.  Au  moment  de  l'accouplement,  le 
mâle  se  montre  très  excité  ;  il  ne  peut  rester  en  place,  vole,  s'élève 
dans  l'air  obliquement,  frappe  violemment  les  pointes  des  ailes,  qu'on 
entend  battre  de  très  loin,  descend  en  planant,  et  continue  ce  jeu  pen- 
dant longtemps.  Sa  femelle  le  suit  quelquefois;  mais,  d'ordinaire, 
elle  reste  perchée  et  l'attend  tranquillement.  Il  revient  généralement 
auprès  d'elle  après  avoir  exécuté  ses  évolutions  aériennes.  Jamais 
je  n'ai  vu  deux  mâles  se  battre  pour  posséder  une  femelle.   » 

La  nourriture  préférée  de  ces  oiseaux  se  compose  de  semences  de 
conifères,  et  c'est  pour  cette  raison  qu'ils  se  tiennent  de  préférence 
dans  les  forêts  composées  en  majeure  partie  d'arbres  à  aiguilles.  Ces 
semences,  ils  les  prennent  aussi  bien  des  cônes  encore  attachés,  qu'à 
terre  où  ils  les  ramassent  après  que  la  maturité  les  a  fait  tomber.  Ils 
aiment  aussi  les  graines  de  diverses  graminées  sauvages  et  en  nour- 
rissent leurs  petits  ;  ils  ne  dédaignent  pas  non  plus  les  céréales,  le 
colza,  les  petits  pois  et  autres  légumineuses, les  glands, les  faînes  et  les 
diverses  baies.  A  l'occasion  ils  prennent  aussi  de  petits  mollusques 
et  des  vers. 

Malgré  leur  régime  granivore,  on  ne  peut  considérer  ces  oiseaux 
comme  nuisibles,  car  ils  ne  prennent  que  ce  qu'ils  trouvent  à  terre  et 
qui  serait  quand  même  perdu. 

Reproduction.  —  La  Colombe  ramier  a  généralement  deux  couvées 


par  année,  plus  rarement  trois  :  la  première  ordinairement  en  avril, 
la  seconde  en  juin.  «  Une  fois  l'emplacement  du  nid  choisi,  dit  Brehm, 
les  deux  époux  apportent  des  matériaux,  mais  la  femelle  seule  tra- 
vaille à  la  construction  de  l'édifice.  Ce  nid  est  profond  et  élevé.  J'en 
ai  vu  sur  des  sapins,  des  chênes,  des  hêtres,  des  aunes  et  des  tilleuls, 
à  une  hauteur  de  dix  à  trente  pieds  au-dessus  du  sol;  d'ordinaire,  il  est 
établi  dans  un  endroit  très  caché,  sur  un  baliveau  dans  un  taillis,  ou 
sur  une  maîtresse  branche  non  loin  du  tronc.  Il  est  formé  de  bûchettes 
sèches  de  pin,  de  sapin,  de  hêtre,  etc.,  mais  il  est  construit  si  lâche- 
ment, qu'on  peut  souvent  voir  les  œufs  au  travers.  Il  est  aplati,  n'a 
qu'une  petite  dépression  dans  laquelle  sont  logés  les  œufs,  et  a  géné- 
ralement douze  à  quinze  pouces  de  diamètre.  Quoique  grossièrement 
établi,  il  est  cependant  assez  solide  pour  résister  aux  mauvais  temps.» 

Il  arrive  parfois  que  des  R,amiers  se  contentent  d'approprier  à  leur 
convenance  des  nids  abandonnés  de  geais,  de  pies  ou  d'écureuils.  La 
ponte  est  de  deux  œufs  blancs,  mesurant  environ  40  millimètres  sur  30. 
Les  deux  parents  les  couvent  durant  dix-sept  à  dix-huit  jours,  mais  le 
mâle  ne  se  met  ordinairement  sur  les  œufs  que  de  dix  heures  du  matin 
à  trois  ou  quatre  heures  du  soir. 

Les  jeunes  naissent  aveugles,  presque  nus  et  couverts  seulement 
d'un  long  duvet  jaunâtre,  mais  plus  abondant  que  chez  le  Pigeon 
domestique.  Ils  sont  couverts  de  plumes  trois  semaines  après  l'éclosion. 
Les  parents  leur  témoignent  peu  d'attachement;  les  chasse-t-on  de 
leur  nid,  ils  abandonnent  aussitôt  œufs  ou  petits,  sans  s'en  inquiéter 
davantage;  mais  quand  on  ne  les  trouble  pas,  ils  élèvent  leur  pro- 
géniture avec  tendresse.  Tant  qu'ils  n'ont  pas  de  plumes,  l'un  des 
parents  reste  sans  cesse  auprès  des  petits  pour  les  réchauffer.  Durant 
les  premiers  jours  de  leur  existence,  les  petits  sont  nourris  du  produit 
laiteux  que  sécrète  le  jabot  des  parents;  plus  tard  ceux-ci  leur  donnent 
des  graines  ramollies. 


—  9  — 

168.  —  La  Colombe  colombin. 

COLUMBA  ŒNAS,   Lin. 

(PL  168) 

CoLUMBA  ŒNAS,  Lin.  Fauna  suec.  p.  75  (1761)  necSyst.  nat. 
CoLUMBA  CAvoRUM,  Brm.  Isis,  1830,  p.  985. 
CoLUMBA  ARBOREA,  Brixi.  Vogelf.  p.  257(1855). 
Palumbœna  columbella,  Bp.  Cat.  Parz.  p.  9  (1856). 
Palumbœna  ŒNAS,  Gray,  Hand-list,  II,  p.  233  (1870). 
Die  Hohltaube,  en  allemand. 
The  Stock-Dove,  en  anglais. 
De  Kleine  Boschduif,  en  flamand. 

Var.  Eversmannl. 

?  CoLUMBA  FUSCA,  Pall.  Zoogr.  Rosso-as.  1,  p.  567  (1811). 

Palumbœna  ^neicapilla  et  Eversmanni,  Blyth,  Jouni.  as.  Soc.  Beng.  1857  p.  219 

et  225. 
?  Columba  FUSCA,  var.  Brachyura,  Severtz.  Journ.  f.  Orn.  1875,  p.  180. 
Columba  eversmanni,  (Bp.)   Finsch,  Reise  W.  Sibir.  p.  117  (1879). 

Taille:  O'^'.SO  ;  ailes  0,21  (sujet  de  Belgique). 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes.  —  Tête  d'un  gris  bleuâtre 
foacé,  un  peu  plus  pâle  à  la  gorge;  dos  cendré;  partie  supérieure  du  cou 
d'un  vert  bronzé  à  reflets  pourprés  ;  couvertures  des  ailes  et  de  la  queue, 
croupion  et  bas  du  dos  d'un  gris  bleuâtre  ;  dernières  des  grandes  couvertures 
des  ailes  marquées  chacune  d'une  tache  irrégulière  noire  ;  rémiges  brunes  ; 
haut  de  la  poitrine  d'un  gris  vineux  ;  les  autres  parties  inférieures  d'un  gris 
bleuâtre;  queue  d'un  cendré  bleuâtre,  mais  noire  au  tiers  terminal,  et  la  base 
du  bord  externe  de  la  rectrice  latérale  blanche.  Bec  rouge,  jaune  à  l'extré 
mité;  pattes  rouges;  iris  rouge  brun. 

La  femelle  est  un  peu  plus  petite  et  a  les  teintes  moins  pures. 

Jeune.  —  Parties  supérieures  d'un  cendré  brunâtre;  bas  du  dos,  croupion, 
sus-caudales  et  grandes  couvertures  des  ailes  d'un  gris  bleuâtre  ;  rémiges 
brunes;  parties  inférieures  grises,  lavées  de  roux  vineux  à  la  poitrine. 

La  variété  Eversmanni  est  facile  à  distinguer  du  type  européen,  d'abord 
par  sa  taille  moins  forte  (0"2r);  ailes  0"'21),  ensuite  par  la  teinte  vineuse 
qui  est  presque  aussi  prononcée  sur  le  dessus  de  la  tête  que  sur  la  poitrine  ;  le 
bas  du  dos  et  le  croupion  sont  d'un  gris  blanchâtre  beaucoup  plus  pâle  que 
chez  Yœnas,  tandis  que  les  sus-caudales  sont  d'un  gris  bleuâtre  assez 
foncé.  (Description  faite  d'après  un  sujet  de  l'Altaï  appartenant  au  Musée  de 
Bruxelles.) 

To.ME  IL  —  1887.  2 


_  40    - 

Hah.  —  La  Colombe  colombin  habite  presque  toute  l'Europe  jus- 
qu'au 60°  1.  N.  (Sundevall, 
von  Wright),  mais  elle  ne  se 
montre  qu'accidentellement  en 
Ecosse  et  elle  est  inconnue  en 
Irlande  (Harting).  Dans  l'Eu- 
rope centrale  et  méridionale  elle 
est  plus  ou  moins  répandue 
partout  ;  en  Belgique ,  elle  est 
de  passage  en  automne  et  en 
mars,  mais  elle  niche  en  petit  nombre  dans  les  grandes  forêts  du 
pays. 

On  observe  également  cette  espèce  au  Maroc  (Irby)  et  en  Algérie 
(Loche),  mais  elle  ne  paraît  pas  se  montrer  dans  le  nord-est  de 
l'Afrique,  car  ni  Riippell,  ni  Brehm,  ni  de  Heuglin  ne  l'ont  vue  en 
Egypte. 

A  l'Est, on  rencontre  cet  oiseau  en  Asie  Mineure  (Krûper),Qii  Pales- 
tine (Tristram),  en  Perse  (Dickson),  au  Caucase  (Radde),  au  Tur- 
kestan  (Severtzow)  et  accidentellement  dans  la  Sibérie  occidentale 
(Finsch). 

La  variété  Eversmanni  habite  l'Asie  centrale  :  on  la  rencontre 
principalement  dans  l'Inde  (Jerdon)  et  dans  la  Sibérie  occidentale 
(Finsch). 

Le  D''  0.  Finsch  pense  que  l'on  doit  rapporter  à  cette  variété  l'oiseau 
signalé  sous  le  nom  de  C.  œnas  par  MM,  Severtzow  (Tuy^k.  Jevotn., 
p.  68)  et  Brandt  (Lehmami's  Reise  nach  Buchara,  p.  320). 

Mœws.  —  Pour  les  contrées  de  l'Europe  centrale,  cette  Colombe 
est  un  oiseau  d'été,  mais  qu'on  rencontre  cependant  parfois  aussi  en 
hiver,  quand  cette  saison  est  exceptionnellement  douce.  En  Belgique, 
elle  est  de  passage  en  mars,  parfois  même  à  la  fin  de  février,  et  en 
automne,  mais  elle  niche  en  petit  nombre  dans  nos  bois  et  même 
dans  la  forêt  de  Soignes,  près  de  Bruxelles. 

A  l'époque  des  migrations,  ces  Colombes  se  réunissent  en  petites 
troupes  de  dix,  vingt,  trente  et  même  de  plus  de  cent  individus,  qui 
se  mettent  généralement  en  voyage  peu  après  le  lever  du  soleil  ;  vers 
le  milieu  du  jour,  ces  bandes  s'abattent  dans  les  champs  pour  y  cher- 
cher leur  nourriture,  et  après  avoir  pris  un  peu  de  repos,  elles 
continuent  leur  voyage  jusqu'au  coucher  du  soleil,  en  traversant 
l'espace  à  une  grande  hauteur. 


—  11  — 

C'est  un  véritable  oiseau  forestier,  qui  ne  se  plaît  réellement  que 
dans  les  bois  à  essences  variées  et  dans  les  lieux  où  il  y  a  beaucoup 
de  grands  arbres  ;  il  préfère  cependant  les  lisières  des  bois  bordés  de 
cultures  et  les  parties  boisées  entrecoupées  de  pâturages  et  de 
champs  et  abondamment  pourvues  de  troncs  d'arbres  creux,  car  c'est 
dans  les  trous  des  arbres  qu'il  passe  généralement  la  nuit. 

Le  Colombin  est  moins  sauvage  et  plus  agile  que  le  Ramier ,  il 
marche  aussi  beaucoup  mieux  que  ce  dernier,  d'une  manière  plus  dé- 
gagée et  en  tenant  le  corps  relevé;  son  vol  est  léger,  rapide  et  élégant. 
En  prenant  son  essor,  il  produit  un  claquement  suivi  bientôt  d'un 
sifflement  assez  fort;  il  se  pose  en  planant  doucement  et  sans  bruit. 
Il  est  aussi  beaucoup  plus  sociable  que  son  congénère  et  niche  même, 
quand  la  chose  est  possible,  en  société  de  ses  semblables  ;  il  tient 
beaucoup  à  sa  demeure  et,  quand  il  en  est  chassé,  il  y  retourne  dès 
que  le  danger  est  passé.  Sa  manière  de  vivre  est  presque  aussi  régu- 
lière que  celle  du  Ramier,  mais  le  Colombin  est  plus  remuant  et  reste 
moins  longtemps  à  la  même  place.  Près  du  nid,  le  mâle  fait  souvent 
entendre  le  cri  de  houkou  ou.  hourkou  ;  il  roucoule  hou,  hou,  hou, 
^oi«  en  se  tenant  immobile,  la  gorge  gonflée;  il  fait  entendre  son 
roucoulement  à  toute  heure  du  jour  depuis  le  mois  d'avril  jusqu'en 
septembre,  et  plusieurs  individus  roucoulent  souvent  ensemble. 

La  nourriture  de  cet  oiseau  se  compose  de  graines  de  céréales  et 
autres  graminées,  de  graines  de  diverses  légumineuses  et  crucifères, 
de  baies,  de  glands,  de  faînes  et  autres  semences  d'arbres  et  de 
plantes  sauvages.  C'est  surtout  dans  les  champs  et  dans  les  prés 
qu'il  cherche  sa  nourriture,  de  huit  à  neuf  heures  du  matin  et  de  trois 
à  quatre  heures  du  soir.  Il  va  s'abreuver  vers  le  milieu  de  la  journée 
et  un  peu  avant  le  coucher  du  soleil. 

Dans  les  contrées  du  Midi,  on  fait  chaque  année  aux  Colombins  et 
aux  Ramiers  des  chasses  très  meurtrières,  bien  que  leur  chair  ne 
vaille  pas  celle  du  Pigeon  domestique.  Nous  empruntons  au  Journal 
des  Chasseurs  la  description  d'une  de  ces  chasses,  dans  le  midi  de  la 
France. 

«  Dans  la  Basse-Navarre,  le  Béarn,  le  Bigorre  et  les  autres  contrées 
voisines  des  Pyrénées,  on  a  i)ris,  au  filet,  de  temps  inunéniorial,  une 
immense  quantité  de  Colombins  et  de  Ramiers. 

«  On  rhoisit  entre  deux  cliaînes  de  montagnes  une  gorge  large  à 
son  oiivertuic  cl  ijui  aille  en  se  rétrécissant  ;  à  son  extrémité  doit  se 
trouver  une  surface  plane  et  unie  d'environ  cent  pas  carrés,    qu'on 


-  îï  - 

appelle  fonte  dans  le  pays.  L'embouchure  étroite  est  entièrement 
fermée  par  des  filets  dont  le  nombre  varie  suivant  la  largeur  de  la 
gorge.  Ces  filets,  qui  ont  chacun  huit  à  neuf  mètres  de  largeur  sur 
dix-huit  de  hauteur,  sont  hissés,  par  le  moyen  de  poulies,  à  des  arbres 
qui  n'ont  pas  moins  de  25  à  30  mètres  d'élévation.  Ces  filets  sont 
masqués,  sur  le  devant,  par  une  seconde  rangée  d'arbres  élagués 
dans  le  bas,  pour  donner  passage  aux  oiseaux. 

«  Environ  30  mètres  en  avant  des  filets  est  une  trèpe,  qui  consiste 
en  trois  troncs  d'arbres  plantés  en  triangle  à  six  pas  les  uns  des  autres, 
rapprochés  et  liés  ensemble  par  le  haut  avec  une  chaîne  de  fer.  Sur 
leurs  cimes  réunies,  on  construit  une  cabane  qui  est  occupée  par  un 
chasseur,  le  plus  intelligent. 

«  Des  deux  côtés  de  la  gorge,  le  long  de  la  crête  des  montagnes, 
sont  également  disposées,  d'espace  en  espace,  des  cabanes  sur  des 
arbres  ou  sur  des  éminences  naturelles.  Chacune  de  ces  cabanes 
recèle  un  chasseur, 

«  Lorsqu'une  volée  de  Colombins  ou  de  Ramiers,  engagée  dans  la 
gorge,  veut  franchir  la  crête,  le  chasseur  le  plus  à  portée  lui  lance 
un  matou,  espèce  de  palette  blanchie  et  emplumée,  imitant  grossiè- 
rement un  oiseau  de  proie.  Les  oiseaux  effrayés  rétrogradent  et 
fondent  souvent  jusqu'à  terre.  Ils  sont  ainsi  maintenus  successive- 
ment, d'un  chasseur  à  l'autre,  dans  la  direction  des  filets.  Au  moment 
où  ils  dépassent  la  trèpe,  le  chasseur  posté  dessus  leur  décoche,  à 
son  tour,  toujours  en  queue,  jamais  par  devant,  un  oiseau  empaillé  ou 
un  matou.  Les  Colombins  épouvantés  se  jettent  les  uns  sur  les  autres  : 
on  lâche  une  détente  et  oiseaux  et  filets  tout  est  précipité  pêle-mêle  à 
terre,  » 

Reproduction.  —  La  Colombe  colombin  niche  dans  le  creux  d'un 
arbre,  de  préférence  d'un  hêtre  ;  il  n'est  cependant  pas  rare  de  trouver 
son  nid  dans  un  chêne,  un  saule  ou  tout  autre  arbre,  et  même  dans 
un  vieux  poirier  ou  pommier.  Elle  profite  souvent  aussi  d'un  trou 
abandonné  par  un  Pic  vert  ou  autre  grand  Pic.  Le  nid  est  fait  sans  art, 
de  bûchettes,  de  radicelles  et  de  mousse,  parfois  aussi  de  feuilles  mortes  ; 
le  centre  présente  un  enfoncement  pour  les  œufs,  La  ponte  est  de  deux 
œufs  d'un  blanc  brillant  et  poreux  ;  ils  mesurent  environ  36  millim. 
sur  29.  Les  deux  parents  les  couvent  pendant  dix-sept  jours. 

«  Un  couple  de  Colombins,  dit  Brehm,  est  un  vrai  type  d'amour 
conjugal.  Le  mâle  ne  quitte  pas  sa  femelle;  il  reste  près  d'elle,  la 
distrait  par  ses  roucoulements  pendant  qu'elle  couve,  et  l'accompagne 


—  43  - 

si  elle  est  chassée  de  dessus  ses  œufs.  A  peine  arrivé  au  printemps^  le 
couple  cherche,  pour  nicher,  un  trou  dans  un  tronc  d'arbre,  et  au 
commencement  d'avril,  on  peut  y  trouver  la  première  couvée.  Si  rien 
ne  vient  les  troubler,  les  Colombins  ont  trois  couvées  par  an,  mais 
jamais  ils  n'en  élèvent  deux  dans  le  même  nid.  La  cause  de  ce  fait 
tient  à  ce  que  les  Pigeons  ne  débarrassent  pas  le  nid  des  ordures  que 
les  petits  y  déposent;  aussi,  lorsque  ceux-ci  sont  grands,  la  cavité  où  ils 
étaient  est-elle  remplie  d'un  tas  d'ordures.  Les  petits  y  reposent  dans 
leurs  excréments,  et  il  en  résulte  que  les  plumes  de  leur  ventre  et  de 
leur  queue  en  sont  souillées  pour  longtemps.  Mais,  comme  chaque 
couple  a  besoin,  dans  le  courant  d'un  seul  été,  de  plusieurs  cavités, 
il  court  risque  de  n'en  pas  trouver  suffisamment.  Il  est  souvent  obligé 
d'en  conquérir  une,  de  combattre  non  seulement  avec  ses  semblables, 
mais  encore  avec  des  Pics,  des  Etourneaux,  des  Choucas,  combats  dans 
lesquels  il  succombe  souvent.  L'année  suivante,  le  couple  revient  à 
sou  ancien  nid  ;  les  ordures  n'existent  plus,  soit  que  la  décomposition 
les  ait  fait  disparaître,  soit  qu'elles  aient  été  mangées  par  les  insectes, 
soit  qu'un  Pic  ou  quelque  autre  oiseau  se  soit  chargé  d'approprier  la 
demeure. 

«....  Autant  le  Ramier  montre  peu  d'attachement  à  sa  progéniture, 
autant  le  Colombin  lui  témoigne  de  dévouement.  Il  ne  quitte  pas  ses 
œufs;  on  peut  même  quelquefois  le  prendre  sur  son  nid,  sans  qu'il 
cherche  à  s'enfuir;  il  revient  à  sa  couvée  au  péril  de  sa  vie.  La  femelle 
se  laisse  tuer  sans  abandonner  ses  petits.  » 


169.  —  La  Colombe  de  roche  ou  Biset. 
COLUMBA  LIVIA,  Briss. 

(PI.  169J. 

CoLLMU.v  LIVIA  et  sAXATiLis,  Biiss.  Om.  I,  pp.  82,  84  (1760;. 
CoLUMBA  ŒNAS,  Lin  (part.)  Si/st.  nat.  I,  p.  279  (1766). 

COLUMBA  AMALI^,  BlTIl.  Isis,  1830,  p.  985. 

CoLUMBA  INTEHMKDIA,  Sti'ickl.  A)in.  Mag .  nat.  hist.  1844,  p.  39. 

CoLUMBA    RLI'ESTRI.S   (llftC     Bp.),    ELEGANS,     GLAUCONOTOS,    UNICOLOR    Ct     DUBIA,     Brill. 

Vogelf.  p.  256  (1855j. 
CoLUMBA    (JYMNOCYCLUS  Ct  l'LUMlI'E.S,  ^  î .   R.  GlJlV,  List  liinfs  lir.  Mus.  p.Ul,  IV,  p.  28 

(1856). 
CoLUMBA  TURRICOLA  et  SCHIMPERI,  Bonap.  Cnnsp.  Gen.  nr.  Il,  p.  47  (1857). 
CoLUMBA  NEGLECTA,  IIiiiuc,  L(i/i.  to  Yarh.  p.  272  (1873  . 


—  14  — 

Die  Felsentaube,  Feldtaube,  en  allemand. 
The  Rock-Dove,  en  anglais. 
De  Steenduif,  en  flamand. 

Var.   Rnpestris. 

CoLUMBA  (œnas)  rupestris,  Pdll.  Zoogr.  Rosso-As.  I,  p.  560,  pi.  XXXV  (1811), 
CoLUMBA  RUPESTRIS,  Bonap.  (nec  Brm.)  Consp.  Gen.  Av.  II,  p.  48  (1857) 
CoLUMBA  LEUCOZONURA,  Swinh.  Idis,  1861,  p.  259. 

CoLUMBA  LiviA   var .    RupicoLA    DAURiCA   (Pall.)  Radde,  Reisen  S.-O.  Sib.  II,  p.  282 
(1863j. 

Taille:  (mâle)  0"\27  à  0,29;  ailes  0,21  à  0,22;  (femelle)  0,25; 
ailes  0,21. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes.  —  D'un  gris  ardoisé,  la  tête,  le 
croupion  et  la  queue  d'une  teinte  généralement  plus  foncée  ;  bas  du  dos  d'un 
blanc  pur,  mais  passant,  suivant  les  individus,  par  tous  les  degrés  au  gris  ; 
cou  d'un  vert  chatoyant  suivant  l'incidence  de  la  lumière  et  passant  plus  ou 
moins  au  violet  ])Ourpré  sur  le  jabot  ;  ailes  traversées  par  deux  bandes  noires; 
certains  individus  ont,  en  outre,  les  ailes,  les  scapulaires  et  parfois  même  le 
manteau  plus  ou  moins  tachés  de  noir  ;  rémiges  d'un  brun  ardoisé  ;  extrémité 
de  la  queue  noirâtre  ;  rectrice  la  plus  externe  blanche  en  dehors,  parfois  d'un 
blanc  grisâtre,  mais,  comme  les  autres,  noirâtre  à  son  extrémité.  Bec  brun  ; 
cire  blanchâtie  ;  iris  orange  ;  pattes  rouges. 

La  femelle  est  plus  petite  ;  cou  et  jabot  moins  brillants. 

Jeune.  —  Semblable  aux  adultes,  mais  sans  reflets  verts  au  cou  et  au  jabot, 
ces  parties  étant  d'un  brun  grisâtre. 

Remarque.  —  La  Colombe  de  roche  ou  Biset  est,  comme  on  sait, 
la  souche  de  toutes  nos  races  de  Pigeons  domestiques,  aussi  la  voit-on 
souvent,  dans  les  contrées  où  elle  est  abondante,  se  croiser  avec  ces 
derniers  (1). 

A  l'état  sauvage,  cette  espèce  est  également  sujette  à  des  variations, 
climatériques  suivant  les  uns,  individuelles  suivant  d'autres.  Voici  les 
caractères  distinctifs  des  différentes  formes  reconnues  : 

1.  C.  livia,  L.  —  Plumage  ordinaire;  bas  du  dos  blanc.  —  Hab. 
p]urope. 

Ce  n'est  que  chez  la  forme  type  que  j'ai  remarqué  des  sujets  dont  le 
manteau  et  les  ailes  étaient  plus  ou  moins  tachés  de  noir  (2). 

2.  C.  saxalilis,  Briss.(twrr2co/a,Bp.)  —  Semblable  à  la  précédente, 


(i)  Voye^  ce  qui  a  été  dit  sur  les  Pigeons  domestiques  dans  l'introduction  du  tome  I  p.  VIII. 
(2)  Je  n'affirme  cependant  pas  que  ces  taches  n'existent  jamais  chez  les  autres  races . 


15  — 


mais  le  bas  du  clos  d'un  gris  blanchâtre.  — -  Hab.  Europe  méridionale, 
Afrique  septentrionale. 

3.  C.  Schimperi,  Bp.  —  Manteau  et  ailes  d'un  gris  plus  pâle  que 
chez  les  précédentes;  bas  du  dos  d'un  blanc  grisâtre.  —  Hab.  Afrique. 

4.  C.  inter^nedia,  Strickl.  —  Bas  du  dos  d'un  gris  un  peu  plus 
pâle  que  le  manteau,  qui  a  la  teinte  des  sujets  d'Europe;  reflets  verts 
et  pourprés  plus  intenses  que  chez  les  formes  précédentes.  —  Hab. 
Asie  centrale  et  orientale. 

5.  C.  rupestris,  Pall.  —  Bas  du  dos  blanc  ;  queue  traversée  par 
une  large  bande  blanche.  C'est  une  bonne  variété  climatérique.  — 
Hab.  Toute  l'Asie  méridionale. 

Beaucoup  d'auteurs  soutiennent  que  les  quatre  premières  formes 
ne  sont  pas  des  races  climatériques,  car,  disent-ils,  si  chacune  d'elles 
est  particulièrement  propre  à  certaines  régions,  on  ne  la  rencontre  pas 
moins  dans  les  autres. 

Suivant  M.  David,  la  var.  Rupestris  «  ne  vit  pas  comme  le  Biset 
commun  dans  le  voisinage  des  habitations  :  elle  se  tient  de  préférence 
sur  les  rochers  élevés,  et  fait  son  nid  dans  des  cavernes  inaccessibles. 
Elle  émigré  chaque  année  et  passe  le  long  des  montagnes  de  Pékin  à 
la  fin  de  l'automne  et  dans  les  premiers  jours  du  printemps.  » 

Hab.  —  La  Colombe  de  roche  est  plus  ou  moins  répandue  dans  les 

parties  montagneuses  de  l'Eu- 
rope, de  l'Asie  et  d'une  grande 
partie  de  l'Afrique.  Aux  îles 
Britanniques,  elle  est  sédentaire 
et  commune  dans  beaucoup  d'en- 
droits, surtout  le  long  des  côtes 
occidentales  de  l'Ecosse  et  aux 
îles  Hébrides  {Harting)  ainsi 
qu'aux  îles  Féroé  {Graba). 
Elle  est  fort  localisée  dans  l'Europe  continentale,  car  ses  mœurs  la 
tiennent  attachée  aux  régions  montagneuses,  surtout  aux  côtes  rocail- 
leuses. En  Norwègc  on  ne  l'observait  qu'au  Slavanger  fjord  (59°  1.  N.) 
et  sur  l'île  Renncsœ,  mais  elle  a  disparu  {Collett).  Elle  ne  paraît  pas 
se  montrer  à  l'état  sauvage  en  Suède,  en  Danemark,  dans  le  nord  de 
l'Allemagne,  en  Pologne  et  en  Finlande  ;  il  en  est  de  même  en 
Suisse,  en  Hollande  et  dans  la  plus  grande  partie  de  la  France.  «  Je 
n'ai  pas  cru,  dit  le  baron  de  Séljs-Longcliamps,  devoir  omettre 
cette  espèce,   parce  qu'elle  se  reproduit  librement  dans  les  vieux 


t6  *q.^.  *gT^»?aiptf€i-^Me 


-  16  - 

édifices  et  même  dans  quelques  rochers  des  bords  de  la  Meuse,  et 
que,  bien  que  ces  individus  fuyards  proviennent  des  Pigeons  de 
champs  qu'on  élève,  il  me  semble  avoir  au  moins  autant  de  droits 
à  faire  partie  de  la  Faune  Belge,  que  le  Lapin  et  le  Surmulot,  que 
l'on  admet  dans  toutes  les  Faunes  de  l'Europe  centrale.*  »  Il  paraît 
cependant  que  le  Biset  est  de  passage  accidentel  dans  notre  pays 
comme  dans  plusieurs  contrées  voisines.  On  l'observe  en  petit 
nombre  dans  le  sud  de  l'Allemagne  {Naumann)  et  de  l'Autriche 
[Hinterberger)  et  il  est  assez  commun  dans  le  sud  de  la  Russie 
{MenzMer,  etc.).  11  est  sédentaire  et  de  passage  dans  le  midi  de  la 
France  (Lacroiœ)  et  plus  ou  moins  commun  dans  toutes  les  contrées 
qui  entourent  la  Méditerranée  et  la  mer  Noire. 

En  Afrique,  on  rencontre  cet  oiseau  dans  toutes  les  parties  septen- 
trionales (/.oc/îe,  Dr^^e,  e^c),  en  Sênégambie  {Hartlauh),  en  Egypte, 
en  Nubie,  en  Abyssinie  et  dans  l'Arabie  méridionale  {Brehm,  de 
Heuglin). 

En  Asie,  on  l'observe  en  Palestine  {T?nstram),  en  Asie  Mineure 
{.Kruper),en  Perse  et  dans  toute  l'Asie  centrale  jusqu'à  Malacca  {Mus. 
Brux.)  et  au  Japon  (Schlégel). 

La  var.  Rupestrh  habite  cerl aines  parties  de  l'Inde  (Jerdon),  du 
Turkestan  {Severtzoïv),  de  la  Sibérie  orientale  {Taczanoivski),  de 
la  Mongolie  et  de  la  Chine  proprement  dite  [David). 

Mœurs  —  La  Colombe  de  roche  ou  Biset  émigré  en  automne  des 
contrées  et  des  îles  les  plus  septentrionales,  mais  elle  est  sédentaire 
partout  ailleurs.  A  l'époque  de  la  migration,  ces  oiseaux  se  rassemblent 
en  bandes  nombreuses  qui  ne  paraissent  pas  se  disperser  de  tout  l'hiver. 
A  première  vue  on  les  prendrait  pour  des  Pigeons  domestiques,  car 
ces  Colombes  n'attirent  l'attention  que  quand  elles  sont  mêlées  à  des 
troupes  de  Corneilles  ou  lorsqu'elles  se  perchent  sur  des  arbres,  ce 
que  les  Pigeons  domestiques  ne  font  jamais. 

Cette  Colombe  passe  sa  vie  sur  les  rochers,  les  falaises,  les 
murailles,  les  clochers  et  sur  les  toits  des  fermes  et  des  bâtiments. 
Dans  certaines  localités,  elle  vit  dans  une  demi-domesticité  et 
s'accouple  même  souvent  avec  les  races  domestiques.  Elle  est 
généralement  rare  à  l'intérieur  des  terres,  car  elle  préfère  le  voisi- 
nage de  la  mer  et  des  grands  cours  d'eau  bordés  de  rochers  à  tout 
autre  endroit.  Jamais  on  ne  la  rencontre  dans  la  profondeur  des  bois, 
tout  au  plus  la  voit-on  sur  les  lisières,  car  elle  ne  se  perche  que 
rarement  sur  les  arbres  ;  pour  se  reposer  elle  choisit  toujours  des 
endroits  élevés. 


—  17  — 

C.  Graba,  qui  a  observé  cette  espèce  aux  îles  Féroé,  dit  qu'elle  y 
est  commune  et  qu'elle  niche  presque  dans  toutes  les  îles  habitées  ; 
mais  elle  sait  si  bien  se  cacher  que  les  habitants  ne  parviennent  pas 
à  trouver  ses  œufs  ou  ses  petits.  «  Quand  ces  Colombes,  continue 
Graba,  viennent  chercher  leur  nourriture  à  Indmarck,  elles  sont  si 
prudentes,  leur  vol  est  si  rapide,  que  ni  les  Corbeaux,  ni  les  oiseaux 
de  proie  ne  parviennent  à  les  capturer,  tandis  qu'ils  s'emparent  fort 
bien  des  Pigeons  domestiques.  Je  vis  un  jour  ces  Bisets  voler  dans  une 
grande  caverne  où  je  pus  arriver  après  beaucoup  de  difficultés  et  en 
courant  bien  des  dangers.  La  caverne  était  éboulée  et  divisée  en  plu- 
sieurs petites  grottes,  dont  les  ouvertures  étaient  masquées  par  des 
pierres  plus  ou  moins  grosses,  de  sorte  qu'il  était  impossible  de  voir  les 
nids  des  Bisets.  On  eût  beau  parler,  crier,  jeter  des  pierres,  rien  ne  put 
les  faire  sortir;  on  tira  un  coup  de  fusil,  aussitôt  la  caverne  s'anima  et 
les  Colombes  arrivèrent  de  tous  côtés.   » 

Aux  îles  Canaries,  suivant  Bolle,  les  Bisets  habitent  aussi  bien  les 
parties  non  boisées  de  l'intérieur  que  les  côtes;  on  en  rencontre  jusqu'à 
une  altitude  de  2600  à  3300  mètres  au-dessus  du  niveau  de  la  mer. 
Berthelot  en  vit  à  Lazarote  dans  le  cratère  du  volcan,  malgré  l'odeur 
de  soufre  et  la  chaleur  qui  y  régnaient.  Dans  ces  îles  ils  dorment  et 
nichent  dans  des  cavernes.  A  Lazarote  on  les  chasse  d'une  façon 
toute  particulière  :  on  pénètre  dans  les  grottes  pendant  la  nuit,  avec 
des  torches  allumées,  on  en  ferme  l'entrée  et  on  assomme  les  oiseaux 
à  coups  de  bâtons. 

D'après  M.  Radde,  cette  espèce  est  très  commune  dans  certaines 
localités  du  Caucase,  où  on  la  rencontre  dans  la  large  zone  qui  s'étend 
depuis  la  mer  jusqu'à  une  altitude  de  9000  pieds.  Aux  sources  du 
Rion,  près  du  village  de  Glola,  elle  vit  dans  la  société  de  Pigeons 
domestiques. 

En  Egypte,  suivant  de  Heuglin,  les  Bisets  sauvages  ne  sont 
presque  pas  à  distinguer  des  Pigeons  domestiques.  Quand  un  village 
est  abandonné  par  ses  habitants,  une  partie  des  Bisets  domestiques 
y  restent,  tandis  que  d'autres  vont  se  mêler  aux  Bisets  sauvages 
pour  reprendre  toute  leur  indépendance.  «  Aux  Indes  comme  on 
Egypte,  dit  A.  Brehm,  la  Colombe  de  roche  vit  dans  un  état  demi- 
sauvage.  Elle  habite  les  vieux  édifices  tranquilles,  les  enceintes  des 
villes,  les  pagodes,  les  temples,  les  tours  que  Ton  construit  à  leur 
intention.  Dans  la  Haute-Egypte,  il  existe  de  nombreuses  construc- 
tions qui  semblent  convenir  mieux  aux  Colombes  qu'aux  iiommes.  Ce 

TuMK  II.  —  1HH7.  3 


-  18  - 

sont  des  maisons  en  forme  de  pyramide,  à  toit  aplati  ;  le  paysan  n'en 
habite  que  l'étage  inférieure;  l'étage  supérieur,  généralement  peint 
en  blanc  et  diversement  décoré,  appartient  aux  Pigeons  ;  on  élève 
aussi  des  tours  exprès  pour  eux.  A  partir  d'une  certaine  hauteur,  la 
maçonnerie  de  ces  colombiers  est  faite  de  grands  pots  ovoïdes,  à 
parois  solides,  placés  les  uns  au-dessus  des  autres  et  reliés  par  du 
mortier  fait  avec  de  la  vase  du  Nil.  L'extrémité  du  pot,  qui  est  tournée 
en  dehors,  est  percée  d'un  trou  suffisant  pour  laisser  passer  l'air  et  la 
lumière,  mais  trop  petit  pour  qu'un  Pigeon  puisse  y  entrer.  Du  côté 
opposé,  au  contraire,  c'est-à-dire  du  côté  qui  regarde  l'intérieur^  le 
pot  est  largement  ouvert.  L'entrée  de  ces  pigeonniers  est  assez  grande 
et  entourée  de  faisceaux  de  branches  scellées  dans  la  maçonnerie. 
Le  nombre  immense  de  Pigeons  qui  entourent  ces  constructions, 
montre  suffisamment  combien  elles  leur  conviennent.  » 

Les  habitudes  du  Biset  diffèrent  peu  de  celles  du  Pigeon  do- 
mestique ;  mais  il  est  plus  agile,  son  vol  est  plus  rapide  et  il  est  assez 
craintif.  A  terre,  il  marche  avec  aisance  en  inclinant  la  tête  à  chaque 
pas;  il  vole  avec  un  bruit  sifflant  et  sait  franchir  environ  110  kilo- 
mètres à  l'heure  ;  il  aime  à  s'élever  haut  dans  l'air,  y  décrit  parfois 
de  grands  cercles  et  plane  quelques  instants  avant  de  se  poser.  Il 
aime  aussi  la  propreté  et  vit  en  bons  rapports  avec  les  autres  oiseaux 
comme  avec  ses  semblables.  A  l'époque  de  la  reproduction,  il  arrive 
quelquefois  que  les  mâles  se  querellent  entre  eux,  mais  sans  que  cela 
dégénère  en  luttes  sérieuses.  Cet  oiseau  se  montre  souvent  envieux, 
jaloux  et  même  avare  :  trouve-t-il  quelque  chose  à  manger,  il  le  couvre 
de  ses  ailes  pour  le  soustraire  à  la  vue  de  ses  compagnons  et  pouvoir 
seul  profiter  de  sa  trouvaille  ;  mais  bientôt  l'instinct  de  sociabihté 
l'emporte  sur  ces  sentiments  d'égoïsme.  Il  roucoule  comme  le  Pigeon 
domestique. 

La  nourriture  de  cet  oiseau  se  compose  de  céréales,  de  diverses 
graminées  sauvages  et  de  graines  de  légumineuses  et  de  crucifères  ;  il 
est  surtout  friand  de  graines  de  vesces,  de  colza  et  de  lin. 

Reproduction.  —  Le  Biset  niche  deux  ou  trois  fois  par  an.  Il 
construit  son  nid  dans  des  fentes  de  rochers,  dans  des  grottes,  des 
cavernes,  des  ruines,  etc.,  mais  jamais  dans  des  trous  d'arbres. 
«  Une  fois  le  couple  uni,  dit  Naumann,  il  ne  se  sépare  plus,  même 
après  la  période  des  amours  ;  les  exceptions  sont  rares.  Le  mâle 
cherche  un  endroit  pour  construire  son  nid,  et  dès  qu'il  l'a  trouvé, 
il  y  appelle  sa  femelle  à  grands  cris.  Celle-ci  accourt,  la  queue 


-   19 

relevée  et  étalée,  l'agace  et  fouille  avec  son  bec  les  plumes  de  sa  tête; 
puis  tous  deux  se  caressent  et  l'accouplement  a  lieu.  Lorsqu'il  est 
accompli,  ils  s'élèvent  dans  les  airs  en  jouant,  en  battant  bruyamment 
des  ailes,  pour  se  reposer  bientôt  et  lisser  leur  plumage.  Ceci  se  répète 
plusieurs  jours  de  suite  ;  enfin,  le  mâle  poussant  sa  femelle  devant 
lui  jusqu'à  la  cavité  destinée  au  nid,  va  chercher  des  matériaux,  qu'il 
remet  ensuite  à  sa  compagne  pour  qu'elle  les  dispose  convenablement. 
Le  nid  est  plat,  légèrement  excavé  au  milieu,  et  formé  d'un  amas 
grossier  de  branches  sèches,  de  brins  d'herbe  et  de  paille.  Plusieurs 
jours  se  passent  avant  que  la  femelle  ponde.  > 

Les  oeufs,  au  nombre  de  deux,  sont  d'un  blanc  pur  et  brillant  ;  ils 
mesurent  39  millimètres  sur  29.  Mâle  et  femelle  couvent  alternative- 
ment pendant  seize  à  dix-huit  jours;  cette  dernière  de  3  heures  de 
l'après-midi  à  10  heures  du  matin,  le  mâle  vient  alors  la  remplacer 
jusque  vers  3  heures  de  l'après-midi;  mais  ce  temps  doit  lui  paraître 
bien  long,  car  vers  une  heure  il  se  met  déjà  à  crier  pour  que  sa 
compagne  vienne  reprendre  sa  place  sur  les  œufs.  Les  petits  sont 
nourris  d'abord  du  produit  lactescent  sécrété  par  le  jabot  de  la  mère, 
puis  de  graines  ramollies,  et  enfin  de  graines  dures.  Ils  ont  les 
caractères  de  l'adulte  à  l'âge  de  quatre  semaines  et  ne  tardent  alors 
pas  à  se  séparer  de  leurs  parents  ;  débarrassés  de  leurs  petits,  ceux-ci 
s'accouplent  de  nouveau  et  ont  bientôt  une  nouvelle  couvée. 

GENRE  XCIV. 

TOURTERELLE.  —  TïïRTUR  (1). 

CoLUMBA,  Briss.  Ornith.  I,  p.  92  (1760). 
Peristera,  Boié  (nec  Swains.)  Isis,  1828,  p.  327. 
TuRTUR,  Selby,  Natural.  libr.  ornith.  V,  p.  169  (1835). 
Streptopelia,  Bp.  Consp.  gen.  av.  II,  p.  65(1857). 

Car.  —  Bec  grêle,  droit,  peu  renflé  à  l'extrémité;  narines  étroites,  hori- 
zontales, surmontées  d'une  membrane  cartilagineuse  peu  renflée  ;  ailes 
médiocres,  sub-aiguës,  deuxième  et  ti-oisième  rémiges  les  plus  longues  ;  queue 
assez  longue  et  plus  ou  moins  arrondie  ;  tarses  de  longueur  moyenne,  grêles, 
nus;  cercle  palpébrale  nu. 


(1)  Le  terme  générique  de  Turtur  doit  prévaloir,  car  les  Tourterelles  de  l'ancien  monde  et 
cellesde  l'Amérique  forment  deux  genres  parfaitement  distincts.  Swainson  créa  en  1827  pour  ces 
dernières  le  nom  générique  de  Peristera,  et  Boic  adopta  l'année  suivante  le  mCme  terme  pour  les 
Tourterelles  de  l'ancien  monde.  Le  nom  de  Perùtera  appartient  donc  aux  espèces  Américaines, 


—  20  — 

Les  deux  sexes  ont  le  même  plumage  et  leurs  formes  sont  sveltes. 

Hab.  —  On  rencontre  des  Tourterelles  en  Europe,  en  Asie,  en 
Afrique  et  dans  quelques  îles  de  l'Archipel  Indien. 

170.  —  La  Tourterelle  vulgaire. 

TURTUR  VULGARIS,  Eyton. 
(PI.  170.) 

CoLUMBA  TURTUR,  Biiss.  Omitli.  I,  p.  92  (1760). 

Peristera  TURTUR,  Boie,  Isis,  1828,  p.  327. 

Peristera  tenera  et  dubia,  Brm.  Isis,  1830,  p.  985. 

TuRTUR  VULGARIS,  Eyt.  Cat.  Br.  Birds,  p.  32  (1836). 

Turtur  auritus,  g  R.  Gray,  (ex  Ray,  1713  !)  Gen.  of  Birds  II,  p,  472  (1849). 

Peristera  rufidorsalis  et  glauconotus,  Brm.  Yogelf.  p.  257  (1855). 

Turtur  migratorius  (Selby)  Bonap.  Consp.gen.  av.  Il,  p.  61  (1857). 

Die  Turteltaube,  en  allemand. 

The  Turtle  Dove,  en  anglais. 

De  Tortelduif,  en  flamand. 

Taille:  0,25;  ailes  0,18. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes.  —  Dessus  de  la  tête  et  du  cou 
et  bas  du  dos  gris,  blanchâtre  au  front  ;  côtés  de  la  tête  d'un  cendré  blan- 
châtre passant  au  vineux  vers  le  bas;  gorge  blanche  ;  demi-collier  noir,  mais 
chaque  plume  bordée  de  blanc;  manteau,  croupion  et  sus-caudales  d'un  brun 
clair  ;  scapulaires  et  couvertures  des  ailes  noires,  mais  largement  bordées  de 
roux  de  rouille,  les  plus  rapprochées  du  bord  de  l'aile  d'un  gris  bleuâtre  ; 
rémiges  brunes,  bordées  de  gris  à  la  base;  devant  du  cou  et  poitrine  d'une 
teinte  vineuse;  sous-caudales  et  ventre  blancs  ;  rectrices  médianes  brunes  dans 
toute  leur  étendue,  les  autres  d'un  gris  sombre  en  dessus,  noires  en  dessous  et 
terminées  par  un  large  bord  blanc,  la  plus  externe  avec  la  barbe  extérieure 
entièrement  blanche.  Bec  brun  ;  iris  rougeâtre;  paupières  nues  et  rouges 
pattes  rouges  ;  ongles  bruns. 

La  femelle  est  un  peu  plus  petite  que  le  mâle,  ses  teintes  sont  plus  sombres 
et  le  demi-collier  moins  étendu. 

Jeune.  —  Collier  nul;  d'un  brun  clair  en  dessus  avec  les  plumes  du  dos  et 
des  ailes  plus  ou  moins  bordées  de  roussâtre  ;  devant  du  cou  et  poitrine  d'un 
cendré  roussâtre  ;  sous-caudales  et  ventre  blancs  (1). 

(1)  La  planche  porte  par  eirem  /emeUe  au  lieu  déjeune. 


—  21  — 


Hah.  —  La  Tourterelle  vulgaire  habite,  en  été,  la  majeure  partie 

de  l'Europe,    le    Sud-ouest    de 


l'Asie  et  le  Nord  de  l'Afrique  ; 

en    hiver,    on    l'observe    dans 

l'Afrique  centrale  jusqu'au  10° 

1.  N. 

Elle  est  commune  dans  le  Sud 

de  l'Angleterre,  rare  en  Ecosse 
,^,tfL;;]  et  en  Irlande  (  7%omp5on)  et  ne 

se  montre  qu'accidentellement 
auxîlesHébrid  es, Shetland, Orkney  et  FéroéfSaxby,  Harting,  Mûller). 
On  l'observe  dans  toutes  les  parties  de  la  Norwège  jusqu'à  Vardô  et 
Vatso  {Collett);  en  Suède  elle  est  plus  abondante  dans  le  Nord  que 
dans  le  Sud  {SundevallJ  ;  on  la  rencontre  également  en  Finlande  et 
elle  est  commune  dans  la  Russie  centrale  et  méridionale  {Sabanéeff, 
Menzbier).  Elle  est  généralement  répandue  et  plus  ou  moins  commune 
dans  toute  l'Europe  centrale  et  méridionale,  mais  elle  est  peu  abon- 
dante en  Belgique. 

Cet  oiseau  niche  dans  le  Nord-ouest  de  l'Afrique  {Loche^Drake,  etc.) 
et  aux  îles  Canaries  (Bolle).  Il  hiverne  dans  toutes  les  contrées  de 
l'Afrique  situées  entre  le  31°  et  le  10°  1.  N.,  mais  il  n'y  niche  pas 
(de  Heuglin).  En  été,  cette  espèce  est  aussi  commune  en  Palestine 
{Tristram),  en  Asie  mineure  {Krûper),  en  Perse  {Blanford),  au  Cau- 
case [Raddé)  et  en  Turkestan  {Severtzow),  mais  elle  ne  paraît  pas 
avoir  été  observée  dans  la  Sibérie  occidentale. 

Mœurs. —  La  Tourterelle  est  un  oiseau  migrateur  qui  nous  revient 
généralement  dans  la  seconde  quinzaine  d'avril.  Dès  la  fin  d'août,  ces 
oiseaux  se  rassemblent  en  troupes  qui  errent  quelque  temps  encore 
dans  le  pays,  pour  le  quitter  définitivement  à  la  fin  de  septembre  ou 
en  octobre.  Ils  émigrent  pendant  le  jour  et  par  bandes  plus  ou  moins 
nombreuses,  mais  nous  reviennent  isolément  au  printemps.  Les 
couples  ne  paraissent  pas  rester  unis  toute  l'année,  car  les  mâles 
reviennent  toujours  quelques  jours  plus  tôt  que  les  femelles. 

Cet  oiseau  vit  aussi  bien  dans  les  bois  situés  sur  les  flancs  des  mon- 
tagnes que  dans  les  forêts  des  plaines,  qu'elles  soient  formées 
d'essences  variées  ou  uniquement  de  conifères,  peu  lui  importe,  car  il 
y  trouve  toujours  sa  nourriture.  Ce  n'est,  pour  ainsi  dire,  que  pendant 
ses  voyages  qu'il  s'aventure  dans  les  endroits  découverts  et  dans  les 
jardins.  Il  aime  beaucoup  les  parties  boisées  traversées  par  une  rivière 


ou  un  ruisseau,  surtout  quand  elles  sont  en  même  temps  bordées  de 
champs  et  de  prés.  Mais  quand  il  séjourne  dans  une  forêt  de  conifères, 
il  n'a  guère  besoin  du  voisinage  des  champs,  car  les  cônes  de  ces 
arbres  lui  fournissent  une  abondante  nourriture,  dont  il  parait  très 
friand.  Il  passe  la  nuit  au  sommet  des  arbres. 

La  Tourterelle  est  bien,  par  sa  beauté,  sa  gentillesse  et  la  douceur 
de  ses  mœurs,  l'un  des  oiseaux  les  plus  recherchés  ;  la  grâce  de  ses 
mouvements,  de  son  port,  la  douceur  de  son  roucoulement  et  la  ten- 
dresse que  le  mâle  témoigne  à  sa  femelle,  plaident  en  sa  faveur; 
mais  en  réalité,  elle  n'a  pas  plus  d'aifection  que  beaucoup  d'autres 
oiseaux  et  elle  est  peut-être  moins  fidèle. 

Ce  Pigeon  marche  facilement,  assez  vite  et  avec  une  certaine  élé- 
gance, en  inclinant  légèrement  la  tête  à  chaque  pas  ;  il  aime  à  courir 
sur  les  grosses  branches  et  à  se  cacher  dans  le  touffu  des  arbres.  Son 
vol  est  facile,  rapide,  peu  bruyant;  malgré  la  rapidité  de  son  vol, 
l'oiseau  sait  changer  brusquement  de  direction  et  échapper  ainsi  aux 
poursuites  des  oiseaux  de  proie. 

Bien  que  la  Tourterelle  soit  très  sociable,  on  ne  la  voit  cependant 
jamais  en  aussi  grand  nombre  que  les  Colombins  ;  il  n'est  pourtant  pas 
rare  d'en  rencontrer  de  huit  à  douze  cherchant  ensemble  leur  nour- 
riture ;  ce  n'est  qu'à  leur  départ  en  automne  qu'elles  se  réunissent  en 
troupes  assez  nombreuses.  C'est  un  oiseau  très  farouche,  mais  à 
l'époque  de  la  reproduction  il  paraît  oublier  sa  timidité,  car  il  devient 
alors  plus  confiant  qu'aucun  autre  Pigeon. 

Son  roucoulement  ressemble  à  tourrtourr,  tourrtourr,  tourrtourr. 
C'est  ordinairement  de  grand  matin  que  le  mâle  se  fait  entendre  du 
haut  d'un  arbre,  jusqu'au  moment  où  la  faim  se  fait  sentir;  il  roucoule 
encore  un  peu  avant  midi  et  surtout  vers  le  soir,  mais  le  mauvais 
temps  le  rend  silencieux.  S'il  y  a  plusieurs  mâles  dans  le  même 
endroit,  ils  rivalisent  entre  eux  et  animent  les  bois  par  leur  roucoule- 
ment, qui  est  leur  chant  d'amour.  Tant  que  dure  la  saison  de  la  repro- 
duction, mâle  et  femelle  restent  fidèlement  attachés  l'un  à  l'autre  ; 
l'un  d'eux  vient-il  à  mourir,  la  douleur  de  l'autre  est  immense. 

La  Tourterelle  se  nourrit  de  graines  de  conifères,  de  céréales,  de 
crucifères,  de  légumineuses  et  d'une  foule  de  plantes  sauvages.  Elle 
va  s'abreuver  matin  et  soir,  et  fait  parfois  plus  de  deux  kilomètres 
pour  trouver  une  bonne  eau  de  source,  car  il  lui  faut  de  l'eau  claire  et 
fraîche. 

Reproduction.  —  Cette  espèce  a  deux  et  parfois  trois  couvées  par 


—  23    - 

année,  et  la  période  de  la  reproduction  dure  depuis  la  fin  d'avril 
jusqu'en  août.  Elle  niche  dans  les  bois  et  non  loin  d'une  eau  limpide. 
Le  nid  est  construit  sur  un  petit  arbre,  le  plus  souvent  à  hauteur 
d'homme,  rarement  à  plus  de  cinq  mètres.  Ce  nid  est  aplati  et  grossiè- 
rement fait  de  bûchettes,  de  bruyères  et  de  radicelles,  et  présente  au 
centre  une  légère  excavation  destinée  aux  œufs  ;  il  est  si  légèrement 
construit,  qu'on  peut  voir  ceux-ci  au  travers,  mais  comme  il  est 
protégé  par  les  branches  sur  lesquelles  il  se  trouve,  il  résiste  assez 
bien  au  vent.  Le  mâle  aide  sa  compagne  à  chercher  les  matériaux 
nécessaires  ;  la  femelle  s'occupe  seule  de  la  construction,  mais  elle 
l'abandonne  dès  qu'elle  est  troublée  par  la  présence  de  quelqu'un,  et 
c'est  pour  cette  raison  que  l'on  trouve  souvent  des  nids  inachevés  et 
abandonnés  ;  même  quand  elle  a  des  œufs,  elle  ne  retourne  plus  au 
nid  si  elle  en  a  été  chassée.  La  ponte  est  de  deux  œufs  d'un  blanc  pur 
et  brillant  et  mesurant  33  millim.  sur  25  environ. 

Les  deux  parents  couvent  alternativement  pendant  seize  à  dix-sept 
jours  ;  le  mâle  se  met  habituellement  sur  les  œufs  depuis  9  ou  10  heures 
du  matin  jusqu'à  3  ou  4  heures  de  l'après-midi,  puis  il  cède  la  place 
à  sa  compagne.  Les  jeunes  sont  nourris  de  la  même  manière  que  les 
autres  Pigeons,  et  les  parents  leur  témoigne  beaucoup  d'attachement. 


ORDRE  VI 
LES  <^.^ll.ii^-A.oé:s 

Caractères.  —  Il  est  assez  difficile  d'indiquer  des  caractères  géné- 
raux qui  soient  communs  à  tous  les  Gallinacés.  Ce  sont  en  général 
des  oiseaux  de  taille  variable,  à  corps  ramassé,  à  ailes  courtes  et 
arrondies,  à  bec  de  forme  variable,  le  plus  souvent  court,  connexe, 
plus  ou  moins  recourbé  à  la  pointe,  avec  les  narines  larges,  béantes 
et  placées  dans  une  dépression  oblongue.  Les  pattes  sont  de  longueur 
moyenne,  fortes  et  constituent  le  principal  organe  locomoteur  de  ces 
oiseaux  ;  les  quatre  doigts  sont  généralement  bien  conformés  et  leurs 
ongles  sont  larges  et  obtus  et  semblent  surtout  propres  à  gratter  la 
terre  ;  chez  quelques  espèces  ils  se  renouvellent  à  certaines  époques 
de  l'année.  Les  Gallinacés  qui  vivent  sur  le  sol  ont  le  doigt  postérieur 
peu  développé  et  situé  sur  un  plan  plus  élevé  que  les  autres  doigts; 
chez  les  espèces  arboricoles,  au  contraire,  il  est  assez  fort  et  souvent 
très  développé  ;  au-dessus  de  ce  doigt  se  trouve  souvent,  chez  les 
mâles,  un  ergot  aigu  dirigé  en  dedans,  qui  sert  d'arme  à  l'animal. 
Leur  queue  varie  de  forme  et  de  longeur  et  manque  même  quelquefois; 
elle  est  composée  de  12  ou  14  rectrices,  et  les  mâles  de  certaines  es- 
pèces en  ont  même  18  ou  20. 

Les  sexes  diffèrent  souvent  beaucoup  entre  eux  :  les  mâles  ont  fré- 
quemment un  plumage  varié  et  brillant,  tandis  que  celui  des  femelles 
est  assez  uniforme  et  sans  couleurs  éclatantes.  Ces  oiseaux  sont  pres- 
que tous  polygames. 

Eab.  —  On  rencontre  des  Gallinacés  dans  le  monde  entier,  depuis 
les  pôles  jusqu'à  l'équateur. 

Mœurs.  —  Les  Gallinacés  vivent  dans  les  bois  et  dans  les  plaines, 
depuis  la  cime  des  montagnes  jusqu'aux  rivages  de  la  mer  et  on  en 
rencontre  même  dans  les  déserts  les  plus  arides.  Ils  sont  partout  à 
leur  aise  et  partout  ils  trouvent  de  quoi  vivre. 

Le  sol  est  leur  vrai  domaine  ;  les  espèces  arboricoles  ne  compren- 
nent que  celles  qui  sont  le  mieux  douées  sous  le  rapport  du  vol.  Leurs 
pattes,  de  longueur  moyenne  et  robustes,  leur  permettent  de  courir 


—  -)K    — 


longtemps  et  vite;  les  ailes  leur  servent  le  plus  souvent  à  se  mainte- 
nir en  équilibre  et  à  accélérer  leur  course,  et  ce  n'est  que  par  néces- 
sité que  la  plupart  prennent  leur  essor, leur  vol  étant  lourd  et  fatigant. 
Quelques-uns,  cependant,  ont  le  vol  rapide  et  facile,  mais  ceux-là 
s'éloignent  sous  certains  rapports  des  vrais  Gallinacés. 

La  voix  de  ces  oiseaux  se  compose  généralement  de  cris  plus  ou 
moins  retentissants  qui  n'ont  rien  d'agréable.  Leurs  facultés  paraissent 
en  général  assez  bornées;  leur  intelligence  est  médiocre,  mais  la  vue  et 
l'ouïe  sont  bien  développées.  L'expérience  les  rend  craintifs  mais  non 
défiants,  et  ils  oublient  toute  prudence  quand  la  jalousie  s'en  mêle. 

La  plupart  de-^  mâles  ou  coqs  vivent  en  polygamie^  et  Tardeur 
sexuelle  se  manifeste  chez  eux  avec  une  telle  violence,  qu'ils  combat- 
tent leurs  rivaux  avec  autant  de  rage  que  de  ténacité.  La  jalousie  des 
coqs  est  un  peu  justifiée,  car  la  fidélité  conjugale  est  chose  rare  chez 
les  poules;  il  est  vrai  qu'elle  est  souvent  enfreinte  des  deux  côtés. 

La  grande  majorité  des  Gallinacés  nichent  à  terre,  les  Hoccos  et 
les  Pénélopes  paraissent  seuls  faire  exception.  Le  nid  esttoujours  d'une 
construction  grossière  et  il  est  ordinairement  placé  dans  uno  faible 
dépression,  sous  un  buisson,  dans  de  hautes  herbes,  et  toujours  dans 
un  endroit  bien  caché.  Les  couvées  sont  généralement  nombreuses. 
Les  mâles  s'inquiètent  peu  de  leur  progéniture,  et  on  dirait  que  la 
mère,  par  son  amour  et  son  dévouement  pour  ses  petits,  veuille  faire 
oublier  l'indifférence  du  père. 

J^es  jeunes  naissent  couverts  d'un  épais  duvet  ;  dès  leur  éclosion 
ils  savent  marcher  et  prendre  eux-mêmes  la  nourriture  que  leur  mère 
leur  indique.  Ils  n'acquièrent  leur  plumage  définitif  qu'à  l'âge  d'un 
an  ;  chez  quelques-uns  ce  n'est  qu'à  deux  et  même  à  trois  ans. 

Tous  les  Gallinacés  sont  recherchés  pour  leur  chair  qui  est  souvent 
fort  délicate.  Plusieurs  espèces  ont  été  domestiquées  et  ont  donné 
naissance  à  diverses  races. 

Classification.  —  On  divise  cet  ordre  en  six  familles,  savoir:  1)  les 
Ptérocliclés,  2)  les  Tétraonidés,  3)  les  Phasianidés,  4)  les  Perdicidés, 
5)  les  Mégapodidés  et  G)  les  Craocidés-  Les  deux  dernières  familles 
n'ont  pas  de  représentants  en  Europe. 

FAMILLE  DES  PTÉROCLIDÉS. 

Car.  —  Bec  petit,  court  ;  narines  situées  à  la  base  du  bec  et  cachées 
par  les  plumes  du  front;    ailes   longues  et  aiguës,  les   rémiges  dinii- 

ToMEll    —  1SS7.  4 


-  26  — 

nuant  régulièrement  de  longueur  à  parlir  de  la  première  ;  queue  mé- 
diocre, conique,  les  deux  rectrices  médianes  dépassant  souvent  les 
autres  de  beaucoup  ;  tarses  courts,  emplumés  ;  quatre  doigts  nus  ou 
emplumés,  mais  le  postérieur  rudimentaire  ou  nul  ;  ongles  courts, 
larges  et  obtus. 

De  Blainville  a  démontré  le  premier  que  les  Ptéroclidés  ont  de 
grands  rapports  avec  les  Pigeons,  et  que  si  ces  oiseaux  offrent  certains 
caractères  qui  les  séparent  de  ces  derniers,  ils  ne  peuvent  cependant 
en  être  éloignés.  Leur  sternum  ressemble  plus  à  celui  des  Pigeons 
qu'à  celui  des  autres  Gallinacés,  et  ils  se  rapprochent  en  outre  des 
Pigeons  par  le  développement  de  leurs  ailes,  leur  vol  soutenu,  leur 
manière  de  marcher  et  de  boire,  ainsi  que  par  leurs  mœurs  mono- 
games. 

Hab.  —  Cette  famille  ne  comprend  que  deux  genres  :  les  Gangas 
{Pterocles)  et  les  Syrrhaptes.  Ils  habitent  les  déserts  et  les  endroits 
arides  de  l'ancien  monde. 

Mœuï\s.  —  Ce  sont  des  oiseaux  sédentaires  ou  errants,  mais  si 
bien  doués  sous  le  rapport  du  vol,  qu'ils  peuvent  franchir  sans  peine 
des  centaines  de  kilomètres.  Ils  animent  mieux  que  tout  autre  oiseau 
les  comrées  désertes  et  arides  qu'ils  habitent.  Ils  sont  sociables,  vivent 
en  bandes,  et  plusieurs  espèces  se  tiennent  souvent  non  loin  les  unes 
des  autres,  mais  sans  jamais  se  mêler.  Pour  trouver  leur  nourriture, 
ils  sont  obligés  de  parcourir  chaque  jour  de  grands  espaces,  car  le 
désert  ne  peut  leur  fournir  qu'une  nourriture  rare  et  dispersée.  Avant 
de  se  livrer  au  repos,  ils  franchissent  souvent  des  distances  énormes 
afin  de  trouver  de  l'eau  pour  s'abreuver. 

GENRE  XCV. 

STRRHAPTE.   —  SYRRHAPTES. 

Tetrao,  Pall  Reise Russ,  Reichs,  II,  p.  712(1773). 
Syrrhaptes,  lUig.  Prodr.  Syst.  p,  243  (1811). 
Nematura,  Fisch.  Mém.  Soc.  imp  nat.  Mosc.  III,  p.  271  (1812). 
Heteroclitus,  Vieill.  Nouv.  Dict.  XIV,  p.  453  (1817). 
Pterocles,  Swains.  Classlf.  ofB.  II,  p.  343(1837). 

Car.  — Bec  court,  sub-conique,  convexe,  à  arête  arrondie  entamant  un  peu 
les  plumes  du  front;  narines  basâtes,  latérales,  presque  entièrement  cachées 
par  des  plumes  ;  ailes  allongées,  étroites  et  pointues,  la  première  rémige  pro- 
longée en  brin  filiforme  ;  queue  médiocre,  conique,  composée  de  seize  rectrices 
aiguës,  les  deux  médianes  très  allongées  et  terminées  en  brins  minces  et 


_   27  

effilés  ;  tarses  courts,  robustes  et  couverts  de  plumes  duveteuses;  pouce  nul  ; 
doigts  antérieurs  épais,  réunis  par  une  forte  membrane  ju.s(iae  près  de  li  ur 
extrémité  et  emplumés  jusqu'aux  ongles  ;  ceux-ci  larges  et  ol)tu^. 

Hab.  —  Les  deux  espèces  connues  de  ce  genre  sont  répandues  dans 
les  plaines  arides  du  Nord  et  du  centre  de  l'Asie;  l'une  d'elles  se 
montre  accidentellement  en  Europe  et  même  en  Belgique. 

171.  —  Le  Syrrhapte  paradoxal. 
SYRRHAPTES   PARADOXUS,  Licht.  ex  PalL 

Tetrao  paradoxa,  Pall.  Reise  Russ.  Reichs,  II,  p.  712,  (1773). 
Syrrhaptes  pallasii,  Temra.  Pig  et  Gallin.  III,  p.  282(1815). 
Heteroclitus  tartaricus,  Vieill.  N.  Dict.  XIV,  p.  453  (1817). 
Syrrhaptes  paradoxus,  Licht.  Reise  nacli  Buchara,  p.  134  (1823). 
Syrrhaptes  heteroclita,  Vieill.  Gai.  des  Ois.  III,  p.  61  (1825). 
Das  Fausthuhn,  en  allemand. 
The  Pallas's  Sand-grouse,  en  anglais. 
Het  Siberische  Zandhoen,  en  flamand. 

Taille:  0™,26  sans  les  filaments  de  la  queue  qui  ont  0,09;  ailes  0.25. 

Deseriptioa  du  mâle  adulte.  —  Tête  d'uu  jaune  d'ocre  tirant  sur  le 
cendré  à  l'occiput,  sur  la  nuque  et  à  la  région  des  oreilles  ;  gorge,  joues  et 
côtés  du  cou  d'un  roux  ferrugiueux,  plus  pâle  au  menton  ;  dos,  scapulaires 
et  sus-caudales  d'un  jaune  d'ocre  sale  avec  des  bandes  transversales  noires; 
couvertures  des  ailes  de  la  même  teinte  d'ocre  sale  avec  quelques  taches  non-es 
sur  les  couvertures  moyennes  les  plus  rapprochées  du  dos  et  au  pli  de  l'aile,  les 
plus  grandes  terminées  de  brun  pourpré;  couvertures  des  primaires  d'une 
teinte  Isabelle  avec  une  strie  longitudinale  noire  ;  rémiges  cendrées,  noirâtres 
à  leur  extrémité,  lisérées  de  blanc  et  à  baguettes  noires;  poitrine  cendrée, 
ornée  d'un  étroit  ceinturon  blanchâtre  dont  les  plumes  sont  bordées  de  noir; 
en  arrière  de  ce  ceinturon,  la  poitrine  est  d'un  cendré  jaunâtre  ;  ventre  noir 
varié  de  jaunâtre;  bas- ventre,  sous-caudales  et  plumes  de^  pattes  d'un  blanc 
jaunâtre;  rectrices  d'un  cendré  foncé,blanches  à  leurextrémité,tachées  de  roux 
jaunâtre  sur  la  barbe  interne,  mais  sur  les  deux  barbes  des  médianes,  dont  les 
filets  sont  noirâtres.  Bec,  iris  et  ongles  bruns. 

Femelle.  —  Ailes  et  queue  se  terminant  en  pointes  moins  allongées.  Gorge 
d'un  j  luiie  d'ocre  et  cette  teinte  est  limitée  par  une  étroite  bande  noire  en 
collier  ;  dessus  de  la  tête,  côtés  du  cou  et  de  la  poitrine  parsemés  de  taches 
noires,  mais  il  n'y  a  point  de  ceinturon;  petites  couvertures  des  ailes  égale- 
ment tachées  de  noir;  les  barides  noires  du  dos  sont  plus  étroites  mais  plus 
n()nd)icusts ;  ventr''  d'un  l)iuii  noirâtre. 


Jeune.  —  Ressemble  à  la  femelle,  mais  les  ailes  et  la  queue  nullement 
prolongées  en  poiiite  ;  les  bandes  étroites  du  dos  sont  plus  ou  moins  disposées 
en  zigzags. 

}lab    —  Ce  Syrrbapte  a  pour  pairie  les  steppes  et  les  plaines 

arides  de  l'Asie  centrale,  depuis 
la  mer  Caspienne  jusqu'en  Daou- 
rie  [Taczanowski)  et  en  Chine. 
Suivant  le  père  David,  on  le  ren- 
contre communément  en  Mon- 
golie, d'où  il  descend,  en  hiver, 
par  bandes  nombreuses  dans  les 
plaines  de  Petchely,  et  l'on  en 
prend  alors  beaucoup  au  filet  en 
Tientsin  et  Takou. 
Pallas  le  découvrit  en  1771  dans  les  steppes  desKirghis,  etSevert- 
zow  l'observa  récemment  en  Turkestan.  Son  aire  de  dispersion  paraît 
donc  comprendre  toutes  les  parties  de  l'Asie  centrale  situées  entre  les 
36°  et  55°  1.  N.,  mais  il  est  probable  que  cet  oiseau  dépasse  souvent 
ces  limites. 

C'est  vers  1853  que  le  premier  Syrrhapte  parait  s'être  montré  en 
Europe  ;  il  fut  tué  à  Sarepta  (1),  en  Russie.  En  1860,  Schlégel  et  Moore 
annoncèrent  simultanément  la  capture  de  quelques  Syrrhaptes  isolés 
dans  l'Europe  centrale:  on  en  avait  tués  dans  les  dunes  de  la  Hol- 
lande et  de  l'Angleterre  ;  d'autres  furent  pris  dans  le  Jutland  en  1861. 
Dans  le  courant  de  1863,  une  bande  énorme  de  ces  oiseaux  fit  irrup- 
tion sur  notre  continent  et  se  dispersa  sur  une  grande  partie  de  l'Eu- 
rope ;  le  professeur  Newton  estime  à  près  de  sept  cents  le  nombre  des 
individus  qui  y  ont  été  capturés  ou  tués.  A  cette  époque,  on  en  prit  dans 
la  Russie  méridionale  et  centrale  (Menzbier) ,  en  Pologne  (  Taczanoioski) , 
en  Allemagne  (A/^wn,  Bolle),  en  Danemark  (Reinhardt),  à  Helgoland 
{Gaetké),  en  Suède  (Sundevall),  en  Norwège  jusqu'au  nord  de  Bergen 
et  près  de  Nordfjord  sous  le  62°  [Collett),  en  Hollande  {Schlégel),  en 
Belgique  {de  Selys),  en  France  {de  Montessus),  en  Italie  {Giglioli),  en 
Galicie  {Dzieduszcki),  en  Autriche  (Tschusi),  en  Bohême  {Fritsch),  en 
Angleterre,  en  Ecosse,  en  Irlande,  aux  îles  Shetland,  Féroé  {Newton, 
etc.)  et  Borkum  (Altum). 

M.  le  baron  de  Sélys-Longchamps  signale,  pour  la  Belgique,   une 


(1)  Naumannia,  ITT,  p.  305  (1853). 


—  29   - 

femelle  prise  à  Rocour,prcs  de  Liège,  le  12  octobre  1863,  et  un  mâle 
tué  le  4  janvier  1864,  à  deux  kilomètres  sud-ouest  d'Ostende  ;  feu 
mon  père  a  mentionné  une  troisième  capture  près  de  Bastogne  (1). 

Mœurs.  —  C'est  à  M.  Radde  que  l'on  doit  les  premiers  renseigne- 
ments sur  les  mœurs  de  cette  espèce,  et  voici  un  résumé  de  ce  que  cet 
auteur  en  dit  : 

«  Au  milieu  de  mars,  lorsque  la  neige  recouvre  encore  les  coteaux 
des  hautes  steppes,  cet  oiseau  arrive  du  midi  ;  il  est  déjà  accouplé  et 
vit  en  petites  troupes.  Dans  les  hivers  peu  rigoureux,  on  le  rencontre 
déjà  aux  limites  Nord-Est  du  haut  Gobi  ;  mais,  après  l'hiver,  même  le 
plus  rude,  il  y  arrive  et  s'y  reproduit  de  fort  bonne  heure.  Dans  les 
premiers  jours  d'avril,  on  le  trouve  déjà  sur  ses  œufs,  et  à  la.  fin  de 
mai  il  a  une  seconde  couvée.  Après  avoir  élevé  celle-ci,  il  change  de 
demeure,  et  en  hiver,  il  émigré  jusqu'aux  limites  Sud  du  Gobi,  vers 
les  contre  forts  septentrionaux  de  l'Himalaya.  Le  10  mars  1856, 
alors  que  pendant  la  nuit  régnait  un  froid  de  —  13°R. ,  que  la  tempéra- 
ture de  midi  ne  dépassait  pas  +  2°R.,  les  premiers  Syrrhaptesse  mon- 
traient au  Tarei-nor.  Ils  volent  en  rangs  serrés,  comme  les  Pluviers; 
au  printemps,  ils  se  réunissent  en  petites  bandes  formées  chacune  de 
quatre  à  six  couples,  et  en  automne  ils  constituent  des  bandes  de 
plusieurs  centaines  d'individus.  En  volant,  ils  font  entendre  un  cri  qui 
leur  a  valu  leur  nom  mongol.  Dans  cette  grande  bande  chaque  couple 
reste  uni. 

«  Au  printemps,  les  Syrrhaptes  arriv^mt  régulièrement  à  heures 
fixes  pour  boire  aux  puits  d'eau  douce  ;  ils  y  viennent  de  toutes  les 
directions;  ils  crient  dès  qu'ils  atteignent  le  bord  de  l'eau,  et  leurs 
compagnons  leur  répondent.  Ils  se  posent  près  de  l'eau  généralement 
en  rangées  de  dix  à  douze  individus.  Ils  n'y  font  pas  une  longue 
halte,  et  en  quittant  l'abreuvoir  pour  aller  de  nouveau  se  repaître,  ils 
gagnent  ces  places  blanches  où  le  sel  s'est  cristallisé,  et  les  petites 
hauteurs  couvertes  d'herbes.  Ils  ne  dédaignent  pas  les  jeunes  pousses 
succulentes  des  salicorniées;  ils  les  paissent,  comme  le  l'ont  les 
Outardes.  Au  printemps,  j'ai  trouvé  dans  leur  estomac  des  graines  de 
Salsola. 

«  En  été,  ils  aiment  à  se  chauffer  au  soleil.  Comme  les  i)oulos,  ils 
creusent  de  petites  dépressions  dans  ces  éminences  gris  blanchâtres 

(Ij  Voy.  au  sujet  de  l'invasion  des  Syirh:i|)te>  :  The  Ibis,  lt*59,  18iJ0,  ISG.!  —  Journal  fur 
Ornttholojrie,  l^GG,  18o4,  1805.  —  Revue  et  A/aj^asiu  Je  zooloi^ie,  18G3.  —  nulletin  de  l' Aca- 
démie royale  de  Belgique,  t.   XVII  (1SG4)  p.  22.—  Dubois,   Les   Ois.   de  rEur.  t.  II,  p.  ViW. 


-  30  — 

pénétrées  de  sel,  qui  bordent  le  Tarei-nor,  et  sur  lesquelles  croissent 
des  plantes  salines.  Je  les  ai  quelquefois  observés  ainsi  au  repos.  Ils 
commencent  par  courir  de  côté  et  d'autre  cherchant  des  aliments,  et 
une  fois  rassasiés,  ils  se  reposent.  II  est  alors  ordinairement  onze 
heures;  c'est  le  moment  où  ils  se  creusent  des  trous,  pour  s'y  tapir  à 
la  façon  des  poules,  en  agitant  leur  corps  et  hérissant  leurs  plumes. 
Ils  demeurent  ainsi  dans  une  immobilité  parfaite,  et  il  est  alors  diffi- 
cile de  les  apercevoir,  tant  leur  plumage  gris  jaune  tacheté  de  noir, 
se  confond  avec  la  teinte  du  sol.  Si  un  Faucon  vient  à  passer  au-dessus 
d'eux,  ils  se  relèvent  et  disparaissent  en  un  instant.  Leur  cri  de 
détresse  a  averti  leurs  compagnons,  et  bientôt  l'air  est  rempli  de  pe- 
tites bandes  innombrables  de  ces  singuliers  oiseaux,  et  ils  sont  loin 
avant  qu'on  ait  pu  les  tirer.  Dès  que  le  danger  est  passé,  ils  reviennent, 
courent  prudemment  sur  le  sol,  puis  s'y  couchent  comme  précédem- 
ment. Il  est  rare  qu'un  Faucon  parvienne  à  en  saisir  un,  car  leur  vol 
est  plus  rapide  que  celui  des  Pigeons.  Ils  ne  peuvent  faire  de  longs 
trajets  à  pieds  ;  ils  courent  vite  mais  pas  longtemps. 

«  J'ai  observé,  qu'en  été,  de  nombreuses  bandes  de  Syrrhaptes 
voyagent  à  travers  les  steppes.  Dans  les  derniers  jours  de  mai,  je 
voulais  me  rendre  aux  îles  d'Aral,  dans  le  Tarei-nor  ;  je  longeais  les 
bords  de  ce  lac,  actuellement  desséché,  et,  vers  midi,  je  vis  une 
quantité  innombrable  de  petites  bandes  de  Syrrhaptes,mais  ces  oiseaux 
étaient  si  défiants  que  je  ne  pus  m'en  approcher.  Après  plusieurs 
tentatives  infructueuses,  je  remis  ma  chasse  à  plus  tard.  Au  coucher 
du  soleil,  ces  oiseaux  se  réunirent  en  deux  grandes  troupes,  chacune 
d'au  moins  un  millier  d'individus  ;  ils  criaient  de  toutes  leurs  forces. 
J'espérais  les  surprendre,  mais  je  ne  pus  parvenir  à  les  approcher  à 
portée  de  fusil,  ni  à  cheval,  ni  en  rampant.  Après  s'être  élevés  et 
abattus  plusieurs  fois,  ils  quittèrent  enfin  les  bords  du  Tarei-nor  et  se 
dirigèrent  vers  l'Est,  dans  le  haut  des  steppes,  où  ils  s'abattirent  en 
deux  endroits,  qui,  pendant  l'hiver,  avaient  servi  de  parcs  à  deux 
troupeaux.  Ces  deux  places  étaient  couvertes  d'une  couche  épaisse  et 
foulée  de  fumier,  qu'aucune  plante  n'avait  encore  pu  percer;  l'approche 
de  la  nuit  m'empêcha  d'y  poursuivre  ces  oiseaux,  qui  continuaient  à 
crier.  Le  lendemain,  ils  avaient  tous  disparu,  et  pendant  tout  le  reste 
de  l'été,  je  n'en  rencontrai  plus  un  seul  au  Tarei-nor. 

«  Je  fus  extrêmement  surpris  de  voir  un  oiseau  quitter  ainsi 
complètement  un  pays,  en  été,  après  sa  seconde  couvée.  C'était 
cependant  là  un  exemple  frappant  des   mœurs  errantes  et  nomades 


-  31    - 

des  véritables  habitants  des  steppes.  Ce  ne  fut  qu'au  mois  d'octobre, 
dans  le  Sud  des  steppes  où  jetais  allé  chasser  l'Antilope,  et  lorsque 
les  migrations  automnales  des  oiseaux  étaient  terminées  depuis 
longtemps  déjà,  que  je  revis  des  Syrrhaptes,  en  deçà  de  l'Argunj.  Ils 
volaient  en  bandes  et  se  dirigeaient  vers  le  Nord,  sur  le  territoire 
russe  ;  mais  je  ne  les  revis  plus  dans  les  steppes  (1).  » 

Il  résulte  de  ce  qui  précède,  ainsi  que  des  observations  faites  en 
Europe  par  MM.  Altum,  von  Droste,  A.  Brehm  et  autres,  que  le 
Syrrhapte  est  un  oiseau  extrêmement  farouche  mais  très  sociable,  et 
qu'il  tient  du  Pigeon  par  la  rapidité  de  son  vol,  et  des  Gallinacés,  par 
sa  manière  de  vivre.  Voici  un  résumé  de  la  note  publiée  par  le 
D""  Altum,  sur  les  Sjrrhaptes  observés  à  Borkum,  petite  île  hollan- 
daise située  au  nord  de  la  province  de  Groningue  : 

«  Ces  oiseaux  apparurent  à  Borkum  le  2i  mai,  par  petites  bandes 
de  deux  à  douze  sujets;  du23  juin  au  l'^juilleton  n'en  vit  plus  aucun, 
puis  ils  se  montrèrent  de  nouveau  par  grandes  bandes.  Le  8  août, nous 
revîmes  les  quatre  premiers,  qui  volaient  avec  une  grande  vitesse,  en 
battant  rapidement  des  ailes  et  en  poussant  les  cris  de  quick,  quick, 
quick.  Ils  s'abattirent  bientôt,  et  M.  F.  von  Droste  chercha  à  les  appro- 
cher. Arrivé  à  cent  pas  environ  d'eux,  il  aperçut  une  grande  bande 
d'oiseaux  qu'il  ne  connaissait  point  encore,  immobiles  et  serrés  les  uns 
contre  les  autres.  On  les  aurait  pris  pour  des  Pluviers  dorés,  si  la 
position  plus  horizontale  de  leur  corps  ne  les  en  avait  distingués.  Ils 
ne  se  laissèrent  approcher  à  moins  de  deux  cents  pas,  et  s'envolèrent 
tout  à  coup  avec  un  fort  bruissement  d'ailes,  en  poussant  des  cris 
ressemblant  à  hoeckerick,  mais  qui,  quand  tous  les  oiseaux  les 
lançaient  à  la  fois,  se  confondaient  en  un  désordre  inextricable.  Ils 
s'envolèrent  en  rasant  presque  la  surface  du  sol  sablonneux,  comme 
une  bande  de  Pigeons  qui  revient  des  champs.  Ils  formaient  une  large 
traînée,  fendaient  l'air  avec  une  grande  vitesse,  s'élevant  et  s'abais- 
sant  de  façon  à  décrire  une  ligne  légèrement  ondulée.  Mon  ami  dut 
remplacer  son  fusil  par  une  longue -vue,  à  l'aide  de  laquelle  il  put 
encore,  pendant  trois  quarts  d'heure,  voir  les  Syrrhaptes  s'éloigner 

(le  nie. 

«  L'endroit  de  la  plage  où  cette  ])ande  s'était  installée, semblait  être 
pour  ces  oiseaux  un  lieu  de  prédilection.  Ils  i-echerchaient  surtout  les 
places  où  croissaient  des  Sdioheria  maritima  des  graines  desquelles 

(1)  G.  Radde,  Reisen  im  Siidtn  von  Osi-Sibirien,  II,  p.  202. 


OC)        __ 


ils  paraissaient  très  friands.  A  cent  pas  des  dunes  il  était  fort  rare 
d'observer  un  de  ces  oiseaux,  car  ils  choisissaient  toujours  un  terrain 
uni  et  découvert.  Outre  les  graines,  ils  mangeaient  encore  des  bour- 
geons et  des  feuilles  de  Schoberia  maritiwM,  tout  comme  le  font  les 
poules.  J'ai  également  trouvé  dans  leur  jabot  des  graines  de 
Lepigonu^n  marinum  et  de  Poa  distans;  le  jabot  était  presque 
rempli  d'aliments;  les  gros  grains  de  sable  y  étaient  peu  nombreux, 
tandis  qu'il  y  en  avait  une  grande  quantité  dans  le  gésier. 

«  Peu  après  sa  chasse  infructueuse,  M.  von  Droste  rencontra  une 
femelle  isolée,  dans  un  bas -fond  d'une  centaine  d'arpents  d'étendue  et 
entouré  de  dunes  de  tous  les  côtés.  Cet  individu  était  bien  moins 
craintif  que  ne  l'était  la  bande  réunie.  En  approchant  prudemment  de 
l'oiseau  jusqu'à  une  distance  de  80  à  100  pas,  le  Syrrhapte  se  mit  à 
courir,  et  quand  il  s'arrêtait,  il  était  fort  difficile  de  l'apercevoir  sur  le 
sable,  avec  lequel  ses  couleurs  se  confondaient.  En  s'élevant,  il 
avait  quelque  analogie  avec  une  Perdrix,  mais  il  faisait  en  même 
temps  claquer  ses  ailes  comme  un  Pioeon.  Au  début  le  vol  paraît 
lourd  et  lent,  et  il  est  loin  d'être  aussi  léger  et  aussi  facile  que  celui 
des  Bécasseaux  et  des  Pluviers;  mais  une  fois  le  premier  élan  pris,  le 
Syrrhapte  surpasse  de  beaucoup  ces  oiseaux  en  vitesse.  Je  suis  porté 
à  croire  que  c'est  un  des  oiseaux  dont  le  vol  est  le  plus  rapide,  et  que 
les  Faucons  sont  peut-être  les  seuls  en  état  de  le  dépasser.  Est- on  à 
proximité,  on  entend  très  bien  le  claquement  des  ailes  quand  les 
Syrrhaptes  prennent  leur  essor;  une  bande  qui  passe  produit  un  fort 
bruissement.  Ces  oiseaux  ne  paraissent  pas  pouvoir  se  détourner 
brusquement  dans  leur  vol,  et  quand  un  Busard  fond  sur  eux,  la  bande 
se  divise  et  laisse  le  rapace  passer  entre  elle.  Ils  parcourent  une  ligne 
légèrement  ondulée,  et  restent  à  peu  près  toujours  dans  le  même 
plan  horizontal.  Les  individus  isolés  seuls  s'élèvent  haut  dans  les  airs, 
mais  les  ban-des  ne  montent  guère  à  plus  de  dix  mètres  au-dessus  du 
sol.  Quand  on  les  chassait,  ils  s'enfuyaient  à  travers  les  vallées  des 
dunes,  jusqu'à  ce  qu'ils  fussent  hors  de  la  vue,  mais  dès  qu'ils 
croyaient  le  danger  passé,  ils  revenaient  à  leur  ancienne  place  ;  si 
cependant  ils  avaient  lieu  de  ne  plus  s'y  croire  en  sûreté,  ils  s'envo- 
laient de  nouveau  pour  s'abattre  au  loin  dans  un  autre  endroit. 

«  Sur  cette  plage  entourée  de  dunes,  on  rencontrait  ordinairement 
les  Syrrhaptes  jusque  vers  9  heures  du  matin.  A  ce  moment,  par  une 
belle  matinée,  M.  von  Droste  s'était  couché  à  plat  ventre  derrière  un 
petit  monticule  de  sable  et  observait  une  bande  composée  de  90  à  100 


individus;  un  de  ces  oiseaux  l'aperçut,  un  mâle  sans  doute,  et  courut 
aussitôt  sur  une  petite  éminence,  leva  la  tête  et  poussa  son  cri  reten- 
tissant de  lîoeckerick,  koeckerick.  Ace  signal,  toute  la  bande  serra  ses 
rangs  et  demeura  immobile,  sauf  une  quinzaine  qui  en  étaient  éloi- 
gnés et  qui  se  serrèrent  quand  même  les  uns  contre  les  autres.  Mon 
ami  fit  feu,  la  bande  s'envola,  mais  le  vieux  mâle  qui  avait  averti  ses 
compagnons,  ne  partit  que  quand  le  chasseur  se  fut  levé  pour  aller 
chercher  les  sept  oiseaux  qu'il  avait  abattus. 

«  Entre  10  et  11  heures,  ils  parcouraient  la  plage  pour  chercher  les 
bourgeons  et  les  graines  dont  ils  se  nourrissaient.  Après  s'être 
abattus,  ils  restaient  environ  vingt  minutes  immobiles,  examinant  les 
alentours,  puis  ils  se  mettaient  à  manger,  courant  sur  le  sable  en 
suivant  toujours  la  môme  direction.  Quelques  petites  troupes  se  déta- 
chaient sur  les  côtés,  restaient  en  arrière,  mais  sans  jamais  s'écarter 
de  beaucoup  du  gros  de  la  bande.  Quelques  autres  individus  isolés  dépas- 
saient ces  petites  troupes,  en  arrière  et  sur  les  côtés,  et  semblaient 
remplir  les  fonctions  de  sentinelles.  En  courant  ces  oiseaux  font 
entendre  un  petit  cri  ressemblant  à  koek  koek  ;  quand  deux  d'entre 
eux  s'approchent  de  trop  près,  ils  lèvent  les  ailes,  baissent  la  tète, 
prennent  un  air  menaçant  et  crient  vivement  krictikrik.  Ils  s'élan- 
cent parfois  aussi  l'un  contre  l'autre,  sautent  en  l'air,  et  immédiate- 
ment quelques  autres  s'élèvent,  comme  s'ils  craignaient  un  danger, 
mais  ils  ne  tardent  pas  à  s'abattre  de  nouveau. 

«  Vers  midi  les  Syrrhaptes  se  rendaient  assez  régulièrement  dans 
les  dunes  sèches  et  chaudes  pour  se  baigner  dans  le  sable,  recherchant 
de  préférence  les  endroits  sablonneux  où  la  tempête  a  détruit  toute 
végétation,  ne  laissant  émerger  que  quelques  rares  Elymus  arenaria. 
C'est  là  quon  pouvait  le  mieux  les  approcher.  Malheureusement  leur 
couleur  se  confond  tellement  avec  celle  du  terrain,  que  de  loin  il  est 
presque  impossible  de  les  apercevoir.  Ainsi,  on  vit  une  fois  treize 
Syrrhaptes  s'abattre  sur  une  dune  ;  on  y  braqua  immédiatement  une 
longue-vue,  mais  l'on  ne  put  voir  aucun  oiseau,  jusqu'à  ce  que  l'un 
d'eux  se  remuât  par  hasard.  A  quarante  pas  il  est  fort  diliîcile  de  voir 
ces  oiseaux,  et  à  deux  cents  pas  il  est  impossibl<'  do  les  distinguer, 
môme  à  l'aide  d'une  longue -vue. 

'•  Au  commencenicnt  de  leur  séjour,  ces  oiseaux  étaient  peu  crain- 
tifs, mais  bientôt  la  chasse  (pi'on  l<'ur  lit  les  n-iulit  déliants,  et  il 
devenait  impossible  aux  plus  adroits  oliasseurs  de  les  surprendre.  Les 
bandes  se  composaient  ordinairement  de  30  à  70  individus,  plus  rare- 
TnMK  11  —  1SS7  r» 


ment  de  80  à  90;  parfois  aussi  on  voyait  de  petites  troupes  de  4,  6,  7, 
9,  12  sujets  et  même  des  individus  isolés.  Jusqu'au  20  août,  on  tua  sur 
l'île  de  Borkum  38  Syrrhaptes,  qui  furent  mangés  pour  la  plupart, 
car  leur  chair  est  excellente  (1).  » 

Suivant  M.  J.  Reinhardt,  des  Syrrliaptes  furent  observes  pour  la 
première  fois  en  Danemark  en  1859,  mais  c'est  par  cen1ain'''S  qu'on 
les  vit  en  1863  dans  le  Jutkmd.  Les  premiers  arrivèrent  vers  la  lin 
de  mai  et  restèrent  jusqu'en  hiver.  A  peine  arrivés,  ils  se  mirent  à 
nicher:  les  premiers  œufs  furent  trouvés  au  commencement  de  mai;  le 
6  juin,  un  chasseur  prit  une  femelle  sur  son  nid,  qui  contenait  trois 
œufs  ;  l'oiseau  fut  mis  en  cage  et  pondit  peu  après  son  quatrième 
œuf.  Un  autre  chasseur  trouva  deux  nids  à  une  courte  distance  l'un 
de  l'autre  :  le  premier,  qui  contenait  trois  œufs,  consistait  en  une 
légère  dépression  creusée  dans  le  sable,  et  tapissée  de  quelques  joncs 
secs;  le  second,  qui  ne  contenait  que  deux  œufs,  était  placé  dans  des 
bruyères  et  formé  d'herbes  sèches.  On  découvrit  encore  d'autres  nids 
dans  le  môme  mois  et  tous  construits  à  peu  près  de  la  môme  façon. 
Le  27  juillet,  un  autre  chasseur  encore  fit  lever  une  femelle  de  dessus 
son  nid,  qui  renfermait  trois  œufs;  il  plaça  un  lacet  et  parvint  quelques 
heures  après  à  s'emparer  de  la  femelle,  et  du  mâle  ensuite.  Pendant 
ce  temps,  un  des  petits  était  éclos;  un  second  sortit  de  l'œuf  peu  après, 
mais  ces  deux  poussins  périrent,  faute  de  soins,  au  bout  du  premier 
jour.  M.  Reinhardt  conclut  des  observations  faites  dans  le  Jutland, 
que  le  Syrrhapte  est  monogame  et  que  le  mâle  prend  part  à  l'incu- 
bation (2). 

M.  A.  Brehni  pense  qu'on  pourrait  fort  bien  acclimater  cette 
espèce  en  Europe,  mais  pour  cela  il  faudrait  commencer  par  la  proté- 
ger. En  1863  la  chose  eut  été  fort  possible,  mais  on  a  fait  alors  à  ces 
pauvres  oiseaux  une  chasse  à  outrance  :  la  chasse  au  fusil  étant 
devenue  trop  difficile,  on  eut  recours  au  poison,  à  des  grains  de  blé 
ind;)ibés  d'une  solution  de  strychnine. 

Reproduction.  —  Complétons  ce  qui  a  été  dit  plus  haut  sur  la  nidi- 
fication, parles  observations  faites  en  Sibérie  par  M.  Radde. 

«  Leur  nid  est  grossièrement  fait  et  ressemble  à  celui  des  Gangas. 
Plusieurs  couples  nichent  souvent  en  société.  Dans  le  terrain  impré- 
gné de  sel  du  Tarei-nor,  ils  creusent  une  petite  fosse  d'environ  cinq 


(1)  Dr  Altum,  Journal  fur  Ornithologie,  1863.  p.  2''-8  et  suivantes. 

(2)  Journal  f.  Orn.  186i,  p.  559. 


pouces  de  diamètre,  dont  les  bords  sont  garnis  de  jeunes  pousses  de 
Salsola  et  parfois  do  graminées.  Les  œufs,  au  nombre  de  quatre,  res- 
semblent également  à  ceux  des  Gangas  ;  ils  sont  roraarquablos  par 
leur  forme  elliptique,  mais  parfois  l'une  des  extrémités  est  plus  poin- 
tue que  l'autre.  Leur  couleur  varie  du  gris  ver-dâtre  au  gris  brunâtre 
sale,  qui  est  la  teinte  la  plus  ordinaire  ;  ils  présentent  k  leur  surface 
des  taches  et  des  points  bruns  dans  deux  tons  différents.  >  Suivant  les 
figures  de  M.  Radde,  ces  œufs  mesurent  en  moyenne  43  millim. 
sur  30. 

FAMILLE  DES  TÉTRAONIDÉS. 

Ca7\  —  Bec  court,  fort,  épais,  courbé  dès  sa  base  et  plus  ou  moins 
crochu  ;  partie  nue  au-dessus  de  l'œil  couverte  de  petites  écailles 
rouges  et  plus  ou  moins  cornées  ;  ailes  courtes  ou  do  longueur 
moyenne;  queue  moyenne,  tronquée  à  angle  droit, rarement  longue  et 
conique  ou  bifurquée  ;  sus  et  sous-caudales  médianes  couvrant  une 
grande  partie  des  rectriccs  et  les  dépassant  même  parfois;  tarses  épais, 
plus  ou  moins  garnis  de  plumes  ;  doigts  souvent  pourvus  d'appendices 
cornés  pectines,  que  Ton  regarde  comme  des  plumes  atrophiées  ; 
pouce  court,  élevé.  Corps  épais  et  ramassé  ;  plumage  abondant. 

Hab.  —  Les  oiseaux  de  cette  famille  habitent  les  bois  et  les  mon- 
tagnes de  la  partie  septentrionale  du  globe;  ils  manquent  en  Afrique 
et  en  Océanie. 

GENRE  XCVI. 

TÉTRAS.  —  TETRAO  (1). 

Tetrao,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  273  (1766). 
Urogallus,  Kp.  Naturl.  Syst.,  p.  180  (1829). 
Lyrurus,  S\v.  Faim.  bor.  Am.  p.  4')7  (18!31) 

Bec  épais,  recnurl)6  et  crochu  ii  la  pointe;  narines  basales,  latérales, 
cachées  par  les  plumes  du  front;  au-des.>.us  des  yeux,  une  hircje  bande  charnue 
et  papilliuse;   ;ii!es  courtes,   arromlies,  concaves,   sub-aiguës;  troisième  et 


(1)  Danj  la  li.slu  dts  oiseaux  de  Ijclgiquc  piib'.icc  eu  I8S2  {Manuel  de  zoologie,  p.  iKH,,  j'ai 
mentionne  le  Layopus  mutas,  dont  on  venait  de  m'annoncer  la  capture  de  trois  individus  aux 
environs  de  Jurhise.  Je  fis  prier  le  propriétaire  de  ces  oisciux,  qui  les  avait  fait  empailler  tous  les 
trois,  de  bien  vouloir  m'en  communiquer  un  pour  la  constatation  de  son  identité.  Mais,  malgré 
mes  instances,  il  refusa  de  rendre  ce  petit  service  A  la  science. 

La  capture  de  cette  espèce  ci  lJelgiq>ie  reste  donc  fort  douteuse,  car  il  y  a  lieu  de  supposer  qu'il 
s'.ngit  simplement  de  quelques  Lagopèdes  d'Kcosse  (Lagopus  scotic*(s),  échappés  des  Ardcnnes  où 
Ton  a  essayé  de  les  acclimater. 


-  36  - 

quatrième  rémiges  les  plus  longues;  queue  médiocre,  de  forme  varialjle,  com- 
posée de  dix-huit  lectrices  ;  tarses  de  la  longueur  du  doigt  médian,  emplumé 
jusqu'aux  doigts;  ceux-ci  allongés,  nus,  pectines  sur  les  Lords;  ongles  évasés 
à  la  pointe,  obtus,  creusés  en  dessous. 

Hah.  —  C«  genre  est  représenté  en  Europe,  ainsi  que  dans  le  Nord 
de  l'Asie  et  de  l'Amérique. 


172.  —  Le  Tétras  auerhan  ou  urogalle. 

TETRAO  UROGALLUS,  Lin. 

(PL  172  et  172b.}. 

Urogallus  major,  Bi'iss.  Odi.  I,  p.  182  (1760). 

Tetrao  urogallus,  Lin.  Syst    nat.  1,  p.  274  (1766). 

Tetrao  major,  maculatus  et  crassirostris.  Brm.  lais,  1830.  p.  985. 

Der  Auerhahn,  en  allemand. 

The  Capercaillie,  en  anglais. 

Het  Groote  Korhoen,  en  flamand. 

Taille  du  mâle  :  0'",85  ;  ailes  0,41  ;  femelle  :  0.52  ;  ailes  0,31 . 

Descriptmi  du  mâle  adulte.  —  Tête  d'un  brun  noirâtre,  varié  de  cendré 
à  la  nuque;  une  plaque  nue  et  papilleuse  d'un  rouge  vif  au-dessus  de  l'œil  ; 
plumes  de  la  gorge  très  allongées,  noires  bordées  de  vert  bronzé  ;  cou,  dos  et 
croupion  noirs  variés  de  gris  et  finement  rayés  en  zigzags  et  pointillés  de 
cendré  ;  ailes  brunes  avec  une  tache  blanche  à  l'épaule,  les  scapulaires  et  les 
couvertures  finement  rayées  et  pointillées  de  roux;  poitrine  d'un  vert  foncé  â 
reflets  bleus  et  violets;  abdomen  d'un  brun  noirâtre  taché  de  blanc  ;  plumes 
des  flancs  brunes,  pointillées  de  roussâtre  et  terminées  de  blanc;  queue  noire 
avec  des  taches  blanches  disposées  en  arc  de  cercle  ;  sus  et  sous-caudales 
noires  terminées  de  blanc  et  plus  ou  moins  pointillées  de  gris  sur  les  bords  ; 
jambes  et  tarses  garnis  de  plumes  filamenteuses  d'un  brun  cendré.  Bec  blan- 
châtre ;  iris  brun  clair;  doigts  bruns. 

Femelle.  —  Elle  est  beaucoup  plus  petite  que  le  mâle.  Parties  supérieures 
noirâtres  rayées  de  roux  et  de  cendré ,  les  parties  claires  pointillées  de  brun  ; 
gorge  et  devant  du  cou  d'un  blanc  roussâtre  avec  quelques  taches  noires  et 
cendrées  au  bas  de  ce  dernier  ;  [loitrine  d'un  roux  ardent  ;  le  reste  des  parties 
inférieures  d'un  roux  moins  vif  et  barrées  de  noir,  mais  toutes  les  plumes  plus 
ou  moins  terminées  de  blanchâtre  ;  ailes  brunes,  tachées  et  barrées  de  roux  ; 
sus-caudales  brunes,  barrées  de  roux  et  terminées  de  blanchâtre  ;  queue  d'un 
roux  ardent  barrée  irrégulièrement  de  brun-noir;  j)lumes  des  tarses  cendrées. 
Bec  brun  de  corne;  iris  et  doigts  comme  cliez  le  mâle. 


ÏBMfflîffil 


-     37  - 

Jeune  mâle.  —  Ressemble  à  la  femelle,  mais  il  est  moins  roux  et  les  parties 
inférieures  sont  rayées  de  brun  à  la  poitrine  comme  au  ventre. 

Poussin.  —  Duvet  très  épais,  serré,  droit.  Teinte  générale  d'un  jaune  ver- 
dâtre  plus  roux  sur  la  poitrine  et  le  dos,  mélangé,  sur  ce  dernier,  de  nom- 
breuses taches  brunes;  tête  d'un  jaune  assez  clair  varié  de  tnches  brunes, dont 
la  plus  apparente  est  sur  le  front  en  forme  de  croissant  ;  bec  allongé;  tardes 
couverts  de  duvet  (A.  Marchand)  (1). 

Hab.  —  Le  Tétras  auerhan,  ou  Grand  Coq  de  bruyère,  est  abon- 
dant en  Scandinavie  et  dans  le 
nord  de  la  Russie  ;  en  Norwège 
et  en  Suède  on  le  rencontre  jusque 
sous  le  70°  1 .  N . ,  et  sa  répartition 
coïncide  avec  celle  du  pin  syl- 
vestre {Collet t,  Sundewall);  en 
Russie  il  habite  les  régions  du 
sapin  et  de  l'Oural  et  les  forêts  de 
pins  de  la  région  du  Tchernosém 
{Bogdanoiv);  il  est  surtout  commun  dans  les  gouvernements  dAr- 
changel,  de  Vladimir,  de  Tver,  de  Smolensk  et  dans  les  forêts  de  la 
partie  septentrionale  du  gouvernement  de  Perm  {Sabanaéff)',  dans  le 
iMidi,  il  ne  paraît  exister  que  dans  le  nord-ouest  de  la  Bessarabie,  oii 
il  doit  se  répandre  des  confins  de  la  Hongrie  ;  l'espèce  est  entièrement 
inconnue  sur  tout  le  reste  du  littoral  de  la  mer  Noire  et  en  Crimée 
[de  Nordmann).  Cette  espèce  est  commune  dans  les  grandes  forêts  de 
la  Bohême  [Fritsch)  et  assez  répandue  dans  celles  de  la  Styrie  [Seiden- 
sacher)  ;  elle  est  également  assez  commune  en  Hongrie,  en  Galicie 
Wodzicki),  dans  les  Bsilca.ns  {El ives  eiBuckley),  en  Pologne  ( T^c^-^- 
noioski),  en  Allemagne,  principalement  dans  le  Nord,  en  Silésie,  en 
Thuringe,  en  Westphalie,  en  Prusse,  en  Poméranie,  etc.  {Naumann, 
Borggy^ève,  v.  H  orne  y  er,  etc.). 

Cet  oiseau  a  complètement  disparu  du  Danemark,  de  la  Hollande  et 
de  la  Belgique.  Il  vivait  encore,  il  y  a  une  quarantaine  d'années, 
dans  la  partie  do  la  Belgique  voisine  de  la  frontière  prussienne,  mais 
l'espèce  semble  complètement  éteinte  dans  notre  pays  ;  de  loin  on 
loin,  parait  il,  on  (Ui  prend  encore  un  individu  venant  de  la  frontière 
allemande.   En  1812,  ^AI.   de  Sélys-Longchamps  écrivait  au  sujet  de 


(1)  N(jtcs  sur  les  poussins  des  oiseaux  d'Europe  (Rcv.  et  Mag.  de  cool.  1870,   p.  iOO  ;    18<)7 
l'I.  i). 


-  88    - 

cet  oiseau  :  «  Vit  en  petit  nombre  près  des  hautes  fanges  dans  les 
forêts  de  Hertogenwakl  et  de  Samrée,  notamment  aux  environs  de 
Jalhay.  »  Anciennement  cette  espèce  était  commune  en  Ecosse  et  en 
Irlande,  mais  elle  devint  de  plus  en  plus  rare  et  le  dernier  sujet  fut 
tué  en  1758  ;  en  1836,  elle  fut  réintroduite  en  Ecosse  et  aujourd'hui 
elle  y  est  de  nouveau  assez  commune,  grâce  à  la  protection  qu'on  lui 
acco;:'de.  Il  serait  à  désirer  que  les  chasseurs  de  Belgique  s'entendissent 
également  pour  réintroduire  ce  bel  oiseau  dans  les  forêts  de  l'Ar- 
donne,  où  il  se  multiplierait  facilement,  si  on  le  ménageait  pendant 
quelques  années. 

Le  Grand  Coq  de  bruyère  est  assez  répandu  dans  les  montagnes  de 
la  Suisse  (  Tchudi).  En  France  on  ne  le  trouve  plus  que  sur  les  hautes 
montagnes  du  Jura,  des  Vosges  et  des  Pyrénées  {Degland  et  Gey^oe)  ; 
en  Espagne  il  paraît  encore  exister  dans  les  provinces  de  Léon,  des 
Asturies  et  de  Galice  {Lilford);  en  Italie  il  a  également  été  exterminé, 
et  on  ne  le  i-encontre  pour  ainsi  dire  plus  que  dans  les  parties  les 
plus  inaccessibles  des  Alpes  italiennes  (Gi'ilioli)  ;  en  Grèce  on  l'ob- 
serve encore  assez  fréquemment  dans  les  bois  de  l'Arcadie,  où  il  niche 
{Lindermayer). 

En  Asie  on  rencontre  cet  oiseau  dans  toute  la  Sibérie  et  dans  l'xVltaï, 
mais  pas  au  Kamtschatka,  où  il  est  remplacé  par  une  espèce  voisine 
(Bogdanow)  ;  il  n'existe  pas  non  plus  dans  le  Caucase. 

Mœurs.  —  Ce  Tétras  vit  de  préférence  dans  les  forêts  qui  couvrent 
les  lianes  des  montagnes,  mais  on  le  rencontre  aussi  dans  les  forêts 
des  plaines,  quand  celles-ci  olfrent  de  vastes  étendues  de  bois  à 
essences  variées,  mais  bien  pourvus  d'arbres  à  aiguilles.  Dans  les  con- 
trées du  Nord,  il  se  tient  même  dans  des  forêts  composées  uniquement 
de  pins  et  de  sapins. 

C'est  un  oiseau  sédentaire  ;  en  hiver,  cependant,  il  quitte  les  régions 
supérieures  des  montagnes  pour  passer  dans  la  zone  moyenne,  où  il 
erre  souvent  d'un  lieu  à  l'autre.  Dans  les  hivers  rigoureux,  il  reste 
parfois  des  semaines  entières  sur  les  arbres,  sans  descendre  à  terre, 
et  vivant  presque  uniquement  d'aiguilles  de  conifères.  En  temps  ordi- 
naire, ce  bol  oiseau  passe  une  grande  partie  de  ses  journées  sur  le  sol, 
recherchant  de  préférence  les  clairières  exposées  au  soleil  et  cou- 
vertes de  bruyères,  de  ronces  et  d'airelles,  et  près  desquelles  coule 
quelque  cours  d'eau  limpide.  Là  on  voit  ce  Tétras  courir  entre  les 
herbes  pour  chercher  sa  nourriture,  grimper  sur  les  buissons  et  ne 
s'envoler  qu'en  cas  de  danger.  Vers  le  soir,  le  coq  et  la  poule  se 


séparent,  et  chacun  cherche  de  son  côté  un  arbre  pour  y  passer  la 
nuit. 

Le  Grand  Coq  de  bruyère  est  lourd  dans  ses  mouvoments  et  d'un 
naturel  prudent  et  farouche.  Il  sait  marcher  avec  rapidité,  mais  pas 
aussi  vite  que  la  Perdrix;  sa  démarche  emprunte  quelque  chose  dn 
solennel  au  degme  qui  lui  est  propre;  son  dos  voûté  et  son  cou  pendant, 
lui  donne  (ju(dque  ressemblance  avec  le  Coq  d'Inde.  Les  sens  de  la 
vue  et  de  l'ouïe  sont  extraordinairement  développés  et,  si  légèrement 
que  le  chasseur  s'avance  sur  la  mousse,  le  coq  entend  le  moindre 
craquement,  le  moindre  froissement  de  feuilles,  et  aussitôt  il  part, 
d'un  vol  bruyant  et  avec  un  rapide  battement  d'ailes  ;  mais  il  est 
trop  lourd  pour  pouvoir  soutenir  longtemps  ce  vol,  dont  on  entend  fort 
loin  le  bruit  et  qui  est  toujours  dirigé  en  droite  ligne.  Bientôt  il  s'abat 
sur  le  faîte  de  quelque  grand  arbre,  de  préférence  sur  ceux  dont  le 
sommet  est  desséché  et  d'où  il  peut  aisément  repartir.  La  poule, 
moins  farouche,  se  voit  bien  plus  souvent  à  la  pâture,  grattant  la 
'erre  et  faisant  entendre  sur  tous  les  tons  son  gloussement  :  hac-hac. 

Le  coq  est  querelleur  et  jaloux  comme  la  plupart  des  Gallinacés; 
il  se  bat  en  toutes  saisons  avec  ses  semblables,  aussi  est-il  forcé  de 
vivre  seul  ;  dans  les  localités  où  ces  oiseaux  sont  abondants,  il  arrive 
cependant  parfois  de  voir  plusieui  s  mâles  se  réunir  en  automne  et 
vivre  durant  quelque  temps  en  bonne  intelligence. 

Le  coq.  qui  est  polygame,  se  conduit  en  despote  à  l'égard  de  ses 
femelles;  il  s'élance  souvent  sans  raison  sur  ses  poules  et  les  maltraite 
brutalement;  d'autres  fois  il  se  montre  doux  et  prévenant. 

LesTétras  adultes  se  nourrissent  d'aiguilles  de  conifères, de  feuilles, 
de  bourgeons,  de  frondes  de  fougères,  de  graines,  de  baies  diverses, de 
larves,  d'insectes  et  de  vers,  auxquels  ils  ajoutent,  pour  faciliter  la 
digestion,  du  gravier,  du  gros  sable  et  des  coquilles  d'escargots  en 
quantité.  Pendant  la  durée  des  amours  et  en  hiver,  le  coq  se  nourrit 
presque  uniquement  d'aiguilles  de  sapins,  ce  qui  donne  à  la  chair  un 
goût  de  résine  et  la  rend  d'autant  plus  coriace  qu'elle  est  déjà  naturel- 
lement dure.  La  poule  mang(^  rarement  des  aiguilles  de  sapins,  aussi 
a-t-clle  une  chair  tendre  <M,  succul-uUe  (jui  la  fait  rechercher  i>;ir  tous 
les  amateurs  de  gibier. 

A  l'époque  des  amours,  le  Tétras  mâle  est  extrêmement  excité  et  il 
surpasse  alors  en  ardeur  nos  coqs  domestiques. 

La  période  des  amours  commence  et  Unit  à  ('"poque  lixe;  (juand  la 
saison  est  avancée,  on  entend  déjà  en  mars  les  cris  de  ([uelques  coqs, 


-  40  — 

mais,  si  le  mauvais  temps  reparaît,  ils  redeviennent  silencieux.  Dans 
la  zone  moyenne  des  montagnes,  le  Tétras  urogalle  est  régulièrement 
en  amour  du  10 au  12  avril,  tandis  que  dans  les  hautes  montagnes, 
le  froid  retarde  souvent  d'un  mois  les  manifestations  de  ses  désirs. 

Le  chant  de  cet  oiseau  a  quelque  chose  de  tout  particulier  et  ne  peut 
être  rendu  par  des  mots  ;  on  ne  l'entend  généralement  qu'au  prin- 
temps. Après  le  coucher  du  soleil,  le  coq  va  se  mettre  sur  un  vieux 
sapin  ou  quelque  grand  hêtre,  le  même  toutes  les  années  quand  il  n'y 
est  pas  dérangé.  Il  se  met  à  chanter  dès  que  les  bourgeons  du  hêtre 
commencent  à  se  développer,  et  on  peut  alors  l'entendre  depuis  la 
première  lueur  de  l'aurore  jusqu'après  le  lever  du  soleil.  Perché 
sur  une  grosse  branche  basse,  il  relève  les  longues  plumes  de  sa 
gorge,  étale  sa  queue  en  éventail,  laisse  pendre  les  ailes,  gonllo  tout 
son  plumage,  trépigne  des  pieds  et,  comme  enivré,  tourne  les  yeux 
de  la  manière  la  plus  comique.  En  môme  temps  il  fait  entendre  des 
claquements  et  des  bruits  de  gosier,  lents  et  isolés  d'abord,  puis  plus 
rapides  et  plus  soutenus,  suivis  d'un  son  éclatant  auquel  viennent  se 
joindre  des  sifflements  et  des  sons  aigres  semblables  à  ceux  que  rend 
une  faux  qu'on  aiguise  ;  le  tout  se  termine  par  une  note  prolongée, 
pendant  laquelle  l'oiseau  ferme  d'ordinaire  les  yeux  d'un  air  béat. 

«  Le  vrai  chasseur,  dit  F.  de  Tschudi,  qui  ne  veut  pas  devoir  son 
gibier  au  hasard  mais  le  gagner  par  adresse,  doit  parfaitement  con- 
naître les  diverses  parties  de  ce  chant  extraordinaire,  qui  se  répèle 
à  de  courts  intervalles  et  ne  s'entend  pas  à  une  grande  distance,  car 
ce  n'est  que  pendant  sa  durée  que  le  coq  est  abordable.  A  trois  heures 
du  matin  il  doit  être  à  son  poste  et  s'approcher  de  l'oiseau  d'environ 
deux  cents  pas,  attendant  sans  remuer  le  commencement  du  ramage. 
Pendant  la  seconde  partie  de  son  chant,  le  Tétras  est  tellement  absorbé 
qu'il  ne  fait  guère  attention  à  ce  qui  se  passe  autour  de  lui.  C'est  ce 
moment,  immédiatement  après  le  cri  principal,  que  le  chasseur  aux 
aguets  choisit  pour  avancer.  Il  le  fait  à  grands  pas  tant  que  dure  la 
chanson,  mais  sitôt  qu'elle  cesse,  il  reste  coi  comme  une  souris  jusqu'.à 
ce  qu'elle  recommence. 

Pendant  la  première  partie,  au  contraire,  l'oiseau  entend  fort  bien 
et  part  brusquement  de  son  arbre  au  moindre  bruit  qui  l'inquiète. 
Alors  le  chant  est  ordinairement  fini  pour  toute  la  journée,  et  le 
gibier  perdu  pour  le  chasseur.  Mais  si  celui-ci  a  assez  d'adresse  et 
d'expérience  pour  ne  s'approcher  que  dans  les  moments  opportuns,  et 
se  tenir  tranquille  pendant  les  intervalles,  il  peut   tirer  le  coq   au 


-  41   - 

milieu  de  ses  étranges  contorsions  et  le  manquer,  sans  que  l'animal 
étourdi  s'en  aperçoive  ;  et  il  est  d'autant  plus  aisé  de  manquer  son 
coup,  que  le  plumage  de  l'oiseau  est  foncé  et  que  dans  l'obscurité,  il 
est  difficile  de  le  mettre  exactement  sous  la  mire.  Comme  il  a  la  vie 
dure,  et  que,  même  après  une  grave  blessure,  il  prend  encore  souvent 
le  vol  et  est  perdu  pour  le  chasseur,  on  ne  devrait  le  tirer  qu'à  balle. 
«  Ses  poules  sont  ordinairement  alors  assez  près  de  lui,  couchées 
dans  l'herbe  ou  sous  les  buissons,  et  lui  répondent  par  un  doux  bac- 
bac.  Il  y  a  quelquefois  entre  les  vieux  et  les  jeunes  coqs,  surtout  quand 
ils  se  rencontrent  dans  le  même  district,  des  combats  terribles  pen- 
dant lesquels  ces  oiseaux,  aveuglés  par  la  fureur,  ne  voient  et  n'enten- 
dent plus  rien,  ainsi  que  cela  arrive  aux  cerfs  dans  le  temps  du  rut. 
Des  témoins  parfaitement  dignes  de  foi  assurent  que,  comme  les  cerfs 
encore,  les  Tétras  au  temps  de  leurs  danses  tombent  avec  rage  sur 
les  autres  animaux  et  même  sur  l'homme.  »  Ce  fait  se  trouve  confirmé 
par  Wildungen,  qui  parle  d'un  mâle  qui  se  précipita  sur  un  bûcheron 
qui  eut  bien  de  la  peine  de  s'en  débarrasser;  un  autre  Coq  de  bruyère, 
toujours  d'après  Wildungen,  s'élança  dans  les  champs,  sauta  après 
les  chevaux  d'un  laboureur  et  les  effraya  ;  un  troisième  attaquait  qui- 
conque s'approchait  de  sa  demeure.  «  Il  y  a  plusieurs  années,  dit 
Brehm  père,  vivait  non  loin  de  chez  moi  un  Coq  de  bruyère  qui  avait 
attiré  sur  lui  l'attention  générale.  Pendant  la  saison  des  amours,  il  se 
tenait  tout  près  d'un  chemin  assez  fréquenté,  et  montrait  qu'il  n'avait 
à  ce  moment  aucune  peur  des  hommes.  Au  lieu  de  s'enfuir,  il  s'appro- 
chait d'eux,  les  poursuivait,  leur  mordait  les  jambes  et  leur  donnait 
des  coups  d'ailes  :  il  était  difficile  de  l'éloigner.  Un  chasseur  s'en 
empara  et  le  porta  à  deux  lieues  plus  loin;  le  lendemain,  l'oiseau  était 
revenu  à  son  ancienne  place.  Un  homme  l'enleva  et  le  prit  pour  le  porter 
au  garde  forestier;  il  se  laissa  prendre,  mais  dès  qu'il  vit  sa  liberté  en 
danger,  il  commença  à  se  défendre  avec  ses  pattes  et  son  bec,  déchira 
les  vêtements  de  son  ravisseur,  qui  dut  se  résoudre  à  le  lâcher.  » 

Le  coq  exécute  son  singulier  manège  jusqu'au  lever  du  soleil:  il 
est  au  plus  haut  point  d'excitation  au  moment  où  le  jour  apparaît,  et 
c'est  par  un  beau  clair  de  lune  qu'il  se  montre  le  plus  ardent.  Lors- 
que le  jour  est  venu  le  coq  va  rejoindre  les  poules  qui  se  tiennent  aux 
environs  ;  parfois,  l'une  d'elles  s'approche  de  lui  et  l'appelle  par  le  cri 
de  bac-bac  ;  alors  il  se  laisse  tomber  de  l'arbre  comme  une  masse,  et 
danse  à  terre  d'une  façon  fort  comique.  Mais,  le  plus  souvent,  il  doit 
poursuivre  les  femelles  qui  l'entraînent  assez  loin.  I)ès(ju'il  bo  trouve 
Tome  II.  —  1887  6 


.„  42  — 

alors  près  d'elles,  il  ne  tarde  pas  à  s'accoupler.  Il  est  rare  qu'il  ait 
plus  de  trois  ou  quatre  poules  autour  de  lui,  car  il  lui  est  difficile  d'en 
rassembler  autant  qu'il  pourrait  le  désirer.  Suivant  C.  Brehm,il  arrive 
parfois  que  quelques  coqs  ne  parviennent  pas  à  s'accoupler,  et  qu'ils 
sont  encore  en  amour  au  mois  de  mai,  et  quelquefois  même  en  juin  et 
en  juillet,  mais  ce  sont  là  de  rares  exceptions. 

Après  trois  ou  quatre  semaines  de  poursuites,  les  mâles  reprennent 
leur  vie  calme  et  silencieuse;  les  femelles,  de  leur  côté,  se  préparent 
à  construire  leur  nid. 

Reproduction.  —  Dans  ce  but,  les  poules  se  creusent  un  trou  assez 
grand  sous  un  buisson  ou  sous  une  touffe  de  bruyère,  de  myrtille  ou 
de  ronce,  et  y  déposent  de  huit  à  quatorze  œufs  sur  la  terre  nue  ou  sur 
une  faible  litière  de  brindilles.  Ces  œufs  sont  d'un  jaune  roussâtre  et 
parsemés  de  petites  taches  d'un  brun  marron  qui  sont  parfois  peu 
apparentes  et  qui  peuvent  même  manquer  complètement,  mais  ceci 
est  fort  rare.  Ils  mesurent  56  millim.  sur  43. 

La  poule  couve  avec  une  telle  ardeur  qu'on  peut  souvent  l'enlever 
de  son  nid.  Les  poussins  éclosent  au  bout  de  quatre  semaines  ;  la  mère 
les  conduit  aussitôt  en  quête  d'insectes  et  elle  bouleverse  les  fourmilières 
pour  mettre  les  larves  à  découvert  ;  elle  soigne  ses  petits  avec  amour, 
les  abrite  et  les  défend  même  au  péril  de  sa  vie.  «  Il  est  touchant,  dit 
Geyer,  de  voir  avec  quelle  épouvante  elle  accueille  l'homme  qui  s'ap- 
proche de  sa  progéniture.  En  un  instant  tous  les  petits  ont  disparu,  et 
ils  savent  si  bien  se  cacher  qu'il  est  difficile  d'en  voir  seulement  un;  la 
couleur  de  leur  livrée  sert  surtout  à  les  rendre  invisibles.  Souvent  j'ai 
eu  des  bandes  entières  à  mes  pieds,  les  jeunes  ne  pouvaient  encore 
voler,  et  cependant  il  m'arrivait  rarement  d'en  découvrir.  Ilssontmoins 
heureux  lorsqu'un  renard  à  l'odorat  subtil  les  surprend.  La  mère  court 
à  trois  ou  quatre  pas  au  devant  de  lui,  et  en  voletant,  comme  si  elle 
était  blessée.  Parvient-elle  par  ce  stratagème  à  éloigner  le  renard  de 
l'endroit  où  sont  les  poussins,  elle  s'élève  subitement  dans  l'air,  et 
revient  ensuite  vers  sa  progéniture.  Ses  cris  glouck,  glouck  indiquent 
que  tout  danger  est  passé,  et  aussitôt  les  petits  d'accourir.  » 

Les  jeunes  Tétras  croissent  très  rapidement.  Vers  la  fin  de  l'au- 
tomne, la  famille  se  sépare;  les  jeunes  femelles  restent  avec  leur  mère, 
tandis  que  les  jeunes  mâles  vont  errer  en  communauté  jusqu'au  prin- 
temps suivant  ;  à  ce  moment,  ils  se  comportent  entièrement  comme 
les  adultes. 

Remarque.  —  Il  n'est  pas  rare  de  rencontrer  à  l'état  sauvage,  des 


—  43  — 

hybrides   du    Tetrao  urogallus  et   du    T.  tetrix,   et  ces  métis  ont 

des  formes   assez  constantes   pour  que  certains  auteurs  aient  cru 

devoir  en  faire  une  espèce  distincte.    Voici  la  synonymie  de  ces 
hybrides  : 

Urogallus  minor  punctatus,  Briss.  Orn.  I,  p.  191  (1760). 

Tetrao  hybridus,  Lin.  Faun.  Sicec.  p.  72  (1761). 

Tetrao  médius,  Mey.  Gesel.  nat.  Fr,  Berlin^  Mag.  1811,  p.  337. 

Tetrao  lnterjMedius,  Langsd.  Mém.  Acad.  St-Pet.  III,  p.  286  (1811), 

Tetrao  urogallo-tetrix,  CoUett,  Remarks.  Orn.  N.  Norway,  p.  49  (1872). 

Tetrao  urogalloides,  (Nilss.)  Coll.,   ibidem. 

Tetrao  uro-tetrix,  Hcnke,  Wiiidm.  XI,  p.  35  (1879). 

Tetrao  urogallo-tetricides,  Sundew.  Sve/isha  Forjlarna,  p.  254  (1886). 

Tetrao  tetrix  urogallus,  A.  B.  Mcy .  Auer-Rack.  u.  Birkic.  p.  69  (1887). 

S.  A.  I.  et  R.  l'Archiduc  Rodolphe,  qui  a  fait  d'intéressantes  obser- 
vations sur  ce  sujet,  considère  cet  hybride  comme  fécond  (1).  Dans  ce 
cas,  les  descendants  doivent  retourner  soit  à  l'une,  soit  à  l'autre  des 
espèces  types,  suivant  que  l'hybride  mâle  s'accouple  avec  la  poule  du 
T.  urogallus  ou  du  T.  tetrix.  Mais  si  le  coq  et  la  poule  sont  tous  deux 
des  métis  des  précédents,  leur  couvée  conservera  le  plumage  hybride 
des  parents,  et  ceux-ci  pourraient  devenir  la  souche  d'une  espèce 
nouvelle,  si,  bien  entendu,  le  croisement  avec  les  espèces  primitives 
n'était  plus  possible,  ce  qu'il  est  difficile  d'empêcher,  et  si  la  stériUté 
ne  vient  pas  arrêter  la  multiplication  au  bout  de  quelques  géné- 
rations. 


173.  —  Le  Tétras  à  queue  fourchue. 

TETRAO  TETRIX,  Lin. 

(PI.   173.) 

Urogallus  minor,  Briss.  Ortnth.  I,  p.  186  (1760). 
Tetrao  tetrix.  Lin.  Syst.  nat.  1,  p.  274  (1766). 
Urogallus  tetrix,  Kp,  Nat.  Syst.  p.  180  (1829). 
Tetrao  juniperorum  et  ekic.eus,  Brm.  Isis,  1830,  p.  785. 
Tetrao  rupestris.  Brin.  Voff.  Deulschl,  p.  509  (1831). 
Lyriirus  tetrix,  Sw,  et  Ilich,  Funn.  bar.  Am.,  p.  497  (1831). 


(1)  \oy.\e?,  M itthcil.  des  Ornith.  Ver.  i)t  If'if».  188^?,  p.  108.  --  I/.\rcliiduc  Rodolphe  a 
également  publié  des  observations  sur  cet  hybride,  dans  sou  ouvrage  imitulé  :  Allcrlei  gcsam. 
Ornith.  Bcobachtioif/,:)i,i^.  118 (Vienne  1880). 


-  44  - 

Lyrurus  derbianus,  Gould.  Proc.  Zool.  Soc.  1837,  p.  132. 

Tetrao  derbianus,  Gray,  Gen.  of  Birds  III,  p.  516  (1849). 

Tetrao  peregrinus,  Brm.  Naitmannia,  1855,  p.  287. 

Tetrao  furcatus,  C.  F.  Dub.  PI.  col.  Ois.  Belg.  II,  p.  152  (1857). 

Der  Birkhahn,  en  allemand. 

The  Black  Grouse,  en  anglais 

Het  Korhoen,  en  flamand. 

Taille:  mâle  0™,50,  ailes  0,28;  femelle  0,36;  ailes  0,24. 

Description  du  mâle  adulte.  —  Tête,  cou,  dos  et  croupion  d'un  bleu  noir 
brillant  à  reflets  violets;  manteau,  couvertures  des  ailes,  poitrine,  ventre  et 
queue  d'un  noir  brunâtre  ;  ailes  traversées  par  une  barre  blanche  ;  rémiges 
brunes  ;  queue  très  fourchue,  les  quatre  rectrices  externes  beaucoup  plus 
longues  que  les  autres  et  contournées  en  dehors;  sous-caudales  blanches, 
quelques-unes  dépassant  les  rectrices  médianes  ;  bas  des  jambes  d'un  blanc 
varié  de  brun;  tarses  garnies  déplumes  filamenteuses  d'un  brun  cendré. 
Bec  noir;  iris  brun;  membrane  papilleuse  de  l'œil  d'un  rouge  vif;  doigts 
bruns. 

Femelle.  —  Parties  supérieures  rousses  marquées  de  taches  noires  transver- 
sales à  la  tête,  au  cou  et  sur  la  poitrine  ;  dos  et  sus- caudales  de  la  même  cou- 
leur rousse,  mais  les  taches  noires  plus  grandes  et  les  parties  claires  ornées  de 
lignes  noires  en  zigzags;  couvertures  moyennes  des  ailes  comme  le  dos,  mais 
terminées  de  blanchâtre  pointillé  de  noir  ;  les  plus  grandes  brunes,  marbrées 
de  roussâtre  et  terminées  de  blanc  ;  rémiges  brunes,  marbrées  de  roussâtre 
sur  le  bord  externe;  parties  inférieures  d'un  roux  varié  de  blanchâtre  et 
barrées  et  pointillées  de  noir;  queue  brune  terminée  de  blanchâtre,  avec  des 
raies  en  zigzags  rousses,  l'extrémité  pointillée  de  brun;  tarses  d'un  cendré 
roussâtre. 

Jeune  mâle.  —  Ressemble  à  la  femelle,  mais  son  plumage  est  en  général 
plus  sombre  et  les  taches  noires  sont  plus  rapprochées. 

Poussin. —  Duvet  d'un  jaune  brunâtre  pâle,  roux  sur  le  dos  et  les  ailes,  dont 
les  plumes  sont  déjà  sorties  ;  la  base  du  duvet  est  noire  sur  le  dos,  et  ce  noir, 
paraissant  à  la  surface,  y  forme  quelques  taches  ou  ondulations;  une  tache 
noire,  en  croissant,  sur  le  front  entre  les  yeux  le  rapproche  du  poussin  du 
Grand  coq  de  bruyère,  dont  il  diffère  par  une  calotte  d'un  roux  vif;  cette 
calotte  est  entourée  de  noir  qui  se  réunit  sur  le  cou  ;  une  série  de  taches 
brunes  sur  la  région  auriculaire  ;  tarses  couverts  de  duvet,  doigts  dénudés 
{A .  Marchand) . 

Var.  accid.  —  D'un  blanc  pur  ou  taché  de  blanc  ;  parfois  le  dos  est  blanc, 
d'autres  fois  au  contraire,  c'est  le  ventre  qui  est  blanc  ;  l'albinisme  se  répand 
aussi  sur  les  ailes  et  sur  la  queue  ;  on  rencontre  également  des  variétés 
d'un  gris  enfumé  ou  d'un  brun  pâle,  ornées  de  bandelettes  et  de  zigzags 
noirs. 


-    45 


Hab.  —  Ce  Tétras,  aussi  appelé  Birkhan  et  Coq  de  bruyère,  habite 

une  grande  partie  de  l'Europe  et 
la  Sibérie.  Il  est  plus  abondant 
que  le  précédent  en  Scandinavie, 
où  on  l'observe  jusque  sous  le 
69''20'  de  1.  N.  {Nilsson,  Collett); 
^^ffi^î^  il  en  est  probablement  de  même 
^  ^"'^"  en  Russie,  car  on  le  voit  nicher 
dans  ce  pays  jusque  sous  le 
67  1/2°  {Malmgren),  et  il  est  cer- 
tain qu'il  dépasse  cette  latitude  en  Russie,  aussi  bien  qu'en  Norwège 
et  en  Sibérie  ;  dans  la  Nouvelle-Russie,  il  se  tient  pendant  toute 
l'année  dans  les  steppes,  qui  offrent  de  grandes  étendues  de  bruyères 
entremêlées  de  genévriers  et  autres  broussailles,  que  cet  oiseau 
recherche  avant  tout;  il  n'y  a  qu'un  petit  nombre  de  ces  oiseaux  qui 
des  steppes  s'avancent  jusqu'en  Crimée  (de  Nordmann).  Le  Tétras  à 
queue  fourchue  est  aussi  plus  ou  moins  répandu,  suivant  les  localités, 
en  Pologne  {Taczanowski),  en  Hongrie  (/.  Gei/er),  en  Autriche 
(Tschusi),  en  Bohême  {Fritsch),  en  Tyrol  {Stejneger),  eu  Allemagne 
{Naumann,  Borggrevé)  et  dans  le  Jutland  [Lûtken).  Il  est  très  loca- 
lisé en  Hollande  {Schlégel)  et  en  Belgique,  où  il  habite  en  petit 
nombre  vers  les  frontières  de  la  Prusse  dans  les  environs  de  Vielsalm 
et  dans  quelques  grandes  forêts  du  Luxembourg  belge,  entre  autres 
dans  le  canton  de  Bastogne  {F.  Fallon)  ;  du  reste  l'espèce  diminue 
chaque  année  et  tend  à  disparaître  complètement  de  notre  pays.  En 
France  son  habitat  paraît  plus  étendu  que  celui  du  Tétras  urogalle 
(Degland);  il  habite  l'Ecosse  et  beaucoup  de  localités  de  l'Angleterre, 
mais  n'existe  pas  en  Irlande  {Harting);  en  Italie  on  l'observe  dans  toute 
la  zone  septentrionale  et  en  Ligurie,  accidentellement  en  Romagne  et 
en  Toscane  {^alvadori);  enfin,  en  Espngne  il  ne  paraît  exister  quii 
dans  la  Catalogne  aux  environs  de  Gerona  {Reycs).  Cet  oiseau  est  aussi 
très  commun  dans  toute  la  Sibérie  jusqu'au  68°  1.  N.  {Middendor/f, 
Radde,  etc.),  mais  il  n'existe  pas  au  Kamtschaïka. 

Mœurs.  —  Le  Tétras  à  queue  fourchue  ou  Birkhan  est  un  oiseau 
sédentaire  et  errant  ;  dans  les  montagnes  il  quitte  les  régions  élevées 
à  l'approche  de  Thiver,  pour  aller  errer  dans  la  zone  moyenne.  Dans 
les  plaines  ces  oiseaux  entreprennent  également  des  voyages  assez 
réguliers,  mais  beaucoup  d'entre  eux  ne  reviennent  plus  à  lour 
ancienne  demeure. 


-  46    - 

Cet  oiseau  recherche  de  préférence  les  endroits  couverts  de  bruyè- 
res, de  genêts,  de  myrtilles,  de  ronces  et  autres  plantes  basses,  entre- 
mêlées de  buissons  et  de  taillis;  ce  qu'il  aime  avant  tout,  ce  sont  les 
terrains  tourbeux  où  dominent  les  plantes  marécageuses,  mais  non 
les  marais  proprement  dits.  Sur  les  montagnes,  il  recherche  les 
forêts  claires,  les  buissons,  les  taillis  et  les  bruyères,  qu'il  paraît 
particulièrement  affectionner^  jamais  il  ne  s'aventurera  dans  une 
forêt  touffue  et  sombre. 

C'est  un  oiseau  très  farouche  et  prudent  qu'il  est  difficile  d'appro- 
cher. Quoique  lourd ,  il  marche  avec  facilité  et  sait  même  fort  bien  courir . 
Il  vole  bien  et  en  ligne  droite,  bat  des  ailes  avec  précipitation  et  sait 
franchir  d'une  seule  traite  un  grand  espace;  dans  tous  ses  mouve- 
ments il  se  montre  plus  agile  que  le  Tétras  urogalle  et  son  vol  est 
aussi  plus  léger  et  moins  bruyant  que  celui  de  ce  dernier.  Les  sens  de 
la  vue,  de  l'ouïe  et  de  l'odorat  sont  bien  développés.  Tschudi  dit 
qu'il  est  stupide,  qu'il  n'a  qu'à  un  faible  degré  le  sentiment  des  loca- 
lités, et  que  sa  timidité  et  sa  sauvagerie  innées  le  sauvent  bien  plus 
souvent  que  sa  prudence  et  son  jugement.  Brehm  n'est  pas  de  cet 
avis  :  «  Très  rarement,  dit-il,  ce  Tétras  se  laisse  surprendre,  et  cela 
n'arrive  qu'en  hiver,  par  les  temps  de  tourmente  qu'il  paraît  d'ailleurs 
pressentir.  Comme  les  Pigeons,  il  tient  en  général  toute  chose  incon- 
nue pour  suspecte,  et  s'enfuit  dès  qu'il  appréhende  quelque  danger.  » 
Il  est  sociable  ;  en  dehors  de  l'époque  des  amours,  il  est  rare  de  ren- 
contrer des  individus  isolés;  en  automne,  ces  oiseaux  restent  en 
famille,  et  en  hiver  ils  se  réunissent  en  troupes  assez  considérables, 
là  où  ils  sont  abondants,  et  vivent  en  bonne  harmonie.  Ce  ne  sont 
que  les  vieux  mâles  qui  mènent  une  vie  solitaire. 

Sa  voix  varie  suivant  les  sexes  ;  le  cri  d'appel  est  un  sifflement  clair 
et  bref,  auquel  la  femelle  répond  par  un  hack  back.  Mais  pendant  la 
période  des  amours,  le  coq  fait  entendre  une  richesse  de  sons  peu  en 
rapport  avec  son  flegme  habituel . 

Il  se  nourrit,  suivant  la  saison,  d'insectes,  de  larves,  de  nymphes 
de  fourmis,  de  vers,  de  petits  escargots,  de  bourgeons  de  bouleaux, 
de  chatons  de  saules,  déjeunes  pousses  de  divers  végétaux,  de  baies 
de  toutes  espèces  et  surtout  de  baies  de  genévriers,  de  myrtilles  et  de 
framboises;  il  mange  aussi  des  graines,  mais  rarement  des  jeunes 
cônes  de  pin  ou  des  aiguilles  de  conifères.  Pour  faciliter  sa  digestion, 
il  avale  du  gravier  et  du  sable. 

A  l'époque  de  l'accouplement,  les  coqs  deviennent  belliqueux  et  se 


—    Al   — 


livrent  entre  eux  des  combats  acharnés  qui,  selon  Tschudi,  se  termi- 
nent parfois  par  la  mort  d'un  des  combattants. 

La  période  des  amours  commence,  dans  l'Europe  centrale,  vers 
la  seconde  quinzaine  de  mars  et  dure  jusqu'au  mois  de  mai;  dans  les 
contrées  du  Nord  et  dans  les  hautes  montagnes,  elle  commence  plus 
tard  et  se  prolonge  jusqu'à  la  fin  de  mai  et  même  jusqu'en  juin.  Pour 
ses  exercices  amoureux,  le  coq  choisit  dans  la  forêt  un  endroit  décou- 
vert, une  prairie,  une  coupe  où  les  jeunes  arbres  ne  peuvent  le  gêner, 
car,  pour  sa  danse,  il  a  besoin  d'un  grand  espace.  Au  premier  siffle- 
ment, que  Nilsson  a  rendu  par  tschiio-y,  succède  le  rémoulage  : 
routtourou  -  routtou  -  7^ouiki  -  ourr  -  ourr  -  ourr  -  rry^outtourou  - 
7'outtou  -  rouiki.  Quand  l'oiseau  est  fort  excité,  ces  diverses  phrases 
se  suivent,  se  lient  si  bien,  qu'on  ne  peut  reconnaître  ni  la  fin  de  l'une, 
ni  le  commencement  de  l'autre.  Il  est  rare  que  le  Birkhan  oublie, 
dans  ses  transports,  de  veiller  à  sa  sûreté. 

«  Dans  les  Alpes,  dit  de  Tschudi,  une  bonne  demi-heure  avant  le 
lever  du  soleil,  resonne  au  loin  le  premier  appel  d'un  Birkhan,  auquel 
répondent  bientôt  tous  ses  confrères  à  la  ronde.  A  plus  d'une  demi-lieue 
de  distance,  ces  tons  tour  à  tour  sourds  et  criards  se  distinguent  nette- 
ment au  milieu  du  concert  général.  Au  commencement  de  la  saison, 
les  chants  d'appel  du  Birkhan  durent  peu  et  cessent  dès  que  le  soleil 
s'est  levé  ;  ils  se  prolongent  davantage  dans  les  endroits  obscurs. 
Quelques  semaines  plus  tard,  on  peut  les  entendre  toute  la  matinée, 
surtout  quand  le  temps  est  couvert.  Cependant  on  ne  peut  rien  fixer  à 
cet  égard  :  il  y  a  des  districts  et  des  années  où  le  temps  des  amours 
est  très  court  et  irrégulier,  d'autres,  au  contraire,  où  il  est  prolongé 
et  continu.  Le  chant  des  coqs  dans  la  montagne  est  plus  court  et 
moins  fort  le  soir,  avant  le  coucher  du  soleil,  que  le  matin.  De 
même  quand  l'automne  est  chaud,  on  les  entend  à  cette  époque,  et 
même  au  mois  d'octobre,  appeler  encore  à  9  heures  du  matin  d'une 
manière  irrôguliêre  et  seulement  pendant  quelques  minutes:  ce  sont 
probablement  les  jeunes  coqs.  Le  chant  complet  se  compose  propre- 
ment de  deux  parties,  la  première  formée  de  sons  sourds,  gutturaux, 
assez  seml)lables  au  cri  de  la  Tourterelle  et  répétés  trois  ou  quatre 
fois,  la  seconde,  do  sons  aigus  et  stridents  une  ou  deux  fois  répétés, 
auxquels  s'ajoute  quelquefois  un  autre  cri,  difîicile  à  décrire.  Cepen- 
dant il  y  a  ici  une  grande  diversité,  tant  chez  les  vieux  que  chez  les 
jeunes  coqs.  Souvent  ce  ne  sont  que  les  tons  sourds  qui  se  font  enten- 
dre, d'autres  fois  ce  ne  sont  que  les  tons  aigus.    Nous   avons  vu  de 


—  48  — 

vieux  coqs  qui  se  bornaient  à  ces  derniers  lorsqu'ils  avaient  quelque 
inquiétude  et  qui,  après  avoir  pris  la  fuite  les  répétaient  encore  ou 
se  taisaient  complètement;  tandis  que  des  jeunes  qui  avaient  été 
dérangés,  reprenaient  immédiatement  leur  chant  complet,  et  cela 
trois  ou  quatre  fois  de  suite,  même  après  un  coup  de  fusil  tiré  sans 
résultat. 

«  Pendant  leur  chant,  les  Birkhans  ont  une  singulière  tournure. 
Tantôt  perchés  au  sommet  d'un  grand  sapin,  sur  une  branche  sèche 
ou  sur  quelque  vieux  tronc,  tantôt  posés  sur  une  crête  de  rocher  ou 
au  milieu  d'un  pâturage  alpestre,  ou  même  sur  le  toit  d'un  cjialet,  ils 
laissent  tomber  leurs  ailes,  étalent  en  large  éventail  leur  belle  queue 
fourchue,  de  manière  à  faire  étinceler  les  plumes  argentées  de  leur 
croupion,  abaissent  et  relèvent  alternativement  leur  tête  aux  caron- 
cules écarlates  et  distendues,  et  enfin  tournent  sur  place  ou  décrivent 
en  sautant  des  cercles  sur  la  terre.  Ce  manège  est  l'expression  de 
sentiments  violents  et  passionnés  ;  souvent  une  poule  sous  le  couvert 
d'un  buisson  y  répond  par  un  tendre  gloussement,  souvent  aussi  il 
n'y  a  point  de  femelle  dans  le  voisinage  et  le  coq  ivre  d'amour  en  est 
pour  ses  frais.  Mais,  contrairement  à  ce  qui  a  lieu  chez  le  Tétras 
urogalle,  le  Birkhan,  pendant  toute  la  durée  de  son  étrange 
comédie,  voit  et  entend  parfaitement  tout  ce  qui  se  passe  autour  de 
lui .  » 

«  C'est  surtout,  dit  A.  Brehm,  quand  plusieurs  mâles  sont  ras- 
semblés qu'ils  déploient  une  ardeur  sans  égale.  Ils  se  battent  avec 
rage;  deux  se  placent  en  face  l'un  de  l'autre,  comme  des  coqs 
domestiques,  et  se  précipitent  l'un  sur  l'autre,  la  tête  penchée  à 
terre  ;  ils  s'élancent  en  l'air,  cherchant  à  se  porter  des  coups  d'ongles, 
puis  retombent,  tournent  l'un  autour  de  l'autre  en  grondant,  prennent 
un  nouvel  élan  et  s'efforcent  de  se  saisir  mutuellement.  Si  le  combat 
devient  plus  sérieux,  chacun  y  laisse  quelques  plumes,  mais  malgré 
toute  l'ardeur  qu'ils  paraissent  déployer,  jamais  ils  ne  se  font  des 
blessures  sérieuses  ;  on  dirait  qu'ils  ne  veulent  que  s'efFraj^er  et  non  se 
nuire.  Il  arrive  cependant  quelquefois  que  le  plus  fort  saisit  son  rival 
par  la  tête,  le  traîne  à  terre  à  quelques  pas,  lui  donne  encore  quelques 
coups  de  bec,  puis  le  chasse.  Le  vainqueur  retourne  alors  triomphant 
sur  le  champ  de  bataille  pour  continuer  son  chant.  Les  mâles  vigou- 
reux viennent  dans  la  matinée  à  plusieurs  endroits, pour  y  essayer  leur 
force  ayec  leurs  rivaux.  Ils  deviennent  parfois  ainsi  la  terreur  de 
tous  les  jeunes  coqs  moins  expérimentés.   Souvent  aussi  le  vaincu 


—  49  — 

revient  à  son  ancienne  place  et  recommence  le  combat,  ou  bien  il  se 
rend  à  quelque  autre  endroit,  pour  se  mesurer  avec  un  nouvel  adver- 
saire.  » 

Suivant  le  même  auteur,  un  mâle  vigoureux  peut  suffire,  dans  une 
matinée,  à  quatre  ou  six  femelles,  mais  il  est  rarement  assez  heureux 
pour  en  réunir  autant  autour  de  lui. 

Reproduction.  —  C'est  vers  le  milieu  de  mai  que  la  femelle  cherche 
un  endroit  très  caché  pour  y  nicher.  Son  nid  se  réduit  en  une  simple 
dépression  creusée  dans  le  sol  et  garnie  de  quelques  herbes  ;  il  est 
établi  entre  d'épaisses  bruyères,  sous  un  buisson,  dans  les  hautes 
herbes  ou  sous  quelque  sapin  branchu  jusqu'au  sol.  Chaque  couvée 
est  de  7  à  12  œufs,  d'un  jaune  roussâtre  et  tachés  irrégulièrement  de 
brun  roux  ou  de  brun  olivâtre.  Ils  mesurent  37  millimètres  sur  27. 
La  femelle  couve  seule  durant  trois  semaines,  et  quand  elle  doit  quitter 
ses  œufs  pour  aller  chercher  sa  nourriture,  elle  les  recouvre  soigneu- 
sement de  mousse  ou  de  feuilles  mortes.  Quelques  heures  après  leur 
naissance,  les  poussins  sont  conduits  par  leur  mère  qui  leur  montre 
leur  nourriture  en  mettant  à  découvert  des  nymphes  de  fourmis,  des 
larves  et  des  vermisseaux.  Au  bout  de  quelques  semaines  les  petits 
savent  voler,  et  toute  la  famille  se  tient  alors  volontiers  disséminée 
sur  le  môme  arbre.  Ils  restent  avec  leur  mère  jusqu'à  la  fin  de 
l'automne,  et  ne  la  quittent  que  quand  ils  ont  revêtu  le  plumage  des 
adultes. 

Remarques. —  1.  Il  a  été  dit  précédemment  (p.  43)  que  le  Tétras 
urogalle  s'accouple  parfois,  à  Tétat  sauvage,  avec  le  Tétras  à  queue 
fourchue.  Ce  dernier  s'accouple  quelquefois  aussi,  dans  la  même  condi- 
tion, avec  le  Lagopède  blanc  {Lagopus  albus),  le  Lagopède  d'Ecosse 
(L.  scoticus),  la  Gelinotte  {Bonasa  hetulina)  et  même  avec  le  Faisan 
commun  [Phasianus  colchicus).  Ces  hybrides  sont  d'autant  plus 
intéressants  qu'ils  sont  le  produit  du  croisement  d'oiseaux  apparte- 
nant à  des  genres  différents.  On  trouvera  des  détails  sur  ces  hybri- 
des, accompagnés  d'excellentes  figures,  dans  le  récent  ouvrage  de 
M.  A.-B.  Meyer(l). 

2.  On  rencontre  en  Asie  plusieurs  autres  Tétras,  décrits  comme 
espèces  distinctes,  mais  plus  ou  moins  voisins  du  T.  urogallus^  dont 
plusieurs  pourraient  bien  n'être  que  des  variétés  climatériques.  N'ayant 


(l)   Unxcr  Aucr-,   Uachcl-  nnd  liirkwild   und  seine  Abartcn  (Vioni.o    1S87). 
TuME  II.    —   1888. 


50     - 

pas  ces  différentes  formes  sous  les  yeux,  je  me  bornerai  à  les  signaler 
à  l'attention  des  ornithologistes.  Ces  espèces  sont  : 

Tetrao  urogalloides,  Midd.,  delà  Sibérie  orientale; 

—  uralensis,  Sev.  et  Menzb.,  du  Sud  de  l'Oural; 

—  Taczanowskii,  M.,  du  Sud-Est  de  la  Sibérie  ; 
kamtschaticus,  Kittl.,  du  Kamtschatka  ; 

—  sachalinensis ,  Bogd.  de  l'île  de  Sachalin. 

Quant  au  Tetrao  acatoptricus,  Radde  {T.  Mlohosiewiczi,  Tacz.) 
du  Caucase,  il  diffère  du  T.  tetrix  par  l'uniformité  de  ses  teintes.  Il 
est  d'un  noir  uniforme  avec  de  légers  reflets  d'un  vert  bleuâtre  sur  le 
dos  et  à  la  poitrine  ;  sous-alaires  blanches  ;  sous-caudales  noires  ;  pas 
de  bande  blanche  sur  l'aile.  —  C'est  bien  une  espèce  distincte. 

3.  Les  femelles  des  divers  Tétras,  dont  la  ponte  est  éteinte  par 
l'âge,  prennent  en  vieillissant  un  plumage  plus  ou  moins  semblable 
à  celui  des  mâles. 

GENRE    XCVII 

GELINOTTE.  —  BONASA. 

BoNASA,  Briss.  Ornith.  I,  p.  191  (1760). 

Tetrao,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  275  (1766), 

BoNASiA,  Kp.  Naturl.  Syst.,  p.  179  (1829). 

Tbtrastes,  Keys,  et  BL,  Wirbelth.  Eut.,   pp.  LXIV,  200  (1840;. 

Car.  —  Bec  médiocre,  épais,  légèrement  recourbé;  narines  basales,  laté- 
rales, cachées  par  les  plumes  du  front;  au-dessus  des  yeux  un  étroit  espace 
nu;  plumes  du  vertex  plus  ou  moins  allongées  et  pouvant  se  redresser  en 
forme  de  huppe;  ailes  courtes,  arrondies,  sub- obtuses,  4°  et  5*  rémiges 
d'égale  longueur  et  les  plus  longues;  queue  médiocre,  arrondie,  formée  de 
seize  rectrices  ;  tarses  emplumés  seulement  sur  la  moitié  de  leur  étendue  ; 
doigts  nus,  pectines  sur  les  bords  ;  ongles  allongés,  obtus,  creusés  en  dessous. 

Hab.  —  Ce  genre  a  des  représentants  dans  l'Europe  septentrionale 
et  centrale,  ainsi  que  dans  le  nord  de  l'Asie  et  de  l'Amérique. 

174.  —  La  Gelinotte  des  coudriers. 

BONASA  BETULINA,  Gr.  ex.  Scop. 

(PI.    174.) 

Tetrao  bonasia,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  275  (1766). 
Tetrao  betulinus,  Scop.  Ann.  I,  hist.  nat.  n»  172  (1769). 
Tetrao  canus,  Sparrm.  Mus.  Caris.  I,  pi.  16  (1786). 
Bonasia  rupestris  et  sylvestris,  Brm.  Isis,  1830,  p.  985. 
Bonasia  europ^a,  Gould,  Birds  ofEur.  IV,  pi.  251  (1837). 


—  M  — 

Tetrastes  bonasia,  Keys.  et  Bl.  Wirbehh.  Eur.,  p.  200  (1840). 

BoNASA  SYLVESTRis,  Gray,  List.  gen.  B.,  p.  80  (1841). 

Bonasia  lagopus,  minor,  ?  albogularis,  Brm.  Naumannia  1855,  p.  287. 

Bonasia  betulina,  Bp.  Cat.  Parz.,  p.  13  (1856). 

Bonasa  betulina,  Gray,   Ea7id-list  of  B.  II,  p.  277  (1870). 

Das  EuROpâiscHE  Haselhuhn,  en  allemand. 

The  Hazel-Grouse,  en  anglais. 

Het  Hazelhoen,  en  flamand. 

Taille:  mâle  0'",30,  ailes  0,173;  femelle  0,28;  ailes  0,17. 

Description  du  mâle  adulte.  —  Parties  supérieures  d'un  cendré  roussâtre, 
les  plumes  de  la  nuque  et  du  manteau  barrées  de  noir  et  terminées  de  cen- 
dré ;  gorge  noire,  encadrée  de  blanc  ;  tache  derrière  l'œil,  blanche  ;  bas  du  dos 
de  la  couleur  du  manteau,  mais  chaque  plume  avec  une  strie  longitudinale 
brune  et  la  partie  cendrée  vermiculée  de  brun  noirâtre  ;  devant  du  cou  et 
flancs  roux,  avec  les  plumes  plus  ou  moins  terminées  de  blanc  et  tachées  ou 
barrées  de  brun  ;  plumes  abdominales  brunes,  mais  largement  bordées  de 
blanc;  bas-ventre  blanc;  sous-caudales  brunes  et  rousses,  mais  terminées  de 
blanc  ;  scapulaires  plus  rousses  que  le  dos,  barrées  et  pointillées  de  noir  ;  cou- 
vertures des  ailes  d'un  brun  pâle,  tachées  et  pointillées  de  brun  avec  une 
tache  terminale  blanchâtre  ;  rémiges  brimes,  avec  le  bord  externe  taché  de 
blanc  roussâtre  ;  queue  cendrée,  variée  de  zigzags  noirs,  toutes  les  rectrices, 
excepté  les  deux  médianes,  traversées  vers  leur  extrémité  par  une  bande  noire 
et  terminées  par  une  bordure  cendrée  ;  plumes  des  tarses  d'un  cendré  rous- 
sâtre. Espace  nu  de  l'œil  d'un  rouge  vif;  bec,  iris  et  doigts  bruns. 

Il  est  à  remarquer  que  cet  oiseau  prend  une  teinte  de  plus  en  plus  cendrée,  à 
mesure  que  son  habitat  devient  plus  septentrional.  Dans  le  nord  de  l'Europe 
et  de  l'Asie,  les  parties  dorsales  du  mâle  sont  d'un  gris  cendré  sans  trace  de  roux, 
sauf  les  scapulaires  qui  restent  de  la  même  couleur  que  chez  les  sujets  de 
rp]urope  centrale. 

Femelle.  —  Un  peu  plus  petite  ;  coloration  générale  comme  chez  le  mâle  ; 
dessus  de  la  tête  taché  de  brun  noir;  gorge  blanchâtre,  variée  de  roussâtre 
et  de  brun  et  non  noire.  —  Dans  le  Nord,  les  femelles  ont  le  dessus  du  corps 
d'un  cendré  roussâtre,  mais  elles  sont  toujours  moins  rousses  que  celles  de  nos 
contrées. 

Jeune  mâle.  —  Comme  la  femelle  adulte,  mais  les  parties  dorsales  plus 
rousses  et  les  taches  noires  du  dos  plus  grandes;  gorgo  maculée  de  noir. 

Poussin.  —  Duvet  laineux,  droit,  plutôt  court,  d'un  jaune  noisette  pâle, 
devenant  roux  de  rouille  sur  la  tête  et  sur  la  ligne  de  l'épine  dorsale  ;  une 
bande  noire  part  de  l'œil  et  se  prolonge  jusqu'à  la  naissance  du  cou  ;  une 
petite  tache  noire  entre  le  bec  et  Tœil;  bec  brun  clair;  tarses  déplumés  dans 
leur  seconde  moitié,  jaunâtres.  Les  plumes  des  ailes  deviennent  apparentes 
entre  le  huitième  et  le  dixième  jour.  {A.  Marchand,  notes  sur  les  poussins.) 


-  52  - 


Hab.  —  La  Gelinotte  est  plus  ou  moins  répandue  dans  le  nord  et  le 

centre  de  l'Europe,  ainsi  que 
dans  toute  la  Sibérie  jusque  dans 
le  nord  de  la  Chine  et  au  Japon, 
mais  elle  n'existe  plus  aux  îles 
4  Britanniques. 


En  Scandinavie  on  la  rencon- 
tre communément  dans  toutes 
JH  les  forêts  de  conifères  jusqu'au 
id  65M.  N.  (Collett.Nilsson),  mais 
on  ne  la  voit  pas  en  Danemark,  quoiqu'elle  habite  le  Holstein 
{Kjaerbôlling)  ;  elle  est  également  commune  dans  toute  la  Russie 
septentrionale  et  centrale  (E.  Buchner,  etc.).  On  la  rencontre  en 
plus  ou  moins  grande  abondance  dans  certaines  parties  de  l'Alle- 
magne (Naumann,  Helm,  Doule),  de  la  Lorraine  (Lieffer),  de  la 
Pologne  (Taczanowski),  de  la  Hongrie  (J.  Geyer),  de  l'Autriche 
(A.  Kr agora) y  de  la  Croatie  (Brusina)  et  de  la  Moldavie.  Cet  oiseau 
est  très  localisé  en  Hollande  (Schlégel)  et  en  Belgique,  où  on  le  ren- 
contre encore  dans  les  Ardennes  belges  aux  environs  de  Chiny,  de  Suxy 
et  de  Bouillon,  mais  cette  espèce  tend  à  disparaître  de  notre  pays. 

En  France,  la  Gelinotte  est  assez  abondante  sur  les  Alpes  du 
Dauphiné,  de  la  Savoie,  sur  les  hautes  montagnes  des  Vosges,  sur 
les  Basses-Alpes  et  les  Pyrénées  ;  elle  est  plus  rare  dans  les  Ardennes 
françaises  et  ne  se  montre  qu'accidentellement  en  Auvergne,  dans 
les  Monts-Dores  (Degland  et  Gerbe)  ;  elle  est  assez  abondante  en 
Suisse  (Tschudi)  et  dans  les  Alpes  italiennes  (Salvadori,  Giglioli); 
en  Espagne  on  ne  l'observe  qu'aux  environs  de  Gerona  en  Catalogne 
(Yayreda). 

En  Asie,  cette  espèce  est  répandue  dans  toute  la  Sibérie  (mais  pas 
au  Kamtschatka)  jusqu'au  69''  1.  N.  (Middendorff,  Radde,  von 
Schrenck),  ainsi  qu'en  Mantchourie  et  dans  la  Chine  septentrionale 
et  se  reproduit  même  dans  la  province  de  Pékin,  sur  les  hautes  mon- 
tagnes boisées  du  Péythang  et  du  Tonglin  (David)  ;  elle  habite  éga- 
lement le  Japon,  particulièrement  les  grandes  forêts  qui  avoisinent 
Hakodadi  {Whitely). 

Mœurs.  —  La  Gelinotte  est  un  oiseau  sédentaire  mais  qui,  en  au- 
tomne et  en  hiver,  mène  souvent  une  vie  plus  ou  moins  errante,  sans 
s'éloigner  cependant  do  sa  région  favorite.  Elle  voyage  en  famille  ou 
en  troupe  mais  en  se  bornant  à  parcourir  un  rayon  assez  restreint. 


-  53  — 

Durant  leurs  voyages,  ces  oiseaux  franchissent  souvent,  en  volant, 
une  étendue  de  plusieurs  l^lomètres  couverte  de  champs  cultivés  ou 
de  pâturages  ;  au  printemps  ils  retournent  tous  dans  les  lieux  qui  les 
ont  vus  naître  pou»  s'y  disperser  par  couples. 

Cette  espèce  habite  de  préférence  les  parties  boisées  et  rocailleuses 
des  montagnes,  arrosées  par  quelque  ruisseau  et  plantées  de  gené- 
vriers, d'aulnes,  de  coudriers,  de  sapins  et  de  bouleaux.  Dans  les 
pays  peu  ou  point  accidentés,  elle  recherche  les  grandes  forêts 
touffues  et  sombres,  formées  d'essences  variées  et  riches  en  buissons 
dans  lesquels  elle  puisse  se  cacher. 

La  Gelinotte  vit  plus  à  terre  que  sur  les  arbres,  sur  lesquels  elle 
cherche  cependant  volontiers  un  abri  pour  la  nuit. 

Pendant  le  jour,  elle  se  tient  si  tranquille  et  si  bien  cachée,  que  ce 
n'est  que  par  hasard  qu'on  aperçoit  un  individu  passant  d'un  buisson 
à  l'autre,  ou  couché  sur  une  grosse  branche  d'arbre  dans  le  sens  de 
]a  longueur,  et  tellement  immobile  qu'il  faut  un  œil  exercé  pour  le 
découvrir.  Quand  elle  se  croit  en  sûreté,  elle  se  tient  presque  accrou- 
pie et  conserve  même  cette  allure  en  marchant  ;  mais  elle  sait  courir 
avec  une  agilité  extraordinaire  entre  les  herbages  et  les  broussailles, 
et  sait  fort  bien  sauter  quand  il  le  faut.  En  courant,  la  poule  rabat  les 
plumes  de  la  tête,  tandis  que  le  mâle  qui  a  toujours  une  allure  plus 
fière,  les  relève  en  même  temps  qu'il  gonfle  les  plumes  de  la  gorge  et 
des  oreilles.  Ces  oiseaux  ne  s'envolent  pas  volontiers  sans  nécessité, 
mais  quand  un  danger  les  menace,  ils  partent  à  tire-d'aile,  sans  cepen- 
dant aller  bien  loin,  ou  bien  ils  sautent  de  leur  perchoir  pour  chercher 
un  refuge  dans  les  buissons.  Ils  ne  volent  du  reste  jamais  haut  et  il 
est  rare  de  les  voir  perchés  au  sommet  d'un  arbre. 

En  été,  la  Gelinotte  se  nourrit  d'insectes,  de  larves,  d'araignées, 
de  vers,  de  petits  escargots,  de  bourgeons,  de  chatons  de  coudriers, 
d'aulnes  et  de  saules,  de  jeunes  pousses  de  diverses  plantes,  de 
feuilles,  etc.;  dans  les  autres  saisons  elle  recherche  également  des 
myrtilles,  des  framboises,  des  baies  de  sureau,  de  troène,  de  sorbier, 
de  genévrier,  d'églantier,  ainsi  que  différentes  graines  d'arbres  qu'elle 
ramasse  à  terre. 

La  voix  de  cet  oiseau  est  claire  et  retentissante,  les  sujets  d'un  an, 
tant  mâles  que  femelles,  crient  simplement/ji,  pi,  pi,  pi;  plus  tard,  le 
cri  d'appel  devient  tih,  thi-titi,  et  la  femelle  se  sert  des  mêmes  sons 
quand  elle  veut  rassembler  ses  poussins  autour  d'elle.  A  l'époque  des 
amours,  le  mâle  répète  les  mêmes  syllabes,  mais  il  met  plus  de  chaleur 


—  54  — 

dans   son  chant,   formé  de  sons  tristes  et  prolongés,  ressemblant  à 
tihi-titititi-tih,  qu'il  pousse  en  gonflant  son  gosier. 

La  Gelinotte  est  monogame.  Au  printemps  chaque  couple  se  choisit 
sa  résidence,  mais  les  familles  se  disséminent  peu.  Le  mâle,  pour 
s'attirer  la  bienveillance  de  la  poule,  se  contente  d'entonner  matin  et 
soir  son  chant  d'amour  et  d'hérisser  les  plumes  de  la  tête  ;  quand  il  est 
fort  excité,  il  chante  toute  la  nuit,  perché  sur  un  arbre  à  une  hauteur 
moyenne,  et  non  loin  de  celui  qui  porte  sa  compagne.  Celle-ci  sait  si 
bieu  captiver  le  coq,  qu'il  ne  la  quitte  pas  d'un  instant,  et  les  cris  des 
autres  mâles  le  laissent  indifférent,  quoiqu'il  soit  d'un  naturel  assez 
belliqueux,  mais  à  un  degré  bien  moindre  que  les  Tétras. 

Reproduction.  —  Peu  après  l'accouplement,  vers  la  fin  de  mai,  la 
femelle  cherche  un  lieu  convenable  pour  nicher,  dans  un  endroit  bien 
caché  sous  un  buisson,  derrière  un  bloc  de  rocher,  entre  des  herbages 
ou  dans  une  touffe  de  fougères  ;  là  elle  creuse  un  légère  excavation 
qu'elle  garnit  de  feuilles  et  de  brins  d'herbes,  et  dans  laquelle  elle 
pond  de  huit  à  quinze  œufs.  Ceux-ci  sont  assez  allongés,  d'un  jaune 
roussâtre  et  tachetés  de  roux  et  de  brun  ;  ils  mesurent  environ  40  mil- 
limètres sur  29. 

La  poule  couve  trois  semaines,  et  chaque  fois  qu'elle  doit  quitter  son 
nid,  elle  recouvre  ses  œufs  soigneusement  de  feuilles  mortes. Pendant 
ce  temps  le  mâle  erre  aux  environs,  mais  il  revient  auprès  de  sa  com- 
pagne, aussitôt  que  les  poussins  ont  un  peu  grandi,  et  il  devient  alors 
pour  sa  famille  un  guide  fidèle  et  prudent.  En  cas  de  surprise,  la 
femelle  cherche  à  tromper  l'ennemi  qui  la  menace  ;  les  poussins  se 
sont  bientôt  cachés  sous  des  herbes  ou  des  feuilles  sèches,  et  il  faut 
alors  le  flair  d'un  chien  de  chasse  ou  d'un  renard  pour  les  découvrir. 
Pendant  les  premiers  jours,  les  petits  passent  la  nuit  à  terre  sous  les 
ailes  de  leur  mère  ;  mais  dès  qu'ils  ont  des  ailes,  ils  vont  se  percher  à 
côté  d'elle  sur  une  branche  d'arbre.  C'est  à  ce  moment  que  le  père  les 
rejoint,  et  toute  la  famille  reste  alors  intimement  unie  jusqu'en 
automne. 

FAMILLE  DES  PHASIANIDÉS. 

Car.  —  Bec  nu  à  la  base,  courbé  et  déprimé  à  la  pointe;  tête  des 
mâles  souvent  garnie  d'une  touffe  de  plumes,  d'une  crête  charnue  ou 
d'un  tubercule  corné;  joues  et  tour  des  yeux  nus,  parfois  couverts  de 
papilles  ;  gorge  emplumée  ou  nue  ;  queue  de  longueur  et  de  forme 


variables,  le  plus  souvent  longue;  pattes  des  mâles  armées  d'un 
éperon .  ♦ 

Les  mâles  sont  ordinairement  ornés  de  brillantes  couleurs,  tandis 
que  les  femelles  ont  généralement  un  plumage  assez  uniforme  et  com- 
plètement privé  de  couleurs  éclatantes. 

C'est  dans  cette  famille  que  viennent  se  placer  les  Paons,  les  Argus, 
les  Faisans,  les  Lophophores,  les  Tragopans,  les  Coqs,  les  Pintades, 
etc. 

Eàb.  —  Cette  famille  est  représentée  dans  les  cinq  parties  du 
monde,  mais  c'est  l'Asie  qui  fournit  le  plus  grand  nombre  d'espèces. 

GENRE  XCVIII 

FAISAN.  —  PHASIANUS 
Phasianus,  Briss.  Ornith,  I,  p.  262  (1760). 

Car.  —  Bec  robuste,  à  mandibule  supérieure  voûtée,  courbée  vers  la 
pointe  qui  dépasse  la  mandibule  inférieure;  narines  basales,  latérales,  à 
moitié  fermées  par  une  membrane  cornée  et  renflée  ;  tour  des  yeux  et  joues 
garnis,  chez  les  mâles,  d'une  peau  verruqueuse  d'un  rouge  vif  qui  s'étend 
jusqu'à  la  base  du  bec  ;  ailes  courtes,  concaves,  arrondies,  obtuses;  queue 
longue,  convexe,  terminée  en  pointe,  formée  de  dix-huit  rectrices  étagées, 
les  médianes  les  pluslongues  ;  tarses  robustes,  scu telles,  armés  d'un  éperon  ; 
doigt  médian  de  la  longueur  du  tarse,  réuni  aux  latéraux  par  une  petite 
membrane,  le  postérieur  court  et  ne  reposant  pas  sur  le  sol. 

Hab.  —  L'Asie  est  la  véritable  patrie  des  Faisans  ;  mais  l'un  d'eux  a  été 
acclimaté  dans  l'Europe  orientale,  d'où  il  a  été  importé  dans  d'autres  parties 
de  notre  continent. 

175.  —  Le  Faisan  vulgaire  ou  de  Colchide. 

PHASIANUS  COLCHICUS,  Lin. 

(PI.   175) 

Phasianus  varius,  Briss.  Ornith.  I,  p.  262  et  267  (1760). 

Phasianus  colchicus,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  271  (1766). 

Phasianus  marginatus,  Wolf,  Taschetib.  Deutsch.  Yijgelk.  I,  p.  291  (1810). 

Phasianus  vulqaris,  C.  Dub  (ex  Lin.  1748)  PI.  col.  ois.  Belg.  II,  p.  150  (1857). 

Der  Edel-Fasan,  en  allemand. 

The  PiiEASANT,  en  anglais. 

De  Gewone  Faisant,  en  flamand. 


-  56  - 

!•  Sans  collier  blanc  : 

Var.  Shawi. 

Phasianus  shawi,  eu.  Proc.  Zool.  Soc.  1870,  p.  403. 
Phasianus  insignis,  Eli.  ibidem,  p.  404. 

Var.  Persicus. 

Phasianus  persicus,  Severz.  Bull.  Soc.  Jmp.  des  nat.  Moscou,    1874,  p.  208. 

Var,  DecoUatus. 

Phasianus  decollatus,  Swinh.  Proc.  Zool.  Soc.  1870,  p.  135. 

Var.  Sladeni. 

Phasianus  sladeni  (Anderss.),  Eli.  Proc.  Zool.  Soc.  1870,  p.   408. 
Phasianus  elegans,  Eli.  Ann.  Mag.  ofN.  H.  VI,  p.  312  (1871). 

2°  Avec  collier  blanc: 

Var.  Torquatus. 

Phasianus  colchicus  var.  Torquatus,  Gmel.  Syst.  nat.  I,  p.  742  (1788). 
Phasianus   albotorquatus,  Bonnat.  Ornith.  p.  184  (1823). 
Phasianus  torquatus,  Gould,  B.  of  As.  part.  VIll  (1856). 

Var.  Mongolicus. 

Phasianus  colchicus  var.  Mongolicus,  Pall.  Zoogr.  Il,  p.  84  (1811). 
Phasianus  colchicus,  Meyend.  Yoy.  d'Oremb.  à  Bokhara,  p.  428  (1826). 
Phasianus  mongolicus.  Brandt,  Bull.  Acad.  Se.  St-Pêt.,  III,  p.  54. 

Var.  Chrysomelas. 

Phasianus  chrysomelas,  Séverz.  Btdl.  Soc.  Imp.  nat.  Moscou,  1874,  p.  208. 
Phasianus  oxianus  et  dorrandti,  Severz.  Journ.  f.  Orn.   1875,  p.  225. 

Var.  Formosanus. 

Phasianus  torquatus,  Swinh.  Ibis,  1863,  p.  401  et  1866,  p.  404. 
Phasianus  formosanus,  Eli.  Proc.  Zool.  Soc.  1870,  p.  406. 

Taille-.  0'",30  (corps);  ailes  0,26;  queue  0,42;  femelle  0,28; 
ailes  0,235  ;  queue  0,32. 

Description  du  mâle  adulte.  —  Dessus  de  la  tête  vert  varié  de  roux  ;  une 
grande  caroncule  rouge  écarlate  entourant  l'œil  et  couvrant  la  joue  ;  une  touffe 
de  plumes  de  chaque  côté  de  l'occiput  et  la  majeure  partie  du  cou  d'un  vert 
brillant  à  reflets  bleus  et  violets  ;  dessus  du  corps  d'un  rouge  bai  à  reflets 
violacés  ;  plumes  du  bas  du  cou  échancrées  et  marquées  d'une  tache  allongée 
et  terminale  noire  ;  centre  des  plumes  dorsales  noir,  avec  une  bande  jaunâtre 
en  forme  de  V  et  souvent  aussi  un  trait  central  de  même  couleur  ;  croupion  et 
sus-caudales  d'une  teinte  pourprée  à  reflets  violets  ;  ailes  d'un  cendré  rous- 


-  57    - 

sâtre  varié  de  pourpre,  les  plus  grandes  couvertures  brunes  au  centre  et  tra- 
versées de  raies  irrégulières  roussâtrcs  ;  rémiges  d'un  brun  pâle,  tachées  de 
cendré  clair  ;  poitrine  et  flancs  d'un  rouge  bai  éclatant  à  reflets  dorés,  les 
plumes  de  la  poitrine  bordées  et  celles  des  flancs  terminées  de  noir  violet  ; 
abdomen,  jambes  et  sous-caudales  d'un  brun  rous^àtre  ;  rectrices  étagécs, 
d'un  brun  olivâtre,  bordées  d'une  teinte  pourprée  et  barrées  de  noirâtre.  Iris 
d'un  brun  jaunâtre  ;  bec  couleur  de  coi  ne  ;  pattes  bruues. 

Femelle.  —  Régions  supérieures  d'un  cendré  roussâtre  tirant  un  peu  sur 
l'olivâtre,  avec  le  centre  des  plumes  noir;  parties  claires  du  dos  et  des  scapu- 
laires  vermiculées  de  brun,  et  la  tache  noire  des  mêmes  plumes  plus  ou  moins 
entourée  de  roux;  gorge  d'un  blanc  jaunâtre;  cou  et  poitrine  d'une  teinte 
vineuse,  chaque  plume  bordée  de  brun  et  avec  une  tache  centrale  noire  ;  cou- 
vertures des  ailes  de  la  couleur  du  dos,  vermiculées  de  brun  et  marquées  de 
grandes  taches  noires;  rémiges  brunes  tachées  de  cendré  roussâtre;  parties 
inférieures  d'un  cendré  roussâtre  pâle,  tirant  légèrement  sur  l'olivâtre  et  ver- 
miculées de  brun;  les  flancs  avec  de  grandes  taches  noires  bordées  de  roux  ; 
queue  de  la  couleur  du  dos,  vermiculée  et  barrée  de  noir. 

Jeune  mâle.  —  Ressemble  à  la  femelle,  mais  facile  à  distinguer  à  la  nudité 
des  joues  ;  ses  couleurs  sont  [dus  rousses  et  plus  sombres;  l'éperon  commence 
à  se  montrer. 

Poussin.  —  Duvet  court  et  laineux,  d'un  gris  jaunâtre,  presque  blanc  sous 
la  gorge  et  le  ventre  ;  dos  varié  de  gris  foncé  et  de  brun  ;  une  bande  occi- 
pitale d'un  brun  vif  accompagnée  de  deux  autres  plus  étroites;  un  trait  par- 
tant des  commissures  du  bec  et  devenant  noir  sur  les  oreilles.  Bec  et  panes 
grisâtres. 

Var.  accid.  —  On  rencontre  parfois  des  variétés  accidentelles  de  couleur 
Isabelle  avec  les  taches  de  couleur  grise,  d'autres  plus  ou  moins  variées  de 
blanc,  ou  même  entièrement  blanches. 

Remarque.  —  La  feuille  précédente  était  imprimée  quand  jo 
m'aperçus  que  j'avais  oublié  de  mentionner  une  nouvelle  variété, 
décrite  récemment  par  M.  Sclater  sous  le  nom  de  Phasianics princi- 
palis  {Proc.  zool.  Soc.  1885,  p.  324,  pi.  XXII).  Cette  variété  prend 
sa  place  entre  la  var.  Shawi  et  la  var.  Persicus. 

M.  Bogdanow  a  décrit,  sous  le  nom  de  Ph.  Komarotcii,  un  Fuisnn 
trouvé  sur  le  marché  d'Aschabad  et  qui  provient  probablement  du  sud 
des  monts  Kopet-dagh.  [Bull.  Acad.  imp.  des  se.  de  St-Pètcrshonrg, 
XXX,  1886,  p.  356).  Cet  oiseau  paraît  se  rapporter  au  Fh.  princi- 
palis. 

Autour  du  b'aisan  do  Coldiido,  viennent  donc  s<^  iJ:rouper  quel- 
ques formes  qui  ont  la  même  coloration  générale,  et  (jui  ne  dilFèrent 
entre  elles  que  par  l'absence  ou  la  présence  d"un  collier  Manc  plu.--. 

ToMK  II.  —  1SR8.  fS 


ou  moins  développé  et  par  de  très  légères  moditications  dans  le  plu- 
mage. Toutes  ces  formes  ont  été  décrites  récemment  comme  espèces 
distinctes  ;  mais  on  commence  déjà  à  voir  que  ce  ne  sont  que  des 
races  locales.  Quoi  qu'il  en  soit,  il  est  certain  que  toutes  les  variétés 
mentionnées  ci-dessus  descendent  d'un  même  type  spécifique,  qui 
s'est  modifié  avec  le  temps  soit  par  l'action  du  climat,  soit  par  des 
croisements.  Ainsi,  le  musée  de  Bruxelles  possède  un  Faisan  (n°  1817 
du  cat.)  qui  ressemble  en  tous  points  au  Ph.  formosanus  de  Formose, 
figuré  dans  la  belle  Monographie  de  M.  Elliot;  et  cependant,  notre 
individu  n'est  qu'un  simple  hybride,  né  au  Jardin  zoologique  de  notre 
ville,  qui  a  eu  pour  père  un  Ph.  torquatus^  et  pour  mère,  la  poule 
d'un  Ph.  versicolo7\  H  y  a  donc  lieu  de  croire  qu'à  l'île  Formose, 
située  non  loin  de  la  Chine  et  du  Japon,  on  a  introduit  primitivement 
des  Ph.  torquatus  et  des  Ph.  versicolor,  propres  à  ces  pays.  Les 
hybrides  nés  du  croisement  de  ces  deux  espèces,  ont  fini  par  remplacer 
dans  cette  île  les  types  dont  ils  dérivent  et  à  produire  la  race  nouvelle, 
connue  aujourd'hui  sous  le  nom  de  Ph.  foo^mosanus. 

MM.  David  et  Oustalet  ont  constaté,  que  les  Ph.  torquatus  du  nord 
de  la  Chine,  ceux  du  Chensi  méridional  et  ceux  du  Fokien  et  du 
Kiangsi,  diffèrent  déjà  les  uns  des  autres;  les  mêmes  auteurs  ajoutent: 
«  Aussi  sommes-nous  portés  à  croire  que  le  Ph.  versicolor  du.  Japon, 
qui  a  tout  le  dessus  du  corps  d'un  vert  bronzé,  n'est  aussi  qu'une 
forme  dérivée  ou  une  simple  variété  de  la  même  espèce  ;  nous  en 
dirons  autant  des  Ph.  formosanus  de  l'île  Formose,  des  Ph.  mongo- 
licus  et  insignis  de  la  Mongolie  occidentale,  des  Ph.  decollatus  et 
sladetii  du  kS.-O.  de  la  Chine".  Nous  sommes  convaincus  également 
qu'il  y  a  des  relations  de  parenté  très  étroites  entre  les  formes  occiden- 
tales {Ph.  colchicus  et  shaivi)  et  les  formes  de  l'Orient;  mais  nous 
pensons  que  c'est  parmi  celles-ci  qu'il  faut  chercher  le  type  primitif, 
en  admettant  que  ce  type  soit  encore  représenté.  Peut-être  est-ce  du 
Ph.  torquatus  que  sont  dérivées  les  autres  formes  secondaires,  que 
la  plupart  des  ornithologistes  considèrent  comme  des  espèces,  et 
parmi  elles  il  y  en  a  quatre  pourvues  d'un  collier  et  cinq  sans  col- 
lier (1)  ». 

M.  Séverzow,  qui  a  décrit  comme  espèces  deux  formes  nouvelles, 
doit  cependant  convenir  qu'elles  ont  toutes  de  grandes  affinités  entre 
elles  :  «...  Les  affinités,  dit  cet  auteur,  de  ma  nouvelle  espèce  avec 

(1)  David  et  Oustalet,  Les  oiseaux  de  la  Chine,  p.  410  (1877). 


—  59  — 

des  Faisans  géographiqiiement  éloignés,  et  ses  diiférences  d'avec  les 
espèces  géographiquement  voisines,  sont  ce  qui  fait  l'intérêt  principal 
du  Pli-  chrijsomelas  :  cet  oiseau,  comparé  aux  autres  espèces  voisines 
du  Ph.  colchicus,  éclaircit  complètement,  dans  le  sens  de  Darwin,  la 
filiation  des  espèces  de  ce  groupe,  qui,  sans  lui,  resterait  obscure  »(1). 
M.  H.  Seebolim  ne  voit  également  que  des  races  dans  les  Faisans 
dont  il  est  question.  «  Tandis  que  les  vrais  Faisans,  dit  M.  Seebolim, 
peuvent  être  divisés  géographiquement  en  deux  races  par  une  ligne 
verticale,  ils  peuvent  aussi  être  divisés  par  une  ligne  horizontale  en 
deux  autres  races.  Une  ligne  tirée  depuis  Astrakan  au  travers  de  la 
vallée  Amu-Darya,  en  suivant  le  plateau  de  Pamir  et  la  chaîne  du 
Thian-shan  en  croisant  le  désert  de  Gobi  et  le  Thibet,  entrant  en 
Chine  au  nord  de  Setchuan,  et  passant  au  sud-est  de  cette  province, 
sépare  les  Faisans  à  collier  de  ceux  qui  n'en  ont  pas;  les  premiers 
habitent  au  nord  de  cette  ligne,  et  les  derniers  au  sud  (2),  M.  Seebohm 
examine  ensuite  les  form<^s  de  l'Asie  occidentale  dont  il  admet  six 
races,  savoir  :  P.  colchicus,  persicus,  principalis,chr y somelas,  shaioi 
et  inongoliciis. 

M.  Dresser  dit  qu'en  Ecosse  on  a  introduit,  outre  le  Faisan  ordi- 
naire, des  Ph.  vcrsicolor  et  reevesii,  qui  se  croisent  entre  eux  de 
toutes  les  manières,  de  façon  qu'il  devient  déjà  difficile  de  rencontrer 
un  Faisan  de  Colchide  pur  sang  (3).  On  doit  donc  s'attendre  à  voir  là 
aussi  de  nouvelles  races  venir  remplacer  les  espèces  primitivement 
introduites.  Sur  le  continent,  et  même  en  Belgique,  on  a  introduit  des 
Faisans  à  collier  dans  plusieurs  localités  ;  ceux-ci  se  croisent  avec 
notre  Faisan  ordinaire,  dont  les  individus  pur  sang  deviennent 
presque  partout  de  plus  en  plus  rares. 

Uab.  —  La  véritable  patrie  du  Faisan  vulgaire  comprend  les  pays 

situés  entre  la  mer  Caspienne  et 
la  mer  Noire.  Il  ne  se  trouve 
point  à  l'état  sauvage  dans  la 
Nouvelle-Russie,  mais  bien  sur 
les  îles  du  Danube,  sur  rétendue 
de  la  côte  orientale  du  Pont- 
lùixin,  au  sud  et  à  l'est  du  Kou- 
l)an,  aux  environs  du  Kouban  et 
de  Tereck,  et  il  est  assez  com- 

(I)  Bull,  de  la  Soc.  Imp.  des  nnluralistrs  df  Moscuit,  t.  XfA'III,  "2,  p.  2(1!)  (t«7l). 
(-2)  The  Ibis.  1S87,  p.  lOS, 
(ô)  BirdsofEnr.  VIT,  p.  87. 


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-  60   - 

mun  dans  l'Abasie  et  la  Mingrélie,  provinces  qui  correspondent  à 
l'ancienne  Colchide,  d'où  celte  espèce  a  tiré  .son  nom  [de  Nordmann). 
Il  est  é^^alement  commun  au  Caucase  [Radde],  dans  certaines  parties 
de  l'Asie  Mineure  [Pearse,  Dresser)  et  dans  le  nord  de  la  Perse 
[De  Filippi). 

Les  auteurs  racontent  que  l'introduction  du  Faisan  en  Europe  date 
de  l'expédition  des  Grecs  en  Colchide.  Ceux-ci  auraient  découvert  ce 
bel  oiseau  sur  les  bords  du  Phase  et  l'auraient  importé  en  Grèce  Or, 
d'après  l'histoire,  c'est  en  1263  avant  J.-C.  que  cette  expédition  eut 
lieu.  C'est  en  mémoire  de  ce  fait  historique  que  Linné  créa  sa  déno- 
mination latine  (1). 

Ce  qui  est  certain,  c'est  que  l'existence  de  cet  oiseau  en  Grèce  date 
de  très  loin,  et  que  de  là  il  fut  importé  par  les  anciens  Romains  dans 
d'autres  contrées  de  l'Europe.  Aujourd'hui  le  Faisan  tend  à  dispa- 
raître de  la  Grèce  où  il  est  devenu  fort  rare,  même  dans  la  Béotie  et 
la  Roumélie,  où  le  terrain  est  cependant  si  favorable  à  sa  propagation 
(Lindermayer).  On  trouve  maintenant  cet  oiseau  en  Turquie,  surtout 
en  Macédoine  et  en  Albanie  [Elives  et  Buckley),  en  Autriche,  en 
Hongrie,  en  Bohéine  [Naumann,  Brehm),  dans  différentes  parties  de 
l'Allemagne,  particulièrement  près  de  l'Elbe  et  de  l'Oder  (Naumann, 
Borggreve),  en  Grande-Bretagne  et  en  h^lande  [Dresser),  en  Bel- 
gique, en  Hollande  (Labouchère),  en  France  (Degland),  en  Italie  et 
en  Corse  ;  sur  cette  dernière  île,  il  est  réellement  sauvage  [Giglioli). 

En  Belgique,  et  dans  plusieurs  autres  pays  mentionnés  ci-dessus, 
on  est  obligé  de  veiller  plus  ou  moins  à  ce  que  les  Faisans  puissent 
trouver  de  la  nourriture  pendant  les  jours  de  neige. 

La  var.  Shaioii  habite  la  partie  orientale  du  Turkestan  [ElUot). 

La  var.  Principalis  se  rencontre  dans  le  nord  de  l'Afghanistan. 

La  var.  Persicus  a  pour  patrie  le  littoral  méridional  de  la  mer 
Caspienne  [Séverzow). 

La  var.  Decollatus  habite  le  centre  et  l'Ouest  de  la  Chine  ;  dans  la 
chaîne  du  Tsinling  et  dans  le  Chensi  méridional,  elle  est  aussi  com- 
mune que  la  var.  Torquatus,  à  laquelle  elle  se  mêle  assez  fréquem- 
ment; mais  dans  le  Kokonoor  oriental,  à  Moupin,  dans  le  Setchuan, 
dans  une  partie  du  Yunan  et  du  Kouytchéou,  elle  remplace  complète- 
ment le  Torquatus  (David). 

La  var.  Sladeni  est  répandue  dans  l'Ouest  du  Setchuan  et  du 
Yunan  à  une  altitude  de  1500  mètres  environ  [David). 

(i)  Phasianns,  du  Phase,  rivière  de  Colchide  [Colchiuus). 


—  61  — 

La  var.  Torquatus  se  rencontre  dans  la  plus  grande  partie  de  la 
Chine,  en  Mantchourie,  dans  la  Mongolie  orientale,  en  Q>Ç)X:é.^  {Damé) 
et  dans  les  provinces  de  l'Amour  et  de  l'Ussuri  {Taczanowski). 

La  var.  Mongoliens  a  pour  patrie  l'Altaï  et  les  monts  Targabatai 
{Brandt),  le  désert  de  Gobi,  le  sud  des  monts  Tagnon,  la  Mongolie 
(Atkinson),  Bol^hara.  {Met/end07^ff)  et  le  Turkestan  [Séverzow). 

La  var.  Clirysomelas  habite  les  rives  de  l'Amou-Daria  [Séverzoïo], 

Enfin,  la  var.  Formosanus  est  propre  à  l'île  Formose  {Sioinhoé). 

Mœurs.  —  Le  Faisan  recherche  les  bois  clairs,  bien  pourvus  de 
taillis  et  de  buissons,  entrecoupés  de  fossés  inondés  et  entourés  de 
champs  cultivés  et  de  pâturages  ;  plus  le  sol  est  couvert  de  broussailles 
et  de  plantes  herbacées,  plus  la  localité  lui  convient.  C'est  à  terre 
qu'il  passe  presque  toute  sa  journée,  cherchant  entre  les  hautes 
herbes  et  les  broussailles  les  aliments  qui  lui  sont  nécessaires;  il 
s'aventure  souvent  dans  les  champs  voisins  et  parcourt  parfois  un 
grand  espace  sans  prendre  son  vol.  Ce  n'est  que  quand  il  est  pour- 
suivi par  un  animal  carnassier  qu'il  cherche  souvent  un  refuge  sur  un 
arbre,  sans  cependant  y  rester  plus  quïl  ne  faut;  mais  c'est  toujours 
sur  une  grosse  branche  d'arbre,  à  huit  ou  dix  mètres  de  hauteur, 
qu'il  passe  la  nuit. 

Dans  la  Livadie  et  la  Roumélie,  dit  von  der  Miihle,  il  existe  de 
grandes  étendues  de  terrains  très  fertiles,  mais  marécageux  et  cou- 
verts de  buissons  épais,  surtout  de  fougères  et  de  ronces  formant  des 
fourrés  épais  et  impénétrables,  aussi  bien  pour  le  chasseur  que  pour 
son  chien  ;  là  les  Faisans  se  trouvent  dans  leur  élément,  et,  chose 
singulière,  au  lieu  de  passer  la  nuit  sur  les  arbres  comme  ils  le  font 
chez  nous,  ils  gagnent  pour  dormir  un  genêt  piétiné  dont  ils  font  leur 
litière.  Lindermayer  dit  qu'en  Grèce  on  fait  une  telle  chasse  à  ce 
gibier,  qu'il  est  à  prévoir,  qu'avant  peu,  le  Faisan  aura  complètement 
disparu  do  ce  pays  ;  M.  Th.  De  Heldrcich  dit  mémo  qu'on  peut  le 
considérer  comme  ayant  entièrement  disparu  du  royaume  Hellénique, 
mais  qu'il  est  encore  assez  fréquent  au  mont  Olympe  en  Thessahe 
et  en  Macédoine. 

La  démarche  de  ce  bel  oiseau  est  fière  et  majestueuse;  il  sait 
courir  avec  rapidité,  mais  son  vol  est  lourd,  bruyant  et  fatigant.  Il 
est  plus  craintif  que  farouche  et  incapable  de  prendre  une  prompte 
résolution  au  nioinoni  du  danger.  Il  pniaît  avoir  conscience  de  sa 
faiblesse  et  de  sa  stupidité;  il  se  cache  aut.-mt  ([ue  possible,  car  tout 
animal,  toute  personne  est  à  ses  yeux  un  ennemi  qu'il  doit  fuir  ;  aussi 


—  62  — 

ne  parvient-on  jamais  à  apprivoiser  complètement  un  Faisan. Winkell 
dit  avec  raison  qu'il  serait  difficile  de  trouver  un  animal  qu'on  puisse 
aussi  facilement  mettre  aux  abois  et  rendre  incapable  de  prendre  une 
résolution.  Un  homme,  un  chien  viennent-ils  à  surprendre  un  Faisan, 
celui-ci  semble  ne  plus  se  rappeler  que  la  nature  lui  a  donné  des 
ailes  pour  se  sauver;  il  reste  immobile,  cache  sa  tête,  ou  court  éperdu 
de  côté  et  d'autre.  S'il  est  poursuivi  et  qu'il  arrive  au  bord  de  l'eau, 
il  y  entre  souvent  et  se  noie,  sans  songer  à  prendre  son  vol  pour 
échapper  à  l'ennemi.  Sa  timidité,  dit  Naumann,  est  sans  bornes  : 
une  souris  le  remplit  de  terreur  et  une  limace  qui  rampe  eiïraye  la 
poule  faisane  au  point  de  la  faire  quitter  momentanément  ses  œufs, 
tandis  qu'elle  reste  rêveuse,  immobile  et  comme  morte,  quand  c'est 
un  danger  réel  qui  la  menace.  Cette  stupidité  est  un  grand  obstacle 
à  la  multiplication  des  Faisans. 

La  nourriture  de  cet  oiseau  consiste  en  graines  variées,  baies  et 
autres  fruits  charnus,  bourgeons,  jeunes  pousses,  feuilles  tendres, 
larves,  insectes,  vers,  etc.  ;  en  domesticité  il  se  contente  des  mêmes 
aliments  que  nos  poules  domestiques. 

C'est  un  animal  peu  sociable  ;  deux  coqs  se  rencontrent-ils,  ils 
fondent  l'un  sur  l'autre,  s'attaquent  à  coups  de  bec,  d'ongles  et 
d'éperons,  et  le  sang  ne  tarde  pas  à  couler;  bien  heureux  si, 
dans  cette  lutte  corps  à  corps,  l'un  des  combattants  ne  reste 
pas  mort  sur  place.  11  est  d'ordinaire  silencieux, de  temps  en  temps 
seulement  il  fait  entendre  le  cri  hock  ou  kouck,  et  en  s'élevant  vers 
un  arbre,  il  crie  kouckouckouc kouck  \  la  voix  de  la  femelle  est 
plus  faible  et  ressemble  plutôt  à  kack.  Dans  le  courant  de  l'année, 
le  mâle  ne  songe  guère  aux  poules  faisanes,  mais  au  printemps 
l'amour  se  réveille  et  il  change  alors  complètement  sa  manière 
d'être. 

Reproduction.  —  Vers  la  fin  de  mars  ou  en  avril  le  mâle  cherche 
à  attirer  des  femelles,  et  dans  ce  but  il  entonne  son  chant  d'amour; 
celui-ci  a  quelque  analogie  avec  celui  de  nos  coqs  domestiques,  mais 
il  est  plus  court  et  plus  rauque. 

Les  poules  faisanes  accourent  à  cet  appel.  «  A  leur  vue, dit  Brehm, 
le  mâle  se  redresse  fièrement,  relève  la  queue,  bat  un  peu  des  ailes, 
en  un  mot,  il  cherche  à  leur  plaire.  Une  femelle  est-elle  près  de  lui, 
il  ouvre  les  ailes,  rentre  le  cou,  se  tapit  contre  le  sol  et  essaye  quel- 
ques sauts  :  on  dirait  qu'il  veut  danser,  mais  il  ne  peut  y  parvenir  ; 
puis,  tout  à  coup,  il  se  précipite  comme  un  furieux  sur  la  poule,  et  si 


—  63  - 

celle-ci  ne  cède  pas  immédiatement  à  ses  désirs,  il  la  frappe  à  coups 
de  bec  et  de  pattes.  » 

Le  mâle  tâche  de  rassembler  près  de  lui  six  à  huit  femelles,  et 
l'accouplement  a  lieu  dès  le  lever  du  soleil;  vers  9  ou  10  heures  il 
crie  encore  une  fois,  puis  se  retire  à  l'ombre;  les  poules  se  dispersent 
à  leur  tour,  mais  reviennent  toutes,  vers  le  soir,  se  percher  sur  les 
arbres  qui  environnent  celui  qu'a  choisi  le  mâle. 

Ce  n'est  qu'au  commencement  de  mai  qu'a  généralement  lieu  la 
ponte.  La  poule  faisane  cherche  alors  un  endroit  solitaire  et  bien  caché 
au  milieu  des  herbages,  sous  des  broussailles  ou  sous  un  buisson,  ou 
bien  encore  dans  un  champ  de  pois,  de  colza,  de  trèfle,  de  luzerne, 
etc.  ;  là  elle  creuse  une  petite  fosse  qu'elle  garnit  de  feuilles  sèches, 
de  brins  et  de  radicelles.  C'est  sur  cette  litière  qu'elle  dépose  de  huit 
à  douze  œufs,  parfois  même  jusqu'à  quinze,  mais  non  sans  interrup- 
tion; ainsi,  elle  pondra  un  œuf  deux  jours  de  suite  pour  se  reposer 
le  troisième,  ou  bien  elle  ne  pondra  qu'un  œuf  tous  les  deux  jours. 
Ces  œufs  sont  d'un  gris  verdâtre  ou  olivâtre  uniforme  et  mesurent 
environ  46  millim.  sur  37. 

Dès  que  son  dernier  œuf  est  pondu,  le  femelle  se  met  à  couver  avec 
une  ardeur  surprenante  ;  deux  fois  par  jour  elle  quitte  sa  couvée  pour 
aller  en  quête  de  nourriture,  mais  elle  a  toujours  soin  de  la  couvrir 
auparavant  do  feuilles  et  de  brins  semblables  aux  matériaux  de  la 
litière.  La  durée  de  l'incubation  est  de  vingt-quatre  à  vingt-six  jours. 

Aussitôt  que  les  poussins  sont  nés,  la  mère  les  reçoit  sous  ses  ailes, 
où  ils  restent  pendant  environ  vingt-quatre  heures,  afin  qu'ils  puissent 
bien  se  sécher  et  conserver  une  douce  chaleur.  Ensuite  elle  les  fait 
sortir  du  nid  pour  leur  montrer  leur  nourriture  ;  elle  bouleverse  dans 
ce  but  des  fourmilières  et  dégage  les  nymphes  des  fourmis  qui  forment 
le  premier  aliment  des  petits. 

Les  poussins  sont  très  sensibles  à  l'humidité,  et  quand  la  saison 
est  pluvieuse  avant  qu'ils  aient  des  plumes,  il  en  succombe  toujours 
beaucoup.  Heureusement  que  celles-ci  ne  tardent  guère  à  pousser  :  au 
bout  de  quinze  jours  leur  corps  est  déjà  suffisamment  garni  de  plumes 
et  leurs  ailes  leur  permettent  déjà  de  voleter  sur  le  sol  à  de  courtes 
distances.  Dès  qu'ils  ont  atteint  la  moitié  de  la  taille  définitive, ils  sont 
en  état  de  voler  sur  les  arbres  pour  y  passer  la  nuit  à  côté  de  leur 
mère.  Dans  le  courant  de  l'automne,  les  jeunes  mâles  s'en  vont,  cha- 
cun de  son  côté,  mais  les  jeunes  femelles  restent  auprès  de  leur  mère 
jusqu'au  ]»rinterap>. 


—  64  — 

FAMILLE  DES  PERDICIDÉS. 

Car.  —  Bec  relativement  allongé,  à  arête  légèrement  bombée; 
tour  des  yeux  le  plus  souvent  nu  ;  ailes  courtes  et  arrondies,  troisième 
ou  quatrième  rémige  la  plus  longue;  queue  courte,  formée  de  douze, 
de  quatorze  ou  de  seize  rectrices  ;  tarses  robustes,  médiocres,  armés, 
chez  les  mâles,  d'un  éperon  peu  développé  et  mousse. 

Les  sexes  diffèrent  généralement  peu  entre  eux. 

Hab.  —  On  rencontre  des  oiseaux  de  cette  famille  dans  toutes  les 
parties  de  l'ancien  monde,  l'extrême  Nord  excepté. 

OENRE  XCIX. 

PERDRIX.  —  CACCÂBIS  (1). 

Perwx,  Briss.  Oniith.  I,  p.  236  (17G0). 

Tetrao,  Lin.  Sijst.  nat.  I,  p.  276  (1766). 

Caccabis,  Alectoris,  Kaup,  Nat.  syst.  pp.  180,  183  (1829). 

Chacura,  Hodgs.  Madr.  Joiirn.,   1837,  p.  505. 

Pyctes,  Hodgs.  Gr.  Zool.  Mise,  p.  85  (1844). 

Car.  —  Bec  épais,  légèrement  arqué,  au  moins  aussi  haut  que 
large,  mandibule  supérieure  dépassant  faiblement  l'inférieure  ; 
narines  basâtes,  fermées  en  partie  par  une  écaille  membraneuse  nue  et 
très  renflée;  ailes  médiocres,  arrondies,  sub-obtuses;  queue  courte, 
arrondie;  les  plus  grandes  sus-caudales  atteignant  presque  l'extrémité 
de  la  queue  ;  tarses  robustes,  pourvus,  chez  les  mâles,  d'un  tubercule 
calleux  mousse;  doigts  réunis  à  la  base  par  une  membrane,  le  médian 
de  la  longueur  de  la  partie  nue  du  tarse  ;  pouce  bien  développé  ;  ongles 
arqués. 

176.  —  La  Perdrix  rouge. 

CACCABIS  RUBRA,  Kp.  ex  Briss. 

(Pi.   176.) 

Perdix  RUBRA,  Briss,  Ornith.  I,  p.  236  (1760). 

Tetrao  rufus,  Lin.  (part.)  8yst.  nat.  I,  p.  277  (1766). 

Tetrao  rufus,  GmeL  8.  N.  I,  p.  756  (1788). 

Perdix  rufa,  Lath.  Ind.  Orn.  II,  p.  647  (1790). 

Caccabis  rubra,  Kp.  Nat.  Syst.  p.  183  (1829). 

Perdix  labatei,  Bout.  Ornith.  Bauphiné,  II,  p.  337,  pi.  72,  f.  5  (1843)  hybride? 


(i)  Les  auteurs  ont  adopté  le  terme  générique  de  Perdix  tantôt  pour  la  Perdrix  rouge  et  ses 
congénères,  tantôt  pour  la  Perdrix  grise.  Mais  il  est  à  remarquer  que  c'est  cette  dernière  qui  est 
décrite  la  première  dans  l'ouvrage  de  Brisson,  comme  type  de  genre,  et  qui  doit  par  conséquent 
conserver  le  nom  générique  de  Pepdix.  C'est  pour  cette  raison  que  Kaup  créa  en  1829  le  terme 
de  Caccabis  pour  la  Perdrix  rouge. 


—  65  — 

Caccabis  rufa,  Gray,  Gen.  of  B.  III,  p.  508  (1849). 

Perdix  rufidorsalis,  C.  Brm.  Yogelf.  p.  266(1855). 

Perdix.  rubra  intercede.ns,  a.  Brm.  Allg.  Deulsch.  nat.  Zeil.  1857,  p.  472. 

Caccabis  rubra  communls,  A.  Hrm.  Samml.  C.  Brm.  p.  11  (1866). 

CoTHURNix  RUBRA,  Lamet.    Cat.  Ois.  Seine-inf.  p.  116  (1871). 

Perdix  xanthopleura  et   atrorufa,  Vincel.  Essnh  dtym.  Maine-et-Loire,  II,  p.  30 

et  32  (1872)  var.  ace. 
Das  Roth-Feldh(;iin',  ca  allemand. 
The  Red-leggei)  Partridge,  en  anglais. 
De  Roode  Patri.i.s,  en  llamand. 

Taille:  0'"30  ;  ailes  0,17. 

Description  du  nirile  adulte.  —  Parties  supérieures  d'un  brun  cendré  légè- 
rement olivâtre,  rougeâtre  à  la  tête  et  sur  le  haut  du  dos  ;  raie  sourcilière, 
joues  et  george  d'un  blanc  pur  ;  une  bande  noire,  partant  des  lorums  et  tra- 
versant l'œil,  encadre  complètement  le  blanc  de  la  gorge  ;  plumes  des  oreilles 
roussûtrcs  :  cou  gris,  tficlié  de  noir  et  passant  au  roux  vineux  ;  rémiges 
brunes  bordées  en  partie  de  roux  jaunâtre  ;  poitrine  et  flancs  d'un  gris 
bleuâtre,  mais  chaque  plume  des  flancs  traversée  d'une  bande  d'un  blanc 
jaunâtre,  suivie  d'une  étroite  bande  noire  et  terminée  par  un  large  bord  r.iux 
marron;  abdomen,  sous-caudales  et  jambes  d'un  roux  clair;  queue  d'un 
marron  rouge,  sauf  les  rectrices  médianes  qui  ont  la  couleur  du  dos.  Tour 
de  l'œil  et  un  espace  nu  derrière  cet  organe,  bec  et  pattes  rouges  ;  iris  brun 
roussâtrc. 

Femelle.  —  Un  peu  moins  forte,  coloration  moins  vive  et  point  de  tuber- 
cule aux  tarses. 

Pousain.  — •  Duvet  épais,  assez  court;  d'un  fauve  isabello  très  clair  en 
dessous,  d'un  brun  roux  sur  le  dessus  de  la  tête  et  les  parties  supérieures  ; 
l'extrémité  de  chaque  brin  do  duvet  est  noir,  ce  qui  forme  un  pointillé  à  la 
surfcice;  bandes  blanchâtres  sur  le  dos  ;  un  trait  noir  en  arrière  do  l'œil  (Mar- 
chand). Tarses  couleur  de  chair  rougeâtre  {Bailly). 

Ilab.  —  La  Perdrix  rouge  habite  le  sud-ouest  de  l'Europe.    Elle  a 
,ipfepa^igy!i^^M-^l^tiJM--^-^|^  été  introduite  en  Angleterre  vers 

-4^r  '  j    1770(C/«r7i6>)ety  est  aujourd'hui 

^yi    assez  abondante;   on   l'a  prise 

-•'H    accidentelloincnt    près    d'Aber- 

deen  en  Ecosse  {Grau).  Elle  est 

inconnue  en  Irlande,  où   l'on  a 

►..  '  Cf^pendant  essayé  de laccliuiater, 

'\  il  y  a  un(^  quarantaine  d'années, 

dans  le  comté  do  Galway,  mais 
elle  ne  paraît  pas  y  avoir  prospéré  {Thompson).  Son  apparition  acci- 
dentelle  dans   le   sud   df   l'Allomagnc  {Naumnnn)  oi   do  r.\ntiiclie 

T.iMi;  Il   —  1SS7.  U 


—  66  — 

{von  Tschusi)  paraît  douteuse,  mais  elle  existe  en  Dalmatie  (A.Brehm) 
et  en  Lorraine  où  elle  est  cependant  rare  {Godron). 

D'après  M.  le  baron  de  Sélys-Longchamps,  cette  espèce  serait  de 
passage  très  accidentel  en  Belgique,  où  un  individu  a  été  tué  près  de 
Tournay  ;  un  autre  aurait  été  capturé  près  de  Maestricht.  Suivant  le 
même  auteur,  on  aurait  essayé  à  diverses  reprises  de  naturaliser  cette 
Perdrix  aux  environs  de  Liège,  mais  on  n'a  pu  y  réussir;  ces  oiseaux 
émigraient  à  l'automne  vers  le  Midi  et  ne  revenaient  plus.  Je  pense 
qu'on  réussirait  mieux  dans  certaines  parties  du  Brabant  et  du  Hai- 
naut.  M.  A.  de  Lafontaine  signale  aussi  la  présence  accidentelle  de 
cette  espèce  dans  le  grand-duché  de  Luxembourg.  Il  est  probable  que 
cet  oiseau  se  soit  montré  plus  d'une  fois  sur  le  sol  belge  sans  tomber 
dans  les  mains  d'un  amateur;  chaque  année  on  voit  sur  les  marchés  de 
Bruxelles  des  quantités  considérables  de  ces  Perdrix,  provenant  de 
France  et  d'Italie;  rien  ne  prouve  qu'il  n'y  ait  jamais  dans  ces  tas  un 
sujet  pris  en  Belgique,  et  cela  est  d'autant  plus  probable  que  la 
Perdrix  rouge  se  reproduit  dans  le  nord  de  la  France. 

Dans  ce  dernier  pays,  cette  Perdrix  est  commune  dans  toute  la  Pro- 
vence ;  on  la  trouve  aussi  en  Bretagne,  en  Anjou,  dans  le  Jura  et  dans 
quelques  autres  localités  du  Midi  et  du  centre  ;  elle  est  plus  rare  dans 
le  Nord  :  on  l'y  rencontre  aux  environs  de  Saint-Pol  où  elle  se  repro- 
duit {Begland  et  Gerbe).  En  Suisse  on  la  voit  quelquefois  dans  le 
canton  du  Valais  [L.  Olphe- Gaillard)  et  aux  environs  de  Genève 
{Tschudi).  Elle  est  commune  dans  toute  l'Italie,  mais  elle  n'existe 
pas  en  Sardaigne,  en  Sicile  et  à  l'île  de  Malte  {Salvadori)  ;  elle  est 
aussi  très  commune  en  Espagne  (Saundet^s)  et  en  Portugal;  suivant 
M.  Tristram,  les  sujets  de  ce  dernier  pays  sont  d'une  taille  plus  forte 
et  les  teintes  sont  plus  vives  et  plus  tranchées.  On  rencontre  encore 
cette  espèce  aux  îles  Madère,  Açores  (Godman),  Baléares  (von 
Homeyer),  en  Corse  et  à  l'île  d'Elbe  [Lilford). 

DansleN.-O.  de  l'Afrique  cette  espèce  est  remplacée  parle  C. 
petrosa,  et  dans  l'Europe  orientale  et  au  Caucase  par  les  C.  saxatilis 
et  grœca;  c'est  à  tort  que  quelques  auteurs  ont  désigné  ces  régions 
comme  habitées  par  le  C.  ruhra. 

Mœurs.  —  Cette  Perdrix  est  très  sédentaire,  ne  s'éloigne  pres- 
que jamais  du  canton  où  elle  est  née,  et  si  elle  est  momentanément 
forcée  de  l'abandonner,  elle  ne  tarde  guère  à  y  revenir.  Elle  recherche 
les  lieux  accidentés,  les  flancs  boisés  des  montagnes,  les  ravins  ro- 
cailleux, les  coteaux  couverts  de  bruyères,  de  buissons  ou  de  vignes 
et  on  la  rencontre  même  dans  les  champs. 


-  67  ~ 

Ce  sont  des  oiseaux  excessivement  sociables,  vivanttoiijours  en  trou- 
pes, et,  à  l'époque  de  la  reproduction,  les  mâles  qui  n'ont  pu  trouver  de 
femelle  se  réunissent  même  souvent  entre  eux  ;  ceux  qui  ont  une  fe- 
melle s'éloignent  peu  du  voisinage  du  nid, etsejoignent  plus  tard  à  leur 
compagne  pour  guider  les  petits  et  veiller  sur  eux.  Leur  naturel  est 
doux  et  craintif  :  la  vue  d'un  rapace  les  terrifie,  et  la  poursuite  d'un 
renard  ou  d'un  chien  les  pousse  souvent  à  chercher  un  refuge  sur  les 
arbres  ;  ils  se  tiennent  avec  facilité  sur  les  branches,  et  dans  les  en- 
droits où  il  y  a  beaucoup  d'arbres  ils  se  perchent  régulièrement  pour 
mieux  inspecter  les  environs.  Leur  vol  est  brusque,  bruyant,  rapide 
quoique  lourd,  peu  élevé  et  de  courte  durée;  «  il  offre  ceci  de  parti- 
culier,disent  Degland  et  Gerbe,  qu'il  est  parallèle  au  sol  dans  presque 
tout  son  trajet  ;  ainsi,  les  Perdrix  rouges  ne  se  portent  pas  d'un  point 
à  un  autre  par  un  vol  qui  représenterait  une  ligne  horizontale,  mais 
elles  suivent,  à  la  hauteur  de  sept  à  dix  mètres  au  plus,  tous  les 
accidents  de  terrain  qu'elles  rencontrent, de  manière  à  décrire  une  ou 
plusieurs  grandes  courbes  continues  et  plus  ou  moins  fortes». 

La  voix  de  cette  espèce  ressemble  à  celle  de  la  Perdrix  grise,  mais 
elle  est  moins  perçante,  moins  criarde  et  plus  sifflante.  Le  signal  d'a- 
vertissement des  deux  sexes  est  reh  reh  ;  von  Homeyer  note. le  cri  du 
mâle  schick,  schéma,  mais  Brehm  croit  être  plus  près  de  la  réalité  en 
le  décrivant  conmic  un  son  rauque  :  tack  tackerack  ou  key^ekekek  ; 
Bailly  le  note  de  la  façon  suivante  :  ket  ket  ketclin,  ketdin  ketotin- 
kin,  ketdinkin. 

Sa  nourriture  consiste  en  insectes,  larves,  vers,  colimaçons,  fèves, 
haricots  et  autres  légumineuses,  glands,  faînes,  raisins,  baies  et  grai- 
nes diverses,  bourgeons,  jeunes  feuilles,  etc. 

L'un  des  fils  Brehm  a  eu  l'occasion  d'étudier  en  Espagne,  les 
moeurs  de  cette  espèce,  et  il  a  publié  sur  ce  sujet  une  note  détaillée 
dont  je  reproduirai  ce  qui  suit  :  «  En  Espagne,  on  trouve  la  Perdrix 
rouge  dans  toutes  les  chaînes  de  montagnes  (sauf  peut-être  celles  qui 
longent  la  côte  septentrionale),  et  jusqu'à  2000  mètres  au-dessus  du 
niveau  de  la  mer.  Elle  évite  les  grandes  forêts  ;  par  contre,  elle  s'eia- 
blit  volontiers  dans  les  parcs  et  dans  les  bois  ou  la  vogelalioii  est 
surtout  représ<mtée  par  d(;  liantes  bi-uyères,  des  chênes  vert<.  -'"- 
buissons  de  thym  et  de  romarin. 

hausses  mouvements,  continue  IWelim,  cet  oiseau  ressemble 
beaucoup  à  la  Perdrix  grise,  mais  il  est  i)lus  gracieux,  plus  élégant. 
Sa  course  est  rapide  et  .Misée  ;   il  court  avec  facilit**   au  milimi  des 


picncs  ci  des  rocaillcs,  g>i'imp(3  très  adroitement  sur  les  rochers,  et  se 
sert  rarement  de  sea  ailes.  Sou  vol  est  beaucoup  plus  rapide  et  moins 
bruyant  que  celui  de  la  Perdrix  grise;  il  se  lève  doucement,  monte  vite 
à  une  certaine  hauteur, à  l'aide  de  quelques  coups  d'aile  précipités  et 
difficiles  à  distinguer.Souvent  il  plane  longtemps  sans  paraître  agiter 
ses  ailes  ;  parfois  il  se  précipite  du  haut  d'un  rocher,  à  la  façon  d'un 
oiseau  de  proie.  Il  n'aime  pas  à  voler  loin  et  préfère  courir. 

<  Presque  toule  l'année, les  Perdrix  rouges  vivent  en  troupes  de  dix 
à  vingt  individus,  formées  de  la  réunion  de  plusieurs  familles.  D'or- 
dinaire, chacune  de  ces  troupes  erre  dans  les  limites  d'un  même  can- 
ton. Comme  ces  oiseaux  ont  peu  besoin  d'eau,  ils  n'ont  pas  d'heures 
régulières  pour  s'abreuver.  Leur  activité  s'éveille  quand  les  premières 
lueurs  de  l'aurore  paraissent  à  l'horizon,  et  dure  jusqu'après  le  lever 
du  soleil;  à  ce  moment  on  n'entend  plus  que  rarement  le  cri  du  mâle. 
Pendant  le  milieu  de  la  journée,  ils  sont  silencieux,  plongés  dans  un 
demi-sommeil  et  cachés  dans  les  herbes  ou  les  buissons.  Vers  le  cou- 
cher du  soleil,  ils  s'animent  de  nouveau,  et  jusqu'à  la  nuit  on  les  voit 
courir,  se  jouant  plutôt  que  cherchant  leur  nourriture.  Mais  la  saison 
des  amours  vient  changer  leurs  allures.  Dès  le  mois  de  février,  les 
bandes  se  séparent  par  couples.  11  est  cependant  à  remarquer  que 
l'époque  des  amours  varie  suivant  les  provinces  ;  dans  le  sud  de  l'Es- 
pagne, elle  commence  dans  les  premiers  jours  de  mars,  dans  le  centre 
et  dans  les  montagnes,  à  la  fin  de  ce  mois  ou  au  commencement  d'avril. 
A  ce  moment  les  mâles  se  livrent  des  combats  acharnés  pour  la  pos- 
session des  femelles.  » 

Reproduction.  —  Cette  espèce  niche  dans  les  champs,  les  vigno- 
bles, sous  uu  buisson  ou  à  l'abri  do  bruyères  ou  d'herbages.  La 
femelle  creuse  dans  le  sol  une  petite  fosse  qu'elle  garnit  de  brindilles 
ou  de  feuilles  sèches.  La  ponte  est  de  douze  à  dix-huit  oeufs  arrondis, 
à  coquille  épaisse  et  poreuse  ;  ces  œufs  sont  d'un  brun  jaunâtre  clair, 
pointillés  et  tachés  de  brun  ou  de  roux,  et  mesurent  environ  38  mil- 
lim.  sur  30.  La  durée  de  l'incubation  est  de  23  jours. 

Les  petits  croissent  vite  :  à  trois  semaines  ils  sont  déjà  lestes  et 
agiles,  et  à  cinq  semaines  ils  sont  grands.  En  cas  de  danger,  ils  se 
comportent  comme  les  poussins  de  la  Perdrix  grise. 

Ce  bel  oiseau  pourrait  aussi  bien  être  acclimaté  en  Belgique  qu'il 
l'a  été  en  Angleterre.  Mais  pour  obtenir  de  bons  résultats,  il  faudrait 
faire  venir  des  œufs  du  midi  de  la  France  ou  de  l'Italie,  et  les  placer 
dans  des  nids  de  Perdrix  grises  en  train  de  couver  ;  de  cette  façon, 


-    69  - 

les  jeunes  perdreaux  seront,  dès  le  premier  jour  de  leur  existence, 
instruits  dans  le  genre  de  y'u)  qu'ils  aurontà  mener.  A  l'âge  adulte,  ils 
se  choisiront  eux-mêmes  les  lieux  qui  leur  conviennent  le  mieux 
pour  la  reproduction. 

Les  œufs,  bien  emballés,  supportent  parfaitement  le  transport, 
sans  perdre  leur  principe  vital. 

GENRE  C. 

PERDRIX  proprement  dite.  —  PERDIX. 

Pkkdix,  Briss.  Onnlh.  I,  p.  21U  (1760). 
Tetrao,  Lin.  Si/st.  nat.  I,  p.  276  (1766). 
Starna,  Bonap.  Comj).  List.  p.  43  (1838). 

Car.  —  Bec  médiocre,  plus  large  que  haut  à  la  base,  à  arête  courbes 
mandibule  supéiieure  dépassant  l'inférieure  et  à  pointe  arrondie;  narine; 
basales,  latérales,  operculées  ;  un  petit  espace  nu  derrière  l'œil;  ailes  médio- 
cres, arrondies,  3®,  4°  et  5^  rémiges  les  plus  longues;  queue  courte;  tarses  et 
doigts  robustes,  les  premiers  dépourvus,  chez  les  mâles  comme  chez  les 
femelles,  de  tubercules  tenant  lieu  d'ergot  ;  ongles  larges,  peu  recourbés. 

Hab.  — Les  vraies  Perdrix  sont  répandues  dans  l'Europe  tempérée 
et  dans  l'Asie  centrale  et  orientale. 


177.  —  La  Perdrix  grise. 
PERDIX  CINEREA,  Briss. 

(PI.    177.) 

Peudix  ciNKKicA  ct  MONTANA,   Briss.   Otllilk.  1,  pp.  210,  224  (1760) 

Tetrao  perdix,  Lin.  Sijot.  nat.  I,  p.  276  (1766). 

Tetr.vo  mo.ntanus,  Gm.  Sijst.  nat.  I,  p.  758  (1788). 

Perdix  vulgakis,  Lcacli.  Syst.  Cat.  B.  M.  Br.  Mus.  (1815). 

Perdix  ci.neracea,  Brm  /sw,  1830,  p.  986. 

Starna  cinerea,  Bonap.  Conq).  List.  p.  43  (1838). 

Perdix  uelgica,  (var.  ace.)  de  Selys,  Faune  bel  g'.',  p.   115  (1842). 

Perdix  sylve^tris,  Brm.   \o<jdf.  p.  267  (1855). 

Starna  perdix,  Bona[).  Cat.  Parz.  p.  13(1856). 

Starna  palustris,  (var.  ace.)  Dcmeezm.  Ibis,  1864,  p.  225. 

Cothurnix  cinerea,  Lamct.  Qat.  Ois.  S'nn>--lnf.  II,  p.  118  (1875). 

Perdix  pallida  (Dcinoozra.)   Olphc-Oal.,  Contrib.   n    A,  Faune  orn.  fa.sc.  XXXIX, 

p.  35(1886). 
Das  1vkh-Fi:i,dhl'iin,  imi  uli"ni:iml. 
TiiE  Partridge,  en  anglais. 
De  Patrusî,  Veldiioen,  en  lUunand. 


—  70  - 
Var.  Damascena. 

Perdix  damascena,  Bi'iss.  Ornith.  I,  p.  223  (1760). 

Tetrao  damascenus,  Gm.  Syst.  nat.  I,  p.  758  (1788). 

Perdix  minor,  Brm.   Yolgelf.  p.  267  (1855). 

CoTHURNix  damascena,  Lamet.  C(xt.  Ois.  Seine-lnf.  Il,  p.   122  (1875). 

Taille:  0"\25;  ailes  O^JS. 

Description  du  mâle  adulte.  —  Front,  sourcils  et  gorge  d'un  roux 
jaunâtre  ;  dessus  de  la  tête  et  nuque  d'un  brun  roussâtre  varié  de  taches 
d'un  jaune  d'ocre  sale;  dessus  du  cou,  dos  et  sus-caudales  d'un  cendré  marqué 
de  fins  zigzags  noirâtres, les  sus-caudales  traversées  en  outre  de  bandes  d'un 
roux  marron;  devant  du  cou,  poitrine  et  lianes  d'un  cendré  plus  pâle  que 
le  dos,  mais  également  marqués  de  zigzags  noirâtres  ;  côtés  de  la  poitrine 
ornés  de  bandes  d'un  roux  rouge  ;  ailes  d'un  cendré  jaunâtre  avec  des  taches 
rougeâtres,  variées  de  zigzags  noirâtres  et  le  centre  des  couvertures  portant 
une  large  strie  longitudinale  blanchâtre  ;  rémiges  brunes  avec  des  bandes 
jaunâtres;  une  grande  tache  marron  en  forme  de  fer  à  cheval,  et  encadrée  de 
blanc  occupe  le  bas  de  la  poitrine  et  une  partie  du  ventre  ;  côtés  du  bas-ventre 
et  sous-caudales  roussâtres  et  parsemés  de  taches  et  de  zigzags  brunâtres  ; 
rectrices  médianes  comme  les  sus-caudales,  les  latérales  d'un  roux  rouge. 
Bec  d'un  brun  olivâtre  ;  pattes  grises;  iris  d'un  brun  roussâtre. 

Femelle.  —  Ses  teintes  sont  un  peu  plus  pâles,  mais  elle  diffère  principa- 
lement du  mâle  par  l'absence  de  la  giande  tache  ventrale  en  fer  à  cheval  ; 
le  ventre  est  d'un  blanc  jaunâtre  avec  quelques  taches  d'un  brun  rougeâtre. 
Chez  les  vieilles  femelles  cependant,  la  tache  marron  en  fer  à  cheval  est  plus 
ou  moins  marquée,  mais  jamais  autant  que  chez  les  mâles. 

Poussin.  —  Duvet  court,  d'un  blond  Isabelle,  marqué  sur  la  tête  et  sur 
les  autres  parties  supérieures  de  taches  d'un  roux  vif;  gorge  et  ventre  d'un 
jaune  pâle;  bec  et  pattes  jaunâtres. 

Yar.  ace. —  On  rencontre  parfois  des  variétés  d'une  teinte  pâle, de  couleur 
isabelle,  entièrement  blanches  ou  blanchâtres, ou  bien  irrégulièrement  tachées 
de  blanc.  Les  cas  de  mélanisme  sont  plus  rares.  Les  individus  désignés  sous 
le  nom  de  P.  onontana  ont  les  parties  inférieures  largement  tachées  de  brun 
marron.  Une  variété  remarquable,  que  l'on  rencontre  parfois  en  France  sur 
les  terrains  tourbeux  des  départements  de  la  Somme,  du  Pas-de-Calais  et  du 
Nord,  jusque  sur  le  territoire  belge  (P.  palustris)  est  généralement  d'un 
beau  gris  de  lin,  avec  le  front,  les  sourcils,  la  gorge  et  les  rectrices  d'un  gris 
blond. 

Var.  Damascena.  —  Sa  taille  est  un  peu  plus  petite  et  ses  pattes  sont  de 
couleur  jaunâtre. 


~    71  — 

Ilah.  —  La  Perdrix  grise  est  commune  dans  la  plus  grande  partie 

-^-^s^^i    -^-  ^-_  'tsY'j^;--, -  _^^ :?r^TPs^^  ^|g  l'Em-ope.  En   Norwège  elle 

^  *^^Mi'^^   / 1    ^^i^^  ^^^^^  i  ""  ^^^  observée  jusqu'au  delà  du 
Jf      .^iiy.^    ,.     .  -v  ^.^o]     ]si.(Col/ett);    elle  a  été 

J     *    introduite   en    Suède  vers    l'an 

t  '  ''  \7^i'i-  ^  1500  et  on  l'y  rencontre  auiour- 

(I  hm    jusque    sous    le    66  15, 

i    (Sundstrôw)  :  en   Finlande  elle 

se  montre  aussi  jusque  sous  le 


6d"  (Palmen),  et  elle  atteint 
probablement  la  même  latitude  eu  Russie,  quoiqu'elle  ne  paraisse  avoir 
été  encore  observée  que  jusqu'au  58  1/2°  (Teplouhoff),  En  Pologne, 
en  Allemagne,  aux  îles  Britanniques  et  dans  le  reste  de  l'Europe  cen- 
trale et  méridionale  elle  est  généralement  commune.  Elle  est  tréscom- 
mune  en  Belgique, mais  elle  est  inconnue  aux  îles  de  la  Méditerranée 
et  ne  se  montre  qu'accidentellement  en  Portugal  (A.  C.  Smith).  En 
Espagne  on  ne  l'observe  aussi  qu'accidentellement  au  sud  de  la  Sierra 
Guadarrama  (Saunders),  mais  on  la  rencontre  dans  la  province  de 
Santander  (Irbp),  dans  les  Asturies,  le  Léon,  la  haute  Catalogne  et 
dans  quelques  localités  de  l'Aragon  (A.  E.  Brehm).  En  Grèce  on  ne 
l'observe  que  sur  les  frontières  septentrionales  (Kruper ),mtx\s  elle  est 
commune  en  biverdans  les  plaines  de  la  Macédoine  (Drummond-Hay); 
elle  est  également  commune  en  Albanie  et  dans  TEpire  où  on  la 
trouve  en  nombre  considérable  près  de  Joannina  et  dans  les  plaines 
d'Arta  (Lillford). 

La  Perdrix  grise  est  fort  répandue  en  Asie  Mineure,  surtout  dans 
les  grandes  plaines  de  la  Lycaonie  et  tout  particulièrement  dans  la 
région  comprise  entre  Karaman  et  Karabounar  {Tchihatchelf).  Au 
Caucase  on  la  rencontre  jusqu'à  6,000  pieds  au-dessus  du  niv(\-iu  de 
la  mer  {Radde)  ;  elle  habite  également  le  nord  de  la  Perse  jusque 
dans  la  vallée  de  Lura  au  nord  de  Téhéran  {Xt-Jolm) .-  dans  le  Tur- 
kestan  on  l'observe  dans  certaines  parties,  tandis  que  dans  d'autres, 
elle  est  remplacée  par  la  /*.  haroala  (Severtzow). 

La  var,  Damascena  paraît  habiter  les  contrées  septentrionales,  car 
Naumann  dit  qu'à  la  fin  d'octobre  ou  en  novembre  ont  voit  arriver 
dans  le  nord  de  l'Allemagne  des  bandes  considérables  d.-  r«'rdrix, 
(pli  ditîèrent  de  celles  du  pays  par-  un»'  taille  un  peu  plus  p.'tite;  les 
chasseurs  allemands  les  désignent  sous  le  nom  de  Ziff//i'>/nu'/-  (Perdrix 
df  passage).  Eu  lîelgiijue,  elle  S(^  montre  irn'gulièrement  en  hiver  par 


-  72  - 

troupes  très  nombreuses (c?e  Selys-Longch,)ei  il  en  est  de  même  dans  le 
Grand-Duché  de  Luxembourg  {A.  de  La  Fontaine).  En  France  elle  se 
montre  chaque  année  dans  l'Artois,  où  quelques  couples  nichent  même 
sur  les  points  les  plus  élevés  de  la  province  ;  elle  se  montre  aussi  en 
Vendée,  et  passe  annuellement,  à  ce  qu'on  dit,  en  Bretagne,  notam- 
ment dans  le  Finistère  {Gerbe)  ;  on  la  voit  également  dans  le  départe- 
ment de  la  Seine-Inférieure  {Hardy)  et  de  l'Eure-et-Loir  ;  dans  ce 
dernier  département  elle  n'est  point  de  passage  régulier,  et  Ton  est 
souvent  bien  des  années  sans  en  voir  (Marchand). 

Remarque.  —  Certains  auteurs  français  ont  admis 'comme  espèces 
distinctes  les  P.  montana  et  damascena  deBrisson.  La  première  n'est 
positivement  qu'une  variété  accidentelle,  quoique  assez  fréquente  ;  il 
a  été  constaté  que  ses  caractères  distinctifs  ne  se  manifestent  jamais 
sur  tous  les  sujets  d'une  même  couvée.  Quant  à  la  seconde,  elle  peut 
être  admise  comme  variété  climatérique  ou  race.  Si  ses  caractères  sont 
peu  apparents,  elle  offre  quelques  particularités  dans  ses  mœurs  dont 
il  faut  tenir  compte;  ainsi,  contrairement  à  la  Perdrix  grise  ordinaire, 
qui  est  très  sédentaire,  la  var.  Damascena  est  migratrice;  elle  est 
aussi  plus  sauvage  et  plus  farouche  que  nos  Perdrix  indigènes,  ne  se 
mêle  jamais  à  ces  dernières  et  son  vol  est  plus  élevé.  Toutes  ces 
différences  dans  les  habitudes  et  dans  la  taille,  proviennent  évidem- 
ment du  milieu  qu'habite  l'oiseau  ;  Naumann  est  peut-être  dans  le  vrai 
quand  il  dit  que  leur  petite  taille  peut  provenir  de  ce  qu  elles  habitent 
des  régions  arides.  Leui-  ponte  n'est  guère  que  de  12  à  14  œufs. 

Mœurs.  —  C'est  un  oiseau  sédentaire, n'abandonnant  que  rarement 
le  canton  où  il  est  né  et  y  revenant  toujours.  Dans  les  contrées  du 
Nord,  cependant,  le  manque  de  nourriture  et  le  grand  > froid  obligent 
les  Perdrix  à  émigrer  vers  un  climat  moins  rigoureux.  C'est  la  petite 
race  qui  nous  arrive  en  automne  par  troupes  de  50  à  100  individus  ; 
Naumann  dit  que  son  frère  vit  un  jour  une  bande  d'environ  500 
sujets,  se  dirigeant  vers  l'Ouest,  moitié  volant,  moitié  courant  avec 
une  grande  rapidité. 

La  Perdrix  grise  habite  de  préférence  les  endroits  cultivés  des 
plaines,  où  elle  s'établit  dans  les  champs  situés  près  d'un  bois  ou 
environnés  de  buissons  ou  de  haies  touffues  ;  on  la  rencontre  égale- 
ment sur  les  lisières  des  forêts  et  près  des  lieux  marécageux,  du 
moment  qu'elle  y  trouve  des  broussailles  ou  des  hautes  herbes  où  elle 
puisse  se  cacher.  Elle  ne  se  montre  jamais  dans  la  profondeur  des 
bois,  mais  on  la  rencontre  partout  dans  les  champs  de  céréales,  de 


-  73  — 

colza,  de  luzerne,  de  trèfle,  de  pois,  etc.  Dans  les  Alpes,  dit  Tschudi, 
on  la  voit  rarement  à  plus  de  3,000  pieds,  et  l'on  cite  comme  une 
chose  extraordinaire  le  fait  de  six  Perdrix  tuées  sur  le  Himmelberg 
(Appenzell,  3,220  pieds). 

Par  ses  mœurs  douces  et  charmantes,  la  Perdrix  grise  s'est  acquis 
la  sympathie  de  tout  le  monde  ;  il  est  vrai  que  la  bonne  qualité  de  sa 
chair,  qui  en  fait  un-  gibier  fort  recherché,  est  pour  beaucoup  dans 
l'estime  qu'on  lui  témoigne.  Quand  elle  marche,  elle  tient  le  cou 
rentré  entre  les  épaules  et  le  dos  arrondi,  mais  elle  allonge  le  cou  dès 
qu'elle  se  met  à  courir.  En  cas  de  danger,  elle  se  cache  admirable- 
ment bien  dans  les  herbages  et  les  broussailles  ;  quand  elle  n'a  aucun 
abri  à  sa  portée,  elle  se  contente  de  s'aplatir  à  terre,  se  liant  dans  la 
conformité  de  couleur  qui  existe  entre  son  plumage  et  la  teinte  du  sol 
pour  rester  inaperçue,  et  ce  stratagème  lui  réussit  souvent.  Son  vol 
n'est  pas  précisément  lourd,  mais  fatigant  et  exige  au  début  de  grands 
battements  d'ailes  ;  une  fois  lancé,  l'oiseau  glisse  dans  l'air  avec  rapi- 
dité et  presque  sans  remuer  les  ailes,  donnant  seulement  de  temps  en 
temps  quelques  battements  pour  prendre  une  nouvelle  impulsion.  Cette 
Perdrix  n'aime  du  reste  pas  à  voler  haut  et  longtemps, surtout  quand 
il  fait  du  vent  ;  c'est  généralement  à  une  faible  hauteur  et  en  ligue 
droite  qu'elle  traverse  l'espace. 

Cet  oiseau  ne  se  perche  jamais  sur  les  arbres,  et  il  est  fort  rare  de 
le  voir  se  reposer  sur  le  toit  d'une  chaumière  ou  d'une  masure,  ce  qui 
ne  lui  arrive  généralement  que  lorsqu'il  est  poursuivi.  Ses  pattes 
robustes  lui  permettent  de  courir  avec  rapidité,  aussi  préfère-t-il 
souvent  chercher  son  salut  dans  une  course  rapide,  aûn  de  pouvoir 
atteindre  sans  danger  un  endroit  convenable  pour  s'y  cacher.  Il  est 
du  reste  prudent  et  craintif,  et  sait  fort  bien  distinguer  de  loin  ses 
ennemis  et  les  éviter  à  temps.  Il  est  sociable,  fidèle  et  capable  de 
dévouement,  aussi  ne  craint-il  pas  d'exposer  sa  vie  pour  défendre  sa 
progéniture. 

Au  printemps  ces  oiseaux  vivent  par  couples,  mais  dans  les  autres 
saisons  on  les  voit  toujours  en  fainille  ;  quand  celle-ci  a  perdu  la 
majorité  de  ses  membres,  les  survivants  cherchent  à  se  joindre  à  une 
autre  famille,  qui  ne  les  reçoit  cependant  pas  toujours  sans  protester 
à  coups  de  bec.  Le  cri  de  la  Perdrix  est  retentissant  et  peut  se  rendre 
par  ^ <*>'/•// /c/l  ou  girhuli.  C'est  naluri'llciuenl  au  i)rihi(Miii>s  (pie  les 
mâles  sont  le  plus  bruyants,  car  étant  généralement  en  plus  graïul 
nombre  que  les  femelles,  ils  sont  obligés  de  combattre  pour  conquérir 

TuMt:  11.  —  1SS8.  1'-' 


—  74  — 

une  compagne,  qui  se  donne  alors  au  plus  fort.  Le  danger  et  la  peur 
leur  font  jeter  le  cri  de  ripripriprip,  qui  se  change,  dans  une.  fuite 
précipitée,  en  taert-taert-taert .  Les  poussins  piaillent  comme  ceux  de 
nos  poules  ;  un  peu  plus  tard  ils  crient  tup-tup,  puis  schirk-schirk,  et 
enfin  girik,  gurrhik  comme  leurs  parents,  mais  le  ton  change  plus  ou 
moins  suivant  les  circonstances. 

La  nourriture  des  Perdrix  se  compose  de  graines  diverses,  de  bour- 
geons, déjeunes  feuilles,  d'insectes  et  de  larves. 

Ces  oiseaux  ne  s'apprivoisent  que  quand  on  les  prend  très  jeunes. 
Le  meilleur  moyen  de  les  élever  est  de  faire  couver  des  œufs  de 
Perdrix  par  une  poule;  mais  on  doit  avoir  soin  de  nourrir  les  pous- 
sins d'œufs  de  fourmis,  de  larves  et  de  petits  insectes. 

Rep7^oduction.  —  Dans  le  courant  de  mars,  ou  même  à  la  fin  do 
février  si  la  saison  est  avancée,  les  familles  se  divisent  et  chaque  mâle 
cherche  une  compagne,  étant  monogame.  Ceci  ne  se  fait  cependant 
pas  sans  bruit  et  sans  lutte,  car,  comme  il  a  été  dit  plus  haut,  les 
mâles  sont  généralement  en  majorité.  Il  va  sans  dire  que  dans  ces 
combats  en  l'iionneur  des  femelles,  les  vainqueurs  sont  toujours  les 
plus  forts  et  les  plus  expérimentés  ;  les  jeunes  de  l'année  précédente 
sont  donc  parfois  obligés  de  se  passer  de  compagne.  Il  est  cependant 
à  remarquer  que  ces  luttes  n'ont  lieu  qu'entre  les  mâles  célibataires 
ou  veufs,  car  les  unions  entre  Perdrix  sont  indissolubles,  et  ce  n'est 
qu'après  la  mort  de  l'un  d'eux  que  le  survivant  cherche  à  contracter 
une  nouvelle  union.  Aussi  les  vieux  couples  se  retirent-ils  toujours  les 
premiers,  pour  chercher  un  endroit  convenable  à  leurs  amours.  Ceux 
qui  n'ont  pu  trouver  de  femelle,  continuent  leurs  clameurs  jusque  dans 
le  mois  de  mai,  et  viennent  parfois  troubler  les  pondeuses,  sans 
s'inquiéter  des  droits  d'autrui,  mais  l'intrus  est  toujours  vigoureu- 
sement repoussé  parles  conjoints. 

La  femelle  niche  généralement  dans  les  environs  de  l'endroit  où 
elle  est  née,  et  qui  se  trouve  toujours  dans  un  champ  de  blé,  de 
colza,  de  trèfle,  etc.,  ou  même  au  milieu  des  hautes  herbes  d'une 
prairie  ou  à  l'abri  d'un  buisson.  Le  nid  est  une  simple  dépression 
creusée  dans  le  sol  et  garnie  de  chaumes  et  de  brins  d'herbes.  C'est 
sur  cette  litière  que  la  femelle  pond,  vers  la  fin  d'avril  ou  en  mai, 
de  dix  à  dix-huit  œufs,  déposant  journellement  un  œuf  jusqu'à  ce  que 
la  ponte  soit  terminée.  On  a  trouvé  des  nids  contenant  jusqu'à  vingt 
et  vingt-six  œufs  ;  mais  plusieurs  auteurs  croient  qu'il  n'ap- 
partiennent pas  tous  à  une  même  femelle.  Il  se  peut,  en  effet,  qu'une 


Perdrix  ayant  eu  son  nid  détruit  pendant  la  ponto,  aille  ronfler  à  un 
autre  nid  le  reste  de  ses  oeufs.  Ceux-ci  sont  d'un  gris  brunâtre  ou 
olivâtre  assez  pâle  et  sans  taches  ;  ils  mesurent  environ  37  millim. 
sur  26. 

La  durée  de  l'incubation  est  de  trois  semaines,  et  la  mère  ne  quitte 
sa  couvée  que  le  temps  strictement  nécessaire  pour  trouver  sa  nourri- 
ture ;  pendant  qu'elle  couve,  le  mâle  reste  non  loin  d'elle  pour  sur- 
veiller les  alentours  et  l'avertit  de  l'approche  d'un  danger.  «  Dès  le 
premier  jour  de  leur  existence,  dit  Brehm,  ils  se  meuvent  avec  agilité; 
ils  quittent  le  nid  avant  d'être  complètement  secs  et  d'être  débar- 
rassés de  tous  les  débris  de  la  coquille  qui  les  enveloppait  ;  ils  sont 
attentifs  aux  avertissements  de  leurs  parents.  Le  père  et  la  mère  en 
prennent  soin  :  le  premier  veille  sur  eux,  les  avertit  et  les  défend,  la 
seconde  les  conduit  et  les  nourrit.  L'un  des  parents  vient-il  à  périr, 
le  survivant  prend  sa  place.  »  En  cas  de  mauvais  temps,  mâle  et  femelle 
abritent  chacun  sous  leurs  ailes  une  partie  de  leur  nombreuse  progé- 
niture. 

Les  allures  des  perdreaux  changent  quand  ceux-ci  ont  à  peu  près  la 
taille  des  adultes  et  qu'ils  sont  en  état  de  se  sauver  eux-mêmes,  mais 
l'aitachement  réciproque  ne  se  modifie  guère.  Chaque  famille  reste 
parfaitement  unie,  et  quand  un  péril  les  surprend,  ils  se  tapissent  tous 
à  terre;  l'ennemi  les  approche-t-il  de  trop  près,  tous  s'envolent  à  la 
fois  pour  s'abattre  plus  loin  ;  s'ils  sont  une  seconde  fois  forcés  de 
prendre  la  fuite,  ils  ne  le  font  plus  avec  le  même  ensemble,  mais  volent 
dans  tous  les  sens  et  s'abattent  éparpillés.  Quand  les  perdreaux  se 
trouvent  ainsi  séparés  de  leurs  parents,  la  peur  les  saisit  et  il  est  alors 
souvent  facile  de  les  surprendre.  Le  danger  passé,  les  parents  rap- 
pellent leurs  petits  qui  répondent  aussitôt,  et  bientôt  toute  la  famille 
est  de  nouveau  nnmio  ;  mais  s'il  manque  quelques  perdreaux,  il  est 
touchant  de  voir  comment  le  père  vole  de  tous  côtés  à  leur  recherche, 
fouillant  les  herbes  et  les  buissons,  et  poussant  sans  cesse  ses  cris 
d'appel,  jusqu'à  ce  qu'il  parvienne  à  retrouver  les  égarés  et  à  les 
ramener  à  leur  mère. 

GENRE    CI. 

CAILLE.  —    COTURNIX. 

Cori'UMX.  liri.ss.  Ornitli.  I,  p.  ~t7  (^ITilOj. 

Tktiiao,  Lin.  Syxt,  nat.  I.  p.  273  (1766). 

()KTY(;i<i.N,  Koys.  et  Bl.  Wirhrith.  /•>»•.  p.  FA\  l  (^l>:|ii). 

Car.  —  Hoc  court,  |)1us  Iai,^'<^  i|ur  haut  à  la  l)asi',  coinpriiiu'  vers  la  poinlo 


—   76  — 

qui  est  fléchie  et  qui  dépasse  un  peu  la  mandibule  inférieure  ;  narines  Lasales, 
latérales,  operculées  ;  ailes  courtes,  aiguës,  1^®  et  2«  rémiges  égales  et  les  plus 
longues;  queue  courte,  arrondie,  les  sus-caudales  atteignant  l'extrémité  des 
rectrices  et  les  couvrant  entièrement  ;  tarses  robustes,  médiocrement  allongés, 
scutellés  postérieurement,  sans  trace  de  tubercule  ;  doigts  antérieurs  réunis 
à  la  base  par  une  petite  membrane,  le  médian,  y  compris  l'ongle,  de  la  lon- 
gueur du  tarse,  le  pouce  libre,  court,  élevé  ;  ongles  courts. 

Hah.  —  Ce  genre  a  des  représentants  en  Europe,  en  Asie,  en  Afrique,  en 
Australie  et  à  la  Nouvelle-Zélande. 


178. —  La  Caille  ordinaire 
COTURNIX  COMMUNIS,   Bonnat. 

(PI.  178.) 

CoTURNix  MAJOR,  Briss.  Ornitli.  I,  p.  251  (1760). 

Teteao  COTURNIX,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  278  (1766). 

CoTURNix  COMMUNIS,  Boniiat.  Tahl.  encycl.  et  méth.  1,  p.  217  (1790) 

Perdix  COTURNIX,  Latli    Ind.  orn.  Il,  p.  651  (1790). 

CoTURNix  DACTYLisoNANS,  B.  Mey.  Voff.  Liv.  und  Est}d.,\>.  167  (1815). 

CoTURNix  vuLGARis,  Flcm,  Bvil.  an.  p.  45  (1828). 

CoTURNix  MEDIA  et  MiNOR,  Brm.  Isis,  1830,  p.  986. 

CoTURNix  EUROP^us,  Swaiiis.  Classif.  of  B.  Il,  p.  344  (1837), 

Ortygion  COTURNIX,  Keys.  et  Bl.  Wirbelth.  Eur.  p.  66  (1840) 

CoTURNix  VULGARIS  JAPONicus,  Schl.  Faun.  Jap.  p.  103,  pi.  61  (1850). 

Ortyx  COTURNIX,  Clien.  et  D.  Murs,  Encycl.  Ois.  VI,  p.  154(1854^. 

ÇoTURNix  BALDAMi  et  LEUCOGENYS,  Bnn.Naumannia,  1855,  p.  288. 

CoTURNix  CHiNENSis,  Swinh.  Ibis.  1860,  p.  63. 

CoTURNix  MUTA,  Dyb.  Journ.  f.  Orn.  1868,  p.  337. 

CoTURNix  JAPONiCA,  Swinli.  Ibis,  1875,  p.  126. 

Ortyx  communis,  Lemett.  Cat.  Ois.  Seine-Inf.  p.  129  (1879). 

CoTURNix  COMMUNIS  ORiENTALis,  Bogdan.  Consp,  Av.  Imp.  Ross.,  p.  44  (1881). 

Die  Schlag-Wachtel,  en  allemand. 

The  common  Quail,  en  anglais. 

De  KwARTEL,  en  flamand. 

Taille:  0'",16;  ailes  0,103. 

Description  du  mâle  adulte.  —  Dessus  de  la  tête  noir,  chaque  plume  bordée 
de  roussâtre  et  une  raie  de  couleur  claire  sur  la  ligne  médiane  ;  raies  sour- 
cilières  larges  et  blanchâtres;  dessus  du  corps  brun  noirâtre,  chaque  plume 
bordée  de  roux  cendré  foncé  et  marquée  de  raies  transversales  roussâtres  et 
d'une  longue  tache  centrale, terminée  en  pointe,  d'un  blanc  roussâtre;  couver- 
tures des  ailes  d'un  cendré  brunâtre  avec  une  strie  claire  au  centre  ;  rémiges 
brunâtres,  tachées  ou  barrées  de  roussâtre  sur  le  bord  externe  ;  milieu  de  la 


-  77   - 

gorge  d'un  brun  noirâtre  ;  joues  et  côtés  du  cou  d'un  cendré  clair  varié  de 
brun  ;  un  demi-collier  blanchâtre  sur  le  devant  du  cou  et  remontant  jusqu'à 
la  région  des  oreilles  ;  poitrine  roussâtre  avec  les  baguettes  des  plumes 
blanchâtres;  côtés  de  la  poitrine  marqués  de  taches  noires  ;  le  reste  des 
parties  inférieures  d'un  blanc  roussâtre,  les  flancs  variés  de  roussâtre  et 
marqués  de  longues  taches  brunes  ;  queue  brune  avec  des  raies  claires 
transversales.  Bec  noir  ;  pattes  roussâtres  ;  iris  brun. 

Femelle.  —  Diffère  principalement  du  mâle  par  l'absence  de  brun  à  la 
gorge;  celle-ci  est  d'un  blanc  jaunâtre  uniforme;  les  côtés  de  la  tête  sont  plus 
roux  ;  il  en  est  de  môme  des  côtés  de  la  poitrine  où  les  taches  noires  ne 
sont  presque  plus  apparentes,  mais  où  les  stries  blanchâtres  sont  plus  larges. 

Poussin.  —  Duvet  assez  long,  d'un  roux  ocreux  en  dessus  ;  le  devant  de  la 
tête  d'un  roux  vif  ;  une  bande  noire  le  long  du  dos,  se  divisant  sur  la  tête  ; 
côtés  du  dos  et  ailes  variés  de  noir  ;  une  tache  noire  derrière  l'œil  ;  parties 
inférieures  jaunâtres. 

Var.  accid.  —  On  rencontre  parfois  des  sujets  d'un  blanc  jaunâtre,  d'un 
blanc  pur  ou  variés  de  blanc,  de  couleur  pâle,  grise  ou  Isabelle;  le  mélanisme 
est  plus  rare  (1). 

Hab.  —  La  Caille  a  une  aire  géographique  très  étendue  :   on   la 

rencontre   dans    presque    toute 


m^. 


l'Europe  ainsi    que  dans  toute 
l'Afrique,  l'Asie  et  le  Japon. 

En  Europe  on  la  rencontre, en 
été,  jusqu'aux  îles  Fœroé  {Feil- 
den),  le  sud  de  la  Scandinavie 
[Collett)  et  la  Finlande  [Pal- 
mén);  elle  a  même  été  capturée 
dans  le  gouvernement  d'Archan- 
gel  jusque  sous  le  6^°  [Tengstrom).  Elle  est  plus  ou  moins  commune 
dans  toutes  les  parties  de  l'Europe  centrale  et  méridionale,  ainsi 
qu'aux  îles  Britanniques.  Elle  est  sédentaire  et  de  passage  en  Sicile 
[Malherbe),  en  Sardaigne  (Salvadurï),  en  Corse,  dans  le  midi  de 
l'Espagne  [Saunders)  et  en  Grèce  [De  Heldreich).  Il  en  est  de  mémo 
dans  le  nord  de  l'Afrique,  où  ces  oiseaux  ne  sont  cependant  pas 
abondants  en  été  [Loche,  de  Ileuglin)  ;  dans  l'Afrique  tropicale  cette 
espèce  ne  paraît  pas    séjourner  longtemps,    mais  elh'    devient   de 


(1)  Le  Synoicus  Lodoisiœ,  Vevr.  et  D.  Murs  {Riv.  d  M'ag.  de  zoohygie,  \^<M,  p.  :2I.",  pi.  Il 
dont  on  ne  connaît  que  l'unique  exemplaire  pris  en  Lomh.irdie,  ne  peut  être  qu'une  variole  acci- 
dentelle de  la  CaïUe  ordinaire. 


-  78  - 

nouveau  sédentaire  et  abondante  dans  le  sud,  surtout  au  Cap  et  au 
Transvaal  {Laijard,  Ayres).  Elle  est  également  sédentaire  ou  de 
passage  sur  toutes  les  îles  de  la  côte  africaine,  y  compris  Madagascar 
[Hartlauh)  et  les  Comores  {Pollen). 

La  Caille  est  aussi  commune  dans  presque  toute  l'Asie  et  le  Japon 
{Schlêgel)  ;  dans  le  nord  elle  atteint  probablement  la  même  latitude 
qu'en  Europe  ;  au  sud  on  la  rencontre  en  Perse  {Blanford),  dans 
l'Inde  entière  [Jey^îon)^  en  Chine  (David)  et  à  Formose  (Sioinhoé). 
Je  ne  la  trouve  pas  mentionnée  comme  habitant  l'Indo-Chine  et  la 
presqu'île  de  Malacca,  mais  il  est  plus  que  probable  qu'elle  habite  ces 
pays. 

Mœws.  —  Dans  nos  contrées,  on  ne  rencontre  la  Caille  qu'en  été  : 
elle  nous  revient  régulièrement  à  la  tin  d'avril  ou  dans  les  premiers 
jours  de  mai,  et  émigré  en  septembre  ou  en  octobre.  Au  moment  du 
départ,  ces  oiseaux  ne  paraissent  pas  se  rassembler  :  chacun  s'en  va 
quand  bon  lui  semble  et  sans  s'inquiéter  des  autres  ;  mais,  pendant  le 
voyage,  un  émigrant  se  joint  à  d'autres,  la  troupe  augmente  à  mesure 
qu'elle  avance,  et  ainsi  se  forment  ces  bandes  énormes  que  l'on  voit 
s'abattre  dans  le  midi  de  l'Europe.  Il  paraît  que  ces  bandes  savent 
franchir  plus  de  cinquante  lieues  en  une  nuit.  Arrivées  près  des  côtes 
delà  Méditerranée,  les  Cailles  s'arrêtent  épuisées  ;  alors  commence  une 
chasse  dont  on  ne  peut  se  faire  une  idée  :  on  les  prend  par  milliers 
à  l'aide  de  filets  et  de  pièges  de  toute  espèce  et  on  les  assomme  même 
à  coups  de  bâton,  A  Rome,  d'après  Waterton,  on  met  parfois  en 
vente,  en  un  seul  jour,  plus  de  17.000  Cailles.  Le  nombre  de  celles 
qui  périssent  ainsi  chaque  année  en  Espagne,  en  Italie,  en  Grèce  et 
en  Turquie  est  réellement  fabuleux;  malgré  cela,  elles  repassent 
l'année  suivante  par  bandes  tout  aussi  nombreuses.  Après  avoir  repris 
des  forces,  et  si  le  vent  est  favorable,  celles  qui  ont  échappé  à  la  des- 
truction s'envolent  de  nouveau  pour  franchir  la  mer.  Si  le  vent  reste 
constant,  elles  arrivent  sans  encombre  sur  la  côte  africaine  ;  mais  s'il 
s'élève  une  tempête,  ces  pauvres  oiseaux  ne  peuvent  lutter  contre  le 
vent,  et  ils  sont  alors  obligés  de  s'abattre  sur  les  rochers  ou  sur  les 
ponts  des  navires,  où  un  nouveau  danger  les  attend,  tandis  que 
d'autres  tombent  à  la  mer  et  s'y  noient. 

Quand  les  Cailles  sont  enfin  parvenues  à  atterrir  en  Afrique^  elles 
restent  d'abord  quelques  instants  immobiles,  ensuite  elles  se  mettent 
à  courir  sur  le  sable,  mais  ne  se  servent  de  leurs  ailes  qu'au  bout  d'un 
jour  ou  deux,  à  moins  qu'un  danger  ne  les  menace.  «  Dès  lors,  dit 


—  79  — 

Brehm,  on  rencontre  des  Cailles  partout  dans  le  nord-est  de  l'Afrique, 
mais  nulle  part  en  grandes  bandes  :  elles  sont  isolées,  quoique 
nombreuses  dans  certaines  localités.  Elles  cherchent  des  endroits 
convenables,  des  champs,  des  jachères  couvertes  de  halfa,  et  surtout 
des  steppes.  Je  crois  que  tout  le  temps  qu  elles  restent  en  Afrique, 
elles  errent  et  ne  font  pas  un  long  séjour  dans  le  même  canton.  A 
l'entrée  du  printemps  la  retraite  commence,  et  en  avril  les  Cailles  se 
réunissent  à  la  côte,  mais  moins  nombreuses  qu'à  l'automne.  Elles  ne 
semblent  du  reste  pas  suivre  toujours  la  mémo  route  :  aux  Cyclades, 
Erhard  n'a  jamais  observé  une  seule  Caille  au  printemps,  tandis  qu'en 
automne  elles  j  arrivent  en  nombre  considérable  ;  par  contre,  d'autres 
observateurs  disent  que,  dans  d'autres  îles,  à  Malte  par  exemple,  elles 
se  montrent  aussi  nombreuses  dans  l'une  comme  dans  l'autre  saison.  » 

p]n  été,  la  Caille  s'établit  dans  les  plaines  fertiles  couvertes  de 
champs,  et  ne  se  montre  jamais  dans  les  régions  montagneuses  ou 
boisées;  ce  qu'elle  préfère,  ce  sont  les  champs  de  céréales,  mais  on 
la  voit  aussi  dans  les  prés,  quand  l'herbe  n'y  est  pas  trop  haute,  dans 
les  champs  de  légumineuses  et  dans  les  endroits  où  croissent  diverses 
plantes  herbacées  et  des  ronces.  Elle  évite  toujours  les  endroits  hu- 
mides et  marécageux. 

Elle  marche  en  tenant  la  tête  rentrée,  le  dos  voûté,  et  ne  présente 
rien  de  gracieux  dans  ses  allures  ;  le  mâle  cependant,  prend  quelque- 
fois une  attitude  plus  fière,  en  redressant  le  corps  et  le  cou.  Sa 
démarche  est  aisée,  et  l'oiseau  sait  courir  avec  rapidité,  surtout  quand 
un  danger  le  menace.  Son  vol  est  assez  rapide,  bruyant  et  saccadé; 
il  n'aime  généralement  pas  de  franchir  d\me  traite  une  grande  éten- 
due, et  ce  n'est  que  lors  des  migrations  qu'il  s'élève  haut  dans 
les  airs  pour  traverser  l'espace  d'un  vol  rapide;  dans  les  temps  ordi- 
naires, il  préfère  courir  que  voler,  et  ce  n'est  pour  ainsi  dire  que 
poussé  par  la  nécessité  qu'il  se  décide  à  prendre  son  vol,  ne  s'élevant 
pourtant  pas  à  plus  d'un  mètre  ou  deux  et  reprenant  terre  à  cent 
pas  plus  loin. 

La  Caille  a  les  sens  de  la  vue  et  de  l'ouïe  très  développés,  mais  son 
intelligence  laisse  beaucoup  à  désirer  ;  elle  est  très  craintive  et  se 
croit  sauvée  quand  elle  a  caché  sa  tête  et  qu'elle-même  ne  voit  plus  le 
danger. 

Pendant  la  journée,  la  Caille  se  tient  tranquille  et  cachée  dans  les 
champs  ;  vers  midi  elle  se  chauffe  au  soleil,  se  roule  dans  le  sable  ou 
s'endort.    C'est  à  l'aurore  et  au   crépuscule,  ainsi  que  pendant  une 


—  80  — 

partie  de  la  nuit  qu'elle  se  montre  pleine  d'activité  :  on  peut  alors 
entendre  ses  cris  et  la  voir  courir  à  la  recherche  de  sa  nourriture, 
poursuivre  les  femelles  ou  attaquer  un  rival.  Cet  oiseau  n'est  pas 
sociable,  il  parcourt  les  champs  seul  et  évite  ceux  de  son  espèce  ;  il 
est  même  rare  de  voir  mâle  et  femelle  s'élever  ensemble  dans  les 
airs,  et  quand  cela  arrive,  chacun  s'abat  d'un  autre  côté  pour  se 
rapprocher  probablement  un  peu  plus  tard.  Du  reste  le  mâle  n'est  pas 
un  époux  fidèle  et  encore  moins  bon  père,  car  il  ne  s'occupe  guère  de 
sa  progéniture.  Pendant  les  premiers  temps,  la  mère  veille  sur  ses 
poussins,  les  garde  près  d'elle  et  les  rappelle  quandils  s'éloignent  trop; 
mais  dès  qu'ils  peuvent  se  passer  des  soins  maternels,  les  petits  quit- 
tent leur  mère  les  uns  après  les  autres  et  celle-ci  ne  cherche  pas  alors 
à  les  retenir.  Les  mâles  sont  très  querelleurs,  se  poursuivent  avec 
rage,se  livrentdes  combats  acharnés  et  maltraitent  même  leurs  femelles. 
«  Les  Chinois,  dit  l'abbé  David,  emploient  la  Caille  comme  oiseau  de 
combat;  pour  l'apprivoiser  et  pour  augmenter  ses  dispositions  belli- 
queuses, ils  lui  font  prendre  des  bains  de  thé  chaud,  puis  ils  la  font 
sécher  en  la  tenant  dans  leur  manche.  Après  un  certain  nombre  de  ces 
bains,  qui  sont  suivis  d'autant  de  repas,  l'oiseau  est  suffisamment 
habitué  à  la  main  de  l'homme  et  tout  disposé  à  entrer  en  lice  contre 
ses  semblables.  Ces  sortes  de  combats  font  les  délices  des  Chinois  qui 
y  engagent  souvent  des  sommes  considérables.   » 

Outre  son  cri  bien  connu  des  campagnards,  la  Caille  en  a  d'autres 
qui  varient  selon  les  circonstances  ;  le  cri  d'appel  des  deux  sexes  est 
bubhoi  suivi  de  prickick  d'une  voix  plus  faible;  le  mécontentement  et 
la  peur  lui  fait  jeter  le  cri  de  trulilil  ty^ulil,  la  colère  celui  de  gour 
gour,  ressemblant  un  peu  au  ronflement  du  chat;  en  s'enfuyant  devant 
un  danger  elle  crie  trubrek,  reck  reck  et  pieppiep.  Dès  leur  arrivée 
au  printemps,  les  mâles  entonnent  leur  chant  d'amour,  et  l'on  entend 
alors  chaque  soir  et  pendant  une  partie  de  la  nuit  les  cris  de  puck- 
werwuck,  puckwerwick  auxquels  les  femelles  répondent  par  hrubruh 
ruh  rub. 

Les  Cailles  se  nourrissent  comme  les  Perdrix,  de  graines  diverses, 
de  larves  et  d'insectes,  mais  elles  se  montrent  moins  avides  de  bour- 
geons et  déjeunes  feuilles  ;  en  fait  de  graines,  elles  préfèrent  celles 
du  blé,  de  l'avoine,  de  millet,  de  pavot, de  colza,  de  navet,  de  chanvre, 
etc.  Pour  se  désaltérer,  elle  se  contente  le  plus  souvent  des  goutte- 
lettes de  rosée  amassées  sur  les  feuilles. 

Ces  oiseaux  s'apprivoisent  facilement  et  sont  très   agréables  en 


—  81    — 

captivité,  même  en  les  laissant  courir  librement  dans  les  apparte- 
ments ;  ils  s'habituent  bientôt  à  leur  volière  et  s  y  reproduisent  souvent. 
On  doit  nourrir  les  poussins  d'oeufs  de  fourmis,  de  pain  blanc  émietté 
et  de  graines  de  millet  ramollies  dans  du  lait. 

Dans  certains  pays  du  Midi,  les  Cailles  font  l'objet  d'un  commerce 
très  important.  En  Grèce,  suivant  De  Heldreich,on  prend  ces  oiseaux 
à  l'aide  de  filets  lors  de  leur  passage  au  mois  d'août  ;  on  les  plume 
immédiatement,  on  les  vide,  leur  coupe  la  tête  et  les  pattes,  puis  on  les 
aplatit  à  l'aide  d'une  planche  chargée  de  pierres;  on  les  met  ensuite 
dans  de  petits  barils  entre  des  couches  de  sel  marin  préparé  à  l'avance, 
et  ils  sont  ainsi  expédiés  à  l'étranger. 

Reproduction.  —  Le  mâle  est  polygame, du  moins  dans  les  contrées 
où  l'espèce  est  abondante.  A  l'époque  de  l'accouplement,  il  est  extrê- 
mement jaloux  et  ne  laisse  approcher  aucun  autre  mâle;  de  là  des 
luttes  à  outrance  et  sans  fin  ;  sa  violence  va  jusqu'à  maltraiter  la 
femelle  si  elle  ne  se  prête  pas  assez  vite  à  ses  désirs  ;  on  dit  que  son 
intempérance  le  pousse  quelquefois  à  se  jeter  sur  des  femelles  de  pas- 
sereaux et  même  sur  des  oiseaux  morts. 

La  femelle  ne  commence  son  nid  que  quand  la  saison  est  déjà  bien 
avancée  et  rarement  avant  la  Saint-Jean;  ce  n'est  qu'à  partir  du  15 
juillet  que  la  plupart  des  femelles  commencent  à  nicher.  Dans  ce  but 
elles  creusent  une  légère  dépression  dans  un  champ  de  blé, de  fèves, de 
pois,  mais  rarement  dans  une  prairie  ;  cette  dépression  est  garnie 
de  quelques  brins  ou  de  feuilles,  mais  l'ensemble  est  si  grossier  que, 
sans  les  œufs,  on  ne  devinerait  jamais  que  c'est  un  nid.  La  ponte  est 
de  huit  à  douze  œufs,  rarement  davantage.  Ceux-ci  sont  d'un  jaune 
brunâtre  ou  olivâtre,  plus  ou  moins  mouchetés  de  brunâtre  et  ordi- 
nairement marqués  de  grandes  taches  brunes  ;  ils  mesurent  environ 
31  miUim.  sur  24.  La  femelle  couve  pendant  dix-huit  à  vingt  jours 
avec  une  persévérance  incroyable.  Elle  veille  sur  ses  poussins  avec 
tendresse,  les  abrite  sous  ses  ailes  durant  la  nuit  ou  en  cas  do  mauvais 
temps,  et  leur  apprend  dès  leur  naissance  à  chercher  leur  nourriture. 
Les  petits  croissent  rapidement  :  à  six  semaines  ils  ont  la  taille  des 
adultes  et  sont  bientôt  en  état  d'entreprendre  leur  long  voyage. 

La  Caille  n'a  qu'une  couvée  par  an,  mais  si  celle-ci  a  été  détruite, 
elle  fait  une  nouvelle  ponte.  C'est  ce  qui  fait  qu'on  trouve  paribis 
encore  à  la  fin  d'août  et  même  en  septembre  des  nids  contenant  des 
œufs;  mais  ces  couvées  tardives  arrivent  rarement  à  bonne  fin,  et  elles 
périssent  le  plus  souvent  dès  les  premiers  froids. 

TuMi^  II.  —  1888  ^' 


ORDRE   VII 

Car,  —  Cet  ordre  comprend  des  oiseaux  de  formes  très  variables, 
mais  qui  se  reconnaissent  facilement  à  la  longueur  relative  de  leurs 
tarses.  Leur  bec  est  tantôt  court  et  conique,  tantôt  long  et  plus  ou 
moins  grêle,  droit  ou  recourbé,  large  et  comprimé  ou  étroit  et  épais; 
leur  cou  est  plus  ou  moins  allongé,  leurs  ailes  sont  bien  développées 
et  leur  queue  est  en  général  courte.  Le  seul  caractère  commun  à  toutes 
les  espèces  du  groupe,  c'est  d'avoir  les  tarses  allongés,  minces  et  nus 
jusqu'au-dessus  de  l'articulation  tibio-tarsienne.  Les  doigts  sont  au 
nombre  de  trois  ou  de  quatre,  et  les  antérieurs  sont  ordinairement 
réunis  à  leur  base  par  une  petite  membrane  ;  chez  quelques  espèces 
les  doigts  antérieurs  portent  latéralement  des  lobes  membraneux. 

Le  plus  souvent  les  femelles  ne  ditfèrent  que  peu  ou  point  des 
mâles  par  leur  système  de  coloration.  Les  petits  ont  en  naissant  le 
corps  couvert  de  duvet. 

Hab.  —  Les  Échassiers  sont  répandus  dans  le  monde  entier  et  cer- 
taines espèces  sont  même  cosmopolites. 

Mœurs.  —  Le  genre  de  nourriture  de  ces  oiseaux  oblige  la  plupart 
à  mener  une  vie  plus  ou  moins  aquatique.  Ils  se  tiennent  ordinaire- 
ment là  où  l'eau  est  peu  profonde  et  où  ils  peuvent  patauger  sans 
mouiller  leur  plumage,  pour  chercher  des  insectes  et  des  mollusques 
aquatiques  qui  constituent  leur  principale  nourriture.  Quelques-uns, 
cependant,  plongent  et  nagent  fort  bien,  surtout  ceux  qui  ont,  comme 
les  Foulques,  les  doigts  lobés.  D'autres  vivent  loin  de  l'eau  et  recher- 
chent les  plaines  cultivées  et  les  steppes.  Les  Echassiers  réellement 
terrestres  n'ont  que  trois  doigts  et  se  nourrissent  en  grande  partie  de 
matières  végétales. 

Tous  les  Échassiers,  sauf  les  Hérodiens,  nichent  sur  le  sol,  parfois 
dans  les  herbages  qui  flottent  sur  l'eau. 

Classification.  —  Quand  on  compare  entre  eux  les  nombreux 
Échassiers  qui  peuplent  notre  globle,  on  est  frappé  de  la  diversité  de 
leurs  formes  ;  à  ces  différences  d'organisation  correspondent  souvent 
des  différences    non  moins  importantes  dans  les  mœurs,  le  régime, 


-  83  - 

etc.,  qui  permettent  de  diviser  ces  oiseaux  en  plusieurs  sous-ordres 
parfaitement  distincts,  dont  le  nombre  varie  cependant  suivant  les 
auteurs.  Les  sous-ordres  généralement  admis  sont  :  1.  les  Échassiers 
coureurs-^  2.  les  Macrodactyles  et  3,  les  Hérocliens. 


PREMIER     SOUS-ORDRE 

LES    ÉCHASSIERS    COUREURS 

Car.  —  Bec  fendu  jusqu'au-dessous  des  yeux  ;  doigts  médiocre- 
ment allongés,  au  nombre  de  quatre  ou  de  trois  seulement  ;  le  pouce, 
quand  il  existe,  est  court  et  ne  repose  parfois  pas  à  terre. 

Cette  division  comprend  tous  ]es  Echassiers  qui  courent  avec  agilité 
et  qui  habitent  les  plaines  découvertes  ou  les  bords  de  la  mer  ou  des 
rivières. 

FAMILLE  DES  OTIDÉS 

Car.  —  Bec  fort,  aplati  à  la  base,  renflé  près  de  la  pointe  de  la 
mandibule  supérieure  ;  ailes  amples,  légèrement  concaves,  à  rémiges 
larges  et  fortes,  la  troisième  la  plus  longue  ;  tarses  épais,  élevés, 
réticulés  de  toute  part;  doigts  au  nombre  de  trois  seulement,  tous 
dirigés  en  avant  ;  queue  médiocre,  formée  de  vingt  larges  rectrices. 

Ce  sont  des  oiseaux  de  grande  ou  de  moyenne  taille,  qui  établissent 
une  sorte  de  transition  entre  les  Gallinacés  et  les  vrais  Echassiers. 
Ils  ont  la  tête  assez  grande,  le  corps  trapu  et  le  plumage  lisse  et 
serré. 

Les  mâles  diffèrent  des  femelles  par  une  taille  plus  forte  et  souvent 
aussi  par  des  plumes  allongées  et  étroites  qui  ornent  la  tête  et  les 
côtés  du  cou. 

Hab.  —  Cette  famille  est  représentée  dans  les  parties  tempérées  et 
chaudes  de  l'ancien  monde  et  en  Australie. 

GENRE    Cil. 

OUTARDE.  —   OTIS. 

Otis,  Lin.   Syst.  uni.  I,  p.  2(54  (1766). 
Psoi'HiA,  Jacq.  Beilr.  Gcsch.  Yog.  p.  24(1784). 
Tetrax,  Leach,  Syst.  Cat.  M.  B.  Br.  Mits.  p.  28  (1817). 
HouHAUA,  Roiiap.  Sof/f/.  distr.  tw't.  An.  vorl.  p.  142(1832) 
Chi.amydotis,  Lcss.  Rev.  zool.  IHIîU,  p.  47. 
Euj'ODOTis,  Gray.  Gen.  of'B.  III,  p.  533  (1845). 


—  84  — 

Car.  —  Bec  plus  court  que  la  tête,  robuste,  conique,  convexe  ;  narines 
ovalaires,  situées  vers  le  milieu  de  la  mandibule  ;  cou  allongé  ;  ailes  égale- 
ment allongées,amples,  concaves,  ne  dépassant  pas  la  queue;  celle-ci  médiocre, 
large,  arrondie  ;  tarses  élevés,  épais,  réticulés  ;  doigts  au  nombre  de  trois, 
scutellés.  Sommet  de  la  tête,  côtés  et  bas  du  cou  ornés  parfois  de  faisceaux 
de  plumes  décomposées. 

Hab.  —  Comme  la  famille. 

179.  —  L'Outarde  barbue 

OTIS  TARDA,  Lm, 

(PL  179  et  179b.) 

Otis  tarda.  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  264  (1766). 

Otis  major,  Brm.  Isis,  1830,  p.  986. 

Otis  barbata,  C.  F.  Dub.  PL  col.  Ois.  Belg.  II,  p.  157  (1857). 

Otis  Dybowskii,  Tacz.  Journ.  f.  Orn.  1874,  p.  331. 

Der  Gross-Trappe,  en  allemand. 

The  Great  Bustard,  en  anglais. 

De  Groote  Trap,  en  flamand. 

Taille  :  mâles  1™,06  ;  ailes  0"\64  ;  tarses  0™,16  ;  femelle  :  0"\77  ; 
ailes  0'", 47  ;  tarses  0'",11. 

Description  du  mâle  adulte  en  juin.  —  Tête  d'un  gris  cendré  ;  cou 
blanc,  lavé  de  roussâtre  vers  le  bas  en  arrière  et  en  avant,  et  offrant  à 
la  partie  supérieure  et  de  chaque  côté,  un  grand  espace  triangulaire  nu  de 
couleur  violacée  et  garni  de  quelques  plumes  usées  ;  une  touffe  de  longues 
plumes  blanches  à  barbes  effilées  et  déliées,  part  de  chaque  côté  du  menton  en 
formant  une  espèce  de  barbe  divisée  à  son  milieu  ;  une  large  écharpe  d'un 
roux  vif  couvre  le  bas  du  cou  et  le  haut  de  la  poitrine,  avec  des  taches  noires 
en  croissants  en  arriére  et  sur  les  côtés;  dos,  croupion  et  petites  couvertures 
des  ailes  d'un  roux  jaunâtre  avec  des  bandes  plus  ou  moins  larges  d'un  noir 
profond  ;  grandes  couvertures  des  ailes  d'un  gris  pâle  ;  rémiges  brunes,  les 
primaires  plus  pâles  et  leurs  baguettes  blanchâtres  ;  parties  inférieures 
blanches  ;  queue  rousse,  blanchâtre  à  la  basse  et  à  son  extrémité,  avec  une 
barre  sub-terminale  noire.  Bec  brun  de  corne;  iris  jaune  orangé;  pattes  grises. 

Mâle  en  hiver.  —  Pas  de  nudité  sur  les  côtés  du  cou  et  pas  d'écharpe 
rousse.  Tête,  cou  et  poitrine  d'un  gris  bleuâtre  uniforme  ;  barbe  moins  déve- 
loppée ;  le  reste  comme  en  été. 

Femelle.  —  D'une  taille  beaucoup  plus  petite  mais  avec  la  même  colora- 
tion que  le  mâle  en  hiver  ;  une  barbe  peu  développée  n'existe  que  chez  les 
vieilles  femelles. 


—  8d  — 


Poussin.  —  Duvet  court  ,  d'un  cendré  roussâtre  taché  de  noir,  sauf  sur 
les  parties  inférieures  qui  sont  unicolores. 

Hab.  —  L'Outarde  barbue  est  répandue  dans  une  grande  partie  de 

l'Europe  et  de  l'Asie,  mais  sa 
véritable  patrie  comprend  la 
Russie  méridionale,  la  Moldavie, 
la  Valachie,  la  Dobrodja,  les 
plaines  de  la  Hongrie  et  de  la 
Gallicie,  les  steppes  qui  s'éten- 
dent entre  la  mer  Noire  et  la 
mer  Caspienne,  enfin  toute  la 
Sibérie  tempérée.  En  Finlande 
elle  se  montre  jusque  sous  le  60"  1.  N.  [Malmgren),  et  il  en  est  proba- 
blement de  même  en  Russie  et  en  Sibérie  ;  elle  est  commune  dans  le 
centre  de  la  Russie  (Goebel,  etc.)  et  surtout  dans  le  midi  de  la  Crimée 
{de  Nordmann) .  On  la  voit  très  accidentellement  dans  le  sud  de  la 
Suède  (Nilsson)  et  en  Danemark  {Kjcierbôlling),  et  elle  est  rare  en 
Pologne  {Taczanoioski)  ;  en  Autriche  elle  est  plus  ou  moins  répan- 
due dans  certaines  localités,  soit  à  l'état  sédentaire,  soit  comme 
oiseau  de  passage  {Lurtig,  Nahlik)  ;  il  en  est  de  même  en  Allemagne 
où  on  l'observe  particulièrement  en  Saxe,  dans  l'Anhalt,  dans  le 
Brandebourg,  la  Silésie,  le  Brunswick,  dans  les  plaines  de  la  Thu- 
ringe  et  dans  certaines  parties  de  la  Bavière  [Naumann,  Brehm, 
Uhde, etc. )Lors  des  hivers  rigoureux,elle  se  montre  par  petites  troupes 
en  Hollande  {Schlégel),  en  Belgique,  dans  le  grand-duché  de  Luxem- 
bourg {de  La  Fontaine)  et  dans  certaines  parties  de  la  Suisse 
{Schneider).  En  France  cet  oiseau  est  sédentaire  dans  les  environs  de 
Châlons-sur-Marnoet  dans  quelques  localités  de  la  Champagne  ;  il  est 
de  passage  irrégulier  dans  le  nord  de  la  France  {Degland  et  Gey^bé)  ; 
il  est  commun  dans  certaines  parties  de  l'Espagne  {Saunders,  Reyes) 
et  assez  répandu  en  Portugal  surtout  dans  les  parties  situées  au  sud 
d'Alemtejo  [du  Bocage,  Sniith)  ;  il  est  de  passage  irrégulier  dans  les 
plaines  de  l'Italie,  ainsi  qu'en  Sicile  et  à  l'He  de  Malte  {Salvadori, 
Giglioli).  L'Outarde  barbue  est  sédentaire  dans  les  plaines  de  la  Grèce, 
surtoutcnBéotie,  mais  elle  devient  de  plus  en  plus  rare  {Bc  Heldreich)  ; 
elle  esl  commune  dans  les  plaines  du  Danube  {Finsch)  et  dans  cer- 
taines parties  de  la  Turquie  surtout  dans  le  Dobrodja  {Allêon)  et  la 
Valachie  {Elwes  et  Bucklci/) .  Autrefois  cet  oiseau  était  fort  comnuin  on 


-  86  - 

Angleterre  et  en  Ecosse  et  on.  le  voyait  même  en  Irlande  ;  aujourd'hui 
on  ne  le  rencontre  plus  que  dans  quelques  comtés  de  l'Angleterre  et 
encore  y  devient-il  de  plus  en  plus  rare  {Stevenson,  Harting). 

En  Asie  cet  oiseau  est  plus  ou  moins  commun  en  Asie-Mineure 
Krûper,  Tristram),  en  Arménie  {St-John),  au  Caucase  {Radde),  en 
Turkestan  {Severtzoïo),  dans  toute  la  Sibérie  tempérée  {Dibowski, 
Taczanowski),  sur  les  hauts  plateaux  de  la  Mongolie  et  il  vient  régu- 
lièrement passer  l'hiver  dans  les  plaines  du  nord  et  du  centre  de  la 
Chine  {David)  et  on  le  voit  même  au  Japon  {Seebohm).  Au  sud  il  s'est 
montré  accidentellement  jusque  dans  le  nord-ouest  de  l'Inde  {Hume). 
Cette  espèce  se  montre  parfois  aussi  dans  le  nord-ouest  de  l'Afrique  : 
elle  a  été  observée  au  Maroc  {Drake)  et  en  Algérie  {Loche). 

Mœurs.  —  L'Outarde  barbue  est  un  oiseau  errant,  qui  se  meut 
sans  cesse  dans  une  zone  de  plusieurs  lieues;  ce  n'est  qu'à  l'époque 
de  la  reproduction  qu'elle  se  fixe  dans  une  localité  pour  y  nicher.  Aux 
premières  neiges,  les  individus  qui  habitent  la  zone  la  plus  septen- 
trionale de  leur  habitat  commencent  à  émigrer,  et  c'est  alors  qu'un 
certain  nombre  de  ces  oiseaux  se  dispersent  dans  les  contrées  euro- 
péennes où  on  n'en  voit  pas  en  été.  «  Quand  l'hiver  est  très  doux,  dit 
de  Nordman,  une  partie  au  moins  de  ces  oiseaux  restent  dans  les  pro- 
vinces septentrionales  de  la  Nouvelle-Russie  ;  dans  le  cas  contraire, 
ils  se  rassemblent  dans  la  Crimée,  et  lorsque  la  couche  de  neige  se 
trouve,  là  aussi,  être  trop  épaisse,  ils  passent  la  mer  Noire  et  gagnent 
les  vastes  plaines  de  l'Asie  Mineure.  C'est  toujours  en  bandes  qu'ils 
opèrent  ces  voyages;  ils  ne  volent  ni  très  haut  ni  très  serrés,  ce  qui 
pourrait  faire  croire  quelquefois  qu'ils  sont  divisés  en  plusieurs  détache- 
ments, suivis  habituellement  d'un  certain  nombre  de  traînards  volant 
les  uns  à  la  suite  des  autres.  Dans  la  première  moitié  de  mars,  quel- 
quefois même  avant,  ils  reviennent,  volant  alors  la  plupart  du  temps 
deux  à  deux.  Malgré  ce  que  nous  venons  de  dire,  les  Outardes  ne 
peuvent  pas  être  considérées  comme  de  vrais  oiseaux  voyageurs,  car 
ces  migrations  se  font  avec  trop  peu  de  constance  et  elles  sont  en 
outre  sujettes  à  des  anomalies  toutes  particulières.  Ainsi,  certaine 
année  àv  la  mi-dëcembre,  par  un  froid  de  18^  R.,  les  steppes 
étant  couvertes  d'une  couche  profonde  de  neige,  je  vis  de  grandes 
troupes  de  ces  oiseaux  se  diriger  du  Nord  vers  le  Midi  ;  au  mois 
de  janvier  suivant,  sans  que  la  température  eût  éprouvé  un  chan- 
gement notable,  j'observai  de  semblables  troupes  prenant  la  direction 
opposée.  Souvent  contraints  à  changer  de  séjour  par  le  manque  des 


—  87  - 

provisions  nécessaires  à  leur  entretien,  aimant  en  outre  à  se  déplacer, 
ces  oiseaux  font  de  grandes  tournées  et  se  transportent  même  d'une 
côte  de  la  mer  Noire  à  l'autre.  » 

Cette  Outarde  fréquente  les  plaines  cultivées  et  les  steppes  ;  elle 
évite  toujours  les  endroits  boisés  ou  garnis  de  buissons,  et  quand  elle 
rencontre  un  bois  sur  sa  route,  elle  s'élève  aussitôt  pour  traverser 
l'espace  par  dessus  les  arbres.  Elle  fuit  aussi  avec  soin  les  lieux 
humides  ou  habités.  Ce  qu'il  lui  faut,  ce  sont  de  grandes  plaines 
découvertes  où  elle  puisse  apercevoir  de  loin  l'arrivée  d'un  ennemi. 
En  hiver  elle  recherche  les  champs  en  état  de  la  nourrir,  ceux,  par 
exemple,  qui  sont  semés  de  blé  d'hiver.  «  Dès  les  premières  lueurs 
de  l'aurore,  dit  Naumann,  les  Outardes  s'éveillent  :  elles  se  lèvent, 
s'étendent,  battent  des  ailes,  marchent  lentement  de  côté  et  d'autre, 
puis  elles  s'envolent  simultanément,  les  plus  vieilles  et  les  plus 
lourdes  formant  l'arrière -garde,  et  elles  gagnent  leur  lieu  de  pâture, 
qui  est  toujours  éloigné  de  celui  où  elles  passent  la  nuit.  »  Selon 
Brehm,  la  démarche  de  cet  oiseau  est  lente  et  mesurée,  ce  qui  lui 
donne  un  certain  air  majestueux  ;  cependant,  quand  il  y  a  nécessité, 
il  court  avec  une  telle  vitesse  qu'un  chien  a  de  la  peine  à  l'atteindre. 
Avant  de  s'envoler,  l'Outarde  fait  deux  ou  trois  bonds,  comme  pour 
prendre  son  élan  ;  elle  s'élève  sans  trop  de  peine  et  vole  au  moyen  de 
coups  d'ailes  qui  se  succèdent  lentement  ;  quand  elle  a  atteint  une 
certaine  hauteur,  elle  glisse  dans  l'air  avec  rapidité,  en  tenant  le  cou 
étendu  en  avant,  les  pattes  en  arrière. 

Ces  oiseaux  sont  fort  craintifs  et  d'une  prudence  extrême,  aussi 
sont-ils  constamment  aux  aguets  pour  voir  si  quelqu'un  s'approche,  et 
tout  ce  qui  leur  paraît  suspect  les  met  en  fuite.  Il  est  donc  fort  difficile 
de  les  approcher  à  portée  de  fusil,  surtout  qu'ils  vivent  toujours  en 
troupes.  Leur  vie  est  ainsi  rarement  en  danger,  ce  qui  leur  permet 
d'atteindre  un  bel  âge  ;  certains  auteurs  pensent  qu'une  Outarde  bar- 
bue peut  dépasser  l'âge  de  cinquante  ans. 

C'est  une  espèce  très  sociable,  vivant  toujours  par  troupes  de  six  à 
dix  individus,  quand  les  besoins  de  la  reproduction  ne  les  obligent  pas 
de  s'isoler  ;  en  hiver,  elles  se  rassemblent  même  enbandes  formées  de 
plusieurs  centaines  de  sujets.  Cette  Outarde  se  fait  rarement  entendre, 
et  encore  faut-il  être  très  près  pour  pouvoir  distinguer  sa  voix;  celle  du 
mâle  peut  se  rendre,  d'après  Naumann,  par  hou-houhou  ressemblant 
au  roucoulement  de  nos  Pigeons  domestiques;  la  femelle  ne  paraît 
guère  se  faire  entendre  et  les  poussins  poussent  une  sorte  de  sifliemcnt; 


de  Nordmann  a  entendu  des  jeunes,  séparés  de  leurs  parents,  pousser 
d'une  voix  forte  des  accents  lamentables  qu'il  serait  difficile  de  rendre 
par  des  syllabes. 

Les  Outardes  barbues  se  nourrissent  de  bourgeons,  de  jeunes 
feuilles  et  autres  substances  végétales,  de  graines  diverses,  de  larves, 
d'insectes,  surtout  de  hannetons,  mais  ce  sont  toujours  les  céréales 
qu'elles  préfèrent  ;  la  nourriture  des  poussins  se  compose  uniquement 
d'insectes. 

Pris  très  jeunes,  ces  oiseaux  s'apprivoisent  assez  facilement,  mais 
il  vaut  toujours  mieux  faire  couver  les  œufs  d'Outarde  par  des  poules 
domestiques;  ils  vivent  alors  pendant  des  années  en  parfaite  intelli- 
gence avec  les  autres  habitants  des  basses-cours. 

L'Outarde  ne  forme  guère  un  gibier  estimé,  car  elle  exhale  une 
odeur  désagréable  qui  se  communique  à  la  chair  et  surtout  à  la 
graisse;  cette  odeur  résiste,  paraît-il,  à  tous  les  systèmes  de  cuisson. 
Reproduction.  —  «  Dès  le  mois  de  février,  dit  Naumann,  les 
Outardes  cessent  de  venir  visiter  régulièrement  leurs  pâturages  habi- 
tuels et  de  vivre  réunies.  Elles  sont  plus  vives,  inquiètes  jusqu'à  un 
certain  point  ;  on  dirait  qu'elles  sont  comme  contraintes  d'errer  tout  le 
jour  d'un  endroit  à  l'autre.  Les  mâles  commencent  à  poursuivre  les 
femelles  et  celles-ci  se  dispersent  ;  la  société  se  relâche  sans  se  dis- 
soudre encore.  A  ce  moment,  on  voit  les  Outardes,  oublieuses  de  leur 
prudence  ordinaire,  voler  à  une  faible  hauteur  au-dessus  des  arbres, 
des  villages  et  même  des  endroits  les  plus  animés.  Le  port  fier  et 
majestueux,  bouffi  comme  un  Dindon,  la  queue  étalée  en  éventail,  le 
mâle  s'avance  à  côté  de  la  femelle,  s'envole  à  une  courte  distance, 
puis  revient  bientôt  la  rejoindre.  » 

«  Au  commencement,  dit  Brehm,  l'Outarde  barbue  marche  les 
ailes  légèrement  pendantes,  la  queue  obliquement  relevée  ;  mais 
bientôt  l'amour  la  transporte  complètement.  Elle  gonfle  tout  à  fait 
son  cou,  qui  paraît  avoir  doublé  de  volume,  renverse  la  tête  en  arrière, 
étale  et  laisse  pendre  les  ailes,  mais,  en  même  temps,  elle  en  relève 
et  en  retourne  toute  les  plumes  en  avant  et  en  haut,  de  manière  que 
les  dernières  scapulaires  recouvrent  le  derrière  de  la  tête,  pendant  que 
les  plumes  de  la  barbe  la  recouvrent  en  avant  ;  elle  relève  sa  queue 
de  façon  à  n'en  faire  voir  que  les  couvertures  inférieures,  et  incline 
vers  le  sol  l'avant  du  corps.  En  même  temps,  elle  devient  au  plus 
haut  degré  courageuse  et  querelleuse.  Un  mâle,  à  ce  moment,  est 
pour  un  autre  mâle  un  objet  de  haine  ;  se  rencontrent-ils,  ils  cher- 


-   89  — 

chent  à  s'intimider,  et  comme  ils  sont  animés  des  mêmes  sentiments, 
ils  en  viennent  aux  prises.  Les  deux  vaillants  champions  fondent  l'un 
sur  l'autre,  bondissent,  se  portent  des  coups  de  bec  et  de  pattes,  se 
poursuivent  au  vol,  etc.  »  Mais  les  mâles  ont  bientôt  conquis  leur 
femelle  et  l'on  rencontre  alors  les  deux  sexes  ensemble.  Les  obser- 
vations de  Naumann,  Brehm  et  autres  semblent  démontrer  que  l'Ou- 
tarde est  monogame. 

Selon  ces  auteurs,  l'Outarde  barbue  clioisit  très  soigneusement 
l'emplacement  où  elle  construit  son  nid.  Si  les  céréales  sont  assez 
hautes,  pour  qu'une  couveuse  puisse  être  complètement  cachée,  la 
femelle  creuse  dans  le  sol  une  légère  dépression,  la  garnit  de  quelques 
chaumes  desséchés  et  y  pond  deux  ou  trois  œufs  ovales,  à  coquille 
épaisse,  d'un  grain  grossier,  et  d'un  vert  olivâtre  clair  ou  d'un  vert 
grisâtre  mat  et  ornés  de  taches  brunes.  Ils  mesurent  environ  75  mil- 
lim.  sur  54.  La  femelle  ne  s'approche  du  nid  qu'avec  prudence  et  en 
évitant  de  se  montrer.  Un  ennemi  s'avance-t-il,  elle  rampe  dans  les 
blés  sans  être  vue  ;  est-elle  surprise  ,  elle  s'envole,  mais  bientôt  elle 
sabat  dans  les  moissons  et  se  sauve  en  courant.  Si  l'on  touche  à  ses 
œufs,  elle  les  abandonne  ;  de  même,  elle  ne  revient  plus  au  nid  si  on 
a  beaucoup  marché  aux  alentours. 

Les  jeunes  éclosent  après  trente  jours  d'incubation.  La  mère  les 
sèche,  les  réchauffe,  puis  les  emmène  avec  elle  ;  elle  leur  témoigne  la 
plus  vive  tendresse  et  emploie  tous  les  moyens  pour  les  protéger  et 
les  défendre.  A  un  mois,  ils  savent  voleter  et  à  six  semaines  ils  volent 
assez  bien  pour  accompagner  leurs  parents  dans  leurs  excursions. 

180.  —  L'Outarde  canepetière. 
OTIS  TETRAX,  Lin. 

(PI.  180  (?t  180'0. 

Otis  mixor,  Briss.  Omith.  V,  p.  24  (1760). 

Otis  tetr.vx,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  264  (1766). 

Tetrax  campestris,  Leach,  Syst.  col.  Mam.  B.  Br.  Mus.  p.  28  (1816). 

Otis  tetrao,  Macg.  Man.  Br.  Birds  II,  p.  40  (1846). 

Der  Klein  Trappe,  en  allemand. 

The  Little  Bustard,  en  anglais. 

De  Kleine  Trai',  en  flamand. 

Taille:  0'",39;  ailes  0,255  ;  tarses  0,0G6. 

Description  du  mâle  adulte  en  été.  —  Dessus  de  la  tête  et  iiu({uo  d'un  jaune 
Tome  II.  —  1888.  12 


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ocreux  varié  de  taches  noires  ;  menton  blanchâtre  ;  côtés  de  la  tête  et  gorge 
d'un  gris  bleuâtre,  passant  au  noir  sur  le  devant  du  cou,  et  cette  teinte  est 
suivie  d'un  coUier  blanc  descendant  très  bas  sur  la  partie  antérieure  du  cou; 
ce  dernier  orné  de  plumes  noires,  allongées  sur  les  côtés  où  elles  forment  une 
espèce  de  collerette  que  l'oiseau  peut  relever  à  volonté  ;  bas  du  cou  traversé 
par  une  large  bande  blanche  ;  dessus  du  corps  du  même  jaune  ocreux  que  la 
tête  et  marqué  d'une  multitude  de  zigzags  et  de  taches  d'un  brun  noirâtre, 
mais  plus  étroites  sur  les  ailes  où  la  teinte  claire  domine  ;  bord  de  l'aile  et 
grandes  couvertures  blanches;  les  premières  rémiges  brunes, blanches  à  leur 
base,  les  suivantes  blanches,  mais  brunes  à  leur  extrémité  ;  sus-caudales 
blanches  tachées  de  noir;  rectrices  médianes  comme  le  dos,  les  latérales 
blanches  tachées  de  noir  et  portant  deux  barres  de  même  couleur  ;  parties 
inférieures  blanches.  Bec  brun  ;  iris  d'un  jaune  brunâtre;  pattes  d'un  cendré 
jaunâtre. 

Mâle  en  automne.  —  Les  plumes  blanches  et  noires  du  cou  sont  rem- 
placées par  des  plumes  plus  courtes  et  d'une  teinte  grise. 

Femelle.  —  Ressemble  au  mâle  en  automne.  Dessus  de  la  tête  et  parties 
dorsales  comme  chez  le  mâle  ;  côté  de  la  tête  d'un  jaune  d'ocre  strié  de  brun; 
gorge  blanche  ;  cou  jaune  d'ocre  avec  une  multitude  de  raies  transversales 
brunes  et  piqueté  de  brun  en  arrière  ;  grandes  couvertures  des  ailes  blanches 
rayées  de  brun  ;  parties  inférieures  blanches  avec  quelques  taches  brunes  sur 
la  poitrine  et  sur  les  flancs. 

Jeune.  —  Ressemble  à  la  femelle. 

Poussin.  —  Manteau,  flancs,  cou,  haut  des  ailes  et  dessus  des  cuisses  pré- 
sentent un  mélange  de  roux  et  de  noir,  formé  par  le  duvet  noir  à  la  base  et  à  la 
pointe,  roux  au  centre  ;  tète  rousse,  portant  au  vertex  des  taches  et  des  traits 
noirs,  avec  deux  bandes  sourcilièies  fauves,  qui  se  réunissent  à  la  nuque  ; 
menton,  ventre,  abdomen,  extrémité  et  dessous  des  ailes  blancs.  Bec  brun 
verdâtre  avec  le  marteau  blanc;  pieds  carné-olive;  iris  brun  pâle.  (J.  Vian). 

Hab.  —  L'Outarde  canepetière  habite  particulièrement  l'Espagne 

{Saunders)  elle  FoYtugsl{Smith) 
où  elle  est  commune  ;  elle  est 
sédentaire  dans  la  province  de 
Naples,  en  Sardaigne  et  en 
Sicile,  et  de  passage  irrégu- 
lier à  Malte  et  dans  le  reste 
de  l'Italie  [Salvador i,  Giglioli)  ; 
en  France  elle  se  reproduit  dans 
les  plaines  de  Montreuil-Bellay, 


de  Doué,  dans  celles  de  la  Champagne,  aux  environs  de  Troyes,  dans 
la  Vendée,  près  do  Niort;  elle  arrive  dans  ces  diverses  contrées  iso- 


-  91  - 

léraent  ou  par  petites  troupes,  vers  la  fin  de  mars  ou  au  commen- 
cement d'avril,  et  les  quitte  à  la  fin  de  septembre  ;  ses  apparitions  dans 
les  départements  du  nord  de  la  France  sont  irrégulières  (Degland  et 
Gerbe),  et  il  en  est  de  même  en  Suisse  (Girtanner).  En  Belgique  cet 
oiseau  ne  se  montre  aussi  que  très  irrégulièrement  :  il  a  été  pris  en 
dernier  lieu,  à  Corroy-le-Grand  en  août  1884  et  à  Schuelen  dans  le 
Limbourg,  en  septembre  1885  ;  cette  dernière  capture  a  été  signalée 
par  M.  E.  Claes  et  se  trouve  dans  la  collection  du  Dr.  Bamps  à  Has- 
selt.  Cette  Outarde  est  très  rare  en  Allemagne  où  on  la  prend 
quelquefois  en  Bavière  {Deubler),  près  de  Hambourg,  [Bôckmann), 
dans  le  Mecklenbourg  (von  Maltzahn),  dans  la  Saxe-Gotha  [Haber- 
mann)  et  dans  le  royaume  de  Saxe  (Marx)  ;  en  Autriche  on  l'observe 
parfois  en  Dalmatie  (Kolombatovié),  aux  environs  de  Triest  (Moser), 
de  Kremsier  {Zahradnik),  de  Fogaras  (von  Czynh),  en  Bohême  (Fritsch) 
etc.  ;  en  Pologne  on  la  voit  de  temps  en  temps  à  diverses  époques,  en 
petites  troupes  ou  en  exemplaires  isolés  (Taczanowski) ;  plus  au  Nord 
elle  a  été  prise  jusque  dans  le  Sud  de  la  Suède  (Nil.sson),  en  Danemark 
(Benzon)  et  dans  le  gouvernement  de  Riazan  en  Russie  (Sabanaëff)  ; 
dans  le  Sud  de  ce  pays,  on  la  rencontre  dans  les  steppes  de  la  Crimée 
et  de  la  région  du  Tchernozém,  dans  les  steppes  ciscaucasiennes,  dans 
les  bassins  du  Terek  et  du  Kouban  (dans  les  steppes  transcauca- 
siennes seulement  en  hiver),  dans  les  parties  septentrionales  et  occi- 
dentales de  la  région  Aralo-Caspienne,  le  Tian-Chan,  le  Kouldja,  la 
Songarie  russe  et  les  hauts  plateaux  du  Tarbagataï  (Bogdanoio). Cette 
espèce  est  aussi  commune  en  Turquie  (Alléon),  en  Roumélie,  et  se 
montre  parfois,  en  automne,  dans  la  Morée  (von  der  Milhle).  Enfin, 
elle  se  montre  accidentellement  en  Angleterre,  surtout  dans  les  comtés 
d'York  et  de  Norfolk,  et  elle  a  même  été  capturée  sur  la  côte  occi- 
dentale de  l'Ecosse  et  en  Irlande  (Seebohm),  ainsi  qu'à  l'île  Helgoland 
(Gactke). 

Au  delà  des  frontières  européennes,  on  rencontre  encore  cette 
Outarde  dans  le  Caucase  où  elle  est  surtout  abondante  dans  la  région 
du  Mugan  (Radde),  dans  le  Turkestan  (Severtzow),  dans  les  déserts 
de  la  Tartarie  (Sdilégel),  en  Asie  Mineure  {lieith  Abbott),  en  Syrie 
(de  Ileuglin),  en  Palestine  (Tnstram),  en  Perse  (Brehm),  jusque  dans 
l'Inde  ;  elle  n'est  pas  rare,  en  hiver,,  dans  plusieurs  localités  du  ter- 
ritoire indien  situé  à  l'Ouest  de  l'Indus  et  s'étendani  nu  Sud  jusi^u'à 
Dera  Ghazée  Khau  ;  elle  niche  en  mai  dans  les  plaines  de  Belooch 
{lluïiie).  Elle  se  montre  irrégulièrement  en  Egypte  (^t  seulement  en 


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hiver,  mais  elle  est   commune   et  niche  aux  environs   de  Tripoli 
{de  Heuglin),  en  Algérie  (Loche)  et  au  Maroc  (Dmké). 

Mœurs.  —  L'Outarde  canepetière  émigré  à  la  fin  d'octobre  ou  en 
novembre  des  contrées  tempérées  ;  à  son  retour,  en  avril,  elle  vit  en 
bandes  de  douze  à  quinze  individus  jusqu'au  moment  de  l'accouple- 
ment. Elle  n'est  pas  aussi  tenue  à  la  plaine  que  l'espèce  précédente  ; 
en  Espagne,  dit  Brehm,  on  la  trouve  surtout  dans  les  vignobles  en 
plaine  ou  sur  les  flancs  des  montagnes.  Par  ses  mœurs  elle  ressemble 
beaucoup  à  l'Outarde  barbue,  mais  elle  est  plus  élégante,  ses  mouve- 
ments sont  plus  vifs,  plus  agiles  et  elle  est  plus  rapide  à  la  course  ;  son 
vol  est  rapide  et  soutenu. 

C'est  un  oiseau  taciturne,  timide  et  craintif,  mais  à  un  degré  moindre 
que  l'espèce  précédente,  et  il  ne  fuit  pas  aussi  loin.  Le  mâle  ne  paraît 
se  faire  entendre  qu'à  l'époque  des  amours  ;  son  cri  est  alors  assez 
retentissant  et  peut  se  rendre  par  tecks,  tecks.  M.  de  Nordmann 
donne  sur  les  mœurs  de  cet  oiseau  en  Russie,  quelques  détails  inté- 
ressants que  je   reproduis  textuellement  ci-dessous: 

«  Dans  leurs  mœurs  et  leurs  habitudes,  les  deux  espèces  ont  beau- 
coup de  rapport  entre  elles;  tout  ce  que  nous  avons  dit  de  l'irrégu- 
larité des  migrations  de  l'Outarde  barbue  s'applique  également  à  la 
Canepetière.  Cependant,  cette  dernière  est  plus  sensible  au  froid,  et 
ce  n'est  que  dans  les  hivers  très  doux  qu'on  en  voit  de  petites  compa- 
gnies rester  dans  les  steppes  de  la  Nouvelle-Russie,  tandis  que  la 
masse  nous  quitte  dès  le  mois  de  novembre.  Ces  dernières  effectuent 
leurs  migrations  en  passant  par  la  Crimée,  où  elles  font  encore  un 
petit  séjour,  si  l'état  de  la  température  le  permet.  Ces  oiseaux 
voyagent  aussi  pendant  la  nuit,  en  longeant  la  côte  ;  c'est  un  fait, 
démontré  par  la  circonstance  suivante.  Sur  la  côte  Sud-ouest  de  la 
Crimée,  à  l'extrémité  d'une  langue  de  terre  qui,  selon  toute  proba- 
bilité, est  le  cap  Parthénon  des  anciens,  et  qui  en  a  même  jusqu'à  ce 
jour  conservé  le  nom,  se  trouve  un  phare  destiné  à  éclairer  l'entrée  du 
port  de  Sébastopol.  A  l'époque  du  passage  des  Outardes  canepetières, 
aux  mois  de  novembre  et  de  mars,  on  trouve  souvent  les  vitres  du 
fanal  brisées  par  des  oiseaux  de  cette  espèce  que  la  lumière  avait, 
attirés 

«  Une  des  habitudes  naturelles  qui  distinguent  l'Outarde  canepe- 
tière de  la  grande  espèce,  c'est  que,  poursuivie,  elle  ne  prend  pas  tout 
de  suite  son  vol,  mais  cherche  à  se  cacher  en  se  tapissant  contre 
terre  ;  lorsqu'elle  voit  Tennemi  tout  près,  elle  quitte  soudain  sa  posi- 


—  Da- 
tion, s'élève  immédiatement  clans  l'air  et  continue  avec  des  batte- 
ments d'ailes  rapides  et  en  ligne  droite,  son  vol  toujours  rapproché 
de  terre.  Tout  cela  se  fait  bruyamment  ;  de  là  le  nom  de  Strépet  que 
les  Russes  lui  ont  donné.  Cette  espèce  partage  les  dispositions 
sociables  de  la  grande  Outarde:  au  printemps  et  en  automne,  on  en 
voit  constamment  des  bandes  parcourant  les  steppes.  Au  reste,  ces 
oiseaux  font  souvent  usage  de  leurs  jambes,  et  ceux  dont  les  ailes  ont 
été  frappées  d'une  charge  de  plomb,  se  sauvent  avec  une  vitesse  telle, 
qu'un  homme  ne  peut  guère  espérer  de  les  atteindre  ;  poussés  à  bout, 
ils  tiennent  tête  à  leur  ennemi  et  se  défendent  en  désespérés  avec  le 
bec. 

«  Dès  la  seconde  semaine  de  mars,  les  mâles  commencent  à  revêtir 
les  belles  plumes  qui  ornent  leur  cou  ;  les  longues  plumes  noires  de  la 
nuque  sont  les  premières  qui  poussent  ;  ensuite  les  côtés  de  la  tête 
deviennent  d'un  cendré  foncé  ;  à  la  fin  parait  le  large  collier  blanc 
qui  entoure  la  poitrine,  de  façon  que  vers  la  mi-avril  Toiseau  porte  la 
livrée  complète  des  noces. 

«  La  mue  générale  a  lieu  au  mois  de  juillet  ;  alors  ces  plumes  de 
parade  se  perdent  et  sont  remplacées  par  des  plumes  grises.  Cette 
circonstance  explique  l'erreur  des  naturalistes  allemands,  qui  ont  pris 
pour  des  femelles  tous  les  individus  de  cette  espèce  tués  en  Allemagne, 
où  elle  ne  se  montre  que  rarement.  11  n'y  a  pas  de  doute  que  dans  le 
nombre  de  ces  oiseaux  il  s'est  aussi  trouvé  des  mâles  qui,  dépouillés 
des  ornements  qui  les  distinguent,  ont  pu  être  confondus  avec  les 
femelles  dont  le  plumage  présente  à  peu  près  la  même  distribution  de 
couleurs. 

«  A  l'entrée  de  la  saison  des  amours,  au  mois  d'avril,  ces  oiseaux  se 
rassemblent  dans  quelque  endroit  de  la  steppe  pour  se  disputer  la 
possession  des  femelles.  La  bizarrerie  des  différents  gestes  et  mouve- 
ments de  ces  mâles  amoureux  offre  un  spectacle  divertissant.  Le  cou 
s'enfle  ;  parmi  les  plumes  dont  cette  partie  est  revêtue,  les  plus  longues 
forment,  en  se  retroussant,  un  collier  proéminent;  les  plumes  de  la 
queue,  écartées  en  éventail,  se  dressent,  tandis  que  les  ailes  traînent 
,par  terre.  Parés  de  la  sorte,  et  la  tête  tantôt  levée,  tantôt  baissée,  ils 
avancent  en  sautant  les  uns  contre  les  autres  et  cherchent  à  se  blesser 
mutuellement  à  coups  de  bec.  Après  avoir  chassé  les  individus  jeunes 
et  faibles,  les  vainqueurs  glorieux  se  promènent  d'un  pas  majestueux, 
en  dessinant  des  cercles  devant  les  femelles  :  cette  scène  est  immédia- 
tement suivie  de  l'accouplement.  Durant  ces  combats,  l'attention  des 


—  94  - 

combattants  et  de  ceux  qui  en  sont  l'objet  est  tellement  absorbée, 
qu'ils  ne  songent  guère  au  danger  ;  ils  laissent  approcher  le  chasseur 
dans  une  voiture,  et  ne  se  dispersent  même  qu'après  qu'il  ait 
été  tiré  plusieurs  coups  de  fusil.  Il  est  constant  que  sur  ces  champs  de 
bataille,  un  mâle  s'allie  à  plusieurs  femelles  ;  et  à  défaut  d'autres 
preuves,  une  seule  circonstance  le  démontrerait  :  c'est  que  les  plus 
faibles  d'entre  les  mâles  ayant  été  obligés  de  quitter  la  place,  il  y 
reste  toujours  plus  de  femelles  que  de  mâles  ;  mais  il  faut  dire  aussi 
que  plus  tard,  quand  la  femelle  couve,  on  trouve  toujours  près  d'elle 
un  mâle  ;  il  paraît  donc  que  les  femelles  surnuméraires,  après  s'être 
éloignées  du  champ  de  bataille,  sont  recherchées  parles  autres  mâles 
qui  restent  avec  elles  pendant  le  temps  de  l'incubation.  » 

La  nourriture  de  cet  oiseau  se  compose  d'insectes,  de  larves  de 
vers  et  de  petits  mollusques,  ainsi  que  de  matières  végétales.  Sa  chair 
est  exquise  et  vaut  presque  celle  du  faisan,  aussi  le  chasse-t-on 
partout  avec  ardeur. 

Reproduction.  —  La  Canepetière  niche  dans  les  champs  de  blé^ 
entre  les  herbages  et,  dans  les  steppes,  parmi  les  hautes  herbes.  Son 
nid  n'est  autre  chose  qu'un  enfoncement  dans  la  terre,  qui  contient 
trois  ou  quatre  œufs,  mais  rarement  avant  le  mois  de  mai.  Ceux-ci 
sont  de  forme  ovale,  à  coquille  épaisse,  d'un  bran  olive  bronzé  et 
lustré,  et  parsemés  de  taches  de  couleur  brunâtre,  irrégulières  et 
comme  effacées  ;  il  y  en  a  aussi  d'un  beau  vert  bleuâtre  avec  des  taches 
et  des  points  d'un  brun  roussâtre  ;  ils  mesurent  environ  55  millim.  sur 
40.  La  durée  de  l'incubation  paraît  être  de  vingt  à  vingt-un  jours. 

Les  poussins  poussent  continuellement  de  petits  cris  d'appel.  Ils 
sont  fort  gloutons,  se  jettent  avec  avidité  sur  les  sauterelles,  les 
criquets,  les  hannetons  et  généralement  sur  tous  les  insectes,  qu'ils 
avalent  entiers,  quelle  qu'en  soit  la  taille  ;  ils  aiment  aussi  les  vers,  les 
limaces,  les  petits  escargots  et  mangent  même  des  petites  grenouilles 
et  des  souris.  Un  jour  ou  deux  suffit  pour  les  rendre  familiers.  On  ne 
peut  les  conserver  en  captivité  qu'à  la  condition  de  leur  fournir  une 
nourriture  plus  animale  que  végétale.  M.  J.  Ray,  selon  M.  Gerbe, 
donnait  à  ses  Outardes  captives  un  mélange  de  viande  crue,  de  mie 
de  pain,  de  feuilles  de  salade,  le  tout  haché  menu  ;  elles  prenaient 
assez  de  gotît  à  cette  espèce  de  pâtée,  mais  il  fallait  d'abord  leur  en 
faire  avaler  de  force  quelques  boulettes. 


9o  - 


181.  —  L'Outarde  de  Macqueen 

OTIS    MACQUEENI,    Gray. 

(PI.  181). 

Otis  houbara  (part.)  de  plusieurs  auteurs. 

Otis  macqueeni,  Gray,  III.  Ind.  Zool.  Il,  pi.  47  (1834). 

Houbara  macqueeni,  Gray,  Zit5<5.  Br.  Mus,  pt.  III,  p.  57  (1844). 

EuPODOTis  MACQUEENI,  Gray,  Gen.  Birds,  III,  p.  533  (1845). 

Der  Macqueen's  Trappe,  en  allemand. 

The  Macqueen's  Bustard,  en  anglais. 

De  Aziatiscme  Kraagtrap,  en  flamand. 

Taille  :  0'",63  ;  ailes  0,40  ;  tarses  0,09. 

Description  du  mâle  adulte.  —  Dessus  de  la  tête  et  cou  d'un  cendré  rous- 
sâtre  pâle  piqueté  de  brun,  les  plumes  du  vertex  plus  ou  moins  allongées, 
et  formant  une  huppe  composée  de  plumes  blanches  et  noires  ;  gorge  blanche; 
côtés  du  cou  garnis  de  plumes  décomposées  très  allongées,  les  supérieures 
noires,  les  inférieures  blanches,  mais  noires  à  leurs  extrémités  ;  jabot  d'un 
beau  gris  bleuâtre  pâle  ;  parties  dorsales  d'un  cendré  clair  varié  de  jaune 
d'ocre,  vermiculées  et  tachetées  de  brun  ;  couverture  des  ailes  blanchâtres 
piquetées  de  brun  ;  rémiges  primaires  brunes,  blanches  à  la  base;  queue  d'un 
roux  ocreux  vermiculée  de  brun,  avec  trois  bandes  de  taches  grises,  la  base 
des  rectrices  latérales  immaculée  ;  parties  inférieures  blanches  ;  région  anale 
et  les  plus  grandes  sous-caudales  barrées  de  brun.  Bec  brun;  iris  brun  ; 
pattes  jaunâtres. 

Femelle.  —  Elle  est  un  peu  plus  petite  que  le  mâle,  sa  huppe  et  sa  colle- 
rette sont  moins  développées. 

Jeune  mâle.  —  Ressemble  à  la  femelle,  mais  sa  taille  est  plus  forte. 

Ilab.  —  C'est  une  espèce  asiatique  qui  ne  se  montre  qu'accidentel- 
lement en  Europe .  Sa  véritable 
patrie  est  assez  restreinte  :  elle 
habite  le  Turkestan  [Severtzoïv], 
les  régions  Aralo -Caspienne,  la 
Songarie  russe,  les  steppes  du 
bassin  de  l'Araxe  (Bogdanow),\B. 
Perse  et  l'Afghanistan  [Blan- 
ford)  ;  en  hiver  on  la  voit  dans 
la  région  Nord-ouest  de  l'Inde, 


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où  elle  est  surtout  abondante  dans  les  vastes  plaines  du  Punjab 
{Jerdon),  dans  le  Beloutchistan  et  le  Sud  do  la  Perse.  L'oiseau  signalé 
par  M.  Radde  dans  son  Omis  caucasica,  sous  le  nomd'O.  liouhara, 


—  96  - 

appartient  probablement  à  la  même  espèce  :  «  Je  ne  connais  cet  oiseau, 
dit  M.  Radde,  que  par  ce  que  m'en  ont  dit  les  chasseurs  d'Eriwans. 
Ceux-ci  le  tuent  quelquefois  dans  les  déserts  qui  s'étendent  à  l'Ouest 
jusqu'à  Sardar-Abad,  partout  où  le  sol  n'a  pas  été  l'objet  de  drainages 
artificiels.  11  est  considéré  comme  rare.  »  En  Arménie,  en  Palestine, 
et  dans  le- Nord-est  de  l'Afrique,  cette  espèce  est  remplacée  par  la 
véritable  0.  houhara. 

Les  captures  en  Europe  sont  peu  nombreuses,  et  elles  ont  d'abord 
fait  croire  à  l'apparition  de  l'espèce  africaine;  les  naturalistes  les  ont, 
en  effet,  signalées  sous  le  nom  d'O.  houbara,  jusqu'à  ce  que  feu  mon 
père  eût  démontré  que  les  sujets  tirés  en  Belgique  ne  provenaient  pas 
de  l'Afrique,  mais  d'Asie  et  que  c'étaient  de  vraies  0.  macqueeni.  Les 
remarques  qu'il  publia  à  ce  sujet,  accompagnées  d'une  bonne  figure  (1), 
ne  laissèrent  aucun  doute  sur  la  provenance  de  ce  bel  oiseau,  et 
l'on  reconnut  bientôt  que  tous  les  individus  signalés  en  Europe  sous 
le  nom  d'O.  houbara  appartiennent  réellement  à  l'espèce  décrite 
par  Gray  sous  le  nom  d'O.  macqueni. 

Voici  la  liste  des  captures  faites  jusqu'ici  en  Europe  :  une  près  de 
Breslau  en  1800  (A'at^mann),  une  dans  l'Oberlausitz    (Tobias),    une 
près  de  Doberan,  en  novembre    1847  (von  Preen)  ;  le   12  novembre 
1856,  une  troupe  de  six  individus  fut  observée  près  de  Flensburg  et 
une  vieille  femelle  fat  abattue  (Mechlenburg) .   En  décembre  1844, 
M.  P.  J.  Van  Beneden  annonça  la  première  capture  en  Belgique  :  un 
mâle  magnifique  venait  d'être  tué,  en   décembre  de   cette  année,  à 
Rotselaer  près  de  Louvain  ;  deux  ans  après,  le  vicomte  B.   Du  Bus 
fit  connaître  la  seconde  capture  :  celle-ci,  dans  la  plaine  de  Woluwe  à 
une  lieue  de  Bruxelles  ;   l'oiseau,  tué  en  décembre  1846,  fut  acquis 
pour  le  Musée  royal  d'histoire  naturelle.  M.  le  baron  E.  de  Sélys- 
Longchamps  informa   en  même  temps  son  collègue  de  TAcadémie, 
qu'un  troisième  spécimen  avait  été  tué,  en  septembre  1842,  aux  envi- 
rons de  Virton  et  qu'il  l'avait  vu  chez  un  directeur  de  la  douane  de 
cette  ville.  Ces  trois  oiseaux  ont  été  annoncés  sous  le  nom  d'O.  houbara 
(2).  —  Deux  sujets  de  la  même  espèce  ont  été  tués   en  Italie,  non 
loin  de  Rome  :  l'un  à  la  fm  de  novembre  1859,  l'autre  le  16  décembre 
suivant,  {Giglioli).  Le  7  octobre  1847,  un  individu  fut  tué  en  Angleterre 
dans  le  comté  de  Lmcoln  {Yarrell),   un  autre  à  l'île  d'Ôland  (et  non 

(1)  C.  F.  Dubois,  yourn.  j.  Ornithologie,   1856,    p.   301,  pi.  III.  —  PI.  col.    Ois.  de  la 
Belg.  t.  II,  p.  et  pi.  161. 

(2)5«//.  de  VAcad.  roy.  de  Belg,  t.  XI,  2^  part.  p.  412  (1844)  et  t.  XIII,  l^e  part.  p.  166  (1846) . 


—  97  — 

Gotland  comme  le  dit  Nilsson),  le  2  février  de  la  même  année;  le 
19  septembre  1861,  un  autre  encore  fut  pris  en  Finlande  près  de 
Helsingfors  [Malmgren)  ;  enfin,  pendant  l'hiver  de  1<SG0,  on  prit  éga- 
lement un  individu  de  cette  espèce  aux  environs  d'Itza  en  Pologne, 
[Taczanoioski). 

Mœurs.  —  Les  moeurs  de  cette  espèce  sont  encore  peu  connues. 
Voici,  en  résumé,  ce  qu'en  disent  MM.  Hume  et  Marshall  {Game 
Birds  of  Inclia)  : 

L'Outarde  de  Macqueen  se  tient  de  préférence  dans  les  plaines 
légèrement  accidentées  et  à  moitié  désertes,  où  croissent  de  petites 
touffes  de  gazon  ou  d'autres  plantes  herbacées,  de  petits  acacias  et 
des  touffes  odoriférantes  d'une  herbe  citronneuse. 

Dans  ces  endroits,  on  voit  courir  l'Outarde  au  lever  et  au  couche'r 
du  soleil,  tandis  qu'elle  se  tient  couchée  à  l'ombre  des  buissons  pen- 
dant les  parties  chaudes  delà  journée.  Elle  se  nourrit  de  baies,  de 
jeunes  pousses  d'herbes  citronneuses  ou  autres,  de  larves, de  fourmis, de 
sauterelles  et  de  divers  coléoptères;  elle  avale  aussi  des  petits  coquilla- 
ges et  du  gravier,  mais  ne  prend  jamais  des  lézards  ou  autres  reptiles. 

Cet  oiseau  préfère  courir  que  voler,  et  quand  la  chaleur  n'est  pas 
trop  forte,  il  parcourt  avec  une  vitesse  surprenante  le  labyrinthe  des 
buissons  des  lieux  qu'il  habite  ;  tant  que  ces  buissons  sont  bas,  il  court 
en  baissant  le  corps  et  la  tête,  mais  dès  qu'il  arrive  dans  un  endroit 
où  il  ne  peut  être  aperçu,  il  se  redresse  et  porte  la  tête  très  haut. 
Quand  il  voit  un  ennemi,  i]  s'accroupit  aussitôt,  et  malgré  qu'on  l'ait 
surveillé  pendant  qu'il  regardait  dans  une  autre  direction,  il 
reste  invisible  et  l'on  peut  passer  près  de  lui  sans  l'apercevoir. 
Il  est  très  fatigant  de  poursuivre  ces  Outardes  dans  leur  course 
rapide  et  sous  le  soleil  brûlant  de  l'Inde,  aussi,  dans  les  localités  où 
elles  sont  nombreuses,  les  chassc-t-on  au  faucon  ou  à  dos  de  cha- 
meau. Ce  sont  les  indigènes  pauvres  qui  se  servent  du  faucon,  mais 
cette  chasse  ne  présente  aucun  intérêt,  parce  que  l'Outarde  se  laisse 
immédiatement  tomber  dans  les  buissons  et  échappe  ainsi  le  plus 
souvent  à  l'oiseau  de  proie. 

La  chasse  au  moyen  du  chameau  est  plus  intéressante  :  on  fait 
marcher  la  bête  à  travers  ces  vastes  plaines  que  fréquentent  les 
Outardes,  et,  après  avoir  parcouru  quelques  kilomètres,  on  ne  tarde 
pas  à  voir  du  haut  siège  sur  lequel  on  se  trouve,  un  ou  plusieurs  de 
ces  oiseaux  à  la  recherche  de  leur  nourriture.  Les  chameaux  ne  leur 
causent  aucune  frayeur,  et  tout  le  monde  s'en  sert  ;  à  leur  approche, 

Tome  II.  —  1888..  13 


les  Outardes  s'écartent  simplement  pour  leur  livrer  passage,  et  l'on 
est  toujours  assez  près  pour  pouvoir  les  tirer.  Parfois,  cepen- 
dant, elles  se  sauvent  en  courant  et  envolant  avant  que  l'on  ait 
pu  les  tirer,  mais  elles  ne  volent  guère  longtemps  et  ne  planent  jamais 
comme  la  petite  Outarde  ;  une  autre  fois,  elles  disparaissent  subite- 
ment aux  yeux  du  chasseur  en  s'aplatissant  sur  le  sol  ;  on  s'avance 
vers  l'endroit  où  elles  ont  été  aperçues  jusqu'à  ce  que  l'approche  des 
chameaux  les  oblige  à  se  lever,  et  alors  il  est  facile  de  les  tirer.  Il 
arrive  aussi  que  l'une  d'elles  se  cache  derrière  un  buisson,  et  si  on  en 
fait  le  tour,  l'oiseau  fait  de  même,  de  manière  à  être  toujours  abrité  et 
séparé  du  chasseur  par  le  buisson  ;  mais  si  le  soleil  ne  jette  pas  ses 
rayons  tout  à  fait  verticalement,  l'oiseau  projette  un  cône  d'ombre  qui 
permet  de  l'apercevoir  et  de  le  viser. 

L'Outarde  de  Macqueen  est  un  oiseau  très  silencieux  ;  Hume  dit 
ne  l'avoir  jamais  entendu  jeter  le  moindre  cri,  même  quand  il  avait 
été  blessé  ou  pris  par  un  chien. 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  ne  paraît  pas  être  polygame,  car,  à 
l'époque  de  la  reproduction,  on  ne  le  voit  jamais  qu'avec  une  seule 
femelle.  Rien  n'est  encore  connu  sur  sa  manière  de  nicher,  mais  il 
est  probable  qu'il  agit  comme  sa  proche  alliée,  l'Outarde  houbara,  qui 
dépose  simplement  ses  oeufs  dans  une  petite  fosse,  sans  même  la 
garnir  de  quelques  brins.  M.  Seebohm  possède  un  œuf  de  YO.  Mac- 
queeni,  qu'il  dit  avoir  été  recueilli  dans  l'Altaï  par  les  explorateurs  de 
M.  Tancré  (1).  Cet  oeuf  est  d'un  brun  fauve  ou  couleur  de  schiste, 
moucheté  et  tacheté  de  brun  foncé,  et  sous  ces  taches  il  existe  encore 
des  mouchetures  plus  pâles  tirant  sur  le  gris  ;  ces  taches  sont  éparpil- 
lées sur  toute  la  surface,  mais  aucune  n'est  bien  prononcée,  ni  bien 
définie.  Cet  œuf  mesure  2  pouces  55  lignes  sur  1  pouce  85  lignes 
(mesure  anglaise). 

FAMILLE  DES  CHARADRIIDÉS 

Car.  —  Tête  assez  grosse  ;  bec  court,  plus  ou  moins  membraneux 
à  la  base,  renflé  et  dur  dans  le  tiers  antérieur;  yeux  plus  ou  moins 
gros  ;  narines  amples,  percées  de  part  en  part  et  ordinairement  pro- 


(1)  Le  D""  O.  Finsch  dit  avoir  observé  une  femelle  de  cette  espèce  courant  dans  les  step- 
pes situées  au  nord  du  Saissan-Nor  et  à  la  limite  méridionale  de  l'Altaï.  Le  D""  Brehm 
assure  avoir  vu  cette  Outarde  dès  le  7  mai  près  de  Sergiopol,  et  le  comte  Waldburg  la 
rencontra  dans  les  steppes  de  l'Ala-Kul  près  de  la  rivière  Dschindschili. 


-  99  — 

longées  jusqu'au  milieu  du  bec;  ailes  allongées,  aiguës  ou  sub-aiguës; 
tarses  plus  ou  moins  allongés,  réticulés. 

Eab.  —  Cette  famille  a  des  représentants  dans  toutes  les  parties  du 
monde. 

Mœurs.  —  Quelques-uns  de  ces  oiseaux  vivent  dans  des  lieux 
arides  et  incultes,  mais  la  plupart  recherchent  les  côtes  de  la  mer,  les 
rives  sablonneuses  des  fleuves,  des  lacs  et  des  rivières,  les  marais  et 
les  tourbières. 

Ils  vivent  par  couples  pendant  la  saison  de  la  reproduction,  mais 
dans  le  voisinage  les  uns  des  autres.  Ils  émigrent  en  troupes,  marchent 
bien  et  volent  avec  facilité  et  sans  fatigue.  Ils  se  nourrissent,  suivant 
leur  taille,  de  reptiles,  de  souris,  de  mollusques,  d'insectes  et  de  vers. 
Leur  chair  est  généralement  estimée. 

Ils  nichent  à  terre  dans  une  simple  dépression  du  sol  qui  est  rare- 
ment garnie  de  quelques  brins. 

SOUS-FAMILLE 

DES  ŒDICNÉMINÉS.  —  ŒDICNEMIN.'E. 

Car.  —  Tête  forte,  supporté  par  un  cou  de  moyenne  longueur  ;  bec 
fendu  jusqu'à  l'œil  ;  celui-ci  très  grand;  grandes  sous-caudales  attei- 
gnant ou  dépassant  les  rectrices  latérales  ;  ces  dernières  beaucoup 
plus  courtes  que  les  médianes  ;  tarses  réticulés  ;  doigts  antérieurs 
réunis  à  la  base  par  une  forte  membrane  ;  pouce  nul. 

QENRE     cm. 

(EDICNÈME.  —  (EDICNEMUS. 

Ch.vradhiu.s,  Lin,  (part.)  Sijst.  nat.  I,  p.  255  (1766). 
Oris,  Lath.  (part.),  Gen.  syn.  suppl.  I,  p.  290  (1787). 
Œdicnemus,  Tem.  Man.  d'orn.  p.  322  (1815). 
Fedoa,  Lcach,  Cat.M.  B.  Br.  Mus.  p.  28  (1816). 

Car.  —  Bec  à  peu  près  de  la  longueur  de  la  tête,  robuste,  droit,  triangu- 
laire, la  mandibule  inférieure  anguleuse  en  dessous;  narines  ovalaires,  allon- 
gées, se  prolongeant  jusqu'au  milieu  du  bec;  yeux  très  grands;  ailes 
moyennes,  aiguës,  dépassant  le  milieu  de  la  queue;  celle-ci  •  cunéiforme, 
composée  de  douze  rectrices;  tarses  longs,  robustes,  réticulés;  doigts  anté- 
rieurs courts,  épais,  réunis  à  leur  base  par  une  forte  membrane  qui  s  otend, 
entre  le  doigt  externe  et  le  médian,  jusqu'au  delà  de  la  première  articulation; 
pouce  nul;  ongles  courts,  celui  du  médian  assez  dilaté. 


-  100  - 

Hab.  —  Ce  genre  est  représenté  dans  les  parties  chaudes  et  tempé- 
rées des  cinq  parties  du  monde. 

182.  -  L'Œdicnème  criard. 
ŒDICNEMUS  SCOLOPAX,  Dress.  ex  Gm. 

(PI.   182). 

Pluvialis  MAJOR,  Briss.  Orn.  V,  p.  76  (1760). 

Charadrius  ŒDICNEMUS,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  255  (1766). 

Charadrius  SCOLOPAX,  Gm.  Reise  Russl.  III,  p.  87,  pi.  16  (1774). 

Charadrius  illyricus,  Piller,  It.  Poseg.  Sclav.,  p.  26  (1783). 

Otis  ŒDICNEMUS,  Lath.  Gen.  syn.  suppl.  I,  p.  290  (1787). 

Œdicnemus  crepitans,  Tem.  Mcm.  d'orn.  p.  322  (1815). 

Fedoa  ŒDICNEMUS,  Leacli,  Syst.  Cat.  M.  B.  Br.  Mus.,  p.  28  (1816). 

Œdicnemus  griseus,  Koch,  Syst.  Baier.  Zool.  I,  p.  66  (1816). 

Œdicnemus  europ^us,  Vieill.  N.  dict.  XXIII,  p.  230  (1818). 

Œdicnemus  bellonii,  Flem.  Brit.  an.  p.  114  (1828). 

Œdicnemus  desertorum  et  arenarius,  Brm.  Isis,  1830,  p.  987. 

Œdicnemus  indicus,  Salvad.  Atti  soc.  liai.  se.  nat.  viii,  fasc.  4,  p.  375  (1865). 

Œdicnemus  scolopax,  Dress.  i?.  of.  Eur.  VII,  p.  401  (1876). 

Œdicnemus  crepitans  indicus,  Seeb.,  Geogr.  distrib.  Charadriidœ,  p.  77(1887) 

Der  triel,  en  allemand. 

The  stone-curlew,  en  anglais. 

De  griel,  en  flamand . 

Taille  :  0,34  ;  ailes  0,25;  tarses  0,075. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes.  —  Parties  supérieures 
d'un  cendré  roussâtre  avec  le  centre  des  plumes  brun;  iorums,  une  bande 
au-dessus  de  l'œil,  une  autre  au-dessous  de  cet  organe  et  gorge  d'un  blanc 
un  peu  jaunâtre;  couvertures  des  oreilles  et  une  raie  en  moustaches  variées 
de  cendré  et  de  brun  ;  petites  couvertures  des  ailes  brunes,  plus  ou  moins 
bordées  de  roux;  les  suivantes  d'un  cendré  blanchâtre  avec  une  grande  tache 
brune  en  travers;  rémiges  brunes,  avec  une  grande  tache  blanche  vers  le 
milieu  des  deux  premières;  scapulaires  de  la  couleur  du  dos;  parties  infé- 
rieures d'un  blanc  jaunâtre  et  striées  de  brun  à  la  poitrine  et  sur  les  flancs; 
queue  barrée  de  brun  et  de  blanc,  mais  terminée  de  brun,  excepté  les  deux 
rectrices  médianes  qui  sont  d'un  cendré  roussâtre  et  pUis  ou  moins  marbrées 
de  brunâtre.  Iris  et  base  du  bec  d'un  jaune  citron,  le  reste  du  bec  noir;  pattes 
d'un  jaune  verdâtre. 

Jeune.  —  D'une  taille  un  peu  plus  petite;  les  teintes  sont  plus  pâles,  le 
cendré  domine  et  les  plumes  ont  une  apparence  soyeuse. 

