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FOR THE PEOPLE
FOR EDVCATION
FOR SCIENCE
LIBRARY
OF
THE AMERICAN MUSEUM
OF
NATURAL HISTORY
FAUNE
DES
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VERTEBRES DE LA BELGIQUE
SERIE r>ES OISBA.XJX
o
FAUNE
DES
mlEfflS M LA II
1
Alphonse DUBOIS
DOCTEUR EN SCIENCES,
CONSERVATEUR AU MUSÉE ROYAL d'hISTOIRE NATURELLE DE liELGIQUE,
CHEVALIER DE l'oRDRE DE LÉOPOLD,
MEMBRE DU COMITÉ ORXITHOLOGIQUE INTERNATIONAL ET PERMANENT,
MEMBRE HONORAIRE, CORRESPONDANT OU EFFECTIF DE PLUSIEURS SOCIÉTÉS SAVANTES.
SERIE DES OISEAUX
TOME II
(ISST - 1894:)
BRUXELLES
A LA LIBRAIRIE C. MUQUARDT, TH. FALK S'
rtuo dot* t*arois4sions, 1 8-*-i<)-*.2S
1894
TOUS DROITS RÉSERVÉS
F.KS
OISEAUX DE I.A BELGIQUE
ORDRE V
L.KH <^>ii/iLXi:uitH ou i*i<i:i:oi%H
(Jdrddrrrs. - lifîs l'ij^coiis ont, lo coijiS rainass<';, lo cou court ot
la f<Ho ]Hîlil<î, mais bien conform^o. Leur bec est court, g^iiiôraloment
faiblo cX mou à la baso, corné seulement h son (îxtiYMnit*'! «jui est
bomb<jC et j>lus ou moins crochue à la pointe ; la base de la mandibule
sup('irieure est garnie d'une membrane (la cire) plus ou moins cartila-
gineuse et pins ou moins n'nll«''e, dans laquelle s'ouvrent les narines ;
celles-ci sont {^'•éncralement en /orme de fente lonjjitiidinale. Les ailes
sont formées de rémiges foites et solides dont la deuxième est la plus
longue; la (jueue est com|)osée de douze rectrices, exceptionnellement
de (juatorze ou de sfîize; elle est généi'alement courte ou de longueur
moyenne et arrondie, (jucdcpiefois longue, é(agéeetconi<jue. Les tarses,
rarement plus longs que le doigt médian, sont couverts d'écaillés
court,e8,(!n réseau à la l'acte suj)érieure, disposées transversabunentàla
face postéri(!ure ; les doigts sont toujours au nombre de quatre : trois
antérieurs, libres ou reliés les nns aux autres à la base par une petite
membrane ; le pouce (îst libn; ; les ongles sont fc>rts, mais courts et un
I)eu recourbés.
Le plumage do ces oiseaux est serré au corps et la base des plumes
est garni(; de duvet. Les sexes difU'îrent peu ou i»oint enti-e eux, mais
les jeun(!S sont parfois très dilfi'Mejits des adultes.
Tmmk II. — IHS7.
- 2 —
L'œsophage présente un jabot dont les parois s'épaississent au
moment de l'incubation. A cette époque, la surface interne de cet
organe présente un système de plis et de glandules disposés en réseau;
elle est fortement injectée et sécrète un liquide d'apparence lactée, qui
est la première nourriture des petits. Cette particularité distingue les
Pigeons de tous les autres oiseaux.
Les genres qui composent cet ordre ont un faciès tellement caracté-
ristique, qu'il est impossible de les confondre avec des oiseaux d'un
autre groupe.
Hah, — On rencontre des Pigeons presque sous toutes les latitudes
et dans toutes les parties du monde, mais c'est l'Océanie qui nous
fournit les espèces les plus brillantes.
Mœurs. — Les Pigeons sont ordinairement de mœurs sociables et
douces, et surpassent bien des oiseaux sous le rapport des facultés
physiques et intellectuelles.
Us marchent en général bien et longtemps, quoique leurs pattes
soient très courtes; ceux qui paraissent maladroits à terre, sont
d'autant plus agiles sur les arbres et dans l'espace. La plupart ont un
vol puissant et rapide; ils peuvent, tout en volant, se détourner brus-
quement. Brehm dit avoir vu, en Egypte, des Pigeons nager;
Naumann assure que plusieurs d'entre eux savent plonger en cas de
nécessité.
Leur voix est le plus souvent un roucoulement qui ressemble plus
ou moins à celui de nos diverses races domestiques; quelques-uns
font entendre des sons tremblotants; quelques-uns hurlent; d'autres
rient; il y en a qui grognent d'une façon désagréable ; d'autres, enfin,
produisent des sons harmonieux et soutenus.
Ces oiseaux ont, en général, la vue excellente et l'ouïe fine; l'odorat
et le gotlt doivent aussi être assez développés. Ils sont prudents et
craintifs, mais ne paraissent pas pouvoir distinguer un danger réel
d'un danger apparent.
Depuis les temps les plus reculés, on a fait des Pigeons l'emblème
de toutes les vertus, et cela à cause de leur grâce, de leur douceur et.
des témoignages de tendresse qu'ils se prodiguent entre eux. Mais
leur fidélité conjugale n'est pas à l'abri de tout soupçon, car il n'est
nullement prouvé que les couples restent unis durant toute leur vie.
Dès qu'on les trouble, certaines espèces abandonnent leurs œufs et
même leurs petits, ce que la plupart des passereaux ne font pas ; ils ne
sont pas toujours non plus compatissants pour leurs semblables ; bref
— 3 —
ils sont loin d'avoir toutes les qualités qu'on leur a attribuées.
Les Pigeons, à peu d'exceptions près, vivent dans les bois et sont
arboricoles; très peu d'espèces se tiennent sur les rochers, mais toutes
recherchent le voisinage de l'eau. Les Pigeons qui habitent les con-
trées du Nord émigrent en automne ; les autres sont sédentaires ou
errants. Leur nourriture se compose principalement de graines, de
baies, de fruits et autres substances végétales ; quelques-uns prennent
aussi des vers, des larves, des chenilles et des petits mollusques ;
ils boivent en général beaucoup.
Reproduction. — Ces oiseaux construisent leur nid sur les arbres,
dans les buissons, dans les arbres creux ou dans les fissures des
rochers, mais rarement à terre. Leur nid est grossièrement fait de
ramilles sèches lâchement entrelacées. Ils ont tous plusieurs couvées
par année, mais chaque couvée ne se compose que de deux œufs, d'un
blanc pur, que les parents couvent ensemble. L'éclosion a lieu au bout
de quatorze à vingt jours suivant les espèces. Les petits naissent
faibles, informes, aveugles et couverts d'un rare duvet jaunâtre ; ils ne
quittent leur nid que quand il savent voler. Les parents leur donnent
d'abord la substance laiteuse que sécrètent les parois de leur jabot,
puis des graines ramollies, enfin des semences dures.
Classification. — L'ordre des Pigeons se divise en quatre familles,
savoir: L les Tréronidês, 2, les Colombidés, 3. les Gouridés, 4. les
Didunculidés. La seconde famille seule a des représentants en Eu-
rope.
FAMILLE DES COLOMBIDES.
Car. — Bec de longueur moyenne, faible, corné seulement à sa
[lOinlc, mou à la base qui est recouverte d'une membrane cartilagi-
neus*' ou cire; naiinos ouvertes vers le milieu du bec ; ailes allongées;
queue arrondie ou tronquée à angle droit, rarement allongée et
étagée, formée de douze rectrices ; tarses courts, scutellés,. plus ou
moins emplumés.
C'est à cette famille qu'appartiennent tous les Pigeons indigènes,
tant sauvages que domestiques.
Ihih. — (yC groupe est représente dans les cinq parties du monde
et il r()iiij)ivn(l ])lus d'espèces que les trois autres familles ensemble.
__ 4 -
GENRE XCIII
COLOMBE. — COLUMBA.
Colomba, Rriss. Ornitli. I. p. 80 (1760).
Palumbus, Kaup. Nat'àrl, Syst. p. 107 (1829).
Palumbœna, Bp. Cat. Parz. p. 9. (1856).
Trocaza, Bp. Comiit. rend. XLllI, p. 837(1856).
Car. — Bec médiocre, droit, comprimé, renflé et arrondi à l'extrémité ;
narines étroites, allongées, horizontales, surmontées d'une membrane carti-
lagineuse très bombée; ailes allongées, aiguës; queue ample, arrondie sur
les côtés ou rectiligne; tarses aussi longs ou plus courts que le doigt médian»
plus ou moins emplumés au-dessous de l'articulation ; ongles courts, mais
robustes.
Hah. — Les espèces de ce genre sont répandues en Europe, en
Asie, en Afrique et en Amérique.
167. — La Colombe ramier.
COLUMBA PALUMBUS, Briss.
(PI. 167.)
CoLUMBA PALUMBUS, Briss. Omith. 1. p. 89 (1760),
Columba palumbes, Pall. Zoogr. Rosso-As. 1. p. 563 (1811).
CoLUMBA TORQUATA, Leach. Syst. cat. M. B. Br. Mus. p. 26 (1816).
Columba pinetorum, Brm. Isis. 1830, p. 985.
Palumbus torquatus, Bp. Cat. Par::, p. 9(1856).
Palumbus excelsus, Bp. Compt. rend. XLIII, p. 836 (1856).
Columba trocaz, Morel, Hist. nat. Açores, p. 84 (1860).
Palumbus palumbus, Gr. Haml-Ust, II, p 233 (18^70).
Die RiNGELTAUBE, en allemand.
The ring-dove, en anglais.
De wouDDUiF, en flamand.
Var. Ca ktis.
Palumbus torquatus, var, Blytli, Cat. B. as. Soc. 233 (1849).
Palumbus casiotis, Bp. Consp. yen. ai\ II, p. 42 (1857).
Columba palumbus, Adams, Proc. zool. Soc. 1859 p. 187.
Columba palumbus himalayana, Schl, Mus. P.-B. (Coltcmhœ) p. 66 (1873).
rmï^e: 0'",40; ailes 0,253.
Description du mdle et de la femelle adultes. — Tète, cou, croupion
et sus-caudales d'un gris bleuâtre, plus pâle au croupion; tlos et ailes cendrés ;
partie inférieure du cou orLée, de chaque côté, d'une giande tache transver-
— 5 —
sale blanche avec de légers reflets rosàtres et verdàtres, visibles seulement
sous certain jour; celte tache est entourée d'une teinte verdâtre à reflets
bleu et rose violacé; parties inférieures de couleur vineuse, plus sombre et
à reflets métalliques sur le devant du cou; ventre, flancs et sous-caudales
d'un gris bleuâtre pâle; bord des ailes blanc ; rémiges primaires et leurs cou-
vertures noirâtres, bordées extérieurement de blanc; queue d'un cendré
bleuâtre foncé en dessus, passant au noir à son extrémité; dessous de la
queue noirâtre avec une large bande transversale d'un blanc grisâtre. Bec
couleur chair avec le bout jaunâtre ; la cire blanche ; iris jaune pâle; pattes
rouges; ongles bruns.
La femelle diffère peu du mâle : la tache blanche du cou est moins étendue
et les reflets métalliques sont moins prononcés.
Jeune. — Sans tache blanche sur les côtés du cou et sans reflets métal-
liques; pour le reste, assez semblable à l'adulte, mais les teintes plus
rembrunies; l'extrémité des plumes est encore plus ou moins garnie de
filaments jaunâtres. Ce n'est (ju'environ un mois après la sortie du nid que
les plumes blanches du cou commencent à se montrer.
La var. Casiotis ne difl"èro du type européen que par la couleur des taches
blanches du cou (jui sont d'une teinte isabelle.
Hab.
[pûfÔKÔtMWOl»»»!»"
La Colombe ramier habite presque toute l'Europe ; elle est
assez généralement répandue en
Scandinavie jusqu'au 61" ou
65''l.N.(6V/y^6?errt//)et en Russie
jusqu'à la côte méridionale de la
mer Blanche [Meves). Elle est
assez commune et plus ou moins
sédentaire en Belgique.
Dans le midi de l'Europe,
cette espèce est plus abondante
en hiver qu'en été; il en est de même en Asie Mineure {KyOper) et en
Palestine [Tristraiu). Elle habite également le nord-ouest de l'Afrique
[Brake, Loche), les Açores {Godman) et les iles Baléares {co)i
Hnmojer) ; elle est de passage à l'île de Malte i^Wrighf). On l'observe
accidentellement dans la Sibérie occidentale [Finsch)
La var. Casiotis a pour patrie la Sibérie occidentale [Finsch], le
Turkestan [Screi-tzoïc), le Caucase [Radde) et l'Himalava (5fA/<'r/r/).
Mn'in-s. — Les rigueurs de l'hiver obligent cette esi»èce à quitter
les contrées du Nord, d'où elles émigrent par troupes de ((uiiize à vingt
sujets et même parfois par bandes composées de ciiiqnant»' à rrni
individus, voyageant souvent en plein jour. Haiis \e mkI (!<> l'Ail»'-
— 6 —
magne et en Belgique, il n'est pas rare de rencontrer de ces Colombes
durant tout l'hiver, quand celui-ci est peu rigoureux; mais ce sont
ordinairement des oiseaux venus du Nord qui viennent remplacer
ceux qui ont niché dans nos contrées. Ceux-ci nous quittent en
octobre et reviennent en mars, parfois à la fin de février.
La Colombe ramier vit dans les forêts et dans les bois, surtout
dans les parties boisées des montagnes où les conifères sontabondants.
Dans les plaines, on l'observe partout où il y a de grands arbres,
dans les parcs, les avenues et les jardins, et surtout dans les localités
où des parties boisées alternent avec des champs. A l'époque des
migrations, ces Colombes se tiennent plus particulièrement dans ces
derniers, parce qu'elles y trouvent plus facilement leur nourriture ;
mais dès qu'elles sont rassasiées, elles vont se percher au sommet des
grands arbres, se cachant volontiers au milieu du feuillage, où elles
restent parfois des heures entières. C'est également sur les branches
supérieures de vieux arbres qu'elles passent la nuit.
La Colombe qui nous occupe en ce moment, est un oiseau robuste,
agile, prudent et craintif; du haut de son observatoire elle peut voir le
danger de loin et l'éviter à temps. A terre, elle marche pas à pas en
inclinant la tête et en tenant le corps horizontal. Son vol est vigoureux,
rapide et gracieux, mais bruyant à son début. Elle est moins sociable
que la plupart de ses congénères et ne recherche la société de ses
semblables qu'en dehors de l'époque de la reproduction. Chaque
couple vit dans une union parfaite, mais témoigne peu d'attachement
à sa progéniture.
Cette espèce a une vie très régulière, et voici comment elle est
racontée par Bj'ehm, père : « A la tombée de la nuit, le mâle et la
femelle se rejoignent au voisinage de leur nid. Avant le lever du soleil,
ils s'éveillent et le mâle va se percher sur son arbre Favori. Il y com-
mence à roucouler; sa voix est plus forte (|uo celle du Pigeon des
champs; on peut la rendre ^^^.v rouchouchouck et kouhnuhou ou rou-
koukou koukou. 11 est à ce moment perché sur une branche, le cou
gonflé. Son cri, qu'il répèle tiois ou quatre fois do suite, est d'aiiiant
plus rapide, qu'il csL lui-même plus excité. Les autres mâles, attirés
par ce cri, viennent se percher sur des arbres voisins et tous roucoulent
à l'envi. 11 est à noter que trois mâles se font généralement entendre
à la fois, rarement deux, jamais quatre. Tous sont perchés sur des
arbres élevés, souvent à L'extrême sommet. Une fois, je vis un mâle
posé à terre et roucouler ainsi devant sa femelle ; j'en vis aussi un autre
voler au-dessus de moi, tout en roucoulant. La femelle arrive à son
tour et se pose près du mâle, qui cesse de roucouler, mais pousse de
temps à autre ce petit cri : pouh ou houh ; c'est l'indice d'un grand
contentement ; il semble par là, vouloir célébrer sa victoire sur les
rivaux qui l'entourent. C'est le matin, par une chaude journée, que
les Ramiers roucoulent le plus; je les ai cependant entendus par des
temps de pluie et même de neige ; ils roucoulent surtout au moment
où ils se préparent à une nouvelle couvée.
« A sept, huit ou neuf heures du matin (ce temps est variable), le
mâle se tait, et si sa femelle n'a ni œufs, ni petits, il va avec elle cher-
cher sa nourriture. A dix heures, il recommence à roucouler, mais
plus faiblement et durant peu de temps. A onze heures, il gagne
l'abreuvoir, puis se tient caché pendant le milieu du jour dans le
touffu d'un arbre. A deux ou trois heures, il se met de nouveau en
quête de nourriture ; à cinq ou six heures, parfois plus tôt, parfois plus
tard, il roucoule encore, et, après s'être abreuvé, il se livre au repos.
'< Au printemps et en été, on voit d'ordinaire les Colombes ramiers
par paires, rarement en société. Au moment de l'accouplement, le
mâle se montre très excité ; il ne peut rester en place, vole, s'élève
dans l'air obliquement, frappe violemment les pointes des ailes, qu'on
entend battre de très loin, descend en planant, et continue ce jeu pen-
dant longtemps. Sa femelle le suit quelquefois; mais, d'ordinaire,
elle reste perchée et l'attend tranquillement. Il revient généralement
auprès d'elle après avoir exécuté ses évolutions aériennes. Jamais
je n'ai vu deux mâles se battre pour posséder une femelle. »
La nourriture préférée de ces oiseaux se compose de semences de
conifères, et c'est pour cette raison qu'ils se tiennent de préférence
dans les forêts composées en majeure partie d'arbres à aiguilles. Ces
semences, ils les prennent aussi bien des cônes encore attachés, qu'à
terre où ils les ramassent après que la maturité les a fait tomber. Ils
aiment aussi les graines de diverses graminées sauvages et en nour-
rissent leurs petits ; ils ne dédaignent pas non plus les céréales, le
colza, les petits pois et autres légumineuses, les glands, les faînes et les
diverses baies. A l'occasion ils prennent aussi de petits mollusques
et des vers.
Malgré leur régime granivore, on ne peut considérer ces oiseaux
comme nuisibles, car ils ne prennent que ce qu'ils trouvent à terre et
qui serait quand même perdu.
Reproduction. — La Colombe ramier a généralement deux couvées
par année, plus rarement trois : la première ordinairement en avril,
la seconde en juin. « Une fois l'emplacement du nid choisi, dit Brehm,
les deux époux apportent des matériaux, mais la femelle seule tra-
vaille à la construction de l'édifice. Ce nid est profond et élevé. J'en
ai vu sur des sapins, des chênes, des hêtres, des aunes et des tilleuls,
à une hauteur de dix à trente pieds au-dessus du sol; d'ordinaire, il est
établi dans un endroit très caché, sur un baliveau dans un taillis, ou
sur une maîtresse branche non loin du tronc. Il est formé de bûchettes
sèches de pin, de sapin, de hêtre, etc., mais il est construit si lâche-
ment, qu'on peut souvent voir les œufs au travers. Il est aplati, n'a
qu'une petite dépression dans laquelle sont logés les œufs, et a géné-
ralement douze à quinze pouces de diamètre. Quoique grossièrement
établi, il est cependant assez solide pour résister aux mauvais temps.»
Il arrive parfois que des R,amiers se contentent d'approprier à leur
convenance des nids abandonnés de geais, de pies ou d'écureuils. La
ponte est de deux œufs blancs, mesurant environ 40 millimètres sur 30.
Les deux parents les couvent durant dix-sept à dix-huit jours, mais le
mâle ne se met ordinairement sur les œufs que de dix heures du matin
à trois ou quatre heures du soir.
Les jeunes naissent aveugles, presque nus et couverts seulement
d'un long duvet jaunâtre, mais plus abondant que chez le Pigeon
domestique. Ils sont couverts de plumes trois semaines après l'éclosion.
Les parents leur témoignent peu d'attachement; les chasse-t-on de
leur nid, ils abandonnent aussitôt œufs ou petits, sans s'en inquiéter
davantage; mais quand on ne les trouble pas, ils élèvent leur pro-
géniture avec tendresse. Tant qu'ils n'ont pas de plumes, l'un des
parents reste sans cesse auprès des petits pour les réchauffer. Durant
les premiers jours de leur existence, les petits sont nourris du produit
laiteux que sécrète le jabot des parents; plus tard ceux-ci leur donnent
des graines ramollies.
— 9 —
168. — La Colombe colombin.
COLUMBA ŒNAS, Lin.
(PL 168)
CoLUMBA ŒNAS, Lin. Fauna suec. p. 75 (1761) necSyst. nat.
CoLUMBA CAvoRUM, Brm. Isis, 1830, p. 985.
CoLUMBA ARBOREA, Brixi. Vogelf. p. 257(1855).
Palumbœna columbella, Bp. Cat. Parz. p. 9 (1856).
Palumbœna ŒNAS, Gray, Hand-list, II, p. 233 (1870).
Die Hohltaube, en allemand.
The Stock-Dove, en anglais.
De Kleine Boschduif, en flamand.
Var. Eversmannl.
? CoLUMBA FUSCA, Pall. Zoogr. Rosso-as. 1, p. 567 (1811).
Palumbœna ^neicapilla et Eversmanni, Blyth, Jouni. as. Soc. Beng. 1857 p. 219
et 225.
? Columba FUSCA, var. Brachyura, Severtz. Journ. f. Orn. 1875, p. 180.
Columba eversmanni, (Bp.) Finsch, Reise W. Sibir. p. 117 (1879).
Taille: O'^'.SO ; ailes 0,21 (sujet de Belgique).
Description du mâle et de la femelle adultes. — Tête d'un gris bleuâtre
foacé, un peu plus pâle à la gorge; dos cendré; partie supérieure du cou
d'un vert bronzé à reflets pourprés ; couvertures des ailes et de la queue,
croupion et bas du dos d'un gris bleuâtre ; dernières des grandes couvertures
des ailes marquées chacune d'une tache irrégulière noire ; rémiges brunes ;
haut de la poitrine d'un gris vineux ; les autres parties inférieures d'un gris
bleuâtre; queue d'un cendré bleuâtre, mais noire au tiers terminal, et la base
du bord externe de la rectrice latérale blanche. Bec rouge, jaune à l'extré
mité; pattes rouges; iris rouge brun.
La femelle est un peu plus petite et a les teintes moins pures.
Jeune. — Parties supérieures d'un cendré brunâtre; bas du dos, croupion,
sus-caudales et grandes couvertures des ailes d'un gris bleuâtre ; rémiges
brunes; parties inférieures grises, lavées de roux vineux à la poitrine.
La variété Eversmanni est facile à distinguer du type européen, d'abord
par sa taille moins forte (0"2r); ailes 0"'21), ensuite par la teinte vineuse
qui est presque aussi prononcée sur le dessus de la tête que sur la poitrine ; le
bas du dos et le croupion sont d'un gris blanchâtre beaucoup plus pâle que
chez Yœnas, tandis que les sus-caudales sont d'un gris bleuâtre assez
foncé. (Description faite d'après un sujet de l'Altaï appartenant au Musée de
Bruxelles.)
To.ME IL — 1887. 2
_ 40 -
Hah. — La Colombe colombin habite presque toute l'Europe jus-
qu'au 60° 1. N. (Sundevall,
von Wright), mais elle ne se
montre qu'accidentellement en
Ecosse et elle est inconnue en
Irlande (Harting). Dans l'Eu-
rope centrale et méridionale elle
est plus ou moins répandue
partout ; en Belgique , elle est
de passage en automne et en
mars, mais elle niche en petit nombre dans les grandes forêts du
pays.
On observe également cette espèce au Maroc (Irby) et en Algérie
(Loche), mais elle ne paraît pas se montrer dans le nord-est de
l'Afrique, car ni Riippell, ni Brehm, ni de Heuglin ne l'ont vue en
Egypte.
A l'Est, on rencontre cet oiseau en Asie Mineure (Krûper),Qii Pales-
tine (Tristram), en Perse (Dickson), au Caucase (Radde), au Tur-
kestan (Severtzow) et accidentellement dans la Sibérie occidentale
(Finsch).
La variété Eversmanni habite l'Asie centrale : on la rencontre
principalement dans l'Inde (Jerdon) et dans la Sibérie occidentale
(Finsch).
Le D'' 0. Finsch pense que l'on doit rapporter à cette variété l'oiseau
signalé sous le nom de C. œnas par MM, Severtzow (Tuy^k. Jevotn.,
p. 68) et Brandt (Lehmami's Reise nach Buchara, p. 320).
Mœws. — Pour les contrées de l'Europe centrale, cette Colombe
est un oiseau d'été, mais qu'on rencontre cependant parfois aussi en
hiver, quand cette saison est exceptionnellement douce. En Belgique,
elle est de passage en mars, parfois même à la fin de février, et en
automne, mais elle niche en petit nombre dans nos bois et même
dans la forêt de Soignes, près de Bruxelles.
A l'époque des migrations, ces Colombes se réunissent en petites
troupes de dix, vingt, trente et même de plus de cent individus, qui
se mettent généralement en voyage peu après le lever du soleil ; vers
le milieu du jour, ces bandes s'abattent dans les champs pour y cher-
cher leur nourriture, et après avoir pris un peu de repos, elles
continuent leur voyage jusqu'au coucher du soleil, en traversant
l'espace à une grande hauteur.
— 11 —
C'est un véritable oiseau forestier, qui ne se plaît réellement que
dans les bois à essences variées et dans les lieux où il y a beaucoup
de grands arbres ; il préfère cependant les lisières des bois bordés de
cultures et les parties boisées entrecoupées de pâturages et de
champs et abondamment pourvues de troncs d'arbres creux, car c'est
dans les trous des arbres qu'il passe généralement la nuit.
Le Colombin est moins sauvage et plus agile que le Ramier , il
marche aussi beaucoup mieux que ce dernier, d'une manière plus dé-
gagée et en tenant le corps relevé; son vol est léger, rapide et élégant.
En prenant son essor, il produit un claquement suivi bientôt d'un
sifflement assez fort; il se pose en planant doucement et sans bruit.
Il est aussi beaucoup plus sociable que son congénère et niche même,
quand la chose est possible, en société de ses semblables ; il tient
beaucoup à sa demeure et, quand il en est chassé, il y retourne dès
que le danger est passé. Sa manière de vivre est presque aussi régu-
lière que celle du Ramier, mais le Colombin est plus remuant et reste
moins longtemps à la même place. Près du nid, le mâle fait souvent
entendre le cri de houkou ou. hourkou ; il roucoule hou, hou, hou,
^oi« en se tenant immobile, la gorge gonflée; il fait entendre son
roucoulement à toute heure du jour depuis le mois d'avril jusqu'en
septembre, et plusieurs individus roucoulent souvent ensemble.
La nourriture de cet oiseau se compose de graines de céréales et
autres graminées, de graines de diverses légumineuses et crucifères,
de baies, de glands, de faînes et autres semences d'arbres et de
plantes sauvages. C'est surtout dans les champs et dans les prés
qu'il cherche sa nourriture, de huit à neuf heures du matin et de trois
à quatre heures du soir. Il va s'abreuver vers le milieu de la journée
et un peu avant le coucher du soleil.
Dans les contrées du Midi, on fait chaque année aux Colombins et
aux Ramiers des chasses très meurtrières, bien que leur chair ne
vaille pas celle du Pigeon domestique. Nous empruntons au Journal
des Chasseurs la description d'une de ces chasses, dans le midi de la
France.
« Dans la Basse-Navarre, le Béarn, le Bigorre et les autres contrées
voisines des Pyrénées, on a i)ris, au filet, de temps inunéniorial, une
immense quantité de Colombins et de Ramiers.
« On rhoisit entre deux cliaînes de montagnes une gorge large à
son oiivertuic cl ijui aille en se rétrécissant ; à son extrémité doit se
trouver une surface plane et unie d'environ cent pas carrés, qu'on
- îï -
appelle fonte dans le pays. L'embouchure étroite est entièrement
fermée par des filets dont le nombre varie suivant la largeur de la
gorge. Ces filets, qui ont chacun huit à neuf mètres de largeur sur
dix-huit de hauteur, sont hissés, par le moyen de poulies, à des arbres
qui n'ont pas moins de 25 à 30 mètres d'élévation. Ces filets sont
masqués, sur le devant, par une seconde rangée d'arbres élagués
dans le bas, pour donner passage aux oiseaux.
« Environ 30 mètres en avant des filets est une trèpe, qui consiste
en trois troncs d'arbres plantés en triangle à six pas les uns des autres,
rapprochés et liés ensemble par le haut avec une chaîne de fer. Sur
leurs cimes réunies, on construit une cabane qui est occupée par un
chasseur, le plus intelligent.
« Des deux côtés de la gorge, le long de la crête des montagnes,
sont également disposées, d'espace en espace, des cabanes sur des
arbres ou sur des éminences naturelles. Chacune de ces cabanes
recèle un chasseur,
« Lorsqu'une volée de Colombins ou de Ramiers, engagée dans la
gorge, veut franchir la crête, le chasseur le plus à portée lui lance
un matou, espèce de palette blanchie et emplumée, imitant grossiè-
rement un oiseau de proie. Les oiseaux effrayés rétrogradent et
fondent souvent jusqu'à terre. Ils sont ainsi maintenus successive-
ment, d'un chasseur à l'autre, dans la direction des filets. Au moment
où ils dépassent la trèpe, le chasseur posté dessus leur décoche, à
son tour, toujours en queue, jamais par devant, un oiseau empaillé ou
un matou. Les Colombins épouvantés se jettent les uns sur les autres :
on lâche une détente et oiseaux et filets tout est précipité pêle-mêle à
terre, »
Reproduction. — La Colombe colombin niche dans le creux d'un
arbre, de préférence d'un hêtre ; il n'est cependant pas rare de trouver
son nid dans un chêne, un saule ou tout autre arbre, et même dans
un vieux poirier ou pommier. Elle profite souvent aussi d'un trou
abandonné par un Pic vert ou autre grand Pic. Le nid est fait sans art,
de bûchettes, de radicelles et de mousse, parfois aussi de feuilles mortes ;
le centre présente un enfoncement pour les œufs, La ponte est de deux
œufs d'un blanc brillant et poreux ; ils mesurent environ 36 millim.
sur 29. Les deux parents les couvent pendant dix-sept jours.
« Un couple de Colombins, dit Brehm, est un vrai type d'amour
conjugal. Le mâle ne quitte pas sa femelle; il reste près d'elle, la
distrait par ses roucoulements pendant qu'elle couve, et l'accompagne
— 43 -
si elle est chassée de dessus ses œufs. A peine arrivé au printemps^ le
couple cherche, pour nicher, un trou dans un tronc d'arbre, et au
commencement d'avril, on peut y trouver la première couvée. Si rien
ne vient les troubler, les Colombins ont trois couvées par an, mais
jamais ils n'en élèvent deux dans le même nid. La cause de ce fait
tient à ce que les Pigeons ne débarrassent pas le nid des ordures que
les petits y déposent; aussi, lorsque ceux-ci sont grands, la cavité où ils
étaient est-elle remplie d'un tas d'ordures. Les petits y reposent dans
leurs excréments, et il en résulte que les plumes de leur ventre et de
leur queue en sont souillées pour longtemps. Mais, comme chaque
couple a besoin, dans le courant d'un seul été, de plusieurs cavités,
il court risque de n'en pas trouver suffisamment. Il est souvent obligé
d'en conquérir une, de combattre non seulement avec ses semblables,
mais encore avec des Pics, des Etourneaux, des Choucas, combats dans
lesquels il succombe souvent. L'année suivante, le couple revient à
sou ancien nid ; les ordures n'existent plus, soit que la décomposition
les ait fait disparaître, soit qu'elles aient été mangées par les insectes,
soit qu'un Pic ou quelque autre oiseau se soit chargé d'approprier la
demeure.
«.... Autant le Ramier montre peu d'attachement à sa progéniture,
autant le Colombin lui témoigne de dévouement. Il ne quitte pas ses
œufs; on peut même quelquefois le prendre sur son nid, sans qu'il
cherche à s'enfuir; il revient à sa couvée au péril de sa vie. La femelle
se laisse tuer sans abandonner ses petits. »
169. — La Colombe de roche ou Biset.
COLUMBA LIVIA, Briss.
(PI. 169J.
CoLLMU.v LIVIA et sAXATiLis, Biiss. Om. I, pp. 82, 84 (1760;.
CoLUMBA ŒNAS, Lin (part.) Si/st. nat. I, p. 279 (1766).
COLUMBA AMALI^, BlTIl. Isis, 1830, p. 985.
CoLUMBA INTEHMKDIA, Sti'ickl. A)in. Mag . nat. hist. 1844, p. 39.
CoLUMBA RLI'ESTRI.S (llftC Bp.), ELEGANS, GLAUCONOTOS, UNICOLOR Ct DUBIA, Brill.
Vogelf. p. 256 (1855j.
CoLUMBA (JYMNOCYCLUS Ct l'LUMlI'E.S, ^ î . R. GlJlV, List liinfs lir. Mus. p.Ul, IV, p. 28
(1856).
CoLUMBA TURRICOLA et SCHIMPERI, Bonap. Cnnsp. Gen. nr. Il, p. 47 (1857).
CoLUMBA NEGLECTA, IIiiiuc, L(i/i. to Yarh. p. 272 (1873 .
— 14 —
Die Felsentaube, Feldtaube, en allemand.
The Rock-Dove, en anglais.
De Steenduif, en flamand.
Var. Rnpestris.
CoLUMBA (œnas) rupestris, Pdll. Zoogr. Rosso-As. I, p. 560, pi. XXXV (1811),
CoLUMBA RUPESTRIS, Bonap. (nec Brm.) Consp. Gen. Av. II, p. 48 (1857)
CoLUMBA LEUCOZONURA, Swinh. Idis, 1861, p. 259.
CoLUMBA LiviA var . RupicoLA DAURiCA (Pall.) Radde, Reisen S.-O. Sib. II, p. 282
(1863j.
Taille: (mâle) 0"\27 à 0,29; ailes 0,21 à 0,22; (femelle) 0,25;
ailes 0,21.
Description du mâle et de la femelle adultes. — D'un gris ardoisé, la tête, le
croupion et la queue d'une teinte généralement plus foncée ; bas du dos d'un
blanc pur, mais passant, suivant les individus, par tous les degrés au gris ;
cou d'un vert chatoyant suivant l'incidence de la lumière et passant plus ou
moins au violet ])Ourpré sur le jabot ; ailes traversées par deux bandes noires;
certains individus ont, en outre, les ailes, les scapulaires et parfois même le
manteau plus ou moins tachés de noir ; rémiges d'un brun ardoisé ; extrémité
de la queue noirâtre ; rectrice la plus externe blanche en dehors, parfois d'un
blanc grisâtre, mais, comme les autres, noirâtre à son extrémité. Bec brun ;
cire blanchâtie ; iris orange ; pattes rouges.
La femelle est plus petite ; cou et jabot moins brillants.
Jeune. — Semblable aux adultes, mais sans reflets verts au cou et au jabot,
ces parties étant d'un brun grisâtre.
Remarque. — La Colombe de roche ou Biset est, comme on sait,
la souche de toutes nos races de Pigeons domestiques, aussi la voit-on
souvent, dans les contrées où elle est abondante, se croiser avec ces
derniers (1).
A l'état sauvage, cette espèce est également sujette à des variations,
climatériques suivant les uns, individuelles suivant d'autres. Voici les
caractères distinctifs des différentes formes reconnues :
1. C. livia, L. — Plumage ordinaire; bas du dos blanc. — Hab.
p]urope.
Ce n'est que chez la forme type que j'ai remarqué des sujets dont le
manteau et les ailes étaient plus ou moins tachés de noir (2).
2. C. saxalilis, Briss.(twrr2co/a,Bp.) — Semblable à la précédente,
(i) Voye^ ce qui a été dit sur les Pigeons domestiques dans l'introduction du tome I p. VIII.
(2) Je n'affirme cependant pas que ces taches n'existent jamais chez les autres races .
15 —
mais le bas du clos d'un gris blanchâtre. — - Hab. Europe méridionale,
Afrique septentrionale.
3. C. Schimperi, Bp. — Manteau et ailes d'un gris plus pâle que
chez les précédentes; bas du dos d'un blanc grisâtre. — Hab. Afrique.
4. C. inter^nedia, Strickl. — Bas du dos d'un gris un peu plus
pâle que le manteau, qui a la teinte des sujets d'Europe; reflets verts
et pourprés plus intenses que chez les formes précédentes. — Hab.
Asie centrale et orientale.
5. C. rupestris, Pall. — Bas du dos blanc ; queue traversée par
une large bande blanche. C'est une bonne variété climatérique. —
Hab. Toute l'Asie méridionale.
Beaucoup d'auteurs soutiennent que les quatre premières formes
ne sont pas des races climatériques, car, disent-ils, si chacune d'elles
est particulièrement propre à certaines régions, on ne la rencontre pas
moins dans les autres.
Suivant M. David, la var. Rupestris « ne vit pas comme le Biset
commun dans le voisinage des habitations : elle se tient de préférence
sur les rochers élevés, et fait son nid dans des cavernes inaccessibles.
Elle émigré chaque année et passe le long des montagnes de Pékin à
la fin de l'automne et dans les premiers jours du printemps. »
Hab. — La Colombe de roche est plus ou moins répandue dans les
parties montagneuses de l'Eu-
rope, de l'Asie et d'une grande
partie de l'Afrique. Aux îles
Britanniques, elle est sédentaire
et commune dans beaucoup d'en-
droits, surtout le long des côtes
occidentales de l'Ecosse et aux
îles Hébrides {Harting) ainsi
qu'aux îles Féroé {Graba).
Elle est fort localisée dans l'Europe continentale, car ses mœurs la
tiennent attachée aux régions montagneuses, surtout aux côtes rocail-
leuses. En Norwègc on ne l'observait qu'au Slavanger fjord (59° 1. N.)
et sur l'île Renncsœ, mais elle a disparu {Collett). Elle ne paraît pas
se montrer à l'état sauvage en Suède, en Danemark, dans le nord de
l'Allemagne, en Pologne et en Finlande ; il en est de même en
Suisse, en Hollande et dans la plus grande partie de la France. « Je
n'ai pas cru, dit le baron de Séljs-Longcliamps, devoir omettre
cette espèce, parce qu'elle se reproduit librement dans les vieux
t6 *q.^. *gT^»?aiptf€i-^Me
- 16 -
édifices et même dans quelques rochers des bords de la Meuse, et
que, bien que ces individus fuyards proviennent des Pigeons de
champs qu'on élève, il me semble avoir au moins autant de droits
à faire partie de la Faune Belge, que le Lapin et le Surmulot, que
l'on admet dans toutes les Faunes de l'Europe centrale.* » Il paraît
cependant que le Biset est de passage accidentel dans notre pays
comme dans plusieurs contrées voisines. On l'observe en petit
nombre dans le sud de l'Allemagne {Naumann) et de l'Autriche
[Hinterberger) et il est assez commun dans le sud de la Russie
{MenzMer, etc.). 11 est sédentaire et de passage dans le midi de la
France (Lacroiœ) et plus ou moins commun dans toutes les contrées
qui entourent la Méditerranée et la mer Noire.
En Afrique, on rencontre cet oiseau dans toutes les parties septen-
trionales (/.oc/îe, Dr^^e, e^c), en Sênégambie {Hartlauh), en Egypte,
en Nubie, en Abyssinie et dans l'Arabie méridionale {Brehm, de
Heuglin).
En Asie, on l'observe en Palestine {T?nstram), en Asie Mineure
{.Kruper),en Perse et dans toute l'Asie centrale jusqu'à Malacca {Mus.
Brux.) et au Japon (Schlégel).
La var. Rupestrh habite cerl aines parties de l'Inde (Jerdon), du
Turkestan {Severtzoïv), de la Sibérie orientale {Taczanoivski), de
la Mongolie et de la Chine proprement dite [David).
Mœurs — La Colombe de roche ou Biset émigré en automne des
contrées et des îles les plus septentrionales, mais elle est sédentaire
partout ailleurs. A l'époque de la migration, ces oiseaux se rassemblent
en bandes nombreuses qui ne paraissent pas se disperser de tout l'hiver.
A première vue on les prendrait pour des Pigeons domestiques, car
ces Colombes n'attirent l'attention que quand elles sont mêlées à des
troupes de Corneilles ou lorsqu'elles se perchent sur des arbres, ce
que les Pigeons domestiques ne font jamais.
Cette Colombe passe sa vie sur les rochers, les falaises, les
murailles, les clochers et sur les toits des fermes et des bâtiments.
Dans certaines localités, elle vit dans une demi-domesticité et
s'accouple même souvent avec les races domestiques. Elle est
généralement rare à l'intérieur des terres, car elle préfère le voisi-
nage de la mer et des grands cours d'eau bordés de rochers à tout
autre endroit. Jamais on ne la rencontre dans la profondeur des bois,
tout au plus la voit-on sur les lisières, car elle ne se perche que
rarement sur les arbres ; pour se reposer elle choisit toujours des
endroits élevés.
— 17 —
C. Graba, qui a observé cette espèce aux îles Féroé, dit qu'elle y
est commune et qu'elle niche presque dans toutes les îles habitées ;
mais elle sait si bien se cacher que les habitants ne parviennent pas
à trouver ses œufs ou ses petits. « Quand ces Colombes, continue
Graba, viennent chercher leur nourriture à Indmarck, elles sont si
prudentes, leur vol est si rapide, que ni les Corbeaux, ni les oiseaux
de proie ne parviennent à les capturer, tandis qu'ils s'emparent fort
bien des Pigeons domestiques. Je vis un jour ces Bisets voler dans une
grande caverne où je pus arriver après beaucoup de difficultés et en
courant bien des dangers. La caverne était éboulée et divisée en plu-
sieurs petites grottes, dont les ouvertures étaient masquées par des
pierres plus ou moins grosses, de sorte qu'il était impossible de voir les
nids des Bisets. On eût beau parler, crier, jeter des pierres, rien ne put
les faire sortir; on tira un coup de fusil, aussitôt la caverne s'anima et
les Colombes arrivèrent de tous côtés. »
Aux îles Canaries, suivant Bolle, les Bisets habitent aussi bien les
parties non boisées de l'intérieur que les côtes; on en rencontre jusqu'à
une altitude de 2600 à 3300 mètres au-dessus du niveau de la mer.
Berthelot en vit à Lazarote dans le cratère du volcan, malgré l'odeur
de soufre et la chaleur qui y régnaient. Dans ces îles ils dorment et
nichent dans des cavernes. A Lazarote on les chasse d'une façon
toute particulière : on pénètre dans les grottes pendant la nuit, avec
des torches allumées, on en ferme l'entrée et on assomme les oiseaux
à coups de bâtons.
D'après M. Radde, cette espèce est très commune dans certaines
localités du Caucase, où on la rencontre dans la large zone qui s'étend
depuis la mer jusqu'à une altitude de 9000 pieds. Aux sources du
Rion, près du village de Glola, elle vit dans la société de Pigeons
domestiques.
En Egypte, suivant de Heuglin, les Bisets sauvages ne sont
presque pas à distinguer des Pigeons domestiques. Quand un village
est abandonné par ses habitants, une partie des Bisets domestiques
y restent, tandis que d'autres vont se mêler aux Bisets sauvages
pour reprendre toute leur indépendance. « Aux Indes comme on
Egypte, dit A. Brehm, la Colombe de roche vit dans un état demi-
sauvage. Elle habite les vieux édifices tranquilles, les enceintes des
villes, les pagodes, les temples, les tours que Ton construit à leur
intention. Dans la Haute-Egypte, il existe de nombreuses construc-
tions qui semblent convenir mieux aux Colombes qu'aux iiommes. Ce
TuMK II. — 1HH7. 3
- 18 -
sont des maisons en forme de pyramide, à toit aplati ; le paysan n'en
habite que l'étage inférieure; l'étage supérieur, généralement peint
en blanc et diversement décoré, appartient aux Pigeons ; on élève
aussi des tours exprès pour eux. A partir d'une certaine hauteur, la
maçonnerie de ces colombiers est faite de grands pots ovoïdes, à
parois solides, placés les uns au-dessus des autres et reliés par du
mortier fait avec de la vase du Nil. L'extrémité du pot, qui est tournée
en dehors, est percée d'un trou suffisant pour laisser passer l'air et la
lumière, mais trop petit pour qu'un Pigeon puisse y entrer. Du côté
opposé, au contraire, c'est-à-dire du côté qui regarde l'intérieur^ le
pot est largement ouvert. L'entrée de ces pigeonniers est assez grande
et entourée de faisceaux de branches scellées dans la maçonnerie.
Le nombre immense de Pigeons qui entourent ces constructions,
montre suffisamment combien elles leur conviennent. »
Les habitudes du Biset diffèrent peu de celles du Pigeon do-
mestique ; mais il est plus agile, son vol est plus rapide et il est assez
craintif. A terre, il marche avec aisance en inclinant la tête à chaque
pas; il vole avec un bruit sifflant et sait franchir environ 110 kilo-
mètres à l'heure ; il aime à s'élever haut dans l'air, y décrit parfois
de grands cercles et plane quelques instants avant de se poser. Il
aime aussi la propreté et vit en bons rapports avec les autres oiseaux
comme avec ses semblables. A l'époque de la reproduction, il arrive
quelquefois que les mâles se querellent entre eux, mais sans que cela
dégénère en luttes sérieuses. Cet oiseau se montre souvent envieux,
jaloux et même avare : trouve-t-il quelque chose à manger, il le couvre
de ses ailes pour le soustraire à la vue de ses compagnons et pouvoir
seul profiter de sa trouvaille ; mais bientôt l'instinct de sociabihté
l'emporte sur ces sentiments d'égoïsme. Il roucoule comme le Pigeon
domestique.
La nourriture de cet oiseau se compose de céréales, de diverses
graminées sauvages et de graines de légumineuses et de crucifères ; il
est surtout friand de graines de vesces, de colza et de lin.
Reproduction. — Le Biset niche deux ou trois fois par an. Il
construit son nid dans des fentes de rochers, dans des grottes, des
cavernes, des ruines, etc., mais jamais dans des trous d'arbres.
« Une fois le couple uni, dit Naumann, il ne se sépare plus, même
après la période des amours ; les exceptions sont rares. Le mâle
cherche un endroit pour construire son nid, et dès qu'il l'a trouvé,
il y appelle sa femelle à grands cris. Celle-ci accourt, la queue
- 19
relevée et étalée, l'agace et fouille avec son bec les plumes de sa tête;
puis tous deux se caressent et l'accouplement a lieu. Lorsqu'il est
accompli, ils s'élèvent dans les airs en jouant, en battant bruyamment
des ailes, pour se reposer bientôt et lisser leur plumage. Ceci se répète
plusieurs jours de suite ; enfin, le mâle poussant sa femelle devant
lui jusqu'à la cavité destinée au nid, va chercher des matériaux, qu'il
remet ensuite à sa compagne pour qu'elle les dispose convenablement.
Le nid est plat, légèrement excavé au milieu, et formé d'un amas
grossier de branches sèches, de brins d'herbe et de paille. Plusieurs
jours se passent avant que la femelle ponde. >
Les oeufs, au nombre de deux, sont d'un blanc pur et brillant ; ils
mesurent 39 millimètres sur 29. Mâle et femelle couvent alternative-
ment pendant seize à dix-huit jours; cette dernière de 3 heures de
l'après-midi à 10 heures du matin, le mâle vient alors la remplacer
jusque vers 3 heures de l'après-midi; mais ce temps doit lui paraître
bien long, car vers une heure il se met déjà à crier pour que sa
compagne vienne reprendre sa place sur les œufs. Les petits sont
nourris d'abord du produit lactescent sécrété par le jabot de la mère,
puis de graines ramollies, et enfin de graines dures. Ils ont les
caractères de l'adulte à l'âge de quatre semaines et ne tardent alors
pas à se séparer de leurs parents ; débarrassés de leurs petits, ceux-ci
s'accouplent de nouveau et ont bientôt une nouvelle couvée.
GENRE XCIV.
TOURTERELLE. — TïïRTUR (1).
CoLUMBA, Briss. Ornith. I, p. 92 (1760).
Peristera, Boié (nec Swains.) Isis, 1828, p. 327.
TuRTUR, Selby, Natural. libr. ornith. V, p. 169 (1835).
Streptopelia, Bp. Consp. gen. av. II, p. 65(1857).
Car. — Bec grêle, droit, peu renflé à l'extrémité; narines étroites, hori-
zontales, surmontées d'une membrane cartilagineuse peu renflée ; ailes
médiocres, sub-aiguës, deuxième et ti-oisième rémiges les plus longues ; queue
assez longue et plus ou moins arrondie ; tarses de longueur moyenne, grêles,
nus; cercle palpébrale nu.
(1) Le terme générique de Turtur doit prévaloir, car les Tourterelles de l'ancien monde et
cellesde l'Amérique forment deux genres parfaitement distincts. Swainson créa en 1827 pour ces
dernières le nom générique de Peristera, et Boic adopta l'année suivante le mCme terme pour les
Tourterelles de l'ancien monde. Le nom de Perùtera appartient donc aux espèces Américaines,
— 20 —
Les deux sexes ont le même plumage et leurs formes sont sveltes.
Hab. — On rencontre des Tourterelles en Europe, en Asie, en
Afrique et dans quelques îles de l'Archipel Indien.
170. — La Tourterelle vulgaire.
TURTUR VULGARIS, Eyton.
(PI. 170.)
CoLUMBA TURTUR, Biiss. Omitli. I, p. 92 (1760).
Peristera TURTUR, Boie, Isis, 1828, p. 327.
Peristera tenera et dubia, Brm. Isis, 1830, p. 985.
TuRTUR VULGARIS, Eyt. Cat. Br. Birds, p. 32 (1836).
Turtur auritus, g R. Gray, (ex Ray, 1713 !) Gen. of Birds II, p, 472 (1849).
Peristera rufidorsalis et glauconotus, Brm. Yogelf. p. 257 (1855).
Turtur migratorius (Selby) Bonap. Consp.gen. av. Il, p. 61 (1857).
Die Turteltaube, en allemand.
The Turtle Dove, en anglais.
De Tortelduif, en flamand.
Taille: 0,25; ailes 0,18.
Description du mâle et de la femelle adultes. — Dessus de la tête et du cou
et bas du dos gris, blanchâtre au front ; côtés de la tête d'un cendré blan-
châtre passant au vineux vers le bas; gorge blanche ; demi-collier noir, mais
chaque plume bordée de blanc; manteau, croupion et sus-caudales d'un brun
clair ; scapulaires et couvertures des ailes noires, mais largement bordées de
roux de rouille, les plus rapprochées du bord de l'aile d'un gris bleuâtre ;
rémiges brunes, bordées de gris à la base; devant du cou et poitrine d'une
teinte vineuse; sous-caudales et ventre blancs ; rectrices médianes brunes dans
toute leur étendue, les autres d'un gris sombre en dessus, noires en dessous et
terminées par un large bord blanc, la plus externe avec la barbe extérieure
entièrement blanche. Bec brun ; iris rougeâtre; paupières nues et rouges
pattes rouges ; ongles bruns.
La femelle est un peu plus petite que le mâle, ses teintes sont plus sombres
et le demi-collier moins étendu.
Jeune. — Collier nul; d'un brun clair en dessus avec les plumes du dos et
des ailes plus ou moins bordées de roussâtre ; devant du cou et poitrine d'un
cendré roussâtre ; sous-caudales et ventre blancs (1).
(1) La planche porte par eirem /emeUe au lieu déjeune.
— 21 —
Hah. — La Tourterelle vulgaire habite, en été, la majeure partie
de l'Europe, le Sud-ouest de
l'Asie et le Nord de l'Afrique ;
en hiver, on l'observe dans
l'Afrique centrale jusqu'au 10°
1. N.
Elle est commune dans le Sud
de l'Angleterre, rare en Ecosse
,^,tfL;;] et en Irlande ( 7%omp5on) et ne
se montre qu'accidentellement
auxîlesHébrid es, Shetland, Orkney et FéroéfSaxby, Harting, Mûller).
On l'observe dans toutes les parties de la Norwège jusqu'à Vardô et
Vatso {Collett); en Suède elle est plus abondante dans le Nord que
dans le Sud {SundevallJ ; on la rencontre également en Finlande et
elle est commune dans la Russie centrale et méridionale {Sabanéeff,
Menzbier). Elle est généralement répandue et plus ou moins commune
dans toute l'Europe centrale et méridionale, mais elle est peu abon-
dante en Belgique.
Cet oiseau niche dans le Nord-ouest de l'Afrique {Loche^Drake, etc.)
et aux îles Canaries (Bolle). Il hiverne dans toutes les contrées de
l'Afrique situées entre le 31° et le 10° 1. N., mais il n'y niche pas
(de Heuglin). En été, cette espèce est aussi commune en Palestine
{Tristram), en Asie mineure {Krûper), en Perse {Blanford), au Cau-
case [Raddé) et en Turkestan {Severtzow), mais elle ne paraît pas
avoir été observée dans la Sibérie occidentale.
Mœurs. — La Tourterelle est un oiseau migrateur qui nous revient
généralement dans la seconde quinzaine d'avril. Dès la fin d'août, ces
oiseaux se rassemblent en troupes qui errent quelque temps encore
dans le pays, pour le quitter définitivement à la fin de septembre ou
en octobre. Ils émigrent pendant le jour et par bandes plus ou moins
nombreuses, mais nous reviennent isolément au printemps. Les
couples ne paraissent pas rester unis toute l'année, car les mâles
reviennent toujours quelques jours plus tôt que les femelles.
Cet oiseau vit aussi bien dans les bois situés sur les flancs des mon-
tagnes que dans les forêts des plaines, qu'elles soient formées
d'essences variées ou uniquement de conifères, peu lui importe, car il
y trouve toujours sa nourriture. Ce n'est, pour ainsi dire, que pendant
ses voyages qu'il s'aventure dans les endroits découverts et dans les
jardins. Il aime beaucoup les parties boisées traversées par une rivière
ou un ruisseau, surtout quand elles sont en même temps bordées de
champs et de prés. Mais quand il séjourne dans une forêt de conifères,
il n'a guère besoin du voisinage des champs, car les cônes de ces
arbres lui fournissent une abondante nourriture, dont il parait très
friand. Il passe la nuit au sommet des arbres.
La Tourterelle est bien, par sa beauté, sa gentillesse et la douceur
de ses mœurs, l'un des oiseaux les plus recherchés ; la grâce de ses
mouvements, de son port, la douceur de son roucoulement et la ten-
dresse que le mâle témoigne à sa femelle, plaident en sa faveur;
mais en réalité, elle n'a pas plus d'aifection que beaucoup d'autres
oiseaux et elle est peut-être moins fidèle.
Ce Pigeon marche facilement, assez vite et avec une certaine élé-
gance, en inclinant légèrement la tête à chaque pas ; il aime à courir
sur les grosses branches et à se cacher dans le touffu des arbres. Son
vol est facile, rapide, peu bruyant; malgré la rapidité de son vol,
l'oiseau sait changer brusquement de direction et échapper ainsi aux
poursuites des oiseaux de proie.
Bien que la Tourterelle soit très sociable, on ne la voit cependant
jamais en aussi grand nombre que les Colombins ; il n'est pourtant pas
rare d'en rencontrer de huit à douze cherchant ensemble leur nour-
riture ; ce n'est qu'à leur départ en automne qu'elles se réunissent en
troupes assez nombreuses. C'est un oiseau très farouche, mais à
l'époque de la reproduction il paraît oublier sa timidité, car il devient
alors plus confiant qu'aucun autre Pigeon.
Son roucoulement ressemble à tourrtourr, tourrtourr, tourrtourr.
C'est ordinairement de grand matin que le mâle se fait entendre du
haut d'un arbre, jusqu'au moment où la faim se fait sentir; il roucoule
encore un peu avant midi et surtout vers le soir, mais le mauvais
temps le rend silencieux. S'il y a plusieurs mâles dans le même
endroit, ils rivalisent entre eux et animent les bois par leur roucoule-
ment, qui est leur chant d'amour. Tant que dure la saison de la repro-
duction, mâle et femelle restent fidèlement attachés l'un à l'autre ;
l'un d'eux vient-il à mourir, la douleur de l'autre est immense.
La Tourterelle se nourrit de graines de conifères, de céréales, de
crucifères, de légumineuses et d'une foule de plantes sauvages. Elle
va s'abreuver matin et soir, et fait parfois plus de deux kilomètres
pour trouver une bonne eau de source, car il lui faut de l'eau claire et
fraîche.
Reproduction. — Cette espèce a deux et parfois trois couvées par
— 23 -
année, et la période de la reproduction dure depuis la fin d'avril
jusqu'en août. Elle niche dans les bois et non loin d'une eau limpide.
Le nid est construit sur un petit arbre, le plus souvent à hauteur
d'homme, rarement à plus de cinq mètres. Ce nid est aplati et grossiè-
rement fait de bûchettes, de bruyères et de radicelles, et présente au
centre une légère excavation destinée aux œufs ; il est si légèrement
construit, qu'on peut voir ceux-ci au travers, mais comme il est
protégé par les branches sur lesquelles il se trouve, il résiste assez
bien au vent. Le mâle aide sa compagne à chercher les matériaux
nécessaires ; la femelle s'occupe seule de la construction, mais elle
l'abandonne dès qu'elle est troublée par la présence de quelqu'un, et
c'est pour cette raison que l'on trouve souvent des nids inachevés et
abandonnés ; même quand elle a des œufs, elle ne retourne plus au
nid si elle en a été chassée. La ponte est de deux œufs d'un blanc pur
et brillant et mesurant 33 millim. sur 25 environ.
Les deux parents couvent alternativement pendant seize à dix-sept
jours ; le mâle se met habituellement sur les œufs depuis 9 ou 10 heures
du matin jusqu'à 3 ou 4 heures de l'après-midi, puis il cède la place
à sa compagne. Les jeunes sont nourris de la même manière que les
autres Pigeons, et les parents leur témoigne beaucoup d'attachement.
ORDRE VI
LES <^.^ll.ii^-A.oé:s
Caractères. — Il est assez difficile d'indiquer des caractères géné-
raux qui soient communs à tous les Gallinacés. Ce sont en général
des oiseaux de taille variable, à corps ramassé, à ailes courtes et
arrondies, à bec de forme variable, le plus souvent court, connexe,
plus ou moins recourbé à la pointe, avec les narines larges, béantes
et placées dans une dépression oblongue. Les pattes sont de longueur
moyenne, fortes et constituent le principal organe locomoteur de ces
oiseaux ; les quatre doigts sont généralement bien conformés et leurs
ongles sont larges et obtus et semblent surtout propres à gratter la
terre ; chez quelques espèces ils se renouvellent à certaines époques
de l'année. Les Gallinacés qui vivent sur le sol ont le doigt postérieur
peu développé et situé sur un plan plus élevé que les autres doigts;
chez les espèces arboricoles, au contraire, il est assez fort et souvent
très développé ; au-dessus de ce doigt se trouve souvent, chez les
mâles, un ergot aigu dirigé en dedans, qui sert d'arme à l'animal.
Leur queue varie de forme et de longeur et manque même quelquefois;
elle est composée de 12 ou 14 rectrices, et les mâles de certaines es-
pèces en ont même 18 ou 20.
Les sexes diffèrent souvent beaucoup entre eux : les mâles ont fré-
quemment un plumage varié et brillant, tandis que celui des femelles
est assez uniforme et sans couleurs éclatantes. Ces oiseaux sont pres-
que tous polygames.
Eab. — On rencontre des Gallinacés dans le monde entier, depuis
les pôles jusqu'à l'équateur.
Mœurs. — Les Gallinacés vivent dans les bois et dans les plaines,
depuis la cime des montagnes jusqu'aux rivages de la mer et on en
rencontre même dans les déserts les plus arides. Ils sont partout à
leur aise et partout ils trouvent de quoi vivre.
Le sol est leur vrai domaine ; les espèces arboricoles ne compren-
nent que celles qui sont le mieux douées sous le rapport du vol. Leurs
pattes, de longueur moyenne et robustes, leur permettent de courir
— -)K —
longtemps et vite; les ailes leur servent le plus souvent à se mainte-
nir en équilibre et à accélérer leur course, et ce n'est que par néces-
sité que la plupart prennent leur essor, leur vol étant lourd et fatigant.
Quelques-uns, cependant, ont le vol rapide et facile, mais ceux-là
s'éloignent sous certains rapports des vrais Gallinacés.
La voix de ces oiseaux se compose généralement de cris plus ou
moins retentissants qui n'ont rien d'agréable. Leurs facultés paraissent
en général assez bornées; leur intelligence est médiocre, mais la vue et
l'ouïe sont bien développées. L'expérience les rend craintifs mais non
défiants, et ils oublient toute prudence quand la jalousie s'en mêle.
La plupart de-^ mâles ou coqs vivent en polygamie^ et Tardeur
sexuelle se manifeste chez eux avec une telle violence, qu'ils combat-
tent leurs rivaux avec autant de rage que de ténacité. La jalousie des
coqs est un peu justifiée, car la fidélité conjugale est chose rare chez
les poules; il est vrai qu'elle est souvent enfreinte des deux côtés.
La grande majorité des Gallinacés nichent à terre, les Hoccos et
les Pénélopes paraissent seuls faire exception. Le nid esttoujours d'une
construction grossière et il est ordinairement placé dans uno faible
dépression, sous un buisson, dans de hautes herbes, et toujours dans
un endroit bien caché. Les couvées sont généralement nombreuses.
Les mâles s'inquiètent peu de leur progéniture, et on dirait que la
mère, par son amour et son dévouement pour ses petits, veuille faire
oublier l'indifférence du père.
J^es jeunes naissent couverts d'un épais duvet ; dès leur éclosion
ils savent marcher et prendre eux-mêmes la nourriture que leur mère
leur indique. Ils n'acquièrent leur plumage définitif qu'à l'âge d'un
an ; chez quelques-uns ce n'est qu'à deux et même à trois ans.
Tous les Gallinacés sont recherchés pour leur chair qui est souvent
fort délicate. Plusieurs espèces ont été domestiquées et ont donné
naissance à diverses races.
Classification. — On divise cet ordre en six familles, savoir: 1) les
Ptérocliclés, 2) les Tétraonidés, 3) les Phasianidés, 4) les Perdicidés,
5) les Mégapodidés et G) les Craocidés- Les deux dernières familles
n'ont pas de représentants en Europe.
FAMILLE DES PTÉROCLIDÉS.
Car. — Bec petit, court ; narines situées à la base du bec et cachées
par les plumes du front; ailes longues et aiguës, les rémiges dinii-
ToMEll — 1SS7. 4
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nuant régulièrement de longueur à parlir de la première ; queue mé-
diocre, conique, les deux rectrices médianes dépassant souvent les
autres de beaucoup ; tarses courts, emplumés ; quatre doigts nus ou
emplumés, mais le postérieur rudimentaire ou nul ; ongles courts,
larges et obtus.
De Blainville a démontré le premier que les Ptéroclidés ont de
grands rapports avec les Pigeons, et que si ces oiseaux offrent certains
caractères qui les séparent de ces derniers, ils ne peuvent cependant
en être éloignés. Leur sternum ressemble plus à celui des Pigeons
qu'à celui des autres Gallinacés, et ils se rapprochent en outre des
Pigeons par le développement de leurs ailes, leur vol soutenu, leur
manière de marcher et de boire, ainsi que par leurs mœurs mono-
games.
Hab. — Cette famille ne comprend que deux genres : les Gangas
{Pterocles) et les Syrrhaptes. Ils habitent les déserts et les endroits
arides de l'ancien monde.
Mœuï\s. — Ce sont des oiseaux sédentaires ou errants, mais si
bien doués sous le rapport du vol, qu'ils peuvent franchir sans peine
des centaines de kilomètres. Ils animent mieux que tout autre oiseau
les comrées désertes et arides qu'ils habitent. Ils sont sociables, vivent
en bandes, et plusieurs espèces se tiennent souvent non loin les unes
des autres, mais sans jamais se mêler. Pour trouver leur nourriture,
ils sont obligés de parcourir chaque jour de grands espaces, car le
désert ne peut leur fournir qu'une nourriture rare et dispersée. Avant
de se livrer au repos, ils franchissent souvent des distances énormes
afin de trouver de l'eau pour s'abreuver.