Poussin.  —  Duvet  assez  court,  laineux,  cendré  en  dessus,  blanchâtre  en 
dessous;  deux  bandes  brunes  partent  des  yeux  et  descendent  le  long  de  la 


—  101  — 


nuque  et  du  clos  jusqu'à  la  queue  ;  quelques  traits  noirs  sur  l'occiput;  une 
bande  de  même  couleur  au-dessus  des  yeux,  sur  les  ailes  et  sur  les  flancs. 

Hah.  —  Cet  oiseau  est  plus  ou  moins  commun  et  sédentaire  dans 

toutes  les  contrées  qui  entourent 
la  Méditerranée,  sauf  dans  le 
nord  de  l'Italie  où  il  est  de  pas- 
sage régulier.  On  le  rencontre 
3    donc  en  toutes  saisons  depuis  le 


Portugal  {du  Bocage)  et  l'Espa- 
gne (Saunders)'  jusqu'en  Grèce 
(Krûper)  et  en  Turquie  [Alléon, 
Ehoes  et  Buckley),  j  compris  la 
Sardaigne,  la  Corse,  la  Sicile  et  l'île  de  Malte  {Salvadori,  Giglioli). 

Pour  l'Europe  centrale,  c'est  un  oiseau  d'été  qui  émigré  en  septem- 
bre. En  France,  il  est  plus  abondant  dans  le  midi  que  dans  le  nord 
{Degland)  ;  en  Belgique,  il  est  de  passage  irrégulier  dans  les  bruyères 
de  l'Ardenne  au  printemps  et  en  septembre,  plus  rarement  dans  les 
autres  parties  du  pays  ;  on  ne  le  voit  que  très  accidentellement  en 
Suisse  {Meisner  et  Schinz);  en  Allemagne,  il  est  assez  abondant  dans 
la  zone  méridionale,  dans  les  parties  incultes  de  la  Silésie,  du  Bran- 
debourg, du  Mecklenbourg,  du  Lunebourg  et  de  l'Anlialt  {Naumann), 
ainsi  que  dans  quelques  localités  de  la  Poméranie  et  de  la  Saxe 
{Borggrevé).  Il  est  plusou  moins  répandu  en  Autriche-Hongrie,  surtout 
en  Croatie  {Jurinac),  en  Dalmatie  {Kolmbatovié),  dans  le  Steiermark 
(Hanf),  le  Tyrol  {Lazarinï)  et  la  Bohême  {Fritsch);  en  Pologne  il  est 
commun  en  été  dans  certaines  régions  [Taczanowski)  ;  en  Russie,  il 
habite,  durant  la  belle  saison,  la  Crimée,  le  Caucase,  la  zone  des 
steppes  de  la  région  du  Tchernozém,  la  région  Aralo-Caspienne,  le 
Tian-Chan,  le  Kouldja  et  les  steppes  de  la  Songarie  russe  {Bogdanow). 
En  Danemark,  il  n'a  été  pris  qu'une  couple  de  fois  [KjaerhôUing). 

Cet  oiseau  niche  dans  les  comtés  du  S.-E.  de  l'Angleterre,  mais 
ne  se  montre  qu'accidentellement  dans  le  reste  du  pays  et  en  Ecosse, 
et  il  n'a  été  capturé  qu'une  douzaine  de  fois  en  Irlande  [Seebohm). 

En  Asie,  l'Œdicnènje  est  répandu  en  Turkostan  {Severtzow),  dans 
le  S.-O.  de  la  Sibérie  où  le  D""  Finsch  l'observa  dans  les  steppes 
rocailleuses  situées  au  nord  du  Saissan-Nor,  près  de  la  petite  rivière 
de  Kara-Biruk.  La  forme  indienne  {Œ.  indiens),  qui  ne  présente 
cependant  aucun  caractère  qui   la  distingue   réellement  des   sujets 


—  102  - 

européens,  est  répandue  dans  l'Inde  entière  jusqu'au  Népaul 
{Hodgson)  et  à  Ceylan  (Jerdon),  en  Birmanie  et  dans  le  Beloutchistan 
{Seebohm).  En  Asie  Mineure  {Krupe7-),  en  Perse,  en  Palestine  {Tris- 
tram),  en  Egypte,  en  Nubie  {Shelleij),  en  Abyssinie  {de  Heuglin),  et 
dans  tout  le  nord  de  l'Afrique  {Drake^  Loche),  nous  retrouvons  la 
forme  européenne,  de  même  qu'aux  îles  Canaries  et  Madère  (Godman). 

Mœurs.  —  L'Œdicnème  criard  ne  revient  dans  l'Europe  centrale 
que  dans  les  premiers  jours  d'avril,  rarement  plus  tôt;  il  émigré  en 
septembre,  mais  on  en  voit  encore  passer  jusqu'en  octobre.  Il  voyage 
par  troupes  de  six  à  dix  individus,  et  toujours  pendant  la  nuit,  sur- 
tout par  un  beau  clair  de  lune,  et  en  faisant  retentir  l'air  de  ses 
cris  joyeux. 

C'est  un  oiseau  nocturne,  qui  se  tient  caché  pendant  le  jour;  ce 
n'est  qu'au  crépuscule  qu'il  se  met  en  activité.  Il  recherche  les  plaines 
accidentées  tout  en  évitant  les  régions  montagneuses  ;  il  est  rare  de 
le  rencontrer  aux  environs  des  champs  cultivés.  Ce  qu'il  préfère,  ce 
sont  les  steppes,  les  déserts  et  les  endroits  arides,  où  les  moutons 
trouvent  à  peine  une  maigre  nourriture;  il  recherche  aussi  les  endroits 
sablonneux  garnis  de  jeunes  pins  sylvestres,  entre  lesquels  il  trouve 
toujours  un  abri  assuré.  Il  aime,  cependant,  le  voisinage  d'une  eau 
claire,  où  il  puisse  aller  se  désaltérer  chaque  soir,  mais  cela  n'est 
pas  indispensable. 

Il  est  d'un  naturel  extrêmement  farouche  et  fuit  tout  ce  qui  lui 
annonce  le  voisinage  de  l'homme;  comme  il  se  tient  presque  toujours 
dans  des  endroits  où  sa  vue  peut  porter  au  loin  et  où  il  ne  peut  être 
surpris,  il  parvient  presque  toujours  à  échapper  à  son  ennemi,  même 
avant  d'avoir  été  aperçu.  En  Afrique,  cependant,  où  les  indigènes  ne 
lui  font  guère  la  chasse,  on  les  voit  souvent  en  grand  nombre,  selon 
de  Heuglin,  sur  les  plates-formes  des  maisons,  des  mosquées,  des 
fabriques  et  des  casernes  où  il  niche  même  fréquemment;  en  Egypte 
on  le  voit  aussi  parfois  dans  les  jardins,  les  cimetières  ainsi  que  dans 
les  bosquets  d'acacias.  Selon  Brehm,  la  confiance  qu'il  montre  en 
Egypte  n'existe  qu'en  apparence;  il  se  tient  là  sur  ses  gardes  aussi 
bien  que  chez  nous,  mais  il  est  rare  qu'on  l'aperçoive,  car  il  a  vu 
l'homme  qui  s'approche  bien  avant  que  celui-ci  ait  pu  soupçonner  sa 
présence.  Se  trouve-t-il  dans  une  plaine,  loin  de  tout  fourré  où  il 
puisse  se  cacher,  il  se  rase  et,  grâce  à  la  teinte  terreuse  de  son  plu- 
mage, il  disparaît  aux  regards.  Un  fourré  se  trouve-t-il  près  de  là,  il 
y  court  sans  s'y  arrêter,  le  franchit  en  toute  hâte  et  gagne  les  champs 


—  103  - 

ou  les  herbages  du  côté  opposé  à  celui  par  lequel  arrive  le  chasseur. 
Dans  le  campo  comme  dans  le  désert,  il  commence  par  se  raser;  mais 
si  l'on  continue  à  avancer  vers  l'endroit  où  l'oiseau  s'est  couché, 
celui-ci  se  lève,  court  pour  se  mettre  hors  de  portée  du  fusil,  se 
retourne  de  temps  à  autre,  s'arrête,  puis  recommence  à  courir,  et 
gagne  enfin  une  avance  suffisante,  sans  avoir  été  obligé  de  recourir 
à  ses  ailes. 

Sa  marche  a  quelque  chose  de  raide,  de  trottinant,  mais  en  cas  de 
danger  il  sait  courir  avec  une  rapidité  étonnante.  Son  vol  est  léger, 
assez  facile,  mais  rarement  soutenu. 

L'Œdicnème  se  comporte  comme  un  hibou  :  il  fuit  la  lumière  du 
jour.  Mais  au  coucher  du  soleil,  il  reprend  toute  sa  vivacité,  court  et 
vole  sans  cesse,  s'élève  en  se  jouant  dans  les  airs  et  déploie  un  talent 
de  voilier  qu'on  ne  lui  accorderait  pas  à  première  vue.  Son  premier 
soin  est  d'aller  se  désaltérer,  et,  dans  ce  but,  il  franchit  souvent  plu- 
sieurs kilomètres,  pour  revenir  ensuite  à  l'endroit  où  il  a  élu  domicile. 
Il  passe  toute  la  nuit  en  mouvement,  sautillant  sur  le  sol  sous  les 
rayons  de  la  lune,  qui  lui  donnent  parfois  une  forme  fantastique  qu'il 
perd  en  se  glissant  dans  l'ombre.  Sa  voix  est  retentissante  et  peut  se 
rendre  par  kraeliith  ou  kraeiith;  c'est  surtout  au  coucher  et  au  lever 
du  soleil  que  l'oiseau  fait  retentir  son  cri  perçant.  Au  repos  aussi  bien 
que  quand  il  est  en  mouvement,  il  fait  encore  entendre  un  léger  ditt 
ou  dick^  qu'il  répète  plusieurs  fois  de  suite  avec  rapidité. 

La  nourriture  de  cet  oiseau  se  compose  uniquement  de  substances 
animales;  il  se  nourrit  surtout  de  vers,  de  larves,  d'insectes  de  toute 
espèce,  de  mollusques  terrestres,  de  lézards,  de  petits  serpents,  de 
grenouilles,  de  campagnols  et  de  souris.  Par  son  régime,  cet  oiseau 
rend  donc  de  véritables  services  à  l'agriculture. 

Au  printemps,  selon  Naumann,  les  Œdicnèmes  se  livrent  souvent 
des  combats,  soit  en  l'honneur  des  femelles,  soit  pour  la  possession 
d'un  domaine.  Les  deux  combattants  se  frappent  violemment  du  bec, 
se  poursuivent  au  vol  et  à  la  course;  le  vainqueur  revient  près  de  sa 
femelle,  court  autour  d'elle,  la  tête  inclinée  à  terre,  les  ailes  pen- 
dantes, la  queue  relevée  et  étalée,  en  criant  doucement  dick  dick  dick. 

Reproduction.  —  L'Œdicnème  niche  vers  la  fin  d'avril,  mais  no 
fait  pas  de  nid,  La  femelle  dépose  deux  ou  trois  œufs  dans  une  petite 
fosse  creusée  dans  le  sable.  Les  œufs  sont  d'un  jaune  terreux  ou  d'un 
jaune  olivâtre  pâle,  marqués  de  taches  cendrées  et  de  taches  brunes, 
éparpillées  sur  toute  la  surface.  Ils  mesurent  environ  53  mil.  sur  38. 


-  104  - 

La  durée  de  l'incubation  est  de  seize  cà  dix-sept  jours;  mais  le  plus 
souvent  il  n'y  a  que  deux  œufs  qui  éclosent.  Dès  que  les  petits 
viennent  au  jour,  la  mère  les  sèche  et  les  garde  sous  ses  ailes  pour  les 
réchaufier;  mais  le  jour  môme  de  leur  naissance  ils  sont  en  état  de 
recevoir  une  première  éducation.  Les  parents  veillent  avec  soin  sur 
leur  progéniture,  et,  au  moindre  danger  ils  la  conduisent  en  lieu  sûr. 

L'Œdicnème  n'a  qu'une  couvée  par  année,  mais  si  elle  a  été 
détruite,  la  femelle  fait  une  nouvelle  ponte.  C'est  la  raison  pour 
laquelle  on  trouve  parfois  encore  des  œufs  en  juin  et  même  en  juillet. 


SOUS-FAMILLE 

DES    CHARADRIINÉS.    —    CHARADRIIN/E. 

Car.  —  Bec  droit,  peu  fendu;  œil  placé  assez  en  arrière,  queue 
arrondie  ou  carrée,  les  rectrices  médianes  ne  dépassant  que  peu  ou 
point  les  latérales;  grandes  sous-caudales  n'atteignant  jamais  l'extré- 
mité de  la  queue;  pieds  formés  le  plus  souvent  de  trois  doigts;  le  pouce 
quand  il  existe,  très  court  et  élevé. 

GENRE     CIV. 

PLUVIER.  —  CHÂRÂDRIUS. 

Charadrius,  Lin.  Syst.  mit.  I,  p   150  (1758). 
Pluvialis,  Briss.  Ornith.  V,  p.  42  (1760). 

Car.  —  Bec  droit,  plus  court  que  la  tôte,  comprimé  vers  la  pointe  ; 
narines  latérales,  étroites,  linéaires,  placées  dans  un  sillon  se  prolongeant 
au-delà  du  milieu  du  bec  ;  ailes  aiguës,  atteignant  l'extrémité  de  la  queue, 
première  rémige  la  plus  longue  ;  queue  presque  carrée,  barrée  tranversale- 
ment;  tarses  assez  élevés, réticulés;  trois  doigts  en  avant,  pouce  nul;  plumage 
des  parties  supérieures  tacheté. 

Had.  —  Ce  genre,  dont  il  n'existe  que  quelques  espèces,  est  repré- 
senté en  Europe,  en  Asie,  en  Amérique  et  en  Australie. 

Le  Pluvier  doré  est  la  seule  espèce  qu'on  observe  en  Belgique  ;  il 
émigré  en  hiver  jusque  dans  le  nord  de  l'Afrique  et  traverse  régu- 
lièrement notre  pays  en  automne  et  au  printemps. 


-  105  — 

188.  —  Le  Pluvier  doré. 

CHARADRIUS  AUREUS,  Mûll.  ex  Briss. 
(PL  183.) 

Pluvialis  aurea,  Briss.  Orn.  V,  p.  43,  pi,  IV,  f.  1  (1760). 

Charadrius  pluvialis,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  254  (1766), 

Charadrius  AUREUS,  Mùll.  Natur.  Syst.  svppl.  p.  118  (1776). 

Charadrius  auratus,  Suckow,  Naturg,  cl.  Thiere,  II,  p.  1592  (1801). 

Charadrius  apricarius  (ex  Lin.  1758)  et  altifrons,  Brm.  /sis,  1830,  p.  987. 

Pluvialis  apricarius,  Bonap.  Cat.  met.  Ucc.  Eur.  p.  57  (1842). 

Pluvialis  auratus,  Lacr.  Cat.  rais,  des  Ois.  obs.  d.  l.  Pyrénées  fr.  p.  181  (1873-75), 

Der  Gold-Regenpfeifer,  en  allemand. 

The  Golden  Plover,  en  anglais. 

De  Goud-Plevier,  en  flamand. 

Taille  :  0"\23;  ailes  0,19;  tarses  0,041. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  au  printemps.  —  Front  et  raies  sourci- 
lières  blancs  ;  toutes  les  parties  supérieures  d'un  brun  noirâtre  et  marquées 
de  taches  d'un  jaune  doré,  placées  le  long  des  barbes  et  à  l'extrémité  des 
plumes  ;  joues,  gorge,  devant  du  cou  et  milieu  de  la  poitrine  d'un  noir  lustré, 
bordé  de  blanc  ;  côtés  de  la  poitrine  et  flancs  comme  le  dos,  mais  les  taches 
plus  grandes  ;  ailes  brunes,  les  couvertures  tachées  de  jaune  doré  et  de  blanc 
grisâtre  ;  couvertures  inférieures  blanches  ;  queue  brune,  rayée  transversa- 
lement de  cendré;  sous-caudales  blanches,  la  barbe  externe  des  latérale? 
marquée  de  bandes  obliques  brunes.  Bec  et  pattes  noirs  ;  iris  brun  foncé. 

Mâle  et  femelle  en  hicer.  —  Parties  supérieures  comme  en  été  ;  gorge  et 
abdomen  blancs  ;  poitrine  et  flancs  cendrés,  maculés  de  jaune  et  marqués  de 
nombreuses  taches  brunes. 

Jeune  en  partie  couvert  de  plumes.  —  Poitrine  jaunâtre  parsemée  de  grandes 
taches  terminales  noires  et  triangulaires  ;  côtés  du  ventre  d'un  blanc  pur 
avec  les  plumes  largement  bordées  de  noir  ;  dos  noir  à  bordures  latérales 
d'un  jaune  doré.  Bec  d'un  brun  olive  ;  pieds  gris  brun  ;  iris  brun  foncé 
{W.  Meves). 

Poussin.  —  Parties  supérieures  couvertes  d'un  duvet  formé  de  petites 
houppes  construites  comme  dos  plumes,  c'est-à-dire  composées  d'une  tige  cen- 
trale avec  ramures  laineuses  ;  le  duvet  du  centre  est  fin  et  allongé  ;  les  deux 
sortes  de  duvet  sont  surmontées  par  des  fils  noirs  et  déliés  ;  tête,  dos  et 
dessus  des  cuisses  d'un  beau  jaune  doré,  entièrement  parsemé  de  taches 
noii-cs  ;  gorge,  ventre  et  dessous  de  la  queue  d'un  blanc  pur  ;  duvet  de  la  poi- 
trine noir  â  la  naissance,  blanc  à  l'extrémité.  [A.  Marchand.) 

To.ME  II.  —  1888.  H 


406 


Hab,  —  Le  Pluvier  doré  est,  suivant  les  saisons,  plus  ou  moins 

commun  dans  toute  l'Europe, 
l'Asie  occidentale  et  le  nord  de 
l'Afrique.  En  été  on  le  rencontre 
depuis  le  53°  1.  N.  jusqu'à  la 
Nouvelle-Zemble  [Bogdanow)  et 
l'Islande  {Faber),  et  il  se  montre 
même  parfois  au  Groenland  {Hol- 
hôll).  En  automne  et  au  prin- 
temps, il  est  de  passage  régulier 
dans  toute  l'Europe  centrale  ;  il  est  alors  assez  commun  dans  certaines 
localités  de  la  Belgique  ;  quand  l'hiver  n'est  pas  trop  rude,  un  cer- 
tain nombre  d'individus  hivernent  même  dans  le  nord  de  la  France, 
en  Belgique  et  dans  certaines  parties  de  l'Allemagne  ;  il  s'éloigne 
d'autant  plus  de  nos  contrées  que  l'hiver  est  plus  rigoureux.  Son  véri- 
table quartier  d'hiver  est  le  midi  de  l'Europe  où  il  est  alors  fort  abon- 
dant. Il  pousse  même  ses  migrations  jusque  dans  le  nord  de  l'Afrique 
{Loche,  Drake,  Salvin),  mais  il  n'est  pas  de  passage  régulier  en 
Egypte,  où  de  Heughn  dit  ne  l'avoir  jamais  observé  au  delà  du  Delta; 
cependant,  Layard  dit  l'avoir  capturé  à  Lamo,  sur  la  côte  orientale 
d'Afrique,  Verreaux  le  signale  au  Gabon  et  Hartlaub,  au  Cap  de 
Bonne  Espérance  ;  mais  ces  indications  ne  paraissent  pas  avoir  été 
confirmées. 

En  Asie,  on  rencontre  cet  oiseau  dans  la  Sibérie  occidentale  jus- 
qu'aux fleuves  Lena  et  Taïmyr  (Bogdanow),  enTurkestan  (Severtzow), 
au  Caucase  [Radde),  en  Perse  [Blanford),  en  Béloutchistan  {Seebohm), 
en  Asie  Mineure  [Robson),  enPdiiesime [Tristram)  et  en  Syrie  [de  Heu- 
glin).  Dans  l'Asie  orientale,  il  est  remplacé  par  une  espèce  très  voisine: 
le  Ch.  fulvus,  dont  quelques  captures  ont  même  été  faites  en  Europe. 
Mœurs. — Cette  espèce  émigré  des  contrées  du  Nord  à  partir  de  la  fin 
de  septembre,  mais  les  grands  passages  n'ont  lieu  qu'en  octobre  et  se 
prolongent  souvent  jusque  vers  le  milieu  de  novembre  ;  ces  oiseaux  se 
laissent  parfois  surprendre  par  les  premières  neiges,  avant  de  songer 
à  quitter  leur  séjour  d'été.  C'est  plutôt  le  manque  de  nourriture  que  le 
froid  qui  les  oblige  à  émigrer,  aussi  n'avancent-ils  vers  le  Sud  qu'à 
mesure  que  les  aliments  leur  font  défaut.  C'est  la  raison  pour  laquelle 
nous  en  voyons,  quand  la  saison  n'est  pas  rigoureuse,  pendant  presque 
tout  l'hiver.  Le  second  passage  commence  généralement  en  mars  et 
dure  jusque  dans  la  seconde  quinzaine  d'avril. 


—    107     - 

Les  Pluviers  dorés  voyagent  le  plus  souvent  pendant  la  nuit,  volent 
très  haut  et  par  bandes  nombreuses  composées  parfois  de  plusieurs 
centaines  d'individus.  Quand  ils  veulent  accélérer  leur  vol  et  qu'ils 
sont  nombreux,  ils  se  disposent  en  triangle  pour  fendre  l'air  avec  plus 
de  facilité.  Le  jour,  ils  se  reposent  et  ne  s'occupent  que  de  leur  nour- 
riturCj  et,  chose  singulière,  ils  s'abattent  alors  dans  les  champs  et 
exceptionnellement  dans  les  marécages  et  autres  lieux  inondés.  Ils 
séjournent  parfois  dans  les  champs  des  semaines  entières,  ne  les  quit- 
tant que  vers  le  soir  pour  aller  s'abreuver  et  se  baigner.  Si,  à  leur 
passage  au  printemps,  ils  sont  surpris  par  une  reprise  de  gelée,  ils 
s'arrêtent  de  préférence  dans  les  marais  et  autres  endroits  couverts 
d'eau,  où  ils  trouvent  alors  plus  facilement  leur  nourriture,  mais  en 
général,  ils  Aont  passer  la  nuit  dans  les  champs. 

«  Le  Pluvier  doré,  dit  A.  Brehm,  est  un  oiseau  caractéristique 
des  tundras,  tout  comme  le  Courvite  Isabelle  et  les  Gangas  le 
sont  du  désert.  Quand  on  parcourt  ces  marais,  qui  recouvrent  toute 
la  zone  septentrionale,  on  entend  de  tous  côtés  retentir  le  cri 
mélancolique  et  plaintif  de  cet  oiseau;  on  le  voit  par  paires,  par 
familles,  par  petites  troupes  et  par  bandes  nombreuses,  suivant  la 
saison  ;  on  le  rencontre  partout,  car  une  paire  habite  tout  près  d'une 
autre,  et  du  matin  au  soir  le  chasseur  peut  en  avoir  constamment 
devant  lui.  Aussi  loin  que  la  tundra  s'étend  vers  le  Sud,  aussi  loin 
on  trouve  le  Pluvier  doré  ;  c'est  un  véritable  oiseau  de  marais  :  il  ha- 
bite même  les  endroits  inaccessibles  à  l'homme.  A  partir  de  57°  1.  N., 
il  devient  moins  commun,  et  en  Allemagne  on  ne  rencontre  plus,  en 
été,  que  des  individus  isolés.     » 

C'est  un  oiseau  fort  gai,  vif  et  agile  ;  il  marche  avec  élégance  et 
sait  courir  rapidement,  mais  s'arrête  de  temps  en  temps  sur  un 
petit  monticule,  qui  lui  permet  de  voir  à  une  certaine  distance  autour 
de  lui.  En  cas  de  poursuite,  il  cherche  plus  souvent  son  salut 
dans  une  course  rapide  (pie  dans  le  vol,  et  ce  n'est  que  quand  il  y 
a  nécessité  qu'il  s'enfuit  à  tire-d'aile.  Son  vol  est  rapide,  facile 
et  gracieux,  tantôt  haut,  tantôt  bas,  et  accompagné  de  battements 
d'ailes  accélérés  ;  il  traverse  l'espace  en  ligne  droite,  mais  sait 
fort  bien  se  retourner  pour  prendre  une  autre  direction;  parfois 
il  plane  un  certain  temps  sans  presque  remuer  les  ailes.  Il  est 
très  sociable  et  chaque  individu  veille  à  la  sécurité  de  tous  ;  il  (^st 
aussi  prudent  que  larouche,  mais  distingue  parlaitement  le  passant 
inolfensif  du  chasseur.  De  ce  dernier  il  ne  se  laisse  jamais  approcher 


—  i08  — 

à  portée  de  fusil,  aussi  faut-il  prendre  de  grandes  précautions  pour 
le  tirer. 

Sa  voix  est  un  sifflement  agréable  malgré  son  ton  plaintif,  et  res- 
semble à  tlui'  Les  deux  sexes  crient  aussi  bien  au  repos  qu'en  volant, 
mais  c'est  surtout  en  prenant  leur  vol  qu'ils  se  font  entendre.  Le  chant 
du  mâle  au  printemps  peut  se  rendre  par  taludltaludltaludl  et  ainsi 
de  suite. 

La  nourriture  de  ce  Pluvier  se  compose  principalement  de  larves, 
d'insectes,  de  vers  et  de  petits  mollusques  avec  ou  sans  coquille  ;  il 
mange  aussi  des  baies,  des  graines  et  autres  substances  végétales, 
mais  accessoirement  ;  il  avale  parfois  des  grains  de  silex  pour  faciliter 
sa  digestion.  L'eau  lui  est  indispensable,  tant  pour  boire  que  pour  se 
baigner,  car  il  ne  laisse  pas  passer  un  jour  sans  laver  et  nettoyer  son 
beau  plumage. 

On  chasse  beaucoup  ces  Pluviers  pour  leur  chair  qui  est  excel- 
lente ;  on  les  prend  en  quantité  en  imitant  leur  cri  pour  les  attirer 
dans  des  pièges. 

Reproduction. —  Le  Pluvier  doré  niche  dans  les  contrées  du  Nord, 
mais  on  trouve  déjà  son  nid  à  partir  de  la  Westphalie  ;  il  n'est  pas 
rare  de  trouver  des  œufs  de  cet  oiseau  sur  le  marché  de  Munster. 

Une  fois  accouplé,  le  mâle  ne  quitte  plus  sa  compagne;  il  vole 
autour  d'elle  en  chantant,  plane  au-dessus  du  nid  et  se  livre  à  des 
ébats  sans  fin  ;  la  femelle  répond  de  son  mieux  à  tous  ces  témoignages 
d'amour. 

C'est  dans  un  endroit  très  sec,  souvent  sur  un  petit  monticule  en- 
touré de  bruyères,  que  la  femelle  creuse  la  fossette  qui  doit  contenir 
ses  oeufs;  cette  cavité  est  fréquemment  garnie  de  quelques  brins  et  de 
radicelles.  La  ponte  se  compose  de  quatre  œufs  et  ce  nombre  n'est 
jamais  dépassé,  mais  il  est  rare  qu'il  n'y  ait  que  trois  œufs.  Ceux-ci 
sont  gros  relativement  à  la  taille  de  l'oiseau  ;  leur  couleur  est  d'un  vert 
olivâtre  ou  rougeâtre  avec  de  grandes  taches  d'un  brun  noirâtre  et 
d'un  brun  rouge,  qui  sont  toujours  plus  nombreuses  vers  le  gros  bout. 
Ils  mesurent  environ  52  millim.  sur  36. 

La  durée  de  l'incubation  est  de  seize  à  dix-sept  jours,  mais  la  fe- 
melle l'interrompt  souvent  pendant  la  journée.  Les  jeunes  quittent 
leur  nid  peu  après  leur  naissance,  et  accompagnent  aussitôt  leurs 
parents,  qui  leur  témoignent  beaucoup  d'attachement. 


—  109  — 

OENRE  CV 

GUIGNARD.  —  EUDROMIAS. 

Charadrius,  Lin.  (part.)  »S'y.v/.  }iat.  I,  p.  254  (1766). 
EuDROMiAS,  Breli.  Isis,  1830,  p.  987. 
MoRiNELLUs,  Bonap.  Co.t.  Farz.  p.  14  (i8o6) 

Car-.  —  Les  oiseaux  de  ce  genre  diffèrent  peu  des  précédents  :  leur  bec 
est  plus  grêle  et  relativement  moins  renflé  à  l'extrémité;  ailes  allongées; 
tarses  assez  élevés;  doigts  courts;  pouce  nul. 

Eal).  —  On  rencontre  des  représentants  de  ce  genre  en  Europe,  en 
Asie,  en  Afrique  et  en  Australie. 

184.  —  Le  Pluvier  guignard. 

EUDROMIAS  MORINELLUS,  Brm.  ex  Lin. 

(PL    185). 

Charadrius  morinellus,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  254  (1766). 

Charadrius  sibiricus,  Lepech.  Itin.  pi.  6  (1771-80). 

Charadrius  tartaricus,  Pall.  Reise  Russ.  Reichs,  II,  p.  715  (1773) 

EuDROMIAS  MORINELLA,  MONTANA,  STOLIDA,  Bl'm.  Isis,   1830,  p.  987. 

Pluvialis  morinellus,  Macg.  Mcm.  Br.  B.  II,  p.  50  (1842j. 

Morinellus  sibiricus,  Bp.  Cat.  Parz.  p.  14  (1856). 

Der  Mornell-Regenpfeifer,  en  allemand. 

The  Dotterel,  en  anglais. 

De  Morinelplevier,  en  flamand. 

Taille:  0"\19;  ailes,  0,141  ;  tarses  0,035. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  au  printemps. —  Dessus  de  la  tête  d'un 
1)run  noir  avec  les  plumes  du  front  bordées  de  cendré  clair;  gorge,joues  et  une 
large  raie  sourcilière  d'un  blanc  pur  ;  dessus  du  corps,  région  des  oreilles 
et  ailes  d'un  cendré  brunâtre  tirant  un  peu  sur  l'olive  ;  couvertures  des  ailes 
et  scapulaires  bordées  de  roux  clair  ;  rémiges  brunes,  la  baguette  de  la  pre- 
mière blanche  ;  bas  du  cou  et  haut  de  la  poitrine  cendrés,  et  cette  teinte  se 
termine  par  une  bande  étroite  noirâtre,  suivie  d'un  ceinturon  blanc  ;  le  restant 
de  la  poitrine  et  les  flancs  sont  d'un  roux  assez  vif,  plus  pâle  en  avant  ;  abdo- 
men noir;  sous-caudales  et  bas-ventre  blancs;  queue  cendrée,  plus  foncée 
veis  son  extrémité  (pii  se  termine  par  un  large  bord  blanc,  sauf  les  rectrices 
médianes  qui  sont  simplement  lisérées  de  blanc-ruussâtre.  Bec  noir  ;  pattes 
d'un  cendré  verdâtre  ;  iris  brun  foncé. 

Mâk  et  femelle  en  hiver. —  Dessus  de  la  tête  brun  taché  de  roussâtre  ;  raies 


-  110 


sourcilières  et  gorge  blanchâtres  ;  joues  cendrées  striées  de  brun  ;  nuque  et 
côtés  de  la  poitrine  d'un  cendré  roussâtre  varié  de  brun  ;  dos  et  scapulaires 
bruns,  toutes  les  plumes  bordées  de  roux  vif;  couvertures  des  ailes  d'un  cen- 
dré brunâtre  bordées  de  cendré  roussâtre  pâle  ;  poitrine  et  flancs  cendré  pâle 
varié  de  roussâtre  ;  ceinturon  blanc  à  peine  marqué  et  roussâtre  ;  le  reste  des 
parties  inférieures  blanchâtres . 

Jeune.  —  Ressemble  à  l'adulte  en  hiver,  les  teintes  générales  moins  pures 
et  le  ceinturon  blanc  nul. 

Poussin.  —  Dessus  et  côtés  de  la  tête,  dos,  dessus  des  ailes  et  des  cuisses 
d'un  fauve  marbré  de  roux  et  moucheté  de  taches  et  de  traits  noirs,  irrégu- 
liers mais  bien  accentués  et  absorbant  en  partie  le  fond  ;  trois  traits  de  cette 
couleur  partant  de  la  mandibule  supérieure,  dont  l'un  divise  le  front  dans  toute 
sa  hauteur, les  deux  autres  couvrent  les  lorums,  bifurquent  en  avant  de  l'œil  et 
décrivent  un  arc  en  dessous  ;  gorge  et  ventre  blancs  ;  poitrine  et  abdomen  d'un 
fauve  pâle;  bec  noir  de  corne,  avec  la  base  et  la  pointe  un  peu  plus  pâlesî 
pieds  d'un  brun  roux  (/.  Vian). 

Hab.  —  Le  Pluvier  giiignard  habite,  en  été,  toute  la  zone  boréale 

située  entre   le  59°    et   le  79° 


depuis  la  Norwège  [Collett)  ]m^- 
qu'au  détroit  de  Behring  [Bog- 
danoiv),  y  compris  le  Spitzberg 
[Malmgren)^  la  Nouvelle-Zemble 
{de  lieuglin),  la  région  alpine  de 
certaines  chaînes  de  montagnes 
de  l'Europe  centrale  comme  les 
Alpes,  les  Riesengebirge  et  les 
Siebenburgen  [Tschudi,  Naumann,  de  2'schusï)^  di\i\s\  que  la  région 
alpine  d'Alataou,  du  Tarbagaïaï,  du  Saïan  et  d'autres  montagnes  de  la 
Sibérie  orientale  (Bogdanow).  Dans  le  reste  de  la  Scandinavie,  de  la 
Russie,  de  la  Sibérie  et  dans  toute  l'Europe  centrale,  c'est  un  oiseau 
de  passage.  En  Belgique,  il  est  de  passage  régulier  en  Flandre,  sur 
les  côtes  maritimes  à  la  tin  d'août  et  en  septembre  ;  il  est  plus  rare  en 
Brabant  et  ne  se  montre  qu'accidentellement  en  Ardennes  [de  Sélys) 
et  rarement  aux  environs  d'Anvers  {Croegaert)- 

Cet  oiseau  hiverne  dans  les  pays  méditerranéens  et  les  pays  de 
l'Asie  centrale  correspondant  à  la  même  latitude  ;  il  passe  ainsi  l'hiver 
en  Espagne  (Saunders),  en  Italie  [Giglioli),  en  Grèce  [Lindermayey^), 
en  Turquie  [Ehves  et  Backley),  en  Asie  Mineure  [de  Heuglin),  en 
Palestine  {Tristram)  et  en  Perse  [Blanfmxl)-^  on  l'observe  aussi  en 
Algérie  [Loche) ^  et  probablement  dans  tout  le  nord  de  l'Afrique,  ainsi 


-  111  - 

qu'en  Egypte  jusque  sur  les  côtes  delà  mer  Rouge  {de  Heuglin): 
Mœurs.  —  Ce  Pluvier  est  donc  un  oiseau  migrateur  qui  aban- 
donne, en  automne,  les  régions  septentrionales  et  alpines  pour  passer 
l'hiver  dans  le  Midi.  Il  paraît  même  plus  sensible  au  froid  que  le  Plu- 
vier doré,  car  il  émigré  plus  tôt  et.  retourne  plus  tard  dans  le  Nord  que 
ce  dernier.  En  Allemagne,  dit  Naumann,  les  premiers  individus  se 
montrent  déjà  vers  la  mi-août,  et  ils  restent  dans  ce  pays  jusqu'après 
la  mue.  En  septembre  arrive  la  masse,  et  les  passages  continuent  jus- 
qu'en octobre,  mais  on  n'en  voit  plus  dès  les  premiers  jours  de  novem- 
bre. Au  printemps,  ils  ne  repassent  pas  avant  le  mois  d'avril,  et  l'on 
voit  des  passages  jusque  dans  le  courant  de  mai.  Naumann  pense  que 
ces  oiseaux  ne  prennent  pas  la  même  direction  au  printemps  qu'en 
automne,  car, à  la  fin  de  l'été, on  en  voit  de  grandes  quantités  dans  cer- 
taines parties  do  l'Allemagne,  tandis  qu'on  n'en  voit  presque  pas  au 
printemps.  Dans  le  Holstein  c'est  l'inverse:  ils  sont  rares  à  l'arrière- 
saison  et  communs  au  printemps. Les  migrations  se  font  par  troupes  et 
principalement  pendant  le  jour  et  par  un  beau  clair  de  lune.  Ils  volent 
alors  généralement  à  une  grande  hauteur,  assez  serrés  les  uns  contre 
les  autres,  mais  sans  ordre  et  en  faisant  retentir  l'air  de  leurs  cris. 

C'est  un  véritable  montagnard,  qui  ne  fréquente  que  les  lieux  secs  et 
arides;  jamais  on  ne  le  voit  dans  un  marais  ;  il  ne  va  à  l'eau  que  vers 
le  soir  pour  se  désaltérer,  et  le  moindre  filet  d'eau  lui  sufiit.  Il  passe 
sa  vie  dans  les  montagnes,  où  on  le  rencontre  jusque  dans  la  région 
alpine  ;  ce  n'est  réellement  que  pendant  les  migrations  qu'il  visite  les 
champs  des  plaines. 

Le  Guignard  est  un  charmant  oiseau,  doux  et  peu  farouche,  ce  qui 
a  fait  croire  qu'il  était  stupide  ;  s'il  est  peu  méfiant,  c'est  qu'il  n'a 
guère  à  craindre  les  poursuites  de  l'homme  dans  les  montagnes  qu'il 
habite  ;  mais  quand  on  le  chasse,  il  devient  prudent  et  montre  bientôt 
qu'il  n'est  pas  moins  intelligent  que  ses  congénères.  Son  port  est 
élégant,  sa  marche  légère  et  rapide,  son  vol  gracieux,  rapide  et 
accompagné  de  battements  d'ailes  accélérés,  et  au  besoin  il  devient 
irrégulier  par  des  crochets  brusques  et  gracieux  ;  quand  l'oiseau  se 
voit  poursuivi  par  un  rapace,  il  sait  fendre  l'air  avec  la  rapidité  d'une 
flèche.  A  l'approche  de  l'homme,  il  s  encourt  d'abord,  mais  bientôt  il 
se  tapit  contre  terre  et  ne  s'envole  que  quand  on  est  près  de  lui.  Il 
est  très  sociable,  voyage  par  troupes  composées  do  dix  à  cinciuantc 
sujets,  mais  jamais  par  bandes  aussi  nombreuses  que  le  Pluvier  doré. 
Quand  plusieurs  troupes  s'abattent  dans  le  même  champ,  elles  ne   se 


—  412  — 

mêlent  que  momentanément  et  se  divisen  de  nouveau  en  prenant 
leur  vol.  Si  ces  oiseaux  se  montrent  sociables  entre  eux,  ils  ne  témoi- 
gnent pas  la  même  sympathie  aux  autres  espèces,  car  on  ne  les  voit 
jamais  mêlés  à  d'autres  Pluviers. 

Son  cri  d'appel  n'est  pas  aussi  sonore  que  celui  du  Pluvier  doré,  et 
ressemble  à  drrr,  drru  ou  durrr;  parfois  il  fait  aussi  entendre  un  son 
plus  doux  ressemblant  à  ditf.  Quand  une  troupe  s'envole  ou  s'abat 
dans  un  champ,  on   entend  toujours  les  cris  de  durrr,  dut,  dut,  dut. 

Le  Guignard  se  nourrit  presque  uniquement  d'insectes,  de  larves  et 
de  vers,  rarement  de  substances  végétales. 

Reproduction.  —  Cette  espèce  niche  dans  le  courant  de  juin,  et 
dans  l'extrême  Nord  pas  avant  la  fin  du  mois.  Son  nid  est  une  dépres- 
sion peu  profonde  creusée  dans  le  sol  et  garnie  de  radicelles  et  de 
lichens  terrestres.  La  ponte  est  de  quatre  œufs,  quelquefois  seulement 
de  trois,  de  forme  ovalaire  et  à  coque  lisse  et  peu  brillante;  ils  sont 
d'un  vert  grisâtre  ou  brimâtre  avec  de  grandes  taches  brunes  et  noires; 
ils  mesurent  environ  41  millim.  sur  28.  La  mère  couve  avec  une  telle 
ardeur,  qu'elle  se  laisse  presque  fouler  aux  pieds  avant  d'abandonner 
ses  œufs. 

«  Lorsque  les  jeunes  sont  éclos,  dit  Brehm,  la  famille  offre  un  spec- 
tacle charmant.  Une  seule  fois  j'ai  pu  prendre  sur  moi  de  tuer  des 
Guignards  près  de  leurs  petits,  tant  je  me  sentais  vaincu  par  le  doux 
spectacle  que  j'avais  sous  les  yeux.  La  mère  qui  est  accompagnée  de 
ses  poussins  s'expose  au  danger,  tandis  que  le  père  témoigne  son 
angoisse  par  ses  cris,  son  vol  saccadé  est  inquiet.  La  mère  court, 
boite,  volette,  fait  la  culbute  devant  son  ennemi.  Les  Lapons  qui 
m'accompagnaient  s'y  laissèrent  tromper,  ils  la  poursuivirent  et  ne 
virent  pas  les  jeunes  qui  s'étaient  rasés  à  terre.  Ils  étaient  là  tous  trois 
devant  moi,  le  cou  couché  à  terre,  chacun  à  moitié  caché  derrière  une 
pierre,  les  yeux  ouverts,  immobiles,  n'ayant  garde  de  faire  le  moindre 
mouvement  qui  aurait  pu  les  trahir  ;  j'étais  tout  près  d'eux,  ils  ne  bou- 
gèrent pas.  La  mère,  continuant  son  manège,  éloignait  de  plus  en 
plus  mes  Lapons;  mais  tout  à  coup,  elle  s'envola  et,  avec  la  vitesse 
de  la  flèche,  revint  là  où  ses  petits  étaient  cachés.  A  ma  vue,  elle 
poussa  un  cri;  les  jeunes  ne  lui  répondant  pas,  elle  recommença  le 
jeu  auquel  les  Lapons  s'étaient  laissés  tromper.  Je  m'emparai  des 
jeunes,  qui  se  laissèrent  prendre  sans  résistance,  et  les  montrai  à  la 
mère.  Aussitôt,  renonçant  à  sa  ruse,  celle-ci  vint  vers  moi,  et 
m'approcha  de  si  près  que  j'aurais  pu  Ja  saisir  avec  la  main  :  ses 


—  113  - 

plumes  étaient  hérissées,  ses  ailes  tremblaient,  elle  cherchait  par 
tous  les  moyens  à  exciter  ma  compassion.  Les  jeunes  glissèrent 
entre  mes  doigts,  la  mère  poussa  un  cri  indescriptible,  et  ils  étaient 
de  nouveau  près  d'elle.  Pleine  de  joie  de  les  avoir  retrouvés,  la 
mère  s'arrêta  devant  moi,  cacha  ses  petits  sous  ses  ailes  et  demeura 
immobile  à  la  même  place.  »  Brehm  fut  généreux  :  il  laissa  la  vie 
à  cette  bonne  petite  mère  ainsi  qu'à  ses  petits,  ce  que  bien  peu 
de  chasse ui-s  auraient  fait  à  sa  place. 

GENRE  CVI. 

GRAVELOT.  —  ^aiÀLITIS. 

Charadrils,  Lin.  Syst.nat.  I,  p.  253  (1700). 
^GiALiTis,  Boie,  Isis,  1822,  p.  558. 
HiATicuLA,  Gray,  Lisfofr/en.B.  p.  65  (1840.) 
OCHTHODROMUS,  Reichenb.,  Nat.  Sijst.  p.  18(1851). 
CiRREPiDESMUs,  Ronap.  Corn pt. -rend.  XLIII,  p.  417(1850). 
^GiALOPMiLU.s  GouM,  Hn>,(L  Ti.  Anstr.  II,  p.  234  (1865). 

Car. —  Bec  plus  coui-t  que  la  tête,  droit,  brusquement  renflé  vers  la 
pointe,  la  mandibule  inférieure  d'abord  droite  puis  légèrement  retroussée 
vers  la  pointe  ;  narines  basales,  latérales,  linéaires,  placées  dans  un  large 
sillon  qui  se  prolonge  jusqu'au  mihcu  du  bec  ;  ailes  aiguës,  atteignant  ou 
dépassant  l'extrémité  de  la  queue  ;  celle-ci  de  longueur  moyenne,  arrondie  ; 
tarses  médiocres,  grêles,  réticulés  ;  doigts  de  longueur  moyenne,  l'externe 
réuni  au  médian  par  une  petite  membrane  ;  pouce  nul. 

Hr/h.  —  Ce  genre  est  cosmopolite. 

185.  —  Le  Gravelot  ou  Pluvier  à  collier. 

/EGIALITIS  TORQUATUS  (z?rm.) 

(PI.  186) 

Pi.uviALis  TORQUATA,  Briss.  Ov/nlll.  V,  p.  60(1760). 
Charadrius  HiATiruLA,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  253  (1760). 
CiiAUADRius  TORQCATUS,  Lcacli,  Ccit.  M.  B.  Bi\  Mus,,  p.  28  (1810). 
/Egialitis  hiaticula,  Roie,  Isis.  1822,  p.  558. 
yEaiALiTis  SEPTENTRioNALis,  Brm.  Isis,  18.30,  p.  987. 
HiATicLLA  ANNULATA,  Gf.   IJst  off/cn.  B.,  p.  65  (1840). 
IIlATICCLA  TORQUATA,  Gr.  IJst  of  Sp.  B.  III,  p.  08(1844). 

Ili.vTKULA  HiATicuLA  ct  ARAHS,  Licht.  Nomencl.  av.,  p.  94  (1854). 
yEfJiALiTEs  AiiRiTUS,  Heugl.  Syst.  Ufbrrs.  p.  50(1850). 
.-Egialites  iNTERMEDius,  Gurn.  (ncc  Mèiiétr.)//>''à-,  1868,  p.  255. 
Charadrius  hiaticula  major,  Seeb.  Brit.  />'.  III.  p.  20  (1887). 

TuMi;  II.  —  1888.  15 


—  114  — 

Der  Sand-Regenpfeifer,  en  allemand. 
The  Ringed  plover,  en  anglais, 
De  Bontbek  Plevier,  en  flamand. 

Var.  Interraedia. 

Charadrius  intermedius,  Ménétr.  Cat.  n«'s.  p.  53  (1832). 

Taille  :  0,16  ;  ailes  0,123;  tarses  0,025. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  au  printemps.  —  Dessus  de  la 
tête,  nuque  et  dessus  du  corps  d'un  cendré  brunâtre  ;  partie  antérieure  du 
vertex  blanche  ;  front,  une  bande  au  milieu  du  vertex  entre  les  yeux,  joues 
et  un  large  plastron, noirs;  gorge,  raie  sourcilière  derrière  l'œil,  côtés  du  cou, 
un  étroit  collier  en  arrière  du  cou  et  parties  inférieures  d'un  blanc  pur  ;  col- 
lier blanc  bordé  de  noir  postérieurement  ;  grandes  couvertures  des  ailes  ter- 
minées de  blanc  ;  rémiges  d'un  brun  noir,  la  tige  des  primaires  blanche  vers 
le  bout,  une  tache  oblongue  blanche  sur  les  rémiges  secondaires  ;  queue  cen- 
drée, avec  une  bande  subterminale  brune  et  terminée  de  blanc,  sauf  les  rec- 
trices  médianes  qui  n'ont  pas  de  blanc  à  leur  extrémité  ;  rectrice  la  plus 
externe  blanche,  la  suivante  blanche  avec  une  tache  brune  sur  la  barbe 
interne  ;  sous-caudales  blanches.  Bec  d'un  jaune  orange  avec  la  pointe  noire; 
iris  et  bord  libre  des  paupières  noirâtres;  pattes  d'un  jaune  orange. 

La  femelle  est  un  peu  plus  petite  et  la  bande  frontale  noire  est  plus  étroite. 

En  hiver.  —  Les  plumes  noires  sont  légèrement  bordées  de  cendré. 

Jeune.  —  Toutes  les  parties  qui  sont  noires  chez  l'adulte  sont  ici  du 
même  cendré  brunâtre  que  le  dos,  passant  au  brun  en  arrière  du  collier 
blanc  et  sur  les  côtés  de  la  poitrine  ;  milieu  de  la  poitrine  varié  de  blanc  ; 
collier  blanc  plus  large  que  chez  l'adulte.  Bec  noir  à  base  jaune  ;  pattes 
jaunes. 

Poussin.  —  Duvet  pas  très  long,  soyeux,  filiforme  aux  parties  inférieures 
et  sur  le  dessus  du  cou,  plus  court,  plus  barbelé  et  comme  tronqué  aux  par- 
ties supérieures  ;  côtés  du  cou  nus  ;  dos,  dessus  de  la  tête  et  des  ailes  mou- 
chetés de  noir  sur  fond  cendré  ;  à  la  nuque  une  demi-couronne  noire,  dont  les 
extrémités  bifurquent  en  deux  traits  :  l'un  prolongé  jusqu'aux  yeux  et  l'autre 
sur  les  joues  ;  front,  demi-colHer  sur  le  cou  et  parties  inférieures  d'un  blanc 
pur.  (/.  Vian.) 

Var.  întermedia.  —  Elle  tient  le  milieu,  pour  la  taille,  entre  Y^.  tor- 
quutus  et  V/E.  duhius.  Se  distingue  du  vrai  torqualus  par  son  bec  noir,  ayant 
seulement  la  base  de  la  mandibule  inférieure  d'un  jaune  orange,  et  par  ses 
pattes  couleur  cendrée. 


-  115  — 

Hab.  —  Cet  oiseau  est  plus  ou  moins  répandu  dans  toute  l'Europe 

P^  jusqu'au    80^45'    1.   N.   {Malm- 

^j;j<7rm,    Torell),   y    compris   donc 

_  l'Islande  {Faber),   le    Spitzberg 

Lfl'Mg (7^055),   la   Nouvelle-Zemble  {de 

iptl  '.,/;'     ^[^^i^Mf^^^txi^-^'\Heuglin)  eimêmQ  le  Groenland 


3Pîte3^^&^t^^^^  (7Zo/&^^0-   Pour  la  majeure  par- 

feâj^^^S^  •-  'li^^-iiî^^Ê^^--  ^^^  ^6  l'Europe  centrale,  c'est  un 

i^jîUlLfH-^^i—'jiliHiJ-^-^^^^^*^^^^^  de  passage,  qui  ne   fait 

^,#iW;ra^gg7oxé^ig^g^îrr^ir»^  que  passer  pour  aller  hiverner 

dans  le  Midi;  quelques  couples,  cependant,  nichent  sur  les  côtes  de 
l'Allemagne,  de  la  Hollande  et  de  Borkum  (Di-oste),  de  Dunkerque  et 
de  Calais  {Gerbe),  de  la  Sardaigne  {Cara),  de  la  Sicile  {Malherbe),  de 
Valence  {Reycs),  de  Tîle  de  Malte  {Wright)  et  probablement  encore 
ailleurs.  En  Belgique  il  est  commun  à  l'époque  des  passages  sur  les 
côtes  maritimes  et  sur  les  bords  de  l'Escaut,  surtout  en  aval  d'Anvers, 
mais  il  est  rare  à  l'intérieur  du  pays  ;  peut-être  niche-t-il  sur  nos  côtes. 

Pendant  l'hiver,  on  observe  communément  ce  Pluvier  dans  toute 
l'Europe  méridionale,  depuis  le  Portugal  {du  Bocage)  jusqu'en  Grèce 
{Lindermayer),  ainsi  qu'en  Asie  Mineure  {Robson),  en  Palestine  {Trh- 
traw),  sur  les  côtes  de  la  mer  Rouge  {Ruppell)  et  de  l'Arabie  {Lich- 
tenstein),  dans  tout  le  nord  de  l'Afrique  {Loche,  Drake,  etc.),  sur  les 
côtes  orientales  de  l'Afrique  depuis  l'Egypte  {de  Heuglin)  et  Zanzibar 
{Kirk)  jusqu'au  cap  de  Bonne-Espérance  {Layard),  ainsi  qu'aux  îles 
Baléares  {von  Honieyer). 

En  Asie,  cet  oiseau  habite  le  noid  de  la  Sibérie  {Middendorf); 
dans  ses  migrations  ou  en  liiver  on  l'observe  dans  le  sud  de  ce  pays, 
en  Turkestan  {Severtzoïo),  en  Perse  {Gh-ay)  et  au  Caucase  {Radde). 
Il  s'égare  parfois  jusque  dans  Textrôme  Orient,  car  Dybowski  en  a 
envoyé  des  exemplaires  de  la  Daourie  et  de  Kultuk,  l'abbé  David  dit 
en  avoir  tué  pendant  l'hiver  à  Pékin,  en  Chine,  et  Gould  a  même 
signalé  une  capture  au  port  Stevens  en  Australie. 

M.  H.  Seebohm  fait  une  race  à  part,  sous  le  nom'  Charadrius  hiati- 
cula  major,  des  individus  qui  sont  sédentaires  aux  îles  Britanniques, 
mais  il  est  à  remarquer  que  cette  espèce  est  de  taille  assez  variable. 

La  Vai'.  Intermedia  paraît  résider  particulièrement  sur  les  côtes  de 
la  mer  Caspienne  ;  les  individus  du  sud  de  l'Afrique,  qu'on  a  cru 
appartenir  à  cette  race,  ne  dilïércnt  du  type  que  par  une  taiHe  un 
peu  plus  petite. 


-  116  — 

Mœurs.  —  Le  Pluvier  à  collier  émigré  des  contrées  du  Nord  dès 
la  fin  du  mois  d'août,  et  c'est  à  partir  de  cette  époque  qu'on  commence 
à  le  voir  un  peu  partout  dans  l'Europe  centrale  ;  ce  n'est  cependant 
qu'en  septembre  et  en  octobre  qu'il  devient  abondant,  mais  pour 
disparaître  de  nouveau  à  la  fin  de  ce  dernier  mois.  Il  passe  l'hiver 
dans  les  contrées  du  Midi  et  repasse  en  avril.  Les  premiers  que 
nous  voyons,  nous  arrivent  par  familles,  mais  la  masse  voyage  par 
petites  troupes,  presque  toujours  pendant  la  nuit  et  en  volant  à  une 
grande  hauteur.  Au  printemps,  ils  ne  séjournent  presque  pas  dans 
nos  contrées,  ils  semblent  avoir  hâte  de  regagner  les  lieux  de  la 
reproduction . 

Cet  oiseau  vit  sur  les  rives  sablonneuses  des  lacs  et  des  fleuves,  et 
surtout  sur  les  côtes  maritimes  'et  dans  les  dunes;  ce  n'est  que  pen- 
dant ses  voyages  qu'il  se  montre  dans  des  localités  moins  arides.  Son 
vol  est  rapide  et  gracieux  ;  il  marche  et  court  avec  autant  d'aisance 
que  de  rapidité  ;  il  lui  arrive  souvent  de  patauger  dans  l'eau,  et  quand 
il  se  sent  enfoncer,  il  sait  fort  bien  regagner  la  rive  à  la  nage. 

Pendant  ses  migrations  ils  se  montre  prudent  et  méfiant  ;  il  n'est 
pas  aussi  sociable  que  bien  d'autres  oiseaux  de  son  genre,  mais  il 
n'aime  pas  la  solitude  ;  il  désire  être  en  petite  société  et  vit  en  bons 
rapports  avec  ses  semblables.  Dans  ses  migrations,  il  se  joint  parfois 
à  d'autres  petits  échassiers,  surtout  quand  il  se  trouve  isolé,  mais  il 
quitte  aussi  avec  la  plus  grande  facilité  ses  compagnons  de  voyage. 

Dans  les  endroits  où,  en  été,  plusieurs  couples  ont  élu  domicile,  il 
n'est  pas  rare  de  voir  les  mâles  se  livrer  de  petits  combats,  en  se 
comportant  comme  de  vrais  petits  coqs;  mais  ces  luttes  n'ont  jamais 
des  suites  graves  et  paraissent  plutôt  être  des  jeux. 

Son  naturel  est  gai  et  remuant,  et  sa  bonne  humeur  augmente  à 
mesure  que  le  soleil  descend  sous  l'horizon.  C'est  alors  le  moment  où 
il  vole  de  tous  côtés  à  la  recherche  de  sa  nourriture,  tout  en  poursui- 
vant à  grands  cris  et  en  taquinant  ses  semblables;  ces  joyeux  ébats 
se  prolongent  parfois  jusqu'à  l'aurore,  car  ce  n'est  réellement  que 
pendant  les  nuits  sombres  qu'il  se  tient  tranquille.  Durant  le  jour,  au 
contraire,  il  aime  la  tranquillité,  le  repos,  surtout  pendant  les  heures 
les  plus  chaudes,  et  il  est  rare  alors  qu'il  se  fasse  entendre. 

Il  n'en  est  pas  de  même  près  du  nid  :  là  il  veille  avec  soin  sur  sa  chère 
couvée,  court  autour  d'elle  à  la  moindre  apparence  de  danger  en  pous- 
sant les  cris  tul-tul-tral  et  too-it  d'une  voix  plaintive.  Son  cri  habi- 
tuel est  trr  ou  trit,  trai,  qu'il  répète  à  l'époque  des  amours  avec  tant 
de  rapidité  que  cela  devient  presque  un  chant. 


—  117    - 

La  nourriture  de  ce  charmant  oiseau  consiste  en  larves  et  insectes, 
vermisseaux  et  en  une  foule  d'annélides  et  mollusques  marins. 

Rep7^oduction.  —  Le  Pluvier  à  collier  niche  dans  le  sable  du  rivage 
ou  à  proximité  de  la  mer  et  de  préférence  sur  les  langues  de  terre  qui 
s'avancent  dans  la  mer  et  qui  ne  sont  pas  submergées  à  la  marée 
haute.  Suivant  Brehm  et  Paessler,  il  nicherait  parfois  aussi,  surtout  en 
Scandinavie,  aux  bords  des  lacs  et  des  cours  d'eau  do  l'intérieur. 

Cinq  ou  six  couples  nichent  en  société  non  loin  les  uns  des  autres, 
et  la  ponte  a  lieu  entre  la  mi-avril  et  la  fin  de  mai.  1a\  femelle  dépose 
quatre  œufs  dans  une  petite  fosse  creusée  dans  le  sable,  parfois  aussi 
sur  une  litière  formée  de  quelques  fucus.  Les  œufs  sont  d'un  jaune 
terreux  clair  un  peu  roussâtre  et  ornés  de  taches  et  de  points  cendrés 
et  bruns;  ils  mesurent  environ  35  millim.  sur  24.  —  Il  n'y  a  qu'une 
couvée  par  année,  à  moins  que  celle-ci  ne  soit  détruite;  dans  ce  cas, 
la  seconde  ponte  n'est  jamais  que  de  trois  œufs. 

La  durée  de  l'incubation  est  de  quinze  à  dix-sept  jours  suivant  la 
température,  car  la  femelle  laisse  chantier  ses  œufs  par  le  soleil  pen- 
dant une  partie  de  la  journée  ;  il  en  résulte  que  l'éclosion  se  fait  plus 
rapidement  quand  le  temps  est  sec  et  chaud.  Les  poussins  abandon- 
nent leur  nid  dès  qu'ils  se  sont  bien  séchés  et  accompagnent  aussitôt 
leurs  parents  aux  environs.  Au  moindre  danger,  ils  s'aplatissent  dans 
le  sable  où  ils  restent  dans  une  immobilité  parfaite  ;  il  est  alors  fort 
difficile  de  les  apercevoir;  les  parents  veillent  d'ailleurs  sur  leurs 
petits  avec  la  plus  grande  sollicitude. 

186.  —  Le  Petit  Pluvier  à  collier. 
.EGIALITIS  DUBIUS,  ^winh.  ex  Scop. 

(PI.   187.) 

Charadrius  DUBIUS,  Scop.  Del.  Flor.  et  Faioi.  In^uhr.  p.  93  (178G). 
?nARADRius  cuRO.Nicus,  Giuel.  Syst.  nat.  I,  p.  002  (1788). 
Charadrius  philiphinus,  Lath.  (1)  Ind.  Orn.  II,  p.  745  (1790). 
Charadrius  kluviatilis,  Bechst.  NiUury.  Deutachl  IV,  p,  422  (1809). 
Charadrius  minor,  Mey.  u.  Wolf.  Deut.  Yor/clh.  II,  p.  324  (1810). 
Chauaiirius  mini  tus,  Pall.  Zoofjr.  lio^so-As.  II.  p.  144  (1811). 


(1)  C'est  par  erreur  que  quelques  auteurs  attribuent  cette  dénominalion  à  Scopoli,  car  cet  auteur 
ne  parle  de  cette  espèce  que  dans  l'ouvrage  mcutiouné  ci-desbus,  et  seulement  sous  le  nom  de 

f  'h  .    diibius  . 


—   IIS    - 

Charadrius  pusillus,  Horsf.  Tram.  Lin.  Soc.  XIII,  p.  187  (1822). 

^GiALiTis  MiNOR,  Boie,  Isis,  1822,  p.  558. 

J^Igialitis  fluviatilis,  Brm.  Isis,  1830,  p.  787. 

Charadrius  hiaticuloides,  Frankl.  Proc.  Zool.  Soc.  1831,  p.  125. 

Charadrius  zonatus,  Swains.  Birds  of  W.  Afr.  II,  p.  235  pi.  25  (1837). 

J5GIALITIS  cuRONicus,  Keys.  u.  Bl.  Wirbelth.  Eur.  p.  LXXl  (1840). 

HiATicuLA  PHiLippiNA  et  PusiLLA,  Blyth,  Cat.  Mus.  As.  Soc.  p.  360,  (1840). 

HiATicuLA  cuROMCA,  Liclit.  Nomencl.  av.  p.  94  (1854). 

Charadrius  GRACiLis  et  pygm^us,  Brm.  Naumannia,  1855,  pp.  288-89. 

JÎGiALiTis  PYGMxEA  et  GRACILIS,  Brm.  Vogelf.  p.  282  (1855). 

^GiALiTES  ZONATUS,  Hart.  Ovu.  w.  Afr.  p.  216(1857). 

^GIALITES  PUSILLUS,  Swiiih.  lUs,  1860,  p     63. 

vEgialites  philippinus,  Swinh.  Ibis,  1861,  p.  342. 

JÎGiALiTis  MiNUTUS,  Jcrd.  B.  ofLidii  II,  p.  641  (1863). 

Pluvialis  FLUVIATILIS,  Droste,  Vogelw.  Bork.  n.  153  (1860). 

^GiALiTES  DUBius,  Swiiih.  Proc.  Zool.  Soc.  1871,  p.  404. 

-^GiAi.iTis  MiCRORHYNCHUS,  Ridgw.  Am.  ncit.  VIII,  109(1874). 

JEgialitis  jerdoni,  Legge,  Pr.  Zool.  Soc.  1880,  p.  39. 

Charadrius  MINOR  JERDONi,  Seeb.  Charadriidce  p .  132(1887). 

Der  Fluss-Regenpfeifer,  en  allemand. 

The  Little  ringed  Ployer,  en  anglais. 

De  Kleine  Plevier,  en  flamand. 

Taille:  O'^IS  ;  ailes  0,113. 

Description  du  mdle  et  de  la  femelle  adultes.  —  Même  coloration  que  le  pré- 
cédent, dont  il  diffère  surtout  par  une  taille  plus  petite.  —  Parties  posté- 
rieures de  la  tête,  dessus  du  corps  et  couvertures  des  ailes  d'un  cendré  uni- 
forme; bandeau  frontal  blanc;  une  bande  étroite  noire  contourne  la  base  de  la 
mandibule  supérieure  et  se  prolonge,  en  s'élargissant,  à  travers  les  lores  et 
la  région  oculaire  pour  couvrir  la  région  des  oreilles  ;  une  autre  large  bande 
noire,  bordée  de  blanchâtre  en  arrière^  couvre  le  devant  de  la  tête  entre  les 
yeux  ;  gorge  et  cou  blancs,  formant  un  collier  complet  derrière  la  nuque  ; 
un  second  collier  noir  couvre  le  haut  de  la  poitrine  et  contourne  le  collier 
blanc;  grandes  couvertures  des  ailes  légèrement  terminées  de  blanc  ;  rémiges 
brunes,  la  première  à  baguette  blanche  ;  les  deux  rectrices  externes  blanches 
avec  une  tache  noirâtre  sur  le  bord  interne  ;  les  trois  suivantes  cendrées  à  la 
base,  puis  brunes  et  terminées  par  un  large  bord  blanc  ;  enfin,  les  deux  rec- 
trices médianes  cendrées  avec  l'extrémité  noire;  parties  inférieures  et 
sous-caudales  d'un  blanc  pur.  Iris  noirâtre  ;  bord  libre  des  paupières  jau- 
nâtre ;  bec  complètement  noir  ;  pattes  jaunâtres. 

Chez  la  femelle,  le  bandeau  frontal  est  moins  large  et  d'un  noir  moins 
profond  que  chez  le  mâle. 

Jeune.  —  Ressemble  complètement  au  jeune  de  l'espèce  précédente,  avec 
la  seule  différence  qu'il  est  plus  petit  et  que  son  bec    est  entièrement    noir. 

Poussin.  —  Ressemble  également  au  précédent;  tous  deux  portent  sur  le 


-   119    - 

dessus  du  cou  un  large  collier  blanc  ;  mais  ce  collier  est  limité  à  la  nuque 
par  un  bandeau  noir  dans  le  torquatus,  et  encadré  entre  deux  bandeaux  noirs 
dans  le  dubius, 

Hab.  —  Le  petit  Pluvier  à  collier  est  plus  ou  moins  répandu,  en 

ra  été, dans  toute  l'Europe  et  laSibô- 
^  !  :|^  «^-  ''^^^^'^:ii^i':\  rie  jusque  vers  le  60M.  N.  {Bog- 

Ij  danow),  mais  il  ne  se  montre  que 
i.'l-!!:*-^:^  très  accidentellement  en  Angle- 
terre et  n'a  jamais  été  observé  en 
Ecosse  et  en  Irlande  {Harting). 
Il  est  peu  abondant  en  Belgique: 
^.'é'^ù.  le  baron  F.  Fallon  dit  qu'on  le 
rencontre  en  Flandre  et  cà  et  là 


'y^!ï/.4... 


sur  la  Meuse  et  qu'il  niche  dans  le  pays  ;  il  est  très  rare  sur  l'Escaut; 
suivant  M.  A.  de  Lafontaine,  il  est  assez  commun  sur  la  Moselle,  sur 
la  Sûre  et  sur  la  plupart  des  grands  cours  d'eau  du  Luxembourg.  Il 
est  particulièrement  répandu  dans  les  contrées  du  Midi  où  il  est  séden- 
taire et  abondant  on  hiver. 

Il  est  également  sédentaire  dans  le  nord  de  l'Afrique  {D,-ake, 
Loche,  etc.),  sur  la  côte  orientale  depuis  l'Egypte  jusqu'au  Sud  de 
Mozambique  [Peters),  et  sur  la  côte  occidentale,  depuis  la  Sénégambie 
{»S't6Y«"n.soî^)  jusqu'au  Gabon  {Duchailhc)  et  la  Côte  d'Or  {Pel). 

En  Asie  il  est  plus  ou  moius  commun  dans  le  sud  de  la  Sibérie 
[Radde),  dans  les  provinces  de  l'Amour  {von  Schrenk),  dans  toute  la 
Chine  (David),  dans  l'Afghanistan,  le  Népaul,  le  Decan  {Burgess),  en 
Turkostan  [Severtzoïc),  en  Perse  {Filippi),  en  Palestine  (Tristmm). 
Pendant  ses  migrations  il  se  montre  dans  l'Inde  {Jerdon),  à  Ceylan 
{Leggc),  à  Tenasserim  {Hume),  aux  Philippines  {Jagor),  au  Japon 
{Siebold),  à  Java  [KuJil),  à  Sumatra  {Mv.lley),  à  Bornéo  {Diard),  à 
Célèbes  {v.  Rosenberg),  à  la  Nouvelle-Guinée  {Goldie)  et  sur  d'autres 
îles  voisines.  Il  résulte  de  ce  qui  précède,  que  ce  Pluvier  est  répandu 
dans  toute  la  zone  qui  s'étend,  dans  l'ancien  monde,  entre  le  60'^  L  N 
et  le  lOM,  S. 

Mœurs.  —  Le  petit  Pluvier  à  collier  n'habite  l'Europe  centrale 
qu'en  été,  mais  il  est  sédentaire  dans  les  pays  méridionaux;  il  arrive 
dans  nos  contrées  en  mars  ou  avril  et  émigré  en  août  et  septembre. 
Ces  oiseaux  voyagent  par  bandes  assez  considérables,  qui  demeurent 
unies  tant  qu'elles  résident  à  l'étranger.  Ils  \isiteiit  peu  les  côtes  mari- 
times, mais  vivent  presque  constamment  près  des  lleuves,  des  rivières, 


-  1i>0  - 

des  lacs,  des  étangs,  et  de  préférence  près  des  eaux  douces  dont  les 
rives  sont  sablonneuses  et  couvertes  de  gravier;  ils  recherchent  surtout 
les  bancs  de  sable  qui  s'élèvent  hors  de  l'eau.  L'eau  leur  est  d'ailleurs 
indispensable,  car  ils  boivent  souvent  et  se  baignent  une  ou  deux  fois 
par  jour. 

De  même  que  le  précédent,  le  petit  Pluvier  est  un  oiseau  à  demi 
nocturne  ;  c'est  au  crépuscule  et  à  l'aurore  qu'il  se  montre  le  plus  animé 
et  le  plus  gai,  et  par  les  belles  nuits  claires  il  renonce  même  au  repos; 
en  plein  jour,  au  contraire,  surtout  pendant  les  heures  les  plus  chau- 
des, il  se  livre  complètement  au  sommeil.  Par  ses  allures,  il  ressem- 
ble aussi  beaucoup  au  Pluvier  à  collier  ;  comme  ce  dernier,  il  est  vif, 
léger  et  rapide  dans  ses  mouvements  ;  il  court  avec  une  rapidité  sur- 
prenante, vole  avec  autant  de  grâce  que  de  vitesse,  ordinairement  en 
ligne  droite  et  en  rasant  le  sol  ou  l'eau,  mais  il  s'élève  très  haut  dans 
les  airs  quand  il  veut  franchir  une  grande  distance.  Pendant  la  jour- 
née, cet  oiseau  se  montre  un  peu  apathique,  presque  lourd,  car  il  ne 
se  décide  pas  vite  à  fuir  devant  le  danger;  quand  on  s'approche  de 
lui  pendant  son  sommeil,  il  ne   s'envole  jamais  loin,  souvent  il   se 
contente  de  chercher  un   refuge   sur  les  feuilles  des   nénuphars  ou 
sur   les    amas  de  potamots   flottant  sur  l'eau  à  quelque  distance  du 
rivage.   Au   crépuscule,  au  contraire,  il  s'anime,  se  livre  à  ses  ébats 
en  faisant  retentir  l'air  de  ses  crisjoyeux,  en  un  mot,  ce  n'est  plus  le 
môme  oiseau. 

Il  est  très  sociable  et  vit  en  paix  avec  les  autres  petits  oiseaux 
comme  avec  ses  semblables  ;  plusieurs  couples  nichent  souvent  les 
uns  non  loin  des  autres,  et  même  parfois  dans  la  compagnie  d'autres 
espèces  ;  la  bonne  harmonie  règne  toujours  dans  le  voisinage  des  nids, 
bien  que  les  mâles  se  querellent  parfois  un  peu  entre  eux,  mais  ces 
querelles  paraissent  plutôt  être  des  jeux  que  des  combats.  Mâle  et 
femelle  sont  inséparables  et  vivent  dans  un  accord  parfait. 

Son  cri  habituel  diffère  beaucoup  de  celui  des  autres  Pluviers  ;  il 
peut  se  rendre  par  diè  ou  diu  très  bref  ;  son  cri  d'amour  est  un  vérita- 
ble chant  qui  se  termine  par  un  trille  :  duh,  du,  dull,  lull  luUullull^ 
et  ainsi  de  suite. 

Cet  oiseau  se  nourrit  de  larves,  d'insectes  et  de  petits  mollusques  ; 
il  retourne  les  pierres  pour  trouver  sa  proie  et  la  chasse  même  dans 
l'eau. 

Reproduction.  —  Lé  petit  Pluvier  à  collier  niche  à  peu  distance  de 
l'eau,  sur  un  lit  de  gravier  ou  de  sable,  ou  dans  un  endroit  où  le 


—   \2l   — 

gazon  est  très  court.  Il  ne  fait  pas  de  nid,  mais  creuse  une  petite  fosse 
dans  le  sable  pour  y  déposer  ses  œufs,  Ordinairement,  cependant,  cette 
petite  fosse  est  garnie  de  gravier  à  l'intérieur  et  bordée  de  petits  cailloux. 
La  ponte  a  lieu  à  la  fin  d'avril  ou  dans  le  courant  de  mai  et  se  compose 
généralement  de  quatre  œufs,  jamais  plus.  On  trouve  cependant  par- 
fois encore  des  œufs  jusqu'à  la  fin  de  juin,  car  la  femelle  pond  souvent 
trois  et  quatre  fois  de  suite  quand  sa  couvée  a  été  détruite,  ce  qui 
arrive  assez  souvent,  mais  elle  n'élève  jamais  plus  d'une  couvée. 

Les  œufs  ressemblent  aussi  à  ceux  de  l'espèce  précédente,  mais  ils 
sont  plus  petits,  d'un  roux  jaunâtre  plus  pâle  et  tirant  souvent  sur  le 
verdâtre;  ils  sont  plus  ou  moins  tachetés  de  gris,  do  brun  et  de  noir 
et  mesurent  environ  31  milliui.  sur  22. 

La  durée  de  l'incubation  est  de  seize  à  dix-sept  jours,  à  moins  que 
le  temps  ne  soit  très  cliaud  et  sec,  ce  qui  hâte  toujours  l'éclosion  d'un 
jour  ou  deux.  Pendant  que  la  femelle  couve,  le  mâle  veille  sur  elle  et 
l'avertit  de  l'approche  de  l'ennemi,  afin  qu'elle  puisse  se  sauver  à 
temps.  A  peine  éclos  et  séchés,  les  poussins  suivent  partout  leurs 
parents,  qui  ont  pour  eux  la  plus  grande  sollicitude.  Au  commence- 
ment, la  mère  leur  met  les  aliments  dans  le  bec,  mais  au  bout  de  quel- 
ques jours  ils  sont  en  état  de  prendre  eux-mêmes  la  nourriture  que  les 
parents  leur  montrent.  Au  premier  cri  d'alarme,  les  poussins  s'apla- 
tissent entre  des  cailloux  ou  des  herbes,  où  ils  restent  dans  une  immo- 
bilité absolue.  A  trois  semaines,  selon  Naumann,  ils  peuvent  se  passer 
de  leurs  parents,  mais  ils  restent  cependant  avec  eux  et  les  accompa- 
gnent dans  leur  migration  d'automne. 

187.  —  Le  Pluvier  de  Kent 
^GL\LITIS  GANTIANUS,  Boie  ex  Lath, 

(PI.   188). 

CiiARADRius  C.VNTIANUS.  Lath.  lucl.  Ont.  suppl.  p.  66  (1801). 
Chauadriusalbifrons,  Wolfet  Mey.  Vog.  Deutschl.  I,  p.  180(1805). 
Charadrius  littoralis,  Bechst.  Nat.  Deutschl.  IV,  p.  430  (1809). 
.^GiALiTis  CANTiANLis,  Boie,  Inis,  1822,  p.  558. 

yEaiALITIS  CANT1ANA,  ALBIFRONS  Ct  ALIUGULARIS,  Hrin.   Isis,    lS30,   p.  9<S7. 

HiATicuLACANTiANA,  Hlylli,  Cat.B.  M'fs.  As.  Soc  p.  203  (1849). 
HrATicuLA  ELEGANS,  Licht.  Nomoicl.  ac.  p.  91  (1838). 
iEiiiALiTis  RUFiCEPS  (et  HOMEYERi  ?)  Brm.  Viif/elf.  p.  283  (1855). 
.^GiALOPHiLU-s  CANTiANUS,  Gould,  7/«nf/6.  D.  Auslf.  II,  p.  234  (1856). 

/E'.IALITES  DEALB.\TUS,  Switlll.   P.   Z.  Soc,    1<S70,  p .  I  38. 

EuuuoMiA.s  (ANTiANUs,  Bogd.  Coisp.  (IC.  I»ip.  liOSlf.  p.  75  (I8S4). 

Chakadiuu.s  CANTIANUS  MiNUTUS  et  DEALUATUrf,  Scob.  Chara(triiil<i\  p.  ]<■.'.».  I7i)  ilss7t. 

TuMic  II.  —  1888,  IG 


—  122  — 

Der  See  Regenpfeifeu,  en  allemand. 
The  Kentish  Ployer,  en  anglais. 
De  Strandplevier,  eu  flamand. 

Var.  îMivosa 

^GiALiTis  NivosA,  Baird,  Gass.  etLaw.  B.  N.  Am.  p,  696,  pi.  90  (U 
^GiALiTis  CANTiANUS  vcir.  Nivosus,  Coues,  Chech-list,  N.  Am.  B.  p.  135  (1873). 
^GiALiTis  ALEXANDRiNA  NivosA,  Baird,  Brew.  et  Ridgw.  Water  BirdsN.  Am.  I.p.  164 
(1884). 

Charadrius  CANTIANUS  NIVOSUS,  Seeb.  C/Mradriidœ,  p.  171  (1887). 

Taille  :0^'ib  ;  ailes  0,11. 

Description  du  mâle  adulte.  —  Vertex  et  nuque  d'un  roux  clair  ;  front, 
raie  sourcilière,  joues,  gorge,  collier  au  bas  de  la  nuque  et  toutes  les  parties 
inférieures  d'un  blanc  pur  ;  partie  antérieure  du  vertex,  lores,une  bande  der- 
rière l'œil  et  couvrant  en  partie  la  région  des  oreilles,  ainsi  qu'une  grande 
tacliesur  les  côtés  de  la  poitrine,  d'un  noir  plus  ou  moins  profond;  dessus  du 
corps  et  ailes  d'un  cendré  brunâtre;  grandes  couvertures  des  ailles  terminées 
de  blanc  ;  rémiges  d'un  brun  noirâtre,  avec  la  baguette  en  partie  blanche  ; 
rectrices  latérales  blanches,  les  médianes  cendrées,  mais  terminées  de  brun. 
Iris  d'un  brun  foncé  ;  bec  et  pattes  noirs. 

Femelle.  —  Vertex  et  nuque  d'un  cendré  varié  de  roussâtre  ;  la  bande 
noire  en  arrière  du  front  plus  étroite,  les  autres  parties  qui  sont  noires  chez 
le  mâle  sont  ici  d'un  brun  cendré  ;  le  reste  du  plumage  comme  chez  le  mâle. 

Jeune.  —  Diffère  des  adultes  par  l'absence  de  noir  à  la  tête  et  sur  les  côtés 
delà  poitrine  ;  dessus  de  la  tête,  nuque,  lores,  région  des  oreilles  et  la  tache 
aux  côtés  de  la  poitrine,  d'un  cendré  roussâtre  ;  couvertures  des  ailes  plus 
ou  moins  bordées  de  cendré  clair  ;  le  reste  comme  chez  les  adultes,  mais  le 
blanc  du  front  moins  haut. 

Poussin.  —  Ressemble  à  celui  de  l'espèce  précédente,  mais  il  est  dépourvu 
de  bandeau  noir. 

Var.  Nivosa.  —  Diffère  du  type  par  ses  lores  blancs  et  par  ses  pattes  de 
couleur  claire. 

Hab.  —  Cette  espèce  est  plus  ou  moins  répandue,  suivant  la  saison, 

*'"■-,■    ./■"'• -"T. ç,r}^3î^^^  sur  les  côtes  maritimes  de  pres- 

■  i;|^M|j,     '' ,   ""     I  V  ''^=R^:^y'|  que  toute  l'Europe,  mais  elle  est 

.  :    yj-;  ..                           W^Hj  ^^^^  ^  l'intérieur  des  pays  ;  elle 

;jy,  .4_4-      ^'^                 '-^'^"^  ne    dépasse    cependant   pas   au 

4-^N^'f       r    ''  '^^'''^i:^'--'-'''^  Nord,   le  midi  de  la  Norwège 

Tll'^ir^""'"'''''^^'  •• '^'^~^ftfe5^'^''i  iCollett]ei  delà  Siièàe  (Nilsso7i). 

^^tîWfpW*'        -:/fe^-^fiâïte^1  Elle  est  commune  en  Belcrique, 

TF"Frt-[^-Hi"H  jiiHM  ^^  printemps  et  en  automne,  sur 

rc„-i.„..,.,»,o.Ko«sov,^» .Tfwô ^.,'„irMwr'^'^^^^^-^^^^s^^  j^g  hords  dc  la  mer  où  quelques 

couples  paraissent  nicher  ;  elle  remonte  souvent  l'Escaut  et  on  en  tire 


même  aux  environs  d'Anvers.  Dans  le  midi  de  l'Europe,  cet  oiseau 
est  également  plus  ou  moins  commun  et  sédentaire  sur  les  côtes,  rare 
à  l'intérieur  et  peu  abondant  sur  les  côtes  de  l'Adriatique  ;  il  est  rare 
en  Sicile  [Doclerlcin)^  mais  il  est  commun  et  sédentaire  aux  îles  do 
Sardaigne  et  de  Corse  {Saloadori,  Giglioli),en  Grèce, en  Asie  Mineure 
[Kruper),  en  Turquie  {Alléon,  Robson)  et  en  Palestine  {Tristraw.). 
A  l'Est  on  rencontre  cet  oiseau  jusque  sur  les  rives  des  lacs  salés  de 
la  Daourie  [PaUas)  et  du  Japon  {Blakiston  )  ;  on  l'observe  aussi  sur 
les  côtes  de  l'Inde  (Jerdon),  de  Ceylan  [Legge]^  de  la  Chine  et  de 
Formose  {Sioinhoe^  David),  ainsi  que  de  ITndo-Chine  {Seehohm). 

Il  est  également  commun  dans  le  nord  de  l'Afrique  [Loche,  Salrin, 
etc.),  en  Egypte  et  en  Nubie  [Shelley)  jusqu'au  cap  de  Bonne-Es- 
pérance {La yard)  ,  ainsi  qu'aux  Ils  Canaries,  Madeires  et  Açores 
{Bol le,  Bu  Cane). 

La  var.  Nivosa  est  propre  à  l'Amérique  où  elle  habite  les  côtes  du 
Pacifique  depuis  la  Californie  jusqu'au  nord  du  Chili,  et  se  montre  à 
l'Est  jusqu'au  grand  lac  salé  de  TUtah  [Seebohrn). 

Mœuj's.  —  Ce  pluvier  habite  les  côtes  maritimes  et  les  bords  des 
lacs  salés,  et  ne  paraît  se  montrer  près  des  eaux  douces  que  pendant 
ses  migrations.  Dès  la  fin  d'août,  ces  Pluviers  commencent  à  se  ras- 
sembler en  petites  troupes  pour  errer  pendant  quelque  temps  encore 
le  long  des  côtes  et  des  licuves,  qu'ils  ne  remontent  cependant  pas 
très  loin.  M.  A.  Crocgaert  nous  apprend  qu'on  en  rencontre  alors 
fréquemment  le  long  de  l'Escaut,  à  Bath,  à  Saftingen  et  plus  loin, 
mais  qu'ils  ne  remontent  pas  beaucoup  le  ileuvc  et  qu'on  n'en  tire 
que  quelques-uns,  en  août  et  en  septembre,  devant  Anvers.  Ce  n'est 
qu'au  commencement  de  novembre  qu'ils  nous  quittent  définitivement. 
Ils  voyagent  par  bandes  plus  ou  moins  nombreuses,  en  suivant  autant 
que  possible  les  côtes  maritimes  ;  mais  on  avril  et  mai,  ils  nous  re- 
viennent par  petites  troupes  et  môme  par  couples. 

Si  cette  cs[)éce  est  comnume  sur  la  côte  des  Flandres  à  l'époque 
des  passages,  il  n'en  est  pas  de  môme  au  milieu  de  l'été,  car  les  cou- 
ples qui  nichent  en  Belgique  sont  fort  peu  nombreux. 

Quoique  ce  Pluvier  soit  un  habitant  des  côtes,  il  recherche  cepen- 
dant les  endroits  plus  ou  moins  verdoyants  qui  ne  soient  pas  trop 
éloignés  de  la  mer.  Il  aime  aussi  les  lacs  salés,  bien  que  ceux-ci  soient 
parfois  à  do  grandes  distances  de  la  nier  ;  ainsi,  il  est  commun  près 
des  lacs  de  la  Hongrie,  de  la  I)aouri(\  du  Turkcstan,  etc.  Comuie  les 
espèces  précédentes,  c'est  un  oiseau  à  inoitif"*  nocturne,  car  il  se  mou- 


-    124  — 

Ire  toujours  le  plus  animé  vers  le  soir  et  au  matin,  ainsi  que  pendant 
les  nuits  claires  ;  le  milieu  de  la  journée,  au  contraire,  est  employé 
au  repos. Ses  habitudes  ne  diiïèrent  du  reste  guère  de  celles  des  Ora- 
velots  précédents.  Il  est  farouche  et  prudent  :  dès  qu'il  se  voit  pour- 
suivi, il  cherche  son  salut  dans  une  course  rapide  ;  si  cela  ne  suffit 
pas,  il  s'élève  dans  les  airs  en  décrivant  de  grands  cercles  et  va  s'abat- 
tre dans  un  autre  endroit.  Les  couples  vivent  dans  une  union  parfaite 
et  en  bonne  intelligence  avec  leurs  voisins,  môme  quand  ceux-ci  ap- 
partiennent à  d'autres  espèces.  Son  cri  d'appel  peut  se  rendre  parpi«' 
eipitt-pitt  ;  près  du  nid  ces  cris  sont  répétés  rapidement  de  manière 
à  former  un  trille  ;  le  cri  d'alarme  et  ptirrr. 

La  nourriture  de  cet  oiseau  se  compose  de  petits  animaux  marins 
tels  que  annélides,  mollusques  etcrustacés,  ainsi  que  de  vers, de  larves 
et  d'insectes. 

Reproduction.  —  C'est  vers  la  fin  de  mai  que  le  Pluvier  de  Kent 
commence  à  nicher.  Il  se  choisit  une  place  bien  à  l'abri  des  inon- 
dations et  parfois  à  une  distance  de  plusieurs  centaines  de  mètres 
do  l'eau.  Il  s'empare  d'une  petite  fosse  naturelle  ou  en  creuse  une  avec 
ses  pattes,  et  la  garnit  de  quelques  brins  ou  de  feuilles; parfois  même 
les  oeufs  reposent  sur  la  terre  ou  sur  le  sable  sans  aucune  litière.  Ces 
œufs  sont  toujours  placés  le  bout  aigu  en  dedans,  ce  que  font  du  reste 
la  plupart  des  Pluviers.  Ils  sont  un  peu  pyriformes,  sans  luisant,  d'un 
jaune  terreux  ou  d'un  vert  grisâtre  avec  des  traits, des  mouchetures  et 
des  taches  d'un  brun  noirâtre. Ils  mesurent  environ  33  milhm.  sur  23. 

La  durée  de  l'incubation  est  de  quinze  à  dix-sept  jours.  Dès  leur 
éclosion,les  jeunes  quittent  le  nid  pour  suivre  leurs  parents, et  ceux-ci 
se  montrent  alors  plus  inquiets  que  jamais, car  ils  ont  leur  couvée  à  pro- 
téger et  à  défendre  ;  aussi  la  conduisent-ils  dans  un  endroit  où  le  ter- 
rain est  irrégulier,  caillouteux  ou  garni  de  touffes  d'herbes,  afin  qu'au 
besoin  les  poussins  puissent  trouver  des  places  convenables  pour  se 
cacher  en  se  rasant. 

GENRE  CVI. 

SQUATAROLE.    —  SQUAT.» EOL.\ . 

Vanellus,  Briss.  Ont.  V.  p.  103  (1760). 
Tringa,  Lin.  >S>;.  aot.  I.  p.  250  (1766). 
Ch.vradrius,  Pall.  Reiaen  Rass.  R.  III,  p.  099  (1773). 
Squatarola,  Leaeh,  Sy^t.Cat.  Mon.  etc.  p.  29  (1816). 
Pluvialis,  Macg.  Hl^f.  llr.  B.  IV,  p.  86  ;1852;. 

Car.  —  Ce  genre  ne  diffère  du  genre  CJiaradrius  que  par  la  présence 
d'un  pouce  rudimeiitaire. 


-  125  - 

188.  —  Le  Squatarole  ou  Vanneau  à  ventre  noir 
SQUATAROLA  IIELVEÏIGA,  Keys.  et  Bl.  ex  Briss. 

(PI.  184)). 
Vanellls  griseqs,  varius  el  helveticus,  Briss.  On/.  V,  p.  100-106  (1760). 

TrINGA  HELVETICA,   VARIA  et   SQUATAROLA,  L'ilï.  SlJSt.  HClL  I,  p.   252  (1766). 

CiiARADRius  HYPOMELUS,  Pall.  Rcise  Russ.  Eeichs,  III,  p.  699  (1773). 

Charadrius  x.evius,  Giiiel.  Si/sl.  )i"f.  I,  p.  692  (1788). 

Vanellus  melanogaster,  Bechst.  NcUurg.Deiitschl.  IV,  356  (1809) . 

Charadrius  pardela,  Pall.  Zoogr.  Bos^o  As.  II,  p.  142  (1811). 

SQUATAROLA  GRISEA,  Leacli,  Cat.  Mam.  B.  Br.  Mus.  p.  29(1816). 

SQUATAROLA  varia,  Roie,  Ids,  1822,  p.  558. 

SQUATAROLA  C1NEREA,  Fleiii.  Brit.  an.  p.  111  (1828.) 

Charadrius  squatarola,  Nauni.  VoV/-  Deutschl.  VII,  p.  249  (1834). 

Squatarola  HELVETICA,  Kcys.  et  Blas.  ^YirbeU.  Eur.  p.  207(1840). 

Squatarola  MELANOGASTER,  Malh.  (nec  Swains),  Fcicu.  orn.  Sicile.,'^.  166  (1843). 

Vanellus  squat.\rola,  Schl.  Rev.  crit.  p.  LXXXIV  (1844) . 

Pluvialis  SQUATAROLA,  Macg.  Hist.  Biit.  B.  IV,  p.  86(1852). 

Squatarola  wiLSONi,  Licht.  Nomencl.  av.  p.  95(1854). 

Squatarola  loxgirostris,  A.  E.  Brm.   Jown.  f.  Orn.  1854,  p.  79. 

Squatarola  MEG.A.RiiYNCHus,  A.  Brm.  Yogelf.  p.  284  (1855). 

Squatarola  RHYNCHOMEGA,  Bonap.  Compt.reud.  1850,   p.  416. 

Pluvialis  varius,  Schl.  Mus.  P.-B.  (Cursores),  p.  53  (1865). 

Charadrius  VARIUS,  F.insch  et  Hartl.  Vog.  0.  Afr.  p.  644(1870). 

Charadrius  helveticus,  Sceb.  Brit.  Blrcls,  III,  p.  44(1885). 

Der  Kibisz-Regenpfeifer,  en  allemand. 

The  Grey  PLf)VER,  en  anglais. 

DeZilverplevier,  en  flamand. 

Taille  :  0,"'23  ;  ailes  0,195  ;  tarses  0,047. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes  en  été.  —  Front  et  raie  sour- 
cilière  d'un  bhinc  pur  ;  dessus  de  la  tête,  arrière  du  cou  et  côtés  de  la  poi- 
tiine  également  blancs,  mais  plus  ou  moins  variés  de  noir;  dessus  du  corps 
noir,  mais  totites  les  plumes  terminées  de  blanc,  et  cette  dernière  teinte 
il  )inine  quelquefois;  sus-caudales  blanches  barrées  de  noir;  côtés  de  la  t(')te, 
gorge,  milieu  de  la  poitrine,  abdomen  et  flancs  d'un  l)eau  noir  ;  jaml)es, 
bas-ventre  et  sous-caudales  d'un  blanc  pur,  mais  les  sous-caudalcs  laté- 
rales tachées  de  noir  ;  rémiges  d'un  brun  noir  avec  la  base  du  bord  interne 
et  les  baguettes  blanches  ;  queue  blanche  barrée  de  noir.  Iris  brun  foncé; 
bec  et  pattes  noirs. 

Mâle  et  femelle  en  hiver.  —  De  sus  delà  tète  et  du  corps  iriin  brun  noi- 
râtre varié  de  taches  jaunâtres;  arrière  du  cou  cendré  varié  de  brun  :  Iront 
et  parties  inférieures  d'un  l)lanc  assez  pur  avec  dos  taches  allongées  brunes, 
sauf  sur  le  milieu  du  ventre  qui  est  sans  taches  ;  couvertures  des  ailes  d'un 


~  126 


cendré  brunâtre  mais  bordées  de  blanchâtre  et  de  jaunâtre;  le  reste  comme 
en  été. 

Il  est  à  remarquer  que  dans  son  plumage  d'hiver,  cet  oiseau  ressemble 
beaucouj)  au  Pluvier  doré  dans  la  même  saison  ;  mais  la  présence  d'un  petit 
pouce  chez  le  Squatarole  ne  permet  pas  de  confondre  ce  dernier  avec  le 
Pluvier  doré,  qui  n'en  a  pas. 

Jeune.  —  Parties  supérieures  d'un  cendré  brunâtre  avec  les  bordures  des 
plumes  plus  claires  ;  parties  inférieures  d'un  blanc  jaunâtre  varié  de  cendré 
sur  les  côtés  de  la  tête  et  de  la  poitrine  ;  couvertures  des  ailes  bordées  de 
blanchâtre. 

Hab. — C'est  un  oiseau  cosmopolite,  qui  niche  dans  la  zone  arctique 

^  jusqu'au  74°  et  se  répand,  lors 
des  migrations,  dans  toutes  les 
parties  du  monde.  Il  est  de  pas- 
sage régulier  dans  toute  l'Eu- 
rope, et  se  montre  alors  en 
assez  grand  nombre  en  Belgique, 
particulièrement  dans  les  Flan- 
dres et  la  province  d'Anvers. 
Il  hiverne  dans  le  midi  de  l'Eu- 
rope et  en  Afrique,  où  on  le  rencontre  depuis  l'Algérie  (Loche), 
le  Maroc  {Draàe)  et  l'Egypte  (de  Ileuglin),  jusqu'au  cap  de  Bonne- 
Espérance  [Layard);  on  a  capturé  de  ces  oiseaux  à  Zanzibar  {Ki)-k), 
à  la  Côte  d'Or  {Schlégel),  en  Sénégambie(  Verreaux),  aux  îles  Seychelles 
et  Maurice  {Netvion),  à  Madagascar  {Hartlauh),  etc. 

En  Asie  on  observe  cette  espèce,  suivant  les  saisons,  dans  toute  la 
Sibérie  jusqu'au  Kamtschatka  {Kittlitz)  et  le  Japon  (Siebold),  en 
Chine,  à  F ormose  [Swinhoe),  dans  l'Inde  (Jerdon),  à  Ceylon  {Legge), 
dans  l'Indo-Chine  {Humé),  aux  îles  Philippines  Gleyer),  Bornéo 
{Diard),  Labuan  [Mottley),  Timor,  Nouvelle-Guinée  [S.  Mûl/er), 
Java  (Schlégel),  Célèbes  [von  Rosenberg),  Halmahera  [Wallace),  Salo- 
mon  (Ramsag)  et  en  Australie  (Goidd). 

Enfin,  dans  le  Nouveau  Monde,  on  rencontre  le  squatarole  au 
Groenland  (Reinhardi),  dans  l'Alaska,  où  il  est  cependant  rare 
{Murdoch),  dans  toute  l'Amérique  du  Nord  {Baird),  ainsi  qu'au 
Mexique  {Wiite),  au  Guatemala  (Salvin),  à  Cuba  [Gundlach),  à  Tri- 
nidad  {Léautaud),  et  il  se  montre  probablement  de  temps  en  temps 
dans  diverses  parties  de  l'Amérique  méridionale. 

Mœurs.  —  Le  Squatarole,  aussi  appelé  Vanneau  suisse  et  Vanneau 


-   iï>7  — 

à  ventre  noir,  est  pour  nos  contrées  un  oiseau  de  passage.  Sa  véri- 
table patrie  comprend  la  région  boréale,  où  il  se  plaît  dans  ces  vastes 
marais  tourbeux  connus  sous  le  nom  de  tundras.  Il  quitte  ces  lieux 
par  troupes,  depuis  septembre  jusqu'en  novembre,  en  suivant  une 
direction  sud-ouest  et  en  longeant  autant  que  possible  les  côtes  mari- 
times. Ces  oiseaux  retournent  dans  le  Nord  en  mars  ou  avril,  et  les 
passages  continuent  souvent  jusqu'aux  premiers  jours  de  juin.  Ces 
migrations  se  font  en  plein  jour  ou  pendant  la  nuit,  et  les  bandes 
volent  généralement  à  une  grande  hauteur  et  en  faisant  souvent 
retentir  l'air  de  leurs  cris  ;  quand  les  oiseaux  sont  nombreux,  ils 
volent  sur  deux  lignes  de  façon  à  former  un  angle  aigu. 

Lorsque  cette  espèce  se  trouve  éloignée  des  tundras,  elle  recherche 
de  préférence  les  bords  de  la  mer,  des  lacs,  des  étangs  et  des  rivières, 
mais  à  peu  de  distance  des  jachères  et  des  pâturages,  où  elle  passe 
une  grande  partie  de  son  temps.  Elle  se  repose  peu  durant  la  nuit, 
mais  elle  aime  à  dormir  vers  le  milieu  de  la  journée. 

Par  ses  habitudes,  le  Squatarole  ressemble  beaucoup  au  Pluvier 
doré.  Il  marche  le  corps  horizontal  et  court  à  grands  pas  et  avec 
rapidité  ;  mais  il  est  moins  remuant  que  ce  dernier  et  paraît  même 
un  peu  apathique  quand  on  l'observe  vers  l'heure  de  midi.  Il  vole 
souvent  en  rasant  le  sol,  mais  il  sait  s'élever  à  une  grande  hauteur  et 
franchir  l'espace  avec  la  vitesse  d'une  Hirondelle.  Il  est  très  farouche, 
surtout  quand  il  est  en  société,  mais  les  jeunes  se  montrent  un 
peu  moins  méfiants.  La  vue  d'un  homme  le  met  de  suite  sur  ses 
gardes,  et  il  s'envole  dès  qu'on  n'est  plus  qu'à  une  centaine  de 
mètres  de  l'oiseau  ;  ce  n'est  que  pondant  la  partie  la  plus  chaude  de  la 
journée,  alors  qu'il  se  livre  au  repos,  qu'il  est  possible  de  l'approcher 
de  plus  près. 

Cet  oiseau  est  très  sociable,  se  réunit  souvent  en  troupes  nombreuses 
et  se  mêle  même  à  d'autres  petits  échassiers.  Suivant  Naumann,  son 
cri  habituel  ressemblerait  à  celui  du  Pluvier  doré,  mais  il  serait  d'un 
ton  plus  élevé  ;  il  le  rend  par  tliéi.  M.  H.  Seebohm,  qui  a  observé 
cet  oiseau  dans  les  tundras  du  Nord,  rend  ce  cri  parafe/-;'  ou  klip,  le 
kl  prononcé  comme  s'il  était  séparé  de  la  syllabe  suivante  ;  le  même 
auteur  mentionne  encore  le  cri  de  heup  {kop),  que  l'oiseau  fait  enten- 
dre dans  les  moments  de  danger. 

Sa  nourriture  consiste  en  larves,  insectes  et  mollusques  aquatiques 
et  terrestres,  ainsi  qu'en  annôlides  marins  ;  c'est  principalement  vers 
le  soir  et  au  matin  qu'il  cherche  sa  nourriture,  et  il  avale  généralement 


—  1^28  — 

du  gravier  pour  faciliter  sa  digestion.  Il  se  baigne  volontiers,  aussi 
bien  pendant  le  jour  que  dans  la  soirée. 

Reproduction.  —  Suivant  M.  Seebohm,  l'oiseau  recherclie  pour 
nicher  les  parties  basses  et  tourbeuses  de  la  tundra.  Le  nid  est  placé 
sur  un  petit  monticule,  d'un  pied  ou  deux  de  hauteur,  formé  d'un 
amas  de  tourbe  et  couvert  de  mousse  et  de  feuilles.  C'est  dans  une 
dépression  de  cette  mousse  et  de  ces  feuilles  que  la  femelle  dépose  ses 
quatre  œufs  vers  la  fin  de  juin  ou  en  juillet;  c'est  du  moins  à  cette 
époque  que  MM.  Seebohm  et  Harvie  Brown  découvrirent  dix  de  ces 
nids  dans  la  vallée  de  la  Petchora  à  68*^  de  lat.  Middendorff  a  trouvé 
de  ces  nids  en  Sibérie  sous  le  71°  et  le  74°,  et  vers  la  même  époque. 
D'après  les  figures  données  dans  \lbis,  ces  œufs  sont  pyriformes,  d'un 
jaune  terreux  et  plus  ou  moins  tachés  de  brun  ;  ces  taches  sont  les 
unes  petites,  les  autres  grandes,  mais  toujours  de  forme  très  irrégu- 
lière ;  ils  mesurent  environ  52  millim.  sur  35  (1).  Pendant  l'incuba- 
tion, la  femelle  se  montre  très  remuante,  courant  par-ci  par-là  et 
poussant  des  cris  d'inquiétude  ;  le  mâle,  au  contraire,  se  tient  assez 
éloigné  du  nid  et  reste  calme  et  silencieux  ;  mais  plus  tard,  quand 
les  œufs  sont  sur  le  point  d'éclore,  le  mâle  devient  aussi  inquiet  que 
sa  femelle  et  tous  deux  jettent  alors  des  cris  d'alarme. 

GENRE  CVII 

VANNEAU.  —  VANELLUS. 

VANELLUs,Briss.  Omith.  V.  p.  94  (1766). 
TRiNGA,Lin.5'(/6<.  nat.  1,  p.  248(1766). 
Charadrius,  Pall.Zoo^r.  Rosso,  As.  II,  p.  132(1811). 

Car. — Plumes  de  l'occiput  très  longues,  effilées  et  formant  une  huppe  d'un 
grand  développement.  Bec  plus  court  que  la  tête,  assez  grêle,  brusquemeut 
renflé  vers  la  pointe  ;  narines  latérales  allongées  mais  étroites,  parallèles  au 
bord  de  la  mandibule  supérieure  ;  sillons  nasaux  se  prolongeant  jusqu'au 
renflement  du  bec  ;  yeux  assez  grands  ;  ailes  sub-aiguës,  atteignant  l'extré- 
mité de  la  queue,  pourvues  d'un  tubercule  qui  se  prolonge  parfois  en  un 
éperon,  amples^  à  rémiges  larges;  queue  de  longueur  moyenne,  carrée;  tarses 
longs,  assez  robustes,  réticulés  ;  quatre  doigts  :  l'externe  réuni  au  médian  par 
une  petite  membrane,  le  pouce  court,  placé  assez  haut  et  ne  reposant  pas  k 
terre. 

Hab.  —  Le  genre  Vanneau,  dont  on  ne  connaît  que  trois  ou  quatre 

(l)  Voy.  pour  la  reproduction  du  Squatarole  :  Ibis,  1876,  p.  222  pi.  V.  —  Seebobm,  A  hiatory 
of  Brili^h  Birds,  t.  III,  p.  45  (1885). 


—  129  — 

espèces,  est  représenté  en  Europe,  en  Afrique,  en  Asie  et  dans  l'Amé- 
rique méridionale. 

189.  —  Le  Vanneau  huppé. 
VANELLUS  VULGARIS,  Bechst. 

(PI.  180) 

Tringa  VANELLUS,  Lin.  Sî/st.  nat.  I,  p.  248  (1766). 
Vanellus  capella,  Schacf.  Mus.  Orn.  p.  49  (1789). 
Vanellus  A^ULGARis,  Beclist.  Ornith.  Taschenb.  Il,  p.  313  (1803). 
Vanellus  cristatus,  Wolf  etMey.  Yog.  Deutschl.  II,  p.  110  (1805).     . 
Vanellus  GAVL\,Leach,  Syst.  Cat.  M.B.  Br.  il/«s.p.29  (1816). 
Ch.\radriusgavla.,  Licht.  Vcr^.  DowW.  p.70  (1823), 
Vanellus  bicornis,  C.  Brm.  Isis,  1830  p.  987. 
Charadrius VANELLUS,  Pall.Zoo^T.jRosso-As.  II,  p.  132(1831) 

Vanellus  cristatus  communis,  bicornis  et  crispus,  A.  Brm.  Verz.  Samml.  C.  Brm. 
p.  11  (1866). 

Taille  :  0,  "^27  ;  ailes  0,23  ;   tarses  0,053. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes.  —  Front,  sommet  de  la  tête, 
huppe,  une  bande  sous  l'œil,  tour  du  bec,  gorge  et  poitrine,  d'un  beau  noir 
lustré;  nuque  d'un  cendré  varié  de  verdâtre  et  de  roussâtre  ;  raie  sour- 
cilière  et  côtés  de  la  tête  d'un  blanc  varié  de  noir  ;  côtés  du  cou  d'un  blanc 
pui"  ;  parties  supérieures  du  corps  d'un  vert  bronzé  avec  des  reflets  pourpres 
sur  les  scapulaires;  couvertures  des  ailes  d'un  vert  sombre  à  reflets  bleuâtres; 
rémiges  noires,  les  trois  premières  terminées  de  cendré;  queue  blanche  avec 
la  moitié  terminale  noire,  sauf  la  première  rectrice  qui  est  d'un  blanc  uni- 
forme ;  sus-caudales  d'un  roux  ardent;  abdomen  d'un  blanc  pur;  sous- 
caudales  d'un   roux  Isabelle.  Iris  brun  foncé  ;  bec  noir;  pattes  rougeâtrcs. 

Jeune.  —  Huppe  plus  ou  moins  développée  ;  le  dessus  de  la  tête  est  d'un 
brun  noir  et  les  côtés  lavés  de  roussâtre  :  tour  du  bec  blanchâtre,  brunâtre 
au  front;  gorge  et  devant  du  cou  blancs  ;  les  plumes  du  dos  et  des  ailes  sont 
moins  brillantes  et  bordées  de  roussâtre  ;  haut  de  la  poitrine  d'un  brun  noi- 
râtre avec  les  plumes  plus  ou  moins  bordées  de  blanc  ;  noir  de  la  (jueue 
terminé  de  blanchâtre. 

Poussi7i.  —  Duvet  très  tourni,  assez  long  ;  parties  supérieures  d'un  cendré 
roussâtre  varié  do  noir,  avec  un  demi-collier  d'un  blanc  roussâtre  à  la  nu<iue  ; 
gorge  et  poitrine  d'un  blanc  pur,  mais  séparées  par  un  plastron  noir  dont  le 
duvet  est  terminé  de  cendré  ;  al)doinen  et  flancs  d'un  blanc  roussâtre. 

TmMI.;   II.  —    1.SS8.  1' 


—  130 


liai),  —  Le  Vanneau  habite  toute  l'Europe  jusqu'au  65»  lat.  Nord 

[Bogdanoto),  y  compris  le  sud 
de  l'Islande  [Fahey^]  et  acciden- 
tellement du  Groenland  {Rein- 
hardt).  Dans  la  belle  saison  il 
est  surtout  abondant  dans  les 
contrées  septentrionales  et  cen- 
trales, et  particulièrement  en 
Hollande.  En  Belgique,  il  est 
commun  lors  des  passages,  mais 
il  niche  dans  les  prairies  marécageuses  des  Flandres  et  de  la  Cam- 
pine.  Bien  que  cet  oiseau  ne  soit  réellement  pas  un  résident  des  con- 
trées méridionales,  il  niche  cependant,  en  petit  nombre  il  est  vrai, 
dans  plusieurs  localités  de  la  France  (Degland  et  Gerbe),  du  nord  de 
ritalie  [Giglioli)  et  en  Espagne  {Saunders);  il  niche  également  dans 
les  divers  comtés  de  la  Grande-Bretagne  et  de  l'Irlande  [Seehohm). 
En  Turquie  et  en  Grèce  on  ne  le  voit  qu'en  hiver. 

Dans  le  nord  de  l'Afrique,  il  ne  se  montre  pas  seulement  en  hiver, 
mais  un  petit  nombre  y  niche  [Loche,  h^by,  etc.),  et  il  en  est  de  même 
dans  le  Delta  du  Nil  [Shelley);  en  hiver  on  le  voit  en  assez  grand  nom- 
bre en  Egypte  et  dans  le  nord  de  l'Arabie  (de  Heiiglin),  ainsi  qu'aux 
îles  Canaries  (5o//e),  Madères  [Newton)  et  Açores  [Godman). 

En  Asie,  on  l'observe  en  été,  dans  toute  la  Sibérie  jusqu'au  65°, 
en  Daourie  et  au  pays  Oussourien  [Bogdanoio),  et  à  l'Est  jusqu'à  l'île 
septentrionale  du  Japon  (5'cVi/e^e/);  il  niche  également  en  Turkestan 
{Severtzoïo),  en  Mongolie  et  en  Chine  [David).  En  hiver,  il  se  montre 
en  Asie  Mineure  [Strickland),  en  Palestine  [Tristram),  en  Perse  (5'^- 
John)  jusqu'au  Punjab  dans  l'Inde  [Jerdon)  et  l'île  méridionale  du 
Japon. 

Mœurs.  —  Le  Vanneau  huppé  est,  pour  nos  contrées,  un  oiseau 
d'été  et  de  passage  :  il  arrive  généralement  en  mars  et  en  avril,  et 
émigré  en  automne.  Dès  le  mois  d'août,  ces  oiseaux  se  rassemblent  en 
petites  troupes  qui  errent  à  travers  le  pays  et  finissent  par  se  réunir 
aux  bandes  qui  arrivent  du  Nord,  pour  disparaître  au  commencement 
d'octobre.  Mais  les  individus  des  pays  septentrionaux  continuent  à 
passer  jusqu'en  novembre.  Du  reste,  si  l'automne  est  beau  et  relative- 
ment chaud,  ces  oiseaux  ne  se  hâtent  guère  de  gagner  les  régions 
méridionales,  et  une  partie  s'arrête  dans  certaines  localités,  atten- 
dant les  premiers  froids;  si  l'hiver  est  exceptionnellement  doux,  il 


-    J31   - 

y  en  a  même  qui  résident  toute  l'année  en  Belgique,  mais  c'est  rare. 
Les  Vanneaux  voyagent  généralement  en  bandes  nombreuses,  for- 
mées de  plusieurs  centaines  d'individus,  et  le  plus  souvent  pendant 
le  jour;  ce  ne  sont  généralement  ques  les  petites  troupes  et  les  indi- 
vidus isolés  qui  voyagent  pendant  la  nuit.  Ils  volent  toujours  très  haut 
et  sans  ordre.  A  leur  retour,  au  printemps,  on  ne  les  voit  jamais  en 
bandes  aussi  nombreuses  qu'en  automne. 

Dès  leur  retour  au  printemps,  ces  oiseaux  se  dispersent,  mais  cha- 
que couple  demeure  fidèlement  uni.  C'est  dans  les  endroits  humides 
et  marécageux  que  les  Vanneaux  se  plaisent  le  mieux,  mais  ils  ne 
paraissent  guère  rechercher  le  voisinage  des  fleuves,  des  rivières  ou 
de  la  mer,  à  moins  qu'il  y  ait  des  marécages  aux  environs.  Ce  qu'ils 
préfèrent,  ce  sont  les  prairies  marécageuses,  les  marais  et  les  fossés 
inondés.  M.  de  Nordmann  fait  cependant  remarquer  que  dans  la 
Russie  méridionale,  où  les  terrains  marécageux  sont  fort  rares,  les 
Vanneaux  se  contentent  des  plaines  arides  de  la  steppe  et  même  de 
terrains  entièrement  nus,  couvert  d'un  sable  mouvant  subtil,  et  n'of- 
frant que  de  loin  en  loin  quelques  îlots  de  verdure;  cela  n'empêche 
pas,  qu'avant  et  après  l'époque  de  la  reproduction,  des  milliers  de  ces 
oiseaux  y  prennent  leurs  ébats. 

Le  Vanneau  est  un  oiseau  excessivement  actif  et  remuant,  voletant 
ou  courant  sans  cesse  d'un  endroit  à  l'autre,  mais  sans  oublier  la  pru- 
dence, qui  guide  toujours  tous  ses  actes  ;  il  est  farouche  et  méfiant, 
mais  intelligent,  et  ne  se  sauve  jamais  sans  raison.  Il  fuit  de  loin 
l'homme  suspect  et  le  chasseur  armé  d'un  fusil,  mais  se  laisse  appro- 
cher par  le  campagnard  inolFensif  ou  par  un  enfant,  se  bornant  à  le 
saluer  de  son  cri  perçant  et  à  voler  autour  de  l'importun  avec  une 
liardiesse  surprenante.  C'est  surtout  pendant  les  migrations  qu'il  est 
difficile  d'approcher  do  ces  oiseaux,  car  ils  se  montrent  alors  plus  vigi- 
lants (|ue  jamais.  Ce  n'est  pas  sans  raison  que  le  chasseur  s'iirite  par- 
fois contre  la  vigilance  des  Vanneaux,  car,  à  son  approche,  ils 
avertissent  par  leurs  cris  tout  le  gibier  du  voisinage  et  font  ainsi 
parfois  manquer  la  chasse. 

C'est  un  oiseau  sociable  ;  les  différents  couples  se  tiennent  généra- 
](Mnent  non  loin  les  uns  des  autres,  toujours  prêts  à  accourir  au  secours 
de  leurs  camarades  au  moindre  cri  d'ahirme.  Quand  un  grand  oiseau  se 
présente  dans  leur  domaine,  ils  se  réunissent  à  plusieurs  pour  h^  harce- 
ler et  le  chasser,  et  ils  font  preuve  (mi  cette  occasion,  d'une  audace  et 
irnii  courage  incroyables;  ainsi,  ils  ne  craignent  [)as  de  s'attaquer  à 


-  132  — 

une  Mouette,  à  un  Corbeau,  à  un  Héron  ou  même  à  une  Buse  ou  à  un 
Milan,  car  ils  savent  à  qui  ils  s'adressent;  mais  ils  se  gardent  bien 
de  s'approcher  d'un  Faucon  ou  d'un  Autour,qui  en  aurait  vite  raison. 
Après  avoir  ainsi  réuni  leurs  forces  pour  expulser  l'intrus,  chaque 
couple  retourne  à  ses  occupations  ou  à  son  nid.  Les  Vanneaux  ne 
tolèrent  pas  la  présence  d'autres  petits  échassiers  aux  environs  de 
leur  nid  ;  pendant  leurs  migrations,  les  individus  isolés  se  joi- 
gnent volontiers  aux  troupes  de  Pluviers,  mais  quand  ils  forment  une 
bande,  ils  ne  permettent  pas  que  d'autres  oiseaux  viennent  se  joindre 
à  eux. 

Le  vol  de  cet  oiseau  est  facile  et  très  varié.  «  Au-dessus  de  l'eau, 
dit  A.  Brehm,  ou  près  du  sol,  il  s'avance  en  battant  lentement  des 
ailes  ;  mais  quand  il  a  gagné  les  hautes  régions  de  l'atmosphère,  il 
s'y  joue  ;  chacun  de  ses  mouvements  a  son  expression.  Quand  un 
danger  menace,  soit  lui,  soit  ses  petits,  il  exécute  les  tours  les  plus 
audacieux  :  il  se  précipite  sur  le  sol  pour  se  relever  presque  aussitôt, 
se  jette  à  droite,  à  gauche,  culbute,  descend  à  terre,  y  trotte  quelque 
temps,  se  relève  et  recommence  le  même  manège.  Aucun  oiseau  de 
nos  pays  ne  vole  de  cette  façon,  aucun  ne  peut,  comme  lui,  faire  exé- 
cuter à  ses  ailes  autant  de  mouvements.  Son  vol  est  accompagné  d'un 
bruissement  singulier,  qui  permet  de  le  reconnaître  dans  la  nuit  la 
plus  obscure.  Sa  démarche  vive  et  gracieuse  ressemble  à  celle  du  Plu- 
vier ;  sa  course  est  parfois  excessivement  rapide.  En  marchant  comme 
en  volant,  le  Vanneau  relève  et  abaisse  sa  huppe.  » 

Il  fait  entendre  sa  voix  en  toute  circonstance  ;  son  cri  d'appel  est 
kibit  ou  kiicit,  son  cri  d'angoisse  chréit,  que  la  femelle  fait  souvent 
entendre  près  de  son  nid  ;  le  chant  d'amour  du  mâle  est  facile  à  dis- 
tinguer du  cri  habituel,  car  il  est  formé  d'une  série  continue  de  sons, 
que  l'on  peut  rendre  par  :  chêh  querhhoil  kiwitkiv'itkiioit  kmilit  ;  il 
ne  fait  entendre  ce  chant  qu'en  volant  et  en  l'accompagnant  des  mou- 
vements d'ailes  les  plus  singuliers. 

La  nourriture  du  Vanneau  consiste  en  vers,  petites  limaces  et  mol- 
lusques aquatiques,  larves  et  insectes.  Il  boit  plusieurs  fois  par  jour 
et  se  baigne  volontiers. 

Pris  jeunes,  les  Vanneaux  s'apprivoisent  très  facilement,  viennent 
manger  dans  la  main  de  leur  maître  et  vivent  en  bonne  amitié  avec  les 
chiens  et  les  chats.  On  les  nourrit  de  vers  de  terre,  de  pain  et  de 
viande  hachée,  mais  on  doit  les  mettre  à  l'abri  du  freid  pendant  l'hiver. 

Reproduction.  —  Le  Vanneau  niche  dans  un  sol  humide  entre  les 


—  133  - 

herbages  d'un  pré,  surtout  clans  un  endroit  où  l'herbe  est  courte,  rare- 
ment au  voisinage  immédiat  de  l'eau  ou  dans  un  marais,  et  alors  le 
nid  se  trouve  toujours  sur  une  élévation.  Ce  nid  est  une  simple  dépres- 
sion, parfaitement  arrondie,  et  ordinairement  garnie  de  brins  et  de 
radicelles.  La  femelle  creuse  souvent  plusieurs  petites  fosses  avant 
d'en  terminer  une  pour  y  pondre.  La  ponte  a  parfois  lieu  dans  la 
seconde  quinzaine  de  mars,  mais  le  plus  souvent  en  avril.  Les  œufs, 
au  nombre  de  quatre,  sont  pjriformes,  à  écaille  lisse  et  finement  gre- 
nue, d'un  vert  olivâtre  ou  brunâtre  mat,  parsemés  de  points  et  do 
taches  brunes  ou  noirâtres  ;  ils  mesurent  environ  47  millim.  sur  32. 
La  durée  de  l'incubation  est  de  seize  jours. 

Les  parents  témoignent  le  plus  grand  attacliement  à  leurs  petits  et 
exposent  souvent  leur  vie  pour  eux.  Ils  emploient  mille  ruses  pour 
éloigner  les  animaux  carnassiers  et  y  parviennent  le  plus  souvent. 

GENRE     CIX 

TOURNE-PIERKE.  —  STREPSILAS. 

Akenakia,  LSi-is.s.  Or)iith.  V,  p.  132  (17(30). 

Trin-ga,  Lin.  Syst.  mit.  I,  p.  248  (1700). 

MoRiNELLA,  Mey.  Taschetib.  deicl!<ch.  Vof/clk.  Il,  p.  383  (1810). 

Strepsilas,  Illig.  Prodr.,  p.  203  (1811). 

Charadrius,  Pall,  Zooyr.  Il,  p.  148  (1831). 

CiNCLUS,  Gray,  Liât.  fjen.  B.  p.  87  (1841), 

Car.  —  Bec  plus  court  que  la  tête,  conique,  à  arête  aplatie  et  à  pointe 
comprimée  et  mousse  ;  narines  basales,  latérales,  linéaires  ;  ailes  allongées, 
étroites,  aiguës,  dépassant  légèrement  l'extrémité  delà  queue  ;  celle-ci  de 
longueur  moyenne,  arrondie,  formée  de  douze  rectrices  assez  larges  ;  tarses 
médiocres,  robustes,  recouverts  en  avant  par  une  rangée  de  plaques  étroites, 
réticulés  sur  les  côtés  et  sur  la  face  postérieure  ;  quatre  doigts  libres,  le  pouce 
élevé,  court. 

Hub.  —  Ce  genre,  qui  n'est  composé  que  de  trois  espèces,  est 
cosniopoliie. 

190.  —  Le  Tourne-pierre  à  collier. 

STRKPSIL.VS  IN  rKRPRES,  Illùj.  o-  Lin. 

(l'i.  l'.ii). 

Ahk.nakia  <;inkrka  (.Fcmip),  liriss.  Or/iil/i.  V,  p.  137  (17<)()). 

Trinoa  intkrf'Res  et  Morinella,  Lin.  Si/st.  mit.  I,  p.  248-49  (17()()). 


-    134  — 

Trin'ga  hudsonica,  Miill.  Si/sf,.  nat.  suppl.,  p.  114  (1770), 
MoRiNELLA  coLLARis,  Mey.  Toschenh.  deutsch.  Vogelk.  II,  p.  383(1810). 
Strepsilas  interprks,  Ulig.  Prodr.,  p.  263  (181  P. 
Strepsilas  COLLARIS,  Tcm.  Mau.  d'orn.,  p.  349  (ll:?lo). 
Arenaria  interpres,  Vieill.  Nouv.  dict.  XXXIV,  p.  345  (1819). 
Tringa  oAHUENSis,  Bloxli .  iii  Bijron's  Voij.  ofthe  Blonde,  app.  251  (1820). 
Strepsilas  borealis  et  littoralis,  Brm.  Isis,  1830,  p.  987. 
Charadrius  ciNCLus,  Pall.  Znogr.  Ho.sso-As.  Il,  p.  148  (1831). 
Cinclus  moeinellus,  Gray,  Lût  of  gen.  Birds,  p.  87  (1841). 
CiNCLUs  INTERPRES,  Gray,  Gen.  of  Birds,  III,  p.  549(1846). 
Strepsilas  minor,  Brm.  Yogelfang,  p.  285  (1855). 

Strepsilas  collaris  vulgauis,  borealis,  littoralis,  minor  et  pusilla,  A.  E.  Brm. 
Yerz.  Saimnl.  C.  L.  Brm.  p.  12  (1863). 
Der  Mornell-Steinwalzer,  en  allemand. 
The  Turnstone,  en  anglais 
De  Steexlooper,  en  flamand. 

Taille:  0™,  20;  ailes  0,16;  tarses  0,024. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes.  —  Dessus  de  la  tête  et  du  cou 
d'un  blanc  pur,  avec  des  taches  noires  allongées  au  vertex  et  à  l'occiput; 
haut  du  dos  et  scapulaires  d'un  noir  varié  de  roux  vif;  bas  du  dos  et  grandes 
sus-caudales  blancs  ;  petites  sus-caudales  noirâtres,  les  plus  antérieures  ter- 
minées de  blanc  ;  face,  devant  du  cou  et  poitrine  noirs,  avec  une  grande 
tache  blanche  entre  le  bec  et  l'œil  ;  couvertures  des  oreilles,  gorge,  côtés 
du  cou,  nuque  et  parties  inférieures  d'un  blanc  pur  ;  couvertures  des  ailes 
brunes,  les  plus  petites  bordées  de  cendré,  les  moyennes  de  blanchâtre  et  les 
plus  grandes  de  blanc  pur;  rémiges  brunes;  queue  d'un  cendré  brunâtre, 
blanche  à  la  base,  les  rectrices  latérales  terminées  de  blanc,  la  plus  externe 
entièrement  blanche,  mais  avec  une  large  barre  brune  vers  l'extrémité.  Bec 
noir  ;  iris  noirâtre  ;  patte  d'un  rouge  orange. 

Jeune.  —  Tête  et  cou  d'un  brun  varié  de  cendré  ;  gorge  blanche  ;  devant  du 
cou  et  poitrine  noirâtres,  mais  variés  de  cendré  et  de  blanchâtre;  dos  noi- 
lâtre,  toutes  les  plumes  bordées  de  blanchâtre  ;  ailes  brunes,  les  couvertures 
bordées  de  cendré,  les  plus  grandes  terminées  de  blanc  ;  le  reste  comme  chez 
l'adulte.  —  Se  distingue  des  autres  espèces,  à  tous  les  âges,  par  sa  gorge 
blanche. 

Poussin.  —  Tête,  dos,  dessus  des  ailes  et  des  cuisses  d'un  cendré  lavé 
de  fauve  et  marqué  de  mouchetures  noires,  irrégulières,  formant  bandes 
indécises  sur  le  dos,  sur  les  lorums  et  en  arrière  des  yeux  ;  dessus 
du  cou  cendré,  avec  la  base  et  les  pointes  du  duvet  noires  ;  parties 
inférieures  blanches,  assombries  sur  la  poitrine  par  la  base  brune  du  duvet. 
Bec  brun  ;    pieds  jaune  terne.  (J.  Vian.) 


-  435  — 


Hab.  —  Le  Tourne-pierre  est  un  oiseau  cosmopolite  qu'on  rencontre 

clans  le  monde  entier.  Il  est  plus 
ou  moins  commun  dans  toute 
l'Europe  jusqu'au  cap  Nord 
fl  {Collett)  et  l'Islande  {Faber.).  En 
Belgique,  il  passe  régulièrement 
sur  nos  côtes  maritimes  au  prin- 
temps et  en  automne  ;  des  jeunes 
sujets  remontent  alors  souvent 
l'Escaut  jusque  près  d'xA.nvers  où 
l'on  en  prend  quelques-uns  chaque  année.  En  Afrique,  on  le  rencontre 
presque  partout,  du  nord  {Loche,  de  Heuglin)  au  cap  de  Bonne-Espé- 
rance où  il  est  même  sédentaire  {Lai/ard),  et  de  l'est  {lùrk)  à  l'ouest 
{Verreaux)  ;  il  se  montre  aussi  sur  toutes  les  îles  de  l'Europe  et  de 
l'Afrique  et  môme  à  Madagascar  (./.  Verreaux). 

On  observe  cet  oiseau  en  Asie  jusqu'au  73  3/4'' 1.  N.  {Middendorff), 
et  il  est  aussi  abondant  sur  les  côtes  méridionales  que  sur  les  côtes 
septentrionales.  J'ai  vu  des  spécimens  du  Kamtschatka,  de  l'Inde,  de 
Cochinchine,  de  la  Chine,  des  Moluques,  de  Célèbes,  de  Java,  de  la 
Nouvelle-Guinée,  etc.  On  le  voit  aussi  sur  les  côtes  de  l'Australie  et 
de  la  Tasmanie  {Gould),  de  la  Nouvelle-Zélande  {Buller)  et  des  îles  de 
la  Polynésie  {Finsch). 

p]n  Amérique  cet  oiseau  n'est  pas  rare  sur  les  côtes  de  l'Amérique 
septentrionale  et  du  Mexique  [Baird)  ;  il  est  également  indiqué  aux 
Antilles  {Gosse,  Gundlach),  dans  l'Amérique  centrale  (Salvin),  au 
Pérou  et  aux  îles  Galapagos  {Darioin),  etc.  Le  Musée  de  Bruxelles 
possède  des  individus  du  Canada  et  du  Chili. 

Mœurs.  —  Le  Tourne-pierre  arrive  dans  les  contrées  du  Nord  à  la 
fin  d'avril  ou  vers  le  milieu  de  mai,  et  émigré  à  la  fin  d'août.  Il  voyage 
la  nuit,  soit  isolément,  soit  par  couples  ou  en  petites  troupes,  mais 
jamais  en  bandes  nombreuses  ;  dans  ses  migrations  il  suit  toujours  les 
côtes  maritimes. 

Cet  oiseau  vit  près  de  la  mer  ou  des  lacs  salés  qui  n'en  sont  pas  très 
éloignés,  mais  ne  se  montre  près  des  fleuves  qu'à  l'époque  des 
passages,  et  encore  n'y  voit-on  que  de  jeunes  individus  égarés.  Il 
recherche  particulièrement  les  terrains  sablonneux  et  les  rives  pier- 
reuses mais  ne  se  montre  qu'accidentellement  à  l'intérieur  du  pays  ; 
il  aime  aussi  les  petites  îles  sablonneuses,  couvertes  de  bruyères  et  de 
genévriers.    Il  est  toujours  en  mouvement  et  montre  autant  d'agilité 


—  136    - 

dans  l'air  que  sur  le  sol  ;  c'est  à  peine  s'il  prend  un  peu  de  repos  vers 
le  milieu  de  la  journée.  Son  vol  est  facile  et  rapide,  il  se  détourne 
adroitement  soit  en  rasant  le  sol,  soit  en  volant  dans  les  régions 
élevées  de  l'atmosphère.  A  terre  on  le  voit  souvent  franchir  d'une 
traite  un  espace  considérable,  s'arrêter  un  instant  sur  une  petite 
éminence,  puis  reprendre  sa  course  rapide.  C'est  un  oiseau  farouche 
et  fort  prudent,  qui  fait  Tliomme  do  loin  ;  mais  quand  le  hasard  l'a 
transporté  loin  de  la  mer,  il  perd  de  sa  prudence,  devient  inquiet  et 
tranquille,  et  l'on  ne  reconnaît  alors  plus  cet  oiseau,  d'habitude  si  gai 
et  si  remuant.  Il  est  sociable,  aime  la  société  des  siens,  mais  on  n'en 
voit  jamais  beaucoup  ensemble.  En  hiver,  il  se  joint  souvent  à  d'autres 
petits  échassiers  de  rivage,  mais  en  formant  bande  à  part;  toutefois, 
il  veille  à  la  sûreté  générale  et  donne  l'alarme  à  l'approche  de 
l'ennemi.  Sa  voix  est  forte  et  sifflante  et  peut  se  rendre  par  kiih,  kih 
d'abord  lent,   puis    de   plus    en  plus   accéléré   et  se  terminant  par 

kikikiki ou    par   kittekittekittekitte qui    est   aussi    son    cri 

d'amour.  C'est  en  volant  que  l'oiseau  crie  le  plus,  car  à  terre  il  ne  se 
fait  guère  entendre  souvent,  si  ce  n'est  à  l'époque  de  l'accouplement. 

Sa  nourriture  se  compose  de  vers,  de  mollusques  et  d'une  foule  de 
petits  animaux  marins;  il  prend  aussi  des  larves  et  des  insectes.  Il  a 
l'habitude  de  retourner  les  pierres  pour  prendre  les  vers  cachés  en 
dessous,  d'où  lui  est  venu  le  nom  de   Tourne-pierre. 

Reproduction.  —  C'est  à  la  fin  de  mai  ou  au  commencement  de 
juin  que  cet  oiseau  fait  ses  préparatifs  pour  nicher,  soit  sur  un  banc  de 
sable  ou  dans  un  endroit  sablonneux  non  loin  des  jetées,  soit  sur  un 
îlot,  sous  une  touffe  de  bruyères  ou  de  genévriers,  et  le  plus  souvent 
dans  un  endroit  un  peu  élevé. 

Le  nid  est  une  simple  dépression  creusée  dans  le  sable  et  garnie  de 
quelques  brins.  La  ponte  est  de  trois  ou  quatre  œufs  lisses,  un  peu 
luisants,  pyriformes,  d'un  vert  bleuâtre,  olivâtre  ou  brunâtre  plus  ou 
moins  foncé,  et  tachés  de  cendré  et  de  brun.  Ils  mesurent  environ  42 
millim.  sur  30. 

Les  parents  ont  beaucoup  d'aitachement  pour  leurs  poussins,  et 
ceux-ci  savent  fort  bien  se  cacher  à  terre  en  se  rasant,  dès  qu'un  dan- 
ger les  menace. 

OENRE  ex 

HUITllIER.    —  H^MATOPUS. 

H^MATOPUS,  Lin.  Syst.  nui.  I,  p.  152  (1758)  ;  1,  p.  257  (1766). 
OsTRALEGA,  Briss.  Omitk.  V,  p.  38  (1760). 


—  137  — 

OsTRALEGUS,  Macgill.  Mon.  Brit.  B.  II.  p.  59  (1842). 
Melanibyx  (Reichb.)  Bp.  Compt.-rend.  XLIII,  p.  420  (1854). 

Car.  —  Bec  beaucoup  plus  long  que  la  tête,  plus  haut  que  large  à  la  base, 
très  comiDrimé  latéralement  vers  la  pointe  ;  narines  oblongues,  latérales,  i3er- 
cées  dans  une  rainure  qui  se  prolonge  en  pointe  jusque  vers  le  milieu  du 
bec  ;  ailes  allongées,  aiguës,  atteignant  plus  ou  moins  l'extrémité  de  la  queue, 
première  rémige  la  plus  longue;  queue  médiocre,  large,  composée  de  douze 
rectrices  ;  bas  des  jambes  nu  ;  tarses  robustes,  médiocrement  allongés,  réti- 
culés de  toutes  parts  ;  trois  doigts,  épais,  courts,  bordés,  l'externe  uni  par 
sa  base  au  médian  par  une  forte  membrane;  pouce  nul;  ongles  larges, 
courts. 

Hab.  —  Ce  genre  est  cosmopolite. 

191.  —  L'Huîtrier  ostralège  ou  pie- 

H^MATOPUS  OSTRALEGUS,  Lin. 

(PI    190) 

H.EMATOPUS  OSTRALEGUS,  Lin.  Si/st.  fiat.  I,  p.  257  (1766). 
ScoLOPAX  picA,  Seop.  Ann.  I.  Hist.  nat.  p.  95  (1769). 
OsTRALEGA  PICA,  Booii.  Encycl.  mêth.  I,  p.  26  (1790). 
OsTRALEGA  EUROP^A,  Less.  Man.  tVOrn.  II,  p.  300  (1828). 

H/EMATOPUS  BALTHICUS  et  ORIENTALIS,  BrDQ.  /SW,    1830,  p.  987. 

H.EMAT0PU3  HYPOLEUCA,  Pall.  Zoogr.  Eosso-As.  II,  129  (1831). 

OSTRALEGUS  TULGARis,  Less.  Rev.zool.  1839,  p.  47. 

OSTRALEGUS  H^MATOPUS,  Macg.  Mcin.  Brit.  B.  II,  p.  59  (1842). 

H/KMATOPUS  MACRORHYNCHUS,  B\yi\\,  Joum.  As.  Soc.  Benff.  XIV,  p.  548  (1845). 

Der  Europaische  Austernfischer,  en  allemand. 

The  Oystercatcher,  en  anglais. 

De  Zeeekster,  en  flamand. 

Var.  Osculans 

HiEMATOPUS  OSTRALEGUS,  Midd.  (nec  Lin.)  Sibir.  Reise,  II,  2  p.  213  (1853). 
H^MATOPUS  LONGiROSTRis,  Swinh.  (nec  Vieill.),  Ibis,  1863,  p.  406. 
HiîîMATOPUs  OSCULANS,  Swinh.  Proc.  Zool.  Soc.  1871,  p.  405. 

Taille  :  0'",36  ;  ailes  0,252  ;  tarses  0,051. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes  en  été.   —  D'un  noir  plus  ou 
moins  profond  ;  bas  du  dos,  sus-caudales,  base  de  la  queue,  une  large  bande 
travers  l'aile,  une  petite  tache  sous  l'œil  et  parties  inférieures  à  partir  de  la 
poitrine,  d'un  blanc  pur.  Bec  d'un  rouge  orange  à  pointe  jaunâtre  ;  iris  brun 
rougeâtre;  pattes  d'un  rose  chair. 

En  hiver.  —  La  tache  blanche  sous  l'œil  est  un  peu  plus  grande  et  sur  le 
devant  du  cou  existe  une  tache  en  croissant  également  blanche. 

Tome  II.  —  1888,  18 


138  - 


Jeune.  —  Même  système  de  coloration,  mais  les  parties  supérieures  brunes; 
milieu  de  la  gorge  et  un  large  demi-collier  sur  la  partie  antérieure  du  cou, 
d'un  blanc  pur. 

Poussin.  —  Bec  de  Vanneau,  mais  plus  comprimé  et  plus  long  ;  tête,  dos  et 
dessus  des  ailes  d'un  gris  fauve  avec  la  base  du  duvet  noirâtre,  ce  qui  donne 
aux  parties  supérieures  un  aspect  chiné  ;  taches  et  traits  noirs  répandus  sur 
la  tête,  les  lorums,  le  dos,  le  croupion  et  les  ailes,  et  dessinant  deux  bandes 
longitudinales  sur  le  dos  et  une  bande  demi- circulaire  autour  du  bassin  ;  cou^ 
gorge  et  poitrine  d'un  noir  enfumé,  glacé  de  gris  ;  ventre,  dessous  des  ailes  et 
des  cuisses  d'un  blanc  pur  ;  bec  noir  avec  la  base  de  la  mandibule  inférieure 
jaunâtre  ;  pieds  d'un  jaune  livide.  (J.  Vian.) 

Var.  Osculans.  —  C'est  une  forme  intermédiaire  entre  le  type  ostralegus 
d'Europe  et  VH.  longirostris  d'AustraUe.  Elle  a  le  bec  presque  aussi  long  que 
ce  dernier  ;  les  plumes  sus-caudales  sont  marquées  à  l'extrémité  de  taches 
noires  ;  les  tiges  des  trois  premières  rectrices  sont  noires,  celle  de  la  quatrième 
offre  un  peu  de  blanc  et  les  suivantes  davantage. 


Hah. 


L'Huîtrier  ostralège  se  rencontre  dans  toute  l'Europe  jus- 
qu'au cap  Nord  {Collett),  ainsi 
qu'en  ]s\sinàe{Faber)  et  au  Groen- 
land {Reinhardt).  Il  n'habite 
l'Ecosse  qu'en  été  et  visite  à  cette 
époque  les  îles  voisines,  y  com- 
pris les  îles  Orkneys,  Shetland  et 
Hébrides,  mais  il  est  sédentaire 
sur  les  côtes  de  l'Angleterre  et  de 
l'Irlande  [Seehohm).  Il  niche  sur 
toutes  les  côtes  de  l'Europe  septentrionale  et  occidentale  jusqu'au 
midi  de  la  France  où  il  est  sédentaire  et  de  passage  (A.  Lacroix)  ;  au 
printemps  et  en  automne,  il  est  commun  sur  les  côtes  maritimes  de 
la  Belgique  et  des  individus  isolés  se  montrent  parfois  près  de  la 
Meuse  et  près  des  eaux  des  environs  de  Bruxelles  ;  M.  A.  Croegaert 
dit  qu'il  est  très  abondant  sur  l'Escaut  à  partir  de  Bath  et  qu'on  l'y 
voit  en  bandes  énormes.  En  Suisse  il  est  de  passage  irrégulier  :  on 
l'observe  parfois  en  juin  et  juillet,  plus  rarement  en  octobre,  près  des 
marais,  des  lacs  et  des  fleuves  [Schinz]  ;  en  Pologne  il  est  également 
de  passage  accidentel  {Taczanowski)  ;  Bogdanow  le  mentionne  comme 
se  trouvant  dans  toute  la  Russie  européenne  et  asiatique.  Cet  oiseau 
est  répandu  sur  tout  le  littoral  de  la  mer  Noire,  mais  ne  paraît  pas 
hiverner  sur  la  côte  septentrionale  {de  Nordviann).  Il  ne  se  montre 


—  139  — 

qu'irrégulièrement,  pendant  l'hiver,  aux  environs  de  Constantinople 
{Alléon)  et  en  Grèce  {Linclei-mayer).  En  Italie  il  est  de  passage  acci- 
dentel dans  la  zone  septentrionale  et  de  passage  irrégulier  dans  les 
autres  parties  du  royaume  (Salvadori),  mais  niche  en  Yéjiétie{Giglioliy, 
sur  les  côtes  de  l'Espagne  et  du  Portugal,  on  ne  le  voit  qu'en  hiver 
{Saunders,  Rcyes) . 

En  7\frique  on  rencontre  cet  oiseau  en  hiver  sur  toute  la  côte  sep- 
tentrionale depuis  le  Maroc  (Favier)  et  l'Algérie  {Loche)  jusque  sur 
les  côtes  de  la  mer  Rouge  {de  Heuglin)  et  de  Mozambique  {Pefers)  ; 
le  Musée  de  Lejde  possède  un  spécimen  de  Sénégambie. 

A  l'Est  on  observe  cette  espèce  en  Asie  Mineure  {Gonzenbach)  et  au 
Caucase  sur  le  littoral  de  la  mer  Caspienne,  où  elle  n'est  cependant 
pas  abondante  ;  elle  niche  habituellement  près  des  eaux  douces  non 
loin  des  côtes  {Radde).  En  été  on  la  rencontre  également  prés  des 
rivières  et  des  lacs  du  Turkestan  {Severtzow)  et  de  la  Sibérie  occiden- 
tale {Fin.sc/i),  d'où  elle  se  rend  en  hiver  en  Perse, dans  le  Beloutchistan 
{Blanford),  dans  l'Inde  {Jerdon)  et  à  Ceylan  {L(fi/ard). 

La  Var.  Osculans  remplace  lespèce  type  au  Kamtchatka,  dans  la 
Sibérie  orientale,  en  Chine  et  au  Japon  {Sivinhoe,  Taczanoioski)  et  se 
montre  parfois  jusque  dans  l'Indo-Chine  {Seebo/im). 

Mœurs.  —  L'Huîtrier  émigré  des  contrées  septentrionales  et  des 
côtes  de  la  Baltique  dès  la  tin  do  l'été  ;  en  Islande,  cependant,  il  se 
contente,  selon  Faber,  d'aller  des  côtes  septentrionales  aux  côtes 
méridionales  où  arrivent  des  courants  chauds.  Dans  leurs  migra- 
tions ces  oiseaux  suivent  généralement  les  côtes  maritimes  ;  mais 
il  est  certain  que  quelques-uns  prennent  une  direction  plus  directe 
et  qu'ils  passent  l'hiver  près  des  eaux  douces  de  l'intérieur  des  terres; 
il  est  du  reste  à  remarquer  que  cette  espèce  est  en  général  peu 
abondante  en  hiver  dans  les  contrées  du  Midi. 

Les  Huîtriers  voyagent  par  troupes  composées  souvent  de  plusieurs 
centaines  d'individus,  volant  sans  ordre  aussi  bien  pendant  le  jour 
que  pendant  la  nuit;  quand  ils  ont  un  long  trajet  à  franchir, ils  forment 
une  longue  bande  ou  se  placent  sur  deux  rangs  en  formant  un  angle 
aigu  ;  ils  volent  alors  généralement  très  haut  et  silencieusement,  mais 
([iiand  ils  volent  sans  ordre,  ils  font  retentir  l'air  df  hnirs  cris,  ce  qui 
permet  de  les  entendre  do  loin. 

Ces  oiseaux  vivent  au  bord  de  la  mer  on  dans  ses  enviiuns  et  surtout 
près  des  côtes  rocailleuses.  Cela  n'empêche  cependant  pas  ({u'on  en 
rencontre  souvent  dans  des  pays  très  éloignés  do  la  mer,  comme  la 


—   140 

Suisse,  la  Pologne,  la  Sibérie  occidentale,  le  Tiirkestan,  etc. 
Bogdanow,  comme  on  l'a  vu  plus  haut,  dit  que  les  Huîtriers  habitent 
toute  la  Russie  européenne  et  asiatique  (1),  ce  qui  fait  bien  supposer 
qu'il  ne  s'agit  pas  seulement  des  côtes.  Le  D''  Finsch  en  rencontra 
dans  la  vallée  de  l'irtisch  (Sibérie  occidentale),  en  avril,  juin,  juillet 
et  au  commencement  de  septembre  (2)  ;  il  est  donc  probable  qu'ils 
nichent  près  de  ce  fleuve. 

Sur  les  côtes  accidentées,  cet  oiseau  aime  à  se  tenir  au  sommet  d\m 
rocher  ou  d'un  monticule.  Il  s'éloigne  souvent  des  bords  de  la  mer 
pour  visiter  aux  environs  les  jDrairies  submergées,  les  marais,  les 
étangs  et  les  rivières.  Ses  mœurs  sont  plus  nocturnes  que  diurnes,  car 
il  prend  peu  de  repos  pendant  la  nuit,  surtout  quand  il  y  a  un  clair  de 
lune,  mais  passe  une  partie  de  la  journée  à  dormir,  soit  sur  une  patte, 
soit  sur  deux,  et  en  tenant  la  tête  rentrée  entre  les  épaules. 

A  première  vue  cet  oiseau  semble  lourd,  mais  il  égale  les  Vanneaux 
en  agilité,  marche  et  trottine  avec  aisance,  court  par  saccades,  mais 
quand  c'est  nécessaire  il  sait  courir  avec  rapidité  et  franchir  ainsi  un 
trajet  assez  long.  Il  nage  avec  facilité  et  sans  y  être  contraint,  mais  il 
ne  s'éloigne  jamais  de  la  rive  et  .ne  prolonge  pas  longtemps  cet  exer- 
cice ;  quand  il  est  blessé  par  un  coup  de  feu  et  qu'il  se  trouve  près  de 
l'eau,  il  s'y  jette  de  suite  et  plonge  même  parfois  pour  échapper  à 
celui  qui  veut  le  saisir.  Son  vol  est  vigoureux,  rapide,  ordinairement 
rectiligne  et  fortement  ondulé,  mais  l'oiseau  ne  sait  pas  changer  brus- 
quement de  direction  ;  il  ne  s'élève  jamais  bien  haut,  sauf  pendant  les 
migrations. 

Les  Huîtriers  se  font  bientôt  remarquer  par  leur  sociabilité,  leur 
vivacité  et  leur  courage.  L'un  d'eux  est-il  rassasié  ou  s'est-il  reposé 
un  instant,  il  se  met  aussitôt  à  agacer  et  à  pourchasser  ses  sem- 
blables ou  d'autres  échassiers  ;  ces  agaceries  dégénèrent  parfois  en 
combats  :  le  cou  et  le  bec  tendus,  ils  fondent  l'un  sur  l'autre  comme 
des  coqs,  se  frappant  des  ailes  et  se  donnant  des  coups  de  bec,  et  la 
lutte  ne  finit  qu'avec  la  fuite  du  plus  faible  ;  mais  ces  combats  sont 
rares,  car  ces  oiseaux  sont  plus  taquins  que  querelleurs  et  aiment 
surtout  à  jouer.  Dans  les  lieux  où  ils  nichent,  il  arrive  le  plus  souvent 
que  d'autres  oiseaux  établissent  également  leur  nid  ;  les  Huîtriers 
prennent  alors  la  défense  de  toute  la  colonie  et  veillent  avec  soin  à 

(1)  Bogdanow,  Conspeclus  avium  imperii  Rossici,  p.  77. 

(2)  Eeise  nach  West-Sibirien,  p.  13-1 


-    141  — 

sa  sûreté.  Pas  un  oiseau  ne  passe  sans  être  observé  et  salué  par  des 
cris  ;  mais  si  c'est  un  ennemi  qui  approche,  que  ce  soit  un  Corbeau, 
une  Corneille,  un  Milan  ou  une  grande  Mouette,  les  Huîlriers  aver- 
tissent aussitôt  par  leurs  cris  les  autres  oiseaux,  et  fondent  tous  sur 
l'ennemi  commun,  le  harcellent  et  le  pourchassent  avec  fureur  jusqu'à 
ce  qu'ils  l'aient  mis  en  fuite.  En  ceci  ils  ressemblent  aux  Vanneaux, 
mais  ils  sont  mieux  armés  que  ces  derniers  et  par  conséquent  plus 
certains  de  la  victoire.  Les  autres  oiseaux  de  rivage  reconnaissent 
parfaitement  le  cri  d'alarme  du  cri  ordinaire  des  Huîtriers, 
et  acceptent  volontiers  l'autorité  de  ces  oiseaux  dont  ils  savent 
apprécier  les  services.  Les  Huîtriers  sont  d'ailleurs  extrêmement 
vigilants,  ne  se  laissent  jamais  surprendre  et  distinguent  parfaitement 
le  chasseur  de  l'homme  inoffensif,  aussi  est-il  fort  difficile  de  les 
approcher  à  portée  de  fusil. 

Le  cri  d'appel  de  cette  espèce  est  un  sifflement  sonore  ressemblant 
khuip  ou  kuip, ovi  bien  kioik  kioik  keioik  keioik;  à  l'époque  de  la  repro- 
duction les  mâles  font  entendre  des  trilles  harmonieux,  variés  et 
soutenus  qu'on  n'attendrait  guère  d'un  oiseau  de  son  genre. 

Son  nom  fait  supposer  que  cet  oiseau  se  nourrit  principalement 
d'huîtres,  mais  c'est  là  une  erreur,  car  il  ne  saurait  les  ouvrir  ;  on  se 
demande  d'où  lui  est  venu  le  nom  de  huîtrier,  qu'il  porte  dans  ])resque 
toutes  les  langues  ;  il  est  probable  que  les  anciens  l'ont  nommé  ainsi 
parce  qu'ils  croyaient  que  cet  oiseau  vivait  d'huîtres.  Sa  véritable 
nourriture  se  compose  de  divers  mollusques,  de  vers,  d'annélides  et  de 
petits  crustacés  ;  près  des  eaux  douces  il  prend  aussi  des  larves  et 
des  insectes. 

Les  Huîtriers  s'habituent  facilement  à  la  captivité  et  perdent  bientôt 
leur  crainte  de  l'homme,  quand  ils  sont  convaincus  qu'on  ne  leur 
veut  pas  do  mal.  On  les  nourrit  de  pain,  de  viande  hachée,  de 
pommes  de  terre  cuites  écrasées,  etc. 

Reproduction.  —  Dans  les  contrées  où  les  Huîtriers  sont  séden- 
taires, ils  commencent  à  nicher  dès  la  fin  d'avril  ;  dans  le  Nord,  ils 
commencent  plus  tard,  parfois  pas  avant  la  fin  de  mai  ou  même  en 
juin.  Ace  moment  les  couples  se  forment,  les  mâles  font  entendre 
leur  chant  d'amour  et  se  livrent  des  combats  en  l'honneur  des  femelles. 
Une  fois  accouplés,  ils  vivent  tous  en  bonne  intelligence,  sans  cepen- 
dant renoncer  complètement  à  leurs  agaceries.  Les  nids  se  trouvent 
généralement  non  loin  les  uns  des  aiilrcs  et  souvent  entre  des  nids 
d'autres  oiseaux.Ils  sont  ordinairciucnt  placés  à  queUiuc  distance  de  la 


—  142  — 

mer,  ou  dans  le  voisinage  d'autres  eaux,  ou  même  entre  les  herbages 
d'un  pré, pourvu  que  l'herbe  y  soit  courte.  La  femelle  creuse  une  petite 
fosse  arrondie  qu'elle  garnit  de  brins  et  de  feuilles  de  graminées  ; 
mais  il  lui  arrive  souvent  de  creuser  plusieurs  fossettes  avant  d'en 
garnir  une.  La  ponte  est  de  deux  ou  de  trois  oeufs,  rarement  quatre. 
Ceux-ci  sont  volumineux,  courts  ou  ovalaires,  rarement  pyriformes, 
à  coquille  lisse  et  sans  luisant,  d'un  roux  jaunâtre  ou  d'un  cendré 
olivâtre  plus  ou  moins  foncé,  et  entièrement  couverts  de  taches 
cendrées  et  brunes,  de  forme  et  de  grandeur  très  variables  ;  ces  œufs 
mesurent  environ  56  millim.  sur  40. 

La  femelle  couve  peu  pendant  le  jour,  mais  elle  se  tient  sur  les 
œufs  pendant  toute  la  nuit  ;  le  mâle  ne  la  remplace  que  rarement, 
mais  si  elle  vient  à  périr,  il  continue  à  couver  jusqu'à  éclosion.  La 
durée  de  l'incubation  est  d'environ  trois  semaines.  Dés  que  les  petits 
viennent  au  jour  et  qu'ils  sont  bien  séchés,  ils  suivent  leurs  parents 
qui  leur  apprennent  aussitôt  la  manière  de  trouver  leur  nourriture.  Au 
moindre  danger,  les  poussins  se  cachent  entre  des  pierres  ou  des 
herbages,  et  j  restent  immobiles  tant  que  les  parents  ne  les  appellent 
pas.  Ceux-ci  les  conduisent  toujours  dans  des  endroits  où  ils  trouvent 
facilement  à  se  cacher  ;  ils  font  du  reste  tous  leurs  eiïbrts  pour 
éloigner  l'ennemi  de  leur  couvée,  môme  en  exposant  leur  vie.  Quand 
ils  savent  voler,  les  jeunes  se  séparent  de  leurs  parents  et  vont 
former  des  petites  colonies  distinctes,  qui  s'augmentent  de  plus  en 
plus  jusqu'au  moment  du  départ  de  tous. 

FAMILLE  DES  GLARÉOLIDÉS 

Car.  —  Bec  plus  court  que  la  tête,  convexe,  large  à  la  base,  fendu 
jusqu'au  dessous  des  yeux  ;  ailes  très  longues,  étroites  et  pointues  ; 
queue  plus  ou  moins  fourchue  ;  tarses  de  longueur  moyenne,  scutellés 
en  avant  et  en  arrière  ;  quatre  doigts,  le  pouce  reposant  à  terre. 

Mœurs.  —  Ces  oiseaux,  si  différents  des  groupes  voisins,  rappellent 
à  la  fois  certains  Gallinacés  par  leur  bec,  les  Hirondelles  par  leurs 
ailes  et  leur  queue,  et  les  Pluviers  par  leurs  allures;  aussi  leur  place 
dans  la  série  est-elle  encore  discutée.  Linnée  en  a  fait  des  Hirondelles  ; 
Brisson  les  a  admis  parmi  les  Echassiers,  et  depuis  tous  les  auteurs 
ont  adopté  cette  manière  de  voir,  sans  s'entendre  cependant,  sur  le 
groupe  près  duquel  les  Glaréoles  devraient  être  placées.  Dans  ces 
derniers  temps,  un  naturaliste  russe,  Bogdanow,  a    créé  un   ordre 


-  443  — 

spécial,  les  Heteroclitœ,  dans  lequel  il  comprend  les  familles  des 
Pteroclidse,  des  Thinocoridte  et  des  Glareolidse,  et  cet  ordre  est 
mis  entre  les  Pigeons  et  les  (xallinacés.  Les  Glaréoles  ressemblent 
cependant  plus  aux  Pluviers  qu'aux  représentants  des  ces  derniers 
ordres. 

Par  leurs  moeurs,  ils  tiennent  autant  des  Pluvians  et  des  Courvites 
que  des  Pluviers  et  présentent  bien  un  type  d'Ecbassiers.  Ce  sont  des 
oiseaux  voyageurs  qui  se  plaisent  dans  le  voisinage  de  l'eau,  sans  être 
exclusivement  attachés  à  cet  élément.  Ils  vivent  et  nichent  en  société. 

Hab. — Cette  famille  ne  comprend  qu'un  seul  genre,  dont  les  espèces 
sont  répandues  dans  les  parties  chaudes  et  tempérées  de  l'ancien 
monde  et  de  l'Océanie. 

GENRE  CXI. 

GLARÉOL.E.   —  GLAREOLA. 

Glareola,  Briss.  Ornith.Y,  p.  141   (1760). 
HiRUNDo  (part.),  Lin.  S:jst.  nat.  I,  p.  345  (1766). 
Trachelia,  Scop.  Ail.  I.  Hist.  nat.,  p.  110  (1769). 
Dromochelidon,  Landb.  Jahres.  Ver.  Wiii-tt.  1846,  p.  212. 
Pratincola,  Degl.  Orn.  eur.  Il,  p.  106  (1849). 

Car.  — Bec  robuste,  plus  court  que  la  tête,  large  à  la  base,  convexe,  à 
bords  des  mandibules  dessinant  une  courbe  ;  narines  basales,  latérales, 
obliques,  ovalo-linéaires  ;  ailes  très  longues,  atteignant  ou  dépassant  l'ex- 
1  rémité  de  la  queue,  aiguës,  étroites,  première  rémige  la  plus  longue  ;  queue 
plus  ou  moins  fourchue  ;  tarses  médiocres,  assez  grêles,  sciiteliés  ;  doigts 
grêles,  le  médian  réuni  à  l'externe  par  une  courte  membrane  ;  i)once  court 
mais  bien  déveloi^pé  ;  ongles  courts  et  i-ecourbc>,  celui  du  doigt  médi.in 
allongé  et  pectine  sur  son  bord  interne. 

Hab.  —  Comme  ]a  famille. 

192.  —  La  Glaréole  à  collier 
GLAREOLA  TORQUATA,  Briss. 

(PI.  192). 

Glareola  glareola,  torquata,  senegalensis  et  n,evl\,  Briss.  Orniih.  V.  pp. 141-148 
(1760). 

Hirundo  pratincola,   Lin.5y.s7.  vat.  1,  p  315  (17()()  ). 

Trachelia  pratincola,  Scop.  An.  I.  Ilist.  val.   p.   110  (1769). 

Glareola  austriaca,  Gm.  .^i/st.  nat.  I,  p.  695  (1788). 

Glareola  pratincola,  Lcach,  Trans.  Linn.  Sir.  XIII,  p.  i:>l  ^^1820). 

Pratincola  glareola,  Degl.  Orn.  eur.  Il,  p.  107  (1849). 

Glareola  limbata,  Riipp.  Si/sl.  Ubers.  p.  1 13,  pi.  43  (1845). 

Dromochelidon  nathuphila,  Lamlb.  .1  ilins.  Ver.  Xnt.  Nat.  W'nrtt.   iNI'i,  p.  228. 


-  144  - 


Der  Halsband-Giarol,  en  allemand. 
The  Common  Pratincole,  en  anglais. 
De  Zwaluw-Pleviek,  en  tiamand . 

Taille  :  0,"'23  ;  ailes,  0,185  ;  tarses,  0,032. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes.  —  Parties  supérieures,  y  com- 
pris les  scapulaires  et  les  couvertures  des  ailes,  d'un  brun  cendré  tirant  un 
peu  sur  l'olivâtre  et  nuancé  de  roussâtre  à  la  nuque  ;  croupion  et  sus-caudales 
d'un  blanc  pur;  rémiges  d'un  brun  noirâtre  ;  couvertures  inférieures  des 
ailes,  les  plus  internes,  et  plumes  axillaires  d'un  roux  marron  vif;  gorge  et 
devant  du  cou  d'un  roux  jaunâtre  clair,  encadrés  par  une  bande  étroite  noire, 
finement  bordée  de  blanc,  qui  prend  naissance  sous  l'œil  ;  poitrine  d'un  cen- 
dré brunâtre,  passant  au  roussâtre  à  l'abdomen  ;  bas -ventre  et  sous-caudales 
blancs;  queue  blanche  à  la  base,  brune  à  son  extrémité,  la  première  rectrice 
de  chaque  côté  beaucoup  plus  longue  que  les  autres  et  dépassant  les  ailes. 
Iris  brun  ;  bec  noir,  rouge  à  la  base  ;  pattes  noirâtres. 

Jeune.  — Parties  supérieures  brunâtres,  toutes  les  plumes  plus  ou  moins 
bordées  de  cendré  ;  gorge  et  devant  du  cou  jaunâtres,  mais  non  encadrés  de 
noir  ;  poitrine  d'un  brun  clair  ;  abdomen,  sous-caudales,  croupion  et  sus-cau- 
dales d'un  blanc  assez  pur  ;  rémiges  brunes  terminées  de  cendré  ;  queue 
comme  chez  l'adulte  mais  plus  courte,  les  rectrices  latérales  n'atteignant  pas 
l'extrémité  des  ailes. 

Poussin.  —  Duvet  soyeux,  barbelé, assez  épais, médiocrement  long,  surtout 
aux  parties  supérieures,  paraissant  tondu  sur  le  dos.  Parties  supérieures  d'un 
cendré  lavé  de  roussâtre  à  la  tête  et  aux  ailes,  et  très  maculées  de  noir  sur  le 
vertex  et  le  dos  ;  trait  noir  sur  les  lorums  ;  gorge  et  parties  abdominales 
blanches  ;  poitrine,  dessous  des  ailes,  joues  et  front  d'un  fauve  rosé  ;  bec  noir 
de  corne  avec  marteau  blanc  ;  pieds  d'un  brun  roussâtre  (/.  Vian). 

Hah.  —  Cette  Glaréole  habite  en  été  le  bassin  de  la  Méditerranée  et 

de  la  mer  Noire  et  se  montre  irré- 
gulièrement dans  l'Europe  cen- 
\  traie  et  occidentale.  En  1813, 
Graves  fit  connaître  les  premières 
captures  en  Angleterre  de  cette 
rare  espèce  pour  nos  contrées  : 
elles  datent  de  1807  et  1811  ; 
M.  J.  E.  Harting  signale  pour 
la  Grande-Bretagne  et  l'Irlande, 
vingt  et  un  sujets  tués  de  1807  à  1871  ;  le  10  juin  1874  un 
individu  adulte  a  encore  été  pris  à  Lizard  [Rodd).  En  Danemark 
on  ne  connaît    qu'une  seule  capture  faite  le  18  mai  1831  près  de 


—  145  — 

Ulfshale-on-Moen  {KjaerhÔlling)  ;  dans  le  nord  de  l'Allemagne 
cet  oiseau  s'est  montré  accidentellement  en  Silésie,  dans  l'Anhalt 
et  dans  le  pa3^s  de  Munster  (Borggreve)  ;  on  en  a  également  pris 
dans  la  province  Rhénane  et  en  Bavière  {Naumann),  on  Suisse 
(Schinz),  en  Hollande  {Temminck)  et  en  Belgique  où  quelques 
individus  égarés  ont  été  tués  dans  la  Campine  {de  Sélys-Longchamps): 
de  Meezemaker  a  constaté  l'apparition  d'un  individu  de  cette  espèce 
à  Bergues  en  Flandre. 

Cet  oiseau  est  assez  abondant  et  niche  dans  les  départements  du 
midi  de  la  France,  où  il  arrive  vers  la  mi-avril  pour  émigrer  à  la 
fin  d'août  {Crespon);  il  est  commun  en  Espagne  {Saunders)  et  en 
Portugal  {du  Bocage),  mais  extrêmement  rare  aux  îles  Baléares  {von 
Homeyer)  ;  en  Italie  il  est  rare  dans  le  nord  et  le  centre,  plus  ou 
moins  répandu  dans  les  parties  méridionales  [Salvadori),  mais  com- 
mun aux  passages  en  Sardaigne  et  niche  en  Sicile  (Giglioli)  ;  il  est 
souvent  très  abondant  en  Grèce  où  il  niche  dans  les  parties  septen- 
trionales {Linderinayer)  et  dans  la  vallée  du  Danube  inférieur 
{Seebohm);  cet  oiseau  est  aussi  commun  dans  la  Dobrodja  que  rare  en 
Bulgarie  {Alléon)  :  assez  abondant  en  Dalmatie  {Kolombatoiné)  et  en 
Hongrie  près  du  lac  connu  sous  le  nom  de  Plattensee  [Szikla),  et  se 
montre  accidentellement  en  Autriche  et  même  en  Bohême  {Fritsch)  ; 
près  du  Danube  et  sur  les  îlots  de  ce  fleuve, on  voit  des  centaines  de  ces 
oiseaux  (Finsch).  En  Russie  on  rencontre  cette  Glaréole  dans  les 
steppes  des  environs  d'Odessa,  dans  la  Transcaucasie,  le  Man- 
gychlak^  les  bassins  de  l'Amou-Daria  et  Syr-Daria,  ainsi  que  sur  les 
pentes  occidentales  du  Tian-Chan  {Bogdanow);  il  fréquente  aussi,  en 
été,  les  lacs  salés  du  Turkestan  {Severtzoïo)  jusqu'à  Ala-Kul  {Fhisch). 
11  est  commun  sur  les  côtes  de  l'Asie  Mineure  et  niche  en  grand 
nombre  aux  environs  de  Smyrne,  en  Palestine  {Tristram)  et  en 
Perse  {Blanford),  et  se  montre  accidentellement  dans  l'Inde  où  on  en  a 
tirés  dans  les  provinces  de  Bombay  et  de  Madras  {Jcrdon).  Il  est  fort 
difficile  d'indiquer  ses  limites  géographiques  vers  l'Orient,  car  dans 
le  S.-E.  de  l'Asie  on  rencontre  une  espèce  très  voisine  {G.  orientais), 
qui  est  parfois  confondue  avec  le  type  européen,  dont  elle  dilfère  sur- 
tout par  une  queue  plus  courte. 

Cet  oiseau  est  commun  en  été  dans  le  nord  de  l'Afriiiue  {Loche, 
Drake)  ;  il  est  de  passage  en  Egypte  en  août  et  septembre  et  on  le 
rencontre  alors  par  bandes  énormes  le  long  du  Nil  et  dans  les  marais 
quiavoisinentla  mer  Rouge;  en  octobre,  c'est  par  milliers  qu'on  les 

TuMK  II.  —  188'.)  ly 


—  146  - 

voit  dans  les  steppes  du  Kordofan  et  du  Sennaar  et  près  des  lacs  et 
des  côtes  de  l'Abyssinie  {de  Heuglhi).  C'est  donc  entre  le  10»  et  le 
130  1.  N.  que  cette  espèce  paraît  hiverner.  On  a  cependant  capturé 
de  ces  oiseaux  encore  plus  près  de  l'Equateur  :  au  Sénégal,  en 
Gambie  {Hartlauh)  et  à  la  côte  d'Or  [Frasey)  et  il  est  probable  qu'ils 
hivernent  également  dans  ces  contrées.  Cette  Glaréole  a  aussi  été 
observée  à  Angola  {Monteiro),  à  Damara  {Andersson),  dans  les  colo- 
nies du  Cap  {Layard)  et  de  Natal  {Ayres),  mais  il  est  probable  qu'elle 
ne  se  montre  qu'accidentellement  dans  ces  contrées. 

Mœurs.  —  Comme  nous  l'avons  vu  plus  haut,  la  Glaréole  n'habite 
l'Europe  et  l'Asie  centrale  qu'en  été  :  elle  arrive  en  avril  et  émigré 
à  la  fin  d'août  ou  en  septembre.  Etant  très  sociables,  ces  oiseaux 
voyagent  toujours  par  troupes  plus  ou  moins  nombreuses,  et  leur 
nombre  augmente  à  mesure  qu'ils  avancent  vers  le  Sud  ;  mais  ces 
troupes  volent  sans  ordre,  très  haut,  avec  une  grande  vitesse  et  le 
plus  souvent  pendant  la  nuit. 

Les  Glaréoles  habitent  le  voisinage  des  eaux,  et  principalement 
des  lacs  et  des  fleuves;  mais  elles  ne  se  tiennent  pas  justement  sur 
les  rives  de  ces  derniers,  mais  plutôt  près  des  marais  et  des  mares 
qui  se  trouvent  aux  environs  et  qui  se  dessèchent  plus  ou  moins  pen- 
dant l'été.  On  les  voit  près  des  eaux  douces  comme  près  des  eaux 
salées, mais  rarement  sur  les  rives  sablonneuses;  aussi  ne  les  voit-on 
sur  les  côtes  maritimes  que  pendant  les  migrations.  Elles  fréquen- 
tent aussi  les  pâturages  et  les  jachères,  d'où  leur  est  venu  le  nom 
hongrois  à! Hirondelles  de  jachères,  tandis  que  dans  le  Midi  on  les 
désigne  vulgairement  sous  le  nom  de  Perdrix  de  mer. 

Naumann  dit  avec  raison,  que  les  mœurs  et  les  allures  de  la  Gla- 
réole à  collier  sont  un  mélange  bizarre  des  habitudes  naturelles  d'oi- 
seaux qui  n'ont  entre  eux  aucun  rapport. Son  vol  ressemble  à  celui  de 
l'Hirondelle;  sa  voix  perçante  est  absolument  pareille  à  celle  d'une 
Sterne  naine  ou  d'une  Sterne  caugek  ;  les  mouvements  particuliers  de 
sa  queue  rappellent  ceux  des  Motteux;  enfin,  la  vitesse  avec  laquelle 
elle  court  lui  est  commune  avec  les  Pluviers.  «  Peu  de  temps  après 
leur  arrivée  au  printemps,  dit  de  Nordmann,  ces  oiseaux  se  réunis- 
sent en  grandes  troupes  à  différentes  heures  de  la  journée,  et  se 
divertissent  à  passer  et  à  repasser  au-dessus  d'une  contrée,  remplis- 
sant l'air  de  leurs  cris.  Ils  s'attroupent  de  même  après  avoir  terminé 
l'œuvre  de  la  propagation;  ces  troupes  ne  se  séparent  plus,  et  cou- 
vrent souvent  de  grandes  étendues  de  terrain  dans  les  steppes  arides 


--    147 

de  la  Russie  méridionale  et  sur  les  grands  chemins,  où  elles  montrent 
si  peu  do  crainte  qu'elles  se  dérangent  à  peine  à  l'approche  d'une 
voiture  ;  aussi  les  tire-t-on  très  facilement.  »  L'air  est  le  véritable 
élément  de  cet  oiseau,  car  il  fend  l'espace  avec  la  vitesse  d'une  Hiron- 
delle, quoique  son  vol  ressemble  plutôt  à  celui  des  Sternes  de  petite 
taille  ;  pendant  ses  évolutions  aériennes,  on  le  prendrait  réellement 
pour  un  de  ces  oiseaux,  et  l'erreur  est  d'autant  plus  facile,  que  son 
cri  ressemble  à  celui  de  certaines  Sternes.  La  Glaréole  plane  avec 
élégance,  monte  et  descend  au-dessus  des  marais  et  des  champs  et 
happe  au  passage  les  insectes  qu'elle  rencontre  ;  elle  descend  par- 
fois avec  la  rapidité  d'une  flèche,  rase  l'eau  et  les  prés  pendant  quel- 
ques minutes,  pour  remonter  ensuite  dans  les  régions  élevées,  et  tout 
cela  avec  une  aisance  et  une  rapidité  étonnantes.  Dans  tous  ses  actes, 
elle  montre  une  activité,  une  vivacité  et  une  gaîté  remarquables, 
aussi  ne  peut-elle  rester  un  instant  en  repos;  nullement  farouche, elle 
vole  sans  crainte  autour  des  passants,  mais  elle  devient  parfois  mé- 
fiante quand  elle  se  voit  poursuivie.  Crespon  dit  que  quand  on  appro- 
che de  Tendroit  où  est  établi  son  nid,  on  la  voit  accourir  en  criant, 
passer  et  repasser  sans  cesse  au-dessus  de  soi  et  fondre  même  sur  les 
chiens  ;  quand  on  blesse  un  individu  de  la  bande,  tous  viennent  au- 
près du  blessé  en  poussant  leurs  cris  habituels  ;  cet  auteur  ajoute  qu'il 
en  abattit  un  jour  six  en  un  instant  au  même  endroit,  parce  qu'il  en 
avait  démonté  un  qui  criait  en  courant. 

Les  Glaréoles  à  collier  vivent  généralement  par  troupes  de  douze  à 
vingt  individus  et,  même  à  l'endroit  où  elles  nichent,  les  couples  ne 
s'éloignent  guère  les  uns  des  autres,  mais  elles  n'aiment  pas  la  société 
d'autres  espèces.  Quand  une  troupe  s'abat  dans  une  plaine,  les  indi- 
vidus qui  la  composent  se  dispersent  aussitôt  sur  un  grand  espace;  un 
bruit  suspect  se  fait-il  entendre, toute  la  bande  s'élève  en  même  temps, 
se  rassemble  dans  l'air,  plane  quelques  instants  autour  d(^,  l'endroit 
d'où  elle  est  partie  et  s'envole  ensuite  au  loin. 

La  voix  de  cet  oiseau  ressemble,  comme  il  a  été  dit,  à  celle  de  cer- 
taines Sternes;  d'après  Naumann,  le  cri  peut  se  rendre  par  karia-ka- 
ria  et  kei,  karia  ;  il  entremêle  parfois  ces  cris  d'auti-es  sons,  comme 
par  exemple  karia  bimivedre,  karia  mitivedre  ou  mœdre,  bcdrœ. 

Ces  oiseaux  se  nourrissent  d'insectes  ctde  préférence  des  plus  gros, 
tels  que  hannclons  et  auti'os  (•oi('opton:'S,  sautendlos,  taupes-grillons, 
perce-oreilli's,  libellules,  (riganes,  etc.,  ainsi  que  de  larves  et  de 
chenilles.  En  Afrique,   ils  rendent  de  grands  services  en  faisant  une 


-  148  - 

guerre  à  outrance  aux  terribles  sauterelles  ou  criquets  voyageurs  qui 
forment  à  certaines  époques  leur  unique  nourriture  ;  ^jarlout,  du 
reste,  où  les  Glaréoles  sont  abondantes,  elles  rendent  de  grands  servi- 
ces à  l'agriculture.  Elles  happent  leur  proie  avec  rapidité  et,  d'après 
Brehm,  la  digestion  en  est  si  prompte  que  dix  minutes  après  elles 
rendent  déjà  les  débris  dans  leurs  excréments  ;  elles  avalent  les  insec- 
tes tout  entiers,  comme  le  fait  TEngouievent;  von  der  Miihle  dit  avoir 
trouvé  dans  l'œsophage  de  Glaréoles  fraîchement  tuées,  des  bupres- 
tes, des  cicindèles  et  autres  insectes  appartenant  à  des  espèces  rares, 
tellement  bien  conservés  qu'il  put  les  mettre  dans  sa  collection. 

Selon  Savi,  ces  oiseaux  ne  paraissent  pas  chercher  leur  nourriture 
dans  l'eau  ;  ce  naturaliste  en  garda  un  plusieurs  mois  en  vie  en  le 
nourrissant  d'insectes  et  de  préférence  de  taupes-grillons  ;  l'oiseau 
refusait  de  manger  tout  insecte  qu'on  jetait  vivant  dans  son  baquet 
d'eau,  tandis  qu'il  prenait  avidement  ceux  qu'on  lui  donnait  à  terre  et 
il  allait  même  les  chercher  dans  la  main  de  son  maître.  Suivant  de 
Heuglin,  ces  Glaréoles  sont  très  abondantes  en  août  et  septembre 
près  des  marais  formés  par  la  mer  Rouge,  où  elles  se  nourrissent  de 
petits  crabes,  de  mollusques  et  d  annélides  ;  dans  les  steppes  du  Kor- 
dofan  et  du  Sennaar,  elles  se  nourrissent  particulièrement  d'orthop- 
tères et  de  fourmis  qu'elles  attrapent  le  plus  souvent  au  vol. 

Reproduction, — Cette  Giaréole  niche  dans  les  pâturages  des  steppes 
dégarnis  d'arbres  et  où  l'herbe  est  courte,  dans  les  champs  en  partie 
cultivés  ou  dans  les  plaines  plus  ou  moins  arides,  mais  jamais  dans  les 
endroits  marécageux.  I^e  nid  se  compose  d'une  petite  fosse  naturelle, 
négligemment  garnie  de  brindilles  et  de  radicelles  ;  quelquefois 
cependant  cette  fossette  est  proprement  arrondie  et  se  trouve  abritée 
par  une  toulfe  de  plantes  ou  par  un  petit  monticule  ;  mais  le  plus  sou- 
vent la  femelle  se  contente  de  déposer  ses  œufs  sur  la  terre  nue.  La 
ponte  est  de  deux  à  quatre  œufs,  de  forme  ovale,  sans  luisant,  d'un 
jaune  terreux  pJus  ou  moins  brunâtre  ou  d'un  gris  verdâtre^  et  ornés 
de  taches  irrégulières  brunes  ;  ils  mesurent  environ  30  millim.  sur  25. 

FAMILLE  DES  SCOLOPACIDÉS 

Car.  —  Bec  de  forme  et  de  longueur  variables,  mais  ordinairement 
plus  long  que  la  tôte,  parfois  très  allongé  et  arqué,  en  général  grôle, 
plus  ou  moins  cylindrique,  flexible,  à  extrémité  molle  et  obtuse  ou 
dure  et  pointue  ;  ailes  de  longueur  moyenne,  plus  ou  moins  aiguës,  à 


-  149  -•- 

bord  postérieur  plus  ou  moins  (k'hancré  en  forme  de  faucille  ;  queue 
courte,  formée  de  douze  à  vingt-six  rectrices  ;  tarses  grêles,  générale- 
ment élevés  ;  doigts  antérieurs  libres  ou  réunis  à  la  base  par  de  courtes 
membranes,  ou  bien  lobés  sur  les  côtés  ;  pouce  court,  rarement  absent, 
grôlc,  pourvu  d'un  ongle  très  petit. 

Ces  oiseaux  ont  le  cou  de  longueur  moyenne,  la  tête  fortement 
bombée  et  de  grosseur  moyenne.  Ils  offrent  peu  ou  point  de  différences 
suivant  le  sexe,  mais  beaucoup,  chez  plusieurs  espèces,  suivant  l'âge 
et  les  saisons. 

Hab.  —  On  rencontre  des  Scolopacidés  dans  le  monde  entier,  des 
pôles  à  l'équateur. 

Mœuy-s.  —  Ces  oiseaux  vivent  dans  des  endroits  humides  et  maré- 
cageux ou  près  des  eaux.  Ils  sont  plus  ou  moins  sociables  et  se  réunis- 
sent en  automne  et  en  hiver  en  grandes  bandes  formées  quelquefois 
par  plusieurs  espèces.  Presque  toutes  les  espèces  qu'on  observe  dans 
notre  pays  sont  des  oiseaux  de  passage. 

Chez  la  plupart  des  oiseaux  de  cette  famille,  le  mâle  et  la  femelle 
construisent  leur  nid  en  commun  et  couvent  alternativement. La  ponte 
est  de  deux  à  quatre  œufs. 

On  peut  diviser  cette  famille  en  six  sous-familles,  savoir  :  les 
Tringinœ,  les  Totaninœ^  les  Scolopacinœ,  les  Limosinœ,  les 
Numeniinœ  et  les  Phalaropinœ. 

SOUS-FAMILLE 

DES  TRIXGINÉS.  —  TRINGIN.^ 

Car.  —  Mandibule  supérieure  généralement  sillonnée  jusque  près 
de  l'extrémité,  qui  est  le  plus  souvent  molle,  déprimée,  un  peu  dilatée, 
lisse,  intérieurement  creusée  en  cuiller  ;  les  deux  rectrices  médianes 
se  terminent  le  plus  souvent  en  pointe  et  dépassent  notablement  les 
autres  ;  tarses  scutellés  en  avant  et  en  arrière  ;  quatre  doigts,  rare- 
ment trois. 

GENRE  CXII 

SANDERLING.  —  CALIDRIS 

Tringa,  Briss.  Or//.  V,  p.  230(1700). 

TiuNG.v  et  CnARADRius,  Lin.,  Syst.  nat.  I,  pp.  251,  255  (1766). 
Camdris,  Cuv.  Leç.  d'imat.  comp.  1,  tabl.  II  (1800). 
Arknakia,  Hcch-st.  Ovn.   T'isr/ienh.,  p.  462»  (1 803). 

Car.  —  J)(x  un  peu  jdus  court  (]iii'  la  tête,  comprimé  à  la  base,  légèrement 
létréci  vers  le  milieu,   ;ï  mandibule  supérieure  déprimée  à   l'extrémité,  «jui 


—  loO  — 

est  obtuse  et  très  légèrement  fléchie  à  la  pointe  ;  narines  basales,  latérales, 
ovalo-linéaires,  placées  dans  une  rainure  qui  se  prolonge  jusque  près  de 
l'extrémité  de  la  mandibule  ;  ailes  sur-aiguës,  atteignant  l'extrémité  de  la 
queue  ;  celle-ci  doublement  échancrée  :  les  rectrices  latérales  et  médianes 
dépassant  un  peu  les  autres  ;  bas  des  jambes  dénudé  ;  tarses  médiocres  ; 
doigts  libres,  pouce  nul. 

Ce  genre   ne  diffère  pour  ainsi  dire   de  celui   des   Bécasseaux  que   par 
l'absence  du  pouce. 

Hab.  —  Ce  genre  n'est  représenté  que  par  une  seule  espèce   dont 
l'aire  géographique  est  très  étendue,  comme  on  le  verra  plus  loin. 


193.  —  Le  Sanderling  des  sables 

CALIDRIS  ARENARIA,  Illig.  ex  Lin. 
(PI.  193). 

Tringa  CALIDRIS  GRisEA  MiNOR,  Briss.  Oni.\,  p..  236(1760). 

Tringa  ARENARIA  et  Charadrius  CALIDRIS,  Lin  Syst.  nat.  I,  pp.  251,  255  (1766). 

Charadrius  rubidus,  Gm.  Syst.  nat.  I,  p.  688  (1788). 

Arenaria  vulgaris,  Bechst.    Orn.  Taschenh.  p.  462»  (1803). 

Arenaria  grisea,  Be(i\iS,i.  Naturg .  DeutscJil.  III,  p.  368  (1809). 

Arenaria  CALIDRIS,  Mey.  Tasclienb.  Deuts.  Voyelk.,  II,  p.  326  ,;_1810). 

Calidris  arenaria,  Illig.  Prodr.  p.  249  (1811). 

Calidris  rubidus,  Vieill.  N.  Diction.  cVhist.  nat.  XXX,  p.  127(1819). 

Calidris  tringoides,  Vieill.   Gai.  des  Ois.  III,  p.  95  (1825). 

Trynga  tridactyla,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  II,  p.  198  (1826;. 

Calidris  grisea  et  americana,  Brm.  Isis.,  1830,  p.  991. 

Calidris  MULLERi,  Brm.  Yogelf.  p.  318  (1855). 

Der  Ufer  Sanderling,  en  allemand. 

The  Sanderling,  en  anglais. 

De  Drieteenige  Strandlooper,  en  flamand. 

Taille  :  0,'n65  ;  ailes,  0,121  ;  bec,  0,026  ;  tarses,  0,023. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes  en  été.  —  Parties  supérieures 
d'un  brun  noirâtre,  mais  toutes  les  plumes  bordées  de  roux  vif  et  terminées 
de  cendré  clair  ;  face,  cou  et  poitrine  roux,  chaque  plume  brune  au  centre 
et  terminée  de  blanchâtre  ;  couvertures  des  ailes  brunes  bordées  de  blan- 
châtre, les  scapulaires  de  roux  ;  rémiges  brunes  ;  abdomen  et  sous-caudales 
d'un  blanc  pur  ;  queue  cendrée,  les  rectrices  médianes  brunes  avec  un  peu  de 
roux.  Bec,  iris  et  pattes  noirâtres. 

AJâle  et  femelle  en  hiver.  —  Parties  supérieures  d'un  gris  cendré  clair,  le 
centre  des  plumts  légèrement  brunâtre  ;  face,  joues  et  parties  inférieures  d'un 


iol 


blanc  pur  ;  petites  couvertures  des  ailes  brunâtres,  les  autres  bordées  de 
blanchâtre  ;  queue  comme  en  été,  mais  plus  pâle  et  sans  roux. 

Jeune.  —  Diffère  du  plumage  d'hiver  par  les  plumes  du  dessus  de  la  tête 
et  du  dos  qui  sont  noires  bordées  de  blanchâtre  ;  nuque  cendrée  ;  scapulaires 
d'un  cendré  brunâtre,  tachées  de  blanc  sur  les  bords. 

Cette  espèce  est  toujours  facile  à  reconnaître  à  l'absence  du  pouce, 

Hab.   —  Le    Sanderling  habite,   en  été,    toute  la  zone  polaire 

arctique  jusqu'au  delà  du  82** 
{Seebohm,  de  Ileicgîin)  ;  suivant 
le  professeur  Newton,  il  ne  ni- 
cherait pas  au  sud  du  68°  1.  N.  En 
Islande  on  ne  le  rencontre  que 
sur  la  côte  septentrionale  et  sur- 
tout sur  l'île  Grimsoe,  placée 
sous  le  67°;-  mais  Faber  n'y  a 
pas  trouvé  de  nid.  M.  Seebohm 
dit  à  ce  sujet  :  «  Jusqu'ici  on  n'a  trouvé  des  oeufs  que  près  du  fleuve 
Andersen  (68°),  dans  le  Grinnell  (82  1/2°),  au  Groenland,  à  l'île  Sabine 
(74  1/2°)  et  en  Islande  (65°).  »  Cet  oiseau  abandonne  les  régions 
polaires  en  automne,  et  il  est  alors  plus  ou  moins  commun  sur 
toutes  les  côtes  de  l'Europe  occidentale,  mais  il  est  peu  abondant  sur 
celles  de  la  Baltique.  Il  est  commun  aux  deux  passages  sur  tout  le 
littoral  de  la  Belgique  et  on  en  voit  alors  souvent  sur  les  bords  de 
l'Escaut.  Il  hiverne  sur  les  côtes  du  midi  de  la  France  {Lacroix),  de 
l'Espagne  (^<:«mrfer6-),  du  Portugal  (du  Bocage),  de  VliBWQ{Giglioli), 
mais  on  ne  le  voit  en  Grèce  qu'au  passage  {Lindermayer).  Il  a  été 
observé  sur  les  côtes  de  la  Palestine  (T/ 76-^/ -^zm)  et  il  est  probable  qu'il  se 
montre  aussi  sur  le  littoral  de  l'Asie  Mineure. 

Cet  oiseau  hiverne  également  sur  toutes  les  côtes  de  l'Afrique,  mais 
il  est  rare  sur  le  littoral  de  la  Méditerranée  {Loche)  et  peu  abondant 
sur  la  côte  septentrionale  de  l'Egypte,  mais  il  est  commun  près  de  la 
mer  Rouge  jusqu'àAden  {de  Heuglin),  sur  les  côtes  du  Maroc  et  de 
toute  lAfriqueoccidentale  jusqu'au  cap  de  Bonne-Espérance  (Shcllet/), 
ainsi  qu'aux  îles  Canaries  (Z^o/Zc)  et  Madeiro  [Godman)  ;  sur  le  litto- 
ral oriental,  il  a  été  observe  à  Mozambique  {de  Heuglin,  etc.),  à  Natal 
{Qurne^j)  et  même  à  Madagascar  {Neioton). 

En  Asie,  cette  espèce  est  de  passage  sur  toutes  les  côtes  et  au 
bord  des  grands  lacs  salés  de  la  Sibérie  {Bogdannw),  de  la  Chine  et 
du  Japon  {Scklégcl)  ;   elle  hiverne  sur  les  côtes  méridionales,  mais 


-   152  - 

elle  est  rare  sur  celles  de  l'Inde,  de  Ceylan  et  de  l'Indo-Chine 
{Jerdon,  Seebo/wi),  et  a  même  été  capturée  aux  îles  de  la  Sonde, 
car  le  musée  de  Leyde  possède  un  spécimen  de  Java  {Srhlégel). 

Dans  le  nouveau  monde,  le  Sanderling  est  commun  dans  la  zone 
polaire  arctique  et  il  est  de  passage  sur  tout  le  littoral  de  l'Amérique 
septentrionale  [Coues)  ;  il  hiverne  sur  les  côtes  méridionales  des 
Etats-Unis,  de  l'Amérique  centrale,  des  Antilles,  de  l'Amérique  mé- 
ridionale jusqu'au  Brésil  (i?t«rmez5/er)  et  le  Chili  {Schlégel),  et  proba- 
blement jusqu'en  Patagonie. 

Mœurs.  —  Les  Sanderlings  émigrent  de  la  zone  polaire  à  partir  du 
commencement  de  septembre,  mais  les  passages  continuent  souvent 
jusqu'en  novembre.  Ils  voyagent  pendant  la  nuit  en  bandes  plus  ou 
moins  nombreuses  et  en  suivant  les  côtes  maritimes.  Il  est  cependant 
certain  qu'un  certain  nombre  d'individus  suivent  aussi  les  fleuves  et  les 
rivières,  car  on  en  rencontre  parfois  loin  de  la  mer, par  exemple  près  du 
Volga,  du  lac  Baikal  et  autres  eaux  de  l'intérieur.  On  en  a  même 
observés  et  tués  dans  le  centre  de  l'Allemagne  [Naumann),  en  Suisse 
{Schinz),  en  Bohême  {Fritsch),  en  Transylvanie  {Danfo?^d),  en  Po- 
logne, etc.  M.  Taczanowski  dit  avoir  rencontré,  à  la  fin  d'octobre 
1853,  de  petites  troupes  de  ces  oiseaux  ou  des  individus  isolés  mêlés 
à  des  Bécasseaux,  dans  plusieurs  localités  aux  bords  de  la  Vistule. 
M.  Finsch  en  a  observés  à  plusieurs  reprises  dans  la  tundra  de  la 
Sibérie  occidentale  au  nord  du  Schtschutschja.  Ces  oiseaux  ne  retour- 
nent qu'en  avril  dans  les  régions  boréales. 

Le  Sanderling  est  un  charmant  petit  oiseau,  paisible  et  confiant, 
qu'il  est  facile  d'observer  ;  on  peut  l'approcher  jusqu'à  une  distance 
d'une  dizaine  de  mètres,  et  quand  il  se  sauve,  il  ne  s'éloigne  jamais 
que  de  quelques  mètres,  aussi  est-il  très  facile  de  le  tirer.  Naumann 
rencontra  un  jour  sur  les  bords  du  lac  salé  de  Mannsfeld,  cinq  de  ces 
oiseaux  qu'il  put  observer  longtemps  à  une  distance  de  huit  à  dix  pas 
avant  de  les  capturer.  «  Ayant  fouillé  ma  gibecière,  dit-il,  j'y  trouvai 
quelques  collets  en  crin  que  je  disposai  tant  bien  que  mal  sur  le  sable , 
Je  me  mis  alors  à  rabattre  doucement  ces  oiseaux  ;  mais,  comme  mes 
collets  étaient  mal  tendus,  je  dus  recommencer  plusieurs  fois  l'opéra- 
tion ;  je  finis  cependant  par  en  prendre  trois.  Les  deux  qui  restaient 
étant  devenus  plus  défiants,  je  finis  par  perdre  patience  et  je  les  tuai 
d'un  coup  de  fusil.  »  Le  bruit  d'une  arme  à  feu  ne  les  effraie  pas 
toujours,  et  l'on  peut  quelquefois  tirer  dans  une  bande  sans  que  les 
survivants  cherchent  à  se  sauver  :  ils  se  contentent  de  s'éloigner  de 
quelques  pas. 


—  153  — 

Ces  oiseaux  sont  excessivement  sociables;  CLuand  ils  sont  peu  nom- 
breux, ils  se  mêlent  souvent  à  des  troupes  de  Bécasseaux  qu'ils 
prennent  aussitôt  pour  guides,  et  ils  deviennent  alors  aussi  farouches 
que  certains  de  ces  derniers,  fuyant  avec  eux  au  moindre  danger  ; 
mais  dès  qu'ils  se  retrouvent  entre  eux,  ils  reprennent  leur  vie  insou- 
ciante. Ils  ont  une  démarche  gracieuse  et  aisée  et  savent  courir  avec 
rapidité  ;  leur  vol  est  aussi  facile  que  rapide.  Quant  à  leur  voix,  c'est 
un  cri  sifdant,  bref,  doux  qu'on  peut  rendre  par  pitt  ou  loick. 

Ils  se  nourrissent  d'une  foule  de  petits  animaux  que  les  vagues  re- 
jettent sur  le  rivage,  tels  que  annélides,  mollusques,  petits  crustacés, 
etc.  ;  à  l'occasion  ils  prennent  aussi  des  vers,  des  larves  et  des  insec- 
tes. Naumann  dit  que  quand  ces  oiseaux  trouvent  un  endroit  où  la 
nourriture  est  abondante,  ils  oublient  complètement,  dans  leur  joie,  de 
veiller  à  leur  sécurité. 

Les  Sanderlings  s'apprivoisent  facilement  et  deviennent  très  fami- 
liers. On  peut  les  nourrir  de  mouches  et  de  vermisseaux  mêlés  à  du 
pain  trempé  dans  du  lait. 

Reproduction.  —  Il  a  été  dit  plus  haut  que  les  Sanderlings  ne  se 
reproduisent  que  dans  les  régions  boréales.  C'est  Mac  Farlan  qui 
paraît  avoir  rapporté  les  premiers  œufs  authentiques  de  cette  espèce. 
Il  découvrit  un  nid  le  29  juin  1863  sur  la  côte  de  l'océan  Glacial,  un 
peu  à  l'est  du  fleuve  Andersen,  dans  le  nord-ouest  de  l'Amérique; 
ce  nid  contenait  quatre  œufs  et  la  femelle  fut  prise  sur  son  nid. 
Le  24  juin  1876,  le  capitaine  Feilden  rencontra  de  ces  oiseaux, 
également  près  de  l'océan  Glacial,  mais  un  peu  à  l'ouest  du  cap  de 
l'Union,  et  découvrit  en  même  temps  un  nid  avec  deux  œufs.  Il  était 
placé  sur  une  éminence  de  gravier  à  plusieurs  centaines  de  pieds 
au-dessus  du  niveau  de  la  mer,  et  consistait  simplement  en  une  légère 
dépression  au  centre  d'un  saule  nain  rampant,  garnie  de  quelques 
feuilles  mortes  et  de  chatons  do  l'année  précédente.  Près  de  ce  nid 
on  tua  le  mâle,  de  sorte  qu'il  est  à  présumer  que  les  deux  parents 
jouent  un  rôle  dans  l'incubation  des  œufs.  Vers  le  8  août,  le  capitaine 
Feilden  vit  plusieurs  groupes  de  jeunes  Sanderlings  qui  étaient  à 
peine  capables  de  voler  et  qui  avaient  encore  du  duvet  adhérent  à 
leurs  plumes;  ils  allaient  sous  la  conduite  do  leurs  parents  et  cher- 
chaient activement  des  insectes. 

Suivant  M.  Seebohm,  la  ponte  est  de  quatre  œufs,  d'un  jaune  oli- 
vâtre  et   marqués  de   taches  compactes  d'un   brun   olivâtre,    sous 
lesquelles  existent  quelques  macules  peu  distinctes  d'un  gris  violacé; 
ToMB  II.  —  1889.  20 


-  154  - 

ces  taches  sont  tantôt  plus  nombreuses  vers  le  gros  bout,  tantôt 
uniformément  dispersées  sur  toute  la  surface.  Ils  mesurent  de  1,35 
à  1,44  pouce  sur  0,93  à  0,99  (mesure  anglaise). 

OENRE  CXIII 

BÉCASSEAU.  —  TRINGA. 

Calidkis,  Briss.  Ornith.  v.  p.  226  (1760). 

Tringa,  Lin.  Syst.  nat.I,  p.  247  (1766). 

NuMENius,  Lath.  Ind.  Orn.  II,  p.  712  (1790). 

Erolia,  Vieill.  Anal.  p.  55  (1816). 

TOTANUS,  Steph.  Gen.  zool.  XII,  p.  146  (1824) . 

Calidris,  Pelidna,  C\l^r.Règ.  an.  I,  pp.  525,  526  (1829). 

Leimonites,  ancylocheilus,  actodromas,  Kaup,  Nat.  Syst.,  pp.  37,  50,  55  (1829). 

Canutus,  Brm.  Isis.,  1830,  p.  991. 

ScHŒNiCLUS,  Gray,  Cat.  Br.  Mus.  Grallae,  p.  106  (1844). 

Arquatella,  Baird,  B.  ofAm.  p.  717  (1858). 

Heteropygia,  Coues,  Fr.  Phil.  Acacl.  1861,  p.  199. 

LiMNOciNCLUs,  Gould,  Hanclb.  B.  Austr.  II,  p.  254  (1865). 

Car.  —  Bec  un  peu  plus  long  que  la  tête,  épais,  comprimé  à  la  base, 
rétréci  vers  le  tiers  antérieur,  dilaté  et  légèrement  déprimé  à  l'extrémité  de 
la  mandibule  supérieure  ;  narines  basales,  linéaires,  placées  daus  un  sillon 
très  étendu  ;  ailes  alloDgées,  aiguës,  atteignant  ou  dépassant  l'extrémité  de 
la  queue,  première  rémige  la  plus  longue  ;  queue  courte,  conique,  les  deux 
rectrices  médianes  dépassant  un  peu  les  autres  ;  bas  des  jambes  dénudé  sur 
une  petite  étendue  ;  tarses  médiocres,  scutellés  ;  doigts  libres,  bordés,  le 
pouce  court,  ne  reposant  sur  le  sol  que  par  son  extrémité  ;  ongles  courts, 
obtus. 

Hah.  —  Ce  genre  est  cosmopolite. 

194.  —  Le  Bécasseau  canut. 

TRINGA  CANUTUS,  Lin.  ex  Briss. 

(PL  194). 

Calidris,  Calidris  n^via,  grisea  et  Canutus,  Briss.  Ornith.  v.  pp,  226,  230,  233, 

258  (1760). 
Tringa  ferruginea,  Briinn.  Orn.  bor.  p.  53  (1764). 
Tringa  CANUTUS,  calidris  et  islandica.  Lin.  Syst  nal.  p.  251  (1766). 
Tringa  AUSTRALis,  n^evia  et  grisea,  Gm.  Syst.  nat.,  pp.  679,  681  (1788). 
Tringa  rufa,  Wils.  Am.  Orn.  VII,  p.  43,  pi.   57,  f.  5  (1813;. 
Tringa  cinerea,  Tem.  Man.  d'Orn.  p.  404  (1815). 

Calidris  islandica,  Ross,  Voy.  of  Disc.  éd.  2,  II.  app.  IV,  p.  167  (1819). 
Canutus  islandicus  et  cinereus,  Brm.  Isis,  1830,  p.  991. 
Calidris  canutus,  Gould,  B.  ofEur.  IV,  pi.  324  (1837) . 
Tringa  lomatina,  Licht.  Nomencl.  av.  p.  92  (1854). 
Tringa  cooperi,  Baird,  Cass.  etLawr.  B.  N.  Am.  p.  716  (1858). 
Actodromas  cooperi,  Ridgw.  iVow.  N.  Am.  B.  p.  44(1881). 


-  1S5  — 

Der  Islandische  Strandlaufer,  en  allemand. 

The  Knot,  en  anglais. 

De  Kanoet-Strandlooper,  en  flamand. 

Taille  :  0",21  ;  ailes,  0,175  ;  bec,  0,032  ;  tarses  0,030. 
Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  Dessus  de  la  tête  et  du  cou 
d'un  cendré  roussâtre  avec  de  larges  mèches  noires  au  vertex  et  des  stries 
brunes  à  la  nuque;  dos  noir,  les  plumes  bordées  de  roussâtre  ;  scapulaires 
noires,  terminées  de  cendré  clair  et  marquées  de  grandes  taches  d'un  roux 
ferrugineux  ;  bas  du  dos  d'un  cendré  brunâtre  avec  les  plumes  bordées  de 
blanchâtre;  croupion  et  sus-caudales  blancs  avec  des  croissants  noirs  et 
variés  d'un  peu  de  roux  ;  couvertures  des  ailes  brunes  bordées  de  cendré  ; 
rémiges  noirâtres  avec  les  baguettes  blanches  ;  sourcils,  joues,  gorge,  devant 
du  cou,  poitrine  et  abdomen  d'un  roux  ferrugineux,  plus  pâle  autour  du  bec; 
bas-ventre  et  sous-caudales  blancs  tachetés  de  brun,  les  dernières  variées 
de  roux  de  rouille;  rectrices  cendrées  hsérées  de  blanc. Bec  et  pattes  noirâtres, 
iris  brun. 

Eti  hiver.  —  Parties  supérieures  d'un  cendré  clair  avec  de  petites  mèches 
brunes  sur  la  tête,  la  tige  des  plumes  dorsales  et  des  scapulaires  également 
brune  ;  couvertures  des  ailes  et  queue  comme  en  été,  mais  d'une  teinte  plus 
pâle  ;  sus-caudales  blanches,  mais  terminées  par  un  croissant  noii'âtre  ; 
parties  inférieures  d'un  blanc  pur  avec  des  taches  allongées  brunes  au  devant 
du  cou  et  des  marques  en  zigzags  de  même  couleur  à  la  poitrine  et  sur  les 
flancs. 

Jeune.  —  Parties  supérieures  d'un  cendré  obscur  tirant  sur  le  verdâtre, 
avec  des  taches  allongées  brunes  sur  la  tête  et  sur  le  cou  ;  plumes  du  dos  et 
scapulaires  terminées  par  deux  croissants  étroits  :  le  supérieur  brun,  l'infé- 
rieur blanchâtre  ;  gorge  et  abdomen  blancs  ;  devant  du  cou  et  poitrine  lavés 
de  roussâtre  et  marqués  de  taches  angulaires  brunes  et  d'autres  en  zigzags 
sur  les  flancs. 

Hab.   —  Le  Bécasseau  canut  habite,  en  été,  la  zone  polaire  arc-   ' 
^333:^;,,:^.  .=:^™     tique  jusqu'au  S2"2T  1.  N.,mais 


il  n'a  été  observé  ni  au  Spilz- 
'1     berg,  ni  à  la  Nouvelle-Zemble. 
■■Hi^l     II  commence  à  émigrer  en  août 
et  continue  à  arriver  dans  nos 
, .. .  ^ifc  .1.1  '     contrées  jusqu'en  octobre  ;    on 

^'  .  :    le    rencontre    alors    en    grand 

"  :  -"    nombre  sur  les  côtes  de  l'Europe 

iL*^...-^-  •-.-  .  .i_.-..  _.^:^- _--■-.! .-•r  —  L^-^;    septentrionale,    mais  il  est   tou- 
jours peu  abondant  sur  celles  de  la  Baltique  [Borggrevc),  de  la  Suède 
Nilsson)  et  rare  sur  celles  de  la  Finlande  [BUchnev). 


■■^♦^:- 


—  156  — 

Cet  oiseau  hiverne  en  plus  ou  moins  grand  nombre  sur  toutes  les 
côtes  de  la  Grande-Bretagne  et  de  l'Irlande  {Seebohm),  de  la  Hollande 
{Schlégel)  et  de  la  Belgique,  et  il  est  même  abondant  sur  l'Escaut  à 
partir  de  Bath,  mais  au  printemps  on  le  rencontre  plus  en  aval 
{Croegaerty,  il  est  également  commun  sur  les  côtes  de  France  :  on  le 
rencontre  en  Picardie  et  aux  environs  de  Dunkerque  près  de  six  mois 
de  l'année  {Degland  et  Gerbe) « 

Sur  le  littoral  de  l'Espagne  et  du  Portugal  il  est  de  passage  en 
automne  et  au  printemps  [Saunders ,Reyes)'.,  lord  Lilford  l'observa  par 
milliers,  le  10  mai,  dans  la  Marisma  près  San-Lucar,  en  plumage 
de  noce  et  partant  pour  le  Nord.  Il  est  très  rare  en  hiver  sur  les  côtes 
de  la  Méditerrannée  et  de  l'Adriatique  {Salvadori,  Krûper)  ;  cepen- 
dant, lors  des  passages,  on  le  voit  en  grand  nombre  dans  certaines 
parties  de  l'Italie,  venant  de  l'Afrique  occidentale  ou  s'y  rendant 
[Seebohm)  ;  c'est  aussi  aux  passages  qu'on  l'observe  en  petit  nombre 
en  Grèce  [Lindermayer^,  en  Turquie  {Elwes  et  Backley)  et  il  ne 
serait  pas  rare  à  ces  époques  en  Transylvanie  [Danford)  et  sur  les 
côtes  russes  de  la  mer  Noire  [de  Nord^nann).  Ce  n'est  que  très  acci- 
dentellement qu'on  le  rencontre  à  l'intérieur  des  terres,  comme  en 
Bohême  {Fritsch),  en  Pologne  {Taczanowski),  dans  le  centre  de 
l'Allemagne  {Naumann)  et  en  Suisse  [Schinz). 

Sur  les  côtes  occidentales  de  l'Afrique,  on  le  rencontre  en  hiver 
jusqu'au  pays  de  Damara  [Andersson). 

Cette  espèce  paraît  bien  moins  répandue  en  Asie,  et  on  ne  l'a 
jamais  observée  au  Kamtchatka.  En  été  elle  habite  les  tundras  du 
nord  de  la  Sibérie  [Bogdanow)  ;  elle  paraît  être  rare  dans  la  région 
méridionale  de  la  Sibérie  orientale  {Taczanowski);  l'abbé  David  dit 
qu'au  commencement  du  printemps  et  en  automne  jusqu'aux  jours 
des  grands  froids,  on  voit  des  volées  nombreuses  de  ces  oiseaux  sur 
les  plages  de  Takou  et  sur  beaucoup  d'autres  points  des  côtes  de 
l'empire  chinois  ;  il  est  de  passage  au  Japon  {Seebohm)  ;  suivant  Gould 
un  sujet  aurait  été  tué  en  Australie  dans  la  baie  Moreton  ;  on  le  prend 
parfois  aussi,  en  hiver,  sur  les  côtes  orientales  de  la  Nouvelle- 
Zélande  {Buller).  Jerdon  le  comprend  dans  les  oiseaux  de  l'Inde,  mais 
M.  Hume  fait  remarquer  que  le  Bécasseau  capturé  dans  ce  pays 
appartient  à  une  espèce  voisine,  le  T.  crassirostris,  et  non  au  T.  ca- 
nutus  comme  on  l'a  cru  d'abord. 

En  Amérique  il  habite   le  nord   du    Groenland  {Holbôll)  et   les 
autres  parties  boréales  ;  il  se  montre  aux  passages  ou  en  hiver  sur 


—  157  — 

toutes  les  côtes  orientales  des  Etats-Unis  (fîn^/rti)  jusqu'au  Brésil: 
M.  Burmeister  dit  qu'on  le  rencontre  en  hiver  sur  tout  le  littoral  bré- 
silien. Cet  oiseau  ne  se  montre  jamais  sur  les  côtes  américaines  du 
Pacifique. 

Mœurs.  —  Le  Bécasseau  canut  émigré  des  régions  boréales  vers 
la  fin  d'août,  mais  les  passages  continuent  jusqu'aux  derniers  jours 
d'octobre  ;  ce  n'est  qu'en  mai  qu'il  retourne  dans  la  zone  polaire.  Nau- 
mann  dit  avoir  vu  à  la  fin  de  mai  et  au  commencement  de  juin,  de 
grandes  quantités  de  ces  oiseaux  sur  les  plages  allemandes  de  la  mer 
du  Nord,  et  que  ce  n'était  que  vers  le  milieu  du  dernier  mois,  qu'ils 
avaient  complètement  disparu.  Les  individus  qui  ont  hiverné  sur  les 
côtes  occidentales  de  l'Afrique  et  du  midi  de  l'Europe,  prennent,  à 
leur  retour  dans  le  Nord,  deux  routes  différentes  :  à  partir  de  Calais 
et  de  Dunkerque,  les  uns  suivent  les  côtes  occidentales  des  îles  Bri- 
tanniques pour  se  diriger  vers  l'Islande  et  le  Groenland  ;  les  autres, 
au  contraire,  longent  les  côtes  orientales  de  l'Angleterre  et  de 
l'Ecosse  ou  celles  de  la  Belgique,  de  la  Hollande,  de  l'Allemagne  et 
de  la  Norwège  pour  se  rendre  au  cap  Nord  et  dans  la  Russie  septen- 
trionale. Ces  migrations  ontlieupar  troupes  plus  ou  moins  nombreuses 
et  souvent  par  bandes  de  plusieurs  centaines  d'individus.  Ces  oiseaux 
voyagent  généralement  la  nuit,  surtout  au  crépuscule  et  à  l'aurore,  et 
suivent  généralement  le  littoral;  ce  ne  sont  le  plus  souvent  q  le  des 
jeimes  sujets  que  l'on  rencontre  près  des  eaux  douces  de  l'intérieur, 
où  on  en  voit  parfois  quatre,  cinq  et  jusqu'à  douze  ensemble.  M.  See- 
bohm  fait  remarquer  que  sur  les  côtes  britanniques,  on  observe  par- 
fois à  toute  époque  de  l'été,  de  vieux  sujets  qui  ne  paraissent  plus 
disposés  à  aller  nicher  dans  les  régions  boréales,  préférant  passer  la 
belle  saison  là  où  ils  ont  probablement  vécu  pendant  l'hiver. 

Ce  Bécasseau  est  très  actif  et  remuant;  il  court  avec  grâce  et 
rapidité  sur  le  rivage  aussi  bien  que  sur  des  végétaux  flottants; 
quand  le  terrain  sur  lequel  il  se  meut  est  peu  solide  ou  boueux, 
il  relève  les  ailes,  autant  pour  se  maintenir  en  équilibre  que  pour 
se  rendre  plus  léger  et  éviter  d'enfoncer  dans  la  bouc;  au  besoin, 
dit  Naumann,  il  sait  nager,  mais  il  ne  se  livre  à  cet  exercice 
qu'en  cas  de  nécessité.  Bien  qu'il  sache  fort  bien  courir,  il  ne 
paraît  cependant  pas  pouvoir  soutenir  une  course  rapid(^  aussi 
longtemps  que  les  Pluviers,  et  préfère  voler  i»our  se  trans|>orter  à 
une  certaine  distance.  Son  vol  est  du  reste  fjicile,  ra[iide  et  recti- 
ligne:   il  vole  généralement   bas,   surtout   quand  il   franchit  l'espace 


-  158  - 

au-dessus  de  l'eau  ;  mais  il  sait,  quand  cela  lui  convient,  s'élever  à 
une  grande  hauteur. 

Lorsqu'une  troupe  de  ces  oiseaux  s'abat  dans  un  endroit,  ils  s'épar- 
pillent ordinairement  sur  un  grand  espace  ;  mais,  malgré  leur  viva- 
cité et  leurs  joyeux  ébats,  ils  n'oublient  jamais  de  veiller  à  leur  sûreté. 
De  tous  les  Bécasseaux,  ils  sont  peut-être  les  plus  farouches  :  ils 
fuient  tout  ce  qui  leur  semble  suspect,  et  le  chasseur  a  souvent 
bien  de  la  peine  pour  les  approcher  à  portée  de  fusil  ;  les  jeunes  se 
montrent  moins  défiants,  parce  qu'ils  ne  connaissent  pas  encore  les 
dangers  auxquels  ils  sont  exposés,  mais  ils  ne  tardent  guère  à  s'aper- 
cevoir qu'ils  ont  plus  à  craindre  chez  nous  que  dans  la  froide  patrie 
qui  leur  a  donné  naissance. 

C'est  un  oiseau  très  sociable,  mais  il  ne  recherche  la  compagnie 
d'autres  espèces  que  quand  il  se  trouve  isolé  ;  on  ne  les  voit  ordinai- 
rement que  par  troupes,  et  plus  ils  sont  nombreux,  plus  il  est  difficile 
de  les  approcher.  Leur  cri  est  sonore,  sifflant  et  peut  se  rendre  par 
tui  ou  twi  et  twitwi  ;  on  l'entend  surtout  quand  une  troupe  prend  son 
vol,  mais  rarement  pendant  la  migration  d'automne. 

La  nourriture  du  Bécasseau  canut  se  compose  de  vers,  de  mollus- 
ques, de  petits  crustacés,  d'insectes  et  de  larves  aquatiques,  qu'il 
cherche  dans  l'eau  ou  dans  la  boue. 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  niche  dans  les  régions  boréales,  mais 
on  ne  connaît  encore  rien  de  bien  positif  sur  ses  œufs.  En  1820, 
Sabine  vit  un  grand  nombre  de  ces  oiseaux  nichant  à  l'île  Melville 
sous  le  80";  en  182311  en  vit  également  à  la  péninsule  de  Melville 
sous  le  67"  ;  Richardson  dit  que  cette  espèce  niche  dans  la  baie  d'Hud- 
son  à  partir  du  55'  ;  en  1876,  le  capitaine  Feilden  captura  au 
Grinnell  (82  1/2"),  un  couple  accompagné  de  leurs  petits  en  duvet  ; 
M.  Hart,  naturaliste  américain,  se  procura  sur  la  même  côte,  sous  le 
81  3/4°  des  jeunes  en  duvet,  mais  aucun  de  ces  explorateurs  ne  parvint 
à  se  procurer  des  œufs.  Suivant  le  nombre  des  poussins  qui  accompa- 
gnaient leurs  parents,  il  y  a  lieu  de  supposer  que  la  ponte  est  de  quatre 
œufs. 

Brehm  et  Paessler  disent  que  le  Bécasseau  canut  creuse  lui-même 
une  petite  fosse  pour  ses  œufs,  que  ceux-ci  sont  de  la  grosseur  des 
œufs  du  Scolopaœ  gallinago,  d'un  jaune  olivâtre  ou  brunâtre  avec  des 
taches  profondes  cendrées  et  jaunâtres  et  d'autres,  superficielles,  d'un 
brun  noirâtre. 


—  159  — 

195.  —  Le  Bécasseau  maritime. 

TRINGA  MARITIMA,  Briinn. 

(PI.  195) 

Tringa  MARITIMA,  Briinn.  Orn.  bor.  p.  54  (1764). 

TRINGA  NiGRiCANS,  Mont.  Trans.  Linn.Soc.  IV,  p.  40  (1798). 

Tringa  canadensis,  Lath.  Incl.  orn.  II,  suppl.  p.  65  (1802). 

Trynga  arquatella,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  Il,  p.  190  (1811). 

ToTANUs  maritimus,  Stepli.  Shaw^s  Gen.  zool.  XII,  2,  p.  146  (1824). 

Tringa  littoralis,  Brm.  /ses,  1830,  p.  991. 

Arquatella  maritima,  Coues,  Proc.  Phil.  Acad.  1861,  p.  183. 

Tringa  striata,  Dress.  (nec  Lin.),  Hi^it.  Birds  of  Eur.  Mil    p.  69  (1877  . 

Arquatella  couesi,  Ridgw,  Nutt.  Orn.  Club,  1880,  p     100. 

Der  See-Strandlaufer,  en  allemand. 

The  Purple  Sandpiper,  en  anglais. 

De  Paarse-Strandlooper,  en  flamand. 

Taille:  0,18  ;  ailes  0,128  ;  bec  0,035  ;  tarses  0,026. 

Description  des  deiùx  sexes  adultes  en  été.  —  Dessus  de  la  tête  et  nuque 
roux  striés  de  noir  ;  raie  sourcilière  et  base  du  front  blancs  ;  côtés  de  la  tête 
blanchâtres  striés  de  brun  ;  parties  supérieures  d'un  noir  violacé,  avec  les 
plumes  du  manteau  et  les  scapulaires  bordées  et  tâchées  transversalement  de 
roux;  gorge  blanchâtre  :  devant  du  cou  et  poitrine  d'un  cendré  blanchâtre 
avec  des  taches  d'un  cendré  noirâtre;  abdomen  d'un  blanc  pur  ;  flancs  mar- 
qués de  taches  oblongues  cendrées  ;  couvertures  des  ailes  d'un  noir  violacé 
bordées  de  blanchâtre;  rémiges  noirâtres,  les  secondaires  terminées  par  un 
peu  de  blanc;  rectrices  médianes  noires,  les  autres  cendrées.  Bec  brun,  jaune 
à  la  base;  pattes  d'un  jaune  d'ocre  ;  iris  brun. 

JSn  hiver.  —  Tête  et  dessus  du  cou  d'un  cendré  brunâtre  foncé  tirant  un 
peu  sur  le  violet  ;  manteau  et  scapulaires  noirâtres,  mais  toutes  les  plumes 
bordées  de  gris  violacé;  bas  du  dos  et  sus-caudales  noirs;  gorge  d'un  blanc 
varié  de  cendré;  poitrine  et  flancs  d'un  cendré  un  peu  plus  pâle  que  la  tête, 
ces  derniers  variés  de  blanchâtre  ;  abdomen  blanc  ;  le  reste  du  plumage 
comme  en  été. 

Jeune.  —  Une  étroite  raie  sourcilière  et  menton  blancs  ;  front,  loruuis  et 
joues  d'un  gris  clair  pointillé  et  strié  de  noirâtre  ;  dessus  de  la  tète  noir  avec 
les  plumes  bordées  de  roussâtre  ;  nuque  et  côtés  du  cou  d'un  gris  clair,  mais 
tachés  et  striés  de  noirâtre;  devant  du  cou  et  haut  de  la  poitrine  d'un  lirun 
noirâtre  avec  les  plumes  bordées  de  blanchâtre  ;  manteau  et  scapulaires  noirs 
avec  les  plumes  bordées  de  roux  jaunâtre  et  terminées  de  blanc;  couvertures 
des  ailes  cendrées,  bordées  de  ronx  et  terminées  de  blanchâtre  chez  los  plus 
grandes;  rémiges  d'un  brun  noirâtre,  les  secondaires  bordées  de  blanc;  bas  du 


—  160  ~ 

dos  et  sus-caudales  noirs,  chaque  plume  bordée  de  cendré  ;  rectrices  mé- 
dianes d'un  brun  noirâtre,  les  autres  d'un  cendré  brunâtre  ;  parties  infé- 
rieures d'un  blanc  pur,  les  sous-caudales  avec  une  strie  médiane  noirâtre. 


Hab.  —  Cette  espèce  habite  également,  en  été,  la  zone  boréale,  où 

on  la  rencontre  jusqu'au  Groen- 
land {Holhôll),  au  Spitzberg  et  à 
la  Nouvelle-Zemble  {de  Heuglin)\ 
elle  est  sédentaire  au  Sud  du 
Groenland,  en  Islande,  aux  îles 
Féroé  et  sur  les  côtes  de  la 
Norwège.  p]n  hiver  on  ob- 
serve cet  oiseau  sur  toutes  les 
côtes  rocailleuses  du  Danemark 
{Kjaerbôlling)^  du  Schleswig-Holstein  {vonHomeyer),  àn^.-O.  àQ 
l'Allemagne  (Naumann),  de  la  Hollande  {Schlégel)  et  des  îles 
Britanniques  {Seebohm)  ;  il  est  peu  abondant  en  Belgique  où  on 
ne  l'observe  qu'au  passage  près  de  la  mer  et  des  bouches  de 
TEscaut.  En  octobre  et  en  novembre  on  le  rencontre  sur  les  côtes 
de  Dunkerque  et  de  Calais,  mais  on  ne  l'y  voit  pas  chaque  année 
[Degland  et  Gerbe)  ;  on  l'observe  aussi  sur  les  côtes  rocheuses 
de  l'Espagne  [Saunde^-s)  et  du  Portugal  {du  Bocage)  jusqu'à 
Gibraltar  (/r&2/).  On  ne  le  voit  qu'accidentellement  sur  les  côtes  de 
l'Italie  {Salvadori,  Giglioli),  de  la  Grèce  {Krilper)  et  des  Cyclades 
{Erhardt)  ;  sa  présence  ne  semble  pas  avoir  été  constaté  en  Autriche, 
mais  il  paraît  qu'on  a  capturé  un  individu  en  1857,  sur  le  lac  Neu- 
siedel  en  Hongrie  {Jucoivitz). 

M.  Du  Cane  Godman  a  signalé  l'apparition  d'une  petite  troupe  de 
ces  oiseaux  aux  Açores,  mais  on  ne  paraît  pas  en  avoir  observés  sur 
les  côtes  africaines  ;  le  Ur.  0.  Finsch  dit  cependant  avoir  examiné  un 
individu  de  cette  espèce  provenant  du  cap  de  Bonne-Espérance. 

En  Asie  ce  Bécasseau  semble  relégué  dans  les  tundras  de  la  Sibérie 
septentrionale  {Bogdanoiv)  ;  Middendorff  en  a  tué  trois  exemplaires 
sous  le  75°,  mais  aucun  voyageur  n'a  observé  cette  espèce  ni  dans  la 
Sibérie  orientale,  ni  au  Kamtschatka  ;  les  sujets  capturés  sur  les  îles 
Bering  et  Copper  ont  été  décrits  par  M.  R,  Ridgway  sous  le  nom  de 
Arquatello,  couesi. 

En  Amérique  cette  espèce  ne  paraît  guère  être  très  répandue  : 
elle  habite  les  parties  boréales,  surtout  l'Alaska  {Turner)  ;    en  hiver 


—  161  — 

elle  se  montre  sur  les  côtes  américaines  de  l'Atlantique  jusque 
vers  le  40°  1.  N.  {Baird,  Coues),  rarement  près  des  grands  lacs 
{Cooke). 

Mœurs.  —  Le  Bécasseau  maritime  émigré  en  septembre  des  con- 
trées boréales,  mais  il  hiverne  dans  tous  les  pays  du  Nord  où  les 
côtes  restent  plus  ou  moins  libres  de  glace  ;  c'est  pour  cette  raison 
qu'on  ne  le  voit  pas  chaque  hiver  en  grand  nombre  sur  les  côtes  de 
l'Europe  occidentale  ;  son  abondance  chez  nous  correspond  donc  aux 
hivers  rigoureux  dans  le  Nord. C'est  en  septembre  etsurtouten octobre 
qu'il  fait  son  apparition  sur  notre  littoral  ;  il  retourne  dans  sa  patrie 
en  avril  et  en  mai.  Ces  voyages  ont  lieu  j)ar  troupes  de  vingt  à  trente 
individus,  le  plus  souvent  pendant  la  nuit  et  en  suivant  les  côtes  mari- 
times ;  dans  certains  pays  on  les  voit  arriver  par  bandes  formées  de 
plusieurs  centaines  d'individus. 

Bien  que  la  mer  ne  lui  soit  pas  indispensable,  il  passe  cependant 
près  d'elle  la  plus  grande  partie  de  l'année  ;  cet  oiseau  se  montre  sou- 
vent, en  été,  dans  des  endroits  boueux  ou  marécageux  des  régions 
élevées,  et  qui  se  trouvent  parfois  loin  dans  l'intérieur  ;  mais  il 
recherche  surtout  les  endroits  rocailleux,  les  falaises  et  les  rochers 
escarpés  battus  sans  cesse  par  les  flots. 

Par  son  naturel,  il  ressemble  à  ses  congénères  ;  c'est  un  oiseau  vif 
et  remuant,  courant  avec  agilité  sur  les  falaises  et  les  récifs  en 
évitant  avec  adresse  les  vagues  qui  viennent  se  briser  à  ses  pieds  ; 
Naumann  dit  que  ce  Bécasseau  sait  fort  bien  nager  et  qu'il  s'aventure 
même  à  une  assez  grande  distance  du  rivage,  ce  qu'aucun  autre 
oiseau  de  son  genre  n'oserait  entreprendre.  Son  vol  est  facile,  élégant, 
rapide  et  varié  ;  on  le  voit  souvent  raser  avec  rapidité  la  surface 
de  la  mer  en  suivant  les  ondulations  des  vagues.  C'est  le  plus  confiant 
et  le  moins  craintif  des  Bécasseaux  :  il  ne  s'inquiète  nullement  de  la 
présence  de  l'homme,  et  se  laisse  même  approcher  jusqu'à  la  distance 
de  ({uelques  pas.  Il  est  très  sociable,  vit  en  bonne  intelligence  avec 
ses  compagnons,  et  si  on  ne  le  voit  que  rarement  mêlé  à  d'autres 
espèces,  c'est  que  les  localités  qu'il  fréquente  ne  conviennent  pas 
aux  autres.  Son  cri  est  sonore  et  sifflant,  mais  difficile  à  rendre  par 
des  mots. 

Cet  oiseau  se  nourrit  principalement  d'annélides,  de  petits  crusta- 
cés et  de  mollusques  marins,  rarement  de  larves  et  d'insectes,  qu'il 
ne  trouve  d'ailleurs  qu'exceptionnellement  dans  les  lieux  qu'il  fré- 
quente d'Iiabitude. 

TuME  II.  —  188'.».  -^l 


—  162  - 

Reproduction.  —  Aux  îles  Féroé,  le  Bécasseau  maritime  com- 
mence à  nicher  vers  le  milieu  du  mois  de  mai  ;  plus  au  nord  la 
reproduction  est  retardée  jusque  dans  le  courant  de  juin,  et  dans  la 
Nouvelle-Zemble,  selon  de  Heuglin,  la  ponte  n'a  lieu  qu'en  juillet. 

Cet  oiseau  niche  dans  les  falaises,  dans  les  rochers  et  même  dans 
les  montagnes  situées  loin  des  côtes,  plus  rarement  dans  les  endroits 
rocailleux  des  vallées  et  près  des  mares  d'eau  douce.  Le  nid  se  com- 
pose d'une  petite  fosse  garnie  de  quelques  brins  et  protégée  par  des 
herbages  ou  des  cailloux.  La  ponte  est  de  trois  ou  quatre  œufs,  dont 
la  couleur  fondamentale  varie  entre  le  jaune  olive  et  le  brun  fauve  ; 
ils  sont  ornés  de  taches,  de  points  et  de  stries  d'un  brun  noirâtre, 
plus  serrés  vers  le  gros  bout  ;  ces  œufs  mesurent  37  millim.  sur  26. 

Les  parents  témoignent  beaucoup  d'attachement  à  leurs  petits  ; 
quand  quelqu'un  s'approche,  ils  volent  à  sa  rencontre,  courent  autour 
de  lui  en  traînant  les  ailes,  et  cherchent  à  éloigner  l'ennemi  de  leur 
couvée  en  attirant  l'attention  sur  eux. 


196.  —  Le  Bécasseau  cocorli. 
TRINGA  SUBARQUATA,    Tem.  ex  Gûld. 

(PL   196). 

ScoLOPAX  SUBARQUATA,  Giild.  iVotJ.  Comm.  Petrop.  XIX,  p.  471  pi.  17  (1775). 

SooLOPAX  AFRiCANA  et  PYGM^A,  Gm.  Syst.  nat.  1,  p.  655  (1788). 

NuMENius  AFRiCANus  et  PYGM^us,  Lath.  Ind.  Orn.  Il,  p.  712  (1790). 

ScoLOPAX  DETHARDiNGii,  Siemss.  Handb.  Meckl.  Land-u.  Wasservogel,  p.  149  (1794). 

Tringa  islandica,  Retz,  (nec  Lin.)  Faun.  Suec.  p.  192  (1800). 

NuMENius  SUBARQUATA,  Bechst.  Orn.  Taschenb.  II,  p.  276  (1803). 

NuMENius  FERRUGiNEUs,  Mey.  Tccschenb.  II,  p.  395  (1810). 

Trynga  falcinella,  Pall.  Zoogr.  Rosso-  As.  II,  p.  188  (1811). 

Tringa  subarquata,  Tem.  Man.  d'Orn.Y)    393  (1815). 

Tringa  pygm^a,  Leach,  Syst.  cat.  M.  B.  Br.  Mus.  p.  30  (1816). 

Erolia  tariegata,  Vieill.  Analyse.,  p.  55  (1816). 

Falcinellus  pygm.eus,  Cuv.  Règ.  an.  I,  p.  486  (1817). 

Ancylocheilus  subarquatus,  Kp.  Nat.  Syst.  p.  50  (1829  . 

Pelidna  SUBARQUATA  et  MACRORHYNCHOS,  Brm  Isis,  1830,  p.  991  . 

./Erolia  varia,  Vieill.  Gai.  ois.  II,  p.  89  (1834). 

Falcinellus  Cuvieri,  Bp.  Comp.  list,  p.  50(1838). 

ScHŒNicLus  sub.vrquatus,  Gray,  List  B.  Br.  Mus.lll.,  p.  105  (1844). 

Erolia  PYGM/EA,  Brm.  Vc^fc'Z/".  p.  319  (1855). 

Ancylocheilus  subarquatus,  Gould,  Handb.  B.  Austr.  II,  p.  365  (1865). 

Tringa  subarquata,  Finsch  et  Hartl.  Yog.  Ost-Afr.  p.  761  (1870). 


163   - 


Der  bogenschnablige  Strandlaufer,  en  allemand. 
The  Curlew  Sandpiper,  en  anglais. 
De  Krombek-Strandlooper,  en  flamand. 

Taille    du  mâle:  0n^,143  ;   fem.  0,150  à  0,153;  ailes  0,125  ; 
bec  0,038  ;  tarses  0,028. 

Description  des  deux  sexes  en  été.  —  Dessus  de  la  tête  et  nuque  d'uu  roux 
marron,  tachetés  de  noir  et  pointillés  de  grisâtre;  tour  de  l'œil  blanchâtre  ; 
tour  du  bec  d'un  blanc  grisâtre  pointillé  de  roux  marron  ;  manteau  et  scapu- 
laires  noirs,  tachés  de  roux  marron  et  de  cendré  :  bas  du  dos  d'un  brun 
cendré  mais  les  plumes  bordées  de  blanchâtre  ;  sus- caudales  blanches  barrées 
de  noir  ;  couvertures  des  ailes  d'un  cendré  ])runâtre,  plus  pâles  sur  les  bords, 
les  plus  grandes  terminées  de  blanc  terne,  toutes  marquées  d'une  strie  cen- 
trale noire  ;  rémiges  d'un  brun  noirâtre  avec  les  baguettes  bbinches  ;  devant 
et  côté  du  cou,  poitrine  et  abdomen  d'un  roux  mairon  avec  les  plumes  plus 
ou  moins  bordées  de  blanc  ;  bas -ventre  et  sous-caudales  d'un  blanc  varié  de 
roux  et  taché  de  brun  ;  queue  d'un  cendré  brunâtre,  les  rectrices  légèrement 
bordées  de  blanc.  Bec   un  peu  arqué,  noirâtre;  iris  brun  ;  pattes  noirâtres. 

En  hiver.  —  Parties  supérieures  d'un  cendré  brunâtre  avec  la  tige  des 
plumes  noire  ;  sus-caudales  blanches  ;  parties  inférieures  d'un  blanc  pur  lavé 
de  cendré  à  la  poitrine  ;  sourcils  et  joues  blancs,  les  dernières  striées  de 
cendré  ;  ailes  et  queue  comme  en  été. 

Jeune.  —  Dessus  de  la  tète,  manteau  et  bas  du  dos  d'un  brun  noirâtre 
avec  les  plumes  bordées  de  blanchâtre  ;  nuque  cendrée  striée  de  brun  ;  sus- 
caudales  blanches  ;  sourcils  et  joues  blanchâtres,  striées  de  brun  ;  parties 
inférieures  d'un  blanc  pur  mais  lavées  de  cendré  roussâtre  et  striées  de  brun 
sur  le  devant  du  cou  et  à  la  poitrine  ;  le  reste  comme  chez  les  adultes,  mais 
le  bord  des  couvertures  plus  pâle  et  plus  large. 

Bab.  —  L'habitat  d'été  du  Bécasseau  cocorli  n'est  pas  encore  bien 
«..^.^^...>».».>..».A^^....^^-i^  défini,  mais  on  a  lieu  de  supposer 
il  qu'il  se  trouve  dans  la  région 
arciique  de  l'Europe  et  de  l'Asie, 
depuis  la  Laponie  jusqu'au  dé- 
troit de  Behring  ;  mais  on  ne  l'a 
observé  ni  en  Islande,  ni  au 
Groenland,  ni  aux  îles  de  l'ex- 
trême Nord.  On  le  trouve  surtout 
dans  les  tundras  do  la  Russie 
européenne  et  asiatique,  ainsi  (|ue  dans  les  parties  seplentrionab's 
des  régions  du  sapin  et  do  l'Oural  {B()//(ln)wiv)\  il  a  clé  vu,  on  ^^o,  prés 


^ 


—  164  - 

du  fleuve  Taimyr  par  Middendorff,  dans  l'Arkhangel  par  Henke 
et  Harwie-Brown,  dans  les  vallées  de  la  Petchora  et  du  Jenissei  par 
Seebohm. 

En  automne  et  au  printemps,  cet  oiseau  est  de  passage  sur  les 
côtes  de  la  Scandinavie  {Nilson,  Collett),  de  la  Russie  occidentale 
(Bûchner),  du  Danemark,  de  l'Allemagne  (Naumann),  de  la  Hollande 
(Schlégel)  et  des  îles  Britanniques  (Harting).  11  est  très  commun,  aux 
deux  passages,  sur  les  côtes  maritimes  de  la  Belgique  et  près  des 
embouchures  de  l'Escaut  ;  M.  Croegaert  dit  qu'on  n'en  voit  pas 
beaucoup  près  d'Anvers  et  seulement  à  quatre  lieues  en  aval  de  cette 
ville.  Il  est  à  remarquer  que  ces  Bécasseaux  ne  longent  pas  seulement 
les  côtes  maritimes,  mais  aussi  les  grands  fleuves  qui  les  conduisent 
parfois  loin  dans  l'intérieur  des  terres  ;  ainsi,  M.  Taczanowski  dit 
qu'on  en  rencontre  depuis  la  mi-juillet  jusqu'à  la  fin  d'octobre,  par 
petites  troupes  ou  isolés,  sur  les  bords  de  toutes  les  eaux  de  la  Pologne, 
dans  les  marais  et  les  pâturages  au  bord  des  flaques  d'eau.  Il  en  est 
de  même  en  Bohême  {Fritsch),  en  Transylvanie  [Danford),  en  Alle- 
magne {Naumann)  et  en  Suisse  {Schinz). 

Cet  oiseau  passe  également  en  grand  nombre  sur  les  côtes  de  France 
(Degland),  de  l'Espagne  {Saunders),  du  Portugal  [du  Bocage),  de 
Gibraltar  {Irby),  et  hiverne  en  grand  nombre  sur  les  côtes  méridio- 
nales de  l'Italie  et  sur  ses  îles  {Salvadori,  Giglioli),  en  Grèce  {Lin- 
dermayer)  et  à  Corfou  {Lilford).  Il  visite  très  fréquemment,  à  son 
passage,  les  provinces  méridionales  de  la  Russie,  et  on  l'observe  alors 
souvent  en  compagnie  du  T.  cinclus  sur  les  bords  des  lacs  salés  situés 
dans  le  voisinage  d'Odessa  et  en  Crimée  [de  Nordmann)  ;  au  prin- 
temps il  arrive  par  bandes  sur  les  côtes  de  la  mer  Caspienne  {le  même); 
selon  Bogdanow,  cet  oiseau  hivernerait  en  Transcaucasie,  mais 
M.  Radde  dit  ne  l'y  avoir  jamais  rencontré  en  hiver. 

Ce  Bécasseau  hiverne  également  aux  îles  Baléares  {von  Homege?^), 
en  Palestine  {Trist7mm),  sur  toutes  les  côtes  septentrionales  et  occi- 
dentales de  l'Afrique  jusqu'au  cap  de  Bonne-Espérance  {Layard)  ;  il 
se  montre  aussi  le  long  du  Nil  et  de  ses  aflluents  jusqu'au  centre  du 
Kordofan  et  du  Sennaar,  mais  il  est  bien  plus  abondant  sur  les  côtes 
de  l'Egypte,  de  la  Nubie  et  de  l'Abyssinie  jusqu'au  golfe  d'Aden 
{de  Heuglin).  Selon  ce  dernier  auteur,  cet  oiseau  se  montrerait  aussi  à 
Zanzibar,  à  Mozambique  et  à  Madagascar;  il  est  donc  probable 
qu'il  visite  en  hiver  toutes  les  côtes  africaines. 

Il  n'a  été  observé  ni  au  Kamtschatka  ni  au  Japon.  Outre  la  Sibérie, 


—  165  — 

cet  oiseau  est  encore  de  passage, en  Mongolie  et  en  Chine  (Dacid);  il 
hiverne  dans  l'Inde  [Jerdon],  à  Ceylan,  à  Formose  {Sivinhoe)  et  se 
montre  au  sud  jusque  dans  l'Indo-Chine,  les  îles  Andaman  (Hume), 
Java,  Bornéo  {Schlégel),  Amboine  {S.  Millier)  et  le  midi  de  la  Nou- 
velle-Guinée {Ramsay).  Gould  dit  avoir  eu  trois  beaux  exemplaires 
capturés  en  Australie.  En  Amérique  cette  espèce  se  montre  acciden- 
tellement aux  Etats-Unis  sur  les  côtes  de  l'Atlantique  :  ou  ne  connaît 
jusqu'ici  qu'une  vingtaine  de  captures,  presque  toutes  faites  aux  envi- 
rons de  New- York  [Breioer). 

Mœurs.  —  Le  Bécasseau  cocorli  est,  pour  nos  contrées,  un  oiseau 
de  passage  :  il  passe  en  plus  ou  moins  grand  nombre  depuis  août 
jusqu'en  octobre,  pour  se  rendre  dans  les  contrées  du  Midi  et  en 
Afrique  où  il  hiverne;  il  repasse  en  avril  et  mai,  mais  jamais  en  aussi 
grand  nombre  qu'en  automne.  Il  voyage  par  couples  ou  par  petites 
troupes  de  huit  à  douze  individus,  mais  se  mêle  le  plus  souvent  aux 
bandes  d'autres  petits  échassiers  et  surtout  aux  troupes  de  Bécas- 
seaux variables.  Il  émigré  pendant  la  nuit  et  passe  sesjournées  sur  la 
plage  ou  près  des  eaux  douces  des  environs,  mais  reste  rarement  plus 
d'un  jour  dans  la  même  localité. 

Cet  oiseau  recherche  les  endroits  boueux  et  marécageux,  aussi  bien 
des  eaux  douces  que  salées  ;  on  le  rencontre  donc  dans  les  endroits  non 
accidentés  qui  bordent  la  mer,  les  cours  d'eau,  les  lacs,  les  étangs  et 
les  marais;  il  ne  séjourne  jamais  longtemps  près  des  eaux  claires  à 
fond  de  sable.  Quand  il  a  trouvé  un  endroit  qui  lui  convient  particuliè- 
rement, il  ne  s'en  éloigne  pas  volontiers  et  y  revient  toujours  lorsqu'une 
cause  ou  l'autre  l'a  forcé  de  s'en  éloigner.  Pendant  ses  migrations,  il 
aime  à  s'arrêter  près  des  eaux  bordées  de  pâturages  où  l'herbe  est  courte 
et  serrée,  mais  seulement  quand  il  n'y  a  pas  d'habitation  à  proximité. 

Ses  allures  sont  celles  des  vrais  Bécasseaux  ;  son  maintien,  sa 
marche,  son  vol  et  sa  voix  ressemblent  presque  entièrement  à  ce  que 
nous  observons  chez  le  Bécasseau  variable  ;  lorsqu'il  vole  avec  une 
troupe  de  ces  derniers,  il  imite  tous  les  mouvements  d'ailes  de  ses 
compagnons,  sans  que  l'on  puisse  distinguer  la  moindre  différence 
dans  son  vol. 

Cet  oiseau  n'est  guère  farouche;  les  jeunes,  qui  sont  encore  plus 
insouciants,  se  laissent  approcher  jusqu'à  portée  de  fusil  ;  s'il  aper- 
çoit subitement  un  homme  à  peu  de  distance,  il  ne  sait  souvent  pas 
prendre  de  résolution  immédiate  et  se  borne  à  s'aplatir  sur  le  sol,  pour 
ne  s'envolor  i\\\o  ([uand  on  se  trouve  près  de  lui.  Lorsque  plusieurs  de 


-  lee  — 

ces  oiseaux  se  trouvent  ensemble,  ils  se  montrent  un  peu  plus  pru- 
dents, mais  reviennent  toujours  à  l'endroit  d'où  ils  ont  été  chassés, 
même  quand  l'un  d'eux  y  a  été  tué.  Lorsqu'un  chasseur  a  fait  lever  une 
troupe  de  ces  oiseaux,  ceux-ci  s'envolent  droit  devant  eux  en  rasant 
l'eau,  et  les  individus  se  tiennent  les  uns  près  des  autres  ;  mais  arrivés 
à  une  certaine  distance,  toute  la  troupe  décrit  un  demi-cercle  qui  la 
ramène  au  point  de  départ. 

«  Quand  le  Cocorli,  ditBrehm,  est  en  société  d'autres  Bécasseaux, 
il  les  imite,  court,  vole  avec  eux  et  comme  eux;  il  exécute  même  les 
exercices  de  haut  vol  dont  le  chef  de  la  bande  donne  le  signal  ;  c'est 
généralement  une  Barge  ou  quelque  grand  Chevalier  qui  a  l'honneur 
de  conduire  la  bande  ailée,  et  semble  se  complaire  au  milieu  de  ces 
oiseaux  plus  petits.  Je  crois  pouvoir  conclure  de  mes  observations, 
que  ces  sociétés  restent  formées  pendant  plusieurs  semaines,  et 
qu'elles  ne  se  dissolvent  qu'au  moment  des  migrations.  Dans  ces  cas, 
il  est  souvent  très  difficile  d'observer  notre  oiseau  ;  le  naturaliste  est 
vu  de  loin  par  une  Barge  qui  devient  inquiète,  s'agite,  fait  partager 
ses  craintes  à  ses  compagnons  et  s'enfuit  avec  eux.  Si  la  société  n'est 
formée  que  de  Bécasseaux,  assez  souvent  c'est  un  Cocorli  qui  en  prend 
la  direction  ;  celui-ci  se  montre  alors  plus  prudent  et  plus  craintif 
que  d'habitude.  » 

La  voix  de  cet  oiseau  est  sonore  et  sifflante.  Sa  nourriture  se  com- 
pose de  vers,  de  larves  et  d'insectes  qu'il  cherche  principalement  dans 
la  boue. 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  niche  probablement  dans  les  tundras  de 
la  région  polaire, mais  on  ne  connaît  encore  rien  de  positif  à  cet  égard. 

L'œuf  décrit  et  figuré  par  Baedeker  ne  paraît  pas  appartenir  .au 
Cocorli  ;  je  ne  garantis  pas  non  plus  l'aulhenticité  de  ceux  figurés  sur 
la  pi.  xxxvi^  (n°  173)  du  présent  ouvrage.  Middendorff  a  été  assez 
heureux  de  tuer,  près  du  Taimyr  (74°1.  N.),  une  femelle  qui  avait 
dans  le  corps  un  œuf  tout  développé,  mais  il  ne  nous  en  donne  pas  la 
description. 

197.  —  Le  Bécasseau  variable. 
TRINGA  CINCLUS,  Bnss. 

(PL   197) 
Tringa  CINCLUS,  Briss.  Ornlth.  v.  p.  211  (1760). 

T.    CINCLUS  TORQUATUS  et  SCOLOPAX  GALLINAGO  ANGLICANA,  BrisS.  V.    pp.  216,  309. 


—  i6t  -^ 

Tringa  ALPiXA  etciNCLL's,  Lin.  Syst.  nat.  I,  pp.  249,  251  (1766). 

S':'OLOPAX  pussiLLA,  Gtnel.  Syst  nat.  I,  p.  663  (1788). 

NuMENius  VARiABiLis,  Bechst.  Natuvg.  Deutschl.  III,  141  (1809). 

Tringa  variabilis,  Mey    Taschenb.  II,  p   397  (1810). 

ScoLOPAX  ALPINA,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  II,  p.  177(1811). 

Pelidna  cinclus,  Cuv.  Règ.  an.  I,  p.  490  (1817). 

Tringa  pygm^a,  Schinz,  Thierreich,  I,  p.  782  (1821), 

Tringa  chinzii,  Brm.  Beitr.  Vogelh.  III,  p.  355(1822). 

Pelidna  variabilis,  Steph,,  Shaw's  Gen.  Zool.  XII,  1,  p,  98  (1824). 

Pelidna  alpina,  schinzii  et  calidris,  Brm.  [sis.  1830,  p,  991. 

Tringa  chinensis,  Gray,  Zool.  Mise,  p,  2  (1831), 

Tringa  cinclus  minor,  Schl,  Rev.  crit.  p.  89  (1844), 

ScH.ENiCLUs  CINCLUS,  Gray,  List.  B.  Br.  Mus.  III,  p.  104  (1844). 

Tringa  torquata,  Degl.  Orn.  eur.  II,  p,  230(1849). 

Pelidna  americana,  Brm.  Yogelf.  p.  317  (1855). 

Tringa  alpina,  tar.  americ.\na,  Bd.  Cass.  et  Lawr.  B.  N.  A»i.  p,  719  (1859). 

Pelidna  pacifica,  Coues,  Pr.  Phil.  Acad.  1861,  p.  189. 

Tringa  subarquata,  Swinh.  (nec  Giïld.)  Ibis,  1861,  p.  342. 

Tringa  cinclus,  var.  chinensis,  Swinh,  Proc.  Zool.  Soc.  1871,  p.  408. 

Tringa  damascensis,  Blakist.  (nec  Horsf.)  Ib  s,  1876,  p.  334, 

Pelidna  alpina  pacifica,  Stejn,  Buli.  ofthe  Unit.  St.  nat   Mus.  n»  29  p.  120  (1885). 

Der  Alpen  Strandlaufer,  en  allemand. 

The  Dunlin,  en  anglais. 

De  Bonté  .Strandlooper,  eu  flamand. 

Taille:  0,"^13à0,l6  ;  ailes  0,10  à  0,12;  bec  0,026  à  0,041  ; 
tarses  0,022  à  0,024. 

Mâle  et  femelle  adultes  en  été.  — •  Dessus  de  la  tête  et  manteau  d'un  roux 
ferrugineux  vjf,  avec  le  centre  des  plumes  noir;  nuque  cendrée  striée  de  brun  ; 
croupion  et  sus-caudales  d'un  brun  cendré,  ces  dernières  plus  ou  moins 
bordées  de  roux  sombre,  les  plus  latérales  de  blanc  ;  front  et  sourcils  blancs 
plus  ou  moins  tachetés  de  brun  ;  joues,  devant  du  cou  et  poitrine  blan- 
châtres, mais  tachetés  de  brun  ;  gorge  d'un  blanc  assez  pur;  couvertures  des 
ailes  et  scapulaires  d'un  brun  cendré,  bordées  de  cendré  clair,  les  plus 
grandes  couvertures  terminées  de  blanc  ;  rémiges  brunes  avec  les  baguettes 
blanches  ;  flancs,  bas-ventre  et  sous-caudales  d'un  blanc  pur  ;  milieu  de 
l'abdomen  noir  ;  queue  cendrée,  les  rectrices  médianes  brunes,  bordées  de 
roussâtre.  Bec  noir;  iris  brun  foncé  ;  pattes  noirâtres. 

La  femelle  est  un  peu  plus  grande  que  le  mâle  et  dans  son  plumage  de 
noce,  le  noir  du  ventre  est  moins  étendu  et  moins  pur  :  ces  plumes  noires 
sont  plus  ou  moins  bordées  de  blanc. 

En  hiver.  —  Parties  supérieures  cendrées,  les  plumes  du  manteau  et  des 
ailes  plus  ou  moins  bordées  de  blanchâtre  ;  sourcils,  gorge,  abdomen  et 
sous-caudales  d'un  blanc  pur;  poitrine  d'un  cendré  clair  avec  une  strie 
noirâtre  au  centre  des  plumes.  Chez  les  vieux  sujets,  la  poitrine  est  également 
d'un  blanc  pur. 


-  d68  — 


Jeune.  —  Dessus  de  la  tête  noir  avec  la  bordure  des  plumes  roussâtre 
nuque  cendrée  et  striée  de  brun  ;  manteau  formé  d'un  mélange  de  plumes 
noires  finement  bordées  de  roussâtre  ou  de  blanchâtre,  et  de  plumes  cendrées 
bordées  d'une  teinte  plus  claire  ;  ailes  et  queue  comme  chez  l'adulte  ;  haut 
de  la  poitrine  d'un  cendré  roussâtre  avec  des  taches  brunes  ;  gorge,  abdomen 
et  sous-caudales  d'un  blanc  pur,  avec  des  taches  arrondies  noirâtres  sur  le 
bas  de  la  poitrine  et  sur  les  flancs. 

Poussin.  —  Parties  supérieures  rousses  marbrées  de  noir  et  parsemées  de 
petits  flocons  d'un  fauve  pâle;  poitrine  et  abdomen  d'un  blanc  roussâtre  ; 
gorge  et  ventre  blancs. 

Re'inarque.  —  Cette  espèce  présente  deux  races,  ne  différant  entre 
elles  que  par  la  taille  ;  mais  il  est  à  remarquer  que  ce  Bécasseau 
diffère  beaucoup  dans  ses  proportions  et  qu'on  rencontre  tous  les 
intermédiaires  entre  la  petite  et  la  grande  race.  C'est  pour  cette  raison 
que  les  auteurs  modernes  ont  généralement  renoncé  à  adopter  la  petite 
race  désignée  sous  le  nom  de  T.  Schinzii.  En  Belgique  les  individus 
des  deux  races  arrivent  en  même  temps  et  vivent  ensemble,  mais  ceux 
de  la  forme  Schinzii  sont  toujours  moins  nombreux. 

Hab.  —  Le  Bécasseau  variable  habite  en  été  toute  la  zone  com- 
prise entre  le  53°  et  le  73"  1.  N., 
y  compris  l'Islande,  mais  ne 
niche  qu'en  petit  nombre  à  l'inté- 
rieur des  terres  du  nord  de  l'Al- 
lemagne [Borg gravé).  Il  n'a  été 
observé  ni  au  Spitzberg,  ni  à  la 
Nouvelle-Zemble.  Aux  lies  Bri- 
tanniques, il  niche  dans  le 
Northumberland,  en  Ecosse,  aux 
îles  Hébrides  et  Shetland,  et  on  a  même  trouvé  un  nid  en  Cornouailles 
{Rodd.)  A  l'époque  des  passages,  il  est  commun  dans  toute  l'Europe. 
11  est  alors  très  abondant  sur  les  côtes  de  la  Belgique  et  sur  les  rives 
de  l'Escaut,  mais  de  passage  plus  ou  moins  régulier  dans  les  autres 
parties  du  pays.  Il  hiverne  dans  le  midi  de  l'Espagne  [Saunders),  en 
Sardaigne,  en  Sicile  {Salvadori,  Giglioli)  et  en  Grèce  {Linderma(/er). 
M.  Saunders  dit  qu'il  niche  quelquefois  dans  le  sud  de  l'Espagne,  et  il 
paraît  qu'il  en  est  de  même  en  Vénétie,  d'après  M.  Giglioli. 

Il  hiverne  également  dans  le  nord  de  l'Afrique  {Loche,  Drake,  etc.), 
en  Palestine  {Tristymm)  et  sur  les  côtes  de  la  mer  Rouge  jusqu'au 
golfe  d'Aden  ;  il  est  moins  abondant  près  du  Nil  et  de  ses  affluents,  en 


—  169  - 

Nubie,  au  Sennaar  et  en  Kordofan  {de  Heuglin)  ;  cet  autour  en  vit 
encore  le  15  mai  des  individus  isolés  près  du  lac  Tana  en  Abyssinie. 
Suivant  le  capitaine  Sperling,  cet  oiseau  descendrait  au  sud  jusqu'à 
Zanzibar  et  Mozambique. 

Ce  Bécasseau  est  distribué  en  Asie  dans  les  mêmes  conditions  qu'en 
Europe,  c'est-à-dire  qu'il  est  oiseau  d'été,  d'hiver  ou  de  passage  sui- 
vant les  régions.  On  l'observe  depuis  le  Kamtschatka  {Stejneger)  et  le 
Japon  {Withelij)  jusqu'en  Chine  {Damd),  et  depuis  Formose  {Swinhoe) 
jusqu'au  Beloutchistan  {Blanford),  le  Turkestan  [Severtzoïc)  et  le 
Caucase  [Raddé)  ;  on  ne  le  voit  que  rarement  dans  le  nord  de  l'Inde 
[Jerdon)  et  accidentellement  à  Java  et  à  Bornéo  {Schlégeî). 

En  Amérique,  cette  espèce  habite  le  Groenland  {Holbôll)  et  la  zone 
septentrionale,  depuis  l'Atlantique  jusqu'au  Pacifique,  et  hiverne  au 
sud  des  Etats-Unis  ;  il  est  très  commun  en  hiver  dans  la  Caroline  du 
Sud  {Coues).  Il  est  probable  qu'il  se  montre  encore  plus  au  Midi,  car 
Gundlach  dit  qu'on  le  rencontre  à  Cuba  depuis  octobre  jusqu'en  mai. 

Mœurs.  —  C'est  le  Bécasseau  le  plus  commun  de  nos  côtes  ;  il  passe 
en  très  grand  nombre  depuis  le  commencement  de  septembre  jusqu'à 
la  fin  d'octobre;  d'ordinaire  il  a  complètement  disparu  dès  les  premiers 
jours  de  novembre.  Il  repasse  à  la  tin  d'avril  et  en  mai.  Ces  oiseaux 
émigrent  en  bandes  énormes,  composées  de  milliers  d'individus  ; 
Naumann  dit  avoir  observé,  dans  le  nord  de  l'Allemagne,  une  bande 
composée  de  plus  de  huit  mille  sujets.  Us  voyagent  laremcnt  pendant 
le  jour,  mais  le  plus  souvent  au  crépuscule  et  de  grand  matin,  quel- 
quefois aussi  pendant  la  nuit.  Ils  volent  très  bas  le  long  des  côtes  ou 
lorsqu'ils  suivent  les  vallées  creusées  par  les  grands  fleuves  ;  mais 
quand  ils  traversent  une  contrée,  ils  s'élèvent  généralement  à  une 
grande  hauteur,  franchissant  l'espace  en  ligne  droite  avec  une  grande 
vitesse.  Naumann  fait  remarquer  que  les  jeunes  font  bande  à  part,  et 
que  les  troupes  d'adultes  contiennent  rarement  des  jeunes.  Les  petites 
troupes  se  joignent  souvent  à  des  bandes  formées  d'autres  espèces, 
mais  quand  ils  sont  nombreux,  ils  restent  homogènes.  Pendant  le 
jour,  ils  se  livrent  à  leurs  ébats,  cherchent  leur  nourriture,  visitent 
l'intérieur  du  pays,  volent  d'une  eau  à  l'autre,  mais  reviennent  tou- 
jours à  celle  qui  leur  a  j)rocuré  la  nourriture  la  plus  abondante. 

Le  Bécasseau  variable  recherche  les  rivages  bourbeux,  aussi  bien 
de  la  mer  ([uc  des  lacs,  des  étangs,  des  rivières  et  des  marais  ;  il  ne 
séjourne  jamais  longtemps  près  des  eaux  claires  à  fond  de  sable,  et 
évite  les  lieux  où  la  végétation  est  trop  abondante  et  où  l'eau  est  cou- 
Tome  II.  —  188'J.  '22 


-  170  - 

verte  de  lenticules  ;  il  évite  aussi  les  eaux  entourées  d'arbres.  Dans  le 
Nord,  on  le  voit  souvent  dans  les  montagnes  jDrès  des  mares  et  des  lacs 
de  la  zone  inférieure. 

Par  ses  allures,  il  ressemble  à  ses  congénères  ;  il  tient  le  corps 
horizontal,  la  tête  rentrée,  marche  et  trottine  avec  aisance  et  sait 
courir  avec  rapidité  quand  cela  est  nécessaire.  Son  vol  n'offre  rien 
de  particulier  :  il  est  facile,  varié  et  rapide  ;  quand  ils  sont  nombreux, 
tous  les  individus  exécutent  en  même  temps  les  mêmes  mouvements, 
comme  s'ils  obéissaient  à  un  commandement  ;  ils  ressemblent  en  ceci 
aux  Etourneaux.  Quand  ils  sont  dérangés,  ils  s'envolent  ordinairement 
droit  devant  eux  au-dessus  de  l'eau,  mais  ne  tardent  guère  à  décrire 
un  vaste  demi-cercle  pour  revenir  à  leur  point  de  départ. 

C'est  un  oiseau  extrêmement  confiant  dans  le  jeune  âge,  surtout 
quand  il  se  trouve  isolé,  mais  les  adultes  se  montrent  plus  prudents  ; 
quant  aux  grandes  troupes,  il  est  fort  difficile  de  les  approcher,  car 
elles  s'envolent  avant  qu'on  soit  à  portée  de  fusil.  Ce  Bécasseau  ne 
recherche  pas  seulement  la  société  de  ses  semblables,  mais  encore 
celle  d'autres  petits  échassiers,  avec  lesquels  il  vit  toujours  en  bonne 
intelligence  ;  il  n'est  pas  rare  de  rencontrer  des  troupes  formées  non 
seulement  de  diverses  espèces  de  Bécasseaux,  mais  encore  de  Pluviers, 
de  Sanderlings,  de  Chevaliers,  de  Barges,  de  Vanneaux  suisses,  etc.; 
ce  sont  alors  les  plus  grands  qui  dirigent  la  bande  et  veillent  à  la 
sécurité  de  tous.  Ils  nichent  même  en  société,  de  façon  que  les  nids  se 
trouvent  non  loin  les  uns  des  autres. 

Le  cri  de  cet  oiseau  est  moins  sonore  mais  plus  sifflant  que  celui 
de  la  plupart  des  Bécasseaux  ;  il  peut  se  rendre,  d'après  Naumann, 
par  tlui  ou  h^ui,  et  se  transforme  parfois  en  trur  ou  tu7^  ;  l'oiseau  se 
fait  entendre  au  repos  comme  en  volant,  mais  surtout  quand  il  est 
près  du  nid. 

C'est  dans  la  vase  qu'il  cherche  surtout  ses  aliments,  mais  on  le 
voit  aussi  souvent  chasser  dans  les  pâturages  et  même  dans  les 
champs  ;  sa  nourriture  se  compose  de  vermisseaux,  de  larves, 
d'insectes  et  de  petits  mollusques. 

Reproduction.  —  Le  Bécasseau  variable  niche  à  partir  des  côtes 
septentrionales  de  l'Allemagne,  de  l'Ecosse  et  des  îles  voisines,  y 
compris  les  îles  Hébrides,  Orkney  et  Shetland;  il  se  reproduit  égale- 
ment en  Suisse  {Schinz)  ;  mais  c'est  surtout  dans  les  contrées  du  Nord 
que  ces  oiseaux  nichent  en  abondance  et  dans  le  voisinage  les  uns  des 
autres. 


—  171  — 

Le  nid  est  une  simple  petite  fosse,  garnie  de  brindilles  et  de  frag- 
ments de  tiges  herbacées,  que  l'on  trouve  dans  des  lieux  marécageux 
ou  dans  les  environs  de  la  mer,  mais  toujours  dans  un  endroit  garni 
de  bruyères  ou  d'iierbages.  La  ponte  a  lieu  au  commencement  de  juin 
et  se  compose  de  quatre  œufs,  d'un  jaune  olivâtre  ou  verdâtre  pâle  et 
ornés  de  taches  brunes  et  noirâtres  de  diverses  grandeurs,  mais  qui 
sont  ordinairement  plus  grandes  et  plus  nombreuses  vers  le  gros  bout. 
Ces  œufs  mesurent  environ  31  millim.  sur  25.  Mâle  et  femelle  cou- 
vent alternativement  durant  seize  ou  dix-sept  jours.  Les  petits  quittent 
le  nid  dès  qu'ils  sont  bien  séchés,  pour  suivre  leurs  parents  qui  leur 
apprennent  sans  retard  à  chercher  leur  nourriture.  A  lage  de  trois 
semaines  ils  commencent  à  volleter,  à  un  mois  ou  cinq  semaines  ils 
quittent  leurs  parents  pour  mener  une  vie  indépendante. 

198.  —  Le  Bécasseau  minule. 
TRL\GA  MIiNUTA,  Leisl. 

(PI.  198) 

Tbinga  fusilla,  Lath.  (nec  Lin.)  Gen.  Syn.  suppl.  I,  p.  292  (1787). 

Tringa  minuta,  Leisl.  Nachlr .  zu  BecJts'.  Nat.  Deutsclil.  I,  p.  74  (1812). 

Pelidna  minuta,  Boie,  Isis  1826,  p.  979. 

AcTODROMAS  MINUTA,  Kp.  Nciturl.  S\jst.  p.  55(1829). 

Calidris  MINUTA,  Cuv.  Règ .  an.  1,  p.  526  en  note  (1829). 

Pelidna  fusilla,  Brm.  Isis.,  1830,  p.  991. 

ScH.ENiCLUs  MINUTA,  Gray,  List  B.  Br.  Mus.  III,  p.  106  (1844). 

Der  Kleine  Strandlaufer,  en  allemand. 

The  Little  Stint,  en  anglais. 

De  Kleine  Strandlooper,  en  flamand. 

Var.    Ruficollis 

Trynga  ruficollis,  Pall.  Reise  Rusit.  R-ichs,  III.  p.  700(1776). 

Tringa  salina,  Pall.  Zoogr.  Rosso.  As.  II,  p.   199  (1811). 

Tringa  albescens,  Tem.  PL  col.  41,  f.  2  (1824). 

Calidris  albescens,  Cuv.  Rèf/.  (in.  I,  p.  526  (1829). 

Tringa  australis,  Less.  Traité  iVorn.  p.  558  (1831  ) . 

ScH.ENiCLUS  albescens,  Gould,  B.Austr.  VI.  pi.  31  (1848). 

AcTODROMAS  ALBESCENS  et  AUSTRALIS,  Bp  Coiupt .-ren  I .\L\\\,  p.  596  (1856) . 

AcTODROMAS  DAMACENSis,  Stcjn.  (nec  Horsf  )  Pr.  U.  S.  NcU.  Mus.  1883,  p.  71. 

Tringa  minuta  ruficollis,  Seeb.  Brit.  B.  IH,  p.  205  (1885). 

Taille  :  0"\12  ;  ailes  0,09G  ;  bec  0,019  ;  tarses  0,021. 

Mâle  et  femelle  adultes  en  été.  —  Dessus   de    la   tête,   dos,  croupion  et 
scapulaires  noirs,  imds  toutes  les  phimcs  bordées  de  roux,  et  celles  du  dos 


—  172 


terminées  de  blanchâtre;  front  et  sourcils  blanchâtres  ;  nuque  cendrée;  joue 
et  côtés  de  la  poitrine  d'un  gris  roussâtre;  couvertures  des  ailes  noires  bo- 
dées  de  roux,  les  plus  grandes  noirâtres  terminées  de  blanc  ; 'rémiges  noir 
râtres  avec  les  baguettes  en  grande  partie  blanches;  parties  inférieures  d'un 
blanc  pur  ;  sus-caudales  noires  bordées  de  roux,  les  plus  latérales  blanches; 
rectrices  médianes  noires  bordées  de  roux,  les  autres  cendrées  (1).  Iris  noi- 
râtre ;  bec  et  pattes  noires. 

En  hiver.  —  Parties  supérieures  d'un  cendré  brunâtre  foncé  avec  le  centre 
des  plumes  brun  ;  front,  sourcils,  gorge,  parties  inférieures  et  sus-caudale 
latérales  d'un  blanc  pur;  lorums,  côtés  du  cou  et  de  la  poitrine  d'un  cendré 
brunâtre;  rectrices  médianes  brunes,  les  latérales  cendrées. 

Jeune.  —  Dessus  de  la  tête  et  du  dos  d'un  brun  noirâtre  avec  les  plumes 
bordées  de  roux,  sauf  les  scapulaires  qui  sont  bordées  de  blanc  ;  front,  sour- 
cils et  parties  inférieures  d'un  blanc  pur  ;  lorums  bruns  ;  côtés  du  cou  et  de  la 
poitrine  roussâtres  tachés  de  cendré;  ailes  et  queue  comme  chez  l'adulte. 

Var.  Rufieollis.  —  Ne  diffère  du  type  précédent,  en  été,  que  par  sa  gorge 
rousse  ;  en  hiver  les  deux  races  ne  présentent  aucune  différence  entre  elles. 


Hab, 


Ce  petit  Bécasseau  habite,  en  été,  les  tundras  de  la  zone 

polaire  de  l'Europe  et  de  la  Sibé- 
rie, depuis  le  cap  Nord  jusqu'à 
la  péninsule  de  Taimyr,  y  com- 
pris la  Nouvelle-Zemble  et  l'île 
de  Waigatz  [de  Heuglin).  A 
l'époque  des  migrations  on  fob- 
serve  en  plus  ou  moins  grand 
nombre  sur  toutes  les  côtes  et 
dans  les  grandes  vallées  de 
l'Europe  et  de  l'Asie  occidentale.  Il  est  toujours  plus  abondant  sur 
les  côtes  orientales  que  sur  les  côtes  occidentales  de  l'Angleterre  et  de 
l'Ecosse,  ainsi  qu'en  Irlande  où  on  ne  l'observe  qu'en  petit  nombre 
dans  les  parties  occidentales  [Seebohm.)  En  Belgique  on  le  voit  régu- 
lièrement sur  les  côtes  maritimes  ;  il  n'est  pas  rare  sur  les  bords  de 
l'Escaut  (Croegaert)  et  s'est  montre  accidentellement  aux  environs  de 
Hasselt  [E.  Claes).  A  l'époque  des  passages,  on  rencontre  cet  oiseau  dans 
les  vallées  de  l'intérieur  et  souvent  bien  loin  de  la  mer,  comme  dans 
le  centre  de  l'Allemagne  {Namnann),  dans  l'Alsace  et  les  Vosges 
(Zrœner),  en  Suisse  dans  la  vallée  de  la  Reuss  et  dans  quelques  par- 


(i)  C'est  ce  qui  le  distingue  à  première  vue  du    T.  Teniiiiinckii,  qui  a  les  rectrices  latérales 
blanches. 


—  173  - 

ties  de  l'Engadine  {Tschudi),  etc.  Il  est  de  passage  en  Turquie,  mais 
une  partie  hiverne  en  Grèce  {Lindermaycr),  en  Asie  Mineure  {Rob.son), 
en  Palestine  (Tristram);  il  hiverne  également  en  Perse,  dans  l'Inde, 
à  Ceylan  et  dans  la  Birmanie  [Jerdon,  Seebohm). 

En  Afrique  on  le  rencontre  en  hiver,  sur  presque  toutes  les  côtes  : 
il  a  été  observé  depuis  le  Maroc  (DraA-^)  jusqu'en  Egypte  {Schellei/), 
ainsi  que  le  long  du  Nil  et  de  ses  affluents,  près  des  marais  du  Kor- 
dofan  oriental  et  sur  les  côtes  de  la  mer  Rouge  {de  Hmglw)  ;  dans 
l'Afiique  occidentale,  sa  présence  a  été  signalée  en  Gambie  {Dresser), 
à  Casamance  {Verreaux),  à  la  Côte  d'Or  {Srhlégcl)  ;  cet  oiseau  serait 
commun,  en  hiver,  au  cap  de  Bonne- Espérance  {Layard)  et  on  le  ren- 
contre également  au  Natal  et  au  Transvaal  {Ayres),  ainsi  qu'aux  îles 
Seychelles  {Neioton).  Il  a  été  capturé  à  Lado,  dans  l'Afrique  centrale, 
par  le  D""  Emin  Bey. 

La  var.  Ruficollis  appartient  à  l'Asie  orientale  :  elle  est  commune 
au  détroit  de  Behring  et  au  Kamtschatka  {Stejneger)  ;  elle  est  de 
passage  dans  la  Sibérie  ovÏQ'[iidXQ{Taczanoioski),  au  Japon  {Blackiston) , 
en  Chine  {Darid),  à  Formose  {Swinhoe)  et  hiverne  dans  l'Indo-Chine 
orientale  et  dans  l'Archipel  Indien.  Sa  présence  a  été  signalée  à 
Halmahera,  à  Makian,  à  Morotai  {Bernstein),  à  Ternate,  à  Key 
{von  Rosenherg),  à  Célébes  {Meyer),  à  Timor  {S.  Mûller),  à  Java 
{Schlégel),  ainsi  que  dans  la  Nouvelle-Bretagne  (Finsch),  au  sud  de  la 
Nouvelle-Guinée  (Rarasay),  aux  îles  Arou  {Beccari),  à  Salawatti 
{De  Bruyn),  etc.  On  l'observe  également  en  Australie  et,  d'après 
Gould^  Gilbert  aurait  trouvé  un  nid  de  cet  oiseau  sur  les  récifs  de 
Houtman,  situés  à  la  côte  Ouest  de  l'Australie. 

Mœurs.  —  Le  Bécasseau  minule  est  donc,  pour  nos  contrées,  un 
oiseau  de  passage,  qui  quitte  les  régions  boréales  vers  la  lin  d'août; 
on  le  rencontre  alors  en  Europe  jusqu'à  la  mi-octobre,  mais  c'est  en 
septembre  qu'il  est  le  plus  abondant. 

Ces  oiseaux  arrivent  par  troupes  plus  ou  moins  nombreuses,  et 
quand  ils  sont  en  petit  nombre  ils  se  mêlent  à  des  bandes  d'autres 
espèces.  Voir  des  troupes  de  vingt  à  trente  sujets  est  très  ordinaire, 
mais  il  n'est  pas  rare,  en  automne,  d'observer  plusieurs  centaines  de 
ces  oiseaux  ensemble,  volant  si  près  les  uns  des  autres,  qu'on  peut 
souvent  en  abattre  huit,  dix  et  même  davantage  d'un  seul  coup  de 
fusil.  Il  est  cependant  à  remarquer  ([ue  se  sont  les  jeunes  qui  voyagent 
en  grandes  bandes,  tandis  que  les  adultesémigrent  par  petites  troupes  et 
quittent  ordinairement  leur  séjour  d'été  plus  tard  que  les  jeunes.  A 


—  174  - 

leur  retour  au  printemps,  ils  sont  généralement  rares;  il  est  probable 
qu'ils  s'arrêtent  alors  moins  en  route  et  qu'ils  se  hâtent  de  regagner 
les  lieux  où  ils  sont  nés. 

Cet  oiseau  ne  paraît  guère  tenir  beaucoup  au  rivage  de  la  mer,  car 
il  recherche  surtout  les  baies  et  les  criques  dont  les  bords  sont  bour- 
beux. 11  en  est  de  même  à  l'intérieur  des  terres,  où  il  se  tient  moins 
près  des  fleuves  et  des  rivières  que  près  des  lacs,  des  étangs  et  autres 
eaux  tranquilles,  pourvu  que  leurs  bords  soient  boueux  et  dépourvus 
de  hautes  herbes  et  d'herbages  aquatiques. 

C'est  un  oiseau  très  gracieux,  remuant,  vif  et  actif;  il  court  vite, 
vole  avec  aisance  et  rapidité,  soit  en  rasant  la  surface  de  l'eau  ou  en 
suivant  les  ondulations  des  flots,  soit  très  haut  quand  il  veut  franchir 
une  grande  distance.  Malgré  son  agilité  il  est  peu  farouche  et  même 
trop  confiant;  avec  les  autres  oiseaux  il  se  montre  doux  et  affectueux. 
On  peut  l'observer  d'assez  près,  tant  qu'il  n'a  pas  été  éreinté  par  des 
poursuites  ou  effrayé  par  des  coups  de  feu  ;  mais  s'il  se  trouve  avec 
d'autres  oiseaux  plus  farouches,  il  suit  leur  exemple  et  s'envole  avec 
eux  à  la  moindre  apparence  de  danger. 

On  a  pu  voir  de  ce  qui  précède,  que  le  Bécasseau  minule  est  aussi 
sociable  que  ses  congénères;  mais  il  est  à  remarquer  que  tous  les 
oiseaux  de  rivage  qui  recherchent  à  l'occasion  la  société  d'autres 
espèces,  se  joindront  toujours  à  des  oiseaux  plus  grands  qu'eux  et 
jamais  à  de  plus  petits;  ainsi,  dans  une  troupe  de  Bécasseaux  varia- 
bles on  verra  souvent  quelques  couples  de  Bécasseaux  minules  ou  de 
Temminck,  mais  dans  les  bandes  de  ces  derniers  on  ne  verra  jamais 
des  oiseaux  ayant  une  taille  plus  forte  que  celle  de  leurs  compagnons. 

La  voix  du  Bécasseau  minule  est  douce  et  agréable  ;  Naumann  la 
rend  par  durrr,  durrru  ou  dirrr,  dirrrit-it-it  ;  quand  plusieurs 
donnent  de  la  voix  en  même  temps,  on  croirait,  à  une  certaine  dis- 
tance, entendre  la  stridulation  de  grillons.  11  crie  surtout  en  volant  et 
au  moment  de  prendre  pied,  mais  rarement  pendant  ses  ébats  ;  quand 
il  cherche  sa  nourriture,  il  se  borne  à  pousser  de  temps  en  temps  un 
léger  it-it. 

Cet  oiseau  se  nourrit  comme  les  précédents,  de  larves,  de  petits 
insectes  et  de  vermisseaux.  Il  se  baigne  volontiers  et  souvent. 

Reproduction.  —  Dans  ces  dernières  années,  plusieurs  naturalistes 
ont  rapporté  de  leur  voyage  dans  l'extrême  Nord  des  oeufs  authen- 
tiques de  cette  espèce.  En  1875,  MM.  Seebohm  et  Harwie  Brown  ont 
découvert  des  nids  avec  œufs  près  de  la  Petchora,  et  les  ont  décrits, 


—  175  — 

et  figurés  avec  soin  dans  Vibis  (1876,  p.  294,  pi.  vu).  D'après  ces 
naturalistes,  les  quatre  œufs  que  pond  la  femelle  reposent  dans  une 
petite  fosse  garnie  de  brins  et  de  petites  feuilles,  que  les  oiseaux 
entassent  pendant  l'incubation.  Ces  nids  se  trouvent,  en  juillet,  au 
milieu  de  Careœ  et  de  Sphagnum  propres  aux  régions  arctiques.  Les 
œufs  sont  d'un  jaune  terreux  avec  des  points  et  de  grandes  taches 
irrégulières  d'un  roux  brunâtre,  au-dessus  desquelles  on  en  remarque 
d'autres,  plus  petites,  d'un  brun  sombre.  Ils  mesurent  environ 
28  millim.  sur  21. 


199.  —  Le  Bécasseau  de  Temminck. 
TRINGA  TEMMINCKII.  Leisl. 

(PI.  199) 

Teinga  fusilla,  Lath.  (nec  Lin.)  Ind.  Orn.  ii,  p.  737  (1770). 

Tringa  Temminckii,  Leisl.  Nachlr.  Bechst.  Nat.  Beutsc/d,  ii,  p.  78  (1812). 

Pelidna  Temminckii,  Boie,  Isis,  1826,  p.  979. 

Leimonites  Temminckii,  Kp.  Naturl.  Syst.  p.  37  (1829). 

Calidris  temminckii,  Cuv.,  lièg.  an.  I,  p.  526  (1829). 

ScHŒNiCLUs  TEMMINCKII,  Gray,  List  B.  Br.  Mus.  III,  p.   106  (1844). 

Actodromas  temminckii,  Bp.,  Cornpt.-Rend.  XLllI,  p.  596  (1856). 

Der  Temminck's  Strandlaufer,  en  allemand. 

The  Temminck's  Stint,  en  anglais. 

De  kleinste  Strandlooper,  en  flamand. 

Taille  :  0,13  ;  ailes  0,095  ;  bec  0,018  ;  tarses  0,017. 

Description  des  deux  sexes  en  été.  —  Plumes  des  parties  supérieures  et 
petites  couvertures  des  ailes  d'un  brun  noirâtre  bordées  de  roux  ;  front,  joues 
et  sourcils  blanchâtres,  mais  plus  ou  moins  variés  de  cendré  :  couvertures 
moyennes  des  ailes  ainsi  que  les  plus  grandes  d'un  brun  cendré,  les  dernières 
terminées  de  blanc,  ce  qui  forme  une  bande  blanche  à  travers  de  l'aile  ; 
rémiges  d'un  brun  noirâtre,  la  tige  des  primaires  blanche  ;  gorge,  abdomen 
et  sous-caudales  d'un  blanc  pur  ;  devant  du  cou  et  poitrine  d'un  cendré  plus 
ou  moins  roussâtie  ;  les  quatre  rectrices  médianes  brunes,  les  latérales  blan- 
ches, ce  qui  distingue  cette  espèce,  à  première  vue  du  T.  minuta.  Bec  noir  ; 
iris  brun  ;   pattes  brunâtres. 

En  hiver.  —  Parties  supérieures  d'un  cendré  brunâtre,  le  bas  du  dos  et  le 
croupion  noirâtres  ;  front  et  sourcils  d'un  blanc  varié  de  cendré  ;  joues  et 
poitrine  cendrées  ;  gorge  et  parties  abdominales  d'un  blanc  pur;  couvertures 
des  ailes  de  la  couleur  du  dos,  les  plus  grandes  terminées  de  blanc  ;  rémiges 
et  queue  comme  en  été. 


-  176  — 

Jeune.  —  Ressemble  aux  adultes  en  hiver,  mais  les  plumes  dorsales  d'un 
gris  brunâtre  variées  de  cendré  et  de  roux  jaunâtre. 

Poussin.  —  Large  calotte  sur  le  vertex,  dos,  dessus  des  ailes  et  des  cuisses 
marbrés  de  noir  sur  teinte  fauve,  et  semés  de  petits  flocons  blanchâtres  ; 
lorums  noirs  ;  dessus  du  cou  rembrunis  par  la  base  noirâtre  du  duvet  ;  front 
et  parties  inférieures  d'un  blanc  faiblement  lavé  de  roux,  plus  pâle  sur  le 
ventre.  Bec  brun  avec  la  base  jaunâtre  ;  pattes  jaune  d'ocre  [J.  Vian). 

Hab.  —  Cet  oiseau  habite,  en  été,  le  nord  de  l'Europe  et  de  l'Asie 

entre  le  59°  et  le  71°  1.  N.  Il  est 
moins  abondant  que  le  précédent 
dans  l'Europe  occidentale  à  l'épo- 
que des  passages,  mais  on  l'ob- 
serve cependant  sur  toutes  les 
côtes  de  l'Europe  occidentale  et 
même  près  des  grands  cours 
d'eau.  11  n'a  été  observé  ni  en 
Islande,  ni  à  la  Nouvelle-Zemble. 
En  Angleterre  il  se  montre  régulièrement  sur  les  côtes  orientales  et 
méridionales  (Seebohm)  ;  Gray  dit  qu'il  a  également  été  observé  en 
Ecosse,  et  Thompson  a  signalé  une  capture  en  Irlande.  Il  est  de  pas- 
sage régulier  sur  les  côtes  de  Belgique  et  on  le  voit  alors  souvent  en 
grand  nombre. 

Ce  Bécasseau  n'est  souvent  pas  rare  près  des  eaux  des  contrées  de 
l'Europe  centrale  ;  ainsi  on  le  voit  régulièrement  dans  le  centre  de 
l'Allemagne  {Naumann),  en  Suisse  {Schinz),  etc.  Dans  le  Midi,  cet 
oiseau  est  encore  de  passage  en  Italie  {Salvador i),  en  Turquie  [Rohson) 
et  dans  le  sud  de  la  Russie  [de  Nordmann),  mais  M.  Giglioli  pense 
qu'il  hiverne  en  Sardaigne.  Son  quartier  d'hiver  commence  à  partir  de 
l'Espagne  {Saunde7\s),  du  Portugal  {du  Boccage)  et  de  la  Grèce  ;  Lin- 
dermayer  dit  qu'on  en  voit  dans  ce  dernier  pays  jusqu'au  milieu  de 
juin.  Mais  c'est  surtout  dans  le  nord  de  l'Afrique  que  cet  oiseau 
hiverne,  et  il  est  alors  commun  en  Algérie  {Loche)  et  dans  les  pays 
voisins  ;  il  apparaît  en  août  et  septembre,  par  troupes  plus  ou  moins 
nombreuses,  dans  la  région  du  Nil  et  descend  vers  le  Sud  jusqu'au 
Nil  Blanc  et  les  marais  du  Kordofan  ;  il  hiverne  également  dans  les 
endroits  bourbeux  et  marécageux  des  côtes  de  la  mer  Rouge 
{de  Heuglin)  et  de  la  Sénégambie  {Lichtenstein). 

En  Asie,  on  observe  cet  oiseau  comme  en  Europe  ;  il  passe  l'été 
dans  le  Nord  et  hiverne  dans  les  contrées  du  Midi  :  en  Asie  Mineure 


-  177  — 

{Stricklànd),  dans  l'Inde  {Blyth),  dans  rindo-Chine  et  pousse  parfois 
ses  migrations  jusqu'aux  îles  de  la  Sonde  {Schlégel).  Il  est  de  passage 
dans  la  Sibérie  orientale  {Taczanowski)  et  méridionale  :  le  D""  Radde 
tira  deux  femelles  au  milieu  de  mai  près  du  Tarei-Nor,  où  il  avait  déjà 
observé,  dans  les  premiers  jours  du  même  mois,  de  petites  troupes  de 
ces  oiseaux  ;  il  s'en  procura  encore  en  juiUet  près  du  Baikal.  Il  est 
également  de  passage  au  Japon  {Blakiston)  et  passe  par  troupes  nom- 
breuses à  travers  la  Chine  et  hiverne  même  dans  les  provinces  méri- 
dionales de  cet  empire  {David)  et  à  Formose  {Swinhoé). 

Mœurs.  —  Le  Bécasseau  de  Temminck  commence  à  émigrer  des 
régions  septentrionales  dès  la  mi-août,  et  les  passages  continuent  dans 
l'Europe  centrale  jusque  vers  le  milieu  d'octobre  et  parfois  jusqu'en 
novembre.  En  mai  il  retourne  dans  sa  patrie,  mais  on  en  voit  parfois 
encore  passer  jusque  vers  la  mi -juin.  Il  voyage  pendant  la  nuit  à 
partir  du  coucher  du  soleil,  et  toujours  en  troupes  plus  ou  moins  nom- 
breuses ;  celles-ci  sont  composées  soit  uniquement  d'individus  de  son 
espèce,  soit  en  majeure  partie  d'autres  oiseaux  de  rivage  et  surtout  de 
Bécasseaux  variables.  On  ne  l'observe  jamais  en  aussi  grand  nombre 
que  le  précédent. 

De  môme  que  ses  congénères,  cet  oiseau  recherche  les  endroits 
bourbeux  et  ceux  où  la  vase  est  entremêlée  de  gravier  et  de  cailloux, 
mais  il  n'aime  pas  les  rives  sablonneuses  et  ne  s'y  tient  jamais  long- 
temps. Près  des  cours  d'eau  il  recherche  les  endroits  où  la  rivière 
présente  un  coude,  mais  il  préfère  toujours  les  eaux  dormantes 
comme  les  lacs,  les  étangs  et  les  marais,  ainsi  que  les  bords  de  la 
mer,  quand  ceux-ci  offrent  des  places  où  il  peut  facilement  patauger 
dans  la  vase. 

C'est  un  oiseau  fort  remuant,  courant  par-ci  par-là  ou  volant  en 
rasant  la  terre  ou  l'eau  avec  la  vitesse  d'une  Hirondelle.  Bien  qu'il  ne 
présente  rien  de  particulier  dans  ses  mouvements,  il  paraît  cepen- 
dant plus  leste  et  plus  agile  que  les  autres  Bécasseaux.  Quand  il  se 
trouve  avec  des  oiseaux  plus  grands  que  lui,  il  se  comporte  comme 
eux,  se  montre  confiant  ou  farouche  suivant  le  degré  de  confiance  ou 
de  crainte  que  ses  compagnons  lui  font  partager.  En  général, 
cependant,  il  se  montre  plus  prudent  que  le  Bécasseau  minule, 
surtout  lorsqu'il  a  pu  se  rendre  compte  des  dangers  qu'il  peut  courir. 
Il  est  très  sociable,  mais  en  temps  ordinaire  il  se  tient  davantage  avec 
ses  semblables,  et  no  recherche  d'habitude  la  société  d'autres  espèces 
qu'à  l'époque  des  migrations;  on  le  voit  alors  souvent  avec  d'autres 

Tome  II.  —1889.  23 


—  178  - 

Bécasseaux  et  même  avec  des  petits  Pluviers.  Il  est  curieux  de  voir 
l'accord  qui  règne  entre  tous  ces  oiseaux  de  diverses  tailles  et  même 
de  genres  différents;  les  querelles  sont  inconnues,  les  petits  obéissent 
aux  plus  grands  et  ceux-ci  veillent  à  la  sécurité  de  tous. 

La  voix  du  Bécasseau  de  Temminck  ressemble  aussi  à  la  stridula- 
tion d'un  grillon  et  peut  se  rendre  par  tir7^r,  trrri  ou  ptrrr;  elle 
diffère  peu  de  celle  de  l'espèce  précédente;  l'oiseau  se  fait  surtout 
entendre  en  volant.  Il  se  nourrit  principalement  de  vermisseaux  et 
de  larves,  et  ne  paraît  prendre  des  insectes  parfaits  qu'à  défaut  des 
précédents;  il  avale  parfois  aussi  des  matières  végétales,  mais  il  est 
probable  que  cela  n'a  lieu  qu'accidentellement. 

Reproduction.  —  A  l'époque  de  l'accouplement,  ces  oiseaux  se 
tiennent  par  couples  et  chaque  couple  pour  soi,  mais  les  nids  ne  sont 
pas  très  éloignés  les  uns  des  autres.  Ceux-ci  consistent  en  une  petite 
fosse  creusée  dans  le  sol  et  garnie  de  brins  d'herbe.  Ce  nid  est  caché 
dans  l'herbe  et  dans  un  endroit  relativement  sec,  parfois  même  au 
milieu  d'un  champ  cultivé,  mais  habituellement  à  peu  de  distance  de 
l'eau.  La  ponte  a  lieu  vers  le  milieu  de  juin  et  se  compose  de  quatre 
œufs,  d'un  jaune  roussâtre  ou  verdâtre  avec  de  petites  taches 
arrondies  et  des  points  roussâtres  et  bruns,  recouvrant  partiellement 
d'autres  taches  plus  grandes  et  de  couleur  cendrée;  ils  mesurent 
environ  29  millim.  sur  20. 

Mâle  et  femelle  couvent  alternativement,  témoignent  un  grand 
attachement  à  leurs  petits,  les  protègent  et  les  défendent  autant  que 
cela  leur  est  possible.  On  rencontre  des  poussins  dès  les  premiers 
jours  de  juillet,  mais  il  arrive  souvent  aussi  que  l'on  trouve  encore 
à  cette  époque  des  nids  contenant  des  œufs. 

GENRE    CXIV 

LTMICOLE.  —  LIMICOLA 

NuMENius,  Bechst.  Orn.  Taschenb.,  p.  277  (1802.) 
Tringa,  Tem.  Man.  d'Orti.,  p.  398  (1815.) 
LiMicoLA,  Koeh,  Baier.  Zool.  I,  p.  316  (1816.) 
Falcinellus,  Kp,  Nat.  Syst.,  p.  37  (1829.) 
Pelidna,  Bp,  Comp.  List.,  p.  50  (1838.) 

Car.  —  Bec  plus  long  que  la  tête,  large,  fléchi  à  son  extrémité,  à  arête 
de  la  mandibule  supérieure  très  déprimée,  surtout  dans  la  partie  moyenne; 
ailes  et  pattes  comme  dans  le  genre  Tringa. 

Ce  genre  n'est  représenté  que  par  une  seule  espèce  : 


—  179   - 

200.  —  Le  Limicole  ou  Bécasseau  platyrhynque 

LIMICOLA  PLATYRHYNCHA,   Gr.  ex  Tem. 
(PI.  200) 

NuMENius  PYGMiEUS,  Bechst,  (nec  Lath.)  Orn.  Taschenb.,  p.  277  (1803.) 

NuMENius  PUSiLLUS,  Bechst.  (nec.  Lin.)  Naturg.  Deutschl.  IV,  p.  152  (1809.) 

Tringa  platyrincha,  Tem.  Man.  d'Orn.,  p.  398  (1815.) 

LiMicoLA  PYGM^A,  Koch,  Baier.  Zool.  1,  p.  316  (1816.) 

Tringa  eloroides,  Vieill.  N.  dict.  XXXIV,  p.  463  (1819.) 

Tringa  platyrhyncha,  Mey.  Or7i.  Taschenb,  III,  p.  259  (1822.) 

Tringa  pygm/ea,  Savi,  Orn.  Tosc.  II,  p.  291  (1829.; 

Pelidna  platyrhyncha,  Bp.  Comp.  List,  p.  50  (1838.) 

LiMicoLA  platyrhyncha,  Gr.  List.  B.  Br.  Mus.  III,  p.  107  (1844.) 

Pelidna  megarhynchos,  C.  Brm.  Yogelf.,  p.  317  (1855.) 

Limicola  Hartlaubi,  Verr.  in  Yins.  Voy.  Madag.  ann.  B.,  p.  5  (1865.) 

LiMicoLA  sibirica,  Di'css.  Proc.  zool.  soc.  1876,  p.  674. 

Der  kleine  Sumpflaufer,  en  allemand. 

The  broad-billed  Sandpiper,  en  anglais. 

De  Platbek  Strandlooper,  en  flamand. 

Taille:  0'"125;  ailes  0,107;   bec  0,031;  tarses  0,022. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  en  été.  —  Dessus  de  la  tête,  clos  et  crou- 
pion noirs  avec  les  plumes  légèrement  bordées  de  roux  ;  sourcils  blanchâtres, 
tachetés  de  brun  en  arrière  ;  lorums  bruns  ;  côtés  de  la  tête  et  nuque  d'un 
cendré  varié  de  roussâtre  et  strié  de  noir  ;  scapulaires  noires  bordées  de 
blanchâtre  et  de  roussâtre  ;  petites  couvertures  des  ailes  brunes,  les  autres 
d'un  cendré  brunâtre  bordées  de  blanchâtre;  rémiges  noirâtres;  rectrices 
médianes  noires  légèrement  bordées  de  roux,  les  autres  cendrées  bordées  de 
blanc  ;  sus-caudules  noires  avec  un  liséré  roux,  les  plus  latérales  blanches 
barrées  de  noir  ;  cou  et  côtés  de  la  poitrine  d'un  blanc  varié  de  roux  et  taché 
de  noir  ;  le  reste  des  parties  inférieures  d'un  blanc  pur,  mais  avec  quelques 
taches  lancéolées  noirâtres  sur  les  flancs.  Iris  brun  ;  bec  noir  ;  pattes  d'un 
cendré  verdâtre. 

En  hiver.  —  Parties  supérieures  d'un  cendré  pâle  tirant  sur  le  brunâtre  ; 
croupion  noir  avec  les  plumes  bordées  de  cendré  ;  parties  inférieures  blan- 
ches, mais  les  joues,  les  côtés  et  le  devant  du  cou  tachés  légèrement  de 
cendré  brunâtre. 

Poussin.  —  Parties  supérieures,  ailes  et  flancs  noirs  variés  do  roux  et 
mouchetés  de  blanc;  face  blanche;  lorums,  une  strie  frontale  et  moustaches 
noires;  sous  ces  dernières  une  tache  rousse;  parties  inférieures  blanchâtres, 
un  peu  roussâtre  à  la  poitrine,  la  base  du  duvet  gris. 


180  — 


Hah.  —  Le  Limicole  ou  Bécasseau  platyrhynqae  habite  le  nord  de 

la  Scandinavie  [Collett)  et  la 
tundra  de  la  Russie  européenne 
{Bogdanow),  mais  sa  limite  sep- 
tentrionale n'est  pas  encore  bien 
connue  (probablement  le  70°); 
il  émigré  en  automne  vers  les 
contrées  du  Midi.  Lors  des  pas- 
sages, il  visite  régulièrement  le 
sud  de  la  Scandinavie^  le  Dane- 
mark et  la  Russie  centrale  ;  il  est  plus  rare  en  Allemagne  [Naumann], 
à  Helgoland  {Gdtke),  en  Bohême  {Fritsch)  et  en  Autriche  {Hinterber- 
ger)  ;  Bogdanow  dit  qu'il  est  de  passage  dans  la  Russie  centrale  et 
méridionale,  en  Crimée,  au  Caucase  et  dans  la  région  aralo -Cas- 
pienne ;  Gœbel  dit  ne  l'avoir  observé  qu'une  fois  dans  le  midi  de  la 
Russie  :  le  19  août  1868  il  tira  un  couple  près  d'un  étang  dans 
l'arrondissement  d'Uman  ;  de  Nordmann  ne  l'a  jamais  observé  lui- 
même,  mais  un  oiseleur  lui  apporta  un  sujet  tué  près  d'Odessa.  Radde 
ne  le  mentionne  pas  dans  son  ouvrage  sur  les  oiseaux  du  Caucase. 
Cet  oiseau  ne  se  rencontre  qu'accidentellement  en  Grande-Bretagne, 
où  l'on  n'a  constaté  que  six  captures  depuis  1836  jusqu'en  1885 
{Seehohm)  ;  il  en  est  de  même  en  Hollande,  en  Belgique,  ainsi  que  sur 
les  côtes  méridionales  de  la  France,  mais  il  est  de  passage  irrégulier 
dans  le  nord  de  ce  pays,  sur  les  côtes  de  Dunkerque,  de  Calais,  etc. 
{Degland  et  Gerbe).  En  Italie  il  est  de  passage  irrégulier  en  Vénétie 
et  se  montre  accidentellement  en  Piémont,  en  Lombardie.  en  Ligurie, 
en  Toscane  et  en  Sicile  [Salvadori,  GiglioU).  En  Espagne  on  l'a  pris 
accidentellement  aux  environs  de  Gerona  [Vayy^eda)  ;  en  Grèce  on  le 
voit  régulièrement  au  printemps,  il  est  plus  rare  en  automne  [Linder- 
mayer),  il  est  aussi  de  passage  près  du  Bosphore  (Robson). 

Le  Limicole  hiverne  dans  le  nord  de  l'Afrique  jusqu'en  Egypte 
{Loche,  de  Heuglin)  et  paraît  avoir  été  pris  accidentellement  à  Mada- 
gascar (y^rreaMip).  Aucun  auteur  n'a  signalé  cet  oiseau  dans  la  Sibérie 
centrale,  et  Dybowski  n'a  recueilli  qu'un  seul  exemplaire  près  du 
Baical.  Il  hiverne  dans  l'Inde,  où  il  est  assez  commun  dans  les  parties 
septentrionales  mais  rare  dans  le  Sud  {Jerdon)  ;  il  a  également  été 
observé  dans  le  Béloutchistan  et  serait  très  commun  sur  les  côtes  du 
Mekran  {Hume)  ;  il  se  montre  accidentellement  à  Ceylan  et  aux  îles 
Andaman  (/See&o/im). 


-  181  — 

M.  Dresser  a  décrit,  sous  le  nom  de  L.  sihirica,  une  race  peu  carac- 
térisée que  Middendorff  a  rencontrée  en  grandes  troupes  sur  les  côtes 
méridionales  de  la  mer  d'Ochotsk.  Ces  oiseaux  passent  en  petit  nom- 
bre sur  les  côtes  du  Japon  {Seebohm),  de  la  Chine  {David)  et  hiver- 
nent à  Formose  {Sivinhoe).  C'est  probablement  à  cette  race  que  l'on 
doit  rapporter  les  sujets  qui  hivernent  en  Birmanie,  dans  la  presqu'île 
de  Malacca,  à  Java  et  aux  Philippines  [Schlégel,  Seebohm). 

Mœurs.  —  Il  est  étrange  qu'un  oiseau  migrateur,  très  répandu  dans 
le  nord  de  la  Scandinavie,  soit  si  rare  à  l'époque  des  passages  dans 
les  diverses  parties  de  l'Europe  centrale  et  méridionale.  Il  émigré  en 
août  et  septembre  et  retourne  dans  sa  patrie  en  avril  et  mai  ;  tous  les 
sujets  observés  en  Grande-Bretagne  ont  été  capturés  au  printemps, 
sauf  deux  tués  en  octobre.  Naumann  dit  également  qu'en  Allemagne 
on  le  voit  plus  souvent  au  printemps  qu'en  automne  ;  le  même  fait  se 
remarque  en  Grèce,  suivant  von  der  Mùhle  et  Lindermayer. 

Les  moeurs  de  cet  oiseau  sont  encore  peu  connues.  Suivant  M.  See- 
bohm, il  se  tient  en  hiver  en  petites  troupes  et  se  réunit  parfois  aux 
Bécasseaux  variables  où  à  d'autres  espèces  du  môme  genre,  pour  fré- 
quenter les  bords  de  la  mer.  D'après  Naumann,  il  recherche  particu- 
lièrement les  étangs,  les  marais,  les  bords  vaseux  des  rivières  et  les 
pâturages  humides,  où  il  mène  une  vie  tranquille,  trottinant  à  petits 
pas  et  s'arrêtant  souvent  pour  se  reposer.  Ce  dernier  auteur  le  dit 
indolent  ;  mais  von  der  Mûhle  fait  remarquer  que  cela  peut  être  le  cas 
pour  des  individus  isolés,  mais  qu'il  a  toujours  remarqué  qu'en  Grèce, 
où  cet  oiseau  est  assez  commun  pendant  certaines  années,  il  est  aussi 
animé  et  aussi  gai  que  les  autres  Bécasseaux  ;  von  der  Mùhle  ajoute 
qu'il  ne  l'a  jamais  rencontré  que  près  de  la  mer,  et  le  plus  souvent 
dans  des  endroits  vaseux,  soit  en  compagnie  de  Bécasseaux  variables 
ou  autres,  soit  par  grandes  volées  formées  uniquement  d'individus  de 
son  espèce,  ce  qui  lui  a  permis,  en  août  1836,  d'en  abattre  seize  d'un 
seul  coup  de  fusil  ;  selon  le  môme  auteur,  un  certain  nombre  de  ces 
oiseaux  passerait  tout  l'été  en  Grèce. 

L'approche  d'un  homme,  suivant  Naumann,  n'effraye  guère  cet 
oiseau,  qui  ne  s'envole  que  quand  on  n'est  plus  qu'à  quelques  pas  de 
lui  ;  si  l'on  se  trouve  subitement  en  sa  présence  sans  qu'il  s'en  soit 
aperçu,  il  s'aplatit  immédiatement  à  terre  soit  dans  un  enfoncement, 
soit  derrière  une  touffe  de  plantes,  et  ne  s'envole  que  lorsqu'on  est  tout 
près  de  lui,  mais  sans  aller  bien  loin.  Ce  n'est  pour  ainsi  dire  qu'en 
prenant  son  vol  que  cet  oiseau  fait  entendre  sa  voix  ;  son  cri  resscm- 


—  182  - 

ble  à  celui  de  certains  Bécasseaux,  mais  dans  un  autre  ton,  et  peut  se 
rendre  par  tirrr. 

Sa  nourriture  consiste  en  vermisseaux,  petits  mollusques,  larves 
et  insectes  qu'il  cherche  le  plus  souvent  dans  la  vase. 

Reproduction.  —  C'est  Keitel,  paraît-il,  qui  rapporta  en  1858  de 
Laponie  les  premiers  œufs  de  Limicole.  Plus  récemment,  M.  R.  Dann 
en  recueillit  au  fond  du  golfe  de  Bothnie  où  cet  oiseau  nichait  en 
petites  colonies  dans  des  marais  herbeux.  Il  le  rencontra  également 
au  Dovrefjeld,  dans  les  grands  marais  de  Fokstuen,  à  3000  pieds  au- 
dessus  du  niveau  de  la  mer,  et  c'est  de  là  que  proviennent  la  plupart 
des  œufs  qu'on  trouve  dans  les  collections.  L'oiseau  revenait  vers  la  fin 
de  mai  dans  les  lieux  de  la  reproduction  et  se  montrait  d'abord  très 
sauvage,  cherchant  sa  nourriture  sur  les  bords  herbeux  des  étangs  et 
des  marais.  Lorsqu'on  l'effrayait,  il  s'envolait  à  une  hauteur  considé- 
rable, s'élevant  et  s'abaissant  comme  une  Bécassine  et  poussant  des  cris 
élevés  ressemblant  à  tioo  ivoo  rapidement  répétés.  M.  Dann  trouva 
des  œufs  frais  le  24  juin,  et  dans  la  dernière  semaine  de  juillet  les 
jeunes  étaient  encore  incapables  de  voler.  Le  nid  était  placé  dans  une 
touffe  d'herbe  et  ressemblait  à  celui  d'une  Bécassine.  Les  parents 
et  leurs  poussins  passaient  la  plus  grande  partie  de  leur  temps  dans 
les  herbages  des  marais. 

M.  Mitchell  trouva  des  œufs  au  même  endroit  dans  la  seconde 
moitié  de  mai  1873.  M.  Colett  trouva  un  nid  le  9  juin  1872  ;  il  conte- 
nait quatre  œufs.  On  sait  aujourd'hui  que  le  Limicole  niche  en  grand 
nombre  dans  les  montagnes  de  la  Scandinavie  à  partir  du  ^j'&'  1.  N.  ; 
M.  Wolley  l'a  trouvé  nichant  près  de  Muonioniska  sous  le  68".  Les 
œufs  sont  pyriformes,  d'un  vert  olive  pâle,  pointillés  et  tachetés  de 
brun  cendré,  parfois  avec  des  taches  plus  grandes  et  plus  compactes 
vers  le  gros  bout  ;  ils  mesurent  33  millim.  sur  22. 

SOUS-FAMILLE 

DES    TOTANINÉS.    —   TOTANIN^. 

Car.  —  Bec  de  la  longueur  de  la  tête  ou  un  peu  plus  long,  à  pointe  dure  ; 
ailes  longues  et  étroites;  queue  courte,  arrondie,  étagée  ou  conique,  formée 
de  douze  rectrices  ;  tarses  de  structure  variable,  hauts  et  grêles  ou  courts 
et  vigoureux;  doigts  au  nombre  de  quatre,  l'externe  réuni  au  médian  par 
une  membrane.  Ce  sont  en  général  des  oiseaux  sveltes  et  gracieux. 

GENRE     CXV 

MiCHETES.  —  COMBATTANT 

TRiNGA,,Briss.  Orn.  V,  p.  240  (1760). 


-  183  - 

Pavoncella,  Leach,  Cat.  M.  B.  Br.  3Ius.  p.  29  (1816). 

ToTANUs,  Nilss.,  Orn.  suec.  II,  p.  71  (1817). 

Machetes,  Cuv,  Rég.  an..l,  p.  527  (1829). 

LiMOSA,  Gr.  III.  Ind.  zool.  II,  pi.  52  (1835). 

Philomachus,  Gi".  (ex  Mœhr.  1752],  List  geii.  B.  p.  89  (1841). 

Car.  —  Bec  de  la  longueur  de  la  tête,  droit,  sillonné  aux  deux  tiers 
environ,  plus  haut  que  large  à  la  base,  un  peu  renflé  à  l'extrémité  qui  est 
légèrement  fléchie;  narines  basales,  latérales,  linéaires:  ailes  longues, 
aiguës,  dépassant  un  peu  la  queue  ;  celle-ci  arrondie  ;  jambes  nues  sur  la 
moitié  de  leur  étendue;  tarses  allongés;  assez  grêles;  doigt  médian  uni  à 
l'externe  par  une  courte  membrane;  pouce  très  court;  ongles  médiocres. 

Ce  genre  ne  comprend  qu'une  seule  espèce  : 

201.  — Le  Combattant  querelleur 

MACHETES    PUGNAX,     Cuv.    ex    Lin. 

(PI.  201  et  201») 

ToTANUs  ciNEREUS  et  PuGNAX,  Bi'lss.  Omith.  V.  pp.  203  et  240  (1760). 

Tringa  PUGNAX,  Lin.  S.  iV.  I,  p.  247  (1766). 

Tringa  littorea,  Lin.  Syst.  ncU.,  I,  p.  251  (1766). 

Tringa  equestris  et  grenovicensis,  Lath.  Ind.  Orn.  II,  p.  730-31  (1790). 

Pavoncella  pugnax,  Leach,  Syst.  cat.  M.  B.  Br.  Mtis.  p.  29  (1816). 

ToTANUS  PUGNAX,  Nilss.  Om,  suec.  II,  p.  71  (1817). 

Machetes  pugnax,  Cuv.  Règ.  an.  I,  p.  527  (1829). 

Machetes  alticeps  et  planiceps,  C.  Brm.  Isis  1831,  p.  991. 

Totanus  indica  et  Limosa  hardwickii,   Gr.  III.  Ind.  zool.  II,  pi.   52  (1835). 

Philomachus  pugnax,  Gr.  List,  of  gen.  B.  p.  89  (1841). 

Machetes  optatus,  Hodgs.   Gr.  zool.  Mise.  I,  p.  86  (1844). 

Machetes  Minor,  C.  Brm.  Vogelf.,  p.  320  (1855). 

Der  vielfarbige  Kampflaufer,  en  allemand. 

The  Ruff,  en  anglais. 

De  KeiMphaan,  en  flamand. 

Taille  du  mâle:  0,25;  ailes  0,18  ;  bec  0,035  ;  tarses  0,050;  de 
la  femelle:  0,19;  ailes  0,155;  bec  0,031;  tarses  0,012. 

Description  du  mâle  en  été.  —  Face  couverte  de  papilles  jaunes  ou  rou- 
geâtres;  couvertures  des  ailes  d'un  cendré  brunâtre  bordées  de  blanchâtre; 
rémiges  brunes  avec  les  baguettes  blanchâtres  ;  parties  supérieures  et  sca- 
pulaires  de  couleur  variable  ;  sus-caudales  latérales  blanches  ;  queue  d'un 
cendré  brunâtre  ;  large  collerette  diversement  colorée,  composée  de  plumes 
longues  et  serrées,  surmontée  d'oreillons  formés  par  les  longues  plumes 
recourbées  eu  arrière  qui  partent  des  côtés  de  la  nuque  ;  poitrine  de  couleur 


—  184  - 


variable;  bas- ventre  et  sous-caudales  blancs.  Iris  brun;  bec  brunâtre  ;  pattes 
jaunâtres. 

Il  n'y  a  pas  d'oiseaux  dont  les  mâles  varient  plus  que  ceux  des  Combat- 
tants, aussi  est-il  fort  rare  d'en  rencontrer  deux  exactement  semblables  , 
c'est  la  collerette  qui  varie  le  plus  :  elle  est  tantôt  unicolore,  tantôt  tachetée 
ou  pointillée,  tantôt  barrée  transversalement  ;  quant  à  la  teinte  du  fond, 
elle  varie  à  l'infini. 

Femelle.  —  Beaucoup  plus  petite  que  le  mâle  et  sans  collerette.  D'un 
cendré  brunâtre  avec  des  taches  allongées  noires  sur  la  tête  ;  sourcils,  une 
petite  tache  sous  l'œil  et  gorge  blancs  ;  poitrine  d'un  cendré  pâle  tirant  sur 
le  roussâtre  ;  manteau  et  scapulaires  bruns,  les  plumes  bordées  de  cendré; 
plumes  du  croupion  et  sus-caudales  médianes  brunes  bordées  de  cendré 
roussâtre;  sus-caudales  latérales  blanches  ;  couvertures  des  ailes  d'un  brun 
noirâtre  bordées  de  cendré  pâle,  les  plus  grandes  terminées  de  blanchâtre  ; 
parties  ventrales  et  sous-caudales  blanches;  rectrices  brunes  bordées  de 
blanc  roussâtre. 

Mâle  en  automne.  —  Dans  cette  saison  le  mâle  n'a  plus  ni  papilles  faciales, 
ni  collerette,  et  son  plumage  ressemble  à  celui  de  la  femelle,  quoique  ses 
teintes  soient  moins  pures  ;  c'est  par  la  taille  qu'il  est  le  plus  facile  de 
distinguer  les  sexes  en  dehors  de  la  saison  des  amours. 

Jeune  mâle.  —  Ressemble  à  la  femelle  par  la  taille  et  la  couleur,  mais  les 
plumes  dorsales  bordées  d'une  teinte  tirant  davantage  sur  le  jaune  d'ocre; 
dessus  de  la  tête  et  nuque  lavés  de  la  même  teinte. 

Poussin.  —  Dessus  de  la  tête  d'un  roux  pâle,  coupé  longitudinalement  par 
cinq  bandes  noires,  dont  les  plus  latérales  incomplètes,  qui  se  réunissent 
circulairement  à  la  nuque  ;  deux  petits  traits  de  cette  couleur  derrière  chaque 
mandibule  ;  parties  supérieures,  dessus  des  ailes  et  des  cuisses  rayés  confu- 
sément de  roux  et  surtout  de  noir,  et  semés  de  petits  flocons  d'un  blanc 
fauve  ;  côtés  de  la  tête  et  toutes  les  parties  inférieures  d'un  roux  très  pâle, 
surtout  sur  l'abdomen  ;  bec  noirâtre,  pieds  d'un  brun  roux  {J.  Vian), 

Hab.  —  L'aire  géographique  de  cette  espèce  s'étend  sur  toute 

l'Europe,  sauf  dans  l'extrême 
Nord  ;  elle  se  montre  cependant 
accidentellement  en  Islande 
{Faber).  Elle  niche  en  plus  ou 
moins  grand  nombre  depuis  la 
Hollande  {Schlé gel) jusqu'au  cap 
Nord  {Collett),  et  même  plus  au 
sud  si  la  localité  lui  convient, 
comme  cela  lui  arrive  parfois  en 
France  dans  le  Boulonnais  [Degland).  Aux  îles  Britanniques,  le  Com- 


185  — 


battant  est  de  passage  au  printemps  et  en,  automne,  mais  quelques 
couples  nichent  accidentellement  dans  le  Norfolk  {Seebohm).  Pour  la 
Belgique  c'est  également  un  oiseau  de  passage,  qu'on  rencontre  en 
plus  ou  moins  grand  nombre  au  printemps  et  en  automne,  et  particu- 
lièrement dans  les  prairies  marécageuses  des  provinces  d'Anvers  et 


de  Limbourg. 


Cet  oiseau  hiverne  dans  la  majeure  partie  de  l'Afrique,  car  on  l'a 
observé  aussi  bien  à  l'est  qu'à  l'ouest  de  ce  continent  et  jusqu'au  cap 
de  Bonne-Espérance  [Layard]  et  le  Transvaal  {Ayres).  Suivant  de 
Heuglin,  ces  oiseaux  seraient  excessivement  communs  en  Egypte,  en 
Nubie,  au  Sennaar  et  dans  le  Kordofan  oriental,  depuis  l'automne 
jusqu'au  printemps  ;  en  Abjssinie  on  le  rencontre  jusqu'à  une  altitude 
de  10,000  pieds.  Le  même  auteur  dit,  que  dans  la  zone  africaine  qu'il 
a  explorée,  il  a  rencontré  des  Combattants  pendant  toute  l'année  et 
même  pendant  l'époque  de  la  reproduction. 

En  Asie  on  rencontre  cet  oiseau  depuis  la  mer  Caspienne  (^zc/ii^û^/c?) 
jusqu'au  Kamtschatka  {Pallas),  et  du  75°  1.  N.  {Middendorff)  jusque 
dans  l'Inde  (Jerdon),  mais  il  ne  paraît  pas  avoir  été  observé  en  Mon- 
golie et  en  Chine.  Il  s'est  montré  accidentellement  dans  l'île  septen- 
trionale du  Japon  {Seebohm)  et  à  Cejlan  {Legge). 

Il  s'égare  quelquefois  dans  l'Amérique  du  Nord  où  il  a  été  pris 
dans  les  États  du  Maine,  de  Massachusetts,  de  New- York  et  de 
rOhio  {Baird).  M.  von  Pelzeln  dit  que  M.  Munsberg  a  pris  un  oiseau 
de  cette  espèce  dans  la  Guyane. 

Mœurs.  —  La  migration  des  Combattants  a  lieu  pendant  la  nuit, 
par  troupes  plus  ou  moins  considérables,  mais  les  mâles  adultes  sont 
rarement  accompagnés  de  femelles  ;  celles-ci  voyagent  d'ordinaire  en 
bandes  séparées  ou  accompagnées  des  jeunes  mâles  de  l'année.  Les 
mâles  quittent  les  lieux  de  la  reproduction  dès  la  fin  de  juillet  ou  au 
commencement  d'août,  mais  les  femelles  ne  partent  qu'en  septembre. 
Ce  ne  sont  que  des  jeunes  séparés  des  leurs  qui  se  Joignent  aux  bandes 
d'autres  petits  échassiers.  Au  printemps  ce  sont  également  les 
femelles  que  l'on  voit  passer  les  dernières  par  bandes  plus  ou  moins 
nombreuses,  tandis  que  les  mâles,  qui  les  ont  précédées  d'une  quin- 
zaine de  jours,  passent  par  petites  troupes  de  dix  à  quinze  individus. 
Ces  passages  ont  lieu  vers  la  fin  d'avril  et  en  mai. 

Bien  qu'on  rencontre  souvent  de  ces  oiseaux  dans  le  voisinage  de 
la  mer,  ils  préfèrent  cependant  les  marécages  à  tout  autre  endroit  ; 
ils  aiment  aussi  les  prairies  et  les  pâturages  humides  ou  en  partie  inon- 

ToME  U.  —1889.  24 


—  186  — 

dés.  Lors  des  passages  on  les  voit  un  peu  partout  où  il  y  a  de  l'eau, 
mais  rarement  j)rès  des  rivières. 

Par  son  maintien  comme  par  ses  allures  cet  oiseau  ressemble  à  la 
généralité  des  tringiens,  mais  plus  que  tout  autre  de  la  famille  il 
s'éloigne  des  bords  de  la  mer  et  des  cours  d'eau.  Dans  leur  quartier 
d'hiver  comme  dans  leurs  voyages  les  deux  sexes  font  bande  à  part, 
c'est  ce  qui  a  fait  croire  à  Brehm,  qui  n'avait  jamais  vu  en  Afrique  que 
des  femelles,  que  les  mâles  hivernaient  dans  le  midi  de  l'Europe  ; 
mais  il  a  reconnu  son  erreur  plus  tard,  quand  de  Heuglin  eut  affirmé 
avoir  vu  en  Nubie  des  troupes  de  mâles.  En  dehors  de  la  saison  des 
amours,  cet  oiseau  a  la  démarche  gracieuse,  non  trottinante,  le  main- 
tien fier,  le  vol  rapide;  il  plane  souvent  et  sait  changer  brusquement 
de  direction.  C'est  à  l'aurore  et  au  crépuscLde  qu'il  se  montre  le  plus 
actif  et  le  plus  vif,  et  quand  il  y  a  clair  de  lune  il  est  même  toute  la  nuit 
en  mouvement,  tandis  qu'il  se  livre  au  repos  pendant  la  plus  grande 
partie  de  la  journée.  Il  cherche  sa  nourriture  en  silence,  et  c'est  tout 
au  plus  s'il  se  fait  entendre  quelquefois  en  prenant  son  vol.  Tant  que 
les  mâles  ne  sont  pas  excités  par  l'amour,  ils  se  montrent  pacifiques, 
sociables  et  se  mêlent  même  à  d'autres  oiseaux  de  rivage  ;  mais  leur 
genre  de  vie  change  complètement  à  l'époque  de  la  reproduction.  Les 
mâles  sont  alors  continuellement  en  guerre  et  se  battent  sans  cause 
appréciable,  qu'il  y  ait  ou  non  des  femelles  dans  le  voisinage,  qu'ils 
soient  libres  ou  captifs. 

Suivant  Naumann,  les  Combattants  se  réunissent  à  des  places  déter- 
minées, et  dans  les  localités  où  l'espèce  est  abondante,  ces  places  sont 
éloignées  l'une  de  l'autre  de  cinq  à  six  cents  pas  :  les  oiseaux  y 
reviennent  tous  les  ans.  Rien,  d'ailleurs,  ne  distingue  ces  endroits  du 
terrain  avoisinant.  Une  petite  élévation  d'un  mètre  et  demi  à  deux 
mètres  de  diamètre,  toujours  humide,  couverte  d'un  gazon  court,  tel 
est  leur  champ  de  bataille  où  chaque  jour  arrive  plusieurs  fois  un  cer- 
tain nombre  de  mâles.  Chacun  y  a  sa  place,  et  c'est  à  cette  place, 
toujours  à  peu  près  la  même,  qu'il  attend  ses  adversaires.  Il  n'y  vient 
pas  avant  que  sa  collerette  soit  complètement  poussée  ;  mais  quand  il 
a  revêtu  tout  son  plumage  de  noces,  il  s'y  montre  avec  une  régularité 
vraiment  surprenante. 

«  Le  premier  mâle  qui  arrive,  dit  Naumann,  regarde  de  tous  côtés 
et  attend  qu'un  autre  se  présente.  En  vient-il  un  qui  n'est  pas  disposé 
à  se  battre,  il  en  attend  un  autre  et  bientôt  la  lutte  s'engage;  ils 
fondent  l'un  sur  l'autre,  luttent  jusqu'à  ce  qu'ils  soient  épuisés,  puis 


_   187  — 

chacun  retourne  à  sa  place,  se  repose,  refait  ses  forces  pour  recom- 
mencer une  nouvelle  lutte.  Cela  continue  ainsi  jusqu'à  ce  que  la 
lassitude  l'emporte.  Alors  ils  abandonnent  la  place,  mais  généralement 
pour  y  revenir  bientôt.  Ces  combats  ne  sont  que  des  duels,  jamais 
plus  de  deux  ne  se  battent  ensemble.  Cependant,  si  le  terrain  est  assez 
spacieux,  il  arrive  souvent  que  deux  ou  trois  paires  de  combattants 
en  viennent  aux  prises  en  même  temps,  mais  chacun  pour  soi  ;  leurs 
coups  se  succèdent,  se  croisent  avec  une  telle  rapidité  que,  de  loin, 
Tobservateur  est  tenté  de  croire  que  ces  oiseaux  sont  affolés, 

«  Deux  mâles  qui  se  provoquent  commencent  à  trembler,  à  hocher 
la  tête  ;  ils  hérissent  les  plumes  de  la  poitrine  et  du  dos,  relèvent  celles 
de  la  nuque,  étalent  leurcollerette,  fondent  Tun  sur  l'autre  en  se  portant 
des  coups  de  bec  ;  les  verrucosités  de  la  tête  leur  servent  de  casque, 
leur  collerette  de  bouclier.  Les  attaques  se  suivent,  se  précipitent 
avec  une  rapidité  étonnante  ;  l'ardeur  de  ces  oiseaux  est  telle  qu'ils 
tremblent  de  tous  leurs  membres  et  qu'ils  doivent  se  reposer  par 
moment.  Enfin  le  combat  se  termine  connue  il  a  commencé,  par  un 
tremblement  général  de  l'oiseau  et  par  des  hochements  de  tête  ;  tous 
deux  secouent  leur  plumage  et  retournent  à  leur  ancienne  place  ;  s'ils 
sont  trop  fatigués,  ils  se  séparent  pour  quelque  temps  », 

Comme  ils  n'ont  d'autre  arme  que  leur  bec  flexible  et  sans  pointe,  ils 
ne  peuvent  se  blesser  et  faire  couler  leur  sang  ;  il  est  même  rare  qu'ils 
perdent  quelques  plumes.  Quand  onal'occasion  d'assister  à  ces  luttes, 
on  voit  bientôt  que  les  femelles  n'y  sont  le  plus  souvent  pour  rien  ; 
les  mâles  se  battent  pour  un  ver,  un  insecte,  pour  tout  et  pour  rien, 
c'est  une  manie  qui  les  prend  à  l'époque  de  la  reproduction. 

Ces  oiseaux  ne  se  font  entendre  que  pendant  la  nuit  et  à  l'époque 
des  migrations  ;  leur  voix  est  faible  et  rauque  et  peut  se  rendre  par 
kank  kack,  kick  kack;  les  femelles  crient  quelquefois  en  plein  jour 
lorsqu'elles  sont  près  de  leur  nid,  surtout  quand  quelque  chose  les 
elfraie.  Leur  nourriture  consiste  en  vers,  limaces,  larves  et  insectes  ; 
ils  mangent  môme  des  sauterelles. 

Le  Combattant  s'apprivoise  très  facilement,  et  on  peut  le  garder 
en  captivité  dans  une  grande  volière  pendant  plusieurs  années.  On  le 
nourrit  de  vers,  de  pain  trempé  dans  du  lait,  de  viande  finement  hachée. 
Chaque  mâle  doit  avoir  sa  mangeoire,  sans  quelles  combats  n'auraient 
pas  de  fin.  L'eau  fraîche  doit  leur  être  renouvelée  plusieurs  fois  par 
jour. 

Rcpyfxiw'tion.  —  Ce  singulier-  oiseau  nirlte  vers  la  mi-mai  dans  un 


-  188  — 

marais  ou  dans  une  prairie  humide,  et  toujours  non  loin  de  l'eau.  Le 
nid  consiste  en  une  dépression  creusée  dans  le  sol  et  garnie  de 
quelques  chaumes  et  de  brindilles  sèches.  Les  œufs,  au  nombre  de 
quatre,  sont  pyriformes,  d'un  vert  olive  ou  d'un  brun  olivâtre,  ornés 
de  taches  profondes  d'un  gris  violacé  et  de  taches  et  de  points 
superficiels  d'un  brun  noirâtre.  Ils  mesurent  environ  43  millim. 
sur  31. 

La  femelle  couve  seule  pendant  dix-huit  jours  ;  elle  témoigne  un 
vif  attachement  à  ses  petits,  tandis  que  le  mâle  ne  s'en  inquiète  en 
aucune  façon.  Celui-ci  continue  à  se  distraire  dans  les  luttes  jusqu'au 
commencement  de  juillet;  il  erre  ensuite  à  son  gré  dans  le  pays  en 
attendant  le  moment  du  départ. 

GENRE    CXVI 

CHEVALIER.  —  TOTANUS. 

Tringa,  Limosa,  Briss.  Oryiith.  V.  pp.  117,  276  (1760). 
ScoLOPAX,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  245  (1766). 
ToTANUs,  Bechst.  Orn.  Tasch.  II,  p.  284  (1803). 
Glottis,  Koeh,  Syst.  Baier.  Zool.,  p.  305(1816). 
LiMicuLA,  Leach,  Syst.  cat.  M.  B.  Br.  Mus.  p.  32  (1816). 

Erythroscelus,  Gambetta,  Rhyacophilus,  Helodromas,  Iliornis,  Kaup,  Nat.  Syst. 
pp.  54,  140,  144,  156(1829). 

Car.  —  Bec  phis  long  que  la  tête,  droit,  grêle,  rarement  retroussé,  à  man- 
dibule supérieure  sillonnée  sur  à  peu  près  la  moitié  de  son  étendue,  com- 
primée à  l'extrémité  et  légèrement  fléchie  à  la  pointe  ;  narines  basales, 
linéaires,  latérales  ;  ailes  allongées,  sur-aiguës,  atteignant  ou  dépassant  l'ex- 
trémité de  la  queue  ;  celle-ci  courte,  égale  ou  conique  ;  jambes  nues  au  moins 
sur  la  moite  de  leur  étendue  ;  tarses  longs,  grêles  ;  doigt  externe  réuni  au 
médian  par  une  membrane  assez  développée  ;  pouce  court,  ne  portant  à  terre 
que  par  son  extrémité. 

Hab.  —  Ce  genre  est  cosmopolite. 

202.  —  Le  Chevalier  à  pieds  verts. 
TOTANUS   GLOTTIS,  Bechst.   ex  Lin. 

(PI.  202) 

ScoLOPAx  GLOTTIS,  LUI.  Syst.  nat.  I,  p.  146  (1758)  et  1,  p.  245  (1766). 
Limosa  grisea,  Briss.  Ornith.  V,  p.  267  (1760). 

ScoLOPAX  NEBULARius,  Gunii.  Leeni.  Beskr.  Fimm.  Lap.  p.  251   (1767). 
ScoLOPAX  ciNERACEA,  Lath.  Geu.  Sijn.  suppl.  I,  p.  292  (1787). 
ScoLOPAX  CANESCENS,  Gm,  Syst.  nat.  I,  p.  668  (1787). 


—  189  - 

ToTANUS  GLOTTis,  Bechst.  Ont.  Taschenb.  II,  p.  287  (1803). 

ToTANUS  FiSTULANS  et  GRiSKUs,  BQchst,  Naturr/.  Deutschl.  IV,  pp.  241,  249  (1809). 

ToTANUS  CHLOROPUS,  Mey.  et  W.  Taschenh.  II,  p.  371  (1810). 

LiMicuLA  GLOTTIS,  Lcacli,  Syst.  Cat.  M.  B.  Br.  Mus.  p.  32  (1816). 

Glottis  CHLOROPUS,  Nilss.  Orn.  Suec.  II,  p.  57  (1821). 

Glottis  grisea  et  fistulans,  Brm.  Isis,  1830,  p.  990. 

LiMOSA  TOTANUS,  Pall.  Zoogr.  II,  p.  183  (1831). 

Glottis  nivigula,  Hodgs.  Gr.  Zool.  Mise.  Il,  p.  30  (1831). 

ToTANUS  GLOTTOiDES,  Vig .  Proc.  Zool.  Soc.  1831,  p.  173. 

LiMOSA  GLOTTOiDES  et  ToTANUs  HORSFiELDii,  Syk.  Proc.  zool .  Soc.  1832,  p.  163. 

Glottis  floridanus,  Bp.  Camp.  List  B.  p.  51  (1838). 

Glottis  canescens,  vigorsii,  horsfieldii,  Gray,  List  B  Br.  Mus.  III,  p.  99  (1844). 

ToTANUs  CANESCENS,  Adaiiis,  Pr.  zool.  Soc.  1859,  p.  169. 

ToTANUS  NEBULARius,  Stejn.  Pr.  U.  States  nnt.  Mus.  1882,  p.  37. 

Der  hellfarbige  Wasserlaufer,  en  allemand. 

The  Greenshank,  en  anglais. 

De  Groenpootige  ruiter,  en  flamand. 

Taille  :  0'",24  ;  ailes  0,19  ;  bec  0,057  ;  tarses  0,062  (1). 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes  en  été.  —  Dessus  de  la  tête  noir 
strié  longitudinalement  de  blanc  ;  dessus  du  cou  d'un  cendré  brunâtre  strié 
de  blanchâtre  ;  manteau  et  scapulaires  noirs  avec  les  plumes  bordées  de  blanc 
grisâtre;  couvertures  des  ailes  brunes,  quelques-unes  bordées  de  cendré,  les 
plus  grande  bordées  de  blanc  ;  rémiges  noirâtres  avec  les  baguettes  brunes, 
sauf  celle  de  la  première  qui  est  blanche  ;  sourcils  blancs  plus  ou  moins  poin- 
tillés de  brun  ;  parties  inférieures  d'un  blanc  pur  avec  les  joues,  le  cou,  le 
haut  de  la  poitrine  et  les  flancs  marqués  de  petites  taches  allongées  noirâtres; 
bas  du  dos  d'un  blanc  pur  ;  sus-caudales  blanches  barrées  de  brun  ;  queue 
blanche,  les  rcctrices  médianes  grisâtres  etrayées  en  zigzags  transversalement 
de  brun  cendré,  les  autres  tachées  de  même  couleur  sur  leur  bord  externe. 
Bec  noir  ;  pattes  d'un  vert  olivâtre  ;  iris  brun  clair. 

En  hiver.  —  Dessus  de  la  tête  brun  strié  de  blanc  ;  parties  supérieures  cen- 
drées avec  les  plumes  plus  ou  moins  bordées  de  blanc,  les  scapulaires  et  les 
grandes  couvertures  avec  une  strie  médiane  noire  et  de  petites  taches  brunes 
dans  le  bord  blanc  ;  les  parties  inférieures  d'un  blanc  pur  sans  taches  ;  le 
reste  comme  en  été. 

Jeune.  —  Dessus  de  la  tête  d'un  brun  noir  strié  de  blanc  ;  joues  et  nuque 
d'un  cendré  blanchâtre  avec  des  taches  allongées  d'un  brun  foncé  plus  ou 
moins  serrées  et  plus  accentuées  près  du  dos;  manteau  d'un  brun  noir  plus 
ou  moins  foncé, avec  les  plumes  marquées  d'une  strie  centrale  noire  et  bordées 
de  blanc  roussâtre  sale,  surtout  sur  les  côtes  des  plumes  ;  couvertures  des 


(1)  La  taille  est  toujours  prise  du  sommet  de  la  tête  à  l'extrémitc  de  la  queue  ;  mais  comme 
cette  mesure  est  gcncralement  calculée  sur  des  peaux  préparées,  elle  n'est  pas  d'une  rigoureuse 
exactitude.  I^es  dimensions  données  des  ailes,  du  bec  et  des  tarses  sont  les  seules  bien  exactes. 


—  190  — 

ailes  d'un  bmnuoir,  plus  ou  moins  bordées  de  blanc  jaunâtre  sale,  les  plus 
petites  presque  unicolores  ;  parties  inférieures  d'un  blanc  pur  ;  côtés  et  bas 
du  cou  marqués  de  taclies  allongées  brunes,  parfois  triangulaires  sur  les  côtés 
de  la  poitrine  ;  le  reste  comme  chez  l'adulte. 

Poussin.  —  Front  blanc,  varié  de  noir  sur  la  ligne  médiane  ;  dessus  de  la 
tête  noir,  et  cette  teinte  se  prolonge  en  bande  sur  la  nuque  ;  un  trait  noir 
devant  l'œil  et  une  tache  de  même  couleur  derrière  la  région  des  oreilles  ; 
dessus  du  corps  d'un  fauve  pâle  avec  trois  larges  bandes  dorsales  noires,  et 
une  autre  plus  courte  en  arrière  des  flancs  ;  ailes  de  la  même  teinte  fauve 
avec  une  bande  centrale  noire  ;  duvet  des  jambes  varié  de  noir  et  de  blanc  ; 
parties  inférieures  blanches  ;  queue  noire  variée  de  fauve.  Bec  noirâtre  avec 
la  base  de  la  mandibule  inférieure  rousse  ;  pattes  d'un  gris  olivâtre  (1). 

Hah.  —  L'habitat  d'été  de  cette  espèce  se  trouve  dans  la  zone  septen- 
trionale de  l'Europe  et  de  l'Asie, 
entre  le  60°  et  le  66°  ;  quelques 
couples  isolés  nichent  cependant 
dans  les  montagnes  de  l'Ecosse 
et  des  Hébrides  [Seehohm)  ;  elle 
n'a  pas  été  observée  en  Islande, 
aux  îles  Féroé  et  au  Groenland. 
Lors  des   migrations,    on    ren- 
contre  cet  oiseau    en   plus  ou 
moins  grand  nombre  dans  toute  l'Europe  centrale  et  méridionale  ; 
c'est  à  cette  époque  qu'on  le  voit  en  Belgique  dans  le  voisinage  de  la 
mer,  et  il  est  même  assez  fréquent  en  août  et  septembre  sur  les  bords 
de  l'Escaut  et  dans  les  polders  près  d'Anvers  {Crocgaert),  mais  il  ne 
se  montre  qu'irrégulièrement  dans  les  autres  parties  du  pays,  ainsi 
que  dans  le  grand-duché  de  Luxembourg  (de  La  Fontaine)  et  en  Lor- 
raine {Godron).  Dans  les  autres  contrées  de  l'Europe  centrale  et  méri- 
dionale il  est  généralement  plus  ou  moins  commun  à  l'époque  des 
passages,   mais  il  ne  se  montre  pas  partout  très  régulièrement.  Il 
hiverne  à    partir  du  sud    de  l'Espagne  (Saunders)   et  du  Portugal 
(du  Bocage),  ainsi  que  sur  plusieurs  îles  de  la  Grèce  {LinderwMyer):,  en 
Turquie  on  le  rencontre  parfois  aussi  en  hiver  (Robson),  et  d'après  le 
D""  Finsch  il  nicherait  dans  les  Balcans. 

En  Asie  on  observe  cet  oiseau  dans  toute  la  zone  septentrionale 
jusqu'au  détroit  de  Behring  et  le  Kamtschatka  {Stejneger).  Il  est  de 

(1)  Les  renseignements  que  M.  Dresser  donne,  dans  ses  Birds  of  Europe,  sur  les  changements 
de  plumages  du  Chevalier  à  pieds  verts,  sont  complètement  erronés. 


-  191  — 

passage  dans  toute  l'Asie  centrale  et  au  Japon  {Bm^ger)  ;  en  Chine  il 
passe  en  nombre  considérable  {David).  Il  hiverne  dans  le  sud  de  l'Asie: 
dans  l'Inde  (Jerdofi),  à  Ceylan  {Leggc),  dans  l'Indo-Chine  et  dans 
l'archipel  Indien  où  il  a  été  observé  aux  îles  de  Sumatra,  Ternate, 
Goram,  Kei,  kvo\i{von  Rosenherg),  Bornéo  {Diard),  Java  [Schlégel), 
Timor,  Célèbes  (^S'.  Mûller),  Halmahera  {Wallace)  et  même  en  Aus- 
iralie  {Gould), 

Il  hiverne  également  en  Afrique  et  quelques  individus  passent 
même  l'été  en  Egypte,  en  Nubie  et  près  de  la  mer  Rouge  {de  Heug/in); 
il  est  commun  en  hiver  sur  toute  la  côte  septentrionale  {Brake, 
Loche);  on  l'a  également  observé  en  Sénégambie,  à  Casamanze,  à  la 
Côte  d'Or,  au  Gabon  ainsi  que  sur  toute  la  côte  orientale  {SperUng, 
Peters)  jusqu'à  Natal  {Ayres)  et  le  cap  de  Bonne-Espérance  {Lagard). 
Il  a  aussi  été  observé  aux  îles  Madère,  des  Princes,  Séchelles,  etc. 
{Newton,  Dohrn,  etc.).  Ce  Chevalier  s'égare  parfois  en  Amérique,  où 
Audubon  en  obtint  un  do  la  Floride  ;  le  musée  de  Leyde  possède  des 
sujets  de  Buenos-Ayres,  des  bouches  du  Rio  de  la  Plata  et  du  Chili 
{Schlégel). 

Mœurs,  —  Cet  oiseau,  aussi  appelé  Chevalier  gris  et  aboyeur,  n'est 
donc  aussi  pour  nos  contrées  qu'un  simple  passager  ;  il  commence  à  se 
montrer  en  août,  et  les  passages  continuent  jusque  vers  la  fin  de 
septembre  et  môme  parfois  jusqu'en  octobre;  il  repasse  en  avril  et 
mai,  mais  on  ne  le  voit  alors  généralement  qu'en  petit  nombre.  Il  a 
des  habitudes  semi-nocturnes,  aussi  ne  voyage-t-il  le  plus  souvent 
que  pendant  la  nuit,  et  il  vole  alors  à  une  grande  hauteur  soit  isolé- 
ment, soit  par  couples  ou  par  petites  troupes  de  trois  à  sept  individus, 
plus  rarement  de  dix  à  vingt.  Des  sujets  isolés  se  mêlent  parfois  à  des 
bandes  de  petits  oiseaux  de  rivage  dont  ils  deviennent  alors  les  chefs 
défile  ;  de  tous  ses  congénères,  il  est  le  plus  prudent,  le  plus  méfiant 
et  par  conséquent  le  plus  propre  pour  remplir  le  rôle  de  guide. 

Le  Chevalier  à  pieds  verts  habite  peu  les  côtes  maritimes,  car  il 
préfère  les  eaux  douces  et  surtout  les  bords  des  lacs,  des  rivières,  des 
étangs,  des  marais,  etc.  Il  évite  les  forêts  et  les  buissons  et  ne  se 
lient  que  dans  les  endroits  découverts  d'où  il  peut  voii-  de  loin 
l'approche  d'un  ennemi.  Lors  des  passages,  il  s'arrête  souvent  durant 
plusieurs  jours  dans  les  localités  qui  lui  plaisent,  mais  il  s'en  éloigne 
dès  qu'il  a  été  troublé  et  n'y  retourne  plus.  Partout  où  il  se  montre  il 
recherche  les  endroits  vaseux  et  surtout  les  langues  de  terre  vaseuses 
qui  s'avancent  loin  dans  l'eau  ;  jamais  il  ne  se  cache  dans  les  lier- 


-  192  — 

bages  :  il  s'envole  à  l'approche  d'un  homme  ou  d'un  chien,  mais  se 
tapit  à  terre  au  passage  d'un  rapace,  sachant  fort  bien  que  celui-ci  le 
prendrait  plus  facilement  dans  l'air  que  sur  le  sol.  Il  dort  près  de 
l'eau,  le  plus  souvent  perché  sur  une  patte  et  la  tête  cachée  entre  les 
plumes  du  manteau,  mais  son  sommeil  est  si  léger  que  le  moindre 
bruit  suffit  pour  le  réveiller  ;  il  prend  généralement  son  repos  vers  le 
milieu  du  jour,  rarement  pendant  la  nuit  et  seulement  quand  le  ciel 
est  sombre. 

C'est  un  oiseau  vif,  agile,  gai  et  d'une  prudence  à  toute  épreuve  ; 
son  maintien  est  gracieux  et  fier;  il  marche  vite,  court  quand  c'est 
nécessaire  avec  une  extrême  agilité,  et  aime  à  entrer  dans  l'eau 
jusqu'au  ventre.  Il  nage  en  franchissant  parfois  un  espace  assez 
considérable,  et  sait  plonger  en  cas  de  danger,  nageant  même  sous 
l'eau  en  se  servant  de  ses  ailes  comme  de  rames.  Il  vole  généralement 
en  ligne  droite  en  battant  fortement  des  ailes  ;  souvent  aussi  il  décrit 
des  courbes  élégantes  et  finit  par  se  laisser  tomber  brusquement,  ne 
ralentissant  son  impulsion  que  quand  il  est  près  du  sol. 

De  tous  ses  congénères,  c'est  assurément  le  plus  prudent  et  le  plus 
méfiant.  Il  est  fort  difficile  de  l'approcher  à  portée  de  fusil,  car  dès 
qu'il  voit  quelqu'un  de  loin,  il  reste  immobile,  observe  les  mouvements 
de  celui  qui  se  présente  à  sa  vue,  et  s'il  y  a  lieu  de  s'en  méfier  il 
s'envole  à  grands  cris.  Plus  l'endroit  est  solitaire,  et  plus  il  est  pru- 
dent; quand  il  se  trouve  non  loin  d'une  route  assez  fréquentée,  il  se 
montre  moins  craintif,  et  la  vue  d'un  homme  ou  d'un  cheval  ne 
l'effarouche  pas  autant  ;  mais  en  général  il  craint  et  fuit  tout  ce  qu'il 
n'est  pas  habitué  de  voir.  Sa  sociabilité  a  ses  limites  :  jamais  on  ne 
le  voit  en  troupe,  mais  on  rencontre  parfois  quelques  individus 
ensemble  vivant  en  bonne  harmonie;  les  sujets  isolés  se  joignent 
généralement  à  d'autres  oiseaux  de  rivage,  ou  plutôt  ce  sont  ces 
derniers  qui  arrivent  au  cri  d'appel  du  Chevalier,  le  prennent  pour 
guide  et  le  suivent  partout  aveuglément. 

La  voix  de  cet  oiseau  est  un  sifflement  clair  et  perçant  que  l'on 
peut  rendre  assez  bien  par  tjia  tjia  ou  tjiu\  c'est  surtout  en  volant 
et  dans  les  moments  d'effroi  que  l'oiseau  fait  entendre  ce  cri,  ne  le 
répétant  toutefois  que  deux  ou  trois  fois  de  suite.  Son  vrai  cri  d'appel 
est  dick  dick  dick  ;  à  l'époque  de  la  reproduction  le  mâle  fait  entendre 
d'une  voix  douce,  une  phrase  ressemblant  à  dahudl  dahudl.>..  qui 
représente  son  chant  d'amour. 

La  nourriture  de  cet  oiseau  se  compose  de  divers  petits  animaux 


—  193  - 

tels  que  larves,  insectes,  vers,  mollusques,  petits  poissons,  têtards  de 
grenouilles,  etc.  Bien  que  cette  espèce  soit  très  farouche,  elle  s'ap- 
privoise cependant  en  peu  de  temps  et  peut  vivre  en  captivité  pendant 
plusieurs  années. 

Reproduction.  —  En  Ecosse  l'époque  de  la  reproduction  commence 
en  mai  et  la  ponte  a  lieu  dans  la  seconde  quinzaine  du  même  mois  ; 
dans  les  contrées  du  nord  de  l'Europe  et  de  l'Asie,  la  ponte  n'a  lieu 
que  vers  le  milieu  de  juin.  Ce  Chevalier  prend  un  soin  extrême  à  cacher 
son  nid,  aussi  ne  découvre-t-on  celui-ci  que  par  hasard  ou  après  de 
longues  recherches  ;  il  est  habituellement  caché  entre  des  bruyères  ou 
des  herbages  courts,  et  se  compose  d'une  dépression  garnie  de  brins 
secs  oa  de  feuilles  mortes.  Parfois  aussi,  le  nid  est  placé  tout  près  de 
l'eau,  ou  encore  sur  une  proéminence  gazonnée  entourée  d'eau  ;  le  plus 
souvent  il  est  construit  dans  les  mêmes  conditions  que  le  nid  du  Plu- 
vier doré  ou  du  Bécasseau  variable.  Au  moment  de  la  reproduction, 
les  couples  se  séparent  pour  aller  nicher  à  d'assez  grandes  distances 
les  uns  des  autres.  La  ponte  est  de  quatre  œufs  placés  avec  leur  pointe 
à  l'intérieur,  comme  cela  a  lieu  chez  la  plupart  des  oiseaux  de  rivage. 
Ces  œufs  sont  d'un  blanc  crème,  d'un  fauve  pâle  ou  d'un  cendré 
verdâtre  clair  avec  des  taches  plus  ou  moins  étendues  d'un  brun 
rosâtre  et  cendrées,  et  d'autres,  supérieures,  d'un  brun  un  peu 
roussâtre,  mais  les  grandes  taches  foncées  sont  ordinairement  plus 
abondantes  vers  le  gros  bout.  Ils  mesurent  environ  51  millim.  sur  33. 

203.  —  Le   Chevalier  Stagnatile. 
TOTANUS  STAGNATILIS,  Bcchst. 

(PI.   203) 

ToTANUS  STAGNATILIS,  Bechst.  Om.  Taschenb.  p.  292  (1803). 
ToTANUS  TENUiRosTRis,  Horsf.  Trans.  Lin7i.  Soc.  XIII,  p.  192  (1822). 
Trynga  guinetta,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  II,  p.  195  (1831). 
Der  Teich-Wasserlaufer,  en  allemand. 
The  Marsh  Sandpiper,  en  anglais. 
De  Poel  Ruiter,  en  flamand. 

Taille  :  0,18  ;  ailes  0,136  ;  bec  0,04  ;  tarses  0,057. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes  en  été.  —  Dessus  de  la  tête  et  du 
cou  d'un  cendré  blanchâtre  avec  de  larges  raies  longitudinales  noires  ;  man- 
teau, scapulaires  et  les  plus  longues  des  couvertures  des  ailes  d'un  cendre 
rougeâtre  avec  de  grandes  taches  noires,  les  unes  longitudinales,  les  autres 
Tome  II.  —1889.  25 


—  194  - 

transversales,  ces  dernières  surtout  sur  les  couvertures  et  les  scapulaires  ; 
bas  du  dos  d  un  blanc  pur  ;  petites  et  moyennes  couvertures  des  ailes  d'un  brun 
cendré  ;  rémiges  d'un  brun  noir,  la  baguette  de  la  première  blanche  ;  raie 
sourcilière  et  côtés  de  la  tête  blancs  tachetés  de  noir  ;  parties  inférieures 
d'un  blanc  pur,  avec  de  petites  taches  noires  ovalaires  au  cou  et  à  la  poi- 
trine et  des  taches  angulaires  de  même  couleur  sur  les  flancs  ;  queue  blan- 
che, les  rectrices  médianes  et  le  bord  externe  des  latérales  cendrés  et  toutes 
plus  ou  moins  barrées  de  brun  noirâtre  ;  sus-caudales  blanches  barrées  de 
même  couleur  que  les  rectrices  ;  sous-caudales  également  blanches  avec 
quelques  taches  brunes,  les  plus  longues  barrées  comme  les  supérieures.  Bec 
noir  ;  pattes  d'un  noir  rougeâtre;  iris  brun. 

Les  deux  sexes  en  hiver.  —  Parties  supérieures  d'un  gris  cendré,  chaque 
plume  plus  ou  moins  bordée  de  blanc  et  marquée  d'une  strie  noire  longitudi- 
nale au  centre  ;  petites  couvertures  des  ailes  brunes,  les  autres  de  la  couleur 
du  dos  ou  un  peu  plus  foncées  et  bordées  de  blanchâtre,  les  longues  plumes 
qui  recouvrent  les  rémiges  barrées  extérieurement  de  noir  ;  queue  comme 
en  été,  mais  plus  blanche  ;  face  et  toutes  les  parties  inférieures  d'un  blanc 
pur,  avec  de  petites  stries  noires  sur  les  côtés  du  cou  et  de  la  poitrine. 

Jeune.  —  Parties  supérieures  d'un  brun  cendré,  varié  de  blanc  et  strié  de 
noir  sur  la  tête;  dos,  scapulaires  et  couvertures  des  ailes  marqués  de  petites 
taches  blanchâtres  sur  les  bords  des  plumes  ;  poitrine  cendrée  avec  une  strie 
brune  au  centre  des  plumes  ;  gorge,  ventre  et  sous-caudales  d'un  blanc  pur. 
Pattes  d'un  brun  verdâtre. 

Hah.  —  Le  Chevalier  stagnatile  est  peu  répandu  en  Europe  et  c'est 

plutôt  un  oiseau  asiatique.  Sur 
notre  continent  il  ne  paraît  guère 
dépasser  au  nord  le  50'',  et  il  n'a 
jamais  été  observé  aux  îles  Bri-. 
tanniques  (1).  M.  Gâtke  le  men- 
tionne comme  ayant  été  capturé 
accidentellement  à  Helgoland. 
Suivant  de  Nordmann,  cet  oiseau 
est  commun,  surtout  au  prin- 
temps, dans  les  parages  de  la  mer  Noire  ;  «  c'est  au  mois  d'avril,  dit 
cet  auteur^  qu'il  arrive  chez  nous  ;  les  bandes  souvent  très  nombreuses 
de  ces  Chevaliers,  se  répandent  sur  toute  la  Nouvelle  Russie,  et  l'on 
en  tue  beaucoup    qu'on  vend  ensuite   sur   le  marché  aux  oiseaux 


(1)  Aucun  auteur  anglais  ne  signale  de  capture  de  cette  espèce  sur  le  sol  britannique. 
C'est  donc  probablement  par  erreur  que  Schlégel  mentionne,  dans  son  catalogue  du  Musée 
des  Pays-Bas,   un  spécimen   provenant  d'Angleterre. 


—  195  — 

d'Odessa.  Il  est  plus  que  probable  qu'il  niche  chez  nous,  car  je  sais 
positivement  qu'à  la  mi-mai  on  en  trouve  encore  dans  la  Bessarabie 
et  dans  le  gouvernement  de  Kherson  ».  Il  n'est  pas  rare  non  plus  en 
Turquie  et  en  Asie  Mineure  (Robson)  et  il  est  même  commun  à  Corfou 
(Lilford).  En  Grèce  il  arrive  en  grand  nombre  à  la  suite  des  ouragans 
qu'amène  l'équinoxe  du  printemps,  et  y  séjourne  dans  les  prairies 
marécageuses  jusque  vers  la  mi-mai  [Lindermayer).  Il  est  rare  aux 
deux  passages  en  Pologne  {Taczanowski) ,  et  M.  J.  von  Frivaldsky  a 
assuré  à  M.  Dresser  qu'il  niche  en  Hongrie;  en  Autriche  on  le  prend 
quelquefois  près  du  Danube  {Hinterberger),  et  en  Allemagne  il  se 
montre  accidentellement  en  Silésie,  dans  le  Wurtemberg,  près  du 
Mein,  en  Thuringe,  près  du  lac  salé  de  Mannsfeld  [Naumann)  et  près 
du  Rhin  {Boeck).  Feu  mon  père  a  signalé  cet  oiseau  comme  se 
montrant  accidentellement  en  Belgique,  et  M.  de  Selys-Longchamps 
confirme  cette  mention.  Ce  Chevalier  est  de  passage  irrégulier  dans 
le  nord  et  dans  quelques  autres  localités  de  la  France  :  on  l'a  tué 
près  de  Dunkerque,  de  St-Omer,  d'Abbeville,  de  Dieppe,  dans  le 
département  de  l'Aube  et  dans  le  midi  de  la  France  {Begl.  et  Gerbe)  ; 
M.  Besson  pense  qu'il  niche  près  d'Hyères;  il  est  rare  en  Savoie 
[Bailhj)  et  près  de  Nice  {Salvadori).  En  Italie  il  est  de  passage  régu- 
lier en  Lombardie,  en  Vénétie,  en  Ligurie,  en  Romagne,  en  Toscane, 
dans  la  province  de  Naples,  en  Sicile  {Salvadori ,  Giglioli,  Malherbe) 
et  à  l'île  de  Malte  [Wright),  et  de  passage  irrégulier  ou  accidentel  en 
Piémont,  en  Sardaigne  {Salvadori,  Bonomi)  et  dans  le  Tyrol  {Altham- 
mer).  En  Espagne  il  est  de  passage  dans  les  provinces  de  Murcie, 
de  Valence,  de  Saragosse  et  de  Gérone  {Reyes). 

En  Asie,  cette  espèce  paraît  être  assez  répandue  dans  la  partie 
méridionale  du  Caucase  :  M.  Radde  dit  qu'au  commencement  d'avril, 
on  voit  souvent  de  ces  oiseaux  sur  le  marché  de  Tiflis,  qu'il  en  a 
rencontré  pendant  son  voyage  au  lac  Tschaldyr  et  que  l'espèce  niche 
dans  les  régions  du  Terek  et  du  Kuban.  Il  est  commun  et  niche 
dans  le  Turkestan  {Severtzoïo)  et  dans  la  Sibérie  méridionale 
{Radde);  Middendorff  n'a  tiré  (ju'un  seul  sujet  sur  la  côte  méridio- 
nale de  la  mer  d'Ochotsk  ;  Dybowski  en  a  trouvés  à  l'époque  de  la 
nidification  dans  les  steppes  du  bord  de  l'Argun;  Radde  et  Prze- 
walski  le  citent  du  pays  de  l'Ussuri.  Il  est  rare  en  Chine  {David)  et 
à  P^ormose  {Swinhoe).  On  on  a  pris  à  Bornéo  {Sclnoancr),  à  Java 
{Srhlégcl),  à  Halmahera  {Wallace)  et  dans  hi  nord  de  l'Australie 
{GoiUd,  Rarimijj).  Il  est  plus  ou  moins  abondant,  en   hiver,  dans  le 


496  — 


sud-ouest  de  l'Asie,  dans  l'Inde  [Jerdon)  et  à  Ceylan  [Legge). 
Cette  espèce  habite  également,  pendant  la  saison  d'hiver,  une 
grande  partie  de  l'Afrique,  l'Algérie  {Loche),  l'Egypte  {Shelley),  la 
Palestine  {Tristram),  la  Nubie,  l'Abyssinie,  le  Kordofan,  le  Sennaar 
et  surtout  les  marais  qui  avoisinnent  le  Nil  bleu  et  le  Nil  blanc  à 
l'est  du  Kordofan  {de  Heuglin).  Elle  a  également  été  observée  à 
Natal  {Ayres)  et  dans  la  colonie  du  Cap  {Layard)  ;  elle  est  assez 
répandue  dans  le  pays  de  Damara  {Andersson).  A  la  côte  occidentale, 
cet  oiseau  a  été  pris  dans  l'Aschanti  {Pel),  en  Gambie  {Rendall)  et  à 
la  Côte  d'Or  {Schlégel). 

Mœurs.  —  Cet  oiseau  paraît  émigrer  très  tôt  des  contrées  de 
l'Europe,  car  de  Heuglin  dit  l'avoir  vu  près  d'Alexandrie  dès  les 
premiers  jours  du  mois  d'août;  c'est  en  avril  et  mai  qu'on  le  voit  le 
plus  souvent  dans  les  contrées  européennes  où  il  est  de  passage. 

Suivant  Naumann,  ce  Chevalier  ressemble  beaucoup,  par  ses 
mœurs  et  même  par  sa  voix,  au  T.  glottis,  ce  qui  fait  supposer  qu'il 
est  comme  ce  dernier  plus  nocturne  que  diurne.  Il  préfère  les  eaux 
tranquilles  des  étangs  et  des  mares  aux  eaux  courantes,  bien  qu'on 
le  rencontre  parfois  aussi  sur  les  bords  des  rivières.  C'est  le  plus 
gracieux  et  le  plus  élégant  des  Chevaliers  ;  il  court  et  vole  avec  une 
extrême  agilité;  ses  mouvements  d'ailes  ne  diffèrent  guère  de  ceux 
de  ses  congénères,  mais  son  vol  est  plus  rapide.  Il  est  aussi  très 
farouche  et  prudent. 

«  Dans  le  N.-E.  de  l'Afrique,  dit  de  Heuglin,  jai  rencontré  cet 
oiseau  sous  ses  divers  plumages.  On  ne  le  voit  le  plus  souvent 
qu'isolément  ou  par  couple,  quelquefois  mélangé  à  d'autres  oiseaux 
de  rivage.  Il  évite  le  voisinage  de  la  mer,  mais  il  aime  les  lacs,  les 
étangs  et  les  mares  des  régions  boisées.  » 

Voici  ce  que  de  Nordmann  dit  au  sujet  de  cette  espèce  :  «  Dans 
plusieurs  individus  vieux,  en  Uvrée  de  noces  complète,  que  je  tuai 
au  printemps,  je  trouvai  la  couleur  des  pieds  d'un  noir  rougeâtre 
avec  une  légère  teinte  verte  aux  articulations.  Il  semble  donc  que  la 
teinte  verdâtre  n'appartient  qu'aux  jeunes  sujets.  La  forme  et  les 
mouvements  de  cet  oiseau  ont  beaucoup  de  grâce  et  d'élégance  ;  à  son 
arrivée  au  printemps  il  ne  montre  point  de  crainte  et,  lorsqu'on  sur- 
prend plusieurs  individus  se  promenant  sur  le  rivage  de  quelque 
étang,  à  moins  qu'on  ne  les  chasse  brusquement,  ils  se  jettent  dans 
l'eau,  se  tenant  serrés  les  uns  contre  les  autres,  et  se  sauvent  à  la 
nage  plutôt  que  de  recourir  à  leurs  ailes.  Le  Chevalier  stagnatile  est 


—  197  — 

aussi  bon  nageur  que  les  Phalaropes,  avec  lesquels  il  a,  dans  sa 
manière  d'être,  plusieurs  rapports,  sans  compter  ceux  qui  existent 
dans  la  forme  du  bec  long  et  excessivement  grêle. 

«  La  cliair  de  cet  oiseau  est  un  mets  d'une  délicatesse  exquise  ;  au 
printemps  tout  son  corps  est  entouré  d'une  couche  de  graisse  presque 
fondante  qui,  bien  qu'épaisse,  se  détache  facilement  de  la  chair,  ce 
qui  fait  qu'en  le  dépouillant,  il  faut  user  de  beaucoup  de  précaution  ». 

La  nourriture  principale  de  cet  oiseau  paraît  se  composer  de  larves 
et  d'insectes  aquatiques  ainsi  que  de  petits  mollusques. 

Repy^oduction.  —  Le  Chevalier  stagnatile  niche  au  bord  des  étangs 
et  des  mares,  de  la  même  manière  que  ses  congénères.  Il  pond  quatre 
œufs  d'un  jaune  roussâtre  terreux,  avec  des  taches  profondes  cendrées 
et  d'autres,  de  diverses  grandeurs,  brunes  et  rougeâtres.  Ces  œufs 
mesurent  environ  39  millim.  sur  29. 

204.  —  Le  Chevalier  sombre. 

TOTANUS  FUSGUS,  Beclist.  ex  Brus. 
(PL  204) 

LiMOSA  FUSCA,  Briss.  Ornith.  v.  p.  277  (1760). 

ScoLOPAx  FUSCA,  Liii.  Sijst.  nat.  I,  p.  243  (1766). 

ScoLOPAX  MACULATA,  Tunst.  Om.  Brit.  p.  3  (1771). 

ScoLOPAx  CANTABRiGiENSis,  Lath.  Gen.  Syn.  suppl.  I,  p.  292  (1787). 

ScoLOPAXNiGKA,  cuR0NiCAetTRiNGAATRA,Gmel.5î/s<.  nat.  I,  pp.  659,  669,  673  (1788). 

ScoLOPAX  NATANS,  Otto,  Uehers.  Buff.  Ybg.  XXVI,  p.  234  (1797). 

ToTANUs  MACULATUS,  Fuscus,  NATANS,  Bechst.  Om.  Tasckefib.  pp.  284,  286  (I803">. 

Tringa  longipes,  Leisl.  iVac/?<r.  Bechst.  yat.  Deutschl.  11,  p.  189  (1813). 

Tringa  TOTANUS,  Mey.  Vog.  Liv.  und  Esthl.  p.  200  (1815). 

Totanus  raii,  Leach,  Syst.  Cat.  M.  B.  Br.  Mus.  p.  31  (1816). 

Erythroscelus  fuscus,  Kp.  Natiirl.  Syst.  p.  54  (1829). 

Totanus  ater,  Brm.  Isis,  1830,  p.  990. 

Totanus  obscuru.s,  C.  Dub.  PI.  col.  ois.  Belff.  11,  p.  189  (1857). 

Der  dunkelfarbige  Wasserlaufer,  en  allemand. 

The  dusky  redshank,  en  anglais. 

De  Zwarte  Ruiter,  en  flamand. 

Taille  :  0,22  ;  ailes  0,165;  bec  0,058  ;  tarses  0,056. 

Description  des  deux  sexes  adultes  au  printemps.  —  Tête,  cou,  poitrine  et 
abdomen  d'un  j,'ris  ardoise  foncé,  les  plumes  de  l'abdomen  très  légèrement 
terminées  de  blanc;  tour  des  yeux  blanc;  manteau  et  scapulaires  d'un  brun 
noir  à  reflets  pourpres,  mais  toutes  les  plumes  légèrement  bordées  de  blanc 
et  marquées  sur  les  côtés  de  petites  taches  également  blanches  ;  couvertures 
des  ailes  d'un  brun  noirâtre  varié  de  cendré,  chaque  plume  bordée  et  tachée 


—  198  — 

latéralement  de  blanc;  rémiges  brunes;  bas  du  dos  blanc;  sus  et  sous-cau- 
dales barrées  alternativement  de  brun  noirâtre  et  de  blanc;  rectrices  bru- 
nâtres, les  médianes  lavées  de  cendré,  toutes  barrées  de  blanc  sur  les  bords. 
Bec  noir  avec  la  base  de  la  mandibule  inférieure  rouge  ;  iris  brun  ;  pattes 
d'un  brun  rougeâtre. 

En  hiver.  —  Parties  supérieures  d'un  gris  cendré,  les  plumes  légèrement 
bordées  de  blanc  ;  lorums  brunâtres;  raie  sourcilière,  tour  de  l'œil  et  joues 
d'un  blanc  assez  pur,  mais  les  dernières  variées  de  cendré  ;  bas  du  dos  blanc 
devant  du  cou,  côtés  et  haut  de  la  poitrine  d'un  cendré  varié  de  blanc  ; 
gorge,  bas  de  la  poitrine  et  abdomen  d'un  blanc  pur;  ailes  et  queue  comme 
en  été  mais  d'une  teinte  plus  grise  et  plus  pâle.  Pattes  d'un  rouge  orangé. 

Jeune.  —  Parties  supérieures  brunes,  le  dos  tacheté  de  blanc  ;  lorums 
bruns  ;  raie  sourcilière  et  tour  de  l'œil  blancs  ;  joues  striées  de  cendré  ;  gorge 
d'un  blanc  pur;  les  autres  parties  inférieures  blanchâtres,  avec  des  mèches 
cendrées  au  cou  et  à  la  poitrine  et  des  raies  transversales  en  zigzags  de 
même  couleur  sur  l'abdomen  ;  ailes  et  queue  comme  chez  l'adulte.  Pattes 
rouges. 

Poussin.  —  Dessus  de  la  tête,  milieu  du  front  et  lorums  d'un  brun  noirâ- 
tre ;  larges  raies  sourcilières  d'un  cendré  blanchâtre  se  réunissant  derrière 
la  nuque;  une  autre  raie  blanchâtre,  plus  étroite,  passant  au-dessus  de  la 
précédente  pour  se  terminer  derrière  l'œil  ;  joues  blanchâtres  ;  une  raie  noire 
derrière  l'œil,  aboutissant  à  une  bande  de  même  couleur  couvrant  la  nuque  ; 
côtés  du  cou  cendrés  ;  dos  noir  varié  de  cendré  roussâtre  avec  deux  bandes 
latérales  de  cette  dernière  couleur  ;  ailes  noires,  variées  et  bordées  de  cen- 
dré ;  flancs  et  duvet  de  la  queue  variés  des  mêmes  teintes  ;  parties  inférieures 
blanchâtres,  l'extrémité  du  duvet  brunâtre. 

Hab.  —  Le  Chevalier  sombre  ou  Arlequin  habite,  en  été,  tout  le 

nord  de  l'Europe  et  niche  jus- 


que sous  le  70''  1.  N.  {Collett)  ; 
mais  il  ne  paraît  pas  avoir  été 
observé  aux  îles  Féroë,  enislande 
et  au  Groenland.  A  l'époque  des 
migrations  il  est  plus  ou  moins 
abondant  dans  toute  l'Europe 
ï^!]  centrale,  mais  rare  aux  îles  Bri- 
tanniques  {Seebohm).  Il  est  géné- 
ralement commun  en  Belgique,  lors  des  passages,  aussi  bien  sur  nos 
côtes  maritimes  que  près  des  cours  d'eau  et  des  marais.  Il  est  rare 
en  Portugal  {du  Bocage)  ;  en  Espagne  il  est  de  passage  et  hiverne 
mais  n'est  pas  abondant  {Saunders)  ;  dans  le  midi  de  la  France  il  est 


—  199  - 

de  passage  en  automne,  en  hiver  et  au  mois  d'avril,  et  il  est  même 
alors  commun  dans  le  département  des  Pyrénées-Orientales  (/.«croï^r); 
il  est  également  de  passage  régulier  en  Italie  et  y  hiverne  [Salvador i, 
Gigliolï)  ;  en  Grèce  il  est  de  passage  mais  rare,  et  ne  paraît  pas 
avoir  été  vu  sur  les  îles  de  l'Archipel  {Lindcrmayer).  Cet  oiseau 
passe  par  la  Russie  méridionale  deux  fois  par  an  ;  dès  le  mois  de 
mars  et  en  septembre  et  octobre,  et  il  est  alors  commun  dans  les 
parages  de  la  mer  Noire  et  de  la  Caspienne,  où  l'on  peut  alors  voir 
des  troupes  composées  de  soixante  à  quatre-vingts  individus  [de  Nord- 
mann)  ;  dans  l'arrondissement  d'Uman  du  gouvernement  de  Kiew, 
cet  oiseau  est  de  passage  régulier  mais  peu  abondant  ;  il  passe 
quelquefois  déjà  le  7  août,  mais  jamais  plus  tard  que  le  7  octobre 
[Gœbcl). 

En  Asie  on  rencontre  ce  Chevalier  depuis  les  monts  Oural  s  jusqu'au 
Kamtschatka  [Stejneger)  et  le  Japon  ;  il  est  de  passage  dans  les  con- 
trées du  centre  et  hiverne  dans  le  Sud,  mais  ne  paraît  pas  se  montrer 
en  Asie  Mineure,  eu  Palestine  et  en  Perse.  Il  est  assez  répandu 
dans  l'Inde  pendant  l'hiver  [Jerdon),  et  on  le  voit  même  à  Ceylai; 
[Layard)  et  dans  l'Indo-Chine  [Seebohm).  L'abbé  David  dit  que  pen. 
dant  la  saison  chaude  on  le  voit  dans  la  Sibérie  Orientale,  le  Japon, 
la  Chine  et  la  Mongolie  où  il  l'a  rencontré  assez  fréquemment  ; 
M.  Swinhoe  l'a  trouvé  également  aux  environs  de  Canton,  de  Tientsin 
et  de  Shangaï. 

On  ne  voit  cet  oiseau  en  Egypte  et  en  Nubie  qu'en  petit  nombre 
[Shelley);  il  est  de  passage  accidentel  en  Algérie  (Z/oc/^e)  et  se  montre 
probablement  encore  accidentellement  dans  d'autres  parties  de  l'Afri- 
que, car  M.  Layard  en  prit  un  exemplaire  dans  la  colonie  du  Cap, 
près  de  Knysna. 

Mœurs.  —  La  migration  d'automne  a  lieu  pendant  la  nuit  et  par 
groupes  composés  souvent  de  vingt  à  trente  sujets  et  même  davantage. 
C'est  vers  la  rai-août  que  le  départ  commence  dans  le  Nord,  et  on 
rencontre  alors  de  ces  Chevaliers  jusqu'en  octobre  et  novembre  dans 
toute  l'Europe  centrale  ;  ils  hivernent  dans  les  pays  qui  entourent  la 
Méditerranée  et  dans  le  sud  de  l'Asie  comme  nous  avons  vu  plus 
haut.  Les  passages  du  printemps  ont  lieu  entre  la  mi-mars  et  le 
milieu  de  mai,  mais  ces  oiseaux  sont  alors  généralement  fort  rares, 
aussi  bien  en  Allemagne  qu'en  Belgique;  on  les  rencontre  à  cette 
époque  isolément  ou  par  couples.  En  automne  ils  voyagent  souvent 
en  société  du  Chevalier  à  pieds  verts  ou  autres  espèces  voisines  ;  les 


—  200  — 

troupes  d'une  certaine  importance  sont  ordinairement  formées  de 
jeunes  de  l'année,  tandis  que  les  vieux  préfèrent  voyager  isolément 
ou  par  couples,  s'arrêtant  volontiers  des  journées  entières  dans  les 
localités  qui  leur  conviennent.  Si  la  nuit  est  très  sombre,  ils  s'abattent 
près  d'une  eau  quelconque  et  y  attendent,  dans  le  repos,  les  premières 
lueurs  de  l'aurore  pour  continuer  leur  voyage. 

Le  Chevalier  sombre  ne  se  montre  sur  les  côtes  maritimes  que 
pendant  les  migrations,  et  encore  ne  Ty  voit-on  qu'en  petit  nombre  ; 
il  recherche  les  eaux  intérieures,  les  rivières,  les  lacs,  les  étangs  et  les 
marécages,  et  on  le  voit  même  près  des  mares  qui  se  trouvent  non 
loin  des  routes  et  des  villages.  Il  lui  faut  cependant  des  eaux  décou- 
vertes ;  il  n'aime  pas  celles  qui  sont  bordées  d'arbres  ou  de  buissons 
ou  garnies  de  roseaux  ou  de  joncs,  aussi  se  tient-il  éloigné  de  tout 
endroit  trop  ombragé  ou  garni  de  hautes  herbes  ;  ce  qu'il  préfère  ce 
sont  les  marécages  où  il  peut  facilement  patauger  dans  la  boue. 

C'est  également  près  de  l'eau  qu'il  cherche  le  repos,  mais  il  ne  se 
livre  au  sommeil  que  pendant  le  milieu  de  la  journée  ou  durant  une 
partie  des  nuits  sombres  ;  son  sommeil  est  léger  et  souvent  interrompu, 
car  il  se  réveille  au  moindre  bruit. 

Sa  démarche  est  élégante,  régulière,  mais  quand  il  le  veut,  il  sait 
courir  avec  une  extrême  agilité  ;  lorsqu'il  entre  dans  l'eau,  il  y  marche 
aussi  longtemps  que  ses  jambes  le  lui  permettent,  puis  il  continue  sa 
route  à  la  nage  et  se  montre  alors  fort  habile  nageur  ;  il  plonge  même 
quand  un  danger  le  menace,  pour  revenir  à  la  surface  dans  un  autre 
endroit.  Son  vol  est  gracieux  et  rapide  et  ressemble  entièrement  à  celui 
du  Chevalier  à  pieds  verts  ;  quand  l'oiseau  a  un  grand  trajet  à  franchir 
il  s'élève  généralement  très  haut.  Il  est  très  farouche,  mais  moins 
prudent  que  les  précédents,  sans  cependant  négliger  de  prendre  son 
vol  à  l'approche  d'un  chasseur.  Il  se  montre  plus  sociable,  lors  de  la 
migration  d'automne,  que  les  autres  grands  Chevaliers  ;  les  troupes 
restent  unies  durant  tout  le  voyage,  aussi  bien  à  terre  que  dans 
l'air,  et  si  une  cause  quelconque  vient  à  séparer  les  individus,  ils 
ne  tardent  guère  à  se  réunir  de  nouveau  en  s'appelant  les  uns  les 
autres.  Les  sujets  isolés  se  joignent  souvent  à  d'autres  espèces,  mais 
il  est  rare  qu'ils  se  mettent  à  la  tête  de  bandes  de  petits  oiseaux  de 
rivage. 

La  voix  de  cet  oiseau  est  sonore  et  sifflante  et  peut  être  entendue 
de  loin;  son  cri  peut  se  rendre  par  tjoït  ou  tjuit,  rarement  répété 
sans  intervalle;  son  cri  de  ralliement  est  tick,  tick  ou  tack. 


-  201  — 

Sa  nourriture  se  compose  surtout  de  mollusques,  de  têtards  de  gre- 
nouilles, de  larves  et  d'insectes  aquatiques  ainsi  que  de  vers.  Comme 
cette  espèce  s'apprivoise  facilement,  on  peut  nourrir  les  sujets  captifs 
d'abord  de  vers  de  terre,  ensuite  on  mélange  ces  derniers,  coupés  en 
morceaux,  à  du  pain  blanc  trempé  dans  du  lait,  les  habituant  insen- 
siblement à  se  contenter  de  cette  dernière  nourriture  ;  on  ne  doit  pas 
négliger  de  leur  donner  beaucoup  d'eau  fraîche. 

Reproduction.  —  Nous  résumons  ci-dessous  les  observations  faites 
par  WoUej,  en  Laponie,  sur  la  manière  d'être  de  cet  oiseau  pendant 
la  durée  de  la  reproduction. 

Le  Chevalier  sombre  revient  en  Laponie  dès  la  fonte  des  neiges 
et  se  prépare  bientôt  à  faire  son  nid.  Il  se  tient  alors  dans  les 
lieux  découverts  de  la  forêt,  souvent  loin  de  l'eau,  choisissant 
surtout  les  endroits  où  l'on  a  brûlé  du  bois  et  où  la  végétation  est 
rare.  Les  couples  se  tiennent  fort  éparpillés  et  c'est  à  peine  si  on  en 
rencontre  deux  ou  trois  pendant  une  journée  de  marche.  Le  nid  se 
trouve  dans  une  clairière  entourée  de  sapins,  à  une  grande  distance 
des  marécages,  et  le  plus  souvent  sur  une  éminence  ou  au  sommet 
d'une  colline.  Le  terrain  dans  lequel  cet  oiseau  creuse  une  légère 
dépression,  s'il  n'en  trouve  de  naturelle,  est  ordinairement  couvert 
de  courtes  bruyères  et  autres  petites  plantes  croissant  parmi  des 
lichens  ;  la  petite  fosse  qui  sert  de  nid  est  elle-même  garnie  d'une 
légère  couche  d'aiguilles  sèches  de  sapins.  La  femelle  couve  avec 
persistance  en  tenant  le  cou  rentré  et  en  découvrant  son  croupion  dont 
la  blancheur  frappe  le  regard  de  loin  ;  aussi  le  chasseur  est-il  tenté 
de  s'emparer  de  l'oiseau  et  s'en  approche  avec  mille  précautions. 
Mais  l'animal  s'envole  à  temps,  ou  court  par-ci  par-là  avant  de 
s'élever,  puis  il  décrit  des  cercles  au-dessus  de  l'intrus  en  faisant 
de  temps  en  temps  entendre  son  cri  d'angoisse  ;  parfois  il  va  se 
percher  sur  un  arbre  voisin.  La  ponte,  qui  est  de  quatre  œufs,  a 
lieu  vers  la  fin  de  mai.  Ces  œufs  sont  d'un  vert  olivâtre  plus  ou  moins 
foncé,  parsemés  de  taches  d'un  cendré  brunâtre  au-dessus  desquelles 
on  aperçoit  un  grand  nombre  de  petites  et  de  grandes  taches, 
allongées  ou  arrondies,  d'un  brun  rougeâtre  ou  noirâtre;  ils  me- 
surent environ  48  millim.  sur  33. 

Wolley  a  constaté  que  les  parents  se  montrent  surtout  inquiets 
quand  ils  ont  des  jeunes  ;  à  son  approche  l'oiseau  planait  au-dessus 
de  lui  ou  se  tenait  à  ses  côtés  en  hochant  la  tête  et  ouvrant  et  fermant 
alternativement  le  bec.  Jamais  la  femelle  ne  vous  permettra  de  dé- 

ToME  II.  —1889.  26 


—  202    - 

couvrir  sa  couvée,   car  elle  parviendra  toujours  à  vous  dérouter  ;  ce 
n'est  que  par  hasard  que  l'on  peut  trouver  son  nid. 

205.  —  Le  Chevalier  gambette 

TOTANUS    CALIDRIS,  Bechst.  ex  Lin. 

(PL  205) 

ToTANUs  STRIATUS  et  NŒVius,  Bi'iss.  Ortiith.  V,  pp.  196,  200  (1760). 
Tringa  gambetta,  Lin.  Fauna  Suec.  p.  63  (1761). 

SCOLOPAX  CALIDRIS  Ct  TrINGA  GAMBETTA  et  STRIATA,  Liii.  S.  N.  p.  245  et  248  (1766). 

ToTANUs  CALIDRIS,  Bectist.  Omith.  Taschenb.  II,  p.  284  (1803). 

Gambetta  calidris,  Kp.  Nat.  Syst.  p,  54  (1829). 

ToTANUs  littoralis,  Brm.  Isis,  1830,  p.  990. 

Totanus  gr^cus  et  meridionalis,  Brm.  Yogelf.  p.  312  (1855). 

TOTANUS  GAMBETTUS,  C.  Dub.  PI.  col.  Ois.  Belfj.  II,  p.  188  (1857). 

Der  Gambett-Wasserlaufer,  eu  allemand. 

The  common  Redshank,  en  anglais. 

De  Tureluur,  en  flamand. 

Taille  :  0'",22  ;  ailes  0,155;   bec  0,040  ;  tarses  0,052. 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  — Parties  supérieures  et  joues  d'un 
brun  cendré  olivâtre  varié  de  rougeâtre,  avec  une  raie  noire  longitudinale  au 
centre  des  plumes  de  la  tête,  du  cou  et  du  dos;  sur  ce  dernier,  ainsi  que  sur 
les  scapulaires,  on  remarque  également  des  raies  noires  transversales  sur- 
montées d'une  raie  d'un  rougeâtre  clair  ;  partie  moyenne  et  inférieure  du  dos 
d'un  blanc  pur;  couvertures  des  ailes  d'un  cendré  olivâtre,  les  plus  grandes 
barrées  de  noir  et  terminées  de  blanc  ;  rémiges  primaires  brunes,  leur  bord 
interne  blanc  pointillé  de  brun,  la  baguette  de  la  première  blanche,  la  moi- 
tié terminale  des  secondaires  d'un  blanc  pur  ;  sus  et  sous- caudales  ainsi  que 
les  rectrices,  blanches  barrées  de  noir;  parties  inférieures  blanches  avec  des 
taches  brunes,  de  forme  allongée  sur  le  devant  du  cou  et  à  la  poitrine  et 
transversales  sur  les  flancs.  Bec  brun,  rouge  à  la  base  ;  iris  brun  ;  pattes 
d'un  rouge  vermillon. 

En  hiver.  —  Parties  supérieures  d'un  cendré  rembruni  sans  taches,  avec 
les  bordures  des  plumes  d'une  teinte  plus  claire  ;  joues  blanchâtres  marquées 
de  brun  ;  sourcil  et  tour  de  l'œil  blancs  ;  côtés  du  cou  et  de  la  poitrine  d'un 
cendré  brunâtre  ;  petites  et  moyennes  couvertures  des  ailes  brunes,  bordées 
de  blanc  d'une  manière  peu  apparente  ;  parties  inférieures  blanches,  plus  ou 
moins  rayées  longitudinalement  de  brun  sur  le  devant  du  cou  et  à  la  poi- 
trine ;  flancs  et  sous-caudales  plus  ou  moins  tachetés  de  brun  ;  le  reste  comme 
en  été.  Il  est  à  remarquer,  qu'en  hiver,  les  raies  et  les  taches  des  parties  infé- 
rieures disparaissent  de  plus  en  plus  à  mesure  que  l'oiseau  avance  en  âge. 


203  — 


Jeune.  —  Dessus  de  la  tête  brun  avec  les  bordures  latérales  des  plumes 
d'un  jaune  brunâtre  pâle  ;  joues  blanches,  marquées  de  brun  en  arrière  ; 
sourcils,  tour  de  l'œil  et  gorge  blancs;  lorums  bruns;  nuque  grise,  rayée  longi- 
tudinalement  de  brun  grisâtre  ;  haut  du  dos, épaules  et  couvertures  des  ailes 
d'un  brun  foncé  tacheté  de  blanc  jaunâtre  ;  parties  inférieures  blanches, 
lavées  de  cendré  et  striées  de  brun  sur  le  devant  et  les  côtés  du  cou,  sur  le 
jabot  ces  stries  prennent  la  forme  de  petites  taches  allongées  ;  côtés  de  la 
poitrine  lavés  de  roussâtre  et  marqués  de  quelques  taches  angulaires  ou 
transversales  ;  sous-caudales  avec  une  strie  centrale  brune  ;  le  reste  du  plu- 
mage comme  chez  l'adulte.  Base  du  bec  et  pattes  oranges. 

Poussin.  —  Sur  le  vertex  calotte  étroite  d'un  roux  sombre,  encadrée  de 
noir,  dont  les  extrémités  aiguës  descendent  jusqu'à  la  naissance  du  bec  et  au 
commencement  du  cou  ;  front  et  côtés  de  la  tête  d'un  gris  fauve,  portant  de 
chaque  côté  un  trait  noir  qui  part  de  la  mandibule  supérieure;  traverse  le 
orum,  l'œil,  la  région  auriculaire  et  se  dilate  sur  les  côtés  de  la  nuque  ;  par- 
ties supérieures  d'un  gris  roussâtre  par  places,  coupés  par  quatre  bandes 
noires  longitudinales  sur  le  dos,  qui  présente  ainsi  une  bande  centrale  grise, 
et  marqué  de  taches  irrégulières  noires  ;  plumeau  caudal  varié  de  brun  et 
de  roux  ;  gorge  et  ventre  blancs  ;  poitrine,  devant  du  cou  et  abdomen  d'un 
fauve  pâle  ;  bec  noir  avec  la  mandibule  inférieure  plus  pâle  à  la  base  ;  pieds 
d'un  jaune  terne  [J.  Vian).    , 

Hah.  —  Le    Chevalier   gambette   est   généralement  répandu    en 

Europe  et  en  Asie  ;  en  été,  il  est 


commun  en  Islande  {Faber)  et 
très  commun  dans  le  nord  de 
l'Europe  jusqu'au  70°  {Wallen- 
gren),  mais  à  l'est  de  la  mer 
Blanche  il  ne  paraît  pas  dépasser 
le  58"  et  en  Sibérie  le  55^  [See- 
bohm).  Sur  notre  continent,  il 
niche  à  peu  près  dans  tous  les 
lieux  qui  lui  conviennent  depuis  sa  limite  septentrionale,  la  Grande- 
Bretagne,  l'Irlande,  les  îles  Hébrides,  Orkneys  et  Shetland  jusque 
sur  les  côtes  de  la  IMéditerranée  et  le  nord  de  la  Grèce  {Lacroix, 
Saunders,  Giglioli,  Lindermayer,  etc.);  mais  en  été  il  est  toujours 
moins  abondant  dans  les  contrées  du  Midi  et  manque  môme  complè- 
tement dans  certaines  régions.  Il  est  sédentaire  en  Angleterre  et  en 
Irlande  [Seebohm)  et  à  partir  du  midi  de  la  France  {Degland).  Il  est 
probable  qu'il  niche  en  petit  nombre  dans  les  marais  du  nord  de  la 
Belgique,  mais  je  n'en  suis  pas  certain;  il  (îst  cependant  commun  eu 


—  204  — 

avril  et  à  la  fin  de  l'été  près  de  la  mer,  le  long  de  l'Escaut  et  dans 
les  polders,  mais  selon  M.  E.  Claes,  il  est  peu  abondant  dans  les 
marais  du  Limbourg  belge  ;  on  l'a  tué  plusieurs  fois  sur  la  Meuse 
près  de  Namur  {Fallon). 

En  hiver  on  observe  également  cet  oiseau  dans  le  nord  {Loche, 
Irby,  Salvin,  etc.,)  et  le  nord-est  de  l'Afrique.  11  fait  son  apparition 
dans  le  Delta  dès  le  commencement  du  mois  d'août,  remonte  ensuite 
le  Nil  et  ses  afluents  et  longe  les  côtes  de  la  mer  Rouge  jusque  vers 
le  10°  l.N.  ;  il  est  commun  depuis  septembre  jusqu'en  décembre  dans 
le  Kordofan  oriental  ainsi  que  près  du  Nil  Blanc  et  du  Nil  Bleu  ;  en 
Abyssinie  on  le  voit  encore  jusqu'en  avril,  et  durant  tout  l'été  on 
rencontre  en  Egypte,  en  Nubie  et  sur  les  côtes  de  la  mer  Rouge 
des  individus  isolés  ou  des  couples  {de  Heuglin).  On  l'observe  égale- 
ment en  Sénégambie  {Rendall),  dans  l'Aschanti  [Pel),  à  la  Côte  d'Or 
{Ussher)  et  en  petit  nombre  au  cap  de  Bonne-Espérance  {Layard), 
ce  qui  fait  supposer  qu'il  se  montre  sur  toute  la  côte  de  l'Afrique 
occidentale. 

En  Asie  cet  oiseau  a  été  observé  presque  partout,  à  partir  du  55% 
depuis  les  monts  Ourals  jusqu'à  la  mer  d'Ochotsk  (Middendor/f) , 
mais  pas  au  Japon.  11  hiverne  en  Palestine,  en  Asie  Mineure,  en 
Perse,  dans  l'Inde,  àCeylan  {Jerdon,  Layard,  etc.),  aux  îles  Andaman 
{Walden),  en  Chine  {David)  et  on  l'observe  même  dans  l'Indo-Chine, 
en  Malaisie,  aux  Philippines,  à  Bornéo,  à  Célèbes  et  à  Java,  carie 
musée  de  Leyde  possède,  d'après  Schlégel,  des  sujets  de  ces  diverses 
provenances. 

Mœurs.  —  Le  Chevalier  gambette  quitte  les  contrées  du  Nord 
vers  la  fin  d'août,  et  les  passages  continuent  jusqu'en  octobre.  Ceux 
qui  nichent  en  Allemagne,  dit  Naumann,  quittent  parfois  déjà  les 
lieux  de  la  reproduction  dès  la  seconde  moitié  de  juin,  aussitôt  que 
les  jeunes  sont  en  état  de  voler,  et  au  plus  tard  en  juillet  ;  ils  errent 
alors  au  loin  en  attendant  le  moment  du  départ  définitif.  Au  prin- 
temps ces  oiseaux  repassent  à  partir  de  la  mi-mars  et  les  passages 
se  poursuivent  jusque  dans  la  seconde  quinzaine  d'avril.  Les 
migrations  ont  lieu  pendant  la  nuit  ou  un  peu  avant  le  coucher  ou  le 
lever  du  soleil,  mais  rarement  en  plein  jour.  Les  jeunes  voyagent 
ordinairement  en  famille  ou  par  troupes  de  vingt  à  trente  sujets  ;  les 
adultes  passent  isolément  ou  par  groupes  de  trois  à  cinq  individus. 
Mais  sur  les  côtes  maritimes  on  voit  souvent  des  bandes  plus  ou 
moins  nombreuses  ;  Naumann  pense  que  ces  bandes  se  composent 


—  205  — 

des  individus  venant  des  contrées  septentrionales  et  qui,  par  con- 
séquent^ ont  un  plus  long  trajet  à  franchir. 

Lors  des  passages,  on  rencontre  ces  Chevaliers  le  plus  ordinaire- 
ment dans  les  pays  plats  et  marécageux,  surtout  dans  les  prairies 
humides,  dans  les  pâturages  entrecoupés  de  flaques  d'eau,  près  des 
lacs,  des  étangs,  des  marais  et  des  rivières  ;  on  le  voit  alors  en  grand 
nombre  près  de  TEscaut  et  dans  les  mares  des  polders.  Il  se  tient 
aussi  près  de  la  mer,  et  dans  le  Nord  il  niche  souvent  dans  son  voisi- 
nage. Il  recherche  partout  un  terrain  vaseux  où  il  peut  patauger  dans 
la  boue,  et  ne  séjourne  jamais  longtemps  là  où  l'eau  est  claire  et 
limpide. 

C'est  également  un  oiseau  assez  nocturne,  car  il  ne  se  livre  au 
sommeil  pendant  la  nuit  que  quand  celle-ci  est  très  sombre  ;  il  prend 
son  repos  vers  le  milieu  du  jour,  ne  dormant  cependant  que  d'un 
sommeil  léger,  car  le  moindre  bruit  suffit  pour  le  réveiller.  C'est  du 
reste  un  oiseau  farouche  et  prudent  qui  ne  se  laisse  jamais  approcher 
à  portée  de  fusil,  mais  qui  sait  fort  bien  distinguer  le  passant  inoffensif 
du  chasseur. 

Le  Chevalier  gambette  a  une  démarche  élégante  et  mesurée,  et  il 
sait  courir  avec  une  grande  vitesse  quand  c'est  nécessaire.  Il  entre 
parfois  dans  l'eau  jusqu'au  ventre,  mais  ne  plonge  qu'en  cas  de 
danger  pressant,  et  seulement  quand  une  blessure  à  l'aile  l'empêche 
de  voler  ou  qu'il  se  voit  guetté  par  un  rapace.  Il  nage  avec  facilité, 
vole  avec  autant  de  rapidité  que  de  légèreté  et  plane  parfois  long- 
temps sans  agiter  les  ailes.  Il  lui  arrive  souvent,  dans  les  lieux  où  il 
se  sent  en  sûreté,  de  voler  très  bas  en  rasant  le  sol  ou  l'eau  ;  s'il  a  été 
effrayé,  il  s'élève  de  suite  très  haut,  mais  c'est  pendant  les  mi- 
grations qu'il  vole  surtout  à  une  grande  hauteur.  Il  est  rare  de  voir 
un  do  ces  oiseaux  dans  une  volée  composée  d'autres  espèces,  à  moins 
que  ce  ne  soit  une  bande  do  Chevaliers  à  pieds  verts,  dont  le  cri 
d'appel  ressemble  beaucoup  à  celui  de  l'espèce  qui  nous  occupe  ; 
mais  on  voit  assez  souvent  des  jeunes  Chevaliers  gambettes  isolés 
servir  de  guide  à  des  bandes  de  petits  oiseaux  de  rivage. 

D'après  Naumann,  le  cri  de  cet  oiseau  est  sifflant  et  peut  se 
rendre  par  dja  dja  djaa  ou  dja  da  da  ;  au  repos  il  fait  entendre  de 
temps  en  temps  un  djaa  unique,  et  ne  le  répète  plusieurs  fois  de  suite 
que  pour  témoigner  sa  satisfaction  ou  pour  appeler  ses  semblables  ; 
c'est  (lu  reste  un  oiseau  assez  bruyant  (|ui  se  fait  entendre  en  toute 
occasion.  11  a  encore  un  autre  cri,   celui  do  tuck,  tuck,  tack,  qui  est 


—  «06  — 

commun  à  plusieurs  espèces  de  son  genre  ;  son  chant  d'amour  est 
très  caractérisque  et  ressemble  à  daelicll  dlidl  dlidl 

La  nourriture  de  cet  oiseau  ne  diifère  guère  de  celle  des  autres 
espèces  de  son  genre:  larves  et  insectes  aquatiques  et  terrestres, 
petits  mollusques  et  vers  ;  il  avale  du  gravier  pour  faciliter  sa 
digestion  et  enfonce  parfois  la  tête  dans  l'eau  afin  de  fouiller  dans  la 
vase  et  en  retirer  les  petits  êtres  dont  il  se  nourrit. 

Reproduction.  —  Dans  l'Europe  centrale,  la  reproduction  a  lieu 
en  avril  et  l'on  trouve  des  œufs  dans  la  seconde  moitié  de  ce  mois  et 
en  mai  ;  plus  au  Nord  la  ponte  a  lieu  plus  tard,  et  dans  la  partie  la 
plus  septentrionale  de  la  Norwège  elle  n'a  lieu  que  dans  la  seconde 
quinzaine  de  juin.  Ces  Chevaliers  sont  à  cette  époque  extrêmement 
sociables  et  nichent  non  loin  les  uns  des  autres. 

Le  nid  est  placé  tantôt  dans  une  toulFe  de  joncs  entourée  de  vase, 
tantôt  dans  un  pâturage  ou  au  bord  d'un  marais,  plus  rarement  dans 
un  pré,  et  le  plus  souvent  dans  le  voisinage  de  l'eau.  Ce  nid  ne  con- 
siste également  qu'en  une  simple  dépression  garnie  de  quelques  brins 
ou  d'un  peu  de  mousse.  Il  n'est  pas  difficile  à  découvrir  si  Ton  veut 
observer  les  oiseaux  de  loin  ;  en  s'approchant  lentement, l'anxiété  des 
parents  trahit  bientôt  la  place  de  leur  couvée.  La  ponte  est  de  quatre 
œufs  ;  mais  si  ceux-ci  ont  été  enlevés  et  que  la  femelle  se  trouve  ainsi 
obligée  de  faire  une  nouvelle  ponte,  elle  ne  déposera  plus  que  trois 
œufs.  Ceux-ci  sont  de  couleur  assez  variable:  on  en  trouve  d'un 
jaune  grisâtre  ou  brunâtre,  de  rougeâtres  ou  d'une  teinte  olive 
passant  plus  ou  moins  au  brunâtre  ;  ils  sont  parsemés  de  taches  pro- 
fondes cendrées  et  roussâtres  et  de  taches  superficielles  brunes  de 
différentes  grandeurs  ;  ils  mesurent  environ  44  millim.  sur  31. 

La  femelle  couve  avec  assez  de  persistance,  surtout  dans  les  der- 
niers temps,  et  l'éclosion  a  lieu  au  bout  de  quatorze  à  seize  jours. 
Les  poussins  quittent  leur  nid  dès  qu'ils  sont  bien  séchés,  et  suivent 
aussitôt  leur  mère  qui  leur  apprend  sans  tarder  à  trouver  leur  nour- 
riture. En  cas  de  danger,  ils  savent  fort  bien  se  cacher  et  se  laissent 
parfois  écraser  plutôt  que  de  quitter  leur  cachette.  La  mère  est  du 
reste  pleine  de  dévouement  pour  ses  petits  et  n'hésite  pas  à  les 
défendre  au  péril  de  sa  vie  ;  le  père  se  montre  aussi  bon  protecteur, 
mais  il  est  moins  courageux  que  sa  compagne.  Pour  plus  de  sûreté, 
la  femelle  conduit  sa  progéniture  dans  les  marécages  où  elle  court 
moins  de  danger  et  où  elle  a  plus  de  facilité  pour  se  cacher  ;  vers  le 
soir,  toute  la  famille  se  rend  parfois  dans  un  endroit  plus  découvert. 


—  207  — 

mais  les  petits  ne  s'aventurent  sur  le  rivage  que  quand  ils  savent  bien 
voler. 

206.  —  Le  Chevalier  Sylvain 

TOTANUS  GLAREOLA.    Tem.   ex  Lin. 
(PI.  206.) 

Tringa  GLAREOLA,  Lin.  Sijst.  7iat.,  l;  p.  149  (1758) 

Tringa  ochropus,  p.  GLAREOLA,  Lin.  Si/st.  nat.  1,  p.  250  (1766). 

Trynga  littorea,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  Il,  p.  195  (1811). 

Tringa  grallatoris,  Mont.Orn.  dict.  suppl.  App.  S.  (1813). 

ToTANUS  GLAREOLA,  Temm.  3£an.  cVOrn.^  p.  421  (1815). 

ToTANUS  AFFiNis,  Horsf.  Trans.  Linn.  Soc.  XII,  p.  191  (1822). 

ToTANUS  GRALLATORIS,  Stepli.  Shaw's  Gen.  Zool.  XII,  pt.  I,  p.  146  (1824.) 

Rhyacophilus  GLAREOLA,  Kp.  Nat.  Syst..,  p.  140  (1829). 

ToTANUS  SYLVESTRis,  PALUSTRis  et  KUHLii,  Briiî,  Isis  1830,  p.  990. 

ToTANUs  GLAREOLOiDES,  Hodgs.  in  Gray,  ZqoI.  Mise.  p.   86  (1844). 

AcTiTis  GLAREOLA,  Blyth.  Ccit.  B.  Mus.  As.  Soc.   p.  167  (1849). 

Rhyxchophilus  GLAREOLA,  Brm.  et  Paessl.  Eier  cl.  Eur-Voeg,  texte  de  la  pi.  30  (1863 

ToTANUs  GLAREOLas,  Rosenb.  Reist.  naar  Geelvinkl.  p.  8  (1875). 

Der  Bruch-Wasserlaufer,  en  allemand. 

The  Wood-Sandpiper,  en  anglais. 

De  Boschruiter,  en  flamand. 

Taille:  O'^IT;  ailes  0,122;   bec  0,028;  tarses  0,38. 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  Parties  siipéi-ieures  d'un  brun 
noirâtre  et  marquées  de  stries  blanches  sur  la  tête  et  à  la  nuque  et  de  taches 
marginales  blanches  sur  le  dos  et  sur  les  scapulaires  ;  bas  du  dos  noirâtre  ; 
raie  sourcilière  et  côtés  de  la  tête  blancs,  ces  derniers  tachetés  de  brun 
lorums  bruns  ;  parties  inférieures  blanches  ;  devant  et  côtés  du  cou  avec 
des  taches  allongées  brunes;  côtés  de  la  poitrine  variés  de  cendré  et  marqués 
de  taches  brunes  ;  flancs  avec  des  taches  transversales  de  même  couleur  mais 
moins  nombreuses  ;  couvertures  des  ailes  brunes,  les  plus  rapprochées  des 
scapulaires  tachées  do  blanc  ;  rémiges  brunes,  la  baguette  de  la  première 
blanche  ;  croupion  et  sus-caudales  d'un  blanc  pur,  les  plus  longues  des  der- 
nières tachées  de  brun  à  leur  extrémité;  queue  blanche  barrée  de  brun  noi- 
râtre ;  sous-caudales  blanches,  les  plus  latérales  avec  une  strie  brune  plus 
ou  moins  large.  Bec  noir:  iris  brun;  pattes  d'un  vert  olive  tirant  plus  ou 
moins  sur  le  cendré. 

Les  deux  sexes  en  hiver.  —  Ressemblent  beaucoup  aux  sujets  en  plumage 
d'été,  mais  les  taches  blanches  des  parties  supérieures  sont  plus  grandes  et 
souvent  lavées  légèrement  de  roussâtre,  surtout  sur  la  tête  et  à  la  nuque;  les 
parties  latérales  et  antérieures  du  cou  sont  davantage  lavées  et  ondulées 


208  — 


de  cendré  fauve  et  moins  tachées;  les  flancs  sont  également  moins  marqués 
de  brun. 

Jeune.  —  Ressemble  à  l'adulte  en  hiver,  dont  il  diffère  surtout  par  le 
dessus  de  la  tête  et  la  nuque  d'un  brun  noir  avec  les  plumes  finement  bordées 
de  blanchâtre  ;  par  les  autres  parties  supérieures  d'un  brun  noir  avec  de 
légers  reflets  verts  et  pourpres,  et  de  nombreuses  taches  triangulaires  et 
allongées  d'un  roux  jaunâtre  passant  par-ci  par-là  au  blanc. 

Poussin.  —  Dessus  de  la  tête  noir  avec  une  raie  centrale  blanchâtre  ;  face, 
côtés  du  cou  et  une  large  raie  sourcilière  se  terminant  à  la  nuque,  d'un  blanc 
varié  de  fauve  ;  une  strie  au  milieu  du  front,  lorums,  une  grande  tache  cou- 
vrant la  région  parotique  et  milieu  de  la  nuque,  noirs  ;  parties  dorsales  d'un 
fauve  varié  de  roussâtre,  avec  trois  bandes  longitudinales  noires,  dont  celle 
du  milieu  est  la  mieux  marquée  ;  ailes  blanchâtres  avec  une  grande  tache 
noire  ;  flancs  et  partie  caudale  noirs  variés  de  fauve  ;  parties  inférieures 
blanches. 

Hab.  —  On  rencontre  le  Chevalier  sjlvain  dans  toute  l'Europe 

jusqu'au  70°  l.-N.  (Wallengren), 
mais  il  est  rare  dans  certaines 
régions,  par  exemple  en  Belgi- 
que, où  on  en  voit  cependant 
chaque  année,  au  passage  d'avril, 
dans  les  marais  des  environs  de 
Burght  ;  il  se  montre  aussi,  mais 
accidentellement, dans  les  marais 
delaCampine.  Il  est  sédentaire  (?) 
et  niche  régulièrement  dans  le  département  des  Pyrénées-Orientales 
{Lac7^oix)  ;  de  passage  en  Espagne,  mais  quelques  couples  s'y  repro- 
duisent {Saunders)  ;  il  en  est  de  même  en  Italie  {Giglioli,  Vallon).  La 
Grèce. paraît  être  le  seul  pays  de  l'Europe  où  cette  espèce  hiverne 
régulièrement  {Lindermayer). 

Cet  oiseau  hiverne  principalement  dans  le  nord  et  le  nord-est  de 
l'Afrique  et  probablement  dans  tout  le  continent  noir,  car  il  a  été  ren- 
contré en  Palestine  {Trùiram),  en  Egypte,  en  Nubie,  en  Abyssinie, 
au  Kordofan  {de  Heuglin),  en  Sénégambie,  à  la  Côte  d'Or  {Schlégel), 
à  Casamanze,  au  Gabon  [Verreaux),  à  Benguela  (Dresser),  à  Damara 
{Anderson),  au  Cap  {Layard),  à  Natal  {Ayres)  et  au  Zambèze  [Kirk). 
En  Abyssinie  il  a  été  rencontré  près  de  mares  situées  à  10.000  pieds 
d'altitude. 

Il  est  également  répandu  dans  toute  l'Asie  jusqu'au  70°  1.  N. 
[Middendorff),  au  Japon  [Siehold)   et   au    Kamtchatka  {Kittlitz).  Il 


—  209  - 

hiverne  dans  les  contrées  méridionales  :  l'Asie  Mineure  (Kriiper),  la 
Perse,  le  Beloutchistan  {Blanford,  St-John),  l'Inde  {Jerdon),  Geylan 
{Leggé),  Tempire  Birman  {Wardlaio-Ramsay),  Malacca  {Mus.  Bruœ.) 
et  le  sud  de  la  Chine  [David)-  Il  pousse  parfois  ses  migrations  jus- 
qu'aux Philippines  {Cuming,  Everett),  les  îles  Andaman  {Wardlaw- 
Ramsay),  Bornéo,  Java  {S.  Miiller,  Mottley),  Timor  {Wallacé), 
Togian,  Célèbes  [Meyer),  Ternate,  Goram  [von  Rosenherg)  et 
Amboine  {Forsten). 

Mœurs.  —  Le  Chevalier  sjlvain  émigré  des  contrées  du  Nord  dans 
la  seconde  quinzaine  d'août^  mais  l'on  remarque  des  passages  jusque 
vers  la  fin  de  septembre.  Les  émigrants  entraînent  parfois  ceux  de 
leur  espèce  qu'ils  rencontrent  sur  leur  route  et  finissent  par  former  des 
bandes  de  plus  de  cent  sujets  ;  mais  d'ordinaire  les  troupes  sont  moins 
nombreuses  et  formées  parfois  d'une  dizaine  d'individus  seulement. 
Au  printemps  les  passages  ont  lieu  du  15  avril  à  la  fin  de  mai.  Ces 
oiseaux  voyagent  pendant  la  nuit  et  volent  alors  généralement  très 
haut,  faisant  retentir  l'air  de  leurs  cris. 

Le  nom  de  sylcain  conviendrait  mieux  au  T.  ochropus  qu'à  l'espèce 
qui  nous  occupe,  car  celle-ci  ne  se  montre  qu'exceptionnellement  près 
des  bois  et  ne  se  perche  que  rarement  sur  les  arbres  ;  M.  Seebohm  dit 
cependant  avoir  tué,  dans  la  vallée  de  la  Petchora,  un  Chevalier  Syl- 
vain qui  se  tenait  sur  un  mélèze  mort  à  plus  de  60  pieds  de  hauteur, 
d'où  il  lançait  ses  notes  joyeuses.  Il  est  cependant  certain  que  cet 
oiseau  doit  surtout  son  nom  à  la  confusion  des  deux  espèces  ;  certains 
auteurs  disent  encore  de  nos  jours,  d'après  les  anciens  ouvrages, 
que  le  Chevalier  Sylvain  niche  parfois  sur  les  arbres  dans  des  nids 
abandonnés.  Il  est  cependant  bien  prouvé  aujourd'hui  que  le  Cul-blanc 
{T.  ochropus)  est  le  seul  Chevalier  qui  niche  sur  les  arbres. 

Le  Chevalier  sylvain  recherche  de  préférence  les  grands  marais 
découverts,  mais  on  le  rencontre  aussi  près  des  lacs,  des  étangs  et 
des  rivières  si  leurs  bords  ne  sont  pas  trop  ombragés  par  des 
arbres  ;  il  est  probable  qu'il  visite  parfois  aussi  les  grandes  mares 
et  les  étangs  qui  se  trouvent  sur  les  lisières  des  bois.  On  le  voit 
souvent  dans  les  lieux  fréquentés  par  des  Combattants  et  des  Che- 
valiers gambettes. 

Par  son  attitude  et  sa  démarche,  cet  oiseau  ressemble  à  la  plupart 

de  ses  congénères,    dont  on   peut  facilement  le  distinguer  de  loin  à 

sa  petite  taille.  Son  naturel  est  gai,  leste  et  agile  ;  quand  on  s'en 

approche  et  qu'il  vous  a  aperçu,  il  reste  d'abord  quelques  instants  à 

Tome  II.  —1889,  27 


—  210  — 

vous  observer,  puis  s'élève  obliquement  et  s'envole  droit  devant  lui 
avec  la  rapidité  d'une  flèche.  Il  est  rare  de  le  voir  raser  l'eau  ou  le 
sol,  car  il  s'élève  de  suite  à  une  assez  grande  hauteur  et  se  laisse  des- 
cendre presque  verticalement  dans  l'endroit  où  il  veut  s'arrêter.  Il  est 
assez  sociable  mais  ne  recherche  que  la  société  de  ses  semblables  ;  si 
le  hasard  le  met  en  présence  d'autres  oiseaux  de  rivage,  il  ne  se 
mêle  point  à  eux,  reste  avec  les  siens  et  ne  tarde  point  à  s'éloigner 
des  autres  ;  c'est  avec  le  Chevalier  gambette  qu'il  s'entend  encore  le 
mieux,  mais  les  deux  espèces  ne  restent  jamais  longtemps  ensemble. 

Les  Chevaliers  sylvains  se  montrent  toujours  très  farouches,  et  plus 
ils  sont  nombreux,  plus  ils  sont  craintifs.  Comme  ils  se  tiennent  tou- 
jours dans  des  endroits  découverts  et  qu'il  leur  est  ainsi  facile  d'aper- 
cevoir de  loin  le  danger  qui  les  menace,  ils  peuvent  s'envoler  avant 
qu'on  soit  à  portée  de  fusil.  Leur  cri,  d'après  Naumann,  est  clair  et 
sonore  et  peut  se  rendre  par  guiff  guiff  guiff,  oujiffjiff;  c'est  surtout 
en  volant  qu'ils  se  font  entendre;  M.  Seebohm  rend  leur  cri  par 
til-il~il  et  le  cri  d'alarme  par  tyii.  Leur  nourriture  se  compose  de 
larves  et  d'insectes  aquatiques,  de  vers  et  de  petits  mollusques  avec 
ou  sans  coquille  qu'ils  cherchent  généralement  dans  la  vase. 

Reproduction.  —  Naumann  nous  apprend  que  cet  oiseau  niche  à 
partir  du  centre  et  du  nord  de  l'Allemagne;  suivant  M.  Seebohm,  des 
œufs  authentiques  auraient  été  trouvés  en  Angleterre  parM.  Hancock, 
le  3  juin  1853,  mais  il  est  probable  que  ce  n'est  pas  un  cas  excep- 
tionnel; nous  avons  vu  plus  haut  que  des  couples  isolés  nichent 
également  dans  certaines  contrées  du  Midi,  probablement  dans  les 
régions  élevées.  Le  nid  est  toujours  si  bien  caché  qu'on  ne  le  découvre 
le  plus  souvent  que  par  hasard.  Il  est  placé  soit  dans  un  marais, 
soit  dans  un  pré.  mais  jamais  loin  de  l'eau  et  fréquemment  dans  le 
voisinage  d'un  saule  rabougri  sur  lequel  l'oiseau  va  quelquefois  se 
percher. 

Ce  nid  consiste  en  une  simple  dépression  garnie  de  brins  ou  de 
quelques  feuilles  de  graminées.  La  ponte  a  lieu  vers  la  fin  de  mai  ou 
en  juin  et  se  compose  de  quatre  œufs.  Ceux-ci  sont  d'un  vert  olivâtre 
tirant  parfois  sur  le  brunâtre,  avec  des  taches  et  des  points  gris,  roux 
et  noirâtres,  généralement  plus  nombreux  vers  le  gros  bout;  ils 
mesurent  environ  40  millim.  sur  27. 

La  durée  de  l'incubation  est  de  quatorze  à  seize  jours.  Les  poussins 
quittent  leur  nid  dès  qu'ils  sont  bien  séchés  et  suivent  aussitôt  leur 
mère  qui  leur  témoigne  les  soins  les  plus  affectueux. 


—  211  — 


207.  —  Le  Chevalier  cul-blanc 
TOTANUS  OCHROPUS   Tem.  ex  Lin. 

(PL  207.) 

Tringa  OCHROPUS,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  250  (1766.) 

ToTANUs  OCHROPUS,  Tem.  Man.  d'orn.  p.  420  (1815.) 

Helodromas  OCHROPUS,  Kp.  Nat.  Syst.  p.  144  (1829.) 

ToTANUs  RivALis  et  LEUCUROS,  Brm.  Isis.,  1830,  p.  990. 

ToTANUS  PUNCTULATUS,  G.  Dub.  PI.  col.  ois.  Belg.  II,  p.  186  (1857.) 

AcTiTis  OCHROPUS,  Jei'd.  B.  India  III,  p.  698  (1863.) 

Der  punktirte  Wasserlaufer,  en  allemand, 

The  green  Sandpiper,  en  anglais. 

Het  Witgatje,  en  flamand. 

Taille:  0,18;  ailes  0,14;  bec  0,033;  tarses  0,036. 

Description  des  deux  sexes  en  été.  —  Parties  supérieures  d'un  brun  olivâtre 
à  reflets,  avec  des  stries  blanchâtres  sur  la  tête  et  surtout  à  la  nuque,  et  de 
nombreuses  petites  taches  blanches  sur  les  bords  et  à  l'extrémité  des  plumes 
du  manteau  et  des  ailes  ;  une  raie  blanche  entre  le  bec  et  l'œil  au-dessus  des 
lorums,  ces  derniers  pointillés  de  brun  ;  joues  blanches  striées  et  pointillées 
de  brun  ;  parties  inférieures  d'un  blanc  pur,  avec  des  taches  brun-olive  au 
cou  et  à  la  poitrine,  la  teinte  brune  dominant  même  sur  les  côtés  de  cette 
dernière  ;  croupioli  et  sus-caudales  blancs  ;  queue  blanche  avec  cinq  larges 
bandes  transversales  brunes,  mais  diminuant  en  nombre  et  en  étendue 
jusqu'à  la  plus  externe,  qui  est  à  peine  marquée  d'une  petite  tache  près  de 
son  extrémité  externe;  rémiges  noirâtres,  toutes  les  baguettes  brunes.  Bec 
noir,  verdâtre  à  la  base  de  la  mandibule  inférieure;  iris  brun;  pattes  d'un 
gris  ardoise,  verdâtres  aux  articulations. 

Eîi  hiver.  —  Dans  cette  saison,  l'oiseau  ne  diffère  presque  pas  du  plumage 
d'été  :  les  stries  du  dessus  de  la  tête  et  de  la  nuque  disparaissent  presque 
entièrement  et  les  taches  blanches  du  manteau  et  des  ailes  deviennent  plus 
petites  et  d'un  blanc  plus  sombre.  Les  sexes,  en  toutes  saisons,  n'offrent 
aucune  différence. 

Jeune.  —  Se  distingue  de  l'adulte  en  hiver  par  la  coloration  des  parties 
supérieures  qui  est  plus  sombre,  et  les  taches  qui  sont  rousses  et  non 
blanches. 

Poussin.  —  Front  blanc  avec  des  taches  noires  ;  dessus  de  la  tête,  lorums 
et  un  trait  derrière  l'œil  noirs  ;  joues  blanchâtres  ;  les  autres  parties  supé- 
rieures d'un  roux  rougcâtre  soral)re  varié  do  noir;  une  bande  dorsale  et  une 
autre  sur  les  flancs  noires;  régions  inférieures  blanches. 


—  212  — 


Hab. 


Ce  Chevalier  est  répandu,  en  été,  dans  le  nord  de  l'Europe 

et  de  l'Asie  jusqu'au  cercle 
polaire,  et  niche  à  partir  du  nord 
de  l'Allemagne.  Il  est  de  passage 
régulier  aux  îles  Britanniques 
et  dans  l'Europe  centrale.  En 
Belgique  il  est  assez  abondant 
près  des  eaux  douces  lors  des 
passages,  c'est-à-dire  en  avril 
ainsi  qu'en  août  et  septembre. 
Il  hiverne  dans  le  midi  de  l'Europe,  en  Asie  Mineure  [Kruper)  et  en 
Palestine  [Trish^am).  Il  arrive  en  Egypte  en  août  et  septembre  et  on 
le  voit  alors  le  long  du  Nil  et  de  ses  affluents  et  dans  les  terrains 
inondés,  mais  peu  sur  les  côtes  de  la  mer  Rouge;  il  se  montre  aussi 
en  Nubie,  en  Abyssinie  et  dans  les  régions  marécageuses  de  l'Abiad 
jusqu'au  8°  1.  N.;  il  disparaît  de  ces  pays  en  mars  et  au  commence- 
ment d'avril  [de  Heuglin).  Cet  oiseau  hiverne  également  dans  le  nord 
de  l'Afrique  {Loche,  Favier),  à  la  Côte  d'Or  {Shclley),  à  Angola  {Mon- 
teiro),  au  Gabon  {Schlégel),  et  il  est  même  abondant  au  sud  de 
V Afrique  [Layar cl);  d'après  M.  Seebohm,  on  le  rencontre  en  hiver 
dans  toute  l'Afrique. 

Cet  oiseau  niche  également  dans  les  parties  septentrionales  de 
l'Asie  jusqu'au  delà  de  l'Amour  [von  Schrenk)  et  au  Japon  [Siehold). 
Il  hiverne  en  Perse  [De  Philippi),  dans  le  Beloutchistan  [Blanford), 
dans  l'Inde  i^Jerdon),  à  Ceylan  {Schlégel),  en  Chine  [David),  à  For- 
mose  [Swinhoe)  et  dans  l'Indo-Chine  [Dy^esser,  etc.) 

Mœurs.  —  Lors  de  la  migration  d'automne,  cet  oiseau  séjourne 
souvent  des  semaines  entières  dans  les  endroits  qui  lui  conviennent, 
ce  qui  fait  qu'on  le  voit  parfois  jusqu'à  la  fin  de  septembre.  Il  voyage 
toujours  pendant  la  nuit,  s'arrête  souvent  quelques  moments  près  des 
eaux  qu'il  rencontre,  mais  ne  tarde  guère  à  continuer  son  voyage 
jusqu'à  l'aurore;  alors  il  s'abat  dans  un  endroit  à  sa  convenance  et 
y  séjourne,  s'il  n'y  est  pas  inquiété,  jusqu'au  coucher  du  soleil.  Il 
est  à  remarquer  qu'au  printemps  il  fait  des  stations  bien  moins 
longues  qu'en  automne,  car  alors  il  a  hâte  d'arriver  aa  lieu  de  la 
reproduction.  Les  migrations  ont  lieu  par  individus  isolés  ou  par 
couples,  rarement  par  volées  de  six  à  huit  individus,  et  jamais  en 
troupes  plus  nombreuses. 

Le  Chevalier  cul-blanc  n'aime  ni  les  bords  de  la  mer,  ni  ceux  des 


-  213  — 

grands  lacs  et  des  fleuves  découverts  et  ne  s'y  montre  qu'exception- 
nellement ;  ce  qu'il  recherche,  ce  sont  les  marais,  les  étangs  et  toutes 
les  eaux  abondamment  pourvues  de  roseaux,  de  joncs,  de  buissons,  de 
grands  herbages  ou  bordées  d'arbres  ;  on  le  voit  même  dans  les  bois 
prés  des  mares  et  des  fossés  inondés.  Il  ne  visite  les  eaux  découvertes 
que  pendant  les  migrations  et  seulement  durant  la  nuit.  Sa  démarche 
esL  gracieuse  et  mesurée  ;  il  ne  court  que  rarement,  mais  hâte  le  pas 
chaque  fois  qu'il  s'agit  de  saisir  une  proie  se  montrant  à  proximité.  Il 
nage  bien,  mais  jamais  sans  nécessité,  et  quand  il  est  poursuivi  il 
peut  au  besoin  plonger  et  rester  sous  l'eau  pendant  quelques  instants. 
Son  vol  est  gracieux  extrêmement  rapide  et  l'oiseau  sait  franchir 
un  grand  espace  sans  mouvoir  ses  ailes  d'une  manière  visible.  Son 
maintien  comme  ses  allures  ressemblent  beaucoup  à  ce  que  l'on  voit 
chez  les  autres  espèces  du  même  genre,  mais  il  aime  les  endroits 
ombragés,  perche  fréquemment  sur  des  arbres  et  n'est  pas  sociable 
du  tout.  Il  vit  seul,  évite  autant  ses  semblables  que  les  autres  petits 
échassiers,  et  il  est  rare  de  voir  un  couple  ensemble  en  dehors  de  l'épo- 
que de  la  reproduction.  Môme  les  jeunes,  qui  voyagent  parfois  par 
volées  de  six  à  huit  individus,  se  dispersent  sur  un  grand  espace  dès 
qu'ils  prennent  terre,  mais  ils  se  réunissent  de  nouveau,  en  s'appelant 
les  uns  les  autres,  quand  l'heure  du  départ  est  arrivée. 

D'un  naturel  farouche  et  prudent,  il  sait  reconnaître  l'ennemi  de 
loin  et  l'éviter  à  temps  ;  seulement,  comme  cet  oiseau  se  tient  d'habi- 
tude entre  les  herbages,  il  lui  arrive  parfois  de  ne  pas  apercevoir  le 
chasseur  qui  s'approche  et  d'être  surpris  à  l'improviste  ;  alors,  si  la 
chose  est  encore  possible,  il  fuit  en  silence  entre  les  herbes  et  les  buis- 
sons jusqu'à  ce  qu'il  arrive  à  un  endroit  découvert,  puis  il  s'envole  à 
tire-d'aile,  et  ce  n'est  qu'à  ce  moment  qu'il  fait  entendre  son  cri  stri- 
dent de  détresse  :  dih  !  dih  !  —  La  voix  de  ce  Chevalier  est  agréable, 
sonore,  sifflante  et  argentine,  et  peut  se  rendre,  d'après  Naumann, 
par  dluidluidlui,  les  syllabes  se  succédant  avec  rapidité  quoique  bien 
vocalisées.  C'est  le  soir,  et  surtout  en  volant,  que  l'oiseau  se  fait 
entendre,  et  son  chant  vient  ranimer  d'une  façon  charmante  le  calme 
des  soirées  d'été.  A  terre  il  jette  parfois  aussi  le  CTiàe  dick,  dick. 
Sa  nourriture  est  la  même  que  celle  des  autres  petits  échassiers  : 
insectes  et  larves  aquatiques  et  terrestres,  araignées,  vers,  etc., 
mais  c'est  principalement  dans  la  vase  qu'il  cherche  sa  proie. 

Reproduction.  —  C'est  dans  sa  manière  do  nicher  que  le  Chevalier 
cul-blanc  se  distingue  de  tous  ses  congénères  ;  au  lieu  de  mettre  ses 


—  214  — 

œufs  à  terre  dans  une  petite  excavation,  comme  le  font  les  autres 
oiseaux  de  son  genre,  il  les  dépose  sur  des  arbres  ou  des  arbustes  dans 
des  nids  abandonnés  d'autres  oiseaux  et  même  d'écureuils,  ou  simple- 
ment sur  un  lit  de  feuilles  mortes,  de  mousse  ou  de  lichens  se  trouvant 
par  hasard  dans  la  bifurcation  des  grosses  branches  d'an  arbre. 

C'est  à  W.  Hintz  que  l'on  doit  les  premiers  renseignements  précis 
sur  le  mode  de  nidification  de  cette  espèce.  Ses  observations  datent 
de  1818,  où  il  trouva  dans  le  Mecklembourg  les  premiers  œufs  de  cet 
oiseau  ;  mais  ce  n'est  qu'à  partir  de  1852  qu'il  porta  réellement  son 
attention  sur  la  manière  de  pondre  de  cette  espèce.  Depuis  cette  épo- 
que jusqu'en  1862,  il  découvrit  un  grand  nombre  d'œufs  de  Chevaliers 
cul-blanc,  et  presque  toujours  dans  des  nids  abandonnés  de  grives  ; 
deux  fois  cependant,  il  en  trouva  dans  des  nids  de  Tourterelles,  une 
fois  dans  un  nid  dePie-grièche  [L.  collurio)  et  une  fois  dans  celui  d'un 
Ecureuil.  Presque  toutes  les  couvées  observées  par  Hintz  se  trou- 
vaient à  une  distance  d'environ  trois  pas  de  l'eau  et  à  une  hauteur  de 
trois  à  six  pieds.  Cependant,  le  10  mai  1861,  il  trouva  sur  un  bouleau,  à 
environ  trente  pieds  de  hauteur,  un  vieux  nid  d'écureuil  contenant  trois 
poussins  à  peine  éclos  et  un  œuf  sur  le  point  d'éclore.  Les  poussins 
sautèrent  du  nid  sans  se  faire  de  mal  et  allèrent  se  cacher  dans  l'herbe. 

D'autres  observateurs  ont  encore  trouvé  des  œufs  de  cet  oiseau  dans 
des  nids  abandonnés  de  Geais  et  de  Corneilles,  mais  surtout  dans  des 
nids  de  Merles  et  de  Grives  chanteuses,  draines  et  litornes.  Ces  œufs 
sont  pjriformes,  à  écaille  lisse  et  peu  luisante,  de  couleur  roussâtre  ou 
d'un  blanc  verdâtre,  avec  de  petites  taches  et  des  points  d'un  gris 
violacé,  roux  et  bruns,  mais  ceux  de  cette  dernière  couleur  sont  les 
plus  nombreux.  Ils  mesurent  40  millim.  sur  29  environ. 

GENRE  CXVII 

GUIGNETTE.  —  ACTITIS. 

Tringa,  Briss.  OrnUh.  V,  p.  183(1760). 
AcTiTis,  lUig.  Prodr.  tnam.  et  av.  p.  262  (1811). 
ToTANUS,  Tem.  Man.  d'orn.  p.  424  (1815). 
Tringoides,  Bp.  Sagff.  distr.  met.  p.  58  (1831). 
GuiNETTA,  Gray,  List  gen.  B.  p.  68  (1840). 

Car.  —  Ce  genre  est  très  voisin  du  précédent,  dont  il  diffère  par  un  bec 
plus  court,  seulement  un  peu  plus  long  que  la  tête,  et  plus  robuste  ;  une  queue 
ample,  assez  longue  et  dépassant  les  ailes;  des  tarses  moins  longs. 

Hab.  —  Les  oiseaux  de  ce  genre  sont  cosmopolites. 


-  215  — 

208.  —  La  Guignette  vulgaire. 
ACTITIS  GUINETTA  {BHss). 

(PI.  208) 

Tringa  GUINETTA,  Bi'iss.  Om.  V.  p.  183(1760), 

Tringa  hypoleucos,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  250  (1766). 

Trynga  GUINETTA  et  LEucoPTERA,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  II,  pp.  195-96  (1811). 

ToTANUS  HYPOLEUCOS,  Tem.  Man.  d'orn.  p.  424  (1815). 

TOTANUS  GUINETTA,  Leach,  Syst.  cat.  mam.  B.  Br.  Mus.  p.  30  (1816). 

AcTiTis  HYPOLEUCUS,  Boie,  Isis,  1822,  p    560. 

ACTITIS  CINCLUS  et  STAGNATILIS,  Brm.  /st5,  1830,  P-  990. 

Tringoides  HYPOLEUCUS,  Bonap .  Sagy.  distrib.  metod.  p.  58  (183 Ij. 

GuiNETTA  HYPOLEUCA,  Gray,  List  gen.  B.  p.  68  1840). 

AcTiTis  EMPUSA,  Gould,  Proc.  zool.  Soc.  1847,  p.  222. 

AcTiTis  MEGARHYNCHOS,  Brm.   Vogelf.p.  314(1855). 

AcTiTis  scHLEGELi,  Bonap.  Comptes,  rend.  t.  XLIII,  p.  597  (1856). 

Tringoides  empusa,  Sclat.  Journ.  Proc.  Lin.  Soc.  II,  p.  170  (1858). 

ToTANUS  empusa,  Gray,  Cat.  B.  N.  Guinea,  p.  52  (1859). 

Der  Fluss-Uferlaufer,  en  allemand. 

The  common  Sandpiper,  en  anglais. 

De  Oeverlooper,  en  flamand. 

Taille:  0,15;  ailes  0,106;  bec  0,027;  tarses  0,025. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes.  —  Parties  supérieures  d'un  brun 
olivâtre  à  reflets,  avec  une  strie  brune  au  centre  des  plumes  ;  tour  de  l'œil 
et  une  raie  entre  ce  dernier  et  le  bec  d'un  blanc  assez  pur  ;  couvertures  des 
ailes  de  la  couleur  du  dos,  mais  barrées  de  brun  et  terminées  par  un  fin 
liséré  blanchâtre,  les  plus  grandes  largement  terminées  de  blanc  ;  rémiges 
brunes,  la  deuxième  et  les  suivantes  avec  une  grande  tache  blanche 
sur  la  barbe  interne  ;  côtés  du  cou  et  de  la  poitrine  lavés  et  striés  de  brun 
olivâtre  ;  couvertures  de  la  queue  barrées  comme  celles  des  ailes  mais  d'une 
manière  moins  apparente  ;  parties  inférieures  d'un  blanc  pur  ;  rectrices 
médianes  d'un  brun  ohvâtre,  les  latérales  blanches  avec  des  raies  irrégulières 
brunes.  Bec  brun  avec  la  base  de  la  mandibule  inférieure  roussâtre  ;  iris 
brun  ;  pattes  d'un  gris  verdâtre,  couleur  chair  aux  articulations. 

Jeune.  —  Même  coloration  que  l'adulte,  mais  les  plumes  du  manteau,  du 
dos,  les  scapulaires,  les  couvertures  des  ailes  et  les  rectrices  bordées  de  cen- 
dré roussâtre,  et  ces  bordures  sont  divisées  par  des  taches  noirâtres  ou 
brunes,  ce  qui  donne  à  ces  parties  l'apparence  d'être  rayées  en  zigzag  de  roux 
et  de  brun. 

Poussin.  —  Tête  et  parties  supérieures  d'un  gris  roussâtre  finement  maculé 
de  noir  ;  bande  médiane  de  cette  couleur  descendant  du  vertex  au  bas  le  la 
nuque  ;  de  chaque  côté  de  la  tête  un  trait  noir  commençant  derrière  les 


—  216  - 


narines  et  traversant  le  lorum,  l'œil  et  la  région  auriculaire  jusqu'à  la  nuque  ; 
bande  diffuse  de  cette  couleur  sur  l'épine  dorsale  ;  dessus  du  cou  d'un  gris 
rembruni  à  la  base  et  à  l'extrémité  du  duvet  ;  plumeau  caudal  varié  de  noir 
et  de  roux  ;  toutes  les  parties  inférieures  d'un  blanc  pur  ;  bec  brun,  plus  pâle 
à  la  base  de  la  mandibule  inférieure  ;  pieds  d'un  gris  verdâtre  ;  iris  brun. 
(J.  Vian). 

Hab.  —   La  Guignette   vulgaire  a  une  aire  de  dispersion  très 

étendue,  comprenant  l'Europe, 
l'Afrique,  l'Asie  et  TOcéanie. 
Elle  habite  en  été  toute  la  zone 
de  l'ancien  monde  qui  s'étend  à 
peu  près  du  42°  l.  N.  au  cercïe 
polaire,  mais  elle  est  toujours 
plus  abondante  dans  les  parties 
WX\  septentrionales  ;  elle  n'a  été  ob- 
servée   ni    en    Islande,    ni   au 


M 


Groenland.  Elle  est  commune  aux  îles  Britanniques,  y  compris  les 
îles  Orkneys,  Shetland  et  Hébrides.  En  Belgique  elle  arrive  dans  la 
seconde  quinzaine  d'avril  et  niche  sur  les  îlots  de  l'Escaut  et  de  la 
Meuse  ;  elle  est  de  passage  plus  ou  moins  régulier  dans  les  autres 
parties  du  pays.  Cet  oiseau  est  sédentaire  à  partir  du  midi  de  l'Es- 
pagne {Saunclers),  de  la  Sardaigne  {Giglioli),  de  la  Sicile  {Malherbe) 
et  de  la  Grèce  [Lindermayer). 

Il  serait  trop  long  d'énumérer  toutes  les  contrées  de  l'Afrique  et  de 
l'Asie  où  cet  oiseau  a  été  observé,  car  il  se  montre  presque  partout  ; 
dans  l'Afrique  australe  on  l'a  capturé  jusqu'au  Cap,  au  Transvaal  et 
au  Zambèze  ;  il  est  aussi  commun  à  Madagascar  que  chez  nous  et  se 
montre  également  aux  îles  Comores,  Seychelles,  Mascareignes,  Cana- 
ries, Madère,  Açores,  etc. 

En  Asie  nous  rencontrons  cette  Guignette  jusqu'au  Kamtschatka 
et  le  Japon  {Siebold),  et  elle  est  très  commune  en  hiver  dans  tout  le 
sud  de  l'Asie,  à  Ceylan  et  à  Formose. 

Dans  l'Archipel  Indien  cet  oiseau  a  été  signalé  principalement  dans 
les  îles  suivantes:  Philippines  [Cuming),  Fe]ew {Gode ff roi/),  Sumatra, 
Bornéo,  Jobi,  Arou  {Bcccari),  Bangka  {van  den  Bossche),  Labuan 
{Mottley),  Jb-yb.  {Schfégel),  Flores,  Timor  {Wallace),  Célèbes  {Meyer), 
Waigiou,  Moluques  {Bernstein),  Salawatti  {Bruyn),  Nouvelle-Guinée 
{von  Rosenberg),  Salomon  {Sclater)  et  autres  îles  voisines,  ainsi  qu'en 
Australie  et  en  Tasmanie  {Gould,  Ramsay). 


-  217  - 

Comme  on  vient  de  le  voir,  notre  Guignette  se  rencontre  presque 
partout,  sauf  en  Amérique  où  elle  est  remplacée  par  une  autre 
espèce,  dont  il  sera  parlé  plus  loin. 

Mœurs.  —  Cet  oiseau  revient  dans  l'Europe  centrale  vers  le 
17  avril  et  émigré  en  août  et  septembre.  Il  voyage  pendant  la  nuit 
par  couples  ou  par  groupes  de  cinq  à  liuit  sujets, rarement  davantage  ; 
il  arrive  cependant  parfois  que  plusieurs  groupes  se  rencontrent  et 
qu'ils  font  alors  ensemble  un  certain  trajet  jusqu'à  la  prochaine  halte, 
où  ils  se  séparent.  Il  n'est  donc  pas  très  sociable,  et  il  est  fort  rare 
de  le  rencontrer  avec  d'autres  oiseaux  de  rivage. 

On  rencontre  les  Guignettes  près  des  grands  fleuves,  des  rivières  et 
des  ruisseaux,  mais  seulement  dans  les  endroits  où  les  rives  sont  cou- 
vertes de  roseaux  et  de  buissons  ou  bordées  de  pâturages  ;  pendant  les 
migrations  on  les  voit  aussi  près  des  lacs,  des  étangs,  des  marais  et 
même  près  des  mares  en  partie  cachées  par  des  arbres  et  des  buis- 
sons. Elles  affectionnent  surtout  les  eaux  ombragées  par  des  massifs 
de  saules  sous  lesquels  elles  aiment  à  courir,  et  il  n'est  même  pas 
rare  de  les  voir  se  percher  sur  ces  arbustes. 

Les  allures  de  cet  oiseau  diffèrent  notablement  de  celles  des  vrais 
Chevaliers  :  il  tient  le  corps  dans  une  position  horizontale,  court  rapi- 
.  dément  en  trottinant  et  en  hochant  continuellement  la  queue  ;  là  où 
les  eaux  sont  couvertes  de  nénuphars,  on  le  voit  souvent  courir  avec 
légèreté  sur  les  feuilles  de  ces  plantes.  Son  vol  est  léger,  facile,  rapide 
et  recti ligne,  mais  l'oiseau  s'élève  rarement  haut,  sauf  pendant  les 
migrations;  au  besoin  il  nage  et  plonge  avec  facilité.  La  Guignette 
vit  dans  les  herbages  où  il  est  difficile  de  bien  l'observer,  bien  qu'elle 
ne  cherche  nullement  à  se  cacher.  Elle  est  cependant  prudente, 
méfiante  et  très  craintive,  ce  qui  ne  l'empêche  pas  de  s'établir  parfois 
non  loin  des  habitations  ou  près  d'un  chemin  assez  fréquenté  ;  mais 
elle  se  tient  toujours  sur  ses  gardes  et  sait  fort  bien  faire  la  dis- 
tinction entre  les  gens  qu'elle  doit  craindre  et  le  passant  inoffensif. 
Sa  nourriture  se  compose  de  larves,  d'insectes,  d'araignées  et  de 
vermisseaux. 

Le  cri  de  la  Guignette  ressemble  beaucoup  à  celui  du  Martin- 
pêcheur,  mais  il  est  plus  bas  de  ton;  c'est  un  sittlement  clair,  haut, 
perçant,  qui  peut  se  rendre  par  liididi,  hididi,  mais  son  intonation 
varie  plus  ou  moins  suivant  que  l'oiseau  est  gai,  triste,  etïrayé,  etc. 
Le  mâle  fait  entendre  à  l'époque  des  amours  une  sorte  de  trille  com- 
posée à  pou  près  des  mêmes  syllabes  mais  répétées  un  grand  nombre 

Tome  m.  —  1889.  28 


-  218  - 

de  fois,  comme  titihidi,  titihidi,  titihidi  et  ainsi  de  suite.  Ce  chant 
commence  doucement,  va  en  augmentant  d'intensité,  puis  en  dimi- 
nuant et  n'est  nullement  désagréable  à  Toreille  ;  le  mâle  ne  chante 
jamais  au  repos,  mais  en  volant  en  zigzags  autour  de  sa  compagne. 

Reproduction.  —  LaGuignette  vulgaire  niche  en  mai  dans  l'Europe 
centrale,  un  peu  plus  tard  dans  les  pays  du  Nord,  et  toujours,  paraît-il, 
près  des  rivières  ou  des  fleuves  et  dans  un  endroit  garni  de  saules,  de 
buissons  et  d'herbages.  Les  couples  arrivent  tout  formés,  choisis- 
sent un  emplacement  convenable  pour  leur  nid  et  ne  tolèrent  aucun 
autre  couple  dans  leur  voisinage  immédiat.  Le  nid  est  ordinairement 
caché  dans  un  buisson,  de  préférence  dans  un  fourré  de  saules,  et 
toujours  à  l'abri  de  la  crue  des  eaux  ;  il  consiste  en  une  petite  excava- 
tion proprement  garniede  brindilles,  de  chaumes  et  de  feuilles  mortes. 
Ce  nid  est  si  bien  caché  qu'on  a  de  la  peine  à  le  découvrir,  malgré 
l'inquiétude  que  témoignent  les  parents  et  qui  en  trahit  la  présence. 
La  ponte  est  de  quatre  œufs,  très  volumineux  par  rapport  à  la  taille 
de  l'oiseau,  pyriformes,  d'un  fauve  pâle  ou  un  peu  roussâtre,  avec 
quelques  taches  d'un  cendré  violacé  et  d'autres,  accompagnées  de 
points,  d'un  brun  roussâtre,  ordinairement  plus  nombreux  et  plus 
étendus  au  gros  bout.  Ils  mesurent  environ  36  millim,  sur  25. 

La  durée  de  l'incubation  est  de  quinze  jours;  le  mâle  et  la  femelle 
couvent  alternativement.  Quand  les  poussins  sont  bien  séchés,  leur 
mère  les  conduit  dans  les  fourrés  et  leur  apprend  à  trouver  des 
insectes  et  des  larves.  Au  bout  de  huit  jours  les  rémiges  apparaissent 
et  à  l'âge  d'un  mois  les  petits  peuvent  prendre  leur  vol. 


209.  —  La  Guigne tte  grivelée 
ACTITIS  MACULARIUS,  Boie  ex  Lin. 

(PI.  208b  ) 

Tkinga  turdus  aquaticus,  Briss.  Ornith.  V.  p.  255  (1760). 

Tringa  macularia,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  249  (1766). 

ToTANus  MACULARIUS,  Tem.  Man.  d'Orn.  p.  422  (1815). 

AcTiTis  MACULARIUS,  Boie,  Isis,  1826,  p.  979. 

Tringoides  macularia,  Gray,  Gen.  B.  III,  574  (1846). 

Tringites  MACULARIUS,  Scl.  et  Salv,  Proc.  Zool.  Soc.  1873,  p.  309. 

Tringoides  macularius,  Scl.  et  Salv.  Nomenclator  p.  146  (1873). 

Tringoides  hypoleucos,  var.  Macularius,  Ridgw.  Anv.  Lyc.  N.-Y.  X,  1874,  p.  384. 


-  219  — 

Der  Drossel-Uferlaufer,  en  allemand. 
The  Spotted  Sandpiper,  en  anglais. 
De  Gevlekte  Oeverlooper,  en  flamand. 

Taille  :  0,™155  ;  ailes  0,104  ;  bec  0,023  ;  tarses  0,025. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes.  —  Parties  supérieures  d'un  brun 
olivâtre  à  reflets  un  peu  In'onzés,  avec  des  stries  noirâtres  sur  la  tête  et  à  la 
nuque,  et  des  raies  transversales  également  noirâtres  sur  le  dos  et  sur  les 
ailes  ;  lorum  brun  ;  raie  sourcilière  et  tour  de  l'œil  blanchâtres  ;  joues  et 
côtés  de  la  poitrine  lavés  de  cendré  ;  parties  inférieures  blanches  avec  des 
taches  noirâtres  plus  ou  moins  orbiculaires  et  assez  larges,  mais  petites  et 
arrondies  à  la  gorge  ;  rémiges  brunes  terminées  par  un  fin  liséré  blanchâtre, 
la  troisième  et  les  suivantes  marquées  d'une  grande  tache  blanche  sur  la 
barbe  interne,  les  rémiges  secondaires  blanches  à  leur  base  et  à  leur  extré- 
mité ;  les  quatre  rectrices  médianes  de  la  couleur  du  dos  mais  unicolores, 
les  suivantes  de  même  couleur  mais  terminées  de  bhanc  et  barrées  de  brun 
vers  l'extrémité,  laphis  externe  blanche  extérieurement  mais  barrée  de  brun. 
Bec  brun,  jaunâtre  à  la  base  de  la  mandibule  inférieure  ;  iris  brun  ;  pattes 
d'un  jaune  rougeâtre. 

Jeune.  —  Parties  supérieures  comme  chez  l'adulte  mais  presque  unicolores, 
le  bord  des  plumes  scul(;ment  un  peu  plus  foncé;  couvertures  des  ailes 
barrées  de  brun  et  de  cendré  ;  parties  inférieures  d'un  blanc  pur,  lavées  de 
cendré  sur  les  côtés  de  la  poitrine.  —  Un  peu  plus  tard  les  taches  commen- 
cent à  se  montrer  sur  les  régions  inférieures,  et  les  raies  noirâtres  sur  le 
manteau. 

Tant  que  le  jeune  a  le  dessous  du  corps  immaculé,  il  est  fort  difficile  de 
le  distinguer  de  l'espèce  européenne. 


Ilah.  —  La  Guignette  grivelée  est  aussi  répandue  en  Amérique  que 


la  Guignette  vulgaire  l'est  dans 


^l'- 


ancien monde.  Dans  l'Amérique 
du  Nord  elle  se  montre  en  été 
•y,j  jusqu'au  cercle  polaire  ;  elle  hi- 
verne dans  le  sud  des  Etats-Unis, 
au  Mexique,  aux  Antilles,  dans 
1  '  Amérique  centrale  (  Baird , 
Coues,  Audubon,  etc.)  jusqu'au 
Brésil  {ron  Pclzcln)  et  le  Pérou 
sept(!n(ii(»iial  oii  elle  liabiLe  la  zone  monlagncuse  des  Cordillères, 
mais  rarement  la  côte  [Tschudi). 

Cet   oiseau    se   montre   accidonteUomcni  en  Europe;  M.  I[artiii,u' 


—  220  — 

signale  dix-neuf  captures  faites  aux  îles  Britanniques  (1)  ;  M.  Gurney 
trouve  ce  nombre  exagéré,  vu  qu'il  n'est  pas  prouvé  que  tous  ces 
oiseaux  appartiennent  à  l'espèce  qui  nous  occupe;  M.  Saunders  pense 
que  quatre  sujets  seulement  sont  bien  authentiques.  Il  est  cependant 
à  remarquer,  qu'à  l'époque  de  la  migration  d'automne,  les  jeunes  sont 
encore  dépourvus  de  taches  et  qu'il  est  alors  fort  difficile  de  les  dis- 
tinguer des  Guignettes  européennes  ;  il  est  certain  que  l'on  doit 
prendre  sur  notre  continent  plus  déjeunes  que  d'adultes,  mais  que 
les  premiers  passent  inaperçus.  M.  Giitke  signale  une  capture  de 
cette  espèce  à  Helgoland.  Suivant  Naumann,  quelques  sujets  auraient 
été  pris  en  Allemagne  près  du  Rhin,  du  Main  et  de  la  mer  Baltique  ; 
Borggreve  mentionne  une  capture  dans  la  Hesse.  Feu  mon  père  dit 
en  avoir  trouvé  trois,  en  mars  18-17,  chez  un  marchand  de  gibier  de 
Bruxelles  :  «  elles  étaient  encore  jeunes,  avaient  très  peu  de  taches 
et  une  était  même  immaculée  (2).  »  Il  est  à  remarquer  qu'à  cette 
époque  les  chemins  de  fer  étaient  encore  peu  étendus,  et  qu'on  ne 
voyait  sur  nos  marchés  que  des  oiseaux  pris  en  Belgique.  Il  y  a 
quelques  années  (vers  1883  ou  1884?)  un  individu  adulte  fut  tué  près 
d'Anvers;  cet  oiseau,  que  j'ai  eu  en  main,  se  trouve  dans  la  collec- 
tion de  M.  Ch.  délia  Faille,  qui  a  malheureusement  négligé  de  tenir 
note  de  la  date  de  la  capture. 

Schlégel  rapporte,  d'après  des  auteurs  italiens,  qu'une  petite  colonie 
vit  à  l'état  sédentaire  en  Italie,  dans  la  vallée  du  Pô,  et  s'y  reproduit 
régulièrement (3)  ;  plusieurs  auteurs  ont  répété  ce  fait,  mais  M.  Giglioli 
dit  que  la  Guignette  grivelée  n'a  jamais  été  prise  en  Italie  (4). 

Mœurs.  —  Les  mœurs  de  cette  espèce  ne  diifèrent  guère  de  celles 
de  la  Guignette  indigène.  Voici  ce  qu'en  dit  Wilson,  l'auteur  améri- 
cain bien  connu  (5)  : 

«  C'est  une  espèce  américaine  très  commune,  qui  arrive  en  Pen- 
sylvanie  vers  le  20  avril,  se  montrant  d'abord  le  long  des  rives  de 
nos  grandes  rivières;  à  mesure  que  la  saison  avance,  elle  se  dirige 
vers  l'intérieur  en  longeant  nos  criques  et  nos  ruisseaux.  Ces  oiseaux 
abondent  en  été  le  long  des  rivières  Schuylkill  et  Delaware   et   de 


(i)  J.  E.  Ilartiug,  Handbook  of  Brilish  Biriis,\).  139. 

(2)  Ch.  F.  Dubois,  PL  col.  des  Ois.  de  la  Belg.  II,  p.  185a. 

(3)  Schlégel,  Muséum  d'histoire  naturelle  des  Pays-Bas  {^Scolopaces)  p.  84. 

(4)  Giglioli,   Avi/aitna  italica,   p.  393   (1886). 

C5)   Alex.    Wilson,    American   Ornithology,    with    a   continuation    by    Ch.    L.    Bonaparte, 
vol.  IL  p.  350. 


—  221  - 

leurs  affluents.  Ils  se  font  remarquer  par  le  mouvement  continuel  de 
leur  queue,  môme  quand  ils  courent  à  terre,  sur  les  palissades  ou 
dans  l'eau,  et  les  jeunes,  à  peine  sortis  de  l'œuf,  montrent  déjà  une 
tendance  à  imiter  ce  mouvement. 

«  Ils  volent  ordinairement  à  une  faible  hauteur  et  en  rasant  la 
surface  de  l'eau,  leurs  longues  ailes  formant  un  angle  considérable  ; 
tout  en  volant  ils  font  entendre  le  cri  de  ouite,  ouite,  ouite  (selon  la 
prononciation  anglaise  :  loeet,  loeet,  loeet),  et  en  voltigeant  ils  se 
dirigent  rarement  en  ligne  droite  vers  le  haut  ou  le  bas  du  fleuve, 
mais  font  un  grand  détour  circulaire  s'étendant  au  loin,  pour  revenir 
insensiblement  vers  la  rive.  Ces  oiseaux  se  montrent  parfois  aussi 
près  des  marais  qui  avoisinent  la  mer  et  nichent  dans  les  champs  de 
blé  des  environs,  mais  se  mêlent  rarement  aux  autres  petits  oiseaux 
de  rivage.  Ils  nous  quittent  vers  le  milieu  d'octobre  pour  les  contrées 
du  Sud,  mais  à  ma  connaissance  ils  n'hivernent  pas  dans  les  Etats 
de  l'Atlantique.  » 

Reproduction.  —  Je  continue  la  traduction  du  texte  de  Wilson  : 
«  Vers  le  milieu  du  mois  de  mai,  les  Guigne ttes  se  rendent  dans  les 
champs  de  blé  du  voisinage  pour  y  nicher,  et  c'est  là  que  j'ai  sou- 
vent observé  et  trouvé  leur  nid.  Celui  qui  se  trouve  devant  moi 
est  composé  uniquement  de  brins  de  paille  sèche  ;  il  était  placé  dans 
un  champ  de  maïs  sur  un  terrain  élevé.  Les  œufs,  au  nombre  de 
quatre,  sont  d'une  couleur  crème  ou  d'une  nuance  d'argile  pâle, 
marqués  de  grandes  taches  noires  irrégulières  et  peu  serrées,  et 
d'autres  d'une  teinte  plus  pâle.  Ces  œufs  sont  volumineux  par 
rapport  à  la  taille  de  l'oiseau,  très  épais  au  gros  bout  et  se  terminent 
brusquement  en  pointe  à  l'autre  extrémité;  ils  mesurent  1  1/4  pouce 
de  longueur. 

«  Les  poussins  courent  avec  une  rapidité  surprenante  dès  qu'ils 
sont  sortis  de  l'œuf,  et  ils  sont  alors  couverts  d'un  duvet  couleur 
marron  terne,  marqué  d'une  seule  raie  noire  le  long  de  l'épine  dorsale 
et  d'une  autre  derrière  la  région  des  oreilles.  Leur  voix  est  faible  et 
plaintive. 

«  A  l'approche  de  quelqu'un,  les  parents  montrent  une  grande 
frayeur,  font  semblant  d'être  estropiés  et  voltigent  on  rasant  la  terre 
avec  une  difficulté  apparente.  A  la  vue  d'un  chien  cette  agitation 
augmente  encore,  et  il  est  intéressant  de;  voir  avec  quelle  adresse  la 
mère  le  détournera  de  ses  poussins  en  se  jetant  à  dilfcrentes  reprises 
devant  lui,  s'en  volant  de  quelques  pas  et  se  tenant  toujours  hors  de 


222  

sa  portée  et  dans  la  direction  contraire  de  celle  où  se  trouve  sa 
couvée  sans  défense.  Mon  vénérable  ami,  G.  Bartram^  m'a  dit  avoir 
vu  an  de  ces  oiseaux  défendre  ses  jeunes  pendant  un  temps  assez 
long  contre  les  attaques  répétées  d'un  écureuil  terrestre.  La  scène 
de  l'action  avait  eu  lieu  au  bord  d'une  rivière.  A  chaque  effort  que 
faisait  l'écureuil  pour  saisir  les  poussins  qui  se  tenaient  derrière  leur 
mère,  celle-ci  levait  ses  ailes  dans  une  position  presque  verticale, 
prenait  l'aspect  le  plus  formidable  et  s'élançait  au  devant  du  rongeur; 
celui-ci,  intimidé  par  cette  brusque  attaque  battait  en  retraite,  mais 
pour  revenir  à  la  charge  d'un  autre  côté.  Cette  lutte  inégale  durait 
bien  depuis  dix  minutes,  les  forces  de  la  pauvre  mère  commençaient 
à  s'épuiser  et  les  attaques  de  l'écureuil  devenaient  de  plus  en  plus 
fréquentes,  quand  mon  ami  vint  au  secours  de  la  petite  famille  en 
chassant  l'assaillant  dans  son  trou.   » 

SOUS-FAMILLE. 

DES  SCOLOPACINÉS.  —  SCOLOPAGINiE. 

Car.  —  Mandibule  supérieure  sillonnée  jusque  près  de  son  extrémité,  qui 
est  plus  ou  moins  flexible,  renflée,  rugueuse  et  creusée  d'avant  en  arrière  par 
un  sillon  médian  :  mandibule  inférieure  sillonnée  latéralement  et  divisée  par 
un  sillon  médian  ;  tarses  scutellés  en  avant,  réticulés  en  arrière  ;  quatre 
doigts,  les  antérieurs  le  plus  souvent  libres;  yeux  gros  et  reculés  vers  l'oc- 
ciput. 

GENRE  CXVIII. 

BÉCASSINE.  —  GALLINAGO. 

ScoLOPAX,  Briss.  Ornith.  V,  p.  298(1700). 

Gallinago,  Guerini,  Orn.  meth.  Di;j.  IV,  p.  59  (1773). 

Telmatias,  Boie,  Isis,  1826,  p.  980. 

Lymnocryptes,  Pelorychus,  Enalius,  Kp.  Naturl.  Sijst.  pp.  118-121  (1829). 

Philolimnos,  Brm.  Isis,  1830,  p.  989. 

AscALOPAx,  Keys.  et  Blas.  Wirhelth.  Eur.  p.  77  (1840). 

Car.  —  Bec  très  allongé,  parfois  double  de  la  longueur  de  la  tête,  droit, 
grêle,  arrondi,  plus  haut  que  large  à  la  base  et  l'inverse  à  l'extrémité,  qui 
est  renflée  et  pourvue  de  rugosités  ;  narines  basales,  latérales,  petites  et  ova- 
laires  ;  ailes  médiocrement  allongées,  sub-aiguës;  queue  courte,  conique,  à 
rectrices  de  largeur  variable,  résistantes  ou  flexibles  ;  partie  nue  des  jambes 
peu  étendue  ;  tarses  médiocres  ;  doigts  libres,  le  médian  uni  seulement  à 
l'externe  par  un  pli  membraneux  très  petit  ;  pouce  bien  développé  mais  ne 
reposant  sur  le  sol  que  par  son  extrémité . 

Hah,  —  Ce  genre  est  cosmopolite. 


^28  

210.  —  La  Bécassine  double. 
GALLINAGO  MEDIA,  Guer.  ex  Frisch. 

(PI.    209). 

ScoLOPAS  MEDIA,  Friscli,  Yog .  Detitschl.  pi.  228  (1763). 

Gallinago  MEDIA,  Gucr.  Ornith.  melh.  Dig.  IV,  p.  59  (1773). 

ScoLOPAX  MAJOR,  Gm.  Sysl.  nat.  I,  p.  661  (1788). 

ScoLOPAX  PALUSTRI.S,  Pall.  ZoogT.  Rosso-As.  II,  p.  173  (1811). 

Gallinago  m.uor,  Leach,  Sijst.  Cal.  etc.,  p.  31  (1816). 

Telmatias  major  et  nisoria,  Rrm.  Isis,  1830  p.  989. 

ScoLOPAx  LEUCURUS,  Swaiiis.  Fann.  bor .  Am.  Il,  p.  501  (1831). 

Gallinago  montagui,  Bp.  Comj).  list  B.  p.  52  (1838). 

AscALOPAX  MAJOR,  Keys.  et  Bl.  WirbelUi.  Eiir.  p.  78  (1840). 

ScoLOPAx  soLiTARiA,  Macg.  (iiec  Hoclgs.  )  Man.  Brit.  B.  II.  i).  102  (1842). 

Telmatias  brachyptera  et  uliginosa,  Brm.  Vogelf.  p.  305  (1855). 

Die  grosse  Sumpfschnepfe,  en  allemand. 

The  GREAT  Snipe,  en  anglais. 

De  Poelsnip,  en  flamand, 

Taille:  0™,19;  ailes  0,14;  boc  0,0G1  ;  tarses  0,011. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes.  —  Parties  supérieures  noires 
tachées  de  roux  :  dessus  de  la  tôte  noir  avec  quelques  taches  rousses  et  une 
bande  médiane  d'un  blanc  jaunâtre  ;  raies  sourcilièrcs  et  joues  d'un  blanc 
jaunâtre  tachetées  de  brun  noir  ;  lorums  de  cette  dernière  couleur;  plumes 
du  cou  et  de  la  nuque  largement  bordées  de  blanc  jaunâtre  terreux  ;  celles 
des  côtés  du  dos  et  scapulaires  bordées  de  même  et  variées  de  taches  et  de 
raies  transversales  en  zigzag  de  couleur  roussâtre  ;  bas  du  dos  et  sus-cau- 
dales bruns  barrés  de  cendré  roussâtre  ;  petites  couvertures  des  ailes 
d*un  brun  noirâtre  terminées  de  cendré  blanchâtre,  les  moyennes  terminées 
de  blanc  et  les  plus  grandes  barrées  de  cendré  roussâtre  et  terminées  de 
blanchâtre  ;  rémiges  d'un  brun  noir  avec  les  baguettes  des  premières  blan- 
ches ou  blanchâtres  et  celles  des  suivantes  brunes  ;  couvertures  des  pri- 
maires terminées  de  blanc  ;  parties  inférieures  d'un  blanc  un  peu  jaunâtre, 
mais  fortement  lavées  de  cendré  roussâtre  au  cou  et  à  la  poitrine,  et  marquées 
de  grandes  taches  transversales  brunes  ayant  plus  ou  moins  la  forme  d'un  V 
dont  les  deux  branches  seraient  très  écartées  ;  milieu  du  ventre  presque  uni- 
colore  ;  rectrices  médianes  noires  à  la  base,  largement  et  irrégulièrement  bar- 
rées de  roux  dans  leur  seconde  moitié  et  terminées  de  blanc  ;  les  quatre 
rectrices  latérales  de  chaque  côté,  blanches  avec  dou.\  ou  trois  barres  foncées 
à  la  base  des  barbes  externes.  Iris  brun  ;  boc  rougeâtre,  brun  à  sou  extré- 
mité ;  pattes  d'un  cendré  rougeâtre. 

11  n'y  a  pas  de  différence  entre  les  sexes,  mais  la  femelle  est  ordinairement 
un  peu  plus  grande  que  le  niAlo. 


—  224 


En  automne  les  teintes  sont  généralement  plus  foncées  et  l'oiseau  est 
moins  coloré  ;  les  plumes  des  ailes  sont  noires,  ce  qui  fait  davantage  res- 
sortir les  bords  blancs. 

Jeune.  —  Ne  diffère  presque  pas  des  adultes  en  automne  ;  les  parties  infé- 
rieures sont  plus  blanches,  le  blanc  des  ailes  est  moins  étendu  et  moins  pur. 

Poussin.  —  Fond  de  la  robe  d'un  gris  fauve,  teinté  de  roux  assez  vif  aux 
parties  supérieures,  un  peu  rembruni  à  la  poitrine;  sur  la  tête  une  bande 
longitudinale  noire  du  bec  à  la  nuque  ;  sur  les  côtés  une  bande  sourcilière 
blanche  et  deux  traits  noirs,  épanouis  et  réunis  sur  la  région  auriculaire, 
dont  l'un  traverse  le  lorum  et  l'œil,  et  l'autre  forme  demi  cercle  au-dessous  ; 
dos  et  dessus  des  ailes  absorbés  en  partie  par  des  taches  et  des  bandes  noires, 
mais  rehaussés  par  un  semis  de  petits  flocons  blancs.  Bec  et  pieds  gris  de 
plomb.  (/.  Vian). 

Haï).  —  L'aire  géographique  de  celte  espèce  est  fort  remarquable  : 

en    été   elle  s'étend    depuis    la 


Scandinavie  jusqu'à  la  vallée  du 
Jenesay,  et  en  hiver  elle  se  réduit 
au  bassin  de  la  Méditerranée  et 
au  continent  africain.  Cette 
Bécassine  niche  donc  dans  le 
nord  et  surtout  dans  le  nord- 
est  de  l'Europe,  ainsi  que  dans 
l'ouest  de  la  Sibérie  et  dans  les 
régions  élevées  du  Caucase  où  elle  atteint  souvent  une  altitude  de  plus 
de  6000  pieds  (Radcle)  ;  elle  niche  également  dans  les  parties  maréca- 
geuses de  la  Bessarabie  {fie  Norchnann).  Dans  le  nord  de  l'Europe  on 
la  rencontre  jusqu'au  70°  1.  N.;  dans  les  vallées  de  la  Petchora  et  de 
rOb  elle  ne  dépasse  guère  le  67  1/2",  et  dans  la  vallée  de  Jenesay  on 
ne  la  rencontre  plus  au  delà  du  66  1/2*^  [Seebohm).) 

Cet  oiseau  est  de  passage  en  Allemagne,  mais  des  couples  isolés 
nichent  souvent  dans  les  parties  septentrionales  (Borggreve)  ;  il  est 
cependant  rare  dans  le  sud  de  ce  pays  et  de  l'Autriche  (Frisch,  Bru- 
sina,  etc.),  mais  de  passage  régulier  dans  la  Dobrodja  et  la  Bulgarie 
[Alléon).  Cette  Bécassine  est  assez  rare  en  Belgique  :  on  la  ren- 
contre parfois  au  printemps  et  en  automne  dans  les  marais  de  la  Cam- 
pine  et  de  l'Ardenne,  plus  rarement  dans  les  autres  parties  du  pays. 
De  passage  régulier  en  Hollande  {Schlégel)  et  en  France  {Degland, 
Lacroix),  mais  très  rare  en  Suisse  [Tschudi]  ;  elle  est  peu  commune 
en  Italie  {Salvadori,  Giglioli),  abondante  en  Sicile  [Mallierbe),  rare  en 


—    35n   _ 


Portugal  {du  Bocage),  de  passage  en  Espagne,  surtout  sur  la  côte  de 
l'est,  car  on  en  tue  tous  les  ans  dans  les  environs  de  Valence,  mais 
elle  n'est  jamais  abondante  dans  l'Andalousie  (iSâ^wnc/er^);  elle  arrive  en 
grand  nombre  en  Grèce  avec  la  Bécassine  ordinaire  et  y  hiverne,  mais 
c'est  un  oiseau  de  passage  pour  les  îles  de  l'Archipel  {Lindermayer). 
Cet  oiseau  est  très  rare  aux  îles  Britanniques,  mais  on  en  a  pris  dans 
différentes  parties  du  pays,  aussi  bien  sur  les  côtes  qu'à  l'intérieur  et 
y  compris  l'Irlande  et  les  îles  Orkneys  et  Shetland  (Seehohm). 

En  Afrique  nous  rencontrons  cette  espèce,  en  hiver,  au  Maroc 
{Drake)  et  en  Algérie  (Loe/ie),mais  elle  ne  se  montre  qu'irrégulièrement 
en  Egypte  {de  Heuglin)  et  en  Nubie  {Hempr.  et  Ehrenb.),  et,  chose 
singuhère,  elle  hiverne  au  Natal  {Layard)  et  au  Transvaal  où  elle 
réside  depuis  septembre  jusqu'en  février  [Ayres).  Aux  deux  passages 
elle  traverse  en  grand  nombre  le  détroit  de  Gibraltar,  ce  qui  fait  sup- 
poser qu'elle  doit  se  disperser  en  Afrique  ;  il  est  du  reste  certain  que 
pour  arriver  dans  le  Sud  de  ce  continent,  elle  doit  le  traverser  dans 
toute  sa  longueur,  soit  en  longeant  les  côtes,  soit  en  longeant  les 
fleuves  pour  s'éparpiller  dans  les  vastes  marais  de  l'Afrique  centrale. 
Elle  a  également  été  observée  à  Madeiro  {Ileinecken),  à  Damara 
{Andersson),  et  dans  le  nord  de  la  Perse  {St-JoJin). 

Mœurs.  —  Cette  espèce  paraît  plus  sensible  au  froid  que  ses  congé- 
nères, car  elle  émigré  plus  tôt  et  retourne  plus  tard  dans  les  pays  où 
elle  niche.  Elle  quitte  les  contrées  du  Nord  à  partir  de  la  mi-août 
jusque  vers  le  15  septembre,  et  n'y  retourne  jamais  avant  la  seconde 
moitié  d'avril;  il  arrive  même  qu'on  ne  la  revoit  pas  avant  la  première 
quinzaine  de  mai.  Cet  oiseau  voyage  pendant  la  nuit  et  isolément 
ou  par  couples,  mais  ces  derniers  ne  s'observent  qu'au  printemps. 

La  Bécassine  double  habite  les  prairies  humides,  les  pâturages 
entrecoupés  de  mares  ou  traversés  par  un  ruisseau  ou  une  rivière, 
ainsi  que  les  marais,  mais  évite  les  endroits  garnis  de  roseaux  et  de 
joncs.  Elle  recherche  moins  l'eau  que  la  Bécassine  ordinaire  et  se  con- 
tente souvent  d'un  endroit  humide  où  l'herbe  est  courte  et  serrée, 
surtout  si  le  terrain  ofïre  des  irrégularités  et  de  petites  fosses  dans 
lesquelles  elle  puisse  se  cacher  pendant  la  journée. 

Cet  oiseau  marche  avec  agilité,  mais  ne  court  généralement  pas 
vite,  car  il  préfère  se  servir  de  ses  ailes  chaijuo  fois  qu'il  veut 
franchir  une  certaine  distance.  Son  vol  est  assez  rapide,  mais  en 
général  plus  lourd  (]ue  celui  des  autres  Scolopacidés  ;  sa  direction  est 
toujours  rectilignc  et  l'oiseau  ne  s'élève  jamais  bi(>n  haut,  si  ce  n'est 

TuMEii.  —  188U.  -^^ 


—  226  - 

pendant  la  nuit.  D'un  naturel  assez  paresseux,  il  ne  se  déplace  pas 
volontiers  sans  nécessité,  ce  qui  tient  surtout  à  ses  mœurs  plus  noc- 
turnes que  diurnes;  il  est,  du  reste,  beaucoup  moins  remuant  que 
l'espèce  ordinaire.  En  cas  de  nécessité  il  sait  un  peu  nager,  mais  il  ne 
se  sauve  à  la  nage  que  quand  il  ne  peut  pas  faire  autrement. 

Cette  Bécassine  est  craintive  mais  peu  farouche;  il  est  vrai  qu'on 
la  voit  rarement  pendant  le  jour,  car  elle  se  tient  alors  blottie  dans 
une  petite  excavation  ou  entre  les  herbes,  et  ne  quitte  sa  place  que 
quand  elle  doit  fuir  devant  un  danger.  Ce  n'est  qu'au  crépuscule 
qu'elle  se  met  en  mouvement,  mais  sans  chercher  la  société  d'autres 
individus,  car  elle  n'est  pas  sociable.  Il  est  rare  d'entendre  sa  voix; 
au  printemps  elle  jette  parfois  en  s'élevant  un  cri  étoufiPé  ressemblant 
à  baed,  haed,  haed.  Sa  nourriture  se  compose  d'insectes,  de  larves, 
de  vers,  de  mollusques  avec  ou  sans  coquille,  qu'elle  cherche  le  plus 
souvent  dans  la  vase. 

Reproduction.  —  La  Bécassine  double  niche  dans  les  prairies  et  les 
pâturages  humides,  dans  les  marais  ou  près  dés  étangs  et  des  mares. 
Son  nid  est  une  simple  dépresssion  garnie  de  feuilles  de  graminées, 
et  contient  quatre  œufs  dans  la  seconde  quinzaine  de  mai  ou  au 
commencement  de  juin.  Ces  œufs  sont  d'un  gris  jaunâtre  ou  d'un  brun 
olivâtre  garnis  de  taches  cendrées  et,  plus  superficiellement,  de  taches 
et  de  points  plus  ou  moins  nombreux  brims  et  noirâtres;  ils  mesurent 
en  moyenne  45  millim.  sur  32.  La  durée  de  l'incubation  est  de  dix-sept 
ou  dix-huit  jours. 


211.  —  La  Bécassine  ordinaire. 
GALLINAGO  CŒLESTIS,  Bress.  ex  Frenz. 

(PI.  211). 

ScoLOPAX  GALLINAGO,  Briss.  Omith.  V,  p.  298  (1760). 

ScoLOPAX  CŒLESTIS,  Frenzel,  Beschr.  Yog.  u.  Eier.   Wittenb.  p.  58  (1801). 

Gallinago  MEDIA,  Leach  (nec  Frisch  et  auct.  plur.)  Syst.  cat.  M.  B.  Br.  Mus.  p.  30 

(1816). 
ScoLOPAX  MEDIA  et  SARHALiNA,  Vieill.  iV.  Dict.  cVMst.  nat.  III,  pp.  358-59  (1817). 
Scolopax  brehmii,  Kp.  /sw,  1823,  p.  1147. 
ScoLOPAX  SABiNi,  Vig.  Trans.  Linn.  Soc.  XIV,  p.  557  (1825). 
Telmatias  GALLINAGO,  Boie,  Isis,  1826,  p.  979. 

Pelorychus  BREHMII  et  Enalius  SABINI,  Kp.  Nat.  Syst    pp.  119,  121  (1829). 
Telmatias  fœrœensis,  brehmii,  stagnatilis,  septentrionalis  et  peregrina,  Brm. 

Isis,  1830,  p.  989. 


;227   

Gallinago  brehmii,  Bp.  Icon.  Faun,  It.  Ucc.  introd.  (1832). 

Gallinago  uniclavus,  Hodgs.  Journ.  As.  Soc.  Beng.  VI,  p.  492  (1837). 

Gallinago  scolopacinus  et  sabini,  Bp.  Comp.  List.  p.  52  (1838). 

ScoLOPAx  PEREGRiNA,  Tem.  Man.  d'orn.  IV,  p.  435(1840). 

AscALOPAx  SABINI  et  GALLINAGO,  Keys.  et  Blas.  Wirbelt.  Eur.  p.  216  (1840). 

Gallinago  gallinago,  Licht.  Nomencl.  av.  p.  93  (1854). 

Telmatias  robusta,  salicaria,  petenyi,  lacustris,  brachypus,   Brm.  Yogelf.  pp. 

304-307  (1855). 
Gallinago  japonioa,  nilotica,    burka,   lamottii,   pygm.ea,  picta  et   vegyptiaca, 

Bonap.,  Compt.  rend.  XLlII,p.  579  (1856). 
Gallinago  vulgaris,  G.  F.  Dub.  PI.  col.  ois.  Bely.  II,  p.  182  (1857). 
Gallinago  russata,  Gould,  B.  Gt.  Brit.  Introd.  p.  118  (1873). 
Gallinago  cœlestis,  Dress.  B.  ofEur.  VII,  p.  641  (1880). 
Die  gemeine  Sumpfschnepfe,  en  allemand. 
The  common  Snipe,  en  anglais. 
De  W^atersnip,  en  flamand. 

Taille:  0"'17  ;  ailes  0,127;  bec  0,067;  tarses  0,030. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes.  —  Dessus  de  la  tête  noir  tacheté 
de  roux,  avec  une  bande  médiane  et  de  larges  raies  sourcilières  d'un  blanc 
roussâtre  ;  lorums  bruns  ;  joues  et  gorge  blanchâtres,  les  premières  tachées 
de  brun  ;  nuque  rousse  avec  des  stries  noires  ;  haut  du  dos  noir  avec  des 
taches  rousses  et  deux  bandes  latérales  roussâtres  se  rajaprochant  en  arrière; 
scipulaires  noires,  bordées  de  blanc  roussâtre  et  barrées  de  l'oux;  bas  du 
dos  noir  barré  de  blanc  ;  croupion  et  sus-caudales  d'un  cendré  roussâtre 
barrés  de  noir  ;  petites  couvertures  des  ailes  brunes  avec  des  taches  d'un 
blanc  un  peu  roussâtre  sur  les  bords  et  à  l'extrémité,  les  plus  grandes  noi- 
râtres et  terminées  de  blanc  ;  rémiges  noirâtres,  la  première  avec  son  bord 
externe  blanc,  les  secondaires  terminées  de  blanc  ;  cou  et  poitrine  d'un  cen- 
dré roussâtre,  le  premier  avec  des  taches  allongées  brunes,  la  seconde  avec 
des  raies  transversales  de  même  couleur  ;  ventre  blanc  ;  flancs  barrés  de 
brun  ;  queue  noire  à  la  base,  d'un  roux  ardent  au  milieu  avec  une  bande  et 
des  taches  subterminales  noires,  et  toutes  les  rectrices  terminées  de  blanc  ou 
de  blanchâtre  ;  sous-caudales  d'un  blanc  lavé  de  roussâtre  et  barrées  de  noir. 
Bec  brun,  plus  pâle  à  la  base  et  plus  foncé  à  son  extrémité  ;  pattes  brunes  ; 
iris  couleur  noisette. 

Au  printemps  les  couleurs  sont  plus  vives  et  le  noir  du  dos  offre  de  légers 
reflets  verdâtres.  —  Le  plumage  du  mâle  ne  diffère  pas  de  celui  de  la  femelle, 
mais  cette  dernière  est  généralement  un  peu  plus  grande. 

Jeune.  —  Ne  diffère  de  l'adulte  que  par  des  teintes  moins  vives;  son  bec 
est  très  mou  et  les  pattes  sont  d'un  gris  verdâtre. 

Poussin.  —  D'un  roux  marron,  assez  vif  sur  la  face,  mais  généralement 
rembruni  par  la  base  noire  du  duvet,  avec  une  tache  sur  le  front,  une  bande 
longitudinale  sur  la  tête,  un  trait  sur  l'ceil,  un  autre  au-dessous,  et  des  mar- 
brures sur  le  dos,  les  ailes  et  les  cuisses  d'un  marron  très  foncé,  le  tout 


—  228  — 


rehaussé  par  des  flocons  blancs,  groupés  en  couronne  autour  de  la  tête  et 
semé  irrégulièrement  sur  le  vertex  et  les  autres  parties  supérieures  ;  bec 
brun  foncé,  avec  la  base  de  la  mandibule  inférieure  jaunâtre;  pieds  bruns  ; 
iris  noirâtre.  (J.  Vian). 

Hab.  —  La  Bécassine  ordinaire  habite  l'Europe  et  l'Asie  jusqu'au 

70M.  N.  Elle  n'est  pas  rare  en 
Islande  où  quelques  individus 
paraissent  même  hiverner  près 
des  sources  chaudes,  car  Faber 
dit  en  avoir  rencontré  encore 
trois  dans  les  premiers  jours 
de  février,  mais  dans  la  partie 
méridionale  de  l'île.  Elle  est 
commune  aux  îles  Foeroé  et  se 
montre  parfois  au  Groenland  {Holbôll). 

Pour  l'Europe  centrale  c'est  un  oiseau  de  passage  régulier, bien  que 
quelques  couples  nichent  jusqu'en  Angleterre,  en  Hollande,  en  Bel- 
gique et  dans  le  nord  de  la  France.  Ces  Bécassines  passent  l'hiver 
dans  le  midi  de  l'Europe  et  on  en  voit  alors  des  essaims  innombrables 
dans  les  marais  Pontins  près  de  Rome.  Elles  hivernent  également 
dans  le  nord  de  l'Afrique  [Loche,  Drake),  jusqu'au  fleuve  Gambie  à 
l'ouest  {Seebohm)  et  l'Abjssinie  à  l'est  {Blanford).  En  hiver  on  les 
rencontre  aussi  aux  îles  Madeire, Canaries  et  Açores,en  Asie  Mineure 
et  dans  toute  l'Asie  centrale  et  méridionale  jusqu'au  îles  Andaman, 
Ceylan,  Formose,  Philippines  et  la  presqu'île  de  Malacca.  Elles  sont 
de  passage  au  Japon  {Blakiston). 

Cet  oiseau  est  remplacé  en  Amérique  par  une  espèce  très  voisine 
{Gallinago  Wilsonï),  qui  n'est  probablement  qu'une  race  climatérique 
du  type  européen. 

Mœurs.  —  La  Bécassine  ordinaire  est  donc  pour  la  Belgique  un 
oiseau  de  passage  régulier  ;  quelques  couples  se  reproduisent  même 
chaque  année  dans  les  marais  des  provinces  de  Namur,  de  Luxem- 
bourg, etc.,  et  particulièrement  dans  les  fanges  de  l'Ardenne. 

Si  l'on  rencontre  parfois  un  grand  nombre  de  ces  oiseaux  dans  une 
même  localité,  on  ne  peut  en  conclure  que  l'espèce  soit  vraiment 
sociable,  car  les  individus  se  tiennent  non  loin  les  uns  des  autres 
sans  s'inquiéter  de  leurs  voisins,  et  chacun  vit  pour  soi.  Ils  voyagent 
aussi  isolément  et  pendant  la  nuit,  quoiqu'il  arrive  souvent  que 
plusieurs  suivent  la  même  direction. 


229  — 

Les  passages  ont  lieu  dès  que  la  température  se  radoucit,  c'est-à- 
dire  depuis  la  fin  de  février  jusqu'au  milieu  d  avril,  mais  c'est  dans  la 
seconde  moitié  de  mars  qu'ils  sont  le  plus  abondants. 

Ces  Bécassines  ne  reviennent  dans  le  sud  de  la  Finlande  que  tard 
en  avril,  en  Laponie,  pas  avant  la  fin  de  mai,  et  ce  n'est  que  dans  la 
première  huitaine  de  juin  qu'elles  font  leur  apparition  sous  le  cercle 
polaire.  A  l'arrière-sàison  les  passages  commencent  vers  la  mi -août  et 
durent  jusqu'en  octobre;  ils  y  en  a  qui  séjournent  toute  Tannée  dans 
notre  pays. 

On  n'observe  ces  oiseaux  que  dans  les  endroits  humides  et  maréca- 
geux, tels  que  marais,  étangs  et  prairies  parsemés  de  mares  et  de 
bas-fonds  inondés  ;  ils  aiment  surtout  les  lieux  herbeux  ou  garnis  de 
joncs  et  autres  plantes  qui  leur  procurent  un  gîte  bien  caché.  Ce  qui 
leur  convient  surtout,  ce  sont  les  marais  et  les  j)rairies  inondés  silués 
près  d'une  forêt  et  bordés  de  buissons  d'aunes  et  de  hêtres;  ils  mènent 
là  une  vie  silencieuse  sans  attirer  Tattention. 

La  Bécassine  ordinaire  a  des  mœurs  plus  diurnes  que  la  Bécasse, 
mais  c'est  cependant  au  crépuscule  qu'elle  se  montre  le  plus  active. 
Elle  se  repose  vers  le  milieu  de  la  journée,  le  reste  du  temps  est 
employé  à  courir  par-ci  par-là  à  la  recherche  de  sa  nourriture.  Celle-ci 
se  compose  de  larves,  d'insectes,  de  vers,  de  petites  limaces  et  autres 
mollusques. 

Sa  démarche  est  aisée  mais  peu  accélérée  ;  son  vol  est  rapide  ;  en 
s'élevant  l'oiseau  décrit  d'abord  plusieurs  zigzags,  puis  s'élève  haut 
dans  l'air,  s'éloigne  en  battant  précipitamment  des  ailes,  décrit  un 
grand  arc  de  cercle,  revient  à  peu  près  à  l'endroit  d'où  il  est  parti, 
ferme  les  ailes  et  se  laisse  tomber  obliquement  dans  le  marais.  En  cas 
de  danger  elle  nage  avec  aisance,  et  plonge  même  quand  il  s'agit 
d'échapper  aux  poursuites  d'un  rapace. 

Son  cri  ordinaire  est  skètsch  ou  guètsch  d'une  voix  rauque  que 
l'oiseau  répète  plusieurs  fois  en  prenant  son  vol.  Pendant  ses  voyages 
nocturnes,  la  Bécassine  fait  entendre  un  son  rauque  ressemblant  à 
greckguekguè,&ViW\SiBSQz  souvent  d'un  cri  plus  élevé,  rarement  répété, 
et  qu'on  peut  rendre  par  tzip.  A  l'époque  de  la  reproduction,  les  deux 
sexes  font  entendre  des  sons  qui  diffèrent  complètement  du  cri  habi- 
tuel ;  ce  sont  des  cris  élevés,  clairs  et  sifflants  que  l'on  entend  de 
loin  et  qui  ressemblent  à  tik/mp,  tikkup,  tikkct. 

Son  naturel  est  craintif  e(  diMiant,  mais  eu  même  temps  gai  et  assez 
remuant;  ce  n'est  que  quanti  l'oiseau  est  très  gras  qu'il  devient  un 


—  230  - 

peu  paresseux.  «  Peu  de  temps  avant  l'accouplement,  dit  Naumann, 
le  mâle  s'anime,  s'élève  dans  les  airs,  obliquement  d'abord,  puis  en 
décrivant  une  spirale  allongée,  et  si  haut  que  l'œil  a  de  la  peine  à  le 
suivre.  A  cette  hauteur  il  décrit  des  cercles,  puis,  les  ailes  étendues 
et  immobiles,  il  se  laisse  tomber  verticalement  ;  il  descend,  remonte 
en  formant  une  ligne  ondulée  et  avec  tant  de  force  que  les  extré- 
mités de  ses  grands  rémiges  en  vibrent  et  produisent  un  son  singulier, 
tremblé,  qui  ressemble  beaucoup  au  bêlement  d'une  chèvre.  Revenu 
dans  les  hautes  régions,  il  recommmence  à  tourner  en  cercle  pour 
décrire  de  nouveau  une  seconde  ligne  ondulée,  en  produisant  le  même 
bruit.  Ce  manège  se  continue  sans  interruption  pendant  un  quart 
d'heure  ou  une  demi-heure  ;  quant  au  bruit  qui  l'accompagne,  il  dure 
environ  deux  secondes,  et  se  répète  à  des  intervalles  de  six  à  huit 
secondes  ;  plus  tard,  quand  les  forces  commencent  à  diminuer,  à  des 
intervalles  de  vingt  à  vingt-cinq  secondes.  On  pourrait  rendre  ce  bruit 
par  les  syllabes  :  doudoudoudoudoudou ,  prononcées  aussi  vite  que 
possible.  Le  mâle  se  livre  à  ces  exercices  le  matin  et  le  soir,  et  même 
pendant  la  journée  quand  le  ciel  est  parfaitement  pur^l'air  tranquille  ;  on 
peut  alors,  si  l'onest  doué  d'une  bonne  vue, voir  les  vibrations  de  l'extré- 
mité des  ailes,  et  reconnaître  que  c'est  là  la  seule  cause  de  ces  bruits.  » 

Plusieurs  ornithologistes  tels  que  Macgillivray,  Hancock,  Saxby, 
Jardine,  Blyth  et  autres,  partagent  la  manière  de  voir  de  Naumann 
au  sujet  de  ce  bruit;  Altum,  Meves  et  autres  auteurs  récents,  l'attri- 
buent, au  contraire,  aux  rectrices  externes  mises  en  vibration  pendant 
le  vol  ;  Legge  pense  que  c'est  le  résultat  d'une  action  combinée  des 
rémiges  et  des  rectrices.  A.  Brehm  fait  remarquer  que  Meves,  de 
Stockholm,  a  imité  ce  bruit  en  sa  présence,  et  d'une  façon  parfaite, 
en  agitant  rapidement  un  bâton  à  l'extrémité  duquel  il  avait  fixé  des 
rectrices  de  Bécassine. 

Reproduction.  —  A  l'époque  de  l'accouplement  les  allures  du  mâle 
changent  complètement  ;  il  s'élève  et  descend  d'un  vol  tremblant  et 
saccadé, se  perche  sur  les  arbres,  devient  jaloux,  attaque  et  livre  com- 
bat aux  autres  mâles.  «  Ce  manège,  dit  Naumann,  continue  souvent 
jusqu'au  moment  où,  de  la  surface  du  sol,  parfois  du  haut  d'une  pierre 
ou  de  quelque  motte  de  terre,  retentit  le  doux  cri  d'appel  de  la 
femelle.  A  peine  le  mâle  l'a-t-il  entendu,  qu'il  met  fin  à  ses  ébats  et 
se  laisse  tomber  presque  verticalement  comme  une  pierre  à  côté  de  sa 
compagne.  Le  dernier  acte,  les  herbes  et  les  broussailles  empêchent 
l'observateur  d'en  être  témoin.  » 


—  231  - 

La  Bécassine  ordinaire  niche  dans  nos  contrées  du  15  avril  au  15 
mai  ;  dans  la  région  polaire  la  ponte  n'a  jamais  lieu  avant  le  milieu 
de  juin.  Le  nid  consiste  en  une  simple  fosse  creusée  ordinairement 
dans  une  petite  éminence  placée  dans  un  marais  et  entourée  d'her- 
bages et  d'eau.  Cette  fosse  est  grossièrement  garnie  de  feuilles  de  gra- 
minées et  contient  quatre  œufs,  finement  grenus,  lisses,  d'un  jaune 
olivâtre,  verdâtre  ou  brunâtre,  semés  de  taches  cendrées,  brunes  et 
noirâtres,  souvent  rassemblées  au  gros  bout  ;  ils  mesurent  environ 
40  millim.  sur  28.  La  femelle  les  couve  seule  pendant  quinze  à 
dix-sept  jours,  mais  père  et  mère  se  partagent  les  soins  que  réclament 
leurs  petits  ;  ceux-ci  se  cachent  bientôt  dans  les  herbages  où  il  est 
difficile  de  les  découvrir. 


212.  — La  Bécassine  minime  ou  Jacquet 
GALLINAGO  GALLINULA,  Bp.  ex  Lin. 

(PI.  210) 

SCOLOPAX  GALLINAGO  MINOR,  Bi'iss.  Or)iilh.  V.  p.  304  (1760). 
ScoLOPAx  GALLINULA,  Lin.  Syst.  nul.  I,  p.  244  (1766). 
Gallinago  minima,  Leach,  Syst.  cat.  Mam.  B.  Br.  M tes.  p.  31  (1816). 
Lymnocryptes  GALLINULA,  Kp.  NaticH  Syst.  p.  118  (1829j. 

PhILOLIMNOS  GALLINULA,  STAGNATILIS  et  MINOR,  Bpin.   /stS,   1830  p.  989. 

Gallinago  gallinula,  Bonap.  Comp.  list  B.  p.  52  (1838). 

AscALOPAX  GALLINULA,  Keys.  et  Blas.  Wirbelt.  Eur.  p.  77  (1840). 

Telmatias   GALLINULA,  Droste,  Yog.  Bork.  p.  234  (1869j. 

Die  kleine  Sumpfschnepfe,  en  allemand. 

ThE  Jack  Snipe,  en  anglais, 

De  Doover  ou  Klein  Snepke,  en  flamand. 

Taille:  0'"16;  ailes  0,11  ;  bec  0,039;  tarses  0,022. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes.  —  Dessus  de  la  tête  noir  taché 
de  roux  ;  larges  raies  sourcilières  d'un  blanc  jaunâtre,  se  prolongeant  jusque 
sur  la  nuque  et  bordées  inférieurement  de  taches  noires  ;  loruni  brun  avec 
une  bande  d'un  blanc  jaunâtre  au-dessous  ;  nuque  d'un  cendré  brunâtre  et 
tachetée  de  brun  ;  haut  du  dos  noir  avec  des  taches  rousses  et  deux  bandes 
latérales  d'un  jaune  d'ocre  ;  scapulaires  noires  avec  des  taches  et  des  bandes 
rousses,  un  petit  liséré  terminal  blanchâtre  et  une  large  bande  d'un  jaune 
d'ocre  sur  le  bord  externe,  les  plus  longues  brunes  avec  des  bandes  transver- 
sales rousses  sur  le  bord  externe;  sur  la  ligue  médiane  du  dos  et  sur  le  bord 
interne  des  scapulaires,  on  remarque  des  reflets  bronzés  et  violets  très  appa- 
rents ;  l)as  du  dos  noir  à  reflets  violacés  et  plus  ou  moins  rayé  de  blanchâtre; 


-  232  - 


sus-caudales  brunes,  tachées  de  roux  et  bordées  de  jaune  d'ocre;  couvertures 
des  ailes  brunes,  bordées  de  cendré  roussâtre  ;  rémiges  brunes  terminées  do 
blanchâtre  ;  côtés  du  cou  variés  de  gris,  de  blanchâtre  et  tachés  de  brun  ; 
parties  inférieures  blanches,  mais  variées  de  roux  et  tachées  de  brun 
sur  le  devant  du  cou,  la  poitrine  et  les  flancs  ;  queue  conique,  brune,  les  rec- 
trices  bordées  de  roux  ;  sous-caudales  blanches  avec  une  strie  brune.  Iris 
brun  ;  pattes  d'un  gris  rougeâtre  ;  bec  de  même  couleur  mais  noirâtre  à  son 
extrémité. 

Les  Jeunes  ne  différent  que  fort  peu  des  adultes  ;  le  plumage  est  moins 
brillant. 

Poussin.  —  Parties  supérieures  d'un  roux  châtain,  absorbé  en  partie  par 
des  taches,  des  bandes  et  des  traits  noirs,  notamment  sur  le  front,  le  vertex, 
1<  s  lorums  et  les  joues  ;  tête,  dos,  dessus  des  ailes  et  des  cuisses  semés  de  petits 
flocons  blancs,  formant  par  agglomération  des  bandes  sur  le  dos  et  sous  les 
yeux  et  présentant  un  aspect  demi-deuil  ;  gorge  roux  pâle  ;  poitrine  roux 
rembruni  ;  ventre  gris  fauve  ;  bec  noirâtre,  avec  l'extrême  pointe  rousse  ; 
pieds  bruns;  iris  noirâtre.  (J.  Vian). 

Hah.  —  La  Bécassine  Jacquet  est  très  irrégulièrement  distribuée, 

en  été,  dans  les  régions  arctiques 
depuisl'Atlanlique  jusqu'au  Paci- 
fique. Middendorf  dit,  qu'en  Sibé- 
rie,il  l'a  trouvée  nichant  près  du 
Boganida  (70°  I.    N.),   que  les 
premières  furent  observées  le  8 
juin  et  que  les  dernières  furent 
tirées  le  31  août  ;  il  est  certain 
cependant  que  l'espèce  est  rare 
dans  la  Sibérie  orientale  {Taczanowsky)  et  qu'on  ne  la  voit  qu'acci- 
dentellement au  Japon  {Whitely).  Elle  est  inconnue  en  Islande,  aux 
îles  Fœroé  et  au  Groenland,  mais  il  est  probable  qu'elle  niche  un  peu 
partout  en  Europe  et  en  Asie  entre  le  60°  et  le  71°  1.  N.  Lors  des 
migrations,  elle  est   plus    ou   moins  commune  dans  toute  l'Europe 
septentrionale   et   centrale  ainsi   que   dans    la   Sibérie  occidentale 
{Finsch),  le  Turkestan  [Severtzoïu),  etc.  Pour  la  Russie,  Bogdanow 
dit  ce  qui  suit:  «  habite  le  toundra  et  la  plus  grande  partie  de  la  région 
du  sapin  jusqu'au  60°  1.  N.  vers  le  Sud  ;  le  toundra  et  la  partie  septen- 
trionale de  la  Sibérie  ;  plus  au  Sud, c'est  partout  un  oiseau  de  passage.  » 
En  Belgique  elle  est  généralement  commune  au  deux  passages,  surtout 
dans  les  parties  marécageuses. 

Cette    Bécassine  hiverne  en  grand  nombre  dans  l'Europe  méri 


—  233  - 

dionale,  dans  le  nord  de  l'Afrique  {Favier,  Loche)  et  en  Egypte 
{de  Heuglin).  En  Asie,  elle  hiverne  en  Asie  Mineure,  en  Perse  {Blan- 
ford),  en  Afghanistan,  dans  l'Inde,  à  Ceylan  et  en  Birmanie  {.Terdon, 
Seebohm,  etc.),  et  se  montre  accidentellement  en  Chine  [David)  et  à 
Formose  [Sivinhoe). 

Mœurs.  —  Cet  oiseau  est  de  passage  dans  nos  contrées  depuis  la  mi- 
mars  jusqu'au  commencement  de  mai,  et  repasse  en  août  et  septembre. 
On  le  rencontre  donc  à  peu  près  aux  mômes  époques  que  la  Bécassine 
ordinaire,  mais  plus  tard  au  printemps  et  plus  tôt  à  l'arrière-saison. 
Cette  espèce  voyage  aussi  pendant  la  nuit  et  isolément,  comme  les 
autres  du  môme  genre  ;  mais  elle  est  parfois  si  abondante,  qu'on  voit 
au  matin  un  nombre  assez  considérable  de  ces  oiseaux  éparpillés  sur 
un  espace  relativement  restreint,  sans  cependant  s'inquiéter  les  uns 
des  autres. 

Le  Jacquet,  comme  on  l'appelle  vulgairement^  habite  les  marais  et 
les  endroits  marécageux,  les  prairies  et  les  champs  inondés,  ainsi  que 
les  eaux  stagnantes  bien  pourvues  sur  leurs  bords  d'herbages  et  de 
buissons  ;  on  ne  le  rencontre  jamais  près  de  la  mer  ou  aux  bords  des 
grands  fleuves,  car  il  lui  faut  des  eaux  peu  profondes  et  boueuses. 
Pendant  le  jour  il  ne  se  montre  jamais  sans  nécessité,  car  il  se  tient 
alors  caché  dans  les  herbages.  En  Grèce,  où  cette  Bécassine  hiverne, 
on  voit  souvent,  suivant  von  der  Mûhle,  des  milliers  de  ces  oiseaux 
dans  les  champs  couverts  d'eau  à  la  suite  de  pluies  prolongées.  Lin- 
dermayer  ajoute  qu'on  peut  les  tuer  quand  ils  sont  posés,  mais  qu'après 
un  coup  de  feu,  il  s'élève  une  véritable  nuée  de  Bécassines  ordinaires 
et  minules  qui  désorientent  complètement  le  chasseur. 

Le  vol  de  cet  oiseau  diffère  beaucoup  de  celui  des  deux  espèces 
précédentes  :  il  est  plus  léger,  plus  silencieux  et  plus  incertain,  mais 
assez  rapide  et  l'oiseau  sait  facilement  changer  de  direction  ;  il  n'aime 
pas  à  s'élever  haut  et  se  contente  souvent  de  voleter  au-dessus  d'un 
marais  à  la  façon  d'une  chauve-souris  ;  ce  n'est  que  pendant  les 
migrations  qu'il  s'élève  haut  dans  les  airs. 

C'est  la  moins  farouche  des  Bécassines  ;  elle  ne  se  décide  parfois 
à  s'envoler  que  quand  son  ennemi  n'est  plus  qu'à  quelques  pas.  Elle 
est  aussi  peu  sociable  que  ses  congénères  et  ne  prête  aucune  attention 
aux  autres  oiseaux,  môme  quand  ils  appartiennent  à  son  espèce.  Il  est 
rare  qu'elle  fasse  entendre  sa  voix  ;  vers  le  soir,  en  prenant  son  vol, 
elle  pousse  parfois  un  cri  perçant  qui  ressemble  à  kit:^  ou  kutz  ;  elle  a 
également  un  cri  sourd  ressemblant  à  èhtch  ;  son  chant  d'amour  au 

Tome  ii.  —  1890.  30 


—  234  - 

printemps  peut  se  rendre,  d'après  Naumann,  par  tettettettettet 

sans  interruption  pendant  quatre  à  six  secondes. 

La  nourriture  est  la  même  que  pour  les  Bécassines  précédentes, 
sauf  que  les  aliments  de  nature  animale  sont  mélangés  à  des  graines 
de  diverses  plantes. 

Reproduction.  —  La  Bécassine  Jacquet  niche  en  mai  dans  les  con- 
trées les  plus  septentrionales  ;  il  paraît  cependant,  suivant  Brehm  et 
Paessler,  que  cet  oiseau  niche  quelquefois  en  Poméranie  et  en  West- 
phalie.  Le  nid  est  placé  entre  les  herbes  d'un  marais  :  c'est  une  simple 
excavation  garnie  de  quelques  brins  et  creusée  au  haut  d'une  petite  émi- 
nence.  Les  œufs,  au  nombre  de  quatre,  ressemblent  entièrement  à 
ceux  de  la  Bécassine  ordinaire,  mais  ils  sont  un  peu  plus  petits  et  plus 
lisses  ;  ces  œufs  sont  très  gros  en  proportion  de  la  taille  de  l'oiseau  : 
ils  mesurent  environ  36  millim.  sur  26. 

GBNRE  CXIX. 

BÉCASSE.  —  SCOLOPAX. 

ScoLOPAx,  Briss.  Orn.  V.  p.  292  (1760). 

RusTicoLA,  Vieill.  N.  dict.  d'hist.  nat.  III,  p.  348  (1816). 

Car.  —  Bec  beaucoup  plus  long  que  la  tête,  droit,  un  peu  dilaté  à  son 
extrémité  qui  est  rugueuse  sur  les  côtés  ;  narines  basales,  latérales,  allon- 
gées et  s'ouvrant  dans  une  membrane  ;  ailes  de  longueur  moyenne,  assez 
amples,  sur-aiguës  ;  queue  courte,  arrondie,  recouverte  en  grande  partie  par 
les  sus-caudales  ;  jambes  complètement  emplumées  ;  tarses  assez  courts, 
robustes  ;  doigts  libres  ;  yeux  gros  et  placés  très  en  arrière. 

Hab.  —  Ce  genre  est  représenté  en  Europe,  en  Asie,  en  Océanie, 
dans  l'Amérique  du  Nord  et  dans  l'Afrique  septentrionale. 

213.    —    La    Bécasse    ordinaire 
SCOLOPAX  .RUSTICOLA,  Lin. 

(PI.  212). 

ScoLOPAX  RUSTICOLA,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  243  (1766). 

RusTicoLA  vuLGARis,  Vieill.  N.  dict.  dliist.  nat.  111.  p.  348  (1816). 

ScoLOPAx  SYLVESTRis  et  piNETORUM,  Brin.  Isis,  1830,  p.  289. 

RusTicoLA  EUROP^A,  Less.  Traité  d'orn.  p.  555  (1831), 

ScoLOPAX  iNDicus,  Hodgs.  Joum.  As.  Soc.  Beng.  II.  1,  p.  490  (1837) . 


—  -23o  ^ 

ScoLOPAX  coMMUNis,  Selby,  Cat.  gen.  subg.  aves,  p.  43(1840). 
RusTicoLA  SYLVESTRis,  Macg.  Man.  Brit.  B.  II,  p.  105  (1842). 
ScoLOPAx  TORQUATA  et  oRiENTALis,  Ri*m.  Yogelf.  p.  304  (1855). 
ScoLOPAX  scoPARiA,  Bp .  Compt.-rencl.  XLIII,  p.  579  (1856). 
Die  GEiMEiNE  Waldschnepfe,  en  allemand. 
The  Woodcock,  en  anglais. 
De  Houtsnip,  en  flamand. 

Taille  :  0^23  ;  ailes  0,17  ;  bec  0,074  ;  tarses  0,042. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  Plumage  fort  bigarré  et  difficile  à 
bien  décrire.  Front  et  partie  antérieure  de  la  tête  d'un  cendré  nuancé  de 
brunâtre  ;  une  bande  brune  du  bec  à  l'œil  ;  occiput  et  nuque  noirs,  traversés 
de  bandes  jaunâtres  ondulées  de  brun  ;  manteau  et  scapulaires  variés  de 
marron,  de  roussâtre,  de  cendré  et  marqués  de  grandes  taches,  de  points  et 
de  zigzags  noirs  ;  couvertures  des  ailes  d'un  roux  marron  avec  des  barres 
transversales  d'un  cendré  brunâtre,  bordées  elles-mêmes  irrégulièrement  de 
noir;  rémiges  brunes,  avec  des  taches  triangulaires  rousses  sur  la  barbe 
externe;  gorge  blanche  ;  parties  inférieures  d'un  roux  jaunâtre,  avec  des  raies 
transversales  brunâtres  ;  sous  la  gorge  et  sur  les  côtés  de  la  poitrine  des 
taches  rousses  et  noires;  bas  du  dos  et  sus-caudales  d'un  roux  assez  vit 
avec  des  raies  transversales  et  en  zigzags  noires  ;  queue  noire  terminée  de 
cendré  en  dessus  et  de  blanc  en  dessous,  avec  la  barbe  externe  des  rectrices 
marquée  de  taches  triangulaires  rousses.  Bec  d'un  gris  rougeâtre,  brun  à 
son  extrémité  ;  iris  brun  ;  pattes  d'un  gris  livide. 

La  femelle  n'est  pas  à  distinger  du  mâle  :  les  caractères  qu'on  a  cru  pou- 
voir lui  assigner  ne  sont  pas  constants,  mais  elle  est  toujours  un  peu  plus  grande 
que  le  mâle. 

Jeune.  —  Même  plumage  que  les  adultes,  mais  plus  sombre  et  les  couleurs 
moins  pures. 

Poussin.  —  Robe  fauve,  pâle  sur  la  gorge,  plus  foncée  sur  la  poitrine,  large- 
ment marquée  de  bandes  et  de  taches  d'un  marron  plus  ou  moins  vif,  dont  une 
grande  sur  la  tête,  touchant  par  ses  ramifications  le  bec,  la  nuque  et  les  yeux, 
trois  bandes  longitudinales  et  parallèles  sur  le  dos,  une  très  foncée  sur  le 
lorum,  et  d'autres  variables  sur  les  ailes,  les  cuisses,  le  bas  du  cou  et  les  côtés 
do  la  tête  ;  bec  jaune  à  la  base,  d'un  noir  plombé  vers  la  pointe;  pieds  jaunes, 
ongles  bruns;  iris  brun  foncé.  {J.  Vian.) 

Variétés  accid.  —  Ou  rencontre  parfois  des  sujets  d'un  blanc  pur  ou  tachés 
de  blanc,  mais  ils  sont  rares;  on  en  connaît  d'un  jaune  ijaillc  avec  les  dessins 
à  peine  marqués  ;  d'autres  sont  roussâtres,  couleur  café  au  lait  ou  Isabelle 
avec  les  taches  plus  ou  moins  marquées  ;  eulin,  on  eu  rencontre  qui  ont  les 
rémiges  ou  l;i  quruc  d'un  blanc  pur. 


—  236  — 

Hab.  —  La  Bécasse  habite  en  été  toute  la  zone  froide  et  tempérée 

de  l'ancien  monde  :  en  Scandi- 
navie jusqu'au  cercle  polaire, 
dans  la  Russie  occidentale  jus- 
qu'au 65o,  mais  dans  la  Russie 
orientale  et  en  Sibérie  elle  ne  dé- 
passe pas  le  60°  1.  N.  (Seeàohm). 
Elle  nicbe  en  petit  nombre  aux 
îles  Britanniques  {le  même),  dans 
le  centre  et  le  nord  de  la  France 
{Degl.  et  Gerbe)  (en Belgique,  en  Suisse  {Tschudi),  dans  les  Carpathes, 
ainsi  que  dans  les  montagnes  boisées  des  îles  Canaries,  Madeire  et 
Açores  {Godman,  etc.),  où  elle  est  sédentaire. 

Cet  oiseau  hiverne  dans  le  midi  de  l'Europe,  au  Maroc  (Drake), 
en  Algérie  {Taczanoioski),  en  Egypte  {de  Heuglin),  en  Palestine 
{Trish^am),  en  Perse  {Blanford),  dans  l'Inde  {rJerdon),  à  Ceylan 
{Legge),  en  Birmanie  {Beavan)  et  en  Chine  {Swinhoe)  ;  il  hiverne 
également  dans  la  partie  chaude  du  Caucase,  où  il  niche  dans  les 
montagnes  boisées  jusqu'à  une  altitude  de  3000  à  4000  pieds  {Radde)] 
il  en  est  de  même  au  Japon  {Wliitely).  La  Bécasse  n'a  été  observée 
ni  en  Islande,  ni  au  Groenland,  et  n'a  été  capturée  qu'une  fois  ou 
deux  aux  îles  Foeroë  {Feilden)  ;  on  l'a  également  prise  accidentelle- 
ment dans  l'Amérique  du  Nord  {Laivrence),  où  elle  est  remplacée  par 
une  espèce  voisine  :  Scolopax  ^minor. 

Mœurs.  —  La  Bécasse  est  de  passage  régulier  en  octobre  et  en 
novembre,  et  repasse  vers  la  fin  de  février  et  en  mars,  parfois  jus- 
qu'au commencement  d'avril.  Si  l'hiver  est  doux,  une  partie  hiverne 
en  Belgique  ;  quelques  couples  nichent  régulièrement  dans  nos  bois, 
surtout  dans  ceux  de  l'Ardenne. 

Ces  oiseaux  voyagent  en  général  isolément  ou  par  couple,  jamais 
en  troupe,  mais  on  voit  quelquefois  un  assez  grand  nombre  suivre  la 
même  direction,  sans  pour  cela  former  un  groupe  uni  par  la  volonté. 
Ils  émigrent  pendant  la  nuit,  interrompant  leur  voyage  durant  les 
tourmentes  et  les  nuits  sombres  ;  quand  ils  sont  surpris  par  une 
bourrasque,  ils  s'abattent  au  premier  endroit  venu,  même  au  milieu 
des  champs  et  y  attendent  le  lever  du  soleil  pour  gagner  les  endroits 
buissonneux  ou  boisés.  Lorsqu'ils  prévoient  des  intempéries,  ils 
demeurent  dans  la  localité  jusqu'à  ce  que  le  calme  renaît.  Les 
Bécasses  paraissent  d'ailleurs  très  sensibles  aux  influences  atn^os- 


-  237  — 

phériques,  et  c'est  à  ces  influences  qu'on  doit  attribuer  l'irrégularité 
de  leurs  passages  et  de  leurs  allures  pendant  les  migrations.  Il  arrive 
souvent  que  les  Bécasses  se  montrent  une  année  en  abondance  dans 
une  région  qui  paraît  leur  plaire  ;  puis,  plusieurs  années  de  suite, 
pas  une  seule  ne  s'y  montrera. 

La  Bécasse  est  un  oiseau  forestier  qui  n'a  de  préférence  pour 
aucune  espèce  d'arbres  ;  elle  vit  aussi  bien  dans  les  bois  de  conifères 
que  dans  les  autres,  mais  elle  préfère  toujours  les  grandes  forêts  aux 
bois  de  moindre  étendue,  probablement  parce  qu'elle  y  trouve  un  abri 
plus  assuré  ;  il  lui  faut  cependant  un  sol  humide  où  il  y  a  beaucoup 
de  terreau,  bien  ombragé  et  buissonneux.  Dans  les  contrées  déboisées 
on  ne  la  voit  qu'aux  passages,  et  elle  s'abat  alors  souvent  dans  les 
jardins  ou  dans  les  haies  qui  bordent  les  champs  ;  il  est  rare  de  la 
rencontrer  dans  les  prés,  les  marécages  ou  près  des  eaux. 

Elle  est  craintive  et  défiante  au  plus  haut  degré,  et  passe  la  plus 
grande  partie  de  la  journée  à  dormir  dans  un  endroit  sombre  ;  ce 
n'est  qu'au  crépuscule  qu'elle  commence  à  se  montrer  dans  des  lieux 
découverts  et  à  courir  de  côté  et  d  autre.  Sa  démarche  est  lente,  trot- 
tinante et  peu  soutenue,  aussi  préfère-t-elle  voler  pour  franchir  une 
petite  distance  que  de  courir.  Son  vol  est  généralement  assez  lent, 
mais  elle  sait  à  volonté  le  ralentir  ou  l'accélérer.  Elle  ne  vole  pas 
aussi  vite  qu'une  perdrix,  mais  elle  est  plus  adroite  pour  changer  de 
direction,  s'élever  ou  s'abaisser  et  pour  traverser  un  fourré  sans  se 
heurter  aux  branches.  Quand  elle  part  d'un  taillis  ou  qu'elle  veut  fuir 
un  danger,  son  vol  devient  rapide,  saccadé  et  souvent  bruyant  ;  elle 
tourne  avec  une  grande  légèreté  autour  des  buissons  et  des  arbres, 
pour  aller  ensuite  s'abattre  au  loin.  Si  on  l'clfraye,  elle  s'élève  en 
produisant  un  bruit  sourd  bien  connu  des  chasseurs,  et  va  gagner 
le  côté  opposé  du  buisson  près  duquel  elle  était,  de  façon  à  être  tou- 
iours  séparée  du  chasseur  par  un  touffu  quelconque.  Elle  feint  sou- 
vent de  s'abattre,  mais  fait  aussitôt  un  crochet,  court  entre  les 
buissons,  s'envole  ensuite  dans  une  autre  direction  pour  s'abattre  dans 
un  endroit  où  l'on  ne  songerait  guère  à  la  poursuivre.  Ceci  prouve  bien 
que  la  Bécasse  est  aussi  prudente  que  rusée  et  qu'elle  n'est  pas  aussi 
stupide  qu'on  le  croit  ;  elle  sait  du  reste  fort  bien  que  les  couleurs  de 
son  plumage  se  confondent  avec  celles  du  sol,  et  qu'en  se  couchant 
parmi  dos  feuilles  sèches,  des  morceaux  de  bois  ou  d'écorce,  elle 
échappe  le  plus  souvent  aux  yeux  du  chasseur. 

11  a  été  dit  plus  haut  que  cet  oiseau  n'est  pas  sociable  et  qu'il  aime 


—  238  - 

la  solitude  ;  les  autres  oiseaux  lui  sont  indifférents,  mais  il  s'en  défie. 
«  Lorsque  deux  Bécasses  mâles  se  rencontrent  dans  l'air,  dit  Brehm, 
elles  se  livrent  bataille,  se  poursuivent  en  cherchant  à  se  frapper 
avec  leur  bec  ;  quelquefois  elles  se  saisissent  mutuellement  et  s'em- 
pêchent de  voler.  Il  est  arrivé  que  trois  Bécasses  formant  ainsi  une 
véritable  pelote  sont  tombées  à  terre.  Ces  luttes,  ces  combats  doivent 
être  attribués  à  l'influence  des  amours,  mais  il  est  singulier  qulls 
commencent  pendant  les  migrations,  à  une  époque  où  la  Bécasse  ne 
songe  pas  à  nicher.  Dans  les  premiers  temps  ces  combats  durent  peu, 
mais  plus  tard,  quand  ces  oiseaux  arrivent  dans  leur  patrie,  ils  sont 
plus  soutenus,  mais  ils  prennent  généralement  fin  à  la  tombée  de  la 
nuit.  » 

La  Bécasse  quitte  sa  retraite  au  crépuscule,  vole  vers  les  endroits 
découverts  et  marécageux  des  forêts,  et  même  dans  les  pâturages  et 
les  champs  qui  se  trouvent  près  des  bois.  Là  elle  trouve  de  la  nourri- 
ture en  abondance  en  fouillant  la  bouse,  les  détritus  ou  les  tas  de 
feuilles  mortes  qu'elle  retourne  pour  découvrir  les  larves  et  les 
insectes  cachés  en  dessous  ;  souvent  aussi  elle  perce  des  trous  dans  le 
sol  humide  pour  en  retirer  les  vers.  D'ordinaire  elle  ne  reste  pas  long- 
temps à  la  même  place,  vole  d\in  endroit  à  l'autre,  visitant  tout  ce 
qui  peut  lui  procurer  des  larves  et  des  insectes. 

La  voix  de  cet  oiseau  est  assez  variée  et  se  compose  de  sons  rau- 
ques  et  de  sons  étouffés  qui  n'ont  rien  d'harmonieux.  En  s'élevant  il 
fait  souvent  entendre  le  cri  de  katch  ou  dack  répété  une  ou  deux  fois  ; 
son  cri  d'appel  est  ètche  ou  atche  d'une  voix  sourde.  Au  temps  des 
amours  le  mâle  pousse  un  sifflement  bref  :  pssiep,  qu'accompagne 
souvent  un  son  sourd  :  yourrk  ou  youarrk,  paraissant  sortir  du  fond 
de  la  poitrine,  auquel  la  femelle  répond  par  pip  pip,  pipip  pip  / 

C'est  un  gibier  fort  recherché,  mais  qui  a  de  nombreux  ennemis  : 
les  rapaces,  les  renards,  les  fouines,  les  putois,  les  belettes  et  les 
chats  en  détruisent  énormément  ;  dans  les  forêts  où  il  y  a  beaucoup 
de  renards  les  Bécasses  sont  toujours  rares.  Pris  jeune,  cet  oiseau 
s'apprivoise  avec  facilité,  devient  confiant,  reconnaît  bientôt  son 
maître  et  arrive  à  son  appel  ;  mais  il  ne  procure  guère  d'agrément  à 
cause  de  ses  mœurs  nocturnes. 

Reproduction.  —  La  Bécasse  niche  dans  la  plupart  des  forêts  de 
l'Europe  centrale,  mais  c'est  surtout  dans  le  Nord  qu'elle  se  reproduit 
en  abondance. 

Cet  oiseau  niche  dans  les  parties  boisées  des  montagnes  et  dans 


-  239  - 

les  forêts  tranquilles,  mais  il  recherche  de  préférence  les  lieux  où  des 
vallées  et  des  clairières  alternent  avec  des  taillis  touffus,  évitant  la 
futaie  proprement  dite.  Après  l'accouplement,  c'est-à-dire  vers  la  fin 
d'avril  ou  en  mai,  la  femelle  cherche  un  endroit  convenahle  pour 
nicher,  soit  dans  la  mousse  ou  dans  l'herbe,  soit  derrière  un  buisson, 
une  vieille  souche  ou  entre  des  racines;  elle  profite  d'une  dépression 
naturelle  ou  en  creuse  une  elle-même,  la  garnit  de  feuilles  sèches, 
d'herbes,  de  mousse  ou  autres  matériaux  analogues  qui  se  trouvent 
aux  alentours,  et  y  dépose  bientôt  quatre  œufs,  jamais  plus,  rarement 
trois.  Ces  oeufs  sont  moins  pyriformes  que  ceux  des  Bécassines  ;  ils  ont 
une  teinte  jaunâtre  et  des  taches  cendrées  et  rousses  plus  ou  moins 
nombreuses,  surtout  au  gros  bout,  et  mesurent  environ  46  millim. 
sur  34. 

La  femelle  couve  durant  dix-sept  jours.  Le  mâle  s'inquiète  peu  de 
la  couvée  et  ne  se  tient  même  pas  dans  son  voisinage.  Les  poussins  se 
mettent  à  courir  quand  ils  sont  à  peine  séchés  et  ils  ont  parfois 
encore  des  fragments  de  la  coque  adhérents  à  leur  duvet.  La  femelle 
leur  témoigne  beaucoup  d'attachement,  et  le  mâle  vient  rejoindre  sa 
petite  famille  pour  veiller  sur  elle.  A  l'approche  d'un  ennemi,  les 
parents  s'envolent  avec  inquiétude  en  poussant  des  cris  de  détresse 
et  en  décrivant  des  cercles  au-dessus  de  l'endroit  où  les  petits  sont 
cachés  ;  mais  ceux-ci  se  tiennent  cois,  et  il  faut  le  flaire  du  renard  ou 
d'un  bon  chien  de  chasse  pour  les  découvrir.  A  trois  semaines  ils 
commencent  à  voleter  ;  ils  quittent  leur  mère  et  se  dispersent  avant 
même  de  savoir  bien  voler. 

Il  est  généralement  admis  que  la  Bécasse  ne  niche  qu'une  fois  par 
an,  à  moins  qu'on  no  lui  ait  enlevé  ses  œufs  ;  mais  il  paraît  cepen- 
dant qu'elle  peut  élever  deux  couvées  quand  la  saison  est  favorable. 

SOUS-FAMILLE 

DES  LIMOSINÉS.  —  LIMOSIN^ 

Car.  —  Les  oiseaux  de  cette  division  ressemblent  aux  précédents  par  leur 
bec  long  et  sillonné,  mais  ils  en  diffèrent  par  des  jambes  plus  longues  et  plus 
dénudées,  des  ailes  plus  allongées,  ainsi  que  par  leurs  mœurs,  ce  qui  les 
rapproche  des  Totaninés. 

GENRE    cxx 
BARGE.  —  LIMOSA 

LiMiiSA,  Briss.  Ornith.,  v.  p.  202  (1700). 
ScoLOPAX,  Lin.  Sijst.  nal.  [,  p.  245  (1766). 
TûTANUS,  Hcclist.  On,.  Taschoib.  11,  p.  287  (1S03). 


-  240  — 

AcTiTis,  Illig.  Prodr.  p.  262  (181 1). 
LiMicuLA,  Vieill.  N.  dict.  111,  p.  249  (1816). 
Fedoa,  Steph.  Gen.  Zool .  XII,  1,  p.  73  (1824). 

Car.  —  Bec  très  long,  ayant  au  moins  le  double  de  la  longueur  de  la  tête, 
flexible,  épais  et  droit  à  la  base,  légèrement  retroussé  à  son  extrémité: 
narines  basales,  latérales,  oblongues;  ailes  allongées,  sur-aiguës;  queue 
courte,  égale;  jambes  assez  longues,  emplumées  sur  la  moitié  de  leur 
étendue;  tarses  longs,  grêles,  scutellés  en  avant,  réticulés  en  arrière  ;  doigts 
médiocres,  l'externe  uni  au  médian  par  une  membrane  qui  ne  dépasse  pas  la 
première  articulation. 

214.  —  La  Barge  à  queue  noire  (1) 
LIMOSA  MELANURA,  Leid. 

(PI.  213) 

ScoLOPAx  LIMOSA,  Lin.  Sijst.  nat.  1,  p.  245  (1766). 

ScoLOPAx  BELGicA,  Gm.  Syst.  nat.  1,  p.  663  (1788). 

ToTANUS  LIMOSA,  Bechst.  Orn.  Taschenb.  11,  p.  287  (1803). 

AcTiTis  LIMOSA,  Illig.  Prodr . ,  p.  262  (181 1). 

LiMOSA  MELANURA,  Leisl.  Naclilv.  Bechst.  Naturg.  II,  p.  153  (1813). 

LiMicuLA  MELANURA,  Vieill.  N.  dict.  d'hist.  nat.  III,  p.  250  (1816) 

Feda  MELANURA,  Steph.  S/uiio's  Gen.  Zool.  Xll,  I.  p.  73  (1824). 

LiMOSA  isLANDiCA,  Bi'm.  /si's,  1830,  p.  989. 

ToTANUS  MELANURUS,  Socb.  Brit.  Birds.  III,  p.  162  (1885). 

LiMOSA  ^GOCEPHALA,  auctorum  plurimorum  (nec  Lin.). 

Die  Schwarzschwanzige  Uferschnepfb:,  en  allemand. 

The  black-tailed  Godwit,  en  anglais. 

De  Grutto,  en  flamand. 

Var.  Melanuroides. 

LiMOSA  ^GOCEPHALA,  Pall.  (nec  Lin.),  Zoogr.  t.  11,  p.  178  (1811). 
LiMOSA  MELANURA,  Horsf.  (nec  Leisl.),  Trans.  Linn.  Soc.  XIII,  p.  193(1821). 
LiMOSA  MELANUROIDES,  Gould,  Proc.  Zool.  Soc,  1864,  p.  84. 
Totanus  melanurus  MELANUROIDES,  Seeb.  Brit.  B.  III,  p.  163  (1885). 
LiMOSA  /EGOCEPHALA  MELANUROIDES,   Stejn.,  Bull.  of  the  U.  S.  nat.  Musetcm,  n»  29, 
p.  316  (1885). 

LiMOSA  BREViPES,  auctorum  plurimorum  (nec  Gray). 

Taille:  0,31  ;  ailes  0,21  ;  bec  0,105;  tarses  0,08 J. 

(i)  M.  H.  Seebohm  fait  remarquer  avec  raison  (A  history  of  Brit.  Birds  III,  p.  162)  que 
c'est  bien  à  tort  que  plusieurs  ornithologisfes  modernes  ont  rapporté  à  la  Barge  à  queue  noire, 
l'oiseau  décrit  par  Linné  sous  le  nom  de  Scolopax  agocephala .  La  description  de  ce  dernier  se 
rapporte,  en  effet,  à  la  Barge  rousse  ;  le  doute  est  d'autant  moins  possible  que  Linné  décrit  les 
pennes  de  la  queue  :  «  niqricantes  albo  striatœ  »  ce  qui  est  bien  un  des  caractères  du  Limosa  ru  fa. 


-    ^41  - 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  Tête,  cou,  haut  de  la  poitrine 
d'un  roux  vif,  plus  pâle  à  la  gorge,  avec  de  larges  stries  noires  sur  la  tête, 
d'autres  plus  étroites  et  moins  apparentes  sur  les  joues  et  sur  la  nuque,  et  des 
raies  transversales  noirâtres  sur  la  poitrine;  raies  sourcilières  d'un  blanc  rous- 
sâtre  ;  manteau  et  scapulaires  noirs  avec  les  plumes  barrées  et  terminées  de 
roux  ;  bas  du  dos  noirâtre  ;  croupion  et  sus-caudales  d'un  blanc  pur,  mais  les 
plus  longues  des  dernières  terminées  de  noir  ;  couvertures  des  ailes  cendrées 
avec  des  bordures  plus  claires,  les  plus  grandes  terminées  de  blanc  ;  rémiges 
noirâtres  avec  un  miroir  blanc  ;  abdomen  et  sous-caudales  blancs  rayés  de 
brun  et  de  roux,  les  plus  grandes  des  sous-caudales  immaculées  ;  c[ueue  noire, 
blanche  à  la  base,  le  blanc  dominant  sur  les  rectrices  latérales  et  diminuant 
graduellement  d'étendue  sur  les  suivantes.  Bec  roussâtre,  brun  à  l'extrémité  ; 
iris  brun  ;  pattes  noirâtres. 

Mâle  et  femelle  en  hiver.  —  Parties  supérieures  d'un  cendré  brunâtre  ;  raie 
sourcilière,  tour  de  l'œil  et  gorge  blanchâtres  ;  devant  du  cou  et  haut  de  la 
poitrine  d'un  cendré  clair  ;  les  autres  parties  inférieures  d'un  blanc  pur  ;  bas 
du  dos,  queue  et  rémiges  comme  en  été. 

Jeune.  —  Dessus  de  la  tête  brun  avec  les  plumes  bordées  de  roux  clair  ;  cou 
et  poitrine  d'un  roux  cendré  clair;  plumes  du  manteau  et  scapulaires  noirâ- 
tres, bordées  de  roux;  couvertures  des  ailes  cendrées,  bordées  par  une 
teinte  d'un  blanc  roussâtre  ;  raies  sourcilières,  gorge  et  abdomen  d'un  blanc 
pur;  le  reste  comme  chez  les  adultes,  mais  la  queue  terminée  de  blanc. 

La  var.  Melanuroides  ne  diffère  de  la  forme  européenne  que  par  une 
taille  plus  petite  (1). 

Hab.  —  Cette  espèce  peut  se  diviser  en  deux  races  ou  variétés, 

dont  l'une  habite  l'Orient,  l'autre 
l'Occident.  Cette  dernière,  qui 
représente  le  type,  est  répandue 
depuis  le  sud  de  l' Islande (i^^^Z^c^r) 
et  les  îles  Févoé{Fei/den)  jusqu'à 
la  vallée  de  l'Obi  en  Sibérie,  sans 
dépasser  à  l'Est  le  60*^  1.  N.  ;  en 
Scandinavie  on  l'observe  jusqu'au 
68  1/2"  1.  N.  [Mahngren).  Elle  se 
montre  aussi,  mais  rarement,  au  Groenland  [Holbull). 

Cette  Barge  est  de  passage  aux  îles  Britanniques  sans  y  être  com- 
mune ;  on  la  voit  régulièrement  sur  la  côte  orientale  de  l'Angleterre, 
plus  rarement  de  l'Ecosse  et  accidentellement  en  Irlande  ySeebolim). 


(1)  Plusieurs  auteurs  rattachent  à  cette  variété  la  f.iinosa  brevipes  de  Gray,  qui  est  une  variété 
de  la  Limosa  r'ija,  comtue  uous  le  verrous  plus  loiu. 

Tome  II.  —  1890,  31 


—  242  — 

Outre  les  contrées  du  Nord,  elle  niclie  aussi  en  Hollande  {Schlégel), 
dans  le  Jutland  {Kjaerbôlling),  dans  le  nord  de  l'Allemagne  {Borg- 
grevé),  en  Pologne  {Taczanowski),  en  Russie  {Bogdanow),  dans  le 
Turkestan  occidental  (Severtzoïo)  et  dans  les  steppes  inondées  du 
sud-ouest  de   la  Sibérie  {Finsch).   Elle  est   de  passage   régulier  en 
Belgique  et  dans  toute   l'Europe    centrale,    hiverne  dans    l'Europe 
méridionale  et  dans  le  Nord  de  l'Afrique  {Loche,  Irby).  On  rencontre 
cette  espèce  par  troupes  de  10  à  50  individus  dans  les  lagunes,  les 
marais  et  les  prairies  inondées  de  la  basse  Egypte  ;  beaucoup  séjour- 
nent dans  le  Delta  et  dans  l'Egypte  moyenne,  d'autres  suivent  le 
cours  du  Nil  et  de  ses  affluents  pour  se  disperser  dans  les  marais  du 
Kordofan,  du  Nil  Bleu  et  du  Nil  Blanc,  sans  dépasser  au  Sud  le  12° 
1.  N.;  on  en  rencontre  aussi  un  grand  nombre  en  Abyssinie  près  du  lac 
Tana,  et  même  jusqu'à  la  mi-mai  ;  il  n'est  donc  pas  impossible  que 
quelques  couples  y  passent  l'été  {de  Heuglin).  Vierthaler  en  a  vus  à  la 
même  époque  près  de  Karthoum.  Elle  se  moutre  accidentellement  aux 
îles  Canaries  et  Madeire.  A  l'Est  cette  espèce  hiverne  dans  le  Bélout- 
chistan  et  sur  le  littoral  du  golfe  Persique  {Radde),  dans  l'Inde  et 
àCeylan  {Seebohm). 

La  var.  Melanuroides  est  répandue  depuis  l'Obi  ou  le  Jenissei 
jusqu'au  Kamtchatka  {Stejneger)  sans  dépasser  le  55".  Elle  niche  dans 
l'Altaï,  près  du  Baikal  et  dans  la  vallée  de  l'Amour,  se  montre  aux 
passages  en  Mongolie  et  au  Japon,  et  hiverne  en  Chine,  en  Birmanie 
{Seebohm),  dans  la  presqu'île  de  Malacca  {Hume),  à  Bornéo  {Diard), 
à  Java  {Horsfleld),  à  Halmahera  {Bernstein),  à  Céram  {Hoedt),  dans  la 
Nouvelle-Bretagne  {Finsch)  et  dans  le  nord  de  l'Australie  {Gould, 
Ramsay). 

Mœurs.  —  La  Barge  à  queue  noire  se  montre  régulièrement  dans 
notre  pays  deux  fois  par  an  :  en  mars  et  avril  et  dans  le  courant  du 
mois  d'août  et  en  septembre;  elle  est  alors  assez  abondante,  surtout 
près  de  l'Escaut  et  dans  les  polders,  mais  assez  rare  dans  le  Limbourg 
et  dans  le  centre  du  pays.  Les  migrations  ont  lieu  pendant  la  nuit  et 
par  bandes  composées  souvent  de  plusieurs  centaines  de  sujets;  il 
arrive  parfois,  à  l'époque  des  passages,  qu'on  reste  plusieurs  jours 
sans  voir  un  seul  de  ces  oiseaux,  puis  tout  à  coup  une  nouvelle  bande 
arrive,  reste  quelques  jours  dans  la  localité  et  continue  ensuite  son 
voyage. 

C'est  un  véritable  oiseau  de  marais,  qui  recherche  les  eaux  douces 
et  surtout  les  mares  et  les  prairies  inondées.  Ses  tarses  allongés  lui 


—  243  — 

permettent  de  patauger  dans  les  étangs  et  dans  les  marais  ayant  par- 
fois de  l'eau  jusqu'au  ventre,  mais  il  ne  nage  et  ne  plonge  que  dans 
les  cas  d'urgence  extrême.  Sa  démarche  est  aisée  quoique  assez  lente, 
mais  il,  sait  fort  bien  courir  quand  il  le  veut.  Son  vol  est  élégant, 
léger,  vigoureux  et  ressemble  beaucoup  à  celui  des  grands  Chevaliers; 
l'oiseau  s'élève  ta,ntôt  haut  dans  les  airs,  tantôt  vole  en  rasant  presque 
l'eau  ou  le  sol. 

Cette  Barge  n'est  pas  d'un  naturel  fort  gai,  sans  cependant  être 
apathique,  car  elle  est  farouche,  défiante  et  fuit  l'homme  de  loin  ; 
elle  l'attend  d'abord  jusqu'à  une  certaine  distance,  puis  s'envole  à 
tire-d'aile  jusqu'à  perte  de  vue.  Les  Jeunes  et  ceux  qui  ont  des  petits  à 
protéger,  se  hâtent  moins  à  fuir  et  se  laissent  parfois  approcher  à  portée 
de  fusil;  il  en  est  de  même  dans  les  contrées  où  l'oiseau  se  sait  en 
sûreté.  Cette  Barge  se  rapproche  beaucoup  des  ('hevaliers  par  ses 
allures,  surtout  du  Chevalier  gambette  avec  lequel  elle  se  rencontre 
souvent  dans  les  mêmes  endroits.  Elle  est  assez  sociable  et  se  tient 
même  au  milieu  d'autres  petits  échassiers.  Sa  voix  est  pure,  sifflante 
et  sonore  et  ressemble  aussi  à  celle  de  certains  Totaniens;  son  cri 
peut  se  rendre,  d'après  Naumann,  par  djo,  djodjo  ou  lodjo,  mais 
l'oiseau  ne  se  fait  pour  ainsi  dire  entendre  que  dans  le  voisinage  du 
nid  et  tout  en  décrivant  des  cercles  au-dessus  des  marais.  Sa  nour- 
riture consiste  en  insectes,  larves,  vers,  mollusques  avec  ou  sans 
coquille,  frai  de  poissons  et  de  grenouilles  et  petits  têtards. 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  niche  sur  une  petite  éminence  placée 
dans  un  marais,  et  y  creuse  une  fossette  qu'il  garnit  de  brins  et 
de  radicelles  ;  c'est  sur  cette  litière  que  la  femelle  dépose,  à  la  fin 
d'avril,  quatre  œufs  de  grandeur  et  de  couleur  très  variables.  La 
teinte  générale  est  d'un  gris  verdâtre,  jaunâtre,  d'un  vert  brunâtre 
ou  d'un  brun  olivâtre  et  toujours  sans  brillant  ;  ces  œufs  sont  marqués 
de  taches  de  diverses  grandeurs,  de  stries  et  de  points  plus  ou  moins 
apparents  et  variant  du  cendré  au  jaune  terreux,  au  brun  et  au  roux  ; 
ces  maculatures  sont  généralement  plus  apparentes  et  plus  nombreuses 
près  du  gros  bout.  Les  œufs  mesurent  de  54  à  60  millimètres  sur 
36  à  38. 

Les  deux  sexes  couvent  alternativement  et  témoignent  beaucoup 
d'attachement  à  leurs  petits,  mais  ceux-ci  les  quittent  dès  qu'ils 
commencent  à  voler. 


-  244 


215.  —  La  Barge  rousse 

LIMOSA  RUFA,  Briss. 

(Pi.  214) 

LiMOSA  GRiSEA,  MAJOR,  FuscA,  RUFA  et  RUFA  MAJOR,  Briss.  OrmtJi .  V.  pp.    272-284 

(1760). 
ScoLOPAX  LAPPONicA  et  .EGOCEPHALA,  Lin.  SijsL  nat.  I,  p.  246  (1766). 
ScoLOPAX  LEUCOPH^A,  Lath.  Ind.orn.  II,  p.  719  (1790). 

ToTANUS  ^GOCEPHALUs  et  LEUCOPH^us,  Bechst.  Orn.  Taschenb.  II,  pp.  288,  289  (1803). 
ToTANUs  FERRUGINEUS,  Mey .  TascJienb.  II,  p.  374  (1810). 
LiMOSA  MEYERi,  Leisl.  Nachtr.  Bechst.  Natury.  II,  p.  172  (1813). 
LiMicuLA  MEYERI  et  LAPPONICA,  Vieil!.  N.  dict.  d'hist.  nat.  111,  pp.  249,  2ô0  (1816). 
LiMOSA  JADRECA,  NOVEBORACENSis,  ^GOCEPHALA,  Leach,  Syst.  cat.  m.  Birds  Br.  Mus. 

p.  32  (1816). 
Fedoa  MEYERI,  RUFA,  PECTORALis,  Steph.   Skaio's  f/en.   Zool. '^11,  \}t.    1.    pp.    75-79 

(1824). 
LiMOSA  FERRUGiNEA,  Pall.  Zoogr . Rosso-As.  II,  p.  180  (1826). 
ToTANUS  RUFUS,  Seebohm,  Brit.  Birds,  III,  p.  156  (1885). 
Die  rostrothe  Uferschnepfe,  en  allemand. 
The  Bar-tatled  Godwit,  en  anglais. 
De  rosse  Grutto,  en  flamand. 

Var.   Baueri. 

LiMOSA  BAUERI,  Naum.  Voy-  Deiitschl.  VIII,  p.  429  (1836). 

LiMOSA  BREVIPES,  AUSTRALASIANA,  Gr.  (1)  List.  B.  Br.  Muf.  III,  pp.  95-96  (1844). 

LiMOSA  LAPPONICA  vciv.  Nov.e-Zealandle,  Gr    Yoy.  Ereb.  and  Terror,  Birds.,  p.    13 

(1846). 
LiMOSA  NOv^-ZEALANDi^,  Gr.  Gen.  B.  111,  p.  570  (1844). 
LiMOSA  UROPYGiALis,  Gould,  Proc.  Zool.  Soc.  1848,  p.  38. 
LiMOSA  Foxii,  Peale,  U.  S.  Expl.  Exp.  p.  231.  pi.  65  (1848). 
LiMOSA  RUFA,  Temm.  et  Schl.  Faun.  Jap.  av.  p.  114  (1849). 
LiMOSA  LAPPONICA,  Gass.  Pr.  Acad.  Philad .  1858,  p.  196. 
Gallinago  punctata,  Ellm.  Zooloyist.,  1861,  p.  7470. 
LiMOSA  LAPPONICA  UROPYGIALIS,   Seftb.  Brit.  B    III,  p.  157  (1885). 
LiMOSA  LAPPONICA  BAUERI,  Stejn.  BulUt .   u.  s.  nat.  Muséum,  n"  29,  p.  122  (1885). 
LiMOSA  RUFA  UROPYGIALIS,  Seeb.  Geoyr.  distr.  Charadriidœ,  p.  387  (1887). 

Taille:  0,25;  ailes  0,205;  bec  0,079;  tarses  0,05. 

(Ij  M.  Seebohm  fait  remarquer  avec  raison,  qu'il  est  étrange  que  Gray  ait  donné  trois  noms  au 
même  oiseau,  ce  qui  a  fait  croire  à  plusieurs  auteurs  que  la  Limosa  brevipes  devait  se  rapporter  à 
laZ.  Melannroidcs .  Mais  le  type,  conservé  au  Musée  britannique,  est  bien  une  Barge  rousse. 
Gray  reconnut  lui-même,  deux  ans  plus  tard,  que  le  choix  de  la  dénomination  laissait  à  désirer,  et 
il  la  transforma  en  L.  N'ovœ-Z.ealandiœ,  dénomination  inscrite  sur  l'étiquette  du  même  sujet. 
Quant  au  type  de  la  L.  australasiana,  il  est  également  au  Musée  de  Londres  :  c'est  la  var.  Baueri 
en  plumage  d'hiver,  offrant  quelques  raies  peu  distinctes  sur  les  rectrices. 


—  24o  — 

Description  du  mâle  adulte  en  été.  —  Tête,  cou  et  parties  inférieures  d'un 
beau  roux  rougeâtre  foncé,  plus  pâle  à  la  gorge,  aux  raies  sourcilières  et  à  la 
base  des  jambes  ;  dessus  de  la  tête  marqué  de  larges  stries  brunes  ;  nuque  et 
région  des  oreilles  avec  des  stries  semblables  mais  plus  étroites  ;  lorums  poin- 
tillés de  brun  ;  dos  et  scapulaires  d'un  brun  noirâtre  avec  des  taches  rousses  ; 
bas  du  dos  et  croupion  blancs,  plus  ou  moins  marqués  de  taches  brunes  ; 
sus-caudales  blanches  barrées  de  brun  ;  couvertures  des  ailes  cendrées,  bor- 
dées de  blanc  et  marquées  d'une  strie  centrale  brune  ;  rémiges  noirâtres, 
marbrées  intérieurement  de  blanc  ;  queue  rayée  alternativement  de  blanc  et 
de  brun,  mais  terminée  de  blanc.  Bec  brun,  plus  pâle  à  la  base;  iris  brun  ; 
pattes  noires. 

Femelle  en  été.  —  Elle  n'est  jamais  d'un  roux  aussi  vif  que  le  mâle  ;  les 
parties  inférieures  sont  d'un  roux  plus  clair  avec  le  milieu  de  l'abdomen 
varié  de  blanc  ;  côtés  de  la  poitrine,  flancs  et  sous-caudales  marqués  de  traits 
bruns.  —  Cette  espèce  varie  beaucoup  suivant  les  sexes,  lage  et  les  saisons. 

Les  deux  sexes  en  hiver.  —  Sommet  de  la  tête,  lorums,  joues  et  cou  d'un 
cendré  clair  strié  de  brun  ;  raies  sourcihères,  gorge,  poitrine  et  ventre  d'un 
blanc  pur  varié  de  cendré  sur  les  côtés  de  la  poitrine  ;  manteau  et  scapu- 
laires d'un  gris  cendré  avec  les  plumes  bordées  de  blanc  et  marquées  d'une 
strie  centrale  brune  ;  bas  du  dos  et  sus-caudales  d'un  blanc  pur,  les  der- 
nières avec  quelques  taches  brunes  ;  ailes  à  peu  près  comme  en  été  ;  queue 
d'un  gris  cendré  uniforme,  légèrement  marbrée  à  la  base  (chez  les  individus 
non  entièrement  adultes  la  queue  est  plus  ou  moins  barrée). 

Jeune.  —  Ressemble  au  plumage  d'hiver,  mais  les  parties  supérieures  sont 
plus  brunes  ;  raies  sourcilières,  gorge  et  ventre  d'un  blanc  pur  ;  cou,  poitrine 
et  flanc  d'un  cendré  roussâtre  ;  queue  barrée  comme  l'adulte  en  été. 

Poussin.  —  Entièrement  vêtu,  excepté  sur  les  côtés  du  cou,  d'un  duvet 
assez  abondant,  barbelé  sur  les  deux  tiers  de  sa  longueur,  filiforme  et  aigu 
au  delà,  soyeux  au  toucher,  assez  long  sur  le  corps  et  le  cou,  moitié  moins 
sur  la  tête,  partout  brun  à  sa  base,  accusant  un  peu  la  queue  ;  gorge  et 
abdomen  blanchâtres  ;  tête  d'un  blanc  fauve,  avec  une  large  calotte  d'un  brun 
foncé  sur  le  vertex,  prolongée  en  deux  branches  étroites,  l'une  sur  le  front, 
l'autre  sur  la  nuque  ;  un  trait  noir  couvre  les  lores,  se  divise  pour  border  les 
paupières  et  s'épanouit  au-dessus  des  oreilles  ;  dos,  dessus  des  ailes  et  du 
cou  marbrés  confusément  par  masses,  de  fauve  et  de  noirâtre  ;  devant  du  cou 
et  parties  inférieures  d'un  fauve  un  peu  roux  sur  les  flancs  ;  côtés  du  cou  nus 
carné  jaunâtre  ;  bec  brun  de  corne  avec  la  base  de  la  mandibule  inférieure 
jaune  ;  pieds  bruns  ;  ongles  noirs  ;  iris  brun  roux.  (J.  Vian). 

La  var.  Baueri  difi'ère  du  type  européen  par  les  taches  du  bas  du  dos  et  du 
croupion  qui  sont  plus  étendues  :  chez  la  variété  c'est  le  brun  qui  domine  à 
ces  parties,  tandis  que  chez  le  type  c'est  le  blanc  qui  domine. 


Eab. — La  Barge  rousse  habite,  pendant  la  saison  des  amours,  toute 

la  zone  boréale  depuis  la  Laponie 
(Co//e^^)  jusqu'aux  toundras  delà 
Sibérie  occidentale  (74°  1.  N.). 
Il  paraît  certain  que  c'est  à  tort 
que  Bogdanow  (1)  et  Seebohm 
(2)  étendent  l'aire  géographique 
de  cette  espèce  jusqu'au  Kamt- 
schatka,  les  îles  de  la  mer  de 
Behring  et  l'Alaska,  car  ni  Stej- 
neger  (3),  ni  Taczanowski  (4),  ni  Nelson  (5)  ne  comprennent  la  Barge 
rousse  parmi  les  oiseaux  de  ces  pays,  mais  bien  la  var.  Baueri  ou  Uro- 
pygialis. 

La  Barge  rousse  n'a  été  observée  ni  au  Groenland,  ni  en  Islande, 
ni  aux  îles  Féroé,  mais  elle  est  de  passage  le  long  des  côtes  de  la 
Scandinavie  {Collett,   Nilsson),  de  la  Russie  {Bûchner),  de  l'Alle- 
magne {Naumann),  du  Danemark  (^en^on),  de  la  Hollande  (Schlégel), 
de   la    Belgique,    des  îles    Britanniques  {Seeboh?n),    de   la   France 
(Degland),  de  l'Espagne  [Reyes)  et  du  Portugal  [Smith),  et  remonte 
souvent  le  cours  des  fleuves  jusque  loin  dans  l'intérieur  des  terres. 
Elle  est  de  passage  irrégulier  en  Italie  [Giglioli)  et  se  montre  rare- 
ment en  Grèce  [Lindermayer)  et  dans  le  sud  de  la  Russie  près  de  la 
mer  Noire  [de  Nordmann).  Pallas,  Eichwald  et  Ménétries  la  men- 
tionne comme  étant  de  passage  au  Caucase,  mais  M.  Radde  ne  l'y  a 
jamais  rencontrée.  En  Sibérie  elle  ne  dépasse  probablement  pas  le 
Jenissei.  Elle  hiverne  en  partie  dans  le  nord  de  l'Afrique  où  elle  est 
abondante  aux  deux  passages  ;  à  l'Ouest  cet  oiseau  se  montre  en  hiver 
jusqu'au  fleuve  Gambie  (Hartlaub  et  Finsch);  à  l'Est  on  le  rencontre 
par  petites  troupes  sur  les  côtes  de  la  mer  Rouge  depuis  septembre 
jusqu'en  décembre,  mais  jamais  dans  la  région  du  Nil  [de  Heuglin). 
La  var.  Baueri  niche  dans  le  nord-est  de  la  Sibérie  [Middendorf) 
et  dans  l'Alaska  [Nelson).  Elle  est  de  passage  au  Japon  [Siebold],  dans 
la  Sibérie  orientale,  en  Mongolie  et  en  Chine,  et  quelques  individus 
séjournent  même  pendant  tout  l'hiver  dans  le  sud  du  Céleste  Empire 


(1)  ConspectHS  avinin  imperii  Rossici,  p.  86. 

(2)  BriL  Birds,  III,  p.  156. 

(3)  ResuUsoforn.  explor.  inthe  Commander  isl.  and  Kamtschatha,  p.  122. 

(4)  Rev.  crit.  de  la  faune  orn.  de  la  Sibérie  or.  (Bullet,  Soc.  Zool.  Fr.  I,  p.  255). 

(5)  Birds  of  Alaska,  p.  115. 


—  247  — 

(David).  Cette  variété  hiverne  également  à  Formose,  à  Hainan  {Swin- 
hoé),  aux  Philippines,  à  Bornéo  [Everett),  à  Java  {van  Hasselt),  à 
Timor  {S.  Millier),  à  Célèbes  (Forsten),  à  Halmahera  (Bernstein),  à  la 
Nouvelle-Guinée,  aux  î]es  Arou  (von  Rosenheiy),  à  la  Nouvelle-Bre- 
tagne (Fmsc/0,  aux  îles  ^dlomon  [Richards),  en  Australie  {Gould, 
Ramsay),  à  la  Nouvelle-Zélande  {Buller),  à  la  Nouvelle-Calédonie 
{Layard),  aux  Nouvelles-Hébrides  [Gray),  aux  îles  Samoa  [Peale), 
Fidji  (Grd/jt'e),  etc. 

Mœurs.  —  La  Barge  rousse  émigré  par  troupes  dès  la  lin  du  mois 
d'août  et  les  passages  durent  jusqu'en  octobre  ;  les  individus  qui 
nichent  dans  le  nord  de  l'Europe  émigrent  en  suivant  les  côtes  euro- 
péennes pour  hiverner  en  Afrique  (1);  la  race  orientale  suit  les  côtes  de 
la  Sibérie,  du  Japon  et  delà  Chine  pour  passer  l'hiver  en  Océanie. 
Le  retour  n'a  lieu  qu'en  avril  et  mai  ;  ces  oiseaux  ne  restent  réel- 
lement qu'un  peu  plus  de  deux  mois  dans  les  lieux  de  la  reproduction. 

Ces  Barges  voyagent  ordinairement  pendant  la  nuit,  plus  rarement 
en  plein  jour,  et  sont  souvent  accompagnées  de  divers  Bécasseaux. 
En  automne  elles  s'arrêtent  partout  où  le  pays  leur  convient,  y  passent 
quelques  jours  et  continuent  ensuite  leur  voyage  ;  c'est  ce  qui  fait 
qu'elles  sont  souvent  surprises  par  les  premières  gelées  qui  les  obligent 
à  hâter  leur  retour  au  quartier  d'hiver.  Le  trajet  se  fait  toujours  plus 
rapidement  au  printemps.  On  les  voit  arriver  sur  les  côtes  occiden- 
tales du  Jutland  et  près  des  bouches  de  l'Elbe  en  quantités  énormes  ; 
«  des  myriades  de  Barges,  dit  Naumann,  arrivent  comme  une  nuée 
d'au  delà  de  la  mer  et  s'abattent  dans  les  prés  ;  la  côte  en  est 
couverte  ;  la  bande  s'avance  tranquillement,  chaque  oiseau  cherchant 
sa  nourriture,  et  couvrant  bientôt  une  étendue  que  l'œil  ne  peut 
embrasser  d'un  seul  regard.  Ce  spectacle  est  presque  indescriptible  ; 
une  pareille  bande  vue  de  loin  au  moment  où  elle  s'envole,  ressemble 
à  une  fumée  qui  s'élève.  » 

Des  troupes  nombreuses  de  ces  oiseaux  séjournent  sur  les  côtes  de 
la  Baltiqup  jusque  dans  la  première  huitaine  de  juin  ;  à  peine  les  der- 
niers ont-ils  disparu,  que  déjà,  en  juillet,  on  voit  revenir  quelques 
sujets  isolés  :  ce  sont  probablement  des  individus  trop  vieux  pour  la 


(1)  Suivant  M.  Seebohni,  ces  oiseaux  suivraient  aussi  les  grands  fleuves  de  la  Russie  orientale  e 
de  la  Sibérie  occidentale  pour  ai  river  près  de  la  mer  Caspienne.  Mais  en  dehors  des  renseigne- 
nientsassez  vaguesde  Pallaset  de  Mcnétries,  aucun  auteur  lécent  ne  signale  cette  espièce  près  de 
cette  uicr. 


—  248  — 

reproduction,  ou  des  jeunes  qui  se  sont  laissés  évincer  par  d'autres 
plus  expérimentés, 

La  Barge  rousse  ne  quitte  que  rarement  le  rivage  de  la  mer  ;  on  la 
voit  cependant  quelquefois  remonter  le  cours  des  tieuves  et  s'avancer 
assez  loin  dans  l'intérieur  des  terres  ;  c'est  ainsi  qu'elle  se  montre  de 
temps  en  temps,  pendant  les  passages,  près  d'Anvers.  Elle  se  tient 
volontiers  sur  les  bancs  de  sable  mis  à  sec  par  la  marée  basse,  et 
revient  à  terre  à  la  marée  haute  pour  visiter  les  marécages  et  les  prai- 
ries humides  des  environs.  Vers  l'heure  de  midi  elle  s'éloigne  de  l'eau 
pour  se  livrer  au  repos  ;  il  n'est  alors  pas  rare  d'en  voir  quelques-unes 
ensemble,  perchées  sur  une  patte,  la  tête  cachée  dans  les  plumes  du 
dos  et  dormant  paisiblement. 

Ces  oiseaux  ont  les  allures  des  Chevaliers  :  ils  marchent  comme  eux 
pas  à  pas,  entrent  souvent  dans  l'eau  jusqu'au  ventre,  mais  ne  nagent 
jamais  sans  nécessité.  Leur  vol  est  léger,  rapide  et  rectiligne,  mais  ils 
le  ralentissent  quand  ils  s'élèvent  haut  dans  les  airs.  Quand  plusieurs 
Barges  veulent  se  rendre  d'un  endroit  à  un  autre,  elles  volent  sans 
ordre.  Dans  leurs  migrations,  au  contraire,  elles  forment  une  longue 
file,  et  si  elles  sont  très  nombreuses,  elles  volent  sur  deux  lignes 
formant  un  angle  aigu. 

Les  individus  isolés  se  montrent  souvent  peu  craintifs,  mais  la  plu- 
part évitent  le  chasseur  et  savent  le  reconnaître  d'avec  les  personnes 
inoffensives  ;  en  troupes  ces  oiseaux  sont  toujours  défiants,  et  plus  ils 
sont  nombreux,  plus  ils  se  montrent  craintifs. 

On  a  pu  voir  de  ce  qui  précède  que  les  Barges  rousses  sont  très 
sociables  ;  pendant  les  migrations  il  n'est  pas  rare  de  voir  un  de  ces 
oiseaux  conduire  une  troupe  composée  d'autres  petits  échassiers,  ou 
même  plusieurs  Barges  se  réunira  d'autres  espèces.  Leur  cri  varie 
suivant  les  circonstances  et  ressemble  à  kjeou,  kewkewkew,  keu- 
keukeu  ou  keikeikei,  mais  on  n'entend  leur  voix  que  quand  elles  sont 
en  bandes  ;  leur  cri  d'amour  est  plus  flûte  et  peut  se  rendre  par  tabié, 
tablé. 

Leur  nourriture  consiste  en  larves,  insectes,  vers,  annélides  marins, 
mollusques  et  petits  crustacés,  frai  et  têtards  de  grenouilles. 

Reproduction.  —  Cette  espèce  niche  dans  les  toundras  de  la  région 
arctique  de  l'ancien  monde.  Suivant  Wolley,  qui  découvrit  des  œufs 
de  cet  oiseau  en  1858,  le  nid  est  bien  caché  dans  un  marais  et  le  plus 
souvent  au  pied  d'une  colline.  La  ponte,  qui  est  de  quatre  œufs,  a  lieu 
à  la  fin  de  mai  ou  en  juin  ;  Wolley  trouva  des  œufs  en  Finlande  le 


—  249 


29  mai.  Le  nid  est  une  simple  dépression  garnie  d'herbages.  Les  œufs 
sont  d'un  brun  olivâtre  plus  ou  moins  foncé,  tachetés  et  mouchetés  de 
brun  et  marqués  de  taches  profondes  grises.  Ils  mesurent  environ  50 
millim.  sur  35. 


SOUS-FAMILLE 

DES  NUMÉNIINÉS.  —  NUMENIIN^. 


Car.  —  Bec  arqué,  deux  à  trois  fois  plus  long  que  la  tête,  mais 
de  longueur  variable  suivant  les  individus,  dur  et  obtus  à  l'extrémité, 
tarses  allongés,  presque  entièrement  réticulés  ;  quatre  doigts,  assez 
courts,  les  antérieurs  réunis  à  la  base  par  une  double  membrane. 


GENRE  CXXI. 


COURLIS.  —  NUMENIUS. 


NuMENius^  Briss.  Ornith.  V,  p.  311  (1760). 
CuRLiRius,  Rafin.  An.  de  la  nat.  p.  71  (1815). 
Ph.eopus,  Cuv.  Règne  an.  I,  p.  485  (1817). 
Cractiornis,  Gray,  List  gen.  and  subg.  B.  p.  88(1841). 

Car.  — Bec  beaucoup  plus  long  que  la  tête,  arqué,  grêle,  comprimé  à  l'ex- 
trémité, la  mandibule  inférieure  un  peu  plus  courte  que  la  supérieure; 
narines  basales,  latérales,  linéaires  et  placées  dans  une  rainure  :  ailes 
longues,  pointues  ;  queue  courte,  égale  ou  légèrement  arrondie  ;  tarses  allon- 
gés, scutellés  en  avant  sur  une  étendue  variable  suivant  les  espèces,  réti- 
culés supérieurement  et  sur  la  face  postérieure  ;  doigts  relativement  courts, 
le  médian  beaucoup  plus  court  que  le  tarse  ;  ongles  robustes,  peu  allongés, 
celui  du  doigt  médian  assez  dilaté  et  festonné  sur  son  bord  interne. 

H(th.  —  Ce  genre  a  des  représentants  dans  les  cinq  parties  du 
monde. 

210.  —  Le  Courlis  arqué  ou  cendré 
NUMENIUS  ARQUATUS. 

(Pi.  215) 

ScoLoi'AX  ARQUATA,  Lin.  S.  N .  I,  p.  115  (1758)  ;  I,  p.  242  (176G). 
NUMENIUS  MAUAGASCARIENSIS,  Bri.ss.  Oniith.  V,  p.  322  (1700). 

Tome  II.  —  1890.  32 


—  250  - 

■  ScoLOPAx  MADAGASCARiENSis,  Lin.  Synt.  nat.  I,  p.  242  (1766) . 
NuMENius  ARQUATA,  Lath . ,  Gen.  syn.  snppl.  I,  p.  291  (1787). 
NuMENius  MAJOR,  Steph. ,  iVmio'i'  Gen.  Zool.  XII,  I,  p.  26  (1824). 
NuMENius  viRGATUs,  Cuv.  Règne  an.  I,  p.  521  (1829). 
NuMEMUs  MEDIUS,  Brm.  /sîs,  1830,  p.  989. 

NuMEXius  ASsiMiLis,  RUFESCENS  et  LONGiROSTRis,  Brm.  Nciumannia,  1855,  p.  291. 
Der  GROSSE  Brachvogel,  en  allemand. 
The  common  Curlew,  en  anglais. 
De  groote  Wulp,  en  flamand. 

Var.  Lineatns 

NuMENius  ARQUATA  (part.)  Pall .  Zooyr.  Il,  p.  168(1811). 
NuMENius  LINEATUS,  Cuv.  Rèy .  a?i.  I,  p.  521  (1829), 
NuMENiusNASicus,  Tem.  ilfaTî.  cZ'on^.  IV,  p.  293  (1840). 
NuMENius  ARQUATULA,  Hodgs.,  Gr.  Zool.  Miscel.  I,  p.  86  (1844). 
NuMENius  CASSiNi,  Swinh.,  Ibis,  1867,  p.  398. 

Taille:  0^^1,38;  ailes  0,30;  bec  0,12  environ;  tafses  0,08. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  Tête,  cou  et  haut  de  la  poitrine 
d'un  cendré  roussâtre,  avec  des  stries  brunes  devenant  de  plus  en  plus  larges 
à  mesure  qu'elles  se  trouvent  plus  près  du  dos  ou  de  la  poitrine  ;  raie  sour- 
cilière  blanchâtre  finement  striée  de  brun  ;  gorge  d'un  blanc  pur  ;  manteau 
brun,  toutes  les  plumes  bordées  de  cendré  roussâtre,  les  bordures  des  scapu- 
laires  barrées  de  brun  ;  bas  du  dos  blanc  avec  de  petites  taches  brunes  ;  sus- 
caudales  blanches  avec  le  centre  des  plumes  brun  et  quelques  petites  taches 
de  même  couleur  sur  les  bordures,  les  plus  grandes  barrées  de  brun;  couver- 
tures des  ailes  brunes  bordées  de  cendré  blanchâtre  ;  rémiges  d'un  brun  noir 
avec  des  taches  blanches  sur  la  barbe  interne;  bas  de  la  poitrine  et  abdomen 
blancs  avec  des  taches  allongées  brunes  ;  sous-caudales  blanches  avec  des 
taches  ou  des  stries  brunes  ;  queue  blanche  barrée  de  brun,  les  rectrices 
médianes  lavées  de  cendré  roussâtre.  Bec  brun,  plus  pâle  à  la  base  de  la  man- 
dibule inférieure;  iris  brun;  pattes  d'un  gris  de  plomb. 

Il  est  impossible  de  reconnaître  les  sexes  avec  certitude  :  le  mâle  est  ordi- 
nairement un  peu  plus  grand  que  la  femelle  et  son  boc  cLt  plus  long  que 
celui  de  cette  dernière. 

Jeune.  —  Ressemble  à  l'adulte,  mais  les  teintes  sont  moins  rousses  et  le 
bec  est  plus  court. 

Poussin.  —  Parties  supérieures  d'un  roux  pâle,  marqué  de  taches  brunes 
irrégulières  ou  longitudinales,  la  principale  sur  le  vertex  en  forme  de  trapèze, 
dont  h  s  angles  aigus  descendent  l'un  sur  le  front,  l'autre  sur  la  nuque,  une 
autre  diffuse  sur  les  oreilles  et  un  irait  sur  les  commissures  ;  parties  infé- 
rieures d'une  teinte  fauve,  presque  rousse  sur  la  poitrine  et  l'abdomen.  Bec 
noir  avec  la  moitié  basale  de  la  mandibule  inférieure  jaune.  (/.  Vian.) 


-   2ol 


La  var.  Lineatus  diffère  du  type  européen  par  l'absence  de  taches  sur  le  bas 
du  dos  et  sur  les  plumes  axillaires,  et  par  les  bordures  des  scapulaires  et  des 
plumes  du  haut  du  dos  qui  sont  presque  blanches.  —  Ces  caractères  ne  sont 
pas  toujours  constants,  car  on  rencontre  souvent  des  sujets  intermédiaires. 

Hab.  —  Cette  espèce  peut  se  diviser  en  deux  races  ou  variétés 

climatériques,  dont  l'une  habite 
l'Europe, l'autre  l'Asie .  La  variété 
orientale  a  souvent  été  confondue 
avec  le  type  européen,  et  bien 
des  auteurs  ne  l'ont  pas  admise; 
il  est  vrai  qu'elle  est  peu  carac- 
téristique. 

La  forme   occidentale  habite 
toute  l'Europe  jusqu'au   cercle 
polaire  ;  elle  visite  les  îles  Fêroé  en  automne  et  en  hiver  {Feildcn)  et 
se  montre  accidentellement  en  Islande  {Faber).  Elle  niche  en  grand 
nombre  dans  toute  la  zone  septentrionale  de  notre  continent;  quelques 
couples  nichent  également  dans  divers  comtés  des  îles  Britanniques 
{Seebohw),  en  Allemagne  {Borggreve),  en  Hollande  {Schlêgel)  et  pro- 
bablement  en   Belgique,  où  l'espèce  est  très  commune  et  presque 
sédentaire.  M.  de  Selys-Longchamps  pense  que  ce  Courlis  niche  dans 
les  terrains  sablonneux  et  arides  de  notre  pays,  car  il  en  a  reçu  de 
l'Ardenne  en  été,  et  en  a  vu  d'autres  à  Ostende  en  aoiït.  Dans  les 
observations  ornithologiques  de  1885  et  de  1886,  les  chefs-gardes  de 
nos  phares  annoncent  avoir  vu  de  ces  oiseaux  en  juillet  et  en  août. 
M.  A   Croegaert  affirme  que  cette  espèce  est  très  abondante  près  de 
l'Escaut  à  Anvers  en  hiver  et  aux  passages.  M.  A.  Lacroix  dit,  qu'en 
France,  elle  est   sédentaire  et  de  passage  dans  le  département  de 
l'Hérault  et  qu'elley  niche  régulièrement.  En  Italieon  la  voitôgalement 
pendant  toute  l'année  mais  elle  n'y  nicherait  pas  {Giglioli);  en  Espa- 
gne elle  ne  se  montre  qu'en  hiver  et  aux  passages  {Saundcrs).  Il  est 
probable  que  cet  oiseau  hiverne  plus  ou  moins  dans  toute  l'Europe 
centrale  et  méridionale,  mais  qu'il   ne  niche  qu'exceptionnellement 
dans  les  contrées  situées  au  sud  des  Pays-Bas. 

Le  Courlis  cendré  hiverne  aussi  dans  le  nord  de  l'Afrique  (Loche), 
en  Egypte  et  en  Nubie  {'%cllt\>/)  jusqu'au  10"  1.  N.,  et  il  est  surtout 
abondant  sur  les  côtes  de  la  mer  Rouge  et  dans  lo  golfe  d'Aden,  où 
on  l'observe  pendant  toute  l'année  mais  isolément  en  été  [de  Heuglin). 


252  

11  visite  accidentellement  les  îles  Açores  ;  il  est  de  passage  au  Cau- 
case {Radde),  en  Asie  Mineure  et  en  Perse  {Scelwhm). 

La  var.  Lineatus  niche  dans  la  Sibérie  centrale,  mais  pas  au  delà 
de  la  Daourie  et  des  affluents  méridionaux  de  l'Amour  ;  elle  est  de 
passage  dans  le  Turkestan  {Severtzow)  et  se  montre  accidentellement 
sur  les  côtes  orientales  de  l'Afrique,  mais  elle  hiverne  surtout  dans 
l'Inde,  à  Ceylan,dans  l'Indo-Chine,  à  Malacca  {Seebohm),  à  Sumatra, 
à  Bornéo  et  à  Java  {Vordermann). 

Mœurs.  —  Il  a  été  dit  plus  haut  que  le  Courlis  arqué  ou  cendré  est 
presque  sédentaire  en  Belgique  ;  mais  il  est  surtout  commun  aux 
époques  des  passages,  c'est-à-dire  depuis  la  seconde  quinzaine  du 
mois  d'août  jusqu'en  octobre,  et  en  avril  jusqu'au  commencement  de 
mai.  Ces  oiseaux  voyagent  généralement  par  troupes  plus  ou  moins 
considérables  et  aussi  bien  pendant  la  nuit  que  djirant  le  jour  ;  ils 
s'écartent  souvent  des  côtes  maritimes  et  des  rivières  et  franchissent 
même  des  montagnes  assez  élevées. 

Ce  Courlis  se  plaît  un  peu  partout  et  il  a  bientôt  trouvé  un  endroit 
à  sa  convenance  ;  on  le  rencontre  près  de  la  mer,  des  lacs  et  des 
rivières,  dans  les  marais,  dans  les  champs  et  les  prés,  et  même  dans 
les  plaines  arides,  mais  jamais  dans  des  endroits  boisés.  Les  toundras 
sont  cependant  sa  vraie  patrie,  car  c'est  dans  les  tourbières  énormes 
des  régions  septentrionales  que  la  plupart  ont  pris  naissance.  Il 
ne  séjourne  jamais  longtemps  près  de  l'eau,  mais  il  s'y  rend  plusieurs 
fois  par  jour  ;  il  aime  le  changement  et  passe  volontiers  d'un  endroit 
humide  à  un  endroit  sec  ou  aride  ;  il  témoigne  cependant  une  certaine 
préférence  pour  les  terrains  sablonneux,  surtout  quand  ils  se  trouvent 
non  loin  de  l'eau. 

Cet  oiseau  aime  à  patauger  et  nage  avec  facilité,  même  sans  y  être 
forcé  ;  il  marche  à  grands  pas,  mais  avec  légèreté  et  élégance,  et 
pour  aller  vite  il  allonge  le  pas  davantage  ;  son  vol  n'est  pas  très 
rapide,  mais  il  est  régulier,  facile  et  l'oiseau  exécute  sans  fatigue  des 
détours  remarquables;  pour  l'accélérer  il  multiplie  les  battements  des 
ailes;  parfois  il  plane  quelques  instants.  Pour  descendre  d'une  grande 
hauteur  il  ferme  presque  les  ailes,  tombe  bruyamment  jusque  près  du 
sol,  ralentit  alors  sa  chute  en  étendant  les  ailes,  etne  se  pose  qu'après 
s'être  encore  balancé  quelque  temps  au-dessus  de  l'endroit  où  il  veut 
s'abattre. 

C'est  un  oiseau  extrêmement  farouche  et  méfiant  ;  toujours  attentif, 

fuit  de  loin  tout  ce  qui  lui  paraît  suspect,  mais  il  sait  fort  bien  dis- 


-  253  - 

tinguer  l'ennemi  d'un  être  inoffensif  ;  c'est  pour  cette  raison  qu'il  ne 
se  hâte  pas  trop  de  fuir  à  l'arrivée  d'un  cavalier,  d'une  voiture,  d'une 
femme  ou  d'un  enfant  ;  c'est  surtout  quand  il  est  en  société  qu'il  est 
difficile  de  l'approcher  à  portée  de  fusil, ce  qui  fait  souvent  le  désespoir 
du  chasseur.  Il  est  du  reste  très  sociable  ;  lorsqu'il  se  trouve  seul,  il 
jette  son  cri  d'appel  pour  attirer  l'attention  de  ses  semblables,  qui  lui 
répondent  aussitôt.  Suivant  de  Heuglin,  on  le  rencontre  fréquemment, 
en  Afrique,  au  milieu  d'une  troupe  de  Barges,  de  Pluviers  ou  de  Bécas- 
seaux, auprès  desquels  il  remplit  souvent  le  rôle  de  guide.  Sa  voix  se 
compose  de  notes  pleines,  arrondies  et  sonores  que  l'on  peut  rendre 
par  les  syllabes  tau,  tail,  tJauit  ;  quand  plusieurs  oiseaux  jettent  à  la 
fois  leur  cri  d'appel,  on  croirait  entendre  les  sons  d'un  orgue  dans 
le  lointain.  Réunis  en  grand  nombre  ils  poussent  souvent  les  cris  de 
tici  twi  ou  tiou  tivi,  mais  c'est  toujours  en  volant  qu'ils  se  font  enten- 
dre, rarement  au  repos.  Le  chant  d'amour  du  mâle  est  court  et  com- 
posé des  divers  sons  indiqués  plus  haut,  mais  dont  les  notes  se  fondent 
les  unes  dans  les  autres  d'une  façon  singulière  mais  pas  désagréable. 
L'inquiétude  et  l'angoisse  leur  font  jeter  des  cris  rauques ressemblant 
à  krèh  ou  kruh. 

La  nourriture  du  Courlis  cendré  se  compose  de  larves,  d'insectes, 
de  vers,  de  mollusques,  de  petits  crustacés  et  de  substances  végé- 
tales, principalement  de  baies.  Les  jeunes  ne  mangent  que  des  insectes 
et  des  larves. 

Cet  oiseau  s'habitue  bientôt  à  la  captivité,  surtout  quand  on  le 
laisse  courir  librement  dans  un  jardin,  où  il  rendra  même  des  services. 
On  le  nourrit  d'abord  de  vers  et  de  larves,  l'habituant  insensiblement 
à  de  la  viande  hachée.  Il  lui  faut  toujours  de  l'eau  fraîche  car  il  boit 
beaucoup.  Sa  chair  est  assez  estimée. 

Reproduction.  —  Ce  Courlis  niche  dans  une  légère  excavation, 
cachée  entre  les  herbes  et  les  bruyères,  et  garnie  de  brins  et  de 
feuilles  de  graminées.  La  ponte  a  lieu  au  commencement  de  mai  et 
se  compose  de  quatre  œufs.  Ceux-ci  ont  une  écaille  épaisse  presque 
sans  luisant  et  sont  d'un  vert  olivâtre  passant  au  jaunâtre  ou  au  bru- 
nâtre et  marqués  de  taches  profondes  cendrées  et  d'autres,  superfi- 
cielles, plus  ou  moins  nombreuses,  d'un  brun  assez  foncé  ;  ils 
mesurent  environ  (u  niillini.  sur  18.  11  paraît  probable  que  les  deux 
sexes  couvent  alternativement,  car  tous  deux  t('nu)ignen(  Ir  niémo 
attachement  à  leurs  petits. 


—  254  — 

217.  —  Le  Courlis  à  bec  grêle. 

NUMENIUS  TENUIROSTRIS,  Vieill. 

(PL  216). 

NuMENius  TENUIROSTRIS,  Vieill.  Nouv .  dict.  dliist.  nat.  VIII,  p.  302  (1817). 
NuMENius  SYNGENiGos,  V.  d.  Mllhle,  Orn.  Griechenl.  p.  111  (1844). 
Der  DtiNSCHNaBLiGE  Brachvogel,  en  allemand. 
The  slender-billed  Curlew,  en  anglais. 
De  Dunbek-Wulp,  en  flamand. 

Taille  :  0,33  ;  ailes  0,26  ;  bec  0,085  ;  tarses  0,067. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  Dessus  de  la  tête  bran  avec  les 
plumes  bordées  de  cendré  roussâtre  ;  sourcils  et  côtés  de  la  tête  blanchâtres 
striés  de  brun  ;  gorge  blanche  ;  cou  d'un  cendré  blanchâtre,  légèrement  lavé 
de  roussâtre  à  la  nuque,  avec  des  stries  brunes  assez  larges^,  manteau  brun, 
les  plumes  bordées  de  cendré  brunâtre,  les  scapulaires  plus  ou  moins  barrées 
de  brun  ;  couvertures  supérieures  des  ailes  brunes  bordées  de  blanchâtre, 
les  plus  grandes  avec  des  taches  blanches  sur  les  bords  ;  rémiges  brunes,  les 
5«  et  6«  avec  des  taches  blanches  sur  les  bords  ;  couvertures  inférieures  des 
ailes  et  plumes  axillaires  d'un  blanc  pur  ;  poitrine  d'un  blanc  faiblement  lavé 
de  cendré  et  marquée  de 'taches  allongées  brunes;  les  autres  parties  infé- 
rieures d'un  blanc  pur,  marquées  sur  l'abdomen  et  sur  les  flancs  de  grandes 
taches  de  même  couleur  en  forme  de  fer  de  lance;  sous-caudales  blanches  avec 
une  petite  strie  brune  à  l'extrémité  ;  queue  blanche  avec  des  barres  transver- 
sales brunes.  Bec  brun,  de  couleur  pâle  à  la  base  de  la  mandibule  inférieure; 
iris  brun  ;  pattes  gris  de  plomb. 

Le  jeune  diffère  peu  des  adultes  et  se  reconnaît  principalement  à  son  bec 
plus  court. 

Cette  espèce  est  souvent  confondue  avec  le  Numenius  phœopus 
dont  elle  est  assez  voisine.  Voici  les  caractères  qui  la  distinguent  à 
première  vue  de  son  congénère  : 


N.  tenuirostris. 

Bec  grêle.  —  Couvertures  inférieu- 
res des  ailes  et  plumes  axillaires  d'un 
blanc  pur  sans  taches. 

Abdomen  et  flancs  blancs  avec  de 
grandes  taches  brunes  en  forme  de  fer 
de  lance. 

Tarses  mesurant  0,067  millim. 


N.  phaeopus. 

Bec  relativement  robuste. — Couvertu- 
res inférieures  des  ailes  et  plumes  axil- 
laires d'un  blanc  pur  avec  des  taches 
et  des  raies  transversales  brunes. 

Abdomen  d'un  blanc  pur  avec  des 
raies  transversales  sur  les  flancs. 

Tarses  mesurant  0,076  millim. 


—  iJ5o  - 

jjab.  —  Ce  Courlis  appartient  au  bassin  de  la  Méditerranée  mais 

son  aire  géographique  est  peu 
étendue.  Il  est  de  passage  en 
Italie  et  hiverne  en  Romagne, 
en  Sicile  et  en  Sardaigne(<S«/ya- 
dori)  ;  de  passage  régulier  dans 
le  midi  de  la  France  ei  accidentel 
dans  le  nord  :  on  en  a  capturé 
près  de  Montpellier,  de  Nîmes, 
de  Marseille,  aux  environs  de 
Calais  (fév.  1840),  sur  les  plages  maritimes  du  Calvados,  en  Picardie 
{Degland  et  Gerbe),  et  il  a  été  tué  plusieurs  fois  le  long  de  la  Saône 
jusqu'à  Châlons  {Olphe-Galliard)'^\\ est  de  passage  régulii  r  en  automne 
et  au  printemps  dans  les  départements  de  l'Aude,  du  Gers,  de  l'Hérault, 
de  Tarn,  de  Tarn-et-Garonne  et  quelques  sujets  passent  l'hiver  dans 
le  département  des  Pyrénées-Orientales  {A.  Lacroix).  En  Espagne  cet 
oiseau  est  également  de  passage  régulier  {Saunders),  il  est  com- 
mun en  hiver  en  Andalousie  {h-bi/)  et  niche  souvent  non  loin  de  la 
côte  entre  Valence  et  Barcelone  (/.  Liditenstein)  et  régulièrement  aux 
îles  Baléares  {von  Ilomeyer)  ;  il  est  de  passage  en  Portugal  {Ca.tcdogo 
de  Gir aides)  et  se  montre  accidentellement  en  Galicie  (Rios),  en  l)al- 
matie  et  sur  le  littoral  autrichien  [Naumami). 

En  Grèce  il  est  plus  répandu  que  le  N.  phœopus:  von  der  Miihle 
dit  qu'il  doit  nicher  dans  ce  pays,  car  il  a  rencontré  de  ces  oiseaux  en 
été  et  a  eu  l'occasion  de  tuer  des  jeunes  en  août  ;  d'après  cet  auteur 
l'espèce  quitte  la  Grèce  en  septembre.  Ce  Courlis  est  commun  à  1  île 
de  Malte  {Wright),  passe  aux  doux  saisons  dans  la  Dobrodja  et  la  Bul- 
garie {Alléon)  et  se  montre  parfois  dans  le  Monténégro  [FritscJi).  A 
l'Est  on  l'observe  en  Crimée,  dans  la  Nouvelle-Russie,  dans  la  région 
du  Tchernozem  et  dans  la  région  Aralo-Caspieune  [Bogdanow)  ;  il 
niche  dans  les  steppes  d'Oronibourg  [Ecersinann). 

Le  Courlis  à  bec  grêle  se  montre  très  accidentellement  en  Belgique; 
mon  père  en  a  signalé  deux  captures  :  Tune  près  de  Louvain  en  185 1 
et  l'autre  non  loin  d'Ostende  en  1856;  j'ai  moi-même  mentionné  en 
1885,  un  sujet  qui  avait  été  tiré  à  Lillo  près  d'Anvers,  le  G  février 
1884,  par  M.  Louis  van  Delft  qui  le  conserve  dans  sa  collection. 
M.   le   baron  de  Selys-Longchamps  rapporte  (1)  que  MM.  Bovie  et 


(l)  Naiiinanniii,    185(',   p.  W.H. 


—  256  — 
« 
Roberti  lui  ont  dit  que  cette  espèce  a  niché  une  fois  près  de  St-Trond, 

mais  cela  me  paraît  peu  probable.  Un  individu  a  aussi  été  tué  près 
de  Spaarndam,  en  Hollande,  le  5  décembre  1856  {Schlégel),  et  un 
autre  à  l'île  de  Sylt  sur  la  côte  danoise  {von  Preen) . 

Cet  oiseau  hiverne  dans  le  nord  de  l'Afrique  {Loche,  Salviné)  ;  en 
Algérie,  dans  la  province  de  Constantine,  il  est  peu  commun  près  de 
la  côte,  mais  excessivement  abondant  près  des  lacs  situés  entre  Batna 
et  Constantine  {Taczanoioski).  On  l'observe  également  en  Egypte, 
en  Nubie,  en  Palestine  {Tristram)  et  en  Asie  Mineure  {Dresser). 

Mœurs.  —  On  ne  possède  que  fort  peu  de  renseignements  sur  les 
mœurs  de  cette  espèce,  ce  Ces  oiseaux  vivent,  écrivait  feu  mon  père, 
tantôt  dans  le  voisinage  des  eaux  courantes,  tantôt  dans  celui  des 
eaux  stagnantes,  mais  ils  vont  rarement  sur  les  bords  de  la  mer.  Il 
est  à  remarquer  qu'ils  quittent  journellement  le  voisinage  des  eaux 
pour  se  répandre  dans  les  prairies,  les  pâturages  et  les  champs  en 
friche,  où  ils  semblent  se  plaire  davantage  car  ils  y  restent  plus  long- 
temps. Toutefois,  ils  ne  peuvent  se  passer  d'eau,  car  ils  boivent 
beaucoup  et  se  baignent  fréquemment.  Pour  les  chasseurs  c'est  un 
gibier  difficile  à  atteindre,  car  ils  ne  se  laissent  point  approcher.  Leur 
chair,  d'un  goût  agréable,  est  estimée  en  Italie  où  on  en  fait  le  plus 
grand  cas.  » 

Aux  îles  Baléares,  dit  M.  A.  von  Homeyer,  ce  Courlis  séjourne 
volontiers  dans  les  prés  humides  et  il  entre  souvent  dans  l'eau  jusqu'au 
ventre;  dans  la  Dobrodja,  M.  Alléon  l'a  toujours  observé  dans  les 
champs,  jamais  dans  les  terrains  humides.  M.  Taczanowski  le  dit 
moins  farouche  que  ses  congénères.  Suivant  Malherbe,  cet  oiseau  est 
le  plus  commun  des  trois  espèces  qui  fréquentent  la  Sicile.  «  On  en 
voit  beaucoup  au  printemps  du  côté  de  Messine  et  de  Palerme,  et  il 
est  répandu  tout  l'hiver  dans  les  diverses  parties  de  la  Sicile,  notam- 
ment aux  environs  de  Catane  et  de  Syracuse.  »  Selon  M.  Salvador!, 
il  arrive  en  Sardaigne  en  automne  et  émigré  au  printemps. 

Reproduction.  —  «  Niche  dans  les  plaines  marécageuses,au  milieu 
des  herbes,  en  compagnie  du  Combattant  et  des  Bécassines  et  pond 
quatre  ou  cinq  œufs  d'un  blanc  laiteux  ou  d'un  blanc  nuancé  de  jau- 
nâtre, marqués  de  points  bruns  et  de  taches  irrégulières,  les  unes 
brunes,  les  autres  cendrées,  plus  larges  et  plus  nombreuses  sur  le 
gros  bout  ;  quelques-unes  sont  confluentes  ;  ils  mesurent  55  à  57  mil- 
limètres sur  38  à  42  millimètres,  »  {Degland  et  Gerbe.) 


20/ 


218.  —  Le  Courlis  pluvial  ou  Corlieu 
NUMENIUS    PHyEOPUS,     Lath.  ex  Lin. 

(PI.   217). 

ScoLOPAX  PH.EOPUS,  Lin.  Syat.  nat.  I,  p.  146  (1758)  et  I,  p.  243  (1766). 
NuMENius  MiNOR,  Briss.  Ornith.  V,  p.  317  (1760). 
NuMENius  PH.îîOPUs,  Lath.  Geyi.  syn.  suppl.  I,  p.  291  (1787). 
Ph^opus  ph.eopus,  Cuv.  Rèc).  an.  I,  p.  485  (1817). 
Ph.eopus  vulgaris,  Hem.  Phil.  zool.  II,  p.  254  (1822). 
Ph.eopus  arquatus,  Steph.  Shaw's  Gen.  zool.  XII,  1,  p.  36  (1824). 
NuMENius  melanorhynchus,  Bp.  Comp.  rend.  XLIIl,  p.  1021  (1856). 
NuMENius  H^siTATUS,  Hartl.  Ornith.  Westafr.,  p.  233  (1857). 
NuMENius  PLUviALis,  C.  F.  Dub.  PI.  col.  Ois.  Belg.  III,  p.  193  (1860). 
Der  Regen-Brachvogel,  en  allemand . 
The  Whimbrel,  en  anglais. 
De  Regenwulp,  en  flamand. 

Var.  Variegata 

Tantalus  variegatus,  Scop.  Del.  FI.  Faun.  Ins.  II,  p.  92  (1786). 

ScoLOPAX  LUZONIENSIS,  Gm.  Sijst.  nat.  I,  p.  656  (1788). 

Numeniusluzoniensis,  Lath.  Ind.  orn.  II,  p.  711  (1790). 

NuMENius  PH.EOPUS,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  II,  p.  \Q^  {IBW)  ai  auct.  plur. 

NuMENius  atricapillus,  ViciU.  Nouv.  Dict.  dlmt.  nat.  VIII,  p.  303(1817). 

NuMENius  UROPYGiALis,  Gould,  Pr .  zool.  Soc.  1840.  p.  175. 

NuMENius  VARIEGATUS,  Salvad.  Ann.  Mus.  civ.  Gen.  XVIH,  p.  330  (1882). 

NuMENius  PH.EOPUS  VARIEGATUS,  Seeb.  Brit.  B.  III,  p.  101  (1885). 

Taille  :  0™,32;  ailes  0,25;  bec  0,087;  tarses  0,076 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  Dessus  de  la  tête  brun  avec  une  raie 
médiane  irrégulière  blanchâtre  ;  nuque  cendrée  avec  des  stries  brunes  ;  man- 
teau brun,  les  plumes  bordées  de  cendré  brunâtre  ;  bas  du  dos  blanc,  taché 
de  brun  sur  le  croupion  ;  sus -caudales  blanches  barrées  de  brun  ;  cou- 
vertures des  ailes  brunes  avec  des  taches  blanchâtres  sur  les  bords  ;  scapu- 
laires  de  môme  couleur  avec  des  barres  plus  foncées  mais  peu  apparentes  et 
plus  ou  moins  bordées  de  blanchâtre  extérieurement  ;  rémiges  brunes,  les 
secondaires  tachées  de  blanc  ;  couvertures  inférieures  des  ailes  et  plumes 
axillaires  d'un  blanc  pur  avec  des  barres  brunes  ;  sourcils  et  côtés  de  la  tête 
blanchâtres  striés  de  brun  ;  lorums  bruns  variés  de  cendré  ;  gorge  l)lanche  ; 
cou  et  poitrine  d'un  cendré  blanchâtre  avec  des  stries  brunes  ;  abdomen,  jam- 
bes et  sous-caudales  d'un  blanc  pur,  mais  ces  dernières  avec  quelques  stries 
brunes  ;  lianes  marqués  de  stries  et  de  taches  transversales  brunes  ;  queue 
d'un  cendré  brunâtre  pâle  avec  des  bandes  transversales  brunes.  Bec  noi- 
râtre, plus  pâle  à  la  base  de  la  mandibule  inférieure  ;  iris  hnin  ;  [)  ittes  (l'un 
gris  ardoise. 

T.. ME  II.    -  1890.  33 


~  258  — 

Jeune  âge.  —  Ressemble  à  l'adulte  mais  d'une  teinte  plus  fauve:  les  plumes 
du  manteau  et  les  scapulaires  ont  des  taches  fauves  sur  leurs  bords  ;  les  cou- 
vertures des  ailes  sont  également  tachées  de  fauve.  Bec  plus  court  et  moins 
arqué. 

Poussin.  —  Teinte  générale  d'un  gris  blanchâtre,  faiblement  lavée  de 
roux  aux  parties  supérieures,  très  pâle  sur  les  côtés  de  la  tête  et  sur  les  par- 
ties inférieures,  presque  blanche  sur  le  ventre  ;  sur  le  vertex  calotte  noirâtre, 
de  forme  triangulaire,  descendant  en  pointe  sur  la  nuque,  et  reliée  au  bec  par 
une  bande  qui  traverse  le  front;  trait  noir  discontinu  sur  les  lorums,  les  yeux  et 
les  oreilles  ;  bande  sourcilière  blanche;  taches  longitudinales  noires  sur  le  dos 
et  sur  les  ailes  ;  bec  noir,  avec  la  base  de  la  mandibule  inférieure  jaunâtre  ; 
pieds  gris  de  plomb  ;  iris  brun  foncé  (J.  Vian). 

^  Var.  Variegata.  —  Cette  variété  se  distingue  de  la  forme  européenne  par 
des  taches  brunes  plus  grandes  sur  le  bas  du  dos,  le  croupion,  les  sus-caudales 
et  sur  les  couvertures  inférieures  des  ailes,  mais  ce  caractère  ne  paraît  nulle- 
ment constant.  Beaucoup  d'auteurs  n'ont  pas  admis  cette  variété. 


Hab.  —  Le  Gouiiis  corlieu  habite,  en  été,  le  Groenland  et  le  nord 

de    l'Europe    depuis    l'Islande 


jusqu'en  Sibérie,  probablement 
jusqu'au  Jenissei.  11  est  alors 
plus  ou  moins  commun  en 
Islande  {Faber),  aux  îles  Féroé 
[Feilden),  Orknej  et  Shetland, 
dans  le  N.-O.  de  l'Ecosse  {See- 
bohm),  sur  les  côtes  et  les  îles 
de  la  Finmark  {Collett),  dans  la 
Russie  septentrionale  jusqu'au  66°  1.  N.  et  la  Sibérie  occidentale 
jusqu'au  65»  {Bogdanoio). 

A  l'époque  des  passages, on  rencontre  de  ces  oiseaux  sur  toutes  les 
côtes  européennes,  et  ils  sont  alors  assez  abondants  sur  celles  de 
Belgique  et  même  près  de  l'Escaut.  Ils  hivernent  dans  le  midi  de 
TEspagne  {Saunders),dQ  l'Italie  {Giglioii)ei  en  Grèce  {Li7idermayer). 
Cette  espèce  hiverne  également  dans  le  nord  de  l'Afrique,  mais 
elle  paraît  être  plus  rare  dans  le  N.-E.  de  ce  continent,  où  elle  a 
cependant  été  observée  en  Egypte,  près  de  Karthoum  {de  Heuglin), 
sur  le  Nil  Bleu  {Vierthaler)  et  sur  les  côtes  de  l'Arabie  {Hempr.  et 
Ehrenb.),  Elle  a  également  été  observée  à  la  Côte  d'Or  {Schlégel), 
au  Transvaal  (A^r^.s),  au  Cap  de  Bonne-Espérance  [Layard),  aux 
îles  Canaries  {Bolle),  Açores  {Qodman),  Seychelles  [Newton),  Mada- 


-  2o9  - 

gascar  {Grandidier)  et  Maurice  {Verreaux)',  il  y  a  donc  lieu  de  sup- 
poser que  cet  oiseau  se  montre  sur  toutes  les  côtes  africaines. 

La  var.  Variegata  habite  en  été  le  Kamtchatka  jusqu'au  détroit 
de  Behring  [Stejnegey-)  ;  il  est  de  passage  dans  la  Sibérie  orientale 
{Bogdanow),  au  Japon  {Siebold),  en  Chine  [David),  à  Formose  [Swin- 
hoe)  et  hiverne  aux  Philippines  [Everett),  à  Malacca,  Bornéo,  Java 
(Vorderman),  à  Sumatra,  Célèbes  et  à  la  Nouvelle-Guinée  [S.  Mul- 
ler),  aux  Moluques  [Bernstein)  et  autres  îles  de  l'Océanie,  en  Aus- 
tralie, en  Tasmanie  (Gould),  aux  îles  Carolines,  Ponapé  [Finsch), 
Pelew  [Kubary],  etc. 

Mœurs.  —  Cet  oiseau  quitte  les  régions  septentrionales  en  août, 
et  passe  par  nos  contrées  vers  la  fin  du  même  mois  et  en  septembre  ; 
quelques  sujets  séjournent  parfois  dans  notre  pays  jusqu'en  octobre  ; 
il  repasse  à  la  fin  d'avril  et  en  mai,  et  à  cette  époque  il  est  assez  abon- 
dant sur  l'Escaut.  Cette  espèce  se  montre  au  printemps  avec  une 
grande  régularité,  ce  qui  lui  a  vallu,  dans  le  pays  flamand,  le  nom  de 
Mei-wulp;  c'est  pour  la  même  raison  que  les  Anglais  l'appellent  vul- 
gairement May-bird.  Naumann  dit  qu'en  Allemagne  on  voit  des 
sujets  adultes  dès  la  tin  de  juillet,  des  jeunes  jusqu'à  la  mi-août,  et 
que  les  retardataires  qui  se  montrent  encore  en  septembre  sont 
rares. 

Ces  Courlis  émigrent  en  suivant  les  côtes  maritimes  ;  ils  voyagent 
généralement  pendant  la  nuit  et  par  troupes  plus  ou  moins  considé- 
rables, formées  souvent  de  plusieurs  centaines  d'individus.  Ils  volent 
alors  habituellement  très  haut,  se  suivant  à  la  file  en  formant  deux 
lignes  disposées  en  angle  aigu  ;  il  est  rare  d'en  voir  loin  dans 
l'intérieur  des  terres. 

Cet  oiseau  vit  principalement  sur  les  bords  de  la  mer,  recherchant 
de  préférence  les  bancs  de  sable  et  les  endroits  où  il  peut  facilement 
patauger  dans  l'eau.  Dans  les  lieux  de  la  reproduction,  il  s'éloigne 
davantage  de  la  mer,  fréquente  les  bords  des  lacs,  des  fleuves,  des 
rivières  et  autres  eaux  découvertes,  d'où  il  se  rend  souvent  dans  des 
endroits  secs  et  même  arides.  L'eau  ne  lui  est  pas  indispensable  ;  il 
s'en  éloigne  souvent  pour  visiter  les  prés,  les  pâturages  et  même  les 
plaines  couvertes  de  bruyères  situées  à  une  grande  distance  d'un 
endroit  aquatique.  Il  se  tient  généralement  près  de  l'eau  durant  la 
nuit,  mais  pendant  le  jour  il  paraît  préférer  les  endroits  secs,  dont  il 
ne  s'éloigne  que  pour  se  désaltérer  ou  se  baigner. 

Par  ses  allures,  son  vol  et  ses  mreiirs,  cet  oiseau  ressemble  complè- 


—  260  — 

tement  au  Courlis  arqué  ;  comme  ce  dernier,  il  nage  avec  aisance  et 
sans  nécessité,  et  plonge  même  en  cas  de  danger.  A  l'approche  du 
mauvais  temps  et  pendant  la  pluie,  il  devient  inquiet,  bruyant  et 
il  perd  alors  de  sa  méfiance.  D'habitude  il  n'est  guère  moins  farouche 
que  son  congénère  le  grand  Courlis,  mais  les  jeunes  se  laissent  plus 
facilement  attirer  par  celui  qui  sait  bien  imiter  leur  cri.  Les  adultes 
fuient  l'homme  de  loin  ;  quand  une  troupe  nombreuse  s'abat  dans 
un  endroit,  on  voit  toujours  aux  alentours  des  individus  isolés, faisant 
fonction  de  sentinelles,  qui  donnent  l'alarme  au  moindre  danger  ;  ils 
savent  cependant  reconnaître  l'ennemi  et  ne  s'envolent  pas  à  la  vue 
d'un  être  inoffensif,  à  moins  qu'il  ne  leur  soit  suspect. 

Cet  oiseau  est  sociable,  mais  il  ne  recherche  que  la  société  des 
individus  de  son  espèce,  et  il  est  rare  de  le  voir  en  compagnie  du 
grand  Courlis.  Sa  voix  ressemble  à  celle  de  ce  dernier,  mais  elle  est 
d'un  ton  plus  haut.  Il  se  nourrit  de  larves,  d'insectSS,  de  petits  crus- 
tacés, de  vers,  de  limaces  et  de  baies. 

Reproduction.  —  Le  Courlis  corlieu  niche  dans  le  voisinage  du 
cercle  arctique  vers  la  fin  de  mai  et  en  juin.  A  ce  moment  il  perd  en 
partie  son  naturel  craintif  et  devient  plus  confiant  ;  il  est  vrai  que 
dans  ces  régions  désertes  il  n'a  guère  beaucoup  à  craindre  de  l'homme. 

Le  nid  est  une  simple  dépression,  garnie  de  brins  et  de  feuilles 
mortes,  cachée  par  une  touffe  d'herbes  ou  par  un  saule  nain.  Ce  nid 
n'est  pas  diflâcile  à  découvrir, car  les  oiseaux  en  trahissent  eux-mêmes 
la  présence  par  leur  agitation  et  leurs  cris  de  détresse.  La  ponte  est 
de  quatre  œufs,  rarement  de  trois.  Ceux-ci  sont  piriformes  et  entière- 
ment semblables  à  ceux  du  Courlis  arqué,  mais  plus  petits  :  ils 
mesurent  56  à  60  millim.  sur  42  à  44  millim. 

Il  est  probable  que  les  deux  sexes  couvent  alternativement,  car  on 
a  constaté  une  tache  incubatrice  aussi  bien  chez  le  mâle  que  chez  la 
femelle.  Tous  deux  se  montrent  fort  attachés  à  leur  couvée,  et  quand 
on  s'en  approche,  dit  Graba  dans  son  voyage  aux  îles  Féroé,  la 
femelle  vole  autour  de  l'intrus  en  poussant  les  cris  de  krururukru- 
rurukru....,  pendant  que  le  mâle  s'élève  dans  les  airs  en  faisant 
entendre  le  cri  de  u-tueu. 

Les  œufs  éclosent  ordinairement  dans  la  seconde  quinzaine  de  juin. 
Les  petits  grandissent  rapidement  et  se  séparent  de  leurs  parents  en 
juillet. 


-  261  - 

SOUS-FAMILLE 

DES  PHALAROPIXÉS.  —  PHALAROPIN.'E. 

Car.  —  Bec  droit,  de  longueur  moyenne;  ailes  longues  et  suraiguës,  la 
première  rémige  étant  la  plus  longue  ;  tarses  relativement  courts  ;  doigts  au 
nombre  de  quatre,  les  antérieurs  réunis  par  une  demi-palmature,  bordés, 
en  outre,  de  lobules  cutanés  s'étendant  d'une  articulation  phalangienne  à 
l'autre,  et  dont  le  bord  convexe  est  finement  dentelé.  Cette  conformation 
des  pieds  rapproche  ces  oiseaux  des  Foulques,  mais  par  le  restant  de  leur 
organisation  ils  sont  plus  voisins  des  Tringidés. 

GENRE  CXXII. 

PHALAROPE.  —  PHALAR0PU3. 

Phalaropus,  Rriss.  Om.  VI,  p.  12  (1760). 

Crymophilus,  Vieill.  An.  nouv.  orn.  élém.  p.  62  (1816). 

LoBiPES,  Cuv.  Règ.  an.  I,  p.  495  (1817). 

Steganopus,  Vieill.  N.  dict.  dliist.  nat.  XXXII,  p.  136(1819). 

HoLOPODius,  Bonap.  Comp.  reyid.  XLIII.  p.  420  (1856). 

Car.  —  Bec  droit,  de  la  longueur  de  la  tête  ou  un  peu  plus  long  ;  narines 
basales,  latérales,  linéaires,  placées  dans  une  rainure  ;  ailes  allongées  mais 
ne  dépassant  pas  la  queue,  suraiguës  ;  queue  moyenne,  cunéiforme  ;  les 
plus  grandes  sous-caudales  atteignant  l'extrémité  des  rectrices  ;  jambes 
emplumées  aux  deux  tiers  environ  ;  tarses  relativement  courts,  scutellés  ; 
doigts  réunis  à  leur  base  par  une  membrane  s'étendant  au  delà  de  la  pre- 
mière articulation,  garnis  de  lobes  latéraux  dans  le  reste  de  leur  étendue, 
comme  chez  les  Grèbes  et  les  Foulques  ;  pouce  grêle. 

Uah.  —  Lr's  trois  espèces  connues  de  ce  genre  habitent  l'hémi- 
sphère boréal,  et  particulièrement  la  zone  polaire. 

219.  —  Le  Phalarope  platyrhynque. 
PHALAROPUS  FULICARIUS,  Bp.  ex  Lin. 

(PI.  218  et  219,  fig.  1.) 

Tringa  fulicaria.  Lin.  S\j!^t.  nat.  I,  p.  148  (1758)  ;  I,  p.  249  (1766). 

Phalaropus  rufescens,  Briss.  Or7i.  VI,  p.  20  (1760). 

Phalaropus  lobatus,  Tiinst.  Orn.  Bril.  p.  3  (1771). 

Phalaropus  rufus,  Bcchst.  Nat.  Deutschl.  IV,  p.  381  (1809). 

Phalaropus  platyrhvnchus,  Tem.  Man.  d'orn.  p.  459(1815). 

Phalaropls  grisecs,  Lcach,  Sysl.  cat.  M.  Birds  Br.  Mus.  p.  34  (1816). 

Crvmophiu's  rufcs,  Vieill.  .V.  dict.  dlust.  nni.  VIII,  p.  521  (1817). 

Phalaropus  fulicarius,  Bonap.  Comp.  Ust  B.  p.  54  (1838). 

Phalaroim^s  pi.ATVRosTRis,  Nonlm.  iJrmirf.  Voif.  Russie  mrr.  III,  p.  250  (1840). 


262  — 


Phalaropus  asiaticus.  Hume,  Stray  Feath.  I,  p.  246  (1873). 

Crymophilus  fuligarius,  Stejn.  Bull.  U.  S.  nat.  Mus.  n"  29,  p.  140  (1885). 

Der  plattschnablige  Wassertreter,  en  allemand, 

The  grey  Phalarope,  en  anglais. 

De  rosse  Franjepoot,  en  flamand. 

Taille:  0,16  mâle;  0,18  femelle;  ailes  0,12  à  0,137;  bec  0.022; 
tarses  0,020. 

Description  des  deux  ssxes  adultes  en  été.  —  Front,  dessus  de  la  tête,  nuque, 
tour  du  bec  et  gorge  d'un  brun  noirâtre  ;  joues  et  raies  sourcilières 
blanches  ;  manteau  et  scapulaires  noirs,  mais  toutes  les  plumes  bordées  de 
roux  jaunâtre  ;  bas  du  dos  blanc  ;  croupion  roux  ;  sus- caudales  d'un  roux 
jaunâtre  avec  une  strie  brune  au  centre  ;  couvertures  des  ailes  cendrées,  bor- 
dées de  blanchâtre,  les  plus  grandes  largement  terminées  de  blanc,  ce  qui 
forme  une  bande  blanche  sur  l'aile  ;  rémiges  brunes  ;  rectrices  médianes 
brunes,  les  autres  d'un  cendré  brunâtre  lisérées  de  blanchâtre  ;  devant  et 
côtés  du  cou  ainsi  que  toutes  les  parties  inférieures,  y'compris  les  sous-cau- 
dales, d'un  roux  rougeâtre  sombre.  Bec  épais,  trigone  à  la  base,déprimé  dans 
toute  son  étendue,  rétréci  vers  le  milieu,  élargi  vers  son  extrémité,  d'un 
jaune  olive  à  extrémité  noirâtre  ;  iris  brun  rougeâtre  ;  pattes  olivâtres. 

La  femelle  ne  se  distingue  du  mâle  que  par  une  taille  plus  forte  ;  ses  cou- 
leurs sont  aussi  généralement  plus  vives. 

Les  deux  sexes  en  hiver.  —  Face  et  côtés  de  la  tête  ainsi  que  les  parties 
inférieures  d'un  blanc  pur  ;  partie  moyenne  de  la  nuque  et  occiput  noirâtres; 
et  cette  teinte  se  prolonge  en  une  bande  latérale  jusqu'au-dessus  de  l'œil  ; 
bande  noirâtre  derrière  l'œil  ;  dos,  scapulaires,  croupion  et  sus-caudales 
d'un  beau  gris  bleuâtre,  avec  les  scapulaires  terminées  par  un  liséré  blan- 
châtre ;  ailes  et  queue  comme  en  été. 

Jeune.  —  DiÔere  surtout  de  l'adulte  en  plumage  d'hiver,  en  ce  que  toutes 
les  parties  dorsales  sont  brunes  avec  les  plumes  bordées  de  roux  jaunâtre  pâle. 

Bab.  —  Le  Phalarope  platyrhynque  est  un  habitant  de  la  zone 

p^  polaire  arctique,  où  il  niche 
entre  le  68'^  et  le  80"  1.  N.  Il 
paraît  peu  répandu  en  Islande 
{Faber),  mais  il  est  commun  dans 
le  nord  du  Groenland  et  dans  le 
détroit  de  Davis  (Holbôll),  au 
Spitzberg,  même  dans  les  parties 
les  plus  septentrionales  {Malm- 
gren),  et  probablement  dans  la 
Nouvelle-Zemble,  bien  que  de  Heuglin  ne  l'y  ait  pas  rencontré.  11  est 
également  commun  dans  le  Taimyr  et  dans  tout  le  nord  de  la   Sibé- 


—  263  —       ' 

rie  {Middendorff),  dans  le  détroit  de  Behring  (Stejneger),  à  la  pointe 
de  Barrow  et  aux  îles  du  Commandeur  [Nelson],  ainsi  que  dans  toute 
l'Amérique  boréale  jusqu'au  82  l/2o. 

En  automne,  cet  oiseau  émigré  vers  le  Sud,  mais  ne  quitte  qu'acci- 
dentellement la  zone  froide;  on  le  voit  alors  en  Norvi'ège  (Collett),  en 
Suède  [Nilsson],  en  Danemark  [Kjarbôlling],  près  des  côtes  occiden- 
tales de  la  Russie  [Buchner),  dans  le  nord  de  l'Allemagne  {Borggrevé) 
et  aux  îles  Britanniques  {Seebohm).  Il  se  montre  accidentellement  en 
Pologne  [Taczanowski),  en  Bohême  [Fritsch),  en  Tyrol  [Althamer), 
en  Suisse  [Schneider-]  et  en  Belgique, où  un  individu  a  été  tiré  en  1855 
près  de  Louvain  et  deux  autres  près  d'Ostende  (C  F.  Dubois)', 
M.  de  Selys-Longchamps  dit  qu'il  est  de  passage  accidentel  dans  les 
marais  de  la  Campine  et  sur  les  côtes  de  Flandre,  mais  seulement 
pendant  les  hivers  rigoureux.  Il  est  de  passage  irrégulier  dans  le 
nord  de  la  France  :  en  octobre  1834,  un  grand  nombre  d'individus 
ont  été  capturés  à  Dunkerque,  et  on  en  a  tué  à  cette  époque  tout  le 
long  de  la  mer  jusqu'à  Bayonne,  par  suite  d'une  tourmente  et  d'un 
vent  impétueux  qui  a  duré  plusieurs  jours  {Degland  et  Gerbe).  Des 
captures  accidentelles  ont  également  été  faites  enFortugal [du Bocage), 
en  Espagne,  où  un  sujet  a  été  tué  le  20  septembre  1871  dans  la 
lagune  de  Janda  entre  Cadix  et  Tarifa  [Irby],  en  Savoie  [Bail l y),  près 
des  lacs  du  nord  de  l'Italie  {Savi),  et  deux  spécimens  ont  été  pris  près 
de  Naples  en  décembre  1869  et  en  janvier  1870  (Salvadori);  on 
signale  même  une  capture  au  Maroc  près  de  Tanger  (Drake). 

Cette  espèce  a  également  fait  des  apparitions  accidentelles  dans  le 
sud  de  l'Asie  :  elle  a  été  capturée  près  de  Calcutta  {Bl(/th),  dans  les 
golfes  d'Oman  et  Persique,  ainsi  que  sur  la  côte  de  Mekran  {Hume). 
En  Amérique  on  le  voit  parfois  aux  Etats-Unis  où  on  a  pris  des  sujets 
dans  le  Nouveau-Brunswick,  dans  l'Etat  de  New- York,  dans  le 
Kentucky,  l'Ohio  et  dans  la  Nouvelle-Jersey  [Audubou). 

Mœurs.  —  Ce  Phalarope,  d'après  liolboll,  ne  revient  au  Groenland 
que  (|uan(l  la  saison  est  déjà  avancée,  car  on  ne  l'y  voit  jamais  avant 
le  commencement  de  juin.  «  Tant  que  notre  marche  fut  enrayée  par 
les  banquises,  dit  liolboll  (1),  nous  vîmes  constamment  de  ces  oiseaux 
nager  entre  les  glarons.  Cette  espèce  est  rare  dans  le  sud  du  Groen- 
land, où  on  ne  la  voit  qu'à  l'époque  des  passages  ;  mais  dans  le  nord 
de  ce  pays,  à  partir  du  68"  1.  N.,  elh;  est  très  commune  et  niche  sur 

(1)  C.   IlulboU,   Omit  h.    Biitra^'  :,ur  Faiina  Grocn'.aïuis.    \^.   41. 


_  264  — 

toutes  les  îles  qui  possèdent  des  étangs.  Elle  ne  niche  jamais  à  l'inté- 
rieur des  fjords,  ce  qui  la  distingue  de  son  congénère,  qui  se  reproduit 
près  des  côtes  ;  pour  le  reste,  les  deux  espèces  ont  à  peu  près  les 
mêmes  moeurs.  Les  jeunes  commencent  à  voler  en  août  ;  en  sep- 
tembre on  les  voit  réunis  aux  adultes,  en  plumage  d'hiver,  voltigeant 
dans  les  roseaux  et  autour  des  îlots;  ils  quittent  ces  parages  vers  la 
fin  de  ce  mois  et  on  les  rencontre  alors  par  petites  troupes  près  des 
îles  du  sud  du  Groenland.   » 

C'est  sur  la  mer  que  ces  oiseaux  passent  la  mauvaise  saison,  et  la 
mer  leur  fournit  une  nourriture  tellement  abondante,  qu'il  s'engrais- 
sent au  point  qu'on  peut  à  peine  les  dépouiller.  Audubon  dit  qu'ils 
aiment  à  s'abattre  sur  les  algues  flottantes,  et  qu'ils  y  sont  très  occu- 
pés, sans  doute  à  chercher  leur  nourriture.  Ce  qui  est  certain,  c'est 
qu'ils  ont  tout  à  fait  les  allures  de  vrais  pélagiens  et  qu'ils  nagent 
aussi  bien  que  des  palmipèdes.  «  Ces  oiseaux,  dit  Â7  E.  Brehm,  sont 
on  ne  peut  plus  attrayants;  ils  sont  admirablement  doués  et  ont  des 
mouvements  légers  et  gracieux;  ils  se  plaisent  sur  la  terre  ferme 
comme  dans  les  marais,  dans  l'eau  comme  dans  l'air.  Leur  démarche 
ressemble  à  celle  des  Tringidés  et  ils  vivent  paisiblement  au  bord  des 
eaux;  le  cou  un  peu  rentré,  ils  trottinent,  courent,  se  meuvent  avec 
agilité  au  milieu  des  roseaux  et  savent  parfaitement  s'y  cacher;  leur 
vol  est  rapide.  Ils  nagent  avec  facilité,  élégance  et  une  célérité 
remarquable,  et  leur  corps  semble  à  peine  effleurer  l'eau  ;  ils  ont 
alors  le  plumage  serré  au  corps  et  ils  rament  vigoureusement,  mais 
ne  plongent  jamais.  Quand  ils  sont  blessés,  au  lieu  de  disparaître 
sous  l'eau,  ils  se  dirigent  à  toute  vitesse  vers  les  roseaux  où  ils  se 
cachent  à  merveille.  De  l'eau  ils  s'élèvent  dans  l'air^  et  de  même,  ils 
se  laissent  retomber  de  fort  haut  à  la  surface  de  l'eau.  Ils  vaquent, 
en  nageant,  à  toutes  leurs  occupations,  cherchent  leur  nourriture, 
mangent,  se  pourchassent,  s'accouplent  même.  Peu  leur  importe  que 
l'eau  soit  tranquille  ou  agitée,  chaude  ou  froide. 

«  Leurs  sens  sont  fins  et  leur  intelligence  est  très  développée. 
Pleins  de  confiance,  ils  laissent  l'homme  les  approcher  jusqu'à  une 
dizaine  de  mètres  ;  s'il  ne  les  effraye  pas,  il  peut  les  observer  à  son 
aise,  mais  s'il  fait  mine  de  les  chasser,  ils  deviennent  prudents,  et  le 
premier  coup  de  feu  les  rend  défiants.  Ces  oiseaux  ne  paraissent  pas 
s'inquiéter  des  autres  créatures,  du  moins  dans  la  saison  des  amours  : 
c'est  pour  eux-mêmes  qu'ils  vivent.  Cependant  l'amour  exerce  aussi 
sur  eux  son  empire  et  détermine  des  combats  entre  les   mâles  eu 


-    ^6o  - 

l'honneur  des  femelles.  Ces  luttes  commencent  clans  l'eau  et  se  conti- 
nuent dans  l'air.  Un  mâle  qui  arrive  dans  le  domaine  que  s'est  choisi 
un  couple,  excite  la  jalousie  du  légitime  possesseur;  les  deux  oiseaux 
nagent  l'un  contre  l'autre,  puis  s'élèvent  dans  l'air,  se  battent  jusqu'à 
ce  que  l'intrus  soit  mis  en  fuite.  Les  deux  sexes  se  témoignent  beau- 
coup d'amour,  restent  toujours  l'un  près  de  l'autre  et  se  quittent 
rarement.  »  Il  se  peut  que,  sur  les  grands  étangs,  plusieurs  couples 
nichent  à  quelque  distance  les  uns  des  autres  ;  mais  pour  les  petits 
étangs,  il  paraît  que  chaque  couple  en  occupe  un  et  n'y  tolère  aucun 
autre. 

Suivant  de  Heuglin,  qui  a  observé  cette  espèce  au  Spitzberg  (1),  ce 
ne  serait  qu'à  la  seconde  année  qu'elle  pourrait  se  reproduire.  Les 
sujets  d'un  an  vivent  par  petites  troupes  de  cinq  à  dix  individus, 
prenant  leurs  ébats  dans  la  mousse,  dans  l'herbe,  dans  les  endroits 
tourbeux,  près  des  rivières  et  des  étangs,  et  principalement  dans  les 
lieux  non  accidentés,  rarement  dans  les  endroits  escarpés  ou  rocail- 
leux du  rivage.  Ils  se  poursuivent  en  jouant,  tant  à  terre  que  dans 
l'eau,  mais  il  est  rare  d'en  voir  sur  la  mer  pendant  l'époque  de  la 
reproduction.  Leur  cri  d'appel  ressemble  à  celui  des  Bécassines,  mais 
de  Heuglin  ne  l'a  entendu  qu'au  moment  où  les  oiseaux  s'envolaient. 
Leur  vol,  toujours  d'après  le  môme  observateur,  est  élevé,  rapide  et 
troublé,  et  l'oiseau  décrit  de  nombreux  zigzags.  1  a  nourriture  se 
compose  de  petites  mouches,  de  larves,  d'araignées  et  de  vers. 
Malmgren  dit,  qu'au  Spitzberg,  ce  Phalarope  se  nourrit  presque 
exclusivement  d'une  petite  algue,  qui  est  là  très  commune.  En  volant, 
dit  Faber,  il  fait  entendre  un  cri  ressemblant  à  ihm  ihm. 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  niche,  suivant  de  Heuglin,  aussi  bien 
dans  des  endroits  secs  que  marécageux,  et  souvent  sur  une  colline 
inaccessible  aux  renards.  Il  se  creuse  une  petite  fosse  dans  le  sable 
près  du  rivage,  ou  dans  l'herbe  sur  un  monticule  émergeant  d'un 
marais  ;  cette  excavation  est  protégée  par  des  pierres  et  garnie  parfois 
de  quelques  brins  d'herbe.  La  ponte,  qui  a  lieu  vers  la  mi-juin,  se 
compose  de  quatre  œufs  d'un  brun  olive  pâle,  marqués  de  taches  plus 
foncées  et  d'auti-es  noirâtres  et  noires,  souvent  contluentes  vers  le  gros 
bout.  Ces  œufs  ressemblent  à  ceux  du  Phalarope  hyperboré,  mais  ils 
sont  généralement  plus  gros  :  ils  mesurent  de  28  à  32  millim.  sur  t'I. 

Il  est  probable  que  les  deux  sexes  se  partagent  les  soins  de  l'incu- 

(1)  voa  Heuglin,  Reisen  nacli  dcin  Nordpûlarmcer  I,   p.    lO'J  et  IH,  p.   122. 

To.ME  IL— 1890  34 


—  266  — 

pation,  car  tous  deux  portent  des  taches  incubatrices  ;  de  Heuglin  n'a 
vu  couver  que  des  femelles. 

220.   —  Le  Phalarope  hyperboré. 
PHALAROPUS  CINEREUS,  Briss. 

(PL  218  et  219  f.  2). 

Phalaropus  CINEREUS  et  Fuscus,  Briss.  Ornith.  VI,  pp.  15,  18  (1760). 

Tringa  lobata  et  hyperborea.  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  249  (1766). 

Phalaropus  hyperboreus,  Tunst.  Orn,  Brit.  p.  3.  (1771). 

Tringa  fusca,  Gm.  Syst.  nat.  I,  p.  675  (1788). 

Phalaropus  vulgaris,  Bechst.  Orn.  Taschenb.  II,  p.  317  (1803). 

Phalaropus  williamsii,  Simm.  Trajis.  Linn.Soc.  VIII,  p.  264  (1807). 

LoBiPES  hyperborea,  Steph.  Shaw's  Gen.  Zool.  XII,  I  p.  169'(T824) . 

Phalaropus  ruficollis  et  cinerascens,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  II,  pp.  203-4  (1826). 

Lobipes  CINEREUS,  Landb.  Syst.  Aufz.  Yog.  Wilrtemb.  p.  65  (1834). 

Phalaropus  angustirostris,  Naum.  Yog.  Deutschl.  VIII,  p.  240  (1836). 

Phalaropus  lobatus,  Salvad.  Ucc.  cTItal.  II,  p.  210  (1871). 

Lobipes  tropicus.  Hume,  Stray  Feath.,  1873,  p.  247. 

Lobipes  lobatus,  Baird,  Brew.  et  Bidgw.  Water-Birds N.  Amer.  I,  p.  330(1880). 

Der  schmalschnablige  Wassertreter,  en  allemand. 

The  Red-necked  Phalarope,  en  anglais. 

De  (jraauwe  Franjepoot,  en  flamand. 

Taille:  0,14  à  0,15  ;  ailes  0,112;  bec  0,21  ;  tarses  0,018. 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  Tête,  nuque  et  parties  dorsales 
d'un  brun  cendré  velouté,  avec  quelques  taches  allongées  roussâtres  sur  le 
haut  du  dos  et  sur  les  scapulaires  ;  gorge  et  une  petite  tache  sur  l'œil  d'un 
blanc  pur  ;  large  collier,  interrompu  sur  la  nuque,  d'un  roux  ardent  cou- 
vrant le  haut  de  la  poitrine  et  remontant  latéralement  vers  la  région  de 
l'oreille  ;  côtés  de  la  poitrine  d'un  brun  cendré  ;  ailes  brunes  avec  une  bande 
transversale  blanche  ;  rémiges  noirâtres  avec  les  baguettes  blanches  ;  queue 
brune,  les  rectrices  latérales  lisérées  de  blanc  ;  parties  inférieures  blanches 
avec  des  taches  d'un  cendré  brunâtre  sur  les  flancs  et  sur  les  couvertures 
latérales  de  la  queue.  Bec  grêle,  pointu,  comprimé,  noir  ;  iris  brun  ;  pattes 
d'un  cendré  brunâtre  avec  les  lobes  des  doigts  blanchâtres. 

La  taille  de  la  femelle  est  un  peu  plus  forte  que  celle  du  mâle  et  ses  cou- 
leurs sont  plus  vives. 

Les  deux  sexes  en  hiver.  —  Parties  supérieures  cendrées,  plus  foncées  au 
centre  des  plumes  ;  front,  raie  sourcilière,  côtés  du  cou  et  parties  inférieures 
d'un  blanc  pur  ;  une  bande  d'un  cendré  foncé  derrière  les  yeux  ;  côtés  de  la 
poitrine  cendrés  ;  couvertures  supérieures  des  ailes  cendrées  et  lisérées  de 


—  267   - 

blanchâtre,  les  plus  grandes  largement  terminées  de  blanc  et  formant  une 
bande  transversale  blanche  sur  l'aile  ;  le  reste  comme  en  été.  Pattes  d'un 
gris  clair,  avec  les  parties  membraneuses  d'un  jaune  pâle  (1). 

Jeune.  —  Dessus  de  la  tête,  nuque  et  parties  dorsales  d'un  brun  noirâtre, 
avec  les  plumes  du  dos  et  les  scapulaires  bordées  de  roux  jaunâtre  clair  ;  ailes 
comme  chez  les  adultes  en  hiver,  mais  plus  foncées  ;  région  des  oreilles  et 
côtés  de  la  poitrine  cendrés  ;  front,  raie  sourcilicre,  côtés  du  cou  et  parties 
inférieures  d'un  blanc  pur  avec  quelques  stries  cendrées  sur  les  flancs  ;  le  reste 
comme  chez  l'adulte  en  hiver. 

Poussin.  —  Parties  supérieures  d'un  roux  jaunâtre  varié  de  noir  sur  le 
haut  du  dos  ;  calotte  noire,  se  prolongeant  en  pointe  vers  la  nuque  ;  région 
de  l'oreille  et  lorums  bruns  ;  raies  sourcilières  et  côtés  de  la  tête  blanchâtres  ; 
milieu  et  bas  du  dos  noirs  avec  deux  bandes  blanchâtres  piquetées  de  rous- 
sâtre;  gorge  jaunâtre  ;  parties  inférieures  cendrées,  variées  de  blanc  sur  le 
milieu  de  l'abdomen  ;  ailes,  flancs  et  queue  variés  de  noir  et  de  roux. 

Hab.  —  Le  Phalarope  hyperboré  habite  toute  la  zone  arctique  et 

niche  entre  le  62°  et  le  75°  1.  N., 
rarement  plus  au  sud  ;  il  se  repro- 
duit   cependant    parfois     dans 
l'extrême  nord  de  l'Ecosse  et  sur 
les  îles  voisines  {Dresser),  mais 
sur  les  côtes  de  l'Angleterre  on 
ne  le  voit  que  très  rarement  et 
seulement  en  hiver  (Harting).  Il 
est  commun  en  Laponie,   mais 
ne  se  montre  que  rarement  pendant  les  migrations  dans  le  sud  de  la 
Scandinavie  (M/.s'.von,  Colleft);  il  habite  également,  en  été,  les  toundras 
aussi  bien  de  la  Russie  européenne  que  de  la  Russie  asiatique,  ainsi 
que  les  îles  russes  de  l'Océan  Pacifique;  dans  le  reste  de  la  Russie 
et  de  la  Sibérie  c'est  un  oiseau  de  passage  {Bogdanow).  Il  n'a  pas  été 
observé  au  Spilzberg,  mais  de  Heugliii  l'a  trouvé  par  petites  troupes 
à  Waigatsch,  ce  qui  lui  lait  supposer  qu'il  existe  aussi  à  la  Nouvelle- 
Zemble.  Au  Danemark  et  dans  le  nord  do  l'Allemagne,  on  voit  cet 
oiseau  irrégulièrement  en  automne  et  en  hiver.  Dans  les  autres  parties 
de  l'Europe  cette  espèce  ne  se  montre  que  très  accidentellement  et  seu- 
lement pondant  les  hivers  très  rigoureux;  elle  a  été  observée  sur  les 
côtes  de  la  Hollande  [Tcmminck)  et  de  la  France  [Dcglandei  Gerbe), 
près  des  lacs  et  des  fleuves  de  la  Suisse  {Meisner  et  Schinz),  et  quatre 


(1)  La  figure  2  de  notre  planche  219  représente  le /(V/z/f  et  non  IW/z/Ze' eu  hiver. 


—  268  - 

ou  cinq  captures  ont  été  faites  en  Italie  {Salvadori);  un  individu  de 
cette  espèce  a  été  pris  en  Bohême  le  6  novembre  1844  et  un  autre  le 
18  septembre  1853  {Tschusi-Schmidhofen)  ;  elle  a  également  été 
capturée  à  diverses  reprises  en  Prusse  [Boeck),  en  Silésie  {Gloger),  en 
Hongrie  (Jukoioits),  dans  le  Siebenburgen  [Jickeli),  en  Ga'icie 
{Zioadzki)  et  dans  le  sud  de  la  Russie  [de  Nordmann).  En  Belgique  il 
est  encore  plus  rare  que  le  précédent  sur  nos  côtes  maritimes  et  seu- 
lement pendant  les  hivers  rigoureux  {de  Selys-Longchamps) . 

En  Asie  on  rencontre  cet  oiseau  dans  toutes  les  parties  septen- 
trionales jusqu'au  Japon  {Perry).  Il  a  été  observé  en  hiver  au 
Turkestan  [Severtzoïv),  sur  les  côtes  de  la  mer  Caspienne  [Radde),  de 
la  Perse  {Blanford),  et  jusque  sur  celles  de  l'Inde  {Jerdon),  de  la 
Chine  [David)  et  des  îles  Célèbes  [Reinwordt),  Moluques  {Foi^stcn), 
Amboine  [Hocdt),  Nouvelle-Guinée  [Cha/ lenyer)^^ Avou.  [Wallace], 
Nouvelle-Bretagne  [Finsch)  et  même  de  l'Algérie  {Loche). 

En  Amérique  nous  trouvons  ce  Phalarope  dans  toute  la  zone 
septenirionale;  en  hiver  on  le  rencontre  parfois  sur  les  côtes  méri- 
dionales des  Etats-Unis,  et  il  pousse  parfois  ses  migrations  jusqu'au 
Guatemala  [Sclater,  Salvin)  et  aux  îles  Bermudes  {von  Martens). 

Mœurs.  —  Cet  oiseau  est  de  retour  en  Islande  et  au  Groenland 
entre  le  20  et  le  25  mai  ;  il  émigré  à  la  lin  du  mois  d'août. 

Dans  la  zone  polaire,  on  rencontre  ce  Phalarope  près  des  eaux 
garnies  de  roseaux  qui  se  trouvent  non  loin  de  la  côte.  Holboell  dit 
que  ces  oiseaux  quittent  tous  les  soirs  les  étangs  pour  se  rendre  dans 
les  fjords,  y  nager  et  y  chercher  leur  nourriture.  Celle-ci  consiste  en 
insectes,  larves  et  annélides,  qu'ils  prennent  aussi  bien  dans  l'eau  que 
sur  la  terre.  Quand  ils  nagent,  on  les  voit  constamment  baisser  la 
tête  pour  saisir  les  insectes  qui  se  tiennent  à  la  surface  de  l'eau. 

Le  Phalarope  hyperboré  ne  ditFère  guère  du  précédent  par  ses 
mœurs;  comme  ce  dernier,  c'est  un  véritable  oiseau  marin  qui  ne  se 
montre  près  des  eaux  douces  que  pendant  la  saison  des  amours  ;  mais 
Faber  dit  qu'il  s'avance  plus  profondément  dans  les  terres  et  qu'il  en 
a  vu,  en  Islande,  nager  dans  des  sources  chaudes  où  l'on  avait  de  la 
peine  à  tenir  la  main.  Comme  cet  oiseau  ne  se  laisse  pas  vite  intimider, 
on  peut  facilement  s'en  approcher  pour  l'observer.  Le  cri  d'appel, 
suivant  de  Heuglin,  est  inie-ununioi  ;  celui  des  vieux  mâles  ressemble 
au  cri  des  Bécassines,  mais  il  est  beaucoup  plus  doux. 

Reproduction.  —  Ces  oisenux  quittent  la  mer  vers  la  tin  de  mai  et 
se  mettent  aussitôt  en  quête  d'un  endroit  convenable  pour  la  nidifi- 


-  269  — 

cation.  Le  nid  est  une  simple  petite  fosse  creusée  entre  les  herbes, 
soit  au  bord  d'un  étang,  soit  sur  un  petit  monticule  émergeant  de 
l'eau.  La  femelle  y  dépose,  dans  les  premiers  jours  de  juin,  quatre 
oeufs  sur  une  litière  formée  de  brins  ou  de  feuilles  mortes.  Ceux-ci 
sont  piriformes,  peu  luisants,  d'un  vert  ou  d'un  brun  olivâtre,  marqués 
de  taches  profondes  d'un  cendré  violacé  et  de  nombreuses  taches 
brunes  et  noirâtres  qui  recouvrent  en  partie  les  précédentes.  Ces 
oeufs  mesurent  environ  30  rniHimètres  sur  20,  et  éclosent  au  bout  de 
quinze  à  dix- sept  jours. 

Les  petits,  dès  leur  naissance,  suivent  leurs  parents  et  vont  chercher 
leur  première  nourriture  dans  les  herbages.  Père  et  mère  veillent 
avec  le  plus  grand  soin  sur  leur  progéniture,  et  rien  n'égale  leur 
inquiétude  lorsque  quelqu'un  s'en  approche.  Il  paraît  que  le  mâle 
partage  avec  sa  compagne  les  soins  de  l'incubation.  Les  poussins  ont 
les  allures  des  jeunes  Tringidés,  avec  cette  diâférence,  dit  A.  Brehm, 
qu'ils  nagent  parfaitement;  Faber  et  Holboell  prétendent  le  con- 
traire. 

FAMILLE  DES  RÉGURVIROSTRIDÉS 

Car.  —  Bec  long,  grêle,  aminci  en  avant,  aigu,  plus  ou  moins 
retroussé  et  plus  ou  moins  sillonné  ;  ailes  longues,  atteignant  l'extré- 
mité de  la  queue  ou  la  dépassant,  aiguës;  queue  courte;  jambes  nues 
sur  les  deux  tiers  au  moins  de  leur  étendue,  réticulées  ;  tarses  aussi 
longs  ou  plus  longs  que  le  bec,  réticulés  ;  doigts  antérieurs  plus  ou 
moins  palmés;  pouce  très  petit,  élevé  ou  nul. 

Hah.  —  Cette  famille  a  des  représentants  dans  les  parties  tempé- 
rées et  chaudes  des  cinq  parties  du  monde. 

Mœurs.  —  Ce  sont  des  oiseaux  d'un  naturel  paisible  et  sociable, 
qui  se  plaisent  près  des  eaux  douces  ou  saumâtres,  ou  sur  les  plages 
limoneuses.  Ils  nagent  avec  facilité  et  se  nourrissent  surtout  de  petits 
animaux  a(jiiati(|ues. 

GENRE  CXXIII. 

AVOCETTE.  —  RECURVIROSTRA. 

IIecurviuostra,  Lin.  .S'.  N.  I,  p.  151  (1758);  I,  p.  256  (17G0). 
AvocETTA,  liriss  Ondik.  VI,  p.  538  (1700). 
MiMANTOPUS,  Seeb.  Brit.  Hin/s,  III,  p.  73  ^l^^^S). 

Car.  —  Bec  long,  lloxible,  sillonné  à  la  l)iise,  déprimé  dans  sa  partie  anté- 
rieure (jiii  e.st  fortomeut  retrnusséc  et  très  niinee  ;  narines  l)asales,  latérales, 


—  270  - 

linéaires;  ailes  allongées,  aiguës,  dépassant  légèrement  la  queue;  celle-ci 
courte,  presque  carrée  ;  jambes  nues  sur  les  deux  tiers  de  leur  étendue  ;  tarses 
de  la  longueur  du  bec,  grêles,  réticulés  ;  doigts  antérieurs  réunis  par  une 
palmature  échancrée  qui  se  prolonge  jusqu'à  leur  extrémité  ;  pouce  presque 
rudimentaire  et  ne  reposant  pas  sur  le  sol. 

Hab.  —  Les  parties  tempérées  et  chaudes  des  cinq   parties  du 
monde. 

221.  —  La  Récurvirostre  avocette 

RECURVIROSTRA  AVOCETTA,  Lin. 

(PI.  220). 

Recurvirostra  AVOCETTA,  Lin,  Syst.  nat.  I.  p.  256  (1766). 
ScoLOPAx  AVOCETTA,  Scop.  Ann.  I.  Hist.  nat.  p.  92  (1769) . 
Recurvirostra  europ.ea,  Dumont,  Dict.  se.  nat.  III,  p.  339  (1816). 
Recurvirostra  fissipes,  C.  L.  Brehm,  Isis,    1831  p.  992. 
Recurvirostra  helebi,  A.  E.  Brehm,  Journ.  f.  Orn.,  1854  p.  84. 
Recurvirostra  helevi,  C.  L.  Brehm,  Vogeîf.  p.  326  (1855). 
Recurvirostra  sinensis,  Swinh.  /6w,  1867  p.  401. 
Himantopus  AVOCETTA,  Seebolim,  Brit.  Birds,  III,  p.  74  (1885). 
Der  Sabelschnabler,  en  allemand. 
The  Avocet,  en  anglais. 
De  Kluit,  en  flamand. 

Taille  :  0,33;  ailes  0,225;  bec  et  tarses  0,080. 

Description  du  mâle  adulte.  —  D'un  blanc  pur;  dessus  de  la  tête,  milieu  de 
la  nuque,  scapulaires  les  plus  rapprochées  du  dos,  petites  et  moyennes  cou- 
vertures des  ailes  ainsi  que  les  rémiges  d'un  noir  profond.  Bec  noir;  iris 
rougeâtre;  pattes  d'un  gris  bleuâtre. 

Femelle.  —  Semblable  au  mâle,  mais  les  parties  noires  tirent  fortement 
sur  le  brun. 

Jeune.  —  Ressemble  à  la  femelle,  mais  le  blanc  est  moins  pur;  scapu- 
laires et  couvertures  des  ailes  plus  ou  moins  bordées  de  cendré  ;  bec  plus 
court  et  taille  moins  forte  que  les  adultes. 

Poussin.  —  Duvet  soyeux,  barbelé,  épais  ;  dessus  de  la  tête,  haut  des  ailes, 
dos  et  croupion  lavés  de  cendré  et  de  fauve  et  semés  de  taches  et  de  bandes 
irrégulières  noirâtres,  dont  une  forme  demi-cercle  autour  du  bassin;  cou  d'un 
cendré  rembruni  à  la  base  du  duvet;  gorge,  ventre  et  extrémité  des  ailes 
d'un  blanc  pur;  abdomen  d'un  fauve  pâle  ;  bec  noir,  bleuâtre  vers  la  base; 
pieds  gris  de  plomb  ;  iris  brun  (J.  Vian). 


-  271 


L'Avocette,  quoique  répandue  dans  presque  toute  l'Europe,  ne  se 

reproduit  guère  sur  notre  conti- 
nent que  dans  peu  de  localités  ; 
elle  niche  parfois  dans  les  îles 
des  côtes  du  Danemark  {Kjaer- 
bôllmg),  sur  les  côtes  du  nord  de 
l'Allemagne  [Borggrevé),  plus 
fréquemment  sur  celles  de  Hol- 
-^  lande  [Schlégel)  et  de  Borkum 
{von  Droste),  accidentellement 
près  de  l'Escaut  en  Belgique,  communément  près  des  bouches  du 
Rhône  à  la  Camargue  {Jauàert  et  Lapommeray),  en  petit  nombre 
dans  le  sud  de  l'Espagne  {Saunders),  près  des  lacs  de  la  Dobrodja  et 
de  la  Bulgarie  {Alléon)  et  en  abondance  dans  les  lagunes  et  les 
marais  salés  qui  avoisinnent  les  mers  Noire  et  d'Azow  (Bogdanoïc). 
Dans  toutes  les  autres  parties  maritimes  et  fluviatiles  de  l'Europe,  au 
sud  du  58°  1.  N.,  cet  oiseau  ne  se  montre  qu'aux  passages  ou  très 
accidentellement,   suivant  les  localités. 

Au  commencement  de  ce  siècle,  d'après  M.  Seebohm,  l'Avocette 
était  commune,  en  été,  près  des  côtes  orientales  de  l'Angleterre  et  y 
nichait  en  grand  nombre;  mais  aujourd'hui,  ce  n'est  plus  qu'un  oiseau 
de  passage  irrégulier  que  l'on  voit  quelquefois  au  printemps,  et  moins 
souvent  en  automne,  dans  les  lieux  où  ses  ancêtres  se  reproduisaient. 
Les  captures  sont  encore  plus  rares  en  Irlande  et  en  Ecosse,  mais  on 
a  tué  de  ces  oiseaux  jusqu'aux  îles  Orkney  {Edmonston)  et  Shetland 
{Saxhy).  On  n'observe  aussi  cet  oiseau  que  très  accidentellement  dans 
le  sud  de  la  Scandinavie  {NiJsson,   Collett),  en  Pologne,  où  un  sujet 
unique  a  été  tué  dans  le  midi  du  gouvernement  de  Lublin  [Tacza- 
nowski),  près  des  grands  lacs  de  la  Hongrie  et  dans  rintérieur  de 
l'Allemagne  et  de  l'Autriche  {Naumann),  ainsi  qu'en  Suisse  {Meisner 
et  Scldnz).  L'Avocette  est  de  passage  régulier  sur  les  côtes  belges,  et 
elle  est  même  alors  abondante  sur  l'Escaut  :  un  couple  nichait,  il  y  a 
une  vingtaine  d'années,  dans  les  remparts  do  l'ancien  fort  Calloo,  non 
loin  de  la  Tête-de-Flandre  {A.  Crocgaert).  Elle  est  plus  rare  sur  les 
côtes  septentrionales  de  la  France  {Dcghind  et  Gerbe)  ;  en  Italie,  elle 
est,  suivant  les  localités,  rare  ou  commune,  de  passage  ou  sédentaire 
{Giglioli)  ;  elle  est  de  passage  en  Portugal  {Reyes),  aux  îles  Baléares 
{Barcelo),  en  Grèce  {Lindermaycr),  mais  ne  visite  que  rarement  l'ilo 
de  Malte  {Wrighf). 


272  

En  Afrique  on  rencontre  cet  oiseau,  en  hiver,  sur  presque  toutes 
les  côtes  et  près  des  grands  fleuves,  depuis  l'Algérie  {Loche),  le  Maroc 
{Favier)  et  le  Congo  {Tuckey),  jusqu'au  Zambèze  {Livingstoné)  et  le 
cap  de  Bonne-Espérance  {Layard),  et  il  est  sédentaire  dans  beaucoup 
de  localités  ;  il  est  même  commun  à  Madagascar  {Grandidier). 

L'Avocette  se  montre  en  Asie  depuis  la  région  Aralo-Oaspienne 
{Raddé)  jusqu'au  sud  du  Japon  {Scebohm),  et  depuis  le  sud  de  la 
Sibérie,  de  la  Daourie  et  de  la  Mongolie  [Radde,  Bogdanoio)  jusqu'à 
QQy\^u{Layard)\  elle  est  sédentaire  en  VdlQ^imQ  [THstram)  et  en 
Perse  {Blanford),  hiverne  dans  l'Inde  {Jerdon),  dans  le  midi  de  la 
Chine  [David),  à  Formose  et  à  Hainan  {Siainhoe);  en  Asie  Mineure, 
elle  est  principalement  de  passage,  mais  un  petit  nombre  d'individus 
hivernent  dans  ce  pays. 

Mœurs.  —  L'Avocette  arrive  en  Europe  en  avril  et  émigré  à  la  fin 
d'août  ou  en  septembre.  Elle  vit  près  des  côtes  maritimes,  à  l'embou- 
chure des  fleuves  et  aux  bords  des  lacs  salés  ou  saumâtres,  aussi, 
pendant  les  migrations,  les  bandes  d'Avocettes  suivent-elles  toujours 
les  bords  de  la  mer,  volant  très  haut  et  voyageant  la  nuit  comme  le 
jour.  Ces  jolis  oiseaux,  à  la  démarche  élégante,  se  plaisent  surtout  sur 
les  plages  coupées  de  nombreux  bras  de  mer  où  abondent  les  fonds 
vaseux  et  les  flaques  d'eau,  qu'ils  aiment  à  fouiller  avec  leur  long  bec 
pour  y  prendre  les  petits  animaux  marins  dont  ils  se  nourrissent.  Il 
est  rare  de  les  voir  près  des  eaux  douces  à  l'intérieur  des  terres,  et 
ils  n'y  séjournent  jamais  bien  longtemps. 

Ces  charmants  oiseaux  vivent  en  troupes  et  mènent  une  existence 
paisible  et  inoffensive  ;  la  faiblesse  de  leur  bec  ne  leur  permet  du 
reste  ni  l'attaque  ni  la  défense,  ce  qui  les  oblige  à  éviter  les  espèces 
querelleuses.  Ils  vivent  donc  en  paix  avec  tous  les  oiseaux,  mais  ne 
recherchent  que  la  société  de  leurs  semblables.  Ils  sont  craintifs  et 
fuient  l'homme  de  loin  ;  si  l'on  s'en  approche,  ils  deviennent  d'abord 
inquiets,  s'éloignent  dans  l'eau  en  marchant  ou  en  nageant  et  s'envo- 
lent bientôt  pour  ne  s'arrêter  que  hors  de  portée.  Si  l'un  d'eux  a  été 
blessé,  ses  compagnons  volent  en  cercle  autour  de  lui  en  poussant  les 
cris  de  tut,  tut,  tu-it,  tu-it.  Leur  voix  est  sifllante,  plaintive,  sans  être 
désagréable  ;  le  cri  d'appel  est  quoui  ou  dult,  le  cri  d'amour  est  un 
kliou  plaintif  répété  plusieurs  fois  avec  rapidité. 

L'avocette  se  tient  le  plus  souvent  dans  l'eau,  s'y  promenant  lente- 
ment, baissant  et  relevant  sans  cesse  la  tête  pour  saisir  sa  nourriture  ; 
celle-ci  se  compose  de  petits  crustacés^  de  vers,  de  larves  et  d'insectes 


-  273  - 

aquatiques,  entremêlés  d'un  peu  de  gravier  pour  faciliter  la  digestion. 
«  Elle  se  sert  de  son  bec  comme  d'un  sabre,  dit  Naumann,  elle  le 
porte  rapidement  à  droite  et  à  gauche,  prend  les  animaux  qui  nagent 
et  qui  demeurent  adhérents  aux  sillons  de  la  face  interne  ».  Le  D"" 
Bodinus  a  eu  l'occasion  d'étudier  ces  oiseaux  au  Jardin  zoologique  de 
Cologne,  et  voici  ce  qu'il  dit  de  leur  manière  de  chasser  :  «  Jamais 
mes  Avocettes  captives  n'ont  fait  entendreles  sons  flûtes  qu'elles  pous- 
sent en  liberté.  Par  contre,  j'ai  pu  observer  comment  elles  prennent 
leur  nourriture.  On  admet  généralement  qu'elles  y  procèdent  d'une 
façon  toute  singulière,  en  agitant  leur  bec  latéralement.  On  dit  que  ces 
mouvements  se  font  le  bec  ouvert,  que  les  petits  animaux  se  prennent 
entre  les  mandibules  et  que  l'oiseau  les  avale  ensuite.  D'après  mes 
observations,  qui  excluent  toute  idée  de  doute,  l'Avocette  exécute  ces 
mouvements  le  bec  fermé,  et  cela  sur  terre  comme  dans  l'eau.  Je 
croirais  volontiers  qu'elle  le  fait  pour  effrayer  les  petits  animaux  dont 
elle  se  nourrit,  tout  comme  les  Mouettes  et  les  Flamants  frappent  le 
sol  de  leurs  pattes.  La  vase  est  agitée,  les  animaux  qui  y  sont  cachés 
sont  mis  à  découvert,  et  l'oiseau  peut  alors  les  saisir  et  les  avaler. 
C'est  là  ce  que  fait  l'Avocette  en  portant  son  bec  à  droite  et  à  gauche. 
Jamais  je  n'ai  vu  une  de  mes  captives  prendre  sa  nourriture  comme 
on  le  supposait;  j'ai  observé,  au  contraire,  qu'elles  la  saisissaient 
avec  la  pointe  du  bec,  tout  comme  un  Pluvier  ou  un  autre  oiseau 
analogue.  » 

Reproduction.  —  Peu  après  leur  retour  dans  les  lieux  de  la  repro- 
duction, les  Avocettes  se  séparent  par  paires  et  vont  nicher  dans  des 
endroits  couverts  d'un  court  gazon,  plus  rarement  dans  des  champs 
de  céréales,  mais  toujours  dans  le  voisinage  de  la  mer,  d'un  lieuve 
ou  d'un  lac  à  eau  saumâtre.  En  mai,  la  femelle  creuse  une  exca- 
vation qu'elle  garnit  plus  ou  moins  de  brins  et  de  radicelles,  mais 
elle  ne  se  donne  aucun  mal  pour  caclier  sa  couvée.  La  ponte  a 
lieu  vers  la  fin  de  mai^  un  peu  plus  tard  dans  l'Europe  orientale,  et 
se  compose  de  trois,  rarement  de  quatre  et  parfois  seulement  de  deux 
œufs.  Ceux-ci  sont  plus  ou  moins  piriformes,  mats,  d'un  jaune 
terreux  pâle  ou  olivâtres,  semés  de  taches  cendrées  et  d'autres  brunes 
ou  noirâtres  couvrant  en  partie  les  premières;  ils  mesurent  47  à 
53  millim.  su^"  31    à  31. 

Les  deux  sexes  couvent  alternativement  pendant  dix-sept  ou 
dix-liuit  jours. 


Tome  II.  —  1890.  35 


—  i>74  — 

GENRE    CXXIV. 

ECHASSE.  —  HIMANTOPUS. 

HiMANTOPUs,  Rriss.  Ornith.  V,  p.  34  (1760). 
Charadrius,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  255  (1766). 
Macrotarsus,  Lacép.  Mém.  de  VInst.  III,  p.  518  (1801). 
Hypsibates,  mizsoh,  Encijcl.  XVI,  p.  150  (1827). 

Car.  —  Bec  d'un  tiers  environ  plus  long  que  la  tête,  grêle,  arrondi  à  la 
base,  très  légèrement  retroussé,  sillonné  dans  la  moitié  de  son  étendue,  à 
mandibules  infléchies  l'une  vers  l'autre  à  la  pointe  ;  narines  latérales, 
linéaires  ;  ailes  très  longues,  aiguës,  dépassant  la  queue  ;  cette  dernière  de 
longueur  moyenne  ;  jambes  plus  longues  que  le  bec,  réticulées  ;  tarses  grêles, 
atteignant,  chez  les  adultes,  une  longueur  double  de  celle  du  bec,  réticulés  ; 
doigts  assez  longs,  grêles,  le  médian  et  l'externe  réunis  par  une  membrane 
jusqu'à  la  première  articulation,  l'interne  n'est  réuni  aurtnédian  que  par  un 
simple  repli  membraneux  ;  pouce  nul. 

Hab.  —  Ce  genre  a  des  représentants  dans  les  parties  chaudes  et 
tempérées  des  cinq  parties  du  monde. 


222.  —  L'Echasse  blanche. 
HIMANTOPUS  PLINII,  Gerini. 

(PI.  221.) 

Charadrius  himantopus.  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  151  (1758);  I,  p.  255  (1766). 

HiMANTOPUS  HIMANTOPUS,  Briss.  Om.  V,  p.  34  (1760). 

Himantopus  Plinii,  Gerini,  Or7i.  meth.  Dig.  IV,  p.  67  (1773). 

Himantopus  candidus,  Bonnat.  Tabl.  encycl.  I,  p.  24  (1790). 

Himantopus  vuLGARis,  Bechst.  Om.  Taschenb.  II,  p.  325(1803). 

Cursorius  himantopus,  Turton,  Bril.  Faun.  p.  62  (1807). 

Himantopus  rufipes,  Bechst.  Naliirg.  Deutschl.  III,  p.  446  (1809). 

Himantopus  atropterus,  Mey.et  Wolf,  Taschenb.  Deut.  Yogelh.  II,  p.  315  (1810). 

Limosa  himantopus,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  II,  p.  186  (1811). 

Himantopus  melanopterus,  Mey.  Ann.  Wetter.  Gesellsch.  III,  p.  177  (1814). 

Himantopus  albicollis,  Vieill.  N.  dict.  d'hist.  nat.  X,  p.  41  (1817). 

Hypsibates  himantopus,  Nitzscli,  Ersche  u.  Grub.  Encycl.  XVI,  p.  150  (1827). 

Himantopus  longipes,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  992. 

Himantopus  asiaticus,  Less.  Rev.  Zool.  1839,  p.  44. 

Himantopus  intermedius,  Blyth,  Cat.  B.  Mus.  As.  Soc.  p.  265  (1849). 

Himantopus  melanocephalus,  nigricollis,  leucocephalus  et  brevipes,  C.  Brehm, 

Naumannia,  1855,  p.  293. 
Himantopus  minor  (Natt.),  Hartl.  Journ.  f.  Om.  1860,  p.  170. 
Himantopus  albus,  EUman,  Zoologist.,  1861,  p.  7470. 
Himantopus  EUROP^us  (Sander)  et  automnalis,  Gray,  Hand-list  ofB.  III,  p.  47  (1871). 


—  275  — 

Der  grauschwanzige  Stelzenlaufer,  en  allemand. 
The  BLACK- wiiVGED  Stilt,  en  anglais. 
De  Steltkluit,  en  flamand. 

Taille  :  0,27  ;  ailes  0,25  ;  bec  0,064  ;  partie  nue  des  jambes  0,086  ; 
tarses  0,128. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes.  —  D'un  blanc  pur,  lavé  de 
rose  à  la  poitrine  ;  calotte  noire  sur  la  tête,  s'étendant  jusqu'aux  régions 
parotiques;  manteau,  scapulaires  et  ailes  d'un  noir  à  reflets  verdâtres;  queue 
d'un  cendré  clair  en  dessus.  Bec  noir  ;  pattes  rouges;  iris  cramoisi. 

La  calotte  noire  disparaît  insensiblement  avec  l'âge,  et  les  vieux  mfdes  ont 
la  tête  entièrement  blanche. 

Adolescent.  —  D'un  blanc  moins  pur,  lavé  de  cendré  à  la  nuque  et  sur  les 
côtés  inférieurs  du  cou  ;  calotte  d'un  cendré  brunâtre  varié  de  blanc,  man- 
teau et  scapulaires  bruns  ;  ailes  d'un  noir  verdâtre. 

Jeune.  —  Blanc,  varié  de  cendré  à  la  nuque  ;  calotte,  manteau  et  scapu- 
laires bruns,  mais  toutes  les  plumes  bordées  de  blanchâtre  ;  ailes  noires,  les 
couvertures  bordées  de  cendré  ;  pattes  couleur  orange. 

Poussin.  —  Dessus  de  la  tête,  dos,  ailes  et  appendice  caudal  d'un  gris  rous- 
sâtre,  moucheté  de  noir  et  portant  deux  bandes  longitudinales  et  parallèles 
de  cette  couleur  sur  le  dos  et  une  sur  le  vertex  ;  trait  noir  sur  les  lorums 
prolongé  en  arrière  des  yeux  ;  dessus  du  cou  cendré,  avec  la  base  du  duvet 
noirâtre  ;  parties  inférieures  blanches,  unies  latéralement  aux  parties  supé- 
rieures par  une  teinte  graduellement  fauve  ;  bec  noir  avec  l'extrême  pointe 
blanchâtre  ;  pieds  d'un  jaune  rembruni.  (/.  Vian.) 

Remarque.  —  Plusieurs  auteurs  considèrent  les  sujets  à  manteau 
brun  comme  des  femelles,  et  ceux  à  tête  blanche  comme  étant  en 
plumage  d'hiver.  Mais  il  paraît  que  la  seule  diâôrence  sexuelle  réside 
dans  la  taille;  la  femelle  est  toujours  plus  petite  et  moins  brillante. 
La  calotte  noire  disparaît  avec  lïige  chez  les  mâles,  mais  jamais  com- 
plètement chez  les  femelles,  où  elle  est  variée  de  blanc. 

Hab.  —  L'Echasse  blanche  ne  se  reproduit  en   Europe  que  dans 

certains    marécages,     lacs    ou 


étangs  à  eau  saumâtre  des  con- 
trées méridionales  et  orientales; 
elle  niche  donc  en  Portugal,  en 
Espagne  {Saundcrs,  Irby),  à 
rombouchure  du  Rhône  {De- 
(jland  et  Gerbe),  en  Hongrie 
{Nau7nann),  au  sud  du  Danube 
^^^^^^^.^^.^  ...... ,:i^^ifk^ii;..<^^...  .:,:..  .,/;    j„squ'aux  marais  salés  de  Kus- 

tondji  on  Turquie  {T),-esfirr),   dans   la  Dobnxlja,  notamment  près  du 


—  276  — 

lac  de  Tuzla  {Alléon),  ainsi  que  sur  tout  le  littoral  de  la  mer  noire 
{de  Nordmann).  Partout  ailleurs,  sur  notre  continent,  cet  oiseau  ne 
se  montre  qu'aux  passages,  et  s'il  niche  parfois  dans  le  midi  de 
l'Allemagne  ce  n'est  qu'exceptionnellement,  comme  cela  peut  se 
présenter  dans  d'autres  pays  encore. 

L'Echasse  se  montre  accidentellement  aux  îles  Britanniques  {Har- 
ting),  dans  le  nord  de  la  France,  en  Belgique,  en  Hollande,  dans  le 
nord  de  l'Allemagne  {Borggrevé),  en  Autriche  [de  Tschusi)  et  en  Polo- 
gne [Taczanowski).  Elle  est  de  passage  plus  ou  moins  régulier  dans 
le  sud-ouest  de  la  France,  toujours  par  bandes  ne  dépassant  pas  vingt- 
cinq  sujets;  elle  niche  en  petit  nombre  dans  les  départements  de 
l'Aude  et  de  l'Hérault,  ainsi  que  dans  celui  des  Pyrénées  orientales 
où  elle  est  sédentaire  sur  quelques  points  [Lacroix).  En  Italie  elle  est 
de  passage  régulier  ou  irrégulier  suivant  les  localités  [Salvadori),  et 
il  en  est  de  même  en  Grèce  [Lmdermaycr)  et  en  Asie  Mineure 
[Krûper),  mais  elle  est  sédentaire  en  Palestine  [Tristram). 

L'Afrique  paraît  être  la  véritable  patrie  de  cet  oiseau,  car  il  y  est 
commun,  surtout  en  hiver, près  de  toutes  les  eaux  qui  lui  conviennent, 
et  niche  en  beaucoup  d'endroits  ;  on  le  rencontre  également  en  assez 
grand  nombre  à  Madagascar  [Grandidier). 

En  Asie  on  observe  l'Echasse  européenne  depuis  le  Caucase 
[Radde)  jusqu'en  Chine  (au  sud  du  40°  1.  N.)  où  elle  est  cependant 
rare  [David),  et  depuis  les  lacs  salés  avoisinant  l'irtisch  au  sud  de  la 
Tartarie  [Pallas)  jusqu'à  Ceylan  [Legge)  et  l'Indo- Chine  [Seebohm). 
Les  captures  signalées  aux  Philippines,  à  Bornéo,  à  Timor  et  à  la 
Nouvelle-Zélande,  appartiennent  probablement  à  une  espèce  voisine 
[Rimant opus  leucocephalus  y  Gould). 

Mœurs.  —  L'Echasse  blanche  n'est  donc,  dans  la  majeure  partie 
de  l'Europe,  qu'un  oiseau  de  passage,  et  il  est  rare  de  la  voir  dans 
nos  contrées  en  dehors  des  mois  de  mai  et  d'août.  Elle  voyage  aussi 
bien  pendant  la  nuit  que  durant  le  jour,  mais  son  vol  est  très  élevé 
dès  que  le  soleil  s'élève  au-dessus  de  l'horizon. 

Cet  oiseau  n'est  pas  véritablement  une  espèce  maritime,  car  il  ne 
visite  le  plus  souvent  les  plages  que  pendant  les  migrations.  Ce  qu'il 
recherche,  ce  sont  les  marais,  les  lacs,  les  mares  et  les  étangs  inté- 
rieurs, et  de  préférence  les  eaux  salées  ou  saumâtres.  11  est  d'un 
naturel  paisible  et  sociable  et  on  le  reu contre  souvent  avec  des  Avo- 
cettes  ;  il  vit  par  troupes  de  six  à  dix  sujets,  mais  dans  les  contrées 
africaines  il  n'est  pas  rare  de  rencontrer,  en  hiver,  des  bandes  com- 


—  277  — 

posées  de  deux  à  trois  cents  Echasses.  Ce  n'est  qu'au  moment  de  la 
reproduction  que  les  bandes  se  divisent  par  couples  qui  vont  nicher 
chacun  de  son  côté. 

Ses  mœurs  ressemblent  beaucoup  à  celles  des  Chevaliers  ;  l'Echasse 
fréquente  à  peu  près  les  mêmes  lieux,  mais  ses  longues  jambes  lui 
permettent  de  patauger  dans  des  eaux  plus  profondes;  elle  vit  du  reste 
plus  dans  l'eau  que  sur  le  sol  où  on  ne  la  voit  que  rarement.  A  terre, 
sa  démarche  est  aisée  :  elle  avance  à  grands  pas  sans  se  hâter  et  d'une 
manière  fort  gracieuse.  Elle  nage  en  cas  de  nécessité  mais  pas  avec 
une  grande  aisance.  Son  vol  est  léger,  élégant,  rapide,  mais  peu  élevé 
en  dehors  des  migrations  ;  l'oiseau  bat  rapidement  des  ailes,  mais  à 
une  certaine  hauteur  son  vol  devient  plus  lent,  plus  posé,  et  avant  de 
s'abattre,  il  décrit  en  planant  une  ligne  ondulée.  Pendant  le  vol  il 
étend  toujours  ses  longues  pattes  en  arrière,  ce  qui  permet  facilement 
de  le  reconnaître.  Il  n'est  pas  rare  d'entendre  sa  voix,  surtout  au 
moment  de  s'envoler.  Son  cri  peut  se  rendre  par  kit,  kit,  kit  ou  hit, 
hit,  hit,  accompagné  parfois  d'une  finale  rogue  ressemblant  kpeurrre; 
le  cri  d'alarme  est  tèhr  ou  trèh. 

L'Echasse  se  nourrit  de  petits  poissons,  de  têtards  et  frai  de  gre- 
nouilles, de  mollusques,  de  larves,  d'insectes,  d'araignés  et  de  vers  ; 
de  Heuglin  dit  avoir  souvent  trouvé  l'estomac  et  le  jabot  de  ces 
oiseaux  remplis  de  petits  poissons,  mais  qu'avec  ce  régime  leurs 
intestins  fourmillent  de  vers. 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  niche  dans  les  marécages  sur  un  petit 
monticule  entouré  d'eau  ou  de  boue.  C'est  là  que  la  femelle  creuse 
une  petite  fosse  qu'elle  garnit  de  brins  et  autres  substances  végétales, 
et  c'est  sur  cette  litière  qu'elle  dépose,  dans  la  première  quinzaine  de 
juin,  quatre  œufs  piriformes,  quelquefois  seulement  trois.  Ces  œufs 
sont  d'un  gris  jaunâtre  ou  roussâtre  ou  d'un  vert  olivâtre  tirant  plus  ou 
moins  sur  le  jaune  olive;  ils  sont  marqués  de  taches  d'un  gris  violacé 
peu  nombreuses,  et  d'autres  superficielles,  arrondies,  d'un  brun  rou- 
geâtre  et  noirâtres.  Ils  mesurent  environ  41  millim.  sur  33. 

DEUXIÈME    SOUS-ORDRE. 

LES  ÉCHASSIERS  MACRODACTYLES. 

Car.  —  Bec  rarement  plus  long  que  la  tôle  ;  narines  s'ouvrant 
généralem<mt  dans  de  larges  fosses  nasales  qui  atteignent  ou 
dépassent  lu  milieu  du  bec  ;   ailes  concaves,  assez  courtes,  parfois 


-  278  - 

armées  d'un  éperon  (espèces  exotiques)  ;  doigts  allongés,  libres,  le 
médian  ayant  au  moins  la  longueur  du  tarse  ;  pouce  bien  développé  et 
reposant  plus  ou  moins  sur  le  sol. 

La  plupart  des  oiseaux  de  ce  groupe  vivent  solitaires  et  cachés  au 
milieu  des  herbes  des  prairies  humides  et  des  marécages. 

FAMILLE  DES  RALLIDÉS. 

Car.  —  Bec  plus  haut  que  large  surtout  à  la  base,  comprimé  ; 
front  souvent  protégé  par  une  plaque  lisse  plus  ou  moins  aplatie  ; 
ailes  assez  courtes  ;  jambes  peu  dénudées  ;  tarses  généralement 
médiocres  ;  doigts  antérieurs  lisses  ou  bordés  latéralement  d'une 
membrane  de  forme  variable  ;  ongles  relativement  courts,  recourbés. 

Hah.  —  Cette  famille  a  des  représentants  dans  l^s  parties  chaudes 
et  tempérées  des  cinq  parties  du  monde. 

Mœurs.  —  Ce  sont  des  oiseaux  de  taille  moyenne  ou  petite,  remar- 
quables par  l'élégance  de  leurs  formes  et  par  la  vivacité  de  leurs 
mouvements.  Ils  sont  d'un  naturel  doux  et  paisible,  aiment  la  solitude 
et  se  tiennent  généralement  cachés  pendant  le  jour. 

Ils  sont  aussi  bons  coureurs  que  mauvais  voiliers,  aussi  n'entre- 
prennent-ils pas  de  longs  voyages  et  sont  plutôt  erratiques  que 
migrateurs.  Ils  vivent  près  des  eaux  et  dans  les  lieux  humides,  savent 
plus  ou  moins  nager  et  quelques-uns  plongent  parfaitement. 

GENRE  CXXV. 

RALE.  —  RALLUS. 

Rallus,  Briss.  Ornith.  V,  p.  151  (1760). 
ScoLOPAx,  Gmel.  Reîse  Russl.   III,  p.  90  (1774). 
Aramus,  Gray,  Hand-list,  III,  p.   59  (1871). 

Car.  —  Bec  plus  long  que  la  tête,  le  plus  souvent  grêle,  élevé  à  la  base, 
comprimé  latéralement,  légèrement  infléchi  ;  narines  latérales,  allongées, 
n'atteignant  pas  le  milieu  du  bec  et  placées  dans  un  large  sillon  occupant 
les  deux  tiers  de  la  mandibule  ;  ailes  courtes,  subaiguës  ;  queue  courte,  coni- 
que, à  rectrices  souples  ;  jambes  à  peine  dénudées  près  de  l'articulation  ; 
tarses  médiocres,  robustes,  scutellés  ;  doigts  allongés,  grêles,  libres,  le 
médian  aussi  long  que  le  tarse  ;  pouce  relativement  court,  pourvu  d'un  ongle 
très  petit. 

jjah.  —  Ce  genre  est  représenté  dans  les  cinq  parties  du  monde. 


—  279  — 

223.  —  Le  Râle   d'eau. 
RALLUS  AQUATICUS,  Briss. 

(PI.  222) 

Râllus  AQUATICUS,  Briss.  Ornith.Y^  p.  151  (1760). 

ScoLOPAX  OBSCURA,  Giiiel.  Reise  d.  Russl.  III,  p.  90,  pi.  XVII  (1774). 

Rallus  sericeus,  Leach,  Syst.  cat.  M.  B.  Brit.  Mus.,  p.  33  (1816). 

Rallus  germanicus,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  992. 

Rallus  minor  et  fuscilateralis,  Brehm,  Yogelf.  p.  328  (1855). 

Aramus  AQUATICUS,  Gray,  Eand-list,  111,  p.  59  (1871). 

Der  Wasserralle,  en  allemand. 

The  Water-Rail,  en  anglais. 

De  Waterral,  en  flamand. 

Var.  Indiens. 

Rallus  indicus,  Blyth,  Journ.  As.  Soc.  Betu/.  XVIII,  p.  820(1849). 
Rallus  aquaticus,  Tem.  et  Schl.  Fauna  Jap.  Aves,  p.  122  (1850). 
Rallus  aquaticus,  var.  indicus,  Bonap.  Tabl.  des  Ecliass.  p.  18  (1856). 
Rallus  aquaticus,  var.  japonicus  (Schl.),  Bonap.  ibidem. 

Taille:  0^,25  ;  ailes  0,112  ;  bec  0,037  ;  tarses  0,038. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes.  —  Dessus  de  la  tête,  du  cou 
et  du  corps,  scapulaires,  couvertures  des  ailes  et  de  la  queue,  noirs,  mais 
toutes  les  plumes  largement  bordées  de  brun  olivâtre,  sauf  sur  la  tête  où  ces 
bordures  sont  peu  apparentes  ;  lorums  noirâtres  ;  gorge  blanchâtre  ;  raies 
sourcilières,  côtés  de  la  tête  et  parties  inférieures  jusqu'aux  jambes  d'un 
beau  cendré  bleuâtre  ;  bas-ventre  roussâtre  ;  flancs  noirs  traversés  de 
bandes  blanches  ;  sous-caudales  blanches,  en  partie  recouvertes  par  d'autres 
qui  sont  noires  rayées  de  blanc  et  terminées  de  roux  ;  rémiges  et  rectrices 
d'un  brun  noirâtre.  Bec  rougeâtre  nuancé  de  brun  en  dessus  et  à  la  pointe  ; 
iris  rouge  ;  pattes  d'un  brun  rougeâtre. 

Jeune.  —  Il  est  plus  petit  et  a  le  bec  moins  long.  Sur  les  parties  supé- 
rieures la  teinte  brune  olivâtre  domine  davantage;  gorge  blanche  ;  sourcils, 
côtés  de  la  tête  et  du  cou,  poitrine  et  abdomen  d'un  cendré  olivâtre  pâle  ; 
flancs  bruns  avec  des  bandes  d'un  blanc  jaunâtre. 

Poussin.  —  Duvet  d'un  noir  uniforme. 

Var.  Indicus.  —  Diffère  du  type  par  une  taille  un  pou  plus  forte  (0,2s),  et 
par  son  bec  et  ses  tarses  plus  robustes.  ISou  plumage  est  absolument  lo 
même  que  celui  du  Râle  d'Europe. 


—  280  - 


Eab.  —  Le  Râle  d'eau  habite  toute  l'Europe  centrale  et  méridio- 
nale et  s'élève,  dans  le  nord  de 
la  Scandinavie,  jusqu'au  66" 
{Collett).  Il  est  sédentaire  en 
Islande  {Fonder)  et  probablement 
aussi  aux  îles  Foeroé,  où,  sui- 
vant von  Millier,  il  ne  serait  que 
de  passage.  Il  est  plus  ou  moins 
répandu  dans  l'Europe  centrale 
où  il  hiverne  en  petit  nombre 
jusque  vers  le  55"  1.  N.  En  Belgique  il  est  assez  commun  dans  les 
régions  marécageuses,  surtout  à  l'époque  des  passages.  Il  est  séden- 
taire dans  tout  le  midi  de  notre  continent,où  il  est  en  général  commun, 
surtout  en  hiver.  Il  en  est  de  même  dans  le  nord  de  rAfrique  (Favier, 
Loche)  et  en  Palestine  {Tristram)  ;  en  hiver  cet  oiseau  est  abondant 
dans  la  basse  Egypte  (Shelley),  et  il  a  été  trouvé  jusque  dans  les 
prairies  d'Adoua  en  Abyssinie  {Lefchvrc). 

A  l'Est,  on  observe  le  Râle  d'eau  dans  toute  la  Russie  depuis  les 
parties  méridionales  des  régions  du  sapin  (60")  et  de  l'Oural;  il  est 
plus  ou  moins  commun  au  Caucase,  dans  les  régions  Aralo-Gas- 
pienne  et  du  Tian-Chan  {Bogdanow),  au  Turkestan  (Severtzow),  en 
Afghanistan,  en  Perse  {Blanford)  et  en  Asie  Mineure. 

La  var.  Indiens  remplace  l'espèce  type  dans  la  Sibérie  orientale, 
depuis  la  région  du  Baical  jusque  dans  la  vallée  de  l'Amour  au  S.  du 
50°  {Bogdanoiv),  au  Japon  {Schlégel),  en  Chine  {David),  dans  l'Indo- 
Chine,  dans  les  parties  méridionales  et  orientales  de  l'Inde  et  à  Cey- 
lan  {Jerdon,  Seebohm,  etc.). 

Mœurs.  —  Le  Râle  est,  pour  nos  régions,  un  oiseau  migrateur  qui 
arrive  en  mars  et  avril  pour  émigrer  en  octobre  et  en  novembre.  Bien 
qu'en  partie  sédentaire  dans  notre  pays,  il  est  cependant  toujours 
plus  abondant  aux  époques  des  passages  qu'en  tout  autre  temps.  Il 
voyage  pendant  la  nuit,  isolément  et  par  petites  étapes.  Les  sujets  qui 
hivernent  chez  nous,  cherchent  un  refuge  pendant  les  grands  froids 
près  des  eaux  qui  ne  gèlent  pas,  et  on  en  rencontre  alors  parfois  près 
des  sources  et  autres  endroits  où  ils  ne  se  montrent  pas  d'ordinaire. En 
Islande,  où  l'oiseau  est  sédentaire,  car  il  lui  serait  difficile  de  franchir 
d'une  seule  traite  l'espace  qui  sépare  cette  île  du  continent,  il  hiverne, 
d'après  Faber,  près  des  sources  chaudes  du  sud  de  l'île. 

Cet  oiseau  vit  surtout  dans  les  marécages  et  près  de  toutes  les  eaux 


-  281   - 

bordées  de  buissons  et  de  hautes  herbes,  dans  lesquels  il  trouve  un 
abri  assuré.  On  le  rencontre  même  près  des  mares  et  des  eaux  qui 
existent  sur  la  lisière  des  bois  ou  à  l'intérieur  des  forêts,  pourvu 
qu'elles  soient  couvertes  de  roseaux  et  de  joncs,  ou  bordées  de  buis- 
sons d'aunes  et  de  saules  entremêlés  d'herbages  touffus,  car  il  évite 
avec  soin  toute  eau  découverte.  Lors  des  migrations,  on  l'observe 
parfois  loin  des  lieux  aquatiques,  mais  toujours  dans  des  endroits 
buissonneux  ou  couverts  de  hautes  herbes. 

Le  Râle  est  plus  nocturne  que  diurne,  et  c'est  au  crépuscule,  qu'il 
est  le  plus  actif  ;  jamais,  de  son  plein  gré,  il  ne  se  montrera  pendant 
la  journée,  car  c'est  le  moment  consacré  au  repos,  souvent  même  au 
sommeil;  mais  dès  que  le  soleil  est  à  son  déclin,  l'oiseau  s'anime, 
court  par-ci  par-là,  vole  d'une  eau  ou  d'un  endroit  à  l'autre,  s'agite 
sur  les  végétaux  flottants  ou  traverse  un  étang  à  la  nage. 

En  marchant,  il  tient  le  corps  horizontal,  le  cou  rentré,  la  queue 
relevée;  aperçoit-il  quelque  chose  de  suspect,  il  redresse  le  cou  et 
hoche  la  queue.  Il  court  avec  agilité,  nage  parfaitement  même  sans 
y  être  forcé,  mais  vole  avec  difficulté,  les  ailes  bien  étendues  et  conti- 
nuellement en  mouvement,  ce  qui  donne  à  son  vol  quelque  ressem- 
blance avec  celui  d'une  chauve-souris.  «  Sa  démarche,  dit  Naumann, 
est  légère  et  gracieuse  ;  il  court  avec  rapidité,  franchit  tous  les 
obstacles  sous  lesquels  il  ne  peut  se  glisser,  passe  sur  la  vase  la  plus 
ténue,  sur  les  feuilles  flottantes  comme  sur  les  branches  mortes 
éparpillées  sur  le  sol  ;  il  se  fait  un  passage  au  milieu  des  fourrés  de 
plantes  aquatiques  les  plus  entrelacées.  Grâce  à  son  corps  mince,  il 
passe  entre  les  herbes  sans  les  toucher,  et  jamais  on  ne  peut  recon- 
naître à  l'agitation  des  plantes  la  direction  de  sa  fuite.  L'entrevoit-on 
par  hasard,  on  croit  voir  un  rat  plutôt  qu'un  oiseau,  et  il  a  disparu 
aussi  vite  qu'on  l'a  aperçu.  Arrive-t-on  sans  bruit  à  l'endroit  où  il 
se  tient,  y  demeure-t-on  longtemps  immobile,  on  peut  se  donner  la 
satisfaction  d'observer  de  près  ses  allures  silencieuses.  Je  sais  des  cas 
où  cet  oiseau  inoffensif  a  vaqué  à  toutes  ses  occupations,  à  quelques 
pas  d'un  observateur  immobile,  soit  qu'il  ne  le  vit  pas,  soit  qu'il  le 
prit  pour  quelque  objet  inanimé.  Le  Râle  prend  alors  les  posi- 
tions les  plus  gracieuses,  exécute  les  mouvements  les  plus 
élégants.  Lui  fait-on  soupçonner  quelque  danger,  il  s'allonge,  hoche 
vivement  la  queue  et  se  prépare  à  disparaître  au  milieu  des  herbes.  Il 
nage  facilement  et  avec  gi"âce,  s'aventure  dans  les  endroits  les  plus 
profonds  des  marais,  mais  évite  toujours  de  franchir  des  surfaces 
ToMK  II.—  1890  3G 


282  

étendues  et  entièrement  découvertes.  Le  surprend-on  à  ce  moment, 
il  s'enfuit,  moitié  volant,  moitié  courant  à  la  surface  de  l'eau,  pour 
gagner  le  fourré  le  plus  proche  ;  est-il  serré  de  trop  près,  il  cherche 
à  se  sauver  en  plongeant.  »  Son  cri  est  sonore  et  s'entend  de  loin, 
mais  l'oiseau  ne  le  fait  entendre  que  dans  la  soirée  et  en  volant  ;  on 
peut  le  rendre  par  krrili  ou  lirrih\  son  cri  d'appel  ressemble  à  wouit. 

Le  Râle  n'est  nullement  sociable  et  ne  vit  avec  sa  femelle  qu'à 
l'époque  de  la  reproduction.  Il  n'est  pas  intelligent  non  plus,  mais 
farouche  par  nature.  Brehm  père  raconte  qu'un  de  ses  amis  chassait 
dans  un  fourré  de  joncs,  lorsqu'il  vit  un  Râle  d'eau  qui  cherchait  à 
se  sauver  en  courant;  il  tira,  mais  le  manqua.  L'oiseau  s'envola  et 
alla  s'abattre  dans  un  champ  voisin,  où  le  chasseur  put  le  prendre 
sans  peine  avec  la  main.  Quand  il  est  surpris,  cet  oiseau  perd  la  tête 
et  ne  sait  plus  comment  se  sauver. 

La  nourriture  du  Râle  se  compose  de  larves  et  d^nsectes  aquati- 
ques ou  terrestres  et  de  petits  mollusques  avec  ou  sans  coquille  ;  en 
hiver,  il  vit  presque  uniquement  de  graines  de  graminées  et  surtout 
de  graines  de  roseaux  et  de  joncs. 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  niche  près  des  eaux  douces  ou  dans  un 
marais  et  toujours  dans  un  endroit  bien  caché.  Le  nid  se  trouve  ordi- 
nairement dans  un  fourré  de  joncs,  de  roseaux  ou  d'autres  herbages, 
où  il  est  fort  difficile  de  le  découvrir,  mais  les  parents  trahissent  géné- 
ralement sa  présence  par  leurs  cris  de  détresse.  Ce  nid  est  assez  profond 
et  lâchement  construit  avec  des  feuilles  sèches  de  joncs  et  de  roseaux 
et  diverses  graminées.  La  ponte  a  lieu  au  commencement  de  juin,  et 
se  compose  de  six  à  douze  œufs  ressemblant  beaucoup  à  ceux  du  Crex 
des  prés,  mais  ils  sont  plus  petits.  Ces  œufs  ont  une  coquille  solide  et 
lisse,  d'un  jaune  roussâtre  ou  d'un  blanc  rosâtre  sale,  marquée  de 
taches  grises  profondes  et  d'autres,  superficielles,  d'un  brun  rougeâtre 
ou  couleur  cannelle,  mais  peu  nombreuses  et  rapprochées  seulement  à 
l'extrémité  du  gros  bout.  Ils  mesurent  environ  35  millim.  sur  24.  La 
durée  de  l'incubation  est  d'environ  vingt  jours.  Les  petits  quittent  leur 
nid  dès  qu'ils  sont  séchés,  et  courent  dans  les  herbes  près  de  leur  mère, 
qui  les  rappelle  quand  ils  s'éloignent  trop  ;  ce  n'est  que  quand  ils  savent 
suffire  à  tous  leurs  besoins  que  la  mère  les  abandonne  à  eux-mêmes. 


«^s?. 


GENRE  CXXVI. 

CBEjX.  —  CREX. 

Rallus,  Briss.  Ornith.  Y,  p.  159  (1760). 

Gallinula,  Lath.  Ind.  orn.  II,  p.  766  (1790). 

Crex,  Bechst.  Orn.  Taschenb.  p.  336(1803). 

Ortygometra,  Leach,  Sijst.  cat.  M.  B .  Br.  Mus.  p.  34  (1816). 


Car.  —  Bec  plus  court  que  la  tête,  presque  conique,  haut  à  la  base,  com- 
primé latéralement,  à  arête  arrondie;  narines  latérales,  allongées,  étroites, 
atteignant  le  milieu  du  bec  ;  ailes  de  longueur  moyenne,  couvrant  la  majeure 
partie  de  la  queue,  sub-aiguës  ;  queue  courte,  à  rectrices  flexibles  ;  jambes 
peu  dénudées,  réticulées  ;  tarses  assez  longs,  épais,  scutellés  en  avant  et  en 
arrière,  réticulés  latéralement  aux  extrémités;  doigts  médiocrement  allongés, 
le  médian  plus  court  que  le  tarse  ;  pouce  bien  développé  et  portant  à  terre 
par  son  extrémité  ;  ongles  courts; 

Hab.  —  Ce  genre,  dont  on  ne  connaît  ([u'ime  seule  espèce,  est 
propre  à  l'ancien  monde. 