GENRE XCV.
STRRHAPTE. — SYRRHAPTES.
Tetrao, Pall Reise Russ, Reichs, II, p. 712(1773).
Syrrhaptes, lUig. Prodr. Syst. p, 243 (1811).
Nematura, Fisch. Mém. Soc. imp nat. Mosc. III, p. 271 (1812).
Heteroclitus, Vieill. Nouv. Dict. XIV, p. 453 (1817).
Pterocles, Swains. Classlf. ofB. II, p. 343(1837).
Car. — Bec court, sub-conique, convexe, à arête arrondie entamant un peu
les plumes du front; narines basâtes, latérales, presque entièrement cachées
par des plumes ; ailes allongées, étroites et pointues, la première rémige pro-
longée en brin filiforme ; queue médiocre, conique, composée de seize rectrices
aiguës, les deux médianes très allongées et terminées en brins minces et
_ 27
effilés ; tarses courts, robustes et couverts de plumes duveteuses; pouce nul ;
doigts antérieurs épais, réunis par une forte membrane ju.s(iae près de li ur
extrémité et emplumés jusqu'aux ongles ; ceux-ci larges et ol)tu^.
Hab. — Les deux espèces connues de ce genre sont répandues dans
les plaines arides du Nord et du centre de l'Asie; l'une d'elles se
montre accidentellement en Europe et même en Belgique.
171. — Le Syrrhapte paradoxal.
SYRRHAPTES PARADOXUS, Licht. ex PalL
Tetrao paradoxa, Pall. Reise Russ. Reichs, II, p. 712, (1773).
Syrrhaptes pallasii, Temra. Pig et Gallin. III, p. 282(1815).
Heteroclitus tartaricus, Vieill. N. Dict. XIV, p. 453 (1817).
Syrrhaptes paradoxus, Licht. Reise nacli Buchara, p. 134 (1823).
Syrrhaptes heteroclita, Vieill. Gai. des Ois. III, p. 61 (1825).
Das Fausthuhn, en allemand.
The Pallas's Sand-grouse, en anglais.
Het Siberische Zandhoen, en flamand.
Taille: 0™,26 sans les filaments de la queue qui ont 0,09; ailes 0.25.
Deseriptioa du mâle adulte. — Tête d'uu jaune d'ocre tirant sur le
cendré à l'occiput, sur la nuque et à la région des oreilles ; gorge, joues et
côtés du cou d'un roux ferrugiueux, plus pâle au menton ; dos, scapulaires
et sus-caudales d'un jaune d'ocre sale avec des bandes transversales noires;
couvertures des ailes de la même teinte d'ocre sale avec quelques taches non-es
sur les couvertures moyennes les plus rapprochées du dos et au pli de l'aile, les
plus grandes terminées de brun pourpré; couvertures des primaires d'une
teinte Isabelle avec une strie longitudinale noire ; rémiges cendrées, noirâtres
à leur extrémité, lisérées de blanc et à baguettes noires; poitrine cendrée,
ornée d'un étroit ceinturon blanchâtre dont les plumes sont bordées de noir;
en arrière de ce ceinturon, la poitrine est d'un cendré jaunâtre ; ventre noir
varié de jaunâtre; bas- ventre, sous-caudales et plumes de^ pattes d'un blanc
jaunâtre; rectrices d'un cendré foncé,blanches à leurextrémité,tachées de roux
jaunâtre sur la barbe interne, mais sur les deux barbes des médianes, dont les
filets sont noirâtres. Bec, iris et ongles bruns.
Femelle. — Ailes et queue se terminant en pointes moins allongées. Gorge
d'un j luiie d'ocre et cette teinte est limitée par une étroite bande noire en
collier ; dessus de la tête, côtés du cou et de la poitrine parsemés de taches
noires, mais il n'y a point de ceinturon; petites couvertures des ailes égale-
ment tachées de noir; les barides noires du dos sont plus étroites mais plus
n()nd)icusts ; ventr'' d'un l)iuii noirâtre.
Jeune. — Ressemble à la femelle, mais les ailes et la queue nullement
prolongées en poiiite ; les bandes étroites du dos sont plus ou moins disposées
en zigzags.
}lab — Ce Syrrbapte a pour pairie les steppes et les plaines
arides de l'Asie centrale, depuis
la mer Caspienne jusqu'en Daou-
rie [Taczanowski) et en Chine.
Suivant le père David, on le ren-
contre communément en Mon-
golie, d'où il descend, en hiver,
par bandes nombreuses dans les
plaines de Petchely, et l'on en
prend alors beaucoup au filet en
Tientsin et Takou.
Pallas le découvrit en 1771 dans les steppes desKirghis, etSevert-
zow l'observa récemment en Turkestan. Son aire de dispersion paraît
donc comprendre toutes les parties de l'Asie centrale situées entre les
36° et 55° 1. N., mais il est probable que cet oiseau dépasse souvent
ces limites.
C'est vers 1853 que le premier Syrrhapte parait s'être montré en
Europe ; il fut tué à Sarepta (1), en Russie. En 1860, Schlégel et Moore
annoncèrent simultanément la capture de quelques Syrrhaptes isolés
dans l'Europe centrale: on en avait tués dans les dunes de la Hol-
lande et de l'Angleterre ; d'autres furent pris dans le Jutland en 1861.
Dans le courant de 1863, une bande énorme de ces oiseaux fit irrup-
tion sur notre continent et se dispersa sur une grande partie de l'Eu-
rope ; le professeur Newton estime à près de sept cents le nombre des
individus qui y ont été capturés ou tués. A cette époque, on en prit dans
la Russie méridionale et centrale (Menzbier) , en Pologne ( Taczanoioski) ,
en Allemagne (A/^wn, Bolle), en Danemark (Reinhardt), à Helgoland
{Gaetké), en Suède (Sundevall), en Norwège jusqu'au nord de Bergen
et près de Nordfjord sous le 62° [Collett), en Hollande {Schlégel), en
Belgique {de Selys), en France {de Montessus), en Italie {Giglioli), en
Galicie {Dzieduszcki), en Autriche (Tschusi), en Bohême {Fritsch), en
Angleterre, en Ecosse, en Irlande, aux îles Shetland, Féroé {Newton,
etc.) et Borkum (Altum).
M. le baron de Sélys-Longchamps signale, pour la Belgique, une
(1) Naumannia, ITT, p. 305 (1853).
— 29 -
femelle prise à Rocour,prcs de Liège, le 12 octobre 1863, et un mâle
tué le 4 janvier 1864, à deux kilomètres sud-ouest d'Ostende ; feu
mon père a mentionné une troisième capture près de Bastogne (1).
Mœurs. — C'est à M. Radde que l'on doit les premiers renseigne-
ments sur les mœurs de cette espèce, et voici un résumé de ce que cet
auteur en dit :
« Au milieu de mars, lorsque la neige recouvre encore les coteaux
des hautes steppes, cet oiseau arrive du midi ; il est déjà accouplé et
vit en petites troupes. Dans les hivers peu rigoureux, on le rencontre
déjà aux limites Nord-Est du haut Gobi ; mais, après l'hiver, même le
plus rude, il y arrive et s'y reproduit de fort bonne heure. Dans les
premiers jours d'avril, on le trouve déjà sur ses œufs, et à la. fin de
mai il a une seconde couvée. Après avoir élevé celle-ci, il change de
demeure, et en hiver, il émigré jusqu'aux limites Sud du Gobi, vers
les contre forts septentrionaux de l'Himalaya. Le 10 mars 1856,
alors que pendant la nuit régnait un froid de — 13°R. , que la tempéra-
ture de midi ne dépassait pas + 2°R., les premiers Syrrhaptesse mon-
traient au Tarei-nor. Ils volent en rangs serrés, comme les Pluviers;
au printemps, ils se réunissent en petites bandes formées chacune de
quatre à six couples, et en automne ils constituent des bandes de
plusieurs centaines d'individus. En volant, ils font entendre un cri qui
leur a valu leur nom mongol. Dans cette grande bande chaque couple
reste uni.
« Au printemps, les Syrrhaptes arriv^mt régulièrement à heures
fixes pour boire aux puits d'eau douce ; ils y viennent de toutes les
directions; ils crient dès qu'ils atteignent le bord de l'eau, et leurs
compagnons leur répondent. Ils se posent près de l'eau généralement
en rangées de dix à douze individus. Ils n'y font pas une longue
halte, et en quittant l'abreuvoir pour aller de nouveau se repaître, ils
gagnent ces places blanches où le sel s'est cristallisé, et les petites
hauteurs couvertes d'herbes. Ils ne dédaignent pas les jeunes pousses
succulentes des salicorniées; ils les paissent, comme le l'ont les
Outardes. Au printemps, j'ai trouvé dans leur estomac des graines de
Salsola.
« En été, ils aiment à se chauffer au soleil. Comme les i)oulos, ils
creusent de petites dépressions dans ces éminences gris blanchâtres
(Ij Voy. au sujet de l'invasion des Syirh:i|)te> : The Ibis, lt*59, 18iJ0, ISG.! — Journal fur
Ornttholojrie, l^GG, 18o4, 1805. — Revue et A/aj^asiu Je zooloi^ie, 18G3. — nulletin de l' Aca-
démie royale de Belgique, t. XVII (1SG4) p. 22.— Dubois, Les Ois. de rEur. t. II, p. ViW.
- 30 —
pénétrées de sel, qui bordent le Tarei-nor, et sur lesquelles croissent
des plantes salines. Je les ai quelquefois observés ainsi au repos. Ils
commencent par courir de côté et d'autre cherchant des aliments, et
une fois rassasiés, ils se reposent. II est alors ordinairement onze
heures; c'est le moment où ils se creusent des trous, pour s'y tapir à
la façon des poules, en agitant leur corps et hérissant leurs plumes.
Ils demeurent ainsi dans une immobilité parfaite, et il est alors diffi-
cile de les apercevoir, tant leur plumage gris jaune tacheté de noir,
se confond avec la teinte du sol. Si un Faucon vient à passer au-dessus
d'eux, ils se relèvent et disparaissent en un instant. Leur cri de
détresse a averti leurs compagnons, et bientôt l'air est rempli de pe-
tites bandes innombrables de ces singuliers oiseaux, et ils sont loin
avant qu'on ait pu les tirer. Dès que le danger est passé, ils reviennent,
courent prudemment sur le sol, puis s'y couchent comme précédem-
ment. Il est rare qu'un Faucon parvienne à en saisir un, car leur vol
est plus rapide que celui des Pigeons. Ils ne peuvent faire de longs
trajets à pieds ; ils courent vite mais pas longtemps.
« J'ai observé, qu'en été, de nombreuses bandes de Syrrhaptes
voyagent à travers les steppes. Dans les derniers jours de mai, je
voulais me rendre aux îles d'Aral, dans le Tarei-nor ; je longeais les
bords de ce lac, actuellement desséché, et, vers midi, je vis une
quantité innombrable de petites bandes de Syrrhaptes,mais ces oiseaux
étaient si défiants que je ne pus m'en approcher. Après plusieurs
tentatives infructueuses, je remis ma chasse à plus tard. Au coucher
du soleil, ces oiseaux se réunirent en deux grandes troupes, chacune
d'au moins un millier d'individus ; ils criaient de toutes leurs forces.
J'espérais les surprendre, mais je ne pus parvenir à les approcher à
portée de fusil, ni à cheval, ni en rampant. Après s'être élevés et
abattus plusieurs fois, ils quittèrent enfin les bords du Tarei-nor et se
dirigèrent vers l'Est, dans le haut des steppes, où ils s'abattirent en
deux endroits, qui, pendant l'hiver, avaient servi de parcs à deux
troupeaux. Ces deux places étaient couvertes d'une couche épaisse et
foulée de fumier, qu'aucune plante n'avait encore pu percer; l'approche
de la nuit m'empêcha d'y poursuivre ces oiseaux, qui continuaient à
crier. Le lendemain, ils avaient tous disparu, et pendant tout le reste
de l'été, je n'en rencontrai plus un seul au Tarei-nor.
« Je fus extrêmement surpris de voir un oiseau quitter ainsi
complètement un pays, en été, après sa seconde couvée. C'était
cependant là un exemple frappant des mœurs errantes et nomades
- 31 -
des véritables habitants des steppes. Ce ne fut qu'au mois d'octobre,
dans le Sud des steppes où jetais allé chasser l'Antilope, et lorsque
les migrations automnales des oiseaux étaient terminées depuis
longtemps déjà, que je revis des Syrrhaptes, en deçà de l'Argunj. Ils
volaient en bandes et se dirigeaient vers le Nord, sur le territoire
russe ; mais je ne les revis plus dans les steppes (1). »
Il résulte de ce qui précède, ainsi que des observations faites en
Europe par MM. Altum, von Droste, A. Brehm et autres, que le
Syrrhapte est un oiseau extrêmement farouche mais très sociable, et
qu'il tient du Pigeon par la rapidité de son vol, et des Gallinacés, par
sa manière de vivre. Voici un résumé de la note publiée par le
D"" Altum, sur les Sjrrhaptes observés à Borkum, petite île hollan-
daise située au nord de la province de Groningue :
« Ces oiseaux apparurent à Borkum le 2i mai, par petites bandes
de deux à douze sujets; du23 juin au l'^juilleton n'en vit plus aucun,
puis ils se montrèrent de nouveau par grandes bandes. Le 8 août, nous
revîmes les quatre premiers, qui volaient avec une grande vitesse, en
battant rapidement des ailes et en poussant les cris de quick, quick,
quick. Ils s'abattirent bientôt, et M. F. von Droste chercha à les appro-
cher. Arrivé à cent pas environ d'eux, il aperçut une grande bande
d'oiseaux qu'il ne connaissait point encore, immobiles et serrés les uns
contre les autres. On les aurait pris pour des Pluviers dorés, si la
position plus horizontale de leur corps ne les en avait distingués. Ils
ne se laissèrent approcher à moins de deux cents pas, et s'envolèrent
tout à coup avec un fort bruissement d'ailes, en poussant des cris
ressemblant à hoeckerick, mais qui, quand tous les oiseaux les
lançaient à la fois, se confondaient en un désordre inextricable. Ils
s'envolèrent en rasant presque la surface du sol sablonneux, comme
une bande de Pigeons qui revient des champs. Ils formaient une large
traînée, fendaient l'air avec une grande vitesse, s'élevant et s'abais-
sant de façon à décrire une ligne légèrement ondulée. Mon ami dut
remplacer son fusil par une longue -vue, à l'aide de laquelle il put
encore, pendant trois quarts d'heure, voir les Syrrhaptes s'éloigner
(le nie.
« L'endroit de la plage où cette ])ande s'était installée, semblait être
pour ces oiseaux un lieu de prédilection. Ils i-echerchaient surtout les
places où croissaient des Sdioheria maritima des graines desquelles
(1) G. Radde, Reisen im Siidtn von Osi-Sibirien, II, p. 202.
OC) __
ils paraissaient très friands. A cent pas des dunes il était fort rare
d'observer un de ces oiseaux, car ils choisissaient toujours un terrain
uni et découvert. Outre les graines, ils mangeaient encore des bour-
geons et des feuilles de Schoberia maritiwM, tout comme le font les
poules. J'ai également trouvé dans leur jabot des graines de
Lepigonu^n marinum et de Poa distans; le jabot était presque
rempli d'aliments; les gros grains de sable y étaient peu nombreux,
tandis qu'il y en avait une grande quantité dans le gésier.
« Peu après sa chasse infructueuse, M. von Droste rencontra une
femelle isolée, dans un bas -fond d'une centaine d'arpents d'étendue et
entouré de dunes de tous les côtés. Cet individu était bien moins
craintif que ne l'était la bande réunie. En approchant prudemment de
l'oiseau jusqu'à une distance de 80 à 100 pas, le Syrrhapte se mit à
courir, et quand il s'arrêtait, il était fort difficile de l'apercevoir sur le
sable, avec lequel ses couleurs se confondaient. En s'élevant, il
avait quelque analogie avec une Perdrix, mais il faisait en même
temps claquer ses ailes comme un Pioeon. Au début le vol paraît
lourd et lent, et il est loin d'être aussi léger et aussi facile que celui
des Bécasseaux et des Pluviers; mais une fois le premier élan pris, le
Syrrhapte surpasse de beaucoup ces oiseaux en vitesse. Je suis porté
à croire que c'est un des oiseaux dont le vol est le plus rapide, et que
les Faucons sont peut-être les seuls en état de le dépasser. Est- on à
proximité, on entend très bien le claquement des ailes quand les
Syrrhaptes prennent leur essor; une bande qui passe produit un fort
bruissement. Ces oiseaux ne paraissent pas pouvoir se détourner
brusquement dans leur vol, et quand un Busard fond sur eux, la bande
se divise et laisse le rapace passer entre elle. Ils parcourent une ligne
légèrement ondulée, et restent à peu près toujours dans le même
plan horizontal. Les individus isolés seuls s'élèvent haut dans les airs,
mais les ban-des ne montent guère à plus de dix mètres au-dessus du
sol. Quand on les chassait, ils s'enfuyaient à travers les vallées des
dunes, jusqu'à ce qu'ils fussent hors de la vue, mais dès qu'ils
croyaient le danger passé, ils revenaient à leur ancienne place ; si
cependant ils avaient lieu de ne plus s'y croire en sûreté, ils s'envo-
laient de nouveau pour s'abattre au loin dans un autre endroit.
« Sur cette plage entourée de dunes, on rencontrait ordinairement
les Syrrhaptes jusque vers 9 heures du matin. A ce moment, par une
belle matinée, M. von Droste s'était couché à plat ventre derrière un
petit monticule de sable et observait une bande composée de 90 à 100
individus; un de ces oiseaux l'aperçut, un mâle sans doute, et courut
aussitôt sur une petite éminence, leva la tête et poussa son cri reten-
tissant de lîoeckerick, koeckerick. Ace signal, toute la bande serra ses
rangs et demeura immobile, sauf une quinzaine qui en étaient éloi-
gnés et qui se serrèrent quand même les uns contre les autres. Mon
ami fit feu, la bande s'envola, mais le vieux mâle qui avait averti ses
compagnons, ne partit que quand le chasseur se fut levé pour aller
chercher les sept oiseaux qu'il avait abattus.
« Entre 10 et 11 heures, ils parcouraient la plage pour chercher les
bourgeons et les graines dont ils se nourrissaient. Après s'être
abattus, ils restaient environ vingt minutes immobiles, examinant les
alentours, puis ils se mettaient à manger, courant sur le sable en
suivant toujours la môme direction. Quelques petites troupes se déta-
chaient sur les côtés, restaient en arrière, mais sans jamais s'écarter
de beaucoup du gros de la bande. Quelques autres individus isolés dépas-
saient ces petites troupes, en arrière et sur les côtés, et semblaient
remplir les fonctions de sentinelles. En courant ces oiseaux font
entendre un petit cri ressemblant à koek koek ; quand deux d'entre
eux s'approchent de trop près, ils lèvent les ailes, baissent la tète,
prennent un air menaçant et crient vivement krictikrik. Ils s'élan-
cent parfois aussi l'un contre l'autre, sautent en l'air, et immédiate-
ment quelques autres s'élèvent, comme s'ils craignaient un danger,
mais ils ne tardent pas à s'abattre de nouveau.
« Vers midi les Syrrhaptes se rendaient assez régulièrement dans
les dunes sèches et chaudes pour se baigner dans le sable, recherchant
de préférence les endroits sablonneux où la tempête a détruit toute
végétation, ne laissant émerger que quelques rares Elymus arenaria.
C'est là quon pouvait le mieux les approcher. Malheureusement leur
couleur se confond tellement avec celle du terrain, que de loin il est
presque impossible de les apercevoir. Ainsi, on vit une fois treize
Syrrhaptes s'abattre sur une dune ; on y braqua immédiatement une
longue-vue, mais l'on ne put voir aucun oiseau, jusqu'à ce que l'un
d'eux se remuât par hasard. A quarante pas il est fort diliîcile de voir
ces oiseaux, et à deux cents pas il est impossibl<' do les distinguer,
môme à l'aide d'une longue -vue.
'• Au commencenicnt de leur séjour, ces oiseaux étaient peu crain-
tifs, mais bientôt la chasse (pi'on l<'ur lit les n-iulit déliants, et il
devenait impossible aux plus adroits oliasseurs de les surprendre. Les
bandes se composaient ordinairement de 30 à 70 individus, plus rare-
TnMK 11 — 1SS7 r»
ment de 80 à 90; parfois aussi on voyait de petites troupes de 4, 6, 7,
9, 12 sujets et même des individus isolés. Jusqu'au 20 août, on tua sur
l'île de Borkum 38 Syrrhaptes, qui furent mangés pour la plupart,
car leur chair est excellente (1). »
Suivant M. J. Reinhardt, des Syrrliaptes furent observes pour la
première fois en Danemark en 1859, mais c'est par cen1ain'''S qu'on
les vit en 1863 dans le Jutkmd. Les premiers arrivèrent vers la lin
de mai et restèrent jusqu'en hiver. A peine arrivés, ils se mirent à
nicher: les premiers œufs furent trouvés au commencement de mai; le
6 juin, un chasseur prit une femelle sur son nid, qui contenait trois
œufs ; l'oiseau fut mis en cage et pondit peu après son quatrième
œuf. Un autre chasseur trouva deux nids à une courte distance l'un
de l'autre : le premier, qui contenait trois œufs, consistait en une
légère dépression creusée dans le sable, et tapissée de quelques joncs
secs; le second, qui ne contenait que deux œufs, était placé dans des
bruyères et formé d'herbes sèches. On découvrit encore d'autres nids
dans le môme mois et tous construits à peu près de la môme façon.
Le 27 juillet, un autre chasseur encore fit lever une femelle de dessus
son nid, qui renfermait trois œufs; il plaça un lacet et parvint quelques
heures après à s'emparer de la femelle, et du mâle ensuite. Pendant
ce temps, un des petits était éclos; un second sortit de l'œuf peu après,
mais ces deux poussins périrent, faute de soins, au bout du premier
jour. M. Reinhardt conclut des observations faites dans le Jutland,
que le Syrrhapte est monogame et que le mâle prend part à l'incu-
bation (2).
M. A. Brehni pense qu'on pourrait fort bien acclimater cette
espèce en Europe, mais pour cela il faudrait commencer par la proté-
ger. En 1863 la chose eut été fort possible, mais on a fait alors à ces
pauvres oiseaux une chasse à outrance : la chasse au fusil étant
devenue trop difficile, on eut recours au poison, à des grains de blé
ind;)ibés d'une solution de strychnine.
Reproduction. — Complétons ce qui a été dit plus haut sur la nidi-
fication, parles observations faites en Sibérie par M. Radde.
« Leur nid est grossièrement fait et ressemble à celui des Gangas.
Plusieurs couples nichent souvent en société. Dans le terrain impré-
gné de sel du Tarei-nor, ils creusent une petite fosse d'environ cinq
(1) Dr Altum, Journal fur Ornithologie, 1863. p. 2''-8 et suivantes.
(2) Journal f. Orn. 186i, p. 559.
pouces de diamètre, dont les bords sont garnis de jeunes pousses de
Salsola et parfois do graminées. Les œufs, au nombre de quatre, res-
semblent également à ceux des Gangas ; ils sont roraarquablos par
leur forme elliptique, mais parfois l'une des extrémités est plus poin-
tue que l'autre. Leur couleur varie du gris ver-dâtre au gris brunâtre
sale, qui est la teinte la plus ordinaire ; ils présentent k leur surface
des taches et des points bruns dans deux tons différents. > Suivant les
figures de M. Radde, ces œufs mesurent en moyenne 43 millim.
sur 30.
FAMILLE DES TÉTRAONIDÉS.
Ca7\ — Bec court, fort, épais, courbé dès sa base et plus ou moins
crochu ; partie nue au-dessus de l'œil couverte de petites écailles
rouges et plus ou moins cornées ; ailes courtes ou do longueur
moyenne; queue moyenne, tronquée à angle droit, rarement longue et
conique ou bifurquée ; sus et sous-caudales médianes couvrant une
grande partie des rectriccs et les dépassant même parfois; tarses épais,
plus ou moins garnis de plumes ; doigts souvent pourvus d'appendices
cornés pectines, que Ton regarde comme des plumes atrophiées ;
pouce court, élevé. Corps épais et ramassé ; plumage abondant.
Hab. — Les oiseaux de cette famille habitent les bois et les mon-
tagnes de la partie septentrionale du globe; ils manquent en Afrique
et en Océanie.
GENRE XCVI.
TÉTRAS. — TETRAO (1).
Tetrao, Lin. Syst. nat. I, p. 273 (1766).
Urogallus, Kp. Naturl. Syst., p. 180 (1829).
Lyrurus, S\v. Faim. bor. Am. p. 4')7 (18!31)
Bec épais, recnurl)6 et crochu ii la pointe; narines basales, latérales,
cachées par les plumes du front; au-des.>.us des yeux, une hircje bande charnue
et papilliuse; ;ii!es courtes, arromlies, concaves, sub-aiguës; troisième et
(1) Danj la li.slu dts oiseaux de Ijclgiquc piib'.icc eu I8S2 {Manuel de zoologie, p. iKH,, j'ai
mentionne le Layopus mutas, dont on venait de m'annoncer la capture de trois individus aux
environs de Jurhise. Je fis prier le propriétaire de ces oisciux, qui les avait fait empailler tous les
trois, de bien vouloir m'en communiquer un pour la constatation de son identité. Mais, malgré
mes instances, il refusa de rendre ce petit service A la science.
La capture de cette espèce ci lJelgiq>ie reste donc fort douteuse, car il y a lieu de supposer qu'il
s'.ngit simplement de quelques Lagopèdes d'Kcosse (Lagopus scotic*(s), échappés des Ardcnnes où
Ton a essayé de les acclimater.
- 36 -
quatrième rémiges les plus longues; queue médiocre, de forme varialjle, com-
posée de dix-huit lectrices ; tarses de la longueur du doigt médian, emplumé
jusqu'aux doigts; ceux-ci allongés, nus, pectines sur les Lords; ongles évasés
à la pointe, obtus, creusés en dessous.
Hah. — C« genre est représenté en Europe, ainsi que dans le Nord
de l'Asie et de l'Amérique.
172. — Le Tétras auerhan ou urogalle.
TETRAO UROGALLUS, Lin.
(PL 172 et 172b.}.
Urogallus major, Bi'iss. Odi. I, p. 182 (1760).
Tetrao urogallus, Lin. Syst nat. 1, p. 274 (1766).
Tetrao major, maculatus et crassirostris. Brm. lais, 1830. p. 985.
Der Auerhahn, en allemand.
The Capercaillie, en anglais.
Het Groote Korhoen, en flamand.
Taille du mâle : 0'",85 ; ailes 0,41 ; femelle : 0.52 ; ailes 0,31 .
Descriptmi du mâle adulte. — Tête d'un brun noirâtre, varié de cendré
à la nuque; une plaque nue et papilleuse d'un rouge vif au-dessus de l'œil ;
plumes de la gorge très allongées, noires bordées de vert bronzé ; cou, dos et
croupion noirs variés de gris et finement rayés en zigzags et pointillés de
cendré ; ailes brunes avec une tache blanche à l'épaule, les scapulaires et les
couvertures finement rayées et pointillées de roux; poitrine d'un vert foncé â
reflets bleus et violets; abdomen d'un brun noirâtre taché de blanc ; plumes
des flancs brunes, pointillées de roussâtre et terminées de blanc; queue noire
avec des taches blanches disposées en arc de cercle ; sus et sous-caudales
noires terminées de blanc et plus ou moins pointillées de gris sur les bords ;
jambes et tarses garnis de plumes filamenteuses d'un brun cendré. Bec blan-
châtre ; iris brun clair; doigts bruns.
Femelle. — Elle est beaucoup plus petite que le mâle. Parties supérieures
noirâtres rayées de roux et de cendré , les parties claires pointillées de brun ;
gorge et devant du cou d'un blanc roussâtre avec quelques taches noires et
cendrées au bas de ce dernier ; [loitrine d'un roux ardent ; le reste des parties
inférieures d'un roux moins vif et barrées de noir, mais toutes les plumes plus
ou moins terminées de blanchâtre ; ailes brunes, tachées et barrées de roux ;
sus-caudales brunes, barrées de roux et terminées de blanchâtre ; queue d'un
roux ardent barrée irrégulièrement de brun-noir; j)lumes des tarses cendrées.
Bec brun de corne; iris et doigts comme cliez le mâle.
ÏBMfflîffil
- 37 -
Jeune mâle. — Ressemble à la femelle, mais il est moins roux et les parties
inférieures sont rayées de brun à la poitrine comme au ventre.
Poussin. — Duvet très épais, serré, droit. Teinte générale d'un jaune ver-
dâtre plus roux sur la poitrine et le dos, mélangé, sur ce dernier, de nom-
breuses taches brunes; tête d'un jaune assez clair varié de tnches brunes, dont
la plus apparente est sur le front en forme de croissant ; bec allongé; tardes
couverts de duvet (A. Marchand) (1).
Hab. — Le Tétras auerhan, ou Grand Coq de bruyère, est abon-
dant en Scandinavie et dans le
nord de la Russie ; en Norwège
et en Suède on le rencontre jusque
sous le 70° 1 . N . , et sa répartition
coïncide avec celle du pin syl-
vestre {Collet t, Sundewall); en
Russie il habite les régions du
sapin et de l'Oural et les forêts de
pins de la région du Tchernosém
{Bogdanoiv); il est surtout commun dans les gouvernements dAr-
changel, de Vladimir, de Tver, de Smolensk et dans les forêts de la
partie septentrionale du gouvernement de Perm {Sabanaéff)', dans le
iMidi, il ne paraît exister que dans le nord-ouest de la Bessarabie, oii
il doit se répandre des confins de la Hongrie ; l'espèce est entièrement
inconnue sur tout le reste du littoral de la mer Noire et en Crimée
[de Nordmann). Cette espèce est commune dans les grandes forêts de
la Bohême [Fritsch) et assez répandue dans celles de la Styrie [Seiden-
sacher) ; elle est également assez commune en Hongrie, en Galicie
Wodzicki), dans les Bsilca.ns {El ives eiBuckley), en Pologne ( T^c^-^-
noioski), en Allemagne, principalement dans le Nord, en Silésie, en
Thuringe, en Westphalie, en Prusse, en Poméranie, etc. {Naumann,
Borggy^ève, v. H orne y er, etc.).
Cet oiseau a complètement disparu du Danemark, de la Hollande et
de la Belgique. Il vivait encore, il y a une quarantaine d'années,
dans la partie do la Belgique voisine de la frontière prussienne, mais
l'espèce semble complètement éteinte dans notre pays ; de loin on
loin, parait il, on (Ui prend encore un individu venant de la frontière
allemande. En 1812, ^AI. de Sélys-Longchamps écrivait au sujet de
(1) N(jtcs sur les poussins des oiseaux d'Europe (Rcv. et Mag. de cool. 1870, p. iOO ; 18<)7
l'I. i).
- 88 -
cet oiseau : « Vit en petit nombre près des hautes fanges dans les
forêts de Hertogenwakl et de Samrée, notamment aux environs de
Jalhay. » Anciennement cette espèce était commune en Ecosse et en
Irlande, mais elle devint de plus en plus rare et le dernier sujet fut
tué en 1758 ; en 1836, elle fut réintroduite en Ecosse et aujourd'hui
elle y est de nouveau assez commune, grâce à la protection qu'on lui
acco;:'de. Il serait à désirer que les chasseurs de Belgique s'entendissent
également pour réintroduire ce bel oiseau dans les forêts de l'Ar-
donne, où il se multiplierait facilement, si on le ménageait pendant
quelques années.
Le Grand Coq de bruyère est assez répandu dans les montagnes de
la Suisse ( Tchudi). En France on ne le trouve plus que sur les hautes
montagnes du Jura, des Vosges et des Pyrénées {Degland et Gey^oe) ;
en Espagne il paraît encore exister dans les provinces de Léon, des
Asturies et de Galice {Lilford); en Italie il a également été exterminé,
et on ne le i-encontre pour ainsi dire plus que dans les parties les
plus inaccessibles des Alpes italiennes (Gi'ilioli) ; en Grèce on l'ob-
serve encore assez fréquemment dans les bois de l'Arcadie, où il niche
{Lindermayer).
En Asie on rencontre cet oiseau dans toute la Sibérie et dans l'xVltaï,
mais pas au Kamtschatka, où il est remplacé par une espèce voisine
(Bogdanow) ; il n'existe pas non plus dans le Caucase.
Mœurs. — Ce Tétras vit de préférence dans les forêts qui couvrent
les lianes des montagnes, mais on le rencontre aussi dans les forêts
des plaines, quand celles-ci olfrent de vastes étendues de bois à
essences variées, mais bien pourvus d'arbres à aiguilles. Dans les con-
trées du Nord, il se tient même dans des forêts composées uniquement
de pins et de sapins.
C'est un oiseau sédentaire ; en hiver, cependant, il quitte les régions
supérieures des montagnes pour passer dans la zone moyenne, où il
erre souvent d'un lieu à l'autre. Dans les hivers rigoureux, il reste
parfois des semaines entières sur les arbres, sans descendre à terre,
et vivant presque uniquement d'aiguilles de conifères. En temps ordi-
naire, ce bol oiseau passe une grande partie de ses journées sur le sol,
recherchant de préférence les clairières exposées au soleil et cou-
vertes de bruyères, de ronces et d'airelles, et près desquelles coule
quelque cours d'eau limpide. Là on voit ce Tétras courir entre les
herbes pour chercher sa nourriture, grimper sur les buissons et ne
s'envoler qu'en cas de danger. Vers le soir, le coq et la poule se
séparent, et chacun cherche de son côté un arbre pour y passer la
nuit.
Le Grand Coq de bruyère est lourd dans ses mouvoments et d'un
naturel prudent et farouche. Il sait marcher avec rapidité, mais pas
aussi vite que la Perdrix; sa démarche emprunte quelque chose dn
solennel au degme qui lui est propre; son dos voûté et son cou pendant,
lui donne (ju(dque ressemblance avec le Coq d'Inde. Les sens de la
vue et de l'ouïe sont extraordinairement développés et, si légèrement
que le chasseur s'avance sur la mousse, le coq entend le moindre
craquement, le moindre froissement de feuilles, et aussitôt il part,
d'un vol bruyant et avec un rapide battement d'ailes ; mais il est
trop lourd pour pouvoir soutenir longtemps ce vol, dont on entend fort
loin le bruit et qui est toujours dirigé en droite ligne. Bientôt il s'abat
sur le faîte de quelque grand arbre, de préférence sur ceux dont le
sommet est desséché et d'où il peut aisément repartir. La poule,
moins farouche, se voit bien plus souvent à la pâture, grattant la
'erre et faisant entendre sur tous les tons son gloussement : hac-hac.
Le coq est querelleur et jaloux comme la plupart des Gallinacés;
il se bat en toutes saisons avec ses semblables, aussi est-il forcé de
vivre seul ; dans les localités où ces oiseaux sont abondants, il arrive
cependant parfois de voir plusieui s mâles se réunir en automne et
vivre durant quelque temps en bonne intelligence.
Le coq. qui est polygame, se conduit en despote à l'égard de ses
femelles; il s'élance souvent sans raison sur ses poules et les maltraite
brutalement; d'autres fois il se montre doux et prévenant.
LesTétras adultes se nourrissent d'aiguilles de conifères, de feuilles,
de bourgeons, de frondes de fougères, de graines, de baies diverses, de
larves, d'insectes et de vers, auxquels ils ajoutent, pour faciliter la
digestion, du gravier, du gros sable et des coquilles d'escargots en
quantité. Pendant la durée des amours et en hiver, le coq se nourrit
presque uniquement d'aiguilles de sapins, ce qui donne à la chair un
goût de résine et la rend d'autant plus coriace qu'elle est déjà naturel-
lement dure. La poule mang(^ rarement des aiguilles de sapins, aussi
a-t-clle une chair tendre <M, succul-uUe (jui la fait rechercher i>;ir tous
les amateurs de gibier.
A l'époque des amours, le Tétras mâle est extrêmement excité et il
surpasse alors en ardeur nos coqs domestiques.
La période des amours commence et Unit à ('"poque lixe; (juand la
saison est avancée, on entend déjà en mars les cris de ([uelques coqs,
- 40 —
mais, si le mauvais temps reparaît, ils redeviennent silencieux. Dans
la zone moyenne des montagnes, le Tétras urogalle est régulièrement
en amour du 10 au 12 avril, tandis que dans les hautes montagnes,
le froid retarde souvent d'un mois les manifestations de ses désirs.
Le chant de cet oiseau a quelque chose de tout particulier et ne peut
être rendu par des mots ; on ne l'entend généralement qu'au prin-
temps. Après le coucher du soleil, le coq va se mettre sur un vieux
sapin ou quelque grand hêtre, le même toutes les années quand il n'y
est pas dérangé. Il se met à chanter dès que les bourgeons du hêtre
commencent à se développer, et on peut alors l'entendre depuis la
première lueur de l'aurore jusqu'après le lever du soleil. Perché
sur une grosse branche basse, il relève les longues plumes de sa
gorge, étale sa queue en éventail, laisse pendre les ailes, gonllo tout
son plumage, trépigne des pieds et, comme enivré, tourne les yeux
de la manière la plus comique. En môme temps il fait entendre des
claquements et des bruits de gosier, lents et isolés d'abord, puis plus
rapides et plus soutenus, suivis d'un son éclatant auquel viennent se
joindre des sifflements et des sons aigres semblables à ceux que rend
une faux qu'on aiguise ; le tout se termine par une note prolongée,
pendant laquelle l'oiseau ferme d'ordinaire les yeux d'un air béat.
« Le vrai chasseur, dit F. de Tschudi, qui ne veut pas devoir son
gibier au hasard mais le gagner par adresse, doit parfaitement con-
naître les diverses parties de ce chant extraordinaire, qui se répèle
à de courts intervalles et ne s'entend pas à une grande distance, car
ce n'est que pendant sa durée que le coq est abordable. A trois heures
du matin il doit être à son poste et s'approcher de l'oiseau d'environ
deux cents pas, attendant sans remuer le commencement du ramage.
Pendant la seconde partie de son chant, le Tétras est tellement absorbé
qu'il ne fait guère attention à ce qui se passe autour de lui. C'est ce
moment, immédiatement après le cri principal, que le chasseur aux
aguets choisit pour avancer. Il le fait à grands pas tant que dure la
chanson, mais sitôt qu'elle cesse, il reste coi comme une souris jusqu'.à
ce qu'elle recommence.
Pendant la première partie, au contraire, l'oiseau entend fort bien
et part brusquement de son arbre au moindre bruit qui l'inquiète.
Alors le chant est ordinairement fini pour toute la journée, et le
gibier perdu pour le chasseur. Mais si celui-ci a assez d'adresse et
d'expérience pour ne s'approcher que dans les moments opportuns, et
se tenir tranquille pendant les intervalles, il peut tirer le coq au
- 41 -
milieu de ses étranges contorsions et le manquer, sans que l'animal
étourdi s'en aperçoive ; et il est d'autant plus aisé de manquer son
coup, que le plumage de l'oiseau est foncé et que dans l'obscurité, il
est difficile de le mettre exactement sous la mire. Comme il a la vie
dure, et que, même après une grave blessure, il prend encore souvent
le vol et est perdu pour le chasseur, on ne devrait le tirer qu'à balle.
« Ses poules sont ordinairement alors assez près de lui, couchées
dans l'herbe ou sous les buissons, et lui répondent par un doux bac-
bac. Il y a quelquefois entre les vieux et les jeunes coqs, surtout quand
ils se rencontrent dans le même district, des combats terribles pen-
dant lesquels ces oiseaux, aveuglés par la fureur, ne voient et n'enten-
dent plus rien, ainsi que cela arrive aux cerfs dans le temps du rut.
Des témoins parfaitement dignes de foi assurent que, comme les cerfs
encore, les Tétras au temps de leurs danses tombent avec rage sur
les autres animaux et même sur l'homme. » Ce fait se trouve confirmé
par Wildungen, qui parle d'un mâle qui se précipita sur un bûcheron
qui eut bien de la peine de s'en débarrasser; un autre Coq de bruyère,
toujours d'après Wildungen, s'élança dans les champs, sauta après
les chevaux d'un laboureur et les effraya ; un troisième attaquait qui-
conque s'approchait de sa demeure. « Il y a plusieurs années, dit
Brehm père, vivait non loin de chez moi un Coq de bruyère qui avait
attiré sur lui l'attention générale. Pendant la saison des amours, il se
tenait tout près d'un chemin assez fréquenté, et montrait qu'il n'avait
à ce moment aucune peur des hommes. Au lieu de s'enfuir, il s'appro-
chait d'eux, les poursuivait, leur mordait les jambes et leur donnait
des coups d'ailes : il était difficile de l'éloigner. Un chasseur s'en
empara et le porta à deux lieues plus loin; le lendemain, l'oiseau était
revenu à son ancienne place. Un homme l'enleva et le prit pour le porter
au garde forestier; il se laissa prendre, mais dès qu'il vit sa liberté en
danger, il commença à se défendre avec ses pattes et son bec, déchira
les vêtements de son ravisseur, qui dut se résoudre à le lâcher. »
Le coq exécute son singulier manège jusqu'au lever du soleil: il
est au plus haut point d'excitation au moment où le jour apparaît, et
c'est par un beau clair de lune qu'il se montre le plus ardent. Lors-
que le jour est venu le coq va rejoindre les poules qui se tiennent aux
environs ; parfois, l'une d'elles s'approche de lui et l'appelle par le cri
de bac-bac ; alors il se laisse tomber de l'arbre comme une masse, et
danse à terre d'une façon fort comique. Mais, le plus souvent, il doit
poursuivre les femelles qui l'entraînent assez loin. I)ès(ju'il bo trouve
Tome II. — 1887 6
.„ 42 —
alors près d'elles, il ne tarde pas à s'accoupler. Il est rare qu'il ait
plus de trois ou quatre poules autour de lui, car il lui est difficile d'en
rassembler autant qu'il pourrait le désirer. Suivant C. Brehm,il arrive
parfois que quelques coqs ne parviennent pas à s'accoupler, et qu'ils
sont encore en amour au mois de mai, et quelquefois même en juin et
en juillet, mais ce sont là de rares exceptions.
Après trois ou quatre semaines de poursuites, les mâles reprennent
leur vie calme et silencieuse; les femelles, de leur côté, se préparent
à construire leur nid.
Reproduction. — Dans ce but, les poules se creusent un trou assez
grand sous un buisson ou sous une touffe de bruyère, de myrtille ou
de ronce, et y déposent de huit à quatorze œufs sur la terre nue ou sur
une faible litière de brindilles. Ces œufs sont d'un jaune roussâtre et
parsemés de petites taches d'un brun marron qui sont parfois peu
apparentes et qui peuvent même manquer complètement, mais ceci
est fort rare. Ils mesurent 56 millim. sur 43.
La poule couve avec une telle ardeur qu'on peut souvent l'enlever
de son nid. Les poussins éclosent au bout de quatre semaines ; la mère
les conduit aussitôt en quête d'insectes et elle bouleverse les fourmilières
pour mettre les larves à découvert ; elle soigne ses petits avec amour,
les abrite et les défend même au péril de sa vie. « Il est touchant, dit
Geyer, de voir avec quelle épouvante elle accueille l'homme qui s'ap-
proche de sa progéniture. En un instant tous les petits ont disparu, et
ils savent si bien se cacher qu'il est difficile d'en voir seulement un; la
couleur de leur livrée sert surtout à les rendre invisibles. Souvent j'ai
eu des bandes entières à mes pieds, les jeunes ne pouvaient encore
voler, et cependant il m'arrivait rarement d'en découvrir. Ilssontmoins
heureux lorsqu'un renard à l'odorat subtil les surprend. La mère court
à trois ou quatre pas au devant de lui, et en voletant, comme si elle
était blessée. Parvient-elle par ce stratagème à éloigner le renard de
l'endroit où sont les poussins, elle s'élève subitement dans l'air, et
revient ensuite vers sa progéniture. Ses cris glouck, glouck indiquent
que tout danger est passé, et aussitôt les petits d'accourir. »
Les jeunes Tétras croissent très rapidement. Vers la fin de l'au-
tomne, la famille se sépare; les jeunes femelles restent avec leur mère,
tandis que les jeunes mâles vont errer en communauté jusqu'au prin-
temps suivant ; à ce moment, ils se comportent entièrement comme
les adultes.
Remarque. — Il n'est pas rare de rencontrer à l'état sauvage, des
— 43 —
hybrides du Tetrao urogallus et du T. tetrix, et ces métis ont
des formes assez constantes pour que certains auteurs aient cru
devoir en faire une espèce distincte. Voici la synonymie de ces
hybrides :
Urogallus minor punctatus, Briss. Orn. I, p. 191 (1760).
Tetrao hybridus, Lin. Faun. Sicec. p. 72 (1761).
Tetrao médius, Mey. Gesel. nat. Fr, Berlin^ Mag. 1811, p. 337.
Tetrao lnterjMedius, Langsd. Mém. Acad. St-Pet. III, p. 286 (1811),
Tetrao urogallo-tetrix, CoUett, Remarks. Orn. N. Norway, p. 49 (1872).
Tetrao urogalloides, (Nilss.) Coll., ibidem.
Tetrao uro-tetrix, Hcnke, Wiiidm. XI, p. 35 (1879).
Tetrao urogallo-tetricides, Sundew. Sve/isha Forjlarna, p. 254 (1886).
Tetrao tetrix urogallus, A. B. Mcy . Auer-Rack. u. Birkic. p. 69 (1887).
S. A. I. et R. l'Archiduc Rodolphe, qui a fait d'intéressantes obser-
vations sur ce sujet, considère cet hybride comme fécond (1). Dans ce
cas, les descendants doivent retourner soit à l'une, soit à l'autre des
espèces types, suivant que l'hybride mâle s'accouple avec la poule du
T. urogallus ou du T. tetrix. Mais si le coq et la poule sont tous deux
des métis des précédents, leur couvée conservera le plumage hybride
des parents, et ceux-ci pourraient devenir la souche d'une espèce
nouvelle, si, bien entendu, le croisement avec les espèces primitives
n'était plus possible, ce qu'il est difficile d'empêcher, et si la stériUté
ne vient pas arrêter la multiplication au bout de quelques géné-
rations.
173. — Le Tétras à queue fourchue.
TETRAO TETRIX, Lin.
(PI. 173.)
Urogallus minor, Briss. Ortnth. I, p. 186 (1760).
Tetrao tetrix. Lin. Syst. nat. 1, p. 274 (1766).
Urogallus tetrix, Kp, Nat. Syst. p. 180 (1829).
Tetrao juniperorum et ekic.eus, Brm. Isis, 1830, p. 785.
Tetrao rupestris. Brin. Voff. Deulschl, p. 509 (1831).
Lyriirus tetrix, Sw, et Ilich, Funn. bar. Am., p. 497 (1831).
(1) \oy.\e?, M itthcil. des Ornith. Ver. i)t If'if». 188^?, p. 108. -- I/.\rcliiduc Rodolphe a
également publié des observations sur cet hybride, dans sou ouvrage imitulé : Allcrlei gcsam.
Ornith. Bcobachtioif/,:)i,i^. 118 (Vienne 1880).
- 44 -
Lyrurus derbianus, Gould. Proc. Zool. Soc. 1837, p. 132.
Tetrao derbianus, Gray, Gen. of Birds III, p. 516 (1849).
Tetrao peregrinus, Brm. Naitmannia, 1855, p. 287.
Tetrao furcatus, C. F. Dub. PI. col. Ois. Belg. II, p. 152 (1857).
Der Birkhahn, en allemand.
The Black Grouse, en anglais
Het Korhoen, en flamand.
Taille: mâle 0™,50, ailes 0,28; femelle 0,36; ailes 0,24.
Description du mâle adulte. — Tête, cou, dos et croupion d'un bleu noir
brillant à reflets violets; manteau, couvertures des ailes, poitrine, ventre et
queue d'un noir brunâtre ; ailes traversées par une barre blanche ; rémiges
brunes ; queue très fourchue, les quatre rectrices externes beaucoup plus
longues que les autres et contournées en dehors; sous-caudales blanches,
quelques-unes dépassant les rectrices médianes ; bas des jambes d'un blanc
varié de brun; tarses garnies déplumes filamenteuses d'un brun cendré.
Bec noir; iris brun; membrane papilleuse de l'œil d'un rouge vif; doigts
bruns.
Femelle. — Parties supérieures rousses marquées de taches noires transver-
sales à la tête, au cou et sur la poitrine ; dos et sus- caudales de la même cou-
leur rousse, mais les taches noires plus grandes et les parties claires ornées de
lignes noires en zigzags; couvertures moyennes des ailes comme le dos, mais
terminées de blanchâtre pointillé de noir ; les plus grandes brunes, marbrées
de roussâtre et terminées de blanc ; rémiges brunes, marbrées de roussâtre
sur le bord externe; parties inférieures d'un roux varié de blanchâtre et
barrées et pointillées de noir; queue brune terminée de blanchâtre, avec des
raies en zigzags rousses, l'extrémité pointillée de brun; tarses d'un cendré
roussâtre.
Jeune mâle. — Ressemble à la femelle, mais son plumage est en général
plus sombre et les taches noires sont plus rapprochées.
Poussin. — Duvet d'un jaune brunâtre pâle, roux sur le dos et les ailes, dont
les plumes sont déjà sorties ; la base du duvet est noire sur le dos, et ce noir,
paraissant à la surface, y forme quelques taches ou ondulations; une tache
noire, en croissant, sur le front entre les yeux le rapproche du poussin du
Grand coq de bruyère, dont il diffère par une calotte d'un roux vif; cette
calotte est entourée de noir qui se réunit sur le cou ; une série de taches
brunes sur la région auriculaire ; tarses couverts de duvet, doigts dénudés
{A . Marchand) .
Var. accid. — D'un blanc pur ou taché de blanc ; parfois le dos est blanc,
d'autres fois au contraire, c'est le ventre qui est blanc ; l'albinisme se répand
aussi sur les ailes et sur la queue ; on rencontre également des variétés
d'un gris enfumé ou d'un brun pâle, ornées de bandelettes et de zigzags
noirs.
- 45
Hab. — Ce Tétras, aussi appelé Birkhan et Coq de bruyère, habite
une grande partie de l'Europe et
la Sibérie. Il est plus abondant
que le précédent en Scandinavie,
où on l'observe jusque sous le
69''20' de 1. N. {Nilsson, Collett);
^^ffi^î^ il en est probablement de même
^ ^"'^" en Russie, car on le voit nicher
dans ce pays jusque sous le
67 1/2° {Malmgren), et il est cer-
tain qu'il dépasse cette latitude en Russie, aussi bien qu'en Norwège
et en Sibérie ; dans la Nouvelle-Russie, il se tient pendant toute
l'année dans les steppes, qui offrent de grandes étendues de bruyères
entremêlées de genévriers et autres broussailles, que cet oiseau
recherche avant tout; il n'y a qu'un petit nombre de ces oiseaux qui
des steppes s'avancent jusqu'en Crimée (de Nordmann). Le Tétras à
queue fourchue est aussi plus ou moins répandu, suivant les localités,
en Pologne {Taczanowski), en Hongrie (/. Gei/er), en Autriche
(Tschusi), en Bohême {Fritsch), en Tyrol {Stejneger), eu Allemagne
{Naumann, Borggrevé) et dans le Jutland [Lûtken). Il est très loca-
lisé en Hollande {Schlégel) et en Belgique, où il habite en petit
nombre vers les frontières de la Prusse dans les environs de Vielsalm
et dans quelques grandes forêts du Luxembourg belge, entre autres
dans le canton de Bastogne {F. Fallon) ; du reste l'espèce diminue
chaque année et tend à disparaître complètement de notre pays. En
France son habitat paraît plus étendu que celui du Tétras urogalle
(Degland); il habite l'Ecosse et beaucoup de localités de l'Angleterre,
mais n'existe pas en Irlande {Harting); en Italie on l'observe dans toute
la zone septentrionale et en Ligurie, accidentellement en Romagne et
en Toscane {^alvadori); enfin, en Espngne il ne paraît exister quii
dans la Catalogne aux environs de Gerona {Reycs). Cet oiseau est aussi
très commun dans toute la Sibérie jusqu'au 68° 1. N. {Middendor/f,
Radde, etc.), mais il n'existe pas au Kamtschaïka.
Mœurs. — Le Tétras à queue fourchue ou Birkhan est un oiseau
sédentaire et errant ; dans les montagnes il quitte les régions élevées
à l'approche de Thiver, pour aller errer dans la zone moyenne. Dans
les plaines ces oiseaux entreprennent également des voyages assez
réguliers, mais beaucoup d'entre eux ne reviennent plus à lour
ancienne demeure.
- 46 -
Cet oiseau recherche de préférence les endroits couverts de bruyè-
res, de genêts, de myrtilles, de ronces et autres plantes basses, entre-
mêlées de buissons et de taillis; ce qu'il aime avant tout, ce sont les
terrains tourbeux où dominent les plantes marécageuses, mais non
les marais proprement dits. Sur les montagnes, il recherche les
forêts claires, les buissons, les taillis et les bruyères, qu'il paraît
particulièrement affectionner^ jamais il ne s'aventurera dans une
forêt touffue et sombre.
C'est un oiseau très farouche et prudent qu'il est difficile d'appro-
cher. Quoique lourd , il marche avec facilité et sait même fort bien courir .
Il vole bien et en ligne droite, bat des ailes avec précipitation et sait
franchir d'une seule traite un grand espace; dans tous ses mouve-
ments il se montre plus agile que le Tétras urogalle et son vol est
aussi plus léger et moins bruyant que celui de ce dernier. Les sens de
la vue, de l'ouïe et de l'odorat sont bien développés. Tschudi dit
qu'il est stupide, qu'il n'a qu'à un faible degré le sentiment des loca-
lités, et que sa timidité et sa sauvagerie innées le sauvent bien plus
souvent que sa prudence et son jugement. Brehm n'est pas de cet
avis : « Très rarement, dit-il, ce Tétras se laisse surprendre, et cela
n'arrive qu'en hiver, par les temps de tourmente qu'il paraît d'ailleurs
pressentir. Comme les Pigeons, il tient en général toute chose incon-
nue pour suspecte, et s'enfuit dès qu'il appréhende quelque danger. »
Il est sociable ; en dehors de l'époque des amours, il est rare de ren-
contrer des individus isolés; en automne, ces oiseaux restent en
famille, et en hiver ils se réunissent en troupes assez considérables,
là où ils sont abondants, et vivent en bonne harmonie. Ce ne sont
que les vieux mâles qui mènent une vie solitaire.
Sa voix varie suivant les sexes ; le cri d'appel est un sifflement clair
et bref, auquel la femelle répond par un hack back. Mais pendant la
période des amours, le coq fait entendre une richesse de sons peu en
rapport avec son flegme habituel .
Il se nourrit, suivant la saison, d'insectes, de larves, de nymphes
de fourmis, de vers, de petits escargots, de bourgeons de bouleaux,
de chatons de saules, déjeunes pousses de divers végétaux, de baies
de toutes espèces et surtout de baies de genévriers, de myrtilles et de
framboises; il mange aussi des graines, mais rarement des jeunes
cônes de pin ou des aiguilles de conifères. Pour faciliter sa digestion,
il avale du gravier et du sable.
A l'époque de l'accouplement, les coqs deviennent belliqueux et se
— Al —
livrent entre eux des combats acharnés qui, selon Tschudi, se termi-
nent parfois par la mort d'un des combattants.
La période des amours commence, dans l'Europe centrale, vers
la seconde quinzaine de mars et dure jusqu'au mois de mai; dans les
contrées du Nord et dans les hautes montagnes, elle commence plus
tard et se prolonge jusqu'à la fin de mai et même jusqu'en juin. Pour
ses exercices amoureux, le coq choisit dans la forêt un endroit décou-
vert, une prairie, une coupe où les jeunes arbres ne peuvent le gêner,
car, pour sa danse, il a besoin d'un grand espace. Au premier siffle-
ment, que Nilsson a rendu par tschiio-y, succède le rémoulage :
routtourou - routtou - 7^ouiki - ourr - ourr - ourr - rry^outtourou -
7'outtou - rouiki. Quand l'oiseau est fort excité, ces diverses phrases
se suivent, se lient si bien, qu'on ne peut reconnaître ni la fin de l'une,
ni le commencement de l'autre. Il est rare que le Birkhan oublie,
dans ses transports, de veiller à sa sûreté.
« Dans les Alpes, dit de Tschudi, une bonne demi-heure avant le
lever du soleil, resonne au loin le premier appel d'un Birkhan, auquel
répondent bientôt tous ses confrères à la ronde. A plus d'une demi-lieue
de distance, ces tons tour à tour sourds et criards se distinguent nette-
ment au milieu du concert général. Au commencement de la saison,
les chants d'appel du Birkhan durent peu et cessent dès que le soleil
s'est levé ; ils se prolongent davantage dans les endroits obscurs.
Quelques semaines plus tard, on peut les entendre toute la matinée,
surtout quand le temps est couvert. Cependant on ne peut rien fixer à
cet égard : il y a des districts et des années où le temps des amours
est très court et irrégulier, d'autres, au contraire, où il est prolongé
et continu. Le chant des coqs dans la montagne est plus court et
moins fort le soir, avant le coucher du soleil, que le matin. De
même quand l'automne est chaud, on les entend à cette époque, et
même au mois d'octobre, appeler encore à 9 heures du matin d'une
manière irrôguliêre et seulement pendant quelques minutes: ce sont
probablement les jeunes coqs. Le chant complet se compose propre-
ment de deux parties, la première formée de sons sourds, gutturaux,
assez seml)lables au cri de la Tourterelle et répétés trois ou quatre
fois, la seconde, do sons aigus et stridents une ou deux fois répétés,
auxquels s'ajoute quelquefois un autre cri, difîicile à décrire. Cepen-
dant il y a ici une grande diversité, tant chez les vieux que chez les
jeunes coqs. Souvent ce ne sont que les tons sourds qui se font enten-
dre, d'autres fois ce ne sont que les tons aigus. Nous avons vu de
— 48 —
vieux coqs qui se bornaient à ces derniers lorsqu'ils avaient quelque
inquiétude et qui, après avoir pris la fuite les répétaient encore ou
se taisaient complètement; tandis que des jeunes qui avaient été
dérangés, reprenaient immédiatement leur chant complet, et cela
trois ou quatre fois de suite, même après un coup de fusil tiré sans
résultat.
« Pendant leur chant, les Birkhans ont une singulière tournure.
Tantôt perchés au sommet d'un grand sapin, sur une branche sèche
ou sur quelque vieux tronc, tantôt posés sur une crête de rocher ou
au milieu d'un pâturage alpestre, ou même sur le toit d'un cjialet, ils
laissent tomber leurs ailes, étalent en large éventail leur belle queue
fourchue, de manière à faire étinceler les plumes argentées de leur
croupion, abaissent et relèvent alternativement leur tête aux caron-
cules écarlates et distendues, et enfin tournent sur place ou décrivent
en sautant des cercles sur la terre. Ce manège est l'expression de
sentiments violents et passionnés ; souvent une poule sous le couvert
d'un buisson y répond par un tendre gloussement, souvent aussi il
n'y a point de femelle dans le voisinage et le coq ivre d'amour en est
pour ses frais. Mais, contrairement à ce qui a lieu chez le Tétras
urogalle, le Birkhan, pendant toute la durée de son étrange
comédie, voit et entend parfaitement tout ce qui se passe autour de
lui . »
« C'est surtout, dit A. Brehm, quand plusieurs mâles sont ras-
semblés qu'ils déploient une ardeur sans égale. Ils se battent avec
rage; deux se placent en face l'un de l'autre, comme des coqs
domestiques, et se précipitent l'un sur l'autre, la tête penchée à
terre ; ils s'élancent en l'air, cherchant à se porter des coups d'ongles,
puis retombent, tournent l'un autour de l'autre en grondant, prennent
un nouvel élan et s'efforcent de se saisir mutuellement. Si le combat
devient plus sérieux, chacun y laisse quelques plumes, mais malgré
toute l'ardeur qu'ils paraissent déployer, jamais ils ne se font des
blessures sérieuses ; on dirait qu'ils ne veulent que s'efFraj^er et non se
nuire. Il arrive cependant quelquefois que le plus fort saisit son rival
par la tête, le traîne à terre à quelques pas, lui donne encore quelques
coups de bec, puis le chasse. Le vainqueur retourne alors triomphant
sur le champ de bataille pour continuer son chant. Les mâles vigou-
reux viennent dans la matinée à plusieurs endroits, pour y essayer leur
force ayec leurs rivaux. Ils deviennent parfois ainsi la terreur de
tous les jeunes coqs moins expérimentés. Souvent aussi le vaincu
— 49 —
revient à son ancienne place et recommence le combat, ou bien il se
rend à quelque autre endroit, pour se mesurer avec un nouvel adver-
saire. »
Suivant le même auteur, un mâle vigoureux peut suffire, dans une
matinée, à quatre ou six femelles, mais il est rarement assez heureux
pour en réunir autant autour de lui.
Reproduction. — C'est vers le milieu de mai que la femelle cherche
un endroit très caché pour y nicher. Son nid se réduit en une simple
dépression creusée dans le sol et garnie de quelques herbes ; il est
établi entre d'épaisses bruyères, sous un buisson, dans les hautes
herbes ou sous quelque sapin branchu jusqu'au sol. Chaque couvée
est de 7 à 12 œufs, d'un jaune roussâtre et tachés irrégulièrement de
brun roux ou de brun olivâtre. Ils mesurent 37 millimètres sur 27.
La femelle couve seule durant trois semaines, et quand elle doit quitter
ses œufs pour aller chercher sa nourriture, elle les recouvre soigneu-
sement de mousse ou de feuilles mortes. Quelques heures après leur
naissance, les poussins sont conduits par leur mère qui leur montre
leur nourriture en mettant à découvert des nymphes de fourmis, des
larves et des vermisseaux. Au bout de quelques semaines les petits
savent voler, et toute la famille se tient alors volontiers disséminée
sur le môme arbre. Ils restent avec leur mère jusqu'à la fin de
l'automne, et ne la quittent que quand ils ont revêtu le plumage des
adultes.
Remarques. — 1. Il a été dit précédemment (p. 43) que le Tétras
urogalle s'accouple parfois, à Tétat sauvage, avec le Tétras à queue
fourchue. Ce dernier s'accouple quelquefois aussi, dans la même condi-
tion, avec le Lagopède blanc {Lagopus albus), le Lagopède d'Ecosse
(L. scoticus), la Gelinotte {Bonasa hetulina) et même avec le Faisan
commun [Phasianus colchicus). Ces hybrides sont d'autant plus
intéressants qu'ils sont le produit du croisement d'oiseaux apparte-
nant à des genres différents. On trouvera des détails sur ces hybri-
des, accompagnés d'excellentes figures, dans le récent ouvrage de
M. A.-B. Meyer(l).
2. On rencontre en Asie plusieurs autres Tétras, décrits comme
espèces distinctes, mais plus ou moins voisins du T. urogallus^ dont
plusieurs pourraient bien n'être que des variétés climatériques. N'ayant
(l) Unxcr Aucr-, Uachcl- nnd liirkwild und seine Abartcn (Vioni.o 1S87).
TuME II. — 1888.
50 -
pas ces différentes formes sous les yeux, je me bornerai à les signaler
à l'attention des ornithologistes. Ces espèces sont :
Tetrao urogalloides, Midd., delà Sibérie orientale;
— uralensis, Sev. et Menzb., du Sud de l'Oural;
— Taczanowskii, M., du Sud-Est de la Sibérie ;
kamtschaticus, Kittl., du Kamtschatka ;
— sachalinensis , Bogd. de l'île de Sachalin.
Quant au Tetrao acatoptricus, Radde {T. Mlohosiewiczi, Tacz.)
du Caucase, il diffère du T. tetrix par l'uniformité de ses teintes. Il
est d'un noir uniforme avec de légers reflets d'un vert bleuâtre sur le
dos et à la poitrine ; sous-alaires blanches ; sous-caudales noires ; pas
de bande blanche sur l'aile. — C'est bien une espèce distincte.