224.  —  Le  Crex  des  prés  ou  Râle  de  genêt. 

CREX   PRATENSIS,   Bechst. 
(PL  223). 

Rallus  genistarum  sive  ortygometra,  Briss.  Ornith.  V.  p.  159  (1760). 

Rallus  crex,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  261  (1766). 

Gallinula  crex,  Tunst.  Orn.  Brit.  p.  3  (1771). 

Crex  pratensis,  Bechst.  Orn.  Taschenb.  Deutsehl.  p.  337(1803). 

Ortygometra  crex,  Leach,  Syst.  cat.  M.  B.  Br.  Mus.  p.  34  (1816). 

Crex  herbarum,  alticeps,  Brehm,  /«s,  1830,  p.  992. 

Die  Wiesenralle,  en  allemand. 

The  Corn-crake  or  Land-Rail,  en  anglais. 

De  Kwartelkoning,  en  flamand. 

Taille  du  mâle  0,20;  ailes  0,143;  bec  0,022  ;  tarses  0,041  ;  femelle 
0,17;   ailes  0,127. 

Description  du  mâle  adulte  en  été.  —  Parties  supérieures  d'un  brun  olivâtre 
clair  avec  le  centre  des  plumes  d'un  brun  noirâtre  ;  large  raie  sourcilière, 
joue.s,  devant  du  cou  et  poitrine  d'un  gris  bleuâtre  ;  une  bande  fauve  du  bec 
à  l'oreille  ;  gorge  et  milieu  de  l'abdomen  blancs  ;  flancs  et  sou>-c:uulales  bar- 
rés de  brun,  de  roussâtre  et  de  blanchâtre;  couvertures  des  ailes  d'un  beau 
loux  de  rouille  :  rémiges  brunes,  la  barbe  externe  tirant  sur  le  roux,  sauf  celle 
de  la  ])r('mière  (jui  est  blancliAtre  ;  queue  d'un  brun  noirâtre  avec  les  rectrices 


—  284  — 


bordées  de  cendré  olivâtre.  Bec  et  pattes  d'un  brun  pâle  ;  iris  noisette. 

Femelle.  —  Kessemble  au  mâle  mais  elle  est  plus  petite  ;  le  gris  de  la  poi- 
trine est  plus  pâle  et  moins  pur  ;  le  roux  des  ailes  moins  vif  et  les  grandes 
couvertures  portent  quelques  petites  taches  blanchâtres. 

En  automne.  —  Le  gris  des  parties  inférieures  est  remplacé  par  du  cendré 
roiissâtre  pâle,  mais  les  raies  sourcilières  grises  persistent. 

Jeune.  —  Ressemble  au  plumage  d'automne,  mais  les  raies  sourcilières  sont 
d'un  cendré  roussâtre  pâle,  la  teinte  générale  est  plus  rousse,  les  bordures  des 
plumes  sont  plus  larges  et  cachent  davantage  la  partie  centrale  noire. 

Poussin.  —  D'un  noir  fuligineux,  plus  pâle  en  dessous  ;  bec  noir  à  extré- 
mité blanche  ;  pattes  brunes. 

Hab.  —  Le  Crex  des  prés,  plus  connu  sous  les  noms  de  Râle  de 

genêt    et    de    roi  des  Cailles, 


habite,  en  été^^toute  l'Europe  et 
les  îles  Britanniques,  y  compris 
les  îles  Hébrides,  Orkney,  Shet- 
land, St-Kilda  et  Channels  [See- 
bohm);  il  visite  également  les 
îles  Foeroé.  En  Scandinavie  il 
niche  jusqu'au  de  là  du  cercle 
polaire  {Collett),  mais  il  a  été 
observé,  en  1868,  près  de  Tromsœ  (69"40')  par  le  professeur  Holin- 
gren.  En  Russie  il  dépasse  rarement  le  60°  {^abanàeff)  ;  on  l'observe 
en  été  dans  les  parties  méridionales  des  régions  du  sapin  et  de  l'Ou- 
ral, la  région  du  Tchernozem,  la  Crimée,  le  Caucase,  les  vallées  de 
quelques  fleuves  de  la  région  Aralo-Caspienne,  la  Songarie  russe  (la 
vallée  du  fleuve  Irtysch)  et  le  Tian-Chan  [Bogdanow):  il  est  commun 
dans  les  monts  Altaï  mais  ne  paraît  pas  dépasser  à  l'Est  le  Jénissei, 
où  il  ne  s'élève  pas  au  delà  du  59°  1/2;  d'après  Pallas,  il  atteindrait 
cependant  la  vallée  de  la  Lena.  Il  niche  en  Turkestan  (Severtzow),  est 
sédentaire  en  Asie  Mineure  {Krûper)  et  en  Palestine  {Ty^istram), 
hiverne  en  Perse  (St-John),  en  Afganistan  et  se  montre  jusque  dans  le 
nord-ouest  de  l'Inde  {Jerdon). 

Cet  oiseau  est  assez  répandu  en  Belgique  comme  dans  le  reste  de 
l'Europe  centrale  et  méridionale;  mais  en  Espagne,  dans  le  sud  de 
l'Italie,  en  Sicile  et  en  Grèce,  on  ne  le  voit  qu'aux  passages.  11  visite 
accidentellement  les  îles  Acores,  Canaries  et  Madeire  [Harcourt,  etc.). 
Il  est  de  passage  au  Maroc  {Favier),  mais  quelques  couples  nichent 
dans  les  plaines  humides  de  l'Algérie  {Loche).  Le  Crex  arrive  en 


—  285  — 

Egypte  et  en  Arabie  à  la  fin  d'août  et  au  commencement  de  septem- 
bre; pendant  le  dernier  mois  il  fut  observé  près  de  Khartoum  [de 
Heuglin)  et  en  Abyssinie  [Lcfèbvré)  ;  il  hiverne  également  dans 
l'Afrique  orientale  jusqu'au  cap  de  Bonne-Espérance  [Layard]  et  le 
Natal  {A)jï^es).  Pendant  les  migrations,  les  vents  contraires  semblent 
chasser  parfois  quelques  sujets  vers  les  côtes  américaines,  où  on  en 
a  pris  au  Groenland  [Schlégel),  sur  les  côtes  occidentales  des  Etats- 
Unis  [Daird)  et  aux  îles  Bermudes  {vo7î  Martens)  ;  un  individu  paraît 
même  avoir  été  tué  près  de  Nelson  en  Nouvelle-Zélande  {Dresser). 

Mœurs.  —  C'est  un  oiseau  migrateur  qui  arrive  dans  nos  contrées 
en  avril  ou  mai,  suivant  l'état  de  la  saison,  et  émigré  en  septembre; 
mais  on  en  voit  encore  passer  en  octobre,  si  l'automne  est  beau  et 
chaud.  Pour  la  Belgique,  c'est  surtout  un  oiseau  de  passage,  plus  ou 
moins  abondant  suivant  les  années,  mais  quelques  couples  restent 
nicher  dans  le  pays.  Il  voyage  isolément  pendant  la  nuit,  traverse 
l'espace  à  une  grande  hauteur,  mais  accomplit  une  partie  de  sa  route 
en  courant.  Les  anciens  croyaient  que  le  Crex  servait  de  guide  aux 
Cailles,  qui  arrivent  vers  la  même  époque,  d'où  son  nom  vulgaire  de 
Roi  des  cailles;  rien  cependant  ne  le  rapproche  de  ces  oiseaux,  dont 
il  ne  recherche  pas  même  la  société. 

Le  Crex  vil  dans  les  prés  et  les  champs,  mais  il  lui  faut  un  terrain 
qui  ne  soit  ni  trop  sec,  ni  trop  humide.  Il  séjourne  dans  les  prairies 
jusqu'au  moment  de  la  fenaison  et  se  rend  ensuite  dans  les  champs 
de  céréales,  de  trèfle  ou  de  luzerne  pour  y  demeurer  jusqu'à  la 
moisson.  Plus  tard,  quand  les  prés  et  les  champs  sont  fauchés,  il 
cherche  un  refuge  dans  les  buissons  et  les  herbages.  Dans  le  même 
arrondissement  et  sans  raison  appréciable,  il  est  tantôt  rare,  tantôt 
commun. 

Cet  oiseau  se  distingue  des  autres  Rallidés  par  ses  mœurs  terrestres, 
qui  le  tiennent  éloigné  des  eaux  et  des  lieux  humides.  Il  est  plus 
nocturne  que  diurne  :  c'est  au  crépuscule  et  à  l'aurore,  ainsi  que 
pendant  les  nuits  claires  et  chaudes,  qu'il  se  montre  dans  toute  son 
activité,  mais  il  se  repose  toujours  vers  le  milieu  de  la  nuit.  On  ne 
le  voit  que  rarement  durant  le  jour,  car  il  se  tient  alors  caché  dans 
les  herbes,  et  le  milieu  de  la  journée  est  même  consacré  au  sommeil. 
C'est  pendant  les  belles  soirées  de  juin  que  l'on  peut  entendre  le  mâle, 
car  c'est  alors  l'époque  de  la  reproduction  et  il  faut  plaire  à  sa 
compagne;  son  chant  d'amour  n'est  C(^pendant  guère  agréable,  il  se 
résume  à  quelques  cris  rauques  r(iSSoml)lant  à  arp-srhnarp  ou  kncrp- 


—  286  — 

knerrp,  rerp-i^erp  qu'on  peut  entendre  presque  sans  interruption 
pendant  des  nuits  entières.  Les  sexes  s'appellent  par  un  léger  kju, 
kjo,  kjé,  mais  après  la  ponte  ils  deviennent  muets  ;  cependant,  quand 
ils  sont  supris,  ils  jettent  un  cri  d'angoisse  ressemblant  à  tzîh. 

Le  Râle  de  genêt,  comme  on  le  désigne  souvent,  a  des  formes 
élégantes  et  des  mouvements  fort  gracieux  ;  il  court  avec  une  rapidité 
étonnante,  la  tête  baissée,  le  cou  rentré,  le  corps  horizontal,  et  se 
faufile  entre  les  herbes  avec  une  agilité  extrême  et  presque  sans  les 
agiter;  aussi  peut-on  entendre  le  cri  de  cet  oiseau  tantôt  dans  un 
endroit,  tantôt  dans  un  autre,  sans  rien  remarquer  de  sa  course. 
Il  vole  assez  rapidement  en  rasant  le  sol  en  ligne  droite,  mais  ne  va 
jamais  loin  ;  il  sait  qu'il  est  plus  en  sûreté  au  milieu  des  herbes  que 
dans  l'air,  et  ce  n'est  qu'à  l'approche  d'un  chien  qu'il  se  décide  à 
s'envoler;  il  faut  cependant  un  bon  chien  d'arrêt  pour  le  faire  lever, 
et  encore  déjoue-t-il  souvent  les  poursuites  du  chasseur.  Son  vol  est 
lourd  et  fatigant  ;  pendant  les  migrations  il  s'élève  haut  dans  les  airs 
et  profite  le  plus  possible  d'un  vent  favorable  quand  il  a  une  mer  à 
traverser;  arrivé  à  terre,  il  continue  sa  route  autant  en  courant  qu'en 
volant. 

Le  Crex  n'est  nullement  sociable,  et  ne  recherche  pas  plus  la  société 
des  siens  que  celle  d'autres  espèces;  les  jeunes  quittent  même  leur 
mère  et  se  dispersent  dans  les  champs  avant  de  savoir  voler.  C'est 
un  pillard  de  nids  des  plus  dangereux  :  il  tue  les  petits  passereaux  qui 
nichent  dans  les  champs  pour  leur  manger  la  cervelle  ;  les  mulots  et 
les  campagnols  ne  sont  pas  davantage  à  l'abri  de  ses  atteintes,  car  il 
leur  a  bientôt  troué  le  crâne  à  coups  de  bec. 

Cet  oiseau  se  nourrit  d'ordinaire  d'insectes,  de  larves,  de  chrysa- 
lides, d'araignées,  de  vers,  de  petits  mollusques  à  coquille,  plus 
rarement  de  graines  et  presque  uniquement  de  graines  de  graminées. 
Il  avale  également  du  gravier  et  de  petites  pierres  pour  faciliter  sa 
digestion.    Il  boit  beaucoup  et  se  baigne  volontiers. 

Reproduction.  —  Le  Crex  des  prés  ne  commence  la  construction 
de  son  nid  qu'à  la  fin  de  mai  ou  au  commencement  de  juin.  C'est  au 
milieu  des  herbes  d'une  prairie  ou  dans  un  champ  de  trèfle  ou  de 
luzerne,  que  la  femelle  creuse  une  petite  fosse  qu'elle  garnit  grossiè- 
rement de  brins  d'herbes,  de  feuilles,  de  mousse  et  de  radicelles. 
La  ponte  est  ordinairement  de  sept  à  neuf  œufs,  mais  ce  nombre  peut 
s'élever  jusqu'à  douze  ;  si  la  première  couvée  a  été  enlevée,  la  seconde 
ne  sera  plus  que  de  cinq  œufs.  Ceux-ci  ont  une  coquille  finement 


—  287  — 

grenue,  lisse,  brillante,  de  couleur  grisâtre  ou  rosâtre,  et  marquée  de 
taches  et  de  points  violacés  et  d'un  jaune  rougeâtre  ou  brun;  ils 
mesurent  environ  38  millim.  sur  27. 

La  femelle  couve  pendant  trois  semaines  et  avec  une  telle  ardeur 
qu'on  peut  l'enlever  de  son  nid  avec  la  main  sans  qu'elle  songe  à  fuir. 
Les  poussins  quittent  leur  nid  le  lendemain  de  l'éclosion,  et  suivent 
aussitôt  leur  mère  pour  apprendre  à  trouver  leur  nourriture;  ils 
répondent  à  son  appel  par  des  piaillements  qui  ressemblent  aux  cris 
des  jeunes  moineaux. 

OENRE     CXXVII 

MARQUETTE.  —  POEZANA. 

Rallus,  Briss.  Or7i.  V,  p.  155  (17GU). 

Gallinoila,  Lath.  Ind.  orn.  II,  p.  772  (1790). 

PoRZANA,  Vieill.   Analyse,  p.  61  (1816). 

Ortygometra,  Zahornia,  Leach,  Syst.  cal.  M.  B.  Dr.  Mus.  p.  34  (1816). 

OcTOGOMETRA,  Zaporina,  Forst,  Syn-  Cal.  Br.  B.  pp.  27,  59  (1817). 

Crex,  Licht.  Verz.  Doubl.  p.  80  (1823). 

PHAL.A.RIDION,  Kp.  NuluH.  Syst.,  p.  173  (1829). 

Phalaridium,  Meves,  Joum.  f.  Orn.  1875  p.  433. 

Car.  —  Bec  plus  court  que  la  tête,  atténué  à  la  pointe,  comprimé  latérale- 
ment ;  narines  latérales,  oblongues,  étroites,  atteignant  le  milieu  du  bec  ; 
ailes  médiocres,  sub-aiguës  ;  queue  courte,  conique,  à  rectrices  souples  et 
assez  étroites  ;  tarses  médiocres,  robustes,  scutellés  ;  doigts  longs,  grêles,  le 
médian  plus  long  que  le  tarse  ;  pouce  bien  développé  et  portant  à  terre. 

ILib.  —  Ce  genre  a  des  représentants  dans  l'ancien  monde  et  en 
Océanie. 

225.  —  Marouette  tachetée 

PORZANA  MARUETTA,  Bonup.  ex  Leach. 

(PI.  204) 

Rallus  aquaticus  minor,  Briss.  Ornillt .  v.  p.  155  (1760). 

Rallu.s  PORZANA,  Liii.  Syi<t.  nat.  I,  p.  202(1766). 

Rallis  KULicrLA,  Scop.  Ann.  I.  Hist.  nat.  p.  108  (1769). 

Gallinl'LA  ocHRA,Geriiii,  Ont.  virih.  Di;i.  V,  p.  2,  pi.  484  (1776). 

Gallinula  PORZANA,  Latli.  liai.  Orti   11,  p.  772(1790). 

Oktygometka  MARUETTA,  Leucli,  .S'//s7.  L'ut.  B.  Br.  Mus.  p.  34(I81G). 

()(  loiidMKTKA  MARUETTA,  VoTst ,  :Sy>iopl.  Cal.  Uni.  B.  [).  27  (1HI7), 

CuEX  PORZANA,  Liclit,  Vcrz.  DouOletlt'/i,  \).  80  (1S23). 

OuTYGo.METKA  PoRZANA,  Stcpli.  ^/taio's  (Jeu.  Zool.  XII,  1,  p.  233  (1S24). 

Gallinula  maculata  et  I'unctata,  G.  Brehm,  [sis  1830  p.  992. 


-  288  — 

Zapornia  porzana,  Gould,  B.  of  Eur.  pi.  343  Cl 837), 
PoRZANA  MARUETTA,  Bonap.  Cat.  metod.  Ucc.  Eur.,  p.  64  (1842). 
Ortygometra  arabica,  Licht.  Nomencl.  avimn,  p.  96  (1854). 
Gallinula  leucothorax  et  gracilis,  L.  Brehra.  Naum.  1855  p.  293. 
Porzana  maculata,  G.  F.  Dub.  PI.  col.  Ois.  Belg.  III,  p.  211  (1860). 
Das  gesprenkelte  Sumpfhuhn,  en  allemand. 
The  spotted  Crake,  en  anglais. 
Het  Porceleinhoentje,  en  flamand. 

Taille  :  0^18  ;  ailes  0,117  ;  bec,  0,021  ;  tarses,  0,033. 


Description  des  deux  sexes  adultes.  —  Dessus  de  la  tête,  nuque,  manteau 
et  scapulaires  d'un  brun  olivâtre  avec  le  centre  des  plumes  noirâtre,  des 
mouclietures  blanches  sur  la  nuque  et  des  stries  de  même  couleur  longitu- 
dinales sur  le  manteau  et  transversales  sur  les  scapulaires  ;  bas  du  dos  noir, 
chaque  plume  terminée  de  brun  olivâtre  et  tachetée  de  blanc  sur  les  côtés  ; 
lorums  noirs  ;  front,  larges  raies  sourcilières,  gorge  et  poitrine  d'un  gris 
foncé  ;  région  paro tique,  côtés  du  cou  et  de  la  poitrine  lavés  de  brun  olivâ- 
tre et  les  côtés  du  cou  et  de  la  poitrine  mouchetés  en  outre  de  blanc  ;  couver- 
tures des  ailes  d'un  brun  olivâtre  avec  des  raies  et  des  taches  blanches 
bordées  de  noir  ;  rémiges  et  rectrices  brunes  ;  flancs  barrés  de  brun 
olivâtre,  de  blanc  et  de  noir  ;  sous-caudales  et  milieu  du  ventre  blancs.  Bec 
d'un  jaune  verdâtre  avec  la  base  rouge  ;  pattes  verdâtres  ;  iris  brun. 

La  femelle  ressemble  au  mâle,  mais  le  gris  de  la  tête  et  de  la  poitrine  est 
moins  pur  et  moins  étendu.  En  automne  la  poitrine  est  fortement  lavée  de 
brun  olivâtre  da,ns  les  deux  sexes. 

Jeune.  —  Aspect  général  des  adultes  en  automne  ;  gorge  et  milieu  du  ven- 
tre d'un  blanc  varié  de  cendré  olivâtre  ;  raies  sourcilières  et  poitrine  d'un 
brun  olivâtre  et  tachetées  de  blanc  ;  raies  blanches  des  flancs  plus  étroites  ; 
sous-caudales  lavées  de  roussâtre  ;  bec  et  pattes  d'un  brun  verdâtre. 

Poussin. —  Duvet  d'un  noir  uniforme  ;  bec  et  pattes  d'un  blanc  rougeâtre, 
les  dernières  un  peu  plus  grisâtres. 

Hab:  —  La  Marouette  tachetée  est  généralement  répandue  dans 

toute  l'Europe  ;  en  été  on  l'ob- 
serve en  Scandinavie  jusqu'au 
65",  mais  dans  la  Russie  occi- 
dentale elle  ne  dépasse  guère  le 
64%  dans  l'Oural  le  58°  et  dans 
la  Sibérie  occidentale,  le  55°. 
Aux  îles  Britanniques  elle  est 
plus  ou  moins  répandue  partout, 
hiverne  même  dans  quelques  régions  et  se  montre  parfois  aux  îles 


-  289   - 

Orkney  et  Shetland  [Seehohm).  Elle  est  assez  commune  et  niche  dans 
certaines  localités  de  la  Belgique,  surtout  dans  les  polders  de  la 
Flandre. 

Cet  oiseau  est  abondant  et  sédentaire  dans  les  pays  qui  entourent 
la  Méditerranée,  y  compris  le  Maroc  [Dymke]  et  l'Algérie  {Loche).  En 
hiver,  on  l'observe  en  Egypte,  en  Nubie,  sur  les  côtes  de  la  mer 
Rouge,  dans  la  région  du  Nil  Bleu  et  du  Nil  Blanc  {de  Heuglin),  en 
Abyssinie  {Ruppell)  et  aux  îles  Canaries  {Berthelot). 

A  l'Est  on  rencontre  cette  espèce  dans  la  région  Aralo-Caspienne, 
dans  les  vallées  de  l'Irtysch  et  de  TOuroungou,  dans  la  Songarie, 
dans  la  région  du  Tian-Chan  [Bogdanoio),  en  Turkestan  {Severtzow), 
en  Perse  {Blan/o?'d),  en  Asie  Mineure  {Strickland),  et  son  habitat 
s'étend  vers  l'Est  jusque  dans  l'Inde  [Jerdon)  et  la  Birmanie 
[Seebohm). 

Mœurs.  —  Cet  oiseau  nous  revient  à  la  fin  de  mars  ou  en  avril 
et  émigré  en  septembre.  Il  voyage  isolément  pendant  la  nuit  et  tra- 
verse l'espace  à  une  grande  hauteur,  car  il  lui  est  plus  facile  de  voler 
dans  les  hautes  régions  que  près  du  sol.  Mais  ces  voyages  lui  occa- 
sionnent toujours  beaucoup  de  fatigue,  aussi  est-il  souvent  obligé  de 
prendre  terre  pour  se  reposer  ;  à  ce  moment,  il  est  parfois  tellement 
abattu  qu'il  se  laisse  prendre  avec  la  main. 

La  Marouette  tachetée  vit  dans  les  prairies  humides,  dans  les 
marais,  près  des  étangs  et  des  fossés  inondés,  et  elle  se  dissimule 
dans  les  herbes,  les  joncs  et  les  carex  ;  jamais  on  ne  la  rencontre  près 
de  grandes  eaux  découvertes,  car  il  lui  faut  toujours  des  herbages 
pour  se  cacher.  Elle  n'aime  cependant  pas  les  endroits  couverts  de 
roseaux  et  de  massettes,  et  ne  s'y  rend  que  momentanément,  alors 
qu'il  n'y  a  rien  de  plus  convenable  aux  environs.  Pendant  le  jour  elle 
se  tient  tranquille  et  silencieuse  ;  au  crépuscule  elle  se  met  en  mou- 
vement, s'anime,  vole  d'un  endroit  à  l'autre  et  continue  ses  ébats 
jus({u'au  lever  du  soleil.  C'est  surtout  vers  le  milieu  du  jour  qu'elle  se 
livre  au  sommeil. 

Cette  Marouette  ressemble  beaucoup  par  ses  allures  au  Râle  de 
genêt;  elle  marche  à  grands  pas  en  tenant  le  corps  horizontal,  le  dos 
voûté,  la  queue  pendante  et  les  jambes  cachées  dans  les  plumes,  ce 
qui  lui  donne  l'apparence  d'avoir  les  pattes  plus  courtes  qu'elles  ne  le 
sont  réellement.  Mais  quand  elle  S(^  croit  en  sûreté,  elle  allonge  le 
cou  et  les  jambes  et  accompagne  sa  inarche  d»»  niouvciiioiiis  tle  tète; 
à  la  course  elle  est  d'une  agilité  étoimauie,  et  son  pas  est  alors  (\\n\o. 
Tome  IL—  1890  W? 


—  290  - 

longueur  démesurée.  Sa  légèreté  lui  permet  de  se  glisser  entre  les 
herbes  presque  sans  les  toucher  et  de  courir  sur  les  feuilles  de  nénu- 
phars qui  flottent  à  la  surface  des  eaux.  Elle  nage  avec  aisance  et 
sans  contrainte  et  paraît  même  se  plaire  à  cet  exercice  ;  par  contre, 
son  vol  est  lourd,  difficile  et  de  courte  durée,  aussi  l'oiseau  ne  s'en- 
vole-t-il  que  rarement  sans  nécessité.  C'est  dans  les  herbages  que  la 
Marouette  vit  et  se  cache,  et  ses  ennemis  ne  parviennent  que  diffici- 
lement à  la  dépister  ;  elle  ne  s'envole  que  quand  elle  est  surprise  ou 
serrée  de  près  par  un  chien  ou  par  tout  autre  carnassier.  Elle  mène 
une  vie  solitaire,  et  on  ne  voit  le  mâle  avec  sa  femelle  qu'à  l'époque 
des  amours.  Pendant  le  jour  on  ne  l'entend  jamais,  mais  bien  dans  la 
soirée  et  pendant  la  nuit  ;  son  cri  ressemble  à  quit  ou  whit. 

La  nourriture  de  cet  oiseau  consiste  en  insectes,  larves,  petits 
mollusques  avec  ou  sans  coquille,  vers,  matières  végétales  vertes  et 
graines  ;  il  avale  en  même  temps  du  sable  et  du  gravier.  C'est  surtout 
près  de  l'eau  ou  dans  leau  qu'il  cherche  sa  nourriture. 

Reproduction.  —  La  Marouette  tachetée  niche  dans  les  marais, 
dans  les  prairies  humides,  dans  les  fossés  inondés  ou  autres  endroits 
semblables.  Le  nid  est  placé  sur  un  tas  de  plantes  renversées  et  piéti- 
nées  et  toujours  sur  un  sol  humide  ou  marécageux  ;  il  est  volumineux, 
assez  profond,  formé  de  feuilles  sèches  de  carex,  de  joncs  et  de  roseaux 
légèrement  enchevêtrées  et  retenues  par  des  brindilles  aux  herbes 
environnantes;  l'intérieur  est  garni  de  fines  graminées  et  de  duvet 
végétal.  Ce  nid  est  difficile  à  trouver,  car  la  femelle  a  soin  d'inchner 
les  herbes  et  les  carex  qui  l'entourent,  de  façon  à  lui  former  une 
sorte  de  toit  de  verdure  qui  le  cache  aux  yeux  des  oiseaux  de  proie  ; 
elle  peut  ainsi  couver  sans  être  inquiétée,  car  elle  ne  trahit  jamais  sa 
présence  par  des  cris. 

La  ponte  a  lieu  à  la  fin  de  mai  ou  au  commencement  de  juin,  et  se 
compose  de  neuf  à  douze  œufs.  Ceux-ci  sont  brillants,  d'un  roux 
jaunâtre  pâle  et  parsemés  de  taches  arrondies  et  de  points  d'un  gris 
bleuâtre  et  d'un  brun  rougeâtre  ;  ils  mesurent  environ  34  millim. 
sur  23. 

La  femelle  couve  pendant  trois  semaines  avec  une  telle  ardeur, 
qu'elle  ne  songe  à  fuir  que  quand  l'ennemi  est  près  d'elle.  Ce  n'est  que 
quand  la  première  couvée  a  été  détruite,  qu'elle  fait  une  seconde 
ponte,  mais  celle-ci  ne  se  compose  alors  que  de  six  à  huit  œufs.  Les 
poussins  se  cachent  avec  adresse  et  quittent  leur  mère  avant  de  savoir 
bien  voler. 


—  291  — 

226.  —  La  Marouette  poussin  (1). 

PORZANA    PARVA,    Dubois    ex    Scop. 

(PI.  225). 

Rallus  parvus,  Scop.  Ann.  I.  hist.  nat.  p.  108  (1769). 

Rallus  pusillus,  Cim.  (nec  Pall.)  Syst.  nat.  I,  p.  719  (1788). 

Rallus  mixtus,  Lapeyr.  Mam.  et  ois.  de  la  Haute-Garonne.,  p.  38  (1799). 

Gallinula  pusillus,  Bechst.  Ornith.  Taschenb.  p.  340  (1803). 

Gallinula  minuta.  Mont,  (nec  Pall.),  Orn.  Dict.  mppl.  G.  2,  fol.  9  (1813). 

Gallinula  foljambii,  Mont,  ibidem  fol.  B  b.  (1813). 

Zapornia  minuta,  Leach,  S^ii.  C«i.  mam.  Brit.  Mus.  p.  34  (1816). 

Zapornia  minuta,  Forst,  Synop.  Cat.  Br.  i?.  p.  59  (1817). 

Rallus  peyrousei,  Vieill.  N.  Dict.  dliist.  nat.  XXVlll,  p.  562(1819). 

Crex  pusilla,  Licht.,  Yerz.  Doubletten  p.  80  (1823). 

Ortygometra  olivacea,  Leach,  Sliarcs  Gen.  Zool.  XII,  1,  p.  226  (1824). 

Phalaridion  pusillum,  Kaup,  Nat.  Syst.  d.  Europ.  Thierio.  p.  173  (1829). 

Ortygometra  pusilla,  Bonap.  Comp.  List.  p.  53  (1838). 

Ortygometra  minuta,  Keys.  et  BL,  Wirbelth.  Eur.  p.  LXVIII  (1840). 

Porzana  minuta,  Bonap.  Ucc.  Eur.  p.  65  (1842). 

Gallinula  parva  et  mixutissima,  Brehra,  Naumannia,  1855,  p.  293. 

Porzana  pusilla,  C.  Dubois,  PI.  col.  Ois.  Belg.  111,  p.  212(1860). 

PoRZ.\NA  PARVA,  A.  Dubois,  Consp.  aviurn  Ettrop.  p.  26  (1871). 

Crex  parva,  Seeb.  Brit.  Birds,  II,  p.  547  (1884). 

Das  Kleine  Sumpfhuhn,  en  allemand. 

The  Little  Crake,  en  anglais. 

Het  Kleinste  waterhoen,  en  flamand. 

Taillo  :  0■^17  ;  ailes  0,102;  tarses  0,031. 

Description  du  mâle  en  été.  —  Parties  supérieures  d'un  brun  olivâtre  avec 
des  taches  noires  variées  de  quelques  petites  taches  blanches  sur  le  dos  ;  cou- 
vertures des  ailes  d'un   cendré  olivâtre  sans  taches  ;  rémiges  et  rectrices 

(i)  Beaucoup  d'auteurs  désignent  cette  espèce  sous  le  nom  de  /'.  minuta  (Pall.)  ou  de  P.  pusilla 
(Pall.),  mais  ces  dénominations  n'appartiennent  pas  à  la  Marouette  poussin. 

Pallas  a  décrit  en  1776  un  oiseau  provenant  de  Daourie  sous  le  nom  de  Rallus  pusillus,  et  en 
181 1  il  décrivit  le  même  oiseau  sous  le  nom  de  Rallus  minutus.  C'est  la  Marouette  api>elée  par 
Vieillot  llallus  Baillonii  et  par  Naumann  Crcxpy^nuca.  Le  P   paii'a  n'existe  pas  en  Daourie. 

La  dénomination  de  Porzana  p'isilla  appartient  donc  de  droit  à  la  Marouette  de  Bâillon,  et 
non  à  l'espèce  qui  nous  occupe.  Bogdanow  fait  remarquer  que  dans  sa  Zoo^n-ap'iia  (ÏI,  p.  155), 
Pallas  cite  sa  première  description,  en  changeant  le  nom  de  R.  pusillus  en  /?.  minut'is  et 
impr>sece  dernier  nom,  en  ajoutant  aux  caractères  spécifiques  «  venter  testaccus .•»  «  Il  est  probable, 
ajoute  Bogdanow,  c|ue  l'exemplaire  recueilli  en  Daourie  adisjiaru,  et  que  Pallas  a  contrôlé  sa  pre- 
mière description  sur  un  sujet  à  ventre  trstaceus  mais  ap]iartenant  ;\  une  autre  esjjèce;  de  manière 
(|ue  dans  sa  Zooi^rapliln,  il  a  com]X)sé  la  descriiition  du  R.  minuUis  d'après  deux  oiseaux  appar- 
leiianl  à  dillcrentes  espèces.  »  —  C'est  jwur  éviter  toute  confusion,  que  j'ai  rendu  ;\  la  Marouette 
]xiussin  le  nom  de /«ry(Z  donné  |wr  .Sc(ii><)li  (Voy.  mon  Conff>.  a-'iinn  «v/r.  p.  26.,  1S71  ).  M.M. 
Dresser  (1878),  Bogdanow  et  Seel)ohtii  (1X84)  ont  suivi  ma  manière  de  voir. 


—   292  — 

brunes  ;  sus-caudales  d'un  roux  olivâtre  ;  front,  sourcils,  côtés  de  la  tête, 
devant  et  côtés  du  cou,  poitrine  et  abdomen,  d'un  gris  bleuâtre  ;  les  plumes 
du  bas-ventre  plus  foncées  et  terminées  de  blanc  ;  sous-caudales  noires 
barrées  de  blanc.  Bec  d'un  beau  vert  avec  la  base  rouge  ;  iris  rouge  carmin  ; 
pattes  vertes. 

Femelle.  — Parties  supérieures  comme  chez  le  mâle  ;  front,  sourcils  et  joues 
d'un  gris  bleuâtre  ;  gorge  et  une  partie  du  devant  du  cou  blanchâtres  ;  bas  du 
cou,  poitrine  et  abdomen  d'un  blanc  roussâtre,  plus  roux  sur  les  flancs;  bas- 
ventre  et  sous-caudales  noirâtres,  toutes  les  plumes  tachetées  de  blanc,  ce  qui 
forme  à  ces  parties  des  barres  irrégulières. 

Le  plumage  d'hiver,  dans  les  deux  sexes,  diffère  peu  de  celui  de  la  femelle 
adulte  en  été. 

Jeune  âge.  —  Ressemble  également  à  la  femelle,  mais  le  front,  les  sourcils 
et  les  joues  sont,  comme  les  parties  inférieures,  d'un  blanc  roussâtre  ;  côtés  de 
la  poitrine  barrés  de  brun. 

Poussin.  —  Revêtu  d'un  duvet  noir  à  reflets  verdâtfés  sur  la  tête  et  sur 
une  partie  du  cou. 

Hab.  —  Cet  oiseau  ne  dépasse  pas,  au  Nord,  le  sud  de  la  Suède  et 
sp»^j'^^'?^H^^^^?f:f^^f^^^ff^l     n'a  pas  été  observé  en  Norwège: 
^|:  i  i| I  i  !  iJ  i âr^P4i^Jj|      il  a  niché  accidentellement,  en 
i^         ;  '  '•        '      ^y^^p    juin   1862,  dans  la  partie  méri- 

M  kj-rK'^T'  .  '  •■   ' 'fwrtlH     dionale  de    Kolmar   Lâne,    en 

mpM-!-'^:         .^^'^'i^^^^q    Suède  {Westerlund)  ;   il   ne   se 
t-F+  -M^trrtH^tS'rr;.     montre     aussi    qu  accidentelle- 

\l-^i-~.::-^Yài^u-:{:\^^-^^^m±\xt,:^^^^-^:..  mont  aux  lies  Britanniques 
L-;!  !-ji  i.--.--|fc+:^-^l-t|H-|--m^^  (Seebohm).  Il  est  moins  rare  en 

u_^^        ^  Danemark;  en  Allemagne  il  est 

plus  répandu  dans  les  parties  méridionales  que  dans  le  nord  [Nau- 
'inann)  ;  en  Russie  on  l'observe  dans  les  parties  méridionales  des 
régions  du  Tchernozem  et  de  l'Oural,  en  Crimée,  au  Caucase,  dans 
les  régions  Aralo-Caspienne  et  du  Tian-Chan  {Bogdanow).  Il  est  plus 
ou  moins  répandu,  en  été,  dans  l'Europe  centrale  et  méridionale  ; 
mais  il  est  rare  et  de  passage  irrégulier  en  Belgique.  Il  est  séden- 
taire en  Algérie  (Loc/ze),  mais  ne  se  montre  jamais  dans  le  nord-est 
de  l'Afrique. 

En  Asie,  on  observe  cette  Marouette  en  Turkestan  {Severtzow),  en 
Afghanistan  [Seebohm]  jusque  dans  la  partie  nord-ouest  de  l'Inde 
{Hume),  mais  elle  n'a  été  observée  ni  en  Asie  Mineure,  ni  en  Pales- 
tine, ni  en  Perse.  Il  est  probable  que  cette  espèce  hiverne  dans  les 
parties  les  plus  méridionales  de  l'Europe. 


—  293  — 

Mœurs.  —  La  Marouette  poussin  ne  revient  dans  sa  patrie  que 
dans  le  courant  de  mai  et  émigré  en  septembre.  Elle  vit  dans  les 
marécages,  les  prairies  humides,  les  fossés  inondés,  près  des  lacs  et 
des  étangs  et  se  montre  même,  pendant  ses  voyages,  près  des  fleuves 
et  des  rivières.  Crespon  dit  que  l'on  prend  chaque  année  quelques 
individus  dans  les  jardins  et  les  basses-cours  des  environs  de  la  ville 
de  Nîmes.  Cet  oiseau  se  plaît  surtout  dans  les  herbages  croissant  dans 
un  sol  boueux  ;  il  recherche  du  reste  toutes  les  eaux  fangeuses  gar- 
nies de  joncs,  de  roseaux,  de  massettes  et  autres  plantes  aquatiques, 
ou  bordés  de  buissons  de  saules  et  d'aunes.  Il  se  tient  si  bien  caché 
qu'il  est  fort  difficile  de  l'apercevoir,  et  c'est  peut-être  la  raison  pour 
laquelle  il  est  si  rare  ;  il  court  avec  une  telle  vitesse  dans  les  herbages 
qu'il  est  presque  impossible  de  le  faire  lever,  si  l'on  n'a  pas  un  chien 
bien  dressé  à  ce  genre  de  chasse;  il  fatigue  tellement  l'ennemi  qui  le 
poursuit,  que  dans  le  midi  de  la  France  on  l'a  surnommé  le  crève- 
chien.  Poursuivi  à  outrance,  il  se  jette  à  l'eau,  luit  à  la  nage  et  plonge 
aussitôt  que  le  chien  est  sur  le  point  de  l'atteindre. 

Ses  mœurs  et  ses  habitudes  sont  analogues  à  celles  de  l'espèce  pré- 
cédente, mais  la  Marouette  poussin  ne  rentre  pas  les  jambes  dans  son 
plumage.  Dès  qu'elle  entend  un  bruit  suspect,  elle  allonge  le  cou, 
relève  l'extrémité  des  ailes,  étale  et  hoche  la  queue  et  ne  tarde  pas  à 
disparaître  dans  un  fourré.  Elle  nage  avec  autant  de  facilité  que  d'élé- 
gance; là  où  l'eau  est  couverte  de  plantes  aquatiques, elle  court  avec  une 
légèreté  admirable,  la  queue  relevée  et  étalée,  et  en  accompagnant 
presque  chaque  pas  d'un  mouvement  de  la  tête;  aucun  obstacle  ne 
l'arrête  dans  sa  course,  car  elle  trouve  toujours  un  moyen  pour  le 
franchir. 

Son  vol  est  très  mouvementé  et  de  peu  de  durée,  mais  l'oiseau  ne  se 
sert  de  ses  ailes  qu'en  cas  de  nécessité.  On  n'entend  son  cri  que  dans 
la  soirée  et  pendant  la  nuit  et  celui-ci  ressemble  à  un  kihik  sonore 
et  sifflant  ;  parfois  aussi,  c'est  une  série  de  kik,  kih,  kik....  que  l'oi- 
seau fait  entendre.  Sa  nourriture  consiste  en  insectes,  larves,  mollus- 
ques, vers,  graines  et  autres  substances  végétales. 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  niche  à  la  fln  de  mai  ou  en  juin,  dans 
une  toufle  de  roseaux,  de  joncs  ou  autres  plantes  aquatiques  émer- 
geant de  l'eau  ou  de  la  vase  ;  parfois  aussi  dans  les  carex  d'un  endroit 
humide.  Le  nid  est  assez  vaste  et  grossièrement  construit  à  l'aide  de 
feuilles  de  carex  et  de  joncs  entrelacées;  l'intérieur  est  garni  de  gra- 
minées sèches.  La  feuKdle  a  soin  de  pencher  sur  son  nid  les  lierbes  ([ui 


—  294  — 

Tentourent,  afin  de  le  rendre  invisible  de  toute  part.  La  ponte  est  de 
huit  à  dix  œufs,  d'un  brun  jaunâtre  terne,  avec  des  taches  plus  foncées 
formant  plutôt  des  nuages  que  des  macules  ;  ils  mesurent  environ  30 
millim.  sur  21.  La  durée  de  l'incubation  est  de  trois  semaines. 

227.  —  La  Marouette  Bâillon.  (1) 
PORZANA  FUSILLA,  Bogd.  ex  Pall. 

(PI.  226.) 

Rallus  pusillus,  Pall.  (nec  auct.  plur.)  Reise  Russ.  Reichs^  III,  app.  p.  700  (1776). 

Rallus  minutus,  Pall.  (ex  parte)  Zoogr.  Rosso-As.  11,  p.  273  (1811). 

Rallus  Bailloni,  Vieill.  N.  dict.  d'hist.  nat.  XXI II,  p.  548  (1819). 

Gallinula  Bailloni  et  stellaris,  Tem.  Man.  d'Or.  11,  pp.  692,  693  (1820-40). 

Crex  Bailloni,  Licht.  Verz.  Douhletten,  p.  80  (1823). 

Ortygometra  Bailloni,  Steph.  Shaw's  Gen.  Zool.  XII,  p.  228  (1824). 

Gallinula  pygm.ï;a,  Naum.  in  Brehm,  Lehrh.  Nat.  eiir.  Yog.  ICI).  ^41  (1824). 

Phalaridion  pygm.eum,  Kaup,  Nat.  Syst.  p.  173  (1829). 

Crex  Foljambei,  Eyt,  (nec  Mont.),  Cat.  Brit.  B.  p.  46  (1836). 

Crex  pygm^a,  Naum.  Yog.  Betitschl.  IX,  p.  567  (1838). 

Ortygometra  pygm^a,  Keys.  et  Blas.  Wirbelt.  Eicr.  p.  LXIII  (1840). 

PoRZANA  PYGM^A,  Bonap.  Cat.  met.  Ucc.  Eur.  p.  64  (1842). 

Zaporina  pygm^a,  Bonap.  Cat.  Parz.  p.  15  (1856). 

PoRZANA  Bailloni,  C.  Dubois,  PL  col.  ois.  Belg.  111.  p.  213  (1860). 

Ortygometra  minuta,  Radde,  Reiseim  Sud.  v.  Ost-Sib.  II,  p.  311  (1863). 

?  Phalaridium  pusillum,  Meves,  Journ.  f.  Orn.  1875,  p.  433. 

Porzana  pusilla,  Bogd.  Consp.  Avium  Imp,  Ross.  p.  54  (1884). 

Das  Zwerg-Sumpfhuhn,  en  allemand. 

The  Baillon's  Crake,  en  anglais. 

Het  Bâillon  Waterhoen,  en  flamand. 

Taille  :0,U\  ;  ailes  0,088;  tarses  0,028. 

Description  du  mâle  adulte  au  printemps.  —  Parties  supérieures  d'un  brun 
olivâtre,  avec  le  centre  des  plumes  de  la  tête,  du  dos  et  des  scapulaires 
noir;  manteau,  scapulaires  et  quelques-unes  des  grandes  couvertures  forte- 
ment maculés  de  blanc  ;  front,  larges  raies  sourcilières,  lores,  joues,  côtés  et 
devant  du  cou  et  poitrine  d'un  gris  bleuâtre,  plus  pâle  à  la  gorge  ;  jambes, 
flancs,  abdomen  et  sous-caudales  noirs  barrés  de  blanc  ;  rémiges  et  queue 
brunes,  mais  le  centre  des  rectrices  noir.  Bec  vert,  plus  sombre  à  son  extré- 
mité ;  iris  rouge  carmin  ;  pattes  roussâtres. 

Femelle.  —  Elle  diffère  peu  du  mâle  ;  lores  et  région  des  oreilles  d'un  brun 
roussâtre  ;  gorge  et  devant  du  cou  blanchâtre  ;  le  gris  des  parties  inférieures 
plus  pâle  ;  sa  taille  est  aus?i  un  peu  plus  petite. 

Jeune.  —  Parties  supérieures  comme  chez  les  adultes,  mais  plus  pâles  et 

(i)  Voir  la  note  à  la  page  agi. 


—  295  — 

moins  marquées  de  blanc;  pas  de  gris  à  la  tête,  cette  teinte  étant  remplacée 
par  du  brun  olivâtre;  gorge  blanche;  poitrine  d'un  blanc  roussâtre  varié  de 
cendré  olivâtre  ;  le  reste  comme  chez  l'adulte. 

Poussin.  —  Duvet  épais,  soyeux,  noir,  avec  des  reflets  verts  et  violets. 
Bec  blauc  tirant  sur  le  jaune;  pieds  noirs,  à  Vàge  de  deux  jours  [Marchand.) 

Remarque.  —  Cette  espèce  ressemble  beaucoup  à  la  Marouette 
poussin,  dont  il  est  cependant  facile  de  la  distinguer  aux  caractères 
suivants  :  cette  dernière  est  d'une  taille  un  peu  plus  forte  et  n'a  pas 
de  taches  blanches  sur  les  scapulaires  ;  la  Marouette  Bâillon  a  les 
flancs,  les  jambes,  le  ventre  et  les  sous-caudales  très  distinctement 
barrés  de  noir  et  de  blanc,  tandis  que  chez  l'espèce  précédente,  les 
jambes  et  les  flancs  sont  unicolores  comme  la  poitrine,  le  bas-ventre 
d'un  gris  sombre  avec  les  plumes  légèrement  terminées  de  blanc, 
mais  ne  formant  pas  des  barres  distinctes,  et  les  sous-caudales  noires 
barrées  de  blanc  ou  de  roussâtre. 

Hab.  —  Cette  Marouette  habite  l'Europe  centrale  et  méridionale, 

pp^^^^™^^^^P^^^|j  mais  son  aire  géographique  ne 

^"Nfesia  ''  P^^^^^  P^s  dépasser  au  Nord  les 

4  U  '  côtes  allemandes  de  la  mer  Bal- 

■■I I  ^■^^^'^  tique  ;  quoique  sédentaire  dans 

Hfpvnj  quelques  localités,  elle  est  rare 

-^•'  en  Angleterre  et  ne  se  montre 

w*^i  H.  qu'accidentellement    en   Ecosse 

..    ^*C  et  en  Irlande  [Harting).  Elle  est 

^^.^^^^z;  p^^g  ^^  j^^-^g  ^^^^  ^^^g  l'Europe 

centrale  et  on  ne  la  voit  qu'irrégulièrement  en  Belgique  à  l'époque 
des  passages.  En  France  on  l'observe  à  peu  près  partout  à  son 
passage  d'automne  ;  en  août,  elle  quitte  les  départements  septen- 
trionaux pour  se  porter  plus  au  midi,  et  y  revient  en  avril  et  mai 
pour  se  reproduire  [Degl.  et  Gei^be)',  elle  est  sédentaire  dans  plusieurs 
départements  du  midi  de  la  France  {Lacroix),  en  Espagne  {Saiinders) 
et  en  Portugal.  En  Italie,  elle  arrive  en  mars  et  en  avril  et  émigré 
en  septembre  {Giglioli),  mais  elle  est  sédentaire  en  Grèce  dans  les 
marais  du  Péloponèse,  en  Roumélie  [Lindermayer)  et  aux  Cyclades 
{Erhard). 

A  l'Est,  on  observe  cette  espèce  en  Russie,  dans  les  parties  méridio- 
nales des  régions  du  Tcheriiozcm  (50°  1.  N.)  et  de  !'(  )ural,  en  Crimé«\ 
au  Caucase,  dans  la  région  Aralo-Casi)ienne,  dans  le  Tian-Chan, 
dans   lu    bassin    de    l'Irtych,    en   l):iuurie,  dans    le  pays   Uubsouricu 


—  296  — 

{Bogdanoio),  en  Tuikestan  d'où  il  émigré  en  Perse  (Severtzow),  dans 
l'Inde  {Jerdon),  au  Kashmir  {Hume),  au  Népaul  (Hodgson),  à  Ceylan 
[Laym-d),  aux  îles  Andaman  (Davison),  en  Birmanie  {Seehohm)  et 
jusqu'aux  Philippines  {Irhij)  et  l'île  de  Bornéo  (Sharpe);  elle  est 
abondante  en  Chine  {David)  et  a  même  été  observée  au  Japon  {Schlê- 
gel).  Il  y  a  donc  lieu  de  supposer  que  cet  oiseau  est  répandu  dans 
tout  le  sud-est  de  l'Asie.  D'après  Schlégel,  le  musée  de  Leyde  possède 
un  sujet  de  cette  espèce,  acquis  à  Verreaux,  comme  provenant 
d'Australie. 

Cet  oiseau  ne  paraît  pas  avoir  été  observé  en  Palestine,  en  Asie 
Mineure  et  dans  le  sud-ouest  de  la  Sibérie.  Mais  il  est  probable  qu'il 
est  répandu  dans  toute  l'Afrique,  car  on  le  rencontre  aussi  bien  dans 
le  midi  que  dans  le  nord  du  continent  noir.  Il  doit  cependant  être  fort 
rare  en  Egypte,  Riippell  paraît  être  le  seul  voyageur  qui  l'y  ait 
observé;  AI.  Dresser  assure  cependant  avoir  reçu  un  spécimen 
d'Alexandrie  ;  de  Heuglin  dit  avoir  observé  assez  souvent  cette  espèce 
en  mai,  à  la  pointe  N.-E.  des  lacs  Birket  el  Qarn  dans  le  Fajum,  et 
généralement  par  couples,  ce  qui  fait  supposer  qu'elle  y  niche.  Dans 
l'Afrique  occidentale,  elle  a  été  observée  depuis  leDamara  {Andersson) 
jusqu'au  cap  de  Bonne-Espérance  {Layard).  Elle  est  rare  et  de  pas- 
sage à  Madeire  {Harcourt)  et  se  trouve  également  dans  l'est  et  au 
centre  de  Madagascar  [Grandidier). 

Mœurs.  —  Cette  espèce  est,  pour  l'Europe  centrale,  un  oiseau  d'été 
qui  arrive  en  mai  et  émigré  en  août,  isolément  et  pendant  la  nuit; 
dans  les  parties  du  midi  de  la  France  où  il  n'est  pas  sédentaire,  il 
arrive  du  15  au  30  mars  et  émigré  tin  septembre.  Ses  mœurs  ne 
diffèrent  guère  de  celles  de  l'espèce  précédente  :  il  vit  dans  les 
marécages  et  autres  lieux  aquatiques,  et  se  tient  caché  pendant  le  jour 
dans  les  herbes  et  les  buissons,  ou  prend  ses  ébats  sur  des  feuilles 
flottantes.  «  Il  aime  à  se  promener  sur  les  feuilles  de  nénuphars,  dit 
M.  Ad.  Lacroix;  j'ai  vu,  fin  septembre  1868,  cinq  Râles  Bâillon 
s'amuser  sur  un  grand  amas  de  feuilles  de  la  plante  citée  plus  haut; 
il  m'est  impossible  de  décrire  la  manière  agile  dont  ils  parcouraient 
en  tous  sens  cette  espèce  de  radeau  que  forment  les  nénuphars.  Je 
suis  resté  caché  prés  d'une  heure  ;  ils  n'ont  cessé  de  se  poursuivre  et 
de  s'amuser  que  lorsque  je  me  suis  montré,  alors  ils  ont  plongé  et 
sont  allés  se  mettre  en  dessous  des  feuilles,  d'où  ils  sortaient  la  tête 
hors  de  l'eau  en  soulevant  les  dites  feuilles.  Je  me  suis  caché  de 
nouveau,  et,  peu  de  temps  après,  ils  ont  recommencé  leurs  amuse- 
ments.  » 


-  397  — 

Cette  Marouette  met  autant  d'adresse  que  ses  congénères  pour 
éviter  le  chasseur  et  les  chiens,  et  ne  s'envole  qu'à  la  dernière  extré- 
mité, mais  seulement  pour  aller  se  cacher  dans  un  fourré  plus  éloigné. 
Elle  paraît  un  peu  plus  sociable  que  les  précédentes  ;  le  soir  et  pendant 
la  nuit,  on  peut  entendre  son  cri  de  Mk,  kik,  kik.  M.  de  Heuglin  dit 
que  les  Marouettes  qu'il  a  observées  en  Afrique,  se  tenaient  dans  des 
eaux  à  fond  de  sable,  non  loin  du  bord  et  dans  le  voisinage  de  buissons 
de  tamarin.  Elles  se  montraient  farouches  pendant  le  jour  etfuj^aient, 
quand  on  approchait,  pour  aller  se  cacher  dans  des  amas  de  racines 
qu'elles  n'abandonnaient  pas  de  sitôt.  Pendant  la  nuit  et  au  lever  du 
soleil,  elles  prenaient  leurs  ébats  sur  des  eaux  découvertes. 

La  nourriture  de  cet  oiseau  consiste  en  vers,  larves,  insectes  divers, 
araignées  et  petits  mollusques;  il  saisit  avec  adresse  les  mouches  qui 
viennent  se  poser  sur  les  feuilles. 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  niche  de  la  même  manière  et  dans  les 
mêmes  endroits  que  la  Marouette  poussin,  et  son  nid  ne  diffère  guère 
de  celui  de  cette  dernière,  mais  il  est  plus  petit  ;  on  le  trouve  ordi- 
nairement dans  les  parties  marécageuses  où  les  joncs  ont  été  coupés 
et  parmi  les  jeunes  pousses.  M.  René  Martin  dit  qu'il  est  fait,  comme 
celui  de  ses  congénères,  avec  des  carex  et  de  menus  roseaux  secs, 
mais  qu'il  est  du  double  moins  vaste  que  celui  des  espèces  voisines. 

En  Europe  la  ponte  a  lieu  fin  mai  ou  en  juin,  mais  dans  l'Inde, 
d'après  Hume,  elle  ne  se  fait  qu'en  juillet  et  août.  Brehm  et  Paessler 
font  remarquer  que  quand  la  première  couvée  a  été  détruite,  les 
oiseaux  construisent  un  second  nid,  et  parfois  même  un  troisième,  ce 
qui  fait  que  l'on  trouve  quelquefois  encore  des  nids  de  cette  Marouette 
jusqu'en  août.  La  ponte  est  de  quatre  à  huit  œufs,  mais  le  plus  ordi- 
nairement de  six;  ceux-ci  sont  d'im  gris  jaunâtre  terreux,  tachés  et 
pointiUés  de  cendré  et  marqués  superficiellement  de  taches  d'un  brun 
rougeâtre  éparpillées  sur  toute  la  surface  ou  plus  nombreuses  au  gros 
bout.  Ces  œufs  mesurent  en  moyenne  26  millim.  sur  19. 

GENRE     CXXVIII 

POULE  D'EAU.  —  GALLINULA 

Gallinula,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  3  (1760.) 
FuLiCA,Lin.  Sijst.  nat.  I,  p.  258  (1766.) 
Hydrogallina,  Lacép.  Mém.  de  l'Inst.  III,  p.  51S  (ISOl.) 
Rallus,  Savi,  Orn.  Tosc.  II,  p.  382  (1829.) 
Stagnicola,  Brclim,  Isis,  1830,  p.  992. 

Car.  —  Bec  un  peu  moins  long  «iiio  la  tête,  épais,  comprimi',  un  peu  rcnllé 
ToMK  II.—  1890  38 


—  ^>98  — 

en  dessous  vers  la  pointe,  arrête  se  prolongeant  et  se  dilatant  sur  le  front  en 
une  plaque  lisse  qui  s'étend  jusqu'au-dessus  des  yeux  ;  narines  latérales, 
oblongues,  atteignant  le  milieu  du  bec  et  percées  dans  de  larges  fosses 
nasales  ;  ailes  médiocres,  sub-aiguës  ;  queue  courte,  arrondie,  à  rectrices 
larges  et  assez  résistantes  ;  partie  nue  des  jambes  scutellée  ;  tarses  assez 
courts,  robustes,  scutellés  en  avant,  réticulés  en  arrière  ;  doigts  longs,  bordés 
sur  les  côtés  d'une  membrane  étroite,  le  médian  plus  long  que  le  tarse  ; 
pouce  allongé  et  reposant  à  terre. 

Hab.  —  Ce  genre  a   des  représentants  dans  les  cinq  parties  du 

monde. 

228.  —  La  Poule  d'eau  ordinaire. 
GALLINULA   CHLOROPUS,  Lath.  ex^Lin. 

(PL  227). 

FuLiCA  FUSCA  et  CHLOROPUS,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  257-58  (1766). 

Gallinula  CHLOROPUS  et  FUSCA,  Lath.  Ind.  Orw,  pp.  770-71  (1790). 

Rallus  CHLOROPUS,  Savi,  Orn.  Tosc.  II,  p.  382  (1829). 

Stagnicola   SEPTENTRiONALis,  CHLOROPUS  et  MiNOR,  Brelim,  Isis  1830,  p.  992. 

Stagnicola  FLAviPEset  FiSTULANS,  Brchm,  Vog.  Deiclschl.  p.  705  (1831). 

Stagnicola  parvifrons,  Brehm,   Naumannia,  p.  293  (1855). 

Gallinula  communis,  C.  F.  Dubois,  PI.  col.  Ois.  Belg.  III,  p.  200  (1860). 

Das  gemeine  Teichhuhn,  en  allemand. 

The  Moorhen,  en  anglais. 

Het  Waterhoentje,  en  flamand. 

Var.  Pyrrhorrhoa. 

FuLiCA  CHLOROPUS,  Desj .  Proceed.  zool.  Soc.  1831,  p.  45. 

Gallinula  chloropus,  Auct.  plurimorum. 

Gallinula  pyrrhorrhoa,  A.  Newt.  Proceed.  zool.  Soc.  1861,  p.  18. 

Gallinula  CHLOROPUS  var.  Pyrrhorrhoa,  Grandid.  Rev.  etMag.  de  Zool.  1868 

Var.  Galeata. 

Crex  galeata,  Licht.  Yerz.  Boubletlen,  p.  80  (1823). 

Gallinula  galeata,  Bonap.  Am,  Orn.  IV,  p.  128  (1832). 

Gallinula  CHLOROPUS  var.  Galeata,  (Hartl.  et  Finsch),  Ridgw.  Ann.  Lyc.N.  Y.  X, 

1874,  p.  387. 

Var.  Sandvicensis . 

Gallinula  sandvicensis,  Streets,  Ibis.,  1877,  p.  25. 

Taille  :  0,26  ;  ailes  0,18  ;  tarses  0,058. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  Tête,  cou,  poitrine  et  abdomen 
d'un  gris  ardoise  foncé,  avec  les  plumes  des  flancs  marquées  d'une  large 
strie  blauche  ;  dos;,  scapulaires,  couvertures  des  ailes  et  sus- caudales  d'un 


—  299    - 

brun  olivâtre  lustré  :  rémiges  brunes  ;  rectrices  d'un  brun  noirâtre  ;  plumes 
du  bas-ventre  terminées  de  blanc;  sous-caudales  blanches,  les  médianes 
noires.  Plaque  frontale  et  bec  d'un  rouge  vif,  ce  dernier  jaune  à  sa  partie 
terminale  ;  iris  rouge  carmin  ;  partie  nue  des  jambes  rouge  ;  pattes  d'un 
vert  jaunâtre. 

La  femelle  est  un  peu  plus  petite  que  le  mâle,  sa  plaque  frontale  est  moins 
étendue,  ses  teintes  sont  plus  claires  et  les  stries  blanches  des  ilancs  moins 
nombreuses. 

Jeune.  —  Parties  supérieures  d'un  brun  légèrement  olivâtre^  plus  sombre 
au  bas  du  dos  ;  gorge,  devant  du  cou  et  milieu  de  l'abdomen,  blancs  ;  poitrine 
cendrée  ;  flancs  d'un  brun  olivâtre  plus  pâle  que  le  dos  ;  ailes  et  queue 
brunes  ;  sous-caudales  d'un  blanc  jaunâtre,  les  médianes  noires  ;  plaque 
frontale  peu  développée  et,  de  même  que  le  bec,  d'un  brun  olivâtre;  iris  brun; 
pattes  d'un  vert  plus  sombre  que  chez  l'adulte. 

Poussin.  —  Duvet  d'un  noir  uniforme  ;  tour  de  l'œil,  région  des  oreilles  et 
gorge  variés  de  blanc  ;  partie  interne  des  jambes  blanches. 

Var.  ace.  —  On  rencontre  parfois  des  sujets  variés  de  blanc  ou  d'un  blanc 
pur. 

La  var.  Pyrrhorrhoa  ne  diffère  de  la  forme  type  que  par  ses  sous-caudales 
qui  sont  roussâtres  et  non  blanches. 

La  var.  Galeata  ne  se  distingue  que  par  la  plaque  frontale  plus  large,  non 
arrondie  en  arrière  mais  coupée  presque  carrément. 

La  var.  Sandvicensis  ressemble  à  la  var.  Galeata,  dont  elle  diffère  par  la 
plaque  frontale  plus  étendue,  des  ailes  plus  courtes  et  par  l'absence  de  blanc 
à  l'abdomen . 


Hab.  —  La  Poule  d'eau  ordinaire  est  presque  un  oiseau  cosmopolite  ; 

mmm^^mst^^mmm^^mm^w^^^^^^i  ^^^^'^  l'ancien  monde  on  la  ren- 
contre jusqu'au  delà  du  G5^  1.  N. 
En  Europe  elle  est  généralement 
commune  partout  jusqu'au  55°. 
Le  Marquis  de  Wavrin  m'a  dit 
avoir  vu,  lors  de  son  voyage  au 
cap  Nord,  deux  Poules  d  eau  en 
vie,  qui  avaient  été  prises  à 
Gjesvaer,  île  de  Margero,  à  71° 
1.  N.  vers  la  fin  de  mars  1885  ;  c'est  la  première  fois  que  cette  espèce 
a  été  signalée  sous  une  latitude  aussi  boréale.  Un  individu  a  été 
capturé  dans  le  sud  de  l'Islande  le  4  avril  1882  [Grondai).  Elle  est 
commune  et  sédentaire  en  Belgique. 

En  Afrique  on  rencontre   cet  oiseau  depuis  le  Maroc,   l'Algcrie  et 


—  300  — 

l'Egj^pte  {Loche,  Shelley,  etc.)  jusqu'au  cap  de  Bonne-Espérance 
{Sharpé)  ;  M.  Barboza  du  Bocage  dit  qu'il  n'est  pas  rare  dans 
l'Angola  et  surtout  dans  les  régions  maritimes  du  Benguela  ;  à  l'Est 
du  continent  noir  sa  présence  à  été  signalée  à  Mozambique,  en 
Abyssinie,etc.  {de  Heuglin)  ;  on  rencontre  également  cette  espèce  aux 
îles  Açores,  Madères  et  Canaries  {Du  Cane  Godman). 

En  Asie,  cette  Poule  d'eau  est  également  répandue  presque  partout  : 
sa  présence  a  été  constatée  au  Turkestan,  dans  l'Inde,  la  Chine,  la 
Sibérie  orientale,  le  Japon,  etc.  {David,  Schlégel),  et  même  aux  Phi- 
lippines, à  Célèbes,  à  Bornéo,  à  Java  et  à  Sumatra  {Schlégel,  Dresser). 
La  var.  Pyrrhorrhoa  habite  Madagascar  et  l'île  Maurice  ;  aux  Sey- 
chelles,  au  contraire,  on  trouve  la  forme  à  sous-caudales  blanches 
{G^mndidier), 

La  var.  Galcata  habite  toute  l'Amérique  depuis  1êl50°  1.  N.  jusqu'au 
40^  1.  S.,  c'est-à-dire  du  Canada  [Mus.  Bruœ.)  au  Chili  {Coues). 
La  var.  Sandvicensis  habite  l'île  d'Oahu, l'une  des  îles  Hawaï  {Streets). 
Mœurs.  —  Cette  espèce  émigré  des  régions  septentrionales  en  sep- 
tembre, et  les  passages  continuent  pendant  tout  le  mois  d'octobre  ; 
les  jeunes  des  dernières  couvées  ne  passent  souvent  même  qu'en 
novembre  et  hivernent  près  des  eaux  qui  ne  gèlent  pas.  Ces  oiseaux 
voyagent  par  couples,  pendant  la  nuit  et  en  volant.  Au  printemps,  ils 
retournent  dans  le  Nord  en  avril;  le  mâle  et  la  femelle  arrivent  géné- 
ralement la  même  nuit,  pour  reprendre  possession  de  l'étang  qu'ils 
ont  occupé  l'année  précédente  ;  Naumann  a  cependant  remarqué  que 
c'était  tantôt  la  femelle,  tantôt  le  mâle  qui  arrivait  le  premier.  Dès 
qu'un  couple  a  pris  possession  d'un  étang,  il  ne  s'inquiète  plus  des 
clameurs  de  ses  semblables  qui  passent  dans  les  airs  ;  mais  s'il  n'y  a 
qu'un  seul  individu,  il  les  invite  par  ses  cris  à  venir  auprès  de  lui. 

En  Belgique  on  rencontre  la  Poule  d'eau  dans  tous  les  marais  des 
Flandres  et  de  la  Campine,  sur  les  étangs  des  environs  de  Bruxelles, 
près  des  cours  d'eau  et  presque  partout  où  il  y  a  des  mares  et  des 
étangs.  Elle  est  sédentaire  dans  notre  pays,  car  elle  n' émigré  que 
dans  les  hivers  les  plus  rigoureux,  et  pour  autant  qu'elle  ne  trouve 
pas  de  sources  chaudes  ou  de  rivières  qui  ne  gèlent  pas. 

La  Poule  d'eau  recherche  de  préférence  les  petits  étangs  et  les 
mares  dont  les  bords  sont  garnis  de  roseaux  et  autres  herbages,  ou 
ombragés  par  des  buissons.  Chaque  étang  n'abrite  qu'une  seule  paire, 
à  moins  qu'il  ne  soit  très  étendu,  et  dans  ce  cas,  les  différents  couples 
se  tiennent  toujours  éloignés  les  uns  des  autres,  chacun  défendant  le 


—  801    - 

domaine  qu'il  s'est  choisi.  Il  arrive  bien  quelquefois  qu'un  mâle  fasse 
une  incursion  dans  le  domaine  de  son  voisin,  mais  il  en  est  aussitôt 
chassé  par  les  propriétaires  légitimes,  qui  unissent  leurs  efforts  pour 
éloigner  l'intrus. 

On  rencontre  également  cet  oiseau  près  des  lacs,  des  petites 
rivières  et  dans  les  marais,  mais  il  paraît  toujours  préférer  les  endroits 
où  l'eau  est  assez  profonde,  pourvu  qu'une  partie  soit  couverle  de  ro- 
seaux et  de  joncs,  ou  que  les  bords  soient  garnis  de  buissons  de  saules 
ou  d'aunes. 

La  Poule  d'eau  est  un  charmant  oiseau  qui  s'établit  souvent  dans 
le  voisinage  de  l'homme,  et  se  laisse  facilement  observer  quand  on  ne 
le  poursuit  pas.  Ses  mouvements  sont  gracieux  et  son  naturel  est 
doux,  paisible  et  joyeux,  mais  peu  sociable  ;  la  vue  d'un  objet  l'in- 
trigue-t-elle,  elle  allonge  le  cou,  projette  son  corps  en  avant  et  agite 
la  queue.  C'est  véritablement  un  oiseau  diurne,  qui  s'éveille  dès  l'au- 
rore et  ne  se  livre  que  tard  au  repos.  Sur  les  étangs  éloignés  des 
habitations,  la  Poule  d'eau  se  tient  cachée  dans  les  roseaux  pendant 
toute  la  journée,  et  ne  se  montre  dans  les  endroits  découverts  que  le 
soir  et  le  matin.  Mais  elle  devient  plus  hardie  là  où  elle  sait  que 
l'homme  la  protège.  Nauinann  cite  doux  de  ces  oiseaux  qui  habitaient 
un  étang  près  de  son  jardin,  et  qui  étaient  presque  aussi  apprivoisés 
que  des  animaux  domestiques  ;  ils  savaient  distinguer  les  personnes 
qu'ils  connaissaient  de  celles  qui  leur  étaient  inconnues  ;  mais  ils  ne 
supportaient  pas  qu'on  les  observât  longtemps. 

La  Poule  d'eau  nageavec  aisance  et  on  la  voitramer  avec  dextérité, 
malgré  l'absence  totale  de  membranes  natatoires.  De  temps  à  autre 
elle  s'arrête,  se  repose  sur  un  morceau  de  bois  flottant,  sur  un  îlot, 
sur  un  tas  do  roseaux  renversés  ou  sur  quelque  branche  basse  ;  elle 
nettoie  et  lisse  alors  son  plumage,  l'oint  de  la  matière  grasse  que 
sécrètent  les  glandes  du  croupion,  puis  s'en  va  fouiller  les  roseaux  et 
les  herbes.  Elle  plonge  parfaitement,  sait  nager  entre  deux  eaux  en 
s'aidant  de  ses  pattes  et  de  ses  ailes  ;  lorsqu'elle  est  chassée,  elle  tient 
le  corps  sousl'eau caché  entre  les  roseaux,  et  ne  laisse  sortir  que  la  par- 
tie antérieure  de  la  tête  pour  pouvoir  respirer.  Grâce  à  ses  formes 
sveltes,  elle  jxMit  se  gliss(U'  au  milieu  des  fourrés  les  plus  épais;  ses 
longs  doigis  lui  primetlent  de  courir  facilement  sur  les  feuill(\s  des 
nénuphars  ou  sur  la  b'gère  couche  d'herbes  ou  de  joncs  qui  couvre  la 
surface  de  l'eau  ;  ils  lui  servent  aussi  à  grimper  le  long  des  roseaux 
dont  clic  peut  cnihiasscr  plusieurs  tiges,  et  à  se  percher  sur  les  bran- 


—  302   - 

ches  des  arbres  qui  bordent  les  eaux.  M.  A.  Duvivier  dit  avoir 
remarqué,  que  quand  les  étangs  sont  entourés  de  grands  arbres,  par- 
ticulièrement de  mélèzes,  les  Poules  d'eau  se  cachent  fréquemment 
entre  les  branches  de  ces  arbres  et  paraissent  même  en  affectionner  la 
cime,  surtout  en  hiver  {Omis,  J890,  p.  338),  A  terre  cet  oiseau 
marche  avec  aisance  et  rapidité,  et  en  présence  du  danger  il  court 
aussi  vite  que  le  chien  qui  le  poursuit. 

La  Poule  d'eau  vole  péniblement  en  battant  rapidement  des  ailes 
et  en  tenant  le  cou  et  les  pattes  étendues  ;  ce  n'est  que  quand  elle  a 
atteint  une  certaine  hauteur  que  son  vol  devient  plus  facile  et  plus 
rapide.  Il  est  cependant  certain  qu'elle  ne  s'envole  pas  volontiers  et 
seulement  quand,  serrée  de  près,  elle  ne  peut  faire  autrement.  Sa 
voix  est  sonore  et  s'entend  au  loin;  elle  fait  habituellement  entendre 
un  son  ressemblant  à  h7^&r  ou  ker  ei  k  kurrk\  son  cri  d'appel  est 
plutôt  kirkrekreck;  le  danger  lui  fait  jeter  leTi^i  de  kertettet,  et 
pendant  ses  voyages  elle  fait  souvent  eutendre  le  cri  de  keckeckeck  ou 
kickickick',  la  femelle  appelle  ses  petits  par  gourr  gourr. 

La  nourriture  de  cet  oiseau  consiste  en  insectes,  larves,  vers,  mol- 
lusques et  matières  végétales,  et  c'est  le  plus  souvent  en  nageant 
qu'il  cherche  ses  aliments. 

Reproduction.  —  C'est  en  mai  qu'a  lieu  la  reproduction,  et  les 
mâles  se  livrent  alors  de  violents  combats.  Dès  qu'un  couple  a  fait 
choix  de  l'emplacement  du  nid  à  construire,  mâle  et  femelle  unissent 
leurs  forces  pour  le  défendre  contre  les  attaques  d'autres  mâles.  Le 
nid,  qui  est  assez  volumieux,  repose  ordinairement  sur  un  tas  d'her- 
bageSj  de  joncs  ou  de  roseaux  renversés,  ou  entre  plusieurs  souches 
de  joncs  et  au-dessus  delà  surface  de  l'eau;  il  est  rarement  établi  à 
sec  sur  quelque  éminence  du  sol.  Mâle  et  femelle  travaillent  de  concert 
à  sa  construction  et  y  mettent  plus  ou  moins  de  soins.  Ce  nid  a  la 
forme  d'une  coupole  profonde  et  il  est  fait  de  feuilles  de  roseaux,  de 
joncs  et  de  carex  adroitement  entrelacées  et  disposées  par  couches  les 
unes  au-dessus  des  autres.  La  ponte  dure  une  quinzaine  de  jours  et 
se  compose  de  huit  à  onze  oeufs,  relativement  grands,  à  coquille  fine- 
ment grenue,  lisse,  terne,  d'un  jaune  roux  pâle  et  parsemée  de  taches 
et  de  points  d'un  gris  violet  et  d'un  brun  rougeâtre.Ils  mesurent  environ 
45  millim.  sur  32.  Les  deux  parents  les  couvent  pendant  dix-neuf  à 
vingt  et  un  jours.  Après  l'éclosion,  les  poussins  restent  encore  environ 
vinQ:t-quatre  heures  dans  le  nid;  la  femelle  les  conduit  ensuite  à  l'eau 
et  le  mâle  les  accompagne  en  poussant  des  cris  de  joie.  Au  bout  de 


-  303  — 

quelques  semaines   ils  savent  suffire  à  leurs  besoins,  et  les  parents 
se  préparent  alors  à  faire  une  seconde  couvée. 

«  Au  moment,  dit  Naumann,  où  les  poussins  de  la  seconde  couvée 
arrivent  sur  l'eau,  les  jeunes  de  la  première,  à  demi  adultes  mainte- 
nant, accourent,  les  reçoivent  avec  amitié,  leur  prêtent  secours,  les 
guident.  Grands  et  petits,  jeunes  et  vieux,  ces  oiseaux  ne  font  tous 
qu'un  cœur  et  qu'une  âme,  si  j'ose  m'exprimer  ainsi.  Les  aînées  font 
avec  leurs  parents  l'éducation  de  leurs  jeunes  sœurs;  elles  leur  témoi- 
gnent amour  et  sollicitude,  leur  cherchent  des  aliments,  les  leur 
apportent  et  les  déposent  devant  elles,  tout  comme  les  parents  l'ont 
fait  autrefois  pour  elles-mêmes.  Le  spectacle  est  des  plus  charmants 
quand  toute  la  famille  vaque  sans  crainte  à  ses  occupations  sur  la 
surface  d'un  petit  étang.  Chacune  des  aînées  est  tout  aifairée  à  donner 
à  manger  à  l'une  de  ses  jeunes  sœurs  ;  celles-ci  suivent  tantôt  leurs 
parents,  tantôt  une  de  leurs  sœurs  ;  leurs  piaillements  indiquent 
qu'elles  ont  faim,  et  elles  acceptent  à  manger  de  celle  qui  leur  apporte 
des  aliments  la  première.  D'ordinaii'e,  le  nombre  des  jeunes  de  la 
seconde  couvée  étant  inférieur  à  celui  de  la  première,  et  les  parents 
ne  se  lassant  pas  de  leur  venir  en  aide,  il  en  résulte  souvent  qu'un 
poussin  de  la  seconde  couvée  a  deux  guides  qui  veillent  sur  lui  et 
pourvoient  à  ses  besoins.  Il  nage  entre  les  deux,  en  recevant  à  tour  de 
rôle  des  caresses  et  des  aliments.  En  cas  de  danger,  ce  sont  encore  les 
jeunes  de  la  première  couvée  qui  avertissent  les  autres  et  les  font 
cacher.  » 

GENRE     CXXIX 

FOULQUE.  —  FULICA. 

FuLiCA,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  23  (1760). 
LuPHA,  Reichenb.  Naturl.  Syst.  p.  XXI  (I85I). 

Car.  —  Bec  plus  court  que  la  tète,  convexe,  conqirimé  latéralement,  pro- 
longé sur  le  front  en  une  plaque  assez  large,  nue,  lisse,  parfois  surmontée  en 
arrière  par  deux  tubercules  membraneux  ;  mandibule  inférieure  anguleuse  ; 
narines  latérales,  linéaires,  s'ouvraut  chacune  clans  une  large  fosse  ovalaire; 
ailes  médiocrement  allongées,  amples,  subaiguës;  queue  très  courte,  arrondie; 
jambes  peu  dénudées;  tarses  épais,  ])ea  allongés;  doigts  bordés  d'une  mem- 
brane découpée  en  lobes  dont  le  nombre  est  en  rapport  avec  celui  des  arti- 
culations, le  médian  un  ])eu  plus  long  (pie  le  tarse;  pouce  bien  développé  et 
l)ortant  à  terre,  grêle,  meml)raneux  en  dessous. 

n<d>.  —  Le  genre  Foulque  a  des  représentants  dans  toutes  les 
parties  ihi  inonde. 


304  - 


229.    —  La  Foulque  noirâtre 
FULICA  ATRA,  Lin. 

(PI.  228) 

FuLiCA  MAJOR,  Briss.  Orniih.   VI.  p.  28(1760). 

FuLiCA  ATRA  et  ATERRiMA,  Lin.  Sijst.  nat.  I,  pp.  257-58  (1760). 

FuLicA  FULiGiNOSA  et  (?)  ALBivENTRis,  Scop.  Ann.  I.  Hist .  nat.  p.  104  (1769). 

FuLiCA  LEUCORYX  et  ^THiops,  Sparpin.  Mus.  Caris.,  pi.  12,  13  (1786). 

FuLiCA  ATRATA  et  PULLATA,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  II,  pp.  158-59  (1811). 

FuLiCA  PLATYUROS,  BrehiTi,  Isis,  1830,  p.  992. 

FuLiCA  LUGUBRis,  S,  MiilL,  Yerh.  nat.  gesch.  Nederl.  Bezitt.  III,  p.  454  (1839-44). 

FuLicA  AUSTRALis,  Gould,  Proc.  Zofll.  Soc.  1845,  p.  2. 

FuLiCA  ATRA  JAPONiCA,  Tem.  et  Schl.  Fauna  Jap.  p.  120,  pi.  77  (1850). 

FuLicA  ciNEREicoLLis  (M'Clel.)  Schleg.  Mus.  P.-B.  RalU.  p.  62  (1865). 

Das  Wasserhuhn,  Blasshuhn,  en  allemand. 

The  common  Coot,  en  anglais. 

De  Meerkoet,  en  flamand.  . — 

Taille  :  0,35,  ;  ailes  0,225  ;  tarses,  0,069. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes.  —  Tête  et  cou  noirs,  fuligineux 
à  ]a  gorge;  dessus  du  corps  d'un  gris  noirâtre  ;  dessous  d'un  cendré  sombre; 
ailes  noirâtres,  rémiges  secondaires  terminées  de  blanc  ;  queue  et  sous-cau- 
dales noires.  Plaque  frontale  blanche;  bec  blanc  rosé,  bleuâtre  à  la  pointe  ; 
pattes  cendrées, lavées  de  verdâtre  et  de  jaunâtre;  bas  des  jambes  rougeâtre  ; 
iris  rouge  cramoisi. 

Jeune.  —  Moins  foncé  en  dessus;  côtés  de  la  tête, dessous  du  cou,  jabot  et 
une  partie  de  la  poitrine,  blanchâtres. 

Poussin.  —  Duvet  d'un  noir  fuligineux,  sauf  au  front  et  aux  côtés  de  la 
tête  cil  il  est  d'un  roux  ardent;  côtés  du  cou  parsemés  de  soies  blanches. 
Plaque  frontale  nulle. 

Hab.   —  La   Foulque   habite  toute   l'Europe  jusqu'au  68°  1.  N. 

qu'elle  dépasse  même  quelque- 
fois; pendant  l'automne  de  1857, 
deux  individus  ont  été  observés 
près  de  Vardo  (70°  20')  en  Fin- 
mark  {Collett).  Elle  est  séden- 
taire en  Grande-Bretagne,  en 
Irlande,  aux  Hébrides  exté- 
rieures et  aux  îles  Orkneys,  de 
^^  passage  aux  îles  Pœroe,  et  ne 

visite  qu'accidentellement  les  îles  Shetland  [Gray,  Seehohm,  etc.)  et 

l'Islande  (Faber). 


—  3Û0  - 

Cette  espèce  est  commune  en  Belgique,  comme  dans  toute  l'Europe 
centrale,  mais  la  majorité  émigré  en  automne  ;  elle  est  sédentaire 
dans  le  midi  de  notre  continent,  où  elle  est  cependant  plus  abondante 
en  hiver  qu'en  été.  Elle  est  généralement  répandue  en  Asie  Mineure 
{Kriipe?")  et  en  Palestine  {Tristram)]  visite  régulièrement  en  hiver, 
par  bandes  considérables,  les  canaux,  les  marais  et  les  lagunes  de 
la  Basse-Egypte  et  de  l'Egypte  moyenne,  mais  des  sujets  isolés 
remontent  le  Nil  et  ses  affluents  jusque  dans  le  Kordofan  [de  Heu- 
glin).  Ses  apparitions  en  Sénégambie  restent  douteuses  ;  elle  est  rem- 
placée dans  ce  pays,  comme  dans  le  reste  de  l'Afrique,  par  la  Fulica 
cristata. 

En  Asie  on  rencontre  la  Foulque  commune  dans  toute  la  Sibérie 
jusqu'au  660  1.  N.,  et  son  aire  géographique  s'étend  vers  l'Orient 
jusqu'au  détroit  de  Behring  [Bogclanow),  la  Chine  [David),  Formose 
{Swinhoe)  et  le  Japon  {Schlégel).  Elle  hiverne  dans  le  sud  de  l'Asie, 
en  Perse,  dans  l'Inde  et  l'Indo-Chine.  Elle  habite  également  les 
îles  de  Java  {S.  Muller)  et  de  Bornéo  (  Vorderman),  ainsi  que  l'Aus- 
tralie {Gould). 

Mœurs.  —  Les  Foulques  n'habitent  pas  nos  contrées  toute  l'année  : 
à  l'arrière-saison  elles  se  rassemblent  sur  les  grandes  eaux  et  éinigrent 
dès  que  celles-ci  se  couvrent  de  glace  ;  ces  oiseaux  nous  reviennent 
au  printemps,  peu  après  la  fonte  des  neiges.  Les  époques  du  départ, 
et  du  retour  varient  suivant  la  température  de  la  saison  ;  en  général, 
cependant,  les  Foulques  émigrent  entre  le  15  octobre  et  tin  novembre 
et  nous  reviennent  dans  le  courant  de  mars;  quelques-unes  paraissent 
hiverner  dans  le  pays,  car,  malgré  les  rigueurs  de  cet  hiver  (1890), 
on  en  a  tuées  jusque  fin  décembre.  Elles  voyagent  pendant  la  nuit, 
isolément  ou  par  troupes  disséminées,  et  volent  haut,  assez  vite  et 
en  ligne  droite,  tout  en  poussant  leurs  cris. 

Cet  oiseau  habite  les  eaux  stagnantes  d'une  certaine  étendue  et  en 
partie  couvertes  de  roseaux  et  de  joncs  ;  on  ne  l'observe  que  rarement 
sur  les  petits  étangs  et  les  rivières.  En  Belgique  il  est  assez  commun 
dans  les  polders  et  dans  les  marais  des  Flandres  et  de  la  Campine. 

La  Foulque  noirâtre  ou  macroule  se  tient  presque  constamment  sur 
l'eau,  elle  ne  vient  à  terre  que  pour  le  repos  de  la  nuit  ou  pour  lisser 
son  plumage,  et  encore  pré(ère-t-elle  un  ilôt  qui  lui  offre  un  abri  plus 
sûr.  Elle  court  assez  lestement,  mais  nage  à  la  perfection,  car  ses 
pieds  lobés  sont  des  rames  excellentes  ;  elle  plonge  avec  autant  de 
facilité  qu'un  palmipède,  descend  à  de  grandes  profondeurs  et  nage 
ToMïIl.— 1891  89 


-  306    - 

entre  deux  eaux  sur  une  assez  longue  distance.  C'est  au  fond  de  l'eau 
qu'elle  cherche  en  grande  partie  sa  nourriture,  et  c'est  en  plongeant 
qu'elle  échappe  à  ses  ennemis.  Quand  elle  est  chassée,  elle  s'accroche 
aux  végétaux  à  l'aide  des  pattes  et  attend  sous  l'eau  que  le  danger  ait 
disparu,  ne  laissant  sortir  que  la  partie  antérieure  de  la  tête  pour 
respirer  ;  si  l'eau  n'offre  pas  de  végétaux  entre  lesquels  elle  puisse  se 
cacher,  elle  cherche  à  échapper  à  son  ennemi  par  des  plongeons  suc- 
cessifs. Son  vol,  quoique  plus  facile  que  celui  de  la  Poule  d'eau,  est 
cependant  lourd  et  fatigant,  aussi  l'oiseau  ne  s'envole-t-il  que  quand 
il  y  est  contraint  ;  pour  s'élever,  il  prend  un  fort  élan,  court  en  vole- 
tant à  la  surface  de  l'eau  qu'il  frappe  de  ses  pieds,  et  s'élance  enfin 
dans  les  airs  pour  filer  sans  bruit  droit  devant  lui.  Suivant  M.  See- 
bohm,  la  Foulque  se  perche  parfois  aussi  sur  des  arbres,  sautant  de 
branche  en  branche  à  la  façon  des  gallinacés.  La  Foulque  n'est  véri- 
tablement pas  farouche,  mais  très  prudente,  se  défie  de  l'homme  et 
l'évite  de  loin  ;  elle  sait  pourtant  distinguer  le  chasseur  d'un  être  inof- 
fensif, ne  témoigne  aucune  crainte  pour  ce  dernier,  et  se  fixe  même 
dans  le  voisinage  de  lieux  habités.  Elle  est  très  sociable  :  en  dehors 
de  l'époque  des  amours,  les  Foulques  se  réunissent  en  troupes  et 
même  en  bandes  nombreuses.  Dans  leur  quartier  d'hiver,  dit  Brehm, 
elles  couvrent  littéralement  des  surfaces  énormes  de  grands  étangs, 
des  surfaces  qui  ont  parfois  plus  d'un  kilomètre  carré  ;  mais  ces  ban- 
des n'aiment  pas  la  société  d'autres  espèces  aquatiques,  surtout  des 
canards,  qu'elles  chassent  toujours  loin  d'elles. 

Le  cri  de  cet  oiseau  est  plaintif  et  perçant  :  il  peut  se  rendre  par 
hœ  ou  ku  ;  quand  l'animal  est  excité,  il  répète  ce  cri  plusieurs  fois  de 
suite  et  l'on  croirait  alors  entendre  l'aboiement  d'un  jeune  chien.  Sa 
nourriture  se  compose  de  larves,  d'insectes,  de  vers,  de  mollusques  et 
surtout  de  jeunes  feuilles,  de  bourgeons,  de  graines  et  de  radicelles 
de  diverses  plantes  aquatiques. 

La  Foulque  s'apprivoise  facilement,  et  l'on  peut  fort  bien  la  garder 
en  captivité  si  l'on  peut  mettre  une  pièce  d'eau  à  sa  disposition.  On  la 
nourrit  de  vers,  de  pain,  de  pommes  de  terre  et  de  légumes  cuits,  de 
viande  hachée,  de  céréales  et  surtout  d'orge. 

Reproduction.  —  La  construction  du  nid  n'a  lieu  que  quand  les 
roseaux  et  les  joncs  sont  assez  élevés  pour  le  cacher,  ce  qui  n'arrive 
ordinairement  qu'à  la  fin  d'avril.  Les  couples  s'installent  en  attendant 
sur  les  pièces  d'eau  et  cherchent  à  conquérir  un  domaine,  ce  qui  n'a 
pas  toujours  lieu  sans  luttes.  «  Là  où  vivent  plusieurs  de  ces  oiseaux, 


—  307  - 

dit  Naumann,  leurs  disputes,  leurs  poursuites,  leurs  cris,  leurs 
clapottements  n'ont  pas  de  fin;  l'un  d'eux  dépasse-t-il  ses  limites, 
ses  voisins  fondent  aussitôt  sur  lui  pour  le  chasser.  Ces  combats 
sont  très  intéressants  à  observer,  car  on  voit  alors  se  manifester  toute 
la  colère  de  l'oiseau  ;  le  corps  ramassé,  frappant  l'eau  de  leur  bec,  les 
Foulques  nagent  l'une  vers  l'autre,  se  portent  des  coups  de  bec, 
d'ailes,  de  pattes,  jusqu'à  ce  que  l'une  d'elles  batte  en  retraite.  » 

Chaque  mâle  n'a  qu'une  femelle  dont  il  se  montre  fort  jaloux  ;  il 
l'assiste  à  construire  le  nid,  à  couver,  et  plus  tard,  à  élever  et  à  pro- 
téger les  petits.  Le  nid  est  placé  entre  des  roseaux  ou  des  joncs  non 
loin  du  bord  de  l'étang,  et  repose  sur  de  vieilles  souches  de  roseaux 
ou  flotte  librement  à  la  surface  de  l'eau,  mais  toujours  protégé  par  des 
roseaux  qui  Tempéchent  d'aller  à  la  dérive.  Il  se  compose  de  chaumes, 
de  feuilles  de  roseaux  et  de  joncs  bien  entrelacés  ;  l'intérieur  est 
proprement  garni  des  mêmes  substances  mais  plus  fines,  d'herbes 
sèches  et  de  feuilles  ;  cette  cavité  est  assez  profonde  et  bien  arrondie. 
La  femelle  rassemble  généralement  au-dessus  de  son  nid  les  her- 
bages qui  l'entourent,  afin  qu'il  soit  couvert  et  caché.  La  ponte  a  lieu 
dans  le  courant  de  mai  et  se  compose  de  sept  à  huit  œufs,  parfois 
même  de  douze  à  quatorze.  Ceux-ci  sont  relativement  grands, à  coquille 
épaisse,  finement  grenue,  un  peu  luisante,  d'un  jaune  d'ocre  pâle 
tirant  plus  ou  moins  sur  le  cendré,  tachetée  et  pointillée  de  gris  et  de 
brun  ;  ils  mesurent  de  50  à  56  millim.  sur  36.  La  durée  de  l'incubation 
est  de  vingt  à  vingt  et  un  jours. 

Les  parents  conduisent  et  nourrissent  leurs  petits,  les  avertissent 
de  l'approche  du  danger  et  les  défendent  avec  courage  ;  mais  dans  les 
lieux  qui  leur  semblent  à  l'abri  d'une  surprise, toute  la  famille  se  mon- 
tre tellement  confiante,  qu'elle  ne  fuit  pas  même  à  l'approche  d'une 
personne. 

FAMILLE  DES  GRUIDÉS. 

Car.  —  Bec  de  la  longueur  de  la  tête  ou  un  peu  plus  long,  médio- 
crement fendu,  pointu,  à  arête  dorsale  mousse;  narines  médianes,  per- 
cées de  part  en  part  dans  de  larges  fosses  nasales;  cou  long  et  mince; 
tête  petite  ;  lores  garnis  de  plumes  sétacées  ;  ailes  longues  et  aiguës; 
queue  courte;  jambes  allongées,  nues;  tarses  très  longs;  doigts  assez 
courts,  l'externe  et  le  médian  réunis  à  la  base  par  une  petite  mem- 
brane, le  pouce  médiocre,  inséré  très  haut  et  touchant  à  i)(Mn('  le  sol  ; 
ongle  du  doigt  externe  très  arqué  et  le  plus  robuste. 


-  308  — 

Hah,  —  Cette  famille  est  représentée  dans  toutes  les  parties  du 
monde. 

Mœurs.  —  Les  Gruidés  se  rapprochent  des  Rallidés  par  leurs 
mœurs  et  leur  conformation  ;  malgré  leur  grande  taille,  qui  paraît  les 
unir  aux  Hérodiens,  leur  squelette  ressemble  peu  à  celui  de  ces 
oiseaux. 

Les  Gruidés  habitent  les  plaines  marécageuses  et  sont  surtout  her- 
bivores et  granivores, car  les  Graes  ne  prennent  qu'accessoirement  des 
insectes,  des  vers,  des  reptiles  et  des  batraciens.  Ce  sont  des  oiseaux 
migrateurs  très  sociables,  qui  vivent  en  paix  avec  tous  les  échassiers. 
Ils  nichent  dans  les  marais  et  ne  pondent  que  deux  oeufs,  rarement 
trois.  Leur  grande  pi'udence  les  garantit  de  bien  des  dangers,  aussi 
est-il  fort  difficile  de  les  surprendre. 

GENRE  CXXX. 

GRUE.  —  GRUS.  ^- 

Ardea,  p.  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  234  (1766). 

Grus,  Bechst.  Ybg.  Deutschl.  III,  p.  60  (1793). 

Anthropoïdes,  Vieill.  N.  Dict.  II,  p.  163  (1816). 

Antigone,  Reichenb.  Syst.  av.  p.  XXII  (1851). 

Scops,  G.  R.  Gray,  List  ofGen.  nnd  snbg.  of  B.  p.  113  (1855). 

Leucogeranus,  Bonap.  Cat.  Parzud.  p.  9  (1856J. 

Car.  —  Bec  plus  long  que  la  tête,  légèrement  fléchi  et  obtus  à  l'extré- 
mité ;  narines  eHij^tiques,  percées  dans  un  large  sillon  s'étendant  au  delà  de 
la  moitié  du  bec  ;  ailes  longues  et  sub-obtuses,  les  dernières  rémiges  secon- 
daires allongées,  larges,  courbées,  à  barbes  décomposées  et  formant  panache 
sur  la  queue  qu'elles  recouvrent  complètement  ;  queue  très  courte  ;  jambes 
allongées,  la  partie  nue  réticulée  ;  tarses  très  longs,  robustes,  scutellés  en 
avant,  réticulés  en  arrière  ;  doigts  courts  ;  pouce  court,  ne  touchant  à  terre 
que  par  l'extrémité  de  l'ongle . 

Hab.  —  Ce  genre  est  cosmopolite. 

230.  —  La  Grue  cendrée. 

GRUS   COMMUNIS,  Bechst. 

(PI.  229.) 

Ardea  grus,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  234  (1766), 
Grus  communis,  Bechst.  Yog.  Deutschl.  III,  p.  60  (1793). 
Grus  cinerea,  Bechst.  Nat.  Yog.  Deutschl.  IV,  p.  103  (1809). 
Grus  vulgaris,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  II,  p.  106  (1811). 
Grus  canorus,  Forst.  Syn.  Cat.  Br.  B.  p.  58  (1817). 


-   309  - 

Grus  cinerea  longirostris,  Tem.  et  Schl.  Fauna  Jap.  p.  117  (1850). 

Grus  cineracea,  Brehm,  Naumannia,  p.  289  (1855). 

Grus  communis,  var.  orientalis,  Blyth,  Nat.  hist.  Crânes^  p.  59  (1881). 

Grus  grus  orientalis,  Stejn.  Bull.  n°  29   U.  S.  nat.  Mus.  p.  317  (1885). 

Der  Gemeiner  Kranich,  en  allemand. 

The  commun  crâne,  en  anglais. 

De  Kraan,  en  flamand. 

Taille  :  P40  ;  ailes  0,66;  bec  0,11;  tarses  0,27. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes,  —  Front,  occiput  et  lorums 
noirs  ;  vertex  nu  et  rouge,  garni  seulement  de  quelques  poils  noirs  ;  haut  de 
la  nuque,  bas  des  joues,  gorge  et  devant  du  cou  d'un  brun  noirâtre;  une 
bande  blanche  part  de  l'œil,  couvre  les  côtés  de  la  tête  et  la  partie  postérieure 
du  cou;  bas  du  cou  et  le  restant  du  corps  d'un  gris  cendré;  rémiges  noires, 
quelques-unes  des  secondaires  allongées,  larges  vers  le  milieu,  à  barbes 
décomposées,  formant  panache  sur  la  queue^  les  supérieures  d'un  cendré 
foncé  mais  terminées  de  noir;  queue  cendrée  à  extrémité  noirâtre.  Bec  d'un 
noir  verdâtre  avec  l'extrémité  d'un  brun  de  corne  ;  iris  d'un  brun  rougeâtre  ; 
pattes  noires. 

Jeune.  —  D'un  gris  cendré  rembruni  et  presque  uniforme  ;  gorge  noirâtre; 
tête  entièrement  emplumée,  d'un  brun  roussâtre  surtout  à  la  nuque  ;  les 
lémiges  secondaires  en  panache  n'existent  pas  encore  ;  rémiges  primaires 
noires. 

Poussin.  —  Parties  supérieures  d'un  roux  assez  vif,  tournant  au  marron 
sur  le  vertex,  le  dessus  des  ailes,  et  par  trois  taches  oblongues,  en  ligne  sur 
le  dos  et  sur  le  croupion  ;  côtés  de  la  tête,  devant  du  cou,  côtés  de  la  poitrine, 
flancs  et  cuisses  d'un  roux  plus  pâle  ;  gorge  et  milieu  du  ventre  blancs  ;  bec 
carné  rembruni,  avec  la  base  plus  pâle  et  le  marteau  blanc  ;  pieds  d'un  jaune 
sombre.  (J.  Vian). 

Hab.  —  La  Grue   cendrée  niche   dans   la  zone  qui    s'étend,   en 
jg^yg&i^^P^'^ ^^ffl^^ "-fff^xffj^^      Europe  et  en  Asie,  entre  le  53° 


et  le  65°,  mais  elle  se  montre 
parfois  jusqu'au  68  1/2°  {Malm- 
gren).  Au  sud  de  cette  zone  elle 
se  reproduit  dans  les  grands 
marais  de  la  Poméranie  [Borg- 
greve),  de  la  Pologne,  surtout 
^___^  sur  la  rive  droite  de  la  Vistule 

,-,,L,^.-.;.i>a£^^  (7V.c^«noi^5;fee),    en  Podolie,  en 

Volhynie,  en  Bessarabie  {de  Nordmann)  et  sur  certaines  îles  maré- 
cageuses du  Danube  (Finsc/i).  Partout  ailleurs  en  Europe,  ainsi  que 
dans  l'Asie  cenlralo,  elle  est  de   passage   plus   ou    moins    régulier 


-  310  — 

suivant  les  pays,  mais  ne  passe  qu'accidentellement  aux  îles  Fœroé. 
Quelques  couples  cependant,  nichent  en  Espagne  dans  les  grands 
marais  du  Guadalquivir,  où  MM.  Saunders  et  Irby  ont  trouvé  des 
œufs  ;  il  en  est  de  même  dans  les  vastes  marais  de  la  Vénétie  [Giglioli) 
et  de  la  Macédoine  {Ekoes  et  Buckley).  En  Belgique  elle  passe  par 
troupes  entre  le  20  mars  et  le  15  avril,  et  repasse  en  octobre,  mais 
ne  s'arrête  que  peu  ou  point  dans  le  pays. 

Cet  oiseau  hiverne  dans  le  midi  de  l'Espagne  {Lilford)  et  de  l'Italie 
{Giglioli),  mais  on  ne  le  voit  qu'accidentellement  en  Portugal 
(Barboza  du  Bocage)  ;  il  hiverne  également  en  grand  nombre  dans 
le  nord  de  l'Afrique  {Loche,  Salvin,  etc.),  en  Palestine  {Tristram), 
en  Egypte,  en  Nubie,  au  Sennaar,  au  Kordofan  jusqu'en  Abyssinie 
{de  Heuglin). 

A  l'Est,  on  observe  la  Grue  cendrée  jusque  dans  la  Sibérie  orien- 
tale {Bogdanow),  le  Kamtschatka  {Pallas,  Stejneger)  et  le  Japon 
{Schlégel).  Elle  passe  parfois  au-dessus  des  plaines  de  Pékin  et  plus 
fréquemment  le  long  des  montagnes  occidentales  de  la  Chine  {David), 
et  hiverne  dans  le  midi  de  cet  empire,  à  l'île  Hainan  {Sioinhoe),  en 
Perse  {Blanford),  dans  le  nord  et  le  centre  de  l'Inde  {Jerdon)  et 
probablement  dans  l'Indo-Chine. 

Mœurs. —  La  Grue  est  donc  pour  nos  contrées  un  oiseau  de  passage 
régulier.  Elle  voyage  à  toute  heure  du  jour  et  de  la  nuit,  et  vole  alors 
à  une  grande  hauteur,  surtout  en  plein  jour.  Quand  ces  oiseaux  sont 
en  petit  nombre,  ils  volent  le  plus  souvent  à  la  file  en  décrivant 
une  ligne  oblique  ;  mais  lorsqu'ils  sont  nombreux,  ils  forment  géné- 
ralement un  angle  représentant  un  V  ou  mieux  un  Y  renversé  [x), 
ce  qui  leur  permet  de  franchir  l'espace  avec  plus  de  facilité.  Avant 
d'entreprendre  leur  long  voyage,  les  Grues  se  rassemblent  dans  des 
localités  déterminées,  d'où  elles  partent  toutes  à  la  fois  en  faisant 
retentir  l'air  de  leurs  cris  perçants;  cette  bande  en  rencontre  une 
autre,  le  nombre  des  sujets  augmente  de  plus  en  plus  à  mesure  que 
la  troupe  avance,  et  celle-ci  finit  par  se  composer  de  centaines  d'oi- 
seaux. Arrivées  près  de  la  mer,  les  Grues  descendent  à  terre  pour 
prendre  du  repos  et  des  forces  ;  les  oiseaux  des  difierentes  bandes  se 
rassemblent  sur  des  îlots  ou  sur  la  côte,  et  attendent  un  vent  favo- 
rable pour  faire  la  traversée.  A  l'île  de  Rugen  on  voit  souvent,  au 
printemps,  des  milliers  de  Grues  attendre  le  moment  propice  pour 
franchir  toutes  ensemble  la  mer  Baltique.  Ces  bandes  voyageuses 
suivent  chaque  année  une  route  déterminée  et  traversent  à  peu  près 


—  311   — 

les  mêmes  endroits.  Avant  de  s'abattre  pour  chercher  leur  nourriture 
ou  prendre  du  repos,  les  Grues  décrivent  dans  l'espace  des  cercles 
désordonnés  en  poussant  de  grands  cris,  mais  elles  ne  séjournent 
jamais  longtemps  dans  la  même  localité. 

La  Grue  cendrée  fréquente  les  plaines  et  surtout  les  champs  culti- 
vés situés  non  loin  de  marécages  et  éloignés  de  toute  habitation  ;  en 
été,  on  la  rencontre  aussi  dans  les  bois  marécageux  bordés  de  champs, 
mais  jamais  dans  des  endroits  touiFus.  En  Afrique  et  dans  le  sud  de 
l'Asie,  elle  hiverne  en  bandes  nombreuses  sur  les  îlots  qu'offrent  les 
grands  fleuves,  et  il  n'est  alors  pas  rare  de  la  voir  mêlée  à  des  oiseaux 
appartenant  à  des  espèces  voisines.  Chaque  matin  la  troupe  se  rend 
dans  les  champs  où  les  Grues  trouvent  une  nourriture  abondante,  et 
comme  elles  sont  surtout  granivores,  elles  occasionnent  parfois  de 
grands  dommages  dans  les  pays  où  elles  séjournent;  après  s'être  bien 
repues,  elles  retournent  sur  leurs  îlots  où  elles  passent  la  nuit.  Ce 
sont  donc  des  oiseaux  de  rivage  en  hiver  et  des  oiseaux  de  marais  en 
été,  mais  elles  n'aiment  pas  les  marécages  couverts  de  roseaux  élevés 
qui  les  empêchent  de  porter  leurs  regards  au  loin. 

La  Grue  est  essentiellement  diurne  :  elle  se  repose  pendant  la  nuit 
dans  des  endroits  découverts,  car  elle  est  extrêmement  prudente  et 
difficile  à  surprendre.  Elle  est  bien  conformée  et  admirablement 
douée  sous  tous  les  rapports  ;  sa  grande  taille  ne  l'empêche  pas  d'être 
fort  gracieuse  dans  ses  mouvements,  et  tous  ses  actes  démontrent  des 
facultés  intellectuelles  très  développées,  aussi  a-t-elle  conscience  de 
ses  qualités.  Sa  démarche  est  légère  et  mesurée,  au  besoin  elle 
allonge  le  pas  et  sait  courir  avec  agilité.  Après  un  bond  ou  deux  elle 
s'élève  sans  efl'ort,  vole  comme  les  cigognes  en  tenant  le  cou  et  les 
pattes  étendus,  et  quelques  coups  d'ailes  l'ont  bientôt  transportée  dans 
l'espace;  là,  elle  plane  souvent  en  décrivant  de  grands  cercles,  tout 
en  s'élevant  de  plus  en  plus  dans  les  airs  et  finit  par  disparaître  à  la 
vue.  Rien  n'est  plus  beau  que  de  voir  voltiger  une  troupe  de  Grues, 
décrivant  mille  cercles  en  tous  sens  et  à  des  hauteurs  diverses,  les 
unes  en  planant,  les  autres  en  battant  vivement  des  ailes.  Une  autre 
fois,  c'est  sur  le  sol  qu'elles  prennent  leurs  joyeux  ébats  :  elles 
sautent,  dansent  en  tournoyant  les  unes  autour  des  autres,  prennent 
les  poses  les  plus  grotesques,  mais  tous  leurs  mouvements  restent 
gracieux  et  attestent  de  leur  bonne  humeur.  Leur  prudence  est 
extrême,  aussi  est-il  fort  difficile  de  les  approcher  à  portée  de  fusil, 
môme  dans  les  lieux  où  elles  sont  abondantes.  Une  bande  s'abat-elle 


—  312  - 

quelque  part  pour  y  passer  la  nuit  ou  pour  y  chercher  de  la  nourri- 
ture, des  sentinelles  sont  aussitôt  postées  pour  veiller  au  salut 
commun  ;  ont-elles  été  dérangées  dans  un  endroit,  elles  n'y  retournent 
qu'après  avoir  envoyé  des  éclaireurs  chargés  d'examiner  le  terrain. 
«  C'est  avec  un  véritable  plaisir,  dit  Brehm,  que  j'ai  vu  la  prudence 
des  Grues  se  manifester  en  Afrique,  lorsqu'elles  eurent  connu  nos 
procédés  hostiles.  Elles  envoyaient  un  éclaireur,  puis  plusieurs; 
ceux-ci  examinaient  tout,  cherchaient  s'il  n'y  avait  plus  rien  de 
suspect  et  retournaient  vers  la  communauté  qui  n'avait  pas  toujours 
pleine  confiance;  alors  d'autres  éclaireurs  étaient  envoyés  comme  pour 
contrôler  les  rapports  des  premiers  ;  puis  enfin  la  bande  entière 
arrivait.  » 

La  Grue  est  donc  très  sociable,  contracte  amitié  avec  les  espèces 
voisines  et  vit  même  en  bons  rapports  avec  les  autjgs  échassiers,  mais 
sans  les  rechercher;  le  mâle  voue  à  sa  compagne  une  fidélité  inébran- 
lable. Son  cri  est,  suivant  les  circonstances,  crou,  crou,  kourr,  hurry^ 
ou  kirr;  les  jeunes  crient  schiep,  schiep,  d'une  voix  stridente. 

La  nourriture  de  cet  oiseau  se  compose  surtout  de  matières  végé- 
tales :  jeunes  céréales  et  autres  graminées,  pois,  fèves,  baies,  fruits, 
graines,  etc.  ;  il  prend  également  des  vers,  des  larves,  des  insectes, 
des  lézards,  des  grenouilles,  des  souris,  des  campagnols,  etc. 

La  Grue  s'apprivoise  bientôt  et  se  reproduit  même  en  captivité  ; 
elle  se  fait  à  tous  les  régimes,  mais  elle  préfère  les  pois,  les  fèves  et 
le  pain  aux  céréales;  elle  aime  aussi  les  pommes  de  terre  cuites  et  la 
viande  fraîche.  «  Autant,  dit  encore  Brehm,  elle  évite  l'homme  tant 
qu'elle  est  libre,  autant  elle  s'attache  à  lui  une  fois  qu'elle  est  réduite 
en  captivité.  Il  n'y  a  pas  d'oiseau,  à  l'exception  des  perroquets  les 
plus  parfaits,  qui  contracte  aussi  intimement  que  la  Grue  amitié  avec 
l'homme,  qui  comprenne  aussi  bien  tous  ses  gestes,  qui  sache  lui  être 
plus  utile;  elle  ne  voit  pas  dans  son  maître  celui  qui  la  nourrit,  mais 
un  ami  et  elle  cherche  à  le  témoigner.  Elle  s'habitue  à  la  maison  plus 
facilement  qu'aucun  autre  oiseau;  elle  connaît  chaque  pièce  de 
l'habitation,  estime  le  temps,  juge  à  quel  degré  d'intimité  se  trouvent, 
dans  la  maison,  des  personnes  ou  des  animaux  étrangers  ;  elle  a  pour 
l'ordre  une  véritable  passion,  ne  supporte  dans  la  cour  aucune 
dispute,  garde  le  bétail  tout  comme  le  ferait  le  chien  le  mieux  dressé  ; 
elle  punit  ceux  qui  lui  veulent  du  mal,  en  poussant  des  cris  perçants, 
en  les  frappant  à  coups  de  bec  ;  elle  témoigne  au  contraire  sa  recon- 
naissance et  ses  bons  sentiments  par  des  inclinations  de  corps,  des 
danses;  elle  se  plaît  avec  les  personnes  qui  lui  font  du  bien,  recherche 


-   313  - 

leur  société;  mais  elle  ne  souffre  aucune  injure  et  en  garde  le  souve- 
nir pendant  des  mois,  des  années; » 

Repï'oduction.  —  A  peine  de  retour  dans  sa  patrie,  chaque  couple 
reprend  possession  de  l'endroit  où  il  a  niché  l'année  précédente  et  ne 
tolère  aucun  autre  couple  dans  un  certain  rayon.  La  ponte  n'a  cepen- 
dant lieu  que  tard  en  avril  ou  en  mai,  alors  que  la  végétation  est  déjà 
bien  avancée. 

La  Grue  cendrée  niche  dans  les  marais  entrecoupés  de  buissons  de 
saules  et  d'aunes  et  dans  un  endroit  bien  caché.  Le  nid  repose  soit 
sur  un  monticule  gazon  né  entouré  d'eau  ou  de  boue,  soit  sur  un  tas 
d'herbages  secs  et  piétines,  soit  enfin,  dans  un  buisson  peu  élevé, 
mais  toujours  à  sec  et  dans  un  endroit  à  l'abri  des  surprises.  Le  nid 
est  vaste,  aplati  et  d'une  construction  très  sommaire  ;  il  se  compose 
d'un  tas  de  branches  mortes  recouvertes  de  brins,  de  feuilles  de 
roseaux,  de  joncs  et  d'herbes  diverses,  le  tout  bien  sec  et  disposé  de 
façon  à  ménager  une  excavation  centrale.  La  femelle  y  dépose  deux 
œufs,  rarement  trois.  Ceux-ci  sont  d'un  cendré  verdâtre,  tantôt  plus 
verts,  tantôt  plus  bruns  et  même  parfois  d'un  vert  grisâtre  clair  ;  ils 
sont  plus  ou  moins  tachés  de  brun  rougeâtre  et  les  plus  grandes 
taches  sont  parfois  confluentes  et  effacées  sur  les  bords  ;  on  trouve 
même  des  œufs  dont  les  taches  sont  peu  apparentes.  Ils  mesurent 
environ  96  millim.  sur  57.  Mâle  et  femelle  couvent  alternativement 
et  défendent  courageusement  leurs  petits  en  cas  d'attaque. 

Les  Grues  prennent  un  soin  extrême  à  cacher  leur  nid.  «  Ce  grand 
oiseau,  dit  Naumann,  facile  à  apercevoir,  laisse  à  peine  soupçonner 
à  l'observateur  l'existence  de  son  nid  dans  le  marais  ;  il  n'y  arrive 
qu'à  pied  et  de  loin,  se  tenant  courbé,  masqué  par  des  buissons,  et 
des  plantes  élevées.  La  Grue,  en  train  de  couver,  se  glisse  de  môme 
inaperçue  hors  de  son  nid  quand  un  danger  la  menace,  et  elle  ne  se 
montre  à  découvert  que  loin  de  là;  souvent  même,  si  l'ennemi  ne 
s'avance  pas  trop  près,  elle  ne  se  dérange  même  pas.  L'emplacement 
du  nid  est  par  conséquent  dithcile  à  trouver,  et  ce  qui  augmente  encore 
cette  difficulté,  c'est  la  peine  qu'on  éprouve  à  s'avancer  dans  les 
marais;  il  faut  donc  pour  trouver  un  nid  de  Grue  être  favorisé  parle 
hasard.  » 

Les  jeunes,  à  leur  retour  au  printemps,  mènent  une  vie  errante, 
sans  s'éloigner  beaucoup  des  lieux  liabités  par  leurs  parents  ;  ils  ne 
sont  en  état  de  se  reproduire  qu'à  l'âge  de  deux  ans. 

Tome  II.  —  1801.  40 


-  314  - 

TROISIÈME    SOUS-ORDRE 

LES  HÉRODIENS. 

Car.  —  Cette  division  comprend  en  général  des  oiseaux  d'assez 
grande  taille,  à  tête  petite  et  à  cou  long  et  mince. 

Bec  allongé,  fort,  droit  ou  recourbé,  exceptionnellement  élargi  en 
forme  de  spatule  ;  lorums  et  parfois  la  face  et  une  partie  du  cou  nus  ; 
ailes  bien  développées;  queue  courte  à  rectrices  assez  étroites;  jambes 
emplumées  à  peu  près  sur  la  moitié  de  leur  longueur  ;  tarses  allon- 
gés ;  doigts  au  nombre  de  quatre,  tous  bien  conformés,  les  antérieurs 
réunis  par  une  courte  membrane  et  munis  d'ongles  robustes. 

Mœurs.  —  Les  Hérodiens  habitent  les  marécages  ou  le  bord  des 
eaux  courantes,  rarement  les  lieux  secs.  Ils  se  nourrissent  de  petits 
vertébrés,  d'articulés,  de  mollusques  et  de  vers,  et  cherchent  souvent 
leur  nourriture  dans  l'eau.  Ils  nichent  dans  des  endroits  élevés,  sou- 
vent sur  des  arbres,  et  leurs  petits  sont  nourris  dans  le  nid. 

FAMILLE  DES  ARDÉIDÉS. 

Car.  —  Bec  plus  long  que  la  tête,  fendu  au  moins  jusqu'au-dessous 
de  l'oeil,  droit,  fort,  déprimé  à  la  base,  à  bords  des  mandibules  tran- 
chants ;  narines  basales,  placées  dans  des  sillons  plus  ou  moins  allon- 
gés et  assez  profonds  ;  lorums  nus  ;  ailes  allongées,  larges  et  obtuses  ; 
queue  courte,  arrondie,  formée  de  dix  à  douze  rectrices  ;  tarses  allon- 
gés, scutellés  en  avant;  doigts  antérieurs  longs  et  déliés,  le  pouce 
allongé  et  portant  sur  le  sol  dans  toute  son  étendue  ;  membranes 
interdigitales  peu  développées;  ongles  comprimés,  aigus,  celui  du 
doigt  médian  pectine  sur  son  bord  interne. 

Les  sexes  ne  diffèrent  guère  extérieurement  entre  eux  que  par  la 
taille,  mais  les  jeunes  sont  très  différents  des  adultes. 

Hab.  —  Cette  famille  est  cosmopolite. 

Mœurs.  —  On  rencontre  des  oiseaux  de  cette  famille  depuis  les 
côtes  maritimes  jusqu'au  haut  des  montagnes,  mais  toujours  dans  le 
voisinage  de  l'eau,  uelques-uns  préfèrent  les  bords  de  la  mer, 
d'autres  les  cours  d'eau,  d'autres  les  marais.  De  leurs  sens  c'est  la  vue 
qui  parait  le  plus  parfait. 

Leur  naturel  est  généralement  haineux,  méchant  et  craintif  :  ils 
craignent  les  animaux  plus  forts  qu'eux  et  se  montrent  cruels  vis-à- 


—  315  - 

vis  de  plus  faibles.  Ils  se  nourrissent  de  proies  vivantes,  et  nichent 
souvent  en  colonies  sur  les  arbres. 

GENRE  CXXXI. 

HÉRON.  —  ARDEA. 

Ardea,  Briss.  Ornith.  V,  p.  392  (1760)  et  auct. 

Car,  —  Bec  plus  long  que  la  tête,  robuste,  conique,  à  arête  plus  ou  moins 
arrondie  ;  mandibule  supérieure  échancrée  vers  le  bout,  sillonnée  jusque  près 
de  son  extrémité,  à  sillon  nasal  large;  narines  allongées,  plus  larges  en 
arrière  ;  lorums  nus  ;  ailes  sub-obtuses  ;  queue  courte,  ne  dépassant  que 
peu  ou  point  les  ailes,  égale,  à  rectrices  assez  raides  ;  jambes  emplumées  à 
peu  près  sur  la  moitié  de  leur  étendue,  la  partie  nue  réticulée  ;  tarses  allon- 
gés, robustes,  scutellés  en  avant,  réticulés  en  arrière  et  sur  les  articula- 
tions :  doigt  médian  beaucoup  plus  court  que  le  tarse,  uni  à  l'interne  par  un 
petit  repli  membraneux  et  à  l'externe  par  une  large  membrane  qui  s'étend 
jusqu'à  la  première  articulation  ;  tous  les  doigts  légèrement  bordés.  Cou  long 
et  grêle. 

Hah.  —  Ce  genre  est  cosmopolite. 

231.  —  Le  Héron  cendré. 

ARDEA  CINEREA,  Briss. 

(PI.  230). 

Ardea,  ardea  cristata,  ciNEREAet  n^:via,  Briss.  Ornith.  pp.  392-410  (1760). 

Ardea  major  et  cinerea,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  236  (1766). 

Ardea  rhenana,  Sander,  Naturforscher.,  XIII,  p.  195  (1779). 

Ardea  johann.e,  Gmel.  Syst.  nat.  I,  p.  629  (1788). 

Ardea  griseo-alba,  Rich.  et  Bern.  Actes  Soc.  hist.  nat.  de  Paris,  p.  117  (1792). 

Ardea  cineracea,  Brehm,  his,  1830,  p.  988. 

Ardea  brag,  S^'-Hil.,  Jacquem.  Voy.  dans  l'Inde,  IV,  p.  85  (1844). 

Ardea  leucoph^ba,  Gould,  Proc.  Zool.  Soc.  1848,  p.  58. 

Der  Fisch-Reiher,  en  allemand. 

The  Common  Héron,  en  anglais. 

De  Blauwe  Reiger,  en  flamand. 

Taille  :  O'^SO  ;  ailes  0,45;  bec  0,11  ;  tarses  0,14. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  Tête  blanche  ;  vertex,  à  partir  des 
yeux,  et  occiput  d'un  beau  noir  bleuâtre  mais  recouverts,  sur  le  dessus  do  la 
tête,  par  les  longues  plumes  blanches  et  étagécs  qui  partent  de  la  partie  anté- 
rieure du  vertox  ;  plumes  occipitales  allongées  et  formant  une  huppe  tom- 
bante composée  de  deux  à  cinq  longues  plumes  très  effilées  et  noires  ;  cou 


—  316  — 

■blanc  lavé  de  cendré  et  marqué  sur  sa  partie  médio-antérieure  de  taches 
oblongues  d'un  noir  bleu  ;  plumes  du  bas  du  cou  en  partie  longues,  effilées  et 
d'un  cendré  blanchâtre,  et  en  partie  plus  longues,  subulées  et  d'un  blanc 
lustré  ;  partie  postéro-inférieure  du  cou,  dos,  ailes  et  queue  d'un  cendré 
bleuâtre,  avec  de  longues  plumes  effilées  d'un  cendré  plus  clair  sur  les  scapu- 
laires  ;  rémiges  noirâtres  ;  épaules,  poitrine,  jambes,  milieu  du  ventre  et 
sous-caudales  d'un  blanc  assez  pur  ;  côtés  de  la  poitrine  et  flancs  d'un  noir 
bleuâtre  profond.  Bec,  iris  et  lorums  d'un  beau  jaune  ;  pattes  d'un  brun 
rougeâtre,  lavées  de  jaunâtre  aux  articulations  et  sous  les  doigs . 

Jeune.  —  Pas  de  huppe,  ni  de  plumes  effilées  ou  subulées  aux  scapulaires 
et  au  bas  du  cou.  —  Dessus  de  la  tête  d'un  gris  noirâtre;  joues  blanchâtres; 
gorge  blanche  ;  cou  cendré,  blanc  en  avant  avec  des  taches  oblongues  noires 
sur  la  ligne  médiane  ;  dessus  du  corps  d'un  gris  cendré  assez  foncé  ;  dessous 
blanc  terne,  avec  quelques  taches  noirâtres  sur  la  poitrine  ;  flancs  cendrés. 
Bec  brun,  la  mandibule  inférieure  jaunâtre  ;  lorums  d'un  jaune  verdâtre. 

Poussin.  —  Lorums  et  tour  des  yeux  nus,  d'un  brun  fancé  ;  devant  du  cou, 
centre  du  ventre,  abdomen,  région  anale,  dessous  des  ailes  et  des  cuisses  éga- 
lement nus,  mais  jaunâtres;  gorge,  joues  et  côtés  du  cou  semés  de  gaines 
aiguës,  blanches  sur  la  gorge  et  les  joues,  rousses  sur  le  cou;  tout  le  dessus 
de  la  tête  couvert  d'un  duvet  relativement  épais,  gris  à  la  base,  mais  for- 
mant par  torsion  des  fils  blanchâtres,  forts  et  longs,  atteignant  jusqu'à  quatre 
centimètres  au  vertex,  plus  ou  moins  ondulés  ;  les  autres  parties  à  demi- 
vêtues  d'un  duvet  long,  mais  très  clairsemé  et  laissant  entrevoir  la  peau 
brune  ;  duvet  gris  sur  le  manteau  et  les  ailes,  blanc  sur  les  cuisses  et  les 
côtés  du  ventre  ;  mandibule  supérieure  brune,  avec  teinte  olivâtre  au  centre 
et  marteau  blanc  à  l'extrémité  ;  mandibule  inférieure  olive  ;  pieds  et  ongles 
gris  de  fer,  avec  une  teinte  jaunâtre  aux  genoux  ;  iris  d'un  jaune  verdâtre 
très  pâle  (J.  Vian). 


Hab.  —  Le  Héron  cendré  habite  presque  toute  l'Europe,  l'Asie  et 

l'Afrique,  ainsi  que  les  îles  qui 
entourent  ces  continents.  En 
Scandinavie  il  s'élève  jusque 
sous  le  68°  1.  N.,  en  Russie  jus- 
qu'au 6i°  et  en  Sibérie  il  ne 
dépasse  guère  le  57".  En  Europe 
il  est  généralement  commun  ;  il 
est  sédentaire  en  Belgique,  en 
Grande-Bretagne,  en  Irlande, 
dans  une  grande  partie  de  l'Allemagne  et  dans  toutes  les  autres  con- 
trées du  centre  et  du  Midi. 


-  317  — 

En  hiver  il  paraît  généralement  répandu  dans  toute  l'Afrique,  il 
niche  même  en  Algérie  [Loche)  et  dans  le  sud  du  continent  noir, 
surtout  dans  la  colonie  du  Cap  [Layarcï).  Il  a  été  observé  au  Maroc 
(Dtrike),  au  Tripoli,  en  Egypte,  en  Nubie,  en  Abyssinie  et  sur  les 
côtes  de  la  mer  Rouge  {de  Heufflin),  à  Mozambique  (Pe^ens),  à  Zanzi- 
bar, en  Sénégambie,  à  la  côte  d'Or,  au  Gabon,  dans  l'Angola  et  le 
Benguéla  {Hartlaub,  Verreauœ,  etc.),  dans  le  Damara  [Andersson).  Il 
est  de  passage  aux  îles  du  Cap  Vert  [Dohm),  hiverne  aux  Canaries 
(Bolle),  est  sédentaire  aux  Açores  [Godman)  ;  il  est  commun  à  Mada- 
gascar [Grandidier),  et  a  même  été  observé  aux  îles  Comores  et 
Maurice  (Hartlaub).  —  11  paraît  que  les  Hérons  cendrés  de  l'Afrique 
australe  et  de  Madagascar  sont  notablement  plus  grands  que  ceux 
d'Europe. 

Cette  espèce  habite  également  la  majeure  partie  de  l'Asie,  où  sa 
limite  boréale  ne  paraît  pas  dépasser  le  57"*  1.  N.  ;  son  aire  géogra- 
phique s'étend  à  l'Est  jusqu'au  Japon  [Schlégel).  Elle  hiverne  dans 
tout  le  sud  de  l'Asie:  en  Perse  [Blanford),  dans  l'Inde  [Jerdon],  à 
Ceylan  (Holdsivorth),  dans  l'Indo-Chine,  en  Chine  {David),  aux  îles 
Haïnan  et  Formose  {Sioinhoé)  et  même  à  Bornéo,  à  Sumatra  (  Vorder- 
man)  et  à  Java  {Schlégel),  ainsi  que  dans  le  sud  de  l'Australie  {Gould}. 

Mœurs.  —  Le  Héron  cendré  est  donc,  pour  nos  contrées,  un  oiseau 
sédentaire;  mais  il  émigré  des  pays  du  Nord  en  septembre  ou  octobre 
pour  passer  l'hiver  dans  le  Midi  ou  en  Afrique  ;  il  retourne  dans  sa 
patrie  en  mars  et  avril.  Les  migrations  ont  lieu  par  troupes  de  vingt 
à  cinquante  individus  ou  par  familles,  et  le  plus  souvent  pendant  la 
nuit  ;  les  oiseaux  volent  alors  très  haut  dans  les  airs,  lentement  et  en 
formant  une  ligne  oblique. 

Le  Héron  cendré  ou  commun  est  assez  abondant  en  Belgique  sur 
l'Escaut  et  sur  la  Meuse,  dans  la  Campine,  dans  les  polders  de 
Hoboken  et  des  Flandres,  et,  en  général,  près  de  toutes  les  eaux 
poissonneuses  ;  en  hiver  il  se  retire  près  des  eaux  qui  ne  gèlent  pas  ; 
il  est  surtout  abondant  à  l'époque  des  passages,  et  il  n'est  pas  rare 
d'en  voir  alors  des  volées  de  vingt-cinq  à  trente  individus. 

Cet  oiseau  aime  surtout  les  eaux  claires  et  on  le  voit  aussi  bien 
près  des  étangs  que  près  des  fleuves  et  des  rivières,  pourvu  que  l'eau 
ne  soit  pas  profonde  près  des  bords;  dans  les  pays  où  il  hiverne,  il 
séjourne  souvent  sur  les  côtes  maritimes  et  près  des  lacs  ;  en  été,  il 
recherche  surtout  les  eaux  qui  traversent  une  forêt  ou  qui  sont  bordées 
de  grands  arbres;  on   peut  dire  d'une  manière  générale,  que   cet 


—  318  — 

oiseau  fréquente  toutes  les  eaux,  qu'elles  soient  courantes  ou 
stagnantes,  douces  ou  salées,  pourvu  qu'elles  soient  poissonneuses, 
car  le  poisson  forme  sa  principale  nourriture.  Il  lui  arrive  cependant 
parfois  de  s'éloigner  de  l'eau  pour  errer  dans  les  prés  et  les  champs  ; 
il  est  probable  que  cela  a  lieu  surtout  quand  sa  pêche  n'a  pas  été 
fructueuse,  et  qu'il  se  voit  obligé  de  faire  la  chasse  aux  grenouilles  et 
aux  petits  animaux  des  champs. 

C'est  sur  les  grands  arbres  que  le  Héron  cherche  généralement  le 
repos  et  passe  ses  nuits  ;  pendant  les  heures  les  plus  chaudes  des 
journées  d'été,  on  le  voit  parfois  aussi  dormir  près  d'un  étang  soli- 
taire, dans  un  pré  ou  dans  un  champ  éloigné  de  toute  habitation.  Il 
dort  généralement  le  cou  rentré  et  les  deux  pieds  reposant  à  terre  ou 
sur  la  branche,  s'il  est  perché.  Ses  mouvements  témoignent  de  la 
nonchalance,  et  il  reste  souvent  des  heures  entières  immobile  et 
affaissé  près  de  l'eau  ou  au  sommet  d'un  arbre;  mais  dès  qu'un  bruit 
suspect  se  fait  entendre,  il  allonge  aussitôt  le  cou,  tourne  la  tête  de 
côté  et  d'autre  et  s'envole  au  moindre  danger.  Sa  démarche  est  lente, 
inquiète,  et  il  ne  sait  pas  courir  bien  vite;  quand  une  blessure  l'em- 
pêche de  s'envoler,  il  ne  cherche  guère  son  salut  dans  la  fuite,  mais 
attend  l'ennemi  de  pied  ferme,  se  défend  à  coups  de  bec,  visant  surtout 
les  yeux  de  l'assaillant,  ce  qui  le  rend  très  dangereux.  Il  nage  mala- 
droitement et  seulement  quand  il  y  est  forcé,  mais  s'empresse  de 
gagner  la  rive  au  plus  vite  ;  par  contre,  il  aime  à  marcher  dans  l'eau 
mais  sans  que  celle-ci  atteigne  son  plumage.  Son  vol  est  facile,  assez 
uniforme  et  caractéristique;  l'oiseau  tient  le  cou  recourbé,  de  façon  que 
la  tête  repose  sur  la  base  du  cou,  et  les  pattes  étendues  en  arrière. 

Le  Héron  cendré  est  fort  craintif  et  plus  défiant  qu'aucun  de  ses 
congénères,  aussi  est-il  fort  difficile  de  surprendre  un  sujet  adulte  ; 
il  connaît  le  danger,  tout  homme  lui  paraît  suspect  et  il  le  fuit  à 
temps.  Un  coup  de  tonnerre  le  remplit  d'effroi  et  lui  fait  pousser  des 
cris  de  terreur;  la  pluie  le  rend  triste.  A  certains  moments,  il  prend 
les  poses  les  plus  grotesques  qui  n'ont  rien  de  gracieux.  Il  vit  souvent 
en  troupes  composées  de  diverses  espèces  de  la  même  famille,  mais  ne 
se  montre  guère  sociable,  car  son  naturel  est  haineux  et  méchant  ; 
parfois  sans  raison,  il  lance  un  coup  de  bec  à  un  voisin  trop  confiant, 
ou  l'empêche  de  manger  sans  profit  pour  lui-même.  Il  se  montre 
cependant  un  peu  plus  sociable  à  l'époque  de  la  reproduction,  et  l'on 
observe  alors  dans  certains  pays,  des  colonies  de  Hérons  formées  de 
plus  de  cent  couples  nichant  les  uns  près  des  autres.  Sa  voix  est  un 


—  319  — 

cri  rauqiie,  guttural  et  retentissant  ressemblant  à  krèïk\  son  cri 
d'avertissement  est  bref  et  peut  se  rendre  par  ka. 

La  nourriture  du  Héron  se  compose  surtout  de  poissons  ayant  de 
dix  à  vingt  centimètres  de  long,  de  grenouilles,  de  têtards,  de 
lézards,  de  serpents,  de  larves,  d'insectes  et  de  vers;  à  l'occasion,  il 
prend  des  poussins  d'oiseaux  aquatiques,  pille  les  nids  des  oiseaux 
qui  nichent  dans  les  champs  et  fait  la  chasse  aux  mulots,  aux  campa- 
gnols et  aux  musarai,2:nes.  Pour  pêcher,  le  Héron  entre  dans  l'eau,  s'y 
promène  à  pas  lents,  le  cou  fléchi,  le  bec  incliné  sur  l'onde  ;  à  chaque 
poisson  qui  passe,  le  cou  s'allonge  avec  la  rapidité  d'un  ressort  qui 
se  détend,  le  bec  ou  la  tête  entière  disparaît  sous  l'eau  et  le  poisson 
est  pris  ;  celui-ci  est  avalé  aussitôt  ou  retourné  de  façon  à  pouvoir 
l'engloutir  la  tête  la  première. 

Reproduction.  —  Dans  certains  pays,  les  Hérons  nichent  donc  en 
nombreuses  sociétés  et  forment  çà  et  là  des  colonies  ou  héronnières. 
On  rencontre  de  ces  héronnières  surtout  en  Hongrie,  en  Bulgarie^  en 
Pologne,  etc.  En  France,  on  n'en  connaît  que  deux  ou  trois  dont 
la  principale  appartient  au  comte  de  Sainte-Suzanne  ;  elle  est  située 
dans  son  parc  d'Ecury  (Marne),  à  proximité  du  grand  marais  de 
Champigneulles.  A  l'époque  de  la  reproduction  on  voit  là  de  cent 
cinquante  à  deux  cents  nids,  placés  sur  un  groupe  d'arbres,  la 
plupart  des  aunes.  En  Belgique  le  Héron  niche  par  couples  isolés. 

Baldamus  a  décrit  une  héronnière  qu'il  a  visitée  en  Hongrie.  Sur 
des  saules  et  des  peupliers  qui  s'élèvent  çà  et  là  dans  une  plaine 
immense,  nichait  toute  une  colonie  de  Hérons  de  diverses  espèces  ;  les 
nids  étaient  répartis  sur  cent  à  cent  cinquante  arbres,  mais  plusieurs 
de  ces  arbres  portaient  de  dix  à  vingt  nids.  Sur  les  branches  les  plus 
fortes  des  saules  les  plus  grands  se  trouvaient  des  nids  de  Hérons 
cendrés;  puis  à  côté,  souvent  bord  à  bord,  ceux  des  Bihoreaux;  des 
branches  plus  faibles  et  plus  élevées  supportaient  ceux  du  Héron 
garzette  et  du  Cormoran  nain,  tandis  que  plus  bas  étaient  les  petits 
nids  du  Blongios.  Tout  à  coup  de  grandes  clameurs  partent  de  la 
colonie  :  c'est  un  Milan,  dont  l'aire  se  trouve  non  loin  de  là,  qui 
enlève  tranquillement  un  jeune  Héron.  «  La  mère  quitte  son  nid, 
menaçant,  grognant,  mais  elle  laisse  le  ravisseur  s'éloigner,  quand 
d'un  seul  coup  de  son  bec  formidable,  elle  pourrait  le  mettre  à  mort. 
Quelques  Bihoreaux  poursuivent  leur  ennemi  en  criant;  mais  de 
nouveaux  cris  plus  forts  les  rappellent  :  ici  une  Pie,  là  une  Corneille 
ont  profité  de  leur  absence  pour  enlever  quelques  œufs  ;  les  voisins 


—  320  — 

de  l'individu  pillé  poussent  des  clameurs  formidables,  tandis  que 
d'autres  pillards,  mettant  à  profit  le  tumulte,  se  précipitent  sur  les 
nids  abandonnés  un  instant  et  s'enfuient  avec  leur  butin.  » 

Il  n'y  a  rien  de  plus  mouvementé  et  de  plus  curieux  à  voir  qu'une 
pareille  héronnière,  mais  il  faut  pouvoir  supporter  ces  cris  assourdis- 
sants et  continuels,  cette  odeur  infecte  résultant  des  excréments  qui 
couvrent  le  sol  et  les  arbres  et  détruisent  le  feuillage  ;  ajoutez  à  cela 
l'odeur  des  poissons  qui  n'ont  pas  été  dévorés  et  dont  la  putréfaction 
empoisonne  l'atmosphère,  et  vous  aurez  une  idée  des  désagréments 
que  procure  le  voisinage  d'une  colonie  de  Hérons. 

En  Chine,  selon  le  père  David,  où  personne  ne  songe  à  molester  le 
Héron,  il  établit  ses  héronnières  un  peu  partout,  sur  des  tours  aban- 
données, sur  de  grands  arbres  et  jusque  dans  l'intérieur  de  la  ville  de 

Pékin.  _ 

Plusieurs  auteurs  mettent  en  doute  que  dans  les  contrées  plates  et 
dépourvues  d'arbres,  le  Héron  place  parfois  son  nid  dans  les  roseaux; 
c'est  pourtant  ce  qui  a  lieu,  suivant  de  Nordmann,  dans  les  vastes 
steppes  de  la  Russie  méridionale.  Le  baron  d'Hamonville  dit  qu'en 
Lorraine,  les  Hérons  nichent  isolément  sur  les  grands  étangs  en 
forêt,  et  que  leur  nid  n'a  aucun  rapport  avec  celui  de  leurs  similaires 
vivant  en  société  ;  ils  le  placent  au  milieu  d'un  grand  massif  de 
roseaux,  sur  un  buisson  de  saules  rabougris,  ou  simplement  sur  les 
roseaux  qui  s'inclinent  sous  le  poids,  et  le  construisent  fort  négligem- 
ment à  l'aide  de  ces  mêmes  roseaux.  Dans  ces  conditions,  la  ponte 
serait  de  cinq  ou  six  œufs,  rarement  moins. 

C'est  en  avril  que  les  Hérons  construisent  leur  nid  ou  réparent 
l'ancien.  Ce  nid  a  de  60  centimètres  à  un  mètre  de  largeur;  il  est 
ordinairement  plat,  grossièrement  construit  avec  des  branches  sèches, 
des  brindilles,  des  roseaux,  des  feuilles,  de  la  paille;  l'intérieur  est 
garni  de  poils,  de  laine,  de  plumes  et  de  fines  brindilles.  Les  œufs, 
au  nombre  de  trois  ou  quatre,  sont  d'un  vert  pâle,  sans  taches  et  à 
coquille  épaisse  et  lisse;  ils  mesurent  environ  61  millim.  sur  45. 
La  femelle  couve  seule  pendant  trois  semaines,  et  durant  ce  temps  le 
mâle  lui  procure  en  grande  partie  les  ahments  nécessaires. 

Les  poussins  paraissent  en  proie  à  une  faim  dévorante  et  ils  absor- 
bent des  quantités  incroyables  d'aliments,  mais  en  rejettent  beaucoup. 
Leur  séjour  au  nid  est  d'un  peu  plus  de  quatre  semaines,  mais  les 
parents  ne  les  abandonnent  que  quand  ils  savent  bien  voler.  Tous  se 
séparent  alors  et  la  héronnière  est  abandonnée. 


-  321   - 

232.  —  Le  Héron  pourpré. 

ARDEA  PURPURASCENS,  Briss. 

(PI.  231) 

Ardea  purpurasckns,  a.  cristata  PURPURASCENS,  A.  BOTAURUS  MAJOR,  Briss.  Omith. 
V,  pp.  420,  424,  455(1760). 

Ardea  purpurea.  Lin.,  Syu.  nat.  I.  p.  236  (1766). 
Ardea  rufa  et  variegata,  Scop.,  Ann.  I.  Hist.  nat.  pp.  87,  88  (1769). 
Ardea CASPiA,  Gmel.  Reise  Russl.  Il,  p.  193,  pi.  24  (1774). 
Ardea  RUTILA,  Lath.  Gen.  syjt.  siippl.  1,  p.  291  (1787). 
Ardea  botaurus  et  purpurata,  Gmel.  Syst.  nat.  I,  pp.  636,  641  (1788). 
Ardea  monticola,  Pic.  de  la  Peyr  ,  Mam,  Ois.  de  la  Haute-Garonne.,  p.  44  (1799). 
Ardea  caspica,  Turt.  Brit.  Fauna,  1.,  p.  54  (1807). 

Ardea  purpurea  var.  Manilensis,  Mey.  Nov.  actor.  Acad.  Caes.  Leop.  Car.  nat. 
CUR.  1834,  p.  102. 

Ardea  pharaonica,  Bonap.  Consp.  gen.  aviuni,  II,  p.  113  (1857). 

Der  Purpur-Reiher ,  en  allemand. 

The  Purple  Héron,  en  anglais. 

De  Purper-Reiger,  en  flamand. 

Taille  :  0^78  ;  ailes  0,37  ;  bec  0,12  ;   tarses  0,13. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  Dessus  de  la  tête  d'un  noir  verdâtre 
avec  deux  longues  plumes  effilées,  subulées  et  tombantes  à  l'occiput  ;  gorge 
blanche  ;  côtés  de  la  tête  et  cou  d'un  roux  vif  nuancé  de  roux  clair  ;  une  raie 
noire  partant  de  la  commissure  du  bec  et  se  dirigeant  vers  l'occiput,  une 
autre  médiane  sur  la  partie  postérieure  du  cou  et  passant  au  gris  vers  le  bas, 
et  deux  autres  raies  noires  latérales  ;  devant  du  cou  marqué  de  longues  taches 
noires  sur  un  fond  blanc  roussâtre  ;  jabot  orné  d'une  touffe  de  plumes  lon- 
gues et  effilées  grises,  blanchâtres  et  rousses  ;  dessus  du  corps,  ailes  et 
queue  d'un  cendré  sombre  à  reflets  verdâtres  et  nuancé  de  roux  sur  le  bord 
des  couvertures  ;  scapulaires  formées  en  partie  de  longues  plumes  décompo- 
sées cendrées  et  d'un  roux  vif  ;  poitrine  d'une  teinte  pourpre  ;  ventre  d'un 
cendré  sombre  à  reflets  verdâtres  et  nuancé  supérieurement  de  pourpre  ; 
flancs  d'un  cendré  clair;  jambes,  bord  de  l'aile  et  couvertures  sous-alaires 
roux  ;  rémiges  brunes  ;  sous-caudales  d'un  gris  sombre  et  en  partie  avec  une 
strie  blanche  au  centre.  Bec,  lorum  et  iris  d'un  jaune  orangé  ;  pattes  d'un 
brun  noirâtre,  rougeàtres  aux  articulations,  aux  membranes  et  sous  les 
doigts. 

La  coloration  de  la  femelle  est  en  général  moins  vive,  les  plumes  effilées 
de  l'occiput  moins  longues  et  la  taille  un  peu  plus  petite  ;  il  est  cependant 
fort  difficile  de  reconnaître  le  sexe  au  plumage. 

Jeune.  —  D'un  roux  clair,  plus  pâle  en  dessous,  avec  les  plumes  du  dos 
et  des  ailes  d'un  cendré  brunâtre  au  centre  ;  dessus  de  la  tête  d'un  brun 
Tome  h.—  1801.  41 


—  322 


pourpré,  noirâtre  au  front  ;  gorge  blanche  ;  devant  du  cou  avec  des  taches 
allongées  brunes.  Point  de  plumes  effilées  à  la  nuque,  aux  scapulaires  et  au 
bas  du  cou. 

Poussin.  —  Lorum,  tour  des  yeux,  devant  du  cou,  centre  du  ventre  et  de 
l'abdomen,  région  anale,  dessous  des  ailes  et  des  cuisses  nus,  d'un  jaune 
nuancé,  assombri  sur  la  face  ;  dessus  de  la  tête  semé  de  tiges  ondulées,  lon- 
gues, sans  toutefois  excéder  25  millim.,  fortes,  brunes  et  un  peu  barbelées  à 
la  base, fines  et  blanches  à  leur  extrémité  ;  duvet  des  côtés  du  cou, du  dos  et  du 
dessus  des  ailes  brun  ;  celui  de  la  poitrine  et  du  ventre  blanc  ;  bec  d'un 
corné  jauûâtre,  avec  les  deux  pointes  et  le  marteau  blancs  ;  pieds  et  ongles 
jaunes  [J.  Vian.) 

Hab.  —  L'aire  géographique  du  Héron  pourpré  est  bien  plus  éton. 

due  que  celle  du  Héron  cendré, 
mais  elle  ne  paraît  guère  dépas- 
ser le  53°  1.  N.  Nilsson  signale 
cependant  une  capture  faite  le 
y  18  avril   1853  dans  le  sud  de  la 
Suède  prés  de  Ostra  Torp.  En 
à\  été,    il    séjourne   régulièrement 
'j^îj  dans  tout  le  midi  de  l'Europe,  y 
"  compris    le    littoral    des    mers 

Noire  et  d'Azow,  les  cours  inférieurs  du  Dnieper  et  du  Don,  la  Cri- 
mée, le  Caucase,  la  région  Aralo-Caspienne,  le  Tian-Chan  et  la  Son- 
garie  russe  {Bogdanow).  Il  est  plus  ou  moins  commun  dans  le  sud  de 
l'Allemagne,  en  Autriche  et  surtout  près  du  Danube,  en  Bulgarie 
{Elwes  et  Buckley)  et  dans  les  grands  marais  de  la  Grèce  {Linder- 
Tïiayer)  ;  il  est  plus  rare  en  Bohême  [Spatny).  Il  se  montre  irrégulière- 
ment dans  le  nord  de  l'Allemagne  {Borggreve),  mais  il  niche  cependant 
dans  les  marécages  de  la  moyenne  et  de  la  basse  Silésie  {Gloger),  et 
M.  A.  von  Homeyer  a  même  trouvé  un  nid  sur  un  îlot  du  Rhin,  près 
de  Darmstadt.  Cet  oiseau  ne  visite  aussi  qu'irrégulièrement  la  Hollande 
{Schlégel),  la  Belgique,  ainsi  que  les  départements  du  nord  et  de 
l'ouest  de  la  France,  mais  il  se  reproduit  en  assez  grand  nombre 
dans  le  midi  de  ce  pays  {Degl.  et  Gerbe).  Le  Héron  pourpré  n'hiverne 
pas  en  Europe  ;  Malherbe  dit  cependant  qu'en  Sicile  on  observe 
encore  pendant  l'hiver  quelques-uns  de  ces  oiseaux  dans  les  marais 
de  Catane.  Pour  l'Angleterre  c'est  un  oiseau  de  passage  accidentel, 
se  montrant  surtout  dans  les  parties  méridionales  et  orientales  ;  deux 
captures  seulement  ont  été  signalées  en  Ecosse  et  une  en  Irlande 
{Seebohm). 


—  323  - 

En  Afrique  on  rencontre  cette  espèce  dans  toutes  les  parties  qui  lui 
conviennent,  depuis  l'Algérie  {Loche)  et  l'Egypte  {Shelley)  jusqu'au 
cap  de  Bonne-Espérance  [Layard),  et  du  Congo  {Mus.  Brux.)  au 
Zambèze  {Chapman).  Il  n'est  pas  rare  à  Madagascar  {Grandidier)  et 
sa  présence  a  également  été  signalée  aux  îles  Comores  {de  Heuglin). 

Ce  Héron  habite  aussi,  soit  en  été,  soit  à  l'état  sédentaire,  toute 
l'Asie  tempérée  et  chaude,  depuis  le  Turkestan  {Severtzow)  jusqu'en 
Chine  {Dcœid)  et  au  Japon  {Hartlaub,  Finach).  Il  habite  également  les 
îles  Andaman  {Walden),  Sumatra,  Célèbes  {Seebohm),  Bornéo,  Java 
{SchlégeJ)  et  les  Philippines  {Steeré). 

Mœurs.  —  Le  Héron  pourpré  n'habite  donc  l'Europe  qu'en  été; 
c'est  à  la  fin  de  mars  ou  au  commencement  d'avril  qu'il  reprend  posses- 
sion de  son  ancien  domaine,  car  il  retourne  toujours  dans  les  lieux 
qui  l'on  vu  naître.  Il  émigré  en  septembre,  voyageant  en  plein  jour 
par  petites  troupes  qui  traversent  l'espace  à  une  grande  hauteur, 
mais  les  individus  volent  à  la  file  en  formant  une  ligne  oblique. 

Cet  oiseau  a  des  mœars  assez  différentes  de  celles  de  son  congénère 
et  qui  le  rapprochent  plutôt  du  Butor,  Il  se  tient  de  préférence  dans 
les  marais  et  dans  les  endroits  marécageux,  et  ne  se  montre  près  des 
eaux  courantes  que  quand  elles  sont  bordées  d'herbages  ou  de  buis- 
sons de  saules  et  d'aunes  ;  il  affectionne  surtout  les  lieux  couverts  de 
roseaux  et  de  joncs  entre  lesquels  il  peut  se  cacher.  Jamais  on  ne  le 
rencontrera  près  d'une  eau  découverte, et  il  est  rare  de  le  voir  dans  des 
herbages  moins  hauts  que  lui  ;  il  aime  cependant  les  espaces  libres 
que  l'on  rencontre  par-ci  par-là  dans  les  forêts  de  roseaux  quand, 
bien  entendu,  l'eau  n'y  est  pas  trop  profonde  et  qu'il  peut  s'y  promener 
sans  mouiller  son  plumage.  Il  se  montre  aussi  dans  des  endroits  sim- 
plement humides  et  entourés  de  buissons,  mais  jamais  dans  les  prés 
et  les  champs.  Il  est  rare  qu'il  aille  se  percher  sur  un  arbre,  et  quand 
il  le  fait, il  a  soin  de  se  cacher  dans  la  partie  toufïue.  Par  sa  démarche 
et  son  vol  il  ressemble  assez  au  Héron  cendré,  mais  il  se  montre  en 
général  moins  lourd. 

Son  naturel  est  moins  haineux  et  moins  faux  que  celui  de  son  con- 
génère, mais  il  est  aussi  moins  craintif.  «  Là  où  il  est  peu  chassé,  dit 
de  Nordmann,  il  ne  montre  aucune  défiance  ;  à  l'approche  d'un  homme 
il  ne  prend  pas  la  fuite,  mais  cherche  à  se  soustraire  aux  regards  par 
toutes  sorlos  de  gestes  bizarres  et  do  postures  contraintes;  au  reste 
c'est  un  oiseau  solitaire,  inoffensif  et  même  stupide.  y  II  ne  sort  guère 
de  sa  retraite  que  vers  le  soir  et  de  grand  matin,  et  alors  il  est  dans 


-  324  - 

toute  son  activité  ;  mais  il  est  rare  de  le  rencontrer  dans  la  journée, 
et  si  on  le  voit,  c'est  qu'un  ennemi  quelconque  l'a  forcé  de  quitter  ses 
roseaux  et  ses  joncs. 

En  plein  jour  il  sait  rester  des  heures  entières  à  la  même  place  et 
presque  sans  bouger.  Il  ne  s'inquiète  guère  des  autres  oiseaux  qui 
vivent  autour  de  lui,  et  se  montre  assez  sociable  avec  les  individus 
de  son  espèce.  Son  cri  ne  diffère  pas  de  celui  du  Héron  cendré, 
mais  il  est  moins  sonore,  et  de  loin  il  ressemble  à  s'y  méprendre 
au  cri  du  Canard  sauvage,  mais  l'oiseau  ne  le  fait  entendre  qu'en 
volant. 

La  nourriture  de  cet  oiseau  se  compose  principalement  de  poissons, 
de  grenouilles  et  de  têtards,  mais  il  prend  aussi  des  insectes,  des 
larves,  des  vers,  des  mulots  et  autres  petits  rongeurs. 

Il  paraît  que  les  jeunes  qu'on  élève  n'attaquent  pas  à  coups  de  bec 
les  personnes  et  les  chiens  qui  les  approchent,  comme  le  font  le  Héron 
cendré  et  le  Butor. 

Reproduction.  —  Le  Héron  pourpré  ne  nicho  régulièrement  en 
Europe  que  dans  les  parties  méridionales  et  sud-est  du  continent,  et 
dans  les  localités  où  l'espèce  est  abondante,  il  n'est  pas  rare  de  voir 
plusieurs  nids  non  loin  les  uns  des  autres. 

Le  nid  est  généralement  construit  dans  les  grands  massifs  de 
roseaux,  plus  rarement  dans  un  buisson  ou  sur  un  arbre.  Gôbel 
trouva  un  nid  dans  un  buisson,  et  le  major  Legge  dit  qu'à  l'île  de 
Ceylan  cet  oiseau  niche  en  colonies  sur  des  arbres  et  souvent  en 
société  de  l'Aigrette  blanche.  Dans  les  marais  le  nid  repose  soit  sur 
un  petit  monticule  émergeant  de  l'eau,  soit  sur  de  vieilles  souches  de 
roseaux  ou  de  joncs.  Il  est  formé  de  roseaux,  parfois  entremêlés  de 
bûchettes,  et  le  tout  est  recouvert  d'un  mélange  de  joncs,  de  chaumes 
et  de  diverses  graminées;  au  centre  de  cette  grossière  construction, 
qui  a  au  moins  soixante  centimètres  de  diamètre,  se  trouve  un  enfon- 
cement pour  les  œufs. 

L'époque  de  la  ponte  varie  suivant  les  contrées  :  en  Europe  elle  a 
lieu  en  mai,  et  dans  les  parties  les  plus  méridionales,  vers  la  mi- 
avril  ;  dans  l'Inde,  d'après  Hume,  on  trouve  des  œufs  frais  depuis 
avril  jusqu'en  août  suivant  la  région  ;  le  major  Legge  trouva  des 
œufs  en  décembre  dans  le  nord  de  Ceylan,  et  des  poussins  en  mars 
dans  le  sud  de  la  même  île.  M.  Hume  dit  avoir  observé,  dans  l'Inde, 
environ  une  centaine  de  nids  de  Hérons  pourprés,  qui  se  trouvaient 
invariablement  sur  une  litière  de  roseaux  ou  de  joncs,  et  qu'il  n'a 


-  32?i  - 

jamais  vu  cet  oiseau  nicher  en  société  d'autres  Hérons  (1).  Au  Trans- 
vaal  M.  Ajres  a  souvent  remarqué  cinq  ou  six  couples  nichant  en 
société  ;  M.  Oates  a  vu  en  Birmanie,  de  grandes  colonies  de  ces 
oiseaux  nichant  dans  les  roseaux  en  juillet  et  août.  Ce  qui  précède 
démontre  que  l'époque  de  la  reproduction  et  la  manière  de  nicher  de 
ce  Héron  varient  suivant  les  pays. 

La  ponte  est  ordinairement  de  trois  ou  quatre  œufs,  quelquefois  de 
cinq,  mais  quatre  est  le  nombre  le  plus  ordinaire.  Ceux-ci  sont  d'un 
bleu  verdâtre  et  rudes  au  toucher  ;  ils  mesurent  de  54  à  56  millim. 
sur  40  à  41,  et  ressemblent  entièrement  aux  œufs  du  Héron  commun, 
mais  ils  sont  généralement  un  peu  plus  petits. 

GENRE  CXXXII 

AIGRETTE.  —  HERODIAS. 

Akdea,  Briss.  Ornith.  V,  p.  392  (1760)  et  auct.  plur. 
Herodias,  Boie,  /«s,  1822,  p.  559. 
Egretta,  Bonap.  Comp.  List,  p.  47  (1838). 
Erodius,  Macg.  Mœi.  Brit.  B.  Il,  p.  134  (1842). 
Garzetta,  Bonap.  Consp.  av.  Il,  p.  118  (1857). 

Car.  —  Les  Aigrettes  ont  les  mêmes  caractères  que  les  Hérons,  mais  leur 
bec  est  relativement  plus  mince  et  moins  élevé  à  la  base  ;  leurs  formes  sont 
plus  sveltes  ;  les  jambes  sont  dénudées  sur  une  plus  grande  étendue.  Elles  se 
distinguent  encore  par  ini  plumage  d'un  blanc  pur  à  toutes  les  époques  de 
leur  vie, et  par  les  aigrettes  que  forment,  à  la  saison  des  amours,  les  plumes 
du  dos  et  des  scapulaires,  d'où  leur  est  venu  le  nom  qu'elles  portent. 

Hab.  —  Comme  le  précédent  ce  genre  est  cosmopolite. 

233.  —  L'Aigrette  blanche  ou  Héron  aigrette. 
HERODIAS  ALBA,  Reichenb.  ex  Lin. 

(PL  232). 

Ardea  candida,  Briss.  (part.)  Ornilh.  V,  p.  428(1760). 

Ardea  alba,  Lin.  Syst.  nal.  I,  p.  239  (1766). 

Arde.v  egrettoides,  Gmel.  lieis'^  Russi.  II,  p.  139,  pi.  25  (1774). 

Ardea  egretta,  Bechst.  (necGrael.),  Naluri/.  Beiilsc/i''.  III,  p.  41  (1793). 

Herodias  egretta,  Boie  (nec  Gmel.)  Isis,  1822,  p.  559. 

Ardea  flavirostris,  Wagl.  Syst.  avium,  Ardea,  sp.  9  (1827). 

Egretta  melanorhynciia,  Wagl.  Isis,  1829,  p.  659. 

(l)  A.    Hume,   Xfs/s  ami  eg^'S  [ndian  Birds,  p.  6ii.  Calcutta,    1S75. 


—  326  — 

Herodias  CANDiDA,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  988. 

Ardea  TORRA  etPUTEA,  (Buch.)  Frankl.  Proceed.  Zool.  Soc.  1831,  pp.  123,  124, 

Ardea  TiMORENSis  (Cuv)  Less.  Traité  d'Orn.  p.  575(1831). 

Leptorodas  FLAViROSTRis,  Hempp.  Ehr.  Symb.  Phys.  fol.  m.  (1832). 

Ardea  modesta,  Gray  et  Hardw.  III.  Ind.  Zool.  II,  pi.  49  (1834). 

Ardea  longicollis,  Meyen,  Nov.  act.  Acad.  Caes.  Leop.  Car.  nat.  cur.,  1834,  p. 104. 

Egretta  alba,  Bonap.  List.  B.  Eur.  N.  Am.  p.  47  (1838). 

Ardea  orientalis,  Keys.  et  Bl.  Wirbelth.  Eur.  p.  218  (1840). 

Erodius  VICTORIA  et  ALBUS,  Macg.  3Ian.  Brit.  B.  pp.  131,  134  (1842). 

Herodias  flavirostris,  Gray,  Voy.  Ereb.  and  Terr.  p.   12  (1843*. 

Herodias  modesta,  Gray,  List.  spec.  B.  Br.  Mus.  III,  p.  77  (1844). 

Herodias  strmatophorus,  Gould,  B.  ofAustr.  VI,  pi.  56  (1848). 

Herodias  alba  et  syrmatophora,  Reichenb.  Syn.  aviutn,  ûg.  1028-29  et  2407  (1851). 

Herodias  Latiefii  et  ?  BRACHYRHYNCHus,  A.  Breh.  Journal/.  Orn.  1854,  p.  80. 

Egretta  syrmatophora  et  modesta,  Bonap.  Consp.  av.  II,  p.  117  (1857). 

Ardea  syrmatophora,  Gray,  Proceed.  Zool.  Soc.   1858,  p.  197. 

Ardea  intermedia,  Finsch  (nec  Wagl.)  Joiirn.  f.  Orn.  1867,  p.  332. 

Egretta  Rupelli  (Bonap.)  Gieb.  Thés.  orn.  I,  p.  409  (1872). 

Herodias  torra,  Salvad.  Cat.  Ucc.  Born.  p.  347  (1874). 

Ardea  alba  var.  Modesta,  Briigg.  Yerh.  nalurw.   Ver.  Brem.  1876,  p.  96. 

Der  Silberreiher,  en  allemand. 

The  Great  white  Egret,  en  anglais. 

De  Groote  Zilverreiger,  en  flamand . 

Taille  .-O'^Sl  ;  ailes  0,41;  bec  0,116;  tarses  0,16. 

Description  des  deux  sexes  en  été. — D'un  blanc  pur  dans  toutes  ses  parties  ; 
plumes  de  l'occiput  et  du  bas  du  cou  assez  allongées  ;  scapulaires  très  lon- 
gues, à  baguette  blanche,  raide,  droite,  aplatie  et  à  barbes  rares,  décom- 
posées et  filiformes,  formant  un  panache  dorsal  qui  dépasse  la. queue  de 
plus  de  25  centim.  Parties  nues  des  côtés  de  la  tête  d'un  vert  tendre  et  jau- 
nâtre; iris  jaune;  bec  noir;  pattes  brunes,  la  partie  nue  des  jambes  plus 
pâle  et  tirant  sur  le  jaunâtre. 

En  hiver. —  Plumes  de  l'occiput  et  du  bas  du  cou  plus  courtes,  et  absence 
complète  du  panache  d'aigrettes  dorsales.  Bec  jaune  et  non  noir. 

Jeune.  —  Comme  en  hiver,  mais  d'un  blanc  plus  terne  et  le  bec  d'un  jaune 
plus  pâle. 

La  femelle  est  plus  petite  que  le  mâle  et  le  jeune  est  ordinairement  d'une 
taille  inférieure  à  celle  de  la  femelle. 

Poussin.  —  Face,  gorge,  une  partie  du  cou  et  flancs  nus  et  d'un  jaune 
assez  intense;  toutes  les  autres  parties  couvertes  d'un  duvet  blanc,  filamen- 
teux, très  long  et  droit  sur  la  tête.  Bec  jaunâtre  ;  pattes  roussâtres. 

Remarque.  —  Les  auteurs  sont  peu  d'accord  sur  les  espèces  d'Ai- 
grettes à  adopter,  et  l'analogie  qui  existe  entre  plusieurs  d'entre  elles 
a  produit  une  grande  confusion.  Pour  Schlégel,  le  H.  alba  n'existe 


—  327  — 

qu'en  Europe,  dans  le  nord  de  l'Afrique  et  dans  les  parties  occiden- 
tales de  l'Asie;  le  H.  egretta  habiterait  rAmérique,le  reste  de  l'Afrique, 
l'Asie  et  l'Océanie.  Or,  cette  dernière  espèce  se  distingue  des  sujets 
de  l'ancien  monde,  par  son  bec  jaune  en  toutes  saisons,  tandis  que  les 
Aigrettes  d'Europe,  d'Asie,  d'Afrique  et  d'Océanie  ont  le  bec  noir  en 
été  et  Jaune  en  hiver  et  pendant  le  jeune  âge;  au  moment  de  la  mue 
on  rencontre  des  individus  qui  ont  le  bec  en  partie  noir  et  en  partie 
jaune.  Le  H.  egretta  est  donc  une  espèce  purement  américaine. 

Il  reste  à  comparer  la  forme  type  alba  à  celle  désignée,  suivant  les 
auteurs,  sous  les  noms  de  torra,  ^modesta,  syrmatophora,  etc.  Pour 
les  uns,  cette  dernière  forme  est  une  espèce  distincte,  pour  les  autres 
ce  n'est  qu'une  race  un  peu  plus  petite  de  Valba,  d'autres  enfin,  ne  la 
distinguent  en  aucune  façon  de  la  forme  type,  et  je  partage  cette 
manière  de  voir.  11  est  certain  que  la  forme  orientale  ne  diffère  des 
sujets  d'Europe  que  par  une  taille  un  peu  plus  faible.  Mais  si  l'on 
mesure  un  certain  nombre  d'Aigrettes  de  diverses  provenances,  on 
trouvera  des  dimensions  bien  différentes,  et  toutes  les  proportions 
entre  les  oiseaux  les  plus  grands  et  les  plus  petits  (1).  Cette  différence 
de  taille  est  donc  sans  valeur  spécifique,  comme  l'ont  déjà  reconnu 
Blyth,  Jerdon,  David,  Hartlaub,  Grandidier,  A.  Milne  Edwards  et 
bien  d'autres.  Si  l'on  veut  tenir  compte  de  la  taille,  on  doit,  pour  être 
logique,  ériger  en  espèce  le  Héron  cendré  de  l'Afrique  australe  et  de 
Madagascar,  qui  est  notablement  plus  grand  que  celui  de  nos  contrées. 
Hab.  —  L'Aigrette  blanche  habite  le  sud-est  de  l'Europe,  le 
^^^^^fW^Î  midi  de  l'Asie,  l'Archipel  Indien 
lîr  f&-^^|^^  I  jusqu  en  Australie  et  toute 
M&iuJ^J  l'Afri 


Afrique  ;  elle  se  montre  acci- 
"  1  dentellement  dans  l'Europe  occi- 


dentale  et  centrale. 

M.  J.  E.  Harting  mentionne 
j  dix-huitcaptures  faites  à  diverses 

époques  en   Angleterre,    et    le 

^  D   bundstrom  en    signale    cinq 

pour  le  midi  de  la  Suède.  On  voit  cet  oiseaux  assez  fréquemment  dans 
le  sud- est  de  l'Allemagne,  surtout  en  Silésie  où  il  a  môme  niché 
{Borggrevé)  ;  un  individu  a  été  tué  près  do  Berlin  en  18:31.    11    est 


(i)  Si  les  mesures  données  par  Bullcr  sont  i.xaclcs,  c'est  à  lii  jSouVi  lle-Zclaude  que  se  trouve- 
rait la  race  la  plus  grande. 


—  328  - 

assez  répandu  dans  certaines  parties  de  l'Autriche  et  de  la  Hongrie, 
{Naumann),  dans  la  Dobrodja  et  la  Bulgarie  [Alléon),  mais  on  ne  le 
Yoit  qu'accidentellement    en  Pologne   {Taczanoioski).   Schlégel   ne 
mentionne  qu'une  seule  capture  pour  la  Hollande,  en  1855  ;  la  même 
année,  dans  le  courant  du  mois  de  mai,  un  beau  sujet  adulte  fut  tué 
en  Belgique  près  de  Mon  s,  un  autre  fut  pris  quelques  temps   après 
près  de  Tongres  (C.  F.  Dubois)  ;  le  Marquis  de  Wavrin  me  signale 
une  troisième  capture  faite  dans  notre  pays, il  y  a  une  vingtaine  d'an- 
nées, à  Corroy-le-Grand.  Cette  espèce  est  aussi  très  rare  en  France: 
Bâillon  indique  une  capture  près  d'Abbeville,  Degland  en  signale  une 
autre  près  de  Montreuil- sur-Mer  et  une  sur  la  Nied  à  quelques  lieues 
de  Meiz,  le  13  décembre  1822  ;  Crespon  a  vu  plusieurs  de  ces  oiseaux 
qui  avaient  été  pris  dans  les  marais  qui  avoisinent  le  Rhône  à   son 
embouchure  ;  M.  Lacroix  dit  qu'il  connaît  trois  captures  authentiques 
aux  environs  de  Toulouse,  qu'un  sujet  a  été  pris-Je  17  février  1866 
près  de  Gimont,  et  que  quelques  couples  se  reproduisent  de  loin  en 
loin   dans   les   marais    du    département    des    Pyrénées-Orientales. 
L'Aigrette   paraît  aussi  être  rare  en  Espagne  ;  elle  a  été  observée 
dans   diverses  localités   et  surtout    près    de     Gérone    {Vayreda)  ; 
M.  Saunders  ne  l'a  observée  qu'une  seule  fois,  le  2  mai  1868,  dans  les 
marais  du  Guadalquivir,  mais  il  dit  qu'elle  est  moins  rare  sur  les  côtes 
de  l'est.    Elle  est  aussi  moins  rare  dans  certaines  parties  de  l'Italie, 
où  elle  hiverne,  surtout  en  Vénétie  et  en  Toscane  [Giglioli),  et  passe 
souvent  par  bandes  nombreuses  dans  l'intérieur  de  la  ^\c\\q  [Malherbe)', 
elle  est  plus  rare  en  Grèce,  quoiqu'elle  paraisse  y  être  sédentaire 
[Lindermayer),  mais  elle  est  très  commune  dans  les  marais  de  la 
Macédoine  {Ehves  et  Buckley)  et  dans  tous  les  pays  qui  entourent  le 
Pont  Euxin,    oîi   elle   séjourne  depuis   le  commencement  de   mars 
jusqu'à  la  fin  de  septembre  [de  Nordmann)  ;   on  la  rencontre  du  reste 
dans  une  grande  partie  de  l'empire    russe  :    le  littoral    des    mers 
Noire  et  d'Azow,  la  Crimée,  le  Caucase,  la  région  Aralo-Caspienne, 
le  Tian-Chan,  la  Songarie  russe,  la  Daourie,  le  pays  Oussourien  et  le 
bassin  du  fleuve  Amour  [Bogdanoiv)  ;    Dybowski  en  a  rapporté  de 
l'Argun  et  du  port  de  Strielok.  Elle  est  commune  dans  toute  la  Chine 
(David)  et  habite  tout  le  sud  de  l'Asie  jusqu'à  Ceylan  [Leggé),  Formose 
{Swinhoe)  elle  3si^on{Siebold).  Elle  habite  également  la  plupart  des 
îles  de  l'Archipel  Indien  {Millier,  Bernstein,  Wallace,  etc.),  la  Nou- 
velle-Guinée [Beccari),  l'Australie,  la  Tasmanie  [Gould)  et  la  Nouvelle- 
Zélande  [Buller). 


-  329  - 

En  Afrique  cet  oiseau  paraît  répandu  partout  où  il  y  a  des  marais 
et  des  eaux  qui  lui  conviennent  :  il  a  été  observé  aussi  bien  dans  les 
parties  septentrionales  [Loche]  qu'au  cap  de  Bonne-Espérance 
[Layard],  à  la  Côte  d'Or  [Pel]  et  au  Benguela  [Anchieta]  qu'à  Mozam- 
bique [Peters]  et  en  Egypte  {de  Heuglin)  ;  il  n'est  même  pas  rare  à 
Madagascar  [Grandidier). 

Mœurs.  —  Ce  bel  oiseau  arrive  en  Europe  en  avril  ei  émigré  en 
septembre.  Il  voyage  en  plein  jour,  vole  très  haut  et  en  troupes  plus 
ou  moins  nombreuses  ;  dans  les  contrées  où  l'espèce  est  commune,  il 
émigré  en  bandes  composées  de  vingt  à  trente  individus, 

L'Aigrette  blanche  habite  les  mêmes  localités  que  le  Héron  cendré  : 
les  eaux  découvertes,  les  cours  d'eau,  les  étangs  et  les  marais,  mais 
recherche  toujours  les  endroits  les  plus  tranquilles;  en  hiver  elle  se 
tient  autant  dans  les  pâturages  que  dans  les  marais,  mais  on  ne  la 
voit  jamais  sur  les  côtes  maritimes. 

Ses  mœurs  ressemblent  aussi  à  celles  du  Héron  cendré  ;  comme  ce 
dernier  elle  prend  les  postures  les  plus  singulières,  cache  sous  ses 
plumes  la  tête,  le  cou  et  une  patte,  et  de  loin  on  ne  distingue  alors  plus 
qu'une  masse  blanche  reposant  sur  un  mince  support.  Mais  tous  ses 
mouvements  sont  plus  gracieux  que  ceux  du  Héron,  sa  démarche  est 
plus  légère,  son  vol  plus  beau  mais  bruyant.  L'Aigrette  est  assez 
sociable,  vit  en  bonne  intelligence  avec  les  autres  oiseaux,  mais  reste 
indifférente  à  leurs  avances.  Elle  n'a  ni  la  ruse,  ni  la  méchanceté  de 
la  plupart  des  autres  Ardéidés,  et  ne  se  montre  pas  très  farouche  dans 
les  lieux  où  elle  se  croit  en  sûreté;  à  Pékin,  dit  l'abbé  David,  on  en 
voit  souvent  sur  les  pièces  d'eau  qui  a  voisinent  le  palais  impérial. 
Elle  est  cependant  prudente  et  craintive  et  choisit  toujours   pour  s'y 
fixer,  les  endroits  où  elle  sera  le  plus  à  l'abri  des  dangers.  Naumann 
croit  qu'elle  est  plus  facile  à  tirer  que  le  Héron  cendré  ;  A.  Brehm  est 
d'un  avis  contraire,  il  a  toujours  vu  cet  oiseau  très  méfiant  ;  il  a  d'ail- 
leurs, dit  Brehm,  de  bonnes  raisons  pour  l'être,  car  dans  sa  patrie  on 
le  chasse  avec  ardeur  pour  ses  belles  plumes  dont  on  fait  des  parures 
de  grande  valeur.  Aux  yeux  des   Hongrois  et  des  Valaques,  c'est 
chose  méritoire  que  d'avoir  pu  surprendre  un  oiseau  aussi  prudent. 
La  nourriture  du  Héron  aigrette  se  compose  de  poissons,  de  gre- 
nouilles, d'insectes,  de  larves,  de  vers  ;  il  aime  aussi  à  faire  la  chasse 
aux  mulots,  aux  campagnols  et  même  aux  rats,  (Quoiqu'il  ait  quelque 
difficulté  à  les  avaler.  Suivant  le  docteur  Radde,  l'Aigrette  se  montre 
très  adroite  à  cette  chasse,  et  elle  tue  les  rats  en  leur   donnant  un 

Tome  u.  —  18'J1  -l- 


—  330  — 

violent  coup  de  bec  sur  la  tête  ;  elle  les  jette  ensuite  dans  l'eau  pour 
les  mouiller  et  les  avale  ainsi  avec  plus  de  facilité,  la  tête  toujours  la 
première  ;  ceci  démontre  la  grande  dilatabilité  de  son  œsophage. 

Reproduction.  —  L'Aigrette  blanche  niche  aussi  bien  sur  les  arbres 
que  dans  les  marais. En  Hongrie  elle  établit  son  nid  dans  les  fourrés  de 
roseaux  qui  couvrent  les  marais,  mais  sans  éviter  les  arbres  ;  elle 
agit  suivant  les  lieux,  c'est-à-dire  qu'elle  construit  son  nid  sur  un 
arbre  dans  les  endroits  où  elle  se  trouve  à  l'abri  de  tout  danger, 
dans  le  cas  contraire  elle  se  fixe  dans  les  roseaux.  Dans  l'Inde,  suivant 
Hume,  l'Aigrette  niche  sur  les  arbres  en  société  d'autres  espèces  de 
Hérons,  d'Ibis  et  de  Cormorans  pygmées;  les  nids  de  ces  différentes 
espèces  sont  disposés  par  groupes  de  cinq  ou  six,  l'un  touchant  parfois 
l'autre,  et  l'on  voit  souvent  vingt  à  trente  de  ces  nids  sur  le  même 
arbre.  En  Chine,  dit  l'abbé  David,  les  héronnières  de  l'Aigrette 
sont  assez  nombreuses  dans  les  environs  de  Pékitr;  sur  les  grands 
arbres  qui  entourent  les  pagodes. 

Baldamus,  qui  explora  les  provinces  danubiennes  dans  la  saison  de 
la  ponte,  ne  vit  pas  d'Aigrettes  dans  les  héronnières  établies  sur  les 
arbres  ;  il  découvrit  un  nid  dans  les  roseaux  du  Marais-Blanc,  et  il 
émit  l'opinion  que  l'espèce  ne  niche  jamais  sur  des  arbres.  Jusqu'en 
1863,  on  n'avait  jamais  vu  d'Aigrettes  nicher  en  Allemagne  ;  mais 
cette  année-là, deux-couples  vinrent  s'établir  aux  environs  de  Glogau, 
qu'habitait  alors  von  Homeyer,  qui  en  fut  bientôt  informé  par 
l'inspecteur  des  forêts.  Après  avoir  constaté  le  fait  par  lui-même,  von 
Homeyer  alla  visiter  la  héronnière  tous  les  deux  jours,  et  le  21  mai 
il  vit  qu'il  n'y  avait  plus  que  deux  Aigrettes,  mais  elles  couvaient.  Le 
nid  était  construit  sur  un  assez  gros  pin  et  reposait  sur  une  forte 
bifurcation,  tout  près  de  la  cime  ;  sa  structure  était  grossière  et  peu 
compacte  ;  quelques  branches  le  dépassaient  de  cinq  à  sept  pieds  sur 
les  côtés,  mais  tout  était  libre  au-dessus.  Le  nid  le  plus  voisin  de  Hé- 
ron cendré  en  était  distant  de  huit  pieds  et  il  était  plus  élevé  ;  sur  le 
même  pin,  mais  beaucoup  plus  bas,  se  trouvait  un  nid  de  Cresserelle. 
Continuant  ses  observations,  von  Homeyer  constatait  le  28  juin  que 
les  jeunes  étaient  éclos  depuis  quelques  jours,  et  qu'ils  criaient  forte- 
ment: keck,keck,  keck,c>omïn.Q  les  jeunes  Hérons  cendrés, mais  avec  une 
voix  moins  rauque.ll  put  suivre  leur  croissance  jusqu'au  10  juillet  ;  ce 
jour-là  l'un  des  jeunes  était  debout  au  bord  du  nid,un  autre  était  debout 
dans  le  nid,  le  plus  petit  était  encore  accroupi  ;  deux  jours  plus  tard,  le 
plus  âgé  quittait  son  gîte,  s'envolait  sur  un  arbre  voisin  et  y  passait 


-  331  — 

presque  toute  l'après-midi  ;  le  second  restait  sur  une  brandie  à  côté 
du  nid,  le  troisième  n'en  était  pas  sorti;  le  soir  tous  trois  étaient  de 
nouveau  réunis  dans  leur  demeure.  Mais  à  partir  de  ce  jour,  le  major 
von  Homeyer  ne  put  plus  continuer  ses  observations,  son  régiment 
ayant  reçu  l'ordre  de  se  porter  sur  la  frontière  de  Pologne.  Le  28  juil- 
let, les  trois  jeunes  Aigrettes  quittent  leur  nid  et  sont  tuées. 

Le  nid  est  grossièrement  construità  l'aide  de  bois  mort, les  plus  fines 
bûchettes  à  l'intérieur;  mais  quand  il  est  placé  dans  un  marais,  il  est 
formé  de  roseaux  secs  recouverts  d'autres  végétaux  aquatiques.  Chaque 
année  les  oiseaux  reviennent  à  leur  ancien  nid  et  le  réparent  pour  une 
nouvelle  couvée.  La  ponte  est  de  trois  ou  quatre  œufs,  quelquefois  de 
cinq.  Ceux-ci  sont  d'un  vert  bleuâtre,  à  grain  rude  et  sans  brillant  ; 
ils  mesurent  environ  61  millim.  sur  43.  Il  est  impossible  de  distinguer 
ces  œufs  de  ceux  des  Hérons  précédents,  mais  ils  sont  généralement 
un  peu  plus  volumineux. 


231.  —  L'Aigrette  garzette. 
IIERODIAS  GARZETTA,  Boie  ex  Lin. 

(PI.  233). 

Akdea  EciKETTA,  Briss.  (necGm.)  Ornith,  V,  p.  431  (1700). 

Ardea  GARZETTA,  Lin.  S>/st.  nat.  1,  p.  237  (1766). 

AuDEA  NivEA,  Grael.  Reise  Russl.  1,  p.  164  (1770). 

Ardea  SANTODACTYLOS,  (jïael.,  ibidem  111,  p.  253  (1774). 

Ardea  xanthodactyla,  Kafin.  Caratteri,  p.  5(1810). 

Ardea  ^equinoctiaus  (Lin.)  Leach,5y*'<.  cat.  Mam.  B.  llrit.  Mu.^.,  p.  33  (I.SIO). 

HeRODIAS  GARZETTA,  BoiG,  /sis,  1822,  p.  559. 

Ardea  melanopus,  Wagl.  Isis,  1829,  p.  660. 

Herodias  jubata  et  nivea,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  988. 

Ardea  nigrirostris  et  orientalis,  Gray,  Zool.  MiscelL,  pp.  19,  20  (1831). 

Egretta  nigrirostris,  orientalis  et  GARZETTA,  Bonap.  Conn}t.  List  B.  p.  47  (1838). 

Ardea  NiGRiPES,  Tem.  Man.  cfOrt?.  111,  p.  377  (1840). 

Ardea  candidis.sima,  Kittl.  (nec  Gmel.),  Luthe  Vny.  III,  p.  327. 

Erodius  GARZETTA,  Macg.  Man.  Brit.  B.  Il,  p.  135  (1842). 

Herodias  iMMACULATA,  Gould,P.  ofAuslr.  VI,  pi.  59(1848). 

Egretta  nivea,  Bonap.  Rev.  crit.  de  VOrn.  Enr.,  p.  189  (1850). 

Herodias  LiNDEiiMAVERi,  Breh.  Joiirn.  f.  Orn.  1854,  p.  80. 

Garzetta  IMMACULATA,  Bonap.  Compt.  rend.  XL,  p,  722(1855). 

Egretta  JUHATA,  Lindekmayeri,  Brehm,  Naumannia,  1855,  p.  290. 

Garzetta  ejiretta,  orientalis,  nigripes,  Bonai).  Consp.  av.  pp.  118,  119(1857). 

Herodias  MELANOPUS,  Gould,  Ilandh.  B.  Austr.  II,  p.  304  (1865\ 

Hekodia.s  Mr;iui-E.s,  Wal.l.  Trnns.  Zool.  Soc  Vlll,  2,  p.  99(1872). 


382  — 


Ardea  GARZETTA  vnT.  NiGRiPES,  Briigg.  Ahliancll.  naturw.  Ver.  Brem,  V,  p.  96  (1876). 

Garzetta  nia'ea,  Tacz,  Bull.  Soc.  Zool.  de  France.,  II,  p.  15'J  (1877). 

Der  Silber-Reiher,  en  allemand. 

The  Little  Egret,  en  anglais. 

De  Kleine  Zilverreiger,  en  flamand. 

Taille  :  0'"52  ;  ailes  0,295  ;  bec  0,093  ;  tarses  0, 1 13. 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  D'un  blanc  pur  ;  une  petite  huppe 
occipitale  avec  deux  ou  trois  plumes  très  longues,  étroites,  subulées  et  pen- 
dantes; bas  du  cou  orné  à  la  partie  antérieure  d'une  touffe  de  plumes  à 
extrémité  très  étroite  et  lustrée  ;  scapulaires  composées  de  plumes  dont  la 
baguette  est  grêle  et  relevée  au  bout,  les  barbes  rares,  très  longues  et  fila- 
menteuses ;  ces  plumes  aigrettes  forment  un  panache  qui  couvre  une  grande 
partie  du  dos  mais  ne  dépassant  que  peu  la  queue.  Bec  noir,  la  base  de  la 
mandibule  inférieure  parfois  jaunâtre;  lorums  nus,  d'un  beau  violet;  iris 
d'un  jaune  plus  ou  moins  vif,  parfois  blanc;  jambes  et  tarses  noirs,  doigts  et 
base  des  tarses  jaunâtres.  La  femelle  est  toujours  un  peu  plus  petite  que  le 
mâle. 

En  automne.  —  Point  de  longues  plumes  à  l'occiput,  ni  de  panaches  au 
jabot  et  au  dos. 

Jeune.  —  Comme  l'adulte  en  automne,  mais  d'une  taille  moins  forte,  d'un 
blanc  plus  terne  et  un  peu  jaunâtre  ;  lorums  d'un  vert  olivâtre;  doigs  d'un 
jaune  verdâtre. 

Hab.  —  Cet  oiseau  habite  les  mêmes  régions  que  le  précédent, 

mais  il  ne  s'aventure  jamais 
dans  les  contrées  septentrionales, 
et  ne  paraît  pas  dépasser  le  52° 
1.  N.  En  Europe,  il  niche  en 
Espagne,  dans  le  delta  du  Rhône, 
en  Sardaigne,  en  Sicile,  dans  la 
vallée  du  Danube,  en  Grèce,  en 
Bessarabie,  en  Moldavie  et  dans 
les  quatre  provinces  russes  de 
la  mer  Noire  ;  M.  Giglioli  pense  qu'il  est  sédentaire  en  Sardaigne, 
mais  pour  l'Italie  continentale  ce  n'est  qu'un  oiseau  de  passage  régu- 
lier ou  irrégulier  suivant  les  régions  {Salvador i)  ;  il  est  également  de 
passage  régulier  dans  le  midi  de  la  France,  mais  on  ne  le  voit  qu'acci- 
dentellement dans  les  départements  du  centre  et  du  nord  [Degl.  et 
Gerbe).  En  Belgique  on  ne  connaît  que  quelques  captures  :  feu  mon 
père  en  signale  une  près  de  la  frontière  hollandaise,  et  une  près  de 
Namur  vers  la  fin  d'avril  1857 ,  plus  récemment  un  individu  de  cette 


—  333  — 

espèce  fut  tué,  en  1874,  sur  un  banc  de  sable  de  l'Escaut.  Il  visite 
quelquefois  les  lacs  intérieurs  de  la  Suisse  {de  Tschudi).  Suivant 
M.  Harting,  la  Garzette  aurait  été  prise  dix  fois  en  Angleterre,  une 
fois  en  Ecosse  et  une  fois  en  Irlande  ;  mais  M.  J.  H.  Gurney  dit  que 
cinq  de  ces  captures  sont  douteuses.  La  présence  de  cette  espèce  en 
Hollande  n'est  qu'accidentelle  (Schlérjel);  il  en  est  de  même  dans  la 
haute  Silésie  et  le  centre  de  l'Allemagne  {Naumann)  ;  elle  a  été  vue 
à  plusieurs  reprises  près  du  lac  de  Trachenberg  dans  la  propriété  du 
Comte  de  Hatzfeld  {v.  Homeijer);  elle  est  plus  rare  que  la  grande 
Aigrette  eu  Bohême  {Fritsdi),  et  très  rare  en  Pologne  [Taczanoioski); 
mais  elle  est  très  commune  dans  la  Dobrodja  et  la  Bulgarie  {Alléon) 
ainsi  que  dans  le  sud  de  la  Russie  {de  Nordmmm)  et  en  Hongrie  dans 
la  vallée  du  Danube  {Naumann). 

Le  Héron  garzette  habite  également,  du  moins  en  hiver,  toute 
l'Afrique  ;  il  a  été  observé  jusqu'au  cap  de  Bonne-Espérance 
{Layard),  et  de  la  côte  occidentale  (Sénégambie,  côte  d'Or)  à  la  côte 
orientale  (Mozambique,  Zanzibar).  M.  de  Heuglin  pense  qu'il  niche 
dans  la  basse  Egypte,  car  il  l'y  a  rencontré  pendant  l'époque  de  la 
reproduction,  c'est-à-dire  d'avril  en  juin.  Il  n'est  pas  rare  à  Mada- 
gascar {Grandidier). 

A  l'Est  on  rencontre  cette  espèce  en  Asie  Mineure  {Danford),  en 
Palestine  {Tristram),  au  Caucase  {Raddé),  dans  la  région  Aralo- 
Caspienne,  le  Tian-Chan  {Bor/danoid),  dans  tout  le  sud  de  l'Asie 
depuis  la  Perse  {Blanfovd)  jusqu'en  Chin,e  {David)  et  au  Japon 
{Siebold).  Elle  est  commune  dans  l'Inde  {.1er don),  à  Ceylan  {Legge) 
dans  l'Indo-Chine  et  aux  îles  Andaman  {Tweddalé)  et  Formose 
{Sivinhoe)  ;  elle  est  abondamment  répandue  dans  la  Chine  entière  et 
ne  quitte  pas  en  hiver  les  provinces  centrales  et  méridionales  de 
l'empire  ;  dans  le  sud  elle  est  même  plus  commune  que  la  grande 
Aigrette,  qui  domine  au  contraire  aux  environs  de  Pékin  {David). 
Dans  l'Archipel  la  présence  de  cet  oiseau  a  été  constatée  aux  Philip- 
pines {Stcere),  à  Bornéo,  Sumatra,  Java  {Schlégcl),  Célèbcs  {Mcf/er), 
aux  Moluques  {Bernstein),  à  la  Nouvelle-Guinée  et  îles  voisines 
{v.  Rosenhe)-g)  ainsi  qu'en  Australie  {Gould,  Rarnsat/). 

Mœurs. —  Ce  bel  oiseau  arrive  dans  le  midi  de  l'Europe  en  avril  et 
émigré  en  septcmbi'C.  Il  fréquente  les  marécages  et  les  étangs  décou- 
verts, le  bord  des  lacs  et  des  eaux  courantes  et  les  marais  à  eau  sau- 
nâtre  ;  il  paraît  également  aimer  les  bords  de  la  mer,  car  Lîndermayer 
dit  (ju'à  leur  arriv(''(i  au  piintoin[)S,  on  Grèce,  ces  Aigrettes  séjournent 


—  334  — 

quelque  temps  sur  les  côtes  maritimes,  qu  elles  ne  quittent  qu'au 
bout  d'un  mois  environ  pour  aller  se  reproduire  sur  les  eaux  douces 
de  l'intérieur. 

L'Aigrette  garzette  se  tient  de  préférence  dans  les  eaux  peu  pro- 
fondes, à  fond  sablonneux,  où  elle  pêche  toute  la  journée,  s'inter- 
rompant  à  peine  pendant  les  heures  les  plus  chaudes.  Elle  marche 
dans  l'eau  avec  légèreté,  le  corps  horizontal,  le  cou  et  la  tête  rentrés  ; 
elle  aime  à  se  reposer  sur  les  arbres,  visite  souvent  les  prairies 
humides  et  généralement  les  lieux  animés  par  des  bandes  d'autres 
oiseaux  aquatiques.  A  Java,  dit  Schlégel,  cette  espèce  se  tient  dans 
les  mêmes  lieux  que  la  grande  Aigrette  ;  sa  marche  est  plus  préci- 
pitée et  en  général  elle  a  dans  tous  ses  mouvements  plus  de  vivacité 
que  cette  dernière.  L'oiseau  relève  parfois  son  panache  flexible  et  le 
développe  dans  toute  sa  splendeur  par  des  tremblements  accélérés  et 
répétés  huit  à  dix  fois  de  suite  ;  c'est  bien  l'oiseauTe  plus  élégant  et 
le  plus  gracieux  de  la  famille,  ei  comme  il  ne  montre  point  de 
défiance,  on  peut  l'observer  avec  assez  de  facilité  ;  suivant  Naumann, 
il  est  assez  prudent  pour  fuir  le  chasseur  et  se  mettre  hors  de  sa 
portée,  et  assez  intelligent  pour  distinguer  le  chasseur  d'une  personne 
inoffensive.  Son  cri  d'alarme  est  ali,  ark  et  ork. 

Le  Héron  garzette  se  nourrit  comme  ses  congénères  de  petits  pois- 
sons, de  gi'enouilles,  de  vers,  etc.  En  Afrique  de  Heuglin  trouva 
vingt-cinq  petits  poissons  dans  le  jabot  et  dans  l'estomac  d'un  de  ces 
oiseaux. 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  niche  le  plus  souvent  en  colonies  dans 
les  massifs  de  joncs  et  de  roseaux,  dans  des  buissons  ou  sur  des 
arbres  suivant  les  localités,  et  le  plus  ordinairement  en  société  d'autres 
espèces  de  la  même  famille;  il  est  rare  de  trouver  un  couple  de 
Garzettes  solitaire.  Quand  le  nid  est  bâti  sur  un  arbre, il  est  formé  de 
bois  mort  lâchement  entrelacé,  et  l'on  peut  parfois  apercevoir  les 
œufs  au  travers.  Ailleurs,  il  est  construit  à  l'aide  de  roseaux  secs, 
recouverts  de  feuilles  de  diverses  graminées,  de  joncs,  de  foin  et 
autres  matières  végétales.  Il  ressemble  en  général  aux  nids  des 
Hérons  précédents,  mais  il  est  plus  petit. 

L'époque  de  la  ponte  varie  selon  le  pays  :  en  Europe  elle  a  lieu  en 
mai,  dans  le  nord  de  l'Inde,  d'après  Hume,  en  juillet  et  août,  dans  le 
sud  de  ce  pays  en  décembre,  et  à  Ceylan  en  avril.  La  ponte  est  de 
trois  à  six  oeufs  d'un  vert  bleuâtre  uniforme.  Ils  mesurent  environ 
44  millimètres  sur  32. 


—  335  — 

Pendant  que  la  femelle  couve,  le  mâle  pêche  pour  elle  et  la 
pourvoit  du  nécessaire  ;  plus  tard,  il  aide  sa  compagne  à  élever  les 
petits  ;  ceux-ci  séjournent  dans  le  nid  jusqu'au  moment  où  ils  savent 
bien  voler,  et  ils  sont  alors  en  ctat  de  chercher  eux-mêmes  leur  nour- 
riture. 

GENRE  CXXXIII. 

CRABIER.  —  ARDEOLA. 

Ardea  (part.)  auctorum  plurimorum. 
Ardeola,  Boie,  Isis,  18ii2,  p.  559. 
BuPHUS,  Boie,  Isis,  1826,  p.  356. 
Cancrophagus,  Kaup,  Nat.  Syst.  p.  42(1829). 
Egretta  (part.),  Swains,  Classif,  B.  II,  p.  354(1837) 
BoTAURUS  (part.),  Macg.  Man.  Br.  B.  II,  p.  125  (1842). 

Car.  —  lîec  de  la  longueur  de  la  tête,  droit,  aigu,  à  arête  assez  vive  ; 
narines  linéaires  ;  occiput  garni  d'une  touffe  de  plumes  rubanaires  et  tom- 
bantes ;  cou  de  longueur  médiocre  ;  ailes  subobtuses,  les  quatre  premières 
rémiges  les  plus  longues  ;  pkuiies  du  dos  longues  et  filamenteuses,  dépassant 
la  queue  ;  celle-ci  courte,  égale;  jambes  emplumées  sur  les  deux  tiers  de  leur 
longueur  ;  tarses  plus  courts  que  le  doigt  médian  (l'ongle  compris),  scutellés 
en  avant,  réticulés  en  arrière  et  aux  articulations;  doigt  externe  uni  au 
médian  par  une  petite  membrane  qui  s'étend  jusqu'à  la  première  articulation. 

Hab.  —  Ce  genre  a  des  représentants  dans  le  midi  de  l'Europe  et 
de  l'Asie  jusqu'aux  îles  de  la  Sonde,  en  Afrique  et  à  Madagascar. 

235.  —  Le  Crabier  chevelu 

ARDEOLA  RALLOIDES,  Boie  ex  Scop. 
(PI.  234). 

Ardea  botaurus  minor,  cancrofagus,  cancrofagus  rufus  n.kvius,  cancrokagus 
LUTEUS,  Briss.  Ornith.  V.  pp.  452,  466,  471,  472  (1760). 

Ardka  RALLOIDES,  Scop.  Ann.  I.  Hist.  nat.  p.  88  (1769)-. 

Ardea  castanea,  Gmel.  Reise  Russl.  I,  p.  165  (1770). 

Aroea  MARSiGLi  et  PU.MiLA,  Lcpcch.  Nov.  Comm.  Petrop.  XIV,  p.  502(1770). 

Ardea  comata,  Pall.  Reise  Riiss.  Reichs,  II,  {).  715  (1773)  et  auctor.  plur. 

Ardea  squaiotta,  erytiiropus  et  senegalensi.s,  Ginel.  Si/st.  nat.  I,  pp.  634,  645 
(1788). 

Ardea  griseo-alba,  Bosc.  Act.  Soc.  hist.  nat.  Paris,  I,  N"  59  (1792). 

Ardea  audax,  Lapeyr.  Neice  schiced.  Ab/i.  III,  p.  106  (1794). 

Ardea  botauhulus,  Schr.  Fauiia  Doica,  I,  p.  221  (1798). 

Ardea  deaurata,  Merr.  Ersch.  u.  Griib.  Encyd.  V.  p.  173  (liS20). 

Ardeola  kalloides,  Boie,  Isis,  1822,  p.  55V). 

CA.\ORoi'iiAGU.s  rallomjes,  Kaup,  Nat.  Syst.  p.  42  (1829). 


—  336  — 


BuPHUs  COMATUS,  CASTANEUS,  RALLOiDEset  iLLYRicus,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  988. 

Nycticorax  ralloides,  Hempr.  et  Ehr.  Symb.  pliys.  Aves^  fol.  m.  (1833). 

Egretta  comata,  Swains.  Classif.  B.  II,  p.  354  (1837). 

BoTAURUS  COMATUS,  Macgill.  Man.  Brit.  B.  11,  p.  125  (1842). 

BuBULCUs  RALLOIDES,  (Brm)  A.  Dubois,  Consp.  Avium  Eur.  p.  27  (1871). 

Der  Schopf-Reiher,  en  allemand. 

The  Squacco  Héron,  en  anglais. 

De  Ralreiger,  en  flamand. 

Taille  :  0M4;  ailes  0,24;  bec  0,067;  tarses  0,065. 

Deseription  des  deux  sexes  adultes.  —  Dessus  de  la  tête  et  du  cou  d'un 
jaune  d'ocre,  avec  les  plumes  allongées,  lancéolées  et  bordées  de  brun  noi- 
râtre ;  une  touffe  occipitale  de  longues  plumes  tombantes,  blanches  bordées 
de  noir  ;  gorge  blanche  ;  devant  et  côtés  du  cou,  jabot  et  scapulaires  d'un 
jaune  d'ocre;  haut  du  dos  et  les  scapulaires  supérieures  d'un  roux  rougeâtre  ; 
bas  du  dos,  ailes,  queue  et  parties  inférieures  d'un  blanc  pur.  Bec  d'un  bleu 
cobalt  à  la  base,  noir  à  l'extrémité  ;  lorum  et  tour  de  Ijoail  verts  ;  iris  jaune  ; 
pattes  d'un  vert  jaunâtre. 

Jeune.  —  Point  de  longues  plumes  occipitales  blanches.  Tête  et  cou 
jaune  d'ocre  terne  avec  de  longues  stries  brunes,  mais  la  partie  médiane 
antérieure  du  cou  d'un  blanc  jaunâtre  sans  stries  ;  haut  du  dos  et  scapulaires 
d'un  brun  cendré;  le  reste  du  plumage  d'un  blanc  assez  pur.  Bec  d'un  jaune 
verdâtre  à  la  base,  noir  vers  l'extrémité. 

Poussin.  —  Face,  région  périophthalmique,  derrière  et  devant  du  cou, 
ventre  et  dessous  des  ailes  glabres,  jaunâtres  ;  duvet  du  dessus  de  la  tête 
bien  fourni,  barbelé  et  fauve  à  la  base,  filiforme,  blanc  et  brillant  dans  sa 
plus  grande  longueur,  atteignant  17  mm.  et  formant  bien  la  huppe;  côtés 
du  cou,  manteau  et  dessus  des  ailes  d'un  gris  vineux  pâle  ;  ventre,  abdomen 
et  cuisses  blancs;  bec  jaune  avec  le  marteau  blanc;  pieds  d'un  jaune  rem- 
bruni, ongles  jaunes.  (J.  Vian). 

Hab.  —  Le  Crabier  habite  le  midi  de  l'Europe,  le  sud-ouest  de 

l'Asie  et  l'Afrique.  On  le  ren- 
contre au  Portugal  {Barboza  du 
Bocage)  et  il  est  assez  abondant 
dans  les  grands  marais  de  l'Es- 
pagne, surtout  dans  ceux  de 
Valence  (Saunders)  ;  dans  le 
;J  midi  de  la  France  il  est  de  pas- 
w  sage  annuel  ou  irrégulier  suivant 
les  régions  {Jaubert,  Lacroix), 
mais  ne  se  montre  qu'accidentellement  dans  les  départements  du 
centre  et  du  nord  [De gland)  ;  il  est  plus  ou  moins  abondant  en  Italie 


oo  i 


suivant  les  localités,  ainsi  qu'en  Sardaigne,  en  Corse  [GiglioU).  en 
Sicile  [Malherbe)  et  à  l'île  de  Malte  {Wriffht);  il  en  est  de  même  en 
Grèce  {Lindermayer).  11  niche  en  abondance  dans  la  vallée  du  Da- 
nube jusqu'en  Dalmatie  {Naumann),  dans  la  Dobrodja,  la  Bulgarie 
[Alléon)  et  à  l'embouchure  de  tous  les  fleuves  de  la  Russie  méridio- 
nale (c/e  i\rjrc?m«nn).  Cet  oiseau  visite  régulièrement  la  Bohême  et 
il  est  probable  qu'il  y  niche  [Fritsch),  se  montre  assez  souvent  en 
Silésie,  accidentellement  dans  l'Anhalt  [Naumann),  en  Prusse  près 
du  Rhin  [Boech),  dans  le  Mecklembourg  [von  Preen),  dans  le  Holstein 
et  le  Jutland  [ReinharcU).  Un  individu  a  été  tué  à  Kralingen  près  de 
Rotterdam  et  l'espèce  nicherait  même,  d'après  Schlégel,  près  de 
l'embouchure  de  la  Aieuse,  mais  cela  me  paraît  peu  probable.  Il  est 
très  rare  en  Belgique  où  il  a  été  tiré  accidentellement  près  de  Tour- 
nai, de  Huy,  de  Namur  et  dans  les  Ardennes.  Vingt- trois  captures 
ont  été  signalées  aux  îles  Britanniques  de  1778  à  1867  [Harting),  et 
plus  récemment,  trois  individus  ont  encore  été  tués  en  Irlande,  le 
dernier  datant  du  23  novembre  1881  [Seebohm).  On  ne  l'observe  que 
très  accidentellement  en  Pologne  [Taczanowski)  et  jamais  en  Scandi- 
navie et  dans  le  nord  de  la  Russie. 

A  l'Est,  on  rencontre  cet  oiseau  au  Caucase  [Raddé),  dans  la  région 
Aralo-Caspienne  [Bogdanotv),  en  Perse  [Blanford),  en  Asie  Mineure 
[Krûper),  en  Palestine  [Tristram)  et  en  Arabie  [Einpr.  et  Ehrenb.). 

Le  Crabier  paraît  habiter  également  toutes  les  régions  humides  de 
l'Afrique  :  il  a  été  observé  au  Maroc  {Favier),  en  Algérie  [Loche),  sur 
les  rives  du  Nil  et  de  ses  alïluents  [de  Heiiglin),  à  Zanzibar,  au 
Zambèze  [Kirk),  au  Transvaal  [Ayres),  au  Natal  [Gurney)y  à  Caza- 
manze  (Verreaux),  à  la  Côte  d'Or  [Reichcnoio),  en  Gambie  [Rcndall), 
au  Sénégal  [Ilartlaub),  etc.  Il  est  de  passage  aux  Canaries  [Bol le) 
et  habite  également  Madagascar  {Grandidier)  et  les  îles  Comores 
[de  Heuglin). 

Mœurs.  —  Le  Crabier  chevelu  fait  son  apparition  en  Europe  dans 
la  dernière  semaine  de  mars  et  émigré  en  septembre.  Suivant  le 
comte  von  dcr  Miihle,  il  arrive  en  Grèce  par  centaines  et  en  bandes 
à  la  même  époque  que  la  Garzette,  mais  fréquente  d'autres  endroits. 
C'est  dans  les  pâturages  marécageux  qu'il  se  tient  de  préférence  à 
son  arrivée,  courant  et  cherchant  sa  nourriture  au  milieu  des  bétes  à 
cornes  où  il  est  assez  difficile  de  le  tirer.  Après  un  court  séjour  en 
Morée,  il  continue  sa  route  vers  les  lieux  de  la  reproduction. 

On  rencontre  également  cet  oiseau  dans  les  grands  marais,  près 

Tome  il—  1801.  43 


—  338  — 

des  lacs,  des  claiigs  et  des  cours  d'eau  bordés  de  roseaux  et  de  buis- 
sons de  saules  et  d'aunes  ;  mais  il  n'aime  pas  ces  vastes  marécages 
couverts  de  plantes  aquatiques  et  sans  espaces  libres.  On  le  voit  aussi 
près  des  lacs  à  eau  saumâtre  et  dans  les  pâturages  qui  avoisinent  la 
mer,  mais  seulement  à  l'époque  des  passages.  Il  paraît  préférer  les 
eaux  bourbeuses  parsemées  de  louiïes  de  roseaux  et  de  joncs  et  les 
prairies  humides  entourées  de  buissons  ;  en  pleiu  jour  il  visite  même 
les  eaux  découvertes  où  il  se  rencontre  souvent  avec  les  deux  espèces 
d'Aigrettes.  Naumann  dit  avoir  vu  sur  un  lac  près  de  Szurcsin  en 
Syrnie,  plusieurs  centaines  de  Hérons  Aigrettes  et  Crabiers,  ces 
derniers  formant  les  deux  tiers,  et  prenant  leurs  ébats  au  milieu  de 
milliers  d'oiseaux  aquatiques,  tant  Ecliassiers  que  Palmipèdes.  Le 
Crabier  est  d'ailleurs  fort  sociable  et  pas  farouche  du  tout,  et  il  n'est 
difficile  à  tirer  que  quand  il  se  meut  au  milieu  des  bestiaux  qu'on  est 
exposé  à  atteindre.  Il  passe  ses  journées  ent'ères  à  chercher  sa  nour- 
riture et  ne  fait  que  rarement  entendre  sa  voix,  qu'on  peut  rendre 
par  krah  krah,  selon  von  der  Mijhle;  Naumaun  rend  ce  cri  par  harr 
ou  charr  ;  il  est  du  reste  difficile  de  bien  le  noter,  car  l'oiseau  est 
extrêmement  silencieux. 

Pendant  les  fortes  chaleurs, le  Crabier  se  repose  durant  les  heures  les 
plus  chaudes  à  l'abri  d'un  buisson  ou  d'une  touffe  de  roseaux;  surpris 
dans  son  sommeil,  il  se  réfugie  d'abord  dans  un  touffu  quelconque, 
mais  si  on  continue  à  le  poursuivre,  il  s'envole  vers  un  arbre  sur 
lequel  il  se  perche  et  où  il  est  alors  facile  de  l'abattre.  Sa  démarche 
est  un  peu  plus  leste  que  celle  des  autres  Hérons,  et  quand  il  vole,  il 
rentre  moins  la  tête,  mais  rejette  toujours  ses  jambes  en  arrière;  son 
vol  est  silencieux  et  assez  rapide. 

Le  Crabier  est  essentiellement  diurne  et  passe  la  nuit  dans  le  repos. 
C'est  uniquement  pendant  le  jour  qu'il  fait  la  chasse  aux  petits 
poissons,  aux  jeunes  grenouilles,  aux  têtards,  aux  insectes,  aux 
larves,  aux  petits  crustacés,  aux  mollusques  et  aux  vers  dont  il  se 
nourrit. 

Bien  que  d'un  naturel  doux  et  inoifensif,  il  paraît  que  pris  jeune, 
il  devient  si  querelleur  qu'il  harcelle  tous  ses  camarades  de  captivité, 
sans  tenir  compte  de  leur  taille  ni  des  moyens  de  défense  dont  ils 
disposent;  c'est  du  moins  ce  qu'a  observé  le  comte  Alléon. 

Reproduction.  —  Le  Crabier  niche  comme  les  précédents  dans  les 
roseaux  et  les  joncs  ou  sur  les  arbres  suivant  les  lieux  qu'il  habite,  et 
son  nid  est  fait  sur  le  même  modèle  que  celui  du  Héron  garzette  et 


du  Bilioreau,  mais  il  est  plus  petit.  Quand  il  est  place  sur  un  arbre, 
le  nid  est  i'urmé  de  bûchettes  si  lâchement  entrelacées  qu'on  sait 
apercevoir  les  œufs  au  travers.  La  ponte  a  lieu  dans  la  première 
quinzaine  de  juin  et  se  compose  de  quatre  à  six  œufs,  d'un  vert  un 
peu  plus  pâle  que  ceux  dos  Hérons  précédents;  ils  mesurent  38  à 
40  millini.  sur  28  à  20  millim. 

M.  Seebohm  fait  remarquer  que  dans  la  vallée  du  Danube  on  ne 
voit  jamais  de  nids  do  Crabier  ailleurs  que  sur  les  arbres,  tandis  que 
dans  le  nord  de  l'Afrique  cet  oiseau  niche  toujours  sur  le  sol,  proba- 
blement à  cause  de  l'absence  d'arbres  convenables. 

GENRE  CXXXIV 

BLONGIOS.  —  ARDETTiJ 

Arde.v  (part.)  aiictorum  pUirimornm. 
BoTAURUS  (part.),  Boie,  /sis,  1822,  p.  559. 
Cancroph.vgus  (part.),  Kanp,  Nat.  SysL  p.  42  (1829). 
Ardeol.v  (part.},  Boiiap.  Comp.  List  B.  p.  48  (1838). 
Ardetta,  Gray,  List.  Gen.  B.  Appoid.  p.  13  (1842). 
Erodiscus,  Glog.  Lliuid-  iind  LLilfsb.  d.  Naturg.  I,  p.  410  (1812). 
Ardeiralla,  (Verr.)  llarti.  Oni.  W.  Afr.  p.  224  (1857). 
BuTOROiDES,  (Blyth)  Goukl,  Hnulb.  B.  Austr .  Il,  p.  31  1(1856). 

Car.  —  Bec  de  la  long  levir  do  hi  tète,  un  psii  plus  long  que  le  t^rse,  droit, 
aigu,  finement  dentelé  vers  le  bout  ;  fcillon.s  nasaux  assez  profonds  ;  ailes 
aiguës,  les  trois  premières  rémiges  à  peu  près  égales;  queue  courte,  foiméo 
de  dix  rectrices  peu  résistantes;  jand)cs  entièrement  emplumées;  doigt 
médian,  l'ongle  compris,  de  la  longueur  du  tarse,  l'interne  plus  long  que  l'ex- 
terne et  le  pouce  bien  développé. 

Ilah.  —  Ce  genre  habite  les  parties  chaudes  et  tempérées  des  cinq 
parties  du  monde. 

2'.](')  —  Le  Blongios  nain. 
ARDKTTA  MLXUTA,  Gray  ex  Lin. 

fPl.  23") 

ArDEA  AHDEOI.ACt  A.  AUDEOLA  N.EVIA,   Bi'is-^.  Om.    \',   pp.  497,  500  (1700). 

Ardea  minuta.  Lin.  S\il.  nat.  I,  p.  240  (17Gii). 
BoTAURUS  MIN'UTUS,  Roio,  /.vif,  1822,  p.  559. 

Cancroimiaous  MiNUTus,  Kaup,  Nul.  S)/si.  p.  42(1829). 
BoTAURUS  PCSiLLUS,  BreliiTi,  Lis,  1830,  p.  989. 
BtTOR  MiNUTUS,  Swains,  Cl'ssif.  /?,  Il,  [>.  ;î5  1  (1837). 


—  340  - 

Ardeola  minuta,  Bonap.  Comp.  List  B.  Eur.  Am.  p.  48  (1838). 
Ardetta  minuta,  Gray,  List  Gen.  B.  Appetxd.  p.  13  (1842). 
Ardeola  ntevia  et  fusilla,  Brehm,  Naumannia,  1855,  p.  290. 
Die  Kleine  Rohrdommel,  en  allemaad. 
The  little  Bittern,  en  anglais 
De  Kleine  Puitoor,  en  flamand. 

Var.  Fusilla. 

Ardea  fusilla,  Y\q\\\.  Noicv .  Dict.  (Thist.  nat.  XIV,  p.  432(1817j. 
Ardetta  fusilla,  Gould,  B.  Austr.  VI,  pi.  78  (1848). 
Ardeola  fusilla  et  fodiceps,  Bonap.  Consp.  gen.  av.  Il,  p.  134  (1857). 
Ardea  Payesii,  Verr.  Journ.  f.  Ornith.  1858,  p.  42. 
Ardea  podicefs,  Hartl.  Journ.  f.  Om.  1860,  p.  168. 
Ardetta  fodicefs,  Gurn.  Ibis,  1863,  p.  330. 

Ardea  minuta  australis,  Schleg.  Mus.  P.-B.  (Anlece),  p.  39  (1863). 
Botaurus  minutus  subsp.  Pusillus,  Reichenow,  Joicrn.  f.  Om.  1877  p.  243, 
Ardea  minuta  var.  Podicefs,  M.  Edw.  et  Grand.  Eist.  Mada^.  t.  XII,  Ois.  p.  559,  pi. 
229a  (1879). 

Taille  :  0,25;  ailes  0,15;  bec  0,049;  tarses  0,045. 

Description  du  mâle  adulte.  —  Dessus  de  la  tête,  dos,  scapulaires,  sus-cau- 
dales, queue  et  rémiges  secondaires  d'un  noir  verdâtre;  côtés  de  la  tête  et 
du  cou  d'un  cendré  vineux  ;  gorge  blanche  ;  les  autres  parties  d'un  jaune 
ocreux  ;  côtés  de  la  poitrine  bruns  avec  les  plumes  bordées  de  jaune  ocreux  ; 
grandes  couvertures  des  ailes  d'un  gris  pâle,  lavées  de  jaunâtre  sur  les  bords; 
rémiges  noirâtres;  sous-caudales  blanches.  Bec  jaune,  brun  en  dessus  ;  iris, 
tour  des  yeux  et  lorums  jaunes  ;  pattes  d'un  vert  jaunâtre. 

Femelle.  —  Dessus  de  la  tête  et  queue  d'un  noir  verdâtre;  plumes  du  dos 
et  scapulaires  d'un  brun  foncé  légèrement  bordées  de  jaune  d'ocre  ;  dessus  du 
cou  couleur  marron  fauve  ;  gorge  blanche  avec  une  raie  médiane  ocracée  ; 
côtés  de  la  tête,  devant  et  côtés  du  cou  et  couvertures  des  ailes  d'un  jaune 
ocreux  fauve  ;  une  tache  rousse  à  l'épaule;  côtés  de  la  poitrine  bruns  avec  les 
plumes  bordées  d'ocre  ;  abdomen  et  flancs  d'un  blanc  roussâtre,  ces  derniers 
avec  une  raie  brune  au  centre  des  plumes  ;  le  reste  comme  chez  le  mâle. 

Jeune.  —  Plumes  du  dessus  de  la  tête  noirâtres  et  plus  ou  moins  bordées 
de  roux  ;  celles  de  la  nuque  d'un  roux  marron  varié  de  jaunâtre  ;  celles  du 
dos  et  scapulaires  brunes  bordées  de  jaunâtre  ;  couvertures  des  ailes  d'un 
jaune  fauve,  brunâtre  au  centre  et  d'un  roux  marron  à  l'épaule  ;  gorge 
blanche  avec  une  raie  médiane  fauve  ;  les  autres  parties  d'un  blanc  rous- 
sâtre, les  plumes  du  cou  et  des  flancs  brunâtres  au  centre;  sous-caudales 
blanches.  Brun  du  bec  plus  étendu. 

Poussin.  —  Lorums,  tour  des  yeux,  derrière  du  cou,  poitrine  et  dessous  des 
ailes  nus,  d'un  jaune  faiblement  lavé  de  verdâtre  ;  toutes  les  autres  parties 
vêtues  à  claire- voie  d'un  duvet  très  fin,  un  peu  plus  long  au  vertex,  de  teinte 


341  - 


Isabelle,  tournant  au  roux  sur  les  parties  supérieures  ;  bec  et  pieds  jaunes  ; 
iris  jaune  très  pâle  (J.  Vian). 

Hab.  —  Le  Blongios  nain  habite,  en  été,  l'Europe  centrale  et  méri- 
dionale; on  ne  l'observe  qu'ac- 


jas  ^^^;tfëi5o^vflgt2^^i 


Ut>voteoi3mtoi.wofaotiia»QfùTi 


cidentellement  en  Danemarck 
{Collin)  et  dans  le  sud  de  la 
Suède  {Nilsson).  Il  est  assez 
abondant  dans  certaines  parties 
marécageuses  de  la  Belgique 
et  y  niche.  En  Angleterre  on  ne 
le  voit  que  bien  rarement  et  il 
ne  visite  qu'accidentellement 
l'Ecosse  et  l'Irlande  {Seebohm).  Cet  oiseau  est  sédentaire  aux  Açores, 
à  Madeire  [Gocbnan),  au  Maroc  {Favier),  dans  la  régence  de  Tunis 
{Kœnig)  et  en  Egypte  {de  Heuglin)  ;  en  hiver,  on  l'observe  en  Nubie, 
au  Sennaar,  en  Abyssinie  [de  Heuglin),  au  Gabon  [Yerreaux)  et  dans 
l'Afrique  centrale  ;  il  est  cependant  difficile  d'indiquer  au  juste  sa 
limite  méridionale,  car  la  var.  Pusilla  est  souvent  confondue  avec  la 
forme  type. 

A  l'Est  on  observe  le  Blongios  nain  en  Palestine  {Tristam),  en  Asie 
Mineure  {Krilper),  en  Perse  et  dans  le  Beloutchistan  {Blanford), 
au  Cachemire,  dans  le  nord-ouest  du  Turkestan  [Severtzoïo)  et  dans 
l'ouest  de  l'Himalaya.  Le  D""  Henderson  l'a  trouvé  nichant  au  Cache- 
mire, et  M.  Hume  dit  qu'on  le  rencontre  dans  beaucoup  de  localités 
de  l'intérieur  de  l'Himalaya,  mais  qu'on  ne  le  voit  qu'accidentellement 
dans  le  nord  de  l'Inde,  d'où  il  ne  connaît  qu'une  seule  capture  faite 
aux  environs  de  Larkliana. 

La  var.  Pusilla  est  propre  à  l'Afrique  australe,  à  Madagascar 
{Grandidier),  au  sud  de  l'Australie  [Gould)  et  à  quelques  îles  de  la 
Polynésie  {Reichenoio). 

Mœurs.  —  Le  Blongios  nain  n'habite  donc  les  contrées  euro- 
péennes qu'en  été  :  il  arrive  à  la  tin  d'avril  ou  dans  la  première  hui- 
taine de  mai  et  émigré  en  septembre  ;  il  est  rare  d'en  voir  encore 
passer  en  octobre, et  ce  ne  sont  alors  le  plus  souvent  que  des  jeunes. 
Il  voyage  pendant  la  nuit,  isolément  ou  en  famille. 

Cet  oiseau  vit  dans  les  marais  et  près  de  toutes  les  eaux  couvertes 
de  roseaux  ou  bordées  de  buissons  et  d'arbres.  Mais  il  se  tient  de 
préférence  dans  les  roseaux,  dès  que  ceux-ci  ont  atteint  une  certaine 


-   842  — 

hauteur,  si  non  il  se  cache  sur  les  arbres  de  hauteur  moyenne  et  dans 
les  buissons  de  saules  et  d'aunes. 

C'est  un  oiseau  nocturne  qui  ne  se  montre  que  rarement  en  plein 
jour  ;  il  dort  presque  toute  la  journée,  mais  son  sommeil  est  si  léger 
que  le  moindre  bruit  le  réveille  ;  si  quelqu'un  approche  de  son  gîte,  il 
baisse  les  tarses,  mais  redresse  le  corps,  lo  cou  et  la  tête  en  se  ren- 
dant aussi  mince  que  possible,  et  reste  ainsi  immobile  jusqu'à  ce  qu'on 
soit  passé  ou  qu'il  ait  été  forcé  de  s'envoler  ;  dans  cette  attitude,  il 
ressemble  à  s'y  méprendre  à  un  pieu  ou  à  une  toulîe  de  roseaux  secs, 
et  celui  qui  le  voit  ainsi  pour  la  première  fuis,  ne  se  douterait  guère 
à  première  vue  que  c'est  un  oiseau.  Quand  les  roseaux  ont  toute  leur 
hauteur,  il  est  impossible  d'en  déloger  le  Blongios,  même  à  l'aide 
d'un  bon  chien  ;  on  a  beau  jeter  des  pierres  ou  frapper  les  roseaux  à 
coups  de  bâton, l'oiseau  ne  bouge  pas;  le  danger  devient-il  menaçant, 
le  Blongios  se  sauve  en  courant  dans  les  parties  les~plus  touffues  où 
le  chien  ne  peut  le  suivre  ;  souvent  même,  perché  au  sommet  d'un 
roseau,  il  attend  et  brave  son  ennemi  qui  ne  peut  l'atteindre  à  cette 
hauteur.  Ce  n'est  que  vers  le  soir  qu'il  se  montre  volontairement  à 
découvert,  mais  seulement  dans  les  lieux  où  il  se  croit  en  sûreté.  A 
ce  moment  il  vole  souvent  en  rasant  la  surface  de  l'eau  pour  gagner 
un  autre  endroit.  Il  est  du  reste  en  mouvement  pendant  toute  la 
nuit,  mais  ne  néglige  jamais  de  veiller  à  sa  sécurité  car  il  est 
extrêmement  farouche  et  prudent.  D'ordinaire  il  tient  le  cou 
recourbé  en  S,  la  tête  inclinée  vers  la  terre  et  il  paraît  alors  plus 
petit  qu'il  n'est  réellement.  Il  marche  avec  légèreté  en  hochant  la 
queue,  et  sait  courir  très  vite  quand  c'est  nécessaire  ;  il  sait  aussi 
grimper  le  long  des  tiges  de  roseaux  avec  une  adresse  remarquable. 
11  vole  avec  autant  d'aisance  que  de  rapidité  et  peut  changer  de  direc- 
tion assez  brusquement  ;  il  volette  en  s'élevant  et  plane  quelques 
instants  avant  de  reprendre  terre  ;  pendant  le  vol  il  laisse  pendre  les 
jambes  un  peu  obliquement. 

«  Bien  que  le  Blongios  soit  plus  vif  et  plus  sociable  en  apparence 
que  le  Butor  et  la  plupart  des  Ardéidés,  ditNaumann,  on  se  tromperait 
si  on  voulait  se  fier  à  ses  façons  débonnaires,  car  il  est  au  fond  aussi 
méchant  et  aussi  courageux  que  les  autres.  Si  on  le  presse  de  trop 
près,  sans  qu'il  puisse  se  sauver,  il  lance  brusquement  le  cou  en  avant, 
porte  de  vigoureux  coups  de  bec  dirigés  vers  les  yeux, contre  les  mains, 
et  il  peut  ainsi  devenir  dangereux.  Etendre  subitement  son  cou  et  le 
ramener  avec  la  môme  promptitude  est  l'affaire  d'un  instant.  Ce  mou- 


-    343  - 

veinent  brusque  et  subit  paraît  d'autant  plus  singulier,  que  l'oiseau  se 
tient  ramassé  sur  lui-même  comme  une  masse  inerte  ;  cette  créature, 
en  apparence  courte  et  trapue,  s'allonge  subitement,  devient  grêle  et 
prend  une  taille  double.  Au  besoin  il  sait  se  défendre  vigoureusement 
jusqu'à  son  dernier  souffle.   » 

Le  Blongios  n'est  guère  plus  sociable  que  le  Butor;  il  s'inquiète  peu 
des  autres  oiseaux,  mais  si  de  plus  faibles  que  lui  se  trouvent  à  sa 
portée,  ils  sont  exposés  à  recevoir  de  violents  coups  de  bec.  A  l'épo- 
que de  la  reproduction,  le  mâle  fait  souvent  entendre,  pendant  la  nuit, 
son  cri  d'un  ton  bas  et  étouffé,  qu'on  peut  rendre  selon  Naumann,  par 
pouonm  ou  poumb  ;  ce  cri,  que  l'oiseau  répète  deux  ou  trois  fois  de 
suite,  ressemble  assez  bien  à  celui  du  Crapaud  sonneur  [Bomhinator 
homMnus)  ;  quand  un  danger  menace  sa  couvée,  la  femelle  crie  d'un 
ton  plaintif:  gaeth,  gacth  ou  get,  gel,  get,...  en  hochant  la  queue 
et  se  montrant  pleine  d'angoisse. 

Cet  oiseau  se  nourrit  comme  les  précédents  d'insectes,  de  larves,  de 
vers,  de  petits  poissons,  de  jeunes  grenouilles,  de  têtards  et  de  frai  de 
batraciens  et  de  poissons. 

Pris  jeune,  le  Blongios  supporte  bien  la  captivité,  s'apprivoise  avec 
facilité,  s'habitue  bientôt  à  son  maître  et  accourt  à  son  appel  ;  mais  il 
conserve  toujours  son  naturel  défiant  et  il  est  bon  de  ne  pas  trop  s'y 
fier.  Il  exige  un  assez  grand  espace  et  des  endroits  où  il  puisse  se 
cacher.  «  En  tient-on  plusieurs  dans  une  même  volière,  dit  Brehm, 
ils  deviennent  très  amusants  par  la  facilité  avec  laquelle  ils  prennent, 
comme  au  commandement,  les  postures  les  plus  diverses  et  les  conser- 
vent un  certain  temps.  Un  spectacle  très  plaisant  s'observe  quand  on 
entre  dans  leur  volière  :  ils  se  lèvent  aussitôt  et  restent  droits  comme 
des  piquets  ;  s'approche-t-on  d'eux,  ils  ne  bougent  pas,  mais  leur 
regard  demeure  attaché  sur  chaque  mouvement  que  l'on  fait  et  leur 
cou  se  tourne  en  spirale  autour  de  son  axe  ». 

M.  A.  Crocgaert  raconte  ce  qui  suit  au  sujet  de  la  captivité  de  cet 
oiseau  :  «  Dans  ma  jeunesse,  mon  père  éleva  une  nichée  de  quatre 
petits  Blongios,  dont  le  seul  survivant  avait  contracté  une  alliance 
intime  avec  un  singe  Cercopithèque.  Le  soir,  ce  dernier  regardait 
d'un  œil  anxieux  si  son  ami  n'ari'ivait  pas,  et  quand  à  la  fin  l'oiseau 
s'y  décidait,  le  singe  le  prenait  dans  ses  bras,  le  serrait  près  de  son 
corps,  prenait  ensuite  sa  couverture  et  savait  si  bien  s'en  entourer 
(ju'on  ne  voyait  [)lus  v\o\\  ni  du  singe,  ni  de  l'oiseau.  C'est  ainsi  qu'ils 
passaient  la  nuit  d  la  même  scène  se  répétait  tous  les  soirs  ». 


—  344  - 

Reproduction.  —  Le  Blongios  nain  niche  en  petit  nombre  dans 
divers  marais  et  étangs  de  la  Belgique  et  parfois  même  aux  environs 
de  Bruxelles.  M.  A.  Croegaert  dit  avoir  trouvé  à  diverses  reprises  des 
nids  de  cet  oiseau  au  fort  Calloo  près  de  la  Tôte-de-FIandre  (Anvers); 
M.  A.  Duvivier  assure  qu'il  nichait,  il  y  a  quelques  années,  à  Dieghem- 
lez-Bruxelles  dans  les  roseaux  de  l'étang  situé  près  de  la  gare  du 
chemin  de  fer  ;  il  paraît  qu'il  se  reproduit  aussi  dans  certaines  loca- 
lités de  l'Ardenne  et  des  Flandres,  ainsi  qu'aux  environs  de  Louvain. 

Le  nid  est  ordinairement  établi  dans  les  endroits  les  plus  inaborda- 
bles et  au  milieu  des  fourrés  de  joncs  et  de  roseaux;  il  est  générale- 
ment construit  au-dessus  de  l'eau  sur  de  vieilles  souches  de  roseaux, 
sur  des  joncs  et  des  roseaux  renversés,  plus  rarement  dans  un  buisson 
de  saule  ou  sur  la  tête  d'un  saule  peu  élevé  et  incliné  sur  l'eau.  Il 
paraît  môme  que  l'oiseau  se  sert  quelquefois  d'un  vieux  nid  de  Pie, 
quand  celui-ci  $e  trouve  sur  un  arbre  près  de  l'eau. Xe  nid  du  Blongios 
est  volumineux  et  grossièrement  construit  à  laide  de  joncs  et  de 
roseaux  secs,  parfois  entremêlés  de  bûchettes  ;  l'intérieur  est  garni  de 
feuilles,  de  roseaux,  de  joncs  et  d'herbes  diverses;  le  tout  forme  une 
masse  peu  compacte  mais  solide.  Dans  nos  contrées  la  ponte  n'a  lieu 
qu'au  commencement  de  juin,  et  se  compose  de  cinq  à  neuf  œufs,  d'un 
blanc  tirant  sur  le  bleu  verdâtre,  mais  cette  teinte  disparaît  bientôt  et 
l'œuf  est  alors  d'un  blanc  pur  ;  il  mesure  environ  35  millim.  sur  28. 

La  femelle  couve  avec  ardeur  pendant  seize  à  dix-sept  jours.  Les 
parents  élèvent  leurs  petits  en  commun,  ils  leur  apportent  la  nourriture 
dans  leur  jabot  et  la  rejettent  au  bord  du  nid.  Là  où  ils  ne  sont  pas 
dérangés,  les  petits  Blongios  demeurent  au  nid  jusqu'au  moment  de 
prendre  leur  essor,  mais  quand  on  les  trouble,  ils  se  jettent  bientôt 
dans  les  roseaux  où  ils  se  tirent  fort  bien  d'affaire,  grâce  à  la  protec- 
tion et  à  la  tendresse  de  leurs  parents.  «  Ces  oiseaux,  dit  Naumann, 
tiennent  tellement  à  leur  couvée,  que  la  femelle  ne  se  laissera  guère 
chasser  du  fourré  qui  abrite  son  nid  avec  les  œufs.  S'approche-t-on  de 
ce  dernier,  elle  accourt  et  se  met  contre  son  habitude  à  découvert, 
s'agite  et  grimpe  le  long  des  roseaux,  crie  d'un  ton  ^\B.mt\î  gaeck, 
gaech,  gaeck  en  hochant  la  queue  à  la  façon  du  Râle,  et  se  montre 
pleine  d'angoisse  et  de  désespoir.  Quand  elle  a  des  petits,  trop  faibles 
encore  pour  fuir,  elle  s'approche  si  près  de  l'assaillant  que  celui-ci 
peut  parfois  la  tuer  d'un  coup  de  canne.  Le  mâle  se  tient  plus  à  l'écart 
et  se  borne  à  observer  Fennemi  de  loin  ;  il  fait  bien  entendre  de  temps 
en  temps  un  cri  de  détresse,  mais  il  ne  s'expose  que  bien  rarement.  » 


—  345  — 

GENRE  CXXXV. 

BUTOR.  —  BOTAURUS. 

Ardea,  Briss. ,  Lin. 

BoTAURUs,  Steph.  Sl/aic's  G  en.  Zool.  XI,  p.  593  (1819). 
Nycticorax,  Ehrenb.  Symb.  phys.  Av.  fol.  m.  (1832). 
Butor,  Swains.  Classif.  B.  II,  p.  354  (1837). 

Car.  —  Bec  de  la  longueur  de  la  tête,  avec  une  petite  échancrure  à 
l'extrémité  de  la  mandibule  supérieure  qui  est  un  peu  fléchie;  sillons  nasaux 
larges  et  profonds  ;  cou  médiocre,  garni  de  duvet  en  dessus,  les  plumes  laté- 
rales longues,  larges  et  convergeant  en  arrière  ;  ailes  amples,  sub-obtuses; 
queue  courte,  formée  de  dix  rectrices  peu  résistantes;  jambes  aux  trois  quarts 
emplumées;  la  partie  nue  réticulée;  tarses  relativement  courts,  scutellés  en 
avant,  réticulés  en  arrière  ;  doigts  longs,  le  médian,  ongle  compris,  plus  long 
que  le  tarse  et  réuni  à  l'externe  par  une  petite  membrane,  doigt  interne  plus 
long  que  l'externe. 

Had.  —  Ce  genre  a  des  représentants  dans  les  cinq  parties  du 
monde. 

237.  —  Le  Butor  vulgaire  ou  étoile. 
BOTAURUS  STELLARIS,  Stcph.  ex  Lin. 

(PI.  236). 

Ardea  botaurus,  Briss.  Ornith.  V,  p.  444  (1760). 

Ardea  stellaris,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  239  (1766). 

Botaurus  stell.\ris,  Steph.  Shaws  Gen.  Zool.  XI,  p.  593  (1819). 

Botaurus  lacustris  et  arundixaceus,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  989. 

Nycticorax  stellaris,  Hempr.  Ehr.  Symb.  phys.  Aves,  fol.  m.  (1832). 

Butor  stellaris,  Swains.  Classif.  B.  II,  p.  354  (1837). 

Botaurus  vulgaris,  C.  F.  Dub.  PL  col.  Ois.  Belg.  III,  p.  206  (1860). 

Ardea  stellaris  capensis,  Sclileg.  Mus.  P.-B.  Anleœ,  p.  48  (1863). 

Die  grosse  Rohrdo.m.mel,  en  allemand. 

The  Bittern,  en  anglais. 

De  Roerdomp,  en  llamand. 

Taille:  0™G0  ;  ailes  0,315;  bec  0,074;  tarses  0,09. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  D'un  roux  jaunâtre  clair  varié  de 
roux  rougeâtre  ;  dos  et  scapuluires  marqués  de  taches  noirâtres  longitudi- 
nales et  d'autres  plus  petites  et  irrégulières  sur  les  bords  des  plumes  ;  dessus 
de  la  tête  et  front  noirs  ;  raies  sourcilicrcs,  joues  et  côtés  du  cou  d'un  roux 
jaunâtre,  ces  derniers  barrés  de  raies  noirâtres  en  zigzags  ;  gorge  d'un  blanc 
roussâtre  avec  une  raie  médiane  rousse  et  bordée  latéralement  d'iiia'  bande 
noirâtre  partant  do  la  commi.ssure  du  bec;  devant  du  cou  plus  pâle  et  marqué 
de  quatre  bandes  irrégulières  et  longitudinales  d'un  roux  tacheté  de  brun  ; 
Tome  u.  —  1891  44 


346 


couvertures  des  ailes  avec  des  raies  noirâtres  transversales  et  en  zigzags  ; 
rémiges  brunes  barrées  irrégulièrement  de  rougeâtre  ;  parties  inférieures 
d'un  roux  jaunâtre  pâle,  avec  de  grandes  taches  noires  à  la  poitrine,  des 
stries  rousses  tachetées  de  brun  sur  l'abdomen,  et  des  raies  en  zigzags  sur  le 
bas-ventre  ;  sous-caudales  blanchâtres  avec  des  stries  brunes  ;  queue  rous- 
sâtre  et  marquée  d'un  grand  nombre  de  taches  et  de  zigzags  noirâtres.  Bec 
brun  en  dessus,  d'un  jaune  verdâ,tre  en  dessous  et  sur  les  bords  ;  iris  jaune  ; 
lorums  et  pattes  d'un  jaune  verdâtre. 

Le  mâle  ne  se  distingue  extérieurement  que  par  une  taille  un  peu  plus  forte. 

Jeune.  —  Comme  l'adulte,  mais  les  teintes  plus  pâles  et  moins  pures,  les 
plumes  du  cou  plus  courtes,  le  dessus  de  la  tête,  les  côtés  de  la  gorge  et  les 
taches  du  dos  bruns.  Iris  blanchâtre  ;  lorums  jaunes  ;  pattes  plus  sombres. 

Poussin.  —  Toutes  les  parties  nues,  jaunes;  duvet  très  long,  soyeux  et  de 
couleur  rousse. 


Hab. 


Le  Butor  étoile  est  répandu  en  Europe,  en  Asie  et  en 

Afrique,  mais  il  ne  dépasse  que 
très  rarement  le  61°  1.  N.  Il  a 
été  pris  accidentellement  dans  le 
sud  de  la  Finlande  (Palmên), 
est  très  rare  dans  le  midi  de  la 
Suède  {Nilsson)  et  ne  se  montre 
pas  en  Norwège.  Il  est  égale- 
ment rare  au  Danemark  {Benzon) 
et  dans  le  nord  de  l'Allemagne 


{Borggreve)\  on  le  voit  accidentellement  dans  toutes  les  parties 
marécageuses  des  îles  Britanniques,  mais  il  est  cependant  probable 
qu'il  niche  en  petit  nombre  dans  les  grands  marais,  particulièrement 
de  l'Ecosse  et  de  l'Irlande  [Seehohm).  En  Russie  on  l'observe  jusqu'au 
61°  1.  N.  {Bogdanow)  et  il  est  môme  abondant  sur  tout  le  littoral  du 
Pont-Euxin,où  il  passe  l'hiver  sur  la  côte  méridionale  (de  Nordmann). 
On  ne  le  voit  dans  l'Europe  centrale  qu'en  été,  mais  il  est  sédentaire 
dans  le  centre  et  le  midi  de  l'Italie  {Giglioli)',  il  hiverne  en  Portugal, 
en  Espagne,  dans  le  midi  de  la  France  et  de  la  Grèce.  En  Belgique 
il  est  assez  commun  dans  les  polders  et  dans  les  marais  de  la  Cam- 
pine  ;  à  l'époque  des  migrations,  on  le  voit  de  temps  à  autre  sur  la 
Meuse  et  sur  les  étangs  de  l'intérieur. 

Cet  oiseau  hiverne  dans  toutes  les  parties  de  l'Afrique  où  il  trouve 
des  lieux  convenables  à  ses  mœurs  ;  il  est  sédentaire  dans  le  sud  du 
continent  noir  {Lai/aîxl)  où  les  individus  ont,  suivant  Schlégel,   une 


—  Ul  — 

taille  moins  forte.  On  le  voit  dans  le  Delta  du  Nil  jusqu'en  avril 
{de  Heuglin). 

On  observe  également  cette  espèce  aux  îles  Baléares  {von  Homeyer), 
de  Malte  [Wright],  Açores  {Godman),  Madère  {Zuchold)  et  Canaries 
{Bolle). 

A  l'Est,  le  Butor  est  répandu  dans  la  région  Aralo-Caspiennc,  le 
Tian-Chan,la  Songarie  russe  et  dans  toute  la  Sibérie  jusqu'au  59°  1.  N. 
{Bogdanoio);  il  se  trouve  également  au  Japon  {Schlégel).\)3iTis  le  sud 
de  TAsie,  cet  oiseau  hiverne  en  Asie  Mineure  {Krûper),  en  Palestine 
{Tristram),  en  Perse  {St-John),  au  Turkestan  {Sevcrtzoïo),  dans  l'Inde 
centrale  et  septentrionale  {Jerdon),  en  Chine  {David)  et  en  Birmanie 
{SeeboJwî). 

Mœurs.  —  Le  Butor  émigré  des  contrées  du  Nord  en  septembre  et 
octobre  et  y  retourne  vers  la  fin  de  mars  ou  en  avril.  Si  Thiver  est 
doux,  il  arrive  parfois  que  des  sujets  passent  cette  saison  dans 
certaines  parties  de  l'Allemagne  et  en  Belgique,  mais  le  plus  ordinai- 
rement, ils  ne  quittent  ces  pays  que  quand  la  neige  et  les  gelées  les 
obligent  à  chercher  un  climat  plus  doux.  Les  migrations  ont  lieu 
pendant  la  nuit,  et  probablement  par  individus  isolés  qui  traversent 
l'espace  à  une  grande  hauteur  en  jetant  do  temps  en  temps  leur  cri 
rauque  et  retentissant. 

Cet  oiseau  habite  les  plaines  marécageuses,  les  lacs,  les  étangs,  les 
cours  d'eau,  et  en  général  toutes  les  eaux  dont  les  bords  au  moins  sont 
garnis  de  roseaux,  car  ceux-ci  lui  sont  indispensables.  Ce  n'est,  qu'au 
printemps,  quand  les  roseaux  et  les  joncs  sont  encore  trop  bas  pour 
l'abriter,  qu'il  cherche  un  refuge  dans  les  buissons  de  saules  et  d'aunes 
et  parfois  sur  les  arbres. 

C'est  un  oiseau  nocturne, qui  se  tient  caché  pendant  le  jour  dans  les 
fourrés  de  roseaux  les  plus  impénétrables  ;  au  coucher  du  soleil,  il  se 
réveille,  lisse  son  plumage,  étend  les  ailes  et  vole  vers  les  endroits  de 
pêche  en  faisant  retentir  l'air  de  ses  cris  lugubres.  Dés  l'aurore  il 
retourne  à  son  gîte, dont  il  n'est  pas  facile  de  le  faire  sonirsans  un  bon 
chien,  car  son  sommeil  est  fort  léger  et  au  moindre  bruit  il  se  met  sur 
ses  gardes.  Est-il  surpris,  il  s'assied  sur  ses  tarses,  se  fait  aussi  mince 
que  possible,  redresse  le  corps,  le  cou,  la  tête  et  le  bec,  de  manière  à 
ce  que  le  tout  ne  forme  qu'une  ligne  droite  presque  vcrticale,et  il  reste 
ainsi  immobile  en  observant  les  niouxcnionts  de  l'onncnii.  Dans  cette 
position  on  le  prendrait,  à  quelque  distance,  pour  un  objet  inerte, 
d'autant  plus  que   ses   teintes  jaunâtres  et  son   ininiobiliié  le  font 


—  348  — 

ressembler  à  un  morceau  de  bois  fiché  en  terre  ;  le  danger  devient-il 
pressant,  le  Butor  se  glisse  entre  les  roseaux,  fait  mille  détours  et 
parvient  souvent  à  échapper  au  chasseur.  Il  surpasse  tous  les  Hérons 
dans  l'art  de  prendre  les  postures  les  plus  singulières.  Au  repos,  il 
penche  un  peu  son  corps  en  avant,  retire  son  cou  de  façon  que  sa  tête 
semble  reposer  sur  la  nuque  ;  en  marchant  il  porte  souvent  le  cou  en 
forme  d'S,  et  quand  il  est  excité,  il  gonfle  tout  son  plumage,  hérisse 
les  plumes  de  la  tête  et  du  cou  et  se  tient  prêt  à  l'attaque  ;  s'il  a  été 
blessé  et  qu'il  ne  peut  plus  s'envoler,  il  se  couche  sur  le  dos  et  se 
défend  à  coups  de  bec  et  d'ongles  jusqu'à  son  dernier  souffle.  C'est 
d'ailleurs  un  oiseau  peu  sympathique  :  il  est  paresseux,  craintif  et 
méfiant  et  en  même  temps  rusé,  prudent  et  méchant.  «  Il  ne  vit  que 
pour  lui,  dit  Brehm,  et  semble  haïr  tous  les  autres  êtres;  les  animaux 
de  petite  taille  sont  pour  lui  des  proies  et  il  les  tue;  ceux  qui  sont 
trop  grands,  il  les  attaque  avec  fureur  quand  ils  l^pprochent  de  trop 
près.  Il  bat  en  retraite  devant  un  adversaire  plus  fort  que  lui  aussi 
longtemps  que  cela  est  possible,  mais  s'il  se  trouve  acculé,  poussé  à 
bout,  il  fond  sur  lui  avec  une  témérité  incroyable  et  lui  lance  des  coups 
de  bec  avec  autant  de  force  que  d'adresse.  Ses  coups  sont  dirigés  de 
préférence  contre  les  yeux  ;  l'homme  lui-même  est  obligé  de  se  tenir 
sur  ses  gardes  s'il  ne  veut  recevoir  de  graves  blessures.  La  captivité  ne 
modifie  pas  ses  instincts  :  les  jeunes  Butors  que  l'on  élève  présentent 
tous  les  défauts  de  leurs  semblables  en  liberté;  leurs  allures,  leurs 
postures  si  comiques  sont  incapables  d'apaiser  les  haines  qu'ils  ne 
tardent  pas  à  faire  naître.  » 

La  démarche  du  Butor  est  lente,  ses  pas  sont  mesurés  et  il  ne  court 
jamais;  ses  longs  doigts  lui  permettent  de  marcher  sur  la  vase  et  de 
saisir  plusieurs  roseaux  à  la  fois  quand  il  veut  y  grimper,  ce  qu'il  ne 
pourrait  faire  sur  un  roseau  unique,  trop  faible  pour  le  porter.  Il  ne 
sait  patauger  que  dans  les  eaux  peu  profondes,  vu  la  brièveté  de  ses 
tarses,  aussi  se  tient-il  le  plus  souvent  dans  des  endroits  vaseux,  sur 
des  souches  de  roseaux  ou  sur  des  herbages  flottants  ;  sa  place  favorite 
est  toujours  dans  le  touffu  des  roseaux,  ce  qui  l'oblige,  quand  il  veut 
s'envoler,  d'en  saisir  quelques-uns  et  de  grimper  jusqu'à  leur  sommet 
afin  d'avoir  la  place  nécessaire  pour  déployer  ses  ailes.  Il  est  rare  de 
rencontrer  plus  d'un  couple  de  Butors  dans  un  même  étang;  ce  n'est 
que  dans  les  marais  et  les  étangs  d'une  grande  étendue  qu'on  peut  en 
voir  plusieurs. 

Le  vol  de  cet  oiseau  ressemble  assez  à  celui  d'un  grand  Hibou,  et, 


-  349  - 

comme  le  vol  de  ce  dernier,  il  est  silencieux,  mais  lent  et  maladroit 
en  apparence  ;  l'oiseau  bat  nonchalamment  ses  grandes  et  larges  ailes, 
et  ce  n'est  qu'au  moment  de  s'élever  dans  l'air  que  les  coups  d'ailes  se 
précipitent  un  peu.  Il  ne  s'élève  dans  les  hautes  régions  de  l'atmos- 
phère que  pendant  la  nuit  et  après  avoir  décrit  quelques  spirales  en 
voletant  ;  il  descend  de  la  même  manière  jusqu'au  niveau  des  roseaux, 
puis  il  ferme  les  ailes  et  se  laisse  choir  verticalement  ;  pendant  le  jour 
il  ne  fait  que  raser  le  sommet  des  roseaux  pour  se  porter  d'un  endroit 
à  l'autre,  et  cela  seulement  quand  c'est  nécessaire  à  sa  sécurité. 

Son  manque  de  sociabilité  est  proverbiale  ;  il  ne  supporte  dans  sou 
voisinage  aucun  autre  couple  de  son  espèce,  et  les  autres  oiseaux  qui 
ont  l'imprudence  de  s'en  approcher,  ne  tardent  guère  à  en  subir  les 
brutalités. 

Le  cri  d'appel  du  Butor  est  rauque  et  retentissant  et  ressemble  à 
celui  du  Corbeau  ;  on  peut  le  rendre  par  krat  ou  kraou.  Pendant  la 
reproduction,  le  mâle  fait  souvent  entendre  des  beuglements  formi- 
dables qui  ressemblent  à  ceux  du  bœuf,  et  que  Naumann  rend  par 
ou  u,  uproumb,  uproumb,  uproumb.  Quelquefois,  mais  rarement,  le 
proumb  est  suivi  de  bouh.  Quand  on  est  près,  on  perçoit  un  autre 
bruit, analogue  à  celui  qu'on  produirait  en  frappant  l'eau  avec  un  bâton. 
Le  Butor  commence  ses  beuglements  au  crépuscule  et  les  prolonge 
jusqu'à  l'aurore,  ne  s'interrompant  que  lorsqu'il  est  fatigué.  Naumann 
s'est  donné  beaucoup  de  peine  pour  découvrir  la  cause  de  ces  beugle- 
ments, mais  sans  y  parvenir.  Le  comte  Wodzicki  fut  plus  heureux; 
il  eut  la  patience  de  rester  des  heures  entières  dans  l'eau,  immobile 
comme  une  statue,  pour  observer  un  couple  de  Butors.  C'est  long- 
temps avant  la  ponte  que  le  mâle  fait  entendre  ses  beuglements,  qui 
forment  son  chant  d'amour  ;  dans  le  principe,  il  les  pousse  non  seule- 
ment la  nuit  mais  aussi  le  jour,  se  taisant  dès  qu'il  soupçonne  qu'on 
l'observe.  «  Le  mâle  était  là,  dit  Wodzicki,  debout  sur  ses  deux  pattes, 
le  corps  horizontal,  le  bec  dans  l'eau.  Au  moment  où  les  beuglements 
se  faisaient  entendre, l'eau  rejaillissait  de  tous  côtés.  Après  que  l'oiseau 
eut  lancé  quelques  notes,  j'entendis  entin  le  lo  signalé  par  Naumann  ; 
le  Butor  releva  la  tête,  la  lança  en  arrière,  puis  enfonça  rapidement 
le  bec  dans  l'eau,  et  les  beuglements  commencèrent  avec  une  telle 
violence  que  j'en  fus  effrayé.  Un  fait  m'était  prouvé  :  ces  notes,  hautes 
au  début,  l'oiseau  ne  les  fait  entendre  que  quand  il  a  son  bec  plein 
d'eau  et  qu'il  lance  cette  eau  avec  beaucoup  de  force.  La  musique 
continua,  mais  le  Butor  ne  rejeta  plus  le  cou  en  arrière,  et  je  n'entendis 


—  350  — 

plus  ces  notes  élevées.  Il  semble  donc  que  ce  cri  soit  l'expression  de  sa 
plus  grande  ardeur,  et  qu'il  ne  le  répète  plus,  une  fois  ses  désirs  satis- 
faits. Après  quelques  accords,  il  lève  la  tête  et  regarde  prudemment 

de  tous  côtés Au  moment  des  amours,  le  Butor  étoile  ne  se  tient 

pas  au  plus  épais  du  fourré  de  roseaux,  il  cherche,  au  contraire,  des 
endroits  découverts  mais  de  peu  d'étendue  ;  il  faut  que  la  femelle  puisse 
le  voir  et  l'admirer.  Le  bruit,  comparable  à  celui  qu'on  fait  en  frappant 
l'eau  avec  un  bâton,  est  produit  par  le  mâle  qui,  au  moment  où  il 
lance  ses  notes  hautes,  frappe  l'eau  deux  ou  trois  fois  de  son  bec  avant 
de  l'y  enfoncer.  D'autres  bruits,  bruits  aquatiques,  s'il  m'est  permis 
de  m'exprimer  ainsi,  sont  produits  par  la  chute  des  gouttelettes  d'eau 
qui  sont  restées  adhérentes  à  son  bec.  Le  dernier  son,  un  houh  étouffé, 
s'entend  quand  l'oiseau,  en  retirant  le  bec,  rejette  au  dehors  l'eau 
qui  le  remplissait.  » 

La  nourriture  de  cet  oiseau  se  compose  principalement  de  poissons 
et  de  leur  frai;  il  prend  également  des  grenouilles,  des  têtards,  des 
mulots,  des  insectes  et  des  larves  aquatiques,  des  annélides,  etc. 

Reproduction.  —  Le  Butor  niche  dans  les  roseaux  et  dans  un 
endroit  des  plus  inaccessibles,  mais  il  trahit  presque  toujours  par  ses 
cris  la  présence  de  sa  couvée.  Le  nid  est  ordinairement  placé  sur  de 
vieilles  souches  de  roseaux  et  au-dessus  de  la  surface  de  l'eau,  où  il 
flotte  quelquefois,  s'élevant  et  s'abaissant  en  même  temps  que  le 
niveau  de  l'eau  ;  il  n'est  cependant  pas  exposé  à  aller  à  la  dérive,  car 
il  est  toujours  fixé  aux  roseaux  voisins.  Parfois  aussi,  il  repose  sur 
un  petit  îlot  ou  sur  un  tas  d'herbages,  mais  toujours  au  milieu  des 
roseaux.  Sa  structure  varie  d'après  l'emplacement  :  tantôt  c'est  une 
grande  masse  informe  composée  de  divers  matériaux,  tantôt  il  est 
plus  petit,  mieux  soigné,  arrondi,  plus  ou  moins  aplati  et  formé  de 
bûchettes,  de  roseaux  et  de  joncs  secs,  et  garni  à  l'intérieur  d'herbes 
et  de  feuilles  sèches. 

La  ponte  a  lieu  dans  la  seconde  quinzaine  de  mai  ou  dans  le  cou- 
rant de  juin,  suivant  la  contrée,  et  se  compose  de  trois  à  cinq  oeufs  à 
coquille  assez  mince,  d'un  gris  fauve  uniforme.  Ils  mesurent  environ 
54  millim,  sur  38. 

La  femelle  couve  seule  et  avec  ardeur  durant  vingt-un  à  vingt-trois 
jours;  pendant  ce  temps,  le  mâle  pourvoit  à  sa  subsistance  et  cherche 
à  la  distraire  par  ses  beuglements.  La  mère  témoigne  beaucoup  de 
sollicitude  à  ses  petits  et  le  mâle  aide  à  les  nourrir.  Dans  les  localités 
où  il    ne  sont  pas  dérangés,  les  jeunes  séjournent  longtemps  dans 


—  351  — 

le  nid  ;  mais  quand  il  sont  troublés,  ils  le  quittent  plus  tôt  pour 
aller  se  cacher  dans  les  roseaux  où  ils  se  tiennent  cramponnés  aux 
tiges. 

OËNRE  CXXXVI 

BIHOREAU.  —  NYCTICORAX. 

Ardea,  Briss.  et  auct.  plur. 

Ntcticorax,  Forst.  Syn.  cat.  Br.  J5.,  p.  59  (1817). 
Nyctiardea,  Swains.  Classif.  B.  Il,  p.  355  (1837). 
Ntcterodius,  Macg.  Man.  Brit.  B.  II,  p.  127  (1842). 
ScoTAEUs,  Heugl.  Syst.  Uebers.  p.  59  (1856). 

Car.  —  Bec  de  la  longueur  de  la  tête,  épais,  comprimé  latéralement,  à 
arête  recourbée  vers  le  bout  ;  sillons  nasaux  profonds  ;  yeux  grands  ;  nuque 
ornée  de  longues  plumes  subulées  ;  cou  assez  court;  ailes  sub-obtuses; 
queue  courte,  à  douze  rectrices;  jambes  aux  trois  quarts  emplumées,  la  partie 
nue  réticulée  ;  tarses  de  la  longueur  du  doigt  médian  ou  un  peu  plus  courts, 
scutellés  en  avant,  réticulés  en  arrière  ;  doigt  médian  réuni  à  Texterne  par 
une  courte  membrane  qui  s'étend  jusqu'à  la  première  articulation. 

Ilab.  —  Parties  chaudes  et  tempérées  des  cinq  parties  du  monde. 

238.  —  Le  Bihoreau  d'Europe. 
NYCTICORAX  GRISEUS,  Gray  ex  Briss. 

(PL   237). 

Ardea  grisea,  A.  mexicana  cristata,  A.  botaurus  naevius,  A.  nycticorax,  Briss, 

Onnth.  V,  pp.  411,  412,  462,  493  (1760). 
Ardea  kwakwa  et  A.  ferruginea,  Gmel.  Nov.  Comm.  Petrop.  XV,  pp.  452,  456 

(1771). 
Ardea  CYANOCEPHALA,  Molina,  Sagg.  Slor.  Nat.  Chili,  p.  344  (1782). 
Ardea  naevia,  Bodd.  Tabl.  PI.  enl.  p.  56,  n"  939  (1783). 
Ardea  jamaicensis,  A.  hoactli,  A.  g-^rdeni,  A.  maculata,  Gmel.  Syst.  nat.  pp.  625. 

630,645(1788). 
Nycticorax  infaustus,  Forst.  Syn.  Cal.  Br.  B.  p.  59  (1817). 
Nycticorax  europ/eus,  Steph.,  Shaws  Gen.  Zool.  XI,  p.  609  (1819). 
Ardea  SEXSETACEA  et  A.TAYAZAGUiRA,  Vieill.  Tabl.encyc'.mèth.  111,  p.  1130-31  (1823). 
Nycticorax  orientalis,  N.  badius,  N.  meridionalls,  Brehin,  Isis,  1830,  p.  988. 
Nycticorax  gardenii,  Jard.  Wits.  Am.  orn.  III,  p.  5  (1832). 

Nycticorax  vulgaris  et  N.  brevihes,  Heinpr.  Elir.  Synib.phys.  Aves,  fol.  m.  (1833). 
Ardea  discoks,  Nutt.  Man.  urn.  U.  S.  II,  p.  54  ^1834). 

NVCTIAKDEA  BUROI'.KA,  SwaillS.  Cl'UiSif.  B.  II,  p.  355  (1837j. 

Nycticorax  americanu.s,  Bonap.  Comp.  lisi.  B.  p.  48(1838). 
Nycticorax  ardeola,  Tem.  Man.  (TOrn.  I\',  p.  384  (1840). 
Nycterodius  nycticorax,  Macjj'.  Man.^Brit.  B.  U,  p.  127  (1842). 


-  352  — 

Nycticorax  griseus  et  N.  n^yius,  Gray,  Geti.  B.  III,  p.  558  (1847). 

ScoTAEUs  NYCTICORAX  et  S.  GUTTATus,  Heugl.  Sijst.  Uebers .  p.  59(1856). 

Nyctiardea  gardeni,  Baird,  B.  N.  Am.  p.  678  (1858). 

BoTAURUS  NYCTICORAX,  C.  F.  Dub.  PL  col.  Ois.  Belij.  III,  p.  205  (1860). 

Nyctiardea  nycticorax,  Swinh.  Proc.  Z.  S.  1871,  p.  413. 

Nycticorax  ^gyptius,  Gurn.  Anderss.  B.  of  Damara,  p.  293  (1872). 

Nyctiardea  grisea  Var.  N^via,  Allen,  Bull.  M.  C.  Z.  III,  p.  182  (1872). 

Nyctiardea  grisea  Yar.  Gardeni,  Ridgw.  An.  Lyc.  N-Y.  X.  p.  386  (1874). 

Die  nachtliche  Rohrdommel,  en  allemand. 

The  Night-Heron,  en  anglais. 

De  Nacht-Reiger,  en  flamand. 

Taille:  0M8  ;  ailes  0,29;  bec  0,075;  tarses  0,072. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  Dessus  de  la  tête,  partie  supérieure 
de  la  nuque,  manteau  et  scapulaires  d'un  noir  à  reflets  verdâtres  et  bleuâtres  ; 
à  l'occiput  trois  à  cinq  longues  plumes  blanches  subulées  ;  front,  joues,  raie 
sourcilière,  côtés  du  cou  et  de  la  poitrine  d'un  cendré'cîair  ;  gorge,  devant 
du  cou,  milieu  de  la  poitrine,  abdomen,  sous-caudales  et  jambes,  d'un  blanc 
assez  pur  ;  bas  du  dos,  ailes,  sus-caudales  et  queue  d'un  gris  cendré.  Bec 
noir,  jaunâtre  à  la  base  de  la  mandibule  inférieure  ;  lorums,  tour  des  yeux 
d'un  jaune  verdâtre  ;  iris  rouge;  pattes  dun  brun  rougeâtre  clair,  jaunâtres 
aux  articulations  et  sous  les  doigts. 

Jeune.  —  Point  de  plumes  subulées  à  la  nuque  ;  parties  supérieures  d'un 
brun  cendré  terne  avec  une  strie  blanchâtre  au  centre  des  plumes,  et  les  cou- 
vertures des  ailes  avec  une  grande  tache  arrondie  blanchâtre  à  leur  extré- 
mité ;  rémiges  cendrées,  avec  une  tache  blanchâtre  à  leur  extrémité  ;  gorge 
blanche  ;  parties  inférieures  d'un  brun  cendré  clair,  avec  une  longue  mèche 
blanche  au  centre  des  plumes  ;  sous-caudales  blanches.  Bec  d'un  jaune  pâle, 
brunâtre  en  dessus  ;  iris  jaune  ;  pattes  d'un  vert  brunâtre,  les  articulations 
jaunes. 

Poussin.  —  Lorums,  région  périophtalmique,  derrière  du  cou  et  dessous 
des  ailes  nus,  jaunâtres  ;  dessus  de  la  tête  bien  couvert  de  tiges  barbelées  et 
rousses  à  la  base,  lihformes,  blanches  et  brillantes  dans  leur  plus  grande 
longueur,  atteignant  25  millimètres  et  formant  bien  la  huppe;  côtés  du  cou, 
manteau  et  dessus  des  ailes  d'un  brun  vineux  pâle  ;  ventre  et  cuisses  blancs  ; 
bec  jaune  avec  les  pointes  brunes  et  le  marteau  blanc  ;  pieds  d'un  jaune 
terne  ;  ongles  jaunes.  (J.  Vian). 

Hah.  —  Le  Bihoreau  est  répandu  dans  l'Europe  centrale  et  méri- 
dionale, en  Afrique,  en  Asie,  dans  l'Archipel  indien  et  en  Amérique. 
Il  ne  se  montre  que  très  accidentellement  au  nord  de  la  Baltique  :  un 
jeune  mâle  fut  pris  en  juillet  1870  aux  îles  Fœroé  près  de  Nordedhal 
dans  l'île  de  Stromoe  {Dresser),  et  en  1863,  une  jeune  femelle  a  été 


3o3  - 


tuée  dans  le  sud  de  la  Suède  [Sundstrôm).  Ses  apparitions  au  Dane- 
mark [CoUin]  et  dans  la  Russie  centrale  sont  très  irrégulières.  Il  est 
très  rare  aux  îles  Britanniques  :  plusieurs  captures  de  cette  espèce 
ont  été  faites  en  Angleterre,  surtout  dans  les  parties  méridionales  et 

fff^^ffffnP  orientales, ainsi  qu'en  Irlande,  et 
l'on  compte  également  trois  ou 
quatre  captures  en  Ecosse  {See- 
bohm).  En  Allemagne  cet  oiseau 
ne  se  montre  le  plus  souvent 
qu'isolément  et  irrégulièrement 
(Brehm),  cependant,  en  1863, 
Wicke  découvrit  une  colonie  de 
ces  Hérons  près  de  Gœttingue  ; 
il  est  ordinairement  rare  et  de  passage  irrégulier  en  Pologne,  mais  il 
y  a  des  années  où  il  est  assez  commun  en  automne  [Taczanoioski). 
En  Russie  il  habite,  en  été,  la  Crimée,  le  Caucase,  la  partie  méridio- 
nale de  la  région  du  Tchernozem  (les  vallées  des  grands  Heuves),  la 
région  Aralo-Caspienne,  le  Tian-Chan  et  la  Songarie  russe  [Bogda- 
now).  Il  est  surtout  abondant  dans  les  provinces  Danubiennes  et  sur 
1(3S  bords  de  la  mer  Noire  et  de  la  mer  Caspienne  ;  il  paraît  être  assez 
répandu  en  HoWdinàe  (Schlêgel),  mais  il  est  rare  et  de  passage  irrégu- 
lier en  Belgique.  Dans  l'Europe  méridionale,  il  est  plus  ou  moins 
commun  partout  où  il  y  a  des  eaux,  qui  lui  conviennent,  soit  en  été, 
soit  à  l'époque  des  passages,  et  il  niche  dans  beaucoup  de  localités. 
Suivant  M.  Giglioli,  il  serait  sédentaire  dans  certaines  parties  de 
l'Italie. 

Cette  espèce  habite  également  toute  l'Afrique,  où  elle  niche  dans 
beaucoup  d'endroits,  et  elle  n'est  même  pas  rare  à  Madagascar 
{Grandidier).  A  l'Est  on  la  rencontre  dans  tout  le  centre  et  le  sud  de 
l'Asie  jusqu'à  Ceylan,  l'Indo-Chine  et  le  Japon  {Siebold).  Elle  est 
commune  en  Chine,  où  elle  établit  ses  héronnières  sur  les  grands 
arbres  jusque  dans  l'intérieur  de  la  ville  de  Pékin  {David).  Sa  présence 
a  également  été  signalée  à  Formose  {Swinhoé),  aux  Philippines 
{Steere),  à  Java,  à  Bornéo,  à  Célèbes  [Schlégel)  et  à  Céram  {de  Heu- 
glin). 

Le  Bihoreau  est  aussi  très  répandu  en  Amérique  :  on  le  rencontre, 
en  été,  depuis  les  Etats-Unis  et  le  Nouveaii-Bruns\vick,et  il  hiverne 
dans  les  Etats  du  Sud,  au  Mexique,  dans  l'Amérique  centrale  et  dans 
l'Amérique  méridionale  jusqu'au  Chili  {Danciti),  la  République  Argen- 

ToME  II.  —  1891  45 


—  354  — 

tine  {Frantzius)  et  le  Paraguay  {de  Heuglin);  on  l'observe  donc  en 
Amérique  du  50"  1.  N.  au  30°  1.  S.,  tandis  qu'il  se  montre  en  Europe 
jusqu'au  55*^  1.  N.  et  même  au  delà,  mais  en  Asie  il  ne  paraît  pas 
dépasser  le  48°  1.  N. 

Mœurs.  —  Le  Bihoreau  est  pour  l'Europe  un  oiseau  migrateur;  il 
apparaît  dans  les  contrées  du  Midi  en  avril  et  dans  celles  du  centre 
en  mai  ;  il  émigré  en  septembre  et  octobre,  généralement  par  individus 
isolés  ou  en  famille. 

Cet  oiseau  séjourne  de  préférence  dans  les  marécages  couverts  de 
roseaux  et  de  joncs,  se  trouvant  à  proximité  d'un  bois,  à  moins  qu'ils 
ne  soient  bordés  ou  entrecoupés  de  grands  arbres.  On  le  voit  aussi 
prés  des  cours  d'eau,  des  lacs  et  des  étangs  garnis  de  roseaux  et 
d'autres  herbages,  mais  il  n'aime  pas  les  eaux  qui  n'ont  pas  d'arbres 
dans  leur  voisinage.  Dans  les  contrées  où  les  marais  se  trouvent  loin 
des  parties  boisées,  il  passe  la  journée  dans  ces  deraières  et  se  rend  le 
soir  près  de  l'eau  ;  il  est  alors  parfois  obligé  de  franchir  un  grand 
espace  avant  d'atteindre  les  régions  aquatiques  où  il  peut  se  livrer  à 
la  pêche.  Sa  prédilection  pour  les  parties  boisées  provient  de  ce  qu'il 
passe  généralement  ses  journées  à  dormir  sur  les  arbres.  C'est  sur  une 
grosse  branche  de  hauteur  moyenne  qu'il  se  tient  habituellement 
caché  au  milieu  du  feuillage;  là  on  le  voit  le  cou  rentré,  la  tête  repo- 
sant entre  les  épaules  et  dans  une  immobilité  parfaite,  aussi  est-il 
difficile  de  l'apercevoir.  Jamais  le  Bihoreau  ne  se  montre  volontaire- 
ment à  découvert  pendant  le  jour,  mais  dès  que  le  soleil  a  quitté 
l'horizon,  notre  oiseau  reprend  ses  ébats  jusqu'à  l'aurore,  car  il  est 
essentiellement  nocturne. 

Il  est  plus  sociable  que  la  plupart  des  autres  Hérons,  et  dans  les 
pays  où  l'espèce  est  commune,  on  les  voit  par  bandes  composées  d'une 
centaine  d'individus  et  plus.  Il  se  rencontre  souvent  avec  des  Aigrettes 
et  autres  Hérons,  mais  il  ne  s'en  inquiète  pas.  Quand  la  nuit  est 
tombée,  le  Bihoreau  se  montre  vif^  actif  et  prudent;  il  évite  l'homme 
avec  crainte,  et  s'il  a  été  chassé,  il  devient  fort  méfiant.  «  Au  crépus- 
cule, dit  Brehm,  les  oiseaux  endormis  se  réveillent,  sautent  avec 
agilité  d'une  branche  à  l'autre,  gagnent  peu  à  peu  la  cime  de  l'arbre, 
et  tout  à  coup,  au  milieu  de  cris  ou  plutôt  de  croassements,  toute  la 
bande  s'envole  et  se  dirige  vers  un  marais  voisin.  Une  bande  se  joint 
à  l'autre,  et  l'on  voit  ainsi  réunis  des  milliers  d'oiseaux,  sans  que  l'on 
sache  d'où  ils  viennent.  Un  tel  spectacle  se  montre  non  seulement  en 
Egypte,   mais  encore  dans  le   centre  de  l'Afrique.  »  Pendant  leur 


sommeil  on  peut  souvent  approcher  jusqu'au  pied  de  l'arbre. sur 
lequel  ils  se  tiennent  perchés,  mais  alors  ils  s'envolent  vers  d'autres 
arbres  ou  se  jettent  dans  les  roseaux  où  il  n'est  pas  facile  de  les 
déloger. 

Les  mouvements  du  Bihoreau  sont  lents  et  ses  pas  mesurés,  ce  qui 
ne  l'empêche  pas  d'être  adroit  et  agile,  et  de  se  mouvoir  avec  facilité 
au  milieu  des  branches  et  des  roseaux.  Son  vol  est  silencieux  et  s'exé- 
cute par  des  coups  d'ailes  relativement  rapides,  et  l'oiseau  plane  un 
instant  avant  de  se  poser.  En  volant,  il  tient  le  cou  replié  et  les  pattes 
étendues  en  arrière.  Dans  l'obscurité  on  le  distingue  facilement  du 
Butor  étoile,  par  ses  formes  plus  sveltes,  ses  ailes  plus  étroites  et  ses 
mouvements  plus  rapides.  Sa  voix  est  rauque  et  retentissante  et  rap- 
pelle le  croassement  du  Corbeau  ;  son  cri  ressemble  à  koau,  Jioa, 
kiouak;  son  cii  d'alarme  est  ka-ioak.  C'est  en  général  un  oiseau 
silencieux,  ne  se  faisant  entendre  que  la  nuit  et  en  volant,  et  surtout 
à  l'époque  de  la  reproduction. 

Il  se  nourrit  comme  les  précédents  de  petits  poissons, de  grenouilles, 
de  têtards,  de  frai,  de  lézards,  de  crustacés  d'eau  douce,  d'insectes  et 
de  larves  aquatiques,  de  vers,  de  sangsues  et  de  mollusques.  11  est  à 
remarquer  que  quand  le  Bihoreau  a  des  jeunes,  il  est  forcé  de  pêcher 
aussi  pendant  le  jour,  afin  d'apaiser  la  faim  insatiable  de  ses 
petits. 

Reproduction.  —  La  saison  des  amours  varie  suivant  le  pays  :  dans 
la  vallée  du  Danube  l'oiseau  niche  en  mai  et  en  juin;  le  capitaine 
Legge  trouva  des  œufs  à  Ceylan  en  mars  ;  au  Cachemir,  Brooks  l'a 
vu  nicher  en  avril  et  mai,  mais  dans  les  plaines  du  nord-ouest  de 
rinde,  Hume  trouva  des  œufs  de  cet  oiseau  jusqu'au  21  août.  Ce 
hérodien  se  reproduit  assez  régulièrement  en  Hollande,  rarement  en 
Allemagne  mais  plus  souvent  qu'on  ne  le  croit  généralement;  le  mar- 
quis de  Wavrin  m'informe  qu'un  couple  a  niché  en  Belgique  près  de 
Thisselt  en  1885.  Dans  les  héronnières  de  la  Hongrie,  le  Bihoreau 
est  toujours  l'espèce  la  plus  nombreuse;  ainsi,  sur  un  même  saule, 
Baldamus  compta  onze  niils  de  Bihoreaux  sur  seize. 

Le  Bihoreau  niche  donc  en  société  sur  les  arbres  et  dans  les  héron- 
nières formées  par  diverses  espèces  de  Hérons.  Le  nid  est  placé  sur 
iHK!  biCiucation  à  liaulrMir  moyenne,  mais  jamais  au  somnuM  de  l'arbre. 
Il  est  grossiorenicnt  construit  à  l'aide  de  bois  mort  recouvert  de 
feuilles  et  d'herbes  sèches;  il  ressemble  du  r(\sle  au  nid  du  Héron 
cendré  mais  il  est  plus  petit.  La  plupart  des  auteurs  ([iii  ont  observé 


-  356  — 

cet  oiseau,  sont  d'accord  à  dire  qu'il  niche  sur  les  arbres,  mais  il 
paraît  qu'il  y  a  des  exceptions.  En  Russie,  selon  de  Nordmann,  il 
établit  son  nid  tantôt  sur  un  saule,  tantôt  sur  des  joncs  et  des  roseaux 
plies;  dans  le  midi  de  la  France,  disent  Jaubert  et  Barthélémy,  il  le 
place  tantôt  à  terre,  tantôt  dans  les  trous  des  rochers,  sur  les  arbres 
ou  dans  les  buissons,  quelquefois  au  milieu  des  joncs.  —  La  ponte  est 
de  trois  à  cinq  oeufs  d'un  vert  bleuâtre  clair,  mais  ils  sont  plus  pâles 
que  ceux  du  Héron  cendré;  ils  mesurent  environ  47  millimètres 
sur  35. 

«  Quand  aucun  oiseau  de  proie  ne  vient  les  déranger,  dit  Balda- 
mus,  les  Bihoreaux  trouvent  assez  d'occasions  de  se  harceler  entre 
eux,  de  se  poursuivre  en  cfiant,  de  se  mettre  sur  la  défensive.  Ils 
prennent  les  postures  les  plus  singulières,  les  plus  comiques,  et  crient 
continuellement.  Une  femelle  qui  cherche  à  enlever  une  branche  à  un 
nid  voisin  et  qui  éprouve  de  la  résistance,  se  met  à^crier;  le  mâle  qui 
est  auprès  d'elle  profite  du  moment  pour  donner  à  son  voisin  un  coup 
de  bec  dans  les  pattes;  celui-ci  étale  ses  ailes,  ouvre  son  bec  et 
cherche  à  se  défendre;  son  agresseur  placé  au-dessous  de  lui,  le 
poursuit  de  branche  en  branche  jusqu'au  haut  de  l'arbre  ou  jusqu'à  ce 
qu'il  ait  abandonné  la  place.  La  disproportion  entre  les  efforts  de 
ces  oiseaux  et  les  maigres  résultats  qu'ils  obtiennent  est  vraiment 
comique  ;  ils  ont  le  bec  grand  ouvert,  poussent  sur  tous  les  tons  leurs 
cris  rauques,  leurs  yeux  injectés  de  sang  brillent  de  rage  et  de  fureur, 
leurs  ailes  se  lèvent  menaçantes,  ils  lancent  la  tête  en  avant  et  la 
retirent,  ils  se  démènent  de  tous  leurs  membres, redressent  et  rabattent 
leur  huppe  ;  on  dirait  qu'ils  vont  se  battre  à  mort,  et  c'est  à  peine  s'ils 
se  touchent,  encore  n'est-ce  que  du  bout  des  ailes,  jamais  avec  le  bec.» 

Swinhoe  a  fait  une  intéressante  observation  dans  une  héronnière 
établie  près  du  grand  temple  Honam  à  Canton,  en  Chine.  Il  se  fit 
apporter  trois  des  nids  qui  se  trouvaient  à  cet  endroit  :  deux  conte- 
naient des  oeufs,  le  troisième,  deux  poussins  et  un  oeuf.  A  en  juger  à 
leur  taille,  l'un  de  ces  oisillons  devait  être  né  au  moins  trois  jours 
avant  l'autre  ;  l'oeuf  contenait  un  poussin  en  vie  qui  n'aurait  pu  éclore 
que  deux  jours  après.  En  examinant  les  embryons  des  autres  œufs, 
Swinhoe  eut  la  conviction  que  la  différence  entre  ces  embryons 
devait  être  de  six  jours,  et  certainement  pas  moins  de  trois.  Il  en 
résulte  que  la  mère  doit  se  mettre  à  couver  dès  la  ponte  de  son  pre- 
mier œuf  et  sans  attendre  les  autres,  et  que  l'éclosion  de  ses  œufs 
n'a  lieu  que  successivement,  avec  quelques  jours  d'intervalle. 


-  357  — 

FAMILLE  DES  CICONIIDÉS 

Car.  —  Bec  long,  droit,  conique  ou  cunéiforme,  parfois  un  peu 
retroussé  vers  le  bout,  comprimé  vers  la  pointe,  fendu  jusqu'à  l'œil, 
à  mandibule  supérieure  convexe  à  la  base  ;  narines  basales,  placées 
dans  un  sillon  plus  ou  moins  apparent  ;  menton  nu  ;  une  partie  de  la 
face  plus  ou  moins  dénudée;  ailes  longues  et  larges;  queue  courte, 
arrondie,  formée  de  douze  rectrices  ;  partie  nue  des  jambes  et  tarses 
réticulés,, ces  derniers  robustes;  doigts  courts,  les  antérieurs  reliés 
par  une  palmature  qui  embrasse  la  première  phalange  du  médian  et 
de  l'externe  et  qui  est  moins  étendue  entre  le  médian  et  l'interne  ; 
pouce  assez  court  ;  ongles  épais,  échancrés,  sauf  le  médian. 

Hab.  —  Cette  famille  a  des  représentants  dans  toutes  les  parties 
du  monde,  mais  surtout  dans  la  zone  tropicale. 

Mœurs.  —  Les  oiseaux  qui  forment  cette  famille  préfèrent  généra- 
lement les  plaines  humides  aux  lieux  secs  et  élevés  ;  ils  recherchent 
les  forets,  car  la  plupart  aiment  de  passer  la  nuit  sur  les  arbres  ou 
dans  des  endroits  élevés,  et  quelques-uns  nichent  même  sur  les  toits 
des  habitations. Les  espèces  qui  habitent  le  Nord  émigrent  à  l'approche 
du  froid,  celles  qui  vivent  dans  les  pays  chauds  errent  à  certaines 
époques  à  travers  la  contrée. 

Ces  oiseaux  se  tiennent  droit,  le  cou  légèrement  replié  en  S  et 
marchent  avec  une  certaine  dignité  ;  leurs  longues  jambes  leur 
permettent  d'entrer  fort  avant  dans  l'eau,  mais  ils  ne  nagent  que 
quand  ils  y  sont  contraints  ;  ils  volent  avec  facilité,  planent 
fréquemment  et  s'élèvent  souvent  à  une  grande  hauteur.  Leur  voix 
est  une  sorte  de  sifflement,  mais  le  plus  souvent  ils  font  entendre 
un  claquement  du  bec. 

Ces  oiseaux  s'apprivoisent  avec  facilité.  Ils  sont  en  général  carni- 
vores et  insectivores  et  font  la  chasse  à  tous  les  animaux  plus  faibles 
qu'eux;  il  y  en  a  même  qui  vivent  de  charognes.  Ils  nichent  sur  les 
arbres,  sur  les  édifices  ou  sur  les  rochers. 

Tous  les  Ciconiidés  doivent  être  considérés  comme  des  oiseaux  utiles. 

GENRE  CXXXVII 

CIGO&NE.  —  CÏCOxMA. 

CicoNiA,  Rriss.  Ornitit.  V.  p.  365  (1700). 

Ardka,  part.  Lin.  5.  N.  I,  p.  2:^5  (ITOCi). 

Si'HENOHHYNCiius,  Hempp.  Ehreiib.  Symb.  phys.  av.  t.  2  (1832). 


!  unr^ 


-  358  — 

Melanopelargus  (Reichenb.)  Bonap.  Consp.  av.  II,  p.  105  (1857). 
Abdimia,  Bonap.  Co?tsp.  av.  II,  p.  106  (1857). 

Car.  —  Bec  très  robuste,  plus  long  que  la  tête,  droit,  pointu  ;  narines 
basales,  étroites,  oblongues,  percées  de  part  en  part;  partie  nue  de  la  face 
plus  ou  moins  chagrinée  ;  ailes  allongées,  amples,  sub-obtuses;  queue  courte, 
arrondie,  composée  de  douze  rectrices  ;  jambes  dénudées  sur  plus  de  la 
moitié  de  leur  étendue  ;  tarses  très  longs,  robustes,  réticulés;  pouce  court, 
mince  et  portant  en  partie  sur  le  sol  ;  ongles  courts,  larges  et  aplatis . 

Hab.  —  Ce  genre  est  représenté  dans  les  cinq  parties  du  monde. 

239.  —  La  Cigogne  blanche. 

CICONIA  ALBA,   Briss. 

(PI.  238). 

CicoNiA  ALBA,  Briss.  Ornith.  V.  p.  365  (1760)  et  auct.  plur, 

Ardea  CICONIA,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  235  (1766). 

CicoNiA  ALBESCENs,  NivEA  et  CANDIDA,  Brohm,  Isis.,  1830,  p.  988. 

CicoNiA  MAJOR,  Brehm,  Naumannia,  1855,  p.  289. 

CicoNiA  ALBA  var .  Major,  C.  azreth,  C.  alba  asiatica,  Severtz.  Turkest.  Jevotn.  pp. 

68,  145  (1873). 
CicoNiA  MYCTERioRHYNCHA,  Sevortz.  Joum.  f.  Om.  1875,  p.  182. 
CicoNiA  ALBA  t5ar.  Orientalis,  Severtz.  Stray  Feathers,  1885,  p.  431. 
Der  weisse  Storch,  en  allemand. 
The  white  Stork,  en  anglais. 
De  OoiEVAAR,  en  flamand. 

Taille  :  0™95  ;  ailes  0,59  ;  bec  0,18  ;  tarses  0,23. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  D'un  blanc  pur  ;  scapulaires,  grandes 
couvertures  et  rémiges  noires  ;  partie  nue  des  lorums  et  des  orbites  noire  ; 
peau  nue  du  menton  d'un  noir  rougeâtre.  Bec  rouge  à  pointe  jaune  ;  iris  brun  ; 
pattes  rouges.  —  La  femelle  est  légèrement  plus  petite  que  le  mâle. 

Jeune.  —  Noir  des  ailes  nuancé  de  brun  et  moiré  de  cendré,  surtout  sur 
les  barbes  externes  des  rémiges  secondaires.  Bec  et  pattes  d'un  rouge  plus 
pâle,  ces  dernières  tachées  de  noirâtre. 

Poussin.  —  Revêtu  d'un  duvet  blanc,  épais,  pas  très  long,  barbelé  et  lai- 
neux ;  bec  et  pattes  noirâtres,  mais  l'extrémité  de  la  mandibule  supérieure 
et  le  dessus  des  doigts  d'un  blanc  jaunâtre. 

Hab.  —  La  Cigogne  blanche  habite,  en  été,  la  majeure  partie  de 
l'Europe  jusqu'au  61°  1.  N.,  mais  elle  ne  niche  pas  au  delà  du  sud 
de  la  Suède  (JSilsson)  ;  elle  se  montre  accidentellement  dans  le  sud 
de  la  Finlande,  et  son  habitat  ne  s'étend  pas  à  l'Est  au  delà  des 


—  359  — 


parties  occidentales  de  la  Rusie.  Dans  le  midi  de  la  Norwège  elle  est 

généralement  de  passage  régulier 


par  petites  troupes  atteignant 
parfois  jusque  trente  individus, 
mais  elle  n'a  jamais  été  rencon- 
trée plus  au  nord  que  Bergen 
{Collelt).  En  Russie  on  la  ren- 
contre dans  les  parties  occiden- 
tales, mais  on  ne  la  voit  qu'acci- 
dentellement dans  le  nord  du 
gouvernement  de  St-Pétersbourg  {Bac/mer)  et  elle  ne  paraît  pas 
dépasser, à  l'Est,  la  vallée  du  Dnieper  {Bogdanow)  ;  elle  est  rare  en 
Crimée  et  n'y  niche  pas  [Kessley-),  mais  commune  au  Caucase  (Radde). 
Cet  oiseau  niche  ou  est  simplement  de  passage  dans  toute  l'Europe 
centrale  et  méridionale,  mais  il  est  rare  en  Angleterre,  où  on  ne 
le  voit  qu'irrégulièrement  lors  des  passages  dans  les  comtés  du 
Sud-est  ;  il  visite  accidentellement  l'Ecosse  et  il  n'a  été  vu  qu'une 
seule  fois  en  Irlande,  en  1846  [Seebohm). 

La  Cigogne  ne  fait  que  passer  et  ne  séjourne  plus  dans  plusieurs 
paj'^s,  soit  parce  qu'elle  y  a  été  inquiétée  pendant  la  reproduction,  soit 
parce  qu'elle  a  été  effrayée  par  le  bruit  du  canon  et  des  fusillades  lors 
des  dernières  guerres  d'Italie  et  de  France.  Suivant  Degland, elle  nichait 
anciennement  à  Valenciennes,  à  Douai,  à  Cambrai,  à  Bergues  et 
en  d'autres  endroits  du  nord  de  la  France,  En  Espagne,  par  contre, 
elle  est  répandue  presque  partout  pendant  la  belle  saison  {Saunders). 
En  Hollande,  où  elle  est  également  protégée,  elle  est  généralement 
commune  ;  Schlégel  dit  cependant,  que  depuis  que  ces  oiseaux  ont  été 
surpris  à  leur  retour  par-un  ouragan  qui  lus  a  jetés  sur  la  côte  occi- 
dentale de  la  France  (vers  1839),  où  ils  ont  péri  en  grande  partie, 
ils  n'ont  plus  jamais  été  aussi  abondants  dans  les  Pays-Bas.  En  Grèce 
les  Cigognes  se  répandent  surtout  dans  les  villes  qui  possèdent  d'an- 
ciennes ruines  :  «  partout,  dit  Lindermayer,  où  la  domination  turque 
s'est  prolongée,  où  la  révolution  grecque  n'a  pas  tout  nivelé,  les 
Cigognes  demeurent  en  possession  de  leurs  palais  ;  c'est  ce  qui 
arrive,  par  exemple,  dans  l'ile  Eubée.  Mais  là  où,  dès  les  premiers 
jours  de  la  révolution,  s'est  établi  l'hellénisme,  là  aussi  les  Cigognes 
ont  disparu  ;  il  n'en  existe  plus  à  Nauplie,  à  Fatras,  à  Syra,  à  Athè- 
nes. »  En  Turquie  ces  oiseaux  sont  au  contraire  très  communs  {Elices 
et  Bucklei/);  il  en  est  de  même  dans  la  Dobrodja  et  la  Bulgarie,  où 


—  360  — 

l'on  voit  nicher  dans  chaque  village  un  couple  ou  deux  [Alléon). 
En  Belgique  c'est  un  simple  oiseau  de  passage  ne  s'arretant  que  peu 
ou  point  dans  le  pays. 

A  l'Est,  on  rencontre  cet  oiseau  en  Palestine  [Tristram),  en  Syrie, 
en  Asie  Mineure  (Kruper),  en  Perse  {Blanford),  en  Turkestan 
{Severtzow),  dans  le  Tian-Chan  occidental,  le  Boukhara  {Bogdanow), 
la  vallée  supérieure  de  l'Irtysch  (Karelin),  et  il  hiverne  dans  l'Inde, 
mais  rarement  dans  le  sud  de  ce  pays  {Jerdon,  Blyth).  La  Gigogne 
niche  également  dans  le  nord  et  le  nord-est  de  l'Afrique  ;  de  Heuglin 
a  rencontré  des  troupes  de  ces  oiseaux  en  Egypte,  en  Nubie  et  en 
Arabie  pendant  les  mois  d'avril,  de  mai,  juin,  juillet  et  septembre,  et 
particulièrement  dans  les  prairies  sèches  et  les  champs  en  friche.  Elle 
hiverne  en  Sénégambie  {Lichtenstein),  à  Damara  {Andersson),  dans  la 
colonie  du  Cap  [Layard),  à  Natal  [Gurney)  et  dans  toute  l'Afrique 
orientale  jusqu'au  Soudan  {Seebohm).  Elle  est  probablement  séden- 
taire dans  le  midi  de  l'Afrique  où  elle  niche.  Dans  l'Asie  orientale  et 
au  Japon,  habite  une  Cigogne  très  voisine  de  la  nôtre  {Ciconia 
boyciana),  qui  n'en  diffère  que  par  son  bec  noir  et  par  les  parties  nues 
des  lorums  et  des  orbites  d'un  beau  rouge  vermillon. 

Mœurs.  —  La  Cigogne  blanche  est  donc  un  oiseau  migrateur  qui 
quitte  les  pays  du  Nord  au  commencement  du  mois  d'août.  A  cette 
époque,  tous  les  individus  d'un  môme  canton  se  rassemblent  dans  une 
prairie  marécageuse,  et  leur  nombre  augmente  de  jour  en  jour. 
Enfin,  le  moment  du  départ  est  arrivé,  toute  la  bande  s'élève  dans 
les  airs  comme  à  un  signal  donné,  décrit  quelques  cercles  au-dessus 
de  la  prairie  qu'elle  abandonne  et  se  dirige  à  lire-d'aile  vers  la  région 
des  nuages  où  on  la  perd  bientôt  de  vue.  11  paraît  que  les  individus 
incapables  d'entreprendre  le  voyage  sont  parfois  tués  par  les  autres. 
Les  Cigognes  qui  partent  les  premières  s'arrêtent  souvent  plusieurs 
jours  dans  des  lieux  déterminés, afin  d'y  attendre  l'arrivée  de  nouvelles 
troupes.  On  connaît  des  marécages  où,  chaque  année,  se  réunissent 
des  centaines  de  ces  oiseaux,  et  qui  disparaissent  un  beau  matin  subi- 
tement comme  ils  sont  venus.  Le  voyage  se  fait  toujours  pendant  le 
jour,  et  toute  la  bande  se  repose  la  nuit,  le  plus  souvent  sur  les  arbres 
d'une  forêt.  Ces  oiseaux  volent  à  une  grande  hauteur,  sans  battre 
visiblement  des  ailes,  et  en  formant  de  longues  files  irrégulières. 
Naumann  parle  de  vols  de  Cigognes  de  deux  mille  à  cinq  mille  sujets  ; 
Brehm  dit  avoir  vu  en  Afrique  des  bandes  parfois  si  nombreuses, 
qu'elles  couvraient  entièrement  de  grandes  surfaces  et  qu'elles  rem- 


—  361  — 

plissaient  tout   le   champ  visuel  au   moment  où  elles   s'envolaient. 

Les  passages  se  poursuivent  jusqu'en  septembre.  Au  printemps,  on 
les  voit  revenir  dès  les  premiers  jours  de  mars,  et  les  bandes  se 
succèdent  jusqu'en  avril.  Quand  un  couple  arrive  près  de  l'endroit  où 
il  a  habité  l'été  précédent,  il  se  détache  de  la  bande  et  on  le  voit 
descendre  d'une  hauteur  considérable  en  décrivant  d'élégantes 
spirales,  se  poser  sur  le  toit  de  son  ancienne  demeure  et  se  montrer 
aussi  familier  avec  les  lieux  comme  s'il  ne  les  avait  jamais  quittés. 

La  Cigogne  vit  dans  les  plaines  basses  entrecoupées  de  cours 
d'eau  et  de  marécages  ;  elle  évite  les  endroits  secs  et  les  pays  monta- 
gneux, visite  souvent  les  champs  et  montre  une  grande  prédilection 
pour  les  lieux  habités  par  l'homme.  Partout  où  elle  est  bien  accueillie, 
elle  niche  sur  les  toits  des  maisons  et  des  bâtiments  élevés;  ailleurs, 
elle  construit  son  nid  sur  les  arbres  d'une  forêt  non  éloignée  de  l'eau. 
On  la  voit  du  reste  souvent  perchée  sur  une  forte  branche  décou- 
verte, car  elle  ne  se  cache  ni  dans  le  feuillage,  ni  dans  les  roseaux  et 
les  hautes  herbes  des  marais.  Elle  a  dans  tout  son  être  quelque  chose 
de  digne,  et  ne  prend  jamais  les  poses  singulières  et  ridicules  des 
Hérons;  elle  tient  ordinairement  le  corps  assez  relevé,  le  cou  légère- 
ment en  forme  d'S  et  la  tête  un  peu  inclinée.  Sa  démarche  est  lente  et 
mesurée,  et  l'oiseau  parcourt  avec  gravité  les  prés  et  les  champs  ;  elle 
entre  souvent  dans  l'eau  aussi  profondément  que  le  lui  permettent  ses 
longues  jambes.  Son  vol  ressemble  à  celui  des  Grues,  mais  il  a  lieu 
avec  moins  de  battements  d'ailes  :  il  est  assez  lent,  mais  beau, 
majestueux  et  remarquable  parles  spirales  élégantes  que  l'oiseau  décrit 
dans  les  airs.  La  Cigogne  ne  se  fatigue  guère  à  voler,  car  elle  sait  à 
merveille  profiter  des  courants  aériens  ;  elle  plane  souvent,  et  tout  en 
planant,  elle  peut  monter  ou  descendre,  grâce  à  la  facilité  avec 
laquelle  elle  dirige  sa  queue  qui  lui  sert  de  gouvernail.  En  volant 
elle  tient  le  cou  droit  devant  elle  et  les  pattes  dirigées  en  arrière,  le 
tout  presque  dans  la  même  ligne. 

La  confiance  que  la  Cigogne  témoigne  à  l'homme  est  plutôt  indivi- 
dueP.e  que  générale,  car  elle  ne  se  fie  pas  à  tout  le  monde,  il  faut 
qu'on  lui  ait  donné  des  preuves  de  bienveillance.  En  Allemagne,  en 
Hollande,  dans  les  pays  mahométans,  elle  est  presque  partout  bien 
accueillie  et  parfois  même  vénérée  ;  dans  beaucoup  d'endroits  les 
habitants  facilitent  l'installation  de  son  nid  :  tantôt  c'est  une  vieille 
roue  de  voiture  fixée  à  plat  sur  un  bâtiment,  tantôt  c'est  un  panier, 
une  caisse  ou  simplement  des  planches  c  m  attache  sur  le  toit  des 
ToMK  II.  —  1891  46 


—  362  - 

maisons  et  qui  attirent  les  Cigognes,  complètement  rassurées  par  ces 
bons  procédés.  Loin  de  son  nid,  c'est  un  oiseau  prudent,  méHant  et 
qui  ne  se  laisse  guère  approcher  à  portée  de  fusil  par  un  chasseur  ; 
cette  méfiance  augmente  encore  pendant  les  migrations,  et  même 
quand  quelques  sujets  seulement  se  trouvent  réunis.  En  Afrique,  la 
Cigogne  fuit  plus  vite  à  l'approche  d'un  blanc  que  d'un  nègre,  parce 
qu'elle  sait  qu'elle  a  peu  à  craindre  de  ce  dernier. 

«  La  Cigogne,  dit  Naumann,  possède  beaucoup  de  qualités  intellec- 
tuelles et  elle  est  très  intelligente.  Elle  sait  se  faire  aux  gens  et  se 
plier  aux  circonstances,  et  surpasse  en  cela  presque  tous  les  autres 
oiseaux  ;  elle  sait  immédiatement  apprécier  dans  quelle  disposition 
sont  à  son  égard  les  habitants  de  tel  ou  tel  endroit,  et  remarque 
bientôt  si  on  la  tolère,  si  sa  présence  est  agréable.  Quelques  jours 
auparavant,  elle  était  prudente,  craintive,  fuyait  l'homme  et  se  défiait 
de  tout  ;  maintenant  elle  voit  une  roue  installéé^sur  un  toit,  sur  un 
arbre,  qui  l'invite  à  y  construire  son  nid  ;  elle  perd  alors  toute 
crainte,  en  prend  possession,  et  devient  bientôt  assez  confiante  pour 
se  laisser  observer  de  près.  Elle  apprend  à  connaître  son  hôte, les  per- 
sonnes qui  lui  veulent  du  bien  de  celles  qui  pourraient  lui  être  dan- 
gereuses ;  elle  sait  si  on  l'aime,  si  on  la  voit  avec  plaisir  ou  si  on  la 
regarde  avec  inditférence  ;  elle  observe  tout,  et  jamais  son  expérience 
n'est  en  défaut.  » 

Brehm  père  raconte  que,  n'ayant  pas  encore  cette  espèce  dans  sa 
collection,  il  voulait  tuer  la  femelle  d'un  couple  qui  avait  niché  sur  un 
un  chêne.  «  Quand  je  m'approchai,  dit-il,  elle  quitta  le  nid;  c'était 
pourtant  la  nuit,  au  clair  de  lune,  et  elle  ne  revint  que  longtemps 
après.  Mais  mon  fusil  rata  (c'était  encore  du  temps  des  fusils  à  silex); 
néanmoins,  les  étincelles  produites  par  le  choc  de  la  pierre  firent 
une  telle  impression  sur  la  Cigogne,  que  je  l'attendis  en  vain  jusqu'à 
onze  heures  du  soir,  bien  que  j'eusse  pris  le  soin  de  me  cacher  parfai- 
tement. Deux  années  après,  cette  femelle  se  rappelait  encore  cette 
chasse  et  elle  ne  me  laissait  pas  approcher  à  soixante  pas  de  son  nid.» 
La  Cigogne  est  principalement  Carnivore  et  fait  la  chasse  à  tous  les 
animaux  dont  elle  peut  s'emparer  :  grenouilles,  lézards,  orvets,  ser- 
pents veuimeux  ou  non,  poissons,  jeunes  oiseaux,  petits  mammifères 
tels  que  mulots  et  taupes, insectes  divers  et  leurs  larves,  mollusques  et 
vers;  elle  tue  par  aversion  tous  les  crapauds  qu'elle  rencontre,  mais  ne 
les  mange  pas.  Avec  un  pareil  régime,  on  ne  peut  nier  qu'elle  occa- 
sionne des  préjudices;  elle  détruit  une  quantité  de  batraciens  utiles, 


-  363  — 

avale  des  poissons  longs  comme  la  main,  pille  les  nids  des  oiseaux 
qui  nichent  sur  le  sol  et  enlève  les  levrauts  à  leur  mère.  Mais  si  l'on 
considère,  d'autre  part,  les  services  qu'elle  rend  à  l'agriculture  en 
détruisant  des  quantités  énormes  de  petits  rongeurs,  en  poursuivant 
à  outrance  les  dangereuses  vipères  et  une  foule  de  petits  animaux 
malfaisants,  on  doit  reconnaître  que  les  dégâts  qu'elle  produit  sont 
bien  compensés.  Altum  lui-même,  tout  en  condamnant  la  Cigogne, 
nous  en  donne  une  preuve.  Il  raconte  en  effet  avec  force  détails,  qu'en 
août  1872,  une  grande  bande  de  Cigognes  séjourna  quelque  temps 
dans  l'arrondissement  de  Liepe.  Après  leur  départ,  on  trouva  à 
l'endroit  où  s'étaient  tenus  ces  oiseaux,  une  telle  quantité  de  pelotes 
formées  des  parties  non  digérées  et  régurgitées,  qu'elle  aurait  pu 
suffire  à  la  charge  d'un  grand  chariot  à  deux  chevaux!  Ces  pelotes 
mesuraient  jusqu'à  70  centim.  de  longueur,  55  de  largeur  et  30 
d'épaisseur.  Après  avoir  examiné  la  composition  d'un  grand  nombre 
d'entre  elles,  Altum  constata  qu'elles  étaient  formées  en  majeure 
partie  de  poils  de  campagnols  mélangés  à  des  débris  d'insectes  (1).  On 
comprend  quelle  quantité  énorme  de  campagnols  et  mulots  ces 
Cigognes  ont  dû  détruire,  pour  que  ce  qu'elles  aient  rejeté,  après 
digestion,  soit  encore  suffisant  pour  former  la  charge  d'un  grand 
chariot. 

«  La  Cigogne,  dit  Naumann,  n'est  pas  aussi  inoffensive  qu'elle  le 
paraît.  La  manière  dont  elle  se  nourrit  lui  fait  du  meurtre  une  habi- 
tude, et  elle  l'exerce  parfois  sur  des  sujets  de  son  espèce.  On  a  des 
exemples  que  des  Cigognes,  arrivant  d'autres  lieux,  se  précipitaient 
sur  dos  nids  de  leurs  semblables  pour  se  jeter  sur  les  petits  et  les 
égorger,  malgré  la  défense  énergique  des  parents,  et  qu'elles  répé- 
taient cette  cruauté  sur  plusieurs  nids  de  la  localité.  On  sait  qu'elles 
luent  leurs  semblables  malades  au  moment  de  l'émigration,  et  qu'elles 
tuent  aussi  les  sujets  captifs  qui  refusent  à  les  suivre  ou  qui  en  sont 
incapables.  Irrite-t-on  une  Cigogne  apprivoisée,  celle-ci  s'élance 
aussitôt  sur  son  adversaire;  un  individu  blessé  se  défend  jusqu'à  son 
dernier  souffle  en  donnant  de  violents  coups  de  bec, dirigés  surtout  vers 
les  yeux  du  chasseur  ou  des  chiens  qui  l'attaquent,  et  peut  ainsi  être 
très  dangereux.    » 

Le  même  auteur  dit  plus  loii^  :  «  Le  natiii'ol  dos  Cigognes  Idanches 
diffère  beaucoup  suivant  les  individus  ;  les  unes  sont  sociables  et  souf- 


(1)   \'i>v<'/  :  hu.  H.  Altim,  /'orstzoalojiii'.  II,  p.  5^3 


—  364  — 

frent  que  d'autres  nichent  dans  leur  voisinage  ;  d'autres,  au  contraire, 
s'entêtent  à  régner  seules  sur  une  certaine  région.  Divers  motifs, 
parmi  lesquels  surtout  la  crainte  des  dangers,  déterminent  les  Cigo- 
gnes à  se  réunir  pour  voyager;  mais  ce  n'est  qu'entre  elles  qu'elles 
sont  sociables  ;  jamais  une  Cigogne  isolée  ne  se  joindra  à  d'autres 
oiseaux,  pas  même  à  une  bande  de  Cigognes  brunes.   » 

Il  est  singulier  qu'un  aussi  grand  oiseau  soit  presque  privé  de  voix, 
car  c'est  à  peine  s'il  fait  entendre  une  espèce  de  sifflement  rauque, 
impossible  à  rendre  par  la  plume  ;  par  contre,  il  manifeste  ses  senti- 
ments en  faisant  claquer  son  bec  sur  tous  les  tons,  et  en  produisant  à 
volonté  des  claquements  longs  ou  brefs,  rapides  ou  lents,  suivant  les 
circonstances.  Les  jeunes,  quand  ils  sont  affamés,  crient  fitschut, 
schut  schut  schut  . . 

La  Cigogne  blanche  s'apprivoise  facilement,  surtout  quand  elle 
est  prise  jeune.  Elle  apprend  vite  à  comprendre  les  gestes  et  même 
les  paroles  de  son  maître  et  arrive  à  l'appel  de  son  nom.  Elle  connaît 
bientôt  les  habitants  de  la  maison,  témoigne  de  l'attachement  à  ceux 
qui  lui  veulent  du  bien,  de  l'aversion  à  ceux  qui  la  taquinent;  bref, 
c'est  un  des  oiseaux  les  plus  agréables  à  avoir  en  captivité,  car  il  ne 
tarde  guère  à  se  faire  aimer  par  son  intelligence,  mais  on  ne  doit  pas 
le  tourmenter. 

Reproduction.  —  Les  Cigognes  contractent  leur  union  pour  toute 
la  durée  de  leur  vie,  et  les  conjoints  sont  en  général  très  fidèles  l'un 
à  l'autre,  les  exceptions  sont  fort  rares.  Au  printemps  c'est  d'ordir 
naire  le  mâle  qui  revient  le  premier  au  nid,  mais  sa  compagne  l'y 
rejoint  au  plus  tard  au  bout  d'un  jour  ou  deux.  On  ignore  combien 
d'années  le  même  couple  vient  occuper  le  même  nid  ;  mais  on  admet, 
non  sans  raison,  que  la  vie  de  la  Cigogne  est  relativement  fort  longue 
et  que  le  nid  change  rarement  de  propriétaire.  Il  est  singulier  que  ces 
oiseaux,  nichant  d'habitude  sur  les  arbres,  préfèrent  étabhr  leur  nid 
sur  un  toit,  dès  qu'on  y  a  fixé  une  vieille  roue,  un  panier  ou  quelques 
planches  pour  les  y  inviter.  «  Il  est  étonnant,  dit  Naumann,  que  des 
Cigognes  élevées  à  l'étranger,  malgré  toute  leur  défiance  naturelle, 
reconnaissent  aussitôt  qu'on  les  voit  d'un  bon  oeil,  comprennent  la 
signification  des  bâtises  que  l'on  fait  pour  elles  et  cèdent  au  désir  de 
l'homme.  Une  paire  de  Cigognes  apparut  un  jour  aux  environs  de 
ma  demeure  et  s'y  établit  sur  de  hauts  peupliers,  entre  deux  villages 
voisins.  Le  propriétaire  de  la  chasse  ne  comprit  pas  ce  signe,  tira 
dessus,  mais  les  manqua;  elles  s'en  allèrent  aussitôt  à  un  quart  de 


—  365  — 

lieue  plus  loin.  Là  régnait  à  leur  égard  un  autre  sentiment  ;  on  établit 
une  vieille  roue  sur  le  haut  d'un  toit  de  chaume,  et  aussitôt  les  Cigo- 
gnes acceptèrent  l'invitaiion.  Au  bout  de  quelques  jours  elles  y 
avaient  construit  et  achevé  leur  nid,  et  tous  les  ans  elles  y  revien- 
nent régulièrement. 

«  Quelle  est  la  raison  de  cet  attachement  pour  l'homme?  Il  serait 
difficile  de  le  dire,  mais  ce  qui  doit  certainement  y  contribuer  beau- 
coup,c'est  la  sécurité  dont  jouissent  les  Cigognes  dans  le  voisinage  de 
l'homme,  pour  elles  et  pour  leurs  petits.  Leur  confiance  dans  la  pro- 
tection de  l'homme  est  d'ailleurs  si  grande,  que  quand  des  Cigognes  se 
préparent  à  nicher  sur  des  arbres,  elles  les  abandonnent  dès  que  sur 
quelque  toit  on  fait  des  préparatifs  pour  les  y  recevoir.  On  peut  même 
les  attirer  dans  des  endroits  où  elles  ne  se  montrent  pas  d'habitude, en 
leur  préparant  sur  des  toits  une  base  convenable  pour  leur  vaste  nid, 
mais  pour  autant,  toutefois,  que  la  localité  leur  convienne  (1).  » 

Le  nid  est  donc  toujours  construit  dans  des  lieux  élevés  et  bien  à 
découvert;  il  se  trouve  le  plus  souvent  sur  de  hauts  bâtiments,  des 
toits,  des  cheminées,  des  tours,  des  ruines  ou  dans  la  couronne  d'un 
grand  arbre.  Là  où  l'homme  n'a  pu  prendre  soin  de  lui  établir  une 
base  solide,  le  nid  est  parfois  renversé  par  la  tempête. 

Peu  après  leur  retour,  les  jeunes  couples  commencent  la  construc- 
tion de  leur  nid.  Les  Cigognes  qui  ont  déjà  niché,  se  bornent  à  réparer 
leur  ancien  nid,  y  apportent  de  nouveaux  matériaux,  et  la  construction 
augmente  ainsi  en  volume  d'année  en  année,  jusqu'à  atteindre  parfois 
la  hauteur  d'un  homme  ;  sa  base  primitive, en  partie  pourrie  par  l'humi- 
dité du  temps,  finit  par  n'être  plus  assez  solide  pour  supporter  une 
pareille  masse,  et  celle-ci  est  alors  emportée  au  premier  coup  de  vent. 
Ce  nid  est  loin  d'être  élégant  mais  il  est  solidement  construit  :  c'est  un 
amas  de  grosses  branches,  d'épines  et  de  mottes  de  gazon  entremêlées 
de  terre  qui  en  forme  la  base  ;  des  branches  plus  fines,  des  feuilles  de 
roseaux  et  des  joncs  forment  une  seconde  couche, au-dessus  de  laquelle 
en  existe  une  troisième, composée  d'herbes  sèches, de  paille,  de  fumier, 
de  chiffons,  de  plumes,  etc.,  et  celle-ci  sert  de  berceau  aux  petits  ;  son 
diamètre  est  de  0,90  cent,  à  lni80,et  la  profondeur  de  son  excavation 
est  d'environ  0,10  cent.  ;  la  première  année  sa  hauteur  ne  dépasse 
guère  0,30  cent.,  et  encore  est-elle  bientôt  réduite  par  le  poids  des 
parents  et  des  petits.  Mâle  et  femelle  travaillent  ensemble,  mais  cette 

(i)   Nauinann,  Nattir^.  der  Vo^çel  Deutschlands,  IX,  p.  261. 


—  366  — 

dernière  y  met  toujours  plus  d'ardeur  et  un  nouveau  nid  est  fait  en  huit 
jours  ;  la  réparation  d'un  ancien  ne  prend  pas  plus  de  trois  jours. 

La  ponte  a  lieu,  suivant  les  localités,  entre  la  dernière  huitaine  de 
mars  (Algérie)  et  la  seconde  quinzaine  de  mai  (Danemark)  ;  le  nombre 
des  œufs  varie  selon  l'âge  de  la  pondeuse  :  une  jeune  femelle  n'en 
pondra  que  trois,  tandis  qu'une  femelle  d'un  âge  plus  avancé  en  aura 
quatre  ou  cinq  et  parfois  six.  Ces  oeufs  sont  lisses,  peu  brillants,  fine- 
ment grenus,  d'un  blanc  pur,  et  mesurent  environ  74  millimètres  sur 
50.  La  femelle  couve  presque  sans  interruption  durant  28  à  31  jours, 
et  ne  quitte  que  rarement  son  nid  ;  le  mâle  la  nourrit  pendant  ce 
temps,  veille  sur  elle  et  la  protège.  Quand  les  jeunes  sont  éclos,  la 
sollicitude  des  parents  redouble  et  jamais,  dans  les  premiers  temps, 
ils  ne  quittent  le  logis  ensemble  :  quand  l'un  va  à  la  chasse,  l'autre 
reste  près  des  poussins.  La  première  nourriture  consiste  en  vers, 
sangsues,  larves  et  insectes,  que  les  parents  mettent  dans  le  bec  de 
leurs  petits;  plus  tard,  ceux-ci  reçoivent  une  nourriture  plus  substan- 
tielle, qui  est  déposée  devant  eux  ;  les  parents  apportent  également 
dans  leur  jabot  de  l'eau  pour  abreuver  la  nichée.  Il  faut  deux  bons 
mois  avant  que  les  jeunes  Cigognes  soient  en  état  de  suivre  les 
auteurs  de  leurs  jours. 


240.  —  La  Cigogne  brune. 
CICONIA  FUSCA,  Briss. 

(PI  239) 

CicoNiA  FUSCA,  Briss.  Ornith.  v.  p.  362  (1760). 

Ardea  nigra,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  235  (1766). 

Ardea  chrysopelargus,  Licht.  Cat.  Rer.  nat.  rar.  sp.  284  (1793). 

CicoNiA  nigra,  Pallas,  Zoor/r.  Eosso-As.  II,  p.  114  (1811). 

Melanopelargus  NIGER,  Reichenb.  Si/st.  Av.  pi.  165,  f.  453,  545  (1850). 

Der  schwarze  Storch,  en  allemand. 

The  BLACK  Stork,  en  anglais. 

De  zwarte  Ooievaar,  en  flamand. 

Taille  :  0'",85  ;  ailes  0,53  ;  bec  0,165  ;  tarses  0,20. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  D'un  brun  noirâtre  à  reflets  métal- 
liques violets,  bleus,  verts  et  pourpres  ;  rémiges  noires  ;  bas  de  la  poitrine, 
abdomen  et  sous-caudales  d'un  blanc  pur  ;  queue  brune.  Bec,  lorum,  tour  de 
l'œil  et  menton  d'un  rouge  vif  ;  pattes  également  rouges  avec  les  ongles 
bruns  ;    iris  brun. 


—  367 


Jeune.  —  Tête  et  cou  d'un  brun  cendré,  l'extrémité  des  plumes  d'un  cendré 
blanchâtre  ;  dos  et  ailes  d'un  brun  foncé  à  reflets  verdâtres  :  parties  abdo- 
minales blanches.  Bec  d'un  vert  olivâtre  ;  pattes  d'un  vert  olivâtre,  bleuâtres 
aux  articulations. 

Poussin.  —  Dos  et  dessus  des  ailes  d'un  cendré  pâle,  les  autres  parties 
d'un  blanc  pur,  excepté  le  menton,  une  partie  de  la  face,  le  jabot  et  le  centre 
du  ventre,  qui  sont  nus  ou  à  peu  près  nus  ;  bec  roux  avec  le  marteau  blan- 
châtre ;  peau  du  menton  jaunâtre  ;  pieds  d'un  roux  terne  ;  iris  brun  très 
foncé  (J.  Vian). 

Hab.  —  La  Cigogne  brune  est  plus  ou  moins  répandue  en  Europe 

jusqu'au  sud  de  la  Scandinavie, 
mais  ne  dépasse  guère  au  Nord 
le  60''.  Elle  niche  en  petit  nom- 
bre dans  le  midi  de  la  Suède 
{Nilsson),  mais  ne  se  montre 
qu'accidentellement     dans    les 


^^  parties  méridionales  de  la  Nor- 
j  wége  {Collett)  et  de  la  Finlande 
{Sundstrôm).  Elle  n'est  pas  rare 
au  Danemark  [Fischer),  dans  les  parties  N.-E.  de  l'Allemagne, surtout 
sur  le  plateau  de  la  Poméranie,  mais  paraît  manquer  dans  les  provinces 
occidentales  [Borggrevé);  Naumann  dit  qu'on  la  rencontre  dans  toutes 
les  parties  de  l'Allemagne,  mais  qu'elle  n  est  nulle  part  aussi  abon- 
dante que  la  Cigogne  blanche  ;  Borggrevé  dit  avoir  observé  dans  un 
marais  près  de  l'Oder,  une  bande  de  plus  de  cent  sujets  ;  elle  n'est  pas 
rare  non  plus  dans  les  provinces  Danubiennes  mais  bien  en  Pologne, 
quoiqu'elle  niche  en  petit  nombre  dans  les  grandes  forêts  des  diverses 
parties  de  ce  pays  {Taczanoioski)  ;  en  Russie  on  l'observe  dans  toute 
les' régions  boisées  sauf  dans  l'extrême  Nord  {Bogdanow). 

Cet  oiseau  se  montre  très  accidentellement  en  Angleterre  [Seebohm) , 
mais  ne  paraît  pas  avoir  été  observé  dans  les  autres  parties  des  îles 
Britanniques.  On  le  voit  parfois  lors  des  passages  en  Plollande 
{ScJilégel),  mais  très  rarement  en  Belgique  et  dans  le  grand  duché  de 
Luxembourg  ;  il  visite  assez  régulièrement,  à  son  passage  d'automne, 
les  départements  septentrionaux  de  la  France  ;  on  en  a  tué  plusieurs 
fois  près  de  Lille,  de  Dunkerque,  de  Boulogne,  de  AIontreuil-sur-Mer 
et  d'Abbeville  [Degl.  et  Gerbe)  ;  dans  le  midi  de  la  France  il  est  do 
passage  régulier  ou  irrégulier  suivant  les  localités  [Lacroix). 

Cette   Gigogne   est   assez   rare   en    Espagne,    quoique  répandue 


—  368  — 

dans  tout  le  pays  {Saunders),  mais  elle  n'est  que  de  passage  irré- 
gulier en  Portugal  (Rei/es)  et  en  Italie  {Giglioli)  ;  en  Grèce  on  la  voit 
plus  souvent  en  automne  qu'au  printemps  {Lindey^mayer).  Elle  niche 
en  Turquie  et  en  Palestine  [Tristram),  mais  ne  paraît  se  montrer  en 
Asie  Mineure  qu'aux  passages.  Elle  est  plus  ou  moins  sédentaire  dans 
l'intérieur  du  Caucase  et  elle  est  surtout  abondante  dans  les  bois  de 
Lenkoran  {Radde).  Plus  à  l'Est,  on  observe  cette  espèce  dans  toute  la 
Sibérie,  sauf  dans  l'extrême  Nord  et  au  Kamtchatka  {Bogdanow),  au 
'ïu.vke^i3iTi{Severtzow),  en  Perse  {De  Filippi),  au  Cachemir  [Adams), 
dans  le  centre  et  le  N.-O.  de  l'Inde  (Jerdon),  ainsi  qu'en  Chine  et  en 
Mongolie  {David). 

Il  est  probable  que  cette  Gigogne  hiverne  dans  la  majeure  partie  de 
l'Afrique,  peut-être  même  partout  où  les  lieux  lui  conviennent,  car  elle 
a  été  observée  dans  le  Nord  de  ce  continent  comme  dans  le  Midi  et  aussi 
bien  dans  les  pays  occidentaux  qu'orientaux.  Voici  les  contrées  où 
la  présence  de  cet  oiseau  a  été  constatée  :  le  Maroc  {Irhy),  l'Algérie 
{Loche),  l'Egypte,  la  Nubie,  le  Sennaar,  le  Kordofan  et  l'Abyssinie 
{de  Heuglin),  le  Zambèze  {Chapmann),  le  cap  de  Bonne-Espérance 
[Layard),  le  Benguéla,  l'Achanti  (T^e/)  et  la  Sénégambie  {Hartlaub). 

Mœurs.  —  La  Cigogne  brune,  aussi  appelée  Cigogne  noire  bien 
qu'elle  ne  soit  pas  de  cette  couleur,  est  un  oiseau  migrateur,  mais  qui 
paraît  mieux  supporter  le  froid  que  son  congénère  ;  elle  revient  dans 
l'Europe  centrale  vers  la  fin  de  mars  ou  en  avril.  En  août  ces  oiseaux 
se  rassemblent  souvent  par  troupes  de  douze  à  trente  sujets, qui  dispa- 
raissent dans  le  courant  de  septembre  pour  aller  hiverner  en  Afrique; 
mais  on  voit  encore  passer  des  retardataires  jusque  dans  la  première 
huitaine  d'octobre.  Ils  voyagent  pendantle  jour  et  traversent  l'espace 
à  une  très  grande  hauteur. 

C'est  un  oiseau  très  farouche,  qui  fuit  le  voisinage  de  l'homme  pour 
vivre  dans  les  bois  et  même  dans  les  parties  boisées  des  montagnes  ; 
Radde  dit  l'avoir  rencontré  sur  le  plateau  arménien  à  plus  de  6000 
pieds  d'altitude,  où  il  nichait  dans  une  forêt  d'épicéas  {Abies  Nord- 
TYianniand)  ;  il  fait  remarquer  que  cette  Cigogne  arrive  dans  ces 
parages  vers  le  15/27  mars,  alors  que  les  montagnes  sont  encore  cou- 
vertes de  neige. 

Dans  les  pays  plats,  la  Cigogne  brune  fréquente  toujours  de  préfé- 
rence les  bois  qui  bordent  les  fleuves  et  les  rivières,  ainsi  que  les 
forêts  humides  parsemées  d'étangs,  de  mares  et  de  marécages  ;  elle 
visite  également  les  pâturages  où  elle  se  tient  surtout  près  des  fossés 


—  369  — 

inondés  et  des  ruisseaux  ;  on  la  voit  parfois  aussi  dans  les  champs, 
mais  elle  n'y  séjourne  jamais  longtemps  ;  il  en  est  de  même  près  des 
côtes  maritimes,  car  elle  n'aime  pas  plus  l'eau  de  la  mer  que  celle  des 
marais  salants  de  l'intérieur.  C'est  sur  les  grands  arbres  d'une  forêt 
qu'elle  passe  la  nuit  dans  un  repos  absolu,  dût-elle  franchir  une 
grande  distance  pour  y  arriver  ;  là,  on  la  voit  perchée  sur  une  forte 
branche  en  partie  dégarnie  et  située  à  mi-hauteur  de  l'arbre  ;  l'oiseau 
ne  cherche  guère  à  se  cacher  et  se  tient  immobile  sur  une  patte,  la  tête 
enfouie  dans  les  scapulaires. 

Dans  sa  démarche,  son  vol  et  son  naturel,  cet  oiseau  ne  diffère  pas 
de  la  Cigogne  blanche,  et  les  sujets  apprivoisés,  quand  on  les  prend 
jeunes,  se  montrent  aussi  intelligents  que  ceux  de  cette  dernière; 
mais  la  Cigogne  brune  est  plus  sauvage  et  compte  parmi  les  oiseaux 
les  plus  farouches,  car  elle  évite  l'homme  en  toute  occasion  et  se  mon- 
tre toujours  sur  ses  gardes.  Sa  prudence  l'oblige  à  se  tenir  dans  des 
endroits  où  sa  vue  peut  porter  au  loin,  afin  d'éviter  toute  surprise;  ce 
n'est  que  dans  les  localités  où  l'arrivée  d'un  homme estpeu  à  craindre, 
qu'elle  se  tient  près  d'une  eau  entourée  de  buissons  ou  de  roseaux 
qui  lui  cachent  les  alentours.  Son  amour  pour  la  solitude  la  rend  peu 
sociable,  car  chaque  couple  se  ménage  un  certain  domaine  dans 
lequel  il  ne  souffre  la  présence  d'aucun  autre  de  ses  semblables.  Les 
migrations  se  font  également  par  couples  ou  par  individus  isolés  ;  ce 
ne  sont  ordinairement  que  les  jeunes  qui  voyagent  par  petites  troupes. 

Les  poussins  crient  comme  les  jeunes  Cigognes  blanches  ;  ils  font 
entendre  un  sifflement  rauque  que  l'on  peut  rendre  par  tschiUschut- 
schutschut,  tschutschut...  et  ainsi  de  suite.  Dès  qu'ils  ont  quitté  leur 
nid  et  qu'ils  n'ont  plus  besoin  de  l'assistance  de  leurs  parents,  les 
jeunes  perdent  la  voix  et  se  bornent  à  faire  entendre  des  claquements 
de  bec  sur  tous  les  tons,  comme  le  font  les  adultes. 

La  Cigogne  brune  est  Carnivore  et  insectivore  et  se  nourrit  des 
mêmes  animaux  que  l'espèce  précédente  ;  elle  rend  de  grands  services 
en  Afrique  en  détruisant  des  quantités  énormes  de  criquets  voyageurs, 
quoiqu'elle  préfère  toujours  les  petits  vertébrés  aux  insectes. 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  niche  ordinairement  sur  les  grands 
arbres  d'une  forêt,  à  quatre  ou  cinq  mètres  du  sol;  le  nid  repose  sur 
la  bifurcation  d'une  forte  branche  horizontale.  Les  conjoints,  qui 
paraissent  être  unis  pour  la  vie,  reviennent  chaque  année  nicher  sur 
le  même  arbre  tant  qu'ils  n'y  ont  pas  été  dérangés,  mais  ils  se  conten- 
tent le  plus   souvent  de  réparer  leur  ancien  nid,  sans  que  celui-ci 

Tome  II.  —  1801  47 


-  370  — 

augmente  notablement  de  volume.  L'aire  abandonnée  d'un  grand 
rapace  sert  parfois  de  base  au  nid;  mais  celui-ci  est  toujours  formé 
d'une  couche  de  branches  sèches  assez  fortes  sur  lesquelles  se  trou- 
vent d'autres  branches  plus  fines,  le  tout  maintenu  par  des  mottes 
de  terre  humide;  puis  vient  une  couche  de  graminées  et  de  joncs,  au 
centre  de  laquelle  est  ménagée  une  cavité  garnie  de  radicelles,  de 
paille,  d'herbes  et  de  feuilles  sèches,  de  fumier,  de  poils,  de  plumes, 
etc.  Bien  que  ce  nid  atteigne  souvent  plus  d'un  mètre  de  diamètre,  les 
conjoints  le  terminent  en  peu  de  jours,  car  ils  y  travaillent  sans 
relâche  et  cherchent  ensemble  les  matériaux  nécessaires. 

La  ponte  a  lieu  en  avril  ou  en  mai,  suivant  la  température  de  la 
saison  ;  elle  se  compose  de  trois  à  cinq  œufs  d'un  blanc  uniforme  et  à 
grain  fin  mais  visible  ;  ils  mesurent  environ  66  millimètres  sur  48  ; 
ils  sont  donc  plus  petits  que  ceux  delà  Cigogne jilanche.  La  durée 
de  l'incubation  est  d'environ  vingt-huit  jours. 

Les  parents  ne  songent  guère  à  défendre  leur  couvée  ;  ils  s'envolent 
quand  on  est  encore  à  deux  cents  pas  de  l'arbre  qui  porte  leur  nid  et 
observent  de  loin  le  danger  que  court  leur  progéniture.  Mais  celle-ci 
est  en  sûreté  dans  sa  demeure,  car  le  nid  se  trouve  le  plus  souvent 
hors  des  atteintes  de  l'homme. 

Dans  les  pays  montagneux  ces  oiseaux  nichent  souvent  sur  des 
rochers  escarpés,  comme  l'àbbé  David  l'a  constaté  en  Chine  ; 
MM.  Elwes  et  Buckley  ont  fait  la  même  observation  en  Bulgarie. 

FAMILLE  DES  PLATALÉIDÉS. 

Car.  —  Bec  long,  large  et  en  forme  de  spatule,  ou  plus  ou  moins 
arrondi  et  recourbé  de  la  base  à  l'extrémité  ;  tête  et  haut  du  cou  en 
partie  ou  en  totalité  nus  ;  ailes  amples  ;  tarses  allongés  ;  doigt  médian 
plus  court  que  le  tarse. 

Had.  —  Ces  oiseaux  habitent  les  parties  chaudes  et  tempérées  des 
cinq  parties  du  monde. 

Mœurs.  —  Les  oiseaux  de  cette  famille  ont  un  naturel  doux  et 
sociable;  les  diverses  espèces  vivent  en  bonne  intelligence  entre  elles 
et  forment  parfois  de  grandes  colonies.  Ils  fréquentent  les  marais,  les 
étangs,  les  bords  limoneux  des  cours  d'eau,  etc.  Ils  émigrent  des  con- 
trées tempérées  à  des  époques  déterminées  et  nichent  sur  les  arbres 
ou  dans  les  roseaux  et  les  joncs. 

On  divise  ce  groupe,  suivant  la  forme  du  bec,  en  deux  sous-familles: 
les  Plataléinês  et  les  Ibidinés. 


-  371  — 

SOUS-FAMILLE 

DES  PLATALÉINÉS.  —  PLATALEINyE 

Car.  —  Bec  droit,  comprimé,  les  deux  mandibules  dilatées  à  leur 
extrémité  en  forme  de  spatule  très  aplatie. 

GENRK   CXXXVIII 

SPATULE.  —  PLATALBA 

Platalea,  Lin.  Syst.  nat.  (1735  et  1766). 

Platea,  Briss.  Ornith.  V,  p.  352  (1760). 

Spath.erodia,  ajaja,  leucerodia,  Reichenb.  Av.  Syst.  nat.^  p.  XVI  (1852-53). 

Plateibis,  Bonap.  Consp.  av.  II,  p.  149  (1857). 

Car.  —  Bec  droit,  aussi  haut  que  large  à  la  base,  plat  dans  le  reste  de  son 
étendue,  flexible,  dilaté  et  arrondi  en  forme  de  spatule  et  terminé  à  la  pointe 
par  un  faible  onglet;  narines  dorsales,  rapprochées,  basales,  oblongues, 
bordées  par  une  membrane;  ailes  amples,  aiguës;  queue  courte;  jambes  à 
moitié  dénudées;  tarses  longs,  robustes;  doigts  antérieurs  réunis  jusqu'à  la 
deuxième  articulation  par  une  membrane  profondément  découpée,  le  médian 
plus  court  que  le  tarse  ;  face  et  menton  plus  ou  moins  nus  chez  les  adultes. 

Hab.  —  Comme  la  famille. 

241 .  —  La  Spatule  blanche 
PLATALEA  LEUCORODIA,  Lin. 

(PI.  240) 

Platalea  leucorodia,  Lin.  Syst.  nat.  I,p.  231  (1766). 

Platea  leucopodius,  Gmel.  Rcise  Russl.  p.  163  (1770). 

Platea  leucorodia,  Leach,  Syst.  cat.  main.  B.  Br.  Mus.  p.  33  (1816). 

Platalea  nivea,  Cuv.  Règne  anim.  I,  p.  482  (1817). 

Platalea  leucerodius,  Glog.  Schles.  Fatma.,  p.  50  (1833). 

Platalea  pyrrhops,  Hodgs.  Gray's  Zool.  Miscell.  p.  86  (1844). 

Platalea  leucerodia,  Reichw.  Journ.  f.  Orn.  1877,  p.  159. 

Der  Weisse  Loffler,  en  allemand. 

The  Spoonbill,  en  anglais. 

De  Lepelaar,  en  flamand. 

Var.  Major. 

Platalea  ma.ior  et  minor,  Tem.  et  Schleg.  Fami.  Jap.  p.  119,  pi.  75  et  76  (1850). 
Platalea  leucorodia,  Swinh.  Ibis.,  1860,  p.  65. 

Platalea  leucorodius,  Radde,  Reise  im  S.  von  Ost-Sib.  Il,  p.  345  (1863). 
Platalea  japonica,  Reichenow,  .Journ.  f.  Orn.  1877,  p.  159. 

Taille:  0"'76  ;  ailes  0,40;  bec  0,20;  tarses  0,14. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  D'un  blanc  pur  ;  plumes  de  l'occiput 
très  allongées,  étroites  et  formant  mw  huppe  touffue  ;  un  large  plastron  d'un 
jaune  roussâtre  couvre  la  poitrine  et  les  extrémités  do  ce  plastron  se  réu- 


—  37i> 


nissent  pour  former  une  bande  de  même  couleur  qui  contourne  la  base  du 
cou;  nudités  des  yeux  et  de  la  gorge  d'un  jaune  pâle.  Bec  noir,  mais  bleuâtre 
dans  le  creux  des  sillons  et  à  extrémité  d'un  jaune  d'ocre  ;  iris  rouge  car- 
miné ;  pattes  noires. 

La  femelle  est  un  peu  plus  petite  que  le  mâle,  a  la  huppe  moins  longue  et 
le  plastron  moins  développé. 

Jeune.  —  D'un  blanc  pur,  sans  huppe  et  sans  plastron  d'un  jaune  rous- 
sâtre  ;  bec  plus  court,  près  du  front  et  en  dessous  couleur  chair,  le  dessus  de 
la  spatule  d'un  gris  rougeâtre  ;  iris  d'un  gris  bleuâtre . 

Poussin.  —  Toutes  les  parties  nues  jaunes  ;  duvet  laineux,  court,  assez 
épais  et  d'un  blanc  pur  ;  bec  et  pattes  jaunes  ;  iris  brun. 

La  var.  Major  se  distingue  du  type  européen  par  des  pattes  plus  longues» 
un  bec  plus  développé,  et  par  l'espace  dénudé  de  sa  gorge  moins  étendue. 

Hab.  —  La  Spatule    blanche  niche  en  Espagne  [Saunders],  en 

sffs^fi  Hollande  {Schlêgel),  en  Hongrie 
{Naumann)  éTdans  tous  les  pays 
M^^  :  i  Tiin  qui  entourent  la  mer  Noire  (c?e 
No?^dmann).  Elle  est  de  passage 
plus  ou  moins  régulier  dans  les 
autres  parties  de  l'Europe,  mais 
elle  est  rare  en  Italie  [Salvadori, 
PI  Giglioli),  en  Suisse  {Meisner  et 
Schinz),  en  Allemagne  [Reiche- 
noio)  et  en  Autriche,  sauf  dans  la  vallée  du  Danube.  Elle  passe 
régulièrement  en  France  et  n'est  pas  rare, en  automne  et  au  printemps, 
sur  les  côtes  maritimes  de  la  Picardie, de  la  Normandie, de  la  Bretagne 
et  on  l'a  également  observée  dans  plusieurs  départements  du  centre 
et  du  Nord  [Degl.  et  Gerbe)  ;  elle  se  montre  aussi  régulièrement  en 
Grèce  [Lindermayer)  ai  sur  les  côtes  maritimes  de  la  Belgique,  où  on 
la  voit  souvent  dans  les  marais  des  Flandres  et  de  la  province 
d'Anvers,  mais  très  rarement  sur  les  eaux  de  l'intérieur  du  pays. 

Cet  oiseau  se  montre  accidentellement  aux  îles  Britanniques  y  com- 
pris les  îles  Hébrides,Orcades  et  Shetland  (^>eZ>o/im);  il  en  est  de  même 
en  Pologne  {Taczanoioshi),  en  Finlande  (Malmgv^en)  et  dans  le  nord 
de  la  Russie,  où  une  troupe  de  huit  sujets  a  été  vue  près  d'Archangel 
il  y  a  quelques  années  {Henck).  On  ne  connaît  que  deux  captures  en 
Norwège  :  l'une  près  de  Jarlsberg  en  1846  et  l'autre  dans  le  Ryfylke 
en  \S4&  {Wallengren)  ;  il  est  moins  rare  en  Suède  {Nilsson). 

Dans  l'empire  russe,  on  rencontre  surtout  la  Spatule  sur  le  littoral 
de  la  mer  Noire  et  de  la  mer  d'Azow,  en  Grimée,  au  Caucase,  dans 


—  373  — 

la  région  Aralo-Caspienne,  dans  le  Tian-Chan  et  sur  les  bords  du  lac 
Balkhach  {Bogdanow)  ;  le  V  octobre  1887,  un  jeune  sujet  fut  tué 
près  de  Peddust  sur  Moon  sous  le  58°  53'  1.  N.  [von  Ekesparré).  On 
rencontre  également  cette  espèce  en  Turkestan  [Severtzow),Qi\  Perse, 
et  elle  niche  dans  l'Inde  (Jerdon)  et  à  Ceylan  (Legge)  ;  en  Asie 
Mineure  et  en  Palestine  elle  paraît  se  montrer  surtout  aux  passages 
(Tristra77t). 

En  Afrique  cet  oiseau  habite  le  Maroc  (Drake),  l'Algérie  (Loche)  et 
il  est  commun  en  Egypte  et  en  Nubie  [Shelley)  ;  il  niche  probablement 
dans  les  parties  orientales  du  delta  du  Nil,  mais  on  ne  le  voit  qu'en 
hiver  dans  la  Haute-Egypte  ;  il  niche  également  près  de  la  mer 
Rouge  sur  les  côtes  égyptienne  et  arabe,  ainsi  que  dans  l'Archipel 
de  Dahalak  sous  le  16°  1.  N.  [de  Heuglin).  Il  visite  accidentellement 
les  îles  Açores,  Madère,  Canaries  et  du  Cap  Vert  {Bolle, Heuglin, etc.). 

La  var.  Major  a  d'abord  été  signalée  au  Japon  {Temminck)  ;  elle  a 
été  rencontrée  plus  récemment  en  Daourie,dans  V kmo\\v\dindi{Radde), 
sur  le  lac  Chanka  {Przewalski),  en  Mantchourie  et  en  Chine  où 
elle  semble  assez  rare  [David],  ainsi  qu'à  Formose  (Sioinhoe)  ;  mais 
les  sujets  de  l'Asie  orientale  appartiennent-ils  bien  à  la  var.  Major? 

Mœurs.  —  Les  Spatules  qui  nichent  en  Europe,  hivernent  princi- 
palement dans  le  N.-E.  de  l'Afrique  ;  elles  quittent  ces  régions  vers 
la  fin  de  mars, arrivent  en  Espagne  vers  le  milieu  d'avril, mais  ne  font 
leur  apparition  en  Hongrie  qu'au  commencement  de  mai,  car  elles 
s'arrêtent  partout  où  elles  trouvent  des  lieux  qui  leur  plaisent.  Elles 
émigrent  en  septembre.  Ces  oiseaux  voyagent  pendant  le  jour  par 
troupes  plus  ou  moins  considérables  formant  une  ligne  simple  ou 
double  et  parfois  un  angle  irrégulier  ;  en  volant  ils  tiennent  la  tête, 
le  cou  et  les  pattes  étendus  horizontalement. 