3. Les femelles des divers Tétras, dont la ponte est éteinte par
l'âge, prennent en vieillissant un plumage plus ou moins semblable
à celui des mâles.
GENRE XCVII
GELINOTTE. — BONASA.
BoNASA, Briss. Ornith. I, p. 191 (1760).
Tetrao, Lin. Syst. nat. I, p. 275 (1766),
BoNASiA, Kp. Naturl. Syst., p. 179 (1829).
Tbtrastes, Keys, et BL, Wirbelth. Eut., pp. LXIV, 200 (1840;.
Car. — Bec médiocre, épais, légèrement recourbé; narines basales, laté-
rales, cachées par les plumes du front; au-dessus des yeux un étroit espace
nu; plumes du vertex plus ou moins allongées et pouvant se redresser en
forme de huppe; ailes courtes, arrondies, sub- obtuses, 4° et 5* rémiges
d'égale longueur et les plus longues; queue médiocre, arrondie, formée de
seize rectrices ; tarses emplumés seulement sur la moitié de leur étendue ;
doigts nus, pectines sur les bords ; ongles allongés, obtus, creusés en dessous.
Hab. — Ce genre a des représentants dans l'Europe septentrionale
et centrale, ainsi que dans le nord de l'Asie et de l'Amérique.
174. — La Gelinotte des coudriers.
BONASA BETULINA, Gr. ex. Scop.
(PI. 174.)
Tetrao bonasia, Lin. Syst. nat. I, p. 275 (1766).
Tetrao betulinus, Scop. Ann. I, hist. nat. n» 172 (1769).
Tetrao canus, Sparrm. Mus. Caris. I, pi. 16 (1786).
Bonasia rupestris et sylvestris, Brm. Isis, 1830, p. 985.
Bonasia europ^a, Gould, Birds ofEur. IV, pi. 251 (1837).
— M —
Tetrastes bonasia, Keys. et Bl. Wirbehh. Eur., p. 200 (1840).
BoNASA SYLVESTRis, Gray, List. gen. B., p. 80 (1841).
Bonasia lagopus, minor, ? albogularis, Brm. Naumannia 1855, p. 287.
Bonasia betulina, Bp. Cat. Parz., p. 13 (1856).
Bonasa betulina, Gray, Ea7id-list of B. II, p. 277 (1870).
Das EuROpâiscHE Haselhuhn, en allemand.
The Hazel-Grouse, en anglais.
Het Hazelhoen, en flamand.
Taille: mâle 0'",30, ailes 0,173; femelle 0,28; ailes 0,17.
Description du mâle adulte. — Parties supérieures d'un cendré roussâtre,
les plumes de la nuque et du manteau barrées de noir et terminées de cen-
dré ; gorge noire, encadrée de blanc ; tache derrière l'œil, blanche ; bas du dos
de la couleur du manteau, mais chaque plume avec une strie longitudinale
brune et la partie cendrée vermiculée de brun noirâtre ; devant du cou et
flancs roux, avec les plumes plus ou moins terminées de blanc et tachées ou
barrées de brun ; plumes abdominales brunes, mais largement bordées de
blanc; bas-ventre blanc; sous-caudales brunes et rousses, mais terminées de
blanc ; scapulaires plus rousses que le dos, barrées et pointillées de noir ; cou-
vertures des ailes d'un brun pâle, tachées et pointillées de brun avec une
tache terminale blanchâtre ; rémiges brimes, avec le bord externe taché de
blanc roussâtre ; queue cendrée, variée de zigzags noirs, toutes les rectrices,
excepté les deux médianes, traversées vers leur extrémité par une bande noire
et terminées par une bordure cendrée ; plumes des tarses d'un cendré rous-
sâtre. Espace nu de l'œil d'un rouge vif; bec, iris et doigts bruns.
Il est à remarquer que cet oiseau prend une teinte de plus en plus cendrée, à
mesure que son habitat devient plus septentrional. Dans le nord de l'Europe
et de l'Asie, les parties dorsales du mâle sont d'un gris cendré sans trace de roux,
sauf les scapulaires qui restent de la même couleur que chez les sujets de
rp]urope centrale.
Femelle. — Un peu plus petite ; coloration générale comme chez le mâle ;
dessus de la tête taché de brun noir; gorge blanchâtre, variée de roussâtre
et de brun et non noire. — Dans le Nord, les femelles ont le dessus du corps
d'un cendré roussâtre, mais elles sont toujours moins rousses que celles de nos
contrées.
Jeune mâle. — Comme la femelle adulte, mais les parties dorsales plus
rousses et les taches noires du dos plus grandes; gorgo maculée de noir.
Poussin. — Duvet laineux, droit, plutôt court, d'un jaune noisette pâle,
devenant roux de rouille sur la tête et sur la ligne de l'épine dorsale ; une
bande noire part de l'œil et se prolonge jusqu'à la naissance du cou ; une
petite tache noire entre le bec et Tœil; bec brun clair; tarses déplumés dans
leur seconde moitié, jaunâtres. Les plumes des ailes deviennent apparentes
entre le huitième et le dixième jour. {A. Marchand, notes sur les poussins.)
- 52 -
Hab. — La Gelinotte est plus ou moins répandue dans le nord et le
centre de l'Europe, ainsi que
dans toute la Sibérie jusque dans
le nord de la Chine et au Japon,
mais elle n'existe plus aux îles
4 Britanniques.
En Scandinavie on la rencon-
tre communément dans toutes
JH les forêts de conifères jusqu'au
id 65M. N. (Collett.Nilsson), mais
on ne la voit pas en Danemark, quoiqu'elle habite le Holstein
{Kjaerbôlling) ; elle est également commune dans toute la Russie
septentrionale et centrale (E. Buchner, etc.). On la rencontre en
plus ou moins grande abondance dans certaines parties de l'Alle-
magne (Naumann, Helm, Doule), de la Lorraine (Lieffer), de la
Pologne (Taczanowski), de la Hongrie (J. Geyer), de l'Autriche
(A. Kr agora) y de la Croatie (Brusina) et de la Moldavie. Cet oiseau
est très localisé en Hollande (Schlégel) et en Belgique, où on le ren-
contre encore dans les Ardennes belges aux environs de Chiny, de Suxy
et de Bouillon, mais cette espèce tend à disparaître de notre pays.
En France, la Gelinotte est assez abondante sur les Alpes du
Dauphiné, de la Savoie, sur les hautes montagnes des Vosges, sur
les Basses-Alpes et les Pyrénées ; elle est plus rare dans les Ardennes
françaises et ne se montre qu'accidentellement en Auvergne, dans
les Monts-Dores (Degland et Gerbe) ; elle est assez abondante en
Suisse (Tschudi) et dans les Alpes italiennes (Salvadori, Giglioli);
en Espagne on ne l'observe qu'aux environs de Gerona en Catalogne
(Yayreda).
En Asie, cette espèce est répandue dans toute la Sibérie (mais pas
au Kamtschatka) jusqu'au 69'' 1. N. (Middendorff, Radde, von
Schrenck), ainsi qu'en Mantchourie et dans la Chine septentrionale
et se reproduit même dans la province de Pékin, sur les hautes mon-
tagnes boisées du Péythang et du Tonglin (David) ; elle habite éga-
lement le Japon, particulièrement les grandes forêts qui avoisinent
Hakodadi {Whitely).
Mœurs. — La Gelinotte est un oiseau sédentaire mais qui, en au-
tomne et en hiver, mène souvent une vie plus ou moins errante, sans
s'éloigner cependant do sa région favorite. Elle voyage en famille ou
en troupe mais en se bornant à parcourir un rayon assez restreint.
- 53 —
Durant leurs voyages, ces oiseaux franchissent souvent, en volant,
une étendue de plusieurs l^lomètres couverte de champs cultivés ou
de pâturages ; au printemps ils retournent tous dans les lieux qui les
ont vus naître pou» s'y disperser par couples.
Cette espèce habite de préférence les parties boisées et rocailleuses
des montagnes, arrosées par quelque ruisseau et plantées de gené-
vriers, d'aulnes, de coudriers, de sapins et de bouleaux. Dans les
pays peu ou point accidentés, elle recherche les grandes forêts
touffues et sombres, formées d'essences variées et riches en buissons
dans lesquels elle puisse se cacher.
La Gelinotte vit plus à terre que sur les arbres, sur lesquels elle
cherche cependant volontiers un abri pour la nuit.
Pendant le jour, elle se tient si tranquille et si bien cachée, que ce
n'est que par hasard qu'on aperçoit un individu passant d'un buisson
à l'autre, ou couché sur une grosse branche d'arbre dans le sens de
]a longueur, et tellement immobile qu'il faut un œil exercé pour le
découvrir. Quand elle se croit en sûreté, elle se tient presque accrou-
pie et conserve même cette allure en marchant ; mais elle sait courir
avec une agilité extraordinaire entre les herbages et les broussailles,
et sait fort bien sauter quand il le faut. En courant, la poule rabat les
plumes de la tête, tandis que le mâle qui a toujours une allure plus
fière, les relève en même temps qu'il gonfle les plumes de la gorge et
des oreilles. Ces oiseaux ne s'envolent pas volontiers sans nécessité,
mais quand un danger les menace, ils partent à tire-d'aile, sans cepen-
dant aller bien loin, ou bien ils sautent de leur perchoir pour chercher
un refuge dans les buissons. Ils ne volent du reste jamais haut et il
est rare de les voir perchés au sommet d'un arbre.
En été, la Gelinotte se nourrit d'insectes, de larves, d'araignées,
de vers, de petits escargots, de bourgeons, de chatons de coudriers,
d'aulnes et de saules, de jeunes pousses de diverses plantes, de
feuilles, etc.; dans les autres saisons elle recherche également des
myrtilles, des framboises, des baies de sureau, de troène, de sorbier,
de genévrier, d'églantier, ainsi que différentes graines d'arbres qu'elle
ramasse à terre.
La voix de cet oiseau est claire et retentissante, les sujets d'un an,
tant mâles que femelles, crient simplement/ji, pi, pi, pi; plus tard, le
cri d'appel devient tih, thi-titi, et la femelle se sert des mêmes sons
quand elle veut rassembler ses poussins autour d'elle. A l'époque des
amours, le mâle répète les mêmes syllabes, mais il met plus de chaleur
— 54 —
dans son chant, formé de sons tristes et prolongés, ressemblant à
tihi-titititi-tih, qu'il pousse en gonflant son gosier.
La Gelinotte est monogame. Au printemps chaque couple se choisit
sa résidence, mais les familles se disséminent peu. Le mâle, pour
s'attirer la bienveillance de la poule, se contente d'entonner matin et
soir son chant d'amour et d'hérisser les plumes de la tête ; quand il est
fort excité, il chante toute la nuit, perché sur un arbre à une hauteur
moyenne, et non loin de celui qui porte sa compagne. Celle-ci sait si
bieu captiver le coq, qu'il ne la quitte pas d'un instant, et les cris des
autres mâles le laissent indifférent, quoiqu'il soit d'un naturel assez
belliqueux, mais à un degré bien moindre que les Tétras.
Reproduction. — Peu après l'accouplement, vers la fin de mai, la
femelle cherche un lieu convenable pour nicher, dans un endroit bien
caché sous un buisson, derrière un bloc de rocher, entre des herbages
ou dans une touffe de fougères ; là elle creuse un légère excavation
qu'elle garnit de feuilles et de brins d'herbes, et dans laquelle elle
pond de huit à quinze œufs. Ceux-ci sont assez allongés, d'un jaune
roussâtre et tachetés de roux et de brun ; ils mesurent environ 40 mil-
limètres sur 29.
La poule couve trois semaines, et chaque fois qu'elle doit quitter son
nid, elle recouvre ses œufs soigneusement de feuilles mortes. Pendant
ce temps le mâle erre aux environs, mais il revient auprès de sa com-
pagne, aussitôt que les poussins ont un peu grandi, et il devient alors
pour sa famille un guide fidèle et prudent. En cas de surprise, la
femelle cherche à tromper l'ennemi qui la menace ; les poussins se
sont bientôt cachés sous des herbes ou des feuilles sèches, et il faut
alors le flair d'un chien de chasse ou d'un renard pour les découvrir.
Pendant les premiers jours, les petits passent la nuit à terre sous les
ailes de leur mère ; mais dès qu'ils ont des ailes, ils vont se percher à
côté d'elle sur une branche d'arbre. C'est à ce moment que le père les
rejoint, et toute la famille reste alors intimement unie jusqu'en
automne.
FAMILLE DES PHASIANIDÉS.
Car. — Bec nu à la base, courbé et déprimé à la pointe; tête des
mâles souvent garnie d'une touffe de plumes, d'une crête charnue ou
d'un tubercule corné; joues et tour des yeux nus, parfois couverts de
papilles ; gorge emplumée ou nue ; queue de longueur et de forme
variables, le plus souvent longue; pattes des mâles armées d'un
éperon . ♦
Les mâles sont ordinairement ornés de brillantes couleurs, tandis
que les femelles ont généralement un plumage assez uniforme et com-
plètement privé de couleurs éclatantes.
C'est dans cette famille que viennent se placer les Paons, les Argus,
les Faisans, les Lophophores, les Tragopans, les Coqs, les Pintades,
etc.
Eàb. — Cette famille est représentée dans les cinq parties du
monde, mais c'est l'Asie qui fournit le plus grand nombre d'espèces.
GENRE XCVIII
FAISAN. — PHASIANUS
Phasianus, Briss. Ornith, I, p. 262 (1760).
Car. — Bec robuste, à mandibule supérieure voûtée, courbée vers la
pointe qui dépasse la mandibule inférieure; narines basales, latérales, à
moitié fermées par une membrane cornée et renflée ; tour des yeux et joues
garnis, chez les mâles, d'une peau verruqueuse d'un rouge vif qui s'étend
jusqu'à la base du bec ; ailes courtes, concaves, arrondies, obtuses; queue
longue, convexe, terminée en pointe, formée de dix-huit rectrices étagées,
les médianes les pluslongues ; tarses robustes, scu telles, armés d'un éperon ;
doigt médian de la longueur du tarse, réuni aux latéraux par une petite
membrane, le postérieur court et ne reposant pas sur le sol.
Hab. — L'Asie est la véritable patrie des Faisans ; mais l'un d'eux a été
acclimaté dans l'Europe orientale, d'où il a été importé dans d'autres parties
de notre continent.
175. — Le Faisan vulgaire ou de Colchide.
PHASIANUS COLCHICUS, Lin.
(PI. 175)
Phasianus varius, Briss. Ornith. I, p. 262 et 267 (1760).
Phasianus colchicus, Lin. Syst. nat. I, p. 271 (1766).
Phasianus marginatus, Wolf, Taschetib. Deutsch. Yijgelk. I, p. 291 (1810).
Phasianus vulqaris, C. Dub (ex Lin. 1748) PI. col. ois. Belg. II, p. 150 (1857).
Der Edel-Fasan, en allemand.
The PiiEASANT, en anglais.
De Gewone Faisant, en flamand.
- 56 -
!• Sans collier blanc :
Var. Shawi.
Phasianus shawi, eu. Proc. Zool. Soc. 1870, p. 403.
Phasianus insignis, Eli. ibidem, p. 404.
Var. Persicus.
Phasianus persicus, Severz. Bull. Soc. Jmp. des nat. Moscou, 1874, p. 208.
Var, DecoUatus.
Phasianus decollatus, Swinh. Proc. Zool. Soc. 1870, p. 135.
Var. Sladeni.
Phasianus sladeni (Anderss.), Eli. Proc. Zool. Soc. 1870, p. 408.
Phasianus elegans, Eli. Ann. Mag. ofN. H. VI, p. 312 (1871).
2° Avec collier blanc:
Var. Torquatus.
Phasianus colchicus var. Torquatus, Gmel. Syst. nat. I, p. 742 (1788).
Phasianus albotorquatus, Bonnat. Ornith. p. 184 (1823).
Phasianus torquatus, Gould, B. of As. part. VIll (1856).
Var. Mongolicus.
Phasianus colchicus var. Mongolicus, Pall. Zoogr. Il, p. 84 (1811).
Phasianus colchicus, Meyend. Yoy. d'Oremb. à Bokhara, p. 428 (1826).
Phasianus mongolicus. Brandt, Bull. Acad. Se. St-Pêt., III, p. 54.
Var. Chrysomelas.
Phasianus chrysomelas, Séverz. Btdl. Soc. Imp. nat. Moscou, 1874, p. 208.
Phasianus oxianus et dorrandti, Severz. Journ. f. Orn. 1875, p. 225.
Var. Formosanus.
Phasianus torquatus, Swinh. Ibis, 1863, p. 401 et 1866, p. 404.
Phasianus formosanus, Eli. Proc. Zool. Soc. 1870, p. 406.
Taille-. 0'",30 (corps); ailes 0,26; queue 0,42; femelle 0,28;
ailes 0,235 ; queue 0,32.
Description du mâle adulte. — Dessus de la tête vert varié de roux ; une
grande caroncule rouge écarlate entourant l'œil et couvrant la joue ; une touffe
de plumes de chaque côté de l'occiput et la majeure partie du cou d'un vert
brillant à reflets bleus et violets ; dessus du corps d'un rouge bai à reflets
violacés ; plumes du bas du cou échancrées et marquées d'une tache allongée
et terminale noire ; centre des plumes dorsales noir, avec une bande jaunâtre
en forme de V et souvent aussi un trait central de même couleur ; croupion et
sus-caudales d'une teinte pourprée à reflets violets ; ailes d'un cendré rous-
- 57 -
sâtre varié de pourpre, les plus grandes couvertures brunes au centre et tra-
versées de raies irrégulières roussâtrcs ; rémiges d'un brun pâle, tachées de
cendré clair ; poitrine et flancs d'un rouge bai éclatant à reflets dorés, les
plumes de la poitrine bordées et celles des flancs terminées de noir violet ;
abdomen, jambes et sous-caudales d'un brun rous^àtre ; rectrices étagécs,
d'un brun olivâtre, bordées d'une teinte pourprée et barrées de noirâtre. Iris
d'un brun jaunâtre ; bec couleur de coi ne ; pattes bruues.
Femelle. — Régions supérieures d'un cendré roussâtre tirant un peu sur
l'olivâtre, avec le centre des plumes noir; parties claires du dos et des scapu-
laires vermiculées de brun, et la tache noire des mêmes plumes plus ou moins
entourée de roux; gorge d'un blanc jaunâtre; cou et poitrine d'une teinte
vineuse, chaque plume bordée de brun et avec une tache centrale noire ; cou-
vertures des ailes de la couleur du dos, vermiculées de brun et marquées de
grandes taches noires; rémiges brunes tachées de cendré roussâtre; parties
inférieures d'un cendré roussâtre pâle, tirant légèrement sur l'olivâtre et ver-
miculées de brun; les flancs avec de grandes taches noires bordées de roux ;
queue de la couleur du dos, vermiculée et barrée de noir.
Jeune mâle. — Ressemble à la femelle, mais facile à distinguer à la nudité
des joues ; ses couleurs sont [dus rousses et plus sombres; l'éperon commence
à se montrer.
Poussin. — Duvet court et laineux, d'un gris jaunâtre, presque blanc sous
la gorge et le ventre ; dos varié de gris foncé et de brun ; une bande occi-
pitale d'un brun vif accompagnée de deux autres plus étroites; un trait par-
tant des commissures du bec et devenant noir sur les oreilles. Bec et panes
grisâtres.
Var. accid. — On rencontre parfois des variétés accidentelles de couleur
Isabelle avec les taches de couleur grise, d'autres plus ou moins variées de
blanc, ou même entièrement blanches.
Remarque. — La feuille précédente était imprimée quand jo
m'aperçus que j'avais oublié de mentionner une nouvelle variété,
décrite récemment par M. Sclater sous le nom de Phasianics princi-
palis {Proc. zool. Soc. 1885, p. 324, pi. XXII). Cette variété prend
sa place entre la var. Shawi et la var. Persicus.
M. Bogdanow a décrit, sous le nom de Ph. Komarotcii, un Fuisnn
trouvé sur le marché d'Aschabad et qui provient probablement du sud
des monts Kopet-dagh. [Bull. Acad. imp. des se. de St-Pètcrshonrg,
XXX, 1886, p. 356). Cet oiseau paraît se rapporter au Fh. princi-
palis.
Autour du b'aisan do Coldiido, viennent donc s<^ iJ:rouper quel-
ques formes qui ont la même coloration générale, et (jui ne dilFèrent
entre elles que par l'absence ou la présence d"un collier Manc plu.--.
ToMK II. — 1SR8. fS
ou moins développé et par de très légères moditications dans le plu-
mage. Toutes ces formes ont été décrites récemment comme espèces
distinctes ; mais on commence déjà à voir que ce ne sont que des
races locales. Quoi qu'il en soit, il est certain que toutes les variétés
mentionnées ci-dessus descendent d'un même type spécifique, qui
s'est modifié avec le temps soit par l'action du climat, soit par des
croisements. Ainsi, le musée de Bruxelles possède un Faisan (n° 1817
du cat.) qui ressemble en tous points au Ph. formosanus de Formose,
figuré dans la belle Monographie de M. Elliot; et cependant, notre
individu n'est qu'un simple hybride, né au Jardin zoologique de notre
ville, qui a eu pour père un Ph. torquatus^ et pour mère, la poule
d'un Ph. versicolo7\ H y a donc lieu de croire qu'à l'île Formose,
située non loin de la Chine et du Japon, on a introduit primitivement
des Ph. torquatus et des Ph. versicolor, propres à ces pays. Les
hybrides nés du croisement de ces deux espèces, ont fini par remplacer
dans cette île les types dont ils dérivent et à produire la race nouvelle,
connue aujourd'hui sous le nom de Ph. foo^mosanus.
MM. David et Oustalet ont constaté, que les Ph. torquatus du nord
de la Chine, ceux du Chensi méridional et ceux du Fokien et du
Kiangsi, diffèrent déjà les uns des autres; les mêmes auteurs ajoutent:
« Aussi sommes-nous portés à croire que le Ph. versicolor du. Japon,
qui a tout le dessus du corps d'un vert bronzé, n'est aussi qu'une
forme dérivée ou une simple variété de la même espèce ; nous en
dirons autant des Ph. formosanus de l'île Formose, des Ph. mongo-
licus et insignis de la Mongolie occidentale, des Ph. decollatus et
sladetii du kS.-O. de la Chine". Nous sommes convaincus également
qu'il y a des relations de parenté très étroites entre les formes occiden-
tales {Ph. colchicus et shaivi) et les formes de l'Orient; mais nous
pensons que c'est parmi celles-ci qu'il faut chercher le type primitif,
en admettant que ce type soit encore représenté. Peut-être est-ce du
Ph. torquatus que sont dérivées les autres formes secondaires, que
la plupart des ornithologistes considèrent comme des espèces, et
parmi elles il y en a quatre pourvues d'un collier et cinq sans col-
lier (1) ».
M. Séverzow, qui a décrit comme espèces deux formes nouvelles,
doit cependant convenir qu'elles ont toutes de grandes affinités entre
elles : «... Les affinités, dit cet auteur, de ma nouvelle espèce avec
(1) David et Oustalet, Les oiseaux de la Chine, p. 410 (1877).
— 59 —
des Faisans géographiqiiement éloignés, et ses diiférences d'avec les
espèces géographiquement voisines, sont ce qui fait l'intérêt principal
du Pli- chrijsomelas : cet oiseau, comparé aux autres espèces voisines
du Ph. colchicus, éclaircit complètement, dans le sens de Darwin, la
filiation des espèces de ce groupe, qui, sans lui, resterait obscure »(1).
M. H. Seebolim ne voit également que des races dans les Faisans
dont il est question. « Tandis que les vrais Faisans, dit M. Seebolim,
peuvent être divisés géographiquement en deux races par une ligne
verticale, ils peuvent aussi être divisés par une ligne horizontale en
deux autres races. Une ligne tirée depuis Astrakan au travers de la
vallée Amu-Darya, en suivant le plateau de Pamir et la chaîne du
Thian-shan en croisant le désert de Gobi et le Thibet, entrant en
Chine au nord de Setchuan, et passant au sud-est de cette province,
sépare les Faisans à collier de ceux qui n'en ont pas; les premiers
habitent au nord de cette ligne, et les derniers au sud (2), M. Seebohm
examine ensuite les form<^s de l'Asie occidentale dont il admet six
races, savoir : P. colchicus, persicus, principalis,chr y somelas, shaioi
et inongoliciis.
M. Dresser dit qu'en Ecosse on a introduit, outre le Faisan ordi-
naire, des Ph. vcrsicolor et reevesii, qui se croisent entre eux de
toutes les manières, de façon qu'il devient déjà difficile de rencontrer
un Faisan de Colchide pur sang (3). On doit donc s'attendre à voir là
aussi de nouvelles races venir remplacer les espèces primitivement
introduites. Sur le continent, et même en Belgique, on a introduit des
Faisans à collier dans plusieurs localités ; ceux-ci se croisent avec
notre Faisan ordinaire, dont les individus pur sang deviennent
presque partout de plus en plus rares.
Uab. — La véritable patrie du Faisan vulgaire comprend les pays
situés entre la mer Caspienne et
la mer Noire. Il ne se trouve
point à l'état sauvage dans la
Nouvelle-Russie, mais bien sur
les îles du Danube, sur rétendue
de la côte orientale du Pont-
lùixin, au sud et à l'est du Kou-
l)an, aux environs du Kouban et
de Tereck, et il est assez com-
(I) Bull, de la Soc. Imp. des nnluralistrs df Moscuit, t. XfA'III, "2, p. 2(1!) (t«7l).
(-2) The Ibis. 1S87, p. lOS,
(ô) BirdsofEnr. VIT, p. 87.
r ■
m'""
- 60 -
mun dans l'Abasie et la Mingrélie, provinces qui correspondent à
l'ancienne Colchide, d'où celte espèce a tiré .son nom [de Nordmann).
Il est é^^alement commun au Caucase [Radde], dans certaines parties
de l'Asie Mineure [Pearse, Dresser) et dans le nord de la Perse
[De Filippi).
Les auteurs racontent que l'introduction du Faisan en Europe date
de l'expédition des Grecs en Colchide. Ceux-ci auraient découvert ce
bel oiseau sur les bords du Phase et l'auraient importé en Grèce Or,
d'après l'histoire, c'est en 1263 avant J.-C. que cette expédition eut
lieu. C'est en mémoire de ce fait historique que Linné créa sa déno-
mination latine (1).
Ce qui est certain, c'est que l'existence de cet oiseau en Grèce date
de très loin, et que de là il fut importé par les anciens Romains dans
d'autres contrées de l'Europe. Aujourd'hui le Faisan tend à dispa-
raître de la Grèce où il est devenu fort rare, même dans la Béotie et
la Roumélie, où le terrain est cependant si favorable à sa propagation
(Lindermayer). On trouve maintenant cet oiseau en Turquie, surtout
en Macédoine et en Albanie [Elives et Buckley), en Autriche, en
Hongrie, en Bohéine [Naumann, Brehm), dans différentes parties de
l'Allemagne, particulièrement près de l'Elbe et de l'Oder (Naumann,
Borggreve), en Grande-Bretagne et en h^lande [Dresser), en Bel-
gique, en Hollande (Labouchère), en France (Degland), en Italie et
en Corse ; sur cette dernière île, il est réellement sauvage [Giglioli).
En Belgique, et dans plusieurs autres pays mentionnés ci-dessus,
on est obligé de veiller plus ou moins à ce que les Faisans puissent
trouver de la nourriture pendant les jours de neige.
La var. Shaioii habite la partie orientale du Turkestan [ElUot).
La var. Principalis se rencontre dans le nord de l'Afghanistan.
La var. Persicus a pour patrie le littoral méridional de la mer
Caspienne [Séverzow).
La var. Decollatus habite le centre et l'Ouest de la Chine ; dans la
chaîne du Tsinling et dans le Chensi méridional, elle est aussi com-
mune que la var. Torquatus, à laquelle elle se mêle assez fréquem-
ment; mais dans le Kokonoor oriental, à Moupin, dans le Setchuan,
dans une partie du Yunan et du Kouytchéou, elle remplace complète-
ment le Torquatus (David).
La var. Sladeni est répandue dans l'Ouest du Setchuan et du
Yunan à une altitude de 1500 mètres environ [David).
(i) Phasianns, du Phase, rivière de Colchide [Colchiuus).
— 61 —
La var. Torquatus se rencontre dans la plus grande partie de la
Chine, en Mantchourie, dans la Mongolie orientale, en Q>Ç)X:é.^ {Damé)
et dans les provinces de l'Amour et de l'Ussuri {Taczanowski).
La var. Mongoliens a pour patrie l'Altaï et les monts Targabatai
{Brandt), le désert de Gobi, le sud des monts Tagnon, la Mongolie
(Atkinson), Bol^hara. {Met/end07^ff) et le Turkestan [Séverzow).
La var. Clirysomelas habite les rives de l'Amou-Daria [Séverzoïo],
Enfin, la var. Formosanus est propre à l'île Formose {Sioinhoé).
Mœurs. — Le Faisan recherche les bois clairs, bien pourvus de
taillis et de buissons, entrecoupés de fossés inondés et entourés de
champs cultivés et de pâturages ; plus le sol est couvert de broussailles
et de plantes herbacées, plus la localité lui convient. C'est à terre
qu'il passe presque toute sa journée, cherchant entre les hautes
herbes et les broussailles les aliments qui lui sont nécessaires; il
s'aventure souvent dans les champs voisins et parcourt parfois un
grand espace sans prendre son vol. Ce n'est que quand il est pour-
suivi par un animal carnassier qu'il cherche souvent un refuge sur un
arbre, sans cependant y rester plus quïl ne faut; mais c'est toujours
sur une grosse branche d'arbre, à huit ou dix mètres de hauteur,
qu'il passe la nuit.
Dans la Livadie et la Roumélie, dit von der Miihle, il existe de
grandes étendues de terrains très fertiles, mais marécageux et cou-
verts de buissons épais, surtout de fougères et de ronces formant des
fourrés épais et impénétrables, aussi bien pour le chasseur que pour
son chien ; là les Faisans se trouvent dans leur élément, et, chose
singulière, au lieu de passer la nuit sur les arbres comme ils le font
chez nous, ils gagnent pour dormir un genêt piétiné dont ils font leur
litière. Lindermayer dit qu'en Grèce on fait une telle chasse à ce
gibier, qu'il est à prévoir, qu'avant peu, le Faisan aura complètement
disparu do ce pays ; M. Th. De Heldrcich dit mémo qu'on peut le
considérer comme ayant entièrement disparu du royaume Hellénique,
mais qu'il est encore assez fréquent au mont Olympe en Thessahe
et en Macédoine.
La démarche de ce bel oiseau est fière et majestueuse; il sait
courir avec rapidité, mais son vol est lourd, bruyant et fatigant. Il
est plus craintif que farouche et incapable de prendre une prompte
résolution au nioinoni du danger. Il pniaît avoir conscience de sa
faiblesse et de sa stupidité; il se cache aut.-mt ([ue possible, car tout
animal, toute personne est à ses yeux un ennemi qu'il doit fuir ; aussi
— 62 —
ne parvient-on jamais à apprivoiser complètement un Faisan. Winkell
dit avec raison qu'il serait difficile de trouver un animal qu'on puisse
aussi facilement mettre aux abois et rendre incapable de prendre une
résolution. Un homme, un chien viennent-ils à surprendre un Faisan,
celui-ci semble ne plus se rappeler que la nature lui a donné des
ailes pour se sauver; il reste immobile, cache sa tête, ou court éperdu
de côté et d'autre. S'il est poursuivi et qu'il arrive au bord de l'eau,
il y entre souvent et se noie, sans songer à prendre son vol pour
échapper à l'ennemi. Sa timidité, dit Naumann, est sans bornes :
une souris le remplit de terreur et une limace qui rampe eiïraye la
poule faisane au point de la faire quitter momentanément ses œufs,
tandis qu'elle reste rêveuse, immobile et comme morte, quand c'est
un danger réel qui la menace. Cette stupidité est un grand obstacle
à la multiplication des Faisans.
La nourriture de cet oiseau consiste en graines variées, baies et
autres fruits charnus, bourgeons, jeunes pousses, feuilles tendres,
larves, insectes, vers, etc. ; en domesticité il se contente des mêmes
aliments que nos poules domestiques.
C'est un animal peu sociable ; deux coqs se rencontrent-ils, ils
fondent l'un sur l'autre, s'attaquent à coups de bec, d'ongles et
d'éperons, et le sang ne tarde pas à couler; bien heureux si,
dans cette lutte corps à corps, l'un des combattants ne reste
pas mort sur place. 11 est d'ordinaire silencieux, de temps en temps
seulement il fait entendre le cri hock ou kouck, et en s'élevant vers
un arbre, il crie kouckouckouc kouck \ la voix de la femelle est
plus faible et ressemble plutôt à kack. Dans le courant de l'année,
le mâle ne songe guère aux poules faisanes, mais au printemps
l'amour se réveille et il change alors complètement sa manière
d'être.
Reproduction. — Vers la fin de mars ou en avril le mâle cherche
à attirer des femelles, et dans ce but il entonne son chant d'amour;
celui-ci a quelque analogie avec celui de nos coqs domestiques, mais
il est plus court et plus rauque.
Les poules faisanes accourent à cet appel. « A leur vue, dit Brehm,
le mâle se redresse fièrement, relève la queue, bat un peu des ailes,
en un mot, il cherche à leur plaire. Une femelle est-elle près de lui,
il ouvre les ailes, rentre le cou, se tapit contre le sol et essaye quel-
ques sauts : on dirait qu'il veut danser, mais il ne peut y parvenir ;
puis, tout à coup, il se précipite comme un furieux sur la poule, et si
— 63 -
celle-ci ne cède pas immédiatement à ses désirs, il la frappe à coups
de bec et de pattes. »
Le mâle tâche de rassembler près de lui six à huit femelles, et
l'accouplement a lieu dès le lever du soleil; vers 9 ou 10 heures il
crie encore une fois, puis se retire à l'ombre; les poules se dispersent
à leur tour, mais reviennent toutes, vers le soir, se percher sur les
arbres qui environnent celui qu'a choisi le mâle.
Ce n'est qu'au commencement de mai qu'a généralement lieu la
ponte. La poule faisane cherche alors un endroit solitaire et bien caché
au milieu des herbages, sous des broussailles ou sous un buisson, ou
bien encore dans un champ de pois, de colza, de trèfle, de luzerne,
etc. ; là elle creuse une petite fosse qu'elle garnit de feuilles sèches,
de brins et de radicelles. C'est sur cette litière qu'elle dépose de huit
à douze œufs, parfois même jusqu'à quinze, mais non sans interrup-
tion; ainsi, elle pondra un œuf deux jours de suite pour se reposer
le troisième, ou bien elle ne pondra qu'un œuf tous les deux jours.
Ces œufs sont d'un gris verdâtre ou olivâtre uniforme et mesurent
environ 46 millim. sur 37.
Dès que son dernier œuf est pondu, le femelle se met à couver avec
une ardeur surprenante ; deux fois par jour elle quitte sa couvée pour
aller en quête de nourriture, mais elle a toujours soin de la couvrir
auparavant do feuilles et de brins semblables aux matériaux de la
litière. La durée de l'incubation est de vingt-quatre à vingt-six jours.
Aussitôt que les poussins sont nés, la mère les reçoit sous ses ailes,
où ils restent pendant environ vingt-quatre heures, afin qu'ils puissent
bien se sécher et conserver une douce chaleur. Ensuite elle les fait
sortir du nid pour leur montrer leur nourriture ; elle bouleverse dans
ce but des fourmilières et dégage les nymphes des fourmis qui forment
le premier aliment des petits.
Les poussins sont très sensibles à l'humidité, et quand la saison
est pluvieuse avant qu'ils aient des plumes, il en succombe toujours
beaucoup. Heureusement que celles-ci ne tardent guère à pousser : au
bout de quinze jours leur corps est déjà suffisamment garni de plumes
et leurs ailes leur permettent déjà de voleter sur le sol à de courtes
distances. Dès qu'ils ont atteint la moitié de la taille définitive, ils sont
en état de voler sur les arbres pour y passer la nuit à côté de leur
mère. Dans le courant de l'automne, les jeunes mâles s'en vont, cha-
cun de son côté, mais les jeunes femelles restent auprès de leur mère
jusqu'au ]»rinterap>.
— 64 —
FAMILLE DES PERDICIDÉS.
Car. — Bec relativement allongé, à arête légèrement bombée;
tour des yeux le plus souvent nu ; ailes courtes et arrondies, troisième
ou quatrième rémige la plus longue; queue courte, formée de douze,
de quatorze ou de seize rectrices ; tarses robustes, médiocres, armés,
chez les mâles, d'un éperon peu développé et mousse.
Les sexes diffèrent généralement peu entre eux.
Hab. — On rencontre des oiseaux de cette famille dans toutes les
parties de l'ancien monde, l'extrême Nord excepté.
OENRE XCIX.
PERDRIX. — CACCÂBIS (1).
Perwx, Briss. Oniith. I, p. 236 (17G0).
Tetrao, Lin. Sijst. nat. I, p. 276 (1766).
Caccabis, Alectoris, Kaup, Nat. syst. pp. 180, 183 (1829).
Chacura, Hodgs. Madr. Joiirn., 1837, p. 505.
Pyctes, Hodgs. Gr. Zool. Mise, p. 85 (1844).
Car. — Bec épais, légèrement arqué, au moins aussi haut que
large, mandibule supérieure dépassant faiblement l'inférieure ;
narines basâtes, fermées en partie par une écaille membraneuse nue et
très renflée; ailes médiocres, arrondies, sub-obtuses; queue courte,
arrondie; les plus grandes sus-caudales atteignant presque l'extrémité
de la queue ; tarses robustes, pourvus, chez les mâles, d'un tubercule
calleux mousse; doigts réunis à la base par une membrane, le médian
de la longueur de la partie nue du tarse ; pouce bien développé ; ongles
arqués.
176. — La Perdrix rouge.
CACCABIS RUBRA, Kp. ex Briss.
(Pi. 176.)
Perdix RUBRA, Briss, Ornith. I, p. 236 (1760).
Tetrao rufus, Lin. (part.) 8yst. nat. I, p. 277 (1766).
Tetrao rufus, GmeL 8. N. I, p. 756 (1788).
Perdix rufa, Lath. Ind. Orn. II, p. 647 (1790).
Caccabis rubra, Kp. Nat. Syst. p. 183 (1829).
Perdix labatei, Bout. Ornith. Bauphiné, II, p. 337, pi. 72, f. 5 (1843) hybride?
(i) Les auteurs ont adopté le terme générique de Perdix tantôt pour la Perdrix rouge et ses
congénères, tantôt pour la Perdrix grise. Mais il est à remarquer que c'est cette dernière qui est
décrite la première dans l'ouvrage de Brisson, comme type de genre, et qui doit par conséquent
conserver le nom générique de Pepdix. C'est pour cette raison que Kaup créa en 1829 le terme
de Caccabis pour la Perdrix rouge.
— 65 —
Caccabis rufa, Gray, Gen. of B. III, p. 508 (1849).
Perdix rufidorsalis, C. Brm. Yogelf. p. 266(1855).
Perdix. rubra intercede.ns, a. Brm. Allg. Deulsch. nat. Zeil. 1857, p. 472.
Caccabis rubra communls, A. Hrm. Samml. C. Brm. p. 11 (1866).
CoTHURNix RUBRA, Lamet. Cat. Ois. Seine-inf. p. 116 (1871).
Perdix xanthopleura et atrorufa, Vincel. Essnh dtym. Maine-et-Loire, II, p. 30
et 32 (1872) var. ace.
Das Roth-Feldh(;iin', ca allemand.
The Red-leggei) Partridge, en anglais.
De Roode Patri.i.s, en llamand.
Taille: 0'"30 ; ailes 0,17.
Description du nirile adulte. — Parties supérieures d'un brun cendré légè-
rement olivâtre, rougeâtre à la tête et sur le haut du dos ; raie sourcilière,
joues et george d'un blanc pur ; une bande noire, partant des lorums et tra-
versant l'œil, encadre complètement le blanc de la gorge ; plumes des oreilles
roussûtrcs : cou gris, tficlié de noir et passant au roux vineux ; rémiges
brunes bordées en partie de roux jaunâtre ; poitrine et flancs d'un gris
bleuâtre, mais chaque plume des flancs traversée d'une bande d'un blanc
jaunâtre, suivie d'une étroite bande noire et terminée par un large bord r.iux
marron; abdomen, sous-caudales et jambes d'un roux clair; queue d'un
marron rouge, sauf les rectrices médianes qui ont la couleur du dos. Tour
de l'œil et un espace nu derrière cet organe, bec et pattes rouges ; iris brun
roussâtrc.
Femelle. — Un peu moins forte, coloration moins vive et point de tuber-
cule aux tarses.
Pousain. — • Duvet épais, assez court; d'un fauve isabello très clair en
dessous, d'un brun roux sur le dessus de la tête et les parties supérieures ;
l'extrémité de chaque brin do duvet est noir, ce qui forme un pointillé à la
surfcice; bandes blanchâtres sur le dos ; un trait noir en arrière do l'œil (Mar-
chand). Tarses couleur de chair rougeâtre {Bailly).
Ilab. — La Perdrix rouge habite le sud-ouest de l'Europe. Elle a
,ipfepa^igy!i^^M-^l^tiJM--^-^|^ été introduite en Angleterre vers
-4^r ' j 1770(C/«r7i6>)ety est aujourd'hui
^yi assez abondante; on l'a prise
-•'H accidentelloincnt près d'Aber-
deen en Ecosse {Grau). Elle est
inconnue en Irlande, où l'on a
►.. ' Cf^pendant essayé de laccliuiater,
'\ il y a un(^ quarantaine d'années,
dans le comté do Galway, mais
elle ne paraît pas y avoir prospéré {Thompson). Son apparition acci-
dentelle dans le sud df l'Allomagnc {Naumnnn) oi do r.\ntiiclie
T.iMi; Il — 1SS7. U
— 66 —
{von Tschusi) paraît douteuse, mais elle existe en Dalmatie (A.Brehm)
et en Lorraine où elle est cependant rare {Godron).
D'après M. le baron de Sélys-Longchamps, cette espèce serait de
passage très accidentel en Belgique, où un individu a été tué près de
Tournay ; un autre aurait été capturé près de Maestricht. Suivant le
même auteur, on aurait essayé à diverses reprises de naturaliser cette
Perdrix aux environs de Liège, mais on n'a pu y réussir; ces oiseaux
émigraient à l'automne vers le Midi et ne revenaient plus. Je pense
qu'on réussirait mieux dans certaines parties du Brabant et du Hai-
naut. M. A. de Lafontaine signale aussi la présence accidentelle de
cette espèce dans le grand-duché de Luxembourg. Il est probable que
cet oiseau se soit montré plus d'une fois sur le sol belge sans tomber
dans les mains d'un amateur; chaque année on voit sur les marchés de
Bruxelles des quantités considérables de ces Perdrix, provenant de
France et d'Italie; rien ne prouve qu'il n'y ait jamais dans ces tas un
sujet pris en Belgique, et cela est d'autant plus probable que la
Perdrix rouge se reproduit dans le nord de la France.
Dans ce dernier pays, cette Perdrix est commune dans toute la Pro-
vence ; on la trouve aussi en Bretagne, en Anjou, dans le Jura et dans
quelques autres localités du Midi et du centre ; elle est plus rare dans
le Nord : on l'y rencontre aux environs de Saint-Pol où elle se repro-
duit {Begland et Gerbe). En Suisse on la voit quelquefois dans le
canton du Valais [L. Olphe- Gaillard) et aux environs de Genève
{Tschudi). Elle est commune dans toute l'Italie, mais elle n'existe
pas en Sardaigne, en Sicile et à l'île de Malte {Salvadori) ; elle est
aussi très commune en Espagne (Saundet^s) et en Portugal; suivant
M. Tristram, les sujets de ce dernier pays sont d'une taille plus forte
et les teintes sont plus vives et plus tranchées. On rencontre encore
cette espèce aux îles Madère, Açores (Godman), Baléares (von
Homeyer), en Corse et à l'île d'Elbe [Lilford).
DansleN.-O. de l'Afrique cette espèce est remplacée parle C.
petrosa, et dans l'Europe orientale et au Caucase par les C. saxatilis
et grœca; c'est à tort que quelques auteurs ont désigné ces régions
comme habitées par le C. ruhra.
Mœurs. — Cette Perdrix est très sédentaire, ne s'éloigne pres-
que jamais du canton où elle est née, et si elle est momentanément
forcée de l'abandonner, elle ne tarde guère à y revenir. Elle recherche
les lieux accidentés, les flancs boisés des montagnes, les ravins ro-
cailleux, les coteaux couverts de bruyères, de buissons ou de vignes
et on la rencontre même dans les champs.
- 67 ~
Ce sont des oiseaux excessivement sociables, vivanttoiijours en trou-
pes, et, à l'époque de la reproduction, les mâles qui n'ont pu trouver de
femelle se réunissent même souvent entre eux ; ceux qui ont une fe-
melle s'éloignent peu du voisinage du nid, etsejoignent plus tard à leur
compagne pour guider les petits et veiller sur eux. Leur naturel est
doux et craintif : la vue d'un rapace les terrifie, et la poursuite d'un
renard ou d'un chien les pousse souvent à chercher un refuge sur les
arbres ; ils se tiennent avec facilité sur les branches, et dans les en-
droits où il y a beaucoup d'arbres ils se perchent régulièrement pour
mieux inspecter les environs. Leur vol est brusque, bruyant, rapide
quoique lourd, peu élevé et de courte durée; « il offre ceci de parti-
culier,disent Degland et Gerbe, qu'il est parallèle au sol dans presque
tout son trajet ; ainsi, les Perdrix rouges ne se portent pas d'un point
à un autre par un vol qui représenterait une ligne horizontale, mais
elles suivent, à la hauteur de sept à dix mètres au plus, tous les
accidents de terrain qu'elles rencontrent, de manière à décrire une ou
plusieurs grandes courbes continues et plus ou moins fortes».
La voix de cette espèce ressemble à celle de la Perdrix grise, mais
elle est moins perçante, moins criarde et plus sifflante. Le signal d'a-
vertissement des deux sexes est reh reh ; von Homeyer note. le cri du
mâle schick, schéma, mais Brehm croit être plus près de la réalité en
le décrivant conmic un son rauque : tack tackerack ou key^ekekek ;
Bailly le note de la façon suivante : ket ket ketclin, ketdin ketotin-
kin, ketdinkin.
Sa nourriture consiste en insectes, larves, vers, colimaçons, fèves,
haricots et autres légumineuses, glands, faînes, raisins, baies et grai-
nes diverses, bourgeons, jeunes feuilles, etc.
L'un des fils Brehm a eu l'occasion d'étudier en Espagne, les
moeurs de cette espèce, et il a publié sur ce sujet une note détaillée
dont je reproduirai ce qui suit : « En Espagne, on trouve la Perdrix
rouge dans toutes les chaînes de montagnes (sauf peut-être celles qui
longent la côte septentrionale), et jusqu'à 2000 mètres au-dessus du
niveau de la mer. Elle évite les grandes forêts ; par contre, elle s'eia-
blit volontiers dans les parcs et dans les bois ou la vogelalioii est
surtout représ<mtée par d(; liantes bi-uyères, des chênes vert<. -'"-
buissons de thym et de romarin.
hausses mouvements, continue IWelim, cet oiseau ressemble
beaucoup à la Perdrix grise, mais il est i)lus gracieux, plus élégant.
Sa course est rapide et .Misée ; il court avec facilit** au milimi des
picncs ci des rocaillcs, g>i'imp(3 très adroitement sur les rochers, et se
sert rarement de sea ailes. Sou vol est beaucoup plus rapide et moins
bruyant que celui de la Perdrix grise; il se lève doucement, monte vite
à une certaine hauteur, à l'aide de quelques coups d'aile précipités et
difficiles à distinguer.Souvent il plane longtemps sans paraître agiter
ses ailes ; parfois il se précipite du haut d'un rocher, à la façon d'un
oiseau de proie. Il n'aime pas à voler loin et préfère courir.
< Presque toule l'année, les Perdrix rouges vivent en troupes de dix
à vingt individus, formées de la réunion de plusieurs familles. D'or-
dinaire, chacune de ces troupes erre dans les limites d'un même can-
ton. Comme ces oiseaux ont peu besoin d'eau, ils n'ont pas d'heures
régulières pour s'abreuver. Leur activité s'éveille quand les premières
lueurs de l'aurore paraissent à l'horizon, et dure jusqu'après le lever
du soleil; à ce moment on n'entend plus que rarement le cri du mâle.
Pendant le milieu de la journée, ils sont silencieux, plongés dans un
demi-sommeil et cachés dans les herbes ou les buissons. Vers le cou-
cher du soleil, ils s'animent de nouveau, et jusqu'à la nuit on les voit
courir, se jouant plutôt que cherchant leur nourriture. Mais la saison
des amours vient changer leurs allures. Dès le mois de février, les
bandes se séparent par couples. 11 est cependant à remarquer que
l'époque des amours varie suivant les provinces ; dans le sud de l'Es-
pagne, elle commence dans les premiers jours de mars, dans le centre
et dans les montagnes, à la fin de ce mois ou au commencement d'avril.
A ce moment les mâles se livrent des combats acharnés pour la pos-
session des femelles. »
Reproduction. — Cette espèce niche dans les champs, les vigno-
bles, sous uu buisson ou à l'abri do bruyères ou d'herbages. La
femelle creuse dans le sol une petite fosse qu'elle garnit de brindilles
ou de feuilles sèches. La ponte est de douze à dix-huit oeufs arrondis,
à coquille épaisse et poreuse ; ces œufs sont d'un brun jaunâtre clair,
pointillés et tachés de brun ou de roux, et mesurent environ 38 mil-
lim. sur 30. La durée de l'incubation est de 23 jours.
Les petits croissent vite : à trois semaines ils sont déjà lestes et
agiles, et à cinq semaines ils sont grands. En cas de danger, ils se
comportent comme les poussins de la Perdrix grise.
Ce bel oiseau pourrait aussi bien être acclimaté en Belgique qu'il
l'a été en Angleterre. Mais pour obtenir de bons résultats, il faudrait
faire venir des œufs du midi de la France ou de l'Italie, et les placer
dans des nids de Perdrix grises en train de couver ; de cette façon,
- 69 -
les jeunes perdreaux seront, dès le premier jour de leur existence,
instruits dans le genre de y'u) qu'ils aurontà mener. A l'âge adulte, ils
se choisiront eux-mêmes les lieux qui leur conviennent le mieux
pour la reproduction.
Les œufs, bien emballés, supportent parfaitement le transport,
sans perdre leur principe vital.
GENRE C.
PERDRIX proprement dite. — PERDIX.
Pkkdix, Briss. Onnlh. I, p. 21U (1760).
Tetrao, Lin. Si/st. nat. I, p. 276 (1766).
Starna, Bonap. Comj). List. p. 43 (1838).
Car. — Bec médiocre, plus large que haut à la base, à arête courbes
mandibule supéiieure dépassant l'inférieure et à pointe arrondie; narine;
basales, latérales, operculées ; un petit espace nu derrière l'œil; ailes médio-
cres, arrondies, 3®, 4° et 5^ rémiges les plus longues; queue courte; tarses et
doigts robustes, les premiers dépourvus, chez les mâles comme chez les
femelles, de tubercules tenant lieu d'ergot ; ongles larges, peu recourbés.
Hab. — Les vraies Perdrix sont répandues dans l'Europe tempérée
et dans l'Asie centrale et orientale.
177. — La Perdrix grise.
PERDIX CINEREA, Briss.
(PI. 177.)
Peudix ciNKKicA ct MONTANA, Briss. Otllilk. 1, pp. 210, 224 (1760)
Tetrao perdix, Lin. Sijot. nat. I, p. 276 (1766).
Tetr.vo mo.ntanus, Gm. Sijst. nat. I, p. 758 (1788).
Perdix vulgakis, Lcacli. Syst. Cat. B. M. Br. Mus. (1815).
Perdix ci.neracea, Brm /sw, 1830, p. 986.
Starna cinerea, Bonap. Conq). List. p. 43 (1838).
Perdix uelgica, (var. ace.) de Selys, Faune bel g'.', p. 115 (1842).
Perdix sylve^tris, Brm. \o<jdf. p. 267 (1855).
Starna perdix, Bona[). Cat. Parz. p. 13(1856).
Starna palustris, (var. ace.) Dcmeezm. Ibis, 1864, p. 225.
Cothurnix cinerea, Lamct. Qat. Ois. S'nn>--lnf. II, p. 118 (1875).
Perdix pallida (Dcinoozra.) Olphc-Oal., Contrib. n A, Faune orn. fa.sc. XXXIX,
p. 35(1886).
Das 1vkh-Fi:i,dhl'iin, imi uli"ni:iml.
TiiE Partridge, en anglais.
De Patrusî, Veldiioen, en lUunand.
— 70 -
Var. Damascena.
Perdix damascena, Bi'iss. Ornith. I, p. 223 (1760).
Tetrao damascenus, Gm. Syst. nat. I, p. 758 (1788).
Perdix minor, Brm. Yolgelf. p. 267 (1855).
CoTHURNix damascena, Lamet. C(xt. Ois. Seine-lnf. Il, p. 122 (1875).
Taille: 0"\25; ailes O^JS.
Description du mâle adulte. — Front, sourcils et gorge d'un roux
jaunâtre ; dessus de la tête et nuque d'un brun roussâtre varié de taches
d'un jaune d'ocre sale; dessus du cou, dos et sus-caudales d'un cendré marqué
de fins zigzags noirâtres, les sus-caudales traversées en outre de bandes d'un
roux marron; devant du cou, poitrine et lianes d'un cendré plus pâle que
le dos, mais également marqués de zigzags noirâtres ; côtés de la poitrine
ornés de bandes d'un roux rouge ; ailes d'un cendré jaunâtre avec des taches
rougeâtres, variées de zigzags noirâtres et le centre des couvertures portant
une large strie longitudinale blanchâtre ; rémiges brunes avec des bandes
jaunâtres; une grande tache marron en forme de fer à cheval, et encadrée de
blanc occupe le bas de la poitrine et une partie du ventre ; côtés du bas-ventre
et sous-caudales roussâtres et parsemés de taches et de zigzags brunâtres ;
rectrices médianes comme les sus-caudales, les latérales d'un roux rouge.
Bec d'un brun olivâtre ; pattes grises; iris d'un brun roussâtre.
Femelle. — Ses teintes sont un peu plus pâles, mais elle diffère principa-
lement du mâle par l'absence de la giande tache ventrale en fer à cheval ;
le ventre est d'un blanc jaunâtre avec quelques taches d'un brun rougeâtre.
Chez les vieilles femelles cependant, la tache marron en fer à cheval est plus
ou moins marquée, mais jamais autant que chez les mâles.
Poussin. — Duvet court, d'un blond Isabelle, marqué sur la tête et sur
les autres parties supérieures de taches d'un roux vif; gorge et ventre d'un
jaune pâle; bec et pattes jaunâtres.
Yar. ace. — On rencontre parfois des variétés d'une teinte pâle, de couleur
isabelle, entièrement blanches ou blanchâtres, ou bien irrégulièrement tachées
de blanc. Les cas de mélanisme sont plus rares. Les individus désignés sous
le nom de P. onontana ont les parties inférieures largement tachées de brun
marron. Une variété remarquable, que l'on rencontre parfois en France sur
les terrains tourbeux des départements de la Somme, du Pas-de-Calais et du
Nord, jusque sur le territoire belge (P. palustris) est généralement d'un
beau gris de lin, avec le front, les sourcils, la gorge et les rectrices d'un gris
blond.
Var. Damascena. — Sa taille est un peu plus petite et ses pattes sont de
couleur jaunâtre.
~ 71 —
Ilah. — La Perdrix grise est commune dans la plus grande partie
-^-^s^^i -^- ^-_ 'tsY'j^;--, - _^^ :?r^TPs^^ ^|g l'Em-ope. En Norwège elle
^ *^^Mi'^^ / 1 ^^i^^ ^^^^^ i "" ^^^ observée jusqu'au delà du
Jf .^iiy.^ ,. . -v ^.^o] ]si.(Col/ett); elle a été
J * introduite en Suède vers l'an
t ' '' \7^i'i- ^ 1500 et on l'y rencontre auiour-
(I hm jusque sous le 66 15,
i (Sundstrôw) : en Finlande elle
se montre aussi jusque sous le
6d" (Palmen), et elle atteint
probablement la même latitude eu Russie, quoiqu'elle ne paraisse avoir
été encore observée que jusqu'au 58 1/2° (Teplouhoff), En Pologne,
en Allemagne, aux îles Britanniques et dans le reste de l'Europe cen-
trale et méridionale elle est généralement commune. Elle est tréscom-
mune en Belgique, mais elle est inconnue aux îles de la Méditerranée
et ne se montre qu'accidentellement en Portugal (A. C. Smith). En
Espagne on ne l'observe aussi qu'accidentellement au sud de la Sierra
Guadarrama (Saunders), mais on la rencontre dans la province de
Santander (Irbp), dans les Asturies, le Léon, la haute Catalogne et
dans quelques localités de l'Aragon (A. E. Brehm). En Grèce on ne
l'observe que sur les frontières septentrionales (Kruper ),mtx\s elle est
commune en biverdans les plaines de la Macédoine (Drummond-Hay);
elle est également commune en Albanie et dans TEpire où on la
trouve en nombre considérable près de Joannina et dans les plaines
d'Arta (Lillford).
La Perdrix grise est fort répandue en Asie Mineure, surtout dans
les grandes plaines de la Lycaonie et tout particulièrement dans la
région comprise entre Karaman et Karabounar {Tchihatchelf). Au
Caucase on la rencontre jusqu'à 6,000 pieds au-dessus du niv(\-iu de
la mer {Radde) ; elle habite également le nord de la Perse jusque
dans la vallée de Lura au nord de Téhéran {Xt-Jolm) .- dans le Tur-
kestan on l'observe dans certaines parties, tandis que dans d'autres,
elle est remplacée par la /*. haroala (Severtzow).
La var, Damascena paraît habiter les contrées septentrionales, car
Naumann dit qu'à la fin d'octobre ou en novembre ont voit arriver
dans le nord de l'Allemagne des bandes considérables d.- r«'rdrix,
(pli ditîèrent de celles du pays par- un»' taille un peu plus p.'tite; les
chasseurs allemands les désignent sous le nom de Ziff//i'>/nu'/- (Perdrix
df passage). Eu lîelgiijue, elle S(^ montre irn'gulièrement en hiver par
- 72 -
troupes très nombreuses (c?e Selys-Longch,)ei il en est de même dans le
Grand-Duché de Luxembourg {A. de La Fontaine). En France elle se
montre chaque année dans l'Artois, où quelques couples nichent même
sur les points les plus élevés de la province ; elle se montre aussi en
Vendée, et passe annuellement, à ce qu'on dit, en Bretagne, notam-
ment dans le Finistère {Gerbe) ; on la voit également dans le départe-
ment de la Seine-Inférieure {Hardy) et de l'Eure-et-Loir ; dans ce
dernier département elle n'est point de passage régulier, et Ton est
souvent bien des années sans en voir (Marchand).
Remarque. — Certains auteurs français ont admis 'comme espèces
distinctes les P. montana et damascena deBrisson. La première n'est
positivement qu'une variété accidentelle, quoique assez fréquente ; il
a été constaté que ses caractères distinctifs ne se manifestent jamais
sur tous les sujets d'une même couvée. Quant à la seconde, elle peut
être admise comme variété climatérique ou race. Si ses caractères sont
peu apparents, elle offre quelques particularités dans ses mœurs dont
il faut tenir compte; ainsi, contrairement à la Perdrix grise ordinaire,
qui est très sédentaire, la var. Damascena est migratrice; elle est
aussi plus sauvage et plus farouche que nos Perdrix indigènes, ne se
mêle jamais à ces dernières et son vol est plus élevé. Toutes ces
différences dans les habitudes et dans la taille, proviennent évidem-
ment du milieu qu'habite l'oiseau ; Naumann est peut-être dans le vrai
quand il dit que leur petite taille peut provenir de ce qu elles habitent
des régions arides. Leui- ponte n'est guère que de 12 à 14 œufs.
Mœurs. — C'est un oiseau sédentaire, n'abandonnant que rarement
le canton où il est né et y revenant toujours. Dans les contrées du
Nord, cependant, le manque de nourriture et le grand > froid obligent
les Perdrix à émigrer vers un climat moins rigoureux. C'est la petite
race qui nous arrive en automne par troupes de 50 à 100 individus ;
Naumann dit que son frère vit un jour une bande d'environ 500
sujets, se dirigeant vers l'Ouest, moitié volant, moitié courant avec
une grande rapidité.
La Perdrix grise habite de préférence les endroits cultivés des
plaines, où elle s'établit dans les champs situés près d'un bois ou
environnés de buissons ou de haies touffues ; on la rencontre égale-
ment sur les lisières des forêts et près des lieux marécageux, du
moment qu'elle y trouve des broussailles ou des hautes herbes où elle
puisse se cacher. Elle ne se montre jamais dans la profondeur des
bois, mais on la rencontre partout dans les champs de céréales, de
- 73 —
colza, de luzerne, de trèfle, de pois, etc. Dans les Alpes, dit Tschudi,
on la voit rarement à plus de 3,000 pieds, et l'on cite comme une
chose extraordinaire le fait de six Perdrix tuées sur le Himmelberg
(Appenzell, 3,220 pieds).
Par ses mœurs douces et charmantes, la Perdrix grise s'est acquis
la sympathie de tout le monde ; il est vrai que la bonne qualité de sa
chair, qui en fait un- gibier fort recherché, est pour beaucoup dans
l'estime qu'on lui témoigne. Quand elle marche, elle tient le cou
rentré entre les épaules et le dos arrondi, mais elle allonge le cou dès
qu'elle se met à courir. En cas de danger, elle se cache admirable-
ment bien dans les herbages et les broussailles ; quand elle n'a aucun
abri à sa portée, elle se contente de s'aplatir à terre, se liant dans la
conformité de couleur qui existe entre son plumage et la teinte du sol
pour rester inaperçue, et ce stratagème lui réussit souvent. Son vol
n'est pas précisément lourd, mais fatigant et exige au début de grands
battements d'ailes ; une fois lancé, l'oiseau glisse dans l'air avec rapi-
dité et presque sans remuer les ailes, donnant seulement de temps en
temps quelques battements pour prendre une nouvelle impulsion. Cette
Perdrix n'aime du reste pas à voler haut et longtemps, surtout quand
il fait du vent ; c'est généralement à une faible hauteur et en ligue
droite qu'elle traverse l'espace.
Cet oiseau ne se perche jamais sur les arbres, et il est fort rare de
le voir se reposer sur le toit d'une chaumière ou d'une masure, ce qui
ne lui arrive généralement que lorsqu'il est poursuivi. Ses pattes
robustes lui permettent de courir avec rapidité, aussi préfère-t-il
souvent chercher son salut dans une course rapide, aûn de pouvoir
atteindre sans danger un endroit convenable pour s'y cacher. Il est
du reste prudent et craintif, et sait fort bien distinguer de loin ses
ennemis et les éviter à temps. Il est sociable, fidèle et capable de
dévouement, aussi ne craint-il pas d'exposer sa vie pour défendre sa
progéniture.
Au printemps ces oiseaux vivent par couples, mais dans les autres
saisons on les voit toujours en fainille ; quand celle-ci a perdu la
majorité de ses membres, les survivants cherchent à se joindre à une
autre famille, qui ne les reçoit cependant pas toujours sans protester
à coups de bec. Le cri de la Perdrix est retentissant et peut se rendre
par ^ <*>'/•// /c/l ou girhuli. C'est naluri'llciuenl au i)rihi(Miii>s (pie les
mâles sont le plus bruyants, car étant généralement en plus graïul
nombre que les femelles, ils sont obligés de combattre pour conquérir
TuMt: 11. — 1SS8. 1'-'
— 74 —
une compagne, qui se donne alors au plus fort. Le danger et la peur
leur font jeter le cri de ripripriprip, qui se change, dans une. fuite
précipitée, en taert-taert-taert . Les poussins piaillent comme ceux de
nos poules ; un peu plus tard ils crient tup-tup, puis schirk-schirk, et
enfin girik, gurrhik comme leurs parents, mais le ton change plus ou
moins suivant les circonstances.