La  Spatule  blanche  ne  recherche  pas  véritablement  les  côtes  mari- 
times ;  elle  se  plaît,  au  contraire,  près  des  lacs,  des  cours  d'eau  et 
des  marais  ;  on  la  rencontre  cependant  aussi  dans  des  endroits  où  la 
mer  est  peu  profonde  et  où  la  plage  est  vaseuse,  ainsi  que  dans  les 
marais  qui  avoisinent  la  mer.  Selon  Radde,  elle  préfère  les  marais 
salants  aux  eaux  douces, mais  l'oau  salée  ne  lui  est  pas  indispensable. 
Elle  évite  les  rives  et  les  endroits  couverts  de  roseaux  ou  de  hautes 
lierbes,  et  paraît  rechercher  de  préférence  les  bords  vaseux  des  cours 
d'eau. 

C'est  un  oiseau  d'un  naturel  doux,  prudent  et  sociable  ;  en  Egypte, 
il  n'est  pas  rare  de  rencontrer  en  liiver,   près  du  Nil,  des  troupes 


—  ;j7i  ~ 

formées  de  centaines  de  Spatules,  vivant  entre  elles  dans  un  accord 
parfait.  «  C'est  avec  une  véritable  satisfaction,  dit  Brehm,  que  j'ai  vu 
deux  de  ces  oiseaux  se  rendre  des  services  réciproques,  se  lisser 
mutuellement  les  plumes  du  cou.  On  ne  peut  assister  à  un  spectacle 
plus  intéressant.  Ils  restent  plusieurs  minutes  serrés  l'un  contre 
l'autre,  dans  le  seul  but,  semble-t-il,  de  se  caresser.  Jamais  des 
querelles  ne  s'élèvent  dans  une  bande  de  Spatules;  la  jalousie 
cependant  peut  se  mettre  parmi  elles,  et  un  individu  affamé  poursuivre 
un  de  ses  compagnons  qui,  plus  heureux,  a  capturé  une  proie,  mais 
elles  n'en  arrivent  pas  à  la  menace.  Je  crois  pouvoir  conclure  de  mes 
observations,  qu'une  Spatule  ne  peut  vivre  sans  la  société  de  ses 
semblables  ;  je  ne  me  rappelle  pas  en  avoir  jamais  vu  une  isolée.  Au 
milieu  des  autres  oiseaux  qui  partagent  son  habitat,  la  Spatule  blanche 
vit  inofïensive  et  paisible  ;  elle  conserve  de  bons  rapports  avec  tous  et 
semble  heureuse  quand  on  la  laisse  en  paix.  Jamais  elle  ne  se  laisse 
aller  à  tourmenter  ou  à  agacer  ses  compagnes.  » 

Par  leurs  mœurs  comme  par  leur  structure,  les  Spatules  ressem- 
blent beaucoup  plus  aux  Ibis  qu'aux  autres  hérodiens;  comme  les 
Ibis,  elles  sont  confiantes  là  où  elles  se  sentent  en  sûreté,  mais 
excessivement  craintives  et  prudentes  partout  où  on  leur  fait  la 
chasse.  Ce  sont  des  oiseaux  diurnes  qui  passent  la  nuit  sur  des  arbres, 
des  rochers  ou  sur  des  îlots  sablonneux  ;  cependant,  par  un  beau  clair 
de  lune  il  leur  arrive  parfois  de  se  mettre  en  quête  de  pâture,  mais 
habituellement  ils  se  livrent  au  repos  dès  le  coucher  du  soleil  pour  ne 
reprendre  leur  activité  qu'au  matin. 

La  Spatule  blanche  a  une  démarche  grave  et  mesurée  ;  d'ordinaire 
elle  tient  le  cou  fléchi  de  façon  que  la  tête  semble  reposer  sur  les 
épaules;  ce  n'est  que  quand  un  bruit  suspect  a  frappé  son  attention 
qu'elle  tend  le  cou  pour  se  rendre  compte  du  danger  qui  pourrait  la 
menacer.  Au  repos,  elle  se  tient  volontiers  sur  une  patte,  le  cou 
rentré,  le  bec  caché  dans  les  scapulaires.  Son  vol  est  élégant,  facile 
et  plus  mouvementé  que  celui  de  la  Cigogne  ;  elle  plane  parfois  en 
décrivant  des  cercles. 

Tant  qu'elle  cherche  sa  nourriture,  la  Spatule  marche  à  pas 
comptés,  la  poitrine  inclinée  vers  le  sol,  portant  son  bec  alternative- 
ment à  droite  et  à  gauche,  fouillant  l'eau  et  la  vase.  Elle  se  nourrit  de 
frai,  de  crustacés,  d'insectes,  de  larves,  de  vers,  de  mollusques  et  de 
plantes  aquatiques  telles  que  Lemnacées;  mais  sa  nourriture  de 
prédilection  paraît  être  le  poisson;  elle  prend  très  adroitement  les 


—  375  — 

petits  poissons  avec  son  bec,  les  retourne  et  les  avale,  la  tête  la 
première. 

On  entend  rarement  la  voix  de  cet  oiseau,  et  celle-ci  est  si  faible 
qu'on  ne  peut  l'entendre  qu'à  une  très  courte  distance;  par  contre,  il 
fait  souvent  claquer  son  bec,  mais  d'une  façon  peu  bruyante. 

Les  jeunes  s'habituent  facilement  à  la  captivité  et  se  font  à  un 
régime  moitié  animal,  moitié  végétal  ;  ils  s'entendent  fort  bien  avec 
les  oiseaux  de  basse-cour. 

Reproduction.  —  La  Spatule  blanche  niche,  suivant  les  circons- 
tances, sur  un  arbre,  dans  un  buisson  ou  dans  les  roseaux  et  les 
joncs;  de  Heuglin  dit  avoir  vu  en  Egypte,  une  troupe  de  ces  oiseaux 
dont  les  nids  se  trouvaient  sur  une  côte  sablonneuse  garnie  d'herbes 
raides.  C'est  cependant  sur  les  arbres  que  cet  oiseau  niche  le  plus 
souvent,  et  le  même  arbre  porte  quelquefois  autant  de  nids  qu'il  peut 
encontenir.  Ces  nids  sont  grossièrement  faits^  mais  solidement,  àl'aide 
de  branches  sèches,  et  leur  cavité  est  garnie  de  feuilles  mortes  et  de 
joncs.  La  ponte  est  de  deux  à  quatre  oeufs.  Ceux-ci  ont  une  coquille 
blanchâtre  marquée  de  petites  taches  d'un  brun  roux  plus  ou  moins 
intense,  plus  nombreuses  et  un  peu  agglomérées  au  gros  bout;  ils 
mesurent  environ  68  millimètres  sur  46.  Hume  dit  avoir  trouvé  dans 
l'Inde  des  oeufs  de  cette  espèce  pendant  le  mois  d'août;  dans  le  sud  de 
Ceylan,  Legge  en  a  recueilli  dans  le  courant  de  mars. 

Les  jeunes  séjournent  longtemps  dans  le  nid;  dès  qu'ils  ont  pris  leur 
essor,  les  parents  les  conduisent  dans  un  marais  et  leur  apprennent 
à  chercher  leur  nourriture. 

SOUS-FAMILLE 

DES  IBIDINÉS.  —  IBIDIN.Î:. 

Car.  —  Bec  très  long,  recourbé  en  forme  de  faucille,  diminuant 
d'épaisseur  de  la  base  à  la  pointe,  presque  cylindrique,  à  mandibule 
supérieure  profondément  sillonnée  longitudinalement  presque  jusqu'à 
l'extrémité. 

GENRE  CXXXIX 

FALCINELLE.  —  PALCINELLUS 

NuMENius  (part.),  Briss.  Omith.,  v.  p.  326  (1760).| 
Tantalus  (part.),  Lin.  Sijst.  nat.  I,  p.  241  (1766). 
ScoLOPAx  (part.),  Scop.,  Afin.  I.  IHst.  nat.,  p.  87  (1769). 
Falcinellus,  Bechst.,  Gem.  Nat.  (1803).  —  Illig.  Prodr.  p.  26)  (1811). 
Ibis  (part.),  Tem.,  Ma7i.  crorn.,  p.  385  (1815). 
Plegadis,  Kanp,  Nat.  Si/st.,  p.  82  (1829). 


—  376  — 

Tantalides,  Wagl.  /sis,  1832,  p.  1231. 
Plegadornis,  Brehm,  Nauma7i7na,  1855,  p.  290. 
EuDOCiMUS,  Barb.  du  Boc,  Journ.  f.  Orn.  1876,  p.  300. 

Car.  —  Bec  long,  arqué,  relativement  mince  ;  tour  des  yeux  et  lorums  nus 
chez  les  adultes;  narines  basales,  petites,  se  prolongeant  dans  le  sillon; 
ailes  médiocres,  assez  larges,  arrondies,  deuxième  et  troisième  rémiges  les 
plus  longues;  queue  courte  ;  tarses  peu  robustes,- plus  longs  que  le  doigt 
médian;  doigts  antérieurs  réunis  par  une  membrane  jusqu'à  la  première 
articulation. 

Hab.  —  Ce  genre  est  presque  cosmopolite. 

242.  —  Le  Falcinelle  éclatant  ou  Ibis  falcinelle 

FALCINELLUS  CASTANEUS,  A.  Dub.  ex  Briss. 

(PI.  241.) 

NuMENius  viRiDis,  N.  CASTANEUS,  N.  MEXiCANUS,  N.  IBIS,  Briss.   Om.  V,  p.    326, 

329,  333,  347  (1760). 
Tantalus  FALCINELLUS,  ScoLOPAX  GUARAUNA  Llii.  Sijst.  nat.  1,  p.  241,  242  (1766). 
ScoLOPAi  RUFA,  Scop.  Ann.  /.  Hist.  nat..,  p.  87  (1769). 

NuMENius  iGNEUS,  N.  VIRIDIS,  Gmel.  Novi  Comm.  Acad.  Petrop.  1770,  pp.  460,  462. 
Tantalus  castaneus,  Mùll.  Natur.  Syst.  §uppl.^  p.  112  (1776). 
Tantalus  igneus,  Lath.,  Gen.  syn.  suppl.  I,  p.  291  (1787). 
Tantalus  manillensis,  mexicanus,  Gmel.  Syst.  nat.  Il,  pp.  649,  652  (1788). 
Ibis  falcinellus,  Savign.  Description  de  VEgyp.  Ois.  pi.  VII,   (1809). 
NuMENius  FALCINELLUS,  'P&W.,  Zoogr.  Rosso-As.  II,  p,  165  (1811). 
Ibis  sacra,  Tem.,  Man.  d'Orn.,  p.  385(1815). 
Ibisignea,  Lèach,  Syst.  cal.  mam.  etc.,  Br.  Mus.,  p.  33  (1816). 
Numenius  chihi,  Vieill.,  N.  Dict.  dliist.  nat.  VIII,  p.  303  (1817). 
Ibisfuscata,  Vieill.  Encycl.  méth.  orn.  III,  p.  1146  (1823). 
Tantalus  chalcopterus,  Tem.  Pi.  col.  III,  pi.  511  (1824). 
Ibis  guarauna,  Wagl.,5?/s^  avium,  sp.  8  (1827). 
Plegadis  FALCINELLUS,  Kaup,  Nat.  Syst.,  p.  82  (1829). 
Ibis  castaneus,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  989. 
Ibis  cuprea,  Breh.  Vdgel Deutschl.,  p.  1018  (1831). 
Tantalides  falcinellus,  Wagl.  Isis,  1832,  p.  1231. 
Ibis  erythrorhyncha,  Gould,  Proc.  zool.  Soc,  1837,  p.  127. 
Ibis  ordii,  Bonap.,  Comp.  List.  B..  p.  49  (1838). 
Falcinellus  igneus,  Gray,  List.  gen.  5.,  p.  87  (1841). 
Ibis  brevirostris,  Peale,  U.  S.  Exped.Ylll,  p.  219  (1848). 
Plegadornis  falcii^ella,  major,  minor,  Brehm,  Naumannia,  1855,  p.  290. 
Falcinellus  BENGALENSis,  F.  peregrina  (Miill.),  F.  mexicanus,  F.  erythrorhyncha, 

Bonai).,  Consp.  av.  U,  pp.  158,   159(1857). 
Falcinellus  ordii,  Goues,  Proc.  Ac.nat.  Se.  Phil.,  1866,  p.  96. 
Falcinellus  autumnalis,  A.  Dubois  (ex  Hasselq.),  Comp.  av.  E<ir.,  p.  28  (1871). 
Ibis  falcinellus  var.  ordii,  Goues,  B.  of.  N.  W.  Am.,  p.  517  (1874). 
Ibis  thalassina,  Ridgw.  Am.  nat.,  1874,  p.  110. 


.      —  377  — 

Falcinellus  ridgwayi,  Allen,  Bull.  Mus.  comp.  zool.  Cambr,,  p.  355  (1876). 

EuDOCiMUS  FALCINELLUS,  du  Boc,  Joum.  f.  Omitli..,  1876,  p.  300. 

Falcinellus  RUFUS,  Reichw.,  Journ.f.  Ornith.,  1877,  p.  146. 

Falcinellus  guarauna  et  thalassinus,  EU,,  Proc.  zool.  Soc,  1877,  pp.  505,  507. 

Falcinellus  castaneus,  A.Dubois,  Bull. Mus.  roy.  d'hist.nat.  deBelg.lY.,^  19(1885). 

Der  dunkelfarbige  Sichler,  en  allemand. 

The  glossy  Ibis,  en  anglais. 

De  bruine  Ibis,  en  flamand. 

Taille  :  0™46;  ailes  0,26;  bec  0,122;  tarses  0,086. 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  Vertex  brun  noirâtre  à  reflets 
verdâtres  ;  cou,  partie  antérieure  du  manteau,  petites  couvertures  des  ailes, 
poitrine, abdomen  et  jambes  d'un  roux  marron  vif;  partie  postérieure  du  man- 
teau d'un  brun  sombre  à  reflets  verdâtres  et  pourpres  ;  bas  du  dos,  sus  et 
sous-caudales  d'un  vert  sombre  mais  brillant;  flancs  d'un  brun  pourpré;  ailes 
et  queue  d'un  vert  sombre  à  reflets  pourpres  et  bronzés  ;  rémiges  d'un  vert 
bronzé.  Bec  d'un  brun  verdâtre  ;  iris  brun  ;  pattes  d'un  gris  verdâtre.  —  La 
femelle  ne  diffère  du  mâle  que  par  une  taille  plus  petite. 

En  hiver.  —  Tête  et  cou  bruns  striés  de  blanc  ;  parties  inférieures  brunes  ; 
dessus  du  corps  et  ailes  d'un  brun  verdâtre  à  reflets  bronzés  et  pourpres,  le 
manteau  toujours  plus  sombre. 

Jeune.  —  Diff'ère  peu  des  adultes  en  hiver,  mais  leur  plumage  ne  présente 
pas  autant  de  reflets  métalliques. 

Poussin.  —  Duvet  noir  sur  les  parties  supérieures  avec  un  bandeau  trans- 
versal blanchâtre  sur  le  vertex  entre  les  yeux  ;  parties  inférieures  d'un  brun 
fuligineux  avec  quatre  bandes  blanches  sur  le  bas  du  cou  ;  bec  court,  jau- 
nâtre, avec  deux  bandes  transversales  noires  ;  pattes  jaunes. 

Remarque.  —  Le  plumage,  la  taille  et  la  longueur  du  bec  sont 
plus  ou  moins  variables  suivant  l'âge  et  l'habitat;  mais  il  est  impos- 
sible d'établir  des  distinctions  constantes  entre  les  individus  des  diffé- 
rentes parties  du  monde.  Suivant  Schlégel,  les  teintes  du  bec  et  des 
pattes  présentent  également  des  variations  et  tirent  quelquefois  au 
rougcâtre,  même  chez  les  individus  de  l'Europe. 

Ilab.  —  Le  Falcineile  éclatant  ou  Ibis  falcinelle  est  presque  cosmo- 
polite mais  très  localisé,  et  se  montre  avec  plus  ou  moins  de  régu- 
larité dans  la  plupart  des  pays  chauds  et  tempérés.  En  Europe, 
il  niche  en  Espagne  {Sau7iders),  en  Hongrie  dans  la  vallée  du 
Danube  {Naumami),  près  des  grands  lacs  de  la  Dobrodja  et  de  la 
Bulgarie  {Alléon)  et  sur  tout  le  littoral  de  la  mer  Noire  ;  de  Nordmann 
dit  qu'il  n'y  a  guère,  sur  ce  littoral,  de  marais  ou  d'étang  où  l'on 
n'en  trouve  quelques  couples,  et  qu'un  grand  nombre  de  ces  oiseaux 
se  propagent  annuellement  dans  l'Abasie  et  la  Mingrélie,  dans  les 
Tome  ii.  —  1891  ^^ 


378  — 


ba^-fonds  du  Boug  et  du  Dnieper,  sur  le  Danube,  sur  le  Pruth  et 

dans  les  parties  centrales  de  la 
Bessarabie.  Il  niche  également 


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sur  le  Volga  inférieur  jusqu'au 
48°  1.  N.  (Seebohm),  ainsi  que 
dans  les  plaines  basses  du  Cau- 
case (Radde). 

Dans  les  autres  parties  de 
l'Europe  méridionale  et  centrale, 
cet  oiseau  ne  se  montre  qu'aux 
passages  soit  régulièrement,  soit  irrégulièrement,  mais  il  ne  visite 
que  très  accidentellement  la  Belgique,  ainsi  que  la  Suisse  {Meisner 
et  Schinz),  la  Hollande  {Schlégel),  l'Allemagne  (Borggreve),  le  Dane- 
mark (Co///r^,),  la  Pologne  (Taczanoivski)  et  la  Norwège  où  un  indi- 
vidu fut  tué  en  1835  près  de  Bodoe  sous  le  64  1/S^  1.  N.  {Collett).  Il 
est  moins  rare,  lors  des  passages,  en  Autriche  (Reichenow)  ainsi  que 
dans  le  midi  et  le  centre  de  la  Suède  {Niisson).  Pour  les  îles  Britan- 
niques, c'est  également  un  oiseau  de  passage  accidentel,  mais  il  a 
été  observé,  surtout  en  automne,  en  Angleterre,  en  Irlande,  en 
Ecosse,  ainsi  qu'aux  îles  Shetland  et  Orkney  {Seebohm);  il  a  même 
été  capturé  aux  îles  Fœroé  (H.  C.  Millier)  et  en  Islande  {Collin). 
En  Afrique,  cet  Ibis  a  été  observé  un  peu  partout  :  il  niche  dans  la 
partie  nord-ouest  [Seebohm)  et  hiverne  en  Egypte,  en  Nubie,  dans  le 
Kordofan,  au  Sennaar  et  en  Abjssinie  [de  Heuglin)  ;  sa  présence  a 
encore  été  signalée  sur  presque  toutes  les  côtes  africaines  :  à  Mozam- 
bique, au  Zambèze,  dans  la  République  d'Orange,  à  Natal,  au  Congo, 
au  Gabon,  dans  la  Sierra-Léone,  au  Sénégal  [auct.  plur.)  et  même  sur 
toutes  les  côtes  de  Madagascar  [Grandidie?^).  Cet  oiseau  se  trouvait 
également  dans  une  collection  recueillie  par  M.  le  capitaine  Em.  Storms 
dans  la  région  du  lac  Tanganyka  (Congo  oriental). 

En  Asie,  le  Falcinelle  éclatant  est  plus  ou  moins  répandu  dans  les 
parties  centrales  et  méridionales  et  il  fait  des  excursions  jusqu'au 
48°  1.  N.  ;  mais  il  n'a  pas  encore  été  observé  dans  la  Sibérie  orientale 
et  ses  apparitions  en  Chine  sont  fort  douteuses,  car  aucun  voyageur 
ne  l'y  a  observé.  Il  hiverne  dans  l'Inde  [Jerdon),  à  Ceylan  [Leggé)^  et 
visite  parfois  en  hiver  la  Birmanie  [Seebohm)  et  la  Gochinchine 
[von  Hïigel).  En  Océanie  on  trouve  cet  oiseau  à  Sumatra  [Raffles),  à 
Bornéo  [Croockeioit),  à  Java  [S.  Millier),  à  Célèbes  [Forsten),  à  la 
Nouvelle-Guinée  [d'Albertis)  et  en  Australie  [Gould,  Ramsay). 


—  379    - 

Enfin,  sur  le  continent  américain,  on  rencontre  le  Falcinelle  dans 
toute  l'Amérique  du  Nord  jusqu'au  Massachusetts,  l'Ohio  {Coues)  et 
le  Connecticut  {Hart  Merria7n),  et  dans  l'Amérique  du  Sud  jusqu'au 
Chili  {Temminck),  le  Paraguay  {Burmeister)  et  Buenos-Ayres 
[deHeuglin). 

Mœurs.  —  On  ne  voit  le  Falcinelle  en  Europe  que  pendant  l'été  ; 
Lindermayer  dit  qu'il  arrive  en  Grèce  après  l'équinoxe  du  printemps, 
qu'il  y  séjourne  en  quantités  énormes  jusque  vers  le  10  ou  le  15  mai, 
et  que  tous  disparaissent  alors  le  même  jour  et  presque  en  même 
temps.  M.  Irby  dit  ne  l'avoir  vu  arriver  à  Gibraltar  que  tard  en  avril. 
Suivant  de  Nordmann,  c'est  un  des  oiseaux  de  passage  les  plus  tar- 
difs, qui  n'arrive  dans  le  midi  do  la  Russie  que  rarement  avant  la 
mi-mai;  il  repart  à  la  fin  d'août  ou  au  commencement  de  septembre. 
Dans  ce  but,  les  Ibis  s'attroupent  souvent  par  plusieurs  milliers, 
volant  tous  à  côté  les  uns  des  autres  et  formant  ainsi  une  longue  file 
qui  va  plus  ou  moins  en  serpentant  et  qui  traverse  l'air  obliquement. 

Cet  oiseau  habite  les  marécages,  les  mares,  les  bords  vaseux  des 
étangs  et  des  lacs  et  autres  eaux  bourbeuses  riches  en  roseaux  et  en 
herbages  divers.  En  dehors  de  l'époque  de  la  reproduction,  les  bandes 
qui  habitent  une  contrée  aiment  à  changer  de  demeure,  volant  d'un 
marais  à  l'autre  et  visitant  parfois  les  pâturages  et  les  champs,  même 
ceux  qui  se  trouvent  loin  de  l'eau.  C'est  d'ailleurs  un  oiseau  très 
sociable,  qui  vit  constamment  en  troupes  plus  ou  moins  nombreuses, 
aussi  est-il  rare  de  n'en  voir  qu'un  couple  ou  un  sujet  isolé. 

Le  Falcinelle  ressemble  assez  aux  Courlis  par  ses  formes,  mais  sa 
structure  et  ses  moeurs  le  rapprochent  davantage  des  Cigognes  et 
surtout  des  Spatules.  Il  marche  tranquillement  mais  à  grands  pas,  le 
cou  rentré  et  recourbé  en  S,  le  bec  incliné  et  le  corps  relevé  par 
devant.  En  cas  de  nécessité,  il  sait  nager  d'un  endroit  à  l'autre  en 
s'aidant  des  pieds  et  des  ailes,  mais  cet  exercice  ne  paraît  pas  lui 
plaire  beaucoup.  Son  vol  ressemble  à  celui  du  grand  Courlis,  mais  il 
est  plus  lent;  en  volant,  l'oiseau  étend  le  cou  et  les  pattes,  bat  assez 
rapidement  des  ailes,  plane  quelque  temps,  puis  donne  un  nouvel  élan; 
il  peut  avec  aisance  changer  brusquement  de  direction,  décrire  d'élé- 
gantes ondulations  et  s'abattre  d'une  grande  hauteur  avec  une  extrême 
rapidité  ;  il  vole  en  général  très  haut  et  par  bandes  qui  s'avancent 
d'une  manière  fort  gracieuse.  «  C'est,  dit  Naumann,  un  charmant 
spectacle  que  celui  d'une  longue  bande  de  Falcinellos  fendant  les  airs. 
Ils  semblent  glisser,  comme  poussés  par  la  brise.  La  ligne  qu'ils  for- 


—  380  — 

ment  n'est  pas  absolument  droite,  elle  s'incline,  s'infléchit  de  la  façon 
la  plus  élégante,  la  plus  variée,  montant,  descendant,  variant  à 
chaque  instant:  tantôt  c'est  le  centre,  tantôt  l'aile  droite  ou  l'aile 
gauche  qui  s'avance,  se  laisse  distancer,  s'élève  ou  s'abaisse;  les 
ondulations  de  cette  ligne  varient  donc  beaucoup,  mais  celle-ci 
demeure  toujours  continue,  chaque  oiseau  reste  à  côté  de  son  voisin. 
Quand  la  bande  va  s'abattre,  aussitôt  la  ligne  se  fragmente,  les 
oiseaux  se  séparent,  planent,  décrivent  des  cercles,  des  spirales,  puis 
ils  s'abattent  bruyamment,  successivement,  l'un  après  l'autre  près  de 
l'eau.  Il  est  tout  aussi  intéressant  de  voir  leur  ligne  se  reformer;  les 
oiseaux  s'élèvent  décrivent  de  nouveau  des  cercles  qui  montent  de  plus 
en  plus,  grandissent,  puis  tout  à  coup  de  leurs  amas  désordonnés  se 
forme  une  ligne  transversale,  qui  s'accroît  à  chaque  extrémité  par 
l'adjonction  de  nouveaux  arrivants.  A  mesure  que  la  ligne  s'avance, 
on  voit  d'autres  Falcinelles  qui  viennent  s'y  joindre  et  la  prolonger  à 
chaque  extrémité,  et  enfin  toute  la  bande  s'éloigne  en  traversant  l'air 
à  une  grande  hauteur  (1).  » 

Naumann  pense  que  ces  oiseaux  ne  volent  ainsi  que  pendant  les 
migrations,  mais  A.  Brehm  affirme  que  c'est  leur  allure  normale 
chaque  fois  qu'ils  volent  en  troupe. 

Cet  Ibis  est  un  oiseau  diurne  extrêmement  prudent  et  craintif,  mais 
intelligent,  gai  et  enclin  à  provoquer  ses  semblables  ;  il  vit  en  paix 
avec  les  autres  oiseaux,  mais  sans  prendre  part  à  leurs  ébats.  Au 
lever  du  soleil  il  se  rend  dans  les  marécages  pour  y  chercher  sa 
nourriture  et  y  reste  toute  la  matinée;  vers  le  milieu  du  jour  il  prend 
quelque  repos  à  terre  ou  sur  un  arbre  et  recommence  sa  chasse  dans 
l'après-midi  ;  toute  la  bande  s'envole  au  crépuscule  pour  passer  la 
nuit  sur  des  arbres.  Sa  nourriture  consiste  en  vers,  larves,  insectes, 
crustacés,  mollusques,  ainsi  qu'en  reptiles  et  poissons  de  petite 
taille;  cet  oiseau  rend  de  grands  services,  en  Afrique,  en  détruisant 
des  quantités  énormes  de  criquets  dont  il  est  très  friand.  Pour  cher- 
cher sa  nourriture,  il  entre  souvent  dans  l'eau  aussi  profondément 
que  ses  pattes  le  lui  permettent. 

Malgré  sa  vivacité  et  sa  sociabilité,  le  Falcinelle  ne  se  fait  entendre 
que  bien  rarement;  ce  n'est,  pour  ainsi  dire,  que  quand  il  est  surpris 
ou  dans  un  moment  de  frayeur  qu'il  jette  un  cri  rauque  et  faible 
ressemblant  à  rrha  ou  rrâ,  et  encore  ne  le  perçoit-on  qu'à  une  très 

(1)  Naumann,  Vùgel  Deuischlamis,  t,  VIII,  p.  554. 


-  381  - 

courte  distance;  les  jeunes  font  parfois  entendre  un  sifflement 
particulier. 

Dans  certains  pays,  on  chasse  ces  Ibis  pour  leur  chair  qu'on  dit 
excellente. 

Reproduction.  —  Le  Falcinelle  niche  ordinairement  sur  les  arbres 
des  héronnières,  et  parfois  en  compagnie  des  Hérons,  des  Bihoreaux, 
des  Aigrettes  et  des  Cormorans  nains.  Le  nid  est  placé  à  hauteur 
variable  et  il  est  construit  sur  le  même  modèle  que  celui  des  Hérons; 
l'intérieur  est  garni  de  tiges  de  roseaux  et  autres  herbages.  Dans 
certaines  localités,  cet  oiseau  niche  sur  des  monticules  boueux  émer- 
geant des  marais  ou  sur  de  vieilles  souches  de  plantes  aquatiques; 
dans  ce  cas  le  nid  est  formé  de  tiges  et  de  feuilles  de  roseaux. La  ponte 
a  lieu  à  la  fin  de  mai  et  se  compose  de  trois  ou  de  quatre  œufs,  de 
forme  plus  ou  moins  allongée  et  d'un  vert  bleuâtre  sans  taches;  ils 
mesurent  environ  51  millimètres  sur  37. 

M.  Doig  trouva  des  nids  dans  l'Inde  en  juin,  et  M.  Legge  en  vit  à 
Cevlan  en  mars. 


ORDRE  VIII 

LES    I>A.LM:ii>ÈI>ES 

Car.  —  Les  Palmipèdes  se  reconnaissent  à  première  vue  à  leurs 
pieds  palmés.  Le  plus  souvent  ce  sont  les  trois  doigts  antérieurs  qui 
sont  réunis  par  une  palmature  (Canards,  Mouettes,  Plongeons);  par- 
fois cependant,  les  quatre  doigts  sont  ainsi  réunis  (Pélicans,  Cormo- 
rans). La  palmature  peut  être  entière  ou  incomplète,  c'est-à-dire 
n'être  qu'à  peine  échancrée  antérieurement,  comiiie  chez  la  plupart 
des  oiseaux  de  l'ordre,  ou  l'être  profondément  comme  chez  les 
Grèbes.  Les  jambes  et  les  tarses  sont  courts. 

Quant  au  bec,  aux  ailes  et  à  la  queue,  ils  varient  à  l'infini.  Les 
ailes  sont  le  plus  souvent  bien  développées,  mais  chez  quelques-uns 
(Manchots)  elles  sont  tellement  imparfaites,  qu'elles  ressemblent  plus 
à  des  nageoires  qu'à  des  ailes. 

Les  femelles  ont  parfois  un  plumage  différent  de  celui  des  mâles  ; 
certaines  espèces  varient  aussi  de  plumage  suivant  les  saisons. 

Hah.  —  Les  Palmipèdes  sont  répandus  dans  le  monde  entier,  mais 
principalement  dans  la  zone  froide. 

Mœurs.  —  Tous  les  Palmipèdes  sont  de  bons  nageurs  ;  beaucoup 
d'entre  eux  sont  des  voiliers  de  premier  ordre,  mais  il  y  en  a  aussi 
qui  ne  savent  pas  voler  et  qui  ne  marchent  qu'avec  la  plus  grande 
diflâculté.  Ce  sont  en  général  des  oiseaux  très  sociables,  et  ceux  qui 
habitent  les  zones  froides,  émigrent  pour  la  plupart  à  l'approche  de 
l'hiver. 

Ils  se  nourrissent  généralement  d'autres  animaux  proportionnés  à 
leur  taille,  très  peu  se  contentent  d'un  régime  purement  végétal. 

Les  Palmipèdes  sont  plus  ou  moins  féconds,  mais  il  y  en  a  beau- 
coup qui  ne  pondent  qu'un  seul  oeuf.  Ils  nichent  le  plus  souvent  sur 
le  sol,  très  peu  construisent  leur  nid  sur  des  arbres. 

Classification.  —  On  divise  cet  ordre  en  six  sous-ordres,  savoir  : 

1.  Lamellirostres  \  2.  Totipalmes;  3.  Longipennes  ;  4.  Tubinaires-, 
5.  Pygopodes\  6.  Impennés. 


-  383  — 

PREMIER    SOUS-ORDRE 

LAMELLIROSTRES 

Car.  —  Bec  droit,  large,  légèrement  bombé,  pourvu  d'un  onglet 
corné  à  l'extrémité  des  deux  mandibules  et  garni  sur  ses  bords  de 
lamelles  également  cornées  ;  ce  bec  est  recouvert  d'une  membrane 
molle  pourvue  de  nerfs,  ce  qui  en  fait  un  organe  de  tact  des  plus 
sensibles;  mandibule  inférieure  plus  ou  moins  cachée  par  la  supé- 
rieure ou  découverte;  narines  percées  de  part  en  part;  langue 
grande,  charnue  mais  cornée  à  son  extrémité  antérieure  qui  est  fran- 
gée et  dentelée.  Tête  relativement  volumineuse;  cou  plus  ou  moins 
allongé,  parfois  très  long;  corps  trapu,  un  peu  allongé;  ailes  géné- 
ralement étroites,  aiguës,  de  longueur  moyenne;  queue  courte, 
arrondie  ou  conique,  les  rectrices  médianes  dépassant  rarement  les 
autres  de  beaucoup  ;  pattes  de  longueur  moyenne  ou  courtes  ;  doigts 
au  nombre  de  quatre,  les  trois  antérieurs  réunis  par  une  palmature; 
pouce  petit,  souvent  pinné,  ne  portant  sur  le  sol  que  par  son  extrémité. 

Le  plumage  est  serré,  lisse  et  imperméable. 

Ce  sous-ordre  ne  comprend  qu'une  seule  famille,  les  Anatidés,  qui 
se  subdivise  en  cinq  sous-familles  :  les  Ansérinés,  les  Cygninés,  les 
A7iafiné.s,  les  Fuligulinés  et  les  Merginés,  qui  ont  toutes  des  repré- 
sentants en  Belgique. 

FAMILLE  DES  ANATIDÉS 

Car.  —  Ceux  du  sous-ordre. 

Hab.  —  Les  oiseaux  de  cette  famille  ont  des  représentants  dans 
toutes  les  parties  du  monde. 

Mœurs.  —  Tous  les  Anatidés  nagent  avec  agilité  et  sans  fatigue, 
beaucoup  plongent  avec  aisance;  ces  oiseaux  marchent  avec  plus  ou 
moins  de  facilité  ;  quelques  espèces  perchent  volontiers  et  paraissent 
se  plaire  au  milieu  des  branches.  La  plupart  volent  bien  et  rapide- 
ment, mais  ils  ne  peuvent  s'élever  sans  un  grand  effort;  jamais  ils  ne 
planent  et  ils  sont  obligés  de  battre  constamment  des  ailes. 

Ces  oiseaux  sont  en  général  doux  et  sociables,  mais  prudents;  au 
besoin,  ils  déploient  une  ruse  et  un  jugement  dont,  à  première  vue, 
on  ne  les  croirait  pas  capables.  Les  sens  de  l'ouïe,  de  la  vue  et  du 
toucher  sont  bien  développés;  l'odorat  et  le  goût  paraissent  assez 
parfaits.  Ils  se  nourrissent  de  substances  animales  et  végétales. 


—  384  — 

Tous  les  Anatidés  sont  monogames,  mais  leur  fidélité  conjugale 
laisse  parfois  beaucoup  à  désirer.  Les  petits  naissent  couverts  de 
duvet;  ils  quittent  le  nid  dès  qu'ils  sont  secs  et  croissent  très  rapi- 
dement. 

Un  grand  nombre  de  ces  oiseaux .  vivent  et  se  reproduisent  en 
domesticité;  les  espèces  voisines  se  croisent  souvent  entre  elles  et 
produisent  des  métis  parfois  féconds, 

SOUS-FAMILLE 

DES  ANSÉRINÉS.  —  ANSERIN/E. 

Car.  —  Bec  aussi  long  ou  moins  long  que  la  tête,  convexe  supérieu- 
rement, aplati  en  dessous,  plus  haut  que  large  à  la  base,  diminuant 
en  hauteur  d'arrière  en  avant  ;  mandibule  inférieure  découverte;  ailes 
assez  larges,  longues,  atteignant  souvent  ou  dépassant  même  l'extrémité 
de  la  queue,  armées  au  poignet  d'une  tubérosité  dure,  qui,  chez  quelques 
espèces,  se  transforme  en  un  vigoureux  éperon  ;  jambes  insérées  vers  le 
milieu  du  tronc;  tarses  de  longueur  moyenne,  médiocrement  comprimés; 
doigts  antérieurs  réunis  par  une  palmature  entière,  parfois  échancrée,  mais 
l'extrémité  des  doigts  est  rarement  libre;  ongles  courts,  forts,  légèrement 
recourbés  ;  queue  courte,  arrondie,  égale,  formée  de  quatorze  à  vingt 
rectrices. 

Hah.  —  Cette  division  a  des  représentants  dans  toutes  les  parties 
du  monde,  mais  chaque  partie  du  globe  terrestre  a  des  espèces  qui 
lui  appartiennent  en  propre. 

Mœurs.  —  Les  Ansérinés  sont  moins  aquatiques  que  les  autres 
Lamellirostres  et  passent  une  grande  partie  de  leur  vie  sur  la  terre 
ferme  ;  quelques-uns  sont  même  arboricoles  {Chenalopeœ,  Nettapus), 
se  reposent  et  nichent  sur  les  arbres.  Ils  sont  aussi  plus  agiles  et  mar- 
chent mieux  que  les  autres  membres  de  la  famille,  mais  ils  nagent 
moins  vite  et  plongent  moins  volontiers.  Ils  volent  avec  légèreté  et 
franchissent  d'une  traite  des  espaces  considérables. 

Ces  oiseaux  se  défient  de  l'homme  et  l'évitent  en  toute  occasion  ; 
mais  une  fois  captifs,  ils  se  soumettent  à  leur  sort  et  s'apprivoisent 
bientôt.  Quelques-uns  sont  querelleurs  et  despotiques,  mais  la  plupart 
sont  très  sociables,  du  moins  vis-à-vis  de  leurs  semblables.  Il  est  vrai 
qu'il  y  a  souvent  des  combats  entre  les  mâles  pour  la  possession  d'une 
femelle  ;  mais  une  fois  que  chacun  a  conquis  sa  compagne,  les  divers 
couples  vivent  en  paix  et  nichent  les  uns  à  côté  des  autres.  Brehm  dit 


—  385  - 

que  le  mâle  témoigne  à  sa  femelle  une  fidélité  inébranlable,  et  que 
les  unions  ne  sont  dissoutes  que  par  la  mort  de  l'un  des  conjoints. 

Tous  les  oiseaux  de  ce  groupe  sont  herbivores  :  ils  vivent  d'her- 
bages, de  feuilles,  de  fruits,  de  baies  et  de  céréales;  là  où  ils  sont 
nombreux,  ils  peuvent  occasionner  des  dégâts  assez  sérieux. 

GENRE  CXL. 

BERxVACHE.   —  BRANTA. 

Anser,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  304  (1760). 

Anas,  Lin.  St/sl.  mit.   I,  p.  198  (1766). 

Branta,  Scop.  Ann.  I.  Hiit.  nat.  p.  67  (1769). 

Bernicla,  Boie,  Isù^  1822,  p.  563. 

RuFiBRENTA,  Bonap.  Comp.rend.  XLIII,  p.  048  (1856). 

Car.  —  Bec  petit,  beaucoup  plus  court  que  la  tête,  plus  haut  que  hirge  a 
la  base,  droit,  convexe,  légèrement  déprimé  en  avant  des  narines  et  terminé 
par  un  onglet  fortement  recourbé  ;  lamelles  complètement  cachées  par  la 
mandibule  supérieure  ;  narines  elliptiques,  latérales,  percées  dans  une  mem- 
brane à  égale  distance  du  sommet  et  de  l'extrémité  de  la  mandibule  ;  ailes 
longues,  aiguës  ;  queue  courte,  arrondie  ;  bas  des  jambes  emplumé  ;  tarses 
robustes,  un  peu  plus  longs  que  le  doigt  médian. 

Hab.  —  Les  espèces  de  ce  genre  habitent,  en  été,  la  zone  polaire; 
elles  hivernent  sur  les  côtes  de  la  zone  tempérée. 

243.  —  La  Bernache  ou  Oie  à  joues  blanches 
BRANTA  LEUCOPSIS,  Bann.  ex  Bechst. 

(PI.  242) 

Anser  bernicla  et  A.  Bernicla  minor,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  300-302  (1760). 

Anas  bernicla,  (part.)  Lin.  Si/st.  nat.  I,  p.  198  (1766). 

Anas  leucopsis,  Bechst.  Ornith.  Taschenb.  Il,  p.  424(1803). 

Anser  leucopsis,  Bechst,  Nutury.  Deictschl.  III,  p.  921  (1809). 

Bernicla  leucopsis,  Boie,  Isis.,  1822,  p.  563. 

Anser  erythropus,  Degl.  (necLin.)  Orn.  eur.  II,  p.  402  (1849). 

Branta  leucopsis,  Bannist.  Proc.  Acad.  nat.  se.  Philad.  1870,  p.  131. 

Die  Weisswanuen-Gans,  en  allemand. 

The  Bernacle  Goose,  en  anglais. 

De  Brandgans,  en  flamand. 

Taille:  0,6G  ;  ailes  0,44;  bec  0,031. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  Front,  joues  et  gorge  blancs  avec 
une  légère  teinte  d'un  roux  jaunâtre  mais  peu  apparente;   lorums,  vertex. 
Tome  II.  —  1891.  49 


386  — 


cou,  haut  (Je  la  poitrine  et  du  dos  d'un  beau  noir  lustré;  scapulaires  et  cou- 
vertures supérieures  des  ailes  d'un  gris  cendré,  terminées  par  une  large  bande 
noire  suivie  d'un  bord  blanc;  rémiges  noires,  bordées  extérieurement  de  gris 
sur  la  majeure  partie  de  leur  étendue;  bas  du  dos,  croupion,  queue  et  bas 
des  jambes,  noirs  ;  sus-caudales  et  toutes  les  parties  inférieures  à  partir  de  la 
poitrine,  d'un  blanc  assez  pur  avec  quelques  bandes  cendrées  sur  les  flancs. 
Bec  et  pattes  noires;  iris  brun.  —  La  femelle  est  toujours  un  peu  plus  petite 
que  le  mâle. 

Jeune  de  Vannée.  —  Se  distingue  de  l'adulte  par  les  lorums  tachés  de  brun 
noirâtre,  le  noir  de  la  tête  et  du  cou  tirant  sur  le  brun,  les  bordures  blanches 
des  scapulaires  et  des  couvertures  des  ailes  plus  larges,  et  en  général  par  des 
teintes  moins  pures.  Bec  et  pattes  d'un  brun  noirâtre. 

jjab.  —  La  Bernache  à  joues  blanches  passe  la  belle  saison  dans  la 

^  partie  la  plus  septentrionale  de 
l'Europe, c'esi^-dire  au  Spitzberg 

tisj^tlf  If  :  M.  'UfS^M-itlii^i  i  (^^  Heuglin) ,  à  la  Nou velle-Zem- 


|,  Li[|^^|P|Ai"i:>^:f^,M  ble  {Nordenskiôld)  et  peut-être 
A  dans  le  nord  de  l'Islande  (Faber) 
et  du  Groenland  ;  c'est  donc  une 
espèce  polaire.  A  l'approche  de 
^3  l'hiver  elle  émigré  et  se  montre 
alors  par  bandes  dans  le  sud  du 
Groenland  {Holbôll)  et  de  l'Islande  {Faber),  ainsi  que  sur  les  côtes  de 
la  Norwège  (Co//e^^)  et  de  la  Suède  [Nilsson),  mais  elle  est  rare  sur 
celles  de  Finlande  [Buchner)  et  de  la  Russie  occidentale;  dans  la  vallée 
de  l'Oural  elle  est  cependant  plus  abondante,  lors  des  migrations,  que 
rOie  à  front  blanc,  et  on  la  voit  alors  souvent  sur  les  lacs  environnants 
{Sabanàeff')',  elle  est  rare  en  Pologne  {Taczanowski).  Cet  oiseau  se 
montre  régulièrement  sur  les  côtes  du  Danemark,  du  nord  de  l'Alle- 
magne, de  la  Hollande,  de  la  Belgique  et  du  nord  de  la  France, 
surtout  pendant  les  hivers  rigoureux,  mais  ne  visite  que  très  acciden- 
tellement les  plages  du  midi  de  la  France  {Gerbe)  et  de  l'Espagne, où 
il  a  été  capturé  près  de  Séville  {Irby,  Saunders)  et  dans  la  province  de 
Gérona  {Vayreda)  ;  on  l'observe  régulièrement  sur  les  côtes  belges  de 
novembre  à  mars,  mais  rarement  à  l'intérieur  du  pays:  on  l'a  cepen- 
dant capturé  sur  la  Meuse  près  de  Namur  {de  Selys),  prés  de  Hasselt 
{Claes)  et  plus  souvent  près  d'Anvers  [Croegaert). 

Cet  oiseau  est  de  passage  accidentel  aux  îles  Féroé  {Feilden)  et 
hiverne  communément  aux  îles  Britanniques,  surtout  sur  les  côtes 
occidentales  de  l'Ecosse  ;  il  est  plus  localisé  en  Irlande  ou  on  l'observe 


-  387  — 

particulièrement  dans  les  parties  septentrionales  et  nord-ouest  {See- 
bohm)  ;  il  visite  également  les  îles  Shetland  {Saœbî/).Ssi  présence  dans 
l'intérieur  de  l'Europe  est  toujours  un  fait  accidentel,  c'est  ainsi  que  deux 
captures  ont  été  faites  en  Bohême  (Fritsch)  et  une  en  Italie  {Giglioli). 
Cette  Bernache  se  montrerait  aussi  accidentellement  en  Amérique 
dans  la  baie  d'Hudson  {Coues),  et  plus  accidentellement  encore  dans 
le  nord  de  la  Caroline  {Lawrence)  ;  mais,  suivant  Baird,  l'apparition 
de  cette  espèce  dans  l'Amérique  du  Nord  serait  fort  douteuse. 

Mœurs.  —  Cette  Bernache,  aussi  appelée  Bernache  nonnette, 
quitte  les  contrées  boréales  en  septembre  et  y  retourne  en  avril.  Faber 
dit  qu'elle  arrive  en  Islande  vers  la  fin  de  la  première  quinzaine 
d'avril  et  qu'elle  visite  alors  en  troupes  les  vallées,  les  prés  et  les 
champs  jusque  vers  la  fin  de  mai;  elle  disparait  alors  complètement 
de  l'île,  car  on  ne  l'y  a  jamais  vue  en  été;  il  se  peut,  cependant,  que 
quelques  couples  nichent  sur  des  plages  désertes  du  nord  de 
l'Islande.  Elle  revient  par  bandes  dans  les  premiers  jours  de  septembre 
pour  disparaître  de  nouveau  vers  le  milieu  d'octobre  ;  c'est  donc, 
pour  l'Islande,  un  oiseau  de  passage. 

Les  migrations  ont  lieu  graduellement  à  mesure  que  le  froid 
devient  plus  intense  et  se  font  le  plus  souvent  le  long  des  côtes  mari- 
times ;  il  est  rare  que  les  bandes  suivent  le  cours  des  fleuves,  et  c'est 
la  raison  pour  laquelle  ces  oiseaux  sont  si  rares  dans  le  centre  de 
l'Europe.  Les  Bernaches  voyagent  donc  par  troupes  ou  en  bandes  plus 
ou  moins  nombreuses  et  toujours  en  plein  jour  ;  les  individus  isolés  se 
joignent  souvent  à  des  bandes  d'Oies  cendrées  ou  des  champs  qui  les 
entraînent  alors  parfois  à  l'intérieur  du  continent  loin  des  bords  de 
la  mer. 

Cet  oiseau  ressemble  aux  vraies  Oies  par  sa  manière  d'être  :  il 
marche  avec  facilité  et  court  même  assez  vite  quand  c'est  nécessaire  ; 
en  nageant,  il  tient  ordinairement  le  cou  droit  et  le  corps  peu  enfoncé 
dans  l'eau.  Son  vol  est  facile  et  gracieux,  l'oiseau  décrit  avec  aisance 
dans  les  airs  les  courbes  les  plus  capricieuses,  même  quand  il  y  a 
grand  vent.  Il  se  plaît  surtout  près  de  la  mer,  mais  visite  souvent  les 
lacs,  les  cours  d'eau  et  les  marais  du  voisinage  et  cherche  surtout  sa 
nourriture  dans  les  prés  et  les  champs. 

La  Bernache  à  joues  blanches  est  assez  farouche, mais  moins  que  la 
plupart  des  Oies;  elle  est  sociable  sans  cependant  rechercher  la 
société  d'autres  palmipèdes,  à  moins  qu'elle  ne  se  trouve  isolée  de  ses 
semblables  ;  c'est  ainsi  que  M.  CoUott  a  vu  un  individu  nager  dans  le 


-  388  - 

Porsatigerfjord  au  milieu  d'une  troupe  d'Eiders.  Son  cri  est  rauque  et 
ressemble  à  kah  prolongé  suivi  de  kak,  liak  d'un  ton  bref,  mais  elle  ne 
se  fait  pas  entendre  souvent  et  répète  rarement  son  cri,  sauf  quand 
elle  voyage  en  bande. 

La  nourriture  de  cet  oiseau  consiste  principalement  en  substances 
végétales  qu'il  trouve  dans  les  prés  et  les  champs  ;  il  vit  surtout  d'her- 
bages, de  bourgeons,  de  graines  diverses,  de  céréales  et  de  préfé- 
rence d'avoine.  Suivant  Naumann,  il  mange  aussi  des  algues  marines, 
des  larves  aquatiques,  des  vers  et  des  insectes.  En  captivité  on  peut 
le  nourrir  comme  les  Oies  domestiques. 

Reproduction.  —  Cette  espèce  ne  se  reproduit  que  dans  les  parties 
les  plus  boréales  de  l'Europe,  c'est-à-dire  au  Spitzberg,  à  la  Nouvelle- 
Zemble,  et  peut-être  dans  le  nord  du  Groenland  et  sur  la  côte  nord- 
ouest  de  la  Sibérie  près  de  la  mer  de  Kara. 

M.  Collett  dit  avoir  reçu  en  1S70  de  M.  Irgens,'1îeux  œufs  trouvés 
à  Borgevaer,  l'une  des  îles  Lofoten  les  plus  septentrionales  (68°15'), 
et  provenant  d'une  Oie  «  ayant  les  joues  blanches,  le  restant  du  plu- 
mage et  les  pieds  de  couleur  sombre  et  ressemblant  un  peu  à  un  Cor- 
moran. »  Ces  œufs,  que  M.  Collett  croit  pouvoir  attribuer  à  la  Ber- 
nache  qui  nous  occupe,  avaient  une  coquille  épaisse,  poreuse,  d'un 
blanc  brillant  avec  une  légère  teinte  jaunâtre  ;  ils  mesuraient  67  mm. 
sur  45  et  46  1/2.  —  Suivant  Brehm  et  Paessler  (1),  la  Bernache  à 
joues  blanches  niche  au  bord  des  fleuves  et  des  lacs,  ainsi  que  dans 
les  marécages;  la  femelle  déposerait  de  six  à  dix  œufs  lisses,  peu  lui- 
sants, à  grain  fin  et  d'un  blanc  un  peu  jaunâtre;  les  tigures  qu'en 
donne  Baedeker  mesurent  72  à  77  millim.  sur  47  à  51  millim. 

Comme  on  le  voit,  on  ne  connaît  encore  rien  de  bien  certain  sur  la 
propagation  de  cette  espèce  ;  Brehm  et  Paessler  ne  disent  pas  la  source 
de  leur  renseignement  et  la  ponte  qu'ils  indiquent  paraît  exagérée. 

244.   —   La  Bernache  à  collier  ou  cravant. 
BRANTA  BRENTA  {BHss.) 

(PI.   243) 

Anser  BRENTA,  Briss.  Ornilli.  VI.  p.  304  (1760). 
Anas  bernicla,  Lin.  Syst.  'iint.  I,  p.  198  (1766). 
Branta  bernicla.  Soop.  Ann.  I.  Hist .  vit.,  p.  67'  (1769). 
Anas  brenta,  Tnnst.  Orn.  Brù.,  p.  4  (1771). 

(i)  Baedeker,  Die  Eier  d.  Eui-op,   Va-^eL  texte  de  la  pi.  63. 


—  389  — 

An  AS  MONACHUs,  Bescke,  Beitr.  Naturg.  Vogel  Kurlands,  p.  45  (1792). 

Amser  torquata,  Bechst.  Naturg.  Deiitschl.  III,  p.  911  (1809). 

Anser  bernicla,  \W.\g.  Prodr.,   p.  277  (1811). 

Bernicla  torquata,  Boie,  Isis,   1822,  p.  563. 

Bernicla  brenta,  ^iQ)^\i.  Shaxo's  Gen.  Zool.  XII,  2,  p    46  (1824). 

Bernicla  glaucogaster,  micropus,  platyuros,  collaris,  Brehni,  Ids,  1830,  p. 996. 

Bernicla  melanopsis,  Macgill.  Mm.  Brit.  Om.  II,  p.    151  (1842). 

Bernicla  pallida,  Bi-ehm,  Naumannia,   1855,  p.  2.17. 

Brenta  bernicla,  Heagl.  Reisen  Nordpolarmeer,  III,  p.    132  (1874). 

Anser  brenta  glaucogaster,  Seeb.  Bril.  B.  IH,  p.  508  (1885). 

Die  Ringelgans,  en  allemand. 

The  Brent  Goose,  en  anglais. 

De  Rotgans,  en  flamand. 

Var.  Nigricans 

Anser  nigricans,  Lawr.  Anyi.  Li)c.  X.  Y.  IV,  p.   171   (1846). 

Bernicla  nigricans,  Cass.  ILl.  B.  of  Cnl.,   Ter.  elc  ,  p.  ,52,  pi.    10  (1856). 

Branta  nigricans,  Bann.  Proc.  Phil.  Acad.,  1870,  p.  131. 

Branta  bernicla  var.  Nigricans,  Coues,  Key,   1872,  ]i.  284. 

Anser  bernicla  (part.),  Schleg.  Mus.  des  P.-B.  Anseres.,  p.    103  (1866). 

Trdlle  -.  0"'50  ;  ailes  0,33  ;  bec  0,034  (à  partir  du  front). 

Deserlptiondes  deux  sexes  adultes.  —  Tête,  cou.  haut  à>^  la  poitrine  d'un  noir 
un  peu  grisâtre,  avec  un  espace  blanc  maculé  de  noir  de  chaque  côté  à 
la  partie  supérieure  du  cou;  manteau,  scapulaires  et  couvertures  des  ailes 
d'un  cendré  brunâtre  avec  les  plumes  bordées  d'une  teinte  plus  claire;  poi- 
trine, abdomen  et  flancs  d'uti  cendrô  plus  pâle  que  le  dos,  avec  les 
plumes  des  flancs  terminées  de  cendré  blanchâtre;  rémiges  et  queue 
d'un  brun  noirâtre;  croupion  noirâtre;  bas-ventre  et  côtés  du  croupion 
d'un  blanc  pur;  sus  et  sous-caudales  blanches  et  atteignant  l'extrémité  de 
la  queue  qu'elles  cachent  presque  complètement.  Bec  et  pattes  noirs  ;  iris 
brun  foncé.  —  La  femelle  est  plus  petite  et  les  parties  inférieures  du  corps 
sont  plus  pâles. 

Jeune.  —  Tête,  cou  et  haut  de  la  poitrine  d'un  gris  plus  b'unâtro  et  moins 
brillant  que  chez  l'adulte;  dessus  du  corps  d'un  gris  cendré  foncé  avec  les 
phimes  plus  ou  moins  bordées  de  cendré  clair;  rémiges  et  rectrices  noirâtre,^, 
CCS  dernières  terminées  de  blanchâtie  ;  les  taches  blanches  des  côtés  du  cou 
n'existent  pas  encore  ou  sont  à  peine  marquées.  Pattes  d'un  noir  rougeâtre. 

Var.  Nigricans.  —  Cette  variété  diffère  du  type  européen  par  ses  teintes 
plus  sombres  et  pai-  les  bordures  blanchâtres  des  plumes  des  flancs  phis 
larges;  elle  se  distingue  surtout  par  les  deux  espaces  blancs  du  cou,  qui  se 
réunissent  en  avant  pour  former  im  collier  complet  interrompu  seulement  sur 
la  nufpie.  A  eu  juger  par  l'individu  (lue  j'ai  sous  les  yeux  (un  mâle  de  l'île' 
Vancouver),  le  bec  est  aussi  un  peu  plus  robuste  (pie  cIk/.  les  sujets  de 
l'Europe. 


—  390  — 

Remarque.  —  Suivant  M.  Seebohm,  les  sujets  de  la  côte  nord- 
ouest  du  Groenland  se  distingueraient  de  ceux  de  l'Europe  boréale, 
par  la  coloration  des  parties  inférieures  qui  serait,  à  partir  de  la 
poitrine,  presque  d'un  blanc  pur.  Il  désigne  cette  race,  d'après 
C.  Brehm,  sous  le  nom  de  Glaucogaster  (1). 

Des  individus  de  cette  variété  se  montrent  accidentellement  sur  les 
côtes  des  îles  Britanniques,  et  Brehm  a  signalé  une  capture  près  de 
Ilmenau  sur  l'Elbe  (Hanovre). 

Hab.  —  L'Oie  à  collier,  ou  Bernache  cravant,  niche  dans  la  zone 

m  polaire  au-delà  de  70"  1.  N.  Au 
Spitzberg  elle  est  bien  plus 
commune  que  l'espèce  précé- 
dente et  se  montre  jusque  dans 
les  parties  les  plus  septentrio- 
■^l  nales,  ainsi  que  sur  toutes  les 
côtes  de  la  Nouvelle-Zemble  {de 
Hcuglin);  elle  niche  également 
à  l'embouchure  du  Taimyr  et  du 
Boganida  {Middendorff).  Au  Groenland  elle  ne  niche  qu'au  nord 
du  73"  {de  He^iffh'n),  et  il  en  est  peut-être  de  même  aux  îles  améri- 
caines de  la  mer  Polaire. 

Lors  des  migrations,  ces  palmipèdes  visitent  par  bandes  plus  ou 
moins  nombreuses  les  îles  Féroé  (Feilden),  les  côtes  de  la  Scandinavie 
[CoUett,  Nilsson),  de  la  Russie  occidentale  {Palmèn)  et  l'Islande,  où 
ils  sont  cependant  rares  [Faber).  Ils  hivernent  sur  les  côtes  du  nord 
de  l'Allemagne  [Borggreve],  du  Danemark,  de  la  Hollande,  de  la 
Belgique,  des  îles  Britanniques  et  du  nord  de  la  France,  mais  ils 
sont  beaucoup  plus  rares  sur  les  côtes  du  midi  de  la  France.  On 
n'observe  cette  espèce  que  très  accidentellement  sur  les  côtes  de 
l'Espagne  {Vayreda),  du  Portugal  [Reyes],  de  l'Italie  [Salvadori, 
Giglioli),  et  on  l'a  même  capturée  sur  les  côtes  de  l'Algérie  {Loche), 
de  l'Egypte  {de  Heu  g  lin)  et  de  la  Palestine  {Tristram),  mais  ses 
apparitions  sur  les  côtes  de  la  Méditerranée  sont  toujours  extrême- 
ment rares  et  il  est  probable  qu'elles  coïncident  avec  des  hivers 
exceptionnellement  rigoureux.  On  cite  également  quelques  captures 
accidentelles  en  Transylvanie  [Danfoy^d  et  Harwie-Brown),  en 
Bohême  (Fritsch),  en  Hongrie  (Afw.9.  de  Vienne),  en  Pologne  {Tacza- 


[\j  il.   "Sieh  nnw,  Ih-tt.ish  Jîirds,  ill,   ji.   50>  (1685.) 


—  394  — 

nowski.  En  Belgique  cette  Bernaclie  se  montre  par  bandes  sur  les 
côtes  de  Flandre  et  sur  l'Escaut. 

Dans  le  nord-est  de  l'Amérique,  on  observe  cette  espèce,  durant 
l'hiver  dans  la  baie  d'Hudson  et  sur  les  côtes  de  l'Atlantique  ;  elle 
pousse  parfois  ses  migrations  jusque  sous  le  35°  1.  N,  [Baird,  Coaes). 

La  var.  Nigricans  niche  probablement  dans  les  îles  polaires  du 
nord-ouest  de  l'Amérique  et  près  du  cap  de  Barrow;  elle  est  de 
passage  dans  l'Alaska  (Turner)  et  hiverne  sur  les  côtes  américaines 
du  Pacifique,  accidentellement  sur  celles  de  l'Atlantique  [Coues)  et 
dans  le  nord  du  Japon  (Seebohm)  ;  elle  est  de  passage  aux  îles 
Comandores  {Stejneger). 

Mœurs.  —  Ces  Bernaches  quittent  les  régions  polaires  dès  que  le 
froid  y  devient  intense,  et  apparaissent  alors  en  novembre  par  milliers 
sur  les  côtes  de  la  Baltique  et  de  la  mer  du  Nord,  volant  autant  au- 
dessus  de  la  pleine  mer  que  le  long  des  côtes;  ce  n'est  qu'accidentel- 
lement que  quelques  sujets  s'égarent  pi'ès  des  tieuves  et  des  lacs  de 
l'intérieur,  car  ce  sont  essentiellement  des  oiseaux  marins. 

Ce  sont  aussi  des  oiseaux  très  sociables  entre  eux,  mais  ne  se 
mêlant  pas  aux  Bernaches  à  joues  blanches;  comme  les  deux  espèces 
fréquentent  les  mêmes  lieux,  elles  doivent  évidemment  se  rencontrer 
souvent,  mais  elles  ne  se  confondent  pas,  chaque  espèce  forme  un 
groupe  à  part.  La  Bernaclie  cravant  se  montre  du  reste  indifférente 
à  l'égard  des  autres  oiseaux  et  ne  demande  qu'à  vivre  en  paix.  Elle 
arrive  généralement  sur  nos  côtes  un  peu  plus  tard  que  la  Bernache 
à  joues  blanches,  mais  elle  les  quitte  aussi  après  le  départ  de  cette 
dernière. 

De  même  que  l'espèce  précédente,  la  Bernache  cravant  se  fait 
remarquer  par  ses  formes  élégantes,  ses  mœurs  paisibles  et  la  finesse 
de  ses  sens;  elle  marche  et  nage  avec  aisance,  et  plonge  avec  plus 
de  facilité  que  les  vraies  Oies;  elle  vole  aussi  plus  aisément  que  ces 
dernières,  et  émigré  généralement  par  bandes  désordonnées,  rare- 
ment disposées  en  angle  aigu.  En  volant  elle  produit  un  bruissement 
très  prononcé  et  fait  entendre  des  cris  ressemblant  au  bruit  d'une 
crécelle;  quand  une  bande  s'élève  dans  les  airs,  elle  produit  un  bruit 
assez  semblable  au  roulement  du  tonnerre  dans  le  lointain. 

A  la  fin  de  l'été,  dit  de  Heuglin,  ces  oiseaux  aiment  à  s'attrouper 
en  bandes  énormes  sur  les  écueils  et  les  bancs  de  sable,  d'où  ils 
errent  aux  alentours,  sur  teri'e  et  sur  mei',  pour  chercher  leur  nourri- 
ture. Celle-ci  se  compose  surtout  de  substances  végétales  :  zostères. 


—  392  — 

algues  marines  et  plantes  diverses  croissant  dans  un  terrain  aride 
imprégné  de  sel;  ils  prennent  aussi  des  mollusques,  des  larves 
aquatiques  et  des  annélides  ;  il  est  probable  que  ces  oiseaux  mangent 
aussi  des  graines  diverses  et  des  céréales,  car  en  captivité  on  les 
nouri'it  fort  bien  de  blé  et  surtout  d'avoine. 

Le  calme  qui  règne  dans  les  contrées  polaires  est  cause  que  cette 
Bernache  est  peu  craintive;  tant  qu'elle  n'a  pas  eu  à  subir  les  pour- 
suites de  l'homme,  elle  se  laisse  approcher  sans  défiance  et  on  peut 
môme  parfois  la  tuer  à  coups  de  pierres;  mais  dès  qu'on  lui  fait  une 
chasse  active,  elle  devient  méfiante  et  fuit  à  l'approche  du  chasseur. 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  niche  donc  dans  la  zone  polaire  et 
surtout  au  Spitzberg  et  à  la  Nouvelle-Zemble,  et  construit  son  nid 
sur  la  terre  ferme  aussi  bien  que  sur  les  récifs. 

Dans  son  voyage  au  pôle  Nord,  de  lieugiin  dit  avoir  trouvé  un  nid 
de  cette  Bernache  non  loin  de  nids  d'Eiders  etjde  Mouettes  bourg- 
mestres. Ce  nid  se  trouvait  sur  une  saillie  de  rocher  à  proximité  des 
falaises,  et  consistait  en  une  excavation  assez  étroite  et  peu  profonde, 
garnie  de  mousse  et  de  duvet;  il  contenait,  le  18  juin,  deux  œufs 
fortement  couvés.  —  Le  major  Feilden  trouva  dans  la  troisième 
semaine  de  juin,  sous  le  82  Ys»  1.  N.,  une  demi-douzaine  de  ces  nids 
avec  des  œufs.  Ces  nids  étaient  installés  sur  la  pente  d'une  colline 
dans  de  petites  dépressions  garnies  d'herbe,  de  mousse  et  de  tiges  de 
saxifrages,  le  tout  recouvert  d'une  bonne  couche  de  duvet.  Chacun 
de  ces  nids  contenait  quatre  ou  cinq  œufs  d'un  blanc  crème,  finement 
graines,  peu  brillants  et  mesurant  2.87  à  2.65  pouces  sur  1 .95  à  1.75 
(mesure  anglaise),  soit  une  moyenne  d'environ  70  miUim.  sur  42.  — 
Middendorlf  trouva  des  poussins  déjà  assez  avancés  le  15  juillet,  près 
du  Boganida, 

M.  J.  Murdoch  dit  que  la  var.   Nigricans  pond  de  cinq  à  six  œufs. 

GENRE  CXLI 

OTE.  —  ANSER. 

Anser,  Briss.  Ornith .  YI,  p.  262  (1760). 
Anas,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  197  (1766). 
Branta,  Seop.  Ann.  I.  Uist.  nat.  p.  69  (1769). 

Car.  —  Bec  épais,  à  peu  près  de  la  longueur  de  la  tête,  conique,  très 
élevé  à  la  base  et  terminé  par  un  onglet  large  et  recourbé  ;  lamelles  épaisses, 
dentiformes,  débordant  la  mandibule  supérieure;  narines  elliptiques, 
percées  dans  une  membrane  et  situées  à  égale  distance  des  deux  extrémités 


—  393  — 

du  bec  ;  ailes  aiguës,  atteiguant  parfois  l'extrémité  de  la  queue  ;  celle-ci  de 
longueur  moyenne  et  arrondie  sur  les  côtés  ;  tarses  très  robustes,  à  peu  près 
de  la  longueur  du  doigt  médian,  ongle  compris  ;  pouce  élevé,  ne  touchant 
le  sol  que  par  l'extrémité  de  son  ongle. 

Hab.  —  Les  Oies  habitent  la  zone  boréale  pendant  l'été,  et  hiver- 
nent dans  la  zone  tempérée. 


245.  —  L'Oie   cendrée 
ANSER    CINEREUS,  Meij.  et  Wolf. 

(PL  244) 

ANSEa  sEPTENTRiONALis  SYLVESTRis,  Briss.  Oniith.  VI,  p.  269(1700). 

Anas  ANSER,  Lin.  Sysl.  nat.  L  p.  197  (1766). 

Anser  CINEREUS,  Mey.  u.  "VV.  Taschenb.  deutsch.   Vôgelk.  II,  p,  552(1810). 

Anser  vuLGARis,  Pall.  Zoogr.  liosso-As.  II,  p.  222  (1811). 

Anas  ANSER  ferus,  Temm.  Man.  d'Orn.,  p.  526  (1815). 

Anser  médius,  Mey.  Zus.  te.  Ber.  z.  d.  deutsch.  Vogelk   p.  231  (1822). 

Anser  ferus,  Steph.,  Shaw's  Gen.  Zool.  XII,  2,  p.  28  (1824). 

Anser  palustris,  Flem.  Brit.  An.,  p.  126  (1828). 

Anser  sylvestris,  Brehm  (nec  Bi-iss.)  Isis,  1830,  p.  996. 

Anser  cinereus  var.  Rubrirostris,  Swinh.  Pr.  Zool.  Soc.  1871,  p.  416. 

Die  Grau-Gans,  en  allemand. 

The  Grey-lag  Goose,  en  anglais. 

De  Wilde  Gans,  en  flamand. 

Taille:  0"',79;  ailes  0,46;  bec  0,66. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  Base  de  la  mandibule  supérieure 
bordée  de  petites  plumes  blanches  ;  tête  et  cou  d'un  cendré  brunâtre  avec 
les  bordures  des  plumes  plus  claires,  mais  la  teinte  sombre  dominant  sur  les 
parties  moyennes  du  cou;  manteau  et  scapulaires  d'un  brun  cendré  foncé, 
chaque  plume  terminée  par  un  bord  blanchâtre  assez  large;  milieu  et  bas  du 
dos  d'un  cendré  bleuâtre  ;  sus-caudales  blanchâtres  ;  petites  couvertures  des 
ailes  d'un  cendré  bleuâtre  clair  et  bordées  de  blanc  ;  les  autres  semblables 
aux  scapulaires;  rémiges  primaires  noires,  nuancées  de  cendré  sur  la  barbe 
externe,  avec  les  baguettes  blanches  ;  les  secondaires  brunes  bordées  de 
blanchâtre;  poitrine  d'un  cendré  clair  ondée  de  blanchâtre  sur  les  côtés; 
abdomen  et  sous-caudales  d'un  blanc  assez  pur,  avec  des  taches  noirâtres 
éparses  sur  le  premier  ;  lianes  d'un  brun  cendré  mais  les  plumes  terminées  de 
blanchâtre  ;  rcctrices  médianes  brunes  bordées  et  terminées  de  blanc,  les  laté- 
rales entièrement  blanches.  Hec  d'un  rouge  orange  livide  très  pâle  et  unico- 
ToME  IL  —  lb92  50 


-  394  — 

lore;  iris  brun  clair  ;  pattes  de  couleur  clinir  livide(l). —  La  femelle  ne  diffère 
du  mâle  que  par  une  taille  plus  petite  et  des  formes  plus  grêles,  mais  il  est 
difficile  de  la  distinguer. 

Jeune.  —  Ne  diffère  des  adultes  que  par  l'absence  de  plumes  blanches  à  la 
base  du  bec  et  de  taches  noires  sur  les  parties  abdominales. 

Poussin.  —  D'un  jaune  terne  ;  vertex  et  dos  d'une  teinte  cuivrée  assez 
sombre,  la  base  du  duvet  étant  brune  à  ces  endroits  ;  extrémité  du  duvet 
glacée,  surtout  aux  parties  supérieures  ;  bec  noirâtre  avec  l'onglet  blanchâtre; 
pattes  brunes  lavées  de  jaune,  surtout  aux  membranes. 

Hab. —  Cette  Oie  niche  sur  les  côtes  occidentales  de  l'Ecosse  et  sur 

Bf«^^  les  îles  voisines,  ainsi  que  sur 
le  lac  de  GastleCoole en  Irlande; 
dans  les  autres  parties  des  îles 
Britanniques^lle  se  montre  plus 
ou  moins  régulièrement  aux  pas- 
sages {Seebohm).  Sa  présence  en 
Islande  est  douteuse,  mais  elle 
H  niche  aux  îles  Féroé  {Millier), 
en  Scandinavie,  dans  le  nord  de 
la  Russie  sans  dépasser  le  cercle  polaire,  en  Danemark,  dans  le  nord 
de  l'Allemagne,  dans  la  vallée  du  Danube,  au  Caucase,  et  parfois 
dans  d'autres  pays  encore.  Elle  est  commune,  Jors  des  passages, 
dans  toute  l'Europe  centrale,  et  quand  l'hiver  est  doux,  elle  hiverne 
en  Belgique  dans  les  polders  près  d'Anvers,  mais  les  passages  sont 
toujours  nombreux  près  de  nos  côtes  maritimes.  Elle  hiverne  dans 
certaines  parties  du  midi  de  la  France  [Lacroix),  en  Espagne  (2),  en 
Portugal,  en  Italie  {Giglioli),  en  Turquie,  en  Grèce  [Kriiper),  en 
Palestine  (Tristram),  en  Algérie  [Loche)  et  au  Maroc  [Favier). 

L'Oie  cendrée  est  aussi  fort  répandue  en  Asie  où  ou  la  rencontre 
jusqu'aux  frontières  de  la  Sibérie  orientale  [Taczanowski),  ainsi  que 
dans  l'Amourland  [Schrenck)  et  la  Mongolie  [Przewalski),  mais  en 
Asie  elle  ne  paraît  pas  dépasser  le  55°  1.  N.  Elle  hiverne  dans  l'Asie 


(i)  La  couleur  du  bec  et  des  pattes  permet  de  distinguer  à  première  vue  les  différentes  espèces 
d'Oies  qu'on  observe  dans  le  pays  : 

A.  Bec  jaune  ou  rosé  au  milieu,  (  pattes  jaunes A.  sylvcstris. 

noir  à  la  base  et  à  l'extrémité.  (  pattes    roses A.bracliyrhynchiis. 

B.  Bec  et  pattes  couleur  chair  livide A.  cinercns. 

C.  Bec  et  pattes  jaunes,  front  largement  blanc A.  alhifrons. 

(2).  M.. Reyes  dit  que  l'Oie  cendrée  hiverne  dans  un  grand  nombre  de  localités  de  l'Espagne; 
le  colonel  Irby  dit  qu'elle  y  niche  et  qu'il  a  obtenu  des  œufs  de  ce  pa}s. 


-   395  — 

tempérée,  en  Chine  {David)  et  jusqu'au   centre  de  l'Inde  [Jerdon)  et 
probablement  de  la  Perse. 

Mœurs.  —  Nous  venons  de  voir  que  l'Oie  cendrée  quitte  les  pays 
du  Nord  à  l'approche  du  froid  pour  hiverner  dans  la  zone  tempérée. 
Ces  oiseaux  émigrent  en  famille,  les  parents  avec  leurs  jeunes,  mais 
plusieurs  familles  voyagent  ordinairement  ensemble  ;  la  troupe  tra- 
verse l'espace  en  formant  un  angle  aigu,  et  le  plus  âgé  des  mâles  se 
met  ordinairement  en  avant  pour  la  guider.  Ces  Oies  annoncent  leur 
retour  au  printemps  par  des  cris  joyeux,  et  les  couples  ne  tardent 
guère  à  faire  leurs  préparatifs  pour  nicher. 

Cette  espèce  ressemble  par  ses  allures  à  l'Oie  domestique  qui  en  des- 
cend ;  mais  l'habitude  d'une  vie  indépendante  lui  donne  un  port  plus 
fier  et  des  mouvements  plus  dégagés  et  plus  rapides.  Bien  que  les 
individus  sauvages  se  tiennent  sur  la  terre  ferme  la  majeure  partie  de 
leur  existence,  ils  savent  cependant  nager  pendant  longtemps,  sans 
fatigue,  et  ils  s'aventurent  même  en  pleine  mer  ;  en  cas  de  danger  ils 
plongent  avec  aisance  mais  ne  savent  pas  rester  longtemps  sous  l'eau; 
ils  plongent  aussi  en  jouant  avec  leurs  petits,  et  ceux-ci,  dit  Nau- 
mann,  se  livrent  volontiers  à  cet  exercice  depuis  leur  naissance  jus- 
qu'au moment  où  ils  savent  se  servir  de  leurs  ailes.  Pour  s'élever  dans 
les  airs,  cet  oiseau  donne  de  vigoureux  coups  d'ailes  qui  produisent  un 
certain  bruissement,  mais  une  fois  à  une  certaine  hauteur  il  vole  bien, 
assez  vite  et  d'une  manière  assez  soutenue  ;  en  s'abattant  il  occa- 
sionne le  même  bruissement,  auquel  se  joint  le  clapotement  de  l'eau, 
si  l'oiseau  descend  à  sa  surface.  Quand  un  couple  s'envole  vers  un 
autre  endroit,  la  femelle  précède  généralement  le  mâle. 

C'est  un  oiseau  méfiant  et  prudent;  il  fuit  Ihomme  de  loin,  mais  il 
est  assez  intelligent  pour  distinguer  le  chasseur  du  passant  inoffensif; 
il  ne  se  montre  en  aucune  circonstance  moins  bien  doué  que  la  plupart 
des  autres  oiseaux,  et  le  proverbe  «  bête  comme  une  Oie  »  n'est  nul- 
lement justifié.  Il  est  sociable  avec  les  individus  de  son  espèce,  mais 
ne  se  montre  que  bien  rarement  avec  d'autres.  «  Je  ne  connais  aucun 
exemple,  dit  Naumann,  d'Oie  cendrée  qui  se  soit  jointe  à  d'autres 
espèces  du  môme  genre,  et  l'Oie  dos  moissons  semble  lui  inspirer  une 
antipathie  toute  particulière  ;  quand  celle-ci  a})parait  en  septembre 
dans  une  localité  où  des  Oies  cendrées  ont  niché,  ces  dernières  lui 
font  place  immédiatement  et  disparaissent.  Seules  les  Oies  domes- 
tiques ont  le  don  de  les  attirer,  car  elles  s'approchent  souvent  d'elles 
dans  les  pâturages  et  qu(dques-unes  se  mêlent  même  à  leur  troupeau. 


—  396  — 

Il  est  arrivé  plus  d'une  fois  que  quelques-unes  d'entre  elles  se  soient 
laissées  conduire  avec  des  Oies  domestiques  jusqu'auprès  du  village 
et  ne  se  soient  envolées  qu'au  moment  d'y  entrer.  Il  est  arrivé  aussi 
que  des  mâles  sauvages  se  soient  accouplés  avec  des  femelles  domes- 
tiques, mais  l'inverse  ne  paraît  pas  avoir  été  observé  (1).  » 

La  voix  de  cet  oiseau  ressemble  tellement  à  celle  de  l'Oie  domes- 
tique, qu'il  faut  être  bon  connaisseur  pour  pouvoir  la  reconnaître;  pen- 
dant ses  occupations  aussi  bien  qu'en  volant,  il  fait  entendre 
des  tattattattat  ou  àe^  daddaddaddat  qui  n'en  finissent  pas;  son  cri 
d'appel,  qu'il  pousse  le  plus  souvent  en  volant,  ressemble  à 
kâhkâhhâhh,  parfois  aussi  kihik.  Les  jeunes  ont  le  même  cri  que  les 
poussins  des  Oies  domestiques.  Quant  au  régime,  il  ne  diffère  pas  de 
celui  de  ces  dernières  et  se  compose  de  graines,  de  bourgeons,  de 
jeunes  feuilles,  d'herbes  tendres,  de  jeunes  pousses  de  céréales,  de 
trèfles,  etc.  — 

Prises  jeunes  ou  adultes,  les  Oies  cendrées  s'apprivoisent  toujours 
assez  vite,  mais  si  on  ne  les  retient  pas  de  force,  elles  émigrent  dès 
que  le  moment  est  arrivé  ;  il  y  en  a  bien  qui  reviennent  parfois  à  la 
ferme  où  elles  ont  été  élevées,  mais  c'est  rare.  Boie  raconte  cependant, 
qu'une  Oie  cendrée  apprivoisée  quittait  chaque  automne  la  ferme 
qu'elle  habitait  et  revenait  au  printemps,  privée  et  confiante  dès  le 
premier  jour,  mangeant  dans  la  main,  ne  craignant  personne;  il  en 
fut  ainsi  treize  années  de  suite,  et  pendant  ces  treize  années,  jamais 
elle  n'apparut  avant  le  l*^^""  avril,  ni  plus  tard  que  le  4,  par  conséquent 
toujours  plusieurs  semaines  après  les  autres  Oies  sauvages.  Comme 
les  sujets  domestiques  peuvent  atteindre  un  âge  très  avancé,  plus  de 
60  ans  dit-on,  il  est  probable  que  les  individus  sauvages  jouissent  du 
même  privilège. 

Reproduction.  —  Cette  espèce  niche  dans  les  marécages,  les 
étangs,  les  fossés  inondés  qui  bordent  les  pâturages,  pourvu  que  les 
lieux  soient  bien  garnis  de  roseaux  et  de  divers  herbages  élevés.  Dans 
l'Europe  centrale  ces  Oies  reviennent  ordinairement  dans  la  première 
quinzaine  de  mars  ;  les  adultes,  accouplés  antérieurement,  se  mettent 
aussitôt  à  la  recherche  d'un  endroit  convenable  pour  la  construction 
de  leur  nid.  Les  mâles  de  deux  ans,  qui  se  reproduisent  pour  la  pre- 
mière fois,  se  livrent  souvent  de  violents  combats  pour  la  possession 
d'une  femelle,  se  frappent  des  ailes,  se  mordent  au  cou  jusqu'à  ce  que 


(1)  Vô^el  Deutschlands,  XI,  p.  246. 


—  397  - 

l'un  des  deux  adversaires  abandonne  la  place.  Les  femelles  assistent 
d'ordinaire  à  la  lutte  en  faisant  entendre  leur  bruyant  babillage,  mais 
paraissent  peu  s'intéresser  au  résultat  du  combat.  Quant  aux  jeunes 
de  l'année  précédente,  et  encore  incapables  de  se  reproduire,  ils  se 
rassemblent  dans  une  autre  partie  du  marais  où  ils  se  livrent  insou- 
ciants à  leurs  joyeux  ébats. 

Chaque  mâle  no  prend  qu'une  femelle  et  cette  union  ne  cesse  qu'à 
la  mort  de  l'un  des  conjoints.  Certains  mâles  se  permettent  bien  quel- 
quefois, mais  c'est  l'exception,  d'aller  trouver  des  femelles  non  accou- 
plées, surtout  quand  leur  compagne  est  occupée  à  couver  ;  mais  en 
général,  le  mâle  fait  ardemment  la  cour  à  sa  compagne,  tourne  autour 
d'elle  dans  une  attitude  fière  et  en  hochant  la  tête,  la  suit  partout, 
veille  soigneusement  à  sa  sécurité  et  l'avertit  du  danger.  Il  se  montre 
aussi  jaloux  que  fidèle  et  attaque  courageusement  tout  mâle  céliba- 
taire qui  s'approche  de  sa  femelle. 

L'emplacement  du  nid  est  choisi  avec  grand  soin  dans  les  parties  les 
plus  cachées  et  les  plus  inaccessibles  des  marais.  Les  différents  couples 
nichent  l'un  près  de  l'autre,  mais  chacun  a  son  petit  domaine  dans 
lequel  il  ne  tolère  aucun  intrus.  La  femelle  rassemble  activement  les 
matériaux  nécessaires  à  son  nid;  le  mâle  l'accompagne  pas  à  pas,  mais 
ne  prend  aucune  part  au  travail.  La  base  du  nid  est  formée  de  bran- 
chages, de  tiges  et  de  feuilles  de  roseaux,  de  joncs,  etc.,  le  tout  gros- 
sièrement entrelacé  ;  l'excavation  ménagée  au  centre  est  garnie  de 
matériaux  plus  fins  et  parfois  de  mousse.  Ce  nid  a  de  60  à  90  centi- 
mètres de  diamètre  sur  30  à  40  de  hauteur  ;  mais  à  force  de  le  fouiller 
la  femelle  l'aplatit  de  plus  en  plus,  de  façon  à  en  réduire  considéra- 
blement la  hauteur.  L'époque  de  la  ponte  varie  suivant  le  climat  : 
dans  le  nord  de  l'Allemagne  elle  a  lieu  dans  le  courant  de  mars,  en 
Norwège  en  mai,  et  sous  le  cercle  polaire  plus  tard  encore. 

Quand  la  femelle  commence  à  pondre,  elle  dépose  journellement  un 
œuf,  et  chaque  fois  qu'elle  quitte  son  nid,  elle  recouvre  les  œufs  du 
duvet  qu'elle  s'est  arraché.  Les  femelles  qui  pondent  pour  la  première 
fois  ne  donnent  que  cinq  ou  six  œufs,  colles  qui  sont  plus  âgées  en 
déposent  de  sept  à  dix  ;  il  est  fort  rare  de  trouver  des  nids  avec  un 
plus  grand  nombre  d'œufs,  mais  une  femelle,  d'un  certain  âge  peut 
déposer  jusqu'à  quatorze  œufs.  Ceux-ci  ne  sont  presque  pas  à  distinguer 
de  ceux  do  l'Oie  domestique  :  ils  soiii  d'un  blanc  jaunâtre,  tirant 
légèrement  sur  l'olivâtre  et  mesurent  environ  85  millimètres  sur  62. 

Les  jeunes  écloseiit  au  bout  do  vingt-huit  jours;  ils  quittent  leur 


—  398  — 

nid  vingt-quatre  heures  après  leur  naissance  pour  suivre  leur  mère, 
qui  les  conduit  à  l'eau  et  leur  apprend  à  chercher  leur  nourriture  ; 
celle-ci  consiste  d'abord  en  lemmacées  (lenticules)  et  autres  plantes 
aquatiques;  plus  tard,  ils  vont  paître  dans  les  champs  et  les  prés. 
Au  coucher  du  soleil,  tous  retournent  au  nid,  tant  que  celui-ci  est  en 
état  de  les  contenir.  La  vigilance  du  mâle  augmente  encore  avec  la 
paternité,  il  suit  sa  famille  partout,  la  tête  haute,  regardant  de  tous 
côtés,  inquiet  sur  la  siîreté  des  siens,  et  en  cas  de  danger  c'est  lui  le 
premier  qui  donne  le  signal  de  la  fuite. 

246.  —  L'Oie   des  moissons 
ANSER  SYLVESTRIS,  Briss. 

(PI.    245)  "^~ 

Anser  SYLVESTRIS,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  265  (1760). 
Anas  fabalis,  Lath.,  Gen.  Syn.  Suppl.  I,  p.  207  (1787). 
Anas  segetum,  Gmel.,  Syst.  nat.  I,  p.  512  (1788). 
Anser  segetum,  Mey.  et  W.  Taschenb.  deut.  Yogelk.  II,  p.  554  (1810). 
Anser  RUFESCENS,  Breh.,   Beitr.  z.  Vogelk.  111,  p.  871  (1822).     . 
Anser  ferus,  Flem.,  Brit.  anim.^  p.  126  (1828). 
Anser  PLATYUROS,  arvensis  et  obscurus,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  996. 
Anas   paludosus,  Strickl.,   Ann.  Mag .    nat.    Hist.  séries  3, 111,  p.  124,  pi.  4,  fig.  1 
(1859). 

Die  Saatgans,  en  allemand. 
The  Bean-Goose,  en  anglais. 
De  Rietgans  et  Wullegans,  en  flamand. 

Var.  Serrirostris 

Anser  grandis,  Midd.  (nec  Pall.)  Sibir.  Reise,  p.  225,  pi.  XX,  f.  1  (1847). 
Bernicla  GRANDIS,  Gray,  Ge7t.  ofB.  111.  p.  608  (1849). 
Anser  segetum  car.  Serrirostris,  Swinh.  Proc.  zool  Soc,  1871,  p.  417. 
Anser  Middendorffi,  Severtz.  Turhest.  Jevoln,  p.  225,  pi.  XX,  f.  1  (1873). 
Anser  segetum  serrirostris.  Seeb.,  Brit.  B.,  III,  p.  494  (1885). 
Anser  segetum  Middendorffi,  Stejn.,  Bull.  oftheU.S.   nat.  Mus.,n<^  29,  p.  141 
(1885). 

Taille  :  0™,69;  ailes  0,45;  bec  0,062. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  Base  de  la  mandibule  supérieure  plus 
ou  moins  bordée  de  petites  plumes  blanches,  mais  qui  disparaissent  complè- 
tement dans  un  âge  avancé  ;  tête  et  cou  d'un  cendré  brunâtre  tirant  sur  le 
roux,  plus  foncé  au  vertex  et  à  la  nuque  ;  manteau  d'un  brun  cendré  avec  les 
plumes  terminées    de  cendré  roussâtre  ou  blanchâtre  ;    bas  du  dos  brun 


—  399  — 

scapulaires  et  petites  couvertures  des  ailes  brunes  bordées  de  blanchâtre,  les 
autres  couvertures  d'un  cendré  gris  et  terminées  de  blanc  ;  rémiges  noires 
avec  leur  baguette  blanche,  les  plus  externes  bordées  extérieurement  de 
cendré  gris  ;  sus-caudales  blanches  ;  rectrices  brunes  lisôrées  et  terminées  de 
blanchâtre  ;  part.'es  inférieures  d'un  cendré  clair  avec  les  bordures  des  plumes 
blanchâtres  ;  flancs  bruns  avec  les  plumes  bordées  de  cendré  roussâtre  ;  bas- 
ventre  et  sous-caudales  d'un  blanc  pur.  Bec  noir  à  la  base  et  à  l'onglet,  jaune 
orange  au  milieu  ;  pattes  d'un  jaune  orange;  iris  brun  (1). 

Jeune.  —  D'une  teinte  en  général  plus  pâle  et  le  blanc  qui  borde  la  base  du 
bec  plus  étendu,  surtout  au  front. 

Poussin.  —  Ne  diffère  guère  de  celui  de  l'Oie  cendrée. 

La  var.  Serrirostris  est  en  général  d'une  taille  plus  forte  (0,87  ;  ailes  0,40), 
son  bec  est  plus  long  et  ses  tarses  sont  également  plus  longs;  elle  se  distingue 
encore  par  la  teinte  de  la  tête  et  de  la  nuque  qui  est  d'un  brun  fortement 
roussâtre  (2). 

Hab.  —  L'Oie  des  moissons  niche  en  Islande  [Faber],  à  la  Nouvelle- 
Zemble  {de  Heuglin)  et  dans  le 
nord  de  l'Europe  sans  dépasser 
au  Sud  le  64M.  N.  Elle  est  de 
passage  ethiverne  en  partie  dans 
j^  toute  l'Europe  centrale  et  aux 
îles  Britanniques  ;  pendant  Thi- 
%  ver  elle  est  généralement  très 
abondante  dans  les  Flandres  et 
près  de  l'Escaut,  mais  rare  dans 
les  autres  parties  de  la  Belgique.  Cet  oiseau  hiverne  aussi  communé- 
ment dans  tout  le  midi  de  l'Europe,  y  compris  la  Grèce,  l'Asie  Mi- 
neure, la  Palestine  et  la  Transcaucasie  ;  pendant  les  hivers  rigoureux, 
il  pousse  parfois  ses  migrations  jusqu'au  Maroc  [Favier)  et  l'Algérie 
{Loche),  mais  on  ne  l'a  pas  encore  observé  dans  le  nord-est  de 
l'Afrique;  l'île  Madère  paraît  être  la  limite  méridionale  de  ses 
migrations. 


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(i)  Chez  ccrlains  individus  la  teinte  jaune  orange  du  hec  prédomine  et  le  noir  est  moins 
régulier  ;  c'est  la  race  peu  caractéristique  désignée  par  Brehm  sous  le  nom  de  .-/,  arvi'nsis. 

(2)  l'alla  déclare  ne  pas  connaître  l'/l.  _i;raiii//s  ;  il  en  parle  d'après  Gmélia  et  Stcller.  l'our 
Brandt,  Sevcrtzow  et  Seebohm,  cet  oiseau  se  rapiiorlerait  à  l'.-l.  cvi^itoUes  ;  Middendortï, 
Schlégel  et  Radde  ne  sont  pas  de  cet  avis,  pour  eux  c'est  une  espèce  distincte  voisine  de 
Va.  se!retiim.'SW\s  il  jiarait  (jue  l'rzewalski  a  retrouvé  récemment  VA.  i,'-ran./is,  rall.(nec.  Midd.) 
sur  le  lac  Chanka.  (Voy.  l'rzcw.  /.a  Afont^olie  et  le  pays  des  Titiit;  (en  russe)  II,]).  150,  1S76  et 
Taczanowski,  Bull.  Soc.  Zool.  de  France,  II,  p.  42). 


—  400  — 

En  Asie  nous  rencontrons  cette  espèce  dans  toute  la  Sibérie 
{Middendorff,  von  Schrenk),  dans  le  N.-E.  du  Turkestan  [Severtzow), 
en  Chine  [David),  au  Japon  [Swinhoe)  et  au  Kamtchatka  {Stejneger), 
mais  dans  TAsie  orientale  elle  est  remplacée  par  sa  var.  Serrirostris . 

Mœurs. —  L'Oie  sauvage  ou  des  moissons  passe  par  nos  contrées  à 
partir  de  la  seconde  quinzaine  de  septembre  et  cela  par  bandes  plus  ou 
moins  considérables,  qui  attirent  l'attention  par  leurs  clameurs  autant 
que  par  leurs  évolutions  aériennes.  Là  où  elles  s'arrêtent,  elles 
s'établissent  dans  le  voisinage  des  lacs,  des  cours  d'eau  et  des  étangs 
découverts  pour  se  répandre  ensuite  dans  les  champs  des  environs 
qu'elles  se  mettent  à  brouter,  visitant  tantôt  Tun,  tantôt  l'autre.  A 
l'approche  du  printemps  ces  Oies  se  montrent  inquiètes,  volent  dans 
un  plus  grand  rayon,  s'attroupent  par-ci  par-là  dans  les  champs  de 
pois,  de  fèves  et  d'avoine  fraîchement  ensemencés,  et  disparaissent 
vers  la  fin  d'avril.  — 

Ces  palmipèdes  supportent  un  froid  très  vif,  car  ni  les  fortes  gelées, 
ni  les  neiges  passagères  ne  peuvent  les  décider  à  fuir  ;  ce  n'est  que 
quand  la  terre  se  recouvre  d'une  épaisse  couche  de  neige,  que  le 
manque  de  nourriture  les  oblige  à  se  rendre  dans  un  climat  plus  doux; 
ils  s'envolent  alors  en  grande  hâte  mais  en  bon  ordre. 

Cette  Oie  n'airne  ni  la  mer,  ni  ses  plages,  mais  bien  les  eaux  inté- 
rieures; elle  est  d'ailleurs  peu  aquatique  et  passe  la  plus  grande 
partie  de  sa  vie  dans  les  champs.  Il  est  à  remarquer  que  la  même 
troupe  s'arrêtera  chaque  année  dans  la  même  localité,  à  moins  que  la 
culture  n'y  soit  changée  :  ce  sont  les  céréales  qui  ont  le  pouvoir  de  les . 
retenir.  Au  coucher  du  soleil,  toute  la  bande  s'envole  pour  passer  la 
nuit  sur  l'eau,  sur  un  banc  de  sable  ou  sur  un  îlot. 

L'Oie  des  moissons  ressemble  par  ses  allures  à  ses  congénères  ;  elle 
vole  vite  et  avec  facilité,  mais  ne  s'élève  pas  sans  efforts.  Les  troupes 
composées  de  quarante  à  cinquante  individus  forment  en  volant  un 
angle  aigu  ;  quand  il  n'y  en  a  que  douze  ou  quinze,  elles  se  suivent 
à  la  file  en  ligne  oblique,  les  plus  âgées  toujours  en  tête.  Sa  sociabilité 
ne  lui  permet  cependant  pas  de  se  joindre  à  d'autres  espèces  du  même 
genre.  Elle  est  bien  douée  sous  le  rapport  de  la  vue  et  de  l'ouïe;  dans 
l'obscurité  pourtant,  elle  ne  sait  pas  se  guider  aussi  bien  que  certains 
Canards,  mais  elle  entend  d'autant  mieux.  Elle  est  très  farouche,  mé- 
fiante et  prudente  et  veille  constamment  à  sa  sécurité,  aussi  est-il  fort 
difficile  de  l'approcher.  Sa  voix  est  sonore  et  perçante  ;  Naumann  rend 
son  babillage  par  taddadadat  ;  quand  une  bande  s'envole,  toutes  les 


—  401  — 

Oies  qui  la  composent  se  mettent  à  crier  à  la  fois  keiak,  kaiajak, 
keiakak,  keirra,  kjiikjik!  ces  clameurs  s'entendent  de  fort  loin  surtout 
quand  la  bande  est  nombreuse. 

Le  régime  de  cet  oiseau  est  purement  végétal  et  se  compose  de 
racines,  de  feuilles  tendres,  de  bourgeons,  de  graines,  de  graminées  et 
de  céréales  fraîchement  sorties  de  terre;  c'est  surtout  le  blé,  l'orge  et 
l'avoine  que  cette  Oie  préfère, aussi  occasionne-t-elle  de  grands  dégâts 
dans  les  pays  où  elle  est  abondante. 

Cet  oiseau  se  laisse  facilement  apprivoiser,  mais  il  reste  craintif  et 
se  tient  le  plus  loin  possible  des  Oies  domestiques  qui  partagent  sa 
demeure;  il  ne  se  reproduit  que  rarement  en  captivité. 

Reproduction.  —  Cette  espèce  ne  se  reproduit,  comme  il  a  été  dit 
plus  haut,  que  daiis  la  zone  froide,  et  ne  fait  ses  préparatifs  pour 
nicher  qu'après  la  fonie  des  neiges,  c'est-à-dire  en  juin.  Elle  construit 
son  nid  dans  les  toundras  sur  une  éminence  émergeant  de  l'eau,  sur  un 
îlot  ou  sur  un  banc  de  sable.  Le  nid  consiste  en  une  simple  excava- 
tion creusée  dans  le  sol  et  garnie  d'herbes  sèches, de  mousse  et  de  duvet 
de  la  mère  ;  la  ponte  est  de  trois  ou  quatre  œufs  d'un  blanc  un  peu 
jaunâtre  et  mesurent  environ  84  millim.  sur  56  (1). 

Middendorff  dit  avoir  trouvé  le  l"'"  juillet  en  Sibérie,  sous  le  74" 
1.  N.,  un  nid  d'Oie  des  moissons  qui  contenait  quatre  œufs.  Ce  nid  se 
trouvait  sur  un  monticule  gazonneux  de  deux  pieds  de  haut  placé  près 
de  l'eau,  et  consistait  en  une  dépression  garnie  de  brins  d'herbe  secs 
et  d'un  peu  de  duvet.  Suivant  cet  auteur,  l'émigration  a  lieu  dans 
l'extrême  Nord  du  8  août  au  19  septembre. 

247.  —  L'Oie  à  bec  court. 
ANSER  BRACIIYRHYNCHUS,  Baill. 

(PI.  246) 

Anser  brachyrhynchus,  Baill,  Mèm.  Soc.  roy.  d'émulation  d'Abbeville,  1833,  p.  74. 
Anser  brevirostris,  Thieii.  (nec  Breh.)  Fortpfimiz.  Yogel  Eur.  p.  25  (1838). 
Anser  phœnicopus,  Bartlett,  Froc.  zool.Soc.  1839,  p.  3. 
Anser  segetum  var.  Bpachyrhyncuus,  Malmgr.,  Oeff'oers  pp.  309,  412  (1804). 
Anser  segetum  (part.j  Schleg.  Mtis.  P.-B.  Anseres  p.   112  (1860). 

Taille:  0'"G0;  ailes  0,42;  bec  (à  partir  du  front)  0,04;  tarses  0,08. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  Tète  et  cou  d'un  liruii  un  pou  lous- 
sâtre,  plus  clair  au  cou  ;  manteau  ceudié,  chatjue  plume  terminée  de  brun  et 

(1)  Suivant  M.  J.  Vian,  la  ponte  serait  de  dix  à  dovizc  œufs  {Bull,  de  la  Soc.  Zool.  de  Fr.,  t.  XII, 
p.  405);  mais  d'après  Middendorff  et  autres,  qui  ont  reouielli  des  reufs  de  cette  Oie  dans  les 
contrées  de  reproduction, la  ponte  ordinaire  n'est  «juc  de  trois  ou  quatre  œufs. 

T(j.Mb:  Il    —  l»y2  51 


—  402  - 

d'un  bord  blanc  roussâtre  ;  couvertures  des  ailes  cendrées  et  bordées  de 
blanchâtre,  les  plus  extérieures  d'une  teinte  plus  grise  ;  rémiges  brunes  avec 
les  baguettes  blanches  ;  bas  du  dos  d'un  cendré  brunâtre  ;  sus-caudales  d'un 
blanc  pur  ;  queue  cendrée,  les  rectrices  bordées  et  largement  terminées  de 
blanc  ;  poitrine  et  abdomen  d'un  cendré  plus  pâle  que  le  manteau  avec  les 
plumes  largement  bordées  de  cendré  clair;  flancs  bruns,  les  plumes  égale- 
ment terminées  de  cendré  clair  ;  bas-ventre  et  sous-caudales  d'un  blanc  pur. 
Bec  (d'après  de  Heuglin)  noir,  derrière  l'onglet,  qui  est  également  noir,  une 
bande  transversale  d'un  rouge  orange  (rosée  d'après  Seebohm)  ;  iris  brun  ; 
pattes  rosées  ou  d'une  couleur  vineuse. 

Les  jeunes  ont  la  base  du  bec  plus  ou  moins  bordée  de  petites  plumes 
blanches. 

Remarque.  —  Les  auteurs  ne  sont  pas  d'accord  sur  la  valeur  spé- 
cifique de  cette  Oie  :  pour  les  uns  c'est  une  bonne  espèce,  pour  les 
autres  ce  n'est  qu'une  variété  climatérique  ou  sous-espèce  de  Y  Anser 
sylvestris.  Elle  a,  en  effet,  de  grands  rapports  avec  cette  dernière  (et 
non  avec  l'Oie  cendrée  comme  le  dit  M.  Dresser),  mais  en  diffère  par 
des  caractères  importants  :  sa  taille  est  plus  petite  que  celle  de  l'Oie 
des  moissons,  son  bec  beaucoup  plus  court,  ses  tarses  sont  moins  longs, 
ses  pattes  rosées  et  non  jaunes,  et  les  couvertures  des  ailes  plus  grises. 
Si  ces  caractères  sont  constants,  comme  on  a  lieu  de  le  croire,  il  est 
certain  que  l'Oie  à  bec  court  doit  être  admise  comme  espèce  distincte; 
c'est  l'opinion  de  la  majorité  des  auteurs. 

Hab.  —  L'aire  géographique  de  cette  espèce  est  encore  peu  connue, 
car  beaucoup  d'auteurs  ont  confondu  cette  Oie  avec  la  précédente.  Ce 
qui  est  certain,  c'est  qu'elle  est  très  abondante  sur  la  côte  occidentale 
du  Spitzberg,mais  assez  rare  dans  les  parties  nord  et  nord-est  de  ces 
îles  [Malmgren,  de  Heuglin)',  elle  niche  également  dans  le  nord  de 
l'Islande  (Newton).  Selon  de  Heuglin,  l'existence  de  cette  espèce  à  la 
Nouvelle-Zemble  n'est  nullement  prouvée;  il  n'a  rencontré  dans  ce 
pays  que  des  A.  segetum  à  pattes  d'un  jaune  orange,  et  celles-ci  y 
étaient  très  abondantes  (1).  L'oiseau  de  la  Nouvelle-Zemble  décrit 
antérieurement  par  de  Heuglin  (2),  ne  peut  nullement  être  rapporté  à 
Va.  hrachyrhynchus,  comme  le  fait  M.  Dresser,  puisqu'il  a  des  pattes 
jaunes.  Baer  mentionne  également  1'^.  segetum  comme  vivant  à  la 


(1)  Th.  de  Heuglin,  Rcise  nach  dciii  Nordpolartneer  III,  pp.  128,  131  (1874). 
{2)  yourn.  f.  Ornith.  1872,  p.  122, 


-  403  - 

Nouvelle-Zerable  (1);  mais  Malmgren  suppose  que  cet  auteur  a  fait 
erreur,  que  c'est  l'Oie  à  bec  court  qui  habite  ce  pays  (2). 

Il  n'est  pas  certain  que  l'espèce  qui  nous  occupe  niche  dans  le  nord 
de  la  Norwége,  car  les  sujets  observés  en  juin  1867  près  de  Nordvi, 
dans  la  Finmark  orientale,  peuvent  fort  bien  avoir  été  retardés  pen- 
dant leur  retour  au  Spitzberg.  M.  Collett  se  borne  à  signaler  encore 
un  individu  tué  le  20  septembre  1865  près  de  Christiania,  et  deux 
autres  abattus  dans  les  environs  de  Trondhjem  en  octobre  1871  ;  ceci 
ferait  supposer  que  cette  Oie  n'est  que  de  passage  accidentel  en  Nor- 
vège ;  mais  il  est  difScile  d'admettre  que  ces  oiseaux  suivissent  dans 
leurs  migrations  une  autre  voie  que  les  côtes  norwégiennes  ;  M.  See- 
bohm  dit  d'ailleurs  que  cette  espèce  est  de  passage  régulier  sur  les 
côtes  Scandinaves  et  danoises.  Sa  présence  en  Suède  n'est  qu'acciden- 
telle et  l'on  n'y  connaît  que  trois  captures  :  une  sur  l'île  Tjôrn  le  24 
octobre  1851,  et  deux  près  de  Jockmock  le  1 1  octobre  1866  {Cnattin- 
gius);  Middendorff  dit  qu'un  sujet  a  également  été  pris  près  de 
St-Pétersbourg. 

L'Oie  à  bec  court  visite  communément  les  îles  Britanniques  en 
hiver,  particulièrement  les  côtes  orientales  de  l'Angleterre  et  les 
Hébrides  extérieures,  mais  il  n'est  pas  certain  qu'elle  se  montre  en 
Irlande  et  aux  îles  Shetland  (Sccbohm).  C'est  par  erreur  que  Macgil- 
livray  a  dit  que  cette  Oie  se  propage  aux  Hébrides  ;  d'après  M.  Elwes 
il  y  a  eu  confusion  avec  l'Oie  cendrée.  L'Oie  à  bec  court  est  de  passage 
régulier  sur  les  côtes  occidentales  du  Danemark,  ainsi  que  sur  celles 
de  la  Hollande  [Sclilégel)  et  de  la  Belgique  :  M.  Groegaert  dit,  en 
effet,  que  tous  les  ans  on  en  tire  quelques-unes  sur  l'Escaut  aux  envi- 
rons de  Kieldrecht  et  à  Walsoorden  (3).  Elle  se  montre  quelquefois 
aussi  en  Allemagne  près  de  la  mer  du  Nord  {Reichenow)  et  acciden- 
tellement sur  les  côtes  septentrionales  de  la  France  :  on  en  a  tué 
quelques-unes  en  1829,  1830  et  1838  aux  environs  d'Abbeville,  et  on 
en  a  trouvé  sur  Icsmarchés  de  Dunkcrqueet  de  Calais (Df^^Z.  et  Gerbe)', 
M.  L.  Olphe-Galliard  signale  encore  pour  la  France  des  captures 
dans  la  Seine-Inférieure  en  décembre  1871  {Lemettcil)  et  sur  la 
Manche  [Le  Mcnnicier).  Un  individu  a  également  été  pris  en  Alsace, 
en  février  \^^i{K7-oener). 

(1)  Beiir.  z.  R'cnntniss  d.  russ.  Rciches  VIII,  p.  237. 

[2)  /oiirn.J,  Ornith.  1870,  p.  291. 

(■T)  Il  est  certain  que  M.  Croctfaert  ne  confond  pas  cette  Oie  avic  la  précédente,  puisqu'il 
ajoute  :  «  On  les  confond  avec  l'/l.  set^rtunt,  mais  elles  sont  très  reconnaissables  à  leur  bec  plus 
petit  et  aux  pattes  roses.  »  {Bull.  Mus.  roy.  d'hist,  nat.  de  Bel^.  V.  p.  150) 


—  404  — 

Je  crois  que  de  Heiiglin  a  tort  de  considérer  comme  des  A.  hrachy- 
rhyncuus  les  Oies  capturées  par  Middendorff  près  du  Taimyr  et  du 
Boganida  ;  cet  auteur,  en  donnant  leur  description,  dit  en  effet  que  le 
bec  est  en  partie  orange  et  que  les  pattes  sont  également  oranges  sauf 
les  membranes  interdigitales  qui  sont  de  couleur  livide.  Middendorff 
les  considère  comme  intermédiaires  aux  A.  arvensis  et  segetum: 
«  ces  oiseaux  se  rapportent,  dit-il,  d'après  les  descriptions  de  Nau- 
mann,  à  1'^.  arvensis  par  leur  bec,  et  à  1'^.  segetum  par  la  longueur 
des  ailes  (1).  » 

Jerdon  dit  que  l'Oie  à  bec  court  a  été  prise  dans  le  Punjab  et  dans 
l'Inde  occidentale;  M.  Swinhoe  dit  en  avoir  reçu  une  de  Hakodadi 
(Japon),  mais  qu'il  ne  l'a  jamais  observée  en  Chine.  L'existence  de 
cette  Oie  en  Asie  me  paraît  cependant  encore  douteuse. 

Mœurs  et  reproduction.  —  Les  mœurs  de  cette  espèce  ressemblent 
à  celles  de  la  précédente;  d'après  de  Heuglin,  elle-êtrrive  au  Spitzberg 
au  commencement  de  l'été  et  broute  aussitôt  le  gazon  et  la  mousse  des 
endroits  dégarnis  de  neige  ;  mais  bientôt  les  troupes  se  séparent  et  les 
couples  se  rendent  séparément  sur  la  côte  occidentale  et  dans  les  fjords 
pour  y  nicher.  Elle  est  très  farouche  et  prudente  et  se  laisse  difficile- 
ment approcher. 

Cette  Oie  niche,  d'après  Malmgren,  sur  les  parties  saillantes  des 
rochers,  parfois  sur  des  saillies  qui  s'avancent  au-dessus  d'un  torrent, 
et  toujours  dans  le  voisinage  de  l'eau  et  des  prés;  elle  niche  souvent 
aussi  à  l'intérieur  des  :Qords  près  de  la  mer.  Le  nid  est  placé  à  une 
hauteur  suffisante  pour  que  les  parents  puissent  voir  une  grande  éten- 
due de  terrain  et  fuir  à  temps  le  danger.  Quand  la  femelle  couve,  le 
mâle  reste  près  d'elle  et  veille  à  la  sécurité  commune . 

La  ponte  a  lieu  en  juin  sur  une  litière  de  mousse  et  se  compose  de 
quatre  ou  cinq  œufs  blancs,  à  coquille  assez  épaisse,  et  plus  petits 
que  ceux  de  X A.  segetum;  ils  éclosent  du  10  au  15  juillet  (2).  L'éclo- 
sion  ne  doit  pas  toujours  être  aussi  tardive,  car  de  Heuglin  dit  avoir 
rencontré  le  18  juin  plusieurs  couples  accompagnés  de  trois  ou  quatre 
poussins,  qui  tous  différaient  assez  bien  de  taille. 


(1)  Middendorff,  Sibir.  Rfisc  II,  p.  226. 

(2)  Malmgren,yciw;-«.  f.  Ornith.  1865,  p.  21 1. 


—  40o  — 

248.  —  L'Oie  rieuse  ou  à  front  blanc 
ANSER  ALBIFRONS,  Berhst.  ex  Scop. 

(PI.  247) 

Anser  sei'tentrionalis  sylvestris,  Ri'iss.  Ornith.  VI,  p   26'J  (1760). 

Branta  ALBipniONS,    Scop.  Ann.  /.  liist.  nat.  p.  69  (1769). 

Anas  albikrons,  Lath.,  Gen.Syn.  Supnl.  I.  p.  297  (1787). 

Anser  ALBiFROss,  Bechst.  Nalurij.  D''ui.sc!iL  IV,  p.  898  (1809). 

Anser  eryturopus,  Flein.  (iiec  Liti.)  Brit.  An.  p.  127  (1828). 

Anser  .MEDIUS,  Bruiih,  /«s,  1828,  p.  732. 

Anser  BRucHii,  Rrehm,  Isis,  1830,  p.  996. 

Anser  intermedius,  Naura.  Viig.  Dentscld.  XI,  p.  310  (1842). 

Anser  gambeli,  Hartl.  llnv.  et  mai/,  de  zooL,  1852,  p.  7. 

Anser  albifrons  koseipes,  Schlog.  Nnnma?inia  1855,  p.  254. 

Anser  pallipes,  de  Selys-Long.  Naumannia  1855,  p.  264. 

Anser  KR0NTALI8,  Baird,i?.  N.  Am.  p.  562(1858). 

Anser  albifrons  i;'/r.  gambeli,  Coues,  Kei/  N.  Am.  B.  p.  282  (1872). 

Anser  albikrons  gambeli,  Ridgw.  Proc.  U.  S.  nat.  Mus.  1880,  p.   203. 

Die  Blassgans,  en  allemand. 

The  White-fronted  Goose,  en  anglais. 

De  Kolgans,  en  llamand. 

Var.  Erythropus 
(OIP:  DK  TEMMINCK  pi.  247b). 

Anas  erythropus.  Lin.  Si/st.  fiat.  1,  p.  197  (1766). 
Anasfinmarchicus,  Gunn.  Leem.  Beskr.  Frn:n.  Lap.  p.  264  (1767). 
Anser  Temminck.1,  Boie,  f.us,  1822,  p.  882. 

Anser  CINERACEUS,  Brehm,  Lehrb.  Nattcrg.  VoV/.  II,  p.  772(1824'. 
Anser  bretirostris  (Heckel)  Brehm.  Yog.  Deutschl.  IX,  p.  836  (1831). 
Anser  minutus,  Naum.  Vog.  Deutschl.  XI,  p.  365,  pi.  290  (1842). 
Anser  erythropus,  Newt.  Proc.  Zool  Soc,  1860,  p.  341 . 

Anser  albifrons  var.  Erythropus,  Dubois,  BuU.  Mus.  roy.  cVhist.  »at.  de  Bel/.  H', 
p.  19(188.5). 

Anser  albikrons  minutus,    Seeb.  /?r<<.  7>.  III,  p.  505  (1885). 

Taille  :  (type  alhifronR)  0'"67;  ailes  0,411  ;  (var.  Eri/thropus)0,bb\ 
ailes  0,381.' 

Description  des  deux  sexes  types.  —  Front  et  partie  antérieure  des  joues  d'un 
blanc  pur  l)(>rdé  de  brun  ;  tête  et  cou  d'un  brun  cendré  nuancé  de  roussàtre  ; 
manteau  et  scapulaires  d'un  brun  cendré  foncé,  toutes  les  plumes  terminées 
de  cendré  roussàtre  ou  de  blanchâtre;  bas  du  dos  d'un  brun  noirâtre  terne  ; 
sus-caudales  blanches  ;  queue  brune  avec  les  rectrices  bordées  et  terminées 
(l(î  bluiic  ;  |»('titos  couvertures  des  ailes  d'un  1>riin  terne,  faiblement  bordées 
de  cendré  clair,  les  luoyenni'S  d'un  cendré  grisâtre  et   terminées  de   blauc  J 


rémiges  primaires  noirâtres  à  bord  externe  cendré  à  la  base,  les  baguettes 
blanchâtres;  rémiges  secondaires  noires;  dessous  du  corps  blanchâtre;  bas  de 
la  poitrine  et  abdomen  marqués  de  grandes  taches  irrégulières,  transversales 
noirâtres  ;  flancs  bruns  avec  les  plumes  bordées  de  blanchâtre  ;  bas-ventre 
et  sous-caudales  d'un  blanc  pur.  Iris  brun  ;  bec  d'un  jaune  orange  avec  l'on- 
glet blanc;  pattes  d'un  jaune  orange.  —  La  femelle  est  un  peu  plus  petite  que 
le  mâle,  le  blanc  du  front  est  moins'étendu,  et  les  taches  noirâtres  des  parties 
inférieures  sont  moins  nombreuses  ;  il  est  cependant  difficile  de  distinguer  les 
sexes  d'après  le  plumage. 

Jeune.  —  Diffère  principalement  de  l'adulte  par  l'absence  plus  ou  moins 
complète  de  blanc  au  front  et  de  taches  noires  sur  les  parties  inférieures. 

Var.  Erythropus.  —  Se  distingue  du  précédent  par  une  taille  notablement 
plus  faible,  un  bec  plus  court,  le  blanc  du  front  plus  étendu  et  montant  entre 
les  yeux  jusqu'au-dessus  de  la  tête,  enfin  par  des  couleurs  plus  sombres  sur- 
tout au  bas  du  dos  qui  est  presque  noir.  Bec  couleur  chair  pâle. 

Remarque.  —  L'Anser  gambeli,  de  l'Amérique  du  Nord,  ne  diffère 
de  l'Oie  à  front  blanc  d'Europe  que  par  une  taille  un  peu  plus  forte  et 
un  bec  plus  long.  Mais  il  a  été  constaté  que  la  taille  et  surtout  les 
dimensions  du  bec  sont  très  variables  chez  l'Oie  rieuse  ;  on  trouve  en 
Amérique  des  sujets  ayant  absolument  les  mêmes  proportions  que 
ceux  d'Europe,  et  vice  versa.  M.  Coues  reconnaît  lui-même  qu'il  est 
difficile  de  séparer  la  forme  américaine  de  celle  de  l'ancien  monde. 
Hab.  —  Il  est  assez  difficile  d'établir  d'une  manière  exacte  l'aire 

géographique  du  type  et  de  sa 
variété,  car  les  deux  races  ont 
souvent  été  confondues.  Il  paraît 
cependant  que  le  type  albifrons 
est  remplacé  en  grande  partie 
dans  le  nord  de  la  Scandinavie, 
de  la  Russie  et  de  la  Sibérie  par 
sa  YâT.  Erythropus;  mais  il  est 
certain  que  ces  contrées  ne  sont 
pas  complètement  privées  d'Oies  rieuses,  puisque  Middendorff  en  vit 
près  du  Taimyr  et  du  Boganida,  quoiqu'on  moins  grand  nombre  que 
les  Oies  de  Temminck. 

L'Oie  rieuse  ou  à  front  blanc  niche  en  Islande  (Faber)  et  plus  ou 
moins  dans  toute  la  zone  arctique,  sans  dépasser  les  côtes  continen- 
tales et  le  75°  1.  N.;  on  ne  la  trouve  donc  ni  à  la  Nouvelle-Zemble, 
ni  au  Spitzberg.  Lors  des  migrations,  on  l'observe  sur  les  côtes  de  la 
Norwège  [Collett),  et  accidentellement  sur  celles  de  la  Russie  occi- 


—  407  — 

dentale  (Buchner);  elle  se  montre  régulièrement  dans  le  nord  de 
l'Allemagne,  surtout  sur  les  côtes  maritimes  {Reichenow),  en  Dane- 
mark {Collin),  en  Hollande  {Schlégel),  en  Belgique,  dans  le  nord  et 
l'ouest  de  la  France  où  elle  est  commune  {Degl.  et  G^er&é'),mais  on  ne 
la  voit  que  tout  accidentellement  dans  le  midi  de  la  France  [Lacroix], 
en  Portugal  (du  Bocage),  en  Espagne  [Rei/es]  et  en  Italie  {Giglioli). 
Elle  hiverne  en  grand  nombre  aux  îles  Britanniques  où  elle  est  cepen- 
dant assez  localisée,  elle  est  surtout  abondante  en  IrlSinàQ  {Seehohm) , 
Cette  Oie  hiverne  également  en  Grèce  [Lindermayer),  dans  la  Russie 
méridionale  [de  Nordmann),  dans  les  parties  centrales  de  la  Trans- 
cau-casie  (Radde),  en  Asie  Mineure  {Antinori),  et  surtout  en  Egypte 
{Shell  ey)^ 

En  Belgique,  elle  est  commune  en  hiver  près  des  bouches  de 
l'Escaut,  et  remonte  souvent  ce  fleuve  jusqu'au  delà  d'Anvers,  mais 
elle  n'apparaît  que  très  rarement  dans  l'intérieur  du  pays.  Comme 
cette  espèce  suit  souvent,  durant  ses  migrations,  les  vallées  creusées 
par  les  grands  fleuves,  il  arrive  parfois  que  des  sujets  s'égarent  bien 
loin  dans  l'intérieur  des  continents.  C'est  ainsi  qu'on  en  capture  par- 
fois en  Pologne  {Taczanoicaki),  dans  le  centre  de  l'Allemagne 
[Naumann),  en  Bohême  [Fritsch),  en  Transylvanie  [Danford],  en 
Turquie  [Elioes  et  Buckley),  etc. 

Les  sujets  du  N.-O.  de  l'Asie  traversent  ordinairement  le  Turi^es- 
tan  [Severtzoïd)  pour  hiverner  dans  le  N.-O.  de  l'Inde  {Jerdon);  ceux 
de  l'Orient  hivernent  au  Japon  {Swinhoe)  et  en  Chine  [David),  après 
avoir  côtoyé  le  Sibérie  orientale. 

En  Amérique  nous  trouvons  l'Oie  rieuse  au  Groenland  jusqu'au 
68°  1.  N.  [Neioton)  et  dans  le  nord  du  continent  américain;  elle 
hiverne  aux  Etats-Unis  et  se  montre  accidentellement  à  Cuba 
[Coues). 

La  var.  Erythropus  niche  communément  dans  le  nord  do  la  Scan- 
dinavie [Collett],  et  émigré  le  long  des  côtes  de  la  Finlande  [Palmcn). 
En  hiver  on  l'observe  accidentellement  sur  les  côtes  de  Suède  (Xils- 
son),  dans  la  Russie  centrale,  en  Pologne  [Taczanoicski),  dans  le 
nord  de  l'Allemagne  [Reichenoiv),  au  Danemark  [Collin),  en  Hollande 
[Schlégel),  en  Belgique  [C.-F.  Dubois)  et  dans  le  N.-O.  de  la  France 
[Dcgland),  ainsi  qu'en  Autriche-Hongrie  [Naicmann],  en  Bohême 
[Fritsch)  et  en  Grèce  [Lindermayer).  D'après  feu  mon  pèi'O,  un  sujet 
fut  tiré  en  Belgique  en  novembre  1850  ;  il  en  trouva  un  second 
sur  le  marché  de  Bruxelles  pendant  l'hiver  de  1858.  Cette  variété  n'a 


—  408  — 

été  observée  ni  aux  îles  Britanniques,  ni  dans  le  midi  de  l'Europe, 
mais  M.  J,-H.  Gurney  a  signalé  une  capture  faite  en  janvier  1875  à 
Damiette  dans  la  Basse-Egypte  ;  Antinori  dit  en  avoir  trouvé  un  cou- 
ple, en  1858, sur  le  marché  de  Smyrne,  parmi  un  grand  nombre  d'Oies 
à  front  blanc.  Aux  passages  cette  Oie  est  commune  près  de  l'Oural  et 
du  Volga  inférieur  aux  environs  d'Astrakhan  [Bogdanow);  ellespassent 
par  milliers  dans  le  dislrict  de  Shadrinsk  {Sahandeff),  hivernent 
dans  le  S.-E.  de  la  Transcaucasie  {Radde)  et  accidentellement  dans  le 
N.-O.  de  l'Inde  [Huwé).  Middendorif  dit  qu'elle  est  commune  dans  le 
nord  de  la  Sibérie,  près  du  Taimyr  et  du  Boganida  ;  elle  passe  en 
grand  nombre  au  Tarei-Nor  en  automne  [Radde);  elle  est  rare  dans  la 
région  de  Kultuk,  mais  Zébrowski  l'a  souvent  observée  dans  l'Irkutsk 
[Dybowski).  Elle  hiverne  au  Japon  et  en  Chine  où  de  grandes  bandes 
se  montrent  en  février  ei  mars  sur  les  lacs  des  provinces  orientales  et 
principalement  du  Kiangsi  [David).  ■" 

Mœurs.  —  L'Oie  à  front  blanc  n'arrive  dans  l'Europe  centrale  que 
vers  la  fin  d'octobre,  environ  un  mois  plus  tard  que  l'Oie  des  moissons, 
et  retourne  dans  le  Nord  en  mars  et  avril.  Elle  s'entend  assez  bien 
avec  cette  dernière,  l'accompagne  dans  ses  pérégrinations  mais  les 
troupes  restent  distinctes,  les  deux  espèces  ne  se  confondent  pas.  Celle 
qui  nous  occupe  en  ce  moment  recherche  de  préférence  le  voisinage 
de  la  mer  et  paraît  préférer  l'eau  salée  à  l'eau  douce;  c'est  pour  cette 
raison,  qu'en  hiver  elle  est  commune  sur  nos  côtes  maritimes  et  près 
de  l'Escaut,  tandis  qu'elle  ne  se  montre  que  fort  rarement  sur  les 
eaux  de  l'intérieur  du  pays.  11  n'en  est  cependant  pas  de  même 
partout.  M.  Radde  dit  en  effet  que,  de  toutes  les  Oies  sauvages,  c'est 
l'Oie  rieuse  que  l'on  observe  le  plus  en  hiver  près  des  lacs  du  centre 
de  la  Transcaucasie,  et  que  sur  le  marché  de  Tiflis  on  la  trouve  bien 
plus  souvent  que  les  Oies  cendrées  et  des  moissons.  Comme  ces  der- 
nières, l'Oie  rieuse  fréquente  les  champs,  les  pâturages  et  les  prés 
marécageux,  et  passe  la  nuit  sur  les  lacs  et  les  étangs.  Ses  mœurs  ne 
diffèrent  du  reste  pas  de  celles  des  espèces  précédentes,  mais  sa  voix 
est  caractéristique  et  rappelle  assez  bien  celle  de  la  Grue.  Naumann 
rend  le  cri  de  cet  oiseau  par  klick  klick,  klaeck  klaeck,  ou  kling  kling, 
ou  encore  klaeng  klaeng  ;  ces  ions  diversement  modulés  résonnent 
d'une  façon  singulière,  et  quand  plusieurs  de  ces  palmipèdes  crient  en 
même  temps,  l'ensemble  de  leurs  voix  a  quelque  analogie  avec  le  rire, 
d'où  le  nom  vulgaire  donné  à  cet  oiseau. 

Quant  au  régime,  il  est  principalement  végétal,  mais  il  paraît  que 


—  409  — 

cette  Oie  aime  beaucoup  les  plantes  qui  croissent  clans  un  sol  imprégné 
de  sel;  Naumann  a  trouvé  des  débris  de  coléoptères  dans  Testomac  de 
deux  individus;  M.  Turner  dit  également  avoir  trouvé  dans  l'estomac 
de  sujets  de  l'Alaska,  des  insectes  et  des  larves  aquatiques. 

Cette  espèce  s'apprivoise  aussi  facilement  que  les  autres  et  supporte 
bien  la  captivité. 

Reproduction.  —  L'Oie  rieuse  niche  dans  la  zone  arctique.  Mid~ 
dendorff  a  trouvé  le  10  juillet  près  du  Taimyr,  sous  le  74"  1.  N.,  un 
nid  avec  deux  œufs  ;  ce  nid  consistait  en  une  excavation  creusée  au 
sommet  d'un  monticule  gazonneux,  et  les  œufs  reposaient  sur  une 
épaisse  couche  de  duvet.  Dali,  dit  M.  Seebohm.  a  observé  cette  espèce 
dans  l'Alaska,  où  elle  nichait  en  grand  nombre  sur  des  bancs  de  sable 
du  fleuve  Yukon  ;  les  nids  étaient  de  simples  excavations  creusées 
dans  le  sable  ;  mais  plus  à  l'Est,  à  l'embouchure  du  fleuve  Andersen, 
Mac  Farlane  trouva  des  nids  bien  garnis  d'herbes  sèches,  de  plumes 
et  de  duvet.  La  ponte  ordinaire  est  de  cinq  à  sept  œufs,  mais  Dali  en 
a  trouvé  jusqu'à  dix  dans  le  même  nid.  Ces  œufs  sont  d'un  blanc  un 
peu  jaunâtre  et  mesurent  en  moyenne  82  mill.  sur  53. 

M.  J.  Vian  dit  que  les  œufs  de  la  var.  Erylhropus  sont  beaucoup 
plus  petits  (72  à  73  mill.  sur  49  à  50),  moins  variables  dans  leur 
volume  et  qu'ils  se  distinguent  par  la  finesse  de  leur  grain,  tandis  que 
ceux  de  1'^.  albifrons  ont  été,  au  contraire,  signalés  comme  les  plus 
grenus. 

SOUS-FAMILLE 

DES  CVGNINÉS.  —  CVGNIN/E 

Car.  —  Bec  de  la  longueur  de  la  tête;  loruras  nus;  cou  très  long;  corps 
volumineux  ;  ailes  n'atteignant  pas  l'extrémité  de  la  queue  ;  tarses  courts  ; 
membranes  interdigitales  très  larges. 

Ilah.  —  Les  oiseaux  de  cette  famille  sont  particulièrement  abon- 
dants dans  le  nord  de  l'Europe,  de  l'Asie  et  de  l'Amérique,  et  les 
espèces  européennes  émigrent  jusque  dans  le  nord  de  l'Afrique  ;  on 
en  rencontre  également  dans  l'Amérique  du  Sud  el  en  Australie. 

Mœurs.  —  L'eau  est  le  véritable  domaine  des  Cygnes;  ils  ne  vont 
pas  volontiers  à  terre  et  ne  volent  pas  sans  nécessit('.  Leurs  pattes, 
insérées  très  en  arrière  du  corps,  no  permettent  pas  à  ces  oiseaux  de 
marcher  facilement,  aussi  leur  démarche  semble-t-elle  lourde  et 
vacillante.  Leur  voix  varie  suivant  les  espèces.  Ils  sont  prudents, 
judicieux,  aussi  intelligents  que  les  autres  lamellirostres  et  règlent 
leur  conduite  suivant  les  circonstances. 

TuMK  II.—  1892  52 


—  410  - 

Les  mâles  se  livrent  entre  eux  de  violents  combats  pour  la  posses- 
sion d'une  femelle,  mais  dès  qu'ils  sont  accouplés,  les  deux  sexes  ont 
l'un  pour  l'autre  une  grande  fidélité  et  leur  union  est  pour  la  vie. 
Leur  nid  est  très  vaste  et  il  est  .construit  sur  un  îlot  ou  sur  l'eau  ;  la 
femelle  seule  se  charge  de  sa  construction.  Les  parents  témoignent 
beaucoup  de  tendresse  à  leur  progéniture. 

GENRE  CXLII 

CYGNE.   —   CYGNUS 

Cygnus,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  288(1700). 

Anas,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  194  (1766) . 

Olor,  Wagl.  Isis,  1832,  p.  1234. 

HoLOR,  Olphe-Gal.,  Conlrib.  à  la  faune  orn.  Eitr.  occ.,fasc.  V.  p.  2  (1885). 

Car.  —  Bec  de  la  longueur  de  la  tête,  épais  à  la  base,  déprimé  et  arrondi 
à  l'extrémité,  à  lamelles  peu  saillantes  et  à  onglet  large^t  recourbé  ;  narines 
latérales,  à  peu  près  médianes,  oblongues  ;  ailes  amples,  n'atteignant  pas 
l'extrémité  de  la  queue  ;  celle-ci  courte,  arrondie  ou  plus  ou  moins  carrée  ; 
tarses  épais,  de  la  longueur  du  doigt  interne  ;  doigts  largement  palmés  ; 
pouce  très  court  touchant  à  peine  le  sol  par  l'extrémité  de  son  ongle. 

Hab.  —  Comme  pour  la  sous-famille. 

249.  —  Le  Cygne  sauvage. 

CYGNUS  FERUS,  Briss. 

(PI.   248) 

Cygnus  férus,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  292  (1760). 

Anas  cygnus,  a  férus,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  194  (1706). 

Cygnus  musicus,  Bechst.  Natury.  Deutschl.  Ill,  p.  830  (1809). 

Cygnus  melanorhynchus,  Mey.,  Taschenb.  dent.  Yuyelk.  II,  p.  498  (1810). 

Cygnus  islandicus,  Brehm,  Isis^  1830,  p.  996. 

Olor  musicus,  Wagl.,  Isis,  1832,  p.  1234. 

Cygnus  xanthorhinus,  Naum.  Yog.  Deutschl.  XI,  p.  478,  pi.  296  (1842). 

Olor  cygnus,  Bonap.  Cat.  Parz.,  p.  15  (1856). 

HoLOR  musicus,  Olphe-Gal-,  Contrib.  Faune  orn.  Eur.  occ,  fasc.  V.  p.  3  (1885). 

Der  Gelbnasige  Schwan,  en  allemand. 

The  Hooper  Swan,  en  anglais. 

De  Wilde  Zwaan,  en  flamand. 

Taille  du  mâle  :  l'"48;  ailes  0,62;  femelle  :  1"^18;  ailes  0,60. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  D'un  blanc  pur  avec  la  tête  teintée 
de  roux  jaunâtre.  Lorums  et  partie  antérieure  du  bec  jusqu'aux  narines, 
jaunes,  le  reste  du  bec,  noir  ;  pattes  noirâtres  ;  iris  brun  foncé. 

Jeune.  —  D'un  gris  clair.  Lorums  et  base  du  bec  couleur  chair  livide  ; 


—  411  — 


pattes  d'un  gris  brun.  A  mesure  que  l'oiseau  avance  en  âge,  le  blanc  domine 
de  plus  en  plus. 

Hab.  —  Le  Cygne  sauvage  niche  en  Islande  {Faber)  et,  à  partir 

du  62°,  dans  le  nord  de  l'Europe 
et  de  l'Asie  jusqu'au  74  1/2°1.N. 
{Middendorff)  ;  il  se  montre  quel- 
fois  au  Groenland  et  y  niche 
près  de  Gotthaab  [Reinhaert). 
Certains  auteurs  indiquent  éga- 
lement le  Spitzberg;  mais  de 
-^^  Heuji'lin  fait  remarquer  qu'il  n'est 
nullement  prouvé  que  les  Cygnes 
observés  à  diverses  reprises  sur  les  côtes  occidentales  du  Spitzberg 
soient  des  C.  férus',  von  Bar  l'indique  comme  se  trouvant  à  la  Nou- 
velle-Zemble, ce  qui  n'a  pas  été  confirmé  non  plus.  Il  est  probable 
qu'il  y  a  eu  confusion  et  qu'on  a  pris  le  C.  minor  pour  le  C.  férus. 

Cet  oiseau  hiverne  dans  le  sud  de  l'Islande  (F«^er)  et  plus  ou  moins 
dans  toute  l'Europe,  quoiqu'il  soit  très  rare  dans  les  contrées  du  Midi 
et  dans  beaucoup  de  paj^s  du  centre  où  il  est  plutôt  de  passage.  Il 
est  de  passage  irrégulier  en  Espagne  [Reyes)  et  en  Italie  [Giglioli), 
mais  se  montre  régulièrement  en  Grèce:  von  der  Mûhle  assure  qu'il 
niche  régulièrement  dans  les  marais  des  Thermopyles  ;  Lindermayer 
confirme  le  fait  et  indique  divers  lacs  de  la  Grèce  où  cette  espèce  est 
sédentaire. 

En  Belgique  il  est  généralement  rare  :  pendant  les  hivers  rigou- 
reux on  le  voit  souvent  sur  nos  côtes  et  sur  l'Escaut,  nageant  entre 
les  glaçons  et  remontant  le  fieuve  jusqu'au  delà  d'Anvers;  on  a 
remarqué  des  passages  jusqu'au  centre  du  pays. Il  est  assez  commun, 
en  hiver,  sur  les  côtes  dos  îles  Britanniques  {Scebohm),  mais  il  est 
surtout  abondant  sur  le  Danube,  près  de  la  mer  Noire  (Fùisch)  et 
près  de  la  mer  Caspienne,  les  grands  froids  l'éloignent  cependant  des 
côtes  maritimes  {Radde). 

Pendant  la  mauvaise  saison,  on  observe  également  ce  Cygne  sur  les 
côtes  de  l'Asie  Mineure  et  de  la  Palestine  {Tristram),  dans  la  Basse- 
Egypte,  mais  en  moins  grand  nombre  que  le  C.  olor  [de  Ileuglin), 
ainsi  qu'en  Algérie  {Loc/w). 

En  Asie  notre  oiseau  hiverne  en  Sibérie  jusqu'en  Perse  (B/anford) 
et  en  Chine  {David)  ;  il  est  assez  commun  au  Japon,  {Hhikiston)  et 
il  paraît  ([u'ila  même  été  vu  au  Népaul  [Seebolim). 


-  412  - 

Mœurs.  —  Le  Cygne  sauvage  quitte  la  zone  arctique  en  septembre 
en  se  dirigeant  plus  ou  moins  de  l'E.  au  S.-O.  ;  il  reprend  son 
voyage  vers  le  Midi  à  mesure  que  le  froid  augmente  et  que  les  eaux 
se  couvrent  de  glace  ;  ce  n'est  ordinairement  qu'en  octobre  qu'il  fait 
son  apparition  sur  les  côtes  septentrionales  de  l'Allemagne,  mais  on 
le  voit  rarement  chez  nous  avant  les  mois  de  novembre  et  de  décem- 
bre. En  mars  il  retourne  dans  le  pays  qui  l'a  vu  naître,  mais  sans  se 
hâter,  s'arrêtant  quelques  jours  là  où  les  lieux  lui  conviennent.  Ces 
Cj'gnes  voyagent  généralement  pendant  le  jour,  parfois  aussi  la  nuit, 
en  famille  ou  en  troupes  plus  ou  moins  nombreuses,  composées  parfois 
de  cinquante  à  quatre-vingts  sujets.  Quel  que  soit  leur  nombre,  ils 
volent  toujours  à  la  file  sur  un  seul  rang  en  formant  dans  l'espace  une 
longue  ligne  oblique,  dont  la  longueur  varie  suivant  le  nombre  des 
individus. 

Bien  que  ce  palmipède  ne  soit  pas  un  oiseau  marin,  il  aime  cepen- 
dant les  côtes  maritimes  et  se  plaît  à  nager  dans  la  mer;  mais  il 
recherche  aussi  les  eaux  douces,  les  fleuves,  les  rivières,  les  lacs,  les 
étangs  et  surtout  les  endroits  marécageux  riches  en  herbages  divers. 
Par  ses  allures,  il  diffère  de  presque  tous  les  palmipèdes,  tout  en 
tenant  des  Oies  et  des  Canards.  L'eau  est  son  véritable  domaine,  il 
marche  peu  et  ne  vole  pas  sans  nécessité.  D'ordinaire  il  tient  le  cou 
presque  droit,  et  le  recourbe  rarement  autant  que  le  Cygne  domes- 
tique ;  il  est  du  reste  dans  son  ensemble  moins  élégant  que  ce  dernier, 
mais  lui  ressemble  par  son  vol.  Il  ne  s'élève  pas  sans  difficultés:  avant 
de  prendre  son  essor,  il  étend  le  cou  presque  horizontalement,  bat 
des  ailes,  frappe  la  surface  de  l'eau  de  ses  larges  pieds  et  moitié 
courant,  moitié  volant,  il  franchit  bruyamment  une  assez  grande 
distance  avant  de  pouvoir  s'envoler;  une  fois  à  une  certaine  hauteur, 
il  vole  bien,  assez  vite,  tenant  le  cou  droit  devant  lui,  les  ailes  large- 
ment étalées  et  frappant  l'air  de  coups  redoublés  en  produisant  un 
bruissement  qui  s'entend  de  loin,  surtout  quand  plusieurs  de  ces 
oiseaux  volent  de  concert. 

Ce  Cygne  est  aussi  méfiant  que  prudent,  et  sait  éviter  avec  adresse 
les  embûches  tendues  par  le  chasseur.  Schilling  raconte  qu'un  de  ces 
oiseaux,  ayant  eu  l'aile  cassée  d'un  coup  de  feu ,  parvint  à  se  sauver 
en  courant  vers  un  grand  étang  où  il  se  mêla  à  une  bande  de  Cygnes 
apprivoisés  ;  on  le  poursuivit  en  vain,  car  il  se  tint  constamment  au 
milieu  des  sujets  domestiques  qu'on  aurait  pu  atteindre  en  tirant  sur 
lui:  sa  présence  d'esprit  le  sauva.  Il  est  sociable  mais  n'aime  que  la 


-  413  - 

société  de  ses  semblables;  d'après  Brehm,  il  serait  peut-être  de  tous 
ses  congénères  le  plus  despote,  le  plus  querelleur:  «  j'ai  toujours  vu 
ceux  qu'on  mettait  avec  des  Cygnes  domestiques,  dit  cet  auteur,  atta- 
quer ces  derniers  et  les  mettre  en  fuite  après  de  longs  combats.   » 

Le  Cvgne  sauvage  se  distingue  surtout  par  sa  voix  forte  et  harmo- 
nieuse. Naumann  rend  son  cri  ordinaire  par  kilkliih  et  son  cri  plus 
doux  par  ang,  que  la  femelle  fait  entendre  dans  un  ton  plus  élevé. 
Faber  dit  que  cet  oiseau  mérite  bien  de  conserver  le  nom  de  C.  musi- 
cus  :  «  quand  de  petites  bandes  de  ces  Cygnes  traversent  les  airs  à 
une  grande  hauteur,  ils  font  entendre  leur  voix  harmonieuse  et 
mélancolique,  semblable  à  des  sons  de  trompe  dans  le  lointain.  » 
Selon  Schilling,  sa  voix  est  forte,  riche  en  notes  pures  et  variées,  et 
il  la  fait  entendre  à  toute  occasion  :  c'est  un  cri  d'appel,  d'avertisse- 
ment. «  Quand  il  est  réuni  à  ses  semblables,  dit  cet  observateur,  il 
paraît  causer  avec  eux  ou  rivaliser  à  qui  chantera  le  mieux.  Lorsque, 
par  les  grands  froids,  la  mer  est  couverte  de  glace  dans  les  endroits 
non  occupés  par  les  courants,  que  les  Cygnes  ne  peuvent  plus  se 
rendre  là  où  Teau  peu  profonde  leur  garde  une  nourriture  abondante 
et  facilement  accessible,  alors  on  voit  ces  oiseaux  se  rassembler  par 
centaines  sur  les  points  où  des  courants  maintiennent  la  mer  libre, 
et  leurs  cris  mélancoliques  racontent  leur  triste  sort;  souvent  alors, 
dans  les  longues  soirées  d'hiver  et  pendant  des  nuits  entières,  j'ai 
entendu  leurs  cris  plaintifs  retentir  à  plusieurs  lieues.  On  croit 
entendre  tantôt  des  sons  de  cloches,  tantôt  des  sons  d'instruments  à 
vent,  ces  notes  sont  même  plus  harmonieuses;  provenant  d'êtres 
animés,  elles  frappent  nos  sens  bien  plus  que  des  sons  produits  par 
un  métal  inerte.  C'est  bien  là  la  réalisation  de  la  fameuse  légende  du 
chant  du  Cygne  ;  c'est,  en  elïet,  souvent  le  chant  de  mort  de  ces 
superbes  oiseaux.  Dans  les  eaux  profondes  où  ils  ont  dû  chercher  un 
refuge,  ils  ne  ti'ouvent  plus  de  nourriture  suffisante  ;  atfamés, 
épuisés,  ils  n'ont  plus  la  force  d'émigrer  vers  des  contrées  plus  pro- 
pices, et  souvent  on  les  trouve  sur  la  glace,  morts  ou  à  moitié 
morts  de  faim  et  de  froid.  Jusqu'à  leur  trépas  ils  poussent  leurs  cris 
mélancoliques.  »  Voilà  donc  l'explication  de  la  légende;  l'oiseau  ne 
chante  pas  en  expirant,  mais  son  dernier  râle  a  encore  le  timbre 
harmonieux  qui  caractérise  sa  voix. 

La  nourriture  du  Cvfjrne  est  à  la  lois  animale  et  végétale,  et  se 
compose  de  végétaux  ;i(|u,'iii(|uos,  r.Miill(\s  (cndres,  graines,  ladifrlles, 
insectes    et    larves   a(|uatiques,    nioilnsques,    vers,    têtards,   jeunes 


-  414  - 

grenouilles  et  petits  poissons,  mais  il  préfère  toujours  les  substances 
végétales. 

C'est  un  oiseau  courageux,  ayant  conscience  de  sa  force,  pouvant 
d'un  coup  d'aile  casser  le  bras  ou  la  jambe  d'un  homme,  aussi  ne  se 
laisse-t-il  pas  vite  terrasser  par  un  animal  carnassier;  les  Pygargues 
et  les  grands  Aigles  sont  les  seuls  oiseaux  qui  osent  l'attaquer,  et 
encore  ne  fondent-ils  le  plus  souvent  que  sur  déjeunes  Cygnes.  Mais 
c'est  toujours  l'homme  qui  est  son  plus  grand  ennemi;  celui-ci  le 
poursuit  pour  ses  plumes  et  surtout  pour  son  duvet  qui  est  très  estimé 
comme  fourrure  légère.  Les  jeunes  seulement  sont  mangeables. 

Reproduction.  —  «  Le  nid,  dit  Faber,  est  grand  et  large,  formé  de 
joncs  et  autres  plantes  aquatiques,  et  il  est  parfois  construit  au  milieu 
de  l'eau  comme  celui  du  Grèbe  cornu.  La  femelle  y  dépose  au  com- 
mencement de  mai  de  cinq  à  sept  œufs.  Le  mâle  se  met  souvent  sur 
le  nid  à  côté  de  sa  compagne,  mais  sans  prendre  part  à  l'incubation.  » 
MM.  Seebohm  et  Harvie-Brown  trouvèrent  plusieurs  nids  dans  le 
delta  de  la  Petchora  du  19  au  30  juin;  c'étaient  de  grandes  construc- 
tions formées  de  glaïeuls  et  d'herbages  grossiers,  qui  ne  contenaient 
que  deux  à  quatre  œufs.  Ceux-ci  sont  d'un  blanc  jaunâtre,  tirant  un 
peu  sur  le  verdâtre  ou  sur  le  brunâtre  et  mesurent  environ  110  millim. 
sur  76. 

250.  —  Le  Cygne  Bewick  ou  d'Islande  (^) 

CYGNUS  MINOR,  Keys.  et  BL  ex  Pall. 

(PI.  250) 

Cygnus  olor,  p.  MiNOK,  Pall.  Zoogr.  Rosso-Âs.  II,  p.  214  (1811). 

Cygnus  bewickii,  Yarr.  Trans.  Linn.Soc.  XVI  p.  453  (1833). 

Cygnus  minor,  Keys.  et  Blas.  Wirbelth.  Eur.  p.  LXXXII  (1840). 

Cygnus  melanorhinus,  Naum.  Yog.  Deutschl.  XI,  p.  497,  pi.  297  (1842). 

Cygnus  musicus  minor,  Schleg.  Rev.  crit.,  p.  CXII  (1844), 

Olor  minor,  Bonap.  Cat.  Parz.,  p.  15  (1856). 

Cygnus  islandicus,  C.-F.  Dub.  (nec  Brehm)  Pi.  col.  Ois.  Belg.  III,  p.  et  pi.  298(1860). 

Cygnus  altumii  (Baedeok.),  Schleg.  Mus.  des  P.-B.,  Anscres,  p.  82  (1866). 

HoLOR  minor,  Olphe-Gal.  Contr.  faune  orn.  Eur.  oec,  fasc.  V,  p.  15  (1885). 

Der  Schwarznasige  Schwan,  en  allemand. 

The  Bewick's  Swan,  en  anglais. 

De  Kleine  Zwaan,  en  flamand. 

Taille  :  1»10  à  l'^SO;  ailes  0,52. 
Description  des  deux  sexes  adultes.  —  D'un  blanc  pur  avec  la  tête  lavée  de 

(1)  1^  nom  Aq  C^'i^iie  d'Jslaitde  s.  éié  donné  improprement  à  cette  espèce,  vu  qu'eUe  n'habite 
pas  rislande.  Le  C .  islandicus  de  Brehm  n'est  qu'un  Cygne  sauvage  ordinaire  de  petite  taiUe 
et  non  uu  C.  minor,  comme  l'ont  cru  Naumann,  Keyserling,  Blasius,  Schlégel  et  autres  auteurs. 


-  41  o 


jaune  roussâtre.  Bec  noir  jusqu'au  delà  des  narines  ;  lorums  et  base  du  bec 
jaune,  mais  cbez  les  mâles  adultes  le  bec  est  entièrement  noir  avec  une  large 
tache  ovalaire  jaune  occupant,  de  chaque  côté,  la  base  de  la  mandibule  supé- 
rieure ;  iris  brun  foncé;  pattes  d'un  noir  grisâtre  tirant  sur  le  bleu. 

Jeune.  —  D'un  gris  clair.  Lorums  d'une  teinte  hvide  et  plus  ou  moins 
emplumés  ;  base  du  bec  également  livide. 

Cette  espèce  est  toujours  facile  à  distinguer  de  la  précédente  à  sa  petite 
taille. 

Hab.  —  Pallas  découvrit  ce   Cygne  en  Sibérie  au  commencement 

^   de  ce  siècle,  mais  il  le  considéra 


!  comme  une  simple  variété  du 
J  C.  férus;  Naumann  l'observa  en 
'H  1823  en  Allemagne  et  lui  donna 

le  nom    de    C.    melanorJiinus  ; 

enfin,  un  an  plus  tard,  Yarrell  le 


'^tsm-'W^  découvrit  à  son  tour  en  Angle- 

"tiJ  ^^^^"^  ^^  ^^  décrivit  sous  le  nom 

de    6.  Bewickii  :  c  est   sous   ce 


dernier  nom  que  les  Anglais  le  désignent  le  plus  généralement. 

Autant  que  l'on  sait  aujourd'hui,  ce  Cygne  niche  dans  les  toundras 
qui  s'étendent  à  l'est  de  la  mer  Blanche,  et  principalement  près  des 
embouchures  de  la  Petchora,  de  l'Obi,  du  Yenissoy  et  de  la  Lena, 
ainsi  que  sur  les  îles  de  l'océan  Arctique  ;  il  n'est  pas  rare  à  la  Nou- 
velle-Zemble et  à  Waigatsch  {de  Heuglin),  et  visite  ibrobablement  le 
Spitzberg  où  l'on  a  vu  des  Cygnes  sans  que  l'on  sache  au  juste  à 
quelle  espèce  ils  appartiennent. 

Il  se  montre  accidentellement  on  Norwège  [Collett)  et  en  Finlande 
{Pahnén),  rarement  au  Danemark  {Collin),  mais  il  n'est  pas  très  rare 
en  hiver  dans  le  nord  de  l'Allemagne  (Borggveve)  où  il  paraît  se 
montrer  le  plus  souvent  près  du  Wéser  et  de  l'Ems  {Naimiann);  il 
visite  régulièrement  la  Russie  occidentale  {Bûchner)  et  n'est  pas  rare 
sur  les  côtes  des  îles  Britanniques  :  on  observe  cet  oiseau  sur  les 
côtes  do  l'Angleterre,  de  rp]cosse,  des  îles  Hébrides,  Orkneys,  Shet- 
land et  pi-obablement  des  îles  Channels, mais  il  est  surtoutabondant  dans 
la  partie  occidentale  de  l'Irlande  {Secbohm).  Il  est  étrange  que  le 
Cygne  Bewick,  (|ui  est  si  rare  dans  l'Europe  centrale,  le  soit  si  peu 
aux  îles  Britanniques;  où  nicheraient  bien  les  individus  qui  hivernent 
en  Iilande  et  dans  les  îles  voisines,  puisqu'ils  ne  se  reproduisent  pas 
en  Laponie  l 


-  416  — 

Ce  n'est  que  pendant  les  hivers  bien  rigoureux  que  quelques-uns 
de  ces  oiseaux  visitent  la  Hollande  {Schlêgeî),  la  Belgique  et  la 
France;  on  en  a  tué  assez  bien  en  Belgique  pendant  les  hivers  de 
1(S31,  1838  et  1855;  le  musée  de  Bruxelles  possède  trois  sujets  pris 
dans  le  pays  ;  M.  A.  Croegaert  mentionne  un  exemplaire  tué  en  1880 
dans  le  polder  d'Austruweel.  M.  Olphe-Galhard  signale  plusieurs 
départements  de  la  France  où  l'on  a  pris  de  ces  oiseaux  ;  d'après 
M.  A.  Lacroix,  on  en  aurait  même  tué,  pendant  les  hivers  de  1869, 
1870  et  1871,  dans  les  départements  de  l'Aude,  de  Hérault,  des 
Hautes-Pyrénées  et  du  Tarn-et-Garonne.  Naumann  mentionne  plu- 
sieurs captures  faites  en  Allemagne  et  même  en  Saxe.  Trois  ou  quatre 
sujets  ont  également  été  abattus  en  Italie  {Giglioli). 

Les  individus  qui  nichent  dans  le  nord  de  la  Sibérie  émigrent  en 
suivant  les  grands  fleuves  asiatiques  pour  hiverner  près  de  la  mer 
Caspienne,  auTurkestan  {Severtzow),Qn  Mongolie^en  Chine  {David), 
dans  la  Sibérie  orientale  {Taczanowski),àn.n^  les  hautes  steppes  de  la 
Daourie  {Raclde)  et  au  Japon  {Blakiston,  Pryer).  Comme  on  le  voit, 
c'est  surtout  une  espèce  asiatique  ;  un  sujet  a  même  été  tué  au 
Népaul  (Humé). 

Mœurs  et  reproduction.  —  Ses  mœurs  ne  diffèrent  guère  de  celles 
de  l'espèce  précédente.  Le  Cygne  Bewick  est  aussi  farouche  que  le 
Cygne  sauvage  et,  comme  ce  dernier,  il  ne  recherche  que  la  société 
de  ses  semblables.  Naumann  rend  son  cri  par  kouck  kouck  kouck  et 
kuck  kuck  ;  en  nageant  il  fait  aussi  entendre  un  son  ressemblant  à  ang, 
et  en  volant  haut  dans  les  airs  il  jette  souvent  le  cri  de  kloung,  réson- 
nant comme  un  son  de  trompe.  Tous  ces  cris,  dit  Naumann,  modulés 
sur  différents  tons,  produisent  une  musique  mélancolique  mais  non 
désagréable. 

Il  est  probable  que  cet  oiseau  construit  un  nid  à  peu  près  analogue 
à  celui  du  Cygne  sauvage.  Les  œufs  sont  semblables  à  ceux  de  ce 
dernier,  mais  ils  sont  plus  petits. 

251.  —  Le  Cygne  à  bec  tuberculeux 
CYGNUS  MANSUETUS,  Sal.  ex  Lin. 

(PI.  249) 

Anas  CYGNUS,  p.  MANSUETUS,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  194  (1766). 

Cygnus   MANSUETUS,  Salerne,  Orniih.  ou  Traité  des  Ois.,  p.  404  (1767). 

Anas  olor,  Gmel.  Syst.  nat.  I,  p.  501  (1788). 

Cygnus  gibbus,  Bechst.  Natury.  Deutschl.  III,  p.  815  (1809). 


-  417  — 

Cygnus  sibilus,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  II,  p.  215  (1811). 

Cygnus  olor,  Vieill.  iV.  Dict.  d'hist.nat.  IX,  p.  37(1817). 

Cygnus  immutabilis,  Yarr.  Proc.  Zool.  Soc.  1838,  p.  19. 

Cygnus  olor  immutabilis,  Schleg.  Rev.  crit.  p.  CXII  (1844). 

Cygnus  TUBERCULiROSTRis,  C.-F.  Dub.  PL  col.  Ois.  Belg.  III  p.  300  (1860). 

Cygnus  unwini,  Hume,  Ibis.,  1871,  p.  413. 

Der  Hoker  Schwan,  en  allemand. 

The  Mute  Swan,  en  anglais. 

De  Gewone  Zwaan,  en  flamand. 

Taille  :  1"^46;  ailes  0,58. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  D'un  blanc  pui"  avec  le  sommet  de  la 
tête  lavé  de  roux  jaunâtre.  Lorums  et  un  tubercule  frontal,  noirs;  bec  rouge 
avec  l'onglet,  les  narines  et'les  bords  des  mandibules, noirs  ;  iris  brun  foncé  ; 
pattes  noires.  La  femelle  est  d'une  taille  un  peu  plus  petite  et  son  tubercule 
frontal  est  moins  développé. 

Jeune.  —  D'un  cendré  brunâtre,  plus  foncé  sur  la  tête  ;  bec  d'un  gris  livide  ; 
pattes  d'une  teinte  plombée. 

Poussin.  —  Parties  supérieures  d'un  gris  cendré  pâle,  un  peu  plus  rem- 
bruni sur  le  dos  et  sur  les  ailes  où  l'extrémité  du  duvet  prend  une  teinte 
fauve  ;  gorge  et  ventre  blancs.  Bec  noirâtre  ;  pattes  d'un  brun  roussâtre. 

Remarque.  —  Yarrell  a  décrit  comme  espèce  distincte  un  oiseau  ne 
différant  réellement  pas  du  Cygne  domestique.  Le  C.  immutabilis, 
Yarr.  se  distingue  de  ce  dernier  par  un  tubercule  moins  développé  et  des 
pattes  gris  de  plomb;  le  jeune  est  d'un  blanc  pur  et  non  cendré,  avec 
un  bec  couleur  chair  livide.  La  grosseur  du  tubercule  et  la  couleur 
des  pattes  ne  sont  qu'une  question  d'âge,  et  il  arrive  parfois  de  trou- 
ver un  individu  tout  blanc  dans  une  nichée  dont  les  autres  ont  la 
teinte  corniale  cendrée, 

liab.  —  Le  Cygne  tubercule  vit  dans  une  demi-domesticité  sur  la 

'^"-l  plupart  des  lacs  et  des  étangs 
fiH^ti^J  ^^   l'Europe   tempérée,    d'où   il 


il'.r  '^^■^'   s  échappe  souvent  pour  se  rendre 
^  'rr      .!  sur  les  cours  d'eau  voisins  ;  il  en 
résulte  ([u'il  est  fort  difficile  de 
.  dire  où  il  est  réellement  de  pas- 
sage. Ce  qui  est  certain,  c'est 
.;  qu'il  ne  se  montre  pas  au  delà 
du  58   1.  N. 
Cet  oiseau  habile  en  été  le  midi  de  la  Suède  {Nilsson),  mais  on  ne 
connaît  que  deux  captures  dans  le  sud  de  la  Norwège  :  deux  jeunes 
T.jME  11.  —  IbOi;  53 


—  418  — 

ont  été  tirés,  l'un  en  décembre  1869,  et  l'autre  en  1870  dans  le  même 
mois  [Collett).  Il  niche  dans  beaucoup  de  localités  du  Danemark 
[Collin),  ainsi  que  sur  les  grands  lacs  de  la  Prusse,  de  la  Poméranie, 
du  Mecklembourg(iV(2wm6!^nn),de  laSilésie  {Gloger)ei  à  l'île  de  Rugen 
{v.  Homeyer),  mais,  lors  des  passages,  il  est  plus  rare  sur  les  côtes 
que  le  vrai  Cygne  sauvage  ;  suivant  Naumann,  beaucoup  de  Cygnes 
tuberculeux  hivernent  en  Allemagne  quand  la  saison  n'est  pas  trop 
rigoureuse.  Il  visite  probablement  les  îles  Britanniques  {Seebohm),  la 
Hollande  {Schlégel),  la  Belgique  et  la  France,  car  dans  tous  ces  pays 
on  a  tué  des  sujets  pendant  l'hiver  qui  étaient  sans  doute  de  passage; 
on  a  même  tiré  de  ces  oiseaux  dans  le  midi  de  la  France  [Lacroix] ,  en 
Espagne  dans  les  provinces  de  Valence  (Vidal)  et  de  Gérona  [Vay- 
reda),  en  Portugal  [Reyes)  et  dans  plusieurs  localités  de  l'Italie 
[Giglioli],  Dans  l'est  de  l'Europe,  on  le  voit  en  hiver  sur  les  grands 
fleuves  du  midi  de  la  Russie  [de  Nordmann),  accidentellement  en 
Pologne  {Taczanowski)  et  en  Bohême  {Fritsch),  mais  il  est  sédentaire 
et  pas  rare  sur  le  Danube,  surtout  à  l'embouchure  de  ce  fleuve,  ainsi 
que  sur  certains  lacs  de  la  Dobrodja,  de  la  Bulgarie  {Alléon)  et  de  la 
Turquie  (Elwes  et  Buckley).  On  l'a  également  observé  en  Grèce 
{Krûper),  en  Transylvanie  {Danford)  et  à  l'île  de  Malte  [Wright). 

Cette  espèce  ne  paraît  pas  rare  non  plus  dans  le  nord  de  l'Afrique, 
où  elle  a  été  observée  au  Maroc  (Favier),  en  Algérie  (1)  et  dans  la 
basse  Egypte  ;  dans  le  delta  du  Nil,  et  surtout  sur  le  lac  Menzalah, 
elle  séjourne  parfois  depuis  le  mois  d'octobre  jusqu'au  commence- 
ment de  mai  [de  Heuglin).  On  rencontre  également  cet  oiseau  en 
Asie  Mineure,  en  Syrie  et  près  de  la  mer  Caspienne,  mais  rarement  à 
l'intérieur  de  la  Transcaucasie  [Radde]  ;  on  le  voit  aussi  en  Tur- 
kestan  (Severtzoïo),  et  il  visite  annuellement  le  fleuve  Jubbée  et  la 
partie  occidentale  de  la  vallée  de  Peshawur  [Hume).  Les  sujets  obser- 
vés en  Mongolie  [Seebohm)  et  en  Daourie  [Radde)  appartiennent 
probablement  à  une  autre  espèce  :  le  C.  Davidi,  Swinh. 

Mœurs.  —  Il  est  fort  difficile  de  dire  si  le  Cygne  tubercule  doit 
réellement  être  compris  parmi  les  oiseaux  observés  en  Belgique,  car 
il  vit  chez  nous,  comme  en  France, en  Angleterre  et  partout,  dans  une 
demi-domesticité  sur  la  plupart  des  lacs  et  des  étangs  ;  de  là  il  fait 
souvent  des  excursions  sur  les  fleuves  et  les  rivières  du  voisinage,  où 
les  chasseurs  le  tirent  parfois,  croyant  avoir  aflaire  à  un  individu  sau- 

(i)  M.  le  baron  d'HamonviUe  dit  avoir  trouvé,  en  1854,  un  nid  de  cet  oiseau  sur  le  lac 
Haloulach  en  Algérie.  (La  vie  des  oiseaux,  p.  347.^ 


-  419  ~ 

vage.  M.  Croegaert  dit  Tavoir  souvent  vu  sur  l'Escaut,  mais  il  présume 
que  ce  sont  des  sujets  apprivoisés  ;  «  en  1880,  dit-il,  un  couple  des 
Cygnes  du  parc  d'Anvers  allait  régulièrement  faire  le  matin  une 
excursion  sur  l'Escaut.  »  Mais  comme  cette  espèce  émigré  des  con- 
trées plus  septentrionales,  il  est  plus  que  probable  qu'il  visite  parfois 
notre  pays  lors  de  ses  migrations,  surtout  quand  l'hiver  est  rigoureux; 
mais  cela  est  difficile  à  prouver,  vu  que  rien  ne  distingue  les  sujets 
sauvages  de  ceux  qui  sont  apprivoisés  et  qui  mènent  parfois  une  vie 
assez  vagabonde,  quand  on  ne  les  empêche  pas  de  s'envoler. 

Ce  palmipède  émigré  en  octobre  par  familles  ou  par  troupes  com- 
posés parfois  de  trente  à  soixante  individus,  et  retourne  dans  sa  patrie 
en  mars.  Il  voyage  plus  souvent  le  jour  que  la  nuit,  et  dans  l'obscu- 
rité on  peut  reconnaître  le  passage  d'une  bande  au  bruissement  que 
produisent  leurs  ailes. 

Cette  espèce  ne  diffère  guère  des  précédentes  par  ses  moeurs, et  elle 
se  montre  partout  où  vit  le  Cygne  chanteur.  Son  attitude  est  cepen- 
dant plus  élégante,  et  elle  tient  davantage  le  cou  recourbé  en  S.  Le 
Cygne  tubercule  passe  sa  vie  sur  l'eau  sans  jamais  plonger  ;  comme 
ornement  de  nos  pièces  d'eau,  aucun  autre  oiseau  ne  peut  lui  être  com- 
paré. Il  rend  des  services  en  débarrassant  les  eaux  des  végétaux  cryp- 
togamiques  et  autres,  et  empêche  ainsi  la  formation  des  miasmes  qui 
engendrent  les  fièvres  paludéennes. 

C'est  à  tort,  dit  Naumann,  qu'on  donne  souvent  à  cet  oiseau  le  nom 
de  Cygne  muet,  car  sa  voix  est  aussi  forte  que  celle  de  son  congénère, 
mais  il  ne  la  fait  jamais  entendre  en  volant,  et  rarement  en  nageant. 
Ce  n'est  réellement  que  dans  les  lieux  de  reproduction  qu'on  peut 
l'entendre,  surtout  au  printemps  quand  la  couvée  court  un  danger  ; 
son  cri  est  sonore  et  ressemble  assez  à  celui  de  la  Grue  ;  Naumann  le 
rend  par  kgiurrr  pour  le  mâle  et  par  keiorr  pour  la  femelle  dans  un 
ton  plus  élevé.  Outre  ce  cri,  les  deux  sexes  font  encore  entendre  un 
certain  bourdonnement,  qui  devient  plus  sonore  à  l'époque  de  l'accou- 
plement. 

Ce  palmipède  se  nourrit  comme  les  précédents  de  plantes  aqua- 
tiques, de  racines,  d'herbages  divers, de  graines,  d'insectes  et  de  larves 
aquatiques,  de  mollusques,  de  vers,  de  têtards,  de  grenouilles,  mais 
rarement  de  poissons,  parce  qu'il  n'est  pas  assez  adroit  pour  les  attra- 
per. Il  peut  atteindre  un  grand  âge  :  Naumann  dit  qu'on  ados  exem- 
ples de  Cygnes  qui  ont  atteint  et  même  dépasse  cent  ans. 

On  sait  que  chez  les  Cygnes  l'union  est  pour  la  vie,  et  que  les  con- 


—  420    - 

joints  sont  très  attachés  l'un  à  l'autre.  M.  Radde  nous  en  donne  deux 
exemples.  En  mars  1874,  quelques  amis  chassèrent  pendant  plusieurs 
jours  près  de  Zarskie  Kolodsi.  Ils  tuèrent  un  Cygne,  mais  ils  furent 
poursuivis  et  harcelés,  durant  plusieurs  jours,  par  le  conjoint  survi- 
vant; celui-ci  s'élevait  dans  les  airs  à  une  hauteur  considérable,  pour 
s'abattre  ensuite  avec  une  grande  impétuosité  sur  les  chasseurs,  dont 
il  évitait  les  atteintes  par  une  fuite  rapide.  Un  autre  cas  s'est  présenté 
à  l'île  Sari,  mais  il  eut  une  fin  plus  tragique;  après  s'être  plusieurs 
fois  laissé  tomber  de  tout  son  poids  sur  les  chasseurs,  le  Cygne  fut 
frappé  de  mort  subite. 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  niche  sur  les  lacs,  les  étangs,  dans  les 
marais  parsemés  d'eaux  découvertes.  Les  couples  construisent  leur  nid 
dès  leur  retour  au  printemps,  mais  ils  ne  se  reproduisent  pas  avant 
l'âge  de  deux  ans.  Les  mâles  qui  s'accouplent  pour  la  première  fois 
doivent  conquérir  une  femelle,  ce  qui  ne  se  fait  pas  sans  luttes  ;  ils 
doivent  parfois  aussi  combattre  pour  avoir  une  place  convenable  pour 
leur  nid,  tandis  que  les  couples  unis  les  années  précédentes,  repren- 
nent simplement  possession  de  leur  ancienne  demeure,  dont  ils  chas- 
sent les  intrus;  tout  ceci  occasionne  des  luttes  continuelles  aussi  long- 
temps que  les  différents  couples  n'ont  trouvé  à  se  caser. 

Le  nid  est  construit  sur  un  îlot  ou  sur  des  souches  de  roseaux  et 
de  joncs,  mais  toujours  très  près  de  l'eau  et  dans  un  endroit  difficile 
à  aborder.  Comme  les  roseaux  sont  encore  peu  élevés  à  cette  époque 
de  Tannée,  il  est  facile  d'apercevoir  de  loin  la  vaste  construction  que 
la  femelle  élève  sans  le  concours  du  mâle;   ce  dernier  se  borne  à 
l'accompagner  quand  elle  cherche  les  matériaux  nécessaires  et  à 
veiller  sur  elle.  Quand  le  nid  est  placé  sur  la  terre  ferme,  il  demande 
moins  de  travail,  mais  lorsqu'il  a  pour  base  de  vieilles  souches  ou  un 
tas  de  roseaux  brisés  et  entassés,  il  importe  qu'il  ait  assez  de  solidité 
pour  supporter  le  poids  de  la  couveuse,  sans  être  exposé  à  s'en  aller 
à  la  dérive.  Le  plus  souvent  c'est  le  nid  de  l'année  précédente  qui 
sert  de  base,  et  la  construction  augmente  ainsi  en  volume  d'année  en 
année,  en  s'entassant  de  plus  en  plus,  comme  cela  a  lieu  pour  le  nid 
de  la  Cigogne.  Quand  il  est  construit  de  toute  pièce,   la  femelle 
commence  par  rassembler  en  tas  des  racines,  des  vieilles  tiges  de 
roseaux  et  de  joncs  ainsi  que   des  branchages,  sur  lesquels   elle 
entasse  des  bottes    d'herbaû,es  aquatiques    avec  les  racines  qu  elle 
cherche  dans  l'eau  ;  le  tout  est  recouvert  de  matières  sèches,  compo- 
sées en  grande  partie  de  feuilles  mortes,  de  brins  d'herbes,  de  joncs 


..-  421   — 

secs,  etc.;  la  cavité  centrale  est  peu  profonde.  Ce  nid  mesure  alors 
0"'90  à  1"25  de  diamètre  et  30  à  40  centimètres  de  hauteur. 

La  ponte  a  lieu  vers  la  mi-avril  et  se  compose  de  cinq  à  huit  oeufs, 
suivant Tâge  de  la  pondeuse;  ceux-ci  sont  ovalaires,  d'un  blanc  ver- 
dâtre  uniforme  et  mesurent  environ  107  millim.  sur  74.  D'après 
Naumann,  la  durée  de  l'incubation  est  de  trente-six  à  trente-neuf 
jours.  Les  poussins  ne  quittent  leur  nid  que  le  second  jour;  les 
parents  les  conduisent  alors  sur  l'eau,  leur  montrent  la  nourriture 
qui  leur  convient,  et  le  soir  toute  la  famille  retourne  au  nid,  tant  que 
celui-ci  est  en  état  de  les  contenir  ;  la  mère  abrite  ses  petits  sous  ses 
ailes,  et  le  père  veille  près  du  nid  à  la  sécurité  commune. 

SOUS-FAMILLE 

DES  ANATINÉS.  —  ANATTN^ 

Car.  —  Les  Anatinés  ou  Canards  se  distinguent  des  précédents  par  un  cou 
beaucoup  plus  court,  et  des  Oies  par  des  jambes  moins  hautes. 

Bec  de  la  longueur  de  la  tête  ou  un  peu  plus  court,  d'égale  largeur  dans 
toute  son  étendue  ou  plus  large  à  son  extrémité,  à  crête  dorsale  bombée  ; 
lorums  emplumés  ;  cou  et  ailes  de  longueur  moyenne,  ces  dernières  étroites, 
aiguës,  à  seconde  rémige  la  plus  longue;  queue  courte,  large,  arrondie  ou 
pointue  ;  jambes  insérées  très  en  arriére,  courtes,  emplumées  jusqu'à  la 
naissance  du  tarse;  celui-ci  médiocre,  comprimé  latéralement;  doigt  médian 
plus  long  que  le  tarse;  ongles  faibles. 

Plumage  variant  ordinairement  suivant  le  sexe,  l'âge  et  la  saison;  le 
duvet  est  très  abondant. 

lîah,  —  Cette  division  a  des  représentants  sur  toute  la  surface 
du  globe. 

Mœur^i  —  Les  Canards  sont  des  oiseaux  essentiellement  aqua- 
tiques, qui  vivent  sur  la  mer  ou  sur  les  eaux  douces.  Ceux  qui 
habitent  les  zones  froides,  émigrent  en  automne  et  se  rassemblent 
dans  ce  but  en  bandes  considérables,  plusieurs  espèces  voyageant 
souvent  ensemble.  Ils  se  mettent  ordinairement  en  route  au  coucher 
du  soleil,  volent  pendant  quelques  heures,  puis  s'abattent  sur  l'eau 
pour  y  passer  le  restant  de  la  nuit;  au  matin,  ils  continuent  leur 
voyage.  Ils  dorment  la  tète  cachée  sous  les  scapulaires,  perchés 
sur  une  patte,  ou  couchés  sur  le  ventre,  ou  flottant  sur  l'eau. 

Ces  palmipèdes  marchent  plus  ou  moins  bien,  nagent  à  la  perfec- 


—  422  - 

tion  mais  ne  plongent  qu'exceptionnellement.  Ils  volent  bien,  à  coups 
d'ailes  précipités  et  en  produisant  un  bruissement  plus  ou  moins  fort. 
Leur  voix  varie  suivant  les  espèces,  et  le  cri  du  mâle  est  toujours 
différent  de  celui  de  la  femelle.  Leurs  sens  paraissent  bien  développés. 
Ils  sont  tous  craintifs,  prudents,  rusés  et  intelligents,  et  leur  pru- 
dence augmente  encore  quand  ils  sont  réunis  en  grand  nombre.  Leur 
régime  est  aussi  bien  animal  que  végétal. 

Les  Canards  sont  monogames,  mais  leur  ardeur  les  entraîne  sou- 
vent à  enfreindre  les  devoirs  conjugaux  et  même  à  contracter  des 
unions  hybrides.  Ils  nichent  généralement  en  société  et  construisent 
leurs  nids  très  près  les  uns  des  autres.  La  plupart  nichent  sur  le  sol 
ou  dans  des  trous  creusés  en  terre,  parfois  aussi  dans  des  crevasses 
de  rochers;  quelques-uns  font  leur  nid  dans  des  troncs  d'arbres  creux, 
d'autres  sur  des  arbres  et  parfois  dans  le  nid  abandonné  d'un  oiseau 
arboricole.  La  ponte  est  de  six  à  seize  œufs  et  la  durée  de  l'incubation 
est  de  vingt  à  vingt-quatre  jours, 

La  mère  témoigne  une  grande  tendresse  à  ses  petits  et  les  conduit 
sur  l'eau  dès  qu'ils  sont  secs;  les  poussins  ne  tardent  guère  à  se 
montrer  très  agiles,  ils  prennent  joyeusement  leurs  ébats  et  courent, 
nagent  et  plongent  avec  habileté. 

GENRE  CXLIIl 

TADORNE.  ~  TÂDORNA 

Anas,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  344  (1760). 

Tadorna,  Flem.  Phil.  of  Zool.  II,  p.  260  (1822). 

Casarca,  Bonap.  Comp.  List,  p.  56  (1838). 

VuLPANSKR,  Keys.  et  Blas.  Wirbelth.  Eiir.  p.  LXXXIV  (I840j. 

Car.  —  Bec  plus  court  que  la  tête,  plus  haut  que  large  à  la  base,  aplati  et 
légèrement  retroussé  à  l'extréinité  qui  est  un  peu  plus  large  que  la  base  du 
bec;  onglet  large,  recourbé  et  faisant  retour  eu  arrière;  mandibule  inférieure 
presque  entièrement  cachée  par  la  supérieure,  dont  les  lamelles  sont  un  peu 
saillantes  vers  le  miheu  du  bec  ;  narines  presque  médianes,  espacées,  larges, 
ovales;  ailes  allongées,  aiguës  ;  queue  courte,  légèrement  arrondie;  bas  des 
jambes  très  peu  dénudé  ;  tarses  robustes,  de  la  longueur  du  doigt  médian, 
l'ongle  compris  ;  doigts  relativement  courts. 

Hdb.  —  Ce  genre  a  des  représentants  en  Europe,  en  Afrique,  en 
Asie,  en  Australie  et  aux  îles  océaniennes. 


—  423  — 

252.  —  Le  Tadorne  ordinaire. 
TADORNA  CORNU  TA,   Gray  ex  Gmel. 

(PI.  251) 

Anas  TADORNA,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  159  (1766). 

Anas  cornuta,  Gmel.  Eeise  Russl.  II,  p.  185,  pi.  18  (1774). 

Tadorna  familiaris,  Boie,  Isis,  1822  p.  564. 

Tadorna  bellonii,  Steph.  SJtaw'sGen.  Zool.  XII,  2,  p.  72,  pi.  45  (1824). 

Tadorna  vulpanser,  Flem,  Brit.  an.  p.  122  (1828). 

Tadorna  gibbera,  littoralis,  maritima,  Brehm,  /sts,  1830,  p.  997. 

Vulpanser  tadorna,  Keys.  et  Blas.  Wirbelth.  Eur.  p.  LXXXIV  ('1840). 

Tadorna  schachraman,  Breh.  Naumannia,  1855,  p.  297. 

Tadorna  cornuta,  Gray,  Hand-listofB.  III,  p.  80  (1871)^ 

Die  Brand-Ente,  en  allemand. 

The  common  Sheldrake,  en  anglais. 

De  Bergeend,  en  flamand. 

Taille. •0,-^hO;  ailes  0,«'35. 

Description  du  mâle  adulte.  —  Tête  et  majeure  partie  du  cou  d'un  vert 
noirâtre  ;  base  du  cou,  dessus  du  corps,  couvertures  des  ailes,  flancs,  sus- 
caudales  et  jambes  d'un  blanc  pur;  un  large  ceinturon  d'un  roux  ardent 
couvre  la  poitrine  et  le  haut  du  dos  ;  scapulaires  et  partie  médiane  de  la  poi- 
trine et  du  ventre, noires;  rémiges  secondaires  d'un  vert  pourpré  à  l'extérieur, 
les  plus  supérieures  d'un  roux  pourpré  extérieurement, blanches  à  l'intérieur, 
et  ces  deux  couleurs  sont  séparées  par  une  large  raie  brune  ;  rémiges  primaires 
noires  ;  queue  blanche  avec  l'extrémité  noire;  sous-caudales  roussâtres. 

Bec  rouge,  surmonté  d'une  forte  protubérance  frontale  arrondie  de  même 
couleur,  mais  qui  disparaît  insensiblement  après  l'époque  des  amours  ;  iris 
brun  ;  pattes  couleur  chaii*. 

Femelle.  —  Ressemble  au  mâle  par  ses  teintes,  quoiqu'elles  soient  moins 
vives  ;  sa  taille  est  plus  petite  et  le  bec  est  dépourvu  de  la  protubérance  fron- 
tale. 

Jeune.  —  Dessus  de  la  tête,  joues  et  partie  supérieure  du  cou  d'un  brun 
cendré  foncé  tacheté  de  blanchâtre;  face,  gorge,  toutes  les  parties  inférieures, 
bas  du  dos,  sus-caudales  blancs  ;  côtés  de  la  poitrine  et  base  du  cou  en 
dessus  d'un  roux  terne  avec  les  plumes  lisérées  de  cendré  brunâtre  ;  haut  du 
dos  d'un  brun  cendré  ;  couvertures  des  ailes  blanches,  les  moyennes  terminées 
de  cendré,  les  plus  grandes  presque  entièrement  de  cette  couleur;  scapulaires 
d'un  cendré  brunâtre  mais  terminées  de  blanc  ;  rémiges  secondaires  ou  miroir 
d'un  vert  doré  plus  sombre  que  chez  l'adulte  ;  rémiges  primaires  d'un  brun 
noirâtre  et  terminées  de  blanc;  queue  blanche  terminée  de  brun  ;  sous-cau- 
dales roussâtres.  Bec  d'un  rouge  brunâtre  ;  pattes  couleur  chair  livide. 

Poussin.  — Duvet  bien  fourni,  pas  très  long;  vertex,  nuque,   une  petite 


—  424  - 


tache  sur  les  oreilles,  deux  bandes  dorsales  très  larges  descendant  l'une  sur 
les  ailes  et  l'autre  sur  les  cuisses,  ainsi  que  queue,  d'un  brun  cendré;  front, 
côtés  de  la  tête,  cou,  deux  bandes  transversales  sur  le  dos  et  parties  inférieu- 
res d'un  blancpur.  Bec  brun,  l'onglet  plus  pâle,  mandibule  inférieure  jau- 
nâtre ;  pattes  d'un  brun  varié  de  jaunâtre. 

jlfji^j)^  —  Ce  bel  oiseau  est  plus  ou  moins  répandu  sur  toutes  les  côtes 
^    ,^^,.^^^îSEf^    de  l'Europe,  et  il  niche  depuis 
^^^W^^X'  y   ^^  °^^^^  ^®  ^^  France  {Lacroix) 

'W\  'M^'iS'^M^^-'^^^   et  les  îles  Britanniques  (<See5oAw) 
^■^j^f^4  jusqu'en  Norwège  sous  le  70° 


^^iq  1.  N.  {Collett).  Il  est  sédentaire 
sur  toutes  les  côtes  de  l'Europe 
tempéréejusqueprèsdeSi^l.  N., 
ii  f-M-^i  !H  mais  on  ne  le  voit  qu'en  hiver  en 
Espagne  {Reyes),  où  quelques 
couples  paraissent  cependant  nicher  {Saunders),  en  Portugal  {du 
Bocage)  et  en  Italie  {Giglioli)  ;  il  est  très  rare  en  Sicile  {Malherbe),  de 
passage  en  Grèce  {Lhidermayer),  mais  c'est  le  Canard  le  plus  commun 
dans  la  Dobrodja  où  il  niche  partout  {Alléon);  il  est  également 
sédentaire  sur  les  autres  côtes  de  la  mer  Noire  et  sur  celles  de  la  mer 
Caspienne  {Raddé),  mais  rare  dans  le  golfe  de  Finlande  {Bilchner).  On 
ne  le  voit  qu'accidentellement  en  Pologne  sur  la  Vistule  {Tacza- 
nowski),  en  Bohême  {Fritsch),  en  Transylvanie  {Danford),  en 
Autriche-Hongrie,  dans  l'intérieur  de  l'Allemagne  {Naumann)  et  en 
Suisse  {Meisner  et  Schinz)  ;  c'est  surtout  sur  les  eaux  saumâtres  qu'on 
le  voit  à  l'intérieur  des  terres  et  il  y  est  souvent  sédentaire  si  l'hiver 
n'est  pas  trop  rigoureux.  En  Belgique,  ce  Canard  est  plus  ou  moins 
commun  en  hiver  sur  les  côtes  maritimes  et  à  l'embouchure  de 
l'Escaut,  surtout  si  la  saison  est  rigoureuse,  et  il  est  probable  qu'il 
niche  chez  nous  aussi  bien  que  sur  les  côtes  voisines,  mais  il  ne  se 
montre  qu'accidentellement  dans  l'intérieur  du  pays. 

Le  Tadorne  ne  paraît  pas  habiter  en  Asie  une  latitude  aussi  boréale 
qu'en  Europe,  car  ni  MiddendorlF,  ni  von  Schrenk  ne  l'ont  observé 
dans  le  nord  de  la  Sibérie.  M.  Radde  l'a  rencontré  dans  les  hautes 
steppes  salines  de  la  Daourie  et  au  Tarei-nor,  et  le  D""  Finsch  l'a 
observé  dans  la  Sibérie  occidentale  près  du  Sassyk-Ala-Kul  et  du 
Aul-Uwanas;  il  habite  également  les  eaux  salines  du  Turkestan 
{Seoertzow)  et  visite  régulièrement  en  hiver  la  Mongolie,  la  Chine 
{David),  Formose  {Swinhoe)  et  Tlnde  {Jerdon,  Simson),  mais  sans 


dépasser  au  Midi  le  22"  1.  N.  {Seebohm)  ;  il  est  probablement  séden- 
taire au  Japon  {von  Siehold). 

En  Afrique,  on  voit  cette  espèce  dans  les  parties  septentrionales 
[Loche)  et  il  est  commun  dans  la  basse  Egypte;  de  Heuglin  est  per- 
suadé qu'il  y  niche,  car  il  a  rencontré  des  sujets  adultes  en  mai  et  au 
commencement  de  juin,  et  des  Bédouins  de  la  région  du  lac  Horn  lui 
ont  assuré  que  ce  Canard  niche  dans  les  rochers  qui  avoisinent  les 
ruines  de  l'ancienne  ville  de  Thmé.  Il  niche  également  en  Syrie 
{de  Heuglin). 

Mœurs.  —  C'est  en  octobre  que  les  Tadornes  des  régions  septen- 
trionales se  réunissent  en  bandes  sur  les  côtes  et  sur  les  lacs,  pour 
émigrer  vers  un  climat  plus  clément  ;  ces  bandes  sont  parfois  com- 
posées de  centaines  d'individus,  qui  voyagent  le  plus  souvent  la  nuit 
en  volant  à  la  file  ou  en  deux  lignes  disposées  en  angle  aigu  ;  les 
adultes  et  les  jeunes  ne  voyagent  ordinairement  pas  ensemble.  Ils 
retournent  en  mars  dans  leur  patrie. 

Ce  Canard  n'habite  pour  ainsi  dire  que  les  rivages  de  la  mer,  les 
lacs  salés  et  autres  eaux  saumâtres  ;  il  se  montre  peu  sur  les  eaux 
douces,  et  principalement  quand  il  a  des  poussins,  parce  que  ceux-ci 
ne  sont  pas  assez  robustes  pour  lutter  contre  les  flots  delà  mer,  tandis 
qu'ils  peuvent  nager  sans  crainte  sur  une  eau  tranquille. 

Parmi  les  Canards,  le  Tadorne  est  l'un  des  plus  beaux  et  des  plus 
élégants  ;  dans  son  attitude  il  ressemble  à  l'espèce  ordinaire 
{A.  hoschas),  mais  il  porte  le  cou  fortement  courbé  en  S.  Il  se  tient 
plus  à  terre  que  la  plupart  des  autres  espèces  de  la  famille,  marche 
avec  faciUté  et  sait  mémo  courir  assez  vite  ;  au  repos  il  se  tient  sur 
une  patte,  la  tête  cachée  dans  les  scapulaires,  ou  bien  couché  sur  le 
ventre.  Il  vole  bien,  en  ligne  droite  et  rapidement,  et  nage  à  la  perfec- 
tion. Il  est  très  sociable  avec  ceux  de  son  espèce,  les  autres  lui  sont 
indifférents;  <à  l'époque  de  la  reproduction  il  y  a  bien  quelques 
querelles  entre  les  mâles  au  sujet  des  femelles,  mais  cela  n'est  pas  de 
longue  durée. 

C'est  un  oiseau  craintif  et  prudent,  mais  il  s'aperçoit  bientôt  si 
l'homme  a  de  bonnes  ou  de  mauvaises  intentions  à  son  égard;  quand 
il  se  sent  en  sûreté,  il  devient  très  confiant  et  prend  possession  des 
nids  qu'on  a  disposés  pour  lui. 

Le  Tadorne  se  nourrit  de  végétaux  aquatiques,  de  larves,  d'in- 
sectes, de  vers,  de  mollusques,  de  petits  poissons,  de  crustacés 
ainsi  que  de  graines  ;  en  captivité  il  exige  une  nourriture  végétale  et 

ToMi:  II.    —   I89i  51. 


—  426  — 

animale, mais  se  contente  de  viande  crue  hachée  en  menus  morceaux, 
d'herbages  et  de  graines. 

Comme  chez  la  plupart  des  Canards,  la  voix  diffère  selon  le  sexe  : 
la  femelle  fait  entendre  un  quack  quack  quack,  tandis  que  le  cri  du 
mâle  est  plus  profond  et  ressemble  à  korr,  korr\  lors  de  l'accou- 
plement, le  mâle  fait  aussi  entendre  une  sorte  de  sifflement,  que  Nau- 
mann  a  essayé  de  rendre  par  tiuwiaiuies . . . . 

Reproduction.  —  Le  Tadorne  ordinaire  niche  dans  des  cavités 
souterraines,  et  non  à  découvert  comme  les  autres  Canards;  il  recher- 
che de  préférence  des  terriers  de  lapin,  de  blaireau  et  même  de 
renard,  ce  qui  le  conduit  parfois  jusque  dans  les  bois  assez  éloignés 
de  la  côte  ;  quand  il  ne  trouve  pas  de  terrier  ou  de  cavité  naturelle 
qu'il  puisse  aménager,  il  se  creuse  un  couloir  dans  un  terrain  meuble, 
et  ce  couloir  a  parfois  plus  d'un  mètre  de  profondeur;  son  extrémité 
est  recourbée  et  évasée  de  façon  que  le  nid  ne  puisse  être  vu  de  l'exté- 
rieur. Il  paraît  que  ce  bel  oiseau  ne  s'approprie  pas  seulement  des 
terriers  abandonnés,  mais  qu'il  s'installe  aussi  dans  ceux  qui  sont 
occupés  par  leur  légitime  propriétaire  ;  la  chose  se  comprend  encore 
quand  il  s'agit  du  gîte  d'un  timide  lapin,  mais  la  société  d'un  renard 
ou  d'un  blaireau  n'est  guère  rassurante;  et  cependant, des  observateurs 
consciencieux  et  dignes  de  foi  ont  à  plusieurs  reprises  constaté  qu'un 
renard  et  des  Tadornes  habitaient  le  même  terrier,et  que  jamais  ceux-ci 
n'étaient  attaqués  par  le  carnassier.  «  Mais  pourquoi  le  renard,  dit 
Brehm,  qui  ne  respecte  presque  aucun  animal  plus  faible  que  lui, 
fait-il  une  exception  en  faveur  de  ce  Canard  ?  La  raison  en  est,  je 
crois,  dans  le  grand  courage  que  déploie  cet  oiseau,  et  grâce  auquel 
il  impose  à  son  ennemi.  Ce  courage  n'est  pas  seulement  l'apanage  des 
adultes,  mais  encore  des  jeunes.  J'ai  vu  des  Tadornes,  éclos  depuis 
quelques  jours  à  peine,  montrer  le  bec  à  des  oiseaux  plus  grands 
qu'eux,  à  de  petits  chiens,  à  des  lapins.  Au  lieu  de  se  sauver,  ils 
s'arrêtaient  vaillamment,  étendaient  le  cou,  regardaient  avec  des 
yeux  pleins  de  colère  leur  ennemi,  et  ne  reculaient  que  pour  éviter  le 
coup  qui  leur  était  porté.  Chez  les  adultes,  qui  vivent  par  paires, 
c'est  le  mâle  surtout  qui  se  charge  du  rôle  de  combattant ,  il  se  met 
en  position,  pousse  un  sifflement  particulier,  et  attaque  courageu- 
sement quiconque  fait  mine  de  vouloir  le  troubler.  A-t-il  mis  l'assail- 
lant en  fuite,  il  revient  vers  sa  femelle,  laquelle  souvent  partage  ses 
périls  et  le  secourt  vaillamment,  bien  qu'elle  soit  moins  prompte  à 
l'attaque.  »  —  11  est  probable  qu'une  autre  raison  encore  met  les 


—  4^27  — 

Tadornes  à  l'abri  des  atteintes  du  renard  ;  on  sait,  en  effet,  que  ce 
dernier  est  fort  prudent  et  qu'il  n'enlève  jamais  les  volailles  des  fermes 
qui  se  trouvent  aux  environs  immédiats  de  son  terrier,  afin  de  ne  pas 
attirer  l'attention  sur  lui.  C'est  peut-être  pour  la  même  raison  qu'il 
juge  prudent  de  vivre  en  paix  avec  les  canards  qui  habitent  avec  lui. 

C'est  donc  dans  un  terrier  que  la  femelle  du  Tadorne  dépose  ses 
œufs  à  la  fin  d'avril,  sur  une  litière  de  mousse  et  d'herbes  ;  il  arrive 
cependant  parfois  que  diverses  circonstances  retardent  le  moment  de 
la  ponte,  et  que  celle-ci  n'a  lieu  que  dans  le  courant  de  mai  ou  même 
dans  les  premiers  jours  de  juin.  La  ponte  est  de  sept  à  douze  œufs, 
parfois  davantage;  Naumann  dit,  que  si  on  lui  enlève  successivement 
ses  œufs,  comme  cela  arrive  dans  certaines  localités,  la  femelle  peut 
pondre  de  vingt  à  trente  œufs;  elle  les  entoure  de  duvet  et  les  recouvre 
soigneusement  quand  elle  les  quitte. Ces  œufs  sont  très  lisses,  grais- 
seux, d'un  blanc  de  crème  et  mesurent  environ  63  millim.  sur  45.  La 
durée  de  l'incubation  est  de  vingt-six  jours.  Dès  que  les  poussins  sont 
éclos,  la  mère  les  conduit  sur  une  eau  calme  des  environs  où  ils  peu- 
vent alors  se  cacher  dans  les  roseaux  et  les  herbages.  Quand  l'eau 
est  trop  éloignée  du  terrier  où  les  petits  sont  éclos,  la  femelle,  dit 
Naumann,  les  y  transporte  un  a  un  dans  son  bec  ;  ceci  demande  con- 
firmation. 

Le  même  auteur  raconte  qu'à  Sylt.  et  dans  d'autres  îles  de  la  côte 
du  Schleswig,  on  construit  pour  les  Tadornes  des  terriers  artificiels. 
A  cet  effet,  on  creuse  dans  les  dunes  des  couloirs  qui  se  croisent  au 
centre,  et  où  ces  oiseaux  viennent  nicher  ;  à  chaque  emplacement 
destiné  à  recevoir  un  nid,  on  adapte  un  couvercle  en  gazon,  fermant 
exactement,  mais  pouvant  être  retiré  à  volonté,  ce  qui  permet  de  visi- 
ter le  nid  et  d'enlever  successivement  les  œufs  ;  ceux  ci  sont  estimés 
bien  que  leur  goût  ne  plaise  pas  à  tout  le  monde.  Quant  à  la  chair 
des  Tadornes,  elle  a  une  odeur  désagréable  et  un  goût  rance  ou 
huileux,  aussi  ne  l'utilise-t-on  pas. 

GENRE  CXr.IV 

SOÏÏCEIET.  —  SPATULA 

Anas,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  200. 

Spatula,  Boie,  Isis^  1822,  p.  564. 

Rhynchaspis,  Steph.  Sh'no's  Gen.  Zonl.  XII,  2  p.  111  (1824). 

Spathulea,  Fiera.  JM<.  a;/.,  p.  123  (1828). 

Clypkata,  Less.  Man.  cVOrn.  II,  p.  410(1828). 

Car.  —  Bec  plus  long  (jue  la  tête,  plus  haut  que  large  à  la  base,  élargi  en 


—  428  — 

forme  de  cuiller  dans  sa  moitié  antérieure  ;  lamelles  de  la  mandibule  supé- 
rieure très  saillantes  à  la  base  du  bec  ;  onglet  petit,  saillant  ;  narines  situées 
près  de  la  base,  petites,  ovales  ;  ailes  assez  longues,  aiguës,  la  première 
rémige  la  plus  longue  ;  queue  cunéiforme,  les  rectrices  médianes  aiguës  et 
dépassant  un  peu  les  autres  ;  tarses  comprimés,  de  la  longueur  du  doigt 
interne  ;  pouce  petit,  membraneux  en  dessous. 

Hab.  —  Les  espèces  de  ce  genre  sont  réparties  en  Europe,  en 
Asie,  en  Afrique  et  en  Amérique. 

253.  —  Le  Souchet  spatule 
SPATULA  CLYPEATA,  Boie  ex  Briss. 

(PI.  252). 

Anas  CLYPEATA,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  329  (1760).  - — - 

Anas  MEXiCANA,  RUBENS  ct  JAMAiCENSis,  Guiel.  Sijst.  nat.  I,  p.  529  (1788). 

Spatula  CLYPEATA,  Boie,  7i'2>,  1822,  p  564. 

Rhynchaspis  CLYPEATA,  Steph.  Shaw's  Gen.  zool.  XII,  2,  p.  115  (1824). 

Spathulea  CLYPEATA,  Flem.  Brit.  an.  p.  123  (1828). 

Clypeata  macrorhynchos,  platyrhynchos,  pomarlna  et  BRACHYRHYNCHOS,  Brehm, 
Isis,  1830,  p.  997. 

Rhynchaspis  macrorhynchos,  platyrhynchos,  pomarina,  brachyrhynchos  et 
PLATYUROS,  Brehm,  Naumannia,  1855,  p.  298. 

Rhynchaspis  spathulata,  C.-F.  Dub.,  PI.  col.  Ois.  Belg.  111,  p.  276  (1860). 

Die  Loffelente,  en  allemand. 

The  Shoveller,  en  anglais. 

De  Slobeend,  en  flamand. 

Taille  :  0'"45  ;  ailes  0,26;  la  femelle  est  un  peu  plus  petite. 

Description  du  mâle  adulte  en  plumage  de  noce.  —  Tête  et  haut  du  cou  d'un 
vert  foncé  brillant  ;  bas  du  cou  et  poitrine  d'un  blanc  pur  ;  manteau  brun,  les 
plumes  bordées  de  cendré  ;  dos,  sus  et  sous-caudales  d'un  noir  verdâtre  avec 
reflets  d'un  vert  plus  vif  sur  les  bords  des  plumes  ;  scapulaires  blanches,  les 
plus  longues  d'un  gris  bleu  clair  ou  blanches  avec  les  bords  d'un  noir  verdâtre; 
petites  couvertures  des  ailes  d'un  gris  bleu  clair,  les  suivantes  brunes  termi- 
nées de  blanc;  miroir  d'un  vert  doré  brillant  ;  rémiges  primaires  brunes; 
parties  inférieures  d'un  roux  marron,  plus  sombre  en  avant,  les  côtés  de  la 
région  anale  blancs  ;  rectrices  médianes  brunes,  les  suivantes  brunes  variées 
de  roussâtre  et  bordées  extérieurement  de  blanc,  les  plus  externes  presque 
entièrement  de  cette  dernière  couleur.  Bec  noir  ;  iris  jaune  ;  pattes  oranges. 

Femelle. — Tête  et  cou  d'un  roux  clair,  marqués  de  taches  allongées  noires, 
plus  larges  au  vertex  ;  manteau  brun  noirâtre,  avec  les  bordures  des  plumes 
d'un  roux  clair  et  blanchâtres  ;  bas  du  dos  brun,  les  phimes  légèrement  bor- 


-   429  — 

dêes  de  cendré  ;  sus  caudales  et  rectrices  brunes,  barrées  de  blanc  ;  petites 
couvertures  d'un  gris  bleuâtre  sombre,  les  suivantes  brunes  terminées  de 
blanc;  miroir  brun  à  reflets  verdâtres  et  terminé  de  blanc  ;  rémiges  brunes  ; 
poitrine  et  flancs  roussâtres  avec  de  grandes  taches  brunes  en  croissants;  ven- 
tre d'un  roux  rosâtre. 

Mâle  en  été.  —  A  cette  époque  le  mâle  prend  un  plumage  analogue  à  celui 
delà  femelle,  mais  plus  sombre;  il  conserve  cependant  les  ailes  de  son  plu- 
mage de  noce,  dont  l'éclat  permet  de  distinguer  facilement  le  mâle  de  la 
femelle.  (Voyez  plus  bas  la  remarque). 

Jeune.  —  Les  jeunes  des  deux  sexes  ont  le  même  plumage,  et  celui-ci  ne 
diffère  guère  de  celui  de  la  femelle  adulte,  il  est  seulement  un  peu  plus  som- 
bre ;  le  miroir  du  mâle  est  cependant  plus  brillant  et  à  reflets  verts. 

Poussin.  —  Longue  calotte  elliptique  sur  le  vertex,  ailes  et  toutes  les  par- 
ties supérieures  d'un  brun  roux,  avec  une  tache  fauve  longitudinale  de  chaque 
côté  du  dos;  côtés  de  Li  tête  d'un  roux  enfumé,  coupés  par  une  bande  brune 
qui  s'étend  du  bec  à  la  nuque,  en  traversant  l3S  lorums  et  les  yeux,  et  laisse 
une  longue  bande  sourcilière  pâle  au-dessous  de  la  calotte  ;  souvent  une  tache 
brune  sur  les  joues  ou  sur  la  région  auriculaire;  parties  inférieures  d'un  fauve 
pâle  sur  le  ventre,  grisâtre  sur  la  gorge  et  le  devant  du  cou,  et  sombre  sur  la 
poitrine,  surtout  latéralement.  Mandibule  supérieure  brune,  avec  l'onglet 
roux  pâle,  l'inférieure  jaune;  pieds  jaunâtres,  les  membranes  brunes  (J.Vian). 

Remarque.  —  Le  Souchet  opère  sa  première  mue  en  octobre  pour 
prendre  sa  robe  nuptiale;  cette  mue  est  ordinairement  terminée  vers 
la  fin  de  novembre,  mais  l'oiseau  conserve  de  son  ancien  plumage  les 
ailes  et  la  queue,  sauf  les  rectrices  médianes  qui  sont  remplacées  par 
d'autres  plus  pointues.  En  juin  commence  la  seconde  mue,  qui  enlève 
au  mâle  son  brillant  plumage.  Vers  la  fin  de  ce  mois,  ou  au  commen- 
cement de  juillet,  tous  les  Souchets  mâles  abandonnent  les  eaux 
découvertes,  parce  qu'ils  perdent  à  ce  moment,  dit  Naumann,  la 
faculté  du  vol,  par  suite  de  la  chute  simultanée  de  leurs  rémiges  ;  ce 
n'est  qu'à  la  fin  de  juillet  que  leur  mue  est  terminée  et  qu'ils  peuvent 
de  nouveau  s'envoler  sur  les  eaux.  Le  mâle  seul  perd  toutes  ses 
rémiges  à  la  fois,  elles  ne  tombent  chez  la  femelle  que  les  unes  après 
les  autres  et  celle-ci  conserve  toujours  la  faculté  de  voler:  ses  ailes 
lui  sont  indispensables  pour  réchaufîer  et  protéger  ses  petits. 

IlaJ).  —  C'est  une  espèce  circompolaire  qui  habite,  en  été,  le  Nord 
des  deux  hémisphères  jusque  sous  le  G5o  1.  N.,  quoiqu'elle  ne  soit 
pas  abondante  sous  cette  latitude;  le  professeur  Malmgren  dit  qu'elle 
niche    près   d'Uleaborg  (65''). 

Le  Souchet  spatule  est  plus  ou  moins  répandu  dans  toute  l'Europe, 


430  - 


KiwOTSwfWiit^ 


soit  comme  oiseau  d'été  ou  d'hiver,  soit  comme  oiseau  de  passage, 

mais  il  ne  niche  pas  souvent  au 


sud  du  50°.  Pour  la  Belgique, 
c'est  un  oiseau  de  passage  régu- 
lier, assez  commun  au  printemps 
et  en  automne.  Il  hiverne  dans 
le  sud  de  l'Europe,  mais  dans  le 
midi  de  la  France  il  ne  fait  que 
passer  dès  les  premiers  froids, 
et  repasse  en  mars  et  au  com- 
mencement d'avril  [Lacroix).  Il  hiverne  également  en  Palestine 
[Tristram]  et  dans  le  nord  de  l'Afrique  jusqu'en  Abyssinie  {^de  Heu- 
glin),  mais  il  est  sédentaire  dans  le  N.-E.  de  l'Afrique  [Shelley). 

En  Asie,  cet  oiseau  hiverne  principalement  en  Perse,  clans  l'Inde, 
[Jerdon),  à  Ceylan  [Holdswo7'th),  en  Chine  {David),  à  Formose 
[Swinhoe)  et  au  Japon  [Temminck)\  il  est  de  passage  dans  l'Asie  cen- 
trale et  niche  dans  les  parties  septentrionales. 

En  Amérique,  il  niche  depuis  l'Alaska  et  hiverne  dans  les  Etats  du 
Sud,  au  Mexique,  au  Guatemala,  à  Cuba,  à  la  Jamaïque  [Coues)  et  à 
l'île  de  la  Trinidad.  Il  se  montre  assez  régulièrement  à  cette  dernière 
île,  où  il  arrive  vers  le  mois  de  décembre  ou  de  janvier,  pour  la  quitter 
en  avril  ou  mai  [Léotaud). 

Mœurs.  —  Ce  Canard  est  assez  sensible  au  froid,  aussi  abandonne- 
t-il  les  contrées  du  Nord  dès  le  mois  d'octobre,  mais  les  passages 
continuent  jusqu'en  novembre;  en  mars,  et  le  plus  souvent  en  avril,  il 
regagne  les  lieux  où  il  est  né.  Les  Souchets  voyagent  le  plus  souvent  la 
nuit,  par  couples  ou  en  petites  troupes  de  six  à  vingt  sujets,  rarement 
en  bandes  plus  nombreuses. 

Cette  espèce  recherche  de  préférence  les  endroits  vaseux  des  eaux 
douces,  barbote  volontiers  dans  la  vase  des  mares  et  des  marais  où 
elle  trouve  des  vers  et  des  larves  en  abondance,  ce  qu'elle  préfère  à 
toute  autre  nourriture  ;  lors  des  migrations,  on  la  voit  fréquemment 
près  de  la  mer,  mais  seulement  où  celle-ci  est  peu  profonde  ;  sur  les 
cours  d'eau,  elle  ne  se  tient  non  plus  que  dans  les  endroits  peu  pro- 
fonds et  bien  pourvus  de  roseaux,  de  joncs  et  d'herbages  flottants. 

Par  ses  mœurs  et  ses  habitudes,  le  Souchet  ressemble  aux  autres 
Canards.  Il  nage  facilement  mais  ne  plonge  qu'en  cas  de  nécessité  ; 
son  vol  est  rapide,  peu  bruyant  ;  sa  voix,  qu'il  ne  fait  pas  entendre 
souvent,  est  coassante  :  le  cri  du  mâle  ressemble  à  quaak  ou  ivoak, 


—  431    — 

celui  de  la  femelle  à  quauk,  d'un  ton  plus  bas;  en  s'envolant  il  jette 
un  cri  guttural  ressemblant  à  puck  puck. 

C'est  l'un  des  lamellirostres  les  moins  farouches  ;  il  se  laisse  faci- 
lement surprendre  et  se  montre  parfois  même  stupide  ;  mais  il  devient 
plus  prudent  quand  il  a  été  chassé,  et  il  cherche  alors  à  éviter  le 
chasseur.  Naumann  a  remarqué  que  cet  oiseau  est  plus  prudent  au 
printemps,  quand  il  a  son  plumage  de  noce,  qu'à  l'époque  où  son 
plumage  ressemble  à  celui  de  la  femelle.  Il  est  moins  sociable  que 
d'autres  espèces  et  se  réunit  rarement  en  grandes  troupes. 

La  nourriture  de  cet  oiseau  consiste  en  insectes  aquatiques,  larves, 
vers,  frai  de  poissons  et  de  grenouilles,  mollusques  et  en  plantes 
d'eau  à  feuillage  tendre. 

Le  Souchet  ne  se  conserve  pas  longtemps  en  captivité,  probable- 
ment parce  qu'il  est  difficile  de  lui  procurer  toujours  la  nourriture  qui 
lui  convient.  Brehm  a  reconnu  que  les  mâles  résistent  mieux  que  les 
femelles,  qui  meurent  généralement  peu  de  temps  après  leur  capture. 
Ce  Canard, désigné  sur  les  marchés  de  France  sous  le  nom  àQ  Rouget  de 
rivière,  est  fort  recherché  pour  sa  chair  qui  est  délicate  et  savoureuse. 

Reproduction.  —  Ce  palmipède  niche  sur  les  lacs  et  les  étangs 
d'une  certaine  étendue,  dans  les  marais  et  en  général  au  bord  de 
toutes  les  eaux  douces  pourvues  de  roseaux  et  d'herbages,  et  qui  ne 
sont  pas  ombragées  par  de  grands  arbres. 

C'est  sur  ces  eaux  que  les  luttes  s'engagent  au  printemps  entre  les 
divers  mâles  qui  ambitionnent  parfois  la  même  femelle;  celle-ci  s'en- 
vole souvent  bien  haut  dans  les  airs,  entraînant  à  sa  suite  tous  ses 
prétendants,  jusqu'à  ce  que  la  fatigue  l'oblige  à  redescendre  sur 
l'élément  liquide  où  elle  s'abandonne  à  l'un  d'eux  ;  l'accouplement  a 
lieu  sur  l'eau.  Mais  le  calme  ne  règne  parmi  les  Souchets  que  quand 
ils  sont  tous  accouplés;  si,  cependant  une  cane  quitte  momentanément 
son  nid,  elle  est  aussitôt  poursuivie  par  tous  les  mâles  dont  les 
femelles  couvent  dans  le  voisinage.  «  Ce  Canard,  dit  Naumann, 
paraît  ignorer  ce  que  c'est  que  la  fidélité  conjugale  ;  j'ai  même  vu 
plus  d'une  fois  un  Souchet  mâle  poursuivre  une  cane  de  Canard  sau- 
vage, tout  comme  s'il  se  fût  agi  d'une  de  son  espèce.  > 

Le  nid,  que  la  femelle  construit  seule,  est  établi  dans  les  roseaux 
d'un  étang  ou  d'un  marais,  sous  un  buisson  au  bord  d'un  fossé,  dans 
les  herbes  d'une  prairie  humide,  et  parfois  même  dans  un  champ  de 
céréales,  si  celui-ci  n'est  pas  trop  éloigné  de  l'eau.  Il  est  en  général 
bien  caché  et  formé  de  roseaux,  de  joncs  et  autres  herbages  secs 


—  432  - 

maladroitement  entrelacés  ;  ce  nid  est  arrondi,  sa  cavité  assez  pro- 
fonde et  garni  de  duvet  dont  la  femelle  recouvre  les  oeufs  chaque  fois 
qu'elle  les  quitte. 

Dans  l'Europe  tempérée  la  cane  ne  commence  à  pondre  que  vers  la 
mi-mai,  et  dans  le  Nord  pas  avant  la  mi-juin.  La  ponte  est  de  sept  à 
neuf  œufs, exceptionnellement  de  dix  à  quatorze;  ceux-ci  sont  ovoïdes, 
lisses,  d'un  blanc  fauve  ou  légèrement  olivâtre,  et  mesurent  environ 
54  millim.  sur  37.  Il  n'y  a  qu'une  ponte  par  an;  mais  si,  dans  la 
première  quinzaine,  celle-ci  a  été  détruite,  la  femelle  fait  une  nou- 
velle ponte  qui  ne  se  compose  alors  que  de  cinq  ou  de  six  œufs.  La 
durée  de  l'incubation  est  de  vingt-deux  à  vingt-trois  jours;  les  cane- 
tons commencent  à  voleter  à  l'âge  de  quatre  semaines. 

GENRE     CXLV 

CANARD.   —  ANAS.  _ 

Anas,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  307  (1760) 

BoscHAS,  Swains.  Classif.  of  Birds,  II,  p.  367  (1837). 

Car.  —  Bec  un  peu  plus  long  que  la  tête,  médiocremeut  élevé  à  la  base, 
déprimé  et  dilaté  à  son  extrémité  qui  est  arrondie;  onglet  médiocrement 
courbé,  ne  faisant  pas  saillie;  lamelles  courtes,  celles  de  la  mandibule  supé- 
rieure un  peu  visibles  à  la  partie  postérieure  du  bec  et  dirigées  en  arrière  ; 
narines  presque  basales,  assez  rapprochées,  ovales  ;  ailes  de  longueur 
moyenne,  aiguës  ;  queue  médiocre,  légèrement  cunéiforme  ;  tarses  épais,  de  la 
longueur  du  doigt  médian. 

jjab.  —  Ce  genre  a  des  représentants  dans  les  cinq  parties  du 
monde. 

254.   —   Le  Canard  sauvage. 

ANAS  BOSCAS,  Lin.  (1). 

(Fl.  253). 

Anas  boschas,  Lin.,  Syst.  nat.  p.  127  (1758). 

Anas  fera,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  318  (1760), 

Anas  boschas  et  adunca,  Lin.,  Syst.  nat.  I,  p.  205(1766). 

Anas  domestica,  Gmel.,  Syst.  nat.  I,  p.  538(1788). 

Anas  boscas,  Forst.  Syn.  Cat.  Br.  B.,  p.  35  (1817). 

Anas  archiboschas,  suBBoscHAset  conboschas,  Brehm. ,  /sis,  1830,  p.  997. 

Die  Marzente,  stockente,  en  allemand. 

The  Mallard,  en  anglais. 

De  Wilde  Eend,  en  flamand. 

Taille:  0'"52;  ailes  0,29. 

Description  du  mâle  en  plumage  de  noce.  —  Tête  et  une  partie  du  cou  d'un 

(i)  La  vraie  orthographe  est  ^mcas  et   non  boschas. 


beau  vert  foncé  à  reflets  bleuâtres  et  pourpres,  suivi  d'un  collier  blanc  inter- 
rompu en  arrière  ;  bas  du  cou  en  avant  et  poitrine  d'un  brun  marron;  haut  du 
dos  brun  pointillé  de  cendré;  scapulaires  d'un  cendré  brunâtre  avec  des  zig- 
zags gris  blanc  très  lins,  les  plus  externes  ombrées  de  brun  marron  ;  bas  du 
dos  d'un  brun  noirâtre  ;  croupion,  sus-caudales  et  les  quatre  rectrices 
médianes  noirs  à  reflets  verdâtres,  ces  dernières  relevées  et  recourbées  en 
avant;  couvertures  des  ailes  d'un  cendré  brunâtre,  les  plus  grandes  termi- 
nées de  blanc  avec  un  bord  terminal  noir  ;  miroir  d'un  beau  vert  brillant, 
suivi  d'une  bande  noire  et  d'un  bord  blanc  ;  rémiges  d'un  brun  cendré,  les 
tertiaires  cendrées,  lavées  de  brun  marron  près  du  miroir  ;  parties  inférieures 
blanchâtres,  finement  linéolées  de  brun  cendré  pâle  ;  rectrices  latérales  cen- 
drées mais  blauches  extérieurement  ;  sous-caudales  d'un  noir  bleuâtre.  Bec 
d'un  vert  jaunâtre  ou  olivâtre  avec  l'onglet  noir;  iris  brun;  pattes  oranges. 

Femelle.  —  Tête  et  cou  d'un  cendré  roussâtre  avec  des  taches  noirâtres, 
plus  larges  et  dominant  au  vertex;  gorge  d'un  blanc  roussâtre;  dessus  du 
corps  brun  avec  les  plumes  bordées  de  roussâtre  et  une  longue  tache  de 
même  couleur  sur  la  barbe  externe  des  scapulaires  ;  ailes  comme  chez 
le  mâle  ;  poitrine  d'un  roux  varié  de  brun  ;  abdomen  cendré  roussâtre 
taché  de  cendré  brunâtre;  flancs  avec  de  grandes  taches  brunes  en  fer- 
à-cheval  et  une  tache  lancéolée  au  centre  des  plumes  ;  queue  sans  rectrices 
relevées,  brune  avec  les  bordures  des  pennes  et  des  raies  transversales  d'un 
blanc  roussâtre.  Bec  d'un  gris  verdâtre  foncé,  d'un  jaune  rougeâtre  sur  les 
bords  et  l'onglet  noir. 

Mâle  en  été.  —  A  cette  époque  le  mâle  ressemble  à  la  femelle,  mais  ses 
teintes  sont  plus  foncées,  le  bas  du  dos  est  presque  noir,  les  rectrices  sont  plus 
blanches  et  le  bec  de  couleur-  plus  sombre. 

Jeune  mâle.  —  N'est  presque  pas  à  distinguer  de  la  femelle  adulte. 

Poussin.  —  Parties  supérieures  d'un  brun  olive  ;  côtés  de  la  tête  d'un  jaune 
d'ocre,  avec  une  raie  brune  traversant  l'œil  et  une  autre  couvrant  les  oreilles; 
parties  inférieures  jaunâtres  ;  une  bande  brune  sur  les  flancs,  mais  laissant 
une  tache  jaune  sur  les  côtes  de  la  queue  ;  ailes  traversées  par  une  bande  jau- 
nâtre. Bec  d'un  brun  olivâtre,  l'onglet  plus  pâle,  la  mandibule  inférieure 
jaune  ;  pattes  brunes  variées  de  jaune. 

Remarque.  —  Le  mâle  revct  sa  robe  de  noce  en  octobre  et  la  con- 
serve jusque  vers  la  tin  de  juin;  il  opère  alors  sa  mue  qui  le  rend 
presque  semblable  à  la  femelle;  le  plumage  d'été  est  donc  de  très 
courte  durée. 

M.  le  Baron  d'Hamunvillo  a  conslaié,  (ju'en  perdant  son  beau  plu- 
mage, le  mâle  perd  également  pendant  quelque  temps  la  faculté  de 
voler;  ses  rémiges,  grandes  et  petites, tombent  toutes  presque  eu  même 


T..mf:II.-     IS'.l-^ 


55 


434 


temps,  laissant  l'aileron  à  nu. Il  a  été  dit  précédemment  que  le  Souchet 
spatule  mâle  est  dans  le  même  cas. 

jjfjf^jj   _  Le   Canard   sauvage  habite  toute  la  zone  circompolaire 

jusqu'au  70°  1.  N.  Il  est  commun 
en  Islande  en  toutes  saisons  et 
hiverne  près  des  eaux  qui  ne 
gèlent  pas  {Faber)  ;  dans  le  midi 
de  la  Suède  et  dans  les  parties 
septentrionales  de  l'Allemagne  il 
est  plus  ou  moins  sédentaire  ;  il 
est  commun  pendant  toute  l'année 
en  Belgique  où  il  est  surtout  abon- 
dant au  commencement  et  à  la  fin  de  l'hiver.  Il  est  également  commun 
et  sédentaire  dans  les  autres  parties  de  l'Europe  centrale  et  méridio- 
nale, ainsi  qu'aux  îles  Britanniques.  En  hiver,  on  le  rencontre  éga- 
lement dans  le  nord  de  l'Afrique  {Loche,  Draké),  aux  îles  Canaries 
{Bolle),  Açores  et  Madère  [Du  Cane  Godman),  ainsi  qu'en  Egypte,  en 
Nubie  {Shelley)  et  en  Abyssinie  {Rûppell). 

Cet  oiseau  est  également  très  répandu  en  Asie  depuis  les  monts 
Ourals  jusqu'au  Kamtschatka  [Stejneger)  et  au  Japon  {Blakiston),  et 
depuis  le  nord  de  la  Sibérie  {MiddendorfJ')]Vi^(\^' s^m  Cachemir(5roo/?5), 
le  nord  de  l'Inde  {Jerdon),  la  Chine  {David)  et  Formose  {Swinhoé). 

En  Amérique  on  observe  cette  espèce  depuis  l'Alaska (Twrner)  et  le 
Groenland  (Z?em/i«rc?^)  jusqu'aux  Antilles  et  Panama  {Coues);  elle  est 
abondante  en  hiver  aux  îles  Aléoutiennes  {Turner). 

Mœurs.  —  Cet  oiseau  émigré  en  octobre  et  novembre  des  contrées 
les  plus  septentrionales;  les  Canards  sauvages  se  rassemblent  alors 
en  grandes  bandes,  pour  quitter  les  pays  que  les  rigueurs  de  l'hiver 
rendent  inhabitables  pour  eux.  Lorsqu'ils  sont  surpris  par  de  fortes 
gelées,  ils  cherchent  autant  que  possible  à  empêcher  partiellement  la 
congélation  de  l'eau  en  s'y  agitant  vivement;  mais  quand  cela  ne  leur 
réussit  plus,  ils  émigrent  vers  le  Sud  jusqu'à  ce  qu'ils  rencontrent  une 
eau  qui  leur  permette  de  nager  et  d'y  trouver  leur  nourriture. Les  émi- 
grants  retournent  dans  leur  patrie  en  mars,  et  même  plus  tôt  si  la 
saison  est  favorable.  Ils  voyagent  le  plus  souvent  la  nuit  ;  ils  volent 
alors  très  haut  et  à  la  file  ou  en  formant  un  angle  aigu.  Si  le  but  de 
leur  voyage  n'est  pas  éloigné,  ils  volent  parfois  sans  ordre  et  à  une 
faible  hauteur. 

Ce  palmipède  vit  aussi  bien  sur  les  côtes  maritimes  que  près  des 


—  43o  - 

eaux  douces,  mais  ces  dernières  ont  sa  préférence;  du  reste,  il  n'est 
guère  difficile  sur  le  choix  de  son  domaine,  toutes  les  eaux  lui  con- 
viennent, grandes  ou  petites,  courantes  ou  stagnantes,  qu'elles  soient 
dans  une  forêt  ou  entourées  de  prés  et  de  champs,  ou  qu'elles  se 
trouvent  près  de  lieux  habités.  Il  se  cache  volontiers  pendant  le  jour 
dans  les  roseaux,  les  joncs  et  les  buissons,  aussi  recherche-t-il  de 
préférence  les  eaux  en  partie  couvertes  par  des  fourrés  de  roseaux  et 
autres  plantes  aquatiques, car  il  y  trouve  toujours  une  abondante  nour- 
riture . 

Le  Canard  sauvage  est  la  souche  de  celui  qui  vit  en  domesticité, 
aussi  en  a-t-il  les  habitudes  et  les  allures  ;  il  marche,  nage,  plonge  et 
vole  comme  ce  dernier,  mais  en  mettant  plus  de  vigueur  et  de  force 
dans  ses  mouvements.  D'un  seul  coup  d'aile  il  s'enlève  de  terre  aussi 
bien  que  de  l'eau,  monte  perpendiculairement  une  dizaine  de  mètres 
pour  se  diriger  ensuite  horizontalement  ;  c'est  de  tous  les  Canards 
celui  qui  a  le  vol  le  plus  régulier,  mais  avec  des  battements  d'ailes  un 
peu  tremblottants;  quand  une  troupe  traverse  l'espace,  le  sifflement 
des  ailes  s'entend  à  une  certaine  distance,  surtout  pendant  la  nuit. 
Audubon  estime  que  cet  oiseau  peut  franchir  jusqu'à  cent-vingt  milles 
à  l'heure,  du  moins  quand  il  veut  déployer  toute  la  puissance  de  son 
vol.  Ses  sens  sont  subtiles,  fins,  surtout  le  goût  et  l'odorat;  ses  facultés 
intellectuelles  sont  très  développées  :  il  est  rusé,  prudent,  défiant  et 
fuit  l'homme  de  loin,  surtout  quand  il  a  été  poursuivi  ;  cela  n'empêche 
qu'il  s'établit  souvent  dans  le  voisinage  des  lieux  habités  et  qu'il  s'y 
montre  même  donfiant  dès  qu'il  a  constaté  qu'il  est  bien  accueilli,  sur- 
tout quand  les  personnes  qui  l'approchent  lui  jettent  du  pain  ou  des 
vers  ;  mais  il  conserve  toujours  son  indépendance,  et  il  faut  le  pren- 
dre jeune  et  l'élever  au  milieu  de  sujets  domestiques  pour  pouvoir 
l'apprivoiser.  Il  est  d'ailleurs  très  sociable  et  vit  en  bonne  intelligence 
avecles  autres  oiseaux  aquatiques.  Sa  voix  ne  diffère  pas  de  celle  des 
races  domestiques  ;  comme  chez  ces  dernières,  le  cri  de  la  femelle  est 
plus  retentissant  et  celui  du  mâle  plus  sourd. 

Cet  oiseau  est  un  des  plus  voraces  et  semble  toujours  affamé;  il  se 
nourrit  de  jeunes  pousses  do  divers  végétaux,  de  bourgeons,  de 
graines,  de  céréales,  do  fruits,  de  racines,  de  plantes  aquatiques,  de 
larves  et  insectes  de  toutes  espèces  même  les  plus  gros,  de  vers,  do 
limaces  et  autres  mollus([ues,  de  frai  de  batraciens  et  de  poissons,  et 
même  de  reptiles,  de  petits  poissons  et  de  jeunes  grenouilles.  Dans  les 
endroits  où  il  peut  vivre  en  paix,  il  passe  presque  toute  la  journée  à 


—  436  — 

fouiller  clans  la  vase  à  la  recherche  d'aliments;  mais  dans  les  lieux  où 
il  ne  se  croit  pas  en  sûreté,  il  se  tient  caché  pendant  le  jour  et  ne  se 
met  en  quête  de  nourriture  qu'au  coucher  du  soleil,  prolongeant  ses 
recherches  jusqu'au  matin  et  ne  prenant  presque  pas  de  repos  de  la 
nuit. 

Ce  Canard  est  lort  recherché  pour  sa  chair,  aussi  le  chasse-t-on  par- 
tout avec  ardeur  en  employant  tous  les  moyens  qui  permettent  d'en 
abattre  le  plus  grand  nombre  possible;  dans  certains  pays  on  le  prend 
même  à  l'aide  de  tilets  (1). 

Reproduction.  —  Les  bandes  de  Canards  sauvages  se  dispersent 
peu  après  leur  retour  au  printemps,  et  l'accouplement  a  lieu  dans  le 
courant  ou  vers  la  fin  de  mars  sur  l'eau  ou  dans  son  voisinage  ;  c'est 
cette  circonstance  qui  a  fait  donner  à  cet  oiseau  le  nom  allemand  de 
Marzente  (Canard  de  mars), car  c'est  le  seul  qui  se  reproduit  sitôt  dans 
l'année.  Les  sujets  adultes  reviennent  généralem'éht  accouplés,  mais 
les  jeunes  mâles  doivent  conquérir  une  femelle.  Ils  sont  monogames, 
mais  les  mâles  sont  si  ardents  qu'ils  enfreignent  parfois  les  devoirs 
conjugaux  en  s'adressant  encore  à  d'autres  femelles  ;  les  conjoints  de 
celles-ci  défendent  naturellement  leur  compagne,  ce  qui  engendre  des 
cris  et  des  luttes  qui  ne  finissent  qu'avec  la  fuite  du  séducteur.  Dans 
leur  désir  de  satisfaire  leur  passion,  les  mâles  ne  regardent  pas  tou- 
jours si  la  femelle  à  laquelle  ils  s'adressent  est  de  leur  espèce  ou  non; 
c'est  ainsi  qu'ils  s'accouplent  parfois  avec  des  femelles  de  Canard  pilet, 
de  Chipeau,  de  Sarcelle,  et  même  de  Canard  musqué  et  de  Souchet 
spatule;  en  Amérique  ils  s'unissent  encore  avec  d'autres  espèces.  (2) 

Le  nid  est  bien  caché  dans  les  roseaux,  sous  un  buisson  d'aune  ou 
de  saule,  dans  les  herbages  d'un  marais  ou  d'une  prairie,  dans  un 
champ  de  céréales,  dans  le  creux  d'un  saule  et  toujours  le  plus  près 
possible  de  l'eau;  ce  Canard  niche  même  quelquefois  sur  les  arbres,  et 
il  prend  alors  possession  de  l'aire  abandonnée  d'un  rapace  ou  du 
nid  d'une  corneille  ou  d'une  pie.  La  cane  construit  son  nid  sans 
le  concours  du  mâle,  à  l'aide  de  bûchettes,  de  feuilles  mortes  et 
d'herbes  sèches  lâchement  entrelacées  ou  simplement  amoncelées  ; 
Tintérieur  est  garni  de  duvet.  La  ponte  a  lieu,  suivant  le  pays,  à  la  fin 
de  mars,  en  avril, parfois  même  au  commencement  de  juin,  comme  en 

(1)  Voy.  pour  les  différents  modes  de  chasse  :  Olphe-Galliard,  Contributions  à  1:0  faune 
ornithologique  de  VEurope  occid.,  fasc.  IV,  p.  80  (1888). 

(2)  Les  Anas  maxima.  Gosse,  purpureoviridis,  Schinz,  bicolor,  Don.,  Breweri,  Aud., 
Auduhoni,  Bor\s,p., iopareia,  Phil.  et  Fuligula  viola,  Bell,  ne  sont  que  des  hybrides  de  1'^, 
hoscas  avec  d'autres  espèces. 


-    437   - 

Finlande;  elle  se  compose  de  huit  à  quatorze,  rarement  de  quinze  ou 
seize  œufs,  ovoïdes,  lisses,  d'un  gris  olivâtre  ou  jaunâtre  pâle,  et 
mesurant  environ  56  millim.  sur  40.  La  femelle  les  couve  pendant 
vingt-quatre  à  vingt-huit  jours,  et  quand  elle  doit  momentanément  les 
quitter  elle  les  couvre  soigneusement  du  duvet  qui  les  entoure. 

Après  leur  naissance, les  poussins  restent  encore  un  jour  danslenid, 
puis  la  mère  les  conduit  à  l'eau.  Si  le  nid  se  trouve  à  une  faible  hau- 
teur,les  petits  en  sautent  ou  la  Cane  les  pousse  dehors  sans  qu'ils  aient 
à  souffrir  de  leur  chute;  «  jamais,  dit  Brehm,  leur  mère  ne  les  des- 
cend dans  son  bec  comme  on  l'a  prétendu.  »  Naumann  affirme  cepen- 
dant, que  quand  la  cane  a  pondu  dans  un  nid  d'oiseau  de  proie  ou  de 
corneille  placé  sur  un  arbre  élevé,  la  mère  prend  ses  petits  dans  son 
bec  et  les  descend  un  à  un.  Ceci  paraît  être  confirmé  par  l'observation 
du  comte  H.  Thun,  qui  a  dit  à  M.  von  Tschusi  zu  Schmidhoffen,  avoir 
vu  une  cane  de  Canard  sauvage  transporter  ses  petits  un  à  un  dans 
son  bec  d'un  étang  â  un  autre  qui  se  trouvait  dans  le  voisinage  du  pre- 
mier. Il  me  semble  peu  probable  que  les  poussins  puissent  tomber 
sans  accident  du  haut  d'un  arbre. 

La  mère  et  les  jeunes  se  témoignent  réciproquement  beaucoup 
d'attachement,  mais  le  père  ne  s'occupe  pas  de  sa  famille  :  quand  sa 
femelle  se  met  à  couver,  il  en  cherche  une  autre  et  s'il  n'en  trouve 
pas,  il  va  rejoindre  ses  semblables  et  errer  avec  eux, 

GENRE    CXLVl 

CHIPEAU.  —  CHAULELASMUS 

Anas,  Lin.  Syst.  nal.  I,  p.  200  (1766) 

Chauliodus,  Swains.  Classif.  ofB.  II,  p.  366  (1837). 

Chaulelasmus,  (Gray)  in  Bonap.  Lisf.  /?.  p.  56  (1838). 

Ktinorhynchus,  Eyt.  Mon.  Annt.  p.  137  (1838). 

QuERQUEDULA,  Macg.  Man.  BrU.  B.  Il,  p.  169  (1840). 

Chauliodous,  Olphe-Gal.  Contr.  Faune  ornith.  Eur.  occ.  fasc.  IV,  p.  49  (1888). 

Car.  —  Bec  plus  court  que  la  tête,  un  peu  plus  liant  que  larp^e  à  la  base, 
déprimé,  de  même  largeur  dans  toute  son  étendue,  l'onglet  courbé  et  saillant: 
lamelles  de  la  mandibule  supérieure  visibles  sur  les  deux  tiers  de  leur  éten- 
due; mandibule  inférieure  entièrement  cachée  par  la  supérieure;  narines 
basales,  assez  rapprochées,  ovales;  ailes  allongées,  aigu<'s;  queue  courte, 
conique;  tarses  comprimés,  de  la  longueur  du  doigt  interne  ;  pouce  petit  et 
faible. 

ITrf/r  —  (>~)uimo  pourrespèci^  suivante. 


-   438  - 

255.  —  Le  Chipeau  ou  Canard  strépère. 

GHAULELASMUS  STREPERUS,   Qray  ex  Lin. 

(PI.  254) 

Anas  stbepera,  Lin.  Sijsl.  nat.  I,  p.  200  (1766). 

Anas  cinerea  et  kekuschka,  Gm.  Reise,  II,  p.  184,  III,  p.  249  (1774). 

Chauliodus  strepera,  Swains.  Classif.  ofB.  II,  p.  366  (1837). 

Chaulelasmus  streperus,  Gray,  in  Bonap.  Geogr.  and  comp.  List.  B.  p.  56  (1838). 

Ktinorhynchus  strepera,  Eyt.  Monogr.  Anat.  p.  137  (1838). 

Querquedula  strepera,  Macgil.  Jfare.  Brit.  B.  Il,  p.  169  (1840). 

Chaulelasmus  cinereus,  amebicanus,  Brehm.,  Naumannia,  1855,  p.  297. 

Chaulelasmus  capensis,  Bonap.  in  Schleg.  AIus.  P.-B.  Anseres,  p.  48  (1866). 

Chauliodous  streperus,  Olphe-Gal.,  Contr.  Faictie  ornith.  Eur.  occ.  IV,  p.  50  ('1888). 

Die  Schnatterente,  en  allemand. 

The  Gadwall,  en  anglais. 

De  KRAAKEEND,en  flamand. 

Taille  :  0"'i6  ;   ailes  0,29.  La  femelle  est  un  petTplus  petite. 

Description  du  mâle  adulte  en  plumage  de  noce.  —  Vertex,  occiput  et  une 
bande  médiane  le  long  du  cou  d'un  brun  roussâtre  maculé  de  noir;  front,joues 
et  partie  supérieure  du  cou  d'un  blanc  sale  nuancé  de  roussâtre  et  tachetés 
de  brun  ;  bas  du  cou,  baut  du  dos  et  de  la  poitrine  noirs  avec  des  bandelettes 
blanchâtres  ;  bas  de  la  poitrine  blanchâtre  avec  des  croissants  noirs  ;  scapu- 
laires  d'un  brun  cendré  lesplus  petites  brunes  rayées  transversalement  de  gris, 
les  plus  longues  cendrées  et  bordées  de  blanc:  bas  du  dos,  sus  et  sous-cau- 
dales noirs  â  reflets  verdâtres;  petites  couvertures  des  ailes  d'un  cendré  brun 
avec  des  raies  transversales  d'un  blanc  roussâtre,les  suivantes  d'un  brun  mar- 
ron vif,  les  plus  grandes  noires  ;  miroir  d'un  blanc  pur  ;  rémiges  d'un  brun 
cendré;  flancs  bruns  avec  des  bandelettes  blanchâtres;  abdomen  d'un  blanc 
nuancé  de  jaunâtre  et  marqué  de  taches  cendrées;  queue  d'un  cendré  brunâtre. 
Bec  noir;  iris  brun  clair;  tarses  et  doigts  oranges  avec  les  membranes 
noirâtres. 

Femelle.  —  Elle  ressemble  beaucoup  à  la  femelle  du  Canard  sauvage,  dont 
elle  se  distingue  par  la  teinte  rousse  plus  pâle  et  tirant  sur  le  cendré,  et  par 
son  miroir  d'un  blanc  terne. 

Mâle  en  été.  —  Ressemble  au  jeune  dans  son  premier  plumage,  mais  s'en 
distingue  par  le  miroir  qui  est  comme  au  printemps,  et  par  les  moyennes  cou- 
vertures qui  ont  un  peu  de  brun  marron;  le  manteau  est  intermédiaire  à  celui 
des  sujets  en  noce  et  des  jeunes;  les  parties  inférieures  sont  comme  chez  ces 
derniers  mais  les  taches  sont  plus  petites. 

Jeune.  —  Avant  la  première  mue  le  mâle  ressemble  à  la  femelle.  —  Le 
miroir  blanc  bordé  de  noir  en  avant  permet  de  reconnaître  facilement  les 
sujets  de  cette  espèce,  quel  que  soit  leur  sexe  et  leur  âge. 

Poussin.  —  N'est  presque  pas  à  distinguer  de  celui  du  Canard  sauvage. 


-  439 


Hah. 


-fr  A 


Le   Canard   strépère,   aussi   appelé  Chipeau   bruyant  et 

Ridenne,  a  la  même  distribution 
géographique  que  l'espèce  précé- 
dente, mais  il  n'est  nulle  part 
aussi  abondant  et  ne  dépasse  pas 
i'»j  le  61°  1.  N.;  il  paraît  cependant 
nicher  accidentellement  en  Is- 
lande,mais  Faber  ne  l'ya  observé 
qu'une  seule  fois.  Il  se  montre 
accidentellement  en  Norwège  où 
un  mâle  a  été  tué  près  de  Bergen  en  novembre  1872  {Collett):  il  est 
rare  dans  le  midi  de  la  Suède  {Nilsson)  mais  y  niche  {Mevesy,  en  Russie 
il  n'a  pas  été  observé  au  delà  du  lac  Ladoga  {Meves);  il  n'est  pas  rare 
et  niche  en  Danemark  {KjaerbôUing). 

Il  semble,  d'après  M.  Seebohm,  que  cet  oiseau  est  moins  rare  aux 
îles  Britanniques  qu'on  ne  le  croit  généralement  et  qu'il  s'y  montre 
chaque  hiver  ;  d'après  cet  auteur,  il  niche  môme  régulièrement  dans 
plusieurs  localités  du  Norfolk  où  il  aurait  été  introduit  ;  en  hiver,  il 
visite  en  petit  nombre  les  îles  Orkney  et  Shetland,  les  côtes  orientales 
et  occidentales  de  l'Ecosse,  les  Hébrides  et  l'Irlande,  mais  il  est  rare 
en  Angleterre.  Il  niche  en  Hollande  {Temminck),  en  Allemagne  [Nau- 
mann)  et  dans  les  autres  pays  de  l'Europe  placés  sous  les  mêmes  lati- 
tudes. Ce  Canard  est  assez  commun,  aux  passages,  dans  les  polders 
de  la  Belgique,  et  il  hiverne  en  plus  ou  moins  grand  nombre  en  Por- 
tugal {Reyes),  en  Espagne  {Saunders),  en  Sardaigne,  en  Sicile, à  Malte 
{Salvador i)  et  en  Grèce  {Lindermayer),  ainsi  que  dans  le  nord  de 
l'Afrique  {Loche,  Lilford),  en  Egypte,  en  Nubie  {Shelley)  jusqu'en 
Abyssinie  {deHeuglin).  Il  paraît  qu'il  s'égare  parfois  jusqu'au  sud  de 
l'Afrique,  car  le  musée  de  Leyde  possède  un  sujet  rapporté  par  J.  Ver- 
reaux  du  fleuve  Orange  ;  mais  ni  Layard,  ni  aucun  autre  explorateur 
n'a  rencontré  cette  espèce  sous  une  latitude  aussi  australe. 

En  Asie,  on  observe  cette  espèce  dans  le  midi  de  la  Sibérie  jusqu'à 
la  côte  méridionale  de  la  mer  d'Okhotsk, 57° (Mc?rfcn(ior/r)  et  au  Japon 
{Schl('(jel)\  elle  hiverne  en  petit  nombre  en  Chine  {Darid)  et  dans  le 
nord  de  la  Birmanie  {Seebohm),  plus  abondamment  en  Turkcstan 
{Severtzoïo),  dans  l'Inde  {Jerdon),  en  Asie  Mineure  et  en  Palestine 
{Tristra.m). 

En  Amérique, ce  Canaiil  habite  depuis  La  Nouvell-Bretagne  (?57"  1. 
N.)  jusqu'aux  Antilles  {H.  A/brecht),  les  lies  Bevmudos  {von Marteas), 
le  Texas  et  le  Mexique  {Coues). 


—  440  — 

Mœurs.  —  Le  Canard  strépère  émigré  des  contrées  du  Nord  et  du 
centre  en  octobre  et  novembre,  et  retourne  dans  sa  patrie  en  mars  et 
avril.  Il  voyage  la  nuit  par  couples,  par  petites  troupes  de  huit  à  vingt 
sujets,  rarement  plus,  et  parfois  isolément;  ces  oiseaux  volent  alors 
assez  haut,  les  uns  derrière  les  autres  en  formant  une  ligne  oblique 
et  en  faisant  retentir  l'air  de  leurs  cris. 

Cet  oiseau  vit  particulièrement  dans  les  marais  et  sur  les  eaux  tran- 
quilles riches  en  roseaux  et  en  herbages  divers  ;  on  ne  le  voit  sur  les 
fleuves,  les  rivières  et  sur  la  mer  que  dans  les  endroits  peu  profonds 
et  vaseux.  Pendant  le  jour  il  se  tient  vers  le  centre  des  lacs  et  des 
grands  étangs,  n'approchant  des  bords  quq  là  où  ils  sont  garnis  de 
roseaux  et  de  buissons;ce  n'est  qu'au  coucher  du  soleil  qu'il  se  hasarde 
aux  environs  et  sur  des  eaux  de  moindre  importance.  Par  ses  mœurs, 
ses  allures  et  sa  voix,  il  ressemble  complètement  au  Canard  sauvage, 
mais  ses  mouvements  sont  plus  lestes  et  il  se  montre  un  peu  moins 
farouche;  la  nourriture  est  aussi  la  même  que  pour  ce  dernier. 

Le  Ghipeau  s'apprivoise  facilement  quand  on  le  prend  jeune,  mais 
il  vaut  encore  mieux  faire  couver  ses  œufs  par  une  cane  domestique. 
Reproduction.  —  Cet  oiseau  niche  sur  un  îlot,  dans  un  massif  de 
roseaux  ou  de  joncs  entouré  d'eau,  dans  un  buisson  de  saule  ou  dans 
une  prairie  humide.  La  femelle  cache  son  nid  avec  soin  ;  ce  nid,  d'une 
construction  très  sommaire, est  formé  de  roseaux,  d'herbes  et  de  joncs 
secs,  et  présente  au  centre  une  cavité  garnie  au  dernier  moment 
du  duvet  que  la  cane  s'arrache  pour  en  couvrir  ses  œufs.  La  ponte  a 
lieu  à  la  fin  d'avril  ou  au  commencement  de  mai,  et  se  compose  de 
neuf  à  douze  œufs;  ceux-ci  sont  généralement  ovalaires,  lisses,  un  peu 
lustrés  et  d'un  blanc  jaunâtre  tirant  sur  le  vert;  ils  mesurent  environ 
54  millim.  sur  37.  La  durée  de  l'incubation  est,  d'après  Naumann, 
de  vingt  ou  vingt-un  jours. 

GENRE  CXL.V1I 

MARÈQUE.  —  MARECA. 

Anas,  Lin,  Syst.  nat.  I,  p.  202  (1766). 

Mareca,  Steph.,  Shaws  Gen.  Zcol.  XII.  2.  p.  130  (1824). 

Pénélope,  Kaup,  Nat.  Syst.  p.  31  (1829^. 

Marica,  Olphe-Gal.,  Coutr.  Faune,  ont.  Eur.  occ.  fasc.  IV,  p.  4  (1888). 

Car.  —  Bec  plus  court  que  la  tête,presque  aussi  haut  que  large  à  la  base, 
à  peu  près  d  égale  largeur  sur  les  deux  tiers  postérieurs,  puis  se  rétrécissant 
insensiblement  jusqu'à  l'extrémité  ;  lamelles  assez  larges,  à  peine  visibles 
vers  le  milieu  du  bec  ;   onglet  assez  large,  courbé  ;  narines  presque  basales, 


latérales,  ovales  ;  ailes  aiguës  ;  queue  courte,  cunéiforme,  les  rectrices 
médianes  pointues  et  dépassant  les  autres  ;  tarses  robustes,  comprimés,  de 
la  longueur  du  doigt  interne. 

Hab.  —  Les  quatre  espèces  connues  de   ce  genre  sont  réparties 
dans  les  cinq  parties  du  monde. 


256.  —  Le  Canard  siffleur. 

MARECA  PENELOPE,    Selbij  ex  Lin. 
(PI.  255) 

Anas  PENELOPE,  Lin.  Syst.  nat.  p.  12G  (1758)  et  I  p.  202  (1766). 

Anas  FiSTULARis,  Briss.  Omith.  VI,  p.  391  (1760). 

Anas  cogolca,  Gmel.  Reise  Russl.  I,p.  70  (1770). 

Anas  kogolca,  Gmel.  Nov.  Com.  Pelrop.  XV.  p.  468,  pi.  21  (1771). 

Mareca  FISTULARIS,  Steph.  ShnvDs  Gen.  Zool.  XII,  2,  p.  131  (1824). 

Mareca  PENELOPE,  Selby,  Bril.  Orn.  Il,  p.  324  (1833). 

Mareca  KAJOLKA  et  fistulans,  Brehm,  Nawnannia,  1855  p.  297. 

Marica  FISTULARIS,  Olphe-Gal.,  Contrib.  Faune  orn.  Eur.  oec.,fasc.  IV,  p.  4  (1888). 

Die  Pfeifente,  en  allemand. 

The  Wigeon,  en  anglais. 

De  Smient,  en  flamand. 

Taille  :  0,45  ;  ailes  0,27. 

Description  du  mâle  en  plumage  de  noce,  —  Tête  et  haut  du  cou  d'un  brun 
roux,  légèrement  pointillé  de  noirâtre  sur  la  ligne  médiane  de  la  nuque  et 
autour  des  yeux;  front  et  milieu  du  vertex  d'un  blanc  roussâtre  ;  parties  dor- 
sales d'un  brun  cendré,  rayées  transversalement  de  zigzags  blanchâtres  ; 
les  plus  longues  scapulaires  cendrées  à  l'intérieur,  d'un  beau  noir  à  l'exté- 
rieur avec  un  bord  externe  blanc  ;  les  plus  longues  sus-caudales  noirâtres 
bordées  extérieurement  de  blanc  ;  couvertures  des  ailes  blanches,  les  plus 
grandes  terminées  de  noir  ;  rémiges  secondaires  d'un  cendré  brunâtre  à  l'in- 
térieur avec  une  bande  d'un  vert  doré  suivie  de  noir  à  l'extérieur  ;  le  vert 
forme  donc  un  miroir  limité  en  avant  et  en  arrière  par  une  bande  noire  ; 
rémiges  primaires  et  rectrices  brunes,  ces  dernières  lisérées  de  blanc  ;  bas 
du  cou  en  avant  et  haut  de  la  poitrine  d'un  cendré  lie  de  vin;  les  autres 
parties  inférieures  blanches,  mais  les  lianes  rayés  de  zigzags  d'un  brun 
cendré  ;  sous-caudales  noires.  Bec  d'un  gris  ai'doise,  noir  à  l'extrémité  ;  iris 
brun;  pattes  d'un  gris  bleuâtre,  les  membranes  plus  sombres. 

Mâle  en  été.  —  Dans  cette  saison,  le  plumage  ditlorc  principalement  du 
précédent  par  la  coloration  des  parties  dorsales  ;  les  plumes  des  parties  supé- 
rieures sont  d'un  brun  foncé,  bordées  do  roux  et  barrées  de  blanc  jaunâtre  ; 
ToM  II.  —  1802.  56 


—  442  — 


le  haut  de  la  poitrine  est  d'un  brun  jaunâtre  clair  avec  des  stries  transversales 
noirâtres  ;  les  flancs  sont  d'un  brun  roussâtre.  presque  uniforme. 

Femelle.  — Tête  et  cou  roussâtres  tachetés  de  noir,  surtout  au  vertex  ;  dessus 
du  corps  d'un  brun  noirâtre  avec  les  plumes  bordées  de  cendré  roussâtre  ; 
petites  couvertures  des  ailes  brunes  frangées  de  cendré,  les  suivantes  et  les 
rémiges  secondaires  brunes  plus  ou  moins  bordées  de  blanc  ;  rémiges  pri- 
maires et  rectrices  brunes, ces  dernières  bordées  de  blanchâtre  à  l'extérieur; 
bas  du  cou,  haut  de  la  poitrine  d'un  cendré  roussâtre  avec  des  taches  trans- 
versales brunes  ;  flancs,  jambes  et  sous-caudales  d'un  cendré  roussâtre,  les 
dernières  tachées  de  blanc  ;  poitrine  et  abdomen  blancs. 

Jeune.  —  Ressemble  à  la  femelle,  mais  chez  le  mâle  on  voit  déjà  le  vert 
métallique  du  miroir. 

Poussin.  —  Tête  rousse,  jaunâtre  à  la  gorge,  avec  une  bande  brune  au 
milieu  du  vertex  ;  dessus  du  corps  brun  ;  parties  inférieures  jaunâtres  ;  deux 
bandes  claires  sur  les  côtés  dont  une  traversant  l'aile;  bec^noirâtre,la  mandi- 
bule inférieure  variée  de  jaune  ;  pattes  brunâtres. 

Remarque.  —  La  principale  mue  du  mâle  a  lieu  à  la  fin  de  juin  ou 
au  commencement  de  juillet  ;  à  ce  moment  il  perd  presque  en  même 
temps  toutes  ses  rémiges  et  ses  rectrices,  ce  qui  ne  lui  permet  plus  de 
voler  ;  il  se  tient  alors  soigneusement  caché  dans  les  roseaux  jusqu'à 
ce  que  ses  rémiges  soient  complètement  développées,  ce  qui  n'arrive 
qu'à  la  fin  de  juillet.  En  octobre  il  opère  sa  seconde  mue,  qui  est  par- 
tielle et  qui  lui  rend  son  plumage  de  noce.  La  femelle  ne  perd  jamais 
la  faculté  de  voler. 

Rah.  —  Cette  espèce  habite,  en  été,  la  zone  polaire  de  l'ancien 

monde  jusqu'aux  limites  conti- 


nentales,  ainsi  que  l'Islande 
{Faher)  et  Waigatsch  {de  Heu- 
glin).  En  Europe  elle  niche  ra- 
rement au  sud  de  55°  1.  N.,  mais 
il  y  a  des  exemples  où  elle  a 
niché  dans  la  vallée  du  Danube, 
en  Allemagne,  en  Bohême  et 
même  en  France  ;  elle  est  de 
passage  régulier  dans  toute  l'Europe  centrale  ;  en  Belgique  elle  est 
commune  lors  des  passages,  surtout  sur  les  côtes,  sur  l'Escaut  et  dans 
les  marécages  des  parties  septentrionales  du  pays;  feu  M.  Meuris  dit 
en  avoir  vu  un  individu  avec  sept  jeunes  à  Rouge-Cloître  près  Bru- 
xelles, mais  il  n'indique  pas  l'époque. 


-  443  - 

Le  Canard  siffleur  hiverne  en  grand  nombre  dans  tout  le  midi  de 
l'Europe  à  partir  du  43°  1.  N.  environ,  ainsi  qu'en  Asie  Mineure 
{Sperlmg),  en  Palestine  {Tristram),  dans  le  nord  de  l'Afrique  {Loche, 
Favier),  à  Madeire  {Harcourt),  en  Egypte,  en  Nubie  et  sur  les  côtes 
de  la  mer  Rouge  {de  Heuglin)  et  il  pousse  parfois  ses  migrations  jus- 
qu'en Abyssinie  {Rïippell). 

Cette  espèce  est  aussi  commune  en  Asie  qu'en  Europe,  et  on  la  ren- 
contre dans  toutes  les  parties  septentrionales  jusqu'au  Kamts'chatka 
{Stejncger)  et  au  Japon  {Schlêgel).  Elle  hiverne  jusque  dans  l'Inde 
{Jerdon),  le  sud  de  la  Chine  et  Formose  {Swinhoe).  Lors  des  passages, 
elle  s'égare  souvent  sur  les  côtes  américaines  de  l'Atlantique  et  parfois 
au  Groenland;  elle  a  été  observée  accidentellement  dans  leWisconsin, 
rillinois  et  aux  îles  Prybilow  {Coues). 

Mœurs.  —  Le  Canard  siffleur  quitte  la  zone  polaire  vers  le 
20  septembre  et  y  retourne  en  avril.  Il  voyage  par  bandes  composées 
parfois  de  plusieurs  milliers  d'individus,  volant  en  rangs  serrés  et  très 
haut  ;  quand  ils  sont  moins  nombreux,  ces  oiseaux  volent  souvent 
aussi  à  la  file  en  formant  une  ligne  oblique  parfois  très  longue,  mais 
rarement  un  angle  aigu.  Ils  voyagent  aussi  bien  la  nuit  que  le  jour, 
mais  pendant  la  nuit  ils  volent  généralement  moins  haut. 

Cet  oiseau  fréquente  aussi  bien  les  bords  de  la  mer  que  les  eaux 
douces,  mais  il  visite  ces  dernières  particulièrement  pendant  la 
nuit.  Durant  les  migrations,  il  se  montre  plus  ou  moins  sur  toutes  les 
eaux,  même  sur  les  étangs  et  les  mares  situés  dans  le  voisinage  de 
lieux  habités;  sur  les  côtes  on  voit  alors  des  quantités  prodigieuses 
de  ces  Canards  et,  au  moment  du  reflux,  des  bancs  de  sable  très  éten- 
dus en  sont  complètement  couverts.  Ce  sont  d'ailleurs  des  oiseaux 
extrêmement  sociables,  vivant  toujours  en  bandes  et  se  tenant  pressés 
les  uns  contre  les  autres,  aussi  bien  au  repos  qu'en  volant.  Ils  vivent 
en  bonne  harmonie  avec  les  autres  espèces,  sans  cependant  se  mêler 
intimement  à  elles,  aussi  n'est-il  pas  rare  de  voir  au  milieu  d'eux  de 
petites  troupes  de  Sarcelles,  de  Filets  et  autres.  Pendant  le  jour  ils  se 
tiennent  ordinairement  sur  Peau  et  loin  du  bord  ;  quand  ils  ne  sont  que 
quelques-uns,  ils  se  rapprochent  de  ce  dernier  et  sortent  même  de 
l'eau  s'ils  ne  çont  pas  observés  ;  ils  se  montrent  d'ailleurs  beaucoup 
plus  farouches  quand  ils  sont  attroupés  que  lorsqu'ils  sont  par  couples 
isolés.  Leur  démarche  et  leur  vol  u' offrent  rien  de  particulier  ;  ce  der- 
nier est  rapide,  léger  et  les  coups  d'ailes  répétés  produisent  un  bruis- 
sement très  accentué. 


—  444  — 

La  nourriture  de  cette  espèce  est  la  même  que  pour  les  précédentes: 
larves  et  insectes  aquatiques,  mollusques  divers  et  annélides,  plus 
rarement  du  frai  de  poissons  et  de  grenouilles,  mais  beaucoup  de 
substances  végétales  telles  que  racines  tendres,  jeunes  pousses, 
algues,  graines  de  diverses  plantes  aquatiques,  etc. 

Le  Canard  siffleur  se  reconnaît  entre  tous  par  son  cri  retentissant 
qu'il  fait  entendre  à  tout  propos  ;  c'est  un  sifflement  aigu  ressemblant 
à  huijuh  pour  le  mâle,  huik  pour  la  femelle,  qui  le  prolonge  souvent  en 
huikrrr  ou  chrrahr. 

Cet  oiseau  s'apprivoise  facilement,  surtout  quand  on  le  met  sur  un 
étang  en  société  de  Canards  domestiques  et  autres,  après  lui  avoir 
coupé  une  aile  pour  Tempêclier  de  s'envoler.  Sa  chair  est  très  estimée: 
il  paraît  qu'on  la  mange  en  carême,  comme  chair  maigre! 

Reproduction.  —  Ce  Canard  niche  dans  les  marais,  au  bord  des 
eaux  ou  sur  un  îlot,  entre  des  roseaux  ou  autres  herbages  ou  sous  un 
buisson,  mais  le  nid  est  toujours  bien  caché.  Ce  nid  est  formé  de 
feuilles  sèches  de  roseaux,  de  joncs  ou  autres  feuilles  mortes,  ainsi 
que  de  diverses  graminées  ;  c'est  une  construction  assez  compacte  avec 
une  grande  excavation  au  centre.  La  ponte  a  lieu  vers  la  mi-juin  ;  elle 
se  compose  de  huit  à  dix  œufs  d'un  blanc  jaunâtre,  parfois  un  peu 
verdâtre,  luisants,  et  mesurant  environ  54  millim.  sur  40. 

La  mère,  comme  chez  d'autres  espèces,  s'arrache  du  duvet  pour  en 
couvrir  ses  œufs  chaque  fois  qu'elle  doit  les  quitter.  Le  mâle  laisse  à 
sa  compagne  les  soins  de  la  construction  du  nid  et  de  l'incubation, 
mais  il  reste  près  d'elle  pendant  les  premiers  temps. Bientôt  cependant, 
la  mue  l'oblige  à  la  quitter,  encore  avant  que  les  jeunes  ne  soient 
éclos.  Ceux-ci  naissent  après  vingt-quatre  ou  vingt-cinq  jours  d'incu- 
bation. Dès  que  les  poussins  sont  séchés  et  réchauffés,  la  mère  les 
conduit  à  l'eau,  où  ils  savent  fort  bien  se  cacher  entre  les  herbages 
à  la  moindre  apparence  de  danger 

GENRE    CXLVIII 

PILET.  —  DAFILA. 

Anas,  Lin.  S.  N.  I,  p.  202  (1766). 
Dafila,  Steçh.'  Shaw's  Ge7i.  Zool.  XII,  p.  127  (1824). 
Trachelonetta,  Kaup,  Natûrl.  Syst.  p.  115(1829). 
Phasianurus,  Wagl.,  Isis,  1832,  p.  1235. 
QuERQUEDULA,  Selby,  Brit.  Orn.  II,  p.  311  (1833). 

Car.  —  Bec  à  peu  près  de  la  longueur  de  la  tête,  un  peu  plus  haut  que 


large  à  la  base,  s'élargissant  insensiblement  d'arrière  en  avant,  à  onglet 
arrondi  et  peu  saillant  et  à  lamelles  invisibles  sur  les  côtes  ;  mandibule 
inférieure  presque  complètement  cachée  par  la  supérieure  ;  narines  presque 
basales,  rapprochées,  ovales;  ailes  allongées,  aiguës;  queue  conique,  les 
deux  rectrices  médianes  très  allongées  et  pointues  ;  tarses  robustes,  com- 
primés, de  la  longueur  du  doigt  interne,  qui  est  muni  d'une  étroite  mem- 
brane externe.  Cou  long  et  grêle. 

Hab.  —  Ce  genre  a  des  représentants  en  Europe,  en  Asie,  dans  le 
nord  de  l'Afrique  et  dans  toute  l'Amérique  jusqu'en  Patagonie  et  aux 
îles  Falkland. 

257.  —  Le  Canard  pilet  ou  à  queue  effilée. 
DAFILA  ACUTA,    Eyt.  ex  Lin. 

(PL  256) 

Anas  ACUTA,  Lin.  Sijst.  nat.  (1758;  et  I,  p.  202  (1766) . 

Anas  longicauda,  Briss.  Ornilh.  VI,  p.  369(1760). 

Anas  alandica,  Sparrm.  Mus.  Caris.  III,  pi.  60  (1786). 

Anas  Sparrmanni,  Lath.  Ind.  Orn.  II,  p.  876  (1790). 

Anas  caudacuta,  Steph.,  Syst.  Cat.  M.  and  B.  Br.  Mus.,  p.  38  (1816;. 

Dafila  caudacuta,  Steph.,  Shaw's  Gcn.  Zool.  XII,  p.  127  (1824). 

Trachelonetta  ACUTA,  Kaup,  Natilrl.  Syst.  p.  115  (1829). 

Anas  caudata,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  997. 

Phasianurus  acutus,  Wagl.,  Isis,  1832,  p.  1235. 

QuERQUEDULA  ACUTA,  Selby,  Br.  Orn.  II,  p.  311  (1833). 

Dafila  acuta,  Eyt.  Cat.  Br.  .B.  p.  60  (1836). 

QuERQUEDULA  CAUDACUTA,  Macg.  Man.  Br.  B.  II  p.  170  (1840), 

Dafila  longicauda  et  caudata,  Brehm,  Naumannia,  1855  p.  297. 

Dafila  acuta  var.  Americana,  Bonap.    Compt.-Rend.  XLIII,  p.  650  (1856). 

Die  Pfeilente  ou  Spitzente,  en  allemand, 

The  Pintail,  en  anglais. 

De  Pijlstaart,  en  flamand. 

Taille  du  mâle  :  0"W;  ailes  0,27;  femelle  :  0^43;  ailes  0,25. 

Description  du  mâle  en  plumage  de  noce.  —  Tête,  gorge  et  partie  antéro- 
supérieure  du  cou  bruns,  nuancés  de  violet  et  de  pourpre  sur  les  côtés; 
vertex  tacheté  de  noir;  nuque  noire  avec  une  bande  blanche  de  chaque  côté; 
le  reste  du  cou  blanc  en  avant  et  sur  les  côtés,  cendré  et  pointillé  de  gris  en 
arrière  ;  manteau,  dos,  côtés  de  la  poitrine  et  flancs  rayés  alternativement 
de  zigzags  noirs  et  grisâtres  ;  scapulaires  noires,  les  plus  longues  bordées 
de  cendré  plus  ou  moins  blanchâtre  ;  couvertures  des  ailes  cendrées,  les  plus 
grandes  terminées  de  roux  fauve  ;  miroir  d'un  vert  sombre  pourpré  et  noir, 
suivi  d'une  bande  blanche  ;  rémiges  primaires  brunes  ;  sus-caudales  noires 


extérieurement  et  cendrées  à  l'intérieur  ;  rectrices  brunes  bordées  de  cendré, 
les  deux  médianes  très  allongées  et  noirâtres;  sous-caudales  noires,  les  plus 
latérales  avec  un  bord  externe  blanc  ;  milieu  de  la  poitrine  et  ventre  blancs. 
Bec  et  pattes  d'un  gris  bleuâtre  ;  iris  jaune. 

Femelle.  —  Tête  et  cou  roussâtres  avec  des  taches  allongées  noires  ;  gorge 
blanchâtre;  dessus  du  corps  brun,  marqué  de  taches  irrégulières  en  crois- 
sants roussâtres,  les  scapulaires  bordées  par  la  même  couleur  ;  couvertures 
des  ailes  cendrées  plus  ou  moins  bordées  de  blanchâtre,  les  plus  grandes 
largement  terminées  de  blanc  ;  miroir  d'un  brun  roussâtre,  terminé  de  noir 
et  de  blanc;  rémiges  brunes;  rectrices  brunes,  bordées  et  barrées  de  blanc 
roussâtre,  les  médianes  dépassant  peu  les  autres  ;  milieu  de  la  poitrine  et 
ventre  d'un  blanc  jaunâtre  ;  flancs  d'un  cendré  brunâtre  avec  de  grandes 
taches  blanches  en  V  ;  bas-ventre  et  sous-caudales  variés  de  cendré  brunâtre 
pâle.  Iris  d'un  jaune  brunâtre.  Le  plumage  de  la  femelle  pâlit  avec  le  temps, 
il  est  toujours  plus  sombre  en  automne. 

Mâle  en  été.  —  Diffère  peu  de  la  femelle  dont  il  se  distingue  par  des  cou- 
leurs d'un  roux  plus  sombre,  par  le  miroir  de  Taile  à  reflets  métalliques,  et 
par  l'iris  jaune.  L'oiseau  conserve  ce  plumage  de  juillet  en  septembre. 

Jeune.  —  Ressemble  à  la  femelle  adulte,  mais  les  teintes  générales  tirent 
davantage  sur  le  gris  ;   le  mâle  se  reconnaît  toujours  à  sa  taille  plus  forte. 

Poussin.  —  Parties  supérieures  brunes,  roussâtre  à  la  nuque,  avec  quatre 
taches  blanches  disposées  en  carré  sur  le  dos  ;  joues  et  sourcils  gris  ;  côtés 
du  cou,  gorge  et  ventre  blancs;  poitrine  et  abdomen  grisâtres. 

Hab.  —  Le  Canard  pilet  habite  toute  la  zone  boréale  jusqu'au 

70°  1.  N.;  en  été  on  l'observe  en 
Islande  (Faber),  aux  îles  Féroé 
{Millier),  en  Scandinavie  {Collett, 
Sundstrôm),  dans  la  Russie  sep- 
tentrionale et  il  niche  jusque 
dans  le  nord  de  l'Allemagne 
{Borggrevé)  et  le  centre  de  la 
1^4-^1  j^r^^  Russie,  mais  il  est  toujours  rare 
de  le  voir  nicher  au  sud  du 
SS**  1.  N.  Il  est  de  passage  dans  l'Europe  centrale  et  se  montre  alors 
en  grand  nombre  sur  les  eaux  de  la  basse  Belgique;  il  est  encore  de 
passage  dans  le  midi  de  la  France  {Lacroiœ),  mais  il  hiverne  en  grand 
nombre  en  Portugal  [Barboza  du  Bocage),  en  Espagne  {Saunders), 
dans  le  midi  de  l'Italie  (Salvadori),  en  Bulgarie,  en  Turquie  {Elwes 
et  Buckley),  en  Grèce  {Lindermayer),  aux  îles  Ioniennes  {Lilford)  et 
sur  toutes  les  côtes  de  la  mer  Noire  [de  Nordmann).  Il  hiverne  égale- 


—  447  — 

ment  au  Caucase  {Radde),  en  Asie  Mineure  {Krûper),  en  Palestine 
{Tristram),  en  Egyipie  jusqu'au  Kordofan  (de  Heuglin),  dans  le  nord 
do  l'Afrique  [Loche,  etc.);  Schlégel  indique  aussi  le  Sénégal,  mais  ceci 
mérite  confirmation. 

En  Asie,  on  observe  cet  oiseau  à  travers  toute  la  Sibérie  jusqu'au 
Kamtschatka  [Stejneger)  et  au  Japon.  Il  est  de  passage  dans  les  con- 
trées du  centre  et  hiverne  dans  le  Midi  jusqu'à  Ceylan  {Hartlaub),  la 
Chine  (David)  et  Formose  (Sivinhoe). 

En  Amérique,  cette  espèce  habite  à  partir  de  la  zone  boréale  ;  elle 
hiverne  depuis  les  parties  tempérées  des  Etats-Unis  jusqu'à  Panama 
(Lawrence)  et  les  Antilles  (Sclater). 

Mœurs.  —  Le  Canard  pilet  émigré  en  octobre  et  novembre  des 
contrées  septentrionales  et  y  retourne  vers  la  mi-mars  ou  en  avril, 
suivant  la  saison.  Il  voyage  par  bandes  plus  ou  moins  considérables 
et  le  plus  souvent  pendant  la  nuit. 

Cet  oiseau  fréquente  les  mêmes  endroits  que  le  Canard  sauvage, 
mais  il  préfère  toujours  les  grandes  eaux  découvertes  garnies  de 
roseaux  et  d'herbages;  il  ne  s'arrête  pas  volontiers  sur  les  petits  étangs 
et  les  mares  cachés  dans  les  bois,  ni  sur  les  fleuves,  sauf  cependant 
aux  endroits  peu  profonds  et  vaseux  ou  offrant  des  marécages  aux 
environs.  Il  se  montre  aussi  dans  les  prairies  inondées  et  même  dans 
les  champs;  ce  palmipède  a,  du  reste,  toutes  les  habitudes  et  les 
allures  du  Canard  indigène;  il  plonge  avec  facilité,  nage  parfois  assez 
longtemps  sous  l'eau  pour  dépister  l'ennemi  qui  le  poursuit,  vole 
avec  rapidité,  se  montre  aussi  sociable  avec  les  siens  qu'avec  d'autres 
espèces,  et  c'est  le  Canard  qui  s'accouple  le  plus  souvent  avec  le 
Canard  sauvage.  Son  cri  ressemble  aussi  à  celui  de  ce  dernier,  mais 
il  est  d'un  ton  plus  élevé;  quand  le  mâle  s'envole  effrayé,  il  jette  un 
cri  rauque  particulier  qui  ressemble  fort  à  celui  que  poussent  les 
jeunes  Freux  encore  au  nid;  d'après  Naumann,  pendant  l'époque  de 
la  reproduction,  le  mâle  ferait  encore  entendre  un  son  particulier  et 
étouffé  ressemblant  à  kluck. 

Le  Pilet  se  nourrit  comme  le  Canard  sauvage,  mais  il  détruit  moins 
de  frai  et  de  petits  poissons.  En  captivité,  on  peut  le  nourrir  comme 
l'espèce  domestique,  il  mange  alors  de  tout  et  se  contente  d'avoine, 
de  pain,  de  navets  et  d(3  carottes  mis  en  menus  morceaux. 

On  chasse  beaucoup  cet  oiseau  pour  sa  chair  qui  est  excellente,  sur- 
tout celle  des  jeunes. 

Reproduction.  —  Ce  Canard  niche  entre  les  roseaux  et  les  joncs 


—  448  ^ 

qui  croissent  près  des  eaux  et  des  fossés  inondés,  ou  bien  sur  un  îlot, 
entre  les  herbages  d'une  prairie  et  même  dans  un  champ  de  céréales. 

De  même  que  chez  les  Canards  sauvages,  les  mâles  doivent  com- 
battre pour  conquérir  une  femelle  et  pour  pouvoir  la  conserver,  car 
les  célibataires  sont  peu  scrupuleux  et  ne  se  gênent  nullement  pour 
enlever  les  compagnes  des  autres. 

La  femelle  choisit  elle-même  un  emplacement  convenable  pour  son 
nid  et  le  construit  sans  le  concours  du  mâle.  Ce  nid  est  une  masse 
informe  composée  de  roseaux  et  de  joncs  secs,  de  paille,  de  feuilles 
mortes  et  de  foin  ;  au  centre  se  trouve  une  excavation  assez  profonde 
garnie  de  duvet  au  moment  de  la  ponte  ;  celle-ci  a  lieu  dans  la  seconde 
quinzaine  d'avril  ou  au  commencement  de  mai,  un  peu  plus  tard  dans 
les  pays  du  Nord.  La  femelle  dépose  de  sept  à  dix  œufs  un  peu  lus- 
trés, d'un  blanc  roussâtre,  parfois  un  peu  verdâtre,  et  mesurant 
environ  57  millimètres  sur  39.  La  durée  de  l'incubation  est  d'environ 
vingt-cinq  jours.  Les  parents  se  comportent  avec  leurs  petits  comme 
ceux  du  Canard  sauvage. 

GENRE  ÇXLIX 

SARCELLE.  —  QUERQUEDULA. 

QuERQUEDULA,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  427  (1760). 
Anas,  Lin.,  Syst.  nat.  1,  p.  204  (1766). 
BoscHAS,  Sw.  Classif.  B.  II,  p.  367  (1837). 
Cyanopterus,  Eyt.  Mon.  Anat.  p.  130  (1838). 
Petrocyanea,  Bonap.  Cat.  met.  Ucc.  Eur.  p.  71  (1842). 
EuNETTA,  Bonap.  Comp.-Rend.  XLIII,  p.  650  (1856). 

Car.  —  Bec  un  peu  moins  long  que  la  tête,  plus  haut  que  large  à  la  base, 
droit  à  partir  des  narines,  convexe  en  dessus,  légèrement  élargi  vers  l'ex- 
trémité ;  lamelles  invisibles  sur  les  côtés  ;  onglet  arrondi,  dépassant  les 
bords  de  la  mandibule  qui  cachent  la  mandibule  inférieure;  narines  basales, 
rapprochées,  ovales;  ailes  allongées,  aiguës  ;  queue  courte,  conique  ;  tarses 
robustes,  un  peu  plus  courts  que  le  doigt  médian. 

Hab. — On  rencontre  des  Sarcelles  dans  toutes  les  parties  du  monde. 

258.  —  La  Sarcelle  d'été. 

QUERQUEDULA  CIRCIA,  Steph.  ex  Lin. 

(PI.    257) 

Anas  circia,  Lin.  Syst.  nat.  (1758)  et  I,  p.  204  (1766). 
QuERQUEDULA  ..ESTivA,  Briss.  Ornith  VI,  p.  445  (1760). 
Querquedula  circia,  Steph.  Gen.  Zool.  Xllf,  p.  143  (1824). 


—  449  — 

QuERQUEDULA  GLAUCOPTEROs  et  scAPULARis,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  997. 
BoscHAS  ciRCiA,  Swains.    Cla^sif.  B.  II,  p.  367  (1837). 
Cyanopterus  CIRCIA,  Eyt.,  Mon.  Anat.  p.  130  (1838). 
Pterocyanea  CIRCIA,  Bonap.  Cat.  met.  Ucc.  Eur.  p.  71  (1842). 
Anas  humeralis,  s.  MuUer,  Verhandl.  nat.  Gescided.  p.  159  (184?). 
Querquedula  humeralis,  Gray,  Gen.  of  Birds,  III,  p.  616  (1849). 
Pterocyanea  glaucopteros  et  scapularis,  Bpehm,  Naum.  1855  p.  298. 
Cyanopterus  querquedula,  v,  Heugl,  Syst,  Uebers,  n»  692  (1856). 
Anasglaucoptera,  C.-F.  Dub.  Pi.  col.  Ois.Belg.   III,  p.   274(1860). 
Pterocyanea  querquedula,  v.  Heugl.  Faun.  Rolh.  Meer,  n^  286  (1881). 
Die  Knaekente,  en  allemand. 
The  Summer  Teal,  Garganey,  en  anglais, 
De  Zomertaling,  en  flamand. 

Taille  du  mdle  :  0°'31;  ailes  0,20:  femelle  :  0"^26;  ailes  0,18. 

Description  du  mâle  en  plumage  de  noce.  ■ —  Dessus  de  la  tête  et  ligne 
médiane  de  la  nuque  d'un  brun  noirâtre,  avec  de  petites  stries  roussâtres  sur 
le  front  ;  une  large  bande  blancLe,  qui  prend  naissance  au-dessus  de  l'œil, 
longe  de  chaque  côté  le  brun  de  la  nuque  en  se  rétrécissant  ;  jouus  et  la 
majeure  partie  du  cou  d'un  brun  rougeâtre  strié  de  blanc  ;  gorge  noirâtre  ; 
manteau,  dos  et  sus-caudales  bruns  avec  les  plumes  bordées  de  cendré  clair; 
scapulaires  d'un  gris  bleuâtre  et  lisérées  de  blanc,  les  plus  internes  avec 
une  longue  bande  centrale  blanche  bordée  de  noir  à  reflets  verts  ;  petites 
couvertures  d'un  gris  bleuâtre,  les  plus  grandes  cendrées  mais  terminées  par 
un  large  bord  blanc,  formant  une  bande  blanche  à  travers  de  l'aile  ;  miroir 
d'un  vert  cendré  brillant  avec  une  raie  blanche  terminale  ;  rémiges  brunes 
avec  un  liséré  externe  cendré  et  les  baguettes  blanches;  queue  brune,  les 
rectrices  bordées  de  cendré  clair  ;  bas  du  cou  et  poitrine  noirâtres  avec  des 
croissants  d'un  cendré  roussâtre,  mais  prenant  la  forme  de  bandes  trans- 
versales au  bas  de  la  poitrine  ;  les  autres  parties  inférieures  blanches,  mais 
les  flancs  et  le  bas-ventre  ornés  de  raies  noires  en  zigzags  ;  sous-caudales 
d'un  blanc  jaunâtre  et  tachées  de  brun.  Bec  noirâtre;  iris  brun  clair  ;  pattes 
d'un  cendré  rougeâtre. 

Femelle.  —  Elle  est  plus  petite  que  le  mâle.  Dessus  de  la  tète  et  nuque 
d'un  brun  foncé  ;  raie  sourciliére,  côté  de  la  tète  et  partie  supérieure  du  cou 
d'un  blanc  jaunâtre  tacheté  de  brun  ;  gorge  et  un  espace  situé  de  cluuiue 
côté  à  la  base  du  bec,  de  même  couleur  mais  immaculés;  parties  supérieures 
brunes  avec  les  plumes  plus  ou  moins  bordées  de  cendré  ;  ailes  comme  chez 
le  mâle,  mais  les  scapulaires  d'un  brun  noirâtre,  bordées  extérieurement  de 
blanc  ;  bas  du  cou  et  poitrine  d'un  blanc  roussâtre  avec  des  taches  brunes, 
dont  quelques-unes  en  forme  de  croissants  ;  les  autres  parties  inférieures 
blanchâtres  avec  des  taches  brunes  sur  les  flancs  et  sur  les  sous-caudales  ; 
queue  brune,  les  rectrices  légèrement  bordées  de  cendré. 

Mâle  eu  etc.  —  Même  plumage  que  la  t'emelk'  adulte,  niais  d'une  teinte 
Tu.M  II.  —  1892.  57 


-  450   - 


générale  plus  sombre  et  les  parties  ventrales  plus  blanches  ;  se  reconnaît 
facilement  à  sa  taille  plus  forte. 

Jeune.  —  Bessemble  également  à  la  femelle  adulte,  mais  il  est  d'une  teinte 
plus  sombre,  la  poitrine  est  plus  rousse,  la  gorge  et  les  parties  ventrales  sont 
plus  blanches,  surtout  chez  le  mâle,  les  couvertures  des  ailes  et  le  miroir 
sont  d'une  couleur  plus  cendrée . 

Poussin.  —  Dessus  de  la  tête  brune  ;  front,  raie  sourcilière  et  le  restant 
de  la  tête  jaunâtres  ;  une  bande  traversant  l'œil,  une  tache  allongée  près 
de  la  mandibule  inférieure  et  une  autre  derrière  l'oreille,  brunes  ;  parties 
dorsales  brunes,  avec  quatre  bandes  obliques  jaunâtres  sur  les  côtés,  dispo- 
sées en  carré  ;  jambes  et  flancs  bruns  ;  toutes  les  autres  parties  inférieures 
jaunâtres. 

ffab.—Lsi  Sarcelle  d'été  habite  l'Europe  centrale;  elle  visite  acciden- 
tellement l'Islande  [Newton),  les 
îles  Féroé  {Seebohm)  et  la  Nor- 
wège,  où  un  individu  a  été  cap- 
turé près  de  Christiania  en  mai 
1862  (Collett),  mais  elle  niche 
régulièrement  en  Suède  jusqu'au 
60«  1.  N.  {Wallengren).  En  Fin- 
lande on  l'a  observée  jusqu'à 
Uleaborgh  (65»)  où  elle  paraît 
nicher  [Dresser)  ;  elle  est  du  reste  plus  ou  moins  répandue  dans  toute 
la  Russie  jusqu'à  Archangel.  Elle  est  très  localisée  aux  îles  Britan- 
niques, niche  dans  quelques  localités  du  sud  de  l'Angleterre,  mais  elle 
est  rare  en  Ecosse  et  en  Irlande  et  ne  visite  qu'accidentellement  les 
îles  Shetland  [Seedohm).  Elle  niche  abondamment  au  Danemark 
[Kjaerholling),  en  Allemagne,  en  Autriche  [Naumann,  etc.),  en  Polo- 
gne [Taczanowski)  et  dans  toute  l'Europe  centrale. 

Cet  oiseau  est  commun  en  Belgique  lors  des  passages  et  niche  en 
petit  nombre  dans  les  grands  marais  du  pays  ;  il  en  est  de  même  dans 
le  grand-duché  de  Luxembourg  [de  la  Fontaine),  en  YYnxiQQ[Degland), 
en  Suisse  [Meisner  et  Schinz),  en  Italie  [Salvadori)  et  aux  Thermo- 
pyles  {von  der  Mûhle).  Il  est  sédentaire  ou  hiverne  en  Portugal  [A.  C. 
Smith),  en  Espagne  [Retjes),  dans  le  midi  de  l'Italie  {Giglioli)  et  en 
Grèce  [Lindermayer)  ;  il  hiverne  également  dans  le  nord  [Loche)  et  le 
nord-est  de  l'Afrique  jusqu'au  10°  1.  N.  {de  Heuglin),  ainsi  que  sur  les 
côtes  de  la  mer  Rouge. 

En  été  on  rencontre  cet  oiseau  au  Caucase  [Raddc),  au  Turkestan 


451  — 

{Severtzoïo)  et  en  Sibérie  jusque  vers  le  60<^  1.  N.  ;  il  est  très  rare 
dans  les  provinces  de  l'Amour,  commun  au  Tarei-Nor  {Radde),  et 
von  Middendorff  l'observa  près  des  bouches  de  l'Uda;  il  est  assez 
rare  dans  les  parties  méridionales  de  la  Chine  {David)  et  à  Formose 
{Siainhoe),  hiverne  au  Népaul  {Hodgson),  dans  l'Inde  {Jerdon),  ainsi 
que  dans  Tlndo-Chine,  aux  Philippines,  à  Célèbes  et  à  Java 
{Sdilégel). 

Mœurs.  —  C'est  un  oiseau  d'été  qui  émigré  de  nos  contrées  en 
octobre  ou  dans  la  première  quinzaine  de  novembre,  si  la  température 
ne  s'est  pas  trop  refroidie  ;  il  nous  revient  à  la  fin  de  mars  ou  en  avril. 
Les  migrations  ont  lieu  par  couples  ou  en  petites  troupes  et  le  plus 
souvent  pendant  la  nuit. 

La  Sarcelle  d'été  ne  se  tient  que  sur  les  eaux  douces  ;  pendant  ses 
voyages,  elle  s'arrête  bien  parfois  au  bord  de  la  mer  dans  des  endroits 
fangeux,  mais  ce  n'est  jamais  pour  longtemps.  A  l'intérieur  des  terres 
on  la  voit  nicher  sur  toutes  les  eaux  stagnantes  ou  courantes,  mais 
principalement  près  d'un  étang,  dans  des  marécages,  et  partout  où  il 
y  a  abondance  de  roseaux,  de  joncs  ou  de  buissons;  elle  recherche 
toujours  de  préférence  les  eaux  vaseuses  riches  en  algues  et  en 
plantes  flottantes,  ainsi  que  les  prairies  inondées;  il  lui  arrive  aussi 
parfois  de  s'aventurer  dans  les  pâturages  et  dans  les  champs,  même 
s'ils  sont  à  quelque  distance  de  l'eau. 

Ses  moeurs  et  ses  allures  ne  diffèrent  guère  de  ce  que  nous  voyons 
chez  les  autres  Canards  :  elle  marche,  nage  et  plonge  avec  aisance,  et 
son  vol  est  léger,  silencieux  et  rapide.  Elle  est  moins  bien  partagée 
que  les  autres  Canards  au  point  de  vue  des  facultés,  aussi  est- elle  peu 
farouche  et  même  parfois  un  peu  niaise  ;  elle  est  très  sociable  et  se 
mêle  souvent  à  d'autres  espèces. 

Le  cri  de  cette  Sarcelle  ressemble  à  knèck,  rarement  répété  plus  de 
deux  fois  de  suite,  c'est  d'ailleurs  un  oiseau  peu  bruyant;  au  printemps, 
à  l'époque  de  l'accouplement,  le  mâle  fait  souvent  entendre  un  cri 
ronflant  comme  krrreb  et  ayant  quelque  analogie  avec  celui  de  la 
Grive  draine  ;  outre  ces  cris,  les  deux  sexes  en  font  encore  entendre 
un  autre  qu'on  peut  rendre  ^2iV  jèkjèkjèck,  prononcé  très  rapidement. 
Quant  à  la  nourriture,  elle  est  la  même  que  pour  les  précédents  : 
matières  végétales,  larves,  insectes,  vers,  frai  de  poissons  et  de  gre- 
nouilles, têtards,  etc. 

C'est  un  oiseau  d'un  naturel  très  doux,  aussi  se  laissc-t-il  facile- 
ment apprivoiser.  Sa  chair  est  très  estimée. 


—  452  — 

Reproduction.  —  Cette  Sarcelle  niche  partout  où  il  y  a  de  l'eau  avec 
des  roseaux  et  des  herbages,  même  sur  les  étangs  qui  se  trouvent  à 
l'intérieur  des  forêts.  Les  préliminaires  de  la  reproduction  se  passent 
comme  chez  le  Canard  sauvage,  mais  une  fois  que  les  couples  sont 
unis,  les  conjoints  se  montrent  plus  fidèles.  La  femelle  choisit  pour 
son  nid  un  endroit  bien  caché  dans  les  roseaux  et  les  joncs,  soit  au 
bord  de  l'eau,  soit  sur  un  îlot;  elle  niche  parfois  aussi  dans  les  her- 
bages d'une  prairie,  dans  un  champ  de  céréales,  dans  un  fossé,  sous 
un  buisson,  mais  toujours  à  peu  de  distance  de  l'eau.  La  cane  fait  son 
nid  dans  une  petite  fosse  qu'elle  remplit  de  divers  végétaux  secs  : 
roseaux,  graminées,  feuilles  mortes,  paille,  etc.,  selon  ce  qu'elle  a  pu 
se  procurer;  ces  matériaux  sont  simplement  amoncelés  et  entassés, 
mais  de  manière  à  enlacer  plus  ou  moins  les  roseaux  ou  les  herbages 
environnants,  de  façon  à  ce  que  le  nid  soit  un  peu  couvert  au-dessus 
et  que  la  femelle  puisse  couver  sans  être  trop  vue  d'en  haut. 

Ce  n'est  généralement  qu'au  commencement  de  mai  que  la  cane 
commence  à  pondre  ;  elle  dépose  alors  de  huit  à  douze  oeufs,  parfois 
môme  quatorze,  qui  sont  plutôt  ovalaires  qu'ovoïdes  et  d'un  blanc 
crème  un  peu  lustré;  ils  mesurent  environ  45  millimètres  sur  33.  Dès 
que  la  femelle  commence  à  couver,  elle  s'arrache  le  duvet  nécessaire 
à  couvrir  ses  oeufs, chaque  fois  que  les  nécessités  de  la  vie  l'obligent  à 
les  quitter.  La  durée  de  l'incubation  est  de  vingt  et  un  à  vingt-deux 
jours. 

Le  mâle  reste  près  de  sa  compagne  pendant  les  premiers  temps  ; 
mais  bientôt  sa  sollicitude  diminue,  et  il  va  alors  se  distraire  sur  l'eau 
avec  d'autres  mâles,  jusqu'au  moment  où  la  mue  l'oblige  à  se  cacher, 
ne  pouvant  plus  se  servir  de  ses  ailes  déplumées.  La  mère  est  donc 
obligée  de  pourvoir  seule  aux  exigences  de  sa  progéniture. 

259.  —   La  Sarcelle  d'hiver  ou  Sarcelline. 

QUERQUEDULA  CRECCA,  Steph.  ex  Lin. 

(PI.   258) 

Anas  CRECCA,  Lin.  Syst.  nat.  (1758)  et  I,  p.  204  (1766). 

QuERQUEDULA  MiNOR,  Briss.  Omilh.  VI,  p.  436  (1700). 

Anas  hina,  Gmel.  Sy&t.  nat.  I,  p.  523  (1788). 

QuERQUEDULA  CRECCA,  Steph.  G  en.  Zool.  XII,  2  p.  140  (1824). 

Nettion  CRECCA,  Kaup,  Natilrl.  Syst.  p.  95  (1829). 

QuERQUEDULA  SUBCRECCA  et  CRECcoiDES,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  998. 


-   4o3  — 

BoscHAS  CRECCA,  Swa'ins.,  Classif.  B.  II,  p.  307  (1837). 
Die  Kruck-Ente,  en  allemand. 
The  common  Teal,  en  anglais. 
De  Wintertaling,  en  tlaniand. 

Var.    Caroîinensis. 

Anas  carolinensis,  Gm.  Si/st.  nat.  I,  p.  533  (1788). 

Anas  CRECCA,  AVils.  Am.  Orn.  VllI,  p.  101  (1814). 

Anas  AMERiCANA,  Vieill.  Enc.  meth.  p.  155  (1823). 

QuERQUEDULA  CAROLINENSIS,  Stepli.  Geu.  Zool.  XII,  p.  148  (1824). 

Nettion  CAROLINENSIS,  Baird ,  J5iVcZs  JV.  A.  p.  777  (1858). 

QuERQUEDULA  AMERICANA,  Mui*.  EcUnb .  Neuw.  PkU.  Journ.  V,  p.  230  (1859). 

Taille:  0,30;  ailes  0,18. 

Description  du  mâle  en  plumage  de  nocp.  —  Tête  et  les  deux  tiers  du  cou 
d'un  brun  marron,  avec  une  raie  blanchâtre  concave  à  la  base  du  bec;  un 
grand  espace  d'un  vert  foncé  brillant  entoure  l'œil,  couvre  les  côtés  de  la 
tête  et  se  confond  sur  la  nuque  avec  une  bande  médiane  noire  ;  la  partie 
inférieure  de  la  bande  verte  est  bordée  de  blanc  ;  gorge  brune  ;  partie  infé- 
rieure du  cou,  côtés  de  la  poitrine,  manteau,  la  plupart  des  scapulaires 
et  flancs  avec  des  raies  en  zigzags  alternativement  blanches  et  noires;  les 
scapulaires  les  plus  externes  blanches  avec  un  large  bord  noir  ;  bas  du  dos 
brun  plus  ou  moins  pointillé  de  cendré  ;  couvertures  supérieures  de  la  queue 
brunes  bordées  de  cendré  roussâtre  ;  couvertures  des  ailes  d'un  brun  cendré, 
les  plus  grandes  terminées  de  blanchâtre  passant  au  fauve  clair  ;  miroir 
d'un  beau  vert  brillant,  placé  entre  deux  bandes  noires,  la  plus  inférieure 
avec  un  petit  bord  blanc;  rémiges  brunes  lisérées  de  cendré;  poitrine  d'un 
blanc  roussâtre,marquée  de  taches  arrondies  noirâtres;  abdomen  blanc;  sous- 
caudales  noires,  les  latérales  roussâtres  avec  la  base  noire  ;  queue  brune,  les 
rectrices  lisérées  de  cendré.  Bec  noirâtre;  iris  brun  noisette;  pattes  cendrées. 

Femelle.  —  Dessus  de  la  tête  brun  avec  les  plumes  bordées  de  cendré  rous- 
sâtre ;  le  reste  de  la  tête  d'un  blanc  roussâtre  tacheté  de  brun,  gorge  presque 
immaculée  ;  manteau  d'un  brun  noirâtre  avec  les  plumes  bordées  de  cendré 
et  de  roussâtre  ;  bas  du  dos  et  sus-caudales  de  même  couleur,  mais  les  plu- 
mes bordées  de  cendré;  ailes  comme  chez  le  mâle,  mais  les  couvertures  bor- 
dées de  cendré  et  les  scapulaires  externes  brunes  et  noires  bordées  de  blanc  ; 
poitrine  variée  de  cendré  et  de  roussâtre  et  marquée  de  taches  brunes  en 
croissants  ;  ventre  blanc  avec  des  taches  brunes  et  roussâtres  sur  les  flancs  ; 
sous-caudales  blanches  avec  des  taches  cendrées  ;  queue  brune,  les  rectrices 
bordées  de  blanchâtre. 

Mâle  en  etc.  —  Ressemble  à  la  femelle,  mais  d'une  teinte  générale  plus 
sombre  ;  il  conserve  ce  plumage  de  juillet  â  octobre,  et  commence  sa  seconde 
mue  dans  ce  dernier  mois. 


454 


Jeune.  —  Ressemble  à  la  femelle  et  les  sexes  ne  sont  alors  presque  pas  à 
distinguer,  mais  le  mâle  est  toujours  un  peu  plus  grand  et  plus  foncé  que  la 
femelle. 

Poussin.  —  N'est  pas  à  distinguer  du  poussin  de  la  Sarcelle  d'été,  si  ce 
n'est  à  la  forme  de  l'onglet  ;  celui-ci  est  en  forme  de  triangle  équilatéral 
chez  cette  dernière,  en  ruban  étroit  chez  la  Sarcelle  d'hiver, 

Var.  Carolinensis.  —  Diffère  principalement  de  la  forme  européenne  par 
l'absence  de  plumes  scapulaires  blanches  à  bord  noir  ;  la  bande  verte  de  la 
tête  descend  plus  bas  sur  les  joues,  où  elle  présente,  sous  l'œil,  une  petite 
tache  d'un  blanc  roussâtre  ;  les  rayures  du  dos  sont  aussi  plus  serrées.  La 
femelle  ne  diffère  en  rien  de  celle  du  type  d'Europe.  (Caractères  relevés  sur  un 
couple  du  Mexique.) 


Hab. 


Ce  palmipède  habite  l'ancien  monde,  mais  il  est  remplacé 

eu  Amérique  par  une  variété 
très  voisine  [tfor.  Carolinensis) 
(|ue  Schlégel  réunit  à  la  forme 
européenne:  «  les  caractères, 
dit-il,  assignés  aux  individus 
américains,  paraissent  être  en 
grande  partie  empruntés  à  des 
individus  dont  le  plumage  n'a 
pas  encore  acquis  la  perfection 
complète  des  teintes,  ou  ils  sont  de  si  peu  de  stabilité  qu'il  est  impos- 
sible de  reconnaître  celte  soi-disant  espèce  sans  indication  de  la 
localité...   » 

La  Sarcelle  d'hiver  ou  Sarcelline  niche  en  Islande  {Faber)  et  dans 
tout  le  nord  de  l'Europe  et  de  l'Asie  jusqu'au  70^  1.  N.  ;  elle  est  plus 
ou  moins  sédentaire  en  Grande-Bretagne,  niche  en  petit  nombre  en 
Angleterre  {More)  et  plus  communément  en  Ecosse  [Dresser)  ;  elle 
niche  encore  au  Danemark,  en  Hollande,  dans  les  parties  septentrio- 
nales de  l'Allemagne,  en  Pologne  et  dans  la  Russie  centrale,  mais 
cela  devient  plus  rare  dans  les  contrées  plus  méridionales;  cependant, 
quelques-uns  de  ces  Canards  sont  sédentaires  dans  le  midi  de  la 
France  {Lacroix),  en  Espagne  [Saunders),  en  Italie  [Giglioli),  dans 
le  nord  de  la  Grèce  {Lindcrmayer)  et  même  aux  îles  Açores  {God- 
Tiian)  et  Madeire  (Harcourt). 

Cette  Sarcelle  est  très  abondante  dans  la  basse  Belgique  en 
automne  et  en  hiver,  et  hiverne  dans  tout  le  midi  de  l'Europe,  y 
compris  les   îles  Canaries  [Balle)  et  de  Malte  [Wri[/hf).  Elle  hiverne 


—  4oo  — 

également  dans  le  nord  et  le  nord-est  de  l'Afrique  jusqu'en  Abys- 
sinie  {de  Heuglin),  en  Palestine  [Tristraw)  et  dans  le  sud  de  l'Asie 
jusque  dans  l'Inde  {Jerdrm);  elle  passe  également  l'hiver  à  Cejlan,en 
B\vmd.me  [Seebohon),  en  Chine  [David)  et  à  Formose  [Swinhoé).  Dans  le 
nord  de  l'Asie,  elle  niche  dans  toute  la  Sibérie  jusqu'au  Kamtschatka 
[Stejnege?^)  et  le  Japon  {Temminck).  Elle  se  montre  accidentellement 
sur  les  côtes  de  l'Amérique  orientale  et  au  Groenland  {Reinhardt). 

La  var.  Carolinensis  habite  toute  l'Amérique  du  Nord  et  le  Gi'oën- 
land  ;  elle  hiverne  dans  les  Etats  du  Sud,  au  Mexique,  jusqu'au  Hon- 
duras et  l'île  de  Cuba  [Coues). 

Mœurs.  —  Bien  que  cet  oiseau  soit  moins  sensible  au  froid  que  le 
précédent,  il  émigré  cependant  des  contrées  septentrionales  pour 
hiverner  dans  un  climat  moins  rigoureux.  Les  migrations  commencent 
en  octobre  et  continuent  pendant  tout  le  mois  de  novembre,  ou  plutôt 
jusqu'aux  premières  neiges  accompagnées  de  gelées.  Au  printemps  il 
retourne  très  tôt  dans  sa  patrie,  car  les  passages  commencent  déjà 
dans  la  première  quinzaine  de  mars,  mais  se  poursuivent  jusqu'au 
commencement  de  mai.  Les  voyages  se  font  toujours  par  bandes  plus 
ou  moins  considérables,  et  plus  souvent  durant  la  nuit  que  pendant  le 
jour;  ces  Canards  volent  en  rangs  serrés  et  sans  ordre,  mais  quand 
ils  ont  un  grand  espace  à  franchir,  ils  se  placent  à  la  file  pour  former 
une  ligne  oblique  simple  ou  double  suivant  leur  nombre  ;  dans  ce 
dernier  cas,  ils  volent  toujours  à  une  grande  hauteur  et  en  formant  un 
angle  aigu. 

Cette  espèce  ne  visite  les  bords  de  la  mer  qu'aux  endroits  fangeux 
et  peu  profonds,  et  encore  no  l'y  voit-on  qu'à  l'époque  des  passages; 
elle  n'aime  pas  non  plus  les  grands  lacs  et  les  larges  fleuves,  et  si  elle 
s'y  arrête  ce  n'est  jamais  pour  longtemps;  ce  qu'elle  aime  surtout,  ce 
sont  les  étangs,  les  mares  et  les  marais  bien  garnis  de  roseaux  et 
d'herbages;  comme  elle  est  peu  farouche,  il  n'est  pas  rare  de  la  ren- 
contrer sur  les  étangs  environnés  d'habitations  ou  placés  à  côté  d'une 
chaussée  assez  fréquentée. 

Cette  Sarcelle  ressemble  complètement,  par  ses  mœurs,  à  la  précé- 
dente ;  les  jeunes,  avant  de  savoir  voler,  montrent  une  extrême  dex- 
térité à  la  nage  et  plongent  avec  une  facilité  remarquable,  nageant 
souvent  assez  longtemps  entre  deux  eaux,  faculté  que  les  adultes 
paraissent  perdre,  du  moins  en  partie.  Son  vol  est  léger,  rapide  et 
silencieux. 

E]l(>  osf  peu  Caroiicli.'  (;L  très  sociable.  Son  cri  ressemble  à  hnèk  ou 


—  456  — 

vêk,  rarement  répété  deux  fois  de  suite;  c'est  le  cri  d'appel  qui  est 
propre  aux  deux  sexes  ;  un  autre  cri,  également  isolé,  qu'on  entend 
particulièrement  au  printemps,  peut  se  rendre  par  kruck  ou  py^ut. 
Quant  à  la  nourriture,  elle  est  la  même  que  pour  l'espèce  précé- 
dente. 

Cet  oiseau  s'apprivoise  facilement,  mais  il  est  plus  difficile  à  conser- 
ver que  la  Sarcelle  d'été.  Sa  chair  est  excellente. 

Reproduction.  —  Cette  Sarcelle  se  comporte  entièrement  comme  la 
précédente  pendant  toute  la  durée  de  la  reproduction  ;  elle  niche  de  la 
même  manière  et  dans  les  mômes  endroits.  Il  est  impossible  de  distin- 
guer ses  oeufs  de  ceux  de  la  Sarcelle  d'été,  mais  le  duvet  qui  garnit 
le  nid  permet  toujours  de  reconnaître  l'espèce  qui  les  a  pondus.  La 
ponte  est  de  neuf  à  quatorze  oeufs,  d'un  blanc  crème  un  peu  lustré  et 
mesurant  environ  45  millim.  sur  33.  La  durée  de  l'incubation  est  de 
vingt  et  un  à  vingt-deux  jours. 

Faber  dit  avoir  trouvé  des  jeunes  en  Islande  dès  le  28  juin  ;  d'après 
cet  auteur,  le  mâle  resterait  auprès  de  ses  poussins  et  leur  témoigne- 
rait autant  de  sollicitude  que  la  femelle.  Il  est  cependant  probable  qu'il 
quitte  sa  famille  au  moment  de  la  mue,  car  la  perte  simultanée 
de  ses  rémiges  l'empêche  de  voler  pendant  une  partie  du  mois  de 
juillet. 

260.  —  La  Sarcelle  formose. 
QUERQUEDULA  FORMOSA,  Steph.  ex  Georgi. 

(PI.   258i>) 

Anas  FORMOSA,  Georgi,  Reise  Russ.  Reich.  p.  168  (1775). 

Anas  glocitans,  Pall.  Act.  HoLin.  XL,  pi.  33,  f.  1.  (1779). 

Anas  baikal,  Bonnat.  Table  encycl.  1,  p.  158  (1791). 

QuEKQUEDULA  FORMOSA,  Steph.  Gen.  Zool.  XII,  p.  151  (1824). 

QuERQUKDULA  GLOCITANS,  Vig.  Trans.  Lin  H.  Soc.  XIV,  p.  559  (1825). 

Anas  torquata  (Messerschm.),  a.  picta  (Stell.),  Bonap.  Rev.  crit.  p.  103  (1850). 

EuNÉTTA  FORMOSA,  Bonap.  Compt.-rend.  Ac  se.  XLIII,  p.  650  (1856). 

Anâs  bimaculata,  aactorum  plurimorum  nec  Pennant  (1). 

Die  Gluckente,  en  allemand. 

The  Baikal  Teal,  en  anglais. 

De  Aziatische  Taling,  en  flamand. 


(1)  L.'Anas  èimaatlaia,  Penn.  {Qiierquedula  bimaculata,  Bonap.)  admise  par  plusieurs  auteurs 
comme  espèce  distincte,  par  d'autres  comme  synonyme  de  VA.  formosa,  n'est  en  réalité 
qu'un  hybride  de  VA.  Iwscas  et  du  Qiwupicdnla  crccca. 


;  -  4b7  — 

Taille  :  0,36  ;  ailes  0,2i.   La  femelle  est  un  peu  plus  petite. 

Description  du  mâle  adulte  en  plumage  de  noee.  —  Front  et  dessus  de  la  tête 
noirs;  une  raie  sourcilière  blanche  prend  naissance  en  avant  de  l'œil  et  con- 
tourne l'occiput;  une  grande  tache  ovalaire  d'un  roux  jaunâtre  pâle  couvre 
chaque  côté  de  la  face;  une  large  bande  noire,  bordée  de  blanc,  descend 
sous  l'œil,  contourne  la  tache  précédente  et  couvre  la  gorge;  derrière  cette 
bande  noire  il  s'en  trouve  une  autre  plus  large,  d'un  roux  jaunâtre  pâle, 
bordée  de  blanc  et  qui  couvre  la  partie  antérieure  du  cou  ;  de  chaque  côté 
du  cou,  derrière  cette  dernière,  existe  une  bande  d'un  noir  bleuâtre  ;  enfin, 
derrière  l'œil,  part  une  large  bande  d'un  vert  bronzé  qui  couvre  la  partie 
postérieure  du  cou,  descend  enferme  de  taux  sur  les  côtés  où  elle  est  limitée 
par  une  bande  blanche  se  prolongeant  autour  de  la  bande  noii'o;  manteau, 
dos  et  sus-caudales  d'un  brun  cendré  jaunâtre,  plus  sombre  au  centre  des 
plumes;  côtés  supérieurs  du  manteau  et  les  scapulaires  les  plus  rapprochées 
de  l'épaule,  d'un  gris  bleuâtre  pointillé  de  noir;  couvertures  des  ailes  d'un 
cendré  brunâtre,  les  plus  grandes  terminées  de  roux  ;  miroir  d'un  vert 
bronzé,  suivi  d'une  bande  noire  et  d'un  bord  blanc;  les  plus  longues  scapu- 
laires noires  au  centre,  blanches  intérieurement  et  rousses  à  l'extérieur  ; 
rémiges  et  rectrices  brunes  avec  un  liséré  plus  pâle  ;  poitrine  couleur  lie  de 
vin  avec  des  taches  arrondies  noires  ;  flancs  vermiculés  de  noir  et  de  blanc, 
les  plumes  les  plus  rapprochées  de  la  queue  avec  un  large  bord  blanc; 
abdomen  d'un  blanc  plus  ou  moins  lavé  de  jaunâtre;  sous-caudales  noires, 
les  latérales  bordées  extérieurement  de  roux  rouge.  {Individu  de  V Amour). 
Bec  d'un  noir  bleuâtre  ;  iris  et  pattes  d'un  brun  clair  (1). 

Mâle  en  mue  tué  en  Belgique.  —  Même  plumage  que  l'adulle  ci-dessus, 
mais  les  plumes  du  dessus  de  la  tête  bordées  de  brun  roussâtre  ;  parties  rous- 
sâtres  des  joues  tachetées  de  noir,  tandis  que  la  gorge  et  les  autres  parties 
noires  de  la  tête  sont  tachetées  de  blanc  ;  taches  noires  de  la  poitrine  moins 
visibles,  et  les  belles  scapulaires  effilées  commencent  seulement  à  se  montrer. 

Femelle  adulte.  —  Dessus  de  la  tête  et  partie  postérieure  du  cou  brun  noi- 
râtre, avec  les  plumes  bordées  de  roux  à  la  nuque  et  sur  le  cou;  une  tache 
arrondie  blanchâtre  sur  les  côtés  de  la  mandibule  supérieure  surmontée  d'une 
tache  brune  piquetée  de  noir  ;  une  raie  brune  derrière  l'œil;  gorge  blanche; 
les  autres  parties  de  la  tête  et  du  cou  blanchâtres,  lavées  de  cendré  roussâtre  et 
tachetées  de  brun;  manteau  d'un  brun  noirâtre,  avec  les  plumes  plus  ou  moins 
bordées  de  cendré  roussâtre;  les  scapulaires  largement  bordées  de  cendré 
jaunâtre  ;  bas  du  dos  d'un  brun  gris  avec  une  strie  noire  au  centre  des 
plumes;  sus-caudales  de  même  couleur  mais  bordées  de  cendré  jaunâtre;  ailes 

(1)  Middendorfl' dit  que  les  pattes  du  mâle  adulte  sont  d'un  gris  bleu  clair  ;  l'individu  tué 
en  I>elgi<iuc,  et  (|uc  j'ai  reçu  en  ci;air.  avait  les  siennes  d'un  bnm  clair 

ToM  II.  —    1892.  58 


-  4S8  ^ 


comme  chez  le  mâle;  poitrine  et  flancs  d'an  roux  brunâtre,  plus  pâle  vers  le 
ventre,  tachés  de  noir,  mais  les  taches  étant  beaucoup  plus  grandes  sur  les 
flancs,  où  certaines  plumes  ont  une  tache  blanchâtre  au  centre;  ventre  blan- 
châtre, avec  des  taches  brunes  au  bas-ventre  et  sur  les  sous-caudales;  queue 
brune,  les  rectrices  lisérées  de  cendré  jaunâtre  pâle.  {Individu  de  l'Amour.) 

Mâle  en  été.  —  Ressemble  à  la  femelle  dont  il  est  difficile  à  distinguer; 
cependant  le  manteau  est  d'un  brun  cendré  jaunâtre,  à  peine  plus  pâle  au 
bord  des  plumes,  tandis  que  chez  la  femelle  cette  partie  est  d'un  brun  noi- 
râtre avec  le  bord  des  plumes  d'un  roux  jaunâtre  {von  Middendorff). 

Jeune.  —  M'est  inconnu  ;  il  ressemble  probablement  à  la  femelle  avec  le 
miroir  en  moins. 

Hab.  —  Ce  bel  oiseau  habite,  en  été,  le  nord-est  de  la  Sibérie  jus- 
qu'au 70°  1.  N.,  et  bien  qu'il  soit 
le  canard  le  plus  commun  du  Bo- 
ganida,  il  ne  se  montre  pas  jus- 
qu'au Taimyr  {v.  Middendorff); 
il  habite  également  le  Japon 
Temm.  et  Schleg.);  il  est  très 
répandu  en  Chine  pendantl'hiver 
et  surtout  à  l'époque  de  son 
passage  {David),  ainsi  qu'à 
Formose  {Swinhoe).  Il  se  montre  accidentellement  dans  le  nord-est 
de  l'Inde  {Jerdon)  ;  Blyth  trouva  un  sujet  sur  le  marché  de  Calcutta. 
C'est  donc  uue  espèce  essentiellement  asiatique  et  commune  dans  les 
parties  orientales. 

En  Europe,  cette  Sarcelle  n'a  été  prise  qu'en  France  et  en  Bel- 
gique ;  voici  ce  que  dit  M.  Gerbe  au  sujet  des  premières  captures  ; 
«  Vers  la  fin  de  novembre  1836,  cinq  individus  ont  été  tués,  à  quel- 
ques jours  d'intervalle,  sur  les  bords  de  la  Saône  près  d'Epervans, 
par  le  nommé  Sauvin,  chasseur  de  profession.  Quatre  d'entre  eux 
furent  vendus  pour  la  table,  en  qualité  de  Sarcelle  ordinaire,  à  un 
maître  d'hôtel  de  Châlons,  le  cinquième,  heureusement  préservé  de  la 
destruction  par  un  collectionneur  intelligent,  fut  préparé  par  M.  Mar- 
tin, pharmacien  à  Châlons.  Ce  précieux  spécimen  fait  aujourd'hui 
partie  de  l'intéressante  collection  du  docteur  de  Montessus. 

«  L'apparition  de  cet  oiseau  dans  le  bassin  de  la  Saône  eut  lieu  à  la 
suite  de  vents  impétueux  et  de  pluies  torrentielles  qui  avaient  occa- 
sionné de  grandes  inondations.  D'après  M.  Canivet,  l'espèce  s'est 
aussi  montrée  dans  le  bas  pays  de  la  Manche,  vers  les  bords  de  la 


—  4o9  — 

mer.  Deux  individus,  un  mâle  et  une  femelle,  qu'un  chasseur  des 
environs  de  Carentan  lui  avait  fournis,  ont  été  cédés  par  lui  à  M.  le 
comte  de  Steade,  qui  les  compte  parmi  les  richesses  de  sa  belle  galerie 
d'histoire  naturelle  (1)  ». 

J'ai  signalé  récemment  dans  YOrnis  (t.  VI,  1890,  p.  340)  la  capture 
d'une  Sarcelle  formose  ou  Canard  glousseur  en  Belgique.  Un  mâle  en 
mue  a  été  tué  sur  l'étang  de  La  Hulpe  (en  Brabant),  le  21  novembre 
1888,  par  le  garde-chasse  de  M.  le  chevalier  de  Bosschaert,  et  ce 
dernier  eut  l'amabilité  de  me  l'envoyer  aussitôt  pour  le  Musée  de 
Bruxelles. 

Cette  capture  est  réellement  extraordinaire,  et  ma  première  pensée 
a  été  que  c'était  un  évadé  du  jardin  zoologique  d'Anvers  ;  mais,  infor- 
mation prise,  cet  établissement  ne  possédait  à  cette  époque  aucun 
sujet  de  cette  espèce;  du  reste  l'oiseau  ne  paraissait  pas  avoir  vécu 
en  captivité.  C'est  grâce  à  M.  L.  Vander  Snickt,  l'intelligent  rédac- 
teur en  chef  de  Chasse  et  Pêche,  que  cette  Sarcelle  a  échappé  à  la 
destruction.  Il  se  trouvait  justement  chez  M.  de  Bosschaert  quand  le 
garde  apporta  le  produit  de  sa  chasse,  et  il  vit  de  suite  que  ce  n'était 
pas  une  Sarcelle  ordinaire  ;  au  lieu  de  la  laisser  porter  à  la  cuisine,  il 
la  demanda  pour  le  Musée,  et  je  lui  en  suis  très  reconnaissant. 

MoiU7\s.  —  Les  voyageurs  qui  ont  observé  ce  Canard  en  Asie,  ne 
disent  presque  rien  de  ses  mœurs;  on  peut  toutefois  admettre  que 
celles-ci  ne  diffèrent  pas  beaucoup  de  celles  des  Sarcelles  d'Europe. 
D'après  von  Middendorff,  cet  oiseau  n'apparaît  près  du  Boganida  que 
vers  le  12juin;  le  3  juillet,  ce  naturaliste  trouva,  au  bord  du  lieuve 
sous  un  buisson,  un  nid  contenant  sept  œufs  fraîchement  pondus,  qui 
étaient  d'un  jaune  bleuâtre  et  dontle  plus  petit  mesurait  50  mm.  sur  35. 
Les  poussins  montrèrent  leurs  premières  plumes  le  24  juillet,  mais 
ils  n'étaient  pas  encore  en  état  de  voler  le  4  août.  Le  28  juillet  on 
tira  un  mâle  qui  avait  déjà  son  plumage  d'été,  et  le  23  août  les  der- 
niers avaient  quitté  la  région  du  Boganida.  Ces  oiseaux  se  montrent 
très  farouches  quand  ils  sont  attroupés,  mais  les  couples  isolés  sont 
peu  craintifs.  Us  sont  fort  bruyants  et  ne  cessent  de  faire  entendre 
leurs  cris  perçants  et  sonores  (2). 

Le  D"-  Radde,qui  a  visité  le  S. -E.de  la  Sibérie,  a  constaté  la  présence 
de  ces  oiseaux  près  du  Tarei-nor,  dès  le  2^  mars  (185G).  Vers  la  mi- 


(1)  Deglandet  Gerbe,  Oruithulo(/ie  europèi-nnc,  t.  II,  \>.  b2b. 

(2)  von  Middendonï,  Sihi,-   Ur.ise,  ]->  2'M). 


—  460  — 

avril  il  rencontra,  un  matin,  dans  un  petit  marais,  des  Anas  boscas, 
crecca,  formosa,  clypeata,  acuta  et  quelques  A.  penelope  qui,  tous, 
après  leur  repas,  se  tenaient  couchés  et  serrés  les  uns  contre  les 
autres;  grâce  aux  herbages  élevés,  l'auteur  put  s'approcher  de  l'en- 
droit où  reposaient  ces  Canards,  sans  être  vu  des  oiseaux.  Le  premier 
couple  ne  fut  observé  dans  le  Sajan  oriental,  non  loin  de  Tunka,  que 
le  10  avril  (1859),  et  le  dernier  avait  disparu  dès  le  7  mai.  Dans  la 
région  du  lac  Baïkal,  cette  espèce  est  fort  rare  et  on  ne  l'y  voit  jamais 
en  été  (1). 

L'abbé  A.  David  dit  qu'au  printemps  des  bandes  nombreuses  de 
Canards  glousseurs  animent  les  fleuves  et  les  lacs  de  la  Chine  en 
compagnie  d'autres  Canards,  dont  ils  se  distinguent  facilement  par 
leur  plumage  et  par  leur  voix  singulièrement  retentissante  (2). 

SOUS-FAMILLE  ^ 

DESFULIGULINÉS.  —  FULIGULIN^. 

Car.  —  Bec  de  longueur  moyenne,  souvent  plus  large  à  la  base  que  vers 
l'extrémité  ;  ailes  courtes,  concaves,  les  deux  premières  rémiges  les  plus 
longues;  jambes  courtes,  emplumées  jusqu'à  la  naissance  du  tarse,  placées 
très  en  arrière  du  corps  ;  tarses  courts,  très  comprimés  latéralement  ;  doigts 
allongés,  l'externe  ordinairement  aussi  long  que  le  médian,  pouce  largement 
bordé  en  dessous  ;  palmure  large.  Tête  volumineuse  ;  cou  assez  court  et  gros  ; 
corps  court  et  massif. 

Hab.  —  Les  espèces  de  ce  groupe  sont  dispersées  dans  les  diverses 
parties  du  monde. 

Mœurs.  —  Ces  palmipèdes  sont  d'excellents  plongeurs  et  vivent 
généralement  sur  des  eaux  profondes,  libres  de  végétation  ;  la  plupart 
ne  se  tiennent  que  sur  la  mer  et  ne  gagnent  les  eaux  douces  qu'au 
moment  de  la  reproduction  ;  quelques-uns  se  reproduisent  même  sur 
les  côtes  maritimes  et  sur  des  îlots  en  pleine  mer. 

Ce  sont  des  oiseaux  essentiellement  aquatiques  et  dont  la  marche 
est  lourde  et  difficile  ;  par  le  fait  de  l'insertion  très  en  arrière  de  leurs 
jambes,  ils  doivent,  pour  se  tenir  en  équilibre,  redresser  leur  corps  et 
garder  cette  position  en  marchant.  Ils  sont  moins  bons  voiliers  que 


(1)  G.  Radde,  Reisen  iyn  Siiden  von  ost-Sïbiiçien,  II,  p.  368. 

(2)  David  et  Oustalet,  Les  Oiseaux  de  la  Chine,  p  503. 


—  461  — 

les  Canards,  mais  une  fois  qu'ils  ont  atteint  une  certaine  hauteur,  ils 
peuvent  voler  assez  rapidement,  en  donnant  des  coups  d'ailes  préci- 
pités. Par  contre,  ils  nagent  et  plongent  avec  une  aisance  remar- 
quable ;  ils  plongent  souvent  à  une  i^rande  profondeur  et  font  parfois 
un  assez  long  trajet  en  nageant  entre  deux  eaux. 

Peu  d'entre  eux  sont  herbivores;  la  plupart  se  nourrissent  de  mol- 
lusques, d'annélides,  de  crustacés,  d'insectes  et  de  poissons,  qu'ils 
cherchent  souvent  au  fond  de  l'eau  ou  à  une  certaine  profondeur. 

Ils  sont  très  sociables  et  nichent  en  formant  parfois  de  véritables 
colonies.  «Assez  souvent,  dit  A.  E.  Brehm,  deux  femelles,  appartenant 
même  à  des  espèces  différentes,  pondent  dans  le  même  nid,  y  couvent 
en  commun,  se  partagent  l'éducation  des  petits,  sans  qu'aucune 
d'elles  fasse  de  différence  entre  ceux  qui  lui  appartiennent  et  ceux  qui 
lui  sont  étrangers.  Beaucoup  de  femelles  couvent  avec  une  véritable 
passion  et  se  dérobent  mutuellement  les  œufs  ;  ou  bien  elles  attirent  et 
appellent  des  poussins  d'autrui  pour  les  élever.  » 

GENRE    CI- 
MORILLON.    —    FDLIGULA 

Anas,  Lin.  Sijst.  nat.  I,  p.  203  (1766). 

Nyroca,  Flem.  PJdl.  of  Zool.  Il,  p.  260  (1822). 

Aythya,  Branta,  Boie, /sis,  1822,  p.  564. 

FuLiGULA,  Steph.  Gen.  Zool.  XII,  p.  187(1824). 

Platypus,  Brehm,  Lehrb.  Naturrj .  Eiir.  VôV/.  II,  p.  828(1824). 

Netta,  Kaup,  Natûrl.  Sijst.  p.  102  (1829). 

Callichen,  Breh.  Isis,  1830,  p.  999. 

FuLix,  Sundev.  K.  Yel.  Ak.  Randl.  1835,  p.  129. 

Mergoides,  Eyt.  Coi.  lirit.  B.  p.  57(1836). 

Marila,  Mrtopiana,  Bonap.  Compt.-roul.  XLII,  2,  p.  651  (1850). 

Certains  auteurs  ont  un  peu  trop  multiplié  les  genres.  Nous  réunis- 
sons sous  le  nom  générique  de  Fuligula  les  cinq  genres  et  sous-genres 
adoptés  par  Gray,  en  prenant  pour  type  le  Fuligula  cristata. 

Car.  —  Bec  de  la  longueur  de  la  tête,  légèrement  élevé  à  la  base,  déprimé 
à  Textrémité,  ordinairement  un  peu  plus  large  vers  l'extrémité  qu'à  la  base,  a 
onglet  ovale,  recourbé;  lamelles  larges,  entièrement  cachées;  mandibuh- 
inférieure  visible  seulement  à  son  origine  (luund  le  bec  est  fermé  ;  narines 
sul)-médianes,  latérales,  distantes,  étroites  ;  ailes  de  longueur  moyenne, 
aiguës;  queue  très  courte;  tarses  plus  courts  que  le  doigt  interne,  (pii  est 
bordé. 

Ilah.  —  Ce  genre  a  des  représentants  dans  les  cin([  pai'iies  du 
niondi',  mais  piincipalement  dans  la  zon*^  froide. 


-  462  — 
261.    —  Le  Morillon  à  huppe  rousse. 

FULIGULA  RUFINA,  Steph.  ex  PalL 

(PI.  259) 

Anas  FiSTULARis  CRiSTATA,  Briss,  Ornitli..  VI,  p.  398  (1760). 

Anas  RUFINA,  Pall.  It.  II,  app.  p.  713  (1773). 

Branta  RUFINA.  Boie,  Isis,  1822,  p.  564. 

FuLiGULA  RUFINA,  Steph.  Shaw's  Gen.Zool.  XII,  p.  188  (1824). 

Netta  RUFINA,  Kaup,  Naturl.  Syst.  p.  102  (1829). 

Callichen  ruficeps,  rufinus,  subrufinus  et  MiCROPUS,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  999. 

Platypus  rufinus,  Brehm,  VôV/.  Deu'schl.^  p.  922  (1831). 

Mergoides  RUFINA,  Eyt.  Rar.  Brit.  B.  p.  575  (183G). 

Aythya  RUFINA,  Macg .  Man.  Br.  B    p.  191  (1846). 

Callichen  rufescens,  Breh.  Vor/elf.  p.  379  (1855). 

FuLiGULA  RUFiCRiSTA,  C.  F.  Dub.  PL  col.  Ow.  Belr/.  III,  p.  277  (1860). 

Die  Kolben-Ente,  en  allemand. 

The  Red-crested  Pochard,  en  anglais.  ^"^ 

De  Krooneend,  en  flamand. 

Taille  :  0'"44  ;   ailes  0,26. 

Description  du  mâle  adulte  en  plumage  de  noce.  —  Tête  d'un  rouge  bai,  ornée 
d'une  liuppe  touffue  nuancée  de  jaunâtre,  les  joues,  la  gorge  et  les  côtés  du 
cou  tirant  sur  le  rose  ;  manteau  d'un  cendré  vineux  avec  un  grand  espace 
blanc  sur  les  côtés  de  la  partie  supérieure  du  dos;  bas  du  dos  et  sus-caudales 
d'un  brun  noirâtre  ;  épaule  et  pli  de  l'aile  blancs:  les  autres  couvertures  et 
les  longues  scapulaires  d'un  cendré  un  peu  brunâtre;  rémiges  secondaires 
blanches,  terminées  de  brun  et  d'un  liséré  blanc  ;  les  primaires  blanches 
avec  leur  bord  externe  et  leur  extrémité  bruns;  couvertures  des  primaires 
également  bruns;  partie  inférieure  du  cou,  poitrine,  ventre  et  sous-caudales 
d'un  brun  noir  lustré  ;  flancs  blancs  ;  queue  d'un  brun  cendré.  Bec  d'un  rouge 
vif;  iris  rouge  groseille;  tarses  et  doigts  d'un  rouge  brique  avec  les  mem- 
branes  noirâtres. 

Femelle.  —  Dessus  de  la  tète  jusque  sous  les  yeux  et  nuque  d'un  brun  roux  ; 
dessus  du  corps  d'un  brun  cendré,  le  croupion  noirâtre  et  les  sus-caudales 
d'un  cendré  brunâtre;  joues  et  haut  du  cou  d'un  blanc  sale;  bas  du  cou, 
poitrine  et  flancs  d'un  brun  cendré  avec  les  bordures  des  plumes  plus  claires  ; 
ventre  d'un  blanc  grisâtre  ;  sous-caudales  blanchâtres;  ailes  comme  chez  le 
mâle,  mais  les  teintes  moins  pures;  queue  brune.  Bec  d'un  brun  rougâtre; 
iris  jaune  rougâtre:  tarses  et  doigts  d'un  jaune  sale. 

Mâle  en  été.  —  Ressemble  à  la  femelle  dont  il  se  distingue  par  un  plus 
grand  développement  de  la  huppe,  par  la  couleur  du  ventre,  des  sus  et  des 
sous-caudales  qui  sont  d'un  brun  noir,  par  le  miroir  plus  blanc  et  par  la 
couleur  rouge  du  bec  et  des  pattes  {d'après  Naumann). 


—  463  — 


Jeune.  —  Ressemblp  également  à  la  femelle  adulte,  mais  chez  le  jeune  mâle 
la  poitrine  et  le  manteau  sont  plus  foncés. 

Poussin.  —  Toutes  les  parties  supérieures  d'un  brun  glacé  de  roux  à  la 
pointe  des  tiges;  sur  le  dos  quatre  taches  blanches  disposées  comme  les  quatre 
angles  d'un  quadrilatère  ;  poitrine  et  abdomen  d'un  blanc  grisâtre  ;  ventre, 
gorge,  devant  et  côtés  du  cou  et  faces  latérales  de  la  tête  blancs,  avec  un 
trait  brun  en  arrière  des  yeux  ;  mandibule  supérieure  noirâtre  avec  l'onglet 
jaune,  l'inférieure  jaune  ;  pieds  bruns  avec  des  bandes  jaunes  sur  les  pahnures 
le  long  des  doigs.  (J.  Vian.) 

Hab.  —  L'aire  géographique  de  cette  espèce  est  fort  peu  étendue: 

l'Europe  méridionale  et  centrale 
jusqu'au  50°  1.  N.,  le  nord  de 
l'Afrique  ou  le  sud-ouest  de 
l'Asie.  Ce  Morillon  se  montre 
très  accidentellement  aux  îles 
Britanniques  où  l'on  compte, 
depuis  1818,  une  vingtain'e  de 
captures  {Harting)  ;  il  visite 
aussi  accidentellement  le  Dane- 
mark {KjaerhÔlling),  la  Pologne  {Taczanowski),  le  nord  de  l'Alle- 
magne {Borggreve),  la  Hollande  {Schlégel),  les  marais  des  Flandres 
{de  Selys),  le  Grand-Duché  de  Luxembourg  [de  la  Fontaine),  le  nord 
de  la  France  [Degl.  et  Gerbe)  et  l'Autriche  près  du  Danube  [Hinter- 
berger);  il  niche  quelquefois  en  Bohême  {Fritsch),  en  Silésie,  dans  le 
Mecklembourg  et  près  d'Eisleben  {Baldamus,  etc.),  visite  réguliè- 
rement en  octobre  certains  lacs  de  la  Suisse  et  j  séjourne  jusqu'à  la 
fin  de  mars,  parfois  jusqu'en  mai  {Meisner  et  Schinz)  ;  dans  les 
départements  français  de  l'Aude,  de  l'Hérault  et  des  Pyrénées  Orien- 
tales, il  est  de  passage  régulier  en  hiver  sur  les  côtes  maritimes 
[Lacroix). 

Cet  oiseau  est  commun  et  sédentaire  dans  certaines  parties  de 
l'Espagne  [Saunders],  dans  le  midi  de  l'Italie  [Salvadori),  en  Sicile 
[Malherbe),  mais  il  est  rare  en  Grèce  et  ne  visite  que  les  marais  de  la 
Roumélie  et  du  Péloponèse  [Lindermayer)  ;  il  n'est  pas  rare  en  Tur- 
quie (Ehves  et  Bue/dey),  de  passage  dans  la  Dobrodja  [Alléon),  et  se 
trouve  sur  tout  le  littoral  russe  de  la  mer  Noire,  mais,  cà  ce  qu'il 
paraît,  seulement  par  couples  ou  en  petites  compagnies  {de  Nord- 
mann).  Il  est  également  coiniinin  sur  lo  littoral  ào.  la  mor  Caspienne 
surtout  près  de  Lonkoran  où  il  hivtîfuo  (lùidde)  ;  plus  à  l'Est,  on 


-  464  — 

l'observe  en  Turkestan  [Severtzoïv)  et  il  hiverne  dans  l'Afghanistan 
{Seehohm)  et  dans  l'Inde  {Jerdon).  Il  ne  paraît  pas  avoir  été  observé 
en  Perse  et  en  Asie  Mineure,  mais  il  est  commun  dans  le  nord  de 
l'Afrique  [Tristram)  et  se  montre  accidentellement  en  Egypte  {Schlé- 
gel,  de  Heuglin)  et  à  Malte  [Wright). 

Mœurs.  —  Le  Morillon  à  huppe  rousse  émigré  des  contrées  du 
centre  en  octobre  et  novembre  et  y  retourne  à  la  fin  de  mars  et  en 
avril.  Pendant  ses  voyages,  il  vole  en  petites  troupes,  très  haut  et  en 
formant  une  ligne  oblique. 

Ce  bel  oiseau  fréquente  les  marécages,  les  lacs  et  les  étangs,  pourvu 
que  leurs  bords  soient  bien  garnis  de  roseaux  et  autres  herbages;  on  le 
voit  même  sur  les'  eaux  situées  dans  les  bois,  mais  il  ne  se  montre 
que  momentanément  sur  les  cours  d'eau,  et  principalement  à  l'époque 
des  passages.  Il  se  tient  généralement  loin  du  bord,  et  de  préférence 
dans  les  endroits  où  il  y  a  beaucoup  de  plantes-su bmergée s  et  flot- 
tantes. En  marchant  comme  au  repos,  il  tient  le  cou  recourbé  en  S  et 
le  corps  horizontal,  mais  quand  son  attention  est  mise  en  éveil,  il 
relève  fortement  le  corps  en  avant  et  se  dirige  ainsi  vers  l'eau,  s'il 
soupçonne  un  danger.  Il  nage  et  plonge  avec  aisance,  vole  avec  la 
même  facilité  que  les  Canards,  en  produisant  un  bruissement  facile  à 
percevoir. 

Ce  Morillon  est  sociable,  craintif  et  méfiant;  il  fuit  l'homme  de  loin, 
mais  revient  bientôt  à  la  place  qu'il  a  quittée  ;  plus  ces  oiseaux  sont 
nombreux,  et  plus  ils  sont  farouches,  mais  ils  ne  recherchent  pas  la 
société  d'autres  espèces,  bien  qu'ils  vivent  en  bonne  intelligence  avec 
elles.  Le  cri,  d'après  Naumann,  est  profond  et  ressemble  plutôt  à 
celui  des  Freux  qu'à  celui  d'un  Canard,  mais  l'oiseau  ne  se  fait  guère 
entendre  souvent;  Hume  rend  ce  cri  par  kurr  d'une  voix  profonde. 

Cet  oiseau  se  nourrit  surtout  de  végétaux  aquatiques,  tels  que 
potamots,  myriophylles,  cornifles,  charagnes,  etc.,  mais  il  prend 
aussi  des  insectes,  des  larves,  des  vers,  des  mollusques,  du  frai  et 
même  des  jeunes  grenouilles,  mais  plus  rarement  des  petits  poissons. 

Reproduction.  —  Ce  Morillon,  aussi  appelé  Morillon  roussâtre  et 
Sifileur  huppé,  niche  dans  les  marais  et  les  étangs,  mais  paraît  pré- 
férer ceux  dont  l'eau  est  saumâtre. 

Le  D'"  Baldamus  a  eu  l'occasion  d'observer  la  reproduction  de  cet 
oiseau,  en  Allemagne,  près  du  lac  salé  de  Mansfeld.  Voici,  en 
résumé,  ce  qu'il  en  dit  :  (1) 

[^\)  Jonni..  fur  Ornith.,  ia7U,  p.  t'i'i. 


—  465  — 

Le  nid  se  trouve  dans  les  roseaux  et  les  joncs,  et  le  plus  souvent 
sur  un  monticule  s'élevant  au-dessus  de  leau,  ou  sur  de  vieilles 
souches  de  roseaux.  Il  est  formé,  comme  ceux  des  Canards,  de 
vieilles  tiges  sèches  de  roseaux  et  de  joncs,  de  feuilles  mortes,  etc., 
avec  une  couche  de  duvet  servant  à  couvrir  les  œufs  chaque  fois  que 
la  mère  s'en  éloigne.  La  ponte  est  de  sept  à  neuf  œufs,  rarement  dix, 
d'un  vert  olivâtre  et  mesurant  56  à  60  millim.  sur  40  à  43.  La  durée 
de  l'incubation  est  de  vingt-quatre  jours. 

Le  D'"  Baldamus  recueillit  des  œufs  de  cette  espèce  en  Allemagne 
et  en  Hongrie,  du  12  mai  au  1°"*  juillet,  suivant  les  années,  mais  le 
plus  ordinairement  vers  la  mi-mai. 

262.  —  Le   Morillon   huppé. 
FULIGULA  CRISTATA,  Steph.  ex  Leach. 

(PI.   260) 

Anas  glaucium  minus,  Briss,  Ornith.  VI,  p.  411  (1760). 

Anas  FULIGULA,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  207  (1766). 

?  Anas  scandiaca,  Gm.  (hybride  ?)  Syst.  nat.  p.  520  (1788). 

?  Anas  colymbis,  Pall.  (jeune?),  Zoogr.Rosso-As.  II,  p.  266  (1811). 

Anas  cristata,  Leach,  Syst.  Cat.  M.  and  B.  Br.  Mus.  p.  39(1816). 

Nyroca  FULIGULA,  Flem.  Phil.  of  Zool.  II,  p.  260  (1822). 

Aythya  FULIGULA,  Boïe,  Isis,  1822,  p.  564. 

FuLiGULA  CRISTATA,  Stepli.  Sfiaws  Gen.  Zool.  XII,  2.  p.  190  (1824). 

Platypus  fuligulus,  Brehm.  Lehrb.  d.  Nat.  Eur.  Yog.  II,  p.  833  (1824). 

Aythya  cristata,  Brehm,  Isis.,  1830,  p.  998. 

Platypus  cristatus,  Dyb.  Journ.  f.  Orn.  1868,  p.  339. 

FuLix  cristata,  David,  N.  Arch.  du  Mus.  Bull.  VII,  n"  453  (1871). 

Œdemia  cristata,  Dress.  Ibis.,  1876,  p.  420. 

FuLix  FULIGULA,  Gigl.  Avifauna  Ital.  p.  316  (1886). 

DiB  Reiherente,  Haubenente,  en  allemand. 

The  Tufted  Duck,  en  anglais. 

De  Kuifeend,  en  flamand. 

Taille  :  O'SS  ;  ailes  0,20. 

Description  du  mâle  en  plumage  de  noce.  —  Tête,  Imppo  et  haut  du  cou  d'un 
noir  brillant  à  reflets  violets  et  verdâtres  ;  bas  du  cou,  poitrine,  sus  et  sous, 
caudales  noirs  ;  les  autres  parties  supérieures  d'un  noir  à  reflets  d'un  vert 
bronzé,  surtout  sur  les  ailes;  milieu  du  dos  et  scapulaircs  légèrement  ponc- 
tués de  blanchâtre  ;  miroir  de  l'aile  très  oblique,  blanc,  borné  en  arrière  par 
une  bande  noire;  rémiges  d'un  cendré  brunâtre,  bordées  extérieurement  et 
terminées  de  brun  noirâtre;  queue  brune;  abdomen  et  flancs  blancs.  Bec 
TiJM  II.  —  1892.  59 


—  466  — 


d'un  gris  bleuâtre  avec  Fonglet  noir;  iris  jaune;  pattes  bleuâtres  avec  les 
palmures  noires. 