La nourriture des Perdrix se compose de graines diverses, de bour-
geons, déjeunes feuilles, d'insectes et de larves.
Ces oiseaux ne s'apprivoisent que quand on les prend très jeunes.
Le meilleur moyen de les élever est de faire couver des œufs de
Perdrix par une poule; mais on doit avoir soin de nourrir les pous-
sins d'œufs de fourmis, de larves et de petits insectes.
Rep7^oduction. — Dans le courant de mars, ou même à la fin do
février si la saison est avancée, les familles se divisent et chaque mâle
cherche une compagne, étant monogame. Ceci ne se fait cependant
pas sans bruit et sans lutte, car, comme il a été dit plus haut, les
mâles sont généralement en majorité. Il va sans dire que dans ces
combats en l'iionneur des femelles, les vainqueurs sont toujours les
plus forts et les plus expérimentés ; les jeunes de l'année précédente
sont donc parfois obligés de se passer de compagne. Il est cependant
à remarquer que ces luttes n'ont lieu qu'entre les mâles célibataires
ou veufs, car les unions entre Perdrix sont indissolubles, et ce n'est
qu'après la mort de l'un d'eux que le survivant cherche à contracter
une nouvelle union. Aussi les vieux couples se retirent-ils toujours les
premiers, pour chercher un endroit convenable à leurs amours. Ceux
qui n'ont pu trouver de femelle, continuent leurs clameurs jusque dans
le mois de mai, et viennent parfois troubler les pondeuses, sans
s'inquiéter des droits d'autrui, mais l'intrus est toujours vigoureu-
sement repoussé parles conjoints.
La femelle niche généralement dans les environs de l'endroit où
elle est née, et qui se trouve toujours dans un champ de blé, de
colza, de trèfle, etc., ou même au milieu des hautes herbes d'une
prairie ou à l'abri d'un buisson. Le nid est une simple dépression
creusée dans le sol et garnie de chaumes et de brins d'herbes. C'est
sur cette litière que la femelle pond, vers la fin d'avril ou en mai,
de dix à dix-huit œufs, déposant journellement un œuf jusqu'à ce que
la ponte soit terminée. On a trouvé des nids contenant jusqu'à vingt
et vingt-six œufs ; mais plusieurs auteurs croient qu'il n'ap-
partiennent pas tous à une même femelle. Il se peut, en effet, qu'une
Perdrix ayant eu son nid détruit pendant la ponto, aille ronfler à un
autre nid le reste de ses oeufs. Ceux-ci sont d'un gris brunâtre ou
olivâtre assez pâle et sans taches ; ils mesurent environ 37 millim.
sur 26.
La durée de l'incubation est de trois semaines, et la mère ne quitte
sa couvée que le temps strictement nécessaire pour trouver sa nourri-
ture ; pendant qu'elle couve, le mâle reste non loin d'elle pour sur-
veiller les alentours et l'avertit de l'approche d'un danger. « Dès le
premier jour de leur existence, dit Brehm, ils se meuvent avec agilité;
ils quittent le nid avant d'être complètement secs et d'être débar-
rassés de tous les débris de la coquille qui les enveloppait ; ils sont
attentifs aux avertissements de leurs parents. Le père et la mère en
prennent soin : le premier veille sur eux, les avertit et les défend, la
seconde les conduit et les nourrit. L'un des parents vient-il à périr,
le survivant prend sa place. » En cas de mauvais temps, mâle et femelle
abritent chacun sous leurs ailes une partie de leur nombreuse progé-
niture.
Les allures des perdreaux changent quand ceux-ci ont à peu près la
taille des adultes et qu'ils sont en état de se sauver eux-mêmes, mais
l'aitachement réciproque ne se modifie guère. Chaque famille reste
parfaitement unie, et quand un péril les surprend, ils se tapissent tous
à terre; l'ennemi les approche-t-il de trop près, tous s'envolent à la
fois pour s'abattre plus loin ; s'ils sont une seconde fois forcés de
prendre la fuite, ils ne le font plus avec le même ensemble, mais volent
dans tous les sens et s'abattent éparpillés. Quand les perdreaux se
trouvent ainsi séparés de leurs parents, la peur les saisit et il est alors
souvent facile de les surprendre. Le danger passé, les parents rap-
pellent leurs petits qui répondent aussitôt, et bientôt toute la famille
est de nouveau nnmio ; mais s'il manque quelques perdreaux, il est
touchant de voir comment le père vole de tous côtés à leur recherche,
fouillant les herbes et les buissons, et poussant sans cesse ses cris
d'appel, jusqu'à ce qu'il parvienne à retrouver les égarés et à les
ramener à leur mère.
GENRE CI.
CAILLE. — COTURNIX.
Cori'UMX. liri.ss. Ornitli. I, p. ~t7 (^ITilOj.
Tktiiao, Lin. Syxt, nat. I. p. 273 (1766).
()KTY(;i<i.N, Koys. et Bl. Wirhrith. /•>»•. p. FA\ l (^l>:|ii).
Car. — Hoc court, |)1us Iai,^'<^ i|ur haut à la l)asi', coinpriiiu' vers la poinlo
— 76 —
qui est fléchie et qui dépasse un peu la mandibule inférieure ; narines Lasales,
latérales, operculées ; ailes courtes, aiguës, 1^® et 2« rémiges égales et les plus
longues; queue courte, arrondie, les sus-caudales atteignant l'extrémité des
rectrices et les couvrant entièrement ; tarses robustes, médiocrement allongés,
scutellés postérieurement, sans trace de tubercule ; doigts antérieurs réunis
à la base par une petite membrane, le médian, y compris l'ongle, de la lon-
gueur du tarse, le pouce libre, court, élevé ; ongles courts.
Hah. — Ce genre a des représentants en Europe, en Asie, en Afrique, en
Australie et à la Nouvelle-Zélande.
178. — La Caille ordinaire
COTURNIX COMMUNIS, Bonnat.
(PI. 178.)
CoTURNix MAJOR, Briss. Ornitli. I, p. 251 (1760).
Teteao COTURNIX, Lin. Syst. nat. I, p. 278 (1766).
CoTURNix COMMUNIS, Boniiat. Tahl. encycl. et méth. 1, p. 217 (1790)
Perdix COTURNIX, Latli Ind. orn. Il, p. 651 (1790).
CoTURNix DACTYLisoNANS, B. Mey. Voff. Liv. und Est}d.,\>. 167 (1815).
CoTURNix vuLGARis, Flcm, Bvil. an. p. 45 (1828).
CoTURNix MEDIA et MiNOR, Brm. Isis, 1830, p. 986.
CoTURNix EUROP^us, Swaiiis. Classif. of B. Il, p. 344 (1837),
Ortygion COTURNIX, Keys. et Bl. Wirbelth. Eur. p. 66 (1840)
CoTURNix VULGARIS JAPONicus, Schl. Faun. Jap. p. 103, pi. 61 (1850).
Ortyx COTURNIX, Clien. et D. Murs, Encycl. Ois. VI, p. 154(1854^.
ÇoTURNix BALDAMi et LEUCOGENYS, Bnn.Naumannia, 1855, p. 288.
CoTURNix CHiNENSis, Swinh. Ibis. 1860, p. 63.
CoTURNix MUTA, Dyb. Journ. f. Orn. 1868, p. 337.
CoTURNix JAPONiCA, Swinli. Ibis, 1875, p. 126.
Ortyx communis, Lemett. Cat. Ois. Seine-Inf. p. 129 (1879).
CoTURNix COMMUNIS ORiENTALis, Bogdan. Consp, Av. Imp. Ross., p. 44 (1881).
Die Schlag-Wachtel, en allemand.
The common Quail, en anglais.
De KwARTEL, en flamand.
Taille: 0'",16; ailes 0,103.
Description du mâle adulte. — Dessus de la tête noir, chaque plume bordée
de roussâtre et une raie de couleur claire sur la ligne médiane ; raies sour-
cilières larges et blanchâtres; dessus du corps brun noirâtre, chaque plume
bordée de roux cendré foncé et marquée de raies transversales roussâtres et
d'une longue tache centrale, terminée en pointe, d'un blanc roussâtre; couver-
tures des ailes d'un cendré brunâtre avec une strie claire au centre ; rémiges
brunâtres, tachées ou barrées de roussâtre sur le bord externe ; milieu de la
- 77 -
gorge d'un brun noirâtre ; joues et côtés du cou d'un cendré clair varié de
brun ; un demi-collier blanchâtre sur le devant du cou et remontant jusqu'à
la région des oreilles ; poitrine roussâtre avec les baguettes des plumes
blanchâtres; côtés de la poitrine marqués de taches noires ; le reste des
parties inférieures d'un blanc roussâtre, les flancs variés de roussâtre et
marqués de longues taches brunes ; queue brune avec des raies claires
transversales. Bec noir ; pattes roussâtres ; iris brun.
Femelle. — Diffère principalement du mâle par l'absence de brun à la
gorge; celle-ci est d'un blanc jaunâtre uniforme; les côtés de la tête sont plus
roux ; il en est de môme des côtés de la poitrine où les taches noires ne
sont presque plus apparentes, mais où les stries blanchâtres sont plus larges.
Poussin. — Duvet assez long, d'un roux ocreux en dessus ; le devant de la
tête d'un roux vif ; une bande noire le long du dos, se divisant sur la tête ;
côtés du dos et ailes variés de noir ; une tache noire derrière l'œil ; parties
inférieures jaunâtres.
Var. accid. — On rencontre parfois des sujets d'un blanc jaunâtre, d'un
blanc pur ou variés de blanc, de couleur pâle, grise ou Isabelle; le mélanisme
est plus rare (1).
Hab. — La Caille a une aire géographique très étendue : on la
rencontre dans presque toute
m^.
l'Europe ainsi que dans toute
l'Afrique, l'Asie et le Japon.
En Europe on la rencontre, en
été, jusqu'aux îles Fœroé {Feil-
den), le sud de la Scandinavie
[Collett) et la Finlande [Pal-
mén); elle a même été capturée
dans le gouvernement d'Archan-
gel jusque sous le 6^° [Tengstrom). Elle est plus ou moins commune
dans toutes les parties de l'Europe centrale et méridionale, ainsi
qu'aux îles Britanniques. Elle est sédentaire et de passage en Sicile
[Malherbe), en Sardaigne (Salvadurï), en Corse, dans le midi de
l'Espagne [Saunders) et en Grèce [De Heldreich). Il en est de mémo
dans le nord de l'Afrique, où ces oiseaux ne sont cependant pas
abondants en été [Loche, de Ileuglin) ; dans l'Afrique tropicale cette
espèce ne paraît pas séjourner longtemps, mais elh' devient de
(1) Le Synoicus Lodoisiœ, Vevr. et D. Murs {Riv. d M'ag. de zoohygie, \^<M, p. :2I.", pi. Il
dont on ne connaît que l'unique exemplaire pris en Lomh.irdie, ne peut être qu'une variole acci-
dentelle de la CaïUe ordinaire.
- 78 -
nouveau sédentaire et abondante dans le sud, surtout au Cap et au
Transvaal {Laijard, Ayres). Elle est également sédentaire ou de
passage sur toutes les îles de la côte africaine, y compris Madagascar
[Hartlauh) et les Comores {Pollen).
La Caille est aussi commune dans presque toute l'Asie et le Japon
{Schlêgel) ; dans le nord elle atteint probablement la même latitude
qu'en Europe ; au sud on la rencontre en Perse {Blanford), dans
l'Inde entière [Jey^îon)^ en Chine (David) et à Formose (Sioinhoé).
Je ne la trouve pas mentionnée comme habitant l'Indo-Chine et la
presqu'île de Malacca, mais il est plus que probable qu'elle habite ces
pays.
Mœws. — Dans nos contrées, on ne rencontre la Caille qu'en été :
elle nous revient régulièrement à la tin d'avril ou dans les premiers
jours de mai, et émigré en septembre ou en octobre. Au moment du
départ, ces oiseaux ne paraissent pas se rassembler : chacun s'en va
quand bon lui semble et sans s'inquiéter des autres ; mais, pendant le
voyage, un émigrant se joint à d'autres, la troupe augmente à mesure
qu'elle avance, et ainsi se forment ces bandes énormes que l'on voit
s'abattre dans le midi de l'Europe. Il paraît que ces bandes savent
franchir plus de cinquante lieues en une nuit. Arrivées près des côtes
delà Méditerranée, les Cailles s'arrêtent épuisées ; alors commence une
chasse dont on ne peut se faire une idée : on les prend par milliers
à l'aide de filets et de pièges de toute espèce et on les assomme même
à coups de bâton, A Rome, d'après Waterton, on met parfois en
vente, en un seul jour, plus de 17.000 Cailles. Le nombre de celles
qui périssent ainsi chaque année en Espagne, en Italie, en Grèce et
en Turquie est réellement fabuleux; malgré cela, elles repassent
l'année suivante par bandes tout aussi nombreuses. Après avoir repris
des forces, et si le vent est favorable, celles qui ont échappé à la des-
truction s'envolent de nouveau pour franchir la mer. Si le vent reste
constant, elles arrivent sans encombre sur la côte africaine ; mais s'il
s'élève une tempête, ces pauvres oiseaux ne peuvent lutter contre le
vent, et ils sont alors obligés de s'abattre sur les rochers ou sur les
ponts des navires, où un nouveau danger les attend, tandis que
d'autres tombent à la mer et s'y noient.
Quand les Cailles sont enfin parvenues à atterrir en Afrique^ elles
restent d'abord quelques instants immobiles, ensuite elles se mettent
à courir sur le sable, mais ne se servent de leurs ailes qu'au bout d'un
jour ou deux, à moins qu'un danger ne les menace. « Dès lors, dit
— 79 —
Brehm, on rencontre des Cailles partout dans le nord-est de l'Afrique,
mais nulle part en grandes bandes : elles sont isolées, quoique
nombreuses dans certaines localités. Elles cherchent des endroits
convenables, des champs, des jachères couvertes de halfa, et surtout
des steppes. Je crois que tout le temps qu elles restent en Afrique,
elles errent et ne font pas un long séjour dans le même canton. A
l'entrée du printemps la retraite commence, et en avril les Cailles se
réunissent à la côte, mais moins nombreuses qu'à l'automne. Elles ne
semblent du reste pas suivre toujours la mémo route : aux Cyclades,
Erhard n'a jamais observé une seule Caille au printemps, tandis qu'en
automne elles j arrivent en nombre considérable ; par contre, d'autres
observateurs disent que, dans d'autres îles, à Malte par exemple, elles
se montrent aussi nombreuses dans l'une comme dans l'autre saison. »
p]n été, la Caille s'établit dans les plaines fertiles couvertes de
champs, et ne se montre jamais dans les régions montagneuses ou
boisées; ce qu'elle préfère, ce sont les champs de céréales, mais on
la voit aussi dans les prés, quand l'herbe n'y est pas trop haute, dans
les champs de légumineuses et dans les endroits où croissent diverses
plantes herbacées et des ronces. Elle évite toujours les endroits hu-
mides et marécageux.
Elle marche en tenant la tête rentrée, le dos voûté, et ne présente
rien de gracieux dans ses allures ; le mâle cependant, prend quelque-
fois une attitude plus fière, en redressant le corps et le cou. Sa
démarche est aisée, et l'oiseau sait courir avec rapidité, surtout quand
un danger le menace. Son vol est assez rapide, bruyant et saccadé;
il n'aime généralement pas de franchir d\me traite une grande éten-
due, et ce n'est que lors des migrations qu'il s'élève haut dans
les airs pour traverser l'espace d'un vol rapide; dans les temps ordi-
naires, il préfère courir que voler, et ce n'est pour ainsi dire que
poussé par la nécessité qu'il se décide à prendre son vol, ne s'élevant
pourtant pas à plus d'un mètre ou deux et reprenant terre à cent
pas plus loin.
La Caille a les sens de la vue et de l'ouïe très développés, mais son
intelligence laisse beaucoup à désirer ; elle est très craintive et se
croit sauvée quand elle a caché sa tête et qu'elle-même ne voit plus le
danger.
Pendant la journée, la Caille se tient tranquille et cachée dans les
champs ; vers midi elle se chauffe au soleil, se roule dans le sable ou
s'endort. C'est à l'aurore et au crépuscule, ainsi que pendant une
— 80 —
partie de la nuit qu'elle se montre pleine d'activité : on peut alors
entendre ses cris et la voir courir à la recherche de sa nourriture,
poursuivre les femelles ou attaquer un rival. Cet oiseau n'est pas
sociable, il parcourt les champs seul et évite ceux de son espèce ; il
est même rare de voir mâle et femelle s'élever ensemble dans les
airs, et quand cela arrive, chacun s'abat d'un autre côté pour se
rapprocher probablement un peu plus tard. Du reste le mâle n'est pas
un époux fidèle et encore moins bon père, car il ne s'occupe guère de
sa progéniture. Pendant les premiers temps, la mère veille sur ses
poussins, les garde près d'elle et les rappelle quandils s'éloignent trop;
mais dès qu'ils peuvent se passer des soins maternels, les petits quit-
tent leur mère les uns après les autres et celle-ci ne cherche pas alors
à les retenir. Les mâles sont très querelleurs, se poursuivent avec
rage,se livrentdes combats acharnés et maltraitent même leurs femelles.
« Les Chinois, dit l'abbé David, emploient la Caille comme oiseau de
combat; pour l'apprivoiser et pour augmenter ses dispositions belli-
queuses, ils lui font prendre des bains de thé chaud, puis ils la font
sécher en la tenant dans leur manche. Après un certain nombre de ces
bains, qui sont suivis d'autant de repas, l'oiseau est suffisamment
habitué à la main de l'homme et tout disposé à entrer en lice contre
ses semblables. Ces sortes de combats font les délices des Chinois qui
y engagent souvent des sommes considérables. »
Outre son cri bien connu des campagnards, la Caille en a d'autres
qui varient selon les circonstances ; le cri d'appel des deux sexes est
bubhoi suivi de prickick d'une voix plus faible; le mécontentement et
la peur lui fait jeter le cri de trulilil ty^ulil, la colère celui de gour
gour, ressemblant un peu au ronflement du chat; en s'enfuyant devant
un danger elle crie trubrek, reck reck et pieppiep. Dès leur arrivée
au printemps, les mâles entonnent leur chant d'amour, et l'on entend
alors chaque soir et pendant une partie de la nuit les cris de puck-
werwuck, puckwerwick auxquels les femelles répondent par hrubruh
ruh rub.
Les Cailles se nourrissent comme les Perdrix, de graines diverses,
de larves et d'insectes, mais elles se montrent moins avides de bour-
geons et déjeunes feuilles ; en fait de graines, elles préfèrent celles
du blé, de l'avoine, de millet, de pavot, de colza, de navet, de chanvre,
etc. Pour se désaltérer, elle se contente le plus souvent des goutte-
lettes de rosée amassées sur les feuilles.
Ces oiseaux s'apprivoisent facilement et sont très agréables en
— 81 —
captivité, même en les laissant courir librement dans les apparte-
ments ; ils s'habituent bientôt à leur volière et s y reproduisent souvent.
On doit nourrir les poussins d'oeufs de fourmis, de pain blanc émietté
et de graines de millet ramollies dans du lait.
Dans certains pays du Midi, les Cailles font l'objet d'un commerce
très important. En Grèce, suivant De Heldreich,on prend ces oiseaux
à l'aide de filets lors de leur passage au mois d'août ; on les plume
immédiatement, on les vide, leur coupe la tête et les pattes, puis on les
aplatit à l'aide d'une planche chargée de pierres; on les met ensuite
dans de petits barils entre des couches de sel marin préparé à l'avance,
et ils sont ainsi expédiés à l'étranger.
Reproduction. — Le mâle est polygame, du moins dans les contrées
où l'espèce est abondante. A l'époque de l'accouplement, il est extrê-
mement jaloux et ne laisse approcher aucun autre mâle; de là des
luttes à outrance et sans fin ; sa violence va jusqu'à maltraiter la
femelle si elle ne se prête pas assez vite à ses désirs ; on dit que son
intempérance le pousse quelquefois à se jeter sur des femelles de pas-
sereaux et même sur des oiseaux morts.
La femelle ne commence son nid que quand la saison est déjà bien
avancée et rarement avant la Saint-Jean; ce n'est qu'à partir du 15
juillet que la plupart des femelles commencent à nicher. Dans ce but
elles creusent une légère dépression dans un champ de blé, de fèves, de
pois, mais rarement dans une prairie ; cette dépression est garnie
de quelques brins ou de feuilles, mais l'ensemble est si grossier que,
sans les œufs, on ne devinerait jamais que c'est un nid. La ponte est
de huit à douze œufs, rarement davantage. Ceux-ci sont d'un jaune
brunâtre ou olivâtre, plus ou moins mouchetés de brunâtre et ordi-
nairement marqués de grandes taches brunes ; ils mesurent environ
31 miUim. sur 24. La femelle couve pendant dix-huit à vingt jours
avec une persévérance incroyable. Elle veille sur ses poussins avec
tendresse, les abrite sous ses ailes durant la nuit ou en cas do mauvais
temps, et leur apprend dès leur naissance à chercher leur nourriture.
Les petits croissent rapidement : à six semaines ils ont la taille des
adultes et sont bientôt en état d'entreprendre leur long voyage.
La Caille n'a qu'une couvée par an, mais si celle-ci a été détruite,
elle fait une nouvelle ponte. C'est ce qui fait qu'on trouve paribis
encore à la fin d'août et même en septembre des nids contenant des
œufs; mais ces couvées tardives arrivent rarement à bonne fin, et elles
périssent le plus souvent dès les premiers froids.
TuMi^ II. — 1888 ^'
ORDRE VII
Car, — Cet ordre comprend des oiseaux de formes très variables,
mais qui se reconnaissent facilement à la longueur relative de leurs
tarses. Leur bec est tantôt court et conique, tantôt long et plus ou
moins grêle, droit ou recourbé, large et comprimé ou étroit et épais;
leur cou est plus ou moins allongé, leurs ailes sont bien développées
et leur queue est en général courte. Le seul caractère commun à toutes
les espèces du groupe, c'est d'avoir les tarses allongés, minces et nus
jusqu'au-dessus de l'articulation tibio-tarsienne. Les doigts sont au
nombre de trois ou de quatre, et les antérieurs sont ordinairement
réunis à leur base par une petite membrane ; chez quelques espèces
les doigts antérieurs portent latéralement des lobes membraneux.
Le plus souvent les femelles ne ditfèrent que peu ou point des
mâles par leur système de coloration. Les petits ont en naissant le
corps couvert de duvet.
Hab. — Les Échassiers sont répandus dans le monde entier et cer-
taines espèces sont même cosmopolites.
Mœurs. — Le genre de nourriture de ces oiseaux oblige la plupart
à mener une vie plus ou moins aquatique. Ils se tiennent ordinaire-
ment là où l'eau est peu profonde et où ils peuvent patauger sans
mouiller leur plumage, pour chercher des insectes et des mollusques
aquatiques qui constituent leur principale nourriture. Quelques-uns,
cependant, plongent et nagent fort bien, surtout ceux qui ont, comme
les Foulques, les doigts lobés. D'autres vivent loin de l'eau et recher-
chent les plaines cultivées et les steppes. Les Echassiers réellement
terrestres n'ont que trois doigts et se nourrissent en grande partie de
matières végétales.
Tous les Échassiers, sauf les Hérodiens, nichent sur le sol, parfois
dans les herbages qui flottent sur l'eau.
Classification. — Quand on compare entre eux les nombreux
Échassiers qui peuplent notre globle, on est frappé de la diversité de
leurs formes ; à ces différences d'organisation correspondent souvent
des différences non moins importantes dans les mœurs, le régime,
- 83 -
etc., qui permettent de diviser ces oiseaux en plusieurs sous-ordres
parfaitement distincts, dont le nombre varie cependant suivant les
auteurs. Les sous-ordres généralement admis sont : 1. les Échassiers
coureurs-^ 2. les Macrodactyles et 3, les Hérocliens.
PREMIER SOUS-ORDRE
LES ÉCHASSIERS COUREURS
Car. — Bec fendu jusqu'au-dessous des yeux ; doigts médiocre-
ment allongés, au nombre de quatre ou de trois seulement ; le pouce,
quand il existe, est court et ne repose parfois pas à terre.
Cette division comprend tous ]es Echassiers qui courent avec agilité
et qui habitent les plaines découvertes ou les bords de la mer ou des
rivières.
FAMILLE DES OTIDÉS
Car. — Bec fort, aplati à la base, renflé près de la pointe de la
mandibule supérieure ; ailes amples, légèrement concaves, à rémiges
larges et fortes, la troisième la plus longue ; tarses épais, élevés,
réticulés de toute part; doigts au nombre de trois seulement, tous
dirigés en avant ; queue médiocre, formée de vingt larges rectrices.
Ce sont des oiseaux de grande ou de moyenne taille, qui établissent
une sorte de transition entre les Gallinacés et les vrais Echassiers.
Ils ont la tête assez grande, le corps trapu et le plumage lisse et
serré.
Les mâles diffèrent des femelles par une taille plus forte et souvent
aussi par des plumes allongées et étroites qui ornent la tête et les
côtés du cou.
Hab. — Cette famille est représentée dans les parties tempérées et
chaudes de l'ancien monde et en Australie.
GENRE Cil.
OUTARDE. — OTIS.
Otis, Lin. Syst. uni. I, p. 2(54 (1766).
Psoi'HiA, Jacq. Beilr. Gcsch. Yog. p. 24(1784).
Tetrax, Leach, Syst. Cat. M. B. Br. Mits. p. 28 (1817).
HouHAUA, Roiiap. Sof/f/. distr. tw't. An. vorl. p. 142(1832)
Chi.amydotis, Lcss. Rev. zool. IHIîU, p. 47.
Euj'ODOTis, Gray. Gen. of'B. III, p. 533 (1845).
— 84 —
Car. — Bec plus court que la tête, robuste, conique, convexe ; narines
ovalaires, situées vers le milieu de la mandibule ; cou allongé ; ailes égale-
ment allongées,amples, concaves, ne dépassant pas la queue; celle-ci médiocre,
large, arrondie ; tarses élevés, épais, réticulés ; doigts au nombre de trois,
scutellés. Sommet de la tête, côtés et bas du cou ornés parfois de faisceaux
de plumes décomposées.
Hab. — Comme la famille.
179. — L'Outarde barbue
OTIS TARDA, Lm,
(PL 179 et 179b.)
Otis tarda. Lin. Syst. nat. I, p. 264 (1766).
Otis major, Brm. Isis, 1830, p. 986.
Otis barbata, C. F. Dub. PL col. Ois. Belg. II, p. 157 (1857).
Otis Dybowskii, Tacz. Journ. f. Orn. 1874, p. 331.
Der Gross-Trappe, en allemand.
The Great Bustard, en anglais.
De Groote Trap, en flamand.
Taille : mâles 1™,06 ; ailes 0"\64 ; tarses 0™,16 ; femelle : 0"\77 ;
ailes 0'", 47 ; tarses 0'",11.
Description du mâle adulte en juin. — Tête d'un gris cendré ; cou
blanc, lavé de roussâtre vers le bas en arrière et en avant, et offrant à
la partie supérieure et de chaque côté, un grand espace triangulaire nu de
couleur violacée et garni de quelques plumes usées ; une touffe de longues
plumes blanches à barbes effilées et déliées, part de chaque côté du menton en
formant une espèce de barbe divisée à son milieu ; une large écharpe d'un
roux vif couvre le bas du cou et le haut de la poitrine, avec des taches noires
en croissants en arriére et sur les côtés; dos, croupion et petites couvertures
des ailes d'un roux jaunâtre avec des bandes plus ou moins larges d'un noir
profond ; grandes couvertures des ailes d'un gris pâle ; rémiges brunes, les
primaires plus pâles et leurs baguettes blanchâtres ; parties inférieures
blanches ; queue rousse, blanchâtre à la basse et à son extrémité, avec une
barre sub-terminale noire. Bec brun de corne; iris jaune orangé; pattes grises.
Mâle en hiver. — Pas de nudité sur les côtés du cou et pas d'écharpe
rousse. Tête, cou et poitrine d'un gris bleuâtre uniforme ; barbe moins déve-
loppée ; le reste comme en été.
Femelle. — D'une taille beaucoup plus petite mais avec la même colora-
tion que le mâle en hiver ; une barbe peu développée n'existe que chez les
vieilles femelles.
— 8d —
Poussin. — Duvet court , d'un cendré roussâtre taché de noir, sauf sur
les parties inférieures qui sont unicolores.
Hab. — L'Outarde barbue est répandue dans une grande partie de
l'Europe et de l'Asie, mais sa
véritable patrie comprend la
Russie méridionale, la Moldavie,
la Valachie, la Dobrodja, les
plaines de la Hongrie et de la
Gallicie, les steppes qui s'éten-
dent entre la mer Noire et la
mer Caspienne, enfin toute la
Sibérie tempérée. En Finlande
elle se montre jusque sous le 60" 1. N. [Malmgren), et il en est proba-
blement de même en Russie et en Sibérie ; elle est commune dans le
centre de la Russie (Goebel, etc.) et surtout dans le midi de la Crimée
{de Nordmann) . On la voit très accidentellement dans le sud de la
Suède (Nilsson) et en Danemark {Kjcierbôlling), et elle est rare en
Pologne {Taczanoioski) ; en Autriche elle est plus ou moins répan-
due dans certaines localités, soit à l'état sédentaire, soit comme
oiseau de passage {Lurtig, Nahlik) ; il en est de même en Allemagne
où on l'observe particulièrement en Saxe, dans l'Anhalt, dans le
Brandebourg, la Silésie, le Brunswick, dans les plaines de la Thu-
ringe et dans certaines parties de la Bavière [Naumann, Brehm,
Uhde, etc. )Lors des hivers rigoureux,elle se montre par petites troupes
en Hollande {Schlégel), en Belgique, dans le grand-duché de Luxem-
bourg {de La Fontaine) et dans certaines parties de la Suisse
{Schneider). En France cet oiseau est sédentaire dans les environs de
Châlons-sur-Marnoet dans quelques localités de la Champagne ; il est
de passage irrégulier dans le nord de la France {Degland et Gey^bé) ;
il est commun dans certaines parties de l'Espagne {Saunders, Reyes)
et assez répandu en Portugal surtout dans les parties situées au sud
d'Alemtejo [du Bocage, Sniith) ; il est de passage irrégulier dans les
plaines de l'Italie, ainsi qu'en Sicile et à l'He de Malte {Salvadori,
Giglioli). L'Outarde barbue est sédentaire dans les plaines de la Grèce,
surtoutcnBéotie, mais elle devient de plus en plus rare {Bc Heldreich) ;
elle esl commune dans les plaines du Danube {Finsch) et dans cer-
taines parties de la Turquie surtout dans le Dobrodja {Allêon) et la
Valachie {Elwes et Bucklci/) . Autrefois cet oiseau était fort comnuin on
- 86 -
Angleterre et en Ecosse et on. le voyait même en Irlande ; aujourd'hui
on ne le rencontre plus que dans quelques comtés de l'Angleterre et
encore y devient-il de plus en plus rare {Stevenson, Harting).
En Asie cet oiseau est plus ou moins commun en Asie-Mineure
Krûper, Tristram), en Arménie {St-John), au Caucase {Radde), en
Turkestan {Severtzoïo), dans toute la Sibérie tempérée {Dibowski,
Taczanowski), sur les hauts plateaux de la Mongolie et il vient régu-
lièrement passer l'hiver dans les plaines du nord et du centre de la
Chine {David) et on le voit même au Japon {Seebohm). Au sud il s'est
montré accidentellement jusque dans le nord-ouest de l'Inde {Hume).
Cette espèce se montre parfois aussi dans le nord-ouest de l'Afrique :
elle a été observée au Maroc {Drake) et en Algérie {Loche).
Mœurs. — L'Outarde barbue est un oiseau errant, qui se meut
sans cesse dans une zone de plusieurs lieues; ce n'est qu'à l'époque
de la reproduction qu'elle se fixe dans une localité pour y nicher. Aux
premières neiges, les individus qui habitent la zone la plus septen-
trionale de leur habitat commencent à émigrer, et c'est alors qu'un
certain nombre de ces oiseaux se dispersent dans les contrées euro-
péennes où on n'en voit pas en été. « Quand l'hiver est très doux, dit
de Nordman, une partie au moins de ces oiseaux restent dans les pro-
vinces septentrionales de la Nouvelle-Russie ; dans le cas contraire,
ils se rassemblent dans la Crimée, et lorsque la couche de neige se
trouve, là aussi, être trop épaisse, ils passent la mer Noire et gagnent
les vastes plaines de l'Asie Mineure. C'est toujours en bandes qu'ils
opèrent ces voyages; ils ne volent ni très haut ni très serrés, ce qui
pourrait faire croire quelquefois qu'ils sont divisés en plusieurs détache-
ments, suivis habituellement d'un certain nombre de traînards volant
les uns à la suite des autres. Dans la première moitié de mars, quel-
quefois même avant, ils reviennent, volant alors la plupart du temps
deux à deux. Malgré ce que nous venons de dire, les Outardes ne
peuvent pas être considérées comme de vrais oiseaux voyageurs, car
ces migrations se font avec trop peu de constance et elles sont en
outre sujettes à des anomalies toutes particulières. Ainsi, certaine
année àv la mi-dëcembre, par un froid de 18^ R., les steppes
étant couvertes d'une couche profonde de neige, je vis de grandes
troupes de ces oiseaux se diriger du Nord vers le Midi ; au mois
de janvier suivant, sans que la température eût éprouvé un chan-
gement notable, j'observai de semblables troupes prenant la direction
opposée. Souvent contraints à changer de séjour par le manque des
— 87 -
provisions nécessaires à leur entretien, aimant en outre à se déplacer,
ces oiseaux font de grandes tournées et se transportent même d'une
côte de la mer Noire à l'autre. »
Cette Outarde fréquente les plaines cultivées et les steppes ; elle
évite toujours les endroits boisés ou garnis de buissons, et quand elle
rencontre un bois sur sa route, elle s'élève aussitôt pour traverser
l'espace par dessus les arbres. Elle fuit aussi avec soin les lieux
humides ou habités. Ce qu'il lui faut, ce sont de grandes plaines
découvertes où elle puisse apercevoir de loin l'arrivée d'un ennemi.
En hiver elle recherche les champs en état de la nourrir, ceux, par
exemple, qui sont semés de blé d'hiver. « Dès les premières lueurs
de l'aurore, dit Naumann, les Outardes s'éveillent : elles se lèvent,
s'étendent, battent des ailes, marchent lentement de côté et d'autre,
puis elles s'envolent simultanément, les plus vieilles et les plus
lourdes formant l'arrière -garde, et elles gagnent leur lieu de pâture,
qui est toujours éloigné de celui où elles passent la nuit. » Selon
Brehm, la démarche de cet oiseau est lente et mesurée, ce qui lui
donne un certain air majestueux ; cependant, quand il y a nécessité,
il court avec une telle vitesse qu'un chien a de la peine à l'atteindre.
Avant de s'envoler, l'Outarde fait deux ou trois bonds, comme pour
prendre son élan ; elle s'élève sans trop de peine et vole au moyen de
coups d'ailes qui se succèdent lentement ; quand elle a atteint une
certaine hauteur, elle glisse dans l'air avec rapidité, en tenant le cou
étendu en avant, les pattes en arrière.
Ces oiseaux sont fort craintifs et d'une prudence extrême, aussi
sont-ils constamment aux aguets pour voir si quelqu'un s'approche, et
tout ce qui leur paraît suspect les met en fuite. Il est donc fort difficile
de les approcher à portée de fusil, surtout qu'ils vivent toujours en
troupes. Leur vie est ainsi rarement en danger, ce qui leur permet
d'atteindre un bel âge ; certains auteurs pensent qu'une Outarde bar-
bue peut dépasser l'âge de cinquante ans.
C'est une espèce très sociable, vivant toujours par troupes de six à
dix individus, quand les besoins de la reproduction ne les obligent pas
de s'isoler ; en hiver, elles se rassemblent même enbandes formées de
plusieurs centaines de sujets. Cette Outarde se fait rarement entendre,
et encore faut-il être très près pour pouvoir distinguer sa voix; celle du
mâle peut se rendre, d'après Naumann, par hou-houhou ressemblant
au roucoulement de nos Pigeons domestiques; la femelle ne paraît
guère se faire entendre et les poussins poussent une sorte de sifliemcnt;
de Nordmann a entendu des jeunes, séparés de leurs parents, pousser
d'une voix forte des accents lamentables qu'il serait difficile de rendre
par des syllabes.
Les Outardes barbues se nourrissent de bourgeons, de jeunes
feuilles et autres substances végétales, de graines diverses, de larves,
d'insectes, surtout de hannetons, mais ce sont toujours les céréales
qu'elles préfèrent ; la nourriture des poussins se compose uniquement
d'insectes.
Pris très jeunes, ces oiseaux s'apprivoisent assez facilement, mais
il vaut toujours mieux faire couver les œufs d'Outarde par des poules
domestiques; ils vivent alors pendant des années en parfaite intelli-
gence avec les autres habitants des basses-cours.
L'Outarde ne forme guère un gibier estimé, car elle exhale une
odeur désagréable qui se communique à la chair et surtout à la
graisse; cette odeur résiste, paraît-il, à tous les systèmes de cuisson.
Reproduction. — « Dès le mois de février, dit Naumann, les
Outardes cessent de venir visiter régulièrement leurs pâturages habi-
tuels et de vivre réunies. Elles sont plus vives, inquiètes jusqu'à un
certain point ; on dirait qu'elles sont comme contraintes d'errer tout le
jour d'un endroit à l'autre. Les mâles commencent à poursuivre les
femelles et celles-ci se dispersent ; la société se relâche sans se dis-
soudre encore. A ce moment, on voit les Outardes, oublieuses de leur
prudence ordinaire, voler à une faible hauteur au-dessus des arbres,
des villages et même des endroits les plus animés. Le port fier et
majestueux, bouffi comme un Dindon, la queue étalée en éventail, le
mâle s'avance à côté de la femelle, s'envole à une courte distance,
puis revient bientôt la rejoindre. »
« Au commencement, dit Brehm, l'Outarde barbue marche les
ailes légèrement pendantes, la queue obliquement relevée ; mais
bientôt l'amour la transporte complètement. Elle gonfle tout à fait
son cou, qui paraît avoir doublé de volume, renverse la tête en arrière,
étale et laisse pendre les ailes, mais, en même temps, elle en relève
et en retourne toute les plumes en avant et en haut, de manière que
les dernières scapulaires recouvrent le derrière de la tête, pendant que
les plumes de la barbe la recouvrent en avant ; elle relève sa queue
de façon à n'en faire voir que les couvertures inférieures, et incline
vers le sol l'avant du corps. En même temps, elle devient au plus
haut degré courageuse et querelleuse. Un mâle, à ce moment, est
pour un autre mâle un objet de haine ; se rencontrent-ils, ils cher-
- 89 —
chent à s'intimider, et comme ils sont animés des mêmes sentiments,
ils en viennent aux prises. Les deux vaillants champions fondent l'un
sur l'autre, bondissent, se portent des coups de bec et de pattes, se
poursuivent au vol, etc. » Mais les mâles ont bientôt conquis leur
femelle et l'on rencontre alors les deux sexes ensemble. Les obser-
vations de Naumann, Brehm et autres semblent démontrer que l'Ou-
tarde est monogame.
Selon ces auteurs, l'Outarde barbue clioisit très soigneusement
l'emplacement où elle construit son nid. Si les céréales sont assez
hautes, pour qu'une couveuse puisse être complètement cachée, la
femelle creuse dans le sol une légère dépression, la garnit de quelques
chaumes desséchés et y pond deux ou trois œufs ovales, à coquille
épaisse, d'un grain grossier, et d'un vert olivâtre clair ou d'un vert
grisâtre mat et ornés de taches brunes. Ils mesurent environ 75 mil-
lim. sur 54. La femelle ne s'approche du nid qu'avec prudence et en
évitant de se montrer. Un ennemi s'avance-t-il, elle rampe dans les
blés sans être vue ; est-elle surprise , elle s'envole, mais bientôt elle
sabat dans les moissons et se sauve en courant. Si l'on touche à ses
œufs, elle les abandonne ; de même, elle ne revient plus au nid si on
a beaucoup marché aux alentours.
Les jeunes éclosent après trente jours d'incubation. La mère les
sèche, les réchauffe, puis les emmène avec elle ; elle leur témoigne la
plus vive tendresse et emploie tous les moyens pour les protéger et
les défendre. A un mois, ils savent voleter et à six semaines ils volent
assez bien pour accompagner leurs parents dans leurs excursions.
180. — L'Outarde canepetière.
OTIS TETRAX, Lin.
(PI. 180 (?t 180'0.
Otis mixor, Briss. Omith. V, p. 24 (1760).
Otis tetr.vx, Lin. Syst. nat. I, p. 264 (1766).
Tetrax campestris, Leach, Syst. col. Mam. B. Br. Mus. p. 28 (1816).
Otis tetrao, Macg. Man. Br. Birds II, p. 40 (1846).
Der Klein Trappe, en allemand.
The Little Bustard, en anglais.
De Kleine Trai', en flamand.
Taille: 0'",39; ailes 0,255 ; tarses 0,0G6.
Description du mâle adulte en été. — Dessus de la tête et iiu({uo d'un jaune
Tome II. — 1888. 12
— 90 -
ocreux varié de taches noires ; menton blanchâtre ; côtés de la tête et gorge
d'un gris bleuâtre, passant au noir sur le devant du cou, et cette teinte est
suivie d'un coUier blanc descendant très bas sur la partie antérieure du cou;
ce dernier orné de plumes noires, allongées sur les côtés où elles forment une
espèce de collerette que l'oiseau peut relever à volonté ; bas du cou traversé
par une large bande blanche ; dessus du corps du même jaune ocreux que la
tête et marqué d'une multitude de zigzags et de taches d'un brun noirâtre,
mais plus étroites sur les ailes où la teinte claire domine ; bord de l'aile et
grandes couvertures blanches; les premières rémiges brunes, blanches à leur
base, les suivantes blanches, mais brunes à leur extrémité ; sus-caudales
blanches tachées de noir; rectrices médianes comme le dos, les latérales
blanches tachées de noir et portant deux barres de même couleur ; parties
inférieures blanches. Bec brun ; iris d'un jaune brunâtre; pattes d'un cendré
jaunâtre.
Mâle en automne. — Les plumes blanches et noires du cou sont rem-
placées par des plumes plus courtes et d'une teinte grise.
Femelle. — Ressemble au mâle en automne. Dessus de la tête et parties
dorsales comme chez le mâle ; côté de la tête d'un jaune d'ocre strié de brun;
gorge blanche ; cou jaune d'ocre avec une multitude de raies transversales
brunes et piqueté de brun en arrière ; grandes couvertures des ailes blanches
rayées de brun ; parties inférieures blanches avec quelques taches brunes sur
la poitrine et sur les flancs.
Jeune. — Ressemble à la femelle.
Poussin. — Manteau, flancs, cou, haut des ailes et dessus des cuisses pré-
sentent un mélange de roux et de noir, formé par le duvet noir à la base et à la
pointe, roux au centre ; tète rousse, portant au vertex des taches et des traits
noirs, avec deux bandes sourcilièies fauves, qui se réunissent à la nuque ;
menton, ventre, abdomen, extrémité et dessous des ailes blancs. Bec brun
verdâtre avec le marteau blanc; pieds carné-olive; iris brun pâle. (J. Vian).
Hab. — L'Outarde canepetière habite particulièrement l'Espagne
{Saunders) elle FoYtugsl{Smith)
où elle est commune ; elle est
sédentaire dans la province de
Naples, en Sardaigne et en
Sicile, et de passage irrégu-
lier à Malte et dans le reste
de l'Italie [Salvador i, Giglioli) ;
en France elle se reproduit dans
les plaines de Montreuil-Bellay,
de Doué, dans celles de la Champagne, aux environs de Troyes, dans
la Vendée, près do Niort; elle arrive dans ces diverses contrées iso-
- 91 -
léraent ou par petites troupes, vers la fin de mars ou au commen-
cement d'avril, et les quitte à la fin de septembre ; ses apparitions dans
les départements du nord de la France sont irrégulières (Degland et
Gerbe), et il en est de même en Suisse (Girtanner). En Belgique cet
oiseau ne se montre aussi que très irrégulièrement : il a été pris en
dernier lieu, à Corroy-le-Grand en août 1884 et à Schuelen dans le
Limbourg, en septembre 1885 ; cette dernière capture a été signalée
par M. E. Claes et se trouve dans la collection du Dr. Bamps à Has-
selt. Cette Outarde est très rare en Allemagne où on la prend
quelquefois en Bavière {Deubler), près de Hambourg, [Bôckmann),
dans le Mecklenbourg (von Maltzahn), dans la Saxe-Gotha [Haber-
mann) et dans le royaume de Saxe (Marx) ; en Autriche on l'observe
parfois en Dalmatie (Kolombatovié), aux environs de Triest (Moser),
de Kremsier {Zahradnik), de Fogaras (von Czynh), en Bohême (Fritsch)
etc. ; en Pologne on la voit de temps en temps à diverses époques, en
petites troupes ou en exemplaires isolés (Taczanowski) ; plus au Nord
elle a été prise jusque dans le Sud de la Suède (Nil.sson), en Danemark
(Benzon) et dans le gouvernement de Riazan en Russie (Sabanaëff) ;
dans le Sud de ce pays, on la rencontre dans les steppes de la Crimée
et de la région du Tchernozém, dans les steppes ciscaucasiennes, dans
les bassins du Terek et du Kouban (dans les steppes transcauca-
siennes seulement en hiver), dans les parties septentrionales et occi-
dentales de la région Aralo-Caspienne, le Tian-Chan, le Kouldja, la
Songarie russe et les hauts plateaux du Tarbagataï (Bogdanoio). Cette
espèce est aussi commune en Turquie (Alléon), en Roumélie, et se
montre parfois, en automne, dans la Morée (von der Milhle). Enfin,
elle se montre accidentellement en Angleterre, surtout dans les comtés
d'York et de Norfolk, et elle a même été capturée sur la côte occi-
dentale de l'Ecosse et en Irlande (Seebohm), ainsi qu'à l'île Helgoland
(Gactke).
Au delà des frontières européennes, on rencontre encore cette
Outarde dans le Caucase où elle est surtout abondante dans la région
du Mugan (Radde), dans le Turkestan (Severtzow), dans les déserts
de la Tartarie (Sdilégel), en Asie Mineure {lieith Abbott), en Syrie
(de Ileuglin), en Palestine (Tnstram), en Perse (Brehm), jusque dans
l'Inde ; elle n'est pas rare, en hiver,, dans plusieurs localités du ter-
ritoire indien situé à l'Ouest de l'Indus et s'étendani nu Sud jusi^u'à
Dera Ghazée Khau ; elle niche en mai dans les plaines de Belooch
{lluïiie). Elle se montre irrégulièrement en Egypte (^t seulement en
- 92 -
hiver, mais elle est commune et niche aux environs de Tripoli
{de Heuglin), en Algérie (Loche) et au Maroc (Dmké).
Mœurs. — L'Outarde canepetière émigré à la fin d'octobre ou en
novembre des contrées tempérées ; à son retour, en avril, elle vit en
bandes de douze à quinze individus jusqu'au moment de l'accouple-
ment. Elle n'est pas aussi tenue à la plaine que l'espèce précédente ;
en Espagne, dit Brehm, on la trouve surtout dans les vignobles en
plaine ou sur les flancs des montagnes. Par ses mœurs elle ressemble
beaucoup à l'Outarde barbue, mais elle est plus élégante, ses mouve-
ments sont plus vifs, plus agiles et elle est plus rapide à la course ; son
vol est rapide et soutenu.
C'est un oiseau taciturne, timide et craintif, mais à un degré moindre
que l'espèce précédente, et il ne fuit pas aussi loin. Le mâle ne paraît
se faire entendre qu'à l'époque des amours ; son cri est alors assez
retentissant et peut se rendre par tecks, tecks. M. de Nordmann
donne sur les mœurs de cet oiseau en Russie, quelques détails inté-
ressants que je reproduis textuellement ci-dessous:
« Dans leurs mœurs et leurs habitudes, les deux espèces ont beau-
coup de rapport entre elles; tout ce que nous avons dit de l'irrégu-
larité des migrations de l'Outarde barbue s'applique également à la
Canepetière. Cependant, cette dernière est plus sensible au froid, et
ce n'est que dans les hivers très doux qu'on en voit de petites compa-
gnies rester dans les steppes de la Nouvelle-Russie, tandis que la
masse nous quitte dès le mois de novembre. Ces dernières effectuent
leurs migrations en passant par la Crimée, où elles font encore un
petit séjour, si l'état de la température le permet. Ces oiseaux
voyagent aussi pendant la nuit, en longeant la côte ; c'est un fait,
démontré par la circonstance suivante. Sur la côte Sud-ouest de la
Crimée, à l'extrémité d'une langue de terre qui, selon toute proba-
bilité, est le cap Parthénon des anciens, et qui en a même jusqu'à ce
jour conservé le nom, se trouve un phare destiné à éclairer l'entrée du
port de Sébastopol. A l'époque du passage des Outardes canepetières,
aux mois de novembre et de mars, on trouve souvent les vitres du
fanal brisées par des oiseaux de cette espèce que la lumière avait,
attirés
« Une des habitudes naturelles qui distinguent l'Outarde canepe-
tière de la grande espèce, c'est que, poursuivie, elle ne prend pas tout
de suite son vol, mais cherche à se cacher en se tapissant contre
terre ; lorsqu'elle voit Tennemi tout près, elle quitte soudain sa posi-
— Da-
tion, s'élève immédiatement clans l'air et continue avec des batte-
ments d'ailes rapides et en ligne droite, son vol toujours rapproché
de terre. Tout cela se fait bruyamment ; de là le nom de Strépet que
les Russes lui ont donné. Cette espèce partage les dispositions
sociables de la grande Outarde: au printemps et en automne, on en
voit constamment des bandes parcourant les steppes. Au reste, ces
oiseaux font souvent usage de leurs jambes, et ceux dont les ailes ont
été frappées d'une charge de plomb, se sauvent avec une vitesse telle,
qu'un homme ne peut guère espérer de les atteindre ; poussés à bout,
ils tiennent tête à leur ennemi et se défendent en désespérés avec le
bec.
« Dès la seconde semaine de mars, les mâles commencent à revêtir
les belles plumes qui ornent leur cou ; les longues plumes noires de la
nuque sont les premières qui poussent ; ensuite les côtés de la tête
deviennent d'un cendré foncé ; à la fin parait le large collier blanc
qui entoure la poitrine, de façon que vers la mi-avril Toiseau porte la
livrée complète des noces.
« La mue générale a lieu au mois de juillet ; alors ces plumes de
parade se perdent et sont remplacées par des plumes grises. Cette
circonstance explique l'erreur des naturalistes allemands, qui ont pris
pour des femelles tous les individus de cette espèce tués en Allemagne,
où elle ne se montre que rarement. 11 n'y a pas de doute que dans le
nombre de ces oiseaux il s'est aussi trouvé des mâles qui, dépouillés
des ornements qui les distinguent, ont pu être confondus avec les
femelles dont le plumage présente à peu près la même distribution de
couleurs.
« A l'entrée de la saison des amours, au mois d'avril, ces oiseaux se
rassemblent dans quelque endroit de la steppe pour se disputer la
possession des femelles. La bizarrerie des différents gestes et mouve-
ments de ces mâles amoureux offre un spectacle divertissant. Le cou
s'enfle ; parmi les plumes dont cette partie est revêtue, les plus longues
forment, en se retroussant, un collier proéminent; les plumes de la
queue, écartées en éventail, se dressent, tandis que les ailes traînent
,par terre. Parés de la sorte, et la tête tantôt levée, tantôt baissée, ils
avancent en sautant les uns contre les autres et cherchent à se blesser
mutuellement à coups de bec. Après avoir chassé les individus jeunes
et faibles, les vainqueurs glorieux se promènent d'un pas majestueux,
en dessinant des cercles devant les femelles : cette scène est immédia-
tement suivie de l'accouplement. Durant ces combats, l'attention des
— 94 -
combattants et de ceux qui en sont l'objet est tellement absorbée,
qu'ils ne songent guère au danger ; ils laissent approcher le chasseur
dans une voiture, et ne se dispersent même qu'après qu'il ait
été tiré plusieurs coups de fusil. Il est constant que sur ces champs de
bataille, un mâle s'allie à plusieurs femelles ; et à défaut d'autres
preuves, une seule circonstance le démontrerait : c'est que les plus
faibles d'entre les mâles ayant été obligés de quitter la place, il y
reste toujours plus de femelles que de mâles ; mais il faut dire aussi
que plus tard, quand la femelle couve, on trouve toujours près d'elle
un mâle ; il paraît donc que les femelles surnuméraires, après s'être
éloignées du champ de bataille, sont recherchées parles autres mâles
qui restent avec elles pendant le temps de l'incubation. »
La nourriture de cet oiseau se compose d'insectes, de larves de
vers et de petits mollusques, ainsi que de matières végétales. Sa chair
est exquise et vaut presque celle du faisan, aussi le chasse-t-on
partout avec ardeur.
Reproduction. — La Canepetière niche dans les champs de blé^
entre les herbages et, dans les steppes, parmi les hautes herbes. Son
nid n'est autre chose qu'un enfoncement dans la terre, qui contient
trois ou quatre œufs, mais rarement avant le mois de mai. Ceux-ci
sont de forme ovale, à coquille épaisse, d'un bran olive bronzé et
lustré, et parsemés de taches de couleur brunâtre, irrégulières et
comme effacées ; il y en a aussi d'un beau vert bleuâtre avec des taches
et des points d'un brun roussâtre ; ils mesurent environ 55 millim. sur
40. La durée de l'incubation paraît être de vingt à vingt-un jours.
Les poussins poussent continuellement de petits cris d'appel. Ils
sont fort gloutons, se jettent avec avidité sur les sauterelles, les
criquets, les hannetons et généralement sur tous les insectes, qu'ils
avalent entiers, quelle qu'en soit la taille ; ils aiment aussi les vers, les
limaces, les petits escargots et mangent même des petites grenouilles
et des souris. Un jour ou deux suffit pour les rendre familiers. On ne
peut les conserver en captivité qu'à la condition de leur fournir une
nourriture plus animale que végétale. M. J. Ray, selon M. Gerbe,
donnait à ses Outardes captives un mélange de viande crue, de mie
de pain, de feuilles de salade, le tout haché menu ; elles prenaient
assez de gotît à cette espèce de pâtée, mais il fallait d'abord leur en
faire avaler de force quelques boulettes.
9o -
181. — L'Outarde de Macqueen
OTIS MACQUEENI, Gray.
(PI. 181).
Otis houbara (part.) de plusieurs auteurs.
Otis macqueeni, Gray, III. Ind. Zool. Il, pi. 47 (1834).
Houbara macqueeni, Gray, Zit5<5. Br. Mus, pt. III, p. 57 (1844).
EuPODOTis MACQUEENI, Gray, Gen. Birds, III, p. 533 (1845).
Der Macqueen's Trappe, en allemand.
The Macqueen's Bustard, en anglais.
De Aziatiscme Kraagtrap, en flamand.
Taille : 0'",63 ; ailes 0,40 ; tarses 0,09.
Description du mâle adulte. — Dessus de la tête et cou d'un cendré rous-
sâtre pâle piqueté de brun, les plumes du vertex plus ou moins allongées,
et formant une huppe composée de plumes blanches et noires ; gorge blanche;
côtés du cou garnis de plumes décomposées très allongées, les supérieures
noires, les inférieures blanches, mais noires à leurs extrémités ; jabot d'un
beau gris bleuâtre pâle ; parties dorsales d'un cendré clair varié de jaune
d'ocre, vermiculées et tachetées de brun ; couverture des ailes blanchâtres
piquetées de brun ; rémiges primaires brunes, blanches à la base; queue d'un
roux ocreux vermiculée de brun, avec trois bandes de taches grises, la base
des rectrices latérales immaculée ; parties inférieures blanches ; région anale
et les plus grandes sous-caudales barrées de brun. Bec brun; iris brun ;
pattes jaunâtres.
Femelle. — Elle est un peu plus petite que le mâle, sa huppe et sa colle-
rette sont moins développées.
Jeune mâle. — Ressemble à la femelle, mais sa taille est plus forte.
Ilab. — C'est une espèce asiatique qui ne se montre qu'accidentel-
lement en Europe . Sa véritable
patrie est assez restreinte : elle
habite le Turkestan [Severtzoïv],
les régions Aralo -Caspienne, la
Songarie russe, les steppes du
bassin de l'Araxe (Bogdanow),\B.
Perse et l'Afghanistan [Blan-
ford) ; en hiver on la voit dans
la région Nord-ouest de l'Inde,
-lf?'g^^<^^<nlM i.fnqajajog
L_ ... r-r-^-H-^ft' ^. : '^-H-t-H-H' H-H'P'^'i
r^i,-.>,a.iâii».g°m..i.-ï»iôT57EgaT<fe-s^yî^1<^
où elle est surtout abondante dans les vastes plaines du Punjab
{Jerdon), dans le Beloutchistan et le Sud do la Perse. L'oiseau signalé
par M. Radde dans son Omis caucasica, sous le nomd'O. liouhara,
— 96 -
appartient probablement à la même espèce : « Je ne connais cet oiseau,
dit M. Radde, que par ce que m'en ont dit les chasseurs d'Eriwans.
Ceux-ci le tuent quelquefois dans les déserts qui s'étendent à l'Ouest
jusqu'à Sardar-Abad, partout où le sol n'a pas été l'objet de drainages
artificiels. 11 est considéré comme rare. » En Arménie, en Palestine,
et dans le- Nord-est de l'Afrique, cette espèce est remplacée par la
véritable 0. houhara.
Les captures en Europe sont peu nombreuses, et elles ont d'abord
fait croire à l'apparition de l'espèce africaine; les naturalistes les ont,
en effet, signalées sous le nom d'O. houbara, jusqu'à ce que feu mon
père eût démontré que les sujets tirés en Belgique ne provenaient pas
de l'Afrique, mais d'Asie et que c'étaient de vraies 0. macqueeni. Les
remarques qu'il publia à ce sujet, accompagnées d'une bonne figure (1),
ne laissèrent aucun doute sur la provenance de ce bel oiseau, et
l'on reconnut bientôt que tous les individus signalés en Europe sous
le nom d'O. houbara appartiennent réellement à l'espèce décrite
par Gray sous le nom d'O. macqueni.
Voici la liste des captures faites jusqu'ici en Europe : une près de
Breslau en 1800 (A'at^mann), une dans l'Oberlausitz (Tobias), une
près de Doberan, en novembre 1847 (von Preen) ; le 12 novembre
1856, une troupe de six individus fut observée près de Flensburg et
une vieille femelle fat abattue (Mechlenburg) . En décembre 1844,
M. P. J. Van Beneden annonça la première capture en Belgique : un
mâle magnifique venait d'être tué, en décembre de cette année, à
Rotselaer près de Louvain ; deux ans après, le vicomte B. Du Bus
fit connaître la seconde capture : celle-ci, dans la plaine de Woluwe à
une lieue de Bruxelles ; l'oiseau, tué en décembre 1846, fut acquis
pour le Musée royal d'histoire naturelle. M. le baron E. de Sélys-
Longchamps informa en même temps son collègue de TAcadémie,
qu'un troisième spécimen avait été tué, en septembre 1842, aux envi-
rons de Virton et qu'il l'avait vu chez un directeur de la douane de
cette ville. Ces trois oiseaux ont été annoncés sous le nom d'O. houbara
(2). — Deux sujets de la même espèce ont été tués en Italie, non
loin de Rome : l'un à la fm de novembre 1859, l'autre le 16 décembre
suivant, {Giglioli). Le 7 octobre 1847, un individu fut tué en Angleterre
dans le comté de Lmcoln {Yarrell), un autre à l'île d'Ôland (et non
(1) C. F. Dubois, yourn. j. Ornithologie, 1856, p. 301, pi. III. — PI. col. Ois. de la
Belg. t. II, p. et pi. 161.
(2)5«//. de VAcad. roy. de Belg, t. XI, 2^ part. p. 412 (1844) et t. XIII, l^e part. p. 166 (1846) .
— 97 —
Gotland comme le dit Nilsson), le 2 février de la même année; le
19 septembre 1861, un autre encore fut pris en Finlande près de
Helsingfors [Malmgren) ; enfin, pendant l'hiver de 1<SG0, on prit éga-
lement un individu de cette espèce aux environs d'Itza en Pologne,
[Taczanoioski).
Mœurs. — Les moeurs de cette espèce sont encore peu connues.
Voici, en résumé, ce qu'en disent MM. Hume et Marshall {Game
Birds of Inclia) :
L'Outarde de Macqueen se tient de préférence dans les plaines
légèrement accidentées et à moitié désertes, où croissent de petites
touffes de gazon ou d'autres plantes herbacées, de petits acacias et
des touffes odoriférantes d'une herbe citronneuse.
Dans ces endroits, on voit courir l'Outarde au lever et au couche'r
du soleil, tandis qu'elle se tient couchée à l'ombre des buissons pen-
dant les parties chaudes delà journée. Elle se nourrit de baies, de
jeunes pousses d'herbes citronneuses ou autres, de larves, de fourmis, de
sauterelles et de divers coléoptères; elle avale aussi des petits coquilla-
ges et du gravier, mais ne prend jamais des lézards ou autres reptiles.
Cet oiseau préfère courir que voler, et quand la chaleur n'est pas
trop forte, il parcourt avec une vitesse surprenante le labyrinthe des
buissons des lieux qu'il habite ; tant que ces buissons sont bas, il court
en baissant le corps et la tête, mais dès qu'il arrive dans un endroit
où il ne peut être aperçu, il se redresse et porte la tête très haut.
Quand il voit un ennemi, i] s'accroupit aussitôt, et malgré qu'on l'ait
surveillé pendant qu'il regardait dans une autre direction, il
reste invisible et l'on peut passer près de lui sans l'apercevoir.
Il est très fatigant de poursuivre ces Outardes dans leur course
rapide et sous le soleil brûlant de l'Inde, aussi, dans les localités où
elles sont nombreuses, les chassc-t-on au faucon ou à dos de cha-
meau. Ce sont les indigènes pauvres qui se servent du faucon, mais
cette chasse ne présente aucun intérêt, parce que l'Outarde se laisse
immédiatement tomber dans les buissons et échappe ainsi le plus
souvent à l'oiseau de proie.
La chasse au moyen du chameau est plus intéressante : on fait
marcher la bête à travers ces vastes plaines que fréquentent les
Outardes, et, après avoir parcouru quelques kilomètres, on ne tarde
pas à voir du haut siège sur lequel on se trouve, un ou plusieurs de
ces oiseaux à la recherche de leur nourriture. Les chameaux ne leur
causent aucune frayeur, et tout le monde s'en sert ; à leur approche,
Tome II. — 1888.. 13
les Outardes s'écartent simplement pour leur livrer passage, et l'on
est toujours assez près pour pouvoir les tirer. Parfois, cepen-
dant, elles se sauvent en courant et envolant avant que l'on ait
pu les tirer, mais elles ne volent guère longtemps et ne planent jamais
comme la petite Outarde ; une autre fois, elles disparaissent subite-
ment aux yeux du chasseur en s'aplatissant sur le sol ; on s'avance
vers l'endroit où elles ont été aperçues jusqu'à ce que l'approche des
chameaux les oblige à se lever, et alors il est facile de les tirer. Il
arrive aussi que l'une d'elles se cache derrière un buisson, et si on en
fait le tour, l'oiseau fait de même, de manière à être toujours abrité et
séparé du chasseur par le buisson ; mais si le soleil ne jette pas ses
rayons tout à fait verticalement, l'oiseau projette un cône d'ombre qui
permet de l'apercevoir et de le viser.
L'Outarde de Macqueen est un oiseau très silencieux ; Hume dit
ne l'avoir jamais entendu jeter le moindre cri, même quand il avait
été blessé ou pris par un chien.
Reproduction. — Cet oiseau ne paraît pas être polygame, car, à
l'époque de la reproduction, on ne le voit jamais qu'avec une seule
femelle. Rien n'est encore connu sur sa manière de nicher, mais il
est probable qu'il agit comme sa proche alliée, l'Outarde houbara, qui
dépose simplement ses oeufs dans une petite fosse, sans même la
garnir de quelques brins. M. Seebohm possède un œuf de YO. Mac-
queeni, qu'il dit avoir été recueilli dans l'Altaï par les explorateurs de
M. Tancré (1). Cet oeuf est d'un brun fauve ou couleur de schiste,
moucheté et tacheté de brun foncé, et sous ces taches il existe encore
des mouchetures plus pâles tirant sur le gris ; ces taches sont éparpil-
lées sur toute la surface, mais aucune n'est bien prononcée, ni bien
définie. Cet œuf mesure 2 pouces 55 lignes sur 1 pouce 85 lignes
(mesure anglaise).
FAMILLE DES CHARADRIIDÉS
Car. — Tête assez grosse ; bec court, plus ou moins membraneux
à la base, renflé et dur dans le tiers antérieur; yeux plus ou moins
gros ; narines amples, percées de part en part et ordinairement pro-
(1) Le D"" O. Finsch dit avoir observé une femelle de cette espèce courant dans les step-
pes situées au nord du Saissan-Nor et à la limite méridionale de l'Altaï. Le D"" Brehm
assure avoir vu cette Outarde dès le 7 mai près de Sergiopol, et le comte Waldburg la
rencontra dans les steppes de l'Ala-Kul près de la rivière Dschindschili.
- 99 —
longées jusqu'au milieu du bec; ailes allongées, aiguës ou sub-aiguës;
tarses plus ou moins allongés, réticulés.
Eab. — Cette famille a des représentants dans toutes les parties du
monde.
Mœurs. — Quelques-uns de ces oiseaux vivent dans des lieux
arides et incultes, mais la plupart recherchent les côtes de la mer, les
rives sablonneuses des fleuves, des lacs et des rivières, les marais et
les tourbières.
Ils vivent par couples pendant la saison de la reproduction, mais
dans le voisinage les uns des autres. Ils émigrent en troupes, marchent
bien et volent avec facilité et sans fatigue. Ils se nourrissent, suivant
leur taille, de reptiles, de souris, de mollusques, d'insectes et de vers.
Leur chair est généralement estimée.
Ils nichent à terre dans une simple dépression du sol qui est rare-
ment garnie de quelques brins.
SOUS-FAMILLE
DES ŒDICNÉMINÉS. — ŒDICNEMIN.'E.
Car. — Tête forte, supporté par un cou de moyenne longueur ; bec
fendu jusqu'à l'œil ; celui-ci très grand; grandes sous-caudales attei-
gnant ou dépassant les rectrices latérales ; ces dernières beaucoup
plus courtes que les médianes ; tarses réticulés ; doigts antérieurs
réunis à la base par une forte membrane ; pouce nul.
QENRE cm.
(EDICNÈME. — (EDICNEMUS.
Ch.vradhiu.s, Lin, (part.) Sijst. nat. I, p. 255 (1766).
Oris, Lath. (part.), Gen. syn. suppl. I, p. 290 (1787).
Œdicnemus, Tem. Man. d'orn. p. 322 (1815).
Fedoa, Lcach, Cat.M. B. Br. Mus. p. 28 (1816).
Car. — Bec à peu près de la longueur de la tête, robuste, droit, triangu-
laire, la mandibule inférieure anguleuse en dessous; narines ovalaires, allon-
gées, se prolongeant jusqu'au milieu du bec; yeux très grands; ailes
moyennes, aiguës, dépassant le milieu de la queue; celle-ci • cunéiforme,
composée de douze rectrices; tarses longs, robustes, réticulés; doigts anté-
rieurs courts, épais, réunis à leur base par une forte membrane qui s otend,
entre le doigt externe et le médian, jusqu'au delà de la première articulation;
pouce nul; ongles courts, celui du médian assez dilaté.
- 100 -
Hab. — Ce genre est représenté dans les parties chaudes et tempé-
rées des cinq parties du monde.
182. - L'Œdicnème criard.
ŒDICNEMUS SCOLOPAX, Dress. ex Gm.
(PI. 182).
Pluvialis MAJOR, Briss. Orn. V, p. 76 (1760).
Charadrius ŒDICNEMUS, Lin. Syst. nat. I, p. 255 (1766).
Charadrius SCOLOPAX, Gm. Reise Russl. III, p. 87, pi. 16 (1774).
Charadrius illyricus, Piller, It. Poseg. Sclav., p. 26 (1783).
Otis ŒDICNEMUS, Lath. Gen. syn. suppl. I, p. 290 (1787).
Œdicnemus crepitans, Tem. Mcm. d'orn. p. 322 (1815).
Fedoa ŒDICNEMUS, Leacli, Syst. Cat. M. B. Br. Mus., p. 28 (1816).
Œdicnemus griseus, Koch, Syst. Baier. Zool. I, p. 66 (1816).
Œdicnemus europ^us, Vieill. N. dict. XXIII, p. 230 (1818).
Œdicnemus bellonii, Flem. Brit. an. p. 114 (1828).
Œdicnemus desertorum et arenarius, Brm. Isis, 1830, p. 987.
Œdicnemus indicus, Salvad. Atti soc. liai. se. nat. viii, fasc. 4, p. 375 (1865).
Œdicnemus scolopax, Dress. i?. of. Eur. VII, p. 401 (1876).
Œdicnemus crepitans indicus, Seeb., Geogr. distrib. Charadriidœ, p. 77(1887)
Der triel, en allemand.
The stone-curlew, en anglais.
De griel, en flamand .
Taille : 0,34 ; ailes 0,25; tarses 0,075.
Description du mâle et de la femelle adultes. — Parties supérieures
d'un cendré roussâtre avec le centre des plumes brun; iorums, une bande
au-dessus de l'œil, une autre au-dessous de cet organe et gorge d'un blanc
un peu jaunâtre; couvertures des oreilles et une raie en moustaches variées
de cendré et de brun ; petites couvertures des ailes brunes, plus ou moins
bordées de roux; les suivantes d'un cendré blanchâtre avec une grande tache
brune en travers; rémiges brunes, avec une grande tache blanche vers le
milieu des deux premières; scapulaires de la couleur du dos; parties infé-
rieures d'un blanc jaunâtre et striées de brun à la poitrine et sur les flancs;
queue barrée de brun et de blanc, mais terminée de brun, excepté les deux
rectrices médianes qui sont d'un cendré roussâtre et pUis ou moins marbrées
de brunâtre. Iris et base du bec d'un jaune citron, le reste du bec noir; pattes
d'un jaune verdâtre.
Jeune. — D'une taille un peu plus petite; les teintes sont plus pâles, le
cendré domine et les plumes ont une apparence soyeuse.
Poussin. — Duvet assez court, laineux, cendré en dessus, blanchâtre en
dessous; deux bandes brunes partent des yeux et descendent le long de la
— 101 —
nuque et du clos jusqu'à la queue ; quelques traits noirs sur l'occiput; une
bande de même couleur au-dessus des yeux, sur les ailes et sur les flancs.
Hah. — Cet oiseau est plus ou moins commun et sédentaire dans
toutes les contrées qui entourent
la Méditerranée, sauf dans le
nord de l'Italie où il est de pas-
sage régulier. On le rencontre
3 donc en toutes saisons depuis le
Portugal {du Bocage) et l'Espa-
gne (Saunders)' jusqu'en Grèce
(Krûper) et en Turquie [Alléon,
Ehoes et Buckley), j compris la
Sardaigne, la Corse, la Sicile et l'île de Malte {Salvadori, Giglioli).
Pour l'Europe centrale, c'est un oiseau d'été qui émigré en septem-
bre. En France, il est plus abondant dans le midi que dans le nord
{Degland) ; en Belgique, il est de passage irrégulier dans les bruyères
de l'Ardenne au printemps et en septembre, plus rarement dans les
autres parties du pays ; on ne le voit que très accidentellement en
Suisse {Meisner et Schinz); en Allemagne, il est assez abondant dans
la zone méridionale, dans les parties incultes de la Silésie, du Bran-
debourg, du Mecklenbourg, du Lunebourg et de l'Anlialt {Naumann),
ainsi que dans quelques localités de la Poméranie et de la Saxe
{Borggrevé). Il est plusou moins répandu en Autriche-Hongrie, surtout
en Croatie {Jurinac), en Dalmatie {Kolmbatovié), dans le Steiermark
(Hanf), le Tyrol {Lazarinï) et la Bohême {Fritsch); en Pologne il est
commun en été dans certaines régions [Taczanowski) ; en Russie, il
habite, durant la belle saison, la Crimée, le Caucase, la zone des
steppes de la région du Tchernozém, la région Aralo-Caspienne, le
Tian-Chan, le Kouldja et les steppes de la Songarie russe {Bogdanow).
En Danemark, il n'a été pris qu'une couple de fois [KjaerhôUing).
Cet oiseau niche dans les comtés du S.-E. de l'Angleterre, mais
ne se montre qu'accidentellement dans le reste du pays et en Ecosse,
et il n'a été capturé qu'une douzaine de fois en Irlande [Seebohm).
En Asie, l'Œdicnènje est répandu en Turkostan {Severtzow), dans
le S.-O. de la Sibérie où le D"" Finsch l'observa dans les steppes
rocailleuses situées au nord du Saissan-Nor, près de la petite rivière
de Kara-Biruk. La forme indienne {Œ. indiens), qui ne présente
cependant aucun caractère qui la distingue réellement des sujets
— 102 -
européens, est répandue dans l'Inde entière jusqu'au Népaul
{Hodgson) et à Ceylan (Jerdon), en Birmanie et dans le Beloutchistan
{Seebohm). En Asie Mineure {Krupe7-), en Perse, en Palestine {Tris-
tram), en Egypte, en Nubie {Shelleij), en Abyssinie {de Heuglin), et
dans tout le nord de l'Afrique {Drake^ Loche), nous retrouvons la
forme européenne, de même qu'aux îles Canaries et Madère (Godman).
Mœurs. — L'Œdicnème criard ne revient dans l'Europe centrale
que dans les premiers jours d'avril, rarement plus tôt; il émigré en
septembre, mais on en voit encore passer jusqu'en octobre. Il voyage
par troupes de six à dix individus, et toujours pendant la nuit, sur-
tout par un beau clair de lune, et en faisant retentir l'air de ses
cris joyeux.
C'est un oiseau nocturne, qui se tient caché pendant le jour; ce
n'est qu'au crépuscule qu'il se met en activité. Il recherche les plaines
accidentées tout en évitant les régions montagneuses ; il est rare de
le rencontrer aux environs des champs cultivés. Ce qu'il préfère, ce
sont les steppes, les déserts et les endroits arides, où les moutons
trouvent à peine une maigre nourriture; il recherche aussi les endroits
sablonneux garnis de jeunes pins sylvestres, entre lesquels il trouve
toujours un abri assuré. Il aime, cependant, le voisinage d'une eau
claire, où il puisse aller se désaltérer chaque soir, mais cela n'est
pas indispensable.
Il est d'un naturel extrêmement farouche et fuit tout ce qui lui
annonce le voisinage de l'homme; comme il se tient presque toujours
dans des endroits où sa vue peut porter au loin et où il ne peut être
surpris, il parvient presque toujours à échapper à son ennemi, même
avant d'avoir été aperçu. En Afrique, cependant, où les indigènes ne
lui font guère la chasse, on les voit souvent en grand nombre, selon
de Heuglin, sur les plates-formes des maisons, des mosquées, des
fabriques et des casernes où il niche même fréquemment; en Egypte
on le voit aussi parfois dans les jardins, les cimetières ainsi que dans
les bosquets d'acacias. Selon Brehm, la confiance qu'il montre en
Egypte n'existe qu'en apparence; il se tient là sur ses gardes aussi
bien que chez nous, mais il est rare qu'on l'aperçoive, car il a vu
l'homme qui s'approche bien avant que celui-ci ait pu soupçonner sa
présence. Se trouve-t-il dans une plaine, loin de tout fourré où il
puisse se cacher, il se rase et, grâce à la teinte terreuse de son plu-
mage, il disparaît aux regards. Un fourré se trouve-t-il près de là, il
y court sans s'y arrêter, le franchit en toute hâte et gagne les champs
— 103 -
ou les herbages du côté opposé à celui par lequel arrive le chasseur.
Dans le campo comme dans le désert, il commence par se raser; mais
si l'on continue à avancer vers l'endroit où l'oiseau s'est couché,
celui-ci se lève, court pour se mettre hors de portée du fusil, se
retourne de temps à autre, s'arrête, puis recommence à courir, et
gagne enfin une avance suffisante, sans avoir été obligé de recourir
à ses ailes.
Sa marche a quelque chose de raide, de trottinant, mais en cas de
danger il sait courir avec une rapidité étonnante. Son vol est léger,
assez facile, mais rarement soutenu.
L'Œdicnème se comporte comme un hibou : il fuit la lumière du
jour. Mais au coucher du soleil, il reprend toute sa vivacité, court et
vole sans cesse, s'élève en se jouant dans les airs et déploie un talent
de voilier qu'on ne lui accorderait pas à première vue. Son premier
soin est d'aller se désaltérer, et, dans ce but, il franchit souvent plu-
sieurs kilomètres, pour revenir ensuite à l'endroit où il a élu domicile.
Il passe toute la nuit en mouvement, sautillant sur le sol sous les
rayons de la lune, qui lui donnent parfois une forme fantastique qu'il
perd en se glissant dans l'ombre. Sa voix est retentissante et peut se
rendre par kraeliith ou kraeiith; c'est surtout au coucher et au lever
du soleil que l'oiseau fait retentir son cri perçant. Au repos aussi bien
que quand il est en mouvement, il fait encore entendre un léger ditt
ou dick^ qu'il répète plusieurs fois de suite avec rapidité.
La nourriture de cet oiseau se compose uniquement de substances
animales; il se nourrit surtout de vers, de larves, d'insectes de toute
espèce, de mollusques terrestres, de lézards, de petits serpents, de
grenouilles, de campagnols et de souris. Par son régime, cet oiseau
rend donc de véritables services à l'agriculture.
Au printemps, selon Naumann, les Œdicnèmes se livrent souvent
des combats, soit en l'honneur des femelles, soit pour la possession
d'un domaine. Les deux combattants se frappent violemment du bec,
se poursuivent au vol et à la course; le vainqueur revient près de sa
femelle, court autour d'elle, la tête inclinée à terre, les ailes pen-
dantes, la queue relevée et étalée, en criant doucement dick dick dick.
Reproduction. — L'Œdicnème niche vers la fin d'avril, mais no
fait pas de nid, La femelle dépose deux ou trois œufs dans une petite
fosse creusée dans le sable. Les œufs sont d'un jaune terreux ou d'un
jaune olivâtre pâle, marqués de taches cendrées et de taches brunes,
éparpillées sur toute la surface. Ils mesurent environ 53 mil. sur 38.
- 104 -
La durée de l'incubation est de seize cà dix-sept jours; mais le plus
souvent il n'y a que deux œufs qui éclosent. Dès que les petits
viennent au jour, la mère les sèche et les garde sous ses ailes pour les
réchaufier; mais le jour môme de leur naissance ils sont en état de
recevoir une première éducation. Les parents veillent avec soin sur
leur progéniture, et, au moindre danger ils la conduisent en lieu sûr.
L'Œdicnème n'a qu'une couvée par année, mais si elle a été
détruite, la femelle fait une nouvelle ponte. C'est la raison pour
laquelle on trouve parfois encore des œufs en juin et même en juillet.
SOUS-FAMILLE
DES CHARADRIINÉS. — CHARADRIIN/E.
Car. — Bec droit, peu fendu; œil placé assez en arrière, queue
arrondie ou carrée, les rectrices médianes ne dépassant que peu ou
point les latérales; grandes sous-caudales n'atteignant jamais l'extré-
mité de la queue; pieds formés le plus souvent de trois doigts; le pouce
quand il existe, très court et élevé.
GENRE CIV.
PLUVIER. — CHÂRÂDRIUS.
Charadrius, Lin. Syst. mit. I, p 150 (1758).
Pluvialis, Briss. Ornith. V, p. 42 (1760).
Car. — Bec droit, plus court que la tôte, comprimé vers la pointe ;
narines latérales, étroites, linéaires, placées dans un sillon se prolongeant
au-delà du milieu du bec ; ailes aiguës, atteignant l'extrémité de la queue,
première rémige la plus longue ; queue presque carrée, barrée tranversale-
ment; tarses assez élevés, réticulés; trois doigts en avant, pouce nul; plumage
des parties supérieures tacheté.
Had. — Ce genre, dont il n'existe que quelques espèces, est repré-
senté en Europe, en Asie, en Amérique et en Australie.
Le Pluvier doré est la seule espèce qu'on observe en Belgique ; il
émigré en hiver jusque dans le nord de l'Afrique et traverse régu-
lièrement notre pays en automne et au printemps.
- 105 —
188. — Le Pluvier doré.
CHARADRIUS AUREUS, Mûll. ex Briss.
(PL 183.)
Pluvialis aurea, Briss. Orn. V, p. 43, pi, IV, f. 1 (1760).
Charadrius pluvialis, Lin. Syst. nat. I, p. 254 (1766),
Charadrius AUREUS, Mùll. Natur. Syst. svppl. p. 118 (1776).
Charadrius auratus, Suckow, Naturg, cl. Thiere, II, p. 1592 (1801).
Charadrius apricarius (ex Lin. 1758) et altifrons, Brm. /sis, 1830, p. 987.
Pluvialis apricarius, Bonap. Cat. met. Ucc. Eur. p. 57 (1842).
Pluvialis auratus, Lacr. Cat. rais, des Ois. obs. d. l. Pyrénées fr. p. 181 (1873-75),
Der Gold-Regenpfeifer, en allemand.
The Golden Plover, en anglais.
De Goud-Plevier, en flamand.
Taille : 0"\23; ailes 0,19; tarses 0,041.
Description du mâle et de la femelle au printemps. — Front et raies sourci-
lières blancs ; toutes les parties supérieures d'un brun noirâtre et marquées
de taches d'un jaune doré, placées le long des barbes et à l'extrémité des
plumes ; joues, gorge, devant du cou et milieu de la poitrine d'un noir lustré,
bordé de blanc ; côtés de la poitrine et flancs comme le dos, mais les taches
plus grandes ; ailes brunes, les couvertures tachées de jaune doré et de blanc
grisâtre ; couvertures inférieures blanches ; queue brune, rayée transversa-
lement de cendré; sous-caudales blanches, la barbe externe des latérale?
marquée de bandes obliques brunes. Bec et pattes noirs ; iris brun foncé.
Mâle et femelle en hicer. — Parties supérieures comme en été ; gorge et
abdomen blancs ; poitrine et flancs cendrés, maculés de jaune et marqués de
nombreuses taches brunes.
Jeune en partie couvert de plumes. — Poitrine jaunâtre parsemée de grandes
taches terminales noires et triangulaires ; côtés du ventre d'un blanc pur
avec les plumes largement bordées de noir ; dos noir à bordures latérales
d'un jaune doré. Bec d'un brun olive ; pieds gris brun ; iris brun foncé
{W. Meves).
Poussin. — Parties supérieures couvertes d'un duvet formé de petites
houppes construites comme dos plumes, c'est-à-dire composées d'une tige cen-
trale avec ramures laineuses ; le duvet du centre est fin et allongé ; les deux
sortes de duvet sont surmontées par des fils noirs et déliés ; tête, dos et
dessus des cuisses d'un beau jaune doré, entièrement parsemé de taches
noii-cs ; gorge, ventre et dessous de la queue d'un blanc pur ; duvet de la poi-
trine noir â la naissance, blanc à l'extrémité. [A. Marchand.)
To.ME II. — 1888. H
406
Hab, — Le Pluvier doré est, suivant les saisons, plus ou moins
commun dans toute l'Europe,
l'Asie occidentale et le nord de
l'Afrique. En été on le rencontre
depuis le 53° 1. N. jusqu'à la
Nouvelle-Zemble [Bogdanow) et
l'Islande {Faber), et il se montre
même parfois au Groenland {Hol-
hôll). En automne et au prin-
temps, il est de passage régulier
dans toute l'Europe centrale ; il est alors assez commun dans certaines
localités de la Belgique ; quand l'hiver n'est pas trop rude, un cer-
tain nombre d'individus hivernent même dans le nord de la France,
en Belgique et dans certaines parties de l'Allemagne ; il s'éloigne
d'autant plus de nos contrées que l'hiver est plus rigoureux. Son véri-
table quartier d'hiver est le midi de l'Europe où il est alors fort abon-
dant. Il pousse même ses migrations jusque dans le nord de l'Afrique
{Loche, Drake, Salvin), mais il n'est pas de passage régulier en
Egypte, où de Heughn dit ne l'avoir jamais observé au delà du Delta;
cependant, Layard dit l'avoir capturé à Lamo, sur la côte orientale
d'Afrique, Verreaux le signale au Gabon et Hartlaub, au Cap de
Bonne Espérance ; mais ces indications ne paraissent pas avoir été
confirmées.
En Asie, on rencontre cet oiseau dans la Sibérie occidentale jus-
qu'aux fleuves Lena et Taïmyr (Bogdanow), enTurkestan (Severtzow),
au Caucase [Radde), en Perse [Blanford), en Béloutchistan {Seebohm),
en Asie Mineure [Robson), enPdiiesime [Tristram) et en Syrie [de Heu-
glin). Dans l'Asie orientale, il est remplacé par une espèce très voisine:
le Ch. fulvus, dont quelques captures ont même été faites en Europe.
Mœurs. — Cette espèce émigré des contrées du Nord à partir de la fin
de septembre, mais les grands passages n'ont lieu qu'en octobre et se
prolongent souvent jusque vers le milieu de novembre ; ces oiseaux se
laissent parfois surprendre par les premières neiges, avant de songer
à quitter leur séjour d'été. C'est plutôt le manque de nourriture que le
froid qui les oblige à émigrer, aussi n'avancent-ils vers le Sud qu'à
mesure que les aliments leur font défaut. C'est la raison pour laquelle
nous en voyons, quand la saison n'est pas rigoureuse, pendant presque
tout l'hiver. Le second passage commence généralement en mars et
dure jusque dans la seconde quinzaine d'avril.
— 107 -
Les Pluviers dorés voyagent le plus souvent pendant la nuit, volent
très haut et par bandes nombreuses composées parfois de plusieurs
centaines d'individus. Quand ils veulent accélérer leur vol et qu'ils
sont nombreux, ils se disposent en triangle pour fendre l'air avec plus
de facilité. Le jour, ils se reposent et ne s'occupent que de leur nour-
riturCj et, chose singulière, ils s'abattent alors dans les champs et
exceptionnellement dans les marécages et autres lieux inondés. Ils
séjournent parfois dans les champs des semaines entières, ne les quit-
tant que vers le soir pour aller s'abreuver et se baigner. Si, à leur
passage au printemps, ils sont surpris par une reprise de gelée, ils
s'arrêtent de préférence dans les marais et autres endroits couverts
d'eau, où ils trouvent alors plus facilement leur nourriture, mais en
général, ils Aont passer la nuit dans les champs.
« Le Pluvier doré, dit A. Brehm, est un oiseau caractéristique
des tundras, tout comme le Courvite Isabelle et les Gangas le
sont du désert. Quand on parcourt ces marais, qui recouvrent toute
la zone septentrionale, on entend de tous côtés retentir le cri
mélancolique et plaintif de cet oiseau; on le voit par paires, par
familles, par petites troupes et par bandes nombreuses, suivant la
saison ; on le rencontre partout, car une paire habite tout près d'une
autre, et du matin au soir le chasseur peut en avoir constamment
devant lui. Aussi loin que la tundra s'étend vers le Sud, aussi loin
on trouve le Pluvier doré ; c'est un véritable oiseau de marais : il ha-
bite même les endroits inaccessibles à l'homme. A partir de 57° 1. N.,
il devient moins commun, et en Allemagne on ne rencontre plus, en
été, que des individus isolés. »
C'est un oiseau fort gai, vif et agile ; il marche avec élégance et
sait courir rapidement, mais s'arrête de temps en temps sur un
petit monticule, qui lui permet de voir à une certaine distance autour
de lui. En cas de poursuite, il cherche plus souvent son salut
dans une course rapide (pie dans le vol, et ce n'est que quand il y
a nécessité qu'il s'enfuit à tire-d'aile. Son vol est rapide, facile
et gracieux, tantôt haut, tantôt bas, et accompagné de battements
d'ailes accélérés ; il traverse l'espace en ligne droite, mais sait
fort bien se retourner pour prendre une autre direction; parfois
il plane un certain temps sans presque remuer les ailes. Il est
très sociable et chaque individu veille à la sécurité de tous ; il (^st
aussi prudent que larouche, mais distingue parlaitement le passant
inolfensif du chasseur. De ce dernier il ne se laisse jamais approcher
— i08 —
à portée de fusil, aussi faut-il prendre de grandes précautions pour
le tirer.
Sa voix est un sifflement agréable malgré son ton plaintif, et res-
semble à tlui' Les deux sexes crient aussi bien au repos qu'en volant,
mais c'est surtout en prenant leur vol qu'ils se font entendre. Le chant
du mâle au printemps peut se rendre par taludltaludltaludl et ainsi
de suite.
La nourriture de ce Pluvier se compose principalement de larves,
d'insectes, de vers et de petits mollusques avec ou sans coquille ; il
mange aussi des baies, des graines et autres substances végétales,
mais accessoirement ; il avale parfois des grains de silex pour faciliter
sa digestion. L'eau lui est indispensable, tant pour boire que pour se
baigner, car il ne laisse pas passer un jour sans laver et nettoyer son
beau plumage.
On chasse beaucoup ces Pluviers pour leur chair qui est excel-
lente ; on les prend en quantité en imitant leur cri pour les attirer
dans des pièges.
Reproduction. — Le Pluvier doré niche dans les contrées du Nord,
mais on trouve déjà son nid à partir de la Westphalie ; il n'est pas
rare de trouver des œufs de cet oiseau sur le marché de Munster.
Une fois accouplé, le mâle ne quitte plus sa compagne; il vole
autour d'elle en chantant, plane au-dessus du nid et se livre à des
ébats sans fin ; la femelle répond de son mieux à tous ces témoignages
d'amour.
C'est dans un endroit très sec, souvent sur un petit monticule en-
touré de bruyères, que la femelle creuse la fossette qui doit contenir
ses oeufs; cette cavité est fréquemment garnie de quelques brins et de
radicelles. La ponte se compose de quatre œufs et ce nombre n'est
jamais dépassé, mais il est rare qu'il n'y ait que trois œufs. Ceux-ci
sont gros relativement à la taille de l'oiseau ; leur couleur est d'un vert
olivâtre ou rougeâtre avec de grandes taches d'un brun noirâtre et
d'un brun rouge, qui sont toujours plus nombreuses vers le gros bout.
Ils mesurent environ 52 millim. sur 36.
La durée de l'incubation est de seize à dix-sept jours, mais la fe-
melle l'interrompt souvent pendant la journée. Les jeunes quittent
leur nid peu après leur naissance, et accompagnent aussitôt leurs
parents, qui leur témoignent beaucoup d'attachement.
— 109 —
OENRE CV
GUIGNARD. — EUDROMIAS.
Charadrius, Lin. (part.) »S'y.v/. }iat. I, p. 254 (1766).
EuDROMiAS, Breli. Isis, 1830, p. 987.
MoRiNELLUs, Bonap. Co.t. Farz. p. 14 (i8o6)
Car-. — Les oiseaux de ce genre diffèrent peu des précédents : leur bec
est plus grêle et relativement moins renflé à l'extrémité; ailes allongées;
tarses assez élevés; doigts courts; pouce nul.
Eal). — On rencontre des représentants de ce genre en Europe, en
Asie, en Afrique et en Australie.
184. — Le Pluvier guignard.
EUDROMIAS MORINELLUS, Brm. ex Lin.
(PL 185).
Charadrius morinellus, Lin. Syst. nat. I, p. 254 (1766).
Charadrius sibiricus, Lepech. Itin. pi. 6 (1771-80).
Charadrius tartaricus, Pall. Reise Russ. Reichs, II, p. 715 (1773)
EuDROMIAS MORINELLA, MONTANA, STOLIDA, Bl'm. Isis, 1830, p. 987.
Pluvialis morinellus, Macg. Mcm. Br. B. II, p. 50 (1842j.
Morinellus sibiricus, Bp. Cat. Parz. p. 14 (1856).
Der Mornell-Regenpfeifer, en allemand.
The Dotterel, en anglais.
De Morinelplevier, en flamand.
Taille: 0"\19; ailes, 0,141 ; tarses 0,035.
Description du mâle et de la femelle au printemps. — Dessus de la tête d'un
1)run noir avec les plumes du front bordées de cendré clair; gorge,joues et une
large raie sourcilière d'un blanc pur ; dessus du corps, région des oreilles
et ailes d'un cendré brunâtre tirant un peu sur l'olive ; couvertures des ailes
et scapulaires bordées de roux clair ; rémiges brunes, la baguette de la pre-
mière blanche ; bas du cou et haut de la poitrine cendrés, et cette teinte se
termine par une bande étroite noirâtre, suivie d'un ceinturon blanc ; le restant
de la poitrine et les flancs sont d'un roux assez vif, plus pâle en avant ; abdo-
men noir; sous-caudales et bas-ventre blancs; queue cendrée, plus foncée
veis son extrémité (pii se termine par un large bord blanc, sauf les rectrices
médianes qui sont simplement lisérées de blanc-ruussâtre. Bec noir ; pattes
d'un cendré verdâtre ; iris brun foncé.
Mâk et femelle en hiver. — Dessus de la tête brun taché de roussâtre ; raies
- 110
sourcilières et gorge blanchâtres ; joues cendrées striées de brun ; nuque et
côtés de la poitrine d'un cendré roussâtre varié de brun ; dos et scapulaires
bruns, toutes les plumes bordées de roux vif; couvertures des ailes d'un cen-
dré brunâtre bordées de cendré roussâtre pâle ; poitrine et flancs cendré pâle
varié de roussâtre ; ceinturon blanc à peine marqué et roussâtre ; le reste des
parties inférieures blanchâtres .
Jeune. — Ressemble à l'adulte en hiver, les teintes générales moins pures
et le ceinturon blanc nul.
Poussin. — Dessus et côtés de la tête, dos, dessus des ailes et des cuisses
d'un fauve marbré de roux et moucheté de taches et de traits noirs, irrégu-
liers mais bien accentués et absorbant en partie le fond ; trois traits de cette
couleur partant de la mandibule supérieure, dont l'un divise le front dans toute
sa hauteur, les deux autres couvrent les lorums, bifurquent en avant de l'œil et
décrivent un arc en dessous ; gorge et ventre blancs ; poitrine et abdomen d'un
fauve pâle; bec noir de corne, avec la base et la pointe un peu plus pâlesî
pieds d'un brun roux (/. Vian).
Hab. — Le Pluvier giiignard habite, en été, toute la zone boréale
située entre le 59° et le 79°
depuis la Norwège [Collett) ]m^-
qu'au détroit de Behring [Bog-
danoiv), y compris le Spitzberg
[Malmgren)^ la Nouvelle-Zemble
{de lieuglin), la région alpine de
certaines chaînes de montagnes
de l'Europe centrale comme les
Alpes, les Riesengebirge et les
Siebenburgen [Tschudi, Naumann, de 2'schusï)^ di\i\s\ que la région
alpine d'Alataou, du Tarbagaïaï, du Saïan et d'autres montagnes de la
Sibérie orientale (Bogdanow). Dans le reste de la Scandinavie, de la
Russie, de la Sibérie et dans toute l'Europe centrale, c'est un oiseau
de passage. En Belgique, il est de passage régulier en Flandre, sur
les côtes maritimes à la tin d'août et en septembre ; il est plus rare en
Brabant et ne se montre qu'accidentellement en Ardennes [de Sélys)
et rarement aux environs d'Anvers {Croegaert)-
Cet oiseau hiverne dans les pays méditerranéens et les pays de
l'Asie centrale correspondant à la même latitude ; il passe ainsi l'hiver
en Espagne (Saunders), en Italie [Giglioli), en Grèce [Lindermayey^),
en Turquie [Ehves et Backley), en Asie Mineure [de Heuglin), en
Palestine {Tristram) et en Perse [Blanfmxl)-^ on l'observe aussi en
Algérie [Loche) ^ et probablement dans tout le nord de l'Afrique, ainsi
- 111 -
qu'en Egypte jusque sur les côtes delà mer Rouge {de Heuglin):
Mœurs. — Ce Pluvier est donc un oiseau migrateur qui aban-
donne, en automne, les régions septentrionales et alpines pour passer
l'hiver dans le Midi. Il paraît même plus sensible au froid que le Plu-
vier doré, car il émigré plus tôt et. retourne plus tard dans le Nord que
ce dernier. En Allemagne, dit Naumann, les premiers individus se
montrent déjà vers la mi-août, et ils restent dans ce pays jusqu'après
la mue. En septembre arrive la masse, et les passages continuent jus-
qu'en octobre, mais on n'en voit plus dès les premiers jours de novem-
bre. Au printemps, ils ne repassent pas avant le mois d'avril, et l'on
voit des passages jusque dans le courant de mai. Naumann pense que
ces oiseaux ne prennent pas la même direction au printemps qu'en
automne, car, à la fin de l'été, on en voit de grandes quantités dans cer-
taines parties do l'Allemagne, tandis qu'on n'en voit presque pas au
printemps. Dans le Holstein c'est l'inverse: ils sont rares à l'arrière-
saison et communs au printemps. Les migrations se font par troupes et
principalement pendant le jour et par un beau clair de lune. Ils volent
alors généralement à une grande hauteur, assez serrés les uns contre
les autres, mais sans ordre et en faisant retentir l'air de leurs cris.
C'est un véritable montagnard, qui ne fréquente que les lieux secs et
arides; jamais on ne le voit dans un marais ; il ne va à l'eau que vers
le soir pour se désaltérer, et le moindre filet d'eau lui sufiit. Il passe
sa vie dans les montagnes, où on le rencontre jusque dans la région
alpine ; ce n'est réellement que pendant les migrations qu'il visite les
champs des plaines.
Le Guignard est un charmant oiseau, doux et peu farouche, ce qui
a fait croire qu'il était stupide ; s'il est peu méfiant, c'est qu'il n'a
guère à craindre les poursuites de l'homme dans les montagnes qu'il
habite ; mais quand on le chasse, il devient prudent et montre bientôt
qu'il n'est pas moins intelligent que ses congénères. Son port est
élégant, sa marche légère et rapide, son vol gracieux, rapide et
accompagné de battements d'ailes accélérés, et au besoin il devient
irrégulier par des crochets brusques et gracieux ; quand l'oiseau se
voit poursuivi par un rapace, il sait fendre l'air avec la rapidité d'une
flèche. A l'approche de l'homme, il s encourt d'abord, mais bientôt il
se tapit contre terre et ne s'envole que quand on est près de lui. Il
est très sociable, voyage par troupes composées do dix à cinciuantc
sujets, mais jamais par bandes aussi nombreuses que le Pluvier doré.
Quand plusieurs troupes s'abattent dans le même champ, elles ne se
— 412 —
mêlent que momentanément et se divisen de nouveau en prenant
leur vol. Si ces oiseaux se montrent sociables entre eux, ils ne témoi-
gnent pas la même sympathie aux autres espèces, car on ne les voit
jamais mêlés à d'autres Pluviers.
Son cri d'appel n'est pas aussi sonore que celui du Pluvier doré, et
ressemble à drrr, drru ou durrr; parfois il fait aussi entendre un son
plus doux ressemblant à ditf. Quand une troupe s'envole ou s'abat
dans un champ, on entend toujours les cris de durrr, dut, dut, dut.
Le Guignard se nourrit presque uniquement d'insectes, de larves et
de vers, rarement de substances végétales.
Reproduction. — Cette espèce niche dans le courant de juin, et
dans l'extrême Nord pas avant la fin du mois. Son nid est une dépres-
sion peu profonde creusée dans le sol et garnie de radicelles et de
lichens terrestres. La ponte est de quatre œufs, quelquefois seulement
de trois, de forme ovalaire et à coque lisse et peu brillante; ils sont
d'un vert grisâtre ou brimâtre avec de grandes taches brunes et noires;
ils mesurent environ 41 millim. sur 28. La mère couve avec une telle
ardeur, qu'elle se laisse presque fouler aux pieds avant d'abandonner
ses œufs.
« Lorsque les jeunes sont éclos, dit Brehm, la famille offre un spec-
tacle charmant. Une seule fois j'ai pu prendre sur moi de tuer des
Guignards près de leurs petits, tant je me sentais vaincu par le doux
spectacle que j'avais sous les yeux. La mère qui est accompagnée de
ses poussins s'expose au danger, tandis que le père témoigne son
angoisse par ses cris, son vol saccadé est inquiet. La mère court,
boite, volette, fait la culbute devant son ennemi. Les Lapons qui
m'accompagnaient s'y laissèrent tromper, ils la poursuivirent et ne
virent pas les jeunes qui s'étaient rasés à terre. Ils étaient là tous trois
devant moi, le cou couché à terre, chacun à moitié caché derrière une
pierre, les yeux ouverts, immobiles, n'ayant garde de faire le moindre
mouvement qui aurait pu les trahir ; j'étais tout près d'eux, ils ne bou-
gèrent pas. La mère, continuant son manège, éloignait de plus en
plus mes Lapons; mais tout à coup, elle s'envola et, avec la vitesse
de la flèche, revint là où ses petits étaient cachés. A ma vue, elle
poussa un cri; les jeunes ne lui répondant pas, elle recommença le
jeu auquel les Lapons s'étaient laissés tromper. Je m'emparai des
jeunes, qui se laissèrent prendre sans résistance, et les montrai à la
mère. Aussitôt, renonçant à sa ruse, celle-ci vint vers moi, et
m'approcha de si près que j'aurais pu Ja saisir avec la main : ses
— 113 -
plumes étaient hérissées, ses ailes tremblaient, elle cherchait par
tous les moyens à exciter ma compassion. Les jeunes glissèrent
entre mes doigts, la mère poussa un cri indescriptible, et ils étaient
de nouveau près d'elle. Pleine de joie de les avoir retrouvés, la
mère s'arrêta devant moi, cacha ses petits sous ses ailes et demeura
immobile à la même place. » Brehm fut généreux : il laissa la vie
à cette bonne petite mère ainsi qu'à ses petits, ce que bien peu
de chasse ui-s auraient fait à sa place.
GENRE CVI.
GRAVELOT. — ^aiÀLITIS.
Charadrils, Lin. Syst.nat. I, p. 253 (1700).
^GiALiTis, Boie, Isis, 1822, p. 558.
HiATicuLA, Gray, Lisfofr/en.B. p. 65 (1840.)
OCHTHODROMUS, Reichenb., Nat. Sijst. p. 18(1851).
CiRREPiDESMUs, Ronap. Corn pt. -rend. XLIII, p. 417(1850).
^GiALOPMiLU.s GouM, Hn>,(L Ti. Anstr. II, p. 234 (1865).
Car. — Bec plus coui-t que la tête, droit, brusquement renflé vers la
pointe, la mandibule inférieure d'abord droite puis légèrement retroussée
vers la pointe ; narines basales, latérales, linéaires, placées dans un large
sillon qui se prolonge jusqu'au mihcu du bec ; ailes aiguës, atteignant ou
dépassant l'extrémité de la queue ; celle-ci de longueur moyenne, arrondie ;
tarses médiocres, grêles, réticulés ; doigts de longueur moyenne, l'externe
réuni au médian par une petite membrane ; pouce nul.
Hr/h. — Ce genre est cosmopolite.
185. — Le Gravelot ou Pluvier à collier.
/EGIALITIS TORQUATUS (z?rm.)
(PI. 186)
Pi.uviALis TORQUATA, Briss. Ov/nlll. V, p. 60(1760).
Charadrius HiATiruLA, Lin. Syst. nat. I, p. 253 (1760).
CiiAUADRius TORQCATUS, Lcacli, Ccit. M. B. Bi\ Mus,, p. 28 (1810).
/Egialitis hiaticula, Roie, Isis. 1822, p. 558.
yEaiALiTis SEPTENTRioNALis, Brm. Isis, 18.30, p. 987.
HiATicLLA ANNULATA, Gf. IJst off/cn. B., p. 65 (1840).
IIlATICCLA TORQUATA, Gr. IJst of Sp. B. III, p. 08(1844).
Ili.vTKULA HiATicuLA ct ARAHS, Licht. Nomencl. av., p. 94 (1854).
yEfJiALiTEs AiiRiTUS, Heugl. Syst. Ufbrrs. p. 50(1850).
.-Egialites iNTERMEDius, Gurn. (ncc Mèiiétr.)//>''à-, 1868, p. 255.
Charadrius hiaticula major, Seeb. Brit. />'. III. p. 20 (1887).
TuMi; II. — 1888. 15
— 114 —
Der Sand-Regenpfeifer, en allemand.
The Ringed plover, en anglais,
De Bontbek Plevier, en flamand.
Var. Interraedia.
Charadrius intermedius, Ménétr. Cat. n«'s. p. 53 (1832).
Taille : 0,16 ; ailes 0,123; tarses 0,025.
Description du mâle et de la femelle au printemps. — Dessus de la
tête, nuque et dessus du corps d'un cendré brunâtre ; partie antérieure du
vertex blanche ; front, une bande au milieu du vertex entre les yeux, joues
et un large plastron, noirs; gorge, raie sourcilière derrière l'œil, côtés du cou,
un étroit collier en arrière du cou et parties inférieures d'un blanc pur ; col-
lier blanc bordé de noir postérieurement ; grandes couvertures des ailes ter-
minées de blanc ; rémiges d'un brun noir, la tige des primaires blanche vers
le bout, une tache oblongue blanche sur les rémiges secondaires ; queue cen-
drée, avec une bande subterminale brune et terminée de blanc, sauf les rec-
trices médianes qui n'ont pas de blanc à leur extrémité ; rectrice la plus
externe blanche, la suivante blanche avec une tache brune sur la barbe
interne ; sous-caudales blanches. Bec d'un jaune orange avec la pointe noire;
iris et bord libre des paupières noirâtres; pattes d'un jaune orange.
La femelle est un peu plus petite et la bande frontale noire est plus étroite.
En hiver. — Les plumes noires sont légèrement bordées de cendré.
Jeune. — Toutes les parties qui sont noires chez l'adulte sont ici du
même cendré brunâtre que le dos, passant au brun en arrière du collier
blanc et sur les côtés de la poitrine ; milieu de la poitrine varié de blanc ;
collier blanc plus large que chez l'adulte. Bec noir à base jaune ; pattes
jaunes.
Poussin. — Duvet pas très long, soyeux, filiforme aux parties inférieures
et sur le dessus du cou, plus court, plus barbelé et comme tronqué aux par-
ties supérieures ; côtés du cou nus ; dos, dessus de la tête et des ailes mou-
chetés de noir sur fond cendré ; à la nuque une demi-couronne noire, dont les
extrémités bifurquent en deux traits : l'un prolongé jusqu'aux yeux et l'autre
sur les joues ; front, demi-colHer sur le cou et parties inférieures d'un blanc
pur. (/. Vian.)
Var. întermedia. — Elle tient le milieu, pour la taille, entre Y^. tor-
quutus et V/E. duhius. Se distingue du vrai torqualus par son bec noir, ayant
seulement la base de la mandibule inférieure d'un jaune orange, et par ses
pattes couleur cendrée.
- 115 —
Hab. — Cet oiseau est plus ou moins répandu dans toute l'Europe
P^ jusqu'au 80^45' 1. N. {Malm-
^j;j<7rm, Torell), y compris donc
_ l'Islande {Faber), le Spitzberg
Lfl'Mg (7^055), la Nouvelle-Zemble {de
iptl '.,/;' ^[^^i^Mf^^^txi^-^'\Heuglin) eimêmQ le Groenland
3Pîte3^^&^t^^^^ (7Zo/&^^0- Pour la majeure par-
feâj^^^S^ •- 'li^^-iiî^^Ê^^-- ^^^ ^6 l'Europe centrale, c'est un
i^jîUlLfH-^^i—'jiliHiJ-^-^^^^^*^^^^^ de passage, qui ne fait
^,#iW;ra^gg7oxé^ig^g^îrr^ir»^ que passer pour aller hiverner
dans le Midi; quelques couples, cependant, nichent sur les côtes de
l'Allemagne, de la Hollande et de Borkum (Di-oste), de Dunkerque et
de Calais {Gerbe), de la Sardaigne {Cara), de la Sicile {Malherbe), de
Valence {Reycs), de Tîle de Malte {Wright) et probablement encore
ailleurs. En Belgique il est commun à l'époque des passages sur les
côtes maritimes et sur les bords de l'Escaut, surtout en aval d'Anvers,
mais il est rare à l'intérieur du pays ; peut-être niche-t-il sur nos côtes.
Pendant l'hiver, on observe communément ce Pluvier dans toute
l'Europe méridionale, depuis le Portugal {du Bocage) jusqu'en Grèce
{Lindermayer), ainsi qu'en Asie Mineure {Robson), en Palestine {Trh-
traw), sur les côtes de la mer Rouge {Ruppell) et de l'Arabie {Lich-
tenstein), dans tout le nord de l'Afrique {Loche, Drake, etc.), sur les
côtes orientales de l'Afrique depuis l'Egypte {de Heuglin) et Zanzibar
{Kirk) jusqu'au cap de Bonne-Espérance {Layard), ainsi qu'aux îles
Baléares {von Honieyer).
En Asie, cet oiseau habite le noid de la Sibérie {Middendorf);
dans ses migrations ou en liiver on l'observe dans le sud de ce pays,
en Turkestan {Severtzoïo), en Perse {Gh-ay) et au Caucase {Radde).
Il s'égare parfois jusque dans Textrôme Orient, car Dybowski en a
envoyé des exemplaires de la Daourie et de Kultuk, l'abbé David dit
en avoir tué pendant l'hiver à Pékin, en Chine, et Gould a même
signalé une capture au port Stevens en Australie.
M. H. Seebohm fait une race à part, sous le nom' Charadrius hiati-
cula major, des individus qui sont sédentaires aux îles Britanniques,
mais il est à remarquer que cette espèce est de taille assez variable.
La Vai'. Intermedia paraît résider particulièrement sur les côtes de
la mer Caspienne ; les individus du sud de l'Afrique, qu'on a cru
appartenir à cette race, ne dilïércnt du type que par une taiHe un
peu plus petite.
- 116 —
Mœurs. — Le Pluvier à collier émigré des contrées du Nord dès
la fin du mois d'août, et c'est à partir de cette époque qu'on commence
à le voir un peu partout dans l'Europe centrale ; ce n'est cependant
qu'en septembre et en octobre qu'il devient abondant, mais pour
disparaître de nouveau à la fin de ce dernier mois. Il passe l'hiver
dans les contrées du Midi et repasse en avril. Les premiers que
nous voyons, nous arrivent par familles, mais la masse voyage par
petites troupes, presque toujours pendant la nuit et en volant à une
grande hauteur. Au printemps, ils ne séjournent presque pas dans
nos contrées, ils semblent avoir hâte de regagner les lieux de la
reproduction .
Cet oiseau vit sur les rives sablonneuses des lacs et des fleuves, et
surtout sur les côtes maritimes 'et dans les dunes; ce n'est que pen-
dant ses voyages qu'il se montre dans des localités moins arides. Son
vol est rapide et gracieux ; il marche et court avec autant d'aisance
que de rapidité ; il lui arrive souvent de patauger dans l'eau, et quand
il se sent enfoncer, il sait fort bien regagner la rive à la nage.
Pendant ses migrations ils se montre prudent et méfiant ; il n'est
pas aussi sociable que bien d'autres oiseaux de son genre, mais il
n'aime pas la solitude ; il désire être en petite société et vit en bons
rapports avec ses semblables. Dans ses migrations, il se joint parfois
à d'autres petits échassiers, surtout quand il se trouve isolé, mais il
quitte aussi avec la plus grande facilité ses compagnons de voyage.
Dans les endroits où, en été, plusieurs couples ont élu domicile, il
n'est pas rare de voir les mâles se livrer de petits combats, en se
comportant comme de vrais petits coqs; mais ces luttes n'ont jamais
des suites graves et paraissent plutôt être des jeux.
Son naturel est gai et remuant, et sa bonne humeur augmente à
mesure que le soleil descend sous l'horizon. C'est alors le moment où
il vole de tous côtés à la recherche de sa nourriture, tout en poursui-
vant à grands cris et en taquinant ses semblables; ces joyeux ébats
se prolongent parfois jusqu'à l'aurore, car ce n'est réellement que
pendant les nuits sombres qu'il se tient tranquille. Durant le jour, au
contraire, il aime la tranquillité, le repos, surtout pendant les heures
les plus chaudes, et il est rare alors qu'il se fasse entendre.
Il n'en est pas de même près du nid : là il veille avec soin sur sa chère
couvée, court autour d'elle à la moindre apparence de danger en pous-
sant les cris tul-tul-tral et too-it d'une voix plaintive. Son cri habi-
tuel est trr ou trit, trai, qu'il répète à l'époque des amours avec tant
de rapidité que cela devient presque un chant.
— 117 -
La nourriture de ce charmant oiseau consiste en larves et insectes,
vermisseaux et en une foule d'annélides et mollusques marins.
Rep7^oduction. — Le Pluvier à collier niche dans le sable du rivage
ou à proximité de la mer et de préférence sur les langues de terre qui
s'avancent dans la mer et qui ne sont pas submergées à la marée
haute. Suivant Brehm et Paessler, il nicherait parfois aussi, surtout en
Scandinavie, aux bords des lacs et des cours d'eau do l'intérieur.
Cinq ou six couples nichent en société non loin les uns des autres,
et la ponte a lieu entre la mi-avril et la fin de mai. 1a\ femelle dépose
quatre œufs dans une petite fosse creusée dans le sable, parfois aussi
sur une litière formée de quelques fucus. Les œufs sont d'un jaune
terreux clair un peu roussâtre et ornés de taches et de points cendrés
et bruns; ils mesurent environ 35 millim. sur 24. — Il n'y a qu'une
couvée par année, à moins que celle-ci ne soit détruite; dans ce cas,
la seconde ponte n'est jamais que de trois œufs.
La durée de l'incubation est de quinze à dix-sept jours suivant la
température, car la femelle laisse chantier ses œufs par le soleil pen-
dant une partie de la journée ; il en résulte que l'éclosion se fait plus
rapidement quand le temps est sec et chaud. Les poussins abandon-
nent leur nid dès qu'ils se sont bien séchés et accompagnent aussitôt
leurs parents aux environs. Au moindre danger, ils s'aplatissent dans
le sable où ils restent dans une immobilité parfaite ; il est alors fort
difficile de les apercevoir; les parents veillent d'ailleurs sur leurs
petits avec la plus grande sollicitude.
186. — Le Petit Pluvier à collier.
.EGIALITIS DUBIUS, ^winh. ex Scop.
(PI. 187.)
Charadrius DUBIUS, Scop. Del. Flor. et Faioi. In^uhr. p. 93 (178G).
?nARADRius cuRO.Nicus, Giuel. Syst. nat. I, p. 002 (1788).
Charadrius philiphinus, Lath. (1) Ind. Orn. II, p. 745 (1790).
Charadrius kluviatilis, Bechst. NiUury. Deutachl IV, p, 422 (1809).
Charadrius minor, Mey. u. Wolf. Deut. Yor/clh. II, p. 324 (1810).
Chauaiirius mini tus, Pall. Zoofjr. lio^so-As. II. p. 144 (1811).
(1) C'est par erreur que quelques auteurs attribuent cette dénominalion à Scopoli, car cet auteur
ne parle de cette espèce que dans l'ouvrage mcutiouné ci-desbus, et seulement sous le nom de
f 'h . diibius .
— IIS -
Charadrius pusillus, Horsf. Tram. Lin. Soc. XIII, p. 187 (1822).
^GiALiTis MiNOR, Boie, Isis, 1822, p. 558.
J^Igialitis fluviatilis, Brm. Isis, 1830, p. 787.
Charadrius hiaticuloides, Frankl. Proc. Zool. Soc. 1831, p. 125.
Charadrius zonatus, Swains. Birds of W. Afr. II, p. 235 pi. 25 (1837).
J5GIALITIS cuRONicus, Keys. u. Bl. Wirbelth. Eur. p. LXXl (1840).
HiATicuLA PHiLippiNA et PusiLLA, Blyth, Cat. Mus. As. Soc. p. 360, (1840).
HiATicuLA cuROMCA, Liclit. Nomencl. av. p. 94 (1854).
Charadrius GRACiLis et pygm^us, Brm. Naumannia, 1855, pp. 288-89.
JÎGiALiTis PYGMxEA et GRACILIS, Brm. Vogelf. p. 282 (1855).
^GiALiTES ZONATUS, Hart. Ovu. w. Afr. p. 216(1857).
^GIALITES PUSILLUS, Swiiih. lUs, 1860, p 63.
vEgialites philippinus, Swinh. Ibis, 1861, p. 342.
JÎGiALiTis MiNUTUS, Jcrd. B. ofLidii II, p. 641 (1863).
Pluvialis FLUVIATILIS, Droste, Vogelw. Bork. n. 153 (1860).
^GiALiTES DUBius, Swiiih. Proc. Zool. Soc. 1871, p. 404.
-^GiAi.iTis MiCRORHYNCHUS, Ridgw. Am. ncit. VIII, 109(1874).
JEgialitis jerdoni, Legge, Pr. Zool. Soc. 1880, p. 39.
Charadrius MINOR JERDONi, Seeb. Charadriidce p . 132(1887).
Der Fluss-Regenpfeifer, en allemand.
The Little ringed Ployer, en anglais.
De Kleine Plevier, en flamand.
Taille: O'^IS ; ailes 0,113.
Description du mdle et de la femelle adultes. — Même coloration que le pré-
cédent, dont il diffère surtout par une taille plus petite. — Parties posté-
rieures de la tête, dessus du corps et couvertures des ailes d'un cendré uni-
forme; bandeau frontal blanc; une bande étroite noire contourne la base de la
mandibule supérieure et se prolonge, en s'élargissant, à travers les lores et
la région oculaire pour couvrir la région des oreilles ; une autre large bande
noire, bordée de blanchâtre en arrière^ couvre le devant de la tête entre les
yeux ; gorge et cou blancs, formant un collier complet derrière la nuque ;
un second collier noir couvre le haut de la poitrine et contourne le collier
blanc; grandes couvertures des ailes légèrement terminées de blanc ; rémiges
brunes, la première à baguette blanche ; les deux rectrices externes blanches
avec une tache noirâtre sur le bord interne ; les trois suivantes cendrées à la
base, puis brunes et terminées par un large bord blanc ; enfin, les deux rec-
trices médianes cendrées avec l'extrémité noire; parties inférieures et
sous-caudales d'un blanc pur. Iris noirâtre ; bord libre des paupières jau-
nâtre ; bec complètement noir ; pattes jaunâtres.
Chez la femelle, le bandeau frontal est moins large et d'un noir moins
profond que chez le mâle.
Jeune. — Ressemble complètement au jeune de l'espèce précédente, avec
la seule différence qu'il est plus petit et que son bec est entièrement noir.
Poussin. — Ressemble également au précédent; tous deux portent sur le
- 119 -
dessus du cou un large collier blanc ; mais ce collier est limité à la nuque
par un bandeau noir dans le torquatus, et encadré entre deux bandeaux noirs
dans le dubius,
Hab. — Le petit Pluvier à collier est plus ou moins répandu, en
ra été, dans toute l'Europe et laSibô-
^ ! :|^ «^- ''^^^^'^:ii^i':\ rie jusque vers le 60M. N. {Bog-
Ij danow), mais il ne se montre que
i.'l-!!:*-^:^ très accidentellement en Angle-
terre et n'a jamais été observé en
Ecosse et en Irlande {Harting).
Il est peu abondant en Belgique:
^.'é'^ù. le baron F. Fallon dit qu'on le
rencontre en Flandre et cà et là
'y^!ï/.4...
sur la Meuse et qu'il niche dans le pays ; il est très rare sur l'Escaut;
suivant M. A. de Lafontaine, il est assez commun sur la Moselle, sur
la Sûre et sur la plupart des grands cours d'eau du Luxembourg. Il
est particulièrement répandu dans les contrées du Midi où il est séden-
taire et abondant on hiver.
Il est également sédentaire dans le nord de l'Afrique {D,-ake,
Loche, etc.), sur la côte orientale depuis l'Egypte jusqu'au Sud de
Mozambique [Peters), et sur la côte occidentale, depuis la Sénégambie
{»S't6Y«"n.soî^) jusqu'au Gabon {Duchailhc) et la Côte d'Or {Pel).
En Asie il est plus ou moius commun dans le sud de la Sibérie
[Radde), dans les provinces de l'Amour {von Schrenk), dans toute la
Chine (David), dans l'Afghanistan, le Népaul, le Decan {Burgess), en
Turkostan [Severtzoïc), en Perse {Filippi), en Palestine (Tristmm).
Pendant ses migrations il se montre dans l'Inde {Jerdon), à Ceylan
{Leggc), à Tenasserim {Hume), aux Philippines {Jagor), au Japon
{Siebold), à Java [KuJil), à Sumatra {Mv.lley), à Bornéo {Diard), à
Célèbes {v. Rosenberg), à la Nouvelle-Guinée {Goldie) et sur d'autres
îles voisines. Il résulte de ce qui précède, que ce Pluvier est répandu
dans toute la zone qui s'étend, dans l'ancien monde, entre le 60'^ L N
et le lOM, S.
Mœurs. — Le petit Pluvier à collier n'habite l'Europe centrale
qu'en été, mais il est sédentaire dans les pays méridionaux; il arrive
dans nos contrées en mars ou avril et émigré en août et septembre.
Ces oiseaux voyagent par bandes assez considérables, qui demeurent
unies tant qu'elles résident à l'étranger. Ils \isiteiit peu les côtes mari-
times, mais vivent presque constamment près des lleuves, des rivières,
- 1i>0 -
des lacs, des étangs, et de préférence près des eaux douces dont les
rives sont sablonneuses et couvertes de gravier; ils recherchent surtout
les bancs de sable qui s'élèvent hors de l'eau. L'eau leur est d'ailleurs
indispensable, car ils boivent souvent et se baignent une ou deux fois
par jour.
De même que le précédent, le petit Pluvier est un oiseau à demi
nocturne ; c'est au crépuscule et à l'aurore qu'il se montre le plus animé
et le plus gai, et par les belles nuits claires il renonce même au repos;
en plein jour, au contraire, surtout pendant les heures les plus chau-
des, il se livre complètement au sommeil. Par ses allures, il ressem-
ble aussi beaucoup au Pluvier à collier ; comme ce dernier, il est vif,
léger et rapide dans ses mouvements ; il court avec une rapidité sur-
prenante, vole avec autant de grâce que de vitesse, ordinairement en
ligne droite et en rasant le sol ou l'eau, mais il s'élève très haut dans
les airs quand il veut franchir une grande distance. Pendant la jour-
née, cet oiseau se montre un peu apathique, presque lourd, car il ne
se décide pas vite à fuir devant le danger; quand on s'approche de
lui pendant son sommeil, il ne s'envole jamais loin, souvent il se
contente de chercher un refuge sur les feuilles des nénuphars ou
sur les amas de potamots flottant sur l'eau à quelque distance du
rivage. Au crépuscule, au contraire, il s'anime, se livre à ses ébats
en faisant retentir l'air de ses crisjoyeux, en un mot, ce n'est plus le
môme oiseau.
Il est très sociable et vit en paix avec les autres petits oiseaux
comme avec ses semblables ; plusieurs couples nichent souvent les
uns non loin des autres, et même parfois dans la compagnie d'autres
espèces ; la bonne harmonie règne toujours dans le voisinage des nids,
bien que les mâles se querellent parfois un peu entre eux, mais ces
querelles paraissent plutôt être des jeux que des combats. Mâle et
femelle sont inséparables et vivent dans un accord parfait.
Son cri habituel diffère beaucoup de celui des autres Pluviers ; il
peut se rendre par diè ou diu très bref ; son cri d'amour est un vérita-
ble chant qui se termine par un trille : duh, du, dull, lull luUullull^
et ainsi de suite.
Cet oiseau se nourrit de larves, d'insectes et de petits mollusques ;
il retourne les pierres pour trouver sa proie et la chasse même dans
l'eau.
Reproduction. — Lé petit Pluvier à collier niche à peu distance de
l'eau, sur un lit de gravier ou de sable, ou dans un endroit où le
— \2l —
gazon est très court. Il ne fait pas de nid, mais creuse une petite fosse
dans le sable pour y déposer ses œufs, Ordinairement, cependant, cette
petite fosse est garnie de gravier à l'intérieur et bordée de petits cailloux.
La ponte a lieu à la fin d'avril ou dans le courant de mai et se compose
généralement de quatre œufs, jamais plus. On trouve cependant par-
fois encore des œufs jusqu'à la fin de juin, car la femelle pond souvent
trois et quatre fois de suite quand sa couvée a été détruite, ce qui
arrive assez souvent, mais elle n'élève jamais plus d'une couvée.
Les œufs ressemblent aussi à ceux de l'espèce précédente, mais ils
sont plus petits, d'un roux jaunâtre plus pâle et tirant souvent sur le
verdâtre; ils sont plus ou moins tachetés de gris, do brun et de noir
et mesurent environ 31 milliui. sur 22.
La durée de l'incubation est de seize à dix-sept jours, à moins que
le temps ne soit très cliaud et sec, ce qui hâte toujours l'éclosion d'un
jour ou deux. Pendant que la femelle couve, le mâle veille sur elle et
l'avertit de l'approche de l'ennemi, afin qu'elle puisse se sauver à
temps. A peine éclos et séchés, les poussins suivent partout leurs
parents, qui ont pour eux la plus grande sollicitude. Au commence-
ment, la mère leur met les aliments dans le bec, mais au bout de quel-
ques jours ils sont en état de prendre eux-mêmes la nourriture que les
parents leur montrent. Au premier cri d'alarme, les poussins s'apla-
tissent entre des cailloux ou des herbes, où ils restent dans une immo-
bilité absolue. A trois semaines, selon Naumann, ils peuvent se passer
de leurs parents, mais ils restent cependant avec eux et les accompa-
gnent dans leur migration d'automne.
187. — Le Pluvier de Kent
^GL\LITIS GANTIANUS, Boie ex Lath,
(PI. 188).
CiiARADRius C.VNTIANUS. Lath. lucl. Ont. suppl. p. 66 (1801).
Chauadriusalbifrons, Wolfet Mey. Vog. Deutschl. I, p. 180(1805).
Charadrius littoralis, Bechst. Nat. Deutschl. IV, p. 430 (1809).
.^GiALiTis CANTiANLis, Boie, Inis, 1822, p. 558.
yEaiALITIS CANT1ANA, ALBIFRONS Ct ALIUGULARIS, Hrin. Isis, lS30, p. 9<S7.
HiATicuLACANTiANA, Hlylli, Cat.B. M'fs. As. Soc p. 203 (1849).
HrATicuLA ELEGANS, Licht. Nomoicl. ac. p. 91 (1838).
iEiiiALiTis RUFiCEPS (et HOMEYERi ?) Brm. Viif/elf. p. 283 (1855).
.^GiALOPHiLU-s CANTiANUS, Gould, 7/«nf/6. D. Auslf. II, p. 234 (1856).
/E'.IALITES DEALB.\TUS, Switlll. P. Z. Soc, 1<S70, p . I 38.
EuuuoMiA.s (ANTiANUs, Bogd. Coisp. (IC. I»ip. liOSlf. p. 75 (I8S4).