Femelle.  —  Huppe  beaucoup  moins  développée  ;  tête  et  cou  d'un  brun  noi- 
râtre ;  bas  du  cou,  poitrine  et  flancs  d'un  brun  roussâtre  ;  manteau  d'un  brun 
noirâtre  légèrement  pointillé  de  blancbâtre,  avec  les  bordures  des  plumes 
d'une  teinte  plus  rousse  ;  les  autres  parties  supérieures,  y  compris  les  ailes, 
d'un  brun  noirâtre  ;  rémiges  secondaires  à  reflets  bronzés  ;  miroir  d'un  blanc 
moins  pur  que  chez  le  mâle;  abdomen  blanc;  bas-ventre  et  sous-caudales 
d'un  blanc  entremêlé  de  brun  ;  queue  brune 

Mâle  en  été.  —  Se  distingue  de  la  femelle  par  un  plumage  tirant  plus  sur 
le  noir  que  sur  le  brun,  et  par  une  huppe  plus  développée. 

Jeune,  —  Ressemble  à  la  femelle,  mais  les  bordures  des  plumes  d'une 
teinte  plus  claire  ;  base  du  bec  entourée  d'une  bande  de  plumes  blanches  ; 
rémiges  secondaires  sans  reflets  bronzés  ;  poitrine  tachetée  de  brun  et  de 
roussâtre;  parties  inférieures  plus  ou  moins  blanches^vec  le  bas-ventre 
varié  de  brun  et  les  flancs  de  brun  roussâtre. 

Poussin.  —  Toutes  les  parties  supérieures  d'un  brun  fuligineux  foncé,  glacé 
à  la  pointe  des  tiges  ;  côtés  de  la  tête,  cou,  poitrine,  flancs  et  abdomen  de 
même  couleur  mais  un  peu  plus  pâle  ;  gorge  et  ventre  d'un  blanc  fauve  ;  man- 
dibule supérieure  noirâtre  avec  l'onglet  roux, l'inférieure  marbrée  de  jaune  et 
de  roux;  pieds  bruns,  avec  des  bandes  d'un  jaune  terne  sur  les  membranes, 
le  long  des  doigts  (J.  Vian). 

Hah.  —  Le  Morillon  huppé   habite,  en  été,  toute  la  zone  septen- 
trionale de  l'Europe  et  de  TAsie 
comprise  entre  le  53  1/2°  et  le 
70°  l.  N.;  il  niche  en  Europe  à 
partir  du  Mecklembourg  [Nau- 
mann)  à  l'Ouest  et  du  gouver- 
nement de  Perm  (Russie)  à  l'Est 
{Sabandeff);    il    niche    parfois 
aussi  en  Grande-Bretagne  (Z)r^5- 
ser)  et  accidentellement  aux  îles 
Féroé  {Collin),  mais  il  n'a  été  observé  ni  en  Islande,  ni  au  Groen- 
land. 11  hiverne  plus  ou  moins  dans  toute  l'Europe  centrale  et  méri- 
dionale, ainsi  qu'aux  îles  Britanniques.  11  est  très  commun  en  Bel- 
gique lors  des  passages,  surtout  dans  les  grands  marais  des  Flandres 
et  de  la  Campine,  et  un  certain  nombre  passe  l'hiver  sur  les  eaux  qui 
ne  gèlent  pas.  Il  est  aussi  très  commun  en  hiver  dans  toutes  les  con- 
trées du  midi  de  notre  continent,  ainsi  qu'en  Asie  Mineure,  en  Pales- 
tine {Tristram),  en  Egypte  {Schelley).,  en   Nubie   et   visite  même 


-  467  - 

l'Abjssinie  [de  Heuglin)  ;  il  est  également  commun  en  Algérie  {Loche) ^ 
comme  dans  tous  les  pays  qui  entourent  la  Méditerranée. 

En  Asie,  on  rencontre  cet  oiseau  dans  toute  la  Sibérie  (M'c?G?enc?or/f, 
von  Schrenk),  au  Kamtsctiatka  [Stejneger),  en  Chine  {David)  et  au 
Japon  {Schlégeiy,  il  hiverne  dans  les  parties  méridionales  jusqu'au  sud 
de  l'Inde  {Jerdon). 

Mœurs.  —  Bien  que  ces  Morillons  soient  peu  sensibles  au  froid,  ils 
émigrent  cependant  des  contrées  du  Nord  dès  que  les  eaux  se  couvrent 
de  glace.  Vers  le  commencement  d'octobre,  ils  commencent  à  se  ras- 
sembler sur  les  eaux  d'une  certaine  étendue,  et  leur  nombre  augmente 
de  jour  en  jour;  c'est  par  bandes  formées  de  plusieurs  milliers  d'in- 
dividus qu'ils  émigrent  au  début  des  fortes  gelées,  et  ils  voyagent 
alors  le  plus  souvent  pendant  la  nuit. 

C'est  un  oiseau  très  sociable  qui  fréquente  en  troupes  les  eaux  stag- 
nantes, surtout  pendant  la  belle  saison  ;  aux  autres  époques  de  l'an- 
née on  le  voit  le  long  des  côtes  maritimes  et  de  préférence  à  l'embou- 
chure des  fleuves,  dans  les  lagunes  et  sur  les  grands  lacs  de  l'intérieur. 
Il  n'est  pas  rare,  lors  des  migrations,  de  le  voir  sur  des  mares  de  peu 
d'étendue,  même  à  proximité  des  villages  et  des  routes  assez  fréquen- 
tées. Ce  n'est  que  quand  la  plupart  des  eaux  sont  couvertes  de  glace, 
qu'il  s'abat  sur  les  rivières  et  les  fleuves,  tant  que  ceux-ci  ne  sont  pas 
obstrués  par  des  glaçons. 

Le  MorilJon  huppé  nage  avec  aisance  et  vole  avec  une  grande  rapi- 
dité, en  ligne  droite  et  en  produisant  un  certain  bruissement  ;  par 
contre,  il  ne  paraît  pas  marcher  volontiers. C'est  sur  l'eau  qu'il  déploie 
toute  son  agilité  ;  plonger  est  pour  lui  un  véritable  plaisir,  aussi  le 
voit-on  à  tout  instant  disparaître  dans  l'eau,  nager  à  une  certaine 
profondeur  et  ne  revenir  à  la  surface  que  pour  respirer  ;  souvent 
même  il  se  contente  de  venir  respirer,  en  ne  sortant  de  l'eau  que  le 
bec  jusqu'au  delà  des  narines,  et  disparaît  aussitôt.  Il  n'est  réellement 
craintif  que  sur  les  grandes  eaux  où  il  lui  est  facile  d'échapper  aux 
atteintes  du  chasseur,  mais  il  se  montre  beaucoup  moins  farouche 
sur  les  petits  étangs,  bien  qu'il  y  soit  plus  exposé.  Son  cri  est  peu 
sonore  et  ressemble  à  karr,  karrkarr  ou  kœurr,  kœurr,  kœurrr,  mais 
l'oiseau  ne  le  fait  pas  entendre  souvent  ;  c'est  au  moment  de  s'envoler 
ou  quand  il  est  inquiet  qu'il  crie  le  plus  ordinairement. 

Cet  oiseau  se  nourrit  principalement  d'insectes,  de  larves,  de  crusta- 
cés, de  vers,  de  frai,  do  jeunes  grenouilles,  de  petits  poissons  et 
surtout  de  mollusques  nus  ou  à  coquille;  accessoirement  il  mange 


aussi  des  herbages  aquatiques,  des  jeunes  pousses  et  des  graines.  Ce 
Morillon  est  très  gras  en  automne,  mais  sa  chair  est  sans  valeur 
parce  qu'elle  a  un  goût  rance,  ce  qui  provient  d'une  nourriture  plus 
animale  que  végétale. 

Reproduction.  —  Ce  Morillon  niche  sur  un  îlot,  au  bord  de  l'eau 
ou  dans  une  prairie,  éloignée  parfois  de  soixante  à  cent  mètres  de 
l'eau;  le  nid  est  ordinairement  placé  dans  une  excavation  au  milieu 
des  joncs  et  des  herbages  ou  sous  un  buisson  de  saules  ou  d'aunes.  Il 
est  formé  de  joncs,  de  roseaux  et  de  brins  d'herbes,  et  garni  intérieu- 
rement de  duvet.  La  ponte  a  lieu  en  mai  ou  en  juin  et  se  compose  de 
huit  à  douze  œufs,  d'un  brun  olivâtre  pâle  un  peu  lustré,  et  ils  mesu- 
rent de  56  à  60  millim.  sur  38  à  42.  La  femelle  témoigne  la  plus  grande 
sollicitude  à  ses  poussins  ;  le  mâle,  au  contraire,  ne  s'inquiète  guère 
de  sa  progéniture,  et  bien  avant  l'éclosion  des  oeufe,  il  abandonne  sa 
compagne  pour  aller  s'amuser  avec  d'autres  mâles  sur  les  eaux  envi- 
ronnantes; mais  bientôt  la  mue  les  éloigne  des  eaux  et  les  mâles  se 
tiennent  alors  cachés  dans  les  roseaux  et  les  hautes  herbes. 

263.  —  Le  Morillon  milouinan. 

FULIGULA  MARILA,  Steph.  ex  Lin. 

(PL  261 

Glaucium  minus  striatum,  Briss.  Orniifi.  VI,  p.  416  (1760). 

Anas  MARILA,  Lin.  S\)si.  nai.  I,  p.  196  (1766). 

Anas  subterranea,  Scop.  Ann.  I.  Hist.  nat.  p.  67  (1769). 

Anas  fr/enata,  Sparrm.  Mus.  Caris.  II,  pi.  38(1787). 

Aythya  MARILA,  Boie,  Isis.,  1822,  p.  564. 

Fuligula  MARILA,  Stcpli.  Skaws  Gen.  Zool.  XII,  2,  p.  198  (1824). 

Platypus  marilus,  C.  Brehra,  Leherb.  Nat.  eitr.  Vôg.  II,  p.  830(1824). 

Nyroca  maeila,  Flem.  Brit.  anim.  p.  122  (1828). 

Aythya  ISLANDICA  et  leuconotos,  C.  Brehm,  Isis,  1830,  p.  998. 

Fuligula  gesneri,  Eyt.  Cat.  Brit.  B.  p.  58  (1836). 

Marila  frenata,  Bonap.  Comp.  Rend.  XLII,  21  p.  651  (1856). 

FuLix  MARILA,  Baird,  B.  of  N.  Ani.  p.  791  (1858). 

Aythya  marila  nearctica,  Stejn.  Bull.  U.  S.  Nat.  Mus.,  n»  29,  p.  161  (1885). 

Die  Bergente,  en  allemand. 

The  Scaup,  en  anglais. 

De  Toppereend,  en  flamand. 

Var.  Affinis. 

Anas  marila,  Forst.  (necLin).  Phil.  TVaws.  LXII,  n"  44  (1772). 
Fuligula  marila,  Audub.  Orti.  Biog.  III,  p.  226  (1835). 


-   469  - 

FuLiGULA  AFFiNis,  Eyt.  Mon.  Anat.  p.  157  (1838). 
FuLiGOLA  MARiLoiDES,  Vig.  Zool.  voy .  Blossom,  p.  31  (1839). 
FuLiGULA  MiNOR,  Bell,  Proc.  Ac.  Nat.  Se.  Phil.  I,  p.  141  (1842). 
Marila  affinis,  Bonap.  Compt.-Rend.  sept.  1856. 
FuLix  AFFINIS,  Baird,  Birds  N.  Am.  p.  791  (1858).' 
FuLiGULA  MARILA  (part.)  Seeb.  Brit.  B.  III,  p.  579  (1885). 

Taille:  0,47;  ailes  0,23. 

Description  du  mâle  en  plumage  de  noee.  —  Tête  et  partie  supérieure  du 
cou  d'un  noir  brillant  à  reflets  verts  ;  bas  du  cou,  haut  du  dos,  poitrine,  bas 
du  dos,  sus  et  sous-caudales,  noirs;  partie  moyenne  du  dos  et  scapulaires 
supérieures  d'un  blanc  assez  pur  avec  des  raies  noires  en  zigzags,  plus  lar- 
ges postérieurement  ;  couvertures  des  ailes  d'un  gris  noirâtre  et  tachetées  de 
blanc  ;  miroir  blanc  sous  forme  d'une  bande  oblique  bordée  de  noir  ;  en  ar- 
rière du  miroir,  les  rémiges  sont  d'un  noir  verdâtre  à  reflets  ;  rémiges  pri- 
maires et  rectrices  d'un  brun  noirâtre  ;  abdomen  et  flancs  d'un  blanc  pur,  ces 
derniers  plus  ou  moins  vermiculés  de  cendré  ;  l)as-ventre  avec  des  raies  en 
zigzags  brunes.  Iris  jaune  ;  bec  d'un  gris  bleuâtre  ;  pattes  grises,  les  mem- 
branes noirâtres. 

Femelle  adulte.  —  Elle  est  un  peu  plus  petite  que  le  mâle  ;  un  grand  espace 
blanc  entoure  le  bec  et  une  tache  de  même  couleur  se  trouve  à  la  région 
auriculaire  ;  le  restant  de  la  tête,  cou,  haut  du  dos  et  poitrine  d'un  brun 
foncé,  les  bordures  des  plumes  un  peu  plus  pâles  ou  blanchâtres  à  la  poitrine; 
partie  moyenne  du  dos,  scapulaires  et  flancs  d'un  brun  noirâtre  avec  des  raies 
blanches  en  zigzags  ;  bas  du  dos  noirâtre  ;  sus-caudales  d'un  brun  fuligineux  ; 
couvertures  des  ailes  d'un  cendré  brunâtre  et  pointillées  de  blanc  d'une  ma- 
nière peu  apparente;  les  plus  grandes  scapulaires  d'un  brun  uniforme;  miroir, 
rémiges  et  rectrices  comme  chez  le  mâle  ;  abdomen  blanc  ;  bas-ventre  et 
sous- caudales  brunâtres  plus  ou  moins  tachetés  et  rayés  de  blanc,  surtout 
sur  les  sous-caudales. 

Mâle  en  été.  —  Ressemble  à  la  femelle,  mais  il  a  moins  de  blanc  à  la  base 
du  bec  et  la  tache  blanchâtre  près  de  l'oreille  est  phis  petite  et  souvent 
nulle;  la  teinte  de  la  tête  et  de  la  poitrine  est  plus  foncée.  Il  reprend  son 
beau  plumage  en  octobre  et  novembre. 

Jeune.  —  Ressemble  également  à  la  femelle,  mais  les  parties  dorsales  sont 
d'un  brun  roussâtre  sans  raies  blanches  en  zigzags;  l'espace  blanc  qui  entoure 
le  bec  est  moins  étendu  et  moins  pur.  Après  la  première  mue,  on  voit  appa- 
raître, chez  les  mâles,  les  plumes  noires  à  reflets  verts  de  la  tête,  et  le  blanc 
du  bec  se  réduit  à  une  tache  placée  de  chaque  côté  à  la  base  de  la  mandibule 
supérieure;  les  raies  en  zigzags  du  dos  commencent  aussi  à  se  montrer. 

Poussin.  —  Parties  supérieures  d'un  brun  roussâtre  ;  côtés  de  la  tête  d'un 
iaune  sombre  ;  gorge  et  ventre  d'un  jaune  plus  clair  ;  poitrine,  flancs  et 
abdomen  d'un  brun  pâle  ;  bec  brunâtre  ;  pattes  d'un  brun  oHvâtre. 


470  - 


Var.  A/finis.  —  Taille  plus  petite  (0,36  ;  ailes  0,20);  se  distingue  en  outre 
par  les  reflets  de  la  tête  et  du  cou  qui  sont  pourpres  et  non  verts  ;  la  région 
auriculaire  offre  cependant  des  reflets  verdâtres. 

Haà.  —  Le  Morillon  milouinan  niche  en  IslsLïide  [Faber)  et  dans  la 

zone  polaire  arctique  jusqu'au 
70°  1.  N.  Il  hiverne  à  partir  des 
îles  Féroé  où  quelques  couples 
passent  parfois  l'été  [Feilden),  et 
du  midi  delà  Scandinavie  [Collett, 
Nilsson)  ;  en  hiver  il  est  surtout 
abondant  sur  les  côtes  allemandes 
de  la  Baltique  et,  en  plongeant, 
ces  oiseaux  s'embarrassent  dans 
les  filets  des  pêcheurs  qui  en  prennent  ainsi  par  centaines  (^orp-p-re^je^. 
Il  hiverne  également  en  grand  nombre  sur  les  côtes  du  Danemark,  de 
la  Grande-Bretagne,  de  l'Irlande,  de  la  Hollande,  du  nord  de  la 
France  et  de  la  Belgique  ;  il  est  moins  abondant  sur  l'Escaut  près 
d'Anvers  et  rare  sur  les  eaux  de  l'intérieur  du  pays.  Dans  le  midi  de  la 
France  il  est  de  passage  plus  ou  moins  régulier, mais  toujours  en  petit 
nomhvQ (Lacroix)]  il  est  rare  sur  les  côtes  de  l'Espagne  (ir%),du  Por- 
tugal (Barboza  du  Bocage)  et  de  l'Italie,  ne  se  montre  qu'acciden- 
tellement en  Sardaigne  et  jamais  en  Sicile  [Giglioli).  Dans  le  centre 
de  l'Europe,  cet  oiseau  est  généralement  rare;  il  se  montre  cepen- 
dant par  petites  troupes  et  assez  régulièrement  en  hiver  sur  diffé- 
rents lacs  de  la  Suisse  [Meisner  et  Schinz)  et  de  l'Allemagne,  surtout 
près  de  Eisleben  (Naumann),  et  on  l'a  même  capturé  en  Saxe  (Meyer 
et  Eelm]\  il  visite  la  Bohême  en  automne,  rarement  au  printemps 
{Fritsch),  est  commun  en  Pologne  lors  des  passage  [Taczanowski)  et 
hiverne  en  Transylvanie  [Danford),  sur  les  côtes  de  la  mer  Noire 
[de  Nordmann),  de  la  mer  Caspienne  {Radde),  de  l'Asie  Mineure,  de 
la  Palestine  (Tristram)  et  de  la  Grèce  [v.  d.  Mûhle). 

Ce  palmipède  hiverne  également  en  Algérie  [Loche  )  et  dans  les 
lagunes  de  la  basse  Egypte,  où  on  le  rencontre  souvent  en  grandes 
bandes  ;  il  se  montre  également  près  du  Caire,  dans  l'Arabie  pétrée, 
près  de  Djedah,  et  un  couple  a  même  été  observé,  en  décembre,  en 
Abyssinie  {de  Heuglin).  En  Asie,  on  rencontre  cette  espèce  dans  toute 
la  zone  septentrionale  {Middendorff)  jusque  dans  la  Sibérie  orientale 
{Taczanowski),  le  Kamtschatka  (Stejneger)  et  le  Japon  {Whitely)  ;  elle 
hiverne  sur  certains  lacs  du  Caucase,  dans  le  sud  de  la  Sibérie  {Radde)^ 


—  471  — 

sur  les  côtes  de  la  Chine  et  de  Formose  {Swinhoé),  mais  elle  est  plus 
rare  que  le  Morillon  huppé  à  Pékin  et  sur  les  eaux  douces  de  l'inté- 
rieur de  la  Chine  {David)  ;  elle  n'a  encore  été  observée  ni  au  Turkes- 
tan,  ni  dans  les  provinces  de  l'Amour,  mais  quelques  couples  hiver- 
nent en  Perse  au  sud  de  la  mer  Caspienne,  et  accidentellement  au 
Népaul  {Jerdon), 

Ce  Morillon  habite  également  toute  l'Amérique  du  Nord  et  le 
Groenland  (Coues)  et  hiverne  dans  les  Etats  du  Sud  jusqu'au  Mexique 
[Dresser). 

La  var.  Affmis  habite  également  toute  l'Amérique  du  Nord,  mais 
hiverne  jusqu'au  Guatemala  [Coues)  \  elle  descend  donc  plus  au  Sud 
que  la  forme  type.  Il  paraît  aussi  que  la  var.  Af finis  habite  principa- 
lement l'intérieur  de  l'Amérique,  tandis  que  le  vrai  Milouinan  se 
trouve  plus  particulièrement  sur  les  côtes,  mais  ceci  n'est  pas 
démontré.  Stejneger  complique  encore  la  question  en  admettant  quatre 
variétés,  formant  deux  espèces  :  1.  Aythya  affmis  (de  l'Amérique); 
\  h.  A.  af  finis  mariloides  (des  côtes  asiatiques  du  Pacifique  et  du 
Japon);  2.  A.  marila  (d'Europe);  2  b.  A.  marila  nearctica  (de  l'Amé- 
rique). Ainsi,  d'après  Stejneger,  le  vrai  F.  marila  n'existerait  pas  en 
Amérique  (1).  M.  Seebohm  n'admet  pas  la  var.  Affmis,  parce  qu'en 
Amérique  elle  n'occupe  pas  une  région  géographique  distincte  et  que 
ses  caractères  peuvent  n'être  qu'individuels. 

Mœurs.  —  C'est  au  commencement  d'octobre  que  les  Milouinans 
se  rassemblent  en  grandes  troupes  pour  émigrer  dans  le  courant  du 
même  mois,  en  longeant  le  plus  souvent  les  côtes  maritimes.  Ils 
voyagent  ordinairement  pendant  la  nuit,  en  bandes  plus  ou  moins 
nombreuses,  et  retournent  dans  le  Nord  en  mars  et  avril. 

Ce  Morillon  préfère  la  mer  aux  eaux  douces,  et  il  ne  la  quitte  que 
pendant  les  tempêtes  ;  on  le  voit  cependant  aussi  sur  les  lacs  salés  et 
môme  sur  les  fleuves,  les  rivières,  les  étangs  et  dans  les  marais,  mais 
il  est  toujours  plus  abondant  dans  les  baies  fangeuses  peu  profondes; 
il  évite  cependant  la  pleine  mer.  Il  plonge  avec  une  rapidité  remar- 
quable et  sait  rester  près  de  deux  minutes  sous  l'eau  ;  ses  habitudes 
ressemblent,  du  reste,  à  celles  de  son  congénère  le  Morillon  huppé, 
et  ce  qui  a  été  dit  de  ce  dernier  est  vrai  pour  le  Milouinan.  Celui-ci 
est  au  moins  aussi  sociable  que  le  premier,  il  n'est  pas  craintif  du 
tout,  même  sur  les  grandes  eaux,  et  son  cri  est  rauque  et  ressemble 
à  karr,  karrkarr 

(1)  Uullat.  U.  a.  national  Mus.  no  20,  p.  ICI  (1S85). 


—  472  — 

Ce  palmipède  se  nourrit  principalement  de  mollusques  à  coquille, 
de  crustacés,  de  vers,  d'insectes  et  de  larves  aquatiques,  de  têtards 
et  de  petits  poissons  qu'il  va  souvent  chercher  à  plusieurs  mètres  de 
profondeur;  ce  n'est  qu'accessoirement  qu'il  prend  des  substances 
végétales.  Ce  régime  animal  donne  à  sa  chair  un  goût  rance  assez 
désagréable. 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  niche  dans  le  courant  de  mai  ou  plus 
tard,  suivant  la  latitude  ;  dans  le  sud  de  l'Islande,  la  ponte  a  lieu  à 
la  fin  de  mai;  M.  Seebohm  dit  avoir  trouvé  des  œufs  frais  dans  la 
vallée  de  la  Petchora  le  25  juin  et  le  4  juillet.  Le  nid  est  placé  près 
de  l'eau,  souvent  sur  un  îlot,  et  sous  un  buisson  d'angéliques,  de 
genévriers,  de  saules  ou  entre  les  hautes  herbes  ;  il  est  formé,  comme 
pour  les  précédents,  de  joncs,  de  roseaux  et  d'herbes  diverses,  et 
l'intérieur  est  garni  de  duvet.  La  ponte  est  de  six  à  neuf  œufs  d'un 
gris  verdâtre  clair  et  mesurant  environ  65  millimTsur  44. 

La  femelle  couve  avec  persévérance,  et  on  peut  alors  l'approcher 
de  très  près  avant  qu'elle  songe  à  fuir;  le  lendemain  de  la  naissance 
de  ses  petits,  ou  un  peu  plus  tard,  elle  les  conduit  sur  l'eau  et  leur 
apprend  à  trouver  leur  nourriture,  mais  les  ramène  souvent  à  terre 
pour  se  reposer  ;  si  on  les  surprend  à  ce  moment,  tous  se  jettent  à 
l'eau  et  gagnent  le  large  en  toute  hâte,  sauf  la  mère,  qui  les  suit  à 
distance  en  battant  des  ailes  et  en  poussant  les  cris  de  arry%  arrr 
d'une  voix  stridente  ;  elle  ne  se  décide  à  rejoindre  ses  poussins  que 
quand  elle  les  croit  en  sûreté.  Il  arrive  souvent  que  plusieurs  femelles 
pondent  dans  le  même  nid  ;  dans  ce  cas,  elles  couvent  alternativement 
et  élèvent  les  petits  en  commun. 

264.  —  Le  Morillon  milouin. 

FULIGULA  FERINA,  Steph.  ex  Lin. 

(PI.  262) 

Anas  PENELOPE,  Briss.  (nec  Lin.)  Ornilh.  VI,  p.  384  (1760). 

Anas  FERINA,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  203  (1766). 

Anas  ruficollis,  Scop.  Ann.  I,  p.  66  (1769). 

Anas  lurida  et  erythrocephala,  Gmel.  ReiseRussl.  I,  pp.  70,  71  (1770). 

Anas  rufa,  Gmel.  S^jsi.  nat.  II,  p.  515  (1788). 

Nyroca  FERINA,  Flem.,  Phil.  Zool.  II,  p.  260  (1822). 

Aythya  FERINA,  Boie,  Isis,  1822,  p.  564. 

FuLiGULA  FERINA,  Steph.  Gen.  Zool.  XII,  2,  p.  193(1824). 

Platypus  ferinus,  Brehm,  Lehrb.  Nat.  Eur.  Vôg.  II,  p.  828  (1824). 


-  473  — 

Aythya  erythrocephala,  Brehin,  Isis,  1830,  p.  999, 

Anas  marila,  Malh.  (aec  Lin.),  Faune  orn.  de  la  Sicile,  p.  220  (1813). 

FuLiGULA  HOMEYERi  (aberration),  Baedecker,  Naumannia,  1852,  p.  12,  pi.  1. 

Aythya  homeyeri,  Brehm,  Nutimannia^  1855,  p,  208. 

FuLiGULA  ERYTHROCEPHALA,  C.  F.  Dub.  PI.  col.  Ois.  DelfJ.  III,  p.  278  (1860). 

FuLix  FERiNA,  Salvad.  Faun.  liai.  Uccelli^  p.  265  (1872). 

Die  Tafelente,  en  allemand, 

The  Pochard,  en  anglais. 

De  Tafeleend,  en  flamand. 

Var.  Araericana. 

Anas  ferina,  Wils.  Am.  Orn.  VIII,  p.  110  (1814). 

FuLiGULA  FERINA,  Bonap.  Syn.  p,  392  (1828). 

Nyroca  ferina,  Woodh.  Sitgr.  Rep.  p.  104  (1853). 

Aythya  erythrocephala,  Bonap.  (necBreh.)  Comp.  List.,  p.  58  (1838). 

Fuligula  americana,  Eyt.  Mon.  Anat.  p.  155  (1838). 

Nyroca  americana,  Gray,  Gen.  B.  III,  p.  621  (1849). 

Aythya  americana,  Bonap.  Comptes-Rend.  XLllI,  sept.  (1856), 

Nyroca  erythrocephala,  Heerm.  P.  R.R.  Rep.  X,  pt  VI,  p.  70  (1859), 

Fuligula  ferina  var.  Americana,  Coues,  Keij.  p.  289  (1872). 

Aythya  ferina  var.  Americana,  Allen,  Bull.  M.  C.Z.  III,  p.  183  (1872). 

Taille:  0'^38;  ailes  0,215. 

Description  du  mâle  en  plumage  de  noce.  —  Tête  et  cou  d'un  roux  rougeâtre 
vif  et  lustré;  haut  du  dos,  poitrine.,  bas  du  dos,  sus  et  sous-caudales  d'un 
brun  noir;  manteau, scapulaires  et  flancs  d'un  blanc  grisâtre  et  rayés  trans- 
versalement de  fins  zigzags  noirâtres  très  serrés  ;  couvertures  des  ailes  cen- 
drées et  pointillées  de  gris  ;  rémiges  secondaires  grises  plus  ou  moins 
pointillées  de  blanc  et  terminées  par  un  bord  blanc;  rémiges  primaires  cen- 
drées à  extrémité  brune  ;  rectrices  brunes  ;  abdomen  blanchâtre  avec  des 
ondulations  cendrées  mais  peu  apparentes,  sauf  au  bas-ventre  où  elles  sont 
très  visibles  et  assez  larges.  Bec  d'un  gris  bleuâtre  mais  noir  aux  extré- 
mités ;  iris  orange;  pattes  grises,  noirâtres  aux  articulations,  les  membranes 
noires. 

Femelle.  —  Dessus  de  la  tête  d'un  brun  foncé,  rougeâtre  à  la  nuque  et  sur 
le  cou,  d'une  teinte  plus  pâle  sur  les  joues;  gorge  blanchâtre;  haut  du  dos 
et  poitrine  d'un  brun  roussâtre  avec  les  bordures  des  plumes  plus  pâles  ; 
manteau,  scapulaires  et  flancs  d'un  brun  foncé  avec  de  fines  raies  irrégu- 
lières en  zigzags  d'un  gris  blanchâtre  ;  bas  du  dos,  sus-caudales  et  bas-vontre 
d'un  brun  noirâtre;  ailes  comme  chez  le  mâle  mais  un  peu  phis  foncées; 
abdomen  d'un  cendré  blanchâtre  ;  queue  brune.  Iris  jaune  citron. 

Mâle  en  été.  —  liessemblo  à  la  femelle,  mais  il  a  la  tête  et  le  cou  d'une 
teinte  plus  rousse,  le  bas  du  dos  et  les  sus-caudales  plus  noirs,  le  manteau 
plus  clair  et  l'iris  orange  et  non  jaune. 

To.'i  II.  —  1892.  GO 


474 


Jeune.  —  Ressemble  également  à  la  femelle,  mais  le  manteau,  les  scapu- 
laires,  la  poitrine  et  les  flancs  sont  d'un  brun  foncé  avec  les  bordures  des  plu- 
mes plus  claires  et  sans  raies  en  zigzags.  Iris  d'un  brun  clair. 

Poussin.  —  Occiput  et  dessus  du  corps  ])runs;  c^uatre  taches  blanchâtres 
disposées  en  carré  sur  le  dos;  front,  côtés  de  la  tête  et  cou  jaunâtres,  avec 
une  tache  brime  à  l'oreille  ;  gorge  blanchâtre  ;  parties  inférieures  d'un  blanc 
jaunâtre  sale  varié  de  cendré  au  bas-ventre. 

Var.  Americana.  — •  D'une  taille  un  peu  plus  forte  que  les  sujets  de  l'an- 
cien monde;  pas  de  noir  à  la  base  du  bec  ;  le  dos  plus  gris  ;  la  nuque  pour- 
prée; abdomen  blanc  sans  ondulations. 

Hab.—  Le  Morillon  milouin  habite  l'Europe  centrale  et  ne  se  mon- 
tre que  très  accidentellement  en 
Islande  {Newton)  et  aux  îles 
Féroé  {Reiahardt)  ;  il  est  rare 
dans  le  sud-^e  la  Scandinavie 
{Colleit,  Nilsson)  et  de  la  Fin- 
lande [Palmén),  mais  niche  à 
partir  du  62»  J.  N.  près  du  lac 
Ladoga  {Malmgren),  quoiqu'il 
soit  rare  dans  le  gouvernement 
de  S'-Pétersbourg  [Buchner);  il  est  commun  dans  la  Russie  méridio- 
nale {de  Nordmann). 

Aux  îles  Britanniques  j  on  le  voit  surtout  en  hiver  et  il  est  alors 
commun  en  Ecosse,  aux  îles  Orkneys,  Shetland  et  Hébrides,  mais  il 
niche  dans  plusieurs  comtés  de  l'Angleterre  et  de  l'Irlande  {Seebohm). 
Cet  oiseau  visite,  lors  de  ses  passages,  le  Danemark  {Kjaerhôlling) 
et  le  nord  de  l'Allemagne,  mais  il  niche  isolément  ou  en  petit  nombre 
sur  certains  lacs  de  la  Poméranie,  du  Mecklembourg  {Borggreve), 
de  la  Silôsie  {Gloge?"),  du  Brandebourg,  du  Lausitz,  de  l'Anhalt,  de 
la  Ssixe{Naumann),  de  l'Autriche,  delà  Bohême  {Fritsch),  de  la  Tran- 
sylvanie {Danford),  etc.  A  partir  de  novembre,  il  est  abondant  sur  les 
lacs  de  la  Suisse  qu'il  quitte  en  mars  {Meisner  et  Schinz);  il  en  est  de 
même  en  Hollande  {Schlégeï)  et  en  Belgique,  où  il  est  très  commun 
aux  passages  sur  les  côtes  maritimes  et  dans  les  marais  des  polders 
et  de  la  Campine  ;  en  France  il  hiverne  surtout  dans  les  parties  méri- 
dionales {Lacroix).  Il  hiverne  également  en  Portugal  {Reyes),  en 
Espagne,  où  quelques  couples  se  reproduisent  parfois  {Saunders),  en 
Italie,  et  il  est  surtout  abondant  en  Sardaigne,  en  Sicile  {Glglioli),  à 
Malte  {Wright),  aux  îles  Ioniennes  {Lilford),  dans  le  Péloponèse,  en 
Rouméiie  {Lindermayer),  en  Turquie  {Elwes  et  Buckley),  mais  ne  se 


4/0 


montre  pour  ainsi  dire  qu'aux  passages  dans  la  Dobrodja,  en  Bul- 
garie [Alléon]  et  en  Pologne,  où  il  niche  cependant  en  petit  nombre 
{Taczanowski). 

En  Asie,  ce  Morillon  a  été  observé  en  Turkestan  {Severtzow)  et 
dans  la  région  du  Baïkal  où  il  niche  dans  le  delta  de  l'Angara  supé- 
rieur [Raddé),  mais  il  est  rare  dans  la  Sibérie  orientale  {Taczanowski)\ 
il  hiverne  au  Caucase  {Radde),  en  Asie  Alineure,  en  Palestine  {Tris- 
tram),  en  Perse,  dans  T Afghanistan  {Seehohm),  dans  l'Inde  entière, 
quoiqu'il  soit  toujours  plus  abondant  dans  les  parties  occidentales 
qu'au  Bengale  {Jerdon),  en  Chine  {David)  et  au  Japon  {Schlégel). 

En  Afrique,  on  rencontre  cet  oiseau  en  hiver  au  Maroc  {Favier),  en 
Algérie  {Loche)  et  dans  les  autres  parties  septentrionales;  en  Egypte 
on  le  voit  par  petites  troupes  dans  le  delta,  près  du  lac  Chanka  et 
près  de  la  mer  Rouge  {de  Heug lin)  jusqu'en  Nubie  {Shelley). 

La  Var.  Americana  habite  toute  l'Amérique  du  Nord,  proba- 
blement jusqu'au  delà  du  55°  1.  N.,  car  en  été  elle  est  commune  au 
Canada  dans  la  province  de  Manitoba  {Thompson);  aux  Etats-Unis  elle 
est  surtout  abondante  dans  les  parties  N.-E.  {Coues);  elle  hiverne  dans 
les  états  du  Sud  jusqu'au  Mexique  et  aux  Antilles  {Sclater,  Salvin) 
ainsi  qu'aux  îles  Bahamas  {Bryant). 

Mœurs.  —  Le  Morillon  milouin  émigré  des  contrées  septentrio- 
nales vers  la  fin  d'octobre  et  en  novembre,  par  bandes  plus  ou  moins 
considérables,  composées  ordinairement  de  trente  à  cinquante  indivi- 
dus et  même  davantage  ;  quand  l'hiver  n'est  pas  rigoureux,  un  certain 
nombre  hiverne  dans  nos  contrées  et  même  encore  plus  au  nord  ;  ce 
n'est  du  reste  qu'à  mesure  que  le  froid  augmente  qu'il  se  dirige  de 
plus  en  plus  vers  le  midi.  Il  voyage  généralement  en  troupes  et  sans 
ordre,  plus  rarement  en  un  rang  oblique.  Il  retourne  en  mars  dans  le 
pays  qui  l'a  vu  naître. 

Ce  palmipède  ne  se  montre  sur  les  côtes  maritimes  et  sur  les  fleuves 
qu'à  l'époque  des  migrations;  en  d'autres  temps  il  préfère  les  lacs,  les 
grands  étangs  et  les  marais  bien  garnis  de  roseaux,  d'herbages  et  de 
buissons,  d'où  il  visite  souvent  les  petits  étangs  et  les  mares  des  envi- 
rons. 11  est  généralement  plus  actif  la  nuit  que  le  jour,  car  il  passe 
une  bonne  partie  de  la  journée  dans  un  repos  absolu. 

Le  Milouin  marche  mieux  que  la  plupart  de  ses  congénères,  quoi- 
que sa  démarche  soit  lourde  et  fatigante;  par  contre,  il  nage  et  plonge 
avec  une  extrême  facilité,  vole  à  grands  coups  d'ailes  ot  bruyamment 
mais  sans  fatigue.  Il  ne  compte  pas  parmi  les  oiseaux  les  plus  farou- 


—  476  — 

ches,  mais  des  poursuites  répétées  le  rendent  prudent  et  il  sait  alors 
fort  bien  éviter  le  chasseur.  La  voix  du  mâle  est  un  cri  ronflant  qu'on 
peut  rendre  par  charr  charr  charr;  le  cri  de  la  femelle  est  plus  rauque 
et  ressemble  à  chœurr,  chœurr. 

Cet  oiseau  se  nourrit  presque  exclusivement  de  substances  végé- 
tales, telles  que  racines,  feuilles  et  herbes  tendres,  algues,  graines 
de  plantes  aquatiques,  etc.;  accessoirement  il  prend  des  larves,  des 
insectes,  des  vers,  des  mollusques,  des  têtards  et  des  petits  poissons. 

C'est  le  seul  Morillon  dont  la  cliair  soit  réellement  savoureuse  et 
recommandable,  grâce  au  régime  végétal;  au  printemps,  cependant, 
le  manque  de  végétaux  oblige  cet  oiseau  à  se  nourrir  surtout  de  petits 
animaux,  ce  qui  donne  de  suite  à  sa  chair  un  goût  huileux  désagréa- 
ble; c'est  du  reste  le  cas  pour  la  plupart  des  Canards,  mais  à  un  degré 
plus  ou  moins  prononcé.  Le  Milouin  s'habitue  facilement  à  la  captivité. 

Reproduction.  —  A  leur  retour  en  mars,  ces~^ Morillons  restent 
encore  quelque  temps  en  société  et  se  réunissent  même  à  d'autres 
espèces  avec  lesquelles  ils  prennent  leurs  ébats, sans  s'inquiéter  de  la 
reproduction.  Ce  n'est  qu'à  la  fin  d'avril  que  les  mâles  commencent  à 
devenir  agités,  plus  bruyants,  car  l'époque  de  Taccouplement  appro- 
che. Les  mâles  ne  se  livrent  pas  de  luttes  entre  eux,  ils  se  bornent  à 
suivre  une  femelle  à  la  nage,  à  l'agacer  par  leurs  cris  d'amour,  à  faire 
tout  leur  possible  pour  lui  plaire,  jusqu'à  ce  qu'elle  se  donne  à  l'un 
d'eux.  D'après  Naumann,  la  femelle  choisit  librement  son  époux,  et 
part  aussitôt  avec  lui  pour  chercher  un  endroit  convenable  à  la  repro- 
duction. 

Cet  oiseau  niche  près  des  eaux  stagnantes  bordées  d'herbages  et  de 
buissons,  ou  sur  un  îlot  verdoyant. La  femelle  construit  son  nid,  sans 
le  concours  du  mâle,  au  milieu  des  roseaux  et  des  joncs,  soit  sur  l'eau, 
soit  au  bord  d'un  fossé  ou  dans  les  herbes  d'une  prairie,  mais  toujours 
à  peu  de  distance  de  l'eau.  Le  nid  est  formé  de  feuilles  sèches,  de 
roseaux,  de  joncs,  de  carex  et  de  graminées,  le  tout  assez  bien  entre- 
lacé ;  l'excavation  est,  comme  toujours,  garnie  de  duvet.  Pour  pou- 
voir bien  cacher  son  nid,  la  femelle  est  obligée  d'attendre  pour  le 
construire,  que  la  végétation  soit  assez  avancée;  aussi  fait-elle  rare- 
ment sa  ponte  avant  la  mi-mai,  mais  le  plus  souvent  à  la  fin  du  mois 
et  même  en  juin.  La  ponte  est  de  huit  à  treize  œufs  assez  ternes,  d'un 
gris  jaunâtre  ou  d'un  gris  olivâtre  pâle;  ils  mesurent  de  56  à  60millim. 
sur  41  à  45.  Naumann  dit  qu'en  lui  enlevant  successivement  les  œufs 
au  début  de  la  ponte,  mais  en  ayant  soin  d'en  laisser  toujours  un  ou 


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deux  dans  le  nid,  on  peut  amener  la  femelle  à  pondre  jusqu'à  quarante 
œufs. 

Tant  que  la  femelle  pond,  le  mâle  reste  à  ses  côtés,  veille  sur  elle, 
l'avertit  à  grands  cris  de  l'approcho  d'un  danger,  mais  a  soin  de  se 
sauver  le  premier.  lU'abandonne  dès  qu'elle  s'est  mise  à  couver  et  va  se 
joindre  à  d'autres  mâles,  sans  s'inquiéter  de  ce  que  sera  sa  progéni- 
ture. La  durée  de  l'incubation  est  de  vingt-deux  à  vingt-trois  jours. 
Aussitôt  éclos  et  sécliés,  les  poussins  vont  à  l'eau  et  se  mettent  immé- 
diatement à  plonger,  mais  ils  vont  souvent  se  reposer  dans  les  fourrés 
de  roseaux,  où  la  mère  leur  prépare  des  lieux  de  repos  à  l'abri  de  tout 
danger.  La  femelle  se  dévoue  entièrement  à  ses  petits  et  les  défend 
au  péril  de  sa  vie.  Quand  les  jeunes  commencent  à  voler,  les  mâles 
vont  rejoindre  leur  famille  et  tous  se  réunissent  de  nouveau  en 
société. 

265.  —  Le  Morillon  à  iris  blanc 
FULIGULA  NYROCA,  Steph.  ex  Gilld. 

(PI.  263.) 

Anas  NYROCA,  Giilden.  Nov.  Conim.  Petrop.  XIV,  p.  403  (1769). 

Anas  africana,  a.  ferruginea,  Gmel.  Syst.  nat.  pp.  522,  528  (1738). 

Anas  LEUCOPHTHALMUS,  Bechst.  Ornilh.  Taschenh.  p.  405  (1803). 

Anasglaucion,  Pall.  Zoor/r.  II,  p.  268  (1811). 

Aythya  NYROCA,  Boie,  /.v«.<f,  1822,  p.  564. 

Marila  NYROCA,  Flem.  Phil.  Zool.  Il,  p.  260  (1822). 

FuLiGULA  NYROCA,  Steph.  Geïi.  Zool.  XII,  2,  p.  201  (1822). 

Platypus  LEUCOPHTHALMUS,  Bpehtn,  Lehrb.  Nat.  eur.  Vogel.  11,  p.  834  (1824). 

Aythya  leucophthalmos,  Bpehm,  Isis,  1830,  p.  999. 

NvROCA  LEUC0PHTH.\LM0S  et  OBSOLETA,  Bfehm,  Naumannia,  1855,  p.  298. 

FuLiGULA  LEUCOPHTHALMA,  C.  Dub.  Pi.  col.  Ois.  Bclg .  III,  p.  279  (1857). 

Nyroca  FERRUGINEA,  Dress.  BirdsEur.  VI,  p.  581  (1872). 

FuLix  NYROCA,  Salvad.  Fauna  cVIlal.  Uccelli,  p.  265(1872). 

Die  Moorknte,  en  allemand. 

The  White-eyed  pochard,  en  anglais. 

De  Witoogeend,  en  flamand. 

Taille:  0°37;  ailes  0,185,  la  femelle  un  peu  plus  petite. 

Description  du  mâle  en  plumage  de  noce.  —  Tète,  cou  et  poitrine  d'un  brun 
rougeâtre;  une  tache  blanche  au  menton  ;  dessus  du  corps  et  un  collier  au 
bas  du  cou  d'un  brun  noirâtre,  le  manteau  finement  pointillé  de  roussâtre  ; 
bas  du  dos  et  sus-caudalos  noirs  avec  de  légers  reflets  vordâtres;  couvertures 
des  ailes  d'un  brun  cendré,  les  plus  grandes  à  reflets  bronzés;  miroir  blanc, 
suivi  d'une  bande  brune  ;  rémiges  primaires  ])runes  sur  la  barbe  externe  et 


—  478  - 

à  l'extrémité,  blanchâtre  sur  la  barbe  interne;  flancs  d'un  brun  roussâtre  ; 
abdomen  blanc;  bas-ventre  brun  nuancé  de  cendré;  sous-caudales  blanches; 
queue  d'un  brun  foncé.  Bec  d'un  gris  noirâtre  avec  l'onglet  noir  ;  iris  blanc  ; 
pattes  d'un  gris  noirâtre,  les  membranes  noires. 

Femelle.  —  Côtés  de  la  tète  d'un  brun  roussâtre,  parfois  la  base  du  bec 
blauchâtre;  menton  d'un  blanc  jaunâtre  ;  dessus  de  la  tête,  nuque  et  parties 
dorsah  s  d'un  brun  foncé  ;  poitrine  et  flancs  bruns  avec  le  bord  des  plumes 
plus  roux;  ailes  comme  chez  le  mâle,  mais  sans  reflets  bronzés;  abdomen 
blanc  taché  de  brun  ;  bas-ventre  brun  nuancé  de  cendré  ;  sous-caudales 
blanches;  queue  brune.  Cette  femelle  a  les  caractères  généraux  du  mâle, 
dont  elle  ne  diffère  que  par  un  plumage  plus  sombre,  et  ne  peut  être  confon- 
due avec  aucune  autre. 

Mâle  en  été.  —  Ne  diffère  de  la  femelle  que  par  une  taille  un  peu  plus  forte, 
des  teintes  moins  sombres,  la  poitrine  d'un  brun  plus  rougeâtre  et  moins 
tachée,  le  ventre  d'un  blanc  pur. 

Jeune.  —  Pas  de  blanc  au  menton;  tête  et  cou  d'u'n^brun  roux  foncé; 
dessus  de  la  tête  et  nuque  d'un  brun  noir  luisant  ;  manteau  d'un  brun  noi- 
râtre avec  les  plumes  plus  ou  moins  bordées  de  brun  clair;  bas  du  dos  et 
sus-caudales  noirâtres;  poitrine  et  flancs  d'un  brun  foncé,  le  bord  des 
plumes  plus  clair  ;  abdomen  blanc  varié  de  brun  ;  bas-ventre  et  jambes  bruns; 
sous-caudales  blanches.  Iris  gris. 

Poussin.  —  Front,  côtés  de  la  tête,  devant  du  cou  et  parties  inférieures 
jaunâtres;  dessus  de  la  tète,  nuque,  dessus  du  corps,  ailes,  jambes  et  queue 
bruns  ;  une  raie  jaunâtre  peu  distincte  traverse  le  milieu  du  dos  et  les  ailes  ; 
une  tache  de  même  couleur  de  chaque  côté  du  croupion;  bec  uoii'âtre, 
l'onglet  plus  pâle,  la  mandibule  inférieure  jaune. 

Hab.  —  Le  Morillon  à  iris   blanc  habite  l'Europe  centrale   et 

méridionale  et  ne  dépasse  que 
rarement  le  56°  1.  N.;  sa  limite 
normale  est  le  Danemark  à  l'ouest 
[Kjaerbôlling)  et  la  latitude  de 
Moscou  et  de  Kazan  à  l'est 
(Sabanaëff)  ;  Faber  l'a  cependant 
vu  en  Islande  en  1820  et  1821, 
et  il  pense  que  cet  oiseau  y 
niche  (I);  en  Russie  il  a  été 
observé  jusque  dans  l'Arkhangel  {Meves).  Sa  présence  n'a  pas'encore 


(1)  Beaucoup  d'auteurs  croient  que  Faber  s'est  trompé  et  que  cet  oiseau  ne  se  montre  pas  eu 
Islande;  c'est  possible,  mais  il  est  à  noter  que  sa  présence  a  été  constatée  dans  la  Sibérie  occi- 
dentale jusque  sous  le  cercle  polaire,  comme  l'a  fait  connaître  le  D'^  Finsch. 


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été    constatée   en    Scandinavie,   mais    bien  en    Finlande  (Palmén). 

On  ne  voit  que  rarement  cet  oiseau  aux  îles  Britanniques,  et  le 
plus  souvent  dans  les  parties  orientales  de  l'Angleterre,  mais  on  ne 
connaît  que  deux  captures  en  Ecosse  et  quatre  en  Irlande  {Seebohm). 
Il  niche  dans  diverses  localités  de  l'Allemagne,  de  l'Autriche,  de  la 
Hongrie  et  de  la  Pologne  ;  il  est  commun  dans  ce  dernier  pays  et  y 
hiverne  quelquefois  (Taczanowski).  Il  est  de  passage  en  Suisse 
{Meisner  et  Schinz),  en  Hollande  {Schlégel)  et  se  montre  accidentelle- 
ment dans  le  Grand-Duché  de  Luxembourg  {de  la  Fontaine).  En 
Belgique,  ce  Morillon  est  de  passage  irrégulier,  mais  paraît  nicher 
quelquefois  dans  le  pays,  comme  ]e  cas  s'est  présenté  àDilsen  en  1879, 
d'après  ce  que  m'a  dit  M.  le  marquis  de  "Wavrin.  Il  est  de  passage 
régulier  dans  les  départements  septentrionaux  de  la  France,  acciden- 
tel dans  ceux  de  l'Est,  de  l'Ouest  {Degland)  et  du  Midi  {Lacroix)^  il 
est  rare  en  Portugal  [Reyes),  commun  en  Espagne  en  été  {Saunders)y 
et  hiverne  dans  la  province  de  Valence  [Vidal)  ;  il  est  également  com- 
mun en  Italie  [Salvadori)  et  sédentaire  dans  les  parties  méridionales 
{Giglioli)  et  en  Sicile  [Malherbe)'.,  aux  iles  Ioniennes  il  est  plus  abon- 
dant en  été  qu'en  hiver  [Lilford)  ;  Lindermayer  dit  ne  l'avoir  vu  en 
Grèce  que  pendant  les  mois  de  mars  et  d'avril,  mais  pour  von  der 
Mùhle  il  serait  sédentaire  dans  ce  pays,  quoique  moins  abondant  en 
été  qu'en  hiver.  Il  hiverne  également  en  Turquie,  en  Asie  Mineure 
{Robson),  en  Palestine  [Tristram)  et  en  Egypte  où  il  suit  le  Nil  jus- 
qu'en Nubie  [de  Heuglin),  au  Maroc  [Favier],  en  Algérie  [Loche)  et 
sur  toute  la  côte  septentrionale  de  l'Afrique. 

En  Asie,  la  répartition  de  cette  espèce  est  assez  singulière  :  tandis 
qu'à  l'Ouest  elle  s'élève  jusque  sous  le  cercle  polaire,  où  elle  a  été 
observée  à  Obdorsk  près  de  l'Obi  [Finsch),  à  l'Est  elle  ne  paraît  pas 
dépasser  le  nord  de  la  Chine  ;  sa  présence  a  aussi  été  signalée  dans 
le  gouvernement  de  Tobolsk  [Finsch).  Cet  oiseau  se  rencontre  égale- 
ment au  Caucase  [Radde),  au  Turkestan  [Severtzow),  en  Perse  [Blan- 
ford),  dans  l'Inde  où  il  est  commun  dans  le  Nord  et  le  centre,  plus 
rare  dans  le  Midi  [Jerdon),  au  Népaul  [Uodgson)  et  en  Chine;  il  passe 
l'hiver  en  assez  grand  nombre  dans  ce  dernier  pays,  et  au  printemps 
il  est  commun  sur  les  lacs  et  les  cours  d'eau  de  la  province  de  Pékin 
{David);  on  l'observe  également  au  Japon  [Dlakiston,  Pi-tjer). 

Il  est  certain  que  l'aire  géographique  de  cette  espèce  est  plus 
étendue  en  Asie  qu'on  ne  le  croit;  il  est  plus  que  probable  ([u'elle 
niche  en  Corée,  en  Mandchourie  et  dans  la  vallée  de  l'Amour,  mais 


sa  présence  n'a  pas  encore  été  constatée  dans  ces  pays.  Léotaud 
signale  une  capture  à  l'île  de  la  Trinidad  (Antilles),  mais  cela  doit 
être  une  erreur  (1). 

Mœurs.  —  Ce  Morillon  quitte  l'Europe  centrale  vers  la  fin  d'octobre 
ou  au  commencement  de  novembre,  mais  toujours  avant  l'apparition 
des  gelées  et  des  neiges  ;  il  retourne  à  la  fin  de  mars  au  pays  de  la 
reproduction,  voyageant  par  petites  troupes  désordonnées  de  cinq 
à  huit  individus  ;  dans  les  pays  où  il  est  abondant,  on  rencontre  ce- 
pendant parfois  des  bandes  composées  de  plus  de  cinquante  sujets. 

C'est  un  palmipède  d'eau  douce  qui  ne  se  montre  que  rarement  sur 
les  côtes  maritimes,  et  encore  ne  l'y  voit-on  le  plus  souvent  que  pen- 
dant les  migrations,  et  seulement  dans  les  endroits  fangeux  et  peu 
profonds.  Il  vit  principalement  sur  les  eaux  stagnantes,  et  de  préfé- 
rence sur  les  lacs  et  les  étangs  bien  garnis  de  roseaux  et  de  joncs, 
ainsi  que  dans  les  marais;  il  aime  surtout  les  eaux  couvertes  de 
plantes  submergées  et  flottantes,  comme  celles  appartenant  aux 
genres  Myriophyllum,  Chara,  Lemna,  Potmnogeton,  Nymphœa,  etc. 

Le  Morillon  à  iris  blanc  ressemble  à  ses  congénères  par  ses  allures 
et  ses  mouvements  ;  il  ne  marche  pas  -volontiers,  mais  quand  il  le 
faut,  il  sait  aller  assez  vite  ;  il  nage  et  plonge  à  la  perfection,  vole 
avec  facilité.  Il  est  moins  prudent  et  moins  farouche  que  beaucoup 
d'autres  de  la  famille,  mais  quand  il  se  trouve  sur  un  étang  avec  des 
oiseaux  craintifs,  ceux-ci  l'entraînent  généralement  dans  leur  fuite. 
Ce  n'est  pas  un  oiseau  fort  sociable  :  il  vit  en  petites  troupes  et  ne 
recherche  que  la  société  de  ses  semblables  ;  même  les  individus  isolés 
ne  se  joignent  pas  volontiers  à  d'autres  espèces.  Son  cri  ressemble  à 
celui  d'autres  Morillons  et  peut  se  rendre  par  kœurr,  kœurr,  kœurrr, 
pour  le  mâle,  et  krèkrèkrè...  dans  un  ton  plus  élevé,  pour  la  femelle. 

La  nourriture  de  cet  oiseau  est  plus  végétale  qu'animale,  et  se 
compose  surtout  de  plantes  aquatiques  tendres,  de  racines,  de  bour- 
geons et  de  graines;  mais  il  prend  aussi  des  mollusques  à  coquille, 
des  larves  et  des  insectes  aquatiques,  du  frai,  des  têtards  et  des  jeunes 
grenouilles.  Sa  chair  est  assez  succulente,  surtout  en  automne. 

Reproduction.  —  L'accouplement  n'a  lieu  qu'à  la  fin  d'avril;  comme 
les  femelles  sont  généralement  moins  nombreuses  que  les  mâles, 
ceux-ci  doivent  combattre  entre  eux  pour  conquérir  une  compagne. 
Ces  luttes  sur  l'eau  sont  parfois  si  opiniâtres,  que  ces  oiseaux  oublient 

(1)  A.   Léotaud,  Le:  Oiseaux  de  l'île  de  la  Trinidad,  p.  524  (1866). 


—  481  — 

toute  prudence,  et  sans  les  cris  d'alarme  des  femelles,  ils  devien- 
draient parfois  la  proie  d'un  ennemi.  Il  arrive  aussi  que  la  femelle, 
pourchassée  par  plusieurs  mâles,  doive  se  réfugier  dans  un  fourré. 
Lorsqu'un  mâle  a  enfin  conquis  une  compagne,  il  la  mène  au  plus  vite 
dans  un  lieu  écarté  caché  au  milieu  des  herbages  ;  quant  aux  céliba- 
taires qui  n'ont  pu  trouver  de  femelle,  ils  deviennent  souvent  gênants 
pour  ceux  qui  ont  été  plus  heureux  et  dont  ils  troublent  la  tranquillité; 
mais  ils  finissent  cependant  bientôt  par  s'éloigner,  et  la  paix  règne 
alors  de  nouveau  sur  1  étang. 

Le  nid  est  construit  dans  les  roseaux  et  les  herbages,  soit  au  bord 
d'un  îlot,  soit  dans  une  dépression  du  sol  sous  un  buisson  de  saules 
ou  d'aunes.  Il  est  ordinairement  placé  de  façon  à  être  complètement 
caché  du  côté  de  la  terre  ferme, et  que  la  femelle  ne  puisse  y  arriver  que 
du  côté  de  l'eau.  Il  est  fait  de  la  même  manière  que  les  nids  des 
espèces  précédentes.  La  ponte  a  lieu  vers  la  fin  de  mai  et  se  compose 
de  neuf  à  douze  œufs  d'un  gris  jaunâtre;  ils  mesurent  52  millim. 
sur  37. 

Le  mâle  est  au  commencement  plein  de  prévenance  pour  sa  com- 
pagne, mais  il  l'abandonne  dès  qu'elle  s'est  mise  sérieusement  à 
couver.  La  durée  de  l'incubation  est  de  vingt-deux  jours.  La  femelle 
est  bonne  mère  et  se  dévoue  complètement  à  l'éducation  de  ses  petits. 

GENRE    CLI 

GARROT.  —  CLANGULA. 

Anab,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  199  (1766). 
Clangula,  Boie,  Isis,  1822,  p.  564. 
FuLiQULA,  Bonap.  Sijnop.  p.  393  (1828). 
Glaucion,  Kaup,  Natiirl.  Syst.  p.  53  (1829). 
BucEPHALA,  Baird,  B.  of  N.  Am.  p.  795  (1858). 
Glaucionetta,  Stejn.  Pr.  Un.  St.  Nat.  Mus.  p.  40W  (1885). 

Car.  —  Bec  plus  court  que  la  tête,  très  élevé  à  la  base,  s'atténuant  d'ar- 
rière en  avant,  un  peu  plus  large  au  niveau  des  narines  que  dans  le  reste  de 
son  étendue  ;  mandibule  supérieure  bordée  latéralement  par  un  sillon  strié  ; 
onglet  arrondi, peu  saillant  ;  mandibule  inférieure  et  lamelles  cachées  laté- 
ralement par  la  mandibule  supérieure  ;  narines  médianes,  latérales,  étroites, 
allongées  ;  ailes  de  longueur  moyenne,  aiguës  ;  queue  relativement  assez  lon- 
gue, conique;  tarses  courts;  doigts  allongés,  l'interne  au  moins  aussi  long 
que  le  tarse  ;  pouce  bien  développé,  muni  d'une  large  membrane. 

Hab.  —  La  zoae  circompolaire. 

ToM  II.  —  1892.  61 


—  482  — 

266.  —  Le  Garrot  ou  Morillon  sonneur. 

GLANGULA  GLAUGION,  Brehm  ex  Un. 

(PI.  264) 

Anas  GLAUCiuM,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  406  (1760). 
Anas  clangula  et  a.  glaucion,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  201  (1766). 
Anas  peregrina,  Gmel.  Reise  Russl.  II,  p.  183  (1774). 
?  Anas  hiemalis,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  II,  p.  270  (1811). 
Clangula  clangula,  Boie,  Isis,  1822,  p.  564. 

Clangula  chrysophthalmos,  Steph.  Gen.  Zool.  XII,  2,  p.  182  (1824), 
FuLiGULA  clangula,  Bouap.  Ann.  Lyc.  nat.  hist.  N.  York,  II,  p.  393  (1826). 
Clangula  tulgaris,  Flem.  Brit.  An.  p.  120  (1828). 
Glaucion  clangula,  Kaup,  Naturl.  Syst.  p.  53  (1829). 
Clangula  glaucion,  peregrina  et  leucomelas,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  999. 
Clangula  americana,  Bonap.  Comp.  List.  B.  p.  58  (1838). 
Clangula  chrysophthalma,  Macg.  Hist.  Brit.  B.  V,  p.  174X1.852). 
BucEPHALA  americana,  Baird,  Birds  N.  Am.  p.  796  (1658). 
BucEPHALA  clangula,  Swinh.  Pr.  Zool.  Soc.  1871,  p.  419. 
Clangula  glaucium  americana,  Ridgw.  Proc.  U.  S.  nat.  Mus.  1880,  p.  204. 
Glaucionetta  clangula  et  G.  clangula  americana,   Stejn.  Pr.  U.  S.  Nat.  Mus. 
1885,  p.  409. 
Die  Schellente,  en  allemand. 
The  Golden-eye,  en  anglais. 
De  Brileend,  en  flamand. 

Taille  du  mâle  :  0,45  ;  ailes  0,23  ;  femelle:  0,36  ;  ailes  0,195. 

Description  du  mâle  en  plumage  de  noce.  —  Tête  et  haut  du  cou  d'un  vert 
foncé  brillant  à  reflets  pourprés,  avec  une  grande  tache  blanche  arrondie  sur 
les  côtés  de  la  base  du  bec  ;  dos,  croupion  et  sus-caudales  d'un  noir  profond; 
scapulaires  blanches  avec  le  bord  externe  noir  ;  les  couvertures  des  ailes  les 
plus  rapprochées  du  bord  antérieur  de  celles-ci  et  les  quatre  rémiges  secon- 
daires les  plus  proches  du  corps,  noires;  les  autres  couvertures  des  ailes 
et  rémiges  secondaires  blanches,  ces  dernières  noires  à  leur  base,  mais  le 
blanc  de  ces  pennes  se  continuant  presque  sans  interruption  avec  celui  des 
couvertures;  bas  du  cou,  poitrine  et  abdomen  d'un  blanc  pur,  mais  des 
mèches  noires  sur  les  barbes  internes  des  plus  longues  plumes  des  flancs  ; 
côtés  du  bas-ventre  et  jambes  d'un  brun  noir  ;  rémiges  primaires  noirâtres  ; 
queue  d'un  brun  cendré.  Bec  d'un  noir  bleuâtre  ;  iris  d'un  beau  jaune;  pattes 
d'un  jaune  d'ocre  avec  les  palmures  noirâtres. 

Femelle.  —  Plus  petite  que  le  mâle;  tête  et  haut  du  cou  d'un  brun  rous- 
sâtre  foncé,  suivi  d'un  collier  blanc  varié  de  gris;  manteau  et  scapulaires 
d'un  brun  noirâtre  avec  les  bordures  des  plumes  cendrées  ;  bas  du  dos  et  sus- 
caudales  noirâtres  ;  bas  du  cou,  haut  de  la  poitrine  et  flancs  d'un  gris  cendré 
avec  les  plumes  bordées  de  blanchâtre  ;  les  autres  parties  inférieures  d'un 


—  483  — 


blanc  pur  ;  couvertures  des  ailes  blanches  tachées  de  noir  ;  rémiges  secon- 
daires blanches,  quelques-unes  avec  la  barbe  interne  noirâtre;  rémiges  pri- 
maires et  queue  d'un  brun  noirâtre.  Bec  noir  terminé  par  une  tache  rousse, 
qui  manque  parfois. 

Mâle  en  été.  —  Diffère  principalement  de  la  femelle  par  une  taille  plus  forte 
et  par  les  couvertures  des  ailes  qui  sont  d'un  blanc  pur  sans  taches. 

Jeune.  —  Ressemble  à  la  femelle.  Après  la  première  mue,  les  mâles  se  distin- 
guent par  une  taille  plus  forte  et  la  tête  plus  grosse  ;  les  deux  taches  blanches 
commencent  à  se  montrer  sur  les  côtés  du  bec,  mais  elles  sont  tachetées  de 
brun  ;  les  parties  dorsales  sont  plus  foncées  ;  les  couvertures  des  ailes  sont 
cendrées  ;  la  poitrine  est  d'un  blanc  varié  d'un  peu  de  cendré. 

Poussin.  —  Tête  jusqu'au-dessous  des  yeux,  nuque,  dos,  jambes  et  queue 
d'un  brun  lustré;  joues,  gorge  et  haut  du  cou  d'un  blanc  pur;  une  tache 
blanche  sur  l'aile,  une  autre  au-dessus  de  celle-ci,  de  chaque  côté  du  dos,  et 
une  sur  les  côtés  du  croupion,  également  blanches  ;  haut  de  la  poitrine  cen- 
dré ;  les  autres  parties  inférieures  blanches. 

Hab.  —  Le  Garrot  sonneur  est  une  espèce  circompolaire  fort  com- 
mune, qui  niche  en  Europe  dans 


la  zone  qui  s'étend  à  peu  près 
entre  le  53°  et  le  71°  1.  N.,  du 
moins  jusqu'à  la  limite  des 
arbres;  plus  au  Sud  il  ne  niche 
qu'accidentellement.  11  hiverne 
en  grand  nombre  aux  îles  Bri- 
tanniques et  sur  toutes  les  côtes 
«■i3«ns».*^„,..  ^^  l'Europe  centrale  et  méridio- 
nale jusqu'en  Sicile  {Malherbe)  et  en  Grèce  {Lindermayer)\  il  est 
assez  rare  à  l'intérieur  des  pays.  En  Belgique,  cet  oiseau  est  surtout 
abondant  à  l'époque  des  passages,  et  on  en  voit  alors  un  grand  nom- 
bre sur  les  côtes  maritimes  et  sur  l'Escaut,  mais  il  hiverne  sur  la 
plupart  des  eaux  qui  ne  gèlent  pas.  Il  se  montre  accidentellement 
dans  le  N.-O.  de  l'Afrique  {Loche);  Brehm  l'indique  comme  hivernant 
dans  le  delta  du  Nil,  mais  ni  de  Heuglin,  ni  le  capitaine  Shelley  ne 
l'ont  observé  en  Egypte. 

En  Asie  cette  ospcco  est  répandue  dans  toute  la  Sibérie  {Middcn- 
rfor/f,  etc.)  jusqu'au  Kamtschatka  (-S'^c/ne^er);  elle  hiverne  dans  le 
Turkestan  russe  {Severtzoïo),  mais  surtout  dans  le  sud  de  la  Sibérie 
près  du  lac  Baïkal  où  elle  est  sédentaire  {Raddé)  et  dans  le  nord  de  la 
Chine  où  elle  est  très  commune  aux  environs  de  Pékin  {David);  elle 
hiverne  également  au  Japon  {Schlêgel). 


—  484  — 

Cet  oiseau  est  tout  aussi  répandu  en  Amérique  depuis  l'Alaska 
{Turner)  et  l'Amérique  anglaise  (Thompson);  il  n'est  pas  commun 
aux  îles  Aléoutiennes  et  hiverne  dans  l'Unalashka  [Turner),  ainsi 
qu'aux  Etats-Unis  {Baird)  jusqu'au  N.-O.  du  Mexique  (Grai/son)  et  à 
Cuba  (Gundlach).  Au  Groenland  et  en  Islande  il  est  remplacé  par  le 
(C.  islandica). 

Mœurs.  —  Le  Garrot  ou  Morillon  sonneur  ne  quitte  les  régions 
les  plus  septentrionales  qu'en  octobre  et  novembre,  et  il  y  retourne 
en  mars  ou  avril,  mais  au-delà  du  cercle  polaire  on  ne  le  revoit  qu'en 
mai  ;  il  hiverne  cependant  partout  où  il  trouve  des  eaux  libres  de 
glace.  Cet  oiseau  voyage  généralement  pendant  la  nuit,  en  petites 
troupes  ou  en  bandes  plus  ou  moins  considérables. 

Le  Garrot  vit  aussi  bien  sur  les  eaux  douces  que  salées,  et  on  le 
voit  près  de  la  mer  comme  sur  les  fleuves,  les  rivières,  les  lacs  et  les 
grands  étangs  découverts,  mai  c'est  toujours  présides  eaux  douces 
qu'il  niche.  Il  aime  surtout  celles  qui  longent  une  forêt  ou  qui  sont 
entourées  de  vieux  arbres,  sur  lesquels  il  va  parfois  se  percher;  en 
hiver,  il  se  montre  souvent  sur  les  eaux  les  plus  insignifiantes,  du 
moment  qu'elles  ne  sont  pas  gelées. 

Ce  palmipède  marche  lourdement  et  avec  difficulté,  mais  en 
revanche  il  nage  et  plonge  avec  une  dextérité  remarquable;  quand 
on  observe  une  petite  troupe  de  ces  oiseaux,  on  voit  constamment 
l'un  ou  l'autre  disparaître  dans  l'eau.  Il  vole  bien,  mais  avec  de 
grands  battements  d'ailes,  ce  qui  occasionne  un  bruit  ressemblant 
assez  bien  à  une  sonnerie,  ce  qui  a  valu  à  cet  oiseau  le  nom  de  son- 
neur, en  allemand  Schellente.  Naumann  dit  que  ce  bruit  est  propre 
aux  deux  sexes,  mais  qu'il  est  plus  prononcé  chez  les  adultes,  surtout 
chez  les  vieux  mâles,  que  chez  les  jeunes;  selon  Palmén,  ce  bruit 
n'est  produit  que  par  les  mâles. 

Cet  oiseau  est  peu  farouche  dans  les  localités  où  il  se  reproduit, 
mais  en  hiver  il  de^dent  fort  craintif  et  prudent,  aussi  se  tient-il 
habituellement  vers  le  centre  des  eaux;  quand  par  hasard  il  se 
trouve  près  du  bord,  il  s'en  éloigne  aussitôt  que  quelqu'un  se  montre 
au  loin.  Il  est,  du  reste,  attentif  à  tout  ce  qui  lui  paraît  suspect  et 
se  sauve  à  la  moindre  apparence  de  danger;  ses  cris  attirent  sou- 
vent l'attention  des  autres  oiseaux  aquatiques,  qui  prennent  alors  la 
fuite  par  imitation. 

La  nourriture  du  Garrot  se  compose  principalement  de  mollusques 
à  coquille,  crustacés,  larves  et  insectes  aquatiques,  petits  poissons, 


frai,  têtards,  jeunes  grenouilles  et  matières  .végétales.  Sa  chair  est 
très  grasse  en  automne,  mais  d'un  goût  rance  très  prononcé. 

Reproduction.  —  Les  Garrots  sont  généralement  accouplés  à  leur 
retour  aux  lieux  de  la  reproduction,  et  ils  ne  tardent  alors  guère  à 
faire  leurs  préparatifs  pour  nicher.  Mais,  ce  qui  est  remarquable 
pour  des  Canards,  c'est  qu'ils  font  leur  nid  dans  le  creux  d'un  arbre. 
Voilà  la  raison  pour  laquelle  ils  recherchent  de  préférence  les  eaux 
d'un  bois  ou  celles  qui  longent  ou  traversent  une  forêt.  La  hauteur 
du  trou  leur  importe  peu,  car  M.  Seebohm  dit  avoir  vu,  dans  la 
vallée  de  la  Petchora,  un  nid  de  Garrot  placé  à  vingt-cinq  pieds  de 
hauteur.  Ce  mode  de  reproduction  est  fort  bien  connu  des  peuples  du 
Nord,  qui  en  font  leur  profit.  Ils  fixent  aux  arbres,  de  distance  en 
distance  et  à  des  hauteurs  variables,  de  petites  caisses  en  bois  dans 
lesquelles  les  Garrots  vont  nicher;  ils  enlèvent  ensuite  successive- 
ment les  œufs,  dont  ils  sont  très  friands,  mais  en  ayant  soin  d'en 
laisser  toujours  un  dans  le  nid.  Ce  fait  a  été  observé  dans  la  Russie 
septentrionale  par  M.  Seebohm  et  en  Laponie  par  le  D""  Krùper. 
Suivant  ce  dernier,  les  Lapons  font  des  caisses  à  nicher  d'une  façon 
fort  simple  :  ils  coupent  par  portions  égales  le  tronc  d'un  gros  arbre 
complètement  creux,  et  il  paraît  qu'on  en  trouve  beaucoup  dans  leur 
pays,  clouent  devant  chacune  des  ouvertures  un  morceau  de  planche, 
pratiquent  ensuite  une  ouverture  allongée  suffisante  pour  le  passage 
de  l'oiseau,  et  la  caisse  est  faite  (1). 

Là  où  il  n'y  a  pas  d'arbres  creux,  les  Garrots  nichent  dans  un  trou 
de  rocher,  sous  des  pierres  ou  dans  les  roseaux.  Naumann  dit  que 
quelques  couples  nichent  dans  le  Mecklembourg,  le  Brandebourg,  la 
Silésie,  dans  les  grands  étangs  près  de  Eisleben  et  en  Saxe,  et  qu'ils 
établissent  leur  nid  dans  les  roseaux  et  les  joncs,  sous  un  buisson, 
ou  sur  la  tête  d'un  vieux  saule  en  têtard.  Naumann  ignorait  que  la 
manière  de  nicher  qu'il  décrit  est  l'exception  et  non  la  règle;  mais, 
une  dizaine  d'années  plus  tard,  le  garde  général  des  forêts  Wiese 
découvrit  dans  la  basse  Pomôranie,  un  nid  de  Garrot  établi  dans  un 
trou  d'arbre  creusé  par  un  Pic  noir  (Picus  martius). 

Quand  cet  oiseau  niche  dans  le  trou  d'un  arbre,  il  dépose  simple- 
ment ses  œufs  sur  les  détritus  de  bois  qu'il  y  trouve;  dans  les 
roseaux,  il  construit  un  nid  sur  le  môme  modèle  que  celui  des  Moril- 
lons, mais  la  femelle  recouvre  ses  œufs  dans  tous  les  cas  de  duvet 

(1)  Voy.    Naiimannia,   1857,  p.  41  <-ii  note. 


-  486  - 

quand  elle  s'en  éloigne.  La  ponte  est  de  dix  à  dix-neuf  œufs,  ordinai- 
rement dix  à  douze,  mais  quand  on  lui  enlève  successivement  sa 
ponte,  la  femelle  en  produit  bien  davantage  ;  Naumann  dit  que,  dans 
ce  cas,  elle  peut  pondre  jusqu'à  quarante  oeufs  ;  le  même  auteur  a 
observé  que  la  ponte  est  quelquefois  trop  considérable  pour  la  cavité 
du  nid,  et  que  quelques  œufs  roulent  parfois  dehors  ;  dans  un  nid 
contenant  dix-neuf  œufs,  trois  étaient  tombés  dans  l'eau.  Il  se  pourrait 
bien  que  deux  femelles  aient  déposé  leurs  œufs  dans  le  même  nid, 
comme  cela  se  présente  chez  d'autres  espèces.  Les  œufs  sont  d'un 
gris  verdâtre  pâle  tirant  au  bleuâtre  et  assez  lustrés  ;  ils  mesurent 
55  à  58  millim.  sur  41  à  42.  La  durée  de  l'incubation  est  de 
vingt-deux  jours. 

Le  mâle  ne  s'occupe  plus  de  sa  femelle  dès  que  celle-ci  s'est  mise 
à  couver.  Quand  les  poussins  sont  éclos  et  bien  séchés,  la  mère  les 
conduit  à  l'eau  ;  s'ils  sont  nés  dans  un  trou  d'arbre,  elle  les  porte  uii 
à  un,  non  pas  dans  son  bec,  mais  en  les  serrant  entre  son  bec  et  sa 
poitrine,  comme  l'a  observé  le  pasteur  Bjôrkman,  d'après  ce  que  nous 
apprend  Wallengren  (1). 

Il  paraît  que  la  femelle  du  Garrot,  quand  elle  n'a  pas  de  couvée, 
s'empare  parfois  des  poussins  d'une  autre  femelle  de  son  espèce. 
Palmén  dit  avoir  vu  une  femelle  nageant  avec  rapidité  vers  une 
couvée  et  prenant  tout  à  coup  son  vol  pour  se  précipiter  sur  la  mère 
des  poussins.  Attaquée  aussi  subitement,  cette  dernière  s'envola, 
toujours  poursuivie  par  la  première,  et  décrivit  des  cercles  nom- 
breux en  poussant  des  cris.  Pendant  ce  temps,  les  petits  s'étaient 
réunis,  et,  comme  leur  mère  ne  put  parvenir  à  les  rejoindre,  elle  fut 
obligée  de  les  abandonner  à  l'autre  femelle,  qui  était  probablement 
plus  forte  (2). 


C'est  ici  que  le  Garrot  ou  Morillon  de  Barrpw  (Clangula  islandica, 
Gm.  C.  bari-'oioi,  Sw.,)  figuré  pi.  265  devrait  prendre  place.  Mais 
c'est  par  erreur  que  cette  espèce  a  été  introduite  dans  la  liste  des 
oiseaux  observés  en  Belgique,  et  il  n'y  a  donc  pas  lieu  de  l'y  main- 
tenir. 

M.  le  baron  de  Sélys-Longchamps  disait  en  1842, en  parlant  de  cet 


(1)  Naumannia,  1854,  p.  276. 

(2)  Palmén,  Finland''s  Fogîar,  p.  475. 


—  487  — 

oiseau  :  «  J'en  ai  vu  un  exemplaire  tué  sur  le  Geer;  M.  de  Meeze- 
maker  en  possède  un  tué  en  mai  près  de  Bergues  ;  le  D""  Degland 
l'a  aussi  recueilli  aux  environs  de  Lille  (1).  »  —  Gomme  cette  espèce 
ne  figure  plus  dans  la  dernière  liste  des  oiseaux  de  Belgique  publiée 
par  M.  de  Sélys  (2),  j'ai  prié  mon  savant  confrère  de  bien  vouloir  me 
donner  un  mot  d'explication  à  ce  sujet;  voici  ce  qu'il  me  répond,  sous 
la  date  du  19  septembre  1892  :  «  Je  l'avais  indiqué  en  1842,  après 
avoir  examiné  un  exemplaire  femelle  chez  M.  de  Meezemaker,  à 
Bergues  (département  du  Nord),  qui  me  faisait  remarquer  uue  bande 
noire  partageant  en  deux  le  miroir  blanc  des  ailes  ;  je  retrouvai  ce 
caractère  sur  une  autre  femelle,  tirée  sur  le  Geer.  C'était  alors  le 
caractère  que  les  ornithologistes  donnaient  de  la  femelle  pour  la  dis- 
tinguer du  Clangula  glaucion\  mais  je  n'ai  pas  tardé  à  reconnaître 
qu'il  n'était  pas  suffisant  pour  les  femelles,  et  c'est  pourquoi  je  n'ai 
pas  hésité  à  supprimer  le  C.  islandica  dans  la  liste  de  Patria 
belgica.   » 

Il  paraît  d'autant  plus  certain  que  cet  oiseau  n'a  visité  ni  la  Bel- 
gique ni  la  France,  c'est  que  partout  en  Europe  on  n'a  signalé  que  des 
captures  de  femelles  ;  celles-ci  ne  différent  de  celles  du  Garrot  sonneur 
que  par  une  taille  un  peu  plus  forte,  et  peut-être  par  un  bec  plus 
robuste;  il  est  donc  facile  de  se  tromper.  Le  mâle  se  distingue  de 
celui  de  l'espèce  commune  d'abord  par  une  taille  plus  forte,  mais 
surtout  par  la  bande  noire  qui  divise  le  blanc  de  l'aile,  et  par  la  tache 
blanche  placée  à  la  base  du  bec,  qui  remonte  plus  haut  en  prenant 
la  forme  d'un  croissant. 

Le  Morillon  de  Barrow  n'habite,  en  Europe,  que  l'île  d'Islande  où 
il  est  sédentaire.  Selon  M.  Seebohm,  il  n'a  jamais  été  pris  aux  Iles 
Britanniques.  Naumann  le  décrit  dans  son  ouvrage  sur  les  oiseaux 
d'Allemagne,  mais  ne  signale  aucune  capture  et  se  borne  à  dire  :  «  // 
paraît  qu'il  s'est  aussi  montré  sur  les  côtes  septentrionales  de  l'Alle- 
magne et  que  des  jeunes  ont  été  pris  sur  le  Rhin.  »  Le  D''  Ant. 
Reichenow  ne  le  comprend  pas  dans  sa  liste  des  oiseaux  de  l'empire 
Allemand  (3).M.  Dresser  dit  posséder  un  jeune  mâle  capturé  en  Espagne, 
près  de  Valence  (4);  mais  si  ce  sujet  vient  réellement  d'Espagne,  il 
est  certain  ({ue  ce  ne  peut  être  un  C.  islandica. 

(1)  de  Sélys-Long.  Faune  belge,  p.  146. 

(2)  Alam.f  Ois.  et  liept.  de  Belgique,  dans  Patria  belgica,  t.  i,  p.  277  (1873). 
(U)  Reichenow,  Hyslematisches  Vcrzcichnis  der  Vogel  DeiUschlaiids  (1889). 

(4)  Dresser,  liirds  uf  Eui\,  t.  VI,  p.  GU4. 


—  488  — 

La  véritable  patrie  du  Garrot  de  Barrow  est  l'Islande,  le  Groenland 
et  l'Amérique  polaire. 

Une  autre  espèce  à  supprimer  de  notre  faune  est  le  Morillon  ou 
Garrot  histrion,  figuré  pi.  266  (Clangula  histrionica,  Lin.).  M.  de 
Sélys  a  mentionné  un  exemplaire  qui,  d'après  M.  de  Meezemaker,  a 
été  pris  près  de  notre  frontière,  sur  la  côte  de  Gravelines,  mais  sur 
territoire  français  ;  M.  Ch.  van  Kempen  a  signalé  la  capture  d'un  mâle 
adulte  près  de  Dunkerque  (1).  Les  ornithologistes  anglais  ont  égale- 
ment mentionné  quelques  captures  en  Grande-Bretagne  ;  il  n'est  donc 
pas  impossible  que  cet  oiseau  ait  déjà  visité  les  côtes  de  Belgique; 
mais,  comme  aucun  sujet  n'a  été  pris  dans  notre  pays,  du  moins  à 
ma  connaissance,  je  crois  convenable  de  le  supprimer  de  notre 
faune. 

C'est  une  espèce  circompolaire  ;  elle  a  été  prise  accidentellement 
dans  le  Hanovre,  près  de  Hambourg,  sur  les  cotes  occidentales  du 
Holstein  et  en  Tyrol  (Reichenow);  M.  de  Sélys  m'écrit  qu'il  a  vu, 
en  1838,  dans  un  musée  d'Aix-la-Chapelle,  un  Garrot  histrion  mâle 
qu'on  lui  a  dit  avoir  été  tué  entre  cette  ville  et  la  frontière  belge. 

GENRE    CLII 

MIQUELON.  —  HARELDA. 

Anas,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  203  (1766). 

Clangula,  Boie,  Isis,  1822,  p.  564. 

Harelda,  Steph.  in  Shaw's  Gen.  Zool.  XII,  pt.  2,  p.  175  (1824). 

Platypus,  Brehm,  Lehrb.  eur.  Yôg.  11,  p.  840  (1824). 

FuLiQULA,  Bonap.  Synop.  p.  395  (1826). 

Pagonetta,  Kaup,  Natùrl.  Syst.  p.  66  (1829). 

Crymonessa,  Macg.  Man.  Br.  B.  II,  p.  186  (1842). 

Car.  —  Bec  plus  court  que  la  tête,  plus  large  que  haut  à  la  base,  à  onglet 
arrondi  et  formant  crochet;  lamelles  saillantes,  dentiformes,  débordant  la 
mandibule  supérieure  dans  plus  de  la  moitié  de  son  étendue  ;  narines  situées 
près  de  la  base  du  bec,  latérales,  écartées,  ovales;  ailes  de  longueur  moyenne, 
aiguës  ;  queue  conique,  à  rectrices  terminées  en  pointe,  les  médianes  très 
allongées  chez  les  mâles,  étroites  et  canaliculées  ;  tarses  à  peu  près  de  la 
longueur  du  doigt  interne. 

Hab.  —  La  zone  polaire  arctique. 


(1)  Bull,  de  la  Soo.  xool,  de  France,  1889,  p.  105. 


-  489  — 

267.  —  Le  Miquelon  glacial. 

HARELDA  GLACIALIS,  Steph.  ex  Lin. 

(PI.  267). 

Anas  longicauda  islandica,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  379  (1760). 
Anas  hyemalis  et  glacialis,  Lin.  Syst.  nat.  1,  pp.  202-203  (1766). 
Anas  miclonia,  Bocld.  Tahl.  PI.  enl.  p.  58  (1783). 
Anas  brachyrhynchos,  Beseke,  Yôg.  Kurl.  p.  50,  pi.  6  (1792). 
Anas  longicauda,  Leach,  Syst.  Cat.  etc.  Br.  Mus.  p.  37  (1816). 
Clangula  glacialis,  Boie,  Isis,  1822,  p.  564. 
Platypus  glacialis,  Brehm,  Lehrb.  eur.  Vog.  II,  p.  840  (1824). 
Harelda  glacialis,  Steph.  Shavos  Gen.  Zool.  XII,  pt.  2,  p.  175(1824). 
Fuligula  glacialis,  Bonap.  Ann.  Lyc.  Nat.  Eist.  N.-York  II,  p.  395  (1826). 
Pagonetta  glacialis,  Kaup,  Nalilrl.  Syst. ,  p.  66  (1829). 

Clangula  hiemalis,  faberi,  megauros  et  brachyrhynchos,  Brehm,  Isis,  1830, p.  999. 
Crymonessa  glacialis,  Macg.  Man.  Br.  B.  II,  p.  186  (1842). 

Harelda  hiemalis,   faberi,   brachyrhynchos,   megauros  et   mqsica,  Brehm,  Nau- 
mannia,  1855,  p.  299. 

Fuligula  hiemalis,  Reichw. /Syst.  Vers.  Vog.  Deutschl.  p.  57(1889). 

Die  Eisente,  en  allemand. 

The  Long-tailed  Duck,  en  anglais. 

De  IJsep.'md,  ea  llamand. 

Taille  du  mâle  :  0,50  (y  compris  les  filets  de  la  queue)  ;  ailes,  0,22  ; 
femelle:  0,33;  ailes,  0,21. 

Description  du  mâle  adulte  en  hiver.  —  La  majeure  partie  de  la  tête  et 
du  cou,  ainsi  que  le  haut  du  dos  et  de  la  poitrine  blancs  ;  côtés  de  la  tête 
d'un  gris  rougâtre  clair,  avec  le  tour  de  l'œil  blanc  ;  une  grande  tacbe  allon- 
gée brune  sur  les  côtés  du  cou;  dos  d'un  noir  fuligineux;  sus-caudales 
noires;  scapulaires  blanches,  les  plus  longues  eifilées  et  atteignant  presque 
l'extrémité  des  ailes  ;  couvertures  de  celles-ci  d'un  noir  fuHgineux  ;  rémiges 
brunes  ;  poitrine  d'un  brun  de  suie  ;  abdomen  et  sous-caudales  d'un  blanc 
pur;  queue  blanche,  sauf  les  quatre  rectrices  médianes,  qui  sont  brunes, 
effilées,  très  longues,  et  dont  les  deux  centrales  dépassent  les  pennes  blan- 
ches de  16  à  18  centimètres.  Iris  jaune;  bec  orange,  mais  sa  base  jusqu'aux 
narines  et  Tonglet  noirs  ;  pattes  d'un  gris  de  plomb  clair,  noirâtres  aux  arti- 
culations et  aux  membranes. 

Mâle  en  etc.  —  Tête  et  cou  d'un  brun  noirâtre  ;  côtés  de  la  tête  d'un  cendré 
brunâtre;  un  espace  blanc  autour  de  l'œil  ;  poitrine  brune  ;  dos,  sus-caudales 
et  couvertures  des  ailes  noirâtres  ;  scapulaires  roussâtres,  les  plus  longues 
brunes  au  centre  ;  abdomen,  sous-caudales  et  queue  comme  pour  le  plumage 
d'hiver  (1). 

(1)  La  pi.  207  de  l'atlas  jxjrtc  par  erreur  jeune  mâle  au  lieu  de  mdlc  en  l'U. 

TOM.   II.   —   1892.  62 


-  490 


Le  plumage  d'été  n'est  pas  d'une  aussi  courte  durée  que  chez  les  Morillons 
précédents  ;  la  première  mue  a  lieu  vers  la  fin  d'avril,  et  l'oiseau  conserve 
son  plumage  sombre  jusqu'en  octobre. 

Femelle.  —  Tête  et  cou  blancs,  avec  le  dessus  de  la  tête,  à  partir  de  la 
base  du  bec,  la  nuque  et  un  grand  espace  sur  les  côtés  du  cou  bruns  ;  haut 
du  dos  et  côtés  de  la  poitrine  d'un  brun  cendré  roussâtre,  le  milieu  de  la  poi- 
trine plus  pâle  ;  scapulaires  et  couvertures  des  ailes  brunes  bordées  de  roux 
et  de  cendré  roussâtre  ;  bas  du  dos  et  sus- caudales  noirâtres,  avec  les  plumes 
terminées  de  cendré  roussâtre,  surtout  sur  ces  dernières;  rémiges  brunes; 
rectrices  également  brunes,  mais  lisérées  de  blanchâtre,  sauf  les  deux 
médianes  ;  point  de  longues  plumes  effilées  dans  la  queue  ;  abdomen  et  sous- 
caudales  blancs. 

Jeune.  —  Ressemble  à  la  femelle,  dont  il  diffère  surtout  par  l'absence  de 
roux  aux  scapulaires,  par  le  blanc  de  la  tête  et  du  cou  moins  pur  et  par  les 
parties  brunes  plus  pâles.  Bec  noirâtre;  iris  brun;  pattes  plus  sombres  que 
chez  les  adultes. 

Poussin.  —  Large  capuchon,  descendant  en  avant  sur  les  côtés  de  la  tête 
jusqu'aux  commissures,  dessus  du  cou,  ceinture  en  haut  de  la  poitrine,  tout 
le  dessus  du  corps,  des  ailes  et  des  cuisses  d'un  brun  fuligineux,  faiblement 
glacé  aux  pointes  du  duvet,  avec  deux  ou  trois  petites  taches  blanches  autour 
des  yeux;  gorge  blanche;  devant  et  côtés  du  cou,  partie  basse  des  côtés  de  la 
tête,  ventre  et  abdomen  d'un  blanc  un  peu  assombri  par  la  base  brune  du 
duvet.  Bec  brun  avec  les  onglets  plus  pâles;  pieds  brun  roussâtre,  avec  des 
bandes  jaune  terne  sur  les  membranes,  le  long  des  doigts  (/.  Vian). 

Il  est  à  remarquer  que  cette  espèce  varie  beaucoup  suivant  les  sexes,  l'âge 
et  les  saisons.  L'iris,  de  brun  foncé  chez  le  jeune,  passe  par  toutes  les  teintes 
intermédiaires  jusqu'au  jaune,  mais  ce  n'est  que  chez  les  vieux  sujets  qu'il 
est  d'un  beau  jaune. 

Hab.  —  Le  Miquelon  glacial  habite  la  zone  circumpolaire  entre  le 

60°  30'  et  leSOM.  N.  Ilesttrès 
commun  au  Groenland,  en  Is- 
lande, en  Finmark,  dans  le  nord 
de  la  Russie,  à  Waigatz  et  à  la 
Nouvelle-Zemble,  mais  peu  abon- 
dant au  Spitzberg  {de  Heuglin)  ; 
en  automne  il  émigré  aux  îles 
Féroé  {Feilden),  en  Scandinavie 
[Collett,  Nilsson),  sur  les  côtes 
de  la  Baltique  {Borggreve),  dans  le  golfe  de  Finlande  [Bûchner),  mais 
il  se  montre  rarement  dans  la  Russie  centrale  (Sàbandeff).  Il  visite 


L'Otf  ni.«tf  «)  l5Ql2011DiOOBf 


—  491  - 

régulièrement,  en  hiver,  l'Ecosse  et  les  îles  Orcades  et  Shetland, 
mais  irrégulièrement  les  parties  méridionales  et  orientales  de  l'Angle- 
terre, et  rarement  l'Irlande  {Seebohm)  ;  on  le  voit  aussi  assez  régu- 
lièrement en  Hollande  {Schlégel),  mais  ce  n'est  que  pendant  les  hivers 
rigoureux  qu'on  le  voit  sur  les  côtes  de  Belgique  et  du  nord  de  la 
France.  Pendant  les  hivers  très  rigoureux,  on  en  prend  quelquefois 
en  Suisse  {Meisner  et  ScJiinz)  et  dans  l'intérieur  de  l'Allemagne 
{Reichenow)  ;  c'est  ainsi  qu'on  en  a  pris  aussi  sur  le  lac  de  Chumetz 
(Fritsch)  et  sur  celui  de  Neusiedler  {von  Pelzeln).  C'est  également 
pendant  des  hivers  exceptionnellement  rigoureux  que  quelques  sujets 
ont  été  tués  dans  le  midi  de  la  France  (Lacroix),  en  Espagne,  dans  la 
province  de  Gérone  [Vayreda)  et  dans  diverses  parties  de  l'Italie, 
notamment  à  Venise  (1885),  près  de  Nice  (1878),  en  Toscane  (1872), 
sur  le  lac  de  la  Garde  (1865),  etc.  (Giglioli). 

En  Asie,  cet  oiseau  hiverne  dans  le  sud  de  la  Sibérie,  surtout  sur 
le  lac  Baïkal  (Radde);  il  se  montre  également  au  Japon  {Whitely),  et 
un  jeune  a  été  tué  à  Takou  en  Chine  {David). 

En  Amérique,  il  niche  daas  l'extrême  Nord  et  hiverne  jusque  près 
du  40°  1.  N.  Il  est  commun  en  hiver  dans  la  Nouvelle-Ecosse,  au  Nou- 
veau-Brunswick  et  dans  l'Etat  de  Maine  {Coues). 

Mœurs.  —  Les  froids  précoces  de  la  région  polaire  obligent  ces 
oiseaux  à  émigrer  assez  tôt,  car  dès  la  fin  d'octobre  on  les  voit  arriver 
par  petites  troupes  sur  les  côtes  de  la  mer  Baltique  ;  ce  n'est  cepen- 
dant que  vers  la  mi-novembre  que  les  troupes  deviennent  plus  nom- 
breuses, et  en  décembre  certaines  baies  de  la  Baltique  donnent  asile 
à  des  centaines  et  même  à  des  milliers  de  Miquelons  ;  c'est  alors 
l'espèce  la  plus  commune  des  côtes  allemandes  et  danoises.  Si  le  froid 
devient  trop  intense,  beaucoup  d'entre  eux  émigrent  davantage  vers 
le  Sud  et  se  montrent  alors  sur  nos  côtes  et  parfois  sur  l'Escaut.  Ils 
retournent  dans  le  Nord  en  avril  et  mai  par  bandes  nombreuses,  voya- 
geant principalement  durant  la  nuit. 

Cette  espèce,  comme  on  vient  de  le  voir,  est  très  sociable  et  vit  sur 
la  mer  comme  sur  les  eaux  douces,  mais  c'est  sur  ces  dernières  qu'elle 
se  reproduit  ;  en  été  on  la  voit  donc  presque  uniquement  sur  les  lacs^ 
les  étangs  et  les  marais  de  la  zone  polaire,  tandis  qu'en  hiver  elle  se 
tient  davantage  sur  la  mer  et  sur  les  fleuves. 

Le  Miquelon  nage  avec  légèreté,  le  corps  très  enfoncé  dans  l'eau, 
et  plonge  presque  sans  discontinuer,  nageant  souvent  entre  deux 
eaux  sur  un  assez  long  trajet.  Il  est  peu  farouche,  mais  il  est  difficile 


—  49i>  - 

à  tirer  à  cause  de  sa  grande  agilité  ;  il  ne  s'envole  pas  volontiers 
quand  il  est  sur  l'eau  et  c'est  le  plus  souvent  en  plongeant  qu'il  évite 
le  plomb  du  chasseur  ;  est-il  blessé,  il  plonge  encore,  et  si  sa  blessure 
est  mortelle,  il  se  laisse  souvent  mourir  au  fond  de  l'eau  où  il  reste 
parfois  accroché  aux  plantes  aquatiques.  Il  vole  avec  aisance,  vite  et 
haut,  mais  avec  de  grands  battements  d'ailes.  Faber  dit  que  la  femelle 
chasse  souvent  de  son  nid  celle  du  Morillon  milouinan  et  qu'elle  couve 
ensuite  les  œufs  de  cette  dernière  en  même  temps  que  les  siens.  Entre 
eux  ils  se  querellent  sans  cesse,  aussi  bien  en  volant  qu'en  nageant, 
et  font  constamment  entendre  leurs  cris  de  aou-aou-lik,  â-â-aou-lik, 
toujours  d'après  le  même  observateur. 

Cet  oiseau  se  nourrit  principalement  de  mollusques  à  coquille 
simple  ou  bivalves,  d'annélides,de  crustacés  et  de  petits  poissons  qu'il 
pêche  en  plongeant  ;  sur  les  eaux  douces,  il  prend  aussi  des  larves, 
des  insectes,  des  vers,  des  têtards,  des  bourgeons,  des  graines  et 
autres  substances  végétales. 

On  ne  chasse  guère  ce  palmipède  pour  sa  chair,  car  celle-ci  a  un 
goût  huileux  fort  désagréable. 

Reproduction. —  M.  de  Heuglin  pense  que  cet  oiseau  niche  sur  les 
rochers  qui  avoisinent  les  lacs  et  les  étangs  d'eau  douce  de  la  zone 
polaire,  mais  il  n'a  pas  trouvé  de  nid.  M.  Seebohm  a  été  plus  heureux 
dans  la  vallée  de  la  Petchora,  où  son  guide  trouva  sur  des  lacs  quatre 
nids  de  Miquelons,  en  partie  abrités  sous  des  buissons  de  saules  et  de 
bouleaux  nains;  ces  nids,  découverts  dans  la  seconde  moitié  de  juin 
et  en  juillet,  contenaient  respectivement  trois,  cinq,  six  et  sept  œufs. 
Deux  nids,  ne  contenant  que  du  duvet,  ont  été  trouvés  au  nord  de 
Dvoinik;  ils  étaient  placés  dans  une  excavation  protégée  par  des 
herbes  et  au  milieu  de  débris  laissés  par  la  marée  haute. 

Cet  oiseau  niche  généralement  fort  tard.  M.  Seebohm  dit  avoir 
reçu  de  M.  Eagle  Clarke,  un  jeune  qui  était  moitié  en  duvet  et 
moitié  en  plumes,  et  que  ce  dernier  avait  tiré  en  Islande  le  16  sep- 
tembre. Les  œufs  sont  d'un  gris  jaunâtre  ou  verdâtre  pâle;  ils  mesu- 
rent environ  53  millim.  sur  39. 

OENRE     CLIII 

EIDER.  —  SOMATERIA. 

Anser,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  294  (1760). 

Anas,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  198  (1766). 

SoMATERiA,  Boie,  Isis,  1822,  p.  564. 

FuLiGULA,  Steph.  Shavo's  Gen.  Zool.  XII,  2,  p.  206  (1824). 


-  493  — 

Macropus,  Nutt.  3Ian.  Orn.  U.  S.  II,  p.  451  (1834). 

PoLYSTiCTA,  Eyt.  Ilist.  var.  Brit.  B.  p.  79  (1836). 

Stellaria,  Bonap.  Comp.  List.  p.  57  (1838). 

Eniconetta,  Gray,  List.  Gen.  ofB.  p.  95  (1840). 

Harelda  (part.)  Keys  et  Blas.  Wirhelth.  Eur.  p.  230  (1840). 

Heniconetta,  Agass.  Nomencl.  Zool.  Lnd.  Univ.  p.  178  (1846). 

Car.  —  Bec  de  la  longueur  de  la  tête,  élevé  et  convexe  à  la  base,  un  peu 
déprimé  en  arrière  de  l'onglet,  dilaté  sur  les  bords  de  la  mandibule  inférieure 
qui  est  presque  cachée  par  la  supérieure;  lamelles  espacées,  entièrement 
cachées,  celles  de  la  mandibule  supérieure  petites,  peu  saillantes;  plumes  du 
front  s'avançant  sur  la  base  du  bec  en  formant  un  angle  aigu,  celles  des 
lorums  se  prolongeant  également  en  angle  aigu  jusque  sous  les  narines;  ces 
dernières  elliptiques,  situées  vers  le  milieu  du  bec;  onglet  très  large,  voûté, 
occupant  toute  l'extrémité  du  bec;  ailes  courtes,  étroites  et  aiguës;  queue 
courte,  conique;  tarses  plus  courts  que  le  doigt  interne,  placés  très  en  arrière 
du  corps;  pouce  bien  développé,  grêle,  muni  d'une  large  membrane  en  dessous. 

Eah.—  Les  espèces  de  ce  genre  sont  propres  à  la  zone  polaire 
arctique  et  émigrent  en  hiver  dans  la  zone  tempérée. 

268.  —  L'Eider  vulgaire 
SOMATERIA  MOLLISSIMA,    Boie  ex  Lin. 

(PI.  268.) 

Anas  MOLLISSIMA,  Lin.  Syst.  nat.  p.  124  (1758)  et  I,  p.  198  (1766;. 
Ansek  LANUGiNOSUS,  Briss.  Omitli.  VI,  p.  294(1760). 
Anas  cutberti  etFARNENSis,  Salerne,  Omith.  p.  415  (1767). 
Somateria  MOLLISSIMA,  Boie, /sîs,  1822,  p.  564. 
Anser  mollissimus,  Bonnat.  Encycl.  meth.  I,  p.  119  (1823). 
Platypus  mollissimus  et  leislert,  Brehm,  Lehrb.  pp.  809,  813  (1824). 
Somateria    danica,    norwegica,    platyuros,    fœrœensis,    megauros,    isl.\ndica, 
BOREALis,  LEiSLERi  et  PLANIFRONS,  Breh.  Isis,  1830,  p.  998. 
Somateria  st.  cutberti,  Eyt.  Cat.  Brit.  B.  p.  58  (1836). 
Flligula  MOLLISSIMA,  de  Selys,  Fcainc  belge,  p.  143  (1842). 
Somateria  vulgaris,  C.  Dub.  PI.  col.  Ois.  Belçj.  III,  p.  289(1860). 
Somateria  thulensis,  Malmgr.  Konyl.  Yt't.-Ak.  Œfo.  p.  380  (1864). 
Die  Eidergans,  en  allemand. 
The  Common  Eider,  en  anglais. 
De  Eidereend,  en  flamand. 

Var.   Drosseri. 

Anas  mollissima,  Wilson,  Am.  Or».  VIII.  p.  122.  pi.  71  (1814). 
Fi:ligi;la  mollissima,  Aiuliil).  Ont.  lit»;/.  III,  \>.  314  (1835). 
Somateria  mollissima,  Bonap.  Lis/.  />'.  p.  57  (1838). 


—  494  - 

SoMATERiA  DRESSERi,  Sharpe,  Ann.  Mag.  N.  H.  p.  51  (1871). 
SoMATERiA  MOLLissiMA  var.  DRESSERI,  Coues,  Birds  N.  W.  p.  580  (1874). 
SoMATERiA  MOLLissiMA  DRESSERI,  Seeb.  Brit.  B.  III,  p.  616  (1885). 

Taille  du  mâle  :  0™57;  ailes  0,32;  femelle  :  0,45;  ailes  0,28. 

Description  du  mâle  en  plumage  de  noee. — Dessus  de  la  tête  d'un  noir  violet 
velouté,  divisé  en  arrière  par  une  bande  médiane  d'un  blanc  verdâtre,  s'éten- 
dant  en  avant  sur  la  mandibule  supérieure  en  formant  trois  pointes  :  l'une 
médiane  courte,  les  autres  latérales  se  prolongeant  jusqu'aux  narines;  partie 
supérieure  de  la  nuque  d'un  vert  clair  bordé  latéralement  de  blanc  ;  côtés  du 
haut  du  cou  du  même  vert  clair  soyeux;  joues,  gorge,  cou,  manteau,  petites 
couvertures  des  ailes,  scapulaires  et  une  grande  tache  de  chaque  côté  du 
croupion,  d'un  blanc  pur;  bas  du  cou  et  poitrine  d'un  blanc  teinté  de  nuance 
aurore;  bas  du  dos,  couvertures  de  la  queue,  grandes  et  moyennes  couver- 
tures des  ailes,  abdomen,  flancs  et  sous-caudales  d'un  noir  plus  ou  moins  pro- 
fond; rémiges  et  queue  d'un  noir  fuligineux.  Bec  d'un  vert  olivâtre  sombre; 
iris  brun;  pattes  d'un  vert  olivâtre  clair,  plus  sombre  aux  membranes. 

Femelle.  —  Tête  et  cou  d'un  roux  jaunâtre,  striés  de  brun  noirâtre,  les 
stries  du  vertex  plus  compactes;  dos  et  scapulaires  d'un  brun  sombre  avec  les 
plumes  bordées  de  roussâtre;  couvertures  des  ailes  brunes,  bordées  de  gris 
roussâtre,  les  plus  grandes  terminées  de  blanc;  rémiges  secondaires  de  même 
couleur  et  également  terminées  de  blanc,  ce  qui  forme  deux  raies  blanches  sur 
l'aile;  rémiges  primaires  et  queue  brunes;  poitrine  et  flancs  roussâtres,  mar- 
qués de  raies  transversales  noirâtres,  plus  larges  sur  les  flancs;  abdomen 
d'un  cendré  roussâtre. 

Jeune  mâle.  —  Dessus  de  la  tête  d'un  cendré  brunâtre  varié  de  noir;  côtés 
de  la  tête  et  haut  du  cou  noirs,  les  plumes  finement  terminées  de  cendré;  bas 
du  cou  varié  de  blanc;  parties  dorsales  d'un  brun  noirâtre,  les  plumes  plus  ou 
moins  bordées  de  cendré  roussâtre;  ailes  brunes  avec  deux  raies  blanches 
plus  ou  moins  apparentes;  parties  inférieures  cendrée?,  avec  des  raies  trans- 
versales brunes  et  d'un  roux  jaunâtre;  queue  brune. 

Mâle  en  été.  —  Il  entre  en  mue  dés  qu'il  a  quitté  sa  femelle,  mais  il  ne 
conserve  son  plumage  d'été  qu'un  peu  plus  d'un  mois.  Il  ressemble  alors 
presque  entièrement  au  jeune  décrit  ci-dessus,  il  est  cependant  rare  de  voir 
des  individus  dont  le  plumage  ne  soit  pas  plus  ou  moins  varié  de  blanc. 

Poussins.  —  Toutes  les  parties  supérieures  d'un  brun  fuligineux  foncé  ; 
gorge  et  ventre  d'un  gris  pâle,  poitrine  et  abdomen  d'un  gris  sombre,  les 
teintes  foncées  et  les  teintes  pâles  fondues  sur  les  flancs  ;  bande  sourcilière 
grise  du  bec  à  la  nuque,  bordée  en  dessous  par  une  bande  noirâtre,  qui  se 
dégrade  jusqu'au  gris,  en  descendant  sur  les  joues;  bec  brun  avec  les  onglets 
roussâtres;  pieds  brun  olivâtre  avec  les  palmures  brunes  (J.  Vian). 

Var.  Dresseri.  —  Le  mâle  difî'ère  de  l'espèce  ordinaire  par  la  cire  qui  est 


—  495  — 


plus  large,  très  ridée  et  largement  arrondie  en  arrière;  la  teinte  verte  de  la 
tête  est  plus  étendue  et  accompagne  ordinairement  le  noir  jusque  près  du 
bec.  La  femelle  n'est  pas  à  distinguer  de  celle  de  l'Eider  d'Europe. 

Hab.  —  L'Eider  vulgaire  habite  les  côtes  de  l'Océan  Glacial  jus- 
qu'à la  mer  de  Kara  à  l'Est  et 
dépasse  vers  le  pôle  le  81°  1.  N; 
des  volées  de  centaines  de  sujets 
furent  observées,  en  juillet,  sous 
le  81°  10' par  l'expédition  scien- 
tifique suédoise  au  pôle  Nord. 
Sa  véritable  patrie  comprend  le 
Spitzberg,  la  Nouvelle-Zemble 
[de  Heuglin),  les  côtes  et  les  îles 
de  la  Norwège  {Colleit),  de  l'Islande  {Faber),  du  Groenland  (Holbôll) 
et  de  la  baie  de  Baffin  [Baird);  il  niche  également  aux  îles  Féroé 
{Wolley),  Orcades  et  Shetland,  sur  les  îles  et  les  côtes  occidentales 
de  l'Ecosse  [Seebohm)  et  sur  divers  points  du  Danemark  comme  à 
Hesselo,  Samso,  Christiansô  et  à  l'île  de  Sylt  {Kjaerbôlling),  soit 
jusqu'au  53^ 

Cet  oiseau  se  montre  en  hiver  sur  les  côtes  de  la  Suède  (Nilsson),  de 
l'Allemagne  [Naumann^  Reichenoio)  et  de  la  Hollande  {Schléffel), 
mais  rarement  sur  les  côtes  occidentales  de  l'Angleterre,  et  acciden- 
tellement sur  celles  de  l'Irlande  {Seebohm).  Ce  n'est  que  pendant  les 
hivers  rigoureux  qu'on  voit  quelques-uns  de  ces  oiseaux  sur  les  côtes 
de  Belgique  et  de  France;  dans  ce  dernier  pays,  des  captures  isolées 
ont  même  été  faites  dans  la  Brenne  {R.  Martin),  dans  le  Dauphiné 
{Bouteille),  le  Gard  {Crespon),  les  Landes  {Dubalen),  l'Aude,  l'Hérault 
et  sur  les  côtes  du  département  des  Pyrénées-Orientales  {Lacroix). 
Les  ouragans  chassent  parfois  des  Eiders  encore  plus  vers  le  Midi,  ou 
loin  dans  l'intérieur  des  terres,  car  on  en  a  capturé  en  Alsace 
[Kroener),  en  Lorraine  {Godron),  en  Suisse  {Scimiz),  en  Tyrol 
{Althammer),  sur  plusieurs  points  de  l'Italie  et  même  en  Dalmatie 
{Giglioli)  et  en  Bohême  près  de  Plan  à  l'ouest  de  Pilsen  {Fritsch). 

La  var.  Dresseri  niche  au  Labrador,  à  Terre-Neuve  et  dans  la  baie 
d'Hudson,  et  hiverne  probablement  sur  les  côtes  du  Maine,  du  Nou- 
veau-Brunswick  et  de  la  Nouvelle-Ecosse. 

Mœurs.  —  L'Eider  est  sédentaire  en  Islande  et  dans  quelques  par- 
ties les  plus  méridionales  de  son  aire  de  dispersion,  où  les  courants 
empêchent  la  mer  de  geler;  plus  au  Nord,  il  émigré  régulièrement  en 


—  496  — 

septembre  et  octobre,  mais  les  mâles  paraissent  partir  avant  les 
femelles  et  leurs  jeunes;  «  à  cette  époque,  dit  A.  Brehm,  ces  oiseaux 
se  rassemblent  dans  certaines  localités  où  ils  trouvent  une  nourriture 
abondante,  et  ils  couvrent  littéralement  la  mer  sur  des  surfaces  de 
plusieurs  kilomètres  carrés.  A  partir  du  mois  d'avril,  ils  retournent 
vers  le  Nord,  toujours  réunis  en  bandes  tellement  considérables,  que 
le  chasseur  peut  plusieurs  fois  décharger  et  recharger  son  arme  avant 
que  le  passage  soit  terminé.  > 

C'est  un  oiseau  essentiellement  marin,  n'aimant  que  l'eau  salée  et 
ne  visitant  les  eaux  douces  que  quand  elles  se  trouvent  dans  le  voisi- 
nage de  la  mer,  et  encore  ne  se  montre- t-il  le  plus  souvent  que  sur  les 
fleuves  non  loin  de  leur  embouchure.  Il  ne  se  tient  pas  seulement 
près  des  côtes,  mais  encore  en  pleine  mer  à  plusieurs  kilomètres  du 
rivage.  Sur  terre  il  ne  se  meut  que  difficilement,  en  vacillant  et  tombe 
à  chaque  instant  sur  sa  poitrine,  aussi  ne  march-e^-il  guère  volon- 
tiers. Son  vol  est  également  pénible  et  les  coups  d'ailes  continuels 
qu'il  est  obligé  de  donner  le  fatiguent  beaucoup  ;  il  ne  vole  générale- 
ment qu'à  une  faible  hauteur  et  en  ligne  droite.  Nilsson  dit  qu'un 
Eider  qui  s'égare  au  milieu  des  terres  se  laisse  prendre  à  la  main  ; 
en  avril  1841  il  a  obtenu  un  exemplaire  vivant  qui  volait  en  rasant  la 
terre,  mais  tomba  bientôt  et  se  laissa  prendre  sans  difficulté  ;  il  en  a 
obtenu  ainsi  plusieurs  au  printemps,  ramassés  sur  des  terres  labou- 
rées non  loin  de  Lund,  sans  qu'ils  cherchassent  à  fuir.  L'eau  est  le 
vrai  élément  de  cet  oiseau  ;  il  nage  en  enfonçant  peu  le  corps  et  avec 
plus  de  rapidité  que  les  Morillons,  et  plonge  à  une  plus  grande 
profondeur  que  ces  derniers.  En  hiver  il  est  sauvage  et  craintif,  se 
tient  en  grandes  troupes,  les  mâles  mêlés  aux  femelles  ;  au  printemps 
les  Eiders  se  séparent  par  couples,  perdent  alors  de  leur  timidité,  et, 
quand  ils  s'aperçoivent  qu'on  est  bien  disposé  à  leur  égard,  ils  se 
comportent  souvent  comme  des  oiseaux  domestiques,  surtout  les 
femelles.  Ils  se  montrent  sociables  même  avec  d'autres  espèces,  mais 
au  moment  de  la  reproduction,  les  mâles  se  querellent  et  luttent 
entre  eux  pour  la  possession  d'une  femelle. 

Le  cri  du  mâle  peut  se  rendre  par  aho,  aho,  aho;  celui  de  la 
femelle  par  krr,  korr,  ou  korrerr.  L'Eider  se  nourrit  surtout  de 
moules  et  autres  mollusques  à  coquilles,  de  crustacés,  d'annélides, 
de  frai  et  de  petits  poissons  qu'il  pêche  souvent  à  plus  de  dix  mètres 
de  profondeur;  ce  genre  de  nourriture  donne  à  sa  chair  un  goût 
détestable. 


—  497  — 

On  sait  que  ce  sont  les  Eiders  qui  donnent  ce  précieux  duvet  appelé 
édredon;  celui-ci  est  enlevé  du  nid  à  deux  reprises  :  une  fois  au 
moment  de  la  ponte  et  une  seconde  fois  après  1  eclosion  des  œufs  ; 
pour  faire  une  livre  d'édredon,  il  faut  en  moyenne  le  contenu  de 
douze  nids.  On  comprend  que  ces  oiseaux  sont  d'un  rapport  considé- 
rable pour  les  peuples  septentrionaux  qui  devraient  les  ménager 
davantage;  ils  en  tuent  malheureusement  beaucoup  pour  leur  con- 
sommation et  enlèvent  même  les  œufs.  Holbôll  dit  que  le  sud  du 
Groenland  produit  en  moyenne  par  année  5807  livres  d'édredon,  et 
le  nord  environ  la  moitié,  soit  en  tout  environ  8710  livres,  ce  qui 
représentait,  en  1840,  une  valeur  de  195,975  francs  (1). 

Reproduction.  —  D'après  de  Heuglin,  qui  a  observé  les  Eiders  au 
Spitzberg  et  à  la  Nouvelle-Zemble,  la  ponte  a  lieu,  suivant  les  loca- 
lités, en  juin  ou  en  juillet,  mais  on  trouve  souvent  encore  des  œufs 
jusqu'à  la  mi-août,  probablement  de  femelles  dont  la  première  cou- 
vée a  été  détruite. 

L'Eider  niche  sur  des  îles  rocheuses  et  dans  les  dunes  ;  les  nids 
sont  éparpillés  ou  quelques-uns  réunis  sur  un  petit  espace,  et  ils  sont 
placés  entre  des  pierres,  dans  des  excavations  creusées  dans  le  sable 
ou  dans  la  partie  à  sec  d'un  marais  non  loin  d'un  étang  ;  ces  excava- 
tions sont  garnies  d'un  peu  de  mousse  et  de  feuilles  de  saxifrages,  le 
tout  recouvert  d'une  épaisse  couche  du  précieux  duvet,  dans  lequel 
les  œufs  sont  complètement  enfouis  (2).  La  ponte  est  de  cinq  à  six 
œufs  d'un  vert  olivâtre  clair  et  mesurant  de  77  à  82  millim.  sur  50 
à  53.  M.  Collett  dit  que,  quand  le  contenu  d'un  nid  dépasse  six  œufs, 
(et  on  en  trouve  souvent  huit  et  une  fois  il  en  vit  quatorze  dans  un 
même  nid)  ces  œufs  n'ont  pas  tous  été  pondus  par  la  même  femelle. 
Malmgren  dit  que  les  femelles  dont  on  a  enlevé  les  œufs,  s'emparent 
souvent  de  ceux  d'une  autre  femelle  appartenant  parfois  à  un  autre 
genre  d'oiseaux,  d'une  Bernache  par  exemple.  La  durée  de  l'incuba- 
tion est  de  vingt-cinq  à  vingt-six  jours. 

<  Au  Labrador,  dit  Audubon,  c'est  vers  la  dernière  semaine  de 
mai  que  les  Eiders  commencent  à  nicher;  les  nids  sont  construits  sur 
des  îles  entre  de  maigres  touffes  d'herbes,  sous  des  branches  basses 
de  pins,  et  l'on  trouve  parfois  de  cinq  à  huit  nids  sous  le  même  buis- 
son. Beaucoup  sont  placés  sur  la  pente  des  rochers  qui  se  projettent 


(1)  Holbôll,  Ornith.  Beitrag  zur  Fauna  Groenlands,  p.  69. 

(2)  Voy.  von  Heuglin,  RcUen  nach  dam  Nord  Pularmeer ,  I,  p.  105  et  III  p.  137. 

ToM  II.  —  1892.  63 


—  498  - 

à  quelques  pieds  au-dessus  de  la  limite  des  hautes  eaux....  Enfoncés 
en  terre  autant  que  possible,  ils  se  composent  d'herbes  marines,  de 
mousses  et  de  brindilles  sèches,  croisées  et  entrelacées  avec  assez  de 
soin,    pour  donner  un  air  de  propreté   à  la   cavité   centrale,   qui 
n'excède  pas  cinq  pouces  en  diamètre.  La  ponte  commence  aux  pre- 
miers jours  de  juin,  et  tant  qu'elle  dure,  le  mâle  ne  quitte  pas  sa 
femelle....  >.  Audubon  oublie  le  duvet  qui  forme  cependant  la  partie 
essentielle  du  nid.  La  femelle  conduit  ses  poussins  à  la  mer  dès  qu'ils 
sont  secs  et  souvent  le  jour  même  de  leur  éclosion,  et  ils  nagent  et 
plongent  aussitôt;  c'est  d'ailleurs  sur  la  mer  qu'ils  sont  le  plus  en 
sûreté  et  le  plus  à  l'abri  des  Faucons, des  Corbeaux  et  des  Goélands, 
leurs  ennemis  les  plus  à  craindre.  Si  la  mère  est  tuée  avant  que  les 
jeunes  puissent  se  passer  d'elle,  une  autre  les  adopte,  les  prend  sous 
sa  protection  et  les  traite  comme  ses  propres  petits. 

«  Peu  de  jours  après  la  ponte,  dit  A.  Brehm,  la  femelle  couve  déjà 
avec  persévérance  ;  là  où  elle  est  habituée  à  l'homme,   elle  n'aban- 
donne pas  ses  œufs  quand  on  l'approche  ;  elle  se  contente  de  baisser 
la  tête  contre  le  sol,  d'ouvrir  un  peu  les  ailes  pour  se  rendre  invisible. 
La  couleur  de  son  plumage  s'harmonise  généralement  si  bien  avec 
celle  du  sol,  qu'un  œil  inexpérimenté  l'aperçoit  difficilement.  J'y  ai 
souvent  été  trompé,  et  j'étais  fort  étonné  de  me  sentir  tout  à  coup 
pincer  violemment  par  une  femelle  d'Eider  que  je  n'avais  pas  vue. Dans 
les  îles  même  qui  sont  éloignées  de  toute  habitation,  les  Eiders  se 
laissent  approcher  de  très  près  avant  de  s'envoler.  Quant  à  ceux  qui 
nichent  près  des  habitations,  on  peut  les  prendre,  regarder  leurs  œufs 
et  les  remettre  sur  leur  nid,  sans  qu'ils  songent  à  s'envoler.  Je  me 
suis  souvent  amusé  à  m'asseoir  à  côté  d'un  de  ses  oiseaux,  à  le  cares- 
ser, à  glisser  ma  main  sous  son  ventre,  entre  lui  et  ses  œufs,  et  très 
souvent  l'Eider  ne  songeait  pas  à  s'enfuir.  Quelques-uns  mordaient 
mes  doigts,  comme  en  jouant  ;  d'autres  ne  donnaient  pas  le  moindre 
signe  de  mécontentement.  J'en  enlevai  du  nid  et  les  portais  un  peu 
plus  loin  ;  ils  y  revenaient  comme  si  rien  ne  leur  était  arrivé  ;  ils 
mettaient  le  duvet  en  ordre  et,  en   ma  présence,   reprenaient  leur 
fonction  de  couveuses.   Les  plus  craintifs   se  sauvaient  et  toujours 
souillaient  leurs  œufs  de  leurs  excréments;  mais  jamais  ils  ne  volaient 
loin,  et  ils  ne  tardaient  pas  à  revenir  prendre  place  sur  leurs  œufs.  Si 
rien  ne  la  dérange,  la  femelle  quitte  son  nid  le  matin,  mais  avant  de 
s'éloigner,  elle  a  soin  de  recouvrir  les  œufs  de  duvet.  Elle   s'en  va 
vers  la  mer  aussi  rapidement  que  ses  moyens  le  lui  permettent  ;  elle 


-  499  — 

ploDge  avec  activité  pendant  environ  une  demi-heure,  remplit  outre 
mesure  son  jabot  de  coquillages  et  revient  à  son  nid. 

«  Les  mâles  sont  toujours  plus  craintifs,  même  au  commencement 
de  la  ponte,  quand  ils  accompagnent  les  femelles  à  terre  et  qu'ils 
montent  la  garde  auprès  du  nid,  S'approche-t-on  d'eux,  ils  s'agitent 
beaucoup,  lèvent  et  baissent  la  tête,  appellent  leur  femelle,  se  sauvent 
moitié  volant,  moitié  culbutant,  jusqu'à  la  mer.  » 


L'Eider  à  tête  grise  ou  royal  {Somateria  spectahilis,  Lin.)  figuré 
pi.  269,  n'a  pas  encore  été  pris  en  Belgique.  C'est  sur  deux  jeunes 
sujets  tués  l'un  près  de  Boulogne,  l'autre  sur  nos  côtes  il  y  a  une  cin- 
quantaine d'années,  que  repose  l'introduction  de  cette  espèce  dans  la 
faune  belge.  Mais  comme  les  jeunes  ressemblent  beaucoup  à  ceux  de 
l'Eider  commun, il  est  plus  que  probable  qu'il  y  ait  eu  erreur  de  déter- 
mination ;  je  crois  donc  prudent  de  le  supprimer  de  mon  ouvrage.  Il 
est  cependant  à  noter  que  quelques  exemplaires  de  l'Eider  royal  ont 
été  tués  sur  les  côtes  d'Angleterre  et  d'Ecosse, ainsi  qu'aux  îles  Orcades 
et  Shetland  et  même  en  Irlande  {Seebohm).  Il  n'est  donc  pas  impossi- 
ble que  l'on  prenne  un  jour  ce  bel  oiseau  sur  nos  côtes,  d'autant  plus 
que  M.  Ch.  van  Kempen  signale  la  capture  d'une  paire  adulte  près  de 
Dunkerque. 

OENRE  CLIV. 

MACREÏÏSE.  —  OIDEMIA. 

Anas,  Briss.  Orn.  VI,  p.  420  (1768)  ;  Lin.  S.  N.  I,  p.  196  (1766). 

OïDEMiA,  Flem.,  Phil.Zool.  II,  p.  260  (1822). 

Melanitta,  Boie,  Isis,  1822,  p.  564. 

Platypus,  Brehm,  Lehrb.  II,  p.  820  (1824). 

FuLiGULA,  Nutt,  Ma7i.  Orn.  II,  p.  422  (1834i. 

Œdemia,  Coues,  Key,  p.  293  (1872). 

OïDEMA,  OIphe-Gal.,  Conlrïb.  Fn.  Orn.  fiisc.  III,  p.  22  (1888). 

Car.  —  Bec  plus  court  que  la  tête,  robuste,  élevé,  large,  à  mandibule  supé- 
rieure renflée  ou  gibbeuse  à  la  base,  déprimée  à  l'extrémité,  Tonglet  très 
large  et  couvrant  l'extrémité  de  la  mandibule;  lamelles  larges,  espacées,  peu 
ou  point  visibles  ;  narines  submcdianes,  ovales  ;  ailes  de  longueur  moyenne, 
aiguës  ;  queue  courte,  conique,  les  rectrices  terminées  en  pointe,  les  médianes 
dépassant  un  peu  les  autres;  jambes  placées  très  en  arrière  du  corps;  tarses 
pins  courts  que  le  doigt  interne. 

Ilab.  —  Ce  genre  est  réparti  dans  la  zone  circompolaire,  et  les 
quelques  espèces  qui  le  composent  hivernent  sur  les  côtes  des  pays 
tempérés. 


—  500  — 

269.  —  La  Macreuse  noire. 

OIDEMIA  NIGRA  Flem.  ex  Briss. 

(PL  270). 

Anas  NIGRA,  Lin.  Syst.  Nat.,^^.  123  (1758)  ;  I,  p.  196  (1766). 

Anas  cinerascens,  Bechst.  Orn.  Taschenb.,  p.  437  (1803). 

Anas  ATRA,Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  II,  p.  247  (1811). 

OïDBMiA  NIGRA,  Flem.  PJiil.  Zool.  II,  p.  260  (1822). 

Melanitta  NIGRA,  Boie,  Isis,  1822,  p.  564. 

Platypus  NIGER,  Brehm,  Lehrb.  Nat:  eur.  Vôg.  II,  p.  820  (1824). 

Melanitta  nigripes,  megauros  et  gibbera,  Brm.  Isis^  1830,  p.  998. 

FuLiGULA  NIGRA,  Degl.  Orn.  eur. II.  p.  470  (1849). 

OïDEMiA  nigripes,  megaurus  et  GIBBERA,  Brm.  Naumannia,  1855,  p.  298. 

SoMATERiA  NIGRA,  de  Selys-Long.,  Patria  Belgica,  I,  p.  277  (1873). 

OïDBMA  NIGRA,  Olphe-Gal.  Contrib.  Faune  Orn.  Eur.  occ,  fasc.  III  p.  22  (1888). 

Die  Tbaubrente,  en  allemand. 

The  Common  Scotkr,  en  anglais.  — 

DeZwarte  Zeeëend,  en  flamand. 

Var.  Americana. 

Anas  americana,  Wils.  Am.  Orn.  VIII,  p.  135,  pi.  72  (1814). 

FuLiGULA  (Oidemia)  NIGRA,  Bonap .  Syn.  p.  390  (1828). 

OïDEMiA  americana,  Sw.  6t  Rich.  Faun.  Bor.-Am.  II,  p.  450  (1831). 

FuLiGULA  (Oidemia)  americana,  Nutt.  Mon.  Orn.  II,  p.  422  (1834). 

Melanitta  americana,  Eyt.  Mon.  Anat.  p.  144  (1838). 

FuLiGULA  americana,  Audub.  Orn.  Biog.  V.  p.  117  (1839). 

Œdemia  americana,  Coues,  Key  N.-Am.  B.  p.  293  (1872) . 

Œdbmia  NIGRA  var.  Americana,  Ridgw.  Ann.  Lye.  N.-Y.  X,  p.  390  (1874). 

Taille.  —  0'^48;  ailes,  0,24. 

Description  du  mâle  adulte.  —  D'un  noir  uniforme  brillant,  avec  de  légers 
reflets  bleuâtres  et  violacés  à  la  tête  et  au  cou  ;  ailes  sans  miroir.  Bec  noir, 
la  partie  moyenne  de  la  mandibule  supérieure,  les  narines  et  le  sillon  qui 
divise  la  protubérance  d'un  beau  jaune  orange  ;  iris  brun  ;  pattes  d'un  brun 
cendré,  les  palmures  noires. 

Femelle.  —  Gibbosité  du  bec  moins  développée  ;  dessus  de  la  tête, nuque  et 
partie  postérieure  du  cou  d'un  brun  sombre  ;  joues,  gorge,  devant  et  côtés  de 
la  moitié  supérieure  du  cou  d'un  cendré  clair  varié  de  blanc  et  tacheté  de 
brun  ;  dessus  du  corps  d'un  brun  noirâtre  avec  les  bordures  des  plumes  d'un 
cendré  roussâtre;  bas  du  cou,  haut  de  la  poitrine,  flancs  et  sous-caudales 
bruns,  les  plumes  bordées  de  cendré  roussâtre  ;  bas  de  la  poitrine  et  abdomen 
d'un  brun  cendré,  le  bord  des  plumes  plus  pâle  ;  rémiges  et  rectrices  d'un 
brun  sombre. 

Jeune.  —  Ressemble  à  la  femelle,  mais  les  teintes  plus  sombres  et  le  bec 
d'un  noir  uniforme. 


501  - 


Poussin.  —  Capuchon  ample,  descendant  jusqu'au  niveau  des  commis- 
sures, derrière  du  cou,  manteau  jusqu'à  l'extrémité  des  tiges  caudales,  dessus 
des  ailes  et  des  cuisses  d'un  brun  enfumé;  poitrine  et  flancs  de  cette  couleur, 
mais  un  peu  plus  pâles;  gorge,  devant  et  côtés  du  cou,  ventre  et  abdomen 
gris,  fondus  latéralement  avec  la  teinte  brune;  mandibule  supérieure  d'un 
noir  plombé  avec  l'onglet  roux  ;  mandibule  inférieure  d'un  brun  roux  ; 
pieds  brun  olivâtre,  les  membranes  plus  foncées  ;  iris  brun  (J.  Vian). 

Var.  Amerieana.  —  Ne  diffère  du  type  européen  que  par  la  coloration  de 
lagibbosité  placée  à  la  base  du  bec:  celle-ci  est  noire  chez  les  sujets  d'Europe, 
jaune  chez  ceux  d'Amérique. 


Hab. 


La  Macreuse  ou  Morillon  noir  habite,  en  été,  toute  la  zone 
.^  polaire  de  l'Europe  et  de  l'Asie 
il  i  jusqu'au  74°  1.  N.  (Middendorff), 
y  compris  l'Islande  {Faber),  le 
sud-ouest  de  la  Nouvelle-Zem- 
ble, Waigatz  (de  Heuglin)  et  les 
les  Féroé  {Feilden);  elle  est 
abondante  sur  les  nombreux  lacs 
de  la  Finlande  {Palmén),  et 
quelques  couples  nichent  égale- 
ment en  Ecosse  {Seebohm)  ;  elle  est  commune  aux  passages  dans  la 
Russie  centrale  et  se  montre  à  cette  époque  sur  les  lacs  et  sur  l'Oural 
{Sabandeff).  En  hiver  cet  oiseau  visite  en  grand  nombre  toutes  les 
côtes  et  les  fleuves  de  l'Europe  occidentale  jusque  dans  le  nord  de  la 
France,  et  il  est  alors  commun  sur  nos  côtes  maritimes  et  sur  l'Escaut. 
On  le  voit  en  petit  nombre  dans  le  midi  de  la  France  {Lacroix),  et 
accidentellement  en  Espagne  [Saunders],  en  Italie  [Giglioli)  et  en 
Grèce  {Lindermayer).  Pallas  dit  qu'il  hiverne  aussi  sur  la  mer  Noire 
et  sur  la  mer  Caspienne,  mais  aucun  naturaliste  récent  ne  l'a  observé 
sur  ces  mers  ;  mais  il  visite  avec  assez  de  régularité  les  îles  Açores 
{Godman),  le  Maroc  [Favier),  l'Algérie  {Loche)  et  la  Palestine 
{Tristram). 

En  remontant  le  cours  des  fleuves,  cette  Macreuse  arrive  parfois 
loin  dans  l'intérieur  des  terres:  c'est  ainsi  qu'on  l'a  observée  en 
Pologne  {Taczanoivski),  en  Bohême  {Fritsch),  en  Suisse  {Fatio),  en 
Alsace  {Krœrier),  etc. 

La  var.  Amerieana  habite  les  côtes  et  les  grandes  eaux  intérieures 
de  l'Amérique  septentrionale  (Coues)  et  du  Kamtschatka  {Stejncgcr). 
Elle  ne  paraît  pas  exister  au  Groenland  ;  mais  elle  est  commune  dans 


—  502  — 

l'Alaska,  aux  îles  Aléoutiennes  et  dans  le  détroit  de  Behring  {Nelson). 

Mœurs.  —  La  Macreuse  noire  émigré  en  septembre  des  contrées 
polaires,  mais  elle  ne  devient  abondante  sur  nos  côtes  qu'à  la  fin 
d'octobre  et  en  novembre.  D'après  Naumann,  les  vieux  partiraient 
plus  tôt,  car  on  en  voit  déjà  en  août  sur  la  Baltique;  mais  le  D'  Rei- 
chenow  fait  remarquer  qu'on  observe  souvent,  en  été,  quelques  su- 
jets isolés  le  long  des  côtes  allemandes.  Le  retour  vers  le  Nord  a  lieu 
en  mars  et  avril,  mais  les  passages  se  prolongent  parfois  jusqu'en  mai. 

C'est  surtout  un  oiseau  marin,  mais  il  niche  dans  les  marais  et 
près  des  étangs  et  des  lacs  qui  se  trouvent  dans  le  voisinage  de  la 
mer;  en  hiver,  il  remonte  souvent  le  cours  des  fleuves  et  on  le  voit 
alors  parfois  loin  des  côtes  maritimes:  c'est  ainsi  qu'on  en  tire  chaque 
année  sur  l'Escaut  et  parfois  aux  environs  de  Bruxelles;  il  recherche 
toujours  de  préférence  les  grandes  eaux  profondes,  douces  ou  salées, 
et  dépourvues  d'herbages.  — 

Cette  Macreuse  marche  avec  autant  de  difficulté  que  les  précédents, 
mais  elle  nage  avec  une  grande  aisance,  plonge  avec  facilité  et  peut 
rester  sous  l'eau  plus  longtemps  qu'aucun  autre  Canard  plongeur; 
c'est  aussi  en  plongeant  qu'elle  pêche  les  petits  animaux  dont  elle  se 
nourrit.  Son  vol  est  fatigant  et  bruyant,  et  quand  plusieurs  s'envolent 
en  même  temps,  elles  se  suivent  ordinairement  à  la  file.  Elle  est  très 
sociable  et  se  lie  même  à  d'autres  espèces,  sans  toutefois  se  mêler  à 
celles-ci.  Elle  est  aussi  prudente  que  farouche;  à  l'approche  d'un  danger 
sérieux,  elle  est  toujours  la  première  à  donner  le  signal  de  la  fuite. 
Les  mâles  adultes  ne  se  tiennent  généralement  pas  avec  les  femelles 
et  les  jeunes,  et  forment  de  petites  bandes  à  part. 

Pendant  la  durée  des  amours,  le  mâle  fait  entendre  un  cri  ressem- 
blant, d'après  Naumann,  à  skruck  luck  ;  Faber  dit  que  le  mâle  jette 
souvent  un  cri  sifflant  mais  peu  sonore,  qu'on  peut  rendre  par 
tu-tu-tu-tu,  auquel  la  femelle  répond  par  re-re-re. 

La  Macreuse  noire  se  nourrit  de  coquillages, de  crustacés, de  petits 
poissons,  de  larves,  d'insectes  et  de  matières  végétales  ;  ce  genre  de 
nourriture  donne  à  sa  chair  un  goût  huileux  et  rance  fort  désagréable. 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  ne  niche  que  dans  l'extrême  Nord.  En 
Islande,  dit  Faber,  il  ne  niche  qu'en  petit  nombre  et  seulement  près 
du  lac  Myvatn  ;  là,  on  trouve  le  nid  au  bord  de  l'eau,  caché  sous  un 
buisson  de  saules  ou  de  bouleaux.  Il  construit  parfois  son  nid  près 
d'une  eau  fort  éloignée  de  la  mer,  mais  toujours  dans  un  endroit  tran- 
quille et  éloigné  de  toute  habitation  humaine.  Le   nid  est  formé  de 


—  503  - 

joncs, d'herbes  et  de  feuilles  mortes, le  tout  formant  un  tas  dont  l'exca- 
vation est  garnie  de  duvet. En  Islande  la  ponte  a  lieu  vers  la  mi-juin; 
dans  le  nord-est  de  la  Russie,  M.  Seebohm  ne  trouva  des  œufs  frais 
qu'en  juillet.  La  ponte  est  de  huit  a  dix  œufs  d'un  fauve  pâle  et 
mesurant  environ  63  millim.  sur  43. 

Le  mâle  abandonne  généralement  sa  compagne  au  moment  de  la 
couvaison,  sans  s'inquiéter  de  sa  progéniture,  et  va  rejoindre  sur  la 
mer  les  autres  mâles. 

270.  —  La  Macreuse  brune  ou  lugubre. 
OIDEMIA  FUSCA,  Flem.  ex  Lin. 

(PI.    271). 

Anasfosca,  Lm.Syst.  nat.  p.  l'23  (1758),  I,  p.  196  (1766). 

Anas  nigba  major,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  423  (1760). 

Anas  fuliginosa,  Bechst.  Naturg.  Deutschl.  III,  p.  962  (1809). 

Anas  carbo,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  Il,  p.  244  (1811). 

Melanitta  FUSCA,  Boie,  Isis,  1822,  p.  564. 

OïDEMiA  FUSCA,  Flem.  Phil.  Zool.  II,  p.  260  (1822). 

Platypus  fusgus,  Brehm,  Lehrb.  Naturg.  eur.  Vôg.  II,  p.  822  (1824). 

Melanitta  hornschuchii,  megapus,  platyrhynchos,  Breh.  Isis,  1830,  p.  998. 

FuLiGULA  FUSCA,  Degl.  Om.  Eur.  II  p.  472  (1849), 

FuLiGULA  LUGUBRis,  C.  Dub .  PL  col.  Ois.  Belg.  III,  p.  283  (1860). 

Somateria  fusca,  de  Selys-Loag.  Palria  Belgica,  I.  p.  277  (1873). 

Die  Sammetente,  en  allemand. 

The  Velvet  Scoter,  en  anglais. 

De  Grootb  Zeeëend,  en  flamand. 

Var.  Deglandi. 

Anas  fusca,  Wils.  Am.  Om.  VIII,  p.  137,  pi.  72  (1814). 

OïDEMiA  FUSCA,  Sw.  et  Rich.  Faun.  bor.  Am.  II,  p.  449  (1831). 

FuLiGULA  FUSCA,  Audub.  Orn.  Biog.  II,  p.  454,  pi.  247  (1835). 

FuLiGULA  BiMACULATA,  Herb.  (j^une),  Field Sports.,  2»  éd.  II,  p.  366  (1848) . 

OïDEMiA  deglandi,  Bonap.  Rev.  crit.  p.  108  (1850). 

OïDEMiA  velvetina,  Cass.  Pr.  Philad.  Acad.  V.  p.  126  (1850). 

Melanitta  deglandi,  Bonap   Comp.  Rend.  sept.  (1856). 

OïDEMiA  (Pelionetta)  BIMACULATA,  Baird.  Birds  N.  Am.  p.  808  (1858). 

Melanitta  velvbtina,  Baird.  B.  N.  Am.  p.  805(1858). 

FuLiGULA  FUSCA  VELVETINA,  Scob.  Brit.  B.  111,  p.  605  (1885). 

Taille  du  mâle  :  0'"47  ;  ailes  0,29  ;  femelle  2,45;  ailes  0,27. 

Description  du  mâle  adulte.  —  D'un  noir  profuiul,  avec  une  tacho  blanche 
sous  l'œil  et  uu  miroir  bluuc  sur  l'aile.  Bec  orauge,  les  narines,  la  protubc- 


—  504  — 

rance,  deux  traits  prenant  naissance  au  bord  extérieur  de  celle-ci  et  abou- 
tissant aux  côtés  de  l'onglet,  angles  et  bords  des  mandibules,  noirs;  iris 
blanc  ;  tarses  et  doigts  rouges,  les  membranes  noires. 

Femelle.  —  Brune  en  dessus  ;  lorams  et  une  tache  sur  la  région  paroti- 
que  blanchâtres  ;  un  miroir  blanc  sur  l'aile  ;  parties  inférieures  brunes  avec 
les  plumes  bordées  de  blanchâtre.  Bec  d'un  brun  noirâtre,  sans  protubérance; 
iris  brun  ;  tarses  et  doigts  d'un  jaune  olivâtre. 

Jeune.  —  Ressemble  à  la  femelle  adulte,  mais  les  plumes  du  manteau 
bordées  de  cendré  clair  et  les  parties  inférieures  plus  blanches.  Tarses  et 
doigts  d'un  gris  jaunâtre  chez  la  femelle,  d'un  gris  rougeâtre  chez  le  mâle  ; 
ce  dernier  a  la  tête  d'un  brun  uniforme  sans  taches  blanchâtres. 

Mâle  en  été.  —  Son  plumage  ressemble  alors  probablement  à  celui  de  la 
femelle,  dont  il  doit  se  distinguer  par  la  protubérance  de  son  bec,  la  couleur 
rouge  des  pieds  et  par  son  iris  blanc  {Palmén). 

Poussins.  —  Capuchon  complet  descendant  au-dessous  des  yeux,  en  avant 
jusqu'aux  commissures,  remontant  en  arrière,  au-dessus  des  oreilles,  d'un 
brun  noirâtre  ;  manteau  relié  au  capuchon  par  une  bande  sur  le  derrière  du 
cou,  tiges  caudales,  dessus  des  ailes  et  des  cuisses  et  plastron  sur  la  poitrine 
d'un  brun  un  peu  moins  foncé;  quatre  taches  pâles  mais  à  peine  visibles  sur 
le  dos  ;  gorge  et  ventre  blancs;  côtés  postérieurs  de  la  tête  de  cette  couleur, 
mais  assombris  par  une  petite  tache  sur  les  oreilles,  et  par  les  pointes  brunes 
du  duvet  ;  abdomen  gris  ;  bec  brun  avec  les  onglets  plus  pâles  ;  pieds  d'un 
brun  olive  ;  iris  gris  brun.  (J.  Vian). 

Var.  Deglandi.  —  Elle  a  les  plumes  du  front  qui  descendent  davantage 
sur  le  bec,  et  la  tache  blanche  sous  l'œil  est  plus  grande,  mais  les  traits 
noirs  qui  se  dirigent  de  la  protubérance  du  bec  à  l'onglet  n'existent  pas 
chez  la  variété. 


Hab. 


La  Macreuse  brune 


habite  en  été  le  nord  de  la  Scandi- 
navie, la  Laponie  (Collett),  Wai- 
gatz,  la  Nouvelle-Zemble,  le 
Spitzberg  (de  Heuglin),  tout  le 
nord  de  la  Russie  et  de  la  Sibérie 
{Middendorff)  ainsi  que  le  Japon 
{Swinhoé).  Elle  n'existe  pas  en 
Islande,  mais  visite  parfois  le 
Groenland  (Seebohm)  et  les  îles 
Féroé  {Mûller).  En  hiver  on  la 
voit  régulièrement  aux  îles  Britanniques,  mais  elle  est  peu  abondante 
sur  les  côtes  méridionales  et  orientales  de  l'Angleterre  et  rare 
sur  celles  de  l'Irlande  {Seebohm).  Pendant  la  saison  froide,  cet  oiseau 


-  505  - 

se  montre  communément  sur  les  côtes  du  Danemark,  de  l'Allemagne 
et  de  la  Hollande,  quoique  en  moins  grand  nombre  que  la  Macreuse 
noire  ;  en  Belgique  et  dans  le  nord  de  la  France  on  ne  la  voit  géné- 
ralement qu'en  petit  nombre,  et  elle  devient  de  plus  en  plus  rare  à 
mesure  qu'on  approche  delà  Méditerranée.  Elle  est  donc  plus  ou  moins 
rare  dans  le  midi  de  la  France  {Lacroix),  sur  les  côtes  du  Portugal 
{Barhoza  du  Bocage),  de  l'Espagne  où,  d'après  M.  Dresser,  Lord 
Lilford  observa  une  petite  troupe  en  mai  1876  dans  le  port  de  San- 
tander,  en  Italie  [Gigrlioli) y  en  Grèce  [Lindermayer),  aux  Cyclades 
{Erhardt)  et  sur  la  mer  Noire  {de  Nordmann). 

Cette  Macreuse  visite  souvent  aussi  l'intérieur  de  l'Europe,  et  elle 
n'est  même  pas  rare  en  hiver  sur  les  lacs  de  la  Suisse  {Meisnerei 
Schinz)',  en  France,  on  l'a  capturée  dans  le  Morbihan  {Taslê),  dans 
les  départements  delà  Sarthe  {Gentil),  de  la  Seine-Inférieure  {Hardy), 
du  Rhône  {Olphe-Gallia?'d),  de  la  Charente-Inférieure  et  de  la  Loire 
{Beltrém),  de  l'Indre  {Martin),  de  la  Gironde  {Dubalen),  du  Gard 
{Crespon),  en  Savoie  {Bally),  etc.  En  Allemagne  on  la  voit  chaque 
année  sur  le  lac  de  Eislebe  et  même  parfois  dans  l'Anhalt  {Naumann) 
et  en  Alsace  {Kroener),  ainsi  qu'on  Bohême  {Fritsch),  en  Autriche, 
en  Hongrie  {von  Pelzeln)  et  en  Pologne  {Taczanowski). 

Cet  oiseau  se  montre  aussi  accidentellement  au  Maroc,  en  Algérie 
{Loche)  et  dans  les  lagunes  de  la  Basse-Egypte  {de  Heuglin). 

Outre  les  parties  septentrionales  de  l'Asie,  on  rencontre  encore 
cette  espèce,  au  passage  ou  en  hiver,  près  de  la  mer  Caspienne 
{De  Filippi,  Raddé),  au  Turkestan  {Severtzoïo),  dans  la  Sibérie  orien- 
tale {Taczanoioski),  dans  le  nord  de  la  Mongolie  {Radde),  en  Chine 
{David)  et  au  Japon.  D'après  M.  Stejneger,  les  sujets  de  l'Asie  orien- 
tale appartiendraient  à  la  var.  Deglandi  ;  mais  M.  Swinhoe  dit  que 
les  deux  formes  se  montrent  en  Chine  et  au  Japon. 

La  var.  Deglandi  habite  particulièrement  les  côtes  et  les  grandes 
eaux  intérieures  de  l'Amérique  septentrionale  {Coues)  et  le  Kamt- 
schatka  {Stejneger). 

Mœurs.  —  Les  grands  froids  obligent  cette  Macreuse  à  émigrer  à 
l'approche  de  l'hiver;  c'est  fin  octobre  et  en  novembre  qu'elle  quitte 
la  zone  polaire  pour  y  retourner  fin  février  et  en  mars.  Le  voyage  se 
fait  ordinairement  la  nuit  et  par  troupes,  tous  volant  à  la  tilo  et  en 
ligne  obli(j[ue. 

Cet  oiseau   vit  sur  la  mer  comme  sur  les  eaux  douces,  et  il  se 
montre  même  sur  les  rivières  et  les  lacs  situés  parfois  loin  des  côtes 
TOM.  II.  —  1893.  64 


—  506  - 

maritimes  ;  il  évite  cependant  les  eaux  douces  garnies  de  joncs  et  de 
roseaux,  car  il  lui  faut  une  surface  d'eau  étendue  et  libre.  Son  cri 
ressemble  à  arr,  arr,  arp!  11  se  nourrit  comme  l'espèce  précédente. 

La  Macreuse  brune  ou  double  Macreuse  est  très  sociable  et  se  mêle 
souvent  aux  bandes  de  Macreuses  noires.  Elle  marche  et  vole  lourde- 
ment mais  nage  et  plonge  avec  une  grande  aisance.  Plusieurs  auteurs 
disent  qu'elle  est  peu  farouche  et  qu'elle  se  laisse  prendre  aux  pièges 
les  plus  grossiers;  A.  Brehm  affirme  le  contraire:  «  je  puis  certifier, 
dit-il,  d'après  mes  propres  observations,  qu'en  Norwège  du  moins, 
c'est  le  plus  timide  de  tous  les  fuligulidés.  Ce  fut  à  DovreQeld  que  je 
vis  les  premières  Macreuses;  elles  étaient  par  paires,  car  c'était  l'épo- 
que des  amours.  Je  cherchai,  mais  en  vain,  à  en  tuer.  Il  est  vrai  que 
l'habitude  qu'elles  ont  de  toujours  se  tenir  au  milieu  de  l'eau,  contri- 
bue puissamment  à  rendre  leur  chasse  fort  difficile.  Plus  tard,  en 
Laponie,  j'en  rencontrai  de  nombreuses  familles  fumais  toujours  ces 
oiseaux  se  montraient  fort  prudents.  Tous  ceux  que|  j'ai  pu  observer 
vivaient  pour  eux-mêmes  sans  s'inquiéter  des  autres  oiseaux.  » 

Reproduction. —  La  Macreuse  brune  niche  fin  juin  ou  en  juillet,  au 
bord  des  étangs  assez  voisins  de  la  mer.  Le  nid  est  ordinairement 
établi  au  milieu  des  hautes  herbes,  près  d'un  monticule  ou  d'une 
pierre,  ou  sous  un  buisson  de  saules  ou  de  bouleaux.  Il  est  grossière- 
ment fait  de  branches,  de  chaumes  et  de  feuilles  mortes,  et  l'intérieur 
est  garni  de  duvet.  La  ponte  est  de  huit  à  dix  œufs  d'un  blanc  jau- 
nâtre ou  grisâtre,  et  ils  mesurent  environ  73  millim.  sur  47. 

Aussitôt  que  les  poussins  sont  éclos,  ils  suivent  leur  mère  sur  l'eau 
qu'ils  ne  quittent  presque  plus;  ils  se  reposent  sur  des  pierres  s'élevant 
hors  de  l'eau  ou  sur  le  dos  de  leur  mère.  Ils  passent  d'ailleurs  les  pre- 
miers temps  de  leur  existence  dans  des  endroits  peu  profonds  et 
où  il  y  a  abondance  de  crustacés  et  de  mollusques  ;  Gadamer  dit  que 
les  jeunes  prennent  aussi  très  adroitement  des  mouches  et  autres 
insectes,  et  qu'ils  font  parfois  de  grands  sauts  pour  les  attraper. 

271.   —  La  Macreuse  à  lunettes. 

OIDEMIA  PERSPICILLATA,  Steph,  ex  Lin. 

(PI.  272) 

Anas  PERSPICILLATA,  Lin.  Syst.nat.  I,  p.  201  (1766). 

Anas  latirostris,  Bodd.  Tabl.  PL  col.  p.  58  (1783). 

Melanitta  PERSPICILLATA,  Boie,  Isis.,  1822,  p.  564. 

Platypus  perspicillatus,  Brehm,  Lehrb.  Naturg.  eur.   Yôg.  Il,  p.  823  (1823). 


—  507  - 

OïDEMiA  PER3PICILLATA,  Steph.  Shaw's  Gen.  Zool.  XII,  2,  p.  219  (1824). 

FuLiGULA  (Oidemia)  perspicillata, Bonap.  v1?î. Lî/c.  Nat.  Hist.  N.Y.  II,  p. 389  (1826). 

Macroramphus  perspicillatus,  Less.  Man.  (TOrn.  II,  p.  414(1828). 

Pelionetta  perspicillata,  Kaup.  Naturl.  Si/st.  p.  107  (1829). 

FuLiGULA  perspicillata,  Aud.  Orn.  Biocjr.  IV,  p.  161,  pi.  317  (1838); 

Somaterla.  PERSPiciLL-iTA,  Holb.  Om.  Beitr.  Fauna  Groenl.  p.  77  (1846). 

Pelionetta  trowbridgii,  Baird,  B.  N.  Am.  p.  806  (1858). 

Œdemia  PERSPICILLATA,  uar.  trowbridgei,  Cou.es,  Key  N.  Am.  B.,  p.  295(1872). 

Œdemia  PERSPICILLATA,  Coues,  B.  Northwest.,  p.  582  (1874). 

Die  BkiLLENENTE,  en  allemand. 

Thb  Surf-  Scotter,  en  anglais. 

De  Brillen  Zeeëend,  en  flamand. 

Taille  :  0'"45  ;  ailes  0'"245. 


Description  du  mâle  adulte.  —  D'un  noir  uniforme,  sans  miroir  sur  l'aile, 
avec  une  grande  tache  blanche  sur  le  devant  de  la  tête  et  une  autre  de  même 
couleur  occupant  presque  toute  l'étendue  de  la  nuque  ;  rémiges  et  queue  noi- 
râtres. Bec  jaune  varié  de  rouge,  avec  une  grande  tache  noire,  de  forme 
presque  carrée,  sur  chaque  protubérance  latérale  ;  iris  blanc  ;  pattes  rouges, 
les  membranes  noires. 

Femelle.  —  D'un  brun  tirant  sur  le  cendré,  plus  sombre  en  dessus,  avec 
une  calotte  noirâtre  sur  la  tête  ;  une  tache  blanchâtre  devant  l'œil  et  une 
autre  couvrant  la  région  des  oreilles  ;  milieu  de  l'abdomen  d'un  blanc 
grisâtre  ;  rémiges  et  queue  d'un  brun  noirâtre.  Bec  brun,  sans  renflements 
latéraux  ;  iris  gris  ;  pattes  d'un  gris  rougeâtre,  les  membranes  noires. 

Cette  femelle  ressemble  beaucoup  à  celle  de  la  Macreuse  brune,  mais  s'en 
distingue  à  première  vue  par  l'absence  de  miroir  blanc  sur  l'aile. 

Jeune.  —  Ressemble  à  la  femelle. 


Hab.  —  La  Macreuse  ou  Morillon  à  lunettes  est  une  espèce  amé- 
ricaine qui  habite,  en  été,  toutes 
les  côtes  et  les  grands  lacs  de 
l'Amérique  du  Nord  entre  le  50** 
et  le  70"  1.  N.  ;  elle  hiverne  sur 
les  côtes  et  les  lacs  de  Etats  du 
Sud  jusque  dans  la  Basse-Cali- 
fornie, la  Floride  et  la  Jamaïque 
(Coucs).  Elle  est  rare  au  Groen- 
land [IlolbOll)  et  se  montre  très 
accidentellement  aux  îles  Bermudcs  {Scehohm),  Féroé  {Collin),  Hel- 
gokind  {de  Srlijs-Longchatnps)  et  aux  îles  Britaniiiqut^s. 

M.  llarting  signale  douze  captures  en  Grande-Bretagne  de  1847  à 


—  808  — 

1868  ;  depuis  cette  époque  deux  sujets  furent  tués  aux  îles  Orcades 
en  1875  et  1879,  un  autre  à  l'île  Hoy  en  1872,  deux  autres  près  de 
Stromness  en  1872  et  1880;  la  même  année  on  fit  encore  une  capture 
en  octobre  près  de  Clontarf  en  Irlande;  enfin  le  9  décembre  1882, 
une  femelle  fut  tuée  sur  le  Ribble  {Seehohm).  Sur  le  continent,  cette 
espèce  a  été  prise  plusieurs  fois  en  Laponie  {Malmgren)  ;  Nilsson 
mentionne  un  sujet  tué  en  1833  près  de  Karesuando  et  un  autre  près 
de  Calmar  en  1846  ;  le  D""  Palmén  signale  également  deux  captures  : 
l'une  près  d'Aeland  en  1866  et  une  près  de  Pojo  en  1867,  et  le  pro- 
fesseur Malmgren  a  constaté  une  troisième  capture  dans  la  même 
région.  Feu  mon  père  a  annoncé  qu'une  femelle  de  Macreuse  à  lu- 
nettes avait  été  tuée  sur  la  côte  de  Belgique  en  1845.  Pour  la  France, 
Degland  dit  :  «  On  la  rencontre  sur  les  côtes  maritimes  de  l'Artois, 
de  la  Picardie  et  de  la  Normandie  ;  un  jeune  sujet  a  été  tué  près  de 
Calais  dans  l'hiver  de  1835;  en  1841,  un  autre -mijet  a  été  trouvé, 
dans  la  même  saison,  sur  le  marché  de  Caen.  »  Dans  la  nouvelle 
édition  de  V  Ornithologie  européenne,  M.  Gerbe  ajoute  :  «  On  l'ap- 
porte assez  souvent  sur  le  carreau  de  la  Vallée  à  Paris  :  nous  l'y 
avons  vue  en  1845,  1846  et  1852  ;  en  1864,  quatre  ou  cinq  individus 
y  ont  été  rencontrés  dans  le  courant  de  l'hiver.  »  Naumann  signale 
avec  doute  la  capture  d'une  femelle  sur  le  Rhin. 

Mœurs.  —  Cette  Macreuse  émigré  en  septembre  de  l'Amérique 
boréale  pour  hiverner  sur  les  côtes  et  les  grandes  eaux  intérieures 
des  Etats  du  Sud,  mais  elle  séjourne  sur  les  grands  lacs  jusqu'à  ce 
que  la  gelée  les  ait  couverts  de  glace.  En  hiver  elle  est  commune 
sur  toutes  les  côtes  orientales  depuis  la  Nouvelle-Ecosse  jusqu'à  la 
Caroline.  C'est  un  oiseau  très  sociable  qui  voyage  souvent  en  compa- 
gnie de  Miquelons  et  de  Macreuses  américaines. 

A  mesure  que  le  froid  augmente,  les  bandes  se  dirigent  de  plus  en 
plus  vers  le  Sud,  mais  dès  le  mois  de  février  commence  graduellement 
le  retour  vers  le  Nord  ;  en  avril  ils  sont  de  nouveau  dans  les  lieux  de 
la  reproduction. 

La  Macreuse  à  lunettes  vit  aussi  bien  sur  la  mer  que  sur  les  eaux 
douces,  on  la  rencontre  dans  les  toundras  comme  dans  les  contrées 
boisées  parsemées  de  lacs  et  d'étangs  ou  arrosées  par  une  rivière.  Elle 
se  nourrit  principalement  de  coquillages  et  autres  mollusques,  ainsi 
que  de  petits  poissons,  larves  et  insectes  aquatiques. 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  niche  entre  les  herbages  ou  sous  un 
buisson,  au  bord  d'un  étang  ou  dans  un  marais  sur  une  légère  éleva- 


—  509  - 

don  à  l'abri  de  l'eau.  Le  nid  est  formé  de  bûchettes,  de  feuilles  et 
d'herbes  sèches  et  l'intérieur  est  garni  de  duvet.  La  ponte  est  de  cinq 
à  huit  œufs,  couleur  café  au  lait  ;  ils  mesurent  environ  58  millimètres 
sur  43. 

SOUS-FAMILLE 

DES  MERGINÉS.  —  MERGIN/E. 

Car.  —  Bec  mince,  aussi  long  ou  plus  long  que  la  tête,  rarement  plus 
court,  droit,  épais  et  déprimé  à  la  base,  puis  effilé  et  cyUndrique  jusqu'à 
l'onglet  ;  lamelles  représentées  par  des  dents  cornées  dirigées  en  arrière  et 
visibles  quand  le  bec  est  fermé,  mais  ces  dents  ne  ressemblent  pas  à  celles 
des  autres  vertébrés,  ce  sont  simplement  des  lamelles  dentiformes  ;  narines 
latérales,  elliptiques  ;  ailes  de  longueur  moyenne,  aiguës  ;  jambes  placées  en 
arrière  du  corps;  tarses  plus  courts  que  le  doigt  interne;  pouce  élevé,  muni 
d'un  lobule. 

Plumes  de  la  tête  plus  ou  moins  allongées  et  formant  une  huppe. 

Cette  division  ne  comprend  qu'un  seul  genre,  celui  des  Harles.  " 

Hab.  —  La  zone  froide  des  deux  mondes. 

Mœurs.  —  Les  Harles  sont  plus  ou  moins  marins, mais  ils  se  repro- 
duisent près  des  eaux  douces.  Ils  nagent  et  plongent  à  la  perfection 
et  se  nourrissent  principalement  de  poissoDs  et  autres  petits  animaux, 
qu'ils  vont  parfois  chercher  au  fond  de  l'eau  ;  leurs  mœurs  ont  du 
reste  de  grands  rapports  avec  celles  des  Fuligulinôs.  Comme  certains 
de  ces  derniers,  ils  nichent  sur  le  sol  ou  dans  des  arbres  creux. 

GENRE     CLV 

HARLE.   —  MERGUS. 

Mergus,  Lin.  Syst.  nat.  (1758j  et  1,  p.  208  (1766). 
Mekganser,  Briss.  Omith.  VI,  231  (1760j. 
Mergellus,  Selby,  Cat.  Gen.  B.  p.  47  (1840). 

Car.  —  Ceux  de  la  sous-famille. 


272.   —  Le  Harle  blanc  ou  piette. 
MERGUS  ALBELLUS,  Lin. 

(PI.  273.) 

Merganser  cristatus  minor  et  m.  stellatu-s,  Hiiss.  Ormth.  VI,  pp   243,  252  (1760). 
Mergus  ALUELLUset  minutus,  Lin.^'y^.  nat.  I,  p.  20'J  (1766). 


-  510  — 

Mergus  albulus  et  pannonicus,  Scop.  Ann.  I.  Eist.  nat.  pp.  71,  72  (1769). 

Merganser  albellus,  Bodd.  Tabl.  PL  enl.  p.  27  (1783). 

Mergellus  albellus,  Selby,  Gen.  and  subgen.  B.  p.  47  (1840). 

Der  Kleine  Sager,  en  allemand. 

The  Smbw,  en  anglais. 

Het  Nonnetje,  en  flamand. 

Taille  du  mâle  :  0^37;  ailes  0'"21;  femelle  :  0°^32;  ailes  0^18. 

Description  du  mâle  en  plumage  de  noce.  —  Tête  et  cou  d'un  blanc  pur,  avec 
une  grande  tache  noire  sur  les  côtés  de  la  tête  et  contournant  l'œil,  et  une 
bande  de  même  couleur  de  chaque  côté  de  l'occiput  et  recouvertes  en  partie 
par  les  longues  plumes  blanches  de  la  huppe  ;  poitrine  blanche  ;  manteau,  dos 
et  deux  longs  croissants  de  chaque  côté  de  la  poitrine,  noirs;  scapulaires 
blanches,  mais  à  bord  externe  noir,  les  plus  longues  d'un  cendré  noirâtre  5 
petites  couvertures  des  ailes  noirâtres;  les  moyennes  blanches,les  plus  grandes 
noires  terminées  de  blanc;  rémiges  primaires  noirâtres,  les  secondaires 
noires  terminées  de  blanc;  sus-caudales  cendrées  ;  queue^'un  brun  cendré  ; 
parties  inférieures  blanches,  les  flancs  barrés  de  zigzags  cendrés.  Bec  d'un 
gris  bleuâtre  ;  iris  d'un  blanc  bleuâtre  ;  pattes  gris  de  plomb  avec  les  mem- 
branes noirâtres. 

Femelle.  —  Tête  jusqu'au  dessous  des  yeux  et  nuque  d'un  roux  sombre  ; 
gorge,  devant  et  côtés  du  cou  d'un  blanc  pur  ;  bas  du  cou  d'un  cendré  rous- 
sâtre;  manteau,  dos,  scapulaires  et  sus-caudales  d'un  cendré  brunâtre,  plus 
sombre  au  manteau;  petites  couvertures  des  ailes  cendrées,  les  moyennes 
blanches,  les  plus  grandes  noires  terminées  de  blanc;  rémiges  primaires  noi- 
râtres, les  secondaires  noires  terminées  de  blanc;  parties  inférieures  blan- 
ches,les  côtés  de  la  poitrine  et  les  flancs  cendrés;  queue  d'un  cendré  brunâtre; 
iris  brun  clair. 

Mâle  en  été.  —  Ressemble  à  la  femelle,  mais  la  huppe  plus  développée,  le 
manteau  plus  sombre,  le  jabot  d'un  gris  clair  avec  les  bordures  des  plumes 
plus  pâles  ;  l'iris  blanc. 

Jeune.  —  Ressemble  également  à  la  femelle,  mais  ses  teintes  sont  moins 
pures,  la  huppe  nulle,  les  couvertures  blanches  des  ailes  sont  en  partie  grises; 
iris  brun  foncé. 

Poussin.  —  Large  capuchon  descendant  au-dessous  des  yeux  jusqu'aux 
commissures,  derrière  du  cou,  manteau,  faces  externes  des  ailes  et  des  cuisses 
d'un  brun  noir,  varié  par  des  bordures  aux  ailes  et  quatre  taches  blanches 
disposées  sur  le  dos  comme  les  quatre  angles  d'un  carré  ;  haut  du  dos  et 
plastron  sur  la  poitrine  d'un  brun  plus  pâle;  gorge,  joues,  ventre  et  abdomen 
d'un  blanc  pur;  bec  noirâtre  avec  les  onglets  d'un  jaune  roussâtre;  pieds  d'un 
brun  olivâtre  avec  les  membranes  plus  foncées,  mais  bordées  de  gris  le  long 
des  doigts.  (J.  Vian.) 


-  511  — 


Hah. 


Ce  bel  oiseau  habite  le  nord  de  l'Asie  et  de  l'Europe, 
^f^  depuis  l'île  de  Behring  dans  le 
'  "  Pacifique  {Stejneger)^  la  Sibérie 
îjj  et  la  Russie  jusqu'aux  mers  Bal- 
ly  tique  et  du  Nord,  sans  dépasser 
le  cercle  polaire  arctique.  Il  est 
commun  dans  le  nord  de  la 
Russie  et  dans  les  gouverne- 
ments de  Kasan,  d'Orenbourg, 
de  Saratow,  de  Simbirsk  et  de 
Moscou  {Bogdanow,  etc. )y  mais  ne  paraît  pas  nicher  au  suddu  55°1.  N.; 
Bogdanow  l'a  trouvé  nichant  dans  la  vallée  du  Kama  et  du  Volga 
inférieur.  Il  est  assez  rare  en  Finlande  {Palmén),  dans  la  région  de 
St-Pétersbourg  [Bûchner)  et  sur  les  côtes  de  la  Suède  {Xilsson),  mais 
ne  visite  que  très  accidentellement  le  midi  de  la  Norvège  [Collett). 
Il  est  rare  aux  îles  Britanniques,  qu'il  ne  visite  qu'en  hiver,  et  on  le 
voit  le  plus  ordinairement  sur  les  côtes  et  les  eaux  intérieures  des  par- 
ties orientales  de  l'Ecosse  et  de  l'Angleterre,  irrégulièrement  sur  les 
côtes  occidentales  et  en  Irlande  {Seebohm). 

En  hiver,  le  Harle  piette  est  plus  ou  moins  commun  en  Pologne 
(rûe^«noi^5;fez),  en  Autriche-Hongrie  {Hinterberger,  Bonomi,  Kocyan), 
en  Allemagne  (Naumann),  au  Danemark  {KJaerbôllmg),  en  Hollande 
(Schlégel),  en  Belgique,  ainsi  qu'en  Suisse  {Meisner  et  Schinz). 
Il  est  de  passage  dans  le  nord  de  la  France  {Degland),  mais  ne  se 
montre  dans  le  midi  que  pendant  les  hivers  très  rigoureux  [Lacroix); 
il  en  est  de  même  en  Espagne  [Saunders,  Yayreda)  et  en  Portugal 
{du  Bocage),  mais  il  se  montre  plus  régulièrement  en  Italie,  surtout 
dans  le  nord,  en  Sardaigne  {Giglioli),  en  Sicile  [Malherbe),  à  l'île  de 
Malte  [Wright),  en  Grèce  [Lindermayer),  en  Turquie  [Elives  et 
Buckley),  en  Bulgarie  et  dans  la  Dobrodja  [Alléon);  il  hiverne  en 
grand  nombre  près  de  la  mer  Noire  {de  Nordmann)  et  au  Caucase  où 
il  séjourne  jusqu'à  la  mi-avril  [Radde). 

En  Afrique,  on  ne  voit  cet  oiseau  que  tout  accidentellement  au 
Maroc  [Irby),  en  Algérie  [Loche)  et  en  Palestine  [Tristram). 

En  Sibérie  ce  Harle  est  commun  ^^^^viowi  [Taczanonski);  il  hiverne 
au  Turkestan  [Severtzow)  et  jusque  dans  le  nord  de  l'Inde  {Jerdon); 
il  est  très  commun  sur  les  fleuves  et  les  lacs  de  la  Chine  centrale  et 
passe  en  grand  nombre  à  Pékin  à  la  fin  de  la  saison  froide  {David); 
il  hiverne  également  au  Japon  [Temminck  et  Schlégel). 


—  512  — 

Mœurs.  —  Le  Harle  piette  arrive  dans  nos  contrées  en  novembre 
et  en  décembre  suivant  les  rigueurs  de  la  saison,  et  nous  quitte  en 
février  ou  mars.  Il  voyage  par  petites  troupes  et  le  plus  souvent  pen- 
dant la  nuit. 

Cet  oiseau  ne  montre  aucune  prédilection  pour  la  mer,  et  s'est  tout 
au  plus  s'il  se  montre  à  l'embouchure  des  fleuves  et  dans  les  anses  où 
la  mer  est  peu  agitée.  Ce  sont  les  eaux  douces  qu'il  recherche,  et  de 
préférence  les  eaux  courantes;  pendant  ses  voyages,  il  suit  ordinai- 
rement le  cours  des  fleuves  et  des  rivières,  dont  il  s'écarte  parfois 
pour  visiter  les  lacs  et  les  étangs.  Chez  nous,  il  est  assez  abondant 
pendant  les  hivers  froids  dans  les  marais  du  nord  de  la  Campine,  dans 
les  polders,  sur  l'Escaut  et  sur  la  Nèthe,  et  on  le  voit  même  parfois 
sur  les  eaux  des  environs  de  Bruxelles. 

Au  repos  comme  en  marchant,  ce  palmipède  tient  le  corps  hori- 
zontal, le  cou  recourbé  en  S;  la  huppe  est  ordinairement  couchée, 
mais  l'oiseau  la  redresse  souvent,  surtout  quand  il  est  excité.  Il  nage 
avec  le  corps  très  enfoncé  et  se  meut  entre  deux  eaux  avec  la  plus 
grande  agilité;  quand  il  plonge,  il  se  dirige  dans  l'eau  en  tout  sens 
pour  poursuivre  sa  proie,  et  ne  revient  à  la  surface  que  beaucoup  plus 
loin,  parfois  à  quarante  ou  cinquante  mètres  de  l'endroit  où  il  a  fait  le 
plongeon.  Son  vol  est  rapide,  rectiligne  et  silencieux.  En  toute  occa- 
sion ce  Harle  se  montre  vif  et  actif,  et  les  plus  grands  froids  ne 
peuvent  lui  enlever  sa  bonne  humeur;  il  est  cependant  prudent, 
défiant,  fuit  l'homme  de  loin  et  lui  échappe  le  plus  souvent  en  plon- 
geant. 

L'attachement  que  cet  oiseau  témoigne  au  Garrot  sonneur  est  vrai- 
ment remarquable,  aussi  est-il  rare  de  voir  des  Harles  piettes  qui  ne 
soient  pas  accompagnés  d'un  Garrot  ou  deux  ;  cette  amitié,  dit 
Brehm,  résiste  même  à  la  captivité,  et  l'on  a  vu  plus  d'une  fois  dans 
des  jardins  zoologiques,  des  Harles  piettes  venir  s'établir  volontaire- 
ment sur  l'étang  occupé  par  des  Garrots.  Pendant  l'hiver  cet  oiseau 
est  assez  silencieux;  son  cri  ressemble  à  kr,  kr  d'une  voix  rauque.  Sa 
chair  n'est  pas  recommandable. 

La  nourriture  de  ce  Harle  consiste  en  crustacés,  insectes  et  larves 
aquatiques,  petits  poissons  et  jeunes  grenouilles,  et  généralement 
c'est  dans  l'eau  qu'il  poursuit  sa  proie.  «  C'est,  dit  Naumann,  un  diver- 
tissement fort  agréable  que  de  voir  une  troupe  de  ces  Harles  en  train 
de  pêcher.  Ils  nagent  serrés  les  uns  contre  les  autres,  disparaissent 
tous  à  la  fois,  et  l'on  voit  les  bouillonnements  de  l'eau  qu'ils  agitent. 


-  ol3  — 

Bientôt  ils  reparaissent  l'un  après  l'autre,  mais  séparés  et  souvent  à 
trente  ou  cinquante  mètres  de  l'endroit  où  ils  avaient  plongé.  Ils  se 
rassemblent,  plongent  de  nouveau,  et  continuent  longtemps  ce 
manège.  Une  ouverture  dans  la  glace,  de  quelques  pieds  carrés  à 
peine,  leur  suffit  pour  plonger  et  pour  pécher  leur  nourriture  sous  la 
couche  glacée  qui  recouvre  la  rivière;  ils  retrouvent  toujours  cette 
ouverture  pour  respirer  et  sortir,  ce  qui  prouve  bien  qu'ils  voient  par- 
faitement sous  l'eau.  Si  le  cours  d'eau  qu'ils  habitent  n'est  pas  assez 
poissonneux,  ils  en  fouillent  le  fond  pour  prendre  des  grenouilles, 
des  larves  et  des  insectes.  Des  Harles  piettes  réunis  sur  un  petit 
étang  riche  en  menus  poissons,  y  font  l'eiïot  do  poissons  volants,  ils 
s'élancent  hors  de  l'eau,  y  plongent  de  nouveau  et  produisent  un  tour- 
billonnement continuel.  Ces  oiseaux  ont  pour  habitude  de  plonger 
tous  ensemble,  et  cela  afin  de  surprendre  les  poissons  et  les  pour- 
suivre dans  toutes  les  directions;  ce  qui  échappe  à  l'un  devient  la 
proie  de  l'autre.  > 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  niche  au  bord  des  eaux  dans  des 
arbres  creux  ou  dans  les  petites  caisses  disposées  pour  faciliter  la 
reproduction  des  Garrots,  mais  on  ne  connaît  pas  grand' chose  sur  la 
construction  du  nid.  Ni  M.  Wolley,  ni  MM.  Harvie-Brown  et  See- 
bohm  ne  parvinrent  à  trouver  des  nids,  lors  de  leur  voyage  dans  le 
nord  de  laRussie, mais  ils  finirent  par  se  procurer  des  œufs  trouvés  par 
d'autres  dans  des  arbres  creux  ou  dans  des  caisses  disposées  pour 
des  Garrots.  La  ponte  paraît  être  de  six  à  huit  œufs,  huit  à  douze 
d'après  A.  Brehm,  qui  reposent  sur  une  couche  de  duvet.  Ces  œufs 
sont  d'un  blanc  crème  et  mesurent  environ  55  millim.  sur  38. 


273.  —  Le  Harle  bièvre. 
MERGUS    MERGANSER,   Lin. 

(PI.    274). 

Merganser  et  merganser  cinereus,  Briss.  Omith.  VI,  p.  231,  255  (1760) 

Mergus  merganser  et  m.  castor,  Lin.  Syst.  nat.  I,  pp.  208,  209  (1766). 

Mergus  gulo,  Scop.  Ann.  1 .  Eist.  nat.  p.  69(1708). 

Mergus  rubricapillus,  Gm.  Syst.  Nat.  I,  p.  5-15  (1788). 

Mergus  baucedula,  Bonnat.  Encyd.  p.  101  (1790). 

Merganser  raii  et  m.  gulo,  Leach,  Syit.  Cat.  Mam.  D.  Bf.  Mks.  p.  36  (1816) 

Merganser  castor,  Bonap.  Co»ip.  List  Ij.  p.  59  (1838). 

Mergus  orientalis,  Goukl,  Proc.  Zool.  Soc.  1845,  p.  1. 

TumU.—  1893.  65 


-  514  - 

Mergus  AMERiCANUS,  Câss.  Proc.  Ac.  ncit.sc.  Philad.   1853,  p.  187. 

Mergus  castor  AMERICANUS,   Bonap.  Comp.  Rend.  XLIII,  p.  652  (1856) 

Mergus  major,  C.  F.  Dub.  PL  col.  Ois.  Bel<j.  III  pi.  et  p.  268  (1860). 

Mergus  squamatus,  Gould,  Proc.  Zool.  Soc.  1864  p.  184. 

Mergus  merganser  americanus,  Ridgw.  Proc.  U.  S.  Nat.  Mus.  III,  p.  205  (1880). 

Der  grosse  Sager,  en  allemand. 

The  Goosander,  en  anglais. 

De  Groote  Zaagbek,  en  flamand. 

Taille  :  0",54  ;  ailes  0,29.  La  femelle  est  un  peu  plus  petite. 

Description  du  mâle  en  plumage  de  noce.  —  Tête  et  cou  d'un  noir  verdâtre 
à  reflets,  tirant  au  noir  à  la  gorge,  les  plumes  du  vertex  allongées  et  formant 
une  huppe  touffue  ;  base  du  cou  blanc  ;  haut  du  dos  et  scapulaires  supérieures 
d'un  noir  profond  ;  le  reste  du  dos,  croupion  et  sus-caudales  d'un  gris  cendré, 
le  croupion  varié  de  zigzags  blanchâtres;  couvertures  des  ailes  blanches, 
teintées  de  jaune  orangé  très  clair;  la  majorité  des  scapulaires  blanches, 
lisérées  extérieurement  de  noir  ;  bord  de  l'aile  et  rémiges  ^imaires  noirâtres; 
queue  d'un  brun  cendré  ;  dessous  du  corps  d'un  blanc  teinté  de  nuance  aurore 
(cette  teinte  aurore  disparaît  chez  les  individus  conservés  dans  les  collections 
et  les  parties  inférieures  deviennent  alors  complètement  blanches).  Bec  et 
pattes  rouges  ;  iris  d'un  brun  rouge. 

Femelle.  —  Tête  et  cou  d'un  roux  vif,  les  plumes  du  vertex  et  de  la  nuque 
longues,  effilées  et  formant  une  huppe  d'une  teinte  plus  sombre;  gorge  blan- 
che; bas  du  cou  en  arrière,  dos,  croupion,  sus-caudales  et  scapulaires  supé- 
rieures d'un  cendré  foncé  au  centre  des  plumes  et  d'une  teinte  plus  claire  sur 
les  bords  ;  couvertures  des  ailes  et  le  reste  des  scapulaires  d'un  cendré  plus 
clair,  les  dernières  lisérées  extérieurement  de  noirâtre;  rémiges  secondaires 
blanches,  les  primaires  et  le  bord  de  l'aile  noirâtres  ;  queue  d'un  brun  cendré; 
parties  inférieures  blanches  ;  côtés  de  la  poitrine  et  flancs  cendrés  avec  les 
bordures  des  plumes  blanches. 

Mâle  en  été.  —  Il  ressemble  à  la  femelle,  mais  la  huppe  est  moins  déve- 
loppée, les  parties  dorsales  sont  d'un  gris  ardoise,  le  jabot  d'un  gris  clair 
avec  les  plumes  bordées  de  blanc,  et  les  parties  inférieures  entièrement  blan- 
ches. 

Jeune.  —  Ressemble  également  à  la  femelle,  mais  les  teintes  sont  plus 
ternes  et  il  est  privé  de  huppe. 

Poussin.  —  Dessus  de  la  tête  et  nuque  d'un  brun  roussâtre  foncé;  lorums 
blancs  ;  une  raie  rousse  part  de  la  mandibule  supérieure,  passe  sous  l'œil  et  se 
confond  avec  la  teinte  rousse  de  la  région  auriculaire  et  des  côtés  du  cou  ; 
dessus  du  corps  d'un  brun  cendré  avec  trois  grandes  taches  blanches  de 
chaque  côté  du  dos  dont  une  sur  les  ailes  ;  gorge  et  les  autres  parties  infé- 
rieures d'un  blanc  pur.  Bec  noirâtre  avec  l'onglet  jaune  ;  pattes  d'un  brun 
jaunâtre. 


—  515  — 


Hab.  —  En  été,  cette  espèce  est  plus  ou  moins  répandue  dans  toute 

la  zone  polaire  jusque  vêts  le 
70o  1.  N.  Elle  est  sédentaire  en 
Islande  {Faber)  et  dans  toutes 
les  localités  septentrionales  où 
elle  trouve  des  eaux  en  partie 
libres  de  glace,  jusque  dans  le 
nord  de  l'Allemagne  où  elle 
niche  en  petit  nombre.  En  hiver 
ce  Harle  est  assez  commun  dans 
la  plupart  des  contrées  tempérées  de  l'Europe,  même  dans  celles  de 
l'intérieur  comme  la  Suisse,  où  on  le  voit  chaque  hiver  sur  les  lacs 
par  troupes  de  cinq  à  dix  sujets  [Meisner  et  Schinz).  Ce  n'est  que 
pendant  les  hivers  très  rigoureux  qu'on  l'observe  en  Espagne 
{Saunders),  en  Portugal  {du  Bocage),  en  Italie  {Giglioli)  et  en  Grèce 
{Lindermayer).  Il  se  montre  régulièrement  sur  le  Danube,  dans  la 
Dobrodja  et  la  Bulgarie  {Alléon),  en  Turquie  {Elives  et  BucJilcy),  mais 
accidentellement  sur  le  Bosphore  et  dans  le  midi  de  la  Russie 
{de  Nordmann)  ainsi  qu'en  Bohême  (Fritsch)- En  hiYer,  il  est  a.ssez 
commun  en  Belgique,  aussi  bien  sur  les  côtes  maritimes  que  sur 
l'Escaut  et  sur  les  rivières  de  l'intérieur  qui  ne  gèlent  pas.  Il  visite 
très  accidentellement  le  Maroc  {Famer)  et  l'Algérie  {Loche). 

Le  Harle  bièvre  est  aussi  répandu  en  Asie  qu'en  Europe  :  on  le 
rencontre  dans  le  Nord  et  dans  le  centre  depuis  l'Oural  jusqu'au 
Kamtschatka  {Stejneger)  et  au  Japon  {Temminck  et  Schlegel).  Dans 
le  Midi  on  l'observe  au  Caucase  {Radde),  au  Turkestan  {Severtzoïo)  et 
il  est  commun  en  Mongolie  et  en  Chine  {David)  ;  lors  des  hivers 
rigoureux,  il  se  montre  jusque  dans  le  centre  de  l'Inde  {Jerdon-, 
Hume),  mais  il  ne  paraît  pas  avoir  été  vu  en  Perse  et  dans  le  S.-O. 
de  l'Asie. 

La  forme  américaine,  que  certains  auteurs  ont  vouhi  ériger  en 
espèce,  est  répandue  dans  toute  l'Amérique  du  Nord  {Baird),  depuis 
l'île  de  Behring  {Stejneger),  les  îles  Aléoutiennes  {Dali)  et  l'Alaska 
(Tterner)  jusqu'au  Texas  {Dresser)  et  au  Mexique  {Finsch)  ;  on  l'a 
môme  vue  aux  îles  Bormudes  {Seebnhm).  Sa  limite  méridionale  paraît 
être,  en  Amérique,  le  30«  1.  N.,  et  en  Asie,  le  2A°  1.  N.  (Tropique  du 
Cancer). 

Mœurs.  —  L(>  Ilarlo  bièvre  apparaît  dans  nos  contrées  phis  ou 
moins  tard    suivant  les  rigueurs  de  Li  saison  ;  l'iiiver  est-il  précoce, 


—  ol6  - 

l'oiseau  se  montre  dès  le  courant  de  novembre,  mais  le  plus  souvent 
on  ne  le  voit  pas  avant  la  mi-décembre  ou  le  commencement  de  jan- 
vier; il  nous  quitte  dans  les  mêmes  conditions  entre  le  15  février  et 
les  derniers  jours  de  mars.  Comme  cet  oiseau  supporte  bien  le  froid, 
il  séjourne  partout  où  il  trouve  une  eau  libre  de  glace.  Il  émigré  par 
troupes  et  pendant  la  nuit  ;  ces  bandes  volent  alors  très  haut  en  for- 
mant une  ligne  oblique;  mais  si  le  nombre  des  individus  est  trop  con- 
sidérable, ceux-ci  se  placent  sur  deux  rangs  disposés  en  angle  aigu. 

Ce  Harle  se  plaît  aussi  bien  sur  la  mer  que  sur  les  eaux  douces, 
mais  il  préfère  ces  dernières,  surtout  les  fleuves  et  les  rivières  à  cou- 
rant rapide.  On  le  voit  d'ailleurs  sur  toutes  les  eaux,  même  sur  les 
étangs  et  dans  les  marais,  mais  il  aime  particulièrement  les  eaux 
claires,  profondes  et  courantes,  bordées  d'arbres  et  de  buissons  ou 
traversant  une  forêt.  Sa  démarche  est  lourde  et  vacillante  et  il  tient  le 
corps  dans  une  position  horizontale  ;  son  vol  est  rapide,  bruyant  et 
ressemble  à  celui  de  beaucoup  de  Canards.  «  Lorsqu'il  nage  paisible- 
ment, dit  A.  Brehm,  il  frappe  l'eau  lentement  de  ses  larges  pieds  et 
avance  rapidement;  poursuit-il  quelqu'un  de  ses  semblables  pour  lui 
enlever  la  proie  qu'il  vient  de  capturer,  il  frappe  la  surface  de  l'eau 
avec  une  telle  violence  que  le  bruit  s'en  entend  au  loin,  et  qu'il  sur- 
passe en  vitesse  tous  les  autres  oiseaux  nageurs.  Il  plonge  très  aisé- 
ment, presque  sans  bruit;  il  nage  entre  deux  eaux  avec  une  telle 
rapidité  qu'on  croirait  voir  un  poisson.  Il  reste  parfois  deux  minutes 
sous  l'eau;  mais  son  immersion  dure  ordinairement  un  peu  plus  d'une 
minute,  et  dans  cet  intervalle  il  a,  en  tours  et  détours,  parcouru  une 
distance  d'au  moins  cent  pas.  » 

C'est  un  oiseau  très  intelligent  et  dont  tous  les  sens  sont  bien  déve- 
loppés; sa  grande  prudence  et  sa  déûance  lui  font  bientôt  reconnaître 
le  danger,  qu'il  peut  ainsi  éviter  à  temps.  S'il  voit  un  ennemi,  il 
plonge  aussitôt,  pour  ne  reparaître  à  la  surface  de  l'eau  qu'à  une 
cinquantaine  de  mètres  de  l'endroit  où  il  s'est  enfoncé;  de  cette 
manière  on  ne  sait  jamais  où  l'oiseau  se  montrera,  et  celui-ci  a  le 
temps  de  faire  un  nouveau  plongeon  avant  qu'on  ait  pu  le  viser.  Ce 
n'est  que  dans  les  lieux  de  la  reproduction  qu'il  se  montre  un  peu  plus 
confiant,  surtout  dans  les  pays  du  Nord  où  l'homme  ne  le  poursuit 
pas  trop.  Il  est  très  sociable,  ne  recherchant  toutefois  que  la  société 
de  ses  semblables;  mais  quand  on  observe  une  troupe  de  ces  Harles, 
on  constate  bientôt  que  l'harmonie  ne  règne  pas  toujours  parmi  eux, 
car  leurnaturel  envieux  et  jaloux  se  manifeste  en  toute  occasion;  ils 


~  ol7  — 

se  prêtent  bien  un  mutuel  appui  dans  leurs  chasses  et  se  rabattent 
les  poissons  les  uns  aux  autres,  mais  au  fond  chacun  travaille  dans 
son  intérêt  et  non  pour  rendre  service  à  ses  compagnons. 

La  nourriture  de  cet  oiseau  consiste  surtout  en  poissons  de  dix  à 
quinze  centimètres  de  long,  mais  à  l'occasion  il  ne  dédaigne  pas  les 
grenouilles,  les  têtards^  les  larves  et  insectes  aquatiques,  ainsi  que 
des  vers  et  des  mollusques.  Nilsson  a  observé  en  Suède,  qu'en 
automne  cet  oiseau  se  tient  en  petites  troupes  sur  les  lacs  très  pois- 
sonneux. La  troupe  se  dispose  sur  une  ligne  courbe  et  forme  ainsi  une 
sorte  de  filet  qui  va  toujours  en  s'avançant.  Ils  chassent  devant  eux 
les  poissons  en  plongeant  continuellement  et  en  frappant  l'eau  de  leurs 
ailes,  et  les  poussent  vers  l'extrémité  du  lac  ou  dans  une  baie  où  ils 
s'accumulent,  et  où  les  Harles  peuvent  plus  facilement  les  prendre. 
Quelquefois  ils  ne  s'accordent  pas  entre  eux  et  s'arrachent  la  proie 
les  uns  aux  autres. 

La  voix  de  cet  oiseau  est  un  grondement  sonore  qu'on  peut  rendre 
par  liarr  karrr  ou  kœurr  kœurrr\  c'est  surtout  en  s'envolant  ou  à 
l'époque  de  l'accouplement  que  l'oiseau  se  fait  entendre. 

Reproduction.  —  Le  Harle  bièvre  ou  grand  Harle  niche  dans  les 
contrées  du  Nord  et  même  dans  les  provinces  septentrionales  de 
l'Allemagne,  particulièrement  en  Poméranie,  dans  le  Mecklembourg 
et  le  Holstein,  et  accidentellement  près  de  Berlin,  comme  l'a  constaté 
M.  Hausmann  d'après  ce  que  nous  apprend  M.  C.  Vangerow  (1). 
D'après  le  D""  Schinz,  il  niche  parfois  aussi  en  Suisse;  il  a  du  moins 
constaté  le  fait  près  de  Bregenz  (Tjrol)  en  1812  et  1813. 

Ces  oiseaux  sont  accouplés  quand  ils  reviennent  aux  lieux  de  la 
reproduction;  mais  les  jeunes  mâles  qui  se  reproduisent  pour  la  pre- 
mière fois, choisissent  leur  femelle  dans  leur  patrie, ce  qui  ne  se  fait  pas 
sans  cris  et  sans  luttes.  En  Danemark  et  en  Allemagne  ils  nichent 
vers  la  fin  d'avril  ou  en  mai,  mais  plus  au  Nord  la  ponte  n'a  lieu 
qu'en  juin. 

Ce  Harle  niche  dans  des  endroits  très  divers,  et  l'on  dirait  que 
l'emplacement  du  nid  dépend  plutôt  de  la  fantaisie  de  la  femelle  que 
de  l'aspect  du  terrain.  Il  paraît  cependant  qu'elle  choisit  de  préfé- 
rence le  creux  d'un  arbre,  môme  quand  cette  cavité  est  placée  à  huit 
ou  neuf  mètres  de  hauteur.  Le  nid  se  trouve  souvent  aussi  dans  une 
excavation  et  entre  dos  herbages  ou  sous  un  buisson,  ou  bien  entre 

{\)  Journal  f.  Ornith.  185.5,  p.  :i4r). 


—  548  — 

des  troncs  d'arbres,  sous  des  pierres  ou  sur  la  tête  d'un  saule  en  têtard; 
parfois  l'oiseau  se  contente  de  déposer  ses  œufs  sur  des  arbres  dans 
l'aire  abandonnée  d'un  rapace  ou  dans  un  vieux  nid  de  Corneille  ou  de 
tout  autre  grand  oiseau.  Il  arrive  aussi  que  le  nid  est  construit  sur  un 
îlot  ou  au  bord  de  l'eau,  d'autres  fois  il  se  trouve  à  une  distance  plus 
ou  moins  grande  de  l'eau  et  parfois  à  près  d'un  kilomètre.  «  Au  Tana- 
Elf,  dit  A.  Brebm,  je  vis  sur  tous  les  arbres  de  grandes  caisses,  à 
ouvertures  triangulaires,  destinées  à  loger  des  Harles  bièvres  et  des 
Harles  huppés,  et  disposées  de  façon  à  ce  qu'on  pût  prendre  les  œufs. 
Ces  caisses  sont  très  en  usage  chez  les  Lapons  et  les  Finnois,  et  les 
Harles  vont  régulièrement  s'y  installer  ».  Quand  le  nid  est  construit 
par  le  Harle  lui-même,  il  est  grossièrement  fait  à  l'aide  de  bûchettes, 
de  chaumes,  de  feuilles  mortes,  de  lichens  et  autres  matériaux  secs  ; 
au  moment  de  la  ponte  l'intérieur  est  garni  de  duvet.  Le  nombre  des 
œufs  est  de  huit  à  douze,  mais  il  paraît  que  ce  nombre  peut  être 
doublé  quand  on  enlève  les  œufs  à  mesure  qu'ils  sont  pondus.  Ces 
œufs  sont  lisses,  peu  luisants  et  d'un  fauve  clair;  ils  mesurent  environ 
68  millimètres  sur  47. 

La  femelle  couve  seule  et  élève  ses  petits  sans  le  concours  du  mâle, 
mais  celui-ci  revient  plus  tard  se  joindre  à  sa  famille.  Les  poussins 
naissent-ils  à  terre  ou  à  une  faible  hauteur  au-dessus  de  l'eau,  la 
mère  les  précipite  sur  l'onde,  dès  qu'ils  sont  séchés.  Si,  au  contraire, 
ils  sont  nés  sur  un  arbre,  la  femelle  les  porte  à  terre  l'un  après  l'autre, 
en  les  tenant  serrés  entre  son  bec  et  sa  poitrine,  comme  le  fait  le 
Garrot  et  comme  le  font  probablement  tous  les  anatidés  qui  nichent 
dans  des  endroits  élevés.  Les  poussins  croissent  très  rapidement  et 
deviennent  bientôt  indépendants. 

Suivant  Brehm,  la  femelle  est  tellement  ardente  à  couver,  que 
quand  on  lui  enlève  ses  œufs  elle  va  couver  le  premier  nid  de  Canard 
qu'elle  trouve  ;  elle  en  chasse  la  mère  légitime  et  élève  une  progéni- 
ture qui  lui  est  étrangère. 

274.  —  Le  Harle  huppé. 
MERGUS   SERRATOR,   Lin. 

(PI.  275). 

Mergus  SERRATOR,  Lin.  Syst.  Nat.,  p.  129  (1758)  ;  I,  p.  208  (1766). 
Merganser  CRiSTATUs,  Briss.  0/•/^.  VI,  p.  237  (1760). 
Mkrgus  CRISTATUS,  Briinn.  Orn.  bor.  p.  23  (1764). 


—  519  — 

Mergus  NIGER  et  M.  LEUCOMELAS,  Gmel.  Syst.  nat.  I,  p.  546  (1788). 

Mkrganser  serrata,  Steph.  5'/i«!:^o's  Gen.  Zool,  XII,  2,  p.  165  (1817). 

Merganser  serrator,  de  Selys,  Patria  Belgica,  I,  p.  277  (1873). 

Der  Mittlere  Sagbr,  en  allemand. 

The  Red-breasted  Merganser,  en  anglais. 

Dk  Middelste  saagbek,  en  flamand. 

Taille  :  0'"47  ;  ailes  0™245.  La  femelle  est  un  peu  plus  petite. 

Description  du  mâle  en  plumage  de  noce.  —  Tête  et  partie  supérieure  du 
cou  noires  à  reflets  d'un  vert  bronzé,  les  plumes  du  vertex  et  de  l'occiput 
longues  et  effilées  et  formant  une  huppe;  bas  du  cou  blanc  avec  une  ligne 
médiane  noire  en  arrière  ;  manteau  et  scapulaires  noires  ;  bas  du  dos,  sus- 
caudales  et  flancs  d'un  blanc  grisâtre  vermiculé  de  noirâtre  ;  couvertures  des 
ailes  blanches,  coupées  transversalement  par  deux  bandes  noires  ;  rémiges 
primaires  noirâtres  ;  les  secondaires  noires  à  la  base,  blanches  à  l'extrémité  ; 
les  tertiaires  blanches  lisérées  extérieurement  de  noir;  jabot  roussâtre  avec 
des  taches  noirâtres  ;  plumes  des  côtés  de  la  poitrine  larges,  blanches  et  large- 
ment bordées  de  noir  profond  ;  poitrine,  abdomen  et  sous-caudales  d'un 
blanc  pur  ;  queue  brune,  les  rectrices  médianes  variées  de  blanc  sur  leurs 
bords .  Bec  d'un  rouge  vif,  la  mandibule  inférieure  plus  orange,  l'onglet  brun  ; 
pattes  d'un  rouge  orangé  ;  iris  d'un  jaune  rougeâtre. 

Femelle.  —  Dessus  de  la  tête  d'un  brun  roussâtre,  la  huppe  peu  développée; 
côtés  de  la  tête  et  haut  du  cou  d'un  roux  vif;  gorge  blanche,  lavée  de  brun 
jaunâtre  clair;  dessus  du  corps  d'un  gris  brun  foucé,  la  tige  des  plumes  noire 
et  les  bords  de  ces  dernières  d'un  gris  cendré  clair  ;  couvertures  des  ailes 
comme  le  dos  ;  rémiges  primaires  d'un  brun  noirâtre  ;  les  secondaires  noires 
à  la  base,  blanches  à  l'extrémité  ;  parties  inférieures  blanches,  les  flancs  cen- 
drés ;  queue  d'un  brun  cendré . 

Mâle  en  été.  —  Ressemble  à  la  femelle,  mais  il  a  la  huppe  plus  courte  et  le 
dessus  du  corps  d'un  gris  ardoise. 

Jeune  mâle.  —  llessemble  également  à  la  femelle,  mais  sa  huppe  est  plus 
courte;  dessus  du  corps  d'un  gris  cendré  tirant  un  peu  au  jaunâtre  ;  iris  d'un 
brun  jaunâtre  ;  bec  d'un  noir  rougeâtre  ;  pattes  d'un  rouge  jaunâtre. 

Poussin.  —  Suivant  M.  J.  Vian,  le  poussin  du  llarle  huppé  a  la  même 
coloration  que  celui  du  Harle  bièvre;  tous  deux  ont  la  poitrine  blanche,  mais 
chez  le  dernier  le  duvet  est  blanc  dans  toute  sa  longueur,  tandis  que  chez  le 
Ilarle  huppé  il  est  brun  dans  sa  moitié  basale. 

Les  femelles  et  les  jeunes  mâles  ressemblent  beaucoup  aux  sujets 
du  même  sexe  et  âge  du  Harle  bièvre,  et  peuvent  facilement  être  con- 
fondus avec  ce  dernier  ;  la  différence  de  taille  ne  permet  cependant 
pas  de  les  confondre,  le  Harle  huppé  étant  plus  petit. 


520  — 


^^j.  —  Le  Harle  huppé  est  plus  ou  moins  répandu,  en  été  ou  en 

hiver,  dans  toute  la  zone  des 
deux  mondes  qui  s'étend  entre  le 
32o  et  le  73°  1.  N.  11  s'élève 
donc  un  peu  plus  au  Nord  que  le 
Harle  bièvre,  mais  ne  descend 
pas  aussi  bas  vers  le  Sud.  En 
été,  il  est  commun  en  Islande 
{Faber)y  au  cap  Nord  {CoUett)  et 
dans  toutes  les  contrées  situées 
au  nord  de  la  Baltique,  Il  niche  également  dans  les  provinces  septen- 
trionales de  l'Allemagne  où  il  est  en  partie  sédentaire  {Borggrevé), 
et  il  en  est  de  même  en  Ecosse  [Seebolmi). 

En  hiver,  cet  oiseau  est  commun  aux  îles  Britanniques  et  sur  toutes 
les  côtes  de  l'Europe  occidentale  et  méridionale,  jusqu'en  Portugal 
{du  Bocage),  eii  Espagne  {Saunders),  à  Gibraltar  (Irby),  en  Italie 
{Giglioli),  en  Sardaigne  {Cara),  en  Corse  {Whitehead)  et  en  Sicile 
(Malherbe)  ;  mais  il  est  peu  commun  à  Malte  {Wright),  rare  en  Grèce, 
plus  rare  dans  le  Péloponèse  et  ne  se  montre  jamais  dans  l'Archipel 
{Lindermayer).  Il  n'est  pas  rare  en  Turquie  {Elwes  et  Buckley),  dans 
la  Dobrodja  et  la  Bulgarie  {A Iléon)  et  dans  le  midi  de  la  Russie 
[de  Nordmann). 

Bien  que  cette  espèce  soit  toujours,  lors  des  migrations,  plus  abon- 
dante sur  les  côtes  maritimes  que  sur  les  eaux  intérieures,  on  la 
rencontre  cependant  sur  les  lacs  et  les  rivières  des  pays  les  plus 
éloignés  de  la  mer,  mais  le  plus  souvent  pendant  les  hivers  rigoureux  ; 
c'est  ainsi  que  sa  présence  a  été  signalée  dans  le  Grand-Duché  de 
Luxembourg  [de  la  Fontaine),  en  Lorraine  {Godron),  en  Alsace 
(Kroener),  en  Suisse  [Meisner  et  Schinz),  en  Tyrol  {Althamer),  en 
Bavière  (Koch),  en  Bohême  {Fritsch),  en  Autriche  [Hinterberger], 
en  Pologne  {Taczanowski),  etc.  En  hiver,  ce  Harle  est  commun  en 
Belgique,  aussi  bien  sur  les  côtes  que  sur  l'Escaut  où  on  le  rencontre 
par  grandes  troupes  {Croegaert);  il  est  plus  rare  dans  les  autres 
parties  du  pays,  mais  il  se  montre  parfois  jusqu'aux  environs  de 
Hasselt  [Bamps)  et  de  Bruxelles. 

Cet  oiseau  visite  accidentellement  le  nord  de  TAfrique  [Loche)  et  la 
Basse-Egypte  {de  Heuglin);  il  est  moins  rare  en  Palestine  {Tristram) 
et  surtout  au  Caucase  {Radde).  Plus  à  l'Est,  on  rencontre  cette  espèce 
dans  toute  la  Sibérie  {Middendorff,  Radde,  Maack),  au  Kamtschatka 


—  521  — 

{Stejneger),  au  Japon  (Temminck)  et  en  Chine  {David),  mais  il  ne 
paraît  visiter  ni  le  Turkestan,  ni  l'Inde. 

En  Amérique,  on  observe  cet  oiseau  dans  toute  la  zone  septen- 
trionale :  du  Groenland  {Holbôll)  et  du  Labrador  à  la  Caroline  du 
Nord  {Coues),  et  de  l'Alaska  et  des  îles  Aléoutiennes  {Turner)  à  la 
Californie  [Dresser). 

Mœurs,  —  Le  Harle  huppé  émigré  des  contrées  du  Nord  quand 
les  eaux  commencent  à  geler,  mais  il  séjourne  partout  où  il  trouve 
des  eaux  en  partie  libres  de  glace.  C'est  en  octobre  que  ces  oiseaux 
se  rassemblent  en  bandes  sur  les  bords  de  la  mer,  et  en  novembre  ils 
commencent  à  apparaître  dans  les  contrées  plus  tempérées  ;  il  paraît 
que  les  jeunes  partent  plus  tôt  que  les  adultes,  car  ces  derniers  ne  se 
montrent  généralement  qu'en  décembre. Il  est  aussi  à  remarquer  que  les 
mâles  adultes  ne  s'éloignent  pas  autant  des  pays  froids  que  les  jeunes, 
car  plus  on  se  dirige  vers  le  Midi,  plus  les  vieux  mâles  deviennent 
rares.  Dès  le  courant  de  mars,  tous  regagnent  les  pays  de  la  repro- 
duction. Ils  voyagent  surtout  pendant  la  nuit,  et  quand  ils  le  font  en 
plein  jour  ils  volent  toujours  très  haut,  en  formant  une  longue  ligne 
oblique,  dont  la  longueur  dépend  naturellement  du  nombre  des 
individus. 

Cet  oiseau  fréquente  principalement  les  côtes  maritimes  et  se  montre 
même  en  pleine  mer,  mais  il  visite  volontiers  les  lacs,  les  fleuves  et 
autres  eaux  courantes.  En  hiver,  il  se  montre  un  peu  sur  toutes  les 
eaux  non  gelées  ;  en  été,  il  aime  les  eaux  riches  en  roseaux  et  en 
herbages  élevés  ou  bordées  d'arbres  et  de  buissons,  même  quand  elles 
se  trouvent  non  loin  de  lieux  habités. 

Les  moeurs  de  cette  espèce  ne  diffèrent  guère  de  celles  du  grand 
Harle,  mais  elle  est  peut-être  encore  plus  agile  que  ce  dernier  dans 
l'art  de  nager  en  tous  sens  entre  deux  eaux  à  la  poursuite  des  pois- 
sons. Quand  on  observe  une  troupe  de  Harles  huppés,  on  les  voit 
souvent  disparaître  tous  à  la  fois  sous  l'eau,  pour  ne  revenir  à  la 
surface  qu'au  bout  d'une  couple  de  minutes,  et  bien  loin  de  l'endroit 
où  ils  ont  plongé.  Leur  vol  ressemble  à  celui  de  certains  Canards  :  il 
est  facile  et  rapide  et  le  battement  des  ailes  occasionne  un  léger  bruis- 
sement ;  la  forme  allongée  de  ces  oiseaux  permet  de  les  distinguer 
facilement  au  vol  des  autres  lamellirostres. 

Ce  Harle  est  très  farouche  et  défiant;  il  évite  ordinairement  le  coup 
de  fusil  en  plongeant,  mais  quand  l'oau  est  pou  étendue,  il  s'envole  <à 
tire-d'aile,  ne  tardant  cependant  pas  a  revenir  à  son  point  de  départ, 

TOM.   II.  —  1893.  66 


—  52-2  — 

ce  qui  occasionne  souvent  sa  perte.  Il  se  montre  moins  défiant  dans 
les  contrées  du  Nord,  surtout  quand  il  a  constaté  qu'on  ne  lui  veut 
pas  de  mal.  Il  est  très  sociable  et  se  plaît  dans  la  société  des  Canards, 
des  Macreuses  et  même  des  Plongeons  ;  de  Heuglin  dit  avoir  vu  en 
septembre  dans  une  baie  de  Waigatz,  des  bandes  de  plusieurs  cen- 
taines d'oiseaux  aquatiques,  composées  en  grande  partie  de  Harles 
huppés,  de  Garrots  et  de  Macreuses.  Son  cri,  d'après  Naumann,  res- 
semble à  koerrr  ou  guerrr,  et  l'oiseau  le  fait  entendre  surtout  en 
volant.  Quant  à  sa  nourriture,  elle  se  compose  principalement  de 
poisson;  il  mange  également  des  larves  et  insectes  aquatiques,  des 
vers,  moins  souvent  des  grenouilles,  que  la  nécessité  Foblige 
parfois  à  aller  chercher,  en  hiver,  dans  la  vase  au  fond  des  étangs. 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  niche  ordinairement  près  des  eaux 
douces  qui  ne  sont  pas  trop  éloignées  de  la  mer  ;  mais  comme  il  tient 
à  ce  qu'elles  soient  garnies  de  roseaux  ou  que  leurslbords  soient  plus 
ou  moins  boisés,  il  est  parfois  obligé  de  les  chercher  bien  loin  des 
côtes  maritimes.  Il  niche  de  préférence  dans  des  arbres  creux  ou  dans 
des  caisses  fixées  aux  arbres  à  leur  intention,  parfois  aussi  dans  un 
nid  abandonné  de  rapace,  de  Corneille  ou  de  tout  autre  grand  oiseau, 
même  quand  ce  nid  est  placé  sur  un  arbre  à  une  grande  hauteur  et 
loin  de  l'eau.  D'autre  fois,  il  fait  une  construction  grossière  formée  de 
matériaux  secs,  bûchettes,  feuilles  mortes,  chaumes,  etc.,  que  la 
femelle  entrelace  tant  bien  que  mal,  et  dont  elle  garnit  l'intérieur 
d'une  couche  de  duvet.  Ce  nid  est  alors  placé  soit  à  terre  près  de 
l'eau,  dans  une  excavation  protégée  par  des  pierres,  des  herbages 
ou  un  buisson,  soit  dans  un  trou  de  rocher. 

La  ponte  a  lieu  en  mai  ou  en  juin,  suivant  la  latitude,  et  se  com- 
pose de  neuf  à  douze  œufs,  parfois  même  de  quatorze,  mais  elle  peut, 
d'après  Naumann,  s'élever  jusqu'à  trente  si  on  lui  enlève  ses  œufs 
successivement.  Ces  œufs  sont  lisses,  peu  luisants,  de  couleur  café  au 
lait  clair  et  mesurent  environ  63  millim.  sur  43. 

Le  mâle  quitte  sa  compagne  dès  que  celle-ci  se  met  à  couver,  mais 
rejoint  sa  famille  plus  tard  après  sa  mue.  La  mère  conduit  ses  petits 
à  l'eau  dès  qu'ils  sont  bien  séchés,  et  agit  en  toutes  circonstances 
comme  la  femelle  du  Harle  bièvre. 

DEUXIÈME   SOUS-ORDRE 

TOTIPALMES. 
Car.  —  Bec  plus  ou  moins  long,  large  ou  arrondi,  crochu  ou  ter- 


—  523  — 

miné  en  pointe,  les  deux  branches  de  la  mandibule  inférieure  reliées 
par  une  membrane  nue  et  dilatable;  tête  relativement  peu  volumi- 
neuse; cou  plus  ou  moins  allongé;  ailes  assez  longues,  parfois  très 
longues  et  aiguës;  queue  de  forme  variable,  plus  ou  moins  allongée; 
tarses  courts;  doigts  longs,  tous  quatre  réunis  par  une  large  palma- 
ture,  ce  qui  distingue  ces  oiseaux  de  tous  les  autres  palmipèdes. 

Ce  sous-ordre  se  divise  en  cinq  familles:  les  Frégatidés,les  Phaê- 
tontidés,  les  Pélécanidês,  les  Phalacrocoracidés  et  les  Plotidés,  Deux 
de  ces  familles  sont  représentées  en  Belgique, 

FAMILLE  DES  PÉLÉCANIDÊS. 

Car.  —  Bec  plus  long  que  la  tête,  souvent  très  long,  droit  et 
conique,  ou  large,  aplati  et  terminé  par  un  onglet  crochu;  la  mandi- 
bule inférieure  donne  souvent  attache  à  un  vaste  sac  se  prolongeant 
jusque  sur  le  cou;  ailes  allongées,  plus  ou  moins  aiguës;  queue  de 
longueur  moyenne,  arrondie  ou  conique;  tarses  courts  et  robustes; 
doigts  longs,  le  pouce  réuni  aux  doigts  antérieurs  dans  une  même 
palmature. 

Hab.  —  Cette  famille  a  des  représentants  dans  toutes  les  parties  du 
globe,  mais  principalement  dans  la  zone  tropicale. 

Mœurs.  —  Ces  oiseaux  diffèrent  plus  ou  moins  de  mœurs  suivant 
les  espèces;  les  uns  sont  marins,  les  autres  ne  vivent  que  sur  les 
eaux  douces,  mais  tous  se  nourrissent  de  poissons  et  sont  très  voraces. 
Ils  nichent,  suivant  les  espèces,  dans  les  marais,  sur  des  arbres  ou  sur 
des  rochers  et  ne  pondent  qu'un  petit  nombre  d'œufs. 

GENRE  CLVI. 

FOU.  —  SDLA. 

SuLA,  Briss.  Ornith.  VI  p.  494  (1760). 
Pelecanus  (part.)  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  217  (176G). 
Dtsi'Orus,  lUig.  Prodromus,  p.  279  (1811). 
MoRis,  Loach,  Syst.  C".t.  Brit.  Mns.  p.  35  (1816). 

Car.  —  Bec  fort,  droit,  coniiiue,  plus  haut  que  large  à  la  base,  très 
fendu  et  fléchi  à  son  extrémité,  les  bonis  des  mandibules  finement  dentelés  ; 
mandibule  supérieure  avec  un  long  sillon  latéral  et  semblant  formée  de  trois 
pièces,  l'inférieure  à  l^ranchcs  séparées  jusque  prés  de  leur  extrémité;  nari- 
nes linéaires;  lorums  et  gorge  nus;  ailes  allonîjjées,  aiguës,  atteignant  pros(]ue 
Tcxtrémité  de  la  ({ucue;  celle-ci  coni([uo,  composée   de  douze  rectrices,  les 


—  524  - 

médianes  dépassant  un  peu  les  autres;  tarses  courts,  épais  ;  doigts  longs, 
Tongle  du  médian  pectine  sar  son  bord  interne. 

Hdjy^  —  Des  sept  espèces  connues  de  ce  genre,  quatre  habitent  les 
tropiques,  une  le  sud  de  l'Afrique,  une  la  Nouvelle-Zélande  et  une 
l'Europe. 

275.  —  Le  Fou  blanc  ou  de  Bassan. 
SULA  BASSANA,  Briss. 

(PI.  276.) 

SuLA  MAJOR  et  S.  BASSANA,  Briss.  Omith.  VI.  pp.  497,  503  (1760). 
Pelecanus  bassanus,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  217  (1766). 
Pelecanus  punctatus,  Sparrm,  Mus.  Caris,  pi.  X  (1786). 
Pelecanus  maculatus,  Gmel.  Syst.  nat.  I,  p.  579  (1788). 
SuLA  ALBA,  Mey.  Taschenb.  Deuts.Yôgelk.  II,  p.  582  (1810). 
MoRis  BASSANA,  Leach,  Syst.  Cat.  Brit.  Mus.  p.  35  (1816). 
MoRUS  bassanus,  Vieill.  N.  Diction.  XII,  p.  39  (1817). 
SuLA  AMERiCANA,  Bonap.  Comp.  List.  B.  p.  60  (1838). 
Dysporus  bassanus,  Naum.  Voy.  Deutschl.  XI,  p.  14  (1842). 
SuLA  LEFEVRi,  Baldam.  Naumannia,  1851,  fasc.  IV,  p.  38. 
Der  Bass-Tolpel,  en  allemand. 
The  Gannet,  en  anglais. 
De  Jan  van  Gent,  en  flamand. 

Taille:  0™80;  ailes  0,49. 

Description  du  mâle  et  de  la  femelle  adultes.  —  D'un  blanc  uniforme,  le  des- 
sus de  la  tête  et  du  cou  d'un  jaune  d'ocre  ;  rémiges  primaires  noirâtres.  Bec 
d'un  gris  bleuâtre  pâle,  jaunâtre  à  la  pointe;  parties  nues  de  la  face  noires; 
iris  jaune  ;  pattes  d'un  vert  noirâtre  avec  les  scutelles  d'un  vert  clair.  (1) 

Jeune.  —  Parties  supérieures  d'un  brun  cendré,  chaque  plume  terminée 
par  une  petite  tache  blanche  en  forme  de  fer  de  lance,  ces  taches  sont  natu- 
rellement plus  nombreuses  et  plus  rapprochées  à  la  tête  et  au  cou  ;  bas  de  la 
poitrine  et  ventre  blanchâtres  avec  les  plumes  bordées  de  cendré  brunâtre; 


(i)  On  rencontre  parfois  des  sujets  dont  les  quatre  ou  les  deux'rectrices  médianes,  ainsi  qu'un 
plus  ou  moins  grand  nombre  de  rémiges  secondaires,  sont  noirâtres.  C'est  le  Sula  lefevri  de 
Baldamus.  Mais  ce  sont  simplement  de  jeunes  sujets  qui  ont  pris  pour  la  première  fois  le  plumage 
adulte,  et  dont  quelques  pennes  de  leur  ancien  plumage  leur  sont  restées.  Il  est  aussi  possible  que 
ces  pennes  soient  repoussées  une  dernière  fois  avec  leur  couleur  primitive.  Le  Musée  de  Bruxelles 
possède  un  de  ces  oiseaux  dont  l'une  des  rectrices  médianes  est  noirâtre,  tandis  que  l'autre  est 
blanche  ;  parmi  les  rémiges  secondaires  se  trouvent  également  quelques  pennes  en  partie  noirâ- 
tres. Ceci  prouve  bien  que  le  S.  lefevri  n'est  qu'un  jeune  oiseau  qui  a  pris  imparfaitement  le 
plumage  d'adulte. 


—  525  - 


rémiges  et  queue  noirâtres.  Bec  brun  cendré,  la  pointe  blanchâtre  ;  iris 
blanc  ;  pattes  d'un  gris  de  plomb.  Ce  n'est  qu'à  l'âge  de  trois  ans  qu'il  prend 
complètement  le  plumage  de  l'adulte. 

Poussin.  —  Duvet  épais^  cotonneux,  d'un  blanc  pur  ;  parties  nues  de  la 
tace  d'un  gris  de  plomb;  bec  de  même  couleur  avec  la  pointe  blanchâtre; 
pattes  d'un  gris  noirâtre,  les  scutelles  blanchâtres. 

Rab.  —  Le  Fou  de  Bassan  niche  en  Islande  (Faber)  et  sur  cer- 
taines îles  rocheuses  situées 
autour  de  l'Ecosse,  notamment 
sur  les  îles  Bass,  Ailsa  Craig, 
St-Kilda,  Lundy,  Skellig,  etc., 
{Dresser).  La  colonie  la  plus 
importante  (estimée  à  150,000 
couples),  paraît  être  établie  sur 
le  rocher  de  Sula  S'Geir,  et  une 
autre  (estimée  à  25,000  cou- 
ples) occupe  l'île  Stack,  près  des  Orcades  {Seebohm). 

Ces  oiseaux  quittent  leurs  rochers  en  octobre  pour  errer  sur  les 
côtes  de  l'Europe  occidentale.  On  les  voit  alors  en  plus  ou  moins 
grand  nombre  sur  toutes  les  côtes  des  îles  Britanniques  et  sur  celles 
de  la  Norvège,  mais  ne  dépassant  que  rarement  l'île  de  Lofoten 
(68°  1.  N.),  bien  qu'on  ait  vu  quelques  égarés  jusqu'au  Cap  Nord  et 
sur  les  côtes  de  la  Laponie  russe  {Collett).  Ce  n'est  qu'accidentelle- 
ment qu'on  en  voit  en  Suède  {Nilsson).  Ils  sont  plus  ou  moins  com- 
muns, en  hiver,  sur  les  côtes  du  Danemark  {Collin),  de  Helgoland 
(Cordeaux),  de  l'Allemagne  {Naumann,  Borggreve),  de  la  Hollande 
{Schlégel),  de  la  Belgique  (mais  rares  sur  l'Escaut),  de  la  France 
{Degland),  du  Portugal  (Reyes),  de  l'Espagne  {Saunders)  et  de  Gi- 
braltar {Trb>/)  ;  on  en  voit  accidentellement  au  Maroc  {Favier),  et  une 
ou  deux  captures  seulement  ont  été  faites  sur  les  côtes  italiennes 
Giglioli). 

Cet  oiseau  n'existe  pas  en  Asie,  mais  il  est  commun  sur  certaines 
îles  rocheuses  de  l'Amérique  du  Nord,  du  côté  de  l'Atlantique,  et  en 
hiver  on  l'observe  sur  les  côtes  américaines  depuis  le  Labrador,  jus- 
qu'au golfe  du  Mexique  {Baird)\  il  visite  irrégulièrement  le  Groen- 
land [Holbôll). 

Mœurs.  —  C'est  un  oiseau  plus  ou  moins  sédentaire,  mais  les  colo- 
nies se  dispersent  en  octobre  ol  les  l'ous  se  montrent  alors  par 
troupes  sur  toutoe  les  côtes  de  l'Europe  occidentale;  en  avril,  ils 


—  526  — 

reprenneni  possession  de  leurs  rochers.  Ces  oiseaux  vivent  par  mil- 
liers et  même  par  centaines  de  mille  sur  certaines  îles  rocheuses  et 
sur  des  points  déterminés  des  côtes  rocailleuses.  Jamais  ils  ne  s'éloi- 
gnent volontairement  de  la  mer,  mais  il  arrive  parfois  que  des  oura- 
gans les  jettent  loin  dans  l'intérieur  des  terres  ;  ils  se  montrent  alors 
si  affolés  qu'on  peut  les  prendre  sans  difficulté  ;  c'est  ainsi  qu'on  en 
a  capturés  à  Neuwied,  dans  le  Mecklembourg,  dans  l'Oldembourg  et 
dans  le  Munsterland  {Borg grevé). 

Ils  passent  généralement  la  nuit  près  de  leur  nid  ou  sur  des 
rochers  escarpés  qui  s'élèvent  parfois  au  milieu  de  la  mer  ;  mais  ils 
ont  cependant  leur  préférence,  et  choisissent  plutôt  certains  rochers 
à  d'autres  qui  paraissent  être  dans  les  mêmes  conditions. 

Le  Fou  de  Bassan  est  un  voilier  de  premier  ordre  et,  comme  l'Al- 
batros et  la  Frégate,  il  passe  dans  les  airs  la  plus  grande  partie  de  la 
journée.  Son  vol  est  très  remarquable  :  après  quelques  coups  d'ailes 
successifs  l'oiseau  file  droit  devant  lui,  fend  les  airs  avec  la  rapidité 
d'une  flèche,  puis  tournoie,  décrit  des  cercles  variés,  plane  presque 
sur  la  surface  de  l'eau  et  s'élève  de  nouveau  à  des  hauteurs  prodi- 
gieuses, tout  cela  avec  élégance  et  presque  sans  donner  des  coups 
d'ailes.  Est-il  fatigué  et  ne  voit-il  pas  de  rocher  au  voisinage,  il 
s'abat  sur  l'eau  où  il  se  laisse  ballotter  au  gré  des  flots;  il  s'endort 
souvent  ainsi,  la  tête  cachée  dans  les  scapulaires,  et  son  sommeil  est 
parfois  si  profond  que  l'approche  d'un  vaisseau  ne  le  réveille  même 
pas.  Il  nage  relativement  peu  et,  malgré  le  développement  de  ses  pal- 
matures,  il  préfère  se  laisser  pousser  par  le  vent.  A  terre  il  marche 
assez  bien,  mais  lourdement,  en  vacillant  et  en  laissant  traîner  la 
queue. 

Les  Fous  se  montrent  aussi  sociables  avec  les  autres  oiseaux  de 
mer  qu'avec  leurs  semblables,  ce  qui  n'empêche  qu'ils  soient  assez 
querelleurs  et  qu'ils  mordent  ceux  qui  les  approchent  de  trop  près  ; 
du  reste,  les  querelles  et  les  coups  de  bec  se  succèdent  sans  interrup- 
tion ;  il  est  vrai  qu'ils  ont  souvent  à  se  défendre  contre  les  Goélands 
et  les  Stercoraires  qui  cherchent  à  leur  enlever  le  produit  de  leur 
pêche.  Leur  cri,  dit  Naumann,  consiste  en  un  son  bref,  profond,  sac- 
cadé et  criard  qu'on  peut  rendre  par  rab,  rab,  rab  ;  sont-ils  excités, 
les  sons  se  succèdent  avec  plus  de  rapidité,  comme  rabrabrabrab  ! 
M.  Seebohm  rend  leur  cri  par  carra,  souvent  répété  et  modifié  de 
différentes  façons.  Quant  au  nom  qu'on  a  donné  à  ces  oiseaux,  ils  le 
méritent  bien,  car  là  où  ils  nichent,  ils  paraissent  complètement 


—  527  — 

dépourvus  de  l'instinct  de  la  conservation  :  on  peut  les  tuer  à  coups 
de  bâton  et  les  prendre  à  la  main  sans  qu'ils  cherchent  à  fuir,  ils  pen- 
sent eifrayer  l'assaillant  en  ouvrant  démesurément  leur  bec. 

La  nourriture  de  cet  oiseau  consiste  essentiellement  en  poissons  et 
en  céphalopodes  qu'il  pêche  à  la  surface  de  l'eau.  Il  prend  sa  proie  au 
vol,  se  précipite  sur  l'eau  d'une  certaine  hauteur  et  y  pénètre  souvent 
à  plusieurs  pieds  de  profondeur,mais  revient  de  suite  à  la  surface  pour 
avaler  sa  proie.  Il  est  très  vorace  et  consomme  journellement  quinze 
à  vingt  harengs  ou  autres  poissons  de  même  taille  ;  il  est  vrai  que  sa 
digestion  se  fait  avec  rapidité  et  qu'il  vomit  l'excès  d'aliments,  parfois 
même  à  moitié  digérés. 

Reproduction.  —  En  Europe,  le  Fou  de  Bassan  ne  paraît  nicher 
que  sur  les  côtes  et  les  îlots  rocailleux  de  l'Islande  et  sur  certaines  îles 
rocheuses  situées  près  de  l'Ecosse.  Il  a  été  dit  plus  haut  qu'il  vit  en 
colonies  composées  de  milliers  de  couples,  auxquels  se  joignent  sou- 
vent encore  d'autres  oiseaux  de  mer;  les  îles  rocheuses  que  choisis- 
sent ces  oiseaux  sont  littéralement  couvertes  de  nids.  C'est  vers  la  fin 
d'avril  que  commence  la  construction  ;  les  premiers  couples  arrivés 
aux  lieux  de  la  reproduction  font  leur  nid  sur  les  parties  saillantes, 
mais  bientôt  toutes  les  saillies  sont  occupées  et  les  nouveaux  venus 
doivent  prendre  possession  du  sommet  des  rochers.  Là,  les  nids  sont 
souvent  si  rapprochés  en  certains  endroits,  qu'il  est  parfois  impos- 
sible de  passer  entre  eux.  Les  premiers  construits  sont  très  grands, 
mais  les  suivants  deviennent  de  plus  en  plus  petits  à  mesure  que  la 
place  commence  à  manquer,  car  les  couples  les  derniers  arrivés 
doivent  se  contenter  de  l'espace  resté  libre  entre  les  nids  des  premiers 
occupants.  Ces  nids  ne  sont,  à  vrai  dire,  que  des  masses  informes 
composées  de  varechs  et  de  zostères  humides  que  les  flots  ont  rejetés 
au  pied  de  l'îlot,  et  de  diverses  graminées  arrachées  au  sommet  du 
rocher.  Ils  sont  peu  sohdes  et  les  femelles  doivent  constamment  les 
réparer;  aussi  trouvent-elles  souvent  plus  facile  d'enlever  des  maté- 
riaux aux  nids  voisins,  ce  qui  occasionne  des  cris  de  protestation  et 
des  luttes  à  n'en  pas  finir  ;  parfois  les  combattants,  dans  la  chaleur 
de  la  lutte,  roulent  do  leur  rocher  et  terminent  leur  querelle  dans 
l'eau.  On  comprend  qu'une  pareille  colonie  n'est  guère  agréable  à 
visiter;  le  guano  s'accumule  partout,  des  poissons  abandonnés  se 
putréfient  sous  l'action  du  soleil,  les  varechs  se  décomposent,  et  tout 
cela  exhale  une  odeur  inlocte  qui  empoisonne  l'atmosphère;  puis 
viennent  les  cris  assourdissants  de   centaines  do   mille  oiseaux;  on 


—  528  — 

conviendra  qu'il  faut  avoir  l'amour  de  la  science  ou  être  un  chasseur 
passionné  pour  s'aventurer  dans  un  pareil  milieu. 

«  En  1821,  dit  Faber,  je  me  trouvai  en  Islande  aux  Manôe  occi- 
dentales et  je  gravis  la  petite  île  rocheuse  sur  laquelle  cet  oiseau 
nichait.  A  mon  arrivée,  jeunes  et  vieux  commencèrent  une  discordante 
musique,  qui  consistait  en  un  seul  cri,  un  orrr  rauque  et  dur;  cepen- 
dant ils  ne  quittèrent  pas  leur  place,  et  je  pus  prendre  à  la  main 
autant  de  vieux  et  déjeunes  que  je  voulus.  Les  nids  étaient  serrés  les 
uns  contre  les  autres,  mais  les  restes  de  harengs,  de  céphalopodes, 
etc.,  jetés  aux  petits  par  les  parents,  avaient  rendu  le  sol  si  glissant 
que  je  faillis  tomber  sur  la  pente  de  l'écueil.  Chose  remarquable,  le 
tiers  des  nids  à  peu  près  contenait  des  œufs  altérés  que  les  femelles 
continuaient  néanmoins  à  couver;  bien  plus,  trompés  par  leur  instinct 
de  nourrir  les  jeunes,  qu'ils  attendaient  à  cette  époque,  les  parents 
avaient  jeté  de  la  nourriture  tout  aussi  bien  devant  les  œufs  pourris 
que  devant  les  poussins C'est  vers  la  fin  d'août,  à  Grimsoe  seule- 
ment à  la  Saint-Michel,  que  les  petits  sont  couverts  de  plumes,  et  ils 
sont  alors  presque  plus  grands  que  les  vieux,  du  moins  plus  gras  ; 
les  habitants  en  prennent  alors  tant  qu'il  peuvent  pour  en  faire  des 
salaisons  (1).  > 

Chaque  femelle  ne  pond  qu'un  seul  œuf,  de  forme  allongée,  à  sur- 
face crétacée  et  blanchâtre;  il  mesure  environ  81  millimètres  sur  51. 
Père  et  mère  couvent  alternativement  pendant  six  semaines  au  moins, 
et  soignent  ensuite  leur  petit  en  commun.  Ce  n'est  qu'à  l'âge  de  six  à 
sept  semaines  que  le  poussin  est  en  état  de  suivre  ses  parents  sur  la 
mer  et  de  chercher  lui-même  sa  nourriture. 

FAMILLE  DES  PHALACROCORACIDÉS. 

Car.  —  Bec  plus  ou  moins  long,  fendu  jusqu'au  delà  des  yeux, 
droit,  comprimé,  la  mandibule  supérieure  concave  au  sommet  et  termi- 
née en  pointe  crochue  et  acérée,  l'inférieure  arrondie  à  son  extrémité  ; 
narines  presque  invisibles  dans  l'adulte;  ailes  de  longueur  moyenne, 
couvrant  à  peine  la  base  de  la  queue,  subaiguës,  la  deuxième  rémige 
dépassant  ordinairement  un  peu  la  troisième  ;  queue  allongée,  arron- 
die, composée  de  douze  ou  de  quatorze  rectrices  raides  et  élastiques  ; 

(1)  F.  Faber,  Prodromus  der  Isldnd,  Ornith.  p.  86. 


—  o^J9  — 

bas  des  jambes  garni  de  plumes  ;  tarses  courts,  robustes,  comprimés  ; 
doigt  externe  le  plus  long,  l'ongle  du  médian  pectine  sur  son  bord 
interne. 

Les  sexes  ne  diffèrent  ni  par  leur  plumage,  ni  par  leur  taille  ;  il 
est  vrai  qu'on  rencontre  des  femelles  plus  petites  que  les  mâles,  mais 
par  contre  on  trouve  souvent  des  mâles  dont  la  taille  est  inférieure  à 
celle  de  beaucoup  de  femelles  de  la  même  espèce;  du  reste  la  taille 
est  souvent  très  variable  chez  les  sujets  d'un  groupe  spécifique,  et 
c'est  particulièrement  la  grandeur  du  bec  qui  est  sujette  à  des  varia- 
tions individuelles  parfois  très  remarquables.  Les  jeunes  ont  un  plu- 
mage particulier.  Cette  famille  ne  comprend  qu'un  seul  genre. 

Hab.  —  Les  espèces  sont  réparties  dans  les  diverses  parties  du 
monde. 

Mœurs.  —  Les  Cormorans,  comme  on  désigne  les  oiseaux  de  cette 
famille,  fréquentent  les  bords  de  la  mer  et  les  eaux  douces,  surtout  les 
fleuves  à  courant  rapide.  Ils  volent  bien,  nagent  et  plongent  à  la 
perfection,  se  perchent  volontiers  sur  les  arbres  et  y  font  souvent 
leur  nid. 

Leur  nourriture  consiste  surtout  en  poissons.  Certains  peuples 
dressent  ces  oiseaux  pour  la  pêche. 

GENRE     CLVII 

C0R5I0RAN.  —  PHALACROCORAX. 

Phalacrocorax,  Briss.  Omith.  VI,  p.  511  (1760). 
Peleoanus  (part.)  Lin.  Sijst.  nat.  I,  p.  216  (1766). 
Procellaria  (part.),  Miill.  Zool.  Dan.  Prodr.^.  18  (1776). 
Carbo,  Mey.  Tasclie7ib.  deutsch.  Yogelk.  II,  p.  576  (1810). 
Halieus,  Illig.  Prodr.,  p.  279  (181 1). 
Hydrocorax,  Vieill.  Nouv.  Dict.  Mil,  p.  83  (1817). 
Cormoranus,  Baill.  Mém.  Soc.  roy.  d'Etnul.  d'Abbev.  1833,  p.  77. 
Graculus,  Gray,  Voij.  Ereb.  and  Terr.  Birds,  p.  20  (1844). 
MiCROCARBO,  Bonap.  Cat.  Parzud.  p.  10  (1856). 

Car.  —  Ceux  de  la  famille. 

27G.  —  Le  Cormoran  ordinaire. 
PHALACROCORAX   CARBO,  Pall.  c.r  Lin. 

(PI.  277.) 

Pelecanus  CARBO,  Lin.  Syst.  Nat.  1,  p.  216  (1760). 
Procellaria  pelecanus,  Miill.  Zool.  Dan.  Prodr.  p.  IS  (1776). 

Tome  II.—  IS93.  67 


-  530  — 

Pelecanus  sinensis,  Shâw.,  Nat.  Mise.  p.  529  (1790-1801). 

Carbo  cormoranus,  Mey.  Taschenb.  deuts.  Vogelk.  Il,  p.  576  (1810). 

Halieus  carbo,  Illig.  Prodr.  p.  279  (1811). 

PHA.LACROCORAX  CARBO,  Pall.  Zoogr.  Rosso-Ass.  II,  p.  297  (181 1). 

Hydrocorax  CARBO  et  SINENSIS,  Vieill.  iVowu.  Dict.  VIII,  pp.  83,  86  (1817). 

Phalacrocorax  NOv^-HOLLANDi^  et  SINENSIS,  Ste pli.  S/iaic's  Gen.  Zool.  XIII,  1,  p.  93 
(1825). 

Carbo  glacialis,  arboreus  et  subcormoranus,  Brehm,  Isis.,  1830,  p.  995. 

Cormoranus  crassirostris,  Baill.il/em.  Soc.  roy.  d'Emul.  d'Abbev.  1833,  p.  77. 
?  Carbo  leucotis  et  ater,  Less  Traité  d'Orn.  p.  604  (1831). 

Phalacrocorax  MEDIUS,  Nilss.  Skand.  Fauna.,Vogl.  II,  p.  478  (1835). 

Phalacrocorax  carboides,  Gould,  Proc.  Zool.  Soc.  1837,  p.  156. 

Carbo  albiventris,  Tick.  Jauni.  As.  Soc.  Beng.  1842,  p.  463. 

Halieus  cormoranus,  Naum.  Vôg.  Deutschl.  XI,  p.  52  (1842). 

Graculus  carbo,  sinensis,  MEDIUS,  NOT^-HOLLANDiiE  et  CARBOIDES,  Gray,  Gcn.  of  B., 
p.  667(1845). 

Phalacrocorax  leucotis,  Blyth,  Cat.  B.  Mus.  As.  Soc.  p.  298  (1849). 

Graculus  americanus,  Reichb.  Handb.  pi.  67  (1850). 

Carbo  filamkntosus  et  capillatus,  Tem.  et  Schl.  Fauna  Jap.  pn29,pl.  83,  83^(1850) 

Phalacrocorax  glacialis,  arboreus,  subcormoranus, humilirostris  et  brachyrhyn- 
CHOS,  Brehm,  Vogelf.  p.  360  (1855). 

Phalacrocorax  capillatus,   Bonap   Comp.  Rend.  Ac.  /Sc.XLI,  (1856). 

Phalacrocorax  carbo  major  et  Ph.  carbo  médius,  Nilss.  Skand.  Fauna,  II,  p.  515 
(1858). 

Cormoranus  communis,  C.  F.  Dub.  FI.  col.  Ois.  Belg.  III  p.  228  (1860). 

Phalacrocorax  carbo  var.  Continentalis,  Severtz.  Turh.  Jevotn.  p.  70  (1873). 

Die  Kormoran-Scharbe,  en  allemand. 

The  Cormorant,  en  anglais. 

De  Aalscholver,  en  flamand. 

raz7/e  :  0,^79;  ailes  0,34  (1). 

Deseription  des  deux  sexes  après  la  mue  d'automne.  —  Tête,  cou,  bas  du  dos 
et  parties  inférieures  d'un  noir  verdâtre  brillant,  les  plumes  de  l'occiput 
étroites  et  prolongées  en  forme  de  huppe  tombante  ;  des  plumes  effilées, 
soyeuses  et  d'un  blanc  argentin  ornent  le  vertex  et  le  haut  du  cou,  mais  lais- 
sent apercevoir  entre  elles  le  plumage  sombre  qui  est  dessous;  gorge  et  une 
bande  remontant  vers  l'œil  d'un  blanc  assez  pur  ;  manteau  et  couvertures 
des  ailes  d'un  cendré  roussâtre,  chaque  plume  bordée  de  noir  ;  une  grande 
tache  blanche,  formée  de  plumes  longues  et  larges,  sur  les  flancs  au-dessus 
des  jambes  ;  rémiges  secondaires  d'un  gris  noirâtre,  les  primaires  brunes  ; 
queue  noire.  Parties  nues  de  la  face  jaunes  ;  iris  d'un  beau  vert  ;  bec 
gris,  noir  au-dessus  et  jaunâtre  à  la  base;  pattes  et  membranes  noires. 


(i)  La  taille  de  cet  oiseau  est  très  variable  ;  c'est  surtout  en  Amérique,  en  Australie  et  à 
la  Nouvelle-Zélande  que  l'espèce  acquiert  la  taille  la  plus  forte,  mais  comme  on  rencontre 
toutes  les  dimensions  intermédiaires,  il  n'y  a  pas  lieu  d'admettre  les  différentes  espèces  et 
variétés  qu'on  a  créées.  Les  auteurs  récents  sont  généralement  d'accord  sur  ce  point. 


Il  - 


Au  printemps  le  plumage  est  le  même,  mais  sans  plumes  effilées  blanches 
à  la  tête  et  au  cou  et  sans  la  tache  blanche  des  flancs  ;  toutes  ces  plumes 
blanches  disparaissent  insensiblement  par  l'usure,  car  l'oiseau  n'a  qu'une 
mue  par  année. 

Jeune.  —  Dessus  de  la  tête  et  du  cou  ainsi  que  les  flancs  d'un  brun  foncé  ; 
mant(^au  d'un  cendré  brunâtre  à  reflets  verts  et  bronzés,chaque  plume  bordée 
de  noirâtre  ;  bas  du  dos  d'un  noir  verdâtre  ;  rémiges  secondaires  d'un  brun 
bronzé  ;  le^  primaires  et  la  queue  noires  ;  gorge  et  tour  du  bec  jusqu'à  l'œil 
blanchâtres;  devant  et  côtés  du  cou  bruns  avec  les  plumes  légèrement  bor- 
dées de  blanchâtre;  poitrine  et  abdomen  blancs, mais  les  plumes  plus  ou  moins 
terminées  de  brun  ;  sous-caudales  brunes.  Bec  d'un  gris  brunâtre  passant  au 
blanc  rougeâtre  à  la  base  ;  iris  brunâtre. 

Poussin.  —  Nu  à  sa  naissance,  mais  au  bout  de  quelques  jours  il  est 
1  evêtu  d'un  duvet  court,  épais  et  d'un  noir  fuligineux  avec  quelques  mèches 
blanches  sur  les  ailes  ;  parties  nues  de  la  face  d'un  jaune  orange;  bec  brun, 
blanchâtre  à  la  base  ;  iris  brun  ;  pattes  d'un  gris  noirâtre. 

Hab.  —  Le  Cormoran  ordinaire  est  plus  ou  moins  commun  et  séden- 
taire aux  îles  Britanniques  et 
dans  toute  l'Europe,  ainsi  qu'en 
Islande  {Faber),  au  cap  Nord  et 
dans  la  Laponio  russe  {Collett). 
En  Belgique  il  est  commun  et  sé- 
dentaire sur  les  côtes  maritimes 
et  sur  l'Escaut,  et  il  se  montre 
parfois  jusque  sur  les  eaux  des 
environs  de  Bruxelles;   M.  A. 


ji..jgg..;o»bl 


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ii(LJ 


Groegaert  dit  que  tous  les  ans  il  y  en  a  qui  nichent  sur  le  fort  du 
Nord  (Anvers). 

En  Afrique,  cet  oiseau  est  sédentaire  dans  les  contrées  les  plus 
septentrionales  [Tjoche,  etc.),  mais  il  ne  paraît  visiter  qu'en  hiver  les 
autres  parties  du  continent  noir;  il  est  alors  commun  en  Egypte 
(rfe /Tew^/m)  jusqu'au  Soudan  {A.  Brehm)\  il  est  cependant  probable 
qu'il  se  montre  en  Afrique  un  peu  partout,  car  il  a  été  observé  en 
Sénégambie  [Lichtetistein),  au  Damaras  {Andersson)  et  dans  la  répu- 
blique d'Orange  {Barratt). 

Il  paraît  également  habiter  toute  l'Asie  jusqu'au  Kamtschatka 
'wïdwsiyameïii  {Taczanowski)  et  au  Ja])on{Sfh/égel);  dans  le  Sud,  on 
le  voit  en  Perso  {Blanfny^d),  dans  l'Inde  {Jcrdnn),  à  Ceylan  {Secbohm), 
dans  riiKJo-Chiiio  {Hume),  en  Chine  {Darid),  à  Formose  {Swifi/toc), 
à  Malacca  et  à  Sumatra  {Vurdemian).  Il  est  aussi  plus  ou  moins 


-  532  — 

commun  à  la  Nouvelle-Zélande  (Buller),  en  Australie  et  en  Tasmanie 
{Gould,  etc.). 

En  Amérique  on  observe  cet  oiseau  sur  les  côtes  de  l'Atlantique, 
au  Groenland  {Holbôll)  et  depuis  la  mer  d'Hudson  et  le  Labrador 
{Baird)  jusque  dans  la  Caroline  et  la  Géorgie  {Dresser).  Comme  on 
vient  de  le  voir,  cette  espèce  est  presque  cosmopolite. 

Mœurs.  —  Le  Cormoran  ordinaire  habite  les  côtes  maritimes,  de 
préférence  les  îles  rocheuses  et  les  falaises,  ainsi  que  les  fleuves,  les 
lacs  et  autres  grandes  eaux  poissonneuses  entourées  de  bois  ou  situées 
dans  le  voisinage  d'une  forêt.  Quand  une  localité  lui  convient,  il  y 
retourne  tous  les  ans  et  en  nombre  toujours  plus  considérable,  car  il 
aime  la  société,  aussi  le  voit-on  rarement  seul  ;  c'est  par  centaines  et 
même  par  milliers  qu'on  observe  ces  oiseaux  dans  certains  endroits 
où  ils  se  sentent  en  sûreté.  Ce  n'est  pas,  à  vrai  dire,  une  espèce 
migratrice,  mais  en  automne  elle  quitte  généralement  l'endroit  où 
elle  a  niché  pour  errer  dans  les  pays  voisins,  et  alors  elle  entreprend 
parfois  de  longs  voyages  qui  la  conduisent  jusque  sous  les  tropiques, 
car  tous  les  climats  lui  conviennent. 

A  terre,  cet  oiseau  paraît  indolent  ;  il  marche  avec  difficulté,  mais 
pas  beaucoup  plus  mal  que  les  fuliguliens,  et  tient  le  corps  assez 
droit.  Il  se  repose  de  préférence  sur  les  arbres  et  sur  les  rochers,  et 
se  montre  même  plus  adroit  au  milieu  des  branches  que  sur  le  sol. 
Mais  c'est  dans  l'eau  qu'il  déploie  toute  son  agilité  :  il  nage  à  la 
perfection  et  vite,  plonge  à  une  grande  profondeur  et  se  meut  entre 
deux  eaux  avec  une  célérité  incroyable;  Naumann  dit  qu'il  peut 
rester  trois  à  quatre  minutes  sous  l'eau  sans  respirer.  Lorsqu'il  se 
voit  poursuivi,  il  plonge  une  fois  ou  deux,  ne  revenant  chaque  fois 
à  la  surface  qu'à  une  cinquantaine  de  mètres  de  l'endroit  où  il  a  fait 
le  plongeon  ;  mais  s'il  s'aperçoit  qu'on  continue  à  le  poursuivre,  il 
prend  son  vol  et  s'éloigne  à  tire-d'aile.  «  Quand  sur  mer,  dit  A.  Brehm, 
on  s'approche  en  bateau  d'une  île  de  rochers  sur  lesquels  sont  per- 
chés des  centaines  de  Cormorans,  on  les  voit  tout  d'abord  allonger  le 
cou  et  remuer  la  tête,  puis  piétiner  maladroitement  à  droite  et  à 
gauche  et  enfin  partir  tous  ensemble.  Quelques  individus  de  la  bande 
s'élèvent  dans  les  airs,  volent,  puis  glissent  en  planant  droit  devant 
eux;  quelques  autres  commencent  par  s'élever  en  tournoyant  à  des 
hauteurs  plus  considérables  ;  la  plupart  d'entre  eux  sautent  dans  la 
mer  à  peu  près  à  la  manière  des  grenouilles,  plongent  et  reparaissent 
à  la  surface  le  plus  loin  possible  de  l'endroit  où  ils  ont  plongé;  ils 


—  533  — 

surveillent  le  bateau,  et,  s'il  avance  trop  à  leur  gré,  plongent  de  nou- 
veau et  fuient  jusqu'à  ce  qu'ils  se  trouvent  suffisamment  en  sûreté... 
Sous  l'eau,  ils  nagent  avec  une  telle  rapidité  que  c'est  à  peine  si  la 
meilleure  barque,  conduite  par  les  rameurs  les  plus  exercés,  peut  les 
atteindre  ;  outre  cela,  ils  plongent  longtemps  et  à  des  profondeurs 
considérables,  reparaissent  un  instant  à  la  surface,  respirent  rapide- 
ment et  disparaissent  de  nouveau.  Quand  ils  poursuivent  leur  proie, 
ils  s'allongent  et  donnent  de  larges  coups  de  rame  avec  une  telle 
énergie  que  leur  corps  est  lancé  à  travers  l'eau  comme  une  flèche; 
en  un  mot,  ils  dominent  leur  élément  de  la  manière  la  plus  parfaite.  » 

C'est  donc  un  oiseau  prudent,  rusé  et  méfiant,  mais  il  se  montre 
aussi  agressif  et  méchant  envers  les  autres  oiseaux,  surtout  quand  la 
jalousie  et  la  voracité  sont  en  jeu.  Son  bec  est  une  arme  dangereuse 
et  il  blesse  parfois  jusqu'au  sang  l'oiseau  auquel  il  a  cherché  querelle  ; 
un  individu  blessé  et  incapable  de  se  sauver,  se  défend  courageuse- 
ment contre  les  chiens  et  même  contre  l'homme,  dirigeant  e-urtout 
ses  coups  de  bec  vers  les  yeux  de  l'assaillant  ;  même  les  coups  qu'on 
reçoit  sur  la  main  laissent  parfois  des  traces  profondes. 

En  volant,  l'oiseau  tient  le  cou  droit  devant  lui,  les  ailes  largement 
étalées  ;  il  vole  avec  beaucoup  d'aisance  tantôt  en  battant  des  ailes, 
tantôt  planant  en  décrivant  des  cercles  à  une  hauteur  considérable  ; 
son  vol  est  du  reste  variable  et  ressemble  par  moment  à  celui  d'un 
Sterne,  d'autres  fois  à  celui  d'un  Corbeau  et  parfois  même  on  croirait 
voir  un  Canard.  Le  Cormoran  est  en  général  un  oiseau  peu  bruyant; 
son  cri  est  rauque  et  ressemble  assez  à  celui  du  Corbeau  et  on  peut  le 
rendre  par  kra,  kra,  krau  et  krav. 

La  nourriture  de  cet  oiseau  se  compose  uniquement  de  poissons. 
C'est  surtout  le  matin  qu'il  se  livre  à  la  pêche,  poursuivant  sa  proie 
jusqu'à  vingt-cinq  à  trente  mètres  de  profondeur  ;  quand  il  est  bien 
gorgé  et  qu'il  lui  est  impossible  d'avaler  encore  une  victime,  il  va  se 
percher  sur  un  arbre  ou  sur  un  rocher,  se  repose,  digère  et  sèche  son 
plumage  au  soleil. C'est  un  oiseau  extrêmement  vorace  dont  on  ne  peut 
tolérer  la  présence  près  des  eaux  intérieures,  car  une  bande  do  Cor- 
morans détruit  énormément  de  poissons  et  occasionne  plus  de  dégâts 
qu'une  Loutre. 

En  Chine,  on  dresse  ces  oiseaux  àla  pêche,  mais  on  ne  se  sert  que 
de  sujets  nés  en  captivité,  car  les  Chinois  font  couver  des  œufs  de 
Cormorans  par  des  poules  domestiques.  Un  Cormoran  bien  dressé 
saute  à  l'eau  sur  l'ordre  de  son  maître,  plo[ige  et  rapporte  le  poisson 


—  534  — 

qu'il  a  pris,  car  on  a  soin  de  lui  mettre  autour  du  cou  un  anneau  de 
métal  qui  l'empêche  d'avaler  le  produit  de  sa  chasse  ;  mais  après 
avoir  travaillé  pendant  quelque  temps,  son  maître  lui  enlève  l'anneau 
et  lui  donne  le  fretin  pour  récompense. 

Reproduction.  —  Ce  Cormoran  niche  dans  des  endroits  divers  : 
près  de  la  mer,  il  choisit  les  îles  rocheuses,  les  falaises,  et  construit 
son  nid  dans  les  trous  et  dans  les  crevasses  des  rochers  ;  près  des 
eaux  douces,  il  niche  sur  des  arbres  élevés  ou  sur  la  tête  d'un  saule, 
moins  souvent  dans  les  buissons;  enfin,  dans  les  marais,  il  est  obligé 
de  faire  son  nid  dans  les  joncs  et  les  roseaux.  Là  où  les  Hérons  ont 
leurs  colonies  et  où  nichent  également  des  bandes  de  Freux,  les  Cor- 
morans cherchent  à  s'emparer  de  nids  de  ces  oiseaux  ;  les  Freux  sont 
facilement  expulsés  de  leur  propriété,  mais  il  n'en  est  pas  de  même 
des  Hérons  qui  sont  de  force  à  se  défendre  ;  ce  n!est  qu'après  un 
combat  acharné  que  les  Cormorans  parviennent  à  prendre  possession 
de  quelques  nids  de  Hérons. 

«  Au  printemps  de  1812,  dit  Naumann,  quatre  couples  de  Cormo- 
rans se  montrèrent  dans  une  propriété  non  loin  de  la  ville  de  Lutjen- 
bourg  et  voisine  de  la  mer,  et  s'établirent  dans  un  bois  sur  de  grands 
hêtres,  qui  servaient  depuis  des  années  aux  colonies  de  Hérons  et  de 
Freux.  Ils  expulsèrent  quelques  familles  de  Hérons  pour  se  servir  de 
leurs  nids,  firent  deux  couvées,  la  première  en  mai,  l'autre  en  juillet, 
et,  réunis  en  une  bande  d'une  trentaine  d'individus,  ils  quittèrent  la 
contrée  en  automne.  Ils  revinrent  au  printemps  de  l'année  suivante 
et  de  toutes  les  années  qui  suivirent,  en  nombre  toujours  plus  consi- 
dérable, qu'on  put  bientôt  évaluer  à  7,000  couples.  F.  Boie,  de  qui 
je  tiens  le  fait,  compta  en  juin  1815,  sur  quelques  arbres  placés  dans 
un  petit  rayon,  50  nids  de  Cormorans;  la  quantité  de  ces  oiseaux  qui 
allaient  et  venaient  mêlés  à  des  Hérons  et  à  des  Freux,  remplissaient 
les  airs  de  leurs  cris  sauvages  qui  vous  assourdissaient;  les  arbres 
comme  leur  feuillage  étaient  blanchis  par  les  excréments,  et  l'air 
était  empesté  par  les  poissons  pourris  tombés  des  nids.  Ce  ne  fut 
qu'après  plusieurs  années  de  chasses  actives  et  ininterrompues,  qu'on 
parvint  à  se  débarrasser  de  ces  pillards  qui  finirent  par  se  diviser  en 
plusieurs  bandes  pour  aller  s'établir  près  de  la  mer  (1)  » 

C'est  ordinairement  en  avril  que  ces  oiseaux  reviennent  aux  lieux 
de  la  reproduction  ;  à  ce  moment  ils  ont  encore  leur  beau  plumage, 

(1)  Naumann,    Vôgel  DeuUchl.  xi,  p.  78. 


—  o3o  — 

quoique  déjà  plus  ou  moins  usé;  mais  à  partir  de  ce  jour,  l'usure  des 
plumes  blanches  devient  de  plus  en  plus  visible,  et  quand  les  jeunes 
éclosent,  les  parents  n'ont  plus  de  trace  de  leur  parure  d'automne. 

Près  de  la  mer,  les  nids  sont  ordinairement  construits  à  l'aide 
d'herbes  marines,  mais  la  base  est  autant  que  possible  composée  de 
branches  mortes  et  de  tiges  herbacées.  Quand  ces  oiseaux  nichent 
sur  des  arbres,  leur  nid  demande  toujours  plus  de  travail,  et  c'est 
pour  le  rendre  moins  pénible  qu'ils  s'emparent  de  nids  de  Hérons  ou 
de  Corneilles,  qui  leur  servent  alors  de  base  ;  les  deux  sexes  les  appro- 
prient en  y  ajoutant  des  bûchettes,  des  joncs,  des  roseaux  et  autres 
matériaux  grossiers.  La  ponte  est  de  trois  à  cinq  œufs  elliptiques, 
granulés,  d'un  bleu  verdâtre  pâle,  mais  ils  sont  recouverts  d'une  sub- 
stance calcaire  blanche  qui  laisse  cependant  entrevoir  la  couleur  de 
la  coquille  ;  ils  mesurent  en  moyenne  63  millim.  sur  39. 

Mâle  et  femelle  couvent  alternativement  et  les  œufs  éclosent  au 
bout  d'un  mois.  Les  parents  témoignent  beaucoup  d'atïection  à  leurs 
poussins  et  leur  apportent  une  quantité  de  petits  poissons  qu'ils  jettent 
dans  le  nid.  Vers  la  mi-juin  les  jeunes  peuvent  prendre  leur  vol  et 
suffire  à  leurs  besoins;  les  parents  se  préparent  alors  à  faire  une  nou- 
velle couvée,  du  moins  ceux  qui  habitent  la  zone  tempérée.  Il  est 
cependant  à  remarquer  que,  par  suite  de  certaines  circonstances,  la 
première  ponte  est  parfois  retardée,  et  dans  ce  cas  iln'est  pas  possible 
aux  oiseaux  d'avoir  une  seconde  couvée. 


277.  —  Le  Cormoran  huppé. 
PHALACROCORAX  GRACULUS,  Pall.  ex  Lin. 

(PI.  278) 

Phalacrocorax  minor,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  516  (1760). 

Pelecanus GRACULUS,  Lxn.Syst.  7ial.l,  p.  217  (1766). 

Procellaria  GRACULUS  et  CRiSTATUs,  MuU.  Zool.  Dan.  Prodr,  p.  18  (1776). 

Pelecanus  cristatus,  Fab  Faun.  Gfoenl.  p.  90  (1780). 

Carbo  GRACULUS,  Mey.  Tascitenb.  deuiscli.  Yiiyelh  II,  p.  578  (1810). 

Ph.vlacrocoraxgraculu.s,  Pall.,  Zoogr.  Rosso-As.  II,  p.  299(1811). 

Hydrocorax  cristatus,  Vioill.  iV.  Dict.  (Thist.  nat.  VIII,  p.  89(1817). 

Carho  cristatus,  Tem.,  Man.  d'Orn.  II,  p.  900  (1820). 

Halieus  GRACULUS,  Liclit.  Verz.  Loubl.  p.  80(1823). 

Phalacrocorax  cristatus,  Steph.,  S/iaw's  G^'n.  Zool  XIIIl,  p.  83  (1825). 

Carbo  desmaresti,  Payraud.  Ann.  iSc.  Nat.  1826,  p.  460. 

Carbo  bbachyuros,  Brehm.,  7sis,  1830,  p.  995. 

IIali.eus  leucoqastek,  Gara,  Eknc.  degl.  Ucc.  Sr.rd.  p.  100  (1842). 


536  — 


Carbo  graculus  mediterraneus,  Schleg.  Rev.  crit.  p.  CXXIII  (1844). 

Graculus  cristatus,  linn^ii  et  desmarestii,  Gray.  Gen.  Birds,  III,  p.  667  (1845). 

Phalacrocorax  desmaresti,  Brehm,  Naumannia,  1855,  p  296. 

CoRMORANUS  CRISTATUS,  C.-F.  Dub.  PL  col.  Ois.  Belg.  III,  p.  229  (1860). 

Die  Krahenscharbe,  en  allemand. 

The  Shag,  en  anglais. 

De  geruifde  Aalscholver,  en  flamand. 

Taille  :  0"^55  ;  ailes,  O'^BS. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  D'un  vert  noirâtre  uniforme  à  reflets 
bronzés,  les  plumes  des  ailes  et  du  haut  du  dos  bordées  de  noir  velouté  ; 
rémiges  et  queue  noirâtres  ;  plumes  du  vertex  allongées,  recourbées  en  avant 
et  formant  une  large  huppe  qui  disparaît  après  l'incubation  ;  parties  nues  de 
la  face  d'un  brun  jaunâtre  passant  au  noir  au  menton.  Bec  noir;  iris  d'un 
beau  vert  ;  pattes  noires. 

Jeune.  —  Ressemble  à  celui  du  Cormoran  ordinaire,  mais  il  est  plus  petit, 
a  plus  de  blanc  aux  parties  inférieures  et  n'a  que  douze  pennes  dans  la  queue, 
tandis  que  le  précédent  en  a  quatorze. 

Poussin.  —  Face  et  gorge  dénudées,  d'un  jaune  sale;  duvet  brun,  plus 
foncé  sur  la  tête  et  au  cou.  Bec  brun  à  base  jaunâtre  ;  iris  d'un  gris  bleuâtre  ; 
pattes  blanchâtres,  grises  à  l'extérieur. 

Hab.  —  Ce  Cormoran  est  assez  répandu  et  sédentaire  en  Islande, 

surtout  sur  les  côtes  méridionales 
et  occidentales  {Faber),  aux  îles 
Féroé  {Graba),  Hébrides  et  sur 
toutes  les  côtes  des  îles  Britan- 
niques {Seebohm)  et  de  la  Nor- 
wège  jusqu'au  cap  IS or d{Collett) 
et  la  Laponie  russe;  il  ne  se 
montre  pas  dans  les  pays  bai- 
gnés  par  la    mer  Baltique.   Il 
visite  accidentellement  les  côtes  occidentales  du  Danemark  {Collin)^ 
du  nord-ouest  de  l'Allemagne  où  plusieurs  sujets  ont  été  tués    à 
l'embouchure  de  l'Elbe  {Naumann),  de  la  Hollande  {Schlégel)  et  très 
accidentellement  de  la  Belgique  et  du  nord  de  la  France,  mais,  sur 
les  côtes  de  la  Normandie  il  est  plus  fréquent  que  le  Cormoran  ordi- 
naire {Gadeau  de  Key^ville).  Cet  oiseau  niche  en  grand  nombre  sur  les 
rochers  de  Jobourg  (et  non  Isbourg)  qui  bordent  les  côtes  des  envi- 
rons de  Cherbourg,  ainsi  que  sur  les  îles  Jersey,  Guernesey,  Aurigny 
{Canivet,  Begland),  sur  les  îles  de  la  Bretagne  {Lemetteil)  et  il  n'est 
pas  rare  à  Hendaye  {Olphe-Galliard).  Cet  oiseau  se  montre  aussi 


—  537  — 

accidentellement  sur  les  côtes  d'Espagne  [Saunders),  de  Gibraltar 
{Irby),  du  Portugal  {Reyes),  de  Ligurie  et  de  Toscane,  mais  il  niche 
sur  les  côtes  rocailleuses  de  la  Sardaigne  {Salvadori),  de  la  Corse 
{Giglioli)  et  du  sud  de  la  Dalmatie  {Kolomhatovic)  ;  il  est  de  passage 
en  Sicile  {Malherbe).  Il  est  également  commun  et  sédentaire  en  Grèce 
{Lindermayer)  et  aux  Cjclades  {Erhard),  visite  les  côtes  de  l'Asie 
Mineure  [Lord  Lilford)  et  se  montre  parfois  au  printemps  et  en 
automne  dans  les  parages  du  Pont-Euxin  [de  Nordmann).  11  est 
sédentaire,  mais  rare  au  Maroc  [Favier)  et  en  Algérie  [Loche). 

Mœurs.  —  Le  Cormoran  huppé  ou  Nigaud  est  plus  sédentaire  que 
le  précédent  ;  en  automne,  il  voyage  d'une  côte  à  l'autre  en  troupes 
plus  ou  moins  considérables,  non  pour  chercher  un  climat  plus  doux, 
mais  dans  un  simple  but  de  déplacement,  aussi  fait-il  rarement  un 
long  voyage.  Il  est  essentiellement  maria,  n'habite  que  les  îles 
rocheuses  et  les  falaises  et  ne  se  montre  que  rarement  sur  les  eaux 
douces  de  l'intérieur,  et  jamais  très  loin  des  côtes,  à  moins  d'avoir  été 
emporté  par  une  tempête.  Là  où  il  niche,  on  le  voit  généralement  par 
bandes  composées  de  centaines  d'individus,  établissant  leur  demeure 
sur  des  rochers  arides  et  escarpés. 

Cet  oiseau  a  des  habitudes  et  des  moeurs  assez  semblables  à  celles 
du  Cormoran  ordinaire  ;  il  marche  diflScilement,  ne  reste  pas  long- 
temps debout,  mais  s'accroupit  de  suite  sur  ses  tarses,  tout  en  tenant 
le  corps  assez  droit  ;  il  se  tient  ainsi  parfois  des  heures  entières  à  une 
faible  hauteur  sur  une  saillie  de  rocher  et  la  tête  dirigée  vers  la  mer  ; 
il  est  vrai  que  son  plumage  prend  beaucoup  d'eau  et  qu'il  faut  du 
temps  pour  le  sécher.  Au  premier  coup  de  feu,  toute  la  bande  se  jette 
à  l'eau  et  disparaît  dans  les  flots.  Ce  Cormoran  nage  avec  vigueur, 
mais  il  n'enfonce  pas  autant  le  corps  que  l'espèce  précédente  ;  sous 
l'eau  il  est  d'une  agilité  incroyable,  plonge  à  de  grandes  profondeurs 
où  il  poursuit  les  poissons  en  tout  sens,  et  il  peut,  d'après  Graba, 
rester  submergé  trois  à  quatre  minutes  sans  respirer.  Son  vol  est  facile 
et  varié,  mais  l'oiseau  ne  vole  pas  beaucoup  et  rarement  bien  loin,  car 
c'est  toujours  en  plongeant  qu'il  cherche  à  échapper  à  ses  ennemis, 
mais  si  l'on  continue  à  le  poursuivre,  il  s'envole  au  loin. C'est,  du  reste, 
un  oiseau  prudent  et  farouche,  mais  il  se  montre  moins  détiant  près 
de  son  nid  et  quand  il  se  trouve  isolé  ;  il  aime  la  société,  même  celle 
d'autres  oiseaux  aquatiques  comme  les  Cormorans  ordinaires,  les 
Eiders,  etc.  Son  cri  ressemble  à  celui  de  l'espèce  précédente  :  il  est 
rauque  et  guttural,  mais  l'oiseau  no  le  fait  pas  entendre  souvent. 
TuM.  II.  —  1WU3.  68 


~  538  — 

Le  Cormoran  huppé  se  nourrit,  comme  son  congénère,  essentielle- 
ment de  poissons  qu'il  va  chercher,  d'après  Graba,  jusqu'à  une  pro- 
fondeur de  cent  à  cent  cinquante  pieds,  où  il  trouve  des  Cottus  scor- 
pio,  Clupea  sprattus,  de  jeunes  Pleuronectes  hypoglossus  et  autres 
poissons  (1). 

Reproduction.  —  Cette  espèce  ne  niche  pas  en  troupes  aussi  nom- 
breuses que  la  précédente,  et  cela  tient  surtout  à  ce  qu'elle  établit 
son  nid  de  préférence  dans  des  trous  et  dans  des  crevasses  de  rocher, 
qui  ne  peuvent  pas  toujours  en  contenir  beaucoup  et  qui  sont  souvent 
assez  espacés  les  uns  des  autres.  A  défaut  de  cavités,  elle  niche  sur 
des  saillies  de  rochers,  comme  Graba  l'a  constaté  aux  îles  Féroé.  Le 
nid  est  grand,  assez  élevé  au  début,  enfoncé  au  centre  et  composé 
uniquement  de  fucus,  de  zostères  et  autres  plantes  marines;  c'est,  en 
un  mot,  une  masse  compacte,  humide  et  malpropre,  surtout  quand 
elle  se  couvre  d'excréments  et  de  déjections. 

La  ponte  a  lieu  vers  la  fin  d'avril  ou  en  mai  et  parfois  en  juin; 
M.  CoUett  dit  avoir  vu  au  cap  Nord,  le  26  juin  1872,  des  nids  qui 
avaient  encore  des  œufs,  tandis  que  d'autres  contenaient  des  jeunes  à 
moitié  ailés.  Faber  a  fait  la  même  remarque  en  Islande.  La  femelle 
dépose  trois  ou  quatre  œufs  qui  ne  diffèrent  guère  de  ceux  du  Cor- 
moran ordinaire,  mais  ils  sont  un  peu  plus  petits  :  ils  mesurent  envi- 
ron 58  millim.  sur  35.  Les  deux  sexes  les  couvent  alternativement 
pendant  vingt-quatre  à  vingt- sept  jours,  mais  il  arrive  souvent  que 
l'un  des  œufs  se  gâte. 

Les  jeunes  crient  beaucoup  et  paraissent  toujours  affamés,  bien  que 
leurs  parents  ne  les  laissent  manquer  de  rien. 

TROISIÈMK    SOUS-ORDRE 

LONGIPENNES. 

Car.  —  Bec  de  longueur  moyenne,  comprimé  latéralement,  crochu 
ou  pointu;  ailes  très  longues,  pointues  et  plus  ou  moins  étroites; 
queue  de  longueur  et  de  forme  variables,  composée  ordinairement 
de  douze  rectrices;  les  trois  doigts  antérieurs  réunis  par  une  mem- 
brane parfois  échancrée.  Tête  médiocre;  cou  court;  corps  assez  volu- 
mineux ;  plumage  serré  et  abondant,  de  couleur  assez  uniforme  et 
variable  suivant  l'âge  et  les  saisons. 

(1)  C.  J.  Graba,  Tagebuch,  Reise  nach  Fàrô,  p.  161. 


—  539  — 

Mœurs.  —  La  majorité  des  Longipennes  sont  essentiellement  ma- 
rins et  peuvent  défier  l'océan  et  ses  tempêtes  ;  ils  aiment  la  pleine 
mer  quand  le  temps  est  beau,  mais  les  ouragans  les  chassent  vers  les 
côtes.  Les  uns  sont  sociables,  les  autres  ont  des  habitudes  plus  soli- 
taires. L'air  est  leur  élément  favori,  car  ce  sont  des  voiliers  de  premier 
ordre;  ils  nagent  plus  ou  moins  bien,  mais  peu  savent  se  mouvoir 
sous  l'eau;  leur  marche  est  en  général  facile.  Ceux  qui  vivent  près 
des  côtes  se  montrent  prudents,  intelligents  et  méfiants  ;  ceux,  au 
contraire,  qui  vivent  habituellement  en  pleine  mer,  paraissent  stu- 
pides  et  imprudents.  Ils  se  nourrissent  de  toutes  espèces  d'animaux, 
parfois  de  cadavres  et  de  charognes. 

Ces  oiseaux  nichent  généralement  à  terre,  dans  des  marais,  sur 
des  rochers,  dans  des  trous,  etc.  Ils  pondent,  suivant  les  espèces,  de 
un  à  quatre  œufs  ;  les  jeunes  ne  sont  conduits  à  l'eau  que  quand  ils 
savent  voler. 

Ce  groupe  se  divise  en  deux  familles  :  les  Sternidés  et  les  Laridês. 

FAMILLE  DES  STERNIDÉS. 

Car.  —  Bec  le  plus  ordinairement  de  la  longueur  de  la  tête,  droit, 
la  mandibule  supérieure  fléchie  vers  la  pointe,  ailes  très  longues, 
étroites,  aiguës,  la  première  rémige  la  plus  longue  ;  queue  assez 
longue,  plus  ou  moins  fourchue  et  formée  de  douze  rectrices;  tarses 
courts  ;  quatre  doigts,  les  antérieurs  réunis  par  une  palmature  plus 
ou  moins  échancrée  ;  ongles  assez  acérés. 

Ilab.  —  On  observe  des  oiseaux  de  cette  famille  dans  toutes  les 
parties  du  monde. 

Mœurs.  —  Les  Sternidés  vivent  sur  les  côtes  maritimes  ou  près  des 
eaux  douces.  Ce  sont  des  oiseaux  élégants,  vifs,  agiles  et  toujours  en 
mouvement;  ils  volent  toute  la  journée  avec  une  agilité  prodigieuse, 
et  ce  n'est  pas  sans  raison  qu'on  leur  a  donné  le  nom  à' Hirondelles  de 
mer;  leur  vol  est  aussi  rapide  que  celui  des  vraies  Hirondelles,  et, 
comme  ces  dernières,  les  Sternes  se  reposent  peu  et  jamais  longtemps. 
Au  repos,  leur  corps  prend  une  position  horizontale,  la  tête  rentrée 
entre  les  épaules  et  les  ailes  un  peu  relevées  en  arrière. Elles  marchent 
en  général  mal  et  en  trottinant;  sur  l'eau  elles  flottent  comme  un  mor- 
ceau de  liège,  mais  elles  sont  incapables  de  nager  vite.  Ces  oiseaux 
se  nourrissent,  suivant  leur  taille,  de  petits  poissons,  do  divers  petits 
animaux  marins,  de  vers,  de  larves  et  d'insectes;  les  grandes  espèces 


—  540  — 

poursuivent  souvent  des  oiseaux  et  des  petits  mammifères,  mais  toutes 
saisissent  leur  proie  en  plongeant  ou  en  fondant  sur  elle. 

Elles  nichent  en  société,  mais  le  plus  souvent  chaque  espèce  forme 
des  colonies  séparées;  les  unes  font  leur  nid  dans  les  marais,  les  au- 
tres déposent  simplement  leurs  oeufs  dans  une  petite  excavation 
creusée  dans  le  sable  au  bord  de  la  mer;  quelques-unes  nichent  sur 
des  arbres  ou  déposent  plutôt  leurs  œufs  dans  les  crevasses  des 
écorces  ou  à  la  bifurcation  d'une  branche. 

Tableau  analytique  des  espèces  indigènes  (1) 

A.  Queue  fourchue   (genre  Sterna.) 

a.  Taille  forte,   bec  rouge,  pieds   noirs   (ailes  400  ™™.) 5.  caspia 

b.  Taille   moyenne  : 

.  .  (bec  entièrement  noir     (ailes  335  ™™.) S.  angliea 

1.    pieds  noirs,       |     bec  noir   à  pointe  jaune     (ailes  310  ™'°.)    .     .     .     .  S.  cantiaca 

.    .  (     bec  rouge  à  extrémité  brun  foncé  (ailes  ^0  ™™.)     .  S.fluviatilis 

l.   pieds  rouges,    |     bec  entièrement  rouge  (ailes  275  "''".) S.paradisea 

3.   pieds   oranges,   bec   noir    (ailes   230  "'^i.) S.  dougalU 

c.  Taille  petite,  pieds  oranges,  bec  jaune  à  pointe  noirâtre  (ailes  180  °"".)  S.  minuta 

B.  Queue  peu  fourchue,  palmature  fortement  échancrée  (genre  Hydrochelidon.) 

_,  .         j      (     noires  (ailes  215™™.) H.   leucoptera 

Couvertures  du  (  bec  rouge  (ailes  230-™.)     H.  hybrida 

dessous  de  1  aile   (     blanches  ou  gris  pale,  j  bec  noir  (ailes  210™™.).     H.  nigra 

GENRE    CLVIII. 
STERNE  OU  HIRONDELLE  DE  MER.  —  STERNA. 

Sterna,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  202  (1760). 
Thalasseus  et  Sternula,  Boie,  Isis,  1822,  pp.  563-64. 
ViRALVA,  Steph.  Shaw's  Gen.  Zool.  XIII,  I.p.  174  (1825). 

Thalass.îîa,  AcTOCHELiDON,HYDROPRoaNE,  Kaup,  Natilrl.  Syst.  pp.  31,  91,  97  (1829). 
Syluchelidon,  Gelochelidon,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  994. 

Planetis,  Helopus,  Haliplana,  Laropis,  Onychoprion,  Wagl.  Isis^  1832,  pp.  1222- 
1277. 

Thalassites,  Swains.  Classif.  Birds  II,  p.  372  (1837). 

Hydrocecropis,  Boie,  Isis,  1844,  p.  179. 

Thalassipora,  Riipp.  Syst.  Uebers.  p.  140  (1845). 

Anous,  Less.  Descr.  Mani.  et  Ois.  p.  255  (1847). 

Car.  —  Bec  aussi  long  que  la  tête  ou  un  peu  plus  long,  comprimé,  presque 
droit  ou  à  arête  légèrement  arquée,  plus  haut  que  large  et  diminuant  insen- 
siblement de  la  base  à  l'extrémité;  narines  basales,  latérales,  oblongues  ;  ailes 
très  longues,  la  première  rémige  dépassant  les  autres;   queue  de  longueur 


(1)  Ce  tableau  facilite  la  détermination  des  sujets  adultes  ;  pour  les  jeunes  dont  le  bec  et 
les  pattes  n'ont  pas  encore  leur  couleur  définitive,  la  dimension  des  ailes  est  un  bon  guide, 
quoique  les  ailes  soient  toujours  un  peu  plus  courtes  chez  les  jeunes  que  chez  les  adultes. 


—  341  - 

moyenne,  plus  ou  moins  fourchue,  composée  de  douze  rectrices;  tarses  courts; 
doigts  courts  et  grêles;  membranes  interdigitales  médiocrement  échancrées. 
jlg;ff   —  Ce  genre  est  cosmopolite. 

278.  —  La  Sterne  tschégrava. 
STERNA  CASPIA,  Pall. 

(PI.  279.) 

Stkrna  CASPIA,  Pall.  Nov.  Comm.  Petrop.  XIV,  p.  582  (1769-70). 

Sterna  TSCHEGRAVA,  Lepech.  Nov.  Comm.  Petrop.  XIV,  p.  500  (1769-70). 

Sterna  caspica,  Sparrm,' M^/s.  Cari.  II,  fase.  3,  n°  72  (1788). 

Sterna  MEGARHYNCHOS,Mey.  Taschenb.  Deutsch.  ydgelk.  II,  p.  457  (1810). 

Thalasseus  caspius,  Boie,  Isis,  1822,  p.  563. 

Hydroprognf  ;aspica,  Kaup,  Sk.  Entw.  eur.  Thier.  p.  91  (1829). 

Sylochelidon  balthica,  Schellingii  et  caspia,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  994. 

Helopus  caspius,  Wagl.  /sn-,  1832,  p.  1224. 

Thalassites  melanotis,  Swains.  B.  W.  Afr.  II,  p.  253  (1837). 

Sylochelidon  strenuus,  Gould,  Pr.  Zool.  Soc.  1846,  p.  21. 

Sylochelidon  melanotis,  Bp.  Compt.-rend.  1856,  p.  772. 

Sterna  melanotis,  Hartl.  Orn.  W.  Afr.  p.  254  (1857). 

Sterna  major,  Ellman,Zoo^.  1861,  p.  7472. 

Die  Raub-Meerschwalbe,  en  allemand. 

The  Caspian  Tern,  en  anglais. 

De  Reus-Zeezwaluw,  en  flaman'' 

Taille:  O^^SO  (1);  ailes  0,40. 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  Front,  dessus  de  la  tête  jus- 
qu'aux yeux,  et  les  plumes  allongées  de  l'occiput  d'un  noir  profond  satiné; 
lorums,  cou,  bas  du  dos,  sus-caudales,  blancs;  manteau  et  ailes  d'un  gris 
bleuâtre  pâle  ;  rémiges  primaires  cendrées,  à  bords  et  extrémité  noirâtres, 
les  baguettes  blanches  ;  joues  et  parties  inférieures  d'un  blanc  pur;  queue 
blanchâtre.  Iris  brun;  bec  rouge  vermillon,  passant  au  rouge  brun  à  la  pointe  ; 
pattes  noires. 

En  hiver.  —  Se  distingue  par  la  coloration  de  la  tête:  front  blanc  mou- 
cheté de  gris  noirâtre;  lorums  avec  de  petites  stries  noires,  formant  une  tache 
noire  devant  l'œil;  dessous  de  l'œil  et  région  des  oreilles  noirs  variés  de  gris; 
le  reste  de  la  tête  blanchâtre,  mais  chaque  plume  terminée  de  noir;  les 
autres  parties  comme  en  été. 

Jeune.  —    Calote  d'un  noir  brunâtre,  mais  chaque  plume  plus  ou  moins 


(1)  La  longueur  totale  est  toujours  i>rise  du  sommet  de  l.i  tête  à  l'extrémitc  «les  pointes  de  l.i 
queue,  mais  elle  n'est  qu'approxiu.ativc.  ne  pouvant  prendre  la  mesure  sur  des  sujets  en  chair. 
par  contre,  la  longueur  des  ailes  peut  Cire  donnée  avec  exactitude 


—  542  — 


bordée  de  blanchâtre  ;  dos,  scapulaires  et  couvertures  des  ailes  d'un  gris 
bleuâtre  clair,  les  bordures  des  plumes  un  peu  jaunâtre,  et  devant  celles-ci 
un  croissant  d'un  brun  clair  en  zigzag;  joues,  gorge  et  parties  inférieures 
blanches.  Bec  d'un  rouge  pâle;  pattes  d'un  gris  brunâtre. 

Poussin.  —  Vertex  et  côtés  de  la  tête  d'un  gris  cendré,  un  peu  plus  foncé 
à  la  base  du  duvet;  manteau,  dessus  des  ailes  et  des  cuisses  d'un  cendré  rem- 
bruni à  la  base  et  à  la  pointe  des  tiges,  mais  sans  taches  déiSnies;  devant  du 
cou  et  poitrine  gris;  gorge,  ventre  et  abdomen  blancs;  bec  rouge  pâle,  avec 
une  tache  noire  près  la  pointe  de  chaque  mandibule  et  le  marteau  blanc; 
pieds  d'un  jaune  rougeâtre  (J.  Vian.) 


Hab. 


mipBfM 


La  Sterne  tschégrava  ne  paraît  pas  dépasser  en  Europe  le 

-^-^.  .„    ,^^,,^^,„. 62*'  1.  N.  Elle  niche  sur  les  côtes 

|l  de  la  Suède  {Nilsson),  se  montre 
parfois  sur  celles  du  sud  de  la 
Norwège  (Co//e^^),  de  la  Finlande 
{Palmén),  près  de  St-Péters- 
'^  ]  bourg  {Bûchner),  et  niche  sur 
quelques  îles  danoises  et  du  nord 
de  l'Allemagne,  notamment  à 
^  l'île  de    Sylt.    Jusqu'en    1860, 


quelques  petites  colonies  existaient  sur  les  côtes  et  les  îles  de  la  Bal- 
tique et  de  la  mer  du  Nord;  mais  en  enlevant  constamment  les  œufs 
de  ces  oiseaux,  on  a  fini  par  les  chasser  presque  partout.  Quand,  en 
1819,  Naumann  visita  l'île  de  Sylt,  il  estima  à  près  de  trois  cents  le 
nombre  des  couples  de  Sternes  caspiennes  qui  y  nichaient  ;  en  1874, 
M.  Durnford  n'y  trouva  plus  que  vingt-cinq  couples  environ. 

Cet  oiseau  n'a  été  observé  ni  en  Ecosse,  ni  en  Irlande,  mais  il  visite 
accidentellement  l'Angleterre  :  de  1825  à  1869  on  compte  treize  cap- 
tures pour  ce  pays  {Harting).  Il  se  montre  aussi  très  accidentellement 
en  Hollande  {Schlégel)  et  en  Belgique  :  un  individu  a  été  pris  près  de 
Tournai  [de  Selys),  un  autre  a  été  tué  sur  un  étang  à  Bruxelles  le 
24  juillet  1865  {G.  Vincent),  et  un  jeune  a  été  tiré  il  y  a  une  tren- 
taine d'années  dans  les  polders  d'Anvers,  près  de  la  Tête-de-Flandre 
{Croegaert).  Il  est  aussi  très  rare  en  France  :  M.  Gadeau  de  Ker- 
ville  signale  quelques  captures  sur  les  côtes  de  la  Normandie, 
d'autres  ont  été  faites  sur  celles  de  l'Atlantique  {Olphe-Galliard)  et 
dans  les  départements  de  l'Aude,  de  l'Hérault  et  des  Pyrénées  orien- 
tales {Lacroix);  il  est  moins  rare  en  Espagne,  surtout  sur  les  côtes 
de  l'est  {Saunders)  et  en  Portugal  {du  Bocage);  il  niche  sur  quelques 
îles  désertes  de  la  Sardaigne  {Cantraine),  mais  il  est  rare  dans  les 


—  543  - 

autres  parties  de  l'Italie  {Salvadon,  Giglioli)  et  à  Malte  [Wright).  II 
niche  dans  l'Archipel  grec  [Lindermayer),  dans  la  Dobrodja  {Âlléon), 
sur  les  côtes  de  la  mer  Noire  {Seehohm)  et  de  la  mer  Caspienne,  sur- 
tout à  l'île  Sari  [Radde).  Dans  l'intérieur  de  l'Europe,  cet  oiseau  a  été 
capturé  accidentellement  près  de  Varsovie  {Taczanowski),  en  Autri- 
che, près  de  Seefeld  {von  Pelzeln),  en  Suisse  près  de  Genève 
(Fatio),  etc. 

En  Afrique,  on  rencontre  probablement  des  sujets  de  cette  espèce 
sur  toutes  les  côtes  :  elle  a  éié  observée  en  Algérie  (Loche),  au  Maroc 
[Favier),  sur  la  côte  occidentale  depuis  la  Sierra-Leone  jusqu'au  Da- 
maras  [Andersson)  et  au  cap  de  Bonne-Espérance  [Layard)  ;  elle  esl 
sédentaire  dans  la  Basse-Egypte  et  sur  les  côtes  de  la  mer  Rouge 
jusque  dans  le  golfe  d'Aden,  mais  le  long  du  Nil  et  de  ses  affluents, 
ainsi  que  dans  les  marais  de  la  Haute-Egypte,  de  la  Nubie  et  du  Kor- 
dofan  on  la  voit  surtout  en  hiver  [de  Heuglin);  on  l'a  encore  observée 
en  Abyssinie  [Finsch  et  Eartlaub),  au  Zambèze  où  elle  niche  [Kirke), 
à  Mozambique,  à  la  baie  d'Algoa  [Brehm)  et  à  Madagascar  [Hart- 
lauh). 

Plus  à  l'Est,  on  rencontre  cette  Sterne  sur  les  côtes  de  la  Palestine 
[Tristram)  et  de  l'Asie  Mineure  [Krilper),  au  Turkestan  [Severtzoïo), 
au  Béloutchistan  [Blanford),  sur  les  grands  lacs  qui  avoisinent 
rindus  {Hume),  sur  les  côtes  de  l'Inde  [Jerdon),  de  Ceylan  [Holds- 
worth),  de  la  Birmanie  [Seebohm),  du  sud-est  de  la  Sibérie  près  des 
bouches  du  Dséja  [Radde),  de  la  Chine  et  même  sur  les  lacs  et  les 
cours  d'eau  de  l'intérieur  [David),  à  Formose  [Swinhoé),  sur  les  côtes 
de  l'Australie,  de  la  Tasmanie  [Gould)  et  de  la  Nouvelle-Zélande 
[Buller). 

Enfin,  en  Amérique,  on  observe  cet  oiôeau  accidentellement  sur  les 
côtes  de  l'Alaska  (AWson)  jusque  sur  celles  de  la  Californie  et  du 
nord  du  Mexique,  et  du  Labrador  à  la  Floride  [Seehohm). 

Mœurs.  —  La  Sterne  tschégrava,  ou  Hirondelle  de  mer  Caspienne, 
est  un  oiseau  migrateur  :  elle  quitte  ordinairement  les  régions  du 
nord  dans  le  courant  de  septembre  et  y  retourne  en  avril  ;  elle  ne  doit 
cependant  pas  être  très  sensible  au  froid,  car  Naumaun  dit  qu'on 
a  déjà  vu  de  ces  oiseaux  à  l'île  de  Rugen  vers  le  milieu  de  février. 

Cette  Sterne  vit  surtout  près  des  côtes  maritimes,  mais  elle  visite 
aussi  les  tleuves  et  les  lacs  situes  à  quelques  kilomètres  de  la  mer.  En 
hiver,  cependant,  elle  se  montre  souvent  sur  les  eaux  de  l'intérieur  des 
continents,  car  de  Heuglin  et  A.  Brehm  l'ont  souvent  observée  dans 


—  544  — 

le  Soudan,  où  cet  oiseau  demeurait  assez  longtemps  près  des  lacs  et 
des  fleuves  de  l'Afrique  centrale.  Ce  sont  cependant  des  exceptions 
qui  ne  se  présentent  que  là  où  l'oiseau  peut  suivre  le  cours  d'un  très 
large  fleuve  comme  le  Nil,  et  il  faut  tenir  compte  aussi  de  la 
rapidité  avec  laquelle  il  franchit  en  peu  de  temps  des  distances 
énormes. 

Cet  oiseau  nage  plus  volontiers  que  les  autres  espèces  du  genre, 
mais  sans  adresse  ;  il  sait  courir  assez  vite,  vole  en  donnant  de  lents 
mais  vigoureux  coups  d'ailes  et  plane  souvent  comme  les  Mouettes  ; 
il  vole  ordinairement  à  une  quinzaine  de  mètres  au-dessus  de  l'eau, 
sur  laquelle  il  se  laisse  de  temps  en  temps  tomber  obliquement.  Pour 
se  reposer,  pendant  la  nuit  comme  le  jour,  il  choisit  un  endroit 
sablonneux  du  rivage,  et  là  il  forme  souvent  avec  ses  semblables  une 
lon<^ue  ligne  serrée,  et  tous  les  individus  qui  la  composent  sont  cou- 
chés sur  la  poitrine,  la  tête  toujours  dirigée  du  côté'  de  l'eau.  Il  est 
craintif,  déliant,  peu  sociable  el  ne  se  réunit  en  bande  qu'au  moment 
de  la  reproduction  ;  en  tout  autre  temps,  chacun  vit  pour  soi  et  ne 
rejoint  ses  semblables  que  pour  le  repos  de  la  nuit.  En  cas  d'attaque, 
il  se  défend  avec  courage,  donne  de  vigoureux  coups  de  bec  et  par- 
vient à  mettre  en  fuite  les  plus  grands  Goélands.  Il  est  moins  bruyant 
que  ses  congénères,  mais  sa  voix  est  plus  forte  et  plus  rauque  ;  c'est 
surtout  en  volant  et  près  de  son  nid  qu'il  fait  entendre  son  cri  res- 
semblant, d'après  Naumann,  à  krraeik-krraeike  et  krraei  ! 

C'est  un  oiseau  très  vorace,  se  nourrissant  surtout  de  poissons;  il 
prend  aussi  des  crustacés  et  même  de  petits  oiseaux,  car  il  enlève  sou- 
vent les  couvées  des  espèces  aquatiques  qui  nichent  sur  le  rivage, 
malgré  l'énergique  défense  des  parents;  de  Heuglin  dit  qu'il  s'avance 
parfois  loin  dans  les  steppes  pour  y  faire  la  chasse  aux  sauterelles, 
aux  jeunes  oiseaux  et  aux  souris, 

Reproduction.  —  Cette  Sterne  niche  ordinairement  en  colonies  sur 
le  rivage  de  la  mer.  Il  résulte  des  observations  que  Naumann  a  faites 
à  l'île  de  Sylt,  que  cet  oiseau  fait  sa  ponte  dans  la  seconde  quinzaine 
de  mai  et  qu'il  dépose  simplement  ses  oeufs  dans  une  petite  excavation 
creusée  dans  le  sable.  Les  couvées  ne  sont  pas  éloignées  les  unes  des 
autres  de  plus  de  deux  pieds  ;  elles  se  composent  de  deux  œufs, 
quelquefois  trois,  mais  jamais  plus.  Ces  œufs  ont  la  forme  et  la  gros- 
seur de  ceux  du  Canard  domestique;  ils  sont  assez  lisses,  presque 
mats,  d'un  blanc  jaunâtre  ou  brunâtre  et  parsemés  dépeints  et  de 
petites  taches  arrondies,  les  unes  profondes,  d'un  gris  violacé,  les 


—  545  — 

autres  superficielles,  d'un  brun  plus  ou  moins  foncé  ;  leur  teinte  géné- 
rale comme  leurs  taches  sont  d'ailleurs  très  sujettes  à  varier;  ils 
mesurent  de  60  à  68  millimètres  sur  44  à  48  millimètres. 

A  Sylt  on  enlève  les  œufs  plusieurs  fois,  car  ils  ont  un  goût  fort 
agréable;  ce  n'est  que  huit  ou  quinze  jours  avant  la  St-Jean  qu'on 
laisse  les  oiseaux  couver  en  paix.  Quand  on  s'approche  d'un  nid,  on 
se  voit  aussitôt  assiégé  par  les  parents  qui  jettent  de  grands  cris,  mais 
le  mâle  se  montre  encore  plus  hardi  que  la  femelle.  Cette  dernière 
interrompt  souvent  l'incubation,  et  en  somme  elle  couve  plus  long- 
temps que  ses  congénères;  lorsqu'elle  a  été  effrayée,  elle  ne  revient 
qu'assez  tard  à  son  nid.  Les  poussins  courent  sur  le  sable  quelques 
heures  après  leur  naissance  et  les  parents  les  nourrissent  de  petits 
poissons.  Pendant  que  la  femelle  couve,  le  mâle  lui  apporte  souvent 
des  vivres. 

279.  —  La  Sterne  hansel. 
STERNA   ANGLICA,   Mont. 

(PI.    280) 

?Sterna  nilotica,  Gmel.  Syst.  nat.  I,  p.  606(1788). 
Sterna  anglioa,  Mont.  Orn.  Dict.  suppl.  (1813). 
Sterna  aranea,  Wils.  Am.  Orti.  VIII,  p.  143,  pi.  72,  f.  6  (1814). 
Sterna  akfinis,  Horsf.  Trans.  Linn.  Soc.  1820,  p.  199. 
Sterna  risoria,  Brehm,  Beitr.  z.  Yogelk.  III,  p.  650(1822). 
Thalasseub  anglicus,  Boie,  Isis,  1822,  p.  563. 
Viralva  ANGLICA,  Steph.  Shaws  Gen.  Zool.  XIII,  1,  p.  174  (1826). 
Gelochelidon  balthica,  agraria.  meridionalis,  Brehm,  Isis^  1830  p.  994. 
Gelochelidon  aranea,  Brehm,  Vog.  Deutschl.  p.  775  (1831). 
Laropis  ANGLICA,  Wagl.  Isis,  1832,  p.  1225. 
Sterna  MACROTARSA,  Gould,  Proc.  Zool.  Soc.  1837.  p.  26. 
Gelochelidon  anghca  et  aranea,  Bonap.  Comp.  List.  B.p.  61  (1838). 
Viralva  aranea,  Gould,  Voy.  Beagle,  III,  p.  145  (1841). 
Gelochelidon  palustris,  Maogill.  Man.  Urit.  B.  II,  p.  237  (1742). 
Gelochelidon  macrotarsa,  Gould,  Handb.  B.  Austr.  II,  p.  403  (1805). 
Gelochelidon  nilotica,  Gray,  Hawl-lisl,  III,  p.  119  (1871). 
Die  Lach-Mberschwalbe,  en  allemand. 
Thk  Gull-Billed  TERN,en  anglais. 
De  Lach-Zeezwaluw,  en  flamand. 

Taille:  O^Sl;  ailes  0,33. 

Description  des  deux  scxc^  adultes  en  été.  —  Dessus  de  la  tête  et  nuque  d'un 
noir  profond;  parties  supérieures,  ailes  et  dessus  de  la  queue    d'un  gri- 
bleuâtre  pâle;  rémiges  d'un  cendré  brunâtre,  plus  foncé  à  la  pointe,  les  l)ar- 
ToMK  II.—  1893.  69 


—  546 


bes  internes  d'un  cendré  blanchâtre  sur  une  partie  de  leur  étendue  ;  côtés  de 
la  tête  et  du  cou,  gorge  et  toutes  les  parties  inférieures  d'un  blanc  pur.  Iris 
brun  ;  bec  et  pattes  noirs. 

En  hiver.  —  Comme  en  été,  mais  le  dessus  de  la  tête  blanc  avec  des  stries 
noires  à  la  nuque. 

Jeune.  —  Dessus  de  la  tête  blanchâtre  ou  d'un  gris  bleuâtre  clair,  strié  de 
brun  ;  une  tache  noirâtre  sur  la  région  parotique  ;  lorums  blanchâtres,  striés 
de  brun  noirâtre  formant  tache  au  devant  de  l'œil  ;  dessus  du  corps  et  cou- 
vertures supérieures  des  ailes  variés  de  brun,  de  cendré  et  de  jaunâtre  ;  des- 
sous du  corps  blanc  ;  rémiges  d'un  cendré  brun.  Bec  et  pieds  bruns,  avec  la 
base  du  bec  jaunâtre  et  la  pointe  noirâtre  (Degland  et  Gerbe). 

Poussin.  —  Toutes  les  parties  supérieures  d'un  blanc  fauve,  faiblement 
assombri  sur  le  front  et  varié  de  mouchetures  brunes,  vagues  et  peu  nom- 
breuses sur  le  dos  et  au  bas  de  la  nuque  ;  devant  du  cou  d'un  brun  enfumé 
pâle;  gorge,  ventre,  flancs  et  abdomen  d'un  blanc  pur.  Bec  jaune;  pieds 
d'un  jaune  sombre.  {J.  Vian).  — 

jjab.  —  La  Sterne  hansel  est  une  espèce  méridionale.  Elle  niche 

cependant  en  petit  nombre  en 
Danemark  et  sur  quelques  îlots 
des  côtes  danoises  {Collin);  elle 
est  de  passage  sur  les  côtes  de  la 
Poméranie,  à  l'île  de  Rugen,  et 
niche  sur  la  petite  île  de  Lips 
{Naumann);  un  couple  a  même 
niché  non  loin  de  Munich  près 
de  risar  (  Wagler)ei-près  d'Augs- 
bourg  {Leu).  Elle  visite  accidentellement  l'Angleterre,  mais  jamais 
l'Ecosse  et  l'Irlande  {Seebohm);  elle  se  montre  irrégulièrement  en 
Hollande  {Schlégel)  et  très  accidentellement  en  Belgique  :  plusieurs 
individus  ont  été  tués  en  Flandre  et  aux  environs  de  Tournai 
[de  Selys-Longchamps);  ses  apparitions  sont  également  rares  ou  acci- 
dentelles sur  les  côtes  de  France  [Degland),  et  une  capture  a  été 
signalée  en  Suisse  près  de  Genève  [Fatio).  On  l'observe  parfois  en 
Portugal  [Reyes),  mais  elle  est  abondante  en  Espagne  dans  la 
Marisma  du  Guadalquivir  et  niche  près  de  San-Lucar  [Saunders).  En 
Italie,  cet  oiseau  se  montre  surtout  en  Vénétie,  en  Ligurie,  en  Tos- 
cane, dans  la  Romagne  et  en  Sardaigne  [Salvador i)  et  niche  proba- 
blement en  Toscane  [Giglioli),  mais  il  est  rare  en  Sicile  [Malherbe); 
il  est  assez  répandu  en  Grèce  [Lindermayer),  et  sa  présence  a  été 
constatée  en  Transylvanie  [Danford  et  Hay^vie-Brown),  en  Hongrie 


-  547  — 

près  du  lac  Neusiedel  {Tschusi-Schmidh)  et  en  Turquie  ;  dans  la 
Dobrodja  il  niche  près  du  lac  Razem  {Alléon)-,  on  le  rencontre  égale- 
ment en  Bessarabie  [de  Nordmann),  en  Crimée  et  sur  les  côtes  de  la 
mer  Caspienne  [Radde). 

En  Afrique,  cette  espèce  niche  dans  les  parties  septentrionales 
(Loche)  et  dans  les  lagunes  de  la  basse  Egypte  ;  on  la  rencontre  dans 
la  vallée  du  Nil  jusque  dans  les  marais  et  les  steppes  du  Kordofan, 
mais  le  long  de  la  mer  Rouge  et  en  Abyssinie  elle  paraît  être  de 
passage  {de  Heuglin);  on  ne  l'a  observée  dans  aucune  autre  partie  de 
l'Afrique. 

En  Asie,  cet  oiseau  est  plus  ou  moins  commun  sur  les  lacs  salés  du 
Turkesiàn  (Sevei^izoîv),  duCachemir,  du  sud  delà  Mongolie  {Seebohm) 
et  du  sud-est  de  la  Sibérie  près  du  Tarei-nor  (Radde):  il  hiverne  en 
Perse,  dans  l'Inde  (Jerdon),  à  Ceylan  (Holsioorth),  dans  l'Indo-Chine, 
à  Sumatra  (S.  Millier),  à  Bornéo  (Mottley),  à  Java  (Schlégel),  à  Hal- 
mahera  (Bernstein),  à  la  Nouvelle-Guinée  et  aux  îles  Salomon  (Ram- 
say),  et  niche  dans  diverses  parties  de  l'Australie  (Gould). 

Enfin,  en  Amérique,  on  rencontre  cette  espèce  sur  les  côtes  de 
l'Atlantique  depuis  le  Connecticut  (Baird)  jusqu'au  Texas  (Dresser), 
les  Antilles  (Gundlach,  Léotaud),  le  Brésil  (Sclater)  et  le  nord  de  la 
Patagonie  (Darwin);  du  côté  du  Pacifique,  elle  n'a  été  observée  jus- 
qu'ici qu'au  Guatemala  (Salvin). 

Mœurs.  —  C'est  un  oiseau  migrateur  qui  revient  en  Europe  en 
avril  et  mai  et  émigré  en  septembre.  Il  vit  sur  les  côtes  maritimes,  à 
l'embouchure  des  fleuves  et  sur  les  lacs  salés,  plus  rarement  près  des 
eaux  douces  ;  il  aime  en  général  les  plages  sablonneuses. 

Cette  espèce  a  les  mêmes  allures  que  ses  congénères  :  son  vol  est 
léger,  adroit,  rapide,  et  c'est  dans  les  airs  qu'elle  passe  la  plus  grande 
partie  de  la  journée,  car  on  la  voit  rarement  en  repos;  à  terre,  elle 
marche  et  trotte  avec  facilité,  mais  elle  n'aime  pas  à  nager.  Quand  elle 
s'abat  sur  l'eau,  c'est  plutôt  pour  se  reposer,  car  elle  ne  rame  presque 
pas  et  se  laisse  balotter  par  les  vagues.  C'est  un  oiseau  sociable  avec 
ceux  de  son  espèce;  il  vole  par  couples  ou  en  petites  troupes  non  seule- 
ment au-dessus  des  eaux,  dit  de  Heuglin, mais  encore  dans  les  champs 
et  les  prés  et  même  dans  les  savanes  et  dans  les  steppes  à  plusieurs 
lieues  de  l'eau  ;  il  fréquente  du  reste  beaucoup  les  champs  et  les 
friches,  où  il  fait  la  chasse  aux  sauterelles  et  aux  lézards. 

Cette  Sterne  est  prudente  et  farouche  dans  les  lieux  où  on  la  chasse, 
mais  ailleurs  elle  se    nionlre  assez  conliante,   tout  on   veillant  à  sa 


—  548  — 

sécurité;  quand  elle  est  blessée,  elle  se  défend  courageusement  en 
donnant  de  violents  coups  de  bec.  Son  cri,  d'après  Naumann,  ressem- 
ble au  rire  d'une  personne  et  peut  se  rendre  par  hai  hai  hai  ou 
haihaihai,  d'où  son  nom  allemand  de  Lach-Meerschwalbe  (Hirondelle 
de  mer  rieuse).  Sa  nourriture  favorite  consiste  en  insectes  :  elle 
attrape  très  adroitement  au  vol  des  orthoptères,  des  libellules,  des 
coléoptères  et  des  lépidoptères,  se  jette  sur  l'eau  pour  saisir  des  petits 
poissons,  des  têtards  de  grenouilles,  des  larves  et  des  insectes  aqua- 
tiques ;  à  terre  elle  fait  la  chasse  aux  araignées,  aux  vers,  aux  lézards, 
pille  les  nids  d'oiseaux  plus  faibles  et  dévore  aussi  bien  leurs  œufs  que 
leurs  jeunes,  elle  poursuit  même  les  petits  mammifères. 

Reproduction.  —  Cette  Hirondelle  de  mer  niche  en  mai  ou  au 
commencement  de  juin  près  de  la  mer  et  des  lacs  salés,  et  exception- 
nellement près  des  eaux  douces.  Les  nids  sont  assez  rapprochés, 
mais  consistent  en  une  simple  fossette  creusée  dansîe  sable  et  garnie 
de  quelques  brins  ou  radicelles.  La  ponte  ordinaire  est  de  deux  œufs, 
rarement  trois,  et  quatre  est  l'exception  ;  ces  œufs  sont  ovoïdes,  assez 
aigus  au  petit  bout,  à  grain  fin,  d'un  fauve  verdâtre  pâle  tirant  tantôt 
sur  le  jaunâtre,  tantôt  sur  l'olivâtre,  et  parsemés  de  points  et  de  petites 
taches  arrondies  ou  irrégulières,  les  unes  profondes  peu  nombreuses 
mais  plus  étendues  et  d'un  gris  violacé,  les  autres  superficielles  d'un 
brun  plus  ou  moins  foncé.  Ils  mesurent  en  moyenne  49  millimètres 
sur  35. 

280.  —  La  Sterne  caugek. 

STERNA  CANTIACA,   Gmel. 

(PI.  281) 

Stebna  sandvicknsis,  Lath.  Gen.  Syn.  Suppl.  p.  296  (1787). 

Sterna  CANTIACA  et  AFRicANA,  Gmel  Syst.  nat.  1,  pp.  605-6  (1788). 

Sterna  boysii,  Lath.  Ind.  Om.  II,  p.  806  (1790) . 

Sterna  STUBBERiCA,  Bechst.  Naturg.  Deutschl.  IV,  p.  679  (1809). 

Sterna  canescens,  Mey.  Taschenb.  Deutsch.Yogelk.  II,  p.  458  (1810). 

Thalasseus  CANTiACUS,  Boie,  Isis.,  1822,  p.  563. 

AcTOCHELiDON  CANTIACUS,  Kaup,  Sk.  Entw.  EuT.  Th.,  p.  31  (1829). 

Thalasseus  canescens  et  candicans,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  994. 

Sterna  acuflavida,  Cabot,  Pr.  Bost.  Soc.  II,  p.  257  (1847). 

Thalasseus  acuflavidus,  Coues,  Pr.  Phil.  Ac.  1862,  p.  540. 

Die  Brandseeschwalbe,  en  allemand. 

The  Sandwich  Tern,  en  anglais. 

De  Groote  Zeezwàluw,  en  flamand. 

Taille  :  0'"34  ;  ailes  O'^Sl. 


—  549  — 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  Capuchon  jusqu'aux  yeux  d'un 
beau  noir  lustré,  les  plumes  de  l'occiput  prolongées  en  pointe  ;  une  bande 
partant  des  narines,  joues,  cou  et  parties  inférieures  d'un  blanc  pur;  parties 
dorsales  et  ailes  d'un  cendré  bleuâtre  ;  rémiges  cendré  bleuâtre  en  dehors, 
uue  bande  étroite  plus  sombre  le  long  de  la  tige  à  l'intérieur,  le  reste  de  la 
barbe  interne  et  tige  blancs  ;  queue  très  fourchue,  blanche,  d'un  cendré 
bleuâtre  sur  la  barbe  externe.  Bec  noir  à  pointe  jaunâtre  ;  iris  brun;  pattes 
noi-es. 

En  hiver.  —  Front  blanc,  dessus  de  la  tête  blanc  taché  de  noir,  plumes 
de  l'occiput  noires  ;  manteau  et  ailes  comme  en  été  mais  d'une  teinte  plus 
pâle  ;  rémiges  d'un  gris  noirâtre  saupoudrées  de  gris  bleuâtre,  leur  bord 
interne  blanc;  le  reste  comme  en  été. 

Jeune.  —  Capuchon  d'un  gris  noirâtre  avec  les  plumes  bordées  de  cendré 
roussâtre;  dos  et  scapulaires  d'un  blanc  nuancé  de  jaunâtre  et  marqués  de 
larges  bandes  noirâtres  ;  cou  et  parties  inférieures  blancs  ;  ailes  d'un  cendré 
bleuâtre,  les  petites  courertures  bordées  de  brun,  les  moyennes  et  les  grandes 
terminées  de  blanc  ;  rémiges  à  peu  près  comme  en  hiver  ;  rectrices  médianes 
d'un  cendré  bleuâtre,  légèrement  tachées  de  brun  à  l'extrémité,  les  autres 
d'un  cendré  noirâtre  à  leur  extrémité  avec  la  pointe  blanche  ;  à  cet  âge  la 
queue  est  peu  fourchue.  Bec  d'un  brun  livide  ;  pattes  noirâtres. 

Poussin.  —  Toutes  les  parties  supérieures  d'un  fauve  pâle  et  striées  longi- 
tudinalement  de  noir  ;  parties  inférieures  blanches.  Bec  jaune  varié  de  brun  ; 
pattes  brunâtres. 

jjab.  —  Cet  oiseau  habite,  en  été,  un  grand  nombre  de  côtes  des 
ij^mms^^^^in^^^^^^Wr^-'^"-'  -      îles  Britanniques,  du  Danemark 

[i  I  Jl  !  ^■''  et  du  nord  de  l'Allemagne,  mais 

il  est  rare  sur  la  mer  Baltique, 
.  ne  visite  qu'accidentellement  le 

midi  de  la  Suéde  (Nilsson),  et 
une  capture  a  été  faite  en  Nor- 
wège  près  de  Namsos  {Collett). 
Il  est  plus  ou  moins  abondant 
sur  toutes  les  côtes  de  l'Europe 
occidentale  et  très  commun,  au  printemps  et  en  été,  sur  celles  de 
Belgique  et  sur  l'Escaut  jusqu'à  Anvers.  Pour  l'Italie  c'est  plutôt 
un  oiseau  de  passage  peu  commun,  mais  il  est  sédentaire  en  Sicile 
et  en  Sardaigne  [Giglioli)  ;  il  est  rare  eu  Grèce  {Lindermai/cr),  mais 
commun  sur  les  côtes  do  la  mt'r  Noire  {Kliccs  et  Buckley)^  moins 
abondant  sur  celles  de  la  mer  Caspienne  (Radde). 

Les  sujets  d'I^ui-djn'  \\m\  hiverner  siii'  les  côtes  N.  et  N.-E.  de 


**v. 


-t 


-  550  — 

TAfrique,  et  on  en  rencontre  alors  sur  toutes  les  côtes  de  l'Afrique 
occidentale  jusqu'au  cap  de  Bonne-Espérance  {Layard).  Cette  espèce 
est  sédentaire  aux  Canaries  {Berthelot).  Sa  limite  orientale  est 
l'Asie  Mineure,  la  Perse  {Blanford),  le  Beloutchistan  et  l'Inde  près 
des  bouches  de  l'Indus  [Humé). 

En  Amérique,  cette  Hirondelle  de  mer  est  plus  ou  moins  répandue 
en  été  sur  les  côtes  de  l'Atlantique  depuis  la  Nouvelle-Angleterre 
jusqu'aux  îles  Bahama,  Cuba,  Jamaïque  et  l'Amérique  centrale 
[Coues]  ;  en  hiver  on  la  voit  plus  au  Midi  jusque  sur  les  côtes  brési- 
liennes de  Bahia  {von  Pelzeln,  Seebohm)\  du  côté  du  Pacifique  elle 
ne  paraît  avoir  été  observée  qu'au  Guatemala. 

Mœurs.  —  La  Sterne  caugek  aime  la  pleine  mer  et  ne  se  montre 
presque  jamais  loin  des  côtes  ;  il  lui  arrive  parfois  cependant  de 
remonter  les  grands  fleuves  pendant  quelques  lieues  et  même  de 
nicher  près  des  lacs  qui  ne  sont  pas  trop  éloignés  de  la  mer,  comme 
le  comte  Alléon  l'a  constaté  dans  la  Dobrodja,  où  cette  espèce  niche 
près  du  lac  Razem.  Elle  arrive  dans  nos  eaux  vers  la  fin  d'avril  et 
émigré  en  septembre. 

Cette  espèce  se  réunit  en  grandes  troupes  et  parfois  par  milliers 
sur  les  plages  maritimes,  où  elle  passe  la  nuit  couchée  sur  sa 
poitrine;  elle  prend  peu  de  repos  pendant  le  jour  et  ne  nage  que 
rarement;  par  contre,  elle  vole  sans  discontinuer,  lutte  avec  succès 
contre  les  tempêtes  qui  ne  parviennent  que  rarement  à  la  chasser 
dans  l'intérieur  des  terres.  C'est  un  oiseau  extrêmement  prudent  et 
plus  farouche  qu'aucune  autre  Sterne  ;  il  vit  en  bon  voisinage  avec 
les  autres  oiseaux  de  mer,  mais  sans  se  mêler  à  leurs  bandes.  Il  est 
fort  bruyant,  et  près  des  nids  les  clameurs  de  ces  gracieux  oiseaux, 
quand  ils  sont  très  nombreux,  vous  assourdissent;  ces  cris  sont 
diversement  modulés  et  ressemblent  à  kréj  krré,  kirreck,  kerreck, 
keikkeik,  etc.  Sa  nourriture  consiste  en  petits  poissons  que  l'oiseau 
saisit  au  vol,  en  fondant  sur  sa  proie  avec  la. rapidité  d'une  flèche. 
Reproduction.  —  Il  est  rare  de  voir  cette  Sterne  nicher  en  petites 
colonies  ;  d'ordinaire  elles  se  rassemblent  par  milliers  dans  un  même 
endroit,  et  leurs  nids  sont  si  rapprochés  les  uns  des  autres  qu'on  ne 
peut  marcher  entre  eux  sans  écraser  des  œufs.  La  femelle  dépose  en 
juin  deux  ou  trois  œufs  dans  une  légère  excavation  creusée  dans  le 
sable  ou  sur  les  pierres  nues  d'un  rocher.  Ces  œufs  sont  ovoïdes,  mats, 
à  pores  visibles,  d'un  blanc  roussâtre  ou  d'un  blanc  crème,  et  sont 
parsemés  assez  régulièrement  de  petites  taches  d'un  brun  plus  ou 


—  551   - 

moins  foncé  et  d'autres,  plus  rares  et  profonds,  d'un  gris  ardoise; 
ils  mesurent  environ  50  millim.  sur  36. 

La  femelle  couve  pendant  toute  la  nuit,  mais  peu  durant  le  jour, 
et  jamais  quand  le  soleil  est  ardent  ;  il  lui  arrive  souvent  de  ne  pas 
retrouver  son  nid  et  de  se  mettre  sur  les  œufs  d'une  autre  femelle, 
ou  bien  de  voir  son  nid  occupé  et  alors  elle  va  couver  les  œufs  d'une 
voisine.  La  durée  de  l'incubation  est  de  trois  semaines.  La  femelle 
se  montre  bonne  mère  et  élève  ses  petits  avec  tendresse. 


281 .  —  La  Sterne  arctique 
STERNA  PARADISEA,  Brun. 

(PL  282). 

Stebna  PARADISEA,  Briinn.  Ornith.  Bor.  p.  42(1764). 

Sterna  hirundo,  Lin.  (part.)  Syst.  nat.  L  p.  277  (1766)  et  auct.  plur. 

Sterna  MACRURA,  Naum.  Isis,  I8I9,  p.  1847. 

Sterna  arctica,  Tem.  M  an.  d'om.  II,  p.  742  (1820^. 

Sterna  argentata,  Brehm,  Beitr.  III,  p.  692  (1822). 

Sterna  nitzschii,  Kaup,  Isis,  1824,  p.  153. 

Sterna  brachytarsa,  Graba,  Tageb.  Reise  nachFdro.,  p.  219(1830). 

Sterna  argentacea  et  macroura,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  994. 

Sterna  MARINA,  Eyton,  Cat.Brit.  B.  p.  55(1836). 

Sterna  brachypus,  Swains.  B.  W.  Afr.  p.  252  (1837). 

Sterna  pirei,  Lawr.  Ann.  Lyc.  New-York^  VI,  p.  3  (1853). 

Sterna  hirundo,  Dress.  Birds  of  Eur.  VIII,  p.  255  (1872). 

Sterna  portlandica,  Ridgw.  Am.  Nat.  VIII,  p.  433  (1874). 

Sterna  fluviatilis,  Dub.  (nec  ^a,am.),  Bull.  Mus.  roy.  d'hist.  nat.  lY,  p.  21  (1885). 

Die  Kusten-Meerschwalbe,  en  allemand. 

The  Arctic  Tern,  en  anglais. 

De  VLOEDZBEZWALUW,en  flamand. 

Taille  :  0,'"32  ;  ailes  0,275. 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  Cai)uchoii  d'uu  beau  noir 
satiné,  limité  par  une  bande  blanche  qui  part  du  bec;  nuque,  dessus  du 
corps,  ailes,  poitrine  et  la  partie  antérieure  de  l'abdomen  d'un  gris  cendré 
clair,  mais  plus  foncé  que  dans  le  S.  fluviatilis  ;  croupion,  bas-ventre,  sus  et 
sous-caudalcs  ainsi  que  la  queue  d'un  blanc  pur,  mais  les  deux  rectrices  les 
plus  externes  bordées  extérieurement  de  gris  ;  première  rémige  d'un  gris 
foncé  avec  un  large  bord  blanc  sur  la  barbe  interne,  les  suivantes  grises 
poudrées  de  cendré  pâle,  le  bord  de  la  barbe  interne  en  partie  blanc,  les 
baguettes  également  blanches.  Bec  et  pattes  rouges  ;  iris  brun. 

En  hiver.  —  Front  blanc;  un  trait  noir  devant  l'œil;  dessus  de  la  tête  varié 
de  taches  noires;  partie  occipitale  ot  nuque  noires;  le  reste  comme  en  été. 


—  552  - 


Jeune. Tête  à  peu  près  comme  les  adultes  en  hiver  ;  lorums  blancs 

tachetés  de  noir;  gorge,  joues,  devant  du  cou,  croupion  et  parties  inférieures 
blancs;  parties  supérieures  d'un  gris  cendré,  plus  clair  sur  les  ailes,  les 
bordures  des  plumes  roussâtres  ;  au  devant  de  celles-ci  se  trouve  sur  les 
scapulaires  et  les  ailes  une  bande  transversale  brune  en  forme  de  croissant  ; 
petites  couvertures  des  ailes  d'un  gris  ardoise  ;  rémiges  cendrées,  d'un  gris 
ardoise  à  leur  extrémité  mais  terminées  de  blanc  ;  queue  blanche,  les  rec- 
trices  latérales  avec  leur  bord  externe  cendré,  toutes  terminées  de  gris 
roussâtre.  Bec  brun  noirâtre,  orangé  à  sa  base  et  aux  commissures;  pattes 
d'un  brun  rougeâtre. 

Poussin.  —  Tout  le  front  et  la  gorge  d'un  noir  enfumé;  tour  des  yeux, 
espace  entre  le  front  et  le  vertex  d'un  cendré  uniforme  ;  les  autres  parties 
supérieures  marbrées  de  cendré  et  de  noir,  si  confusément  qu'il  est  difficile 
de  préciser  la  couleur  dominante;  poitrine  et  ventre  d'un  blanc  pur;  abdo- 
men et  dessus  des  cuisses  d'un  gris  très  pâle  ;  bec  jaune  à  la  base,  brun  au 
delà  des  narines  ;  pieds  jaunes.  {J.  Vian.)  -^ 

jjoi^l)^  —  Cette  espèce  habite  en  été  les  côtes  et  les  îles  de  l'Europe 

septentrionale  jusqu'en  Islande 
{Faber),  la  Nouvelle-Zemble  et  le 
Spitzberg  (80°  1.  N.)  où  elle  est 
généralement  répandue  {de  Heu- 
glin)\  elle  est  commune  sur  les 
côtes  de  la  Scandinavie  (Nilsson^ 
Collett),  de  la  Finlande  [Dresser), 
de  la  Russie  occidentale,  du 
Danemark  [Benzon),  des  îles 
Britanniques,  Orcades  et  Hébrides  (^S'ee&o/im), des  îles  Féroé  {Feilden), 
mais  elle  est  peu  commune  sur  les  côtes  du  nord  de  l'Allemagne 
[Borggreve],  et  ne  visite  celles  de  la  Hollande  [Schlégel]  et  de  la  Bel- 
gique que  pendant  les  passages,  et  on  la  voit  alors  parfois  aussi  sur 
TEscaut.  M.  de  la  Fontaine  signale  deux  captures  sur  la  Moselle  dans 
le  grand-duché  de  Luxembourg,  l'une  en  1856,  l'autre  en  1861.  Elle 
est  de  passage  régulier  sur  les  côtes  maritimes  du  nord  de  la  France 
et  s'avance  parfois  jusque  dans  la  Méditerranée  {Deglandei  Gerbe); 
M.  Gadeau  de  Kerville  l'indique  également  comme  étant  de  passage 
régulier  sur  les  côtes  de  Normandie.  Ses  apparitions  sur  les  côtes 
portugaises  et  espagnoles  doivent  être  bien  accidentelles,  car  les 
faunes  de  ces  pays  ne  mentionnent  pas  cette  Sterne,  seul  le  colonel 
Irby  cite  une  capture  dans  le  détroit  de  Gibraltar;  cependant  elle 
hiverne  aux  îles  Açores  et  Canaries,  au  Maroc  (Irby)  et  en  Algérie 


—  553  - 

{Loche),  et  longe  les  côtes  africaines  jusqu'au  cap  de  Bonne-Espé- 
rance {Layard),  mais,  est-ce  bien  le  S.  paradisea  qu'on  voit  dans  le 
sud  de  l'Afrique  ? 

En  Asie,  cet  oiseau  niche  près  du  fleuve  Taimyr  {Middendorff),  et 
plusieurs  exemplaires  furent  tués  le  31  juillet  dans  le  delta  de  l'An- 
gara supérieur  {Radde),  mais  M.  von  Homejer  pense  qu'il  s'agit  d'une 
autre  espèce.  D'après  M.  Seebohm,  son  habitat  s'étendrait  à  l'Est 
jusqu'aux  vallées  de  la  Petschora,  de  l'Obi,  du  Jenissey  et  de  la  Lena. 

En  Amérique  on  rencontre  cette  espèce  dans  toute  la  zone  polaire 
depuis  le  Groenland  {Holbull)  et  l'Alaska  (iVe/son)  jusqu'à  la  Nouvelle- 
Angleterre  {Baird),  et  du  côté  du  Pacifique  jusqu'à  la  Californie, 
40°  1.  N.  {Coues);Q\\Q  longe  parfois  les  côtes  jusqu'à  Bahia  (Saunders), 
traverse  accidentellement  l'isthme  de  Panama  pour  descendre  jusqu'au 
nord  du  Pérou  [Taczanoivski). 

Mœurs.  —  La  Sterne  arctique  est  un  oiseau  migrateur,  qui  ne  se 
montre  sur  les  côtes  des  pays  du  Nord  que  dans  le  courant  d'avril  ou 
au  commencement  de  mai  ;  elle  émigré  dès  le  mois  d'août  et  il  est 
rare  d'en  voir  encore  en  septembre  sur  les  côtes  allemandes.  Les 
migrations  se  font  généralement  pendant  la  nuit  et  par  troupes  plus 
ou  moins  considérables  qui  volent  à  une  grande  hauteur. 

C'est  un  vrai  oiseau  de  mer  vivant  près  des  côtes  maritimes,  et  ne 
visitant  que  rarement  les  fleuves  et  les  lacs  et  jamais  ceux  qui  sont 
loin  dans  l'intérieur  des  terres.  Il  aime  les  îles  rocheuses  et  les  plages 
sablonneuses,  vit,  suivant  les  pays,  en  colonies  nombreuses  ou  par 
groupes  de  quelques  couples,  et  passe  la  journée  à  voler  en  tout  sens, 
car  l'air  est  son  véritable  élément;  pendant  les  tempêtes,  il  se  repose 
dans  un  endroit  abrité  contre  le  vent,  et  parfois  dans  une  prairie  ou 
dans  un  champ.  Son  vol  est  léger  et  rapide,  et  ses  allures  ressemblent 
beaucoup  à  celles  de  la  Sterne  vulgaire  avec  laquelle  la  Sterne  arc- 
tique a  longtemps  été  confondue  (1). 

Cette  dernière  est  confiante  et  peu  farouche,  mais  colérique,  et 
dans  sa  colère  elle  s'élance  parfois  sur  un  ennemi  dont  elle  peut 
devenir  la  victime.  Son  cri  est  doux  et  plaintif;  Naumann  le  rend 
par  kier  ou  krier\  en  se  rencontrant  dans  les  airs,  elles  se  saluent 
par  les  cris  de  Id,  kiki  kieh,  krieh,  ou  gib  gib,  gih  gib  gib  gle  gich\ 
en  se  querellant,  ce  sont  des  rrh  rèh  tetêtctterieh,  r-ich  qu'elles  font 
entendre.  La  nourriture  se  compose  de  petits  poissons  et  de  crustacés. 

(l)  Voyez  le  tableau  analytique  des  Sternes  iiidi^jènes,  à  la  page  540. 

TOM.    II.   —    I8i)3.  70 


—  5S4  — 

Reproduction.  —  Cette  Hirondelle  de  mer  niche  en  colonies  et  de 
préférence  dans  une  île  déserte,  mais  les  nids  ne  sont  jamais  placés 
parmi  ceux  d'autres  espèces  de  Sternes,  quoique  notre  oiseau  partage 
volontiers  son  emplacement  avec  des  Pluviers,  des  Canards,  des 
Eiders,  etc.;  il  aime  même  à  nicher  au  milieu  de  ces  bandes  de  genres 
différents  où  il  se  trouve  en  sûreté.  La  ponte  a  lieu  au  commence- 
ment de  juin  ;  les  deux  ou  trois  œufs  que  pond  la  femelle  reposent 
sur  la  terre  nue,  rarement  sur  une  faible  litière  de  brins,  de  radicelles 
ou  de  feuilles  mortes.  Ces  œufs  sont  très  variables  et  ressemblent 
entièrement  à  ceux  de  la  Sterne  vulgaire,  mais  ils  sont  un  peu  plus 
petits  :  ils  mesurent  environ  37  millim.  sur  29.  Mâle  et  femelle 
couvent  alternativement  pendant  une  quinzaine  de  jours,  mais  peu 
pendant  les  heures  chaudes  de  la  journée;  quand  l'un  est  sur  les 
œufs,  l'autre  lui  apporte  souvent  des  aliments.  Les  parents  témoi- 
gnent une  grande  sollicitude  à  leur  couvée  et  défendent  courageuse- 
ment leurs  poussins. 

282.  —  La  Sterne  vulgaire 
STERNA  FLUVIATILIS,  Naum.  (1). 

(PI.  284.) 

Sterna  major,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  203  (1760). 

Sterna  hirundo  (part.)  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  227  (1766)  et  auct.  plurim. 

Larus  bicolor,  sterna  et  columbinus,  Scop.,  Ann.  I.  hist.  nat.^  p.  82  (1769). 

Sterna  fluviatilis,  Naum.  7sîs,  1819,  p.  1847. 

Sterna  pomarina,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  994. 

Sterna  marina,  Eyt.  Cat.  Br.  B.,  p.  55  (1836). 

Sterna  senegalensis,  Swains.  B.  W.  Afr.  II,  p.  250  (1837). 

Sterna  wilsoni,  Bonap.  Comp.  List  B.,  p.  61  (1838). 

Hydrocecropis  hirundo,  Boie,  Isis,  1844,  p.  179. 

Sterna  chelidon,  Licht.  Nomencl.  av.,  p.  97  (1854). 

Sterna  blasii,  Brehm,  Naumannia,  1855,  p.  295. 

Sterna  vulgaris,  C.  F.  Dub.,  PI.  col.  ois.  Belg.  III,  p.  255  (1860). 

Sterna  macrodactyla  et  macroptera,  Blas.  Journ.  f.  Orn..,  1866,  pp.  75,  76. 

Sterna  dougalli,  Lay.  (nec  Mont.)  B.  S.  Afr.,  p.  369  (1867). 


(i)  Sous  le  nom  de  Slerna  hirundo,  Linné  a  confondu  deux  espèces  parfaitement  distinctes, 
et  ce  n'est  qu'en  1819  que  Naumann  reconnut  l'erreur  ;  pour  qu'elle  soit  évitée  à  l'avenir,  il  donna 
le  nom  de  S.  macrura  à  Tune  de  ces  espèces  et  de  S.  fluviatilis  à  l'autre.  La  plupart  des  auteurs 
ne  tinrent  cependant  pas  compte  de  cette  rectification,  et  continuèrent  à  désigner  sous  le  nom  de 
S.  hirnndû  tantôt  l'une,  tantôt  l'autre  de  ccsiespèces.  Il  est  certain  que  le  terme  linnéen  ne  peut 
être  conservé  pour  aucune  de  ces  espèces. 


—  555  — 

Sterna  major,  Olphe-Gal.,  Contrib.  Faune  orn.,  fasc.  XI,  p.  28  (1886) 
Die  Fluss-Meerschwalbe,  en  allemand. 
The  common  Tern,  en  anglais. 
Het  Vischdiefje,  en  flamand. 

Taille  :  0^28;  ailes  0^27. 

Description  des  deux  Fexes  en  été.  —  Capuchon  et  nuque  d'un  noir  profond; 
dessus  du  corps  et  ailes  d'un  cendré  bleuâtre,  ave^  les  scapulaires  plus  ou 
moins  terminées  de  blanc  ;  une  bande  partant  des  narines,  joues,  côtés  du 
cou,  gorge,  sus  et  sous-caudales  d'un  blanc  pur;  poitrine  et  abdomen  d'un 
blanc  lavé  de  cendré  clair;  rémiges  primaires  cendrées  à  la  base,  noirâtres  à 
leur  extrémité  et  un  large  bord  blanc  sur  la  barbe  interne,  les  baguettes 
également  blanches;  rémiges  secondaires  delà  couleur  du  manteau,  avec  un 
bord  blanc  interne;  queue  blanche, les  rectrices  latérales  avec  leur  barbe  ex- 
terne cendrée.  Bec  rouge,  le  tiers  terminal  brun  ou  noirâtre  ;  pattes  rouges  ; 
iris  brun.    ■'/ 

En  hiver. —  Lorums  et  partie  antérieure  de  la  tête  d'un  blanc  pur, avec  une 
tache  noire  devant  Tœil  ;  plumes  de  l'occiput  blanches  terminées  de  noir  ; 
nuque  noire;  le  reste  comme  en  été. 

Jeune.  —  Il  ressemble  à  l'adulte  en  hiver,  mais  toutes  les  plumes  du  man- 
teau et  les  couvertures  des  ailes  ont  une  bordure  jaunâtre  précédée  d'une 
bande  étroite  plus  foncée  ;  petites  couvertures  de  l'épaule  noirâtres  bordées 
de  blanchâtre  ;  partie  postérieure  de  la  tête  et  nuque  d'un  noir  brunâtre; 
rémiges  primaires  les  phis  courtes  bordées  de  blanc  jusqu'à  leur  extrémité. 
Bec  d'un  brun  rouge,  noirâtre  dans  sa  partie  antérieure;  pattes  d'un  jaune 
d'ocre  sale. 

Poussin.  —  Parties  supérieures  d'un  cendré  pâle  et  maculées  de  brun  noir; 
gorge  d'un  cendré  brunâtre  ;  les  autres  parties  inférieures  blanches.  Bec 
jaune  à  pointe  brune;  pattes  jaunes. 

Hab.  —  A  l'exception  de  l'Islande  et  des  îles  Féroé,  cette  Sterne 

habite  toute  TEurope,  mais  sans 
dépasser  le  cercle  polaire,  et 
elle  est  généralement  commune. 
En  Belgique,  c'est  l'espèce  la 
plus  répandue  du  genre. 

En  Afrique,  on  l'observe  sur 
"'  %/'■  .  <      les  côtes  de  la  Méditerranée  et 

";   ;      •;   •;^  -  ■ '■      dans  Ic  dclta  du  Nil,  mais  on  la 

^iÀèàiimmùmi^^^wH^^r^^^,^^^         ^^i^  rarement   dans  le  sud    de 

l'Egypte  {de  Eeuglin)  ;  on  la  voit  également  sur  les  côtes  occidentales 
d(;  l'Afrique  (5ï^?rtm5on)  jusqu'au  cap  de  Bonne-Espérance  {Lai/ard). 


—  556  - 

Elle  est  sédentaire  aux  îles  Macàère  (Har court),  Açor es  (Godman), 
Canaries  (Bolle)  et  de  Malte  (  Wright). 

En  Asie,  on  rencontre  cette  espèce  dans  le  midi  de  la  Sibérie  sans 
dépasser  au  nord  le  64"  ;  Dybowski  a  rapporté  de  ces  oiseaux  du 
Baikal  et  de  la  Daourie  qui  ne  diffèrent  en  rien  de  ceux  d'Europe. 
Cette  Sterne  habite  également  le  Turkestan  [Severtzow),  la  Perse 
(De  Filippi),  l'Inde  (Jerdon),  Cejlan  {Saunders),  la  Mongolie  et  la 
Chine  centrale  [David),  mais  elle  n'a  pas  été  observée  dans  l'Indo- 
Chine.  Au  Thibet  et  dans  l'est  de  la  Sibérie  elle  est  remplacée  par  la 
S.  tibetana. 

Enfin,  en  Amérique,  la  Sterne  vulgaire  habite  les  côtes  de  l'Atlan- 
tique depuis  le  Labrador  (57°)  jusqu'au  Texas  [Lawrence]  et  la  Flo- 
ride. Suivant  M.  Seebohm,  on  la  verrait  en  hiver  sur  les  côtes  orien- 
tales de  l'Amérique  du  Sud  jusqu'à  Bahia. 

Mœurs.  —  La  Sterne  vulgaire  ou  Pierre-Garin  nous  revient  en 
grand  nombre  à  la  fin  d'avril  ou  en  mai  et  nous  quitte  en  septembre. 
Elle  voyage  ordinairement  par  troupes  de  vingt  à  quarante  sujets, 
aussi  bien  pendant  le  jour  que  la  nuit,  mais  les  migrations  ont  lieu  le 
plus  souvent  après  le  coucher  du  soleil. 

C'est  de  toutes  les  Sternes  celle  qui  se  plaît  le  mieux  près  des 
eaux  douces,  aussi  la  voit-on  voler  sur  les  fleuves,  les  rivières,  les 
lacs  et  les  étangs,  même  sur  les  eaux  qui  se  trouvent  loin  de  la  mer; 
c'est  ainsi  qu'on  la  voit  communément  sur  les 'lacs  de  la  Suisse  et  sur 
les  grands  étangs  du  centre  de  la  France.  Elle  aime  cependant  les 
côtes  maritimes,  surtout  les  plages  couvertes  de  gravier,  car  c'est 
près  de  la  mer  et  à  l'embouchure  des  fleuves  que  ses  colonies  sont 
toujours  plus  abondantes.  Bien  que  très  remuante,  elle  se  repose  plus 
souvent  que  ses  congénères,  surtout  pendant  les  tempêtes  ;  pendant 
le  jour  elle  se  pose  souvent  sur  une  pierre  émergeant  de  l'eau,  sur  un 
poteau,  mais  rarement  sur  l'eau  car  elle  nage  peu.  Son  vol  est  léger 
et  rapide  ;  parfois  elle  reste  planer  au  même  endroit  pour  observer  les 
êtres  qui  s'agitent  dans  l'eau,  et  si  la  proie  lui  convient,  elle  s'abat 
sur  elle  avec  la  rapidité  d'une  flèche  en  faisant  jaillir  l'eau  autour 
d'elle. 

Cet  oiseau  est  peu  farouche  ;  quand  on  visite  une  colonie  de  ces 
Sternes  à  l'époque  des  nichées,  on  est  bientôt  poursuivi  par  plusieurs 
d'entre  elles,  et  à  mesure  qu'on  approche,  leur  nombre  augmente  et 
le  vacarme  devient  assourdissant  ;  elles  finissent  même  parfois  par 
fondre  sur  la  tête  du  visiteur.  M.  F.  Droste-Hiilshoff  a  remarqué  une 


—  557  — 

particularité  qui  distingue  cette  espèce  :  c'est  son  extrême  curiosité; 
on  n'a  qu'à  jeter  en  l'air  un  objet  quelconque  pour  l'attirer  à  l'instant. 
Son  cri  ressemble  à  krick-kri-kri-kri,  d'autres  fois  elle  pousse  celui  de 
kriè,  kriiè  ou  kliièh.  Sa  nourriture  consiste  en  petits  poissons,  jeunes 
grenouilles,  têtards,  vers,  insectes  et  larves  aquatiques,  surtout  de 
larves  de  dytiques  et  de  libellules,  dont  elle  s'empare  en  plongeant. 

Les  jeunes  Sternes  vulgaires  deviennent  souvent  la  proie  du  Fau- 
con, mais  les  adultes,  grâce  à  leur  rapidité,  lui  échappent  facilement. 
Naumann  a  vu  plusieurs  fois  de  ces  Sternes  chassées  pardes  Faucons: 
«  Elle  évite  admirablement  bien,  dit-il,  les  attaques  de  ce  rapace,  et 
à  chaque  attaque  elle  s'élève  davantage  dans  l'air;  quelquefois,  elle 
se  laisse  tomber  verticalement  ou  exécute  brusquement  quelques  cro- 
chets hardis;  en  même  temps,  elle  se  rapproche  de  plus  en  plus  des 
nuages,  jusqu'à  ce  que,  épuisé,  l'oiseau  de  proie  soit  contraint  d'aban- 
donner ses  poursuites.  Mais  s'il  ne  peut  réussir  à  s'emparer  des 
adultes,  le  Faucon  prend  les  jeunes  sans  beaucoup  de  peine.  » 

Reproduction.  —  La  Sterne  vulgaire  niche  sur  des  îles  basses,  des 
bancs  de  sable,  au  bord  des  rivières,  des  lacs  et  des  étangs,  et  surtout 
dans  les  endroits  où  le  sol  est  couvert  de  gravier.  M.  René  Martin 
dit  que  dans  la  Brenne,  en  France,  pays  sauvage,  mal  cultivé  et 
parsemé  de  quatre  cents  étangs  de  un  à  deux  cents  hectares,  les 
nids  de  cette  Sterne  sont  parfois  si  nombreux  à  certains  endroits, 
qu'en  une  journée  un  paysan  lui  apporta  plus  de  cinq  cents  œufs  de 
cette  espèce,  qu'il  avait  ramassés  sur  les  grèves  de  quatre  ou  cinq 
étangs  et  sur  les  gros  tas  de  joncs  flottants. 

Quand  ces  oiseaux  sont  nombreux,  les  nids  ne  sont  jamais  aussi 
rapprochés  les  uns  des  autres,  comme  cela  se  voit  chez  d'autres 
Sternes;  ils  sont  ordinairement  éparpillés  au  milieu  de  nids  de  Sternes 
naines  et  de  Pluviers  à  collier.  La  femelle  fait  sa  ponte  à  la  fin  de 
mai,  et  dépose  deux  ou  trois  œufs  dans  une  petite  excavation  creu- 
sée dans  le  sable  ou  dans  le  gravier,  sans  se  donner  la  peine  de  la 
garnir  de  brins  ou  de  tonte  autre  substance  ;  parfois,  cependant,  les 
œufs  sont  déposés  au  milieu  d'une  touffe  de  plantes  aquatiques  ou  sur 
des  tas  d'herbes.  Ces  œufs  sont  très  vai-iables  :  en  général,  ils  sont 
plus  ou  moins  ovoïdes  ou  piriformes,  mats,  finement  grenus,  d'un 
gris  jaunâtre,  roussâtre  ou  olivâtre,  parsemés  de  points  et  de  taches 
arrondies  ou  irréguliéres  plus  ou  moins  nombreuses,  tantôt  répandues 
assez  uniformément,  tantôt  rassemblées  au  gros  boni  ;  les  taches 
profondes  sont  d'un  gris  violacé,   les  autres  brunes  ou   noires;  ces 


—  558  - 

œufs  mesurent  en  moyenne  40  millim.  sur  31.  Il  arrive  souvent 
qu'une  crue  subite  des  eaux  vient  noyer  des  milliers  d'oeufs;  si  cet 
accident  arrive  de  bonne  heure,  les  oiseaux  ont  une  seconde  couvée, 
mais  si  la  destruction  arrive  plus  tard,  ils  restent  une  année  sans 
progéniture. 

La  durée  de  l'incubation  est  de  seize  ou  dix-sept  jours  ;  la  femelle 
couve  la  nuit,  le  mâle  la  relaye  pendant  le  jour,  mais  quand  le  soleil 
est  ardent,  c'est  lui  qui  est  chargé  dé  réchauffer  les  oeufs.  Les  pous- 
sins croissent  rapidement  et  commencent  déjà  à  voleter  au  bout 
d'une  quinzaine  de  jours. 

283.   —   La  Sterne   de  DougalL 
STERNA  DOUGALLI,  Montag.^ 

(PI.  283.) 

Sterna  DOUGALLI,  Montag.,  Orn.  Dict.  suppl.  (1813). 
Thalass^a  DOUGALLI,  Kaup,  Naturl.  Syst.,  p.  97  (1829). 

Sterna  paradisea,  Keys.  et  Rlas.  (nec  Briinn  ),  Wirbelth.  Eur.^  p.  xcvii  (1840)  et 
auctorum  plurimorum. 

Sterna  macdougalli,  Macgill,  Man.  Brit.  B.  II,  p.  233  (1840). 

Hydrocecropis  dougallii,  Boie,  Isis,  1844,  p.  179. 

Sterna  gracilis,  Gould,  Proc.  Zool.  Soc,  1847,  p.  222. 

Sterna  bicuspis,  Licht.,  Nomencl.  Av.^  p.  98  (1854). 

Sterna  melanoryncha,  Newt.,  Ibis,  1863,  p.  460. 

Sterna  douglasii,  Schl.,  Mus.  P.-B.  {Sternœ),  p.  24  (1863). 

Sterna  tenuirostris  (Licht.),  Blas.,  Joum.  f.  Orn.,  1866,  p.  80. 

Stkrna  korustes,  Hume,  Stray  Feath.  Il,  p.  318  (1874). 

Die  Dougalls-Meerschwalbe,  en  allemand. 

The  Roseate  Tern,  en  anglais. 

De  Dougall  Zeezwaluw,  en  flamand. 

Taille  :  0,33;  ailes  0^23;  rectrice  latérale  0,132. 

Description  des  deux  sexes  en  été.  —  Capuchon  et  nuque  d'un  noir  profond  ; 
dessus  du  corps  et  ailes  d'un  cendré  bleuâtre  très  clair  ;  les  sus-caudales 
blanchâtres;  première  rémige  noirâtre,  les  suivantes  cendrées,  mais  d'une 
teinte  plus  foncée  sur  la  barbe  interne,  toutes  avec  la  tige  et  un  large  bord 
interne,  blancs  ;  une  bande  partant  des  narines,  joues,  côtés  du  cou,  gorge  et 
les  autres  parties  inférieures  d'un  blanc  pur,  mais  lavé  de  rosé  sur  la  poitrine 
et  le  ventre;  queue  très  longue,  blanchâtre.  Bec  assez  grêle,  noir,  rougeâtre 
aux  commissures  ;  pattes  d'un  jaune  rougeâtre  ;  iris  brun. 

En  été.  —  Front  et  vertex  d'un  blanc  pur,  ce  dernier  taché  de  noir  en 
arrière;  occiput  et  nuque  noirs;  le  reste  comme  en  été. 


-  559  — 


JfeMwe.  —  Front  blanchâtre  ;  occiput  noir  avec  les  plumes  bordées  de  rous- 
sâtre;  dessus  du  corps  d'un  cendré  bleuâtre,  les  plumes  bordées  de  gris  roux 
jaunâtre  et  cette  bordure  est  précédée  d'une  tache  transversale  brunâtre  ; 
dessous  du  corps  blanc. 

Poussin.  —  Parties  supérieures  d'un  fauve  taché  de  blanc  et  de  gris  ;  par- 
ties inférieures  d'un  blanc  pur.  (Seebohm). 

Hab.  —  Ce  bel  oiseau  fut  découvert  sur  une  île  écossaise  par  le 

^  D'  Mac  Dougall,  et  décrit  pour 
la  première  fois  par  le  colonel 
Montagu  dans  son  OrnWiolo- 
jq  gical  Dictionary.  11  niche  peut- 
être  encore  sur  diverses  îles 
rocheuses  de  l'Ecosse  et  de  l'Ir- 
lande, mais  ne  visite  que  rare- 
'V^  ment  les  côtes  anglaises.  M.  See- 
bohm dit  qu'il  est  douteux  que 
cette  espèce  niche  encore  aux  îles  Britanniques,  mais  qu'une  capture 
a  encore  été  faite  sur  la  côte  de  Norfolk  en  1880.  Cette  Sterne  a  été 
observée,  mais  rarement,  au  Danemark  (Benzon),  sur  la  côte  occiden- 
tale du  Schleswig  {Naumann),  à  Helgoland  {Gâtke)  et  à  Borkum 
{Droste);  en  Belgique  elle  est  de  passage  accidentel  sur  nos  côtes 
maritimes,  vers  l'embouchure  de  l'Escaut,  en  août  et  septembre 
(de  Selys-Longchamps):  un  jeune  individu  a  été  tiré  aux  environs 
d'Anvers  en  septembre  1880  {Croegaert).  Cette  espèce  est  de  passage 
irrégulier  dans  le  nord  de  la  France,  mais  se  reproduit  en  grand 
nombre  dans  les  îles  de  la  Bretagne,  particulièrement  dans  celles  dites 
Iles  aux  Dames  [Degl.  et  Gerbe);  elle  n'est  pas  signalée  en  Portugal, 
mais  elle  a  été  capturée  en  Espagne  dans  la  province  de  Gérone 
[Vayreda)  et  deux  fois  en  Italie:  prés  de  Gênes,  le  22 juin  1822 
(Salvadori),  et  près  de  Massaciuccoli,  en  1835  {Giglioli);  von  der 
Miihle  dit  avoir  capturé  un  jeune  individu  en  Grèce,  mais  Linder- 
mayer  n'a  pas  observé  cette  espèce  dans  ce  pays.  Le  Baron  Tristrani 
a  tué  un  sujet  en  pleine  mue  près  des  îles  Baléares. 

Cette  Sterne  ne  paraît  pas  se  montrer  sur  les  côtes  occidentales  de 
l'Afrique,  car,  suivant  M.  Saunders,  les  sujets  rapportés  du  Damaras 
sous  le  nom  de  S.  doagalli  sont  en  réalité  des  S.  fJariatilis  ;  mais  le 
musée  Britannique  possède  des  sujets  du  Cap  de  Bonne-Espérance,  et 
M.  Saunders  en  a  plusieurs  de  Natal.  Cette  espèce  est  d'ailleurs  com- 
mune sur  les  rochers  et  les  bancs  de  sable  di'  l'ilc  Cargados,  au  noi'd 


—  560  — 

des  îles  Maurice  et  Rodriguez  {Pollen),  et  elle  a  également  été  obser- 
vée aux  îles  Bourbon,  Maurice  {Newton)  et  Madagascar  {Grandidier). 
Plus  à  l'Est,  on  rencontre  cet  oiseau  au  Bengale  {Schlégel),  à  Cey- 
lan  {Legge),  au  Tenassérim  {Hume),  aux  îles  Andaman  où  il  niche 
{Saunders),  aux  îles  Obi  {Bernstein)Q),  Nouvelle-Guinée  (Rosenberg), 
Arou  {Wallace),  Salomon  {Cockerell),  en  Australie  {Gould,  etc.),  à  la 
Nouvelle-Calédonie  {Latjard)  et  aux  îles  Tongo  et  Paumotu  {Gray). 
Cette  espèce  paraît  être  répandue  plus  régulièrement  en  Amérique, 
où  on  la  rencontre  sur  les  côtes  de  l'Atlantique  depuis  le  Massachu- 
setts jusqu'à  la  Floride,  l'Amérique  centrale  et  aux  Antilles  {Coues, 
Salvin,  Léotaud);  elle  habite  également  les  îles  Bermudes  {Seehohm). 
Mœurs.  —  La  Sterne  de  Dougall  ne  paraît  habiter  que  les  bords 
de  la  mer  ;  elle  émigré  à  la  même  époque  que  ses  congénères  et 
voyage  souvent  dans  leur  société.  On  ne  connaît  pas  grand' chose  de 
ses  moeurs  qui,  d'après  Léotaud,  seraient  semblables  à  celles  de  la 
S.  cayennensis  à  laquelle  il  renvoie  ;  voici  donc  ce  que  cet  auteur  dit 
de  cette  dernière:  «  Cet  oiseau  est  toujours  en  troupe,  soit  au  moment 
de  la  pêche,  soit  au  moment  du  repos.  Son  vol  est  soutenu,  gracieux 
et  assez  rapide.  Il  a  des  places  de  prédilection  où,  sans  doute,  il  trouve 
plus  facilement  les  petits  poissons  dont  il  se  nourrit.  Il  les  guette 
d'une  hauteur  peu   élevée  et  quand  il  s'abat  pour  les  saisir,  il  ne 
plonge  que  le  bec  dans  l'eau.  De  temps  en  temps,  il  jette  un  petit  cri 
qui  semble  un  cri  de  ralliement,  car  c'est  alors  que  toute  la  troupe 
s'assemble  et  se  met  à  tourbillonner  dans  un  très  petit  rayon.  Si  l'un 
d'eux  tombe  sous  le  coup  du  chasseur,  les  cris  redoublent  et  toute  la 
bande  vient  voltiger  au-dessus  de  la  victime  :  c'est  une  larme  accor- 
dée au  malheur.  Après  la  pêche,  la  troupe  va  se  reposer  soit  sur  un 
petit  banc  de  sable  séparé  du  rivage,  soit  sur  un  rocher,  soit  sur  un 
tronc  d'arbre  échoué  à  l'embouchure  d'une   rivière  ;  l'un  se  presse 
contre  l'autre  et  tous  babillent  en  commun  (1).  »  D'après  Naumann, 
son  cri  ressemble  assez  bien  à  celui  de  la  Sterne  vulgaire. 

Selon  Brewer,  la  Sterne  de  Dougall  arrive  sur  les  côtes  des  Etats- 
Unis,  non  loin  de  New-York,  dans  le  milieu  de  mai  et  commence  à 
pondre  vers  le  P'^juin;  les  jeunes  sont  en  état  de  voler  vers  le 
20  août. 

Reproduction.  -—  De  même  que  ses  congénères,  cet  oiseau  ne  fait 
pas  de  nid,  mais  dépose  ses  œufs  dans  une  dépression  creusée  dans 


(1)  Léotaud,  Oiseaux  de  l'Ile  de  la  Trinidad  (Antilles),  pp.  539,  537.  Port-d'Espagne,  1866. 


—   561  — 

le  sable  ou  dans  le  gravier,  qu'il  garnit  au  préalable,  d  après  Brewer,  de 
radicelles  et  de  brins.  Naumann  trouva  un  nid  sur  l'île  Amrom,  l'une 
des  îles  situées  à  l'ouest  du  Schleswig  ;  les  œufs,  au  nombre  de  deux, 
étaient  déposés  dans  une  touffe  de  gramioées  maigres  mélangées  £\ 
des  bruyères,  dont  le  centre  était  piétiné  par  l'oiseau  et  formait  ainsi 
un  nid  arrondi  très  convenable. 

La  ponte  est  de  deux  ou  trois  œufs.  Ceux-ci  présentent  les  mêmes 
variations  que  les  œufs  des  S.  fluviatilis  et  paradisea  dont  il  n'est 
presque  pas  possible  de  les  distinguer. 

284.  —  La  Sterne  naine. 
STERNA  MINUTA,  Lin, 

(PI.  285.) 

Sternaminor.  Briss.  Om.  VI,  p.  206(1760). 

Sterna  minuta,  Lin.  Sijsl.  nat.  I,  p.  228  (1766). 

Sterna  METOPOLEUCOS,  Gm.  Nov.  Comm.  Petrop.  XV,  p.  475(1771) 

Sterna  parva,  Penn.  Brit  Zool.,  p.  144  (1776). 

Sternula  minuta,  Boie,  Isis,  1822,  p.  563. 

Sternula  fissipes,  pomarina  et  danica,  Brehm.  Isis^  1830,  pp.  994-95. 

Sterna  antarctica,  Forst.  Descr.  Anim.  It.  Mar.  Auslr.,  p.  107  (1844). 

Sternula  danubiaus  et  meridionalis,  Brehm,  Naumannia,  1855,  p.  295 

Die  Zwerg  Meerschwalbk,  en  allemand  . 

The  Lesser  Tern,  en  anglais. 

De  Dwerg-Zeezwaluw,  en  riamand . 

Taille  :  0"'20  ;  ailes  0,18. 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  Frout  blanc,  et  cette  couleur 
se  prolonge  latéralement  au-dessus  des  yeux,  mais  sans  les  dépasser;  vertex. 
occiput,  nuque  et  lorums  noirs;  dessus  du  corps  et  ailes  d'un  cendré  bleuâtre 
pâle;  joues,  côtés  du  cou  et  parties  inférieures  d'un  blanc  pur;  les  trois  pre- 
mières rémiges  noirâtres,  les  baguettes  brunes,  le  bord  interne  blanc,  les 
suivantes  d'un  cendré  bleuâtre  uu  peu  plus  foncé  que  le  manteau,  avec  le 
bord  interne  blanc;  queue  blanche.  Bec  jaune  à  pointe  noire;  iris  noirâtre; 
pattes  oranges. 

En  hiver.  —  Comme  en  été,  mais  le  vertex  mélangé  de  quelques  plumes 
blanches. 

Jeune. —  Front  et  lorums  d'un  blanc  jaunâtre;  vertex  taché  de  brun;  nuiiuo 
et  une  bande  remontant  vers  l'œil  qu'elle  entoure,  noirâtres,  mais  les  plumes 
terminées  de  cendré  roussâtre;  dessus  du  corps  et  ailes  d'un  cendré  nuancé 
de  roussâtre,  chaque  plume  avec  un  bord  brun  suivi  d'un  liséré  cendré; 
petites  couvertures  de  l'épaule  d'un  gris  noirâtre;  rémiges  prinnures  d'un 

Tome  II.  —  1893.  71 


-  562    - 

cendré  foncé;  joues,  côtés  du  cou  et  parties  inférieures  d'un  blanc  assez  pur; 
queue  également  blanche,  mais  chaque  rectrice  porte  une  tache  brune  près  de 
son  extrémité  Bec  d'un  rose  jaunâtre  à  pointe  noirâtre  ;  pattes  couleur  chair. 
Poussin. —  Parties  supérieures  de  couleur  Isabelle,  uniforme  sur  le  front  et 
autour  des  yeux,  mais  semée  de  petites  stries  noires  sur  la  tête,  le  dos  et  les 
ailes;  toutes  les  parties  inférieures  d'un  blanc  très  faiblement  teinté  de  jaune. 
Bec  jaune  à  pointe  brune;  pieds  jaunes. 

Hab.  —  La  Sterne  naine  est  plus  ou  moins  répandue  en  Europe 

jusqu'au  60°  1.  N.  Elle  niche 
dans  le  midi  de  la  Suède  {Nils- 
son),  mais  rarement  dans  le  gou- 
vernement de  St-Pétersbourg, 
où  Th.  Pleske  trouva  cinq  ou  six 
couples  nichant  à  l'île  Kotlin  au 
milieu  d'une  cïrtonie  de  Sternes 
vulgaires,  mais  c'est  le  seul 
endroit  du  nord  de  la  Russie  où 
la  reproduction  de  cette  espèce  a  été  constatée  {Buchner)  ;  elle  niche 
plus  communément  dans  les  gouvernements  de  Moscou  et  de  Toula 
[Menzhier).,  et  en  grande  abondance  dans  le  midi  de  la  Russie  {de 
Nordmann).  On  ne  connaît  que  deux  captures  en  Norwège,  faites 
près  de  Jaederen  pendant  l'automne  de  1864  {Collett).  Plus  au  sud, 
c'est-à-dire  dans  tout  le  reste  de  l'Europe,  cet  oiseau  est  plus  ou 
moins  commun,  aussi  bien  sur  les  côtes  que  près  des  fleuves,  des 
rivières  et  des  lacs  de  l'intérieur;  en  Belgique  il  est  assez  commun, 
en  été,  sur  les  côtes  maritimes,  plus  rare  sur  l'Escaut,  et  ne  se  montre 
qu'accidentellement  sur  la  Meuse  et  sur  les  autres  eaux  de  l'intérieur 
du  pays.  Aux  îles  Britanniques  il  n'est  nulle  part  très  abondant. 

L'habitat  de  cette  espèce  s'étend  à  l'Est  jusqu'en  Asie  Mineure 
{Krûper),  en  Palestine  {Tristram),  en  Turkestan  {Severtzow),  en 
Perse  {De  Filippi)  et  dans  l'Inde  occidentale  {Jerdon);  au  delà,  vers 
l'Est,  elle  est  remplacée  par  la  S.  sinensis,  que  plusieurs  auteurs  ont 
confondue  avec  la  S.  minuta.  Cette  dernière  est  sédentaire  dans  la 
moyenne  et  la  Basse-Egypte, ainsi  que  sur  les  côtes  de  la  mer  Rouge 
{de  Heuglin)  et  dans  le  nord  de  l'Afrique  {Loche,  etc.)  ;  en  hiver  on  la 
voit  sur  les  côtes  occidentales  de  ce  continent  {Weiss)  jusqu'au  cap 
de  Bonne-Espérance  {Saunders),  et  elle  a  même  été  capturée  aux 
îles  Seychelles  {Newton)  et  Madagascar  {Hartlaub).  Elle  est  rempla- 
cée en  Amérique  par  une  espèce  voisine:  la  S.  antillarum. 


-  563  — 

Mœurs.  —  La  Sterne  naine  est,  pour  l'Europe,  un  oiseau  d'été, 
qui  nous  revient  en  mai  pour  nous  quitter  en  août,  et  il  est  rare  d'en 
voir  encore  à  la  fin  de  ce  mois.  Elle  émigré  par  couples  ou  en  petites 
troupes,  tantôt  pendant  la  nuit,  tantôt  en  plein  jour  et  vole  alors 
généralement  très  haut,  mais  elle  voyage  en  faisant  de  nombreuses 
stations  en  route.  Elle  vit  sur  les  côtes  maritimes  et  près  des  eaux 
douces,  surtout  près  des  grands  fleuves,  et  choisit  comme  séjour  des 
endroits  sablonneux  ou  des  bancs  de  gravier  au  milieu  de  l'eau,  mais 
il  faut  que  cette  dernière  soit  claire  car  elle  évite  généralement  les 
lieux  bourbeux. 

Cet  oiseau  est  aussi  gracieux  et  aussi  élégant  que  ses  congénères, 
dont  on  le  distingue  facilement  à  sa  taille  beaucoup  plus  petite.  Son 
genre  de  vie  n'offre  rien  de  particulier  et  ressemble  à  celui  des  autres 
Sternes  :  comme  celles-ci,  il  vole  constamment,  se  repose  peu  et 
nage  rarement,  mais  il  compte  parmi  les  espèces  les  plus  agiles  et 
les  plus  remuantes.  «  Deux  de  ces  oiseaux  se  rencontrent-ils,  dit 
Naumann,  leurs  cris  perçants  semblent  exprimer  la  joie  qu'ils 
éprouvent  de  se  revoir;  bientôt  arrivent  un  troisième,  un  quatrième, 
les  cris  deviennent  plus  forts,  plus  variés,  plus  précipités  ;  ils  com- 
mencent à  se  jouer,  à  s'agacer  en  exécutant  au  vol  les  manœuvres 
les  plus  gracieuses.  Ces  scènes  de  gaîté  et  de  bonheur  se  reprodui- 
sent plusieurs  fois  par  jour,  aussi  ces  oiseaux  se  font-ils  bientôt 
remarquer  et  aimer,  même  par  des  personnes  peu  sensibles  aux 
beautés  de  la  nature.  Ces  jeux  dégénèrent  rarement  en  véritables 
querelles,  et  si  elles  ont  lieu,  elles  se  bornent  à  un  instant  de  tumulte 
bien  vite  dissipé.  Mais,  dans  toutes  ses  actions,  l'oiseau  ne  perd  pas 
l'homme  de  vue  ;  il  n'abandonne  sa  défiance  ordinaire  que  là  où  il 
voit  beaucoup  de  monde  et  n'en  est  pas  chassé.  »  Cette  Sterne  est 
moins  sociable  que  la  plupart  de  ses  congénères  et  ne  niche  pas  en 
aussi  nombreuses  colonies.  Elle  se  fait  souvent  entendre,  surtout 
dans  les  lieux  de  la  reproduction  ;  son  cri  ressemble  à  chreh  ou  kreck, 
quelquefois  à  krèik,  et  en  poursuivant  ses  semblables,  l'oiseau  Jette 
le  cri  de  keckèrrek,  kickerek. 

La  nourriture  de  cet  oiseau  consiste  surtout  en  petits  poissons, 
mais  il  prend  aussi  des  crustacés,  des  larves  et  des  insectes  aqua- 
tiques; il  fait  également  la  chasse  aux  sauterelles  et  aux  libellules 
qu'il  attrape  au  vol  avec  beaucoup  d'adresse.  Il  plane  souvent  au- 
dessus  de  l'eau,  et  quand  il  voit  une  proio  à  sa  convenance,  il  s'abat 
avec  la  rapidité  d'uno  tlf'rhf^,  la  saisit    nt   l'omporte,   poursuivi   par 


—  564     - 

ses  compagnons  moins  heureux  qui  cherchent  à  lui  ravir  sa  capture. 

Reproduction.  —  La  Sterne  naine  niche  lin  mai  ou  au  commence- 
ment de  juin  dans  des  endroits  couverts  de  gravier,  soit  près  de  la 
mer,  sur  un  îlot  ou  un  banc  s'élevant  au-dessus  de  l'eau,  soit  au  bord 
d'un  fleuve  ou  d'un  étang.  Elle  niche  dans  la  société  de  la  Sterne 
vulgaire  et  de  petits  Pluviers,  dont  les  nids  sont  éparpillés  entre 
ceux  de  la  Sterne  naine  ;  tandis  que  quand  d'autres  Sternes  nichent 
dans  les  mêmes  parages,  chaque  espèce  a  sa  colonie  séparée  de  celles 
des  autres.  Les  nids  sont  le  plus  souvent  assez  éloi,:nés  les  uns  des 
autres,  ce  qui  fait  qu'ils  occupent  un  rayon  assez  étendu.  Les  œufs 
sont  déposés  sur  le  gravier  dans  une  légère  excavation  ou  sur  un  tas 
de  coquilles  que  la  mer  rejette  au  loin.  La  ponte  est  de  deux,  trois  ou 
quatre  œufs  ovoïdes,  aigus  au  petit  bout,  à  grain  fin,  mats,  de  couleur 
variable  tirant  sur  le  jaune,  le  roux,  l'olivâtre  ou  le  gris,  et  parsemés 
de  points  et  de  petites  taches  arrondies,  parfois  aussi  de  stries, 
souvent  rassemblés  au  gros  bout  ;  les  taches  profondes  sont  d'un 
gris  vineux,  les  superficielles  d'un  brun  noirâtre  plus  ou  moins  foncé. 
Ils  mesurent  environ  32  millim.  sur  24. 

Mâle  et  femelle  couvent  alternativement  pendant  une  quinzaine  de 
jours,  mais  très  peu  pendant  la  journée  quand  le  temps  est  beau  ;  ils 
élèvent  également  leurs  poussins  en  commun. 

GKNRE    ÇLIX 

GDIFETTE  on  HYDROCHÉLIDON.  —  HTDROCHELIDON 

Sterna,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  211  (1760)  et  auctorum  plurimorum. 
Hydrochelidon,  Boie,  Isis,  1822,  p.  563. 

Anous,  Viralva,  Steph.  Shaio's  Geu .  Zool  XIII,  I.  pp.  142,  167  (1825). 
Pelodes,  Kaup,iVa«.  Syst.  p.  107  (1829). 

Car.  —  Bec  à  peu  près  de  la  longueur  de  la  tête,  comprimé,  plus  haut  que 
large,  pointu;  narines  allongées,  latérales,  s'avançant  jusqu'au  premier  tiers 
du  bec  ;  ailes  très  longues  et  dépassant  de  beaucoup  les  rectrices  latérales  ; 
queue  très  peu  fourchue;  tarses  courts  ;  doigts  grêles,  le  médian  de  la  lon- 
gueur du  tarse,  l'ongle  non  compris  ;  membranes  iiiterdigitales,  notamment 
celle  qui  unit  le  doigt  médian  à  l'interne,  étroites  et  profondément  échan- 
crées;  ponce  bien  conformé. 

Hab.  —  Ce  g  nre  est  représenté  dans  les  parties  chaudes  et  tempé- 
rées des  cinq  parties  du  monde. 


—  o6o    — 

285.  —  La  Guifette  ou  Hydrochélidon  noirâtre. 

HYDROCHELIDON  NIGRA,  Boie  ex  Briss. 

(PI.    286) 

Sterna  NIGRA  et  NiEviA,  Briss.  Ornith.  VF,  pp.  211,  21(5  (1760). 
Sterna  NIGRA,  NiiîviA  et  FissiPES,  Lin.  Syst.  nat.  I,  pp.  227-28  (1766). 
Larus  MEUULiNUS,  Scop.  Ann .  I,  Hist  nat.  n'^  108  (1769). 
Stkrna  kusca,  Tuiist.  Or)i.  Brit.  ]>.  3  (1771). 

Sterna  surinamensis  et  ohsciika,  Ginel.  Syst.  nat.  1,  pp.  604,  608(1788). 
Sterna  plumbea,  Wils.  Am.  Orn.  VII,  p.  83,  pi.  60  (1813). 
Sterna  brunnea,  For.st.  Syn.  Cnt.  Br.  B.  p.  63  (1817). 
Hydroi'hei.idon  NIGRA,  Boic,  Isis,  1822,  p.  563. 

Viral  VA  NIGRA  et  Anousi'LUmbea,  Steph.iS'AaioVGen.  Zoo/.  XIII,  l,pp.  142, 167(1825). 
Hydrochélidon  nigrican.s  et  obscura,  Brehm, /sis,  1830,  p.  995. 
Hydrochélidon  nigrum,  Bonap.  Comp.  List  p.  61  (1838). 
Hydrochélidon  fissipes,  Gray,  Gen.  B.  III,  p.  660  (1849). 
Hydrochélidon  pallida,  \M-e\xm.,  Naumanvia.,  1855,  p.  295. 
Hydrochélidon  surinamensis  et  plumbea,  Bonap.  Compt.  rend.  1856,  I,  p.  773. 
Pelodes  surinamensis,  Gray,  Hand-li.'^t  B.  III,  p.  122(1871). 
Hydrochélidon  lariformis,  Coiies,  />'.  of.  N.  W.  p.  704(1874). 
Hydrochélidon  lariformis  surinamensis,  Ridgw.   Nom.  N.  Am  B.  p.  53  (1881). 
Hydrochélidon  nigr.v  surinamensis,    Nels.    Rep.    Nat.    Hist.  coll.  marie  in  Alaska., 
p.  60  (1887). 

Die  schwarze  Seeschwalbe,  en  allemand. 

The  black.  Tern,  en  anglais. 

De  zwarte  Zeezwaluw,  en  flamand. 

Taille:  0^20;  ailes  0,22. 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  Tète,  cou  et  gorge  noirs;  toutes 
les  autres  parties  supérieures,  y  compris  les  ailes  et  la  queue,  d'un  gris  cen- 
dré assez  foncé  ;  couvertures  du  dessous  des  ailes  blanches;  poitrine  et  abdo- 
men d'un  gris  noirâtre  ;  région  anale  et  sous-caudales  d'un  blanc  pur.  Boc 
noir  avec  les  commissures  rouges;  iris  brun  foncé;  pattes  d'un  brun 
rougeâtre. 

En  hiver.  —  Partie  antérieure  de  la  tête,  joues,  gorge,  nuque  et  toutes  les 
parties  inféiieuies  d'un  blanc  puf  ;  occiput  l't  tour  des  yeux  noirs:  dos,  ailes 
et  ({ueue  comme  en  été. 

Jeune.  —  iM-ont  blanc;  dessus  de  la  tête  d'un  gris  noirâtre  varié  de  l)run 
clair;  manteau  brun  cendré  avec  les  bordures  des  plumes  d'un  brun  roussâtre; 
scapulaires  cendrées,  bordées  largement  de  brun  roussâtre;  couvertures  des 
ailes  cendrées,  bordées  de  fauve  et  marquées  d'une  bande  brune  ;  croupion 
et  sus-caudales  d'un  gris  clair  ;  rémiges  et  rectrices  d'un  gris  foncé  avec  un 
li.>-é  (';  blanrhâtre;  nn^pii-.  (  ùtés  du  cou,  joue»!,  gorg  -  et  toutes  les  ])arties  infé- 
rieures d'un  lilanc  pur.  Bec  brun  ;  iri^  noii-;  pattes  livides. 

Poiis.sin.  —  Pariies  supérieures  fauves  avec  des  taches  irrégulières  noires, 


566  - 


sauf  au  front;  parties  inférieures  blanches,  fauves  à  l'abdomen.  Bec  brun  ; 
pattes  jaunâtres. 

Ho.h.  —  La  Guifette  noirâtre  est  plus  ou   moins  répandue  dans 

toute  l'étendue  de  l'Europe  jus- 
qu'au 60"  1.  N.  qu'elle  dépasse 
rarement,  aussi  n'est-ce  que  très 
accidentellement  qu'on  la  voit  en 
Finlande  {Palmén);  mais  dans  le 
gouvernement  de  St-Pétersbourg 
elle  est  déjà  très  abondante  sur 
le  lac  Peipus  (Portschinski),  et 
elle  niche  dans  le  sud  de  la 
Suède  (  Wallengren),  en  Danemark  {Kjaerhôlling),  et  visite  la  Nor- 
wège  au  passage  {Collett).  Cet  oiseau  ne  se  montre~~aux  îles  Britan- 
niques qu'au  printemps  et  en  automne,  lors  des  passages  ;  ancienne- 
ment il  nichait  en  grand  nombre  dans  diverses  parties  de  l'Angleterre, 
mais  depuis  vingt-cinq  ans  on  n'a  plus  trouvé  de  nids;  il  se  montre 
plus  rarement  en  Ecosse  et  accidentellement  en  Irlande  {Seehohm). 
En  Belgique,  cette  epèce  est  généralement  commune,  surtout  dans 
les  grands  marais  de  la  Campine,  sur  l'Escaut,  la  Meuse,  et  elle 
visite  même  les  eaux  des  environs  de  Bruxelles.  Elle  est  plus  ou  moins 
sédentaire  dans  le  midi  de  l'Europe. 

En  Afrique  on  observe  cette  espèce  dans  les  parties  septentrionales 
{Loche,  Drake)  et  en  Egypte  jusqu'au  Kordofan  {de  Heuglin)  et  les  côtes 
de  la  mer  Rouge  (i?Mppe//);  plus  au  Sud  elle  ne  paraît  se  montrer  qu'ac- 
cidentellement et  seulement  en  hiver  :  sa  présence  a  été  constatée  en 
Gambie  {Rendall),  à  la  Côte  d'Or  {Peel),  dans  la  région  de  Fanti 
{Sharpe)  et  dans  le  Damaras  {Andersson).  M.  Ayres  a  également 
signalé  une  capture  au  Transvaal,  mais,  d'après  M.  Saunders,  cet 
oiseau  serait  un  jeune  H.  leucoptera.  A  l'Est  on  observe  cette  Gui- 
fette en  Palestine  {Tristram),  au  Caucase  {Radde),  au  Turkestan 
{Severtzow)  et  dans  le  sud-ouest  de  la  Sibérie  jusqu'à  l'Altaï  {Finsch). 
Quanta  la  forme  américaine, dont  quelques  auteurs  ont  fait,  bien  à 
tort,  une  espèce  distincte  sous  le  nom  de  S.  surinamensis,  elle  est 
répandue  depuis  l'Alaska  où  elle  est  rare  (Dali)  jusqu'aux  Antilles, 
l'Amérique  centrale  et  le  Chili  (Sclater  et  Salvin);  elle  doit  cependant 
êfre  bien  rare  dans  certaines  parties  de  l'Amérique  du  Sud,  car 
Taczanowski  ne  l'indique  pas  dans  son  Ornithologie  du  Pérou. 
Mœurs.  —  L'Hjdrochélidon  noirâtre  nous  revient  au  commence- 


—  567  — 

ment  du  mois  de  mai  et  nous  quitte  à  la  fin  de  septembre.  Cette  espèce 
voyage  la  nuit  comme  le  jour,  par  couples  ou  en  petites  troupes,  mais 
là  où  elle  est  commune,  c'est  par  bandes  de  plusieurs  centaines  d'in- 
dividus qu'elle  opère  ses  migrations.  Quand  ces  oiseaux  traversent 
une  contrée  sèche,  ils  volent  toujours  très  haut,  mais  quand  ils  longent 
un  fleuve  ou  une  rivière  qui  leur  promet  une  abondante  nourriture, 
ils  volent  bas,  par  étapes  et  s'arrêtent  parfois  des  journées  entières 
dans  lamêmelocalité,visitant  les  marécages  et  les  étangs  des  alentours. 

Cette  Guifette,  vulgairement  appelée  Epouvantail,  ne  se  montre 
que  peu  près  de  la  mer,  mais  elle  passe  sa  vie  près  des  lacs,  des 
étangs  et  des  rivières,  ainsi  que  dans  les  marais  ;  elle  aime  surtout 
les  eaux  bourbeuses, riches  en  herbages  et  couvertes  de  nénuphars,  de 
potamots,  de  lenticules,  etc.  ;  c'est  là,  loin  du  bord,  qu'elle  se  livre 
au  repos  de  la  nuit  sur  un  monticule  sortant  de  Teau  ou  sur  un  tas  de 
végétaux  flottants.  De  même  que  ses  congénères,  elle  marche  et  nage 
aussi  mal  que  les  Sternes  ;  par  contre,  elle  a  le  vol  extrêmement 
facile,  léger  et  varié, mais  moins  impétueux  et  moins  vacillant  que  ces 
dernières  ;  mais  quand  le  vent  est  violent,  elle  est  fort  contrariée  dans 
son  vol,  parce  que  ses  ailes  sont  trop  longues  relativement  au  poids 
de  son  corps  et  à  la  puissance  de  ses  muscles.  Elle  passe  ses  journées 
dans  un  mouvement  continuel,  vole  et  chasse  constamment.  «  Nous  les 
voyons  voler  tout  le  jour  au-dessus  des  eaux, dit  M.  R.  Martin, planer 
sur  place  en  battant  des  ailes,  courir  des  bordées  au  moindre  coup  de 
vent,  par  moment  s'abattre  tout  d'un  coup  sur  l'eau,  plonger  à  demi 
et  saisir  un  insecte  pour  repartir  aussitôt.  Elles  se  posent  peu  suj- 
l'eau,  plus  souvent  sur  les  tas  de  joncs  et  sur  les  rivages,  se  laissant 
alors  approcher  avec  quelque  difficulté,  tandis  qu'au  vol  elles  s'appro- 
chent du  chasseur  à  portée  de  bâton  et, s'il  est  près  des  nids,  tournent 
et  retournent  autour  de  lui  en  poussant  leurs  cris  aigus  et  répétés. 
Ces  cris  attirent  toutes  les  Guifettes  de  l'étang,  et  l'homme  se  trouve 
entouré  d'une  nuée  d'oiseaux  multipUant  leurs  clameurs  pendant  des 
heures  entières.  Les  coups  de  fusil  ne  les  effrayent  pas,  on  a  beau  en 
tirer,  elles  continuent  leur  tapage.  > 

Comme  on  vient  de  le  voir,  c'est  un  oiseau  très  sociable  et  les  mem- 
bres d'une  même  bande  sont  très  attachés  les  uns  aux  autres,  sans 
s'inquiéter  des  autres  oiseaux.  11  se  nourrit  principalement  d'insectes 
et  de  larves  aquatiques  ou  terrestres, plus  rarement  de  petits  poissons, 
déjeunes  grenouilles,  de  têtards  et  de  vers.  Il  ne  fond  pas  sur  sa  proie 
comme  les  Sternes,  mais  rase  la  surface  do  l'eau,  plane  quelque  temps 


-  568  - 

et,  quand  il  aperçoit  une  proie,  descend  obliquement,  la  saisit  avec  son 
bec  sans  plonger  entièrement  mais  avec  une  grande  rapidité.  Sa  voix 
est  douce  et  ressemble  à  gick,  gik  entremêlé  parfois  de  kirr. 

Reproduction.  —  La  Guifette  qui  nous  occupe  niche  au  commen- 
cement de  juin  dans  les  marais  et  les  étangs.  Les  nids  sont  souvent 
placés  les  uns  près  des  autres  sur  des  mottes  gazonnées  qui  émergent 
au-dessus  de  l'eau,  dans  des  touffes  d'herbes  et  de  joncs,  sur  des  tas 
de  plantes  flottantes  ou  sur  des  feuilles  de  nénuphar.  Les  nids  sont 
grossièrement  faits  de  feuilles  sèches,  de  joncs  et  de  roseaux,  de  brins 
d'herbes,  de  radicelles,  etc.  La  ponte  ordinaire  est  de  trois  oeufs,  rare- 
ment de  deux  et  exceptionnellement  de  quatre  ;  ils  sont  ovoïdes  ou 
piriformes,  à  grain  fin,  mats,  d'un  gris  roussâtre  ou  olivâtre  et 
marqués  de  points,  de  stries  et  de  taches  d'un  brun  foncé,  plus  nom- 
breux au  gros  bout,  et  ces  taches  couvrent  en  partie  les  macules 
profondes  qui  sont  grisâtres;  ces  œufs  mesurent  environ  34  millim. 
sur  25  ou  26.  La  durée  de  l'incubation  est  de  quatorze  ou  quinze 
jours.  M.  R.  Martin  dit  que  beaucoup  de  ces  œufs  ne  sont  pas 
fécondés  et  qu'un  cinquième  au  moins  ne  vient  pas  à  éclosion  (1). 

Les  jeunes  abandonnent  leur  nid  au  bout  d'une  quinzaine  de  jours 
et  c'est  à  ce  moment  qu'ils  commencent  à  voleter.  Leurs  parents  con- 
tinuent cependant  à  veiller  sur  eux  et  à  leur  donner  à  manger  jusqu'à 
l'époque  de  la  migration. 

286.  —  La  Guifette  ou  Hydrochélidon  leucoptère. 

HYDROCHELIDON   LEUCOPTERA. 

(PI.   287) 

Sterna  fissipks,  Pall.  (nec  Lin.^,  Zoogr.Rosso-As.  II,  p.  336  (1811). 

Sterna  LEUCOPTERA,  Schinz,  Yôg.  der  Schweiz,  p.  264  pi.  (1815). 

Hydrochélidon  leucoptera,  Boie,  Isis,  1822,  p.  563. 

ViRALVA  LEUCOPTERA,  Steph .  Shaw  Gen.  Zool.  XIII,  1,  p.  170  (1825). 

HYDROCHELrooN  LEUcopTERUM,  Bonap.  Conip.  List.  p.  61  (1838). 

Hydrochélidon  nigra  (nec  Briss.  et  Lin,),  Gray,  Gen.  of.  Birds,  III,  p.  660  (1849). 

Hydrochélidon  subleucoptera,  Brehm,  Nauniannia,  1855,  p.  295. 

Hydrochélidon  javanica,  Swinh.  (nec  Horsf.)  Ibis,  1860,  p.  68. 

Sterna  nigra,  Schleg.  Mus.  P.-B.  {Sternœ)  p.  31  (18^3). 

Hydrochélidon  niger,  Severtz.  Turk.  Jevotnie,  p.  70  (1873). 

Die  weissflugelige  Seeschwalbe,  en  allemand. 

(1)  René  Martin,   Cata.ague  aez  Oiseaux  de    a  Brenne  (Bull,  de  la  Soc.  zool.  de  France,  XI 
1887)  p.  83. 


-  569  — 

The  White-winged  black  Terx,  en  anglais. 
De  Witvleugelige  zeezwaluw,  en  flamand. 

7V^///e.- 0-20;  ailes  0,215. 


Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  Tête,  dos,  scapulaires  et 
toutes  les  parties  inférieures,  noirs  ;  petites  et  moyennes  couvertures  des 
ailes  blanches,  les  plus  grandes  et  les  rémiges  cendrées,  les  deux  premières 
rémiges  noirâtres  sur  leur  barbe  externe  et  à  l'extrémité,  les  tiges  blanches  ; 
couvertures  du  dessous  des  ailes  noires  ;  queue,  sus  et  sous-caudales  ainsi 
que  la  région  anale,  blanches.  Iris  noir;  bec  rouge  sombre;  pattes  rouge 
écarlate. 

En  hiver.  —  Dessus  de  la  tête^  région  des  oreilles  et  nuque  noirâtres  variés 
de  blanc  ;  une  petite  tache  noirâtre  devant  l'œil  ;  front,  joues,  parties  infé- 
rieures et  queue  d'un  blanc  pur;  manteau  d'un  gris  bleuâtre  clair;  couver- 
tures du  dessous  des  ailes  blanches  variées  de  noirâtre.  Bec  noirâtre;  pattes 
oranges. 

Jeune.  —  Ressemble  en  général  à  celui  de  VH.  nigra,  mais  d'une  teinte 
plus  claire  (1). 

Poussin.  —  Dessus  de  la  tête  d'un  roux  vif,  avec  des  taches  noires  irré- 
gulières à  l'occiput  et  sur  la  nuque  ;  tour  des  yeux  blanchâtre  ;  dos  et  flancs 
noirs  variés  de  mèches  d'un  roux  jaunâtre  ;  ailes  rousses  avec  une  tache 
noire  à  l'épaule  ;  menton  blanc  ;  devant  et  côtés  du  cou  bruns  ;  parties  infé- 
rieures d'un  cendré  roussâtre,sauf  le  milieu  de  la  poitrine  qui  est  blanchâtre. 

Hab.  —  La  Guifetto  leucoptère  est  une  espèce  méridionale  qui  n'a 

été  observée  ni  en  Finlande,  ni 
en  Norvège,  mais  un  sujet  a  été 
I  tiré  en  Suède,  près  de  Lnnd, 
jr  en  1835  {Wal/engren)\  elle  se 
montre  accidentellement  en  Da- 
-^1  ncmark  [KJaerbulling),  en  Ang'le- 
'  terre  et  en  Irlande  où,  d'après 
j  M.  Harting,  onze  captures  ont 
-"^  été  faites  do  1811  à  1871  ;  depuis 
cette  époque,  cinq  individus  ont  encore  été  abattus  dans  une  bande 
de  douze  près  de  Hickling  Broad,  le  30  mai  1873  {Stevenson),  et  un 
autre  fut  tué  le  10  juin  1883,  près  de  Norfolk  (Chase).  Ses  appari- 
tions en  Allemagne  no  sont  également  qu'accidentelles,  mais  on  l'a 
observée  jusqu'en  Silésie  et  en  l'oméranic^  {Naumann)  et  elle  a  niché 

(1)  L'adulte,  en  été,  est  facile  à  reconnaître  par  les  couvertures  noires  du  dessous  des  .ailes, 
mais  les  plumages  d'hiver  et  du  jeune  ressemblent  beaucoup  à  ceu.x  de  VU.   nigra. 

TUM.   II.   —   18U3.  72 


—  570  — 

en  Bavière  en  1860;  elle  se  montre  plus  régulièrement  dans  le  midi  de 
l'Allemagne,  en  Autriche,  en  Hongrie  et  surtout  sur  les  eaux  qui 
avoisinent  le  Danube.  En  Belgique  on  ne  connaît  qu'une  ou  deux 
captures  :  un  individu  a  été  tué  dans  un  marais  près  de  Tournai  en  mai 
\843{du  Bus)  ;  elle  se  montre  aussi  accidentellement  en  Suisse  [Schinz] 
et  dans  le  nord  de  la  France,  mais  elle  est  assez  commune  sur  les 
côtes  de  la  Méditerranée  {Degland  et  Gerbe)  et  très  commune  en 
Brenne  où  elle  niche  dans  la  société  des  deux  autres  espècs  {R.  Mar- 
tin); elle  est  également  commune  dans  diverses  parties  de  l'Espagne 
{Reyes)  et  aux  îles  Baléares  {Saunders),  où  elle  niche  probablement. 
Elle  niche  aussi  dans  diverses  parties  de  l'Italie  [GiglioU),  en  Sar- 
daigne  {Gara),  en  Corse  {Whitehead).  en  ^ïq'ûq  [MoJherbe).  en  Grèce 
{Lindermayer)  et  probablement  en  Turquie  ;  elle  passe  en  grand  nom- 
bre dans  la  Dobrodja  et  la  Bulgarie  aux  deux  saisons^(^//6%n).  Elle  est 
commune  dans  le  midi  de  la  Russie  {de  Nordmann),  mais  ne  paraît 
pas  dépasser,  au  nord,  le  gouvernement  de  Moscou,  où  on  ne  la  voit 
du  reste  que  très  accidentellement  {Menzbier). 

Cet  oiseau  habite  également  le  Maroc  {Irby),  l'Algérie  [Loche]  et 
Madère  {Harcourt);  il  est  sédentaire  dans  le  Delta  du  Nil  jusqu'à 
la  région  de  Wadi-Halfa,  et  descend  parfois  jusqu'au  Kordofan  {de 
Heugliyi).  11  a  également  été  observé  en  Abyssinie  [Saunders),  au 
Transvaal  [Ayres)  et  au  Damaras  {Andersson),  mais  il  est  probable 
qu'il  ne  visite  ces  contrées  qu'accidentellement. 

A  l'Est,  on  observe  cette  espèce  en  Palestine  {Tristram),  en  Asie 
Mineure,  au  Caucase'  (Radde),  en  Perse  {Blanford).  au  Turkestan 
{Severtzoto),  dans  le  sud  de  la  Sibérie  {FinscJi,  Radde),  dans  la  région 
de  l'Amour  {von  Schrenck),  en  Mongolie  et  en  Chine  [David],  et  acci- 
dentellement à  Célèbes  {Schlégel),  à  la  Nouvelle-Zélande  [Buller] 
et  dans  le  nord  de  l'Australie  [Saunders]. 

Le  D''  E.  Goues  signale  une  seule  capture  dans  l'Amérique  du 
Nord,  faite  près  du  lac  Koskonong  dans  le  Wisconsin,le  5  juillet  1873; 
l'oiseau  était  en  plumage  de  noce. 

Mœurs.  —  C'est  également,  pour  l'Europe,  un  oiseau  d'été  qui 
émigré,  suivant  la  région,  entre  le  commencement  d'août  et  les  pre- 
miers jours  d'octobre,  et  revient  dans  le  courant  de  mai  en  même 
temps  que  ses  congénères.  Il  émigré  souvent  dans  la  société  de  l'es- 
pèce précédente,  et  habite  avec  celle-ci  les  mêmes  localités,  c'est-à- 
dire  les  marais  et  les  étangs,  mais  séjourne  peu  près  des  eaux  cou- 
rantes et  rarement  près  de  la  mer. 


—  o71   - 

Ce  qui  a  été  dit  sur  les  mœurs  de  la  Guifette  noirâtre,  se  rapporte 
également  à  la  Guifette  leucoptère,  que  Schinz  fut  le  premier  à  dis- 
tinguer comme  espèce  distincte  en  1815;  avant  lui,  cet  oiseau  était 
généralement  confondu  avec  l'H.  nigra. 

La  Guifette  leucoptère  est  peu  farouche  et  se  montre  même  assez 
hardie  ;  elle  vole,  par  couple  ou  en  petite  troupe,  très  bas  au-dessus 
des  eaux,  des  prés  et  des  steppes  pour  y  chasser  les  mouches,  les 
cousins,  les  coléoptères,  les  hbellules  et  les  sauterelles;  elle  se  nourrit 
également  de  larves  et  de  vers  et  devient  généralement  très  grasse. 
Son  cri  est  sonore  et  ressemble,  d'après  Naumann,  à  cherrr  ou  kerrr. 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  se  reproduit  dans  les  mêmes  lieux  et 
dans  la  société  de  l'espèce  précédente.  Son  nid  est  construit  de  la 
môme  façon  et  contient  généralement  trois  œufs,  rarement  quatre,  qui 
ressemblent  également  à  ceux  de  la  Guifette  noirâtre  et  otfrent  les 
mêmes  variations  de  couleur;  ils  mesurent  en  moyenne  33  millim. 
sur  24. 

287.  —  La  Guifette  cendrée  ou  Moustac. 

HYDROCHELIDON    HYBRIDA,  Gr.  ex  PcUL 

(PI.  288.) 

Sterna  hybrida,  Pall.  Zoo(jr.  Rossu-Ay.,  Il,  p.  338  (1811). 

Sterna  leucopareia  (Natt.)  Tem.  Man.  cCOr/i.  II,  p.  746  1 1820). 

Sterna  javanica  et  grisea,  Horsf.  Trans.  Linji.  Soc.  XIII,  pp.  l'J8-0'J  (1820). 

Sterna  delamotta,  Vieill.  Enc.  méth.  p.  350  (1823). 

Viralva  indica  et  leucopareia,  Steph.,  .S/taio's  Ge«.  Zool.  XII,  [>.  109  (1825). 

Pelodes  leucopareia,  Kaiip,  Natûrl.  Si/st.  p.  107  (1829;. 

Hydrochelidon  leucopareja,  Brehrn,  Isis,  1830,  p.  995. 

Sterna  similis,  Gr.  et  Hardw.  III.  Ind.  Zool.  I,  pi.  70,  f.  2  (1832) . 

Hydrochelidon  fluvi.vtilis,  Gouki,  Proc.  Zool.  Soc.  1842,  p.  140. 

Hydrochelidon'  hybrida,  grisea,  similis,  javanica  et  indica,  Gray,  Gen.  Birds    lll 

p.  660(1846j. 
Hydrochelidon  leucogenys,  niloticagI  meridionalis,  Brrn,  Yorjelf^  p.  351  (1855). 
Hydrochelidon  DELALANDii,  Bp.  Co»iijt.-R"nd.  XLII,  p.  773(1850). 
Hydrochelidon  cinerea,  C.  Diib.  PI.  col.  Ois.  Bdg.  III,  p.  258(1800). 
Sterna  innotata,  Beav.  Ihis.,  1868,  p.  404. 
Gelochelidon  innotata,  Gr.  Huiul-list.  Ul,  p.    119(1871). 

Pelodes  hybrida,  indica,  kluviatilis,  delalandi^Gi-.  ^a»^/-/.  Ill,pp.  121-22  (1871). 
Sterna  leucopteka,  (laps,  cal.)  Buckl.  Ibis,  1874,  j).  391. 
?  Sterna  melanauchen,  Salv.  Ann.  Mus.  Civ.  Gen.  VIII,  p.  .385  (1876). 
Die  Weisshautige  Seeschwalbe,  eii  alloinand. 
The  Whiskered  Tern,  en  anglais. 
De  (iUAUWE  Zeezwaluw,  en  llainaiid. 

Taille  :  0">:^1;  ai  1rs  0,:i:). 


572 


Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  Capuchon,  nuque  et  lorums 
noirs;  dessus  du  corps,  ailes  et  queue  d'un  gris  cendré,  plus  sombre  au  man- 
teau; barbe  externe  delà  première  rémige  noirâtre;  gorge  et  joues  blanches; 
devant  et  côtés  du  cou  ainsi  que  le  haut  delà  poitrine  d'un  gris  bleuâtre  plus 
ou  moins  foncé  ;  le  reste  de  la  poitrine  et  l'abdomen  d'un  cendré  noirâtre  ; 
région  anale  et  sous-caudales  blanches;  la  rectrice  la  plus  externe  blanche, 
mais  grisâtre  à  son  extrémité.  Bec  et  pattes  rouges;  iris  noir. 

En  hiver.  —  Front  blanc  ;  dessus  de  la  tête  et  nuque  d'un  noir  varié  de 
blanc  ;  parties  supérieures  d'un  gris  cendré  plus  pâle  qu'en  été  ;  rémiges  ter- 
minées de  cendré  brunâtre;  toutes  les  parties  inférieures  blanches. 

Jeune.  —  Front  d'uu  blanc  roussâtre  ;  dessus  de  la  tête,  nuque  et  manteau 
noirâtres  avec  les  plumes  bordées  de  roux  clair  ;  couvertures  des  oreilles  et 
une  tache  devant  l'œil  noirâtres;  scapulaires  cendrées  à  la  base,  puis  noi- 
râtres avec  les  bords  et  une  tache  centrale  d'un  roux  jaunâtre  pâle  ;  ailes  d'un 
cendré  clair,  les  couvertures  bordées  de  roux  jaunâtre  pâle;  rémiges  et  queue 
comme  chez  l'adulte  en  hiver,  mais  les  rectrices  d'un  brun  cendré  vers  leur 
extrémité  et  terminées  par  un  bord  blanchâtre;  bas  du  dos  et  sus-caudales 
d'un  cendré  clair,  la  bordure  des  plumes  roussâtre  ;  parties  inférieures  blan- 
ches variées  de  roux  jaunâtre  sur  les  côtés  de  la  poitrine.  Bec  brun  avec  la 
base  rougeâtre  ;  pattes  couleur  chair. 

Poussin.  —  Front  noirâtre  ;  parties  supérieures  et  flancs  d'un  roux  clair 
varié  de  mèches  irrégulières  noirâtres;  parties  inférieures  blanches;  bas-ven- 
tre d'un  roux  clair.  Bec  brun;  pattes  jaunâtres. 

Hab.  —  Cette  espèce  ne  paraît  pas  s'être  montrée   au  delà  du 

55°  1.  N.  On  ne  connaît  que  cinq 
captures  pour  l'Angleterre  et 
l'Irlande  (Harting)  et  une  pour 
le  Schleswig-Holstein  [Kjaerhôl- 
ling).  En  Allemagne  on  ne 
signale  non  plus  que  quelques 
captures  (Naumann),  et  je  n'en 
connais  qu'une  pour  la  Belgique, 
celle  de  l'individu  tué  près  d'An- 
vers en  1853  et  signalé  par  feu  mon  père  (1).  La  Guifette  cendrée  a 
été  tuée  accidentellement  en  Normandie,  notamment  près  de  Dieppe 
{Gacleau  de  Kervillé),  mais  elle  niche  abondamment  en  Brenne 
{R.  Martin),  rarement  ou  accidentellement  dans  le  midi  de  la  France 
{Lacroix)  et  quelques  couples  se  reproduisent  régulièrement  dans  les 


(1)  Ch.  F.  Dubois,  Planches  col.  des  Ois.  de  la  Belg.  III,  p.  258. 


V-  «  '.1 

—  o/o    — 

parties  basses  de  la  Camargue  [Jaubert  et  Lapom.).  Elle  est  commune 
dans  certaines  parties  de  l'Espagne  [Saunders,  Reyes)  et  en  Portugal 
{Barba za  du  Bocage),  TCiBi?.e\\e  ne  se  montre  qu'irrégulièrement  en 
Italie  {Glgliolï)  où  elle  a  été  capturée  en  Piémont,  en  Lombardie,  en 
Vénétie,  en  Toscane,  en  Romagne  et  en  Sicile  [Salvadorï),  mais  elle 
se  montre  assez  régulièrement  à  Malte  {Wright).  Cet  oiseau  niche  en 
Bohême  près  de  Pardubic  {Ostrdal),  et  communément  dans  le  sud  de 
la  Hongrie  (iVawm<:mn,  Fritsch),  en  Transylvanie  {Danfurd  et  Harvie- 
Brown),  en  Grèce  {Lindermayer),  en  Turquie  {Dresser')  et  accidentel- 
lement dans  la  Dobrodja  {Alléon),  mais  il  est  commun  dans  le  midi 
de  la  Russie  {de  Nordmann). 

Plus  au  Sud,  cette  espèce  habite  l'Asie  Mineure  {Kriiper)  et  la 
Palestine  {Tristram);  elle  est  sédentaire  en  Egypte  et  en  Nubie,  et 
quelques  individus  se  montrent  en  hiver  jusqu'au  Bahr-el-Abiad  et 
le  fleuve  des  Gazelles  {de  Heuglin).  En  été  elle  est  plus  ou  moins 
abondante  dans  le  nord  de  l'Afrique  {Loche,  Favier)  ;  en  hiver  elle 
paraît  commune  dans  le  sud  du  continent  noir,  et  il  est  probable 
qu'elle  y  niche,  car  Andersson  l'y  a  prise  en  plumage  de  noce  en 
avril  {Saunders)  ;  elle  a  également  été  capturée  au  Damaras  {Anders- 
son). 

A  l'Est,  cet  oiseau  habite  le  Caucase  {Radde),  la  Perse  {Blanford), 
le  'V\ivk.QS,i2iX\{Severtzow),  l'Inde  {Jerdon,  IIume),Gey\siïi  {Holdsworth), 
rindo-Chine  {Blyth,  etc.)  ;  Prjewalsky  l'a  trouvé  nichant  dans  la 
vallée  du  Hoang-Ho  dans  le  sud-est  de  la  Mongolie,  Styan  l'obtint 
du  Yang-tsi-Kiang  dans  la  Chine  centrale,  et  Saunders  de  Formose. 
Cet  oiseau  a  également  été  observé  aux  Philippines  {von  Martens), 
à  Bornéo  {Doria,  Schwaner),  à  Sumatra  {Raffles),  à  Java  {Horsfield), 
à  Célôbes  {Forsten),  aux  Moluques  à  Salavatti  {de  Bruyn),  à  la  Nou- 
velle-Guinée, Sorang  {D'Albertis)  et  en  Australie,  particulièrement 
dans  le  Queensland  {Gould,  Ramsay). 

Mœurs.  —  La  Guifette  cendrée  ou  Moustac  est  donc  aussi  une 
espèce  méridionale  ;  elle  revient  en  Europe  à  la  lin  d'avril  ou  dans 
les  premiers  jours  de  mai,  et  émigré  du  27  septembre  au  6  octobre. 
Elle  vit,  comme  ses  congénères,  dans  les  marécages,  près  des  étangs 
et  des  rivières,  mais  ne  se  montre  que  rarement  près  de  la  mer  ;  elle 
aime  les  eaux  fangeuses  riches  en  herbages  et  couvertes  de  nénu- 
phars, de  lenticules  et  autres  plantes  flottantes.  Cet  oiseau  a  du  reste 
le  mémo  genre  de  vie  et  les  mêmes  liabitiulos  (|ue  les  Guileties  pi'éce- 
dentes,  et  il  est  tout  aussi  sociable.  Sa  nourriture  consiste  en  larves 


—  574  — 

aquatiques  et  insectes  divers  qu'il  chasse  particulièrement  en  volant 
au-dessus  des  eaux;  il  prend  également  des  petits  poissons,  des 
têtards,  des  jeunes  grenouilles  et  des  vers. 

Reproduction.  —  La  Guifette  cendrée  niche  sur  un  monticule 
émergeant  de  l'eau  ou  sur  des  tas  de  vieux  joncs  ;  le  nid  est  formé, 
comme  ceux  des  précédentes,  de  fragments  de  joncs  et  de  roseaux 
secs  entremêlés  de  graminées;  il  contient  deux  ou  trois  œufs,  rare- 
ment quatre,  moins  sombres  que  ceux  des  autres  Guifettes  et  un  peu 
plus  grands.  Ils  sont  ordinairement  ovoïdes  ou  légèrement  piriformes, 
à  grain  fin,  presque  mats,  d'un  gris  fauve  ou  d'un  gris  verdâtre  pâle, 
parsemés  de  taches  profondes  rares  et  d'un  gris  vineux,  et  de  points 
et  de  taches  superficiels  d'un  brun  plus  ou  moins  foncé  mais  varié  de 
roux.  Ils  mesurent  en  moyenne  39  millim.  sur  28. 

FAMILLE  DES  LARIDÉS 

Car.  —  Bec  de  longueur  moyenne,  fendu  jusqu'aux  yeux,  robuste, 
crochu,  comprimé  latéralement,  à  arête  de  la  mandibule  supérieure 
droite  jusqu'au  milieu,  puis  insensiblement  recourbée  vers  le  bas  ; 
mandibule  inférieure  plus  ou  moins  anguleuse  à  la  rencontre  de  ses 
branches  ;  narines  percées  généralement  vers  le  milieu  du  bec  ;  ailes 
longues,  larges,  mais  aiguës  à  la  pointe;  queue  ordinairement  égale, 
rarement  conique  ou  fourchue,  formée  de  douze  rectrices  assez  larges  ; 
tarses  de  hauteur  moyenne;  doigts  antérieurs  unis  jusqu'aux  ongles 
par  les  membranes  ;  pouce  libre,  rarement  réduit  à  un  simple  tuber- 
cule. 

Ces  oiseaux  ont  une  taille  qui  varie  entre  celle  d'un  pigeon  et  celle 
d'un  aigle  de  moyenne  taille  ;  leur  poitrine  est  large,  le  cou  court,  la 
tête  assez  grande  et  leur  plumage  est  très  épais. 

Hah.  —  Les  Laridés  sont  répandus  sur  toutes  les  mers,  mais  ils 
sont  toujours  plus  abondants  dans  la  zone  septentrionale. 

Mœuy^s.  —  Ces  oiseaux,  que  l'on  désigne  généralement  sous  les 
noms  de  Goélands  et  de  Mouettes,  ressemblent  aux  corbeaux  par  cer- 
taines particularités  de  leurs  mœurs,  et  ce  n'est  pas  sans  raison  que 
certains  auteurs  les  ont  surnommés  des  Corbeaux  de  mer. 

Ils  vivent,  en  général,  sur  la  mer  sans  s'éloigner  beaucoup  des 
côtes,^ aussi  leur  présence  près  d'un  navire  est-elle  un  indice,  pour  les 
marins,  que  la  terre  n'est  plus  bien  éloignée.  Ils  suivent  souvent  le 
cours  des  fleuves,  passent  d'un  fleuve  à  une  rivière  et  séjournent  par- 


—  575  — 

fois  longtemps  loin  dans  l'intérieur  des  contrées.  Ce  sont,  en  général, 
des  espèces  migratrices  ou  errantes  ;  certaines  d'entre  elles  arrivent 
en  grand  nombre  sur  nos  côtes  et  sur  l'Escaut  à  la  suite  de  tempêtes  et 
disparaissent  de  nouveau  quelques  jours  après. 

Tous  les  Laridés  font  du  poisson  leur  principale  nourriture,  mais 
ils  ne  plongent  pas  ;  beaucoup  se  nourrissent  aussi  d'insectes  et  d'une 
foule  d'animaux  marins,  et  s'abattent  même  sur  de  petits  vertébrés 
terrestres,  sur  des  cadavres  et  des  charognes  :  de  même  que  pour  les 
Corbeaux,  toute  matière  animale  leur  convient  et  ils  sont  extrême- 
ment voraces. 

Ces  oiseaux  sont  en  général  prudents,  intelligents,  sociables  et 
courageux,  mais  aussi  jaloux  et  méfiants;  ils  dévorent  sans  pitié 
leurs  congénères  plus  faibles  et  enlèvent  les  couvées  de  leurs  compa- 
gnons de  ponte.  Ils  nichent  en  sociétés  nombreuses  sur  les  rochers 
et  les  falaises,  construisent  des  nids  grossiers  et  pondent  de  deux  à 
quatre  œufs.  Mâle  et  femelle  couvent  à  tour  de  rôle  et  tous  deux 
élèvent  leurs  petits  avec  beaucoup  de  sollicitude. 

Tableau  analytique  des  espèces  indigènes  (1) 

I.  Ailes  mesicraiit  au  moins  40  centimètres. 

A.  Rémiges  noires  ou  noirâtres  au  moins  à  leur  extrémité,  à  pointe  plus  ou  moins 

blanche  (adultes). 

1.  Manteau  couleur  ardoise  ou  noirâtre  : 

a.  Doigt  médian,  ongle  compris,  ne  dépassant  pas  52  millimètres.     L.  fuscus 

b.  Doigt  médian,  ongle  compris,  dépassant  52  millimètres    .     .     .     L.  marinvs 

2.  Manteau  et  base  des  rémiges  gris  bleuâtre,  les  dernières  noires  a  leur 

extrémité  mais  à  pointe  blanche L.   orqentatus 

B.  Rémiges  brunes  ou  noires  : 

3.  Manteau  d'un  brun  plus  ou  moins  foncé,  mais  les  plumes  bordées  de 
blanc  ou  de  blanchâtre  (jeunes). 

a'.  Doigt  médian,  ongle  compris,  ne  dépassant  pas  52  millimètres.     L.  fuscus 
h'.  Doigt  médian,  dépassant  52  millimètres  : 

c.  Hauteur  du  bec  à  la  base  des  narines 

c'.  ne  dépassant  pas  17  millimètres     .  L.    a)yentntus 

c".  dépassant  17  millimètres.     ...  L     ))iivi)/t(x 


(i)  Pour  faciliter  la  détermination,  nous  laissons  ici  toutes  les  espèces  dans  le  même  .ccnie, 
mais  on  verra  plus  loin  que  quelques-unes  appartiennent  à  des  genres  différents  ;  beaucoup  d'au- 
teurs n'ont  pa.s  tenu  compte  des  différences  génériques. 


—  576  — 

C.  Rémiges  blanches  ou  blanchâtres  ; 

1.  Manteau  gris  pâle  (adultes)  ou  rayé  de  brunâtre  (jeunes). 

a.  Ailes  mesurant  40  à  41  centimètres L.  leucopterus 

b.  Ailes  mesurant  42  à  44  centimètres L.  glnucus 

II.    Ailes  viesuranf  inoins  de  40  centimètres. 

A.  Pouce  bien  distinct  : 

.  .        .        )   ailes  33  à  35  centimètres  .     .  .     .  L.  canus 

'°  '  P  )   ailes  28  à  31  centimètres L- ridibundus 

2.  Rémiges  gris  pâle  terminées  de  blanc;  ailes 23  centimètres.      .     .     .  L.  m>nuf,us 

3.  Rémiges  blanches  ou  avec  une  petite  tache  subterminale  noirâtre; 

ailes  33  centimètres L.  eburneus 

B.  Pouce  réduit  à  un  simple  tubercule;  ailes  28  à  31  centimètres  .  .     L.  tridactylus 

Remarque.  —  En  tête  de  la  famille  des  Laridés,  devrait  prendre 
place  la  Mouette  de  Sabine  {Xema  Sahinei)  figaré©--pl.  297  de  notre 
atlas,  vu  qu'elle  se  rapproche  des  Sternidés  par  sa  queue  fourchue. 
C'est  une  espèce  circompolaire  habitant  les  côtes  maritimes,  les 
fleuves,  les  lacs  et  les  rivières,  mais  dont  on  ne  signale  que  bien  peu 
de  captures  en  Europe.  On  en  a  pris  une  quinzaine  de  sujets  aux  îles 
Britanniques  {Seebohm),  une  à  l'île  Helgoland  {Gaetke),  six  en 
France  :  Seine-Inférieure  (Hardi/),  Rouen,  Dunkerque,  1847 
(De gland),  Bretagne,  août  1872  [Bureau),  St-Jean-de-Luz,  1880  et 
Hendaye,  1884  [Olphe-Galliard).  M.  de  Sélys-Longchamps  signale 
encore  une  capture  sur  les  côtes  de  Hollande  et  une  sur  le  Rhin  ; 
d'après  feu  mon  père,  une  Mouette  de  Sabine  en  plumage  d'hiver  a 
également  été  prise  sur  la  Meuse,  non  loin  de  Maestricht,  mais 
aucun  sujet,  autant  que  je  sache,  n'a  été  capturé  à  l'intérieur  des 
limites  politiques  de  la  Belgique.  C'est  pour  cette  raison  que  je  crois 
devoir  supprimer  cette  espèce  de  notre  faune,  quoiqu'il  ne  soit  pas 
impossible  qu'on  la  prenne  un  jour  dans  notre  pays. 

OENRECIiX. 

GOELAND  OU  MOUETTE.  —  LARUS  (1). 

Larus,  Gavia,  Briss.  Ornith.  VI,  pp.  160,  189  (1760). 

Leucus,  Icthyaetus,  E.YT)KocohŒ.vs,  Kâup,  Ndtûrl.  Syst.T^p.  102,  113(1829). 

Laroides,  Brm.  Isis,  1830,  p.  933. 

(1)  On  désigne  généralement  sous  le  nom  de  Goéland,  les  grandes  espèces  {Larus  fusctis, 
tnarimis,  ai-gen/atiis,  glaiicus  eileifcoptenis),  et  sons  celui  de  Mouette,  les  espèces  dont  les  ailes 
mesurent  moins  de  40  centimètres. 


—  o7T  — 

Chroicocephalus,  Eyt.  Cat.  Brit.  Mus.  p.  63  (1836). 
Glaucus,  Dominicanus,  Bruch,  Journ.  f.  Orn.  1853,  pp.  100,  101. 
Gavina,  Gelastes,  Meligavia,  Bp.  Naumannia,  1854,  p.  212. 
CLUPEiLARUS,Bp.  Consp.  av  ,  II,  p  220  (1857). 
Kroikocephalus,  Jerdon,  B.  ofind.  II,  p.  831  (1863). 
Chroocephalus,  Sel.  et  Salv.,  Pioc.  Zool.  Hoc.  1872,  p.  576 

Car.  —  Bec  plus  court  que  la  tète,  plus  ou  moins  robuste,  très  comprimé 
dans  toute  son  étendue;  mandibule  supérieure  crochue,  l'inférieure  plus 
courte  et  comme  taillée  en  biseau  de  l'angle  à  la  pointe;  narines  oblongues, 
étroites,  découvertes;  ailes  longues  et  pointues  ;  queue  généralement  carrée  ; 
bas  des  jambes  peu  dénudé  ;  tarses  médiocrement  allongés,  scutellés  en 
avant;  doigts- unis  jusqu'aux  ongles  i)ar  les  membranes;  pouce  libre,  petit, 
pourvu  d'un  ongle  faible. 

Hab.  —  Ce  genre  est  cosmopolite. 


288.  —  Le  Goéland  ou  Mouette  glauque. 
LARUS  GLAUCUS,  Brûnn. 

(PI.  289). 

Larus  glaucus,  Briinn.  Orn.  Bor.  p.  44  (1764). 

Larus  giganteus  (Temm.),  Benicke,  Ann.  Wetter.  Gesellsch.  111,  p.  140  (1814). 

Lakus  leuceretes,  Schleep.,  A".  Ann.  Wetter.  Gesellsch.  I,  p.  314(1819). 

Larus  consul,  Hoie,  Isis,  1822,  p.  875. 

Larus  ISL.A.NDICUS,  Edm.  Menu  Wern.  Soc.  IV,  p.  185  (nec  p.  506)  (1823). 

Larus  leucopterus,  Vieill.  (nec  Faber),  Encycl.  p.  346  (1823). 

Larus  gl.*.cialis,  Macg.  Mem.  Wern.  Soc.  V,  pi.  1,  p.  270  (1824). 

Leucus  glaucus,  Kp.  Natûrl.  Syst.  p.  86  (1829). 

Larus  minor,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  993. 

Larus  HUTCHiNsn,  Richards.  Faitn.  bor.  Am.  II,  p.  419(1831). 

Plautus  glaucus,  Reiclib.  Nat.  Syst.  Av.  loityip.  p.  5  (1852). 

Glaucus  consul,  Bruch,  Journ.  /".  Orn  .   1853,  p.  101. 

Laroides  GLAUCUS,  Bruch,  Jowr».  f.  Orn.  1855,  p.  281. 

DieEis-Meve,  BiiRGERMEiSTERMovi:,  Cil  allemand. 

The  glaucousGull,  en  anglai.s. 

De  Burgemeester,  en  flamand. 

Taille:  0»'60  ;    ailes  0,42. 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  Tête,  cou,  queue  et  les  parties 
intérieures  d'un  l»lanc  pur;  manteau,  scapulaires,  couvertures  des  ailes  et 
rémiges  d'un  gris  bleuâtre  pâle;  rémiges  primaires  dans  leur  quart  postérieur 
et  extrémité  des  scapulaircs  et  des  rémiges  secondaires  ainsi  que  les  baguettes 
blancbes.  Bec  jaune,  blanchâtre  à  son  extrémité  et  une  tache  rouge   vers 

Tome  II.  —    lt<93.  73 


578  - 


Tangle  de  la  mandibule  inférieure;  tour  de  l'œil  orange  ;  iris  brun  jaunâtre  ; 
pattes  couleur  chair  livide. 

En  hiver.  —  Comme  en  été,  mais  des -stries  d'un  cendré  brunâtre  sur  la 
tête,  la  nuque  et  les  côtés  du  cou. 

Jeune.  —  Tête  et  cou  d'un  blanc  sale  varié  de  cendré  ;  les  autres  parties 
supérieures  blanchâtres  avec  des  taches  irrégulières  transversales  d'un  cendré 
brunâtre;  rémiges  primaires  d'un  cendré  blanchâtre  à  extrémité  blanche; 
parties  inférieures  d'un  cendré  clair  varié  de  blanc.  Ce  plumage  s'éclaircit  à 
mesure  que  l'oiseau  avance  en  âge,  mais  ce  n'est  qu'à  la  quatrième  année 
qu'il  a  son  plumage  d'adulte.  Bec  noirâtre  ;  iris  brun;  pattes  couleur  chair. 

Poussin.  —  Tête  d'an  cendré  pâle,  marquée  irrégulièrement  de  petites 
taches  noires  peu  nombreuses  et  de  formes  diverses  ;  dos  et  dessus  des  ailes 
marbrés  confusément  de  brun  et  de  cendré  et  très  faiblement  lavés  de  roux  ; 
poitrine  cendrée  et  ventre  blanc  sans  taches;  bec  noir  à  sa  base  jusqu'au  delà 
des  narines,  d'un  jaune  terne  vers  la  pointe  ;  pieds  jaunâtres.  (/.  Vian). 

Hab. 


ky|-      - 


OtlOK>iT*     î!5"0  60Si   4o'fa^  >y 


—   Ce  Goéland  est  une   espèce  circompolaire   qui   s'élève 

vers  le  pôle  jusqu'au  82°  1.  N.  Il 
est  généralement  commun  au 
Spitzbergjà  la  Nouvelle-Zemble, 
à  Waigatz  et  îles  voisines  {de 
Heuglin),  moins  abondant  sur  les 
côtes  occidentales  de  la  Finmark 
{CoUett)  et  du  nord  de  la  Russie; 
il  est  commun  au  Groenland  (^o/- 
bôll)  et  sédentaire  en  Islande 
{Faber),  mais  ne  niche  que  rarement  au  sud  du  cercle  polaire.  En 
hiver  on  voit  quelquefois  cet  oiseau  en  Suède  {Nilson) ,  dans  le  golfe 
de  Finlande  [Palmén),  sur  les  côtes  septentrionales  de  l'Allemagne 
{Naumann),  plus  régulièrement  sur  celles  de  Norwège,  du  Danemark 
{Kjaerbôlling)y  des  îles  Féroé  (Feilden),  Shetland,  Orcades  et  sur  la 
côte  orientale  de  l'Ecosse  {Harting),  plus  rarement  sur  celles  de  l'An- 
gleterre et  de  l'Irlande  {Seebohm).  Ce  n'est  que  pendant  les  hivers 
rigoureux  qu'on  voit  quelquefois  des  jeunes  sur  les  côtes  de  Hollande 
{Schlégel),  de  Belgique  [de  Sêlys-Longchamps)  et  du  nord  de  la  France 
{Gadeau  de  Kerville);  deux  sujets  ont  également  été  capturés  en 
Italie  :  l'un  vers  1853,  l'autre,  une  femelle  adulte,  a  été  tué  près  de 
Gênes  le  10  avril  1877  (Giglioli);  Meisner  et  Schinz  disent  que  les 
sujets  adultes  ne  se  montrent  que  très  accidentellement  sur  les  lacs 
de  la  Suisse,  mais  qu'il  n'est  pas  rare  d'y  observer  des  jeunes  en 


août  et  septembre,  quoique  toujours  isolément  (1).  Une  capture  a 
aussi  été  faite  à  Tanger  [Famer). 

Sur  les  côtes  septentrionales  de  l'Asie,  cette  espèce  niche  rarement 
au  sud  du  74°  1.  N.  {von  Middendorff);  on  l'observe  également  au 
Kamtschatka(T'«c^«no^(;5/^^■)  et  au  Japon,  car  M.  Saunders  dit  avoir 
vu  des  spécimens  rapportés  de  Hakodadi  parle  capitaine  Blakiston. 

Cet  oiseau  habite  également  toutes  les  mers  de  l'Amérique  boréale, 
et  hiverne  le  long  des  côtes  de  l'Atlantique  jusqu'à  l'île  Long,  sous  le 
41M.N.  (Cowe5). 

Mœurs.  —  Le  Goéland  glauque  est  donc  un  oiseau  peu  répandu 
sur  les  côtes  européennes,  et  il  ne  se  reproduit  que  dans  les  régions 
boréales  au  delà  du  cercle  polaire.  Dans  ses  migrations  il  dépasse 
rarement  les  mors  Baltique  et  du  Nord. 

C'est  un  vrai  oiseau  marin,  aimant  la  pleine  mer  et  les  côtes  rocail- 
leuses et  ne  visistant  qu'accidentellement  les  eaux  douces. Ses  mœurs 
ressemblent  complètement  à  celles  du  L.  marinus  que  nous  expose- 
rons plus  loin.  Son  vol  est  facile,  léger,  et  les  mouvements  des  ailes 
sont  lents  et  parfoisimperceptibles.Cet  oiseau  est  malicieux  et  prudent, 
mais  moins  sociable  que  la  plupart  de  ses  congénères. Son  cri,  d'après 
de  Heuglin,ressemble  à  gogiu-gogiic-gogiu,  parfois  à  gaggag  ourogro- 
grogro,  et  se  termine  souvent  par  une  sorte  d'aboiement  rauque. 

C'est  un  pillard  qui  enlève  aux  autres  oiseaux  les  œufs  et  les  pous- 
sins ;  il  se  contente,  du  reste,  de  ce  qu'il  trouve  :  poissons,  crusta- 
cés, mollusques,  cadavres  divers  surtout  de  cétacés,  charognes,  et 
Ton  a  même  trouvé  dans  son  estomac  des  fucus  et  des  conferves  ;  avec 
un  pareil  régime  il  ne  doit  pas  être  souvent  embarrassé  pour  sa  nour- 
riture. 

Reproduction.  —  La  reproduction  a  lieu  vers  la  mi-juin.  11  est 
rare,  dit  de  Heuglin,  que  beaucoup  de  couples  nichent  ensemble  dans 
le  même  endroit,  ils  se  dispersent,  au  contraire,  dans  les  falaises  et 
sur  les  rochers.  Le  nid,  d'après  cet  auteur,  est  assez  artistement  fait 
à  l'aide  de  mousse,  les  bords  en  sont  élevés  et  le  centre  est  plus  ou 
moins  recouvert  d'un  mélanges  d'herbes,  de  tiges,  de  saxifrages,  de 
terre  et  de  plumes.  La  ponte  est  ordinairement  de  trois  œufs,  mais  si 
la  couvée  a  été  déiruite,  la  femelle  n'en  pond  plus  que  deux.  Ces  œufs 
sont  généralement  d'un  olivâtre  pâle  ou  d'un  gris  roussâti'c,  parsemés 
de  points  et  de  taches,  parlois  rassemblés  en  couronne  au  gros  bout  ; 


(1)  Mcisiier  et  Scliiiiz,    Dir  Vns^el  der  Schi-eiz.  p.  2ôS. 


-  o80  — 

les  taches  profondes  sont  d'un  gris  violacé  plus  ou  moins  pâle,  les 
superficielles  d'un  brun  noirâtre  ;  ces  oeufs  mesurent  en  moyenne 
82  millim.  sur  53. 

Les  parents  défendent  leur  couvée  avec  courage  et  font  tout  ce  qui 
est  possible  pour  en  éloigner  l'ennemi,  en  attirant  son  attention  sur 
un  autre  endroit. 

289.  —  Le  Goéland  ou  Mouette  leucoptère. 
LARUS  LEUCOPÏERUS. 

(PI.  290.) 

Larus  ARGENTATus,  Sabine  (nec  auct.),  Trans.  Linn.  Soc.  XII.  p.  546  (1818). 

Larus  leucopterus,  Faber,  Prodr.  Isldnd.  Ornith.  p.  91  (1822). 

Larus  glaucoides  (Tem.)  Boie,  Isis,  1822,  p.  562. 

Larus  islandicus,  Edmonst.,  Mem.  Wern.  Soc.  IV,  p.  506  (1823). 

Larus  arcticus,  Macgill.,  ibidem.,  V,  p.  268  (1824). 

Laroides  glaucoides,  leucopteros  et  subleucopteros,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  993. 

Glaucus  leucopterus  et  glacialis,  Bruch,  Journ.  f.  Orn.  1853,  p.  101. 

Larus  chalcopterus,  Licht.  Nomencl.  av.  p.  99  (1854). 

Laroïdes  chalcopterus  et  glacialis,  Bruch,  Journ.  /'.  Or/i.  1855,  p.  282. 

Leucus  chalcopterus,  arcticus  et  leucopterus,  Bonap.  Consp.  av.  II,  p.  216(1857). 

Die  Polar-Meve,  en  allemand. 

The  Iceland  Gull,  en  anglais. 

De  kleine  Burgemeester,  en  flamand. 

Taille  :  0M7  ;  ailes  0,40. 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  D'un  blanc  pur;  manteau  et 
ailes  d'un  gris  bleuâtre  pâle;  rémiges  primaires  de  la  couleur  du  manteau  à 
leur  base,  blanches  à  leur  extrémité,  les  baguettes  également  blanches.  Bec 
jaune,  une  tache  rouge  à  l'angle  de  la  mandibule  inférieure  ;  iris  jaune  ;  pattes 
d'un  blanc  rosâtre. 

En  hiver.  —  Comme  en  été,  mais  le  dessus  de  la  tête  et  du  cou  strié  de 
brun  clair. 

Jeune. — Blanc  avec  des  taches  brun  clair,  allongées  sur  la  tétc  et  la  nu(iue, 
transversales  sur  le  manteau  et  les  ailes,  irréguhères  sur  la  (pieue;  rémiges 
d'un  blanc  sale  ;  parties  inférieures  d'un  blanc  sale  varié  de  cendré.  Bec 
livide  à  la  base,  noir  dans  sa  moitié  terminale  ;  iris  brun  ;  pattes  d'un  blanc 
grisâtre. 

Hab.  —  Cette  espèce  n'habite  que  l'océan  Glacial  arctique  ou  elle 
est  commune  en  Islande  {Faber),  au  Groenland  {Holbôll)  et  sur  les 
côtes  américaines,  mais  manque  complètement  au  Spitzberg  et  à  la 


;i  - 


Nouvelle-Zemble  ;  elle  est  également  commune  à  l'île  Jean  Mayen 

(Fisrher  et  von  Pelzeln).  Elle  vi- 
site chaque  hiver  les  côtes  occi- 
dentales de  la  Finmark  jusqu'à 
Tromsô  {Collrtt),  mais  ne  se 
montre  que  rarement  plus  au 
sud.  Trois  sujets  ont  été  tués  en 
décembre  1859  sur  Tîle  Hidden- 
sée,  à  l'ouest  de  l'île  de  Rugen 
{Quistorp),  et  on  l'a  capturée  à 
deux  reprises  prés  d'Helsingôr  {Kjaerbfdling).  Peu  de  temps  après 
que  Faber  eut  découvert  cette  espèce  en  Islande,  le  I)""  Edmonston  la 
captura  aux  îles  Shetland  (1823)  et  lui  donna  le  nom  de  L.  islandicus , 
dénomination  qu'il  avait  d'abord  donnée  au  L.  glaucus. 

La  Mouette  leucoptère  ne  visite  les  îles  Britanni(|ucs  que  très  irrégu- 
lièrement, mais  elle  a  ceci  de  commun  avec  le  Jaseur  et  le  Cassenoix, 
c'est  que  quand  elle  vient  passer  l'hiver  en  Ecosse  et  aux  îles  voisines, 
c'est  généralement  en  grand  nombre  et  en  société  de  la  Mouette  glau- 
que ;  elle  est  cependant  toujours  rare  en  Angleterre  et  ne  se  montre 
qu'accidentellement  en  Irlande  {Seebo/im)-Le  Baron  von  Droste-Hiils- 
hofF  a  eu  plusieurs  fois  l'occasion  d'en  tirer  sur  les  côtes  de  la  mer  du 
Nord,  principalement  sur  celles  de  Netherland.  Pendant  les  hivers 
bien  rigoureux,  cet  oiseau  se  montre  accidentellement  sur  les  côtes  de 
Hollande  [Schlégel),  de  Belgique  {de  Sélys-Longchamps)  et  du  nord 
de  la  France:  plusieurs  sujets  ont  été  tués  sur  la  [)lage  de  Dunkerque, 
dans  la  baie  de  Cancale,  (hxns  la  baie  de  la  Somme  {Degland  et  Gerbe) 
et  à  Biarritz  {Dubaï en). 

La  véritable  patrie  de  cet  oiseau  est  l'Amérique  boréale,  où  il  est 
surloui  aboiidanl  dans  le  détroit  de  Davis,  dans  la  baie  de  Baffin,  à 
l'île  Melville  (Sioainson)  et  dans  la  mer  de  Behring  sur  les  côtes  de 
l'Alaska  {I)all)\  il  hiverne  au  Labrador  et  longe  les  entes  de  l'Allan- 
li([ue  jusqu'à  l'île  Long  sous  le  IL'  1.  N.  [Coues).  MiddendorlF  croit 
avoir  vu  cet  oiseau  prés  du  Taimyr  sous  le  75°  1.  N.,  et  M.  Saunders 
dit,  avoii'  vu  un  sujet  rapporté  du  Jai)on  par  \o  cajutaine  Blakiston. 

Md.'a?'^.  —  Faber  nous  a[)[)rtMid  ([ue  le  Goéland  leucoptère  hiverne 
en  Islande  mais  (ju'il  ne  s'y  reproduit  pas;  il  arrive  sur  les  côtes  de 
cette  île  vers  le  milieu  do  septembre  et  les  quitte  à  la  tin  de  mai.  «  Ce 
sont  (les  oiseaux  très  ("amilici-s,  dit  i'o\  .-lutcur.  qui  venaient  souvent 
prés  de  mon  eanipemeiit  i)oiir    atliapei-  bvs  déchets  que  l'on  jetait,  et 


—  582  — 

les  disputaient  vigoureusement  aux  Corbeaux  (Corvus  corax).  J'avais 
apprivoisé  l'un  de  ces  Goélands  au  point  qu'il  venait  chaque  matin  à 
heure  fixe  devant  ma  porte  pour  recevoir  quelque  nourriture;  il  annon- 
çait sa  présence  par  des  cris. 

«  Le  L.  glaucus  plonge  peu,  mais  c'est  un  grand  pillard;  le  L.  leu- 
copterus,  au  contraire,  est  aussi  bon  plongeur  que  les  L.  triclactylus 
et  Sterna  ff.uviatUis.  Par  sa  faculté  de  plonger,  ce  Goéland  indique 
aux  chasseurs  de  phoques  le  lieu  où  se  trouvent  ces  animaux,  car  illes 
suit  toujours  en  grand  nombre  et  en  poussant  des  cris  continuels  ;  les 
phoques,  et  en  particulier  le  Phoca  groenlandica,  font  venir  du  fond 
de  la  mer  à  la  surface  les  sardines  et  autres  poissons,  sur  lesquels 
fondent  sans  cesse  ces  Goélands  en  les  capturant  sous  l'eau.  Ils 
suivent  aussi  les  bancs  de  morues, afin  de  s'emparer  des  petits  poissons 
que  ces  dernières  chassent  vers  la  surface  de  l'eau  pendant  l'hiver 
de  1820  à  1821,  je  séjournai  à  Drebakke  au  sud  de  l'île,  et  je  n'aper- 
çus pas  un  seul  L.  leucoptcrus,  parce  que  cet  oiseau  se  tient  ordinai- 
rement pendant  cette  saison  sur  la  côte  septentrionale,  tandis  que  le 
L.  glaucus  habite  la  côte  méridionale.  On  n'apercevait  que  quelques-uns 
de  ces  derniers  sur  la  plage  qui  était  presque  dégarnie  de  Mouettes  le 
1er  mars  1821  ;  mais  en  sortant  de  mon  habitation,  le  lendemain 
matin,  l'air  était  rempli  de  Goélands.  Etonné  de  cette  apparition 
subite,  je  m'approchai  et  je  reconnus  bientôt  les  L.  leucopterus,  qui 
étaient  arrivés  en  grand  nombre  pendant  la  nuit.  Les  Islandais  con- 
clurent de  l'apparition  de  ces  oiseaux,  que  les  morues  qu'ils  avaient 
attendues  avec  impatience  étaient  arrivées,  et  en  effet,  leur  prévision 
était  exacte  car  les  morues  se  trouvaient  en  grande  quantité...  (1).   » 

Le  cri  de  cet  oiseau  diffère  de  celui  de  l'espèce  précédente,  et  peut 
se  rendre  par  ik-knirrr,  et  ressemble  parfois  aussi  à  gi-ouw,  d'un  ton 
plus  bas  que  le  cri  du  L.  warinus. 

Reproduction.  —  Dali  a  rencontré  cette  espèce  en  grand  nombre 
dans  l'Alaska  où  elle  nichait  sur  les  plages  sablonneuses.  Le  nid  était 
une  simple  dépression  creusée  dans  le  sable;  la  femelle  dépose  ordi- 
nairement trois  œufs  du  5  au  10  juin.  D'après  L.  Brehm  et  Paessler, 
le  nid  serait  construit  sur  des  saillies  de  rochers,  parfois  a  leur  som- 
met, et  formé  d'herbes  marines,  de  tiges  et  de  feuilles  sèches,  et  l'in- 
térieur serait  garni  de  graminées.  Il  est  probable  que  ce  Goéland  ne 
niche  dans  le  sable  que  dans  les  endroits  où  il  n'y  a  pas  de  rochers.  Les 

(ij  Faber,   Prodrovius  dér  Islàndischen   Ornithologie,'^,  (^â^. 


—  883  — 

œufs  varient  du  vert  bleuâtre  pâle  au  brun  olivâtre  ;  ils  sont  marqués 
de  taches  arrondies  plus  ou  moins  nombreuses,  dont  les  inférieures 
sont  grises  et  les  supérieures  brunes,  et  les  taches  sont  souvent  plus 
nombreuses  au  gros  bout.  Ces  œufs  mesurent  environ  68  millim. 
sur  47. 

290.  —  Le  Goéland  à  manteau  noir 

LARUS  MARINUS,  Lin. 

(PI.  291.) 

Larus  NIGER,  VARius  et  SKUCA,  Briss.  Ornith.  VI,  pp.  158,  167  (1760). 

Larus  MARINUS  et  NiBvius,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  225  (1766). 

Larus  maculatus,  Bodd.  Tabl.  PI.  enl.  p.  16  (1783). 

Larus  maximus,  Leach.,  Sysl.  Cat.  Brit.  Mus.,  p.  40  (1816). 

Leucus  MARINUS,  Kaup,  Naturl.  Syst.^  pp.  86,  196  (1829). 

Larus  mulleri  et  fabricii,  Brehm,  /«s,  1830,  p.  993. 

DoMiNiCANUS  MARINUS,  Bruch,  Journ.  f.  Orn.  1853,  p.  100. 

Larus  nigripallus,  C.  F.  Dub.,  PI.  col.  Ois.  BeUj.  III,  [..  240(1860). 

Die  Mantel-Meve,  en  allemand. 

The  GREAT  BLACK.-BACKED  GuLL,  en  anglais. 

De  Mantelmeeuw,  eu  flamand. 

Taille  :  0™52  ;  ailes,  0^47,  à  0'"49. 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  D'un  blanc  pur,  y  compris  le 
croupion  et  la  queue  ;  manteau,  bas  du  dos,  scapulaires  et  couvertures  supé- 
rieures des  ailes  d'un  noir  d'ardoise  foncé  ;  les  plus  longues  scapulaires  ter- 
minées de  blanc;  rémiges  noires  avec  l'extrémité  blanche.  Bec  jaune  avec 
une  tache  rouge  vers  l'angle  de  la  mandibule  inférieure;  paupières  rougeâ- 
tres  ;  iris  jaune  ;  pattes  couleur  chair  pâle. 

En  hiver.  —  Occiput,  nuque  et  côtés  du  cou  avec  des  stries  longitudinales 
d'un  brun  clair  ;  le  reste  comme  eu  été. 

Jeune. —  Tête  et  cou  d'un  blanc  grisâtre  et  striés  de  brun  ;  dessus  du  corps 
et  ailes  d'un  blanc  nuancé  de  roussâtre  et  de  grisâtre  et  varié  de  taches 
brunes  irrégulières  de  diverses  formes;  rémiges  d'un  luuu  noirâtre;  front  vt 
parties  inférieures  du  corps  blancs;  côtés  de  la  poitrine  et  lianes  maniués  de 
taches  plus  ou  moins  apparentes  d'un  cendré  brunâtre  et  en  forme  de  lance  ou 
transversales;  queue  blanchâtre  marbrée  de  brun  noirâtre,  lu  couleur  sombre 
dominant  sur  les  rectrices  médianes  et,  à  l'extrémité  de  la  ([ueue,  ces  taches 
forment  une  ou  deux  bandes  subterminales  assez  régulières.  Bec  noirâtre, 
couleur  chair  livide  à  la  base  de  la  mandil)iile  inférieure;  iris  brun, mais  pas- 
sant bientôt  au  brun  jaunâtre  et  devenant  «le  pins  en  |)lns  pâle;  pattes  couleur 
chair  livide  teintée  de  bleuâtre.  Ce  plumage  se  moditic  eon^idérablement  a\t'C 


—  o84  — 


l'âge,  car  ce   n'est  qu'à  l'iiutomne  de  la  troisième  année  que  l'oiseau  prend 
son  plumage  d'adulte. 

Poussin.  — Parties  supérieures  d'un  cendré  pâle,  marbrésurle  dos  détaches 
brunes  difTuses  et  sur  la  tête  de  taches  noires  circonscrites,  mais  variables, 
dont  une  de  forme  carrée  sur  le  front;  ventre  d'un  blanc  pur;  abdomen  et 
})oitrine  d'un  cendré  rembruni  par  la  base  foncée  du  duvet  ;  mandibule  supé- 
rieure brune  à  la  base,  jaune  à  l'extrémité,  l'inférieure  brune  au  centre, 
jaune  aux  deux  extrémités;  pieds  brun  roussâtre.  (J.  Vian). 

Ij^f^^  —  L'aire  géographique  du  Goéland  à  manteau  noir  s'étend,  en 

Europe,  jusqu'en  Islande  où  il 
est  sédentaire  {Faber),  et  au  Cap 
Nord  [Collett),  et  à  l'Est  jusqu'à 
la  Petschora  (Seebohm)  ;  cet 
oiseau  niche  sur  presque  toutes 
les  côtes  au  delà  de  55°  de  1.  N., 
ainsi  que  sur  celles  del'Ecosseet 
îles  voisines,  de  l'Angleterre 
{Seebohm),  et  quelques  individus 
se  reproduisent  môme  sur  les  côtes  françaises  delà  Normandie  {Gadeau 
de  Kerville);  mais  il  ne  niche  pas  en  Irlande  et  dans  le  nord  de  l'Alle- 
magne, où  il  est  cependant  commun  du  mois  d'octobre  au  mois  de  mars 
(Reichenow).  Il  est  assez  rare  sur  les  côtes  de  Finlande  [Palmén)  et 
dans  le  golfe  de  Finlande  [Bilchner),  mais  abondant  sur  les  rives 
russes  de  la  Baltique  [B.  Meyer);  il  est  généralement  commun, en  hiver, 
sur  les  côtes  de  Hollande  {Schlégel)  et  de  Belgique,  et  après  les  tem- 
pêtes on  en  voit  souvent  sur  l'Escaut  jusqu'au  delà  de  la  ville  d'An- 
vers; à  cette  époque  de  l'année  il  est  également  abondant  sur  les  côtes 
occidentales  de  la  France,  mais  plus  au  Sud  on  ne  rencontre  généra- 
lement que  des  jeunes  isolés,  comme  c'est  le  cas  en  Espagne,  en 
Portugal  {Reyes),  en  Algérie  (L(9c/ze),dansla  Basse-Egypte  {de  Heuglin) 
et  aux  Canaries  {Bolle). 

Cette  espèce  ne  visite  que  très  accidentellement  V\id\iQ{Salvadori), 
la  Sardaigne  {Cara),  la  Sicile  {Doderlein)  et  la  Grèce  {Lindermayer), 
mais  elle  ne  parait  pas  avoir  été  observée  en  Turquie  {Robson).  A  la 
suite  de  grandes  tempêtes,  il  arrive  parfois  que  des  sujets,  chassés 
par  le  vent,  se  montrent  bien  loin  de  la  mer;  on  en  a  vu  ainsi  jus- 
qu'au centre  de  l'Allemagne  {Naumann),  en  Volo^nQ  {Taczanoioski), 
sur  le  Danube  (Tschusi-Sc/wiidhofen),  en  Tyrol  {Althammer),  en 
Suisse  [Meisner  et  Schinz),  etc. 


~  585  — 

Ce  Goéland  est  rare  dans  le  nord  du  Groenland  {Reinhardt)  où  il 
ne  dépasse  pas  le  68",  mais  il  est  commun  au  Labrador  et  sur  les 
grands  lacs  de  l'Amérique  orientale,  et  hiverne  sur  les  côtes  améri- 
caines de  l'Atlantique  jusqu'à  l'île  Long  {Coues)  et  la  ¥\oT\àe{Baird)\ 
il  se  montre  accidentellement  aux  îles  Bermudes  {Reid).  Cette 
espèce  est  remplacée  dans  l'Alaska  et  sur  les  côtes  septentrionales  du 
Pacifique,  par  le  L.  schistisagus,  que  certains  auteurs  ont  confondu 
avec  le  L.  marinus  ;  mais,  d'après  M.  Saunders,  ce  dernier  existerait 
cependant  au  Japon, 

Mœurs.  —  Après  la  reproduction,  les  Goélands  à  manteau  noir 
mènent  une  vie  errante  et  se  dispersent  sur  d'autres  côtes  de  plus  en 
plus  méridionales, à  mesure  que  le  froid  s'accentue, sans  avoir  d'époque 
bien  fixe  pour  la  migration.  Les  tempêtes  persistantes  et  les  migra- 
tions en  bandes  de  certains  poissons,  sont  également  des  causes  de 
déplacement  pour  ces  oiseaux,  qui  se  montrent  alors  souvent  dans 
des  lieux  où  on  ne  les  voit  pas  d'habitude.  C'est  ou  automne  qu'ils 
font  généralement  leur  apparition  sur  nos  plages,  et  les  tempêtes  les 
jettent  parfois  sur  les  eaux  de  l'intérieur,  mais  très  rarement  sur  la 
Meuse.  Les  jeunes  qui  ne  sont  pas  encore  en  âge  de  se  reproduire, 
errent  isolément  ou  deux  à  quatre  ensemble,  et  on  les  rencontre  un 
peu  sur  toutes  les  côtes,  même  sur  la  côte  de  Flandre,  et  cela  à  toutes 
les  époques  de  l'année  mais  surtout  après  les  tempêtes.  Ceux  qui  ont 
passé  l'été  dans  le  Nord,  voyagent  par  couples  ou  par  troupes  de  cinq 
à  dix  sujets,  rarement  en  bandes  plus  nombreuses. 

Ce  Goéland  est  un  vrai  oiseau  de  mer,  car  il  ne  la  quitte  presque 
jamais  volontairement.  C'est  l'une  des  espèces  les  moins  turbulentes 
et  les  plus  calmes,  ce  qui  ne  l'empêche  pas  d'être  très  agile  et  actif 
malgré  son  tempérament  un  peu  flegmatique.  Il  marche  avec  facilité  et 
dignité,  barbote  volontiers  dans  l'eau,  nage  beaucoup  et  avec  plaisir 
même  quand  la  mer  est  agitée,  et  dort  souvent  sur  l'eau  en  se  laissant 
ballotter  par  les  vagues.  En  volant,  il  déploie  largement  les  ailes, 
mais  les  mouvements  de  celles-ci  sont  lents  ;  il  piano  on  tourbillon- 
nant, vole  souvent  contre  le  vent,  et  quand  il  aperçoit  une  proie,  il 
fond  sur  elle  d'une  hauteur  assez  grande  et  s'enfonce  dans  les  flots 
pour  la  saisir.  Il  est  plus  courageux  que  la  plupart  de  ses  congénères, 
mais  il  est  aussi  plus  fort,  plus  pillard  et  plus  vorace.  II  se  repose 
d'habitude  sur  des  bancs  do  sable  ou  sur  des  rochers,  mais  se  montre 
toujours  prudent  et  méfiant  et  ne  se  laisse  pas  facilement  approcher 
à  portée  de  fusil,  aussi  est-il  considéré  comme  l'un  des  plus  farouches 

Tome  II.  —  1893.  74 


-  886  — 

du  genre;  près  du  nid,  cependant,  il  défend  sa  couvée  avec  courage 
et  hardiesse. 

Le  cri  de  cet  oiseau  ressemble  à  celui  des  Goélands  glauque, 
argenté  et  à  pieds  jaunes,  dont  les  cris  ne  différent  que  par  leur  ton 
plus  ou  moins  élevé;  celui  de  l'espèce  qui  nous  occupe  est  profond  et 
rauque  et  peut  se  rendre  par  ag-ag-ag-ag-ag  ;  la  frayeur  ou  l'excita- 
tation  lui  fait  jeter  un  cri  sonore  ressemblant  à  kjauvis  ou  kjan. 

Cet  oiseau  se  nourrit  de  poissons,  de  cadavres  de  divers  animaux, 
de  charognes,  de  petits  mammifères,  de  crustacés,  de  mollusques  et 
autres  animaux  marins;  il  pille  les  nids  de  divers  oiseaux  aquatiques 
dont  il  dévore  les  œufs  et  les  poussins,  et  enlève  même  aux  autres 
Mouettes  le  produit  de  leur  pêche,  bref,  toute  matière  animale  lui  con- 
vient. Dans  la  pêche  il  ne  se  monire  pas  très  habile,  mais  il  se  con- 
tente volontiers  des  poissons  malades  ou  morts  qui-4lottent  à  la  sur- 
face de  l'eau.  Ces  Goélands  rendent  donc  des  services  en  dévorant  les 
cadavres  et  les  charognes  que  les  Ilots  rejeteraient  près  des  côtes, 
où  leur  putréfaction  pourrait  engendrer  des  maladies. 

Reproduction.  —  Ce  Goéland  niche  principalement  dans  les  con- 
trées du  Nord,  sur  les  falaises  et  les  rochers,  et  souvent  dans  la  société 
d'autres  Goélands,  mais  sans  se  mêler  à  eux;  les  nids  occupent  souvent 
le  sommet  herbeux  des  rochers  et  se  trouvent  parfois  assez  loin  de  la 
mer;  les  couples  de  son  espèce  qui  nichent  ensemble  ne  sont  jamais 
bien  nombreux.  Le  nid  est  grand  et  formé  d'un  mélange  d'herbes 
marines,  de  terre  et  de  cochléarias;  le  centre  est  plus  ou  moins  garni 
de  graminées  sèches.  La  femelle  dépose  au  commencement  de  mai 
deux  ou  trois  œufs,  rarement  quatre.  Ceux-ci  sont  d'un  gris  jaunâtre, 
olivâtre  ou  roussâtre,  parsemés  de  points  et  de  taches  d'un  gris  vio- 
lacé et  d'un  brun  plus  ou  moins  foncé  ;  ils  mesurent  en  moyenne 
79  millim.  sur  54. 

A.  Brehm  raconte  qu'il  a  rencontré,  lors  de  son  voyage  en 
Norwège,  une  île  à  Porsangerfjord,  qui  était  habitée  par  plusieurs 
centaines  de  Goélands  à  manteau  noir  et  de  Goélands  argentés.  «Les 
nids  se  trouvaient  sur  les  terres  marécageuses,  pas  trop  rapprochés, 
mais  rarement  éloignés  les  uns  des  autres  de  plus  de  cinquante  pas  ; 
les  nids  de  l'une  des  espèces  étant  au  milieu  des  nids  de  l'autre, 
comme  si  toute  la  colonie  eût  été  de  la  même  espèce.  Quelques-uns 
de  ces  nids  étaient  faits  avec  beaucoup  de  soin  et  garnis  de  petites 
nattes,  tandis  que  d'autres  étaient  construits  avec  plus  de  négligence. . . 
Les  œufs  étaient  gardés  avec  une  inquiète  sollicitude  par  les  deux 


—  o87  — 

parents.  Des  clameurs  inouïes  s'élevèrent  au  moment  où  je  pénétrai 
dans  l'île.  Ceux  des  oiseaux  qui  étaient  à  ce  momenl  occupés  à  couver 
ne  bougèrent  pas,  et  me  laissèrent  approcher  à  quelques  pas,  comme 
s'ils  avaient  espéré  que  ceux  qui  étaient  chargés  de  la  garde  auraient 
le  pouvoir  de  me  faire  reculer.  D'autres  d'entre  eux  s'étaient  levés 
avec  des  cris  perçants  et  m'environnèrent  de  très  près,  fondant  sans 
cesse  sur  moi,  puis  s'élevant  de  nouveau  pour  se  livrer  à  une  nouvelle 
attaque.  A  plusieurs  reprises,  ils  tourbillonnèrent  de  si  près  autour 
de  ma  tête  qu'ils  me  touchèrent  du  bout  de  leurs  ailes,  sans  avoir 
l'audace  cependant  de  m'attaquer  de  leur  bec  acéré.  Je  trouvais  dans 
plusieurs  nids  des  petits,  qui,  à  mon  approche,  cherchèrent  à  se 
cacher  au  milieu  des  nattes  et  des  brins  d'herbes  et  qui  y  parvinrent 
parfaitement.   > 

Mâle  et  femelle  couvent  à  tour  de  rôle  pendant  quatre  semaines, 
et  font  ensemble  l'éducation  des  jeunes  ;  ils  les  nourrissent  d'œufs 
d'oiseaux,  de  poussins  de  diverses  espèces  aquatiques,  de  poissons  et 
de  petits  animaux  marins.  A  la  mi-juin  les  jeunes  ont  atteint  la  moitié 
de  leur  taille,  mais  ils  ont  encore  leur  duvet;  ils  ne  sont  complète- 
ment emplumés  que  vers  la  fin  de  juillet  et  ne  savent  voler  que  dans 
la  première  quinzaine  d'août.  Quand  ils  ne  sont  pas  troublés,  ils 
séjournent  dans  le  nid  jusqu'à  l'apparition  des  plumes,  mais  s'ils  ont 
été  chassés,  ils  savent  fort  bien,  en  cas  de  danger,  se  cacher  derrière 
des  monticules  ou  derrière  des  pierres. 

291.  —  Le  Goéland  à  pieds  jaunes. 
LARUS  FUSCUS,  Un. 

(PI.  292.) 

Larus  griseus,  Briss.  Omith.  VI,  p   162  (17()0). 

Larus  kuscus,  Lin.  5(/s'.  itit.  I,  \i.  223(17(30). 

Larus  flavipes,  Mey.  Taschenb.  Vôij.  DeutschL.  II,  p.  460  (1810). 

Larus  cinereus,  Leach,5//s<.  Cat.  ^fam.  etc.  Br.  Mus.  p.  401  (1816). 

LEUcas  KUscus,  Kaup,  Natàrl.  Syst.  p.  86(1829;. 

Laroiues  .melanotos,  harent.orlim  et  FU^5(;us,  HriTi.  his,  1830,  p.  003. 

DoMiMCANUS  KUSCUS,  Bruch,  Jt»wr// .  f  Or/t.  1853,  j».  100. 

Laroides  kuscescens,  NKiRiDORSALis  et  ASSIM1L1S,  Hrm.  N'iumainii't,  1855,  p.  294. 

Clui>eil.\rus  FUSCUS,  Bonap.  Consp.  av.  Il,  p.  220  (1857). 

Die  Herinqs-Meve,  ea  allomand. 

TiiE  Lesser  hlak.-»ai'kkd  Gull,  en  anglais. 

I)K  Ki.EiNK  Mantei.meeuw,  en  llamaïui. 

Taille-   U"'10;  ailes  0,41,  doigt  mt'dian,  ongh^  ('(uniM'is,  O.O.M. 


Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  Manteau  et  ailes  d'un  noir 
ardoisé;  tête,  cou,  croupion,  queue  et  parties  inférieures  d'un  blanc  pur; 
scapulaires  et  rémiges  secondaires  terminées  de  blanc  ;  rémiges  primaires 
noires,  la  première  avec  une  grande  tache  blanche  près  de  son  extrémité» 
les  autres  terminées  par  un  petit  liséré  blanchâtre.  Bec  jaune  avec  l'angle 
inférieur  rouge  ;  tour  de  l'œil  orange  ;  iris  jaune  ;   pattes  également  jaunes. 

En  hiver.  —  A  cette  saison  l'oiseau  offre  des  stries  longitudinales  brunâtres 
sur  la  tête  et  le  cou. 

Jeune.  —  Variable  suivant  l'âge  ;  tête  et  dessus  du  cou  d'un  brun  cendré 
varié  de  blanc  ;  gorge  et  devant  du  cou  blancs  avec  des  stries  brunâtres  ;  par- 
ties supérieures  brunes  avec  les  plumes  bordées  de  blanchâtre  ou  de  roussâtre  ; 
croupion  et  sus-caudales  blancs  avec  des  barres  brunes;  rémiges  noirâtres  ; 
queue  noire,  avec  des  raies  blarches  irrégulières  et  transversales  à  la  base  et 
le  bord  terminal  )lanc,  sur  .es  rectrices  latérales  le  blanc  domine  ;  parties 
inférieures  d'un  cendré  blanchâtre  avec  des  taches  brunes.  Bec  noir;  iris 
brun  ;  pattes  d'un  blanc  rougeâtre,  mais  toutes  ces  partîfes  passent  insensi- 
blement au  jaune.  Ce  n  est  qu  à  l'automne  de  la  troisième  année  que  le  jeune 
prend  le  plumage  de  l'adulte. 

Poussin.  —  Tête  cendrée,  variée  de  taches  et  de  traits  irréguliers  noirs, 
dont  plusieurs  autour  des  yeux  et  un  très  étroit  sur  le  front  ;  parties  supé- 
rieures d'un  gris  faiblement  lavé  de  roux  et  marqué  de  taches  brunes  un  peu 
diffuses;  gorge  blanchâtre;  les  autres  parties  inférieures  de  teinte  fauve, 
rembrunie  à  la  poitrine  par  la  base  foncée  du  duvet  et  au  ventre  par  un  semis 
de  petites  mèches  brunes  ;  bec  noirâtre  sur  sa  moitié  basale,  jaune  au  delà  ; 
pieds  d'un  brun  roux.  (/.  Vian). 

Hab.  —  Ce  Goéland  est  plus  ou  moins  commun  sur  toutes  les  côtes 

septentrionales  et  occidentales 
de  l'Europe,  jusqu'au  cap  Nord 
{Collett)  et  Arkhangel  prés  de  la 
mer  Blanche  à  l'Est  (Saunders), 
mais  on  ne  le  voit  pas  en  Islande. 
Il  est  sédentaire  aux  îles  Bri- 
tanniques {Seebohm)  et  plus  ou 
mollis  sur  toutes  les  côtes  de 
l'Europe  occidentale  et  méridio- 
nale, même  sur  celles  de  l'Italie  {Giglioli),  mais  il  est  rare  en  Grèce 
{Lindermayer).  Il  est  commun  près  des  plages  belges,  surtout  après 
les  tempêtes  et  à  l'époque  du  passage  des  sardines,  mais  il  ne  paraît 
pas  se  reproduire  chez  nous,  bien  qu'on  en  voie  à  toutes  les  époques, 
même  en  juillet,  mais  il  est  rare  sur  l'Escaut.  Cet  oiseau  visite  sou- 


—  o89  — 

vent  aussi  les  eaux  de  l'intérieur,  c'est  ainsi  qu'on  voit  souvent  des 
jeunes  sur  les  lacs  de  la  Suisse  [Meisner  et  Schinz),  dans  l'inté- 
rieur de  l'Allemagne  {Naumann),  en  Bohême,  en  Auirkh.e  {Tschusi- 
Schmidhofen)  et  en  Pologne  où  il  est  même  parfois  commun,  surtout 
en  mai  [Taczanoioski).  11  est  également  commun  dans  la  Russie 
méridionale  {de  Nordmann),  dans  la  Dobrodja  et  à  Constantinople 
[Alléon). 

En  hiver,  on  voit  ce  Goéland  en  Asie  Mineure,  en  Palestine  [Tris- 
tram)  et  il  est  peut-être  sédentaire  dans  la  Basse-Egypte  et  sur  les 
côtes  de  la  mer  Rouge  jusqu'au  golfe  d'Aden  {de  Ileuglin)  et  la  région 
du  Nil  Bleu  et  ^\si\\c{Finsch  et  Hartlaub);  il  niche  en  Algérie  {Loche), 
à  Madère  et  aux  Canaries  {Godman),  et  descend  au  sud  jusqu'au 
Sénégal  {Saunders). 

L'oiseau  que  Jerdon  s'est  procure  dans  le  Decan  est  probablement 
un  L.  afjinis  et  non  un  jeune  L.  fuscus.  M.  Dresser  dit  que  Dybowski 
a  trouvé  ce  dernier  en  Daourie,  mais  Taczanowski  ne  le  mentionne 
pas  dans  sa  Faune  de  la  Sibérie  orientale;  quant  aux  sujets  recueillis 
par  M.  Swinhoe  sur  les  côtes  de  Chine,  il  est  démontré  que  c'étaient 
des  L.  crassirostris,  aussi  le  père  David  n'a  pas  mentionné  le  L.  fus- 
cus dans  son  ouvrage  sur  les  oiseaux  de  la  Chine.  On  a  également 
signalé  des  captures  de  Goélands  à  pieds  jaunes  sur  les  côtes  améri- 
caines, mais  le  D""  Coues  les  considère  comme  extrêmement  dou- 
teuses. 

Mœurs.  —  C'est  également  un  oiseau  marin  aimant  la  pleine  mer, 
mais  il  se  rend  aussi  sur  les  eaux  intérieures.  Dans  la  Russie  méri- 
dionale, de  Nordmann  a  constaté  que  cet  oiseau  fréquente  les  abattoirs 
des  villes  et  qu'il  se  jette,  avec  les  chiens  et  quelquefois  avec  des 
Mouettes  cendrées,  sur  la  tripaille  et  les  restes  de  boucherie.  Il 
n'émigre  réellement  que  des  contrées  les  plus  septentrionales,  soil 
en  troupe,  soit  isolément,  et  il  suit  alors  souvent  les  phoques  et  les 
squales  qui  lui  amènent  à  la  surface  de  l'eau  une  foule  de  petits 
poissons. 

Par  ses  mœurs  et  ses  allures,  ce  Goéland  ne  ditïere  guère  des 
précédents  :  il  aime  à  se  reposer  sur  le  rivage,  barbotte  volontiers 
dans  l'eau  et  fait  même  des  excursions  dans  les  prés,  les  pâturages 
et  les  chami)S.  Il  vole  et  nag»;  avec  aisance,  se  montre  prudent,  mais 
il  est  moins  farouche  que  bien  d'autres,  car  en  volant  il  s'a[)proche 
parfois  témérairement  de  l'iiomme.  Il  est  plus  vif  et  plus  remuant  que 
les  Goélands  à  manteau  noir  et  argcntt's,  mais  se  montre  tout  aussi 


—  590  — 

sociable.  Sa  voix  ressemble  à  celle  de  l'espèce  précédente,  mais  les 
cris  sont  plus  précipités  et  dans  un  ton  plus  élevé. 

Cet  oiseau  se  nourrit  de  divers  animaux  marins  ou  terrestres  et  de 
charognes  ;  mais  le  poisson  forme  toujours  la  base  de  son  alimentation 
et  il  fait  surtout  une  chasse  active  aux  harengs  et  aux  sardines;  quand 
ces  poissons  sont  abondants,  il  en  prend  tant  que  son  estomac  et  son 
œsophage  en  peuvent  contenir.  Dans  les  prés  et  les  champs  il  fait  la 
chasse  aux  sauterelles,  aux  libellules  et  autres  insectes,  aux  souris, 
aux  campagnols,  etc. 

Reproduction.  —  Le  Goéland  à  pieds  jaunes  niche  en  société  et  de 
la  même  façon  que  l'espèce  précédente  ;  son  nid  est  formé  d'herbes 
marines  et  terrestres,  et  il  est  parfois  aussi  grand  que  celui  du 
Goéland  à  manteau  noir.  La  femelle  pond  deux  ou  trois  œufs  au 
commencement  de  juin.  Ceux-ci  sont  d'un  brun  plus  ou  moins  foncé 
ou  passant  au  verdâtre  et  parsemés  de  taches  profondes  d'un  gris 
brun  et  de  taches  superficielles  d'un  brun  rouge  ou  noirâtres.  Ils 
mesurent  environ  &Q  millim.  sur  48.  Les  parents  couvent  et  élèvent 
leurs  petits  en  commun  et  témoignent  la  plus  grande  sollicitude  à 
leur  progéniture. 


292.  —  Le  Goéland  argenté 
LARUS  ARGENTATUS,  Brûnn. 

(PI.  293.) 

Larus  cinereus,  Briss.  Omith.  VI,  p.  160  (1760). 
Larus  ARGENTATUS,  Briiii.  Om.  bor.  p.  45  (1764) . 
Larus  fuscus,  Penn.  (nec  Lin.),  Brit.  Zool.  II.  p.  131  (1768). 
Larus  argentatus,  Gm.  Syst.  nat.  I,  p.  600  (1788). 
Larus  marinus,  var.  B.  Lath.  Ind.  Orn.  II,  p.  814  (1790). 
Larus  glaucus,  Retz,  (nec  Briin.),   Faun.  Suec.  I,  p.  156  (1800). 
Larus  argentatoides,  Brm.  Beitr.  Yogelk.  III.  p.  791  (1822). 
Larus  argenteus,  Macgil.  Mem.  Wern.  soc.  V,  p.  264  (1824). 

LaROIDES  major,  ARGENTATUS,  ARGENTEUS,  ARGENTATOIDES,  ARGENTACEUS  et  AMERI- 

CANUS,  Brm.  /sis,  1830,  p.  993. 
Glaucus  argentatus  et  argentatoidks,  Bruch,  Journ.  f.  Orn.  1853,  p.  101. 
Larus  marinus,  Gundl.  (nec  Lin.)  Journ.  f.  Orn.  1857,  p.  236. 
Larus  smithsonianus,  Coues,  Pr.  Phil.  acad.  1862,  p.  296. 
Larus  argentatus  var.  smithsonianus,  Coues,  C/<ecA-/is<,  1874,  p.  103. 
Die  Silber-Meve,  en  allemand. 
The  HERRiNG-GuLL,en  anglais. 
De  Zilvïrmeeuw,  en  flamand. 


—  S91  — 


Var.  Cachinnans. 


Larus  cachinnans,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  II,  p.  318  fl811). 

Larus  arhentatus,  Bonap.  le.  F.  Ital.  Uccelli,  Introd.  (1833-41),  et  au?,t.  plar. 

Glaucus  michahellesii,  leucoph/eus  (Licht.)  et  borealis  (Brandt),  Bruch,  Journ.  f. 
Orn.  1853,  p.  101. 

Laroides  michahellesii,  cachinnans  et  BousALis,  Bruch,  Journ.  f.  Om.  1855, 
p.  282. 

Larus  epargyrus  et  lkucoph.îîus,  Licht.,  Nomencl.  av.  Mus.  Berol.  p.  99  (1854). 

Laroides  leucoph^us,  Bp.  yaumfi7inia,  1854,  p.  212. 

Larus  fuscescbns,  Sclat.  Proc.  Zool.  Soc.  1867,  315. 

Larus  argentatus  cachinnans,  Seeb.  Brii.  B.  III,  p.  327  (1885). 

Taille  :  0"^51  ;  ailes,  0M7. 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  D'un  blanc  pur  ;  manteau  et 
ailes  d'un  gris  bleuâtre,  les  scapulaires  et  les  rémiges  secondaires  terminées 
de  blanc  ;  rémiges  primaires  d'un  gris  bleuâtre  à  la  base,  puis  noires  et  ter- 
minées par  un  large  bord  blanc.  Bec  jaune  avec  l'angle  inférieur  rouge;  tour 
de  l'œil  orange;  iris  jaune;  pattes  couleur  chair  livide. 

En  hiver.  —  Après  la  mue  d'automne,  l'oiseau  offre  des  stries  cendrées  à 
la  tête,  sur  la  nuque  et  à  la  poitrine. 

Jeune.  —  Tête  et  cou  d'un  blanc  sale  avec  des  tach(!S  allongées  d'un  cendré 
brunâtre;  gorge  blanche  ;  parties  supérieures  et  ailes  brunes,  les  plumes 
bordées  de  blanc  lavé  de  roussâtre  ;  rémiges  brunes,  les  secondaires  avec  un 
petit  liséré  blanc  à  leur  extrémité;  queue  brune  avec  des  barres  et  des  mar- 
brures irrégulières  blanches  à  la  base  et  un  bord  blanc  à  l'extrémité,  mais  le 
blanc  domine  sur  les  rectrices  latérales  ;  dessous  du  corps  blanchâtre  avec 
des  taches  d'un  cendré  brunâtre,  surtout  à  la  poitrine  et  sur  les  flancs.  Bec 
noir,  plus  ou  moins  rougeâtre  à  la  base  ;  iris  brun,  pâlissant  avec  l'âge  ; 
pattes  livides.  —  Ce  plumage  se  modifie  chaque  année,  mais  ce  n'est  qu'à 
l'automne  de  la  troisième  que  l'oiseau  prend  le  plumage  de  l'adulte. 

Le  jeune  du  Goéland  argenté  est  facile  à  confondre  avec  celui  du  L.  mari- 
nus  et  du  L.  fuseus;  ce  dernier  a  le  doigt  médian  plus  court;  le  L.  marinus  a 
le  bec  plus  haut  à  la  base  des  narines,  où  il  mesure  20  à  21  millimètres,  tan- 
dis que  celui  du  L.  argentatus  ne  mesure  à  la  même  place  que  17  millimètres 
environ.  (Voy.  le  tableau  analytique  des  espèces,  p.  57.').) 

Poussin.  —  Diffère  de  celui  du  Goéland  à  manteau  noir  par  son  bec  moins 
fort  et  par  la  présence  d'une  tache  noire  longitudinale  sur  le  front  ;  sou  duvet 
est  aussi  un  peu  plus  barbelé  et  moins  filamenteux. 

Var.  Cachinnans.  —  Diffère  du  type  jiar  la  teinte  du  manteau  qui  est  un 
])eu  plus  sombre,  et  par  la  couleur  des  pattes  qui  est  jaune  ;  le  tour  île  l'œil 
est  rouge. 


Î592  - 


jjf^l,^  —  I,a  Mouette  argentée  est  plus  ou  moins  sédentaire  sur  les 

côtes  de  la  Scandinavie  jusqu'à 
la  frontière  russe  [Collett,  Nils- 
son),  dans  le  golfe  de  Finlande 
et  le  delta  de  la  'Nevsi{Bûchner), 
niche  même  sur  les  bancs  de 
sable  du  Volga,  du  Kama  et  des 
lacs  voisins  [Bogdanow),  ainsi 
que  sur  toutes  les  côtes  des  mers 
Baltique  et  du  ^ovdi[Reichenow), 
aux  îles  Féroé  et  aux  îles  Britanniques  {Seebohm).  Elle  est  plus  ou 
moins  sédentaire  et  de  passage  sur  les  côtes  de  Belgique,  et  se  montre 
parfois  sur  l'Escaut  et  même  sur  la  Meuse  ;  il  en  est  de  même  en 
Normandie  {Gacleau  de  Kerville)  et  elle  se  reproduit  dans  toutes  les 
hautes  falaises  de  Dieppe,  sur  les  côtes  de  Bretagne,  aux  îles  Auri- 
gny.  Jersey,  Ouessant,  Belle-Ile,  etc.  [Degl.  et  Gerbe),  ainsi  que  sur 
les  côtes  de  l'Andalousie  {Seoane)  et  du  Portugal  {du  Bocage).  En 
hiver,  elle  est  commune  dans  le  détroit  de  Gibraltar  {Saunders},  en 
Algérie  {Loche),  et  se  montre  parfois  sur  les  côtes  occidentales  de 
l'Afrique,  où  on  l'a  observée  à  Angola  et  au  Benguela  jusqu'au 
15°  1.  S.  {Barhoza  du  Bocage).  Elle  visite  également  les  îles  Açores 
(où  elle  niche),  Madère  et  Canaries  {Godman). 

En  Amérique,  cette  espèce  habite  toutes  les  côtes  jusqu'au  cercle 
polaire;  elle  est  assez  répandue  dans  l'Alaska  {Dali,  Bannister)  et 
descend  au  Sud  jusqu'au  Mexique;  du  côté  de  l'Atlantique,  on  l'ob- 
serve du  Labrador  au  Texas,  et  en  hiver  elle  visite  l'île  de  Cuba  et 
les  îles  Bermudes  {Saunders).  Elle  est  rare  au  Groenland  {Rein- 
hardt). 

La  var.  Cachinnans,  souvent  confondue  avec  le  type  argentatus, 
remplace  ce  dernier  dans  la  Méditerranée,  dans  les  mers  Noire  et 
Caspienne,  sur  les  lacs  d'Aral  et  Baïkal,  dans  la  vallée  de  l'Amour 
{Seebohm)  et  sur  les  côtes  de  la  Sibérie  orientale  {Taczanowskï)',  elle 
visite,  en  hiver,  les  côtes  de  la  mer  Rouge  {de  Heuglin),de  la  Perse,  de 
l'Inde, de  la  Chine  et  du  Japon  {Saunders);  elle  se  montre  également 
dans  l'Alaska  {Nelson).  Le  Havre  est  le  point  le  plus  septentrional  de 
ses  pérégrinations  sur  les  côtes  européennes  {Saunders)  ;  elle  est  com- 
mune à  Hendaye  {Olphe-Galliard). 

Mœurs.  —  Le  Goéland  argenté  est,  comme  les  précédents,  un 
oiseau  marin,  mais  il  remonte  davantage  les  fleuves  et  se  montre  plus 


—  S93  - 

fréquemment  sur  les  eaux  intérieures,  mais  sans  y  séjourner  long- 
temps; loin  de  la  mer,  on  ne  rencontre  pourtant  que  des  sujets 
égarés  et  surtout  des  jeunes.  C'est  aussi  un  oiseau  plutôt  errant  que 
migrateur,  mais  il  quitte  cependant  les  régions  septentrionales  pour 
passer  l'hiver  sur  des  eaux  moins  froides,  quoiqu'il  soit  déjà  séden- 
taire à  partir  du  nord  de  l'Allemagne. 

C'est  l'un  des  Goélands  les  plus  communs  dé  l'Europe,  aussi  le 
voit-on  généralement  en  grand  nombre,  surtout  dans  les  endroits  où 
le  rivage  est  sablonneux  ou  pierreux.  A  l'intérieur  des  contrées,  il 
recherche  les  grandes  eaux  libres,  les  fleuves  et  les  lacs  Ses  mœurs 
ressemblent  à  celles  de  ses  congénères  ;  il  est  très  sociable,  et,  là 
oîi  il  y  a  abondance  de  nourriture,  les  Goélands  argentés  se  rassem- 
blent par  centaines  et  vivent  même  en  bonne  intelligence  avec  d'autres 
Mouettes. 

C'est  un  oiseau  intelligent,  méfiant  et  assez  bruyant  près  du  nid  ; 
son  cri  est  sonore  et  ressemble  à  kjau  ou  kian  ;  en  volant  il  fait  enten- 
dre une  sorte  de  rire  rauque  ressemblant  à  ha-ha-ha  ou  han-han-han. 
Sa  voracité  est  très  grande  et  il  vit  beaucoup  de  rapine  ;  il  se  nourrit, 
comme  les  précédents,  de  poissons,  de  petits  mammifères,  de  poussins 
et  d'œufs  d'oiseaux,  de  crustacés,  d'annélides  et  d'insectes,  plus  rare- 
ment de  cadavres  d'animaux. 

Reproduction  —  Ce  Goéland  niche  en  colonies  plus  ou  moins  nom- 
breuses et  composées  parfois  de  plusieurs  milliers  de  couples;  les  nids 
sont  établis  dans  les  hautes  falaises, dans  les  anfractuosités  de  rochers 
coupés  souvent  à  pic  et  inabordables,  ou  au  pied  même  des  rochers 
et  sur  le  sable  ;  il  arrive  parfois  que  des  nids  placés  sur  la  plage  trop 
près  de  l'eau  sont  enlevés  par  les  hautes  marées.  La  construction  des 
nids  commence  vers  la  mi-mai  ;  ceux-ci  sont  formés  de  matériaux 
divers  plus  ou  moins  abondants,  mais  il  arrive  aussi  que  les  œufs 
reposent  dans  une  simple  fossette  creusée  dans  le  sable.  Les  nids  sont 
ordinairement  formés  d'un  amas  de  fucus,  do  zostères  et  autres  plan- 
tes marines,  et  l'intérieur  est  garni  de  quelques  maigres  végétaux 
terrestres.  Audubon  a  vu,  en  1823,  sur  une  île  delà  baie  de  Fundy, 
des  Goélands  argentés  qui  avaient  fait  leur  nid  au  sommet  d'un  arbre, 
probablement  parce  qu'ils  avai<Mit  été  dérangés  sur  le  sol;  la  même 
observation  a  été  faite  vingt  ans  plus  tard  par  Rrewer. 

La  ponte  est  de  deux  ou  trois  œufs  d'un  vert  brunâtre  plus  ou  moins 
foncé  et  mar([ués  de  taches  profondes  d'un  gris  cendré  et  de  laciies 
superficielles  brunes  assez  grosses,  arrondies  ou  sans  forme  distincte 
TOM.  II.  —  1893.  75 


—  594  — 

mais  assez  réguliéreinent  réparties;  ils  mesurent  environ  70  millim. 
sur  50.  Ives  parents,  qui  semblent  fort  attachés  l'un  à  l'autre,  couvent 
à  tour  de  rôle  pendant  quatre  semaines  et  témoignent  beaucoup  d'af- 
fection à  leurs  poussins.  Ceux-ci  séjournent  souvent  une  couple  de 
jours  dans  le  nid  et  même  davantage,  mais  il  arrive  aussi  qu'ils  le 
quittent  aussitôt  qu'ils  savent  marcher  ;  ils  se  couchent  alors  derrière 
des  accidents  de  terrain  ou  entre  des  pierres.  Ce  n'est  qu'à  l'âge  d'un 
mois  qu'il  commencent  à  voler  et  qu'ils  peuvent  suivre  leurs  parents. 
Suivant  Naumann,  on  a  remarqué  que  les  Mouettes  argentées  ne 
quittent  pas  toujours  les  lieux  quand  on  leur  enlève  les  oeufs,  mais 
qu'elles  repondent  dans  le  même  nid  ;  si  cependant  une  autre  femelle 
en  a  pris  possession,  les  œufs  sont  déposés  dans  le  premier  nid  vacant. 
«  Il  a  également  été  constaté,  continue  Naumann,  que  quand  les 
œufs  ont  été  enlevés  à  plusieurs  reprises,  il  se  produit  un  tel  désordre 
dans  la  colonie,  que  beaucoup  de  couples  changent  de  nid,  couvent 
parfois  des  œufs  pondus  par  d'autres,  et  il  arrive  même  que  deux 
femelles  pondent  dans  le  même  nid.  D'autres  couples  abandonnent  des 
lieux  aussi  peu  hospitaliers  et  vont  nicher  ailleurs.  » 


293.  —  La  Mouette  cendrée. 
.    LARUS  CANUS,  Lin. 

(PI.  294.) 

Larus  CANUS,  Lin.,  Sijst.  nat..,  I,  p.  224  (1766). 

Larus  cinereus,  Scop.,  Ann.  I.  Hist.  nat.,  p.  80  (1769). 

Larus  hybernus,  Tunst.,  Orn.  Brit.,  p.  3  (1771). 

Larus  procellosus,  Bechst.,  Orn.  Taschenb  ,  p.  373  (1803) 

Larus  cyanorynchus.  Mey.,  Taschenb.  d.  Deutsch.  Vôgelh.,  Il,  p.  480  (1810). 

Laroides  procellosus  et  L.  canescens,  Brm.  Isii,  1830,  p.  994. 

Glaucus  CANUS  et  G.  lacrymosus  (Licht.),  Bruch,  Journ.  f.  Orn.,  1853,  p.  102. 

Gavina  CANUS,  Bruch,  Journ.  f.  Orn.,  1855,  p.  284. 

Larus  DELA WARENSis,  Coues  (nec  Ord.),  Pr.  Ac.  N.  Se.  Phil.,  1861,  p.  246. 

Larus  audouini,  Tristr.  (nec  Payr.), /6îs,  1868,  p.  330. 

Die  Sturm-Meve,  en  allemand. 

The  common  Gull,  en  anglais. 

De  kleine  ZEEMEEUw,en  flamand. 

Var.  Major. 

Larus  niveus,  Pall.  (nec  Bodd.),  Zoogr.  Rosso-As.,  Il,  p.  320,  pi.  86  (1811). 
Larus  canus,  var.  Ma.ior,  Middend.  Sib.  Reise,  II,  p.  243  (1853). 
Larus  HEiNEi,  Uomo.y..,  Ncmmannia,  1853,  p.  129. 


—  090  — 

Gavina  kamtschatschensis,  Bonap.,  Naicmannia,  1854,  p.  215. 

Gavina  heinei,  Bruch,  Journ.  f.  Or)i.,  1855,  p.  283. 

Larus  canus  major,  Schl.,  ']\fus.  P.-B.  Lan,  p.  26  (I863j.  » 

Larus  suckleyi,  Schl.  (nec  Lawr.),  ibidem,  p.  27  (1863). 

Larus  canus  var.  niveus,  Coues,  B.  N.  W.  Am.,  p.  638  (1874). 

Larus  canus  niveus,  Seeb.,  Brit.  Birds,  III,  p.  316  (1885), 

Larus  kamtschatchensis,  Stejn.,  Bull.  U.  S.  N.  Mus.,  n»  29,  p.  73  (1885). 

Taille  :  O^^Sô;  ailes  0,35  (de  Belgique). 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  D'un  blanc  pur  ;  manteau  et 
ailes  d'an  cendré  bleuâtre  clair,  les  scapulaires  et  les  rémiges  secondaires 
terminées  de  blanc  ;  rémiges  primaires  noires  avec  plus  ou  moins  de  gris  à 
la  base,  la  première,  et  quelquefois  aussi  la  seconde,  avec  une  grande  tache 
blanche  près  de  son  extrémité.  Bec  jaune,  un  peu  verdàtre  à  la  base  ;  iris 
brun  ;  tour  de  l'œil  rouge  orange  ;  pattes  d'un  jaune  clair. 

En  hiver.  —  Se  distingue  par  des  taches  d'un  cendré  brunâtre  qui  occupent 
la  tête,  le  cou  et  le  haut  de  la  poitrine.  Pattes  d'un  gris'bleuâtre. 

Jeune.  —  Tête  et  nuque  blanchâtres  avec  des  stries  d'un  brun  cendré  ; 
manteau  et  couvertures  des  ailes  d'un  brun  cendré.,  les  plumes  bordées  de 
blanc  sale  un  peu  roussâtre  ;  sus-caudales  blanches  avec  des  taches  cendrées  ; 
rémiges  primaires  d'un  brun  noirâtre  sans  tache  blanche  sur  l'externe; 
gorge  blanche  ;  les  autres  parties  inférieures  blanches  avec  des  taches  d'un 
cendré  orunâtre  ;  queue  blanchâtre,  le  tiers  postérieur  d'un  brun  noir  mais 
terminé  par  un  liséré  blanc.  Bec  couleur  chair  un  peu  jaunâtre,  noirâtre  à 
l'extrémité;  iris  brun;  pattes  gris  de  plomb  ou  livides. 

Poussin.  —  Parties  supérieures  d'un  cendré  faiblement  teinté  de  fauve, 
semées  de  taches  noires  irrégulières  mais  nettes,  surtout  à  la  tête,  dont  une 
envahit  le  front  et  encadre  la  mandibule  supérieure  à  sa  base  ;  gorge  blanche, 
limitée  inférieurement  par  des  taches  noires  ;  cuisses  et  devant  du  cou  d'un 
brun  assombri  par  la  base  noirâtre  du  duvet  ;  les  autres  parties  inférieures 
blanches,  mais  lavées  de  fauve  sur  la  poitrine  et  l'abdomen  ;  bec  rougeàtre, 
avec  bande  transversale  noire  vers  la  base  et  marteau  blanc  ;  pieds  rou- 
geâtres,  les  membranes  plus  pâles;   iris  gris.  (J.  Vian). 

Var.  Major.  —  Se  distingue  du  type  canus  par  une  taille  jjIus  forte,  un  bec 
plus  robuste,  des  tarses  et  des  doigts  plus  allongés. 

Ilab.  —  Cette  Mouette  est  pins  ou  moins  commune  sur  toutes  les 
côtes  de  l'Europe  occidentale  ju.squ'au  cap  Nord  {CoUctt),  mais  elle  est 
très  rare  en  Islande  {Sdundcrs)  et  no  paraît  pas  nicher  régulièrement 
au  sud  de  la  mer  Baltiqu(3  (1).  Dans  la  lliissie  orientale  et  la  Sibérie 

(i)  Deglaïul  dit  (|u'elle  se  reproduit  sur  les  eûtes  et  dans  les  rochers  des  environs  de  Cher- 
bourg, et  quelquefois  dans  le  Boulonnais.  M.  Cîadcau  de  Kcrville  dit  qu'un  certain  nombre 
d'individus  sont  sédentaires  en  Normandie.  D'après  M.Salvadori.cettc  Mouette  serait  aussi  séden- 
taire dans  le  nord  de  l'Italie  ;  mais  nichc-t-elle  rcLjulièrcment  en  France  et  en  Italie  ? 


—  596  — 


occidentale,  elle  ne  dépasse  pas  le  680.  Elle  niche  également  dans 

diverses  parties  de  l'Ecosse  et 
de  l'Irlande,  aussi  bien  sur  les 
côtes  que  près  des  eaux  intérieu- 
res, ainsi  qu'aux  îles  Orcades, 
Shetland  et  Hébrides,  mais  ne 
visite  l'Angleterre .  qu'en  hiver 
et  émigré  à  ce  moment  de  l'ex- 
trême nord  de  l'Ecosse  [See- 
hohm).  La  Mouette  cendrée  est 
très  commune  sur  les  côtes  de  Belgique  et  sur  l'Escaut,  depuis  l'au- 
tomne jusqu'au  printemps,  mais  elle  est  moins  abondante  dans  le 
midi  de  l'Europe,  On  rencontre  donc  cette  espèce  dans  toute  TEurope, 
aussi  bien  près  de  la  mer  que  sur  les  grandes  eaux  intérieures,  bien 
qu'elle  ne  soit  pas  toujours  de  passage  régulierjians  les  pays  du 
centre. 

Cet  oiseau  visite  également  l'Asie  Mineure  {Kruper)  et  la  Palestine 
{Tristram) ,mdiis  il  est  rare  en  Egypte  {de  Heuglin);  on  le  voit  aussi  en 
Tunisie  {Kœnig)  et  en  Algérie  (Loche).  Une  capture  a  été  faite  au 
Labrador  [Coues)  (1).  Il  est  difficile  de  dire  jusqu'où  cette  espèce 
étend  son  aire  de  dispersion  vers  l'Est,  car  beaucoup  d'auteurs  la 
confondent  avec  la  var.  Major  \  il  paraît  cependant  qu'elle  visite  le 
Turkestan  {Severtzow)  et  la  Sibérie  occidentale  (Finsch),  peut-être 
jusqu'au  lac  Baïkal.  Toujours  est-il  que  la  var.  Major  habite  la  Sibérie 
orientale  {Taczanowski),  au  Nord  jusqu'au  Kamtschatka  et  l'île  de 
Behring  {Stejnege?-),  ei  qu'elle  descend  régulièrement  chaque  hiver 
sur  les  côtes  du  Japon  et  de  la  Chine,  mais  ce  n'est  qu'au  fort  de 
l'hiver  qu'elle  visite  les  côtes  méridionales  de  cet  empire  [David). 

Mœurs.  —  La  Mouette  cendrée  hiverne  depuis  les  côtes  de  la 
Baltique  et  de  la  mer  du  Nord,  où  elle  est  plus  ou  moins  sédentaire 
jusqu'aux  côtes  hollandaises  (52°),  mais  plus  au  Sud  on  ne  la  voit 
généralement  qu'à  partir  de  l'automne.  M.  Collett  dit  bien  qu'elle  est 
sédentaire  partout  sur  les  côtes  deNorwége,  mais  il  est  probable  qu'il 
s'agit  des  parties  méridionales  de  ce  pays,  car  si  elle  n'émigrait 
pas  des  contrées  boréales,  on  n'en  verrait  pas,  en  hiver,  de  si  grandes 
quantités  dans  les  pays  plus  tempérés. 

(1)  Le  sujet  capturé  au  Labrador  a  été  indiqué  sous  le  nom  de  L.  delawarensis,  mais 
M.  Saunders,  qui  l'a  eu  en  mains,  le  consideie  comme  un  L.  caîius .  (Voy,  Proc.  Zoul.  Soc. 
1878, p.   178). 


—  597  — 

Cette  Mouette  se  plaît  surtout  près  de  la  mer,  mais  elle  n'est  pas 
rare  sur  les  cours  d'eau,  les  lacs  et  même  sur  les  étangs  d'une  cer- 
taine étendue  ;  ce  n'est  cependant  qu'à  l'époque  des  passages  qu'on  en 
voit  quelquefois  sur  les  eaux  du  centre  de  l'Europe,  comme  en 
Suisse,  enAuiriche  et  en  Pologne,  ou  quelques  jeunes  sujets  séjour- 
nent alors  plus  ou  moins  longtemps.  A  l'approche  des  tempêtes,  elle 
s'éloigne  de  la  mer  et  pénètre  très  loin  dans  l'intérieur  des  terres  où 
elle  reste  souvent  quelques  jours  sur  les  eaux  douces.  Elle  n'évite  pas 
les  grands  arbres  et  se  repose  même  parfois  sur  les  grosses  branches 
de  même  que  sur  des  poteaux. 

Cet  oiseau  nage  volontiers  et  dort  souvent  sur  les  eaux  tranquilles  ; 
son  vol  est  doux,  léger  et  gracieux  et  sa  démarche  aisée.  Il  se  montre 
confiant  ou  farouche  suivant  les  localités;  près  des  lieux  où  il  niche, 
il  est  en  général  très  défiant,  mais  il  distingue  fort  bien  le  chasseur 
du  pêcheur  et  du  passant  inotîensif.  Sa  sociabilité  est  très  grande, 
aussi  voit-on  souvent  des  bandes  composées  de  centaines  et  même  de 
milliers  de  ces  Mouettes,  surtout  en  hiver.  Leur  cri  d'appel  est  skiah! 
quand  elles  sont  inquiètes,  elles  jettent  le  cri  de  skak  ou  kak.  Quant  à 
la  nourriture,  elle  consiste  en  poissons,  crustacés,  annélides,  mollus- 
ques, vers  de  terre,  larves  et  insectes  divers  ;  dans  les  champs,  cet 
oiseau  fait  la  chasse  aux  limaces  et  aux  petits  rongeurs  tels  que  mulots 
et  campagnols. 

Reproduction.  —  La  Mouette  cendrée  niche  en  colonies  plus  ou 
moins  considérables  soit  près  de  la  mer,  à  terre  ou  sur  des  rochers, 
soit  près  des  lacs  ou  autres  grandes  eaux  de  l'intérieur.  M.  Collett  dit 
qu'en  Norwège  elle  niche  souvent  près  des  eaux  situées  dans  les 
montagnes  à  une  altitude  de  3.000  pieds,  et  souvent  à  une  distance 
considérable  de  la  côte;  le  même  auteur  rapporte  que  pendant  l'été  de 
1868,  un  couple  de  ces  oiseaux  se  trouvait  près  d'un  lac  d'eau  douce 
non  loin  de  Trondhjem,  où  il  avait  pris  possession  d'un  vieux  nid  de 
Corneille  cendrée,  placé  sur  un  sapin;  les  œufs  ayant  été  enlevés,  une 
seconde  ponte  fut  laite  dans  le  même  nid. 

Dans  les  localités  où  ces  Mouettes  sont  [)cu  nombreuses,  elles 
nichent  souvent  dans  la  société  d'autres  Mouettes  ou  de  Sternes.  Les 
nids  se  trouvent  soit  dans  des  ench-oiis  marécageux  au  milieu  des 
herbes  et  des  joncs,  soit  dans  les  bruyères  ou  dans  un  champ  de  blé, 
moinssouvcntsur  la  terre  nue. Le  nid  est  bientôt  construit  et  consiste 
en  unamasplus  ou  moins  considérable  d'herbes  diverses, de  bruyères, 
de  radic(dlcs,de  i>;iille,  (!<'  léuilles  morlc;s,  de  iiuni«M',de  zostères.etc, 


—  598  - 

suivant  ce  que  les  constructeurs  ont  pu  trouver;  le  tout  est  mêlé  à  de 
la  terre  et  forme  une  masse  compacte  arrondie,  avec  une  excavation 
au  centre.  La  ponte,  qui  est  de  deux  ou  trois  œufs,  a  lieu  vers  la  mi- 
mai dans  les  contrées  tempérées,  un  mois  plus  tard  sous  le  cercle 
polaire.  Ces  oeufs  sont  d'un  gris  verdâtre  ou  d'un  gris  roussâtre  par- 
semés de  taches  profondes  cendrées  et  d'autres  superficielles  de  cou- 
leur brune  ;  les  taches  sont  souvent  confluentes  ou  en  couronne  au 
gros  bout.  Ces  oeufs  mesurent  environ  57  millim.  sur  41. 

Les  parents  se  comportent  avec  leurs  petits  comme  les  espèces 
précédentes.  Quand  les  poussins  ne  sont  pas  dérangés,  ils  séjournent 
longtemps  dans  le  nid  ou  dans  ses  environs,  et  se  cachent  dans  les 
herbages  ou  entre  des  pierres. 

294.    —   La    Mouette    rieuse.— 
LARUS  RIDIBUNDUS,  Lin. 

(PI.  295.) 

Larus  cinerarius  (hiver)  et  rtdibundus  (été),  Lin,,  Syst   nat.  I,  pp.  224,  225(1760). 
Larus  ERYTHROPLis,  Lath.,  Gen.  Syn.,  suppl.  I,  p.  296  (1787). 
Larus  canescens,  Bechst.,  Orn.  Taschenb.,  p.  370  (1803). 
Larus  atricilla,  Pall.  (nec  Lia.),  Zoogr.  Rosso-As.,  II,  p.  324  (18II). 
Larus  n^vius,  Pall.,  tom.  cit.  ,  p.  327. 
Larus  capistratus,  Tem.,  Man.  d'orn.,  II,  p.  785  (1820). 
Xema  RIDIBUNDUS  et  CAPISTRATUS,  Boie,  Isis,  1822,  p.  563. 
Xema  ridibundum,  pileatum  et  capistratum,  Brm.  /«s,  1830,  p.  994. 
Chroicocephalus  capistratus,  Eyt.  Hist.  Rarer  Brit.  B.,  p.  63  (1836). 
Chroicocephalus  RIDIBUNDUS,  Eyt  ,  C'^t.  Brit.  B.,  p.  53  (1836). 
Gavia  RIDIBUNDUS  et  CAPISTRATUS,  Bonap.,  Naumannia,  1854,  p.  213. 
Chroicocephalus  pileatus,  Brm.,  Naumrimna.,  1855,  p.  295. 
?  Larus  brunneicephalus,  Cass.,  Perri/s  Exp.  Japan,  II,  p.  233  (1856). 
Larus  cahirinus  et  L.  cahiricus,  Hemp.  et  Ehr.,  fide  H.  Saunders,  P.  Z.  S.,  1878, 
p.  201. 

Die  Lach-Meve,  en  allemand. 

The  black-headed  Gull,  en  anglais. 

De  Capmeeuw,  en  flamand. 

Taille:  mâle  0^30;  ailes  0,31  ;  femelle  0,28;  ailes  0,28. 


Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  Tête,  gorge  et  haut  du  cou 
liruns,  l'œil  entouré  d'un  cercle  blanc;  le  restant  du  cou,  sus-caudales,  queue 
et  les  parties  inférieures  d'un  blanc  pur,  ces  dernières  teintées  de  rose  (mais 
cette  teinte  rose  disparaît  chez  les  sujets  préparés);  manteau,  scapulaires  et 
couvertures  des  ailes  d'un  gris  bleuâtre  pâle  ;  les  quatre  premières  rémiges 


—  599  — 

blanches,  terminées  et  bordées  de  noir  en  dedans,  la  première  ayant  en  outre 
un  liséré  noir  sur  une  certaine  étendue  de  la  barbe  externe,  et  chez  les  3®,  4® 
et  5°  rémiges  une  tache  blanche  termine  souvent  le  noir  à  la  pointe;  chez  les 
rémiges  secondaires  le  blanc  est  remplacé  par  du  gris.  Bec  et  pattes  rouge 
laque  ;  iris  brun. 

Hiver.  —  Comme  en  été,  mais  sans  capuchon  brun  :  la  tête  est  blanche 
avec  une  petite  tache  noirâtre  devant  les  yeux  et  une  autre  plus  étendue  à  la 
région  parotique. 

Jeune. —  Front,  gorge  et  une  tache  sur  les  côtés  de  la  tête  blancs  ;  le  reste 
du  dessus  de  la  tête  jusqu'à  la  nuque  brun  varié  de  roussâtre;  bas  du  cou 
d'un  blanc  terne  ;  manteau  et  scapulaires  d'un  brun  plus  fonce  avec  les 
plumes  bordées  de  roux  jaunâtre  clair;  bas  du  dos  cendré,  les  phimes  termi- 
nées de  roux  jaunâtre  clair;  sus-caudales  et  parties  inférieures  du  corps  d'un 
blanc  terne;  haut  de  la  poitrine  roux  jaunâtre  clair;  petites  couvertures 
d'un  cendré  bleuâtre,  les  moyennes  brunes  bordées  de  jaune  roussâtre,  les 
suivantes  et  la  plupart  des  rémiges  secondaires  d'un  gris  cendré,  les  plus 
rapprochées  du  dos  brunes  et  terminées  de  roux  clair  ;  rémiges  primaires  à 
peu  près  comme  chez  les  adultes  ;  queue  blanche  avec  une  bande  subtermi- 
nale d'un  brun  noirâtre.  Bec  livide  à  pointe  noire  ;  iris  brun  clair  ;  pattes 
jaunâtres. 

Poussin.  —  Duvet  d'un  roux  pâle,  moucheté  sur  toutes  les  parties  supé- 
rieures et  au  bas  de  la  gorge  de  taches  noires,  irréguliéres,  mais  bien  accen- 
tuées, dont  une  encadre  au  front  la  base  de  la  mandibule  supérieure,  sans 
taches  sur  les  autres  parties  inférieures.  Bec  d'un  jaune  terne  avec  le  marteau 
blanc;  pieds  d'un  jaune  roussâtre.  (J.  Vian.) 

La  Mouette  rieuse  habite  en  été  l'Europe  tempérée,  sans 

dépasser,  au  Nord,  le  sud  de  la 
Scandinavie  {Nilsson)  et  de  la 
Finlande  {Palmén),  mais  elle  est 
rare  en  Norwège  (Col/ett);  vers 
le  15  avril,  elle  est  très  abon- 
dante dans  le  golfe  de  Finlande 
[Bnchner),  mais  assez  rare  sur  le 
liUjiin:  t,  ;  il    lac   Novaja-Ladoga   [Liljeborg, 

Aï'tigy^iëiiv'mviitiiièt-'^îr rH irff^-^7y-i)>»w.jim»iM».H>.i»«..wr,£l   j^cvQs)   ciul  paraît  èlro  sa  limite 

septentrionale.  D'après  Wallengren,  elle  niche  rarement  au  delà 
du  56",  mais  s'avance  d'environ  deux  degrés  plus  au  Nord  du  côté  do 
l'Est.  p]lle  niche  en  grandes  colonies  en  Danemark  {Collin),ei  elle  est 
généralement  commune  dans  toute  Dùirope  centrale,  aussi  bien  sur 
h^s  cotos  (|Uo  sur  les  eaux  intérieures. 


-  600  — 

Cette  espèce  est  très  abondante  en  Belgique  sur  les  côtes,  dans  les 
Polders  et  sur  l'Escaut  ;  il  y  a  une  dizaine  d'années,  elle  était  rare 
aux  environs  de  Bruxelles,  mais  depuis  elle  a  fait  son  apparition 
dans  les  prairies  le  long  de  la  Senne  entre  Vilvorde  et  Malines,  et 
elle  a  même  remonté  cette  rivière  jusque  dans  les  prairies  de  Mon- 
plaisir,  sur  les  territoires  de  Laeken  et  d'Evere.  On  en  voit  quelque- 
fois sur  les  étangs  des  environs  de  Bruxelles  et,  d'après  les  frères 
Athimus  et  Macédone,  deux  individus  ont  même  été  tués,  en  1885, 
sur  un  étang  à  Carlsbourg  (Luxembourg  belge).  Cette  Mouette  est 
sédentaire  aux  îles  Britanniques,  moins  en  Ecosse  [Seeholun),  et  elle 
hiverne  à  partir  de  la  Hollande  et  de  l'Allemagne  centrale.  En 
Espagne  et  en  Portugal,  elle  ne  se  montre  qu'en  hiver  {Saunders, 
Reyes),  et  il  en  est  de  même  dans  toutes  les  contrées  qui  entourent  la 
Méditerranée  ;  il  paraît  cependant  qu'elle  est  sédentaire  dans  le  nord 
de  l'Italie,  comme  en  Vénétie,  en  Lombardie  et  en  Piémont 
[Gigliolï). 

Cette  Mouette  est  également  abondante,  en  hiver,  dans  le  nord  de 
l'Afrique,  en  Algérie  [Loche),  en  Tunisie  [Kœnig),  dans  le  delta  du 
Nil  et  le  long  de  ce  fleuve  et  de  la  mer  Rouge  jusqu'en  Nubie  {de 
Heuglin).  A  l'Est,  nous  la  rencontrons  en  Palestine  [Tristram],  en 
Asie  Mineure  (Krûper),  près  de  la  mer  Caspienne  (Radde),  et  à  travers 
tout  le  sud  de  la  Sibérie  [von  Schrenck,  Taczanoioski)  jusqu'au 
Kamtschatka  (Stejneger)  ;  elle  hiverne  en  Perse,  dans  l'Inde  centrale 
{Jerdon),  en  Birmanie  {Saunders)  et  en  Chine,  particulièrement  dans 
les  provinces  septentrionales  [David),  ainsi  qu'au  Japon  [Blakiston). 
Il  est  fort  douteux,  quoi  qu'en  dise  Schlégel,  qu'elle  visite  le  sud  de 
l'Afrique. 

Mœurs.  —  La  Mouette  rieuse  émigré  donc  en  automne  des  contrées 
septentrionales  et  y  retourne  au  commencement  d'avril,  parfois  vers 
la  fin  de  mars  ;  mais  il  est  à  remarquer  que  les  adultes  partent  et 
reviennent  toujours  plus  tôt  que  les  jeunes  qui  ne  sont  pas  encore  en 
état  de  se  reproduire.  Elle  voyage  en  bande  en  plein  jour  et  vole  alors 
généralement  très  haut.  Au  printemps,  les  troupes  voyageuses  ne 
s'arrêtent  dans  une  localité  que  le  temps  nécessaire  à  apaiser  la  faim 
ou  pour  y  passer  la  nuit,  car  elles  ont  hâte  d'arriver  aux  lieux  de  la 
reproduction.  Ces  oiseaux  habitent  plus  l'intérieur  des  terres  que  les 
côtes  maritimes,  qu'ils  ne  recherchent  d'habitude  qu'en  hiver  ;  il  est 
rare  qu'ils  se  reproduisent  dans  les  falaises  ou  sur  une  île,  car  ils  pré- 
fèrent toujours  les  eaux  douces  ou  saumâtres  entourées  de  champs  et 


—  601  — 

de  prairies,  comme  les  fleuves,  les  rivières,  les  lacs,  les  grands  étangs 
et  les  marais,  et  ils  passent  la  nuit  sur  l'eau  loin  des  bords. 

Cette  Mouette  est  très  remuante,  fort  gracieuse  et  tous  ses  mouve- 
ments sont  lestes  et  légers.  Elle  marche  avec  facilité  et  longtemps,  et 
suit  souvent  le  laboureur  pour  prendre  les  larves  et  les  vers  que  la 
charrue  fait  venir  à  la  surface  du  sol  ;  dans  le  nord  de  l'Afrique,  elle 
visite  les  rizières  et  les  steppes  pour  y  faire  la  chasse  aux  sauterelles, 
ce  fléau  des  cultivateurs  d'au  delà  de  la  Méditerranée  ;  Naumann  a  vu 
de  ces  oiseaux  voler  autour  du  sommet  des  arbres  pour  y  poursuivre 
les  insectes.  Il  résulte  de  ce  qui  précède,  que  la  Mouette  rieuse  est 
un  oiseau  fort  utile  pour  la  campagne  et  qu'il  est  de  l'intérêt  de  Tagri- 
culteur  de  la  protéger.  Elle  vole  mollement  en  tenant  les  ailes  très 
étendues  ;  à  chaque  instant  elle  interrompt  sa  course  pour  voltiger  ou 
pour  décrire  dans  les  airs  les  courbes  les  plus  capricieuses,  presque 
sans  remuer  les  ailes.  Elle  est  prudente  et  méfiante,  mais  dans  les 
lieux  où  on  ne  le  chasse  pas,  elle  se  montre  confiante  et  rôde  sans  in- 
quiétude autour  des  personnes  qui  lui  veulent  du  bien  ;  dans  une  foule 
de  localités  on  la  considère  comme  un  oiseau  à  demi-domestique,  et 
les  jeunes  qu'on  élève  en  captivité  deviennent  bientôt  très  familiers, 
d'une  douceur  remarquable  et  ils  suivent  souvent  leur  maître  comme 
de  petits  chiens.  Ce  sont  du  reste  des  oiseaux  extrêmement  sociables, 
vivant  en  troupes  considérables  et  en  assez  bonne  intelligence  avec 
les  Guifettes. 

La  nourriture  de  cette  Mouette  consiste  donc  surtout  en  insectes  et 
larves  aquatiques  ou  terrestres,  limaces,  vers,  etc.;  à  l'occasion,  et 
surtout  en  hiver,  elle  prend  des  petits  poissons  et  même  des  mulots  et 
des  campagnols  qu'elle  sait  fort  bien  mettre  en  pièces.  Elle  s'empare 
des  petits  poissons  soit  en  plongeant  brusquement,  soit  en  rasant 
l'eau  :  elle  use  du  premier  procédé  sur  la  mer,  et  de  l'autre  sur  les 
eaux  douces.  Les  sujets  élevés  en  captivité  se  contentent  de  pain  et 
de  viande  coupée  en  menus  morceaux.  La  voix  de  cet  oiseau  est 
criarde  et  rappelle  celle  de  la  Corneille,  ce  qui  lui  a  valu  le  surnom 
de  «  Corneille  de  mer  »  ;  elle  se  compose  de  sons  divers  ressemblant 
à  kr,  hit,  Iwh,  krau,  kru,  kri-ah,  keckèckè/i;  ces  cris  variés  jetés  par 
plusieurs  individus  produisent  une  sorte  de  rire  rauque,  d'où  le  nom 
de  Mouette  trieuse. 

Rep/vduction. — Cette  Mouette  niche  vers  la  fin  d'avril  sur  les  eaux 
douces,  en  colonies  plus  ou  moins  nombreuses  composées  parfois 
de   milliers    d'individus.  Les  nids   sont  placés    au  milieu    de    l'eau 

Tome  II.  —   1893.  76 


—  602  — 

sur  de  vieilles  souches  de  roseaux  ou  de  joncs,  sur  un  petit  îlot 
garni  d'herbe,  ou  dans  un  marais,  et  toujours  dans  un  endroit  diffi- 
cilement accessible  ;  ils  occupent  un  espace  relativement  restreint  et 
sont  très  rapprochés  les  uns  des  autres.  Le  choix  de  leur  emplace- 
ment ne  se  fait  pas  sans  disputes  et  sans  cris,  mais  bientôt  renaît  un 
calme  relatif,  et  chacun  travaille  à  la  construction  de  son  nid.  Celui-ci 
est  formé  de  feuilles  mortes,  de  roseaux  et  de  joncs,  de  paille, 
de  foin,  etc.,  et  consiste  en  une  masse  plus  ou  moins  élevée  et  légè- 
rement enfoncée  au  centre.  Il  arrive  aussi  que  la  femelle  dépose  sim- 
plement ses  œufs  dans  l'herbe  ou  sur  le  sable,  sans  la  moindre  litière 
spéciale.  La  ponte  est  de  deux  ou  trois  œufs,  rarement  de  quatre  ; 
ceux-ci  varient  du  vert  bleuâtre  clair  au  gris  olivâtre  ou  brunâtre,  et 
sont  marqués  de  taches  profondes  grises  tirant  plus  ou  moins  sur  le 
rouge,  et  de  taches  et  de  points  superficiels  d'un  brun  olivâtre  ou 
noirâtre  ;  il  arrive  parfois  que  l'un  des  œufs  diffère  des  autres  par  sa 
coloration  ou  par  son  système  de  taches.  Ces  œufs  mesurent  en 
moyenne  53  millim.  sur  37. 

Mâle  et  femelle  couvent  alternativement  pendant  dix-huit  jours, 
mais  quand  la  plaine  est  ensoleillée,  ils  abandonnent  au  soleil  le  soin 
de  chauffer  les  œufs.  Les  poussins  restent  au  nid  pendant  les  pre- 
miers jours,  mais  ils  croissent  assez  vite  et  au  bout  d'un  mois  ils  sont 
à  peu  près  à  même  de  mener  une  vie  indépendante;  jusque-là,  les 
parents  veillent  constamment  sur  leurs  petits  et  cherchent  à  prévenir 
les  dangers  qui  les  menacent. 

295.  —  La  Mouette  pygmée. 
LARUS  MINUTUS,  Pall. 

(PI.  296.) 

?  Larus  albus,  Scop.  Ann.  I.  hist.  nat.  p.  80  (1769). 

Larus  MINUTUS,  Pall.  Reise  Russ.  Reichs,  III,  p.  702  (1776). 

Larus  atricilloides,  Falk,  Russ.  Reise  III,  p.  355,  pi.  24  (1785). 

Xema  MINUTUS,  Boie,  Isis,  1822,  p.  563. 

Larus  orbignyi,  Aud.  Hist.  nat.  de  VEgypte,  pi.  9,  f.  3,  Expl.  p.  271  (1825). 

Hydrocolœus  MINUTUS,  Kaup,  Nat.Syst.  p.  1 13  (1829). 

Larus  nigrotis,  Less.  Traité  d'Orn.  p.  619  (1831). 

Chroicocephalus  MINUTUS,  Eyt.  Cat.  Br.  B.  p.  54  (1836). 

Gavia  minuta,  Macgill.  Hist.  Brit.  B.  V,  p.  613  (1852). 

Die  Zwerg-Meve,  en  allemand. 

The  little  Gull,  en  anglais. 

De  Dwergmeeuw,  en  flamand. 

Taille  :  0'^24;  SLiles,  0,23. 


-  603  - 


Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  Tête  et  cou  noirs,  avec  un 
petit  croissant  blanc  plus  ou  moins  apparent  derrière  les  yeux;  manteau  et 
ailes  d'un  gris  bleuâtre  pâle  ;  sus-caudales  et  queue  d'un  blanc  pur;  rémiges 
primaires  comme  le  manteau,  mais  plus  foncées  sur  le  bord  interne,  toutes 
terminées  de  blanc,  les  baguettes  blanchâtres  ;  parties  inférieures  d'un 
blanc  lavé  d'une  teinte  aurore  qui  disparaît  chez  les  sujets  préparés.  Bec 
d'un  rouge  sombre  ;  iris  brun  ;  pattes  d'un  rouge  cramoisi. 

En  hiver.  —  Comme  en  été,  mais  la  tête  est  blanche  avec  l'occiput,  la 
nuque  et  la  région  auriculaire  d'un  gris  noirâtre. 

Jeune.  —  Vertex,  occiput  et  région  auriculaire  d'un  cendré  noirâtre;  des- 
sus du  corps  gris  brun,  les  scapulaires  bordées  et  terminées  de  blanchâtre  ; 
front,  région  ophthalmique,  devant  et  côtés  du  cou  ainsi  que  les  parties  infé- 
rieures blancs;  petites  couvertures  des  ailes  blanchâtres,  tachetées  de  gris 
et  de  noirâtre,  les  moyennes  noirâtres  bordées  de  brun  clair;  les  quatre  pre- 
mières rémiges  noires  en  dehors  et  à  leur  extrémité,  blanches  en  dedans,  les 
suivantes  cendrées  avec  la  pointe  et  la  barbe  interne  blanche  ;  queue  termi- 
née par  une  bande  noire.  Bec  noirâtre;  pattes  couleur  chair. 

Poussin.  —  Duvet  des  parties  supérieures  d'un  gris  enfumé  et  tacheté  de 
noir,  plus  pâle  et  uniforme  aux  parties  inférieures.  Bec  jaune  à  pointe  brune; 
pattes  d'un  jaune  pâle. 

Hab.  —  La  répartition  géographique  de  cette  Mouette  est  assez 

curieuse,  car  elle  habite,  en  été, 
la  Russie  centrale  et  méridio- 
nale, ainsi  que  la  Sibérie  jus- 
qu'au sud  de  la  mer  d'Okhotsk, 
tandis  qu'elle  passe  l'hiver  dans 
l'ouest  de  l'Asie,  le  midi  de 
l'Europe  et  le  nord  de  l'Afrique. 
Elle  se  reproduit  à  partir  des  îles 
suédoises  de  Oeland  et  de  Gott- 
land  dans  la  mer  Baltique,  mais  ne  visite  que  rarement  les  côtes  de 
la  Suède  {Xilsson);  clic  est  commune  en  Finlande  {Palmchi),  surtout 
sur  le  lac  Novaj a-Ladoga,  au  Nord  jusqu'à  Arkhangel  {Liljeborg)  et 
paraît  étendre  son  habitat  d'été  à  travers  l'empire  russe  jusque  dans  la 
Sibérie  orientale,  où  on  la  trouve  \)^vio\\i  {Taczanoioski)\  dans  le 
midi  de  la  Russie,  les  rivages  des  lacs  salés  sont  animés  par  des  colo- 
nies entières  de  ces  oiseaux,  qui  y  nichent  {de  Nordmann).  Elle 
paraît  être  de  passage  au  Turkestan  (Severtzow)  et  sur  la  mer  Cas- 
pienne {Radde);  et  une  capture  a  été  faite  dans  l'Inde  (Irbi/). 

Dans  l'Europe  occidentale,  cette  espèce  ne  fait  que  dos  apparitions 


—  604  - 

irrégulières  plus  ou  moins  fréquentes  ;  elle  a  été  observée  accidentel- 
lement à  l'île  Helgoland  {Gatke),  au   Danemark  {Kjaerhôlling)  et  en 
Pologne  {Taczanowski),  mais  elle  se  montre  parfois  en  assez  grand 
nombre  sur  les  côtes  allemandes,  particulièrement  près  de  l'embouchure 
de  l'Elbe  [Naumann),  et  en  1850  elle  nichait  encore  sur  la  côte  prus- 
sienne de  la  Baltique  (5oec^).  Cette  Mouette  visite  aussi  irrégulièrement 
et  en  petites  troupes  les  côtes  de  la  Hollande  [Schlégel)  et  de  la  Bel- 
gique: plusieurs  sujets  ont  encore  été  tués  dans  les  premiers  jours  de  no- 
vembre 1888,  près  d'Ostende,  par  le  comte  Max  de  Lalaing,  et  M.Croe- 
gaert signale  deux  captures  sur  l'Escaut  àdes  époques  antérieures.Aux 
îles  Britanniques  on  ne  la  voit  non  plus  qu'irrégulièrement  :  elle  a  été 
observée  dans  diverses  parties  de  l'Angleterre,  de  l'Ecosse  et  de  l'Ir- 
lande, sans  dépasser  au  nord  les  îles  Shetland  {Seebohm).  Elle  visite 
accidentellement  les  côtes  de  Normandie  [Noury),  de  la  Seine  infé- 
rieure {Hardy),  ainsi  que  les  autres  côtes  de  la  France^^t  de  l'Espagne, 
[Vayreda),  de  même  que  Gibraltar  {Irby),  et   elle  était  même  assez 
abondante  pendant  quelques  jours  à  Malaga,  en  1868  [Saunders).^\\Q 
est  rare  sur  les  côtes  de  la  Sardaigne  et  a  été  observée  dans  diverses 
parties  de  l'Italie  {Giglioli),  mais  elle  est  assez  répandue  sur  les  côtes 
de  la  Sicile,  où  elle  paraît  sur  le  littoral  dans  le  courant  de  septem- 
bre et  le  quitte  au  milieu  de  l'hiver  pour  se  rendre  sur  les  lacs  et  les 
étangs  de  l'intérieur;  au  mois  d'avril,  elle  se  rapproche  des  côtes  et 
quitte  définitivement  la  Sicile  en  mai  {Malherbe);  elle  est  parfois  aussi 
abondante  à  l'île  de  Malte  (Wright)  et  en  Grèce  ;  von  der  Muhle  dit 
ne  l'avoir  vue  dans  ce  pays  qu'en  hiver,  tandis  que  Lindermayer  ne  l'y 
a  observée  qu'en  été,  ce  qui  fait  supposer  qu'elle  est  plus  ou  moins 
sédentaire  en  Grèce.  Il  en  est  peut-être  de  même  en  Turquie  où  elle 
est  généralement  répandue  {Cavendish  Taylor);  dans  la  Dobrodja,  elle 
passe  en  abondance  au  printemps,  s'arrêtant  sur  les  lacs  pour  pêcher 
{Alléon). 

Cette  Mouette  n'est  pas  rare  en  hiver  et  au  printemps  sur  les  côtes 
égyptiennes  de  la  Méditerranée  et  sur  les  lacs  voisins,  mais  ne 
paraît  pas  se  rencontrer  sur  le  Nil  {de  Heuglin)  ;  on  la  voit  aussi  en 
Algérie  {Loche)  et  probablement  au  Maroc. 

Mœurs.  —  Cette  gracieuse  petite  Mouette  niche  donc  dans  le  Nord- 
Est  de  l'ancien  monde,  d'où  elle  émigré  vers  la  fin  d'août,  et  elle 
quitte  ses  quartiers  d'hiver  en  mai.  Pendant  l'été,  elle  vit  à  l'inté- 
rieur des  terres  sur  les  eaux  douces,  mais  en  hiver  elle  fréquente 
surtout  les  bords  de  la  mer.  Ses  moeurs  ressemblent  à  celles  de  la 


—  60o  — 

Mouette  rieuse.  Elle  nage  moins  que  la  plupart  de  ses  congénères, 
mais  vole  davantage,  et  cela  avec  légèreté  et  rapidité  ;  elle  plane  aussi 
avec  aisance  en  décrivant  des  cercles  dans  l'espace,  tout  en  s'élevaiit 
à  une  grande  liauteur. 

C'est  l'un  des  oiseaux  les  plus  remuants  du  genre  et  il  se  montre 
très  sociable;  dans  les  lieux  de  la  reproduction,  on  voit  souvent  un 
grand  nombre  de  ces  oiseaux  réunis  à  des  Mouettes  rieuses  et  à  des 
Guifettes,  et  vivant  tous  en  bonne  intelligence.  La  Mouette  pygmée  se 
nourrit  surtout  d'insectes,  de  larves  et  de  vers,  et  elle  attrape  souvent 
sa  proie  au  vol  ;  en  hiver,  elle  vit  de  petits  animaux  marins  et  de 
petits  poissons. 

M.  Alléon  fait  remarquer  que  dans  cette  espèce  les  femelles  pren- 
nent leur  plumage  de  noce  plus  tôt  que  les  mâles  ;  ainsi,  à  la  fin  du 
mois  d'avril  on  a  des  femelles  en  parfait  plumage  d'été,  tandis  que 
les  mâles  sont  encore  en  mue. 

Reproduction.  —  La  Mouette  pygmée  ou  naine  niche  en  colonies 
près  des  eaux  douces,  et  les  nids  sont  rapprochés  les  uns  des  autres  ; 
on  les  trouve  dans  les  marécages,  mais  le  plus  souvent  sur  des  tas 
de  végétaux  accumulés  et  formant  des  îlots  flottants.  Le  nid  est 
formé  d'herbages  divers,  de  roseaux  et  de  graminées,  les  plus  fines 
réservées  pour  la  cavité  centrale.  La  ponte  est  de  trois  ou  quatre 
œufs  ;  ceux-ci  varient  du  gris  fauve  au  brun  olivâtre,  les  taches  super- 
ficielles sont  brunes  ou  noirâtres  et  les  inférieures  grises;  ils  mesu- 
rent environ  41  millim.  sur  30.  Les  deux  parents  concourent  à  l'incu- 
bation. 

GENRE    CLXI 

RISSE   (MOUETTE).   —  RISSA 

L.vRtrs,  auctonun  pluriraorum. 

Gavia,  Boie,  Isis,  1822,  p.  563. 

RissA,  Steph.  Shaw's  Gen.  Zool.  XIII,  1.  p.  181  (1825). 

Chkimonia,  Kaup,  Nat.  Syst.  p.  84  (1829). 

Laroides,  Rrehm,  Isis,  1830,  p.  904. 

Car.  —  Caractères  généraux  des  Lariis  dont  ce  genre  diffère  par  un  bec 
plus  court,  corapiimé  et  arqué,  des  tarses  relativement  plus  courts,  et  par 
l'absence  de  pouce  proprement  dit,  cet  organe  étant  remplacé  par  un  tuber- 
cule généralement  dépourvu  d'ongle  ;  queue  un  peu  échancrée  chez  les 
jeunes,  égale  chez  les  adultes. 

Hab.  —  Les  côtes  septentrionales  de  rAllantique  et  du  Paci- 
fique. 


—  606  — 

296.  —  La  Mouette  ou  Risse  tridactyle 

RISSA  TRIDACTYLA,  Macgill,  ex  Lin. 

(PI.  298) 

Labus  RISSA  et  L.  tridactylus,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p,  224  (1766). 
Larus  albus,  p.  L.  s.  Miill.  Natursyst.  p    108  (1776). 
Larus  ciNERARius,  Fab.  (nec  Lin.),  Faun.  Groenl.  p.  101  (1780). 
Larus  riga,  Gmel.  Syst.  nat.  I,  p.  594  (1788). 
Larus  n^vius,  Schiiff.  Mus.  Orn.  p.  64  (1789). 

Larus  torquatus  et  gavia,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  II,  pp.  328,  329  (1811). 
Gavia  tridactylus,  Boie,  Isis.,  1822,  p.  563. 

RissA  BRUNNiCHii,  Steph.  Sliaw's  Gen.  Zool.  XIII,  1.  p.  181,  pi.  21  (1825). 
Cheimonea  tridactylus,  Kaup,  Nat.  Syst.  eur.  Th.  pp.  84,  196  (1829). 
Laroides  tridactylus,  rissa  et  minor,  Brm.,  Isis,  1830,  p.  994. 
RissA  ciNEREA,  Eyt.  Cat.  Br.  B.  p.  52  (1836). 
Rissa  tridactyla,  Gray,  List.  Gen.  Birds,  p.  79  (1840). 
Rissa  brachyrhynchus,  Bruch  (nec  Gould)  Journ.  f.  Orn.  1853,  p.  103. 
Rissa  nivea,  Bonap.  (née  Pall.),  Naumannia,  1854,  p.  112. 
Rissa  borealis  et  gregaria,  Brm.  Naumannia,  1855,  p.  294. 
Rissa  kotzebui,  Bonap.  Consp.  av..  II,  p.  226  (1856). 
Larus  tridactylus  var.  Kotzebui,  Coues,  Key,  1872,  p.  314. 

Rissa  tridactyla  pollicaris,  Baird,  Brew.  et  Ridgw.,  Water-Birds  N.  Am.  II, 
p.  202  (1874). 

Die  Dreizehen  Meve,  en  allemand. 

The  Kittiwake,  en  anglais. 

De  Drieteenige  Meeuw,  en  flamand. 

Taille  :  O-^SS  ;  ailes  0^29. 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  D'un  blanc  pur  ;  manteau  et 
ailes  d'un  gris  bleuâtre,  les  scapulaires  et  les  rémiges  secondaires  terminées 
de  blanc  ;  rémiges  primaires  noires  à  leur  extrémité,  la  première  avec  la 
barbe  externe  également  noire.  Bec  d'un  jaune  verdâtre,  plus  clair  à  la 
pointe  ;  iris  brun  ;  pattes  noirâtres,  les  membranes  tirant  sur  le  brun. 

En  hiver.  —  Partie  postérieure  du  vertex  et  nuque  d'un  gris  bleuâtre,  ainsi 
qu'une  tache  de  même  couleur  plus  ou  moins  apparente  devant  l'œil;  3®,  4° 
et  5®  rémiges  primaires  avec  une  tache  blanche  à  l'extrémité  de  la  partie 
noire;  le  reste  comme  en  été. 

Jeune.  —  Tête  et  parties  inférieures  blanches,  une  tache  grise  plus  ou 
moins  apparente  devant  l'œil;  région  parotique  cendrée  ;  haut  du  dos  noi- 
râtre varié  de  blanc;  manteau  et  ailes  d'un  gris  bleuâtre,  mais  une  large 
bande  d'un  brun  noirâtre  traversant  le  haut  de  l'aile  dans  sa  longueur  ;  bord 
externe  de  l'aile  également  brun  ;  rémiges  primaires  d'un  brun  noirâtre  avec 
le  bord  interne  blanc  ;  queue  blanche  avec  une  bande  terminale  d'un  brun 
noirâtre.  Bec  d'un  noir  olivâtre  ;  iris  brun  ;  pattes  olivâtres. 

Poussin.   —  Tête,  cou   et  parties  inférieures  d'un  blanc  pur  ;  parties 


—  607  — 


supérieures  d'un  gris  cendré  sans  taches.  Bec  brun  jaunâtre;  pattes  d'un 
brun  roussâtre. 

jy^^^  —  La  Mouette  tridactyle  est  une  espèce  circumpolaire  qu'on 

rencontre  jusqu'au  delà  du  82° 
1.  N.  (Parry).  Elle  est  com- 
mune, en  été,  aux  îles  Féroé 
{Graba),  en  Islande  (Faber),  au 
Spitzberg,  à  la  Nouvelle-Zemble 
[de  Heuglin)  et  sur  toutes  les 
côtes  de  l'Océan  Glacial;  elle 
niche  aussi  sur  les  côtes  de  la 
Norwège  jusque  vers  le  62°, 
ainsi  que  sur  les  côtes  rocailleuses  de  l'Angleterre,  de  l'Ecosse  et  de 
l'Irlande,  aux  îles  Orcades,  Shetland,  Hébrides  et  de  St-Kilda 
(Seebohm).  En  Asie  elle  niche  jusque  sous  le  45°  (Iles  Kouriles)  et 
en  Amérique  jusqu'au  53°  environ. 

Cette  espèce  hiverne  à  partir  des  côtes  septentrionales  de  la  mer 
du  Nord,  plus  rarement  prés  de  la  Baltique  [Reichenoio)  où  elle 
monte  cependant  quelquefois  jusqu'au  sud  de  l'Esthonie  {B.  Meyer), 
mais  elle  ne  paraît  pas  avoir  été  observée  dans  le  golfe  de  Finlande. 
A  l'époque  des  passages,  elle  est  extrêmement  abondante  sur  toutes 
les  côtes  de  l'Europe  occidentale,  mais  on  ne  l'observe  qu'acciden- 
tellement sur  celles  de  l'Italie  {Giglioli)  et  de  la  Grèce  {Lindermayer). 
En  été,  après  certaines  tempêtes,  on  en  voit  quelquefois  en  abon- 
dance sur  les  côtes  de  Belgique,  et  M.  A.  Croegaert  dit  qu'elle  se 
montre  alors  par  quantités  innombrables  sur  l'Escaut  près  d'Anvers, 
tandis  qu'elle  y  est  rare  en  d'autres  temps  ;  on  cite,  dit-il,  un  de 
ces  passages  en  été,  où  ces  oiseaux,  exténués  de  fatigue,  se  lais- 
saient prendre  à  la  main  sur  tous  les  navires.  Cette  espèce  hiverne 
également  aux  îles  Açores,  Madeire  et  Canaries  [Godman),  sur  les 
côtes  de  l'Espagne  {Saunders),  du  Portugal  {Rcyes),  du  Maroc 
{Favier)  et  de  l'Algérie  (Loche),  mais  elle  ne  visite  qu'irrégulièrement 
la  côte  égyptienne  [de  Heuglin)',  à  l'ouest  de  l'Afrique  elle  se  montre 
parfois  jusqu'au  SénésB\{Hartlaub).  Elle  est  rare  sur  la  mer  Noire 
au  sud  de  la  Russie  [de  Nordmann)  et  Ménétries  la  mentionne  sur 
la  mer  Caspienne,  mais  Radde  ne  l'y  a  jamais  observée.  On  la 
voit  aussi  en  Pologne  dans  les  diiïcrcntes  saisons,  mais  rarement 
(rac:ranoi^5/«);  en  hiver  elle  visite  quelquefois  la  Bohême  [Fritsch), 
les  lacs  de  la  Suisse  {Mcisner  et  ^chinz)  et  autres  pays  de  l'intérieur. 


—  608  — 

mais  par  sujets  isolés  qui  sont  probablement  emportés  par  des  coups 
de  vent. 

En  Asie,  la  Mouette  tridactyle  habite  la  zone  boréale,  le  Kamt- 
schatka  {Stejneger),  les  îles  Kouriles  [Seebohm)  et  probablement  la 
Sibérie  orientale,  où  Taczanowski  signale  le  R.  brachyrhyncha  qui 
ne  peut  être  l'oiseau  décrit  sous  ce  nom  par  Gould.  M.  Seebohm  dit 
qu'elle  se  montre  aussi  au  Japon,  ce  qui  ne  paraît  pas  impossible, 
mais,  d'après  M.  Saunders,  on  ne  la  verrait  en  hiver  ni  au  Japon, 
ni  en  Chine.  En  Amérique,  elle  habite  le  Groenland  {Holbôll)  et  la 
zone  boréale  en  été,  les  côtes  des  Etats-Unis  en  hiver  {Baird),  proba- 
blement jusqu'au  30"  1.  N. 

Mœurs.  —  La  Mouette  tridactyle  habite  les  côtes  maritimes,  mais 
elle  se  montre  aussi  sur  les  eaux  intérieures,  car  elle  remonte  parfois 
très  haut  le  cours  des  fleuves,  surtout  lors  des  tempêtes.  Elle  émigré 
des  régions  septentrionales  lin  septembre  pour  se  rendre  sur  les  mers 
libres  de  glaces,  et  on  la  rencontre  alors  souvent  en  pleine  mer  très 
loin  des  côtes  ;  elle  retourne  dans  le  Nord  au  commencement  de  mars. 

Cet  oiseau  est  surtout  marin.  Naumann  a  remarqué  que  les  sujets 
qu'on  rencontre  dans  les  champs  loin  de  la  mer,  sont  tellement  épuisés 
qu'ils  meurent  souvent  de  faim;  il  a  même  trouvé  des  individus  morts 
dont  l'estomac  était  complètement  vide,  alors  qu'il  y  avait  près  de  là 
une  eau  qui  leur  offrait  une  nourriture  abondante.  Ceci  paraît  démon- 
trer que  ces  oiseaux  ont  été  chassés  par  une  tempête  qui  les  a  empê- 
chés de  pêcher.  Par  ses  mœurs,  la  Mouette  tridactyle  ressemble 
engénéral  aux  espèces  précédentes.  Elle  marche  peu  et  avec  diflîculté, 
nage  d'autant  mieux  et  beaucoup,  vole  avec  légèreté  et  vite,  tantôt 
haut,  tantôt  bas  en  décrivant  des  ondulations  les  plus  capricieuses,  ou 
plane  en  cercle  au-dessus  de  l'eau.  Elle  est  moins  remuante  que  la 
plupart  des  autres  Mouettes,  fort  paisible  et  excessivement  sociable, 
aussi  la  voit-on  toujours  par  troupes  composées  parfois  de  milliers 
d'individus  ;  elle  vit  aussi  en  bons  rapports  avec  les  autres  palmipèdes 
qui  se  tiennent  dans  son  voisinage.  Dans  le  Nord,  elle  ne  témoigne 
aucune  crainte  de  l'homme,  mais  dans  nos  contrées  elle  se  montre  plus 
défiante,  sans  être  cependant  aussi  farouche  que  bien  d'autres. 
<  Il  est  impossible,  dit  A.  Brehm,  de  ne  pas  admirer  la  douceur  de 
ces  êtres,  et  on  est  ravi  de  voir  l'harmonie  dans  laquelle  vivent  des 
milliers  d'individus  piaillant  et  criant,  il  est  vrai,  mais  sans  se  dis- 
puter ;  et  toute  la  peine  que  chacun  d'eux  se  donne  pour  conserver, 
au  milieu  de  cette  multitude,  la  place  que  les  circonstances   lui  ont 


-  609  — 

assignée.  La  Mouette  triclactyle  ne  s'occupe  guère  des  autres  oiseaux; 
d'autres  laridés  vivent  sur  la  même  montagne,  sans  qu'il  y  ait  de 
confusion,  car,  de  même  que  la  bande  reste  étroitement  resserrée  sur 
la  mer,  de  même  aussi  les  individus  qui  couvent,  occupent  une  partie 
déterminée  de  la  montagne.  En  dehors  de  l'époque  des  amours, 
l'espèce  est  des  plus  silencieuses  de  sa  famille;  mais,  durant  cette 
période,  elle  ne  cesse  de  pousser  divers  cris  :  tantôt  elle  fait  entendre 
des  ta,  ka,  kai  ou  taia,  tantôt  encore  dack,  dack,  ou  bien  elle  imite 
les  cris  d'un  enfant  qui  pleure,  ou  enfin,  le  bruit  d'une  petite  trom- 
pette. »  Cet  oiseau  se  nourrit  d'animaux  marins,  tels  que  petits  pois- 
sons, crustacés,  annélides-,  mollusques,  etc.,  mais  il  ne  touche  pas 
aux  animaux  morts. 

Reproduction.  —  La  Mouette  tridactylo  niche  en  grandes  colonies 
sur  les  saillies  et  dans  les  anfractuosités  des  rochers,  et  souvent  en 
société  d'autres  laridés  et  même  de  G  aille  mots  ;  Malmgren  dit  que  sur 
les  montagnes  occupées  uniquement  par  des  Mouettes,  la  tridactyle 
prend  possession  de  la  partie  moyenne,  le  L.  glaucus  du  sommet,  et 
le  Pagophila  eburnea  s'installe  à  la  partie  inférieure,  c'est  du  moins 
ce  qu'il  a  observé  dans  la  baie  Murchison.  '.<  Dans  les  montagnes  du 
Grimsoes  en  Islande,  dit  Faber,  il  niche  une  telle  quantité  de  ces 
Mouettes,  qu'elles  cachent  le  soleil  quand  elles  prennent  leur  vol, 
couvrent  complètement  les  rochers  quand  elles  sont  posées,  vous 
assourdissent  par  leurs  cris,  et  qu'elles  colorent  en  blanc,  au  moment 
de  l'incubation,  le  tapis  vert  de  cochléarias  qui  garnit  les  rochers.  » 

«  Celui  qui  n'a  jamais  vu  une  montagne  d'oiseaux  occupée  par  les 
Mouettes  tridactyles,  dit  HolbôU,  ne  peut  pas  se  faire  une  idée  de  leur 
nombre.  On  pourrait  peut-être  comparer  une  pareille  localité  à  un 
gigantesque  colombier  habité  par  des  millions  de  pigeons  de  même 
couleur.  Le  mont  Janjuatuch  a  une  longueur  d'une  demi-lieue,  et 
dans  toute  cette  étendue  il  sert  de  demeure  à  différentes  espèces  de 
Mouettes,  et  cela  jusqu'à  une  telle  hauteur,  que  les  oiseaux  les  plus 
élevés  ne  semblent  être  que  des  points  blancs.  »  A,  Brehm  a  vu  ime 
montagne  semblable  en  Laponie:  «  ...  Je  n'oublierai  jamais,  dit-il,  le 
jour  où  je  traversai  le  promontoire  de  Svarholtt,  non  loin  du  cap 
Nord.  J'assistai  à  ce  spectacle  après  que  mon  affectionné  ami,  le  capi- 
taine du  Potsdam,  m'eût  charge''  un  de  ses  fusils  pour  effaroucher  les 
Mouettes.  J'aperçus  une  muraille  colossale  qui  me  sembla  être  une 
gigantesque  ardoise  couverte  de  millions  de  petits  points  blancs; 
aussitôt  après  le  coup  de  fusil,  ces  points  se  détachèrent  en  partie  de 

Tome  II.  —  1893.  77 


—  610  - 

leur  fond  sombre,  s'avancèrent,  prirent  l'apparence  d'oiseaux,  de 
Mouettes  brillantes,  et  s'étendirent  sur  la  mer,  mais  en  masses  si 
épaisses  et  si  denses  qu'il  me  sembla  qu'une  avalanche  de  neige  s'était 
détachée  tout  à  coup  et  tourbillonnait  en  immenses  flocons  qui  tom- 
baient du  ciel  ;  ce  fut,  pendant  quelques  minutes,  une  véritable  neige 
d'oiseaux,  et  la  mer  en  fut  couverte  sur  une  étendue  que  l'œil  ne  pou- 
vait mesurer.  Malgré  cela,  la  muraille  semblait  tout  aussi  garnie 
qu'avant...  » 

Dans  la  construction  du  nid,  cette  espèce  opère,  suivant  Malmgren, 
avec  beaucoup  plus  d'art  qu'aucune  autre  Mouette.  Une  étroite  saillie 
ou  une  crevasse  sur  le  flanc  d'un  rocher  sert  de  base  au  nid,  formé  d'un 
mélange  de  mousse  et  d'argile  bien  maçonné;  d'en  bas,  ce  nid  a  l'ap- 
parence d'une  écaille  élevée,  dont  un  côté  arrondi  dépasse  la  saillie 
rocheuse,  tandis  que  l'autre  est  solidement  maçonsé  dans  le  roc.  Ces 
nids  sont  ordinairement  construits  à  une  hauteur  de  cent  à  deux  cents 
pieds  au-dessus  de  la  mer.  La  ponte  a  lieu  vers  la  mi-juin  (1)  ;  celle-ci 
se  compose  de  deux  à  quatre  oeufs  ovoïdes,  parfois  ventrus,  mats,  d'un 
blanc  grisâtre,  jaunâtre,  verdâtre  ou  roussâtre,  avec  des  points  et  des 
taches  de  forme  variable,  dont  les  profondes  sont  d'un  gris  vineux, 
les  superficielles  d'un  brun  plus  ou  moins  roussâtre.  Ils  mesurent  en 
moyenne  53  millim.  sur  40. 

Mâle  et  femelle  couvent  alternativement  pendant  trois  semaines. 
Au  commencement  de  juillet  les  petits  sont  éclos  et  les  parents  sont 
alors  très  occupés  à  les  nourrir,  surtout  quand  ils  deviennent  plus 
grands  ;  à  ce  moment  les  poussins  joignent  leurs  cris  à  ceux  des 
adultes,  et  l'on  comprend  ce  que  doivent  être  les  clameurs  qui 
s'échappent  de  millions  de  gosiers  !  Vers  la  mi-août,  les  premiers  nés 
peuvent  prendre  leur  vol  et  s'éloignent  bientôt  avec  leurs  parents  des 
lieux  où  ils  ont  vu  le  jour. 

Remarque.  —  Dans  ma  dernière  liste  des  Vertébrés  de  la  Belgique 
(2),  j'ai  encore  mentionné,  mais  avec  doute,  la  Mouette  blanche  ou 
sénateur  {Pagophila  ehurnea).  Je  ne  trouve  réellement  aucune  cap- 
ture indiquée  pour  notre  pays,  ce  qui  m'engage  à  la  supprimer. 

En  1842,  M.  le  Baron  de  Selys-Longchamps  la  signale  dans  sa 
Faune  belge  d'après  des  indications  de  chasseurs,  mais  il  déclare  qu'il 
n'est  pas  certain  que  cette  espèce  ait  été  tuée  en  Belgique.  C'est  pro- 

(1)  Voy.  Malmgrren,/o«r«.  f.  Orniih.  1863,  p.  375  et  1865,  p.  203. 

(2)  Cette  liste  se  trouve  à  la  fin  de  mon  petit  ouvrage  sur  les  Animajix  nuisibles  de  la  Belgique, 
p.  190  (1893). 


—  611  — 

bablement  sur  ces  renseignements  douteux  que  feu  mon  père  a  cru 
devoir  faire  figurer  cette  espèce  dans  son  ouvrage  sur  les  oiseaux 
indigènes,  car  il  n'indique  aucune  capture.  Le  Baron  F.  Fallon  paraît 
avoir  suivi  les  auteurs  précédents. 

La  présence  de  la  PagophUa  ehurnca  (figurée  pi.  299)  sur  nos 
côtes  n'est  cependant  pas  tout  à  fait  impossible,  car,  tout  en  étant 
sédentaire  dans  la  zone  polaire,  elle  visite  accidentellement  les  îles 
Britanniques,  et  il  paraît  qu'elle  a  même  été  capturée  sur  les  côtes  de 
Hollande  et  de  France. 

GENRE  CLXII. 

STERCORAIRE.  —  STERCORARIUS. 

Stercorarius,  Briss.  Omith.  VI,  p.  150  (1760). 

Larus  (part.)  Lin,  Syst.  nat.  I,  p.  226  (1766). 

Catharacta,  Fab.,  Faun.  Groenl.  p.  103  (1780). 

Catarractes,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  II,  p.  309  (1811). 

Lestris,  lUig.  Prodr.  p.  273  (1811). 

Megalestris,  Bonap.  Cat.  Farz.  p.  11  (1856). 

BuPHAGUs,  Coues,  Pr.  Acad.  nat.  se.  Phiktd.,  1863,  p.  125. 

Car.  —  Bec  peu  comprimé,  revêtu  d'une  sorte  de  cire  qui  s'étend  au  delà 
de  la  moitié  de  sa  longueur;  mandibule  supérieure  crochue,  l'inférieure  plus 
ou  moins  anguleuse  à  la  rencontre  de  ses  branches;  narines  en  fente  étroite, 
percées  à  l'extrémité  de  la  cire,  plus  près  de  l'extrémité  que  de  la  base  ;  ailes 
aiguës  ;  queue  plus  ou  moins  cunéiforme,  les  deux  rectrice.s  médianes  parfois 
très  allongées  à  l'âge  adulte  ;  quatre  doigts,  pouce  élevé  ;  ongles  recourbés, 
aigus,  creusés  en  dessous.  Teinte  dominante  brune. 

Ilab.  —  Ce  genre  est  presque  cosmopolite,  mais  il  est  particuliè- 
ment  représenté  dans  les  zones  polaires, 

297.  —  Le  Stercoraire  brun. 

STERCORARIUS  CATARRHACTES,  Vielll.  ex.  Lin. 

(Pi.  300.) 

Larus  kuscus,  Briss.  Orn.  VI,  p.  165  (17G0). 

Catharacta  .SKUA,  Briinn.  Oim.  Bor.  p.  33  (1764). 

Larus  catarractes,  Lin.  Sijsl.  nat.  I,  p.  226  (1766). 

Larus  keeask,  Lath.  Ind.  Or?/.  II,  p.  818  (1700). 

Lestris  catharractes,  Uli;,'.  Prodr.  p.  273  (1811). 

Lestris  catarractes,  Tcni.  Man.  d'Orn.  \>.  511  (1815). 

Catarracta  ku.sca,  Lcach.  .S'.  Oit.  M.  li.  Ur.  Mus.  p.  10  (1816\. 

Stercorarius cATAKKiiAiTEs,  Vioill.  A'.  Dict.  d'hisi.  nai.  \\\II,  |i.  154  (1810). 


612 


Catarractes  vulgaris,  Flem.  Hist.  Brit.  An.  p.  137  (1828). 
•  Lestris  skua,  Brm.  Isis,  1830,  p.  992. 
Stercorarius  pomarinus,  Vieill.  (nec  Tem.(,  Gai.  Ois.  p.  220,  pi.  288  (1834). 
Stercorarius  cataractes,  de  Selys,  Faune  belge,  p.  155  (1842). 
Megalestris  catarrhactes,  Bp.  Cat.  Parzudaki,  p.  11  (1856). 
Lestris  fusca,  C.  F.  Dubois,  PI.  col.  ois.  Belcj .  III,  p.  et  pi.  238  (1860). 
BuPHAGUS  SKUA,  Côues,  Proc.  Ac.  Nat.  Se.  Philad.,  1863,  p.  125. 
Stercorarius  fuscus,  A.  Dubois,  Consp.  syst.  geogr.  Av.  Eur.,  p.  33  (1871). 
Megalestris  skua,  Ridgw.  Nom.  N.  Arn.  Birds,  p.  53  (1881). 
Die  grosse  Raubmeve,  en  allemand. 
The  GREAT  Sk.ua,  en  anglais. 
De  groote  Jager,  en  flamand. 

Taille:  0M2;  ailes  0,39. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  Capuclion  d'un  brun  foncé  ;  parties 
supérieures  de  même  couleur,  mais  marquées  de  stries  et  de  taches  d'un  roux 
jaunâtre  ou  blanchâtre  ;  rémiges  d'un  brun  noirâtres-lés  cinq  premières 
blanches  à  la  base  jusqu'à  la  partie  moyenne,  leur  baguette  également  blan- 
che, la  première  avec  la  barbe  externe  noirâtre  ;  gorge  brune  ;  les  autres 
parties  inférieures  d'un  brun  roussâtre  fauve,  le  cou  et  la  poitrine  striés  de 
jaunâtre  et  les  plumes  des  flancs  bordées  de  blanc  jaunâtre  ;  queue  brune, 
blanche  à  la  base,  mais  le  blanc  est  caché  par  les  couvertures.  Bec  d'un  noir 
verdâtre  à  la  base,  noir  à  son  extrémité  ;  iris  brun  ;  pattes  noires. 

Jeune.  —  D'après  Naumann,  il  est  de  couleur  plus  uniforme  avec  des  stries 
claires  au  cou  et  sur  la  poitrine,  et  d'autres  moins  distinctes  sur  les  couver- 
tures des  ailes. 

Poussin.  —  Duvet  épais,  mou  et  assez  long,  d'un  gris  brunâtre  uniforme 
et  à  peine  plus  sombre  sur  la  tête  et  le  dos;  bec  d'un  gris  noirâtre;  iris  gris- 
brun  ;  pattes  grisâtres  (Naumann.) 

jldl)^  —  Cet  oiseau  ne  paraît  nicher  qu'en  Islande  {Faber),  aux  îles 

Féroé  et  Shetland  {Graba),  ainsi 
qu'à  l'île  Lofoten  près  de  la  côte 
norwégienne  (Saunders)  entre 
le  68°  et  le  69M.  N.  qui  est  sa 
limite  septentrionale  ;  il  est  rare 
sur  les  côtes  de  la  Norwège 
(Collett),  du  Danemark  {Kjaer- 
bôlling),  mais  visite  en  hiver  les 
côtes  allemandes  de  la  mer  du 
Nord,  plus  rarement  celles  de  la  Baltique  {Naumann).  Il  visite  avec 
plus  ou  moins  de  régularité  les  côtes  de  l'Ecosse  et  de  l'Angleterre, 
plus  rarement  celles  de  l'Irlande  {Seebohm).  Il  se  montre  accidentel- 


—  613  — 

lement,  après  de  violentes  tempêtes,  sur  les  côtes  de  Hollande  [Schlé- 
gel),  de  la  Belgique,  de  la  France  {Degl.  et  Gerbe),  de  l'Espagne,  du 
Portugal,  et  on  en  voit  chaque  hiver  dans  le  détroit  de  Gibraltar  {Irby). 
Sa  présence  dans  la  Méditerranée  est  tout  à  fait  accidentelle:  M.  A. 
von  Homeyer  dit  en  avoir  vu  quelques-uns,  pendant  l'été  de  1861, 
entre  les  îles  Baléares  et  Barcelone. 

L'individu  capturé  à  l'île  de  Malte  et  signalé  par  M.  Wright  serait, 
d'après  M.  Saunders,  un  S.  pomarinus  et  non  un  S.  catarrhactes.  Un 
sujet  a  été  tué  à  coups  de  pierres  en  Bohême  près  de  Sadova  en  sep- 
teptembre  1865  [Fritsch),  et  deux  autres,  non  adultes,  ont  été  tués  en 
Moravie  en  septembre  1851  {Tschusi-Schmidhofen).  Enfin,  d'après  le 
colonel  Irby,  Favier  aurait  observé  un  individu  de  cette  espèce  près 
de  Tanger,  en  décembre  1852. 

Ce  Stercoraire  se  montre  également  au  sud  du  Groenland  {HolbOll), 
mais  ses  apparitions  en  Amérique  paraissent  accidentelles;  Bernard 
Ross  dit  cependant  l'avoir  trouvé  près  des  bouches  du  Mackenzie  et 
sur  le  grand  lac  des  Esclaves,  au  nord  duquel  il  serait  très  rare  ;  il 
est  donc  probable  que  cet  oiseau  habite  les  côtes  de  la  baie  d'Hudson, 
mais  les  auteurs  américains  sont  peu  d'accord  à  ce  sujet.  Baird  dit 
posséder  un  individu  provenant  des  côtes  de  Californie, 

Mœurs.  —  Le  Stercoraire  brun,  aussi  appelé  Labbe  cataracte,  est 
un  oiseau  sédentaire  et  errant;  après  la  reproduction,  un  certain 
nombre  de  ces  oiseaux  quittent  leur  séjour  d'été  pour  errer  à  l'aven- 
ture; d'autres  demeurent  dans  le  Nord  et  cherchent  leur  nourriture 
aux  endroits  où  la  mer  n'est  pas  prise  par  les  glaces.  Il  arrive,  cepen- 
dant, que  de  violentes  tempêtes  en  chassent  parfois  sur  les  côtes  et 
même  à  l'intérieur  des  pays  de  l'Europe  centrale  et  cela  à  différentes 
époques  de  Tannée;  c'est  ainsi  que,  d'après  Naumann,  on  a  capturé 
un  de  ces  oiseaux  près  de  Breslau  en  juillet,  et  un  autre  près  de 
Mayence  en  avril. 

Ce  Stercoraire  ne  vit  d'habitude  que  sur  la  pleine  mer  et  on  le  ren- 
contre souvent  à  plusieurs  lieues  des  côtes;  ce  n'est  qu'au  moment  de 
la  reproduction  qu'il  séjourne  sur  les  rochers  et  dans  les  dunes.  Il 
tient  à  la  fois  des  lariens  et  des  oiseaux  de  proie  ;  son  maintien,  sa 
démarche  et  ses  mouvements  ne  diffèrent  pas  de  ce  que  nous  offrent  les 
Goélands;  il  court  vite,  nage  bien,  la  poitrine  très  enfoncée,  se  repose 
parfois  longtemps  sur  l'eau  et  s'élève  des  liots  avec  la  plus  grande  ûici- 
lité.  Son  vol  est  varié,  rapide  et  rappelle  davantage,  par  ses  allures 
brusques  et  inattendues,  celui  de  certains  rapaces;  l'oiseau  plane  par- 
fois longtemps  sans  mouvoir  ses  ailes  et  en  décrivant  de  grands  cercles 


—  614  — 

dans  l'espace,  comme  le  fait  l'Aigle.  Il  ressemble  encore  aux  oiseaux 
de  proie  par  la  conformation  de  son  bec,  et  par  son  naturel  envieux, 
malicieux,  méchant,  vorace  éternel;  il  ne  vit  en  bonne  intelligence 
avec  aucun  autre  oiseau  et  il  est  un  objet  de  haine  générale.  «  Il  se 
nourrit,  dit  Graba,  de  tout  ce  qui  est  chair,  qu'elle  soit  vivante  ou 
morte.  Je  l'ai  vu  d'un  seul  coup  de  bec  briser  la  tête  d'un  Macareux  ; 
il  arrache  même  les  yeux  aux  agneaux  nouveau-nés  et  leur  ouvre  le 
crâne  pour  dévorer  leur  cervelle,  pille  les  nids  de  tous  les  oiseaux  de 
mer,  enlève  les  œufs  et  les  poussins,  d'où  la  haine  qu'il  inspire  aux 
autres  palmipèdes.  Aucun  oiseau  ne  niche  dans  ses  environs,  et  aucun 
ne  séjourne  sur  les  lacs  intérieurs  où  des  Stercocaires  ont  l'habitude 
de  se  reposer;  les  plus  courageux  l'attaquent  partout  où  il  se  montre, 
chacun  le  regarde  avec  eifroi  quand  il  fait  sa  ronde  sur  les  côtes,  et 
ceux  qu'il  poursuit  se  jettent  dans  les  flots  pour  lui  échapper  en  plon- 
geant. Ce  Stercocaire  attaque  même  avec  opiniâtreté  l'homme  et  les 
mammifères  qui  s'approchent  de  son  nid,  et  leur  donne  de  violents 
coups  de  bec  sur  la  tête  ;  les  habitants  des  îles  Féroé,  pour  se  préserver 
de  ses  atteintes,  tiennent  un  couteau  pointu  au-dessus  de  leur  coiffure 
sur  lequel  les  plus  hardis  viennent  s'embrocher.  Plus  l'on  s'approche 
des  nids  et  plus  les  vieux  Stercoraires  entourent  le  visiteur,  sur  lequel 
ils  finissent  par  fondre  obliquement  (1)  ».  Faber  a  constaté  le  même 
fait  en  Islande,  et  il  ajoute  que  son  chien  a  eu  beaucoup  à  souffrir  des 
coups  de  bec  de  ces  oiseaux. 

«  Son  goût  pour  la  pillage,  dit  Naumann,  est  surtout  prononcé  à 
l'époque  où  il  a  lui-même  des  jeunes.  Le  Stercoraire  brun  pille  alors  les 
nids  qui  se  frouvent  par  milliers  sur  ce  qu'on  appelle  les  montagnes 
d'oiseaux,  et  enlève  les  oeufs  et  les  poussins  pour  les  porter  à  sa 
propre  couvée.  Un  cri  d'effroi  général  est  jeté  par  mille  gosiers  à  la  fois 
aussitôt  que  cet  audacieux  voleur  s'approche  d'un  pareil  lieu  de  repro- 
duction; cependant,  malgré  ces  démonstrations,  il  n'y  a  pas  un  seul 
oiseau  qui  ose  s'opposer  sérieusement  à  ses  projets  pervers;  il  s'em- 
pare du  premier  jeune  qui  s'offre  à  lui  et  s'éloigne,  tandis  que  la  mal- 
heureuse mère  crie  inutilement  et  le  poursuit  un  instant  au  vol.  Dès 
qu'il  n'est  plus  poursuivi,  il  descend  sur  l'eau,  tue  sa  victime,  l'avale 
et  se  dirige  vers  ses  petits  auxquels  il  la  donne  après  l'avoir  régur- 
gitée. Cela  ne  le  gêne  pas  de  se  rendre  plusieurs  fois  par  jour  à  une 
montagne  d'oiseaux,  même  quand  celle-ci  se  trouve  à  une  distance  de 
deux  lieues  de  son  nid.  »  Sa  voracité  est  en  rapport  avec  son  besoin 

(i)  Graba,  Tagebuch  gef.  auf  einer  Reise  nach  Far'o,  p.  187. 


—  615  - 

incessant  d'action,  aussi  chasse-t-il  aussi  bien  en  volant  qu'en 
nageant.  Dès  qu'il  aperçoit  des  oiseaux  pêcheurs,  il  s'en  approche, 
les  observe  et  attend  qu'ils  aient  capturé  une  proie;  mais  alors  il  fond 
sur  eux  avec  une  audace  incroyable  et  les  force  à  lui  abandonner  leur 
butin. 

Le  cri  de  ce  déprédateur  ressemble  à  celui  de  certains  Goélands  : 
en  volant  il  fait  entendre  le  cri  de  ag  ag,  au  repos  celui  àejia  et  pen- 
dant l'attaque  celui  de  hoo  Iioo. 

Reproduction.  —  C'est  en  avril  que  le  Stercoraire  quitte  l'Océan 
pour  se  rendre  à  l'endroit  de  la  reproduction,  qui  est  souvent  près 
d'une  eau  douce  de  l'intérieur,  parfois  éloignée  d'un  bon  kilo- 
mètre de  la  mer.  Il  niche  en  colonies,  mais  les  nids  sont  toujours 
éloignés  les  uns  des  autres  de  plusieurs  mètres,  et  sont  placés  soit 
sur  les  plateaux  des  montagnes,  soit  sur  les  versants  recouverts 
d'herbe  et  de  mousse,  soit  encore  sur  un  banc  de  sable.  Ce  no  sont 
cependant  pas  de  véritables  nids,  car  la  femelle  se  borne  à  piétiner 
l'herbe  ou  la  mousse  et  de  former  ainsi  une  excavation  arrondie,  dans 
laquelle  elle  fait  sa  ponte  vers  la  mi-mai;  parfois  aussi,  elle  dépose 
ses  deux  œufs,  jamais  plus,  dans  une  simple  fossette  creusée  dans  le 
sable  et  plus  ou  moins  garnie  de  quelques  brins.  Ces  œufs  ressemblent 
à  ceux  des  Goélands,  mais  sont  plus  ventrus  ;  leur  couleur  est  d'un 
vert  olivâtre  clair  passant  tantôt  au  brunâtre,  tantôt  au  vert  bleuâtre, 
et  marqués  de  taches  et  de  points  olivâtres,  cendrés  ou  bruns  ;  ils 
mesurent  de  67  à  72  milUmètres  sur  49  environ. 

Mâle  et  femelle  couvent  alternativement  pendant  quatre  semaines. 
A  la  fin  de  juin  on  trouve  des  jeunes  en  duvet  que  les  parents  nour- 
rissent de  mollusques,  de  vers,  d'œufs  d'oiseaux,  etc.;  un  peu  plus 
tard  ils  leur  apportent  des  jeunes  oiseaux,  des  poissons  et  autres 
animaux  de  petite  taille,  qu'ils  doivent  parfois  capturer  fort  loin.  11  a 
été  dit  plus  haut  avec  quel  courage  les  parents  défendent  leurs  petits 
contre  les  attaques  de  l'homme  et  des  carnassiers. 

298.  —  Le  Stercoraire  pomarin. 
STERCORARIUS  POMARINUS,    Vieill.  ce   Tc„i. 

(IM.  :-!()i.) 

STERCORARIUS  STRiATUS,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  152,  pi.  13,  fii,'.  ?,  juv.  (1760). 
Larus  parasiticus,  Mey.  (ncc  auct.),  T>iscltenb.  der  dfitt.  Voijclh.  II,  p.  490  (ISIO). 
Catahracta  parasita,  var.  Camtschatica,  Pall.  Zooip-.  Rosso-  As.U,  p.  312  (1811). 


—  616  — 

Lestris  pomarinus,  Temm    ilfaw.  d'Oni.  p.  514  (1815). 

Stercorarius  pomarinus,  Vieill.  N.  Dict.  dliist.nat.  XXXII,  p.  158  (1819). 

Cataractes  pomarina,  Steph.,  Shaw's  Gen.  Zool.  XIII,  p.  216  (1826). 

Cataractes  pomarinus,  Selby,  III.  Brit.  Om.  II,  p.  517  (1832). 

Lestris  sph^riuros,  Brm.  Isis,  1830,  p.  993. 

Lestris  striatus,  Eyton,  Hist.  rar.  Brit.  B.  p.  53  (1836). 

CopROTHERES  POMARINUS,  Reichb.  Nat.  Syst.  Vôg.  p.  V  (1852). 

Catarracta  POMARINA,  Bljth,  J.  A^.  Soc.  Reng.  XXVIII,  p.  406  (1859). 

Lestris  arctica,  C.  F.  Dubois,  PL  col.  Ois.  Belg.  III,  p.  et  pi.  237(1860). 

Lestris  pomerinus,  Newt.  Proc.  Z.  S.,  1861,  p.  401. 

Lestris  pomarhinus,  Prey.  Reise  Isl.  p.  417  (1862). 

Lestris  pomatorhinus,  Sclat.  Ibis.,  1862,  p.  297. 

Stercorarius  pomatorhinus,  Newt.  Baring-Gould's  Icel.  p.  418  (1863). 

Stercorarius  pomarhinus,  Malmgr.  Spitzb.  Fogl.  p.  411  (1864). 

Die  Mitti.ere  Raubmeve,  en  allemand . 

The  Pomarine  Skua,  en  anglais. 

De  Middelste  Jager,  en  flamand. 

Taille  :  0'M4  jusqu'à  l'extrémité  des  rectrices  médianes;  ailes  0,37. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  Dessus  de  la  tête,  loruras  et  partie 
antérieure  des  joues  d'un  brun  noirâtre,  les  plumes  occipitales  un  peu  effilées; 
cou  et  côtés  postérieurs  de  la  tête  d'un  jaune  d'ocre  pâle;  gorge  d'un  blanc 
jaunâtre  ;  manteau,  dos,  ailes  et  queue  d'un  brun  cendré  foncé;  rémiges  noi- 
râtres, blanchâtres  à  la  base  du  bord  interne,  les  baguettes  également  blan- 
ches, sauf  à  leur  extrémité  qui  est  brune;  parties  inférieures  blanchâtres,  la 
poitrine  et  les  flancs  avec  des  bandes  transversales  brunes;  bas-ventre,  sous- 
caudales  et  bas  des  jambes  d'un  brun  cendré;  rectrices  blanches  à  la  base  de 
leur  bord  interne,  les  deux  médianes  larges,  de  même  largeur  dans  toute 
leur  étendue  et  dépassant  les  autres  de  50  à  60  millim.  Bec  d'un  gris  de 
plomb  avec  l'extrémité  noirâtre;  iris  brun;  pattes  noires. 

Ou  rencontre  parfois  des  sujets  presque  unicolores  :  parties  supérieures 
d'un  brun  noii'âtre,  le  dessus  de  la  tête  presque  noir;  parties  inférieures  plus 
claires  et  de  teinte  fuligineuse  sur  l'abdomen. 

Jeune.  —  Dessus  de  la  tête  brun,  les  bordures  des  plumes  d'un  cendré  rous- 
sâtre;  côtés  de  la  tête  d'un  cendré  jaunâtre  légèrement  varié  de  brun;  toutes 
les  autres  parties  supérieures  d'un  brun  foncé  avec  les  bordures  roussâtres; 
gorge  blanchâtre  tachetée  de  brun;  parties  inférieures  d'un  blanc  roussâtre 
barré  de  brun,  cette  dernière  couleur  domine  sur  la  poitrine  et  sur  les  flancs; 
sous-caudales  barrées  alternativement  de  brun  et  de  blanc,  mais  leur  extré- 
mité est  d'un  blanc  roussâtre;  ailes  et  queue  comme  chez  l'adulte,  mais  les 
rectrices  médianes  ne  dépassant  pas  les  autres.  Bec  d'un  gris  verdâtre,  noi- 
râtre à  l'extrémité;  iris  brun;  tarses  d'uu  gris  bleuâtre,  bases  des  doigts  et  des 
membranes  d'une  teinte  plus  pâle,  le  reste  noirâtre. 

Poussin.  —  D'un  brun  de  suie  uniforme,  un  peu  plus  pâle  aux  parties  infé- 
rieures iSeebohn). 


—  617  — 


Hah.   —  Le  Stercoraire  pomarin  habite,   eu  été,   toute  la  zone 

polaire  où  on  l'observe  à  cer- 
tains endroits  jusque  sous  le 
82°  {Parry).  Il  est  rare  au  Spitz- 
berg, mais  généralement  répandu 
près  de  l'ile  des  Ours  et  de  la 
Nouvelle-Zemble,  où  il  est  moins 
commun  dans  les  parties  septen- 
trionales que  sur  les  côtes  méridio- 
nales et  à  Waigatz  [de  IIeuglia)\ 
il  ne  paraît  pas  nicher  sur  les  côtes  septentrionales  de  l'Europe; 
M.  Collettdit  cependant  que,  d'après  M.  Nordvi,  cet  oiseau  nicherait 
dans  les  marais  des  montagnes  de  l'intérieur  de  la  Finmark,  aussi 
lion  à  l'est  qu'à  l'ouest  de  ce  pays;  ce  qui  paraît  confirmer  la  chose, 
c'est  que  MM.  Newton  et  Simpson  ont  observé  de  grandes  troupes  de 
ces  oiseaux  près  du  cap  Nord  en  juin  1855.  Ce  Stercoraire  est  rare 
et  de  passage  dans  le  golfe  de  Finlande  {BUchner),  sur  les  côtes  de  la 
Suède  {ISilsson),  de  l'Allemagne  {Naumann),  mais  moins  rare  au 
Danemark  {KjuerhOlling).  Il  est  rare  mais  niche  en  Islande  (Faber),  et 
visite  en  hiver  les  îles  situées  au  nord  do  l'Ecosse  et,  avec  plus  ou 
moins  de  régularité,  les  îles  Britanniques  où  il  se  montre  parfois  en 
bandes  nombreuses  {Seebohm).  Il  est  de  passage  irrégulier  en 
Hollande  [SclUégel)  et  en  Belgique,  et  après  de  fortes  lempêtes  on  en 
voit  parfois  sur  l'Escaut  jusque  près  d'Anvers;  il  en  est  de  même  en 
France;  mais,  d'après  M.  A.  Lacroix,  cet  oiseau  séjourne  une  bonne 
partie  de  l'année  sur  les  étangs  et  les  côtes  maritimes  du  département 
des  Pyrénées-Orientales,  et  M.  L.  Olphe-Galliard  ajoute  qu'il  n'est 
pas  rare  en  hiver  près  de  Ilendaye.  Ce  Stercoraire  se  montre  irrégu- 
lièrement sur  les  côtes  du  l'urLugal  [Reyes)  et  de  l'Espagne  où,  en 
décembre  1867  il  fut  très  abondant  pendant  quelques  jours  à  Malaga 
{Saunders)\  M.  A.  von  Homeyer  dit  en  avoir  observé  ([uelques-uns  entre 
Barcelone  et  les  îles  Baléares, et  sa  présence  a  égalonieni  été  observée 
sur  les  côtes  de  la  pr()vin(;e  de  (  lérona  (  Vayrcda).  11  ne  se  montre 
cependant  qu'accidentellement  dans  la  Méditerranée:  on  signale  des 
captures  en  Piémont,  en  Lombardie,  en  Vénéti(\  en  Ligurie,  en 
l'oscanii,  en  Emilie  {^a/c(ulo)-i),  en  Modene  [Dunderlein),  en  Sardai- 
gne,  en  Sicile  et  à  Malte  [(iiglioli). 

(,)u('Iqn('s  ciiiiures  accidentelles  ont  également  tké  faites  en  Bohême 
{Kritsch),    en    Autriche   {c(j»t.   Pclzcln),  en  Hongrie  {Prcyer)  et   dans 
TuMi:  II.  —    18U3.  78 


—  618  — 

diverses  parties  de  l'Allemagne  comme  en  Silésie,  en  Saxe,  en  Thu- 
ringe,  sar  le  Rhin,  le  Mein,  l'Elbe,  l'Oder,  etc.  {Naumann). 

En  Afrique  il  a  été  capturé  près  de  Tanger  [Favier)  et  sur  diffé- 
rents points  de  la  côte  occidentale  jusque  sous  le  23°  1.  S.,  où  An- 
dersson  tua  deux  sujets  dans  la  baie  de  Wolwich.  En  Asie,  ce  Ster- 
coraire niche  sur  les  îles  et  les  côtes  de  la  Sibérie  septentrionale 
{Middendorff),  et  des  captures  accidentelles  ont  été  faites  au  Japon 
{Seebohm),  près  de  Moulmein  sur  la  côte  du  Ténasserim  sous  le 
16^22'  1.  N.  {Blyth)  et  au  cap  York,  la  pointe  septentrionale  de  l'Aus- 
tralie [Saunders]- 

Cet  oiseau  habite  également  le  Groenland  {Holbôll)  et  l'Amérique 
polaire,  la  baie  d'Hudson  {Richardson),  le  Labrador  {Coues)  et  il  se 
montre  en  hiver  jusqu'à  New- York  et  la  Pensylvanie  {Baird).  A 
l'ouest  on  l'observe  dans  l'Alaska  jusqu'à  la  pointe^de  Barrow,  mais 
c'est  la  moins  commune  des  trois  espèces  qui  vivent  dans  ces  parages 
[Murdoch).  D'après  M.  Seebohm,  on  l'aurait  également  pris  sur  des 
lacs  du  Mexique  et  sur  la  côte  du  Pérou. 

Mœurs.  —  Le  Stercoraire  poraarin  est  donc  une  espèce  arctique  qui 
se  montre  en  hiver  jusque  dans  la  zone  tropicale;  il  émigré  plus 
régulièrement  que  le  précédent,  surtout  quand  la  saison  est  rigou- 
reuse, et  les  jeunes  se  montrent  alors  parfois  très  loin  à  l'intérieur 
des  terres.  Pendant  certaines  années,  il  arrive  par  bandes  nom- 
breuses, et  c'est  par  milliers  qu'on  en  a  vu  durant  l'automne  de  1879 
et  de  1880  sur  les  côtes  anglaises  du  Yorkshire. 

Par  ses  mœurs,  cet  oiseau  ressemble  beaucoup  au  Stercoraire  brun, 
et  il  est  tout  aussi  vorace,  mais  comme  il  est  plus  petit  il  est  aussi 
moins  fort  ;  il  se  nourrit  de  la  même  manière  que  ce  dernier,  poursuit 
également  les  oiseaux  pêcheurs  pour  leur  enlever  leur  butin,  pille  les 
nids,  dévore  les  œufs  et  les  poussins  ainsi  que  tous  les  animaux  qu'il 
peut  maîtriser;  les  jeunes  qui  s'aventurent  dans  les  champs  y  font  la 
chasse  aux  vers,  aux  insectes,  aux  larves,  aux  mulots  et  aux  campa- 
gnols. Dans  les  toundras  de  la  zone  polaire,  dit  de  Heuglin,  il  fait  la 
chasse  aux  lemmings  qui  composent,  en  été,  sa  principale  nourriture; 
il  guette  sa  proie  d'un  endroit  élevé  ou  s'abat  sur  elle  du  haut  des 
airs.  Dans  la  première  quinzaine  de  septembre,  ces  oiseaux  se  ras- 
semblent par  troupes  composées  de  dix  à  trente  individus  pour  se 
rendre  dans  les  rochers  des  côtes  ;  leur  cri  est  grèh,  parfois  ivew  wew, 
ce  qui  ressemble  assez,  dit  Faber,  au  jappement  d'un  petit  chien. 

Reproduction.  —  Cet  oiseau  niche  dans  les  toundras  de  la  zone 


—  619  — 

polaire.  Middendorffl'a  trouvé  en  grand  nombre  près  du  fleuve  Tai- 
mjr,  où  ces  oiseau  firent  leur  apparition  le  6  juin;  le  7  juillet  il 
trouva  les  premiers  œufs  sous  le  74°  1.  N.  Ceux-ci  sont  déposés 
dans  la  mousse  au  nombre  de  deux,  sans  litière  particulière.  Ces  œufs 
varient  du  brun  olivâtre  à  l'olive  pâle,  et  sont  marqués  de  taches 
brunes  de  formes  diverses  et  ordinairement  plus  nombreuses  au  gros 
bout  où  elles  sont  confluentes,  les  taches  profondes  sont  d'un  gris 
cendré  ;  ils  mesurent  environ  63  millim.  sur  46. 

La  coloration  des  parties  ventrales  n'est  nullement  un  caractère 
sexuel;  on  voit  parfois  des  individus  à  abdomen  foncé  accouplés  avec 
des  S|UJets  à  abdomen  blanchâtre,  et  entre  ces  deux  extrêmes  on  ren- 
contre tous  les  intermédiaires. 

299.  —  Le  Stercoraire  parasite. 

STERCORARIUS  CREPIDATUS,  Vieill.  ex  Banks. 

(PI.  302  ) 

Catharacta  cei'Phi'S  et  coprotheres,  Rriiii.  Orti.  bor.  p.  30  (17fi4). 

Laris  CREPIDATUS,  Banks,  Hovkesioorth'f;  Voy.  II,  p.  15  (1773). 

Stercorarius  parasiticus,  Schaeff.  Mus.  Orn.  p.  62,  pi.  37  (1780). 

Larus  parasiticus,  Bodd.  (nec  Lin.)  Tab.  PI.  enl.  n»  991  (1783). 

Lestris  CREPIDATUS.  lUig.  Prodr.  p.  273  (1811). 

Catarracta  CEPPHUS,  Leach,  St/^t.  fat.  mam.  B.  Br.  Mus.  p.  39  (1816). 

Stercorarius  crepidatus,  Vieill.  A'^.  DicL  (h/nst.  nnt  XXXII,  p.  155(1810). 

Lestris  parasitica,  Fab.  Prodr.  Isl  Orn.,  p.  105  (1822). 

Cataractes  parasiticus,  Flem.  Brit.  an.  p.  138  (1828). 

Stercorarius  cepphus,  Swains.  Faun.  bor.  Am.  p.  432  (1831). 

Lestris  richardsoxi,  Swaing.  ibidem.,  pi.  73  (1831). 

Lestris  Bo.ii,  Schi.eepii  et  Brnickii,  i^rm.  Yiir/.  Deut^chl.  pp.  719,720,  723  (1831). 

Lestris  parasita,  Koys.  et  Blas.  Wirbeli.  Eur.  p.  XCV  (1840). 

Cataractes  richardsoni,  Macg.  il/a».  Brit.  B.  II,  p.  257  (1842). 

Lestris  spinicaudus,  Hardy,  R''v.  et  M<i<i.  de  zool.  1854,  p.  657. 

Lestris  parasiticus,  L.  parasiticus  xmr.  coprotheres,  Bp.  Consp.  av.  II,  pp.  208- 

209(1857). 
Lestris  thuliaca,  Pvey.  li'-i se  ?/.  LU.  p.  418  (1S62). 
Stercorarius  richardsoni,  Coues,  Pr.  Acad.  nat.  Se.  Phil.  1863,  p.  I.'î5. 
Stercorarius  parasiticus  var.  Tepiiras,  Malraj^r.  Bihanij  tillhrrôtt.  o>u  df^n  Svenska 

exped.  p.  8  (1804). 
Stercorarius  tephras,  Malragr.  Journ.  f.  Orn.  1865,  p.  1^92. 
Stercorarius  spinicauda,  Lay.  Birds  S.  Afr.  p.  360(1867). 
Stercorarius  asiaticus.  Hume,  Stray  Feath.  p.  269(1873). 
DiK  Schmarotzer-Raurmeve,  on  allemand. 
Tue  Iviciiardson's  Skua,  en  anj:;lais. 
Dk  Ki.kine  .I.vuer,  en  (lamand. 


—  620  — 


Taille  :  0™44  jusqu'à  l'extrémité  des  rectrices  médianes,  celles-ci 
dépassent  les  autres  de  0,08  à  0,11  ;  ailes  0,32. 

Deseription  des  deux  sexes  adultes.  —  Dessus  de  la  tête,  manteau,  dos, 
ailes  et  queue  d'un  brun  cndré  foncé;  cou  et  côtés  delà  tête  d'un  jaune 
d'ocre  clair,  blanchâtre  à  la  gorge  ;  poitrine  plus  ou  moins  cendrée  lavée  de 
jaunâtre  ;  côtés  de  la  poitrine,  flancs,  bas-ventre  et  sous-caudales  d'un  cen- 
dré brunâtre  plus  pâle  que  le  dos;  bas  de  la  poitrine  et  abdomen  blancs; 
rémiges  brunes,  noirâtres  à  l'extérieur,  toutes  les  baguettes  des  primaires 
blanches.  Bec  d'un  gris  sombre  ;  iris  brun;  pattes  noirâtres. 

On  rencontre  très  souvent  une  variété  d'un  brun  de  suie  uniforme,  mais 
un  peu  plus  pâîe  en  dessous  (1). 

Jeune.  —  Tête  d'un  cendré  brunâtre,  les  bordures  des  plumes  jaunâtres  ; 
une  tache  noire  devant  l'œil  ;  nuque  et  côtés  du  cou  d'un  cendré  jaunâtre 
striés  de  cendré  foncé  ;  goige  cendrée,  plus  claire  en  ayant,  les  plumes  fine- 
ment bordées  de  jaunâtie  ;  manteau,  dos  et  ailes  brun  foncé,  les  bordures  des 
plumes  d'un  cendré  jaunâtre;  sus-caudales  brunes,  barrées  de  blanc  ;  queue 
brune,  les  rectrices  médianes  dépassant  à  peine  les  autres;  poitrine,  abdomen 
et  jambes  blanchâtres  avec  des  taches  et  des  raies  d'un  cendré  brunâtre,  ces 
raies  sont  mieux  accentuées  sur  les  sous-caudales.  Bec  d'un  gris  de  plomb 
clair,  noirâtre  à  la  pointe;  tarses  et  base  des  doigts  bleuâtres,  le  reste  des 
doigts  et  les  membranes  noirs. 

Poussin.  —  Duvet  long  et  doux,  d'un  gris  brunâtre,  un  peu  plus  clair  en 
dessous. 


Hab. 


Ce  Stercoraire  habite  également  la  zone  polaire  en  été.  On 

le  trouve  alors  communément  au 
Spilzberg,  à  la  Nouvelle-Zemble 
[de  Heuglin),  sur  les  côtes  de  la 
Fin  mark,  de  la  Norwège  (  Collett) 
et  du  nord  de  la  Russie  jusqu'au 
82o2'  1.  N.  [Parry);  il  est  moins 
répandu  sur  les  côtes  de  la 
Suède  {Nilsson)  et  rare  dans  les 
golfes  de  Finlande  [Bûchner)  et 
de  Bothnie  {Palmén);  il  est  peu  répandu  en  hiver  au  Danemark 
{Kjaerbôlling)  et  sur  les  côtes  allemandes,  bien  qu'il  soit  de  tous  les 
Stercoraires  celui  qui  s'y  montre  le  plus  fréquemment,  et  on  l'a  même 


(1)  Cette  variété  est  figurée  sur  notre  planche  (fig.  1),  qui  porte  par  erreur  «  plumage  d'été.  » 
L'oiseau  adulte  a  le  même  plumage  en  toutes  saisons. 


—  621  — 

capturé  dans  le  Holdenbourg,  le  Hanovre,  le  Holstein,  le  Mecklem- 
bourg,  la  Poméranie,  la  Silésie,  le  Lausitz,  le  Brandebourg,  la  Saxe 
et  dans  la  province  Rhénane  [Naumann).  Il  se  montre  assez  irrégu- 
lièrement sur  les  côtes  de  Hollande  et  de  Belgique,  mais  après  les 
tempêtes  d'hiver  on  le  prend  quelquefois  sur  l'Escaut  jusqu'au  delà 
d'Anvers.  Il  niche  en  Islande  {Faber),  aux  îles  Féroé  [Feilden),  aux 
Hébrides  extérieures,  aux  îles  Orcades  et  Shetland,  et  lors  des  migra- 
tions on  le  voit  sur  les  côtes  de  l'Ecosse  et  de  l'Angleterre  orientale, 
plus  rarement  sur  les  côtes  occidentales  et  méridionales  ainsi  que  sur 
celles  de  l'Irlande  {Seebo/mi).  Il  visite  régulièrement  les  côtes  de 
France  et  n'est  pas  rare  eir  automne  prèsdeHendaye  [Olphe-Galliard); 
il  se  montre  aussi  régulièrement  sur  celles  du  Portugal  {Reyes)  et  de 
l'Espagne;  M.  Saunders  dit  en  avoir  eu  de  Malaga,  tant  adultes  que 
jeunes  de  l'année,  dès  les  premiers  jours  d'août  ;  mais  il  ne  visite  que 
très  accidentellement  l'Italie  où  l'on  ne  signale  que  quelques  captures 
{Giglioli),  et  il  en  est  de  même  en  Transylvanie  [Dcmford  et  Harvie- 
Broivn).  Cet  oiseau  se  montre  parfois,  à  la  suite  de  tempêtes,  bien  loin 
à  l'intérieur  des  terres;  c'est  ainsi  qu'on  en  a  prisa  Moscow  {Sabanaefll'), 
en  Pologne  (Taczanouski),  en  Hongrie  sur  le  lac  Neusiedler 
{von  Pelzeln),  en  Saxe  près  de  Halle  et  de  Loeberitz  {Rey),  en  Suisse 
{Fatio),  en  Savoie  [Hardy),  etc. 

Ce  ne  sont  généralement  que  de  jeunes  sujets  qui  s'aventurent  à  l'île 
Sainte-Hélène  [Hardy),  à  Tanger  [Irby)  et  sur  les  côtes  occidentales 
de  l'Afrique  jusqu'au  cap  de  Bonne-Espérance,  où  ils  sont  même  assez 
communs  de  décembre  à  février  [Layard). 

En  Asie,  on  rencontre  cette  espèce  au  nord  de  la  Sibérie  [Midden- 
rtfor/f)  jusqu'au  Kamtchatka  et  les  îles  du  Commandeur,  où  la  variété 
foncée  est  la  plus  abondante  [Stejneger).  En  hiver  on  la  voit  aux  îles 
Kouriles  («S'noz^j)  et  parfois  sur  les  côtes  du  Mékran  et  de  l'Inde  occiden- 
tale jusqu'à  Bombay  [Hume);  ou  l'a  m<une  capturée  à  la  Nouvelle- 
Zélande  Bulle?'). 

Ce  Stercoraire  habite  également  le  Groenland  {Holboll)  et  toute 
l'Amérique  boréale  jusqu'au  82";  il  est  comnuin  dans  le  détroit  de 
Behring,  aux  îles  Aléoutes  [Nelson)  et  dans  l'Alaska  [Turnci-);  il 
hivcine  sur  les  côtes  des  Etats-Unis  et  paraît  se  montrer  accident(dle- 
UKMit  au  Sud  jusqu'à  Rio-do-Janciro  [Sanmlers). 

Mœurs.  —  C'est  de  tous  les  Stercoraires  celui  (|u'oii  observe  le  plus 
souvent  sur  les  côtes  de  l'Europe  occidentale  ;  il  quitte  la  zone  polaire 
en  septembre  et  y  i'«M.)unn'  vers  la  lin  d'avril  ;  on  voit  cependant  (luel- 


^22  

quefois  sur  nos  mers  de  jeunes  sujets  en  plein  été,  mais  seulement 
après  de  fortes  tempêtes. 

Cet  oiseau  vit  par  couples  et  se  montre  souvent  dans  les  golfes  pro- 
fonds et  à  l'embouchure  des  fleuves,  qu'il  remonte  parfois  jusqu'à  plu- 
sieurs lieues  de  distance  de  la  mer;  ceci  se  voit  surtout  de  septembre 
à  novembre.  Il  s'aventure  fréquemment  loin  dans  l'intérieur  des  terres, 
même  dans  des  endroits  où  il  n'y  a  pas  d'eau  ;  là  on  le  voit  courir  dans 
les  champs  et  les  prés  à  la  recherche  de  vers,  de  larves,  d'insectes  et 
surtout  de  tipules  qu'il  attrape  très  adroitement.  Il  se  nourrit  en  outre 
d'oeufs  et  de  jeunes  oiseaux,  ainsi  que  de  poissons  qu'il  enlève  le 
plus  souvent  aux  petites  Mouettes  et  aux  Sternes.  Les  jeunes  et  les 
sujets  non  accouplés  vivent  en  bandes  et  errent  à  travers  la  campagne. 
D'après  de  Heuglin,  le  cri  de  cet  oiseau  est  héian  ou  guerok-guerok\ 
Faber  le  rend  par  ki-auio.  

Reproduction.  ■ —  Ce  Stercoraire  niche  entre  le  58°  et  le  82°  1.  N., 
mais  jamais  en  colonies.  L'accouplement  a  lieu  vers  la  fin  de  mai.  Les 
nids  sont  éparpillés  soit  dans  les  plaines  non  loin  des  montagnes  habi- 
tées par  des  Sternes  et  autres  oiseaux  de  mer,  soit  sur  des  collines 
et  de  préférence  sur  celles  occupées  par  des  Eiders.  La  ponte  a  lieu  en 
Islande  en  juin,  plus  au  Nord  en  juillet. 

Les  deux  œufs  que  pond  la  femelle  sont  simplement  déposés  dans 
l'herbe  ou  dans  la  mousse  sans  la  moindre  litière  sèche.  Ces  œufs  sont 
d'un  gris  olivâtre  avec  des  taches  d'un  brun  noirâtre,  plus  abondantes 
au  gros  bout;  ils  mesurent  56  millim.  sur  41  environ.  Quand  on  s'ap- 
proche d'un  nid,  les  parents  s'avancent  à  votre  rencontre  et  cherchent 
par  tous  les  moyens  à  attirer  l'attention  sur  eux  et  à  vous  éloigner  de 
leur  couvée  ;  au  besoin  ils  usent  des  procédés  les  plus  téméraires. 

II  a  été  dit  plus  haut  que  cette  espèce  présente  deux  variétés  :  l'une 
à  ventre  blanc,  l'autre  à  ventre  brun,  mais  elles  ne  peuvent  former 
des  races  distinctes.  Fai3er  dit,  en  eifet,  que  les  deux  variétés  s'accou- 
plent fréquemment,  et  que  tantôt  un  mâle  à  ventre  blanc  s'unit  à  une 
femelle  à  ventre  brun,  tantôt  c'est  l'inverse.  Il  est  du  reste  à  remar- 
quer qu'entre  les  formes  extrêmes  on  rencontre  tous  les  intermédiaires- 

300.   —  Le  Stercoraire   à   longue  queue. 

STERCORARIUS  LONGICAUDUS,  Briss. 

(PI.  303.) 

Stercorarius  longicaudus,  Briss  Oniith.  VI,  p.  155  (1760). 

Larus  parasiticus,  Lin.  Faun.  Suec.  p.  55  (1761)  ;  Syst.  nat.  I,  p.  226  (1766). 


—  6'2:^  — 

Catharacta.  parasitica,  Briin.  Orn.  Bor.  p.  37  (1764). 

Catarractes  parasita,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  II,  p.  310  (1811). 

Lestris  parasitica,  m.  Prodr.  j).  273  (1811). 

Lestris  parasiticus,  Tem.  Mwii.  (COrn.  p.  512  (1815) 

Stercorarius  longicaudijs,  Vieill.  A'.  Dût.  XXXll,  p.  157  (1819). 

Lestris  crepidata,  Brm.  (nec  Hanks),  Beilr.  z.  YoyeLk.  III,  p.  801  (1822). 

Lestris  buki'oni,  Boie,  /«s,  1822,  pp  562,  874. 

Stercorarius  cepphus,  Steph.  Shaw's  Gen.  Zool.  XIII,  1,  p.  211,  pi.  23  (1826). 

Lestris  macropteros  et  microrynchus,  Brm.  Yn(j.  Deutschl.  pp.  721,725  (1831). 

Lestris  lessoni,  Degl.  Méni.  Ac.  r.  Lille.,  p.  108  (1838). 

Lestris  cephus,  Key.s.  et  Blas.  Wirbeli.  Eur.  j).  XCV,  (1840). 

Stercorarius  longicaudatus,  He  Selys-Long.  Faune  helye,  p.  156  (1842). 

Lestris  longicaudatus,  Thomps.  Nat.  Hist.  Ireland,  III,  p.  399  1851). 

Lestris  hardyi,  Bp.  Tabl.  U.--Lonyipen.  {Compc.  Rend.  Xl.II  (1856). 

Stercorarius  buffoni,  Coues,  Pr.  Acad.  nat.  se.  Philad.  1863,  p.  136. 

Lestris  longicaudata,  v.  Heuglin.  Ibis.,  1872,  p.  65. 

Stercorarius  parasiticus,  Saurid.  Pr.  Zool.  Soc.  1876,  p.  330. 

Die  Kleixe  Raubmeve,  en  allemand. 

The  Buffon's  Skua,  en  anglais. 

De  Kleinste  Jager,  en  flamand. 

Remarque.  —  La  dénomination  spécifique  de  para.siticus  {para- 
sitica ou  parasita)  a  été  employée,  par  divers  auteurs,  pour  désigner 
tantôt  le  ,S.  crepidatus,  tantôt  le  S.  longicaudus  et  même  le  S.  po- 
marinus,  comme  le  démontre  la  synonymie  que  nous  donnons  de  ces 
espèces. 

La  plupart  des  auteurs  (Gray,  Gould,  de  Sélys-Longcliamps, 
Lawrence,  Blakiston,  Degland  et  Gerbe,  Coues,  Newton,  Anders- 
son,  Hume,  Bullor,  Sharpe,  etc.)  onl  pensé  que  le  nom  linnéen  se 
rapporte  au  crepidatus  do  Banks  {richardsoni,  Sw.),  mais  c'est  là  une 
grave  erreur.  Linné  a  décrit  son  Larus  parasiticus  d'une  manière 
précise  en  1761  dans  sa  Fauna  succica,  et  c'est  à  ce  \\\^o  (|ue  se 
rapporte  la  descripiion  du  aS'_^6-^.  nat.  Les  caractères  qu'il  (l()nn(>  dans 
sa  Fauna  des  rémiges  et  des  rectrices,  ne  permettent  pas  de  douter  de 
l'espèce  qu'il  avait  on  vue  ;  il  dit  en  efïet  :  «  rémiges  nigr;e,  rachi 
i,2nivea;  cauda  nigra  rotundata,  rectrices  duœ  intermedia^  ensi- 
formes  duplo  longiores  (p.  55,  n°  156).  >  Ces  caractères  ne  peuvent 
se  rapporter  (ju'aii  S.  Imujicaudus,  dont,  les  rectrices  méiliancs  attei- 
gnent en  elîet  une  longueur  double  des  autres,  et  dont  l<\s  deu.\ 
premières  rémiges  seulenx'ut  ont  leur  baguette  blanche. 

J'ai  conserve''  la  dénomination  de  /r>n^/>;«î<(/a.v,  adoptée  par  IJiisson 
et  \'i('ill()i,  alin  d'éviter  (jUi'  l'on  confonde  encore  le  .S^.  parasiticus 
de    Lintii''   (cl    de    lîninnich,    l 'allas,    Illigcr,    Temminck,   Audubon, 


624   - 


Meyer,  Saunders,  etc.)  avec  le  S.  parasiticus  {crepidatus)  des  auteurs 
mentionnés  plus  haut. 

Taille  :  0,34  sans  les  Ulets  de  la  queue  qui  dépassent  les  rectrices 
latérales  de  16  à  22  centimètres  ;  ailes  0,30. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  Même  système  de  coloration  que  le 
précédent,  mais  de  taille  un  peu  plus  petitp,  les  rectrices  médianes  beaucoup 
plus  longues,  et  le  manteau  d'une  teinte  plus  claiie.  Dessus  de  la  tête  d'un 
brun  noirâtre  ;  cou  et  côtés  de  la  tête  d'un  jaune  d'ocre  ;  gorge  blanchâtre; 
manteau,  dos,  sus-caudales,  base  des  rectrices  médianes  et  ailes  d'un  cendré 
brunâtre  ;  rémiges  et  queue  d'un  brun  noirâtre,  la  base  de  cette  dernière 
d'un  brun  cendré,  baguettes  des  deux  premières  rémiges  primaires  blanches, 
passant  au  noirâtre  à  leur  extrémité  ;  poitrine  et  haut  de  l'abdomen  d'un 
blanc  un  peu  jaunâtre  ;  bas-ventre  et  sous-caudales  cendrés.  Bec  d'un  gris 
sombre,  noirâtre  à  son  extrémité  ;  iris  brun  ;  tarses  etjjase  des  doigts  d'un 
gris  de  plomb,  le  restant  des  doigts  et  membranes  noir. 

Jeune.  —  Variable  suivant  l'âge.  Dessus  de  la  tête  d'un  cendré  jaunâtre 
clair,  tacheté  de  brun;  cou,  côtés  de  la  tête  et  gorge  d'un  blanc  jaunâtre 
sîde  avec  des  stries  brunes  sur  les  joues  ;  rémiges  comme  chez  l'adulte  ; 
queue  brune,  les  rectrices  médianes  dépassant  à  peine  les  autres  ;  poitrine 
d'un  cendré  brunâtre,  les  bordures  des  plumes  plus  claires;  abdomen  et 
sous-caudales  barrés  alternativement  de  brun  et  de  blanc  roussâtre,  mais 
les  bandes  sont  plus  larges  au  bas-ventre  et  sur  les  sous-caudales. 

Hab.  —  Le  Stercoraire  à  longue  queue  est  également  une  espèce 

polaire  ;  il  habite,  en  été,  le 
Spitzberg  {Malmgren),  mais  il 
est  bien  plus  abondant  sur  les 
côtes  occidentales  et  méridio- 
nales de  la  Nouvelle-Zemble  et 
même  en  pleine  mer  ;  mais  il 
est  moins  abondant  à  Waigatz 
[de  Heuglin)  et  n'existe  pas  en 
Islande, mais  bien  aux  îles  Féroé 
{Muller).  En  Finmark  il  est  plus  abondant  à  l'intérieur  de  la  région 
de  l'Est  où  il  niche  rarement  au  sud  du  68°  {Collett)  ;  il  est  également 
commun  sur  toutes  les  côtes  et  les  îles  de  la  Russie  septentrionale 
{Seebohm  et  H.  Broivn),  mais  il  ne  visite  qu'accidentellement  les 
côtes  de  la  Suède  et  de  l'île  Gottland  {Nils. ,  Andr.),  de  la  Finlande 
(Palmén)  et  les  bouches  de  la  Neva  [Bilchner).  Cet  oiseau  se  montre 
isolément  sur  les  côtes  du  Danemark  {Kjaerb.),  de  Helgoland  {Gâtke) 


—  625  — 

et  du  nord  de  l'Allemagne,  et  on  l'a  capturé  très  accidentellement  en 
Silésie,  dans  le  Mecklembourg,  en  Saxe,  dans  la  province  Rhénane 
(Nau/nann),  et  même  en  Suisse  (Meisner  et  Schinz)  et  en  Alsace 
[Ky-œner).  Il  est  rare,  lors  des  migrations,  sur  les  côtes  des  îles 
Britanniques  (Seebohm),  de  la  Hollande  {Schlêgel)  et  de  la  Belgique, 
mais  on  ne  signale  qu'une  capture  sur  l'Escaut,  et  une  autre  aurait  été 
faite  à  Dilsen  (Limbourg  belge)  en  novembre  1879.  Il  est  également 
peu  fréquent  sur  les  côtes  de  France,  quoique  M.  Olphe-Galliard  dise 
qu'il  n'est  pas  rare  près  de  Hendaye.  M.  Saunders  ne  le  comprend 
pas  dans  sa  liste  des  oiseaux  de  l'Espagne,  mais  il  dit  ailleurs  que 
ce  Stercoraire  longe  parfois  les  côtes  de  l'Europe  occidentale  jusqu'au 
détroit  de  Gibraltar  et  au  Maroc  ;  on  signale  aussi  quelques  rares 
captures  en  Italie  {Giglioli). 

En  Asie,  cet  oiseau  habite  toute  la  zone  polaire  [Middend.)']^^' 
qu'au  Kamtschatka,  les  îles  Kouriles  et  Pribylow  {Stejneger,  Seeh.), 
En  Amérique  on  l'observe  également  dans  toute  la  zone  polaire  et  au 
Groenland  jusqu'au  74°  {de  Heuglin).  Du  côté  du  Pacifique,  il  est 
commun  dans  l'Alaska  et  à  la  Nouvelle-Arkhangel  {Nelson)  ;  il  est 
probable  qu'on  le  voit  en  hiver  jusqu'à  l'île  Vancouver;  du  côte  de 
l'Atlantique,  au  contraire,  il  descend  en  hiver  jusqu'au  A0°  {Saundey^s). 

Mœurs.  —  C'est,  comme  les  précédents,  un  oiseau  essentiellement 
marin,  mais  il  ne  s'éloigne  pas  autant  de  la  mer  que  le  Stercoraire 
parasite,  bien  que  les  couples  isolés  recherchent  volontiers  des  ter- 
rains accidentés.  Mais  les  tempêtes  le  chassent  quelquefois  loin  dans 
l'intérieur  des  terres  où  il  se  trouve  perdu,  et  les  circonstances  l'éloi- 
gnent  parfois  de  plus  en  plus  du  rivage,  ce  qui  arrive  surtout  aux 
jeunes  sujets.  Cela  n'empêche  cependant,  pas  qu'il  visite  volontiers 
les  prés  et  les  champs  qui  ne  sont  pas  trop  éloignés  de  la  mer  ;  il  a 
cela  de  commun  avec  les  autres  espèces  du  genre, dont  il  a  également 
les  mœurs.  Il  est  cependant  d'un  naturel  plus  doux  et  se  montre 
moins  farouche. 

Il  vole  tantôt  haut,  tantôt  bas  avec  une  grande  légèreté  ;  de  Heuglin 
dit  ne  l'avoir  jamais  vu  attaquer  dos  Mouettes  pour  leur  enlever  leur 
butin,  ni  faire  la  chasse  aux  lemmings  ;  mais  M.  Nelson  dit  le  contraire, 
d'après  des  observations  faites  dans  l'Alaska  :  c'est  avec  adresse,  dit 
cet  auteur,  et  une  grande  dextérité  qu'il  se  jette  sur  des  Sternes  et  des 
petites  Mouettes  pour  leur  faire  rendre  Je  produit  do  leur  pêche. 

Sa  nourriture  consiste  en  larves,  insectes  divers,  œufs  d'oiseaux, 
campagnols  et  lemmings,  petits  poissons,  crustacés  et  autres  petits 

Tome  II.  —  18^3,  79 


—  626  — 

animaux  marins.  En  automne,  il  se  nourrit  aussi  des  baies  de  la  cama- 
rine  {Empetrum  nigrum),  ce  qui  donne  à  ses  excréments  une  teinte 
bleu  foncé;  le  Stercoraire  parasite  mange  aussi  volontiers  de  ces  baies. 
Malmgren  dit  que  si  le  Stercoraire  à  longue  queue  ne  dédaigne  pas 
les  œufs  des  Bécasseaux  et  autres  petits  oiseaux  qui  nichent  à  terre, 
on  ne  le  voit  cependant  jamais  près  des  montagnes  occupées  par  ces 
masses  de  palmipèdes  dont  il  a  été  parlé  précédemment.  Nelson  dit 
qu'en  volant,  le  cri  de  cet  oiseau  ressemble  à  phéu-phéu-phéu-phéo, 
et  quand  il  poursuit  l'un  de  ses  semblables,  il  fait  souvent  entendre  un 
quâ;  à  d'autres  moments,  son  cri  est  hr-r-r-r,  kr-r-r-r,  kri,  kri- 
kri-kri,  cette  dernière  syllabe  est  stridente  et  plaintive  et  souvent 
suivi  du  son  traînant  de  phéu,  phéu  et  dans  le  même  ton;  de  Heuglin 
rend  le  cri  de  cet  oiseau  par  wieh  ou  zieh,  parfois  wieh-wi-wi-wi. 
Le  même  auteur  dit  que,  malgré  sa  force  relativement  faible,  ce  Ster- 
coraire montre  cependant  un  grand  courage,  qu'il  se  jette  parfois  sur 
l'homme,  et  qu'il  a  vu  un  couple  de  ces  oiseaux  s'abattre  téméraire- 
ment sur  un  Renard  polaire  [Canis  lagopus)  qui  s'approchait  de  leur 
couvée. 

Reproduction.  —  Comme  les  précédents,  cet  oiseau  dépose,  vers 
la  mi-juin,  deux  œufs  dans  l'herbe  ou  dans  la  mousse  sans  autre  for- 
malité. Ces  œufs  ont  la  même  coloration  que  ceux  du  -S',  pomarinus, 
mais  ils  sont  plus  petits  :  ils  mesurent  de  51  à  56  millim.  sur  36  à  38. 
Les  poussins,  dit  von  Middendorff,  ont  déjà  leurs  plumes  dans  la 
première  ou  dans  la  seconde  semaine  de  juillet. 

FAMILLE  DES  PROCELLARIDÉS. 

Car.  —  Bec  à  téguments  cornés  profondément  suturés  sur  les 
côtés,  terminé  par  un  crochet  fortement  recourbé  ;  narines  s'ouvrant 
dans  des  tubes,  qui  sont  complètement  séparés  l'un  de  l'autre  et 
placés  sur  les  côtés  du  bec,  ou  bien  soudés  et  placés  sur  le  dessus  de 
cet  organe;  ailes  étroites, suraiguës;  tarses  comprimés  sur  les  côtés; 
pouce  nul  ou  peu  développé. 

Hab.  —  Les  oiseaux  de  cette  famille  habitent  particulièrement  les 
régions  froides  arctiques  et  antarctiques;  en  hiver  ils  émigrent  vers  la 
zone  tempérée,  mais  ils  sont  rares  dans  la  zone  tropicale. 

Mœurs.  —  Ces  oiseaux  sont  essentiellement  marins  et  ils  ne  recher- 
chent pour  ainsi  dire  les  côtes  que  pour  y  nicher.  Ils  volent  et  nagent 
bien,  mais  marchent  avec  diflSculté;  leurs  sens  les  plus  développés 


-  627  — 

sont  la  vue  et  l'ouïe.  Ils  se  montrent  en  général  audacieux  et  insou- 
ciants du  danger,  et,  pressés  par  la  faim,  ils  se  laissent  prendre  au 
premier  appât  venu  attaché  à  un  hameçon  ;  leur  voracité  est  étroite- 
ment liée  à  la  jalousie  et  aux  instincts  de  rapine,  et  les  plus  faibles 
obéissent  à  la  loi  du  plus  fort.  Ils  se  nourrissent  de  toutes  les  subs- 
tances animales  qui  flottent  à  la  surface-  de  la  mer,  cadavres  d'ani- 
maux, poissons  morts  ou  vivants,  mollusques,  crustacés,  vers,  etc. 

Ces  oiseaux  nichent  ordinairement  sur  des  rochers  isolés  et  ne 
pondent  qu'un  œuf,  relativement  grand  et  volumineux. 

SOUS-FAMILLE 

DES  DIOMÉDÉIXÉS.  —  DIOMEDEIN^. 

Car.  —  Narines  s'ouvrant  à  l'extrémité  de  deux  tubes  très  courts 
et  placés  de  chaque  côté  de  la  mandibule  supérieure  ;  doigts  longs  ; 
pouce  nul  ;  taille  très  forte. 

OENRE    CLXIII 

ALBATROS.  —  DIOMEDEA. 

DioMEDEA,  Lin.  Sijst.  nat.  L  214  (1766). 

Phoebastria,  Phoebetria  et  Thalassarche,  Reichb.  Nat.  Syst.  d.  Yijgel,  p.  V  (1852). 

Car.  —  Bec  allongé,  très  robuste,  droit,  assez  élevé  et  comprimé  ;  man- 
dibule supérieure  à  arête  arrondie,  sillonnée  de  chaque  côté  dans  presque 
toute  sa  longueur  et  fortement  recourbée  et  crochue  à  la  pointe;  l'inférieure 
droite,  un  peu  dilatée  verticalement  à  son  extrémité  et  tronquée  ;  tubes 
nasaux  courts,  latéraux;  ailes  très  longues,  étroites,  suraiguës;  queue 
courte,  arrondie  ou  cunéiforme;  tarses  courts,  épais,  réticulés;  doigt  médian 
plus  long  que  le  tarse;  pouce  nul  ;  ongles  médiocres. 

Rab.  —  Ce  genre  a  des  représentants  dans  les  mers  australes, 
l'océan  Indien,  l'océan  Pacifique  et  dans  les  mers  de  la  Chine  jusqu'au 
Kamtschatka. 

301.    —    L'Albatros  hurleur. 

DIO^IEDEA  EXULANS,  Un. 

(PI.   303b-)- 

DioMEDEA  EXULANS,  Lin.  Syst.  tint.  I,  p.  211  (1766). 
Dio.medea  spadicea,  Omcl.  Syst.  tint.  I,  p.  5(>7  (1788). 
DioMEDEA  AiiiisTA,  Tsrh.  Jouf/i.  f.  Oin.    1856,   p.    157. 
I)EK  iiKossE  alhatro.s.s.  CM  ailciuand. 
The  WANDERiNTf  A1.HATRO.SS,  CI»  anjj;lais. 


—  628  — 

Taille:  l'"05;  ailes,  0,68;  bec  0,17. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  D'un  blanc  uniforme,  les  plus 
grandes  scapulaires  avec  une  tache  externe  noirâtre  ;  rémiges  primaires 
noirâtres,  blanches  sur  une  partie  de  leur  bord  interne,  les  secondaires 
blanches,  souvent  avec  une  grande  tache  noirâtre  terminale,  occupant 
surtout  la  barbe  externe;  queue  blanche.  Bec  d'un  blanc  jaunâtre;  iris 
brun;  pattes  rougeâtres. 

Age  intermédiaire.  —  Blanchâtre,  le  dessus  de  la  tête  et  du  cou 
varié  de  brun,  le  dos  avec  des  raies  pointillées  brunes  en  zigzags  ;  bas  du 
dos,  ailes  et  queue  bruns,  les  bordures  des  plumes  plus  claires;  côtés  de  la 
tête,  front  et  gorge  d'un  blanc  assez  pur  ;  parties  inférieures  du  corps  blan- 
ches, la  poitrine  et  les  flancs  marqués  de  zigzags  bruns. 

Jeune.  —  D'un  brun  fuligineux,  les  ailes  et  la  queue  d'un  brun  noirâtre  ; 
front,  côtés  de  la  tête  et  gorge  blancs. 

Ces  descriptions  sont  faites  sur  des  sujets  du  Musée  de^ruxelles  ;  l'un  des 
jeunes  que  j'ai  sous  les  yeux  a  le  ventre  blanc,pointillé  de  brun  sur  les  flancs, 
tandis  que  le  reste  du  plumage  est  brun,  ce  qui  ferait  supposer  que  ce  sont  les 
parties  ventrales  qui  se  couvrent  de  plumes  blanches  en  premier  lieu. 

Remarque.  —  Dans  un  rapport  sur  la  Biologie  des  oiseaux,  que 
M.  E.  Oustalet  a  communiqué    au   Congrès  ornithologique  interna- 
tional de  Budapest  en  1891,  notre  savant  confrère  fait  la  remarque 
suivante  :  «...  Quelques  spécimens  de  Diomedea  exulans  que  possède 
le  Muséum  de  Paris,  et  qui  ont  été  rapportés  de  l'île  Campbell  par 
M.  Filhol,  sont  des  plus  instructifs.  Ils  permettent  de  suivre  les  trans- 
formations de  l'oiseau  couvert  d'un  duvet  blanc,  floconneux,  aérien, 
en  un  oiseau  revêtu  de  plumes  serrées,  blanches  et  noires.  Mais  à 
côté  de  ces  exemplaires,  il  en  est  d'autres,  qui  semblent  pourtant 
appartenir  à  la  même  espèce  et  qui  portent  une  livrée  brune,  plus  ou 
moins  foncée,  tirant  parfois  au  blanc  sur  le  front.  Qu'est-ce  que  ces 
spécimens?...  »  Je  crois  pouvoir  répondre  à  cette  question  à  l'aide  des 
sujets  de  notre  Musée  royal  d'histoire  naturelle.  M.  Oustalet  reconnaît 
que  des  poussins  prennent  directement  le  plumage  blanc  de  l'adulte, 
tandis  que  d'autres,  qui  semblent  appartenir  à  la  même  espèce,  sont 
bruns  dans  leur  jeune  âge.  Pour  moi,  je  suis  bien  convaincu  que  l'Al- 
batros se  présente  dans  son  jeune  âge  sous  deux  formes  différentes  : 
l'une  blanche  et  noire,  l'autre  brune,  et  que  cette  dernière  passe  par 
tous  les  états  intermédiaires  jusqu'à  ce  qu'elle  ait  atteint  son  plumage 
définitif.  Les  descriptions  ci-dessus  de  \âge  intermédiaire  et  du  jeune 
k  ventre  blanc  paraissent  prouver  la  chose.  Mais  pourquoi  cette  difFé- 


—  639  - 

rence  clans  les  jeunes?  —  Elle  résulte  probablement  d'une  cause  acci- 
dentelle, à  moins  d'admettre,  avec  M.  Filhol,  «  que  les  Albatros  bruns 
sont  des  représentants  d'une  race  locale,  parce  qu'ils  constituent  dans 
les  parages  de  la  Nouvelle-Zélande  une  exception  au  milieu  des  Alba- 
tros blancs,  parce  qu'ils  sont  plus  rares  au  sud  qu'au  nord  de  cette 
terre  et  qu'ils  manquent  complètement  à  l'île  Campbell.  »  Mais  s'il 
s'agissait  d'une  race  locale,  ces  oiseaux  ne  deviendraient  pas  blancs  à 
l'âge  adulte  ou  tout  au  moins  prendraient  un  plumage  particulier,  ce 
qui  n'a  pas  lieu.  Je  ferai  encore  remarquer  que  M.  Buller  [Manual  of 
theBirds  of  New  Zoaland,"^.  82),décrit  le  jeune  de  la  Nouvelle-Zélande 
comme  étant  brun  à  face  blanche  et  ne  dit  mot  déjeunes  à  plumage 
blanc;  ceci  me  fait  supposer  que  ces  derniers  forment  l'exception, tandis 
que  les  jeunes  à  plumage  brun  se  prosentent  le  plus  généralement. 
Hab.  —  L'Albatros  hurleur,  vulgairement  nommé  Mouton  du  Cap, 

habite  les  mers  australes  entre 


le  60°  et  le  30»  de  lat.  S.  Il  niche 
aux  îles  Campbell  {Ross),  Ker- 
guelen  (Kidder),  du  Prince- 
;J  Edouard  {Hutton),  Tristan  d'A- 
^^'H^  cunha  {Carmichael) ,  à  la  Nou- 
■A  velle-Géorgie  du  Sud  (  Weddell) 
ot  sur  quelques  autres  îles  de  la 
région  antarctique.  Pendant  son 
jeune  âge,  il  reste  près  d'une  année  sédentaire  dans  ces  stations,  mais, 
quand  ses  ailes  ont  pris  tout  leur  développement,  il  quitte  ces  terres 
pour  se  répandre  au  loin,  voyage  sans  cesse  et  fait  presque  le  tour  du 
globe,  mais  dépasse  rarement,  vers  l'équateur,  le  30°  1.  S.  Il  abonde 
aux  environs  du  cap  de  Bonne-Espérance  {Lai/ard),  des  îles  Saint- 
Paul  et  d'Amsterdam  {Schlégel),  sur  les  côtes  méridionales  de  l'Aus- 
tralie {Gould)À  la  Nouvelle-Zélande  [Bidler)  et  au  cap  hlorn{Dcff/and). 
Ce  n'est  qu'irrégulièrement  ou  accidentellement  qu'on  le  voit  dans  le 
canal  de  Mozambique  {ScJdégel)  ainsi  que  sur  les  cotes  du  Congo 
{Tuckey)A^  Chili  et  du  Pérou  {Sclater  et  Salvin)  ;  M.Alphonse  Milne 
Edwards  dit  que  le  Muséum  de  Paris  en  a  reçu  plusieurs  des  envi- 
rons des  îles  Sandwich  vers  le  10°  1.  N.  Les  captures  en  Europe  sont 
très  peu  nombreuses  :  une  a  été  faite  en  France  près  de  Dieppe  vers 
1829  {Degland),  un  sujet  a  été  abattu  à  coups  de  rames  sur  l'Escaut 
près  d'Anvers  en  septembre  183)^  {Drapiez),  et  plus  récenmient,  dans 
la  matinée  du  27  avril  1887,  un  Albatros  endormi  sur  un  brise-lames 


—  630  — 

de  la  côte  de  Blankenberghe,  fut  tué  à  coups  de  bâton  par  un  ouvrier 
du  port;  voilà  donc  deux  captures  faites  en  Belgique.  Brimnich  signa- 
lait même,  en  1764,  un  sujet  qui  aurait  été  tué  en  Norwège,  dont  la 
tête  et  les  pattes  étaient  conservées  de  son  temps  au  Musée  de  Co- 
penhague. 

Bonaparte  dit  que  l'Albatros  hurleur  visite  accidentellement  les 
côtes  des  Etats-Unis  d'Amérique,  et  Latham  le  mentionne  comme 
abondant,  en  été,  dans  le  nord  du  Pacifique  aux  environs  des  îles 
Kouriles,  mais  aucun  auteur  américain  ne  confirme  ces  faits;  il  paraît 
certain  que  cet  oiseau  a  été  confondu  avec  le  D.  hrachyura  qui  lui 
ressemble  beaucoup  et  qui  habite  le  nord  du  Pacifique. 

Mœurs.  —  L'Albatros  mouton  ou  hurleur  est  un  oiseau  de  pleine 
mer  qui  dépasse,  par  sa  taille,  tous  les  autres  palmipèdes;  il  atteint 
jusque  quatre  mètres  d'envergure  et  la  vitesse  de  sojdlvoI  esttelle  qu'il 
peut  franchir,  d'après  Gould,  un  espace  de  plus  de  200  milles  anglais 
en  vingt-quatre  heures.  «  C'est  un  beau  spectacle,  dit  Bennett,  de  voir 
cet  oiseau  magnifique,  plein  d'énergie  et  de  grâce,  doué  d'une  force 
exceptionnelle,  voguer  dans  les  airs.  C'est  à  peine  si  l'on  remarque  un 
mouvement  des  ailes  après  le  premier  essor  et  l'élan  qui  porte  ce 
puissant  oiseau  dans  les  airs  ;  on  suit  son  ascension  et  sa  descente, 
dont  les  différents  mouvements  semblent  opérés  par  une  même  puis- 
sance, à  laquelle  il  ne  paraît  appliquer  en  rien  sa  force  musculaire. 
Il  frôle  presque  en  planant  le  gouvernail  des  bateaux,  et  cela  avec 
une  hardiesse  incroyable.  Quand  il  voit  un  objet  flotter,  il  fond  sur  lui 
les  ailes  largement  déployées,  s'en  empare,  nage  quelque  temps,  puis 

se  relève,  se  met  à  tournoyer  et  reprend  son  exploration Dans  ses 

mouvements,  dit  plus  loin  le  même  auteur,  l'on  ne  remarque  aucun 
effort,  mais  de  la  force  et  de  l'énergie  réunies  à  une  grâce  toujours 
égale.  Il  sillonne  les  airs  très  gracieusement,  rase  les  vagues  mou- 
vantes de  si  près  qu'il  semble  y  mouiller  ses  ailes  ;  puis  il  se  remet  à 
planer  avec  la  même  liberté  et  la  même  facilité  d'allures.  Son  vol  est 
si  rapide,qu'on  ne  l'aperçoit  plus  que  dans  le  lointain  quelques  instants 
après  qu'il  a  passé  devant  le  navire,  montant  et  descendant  avec  les 
flots,  et  franchissant  un  immense  espace  en  quelques  minutes.  » 

Par  un  temps  orageux,  l'Albatros  vole  tantôt  dans  la  direction  du 
vent,  tantôt  contre  lui,  et  paraît  heureux  au  milieu  des  vagues  soule- 
vées par  l'ouragan.  «  Quoi  qu'il  lui  arrive  quelquefois,  dit  Gould,  de 
se  reposer  sur  les  eaux  par  un  temps  serein,  on  le  voit  bien  plus  sou- 
vent voler.  Par  un  temps  calme,  il  flotte  avec  assurance  à  la  surface 


—  631  - 

des  mers,  et  par  les  plus  fortes  tempêtes,  il  s'élance  avec  la  rapidité 
d'une  lièche.  »  Il  nage  avec  aisance,  mais  plonge  maladroitement  et 
ne  peut  s'enfoncer  dans  les  flots  qu'en  se  lançant  de  très  haut.  A  terre 
il  est  maladroit,  il  se  dandine  lourdement  et  sait  à  peine  se  mouvoir. 
Il  n'est  pas  sociable,  chacun  semble  poursuivre  son  vol  sans  s'occuper 
des  autres  ;  il  passe  sa  journée  à  chercher  de  la  nourriture,  à  se  repo- 
ser et  à  voler;  le  vaste  océan  étant  son  domaine,  il  peut  poursuivre 
son  vol  sans  s'inquiéter  des  distances,  grâce  à  la  puissance  de  ses 
ailes.  D'après  Gould,  l'Albatros  n'éprouve  aucune  fatigue  à  suivre  un 
bateau,  tout  en  se  livrant  à  des  évolutions  de  plusieurs  lieues,  et  tou- 
jours il  revient  dans  le  sillage  pour  attraper  ce  que  l'on  jette  par  des- 
sus bord.  Tschudi  fit  enduire  de  goudron  la  tête  et  le  cou  d'un  de  ces 
oiseaux  et  lui  rendit  ensuite  la  liberté.  Il  put  constater  que  l'oiseau 
ainsi  marqué  suivit  six  jours  pleins  le  bâtiment,  et  ne  disparut  que 
quatre  fois  de  son  horizon  pendant  ce  temps,  et  jamais  pour  plus 
d'une  heure.  Le  septième  jour,  au  matin,  l'oiseau  partit  au  large  et 
dès  lors  on  ne  le  revit  plus. 

Comme  l'Albatros  n'a  pas  souvent  l'occasion  de  se  trouver  en  pré- 
sence de  l'homme,  il  se  montre  confiant  et  même  téméraire,  car  sa 
A'oracité  lui  fait  souvent  oublier  toute  prudence;  il  se  laisse  prendre 
à  l'hameçon  avec  ]a  plus  grande  facilité,  surtout  quand  une  tempête 
de  longue  durée  l'a  empêché  de  trouver  de  la  nourriture.  Il  est  d'une 
voracité  insatiable  et  sa  digestion  est  fort  rapide  ;  sa  principale  nour- 
riture consiste  en  céphalopodes  et  autres  animaux  marins  mous,  qu'il 
prend  à  la  surface  de  l'eau,  mais  il  ne  paraît  pas  capable  de  prendre 
des  poissons  ;  il  dévore  également  des  substances  diverses  et  même 
des  cadavres  de  poissons  et  de  cétacés  en  putréfaction.  On  a  souvent 
comparé  sa  voix  au  cri  de  l'âne  ;  mais  Tschudi  dit  que  c'est  une  exa- 
gération et  que  cet  oiseau  fait  entendre  des  cris  perçants,  criards  et 
souverainement  désagréables  ;  Kôler  rapporte  qu'il  claque  du  bec 
quand  il  est  en  colère  ou  qu'il  a  peur. 

Reproduction.  —  L'Albatros  se  reproduit  en  novembre.  D'après 
les  observations  faites  par  Gould  et  Cornick,  il  niche  sur  les  versants 
couverts  d'herbes  des  collines  et  des  rochers.  Son  nid  est  composé 
d'herbages  grossiers,  d'herbes  sèches,  de  fouilles  mortes,  le  tout  entre- 
mêlé de  terre  ;  il  mesure  à  sa  partie  inférieure  une  circonférence  de 
près  de  deux  mètres,  son  diamètre  supérieur  est  de  soixante-quinze 
centimètres  environ  et  sa  ii.iuteur  de  cinquante  centimètres.  La  ])onte 
n'est  que  d'un   seul  œuf,  d'un  blanc  un  peu  jaunâtre  et  mesurant 


—  632  — 

132  mill.   sur  84.  Sur  environ  cent  nids,  Cornick  n'en  trouva  qu'un 
qui  contint  deux  œufs. 

Il  a  été  dit  plus  haut,  que  les  jeunes  ne  peuvent  se  servir  de  leurs 
ailes  que  plusieurs  mois  ou  même  un  an  après  leur  naissance,  et  les 
observateurs  sont  d'accord  sur  ce  point.  Quelques  jours  après  son 
arrivée  à  l'île  Campbell,  au  mois  de  septembre,  le  D""  Filhol  a  ren- 
contré en  effet  de  jeunes  Albatros  qui  avaient  la  taille  d'un  oiseau 
adulte,  mais  dont  le  corps  était  encore  en  majeure  partie  revêtu  d'un 
duvet  blanc  floconneux,  cachant  le  plumage  normal.  Sur  la  foi  de 
Harris,  Hutton  avait  supposé  que  le  jeune  Albatros  était  abandonné, 
peu  de  mois  après  sa  naissance,  par  les  parents  qui  regagnaient  la 
haute  mer  et  y  restaient  jusqu'en  octobre,  époque  à  laquelle  ils  reve- 
naient dans  leur  station,  chassaient  le  jeune  de  l'ancien  nid  dans 
lequel  la  femelle  s'installait  bientôt  pour  effectuer  une  nouvelle 
ponte.  Les  jeunes  seraient  donc  livrés  à  eux-mêmes  pendant  six  à 
huit  mois  sans  nourriture,  ou  vivant  de  leur  propre  graisse,  comme  le 
croyait  un  vieux  capitaine  de  marine.  Harris,  qui  a  fait  un  long  séjour 
à  l'île  Tristan  d'Acunha,  avait  en  effet  remarqué  qu'il  se  passait  des 
mois  entiers  sans  qu'un  seul  Albatros  adulte  se  montrât  dans  le  voisi- 
nage du  nid.  Le  D""  Filhol  voulut  avoir  la  clef  de  ce  mystère,  et  il  finit 
par  découvrir  qu'un  oiseau  adulte  venait  chaque  jour  de  grand'matin 
apporter  de  la  nourriture  à  son  poussin  et  s'éloignait  aussitôt,  de 
façon  que  ses  visites  pouvaient  passer  inaperçues.  La  dissection  d'un 
poussin  lui  permit  de  constater  d'autre  part,  que  celui-ci  était  nourri 
principalement  de  poulpes,  dont  on  retrouvait  dans  l'estomac  les 
débris  nageant  dans  une  huile  fétide,  et  que  la  digestion,  à  cette  épo- 
que de  la  vie,  s'opérait  avec  beaucoup' de  lenteur  ;  ceci  explique  que  le 
jeune  peut  rester  un  jour  entier  et  même  plusieurs  jours  sans  recevoir 
de  nourriture. 

SOUS-FAMILLE 

DES  PROCELLARINÉS.  —  PROCELLARIN.E. 

Car. —  Narines  s'ouvrant  à  l'extrémité  d'un  tube  unique  ou  de  deux 
tubes  soudés  et  situés  en  avant  du  front;  pouce  court,  immobile  et 
muni  d'un  ongle  droit  et  robuste. 

GENRE    CL.XIV. 

PÉTREL.  —  PULMARUS. 

Pkocellaria,  Biiss.,  Ornilh.  VI,  p.  143  (1760). 
FuLMARUS,  Leach,  Cat.  Mam.  B.  Br.  Mus.  p.  40  (1810). 


—  633  — 

Rhantistes,  Kaup,  Naturl.  Syst.  p.  105  (1829). 
Wagellus,  Gray,  ListofGen.  of  B.  p.  78  (1840). 

Car.  —  Bec  plus  court  que  la  tête,  épais,  droit,  renflé  à  la  base,  robuste 
et  très  crochu;  tube  nasal  divisé  par  une  cloison  mince;  ailes  allongées, 
aiguës,  la  première  rémige  dépassant  les  autres  ;  queue  courte,  arrondie,  à 
14rectrices;  tarses  médiocres,  comprimés,  réticulés;  doigts  antérieurs  réu- 
nis par  de  larges  mem])ran(.s,  le  médian  plus  long  que  le  tarse. 

Hab.  —  Ce  genre  a  des  représentants  dans  les  mers  arctiques  et 
antarctiques,  et  ceux-ci  visitent,  en  hiver,  les  mers  delà  zone  tempérée. 


302.  —  Le  Pétrel  glacial. 

FULMARUS  GLACIALIS,  Steph.  ex  Lin. 
(PI.  304) 

Procellaria  cinerea,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  143  (1760). 

Procellaria  GLACIALIS,  Lin,  Syst.  nat.  I,  p.  213  (1766). 

Procellarlv  GROENLANDICA,  Guniî.,  Lesnv.  Beskr.  Finm.  Lapj).  p.  273  (1767). 

FuLMARUs  GLACIALIS,  Steph.  Shaw^s  Gen.  Zool.  XIII,  1.  p.  234,  pi.  27  (1825). 

Rhantistes  glacialis,  Kaup,  NaLûrl.  Syst.  p.  105  (1829). 

Procellaria  hiemalis,  Brm.  Isis.^  1830,  p.  995. 

Procellaria  minor,  Kjaerb.  Danm.  Fugle,  p.  324  (1852). 

Procellaria  borealis,  Bi-m.  Nawnan?iia,  1855,  p.  296. 

FuLMARUS  MINOR  et  F.  AuDUBONi,  Boiiap.  Consp.  II,  p.  187  (1857). 

FULMARUS  GLACIALIS  RODGERSI,  StejQ.   Auk.  1884,  p.   233. 

Der  Eis-Mevensturmvogel,  en  allemand. 

The  Fulmar  Pétrel,  en  anglais. 

De  Noordsche  Stohmvogel,  en  flamand. 

Var.  Glupisoha. 

Procellaria  glacialis,  Pall.  (nec  Lin.),  Zoogr.  Rosso-As.  II,  p.  312  (1812). 
ProcELLARiA  PACiFiCA,  Audub.  (nec  Gmel.),  Orn.  Biogr.  V.  p.  331  (1839). 
FuLMARUS  GLACIALIS  var.  Pacifica,  Bonap.  Consp.  av.  II,  p.  187  (1857). 
Priocella  te.nuirostris  (part.)  Nelson  (nec  Audub.),  C»'Mi>e  Corwiti,  [t.  112  (1883). 

FuLMARUS  GLACIALIS  GLUPISCHA,  StCJU.  Auk.   1884,  p.  234. 

Taille:  O'°40;  ailes  0,34  (ces  mesures  sont  approximatives,  car  le 
Pétrel  est  de  taille  très  variable). 

Description   des  deux   sexes  adultes.   —   Tête    et  cou  blancs,  avec  une 

tache  noirâtre  au-devant  des  yeux;  dessus  du  corps   et  ailes  d'un  cendré 

bleuâtre  clair,  ces  dernières  un  peu  plus  foncées  ;  rémiges  d'un  brun  cendré; 

sus-caudales,  (jueue  et  toutes  les  parties  inférieures  blanches.  Bec  JMunâtre, 

To.ME  II.  —   1894.  80 


—  634  — 

gris  à  la  base,  le  crochet  presque  orange,  le  tube  nasal  d'un  gris  plus  ou 
moins  sombre;  iris  brun  ;  pattes  d'un  gris  perle  lavé  de  rougeâtre. 

Jeune  ?  —  Dessus  et  côtés  de  la  tête,  cou,  bas  du  dos  et  toutes  les  parties 
inférieures  d'un  gris  cendré  clair,  les  côtés  de  la  poitrine  et  les  flancs  mar- 
qués de  raies  plus  foncées  ;  manteau  d'un  cendré  plus  foncé,  les  plumes  fine- 
ment terminées  de  blanc  et  les  plus  grandes  avec  un  croissant  brunâtre  mais 
peu  distinct  et  les  tiges  noirâtres;  rémiges  d'un  gris  noirâtre  avec  le  bord 
interne  cendré  et  la  pointe  blanche  :  queue  d'un  gris  cendré  clair,  plus  foncée 
à  l'extrémité  et  terminée  par  un  petit  bord  blanc.  Iris  brun  ;  bec  d'un  jau- 
nâtre sale,  plus  jaune  à  la  pointe,  le  tube  nasal  d'un  gris  de  plomb  sombre 
(Naumann) . 

Poussin.  —  Duvet  long,  épais  et  mou,  dont  la  gorge  seule  est  ordinairement 
privée,  d'un  gris  brunâtre  clair,  plus  pâle  à  la  poitrine  qui  est  parfois  blan- 
che. On  rencontre  aussi  des  sujets  dont  le  duvet  est  tantôt  d'un  blanc  pur 
uniforme,  tantôt  avec  une  légère  teinte  grisâtre  sur  les  parties  supérieures. 
Iris  gris  clair  ;  bec  d'un  gris  rougeâtre  pâle,  blanc  à  la  pointe  ;  pattes  gri- 
sâtres, les  membranes  blanchâtres  {Naumann). 

Var.  Glupiseha.  —  Très  semblable  au  type  glacialis,  mais  à  bec  plus  faible, 
la  taille  un  peu  moins  forte  et  le  plumage  d'un  gris  brun  uniforme  (ScMégel). 

Remarque.  —  M,  Dixon  a  observé  à  Saint-Kilda,  à  côté  des  indi- 
vidus à  plumage  clair,  qui  sont  de  beaucoup  les  plus  communs, 
quelques  individus  à  plumage  foncé.  La  plupart  des  auteurs  consi- 
dèrent les  sujets  foncés  comme  des  jeunes,  et  M.  Malmgren  dit  même 
qu'au  Spitzberg  on  rencontre  tous  les  intermédiaires  entre  les  deux 
plumages  {Journ.  f.  Orn.  1865,  p.  209).  Mais  M.  Dixon  assure, 
d'après  des  habitants  dignes  de  foi  de  Saint-Kilda,  que  le  premier  plu- 
mage ne  diffère  pas  de  celui  des  adultes  {Ibis,  1885,  p.  92).  Suivant 
M.  Seebohm,  un  sujet  de  la  collection  de  M.  Hargitt,  rapporté  des  îles 
Féroé  par  M.  H.  C  MûUer,  semble  en  effet  prouver  que  le  jeune, 
dans  son  premier  plumage,  ressemble  à  l'adulte. 

Les  auteurs  américains  admettent  deux  variétés  ou  races  :  l'une  de 
couleur  claire,  de  l'Atlantique,  l'autre  foncée,  du  Pacifique.  D'après 
M.  Stejneger,  cette  dernière  est  très  commune  dans  le  Pacifique, 
tandis  que  la  forme  claire  y  est  rare  et  n'offre  que  quelques  petites 
colonies  isolées.  M.  Stejneger  fait  remarquer,  en  outre,  que  dans  la 
var.  Glupiseha,  tous  les  individus,  clairs  ou  foncés,  ont  toujours  le  bec 
de  couleur  pâle,  assombrie  seulement  un  peu  aux  bords  des  lamelles  et 
près  du  tube  nasal,  qui  lui-même  est  de  couleur  claire  et  non  gris 
comme  chez  les  individus  de  l'Atlantique.  {Results  of  Ornith.  explor. 
in  the  Commander  Isl.  and  Kam,tschatka,  p.  91). 


6>>3 


Gomme  il  est  reconnu  qu'il  y  a  des  poussins  blancs  et  d'autres  d'un 
gris  brunâtre  dans  les  deux  océans,  c'est-à-dire  dans  les  deux  races, 
il  est  probable  que  ces  oiseaux  conservent  leur  couleur  générale  pri- 
mitive pendant  toute  leur  vie,  d'où  des  sujets  de  couleur  claire  domi- 
nant en  Europe,  et  des  sujets  foncés  particulièrement  abondants  dans 
le  nord  du  Pacifique.  Il  y  a  donc  lieu  d'admettre  que  ces  Pétrels 
nous  offrent  un  phénomène  de  dimorphisme  analogue  à  celui  qu'on 
observe  chez  certains  oiseaux  de  proie,  chez  la  Hulotte  par  exemple, 
qui  présente  dans  les  deux  sexes  et  dans  tous  les  âges  des  individus 
cendrés  et  d'autres  roux. 

Hab.  —  Le  Pétrel  glacial  niche  en  grand  nombre  au  Spitzberg, 

u^^,^.,,c,^^^^.-*^^i.^^n^^^^^~>.^-.^k>.^-.^.>,^^^_«^  surtout  dans  la  baie  de  Bran- 

11 1  i  I  iMfci  1 J  g  '  1 1  '1  n¥gf  1 1  Li  rLrn""rPi"TT! 

iJJJJjBÉffiBi' I IJ!  I  m  fflÉrTMi^  1!    dywine  sous  le  80o24'  {Malm- 


i'%\i 


'^'°  gren),  à  la  Nouvelle-Zemble,  à 
j  Waigats,    à   l'île  des  Ours  {de 
f^^flini^  I  j  !  "   Heuglin),    au   Groenland    mais 
iiM:Ï!Mîi  :J£^   nas  au  sud  du  fi9°  (Rp.inhn.rdfX 


^i^^---P- 


pas  au  sud  du  69°  {Reinhardt), 

lllh  lltfr|44T|f  fi  îfHjfli '1^  ^'^i  {Feilden),  à  Saint-Kilda  et  autres 
_.^^A^^j^^.^^..^±.^_.,.u=^.^^A^.^,.,^^^.i.  ,j^^  rocheuses  situées  à  l'ouest 


4-li:^2^|i':q  en  Islande  [Faber),  aux  îles  Féroé 


■ft  l»l^'lg»W>  1»  H».  I;' 


des  Hébrides  {Bixon  et  autres)  et  probablement  sur  certaines  îles  et 
côtes  voisines  du  cap  Nord,  où  on  le  voit,  en  été,  presque  partout  et 
généralement  en  grand  nombre  {ColletV).  En  hiver,  cet  oiseau  visite  en 
plus  ou  moins  grand  nombre  les  îles  Shetland (-S^ir&j/)  ainsi  que  les  îles 
et  les  côtes  du  nord  de  l'Ecosse,  rarement  les  côtes  de  l'Angleterre  et 
accidentellement  celles  de  l'Irlande,  où  l'on  n'a  encore  signalé  que 
trois  captures  [Thompson).  Ce  n'est  aussi  que  tout  accidentellement 
qu'on  a  capturé  cet  oiseau  sur  les  côtes  méridionales  de  la  Norwège 
et  de  la  Suède  {Nilsson),  sur  celles  de  l'île  Ilelgoland  et  du  nord  de 
l'Allemagne  {Naumann),  de  la  Hollande  {Schlégel)  et  de  la  Belgique 
jusqu'en  Picardie  et  en  Bretagne (c?e  Séli/s-Longchamps).M.  A.  Lacroix 
dit  avoir  reçu  un  sujet  de  Cette  (Hérault)  le  18  décembre  1S60.  Sur 
les  côtes  américaines  de  l'Atlantique,  il  est  très  commun  des  deux 
côtés  du  détroit  de  Davis,  et  en  hiver  il  n'est  pas  rare  sur  les  côtes 
depuis  la  Nouvelle-Ecosse  jusqu'à  New-York  et  il  est  très  abondant 
sur  les  bancs  de  Terre-Neuve  (Audubon). 

La  var.  Glupischa  habite  le  nord  du  Pacitique  au-delà  des  îles  Kou- 
riles et  Aléoutes  et  particulièrement  le  détroit  de  Behring.  On  la  ren- 
contre   [),ir  myriades  à  l'est  dt;  l'ilt;   Unalaska,   et  en  moins   ^randes 


—  me   - 

masses  près  des  îles  Segnam,  Kiska,  AmcMtka,  Atkha  et  surtout 
près  de  SémicM,  la  race  foncée  dominant  partout  (Turner),  mais  elle 
est  rare  sur  certaines  côtes  de  l'Alaska  {Nelson).  M.  Stejneger  dit 
avoir  observé  la  race  foncée  aux  îles  du  Commandeur  en  quantité 
innombrable,  et  que  ni  dans  la  colonie  qui  niche  à  l'île  de  Behring, 
ni  dans  celle  qui  occupe  la  partie  rocheuse  du  nord  de  l'île  Copper, 
il  ne  put  rencontrer  un  seul  sujet  de  la  race  claire;  M.  Stejneger  a 
remarqué  aussi  que  la  race  foncée  est  relativement  rare  du  côté  des 
côtes  américaines  du  Pacifique,  tandis  qu'elle  domine  sur  les  côtes 
asiatiques,  au  sud  jusqu'au  Kamtschatka,  En  hiver  on  voit  parfois  cet 
oiseau  jusqu'au  Japon  (Seebohm) . 

Mœurs.  —  Le  Pétrel  glacial  est  un  oiseau  pélagique,  qui  ne  s'ap- 
proche que  rarement  des  côtes  en  dehors  de  l'époque  de  la  repro- 
duction. Il  redoute   cependant  les    grandes  masses   de  glace  qui 
l'empêchent  de  trouver  sa  nourriture;  aussi  est-il  obligé,  en  hiver,  de 
quitter  les  mers  polaires  pour  se  rendre  un  peu  plus  vers  le  sud;  mais 
il  séjourne  partout  où  la  mer  est  partiellement  libre,  sans  dépasser 
vers  le  sud  le  50°  1.  N.,  et  encore  doit-il  avoir  été  chassé  par  une  vio- 
lente tempête  pour  qu'on  le  voie  dans  des  parages  aussi  méridionaux. 
Par  un  temps  de  brouillard,  on  observe  souvent  de  ces  oiseaux  repo- 
sant par  groupes  sur  des  glaçons  flottants;  ils  dorment  aussi  en 
société  sur  la  mer,  quand  elle  est  calme,  la  tête  cachée  dans  les  plu- 
mes du  manteau  et  se  laissent  ainsi  ballotter  par  les  vagues. Le  vol  du 
Pétrel  est  léger  et  ressemble  à  celui  de  la  Mouette  blanche;   tantôt 
l'oiseau  bat  rapidement  des  ailes,  tantôt  il  glisse  mollement  au-dessus 
des  flots  en  suivant  leurs  ondulations,  les  ailes  largement  déployées 
et  presque  immobiles,  et  il  lutte  ainsi  avec  énergie  contre  les  plus 
fortes  tempêtes  ;  il  sait  aussi  plonger,  mais  il  ne  le  fait  pas  sans  néces- 
sité. A  terre  il  est  maladroit,  marche  avec  difficulté  les  tarses  forte- 
ment inclinés.  Ces  oiseaux  sont  toujours  abondants  dans  les  endroits 
où  l'on  dépèce  des  baleines  et  des  phoques,  car  ils  sont  très  avides  du 
lard  de  ces  animaux, mais  ne  touchent  pas  à  la  chair  saignante;  '.<  ils 
sont  parfois  si  audacieux,  dit  HolbôU,  qu'on  pourrait  en  tuer  des  mil- 
liers à  coups  de  rames.  >  Il  ne  sont  d'ailleurs  nullement  farouches  et 
leur  confiance  dégénère  même  en  stupidité,  car  ils  se  laissent  enlever 
de  leur  nid  sans  chercher  à  fuir.  Ces  oiseaux  sont  très  sociables    et 
vivent  en  troupes  innombrables  ;  ils  se  montrent  indifîerents  envers 
les  autres  oiseaux  et  ne  cherchent  pas  aies  troubler;  leur  naturel  esi 
du  reste  doux  et  patient,  et  ils  ne  paraissent  guère  se  servir  de  leur 


—  637  — 

ormidable  bec  comme  d'une  arme  offensive.  Ils  ont  cependant  un 
autre  moyen  de  défense,  c'est  de  pouvoir  faire  remonter  à  volonté  de 
leur  estomac,  un  liquide  jaune,  huileux  et  fétide  qu'ils  lancent  avec 
force  de  leur  bec  à  près  d'un  mètre  de  distance. Ils  exhalent  aussi  une 
odeur  pénétrante  et  repoussante  qui  se  transmet  même  aux  œufs. 

La  voix  du  Pétrel  est  rauque  et  ressemble,  d'après  de  Heuglin,  à 
gaggerara-gaggag-gagga.  A  défaut  de  lard  de  cétacés  ou  de  phoques, 
cet  oiseau  se  nourrit  de  toute  espèce  d'animaux  marins  mous  et  même 
de  méduses;  Faber  dit  que  pendant  l'incubation,  il  vit  surtout  des 
cochléarias  qui  croissent  sur  les  écueils,  et  que,  par  ce  régime,  sa 
chair  devient  assez  agréable.  Au  moment  où  les  jeunes  commencent 
à  voler,  les  Islandais  en  prennent  par  milliers  et  les  salent  pour 
l'hiver;  malgré  cela,  le  nombre  des  Pétrels  paraît  plutôt  augmenter 
que  diminuer. 

Reproduction.  —  Suivant  Faber,  c'est  au  milieu  de  mars  que  ces 
oiseaux  s'approchent  des  lieux  choisis  pour  la  ponte.  Dans  les  pre- 
miers jours  de  mai,  et  quelquefois  déjà  à  la  mi-avril,  les  femelles 
pondent  un  œuf  unique  qu'elles  déposent  à  nu  sur  les  rochers  dans 
des  crevasses  ou  sur  des  aspérités.  L'œuf  est  rude,  crayeux  et  d'un 
blanc  uniforme  ;  il  mesure  85  miliim.  sur  64  environ.  En  Islande, 
selon  Faber, le  petit  n'éclot  pas  avant  les  premiers  jours  de  juillet,  et 
à  la  fin  du  mois  il  a  atteint  la  moitié  de  sa  taille;  à  ce  moment  il  sait 
déjà,  comme  les  vieux,  lancer  un  jet  de  liquide  huileux  contre  celui 
qui  veut  le  prendre. 

Malmgren  a  observé  au  Spitzberg  dès  le  18  juin  des  jeunes  en  état 
de  voleter,  tandis  que  la  majorité  des  œufs  n'étaient  pas  encore  éclos, 
ce  qui  démontre  que  les  femelles  ne  pondent  pas  toutes  à  la  même 
époque. 

GENRE     CLXV 

THALASSIDROME.   —   fROCELLARIA. 

pRocELLARi.v,  Lin.  Stjst.  tiat.  I,  p.  212  (1766). 

Hydrofjates,  Boie,  /sis,  1822,  p.  562. 

Thalassidroma,  Vig.  Zool.  Journ.  Il,  p.  405  (1825). 

OcEANODROMA,  Reichb.  Nat.  Syst.  d.  Vôgel,  p.  IV  (1852). 

Cy.mochorea,  E.  Coues,  Proc.  Nat.  Hist.  Soc.  Phil.  1864,  p.  76 

Thalassidkomas,  Olphe-Gal.  Contr.  à  la  Faune  Orn.,  fasc.  IX,  p.  1 1  (1886). 

Car.  —  lioc  plus  court  que  la  tête,  comprimé  et  crochu,  le  tub'  iia^al 
atteiirnant  la  moitié  de  la  longueur  du  bec;  ailes  très  longues  et  aiguës,  1 1 
seconde  rémige  la  plus  longue;  (jueue  de  longueur  moyenne,  tantôt  égale  et 
carrée,  tantôt  fourchue;  tarses  grêles;  doigts  antérieurs  longs,  faibles  et  réu- 


—  638  — 

nis  par    des  membranes   entières;  pouce  ayant   l'apparence  d'une  verrue 
armée  d'un  ongle. 

Ce  genre  comprend  les  plus  petits  palmipèdes  connus. 

Hah.  —  Les  océans  Atlantique  et  Pacifique. 

303.  —  Le  Thalassidrome  tempête. 
PROCELLARIA  PELAGICA,  Lin. 

(PI.  305  ) 

Procellaria  PELAGICA,  Lin.  Syst.  nat.  l,  p.  212(1766). 

Hydrobates  PELAGICA,  Boie,  Isis,  1822,  p.  562. 

Thalassidroma  PELAGICA,  Vig.  Zool.  Joum.  II,  p.  405  (1825). 

Hydrobates  faeroeensis  et  pelagicus.  Brm.  Isis^  1830,  p.  995. 

Thalassidroma  melitensis,  Schembri,  Orn.  del  Gruppo  di  MtîUa,  p.  118  (1843). 

Thalassidroma  tenuirostris,  minor,  faeroeensis  et  albifasciata,  Brm.  Naumannia, 

1855,  p.  296. 
Procellaria  lugubris  (Natt.)  et  melanonyx  (Nils.),  Bonap.  Consp.  av.  II,  pp.  196-97 

(1857). 
Thalassidroma  wiLSONi.  Heugl.  (nec  Bp.),  Faun.  Roth.  Meer,  n°  293  (1859). 
Procellaria  melitensis,  Wright,  Ibis,  1864,  p.  154. 
Thalassidroma  oceanica,  Lay.  (nec  Kuhl),  Birds  S.  Afr.  p.  359  (1867). 
Der  Kleine  Schwalbensturmvogel,  en  allemand. 
The  Stormy  Pétrel,  en  anglais. 
Het  Stor.mvogeltje,  en  flamand. 

Taille:  0"13;  ailes  0,117. 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  Parties  supérieures  d'un  brun  noir 
brillant;  parties  inférieures  d'un  brun  de  suie  ;  grandes  couvertures  des  ailes 
et  rémiges  secondaires  terminées  de  blanchâtre,  ce  qui  forme  sur  l'aile  une 
bande  oblique  de  cette  dernière  couleur,  plus  ou  moins  distincte  suivant 
l'usure  des  plumes;  sus-caudales  blanches,  les  plus  longues  terminées  de  noir; 
rémiges  et  queue  noires,  les  trois  rectrices  latérales  à  base  blanche;  sous- 
caudales  comme  les  autres  parties  inférieures,  mais  les  plus  latérales  et  les 
côtés  du  bas-ventre  en  partie  blancs,  c'est-à-dire  que  ces  plumes  sont  blan- 
ches sur  leur  bord  supérieur  et  brunes  sur  l'inférieur.  Ailes  dépassant  sensi- 
blement la  queue  et  celle-ci  se  termine  carrément.  Iris  brun  ;  bec  et  pattes 
noirs. 

Jeune.  —  Ne  diffère  de  l'adulte  que  par  la  teinte  générale  plus  fuligineuse. 

Poussin.  —  Face,  gorge  et  côtés  de  la  tête  nus  et  rougeâtres  ;  les  autres 
parties  garnies  d'un  duvet  long,  épais  et  d'un  gris  brunâtre,  un  peu  plus 
court  et  plus  clair  en  dessous.  Bec  jaune  à  extrémité  noire;  pattes  jaunes. 


-  639  — 

Hab.  —  Ce  petit  oiseau  habite  l'océan  Atlantique  et  se  montre  par- 
fois jusqu'au  69°  1.  N.  {Collett), 
mais  il  est  rare  sur  les  côtes  de 
Norwège  où  on  le  voit  quelque- 
fois après  des  tempêtes  (  Wallen- 
gren)  ;  il  visite  parfois  aussi 
l'Islande,  mais  n'y  niche  pas 
(Faber). 

Le  Thalassidrome  tempête 
niche,  en  Europe,  sur  les  rochers 
des  îles  Féroé  {Graba),  de  différentes  îles  des  côtes  du  pays  de  Galles 
et  de  l'ouest  de  l'Ecosse,  des  îles  du  groupe  de  St-Kilda,  des  Orcades, 
des  îles  Shetland  et  sur  certaines  îles  des  côtes  de  l'Irlande  [Seebohm)\ 
il  niche  également  en  France  sur  les  rochers  de  l'île  Rougie  près  de 
Morlaix  {Degland),  sur  les  îlots  rocheux  de  l'Espagne,  surtout  sur  las 
Hormigas,  la  Isla  Grossa  et  autres  en  dehors  de  la  Mare  xMenor 
{Saunders),  ainsi  que  sur  certaines  îles  rocheuses  de  l'Italie  [Giglioli). 
En  automne  et  en  hiver,  on  observe  plus  ou  moins  cet  oiseau  sur 
toutes  les  côtes  de  l'Europe  occidentale,  et  surtout  sur  celles  des  îles 
Britanniques;  il  est  cependant  très  rare  sur  la  mer  Baltique,  plus 
fréquent  sur  les  côtes  allemandes  de  la  mer  du  Nord  [Xaumann)  et 
sur  celles  du  Danemark  {Kjaerbôlling).  On  le  voit  irrégulièrement  en 
Hollande  [Schlégel]  et  en  Belgique,  mais  parfois  en  grand  nombre  et 
on  l'observe  alors  aussi  sur  l'Escaut;  on  a  même  pris  un  sujet  en  1854 
aux  environs  de  Bruxelles  (1)  et  un  autre  en  novembre  1878;  M.  de 
Sélys-Longchamps  dit  que  deux  individus  se  sont  laissé  prendre  à  la 
main  après  la  tempête  du  30  octobre  1835,  l'un  à  Namur  sur  les  bords 
de  la  Meuse,  l'autre  au  centre  de  l'Ardenne  sur  un  étang.  Sur  les 
côtes  de  France,  d'Espagne  et  du  Portugal,  on  le  voit  un  peu  partout 
à  la  suite  des  tempêtes.  11  est  commun  à  Malte  et  surtout  sur  la  petite 
île  de  Filfola,  dont  il  no  s'éloigne  que  quand  la  mer  devient  orageuse, 
et  on  en  prend  souvent  dans  les  ports  de  la  Sicile  {Malherbe).  Ce  Tha- 
lassidrome se  montre  également  près  des  îles  Baléares  {F.  Fallon), 
sur  la  mer  Ionienne  {Lilford),  près  des  îles  Canaries  [BoUé)  et  Madeire 
[Har  courut). 

On  a  vu  plus  haut  que  les  tempêtes  les  chassent  souvent  loin  dans 
l'intérieur  des  terres';  des  captures  ont  même  été  faites  dans  le  centre 

(1)  cil.  F.   \h\ho\i,  Jourii.jûr  Oniith.  18ô5,  p.  Hd. 


—  640  — 

de  l'Allemagne  {Naumann),  près  de  Vienne  {von  Pelzeln),  en  Moravie 
[Jeitteles),  en  Suisse  {Meisner  et  Schinz),  -etc. 

Cet  oiseau  paraît  également  visiter  toutes  les  côtes  africaines  ;  il 
niche  sur  diverses  îles  rocheuses  des  côtes  de  l'Algérie  {Loche),  et  de 
Heuglin  l'a  observé  dans  le  Bab-el-Mandeb  près  des  côtes  d'Aden. 
A  l'ouest  de  l'Afrique, il  a  été  capturé  sur  les  côtes  de  Fantee  {Sharpe) 
et  du  Damara  {Andersson),  à  l'est,  sur  celles  du  Zambèze  et  de  Zan- 
zibar {Sperling)^  et  il  ne  paraît  pas  rare  au  cap  de  Bonne-Espérance 
{Layard),  d'où  le  D^'  von  Horstock  en  a  rapporté  plusieurs  sujets 
dont  trois  se  trouvent  au  Musée  de  Leyde.  —  Il  paraît  moins 
répandu  sur  les  côtes  américaines  de  l'Atlantique,  mais  on  l'observe 
cependant  sur  les  bancs  de  Terre-Neuve  {Baird),  où  il  niche  proba- 
blement. 

Mœurs.  —  Ce  Thalassidrome  est  le  plus  petit'^es  palmipèdes  ;  il 
habite  toujours  la  pleine  mer  et  ne  visite  pour  ainsi  dire  les  îlots  cou- 
verts de  rochers  qu'à  l'époque  de  la  reproduction,  à  moins  d'y  être 
chassé  par  une  violente  tempête.  C'est  donc  loin  des  côtes  qu'on  ren- 
contre ces  oiseaux,  soit  isolément,  soit  en  troupes,  que  le  temps  soit 
beau  ou  tempétueux.  «  On  les  voit  voler,  dit  le  prince  Max  de  Wied, 
des  journées  entières  au-dessus  des  flots,  tantôt  s'élevant  dans  les  airs 
comme  des  Hirondelles,  tantôt  planant  au  milieu  des  vagues  dont  ils 
suivent  exactement  les  ondulations  sans  jamais  toucher  l'eau.  Aper- 
çoivent-ils à  la  surface  de  la  mer  quelque  chose  qui  puisse  leur  servir 
de  nourriture,  ils  étendent  leurs  pieds  délicats,  étalent  leurs  palmures 
et  marchent  un  instant  sur  l'eau  tout  en  battant  des  ailes  et  en  étalant 
la  queue,  jusqu'à  ce  qu'ils  aient  saisi  l'objet  convoité.  On  ne  les  voit 
presque  jamais  nager,  mais  la  puissance  de  leur  vol  égale  au  moins 
celle  de  nos  Martinets.  Une  volée  de  quatre  vint  tournoyer  autour  de 
notre  vaisseau  et  nous  accompagna  quelque  temps,  même  pendant  la 
nuit  par  un  clair  de  lune.  Cette  puissance  dans  le  vol  est  réellement 
admirable,  car  ils  ne  paraissent  jamais  fatigués.  Quand  le  vent  était 
fort,  des  troupes  de  plus  de  vingt  sujets  se  réunissaient  derrière  le 
vaisseau  dont  ils  suivaient  en  silence  le  sillage.  Parfois,  cependant, 
surtout  pendant  la  nuit,  ils  faisaient  entendre  un  petit  cri  bref  (l).  » 
—  «  Ils  volent  littéralement  des  journées  entières  sans  se  reposer, 
dit  A.  E.  Brehm,  ou  se  reposent  en  prenant  une  autre  allure,  par 

(i)  Journ.  fiii'  Ornith,  1859,  p.  251. 


-  641  - 

exemple  en  battant  des  ailes  après  avoir  plané,  ou  réciproquement. 
Il  n'y  a  que  les  tempêtes  de  longue  durée  qui  puissent  les  épuiser,  et 
cela,  non  point  parce  que  la  lutte  contre  le  vent  les  fatigue,  mais  parce 
que  l'ouragan  rendant  plus  difficile  la  recherche  de  la  nourriture,  la 
faim  finit  par  les  aifaiblir.  »^ 

Ce  sont  des  oiseaux  très  inoffensifs,  qui  vivent  en  paix  entre  eux  et 
ne  s'occupent  pas  des  autres.  Dès  qu'ils  se  trouvent  à  l'intérieur  des 
terres,  ils  sont  complètement  désorientés  et  finissent  presque  toujours 
par  mourir  de  faim. Leur  nourriture  consiste  en  mollusques, annélides, 
petits  crustacés  et  peut-être  aussi  en  très  petits  poissons;  ils  se  mon- 
trent aussi  très  avides  des  substances  grasses  et  huileuses  qui  flottent 
sur  la  mer.  Graba  dit  n'avoir  jamais  trouvé  dans  les  estomacs  des 
Thalassidromes  qu'il  a  examinés,  qu'une  huile  jaune  sans  traces  de 
restes  d'animaux.  De  môme  que  les  Pétrels, ces  petits  oiseaux  ont  la 
faculté  de  pouvoir  lancer  de  leur  bec  des  jets  de  ce  liquide  jaune 
et  huileux  dont  leur  estomac  est  rempli.  Graba  rend  leur  voix  par 
wihb,  wihb,  wih,  ua,  ua\  parfois  ils  font  aussi  entendre  un  cri  res- 
semblant à  kekerek-i,  Vi  prononcé  d  une  voix  plus  sonore. 

Reproduction.  —  «  Plusieurs  semaines  avant  la  ponte,  dit  Graba, 
les  couples  se  rendent  dans  des  grottes  et  des  crevasses  non  loin  de  la 
mer  ;  ils  y  creusent  dans  la  terre  un  trou  qui  a  parfois  un  ou  deux 
pieds  de  profondeur,  et  complètent  leur  nid  à  l'aide  de  quelques  brins 
d'herbes  déposés  au  fond  ;  c'est  sur  cette  faible  litière  que  la  femelle 
dépose  à  la  fin  de  juin  un  œuf  unique.  »  Cet  œuf  est  de  forme  plus  ou 
moins  ovalaire,  à  coquille  mince  d'un  blanc  laiteux  mat  avec  despoints 
d'un  brun  rougeâtre  vers  le  gros  bout,  le  plus  souvent  disposés  en 
couronne;  il  mesure  environ  27  millim.  sur  22.  Il  est  probable  que 
tous  les  Thalassidromes  d'une  localité  ne  nichent  pas  à  la  même 
époque,  à  moins  qu'ils  aient  deux  couvées  par  année,  car,  d'après 
M.  J.  Vian,  le  capitaine  Loche  aurait  recueilli  des  œufs  de  cette 
espèce  sur  les  côtes  de  Provence  de  mai  à  septembre. 

M.  Seebohm,  qui  a  observé  ces  oiseaux  sur  une  petite  île  de  la  côte 
du  comté  de  Kerry,  dit  n'avoir  jamais  eu  la  chance  de  les  voir  voler 
pendant  le  jour,  mais  qu'à  la  tombée  de  la  nuit,  il  put  voir  au  clair 
de  lune  des  Thalassidromes  volant  comme  des  chauves-souris  vers 
leurs  petits  pour  leur  apporter  leur  nourriture  ;  autant  qu'il  a  pu  en 
juger,  celle-ci  ne  se  composait  que  d'huile,  et  dans  l'estomac  des 
jeunes  il  n'a  jamais  trouvé  d'aliments  solides. 

Tome  11.  —  1W4.  81 


642  — 


304.  —  Thalassidrome  de  Leach 

PROCELLARIA    LEUCORRHOA,  Vieill, 

(PI.  306) 

Procellaria  pelagica,  Pall.  (nec  Lin).  Zoogr.  II,  p.  316  (1811.) 

Procellaria  leucorhoa,  Vieill.,  N.  Dict.  dliisl.  nat.,  XXV,  p.  442(1817.) 

Procellaria  leachii,  Temm.,  Man.  d'Orn.  II,  p.  812  ('1820.) 

Hydrobates  leachii,  Boie,  Isis,  1822,  p.  562. 

Procellaria  bullockii,  Flem.  Bnt.  Anim.,  p.  136  (1828.) 

Thalassidroma  bullockii,  Selby,  Bnt.  Orn.  II,  p.  537  (1833.) 

Thalassidroma  leachii,  Bonap.  Comp.  List.  B.,  p.  64  (1838.) 

Cymochorea  LEUCORRHOA,  Coues,  Pr.  Acad.  Nat.  Se.  Phil..,  1864,  p.  76. 

Thalassidroma  leucorrhoa,  Degl.  et  Gerbe,  Orn.  Eur.  II,  p.  387  (1867.) 

OcEANODROMA  LEUCORRHOA,  Stejn.,  Results  oforn.  Explor.Com.  Isl.  and  Kamtschatka, 

p.  97  (1885.) 
Der  Gabelschwanzige  Schwalbensturmvogel,  en  allemand. 
The  Leach's  fork-tailed  Pétrel,  en  anglais. 
Het  TALE  Stormvogeltje,  en  flamand. 

Taille  .-0^16;  ailes  0^144, 

Description  des  deux  sexes  adultes.  — D'un  brun  foncé,  un  peu  plus  pâle  en 
dessous  ;  petites  couvertures  des  ailes  d'un  brun  noirâtre,  les  autres  d'un  brun 
cendré,  les  plus  grandes  terminées  par  une  teinte  plus  claire  ;  sus-caudales 
blanches  ;  sous-caudales  de  la  couleur  des  autres  parties  inférieures  ;  un  peu 
de  blanc  sur  les  côtés  de  la  région  anale  ;  rémiges  et  queue  noires  ;  ailes  ne 
dépassant  pas  sensiblement  la  queue,  cette  dernière  fourchue. 

Cette  espèce  se  distingue  donc  facilement  de  la  précédente  par  sa  taille 
plus  forte  et  surtout  par  sa  queue  fourchue. 

Jeune.  —  Comme  l'adulte,  mais  d'une  couleur  générale  plus  brune. 

Poussin.  —  Couvert  d'un  long  duvet  d'un  gris  brunâtre,  un  peu  plus  pâle 
en  dessous. 

Hab.  —  Ce  Thalassidrome  ne  paraît  nicher,  en  Europe,  qu'aux  îles 

Britanniques,  et  seulement  sur 
les  rochers  du  groupe  de  Saint- 
Kilda  et  de  l'île  Rona  sur  la 
côte  occidentale  de  l'Ecosse 
{Seebohm).  De  là  il  erre  sur  le 
vaste  océan  et  se  montre,  à  la 
suite  des  tempêtes,  sur  les 
diverses  côtes  de  l'Angleterre, 
de  l'Irlande,  de  l'Ecosse  et  des 
îles  voisines,  plus  rarement  sur  celles  du  sud  de  la  Norwège  {Collett)\ 


—  643  - 

ce  n'est  que  très  accidentellement  qu'on  le  voit  à  Helgoland  [Gaetké), 
dans  l'Allemagne  occidentale  {Reichenow)  où  un  sujet  a  même  été  pris 
à  Francfort-sur-Mein  {Naumann),  et  au  Danemark  {Kjaerbôlling). 
Ce  n'est  aussi  qu'accidentellement  qu'on  l'observe  en  Hollande 
{Schlégel)  et  en  Belgique;  dans  notre  pays,  les  ouragans  l'ont  jeté 
plus  d'une  fois  bien  loin  dans  l'intérieur  :  un  individu  a  été  pris  aux 
environs  de  Louvain  en  février  1837,  un  autre  sur  l'Escaut  à  Anvers, 
un  troisième  à  Namur  et  un  quatrième  à  Liège  en  1840  [de  Selys- 
Longchmnps)\  en  1853,  on  prit  vivant  un  oiseau  de  cette  espèce  dans 
un  champ  de  blé  près  de  Vilvorde  (C.  F.  Dubois),  enfin,  un  autre  sujet 
fut  capturé  en  décembre  1885  près  de  Bruxelles,  dans  le  faubourg  de 
Saint-Gilles.  Il  est  de  passage  irrégulier  sur  les  côtes  de  France 
{Degland)  et  du  Portugal  {Barhoza  du  Bocage)-,  il  a  été  assez  souvent 
observé  sur  les  côtes  de  la  Provence  et  quelques  individus  furent 
trouvés  morts  sur  la  plage  de  Cette,  après  un  fort  orage  [Jaubert  et 
Bay^th').  On  l'a  observé  accidentellement  sur  les  côtes  de  l'Algérie 
[Loche)  et  de  Madeire  [Harcourt). 

En  Amérique,  du  côté  de  l'Atlantique,  on  rencontre  cet  oiseau  au 
sud  du  Groenland  jusqu'au  65°  [Holbôll)  et  depuis  le  Massachusets 
jusqu'à  la  baie  de  Baâîn  [Baird);  il  est  commun  sur  les  côtes  du 
Nouveau-Brunswick  dans  la  baie  de  Fundj  [Dresser)  et  sur  les  bancs 
de  Terre-Neuve  [Max  von  Wied)  ;  suivant  Baird,  le  musée  du  Smithso- 
nian  Institution  possède  des  sujets  capturés  près  de  Washington  en 
août  1842.  Du  côté  du  Pacifique,  le  D'"  von  Schrenk  l'a  observé  près 
des  îles  Kouriles,  BischofF  le  trouva  en  abondance  près  de  Sitka,  et 
Dali  le  vit  nicher  sur  des  îlots  rocheux  près  de  Attu  et  dans  les  mon- 
tagnes de  Kyska  et  de  Amchitka,  à  l'ouest  des  îles  Aléoutes  où 
Nelson  le  trouva  en  abondance  en  mai  et  en  octobre  ;  dans  le  groupe 
des  lies  Comandores,  il  niche  à  l'île  Copper  {Stejneger). 

Mœurs.  —  De  même  que  son  congénère,  le  Thalassidrome  de 
Leach  ne  se  rencontre  qu'exceptionnellement  sur  les  côtes  en  dehors 
de  l'époque  de  la  reproduction  ;  ses  mœurs  ne  diffèrent  d'ailleurs  pas 
de  colles  du  précédent.  Son  vol  est  léger  et  ressemble  à  celui  de 
l'Hirondelle,  mais  l'oiseau  vole  généralement  bas  en  suivant  les 
ondulations  des  vagues;  parfois  il  se  repose  sur  l'eau  et  nage  quel- 
ques instants,  mais  seulement  quand  la  mer  est  calme;  il  s'approche 
souvent  aussi  des  vaisseaux,  i)lane  alentour  et  les  accompagne  durant 
quelque  temps,  môme  la  nuit,  car  il  est  plus  ou  moins  nocturne.  C'est 
un  oiseau  silencieux  dont  on  entend  rarement  la  voix  ;  Holbôll  dit 


—  644  — 

cependant  que  «  quand  on  approche  des  îles  du  Groenland,  c'est-à- 
dire  des  bancs  de  poissons,  ces  oiseaux  entourent  souvent  le  bateau 
pendant  les  nuits  claires  de  l'été,  surtout  par  un  temps  calme,  et  font 
entendre  leur  voix  sifflante  analogue  aux  cris  des  souris.  »  Le  même 
auteur  dit  qu'il  est  surtout  abondant  près  de  l'île  Kock  devant  la  baie 
de  Godthaab,  et  que  cela  l'étonnerait  fort  si  ce  Thalassidrome  ne 
nichait  pas  sur  l'une  ou  l'autre  des  centaines  d'îles  qui  se  trouvent 
dans  ces  parages,  d'autant  plus  qu'on  l'observe  dans  le  détroit  de 
Davis  depuis  le  commencement  de  mai  jusqu'à  la  fin  d'août;  quand 
Holbôll  quitta  le  Groenland,  en  octobre,  il  ne  vit  plus  un  seul  de  ces 
oiseaux  dans  le  détroit. 

La  nourriture  de  cette  espèce  se  compose  également  de  petits 
animaux  marins,  et  surtout  des  matières  grasses  et  huileuses  qui 
flottent  à  la  surface  de  l'eau  et  qui  proviennent  principalement  des 
déchets  de  baleines  et  de  phoques.  Quand  on  prend  en  main  un  de 
ces  oiseaux,  il  dégorge  également  une  substance  huileuse  d'une 
odeur  musquée  très  prononcée. 

Reproduction.  —  Le  Thalassidrome  de  Leach  niche  également  par 
petites  colonies  dans  les  crevasses  des  rochers  ou  dans  des  galeries 
souterraines  dont  la  longueur  varie  de  deux  à  cinq  pieds,  et  qu'il 
creuse  lui-même  dans  un  terrain  meuble;  ces  galeries  ont  parfois 
deux  entrées.  Le  nid,  placé  au  fond  de  la  galerie,  est  formé  d'herbes 
sèches,  d'un  peu  de  mousse  ou  de  lichen  ;  on  trouve  ordinairement 
plusieurs  nids  non  loin  les  uns  des  autres.  La  ponte  a  lieu  en  juin  et 
juillet  et  ne  se  compose  que  d'un  seul  oeuf,  qui  ne  diffère  de  celui  du 
Thalassidrome  tempête  que  par  les  dimensions  ;  sa  coquille  est  très 
fragile,  calcareuse  et  sans  luisant  ;  il  mesure  environ  44  millim. 
sur  33. 

Les   deux   sexes   couvent  alternativement,    mais  il  paraît  qu'on 
trouve  plus  souvent  le  mâle  sur  le  nid  que  la  femelle. 

GENRE     CLXVI 

PÏÏPFIN.  —  PUFFINUS. 

PuFFiNUS,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  131  (1760). 
Procellaria,  Briinn.  Orn.  bor.  p.  29  (1764). 
Nectris,  Keys.  et  Blas.  Wirbelth.  Eur.  p.  XCIV  (1840). 
Cymotomus,  Macg.  Man.  Or.  II,  p.  13  (1842). 

Car.  —  Bec  de  la  longueur  de  la  tête,  grêle,  droit,  déprimé  à  la  base, 
comprimé  à  son  extrémité  et  crochu  ;  mandibule  inférieure  un  peu  emboîtée 


—  645  — 

sous  les  bords  de  la  supérieure  ;  narines  basales,  ovales,  s'ouvrant  dans  deux 
tubes  séparés  par  une  cloison;  ailes  longues,  aiguës,  dépassaut  la  queue  ; 
cette  dernière  courte,  composée  de  douze  rectrices  ;  tarses  très  comprimés, 
de  la  longueur  du  doigt  médian;  pouce  rudiinentaire,  mais  pourvu  d'un 
ongle. 

Hab.   —   Les  océans  Atlantique    et   Pacifique  des   hémisphères 
boréal  et  austral. 

305.  —  Le  Puffin  des  Anglais. 

PUFFINUS  ANGLORUM,  Boie  ex  Tem. 

(PI.  307  ) 

Procellaria.  PUFFINUS,  Bi'unn.  Om.  bor.  p.  29  (1764);  Lin.  5".  N.  I,  p.  213  (1766). 

Procellaria  puphinus,  Tunst.  Orn.  Brit.  p.  4  (1771). 

Procellaria  ANGLORUM,  Tem.  Man.  d^orn.  II,  p.  807  (1820). 

PuFFiNUS  ANGLORUM,  Roie,  Isis^  1822,  p.  562. 

PuFFiNUS  ARCTicus,  Faber,  Prodr.  Isl.  Orn.  p.  56  (1822) . 

Procellaria  yelkouan,  Acerbi,  Bihl.  Ital.  CXL  p.  294  (1827). 

Thalassidroma  ANGLORUM,  Swaius.  Classif.  Birds,  II,  p.  374  (1837). 

Nectris  PUFFINUS,  Keys.  et  Blas.  Wirhelth.  Eur.  p.  XCIV,  (1840). 

Cymotomus  ANGLORUM,  Macg.  Man.  Orn  II,  p.  13  (1842). 

PuFFiNus  BAROLii  (Boiiel.) ,  Bonap.  Compt.-rend.  XLII,  p.  769  (1856). 

PuFFiNUS  YELKOUAN,  Bonap.  Consp.  av  II,  p.  205(1857). 

PuFFUNUs  YELCUANUS,  Coucs,  Proc.  Accid.  Philcul.  1864,  p.  137. 

Nectris  ANGLORUM,  ^Glog.)  et  Barolii,  Rey,  Sijno7iymik,  p.  150  (1872). 

Der  Nordische  Tauchersturmvogel,  en  allemand. 

The  Manx  Shearwater,  en  anglais. 

De  Noordsche  Pijlstormvogel,  en  flamand. 

Taille  :  0,27  à  0,38;  tarses  0,043  à  0,052  (d'après  M.  J.  Vian); 
ailes  0,215  à  0,235. 

Description  des  deux  sexes  après  la  mue  d'automne.  —  Cette  mue  ne  paraît 
tenuinée  que  vers  la  tin  de  janvier.  Parties  supérieures,  ailes  et  queue  d'an 
brun  noir  lustré;  parties  inférieures  à  partir  du  menton  d'un  blanc  pur,  les 
côtés  de  la  région  anale  et  les  barbes  externes  des  sous-caudalcs  latérales 
d'un  brun  noirâtre.  Be3  d'un  noir  verdâtre;  tarses  couleur  chair,  leur  face 
postérieure  et  le  doigt  externe  bruns,  membranes  d'un  blanc  rosâtre  veinées 
de  brun;  iris  brun  foncé. 

M.  J.  Vian,  dans  une  Causerie  omiiJiologique  fort  intéressante  (1),  nous 
apprend,  qu'à  l'époque  des  amours,  les  deux  suxes  portent  sur  l'occiput,  à  la 
nuque, et  surtout  à  l'arrière  du  cou,  des  filets  blancs  terminés  on  pinceau; 
ces  tiges  très  déliées,  très  fragiles,  poussent  entre  les  plumes  et  les  excèdent 
de  quelques  millimètres,  mais  ne  doivent  durer  que  fort  peu  de  temps.  Le 
même  auteur  a  constaté  que  les  sous-caudales  latérales  sont  très  variables  : 

(1)  Bulletin  de  la  Soc.  tool.  de  France,  III  (1878),  p.  51 


-  646  — 


il  a  vu  des  sujets  qui  présentaient  un  assortiment  de  plumes  blanches,  de 
plumes  brunes  ou  noirâtres,  de  blanches  mouchetées  de  brun,  de  plumes 
demi-blanches,  demi-noires,  et  enfin  de  plumes  grises,  avec  cette  distinction 
toutefois  que  les  sous-caudales  suivent  généralement  la  teinte  du  manteau. 

Plumage  d'été.  —  Bien  que  la  mue  soit  simple  chez  ce  Pufiin,  les  parties 
noirâtres  se  décolorent  cependant  à  mesure  que  l'été  avance,  et  finissent  par 
devenir  d'un  brun  unicolore  tirant  plus  ou  moins  au  roux.  C'est  le  plumage 
que  beaucoup  d'auteurs  décrivent  pour  le  jeune.  Il  est  probable  que  dans  le 
Nord  la  décoloration  est  moins  rapide  et  moins  accentuée. 

Jeune.  —  Ressemble  à  l'adulte,  mais  d'une  teinte  plus  brune,  les  sous-cau- 
dales et  les  flancs  lavés  de  brun. 

Poussin.  —  Entièrement  vêtu  d'un  duvet  brun  cendré,  formant  sur  la  tête 
une  toque  saillante, dont  les  tiges  recouvrent  en  tombant  le  front  et  les  yeux  ; 
ce  duvet,  un  peu  plus  pâle  aux  parties  inférieures,  y  est  divisé  longitudina- 
lement  de  la  gorge  à  la  région  anale  par  une  bande  blanche,  plus  large  et 
plus  accentuée  sur  l'abdomen.  Bec  noirâtre;  pieds  jaune  orange  avec  mar- 
brures noires  sur  la  face  postérieure  des  tarses  et  sur  les  doigts  externe  et 
médian  (/.  Vian). 

Remarque.  —  Dans  la  même  Causerie  dont  il  est  parlé  plus  haut, 
M.  Jules  Vian  considère  les  Pufflnus  anglorum,  yelkouan,  haroli  et 
obscurus  comme  appartenant  à  une  seule  et  même  espèce.  Je  suis 
d'accord  avec  mon  savant  confrère  en  ce  qui  concerne  les  trois  pre- 
miers ;  quant  au  P.  obscurus  des  mers  tropicales,  il  forme  une  espèce 
distincte.  Ce  dernier  n'a  été  pris  que  deux  fois  en  Europe  et  seule- 
ment aux  îles  Britanniques  (1).  Quant  au  P.  assimilis  des  mers  du 
Sud,  il  doit  être  rapporté  au  P.  obscurus  dont  il  ne  diffère  que  par 
une  taille  plus  petite. 

Hab.  —  Le  Puffin  des  Anglais  ou  Manks  est  fort  répandu  aux  îles 

Britanniques,  où  il  niche  sur  les 
rochers  d'un  grand  nombre  d'îles 
des  côtes  occidentales  de  l'Ecosse 
et  de  l'Angleterre,  j  compris  le 
groupe  de  St-Kilda,  les  îles  Or- 
cades,  Shetland  et  Scilly  ;  en 
automne  et  en  hiver,  ces  oiseaux 
s'éloignent  en  partie  des  lieux 
où  ils  sont  nés,  et  on  les  voit 
alors  en  plus  ou  moins  grand  nombre  sur  toutes  les  côtes  britanniques 

(1)  C'est  par  erreur  que  certains  auteurs  ont  dit  que  le  P.  obscurus  avait  été  pris  accidentelle- 
ment dans  la  Méditerranée;  les  captures  sur  lesquelles  reposaient  leurs  indications  étaient  tout 
simplement  des  Puffins  manks  de  petite  taille  et  non  des  P.  obscurus. 


-  647  — 

{Seebohm).  Cet  oiseau  niche  également  en  Islande  [Faber),  aux  îles 
Féroé  [Gro.ba)  et  visite  quelquefois  en  hiver  les  côtes  méridionales  du 
Groenland  {Newton)  et  du  S.-O.  de  la  Norwège  {Collett)  ;  il  n'a  pas 
été  observé  sur  la  mer  Baltique,  mais  après  les  tempêtes  on  le  voit 
parfois  sur  les  côtes  occidentajes  du  Danemark  {Kjaerbôlling),  à  Hel- 
goland  et  sur  les  côtes  N.-O.  de  l'Allemagne  {Naumann),  sur  celles  de 
la  Hollande  [Schlégel)  et  de  la  Belgique,  mais  il  est  toujours  rare  pour 
notre  faune  et  il  en  est  de  même  pour  la  France  {Degland  et  Gerbe). 
Il  est  moins  rare  sur  les  côtes  du  Portugal  {Barboza  du  Bocage)  et  il 
est  même  abondant  et  niche  sur  plusieurs  îlots  rocheux  de  l'Espagne 
{Saunders),  et  se  montre  communément  en  automne  dans  le  détroit 
de  Gibraltar  {Irby).  Cet  oiseau  est  sédentaire  sur  la  Méditerranée  où 
il  est  plus  ou  moins  abondant  suivant  les  localités  et  surtout  près  des 
îles  et  des  côtes  rocheuses,  mais  il  est  rare  sur  TAdriatique  [Giglioli); 
à  l'Est  il  s'étend  dans  l'Archipel  et  sur  les  côtes  de  la  Grèce  {Linder- 
TYiayer),  il  est  commun  sur  le  Bosphore  [Alléon)  et  à  l'entrée  de  la  mer 
Noire  [Taylor). 