Chakadiuu.s CANTIANUS MiNUTUS et DEALUATUrf, Scob. Chara(triiil<i\ p. ]<■.'.». I7i) ilss7t.
TuMic II. — 1888, IG
— 122 —
Der See Regenpfeifeu, en allemand.
The Kentish Ployer, en anglais.
De Strandplevier, eu flamand.
Var. îMivosa
^GiALiTis NivosA, Baird, Gass. etLaw. B. N. Am. p, 696, pi. 90 (U
^GiALiTis CANTiANUS vcir. Nivosus, Coues, Chech-list, N. Am. B. p. 135 (1873).
^GiALiTis ALEXANDRiNA NivosA, Baird, Brew. et Ridgw. Water BirdsN. Am. I.p. 164
(1884).
Charadrius CANTIANUS NIVOSUS, Seeb. C/Mradriidœ, p. 171 (1887).
Taille :0^'ib ; ailes 0,11.
Description du mâle adulte. — Vertex et nuque d'un roux clair ; front,
raie sourcilière, joues, gorge, collier au bas de la nuque et toutes les parties
inférieures d'un blanc pur ; partie antérieure du vertex, lores,une bande der-
rière l'œil et couvrant en partie la région des oreilles, ainsi qu'une grande
tacliesur les côtés de la poitrine, d'un noir plus ou moins profond; dessus du
corps et ailes d'un cendré brunâtre; grandes couvertures des ailles terminées
de blanc ; rémiges d'un brun noirâtre, avec la baguette en partie blanche ;
rectrices latérales blanches, les médianes cendrées, mais terminées de brun.
Iris d'un brun foncé ; bec et pattes noirs.
Femelle. — Vertex et nuque d'un cendré varié de roussâtre ; la bande
noire en arrière du front plus étroite, les autres parties qui sont noires chez
le mâle sont ici d'un brun cendré ; le reste du plumage comme chez le mâle.
Jeune. — Diffère des adultes par l'absence de noir à la tête et sur les côtés
delà poitrine ; dessus de la tête, nuque, lores, région des oreilles et la tache
aux côtés de la poitrine, d'un cendré roussâtre ; couvertures des ailes plus
ou moins bordées de cendré clair ; le reste comme chez les adultes, mais le
blanc du front moins haut.
Poussin. — Ressemble à celui de l'espèce précédente, mais il est dépourvu
de bandeau noir.
Var. Nivosa. — Diffère du type par ses lores blancs et par ses pattes de
couleur claire.
Hab. — Cette espèce est plus ou moins répandue, suivant la saison,
*'"■-,■ ./■"'• -"T. ç,r}^3î^^^ sur les côtes maritimes de pres-
■ i;|^M|j, '' , "" I V ''^=R^:^y'| que toute l'Europe, mais elle est
. : yj-; .. W^Hj ^^^^ ^ l'intérieur des pays ; elle
;jy, .4_4- ^'^ '-^'^"^ ne dépasse cependant pas au
4-^N^'f r '' '^^'''^i:^'--'-'''^ Nord, le midi de la Norwège
Tll'^ir^""'"'''''^^' •• '^'^~^ftfe5^'^''i iCollett]ei delà Siièàe (Nilsso7i).
^^tîWfpW*' -:/fe^-^fiâïte^1 Elle est commune en Belcrique,
TF"Frt-[^-Hi"H jiiHM ^^ printemps et en automne, sur
rc„-i.„..,.,»,o.Ko«sov,^» .Tfwô ^.,'„irMwr'^'^^^^^-^^^^s^^ j^g hords dc la mer où quelques
couples paraissent nicher ; elle remonte souvent l'Escaut et on en tire
même aux environs d'Anvers. Dans le midi de l'Europe, cet oiseau
est également plus ou moins commun et sédentaire sur les côtes, rare
à l'intérieur et peu abondant sur les côtes de l'Adriatique ; il est rare
en Sicile [Doclerlcin)^ mais il est commun et sédentaire aux îles do
Sardaigne et de Corse {Saloadori, Giglioli),en Grèce, en Asie Mineure
[Kruper), en Turquie {Alléon, Robson) et en Palestine {Tristraw.).
A l'Est on rencontre cet oiseau jusque sur les rives des lacs salés de
la Daourie [PaUas) et du Japon {Blakiston ) ; on l'observe aussi sur
les côtes de l'Inde (Jerdon), de Ceylan [Legge]^ de la Chine et de
Formose {Sioinhoe^ David), ainsi que de ITndo-Chine {Seehohm).
Il est également commun dans le nord de l'Afrique [Loche, Salrin,
etc.), en Egypte et en Nubie [Shelley) jusqu'au cap de Bonne-Es-
pérance {La yard) , ainsi qu'aux Ils Canaries, Madeires et Açores
{Bol le, Bu Cane).
La var. Nivosa est propre à l'Amérique où elle habite les côtes du
Pacifique depuis la Californie jusqu'au nord du Chili, et se montre à
l'Est jusqu'au grand lac salé de TUtah [Seebohrn).
Mœuj's. — Ce pluvier habite les côtes maritimes et les bords des
lacs salés, et ne paraît se montrer près des eaux douces que pendant
ses migrations. Dès la fin d'août, ces Pluviers commencent à se ras-
sembler en petites troupes pour errer pendant quelque temps encore
le long des côtes et des licuves, qu'ils ne remontent cependant pas
très loin. M. A. Crocgaert nous apprend qu'on en rencontre alors
fréquemment le long de l'Escaut, à Bath, à Saftingen et plus loin,
mais qu'ils ne remontent pas beaucoup le ileuvc et qu'on n'en tire
que quelques-uns, en août et en septembre, devant Anvers. Ce n'est
qu'au commencement de novembre qu'ils nous quittent définitivement.
Ils voyagent par bandes plus ou moins nombreuses, en suivant autant
que possible les côtes maritimes ; mais on avril et mai, ils nous re-
viennent par petites troupes et môme par couples.
Si cette cs[)éce est comnume sur la côte des Flandres à l'époque
des passages, il n'en est pas de môme au milieu de l'été, car les cou-
ples qui nichent en Belgique sont fort peu nombreux.
Quoique ce Pluvier soit un habitant des côtes, il recherche cepen-
dant les endroits plus ou moins verdoyants qui ne soient pas trop
éloignés de la mer. Il aime aussi les lacs salés, bien que ceux-ci soient
parfois à do grandes distances de la nier ; ainsi, il est commun près
des lacs de la Hongrie, de la I)aouri(\ du Turkcstan, etc. Comuie les
espèces précédentes, c'est un oiseau à inoitif"* nocturne, car il se mou-
- 124 —
Ire toujours le plus animé vers le soir et au matin, ainsi que pendant
les nuits claires ; le milieu de la journée, au contraire, est employé
au repos. Ses habitudes ne diiïèrent du reste guère de celles des Ora-
velots précédents. Il est farouche et prudent : dès qu'il se voit pour-
suivi, il cherche son salut dans une course rapide ; si cela ne suffit
pas, il s'élève dans les airs en décrivant de grands cercles et va s'abat-
tre dans un autre endroit. Les couples vivent dans une union parfaite
et en bonne intelligence avec leurs voisins, môme quand ceux-ci ap-
partiennent à d'autres espèces. Son cri d'appel peut se rendre parpi«'
eipitt-pitt ; près du nid ces cris sont répétés rapidement de manière
à former un trille ; le cri d'alarme et ptirrr.
La nourriture de cet oiseau se compose de petits animaux marins
tels que annélides, mollusques etcrustacés, ainsi que de vers, de larves
et d'insectes.
Reproduction. — C'est vers la fin de mai que le Pluvier de Kent
commence à nicher. Il se choisit une place bien à l'abri des inon-
dations et parfois à une distance de plusieurs centaines de mètres
do l'eau. Il s'empare d'une petite fosse naturelle ou en creuse une avec
ses pattes, et la garnit de quelques brins ou de feuilles; parfois même
les oeufs reposent sur la terre ou sur le sable sans aucune litière. Ces
œufs sont toujours placés le bout aigu en dedans, ce que font du reste
la plupart des Pluviers. Ils sont un peu pyriformes, sans luisant, d'un
jaune terreux ou d'un vert grisâtre avec des traits, des mouchetures et
des taches d'un brun noirâtre. Ils mesurent environ 33 milhm. sur 23.
La durée de l'incubation est de quinze à dix-sept jours. Dès leur
éclosion,les jeunes quittent le nid pour suivre leurs parents, et ceux-ci
se montrent alors plus inquiets que jamais, car ils ont leur couvée à pro-
téger et à défendre ; aussi la conduisent-ils dans un endroit où le ter-
rain est irrégulier, caillouteux ou garni de touffes d'herbes, afin qu'au
besoin les poussins puissent trouver des places convenables pour se
cacher en se rasant.
GENRE CVI.
SQUATAROLE. — SQUAT.» EOL.\ .
Vanellus, Briss. Ont. V. p. 103 (1760).
Tringa, Lin. >S>;. aot. I. p. 250 (1766).
Ch.vradrius, Pall. Reiaen Rass. R. III, p. 099 (1773).
Squatarola, Leaeh, Sy^t.Cat. Mon. etc. p. 29 (1816).
Pluvialis, Macg. Hl^f. llr. B. IV, p. 86 ;1852;.
Car. — Ce genre ne diffère du genre CJiaradrius que par la présence
d'un pouce rudimeiitaire.
- 125 -
188. — Le Squatarole ou Vanneau à ventre noir
SQUATAROLA IIELVEÏIGA, Keys. et Bl. ex Briss.
(PI. 184)).
Vanellls griseqs, varius el helveticus, Briss. On/. V, p. 100-106 (1760).
TrINGA HELVETICA, VARIA et SQUATAROLA, L'ilï. SlJSt. HClL I, p. 252 (1766).
CiiARADRius HYPOMELUS, Pall. Rcise Russ. Eeichs, III, p. 699 (1773).
Charadrius x.evius, Giiiel. Si/sl. )i"f. I, p. 692 (1788).
Vanellus melanogaster, Bechst. NcUurg.Deiitschl. IV, 356 (1809) .
Charadrius pardela, Pall. Zoogr. Bos^o As. II, p. 142 (1811).
SQUATAROLA GRISEA, Leacli, Cat. Mam. B. Br. Mus. p. 29(1816).
SQUATAROLA varia, Roie, Ids, 1822, p. 558.
SQUATAROLA C1NEREA, Fleiii. Brit. an. p. 111 (1828.)
Charadrius squatarola, Nauni. VoV/- Deutschl. VII, p. 249 (1834).
Squatarola HELVETICA, Kcys. et Blas. ^YirbeU. Eur. p. 207(1840).
Squatarola MELANOGASTER, Malh. (nec Swains), Fcicu. orn. Sicile.,'^. 166 (1843).
Vanellus squat.\rola, Schl. Rev. crit. p. LXXXIV (1844) .
Pluvialis SQUATAROLA, Macg. Hist. Biit. B. IV, p. 86(1852).
Squatarola wiLSONi, Licht. Nomencl. av. p. 95(1854).
Squatarola loxgirostris, A. E. Brm. Jown. f. Orn. 1854, p. 79.
Squatarola MEG.A.RiiYNCHus, A. Brm. Yogelf. p. 284 (1855).
Squatarola RHYNCHOMEGA, Bonap. Compt.reud. 1850, p. 416.
Pluvialis varius, Schl. Mus. P.-B. (Cursores), p. 53 (1865).
Charadrius VARIUS, F.insch et Hartl. Vog. 0. Afr. p. 644(1870).
Charadrius helveticus, Sceb. Brit. Blrcls, III, p. 44(1885).
Der Kibisz-Regenpfeifer, en allemand.
The Grey PLf)VER, en anglais.
DeZilverplevier, en flamand.
Taille : 0,"'23 ; ailes 0,195 ; tarses 0,047.
Description du mâle et de la femelle adultes en été. — Front et raie sour-
cilière d'un bhinc pur ; dessus de la tête, arrière du cou et côtés de la poi-
tiine également blancs, mais plus ou moins variés de noir; dessus du corps
noir, mais totites les plumes terminées de blanc, et cette dernière teinte
il )inine quelquefois; sus-caudales blanches barrées de noir; côtés de la t(')te,
gorge, milieu de la poitrine, abdomen et flancs d'un l)eau noir ; jaml)es,
bas-ventre et sous-caudales d'un blanc pur, mais les sous-caudalcs laté-
rales tachées de noir ; rémiges d'un brun noir avec la base du bord interne
et les baguettes blanches ; queue blanche barrée de noir. Iris brun foncé;
bec et pattes noirs.
Mâle et femelle en hiver. — De sus delà tète et du corps iriin brun noi-
râtre varié de taches jaunâtres; arrière du cou cendré varié de brun : Iront
et parties inférieures d'un l)lanc assez pur avec dos taches allongées brunes,
sauf sur le milieu du ventre qui est sans taches ; couvertures des ailes d'un
~ 126
cendré brunâtre mais bordées de blanchâtre et de jaunâtre; le reste comme
en été.
Il est à remarquer que dans son plumage d'hiver, cet oiseau ressemble
beaucouj) au Pluvier doré dans la même saison ; mais la présence d'un petit
pouce chez le Squatarole ne permet pas de confondre ce dernier avec le
Pluvier doré, qui n'en a pas.
Jeune. — Parties supérieures d'un cendré brunâtre avec les bordures des
plumes plus claires ; parties inférieures d'un blanc jaunâtre varié de cendré
sur les côtés de la tête et de la poitrine ; couvertures des ailes bordées de
blanchâtre.
Hab. — C'est un oiseau cosmopolite, qui niche dans la zone arctique
^ jusqu'au 74° et se répand, lors
des migrations, dans toutes les
parties du monde. Il est de pas-
sage régulier dans toute l'Eu-
rope, et se montre alors en
assez grand nombre en Belgique,
particulièrement dans les Flan-
dres et la province d'Anvers.
Il hiverne dans le midi de l'Eu-
rope et en Afrique, où on le rencontre depuis l'Algérie (Loche),
le Maroc {Draàe) et l'Egypte (de Ileuglin), jusqu'au cap de Bonne-
Espérance [Layard); on a capturé de ces oiseaux à Zanzibar {Ki)-k),
à la Côte d'Or {Schlégel), en Sénégambie( Verreaux), aux îles Seychelles
et Maurice {Netvion), à Madagascar {Hartlauh), etc.
En Asie on observe cette espèce, suivant les saisons, dans toute la
Sibérie jusqu'au Kamtschatka {Kittlitz) et le Japon (Siebold), en
Chine, à F ormose [Swinhoe), dans l'Inde (Jerdon), à Ceylon {Legge),
dans l'Indo-Chine {Humé), aux îles Philippines Gleyer), Bornéo
{Diard), Labuan [Mottley), Timor, Nouvelle-Guinée [S. Mûl/er),
Java (Schlégel), Célèbes [von Rosenberg), Halmahera [Wallace), Salo-
mon (Ramsag) et en Australie (Goidd).
Enfin, dans le Nouveau Monde, on rencontre le squatarole au
Groenland (Reinhardi), dans l'Alaska, où il est cependant rare
{Murdoch), dans toute l'Amérique du Nord {Baird), ainsi qu'au
Mexique {Wiite), au Guatemala (Salvin), à Cuba [Gundlach), à Tri-
nidad {Léautaud), et il se montre probablement de temps en temps
dans diverses parties de l'Amérique méridionale.
Mœurs. — Le Squatarole, aussi appelé Vanneau suisse et Vanneau
- iï>7 —
à ventre noir, est pour nos contrées un oiseau de passage. Sa véri-
table patrie comprend la région boréale, où il se plaît dans ces vastes
marais tourbeux connus sous le nom de tundras. Il quitte ces lieux
par troupes, depuis septembre jusqu'en novembre, en suivant une
direction sud-ouest et en longeant autant que possible les côtes mari-
times. Ces oiseaux retournent dans le Nord en mars ou avril, et les
passages continuent souvent jusqu'aux premiers jours de juin. Ces
migrations se font en plein jour ou pendant la nuit, et les bandes
volent généralement à une grande hauteur et en faisant souvent
retentir l'air de leurs cris ; quand les oiseaux sont nombreux, ils
volent sur deux lignes de façon à former un angle aigu.
Lorsque cette espèce se trouve éloignée des tundras, elle recherche
de préférence les bords de la mer, des lacs, des étangs et des rivières,
mais à peu de distance des jachères et des pâturages, où elle passe
une grande partie de son temps. Elle se repose peu durant la nuit,
mais elle aime à dormir vers le milieu de la journée.
Par ses habitudes, le Squatarole ressemble beaucoup au Pluvier
doré. Il marche le corps horizontal et court à grands pas et avec
rapidité ; mais il est moins remuant que ce dernier et paraît même
un peu apathique quand on l'observe vers l'heure de midi. Il vole
souvent en rasant le sol, mais il sait s'élever à une grande hauteur et
franchir l'espace avec la vitesse d'une Hirondelle. Il est très farouche,
surtout quand il est en société, mais les jeunes se montrent un
peu moins méfiants. La vue d'un homme le met de suite sur ses
gardes, et il s'envole dès qu'on n'est plus qu'à une centaine de
mètres de l'oiseau ; ce n'est que pondant la partie la plus chaude de la
journée, alors qu'il se livre au repos, qu'il est possible de l'approcher
de plus près.
Cet oiseau est très sociable, se réunit souvent en troupes nombreuses
et se mêle même à d'autres petits échassiers. Suivant Naumann, son
cri habituel ressemblerait à celui du Pluvier doré, mais il serait d'un
ton plus élevé ; il le rend par tliéi. M. H. Seebohm, qui a observé
cet oiseau dans les tundras du Nord, rend ce cri parafe/-;' ou klip, le
kl prononcé comme s'il était séparé de la syllabe suivante ; le même
auteur mentionne encore le cri de heup {kop), que l'oiseau fait enten-
dre dans les moments de danger.
Sa nourriture consiste en larves, insectes et mollusques aquatiques
et terrestres, ainsi qu'en annôlides marins ; c'est principalement vers
le soir et au matin qu'il cherche sa nourriture, et il avale généralement
— 1^28 —
du gravier pour faciliter sa digestion. Il se baigne volontiers, aussi
bien pendant le jour que dans la soirée.
Reproduction. — Suivant M. Seebohm, l'oiseau recherclie pour
nicher les parties basses et tourbeuses de la tundra. Le nid est placé
sur un petit monticule, d'un pied ou deux de hauteur, formé d'un
amas de tourbe et couvert de mousse et de feuilles. C'est dans une
dépression de cette mousse et de ces feuilles que la femelle dépose ses
quatre œufs vers la fin de juin ou en juillet; c'est du moins à cette
époque que MM. Seebohm et Harvie Brown découvrirent dix de ces
nids dans la vallée de la Petchora à 68*^ de lat. Middendorff a trouvé
de ces nids en Sibérie sous le 71° et le 74°, et vers la même époque.
D'après les figures données dans \lbis, ces œufs sont pyriformes, d'un
jaune terreux et plus ou moins tachés de brun ; ces taches sont les
unes petites, les autres grandes, mais toujours de forme très irrégu-
lière ; ils mesurent environ 52 millim. sur 35 (1). Pendant l'incuba-
tion, la femelle se montre très remuante, courant par-ci par-là et
poussant des cris d'inquiétude ; le mâle, au contraire, se tient assez
éloigné du nid et reste calme et silencieux ; mais plus tard, quand
les œufs sont sur le point d'éclore, le mâle devient aussi inquiet que
sa femelle et tous deux jettent alors des cris d'alarme.
GENRE CVII
VANNEAU. — VANELLUS.
VANELLUs,Briss. Omith. V. p. 94 (1766).
TRiNGA,Lin.5'(/6<. nat. 1, p. 248(1766).
Charadrius, Pall.Zoo^r. Rosso, As. II, p. 132(1811).
Car. — Plumes de l'occiput très longues, effilées et formant une huppe d'un
grand développement. Bec plus court que la tête, assez grêle, brusquemeut
renflé vers la pointe ; narines latérales allongées mais étroites, parallèles au
bord de la mandibule supérieure ; sillons nasaux se prolongeant jusqu'au
renflement du bec ; yeux assez grands ; ailes sub-aiguës, atteignant l'extré-
mité de la queue, pourvues d'un tubercule qui se prolonge parfois en un
éperon, amples^ à rémiges larges; queue de longueur moyenne, carrée; tarses
longs, assez robustes, réticulés ; quatre doigts : l'externe réuni au médian par
une petite membrane, le pouce court, placé assez haut et ne reposant pas k
terre.
Hab. — Le genre Vanneau, dont on ne connaît que trois ou quatre
(l) Voy. pour la reproduction du Squatarole : Ibis, 1876, p. 222 pi. V. — Seebobm, A hiatory
of Brili^h Birds, t. III, p. 45 (1885).
— 129 —
espèces, est représenté en Europe, en Afrique, en Asie et dans l'Amé-
rique méridionale.
189. — Le Vanneau huppé.
VANELLUS VULGARIS, Bechst.
(PI. 180)
Tringa VANELLUS, Lin. Sî/st. nat. I, p. 248 (1766).
Vanellus capella, Schacf. Mus. Orn. p. 49 (1789).
Vanellus A^ULGARis, Beclist. Ornith. Taschenb. Il, p. 313 (1803).
Vanellus cristatus, Wolf etMey. Yog. Deutschl. II, p. 110 (1805). .
Vanellus GAVL\,Leach, Syst. Cat. M.B. Br. il/«s.p.29 (1816).
Ch.\radriusgavla., Licht. Vcr^. DowW. p.70 (1823),
Vanellus bicornis, C. Brm. Isis, 1830 p. 987.
Charadrius VANELLUS, Pall.Zoo^T.jRosso-As. II, p. 132(1831)
Vanellus cristatus communis, bicornis et crispus, A. Brm. Verz. Samml. C. Brm.
p. 11 (1866).
Taille : 0, "^27 ; ailes 0,23 ; tarses 0,053.
Description du mâle et de la femelle adultes. — Front, sommet de la tête,
huppe, une bande sous l'œil, tour du bec, gorge et poitrine, d'un beau noir
lustré; nuque d'un cendré varié de verdâtre et de roussâtre ; raie sour-
cilière et côtés de la tête d'un blanc varié de noir ; côtés du cou d'un blanc
pui" ; parties supérieures du corps d'un vert bronzé avec des reflets pourpres
sur les scapulaires; couvertures des ailes d'un vert sombre à reflets bleuâtres;
rémiges noires, les trois premières terminées de cendré; queue blanche avec
la moitié terminale noire, sauf la première rectrice qui est d'un blanc uni-
forme ; sus-caudales d'un roux ardent; abdomen d'un blanc pur; sous-
caudales d'un roux Isabelle. Iris brun foncé ; bec noir; pattes rougeâtrcs.
Jeune. — Huppe plus ou moins développée ; le dessus de la tête est d'un
brun noir et les côtés lavés de roussâtre : tour du bec blanchâtre, brunâtre
au front; gorge et devant du cou blancs ; les plumes du dos et des ailes sont
moins brillantes et bordées de roussâtre ; haut de la poitrine d'un brun noi-
râtre avec les plumes plus ou moins bordées de blanc ; noir de la (jueue
terminé de blanchâtre.
Poussi7i. — Duvet très tourni, assez long ; parties supérieures d'un cendré
roussâtre varié do noir, avec un demi-collier d'un blanc roussâtre à la nu<iue ;
gorge et poitrine d'un blanc pur, mais séparées par un plastron noir dont le
duvet est terminé de cendré ; al)doinen et flancs d'un blanc roussâtre.
TmMI.; II. — 1.SS8. 1'
— 130
liai), — Le Vanneau habite toute l'Europe jusqu'au 65» lat. Nord
[Bogdanoto), y compris le sud
de l'Islande [Fahey^] et acciden-
tellement du Groenland {Rein-
hardt). Dans la belle saison il
est surtout abondant dans les
contrées septentrionales et cen-
trales, et particulièrement en
Hollande. En Belgique, il est
commun lors des passages, mais
il niche dans les prairies marécageuses des Flandres et de la Cam-
pine. Bien que cet oiseau ne soit réellement pas un résident des con-
trées méridionales, il niche cependant, en petit nombre il est vrai,
dans plusieurs localités de la France (Degland et Gerbe), du nord de
ritalie [Giglioli) et en Espagne {Saunders); il niche également dans
les divers comtés de la Grande-Bretagne et de l'Irlande [Seehohm).
En Turquie et en Grèce on ne le voit qu'en hiver.
Dans le nord de l'Afrique, il ne se montre pas seulement en hiver,
mais un petit nombre y niche [Loche, h^by, etc.), et il en est de même
dans le Delta du Nil [Shelley); en hiver on le voit en assez grand nom-
bre en Egypte et dans le nord de l'Arabie (de Heiiglin), ainsi qu'aux
îles Canaries (5o//e), Madères [Newton) et Açores [Godman).
En Asie, on l'observe en été, dans toute la Sibérie jusqu'au 65°,
en Daourie et au pays Oussourien [Bogdanoio), et à l'Est jusqu'à l'île
septentrionale du Japon (5'cVi/e^e/); il niche également en Turkestan
{Severtzoïo), en Mongolie et en Chine [David). En hiver, il se montre
en Asie Mineure [Strickland), en Palestine [Tristram), en Perse (5'^-
John) jusqu'au Punjab dans l'Inde [Jerdon) et l'île méridionale du
Japon.
Mœurs. — Le Vanneau huppé est, pour nos contrées, un oiseau
d'été et de passage : il arrive généralement en mars et en avril, et
émigré en automne. Dès le mois d'août, ces oiseaux se rassemblent en
petites troupes qui errent à travers le pays et finissent par se réunir
aux bandes qui arrivent du Nord, pour disparaître au commencement
d'octobre. Mais les individus des pays septentrionaux continuent à
passer jusqu'en novembre. Du reste, si l'automne est beau et relative-
ment chaud, ces oiseaux ne se hâtent guère de gagner les régions
méridionales, et une partie s'arrête dans certaines localités, atten-
dant les premiers froids; si l'hiver est exceptionnellement doux, il
- J31 -
y en a même qui résident toute l'année en Belgique, mais c'est rare.
Les Vanneaux voyagent généralement en bandes nombreuses, for-
mées de plusieurs centaines d'individus, et le plus souvent pendant
le jour; ce ne sont généralement ques les petites troupes et les indi-
vidus isolés qui voyagent pendant la nuit. Ils volent toujours très haut
et sans ordre. A leur retour, au printemps, on ne les voit jamais en
bandes aussi nombreuses qu'en automne.
Dès leur retour au printemps, ces oiseaux se dispersent, mais cha-
que couple demeure fidèlement uni. C'est dans les endroits humides
et marécageux que les Vanneaux se plaisent le mieux, mais ils ne
paraissent guère rechercher le voisinage des fleuves, des rivières ou
de la mer, à moins qu'il y ait des marécages aux environs. Ce qu'ils
préfèrent, ce sont les prairies marécageuses, les marais et les fossés
inondés. M. de Nordmann fait cependant remarquer que dans la
Russie méridionale, où les terrains marécageux sont fort rares, les
Vanneaux se contentent des plaines arides de la steppe et même de
terrains entièrement nus, couvert d'un sable mouvant subtil, et n'of-
frant que de loin en loin quelques îlots de verdure; cela n'empêche
pas, qu'avant et après l'époque de la reproduction, des milliers de ces
oiseaux y prennent leurs ébats.
Le Vanneau est un oiseau excessivement actif et remuant, voletant
ou courant sans cesse d'un endroit à l'autre, mais sans oublier la pru-
dence, qui guide toujours tous ses actes ; il est farouche et méfiant,
mais intelligent, et ne se sauve jamais sans raison. Il fuit de loin
l'homme suspect et le chasseur armé d'un fusil, mais se laisse appro-
cher par le campagnard inolFensif ou par un enfant, se bornant à le
saluer de son cri perçant et à voler autour de l'importun avec une
liardiesse surprenante. C'est surtout pendant les migrations qu'il est
difficile d'approcher do ces oiseaux, car ils se montrent alors plus vigi-
lants (|ue jamais. Ce n'est pas sans raison que le chasseur s'iirite par-
fois contre la vigilance des Vanneaux, car, à son approche, ils
avertissent par leurs cris tout le gibier du voisinage et font ainsi
parfois manquer la chasse.
C'est un oiseau sociable ; les différents couples se tiennent généra-
](Mnent non loin les uns des autres, toujours prêts à accourir au secours
de leurs camarades au moindre cri d'ahirme. Quand un grand oiseau se
présente dans leur domaine, ils se réunissent à plusieurs pour h^ harce-
ler et le chasser, et ils font preuve (mi cette occasion, d'une audace et
irnii courage incroyables; ainsi, ils ne craignent [)as de s'attaquer à
- 132 —
une Mouette, à un Corbeau, à un Héron ou même à une Buse ou à un
Milan, car ils savent à qui ils s'adressent; mais ils se gardent bien
de s'approcher d'un Faucon ou d'un Autour,qui en aurait vite raison.
Après avoir ainsi réuni leurs forces pour expulser l'intrus, chaque
couple retourne à ses occupations ou à son nid. Les Vanneaux ne
tolèrent pas la présence d'autres petits échassiers aux environs de
leur nid ; pendant leurs migrations, les individus isolés se joi-
gnent volontiers aux troupes de Pluviers, mais quand ils forment une
bande, ils ne permettent pas que d'autres oiseaux viennent se joindre
à eux.
Le vol de cet oiseau est facile et très varié. « Au-dessus de l'eau,
dit A. Brehm, ou près du sol, il s'avance en battant lentement des
ailes ; mais quand il a gagné les hautes régions de l'atmosphère, il
s'y joue ; chacun de ses mouvements a son expression. Quand un
danger menace, soit lui, soit ses petits, il exécute les tours les plus
audacieux : il se précipite sur le sol pour se relever presque aussitôt,
se jette à droite, à gauche, culbute, descend à terre, y trotte quelque
temps, se relève et recommence le même manège. Aucun oiseau de
nos pays ne vole de cette façon, aucun ne peut, comme lui, faire exé-
cuter à ses ailes autant de mouvements. Son vol est accompagné d'un
bruissement singulier, qui permet de le reconnaître dans la nuit la
plus obscure. Sa démarche vive et gracieuse ressemble à celle du Plu-
vier ; sa course est parfois excessivement rapide. En marchant comme
en volant, le Vanneau relève et abaisse sa huppe. »
Il fait entendre sa voix en toute circonstance ; son cri d'appel est
kibit ou kiicit, son cri d'angoisse chréit, que la femelle fait souvent
entendre près de son nid ; le chant d'amour du mâle est facile à dis-
tinguer du cri habituel, car il est formé d'une série continue de sons,
que l'on peut rendre par : chêh querhhoil kiwitkiv'itkiioit kmilit ; il
ne fait entendre ce chant qu'en volant et en l'accompagnant des mou-
vements d'ailes les plus singuliers.
La nourriture du Vanneau consiste en vers, petites limaces et mol-
lusques aquatiques, larves et insectes. Il boit plusieurs fois par jour
et se baigne volontiers.
Pris jeunes, les Vanneaux s'apprivoisent très facilement, viennent
manger dans la main de leur maître et vivent en bonne amitié avec les
chiens et les chats. On les nourrit de vers de terre, de pain et de
viande hachée, mais on doit les mettre à l'abri du freid pendant l'hiver.
Reproduction. — Le Vanneau niche dans un sol humide entre les
— 133 -
herbages d'un pré, surtout clans un endroit où l'herbe est courte, rare-
ment au voisinage immédiat de l'eau ou dans un marais, et alors le
nid se trouve toujours sur une élévation. Ce nid est une simple dépres-
sion, parfaitement arrondie, et ordinairement garnie de brins et de
radicelles. La femelle creuse souvent plusieurs petites fosses avant
d'en terminer une pour y pondre. La ponte a parfois lieu dans la
seconde quinzaine de mars, mais le plus souvent en avril. Les œufs,
au nombre de quatre, sont pjriformes, à écaille lisse et finement gre-
nue, d'un vert olivâtre ou brunâtre mat, parsemés de points et do
taches brunes ou noirâtres ; ils mesurent environ 47 millim. sur 32.
La durée de l'incubation est de seize jours.
Les parents témoignent le plus grand attacliement à leurs petits et
exposent souvent leur vie pour eux. Ils emploient mille ruses pour
éloigner les animaux carnassiers et y parviennent le plus souvent.
GENRE CIX
TOURNE-PIERKE. — STREPSILAS.
Akenakia, LSi-is.s. Or)iith. V, p. 132 (17(30).
Trin-ga, Lin. Syst. mit. I, p. 248 (1700).
MoRiNELLA, Mey. Taschetib. deicl!<ch. Vof/clk. Il, p. 383 (1810).
Strepsilas, Illig. Prodr., p. 203 (1811).
Charadrius, Pall, Zooyr. Il, p. 148 (1831).
CiNCLUS, Gray, Liât. fjen. B. p. 87 (1841),
Car. — Bec plus court que la tête, conique, à arête aplatie et à pointe
comprimée et mousse ; narines basales, latérales, linéaires ; ailes allongées,
étroites, aiguës, dépassant légèrement l'extrémité delà queue ; celle-ci de
longueur moyenne, arrondie, formée de douze rectrices assez larges ; tarses
médiocres, robustes, recouverts en avant par une rangée de plaques étroites,
réticulés sur les côtés et sur la face postérieure ; quatre doigts libres, le pouce
élevé, court.
Hub. — Ce genre, qui n'est composé que de trois espèces, est
cosniopoliie.
190. — Le Tourne-pierre à collier.
STRKPSIL.VS IN rKRPRES, Illùj. o- Lin.
(l'i. l'.ii).
Ahk.nakia <;inkrka (.Fcmip), liriss. Or/iil/i. V, p. 137 (17<)()).
Trinoa intkrf'Res et Morinella, Lin. Si/st. mit. I, p. 248-49 (17()()).
- 134 —
Trin'ga hudsonica, Miill. Si/sf,. nat. suppl., p. 114 (1770),
MoRiNELLA coLLARis, Mey. Toschenh. deutsch. Vogelk. II, p. 383(1810).
Strepsilas interprks, Ulig. Prodr., p. 263 (181 P.
Strepsilas COLLARIS, Tcm. Mau. d'orn., p. 349 (ll:?lo).
Arenaria interpres, Vieill. Nouv. dict. XXXIV, p. 345 (1819).
Tringa oAHUENSis, Bloxli . iii Bijron's Voij. ofthe Blonde, app. 251 (1820).
Strepsilas borealis et littoralis, Brm. Isis, 1830, p. 987.
Charadrius ciNCLus, Pall. Znogr. Ho.sso-As. Il, p. 148 (1831).
Cinclus moeinellus, Gray, Lût of gen. Birds, p. 87 (1841).
CiNCLUs INTERPRES, Gray, Gen. of Birds, III, p. 549(1846).
Strepsilas minor, Brm. Yogelfang, p. 285 (1855).
Strepsilas collaris vulgauis, borealis, littoralis, minor et pusilla, A. E. Brm.
Yerz. Saimnl. C. L. Brm. p. 12 (1863).
Der Mornell-Steinwalzer, en allemand.
The Turnstone, en anglais
De Steexlooper, en flamand.
Taille: 0™, 20; ailes 0,16; tarses 0,024.
Description du mâle et de la femelle adultes. — Dessus de la tête et du cou
d'un blanc pur, avec des taches noires allongées au vertex et à l'occiput;
haut du dos et scapulaires d'un noir varié de roux vif; bas du dos et grandes
sus-caudales blancs ; petites sus-caudales noirâtres, les plus antérieures ter-
minées de blanc ; face, devant du cou et poitrine noirs, avec une grande
tache blanche entre le bec et l'œil ; couvertures des oreilles, gorge, côtés
du cou, nuque et parties inférieures d'un blanc pur ; couvertures des ailes
brunes, les plus petites bordées de cendré, les moyennes de blanchâtre et les
plus grandes de blanc pur; rémiges brunes; queue d'un cendré brunâtre,
blanche à la base, les rectrices latérales terminées de blanc, la plus externe
entièrement blanche, mais avec une large barre brune vers l'extrémité. Bec
noir ; iris noirâtre ; patte d'un rouge orange.
Jeune. — Tête et cou d'un brun varié de cendré ; gorge blanche ; devant du
cou et poitrine noirâtres, mais variés de cendré et de blanchâtre; dos noi-
lâtre, toutes les plumes bordées de blanchâtre ; ailes brunes, les couvertures
bordées de cendré, les plus grandes terminées de blanc ; le reste comme chez
l'adulte. — Se distingue des autres espèces, à tous les âges, par sa gorge
blanche.
Poussin. — Tête, dos, dessus des ailes et des cuisses d'un cendré lavé
de fauve et marqué de mouchetures noires, irrégulières, formant bandes
indécises sur le dos, sur les lorums et en arrière des yeux ; dessus
du cou cendré, avec la base et les pointes du duvet noires ; parties
inférieures blanches, assombries sur la poitrine par la base brune du duvet.
Bec brun ; pieds jaune terne. (J. Vian.)
- 435 —
Hab. — Le Tourne-pierre est un oiseau cosmopolite qu'on rencontre
clans le monde entier. Il est plus
ou moins commun dans toute
l'Europe jusqu'au cap Nord
fl {Collett) et l'Islande {Faber.). En
Belgique, il passe régulièrement
sur nos côtes maritimes au prin-
temps et en automne ; des jeunes
sujets remontent alors souvent
l'Escaut jusque près d'xA.nvers où
l'on en prend quelques-uns chaque année. En Afrique, on le rencontre
presque partout, du nord {Loche, de Heuglin) au cap de Bonne-Espé-
rance où il est même sédentaire {Lai/ard), et de l'est {lùrk) à l'ouest
{Verreaux) ; il se montre aussi sur toutes les îles de l'Europe et de
l'Afrique et môme à Madagascar (./. Verreaux).
On observe cet oiseau en Asie jusqu'au 73 3/4'' 1. N. {Middendorff),
et il est aussi abondant sur les côtes méridionales que sur les côtes
septentrionales. J'ai vu des spécimens du Kamtschatka, de l'Inde, de
Cochinchine, de la Chine, des Moluques, de Célèbes, de Java, de la
Nouvelle-Guinée, etc. On le voit aussi sur les côtes de l'Australie et
de la Tasmanie {Gould), de la Nouvelle-Zélande {Buller) et des îles de
la Polynésie {Finsch).
p]n Amérique cet oiseau n'est pas rare sur les côtes de l'Amérique
septentrionale et du Mexique [Baird) ; il est également indiqué aux
Antilles {Gosse, Gundlach), dans l'Amérique centrale (Salvin), au
Pérou et aux îles Galapagos {Darioin), etc. Le Musée de Bruxelles
possède des individus du Canada et du Chili.
Mœurs. — Le Tourne-pierre arrive dans les contrées du Nord à la
fin d'avril ou vers le milieu de mai, et émigré à la fin d'août. Il voyage
la nuit, soit isolément, soit par couples ou en petites troupes, mais
jamais en bandes nombreuses ; dans ses migrations il suit toujours les
côtes maritimes.
Cet oiseau vit près de la mer ou des lacs salés qui n'en sont pas très
éloignés, mais ne se montre près des fleuves qu'à l'époque des
passages, et encore n'y voit-on que de jeunes individus égarés. Il
recherche particulièrement les terrains sablonneux et les rives pier-
reuses mais ne se montre qu'accidentellement à l'intérieur du pays ;
il aime aussi les petites îles sablonneuses, couvertes de bruyères et de
genévriers. Il est toujours en mouvement et montre autant d'agilité
— 136 -
dans l'air que sur le sol ; c'est à peine s'il prend un peu de repos vers
le milieu de la journée. Son vol est facile et rapide, il se détourne
adroitement soit en rasant le sol, soit en volant dans les régions
élevées de l'atmosphère. A terre on le voit souvent franchir d'une
traite un espace considérable, s'arrêter un instant sur une petite
éminence, puis reprendre sa course rapide. C'est un oiseau farouche
et fort prudent, qui fait Tliomme do loin ; mais quand le hasard l'a
transporté loin de la mer, il perd de sa prudence, devient inquiet et
tranquille, et l'on ne reconnaît alors plus cet oiseau, d'habitude si gai
et si remuant. Il est sociable, aime la société des siens, mais on n'en
voit jamais beaucoup ensemble. En hiver, il se joint souvent à d'autres
petits échassiers de rivage, mais en formant bande à part; toutefois,
il veille à la sûreté générale et donne l'alarme à l'approche de
l'ennemi. Sa voix est forte et sifflante et peut se rendre par kiih, kih
d'abord lent, puis de plus en plus accéléré et se terminant par
kikikiki ou par kittekittekittekitte qui est aussi son cri
d'amour. C'est en volant que l'oiseau crie le plus, car à terre il ne se
fait guère entendre souvent, si ce n'est à l'époque de l'accouplement.
Sa nourriture se compose de vers, de mollusques et d'une foule de
petits animaux marins; il prend aussi des larves et des insectes. Il a
l'habitude de retourner les pierres pour prendre les vers cachés en
dessous, d'où lui est venu le nom de Tourne-pierre.
Reproduction. — C'est à la fin de mai ou au commencement de
juin que cet oiseau fait ses préparatifs pour nicher, soit sur un banc de
sable ou dans un endroit sablonneux non loin des jetées, soit sur un
îlot, sous une touffe de bruyères ou de genévriers, et le plus souvent
dans un endroit un peu élevé.
Le nid est une simple dépression creusée dans le sable et garnie de
quelques brins. La ponte est de trois ou quatre œufs lisses, un peu
luisants, pyriformes, d'un vert bleuâtre, olivâtre ou brunâtre plus ou
moins foncé, et tachés de cendré et de brun. Ils mesurent environ 42
millim. sur 30.
Les parents ont beaucoup d'aitachement pour leurs poussins, et
ceux-ci savent fort bien se cacher à terre en se rasant, dès qu'un dan-
ger les menace.
OENRE ex
HUITllIER. — H^MATOPUS.
H^MATOPUS, Lin. Syst. nui. I, p. 152 (1758) ; 1, p. 257 (1766).
OsTRALEGA, Briss. Omitk. V, p. 38 (1760).
— 137 —
OsTRALEGUS, Macgill. Mon. Brit. B. II. p. 59 (1842).
Melanibyx (Reichb.) Bp. Compt.-rend. XLIII, p. 420 (1854).
Car. — Bec beaucoup plus long que la tête, plus haut que large à la base,
très comiDrimé latéralement vers la pointe ; narines oblongues, latérales, i3er-
cées dans une rainure qui se prolonge en pointe jusque vers le milieu du
bec ; ailes allongées, aiguës, atteignant plus ou moins l'extrémité de la queue,
première rémige la plus longue; queue médiocre, large, composée de douze
rectrices ; bas des jambes nu ; tarses robustes, médiocrement allongés, réti-
culés de toutes parts ; trois doigts, épais, courts, bordés, l'externe uni par
sa base au médian par une forte membrane; pouce nul; ongles larges,
courts.
Hab. — Ce genre est cosmopolite.
191. — L'Huîtrier ostralège ou pie-
H^MATOPUS OSTRALEGUS, Lin.
(PI 190)
H.EMATOPUS OSTRALEGUS, Lin. Si/st. fiat. I, p. 257 (1766).
ScoLOPAX picA, Seop. Ann. I. Hist. nat. p. 95 (1769).
OsTRALEGA PICA, Booii. Encycl. mêth. I, p. 26 (1790).
OsTRALEGA EUROP^A, Less. Man. tVOrn. II, p. 300 (1828).
H/EMATOPUS BALTHICUS et ORIENTALIS, BrDQ. /SW, 1830, p. 987.
H.EMAT0PU3 HYPOLEUCA, Pall. Zoogr. Eosso-As. II, 129 (1831).
OSTRALEGUS TULGARis, Less. Rev.zool. 1839, p. 47.
OSTRALEGUS H^MATOPUS, Macg. Mcin. Brit. B. II, p. 59 (1842).
H/KMATOPUS MACRORHYNCHUS, B\yi\\, Joum. As. Soc. Benff. XIV, p. 548 (1845).
Der Europaische Austernfischer, en allemand.
The Oystercatcher, en anglais.
De Zeeekster, en flamand.
Var. Osculans
HiEMATOPUS OSTRALEGUS, Midd. (nec Lin.) Sibir. Reise, II, 2 p. 213 (1853).
H^MATOPUS LONGiROSTRis, Swinh. (nec Vieill.), Ibis, 1863, p. 406.
HiîîMATOPUs OSCULANS, Swinh. Proc. Zool. Soc. 1871, p. 405.
Taille : 0'",36 ; ailes 0,252 ; tarses 0,051.
Description du mâle et de la femelle adultes en été. — D'un noir plus ou
moins profond ; bas du dos, sus-caudales, base de la queue, une large bande
travers l'aile, une petite tache sous l'œil et parties inférieures à partir de la
poitrine, d'un blanc pur. Bec d'un rouge orange à pointe jaunâtre ; iris brun
rougeâtre; pattes d'un rose chair.
En hiver. — La tache blanche sous l'œil est un peu plus grande et sur le
devant du cou existe une tache en croissant également blanche.
Tome II. — 1888, 18
138 -
Jeune. — Même système de coloration, mais les parties supérieures brunes;
milieu de la gorge et un large demi-collier sur la partie antérieure du cou,
d'un blanc pur.
Poussin. — Bec de Vanneau, mais plus comprimé et plus long ; tête, dos et
dessus des ailes d'un gris fauve avec la base du duvet noirâtre, ce qui donne
aux parties supérieures un aspect chiné ; taches et traits noirs répandus sur
la tête, les lorums, le dos, le croupion et les ailes, et dessinant deux bandes
longitudinales sur le dos et une bande demi- circulaire autour du bassin ; cou^
gorge et poitrine d'un noir enfumé, glacé de gris ; ventre, dessous des ailes et
des cuisses d'un blanc pur ; bec noir avec la base de la mandibule inférieure
jaunâtre ; pieds d'un jaune livide. (J. Vian.)
Var. Osculans. — C'est une forme intermédiaire entre le type ostralegus
d'Europe et VH. longirostris d'AustraUe. Elle a le bec presque aussi long que
ce dernier ; les plumes sus-caudales sont marquées à l'extrémité de taches
noires ; les tiges des trois premières rectrices sont noires, celle de la quatrième
offre un peu de blanc et les suivantes davantage.
Hah.
L'Huîtrier ostralège se rencontre dans toute l'Europe jus-
qu'au cap Nord {Collett), ainsi
qu'en ]s\sinàe{Faber) et au Groen-
land {Reinhardt). Il n'habite
l'Ecosse qu'en été et visite à cette
époque les îles voisines, y com-
pris les îles Orkneys, Shetland et
Hébrides, mais il est sédentaire
sur les côtes de l'Angleterre et de
l'Irlande [Seehohm). Il niche sur
toutes les côtes de l'Europe septentrionale et occidentale jusqu'au
midi de la France où il est sédentaire et de passage (A. Lacroix) ; au
printemps et en automne, il est commun sur les côtes maritimes de
la Belgique et des individus isolés se montrent parfois près de la
Meuse et près des eaux des environs de Bruxelles ; M. A. Croegaert
dit qu'il est très abondant sur l'Escaut à partir de Bath et qu'on l'y
voit en bandes énormes. En Suisse il est de passage irrégulier : on
l'observe parfois en juin et juillet, plus rarement en octobre, près des
marais, des lacs et des fleuves [Schinz] ; en Pologne il est également
de passage accidentel {Taczanowski) ; Bogdanow le mentionne comme
se trouvant dans toute la Russie européenne et asiatique. Cet oiseau
est répandu sur tout le littoral de la mer Noire, mais ne paraît pas
hiverner sur la côte septentrionale {de Nordviann). Il ne se montre
— 139 —
qu'irrégulièrement, pendant l'hiver, aux environs de Constantinople
{Alléon) et en Grèce {Linclei-mayer). En Italie il est de passage acci-
dentel dans la zone septentrionale et de passage irrégulier dans les
autres parties du royaume (Salvadori), mais niche en Yéjiétie{Giglioliy,
sur les côtes de l'Espagne et du Portugal, on ne le voit qu'en hiver
{Saunders, Rcyes) .
En 7\frique on rencontre cet oiseau en hiver sur toute la côte sep-
tentrionale depuis le Maroc (Favier) et l'Algérie {Loche) jusque sur
les côtes de la mer Rouge {de Heuglin) et de Mozambique {Pefers) ;
le Musée de Lejde possède un spécimen de Sénégambie.
A l'Est on observe cette espèce en Asie Mineure {Gonzenbach) et au
Caucase sur le littoral de la mer Caspienne, où elle n'est cependant
pas abondante ; elle niche habituellement près des eaux douces non
loin des côtes {Radde). En été on la rencontre également prés des
rivières et des lacs du Turkestan {Severtzow) et de la Sibérie occiden-
tale {Fin.sc/i), d'où elle se rend en hiver en Perse, dans le Beloutchistan
{Blanford), dans l'Inde {Jerdon) et à Ceylan {L(fi/ard).
La Var. Osculans remplace lespèce type au Kamtchatka, dans la
Sibérie orientale, en Chine et au Japon {Sivinhoe, Taczanoioski) et se
montre parfois jusque dans l'Indo-Chine {Seebo/im).
Mœurs. — L'Huîtrier émigré des contrées septentrionales et des
côtes de la Baltique dès la tin do l'été ; en Islande, cependant, il se
contente, selon Faber, d'aller des côtes septentrionales aux côtes
méridionales où arrivent des courants chauds. Dans leurs migra-
tions ces oiseaux suivent généralement les côtes maritimes ; mais
il est certain que quelques-uns prennent une direction plus directe
et qu'ils passent l'hiver près des eaux douces de l'intérieur des terres;
il est du reste à remarquer que cette espèce est en général peu
abondante en hiver dans les contrées du Midi.
Les Huîtriers voyagent par troupes composées souvent de plusieurs
centaines d'individus, volant sans ordre aussi bien pendant le jour
que pendant la nuit; quand ils ont un long trajet à franchir, ils forment
une longue bande ou se placent sur deux rangs en formant un angle
aigu ; ils volent alors généralement très haut et silencieusement, mais
([iiand ils volent sans ordre, ils font retentir l'air df hnirs cris, ce qui
permet de les entendre do loin.
Ces oiseaux vivent au bord de la mer on dans ses enviiuns et surtout
près des côtes rocailleuses. Cela n'empêche cependant pas ({u'on en
rencontre souvent dans des pays très éloignés do la mer, comme la
— 140
Suisse, la Pologne, la Sibérie occidentale, le Tiirkestan, etc.
Bogdanow, comme on l'a vu plus haut, dit que les Huîtriers habitent
toute la Russie européenne et asiatique (1), ce qui fait bien supposer
qu'il ne s'agit pas seulement des côtes. Le D'' Finsch en rencontra
dans la vallée de l'irtisch (Sibérie occidentale), en avril, juin, juillet
et au commencement de septembre (2) ; il est donc probable qu'ils
nichent près de ce fleuve.
Sur les côtes accidentées, cet oiseau aime à se tenir au sommet d\m
rocher ou d'un monticule. Il s'éloigne souvent des bords de la mer
pour visiter aux environs les jDrairies submergées, les marais, les
étangs et les rivières. Ses mœurs sont plus nocturnes que diurnes, car
il prend peu de repos pendant la nuit, surtout quand il y a un clair de
lune, mais passe une partie de la journée à dormir, soit sur une patte,
soit sur deux, et en tenant la tête rentrée entre les épaules.
A première vue cet oiseau semble lourd, mais il égale les Vanneaux
en agilité, marche et trottine avec aisance, court par saccades, mais
quand c'est nécessaire il sait courir avec rapidité et franchir ainsi un
trajet assez long. Il nage avec facilité et sans y être contraint, mais il
ne s'éloigne jamais de la rive et .ne prolonge pas longtemps cet exer-
cice ; quand il est blessé par un coup de feu et qu'il se trouve près de
l'eau, il s'y jette de suite et plonge même parfois pour échapper à
celui qui veut le saisir. Son vol est vigoureux, rapide, ordinairement
rectiligne et fortement ondulé, mais l'oiseau ne sait pas changer brus-
quement de direction ; il ne s'élève jamais bien haut, sauf pendant les
migrations.
Les Huîtriers se font bientôt remarquer par leur sociabilité, leur
vivacité et leur courage. L'un d'eux est-il rassasié ou s'est-il reposé
un instant, il se met aussitôt à agacer et à pourchasser ses sem-
blables ou d'autres échassiers ; ces agaceries dégénèrent parfois en
combats : le cou et le bec tendus, ils fondent l'un sur l'autre comme
des coqs, se frappant des ailes et se donnant des coups de bec, et la
lutte ne finit qu'avec la fuite du plus faible ; mais ces combats sont
rares, car ces oiseaux sont plus taquins que querelleurs et aiment
surtout à jouer. Dans les lieux où ils nichent, il arrive le plus souvent
que d'autres oiseaux établissent également leur nid ; les Huîtriers
prennent alors la défense de toute la colonie et veillent avec soin à
(1) Bogdanow, Conspeclus avium imperii Rossici, p. 77.
(2) Eeise nach West-Sibirien, p. 13-1
- 141 —
sa sûreté. Pas un oiseau ne passe sans être observé et salué par des
cris ; mais si c'est un ennemi qui approche, que ce soit un Corbeau,
une Corneille, un Milan ou une grande Mouette, les Huîlriers aver-
tissent aussitôt par leurs cris les autres oiseaux, et fondent tous sur
l'ennemi commun, le harcellent et le pourchassent avec fureur jusqu'à
ce qu'ils l'aient mis en fuite. En ceci ils ressemblent aux Vanneaux,
mais ils sont mieux armés que ces derniers et par conséquent plus
certains de la victoire. Les autres oiseaux de rivage reconnaissent
parfaitement le cri d'alarme du cri ordinaire des Huîtriers,
et acceptent volontiers l'autorité de ces oiseaux dont ils savent
apprécier les services. Les Huîtriers sont d'ailleurs extrêmement
vigilants, ne se laissent jamais surprendre et distinguent parfaitement
le chasseur de l'homme inoffensif, aussi est-il fort difficile de les
approcher à portée de fusil.
Le cri d'appel de cette espèce est un sifflement sonore ressemblant
khuip ou kuip, ovi bien kioik kioik keioik keioik; à l'époque de la repro-
duction les mâles font entendre des trilles harmonieux, variés et
soutenus qu'on n'attendrait guère d'un oiseau de son genre.
Son nom fait supposer que cet oiseau se nourrit principalement
d'huîtres, mais c'est là une erreur, car il ne saurait les ouvrir ; on se
demande d'où lui est venu le nom de huîtrier, qu'il porte dans ])resque
toutes les langues ; il est probable que les anciens l'ont nommé ainsi
parce qu'ils croyaient que cet oiseau vivait d'huîtres. Sa véritable
nourriture se compose de divers mollusques, de vers, d'annélides et de
petits crustacés ; près des eaux douces il prend aussi des larves et
des insectes.
Les Huîtriers s'habituent facilement à la captivité et perdent bientôt
leur crainte de l'homme, quand ils sont convaincus qu'on ne leur
veut pas do mal. On les nourrit de pain, de viande hachée, de
pommes de terre cuites écrasées, etc.
Reproduction. — Dans les contrées où les Huîtriers sont séden-
taires, ils commencent à nicher dès la fin d'avril ; dans le Nord, ils
commencent plus tard, parfois pas avant la fin de mai ou même en
juin. Ace moment les couples se forment, les mâles font entendre
leur chant d'amour et se livrent des combats en l'honneur des femelles.
Une fois accouplés, ils vivent tous en bonne intelligence, sans cepen-
dant renoncer complètement à leurs agaceries. Les nids se trouvent
généralement non loin les uns des aiilrcs et souvent entre des nids
d'autres oiseaux.Ils sont ordinairciucnt placés à queUiuc distance de la
— 142 —
mer, ou dans le voisinage d'autres eaux, ou même entre les herbages
d'un pré, pourvu que l'herbe y soit courte. La femelle creuse une petite
fosse arrondie qu'elle garnit de brins et de feuilles de graminées ;
mais il lui arrive souvent de creuser plusieurs fossettes avant d'en
garnir une. La ponte est de deux ou de trois oeufs, rarement quatre.
Ceux-ci sont volumineux, courts ou ovalaires, rarement pyriformes,
à coquille lisse et sans luisant, d'un roux jaunâtre ou d'un cendré
olivâtre plus ou moins foncé, et entièrement couverts de taches
cendrées et brunes, de forme et de grandeur très variables ; ces œufs
mesurent environ 56 millim. sur 40.
La femelle couve peu pendant le jour, mais elle se tient sur les
œufs pendant toute la nuit ; le mâle ne la remplace que rarement,
mais si elle vient à périr, il continue à couver jusqu'à éclosion. La
durée de l'incubation est d'environ trois semaines. Dés que les petits
viennent au jour et qu'ils sont bien séchés, ils suivent leurs parents
qui leur apprennent aussitôt la manière de trouver leur nourriture. Au
moindre danger, les poussins se cachent entre des pierres ou des
herbages, et j restent immobiles tant que les parents ne les appellent
pas. Ceux-ci les conduisent toujours dans des endroits où ils trouvent
facilement à se cacher ; ils font du reste tous leurs eiïbrts pour
éloigner l'ennemi de leur couvée, môme en exposant leur vie. Quand
ils savent voler, les jeunes se séparent de leurs parents et vont
former des petites colonies distinctes, qui s'augmentent de plus en
plus jusqu'au moment du départ de tous.
FAMILLE DES GLARÉOLIDÉS
Car. — Bec plus court que la tête, convexe, large à la base, fendu
jusqu'au dessous des yeux ; ailes très longues, étroites et pointues ;
queue plus ou moins fourchue ; tarses de longueur moyenne, scutellés
en avant et en arrière ; quatre doigts, le pouce reposant à terre.
Mœurs. — Ces oiseaux, si différents des groupes voisins, rappellent
à la fois certains Gallinacés par leur bec, les Hirondelles par leurs
ailes et leur queue, et les Pluviers par leurs allures; aussi leur place
dans la série est-elle encore discutée. Linnée en a fait des Hirondelles ;
Brisson les a admis parmi les Echassiers, et depuis tous les auteurs
ont adopté cette manière de voir, sans s'entendre cependant, sur le
groupe près duquel les Glaréoles devraient être placées. Dans ces
derniers temps, un naturaliste russe, Bogdanow, a créé un ordre
- 443 —
spécial, les Heteroclitœ, dans lequel il comprend les familles des
Pteroclidse, des Thinocoridte et des Glareolidse, et cet ordre est
mis entre les Pigeons et les (xallinacés. Les Glaréoles ressemblent
cependant plus aux Pluviers qu'aux représentants des ces derniers
ordres.
Par leurs moeurs, ils tiennent autant des Pluvians et des Courvites
que des Pluviers et présentent bien un type d'Ecbassiers. Ce sont des
oiseaux voyageurs qui se plaisent dans le voisinage de l'eau, sans être
exclusivement attachés à cet élément. Ils vivent et nichent en société.
Hab. — Cette famille ne comprend qu'un seul genre, dont les espèces
sont répandues dans les parties chaudes et tempérées de l'ancien
monde et de l'Océanie.
GENRE CXI.
GLARÉOL.E. — GLAREOLA.
Glareola, Briss. Ornith.Y, p. 141 (1760).
HiRUNDo (part.), Lin. S:jst. nat. I, p. 345 (1766).
Trachelia, Scop. Ail. I. Hist. nat., p. 110 (1769).
Dromochelidon, Landb. Jahres. Ver. Wiii-tt. 1846, p. 212.
Pratincola, Degl. Orn. eur. Il, p. 106 (1849).
Car. — Bec robuste, plus court que la tête, large à la base, convexe, à
bords des mandibules dessinant une courbe ; narines basales, latérales,
obliques, ovalo-linéaires ; ailes très longues, atteignant ou dépassant l'ex-
1 rémité de la queue, aiguës, étroites, première rémige la plus longue ; queue
plus ou moins fourchue ; tarses médiocres, assez grêles, sciiteliés ; doigts
grêles, le médian réuni à l'externe par une courte membrane ; i)once court
mais bien déveloi^pé ; ongles courts et i-ecourbc>, celui du doigt médi.in
allongé et pectine sur son bord interne.
Hab. — Comme ]a famille.
192. — La Glaréole à collier
GLAREOLA TORQUATA, Briss.
(PI. 192).
Glareola glareola, torquata, senegalensis et n,evl\, Briss. Orniih. V. pp. 141-148
(1760).
Hirundo pratincola, Lin.5y.s7. vat. 1, p 315 (17()() ).
Trachelia pratincola, Scop. An. I. Ilist. val. p. 110 (1769).
Glareola austriaca, Gm. .^i/st. nat. I, p. 695 (1788).
Glareola pratincola, Lcach, Trans. Linn. Sir. XIII, p. i:>l ^^1820).
Pratincola glareola, Degl. Orn. eur. Il, p. 107 (1849).
Glareola limbata, Riipp. Si/sl. Ubers. p. 1 13, pi. 43 (1845).
Dromochelidon nathuphila, Lamlb. .1 ilins. Ver. Xnt. Nat. W'nrtt. iNI'i, p. 228.
- 144 -
Der Halsband-Giarol, en allemand.
The Common Pratincole, en anglais.
De Zwaluw-Pleviek, en tiamand .
Taille : 0,"'23 ; ailes, 0,185 ; tarses, 0,032.
Description du mâle et de la femelle adultes. — Parties supérieures, y com-
pris les scapulaires et les couvertures des ailes, d'un brun cendré tirant un
peu sur l'olivâtre et nuancé de roussâtre à la nuque ; croupion et sus-caudales
d'un blanc pur; rémiges d'un brun noirâtre ; couvertures inférieures des
ailes, les plus internes, et plumes axillaires d'un roux marron vif; gorge et
devant du cou d'un roux jaunâtre clair, encadrés par une bande étroite noire,
finement bordée de blanc, qui prend naissance sous l'œil ; poitrine d'un cen-
dré brunâtre, passant au roussâtre à l'abdomen ; bas -ventre et sous-caudales
blancs; queue blanche à la base, brune à son extrémité, la première rectrice
de chaque côté beaucoup plus longue que les autres et dépassant les ailes.
Iris brun ; bec noir, rouge à la base ; pattes noirâtres.
Jeune. — Parties supérieures brunâtres, toutes les plumes plus ou moins
bordées de cendré ; gorge et devant du cou jaunâtres, mais non encadrés de
noir ; poitrine d'un brun clair ; abdomen, sous-caudales, croupion et sus-cau-
dales d'un blanc assez pur ; rémiges brunes terminées de cendré ; queue
comme chez l'adulte mais plus courte, les rectrices latérales n'atteignant pas
l'extrémité des ailes.
Poussin. — Duvet soyeux, barbelé, assez épais, médiocrement long, surtout
aux parties supérieures, paraissant tondu sur le dos. Parties supérieures d'un
cendré lavé de roussâtre à la tête et aux ailes, et très maculées de noir sur le
vertex et le dos ; trait noir sur les lorums ; gorge et parties abdominales
blanches ; poitrine, dessous des ailes, joues et front d'un fauve rosé ; bec noir
de corne avec marteau blanc ; pieds d'un brun roussâtre (/. Vian).
Hah. — Cette Glaréole habite en été le bassin de la Méditerranée et
de la mer Noire et se montre irré-
gulièrement dans l'Europe cen-
\ traie et occidentale. En 1813,
Graves fit connaître les premières
captures en Angleterre de cette
rare espèce pour nos contrées :
elles datent de 1807 et 1811 ;
M. J. E. Harting signale pour
la Grande-Bretagne et l'Irlande,
vingt et un sujets tués de 1807 à 1871 ; le 10 juin 1874 un
individu adulte a encore été pris à Lizard [Rodd). En Danemark
on ne connaît qu'une seule capture faite le 18 mai 1831 près de
— 145 —
Ulfshale-on-Moen {KjaerhÔlling) ; dans le nord de l'Allemagne
cet oiseau s'est montré accidentellement en Silésie, dans l'Anhalt
et dans le pa3^s de Munster (Borggreve) ; on en a également pris
dans la province Rhénane et en Bavière {Naumann), on Suisse
(Schinz), en Hollande {Temminck) et en Belgique où quelques
individus égarés ont été tués dans la Campine {de Sélys-Longchamps):
de Meezemaker a constaté l'apparition d'un individu de cette espèce
à Bergues en Flandre.