On  observe  également  ce  Puffin  sur  les  côtes  de  la  Palestine  {Tris- 
tram),  de  l'Asie  Mineure,  de  la  Syrie  {de  Heuglin),  de  l'Egypte  (Dres- 
ser), de  l'Algérie  {Loche),  du  Maroc  (Favier),  des  îles  Madère, 
Canaries  {Berthelot)  et  Açores  {Godman).  En  Amérique  il  habite,  du 
côté  de  l'Atlantique,  depuis  le  Labrador  et  la  Terre-Neuve  jusqu'au 
40<>  1.  N.  {auct.  amer.),  et  visite  parfois  les  îles  Bermudes  à  la  suite 
de  tempêtes  {Bar tram). 

Mœurs. — Le  Puffin  manks  ou  des  Anglais  n'est  pas  un  vrai  migra- 
teur, mais  en  automne  et  en  hiver  il  erre  au  loin  sur  le  vaste  océan  et 
on  le  voit  alors  près  des  côtes  de  l'Europe  occidentale  et  méridionale 
où  il  ne  niche  pas.  C'est,  comme  les  procellariens  précédents,  un 
oiseau  pélagique  qui  ne  vient  à  terre  qu'à  l'époque  de  la  reproduction, à 
moins  qu'une  violente  tempête  ne  le  chasse  au  delà  des  flots.  Il  est 
plus  nocturne  que  diurne,  surtout  en  été,  et  vit  en  troupes  plus  ou 
moins  nombreuses,  car  il  est  sociable,  de  mœurs  paisibles  et  ne 
s'occupe  guère  des  autres  oiseaux  qui  vivent  dans  son  voisinage.  A 
l'époque  de  la  reproduction,  il  se  tient  caché  pendant  le  jour  dans  des 
creux  naturels  ou  dans  des  galeries  qu'il  creuse  lui-même  à  l'aide  de 
son  bec  et  de  ses  ongles  dans  les  ilancs  des  montagnes  et  des  rochers 
escarpés,  où  il  est  souvent  fort  difficile  de  le  dénicher. 

Ce  Puffin  nage  et  plonge  à  la  perfection, surtout  quand  le  temps  est 
calme,  mais  pendant  les  tempêtes  il  déploie  davantage  la  puissance  de 


son  vol.  Par  un  temps  serein  il  nage  beaucoup,  puis,  relevant  tout  à 
coup  les  ailes,  il  disparaît  dans  les  flots,  nageant  entre  deux  eaux  avec 
une  grande  dextérité,  en  s'aidant  à  la  fois  des  pieds  et  des  ailes.  «  Je 
ne  connais  aucun  oiseau  de  mer,  dit  Brehm,  qui  vole  avec  une  pareille 
impétuosité.  On  le  voit  souvent  nager  tranquillement,  puis  plonger 
dans  les  flots  ;  souvent  aussi,  en  volant  sans  planer,  il  se  lance  sur  les 
vagues  et  les  traverse.  Il  se  précipite  avec  une  incroyable  rapidité 
de  battements  d'ailes,  que  je  comparerais  volontiers  à  des  coups  de 
marteau  secs  et  répétés.  Il  tourne  et  se  meut  non  seulement  de  tous 
les  côtés,  mais  aussi  de  haut  en  bas,  de  telle  façon  que  tantôt  on  aper- 
çoit son  dos  de  couleur  sombre,  tantôt  son  ventre  blanc.  Il  s'élance 
contre  les  vagues,  gravit  leurs  cimes  et  glisse  dans  leurs  sinuosités, 
puis,  s'élevant  tout  à  coup  à  trois  ou  quatre  mètres  de  hauteur,  il  fond 
en  droite  ligne  sur  les  flots,  disparaît  au  milieu  d'eux,  nage  comme 
les  Pingouins,  fait  mouvoir  ailes  et  jambes  en  même  temps,  franchit 
une  certaine  distance,  puis  s'élance  de  nouveau  dans  les  airs,  souvent 
pour  respirer  seulement,  et  disparaît  encore.  Si  les  autres  oiseaux  de 
mer  ont  un  vol  plus  gracieux,  aucun  d'eux  ne  se  meut  avec  autant  de 
variété  et  de  rapidité  que  le  Puffin  des  Anglais.  Cette  diversité  de 
mouvements  frappe  d'autant  plus  qu'on  rencontre  le  plus  souvent 
cette  espèce  en  grand  nombre,  et  que  les  individus  qui  forment  une 
bande  agissent  à  la  fois,  sans  cependant  exécuter  les  mêmes  mouve- 
ments; ainsi,  tandis  que  les  uns  disparaissent  dans  les  vagues,  les 
autres  s'élancent  d'un  peu  plus  loin,  passent  au-dessus  de  ceux  qui 
plongent  et  disparaissent  à  leur  tour,  alors  que  les  premiers  se  mon- 
trent de  nouveau.  Ces  changements  continuels  captivent  l'observateur; 
pour  moi  ces  jeux  des  Puffins  m'ont  réellement  enthousiasmé.  Je  ferai 
encore  remarquer  que,  malgré  toutes  ces  évolutions,  les  Puffins  fran- 
chissent des  étendues  immenses,  car  ils  ne  s'arrêtent  jamais  et  pour- 
suivent toujours  leur  vol,  bien  qu'ils  décrivent  parfois  de  grandes 
courbes  qui  les  ramènent  à  leur  point  de  départ.  » 

La  nourriture  de  cet  oiseau  consiste  en  petits  poissons,  céphalo- 
podes et  autres  mollusques  marins.  Son  cri  peut  se  rendre,  d'après 
Donald,  par  kitty-coo-roo,  kitty-coo-roo. 

Comme  la  plupart  des  Procellariens,  le  Puffin  se  montre  peii 
farouche,  mais  son  infatigable  activité  empêche  toute  poursuite 
sérieuse  ;  quand  on  se  trouve  au  milieu  d'une  de  leurs  bandes,  on  peut 
cependant  en  abattre  beaucoup  les  uns  après  les  autres,  mais  il  est 
fort  difficile  de  les  tirer  lorsqu'ils   volent.  Il  paraît  cependant  que 


—  049  - 

cette  espèce   est  si   abondante  à  St-Kilda,  que  pendant  la  bonne 
saison  on  peut  en  tuer  plusieurs  centaines  en  une  seule  nuit. 

Reproduction.  —  Le  Puffin  manks  niche  au  fond  d'une  galerie  qui 
a  de  trois  à  cinq  pieds  de  pr^ofondeur,  et  qu'il  creuse  horizontalement 
dans  la  terre  sur  les  flancs  des  montagnes  et  des  rochers  battus  par 
la  mer,  et  généralement  un  peu  au-dessous  des  plates-formes  garnies 
d'herbes.  Sur  les  mêmes  montagnes  nichent  souvent  des  quantités 
innombrables  d'autres  oiseaux  marins.  La  galerie  du  Puffin  ressemble 
plus  à  un  terrier  de  lapin  qu'à  un  nid  d'oiseau  ;  le  fond  de  ce  couloir 
est  un  peu  élargi,  et  c'est  là  que  la  femelle  dépose  un  œuf  unique  sur 
une  légère  litière  de  brins  d'herbes.  Cet  œuf  est  arrondi,  d'un  blanc 
uniforme  et  mesure  environ  59  millim.  sur  40. 

La  ponte  a  lieu  depuis  le  mois  de  mai  jusqu'en  juin,  et  les  deux 
sexes  se  partagent  les  soins  de  l'incubation.  Les  jeunes  sont  excessi- 
vement gras  et  sont  fort  recherchés  par  les  habitants  de  certaines  îles. 

CINQUIÈME    SOUS-ORDRE 

LES  PYGOPODESO) 

Car.  —  Bec  de  forme  variable  :  tantôt  allongé  et  plus  ou  moins 
conique,  tantôt  élevé  et  très  comprimé  latéralement  ;  ailes  courtes, 
étroites  et  pointues  ;  jambes  placées  très  à  l'arrière  du  corps  ;  tarses 
courts,  comprimés  latéralement;  doigts  antérieurs  réunis  pardes  mem- 
branes parfois  lobées,  le  pouce  plus  ou  moins  développé  ou  absent; 
queue  courte  ou  nulle.  —  Corps  de  forme  allongé,  robuste;  cou  de 
longueur  moyenne  avec  la  tête  plus  ou  moins  grande  ;  plumage  épais, 
abondant  et  justré. 

Mœurs.  —  Ce  sont  de  vrais  plongeurs,  qui  vivent  sur  l'océan  ou 
sur  les  eaux  douces.  Leur  mode  habituel  de  locomotion  est  la  nata- 
tion, aussi  passent-ils  la  plus  grande  partie  de  leur  vie  à  nager  et  à 
plonger  ;  c'est  également  dans  l'eau  qu'ils  cherchent  leur  nourriture. 
Beaucoup  d'entre  eux  volent  bien,  quoique  leurs  ailes  paraissent 
quelquefois  trop  faibles  pour  porter  le  poids  du  corps,  aussi  sont-ils 
obligés  de  donner  des  coups  d'ailes  répétés  et  fatigants. 

Les  Pygopodes  marchent  en  général  avec  difficulté  en  tenant  le 
corps  assez  droit.  La  plupart  sont   sociables,  d'un  naturel  paciîique 

(i)  Nous  avons  oublié  de  mentionner  à  la  p.  626  le  4"  sous-ordre,  celui  des  Tuoi- 
naires,  qui  a  pour  caractères  ceux  de  la  famille  des  Procellaridés,  la  seule  du  groupe. 
Tome  II.  —  IWH.  82 


—  650  — 

et  stupide  ;  ce  sont  d'ailleurs  les  oiseaux  qui  occupent  le  dernier  rang 
de  la  classe,  leur  organisation  générale  étant  la  moins  parfaite. 

On  divise  ce  sous-ordre  en  trois  familles  :  les  Alcidés,  les  Colym- 
bidês  et  les  Podicépidés . 

FAMILLE  DES  ALCIDES. 

Car.  —  Bec  de  forme  assez  variable,  comprimé,  la  mandibule 
inférieure  emplumée  jusque  près  delà  rencontre  de  ses  branches;  ailes 
étroites,  aiguës;  queue  courte,  formée  de  douze  rectrices  ;  tarses  com- 
primés ;  doigt  externe  un  peu  plus  court  que  le  médian  ;  pouce  nul. 

Ces  oiseaux  ont  la  tête  volumineuse,  le  cou  épais  et  court,  le  corps 
robuste. 

Hab.  —  Les  Alcidés  habitent  la  zone  arctiqué^t  se  montrent  en 
hiver  dans  les  régions  tempérées. 

Mœurs.  —  Ce  sont  des  oiseaux  marins  qui  vivent  continuellement 
sur  l'eau  et  ne  séjournent  sur  la  terre  ferme  que  pour  la  reproduc- 
tion. Ils  nagent  et  plongent  avec  la  plus  grande  facilité,  volent  assez 
bien,  et  marchent  le  corps  droit  et  en  s'appuyant  sur  les  tarses.  Ils 
se  nourrissent  de  petits  poissons,  de  crustacés  et  de  mollusques.  Ils 
nichent  sur  des  rochers  et  ne  pondent  généralerùent  qu'un  seul  œuf, 
mais  très  volumineux  relativement  à  l'oiseau. 

OKNRE  CLXVII. 

GUILLEMOT.  —  URIA. 

Uria,  Briss,  Ornith.  VI,  p.  70  (1760). 
CoLYMBUs,  part.  Lin.  S.  N.  I,  p.  220  (1766). 
Cepphus,  Pall.  Spicil.  Zool.  V,  p.  33  (1769). 
Mergus,  Tunst.  Orn.  Brit.  p.  3  (1771). 
Grylle,  Steph.  Gen.  Zool.  XII,  2.  p.  250  (1824). 
LoMviA,  Coues,Pr.  Ac.  nat.sc.  PhiL,  1868,  p.  75. 

Car.  —  Bec  plus  court  que  la  tête,  droit,  un  peu  recourbé  vers  la  pointe, 
comprimé,  convexe  en  dessus,  anguleux  en  dessous,  emplumé  à  la  base  ; 
narines  étroites,  en  grande  partie  fermées  par  une  membrane  emplumée  ; 
ailes  de  longueur  moyenne,  aiguës;  queue  très  courte,  arrondie;  tarses 
courts,  assez  grêles,  réticulés  ;  ongles  recourbés,  pointus  ;  pouce  nul. 

Hab.  —  Comme  la  famille. 


—  651  - 

306.  —  Le  Guillemot  gryllé. 
URIA  GRYLLE,  Lath.  ex  Lin. 

(PI.  308). 

Uria  minor  nigra,  U.  minor  striâta,  Briss.  Ornith.,  VI.  pp.  76-78  (1760). 

CoLYMBUS  GRYLLE,  Lin.  Syst.  nat.  I.  p.  220  (1766). 

Cepphus  lacteolus,  Pall.  Spicil.  Zool.  V,  p.  33  (1769). 

CoLYMBUS  GRYLLUS,  0.  F.  Miill.  Zool.  Dan.  Prodr.  p.  18  (1776) 

CoLYMBUS  LACTEOLUS,  Gmel.  Syst.  nat.  I,  p.  583  (1788). 

Uria  grylle  et  lacteola,  Lath.  Ind.  Orn.   II,  p.  798  (1790). 

Uria  nivea,  Bonnat.  Encycl.  meth.  Orn.  p.  37  (1790). 

Uria  leucoptera,  Vieill.  Nouv.  Dict.  XIV,  p.  35  (1817). 

Uria  scapui.aris  et  Grylle  scapularis,  Steph.  Shaws  Gen.  Zool.  XII.  2,  pp.  250, 

252(1824). 
Uria  arctica  et  meisneri,  C.  L.  Breh.  Lehrb.  eur.  Vog.  II,  p.  923(1824). 
Cephus  grylle,  arcticus,  meisneri,  faeroeensis,  cl.  Breh.  Isis,  1830,  p.  1001. 
Uria  groenlandica,  Gray,  List.  Gen.  B.  p.  98  (1840). 
Grylle  groenlandicus,  Gray,  Liât  Gen.  B.  p.  77  (1841). 
Grylle  COLOMBA,  Bonap.  (nec  Pall.)  Ucc.  Eur.  p.  82(1842). 
Uria  faeroeensis,  Brm.  Naumannia,   1855,  p.  300. 
Die  gryll-Lumme,  en  allemand. 
The  BLACK  Guillemot,  en  anglais. 
Ds  ZWARTE  Zeekoet,  en  flamand. 

Var.  Mandtii. 

Uria  MANDTii,  Licht.  Verz.  Doubletten,  p.  88  (1823). 

Uria  glacialis,  Brm.  Lehrb  eur.    Vog.  II,  p.  1008  (1824). 

Cephus  glacialis,  Brm.  Vôg.  Deutschl.  p.  991  (1831). 

Grylle  mandtii,  Bonap.  Ucc.  Eur.  p.  82  (1842). 

Uria  grylle  mandtii,  Schl.  Rev.  crit.  p.  G VII  (1844). 

Uria  grylle  var.  Mandtii,  A.  Dubois,  Contip.  av.  Eur.  p.  34(1871). 

Cepphus  mandtii,  Turn.  Contrib.  Nat.    Hist.  of  Alaska,  p.  121  (1886). 

Taille  :  0'^32;  ailes  0,19.  —  La  femelle  est  un  peu  plus  petite. 

Description  des  deux  sexe.";  en  été.  —  D'au  noir  u  informe  avec  les  grandes 
et  les  moyennes  couvertures  des  ailes  d'un  blanc  pur,  mais  noirâtres  à  leur 
base  ;  bord  interne  des  rémiges  primaires  blanc  à  la  base  ;  couvertures  du 
dessous  des  ailes  et  axillaires  d'un  blanc  pur.  Bec  noir,  rouge  à  la  base  ;  iris 
brun;  pattes  d'un  rouge  vermillon. 

En  hiver.  —  Tête  et  cou  d'un  blanc  varié  de  noirâtre  ;  joues  ot  gorge 
blanches  ;  une  tache  noirâtre  derrière  les  oreilles  ;  dos,  scapulaires  et  couver- 
tures supérieures  delà  queue  noirs,  mais  chaciue  plume  terminée  de  blanc; 
croupion  et  parties  inlV'ricurcs  d'un  blanc  a.ssez  pur;  ailes  comme  en  été. 

Jeune.  —  Front,  lorums  et  dessus  de  la  tète  brun  noir;  joues  et  gorge  d'un 


652  — 


blanc  grisâtre  ;  nuque  brun  noirâtre  varié  de  blanc  ;  dos  noirâtre  ;  scapu- 
laires,  croupion  et  sus-caudales  également  noirs  mais  plus  ou  moins  barrés 
de  blanc  ;  ailes  noires,  les  couvertures  blanches  bordées  de  noir  ;  parties 
inférieures  blanches,  mais  la  poitrine  et  les  flancs  ont  leurs  plumes  plus  ou 
moins  bordées  de  noir. 

Poussin.  —  Duvet  d'un  brun  foncé,  plus  clair  aux  parties  inférieures. 

Var.  Mandtii.  —  Diffère  du  type  européen  par  un  bec  plus  grêle,  et  les 
couvertures  blanches  des  ailes  n'ont  pas  de  base  noire. 

Hab.  —  Le  Guillemot  gryllé  est  sédentaire  et  niche  sur  les  côtes  de 

l'Islande  [Faber),  des  îles  Féroé 
(Graba),  de  l'Ecosse,  du  nord  de 
l'Irlande,  des  îles  Hébrides, 
Orcades  et  Shetland  {Seebohm), 
du  Danemark  {Collin),  de  la 
Norwège  jusqu'au  cap  Nord 
(Collett),  de  la  Suède  et  des  îles 
suédoises  de  la  Baltique  {Nilson), 
ainsi  que  sur  les  côtes  finlan- 
daises de  la  mer  Blanche  (Palmén).  En  hiver  on  le  voit  accidentelle- 
ment sur  les  côtes  russes  de  la  Baltique  {Bûchner),  assez  régulière- 
ment sur  celles  de  l'Allemagne  et  d'Helgoland,  mais  rarement  sur 
les  côtes  allemandes  de  la  mer  du  Nord  (Naumann);  en  hiver  on  le  voit 
aussi  assez  souvent  sur  les  côtes  britanniques  où  il  ne  niche  pas,  mais 
il  ne  se  montre  qu'accidentellement  sur  celles  de  Hollande,  de  la 
Belgique  et  du  nord  de  la  France  où  il  a  été  observé  sur  les  côtes  de 
Normandie  {Nou7''y),  de  la  Seine-Inférieure  [Lemetteil)  et  du  Calvados 
[Le  Sauvage).  —  En  Amérique  cette  espèce  niche  au  sud  du  Groen- 
land [Holbôll),  à  la  Terre-Neuve  {Seebohm)  et  se  montre  en  hiver 
jusqu'à  la  Nouvelle-Jersej  [Baird). 

La  var,  Mandtii  est  reléguée  dans  la  zone  polaire  :  elle  habite  le 
Spitzberg,  Waigats,  la  Nouvelle-Zemble  {de  Heuglin)  et  îles  voisines, 
et  probablement  les  îles  et  les  côtes  septentrionales  de  la  Russie  et  de 
la  Sibérie;  elle  a  été  observée  à  l'île  Herald  et  sur  la  terre  de  Wran- 
gel,  et  elle  niche  en  grand  nombre  à  l'île  Bennett  [Seebohm).  En 
Amérique  on  la  rencontre  sur  les  côtes  de  l'Alaska  dans  le  détroit  de 
Behring  (Nelson),  et  dans  toute  la  région  polaire  jusqu'au  nord  du 
Groenland,  la  baie  d'Hudson  et  le  Labrador  {Baird,  Ridgioay,  etc.). 
Il  est  à  remarquer  que,  par  suite  de  la  grande  analogie  des  deux 
formes  et  de  la  confusion  qui  en  est  résultée,  il  est  assez  difficile  d'in- 


—  653  — 

diquer  exactement  les  limites  géographiques  du  type  et  de  sa  variété. 
Ce  qui  est  certain,  c'est  qu'en  Amérique,  du  côté  de  l'Atlantique,  on 
observe  ce  Guillemot  entre  le  44"  et  le  80"  1.  N.,  et  que  la  var. 
Mandtii  occupe  la  zone  la  plus  septentrionale.  M.  de  Heuglin  dit  que 
le  D^  Finsch  lui  a  affirmé  que  les  deux  races  vivent  au  Groenland  et 
souvent  dans  la  même  localité. 

Mœurs.  —  Ce  Guillemot  est  un  oiseau  plus  ou  moins  sédentaire;  en 
automne  cependant,  beaucoup  voyagent  au  loin  en  longeant  les  terres 
ou  en  volant  d'une  île  à  l'autre,  sans  trop  s'éloigner  des  côtes,  à 
moins  d'être  chassés  par  une  tempête,  ce  qui  arrive  assez  souvent.  Il 
airae  une  mer  calme  et  y  passe  une  grande  partie  de  sa  vie  ;  il  dort 
souvent  sur  l'eau,  même  pendant  la  nuit,  mais  le  plus  ordinairement 
il  cherche  le  repos  sur  un  rocher.  Quand  les  eaux  sont  trop  agitées, 
il  cherche  également  un  refuge  dans  les  falaises  ou  sur  des  glaçons 
flottants  et  y  reste  souvent  des  heures  entières.  Dans  la  zone  gla- 
ciale, il  vit  en  grandes  troupes,  mais  jamais  en  bandes  aussi  consi- 
dérables que  le  Guillemot  troïle;  sous  nos  climats,  on  ne  voit  jamais 
ces  oiseaux  que  par  couples  ou  par  groupes  de  cinq  ou  six  sujets. 

Cet  oiseau  nage  avec  aisance,  le  corps  peu  enfoncé,  et  quand  il 
veut  aller  vite  il  élève  fréquemment  ses  pieds  au-dessus  de  l'eau  ; 
pour  plonger,  il  donne  un  vigoureux  coup  des  deux  pieds,  fait  la  cul- 
bute avec  rapidité  et  sans  bruit,  puis  il  étend  les  ailes  et  nage  rapide- 
ment entre  deux  eaux  en  ramant  à  la  fois  des  pieds  et  des  ailes;  il  ne 
peut  cependant  rester  plus  de  deux  minutes  sous  l'eau.  Son  vol  est 
rapide,  soutenu  et  plus  léger  que  celui  des  autres  Guillemets  ;  l'oiseau 
volegénéralementdroitdevantlui,avec  de  rapides  battements  d'ailes  et 
celles-ci  sont  largement  déployées.  Il  lui  faut  un  petit  élan  pour  s'éle- 
ver de  l'eau,  mais  il  ne  vole  pas  volontiers  haut,  quoiqu'il  sache  fort 
bien  s'élever  jusqu'au  sommet  des  montagnes.  Au  repos  il  appuie  sur 
les  tarses,  tient  le  corps  droit  et  marche  également  ainsi,  mais  avec 
difficulté.  Dans  sa  manière  d'agir,  ce  Guillemot  se  montre   doux  et 
bienveillant,    aussi   bien    avec   ses  semblables   qu'avec    les  autres 
oiseaux  de  mer  et  vit  volontiers  dans  leur  société  ;  dans  les  lieux  de 
la  reproduction,  on  le  voit  souvent  au  milieu  de  Pingouins,  de  Maca- 
reux, de  Mouettes  et  autres  oiseaux  qui  nichent  en  colonies  sur  les 
rochers.  A  l'approche  de  l'homme,  la  plupart  de  ces  oiseaux  s'envo- 
lent ou  se  jettent  à  la  mer,  mais  le  Guillemot  gryllé  se  laisse  appro- 
cher et  on  peut  souvent  le  tuer  à  coups  de  bâton  ou  l'enlever  de  son 
nid  :  on  dirait  réellement  (ju'il  oublie  t{u'il  a  des  ailes. 


—  654  — 

La  nourriture  de  cet  oiseau  se  compose  de  petits  poissons,  de  crus- 
tacés, de  mollusques,  d'arénicoles,  de  méduses  et  autres  animaux 
mous  ;  d'après  de  Heuglin,  on  trouve  aussi  du  gravier  dans  son  esto- 
mac. Graba  compare  son  cri  à  celui  de  la  souris  et  le  rend  par  un  iihp 
siflBlant 

Reproduction.  —  Le  Guillemot  gryllé  niche  dans  des  crevasses  ou 
des  fissures  de  rochers  et  pond  un  ou  deux  œufs,  quelquefois  trois, 
qu'il  dépose  plus  ou  moins  profondément  sur  des  rocailles  ou  sur  la 
terre  nue,  sans  la  moindre  litière.  Il  parait  cependant  qu'à  l'occasion 
il  profite  aussi  de  trous  creusés  dans  des  montagnes  sablonneuses; 
Faber  dit,  en  effet,  avoir  observé  sur  la  côte  septentrionale  de  la 
petite  île  de  Beirœ,  dans  le  Cattegat,  une  dizaine  de  couples  de  ces 
Guillemets  nichant  dans  des  trous  de  falaises.  Ces  trous  avaient  été 
creusés  par  des  Hirondelles  de  rivage,  très  abondactes  à  cet  endroit, 
et  avaient  ensuite  été  élargis  et  occupés  par  des  Etourneaux  ;  les 
Guillemets  les  avaient  enfin  appropriés  à  leur  propre  usage  (1). 

Suivant  de  Heuglin,  la  forme  type  niche  en  Norwège  à  une  faible 
hauteur  au-dessus  de  la  mer,  mais  toujours  assez  haut  pour  que  la 
couvée  soit  à  l'abri  des  flots  ;  au  Spitzberg,  au  contraire,  la  var. 
Mandtii  niche  toujours  entre 400  et  1800  pieds  au-dessus  du  niveau  de 
la  mer,  mais  à  la  Nouvelle-Zemble  les  nids  ne  sont  pas  établis  à  une 
si  grande  hauteur,  mais  toujours  plus  haut  qu'en  Norwège  (2).  En 
Ecosse,  la  ponte  a  rarement  lieu  avant  la  fin  de  mai  ou  la  première 
semaine  de  juin,  mais  elle  a  lieu  un  peu  plus  tard  dans  l'extrême  Nord. 
Les  œufs  sont  de  forme  ovoïde,  mats,  à  pores  visibles,  d'un  blanc 
verdâtre  ou  d'un  blanc  jaunâtre  et  présentent  des  taches  générale- 
ment petites,  arrondies  et  uniformément  distribuées,  ou  plus  grandes, 
irrégulières  et  agglomérées  vers  le  gros  bout;  les  taches  profondes  sont 
d'un  gris  vineux  et  brunes,  les  superficielles  noires  ;  ces  œufs  mesurent 
environ  58  millim.  sur  39. 

Les  deux  époux  se  témoignent  beaucoup  d'affection  et  se  becquètent 
comme  de  vrais  pigeons  ;  ce  sont  d'ailleurs  des  oiseaux  d'une  dou- 
ceur remarquable  qui  méritent  bien  leur  nom  vulgaire  de  Colombe  de 
mer.  Les  deux  sexes  couvent  avec  ardeur  et  à  tour  de  rôle  pendant 
vingt-quatre  jours.  Ils  veillent  ensuite  sur  leurs  poussins  et  les 
nourrissent  jusqu'à  ce  qu'ils  sachent  voler  ;  alors  ils  les  conduisent  sur 
l'eau  et  leur  apprennent  à  plonger  et  à  chercher  leur  nourriture. 

(1)  Faber,  Isis,  1829,  p.  719. 

(2)  von  Heuglin,  Reùen  nach  dem  Nordpolarmeer,  III,  p.  162  (1874). 


—  655  - 

307.  —  Le  Guillemot  Troïle. 

URIA  TROILE,  Lath.  ex  Lin. 

(Pis.  30.9  et  309b.) 

Uria  lomvia,  ringvia  et  alga,  Çriinn.  Orn.  bor.  pp.  27,  28  (1764). 

CoLYMBUS  TROILE,  Lin.  Syst.  nat.   I,  p.  220  (1766). 

Mergus  LOMVIA  et  M.  LOMVIA  MiNOR,  Tunst.  Om.  Brit.  p.  3  (1771). 

CoLYMBUS  MINOR,  Gmel.  Syst.  nat.  I,  p.  585  (1788).      • 

Uria  troïle,  Lath.  Ind.  Orn.  Il,  p.  796  (1790). 

Uria  troïle  leucophthalmos,  Fab.  Prodr.  Isl.  Orn.  p.  42  (1822). 

Uria  lacrimans,  La  Pyl.  m.  Choris,  Yoy.  pitt.  autour  du  monde.,  pi.  23  (1822). 

Uria  leucophthalmos,  Fab.  Isis,  1824,  p.  126. 

Uria  minor,  Steph.  Shaws  Gen.  Zool.  XII,  2  p.  246  (1824). 

Uria  leucopsis  et  norwegica,  Brm.  /sis,  1830,  p.  1001. 

Uria  intermedia,  Nilss.  Skand.  Faun.  II,  p.  549  (1858). 

Uria  leucotis,  C.  F.  Dub.  PI.  col.  Ois.  Belg.  III,  p.  262  (1860). 

Catarractes  troïle  et  ringvia,  Bryant,  Proc.  Bost.  Soc.  N.  H.   1861,  pp.  136,  139. 

Aloa  LOMVIA,  Schleg.  Mus.  P.-B.  Urinatores,  p.  16  (1867). 

Lomvia  troïle  et  ringvia,  Coues,  Proc.  Acad.  N.  Se.  Phil.  1868,  p.  75. 

Die  Trottellumme,  en  allemand. 

The  common  Guillemot,  en  anglais. 

De  Zeeroet,  en  flamand . 

Var.   Californica. 

Uria  brunnichii,  Heerm.  (uec  Sabine),  Pacific  R.  R.  Rep.  X.  p.  75  (1859). 
Catarractes  californicus,  Bryant,  Proc.  Bost.  Soc.  N.  H.  1861,  p.  11. 
Lomvia  californica,  Coues,  Proc.  Ac.  N.  Se.  Phil.  1862,  p.  79. 
Lomvia  troïle  var.  Californica,  Coues,  Key  N.  Am.  B.  p.  346  (1872). 
Uria  troïle  californica,  Baird,  Brew.  et  Ridgw.  Water-Birds  N.  Amer.  II,  p.  483 
(1884). 

Taille  :  O'^SS;  ailes  0""! 9. 

Description  des  deux  sexes  en  été.  —  Tête,  cou,  dos,  ailes  et  queue  d'un  brun 
noirâtre  velouté;  un  trait  noir  derrière  l'œil  descendant  sur  les  côtés  du  cou; 
rémiges  secondaires  terminées  de  blanc  ;  parties  inférieures  d'un  blanc  pur, 
avec  des  taches  allongées  noirâtres  sur  les  flancs  et  les  côtés  des  jambes. 
Bec  noir;  iris  brun  ;  pattes  d'un  brun  olivâtre.  —  On  rencontre  souvent  des 
sujets  avec  un  cercle  blanc  autour  des  yeux  qui  se  continue  eu  arrière  avec 
une  ligne  de  môme  couleur  longeant  la  région  auriculaire  :  c'est  la  forme 
ringvia.  (Voyez  la  remarque  ci-dessous). 

En  hiver.  — Parties  supérieures  plus  noires;  occiput  tacheté  de  blanc; 
côtés  de  la  tête,  gorge,  devant  et  côtés  de  cou  d'un  blanc  pur;  une  bande 
noire  descend  de  l'œil  et  se  dirige  en  arrière  en  se  rétrécissant  et  en  formant 
une  courbe  ;  le  reste  comme  en  été. 

Jeune.  —  Ressemble  à  l'adulte  en  hiver,  mais  les  parties  supérieures  sont 


—  656  — 


nuancées  de  brun  cendré  ;  bas  du  cou  et  poitrine  de  couleur  cendrée  ;  bec  plus 
court  et  d'une  teinte  plus  claire. 

Poussin.  —  Tête,  gorge,  parties  supérieures  et  flancs  d'un  brun  cendré; 
duvet  de  la  tête  et  du  cou  entremêlé  de  soies  blanches  ;  poitrine  et  ventre 
blancs. 

Var.  CaUfornim.  —  Ne  diffère  du  type  européen  que  par  un  bec  un  peu 
plus  allongé. 

Remarque.  —  Les  auteurs  sont  peu  d'accord  au  sujet  des  formes  voi- 
sines de  Vu.  troile  ;  les  uns  admettent  quatre  espèces, d'autres  deux  et 
enfin  M.  Seebobm  les  réunit  toutes  en  une  seule  espèce,  qu'il  divise 
en  quatre  races.  Je  n'ai  pas  sous  les  yeux  un  nombre  suffisant  d'indi- 
vidus de  ces  différentes  formes  pour  me  faire  une  opinion,  mais  je 
pense  qu'il  y  a  lieu  d'admettre  deux  espèces  :  1°  YU.  troile  avec  sa 
var.  Californica  ;  2»  XU.  brunnichii,  Sab.  auquel  il  faut  rapporter  à 
titre  de  variété  VU.  arra,  Pall.  Ces  derniers  ont  le  bec  plus  court  et 
plus  robuste. 

Quant  à  VU.  ringvia,  ce  n'est  qu'une  variation  individuelle  ou 
plutôt  un  cas  de  dimorpbisme.  Il  s'accouple  très  souvent  avec  le  type 
Itroile,  et  se  rencontre  partout  où  habite  ce  dernier,  mais  il  est  plus 
rare.  Il  serait  intéressant  de  savoir  si  la  raie  blanche,  qui  caractérise 
a  fo  rme  ringvia,  ne  s'observe  jamais  chez  la  var.  Californica.. 

Hab.  —  Le  Guillemot  troïle  est  propre  au  nord  de  l'Atlantique  :  il 

^ssœp  niche  en  Islande  {Faber),  aux 


îles  Féroé  {Graba),  sur  différents 
points  des  côtes  britanniques,  y 
compris  les  îles  Hébrides,  Orca- 
des, Shetland  et  Saint-Kilda(/See- 
bohm),  ainsi  que  sur  les  côtes  de 
Norwège  jusqu'au  cap  Nord  et 

iiiiitiii'lt'  ^iiilWltt  ^^^  cotes  orientales  de  la  Laponie 
et  hiverne  dans  les  fjords  du  Sud 
{Collett).  Dans  l'arrière-saison,  il  se  montre  quelquefois  sur  les  côtes 
de  la  Suède  (Nilsson)  et  de  la  Finlande  {TAlljeborg),  mais  pas  dans  le 
golfe  de  Finlande;  il  est  commun  en  hiver  sur  les  côtes  du  Dane- 
mark, où  il  niche  même  dans  certaines  localités  {Collin),  ainsi  qu'à 
l'île  Helgoland  [Reichenow)  ;  il  est  rare  sur  les  côtes  allemandes  de  la 
Baltique,  mais  commun  sur  celles  de  la  mer  du  Nord  [Naumann),  de 
la  Hollande  {Schlégel)  et  de  la  Belgique,  où  les  tempêtes  le  chassent 
parfois  jusqu'au  delà  d'Anvers.  Cet  oiseau  est  également  commun,  en 


—  657  — 

hiver,  sur  les  côtes  du  nord  de  la  France,  et  il  se  reproduit  même  en 
grand  nombre  aux  Aiguilles  d'Etretat,  à  18  kilomètres  de  Fécamp, 
dans  les  falaises  de  Jaubourg,  à  Aurigny,  quelquefois  dans  le  Bou- 
lonais,  sur  toutes  les  côtes  et  les  îles  de  la  Bretagne  {Degland  et 
Gerbe)  et  visite  accidentellement  les  côtes  du  midi  de  la  France 
[Lacroix),  de  l'Espagne  [Saunders),à^  ^OYi\x^2i\{Barboza  du  Bocage), 
et  le  détroit  de  Gibraltar  (Irhy).  (1). 

En  Amérique,  du  côté  de  l'Atlantique,  le  Guillemot  troïle  niche 
dans  la  baie  de  Fundy,  à  la  Nouvelle-Ecosse,  au  Labrador  et  au 
Groenland  au  sud  du  64°  [Coues,  Seebohm),  et  se  montre  probable- 
ment en  hiver  jusqu'au  40°.  —  La  var.  Californica  est  propre  au 
Pacifique,  sans  dépasser  au  Nord  les  îles  Pribylov  ;  elle  est  peu  com- 
mune à  l'île  de  Behring  {Stejneger),  mais  abondante  aux  îles  Aléoutes, 
Sitka,  Kadiak  et  aux  îles  Comandores  (Nelson),  et  se  montre  en  hiver 
jusqu'à  San  Francisco  en  Californie  [Seebohm). 

Mœurs.  —  Le  Guillemot  troïle  émigré  en  bandes  nombreuses  des 
contrées  du  Nord  à  mesure  que  le  froid  devient  plus  vif,  mais  il  est 
sédentaire  près  des  côtes  du  nord  de  la  France,  de  l'Angleterre  et 
même  dans  le  sud  de  l'Islande  et  autres  lieux  tempérés. 

C'est  un  oiseau  de  haute  mer  qui  n'approche  des  côtes  qu'à  l'époque 
de  la  reproduction.  Ses  moeurs  ressemblent  à  celles  de  l'espèce  précé- 
dente. Il  nage  et  plonge  à  la  perfection  et  rame  sous  l'eau  des  pieds 
et  des  ailes  avec  beaucoup  de  dextérité  ;  il  vole  rapidement  en  produi- 
sant avec  ses  ailes  un  certain  siiiiement,  mais  il  ne  va  jamais  loin 
d'une  seule  traite  et  ne  ffiit  que  raser  les  flots  ;  quand  il  doit 
rejoindre  son  nid  au  sommet  d'une  montagne,  il  sait  cependant 
s'élever  sans  difficulté  à  une  grande  hauteur.  Sur  la  terre  ferme  sa 
démarche  est  fort  pénible,  il  n'avance  qu'en  glissant  sur  ses  tarses; 
il  court  parfois  aussi  en  sautant  sur  les  doigts  et  en  s'aidant  des  ailes 
pour  se  tenir  en  équilibre. 

Ces  Guillemets  sont  excessivement  sociables,  non  seulement  avec 
les  individus  de  leur  espèce,  mais  encore  avec  les  autres  oiseaux  de 
mer;  tous  seiublont  rivaliser  de  complaisance,  si  l'on  peut  s'exprimer 
ainsi,  chacun  cherche  à  venir  en  aide  à  sou  voisin,  et  les  orphelins 
trouvent  bientôt  des  parents  adoptifs.  Les  couples  surtout  sont  étroi- 
tement unis  ;  ils  se  caressent,  se  becquètent,  se  lissent  mutuellement 

(1)  M.  Giglioli  dit  que  l'oiseau  indiqué  comme  ayant  été  tué  à  Malte  {/f>is,  18ti4,  p.  157), 
n'est  jias  un  W.  troiU,  mais  un  AUa  toria.  Aucun  Guillemot  n'a  été  pris  jusqu'ici  dans  la  Médi- 
terranée. 

Tome  II.  —  1894.  83 


—  658  — 

les  plumes,  se  suivent  partout  et  pèchent  en  commun.  Leur  nourri- 
ture consiste  en  petits  poissons,  crustacés,  mollusques  et  annélides. 
Graba  rend  leurs  cris  par  œrrrrr,  merrerrerrrr ,  iau,  jau,  jê,jirrrr, 
adarèrerrrr^  eiururrèrrr . 

Reproduction.  —  C'est  en  mars  que  les  Guillemets  prennent  pos- 
session des  rochers  et  des  montagnes  battus  par  les  flots,  et  qui 
donnent  abri  à  des  millions  d'oiseaux.  Ils  choisissent  pour  leur  couvée 
des  rochers  escarpés  ou  des  pans  de  rochers  isolés  qui  s'élèvent  sur  le 
rivage,  et  qui  présentent  des  espèces  de  corniches,  des  crevasses, 
des  trous  et  des  fentes  en  grand  nombre.  Chaque  couple,  d'après 
Graba,  paraît  reprendre  annuellement  possession  de  la  même  cavité. 

Le  Guillemot  troïle  ne  fait  pas  de  nid,  mais  dépose  simplement  son 
œuf  unique  sur  une  saillie  de  rocher  ou  dans  une  cavité  quelconque 
de  la  montagne.  Cet  œuf  est  très  volumineux,  piidforme,  d'un  blanc 
jaunâtre,  roussâtre  ou  verdâtre,  parfois  d'un  vert  clair  tirant  plus  ou 
moins  sur  le  bleu,  et  marqué  de  taches  d'un  gris  vineux  et  d'autres, 
superficielles,  brunes  ou  noirâtres,  de  formes  extrêmement  variées;  il 
mesure  75  à  90  millimètres  sur  47  à  52.  Les  deux  sexes  couvent 
alternativement  ;  la  durée  de  l'incubation  serait,  d'après  Naumann, 
de  trente  à  trente-cinq  jours. 

On  trouve  en  général  des  œufs  vers  la  fin  de  mai  et  en  juin,  et  des 
poussins  à  la  fin  de  juin  et  au  commencement  de  juillet.  Vers  la  fin 
de  juillet  ou  dans  les  premiers  jours  du  mois  d'août,  le  jeune  quitte  la 
cavité  où  il  est  né  pour  aller  à  la  mer.  «  Cet  échange,  dit  Naumann, 
n'est  pas  sans  danger,  comme  le  prouvent  clairement  les  inquiétudes 
et  les  cris  de  la  mère.  Le  petit  se  lance  d'un  bond  du  bord  du  rocher 
dans  l'eau,  suivi  par  ses  parents,  plonge  aussitôt  qu'il  est  à  l'eau,  et 
quand  il  remonte  il  se  serre  avec  effroi  contre  sa  mère  en  poussant 
des  sifilements  aigus,  comme  pour  lui  demander  de  venir  à  son 
secours  et  lui  permettre  de  monter  sur  son  dos.  Mais  il  doit  faire 
connaissance  avec  son  nouvel  élément,  et  après  quelques  plongeons, 
toujours  exécutés  en  compagnie  des  vieux,  il  devient  plus  confiant. 
Les  parents  lui  apprennent  en  même  temps  à  pourvoir  lui-même  à  sa 
nourriture.  Ils  continuent  à  le  protéger  et  l'accompagnent  en  pleine 
mer,  où  souvent  on  rencontre  à  plusieurs  lieues  de  la  côte,  des 
oiseaux  adultes  accompagnés  de  leur  petit  à  peine  à  moitié  développé, 
affrontant  les  vents  et  les  flots.  Le  saut  des  rochers  n'est  pas  toujours 
heureux  :  les  petits,  en  sautant,  tombent  quelquefois  sur  des  pierres 
et  se  tuent.  » 


—  659  — 

GBNRK    CLXVIII. 

MERGULE.  —  MERGULUS. 

Alca,  (part.)  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  211  (1766). 

Allé,  Link,  Beschr.  d.  Natural.  d.  Univ.  Rostock,  I,  p.  17  (1806). 

Mergulus,  Vieill.  Analyse^  p.  67  (1816). 

Arctica,  Gray,  ListofGen»  B.  p.  98  (1841). 

Car.  —  Bec  très  court,  épais,  renflé,  convexe ,  la  mandibule  inférieure 
très  anguleuse  à  la  rencontre  de  ses  branches  ;  narines  ovalaires,  en  partie 
découvertes  ;  ailes  de  longueur  moyenne,  sur-aiguës  ;  queue  très  courte, 
arrondie;  tarses  grêles,  de  la  longueur  du  doigt  interne,  scutellés  en  avant, 
réticulés  en  arrière;  ongles  comprimés,  pointus.  —  Taille  petite. 

Hab.  —  Pôle  nord,  la  zone  tempérée  en  hiver. 


308.  —  Le  Mergule  nain 

MERGULUS  ALLE,  Vieill.  ex  Lin. 
(PI.  310) 

Uria  minor,  Briss.  Ornith.  VI.  p.  73  (1760). 

Alca  allé,  Lin.  Sy.st.  nat.  I,  p.  21 1  (1766). 

Allé  nigricans,  Link,  Beschr.  Nnt.-Samml.  Univ.  Rostock,  I.  p.  17  (1806) 

Uria  ALLE,  Pall.  Zoogr.  Rossa- Asiat.  II,  p.  369  (1811). 

Mergulus  allé,  Vieill.  Analyse,  p.  67  (1816). 

Mergulus  melanoleucos,  Leach,  Syst.  Cat.  Mam.  B.  Br.  Mica.  p.  42  (1816). 

Mergulus  ARCTicus,  Brm.  /sis,  1830,  p.  1001. 

Cephus  ALLE,  Less.  Traité  d'Om.  p.  639  (1831) 

Arctica  allé,  Gray,  List.  Gen.  B.  p.  98  (1841). 

Der  Krabbentaucher,  en  allemand. 

The  little  Auk.,  en  anglais. 

De  kleine  Alk,  en  flamand. 

Taille:  0"'18;  ailes  0,11. 

Description  des  deux  sexes  en  été. — Tête, gorge,  cou, dessus  du  corps,  ailes  et 
queue  noirs;  scapulaires  bordées  de  blanc;  rémiges  secondaires  terminées  de 
blanc  ;  parties  inférieures  d'un  ])lanc  pur,  les  plumes  des  flancs  noires  sur 
leur  bord  interne,  blanches  à  l'extérieur.  Bec  noir;  iris  brun;  pattes  d'un 
brun  grisâtre  avec  les  membranes  d'un  brun  verdàtre. 

Les  deux  sexes  en  hiver.  —  Comme  en  été,  mais  la  gorge,  le  devant  et  les 
côtés  du  cou  blancs.  - 

Jeune.  —  Ressemble  à  l'adulte  en  hiver,  mais  les  parties  supérieures  sont 
plus  ternes,  le  desssous  du  corps  d'un  blanc  moins  pur;  gorge  et  joues  blan- 


—  660  — 


ches  ;  région  auriculaire  et  devant  du  cou  d'un  cendré  noirâtre  varié  de  blanc. 
Poussin.  —  Duvet  d'un  brun  de  suie  uniforme. 

Hab.  —  Le  Mergule  nain  habite  le  pôle  Nord,  où  Parry  l'a  ren- 
contré entre  le  81°  et  le  82%  et  il 
ne  paraît  pas  nicher  au  sud  du 
68"  1.  N.  ;  d'après  Faber,  cepen- 
dant, une  cinquantaine  de  cou- 
ples nichent  sur  la  petite  île  de 
Grimsôe,  située  au  nord  de  la 
pointe  septentrionale  de  l'Islande, 
et  en  hiver  on  voit  des  centaines 
d'individus  sur  toutes  les  côtes 
de  l'Islande.  Sa  véritable  patrie  est  le  Spitzberg,  la  Nouvelle-Zemble 
et  îles  voisines  {de  Heuglin),  ainsi  que  le  Groenland  au  nord  du  68° 
{Newton),  et  partout  il  semble  être  en  partie  sédentaire.  Plus  au  sud 
on  ne  le  voit  qu'en  hiver,  car  il  ne  niche  pas  même  au  cap  Nord,  mais 
un  grand  nombre  abandonnent  la  zone  polaire  pour  s'éparpiller  sur  les 
côtes  de  l'Atlantique.  Cet  oiseau  est  alors  commun  sur  les  côtes  de  la 
Norwège  {Collett),  du  nord  de  la  Russie  (Seebohm)  et  visite  parfois 
celles  de  Suède  {Nilsson)  ;  on  le  voit  aussi  en  hiver  sur  toutes  les  côtes 
des   îles  Britanniques,  mais  plus  communément  des  îles  Orcades, 
Shetland  {Seebohm)  et  Féroé  {Feilden),  ainsi  que  sur  les  côtes  du 
Danemark  {Collin),  rarement  sur  celles  de  l'Allemagne  {Naumann). 
Ce  n'est  qu'accidentellement,  et  après  des  tempêtes,  qu'on  voit  ce 
petit  oiseau  sur  les  côtes  de  Hollande  {Schlégel)  et  de  la  Belgique,  et 
il  remonte  alors  parfois  l'Escaut  jusque  près  d'Anvers,  où  un  individu 
a  été  tué  dans  les  polders  en  novembre  1866  {Croegaert);  on  ne  le 
voit  non  plus  qu'accidentellement  sur  les  côtes  du  nord  de  la  France 
{Degland),  de  l'Espagne,  où  il  a  été  tué  près  de  Gerone  {Vayreda), 
et  au  cap  ¥m\.sièvQ{Layard)\  sa  présence  accidentelle  a  même  été 
constatée  aux  îles  Canaries  et  Açores  {Godman). 

Ce  Mergule  niche  également  dans  l'extrême  nord-est  de  l'Amé- 
rique {Walker,  Feilden)',  en  hiver  il  visite  les  côtes  méridionales  du 
Groenland,  celles  de  la  Nouvelle-Bretagne,  du  Labrador,  de  Terre- 
Neuve  et  descend  accidentellement  au  Sud  jusqu'à  la  Nouvelle-Jersey 
(Coues). 

Mœurs.  —  Le  Mergule  nain  est  également  un  oiseau  pélagique, 
vivant  sur  la  haute  mer  et  n'approchant  que  rarement  des  côtes  en 
dehors  de  l'époque  de  la  reproduction,  à  moins  d'y  être  forcé  par  les 


-  661  — 

tempêtes  prolongées  de  l'hiver.  Il  nage  et  plonge  avec  une  adresse 
extraordinaire  au  milieu  des  plus  fortes  vagues,  dort  même  sur  l'eau, 
la  tête  enfoncée  dans  les  plumes,  et  se  comporte  en  tout  comme  les 
Guillemets,  mais  il  est  plus  remuant,  plus  vif  et  plus  adroit.  Il  vole 
avec  facilité  ;  des  bandes  nombreuses  s'élèvent  ensemble,  fendent  l'air 
en  produisant  un  fort  bruissement  et  décrivent  de  vastes  cercles 
autour  des  rochers.  Ces  oiseaux  sont  si  abondants  sur  les  côtes  des 
îles  polaires,  que  les  montagnes  en  sont  littéralement  couvertes, 
tandis  que  d'autres,  par  grandes  volées,  traversent  l'espace  en 
tous  sens.  Malmgren  dit  qu'au  Spitzberg,  on  peut  entendre  leurs 
cris  à  une  lieue  des  côtes,  et  cela  nuit  et  jour.  Faber  rend  leur  voix 

^BX  giv,  try-hy-hy-hy ,  allll-reh-eh-eh-eh Leur  naturel  est  aussi 

sociable  et  aussi  pacifique  que  celui  des  précédents.  Ils  se  nourrissent 
de  crustacés,  de  mollusques  et  d'annélides. 

Reproduction.  —  Ces  oiseaux  nichent  sur  les  saillies  des  rochers, 
dans  des  trous  ou  des  crevasses,  et  déposent  leur  œuf  unique  dans  le 
courant  de  juillet  sur  des  débris  rocailleux;  il  y  en  a  aussi, dit  de  Heu- 
glin,  qui  creusent  des  galeries  sous  les  rocailles  ayant  le  diamètre  et 
la  longueur  d'un  bras.  Ces  nids  sont  établis  à  des  hauteurs  variables, 
parfois  à  quatre  ou  cinq  cents  pieds  au-dessus  du  niveau  de  la  mer, 
et  généralement  dans  les  parties  les  plus  escarpées  et  les  plus  inabor- 
dables. 

Le  Mergule  ne  pond  donc  qu'un  seul  œuf,  relativement  volumi- 
neux, d'un  vert  bleuâtre  clair,  parfois  marqué  de  taches  cendrées  ou 
violacées  peu  apparentes  et  pâlissant  par  l'incubation;  il  mesure 
48  à  51  millim.  sur  31  à  35.  Les  deux  parents  couvent  à  tour  de 
rôle  et  cela  avec  une  telle  persistance  qu'on  peut  les  enlever  avec  la 
main  ;  tous  deux  aiment  leur  petit  d'un  égal  amour  et  le  nourrissent 
jusqu'à  ce  qu'il  soit  complètement  couvert  de  plumes  et  qu'il  puisse 
les  suivre  sur  la  mer.  On  rencontre  encore  des  jeunes  qui  savent  à 
peine  voler  vers  le  milieu  de  septembre. 

GENRE    CLXIX. 

ALC  oa  PINGOUIN.  —  ALCA. 

Alca,  BrisB.  Ornitk.  VI,  p.  85  (1760). 
Plauths,  Briinn.  Zool.  Fundnm.  (1771). 
PiNGUiNUs,  Bonnat.  Tnbl.  Encyc/.  I,  p.  28  (1790). 
Utamama,  I.each,  Syit.  Cm.  Mam.  B.  Br.  Mus.  p.  42  (181(5). 
Matakkoi'TERA,  Glo^'.  Hand-  und  Hilf'sb.  p.  475  (1842) 
Chenalopex,  Gray,  Hand-lisl  B.  111,  p.  05  (1871). 


-  662  — 

Car.  —  Bec  de  la  longueur  de  la  tête  ou  plus  court,  plus  haut  que  large, 
comprimé,  plus  élevé  au  niveau  de  l'angle  maxillaire  qu'à  la  base,  à  mandi- 
bule supérieure  échanerée  et  fortement  recourbée  à  l'extrémité  ;  mandibule 
inférieure  anguleuse  en  dessous  vers  son  extrémité  et  aiguë  ;  narines  margi- 
nales, très  étroites,  presque  entièrement  fermées  par  une  membrane  emplu- 
mée  ;  ailes  de  longueur  moyenne  ou  très  courtes  et  impropres  au  vol  ;  queue 
pointue  ;  tarses  un  peu  plus  courts  que  le  doigt  interne,  scutellés  en  avant, 
réticulés  en  arrière;  pouce  nul;  ongles  médiocres. 

Hab.  —  Le  nord  de  l'Atlantique;  les  côtes  de  la  zone  tempérée 
en  hiver. 

309.  —  L'Aie  ou  Pingouin  torda. 

ALCA  TORDA,  Lin. 

(PI.  311.)  ^^ 

Alca  minor,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  92  (1760). 

Alca  torda  et  pica,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  âlO,  (1766). 

Alca  baltica,  Gmel.  Syst.  nat.  I,  p.  551  (1788). 

PiNGUiNUS  TORDA  et  PICA,  Bonnat.  Encycl.  méth.  I,  pp.  29,  30  (1790). 

Utamania  torda  et  pica,  Leach,  Syst.  Cat.  M.  B.  Br.  Mus.  p.  42  (1812). 

Alca  glacialis  etiSLANoiCA,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  1001. 

Alca  balthica  et  microrhynchos,  Brehm,  Yogelf.  p.  410  (1855). 

Utamania  balthica,  glacialis,  islandica  et  microrhynchos,  Brehm,  Naumannia^ 

1855,  p.  300. 
Der  Tordalk,  en  allemand. 
The  Razorbill,  en  anglais. 
De  Alk,  en  flamand. 

Taille:  O^^Sl  ;  ailes  0,185. 

Description  des  deux  sexes  en  été.  —  Tête,  gorge  et  toutes  les  parties  supé- 
rieures d'un  noir  brunâtre  ;  un  trait  blanc  partant  de  l'œil  et  aboutissant  à  la 
partie  supérieure  de  la  base  du  bec;  rémiges  secondaires  terminées  de  blanc; 
parties  inférieures  blanches;  queue  noire.  Bec  noir,  avec  trois  rainures  cour- 
bes de  chaque  côté  de  la  mandibule  supérieure,  celle  du  milieu  la  plus  large 
et  blanche;  iris  brun;  pattes  d'un  brun  noirâtre. 

En  hiver.  —  Plumage  général  comme  en  été,  mais  le  trait  blanc  devant 
l'œil  moins  apparent;  joues  et  gorge  blanches. 

Jeune.  —  Ressemble  à  l'adulte  en  hiver,  mais  plus  brun  à  la  tête,  une 
bande  brune  sous  l'œil  au-dessus  de  laquelle  le  blanc  est  moucheté  de  brun  ; 
côtés  du  cou  d'un  blanc  moins  pur.  Bec  moins  élevé,  plus  court,  plus  lisse, 
sans  rainure  blanche. 

Poussin.  —  Duvet  de  la  tête  et  du  eou  brun,  blanc  à  l'extrémité  ;  celui  des 


663  — 


parties  dorsales  et  des  flancs  noir  à  pointes  fauves;  poitrine  et  ventre  blancs. 
Bec  brun,  jaunâtre  à  son  extrémité  ;  pattes  brunes. 

Hdl)^  —  Ce  Pingouin  est  également  une  espèce  propre  à  l'Atlan- 

gijcj-^iriîEp     tique  et  on  le  rencontre  jusqu'au 


TO*'  1.  N.,  mais  il  est  inconnu  à 
la  Nouvelle-Zemble  et  au  Spitz- 
berg.  Il  niche  en  Islande  et  quel- 
ques-uns hivernent  sur  les  côtes 
méridionales  de  cette  l\e:{Faber)\ 
il  se  reproduit  également  aux 
iles  Féroé  {Feilden), a-iix  îles  Bri- 
tanniques {Dresser),  sur  les  côtes 
de  la  Norwège  {Collet t)  jusqu'à  la  mer  Blanche  {Seebohm),  sur  celles 
de  Finlande  dans  le  golfe  de  Botnie  {Palmén)  et  sur  certaines  îles  des 
côtes  de  la  Suéde  (Nilsson).  En  hiver  on  le  voit  en  plus  ou  moins 
grand  nombre  sur  les  côtes  allemandes  et  danoises  de  la  Baltique  et 
de  la  mer  du  Nord  {Naumann),  ainsi  que  sur  celles  de  la  Hollande 
{Schlégel)  et  de  la  Belgique  et,  après  une  tempête,  on  l'observe  quel- 
quefois sur  l'Escaut  jusqu'au  delà  d'Anvers;  il  visite  également  les 
côtes  de  la  France  et  niche  même  aux  Aiguilles  d'Etretat,  sur  les 
côtes  de  la  Bretagne,  de  Cherbourg  et  à  Aurigny  {Degl.  et  Gerbe)  ;  il 
visite  parfois  aussi  les  côtes  de  l'Espagne  et  du  Portugal  jusqu'à  Gi- 
braltar {Saunclers,  Irby),  pénètre  dans  la  Méditerranée, où  cet  oiseau 
a  été  capturé  dans  diverses  localités  des  côtes  de  l'Italie  et  de  la 
Sicile,  mais  ne  visite  qu'accidentellement  la  mer  Adriatique  {Gi- 
glioli).  Cet  Aie  a  encore  été  capturé  accidentellement  à  l'île  de  Malte 
{Wright)  et  sur  les  côtes  de  l'Algérie  {Loche)  et  du  Maroc  {Facier). 

C'est  probablement  par  erreur  que  Pallas  a  mentionné  cet  oiseau 
comme  habitant  le  nord  de  la  Sibérie,  le  Kamtschatka  et  les  îles  Kou- 
riles, car  aucun  explorateur  récent  ne  l'a  observé  dans  le  nord  du 
Pacifique  ;  le  Musée  de  Leyde  possède  bien  un  individu  en  mue  rap- 
porté du  Japon  par  von  Siebold,  mais  sa  capture  sur  les  côtes  japo- 
naises paraît  fort  douteuse. 

En  Amérique,  le  Pingouin  niche  au  Groenland  jusqu'au  70"  1.  N., 
sur  les  côtes  du  Labrador,  de  Terre-Neuve,  de  la  Nouvelle- 
Ecosse,  et  se  montre  en  hiver  jusqu'à  la  Nouvelle-Jersey  {Newton, 
Coues,  etc.). 

Mœurs.  —  L'oiseau  (jui  nous  occupe  a  des  mœurs  fort  semblables 
à  celles  des  Guillemots,avec  lesquels  on  le  rencontre  presque  partout. 


—  664  — 

Il  émigré  vers  la  mi-septembre  des  régions  septentrionales,  et  on  le 
rencontre  à  partir  du  mois  d'octobre  sur  la  plupart  des  côtes  de  l'Eu- 
rope occidentale  et  du  nord-est  de  l'Amérique.  Il  voyage  par  bandes 
plus  ou  moins  considérables  qui  occupent  un  grand  espace  au-dessus 
de  la  mer,  et  quand  ils  sont  fatigués,  ils  s'abattent  sur  l'eau  pour  se 
reposer.  Dans  les  lieux  de  la  reproduction,  les  montagnes  et  les 
rochers  sont  couverts  de  millions  d'oiseaux,  composés  en  majeure 
partie  de  Pingouins,  de  Guillemets  et  de  Macareux,  qui  tous  vivent 
en  bonne  intelligence. 

Ce  Pingouin  marche  avec  autant  de  difficulté  que  les  précédents, 
en  se  tenant  debout  et  en  s'appuyant  sur  les  tarses  et  sur  la  queue  ;  son 
vol  est  facile  :  tantôt  il  rase  la  surface  de  l'eau  en  passant  au  travers 
des  vagues,  tantôt  il  s'élève  avec  aisance  et  monte  dans  les  airs  avec 
une  étonnante  rapidité,  en  battant  rapidement  des  ailes,  surtout  quand 
il  vole  de  bas  en  haut.  Il  nage  et  plonge  avec  une  grande  dextérité, 
parcourt  sous  l'eau  des  distances  considérables  et  y  poursuit  sa  proie 
avec  une  agilité  incroyable.  Il  sait  plonger,  d'après  Naumann,jusqu'à 
une  profondeur  de  120  à  180  pieds.  A.Brehm  dit  que  pour  vérifier  la 
profondeur  à  laquelle  un  Aie  peut  plonger,  et  pour  voir  combien  de 
temps  il  peut  rester  sous  l'eau,  il  a  attaché  à  l'un  d'eux  une  mince 
ficelle  à  la  patte  et  l'a  jeté  ensuite  à  la  mer  du  haut  du  navire.  <  L'oi- 
seau disparut  aussitôt  et  développa  jusqu'au  bout  la  boule  de  ficelle 
qui  avait  quarante-deux  mètres  de  long;  après  deux  minutes  et  quart 
environ,  il  reparut  à  la  surface,  respira  et  replongea  de  nouveau.  Je 
le  retirai  alors  à  moi  et  je  remarquai  que  son  corps  était  tout  gonfié  ; 
un  examen  plus  approfondi  me  montra  qu'il  était  rempli  d'air,  au  point 
que  la  peau  n'était  plus  adhérente  qu'au  cou,  aux  ailes,  aux  pattes 
et  près  de  la  queue  ;  partout  ailleurs  elle  était  soulevée  par  l'air.  »  Sa 
voix,  dit  le  même  auteur,  ressemble  à  celle  du  Macareux,  mais  elle  est 
cependant  encore  un  peu  plus  basse  et  plus  rauque  :  c'est  à  peu  près 
oer  ou  arr,  et  par  moments  arr,  err,  querr,  querr. 

Cet  oiseau  se  nourrit  de  crustacés  et  de  petits  poissons,  principale- 
ment déjeunes  harengs. 

Reproduction.  —  L'Aie  torda  niche  également  en  société  et  de  la 
même  manière  que  les  Guillemets,  c'est-à-dire  dans  des  trous  et  des 
fissures  de  rochers,  entre  des  tas  de  pierres,  et  toujours  du  côté  où  la 
montagne  est  baignée  par  la  mer.  Les  derniers  arrivés  ne  trouvent 
souvent  plus  d'excavation  pour  abriter  leur  couvée  ;  ils  se  contentent 
alors  de  déposer  leur  œuf  à  nu  sur  une  saillie  quelconque  du  rocher. 


-  665  — 

M.  Dixon  trouva  un  œuf  d'Alc  dans  une  galerie  creusée  par  un  Puffin, 
et  M.  Saunders  vit  même  une  femelle  couver  son  œuf  dans  le  nid 
abandonné  d'un  Cormoran.  La  ponte  a  rarement  lieu  avant  la  mi-mai, 
mais  les  oiseaux  se  rassemblent  dès  la  fin  de  mars  et  en  avril  sur  les 
montagnes  où  ils  se  reproduisent,  et  chaque  couple  prend  bientôt 
possession  de  la  cavité  où  il  a  niché  l'année  précédente.  Il  est  probable 
que  les  couples,  une  fois  unis,  restent  ensemble  pendant  toute  leur 
vie.  La  ponte  n'est  que  d'un  seul  œuf  que  les  parents  couvent  à  tour 
de  rôle  ;  comme  l'eau  filtre  constamment  dans  l'intérieur  de  la  cavité 
où  l'œuf  est  placé,  la  femelle  le  dépose  sur  un  amas  de  petits  cailloux 
pour  le  mettre  à  l'abri  d'une  trop  grande  humidité.  L'œuf  a  la  forme 
d'un  ovoïde  allongé  un  peu  piriforme;  il  est  d'un  blanc  jaunâtre, 
bleuâtre  ou  verdâtre,  avec  des  taches  profondes  petites  et  peu  nom- 
breuses, cendrées  ou  d'un  gris  vineux;  les  taches  superficielles  sont 
plus  grandes,  brunes,  de  forme  arrondie,  irrégulières  et  réunies  sur 
tout  vers  le  gros  bout  ;  il  mesure  74  mill.  sur  48  à  50  environ. 

Il  n'y  a  qu'une  couvée  par  année,  mais  si  on  lui  enlève  son  œuf,  la 
femelle  en  pond  un  second  et  parfois  même  un  troisième.  A  peine  à 
moitié  développé,  le  jeune  se  jette  dans  la  mer  du  haut  du  rocher, 
encouragé  par  les  cris  d'appel  de  ses  parents  ;  ceux-ci  lui  apprennent 
aussitôt  à  plonger  et  à  chercher  sa  nourriture.  Mais  cette  chute  n'est 
pas  toujours  sans  danger,  et  plus  d'un  se  tue  en  tombant  sur  des  aspé- 
rités rocailleuses. 

GKNRE  CLXX. 

MACAREUX.  -  PRATERCULA. 

Fratercula,  Briss.  Of-n.  VI,  p.  81  (1760;. 

Mormon,  lllig.  Proclr.  p.  283  (1811). 

LUiNDA,  (part.)  Pall.  Zoo(/r.  11,  p.  365  (1811). 

Larva,  Vieill.  Analyse,  i^.  67  (1816). 

Ceratoblepharu.m,  Brandt,  Bull.  Ac.  St-Pétersb.  1837,  p.  348. 

Car.  —  Bec  très  élevé,  très  comprimé  latéralement,  à  arêtes  vives  en 
dessus  et  en  dessous,  marqué  de  sillons  larges  et  profonds,  la  mandibule 
supérieure  arrondie  jusqu'à  la  pointe  qui  est  échancrée,  l'inférieure  arrondie 
à  sa  base,  puis  se  terminant  en  ligne  droite  jusque  vers  la  pointe,  qui  est 
coupée  obUquemeut  et  pourvue  d'une  échancrure;  narines  linéaires,  basales, 
situées  près  des  bords  du  bec,  percées  de  part  en  part  dans  une  membrane 
nue;  commissures  du  bec  garnies  d'une  peau  boursouHée  ;  des  protubérances 
cornées  au-dessus  et  au-dessous  des  yeux;  ailes  courtes  et  aiguës  ;  tarses  plus 
courts  que  le  doigt  interne,  réticulés  ;  ongle  du  doigt  interne  arqué  et  tourné 
en  dedans. 

ToMB  II    —  1894.  84 


—  66Q    - 

Le  bec  des  Macareux  subit  de  véritables  mues  et  ce  phénomène 
paraît  être  unique  dans  la  classe  des  oiseaux.  C'est  au  docteur  Louis 
Bureau  que  l'on  doit  cette  intéressante  découverte  (1). D'après  ce  natu- 
raliste, le  bec  des  Macareux  se  divise  en  deux  parties  bien  distinctes  : 
l'une  postérieure  soumise  au  phénomène  de  la  mue,  l'autre  anté- 
rieure, persistante.  La  partie  postérieure  est  formée  par  l'assemblage 
et  la  suture  de  neuf  pièces  cornées,  qui  se  désunissent  et  tombent 
après  la  saison  des  noces.  Ce  sont  :  à  la  mandibule  supérieure, 
V ourlet  corné,  la  cuirasse  nasale,  les  deux  lamelles  sous-nasales  et 
les  deux  lamelles  transparentes.  A  la  mandibule  inférieure  :  les  deux 
lisérés  cornés  et  la  cuirasse  mentonnière. 

Hab.  —  Ce  genre  est  propre  à  la  zone  polaire  arctique  et  hiverne 
sur  les  côtes  de  la  zone  tempérée. 

810.  —  Le  Macareux  moine. 

FRATERCULA  k'RGTlGk,  Leach  ex  Lin. 

(PI.  312). 

Alca  arctica,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  211  (1766). 

Alca  labradorica,  Gmel.  Syst.  nat.  I,  p.  550  (1788). 

Alca  labradora,  Lath.  Ind.  Om.  II,  p.  793  (1790). 

Alca  canagularis,  Mey.  Taschenb.  deut.  Vogelk.  II,  442  (1810). 

Mormon  arctica,  Illig.  Prodroni.  p.  283  (1811). 

LuNDA  arctica,  Pall.  Zooyr.  Rosso-As.  II,  p.  365  (1811), 

Mormon  fratercula,  Tem.  Man.  d'Om.  p.  614  (1815). 

Fratercula  arctica,  Leach,  Syst.  Cat.  Br.  Mus.  p.  42  (1816). 

Mormon  polaris  et  grab.e,  Brehm,  Isis.,  1830,  p.  1001. 

Fratercula  (Ceratoblepharum)  arctica,  Bi-andt,  Bull.  Ac.  St-Pétersb.  II,  p.  348 

(1837). 
Mormon  arcticus,  Macg.  iJ/ctw.  Brit.  Om.  II,  p.  218  (1842). 
Der  Nordischer  Larventaucher,  en  allemand. 
The  Puffin,  en  anglais. 
De  Zeepapegaai,  en  flamand. 

Var .   Glacialis. 

Mormon  glacialis  (Leach)  Naum.  Isis,  1821,  p.  782,  pi.  7,   .  2. 

Fratercula  glacialis,  Steph.  Shcms  Gen.  Zool.  XIII,  I.  p,  40  (1825). 

LuNDA  glacialis,  Nauiïi.  Yog.  Deutschl.  XIII,  p.  314  (1853). 

Mormon  arcticus.  Malmgr.  Ofvers.  1863,  p.  113. 

Fratercula  corniculata,  Degl.  et  Gerbe  (nec  Naum.),  Orn.  Eur.  II,  p.  609  (1867). 

(1)  Voyez  Bulletin  de  la  Soc.  zool.  de  France,  t.  II  (1877),  p.    377. 


—  667  - 


Fratercula  arctica  car.  Glacialis,  Heugl.  Ibis,  1872,  p.  64. 
Fratercula  arctica  glacialis,  Ridgw.  ]\^om.  iV.  Am.  B.  n°  743a  (1881). 

Taille  :  Qr2S;  ailes  0,18  (sujets  d'Europe). 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  Capuchon  d'un  cendré  noi- 
râtre, bordé  en  arrière  d'une^  teinte  plus  pâle;  côtés  de  la  tête  jusqu'au- 
dessus  des  yeux  et  gorge  d'un  blanc  grisâtre;  parties  supérieures,  ailes, 
queue  et  un  large  collier  couvrant  le  devant  du  cou  d'an  noir  lustré  ;  parties 
inférieures  blanches.  Bec  :  ourlet  corné  d'un  blanc  jaunâtre,  lisérés  cornés 
roussâtres,  cuirasses  nasale  et  mentonnière  d'un  beau  gris,  partie  persistante 
du  bec  rouge  corail  avec  les  sillons  l)lanchâtres  ;  rosace  de  la  commissure 
du  bec  d'un  jaune  orange  ;  iris  brunâtre;  bord  libre  des  paupières  rouge  avec 
deux  plaques  cornées  d'un  gris  de  fer,  l'une  supérieure  triangulaire,  l'autre 
inférieure  et  allongée;  pattes  rouge  vermillon. 

En  hiver.  —  Même  plumage  qu'en  été,  mais  les  côtés  de  la  tête  plus  gris. 
Bec  plus  petit,  comme  tronqué  au  front  et  surtout  à  la  mandibule  inférieure, 
qui  forme  une  ligne  bi  isée  au  lieu  d'une  courbe  régulière  ;  la  partie  posté- 
rieure est  brunâtre  et  a  perdu  de  son  épaisseur  et  de  sa  consistance  ;  la  rosace 
de  la  commissure  du  bec  est  réduite  à  une  étroite  bande  d'un  jaune  pâle  ;  le 
bord  libre  des  paupières  est  décoloré  et  dépourvu  de  plaques  cornées  ;  pattes 
oranges. 

Jeune.  —  Taille  plus  petite.  Coloration  générale  comme  chez  l'adulte  ; 
lorums,  partie  antérieure  des  joues  jusqu'au  delà  de  l'œil,  d'un  gris  noirâtre  ; 
gorge  d'un  gris  cendré.  Bec  moins  élevé,  sans  sillons,  l'angle  de  la  mandibule 
inférieure  saillant,  jaunâtre  à  la  base,  brun  dans  le  reste  de  son  étendue  ; 
pattes  d'un  jaune  rougeâtre. 

Poussin.  —  Parties  supérieures  garnies  d'un  duvet  brun,  long  sur  le  dos, 
plus  court  sur  la  tête;  bas  de  la  poitrine  et  ventre  blancs.  Bec  brun;  pattes 
jaunes,  les  membranes  plus  foncées. 

Var.  Glacialis.  —  Se  distingue  du  type  par  une  taille  un  peu  plus  forte  et 
un  bec  plus  grand. 

Hab. —  Le  Macareux  habite  le  nord  de  l'Atlantique,  mais  au  Spitz- 

bcrg-  et  dans  le  nord  du  Groen- 
land il  est  remplacé  par  sa  var. 
Glacialis  {de  Ueuglin)  jusqu'au 
80°  1.  N.  [Bvehm). 

Le  Macareux  moine  niche  sur 

-j  divers  points  des  côtes  de  la  Nor- 

wège,    surtout    près   du   cercle 

^iL  i^xiBfflffîfflftliifflifS  arcti.,uo((W/..;0,"iaisne  paraît 
5B>4ii,iiii>i.>ùiB^-.».^^^  ,y;.^.^-^Wii^>.^v. jri  pasnicher  près  delamer  Blanche 

où  il  se  montre  quelquefois  ;   il   niche  égnlcment  en  Islande  [Fabcr), 


—  668  — 

aux  îles  Féroé  {Graba),  sur  un  grand  nombre  de  côtes  des  îles  Britan- 
niques, y  compris  les  îles  Hébrides,  Orcades,  Shetland,  etc.  {Seebohm), 
et  en  France  sur  les  côtes  de  la  Bretagne,  à  Aurigny  et  aux  Aiguilles 
d'Etretat  {Degl.  et  Gei^be).  Rn  hiver,  on  le  voit  en  plus  ou  moins  grand 
nombre  sur  toutes  les  côtes  du  nord  de  l'Allemagne  (Naumann),  plus 
rarement  sur  celles  du  Danemark  [Collin),  et  il  est  très  rare  dans  la 
Baltique;  sur  les  côtes  de  l'Europe  occidentale,  on  le  rencontre  en  hiver 
jusqu'au  détroit  de  Gibraltar  {Irby),  mais  il  ne  pénètre  que  rarement 
dans  la  Méditerranée  où  quelques  rares  sujets  ont  été  capturés  sur  les 
côtes  de  îa  Toscane,  de  la  Romagne,  de  Naples,de  la  Sicile, de  la  Sar- 
daigne,de  Malte  et  accidentellement  dans  la  mer  Adriatique  {Giglioli). 
Il  est  assez  rare  sur  les  côtes  de  Belgique  où  on  ne  le  voit  qu'en  hiver. 
Dans  cette  saison  il  visite  parfois  aussi  les  côtes  du  Maroc  {Favier) 
et  de  l'Algérie  [Loche). 

En  Amérique,  cet  oiseau  et  très  commun  sur  les  î5Ôtes  et  les  îles  du 
nord  de  l'Atlantique,  et  niche  en  grand  nombre  au  Groenland 
[Holbôll),  au  Labrador,  à  la  Terre-Neuve,  à  la  Nouvelle-Ecosse,  et  se 
montre  en  hiver  jusqu'au  40°  1.  N.  (Baird,  Coues,  etc).  Dans  le  nord 
du  Pacifique  il  est  remplacé  par  une  espèce  voisine,  le  Fratercula 
corniculata. 

Mœurs.  —  Le  Macareux  n'est  pas  véritablement  un  oiseau  migra- 
teur, mais  il  gagne  la  pleine  mer  après  la  reproduction,  et  s'éloigne 
alors  souvent  loin  du  lieu  qui  l'a  vu  naître,  surtout  pendant  les  tem- 
pêtes; on  le  voit  d'ailleurs  rarement  près  des  côtes  en  hiver,  et  il  ne 
remonte  jamais  les  fleuves. 

Par  son  attitude  et  par  ses  moeurs,  cet  oiseau  ressemble  aux  précé- 
dents et  vit  dans  leur  société;  comme  les  Guillemets,  il  remue  sans 
cesse  la  tête  et  le  cou,  même  au  repos,  comme  s'il  cherchait  quelque 
chose  autour  de  lui.  C'est  surtout  dans  la  zone  arctique  que  ces  oiseaux 
sont  nombreux,  et  c'est  par  centaines  de  mille  qu'on  les  voit  là  alignés 
sur  les  rochers  devant  leurs  nids  ou  prenant  leurs  ébats  dans  la 
mer.  «  Dans  mon  voyage  en  Laponie,  dit  le  D"^  A.  E.  Brehm,  je  ne 
rencontrai,  ou  plutôt  je  ne  distinguai  le  Macareux  moine  des  autres 
oiseaux,  qu'au  voisinage  des  îles  Loffoden.  Ce  qui  me  frappa  tout 
d'abord  dans  cet  oiseau,  ce  fut  la  façon  vraiment  surprenante  dont  il 
vole  sur  les  vagues,  qu'il  rase  sans  paraître  jamais  en  quitter  la  sur- 
face. Il  emploie  à  cet  effet  ses  ailes  aussi  bien  que  ses  pieds,  et  se  trans- 
porte rapidement  d'une  lame  à  une  autre,  comme  un  poisson  moitié 
nageant  et  moitié  volant;  il  frappe  Teau  des  ailes  et  des  pattes  tout 


—  669  — 

à  la  fois,  décrit  une  courbe  après  l'autre,  se  pliant  au  caprice  des  flots 
et  avançant  sans  cesse  avec  une  rapidité  et  une  force  tout  à*fait  mer- 
veilleuse. De  son  bec  il  fouille  la  lame,  tout  en  volant,  et  en  cela  il 
m'a  rappelé  singulièrement  le  Bec-en-ciseaux.  Quand  il  se  lève  de  la 
surface  des  eaux  pour  s'envoler,  il  le  fait  avec  une  rapidité  si  extraor- 
dinaire et  en  ligne  si  directe  que  l'on  tire  toujours  trop  en  arrière,  au 
commencement.  Pour  la  nage,  il  n'est  dépassé  certainement  par 
aucun  autre  membre  de  la  famille  à  laquelle  il  appartient.  Il  repose 
légèrement  sur  les  vagues,  ou  s'enfonce  à  volonté  au-dessous  de  leur 
surface  ;  il  plonge  sans  effort  et  sans  bruit,  et  reste  sous  l'eau  deux 
à  trois  minutes;  au  dire  de  certains  naturalistes,  il  descendrait 
à  une  profondeur  de  trente-cinq  mètres  environ.  A  terre,  il  marche 
à  petits  pas  et  en  vacillant,  mais  très  rapidement;  il  peut  s'enlever 
dans  les  airs  et  se  laisser  tomber  sur  le  sol  tout  d'un  trait  et  sans 
hésitation.  > 

C'est  l'oiseau  le  plus  actif  et  le  moins  stupide  de  la  famille  ;  à  la  vue 
de  l'homme,  au  lieu  de  se  précipiter  dans  la  mer,  il  se  glisse  dans  son 
nid,  au  fond  duquel  il  s'accule  en  grommelant  et  en  lançant  des  coups 
de  bec,  mais  il  finit  toujours  par  se  laisser  prendre;  il  se  montre  plus 
intelligent  sur  la  mer,  son  véritable  élément,  et  devient  soupçonneux 
et  farouche  dès  qu'il  se  voit  poursuivi.  Son  cri  ressemble  à  orr,  orr. 
Il  se  nourrit  de  crustacés,  de  mollusques  et  de  petits  poissons,  et 
poursuit  sa  proie  jusqu'à  de  grandes  profondeurs. 

Reproduction.  —  Le  Macareux  se  reproduit  en  colonies  et  dans  la 
société  des  Guillemets  et  des  Pingouins.  C'est  en  mai  qu'a  lieu  la 
reproduction,  mais  les  couples  commencent  leurs  préparatifs  dès  la 
fin  d'avril,  ou  reprennent  possession  de  leur  ancien  nid.  Il  niche  dans 
les  crevasses,  dans  les  anfractuosités  des  rochers,  ou  au  milieu  de  tas 
de  pierres.  A  défaut  d'une  cavité  naturelle,  il  se  creuse  une  galerie 
dans  la  tourbe  ou  dans  la  terre  qui  recouvre  le  rocher.  Ces  galeries 
diffèrent  considérablement  entre  elles  par  la  largeur  et  la  profondeur; 
tantôt  elles  ne  servent  qu'à  un  seul  couple,  tantôt  elles  en  abritent 
deux.  «Les  deux  sexes, dit  Brehm,  semblaient  travailler  à  la  construc- 
tion du  nid,  car  j\ii  vu  autant  de  femelles  que  de  mâles  autour  des 
trous.  Ils  se  servaient  de  leur  bec  et  de  leurs  pattes  ;  cependant,  je 
ne  saurais  dire  comment  ils  s'y  prenaient,  parla  raison  qu'ils  cessaient 
tout  travail  aussitôt  que  l'on  approchait.  Pendanl  ([u'ils  creusent,  ils 
sont  couverts  d'une  telle  poussière,  ou  plutôt  ils  sont  si  couverts  de 
boue,  que  l'on  peut  à  peine  reconnaître  les  couleurs  de  leurs  plumes; 


—  670  — 

mais  ils  se  nettoient  avec   le  plus  grand  soin  avant   de  se  mettre  à 
couver.   » 

La  ponte,  qui  n'est  que  d'un  seul  œuf,  a  lieu  en  mai  dans  l'Europe 
occidentale,  en  juin  dans  la  zone  arctique. Cet  œuf  est  ovoïde, à  coquille 
mince,  d'un  blanc  grisâtre  mat,  et  porte  souvent  des  marbrures  ou  des 
taches  nébuleuses  d'un  gris  violacé  ou  d'un  brun  très  pâle,  générale- 
ment groupées  en  couronne  vers  le  gros  bout;  il  mesure  59  à  62  mil- 
lim.  sur  42  à  44.  Les  deux  parents  couvent  alternativement,  et  la 
durée  de  l'incubation  est,  d'après  Naumann,  de  cinq  semaines.  Le 
poussin  croît  lentement,  reste  lonpctemps  dans  son  nid  et  ne  le  quitte 
que  quand  ses  ailes  sont  bien  développées.  Si  l'on  enlève  l'œuf,  la 
femelle  en  pond  un  nouveau,  et  si  les  deux  parents  viennent  à  périr, 
un  autre  couple  couve  à  leur  place  et  élève  l'orphelin. 

FAMILLE  DES  COLYMBIDÉS. 

Car.  —  Bec  allongé,  droit,  pointu,  fort,  à  bords  rentrants  et  tran- 
chants, à  arête  à  peu  près  droite^  arrondie,  rentrant  entre  les  plumes 
du  front;  narines  oblongues,  assez  rapprochées  du  front;  plumes  du 
front  s'avançant  jusque  derrière  les  narines  en  formant  un  angle  très 
aigu;  ailes  courtes  et  aiguës;  queue  courte,  arrondie;  tarses  très 
comprimés  latéralement,  réticulés,  enveloppés  jusqu'au  talon  dans  la 
peau  de  l'abdomen  ;  doigts  antérieurs  réunis  par  une  large  mem- 
brane; pouce  court  et  portant  un  lobule  ;  ongles  allongés  à  pointe 
mousse. 

Hab.  —  Les  oiseaux  de  cette  famille  habitent  les  régions  plus  ou 
moins  froides  de  la  zone  arctique,  et  émigrent  en  partie  jusqu'au  delà 
des  régions  tempérées. 

Mœurs.  —  Cette  famille  ne  comprend  qu'un  seul  genre,  celui  des 
Plongeons.  Ce  sont  des  oiseaux  qui  vivent  sur  les  eaux  salées  aussi 
bien  que  sur  les  grandes  eaux  douces  de  l'intérieur;  ils  nagent  le 
corps  hors  de  l'eau,  ou  l'enfoncent  si  profondément  qu'il  ne  reste  visi- 
ble qu'une  étroite  ligne  du  dos  ;  ils  plongent  les  ailes  fermées,  ce  qui 
les  distingue  des  Alcidés.  Quant  à  la  marche,  elle  leur  est  interdite 
et  ils  ne  peuvent  avancer  qu'en  rampant  et  en  se  servant  à  la  fois 
des  ailes,  des  pieds  et  du  bec.  Leur  cri  est  fort  et  perçant.  Ils  sont 
peu  sociables,  construisent  des  nids  et  pondent  généralement  deux 
œufs. 


—  671  — 

GENRE    CLXXI 

PLONGEON.  —  COLYMBUS. 

CoLYMBUS,  Lin,  Sijst.  nat.  I,  p.  221   (1766). 
Urinator,  Cuv.  Anat.  comp.  I,  table  2  (1799). 
EuDYTES,  Ulig.  Prodr.  p.  283  (1811). 

Car.  —  Ceux  de  la  famille. 

311.  —  Le  Plongeon  glacial. 
COLYMBUS  GLACIALIS,  Lin. 
(PI.  313.) 

Mergus  major,  m.  major  n/evius,  Briss.  Ornith.  VI,  pp.  105,  120(1760). 

CoLYMBUS  TORQUATUS,  Brunn.  Orn.  Bor.p.  41  (1764). 

CoLYMBUS  GLACIALIS  et  iMMER,  Liu.  Stfst.  nat.  I,  pp.  221-22  (1766), 

Mergus  glacialis  etN^viA,  Tunst.  Orn.  Brit.  p.  3  (1771). 

Urinator  glacialis,  Cuv.  Anat.  comp.  I,  tab.  2  (1799). 

CoLYMBUS  ATROGULARis,  Mey.  (part.)  Taschenb.  Deut.  Yogelk.,  II,  p.  449  (1810). 

EuDYTES  GLACIALIS  Illig.  Proclr.  p.  283  (1811). 

Cepphus  TORQUATUS,  Pall.  Zooyr.  II,  p.  340  (1811). 

CoLYMBUS  MAxiMUS  et  HiEM.iLis,  Bi'ehm,  Isis,  1830,  p.  1000. 

Urinator  immer,  Stejn.  Proc.  U.  S.  nat.  Mus.  V,  p.  43  (1882). 

Der  Eis-Seetaucher,  en  allemand. 

The  GREAT  NORTHERN  DivER,  en  anglais. 

De  Ijsduiker,  en  flamand. 

Taille  :  O'"?!  ;  ailes  0,36. 

Desenption  des  deux  sex3S  adultes  en  été.  —  Tête  et  cou  noirs  à  reflets 
verdâtres  et  bleuâtres  avec  une  bande  sur  le  devant  du  cou  formée  de  raies 
longitudinales  noires  et  blanches,  et  un  large  collier  situé  plus  bas,  égale- 
ment composé  de  raies  longitudinales  blanches  et  noires,  mais  interrompu  en 
avant  et  eu  arrière  ;  dos  et  scapulaires  noirs  avec  deux  taches  carrées  blan- 
ches à  l'extrémité  de  chaque  plume,  ces  taches  étant  toujours  plus  grandes 
sur  les  scapulaires;  bas  du  dos,  sus-caudales,  couvertures  des  ailes  et  flancs 
noirs  tachés  de  blanc,  mais  les  taches  sont  plus  petites  et  arrondies  ;  côtés  du 
haut  de  la  poitrine  marqués  de  raies  longitudinales  blanches  et  noires;  par- 
ties inférieures  blanches  ;  rémiges  et  queue  d'un  brun  noirâtre.  Bec  noir  ;  iris 
rouge  ;  pattes  d'un  brun  noirâtre. 

En  hiver.  —  Après  la  mue  d'automne  les  parties  supérieures  et  les  flancs 
sont  d'un  brun  noirâtre  avec  des  taches  grisâtres  sur  les  plumes  du  dos  et  sur 
les  scapulaires;  bas  des  joues  d'un  blanc  nuancé  de  cendré  ;  côtés  du  cou 
d'un  brun  noirâtre;  couvertures  des  ailes  de  même  couleur  avec  quehjues 
points  cendrés  ;  toutes  les  parties  inférieures  blanches  avec  quelques  taches 
brunâtres,au-dessous  de  la  gorge.  Bec  couleur  de  corne. 

Jeune.  —  Dessus  de  la  tête  et  du  cou  ainsi  que  les  côtés  de  ce  dernier  d'un 


—  672  — 

brun  noirâtre;  gorge  et  devant  du  cou  blancs  ;  parties  dorsales  et  couver- 
tures des  ailes  d'un  brun  noirâtre  avec  les  bordures  des  plumes  grises  ;  bas  du 
dos  et  flancs  bruns  ;  parties  inférieures  blanches.  Bec  brunâtre  à  la  base, 
d'un  blanc  sale  à  son  extrémité  ;  iris  brun  roux.  Ce  n'est  qu'à  la  troisième 
année  que  le  jeune  prend  le  plumage  d'adulte. 

L'adulte  en  plumage  d'hiver  et  le  jeune  ressemblent  beaucoup  au  Plongeon 
à  gorge  noire  sous  les  mêmes  plumages,  mais  il  est  facile  de  reconnaître  les 
deux  espèces  à  leur  taille,  le  dernier  étant  plus  petit. 

Poussin.  —  Duvet  d'un  brun  noirâtre  aux  parties  supérieures,  d'un  brun 
plus  pâle  aux  parties  inférieures  {Seebohm). 

Hab.  —  Cette  espèce  ne  paraît  pas  se  reproduire  sur  le  continent 

européen,  mais  il  n'est  pas  rare 
et  niche  en  Islande  {Faber).  On 
le  rencontre jdans  tous  les  fjords 
et  sur  toutes  les  côtes  de  la 
Norwège  depuis  l'automne  jus- 
qu'au printemps,  et  en  plus 
grand  nombre  au  nord  du  fjord 
de  Trondhjem  (63°  '/g)  ;  des  su- 
jets adultes  ont  cependant  été 
observés  en  été  dans  la  Finmark,  et  il  se  pourrait  que  quelques  cou- 
ples y  nichassent  dans  les  marais  d'eau  douce,  carLilljeborg  a  trouvé, 
le  26  août,  un  jeune  parfaitement  emplumé  sur  l'île  de  Vano  près  de 
Tromsô  (Colleté).  Cet  oiseau  ne  paraît  pas  se  montrer  à  l'est  de  la 
Finmark  orientale,  où  il  est  remplacé  par  une  espèce  voisine,  le 
C.  adamsi  (1)  ;  il  est  cependant  probable  qu'il  visite  accidentellement 
le  N.-O.  de  la  Russie,  vu  qu'on  en  a  capturés  dans  ce  pays. 

Le  Plongeon  glacial  se  montre  régulièrement  en  hiver  dans  le  sud 
de  la  Suède  (Nilsson),  aux  îles  Féroé  et  aux  îles  Britanniques,  même 
en  Irlande  {Seebohm),  ainsi  que  sur  les  côtes  occidentales  de  la 
Finlande  {Palmén);  il  visite  accidentellement  la  Russie  où  quelques 
captures  ont  été  faites  dans  le  gouvernement  de  Moscou,  dans  le 
district  situé  entre  le  Volga  et  l'Oka  {Menzbier),  près  d'Odessa 
{de  Nordmann)  et  en  Pologne  {Taczanoivski);  on  le  voit  parfois  aussi 
en  Autriche  {Hinterberger),  dans  le  nord  de  l'Allemagne  {Naumann), 
le  long  du  Rhin  et  en  Moravie  {Gloger),  en  Danemark  {Collin),  en 


(1)  Plusieurs  auteurs  ont  signalé  l'existence  du  C.  glacialis  dans  le  nord  de  la  Russie  et  de  la 
Sibérie,  ainsi  qu'à  la  Nouvelle-Zemble,  confondant  cet  oiseau  avec  le  C.  adamsi.  Ce  dernier  est 
d'une  taille  plus  forte  et  se  reconnaît  à  première  vue  à  son  bec  plus  robuste  et  blanchâtre;  il 
hiverne  sur  les  côtes  septentrionales  de  la  Norwège,  comme  Ta  constaté  M.  CoUett. 


—  673  - 

Hollande  {Schlégel)  et  en  Belgique  où  on  ne  le  voit  que  pendant  les 
hivers  très  rigoureux  et  après  des  tempêtes,  et  il  en  est  de  même  en 
Suisse  (T^chudi).  Déjeunes  sujets  ont  été  pris  de  loin  en  loin  dans 
diverses  parties  de  la  France  {Olphe-Gall.)  et  même  dans  le  midi 
{Lacroix),  en  Portugal  {Barboza  du  Bocage),  en  Espagne  dans  la  pro- 
vince de  Gérone  {V(njredr')  et  cinq  ou  six  sujets  ont  été  tués  dans 
divers  points  de  l'Italie  [Giglioli).  On  en  a  également  capturés  en 
Bohême  {Fritsch),  en  Transylvanie  (Danford),  en  Alsace  (TTrœner),  etc. 
En  Amérique,  on  rencontre  cet  oiseau  en  été  au  Groenland 
[HolbôU),  où  il  ne  dépasse  sans  doute  pas  le  67",  et  sur  les  côtes  amé- 
ricaines de  l'Atlantique  jusqu'à  la  Terre-Neuve  ;  en  hiver  on  l'observe 
depuis  le  Maine  jusqu'à  l'extrémité  sud  de  la  Floride,  et  de  là  jusqu'aux 
'bouches  du  Mississipi  et  les  marais  du  Texas  aux  environs  de  l'île 
Galveston  {Auduhon).  Suivant  Baird,  le  Musée  de  Washington  possède 
des  sujets  du  Nouveau-Mexique  et  des  côtes  du  Pacifique  ;  mais 
ceux-ci  n'appartiendraient-ils  pas  au  Colymbus  adamsi,  qui  habite  le 
nord  du  Pacifique  ? 

Mœurs.  —  Toutes  les  espèces  de  Plongeons  ont  des  moeurs  si  sem- 
blables qu'il  est  inutile  de  les  exposer  pour  chacune  d'elles  ;  nous 
parlerons  donc  de  leur  manière  de  vivre  en  nous  occupant  du  Plon- 
geon à  gorge  rousse,  qui  est  la  seule  espèce  qui  se  montre  réguliè- 
rement en  Belgique. 

Le  Plongeon  glacial  est  en  partie  sédentaire  et  en  partie  migrateur. 
Il  vit  particulièrement  sur  la  mer  non  loin  des  côtes  et  évite  la  haute 
mer,  mais  il  niche  près  des  eaux  douces,  et  les  jeunes  passent  les 
premiers  temps  de  leur  vie  sur  des  lacs  et  des  étangs.  Son  attitude  et 
ses  allures  n'offrent  rien  de  particulier,  il  nage  et  plonge  à  la  perfec- 
tion, peut  rester,  d'après  Holboll,  environ  huit  minutes  sous  l'eau 
pour  ne  revenir  à  la  surface  que  150  ou  200  mètres  plus  loin  ;  il  vole 
peu  et  lourdement;  à  l'époque  de  la  migration,  six  à  huit  individus  se 
réunissent  pour  faire  le  voyage  ensemble,,  décrivent  de  grands  cercles 
dans  l'espace  en  faisant  retentir  l'air  de  leurs  cris,  puis  partent  à  tire 
d'aile  en  volant  très  haut.  C'est  le  plus  farouche  des  Plongeons,  il  est 
constamment  sur  ses  gardes  et  évite  le  danger  en  s'éloignant  à  la 
nage  ou  en  plongeant;  mais  s'il  se  trouve  sur  une  eau  de  peu  d'élendue, 
il  cherche  son  salut  dans  la  rapidité  de  son  vol,  sans  cependant  aller 
bien  loin  car  il  revient  bientôt  à  son  point  de  départ.  Il  se  montre  })lus 
confiant  près  de  son  nid,  mais  quand  on  l'approche  de  trop  près,  il  se 
défend  en  donnant  de  violents  coups  de  bec,  dirigés  particulièrement 
Tome  II.  -   1604.  85 


—  674  — 

contre  les  mains  et  la  figure.  Il  n'est  pas  sociable,  vit  par  couples 
et  ne  recherche  des  compagnons  qu'au  moment  des  migrations  ;  sa 
voix  est  retentissante  et  ressemble  à  une  sorte  de  hurlement  plaintif 
que  Naumann  rend  par  houhouhouhouhou....  et  hu  uuu.  Cet  oiseau 
se  nourrit  de  poissons,  de  grenouilles,  de  larves  et  d'insectes  aqua- 
tiques. 

Reproduction.  —  Il  a  été  dit  plus  haut  que  cet  oiseau  ne  se  repro- 
duisait que  dans  le  voisinage  du  cercle  polaire,  mais  HolbôlJ  dit  qu'il 
est  plus  abondant  dans  le  sud  du  Groenland  que  dans  le  nord  de  ce 
pays,  où  il  est  même  rare. 

Le  Plongeon  glacial  niche  sur  les  lacs  et  les  étangs  d'eau  douce 
situés  dans  le  voisinage  de  la  mer  et  souvent  sur  les  eaux  des  monta- 
gnes; il  cherche  en  général  un  endroit  solitaire  où  il  n'a  rien  à  crain- 
dre de  l'homme.  Les  conjoints  sont  très  attachés-  l'un  à  l'autre,  et 
s'accouplent  sur  l'eau  en  jetant  de  grands  cris.  Le  nid  est  construit 
dans  riierbe  près  de  l'eau  sur  une  langue  de  terre  ou  sur  un  îlot;  il  est 
souvent  protégé  par  des  herbages  ou  par  un  buisson,  de  saules  ou  de 
bouleaux;  c'est  une  construction  grossière  d'environ. soixante  centi- 
mètres de  diamètre  et  formée  d'un  tas  de  plantes  aquatiques  et  d'her- 
bes diverses. 

La  ponte  a  lieu,  selon  Faber,  dans  la  seconde  moitié  de  mai  et  se 
compose  de  deux  oeufs.  Ceux-ci  offrent  un  ovale  allongé,  régulier,  les 
deux  extrémités  presque  d'égale  grosseur;  leur  couleur  est  d'un  vert 
olivâtre  plus  ou  moins  foncé  ou  brunâtre,  et  il  sont  marqués  de  taches 
profondes  cendrées  et  de  taches  superficielles  brunes  et  noires  irrégu- 
lièrement distribuées.  Ils  mesurent  91  à  98  millim.  sur  53  à  57. 

Mâle  et  femelle  couvent  alternativement  avec  ardeur;  ils  élèvent 
leurs  petits  avec  la  plus  grande  sollicitude,  les  défendent  avec  courage 
et  se  laissent  tuer  plutôt  que  de  les  abandonner. 


312.  —  Le  Plongeon  à  gorge  noire. 

COLYMBUS  ARCTICUS,  Lin. 

(PL  314). 

Mergus  gutture  nigro,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  115  (1760). 
CoLYMBUS  ARCTICUS,  Lit).  Syst.  nat.  I,  p.  221  (1766). 
CoLYMBUs  ignotus,  Bechst.  Naturg.  Deutschl.  II,  p.  782  (1791). 
Urinator  ARCTICUS,  Cuv.  Anut.  comp.  I,  tab.  2  (1799). 


—  673  — 

CoLYMBUs  LEUCOPUS,  Bechst.  Ornith.  Tasche)ib.  II.  p.  364  (1803). 

CoLYMBUS  ATROGULARis,  Mey.  (part.)  Taschenb.  deut.  Yogelh.  II,  p.  449  (I8I0). 

Cepphus  arcticus,  Pall.  Zoogr.  II,  j».  341  (1811). 

EuDYTES  arcticus,  Illig.  Prodr.  p.  283  (I8I1). 

CoLYMBUS  MACRORHYNCHUS  et  BALTHicus,  Brehin,  /iïs,  1830,  p.  1000. 

CoLY-MBUS  atrigularis,  Homey.  Vôg.  Pomm.^.  79  (1837). 

Der  Polartaucher,  en  alleraanrl.'' 

The  Black-throated  Diver,  en  anglais. 

De  Parklduiker,  en  flamand. 


Var.  Pacifica. 

CoLYMBUS  PACiFicus,  Lawi'.,  BaircI,  B.  N.  Am.  p.  889  (1858). 
CoLYMBUS  ARCTICUS  var .  PACIFICUS,  CouGs,  Key  N.-Am.  B.  p.  335(1872). 
Urinator  PACIFICUS,  Stejn.  Proc.  U.  S.  Nat.  Mus.  V,  p,  43  (1882). 

Taille:  0""60;  ailes  0,31. 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été.  —  Dessus  de  la  tête  et  du  cou 
cendré,  passant  au  brun  sur  les  joues  ;  gorge  noire,  terminée  en  bas  par  une 
bande  de  raies  longitudinales  blanches  et  noires  ;  devant  du  cou  d'un  noir 
violet  bordé  sur  les  côtés  par  une  bande  de  raies  longitudinales  blanches  et 
noires  ;  dos  d'un  beau  noir  lustré,  à  reflets  verdâtres  vers  le  bas  et  sur  les 
sus-caudales  ;  chaque  côté  de  la  partie  supérieure  du  dos  est  marqué  de  dix  à 
douze  bandes  transversales  blanches,  avec  une  strie  noire  au  centre  de 
chaque  plume;  scapulaires  noires,  terminées  par  deux  grandes  taches  blan- 
ches de  forme  plus  ou  moins  carrée,  et  formant  une  douzaine  de  larges 
bandes  transversales;  couvertures  des  ailes  noires  parsemées  de  petites 
taches  arrondies  blanches  ;  côtés  du  haut  de  la  poitrine  avec  des  raies  longi- 
tudinales blanches  et  noires  ;  parties  inférieures  blanclies  avec  les  flancs  noirs; 
rémiges  et  queue  noires.  Bec  noir  ;  iris  brun  rouge  ;  pattes  brunâtres. 

En  hiver.  —  Après  la  mue  d'automne,  la  tête  et  le  dessus  du  cou  sont 
d'un  cendré  foncé  ;  les  autres  parties  supérieures  et  les  couvertures  des  ailes 
d'un  brun  noirâtre,  avec  de  petites  taches  blanchâtres  sur  ces  dernières  ; 
joues,  gorge  et  parties  inférieures  blanches;  côtés  de  la  poitrine  rayés  de 
brunâtre;  flancs  marqués  de  larges  mèches  noires. 

Jeune.  —  Dessus  de  la  tète  et  du  cou  d'un  brun  cendré  ;  parties  dorsales 
et  couvertures  des  ailes  d'un  brun  noirâtre  avec  les  plumes  bordées  de  cen- 
dré ;  rémiges  et  rectrices  brunes,  terminées  par  un  petit  bord  bhinchâtre  ;  bas 
des  joues,  devant  du  cou  et  les  autres  parties  inférieures  l)lancs.  Bec  brun  de 
corne  ;  iris  brun. 

Poussin.  —  Duvet  brun,  très  foncé  aux  parties  supérieures,  plus  pâlo  aux 
parties  inférieures. 

Var.  Pacifica.  —  Se  distingue  par  ili'-^  (linirnsu)iis  nioimlres,  des  ailes  i)lus 


—  676  - 


courtes,  les  doigts  et  les  tarses  proportionnellement  plus  courts  et  le  bec  plus 
étroit  et  plus  court  (Coues). 

Hab.  —  Le  Plongeon  arctique  ou  à  gorge  noire  n'habite  ni  l'Islande, 

ni  le  Groenland,  et  sa  limite  sep- 
tentrionale en  Europe  est  l'île  de 
Waigatz  {de  Heuglin);  il  ne  se 
montre  que  très  accidentellement 
aux  îles  Féroé  {Feilden).  11  est 
commun  en  Scandinavie,  mais  il 
est  plus  abondant  sur  les  lacs 
des  montagnes  de  l'intérieur  que 
sur  les  côtes  et  ne  visite  les  par- 
ties méridionales  de  la  Suède  et  de  la  Norwège  qu'en  hiver  {Collett, 
Nilsson)  ;  il  niche  également  en  Finlande  {Palmén)ei  sur  bien  des  lacs 
russes  des  gouvernements  de  Jaroslaf,de  Tver,de  Vladimir  et  du  nord 
du  gouvernement  de  Moscou  {Sabandeff)\  dans  le  sud  de  la  Russie 
on  ne  4e  voit  qu'en  hiver  [de  Nordmann).  Cet  oiseau  est  rare  au  Dane- 
mark {Kjaerbôlling),  mais  assez  commun  en  Pologne  aux  deux  pas- 
sages et  en  hiver  [Taczanoioski);  il  niche  en  Poméranie  [de  Heuglin) 
et  n'est  pas  rare  en  hiver  sur  les  côtes  allemandes  de  la  Baltique  ; 
on  le  voit  quelquefois  dans  les  vallées  de  l'Elbe,  de  l'Oder  et  même 
sur  le  Rhin  [Naumann),  dont  il  remonte  quelquefois  le  cours  jusqu'en 
Suisse,  où  on  l'a  parfois  observé  sur  certains  lacs  [Meisner  et  Schinz). 
On  l'observe  également  sur  les  fleuves  et  les  lacs  de  l'Autriche  {Hin- 
terberger)  et  de  la  Hongrie,  et  il  est  moins  rare  en  Transylvanie  que 
l'espèce  précédente  [Danford  et  Harv.  Broivn).  A  l'Ouest,  on  le  voit 
assez  fréquemment  sur  les  côtes  et  les  lacs  de  la  Hollande  {Schlégel), 
mais  rarement  sur  les  côtes  de  la  Belgique.  Il  niche  en  petit  nombre 
sur  certains  lacs  des  îles  Hébrides  et  des  comtés  d'Argjll,  de  Perth, 
d'Inverness,  de  Ross  et  de  Sutherland^  mais  ne  visite  que  rarement  ou 
accidentellement  les  autres  parties  des  îles  Britanniques  {Seebohm). 
En  France,  on  ne  voit  guère  sur  les  côtes  et  dans  les  marais  que  de 
jeunes  individus  et  encore  rarement  {Degl.  et  Gerbe)  \  des  captures 
accidentelles  ont  également  été  faites  en  Espagne  dans  la  province  de 
Gérone  [Vayreda)  et  dans  la  Coruna  {Naceyro),  en  Portugal  [Bay^boza 
du  Bocage)  et  sur  divers  points  de  l'Italie  jusqu'en  Sardaigne  et  en 
Sicile  [Giglioli). 

En  Asie,  cet  oiseau  habite  en  été  toute  la  zone  septentrionale  jus- 
qu'au Kamstchatka  [Dgboioski)  et  le  Japon  {Wliitely)  ;  il  est  commun 


—  677  - 

dans  le  nord  de  la  Sibérie  où  von  Middendorf  l'a  vu  nicher  près  du 
Boganida  et  du  Tairayr(l).  On  le  trouve  également  sur  le  fleuve 
Amour  {von  Schrenk)  et  accidentellement  sur  la  ûier  Caspienne  [Raddé). 
Il  niche  également  dans  l'Amérique  du  Nord  et  il  est  abondant  dans 
la  baie  d'Hudson,  au  Labrador,  au  Nouveau-Brunswik;  il  se  reproduit 
aussi  en  petit  nombre  dans  le  nord  des  Etats-Unis  où  les  adultes 
paraissent  sédentaires,  tandis  que  les  jeunes  émigrent  quelquefois 
jusqu'au  Texas  [Audubon).  La  variété  Pacifica  habite  les  côtes  du 
Pacifique  depuis  l'Alaska  {Nelson)  ]n^({\\Q  dans  la  Basse-Californie 
{Seebohni). 

Mœurs.  —  Le  Plongeon  à  gor^^e  noire  habite  des  régions  moins 
roides  que  le  précédent  et  paraît  émigrer  complètement  de  la  zone 
arctique,  car  en  hiver  on  le  voit  plus  régulièrement  et  en  plus  grand 
nombre  dans  les  pays  tempérés,  mais  par  individus  isolés  ou  par  cou- 
ples; les  jeunes  seuls  voyagent  en  petites  troupes.  Il  abandonne  les 
toundras  du  Nord  vers  le  milieu  de  septembre  et  se  montre  un  mois 
plus  tard  sur  les  côtes  méridionales  de  la  Baltique;  dans  les  premiers 
jours  de  juin  il  reprend  possession  des  étangs  de  la  zone  froide. 

Cet  oiseau  diffère  un  peu  du  Plongeon  glacial  par  ses  habitudes  : 
dans  ses  quartiers  d'hiver  il  recherche  moins  la  mer  et  se  montre  da- 
vantage sur  les  eaux  douces  de  l'intérieur  ;  il  niche  aussi  à  de  plus 
grandes  distances  de  la  mer  dont  il  s'éloigne  souvent  de  plusieurs  cen- 
taines de  lieues.  Pour  le  reste  il  ressemble  à  son  congénère.  Le 
D''Finsch,qui  a  observé  ce  Plongeon  près  de  l'Obi, rend  son  cri  d'appel 
par  au-a,  a-ua.  M.  Seebohm  a  eu  l'occasion  d'entendre  souvent  cet 
oiseau  dans  les  vallées  de  la  Petchora  et  du  lénissei,  et  il  dit  que  ses 
cris  discordants  ressemblent  exactement  à  ceux  d'un  enfant.  Quant  à 
sa  nourriture,  elle  se  compose  surtout  de  poissons,  mais  il  mange  aussi 
des  grenouilles,  des  crustacés  et  des  mollusques. 

Reproduction.  -  Le  Plongeon  arctique  niche,  comme  le  précédent, 
au  bord  de  l'eau,  sur  un  îlot  ou  dans  un  marais  et  dans  un  endroit 
garni  d'herbe;  deux  ou  trois  couples  nichent  parfois  prés  de  la  même 
eau,  mais  à  une  certaine  distance  l'un  de  l'autre.  L'herbe  est  aplatie 
et  les  oiseaux  entassent  par  dessus  un  peu  de  plantes  aquatiques  et 
des  herbes  sèches,  et  le  tout  peut  avoir  soixante  centimètres  de  dia- 
mètre; parfois  aussi,  la  femelle  se  contente  de  faire  une  petite  fosse 
dans  l'herbe  ou  dans  la  mousse,  et  d'y  déposer  ses  deux  œufs  dans  la 

(1)  Les  sujets  du  Kaiutscliatka  cl  ilu  Jaix3n  pourraient  bien  appartenir  à  la  variété  Pacifica. 


—  678  — 

seconde  quinzaine  de  juin. Ceux-ci  ressemblent  par  leur  forme  aux  œufs 
de  l'espèce  précédente,  mais  ils  sont  plus  petits  ;  leur  couleur  générale 
est  d'un  vert  olivâtre,  d'un  brun  olivâtre  ou  d'un  brun  foncé,  et  ils  sont 
marqués  de  taches  noirâtres  profondes  et  de  taches  noires  superficielles 
de  diverses  grandeurs  et  éparpillées  sur  toute  la  surface  ;  ils  mesurent 
83  à  87  millimètres  sur  50  à  52. 


313.    —   Le    Plongeon    à    gorge   rousse. 

COLYMBUS  SEPTENTRIONALÏS,  Lin. 

(PI.  315.) 

Mergus  gutture  rubro,  Briss.  Ornith.  VI,  p.  111  (1760). 
CoLYMBUS  LUMME,  Guniî.  Act .  Niclr.  I,  pi.  2,  fig.  2  (1761).       '- 
CoLYMBUs  STELLATUsel  BOREALis,  Briinn.  Orn.  bor.,  p.  39(1764). 
COLYMBUS  SEPTENTRIONALÏS,  Lin.  Syst.  nat .  I,  p.  220  (1766). 
Mergus  septentrionalis,  Tunst.  Orn.  Brit  p.  3  (1771). 
CoLYMBUS  GLACiALis,  Phipps  (iieo  Lin),  Voy  N-  Pôle  (1774). 
CoLYMBUS  iMMER,  Bodd.  (nec  Lin.)  Tabl.  PI.  enl.  p.  58  (1783). 
CoLYMBus  striatus,  Gmel.  Syst.  nat.  I,  p.  586  (1788). 
Urinator  SEPTENTRIONALÏS,  Cuv.  Anat.  comp.  1,  tab.  2  (1799). 
CoLYMBUs  RUFOGULARis,  Mey.  Taschenb.  deut.  Vôgelk.  II  p.  453  (1810). 

EUDYTES  SEPTENTRIONALIS,  Illig.  Prodr.  p.  283  (1811). 

Cepphus  septentrionalis  et  stell.vfus,  Pall.  Zoor/r.  II,  pp.  342.  344  (1811). 

CoLYMBUS  stellaris,  Less.  Traité  d'orn.  p.  637  (1831). 

Colymbus  microrhynchos,  Brm  N'umannia,  1855,  p.  300. 

Urinator  LUMME,  Stejn.  Proc.  U.  S.  Nat.  Mus.  v.  p.  43  (1882). 

Der  Nordseetaucher,  en  allemand  , 

The  red-throated  diver,  en  allemand. 

De  roodrelige  Zeeduiker,  en  flamand . 

Taille  :  0'"50;  ailes  0,28. 

Description  des  deux  sexes  en  été. —  Dessus  de  la  tête  d'un  gris  cendré  avec  de 
petites  taches  noires;  côtés  de  la  tête,  gorge  et  la  majeure  partie  du  cou  d'un 
beau  gris  souris,  la  partie  postérieure  du  cou  noirâtre  avec  des  taches  allon- 
gées blanches,  et  sur  la  partie  antérieure  se  trouve  une  large  bande  longitu- 
dinale d'un  roux  marron  vif,  plus  large  en  bas  qu'en  haut;  dessus  du  corps  et 
ailes  d'un  brun  noir  à  reflets  verdâtres  avec  quelques  petites  taches  blan- 
ches sur  le  haut  du  dos  et  sur  les  côtés  de  la  poitrine  ;  parties  inférieures  d'un 
blanc  satiné  ;  rémiges  et  queue  brunes.  Bec  d'un  brun  noir  ;  iris  brun  rou- 
geâtre;  tarses  et  doigts  d'un  brun  oHvâtre,  milieu   des  palmures  blanchâtre. 

En  hiver.  —  Dessus  de  la  tête  et  du  cou  d'un  brun  cendré  foncé,  avec  des 
taches  noires  au  milieu  du  vertex  et  des  taches  allongées  noirâtres  et  blan- 


—  679  — 


châtres  à  l'occiput  et  à  la  nuque  ;  dos,  scapulaires,  couvertures  des  ailes, 
croupion  et  sus-caudales  d'un  brun  noir  avec  une  multitude  de  petites  taches 
blanches  ;  côtés  de  la  tête,  gorge,  côtés  et  devant  du  cou  ainsi  que  toutes 
les  autres  parties  inférieures  d'un  blanc  pur  satiné. 

Jeune.  —  Ressemble  à  l'aduUe  en  hiver,  mais  les  teintes  générales  moins 
vives  ;  devant  du  cou  sali  de  gris  brun.  Bec  grisâtre. 

Poussin. — Ventre  d'un  cendré  blanchâtre  ;  toutes  les  autres  parties  vêtues 
d'un  duvet  brun,  noirâtre  sur  le  manteau,  un  peu  moins  foncé  sur  la  tête, 
plus  pâle  sur  les  flancs,  le  cou  et  les  parties  inférieures,  où  il  se  fond  avec  le 
blanchâtre  du  ventre  ;  bandeau  blanc  autour  des  yeux,  une  petite  tache  de 
cette  couleur  au-dessus  des  commissures.  Bec  brun  de  corne  avec  le  marteau 
blanc  ;  pieds  noirâtres  sur  la  face  externe  des  tarses  et  sous  la  plante,  mar- 
brés de  jaune  et  de  brun  sur  les  autres  parties;  iris  brun  roussâtre.  (J.  Vian.) 

Ilab.  —  Le  Plongeon  à  o^or^e  rousse  ou  cat-marin  est  une  espèce 

circompolaire  qui  niche  jusqu'au 

80°45'1.N.  {Newton).  Il  niche, en 

n    Europe,  depuis   l'Ecosse    {See- 

Uj    bohm)Qi\Q  sud  de  la  Scandinavie 

4    {Collett),  jusqu'aux    îles    Féroé 

|j!MIU--^^-5    (Graba),   l'Islande    (Faber),    la 

'fWmM:^^    Nouvelle-Zemble  et  le  Spitzberg 


tiiiljitW  tî  Hrl^^-l^  i^^^  Heuglin).  Il  paraît  qu'il  niche 
m^jé^s^siMÉk^r^^é^m  parfois  aussi  en  Poméranie  et 
même  en  Bohême;  le  D""  Fritsch  dit  que,  d'après  Firlinger,  cet  oiseau 
a  niché  en  1842  et  en  1850  sur  un  étang  près  de  Pardubic.  Il  hiverne 
en  partie  dans  le  sud  de  l'Islande  et  sur  les  côtes  de  la  Scandinavie. 
En  hiver  cet  oiseau  est  plus  ou  moins  commun  sur  toutes  les  côtes 
européennes  jusqu'à  Gibraltar  {Mnj),  la  mer  Noire  {de  Nordmanii), 
et  la  mer  Caspienne  {Bogdanoio). 

Ce  Plongeon  est  commun,  en  hiver,  sur  les  côtes  de  Belgique,  sur 
l'Escaut,  dans  les  marais  des  Polders,  et  se  montre  quelquefois  jus- 
qu'aux environs  de  Bruxelles.  Dans  la  Méditerranée  on  voit  quelquefois 
des  jeunes  sur  divers  points  de  l'Italie,  de  la  Sardaigne  et  de  la  Sicile 
{Gi(jlioli)y  et  accidentellement  à  l'île  de  Malle  {Wright)  et  sur  les  côtes 
de  la  Turquie  et  de  la  Grèce,  mais  pas  dans  l'Archipel  {Ltndermaijer)\ 
do  Heuglin  dit  avoir  observé  des  jeunes  à  diverses  reprises  dans  les 
lagunes  de  la  Basse-Egypte  ;  on  en  voit  aussi  accidentellement  sur  les 
côies  de  l'Algérie  {Loche). 

En  Asie,  cet  oiseau  niche  dans  le  nord  de  la  Sibérie  {Middendorff'), 
jusqu'au  Kamtschatka  {Dyboioski)  et  dans  le  nord  du  Japon  {Whitely)  ; 


*'^h.'î.^2»s^^-Bp.d«.:!'<i»yjOjy> 


-  680  — 

en  hiver  on  le  voit  aussi  sur  les  côtes  de  la  Chine  {David)  et  de  For- 
mose  (Swinhoe).  Il  niche  également  dans  l'Amérique  septentrionale 
depuis  l'Alaska  {Bannister)  jusqu'au  Groenland  {Holboll)  et  au  Labra- 
dor, et  hiverne  depuis  le  Massachusetts  jusqu'au  Potomac  {Audubon), 
et  du  côté  du  Pacifique  jusqu'en  Californie  et  quelquefois  sur  les 
grands  lacs  {Seebohm). 

Mœurs.  —  Le  Plongeon  à  gorge  rousse  est  plus  migrateur  que  les 
deux  précédents,  et  il  n'hiverne  dans  les  pays  de  la  reproduction  que 
quand  ceux-ci  se  trouvent  dans  une  zone  assez  tempérée.  En  octobre 
il  commence  à  émigrer  par  bandes  plus  ou  moins  considérables,  en 
suivant  non  seulement  les  côtes  maritimes  mais  encore  les  voies 
fluviales,  comme  le  font  d'ailleurs  aussi  ses  congénères;  il  arrive 
ainsi  par  les  fleuves  jusqu'au  centre  de  l'Europe,  et  il  n'est  alors  pas 
rare  en  Suisse,  dans  le  centre  de  l'Allemagne,  de  l'Autriche,  de  la 
Russie,  etc.  Les  bandes  qui  traversent  les  mers  du  Nord  et  Bal- 
tique sont  parfois  extrêmement  nombreuses  ;  M.  Gaetke  a  observé  de 
ces  bandes  près  de  Helgoland  vers  la  fin  de  1879,  qui  se  suivaient 
durant  plusieurs  jours,  et  il  estimait  à  près  d'un  million  le  nombre 
des  individus  qui  avaient  ainsi  traversé  la  mer.  Quand  une  troupe  de 
Plongeons  s'abat  dans  une  localité,  elle  y  séjourne  tant  que  les  eaux 
ne  se  soient  pas  couvertes  de  glace,  mais  alors  le  manque  de  nourri- 
ture les  obUge  à  continuer  leur  voyage  vers  le  Sud;  ils  retournent 
dans  le  Nord  dans  le  courant  de  mars,  et  volent  toujours  à  une  grande 
hauteur,  tant  la  nuit  que  le  jour. 

11  a  été  dit  précédemment  que  les  diverses  espèces  de  Plongeons 
ont  des  moeurs  à  peu  près  semblables  ;  celui  qui  nous  occupe  est, 
comme  ses  congénères,  un  véritable  oiseau  de  mer,  mais  il  ne  s'éloigne 
que  rarement  du  voisinage  des  côtes.  Il  ne  fréquente  les  eaux  douces 
qu'aux  époques  de  la  reproduction  et  des  migrations,  mais  il  vit 
presque  exclusivement  sur  l'eau,  franchit  à  la  nage  des  distances  con- 
sidérables avec  une  grande  rapidité,  plonge  sans  effort  et  sans  bruit, 
file  sous  l'eau  dans  toutes  les  directions  et  parfois  à  de  grandes  pro- 
fondeurs, et  lutte  de  vitesse  avec  les  poissons  les  plus  agiles;  il  peut 
rester  sous  l'eau  environ  huit  minutes.  «  J'ai  observé  des  Plongeons 
en  captivité,  dit  A.-E.  Brehm,  pendant  des  semaines  entières,  et  très 
souvent  sur  la  terre  ferme,  mais  jamais  je  ne  les  ai  vus  se  tenir  debout; 
jamais  non  plus  je  ne  les  ai  vus  marcher  sur  leurs  doigts  ou  sur  leurs 
tarses,  mais  toujours  ramper  avec  l'aide  du  bec  et  du  cou,  en  même 
temps  qu'avec  le  secours  des  ailes  et  des  pieds.  Ils  volent  plus  facile- 


—  681  — 

mei)t  qu'on  ne  le  suppose,  eu  égard  à  la  brièveté  des  ailes  par  rapport 
au  poids  du  corps.  Ces  oiseaux  sont  réduits  toutefois  à  prendre  un 
vigoureux  élan  pour  pouvoir  s'élever,  mais,  quand  ils  ont  atteint  une 
certaine  hauteur,  ils  avancent  très  vite  en  donnant  de  rapides  et  con- 
tinuels coups  d'ailes.  Leurs  mouvements  sont  remarquablement  beaux 
quand  ils  se  lancent  dans  la  mer  du  sommet  des  falaises.  Ils  ne  font 
alors  mouvoir  les  ailes  qu'autant  que  cela  est  nécessaire  pour  prendre 
une  direction  oblique;  ils  fondent  avec  un  certain  bruissement,  se 
tournent  tantôt  d'un  côté,  tantôt  de  l'autre,  et  parfois  descendent 
comme  une  flèche  dans  les  profondeurs  des  eaux.  » 

Le  Plongeon  à  gorge  rousse  ou  cat-marin  est  en  général  fort 
bruyant,  et  son  cri  perçant  peut  se  rendre,  d'après  de  Heuglin,  par 
gag  gagera,  gag-gag,  gaggarau,  et  parfois  gag-gag,  gag-gag  d'une 
voix  plus  raiique.  Quand  il  est  poursuivi,  il  s'envole  plus  souvent  qu'il 
ne  plonge;  il  est  du  reste  prudent,  toujours  attentif  à  ce  qui  se  passe 
autour  de  lui,  et  évite  autant  que  possible  le  voisinage  de  l'homme. 
Il  est  peu  sociable,  vit  seul  ou  par  couples,  se  tient  toujours  éloigné 
des  autres  palmipèdes,  et  il  est  rare  de  voir  deux  couples  sur  le  même 
étang  ;  ce  n'est  qu'au  moment  des  migrations  qu'il  se  réunit  à  ses  sem- 
blables. Cet  oiseau  ne  manque  pas  de  courage,  car  lorsqu'il  est  blessé 
et  incapable  de  fuir,  il  se  défend  vigoureusement  à  coups  de  bec,  et 
malheur  à  celui  qu'il  atteint.  Sa  nourriture  consiste  en  poissons,  crus- 
tacés, grenouilles  et  autres  petits  animaux;  les  jeunes  mangent  sur- 
tout des  crustacés. 

Reproduction.  —  Ce  Plongeon  fait  sa  réapparition  dans  le  sud  de 
l'Islande  du  7  au  il  avril,  dans  le  nord  dej'île  seulement  dans  la  pre- 
mière huitaine  de  mai  ;  au  Spitzberg  on  no  le  revoit  pas  avant  le 
mois  de  juin.  Peu  après  son  retour,  il  se  rend  sur  les  eaux  douces  de 
l'intérieur  pour  nicher  ;  Brehm  dit  avoir  observé  aux  îles  Loffoden, 
bien  des  couples  de  ces  Plongeons  sur  les  petits  lacs  du  sommet  des 
montagnes.  Son  nid  est  composé  de  plantes  aquatiques  qu'il  amoncelle 
.sans  art  sur  un  monticule  émergeant  de  l'eau  d'un  marais  ou  au  bord 
d'un  lac, d'un  étang;  souvent  aussi,  il  se  contente  d'aplatir  la  mousse 
ou  l'herbe  en  forme  d'excavation,  ou  protîto  d'une  petite  fosse  creusée 
dans  la  tourbe  qu'il  garnit  de  quelques  débris  d'herbages  secs.  La 
ponte,  qui  est  de  deux  œufs,  rarement  do  trois,  a  li(Mi  en  Islande  entre 
la  fin  de  mai  et  la  mi-juin,  mais  dans  le  nord  de  la  Sibérie  et  au  Spitz- 
berg elle  ne  se  fait  pas  avant  le  mois  de  juillet.  Si  l'étang  est  do  peu 
d'étendue,  il  est  rare  de  voir  plus  d'un  couple  y  nicher.  M.  Collett 

Tome  II.  —  IH'J4.  86 


-  682  — 

signale  avec  raison  comme  un  fait  extraordinaire  d'avoir  trouvé  en 
moins  d'une  demi-heure  en  juillet  1872,  sur  la  petite  île  de  Tamsoe 
dans  le  Porsanger  Fjord,  pas  moins  de  quinze  nids  contenant  chacun 
deux  oeufs. 

Les  œufs  de  ce  Plongeon  ont  la  forme  d'un  ovale  allongé  et  sont 
d'un  brun  plus  ou  moins  olivâtre,  parfois  roussâtres  ou  cendi^és,  et 
sont  marqués  de  taches  profondes  grises  peu  nombreuses,  et  de  taches 
et  de  points  noirs  superficiels  souvent  plus  abondants  au  gros  bout; 
ils  mesurent  71  à  75  millim.  sur  45  à  47.  Les  deux  sexes  couvent 
alternativement  avec  une  égale  ardeur  et  font  en  commun  l'éducation 
des  petits.  Lorsque  ceux-ci  sont  aptes  à  voler,  toute  la  famille  quitte 
l'étang  ou  le  marais  pour  gagner  la  mer,  où  ils  séjournent  jusqu'au 
moment  du  départ. 

FAMILLE  DES  PODICIPÉDIDÉS. 

Car.  —  Bec  de  la  longueur  de  la  tête  ou  plus  court,  droit,  pointu, 
un  peu  élargi  à  sa  base,  comprimé  à  son  extrémité  ;  narines  allongées, 
ouvertes  dans  un  sillon;  ailes  courtes  ;  tarses  placés  hors  de  l'équi- 
libre du  corps,  enfoncés  dans  la  peau  du  bas  du  corps,  comme  chez 
les  Colymbidés,  très  comprimés,  largement  scutellés  ;  quatre  doigts, 
les  antérieurs  garnis  sur  les  côtés  de  larges  expansions  membra- 
neuses lobées,  l'externe  aussi  long  ou  plus  long  que  le  doigt  médian  ; 
pouce  pourvu  d'un  lobule;  ongles  larges  et  aplatis;  queue  nulle. 
Tête  petite,  cou  long  et  mince,  corps  allongé  et  garni  d'un  plumage 
soyeux. 

Hab.  —  Les  oiseaux  de  cette  famille  habitent  les  zones  tempérées 
des  deux  hémisphères. 

Mœuy's.  —  Les  Grèbes  vivent  particulièrement  sur  les  eaux  dor- 
mantes qu'ils  ne  quittent  que  rarement,  car  on,  ne  les  voit  presque 
jamais  à  terre.  Ils  volent  assez  bien,  mais  ne  peuvent  prendre  leur 
essor  quand  ils  sont  sur  la  terre  ferme  ;  ils  nagent  et  plongent  avec 
une  grande  dextérité,  et  c'est  également  dans  l'eau  qu'ils  cherchent 
leur  nourriture,  composée  de  divers  petits  animaux  aquatiques.  Ils 
avalent  également  de  leurs  propres  plumes,  et  leur  estomac  en  est 
souvent  rempli  à  tel  point  qu'elles  y  forment  une  pelote  dans  laquelle 
il  n'est  presque  pas  possible  de  retrouver  les  aliments. 

Ces  oiseaux  sont  monogames  ;  ils  construisent  des  nids  flottants 
formés  de  matériaux  humides,  et  les  œufs  reposent  dans  l'humidité. 


—  688  - 

La  ponte  est  de  trois  à  six  œufs.  Les  parents  ont  une  grande  affec- 
tion pour  leurs  petits  et  les  portent  souvent  sur  leur  dos. 

GENRE     CLXXII. 

GHÈBE.  —  P0DICIPE3. 

CoLYMBTS,  Briss  (pari.),  Omith.  VI,  p.  38  (1760)  rt  auct.  plur. 

PoDiciPES,  Salerne,  Hist.   nat.  Omith.,  p.  377(1707'. 

PoDiCEPS  (1)  Lath.  Ge?i.  Syn.  suppl.  U  p.  294  (1787). 

Dites,  Pedetaithya,  Lophaithyia,  Kaup,  Nat.  Syst.,  pp.  41,  44,  72  (1829). 

Sylbeocyclus,  Bonap.  Comp.  List  B.,  p.  64  (1838). 

T.A.CHYBAPTUS,  Reiclib.  Av.  Syst.  nat.,  pi.  2  (1849). 

Car.  —  Ceux  de  la  famille. 
Hab.  —  Les  zones  tempérées. 


314.  —  Le  Grèbe  huppé. 

PODICIPES  CRISTATUS,   Lath.  ex  BHss. 

(PI.  316.) 

CoLYMBUS  CRISTATUS  et  CORNUTUS,  Briss.  Omith.  YI,  pp.  38  et  45  (1760). 

CoLY.MBUS  URiNATOR,  Lin,  Syst.  nat.  l,  p.  223  (1766). 

PoDiCEPS  CRISTATUS,  Lath.  [nd.  Orn.  II,  p.  780  (1790). 

CoLYMBUS  LONGiROSTRis,  Bonn.  Eficycl.  méth.  l,  p.  54  (1790). 

Lophaithyia  cristatus,  Kaup,  Natûrl.  Syst..  p.  72  (1829). 

Podiceps  mitratus  et  patagiatus,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  1000. 

Podiceps  australis,  Gould,  P>oc.  Zool.  Soc,  1844,  p.  135. 

Podiceps  hectori,  BuUer,  Essay  on  Neio-Zeal.  Om.,  p.  19  (1865). 

Podiceps  wiDHALMi,  Goebel,  Journ.  f.  Om.,  1870,  p.  312. 

PodiCipes  CRISTATUS,  Olphc-Gal.  Contrib.  F?ie  Orn.  Eur.  occ,  fasc.  1,  p.  90  (1884). 

Der  grosse  Lappentaucher,  en  allemand. 

The  GREAT  CRESTED  GuKiiE,  cn  angldi--. 

De  Kuikouiker,  en  flamand. 

Taille:  0'"42;  ailes  0™20. 

Description  d'i  mâle  adulte  en  été.  —  Dessus  de  la  tête  et  haut  de  la  nui^ue 
d'un  nnii'  brillant,  les  i)!unics  de  l'occiput  allongées  et  formant,  de  chaque 
côté,  une  toufïe  dont  l'ensemble  forme  une  huppe;  le  restant  de  la  nuipie 
d'un  brun  cendré  ;  raie  sourcilière  d'un  blanc  lavé  de  jaunâtre;  partie  anté- 
rieure des  joues  et  gorge  d'un  blanc  pur,  et  au-dessous  une  large  collerette 
de  plumes  allongées  d'un  roux  ardent,  couleur  qui  se  fond  peu  à  peu  avec  le 


(i)   Podiceps    est  une   conlractioD    vicieuse    du    mot    latin   Podiàpes   (picJs  au    dciiicrc,  de 
poiiex,  podicis  et  de  pes. 


684 


brun  noir  de  leur  extrémité;  dessus  du  corps  d'un  brun  noirâtre,  avec  les 
bordures  des  plumes  brun  cendré  ;  petites  couvertures  des  ailes,  scapulaires 
inférieures  et  rémiges  secondaires  blanches;  rémiges  primaires  brunes  ;  devant 
et  côtés  du  cou,  ainsi  que  toutes  les  parties  inférieures  d'un  blanc  argenté, 
avec  une  teinte  brune  variée  de  roux  sur  les  côtés  de  la  poitrine  et  de  l'abdo- 
men. Partie  nue  des  lorums  rougeâtre;  bec  d'un  rouge  pâle,  brun  eu  dessus, 
blanchâtre  à  l'extrémité  ;  iris  rouge  carmin  ;  tarses  d'un  brun  verdâtro  exté- 
rieurement, d'un  jaune  verdâtre  pâle  à  l'intérieur  de  même  que  les  festons. 
Femelle.  —  Ressemble  au  mâle,  mais  d'une  taille  un  peu  plus  petite  et  les 
ornements  de  la  tête  plus  courts. 

Les  deux  sexes  après  la  mus  d'automne.  —  Huppe  très  courte,  la  collerette 
à  peine  indiquée  par  quelques  stries  foncées;  dessus  de  la  tête,  nuque  et 
toutes  les  autres  parties  supérieures  d'un  brun  noirâtre,  avec  les  bordures  des 
plumes  du  dos  d'un  brun  cendré  ;  ailes  comme  en  été  ;  lorums,  joues,  gorge, 
devant  et  côtés  du  cou  ainsi  que  les  autres  parties  inférieures  d'un  blanc 
pur  et  lustré,  lavé  de  brun  cendré  sur  les  côtés  de  la  poitrine  et  du  ventre. 
Jeune.  —  Se  distingue  surtout  du  plumage  d'hiver  par  la  coloration  de  la 
tête  et  du  cou  :  ceux-ci  sont  blancs  avec  des  bandes  longitudinales,  parfois 
interrompues,  d'un  brun  noirâtre  ;  nuque  brune.  Iris  jaune  ;  bec  d'un  blanc 
rougeâtre  avec  des  taches  d'un  gris  verdâtre,  presque  gris  en  dessus. 

Poussins.  —  Parties  supérieures,  tête  et  cou  zébrés  de  longues  bandes 
longitudinales  brunes  et  roussâtres  sur  le  corps,  noires  et  blanches  sur  la 
tête  et  le  cou;  la  médiane  foncée  remonte  du  croupion  à  la  nuque,  où  elle  se 
divise  pour  encadrer  une  longue  tache  blanche  conique,  qui  a  sa  base  au 
vertex;  une  autre  bande  descend  de  la  gorge  et  bifurque  sur  les  côtés  de  la 
poitrine  ;  gorge  blanche  avec  quelques  petites  taches  noires  ;  ventre  et  abdo- 
men d'un  blanc  pur,  un  peu  satiné  ;  grande  platjue  triangulaire  nue  sur  le 
vertex  et  lorums  jaunes.  Bec  jaune  avec  ddix  bandes  transversales  brunes  et 
marteau  blanc  ;  pieds  jaunes,  avec  la  face  externe  des  tarses  et  le  dessus  des 
palmures  bruns.  (J.  Vian.) 

Hah.  —  Le  Grèbe  huppé  habite  la  majeure  partie  de  l'ancien  monde, 

sans  dépasser  au  Nord  le  63". 
On  le  rencontre  en  Europe  jus- 
que dans   le  sud  de  la  Scandi- 
navie (Nilsson,   Collelt)  et  de  la 
Finlande  {Palmén)  ;  en  Belgique 
|:   on  ne  le  voit  qu'en  hiver  et  il  est 
4   alors    assez    commun    sur   nos 
jy,   côtes,    sur    l'Escaut,    dans    les 
ëEêss^g^sl  grands    marais    des    Flandres, 
plus  rarement  sur  la  Meuse  et  dans  le  centre  du  pays.  11  niche  en 


-  68o  - 

petit  nombre  dans  quelques  comtés  de  l'Anj^leterre  et  en  Irlande,  où 
il  est  sédentaire,  et  visite  assez  régulièrement  en  hiver  les  autres  par- 
ties des  îles  Britanniques  [Seebohm]  ;  il  niche  également  dans  beau- 
coup de  localités  de  la  France  [Deyland  et  Gerhc)  et  des  autres  con- 
trées de  l'Europe  centrale  et  méridionale,  jusqu'en  Asie  Mineure 
{Krilper)  et  en  Palestine  {Tristram).  Ce  Grèbe  quitte  l'Europe  cen- 
trale à  mesure  que  les  eaux  se  couvrent  de  glace,  et  il  n'est  réellement 
sédentaire  qu'à  partir  du  43°,  en  exceptant  le  midi  de  l'Angleterre  et 
l'Irlande.  Quelques  couples  hivernent  cependant  sur  les  côtes  alle- 
mandes {Naumann)  et  de  Belgique,  en  Suisse  {Meùner  et  Schiaz)  et 
probablement  aussi  dans  bien  d'autres  localités  au  nord  du  43"  :  il 
est  probable  que  la  migration  d'automne  est  réglée  d'après  les 
rigueurs  de  l'hiver. 

En  Afrique,  cet  oiseau  paraît  répandu  un  peu  partout  où  il  y  a  de 
Teau,  car  il  a  été  observé  depuis  le  Maroc  (Favier)  et  l'Algérie 
[Loche)  jusqu'en  Egypte  {de  Heuglin),  en  Abyssinie  [Blanford),  au 
Sénégal  et  dans  le  Damaras  {Anderson),  et  il  niche  communément  près 
du  cap  de  Bonne-Espérance  [Layard). 

Cette  espèce  est  répandue  aussi  dans  presque  toute  la  zone  tem- 
pérée de  l'Asie  jusqu'au  Japon  {Schlégel).  Sa  limite  méridionale  parait 
être  le  Turkestan  {Severtzoïo),  le  Beloutchistan  {Seebohm)  et  l'Inde 
entière,  sauf  la  région  subhimalayenne  {Hume).  Elle  n'a  pas  été 
observée  dans  la  Sibérie  orientale,  mais  bien  en  Mongo\ié{Przeoalsk}/) 
et  dans  le  sud  de  la  Chine  {Swinhoe).  Elle  habite  également  le  sud 
de  l'Australie,  la  Tasmanie  {Gould)  et  la  Nouvelle-Zélande  {Buller). 
C'est  par  erreur  qu'Audubon  a  dit,  et  que  d'autres  auteurs  ont  répété, 
que  cet  oiseau  habite  également  l'Amérique  du  Nord;  d'après 
M.  T.  M.  Brewer  [Ibis,  1879,  p.  112),  on  ne  connaît  aucun  sujet  de 
cette  espèce  capturé  en  Amérique;  il  est  certain  qu'Audubon  a  pris 
des  jeunes  Podiceps  griseigcna  pour  des  P.  cristalus. 

Mœurs.  —  Le  Grèbe  huppé  est  donc  un  oiseau  migrateur,  qui 
quitte  le  nord  de  l'Europe  entre  la  fin  de  septembre  et  le  courant  de 
novembre;  M.  Collett  rapporte  qu'en  novembre  1871  un  individu  fut 
encore  tué  près  de  Trondlijem  en  Norwège.  Cet  oiseau  est  rarement 
de  retour  dans  le  aonl  de  rAllemagne  avant  le  mois  d'avril,  et  en 
Finlande  on  no  le  revoit  généralement  qu'en  mai.  La  migration 
d'auioinne  a  li<ni  par  bandes  composées  parlbis  de  50  à  60  individus, 
mais  le  retour  au  prinlomps  s'effectue  par  couples  isolés  ;  les  voyages 
ont  généralement  lieu  pendant  la  nuit  et  les  oiseaux  volent  :\\nv<  babi- 


-  686  - 

luellement  très  haut,  mais  une  partie  de  la  route  se  fait  à  la  nage. 

Ce  Grèbe  ne  se  montre  qu'exceptionnellement  sur  la  mer  et  sans 
s'éloigner  des  côtes;  mais  il  préfère  les  eaux  douces  et  tranquilles  de 
l'intérieur,  surtout  les  lacs  et  les  étangs  dont  les  bords  sont  garnis 
de  roseaux  et  de  joncs.  Pendant  le  jour  on  le  voit  souvent  loin  de  la 
rive,  lisser  et  graisser  son  plumage,  ou  dormir  en  nageant;  il  passe 
d'ailleurs  la  majeure  partie  de  sa  vie  sur  l'eau,  et  il  est  rare  de  le  voir 
sur  la  terre  ferme.  Aucun  autre  genre  d'oiseau  n'a  des  mœurs  aussi 
aquatiques  que  les  Grèbes,  aussi  nagent-ils  avec  une  facilité  remar- 
quable, et  ils  savent  franchir  sous  l'eau,  d'après  Naumann,  une  dis- 
tance de  60  mètres  en  une  demi -minute. 

On  se  demande  comment  un  oiseau  sait  voler  avec  des  ailes  si 
étroites  et  si  courtes,  par  rapport  au  volume  du  corps,  et  cependant 
le  Grèbe  vole  bien  et  longtemps.  Il  ne  peut  prendre  son  essor  sur  la 
terre  ferme,  mais  il  s'envole  de  la  surface  de  l'eau  p^  des  élans  suc- 
cessifs, et  s'élève  de  la  sorte  en  ligne  droite,  atteint  bientôt  une  cer- 
taine hauteur  et  poursuit  alors  son  vol  avec  assez  de  rapidité  et  en 
battant  bruyamment  des  ailes  ;  en  l'absence  de  queue,  c'est  à  l'aide  de 
ses  pieds  dirigés  en  arrière  qu'il  gouverne  son  vol  et  change  de  direc- 
tion à  son  gré.  Il  est  cependant  certain  que  les  Grèbes  n'aiment  pas 
à  voler  et  qu'ils  ne  se  servent  de  leurs  ailes  que  par  nécessité  ;  en 
automne,  après  la  mue,  ils  volent  au  contraire  beaucoup  et  à  tout 
propos,  car  l'époque  de  la  migration  approche  et  il  faut  s'exercer  pour 
le  départ  ;  les  couples  avec  leurs  jeunes  se  rassemblent  en  même  temps 
sur  les  étangs  et  les  lacs,  où  Ton  voit  souvent  50  à  80  sujets  prenant 
ensemble  leurs  ébats.  Autant  il  leur  est  facile  de  se  mouvoir  dans 
l'eau,  autant  leurs  mouvements  sont  pénibles  sur  la  terre  ferme;  ici 
ils  tiennent  le  corps  et  les  tarses  dans  une  position  qui  approche  de 
la  verticale,  et  c'est  ainsi  qu'ils  avancent  péniblement,  tombant  bientôt 
sur  la  poitrine  et  sur  le  ventre. 

Les  Grèbes  sont  des  oiseaux  extrêmement  farouches,  méfiants  et 
rusés  ;  ils  n'ont  confiance  en  aucun  être  humain,  et  si  l'un  de  ces  oiseaux 
est  surpris  au  bord  d'un  étang,  il  se  glisse  aussitôt  entre  les  herbages 
jusqu'à  ce  qu'il  lui  soit  possible  de  se  jeter  à  l'eau  et  de  gagner  en 
plongeant  et  en  nageant  le  milieu  de  l'étang,  où  souvent  il  ne  montre 
que  la  tête  pour  respirer  et  replonge  aussitôt.  Ils  sont  aussi  peu  socia- 
bles :  ils  évitent  les  autres  oiseaux  aquatiques,  vivent  par  couples  et 
ne  recherchent  la  société  de  leurs  semblables  qu'à  l'approche  de  la 
migration.  C'est  également  dans  l'eau  qu'ils  trouvent  leur  nourriture, 


—  687  - 

qui  consiste  en  petits  poissons,  jeunes  grenouilles,  têtards,  mollus- 
ques, insectes  et  larves  aquatiques.  Leur  cri  d'appel  ressemble  à  keky 
kek,  kek;  à  l'époque  des  amours,  le  mâle  fait  souvent  entendre  le  cri 
de  kraorrr,  krraorrr  ou  kruorrr,  auquel  la  femelle  répond  par  un  cri 
semblable. 

La  chair  de  cet  oiseau  n'est  pas  mangeable,  mais  la  peau  avec  ses 
plumes  d'un  blanc  satiné  est  très  estimée  et  employée  comme  fourrure. 

Reproduction.  —  Le  mâle  et  la  femelle  s'unissent  pour  la  vie  et  ils 
ont  l'un  pour  l'autre  une  grande  affection;  ils  nagent  de  concert  et  si 
l'un  s'est  irop  éloigné,  l'autre  le  rappelle  à  grands  cris. Chaque  couple 
se  réserve  un  grand  espace  dans  lequel  il  ne  tolère  la  présence  d'aucun 
autre,  aussi,  quand  l'étang  est  petit,  n'y  trouve-t-on  jamais  plus  d'un 
ou  deux  nids.  La  construction  de  ceux-ci  n'a  lieu  qu'en  mai,  alors 
que  les  roseaux  ont  déjà  atteint  une  bonne  hauteur  au-dessus  de  Teau. 
Le  nid  est  toujours  placé  près  des  joncs  ou  des  roseaux,  mais  aussi 
éloigné  que  possible  de  la  terre  ferme,  parfois  tout  au  milieu  de  l'eau  : 
c'est  un  nid  flottant  qui  repose  sur  une  vieille  souche  végétale  ou  sur 
des  roseaux  brisés  qui,  enveloppés  par  les  matériaux  du  nid,  empê- 
chent celui-ci  d'être  emporté  à  la  dérive  par  le  vent.  Ce  singulier  nid 
est  construit  par  les  deux  conjoints  à  l'aide  de  plantes  aquatiques 
croissant  au  fond  de  l'eau,  telles  que  diverses  espèces  de  Potamogeton, 
Ceratophylium,  Myriophyllum,  Chara,  Uippuris,  Ranunculus  aqua- 
tilis,  etc.,  suivant  ce  que  les  oiseaux  ont  pu  trouver  dans  leur  étang, 
et  le  tout  est  entremêlé,  pour  sa  consolidation,  de  quelques  joncs  et 
feuilles  de  roseaux.  Ces  végétaux  sont  mêlés  à  da  la  boue  et  amon- 
celés en  un  tas  informe  et  humide^  mesurant  environ  trente-cinq  cen- 
timètres de  diamètre  sur  dix-sept  de  haut;  la  cavité  ne  semble  creusée 
que  par  le  poids  du  corps  de  la  mère.  lia  ponte  est  de  trois  ou  quatre 
œufs,  relativement  petits,  elliptiques,  d'un  blanc  verdâtre  ou  jaunâtre 
mat,  mais  qui  se  couvrent  pendant  l'incubation  de  marbrures  bru- 
nâtres, verdâtrcs,  roussâtres..  très  variables  d'intensité,  et  qui  provien- 
nent des  végétaux  sur  lesquels  ils  reposent  ;  ces  œufs  mesurent 
environ  55  millim.  sur  3G.  Mâle  et  femelle  couvent  avec  ardeur  pen- 
dant trois  semaines  :  quand  l'un  quitte  les  œufs  pour  chercher  sa  nour- 
riture, l'autre  le  remplace  aussitôt,  ce  qui  est  du  reste  bien  nécessaire, 
car  l'humidité  du  nid  exposerait  les  œufs  à  se  refroidir  bientôt.  «  Mâle 
et  femelle,  dit  A.  Brehm,  témoignent  une  alfection  exti-aordinaire  à 
leur  couvée,  notammeni  la  lemelh;,  ([ui  se  démène  avec  terreur  quand 
on  s'(ui  approche,  pousse  des  cris  plaintifs  et  expose  sa  vie  sans  hési- 


—  ^88  - 

tatioTi.  Dans  ces  circonstances,  elle  quitte  ses  oeufs,  les  recouvre  rapi- 
dement avant  son  départ  de  matières  qui  ont  servi  à  construire  le 
nid,  ne  s'éloigne  pas  beaucoup  et  revient  aussitôt  que  cela  lui  est  pos 
sible.  Si  on  lui  prend  un  œuf  après  l'autre  avant  qu'elle  couve,  on 
peut  l'amener  à  pondre  vingt  oeufs  et  plus.  Les  jeunes  sont  élevés  par 
les  deux  parents;  néanmoins,  le  père  prend  les  fonctions  de  gardien. 
Au  commencement,  les  poussins  sont  nourris  de  larves  que  le  père  et 
la  mère  leur  présentent,  avec  le  bec;  plus  tard,  ils  laissent  tomber  leur 
becquée  dans  l'eau,  ce  qui  force  les  petits  à  l'atteindre  en  plongeant.  » 
Les  parents  défendent  leurs  poussins  avec  courage; au  début,  quand 
un  danger  les  menace,  ils  prennent  leurs  petits  sous  leurs  ailes  et  dis- 
paraissent avec  eux  dans  leau.  Les  poussins  retournent  rarement  dans 
leur  nid  pour  se  reposer;  sont-ils  fatigués  ou  veulent-ils  dormir,  ils 
grimpent  sur  le  dos  de  leurs  parents  où  ils  trouven^un  abri  fort  com- 
mode ;  pour  en  faciliter  l'accès,  la  mère  ou  le  père  plonge  et  revient 
à  la  surface  au  point  même  où  se  trouvent  les  petits,  qu'il  soulève  et 
reçoit  sur  son  dos. 


315.  —  Le  Grèbe  à  gorge  grise. 

PODICIPES  GRISEIGENA,   Gray  ex  Bodd. 

(PI.  317). 


?  CoLYMBUs  vuLGARis,  Scop.  Afioi.  I.  Hi^t.  nat .  p.  78  (17G9). 

CoLYMBus  GRiSEGENA,  Bodd.  TcM.  PI.  Eul.  p.  55(1783). 

CoLYMBUS  SUBCRISTATUS,  Jacq.  Beitr .  z.  Gesch.  cl.  Yôg .  p  37  (1784). 

CoLYMBus  PAROTis,  Sparmi.   u7is.  Caris,  pi.  9  (1786). 

PoDiCEPS  RUFicoLLis,  Latli.  Gen.  Syn.  Suppl.  I,  p.  294  (1787). 

CoLYMBUS  RUBRicoLLis.  Gmel.  Syst.  nat.  I,  p.  592  (1788). 

PoDicEPS  RUBRICOLLIS,  Lath.  Ind.  Orn.  II,  p.  783(1790). 

CoLYMBUS  LONGiRosTRis,  Bonnat.  Encycl.  mèth  ,  p.  54  (1790). 

PoDiCEPS  SUBCRISTATUS,  Bechst.  Om .  Taschenb.  II,  p.  351  (1803). 

CoLYMBus  cucuLLATUS  et  NyEVius,  Pall.  Zoogr.  Rosso-As.  II,  p.  355  (1811). 

Pedetaithya  subcristata,  Kaup,  NatUrl.  Syst.  p.  44  (1820). 

PoDiCEPS  CANOGULARIS,  Brehm,  [sis,  1830,  p.  1000. 

PoDiCEPS  LONGIROSTRIS,  Boiiap.  Icon.  Fn.  Ital.  Introd.  p.  1  (1833). 

PoDiCEPS  GRISEIGENA,  Gray,  Gen.  B.  III,  p.  633  (1846). 

PoDiCEPS  ciNEREOriUL.^Ris,  C.  Dub.  Pl.col.  Ois.  Selff.  m,  p.  222(1860). 

Pedetaithyia  GRISEIGENA,  Olphe-Gal.,  Contr.  Fne.  Orn.  Eur.  occ  I,  p.  96  (1884). 

Der  rothhalsige  Lappentaucher,  ea  allemand. 

The  Red  necked  Grèbe,  en  anglais. 

Le  Roodhalsfuut,  eu  flamand. 


—  689  — 

Var.  Major. 

PoDiCEPS  RUBRicoLLis,  Bonap.  (nec  Gmel.)  Spec.  comp.  p.  75  (1827)  et  auct.  plur. 
PoDiCEPS  RUBRICOLLIS  MAJOR,  Tein.  et  Schl.  Fauna  Jap.  av.  pi.  786  (IS49). 
PoDiCEPS  HOLBOELLii,  Reinh.  Yidensh.  Meddel.  p.  76  (1853). 
PoDiCEPS  GRiSEiGENA  et  cooPERi,  Lawr.  (nec  Bodd  )  in  Baird's  B.  N.  Am.  pp.  892-93 

(1858). 
PoDiCEPS  SUBCRISTATUS,  Kittl.  (nsc  Jacq.)  Denhw.  Il,  p.  313  (1858). 
PoDiCEPS  AFFiNis,  Salvad.  Atti  Soc.  Ital.Se.  nat.  1866,  p.  45. 
PoDiCEPS  GRiSEGENA  vur.  HoLBOLLi,  A.  Dub.  Consp.  av.  Eur.,  p.  35(1871). 
PoDicEPS  SUBCRISTATUS  var.  MAJOR,  Dybow.  Journ.  f.  Om.  1868,  p.  339. 
PoDiCEPS  cucuLLATUs,  Tacz.  (nec  Pall.)  Journ.  f.  Om.  1874,  p.  336. 
CoLYMBusHOLBOELLii,  Baird,  Brew. et  Ridgw.  Water-Dirds  N.  Am.  II,  p.  428  (1884). 
Pedetaithyia  cucullata,  Olphe-Gal.  Contr.  Fne.  Om.  Eur.  occ.  fasc.  I,  p.  97  (1884), 

Taille:  0™37;  ailes  0,17. 

Deseription  des  deux  sexes  en  été.  —  Dessus  de  la  tête  d'un  noir  lustré  à 
reflets  verdâtres,  avec  les  plumes  occipitales  allongées  et  formant  de  chaque 
côté  une  huppe  touffue,  courte  et  aplatie;  joues  et  gorge  d'un  beau  gris, mais 
bordées  de  blanc;  devant  et  côtés  du  cou  jusqu'au  haut  de  la  poitrine  d'un 
roux  vif;  région  postérieure  du  cou  et  toutes  les  parties  dorsales,  y  compris 
les  ailes, d'un  brun  noirâtre  avec  les  bordures  des  plumes  un  peu  plus  claires  ; 
rémiges  brunes,  les  secondaires  blanches, mais  les  plus  supérieures  terminées 
de  brun;  flancs  et  côtés  de  la  poitrine  teintés  de  brun  et  de  roussâtre;  parties 
ventrales  d'un  blanc  lustré  parsemé  de  petites  taches  plus  ou  moins  appa- 
rentes d'un  brun  cendré.  Bec  noir,  les  commissures  et  la  base  de  la  mandi- 
bule inférieure  jaunes;  iris  brun  rougeâtre;  pattes  d'un  gris  olivâtre  sombre» 
d'un  jaune  olivâtre  en  dedans. 

La  femelle  ne  diffère  du  mâle  que  par  sa  taille  un  peu  plus  petite. 

En  hiver. —  Sans  huppe  ;  dessus  de  la  tête  et  du  corps  très  foncés  ;  gorge  et 
joues  blanches,  ces  dernières  d'un  gris  argenté  au  centre;  cou  d'un  roux  cen- 
dré terne;  mandibule  inférieure  jaune  jusque  près  de  son  extrémité. 

Jeune.  —  Taille  plus  petite  ;  dessus  de  la  tête,  du  cou  et  du  corps  d'un 
brun  noirâtre;  gorge  et  joues  blanches,  ces  dernières  avec  deux  bandes  brunes 
partant  derrière  l'œil,  et  une  troisième  en  dessous  de  celles-ci,  mais  inter- 
rompue et  moins  apparente;  devant  et  côtés  du  cou  d'un  roux  moins  vif  que 
chez  l'adulte;  parties  inférieures  blanches  sans  taches,  lavées  de  cendré  jau- 
nâtre pâle  sur  les  côtés  de  la  poitrine  et  de  brun  sur  les  flancs.  Pattes  d'une 
teinte  plus  claire;  iris  jaune  roussâtre  ;  bec  rougeâtre  pâle,  la  région  des  nari- 
nes et  l'arête  noirâtres,  la  mandibule  inférieure  avec  quelques  taches. 

Poussin.  —  Ressemble  au  poussin  du  Grèbe  huppé,  dont  il  se  distingue  par 
l'absence  de  bandes  longitudinales  sur  le  dos  et  par  la  teinte  d'un  brun 
violacé  de  la  poitrine.  —  Duvet  épais  et  soyeux;  tête  et  cou  blancs  zébrés  de 
Tome  II j—  1894.  87 


—  690  — 


bandes  longitudinales  noires;  dos  d'un  brun  noirâtre  ;  poitrine  d'un  brun  vio- 
lacé; ventre  blanc. 

jlab.  —  Ce  Grèbe  habite  la  Scandinavie  au  sud  du  cercle  arctique 

et  y  niche  en  grand  nombre 
{Nilsson,  Collett);  il  niche  éga- 
lement dans  le  sud  de  la  Finlande 
(Palmên)  et  dans  la  majeure  par- 
tie de  la  Russie  jusqu'à  Arkhan 
gel,  d'où  M.  Dresser  dit  en  avoir 
reçu  des  exemplaires,  mais  il  est 
surtout  commun  dans  le  midi  de 
la  Russie  [de  Nordmann);  il 
niche  aussi  en  Pologne  (Taczanowski),  dans  beaucoup  de  localités 
de  l'Allemagne  {Naumann),  en  Autriche  [Hinterberger),  en  Bohême 
{Fritsch),  dans  la  Dobrodja  et  la  Bulgarie  {Alléon),  mais  il  est  rare 
en  Transylvanie  {Banford).  Au  Danemark  c'est  le  plus  commun  des 
Grèbes  (Collin)  et  il  n'est  pas  rare  en  Hollande  {Schlégel).  On  le  voit 
en  Belgique  aux  passages  en  automne  et  au  printemps  dans  les  marais 
des  Flandres,  mais  il  est  toujours  rare.  Il  visite  régulièrement  les  îles 
Britanniques  en  hiver  :  on  le  voit  en  petit  nombre  sur  les  côtes 
orientales  de  l'Ecosse,  de  l'Angleterre  et  aux  îles  Orcades,  moins 
souvent  sur  les  côtes  occidentales  et  aux  îles  Shetland  {Seedohm),  et 
l'on  ne  connaît  que  quatre  captures  en  Irlande  [Thompson).  Cet  oiseau 
est  rare,  mais  hiverne  quelquefois  en  Suisse  {Meisner  et  Schinz)  ;  il  en 
est  de  même  en  France,  où  des  jeunes  passent  irrégulièrement  de 
septembre  à  janvier  {Degland)  et  hivernent  dans  les  Pyrénées  (L«cro2â?), 
Ses  apparitions  en  ItaUe  ne  sont  qu'accidentelles  :  il  a  été  capturé  en 
Piémont,  en  Lombardie,en  Vénétie,en  Ligurie  {Salvadori),en  Toscane 
(Savi)  et  une  fois  en  Sicile  [Benoit).  Il  se  montre  aussi  accidentellement 
dans  le  delta  du  Nil  [de  Heuglin),  mais  niche  au  Maroc  [Favier,  Irby) 
et  visite  quelquefois  lAlgérie  en  hiver  [Loche)  ;  la  présence  de  cet 
oiseau  dans  le  nord-ouest  de  l'Afrique  est  d'autant  plus  remarquable, 
qu'il  n'a  encore  été  observé  ni  en  Espagne  ni  en  Portugal. 

En  Asie  nous  trouvons  cette  espèce  dans  la  Sibérie  occidentale 
[Finsch),  en  Turkestan  [Severtzow)  et  dans  le  bassin  de  la  mer  Cas- 
pienne [Radde). 

La  var.  Major  ou  Holboelli^  habite  la  Sibérie  orientale,  la  vallée 
de  l'Amour  (•yon>Sc^re>iCi^)  jusqu'au  Kamtschatka  et  l'île  de  Behring 
[Stejneger)B.mû  que  le  Japon  [Schlégel).  En  Amérique  on  la  rencontre, 


—  691  - 

au  sud  du  cercle  arctique, depuis  l'Alaska  (Nelson)  jnsqu' slm  Groenland 
[Ilolbôll);  elle  hiverne  dans  le  nord  des  Etats-Unis,  mais  ne  paraît 
pas  dépasser  au  sud  le  42°  1.  N.  (New-York);  elle  niche  cependant 
dans  l'Etat  de  Minnesota  [HatcJi). 

Mœurs.  —  Le  Grèbe  à  gor'ge  grise  ou  Jou-gris  est  un  oiseau  migra- 
teur :  il  retourne  dans  les  contrées  où  il  se  reproduit  entre  les  mois  de 
mars  et  de  mai,  suivant  la  latitude,  et  émigré  entre  septembre  et 
novembre;  il  est  cependant  à  remarquer,  qu'il  hiverne  dans  beaucoup 
de  localités  de  l'Europe  centrale  où  les  eaux  ne  se  couvrent  pas  de 
glace,  et  dans  ces  pays  il  est  souvent  sédentaire.  Il  voyage  par  cou- 
ples, en  famille  ou  par  petites  troupes. 

Ce  Grèbe  a  le  même  genre  de  vie  que  le  précédent  :  il  se  tient  peu 
sur  la  mer  et  sur  les  fleuves,  mais  recherche  les  eaux  tranquilles  de 
l'intérieur  abondamment  garnies  de  roseaux  et  autres  herbages.  Il  se 
distingue  cependant  de  son  congénère  en  ce  qu'il  mène  une  vie  plus 
cachée,  que  son  vol  est  plus  léger  et  qu'il  est  moins  farouche.  Bien 
que  peu  sociable,  il  n'est  cependant  pas  rare  de  voir  plusieurs  couples 
nicher  sur  le  même  étang,  mais  toujours  à  une  grande  distance  l'un  de 
l'autre;  il  se  montre  aussi  plus  tolérant  envers  les  Grèbes  appartenant 
à  d'autres  espèces,  qui  nichent  souvent  dans  son  voisinage.  Son  cri 
d'appel  est  keck^  keck,  keck  ;  au  printemps,  les  deux  sexes  font  enten- 
dre un  autre  cri,  leur  chant  d'amour,  mais  il  n'est  pas  possible  de  le 
reproduire  par  des  lettres;  d'après  Naumann,  ce  cri  ressemble  à  celui 
d'un  jeune  cochon.  Cet  oiseau  se  nourrit  comme  le  précédent. 

Reproduction. — Les  conjoints  paraissent  unis  pour  la  vie  ;  l'accou- 
plement a  lieu  à  grands  cris  sur  l'eau,  et  à  la  fin  d'avril  commence  la 
construction  du  nid,  de  préférence  entre  les  touffes  de  roseaux  qui 
croissent  au  milieu  de  l'eau.  Les  nids  sont  éloignés  les  uns  des  autres 
d'une  cinquantaine  de  mètres,  et  les  deux  sexes  font  une  construction 
analogue  à  celle  du  Grèbe  précédent.  Ce  nid  repose  sur  de  vieilles 
souches  d'herbes  aquatiques,  ou  flotte  librement  entre  des  roseaux  ou 
des  joncs  qui  l'empêchent  d'être  emporté  à  la  dérive;  il  est  formé  d'un 
tas  de  végétaux  aquatiques  entremêlés  de  boue,  que  les  oiseaux  vont 
chercher  au  fond  de  l'eau.  La  ponte  a  lieu  en  mai,  dans  le  Nord  en 
juin,  et  se  compose  de  trois  ou  quatre  œufs  qui  reposent  sur  une 
litière  trempée  d'eau.  Ces  œufs  ressemblent  à  ceux  du  Grèbe  huppé, 
mais  ils  sont  plus  petits  :  ils  mesurent  48  à  50  millim.  sur  32  environ; 
ils  offrent  les  mêmes  moditications  après  l'incubation. 

Si  on  enlève  les  œufs, la  femelle  en  pond  de  nouveaux,  et  au  besoin 


-  692  - 

elle  sait  même  faire  une  troisième  ponte,  mais  les  conjoints  font  chaque 
fois  un  nouveau  nid.  Mâle  et  femelle  couvent  à  tour  de  rôle,  jour  et 
nuit,  pendant  trois  semaines;  si  un  danger  les  obligea  quitter  tous 
deux  leur  couvée,  ils  recouvrent  d'abord  les  œufs  d'une  touffe  de 
plantes  arrachées  au  nid.  L'attachement  des  pareutspourleurs  petits  est 
aussi  touchant  que  celui  qu'ils  se  témoignent  réciproquement.  «  Quand 
la  femelle,  dit  Naumann,  est  tuée  par  un  coup  de  feu,  le  mâle  nage 
avec  inquiétude  autour  d'elle  et  l'examine  de  tous  côtés;  ce  n'est  qu'à 
l'approche  de  la  barque  ou  du  chien  de  chasse  qui  vient  chercher  la 
dépouille,  qu'il  s'envole  à  quelque  distance.  Lorsque  la  femelle  est 
gravement  blessée,  elle  n'abandonne  pas  son  nid,  elle  se  remet,  au 
contraire,  sur  ses  œufs  et  continue  à  couver  jusqu'à  son  dernier 
souffle.  De  son  côté,  le  mâle  ne  peut  se  décider  à  abandonner  sa  com- 
pagne, il  pousse  des  cris  lamentables  et  s'offre  en  quelque  sorte  au 
chasseur,  bien  que  d'habitude  il  soit  plus  prudent  etrplus  farouche  que 
la  femelle.  »  Les  jeunes  vont  à  l'eau  peu  après  leur  naissance,  et 
apprennent  bientôt  à  plonger  ;  les  parents  veillent  constamment  sur 
eux  et  les  prennent  sur  leur  dos  quand  ils  se  montrent  fatigués. 


316.  —  Le  Grèbe  oreillard  (i). 

PODICIPES    NIGRICOLLIS  {Brehm). 

(PI.  318) 

CoLYMBUS  AURiTus,  Briss.  Omith.  VI,  p.  54  (1760). 

CoLYMBUS  AURITUS,  [3  Lin.  Syst.  nat.  1,  p.  223  (1766). 

PoDiCEPS  AURITUS,  Lath .  Incf.  Orn.  II,  p.  781  (1790). 

PoDiCEPS  NIGRICOLLIS,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  1000. 

PoDiCEPS  REOURViROSTRA  et  ORiENTALis,Brra.  Naumannia^  1855,  p.  299, 

Dytes  NIGRICOLLIS,  Ridgw.  Nom .  N.-Am.  B.,  n°733  (1881) . 

Der  geohrter  Lappentaucher,  en  allemand. 

The  black-necked  Grèbe,  en  anglais. 

De  geoorde  Fuut,  en  flamand. 

Var.  Californica. 

PoDicEPS  AURITUS,  Nutt.,  Audub.,  Bonap.  Lawr.,  etc. 

PoDiCEPS  californicus,  Heerm.  Pr.  Philad.  Acad.  1854,  p.  179. 

PomcEPS  (pROCTOPUs)  californicus,  Coues,  ibidem^  1862,  p.  231 . 

(1)  Linné  a  confondu  plusieurs  espèces  sous  le  nom  de  C.auritus,  ce  qui  fait  que  les  auteurs  ont 
adopté  cette  dénomination  tantôt  pour  l'une  {P.  nigricollis),  tantôt  pour  l'autre  {P xornutus) .  Afin 
d'éviter  toute  confusion,  il  est  bon  d'abandonner  la  dénomination  de  Linné,  comme  l'ont  fait 
beaucoup  d'auteurs  modernes. 


-  693  — 

PoDiCEPS  AURiTus,  vat\  cALiFOENicus,  Couôs,  Key  N.  Am.  5. ,  p.  237  (1872). 
Dytes  NiGRicoLLis  CALiFORNicus,  Ridgw.  Nom.  N.  Am.  B.,  n°733  (1881). 
PoDiCEPS  NIGRICOLLIS  CALIFORNICUS,  Seeb.,  Brit.  B.  m,  p.  466  (1885). 

Taille:  0^21  ;  ailes  0,125  (i). 

Description  des  deux  sexes  adultes 'en  été.  —  Tête,  gorge,  cou,  dos  scapu- 
laires  et  ailes  noirs,  tirant  sur  le  roux  marron  vers  le  bas  du  cou;  plumes  du 
vertex  allongées  et  susceptibles  d'érection  ;  derrière  l'œil  part  une  touffe  de 
longues  plumes  étroites  d'un  jaune  doré  et  rousses  couvrant  la  région  paro- 
tique;  rémiges  primaires  brunes,  les  secondaires  blanches;  poitrine  et  ventre 
d'un  blanc  lustré;  côtés  de  la  poitrine  et  flancs  d'un  roux  marron  vif.  Bec 
noir;  iris  rouge;  pattes  d'un  brun  verdâtre  en  deliors,  cendrées  en  dedans. 

En  hiver. —  Ne  diffère  en  cette  saison  du  P.  cornutus  que  par  une  taille  un 
peu  plus  petite  et  par  son  bec  légèrement  retroussé. 

Jeune  en  mue.  —  Dessus  de  la  tête  d'un  brun  noirâtre;  nuque  d'un  brun 
cendré;  dos  et  ailes  d'un  brun  noirâtre;  des  plumes  d'un  roux  doré  entremê- 
lées de  plumes  brunes  commencent  à  se  montrer  sur  les  régions  parotiques  ; 
gorge  blanche  tachée  de  brun;  devant  du  cou  cendré;  parties  inférieures 
blanches,  les  flancs  noirâtres. 

Poussin.  —  Dessus  de  la  tête  et  du  cou,  dos  et  flancs  couverts  d'un  duvet 
cendré  brunâtre;  dessus  de  la  tête  marqué  de  traits  blancs,  dont  un  sur  le 
front  qui  se  bifurque  à  la  base  de  la  mandibule  supérieure,  deux  autres  tra- 
cent au-dessus  des  yeux  deux  angles  aigus,  parallèles,  dont  les  côtés  externes 
se  prolongent  jusqu'à  la  nuque,  et  d'autres  variables  sur  les  côtés  de  la  tête; 
gorge,  devant  du  cou,  milieu  delà  poitrine  et  du  ventre  d'un  blanc  pur. 

Var.  Caîiforniea.  —  Se  distingue  par  un  bec  plus  court  et  par  l'absence  de 
blanc  sur  le  bord  interne  des  rémiges  primaires  voisines  des  secondaires. 

Hab.  —  Cet  oiseau  est  plus  ou  moins  répandu  dans  l'Europe  cen- 
^^^^y^fnxïïFf^ll      t^^^l^  ^^  hiverne  dans  l'Europe 
:  1  ll4xss+  ;  I  y     méridionale  ;    il   est   cependant 
commun  et  sédentaire  en  Espa- 
gne {Saundcrs)  et  se  reproduit 
aussi  dans  quelques  localités  du 
midi  de  la  France,  aux  environs 
ti'ilti:        '  ■  de  Nîmes  par  exemple  (Z)e^/a>id 

f  jxiiî  L  i  I  i  i  1 JJ  j  l"  "à     ^^  Gerbe);  mais  en  Italie  et  en 

Grèce  il  ne   parait  se    montrer 
qu'en  hiver ((je^/Zo/z,  Lindermayer).  EnNorwège  on  ne  connaîtqu'uue 


m 


(1)  Selon   M.  Gurney,  les  sujets  du  sud  de  l'Afrique  seraient  un  jieu  plus  petits  que  ceux  de 
l'Europe;  ceux  de  l'Amciiquc  ont  la  même  taille  que  les  nôtres. 


—  694  - 

seule  capture  faite  pendant  l'hiver  de  1863-64  dans  le  fjord  de  Tve- 
destrand  [Colleti);  en  Suède,  il  se  montre  accidentellement  sur  les  îles 
et  les  côtes  de  la  mer  Baltique,  sans  dépasser  Upland  au  nord  {Nils- 
son);  onne  le  voitnon  plus  qu'accidentellement  en  Finlande, où  un  couple 
a  été  tué  en  1853  près  de  Helsingfors  {Palmén),  mais  il  est  commun 
dans  tout  le  centre  et  le  midi  de  la  Russie  {de  No?'dmann).  Il  est  rare 
en  Hollande  {Schlégel)  et  de  passage  irrégulier  en  Belgique  ;  il  se 
reproduit  aux  îles  Britanniques,  mais  on  ne  le  voit  qu'accidentel- 
lement en  Ecosse,  en  Irlande  et  dans  les  parties  occidentales  de  l'An- 
gleterre {Seebohm). 

En  Afrique  on  voit  cet  oiseau  isolément  en  hiver  dans  les  lagunes 
de  la  Basse-Egypte  {de  Heuglin),  sur  le  lac  Aschangi  dans  l'Abys- 
sinie  orientale  {Blandford),  et  communément  sur  les  lacs  de  l'Algérie 
et  de  la  Tunisie  [Loche,  etc.).  Il  est  sédentaire  dans-le  sud  de  l'Afrique 
où  il  niche  au  Damaras,  aux  environs  de  la  baie  de  Walwich  {Ande7's- 
son),  dans  la  colonie  du  Gap  {Layard),  au  Transvaal  {Ayres),  etc. 

En  Asie,  ce  Grèbe  a  été  observé  dans  le  sud-ouest  de  la  Sibérie 
{Finsch),en  Daourie  {Dyhoicski),à^x\B  la  région  do  V\}^%m:\{Przeioalski), 
en  un  mot  depuis  le  Caucase  (/?«(i^e)  jusqu'au  Japon  {Whitely)\  il  est 
de  passage,  mais  rare,  dans  le  Turkestan  {Severtzow),  assez  répandu 
dans  le  Beloutchistan,  près  des  bouches  de  l'Indus  et  le  long  des  côtes 
du  Sinde  et  du  Mékran  {Hume),  et  visite  en  hiver  toutes  les  provinces 
septentrionales  de  la  Chine  jusqu'à  Amoy  et  Pékin  [David). 

La  var.  Califomica  habite  l'Amérique  occidentale,  à  l'ouest  du 
Mississipi,  depuis  le  grand  lac  de  l'Esclave  jusqu'au  Guatemala,  et  à 
l'est  jusqu'au  Texas,  le  Dakota  (Coues),  l'Arkansas  [Snoio)  et  ITllinois 
{Ridgivay). 

Mœurs.  —  Le  Grèbe  oreillard  émigré  de  l'Europe  centrale  en 
octobre  et  novembre  et  y  retourne  vers  la  fin  de  mars  ou  en  avril, 
mais  il  est  plus  ou  moins  sédentaire  dans  les  localités  où  les  eaux  ne 
se  couvrent  pas  de  glace.  Il  voyage  généralement  pendant  la  nuit,  en 
société  en  automne,  par  couples  ou  isolément  au  printemps. 

Cet  oiseau  ressemble  par  ses  mœurs  à  ses  congénères  surtout  au 
Grèbe  castagneux.  Il  fréquente  les  lacs  et  les  étangs  garnis  de  roseaux 
et  de  joncs,  au  milieu  desquels  il  trouve  un  abri  assuré.  II  nage  et 
plonge  à  la  perfection,  peut  rester  une  minute  sans  respirer,  et  cela 
lui  suffit  pour  franchir  sous  l'eau  une  distance  de  plus  de  cent  mètres  ; 
quand  il  est  poursuivi,  il  plonge  coup  sur  coup,  ne  montre  qu'une  par- 
tie de  sa  tête  chaque  fois  qu'il  vient  respirer  et  replonge  aussitôt, 


~  695  - 

jusqu'à  ce  qu'il  ait  atteint  les  roseaux  ;  il  est  rare  qu'il  s'envole,  à 
moins  que  l'eau  ne  soit  de  très  peu  d'étendue.  Il  est  l'un  des  plus 
farouches  et  des  plus  prudents  de  son  genre  :  dès  qu'il  aperçoit  quel- 
qu'un, il  se  cache  dans  les  herbages  et  ne  se  laisse  plus  ni  voir,  ni 
entendre,  aussi  longtemps  qu'on  est  en  vue. 

Sa  voix  est,  d'après  Naumann,  sonore  et  sifflante,  mais  il  ne  la  fait 
entendre  qu'aux  époques  de  la  reproduction  et  des  migrations,  et  le 
plus  souvent  dans  la  soirée  et  de  grand  matin.  Son  cri  débute  par  bib, 
bib,  mais  bientôt  il  se  transforme  en  un  trille  ressemblant  à  bideioi- 
dewideioideivide,  et  ces  syllabes  se  suivent  très  rapidement. 

La  nourriture  de  cet  oiseau  consiste  également  en  larves  et  insectes 
aquatiques,  plus  rarement  de  frai  de  poissons  et  de  têtards  de  gre- 
nouilles ;  il  avale  en  même  temps  des  conferves  et  des  algues  qu'on 
trouve  ordinairement  dans  son  estomac  ;  ce  dernier  contient  presque 
toujours  aussi  des  plumes  en  plus  ou  moins  grand  nombre,  arrachées 
à  la  poitrine  ou  au  ventre  et  qui  sont  mêlées  aux  aliments. 

Reproduction.  —  Le  Grèbe  oreillard  niche  de  la  même  manière 
que  les  précédents,  mais  son  nid  est  placé  plus  profondément  dans  les 
roseaux  ou  les  joncs,  quoique  toujours  dans  un  endroit  où  ces  végé- 
taux ne  soient  pas  trop  rapprochés,  ce  qui  permet  souvent  de  l'aperce- 
voir du  bord  de  l'étang.  Ce  nid  est  une  masse  compacte  formée  de 
plantes  aquatiques  retirées  du  fond  de  l'eau  et  entremêlées  de  radi- 
celles, de  brins  d'herbes  et  de  bouo.  La  ponte  a  lieu  en  mai  dans  nos 
contrées,  en  décembre  dans  le  sud  de  l'Afrique  ;  elle  se  compose  de 
quatre  œufs,  rarement  de  cinq,  entièrement  semblables  à  ceux  du  Grèbe 
huppé,  mais  plus  petits  et  on  ne  saurait  les  distinguer  des  œufs  du 
Grèbe  cornu;  ils  mesurent  44  à  46  millim.  sur  29  à  30. 

Mâle  et  femelle  couvent  à  tour  de  rôle  pendant  trois  semaines.  Les 
parents  se  comportent  avec  leurs  petits  comme  les  précédents. 

317.  —  Le  Grèbe  cornu. 
PODICIPES   CORNUTUS  [Gmel.) 

(PI.  319). 

COLYMBUS    CRISTATUS    MINOK   et    C.    CORNUTUS    MINOR,    HrisS.    Oniith.    VI,    pp.    42,    oO 

(1760). 
CoLYMHUS  AURiTUS,  Lin.  (pai't.)  S i/st.  nat.  I,  p.  222(1766). 
CoLYMBUS  NiGRiCANS,  O^uiie)  Scop.  Ariti.  I.  Hist,  liât.,  p.  77  (1769). 
?  CoLYMBUs  DUPLiGATUS,  P.  L.  S.  Mull.  Nalursyst.  Suppl.,  p.  107  (1776). 


-  696  — 

CoLYMBUS  CASPicus,  Gmel.  Reise  d.  Russl.  IV,  p.  137  (1784). 

CoLYMBUs  CRiSTÀTUs,  Mohf  (nec  Lin.),  Islandsh.  Naturh.  p.  39,  pi.  2  (17b6). 

PoDiCEPs  NiGRiCANS,  Lath.  Ge?i.  Sijnop.  suppl.  I,  p.  294  (1787). 

CoLYMBUS  coRNUTUS  et  OBSCURUS,  Gmel.  Srjst.  nat.  1,  p.  591  (1788). 

PoDicEPS  OBSCURUS,  CORNUTUS  et  CASPICUS,  Lath.  Ind.  Om.ll,  pp.  782,784  (1790). 

PoDiCEPS  ARCTicus,  Boie,  Reise  durch  Norw.,  p.  308  (1822). 

Dytes  CORNUTUS,  Kaup,  Natilrl.  Syst.,  p.  41  (1829). 

PoDiCEPS  AMBiGUUS,  Less.  Traité  d'orn.,  p.  595(1831). 

PoDicEPS  BicoRNis,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  1000. 

CoLYMBUs  ARCTICUS,  Nauin.  Vôg.  Deutschl.  IX,  p.  755  (1838). 

PoDiCEPS  CORNUTUS  ARCTICUS,  Schleg,  Rev.  m<.,p.  CV  (1844). 

PoDiCEPS  SCLAVUS,  Bonap.  Compt.-Bend.  XLI,  p.  249  (1855). 

Dytes  auritus,  Ridgw.,  Nom.  N.-Am.  B  ,  n°732  (1882). 

Dytes  sclavus  et  ARCTicus,01phe-Gal.  Contr.  Fne.  orn.  Eur.occ.  fasc.  I,  p.  100(1884). 

Dkr  gehornte  Lappentaucher,  en  allemand. 

The  Sclavonian  Grèbe,  en  anglais. 

De  HooRNDUiKEE, en  flamand. 

Taille  :  0,30  ;  ailes  0,14.  ^ 

Description  des  deux  sexes  en  été.  —  Dessus  de  la  tête  noir  à  reflets  verdâ- 
tres  ;  joues  et  gorge  noires  avec  les  plumes  allongées  formant  une  large  colle- 
rette ;  une  large  bande  d'un  roux  doré  prend  naissance  aux  lorums  et  se 
termine  à  la  région  auriculaire,  où  les  plumes  sont  .allongées  et  disposées  en 
touffes  formant  une  espèce  de  corne  de  chaque  côté  de  l'occiput  ;  dessus  du 
cou  et  du  corps  d'un  brun  noirâtre  lustré  ;  couvertures  des  ailes  moins  foncées 
que  le  dos  ;  rémiges  primaires  brunes,  les  secondaires  blanches  ;  devant  et 
côtés  du  cou,  jabot  et  flancs  d'un  roux  marron  vif,  les  plumes  des  flancs  termi- 
nées de  brun  ;  poitrine  et  abdomen  d'un  blanc  satiné.  Bec  noir,  rouge  à  la 
pointe  et  à  la  base  ;  iris  rouge  avec  un  cercle  intérieur  jaunâtre  ;  pattes  d'un 
noir  verdâtre  extérieurement,  gris  jaunâtre  pâle  en  dedans. 

En  hiver.  —  Dessus  de  la  tête,  du  cou  et  du  corps  d'un  brun  noirâtre  avec 
les  plumes  du  dos  bordées  de  cendré  ;  ailes  comme  en  été;  flancs  d'un  cendré 
brunâtre  varié  de  blanc  ;  une  grande  tache  blanchâtre  devant  l'œil;  joues, 
côtés  de  l'occiput,  devant  du  cou  et  toutes  les  autres  parties  inférieures  d'un 
blanc  satiné. 

Jeune.  —  Plus  petit,  moins  foncé  en  dessus  que  l'adulte  en  hiver,  d'un 
blanc  plus  terne  en  dessous;  gorge  et  bas  des  joues  variés  de  roussâtre  ; 
devant  du  cou  et  flancs  gris.  Bec  gris,  rosâtre  à  la  base. 

Poussin.  —  Dos,  ailes  et  flancs  noirâtres,  coupés  longitudinalement  par  des 
bandes  fauves,  peu  visibles;  tête  noire,  avec  tache  ovalaire  blanche  à  l'occiput 
et  une  plaque  triangulaire,  nue  et  jaune,  au  vertex;  cette  plaque  est  encadrée 
latéralement  par  des  bandes  alternes  noires  et  rosées,  dont  les  supérieures 
se  réunissent  au  front  en  angle  aigu  et  forment  double  bande  sourcilière  ; 
gorge  blanche  et  duvet  du  cou  cendré  pâle,  mais  avec  des  traits  noirs  qui 
descendent  jusque  sur  les  côtés  de  la  poitrine  ;  ventre  blanc,  abdomen  gris, 


-  697  - 

lorums  et  bec  jaunes,  avec  une  tache  noire  et  le  marteau  blanc  ;  faces  externes 
des  tarses  et  dessous  des  membranes  noirâtres,  les  autres  parties  des  pieds 
marbrées  de  brun  et  de  jaune.  (J.  Vian.) 

Hab.  —  Ce  Grèbe  est  une  espèce  circompolaire,  mais  qui  ne  niche 

'•?;%*^  -1     ;*  ;%^^  '    "*  '   '  î;  i     excepte  en  Norvège  ;  en  Europe 

on  ne  le  voit  au  sud  de  la  Bal- 
tique qu'à  l'époque  des  passages 
ou  en  hiver.   C'est  donc  un  oi- 
£-7  rti«^b2--+^"'     seau  d  été  pour  l'Islande  (Faber\ 
■  ■  '  '  ■  'Un  iiM''  ■  '     ^rwV^'^Wm^    ^^""^  ^^  partie  septentrionale  de 
ElMfiSlMlMîMfaiS    1^  Norwège  (Collett)  et  de  la 


., ,- LW 


Suède  (Aï/55on),pour  la  Finlande 
(Palmên)  et  le  nord  de  la  Russie  où  il  niche  jusqu'au  lac  Ladoga 
(Meves)  ;  en  résumé,  cette  espèce  paraît  nicher  au  nord  d'une  ligne 
très  onduleuse  qui  dépasse  rarement  au  sud  le  60°  1.  N.  Le  Grèbe 
cornu  est  de  passage  aux  îles  Féroé  {H.  C.  Muller),  au  Danemark 
(CoUin),  en  Allemagne  (Reichenotv),  en  Pologne  (Taczanoivski),  en 
Autriche  {Hinterherger)  et  en  Transylvanie  {Danford  et  H.  Bi^own), 
mais  il  niche  dans  les  grands  lacs  et  sur  les  bords  du  Danube,  dans 
la  Dobrodja  et  la  Bulgarie  où  il  est  plus  ou  moins  sédentaire  (Alléon). 
A  l'Ouest,  on  voit  cet  oiseau  en  Hollande  {Schlégel),  mais  irréguliè- 
rement dans  les  grands  marais  des  Flandres  belges  et  près  de  l'Es- 
caut. Il  ne  visite  les  îles  Britanniques  qu'en  hiver  :  il  est  alors 
abondant  sur  les  côtes  de  l'Ecosse,  moins  répandu  sur  les  côtes  orien- 
tales de  l'Angleterre,  mais  c'est  le  plus  comnmn  des  Grèbes  qui 
visitent  les  îles  Shetland;  il  est  assez  fréquent  aux  îles  Orcades  et 
dans  les  îles  occidentales  de  l'Ecosse,  ne  se  montre  qu'accidentelle- 
ment dans  le  sud  de  l'Angleterre  et  en  Irlande,  et  jamais  dans  les 
régions  occidentales  de  l'Angleterre  (Seebohm).  Ses  apparitions  dans 
les  départements  du  nord  de  la  France  sont  très  irrégulières,  et  rares 
dans  le  midi  {DegL  et  Gerbe).  Le  colonel  Irby  dit  en  avoir  vu  un  sujet 
tiré  dans  le  détroit  de  Gibraltar  en  octobre  1867  ;  cet  oiseau  no  visite 
que  très  accidentellement  les  provinces  du  nord  de  l'Italie  (Gi- 
glioli). 

Cet  oiseau  habite  en  Asie  les  mémos  latitudes  qu'en  Europe  ;  il  est 

commun  dans  la  Sibérie  occidentale  {Finsch),  assez  commun  sur  le 

Baïkal  et  sur  les  eaux  de  laDaourie  (rac^«nmt?5Âi).Middendorff  cite 

une  femelle  tirée  près  d'Udskoi  Ostrog;  il  est  commun  aux  passages 

Tome  II.  —  1894.  88 


—  698  — 

en  Turkestan  {Severtzow)  et  hiverne  en  grand  nombre  sur  le  lac 
Kazrun  en  Perse  {St-John)  ;  il  a  également  été  observé  dans  le  sud- 
est  de  la  Mongolie  {Prjevalsky),  en  Chine  (Swinhoe),  au  Japon  {Whi- 
tcly)  et  accidentellement  au  Kamtschatka  {Stejneger). 

En  Amérique  cette  espèce  niche  au  sud  du  cercle  arctique  depuis 
l'Alaska  (iVe/son)  jusqu'au  Labrador  et  le  Groenland  {Holbôll)\  elle 
est  commune  en  automne  et  en  hiver  dans  le  sud  des  Etats-Unis,  mais 
rare  près  des  côtes  des  régions  du  centre  et  de  l'est  (Audubon),  et 
visite  accidentellement  les  îles  Bermudes  {Seebohm). 

Mœurs.  —  Le  Grèbe  cornu  émigré  des  contrées  du  Nord  entre  les 
mois  d'octobre  et  de  décembre,  suivant  les  rigueurs  de  la  saison; 
Faber  dit  qu'un  jeune  sujet  fut  encore  tué  en  décembre  dans  le  sud  de 
l'Islande.  Le  retour  a  lieu  à  partir  de  mars,  et  au  commencement  de  la 
seconde  quinzaine  d'avril  on  le  revoit  déjà  en  Islande.  Il  voyage  la 
nuit  par  petites  troupes  de  quatre  à  sept  individus  ou  par  couples. 

Cet  oiseau  vit  également  sur  les  eaux  douces  garnies  de  joncs  et  de 
roseaux,  et  ses  moeurs  ne  diffèrent  guère  de  celles  des  espèces  précé- 
dentes, mais  il  est  moins  farouche.  Sa  nourriture  consiste  en  insectes 
et  larves  aquatiques,  vers  et  mollusques;  les  conferves  qu'on  trouve 
dans  son  estomac  sont  probablement  avalées  en  même  temps  que  des 
insectes,  et  non  comme  aliment. 

Reproduction. —  Ce  Grèbe  niche  dans  la  seconde  quinzaine  de  mai. 
Son  nid  est  une  masse  flottante  formée  de  plantes  aquatiques  et  de 
boue,  que  l'oiseau  construit  entre  les  roseaux  et  les  herbages  non  loin 
du  bord  de  l'étang.  La  femelle  dépose  au  commencement  de  juin,  dans 
l'excavation  de  ce  nid  trempé  d'eau,  quatre  ou  cinq  œufs,  rarement 
six,  qui  ressemblent  par  leur  coloration  à  ceux  du  Grèbe  huppé,  ils 
mesurent  44  à  46  mill,  sur  30.  Les  parents  témoignent  à  leurs  petits 
la  même  tendresse  et  le  même  dévouement  que  les  Grèbes  précé- 
dents. 

318.  —  Le   Grèbe  castagneux. 

PODICIPES  MINOR  [Briss.) 

(PL  320). 

CoLYMBUS  MINOR  et  FLUviATiLis,  Briss,  Ornith^  VI,  pp.  56,  59  (1760). 
CûLTMBus  AURiTUS,  var.  y.  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  223  (1766). 
CoLYMBUS  PYRENAicus,  Lapeïr.  K.  Vet.  Ak.  Nya  Handl.  III.  p.  111  (1782). 
PoBiCEPS  MiNUTus  et  HEBRiDiALis,  Lath.  Gen.  Synop.  Suppl.  p.  294  (1787). 
CoLYMBUS  HEBBiDicus,  Gmel.  Srjst.  nat.  I,  p.  594  (1788). 


—  699  — 

PoDiCEPS  MiNOR,  Lath.  Ind.  Orn.  II,  p.  784  (1790). 

CoLYMBUS  PHiLiPPENSis,  Bonnat.  Encycl.  méth.  I,  p.  58  (1790). 

CoLYMBUS  MINUTUS,  Pall.  Zoogr .  Rosso-As.  II,  p.  358  (1811). 

PoDiCEPS  HEBRiciDUS  et  PYGM.EUS,  Brehm,  Isis,  1830,  p.  1000. 

Sylbeocyclus  MINOR,  Bonap.  Comp.  List,  p.  64  (1838). 

PoDiCEPS  NOCTivAGus,  Tem.  Tabl.  Méth.  p.  100  (1839). 

Sylbeocyclus  europ^us,  Macg.  Ma7i.  B.  Orn.  II,  p.  205  (1842). 

PoDiCEPS  PHILIPPENSIS,  Gray,  Cat.  Mam.  B.  of  Népal,  p.  147  (1846). 

Tachybaptus  minor,  Reichb.  Av.  Syst.  Nat.  Nalatores  pi.  2  (1849). 

PoDicEPS  PALLiDUS,  Brehm,  Vogelfany^  p.  403  (1855). 

Tachybaptus  minor,  philippensis et  capensis,  Bonap.  Compt.-rend.  XLII,  p.775(1857^ 

PoDiCEPS  FLUviATiLis,  Degl.  et  Gerbe,  Orn.  Eur.  II.  p.  587  (1867). 

PoDiCEPS  ALBESCENS  (Mandelli).  Blanf.  Stray  Feath.  V,  p.  486  (1877). 

Der  Kleine  Lappentaucher,  en  allemand. 

The  little  Grebe,  en  anglais. 

De  Dodaars,  en  flamand 

Var.  N ovœ-HollandiïB . 

PoDiCEPS  NOv.E-HOLLANDi^,  Stôph.  Skaw's  Gen.  zool.  XIII,  1,  p.  18(1825). 
PoDicEPS  gularis,  Gould,  Proc.  .îoo/.  ^oc.  1836,  p.  145. 
PoDiLiMiJUS  gularis,  Reichb.  Syn.  av.  Natatore.s,  pi.  VI,  f.  758-59  (1848). 
Tachybaptus  gularis,  Bonap.  Compt.-Rend.  XLII,  p.  775  (1856). 
PoDiCEPS  TRicoLOR  (part.)  Finsch,  Neu-Guin.  p.  185  (1865). 
Sylbeocyclus  nov.^-hollandi^,  Gr.  Hand-list,  III,  p.  94  (1871). 
PoDiCEPS  FLUVIATILIS  (part.)  Dress.  B.  of  Eur.  VIII,  p.  659  (1880). 
PoDiCEPS  MINOR  (part.),  Schlégel,  Seebohm,etc. 


Var.  Tricolor. 

PoDiCEPS  (SYLBEOCYCLUS)  TRICOLOR,  Gray,  Proc.  zool.  Soc.  1860,  p.  366. 

PoDiCEPS  TRICOLOR,  Wall.  Proc.  zool.  Soc.  1863,  p.  20. 

PoDiCEPS  gularis,  Rosenb.  (necGould)  Reis.  naar  Zuidoostereil . ,  p.  82  (1867). 

Poliocephalus TRICOLOR,  Gr.  Iland-list,  III, p.  94  (1871), 

PoDiCEPS  MINOR  var.  TRICOLOR,  Briigg.  Abh.  Natww.  Ver.  Brehm.  V.  p.  98  (1876). 

PoDiCEPS  FLUVIATILIS  (part.)  Dress.  B.  ofEur.  VIII,  p.  659  (1880). 

PoDiCEPS  MINOR  (part.)  Schléirel,  Seebolim,  etc. 


Var.  Pelzelni. 

PoDiCEPS  PELZELNI,  Hartl.  Ornith.  Beifr.  z.  Fauna  Mndag.,  p.  83  (1861). 
Sylbeocyclus  capensis,  Gr.  (part.)  Hand-list,  p.  94  (1871). 

PoDiCEPS  minor  var.  Pelzelni,  A.  Milne-Edw  ,  Hiat.  phys.  nat.  et  pol.  de  Madag. 
Oiseaux,  p.  710  (1879). 

Taille  :  0'^22  ;  ailes  0'"105  (individus  do  Belgique). 

Description  des  deux  sexes  adultes  en  été, — Dessus  de  la  tête  et  partie  posté- 


—  700  — 

rieiire  du  cou  d'un  noir  plus  ou  moins  brunâtre  à  reflets  verdâtres;  partie 
antérieure  des  joues  et  gorge  noires;  le  reste  des  joues,  devantet  côtés  du  cou 
d'un  roux  marron  vif;  parties  supérieures  du  corps  noirâtres  et  luisantes; 
rémiges  primaires  brunes,  les  secondaires  blanches  avec  une  grande  tache 
brune  sur  la  barbe  externe;  poitrine  et  flancs  d'un  brun  varié  de  roussâtre; 
milieu  de  l'abdomen  d'un  cendré  plus  ou  moins  mélangé  de  blanc;  croupion 
et  ses  côtés  d'un  roux  clair  varié  de  blanc.  Bec  noir,  jaunâtre  à  la  pointe,  les 
commissures  d'un  jaune  verdâtre  pâle,  partie  nue  des  lorums  plus  sombre; 
iris  d'un  brun  rouge  ;  pieds  d'un  brun  verdâtre  en  dehors,  rosés  en  dedans. 
La  femelle  est  un  peu  plus  petite,  le  roux  du  cou  descend  moins  bas  que 
chez  le  mâle,  et  les  parties  ventrales  sont  plus  claires. 

Les  deux  sexes  en  hiver.  —  Dessus  de  la  tête,  nuque  et  dos  d'un  brun  cendré 
foncé,  légèrement  lavé  de  roussâtre  ;  ailes  comme  en  été;  gorge,  poitrine  et 
ventre  d'un  blanc  lustré,  lavé  de  cendré  roussâtre  sur  les  flancs  ;  joues,  côtés 
et  devant  du  cou  d'un  cendré  roussâtre  ;  région  anale  grisâtre,  les  côtés  du 
croupion  variés  de  roux.  Bec  brun  à  pointe  blanchâtre,  commissures  et 
lorums  plus  sombres  qu'en  été. 

Jeune.  — Ressemble  aux  adultes  en  hiver,  mais  plus  petit;  derrière  l'œil 
une  raie  noire  au-dessous  de  laquelle  se  trouve  une  autre  variée  de  blanc  ; 
joues  blanchâtres;  les  parties  inférieures  d'un  blanc  moins  pur,  les  flancs  d'un 
cendré  roussâtre  foncé.  Bec  roussâtre  à  pointe  blanche. 

Poussin.  —  D'un  brun  foncé  en  dessus,  le  devant  de  la  tête  cendré,  noirâtre 
près  de  la  naissance  du  bec  ;  une  raie  blanchâtre  derrière  l'œil,  une  raie 
rousse  au-dessus  et  une  tache  de  même  couleur  sur  la  tête  ;  cou  d'un  brun 
foncé  marqué  de  six  bandes  roussâtres,  dont  deux  sur  le  devant,  les  deux 
médianes  se  réunissent  sur  l'occiput  ;  quatre  bandes  longitudinales  rousses 
sur  le  dos  et  une  sur  les  flancs  ;  poitrine  et  ventre  d'un  blanc  pur  ;  bec  jaune 
à  extrémité  blanche. 

Var.  Trieolor.  —  Diffère  du  type  ci-dessus  par  l'absence  de  noir  sur  la  par- 
tie antérieure  des  joues  et  à  la  gorge,  ces  parties  étant  d'un  roux  marron  vif. 

Var.  Novœ-Hollandiœ.  —  Gorge  et  joues  noires  ou  noirâtres  ;  une  étroite 
bande  d'un  roux  marron  vif  prend  naissance  derrière  l'œil,  borde  les  joues 
supérieurement  en  s'élargissant  et  couvre  les  côtés  du  haut  du  cou  ;  le  reste 
du  plumage  comme  chez  le  P.  minor. 

Var.  Pelzeîni.  —  Le  mâle  se  distingue  de  ceux  de  l'Europe  par  un  bec  entiè- 
rement noir,  sans  teinte  claire  à  la  pointe  et  aux  commissures,  et  le  ventre 
est  plus  blanc.  (Sujet  d'Anjouan,  l'une  des  îles  Comores).  —  M.  A.  Milne- 
Edwards  dit  que  chez  les  femelles,  les  côtés  du  cou  sont  seuls  d'un  brun  rouge, 
les  joues  sont,  ainsi  que  le  menton,  d'un  gris  clair  avec  une  petite  bande  blan- 
che en  arrière  de  Fœil,  et  le  ventre  d'un  beau  blanc.  (HisL  phys.  nat.  et 
pol.  de  Madag.  Oiseaux,  p.  711.) 


—  701  - 


Hab.  —  Le  Grèbe  castagneux  est  plus  ou  moins  commun  dans  toute 

^^sm=fTEm   l'Europe  centrale  et  méridionale, 

mais  il  est  rare  dans  le  sud  de 

la  Scandinavie  où  il  ne  dépasse 

À  pas  le  62*'  1.  N.  {Collett.Mlsson)  ; 

À  il  est  également  très  rare  dans  la 


Russie  centrale,  mais  se  montre 
accidentellement  jusqu'en  Fin- 
I4'W  lande,  où  un  sujet  a  été  capturé 
£££5i.,  pj,^g  ^g  Helsingfors  {Palmén). 
En  Belgique  il  est  sédentaire  et  généralement  commun,  surtout  en 
hiver  :  dans  cette  saison  il  se  retire  sur  les  rivières  et  les  ruisseaux  à 
courant  rapide,  et  il  est  alors,  d'après  M.  Groegaert,  très  commun  sur 
l'Escaut.  Il  est  également  commun  et  sédentaire  dans  tout  le  midi  de 
l'Europe. 

Cette  espèce  est  aussi  plus  ou  moins  répandue  dans  toute  l'Afrique 
jusqu'au  Cap  (Layard).  En  Asie  on  le  rencontre  depuis  la  mer  Cas- 
pienne et  le  Turkestan  {Secertzoïv)  jusqu'en  Chine  {David),  au  Japon 
ISclilégel)  et  aux  Philippines  [Steere],  mais  sa  présence  ne  paraît  pas 
encore  avoir  été  constatée  en  Sibérie  et  en  Mongolie;  on  Tobserve  dans 
tout  le  sud  de  l'Asie  jusqu'à  Ceylan  et  dans  l'Indo-Chine. 

La  var.  Novœ-hollandiœ  habite  l'Australie  {Gould,  Ramsaij)  et  la 
Nouvelle-Guinée  {D'Albertis). 

La  var.  Tnco/or  est  répandue  aux  Moluques,  à  Ternate  (Wallace), 
à  Halmahera  (Bernstein),  à  Batjan  (Finsch),  à  Amboine,  Céram,  Kei, 
Arou  {von  Rosenherr/),  à  Célèbes  {Meyer^Blasius),  à  Timor,  Flores 
(  Wallace)  et  à  Java  (Musée.  Brux.). 

Enfin,  la  var.  Pelzelni  habite  Madagascar  {Hartlaub)  et  les  îles 
Comores  {Musée  Brux.). 

Mœurs,  —  Le  Grèbe  castagneux  émigré  au  commencement  de 
novembre  des  régions  les  plus  septentrionales  de  son  habitat,  et 
voyage  la  nuit  par  petites  troupes,  mais  composées  parfois  de  plus  de 
vingt  sujets;  au  printemps  il  retourne  dans  le  pays  qui  l'a  vu  naître, 
mais  voyage  alors  par  couples  ou  isolément.  Il  habite  les  étangs  et  les 
marais  bien  garnis  de  roseaux  et  de  joncs,  et  ne  so  montre  qu'en  hiver 
sur  les  fleuves  et  les  rivières;  il  recherche  surtout  les  eaux  de  peu 
d'étendue  et  en  partie  couvertes  de  lemnacées,  deconferves  et  d'algues. 

Ce  Grèbe  ressemble  aux  précédents  par  ses  mœurs  et  ses  allures» 
il  semble  cependant  se  mouvoir  avec  plus  do  facilité  que  les  grandes 


—  702  — 

espèces,  et  court  relativement  assez  bien.  Dans  l'art  de  nager  et  de 
plonger  il  dépasse  en  agilité  tous  ses  congénères,  mais  se  montre 
aussi  rarement  qu'eux  sur  la  terre  ferme.  Quand  il  plonge, il  nage  sous 
Teau  avec  une  extrême  dextérité,  et  au  bout  d'une  minute  on  le  voit 
souvent  revenir  à  la  surface  à  près  de  deux  cents  mètres  de  l'endroit 
où  il  a  fait  le  plongeon.  «  Jamais,  dit  Droste-Hiilshoff,  il  ne  quitte  un 
étang  pendant  le  jour,  il  se  laisse  plutôt  prendre  avec  la  main;  j'en 
ai  pris  plusieurs  fois  dans  des  étangs  mis  à  sec,  et  aucun  ne  cherchait 
à  s'envoler.  »  Le  baron  d'Hamonville  rapporte  un  fait  analogue  : 
«  Lorsqu'à  la  fin  de  mars  on  lâche  l'eau  des  derniers  étangs  en  pêche, 
dit  cet  auteur,  ces  oiseaux  se  trouvent  à  sec  et,  ne  pouvant  plonger, 
cherchent  leur  salut  dans  la  fuite  à  pied,  sans  essayer  de  s'envoler. 
Plusieurs  fois  j'en  ai  pris  à  la  main  ;  je  les  lançais  en  l'air,  mais  ils 
retombaient  immédiatement  sur  le  sol;  d'autres  fois,  j'en  ai  rapporté 
que  je  lâchais  sur  un  petit  réservoir  et  aussitôt  ils  se  perdaient  sous 
l'eau  comme  de  véritables  poissons.  » 

Cet  oiseau  vole  plus  mal  que  les- autres  Grèbes,  quoique  assez  vite 
quand  il  a  atteint  une  certaine  hauteur,  mais  lourdement  et  avec  des 
oscillations  rapides;  on  voit  que  ce  système  de  locomotion  le  fatigue 
beaucoup,  aussi  est-il  rare  de  le  voir  voler  en  plein  jour;  quand  il 
veut  passer  d'un  étang  à  un  autre,  c'est  pendant  la  nuit  qu'il  y  vole. 
Il  est  extrêmement  farouche  et  se  réfugie  dans  l'eau  dès  qu'on 
approche;  là  il  se  cache  souvent  entre  les  herbages  flottants,  ne  lais- 
sant sortir  de  l'eau  qu'une  partie  de  sa  tête,  et  c'est  ainsi  qu'il  attend 
patiemment  que  le  danger  ait  disparu  ;  mais  on  a  vu  plus  haut  com- 
bien il  est  facile  de  s'emparer  de  cet  oiseau  quand  il  est  à  sec.  Il  se 
nourrit  d'insectes  et  de  larves  aquatiques,  crustacés,  mollusques, ainsi 
que  de  poissons  et  de  grenouilles  de  très  petite  taille.  Il  ne  fait 
entendre  sa  voix  que  près  du  nid,  et  seulement  après  le  coucher  du 
soleil  et  pendant  la  nuit;  son  cri  ressemble  à  bibi,  hibib,  et  parfois 
aussi  à  bhvhvib  ou  wit,  ivit. 

Reproduction,  —  Le  Grèbe  castagneux  niche  entre  les  roseaux, 
les  joncs  ou  autres  hautes  herbes  aquatiques,  mais  ne  cache  guère 
son  nid;  celui-ci  est  même  parfois  complètement  à  découvert,  mais 
aussi  éloigné  que  possible  du  bord  de  l'étang.  Il  repose  parfois  sur 
une  veille  souche  ou  sur  des  herbes  renversées,  mais  souvent  aussi 
il  flotte  librement  entre  les  hautes  herbes  qui  l'empêchent  d'être 
emporté  par  le  vent.  Hume  dit  que  dans  l'Inde,  le  nid  est  souvent 
fixé  dans  les  branches  d'un  arbre  suspendues  sur  l'eau  et  à  une 


-  703  — 

couple  de  pieds  au-dessus  du  niveau  ;  il  est  alors  formé  d'herbes 
diverses  (1).  En  Europe,  le  nid  ressemble  à  celui  des  autres  Grèbes, 
mais  il  est  relativement  plus  grand  et  légèrement  excavé  au  sommet; 
il  est  formé  de  diverses  plantes  aquatiques  {Myriophillum,  Cerato- 
phyllum,  Potamogeton,  etc.),  entremêlées  de  radicelles,  de  brins 
d'herbes  et  de  boue.  La  ponte  est  de  trois  à  cinq  œufs  ;  elle  a  lieu, 
dans  nos  contrées,  vers  la  fin  d'avril  ou  en  mai,  suivant  la  saison; 
au  Kachmir,  la  ponte  se  fait  vers  la  mi-mai,  dans  d'autres  parties  de 
l'Inde,  en  juin  et  en  août,  et  dans  le  sud  de  l'Afrique,  en  janvier. 
Les  œufs  sont  de  forme  assez  variable,  mais  ressemblent  à  ceux  des 
autres  Grèbes;  ils  mesurent  34  à  39  millim.  sur  25  à  26.  Mâle  et 
femelle  couvent  à  tour  de  rôle  pendant  20  à  21  jours,  et  se  compor- 
tent avec  leurs  petits  comme  les  autres  Grèbes. 

Dans  l'atlas  du  présent  ouvrage  j'ai  figuré,  à  la  suite  des  Grèbes, 
quelques  oiseaux  nouvellement  observés  en  Belgique,  dont  je  vais 
maintenant  m'occuper.  Leur  numéro  d'ordre  indique  la  place  qu'ils 
doivent  prendre  dans  la  série. 

4bis   _  L'Aigle  Bonelli 

NISAETUS  FASCIATUS.  Dress.  ex  Vieill.  (2) 

(PI.   321). 

Aquila  fasciata,  Vieill.,  Mém.  de  la  Soc.  Linn.  de  Paris,  p.  152  (1822). 

Falco  bonelli,  Tem.,  PI.  col.  pi.  288  (1824). 

Aquila  intermedia,  Boitard  (1825),  d'après  Degl.  et  Gerbe,  Omith.  Eur.  I,  p.  32. 

Aquila  bonelli,  Less.  Man.  d'Orn.  I,  p.  83  (1828). 

NiSAETUs  GRANDIS,  Hodgs,  Jowti.  As.  Soc.  Ben;/.  V,  p.  230  (1836). 

NiSAKTUS  NiVEUS,  Jerd.  Madr.  Journ.  X,  p.  69  (1839). 

Spizaetus  grandis,  Blyth,  Journ.  Ai.  Soc.  Beng.  XII,  p.  301  (1843). 

Aquila  rubriventkr,  Hodgs.  Gr.  Zool.  M'jsc.,p.  81  (1844). 

EuTOLMAETUS  BONELLI,  Hlytli,  Joiim.  As.  Soc.  Beng.  XIV,  p.  174  (1845). 

ToLMAETUS  BONELLI,  Blyth,  ibidem  XV,  p.  5  (1846). 

NiSAETUS  STRENUUS,  Jerd.,  m.  Ind.  Om.,  pi.  1  (1847). 

Falco  ducalis  (Licht.),  Bonap.  Consp.  I,  p.  14  (1850). 

Aquila  wiedii,  A.  Brm.  Naumannia  (1855),  p.  25. 

PSKUDAETUS  BONELLI,  Boiiap.  Cat.  Parz.  p.   1  (1856). 


(1)  .\.   Hume,  Nests  anJ  .;.v^  .'/  InUan  Birds,   p.  (546,   Calcutta,  187'V 
(8)  Le  genre  .Viscutiis    se  distingue   des  .Vigies  proprement  dits  par  dos  ailt-s    plus  courtes 
et  des  doigts  plus  longs    et   plus   grêles,  ce   qui  r.approche  ces  oiseaux  des  Autours,  dont  ils 
ont  aussi  les  mœurs  et  les  habitudes  carnassières.  *^ 


Aquilastur  bonelli  et  wiedii,  L.  Brm,,  Alhj.  naturh.  Zeit.  II,  pp.  53,  54  (1856). 
NiSAETUS  FASCiATUS,  Dress.  B.  of  Eur.  V,  p.  575  (1874). 
Der  Habichts-adler,  en  allemand. 
The  Bonelli  's  Eagle,  en  anglais. 
De  Bonelli-Arend,  en  flamand. 

Taille  :  mâle  O'^Sô  ;  femelle  0,69;  ailes  0,54. 

Description  du  mâle  adulte.  —  Parties  supérieures  d'un  brun  noirâtre  avec 
quelques  taches  blanches  à  la  nuque  et  sur  le  haut  du  dos  (iDrovenant  de  ce 
que  la  base  des  plumes  est  blanche),  les  scapulaires  et  les  couvertures  des 
ailes  bordées  de  cendré  roussâtre  ;  région  parotique  d'un  blanc  lavé  de  rous- 
sâtre  et  strié  de  noir  ;  parties  inférieures  d'un  blanc  assez  pur  nuancé  de  cendré 
roussâtre  sur  les  côtés  du  cou,  avec  une  strie  brune  au  centre  des  plumes,  plus 
large  sur  les  côtés  du  cou  et  à  la  poitrine,  réduite  au  rachis,  au  bas-ventre  et 
sur  les  sous-caudales;  plumes  des  jambes  et  des  tarses_également  blanches 
avec  une  strie  brune,  mais  les  premières  largement  barrées  de  brun  roux,  de 
façon  que  cette  dernière  teinte  domine  souvent;  rémiges  primaires  noirâtres, 
les  secondaires  brun  foncé  avec  un  petit  bord  terminal  blanchâtre;  queue  d'un 
cendré  brunâtre  en  dessus,  barrée  irrégulièrement  de  brun,  terminée  par  une 
large  bande  d'un  brun  plus  foncé  et  un  petit  liséré  roussâtre,  bord  interne  des 
rectrices  marbré  de  brun  sur  un  fond  clair.  Bec  brun  de  corne  ;  iris  d'un  jaune 
brunâtre  ;  cire  et  doigts  jaunes.  (Sujet  de  V Europe  méridionale.) 

Femelle  adulte.  —  Ressemble  au  mâle,  mais  d'une  taille  beaucoup  plus 
forte.  Les  stries  des  parties  inférieures  sont  plus  larges,  de  forme  lancéolée, 
sur  le  ventre  elles  prennent  même  une  forme  irrégulière  et  sont  souvent 
accompagnées  de  taches  transversales,  surtout  sur  les  sous-caudales  ;  plumes 
des  jambes  d'un  cendré  brunâtre  tachetées  de  roussâtre.  (Sujet  du  Népaul.) 

Jeune  mâle.  —  Partie  antérieure  de  la  tête  d'un  brun  noirâtre  avec  les 
plumes  bordées  de  cendré  roussâtre  ;  occiput,  nuque,  côtés  et  devant  du  cou 
d'un  cendré  roux  avec  une  strie  lancéolée  noirâtre  au  centre  des  plumes  ; 
gorge  blanchâtre  mais  avec  les  mêmes  stries  brunes  ;  dos  et  ailes  d'un  brun 
plus  ou  moins  foncé  avec  les  bords  des  plumes  plus  clairs  ;  rémiges  comme 
chez  l'adulte  ;  parties  inférieures  roussâtres,  mais  passant  insensiblement  au 
blanc  roussâtre  au  ventre, sur  les  sous-caudales  et  les  tarses;  poitrine  avec  une 
strie  noirâtre  au  centre  des  plumes,  mais  réduite  au  rachis  sur  l'abdomen  et 
sur  les  jambes,  et  disparaissant  complètement  au  bas-ventre  et  sur  les  sous- 
caudales  ;  les  plumes  des  jambes  offrent  aussi  à  leur  base  des  taches  brunâtres 
transversales  mais  peu  apparentes  ;  queue  comme  chez  l'adulte,  mais  les 
barres  transversales  plus  régulières  et  plus  apparentes,  la  dernière  pas  plus 
large  que  les  autres.  Iris  brun  clair.  [Sujet  tué  à  Bornhem,  Belgique). 


—  TOo  — 


Hab.   —  Ce  rapace  habite  le  midi  de  l'Europe,  le  nord  de  l'Afrique 

^,  et  l'Inde,  et  visite  accidentelle- 
lijj  ment  certaines  parties  de  l'Eu- 
'\  rope  centrale  ;  c'est  ainsi  qu'il  a 
5^1  été  capturé  deux  fois  en  Bohême 
j  {Fritsch),  ainsi  que  près  du  Da- 
nube inférieur  (Hudleston),  dans 
^tirtt^P^-jii  t^^p-S  le  midi  de  la  Russie  (de  Nord- 
l^Lr|lmffi.iijl44imï^    mann)   et  en    Belgique  ;    dans 
^..^m^'^^fë^tp^^ii^^y^-^..^'^,^,^^,,^.^.^,  notre  pays,  un  individu  a  ete  tue 

aux  environs  d'Esncux,  près  de  Lioge,en  septembre  1879,  et  un  jeune 
mâle  a  été  tiré  à  Bornhem  (prov.  d'Anvers),  le  23  mars  1889  ;  j'ai 
pu  acquérir  ce  dernier  pour  le  Musée  de  l'Etat  à  Bruxelles. 

Dans  le  midi  de  la  France,  il  est  de  passage  en  automne  et  au 
printemps  dans  les  régions  limitrophes  des  Pyrénées,  où  il  ne  niche 
qu'accidentellement  {Loxroix)  ;  il  est  assez  commun  dans  les  monta- 
gnes de  l'Espagne  qui  avoisinent  la  mer  et  les  marais,  et  niche  régu- 
lièrement aussi  sur  le  rocher  de  Gibraltar  (Saunders),  ainsi  qu'en 
Portugal  {Barboza  di(,  Bocage)  ;  en  Italie  il  semble  être  de  passage  et 
assez  rare,  mais  il  est  commun  et  sédentaire  en  Sicile  et  en  Sardaigne 
{Malherbe, Broohe)  et  peut-être  en  Corse  ;  il  habite  également  la  Grèce 
où  il  paraît  peu  abondant  [Lindermai/er).  Il  est  assez  commun  en  Pa- 
lestine (Tristram),  dans  l'Arabie  Pétrée  {A.  Brehm),  dans  la  Haute- 
Egypte,  en  Nubie  et  au  Sennaar  [Antinori),  mais  peu  abondant  dans 
la  Basse-Egypte  et  près  du  Nil  {de  Heuglin)  ;  il  est  également  commun 
au  Maroc  {Irby),  en  Algérie  {Loche),  en  Tunisie  {Salvin)  et  on  l'a  aussi 
capturé  au  Sénégal  {Hartlaub). 

Il  est  signalé  au  pays  desDamaras  par  Andersson  et  dans  la  colonie 
du  Cap  par  Layard;  mais  d'après  le  D"  Sharpe,les  individus  du  sud  do 
l'Afrique  appartiendraient  à  une  espèce  voisine  (le  iV.  Spilogaster); 
il  est  donc  probable  qu'il  en  est  de  même  pour  les  sujets  du  Damaras. 
L'Aigle  bonelli  est  aussi  très  répandu  dans  l'Inde  entière  jusqu'aux 
monts  Himalaya  {Jerdon)  et  à  Ceylan  {Layard). 

Mo'Mvs.  —  Cet  Aigle  se  tient  dans  les  montagnes  déboisées, et  dans 
l'Inde  on  le  rencontre  surtout  dans  les  collines  couvertes  par  les 
jungles;  des  montagnes  il  rayonne  dans  les  plaines  plus  ou  moins 
marécageuses  des  environs  et  quand  il  n'est  pas  retenu  par  la  repro- 
duction, il  erre  au  loin  dans  les  contrées  voisines. 

L'Aigle  bonelli  est  très  agile, courageux,  hardi,  impudent  même;  il 

Tome  II.  —  1894.  8'J 


—  706  — 

a  toutes  les  qualités  de  l'Autour, mais  il  est  encore  mieux  doué  que  lui. 
Son  vol  ressemble  plus  à  celui  des  Faucons  qu'à  celui  des  Aigles  propre- 
ment dits;  comme  ces  derniers,  il  plane  en  décrivant  de  grands  cer 
clés,  mais  en  volant,  dit  A.  Brehm,  il  donne  des  coups  d'ailes  bien  plus 
répétés,  aussi  a-t-il  un  vol  plus  rapide  que  les  Aigles.  Il  réunit  la 
vigueur  du  Faucon  à  l'agilité  de  l'Epervier,  et  le  courage  de  l'Aigle 
fauve  à  la  férocité  de  l'Autour,  aussi  ne  craint-il  aucun  oiseau  ;  Krùper 
vit  un  Nisaète  bonelli  attaquer  un  Pjgargue,  qui  est  cependant  un 
adversaire  bien  redoutable;  Brehm  dit  avoir  assisté  à  ses  combats 
avec  le  Vautour  cendré  et  l'Aigle  fauve.  Il  attaque  tous  les  oiseaux 
et  les  mammifères  de  la  taille  d'un  lièvre  et  au-dessous;  c'est  le  plus 
terrible  ennemi  des  poules  et  des  pigeons  et  occasionne  de  grands 
ravages  dans  les  fermes.  Près  des  eaux,  il  fait  la  chasse  aux  canards, 
aux  poules  d'eau,  aux  vanneaux  et  même  aux  hérons;  en  pleine  cam- 
pagne il  poursuit  les  perdrix,  les  lièvres  et  les  lapins,  et  enlève  aux 
autres  rapaces  la  proie  qu'ils  ont  capturée  ;  dans  l'Inde  il  attaque  le 
Faucon  dressé  pour  la  chasse  et  parvient  souvent  à  le  tuer,  si  celui- 
ci  ne  lâche  pas  de  suite  sa  prise. 

Reproduction.  —  Ce  rapace  niche  dans  les  crevasses  des  rochers 
les  plus  inaccessibles,  et  accidentellement  sur  un  arbre  élevé;  Hume 
dit  avoir  trouvé  dans  l'Inde, l'aire  de  cet  oiseau  construite  sur  un  grand 
figuier  {Ficus  religiosoi).  L'aire,  d'après  cet  auteur,  est  très  vaste,  et 
mesure  quatre  à  six  pieds  anglais  de  diamètre  ;  elle  est  composée  de 
branches  et  de  feuilles, et  au  centre  se  trouve  une  cavité  circulaire  d'en- 
viron douze  pouces  de  diamètre,  garnie  d'une  couche  moelleuse  de  fines 
branches  et  de  feuilles.  La  ponte  est  de  un  ou  deux  œufs,  quelquefois 
trois  ;  dans  les  plaines  de  l'Inde  elle  a  lieu  dans  la  seconde  quinzaine 
de  décembre,  dans  l'Himalaya  en  avril,  en  Espagne  à  la  fin  de  février 
ou  au  commencement  de  mars.  L'œuf  est,  d'après  Thinemann,  blan- 
châtre avec  des  taches  nuageuses  d'un  roux  violacé  pâle,  les  superfi- 
cielles plus  sombres  ;  il  paraît  quOTi  trouve  aussi  des  œufs  d'un  blanc 
gale  et  immaculés  ou  marqués  de  petites  taches  peu  apparentes  ;  ils 
mesurent  environ  64  millim.  sur  52.  Les  parents,  pour  défendre  leur 
couvée, déploient  autant  de  courage  que  dans  toute  autre  circonstance. 


—  707  — 

33''''.  —  Le  Martinet  alpin. 
CYPSELUS  MELBA,  r/lig.  ex  Lia. 

.(PI-  322). 

HiRUNDO  MAJOR  HiSHANiCA,  Briss.  Omitli.  II,  p.  504  (1760). 
HiRUNbo  MELBA,  Lin.  Syst.  nat.  I,  p.  345  (1766). 
HiRUNDO  ALPiNA,  .Scop.  Ann.  I.  Ilist.  7inl.,  p.  166  (1769). 
MiCROPUS  ALPiNUS,  Wolf,  Tasehenb.  deut.  Yikjelk.  I.  p.  282(1810). 
Cypselusmelra,  lUig.  Prorlr.  p.  2.30  (1811). 
HiRUNDO  CrULARis,  Steph    Shaw  '5  Gen.  Zool.l^^  p.  09  (1817). 
Cypselusgutturalis,  Vieil.  Tahl.  Encycl.  Méth .  p.  534  (1822). 
Cypselus  ALPINUS,  Mey.  Tasehenb,  Zus.  u.  Ber.,  p.  255(1822). 
MiCROPUS  MELBA  et  GUTTURALis,  Boie,  Isis,  1844,  p.  165. 
Cypselus  fuscicollis,  Brm.  Naumajmia,  1855,  p.  270. 

Cypselus   melba  alpinus,    euscicollis  et  microriiynchos.  A.  Brm..    Vers.  Samml. 
C.L.Brehm,ii.Z.{\HQQ). 
Der  ALPENSEGLER,  en  allemand. 
The  alpine  sm'IFt,  en  anglais. 
De  alpen-steenzwaluw,  en  flamand. 

Taille:  0"'20;  ailes  0,23. 

Description  du  mâle  adulte,  —  Parties  supérieures,  une  large  bande  pecto- 
rale, flancs  et  sous-caudales  d'un  brun  cendré  uniforme  ;  gorge,  devant  du 
cou  et  les  autres  parties  inférieures  au  delà  de  la  bande  pectorale, d'un  blanc 
pur;  rémiges  et  queue  d'un  brun  coirâtre  ;  plumes  des  tarses  brunes.  Iris 
brun  ;  bec  et  pattes  noires. 

Femelle.  —  KUc  ne  diffère  du  mâle  que  par  la  l)ande  pectorale  qui  est 
moins  largo. 

Jeune.  —  Ressemble  aux  adultes,  mais  toutes  les  plumes  des  parties  fon- 
cées sont  bordées  de  cendré  blanchâtre. 


Ilaù.  —  Ce  M  arlinet  habite  en  été  les  régions  alpines  de  rEuropo  con 


TtximssitMimrtti'' ^kt^ywi-" r>jtci5''V5»''Ht?p3îiii'4*ft'j(42Ç3'n     iiaie  eij  niericiionaie •  11  6Si  com— 


•%^-W^ 


inun  dans  les  Alpes  de  la  Suisse 

(Tschudi), i^cis  rare  dans  colles  du 

-îjJ     Tyrol,  de  la   Haute-Autriche  et 

de  Salzbourg  {Hinterberger)  et 

^«■v  visite  accidentellement  les  con- 

*  trées   voisines   de   l'Allemagne 

•    '    {Rcichenofc);   un    exemplaire  a 

'~-    même  été  tué  dans  Julland,  sur 

l'Ile  Mors,  le  17  juin  I.S04  (A7V/e/'&w//m(7),et  Ratzeburg  a  observé  une 

volée  à  llelgoland  dont  quelques  sujets  furent  tués  {Borggrcve):  plus 


—  708  - 

récemment,  M.  Gaetke  en  a  également  obtenu  sur  cette  île.  On  ne 
connaît  qu'une  seule  capture  en  Belgique  :  «  Vers  la  fin  de  septembre 
1886,  dit  M.  F.  AVautier,  M.  J.  Denis  vit  tournoyer  autour  de  son 
château, à  Noville-sur-Méhaigne  (Brabant),deux  Martinets  plus  grands 
et  plus  gris  que  ceux  qu'il  était  habitué  de  voir  dans  son  parc.  Afin 
d'en  connaître  l'espèce,  il  en  tua  un  et  me  le  fit  remettre  ;  le  second 
individu  n'a  disparu  que  plusieurs  jours  après  la  mort  de  son  compa- 
gnon (1).  »  M.  Wauthier  a  eu  l'obligeance  de  m'envoyer  cet  oiseau  et 
d'en  faire  don  à  notre  Musée  royal;  j'ai  pu  ainsi  m'assurer  que  c'était 
bien  un  C.  melha.  Plusieurs  sujets  ont  aussi  été  capturés  à  diverses 
époques  en  Angleterre  et  en  Irlande  {Seehohm). 

Le  Martinet  alpin  est  assez  répandu  en  France  dans  les  Alpes  et  les 
Pyrénées  (Z)e^/.  et  Ge7-l)e),  en  Portugal  (S«r5o^a  du  Bocage),  en  Espa- 
gne [Saunders],  aux  îles  Baléares  {von  Homeye?')-r-à  l'île  de  Malte 
(Wright),  en  Sicile,  en  Sardaigne  et  en  Corse,  mais  il  est  peu  abon- 
dant dans  les  montagnes  de  l'Italie  continentale  {Giglioli);  il  est  gène 
ralement  répandu  dans  les  montagnes  de  la  Grèce  {Lindermai/er)  et 
de  la  Turquie  [Ehves  et  Buckley),  mais  rare  dans  laDobrodja  et  la  Bul- 
garie (Alléon),  par  contre  il  est  abondant  dans  toute  la  chaîne  ue 
montagnes  des  côtes  sud  et  sud-est  de  la  Crimée,  de  même  que  dans 
les  districts  montagneux  des  provinces  de  la  côte  orientale  de  la  mer 
Noire  {de  Nordmann),  et  en  Transcaucasie  on  Tobserve  jusqu'à  9,000 
pieds  d'altitude,  mais  il  est  peu  abondant  {Raddé)  ;  dans  les  monts 
Ourals  on  le  rencontre  jusqu'au  55°  1.  N.  {Seehohm). 

Cet  oiseau  niche  également  dans  les  montagnes  du  nord  de  l'Afri- 
que, où  il  est  abondant  lors  des  passages  {Loche,  etc.),  mais  il  est  rare 
aux  passages  en  Egypte  et  en  Nubie  {Shelley).  A  l'Est  son  habitat 
s'étend  jusqu'aux  montagnes  de  l'Asie  Mineure,  de  la  Palestine,  du 
Turkestan  occidental,  de  l'Himalaya  occidental,  et  il  est  sédentaire 
dans  l'Inde  et  à  Ceylan  {Tristram,  Severtzow,  Jerdon,  etc.).  Il  est 
également  sédentaire  en  Abyssinie,  mais  dans  le  sud  de  l'Afrique  on 
ne  le  voit  qu'en  automne  et  en  hiver  {Atidersso^i,  Layard,  Seehohm). 

Mœurs.  —  C'est  un  oiseau  migrateur,  qui  quitte  les  régions  monta- 
gneuses de  l'Europe,  de  l'Asie  centrale  et  du  nord  de  l'Afrique  au 
commencement  de  l'automne  ;  en  Suisse,  dit  Tschudi,  il  arrive  com- 
munément à  la  fin  de  mars,  commence  à  nicher  à  la  fin  de  mai,  et  part 
pendant  la  nuit  vers  la  fin  de  septembre.  Dans  le  midi  de  l'Europe  il 

(1)  Ccmipte  r*ndu  des  observations  ornitliologiqncs  faites  en.  Bi'li^i(jiie^çw\A\é  dans  VOniis  de  1890. 


—  709  — 

arrive  à  la  même  époque,  probablement  quelques  jours  plus  tôt  et  tou- 
jours avant  leMartinet  noir. 

Le  Martinet  alpin  est  très  sociable  et  il  est  rare  de  rencontrer  un 
couple  isolé.  Ses  mœurs  ressemblent  à  celles  de  l'espèce  indigène  ;  il 
est  extraordinairement  turbulent  et  agité,  et  par  le  beau  temps  il  est 
toujours  lancé  dans  les  airs,  souvent  à  une  hauteur  prodigieuse,  et  y 
exécute  ses  changements  de  front  avec  la  rapidité  de  l'éclair.  11  ne  vit 
pas  exclusivement  dans  les  montagnes,  car  en  Suisse  on  le  voit  nicher 
sur  les  tours  des  villes  et  des  villages  et  voler  à  travers  les  rues  jus- 
qu'à la  nuit  close.  Spallanzani,  qui  a  observé  de  ces  oiseaux  dans 
divers  pays,  dit  qu'au  milieu  de  leurs  ébats  autour  des  rochers  «  ils 
s'arrêtent  et  s'accrochent  par  les  ongles  aux  blocs  de  pierre  situés 
dans  le  voisinage  de  leurs  nids  ;  aux  premiers  qui  se  sont  accrochés, 
d'autres  viennent  s'attacher,  et  à  ces  derniers  d'autres  encore  formant 
ainsi  une  chaîne  oscillante  et  animée.  Un  instant  après,  ils  se  séparent, 
volent  et  recommencent  leurs  cris  accoutumés.  »  Le  cri  de  ce  Marti- 
net a  quelque  analogie  avec  celui  de  la  Crécerelle,  et  consiste  en  un 
guiri  guiri  guiri ,  diversement  modulé.  Sa  nourriture  consiste  en 
insectes  ailés  qu'il  attrape  au  vol. 

Reproduction.  —  Le  Martinet  alpin  niche  dans  les  trous  et  les 
crevasses  des  rochers  et  des  murs  élevés,  dans  des  grottes,  etc.; 
Malherbe  dit  avoir  observé  un  couple  nichant  sur  la  digue  de  lave  qui 
forme  la  partie  nord  du  port  de  Catane.  En  Suisse,  c'est  dans  la 
seconde  semaine  de  mai  qu'il  commence  à  faire  son  nid  ;  celui-ci  est 
plat  et  formé  de  brins  de  paille,  de  fouilles,  de  chiffons,  de  plumes,  de 
fragments  de  papier,  toutes  choses  enlevées  par  le  vent  et  que  l'oiseau 
attrape  en  l'air,  car  il  est  rare  qu'il  se  pose  sur  le  sol  ;  le  tout  est 
agglutiné  à  l'aide  de  salive,  qui  devient  en  séchant  dure  et  brillante. 
Hume  dit  que  dans  l'Inde  on  voit  parfois  trois  ou  quatre  nids  groupés 
en  une  seule  masse.  La  ponte  a  lieu  à  la  fin  de  mai  et  se  compose  de 
trois  ou  quatre  œufs  blancs,  de  forme  allongée  et  mesurant  28  millim. 
sur  18.  La  durée  de  l'incubation  est  de  trois  semaines,  et  les  petits 
quittent  leur  nid  au  bout  de  six  à  sept  semaines,  c'est-cà-diro  vers  le 
commencement  d'août.  Tscluuli  dit  (ju'il  en  niche  tous  les  ans  40  à  50 
couples  dans  le  vieux  clocher  de  la  cathédrale  de  Berne,  et  que  le 
gardien  de  la  tour  est  chargé  spécialement  de  protéger  ces  oiseaux. 


-  710  — 
103^i^  —  Parus  cœruleus. 

Var.  Pleskii. 
(PI.   323,  fig.   1,  2.) 

Parus  pleskii,  Cab.  Joum.  f.  Orn.  1877,  p.  213,  pi.  3,  fig.  1. 
CvANiSTES  PLESKII,  Cab.  ibidem,  1878,  p.  109  (1). 

Taille  :  0,114  ;  ailes  0,065. 

Description  de  T adulte  (mâle?).  —  Front,  raie  sourcilière  et  joues  d'un  blanc 
pur  ;  dessus  de  la  tête  d'un  bleu  azuré  suivi  d'une  bande  d'un  blanc  lilas  qui 
s'unit  aux  raies  sourcilières  ;  lorum  et  une  raie  derrière  l'œil  noirâtres  ;  collier 
d'un  noir  bleu,  plus  large  sur  les  côtés,  remontant  jusque  sous  le  bec,  mais 
les  plumes  de  la  gorge  terminées  de  blanc;  nuque,  derrière  le  collier  noir, 
d'un  blanc  lilas;  dos  d'un  gris  bleuâtre,  plus  clair  au  croupion;  couvertures 
des  ailes  d'un  bleu  grisâtre,  les  plus  grandes  terminée§~de  blanc  ;  rémiges 
primaires  brunes  avec  un  bord  interne  blanc  et  la  barbe  externe  bleue  à  la 
base,  blanche  à  l'extrémité  ;  les  secondaires  terminées  de  blanc  ;  queue  d'un 
bleu  grisâtre  ;  côtés  de  la  poitrine  d'un  jaune  pâle  ;  milieu  de  la  poitrine 
noirâtre  ;  les  autres  parties  inférieures  blanchâtres  (Sujet  de  Moscou  de  la 
coll.  de  M.  de  Selys-Longchamps). 

Femelle  ?  —  Diffère  du  sujet  décrit  ci- dessus  par  l'absence  presque  com- 
plète de  jaune  sur  les  côtés  de  la  poitrine  et  par  la  couleur  de  son  menton 
qui  est  blanc,  tandis  qu'il  est  noir  chez  l'individu  ci-dessus.  (Sujet  pris  en 
Belgique,  fig.  2  de  notre  planche,  appartenant  également  à  M.  de  Selys- 
Longchamps). 

Hab.  —  Cet  oiseau  habite  le  nord-est  de  la  Russie  vers  l'Oural,  et 
le  nord-ouest  de  la  Sibérie  [Cabanis]  ;  il  niche  régulièrement,  mais 
eu  petit  nombre,  dans  les  environs  de  Saint-Pétersbourg  [Bûchner). 
Un  individu  a  été  pris  à  Liège  dans  le  jardin  de  M.  Oscar  Lamarche, 
en  décembre  1878  (de  Selys-Longchamps). 

Remarque.  —  Cette  Mésange  a  été  décrite  par  M.  Cabanis  comme 
une  espèce  distincte  et  nouvelle.  Je  partage  cependant  plutôt  l'avis 
de  M.  le  baron  Edm.  de  Selys-Longchamps,  qui  la  considère  comme 
une  simple  race  ou  variété  climatôrique  du  P.  cœruleus.  La  capture 
d'un  P.  pleskii  en  Belgique,  parfaitement  semblable  aux  sujets 
russes,  pourrait  même  faire  supposer  qu'il  ne  s'agit  que  d'un  cas 
d'albinisme  partiel  qui  serait  assez  fréquent  en  Russie. 

(1)  Voyez  aussi  :  Edm.  de  Selys-Longchamps,  Considêratiotis  sur  le  genre  Mésange  {Bullet.  de 
la  Soc.  Zool.  de  France,  IX,  1884,  p.  69j.  —  E.  Biichner,  Die  Vôgel  des  St-Pctershurger  Gouver- 
nements^ p.  26.  Saint- Petersburg,  1886. 


-  711  — 

A  la  même  époque  où  M.  Cabanis  décrivait  cette  Mésange  comme 
espèce,  M.  Severtzow  la  décrivait  comme  un  hybride  du  P.  cyaneus 
et  du  P.  cœruleus  (1). 

Devant  cette  divergence  d'opinions  et  le  manque  d'observations, 
il  est  bon  de  ne  rien  conclurQ  pour  le  moment  et  d'attendre  de  nou- 
velles observations  ayant  surtout  rapport  à  la  reproduction  de  cette 
Mésange  (2). 


122bis.  _  La  Calandre  nègre. 
MELANOCORYPHA  YELTONIENSIS,  Bp.  ex  Forst. 

(PI.  324.) 

Alauda  YELTONIENSIS,  Forst.  Phil.  Trcuis.  LVII,  p.  350  (1767). 

Alauda  mutabilis,  Gm.  N.  Comm.  Ac.  Se.  Imp.  Petrop.  XV,  pi.  23,  fig,  2  (1771). 

Alauda  tatarica,  Pall.  Reis.  Russ.  Reichs,  II,  Anh.  p.  707  (1773). 

Tanagra  sibirica,  Sparrm.  Mus.  Caris.  I,  pi.  19  (1786). 

Alauda  nigra,  Steph.  Shaw's  Gen.  Zool.  XIV,  p.  25  (1826). 

Melanocorypha  tartarica,  Boie,  /sis,  1828,  p.  322. 

Saxilauda  tartarica,  Less.,  Compl.  Buff.  Ois.  Il,  p.  125  (1837). 

Melanocorypha  YELTONIENSIS,  Bonap.,  Consp.  I,  p.  242  (1850). 

Calandra  NIGRA,  G.  F.  Dub.,  PI.  col.  Ois.  Belg.  II,  p.  102^  (1857). 

NiGRiLAUDA  NIGRA,  Bogdanow,  Ois.  du  Cauc.  (en  russe),  p.  76(1879). 

Die  Mohrenlerche,  en  allemand. 

The  BLACK  Lark,  en  anglais. 

De  zwarte  Leeuwerik,  en  flamand. 

rrtz7/e  .•  Mâle  0^18;  ailes  0,131;  femelle  0,155;  ailes  0,116. 
Description  du  mâle  adulte  en  été.  —  D'un  noir  unifonne,  les  plumes  du  dos 


(1)  Voy.  BitH.  de  la  Soc.  Zool.  de  France-,  II,  1877,  p.  320. 

(2)  Dans  le  Compte  remlu  des  observations  ornithologiq'ies  faites  en  Beli^iqiie^  et  publié  dans 
VOrnis  fti\  1890,  j'ai  annoncé  (p.  296)  qu'un  Emberiza  chrysophrys,  l'ail,  avait  été  pris  au  filet 
à  Evergem-lez-Gand  en  octobre  1877.  Cet  oiseau,  qui  fait  partie  de  la  collection  de  M.  le  comte 
J.   de  Hemptinne,  a  été  figuré  dans  l'atlas  du  présent  ouvrage  (pi.  323,  fig.  4). 

Or,  un  examen  plus  attentif  de  cet  oiseau  m'a  démontré  que  ce  n'est  pas  un  jeune  E.  chry- 
sophrys,  mais  bien  une  femelle  du  Zonotrichia  aWicoUis  de  r.Vmérique  du  Nord.  Je  m'étais  laissé 
induire  en  erreur  par  le  sourcil  jaune,  et  je  n'avais  comme  point  de  comparaison  qu'un  unique 
sujet  et  adulte  du  vrai  E.  chrysopJirys,  représenté  sur  la  même  planche  (fig.  3). 

J'ai  lie:t  de  croire  que  l'oiseau  capturé  près  de  Gand  est  un  échapi^é  de  volière,  car  il  était  en 
assez,  mauvais  état  au  moment  d'être  pris,  du  moins  sa  queue  était  réduite  à  deux  ou  trois  pennes, 
et  le  préparateur  l'avait  complétée  à  l'aide  de  pennes  d'un  vrai  Bruant. Je  ne  m'en  occuperai  donc 
pas  davantage.  Je  ferai  cependant  remarquer  qu'un  Zonotrichia  albicolUi  a  été  pris  en  l-ico.ase  près 
d'.\bcrdcen  le  17  août  1807  (/'.  Z.  S.  1870,  p.  52)  et  un  autre  Cn  Angleterre  ;\  Heven  Dean,  près 
de  r.riglUon,  le  22  mars  1872  {P.  Z.  .S".  1872,  p.  681),  et  qu'il  n'est  par  consécpicnt  pas  impossible 
que  l'oiseau  du  comte  de  Hemptinne  ne  soit  un  énugré  ;  mais  il  faut  toujours  se  défier  de  ces 
oiseaux  américains  que  l'on  tient  communément  cn  cage. 


712  — 


offrant  souvent  des  bordures  blanchâtres  mais  qui  disparaissent  plus  ou 
moins  par  l'usure.  Bec  couleur  de  corne  claire,  brunâtre  à  la  pointe;  pattes 
noirâtres  ;  iris  brun. 

Mâle  en  hiver.  —  Également  noir,  mais  toutes  les  plumes  sont  bordées  de 
blanc  cendré,  et  cette  teinte  claire  domine  même  parfois  sur  les  parties 
dorsales. 

Femelle  (1).  —  Parties  supérieures  d'un  cendré  roussâtre  clair  avec  le 
centre  des  plumes  brun  ;  régions  parotiques  d'une  teinte  plus  ocracée  et 
variée  de  brun;  couvertures  des  ailes  brunes,  largement  bordées  de  cendré 
blanchâtre;  scapulaires  brunes  bordées  de  blanchâtre,  mais  ce  bord  est  pré- 
cédé d'un  liséré  noirâtre;  rémiges  également  brunes,  bordées  extérieurement 
et  terminées  de  blanchâtre;  côtés  du  cou  d'un  blanc  jaunâtre  ;  gorge  blan- 
châtre, bordée  latéralement  de  petites  taches  brunes  disposées  en  forme  de 
moustaches,  mais  peu  apparentes;  parties  inférieures  blanchâtres;  poitrine 
et  flancs  lavés  de  cendré  roussâtre  et  marqués  de  taches  brunes,  plus  allon- 
gées sur  les  flancs  ;  queue  brune,  les  rectrices  bordées  de-cendré  blanchâtre 
surtout  les  médianes. 

Hab.  —  La  Calandre  nègre  habite  les  steppes  de  la  Sibérie  occi- 
dentale et  émigré  jusque  dans 
le  sud  de  la  Russie;  on  la  voit 
arriver  par  grandes  troupes  vers 
l'automne,  quelquefois  à  la  fin 
d'août,  dans  le  gouvernement 
d'Ekaterinoslaw  et  en  Crimée 
(deNordmann).  Forsterla  décou- 
vrit près  du  lac  Yelton,  à  l'est 
du  Volga,  d'où  le  nom  de  Yelto- 
niensis,  etPallas  l'a  observée  dans  les  steppes  salées  de  la  Tartarie, 
ainsi  que  dans  les  régions  désertes  qui  avoisinent  la  mer  Caspienne  ; 
Bogdanow  l'a  aussi  observée  en  hiver  dans  les  steppes  septentrionales 
du  Caucase,  mais  elle  ne  se  montre  qu'accidentellement  près  de 
Lenkoran  (Radde)',  elle  hiverne  également  au  Turkestan  {Severtzoîo), 
mais  ne  paraît  pas  aller  plus  au  sud.  La  patrie  de  cet  oiseau  semble 
donc  limitée  à  la  zone  tempérée  qui  s'étend  entre  le  Dnieper  et 
rirtisch,et,en  Asie,  entre  le  40°  et  le  55%  mais  sans  dépasser  le  50» 
en  Russie. 

Les  captures  dans  l'Europe  centrale  sont  extrêmement  rares  :  cet 
oiseau  a  été  pris  dans  la  Basse-Autriche  et  en  Allemagne  près  de 


.liJ.Lll£i 


(1)  L'inscription  de  la  planche  porte  par  erreur  :  fig.  2,  Jeune,  mais  c' est  J'e/neik  qu'il  faut  lire. 


—  713  — 

Grimmen  en  Poméranie  {Heichenow).  Au  sujet  des  ai3paritions  de 
cette  espèce  en  Belgique,  feu  mon  père  dit  :  «  Jai  trouvé  une  Calan- 
dre nègre  vers  la  mi-mars  1850  sur  le  marché  de  Bruxelles  chez  un 
oiseleur,  qui  l'avait  attrapée  dans  les  environs  de  cette  ville,  et  il 
m'a  assuré  en  avoir  vu  plusieurs  ensemble,  mais  n'avoir  pu  en  prendre 
qu'une  seule  ;  d'après  l'assurance  de  M.  Croegaert,  père,  on  en  aurait 
aussi  pris  une  dans  les  environs  d'Anvers  en  1852,  et  on  a  pu  la 
tenir  vivante  pendant  plusieurs  semaines.  »  Quand  je  me  suis  occupé 
du  genre  Calandre,  j'ai  émis  un  doute  au  sujet  des  captures  signalées 
par  mon  père  (tome  I, p. 524, en  note), vu  que  la  présence  de  l'espèce  en 
question  n'avait  jamais  été  signalée  dans  l'Europe  occidentale.  Mais 
le  doute  ne  m'est  plus  permis  à  la  suite  d'une  nouvelle  capture  faite 
en  Belgique  entre  1880  et  1885.  Suivant  M.  Ch.  délia  Faille,  une 
dizaine  de  ces  oiseaux  ont  été  pris  près  d'Anvers  par  un  tendeur, 
mais  il  ne  se  rappelle  plus  l'époque  exacte,  n'en  ayant  pas  tenu  note; 
l'une  de  ces  Calandres  nègres,  un  mâle  en  été,  se  trouve  dans  la 
collection  de  M.  délia  Faille  et  m'a  été  communiquée. 

Mœurs.  —  Les  mœurs  de  cet  oiseau  sont  encore  peu  connues,  mais 
il  est  probable  qu'elles  ressemblent  à  celles  des  autres  espèces  du 
môme  genre.  Ce  qui  est  certain,  c'est  qu'il  vit  dans  les  steppes  et  se 
nourrit  surtout  de  graines  de  plantes  salées.  Le  D*"  0.  Finsch,  qui  a 
observé  cette  espèce  dans  la  Sibérie  occidentale,  dit  que  c'est  un 
oiseau  très  attrayant  et  confiant,  qui  aime  à  faire  entendre  son  beau 
chant  en  se  posant  sur  un  monticule  ou  sur  une  pierre,  en  laissant 
ordinairement  pendre  les  ailes  tout  en  tenant  la  queue  relevée.  En 
s'envolant,  il  produit  un  bruit  d'ailes  particulier  et  s'élève  à  la  façon 
d'une  chauve-souris  mais  sans  interrompre  son  chant.  La  Calandre 
nègre  est  très  sociable  et  on  ne  la  rencontre  généralement  que  par 
petites  troupes  de  deux  à  dix  individus. 

Reproduction.  —  Celle-ci  doit  avoir  lieu  en  avril,  car  le  4  mai  le 
D'  Finsch  put  se  procurer  un  jeune  au  nid  déjà  assez  développé.  Le 
nid,  dit  Brehm,  est  grossièrement  fait  à  l'aide  de  quelques  brins  et 
contient  quatre  ou  cinq  œufs.  Ceux-ci  sont,  d'après  Thinemann,  d'un 
gris  rougeâtre  pâle  et  presque  entièrement  couverts  de  petites  et  de 
grandes  taches  jaunâtres  et  d'un  brun  rougeâtre  ;  ils  mesurent  23 
à  25  millim.  sur  18. 

GENRE    ClIIbi* 

COUEVITE.  —  CURSORIUS. 

Charàdrius  (part.),  Gm..  Syst.  tiat.  I,  p.  692  (1788). 

To.ME  II.  —  1894.  90 


—  744  — 

CoRSORius,  Lath.,  Ind.  Om.  Il,  p.  751  (1790). 
Tachydromus,  Illig.  Prodr.  p.  250  (1811). 
CuRSOR,  Wagl.  Syst.  av.  (1827). 

Car.  —  Bec  plus  court  que  la  tête,  un  peu  comprimé,  légèrement  voûté  et 
courbé  vers  la  pointe  ;  narines  basales,  ovalaires  ;  ailes  assez  longues,  aiguës, 
les  deux  premières  rémiges  égales  et  les  plus  longues  ;  queue  courte,  carrée  ; 
jambes  allongées,  dénudées  sur  les  deux  tiers  de  leur  étendue;  tarses  longs, 
grêles,  scutellcs  ;  doigts  épais,  assez  courts,  surtout  les  latéraux,  Tinterne 
plus  court  que  l'externe  ;  pouce  nul. 

ffab.  —  Ce  genre  est  représenté  en  Afrique,  dans  le  sud-ouest  de 
TAsie  et  dans  l'Europe  méridionale. 

139bis    _  Le  Courvite  gaulois. 
CURSORIUS  GALLICUS,  Bonap.  ex  Gmel. 

(PI.    182b) 

Pluvialis  morinellus  flavescens,  Gerini,   Om.  meth.  IV,  p.  69,  pi.  474  (1773). 

Charadrius  CURSOR,  Lath.  Gen.  Syn.  Suppl.  I,  p.  273(1787). 

Charadrius  GALLICUS,  Gmel.  Syst.  nat.  I,  p.  692  (1788). 

CuRSORius  EUROP^us,  Lath.  Ind.  Orn.  II,  p.  751  (1790). 

Charadrius  CORRIRA,  Bonnat.  Tabl.  Encycl.  p.  23  (1790). 

CuRSORius  iSABELLiNUS,  Mey.  Taschenb.  deuts.  Yogelh.  II,  p.  328  (1810). 

Tachydromus  gallicus,  lUig.  Prodr.  p.  250(1811). 

Tachydromus  EUROP^us.  Vieill.  N.  Dict.  d'hist.  7iat.  VIII,  p.  293  (1817). 

CuRSOR  ISABELLINUS,  Wagl.  Sy&t.  Av.  (1827). 

CuRSORius  GALLICUS,  Bonap.  Faun.  Ital.  Ucc.  Introd.  (1832), 

CuRSOR  EUROPyEUS,  Nauiïi.  Vog.  Deutschl.  VII,  p.  77  (1834). 

Tachydromus  ISABELLINUS,  Nilzsch,  Syst.  Pterylogr.  p.  201  (1840), 

CuRSORius  PALLiDUset  brachydactylus,  Brehm,  Yogelf.  p.  279  (1855). 

CuRSORius  JAMESONi,  Jerd.  B.  of  India,  II,  p,  875  (1863). 

Der  europaische  Rennvogel,  en  allemand. 

The  cream-coloured  Courser,  en  anglais. 

De  Rknvogel,  en  flamand. 

Taille  rO-^SO;  ailes  0,16, 

Description  des  deux  sexes  adultes.  —  Front  et  vertex  d'un  roux  isabelle  ; 
occiput  cendré  ;  nuque  noire  ;  large  sourcil  blanc  se  prolongeant  en  arrière 
et  contournant  le  noir  de  la  nuque  ;  derrière  l'œil  une  bande  noire  longeant 
le  sourcil  jusqu'à  la  nuque  ;  joues  d'un  roux  ocreux  clair  ;  gorge  blanchâtre  ; 
dessus  du  corps  et  ailes  d'un  roux  isabelle  plus  pâle  que  le  devant  de  la  tête  ; 
rémiges  et  couvertures  des  primaires  noires  ;  parties  inférieures  de  la  teinte 
du  dos  mais  plus  pâles  ;  bas-ventre  et  sous-caudales  blanchâtres  ;  queue  de 
la  couleur  du  dos  avec  toutes  les  rectrices,  excepté  les  deux  médianes,  mar- 


—  715 


It^^^^Ûi^liil)  Cô  iaw.n.^  w.  ^ 


quées  d'une  tache  noire  à  leur  extrémité  mais  terminées  de  blanchâtre.  Bec 
noir,  la  base  de  la  mandibule  inférieure  blanchâtre  ;  iris  brun  ;  pattes  d'un 
gris  livide. 

Jeune.  —  Dessus  de  la  tête  d'une  teinte  plus  jaunâtre  tachetée  de  brun  et 
lavée  de  cendré  à  la  nuque,  mais  sans  noir  ;  raie  sourcilière  d'un  blanc 
Isabelle  ;  parties  dorsales  d'un  roux  jaunâtre  varié,  surtout  aux  scapulaires 
et  aux  couvertures  des  ailes,  de  taches  et  de  traits  ani,'uleux  d'un  brun  oli- 
vâtre ;  parties  inférieures  plus  claires. 

Hab.  —  Le  Courvite  gaulois  n'est,  pour  l'Europe,  qu'un  visiteur 

_  accidentel ,  car  sa  véritable  patrie 


est  le  nord  de  l'Afrique  et  le  sud- 
ouest  de  l'Asie.  Les  captures  en 
Europe  sont  cependant  assez  fré- 
quentes :  M.  Harting  en  a  rele- 
vées vingt  et  une  aux  îles  Bri- 
tanniques, depuis  que  Lathem  a 
décrit  cet  oiseau.  Sur  le  conti- 
nent, on  a  pris  le  Courvite  en 
Allemagne  près  de  Darmstadt,  de  Mecklembourg,  de  Metz  {Borg- 
greve),  d'Eltfeld  sur  le  Rhin  {Bruch)  et  de  Ravensbourg  [de  Heuglin), 
en  Suisse  {Meisner  et  Schinz),  en  Hollande  près  d'Amsterdam  {Schlé- 
gel),  de  Dordrecht  en  1858  {mn  Bemmelen)  et  dans  les  bruyères 
d'Oirschot  en  1876  {Koller);  en  Belgique,  «il  y  a  quelques  années, dit 
M.  de  Selys-Longchamps,  on  a  tiré  en  automne  (septembre ,je  pense) 
un  Cursorius  gallicus  à  Othée,  chez  M.  Pety  de  Thozée,  gouverneur 
de  la  province  de  Liège,  qui  en  a  fait  gracieusement  don  à  M.  le  pro- 
fesseur Ed.  Van  Beneden  pour  l'Université  de  Liège  (1).  »  Les  appa- 
ritions de  cet  oiseau  sont  plus  fréquentes  dans  les  contrées  du  Midi  ; 
en  France,  il  a  été  tué  aux  environs  de  Paris,  de  Dunkerque,  de 
St-Omer,  de  Calais,  d'Abbeville,  d'Amiens,  de  Dieppe,  de  Fécamp 
{Degl.  et  Gerbe)  et  dans  les  départements  de  l'Aude,  de  l'Hérault  et 
des  Pyrénées^Orientales  {Lacrouf)  ;  en  Espagne,  dans  les  provinces 
de  Grenade  [Seoane),  de  Gérone  {Vayreda)  ei  près  de  Malaga  {^aun^ 
ders)  ;  en  Italie  on  a  fait  des  captures  de  cette  espèce  en  Piémont,  en 
Lorabardie,  en  Vénétie,  dans  l'Emilie,  en  Ligurie,  en  Toscane,  en 
Romagne  (Salvadori),  en  Sardaigne  {liiglioli),  en  Sicile  {Mnllwrbe), 
et  à  Malte  [Wright).  Il  no  paraît  avoir  été  observé  ni  en  Turquie,  ni 
en  Grèce,  mais  il  visite  accidentellement  les  provinces  orientales  de  la 


(1)  Omis,  1890,  i».  3;]3. 


—  716  — 

mer  Noire  {de  Nordmann).  Il  est  a  remarquer  que  presque  tous  les 
Courvites  observés  en  Europe,  ont  été  pris  en  automne. 

Cet  oiseau  niche  aux  îles  Canaries  (5oZ/e),dans  tout  le  nord  de  l'Afri- 
que {Loche,  etc.),  en  Egypte,  en  Nubie  {Shelley),  dans  le  Kordofan  {de 
Heuglin)  et  dsius  l'Abyssinie  {Rilppell).  Son  aire  de  dispersion  s'étend  à 
l'Est  en  AvSihie{Ehrenberg),  en  Palestine  (Tristram),  en  Perse,  dans  le 
Béloutchistan  (5/«n/br6?)  jusque  dans  le  nord-ouest  de  l'Inde  {Jerdon). 

Mœurs.  —  Le  Courvite  gaulois  est  un  vrai  habitant  des  déserts  ;  il 
recherche  les  endroits  les  plus  arides,  où  le  sol  fournit  à  peine  de  quoi 
nourrir  çà  et  là  quelques  maigres  touffes  d'herbe.  Après  la  reproduc- 
tion, il  mène  une  vie  errante  qui  l'entraîne  parfois  loin  de  sa  patrie, 
et  c'est  à  cette  cause  que  l'on  doit  attribuer  ses  apparitions  en  Europe. 

Du  mois  de  février  au  mois  de  juillet,  ces  oiseaux  vivent  par  cou- 
ples ;  on  les  voit  alors  courir  avec  une  rapidité  étonnante,  et  leurs 
pattes  se  meuvent  avec  une  telle  agilité  qu'on  ne  peut  les  distinguer  ; 
on  dirait, dit  A.  Brehm,  un  oiseau  sans  pattes,  mû  par  une  force  qu'on 
ne  peut  s'expliquer.  Tout  à  coup  il  s'arrête,  regarde  autour  de  lui, 
ramasse  quelque  chose  à  terre,  puis  reprend  sa  course  ;  on  peut  le 
suivre  à  distance  pendant  des  heures  sans  qu'il  s'envole.  Il  est  cepen- 
dant bon  voilier,  et  son  vol  est  plus  rapide  que  celui  du  Vanneau.  Il 
est  très  farouche  et,  dit  Belle,  «  il  fuit  le  chasseur  dès  que  celui-ci 
fait  mine  de  s'avancer.  Pour  l'approcher,  il  faut  tourner  tout  autour 
de  lui,  en  décrivant  de  grands  cercles,  que  l'on  rétrécit  de  plus  en 
plus,  et  en  n'ayant  pas  l'air  de  faire  attention  à  lui  ;  mais  il  faut  encore 
une  grande  adresse  pour  pouvoir  le  tuer  lorsqu'il  court.  »  Le  Courvite 
doit  être  un  oiseau  bien  silencieux,  car  aucun  auteur  ne  parle  de  sa 
voix  ;  Favier  cependant,  qui  a  eu  longtemps  un  de  ces  oiseaux  en 
captivité,  rend  son  cri  par  re7^ere7\  C'est  un  insectivore  qui  vit  d'in- 
sectes, de  larves,  de  vers  et  surtout  de  sauterelles. 

Reproduction.  —  Elle  a  lieu  dans  le  nord-ouest  de  l'Afrique  en  mai 
et  en  juin,  en  Egypte  en  mars,  et  en  avril  dans  l'Inde;  Hume  dit  avoir 
trouvé  dans  l'Inde  des  œufs  de  cet  oiseau  depuis  mars  jusqu'en  août, 
suivant  la  saison  des  pluies.  Le  nid  est  une  simple  dépression  creusée 
dans  le  sol,  parfois  garnie  de  quelques  brins,  et  placée  à  l'abri  d'une 
broussaille  ou  d'une  touffe  d'herbe.  La  ponte  est  de  deux  ou  trois 
œufs.  Ceux-ci  sont,  d'après  Brehm  et  Paessler,  d'un  jaune  ocreux  ou 
d'un  jaune  sable,  marqués  de  taches  et  de  traits  cendrés  et  brunâtres, 
rassemblés  surtout  vers  le  milieu  de  l'œuf  où  ces  macules  forment 
une  espèce  de  ceinture;  ils  mesurent  environ  36  millim.  sur  27. 


ADDITIONS  ET  CORRECTIONS 

1.  Aquila  naevia  (t.  I.  p.  16). —  Un  jeune  a  été  tué  à  Bernissart 
en  octobre  1870  [de  Warrùi)^ 

2.  Circus  macrurus  (t.  I,  p.  90).  —  Une  femelle  a  été  tuée  le 
l*""  mai  1888  à  Beauvechain  près  de  Wavre.  —  Un  individu  de  cette 
espèce  a  également  été  capturé  le  23  avril  1866  dans  les  dunes  de 
Noordwijk,  en  Hollande,  suivant  M.  Koller. 

3.  Lanius  excubitor  var.  Major  (t.  I,  p.  188).  —  M.  Croe- 
gaert  m'informe  qu'un  L.  major  a  été  pris  près  d'Anvers  en  novem- 
bre 1884,  et  un  autre  à  Deurne,  au  commencement  d'octobre  1888  ; 
M.  le  comte  J.  de  Hemptinne  en  possède  un  sujet  tué  près  de  Gand 
en  1878.  11  y  a  donc  lieu  de  supposer  que  cette  variété  se  montre  en 
Belgique  plus  souvent  qu'on  ne  l'a  cru. 

4.  Lanius  minor  (t.  I,  p.  189).  —  Cet  oiseau  est  moins  rare 
dans  notre  pays  qu'on  ne  l'avait  pensé  ;  il  se  montre  assez  régulière- 
ment dans  certaines  parties  du  Hainaut,  surtout  près  de  Bernissart. 
Suivant  M.  Willain,  il  serait  de  passage  régulier  dans  les  environs 
de  Mons.  Le  D''  G.  Du  Pré  a  pris  deux  mâles  à  Etterbeek  en  1874. 

5.  Pastor  roseus  (t.  I,  p.  247).  —  Trois  nouvelles  captures  à 
signaler,  dont  une  à  Zwijndreclit  près  d'Anvers,  mais  déjà  ancienne. 
Un  jeune  sujet  a  été  tué  en  septembre  1882  près  de  Bruxelles,  un 
autre  a  été  pris  à  Ciergnon  lez-Dinant,  le  14  novembre  1884. 

6.  Turdus  varius  (I,  p.  269).  —  Cette  espèce  a  été  prise  sept  ou 
huit  fois  en  Belgique  ;  les  dernières  captures  ont  été  faites  à  Beveren 
le  13  octobre  188.")  et  signalée  par  M.  Crocgaert,  et  à  Adeghem  près 
Eccloo  en  octobre  1893;  ce  dernier  sujet  est  bien  adulte  et  se  trouve 
dans  la  collection  du  marquis  de  Wavrin. 

7.  Turdus  naumanni  (I,  p.  282).  —  Je  crois,  après  avoir  de 
nouveau  examiné  une  série  de  ces  Grives,  do  voir  nie  rallier  à  la  manière 
do  voir  de  MM.  von  Middcndorff  et  Radde.  Pour  ces  naturalistes,  le 
T.  nmcnKtnni  n'est  pas  une  espèce  distincte,  mais  un  T.  ruficollis  dans 
son  premier  i)lumage  de  noce.  Il  est  à  reman|iior  que  les  T.  ru/icollis 
dans  leur  premier  plumage,  ressemblent  à  s'y  méprendre  aux  jeunes 
T.  fu.scaêus,  mais  chez  ce  dernier  le  dessous  de  la  queue  est  cendré, 
tandis  qu'il  est  roux  chez  les  7'.  ru/ico/h's  et  ndumanni.  On  ne  doit 
pas  oublier  non  plus  que  chez  les  vieux  T.  ru/icollis,  non  seulement  la 
gorge  et  la  poitrine  sont  rous.ses,  mais  cncoi-t^  le?  flancs  sont  d'un  loux 


—  748  - 

vif.  En  résumé,  le  T.  naumanni  est  un  jeune  T.  ruficollis  dans  son 
premier  plumage  de  noce,  et  le  T.  fuscatus  est  une  espèce  parfaite- 
ment distincte. 

8.  Turdus  swainsonii  (I,  p.  294).  —  Le  marquis  de  Wavrin 
possède  un  T.  swainsonii  type,  pris  près  de  Chiny  (Luxembourg  belge) 
entre  le  15  et  le  20  octobre  1885.  C'est  la  première  fois  que  la  forme 
type  a  été  prise  en  Belgique. 

9.  Turdus  obscurus  (I,  p.  297).  —  Un  individu,  jeune  encore, 
a  été  tué  au  mois  d'octobre  1886  à  La  Hulpe,  à  quelques  lieues  de 
Bruxelles.  Un  sujet  presque  adulte  a  été  pris  à  Mirwart  près  Grupont 
en  octobre  1891. 

10.  Pratincola  rubicola  (I,  p.  316).  —  Un  certain  nombre  de 
ces  oiseaux  passent  l'hiver  en  Belgique,  quand  la  saison  n'est  pas  trop 
rigoureuse. 

11.  Ruticilla  caerulecula  (I,  p.  329).  —  M.^roegaert  dit  en 
avoir  vu  deux  exemplaires  pris  aux  environs  d'Anvers;  M.  E.  Claes  a 
annoncé  une  capture  à  Genck,  Limbourg  belge,  au  printemps  de  1887. 

12.  Accentor  collaris  (I,  p.  344).  —  Un  sujet  a  été  pris  près  de 
Bruxelles  en  septembre  1884. 

13.  Acrocephalus  aquaticus  (I,  p.  386).  —  Cette  espèce  n'est 
pas  aussi  rare  en  Belgique  que  je  l'avais  cru.  AL  E.  Claes  l'a  sou- 
vent rencontrée  en  automne  aux  environs  de  Hasselt,  où  il  lui  est 
arrivé  d'en  voir  trois  et  quatre  le  même  jour  et  souvent  sans  les  cher- 
cher, pendant  qu'il  chassait  à  la  Bécassine. Deson  côté,  M.  C. Fontaine 
dit  que  cet  oiseau  ne  doit  pas  être  bien  rare  dans  la  vallée  de  la 
Dendre;  un  couple  a  niché  en  1875  près  du  moulin  de  Papignies,  et 
en  1879  une  nichée  se  trouvait  dans  la  même  localité. 

14.  Regulus  ignicapillus  (L  p.  419).  —  Niche  communément 
dans  le  Luxembourg  belge,  où  le  Roitelet  huppé  est  rare  et  même 
parfois  inconnu. 

15.  Motacilla  flava  var.  Melanocephala  (I,  p.  466).  — 
M.  Croegaert  rapporte  qu'on  en  prend  presque  tous  les  ans  en  octobre 
quelques  exemplaires  en  Flandre,  près  de  Beveren  ;  d'après  M.  G. 
Vincent  on  Tobserve  quelquefois  en  été  aux  environs  de  Bruxelles. 
Je  n'ai  pas  eu  l'occasion  de  voir  des  sujets  de  cette  variété  pris  en 
Belgique,  mais  je  suis  bien  convaincu  que  les  oiseaux  que  l'on  prend 
pour  des  M.  melanocephala  ne  sont  que  des  il/,  cinereocapilla  à  tête 
foncée  ou  plutôt  des  M.  horealis  (voyez  la  remarque  p.  468).  La  vraie 
M.  melanocephala  ne  se  montre  pas  en  Belgique. 


—  719  - 

16.  Motacilla  flava  var.  Rayi  (I,  p.  466).  —  M.  E.  Claes  a 
annoncé  la  capture  d'un  sujet  de  cette  variété  près  de  Hasselt,  le 
11  septembre  1884. 

17.  Anthus  cervinus  (I,  p.  482).  —  M.  de  Selys-Longchamps 
a  signalé  trois  sujets  de  cette  espèce  pris  à  Waremme  en  octobre  1883 
et  1885.  M.  Croegaert  a  connu  trois  captures  faites  en  octobre  près 
de  Beveren,  en  Flandre. 

18.  Anthus  richardi  (I,  p.  494).  —  M.  Croegaert  dit  qu'en  sep- 
tembre 1866,  il  a  pu  se  procurer,  en  huit  jours  de  temps,  six  de  ces 
oiseaux  dans  les  environs  d'Anvers. 

19.  Melanocorypha  brachydactyla  (I,  p.  512).  —  Pris  au 
Kiel  près  d'Anvers  en  octobre  1880  {Croegaert). 

20.  Melanocorypha  calandra  (I,  p.  517).  —  Deux  sujets  ont 
été  pris  au  filet  près  de  Bruxelles  en  novembre  1882. 

21.  Otocorys  alpestris  (I,  p.  525). —  Contrairement  à  ce  qui  a 
été  dit,  cette  espèce  est  de  passage  régulier  en  Belgique  et  paraît 
même  hiverner  en  petit  nombre  dans  les  parties  septentrionales  du 
pays.  On  en  prend  tous  les  ans  dans  les  Flandres  et  dans  le  Limbourg 
et  souvent  aux  environs  de  Bruxelles.  M.  Xavier  Raspail  m'informe 
qu'il  a  tué  de  ces  oiseaux  dans  les  prairies  de  Nieuport-Bains  aux  dates 
suivantes  :  20  novembre,  5, 10  et  17  décembre  1877,22  février,  25  mars 
et  8  avril  1878. 

•^2.  Plectrophanes  lapponicus  (I,  p.  532).  —  M.  le  comte  J. 
de  Ilemptinne  m'informe  que  plusieurs  de  ces  oiseaux  ont  été  pris  en 
octobre  1887  près  de  Comblain-au-Pont  (Liège);  M.  A.  Duvivier  pos- 
sède un  mâle  tué  près  d'Alost  le  19  octobre  de  la  même  année,  et 
M.  Croegaert  dit  qu'on  en  prend  tous  les  ans  en  octobre  quelques 
exemphiircs  aux  environs  d'Anvers. 

23.  Emberiza  cirlus  (I,  p.  547).  —  Deux  sujets  de  cette  espèce 
ont  été  tués  près  d'Anvers,  mais  il  y  a  déjà  longtemps. 

24.  Emberiza  cia  (I,  p.  550).  —  Ce  rare  oiseau  pour  notre  pays 
a  été  pris,  d'après  M.  Croegaert,  deux  fois  aux  environs  d'Anvers  : 
au  Kiel  en  octobre  1875  et  à  Deurne  en  octobre  1886.  Un  sujet  a 
également  été  pris  aux  environs  de  Bruxelles  au  printemps  de  1887, 
et  un  autre  près  de  Dinant. 

25.  Petronia  stulta  (I,  p.  577).  —  Suivant  M.  L.  De  Pauw,  un 
sujet  de  ccti*;  cspiice  a  été  pris  pi'ès  d'Alost  en  1S7(). 

26.  Linaria  (I,  p.  597).  —  M.  Sharpe  attribue  erronément  aux 
Linottes  le  terme  générique  d'^caw^/iîA",  Bechst.(Ca/.  BirdsBy^t.  Mus, 


—  720  — 

XII,  p.  235).  En  1803,  Bechstein  a  donné  pour  type  à  son  genre 
Acanthis  le  Fringilla  carduelis^  Lin.  [Ornith.  Taschenb  p.  125)  ; 
cette  dénomination  générique  ne  peut  donc  nullement  s'appliquer 
aux  Linottes  et  aux  Sizerins,  vu  qu'elle  a  été  faite  pour  les  Chardon- 
nerets. 

27.  Linaria  montana  ou  flavirostris  (I,  p.  602).  —  M.  L. 
van  Delft  a  écrit  l'intéressante  note  suivante,  qui  complète  ce  que  j'ai 
dit  au  sujet  du  séjour  de  cette  espèce  en  Belgique.  «  La  Linotte  de 
montagne  commence  à  se  montrer  par  petites  bandes  de  dix  à  quinze 
individus  dans  le  schoor  de  Santvliet  (nord  de  la  province  d'Anvers) 
vers  la  fin  de  septembre,  lorsque  les  Salicornia  herhacea  sont  en 
semence,  graine  dont  ces  Linottes  sont  très  friandes.  Bientôt  les  ban- 
des commencent  à  se  réunir,  et  forment  en  octobre  une  masse  de  600 
à  800  individus.  Plus  tard,  lorsque  les  Aster  tripolium  sont  en 
semence,  la  bande  s'y  jette  aussi,  allant  des  Salicornia  aux  Aster,.,. 
Vers  la  fin  de  février,  les  graines  de  prédilection  commençant  à  dimi- 
nuer, la  bande  devient  moins  nombreuse,  et  en  mars  on  ne  rencontre 
plus  que  quelques  retardataires  qui  ne  tardent  pas  à  disparaître  à 
leur  tour  (1).  »  Il  résulte  de  ce  qui  précède,  que  la  Linotte  de  monta- 
gne hiverne  régulièrement  et  en  grand  nombre  dans  le  nord  de  la 
province  d'Anvers. 

28.  Chrysomitris  spinus  (I,  p.  617).  —  Cet  oiseau  niche  régu- 
lièrement dans  la  province  d'Anvers,  surtout  à  Brasschaet,  et  proba- 
blement aussi  dans  les  Ardennes,  où  on  a  vu  des  jeunes  et  un  grand 
nombre  d'adultes  en  juillet  1887  ;  durant  l'été  de  la  même  année,  on  a 
également  vu  des  jeunes  aux  environs  de  Bruxelles.  Suivant  M.  le 
marquis  de  Wavrin,  un  nid  avec  six  jeunes  a  été  trouvé  le  26  août 
1887  à  Gavere-lez-Gand. 

29.  Loxia  curvirostra  (I,  p.  639).  —  On  sait  aujourd'hui  que 
quelques  couples  nichent  en  Belgique  ;  M.  le  marquis  de  Wavrin  a 
trouvé  un  nid  avec  quatre  jeunes  près  de  Gand  le  19  février  1889  ;  la 
même  année,  plusieurs  couples  ont  niché  près  d'Anvers.  Les  obser- 
vations de  ces  dernières  années  font  supposer  que  ce  Bec-croisé  est 
plus  ou  moins  sédentaire  dans  le  pays. 

30.  Loxia  pityopsittacus  (I,  p.  644).  —  Une  petite  volée  de 
ces  oiseaux  a  visité  la  Belgique  en  1887;  à  ma  connaissance,  deux 


(1)  Voy.    Compte  rendu  des  observ.  Orn.,  dans  le  Bull,  du  Mus.  roy.  d'hist.  nat.    de  Belg. 
t.  IV,  p.  198. 


—  721  - 

mâles  ont  été  tués  à  Forest-lez-Briixelles,  et  un  couple  près  de  Wes- 
terloo. 

31.  Loxia  bifasciata  (I,  p.  649).  —  En  1889,  de  petites  bandes 
de  ces  oiseaux  ont  été  vues  dans  les  provinces  de  Liège  et  d'Anvers. 
«  La  première  capture,  dit  i\L  Croegaert,  a  été  faite  près  d'Anvers  le 
8  juin,  et  depuis  lors  jusqu'à  la  fin  de  l'année  on  a  toujours  remarqué 
de  ces  oiseaux  dans  les  bois  de  sapins  de  Schooten  et  des  environs  ;  à 
plusieurs  reprises  on  en  a  présenté  de  vivants  au  marché.  » 

32.  Tichodroma  muraria  (I,  p.  6G0).  —  M.  Boucard  a  pris  sur 
le  plateau  de  Koekelberg  à  Bruxelles,  un  couple  de  cette  rare  espèce: 
la  femelle  fut  prise  le  7  et  le  mâle  le  11  juillet  1891  ;  ce  renseigne- 
ment m'a  été  fourni  par  M.  J.Opdenbosch,  préparateur  au  Musée,  qui 
a  été  chargé  d'empailler  ces  oiseaux. 

33.  Picus  médius  (I,  p.  689).  —  Un  sujet  a  été  tué  à  Deurne  en 
1888. 

34-  Picus  minor  (I,  p.  692).  —  Suivant  un  renseignement  de 
M.  délia  Faille,  ce  Pic  a  niché  à  Deurne  (Anvers)  en  1886  et  en  1887. 
M.  Croegaert  dit  qu'il  y  niche  tous  les  ans. 

35.  Coracias  garrula  (I,  p.  721).  —  Un  individu  de  cette  espèce 
a  été  pris  vivant  près  de  Taviers  en  1885  ;  deux  autres,  dont  un  a  été 
tué,  se  trouvaient  à  Brasschaet  (Anvers)  le  3  juin  1889;  enfin,  un 
magnifique  exemplaire  a  été  tué  près  de  Liège,  dans  le  courant  de 
mai  1894. 

36.  Merops  apiaster  (I,  p.  731).  —  Dans  les  premiers  jours  de 
mai  1891,  m'écrit  le  docteur  Clerfaye,  une  bande  de  dix  à  quinze 
Guêpiers  est  venue  s'abattre  sur  la  lisière  du  bois  d'Havre  près  de 
Mons,  et  il  m'envoie  en  même  temps  un  beau  mâle  pour  le  Musée. 

37.  Syrrhaptes  paradoxus  (II,  p.  27).  —  C'est  le  11  mai  1888 
que  les  Syrrhaptes  firent  une  nouvelle  apparition  en  Belgique.  A  cette 
date,  une  volée  d'une  trentaine  de  ces  oiseaux  vint  s'abattre  sur  le  ter- 
ritoire de  Braine-l'Allcud,  et  deux  femelles  furent  tuées  ;  quelques 
jours  plus  tard  on  en  tua  encore  six.  Dans  les  premiers  jours  de  juin 
de  la  même  année,  une  troupe  s'est  abattue  aux  environs  du  camp  de 
Brasschaet,  et  un  de  ces  oiseaux  s'est  cassé  une  aile  contre  les  lils  du 
télégraphe.  Vers  le  15  mai,  une  troupe  d'une  quarantaine  d'individus 
vint  élire  domicile  dans  les  dunes  d'Adinkorke.  Le  19  février  1889, 
un  mâle  et  deux  lèmcUes  furent  tues  à  Bouchout  (Anvers).  Bref,  pen- 
dant ces  deux  années  on  en  prit  un  peu  partout  :  dans  le  Limbourg 
belge,  dans  le  Brabant,  la  province  d'Anvers  et  surtout  dans  les  dunes 

Tome  II.  —  1894.  91 


—  722  — 

de  la  Flandre  où  ils  ont  peut-être  niché.  M.  L,  Michels  m'assure  que 
ces  oiseaux  ont  niché  à  Lichtaert  (Anvers),  et  M.  L.  De  Pauw  me  dit 
qu'ils  ont  également  niché  à  Merchtem  en  1889.  Les  Syrrhaptes  ont  dû 
être  fort  nombreuXjCar  l'hiver  1888-89  on  en  voyait  chez  tous  les  mar- 
chands de  volaille,  et  à  la  criée  de  Bruxelles  on  les  vendait  parfois 
à  fr.  1,20  et  80  centimes  la  pièce.  Je  n'affirme  cependant  pas  que  tous 
ces  oiseaux  aient  été  pris  dans  le  pays,  car  il  nous  arrive  beaucoup  de 
gibier  de  l'étranger. 

38.  .^gialitis  hiaticula  (II,  p.  113).  —  Niche  sur  nos  côtes, 
de  même  que  Ïj^.  cantianus  ;  M.  X.  Raspail  m'écrit  qu'il  a  trouvé 
plusieurs  fois  les  œufs  de  ce  dernier  sur  la  plage  de  Nieuport-Bains, 
où  ils  étaient  déposés  sur  un  amas  de  débris  de  coquilles. 

39.  Herodias  garzetta(II,  p.  331).—  M.  X.  Raspail  a  tué  un 
sujet  de  cette  espèce  le  4  avril  1878  le  long  du  chenal  de  Nieuport. 

40.  Nycticorax  griseus  (II,  p.351) .  —  M.  le  Marquis  de  Wavrin 
me  confirme  ce  qu'il  m'a  dit  précédemment  au  sujet  de  la  reproduc- 
tion de  cet  oiseau  en  Belgique.  Le  Bihoreau  a  niché  plusieurs  fois  à 
Thisselt-Blaesvelt,  notamment  en  1885  et  en  1886. 


RENSEIGNEMENTS  BIBLIOGRAPHIQUES 

La  vaste  répartition  géographique  de  certaines  espèces  et  l'étude 
des  variétés  climatériques,  m'ont  obligé  à  avoir  recours  à  une  quantité 
de  recueils  périodiques  et  d'ouvrages  d'ornithologie  s'occupant  d'oi- 
seaux de  toutes  les  parties  du  monde.  Il  en  résulte  qu'une  liste  biblio- 
graphique équivaudrait  à  un  catalogue  général  des  publications 
ornithologiques  depuis  1766,  à  l'exclusion  seulement  de  certaines 
monographies.  De  pareils  catalogues  ont  été  faits  et  j'y  renvoie  le 
lecteur  (1). 

Je  me  bornerai  donc  à  signaler  les  pubhcations  nationales  ayant 
rapport  aux  oiseaux  de  notre  pays.  En  tête  vient  la  Faune  belge  de 
M.  Edm.  de  Selys-Longchamps  (1  vol.  in-S»,  Liège  1812).  C'est  le 
point  de  départ  de  nos  connaissances  sur  les  vertébrés  indigènes,  et 
cette  faune  a  considérablement  facilité  les  travaux  ultérieurs.  JNI.  de 
Selys-Longchamps  a  publié  depuis  diverses  notices  sur  des  espèces 
indigènes  ou  nouvelles  pour  le  pays,  qui  sont  dispersées  dans  les 
Mémoires  et  dans  les  Bulletins  de  V  Académie  royale  de  Belgique. 
Il  y  a  encore  à  mentionner  du  même  auteur  :  Catalogues  des  oiseaux 
des  environs  de  Liège  (dans  le  Dict.  géogr.  de  Ph.  Vandermaelen, 
Bruxelles  1833);  Mammifères,  oiseaux  et  reptiles  de  Belgique 
(dans  Patria  helgica,  Brux.  1873). 

En  1851,  feu  mon  père  commença  la  publication  de  ses  Planches 
coloriées  des  oiseaux  de  la  Belgique  et  de  leurs  œufs  (3  vol.  Bru- 
xelles 1851-1860).  Comme  le  titre  l'indique,  c'est  plutôt  un  ouvrage 
iconographique,  aussi  le  but  principal  de  l'auteur  était  de  faire  connaî- 
tre les  oiseaux  et  leurs  œufs  par  de  bonnes  figures  coloriées  à  la  main, 
et  de  faciliter  ainsi  l'étude  des  espèces  indigènes  (2);  chaque  planche 
est  cependant  accompagnée  4'une  page  de  texte  comprenant  la  syno- 
nymie spécifique  et  quelques  renseignements  sur  l'habitat,  les  mœurs 
et  la  reproduction. 

Vient  ensuite  \2^  Mono  g  rapine  des  oiseaux  de  la  Belgique  itar  ]e 
baron  F.  Fallon  (1  vol.  in-8°,  Namur,  1875)  ;  excellent  résumé,  mais 
l'absence  de  descriptions  et  do  figures  rend  ce  volume  peu  praticjuo 

(1)  Voy.  particulièrement:  Giobcl,  Thésaurus  oniitholo^^iiT  [Z  vol.  in-S«.  Leii^zig  1672-77); 
Zoologie  al  Record  (Londoii  1864  à  1892). 

(2)  Un  certain  nombre  de  ics  planches  ont  été  utilisées  dans  l'atlas  du  présent  ouvrai:;c,  ainsi 
que  toutes  celles  représentant  les  œufs,  ce  (|ui  e.\pli(|ue  le  sini^ulicr  système  tic  numérolatîe  de 
ces  derniers;  les  numéros  des  œufs  rc.iiL-snondenf  en  t^lïct  an  numéio  delà  pl.inch»  figurant 
l'oiseau  dans  l'ouvrage  de  mon  père. 


—  724  — 

pour  les  débutants.  Le  D'  C.  Bamps,  dans  deux  brochures  sur  les 
OiseauûG  des  environs  de  Hasselt  (1883  et  1886)  a  fourni  quelques 
renseignements  utiles  sur  les  espèces  observées  dans  son  arrondisse- 
ment. Parmi  mes  travaux  personnels  s'occupant  d'oiseaux  indigènes, 
je  signalerai  :  1°  Conspectus  systematicus  et  geographicus  avium 
Europœarum  (brochure  in-8°,Brux.l871)  ;  2°  Histoire  populaire  des 
animaux  utiles  de  la  Belgique^  mammifères,  oiseaux,  reptiles,  batra- 
ciens, insectes  et  arachnides  (1  vol.  in-12  illustré,  nouv.  édition,  Bru- 
xelles 1889)  ;  3°  Les  animaux  nuisibles  delà  Belgique,  mammifères, 
oiseaux  et  reptiles  (1  vol.  in-12  illustré,  Brux.  1893). 

En  février  1885,  les  délégués  belges  du  Comité  ornithologique 
international  et  permanent  (1)  adressèrent  un  appel  à  tous  les  ama- 
teurs et  connaisseurs  d'oiseaux,  afin  d'établir  dans  différentes  parties 
du  pays  des  stations  d'observation.  A  la  suite  de  cet  appel,  je  publiai 
une  Revue  des  oiseaux  observés  en  Belgique  (danVle  Bulletin  du 
Musée)  accompagnée  de  quelques  détails  sur  leur  séjour  dans  le  pays, 
afin  de  servir  de  guide  aux  observateurs. 

Peu  d'amateurs  répondirent  à  notre  appel,  mais  en  1886  je  pus 
cependant  publier  les  observations  faites  en  1885.  Ces  observations 
furent  continuées  jusqu'en  1888,  mais  alors  il  y  eut  un  relâchement 
général  et  je  ne  pus  parvenir  à  trouver  des  collaborateurs  dans  d'au- 
tres parties  du  pays.  Les  naturalistes  ou  amateurs  qui  ont  collaboré 
au  Compte-rendu  des  observations  ornithologiques  sont  :  pour  An- 
vers :  M.  A.  Croegaert;  pour  Bruxelles  :  MM.  A.  Duvivier,  Th. 
Roels,  G.  Vincent  et  fils;  pour  Carlsbourg  (Luxembourg)  :  les  frères 
Athimus  et  Macédone  ;  pour  Florenne  :  M.  l'abbé  J.  Cabeau  ;  pour 
Hasselt  :  M.  E.  Claes;  pour  Papignies  :  M.  C.  Fontaine;  pour 
Taviers  :  M.  E.  Wautier;  pour  Waremme  :  M.  E.  de  Selys-Long- 
champs.  Dans  les  phares  de  nos  côtes  des  observations  superficielles 
ont  été  faites  par  MM.  F.  Liitzenrath,  S.  Pollet,  E.  Stocker,  Van 
Landtschoot  et  A.  Vermorke,  tous  chefs-gardes  des  phares. Des  ren- 
seignements isolés  m'ont  encore  été  fournis  par  MM.  Ch.  délia  Faille, 
le  comte  J.  de  Hemptinne,  Aug.  Meuris,  L.  van  Delft  et  le  marquis 
de  Wavrin.  Je  réitère  à  tous  ces  collaborateurs  mes  sincères  remer- 
ciements. 

Les  observations  de  1885  et  de  1886  ont  été  publiées  dans  le  Bul- 
letin du  Musée  royal  dliist.  nat.  de  Belg.  (t.  IV  et  V),  celles  de 
1887-89  dans  VOrnis  (t.  VI,  1890). 

(1)  M.  le  baron  Edm.  de  Selys-Longchamps  et  moi. 


TABLE  SYSTÉMATIQUE 

DU  TOME  SECOND 


1>A0ES 

ORDRE  V.  —  Les  Girateurs  ou  Pigeons     ...          .          \ 

Famille  des  Colombidés 3 

Genre  XCIII.  —  Colombe.  —  Columba ....  .4 

Colombe  ramier.  —  Columba  palumbus  et  Var.  Cashtis 4 

—  colombin.  —     —       omas  et  Var.  Eversnianni 9 

—  déroche.  —     —       livia  eivdiV.Rupestris 13  et  14 

Genre  XCIV.  —  Tourterelle.  —  Turtur 19 

Tourterelle  vulgaire.  —  Turtur  vulgaris 20 

ORDRE  VI.  —  Les  Gallinacés 24 

Famille  des  Ptéroclidés 25 

Genre  XCV.  —  Syrrhapte.  —  Syrrhaptes 26 

Syrrhapte  paradoxal.  —  Syrrhaptes paradoxus 27 

Famille  des  Tétraonidés 35 

Genre  XCVL  —  Tétras.  —  Tetrao 35 

Tétras  auerhan  ou  urogalle.  —  Tetrao  urogallus 36 

—  à  queue  fourchue.                      —     tetrix 43 

Genre  XCVIL  —  Gelinotte.  —  Bonasa 50 

Gelinotte  des  coudriers.  —  Bo7iasa  betuUna ...  50 

Famille  des  Phasianidés 54 

Genre  XCVIIL  —  Faisan.  —  Phasianus 55 

Faisan  vulgaire  ou  de  Colchide.  —  Phasianus  colchicus .55 

—  —      Var.  Shaioi,  Persicus,  Decollatus,  Sladeni,  torquatus  ....  56 

—  —      Var.  Mo7igolicus,  Chrysomelas  et  Forynosatius 56 

Famille  des  Perdicidés 64 

Genre  XCIX.  —  Perdrix.  —  Caccabis 64 

Perdrix  rouge.  —  Caccabis  rubra 64 

Genre  C.  —  Perdrix  proprement  dite.  —  Perdix 69 

Perdrix  grise.  —  Perdix  cinerea g9 

Genre  CL  —  Caille.  —  Coturnix 75 

Caille  ordinaire.  —  Coturnix  communis ...  76 

ORDRE  VII.  —  Les  Ecrassiers  coureurs 82 

Famille  des  Otidés 83 

Genre  CIL  —  Outarde.  —  Olis.                     83 

Outarde  barbue.  —  Otis  tarda 84 

—  canepetière.  —  Otis  tetrax 89 

—  de  Macquocn.  —  Otis  maqueeni 95 

Famille  des  Charadriidés 98 

(iENRK  cm.  —  ŒDHNi-;ME.   —    (EoiCNEMUS.  .99 

Œdicnèmc  criard.  —  Œdicnentus  scolapax.                                                         .  100 

Genre  CIV.  —  Pluvier.  —  Charadrius 104 


—  726  — 

PAGES 

Pluvier  doré.  —  Charadrius  aureus 105 

Genre  CV.  —  Guiqnard.  —  Eudromias 109 

Pluvier  guignard.  —  Eudromias  morinellus 109 

Genre  CVI.  —  Gravelot.  —  ^GiALiTis 113 

GrBiVeloi  on  Flayler  k  collier.  —  jEgialitis  torquatus 113 

Petit  Pluvier  à  collier.  —  jEgialitis  dubius 117 

Pluvier  de  Kent.  —  J^gialitis  cantianus 121 

Genre  CVII.  —  Squatarole.  —  Squatarola 124 

Squatarole  à  ventre  noir,  —  Squatarola  helvetica.     ...  .....  125 

Genre  G VIII.  —  Vanneau.— Vanellus 128 

Vanneau  huppé.  —  'Vanellus  vulgaris 129 

Genre  CIX.  —  Tourne-pierre.  —  Strepsilas 133 

Tourne-pierre  à  collier.  —  Strepsilas  interpres 133 

Genre  ex. —HuîTRiER.  —  H^MATOPUS 136 

Huîtrier  ostralège  ou  pie.  —  Hcematopus  osiralegus  et  var.  Osculans     .     .  .137 

Famille  des  Glaréolidés 142 

Genre  CXI.  —  Glaréole.  —  Glareola 143 

Glaréole  à  collier.  —  Glareola  torquata ' 143 

Famille  des  Scolopacidés 148 

Genre  CXII.  —  Sanderling.  —  Calidris 149 

Sanderling  des  sables.  —  Calidris  arenaria 150 

Genre  CXIII.  —  Bécasseau.  —  Tringa 154 

Bécasseau  canut.  —  Tringa  canutus 154 

—  maritime.  —  Tringa  maritima 159 

—  cocorli.  —  Tringa  subarquata 162 

—  variable.  —     —  cinclus 166 

—  minule.  —       —  minuta  et  var.  RuficoUis     .^ 171 

—  de  Temminck.  —  Tringa  temmincldi 175 

Genre  CXIV.  —  Limicole.  —  Limicola 178 

Limicole  platyrhynque.  —  Limicola  platyrhyncha 179 

Genre  CXV.  —  Combattant.  —  Machetes 182 

Combattant  querelleur.  —  Machetes  pugnax 183 

Genre  CXVI. — Chevalier.  —  Totanus 188 

Chevalier  à  pieds  verts.  —  Totomis  ^fZoWts 188 

—  stagnatile.  —  Totanus  stagnatilis 193 

—  sombre.  —  Totanus  fuscus 197 

—  gambette.  —  Totanus  calidris 202 

—  Sylvain .  —  Totanus  glareola 207 

—  cul-blanc.  —  Totanus  ochropus  .     .  211 

Genre  CXVII.  —  Guignette.  —  Actitis 214 

Guignette  vulgaire.  —  Actitis  guinetta 215 

—  grivelée. —       —     macularius 218 

Genre  CXVIII.  —  Bécassine.  —  Gallinago 222 

Bécassine  double.  —  Gallinago  média 223 

—  ordinaire.  —  Gallinago  cœlestis 226 

—  Jacquet.    —  —       galimila 231 

Genre  CXIX.  —  Bécasse.  —  Scolopax 234 

Bécasse  ordinaire.  —  Scolopax  rusticola 234 

Genre  CXX.  —  Barge.  —  Limosa 239 


—  727  — 

,  .  PAGES 

a  queue  noire. — Li7nosa  nielanura  et  v&r.  Melanuroides 240 

—  rousse.  —  —      ru  fa  et  var.  Baueri 244 

Genre  CXXI.  —  Courlis.  —  Numenius 249 

Courlis  arqué  ou  cendré.  —  Numenius  arquatus  et  var.  Lineatus 249-50 

—  à  bec  grêle.  —  Numenius  tenuiroslris 254 

—  corlieu.  —  Numenius  phueopus  et  var.  Variegata 257 

Genre  CXXII.  —  Phalarope,  —  Phalaropus 261 

Phalarope  platyrhynque.  —  Phalaropus  fulicarius  ...  261 

—  hyperboré.  —  Phalaropus  cinereus. 2C6 

Famille  des  Récurvirostridés    ...  269 

Genre  CXXIII.  —  Avocette.  —  Recurvirostra 269 

Recurvirostre  avocette.  —  Recurvirostra  avocetta     ....  270 

Genre  CXXIV.  —  Echasse.  —  Himantopus 274 

Echasse  blanche.  —  Himantopus  plinii 274 

Echassiers  macrodactyles 277 

Famille  des  Ballidés 278 

Gexre  CXXV.  —  R.\i,i;.  —  Rallus 278 

Râle  d'eau.  —  Rallus  aquaticus  et  \ar.  Indica 279 

Genre  CXXVI.  —  Crex.  —  Crex 283 

Crex  des  prés  ou  Râle  de  genêt.  —  Crex  pratensis 283 

Genre  CXXVIl.  —  Marquette. — Porzana 287 

Marouette  tachetée .  —  Porzana  maruetla 287 

—  poussin. —  —     parva 291 

—  Bâillon.  —  —    pusilla 294 

Genre  CXXVIII.  —  Poule  d'eau.  —  Gallinula 297 

Poule  d'eau  ordinaire.  —  Gallinula  chloropus 298 

—  —     var.  Pyrrhorrhoa^  Galeata,  Sandvicensis 298 

Genre  CXXIX.  —  Foulque.  — Fulica 303 

Foulque  noirâtre.  —  Fulica  atrata 304 

Famille  des  Gruidés 307 

Genre  CXXX.  —  Grue.  —  Grus 308 

Grue  cendrée.  —  Grus  communis 308 

HÉRODIENS 314 

Famille  des  Ardéidés 314 

Genre  CXXXI.  —  Héron.  —  Ardea 315 

Héron  cendré.  —  Ardea  cinerea 315 

—  pourpré.  —  Ardea  purpurascens .  321 

Genre  CXXXll.  —  Aigrette.  —  Herodias 325 

Aigrette  blanche.  —  ffe>-odias  alba 325 

—  garzette.  —       —      garzetta 331 

Genre  CXXXIII. — Crabier.  —  Ardeola 335 

Crabicr  chevelu.  —  Ardeola  ralloides ;?35 

Genre  CXXXIV.  —  Blongios.  —  Ardetta 339 

Blongios  nain.  —  Ardetta  minuta  et  y  os.  Pusilla     .     .     .  339-40 

Ge.nre  CXXXV.  —  Butor.  —  Botaurus 345 

Butor  vul^-'aire.  —  Botaurus  stellaris 345 

Genre  CXXXVl.  —  Hihoreau.  —  Ntcticokax .     .  351 

Biliorcau  iri''uropc.  —  Nycticorax  (jrisens.  ■  351 

Famille  des  Ciconiidés  ■  ...  357 


—  728  — 

PA.OES 

Genre  CXXXVII.  —  Cigogne.  —  Ciconia 357 

Cigogne  blanche.  —  Ciconia  alba 358 

—  brune.  —  —      fusea 366 

Famille  des  Plataléldés 370 

Genre  CXXXVIII.  —  Spatule.  —  Platalea 371 

Spatule  blanche.  —  Platalea  leucorodia  et  var.  Major 371 

Genre  CXXXIX.  —  Falcinelle.  —  Falcinellus 375 

Ibis  falcinelle.  —  Falcinellus  castaneus 376 

ORDRE  Y III.  —  Les  Palmipèdes  lamellirostres 382 

Famille  des  Anatidés 383 

Genre  CXL.  —  Bernache.  —  Branta 385 

Bernache  ou  Oie  à  joues  blanches.  —  Branta  leucopsis 385 

—  —     à  collier.  —  Branta  hrenta  et  var.  Nigricans 388 

Genre  CXLI.  —  Oie.  —  Anser 392 

Oie  cendrée.  —  Anser  cinereus 393 

—  des  moissons.  —  Anser  sylveslris  et  var.  Serrirostris 398 

—  à  bec  court.  —  Anser  brachyrhynchus 401 

—  à  front  blanc.  —  Anser  albifrons  et  var.  Erylhropus  .     :    ^. 405 

Genre  CXLII.  —  Cygne.  —  Cygnus 410 

Cygne  sauvage.  —  Cygnus  férus 410 

—  Bewick.  —      —       minor 414 

—  à  bec  tuberculeux.  —  Cygnus  mansuetu^ 416 

Genre  CXLIII.  —  Tadorne.  —  Tadorna 422 

Tadorne  ordinaire.  —  Tadorna  cornuta 423 

Genre  CXLIV.  — Souchet,  —  Spatula 427 

Souchct  spatule.  —  Spatula  clypeata 428 

Genre  CXLV.  —  Canard.  —  Anas 432 

Canard  sauvage.  —  Anas  boscas 432 

Genre  CXLVI.  —  Chipeau.  —  Chaulklasmus 437 

Chipeau  strépère.  —  Chaulelasmus  streperus 438 

Genre  CXLVII.  —  Marèque.  —  Mareca ...  440 

Canard  siflleur.  —  Mareca  penelope 441 

Genre  CXLVIII.  —   Filet.  —  Dafila 344 

Canard  pilet.  —  Dafila  acula ' 445 

Genre  CXLIX. —  Sarcelle.  —  Querquedula 448 

Sarcelle  d'été.  —  Querquedula  circta 448 

—  d'hiver.  —  Querquedula  crecca  et  var.  CaroLnensu 453 

—  formose.  —            —          formosa 456 

Genre  CL.  —  Morillon.  —  Foligula 461 

Morillon  à  huppe  rousse.  —  Fuligula  rufina 462 

—  hoppé.  —  Fuligula  cristata 465 

—  milouinan.  —  Fuligula  marila  et  var.  Affinio 468 

milouin.  —  Fuligula  ferina  et  \&t.  Americana 472-73 

—  à  iris  blanc.  —  Fuligula  nyroca 477 

Genre  CLl.  —  Garrot.  —  Clangula 481 

Garrot  sonneur.  —  Clangula  glaucion 482 

—  de  Barrow. —      —       islandica 486 

—  histrion.  —         —       histrionica ■     .     .     .     .  488 

Genkb  CLIl.  —  MiQUELON.  —  Harelda 488 


PAGES 

Miquelon  glacial.  —  Harelda  glacialis 489 

Genre  CLIII.  —  Eider.  —  Somateria 492 

Eider  vulgaire.  —  Somateria  mollissima  et  var.  Bresseri 493 

—  royal     —              —         speclabilis 499 

Genre  CLIV.  —  Macreuse. — Oidemia 499 

Macreuse  noire.  —  Oidemia  nigra  et  var.  Americana 500 

—  brune.  —       —        fusca  et  var.  Deglandi 5U3 

—  à  lunettes.  —  Oidemia  perspicillata 506 

Genre  CL V.  —  Harle. — Mergus 509 

Harle  blanc  ou  pielte.  —  Mergus  albellus 509 

—  bièvre.  —  Mergus  merganseï' 513 

—  huppé.  —       —     serralor 518 

Palmipèdes  totipalmes 522 

Famille  des  Pélécanidés 523 

Genre  CLVl.  —  Fou.  —  Sula 523 

Fou  blanc  ou  de  Bassan.  —  Sida  bassana 524 

Famille  des  Phalacrocoracidés 528 

Genre  CLVll.  —  Cormoran.  —  Phalacrocorax 529 

Cormoran  ordinaire.  —  Phakia'ocorax  carbo 529 

—  huppé.  —                  —             graciclus 535 

Palmipèdes  longipennes 538 

Famille  des  Sternidés 539 

Genre  CLVIII.  —  Sterne.  —  Sterna 540 

Sterne  tschégrava.  —  Sterna  caspia 541 

—  hansel.  —             — >,      anglica 545 

—  caugek.  —            --       cantiaca 548 

—  arctique.                          paradisea 551 

—  vulgaire.                          fluviatilis.           554 

—  de  Dougall.                     DougalU 558 

—  naine.  —               —       minuta     .     .                561 

Genre  CLIX.  —  GuiFEïTh .        Hydrocheudon 564 

Guifette  noirâtre.  —  Hydrochelidon  nigra  ...                               565 

—  leucoptère. —           —            leucoptera     ....           568 

—  cendré  ou  Moustac.  —  Hydrochelidon  hy'nt  <' 571 

Famille  des  Laridés 574 

Genre  CLX.  —  Goéland  ou  Mouette.  —  Lakus     ...          576 

Goéland  glauque.  —  Larus  glaucus 577 

—  leucoptère.  —  Larus  letccopterus .           .  580 

—  à  manteau  noir.  —  Larus  marinus    .i  .     .                                    .      .     .  583 

—  à  pieds  jauues.  —  Larus  fuscus ...  587 

—  argenté      -  Larus  argentntus  et  \a.r.  Cac/tinnatis                              .      .  590-91 
Mouette  cendrée.     -  Larus  canus  et  var.  Major  .     .                                                 .  594 

—  rieuse.        Larus  ridibundus     ...                                                            .  598 

—  pygraée.  —  Larus  minu tus  .     .                                                                       .  r.02 

Genre  CLXI.  —  Risse. —  Rissa i'>Oô 

Mouette  ou  Ri.ssc  tridactyle.  —  Rissa  ttilactyUt .  006 

Genre  CLXII.  —  Stercoraire.  —  Stercorarius .611 

Stercoraire  brun.  —  Stercorarius  catarr/iactes  .  .611 

—        poinarin. —      —        pomarinus     .     .  .615 

Tome  II   —  1894.  9? 


780  — 


PAGES 


Stercoraire  parasite.  —  Stercorarius  crepidatus 619 

—  à  longue  queue.  — Stercorarius  longicauclus 622 

Palmipèdes  tubinaires 624 

Famille  des  Proeellaridés 626 

Genre  CLXIII.  —Albatros.  —  Diomedea 627 

Albatros  hurleur.  —  Diomedea  exulans 627 

Genre  CLXIV.  —  Pétrel.  —  Fulmarus 632 

P(iire\  glacial.  —  Fuhnarus  y lacialis  et  var.  Glupischa 633 

Genre  GLXV.  —  Thalassidrome.  —  Procellaria 637 

Thalassidrome  tempête.  —   Procellaria  pelagica 638 

—  de  Leach .  —  —         leucorrhoa  .      .     " 642 

Genre  GI.XVl.  —  Puffin.  —  Puf-finus 644 

Puffin  des  Anglais.  —  Piiffimis  anylorwn 645 

Palmipi^des  pygopodes 649 

Famille  des  Alcidés 650 

Genre  CLX Vil.  —  Guillemot. —Uria 650 

(^nïWemotgTyWè.  ~  Uriagrylle  eivaT.Mandtii ^ 651 

—  troïle.    -     —  troile  et  var.  Californica     ....." 655 

Genre  CLXVllI.  —  Mergule.  —  Mergulus 659 

Mergule  na\n.  —  Merffulus  aile 659 

Genre  CLXIX.  —  Alc  ou  PiNGoaiN.  —  Alca 661 

Aie  ou  Pingouin  torda.  —  A^ra  iorrfa 662 

Genre  CLXX.  —  Macareux. —Fratercula 665 

Macareux  moine.  — Fraterculaarciica  et  var.  Glacialis 666 

Famille  des  Colymbidés 670 

Genre  CLXXl.  —  Plongeon. —  CoLYMBus 671 

Plongeon  glacial.  —  Colymbtis  glncialis 671 

—  à  gorge  noire.  —   Colymhtts  arcticus  et  var  Pacifica 674 

à  gorge  rousse.  —  Colymbus  septentrionalis 678 

Famille  des  Podicipédidés 682 

Genre  CLXXIl.  —  Grèbe. —  PoDiciPES 683 

Grèbe  huppé. — Podicipes  crislalus 683 

—  a  gorge  gT\&e.  —  Podicipes  griseigena  et  var.  Major 688-89 

—  oreillard.—  _       nigricollis  et  y^v .  Californica 692 

—  cornu.  —  —       cornutus 695 

—  castagneux.  —  —       minor 698 

—  v.ir.  Sovœ-Hollandi(B^  Tricolor,  Pelzelni.     .....  699 

Supplément 703 

k\g\eBonell\.  ~  Nisaëia.,  fusciatus 703 

yiavi\netal^\n.  —  (Jypselus  melba 707 

Parus  Cœruleicsy av.  Pleskii 710 

Calandre  nègre.  —  Melanocorypha  yeltoniensis 711 

Gknre  CIII'^  .  —  Courvite.  —  CuRSORius 713 

Co\xry\tegavi\ois.~  Cursoriusgallicics 714 

Additio7is  et  correclions 717 

Nocr^s  bibliogi  aphiques 723 


TABLE  ALPHABETIQUE 


DES  GENRES  ET  DES  ESPECES  DÉCRITS  DANS  LES  DEUX  VOLUMES 


A-ccenteiir 

Accentor  aipiiais     . 

—  collaris. 

—  iiiodularts . 
Accipiter  nisus  ... 
Acredula  caudata  . 

—  irbyi, 

—  lotifficaud  i 

—  rosea     ... 

—  trivirgata . 

Acredule 

Acrocephalus  aqxuiticus  . 

—  arundinaceus 

—  axistralis    . 

—  long  irost  ris 

—  orientalis  . 

—  palustris  . 
schœnobaenus 

—  stentorea  . 
strcperus  . 
syrinx  . 

—  tiirduides    . 
Actitis  guinetta  . 

—  macularins 
JEgialitii  cantianns 

—  dubiiis  . 

—  torquatus  .     . 
A'vgiuthtis  hornemanni 

—  linarius 

—  rufescens  . 
Aigle      ...... 

Ai(.'rette.      ... 

Alauda  arborea.     . 

—  arvensis 
Albatros      .     .     . 
Alca  tarda. 
Alcedo  bengalensis  . 

—  ispida  . 
Alouettfl  .  .  . 
Anipelis  garridns    . 

A  nas  boscas    .... 
Anorth}ira  alascensix 

—  borcalis 
fuiuigata- 
hi/nnalis 
pacifica.     . 
tiatischa^urn 
truglodi/trx. 

A  user  albif'tinut. 

—  brachi/ihgncliiià 
ciniTciis 

—  ergihrupiis 

—  arri-irustris 
.11/lrc.itris    . 

Anthiis  n)b'jreit.i. 


38G 


.'^44 

718 

347 
80 
442 
443 
442 
442 
442 
442 
718 
371 
372 
372 
372 
379 
383 
372 
376 
373 
371 
21.5 
218 
121 
117 
,722 
60(') 
6U6 
607 
703 
325 
503 
498 
()27 
CS2 
I  720 
I  72.5 
I   4'.'7 

I  17S 

II  43:^ 
I  39!» 
I  :i98 
I  ;9>s 
I  .■^',Hl 
!  "9'.' 
I   .•t9S 

I  :'9S 

I I  405 
Il  101 
Il  .393 
Il  405 
Il  .i'.KS 
1 1  .•!9S 


.t.  Ip. 
344),. 
344r' 

I 

I 

1 

I 

1 

I 

I 

I 

II 

I 

I 

I 

I 

I 

I 

I 

I 

I 

I 

II 

II 

II 

II 
Il  113 

I 

1 

1 

II 

II 

I 

I 

II 

II 


Anlhns  campestri. 

—  cerviniis 

—  obscit7'us 

—  pralensis 

—  richardi 

—  spinoletta 
Aquila  chrysaetos 

—  fasciata. 

—  ii/Fvia     . 
Archibuse  .... 
Archibuteo  lagopns. 

—  sancti  Johantùs 
Ardca  cinerea     . 

—  pxrpuvaxcens. 
Ardcola  ralloides 
Ardettaniitifita,  . 

—  piisilla. 
Asio  accijiitrinns 

—  amcricaniis 

—  brachyotiis. 

—  otiis    . 
A  stur  pahimbarius 
Alhene  glan.v. 

—  noctiia  . 

—  plionipes 
Autour  ... 
Avocette 


Bnlhuz.ani. 
Barge     . 
Béca.-^SG. 
Bécasseau  . 
Bécassine  . 
Bec-croisé  . 
Berfreronnctte. 
Bernache    . 
lîiboreau    . 
lîlongios     . 
Iii>>nbycilln  hu)iciii  ica 

gnrrnla.     . 
liunasa  bctulina. 
Boudrée. 
Jît.tajiriis  Stella  ris 
Bouvreuil   .... 
/triiiilii  brrntii 

—  -       Irurijpxis 

—  nigricftn^: 
Bruant  .     .     . 
Uiiliii  igniirtis 

—  tmi.rinnis   . 

—  tiircoiiiinni^ 
Bii!<ar(l  . 

Buse.      ... 
JSiitro   rnh/aris 
Butor      . 


1 1  345 

I  627 

I I  3S8 
1 1  3>sô 


.     Il 

Al      11 


3.SS 

719 

124 

124 

124 

.s.T 

25 

26 

345 


732  - 


Caccabis  ruhra II  64 

Caille II  75 

Calamophile    ...          ....  I  450 

Calandre     ......      I     512  II  719 

Calidris  arenaria II  150 

Canard II  432 

Gapiîmulgus  europœus  ....  1  145 

Carduelis  elegans I  613 

Carpodacits  eri/thrimia  ....  I  623 

Casse-noix I  233 

Cerchncis  tinnnncula I  72 

Certhia  familiaris I  656 

—  mexicana I  656 

Charadrius  aureus II  105 

Chardonneret I  612 

Chmdelasiims  streperus  ....  II  438 

C'helido)i  iirbica I  155 

Chevalier II  188 

Chevêche I  110 

Chipeau II  4.37 

Chrysomitris  spinns    .     .     I     617  II  720 

Giconia  alba H  858 

—  fusca II  366 

Cigogne ...  1 1  357 

Cincle I  255 

Cinclus  aquaticus    ......  I  255 

—  melanogastey I  256 

Circaète.     .          I  21 

Circaëtos  beaudonini I  22 

—  fasciolatus I  22 

—  gallicus I  22 

Circiis  cincrarins    .....  I  95 

—  cyaneus I  87 

—  httdsonhia I  87 

—  mucmiriis  ...       I     90  II  717 

—  riifiis I  84 

Clungula  glaucion II  482 

—  histrionica II  488 

—  islandica II  486 

Cochevis I  507 

Coccothratistes  vulgaris    ....  I  651 

Coccyzus  americantis  .....  I  714 

—  dominice}Tsis I  714 

Colombe II  4 

Columba  casiotis.     ...           .     .  Il  4 

—  eversnianni II  9 

—  livia.     ■ II  l8 

—  œnas      ...           ...  II  9 

—  palumbus II  4 

rupestris II  14 

Colymbiis  arcticus  ...          .     .  II  674 

—  glacialis    ...           ,     .  II  671 

—  septentrionalis   ...  II  678 

Combattant II  182 

Coq  de  bruj'ère II  36 

Coiacias  gctrrula     .     .     .     I     721  II  721 

Corbeau .1  212 

Cormoran II  529 

Corneille I  217 

Corvus  capellanus  ......  I  221 

—  cinereus I  221 

—  collaris 1  230 

—  corax    .......  I  212 

—  corone I  217 

—  frugilegus      .     .                .1  225 

—  monedula I  230 

—  pastinator I  226 

Coturnix  communis II  76 


Cotyle  riparia I  164 

Coucou I  705 

Coulicou .     .  I  714 

Courlis II  249 

Courvite II  713 

Crabier II  335 

Crave 1  238 

Cresserelle. I  71 

Crex  pratensis    ...           ...  Il  283 

Cuonlus  canoroides 1  705 

—  canorus I  705 

—  rochii I  706 

Cumorius  gallicus II  714 

Cygne 11  410 

Cygnus  férus II  410 

—  tnansueius II  416 

• —       minor II  414 

Cyp.selus  aims.     .                .     .     .  1  150 

—  melha II  707 

■ —       pallidus 1  151 

—  nnicolor I  151 

lHafila  acuta.     .     .               ...  II  445 

Diomt'dea  exitlans Il  627 

Dur-bec _^    ....  I  634 

Echasse II  274 

Effraye 1  118 

Eider II  492 

Elanion 1  40 

Elanus  cœruleus 1  41 

Emberisa  cia I     550  II  719 

—  cirlus     ....      I     547  II  719 
■ —       citrinella I  544 

—  chrysophrys Il  711 

—  horîulana I  553 

—  pallasii I  557 

—  pusilla 1  561 

—  pyrrhuloides  .           ...  I  557 

—  schœniclus I  556 

Engoulevent I  114 

Epervier I  80 

Erithacus  golzii .1  339 

—  luscinia I  339 

—  rubecida    .....  I  335 

Etourneau .1  250 

Eudromias  morinellus     ....  II  109 

l?^aisan II  55 

Falcinelle II  375 

Falcinellus  castaneus II  376 

Falco  œsalon I  67 

—  columbarius.     .           ...  I  67 

—  communis I  59 

—  melanogenys I  60 

—  minor I  60 

—  subbutco I  63 

Faucon  . 1  59 

Fauvette.          1  350 

Fou II  523 

Foulque .     .  II  303 

Fratercida  arctica  .     .           ...  II  666 

—  glacialis.     .           ...  II  666 
Fringilla  cœlebs I  584 

montifringiUa.     ...  1  589 

Fulica  atrata .     .  II  304 

Fuligula  afflnis .11  468 

—  amevicana     .     .           .     .  II  473 


-  733  - 


Fuligtda  cristata II 

—  ferina II 

—  marila II 

—  nyroca II 

—  rufina II 

Fuhnarus  glacialis.     ...  II 

—  glupischa  .  ....  II 

G-alerita  cristata    .....  T 

(jallinago  cœlestis    .     .  .     .  II 

—  gallinxda II 

—  média II 

Gallinuîa  chloropus.    .     .  .II 

—  galeata II 

—  sandvicensis    ....  II 

Garrot II 

Garrnlus  atricapillus l 

—  branti I 

—  cervicalis I 

—  glandarius I 

—  hyrcanus    .....  I 

—  japonictis I 

—  krynickii I 

—  minor I 

Geai I 

Gécine  ....  I 

Gccinvs  canrts .1 

—  Sharpei .1 

—  viridis I 

Gelinotte II 

Gerfaut .1 

Glareula  torquata   ...  .      .  II 

Glaréole .II 

Gobe-mouche I 

Go.'land II 

Gorye-bleue I 

Graculiis  ercmita I 

Grand-duc.  I 

Gravelot     ...  II 

Grèbe     . II 

Grimpcreau     .  I 

Grive I  2G0  II 

Gros-bec I 

Grue II 

Gi'Ks  cotnmïnii» Il 

Guêpier I  730  II 

GuUcttP II 

Guignard Il 

Gui^nette II 

Guillemot II 


Har»nafopws  osculans 

—  ostralcg)(s . 

Ifaliai'tus  alhicilla. 
Ilarelda  glncialis 

Ilarle 

Herodias  alba     ... 

—  garzi'iiii 
Héron     .... 
Hibou    .  . 
llievofulcu  gi/rfalcu 
Iliniiintuiiiis  pliiiil. 
Hirondelle. 
Hirondelle  de  nier 
JJirundo  donieslicu. 

rrylfirogastra 

—  giitturalis 

—  rustioa.     . 


H 
II 
1 

11 
II 
II 
W.W, 
II 
I 
1 

11 
I 
II 


465 

472 
4(i8 
477 
462 
633 
633 

508 
226 
231 
223 
29S 
298 
298 
481 
207 
207 
207 
206 
207 
207 
207 
207 
206 
697 
701 
697 
697 
50 
55 
143 
143 
168 
577 
330 
238 
123 
113 
GS3 
656 
717 
651 
308 
308 
721 
564 
Kt'.l 
214 
650 

137 

137 

4 

4S9 
509 

722 
315 
127 

56 

r,  I 

1  .-.s 

511) 

l.v.t 

160 
15'.» 
1.5'.' 


Hirundo  savignii  . 
Hoche-queue  .... 

Huîtrier.  ..... 

Hulotte.  ... 

Huppe 

Ilydrochelidon  hybrida 

—  leucoptera . 

—  nigra    . 
Hypolaïs  ictevina 

—  polyglotta 


Jaseur. 


.     .     I  159 

I  455,  II  718 

II  136 

I  114 

I  735 

II  571 
II  568 
Il  565 
I  364 
I  368 


188 
189 


luanùis  colluria. 

—  excubitor   . 

—  major    . 

—  minor    . 

—  rufvs     . 
Larus  argentatus 

—  cachinans  . 

—  canus    . 

—  fuscHS   . 

—  glanciis. 

—  lencopterutt 

—  major    . 

—  maritius 

—  yninntus. 

—  ridibundiis 
Ligurinus  chloris  . 
Limicola  platyrhyncha 

Liiuicole 

Limosa  baueri    . 

—  melanura  . 

—  melani(roides. 

—  rufa. 
Linaria  brevirostj'is 

—  cannabina 

—  montana    . 
Linotte  ...... 

Locustella  luscinoide^ 

—  nœvia    . 

Locustelle 

Loriot 

Loxia  a)neric(ina I 

—  amurensis.  ....     I 

—  bifasciata  ...     1     649     II 

—  cxrvirostra     .          I     6''9     11 
hininliyana 1 

—  leucoptera.      ...  .1 

—  mcxicana 1 

—  pityopsittacKn  1     1)44     II 


1       177 


602 
597 


I 

I 

II 

II 

I 

II 

II 

II 

II 

II 

II 

II 

II 

II 

II 

I 

:i 

II 

II 

II 

II 

II 

I 

I 

II 

II 

1 

[ 

1 

I 


M.acarf  ux 

Afachetes  pvgnax 
Macreuse    .... 
yfareca  penclope. 
iM.ii'ouelte  .     . 
Martinet     .... 
Martin-péchour    . 
Marlin-roselin      .... 
Mtl(niocoryi>ha  bimnculaUi 

brachydactyla 

calandra     . 

sibirica. 

yrltonicnsis 
Morcule.     .     . 
Mi-rgulii.i  al'r. 
Mrrgits  alheltu.'i  . 


150 

217 

512 
517 


11 

H 

11 

II 

11 

11 

I 

H 

1 

11 

II 

1 

II 

II 

11 

11 


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183 

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717 
196 
590 
591 
594 
587 
577 
580 
594 
583 
602 
598 
581 
179 
178 
214 
240 
210 
244 
602 
597 
720 
719 
389 
393 
389 
242 
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649 
720 
720 
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720 

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499 
441 

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70  : 

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717 
517 
719 
719 
522 
711 
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509 


-  734 


Mergus  merganser II  513 

—  ssrrator  .     .          ....  II  518 

Merops  apiaster ....     I     731  II  721 

Mésange I  423 

Milan I  45 

Miliaria  europœa I  540 

Milvus  œgyptius.     .     .          ...  I  49 

—  affinis I  49 

—  niger I  48 

—  rcgalis I  45 

Miquelon II  488 

Moineau I  564 

Monticola  cyanea I  305 

—  saxatilis I  300 

Morillon II  461 

Motacilla  alba I  455 

—  boarula I  461 

cinerea .  1  455 

cinereocapilla I  466 

—  flava I  465 

—  lugubris I  456 

—  melanocephala    .     I     466  II  718 

—  rayi I     466  II  718 

Moltetix I  308 

Mouette II  576 

Muscicapa  collaris I  171 

—  grisola ■  I  17  i 

—  nigra I  168 

Ntsaè'(«s  fasciatus II  703 

Nvcifraga  caryocatactes  ....  I  233 

Numennis  arquMus     .     .           .     .  II  249 

—  lineatus II  250 

—  phœopiis     .....  II  257 

—  tenuirostris    ....  II  254 

—  variegatiis II  257 

Nyctala  tengmahni I  106 

Nyctaie 1  106 

Nycticorax  griseus .     .     .           II     351,  722 

CEdicnème      ........  II  99 

Œdicnemus  scolopax II  100 

Oidemia  americana II  500 

—  deglaîidi II  503 

—  fusca     ....                .II  503 
^       nigra     ....  Il  500 

—  perspicillata II  506 

Oie .  II  392 

Oriohis  galbv.la        .     .           ...  I  243 

Otis  macqueeni II  95 

—  tarda II  84 

—  tetrax II  89 

Otocorys  alpestris    ...     I     525  II  719 

—  penicillata .1  525 

sibirica.     ....  I  525 

Outarde H  83 

l'andion  haliaëtus ...                .1  8 

—  leucocephalus 1  8 

Panurus  barbatus I  450 

Parus  (emodius  ....           .1  427 

—  alpestris     .      .                      .1  437 

—  ■  ater .1  427 

baicalensis I  437 

—  borealis.     ...  I  437 
hritannicits    ...  I  427 

—  cœruleus l  431 

—  cristatïis I  434 


Parus  hamtschatkensis 

—  major   . 

—  michalowskii 

—  mtnor    . 

—  palustris    . 

—  pekinensis. 

—  phœonotus. 

—  pleshii  . 

—  rufipectïis . 

—  tcneriffœ 
Passer  domesticus    . 

—  italiœ     .     . 

—  malaccensis 

—  montanns  . 
Pastor  rosevs. 
Perdix  cinerea  . 

Perdrix 

Pernis  apivorns. 

Pétrel 

Pëtrocincle.     .     . 
Pelronia  stulta  .     . 
Phalacrocorax  carbo 

—  graculus  . 
Phalarope  .... 
Pha'aropns  cinereus  - 

—  fulicari^is. 
Phasianus  colchiciis 

— •       chrysomelas 

—  decollativs  . 

—  formosanus 

—  ho'>narowii 

—  mongoliens 

—  pcrsicus 
principalis 
shawi    . 

—  sladeni  . 

—  torquatus  . 
Phylloscopus  r^i.fus. 

—  sibilatrix  . 

—  trochilus    . 

Pic 

Pica  caudata  . 

—  mauritanica 

—  nnttalHi  , 
Picns  cabanisii  . 

—  kamtschaticus 
kamtschatcen 

—  leuconotus. 

—  major    . 

—  médius  . 
minor  . 
numidicus 

—  poelzami    . 
syriacus 

Pie 

Pie-ffrièche. 

Pilet". 

Pingouin     ... 
Pinicola  emicleator. 

Pinson   

Pipit 

Platalea  Icucorodia. 

—  major    . 
Plectrophane  .     .     . 
Plectrophanes  lapponiciis 

—  nivalis  .  . 
Plongeon  .... 
Pluvier 


247 


577 


680 


689 
692 


532 


437 
423 
427 
423 
436 
427 
427 


II     710 


427 
431 
565 

.565 
572 

572 


II  717 
II  69 
II  64-69 


I 


34 


II     6.32 


I 


II 

II 

II 

II 

JI 

II 

II 

II 

II 

II 

II 

I 

I 

I 


300 


II  719 

II  529 

II  535 

II  261 

II  266 

II  261 


55 

56 

56 

58 

57 

56 

56 

57 

56 

56 

56 

407 

411 

404 


II     721 


200 
201 
201 
681 
680 
693 
686 
680 


II     721 
II     721 


I  681 

I  681 

I  681 

I  200 

II  717 
II  444 
II  661 


635 
584 
474 


II  371 

II  371 

I  532 

II  719 


536 


II     671 
II     104 


-  735 


Podicipes  califoraica 

—  cornutus    . 

—  cristalus    . 

—  griseigena. 

—  major   .... 

—  minor    .... 

—  iiigvicollis . 

—  novae-hollandiic . 

—  pelzelni. 

—  tricolor. 
Porsana  maruetta  . 

—  par  va    .... 

—  piisilla  . 

Pouillot 

Poule  d'eau 

Pratincola  hemprichii     . 

—  le  u  cura. 

—  maura  .... 

—  madagascariensis 

—  rubetra. 

—  rubetraoiden  . 
—       riihicola 

—  torquata 
Procellaria  leiicorrhoa 

—  jjclagica    .... 

Proyer  

Pullin 

Piiffinas  angloriiiH     . 
Pygargue    ...... 

Pyrrhiila  major.     . 

—  rubicilla    . 


C^nerquedula  caroUnensis 

—  circia    . 

—  crecca  . 

—  formosa 


Râle     .... 
Rallxs  aquaticns 

—  indiens. 
Ramier .     .     .     .     , 
lieciirvirostra  avocetta. 
Regains  cristatun    . 

—  ignicapillHn 

—  maderensis 

Rissa  tridactyla  . 

Roitelet 

Rollier 

Roselin 

Rossignol    . 
Rouge-gorge  .     . 
Rouge-ijuoue  . 
Rou.sserolle      .     .     . 
Ruticilla  cœrulevula 

—  cyanecida  . 

—  mcsuleuca  . 

—  pliœnicura. 

—  titys . 
.Sauderliiig.     . 

Sarcelle 

Saxicola  œninthe  . 
Scolupax  ruslicol'i  . 
Scops  bakkaiiurna  . 

—  brute i  . 

—  oapensis 

—  gi'i  ■    ■ 

jajionicHS  . 

—  tnalayaniis 


■M6 


II  692  ^ 

n  695 

II  ôS'o 

Il  6SS 

[I  68',) 

II  698 

I  692 

Il  609 

H  699 

II  699 

II  287 


419 


I  411 
I  720 


I  :v^9 


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2,t4 
403 
297 
317 
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317 

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312 
313 
718 
317 
II  642 
II  638 

I  540 

II  644 


II 


64Ô 

3 

627 

627 


II  453 

II  448 

II  453 

II  456 

278-283 
II     279 


II 

II 

II 

I 

II 

I 

II 

II 

II 

I 

I 

I 

I 

I 

II 

I 

I 

I 

I 

II 

H 

I 

II 

I 


279 
4 
269 
415 
718 
419 
606 
718 
721 
622 
339 
334 
322 
371 
7IS 
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323 
32:i 
326 
149 
41S 
3(j'j 
2:i4 
136 
lo6 
135 
l;t5 
l.U] 
136 


Scops  pennatiis  .     . 

—  ruflpennia . 

Serin 

Serinv.s  hortulaniis 
Sitta  albifrons    . 

—  ainurcnsis. 

—  cœsia     . 

—  europœa     . 
Sittelle 


bizerin  .... 
Sornateria  dvesseri  , 

—  mollisfima 

—  spectabilis . 
Souchet.     ... 

Soulcie 

Spatula  clypeala.     . 

Spatule 

Sqiiatarola  lielvetica 
Stercoraire.  .  .  . 
Stercoraritiscatarrhactes 

—  crepidatus . 

—  longioaudus 

—  poi»arinus. 
Sterna  anglica     . 

—  canliuca 

—  caspia   . 

—  dougalU.     . 

—  fluviatilis  . 

—  minuta. 

—  paradisea  . 
Strepsilas  interpres. 
Strix  délicat  II  la  .     . 

—  flammea 

—  furcata. 

—  javanica    . 

—  perlata  . 

—  pratincola. 

—  rosenbergii 
Sturnus  unicolor     . 

—  vulgaris 
Sxla  bassana . 
Surnia  canadensis 

—  ulula     . 

Suruie 

Hylvia  alricapilla    . 

—  cinerea , 

—  garrula 

—  hortensis  . 
Syrniumalucv    . 

—  nivicola 
Syrrhapte  .... 
Syrrhaptes  paradoxas 


Tadorna  cornuta  . 
Tadorne     ... 

Tarin 

Tetrao  tetrix  .     .     . 

—  urogallua  . 

Tétras 

TlialaBsidrome      .     . 
Tic/iodruma  inuraria 
Tichodronie     .     . 

Torcol 

Totanns  cnlidris     . 

—  glareola 
--       glottis 

—  oohrupus 


I 
I 
I 
I 
I 

II 
II 
II 
11 
I 

II 
II 
II 
II 
H 
II 
II 
II 
II 
il 
II 
II 
II 
II 
II 
II 
I 
I 
I 
1 
I 
I 
I 
1 
I 

H 
I 
I 
I 
I 
I 
I 
I 
I 
I 
II     20, 

ri  27. 


.    .   II 
.    .    II 

617     II 

.     .     II 

.     .     II 

.     .     Il 

.     .     II 

I     660     II 

I     659     II 

I 

.     II 

II 

II 

II 

.     .     Il 


135 
136 
592 
593 
667 
667 

6C)6 
666 
605 
493 
493 
499 
427 
576 
428 
371 
125 
611 
611 
619 
622 
615 
545 
548 
541 
558 
554 
561 
551 
133 
119 
119 
120 
119 
120 
119 
119 
251 
25(1 
524 
101 
101 
100 
351 
360 
357 
354 
115 
115 
721 
721 

423 
422 
720 
43 
36 
35 
637 
721 
721 
675 
202 
197 
207 
188 
211 


—  736 


Totanus  stagnatilis 
Tourne-pierre. 
Tourterelle.     . 

Traquet 

Tringa  canvJus. 

—  cinclus . 

—  tnariihna  . 

—  minuta. 

—  ruficollis   . 

—  subarquata 

—  temmincki. 
Troglodyte.  .  .  . 
Turdus  alicia     . 

—  atrigularin. 
— ■       daunia  . 

—  fuscalus     . 

—  iliacus  . 
lunulatus  . 

—  mcdayanus 

—  tncrula .     . 

—  musicus,     . 


193 
133 
19 
312 
154 
166 
159 
171 
171 
162 
175 
397 
294 
279 
270 
281 
287 
270 
270 
260 
291 


Turdus  naumanni.     .     .     I     282  II  717 

—  obscurus     ...     I     207  II  718 

—  pilaris I  275 

—  sibiricus I  265 

—  swainsoni  ...     I     294  II  718 

—  torquatus 1  263 

—  ustulatus I  294 

—  varius    ....     I     269  II  717 

—  viscivorus I  272 

Turtur  vulgaris     ...          .     .  II  20 

TJpupa  epops I  736 

Uria  californica II  655 

—  grylle Il  651 

—  mandtii II  651 

—  troile     .......  II  655 

Vanellus  vulgaris II  129 

Vanneau .  II  128 

Verdier I  580 

~Yuncc  torquilla 1  676 


CENTRAL  PARK,  "-^ 


^^     NEW  YORK.      A' 


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FAUNE 


DES 


I 

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Alphonse     DUiïOIS 

DOCTEUR   EN    SCIENCES, 

•  ONSiKIlVATELR    AT    MISKK   ROYAI,    d'iIISÏOIRE    NATLREM.B    DE    ItKl.OUJI  E, 

IIIKVAI.IER    DE    l/ORDRE    DE    LÉOPOI.D, 

MKMHRE  DU  COMITÉ    OR.VITIIOLOGIQUE    INTERNATIONAL  ET  PERMANENT, 

MliMHRE    HONORAIRE,    CORRESPONDANT    OU    EEI-ECTII'    DE    PLUSIEURS    SOCIÉTÉS    SAVANTES. 


SÉRIE    DES    OISEAUX 
TOMb:  II 

(1HK7    -    1K<)4=) 


HRUXKLLKS 

A  LA  LlBllAIUlIi:  C.  MUQUAliDT,  TII.  FALK  S' 


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