Cet oiseau est assez abondant et niche dans les départements du
midi de la France, où il arrive vers la mi-avril pour émigrer à la
fin d'août {Crespon); il est commun en Espagne {Saunders) et en
Portugal {du Bocage), mais extrêmement rare aux îles Baléares {von
Homeyer) ; en Italie il est rare dans le nord et le centre, plus ou
moins répandu dans les parties méridionales [Salvadori), mais com-
mun aux passages en Sardaigne et niche en Sicile (Giglioli) ; il est
souvent très abondant en Grèce où il niche dans les parties septen-
trionales {Linderinayer) et dans la vallée du Danube inférieur
{Seebohm); cet oiseau est aussi commun dans la Dobrodja que rare en
Bulgarie {Alléon) : assez abondant en Dalmatie {Kolombatoiné) et en
Hongrie près du lac connu sous le nom de Plattensee [Szikla), et se
montre accidentellement en Autriche et même en Bohême {Fritsch) ;
près du Danube et sur les îlots de ce fleuve, on voit des centaines de ces
oiseaux (Finsch). En Russie on rencontre cette Glaréole dans les
steppes des environs d'Odessa, dans la Transcaucasie, le Man-
gychlak^ les bassins de l'Amou-Daria et Syr-Daria, ainsi que sur les
pentes occidentales du Tian-Chan {Bogdanow); il fréquente aussi, en
été, les lacs salés du Turkestan {Severtzoïo) jusqu'à Ala-Kul {Fhisch).
11 est commun sur les côtes de l'Asie Mineure et niche en grand
nombre aux environs de Smyrne, en Palestine {Tristram) et en
Perse {Blanford), et se montre accidentellement dans l'Inde où on en a
tirés dans les provinces de Bombay et de Madras {Jcrdon). Il est fort
difficile d'indiquer ses limites géographiques vers l'Orient, car dans
le S.-E. de l'Asie on rencontre une espèce très voisine {G. orientais),
qui est parfois confondue avec le type européen, dont elle dilfère sur-
tout par une queue plus courte.
Cet oiseau est commun en été dans le nord de l'Afriiiue {Loche,
Drake) ; il est de passage en Egypte en août et septembre et on le
rencontre alors par bandes énormes le long du Nil et dans les marais
quiavoisinentla mer Rouge; en octobre, c'est par milliers qu'on les
TuMK II. — 188'.) ly
— 146 -
voit dans les steppes du Kordofan et du Sennaar et près des lacs et
des côtes de l'Abyssinie {de Heuglhi). C'est donc entre le 10» et le
130 1. N. que cette espèce paraît hiverner. On a cependant capturé
de ces oiseaux encore plus près de l'Equateur : au Sénégal, en
Gambie {Hartlauh) et à la côte d'Or [Frasey) et il est probable qu'ils
hivernent également dans ces contrées. Cette Glaréole a aussi été
observée à Angola {Monteiro), à Damara {Andersson), dans les colo-
nies du Cap {Layard) et de Natal {Ayres), mais il est probable qu'elle
ne se montre qu'accidentellement dans ces contrées.
Mœurs. — Comme nous l'avons vu plus haut, la Glaréole n'habite
l'Europe et l'Asie centrale qu'en été : elle arrive en avril et émigré
à la fin d'août ou en septembre. Etant très sociables, ces oiseaux
voyagent toujours par troupes plus ou moins nombreuses, et leur
nombre augmente à mesure qu'ils avancent vers le Sud ; mais ces
troupes volent sans ordre, très haut, avec une grande vitesse et le
plus souvent pendant la nuit.
Les Glaréoles habitent le voisinage des eaux, et principalement
des lacs et des fleuves; mais elles ne se tiennent pas justement sur
les rives de ces derniers, mais plutôt près des marais et des mares
qui se trouvent aux environs et qui se dessèchent plus ou moins pen-
dant l'été. On les voit près des eaux douces comme près des eaux
salées, mais rarement sur les rives sablonneuses; aussi ne les voit-on
sur les côtes maritimes que pendant les migrations. Elles fréquen-
tent aussi les pâturages et les jachères, d'où leur est venu le nom
hongrois à! Hirondelles de jachères, tandis que dans le Midi on les
désigne vulgairement sous le nom de Perdrix de mer.
Naumann dit avec raison, que les mœurs et les allures de la Gla-
réole à collier sont un mélange bizarre des habitudes naturelles d'oi-
seaux qui n'ont entre eux aucun rapport. Son vol ressemble à celui de
l'Hirondelle; sa voix perçante est absolument pareille à celle d'une
Sterne naine ou d'une Sterne caugek ; les mouvements particuliers de
sa queue rappellent ceux des Motteux; enfin, la vitesse avec laquelle
elle court lui est commune avec les Pluviers. « Peu de temps après
leur arrivée au printemps, dit de Nordmann, ces oiseaux se réunis-
sent en grandes troupes à différentes heures de la journée, et se
divertissent à passer et à repasser au-dessus d'une contrée, remplis-
sant l'air de leurs cris. Ils s'attroupent de même après avoir terminé
l'œuvre de la propagation; ces troupes ne se séparent plus, et cou-
vrent souvent de grandes étendues de terrain dans les steppes arides
-- 147
de la Russie méridionale et sur les grands chemins, où elles montrent
si peu do crainte qu'elles se dérangent à peine à l'approche d'une
voiture ; aussi les tire-t-on très facilement. » L'air est le véritable
élément de cet oiseau, car il fend l'espace avec la vitesse d'une Hiron-
delle, quoique son vol ressemble plutôt à celui des Sternes de petite
taille ; pendant ses évolutions aériennes, on le prendrait réellement
pour un de ces oiseaux, et l'erreur est d'autant plus facile, que son
cri ressemble à celui de certaines Sternes. La Glaréole plane avec
élégance, monte et descend au-dessus des marais et des champs et
happe au passage les insectes qu'elle rencontre ; elle descend par-
fois avec la rapidité d'une flèche, rase l'eau et les prés pendant quel-
ques minutes, pour remonter ensuite dans les régions élevées, et tout
cela avec une aisance et une rapidité étonnantes. Dans tous ses actes,
elle montre une activité, une vivacité et une gaîté remarquables,
aussi ne peut-elle rester un instant en repos; nullement farouche, elle
vole sans crainte autour des passants, mais elle devient parfois mé-
fiante quand elle se voit poursuivie. Crespon dit que quand on appro-
che de Tendroit où est établi son nid, on la voit accourir en criant,
passer et repasser sans cesse au-dessus de soi et fondre même sur les
chiens ; quand on blesse un individu de la bande, tous viennent au-
près du blessé en poussant leurs cris habituels ; cet auteur ajoute qu'il
en abattit un jour six en un instant au même endroit, parce qu'il en
avait démonté un qui criait en courant.
Les Glaréoles à collier vivent généralement par troupes de douze à
vingt individus et, même à l'endroit où elles nichent, les couples ne
s'éloignent guère les uns des autres, mais elles n'aiment pas la société
d'autres espèces. Quand une troupe s'abat dans une plaine, les indi-
vidus qui la composent se dispersent aussitôt sur un grand espace; un
bruit suspect se fait-il entendre, toute la bande s'élève en même temps,
se rassemble dans l'air, plane quelques instants autour d(^, l'endroit
d'où elle est partie et s'envole ensuite au loin.
La voix de cet oiseau ressemble, comme il a été dit, à celle de cer-
taines Sternes; d'après Naumann, le cri peut se rendre par karia-ka-
ria et kei, karia ; il entremêle parfois ces cris d'auti-es sons, comme
par exemple karia bimivedre, karia mitivedre ou mœdre, bcdrœ.
Ces oiseaux se nourrissent d'insectes ctde préférence des plus gros,
tels que hannclons et auti'os (•oi('opton:'S, sautendlos, taupes-grillons,
perce-oreilli's, libellules, (riganes, etc., ainsi que de larves et de
chenilles. En Afrique, ils rendent de grands services en faisant une
- 148 -
guerre à outrance aux terribles sauterelles ou criquets voyageurs qui
forment à certaines époques leur unique nourriture ; ^jarlout, du
reste, où les Glaréoles sont abondantes, elles rendent de grands servi-
ces à l'agriculture. Elles happent leur proie avec rapidité et, d'après
Brehm, la digestion en est si prompte que dix minutes après elles
rendent déjà les débris dans leurs excréments ; elles avalent les insec-
tes tout entiers, comme le fait TEngouievent; von der Miihle dit avoir
trouvé dans l'œsophage de Glaréoles fraîchement tuées, des bupres-
tes, des cicindèles et autres insectes appartenant à des espèces rares,
tellement bien conservés qu'il put les mettre dans sa collection.
Selon Savi, ces oiseaux ne paraissent pas chercher leur nourriture
dans l'eau ; ce naturaliste en garda un plusieurs mois en vie en le
nourrissant d'insectes et de préférence de taupes-grillons ; l'oiseau
refusait de manger tout insecte qu'on jetait vivant dans son baquet
d'eau, tandis qu'il prenait avidement ceux qu'on lui donnait à terre et
il allait même les chercher dans la main de son maître. Suivant de
Heuglin, ces Glaréoles sont très abondantes en août et septembre
près des marais formés par la mer Rouge, où elles se nourrissent de
petits crabes, de mollusques et d annélides ; dans les steppes du Kor-
dofan et du Sennaar, elles se nourrissent particulièrement d'orthop-
tères et de fourmis qu'elles attrapent le plus souvent au vol.
Reproduction, — Cette Giaréole niche dans les pâturages des steppes
dégarnis d'arbres et où l'herbe est courte, dans les champs en partie
cultivés ou dans les plaines plus ou moins arides, mais jamais dans les
endroits marécageux. I^e nid se compose d'une petite fosse naturelle,
négligemment garnie de brindilles et de radicelles ; quelquefois
cependant cette fossette est proprement arrondie et se trouve abritée
par une toulfe de plantes ou par un petit monticule ; mais le plus sou-
vent la femelle se contente de déposer ses œufs sur la terre nue. La
ponte est de deux à quatre œufs, de forme ovale, sans luisant, d'un
jaune terreux pJus ou moins brunâtre ou d'un gris verdâtre^ et ornés
de taches irrégulières brunes ; ils mesurent environ 30 millim. sur 25.
FAMILLE DES SCOLOPACIDÉS
Car. — Bec de forme et de longueur variables, mais ordinairement
plus long que la tôte, parfois très allongé et arqué, en général grôle,
plus ou moins cylindrique, flexible, à extrémité molle et obtuse ou
dure et pointue ; ailes de longueur moyenne, plus ou moins aiguës, à
- 149 -•-
bord postérieur plus ou moins (k'hancré en forme de faucille ; queue
courte, formée de douze à vingt-six rectrices ; tarses grêles, générale-
ment élevés ; doigts antérieurs libres ou réunis à la base par de courtes
membranes, ou bien lobés sur les côtés ; pouce court, rarement absent,
grôlc, pourvu d'un ongle très petit.
Ces oiseaux ont le cou de longueur moyenne, la tête fortement
bombée et de grosseur moyenne. Ils offrent peu ou point de différences
suivant le sexe, mais beaucoup, chez plusieurs espèces, suivant l'âge
et les saisons.
Hab. — On rencontre des Scolopacidés dans le monde entier, des
pôles à l'équateur.
Mœuy-s. — Ces oiseaux vivent dans des endroits humides et maré-
cageux ou près des eaux. Ils sont plus ou moins sociables et se réunis-
sent en automne et en hiver en grandes bandes formées quelquefois
par plusieurs espèces. Presque toutes les espèces qu'on observe dans
notre pays sont des oiseaux de passage.
Chez la plupart des oiseaux de cette famille, le mâle et la femelle
construisent leur nid en commun et couvent alternativement. La ponte
est de deux à quatre œufs.
On peut diviser cette famille en six sous-familles, savoir : les
Tringinœ, les Totaninœ^ les Scolopacinœ, les Limosinœ, les
Numeniinœ et les Phalaropinœ.
SOUS-FAMILLE
DES TRIXGINÉS. — TRINGIN.^
Car. — Mandibule supérieure généralement sillonnée jusque près
de l'extrémité, qui est le plus souvent molle, déprimée, un peu dilatée,
lisse, intérieurement creusée en cuiller ; les deux rectrices médianes
se terminent le plus souvent en pointe et dépassent notablement les
autres ; tarses scutellés en avant et en arrière ; quatre doigts, rare-
ment trois.
GENRE CXII
SANDERLING. — CALIDRIS
Tringa, Briss. Or//. V, p. 230(1700).
TiuNG.v et CnARADRius, Lin., Syst. nat. I, pp. 251, 255 (1766).
Camdris, Cuv. Leç. d'imat. comp. 1, tabl. II (1800).
Arknakia, Hcch-st. Ovn. T'isr/ienh., p. 462» (1 803).
Car. — J)(x un peu jdus court (]iii' la tête, comprimé à la base, légèrement
létréci vers le milieu, ;ï mandibule supérieure déprimée à l'extrémité, «jui
— loO —
est obtuse et très légèrement fléchie à la pointe ; narines basales, latérales,
ovalo-linéaires, placées dans une rainure qui se prolonge jusque près de
l'extrémité de la mandibule ; ailes sur-aiguës, atteignant l'extrémité de la
queue ; celle-ci doublement échancrée : les rectrices latérales et médianes
dépassant un peu les autres ; bas des jambes dénudé ; tarses médiocres ;
doigts libres, pouce nul.
Ce genre ne diffère pour ainsi dire de celui des Bécasseaux que par
l'absence du pouce.
Hab. — Ce genre n'est représenté que par une seule espèce dont
l'aire géographique est très étendue, comme on le verra plus loin.
193. — Le Sanderling des sables
CALIDRIS ARENARIA, Illig. ex Lin.
(PI. 193).
Tringa CALIDRIS GRisEA MiNOR, Briss. Oni.\, p.. 236(1760).
Tringa ARENARIA et Charadrius CALIDRIS, Lin Syst. nat. I, pp. 251, 255 (1766).
Charadrius rubidus, Gm. Syst. nat. I, p. 688 (1788).
Arenaria vulgaris, Bechst. Orn. Taschenh. p. 462» (1803).
Arenaria grisea, Be(i\iS,i. Naturg . DeutscJil. III, p. 368 (1809).
Arenaria CALIDRIS, Mey. Tasclienb. Deuts. Voyelk., II, p. 326 ,;_1810).
Calidris arenaria, Illig. Prodr. p. 249 (1811).
Calidris rubidus, Vieill. N. Diction. cVhist. nat. XXX, p. 127(1819).
Calidris tringoides, Vieill. Gai. des Ois. III, p. 95 (1825).
Trynga tridactyla, Pall. Zoogr. Rosso-As. II, p. 198 (1826;.
Calidris grisea et americana, Brm. Isis., 1830, p. 991.
Calidris MULLERi, Brm. Yogelf. p. 318 (1855).
Der Ufer Sanderling, en allemand.
The Sanderling, en anglais.
De Drieteenige Strandlooper, en flamand.
Taille : 0,'n65 ; ailes, 0,121 ; bec, 0,026 ; tarses, 0,023.
Description du mâle et de la femelle adultes en été. — Parties supérieures
d'un brun noirâtre, mais toutes les plumes bordées de roux vif et terminées
de cendré clair ; face, cou et poitrine roux, chaque plume brune au centre
et terminée de blanchâtre ; couvertures des ailes brunes bordées de blan-
châtre, les scapulaires de roux ; rémiges brunes ; abdomen et sous-caudales
d'un blanc pur ; queue cendrée, les rectrices médianes brunes avec un peu de
roux. Bec, iris et pattes noirâtres.
AJâle et femelle en hiver. — Parties supérieures d'un gris cendré clair, le
centre des plumts légèrement brunâtre ; face, joues et parties inférieures d'un
iol
blanc pur ; petites couvertures des ailes brunâtres, les autres bordées de
blanchâtre ; queue comme en été, mais plus pâle et sans roux.
Jeune. — Diffère du plumage d'hiver par les plumes du dessus de la tête
et du dos qui sont noires bordées de blanchâtre ; nuque cendrée ; scapulaires
d'un cendré brunâtre, tachées de blanc sur les bords.
Cette espèce est toujours facile à reconnaître à l'absence du pouce,
Hab. — Le Sanderling habite, en été, toute la zone polaire
arctique jusqu'au delà du 82**
{Seebohm, de Ileicgîin) ; suivant
le professeur Newton, il ne ni-
cherait pas au sud du 68° 1. N. En
Islande on ne le rencontre que
sur la côte septentrionale et sur-
tout sur l'île Grimsoe, placée
sous le 67°;- mais Faber n'y a
pas trouvé de nid. M. Seebohm
dit à ce sujet : « Jusqu'ici on n'a trouvé des oeufs que près du fleuve
Andersen (68°), dans le Grinnell (82 1/2°), au Groenland, à l'île Sabine
(74 1/2°) et en Islande (65°). » Cet oiseau abandonne les régions
polaires en automne, et il est alors plus ou moins commun sur
toutes les côtes de l'Europe occidentale, mais il est peu abondant sur
celles de la Baltique. Il est commun aux deux passages sur tout le
littoral de la Belgique et on en voit alors souvent sur les bords de
l'Escaut. Il hiverne sur les côtes du midi de la France {Lacroix), de
l'Espagne (^<:«mrfer6-), du Portugal (du Bocage), de VliBWQ{Giglioli),
mais on ne le voit en Grèce qu'au passage {Lindermayer). Il a été
observé sur les côtes de la Palestine (T/ 76-^/ -^zm) et il est probable qu'il se
montre aussi sur le littoral de l'Asie Mineure.
Cet oiseau hiverne également sur toutes les côtes de l'Afrique, mais
il est rare sur le littoral de la Méditerranée {Loche) et peu abondant
sur la côte septentrionale de l'Egypte, mais il est commun près de la
mer Rouge jusqu'àAden {de Heuglin), sur les côtes du Maroc et de
toute lAfriqueoccidentale jusqu'au cap de Bonne-Espérance (Shcllet/),
ainsi qu'aux îles Canaries (Z^o/Zc) et Madeiro [Godman) ; sur le litto-
ral oriental, il a été observe à Mozambique {de Heuglin, etc.), à Natal
{Qurne^j) et même à Madagascar {Neioton).
En Asie, cette espèce est de passage sur toutes les côtes et au
bord des grands lacs salés de la Sibérie {Bogdannw), de la Chine et
du Japon {Scklégcl) ; elle hiverne sur les côtes méridionales, mais
- 152 -
elle est rare sur celles de l'Inde, de Ceylan et de l'Indo-Chine
{Jerdon, Seebo/wi), et a même été capturée aux îles de la Sonde,
car le musée de Leyde possède un spécimen de Java {Srhlégel).
Dans le nouveau monde, le Sanderling est commun dans la zone
polaire arctique et il est de passage sur tout le littoral de l'Amérique
septentrionale [Coues) ; il hiverne sur les côtes méridionales des
Etats-Unis, de l'Amérique centrale, des Antilles, de l'Amérique mé-
ridionale jusqu'au Brésil (i?t«rmez5/er) et le Chili {Schlégel), et proba-
blement jusqu'en Patagonie.
Mœurs. — Les Sanderlings émigrent de la zone polaire à partir du
commencement de septembre, mais les passages continuent souvent
jusqu'en novembre. Ils voyagent pendant la nuit en bandes plus ou
moins nombreuses et en suivant les côtes maritimes. Il est cependant
certain qu'un certain nombre d'individus suivent aussi les fleuves et les
rivières, car on en rencontre parfois loin de la mer, par exemple près du
Volga, du lac Baikal et autres eaux de l'intérieur. On en a même
observés et tués dans le centre de l'Allemagne [Naumann), en Suisse
{Schinz), en Bohême {Fritsch), en Transylvanie {Danfo?^d), en Po-
logne, etc. M. Taczanowski dit avoir rencontré, à la fin d'octobre
1853, de petites troupes de ces oiseaux ou des individus isolés mêlés
à des Bécasseaux, dans plusieurs localités aux bords de la Vistule.
M. Finsch en a observés à plusieurs reprises dans la tundra de la
Sibérie occidentale au nord du Schtschutschja. Ces oiseaux ne retour-
nent qu'en avril dans les régions boréales.
Le Sanderling est un charmant petit oiseau, paisible et confiant,
qu'il est facile d'observer ; on peut l'approcher jusqu'à une distance
d'une dizaine de mètres, et quand il se sauve, il ne s'éloigne jamais
que de quelques mètres, aussi est-il très facile de le tirer. Naumann
rencontra un jour sur les bords du lac salé de Mannsfeld, cinq de ces
oiseaux qu'il put observer longtemps à une distance de huit à dix pas
avant de les capturer. « Ayant fouillé ma gibecière, dit-il, j'y trouvai
quelques collets en crin que je disposai tant bien que mal sur le sable ,
Je me mis alors à rabattre doucement ces oiseaux ; mais, comme mes
collets étaient mal tendus, je dus recommencer plusieurs fois l'opéra-
tion ; je finis cependant par en prendre trois. Les deux qui restaient
étant devenus plus défiants, je finis par perdre patience et je les tuai
d'un coup de fusil. » Le bruit d'une arme à feu ne les effraie pas
toujours, et l'on peut quelquefois tirer dans une bande sans que les
survivants cherchent à se sauver : ils se contentent de s'éloigner de
quelques pas.
— 153 —
Ces oiseaux sont excessivement sociables; CLuand ils sont peu nom-
breux, ils se mêlent souvent à des troupes de Bécasseaux qu'ils
prennent aussitôt pour guides, et ils deviennent alors aussi farouches
que certains de ces derniers, fuyant avec eux au moindre danger ;
mais dès qu'ils se retrouvent entre eux, ils reprennent leur vie insou-
ciante. Ils ont une démarche gracieuse et aisée et savent courir avec
rapidité ; leur vol est aussi facile que rapide. Quant à leur voix, c'est
un cri sifdant, bref, doux qu'on peut rendre par pitt ou loick.
Ils se nourrissent d'une foule de petits animaux que les vagues re-
jettent sur le rivage, tels que annélides, mollusques, petits crustacés,
etc. ; à l'occasion ils prennent aussi des vers, des larves et des insec-
tes. Naumann dit que quand ces oiseaux trouvent un endroit où la
nourriture est abondante, ils oublient complètement, dans leur joie, de
veiller à leur sécurité.
Les Sanderlings s'apprivoisent facilement et deviennent très fami-
liers. On peut les nourrir de mouches et de vermisseaux mêlés à du
pain trempé dans du lait.
Reproduction. — Il a été dit plus haut que les Sanderlings ne se
reproduisent que dans les régions boréales. C'est Mac Farlan qui
paraît avoir rapporté les premiers œufs authentiques de cette espèce.
Il découvrit un nid le 29 juin 1863 sur la côte de l'océan Glacial, un
peu à l'est du fleuve Andersen, dans le nord-ouest de l'Amérique;
ce nid contenait quatre œufs et la femelle fut prise sur son nid.
Le 24 juin 1876, le capitaine Feilden rencontra de ces oiseaux,
également près de l'océan Glacial, mais un peu à l'ouest du cap de
l'Union, et découvrit en même temps un nid avec deux œufs. Il était
placé sur une éminence de gravier à plusieurs centaines de pieds
au-dessus du niveau de la mer, et consistait simplement en une légère
dépression au centre d'un saule nain rampant, garnie de quelques
feuilles mortes et de chatons do l'année précédente. Près de ce nid
on tua le mâle, de sorte qu'il est à présumer que les deux parents
jouent un rôle dans l'incubation des œufs. Vers le 8 août, le capitaine
Feilden vit plusieurs groupes de jeunes Sanderlings qui étaient à
peine capables de voler et qui avaient encore du duvet adhérent à
leurs plumes; ils allaient sous la conduite do leurs parents et cher-
chaient activement des insectes.
Suivant M. Seebohm, la ponte est de quatre œufs, d'un jaune oli-
vâtre et marqués de taches compactes d'un brun olivâtre, sous
lesquelles existent quelques macules peu distinctes d'un gris violacé;
ToMB II. — 1889. 20
- 154 -
ces taches sont tantôt plus nombreuses vers le gros bout, tantôt
uniformément dispersées sur toute la surface. Ils mesurent de 1,35
à 1,44 pouce sur 0,93 à 0,99 (mesure anglaise).
OENRE CXIII
BÉCASSEAU. — TRINGA.
Calidkis, Briss. Ornith. v. p. 226 (1760).
Tringa, Lin. Syst. nat.I, p. 247 (1766).
NuMENius, Lath. Ind. Orn. II, p. 712 (1790).
Erolia, Vieill. Anal. p. 55 (1816).
TOTANUS, Steph. Gen. zool. XII, p. 146 (1824) .
Calidris, Pelidna, C\l^r.Règ. an. I, pp. 525, 526 (1829).
Leimonites, ancylocheilus, actodromas, Kaup, Nat. Syst., pp. 37, 50, 55 (1829).
Canutus, Brm. Isis., 1830, p. 991.
ScHŒNiCLUS, Gray, Cat. Br. Mus. Grallae, p. 106 (1844).
Arquatella, Baird, B. ofAm. p. 717 (1858).
Heteropygia, Coues, Fr. Phil. Acacl. 1861, p. 199.
LiMNOciNCLUs, Gould, Hanclb. B. Austr. II, p. 254 (1865).
Car. — Bec un peu plus long que la tête, épais, comprimé à la base,
rétréci vers le tiers antérieur, dilaté et légèrement déprimé à l'extrémité de
la mandibule supérieure ; narines basales, linéaires, placées daus un sillon
très étendu ; ailes alloDgées, aiguës, atteignant ou dépassant l'extrémité de
la queue, première rémige la plus longue ; queue courte, conique, les deux
rectrices médianes dépassant un peu les autres ; bas des jambes dénudé sur
une petite étendue ; tarses médiocres, scutellés ; doigts libres, bordés, le
pouce court, ne reposant sur le sol que par son extrémité ; ongles courts,
obtus.
Hah. — Ce genre est cosmopolite.
194. — Le Bécasseau canut.
TRINGA CANUTUS, Lin. ex Briss.
(PL 194).
Calidris, Calidris n^via, grisea et Canutus, Briss. Ornith. v. pp, 226, 230, 233,
258 (1760).
Tringa ferruginea, Briinn. Orn. bor. p. 53 (1764).
Tringa CANUTUS, calidris et islandica. Lin. Syst nal. p. 251 (1766).
Tringa AUSTRALis, n^evia et grisea, Gm. Syst. nat., pp. 679, 681 (1788).
Tringa rufa, Wils. Am. Orn. VII, p. 43, pi. 57, f. 5 (1813;.
Tringa cinerea, Tem. Man. d'Orn. p. 404 (1815).
Calidris islandica, Ross, Voy. of Disc. éd. 2, II. app. IV, p. 167 (1819).
Canutus islandicus et cinereus, Brm. Isis, 1830, p. 991.
Calidris canutus, Gould, B. ofEur. IV, pi. 324 (1837) .
Tringa lomatina, Licht. Nomencl. av. p. 92 (1854).
Tringa cooperi, Baird, Cass. etLawr. B. N. Am. p. 716 (1858).
Actodromas cooperi, Ridgw. iVow. N. Am. B. p. 44(1881).
- 1S5 —
Der Islandische Strandlaufer, en allemand.
The Knot, en anglais.
De Kanoet-Strandlooper, en flamand.
Taille : 0",21 ; ailes, 0,175 ; bec, 0,032 ; tarses 0,030.
Description des deux sexes adultes en été. — Dessus de la tête et du cou
d'un cendré roussâtre avec de larges mèches noires au vertex et des stries
brunes à la nuque; dos noir, les plumes bordées de roussâtre ; scapulaires
noires, terminées de cendré clair et marquées de grandes taches d'un roux
ferrugineux ; bas du dos d'un cendré brunâtre avec les plumes bordées de
blanchâtre; croupion et sus-caudales blancs avec des croissants noirs et
variés d'un peu de roux ; couvertures des ailes brunes bordées de cendré ;
rémiges noirâtres avec les baguettes blanches ; sourcils, joues, gorge, devant
du cou, poitrine et abdomen d'un roux ferrugineux, plus pâle autour du bec;
bas-ventre et sous-caudales blancs tachetés de brun, les dernières variées
de roux de rouille; rectrices cendrées hsérées de blanc. Bec et pattes noirâtres,
iris brun.
Eti hiver. — Parties supérieures d'un cendré clair avec de petites mèches
brunes sur la tête, la tige des plumes dorsales et des scapulaires également
brune ; couvertures des ailes et queue comme en été, mais d'une teinte plus
pâle ; sus-caudales blanches, mais terminées par un croissant noii'âtre ;
parties inférieures d'un blanc pur avec des taches allongées brunes au devant
du cou et des marques en zigzags de même couleur à la poitrine et sur les
flancs.
Jeune. — Parties supérieures d'un cendré obscur tirant sur le verdâtre,
avec des taches allongées brunes sur la tête et sur le cou ; plumes du dos et
scapulaires terminées par deux croissants étroits : le supérieur brun, l'infé-
rieur blanchâtre ; gorge et abdomen blancs ; devant du cou et poitrine lavés
de roussâtre et marqués de taches angulaires brunes et d'autres en zigzags
sur les flancs.
Hab. — Le Bécasseau canut habite, en été, la zone polaire arc- '
^333:^;,,:^. .=:^™ tique jusqu'au S2"2T 1. N.,mais
il n'a été observé ni au Spilz-
'1 berg, ni à la Nouvelle-Zemble.
■■Hi^l II commence à émigrer en août
et continue à arriver dans nos
, .. . ^ifc .1.1 ' contrées jusqu'en octobre ; on
^' . : le rencontre alors en grand
" : -" nombre sur les côtes de l'Europe
iL*^...-^- •-.- . .i_.-.. _.^:^- _--■-.! .-•r — L^-^; septentrionale, mais il est tou-
jours peu abondant sur celles de la Baltique [Borggrevc), de la Suède
Nilsson) et rare sur celles de la Finlande [BUchnev).
■■^♦^:-
— 156 —
Cet oiseau hiverne en plus ou moins grand nombre sur toutes les
côtes de la Grande-Bretagne et de l'Irlande {Seebohm), de la Hollande
{Schlégel) et de la Belgique, et il est même abondant sur l'Escaut à
partir de Bath, mais au printemps on le rencontre plus en aval
{Croegaerty, il est également commun sur les côtes de France : on le
rencontre en Picardie et aux environs de Dunkerque près de six mois
de l'année {Degland et Gerbe) «
Sur le littoral de l'Espagne et du Portugal il est de passage en
automne et au printemps [Saunders ,Reyes)'., lord Lilford l'observa par
milliers, le 10 mai, dans la Marisma près San-Lucar, en plumage
de noce et partant pour le Nord. Il est très rare en hiver sur les côtes
de la Méditerrannée et de l'Adriatique {Salvadori, Krûper) ; cepen-
dant, lors des passages, on le voit en grand nombre dans certaines
parties de l'Italie, venant de l'Afrique occidentale ou s'y rendant
[Seebohm) ; c'est aussi aux passages qu'on l'observe en petit nombre
en Grèce [Lindermayer^, en Turquie {Elwes et Backley) et il ne
serait pas rare à ces époques en Transylvanie [Danford) et sur les
côtes russes de la mer Noire [de Nord^nann). Ce n'est que très acci-
dentellement qu'on le rencontre à l'intérieur des terres, comme en
Bohême {Fritsch), en Pologne {Taczanowski), dans le centre de
l'Allemagne {Naumann) et en Suisse [Schinz).
Sur les côtes occidentales de l'Afrique, on le rencontre en hiver
jusqu'au pays de Damara [Andersson).
Cette espèce paraît bien moins répandue en Asie, et on ne l'a
jamais observée au Kamtchatka. En été elle habite les tundras du
nord de la Sibérie [Bogdanow) ; elle paraît être rare dans la région
méridionale de la Sibérie orientale {Taczanowski); l'abbé David dit
qu'au commencement du printemps et en automne jusqu'aux jours
des grands froids, on voit des volées nombreuses de ces oiseaux sur
les plages de Takou et sur beaucoup d'autres points des côtes de
l'empire chinois ; il est de passage au Japon {Seebohm) ; suivant Gould
un sujet aurait été tué en Australie dans la baie Moreton ; on le prend
parfois aussi, en hiver, sur les côtes orientales de la Nouvelle-
Zélande {Buller). Jerdon le comprend dans les oiseaux de l'Inde, mais
M. Hume fait remarquer que le Bécasseau capturé dans ce pays
appartient à une espèce voisine, le T. crassirostris, et non au T. ca-
nutus comme on l'a cru d'abord.
En Amérique il habite le nord du Groenland {Holbôll) et les
autres parties boréales ; il se montre aux passages ou en hiver sur
— 157 —
toutes les côtes orientales des Etats-Unis (fîn^/rti) jusqu'au Brésil:
M. Burmeister dit qu'on le rencontre en hiver sur tout le littoral bré-
silien. Cet oiseau ne se montre jamais sur les côtes américaines du
Pacifique.
Mœurs. — Le Bécasseau canut émigré des régions boréales vers
la fin d'août, mais les passages continuent jusqu'aux derniers jours
d'octobre ; ce n'est qu'en mai qu'il retourne dans la zone polaire. Nau-
mann dit avoir vu à la fin de mai et au commencement de juin, de
grandes quantités de ces oiseaux sur les plages allemandes de la mer
du Nord, et que ce n'était que vers le milieu du dernier mois, qu'ils
avaient complètement disparu. Les individus qui ont hiverné sur les
côtes occidentales de l'Afrique et du midi de l'Europe, prennent, à
leur retour dans le Nord, deux routes différentes : à partir de Calais
et de Dunkerque, les uns suivent les côtes occidentales des îles Bri-
tanniques pour se diriger vers l'Islande et le Groenland ; les autres,
au contraire, longent les côtes orientales de l'Angleterre et de
l'Ecosse ou celles de la Belgique, de la Hollande, de l'Allemagne et
de la Norwège pour se rendre au cap Nord et dans la Russie septen-
trionale. Ces migrations ontlieupar troupes plus ou moins nombreuses
et souvent par bandes de plusieurs centaines d'individus. Ces oiseaux
voyagent généralement la nuit, surtout au crépuscule et à l'aurore, et
suivent généralement le littoral; ce ne sont le plus souvent q le des
jeimes sujets que l'on rencontre près des eaux douces de l'intérieur,
où on en voit parfois quatre, cinq et jusqu'à douze ensemble. M. See-
bohm fait remarquer que sur les côtes britanniques, on observe par-
fois à toute époque de l'été, de vieux sujets qui ne paraissent plus
disposés à aller nicher dans les régions boréales, préférant passer la
belle saison là où ils ont probablement vécu pendant l'hiver.
Ce Bécasseau est très actif et remuant; il court avec grâce et
rapidité sur le rivage aussi bien que sur des végétaux flottants;
quand le terrain sur lequel il se meut est peu solide ou boueux,
il relève les ailes, autant pour se maintenir en équilibre que pour
se rendre plus léger et éviter d'enfoncer dans la bouc; au besoin,
dit Naumann, il sait nager, mais il ne se livre à cet exercice
qu'en cas de nécessité. Bien qu'il sache fort bien courir, il ne
paraît cependant pas pouvoir soutenir une course rapid(^ aussi
longtemps que les Pluviers, et préfère voler i»our se trans|>orter à
une certaine distance. Son vol est du reste fjicile, ra[iide et recti-
ligne: il vole généralement bas, surtout quand il franchit l'espace
- 158 -
au-dessus de l'eau ; mais il sait, quand cela lui convient, s'élever à
une grande hauteur.
Lorsqu'une troupe de ces oiseaux s'abat dans un endroit, ils s'épar-
pillent ordinairement sur un grand espace ; mais, malgré leur viva-
cité et leurs joyeux ébats, ils n'oublient jamais de veiller à leur sûreté.
De tous les Bécasseaux, ils sont peut-être les plus farouches : ils
fuient tout ce qui leur semble suspect, et le chasseur a souvent
bien de la peine pour les approcher à portée de fusil ; les jeunes se
montrent moins défiants, parce qu'ils ne connaissent pas encore les
dangers auxquels ils sont exposés, mais ils ne tardent guère à s'aper-
cevoir qu'ils ont plus à craindre chez nous que dans la froide patrie
qui leur a donné naissance.
C'est un oiseau très sociable, mais il ne recherche la compagnie
d'autres espèces que quand il se trouve isolé ; on ne les voit ordinai-
rement que par troupes, et plus ils sont nombreux, plus il est difficile
de les approcher. Leur cri est sonore, sifflant et peut se rendre par
tui ou twi et twitwi ; on l'entend surtout quand une troupe prend son
vol, mais rarement pendant la migration d'automne.
La nourriture du Bécasseau canut se compose de vers, de mollus-
ques, de petits crustacés, d'insectes et de larves aquatiques, qu'il
cherche dans l'eau ou dans la boue.
Reproduction. — Cet oiseau niche dans les régions boréales, mais
on ne connaît encore rien de bien positif sur ses œufs. En 1820,
Sabine vit un grand nombre de ces oiseaux nichant à l'île Melville
sous le 80"; en 182311 en vit également à la péninsule de Melville
sous le 67" ; Richardson dit que cette espèce niche dans la baie d'Hud-
son à partir du 55' ; en 1876, le capitaine Feilden captura au
Grinnell (82 1/2"), un couple accompagné de leurs petits en duvet ;
M. Hart, naturaliste américain, se procura sur la même côte, sous le
81 3/4° des jeunes en duvet, mais aucun de ces explorateurs ne parvint
à se procurer des œufs. Suivant le nombre des poussins qui accompa-
gnaient leurs parents, il y a lieu de supposer que la ponte est de quatre
œufs.
Brehm et Paessler disent que le Bécasseau canut creuse lui-même
une petite fosse pour ses œufs, que ceux-ci sont de la grosseur des
œufs du Scolopaœ gallinago, d'un jaune olivâtre ou brunâtre avec des
taches profondes cendrées et jaunâtres et d'autres, superficielles, d'un
brun noirâtre.
— 159 —
195. — Le Bécasseau maritime.
TRINGA MARITIMA, Briinn.
(PI. 195)
Tringa MARITIMA, Briinn. Orn. bor. p. 54 (1764).
TRINGA NiGRiCANS, Mont. Trans. Linn.Soc. IV, p. 40 (1798).
Tringa canadensis, Lath. Incl. orn. II, suppl. p. 65 (1802).
Trynga arquatella, Pall. Zoogr. Rosso-As. Il, p. 190 (1811).
ToTANUs maritimus, Stepli. Shaw^s Gen. zool. XII, 2, p. 146 (1824).
Tringa littoralis, Brm. /ses, 1830, p. 991.
Arquatella maritima, Coues, Proc. Phil. Acad. 1861, p. 183.
Tringa striata, Dress. (nec Lin.), Hi^it. Birds of Eur. Mil p. 69 (1877 .
Arquatella couesi, Ridgw, Nutt. Orn. Club, 1880, p 100.
Der See-Strandlaufer, en allemand.
The Purple Sandpiper, en anglais.
De Paarse-Strandlooper, en flamand.
Taille: 0,18 ; ailes 0,128 ; bec 0,035 ; tarses 0,026.
Description des deiùx sexes adultes en été. — Dessus de la tête et nuque
roux striés de noir ; raie sourcilière et base du front blancs ; côtés de la tête
blanchâtres striés de brun ; parties supérieures d'un noir violacé, avec les
plumes du manteau et les scapulaires bordées et tâchées transversalement de
roux; gorge blanchâtre : devant du cou et poitrine d'un cendré blanchâtre
avec des taches d'un cendré noirâtre; abdomen d'un blanc pur ; flancs mar-
qués de taches oblongues cendrées ; couvertures des ailes d'un noir violacé
bordées de blanchâtre; rémiges noirâtres, les secondaires terminées par un
peu de blanc; rectrices médianes noires, les autres cendrées. Bec brun, jaune
à la base; pattes d'un jaune d'ocre ; iris brun.
JSn hiver. — Tête et dessus du cou d'un cendré brunâtre foncé tirant un
peu sur le violet ; manteau et scapulaires noirâtres, mais toutes les plumes
bordées de gris violacé; bas du dos et sus-caudales noirs; gorge d'un blanc
varié de cendré; poitrine et flancs d'un cendré un peu plus pâle que la tête,
ces derniers variés de blanchâtre ; abdomen blanc ; le reste du plumage
comme en été.
Jeune. — Une étroite raie sourcilière et menton blancs ; front, loruuis et
joues d'un gris clair pointillé et strié de noirâtre ; dessus de la tète noir avec
les plumes bordées de roussâtre ; nuque et côtés du cou d'un gris clair, mais
tachés et striés de noirâtre; devant du cou et haut de la poitrine d'un lirun
noirâtre avec les plumes bordées de blanchâtre ; manteau et scapulaires noirs
avec les plumes bordées de roux jaunâtre et terminées de blanc; couvertures
des ailes cendrées, bordées de ronx et terminées de blanchâtre chez los plus
grandes; rémiges d'un brun noirâtre, les secondaires bordées de blanc; bas du
— 160 ~
dos et sus-caudales noirs, chaque plume bordée de cendré ; rectrices mé-
dianes d'un brun noirâtre, les autres d'un cendré brunâtre ; parties infé-
rieures d'un blanc pur, les sous-caudales avec une strie médiane noirâtre.
Hab. — Cette espèce habite également, en été, la zone boréale, où
on la rencontre jusqu'au Groen-
land {Holhôll), au Spitzberg et à
la Nouvelle-Zemble {de Heuglin)\
elle est sédentaire au Sud du
Groenland, en Islande, aux îles
Féroé et sur les côtes de la
Norwège. p]n hiver on ob-
serve cet oiseau sur toutes les
côtes rocailleuses du Danemark
{Kjaerbôlling)^ du Schleswig-Holstein {vonHomeyer), àn^.-O. àQ
l'Allemagne (Naumann), de la Hollande {Schlégel) et des îles
Britanniques {Seebohm) ; il est peu abondant en Belgique où on
ne l'observe qu'au passage près de la mer et des bouches de
TEscaut. En octobre et en novembre on le rencontre sur les côtes
de Dunkerque et de Calais, mais on ne l'y voit pas chaque année
[Degland et Gerbe) ; on l'observe aussi sur les côtes rocheuses
de l'Espagne [Saunde^-s) et du Portugal {du Bocage) jusqu'à
Gibraltar (/r&2/). On ne le voit qu'accidentellement sur les côtes de
l'Italie {Salvadori, Giglioli), de la Grèce {Krilper) et des Cyclades
{Erhardt) ; sa présence ne semble pas avoir été constaté en Autriche,
mais il paraît qu'on a capturé un individu en 1857, sur le lac Neu-
siedel en Hongrie {Jucoivitz).
M. Du Cane Godman a signalé l'apparition d'une petite troupe de
ces oiseaux aux Açores, mais on ne paraît pas en avoir observés sur
les côtes africaines ; le Ur. 0. Finsch dit cependant avoir examiné un
individu de cette espèce provenant du cap de Bonne-Espérance.
En Asie ce Bécasseau semble relégué dans les tundras de la Sibérie
septentrionale {Bogdanoiv) ; Middendorff en a tué trois exemplaires
sous le 75°, mais aucun voyageur n'a observé cette espèce ni dans la
Sibérie orientale, ni au Kamtschatka ; les sujets capturés sur les îles
Bering et Copper ont été décrits par M. R, Ridgway sous le nom de
Arquatello, couesi.
En Amérique cette espèce ne paraît guère être très répandue :
elle habite les parties boréales, surtout l'Alaska {Turner) ; en hiver
— 161 —
elle se montre sur les côtes américaines de l'Atlantique jusque
vers le 40° 1. N. {Baird, Coues), rarement près des grands lacs
{Cooke).
Mœurs. — Le Bécasseau maritime émigré en septembre des con-
trées boréales, mais il hiverne dans tous les pays du Nord où les
côtes restent plus ou moins libres de glace ; c'est pour cette raison
qu'on ne le voit pas chaque hiver en grand nombre sur les côtes de
l'Europe occidentale ; son abondance chez nous correspond donc aux
hivers rigoureux dans le Nord. C'est en septembre etsurtouten octobre
qu'il fait son apparition sur notre littoral ; il retourne dans sa patrie
en avril et en mai. Ces voyages ont lieu j)ar troupes de vingt à trente
individus, le plus souvent pendant la nuit et en suivant les côtes mari-
times ; dans certains pays on les voit arriver par bandes formées de
plusieurs centaines d'individus.
Bien que la mer ne lui soit pas indispensable, il passe cependant
près d'elle la plus grande partie de l'année ; cet oiseau se montre sou-
vent, en été, dans des endroits boueux ou marécageux des régions
élevées, et qui se trouvent parfois loin dans l'intérieur ; mais il
recherche surtout les endroits rocailleux, les falaises et les rochers
escarpés battus sans cesse par les flots.
Par son naturel, il ressemble à ses congénères ; c'est un oiseau vif
et remuant, courant avec agilité sur les falaises et les récifs en
évitant avec adresse les vagues qui viennent se briser à ses pieds ;
Naumann dit que ce Bécasseau sait fort bien nager et qu'il s'aventure
même à une assez grande distance du rivage, ce qu'aucun autre
oiseau de son genre n'oserait entreprendre. Son vol est facile, élégant,
rapide et varié ; on le voit souvent raser avec rapidité la surface
de la mer en suivant les ondulations des vagues. C'est le plus confiant
et le moins craintif des Bécasseaux : il ne s'inquiète nullement de la
présence de l'homme, et se laisse même approcher jusqu'à la distance
de ({uelques pas. Il est très sociable, vit en bonne intelligence avec
ses compagnons, et si on ne le voit que rarement mêlé à d'autres
espèces, c'est que les localités qu'il fréquente ne conviennent pas
aux autres. Son cri est sonore et sifflant, mais difficile à rendre par
des mots.
Cet oiseau se nourrit principalement d'annélides, de petits crusta-
cés et de mollusques marins, rarement de larves et d'insectes, qu'il
ne trouve d'ailleurs qu'exceptionnellement dans les lieux qu'il fré-
quente d'Iiabitude.
TuME II. — 188'.». -^l
— 162 -
Reproduction. — Aux îles Féroé, le Bécasseau maritime com-
mence à nicher vers le milieu du mois de mai ; plus au nord la
reproduction est retardée jusque dans le courant de juin, et dans la
Nouvelle-Zemble, selon de Heuglin, la ponte n'a lieu qu'en juillet.
Cet oiseau niche dans les falaises, dans les rochers et même dans
les montagnes situées loin des côtes, plus rarement dans les endroits
rocailleux des vallées et près des mares d'eau douce. Le nid se com-
pose d'une petite fosse garnie de quelques brins et protégée par des
herbages ou des cailloux. La ponte est de trois ou quatre œufs, dont
la couleur fondamentale varie entre le jaune olive et le brun fauve ;
ils sont ornés de taches, de points et de stries d'un brun noirâtre,
plus serrés vers le gros bout ; ces œufs mesurent 37 millim. sur 26.
Les parents témoignent beaucoup d'attachement à leurs petits ;
quand quelqu'un s'approche, ils volent à sa rencontre, courent autour
de lui en traînant les ailes, et cherchent à éloigner l'ennemi de leur
couvée en attirant l'attention sur eux.
196. — Le Bécasseau cocorli.
TRINGA SUBARQUATA, Tem. ex Gûld.
(PL 196).
ScoLOPAX SUBARQUATA, Giild. iVotJ. Comm. Petrop. XIX, p. 471 pi. 17 (1775).
SooLOPAX AFRiCANA et PYGM^A, Gm. Syst. nat. 1, p. 655 (1788).
NuMENius AFRiCANus et PYGM^us, Lath. Ind. Orn. Il, p. 712 (1790).
ScoLOPAX DETHARDiNGii, Siemss. Handb. Meckl. Land-u. Wasservogel, p. 149 (1794).
Tringa islandica, Retz, (nec Lin.) Faun. Suec. p. 192 (1800).
NuMENius SUBARQUATA, Bechst. Orn. Taschenb. II, p. 276 (1803).
NuMENius FERRUGiNEUs, Mey. Tccschenb. II, p. 395 (1810).
Trynga falcinella, Pall. Zoogr. Rosso- As. II, p. 188 (1811).
Tringa subarquata, Tem. Man. d'Orn.Y) 393 (1815).
Tringa pygm^a, Leach, Syst. cat. M. B. Br. Mus. p. 30 (1816).
Erolia tariegata, Vieill. Analyse., p. 55 (1816).
Falcinellus pygm.eus, Cuv. Règ. an. I, p. 486 (1817).
Ancylocheilus subarquatus, Kp. Nat. Syst. p. 50 (1829 .
Pelidna SUBARQUATA et MACRORHYNCHOS, Brm Isis, 1830, p. 991 .
./Erolia varia, Vieill. Gai. ois. II, p. 89 (1834).
Falcinellus Cuvieri, Bp. Comp. list, p. 50(1838).
ScHŒNicLus sub.vrquatus, Gray, List B. Br. Mus.lll., p. 105 (1844).
Erolia PYGM/EA, Brm. Vc^fc'Z/". p. 319 (1855).
Ancylocheilus subarquatus, Gould, Handb. B. Austr. II, p. 365 (1865).
Tringa subarquata, Finsch et Hartl. Yog. Ost-Afr. p. 761 (1870).
163 -
Der bogenschnablige Strandlaufer, en allemand.
The Curlew Sandpiper, en anglais.
De Krombek-Strandlooper, en flamand.
Taille du mâle: 0n^,143 ; fem. 0,150 à 0,153; ailes 0,125 ;
bec 0,038 ; tarses 0,028.
Description des deux sexes en été. — Dessus de la tête et nuque d'uu roux
marron, tachetés de noir et pointillés de grisâtre; tour de l'œil blanchâtre ;
tour du bec d'un blanc grisâtre pointillé de roux marron ; manteau et scapu-
laires noirs, tachés de roux marron et de cendré : bas du dos d'un brun
cendré mais les plumes bordées de blanchâtre ; sus- caudales blanches barrées
de noir ; couvertures des ailes d'un cendré ])runâtre, plus pâles sur les bords,
les plus grandes terminées de blanc terne, toutes marquées d'une strie cen-
trale noire ; rémiges d'un brun noirâtre avec les baguettes bbinches ; devant
et côté du cou, poitrine et abdomen d'un roux mairon avec les plumes plus
ou moins bordées de blanc ; bas -ventre et sous-caudales d'un blanc varié de
roux et taché de brun ; queue d'un cendré brunâtre, les rectrices légèrement
bordées de blanc. Bec un peu arqué, noirâtre; iris brun ; pattes noirâtres.
En hiver. — Parties supérieures d'un cendré brunâtre avec la tige des
plumes noire ; sus-caudales blanches ; parties inférieures d'un blanc pur lavé
de cendré à la poitrine ; sourcils et joues blancs, les dernières striées de
cendré ; ailes et queue comme en été.
Jeune. — Dessus de la tète, manteau et bas du dos d'un brun noirâtre
avec les plumes bordées de blanchâtre ; nuque cendrée striée de brun ; sus-
caudales blanches ; sourcils et joues blanchâtres, striées de brun ; parties
inférieures d'un blanc pur mais lavées de cendré roussâtre et striées de brun
sur le devant du cou et à la poitrine ; le reste comme chez les adultes, mais
le bord des couvertures plus pâle et plus large.
Bab. — L'habitat d'été du Bécasseau cocorli n'est pas encore bien
«..^.^^...>».».>..».A^^....^^-i^ défini, mais on a lieu de supposer
il qu'il se trouve dans la région
arciique de l'Europe et de l'Asie,
depuis la Laponie jusqu'au dé-
troit de Behring ; mais on ne l'a
observé ni en Islande, ni au
Groenland, ni aux îles de l'ex-
trême Nord. On le trouve surtout
dans les tundras do la Russie
européenne et asiatique, ainsi (|ue dans les parties seplentrionab's
des régions du sapin et do l'Oural {B()//(ln)wiv)\ il a clé vu, on ^^o, prés
^
— 164 -
du fleuve Taimyr par Middendorff, dans l'Arkhangel par Henke
et Harwie-Brown, dans les vallées de la Petchora et du Jenissei par
Seebohm.
En automne et au printemps, cet oiseau est de passage sur les
côtes de la Scandinavie {Nilson, Collett), de la Russie occidentale
(Bûchner), du Danemark, de l'Allemagne (Naumann), de la Hollande
(Schlégel) et des îles Britanniques (Harting). 11 est très commun, aux
deux passages, sur les côtes maritimes de la Belgique et près des
embouchures de l'Escaut ; M. Croegaert dit qu'on n'en voit pas
beaucoup près d'Anvers et seulement à quatre lieues en aval de cette
ville. Il est à remarquer que ces Bécasseaux ne longent pas seulement
les côtes maritimes, mais aussi les grands fleuves qui les conduisent
parfois loin dans l'intérieur des terres ; ainsi, M. Taczanowski dit
qu'on en rencontre depuis la mi-juillet jusqu'à la fin d'octobre, par
petites troupes ou isolés, sur les bords de toutes les eaux de la Pologne,
dans les marais et les pâturages au bord des flaques d'eau. Il en est
de même en Bohême {Fritsch), en Transylvanie [Danford), en Alle-
magne {Naumann) et en Suisse {Schinz).
Cet oiseau passe également en grand nombre sur les côtes de France
(Degland), de l'Espagne {Saunders), du Portugal [du Bocage), de
Gibraltar {Irby), et hiverne en grand nombre sur les côtes méridio-
nales de l'Italie et sur ses îles {Salvadori, Giglioli), en Grèce {Lin-
dermayer) et à Corfou {Lilford). Il visite très fréquemment, à son
passage, les provinces méridionales de la Russie, et on l'observe alors
souvent en compagnie du T. cinclus sur les bords des lacs salés situés
dans le voisinage d'Odessa et en Crimée [de Nordmann) ; au prin-
temps il arrive par bandes sur les côtes de la mer Caspienne {le même);
selon Bogdanow, cet oiseau hivernerait en Transcaucasie, mais
M. Radde dit ne l'y avoir jamais rencontré en hiver.
Ce Bécasseau hiverne également aux îles Baléares {von Homege?^),
en Palestine {Trist7mm), sur toutes les côtes septentrionales et occi-
dentales de l'Afrique jusqu'au cap de Bonne-Espérance {Layard) ; il
se montre aussi le long du Nil et de ses aflluents jusqu'au centre du
Kordofan et du Sennaar, mais il est bien plus abondant sur les côtes
de l'Egypte, de la Nubie et de l'Abyssinie jusqu'au golfe d'Aden
{de Heuglin). Selon ce dernier auteur, cet oiseau se montrerait aussi à
Zanzibar, à Mozambique et à Madagascar; il est donc probable
qu'il visite en hiver toutes les côtes africaines.
Il n'a été observé ni au Kamtschatka ni au Japon. Outre la Sibérie,
— 165 —
cet oiseau est encore de passage, en Mongolie et en Chine (Dacid); il
hiverne dans l'Inde [Jerdon], à Ceylan, à Formose {Sivinhoe) et se
montre au sud jusque dans l'Indo-Chine, les îles Andaman (Hume),
Java, Bornéo {Schlégel), Amboine {S. Millier) et le midi de la Nou-
velle-Guinée {Ramsay). Gould dit avoir eu trois beaux exemplaires
capturés en Australie. En Amérique cette espèce se montre acciden-
tellement aux Etats-Unis sur les côtes de l'Atlantique : ou ne connaît
jusqu'ici qu'une vingtaine de captures, presque toutes faites aux envi-
rons de New- York [Breioer).
Mœurs. — Le Bécasseau cocorli est, pour nos contrées, un oiseau
de passage : il passe en plus ou moins grand nombre depuis août
jusqu'en octobre, pour se rendre dans les contrées du Midi et en
Afrique où il hiverne; il repasse en avril et mai, mais jamais en aussi
grand nombre qu'en automne. Il voyage par couples ou par petites
troupes de huit à douze individus, mais se mêle le plus souvent aux
bandes d'autres petits échassiers et surtout aux troupes de Bécas-
seaux variables. Il émigré pendant la nuit et passe sesjournées sur la
plage ou près des eaux douces des environs, mais reste rarement plus
d'un jour dans la même localité.
Cet oiseau recherche les endroits boueux et marécageux, aussi bien
des eaux douces que salées ; on le rencontre donc dans les endroits non
accidentés qui bordent la mer, les cours d'eau, les lacs, les étangs et
les marais; il ne séjourne jamais longtemps près des eaux claires à
fond de sable. Quand il a trouvé un endroit qui lui convient particuliè-
rement, il ne s'en éloigne pas volontiers et y revient toujours lorsqu'une
cause ou l'autre l'a forcé de s'en éloigner. Pendant ses migrations, il
aime à s'arrêter près des eaux bordées de pâturages où l'herbe est courte
et serrée, mais seulement quand il n'y a pas d'habitation à proximité.
Ses allures sont celles des vrais Bécasseaux ; son maintien, sa
marche, son vol et sa voix ressemblent presque entièrement à ce que
nous observons chez le Bécasseau variable ; lorsqu'il vole avec une
troupe de ces derniers, il imite tous les mouvements d'ailes de ses
compagnons, sans que l'on puisse distinguer la moindre différence
dans son vol.
Cet oiseau n'est guère farouche; les jeunes, qui sont encore plus
insouciants, se laissent approcher jusqu'à portée de fusil ; s'il aper-
çoit subitement un homme à peu de distance, il ne sait souvent pas
prendre de résolution immédiate et se borne à s'aplatir sur le sol, pour
ne s'envolor i\\\o ([uand on se trouve près de lui. Lorsque plusieurs de
- lee —
ces oiseaux se trouvent ensemble, ils se montrent un peu plus pru-
dents, mais reviennent toujours à l'endroit d'où ils ont été chassés,
même quand l'un d'eux y a été tué. Lorsqu'un chasseur a fait lever une
troupe de ces oiseaux, ceux-ci s'envolent droit devant eux en rasant
l'eau, et les individus se tiennent les uns près des autres ; mais arrivés
à une certaine distance, toute la troupe décrit un demi-cercle qui la
ramène au point de départ.
« Quand le Cocorli, ditBrehm, est en société d'autres Bécasseaux,
il les imite, court, vole avec eux et comme eux; il exécute même les
exercices de haut vol dont le chef de la bande donne le signal ; c'est
généralement une Barge ou quelque grand Chevalier qui a l'honneur
de conduire la bande ailée, et semble se complaire au milieu de ces
oiseaux plus petits. Je crois pouvoir conclure de mes observations,
que ces sociétés restent formées pendant plusieurs semaines, et
qu'elles ne se dissolvent qu'au moment des migrations. Dans ces cas,
il est souvent très difficile d'observer notre oiseau ; le naturaliste est
vu de loin par une Barge qui devient inquiète, s'agite, fait partager
ses craintes à ses compagnons et s'enfuit avec eux. Si la société n'est
formée que de Bécasseaux, assez souvent c'est un Cocorli qui en prend
la direction ; celui-ci se montre alors plus prudent et plus craintif
que d'habitude. »
La voix de cet oiseau est sonore et sifflante. Sa nourriture se com-
pose de vers, de larves et d'insectes qu'il cherche principalement dans
la boue.
Reproduction. — Cet oiseau niche probablement dans les tundras de
la région polaire, mais on ne connaît encore rien de positif à cet égard.
L'œuf décrit et figuré par Baedeker ne paraît pas appartenir .au
Cocorli ; je ne garantis pas non plus l'aulhenticité de ceux figurés sur
la pi. xxxvi^ (n° 173) du présent ouvrage. Middendorff a été assez
heureux de tuer, près du Taimyr (74°1. N.), une femelle qui avait
dans le corps un œuf tout développé, mais il ne nous en donne pas la
description.
197. — Le Bécasseau variable.
TRINGA CINCLUS, Bnss.
(PL 197)
Tringa CINCLUS, Briss. Ornlth. v. p. 211 (1760).
T. CINCLUS TORQUATUS et SCOLOPAX GALLINAGO ANGLICANA, BrisS. V. pp. 216, 309.
— i6t -^
Tringa ALPiXA etciNCLL's, Lin. Syst. nat. I, pp. 249, 251 (1766).
S':'OLOPAX pussiLLA, Gtnel. Syst nat. I, p. 663 (1788).
NuMENius VARiABiLis, Bechst. Natuvg. Deutschl. III, 141 (1809).
Tringa variabilis, Mey Taschenb. II, p 397 (1810).
ScoLOPAX ALPINA, Pall. Zoogr. Rosso-As. II, p. 177(1811).
Pelidna cinclus, Cuv. Règ. an. I, p. 490 (1817).
Tringa pygm^a, Schinz, Thierreich, I, p. 782 (1821),
Tringa chinzii, Brm. Beitr. Vogelh. III, p. 355(1822).
Pelidna variabilis, Steph,, Shaw's Gen. Zool. XII, 1, p, 98 (1824).
Pelidna alpina, schinzii et calidris, Brm. [sis. 1830, p, 991.
Tringa chinensis, Gray, Zool. Mise, p, 2 (1831),
Tringa cinclus minor, Schl, Rev. crit. p. 89 (1844),
ScH.ENiCLUs CINCLUS, Gray, List. B. Br. Mus. III, p. 104 (1844).
Tringa torquata, Degl. Orn. eur. II, p, 230(1849).
Pelidna americana, Brm. Yogelf. p. 317 (1855).
Tringa alpina, tar. americ.\na, Bd. Cass. et Lawr. B. N. A»i. p, 719 (1859).
Pelidna pacifica, Coues, Pr. Phil. Acad. 1861, p. 189.
Tringa subarquata, Swinh. (nec Giïld.) Ibis, 1861, p. 342.
Tringa cinclus, var. chinensis, Swinh, Proc. Zool. Soc. 1871, p. 408.
Tringa damascensis, Blakist. (nec Horsf.) Ib s, 1876, p. 334,
Pelidna alpina pacifica, Stejn, Buli. ofthe Unit. St. nat Mus. n» 29 p. 120 (1885).
Der Alpen Strandlaufer, en allemand.
The Dunlin, en anglais.
De Bonté .Strandlooper, eu flamand.
Taille: 0,"^13à0,l6 ; ailes 0,10 à 0,12; bec 0,026 à 0,041 ;
tarses 0,022 à 0,024.
Mâle et femelle adultes en été. — • Dessus de la tête et manteau d'un roux
ferrugineux vjf, avec le centre des plumes noir; nuque cendrée striée de brun ;
croupion et sus-caudales d'un brun cendré, ces dernières plus ou moins
bordées de roux sombre, les plus latérales de blanc ; front et sourcils blancs
plus ou moins tachetés de brun ; joues, devant du cou et poitrine blan-
châtres, mais tachetés de brun ; gorge d'un blanc assez pur; couvertures des
ailes et scapulaires d'un brun cendré, bordées de cendré clair, les plus
grandes couvertures terminées de blanc ; rémiges brunes avec les baguettes
blanches ; flancs, bas-ventre et sous-caudales d'un blanc pur ; milieu de
l'abdomen noir ; queue cendrée, les rectrices médianes brunes, bordées de
roussâtre. Bec noir; iris brun foncé ; pattes noirâtres.
La femelle est un peu plus grande que le mâle et dans son plumage de
noce, le noir du ventre est moins étendu et moins pur : ces plumes noires
sont plus ou moins bordées de blanc.
En hiver. — Parties supérieures cendrées, les plumes du manteau et des
ailes plus ou moins bordées de blanchâtre ; sourcils, gorge, abdomen et
sous-caudales d'un blanc pur; poitrine d'un cendré clair avec une strie
noirâtre au centre des plumes. Chez les vieux sujets, la poitrine est également
d'un blanc pur.
- d68 —
Jeune. — Dessus de la tête noir avec la bordure des plumes roussâtre
nuque cendrée et striée de brun ; manteau formé d'un mélange de plumes
noires finement bordées de roussâtre ou de blanchâtre, et de plumes cendrées
bordées d'une teinte plus claire ; ailes et queue comme chez l'adulte ; haut
de la poitrine d'un cendré roussâtre avec des taches brunes ; gorge, abdomen
et sous-caudales d'un blanc pur, avec des taches arrondies noirâtres sur le
bas de la poitrine et sur les flancs.
Poussin. — Parties supérieures rousses marbrées de noir et parsemées de
petits flocons d'un fauve pâle; poitrine et abdomen d'un blanc roussâtre ;
gorge et ventre blancs.
Re'inarque. — Cette espèce présente deux races, ne différant entre
elles que par la taille ; mais il est à remarquer que ce Bécasseau
diffère beaucoup dans ses proportions et qu'on rencontre tous les
intermédiaires entre la petite et la grande race. C'est pour cette raison
que les auteurs modernes ont généralement renoncé à adopter la petite
race désignée sous le nom de T. Schinzii. En Belgique les individus
des deux races arrivent en même temps et vivent ensemble, mais ceux
de la forme Schinzii sont toujours moins nombreux.
Hab. — Le Bécasseau variable habite en été toute la zone com-
prise entre le 53° et le 73" 1. N.,
y compris l'Islande, mais ne
niche qu'en petit nombre à l'inté-
rieur des terres du nord de l'Al-
lemagne [Borg gravé). Il n'a été
observé ni au Spitzberg, ni à la
Nouvelle-Zemble. Aux lies Bri-
tanniques, il niche dans le
Northumberland, en Ecosse, aux
îles Hébrides et Shetland, et on a même trouvé un nid en Cornouailles
{Rodd.) A l'époque des passages, il est commun dans toute l'Europe.
11 est alors très abondant sur les côtes de la Belgique et sur les rives
de l'Escaut, mais de passage plus ou moins régulier dans les autres
parties du pays. Il hiverne dans le midi de l'Espagne [Saunders), en
Sardaigne, en Sicile {Salvadori, Giglioli) et en Grèce {Linderma(/er).
M. Saunders dit qu'il niche quelquefois dans le sud de l'Espagne, et il
paraît qu'il en est de même en Vénétie, d'après M. Giglioli.
Il hiverne également dans le nord de l'Afrique {Loche, Drake, etc.),
en Palestine {Tristymm) et sur les côtes de la mer Rouge jusqu'au
golfe d'Aden ; il est moins abondant près du Nil et de ses affluents, en
— 169 -
Nubie, au Sennaar et en Kordofan {de Heuglin) ; cet autour en vit
encore le 15 mai des individus isolés près du lac Tana en Abyssinie.
Suivant le capitaine Sperling, cet oiseau descendrait au sud jusqu'à
Zanzibar et Mozambique.
Ce Bécasseau est distribué en Asie dans les mêmes conditions qu'en
Europe, c'est-à-dire qu'il est oiseau d'été, d'hiver ou de passage sui-
vant les régions. On l'observe depuis le Kamtschatka {Stejneger) et le
Japon {Withelij) jusqu'en Chine {Damd), et depuis Formose {Swinhoe)
jusqu'au Beloutchistan {Blanford), le Turkestan [Severtzoïc) et le
Caucase [Raddé) ; on ne le voit que rarement dans le nord de l'Inde
[Jerdon) et accidentellement à Java et à Bornéo {Schlégeî).
En Amérique, cette espèce habite le Groenland {Holbôll) et la zone
septentrionale, depuis l'Atlantique jusqu'au Pacifique, et hiverne au
sud des Etats-Unis ; il est très commun en hiver dans la Caroline du
Sud {Coues). Il est probable qu'il se montre encore plus au Midi, car
Gundlach dit qu'on le rencontre à Cuba depuis octobre jusqu'en mai.
Mœurs. — C'est le Bécasseau le plus commun de nos côtes ; il passe
en très grand nombre depuis le commencement de septembre jusqu'à
la fin d'octobre; d'ordinaire il a complètement disparu dès les premiers
jours de novembre. Il repasse à la tin d'avril et en mai. Ces oiseaux
émigrent en bandes énormes, composées de milliers d'individus ;
Naumann dit avoir observé, dans le nord de l'Allemagne, une bande
composée de plus de huit mille sujets. Us voyagent laremcnt pendant
le jour, mais le plus souvent au crépuscule et de grand matin, quel-
quefois aussi pendant la nuit. Ils volent très bas le long des côtes ou
lorsqu'ils suivent les vallées creusées par les grands fleuves ; mais
quand ils traversent une contrée, ils s'élèvent généralement à une
grande hauteur, franchissant l'espace en ligne droite avec une grande
vitesse. Naumann fait remarquer que les jeunes font bande à part, et
que les troupes d'adultes contiennent rarement des jeunes. Les petites
troupes se joignent souvent à des bandes formées d'autres espèces,
mais quand ils sont nombreux, ils restent homogènes. Pendant le
jour, ils se livrent à leurs ébats, cherchent leur nourriture, visitent
l'intérieur du pays, volent d'une eau à l'autre, mais reviennent tou-
jours à celle qui leur a j)rocuré la nourriture la plus abondante.
Le Bécasseau variable recherche les rivages bourbeux, aussi bien
de la mer ([uc des lacs, des étangs, des rivières et des marais ; il ne
séjourne jamais longtemps près des eaux claires à fond de sable, et
évite les lieux où la végétation est trop abondante et où l'eau est cou-
Tome II. — 188'J. '22
- 170 -
verte de lenticules ; il évite aussi les eaux entourées d'arbres. Dans le
Nord, on le voit souvent dans les montagnes jDrès des mares et des lacs
de la zone inférieure.
Par ses allures, il ressemble à ses congénères ; il tient le corps
horizontal, la tête rentrée, marche et trottine avec aisance et sait
courir avec rapidité quand cela est nécessaire. Son vol n'offre rien
de particulier : il est facile, varié et rapide ; quand ils sont nombreux,
tous les individus exécutent en même temps les mêmes mouvements,
comme s'ils obéissaient à un commandement ; ils ressemblent en ceci
aux Etourneaux. Quand ils sont dérangés, ils s'envolent ordinairement
droit devant eux au-dessus de l'eau, mais ne tardent guère à décrire
un vaste demi-cercle pour revenir à leur point de départ.
C'est un oiseau extrêmement confiant dans le jeune âge, surtout
quand il se trouve isolé, mais les adultes se montrent plus prudents ;
quant aux grandes troupes, il est fort difficile de les approcher, car
elles s'envolent avant qu'on soit à portée de fusil. Ce Bécasseau ne
recherche pas seulement la société de ses semblables, mais encore
celle d'autres petits échassiers, avec lesquels il vit toujours en bonne
intelligence ; il n'est pas rare de rencontrer des troupes formées non
seulement de diverses espèces de Bécasseaux, mais encore de Pluviers,
de Sanderlings, de Chevaliers, de Barges, de Vanneaux suisses, etc.;
ce sont alors les plus grands qui dirigent la bande et veillent à la
sécurité de tous. Ils nichent même en société, de façon que les nids se
trouvent non loin les uns des autres.
Le cri de cet oiseau est moins sonore mais plus sifflant que celui
de la plupart des Bécasseaux ; il peut se rendre, d'après Naumann,
par tlui ou h^ui, et se transforme parfois en trur ou tu7^ ; l'oiseau se
fait entendre au repos comme en volant, mais surtout quand il est
près du nid.
C'est dans la vase qu'il cherche surtout ses aliments, mais on le
voit aussi souvent chasser dans les pâturages et même dans les
champs ; sa nourriture se compose de vermisseaux, de larves,
d'insectes et de petits mollusques.
Reproduction. — Le Bécasseau variable niche à partir des côtes
septentrionales de l'Allemagne, de l'Ecosse et des îles voisines, y
compris les îles Hébrides, Orkney et Shetland; il se reproduit égale-
ment en Suisse {Schinz) ; mais c'est surtout dans les contrées du Nord
que ces oiseaux nichent en abondance et dans le voisinage les uns des
autres.
— 171 —
Le nid est une simple petite fosse, garnie de brindilles et de frag-
ments de tiges herbacées, que l'on trouve dans des lieux marécageux
ou dans les environs de la mer, mais toujours dans un endroit garni
de bruyères ou d'iierbages. La ponte a lieu au commencement de juin
et se compose de quatre œufs, d'un jaune olivâtre ou verdâtre pâle et
ornés de taches brunes et noirâtres de diverses grandeurs, mais qui
sont ordinairement plus grandes et plus nombreuses vers le gros bout.
Ces œufs mesurent environ 31 millim. sur 25. Mâle et femelle cou-
vent alternativement durant seize ou dix-sept jours. Les petits quittent
le nid dès qu'ils sont bien séchés, pour suivre leurs parents qui leur
apprennent sans retard à chercher leur nourriture. A lage de trois
semaines ils commencent à volleter, à un mois ou cinq semaines ils
quittent leurs parents pour mener une vie indépendante.
198. — Le Bécasseau minule.
TRL\GA MIiNUTA, Leisl.
(PI. 198)
Tbinga fusilla, Lath. (nec Lin.) Gen. Syn. suppl. I, p. 292 (1787).
Tringa minuta, Leisl. Nachlr . zu BecJts'. Nat. Deutsclil. I, p. 74 (1812).
Pelidna minuta, Boie, Isis 1826, p. 979.
AcTODROMAS MINUTA, Kp. Nciturl. S\jst. p. 55(1829).
Calidris MINUTA, Cuv. Règ . an. 1, p. 526 en note (1829).
Pelidna fusilla, Brm. Isis., 1830, p. 991.
ScH.ENiCLUs MINUTA, Gray, List B. Br. Mus. III, p. 106 (1844).
Der Kleine Strandlaufer, en allemand.
The Little Stint, en anglais.
De Kleine Strandlooper, en flamand.
Var. Ruficollis
Trynga ruficollis, Pall. Reise Rusit. R-ichs, III. p. 700(1776).
Tringa salina, Pall. Zoogr. Rosso. As. II, p. 199 (1811).
Tringa albescens, Tem. PL col. 41, f. 2 (1824).
Calidris albescens, Cuv. Rèf/. (in. I, p. 526 (1829).
Tringa australis, Less. Traité iVorn. p. 558 (1831 ) .
ScH.ENiCLUS albescens, Gould, B.Austr. VI. pi. 31 (1848).
AcTODROMAS ALBESCENS et AUSTRALIS, Bp Coiupt .-ren I .\L\\\, p. 596 (1856) .
AcTODROMAS DAMACENSis, Stcjn. (nec Horsf ) Pr. U. S. NcU. Mus. 1883, p. 71.
Tringa minuta ruficollis, Seeb. Brit. B. IH, p. 205 (1885).
Taille : 0"\12 ; ailes 0,09G ; bec 0,019 ; tarses 0,021.
Mâle et femelle adultes en été. — Dessus de la tête, dos, croupion et
scapulaires noirs, imds toutes les phimcs bordées de roux, et celles du dos
— 172
terminées de blanchâtre; front et sourcils blanchâtres ; nuque cendrée; joue
et côtés de la poitrine d'un gris roussâtre; couvertures des ailes noires bo-
dées de roux, les plus grandes noirâtres terminées de blanc ; 'rémiges noir
râtres avec les baguettes en grande partie blanches; parties inférieures d'un
blanc pur ; sus-caudales noires bordées de roux, les plus latérales blanches;
rectrices médianes noires bordées de roux, les autres cendrées (1). Iris noi-
râtre ; bec et pattes noires.
En hiver. — Parties supérieures d'un cendré brunâtre foncé avec le centre
des plumes brun ; front, sourcils, gorge, parties inférieures et sus-caudale
latérales d'un blanc pur; lorums, côtés du cou et de la poitrine d'un cendré
brunâtre; rectrices médianes brunes, les latérales cendrées.
Jeune. — Dessus de la tête et du dos d'un brun noirâtre avec les plumes
bordées de roux, sauf les scapulaires qui sont bordées de blanc ; front, sour-
cils et parties inférieures d'un blanc pur ; lorums bruns ; côtés du cou et de la
poitrine roussâtres tachés de cendré; ailes et queue comme chez l'adulte.
Var. Rufieollis. — Ne diffère du type précédent, en été, que par sa gorge
rousse ; en hiver les deux races ne présentent aucune différence entre elles.
Hab,
Ce petit Bécasseau habite, en été, les tundras de la zone
polaire de l'Europe et de la Sibé-
rie, depuis le cap Nord jusqu'à
la péninsule de Taimyr, y com-
pris la Nouvelle-Zemble et l'île
de Waigatz [de Heuglin). A
l'époque des migrations on fob-
serve en plus ou moins grand
nombre sur toutes les côtes et
dans les grandes vallées de
l'Europe et de l'Asie occidentale. Il est toujours plus abondant sur
les côtes orientales que sur les côtes occidentales de l'Angleterre et de
l'Ecosse, ainsi qu'en Irlande où on ne l'observe qu'en petit nombre
dans les parties occidentales [Seebohm.) En Belgique on le voit régu-
lièrement sur les côtes maritimes ; il n'est pas rare sur les bords de
l'Escaut (Croegaert) et s'est montre accidentellement aux environs de
Hasselt [E. Claes). A l'époque des passages, on rencontre cet oiseau dans
les vallées de l'intérieur et souvent bien loin de la mer, comme dans
le centre de l'Allemagne {Namnann), dans l'Alsace et les Vosges
(Zrœner), en Suisse dans la vallée de la Reuss et dans quelques par-
(i) C'est ce qui le distingue à première vue du T. Teniiiiinckii, qui a les rectrices latérales
blanches.
— 173 -
ties de l'Engadine {Tschudi), etc. Il est de passage en Turquie, mais
une partie hiverne en Grèce {Lindermaycr), en Asie Mineure {Rob.son),
en Palestine (Tristram); il hiverne également en Perse, dans l'Inde,
à Ceylan et dans la Birmanie [Jerdon, Seebohm).
En Afrique on le rencontre en hiver, sur presque toutes les côtes :
il a été observé depuis le Maroc (DraA-^) jusqu'en Egypte {Schellei/),
ainsi que le long du Nil et de ses affluents, près des marais du Kor-
dofan oriental et sur les côtes de la mer Rouge {de Hmglw) ; dans
l'Afiique occidentale, sa présence a été signalée en Gambie {Dresser),
à Casamance {Verreaux), à la Côte d'Or {Srhlégcl) ; cet oiseau serait
commun, en hiver, au cap de Bonne- Espérance {Layard) et on le ren-
contre également au Natal et au Transvaal {Ayres), ainsi qu'aux îles
Seychelles {Neioton). Il a été capturé à Lado, dans l'Afrique centrale,
par le D"" Emin Bey.
La var. Ruficollis appartient à l'Asie orientale : elle est commune
au détroit de Behring et au Kamtschatka {Stejneger) ; elle est de
passage dans la Sibérie ovÏQ'[iidXQ{Taczanoioski), au Japon {Blackiston) ,
en Chine {Darid), à Formose {Swinhoe) et hiverne dans l'Indo-Chine
orientale et dans l'Archipel Indien. Sa présence a été signalée à
Halmahera, à Makian, à Morotai {Bernstein), à Ternate, à Key
{von Rosenherg), à Célébes {Meyer), à Timor {S. Mûller), à Java
{Schlégel), ainsi que dans la Nouvelle-Bretagne (Finsch), au sud de la
Nouvelle-Guinée (Rarasay), aux îles Arou {Beccari), à Salawatti
{De Bruyn), etc. On l'observe également en Australie et, d'après
Gould^ Gilbert aurait trouvé un nid de cet oiseau sur les récifs de
Houtman, situés à la côte Ouest de l'Australie.
Mœurs. — Le Bécasseau minule est donc, pour nos contrées, un
oiseau de passage, qui quitte les régions boréales vers la lin d'août;
on le rencontre alors en Europe jusqu'à la mi-octobre, mais c'est en
septembre qu'il est le plus abondant.
Ces oiseaux arrivent par troupes plus ou moins nombreuses, et
quand ils sont en petit nombre ils se mêlent à des bandes d'autres
espèces. Voir des troupes de vingt à trente sujets est très ordinaire,
mais il n'est pas rare, en automne, d'observer plusieurs centaines de
ces oiseaux ensemble, volant si près les uns des autres, qu'on peut
souvent en abattre huit, dix et même davantage d'un seul coup de
fusil. Il est cependant à remarquer ([ue se sont les jeunes qui voyagent
en grandes bandes, tandis que les adultesémigrent par petites troupes et
quittent ordinairement leur séjour d'été plus tard que les jeunes. A
— 174 -
leur retour au printemps, ils sont généralement rares; il est probable
qu'ils s'arrêtent alors moins en route et qu'ils se hâtent de regagner
les lieux où ils sont nés.
Cet oiseau ne paraît guère tenir beaucoup au rivage de la mer, car
il recherche surtout les baies et les criques dont les bords sont bour-
beux. 11 en est de même à l'intérieur des terres, où il se tient moins
près des fleuves et des rivières que près des lacs, des étangs et autres
eaux tranquilles, pourvu que leurs bords soient boueux et dépourvus
de hautes herbes et d'herbages aquatiques.
C'est un oiseau très gracieux, remuant, vif et actif; il court vite,
vole avec aisance et rapidité, soit en rasant la surface de l'eau ou en
suivant les ondulations des flots, soit très haut quand il veut franchir
une grande distance. Malgré son agilité il est peu farouche et même
trop confiant; avec les autres oiseaux il se montre doux et affectueux.
On peut l'observer d'assez près, tant qu'il n'a pas été éreinté par des
poursuites ou effrayé par des coups de feu ; mais s'il se trouve avec
d'autres oiseaux plus farouches, il suit leur exemple et s'envole avec
eux à la moindre apparence de danger.
On a pu voir de ce qui précède, que le Bécasseau minule est aussi
sociable que ses congénères; mais il est à remarquer que tous les
oiseaux de rivage qui recherchent à l'occasion la société d'autres
espèces, se joindront toujours à des oiseaux plus grands qu'eux et
jamais à de plus petits; ainsi, dans une troupe de Bécasseaux varia-
bles on verra souvent quelques couples de Bécasseaux minules ou de
Temminck, mais dans les bandes de ces derniers on ne verra jamais
des oiseaux ayant une taille plus forte que celle de leurs compagnons.
La voix du Bécasseau minule est douce et agréable ; Naumann la
rend par durrr, durrru ou dirrr, dirrrit-it-it ; quand plusieurs
donnent de la voix en même temps, on croirait, à une certaine dis-
tance, entendre la stridulation de grillons. 11 crie surtout en volant et
au moment de prendre pied, mais rarement pendant ses ébats ; quand
il cherche sa nourriture, il se borne à pousser de temps en temps un
léger it-it.
Cet oiseau se nourrit comme les précédents, de larves, de petits
insectes et de vermisseaux. Il se baigne volontiers et souvent.
Reproduction. — Dans ces dernières années, plusieurs naturalistes
ont rapporté de leur voyage dans l'extrême Nord des oeufs authen-
tiques de cette espèce. En 1875, MM. Seebohm et Harwie Brown ont
découvert des nids avec œufs près de la Petchora, et les ont décrits,
— 175 —
et figurés avec soin dans Vibis (1876, p. 294, pi. vu). D'après ces
naturalistes, les quatre œufs que pond la femelle reposent dans une
petite fosse garnie de brins et de petites feuilles, que les oiseaux
entassent pendant l'incubation. Ces nids se trouvent, en juillet, au
milieu de Careœ et de Sphagnum propres aux régions arctiques. Les
œufs sont d'un jaune terreux avec des points et de grandes taches
irrégulières d'un roux brunâtre, au-dessus desquelles on en remarque
d'autres, plus petites, d'un brun sombre. Ils mesurent environ
28 millim. sur 21.
199. — Le Bécasseau de Temminck.
TRINGA TEMMINCKII. Leisl.
(PI. 199)
Teinga fusilla, Lath. (nec Lin.) Ind. Orn. ii, p. 737 (1770).
Tringa Temminckii, Leisl. Nachlr. Bechst. Nat. Beutsc/d, ii, p. 78 (1812).
Pelidna Temminckii, Boie, Isis, 1826, p. 979.
Leimonites Temminckii, Kp. Naturl. Syst. p. 37 (1829).
Calidris temminckii, Cuv., lièg. an. I, p. 526 (1829).
ScHŒNiCLUs TEMMINCKII, Gray, List B. Br. Mus. III, p. 106 (1844).
Actodromas temminckii, Bp., Cornpt.-Rend. XLllI, p. 596 (1856).
Der Temminck's Strandlaufer, en allemand.
The Temminck's Stint, en anglais.
De kleinste Strandlooper, en flamand.
Taille : 0,13 ; ailes 0,095 ; bec 0,018 ; tarses 0,017.
Description des deux sexes en été. — Plumes des parties supérieures et
petites couvertures des ailes d'un brun noirâtre bordées de roux ; front, joues
et sourcils blanchâtres, mais plus ou moins variés de cendré : couvertures
moyennes des ailes ainsi que les plus grandes d'un brun cendré, les dernières
terminées de blanc, ce qui forme une bande blanche à travers de l'aile ;
rémiges d'un brun noirâtre, la tige des primaires blanche ; gorge, abdomen
et sous-caudales d'un blanc pur ; devant du cou et poitrine d'un cendré plus
ou moins roussâtie ; les quatre rectrices médianes brunes, les latérales blan-
ches, ce qui distingue cette espèce, à première vue du T. minuta. Bec noir ;
iris brun ; pattes brunâtres.
En hiver. — Parties supérieures d'un cendré brunâtre, le bas du dos et le
croupion noirâtres ; front et sourcils d'un blanc varié de cendré ; joues et
poitrine cendrées ; gorge et parties abdominales d'un blanc pur; couvertures
des ailes de la couleur du dos, les plus grandes terminées de blanc ; rémiges
et queue comme en été.
- 176 —
Jeune. — Ressemble aux adultes en hiver, mais les plumes dorsales d'un
gris brunâtre variées de cendré et de roux jaunâtre.
Poussin. — Large calotte sur le vertex, dos, dessus des ailes et des cuisses
marbrés de noir sur teinte fauve, et semés de petits flocons blanchâtres ;
lorums noirs ; dessus du cou rembrunis par la base noirâtre du duvet ; front
et parties inférieures d'un blanc faiblement lavé de roux, plus pâle sur le
ventre. Bec brun avec la base jaunâtre ; pattes jaune d'ocre [J. Vian).
Hab. — Cet oiseau habite, en été, le nord de l'Europe et de l'Asie
entre le 59° et le 71° 1. N. Il est
moins abondant que le précédent
dans l'Europe occidentale à l'épo-
que des passages, mais on l'ob-
serve cependant sur toutes les
côtes de l'Europe occidentale et
même près des grands cours
d'eau. 11 n'a été observé ni en
Islande, ni à la Nouvelle-Zemble.
En Angleterre il se montre régulièrement sur les côtes orientales et
méridionales (Seebohm) ; Gray dit qu'il a également été observé en
Ecosse, et Thompson a signalé une capture en Irlande. Il est de pas-
sage régulier sur les côtes de Belgique et on le voit alors souvent en
grand nombre.
Ce Bécasseau n'est souvent pas rare près des eaux des contrées de
l'Europe centrale ; ainsi on le voit régulièrement dans le centre de
l'Allemagne {Naumann), en Suisse {Schinz), etc. Dans le Midi, cet
oiseau est encore de passage en Italie {Salvador i), en Turquie [Rohson)
et dans le sud de la Russie [de Nordmann), mais M. Giglioli pense
qu'il hiverne en Sardaigne. Son quartier d'hiver commence à partir de
l'Espagne {Saunde7\s), du Portugal {du Boccage) et de la Grèce ; Lin-
dermayer dit qu'on en voit dans ce dernier pays jusqu'au milieu de
juin. Mais c'est surtout dans le nord de l'Afrique que cet oiseau
hiverne, et il est alors commun en Algérie {Loche) et dans les pays
voisins ; il apparaît en août et septembre, par troupes plus ou moins
nombreuses, dans la région du Nil et descend vers le Sud jusqu'au
Nil Blanc et les marais du Kordofan ; il hiverne également dans les
endroits bourbeux et marécageux des côtes de la mer Rouge
{de Heuglin) et de la Sénégambie {Lichtenstein).
En Asie, on observe cet oiseau comme en Europe ; il passe l'été
dans le Nord et hiverne dans les contrées du Midi : en Asie Mineure
- 177 —
{Stricklànd), dans l'Inde {Blyth), dans rindo-Chine et pousse parfois
ses migrations jusqu'aux îles de la Sonde {Schlégel). Il est de passage
dans la Sibérie orientale {Taczanowski) et méridionale : le D"" Radde
tira deux femelles au milieu de mai près du Tarei-Nor, où il avait déjà
observé, dans les premiers jours du même mois, de petites troupes de
ces oiseaux ; il s'en procura encore en juiUet près du Baikal. Il est
également de passage au Japon {Blakiston) et passe par troupes nom-
breuses à travers la Chine et hiverne même dans les provinces méri-
dionales de cet empire {David) et à Formose {Swinhoé).
Mœurs. — Le Bécasseau de Temminck commence à émigrer des
régions septentrionales dès la mi-août, et les passages continuent dans
l'Europe centrale jusque vers le milieu d'octobre et parfois jusqu'en
novembre. En mai il retourne dans sa patrie, mais on en voit parfois
encore passer jusque vers la mi -juin. Il voyage pendant la nuit à
partir du coucher du soleil, et toujours en troupes plus ou moins nom-
breuses ; celles-ci sont composées soit uniquement d'individus de son
espèce, soit en majeure partie d'autres oiseaux de rivage et surtout de
Bécasseaux variables. On ne l'observe jamais en aussi grand nombre
que le précédent.
De môme que ses congénères, cet oiseau recherche les endroits
bourbeux et ceux où la vase est entremêlée de gravier et de cailloux,
mais il n'aime pas les rives sablonneuses et ne s'y tient jamais long-
temps. Près des cours d'eau il recherche les endroits où la rivière
présente un coude, mais il préfère toujours les eaux dormantes
comme les lacs, les étangs et les marais, ainsi que les bords de la
mer, quand ceux-ci offrent des places où il peut facilement patauger
dans la vase.
C'est un oiseau fort remuant, courant par-ci par-là ou volant en
rasant la terre ou l'eau avec la vitesse d'une Hirondelle. Bien qu'il ne
présente rien de particulier dans ses mouvements, il paraît cepen-
dant plus leste et plus agile que les autres Bécasseaux. Quand il se
trouve avec des oiseaux plus grands que lui, il se comporte comme
eux, se montre confiant ou farouche suivant le degré de confiance ou
de crainte que ses compagnons lui font partager. En général,
cependant, il se montre plus prudent que le Bécasseau minule,
surtout lorsqu'il a pu se rendre compte des dangers qu'il peut courir.
Il est très sociable, mais en temps ordinaire il se tient davantage avec
ses semblables, et no recherche d'habitude la société d'autres espèces
qu'à l'époque des migrations; on le voit alors souvent avec d'autres
Tome II. —1889. 23
— 178 -
Bécasseaux et même avec des petits Pluviers. Il est curieux de voir
l'accord qui règne entre tous ces oiseaux de diverses tailles et même
de genres différents; les querelles sont inconnues, les petits obéissent
aux plus grands et ceux-ci veillent à la sécurité de tous.
La voix du Bécasseau de Temminck ressemble aussi à la stridula-
tion d'un grillon et peut se rendre par tir7^r, trrri ou ptrrr; elle
diffère peu de celle de l'espèce précédente; l'oiseau se fait surtout
entendre en volant. Il se nourrit principalement de vermisseaux et
de larves, et ne paraît prendre des insectes parfaits qu'à défaut des
précédents; il avale parfois aussi des matières végétales, mais il est
probable que cela n'a lieu qu'accidentellement.
Reproduction. — A l'époque de l'accouplement, ces oiseaux se
tiennent par couples et chaque couple pour soi, mais les nids ne sont
pas très éloignés les uns des autres. Ceux-ci consistent en une petite
fosse creusée dans le sol et garnie de brins d'herbe. Ce nid est caché
dans l'herbe et dans un endroit relativement sec, parfois même au
milieu d'un champ cultivé, mais habituellement à peu de distance de
l'eau. La ponte a lieu vers le milieu de juin et se compose de quatre
œufs, d'un jaune roussâtre ou verdâtre avec de petites taches
arrondies et des points roussâtres et bruns, recouvrant partiellement
d'autres taches plus grandes et de couleur cendrée; ils mesurent
environ 29 millim. sur 20.
Mâle et femelle couvent alternativement, témoignent un grand
attachement à leurs petits, les protègent et les défendent autant que
cela leur est possible. On rencontre des poussins dès les premiers
jours de juillet, mais il arrive souvent aussi que l'on trouve encore
à cette époque des nids contenant des œufs.
GENRE CXIV
LTMICOLE. — LIMICOLA
NuMENius, Bechst. Orn. Taschenb., p. 277 (1802.)
Tringa, Tem. Man. d'Orti., p. 398 (1815.)
LiMicoLA, Koeh, Baier. Zool. I, p. 316 (1816.)
Falcinellus, Kp, Nat. Syst., p. 37 (1829.)
Pelidna, Bp, Comp. List., p. 50 (1838.)
Car. — Bec plus long que la tête, large, fléchi à son extrémité, à arête
de la mandibule supérieure très déprimée, surtout dans la partie moyenne;
ailes et pattes comme dans le genre Tringa.
Ce genre n'est représenté que par une seule espèce :
— 179 -
200. — Le Limicole ou Bécasseau platyrhynque
LIMICOLA PLATYRHYNCHA, Gr. ex Tem.
(PI. 200)
NuMENius PYGMiEUS, Bechst, (nec Lath.) Orn. Taschenb., p. 277 (1803.)
NuMENius PUSiLLUS, Bechst. (nec. Lin.) Naturg. Deutschl. IV, p. 152 (1809.)
Tringa platyrincha, Tem. Man. d'Orn., p. 398 (1815.)
LiMicoLA PYGM^A, Koch, Baier. Zool. 1, p. 316 (1816.)
Tringa eloroides, Vieill. N. dict. XXXIV, p. 463 (1819.)
Tringa platyrhyncha, Mey. Or7i. Taschenb, III, p. 259 (1822.)
Tringa pygm/ea, Savi, Orn. Tosc. II, p. 291 (1829.;
Pelidna platyrhyncha, Bp. Comp. List, p. 50 (1838.)
LiMicoLA platyrhyncha, Gr. List. B. Br. Mus. III, p. 107 (1844.)
Pelidna megarhynchos, C. Brm. Yogelf., p. 317 (1855.)
Limicola Hartlaubi, Verr. in Yins. Voy. Madag. ann. B., p. 5 (1865.)
LiMicoLA sibirica, Di'css. Proc. zool. soc. 1876, p. 674.
Der kleine Sumpflaufer, en allemand.
The broad-billed Sandpiper, en anglais.
De Platbek Strandlooper, en flamand.
Taille: 0'"125; ailes 0,107; bec 0,031; tarses 0,022.
Description du mâle et de la femelle en été. — Dessus de la tête, clos et crou-
pion noirs avec les plumes légèrement bordées de roux ; sourcils blanchâtres,
tachetés de brun en arrière ; lorums bruns ; côtés de la tête et nuque d'un
cendré varié de roussâtre et strié de noir ; scapulaires noires bordées de
blanchâtre et de roussâtre ; petites couvertures des ailes brunes, les autres
d'un cendré brunâtre bordées de blanchâtre; rémiges noirâtres; rectrices
médianes noires légèrement bordées de roux, les autres cendrées bordées de
blanc ; sus-caudules noires avec un liséré roux, les plus latérales blanches
barrées de noir ; cou et côtés de la poitrine d'un blanc varié de roux et taché
de noir ; le reste des parties inférieures d'un blanc pur, mais avec quelques
taches lancéolées noirâtres sur les flancs. Iris brun ; bec noir ; pattes d'un
cendré verdâtre.
En hiver. — Parties supérieures d'un cendré pâle tirant sur le brunâtre ;
croupion noir avec les plumes bordées de cendré ; parties inférieures blan-
ches, mais les joues, les côtés et le devant du cou tachés légèrement de
cendré brunâtre.
Poussin. — Parties supérieures, ailes et flancs noirs variés do roux et
mouchetés de blanc; face blanche; lorums, une strie frontale et moustaches
noires; sous ces dernières une tache rousse; parties inférieures blanchâtres,
un peu roussâtre à la poitrine, la base du duvet gris.
180 —
Hah. — Le Limicole ou Bécasseau platyrhynqae habite le nord de
la Scandinavie [Collett) et la
tundra de la Russie européenne
{Bogdanow), mais sa limite sep-
tentrionale n'est pas encore bien
connue (probablement le 70°);
il émigré en automne vers les
contrées du Midi. Lors des pas-
sages, il visite régulièrement le
sud de la Scandinavie^ le Dane-
mark et la Russie centrale ; il est plus rare en Allemagne [Naumann],
à Helgoland {Gdtke), en Bohême {Fritsch) et en Autriche {Hinterber-
ger) ; Bogdanow dit qu'il est de passage dans la Russie centrale et
méridionale, en Crimée, au Caucase et dans la région aralo -Cas-
pienne ; Gœbel dit ne l'avoir observé qu'une fois dans le midi de la
Russie : le 19 août 1868 il tira un couple près d'un étang dans
l'arrondissement d'Uman ; de Nordmann ne l'a jamais observé lui-
même, mais un oiseleur lui apporta un sujet tué près d'Odessa. Radde
ne le mentionne pas dans son ouvrage sur les oiseaux du Caucase.
Cet oiseau ne se rencontre qu'accidentellement en Grande-Bretagne,
où l'on n'a constaté que six captures depuis 1836 jusqu'en 1885
{Seehohm) ; il en est de même en Hollande, en Belgique, ainsi que sur
les côtes méridionales de la France, mais il est de passage irrégulier
dans le nord de ce pays, sur les côtes de Dunkerque, de Calais, etc.
{Degland et Gerbe). En Italie il est de passage irrégulier en Vénétie
et se montre accidentellement en Piémont, en Lombardie. en Ligurie,
en Toscane et en Sicile [Salvadori, GiglioU). En Espagne on l'a pris
accidentellement aux environs de Gerona [Vayy^eda) ; en Grèce on le
voit régulièrement au printemps, il est plus rare en automne [Linder-
mayer), il est aussi de passage près du Bosphore (Robson).
Le Limicole hiverne dans le nord de l'Afrique jusqu'en Egypte
{Loche, de Heuglin) et paraît avoir été pris accidentellement à Mada-
gascar (y^rreaMip). Aucun auteur n'a signalé cet oiseau dans la Sibérie
centrale, et Dybowski n'a recueilli qu'un seul exemplaire près du
Baical. Il hiverne dans l'Inde, où il est assez commun dans les parties
septentrionales mais rare dans le Sud {Jerdon) ; il a également été
observé dans le Béloutchistan et serait très commun sur les côtes du
Mekran {Hume) ; il se montre accidentellement à Ceylan et aux îles
Andaman (/See&o/im).
- 181 —
M. Dresser a décrit, sous le nom de L. sihirica, une race peu carac-
térisée que Middendorff a rencontrée en grandes troupes sur les côtes
méridionales de la mer d'Ochotsk. Ces oiseaux passent en petit nom-
bre sur les côtes du Japon {Seebohm), de la Chine {David) et hiver-
nent à Formose {Sivinhoe). C'est probablement à cette race que l'on
doit rapporter les sujets qui hivernent en Birmanie, dans la presqu'île
de Malacca, à Java et aux Philippines [Schlégel, Seebohm).
Mœurs. — Il est étrange qu'un oiseau migrateur, très répandu dans
le nord de la Scandinavie, soit si rare à l'époque des passages dans
les diverses parties de l'Europe centrale et méridionale. Il émigré en
août et septembre et retourne dans sa patrie en avril et mai ; tous les
sujets observés en Grande-Bretagne ont été capturés au printemps,
sauf deux tués en octobre. Naumann dit également qu'en Allemagne
on le voit plus souvent au printemps qu'en automne ; le même fait se
remarque en Grèce, suivant von der Mùhle et Lindermayer.
Les moeurs de cet oiseau sont encore peu connues. Suivant M. See-
bohm, il se tient en hiver en petites troupes et se réunit parfois aux
Bécasseaux variables où à d'autres espèces du môme genre, pour fré-
quenter les bords de la mer. D'après Naumann, il recherche particu-
lièrement les étangs, les marais, les bords vaseux des rivières et les
pâturages humides, où il mène une vie tranquille, trottinant à petits
pas et s'arrêtant souvent pour se reposer. Ce dernier auteur le dit
indolent ; mais von der Mûhle fait remarquer que cela peut être le cas
pour des individus isolés, mais qu'il a toujours remarqué qu'en Grèce,
où cet oiseau est assez commun pendant certaines années, il est aussi
animé et aussi gai que les autres Bécasseaux ; von der Mùhle ajoute
qu'il ne l'a jamais rencontré que près de la mer, et le plus souvent
dans des endroits vaseux, soit en compagnie de Bécasseaux variables
ou autres, soit par grandes volées formées uniquement d'individus de
son espèce, ce qui lui a permis, en août 1836, d'en abattre seize d'un
seul coup de fusil ; selon le môme auteur, un certain nombre de ces
oiseaux passerait tout l'été en Grèce.
L'approche d'un homme, suivant Naumann, n'effraye guère cet
oiseau, qui ne s'envole que quand on n'est plus qu'à quelques pas de
lui ; si l'on se trouve subitement en sa présence sans qu'il s'en soit
aperçu, il s'aplatit immédiatement à terre soit dans un enfoncement,
soit derrière une touffe de plantes, et ne s'envole que lorsqu'on est tout
près de lui, mais sans aller bien loin. Ce n'est pour ainsi dire qu'en
prenant son vol que cet oiseau fait entendre sa voix ; son cri resscm-
— 182 -
ble à celui de certains Bécasseaux, mais dans un autre ton, et peut se
rendre par tirrr.
Sa nourriture consiste en vermisseaux, petits mollusques, larves
et insectes qu'il cherche le plus souvent dans la vase.
Reproduction. — C'est Keitel, paraît-il, qui rapporta en 1858 de
Laponie les premiers œufs de Limicole. Plus récemment, M. R. Dann
en recueillit au fond du golfe de Bothnie où cet oiseau nichait en
petites colonies dans des marais herbeux. Il le rencontra également
au Dovrefjeld, dans les grands marais de Fokstuen, à 3000 pieds au-
dessus du niveau de la mer, et c'est de là que proviennent la plupart
des œufs qu'on trouve dans les collections. L'oiseau revenait vers la fin
de mai dans les lieux de la reproduction et se montrait d'abord très
sauvage, cherchant sa nourriture sur les bords herbeux des étangs et
des marais. Lorsqu'on l'effrayait, il s'envolait à une hauteur considé-
rable, s'élevant et s'abaissant comme une Bécassine et poussant des cris
élevés ressemblant à tioo ivoo rapidement répétés. M. Dann trouva
des œufs frais le 24 juin, et dans la dernière semaine de juillet les
jeunes étaient encore incapables de voler. Le nid était placé dans une
touffe d'herbe et ressemblait à celui d'une Bécassine. Les parents
et leurs poussins passaient la plus grande partie de leur temps dans
les herbages des marais.
M. Mitchell trouva des œufs au même endroit dans la seconde
moitié de mai 1873. M. Colett trouva un nid le 9 juin 1872 ; il conte-
nait quatre œufs. On sait aujourd'hui que le Limicole niche en grand
nombre dans les montagnes de la Scandinavie à partir du ^j'&' 1. N. ;
M. Wolley l'a trouvé nichant près de Muonioniska sous le 68". Les
œufs sont pyriformes, d'un vert olive pâle, pointillés et tachetés de
brun cendré, parfois avec des taches plus grandes et plus compactes
vers le gros bout ; ils mesurent 33 millim. sur 22.
SOUS-FAMILLE
DES TOTANINÉS. — TOTANIN^.
Car. — Bec de la longueur de la tête ou un peu plus long, à pointe dure ;
ailes longues et étroites; queue courte, arrondie, étagée ou conique, formée
de douze rectrices ; tarses de structure variable, hauts et grêles ou courts
et vigoureux; doigts au nombre de quatre, l'externe réuni au médian par
une membrane. Ce sont en général des oiseaux sveltes et gracieux.
GENRE CXV
MiCHETES. — COMBATTANT
TRiNGA,,Briss. Orn. V, p. 240 (1760).
- 183 -
Pavoncella, Leach, Cat. M. B. Br. 3Ius. p. 29 (1816).
ToTANUs, Nilss., Orn. suec. II, p. 71 (1817).
Machetes, Cuv, Rég. an..l, p. 527 (1829).
LiMOSA, Gr. III. Ind. zool. II, pi. 52 (1835).
Philomachus, Gi". (ex Mœhr. 1752], List geii. B. p. 89 (1841).
Car. — Bec de la longueur de la tête, droit, sillonné aux deux tiers
environ, plus haut que large à la base, un peu renflé à l'extrémité qui est
légèrement fléchie; narines basales, latérales, linéaires: ailes longues,
aiguës, dépassant un peu la queue ; celle-ci arrondie ; jambes nues sur la
moitié de leur étendue; tarses allongés; assez grêles; doigt médian uni à
l'externe par une courte membrane; pouce très court; ongles médiocres.
Ce genre ne comprend qu'une seule espèce :
201. — Le Combattant querelleur
MACHETES PUGNAX, Cuv. ex Lin.
(PI. 201 et 201»)
ToTANUs ciNEREUS et PuGNAX, Bi'lss. Omith. V. pp. 203 et 240 (1760).
Tringa PUGNAX, Lin. S. iV. I, p. 247 (1766).
Tringa littorea, Lin. Syst. ncU., I, p. 251 (1766).
Tringa equestris et grenovicensis, Lath. Ind. Orn. II, p. 730-31 (1790).
Pavoncella pugnax, Leach, Syst. cat. M. B. Br. Mtis. p. 29 (1816).
ToTANUS PUGNAX, Nilss. Om, suec. II, p. 71 (1817).
Machetes pugnax, Cuv. Règ. an. I, p. 527 (1829).
Machetes alticeps et planiceps, C. Brm. Isis 1831, p. 991.
Totanus indica et Limosa hardwickii, Gr. III. Ind. zool. II, pi. 52 (1835).
Philomachus pugnax, Gr. List, of gen. B. p. 89 (1841).
Machetes optatus, Hodgs. Gr. zool. Mise. I, p. 86 (1844).
Machetes Minor, C. Brm. Vogelf., p. 320 (1855).
Der vielfarbige Kampflaufer, en allemand.
The Ruff, en anglais.
De KeiMphaan, en flamand.
Taille du mâle: 0,25; ailes 0,18 ; bec 0,035 ; tarses 0,050; de
la femelle: 0,19; ailes 0,155; bec 0,031; tarses 0,012.
Description du mâle en été. — Face couverte de papilles jaunes ou rou-
geâtres; couvertures des ailes d'un cendré brunâtre bordées de blanchâtre;
rémiges brunes avec les baguettes blanchâtres ; parties supérieures et sca-
pulaires de couleur variable ; sus-caudales latérales blanches ; queue d'un
cendré brunâtre ; large collerette diversement colorée, composée de plumes
longues et serrées, surmontée d'oreillons formés par les longues plumes
recourbées eu arrière qui partent des côtés de la nuque ; poitrine de couleur
— 184 -
variable; bas- ventre et sous-caudales blancs. Iris brun; bec brunâtre ; pattes
jaunâtres.
Il n'y a pas d'oiseaux dont les mâles varient plus que ceux des Combat-
tants, aussi est-il fort rare d'en rencontrer deux exactement semblables ,
c'est la collerette qui varie le plus : elle est tantôt unicolore, tantôt tachetée
ou pointillée, tantôt barrée transversalement ; quant à la teinte du fond,
elle varie à l'infini.
Femelle. — Beaucoup plus petite que le mâle et sans collerette. D'un
cendré brunâtre avec des taches allongées noires sur la tête ; sourcils, une
petite tache sous l'œil et gorge blancs ; poitrine d'un cendré pâle tirant sur
le roussâtre ; manteau et scapulaires bruns, les plumes bordées de cendré;
plumes du croupion et sus-caudales médianes brunes bordées de cendré
roussâtre; sus-caudales latérales blanches ; couvertures des ailes d'un brun
noirâtre bordées de cendré pâle, les plus grandes terminées de blanchâtre ;
parties ventrales et sous-caudales blanches; rectrices brunes bordées de
blanc roussâtre.
Mâle en automne. — Dans cette saison le mâle n'a plus ni papilles faciales,
ni collerette, et son plumage ressemble à celui de la femelle, quoique ses
teintes soient moins pures ; c'est par la taille qu'il est le plus facile de
distinguer les sexes en dehors de la saison des amours.
Jeune mâle. — Ressemble à la femelle par la taille et la couleur, mais les
plumes dorsales bordées d'une teinte tirant davantage sur le jaune d'ocre;
dessus de la tête et nuque lavés de la même teinte.
Poussin. — Dessus de la tête d'un roux pâle, coupé longitudinalement par
cinq bandes noires, dont les plus latérales incomplètes, qui se réunissent
circulairement à la nuque ; deux petits traits de cette couleur derrière chaque
mandibule ; parties supérieures, dessus des ailes et des cuisses rayés confu-
sément de roux et surtout de noir, et semés de petits flocons d'un blanc
fauve ; côtés de la tête et toutes les parties inférieures d'un roux très pâle,
surtout sur l'abdomen ; bec noirâtre, pieds d'un brun roux {J. Vian),
Hab. — L'aire géographique de cette espèce s'étend sur toute
l'Europe, sauf dans l'extrême
Nord ; elle se montre cependant
accidentellement en Islande
{Faber). Elle niche en plus ou
moins grand nombre depuis la
Hollande {Schlé gel) jusqu'au cap
Nord {Collett), et même plus au
sud si la localité lui convient,
comme cela lui arrive parfois en
France dans le Boulonnais [Degland). Aux îles Britanniques, le Com-
185 —
battant est de passage au printemps et en, automne, mais quelques
couples nichent accidentellement dans le Norfolk {Seebohm). Pour la
Belgique c'est également un oiseau de passage, qu'on rencontre en
plus ou moins grand nombre au printemps et en automne, et particu-
lièrement dans les prairies marécageuses des provinces d'Anvers et
de Limbourg.
Cet oiseau hiverne dans la majeure partie de l'Afrique, car on l'a
observé aussi bien à l'est qu'à l'ouest de ce continent et jusqu'au cap
de Bonne-Espérance [Layard] et le Transvaal {Ayres). Suivant de
Heuglin, ces oiseaux seraient excessivement communs en Egypte, en
Nubie, au Sennaar et dans le Kordofan oriental, depuis l'automne
jusqu'au printemps ; en Abjssinie on le rencontre jusqu'à une altitude
de 10,000 pieds. Le même auteur dit, que dans la zone africaine qu'il
a explorée, il a rencontré des Combattants pendant toute l'année et
même pendant l'époque de la reproduction.
En Asie on rencontre cet oiseau depuis la mer Caspienne (^zc/ii^û^/c?)
jusqu'au Kamtschatka {Pallas), et du 75° 1. N. {Middendorff) jusque
dans l'Inde (Jerdon), mais il ne paraît pas avoir été observé en Mon-
golie et en Chine. Il s'est montré accidentellement dans l'île septen-
trionale du Japon {Seebohm) et à Cejlan {Legge).
Il s'égare quelquefois dans l'Amérique du Nord où il a été pris
dans les États du Maine, de Massachusetts, de New- York et de
rOhio {Baird). M. von Pelzeln dit que M. Munsberg a pris un oiseau
de cette espèce dans la Guyane.
Mœurs. — La migration des Combattants a lieu pendant la nuit,
par troupes plus ou moins considérables, mais les mâles adultes sont
rarement accompagnés de femelles ; celles-ci voyagent d'ordinaire en
bandes séparées ou accompagnées des jeunes mâles de l'année. Les
mâles quittent les lieux de la reproduction dès la fin de juillet ou au
commencement d'août, mais les femelles ne partent qu'en septembre.
Ce ne sont que des jeunes séparés des leurs qui se Joignent aux bandes
d'autres petits échassiers. Au printemps ce sont également les
femelles que l'on voit passer les dernières par bandes plus ou moins
nombreuses, tandis que les mâles, qui les ont précédées d'une quin-
zaine de jours, passent par petites troupes de dix à quinze individus.
Ces passages ont lieu vers la fin d'avril et en mai.
Bien qu'on rencontre souvent de ces oiseaux dans le voisinage de
la mer, ils préfèrent cependant les marécages à tout autre endroit ;
ils aiment aussi les prairies et les pâturages humides ou en partie inon-
ToME U. —1889. 24
— 186 —
dés. Lors des passages on les voit un peu partout où il y a de l'eau,
mais rarement j)rès des rivières.
Par son maintien comme par ses allures cet oiseau ressemble à la
généralité des tringiens, mais plus que tout autre de la famille il
s'éloigne des bords de la mer et des cours d'eau. Dans leur quartier
d'hiver comme dans leurs voyages les deux sexes font bande à part,
c'est ce qui a fait croire à Brehm, qui n'avait jamais vu en Afrique que
des femelles, que les mâles hivernaient dans le midi de l'Europe ;
mais il a reconnu son erreur plus tard, quand de Heuglin eut affirmé
avoir vu en Nubie des troupes de mâles. En dehors de la saison des
amours, cet oiseau a la démarche gracieuse, non trottinante, le main-
tien fier, le vol rapide; il plane souvent et sait changer brusquement
de direction. C'est à l'aurore et au crépuscLde qu'il se montre le plus
actif et le plus vif, et quand il y a clair de lune il est même toute la nuit
en mouvement, tandis qu'il se livre au repos pendant la plus grande
partie de la journée. Il cherche sa nourriture en silence, et c'est tout
au plus s'il se fait entendre quelquefois en prenant son vol. Tant que
les mâles ne sont pas excités par l'amour, ils se montrent pacifiques,
sociables et se mêlent même à d'autres oiseaux de rivage ; mais leur
genre de vie change complètement à l'époque de la reproduction. Les
mâles sont alors continuellement en guerre et se battent sans cause
appréciable, qu'il y ait ou non des femelles dans le voisinage, qu'ils
soient libres ou captifs.
Suivant Naumann, les Combattants se réunissent à des places déter-
minées, et dans les localités où l'espèce est abondante, ces places sont
éloignées l'une de l'autre de cinq à six cents pas : les oiseaux y
reviennent tous les ans. Rien, d'ailleurs, ne distingue ces endroits du
terrain avoisinant. Une petite élévation d'un mètre et demi à deux
mètres de diamètre, toujours humide, couverte d'un gazon court, tel
est leur champ de bataille où chaque jour arrive plusieurs fois un cer-
tain nombre de mâles. Chacun y a sa place, et c'est à cette place,
toujours à peu près la même, qu'il attend ses adversaires. Il n'y vient
pas avant que sa collerette soit complètement poussée ; mais quand il
a revêtu tout son plumage de noces, il s'y montre avec une régularité
vraiment surprenante.
« Le premier mâle qui arrive, dit Naumann, regarde de tous côtés
et attend qu'un autre se présente. En vient-il un qui n'est pas disposé
à se battre, il en attend un autre et bientôt la lutte s'engage; ils
fondent l'un sur l'autre, luttent jusqu'à ce qu'ils soient épuisés, puis
_ 187 —
chacun retourne à sa place, se repose, refait ses forces pour recom-
mencer une nouvelle lutte. Cela continue ainsi jusqu'à ce que la
lassitude l'emporte. Alors ils abandonnent la place, mais généralement
pour y revenir bientôt. Ces combats ne sont que des duels, jamais
plus de deux ne se battent ensemble. Cependant, si le terrain est assez
spacieux, il arrive souvent que deux ou trois paires de combattants
en viennent aux prises en même temps, mais chacun pour soi ; leurs
coups se succèdent, se croisent avec une telle rapidité que, de loin,
Tobservateur est tenté de croire que ces oiseaux sont affolés,
« Deux mâles qui se provoquent commencent à trembler, à hocher
la tête ; ils hérissent les plumes de la poitrine et du dos, relèvent celles
de la nuque, étalent leurcollerette, fondent Tun sur l'autre en se portant
des coups de bec ; les verrucosités de la tête leur servent de casque,
leur collerette de bouclier. Les attaques se suivent, se précipitent
avec une rapidité étonnante ; l'ardeur de ces oiseaux est telle qu'ils
tremblent de tous leurs membres et qu'ils doivent se reposer par
moment. Enfin le combat se termine connue il a commencé, par un
tremblement général de l'oiseau et par des hochements de tête ; tous
deux secouent leur plumage et retournent à leur ancienne place ; s'ils
sont trop fatigués, ils se séparent pour quelque temps »,
Comme ils n'ont d'autre arme que leur bec flexible et sans pointe, ils
ne peuvent se blesser et faire couler leur sang ; il est même rare qu'ils
perdent quelques plumes. Quand onal'occasion d'assister à ces luttes,
on voit bientôt que les femelles n'y sont le plus souvent pour rien ;
les mâles se battent pour un ver, un insecte, pour tout et pour rien,
c'est une manie qui les prend à l'époque de la reproduction.
Ces oiseaux ne se font entendre que pendant la nuit et à l'époque
des migrations ; leur voix est faible et rauque et peut se rendre par
kank kack, kick kack; les femelles crient quelquefois en plein jour
lorsqu'elles sont près de leur nid, surtout quand quelque chose les
elfraie. Leur nourriture consiste en vers, limaces, larves et insectes ;
ils mangent môme des sauterelles.
Le Combattant s'apprivoise très facilement, et on peut le garder
en captivité dans une grande volière pendant plusieurs années. On le
nourrit de vers, de pain trempé dans du lait, de viande finement hachée.
Chaque mâle doit avoir sa mangeoire, sans quelles combats n'auraient
pas de fin. L'eau fraîche doit leur être renouvelée plusieurs fois par
jour.
Rcpyfxiw'tion. — Ce singulier- oiseau nirlte vers la mi-mai dans un
- 188 —
marais ou dans une prairie humide, et toujours non loin de l'eau. Le
nid consiste en une dépression creusée dans le sol et garnie de
quelques chaumes et de brindilles sèches. Les œufs, au nombre de
quatre, sont pyriformes, d'un vert olive ou d'un brun olivâtre, ornés
de taches profondes d'un gris violacé et de taches et de points
superficiels d'un brun noirâtre. Ils mesurent environ 43 millim.
sur 31.
La femelle couve seule pendant dix-huit jours ; elle témoigne un
vif attachement à ses petits, tandis que le mâle ne s'en inquiète en
aucune façon. Celui-ci continue à se distraire dans les luttes jusqu'au
commencement de juillet; il erre ensuite à son gré dans le pays en
attendant le moment du départ.
GENRE CXVI
CHEVALIER. — TOTANUS.
Tringa, Limosa, Briss. Oryiith. V. pp. 117, 276 (1760).
ScoLOPAX, Lin. Syst. nat. I, p. 245 (1766).
ToTANUs, Bechst. Orn. Tasch. II, p. 284 (1803).
Glottis, Koeh, Syst. Baier. Zool., p. 305(1816).
LiMicuLA, Leach, Syst. cat. M. B. Br. Mus. p. 32 (1816).
Erythroscelus, Gambetta, Rhyacophilus, Helodromas, Iliornis, Kaup, Nat. Syst.
pp. 54, 140, 144, 156(1829).
Car. — Bec phis long que la tête, droit, grêle, rarement retroussé, à man-
dibule supérieure sillonnée sur à peu près la moitié de son étendue, com-
primée à l'extrémité et légèrement fléchie à la pointe ; narines basales,
linéaires, latérales ; ailes allongées, sur-aiguës, atteignant ou dépassant l'ex-
trémité de la queue ; celle-ci courte, égale ou conique ; jambes nues au moins
sur la moite de leur étendue ; tarses longs, grêles ; doigt externe réuni au
médian par une membrane assez développée ; pouce court, ne portant à terre
que par son extrémité.
Hab. — Ce genre est cosmopolite.
202. — Le Chevalier à pieds verts.
TOTANUS GLOTTIS, Bechst. ex Lin.
(PI. 202)
ScoLOPAx GLOTTIS, LUI. Syst. nat. I, p. 146 (1758) et 1, p. 245 (1766).
Limosa grisea, Briss. Ornith. V, p. 267 (1760).
ScoLOPAX NEBULARius, Gunii. Leeni. Beskr. Fimm. Lap. p. 251 (1767).
ScoLOPAX ciNERACEA, Lath. Geu. Sijn. suppl. I, p. 292 (1787).
ScoLOPAX CANESCENS, Gm, Syst. nat. I, p. 668 (1787).
— 189 -
ToTANUS GLOTTis, Bechst. Ont. Taschenb. II, p. 287 (1803).
ToTANUS FiSTULANS et GRiSKUs, BQchst, Naturr/. Deutschl. IV, pp. 241, 249 (1809).
ToTANUS CHLOROPUS, Mey. et W. Taschenh. II, p. 371 (1810).
LiMicuLA GLOTTIS, Lcacli, Syst. Cat. M. B. Br. Mus. p. 32 (1816).
Glottis CHLOROPUS, Nilss. Orn. Suec. II, p. 57 (1821).
Glottis grisea et fistulans, Brm. Isis, 1830, p. 990.
LiMOSA TOTANUS, Pall. Zoogr. II, p. 183 (1831).
Glottis nivigula, Hodgs. Gr. Zool. Mise. Il, p. 30 (1831).
ToTANUS GLOTTOiDES, Vig . Proc. Zool. Soc. 1831, p. 173.
LiMOSA GLOTTOiDES et ToTANUs HORSFiELDii, Syk. Proc. zool . Soc. 1832, p. 163.
Glottis floridanus, Bp. Camp. List B. p. 51 (1838).
Glottis canescens, vigorsii, horsfieldii, Gray, List B Br. Mus. III, p. 99 (1844).
ToTANUs CANESCENS, Adaiiis, Pr. zool. Soc. 1859, p. 169.
ToTANUS NEBULARius, Stejn. Pr. U. States nnt. Mus. 1882, p. 37.
Der hellfarbige Wasserlaufer, en allemand.
The Greenshank, en anglais.
De Groenpootige ruiter, en flamand.
Taille : 0'",24 ; ailes 0,19 ; bec 0,057 ; tarses 0,062 (1).
Description du mâle et de la femelle adultes en été. — Dessus de la tête noir
strié longitudinalement de blanc ; dessus du cou d'un cendré brunâtre strié
de blanchâtre ; manteau et scapulaires noirs avec les plumes bordées de blanc
grisâtre; couvertures des ailes brunes, quelques-unes bordées de cendré, les
plus grande bordées de blanc ; rémiges noirâtres avec les baguettes brunes,
sauf celle de la première qui est blanche ; sourcils blancs plus ou moins poin-
tillés de brun ; parties inférieures d'un blanc pur avec les joues, le cou, le
haut de la poitrine et les flancs marqués de petites taches allongées noirâtres;
bas du dos d'un blanc pur ; sus-caudales blanches barrées de brun ; queue
blanche, les rcctrices médianes grisâtres etrayées en zigzags transversalement
de brun cendré, les autres tachées de même couleur sur leur bord externe.
Bec noir ; pattes d'un vert olivâtre ; iris brun clair.
En hiver. — Dessus de la tête brun strié de blanc ; parties supérieures cen-
drées avec les plumes plus ou moins bordées de blanc, les scapulaires et les
grandes couvertures avec une strie médiane noire et de petites taches brunes
dans le bord blanc ; les parties inférieures d'un blanc pur sans taches ; le
reste comme en été.
Jeune. — Dessus de la tête d'un brun noir strié de blanc ; joues et nuque
d'un cendré blanchâtre avec des taches allongées d'un brun foncé plus ou
moins serrées et plus accentuées près du dos; manteau d'un brun noir plus
ou moins foncé, avec les plumes marquées d'une strie centrale noire et bordées
de blanc roussâtre sale, surtout sur les côtes des plumes ; couvertures des
(1) La taille est toujours prise du sommet de la tête à l'extrémitc de la queue ; mais comme
cette mesure est gcncralement calculée sur des peaux préparées, elle n'est pas d'une rigoureuse
exactitude. I^es dimensions données des ailes, du bec et des tarses sont les seules bien exactes.
— 190 —
ailes d'un bmnuoir, plus ou moins bordées de blanc jaunâtre sale, les plus
petites presque unicolores ; parties inférieures d'un blanc pur ; côtés et bas
du cou marqués de taclies allongées brunes, parfois triangulaires sur les côtés
de la poitrine ; le reste comme chez l'adulte.
Poussin. — Front blanc, varié de noir sur la ligne médiane ; dessus de la
tête noir, et cette teinte se prolonge en bande sur la nuque ; un trait noir
devant l'œil et une tache de même couleur derrière la région des oreilles ;
dessus du corps d'un fauve pâle avec trois larges bandes dorsales noires, et
une autre plus courte en arrière des flancs ; ailes de la même teinte fauve
avec une bande centrale noire ; duvet des jambes varié de noir et de blanc ;
parties inférieures blanches ; queue noire variée de fauve. Bec noirâtre avec
la base de la mandibule inférieure rousse ; pattes d'un gris olivâtre (1).
Hah. — L'habitat d'été de cette espèce se trouve dans la zone septen-
trionale de l'Europe et de l'Asie,
entre le 60° et le 66° ; quelques
couples isolés nichent cependant
dans les montagnes de l'Ecosse
et des Hébrides [Seehohm) ; elle
n'a pas été observée en Islande,
aux îles Féroé et au Groenland.
Lors des migrations, on ren-
contre cet oiseau en plus ou
moins grand nombre dans toute l'Europe centrale et méridionale ;
c'est à cette époque qu'on le voit en Belgique dans le voisinage de la
mer, et il est même assez fréquent en août et septembre sur les bords
de l'Escaut et dans les polders près d'Anvers {Crocgaert), mais il ne
se montre qu'irrégulièrement dans les autres parties du pays, ainsi
que dans le grand-duché de Luxembourg (de La Fontaine) et en Lor-
raine {Godron). Dans les autres contrées de l'Europe centrale et méri-
dionale il est généralement plus ou moins commun à l'époque des
passages, mais il ne se montre pas partout très régulièrement. Il
hiverne à partir du sud de l'Espagne (Saunders) et du Portugal
(du Bocage), ainsi que sur plusieurs îles de la Grèce {LinderwMyer):, en
Turquie on le rencontre parfois aussi en hiver (Robson), et d'après le
D"" Finsch il nicherait dans les Balcans.
En Asie on observe cet oiseau dans toute la zone septentrionale
jusqu'au détroit de Behring et le Kamtschatka {Stejneger). Il est de
(1) Les renseignements que M. Dresser donne, dans ses Birds of Europe, sur les changements
de plumages du Chevalier à pieds verts, sont complètement erronés.
- 191 —
passage dans toute l'Asie centrale et au Japon {Bm^ger) ; en Chine il
passe en nombre considérable {David). Il hiverne dans le sud de l'Asie:
dans l'Inde (Jerdofi), à Ceylan {Leggc), dans l'Indo-Chine et dans
l'archipel Indien où il a été observé aux îles de Sumatra, Ternate,
Goram, Kei, kvo\i{von Rosenherg), Bornéo {Diard), Java [Schlégel),
Timor, Célèbes (^S'. Mûller), Halmahera {Wallace) et même en Aus-
iralie {Gould),
Il hiverne également en Afrique et quelques individus passent
même l'été en Egypte, en Nubie et près de la mer Rouge {de Heug/in);
il est commun en hiver sur toute la côte septentrionale {Brake,
Loche); on l'a également observé en Sénégambie, à Casamanze, à la
Côte d'Or, au Gabon ainsi que sur toute la côte orientale {SperUng,
Peters) jusqu'à Natal {Ayres) et le cap de Bonne-Espérance {Lagard).
Il a aussi été observé aux îles Madère, des Princes, Séchelles, etc.
{Newton, Dohrn, etc.). Ce Chevalier s'égare parfois en Amérique, où
Audubon en obtint un do la Floride ; le musée de Leyde possède des
sujets de Buenos-Ayres, des bouches du Rio de la Plata et du Chili
{Schlégel).
Mœurs, — Cet oiseau, aussi appelé Chevalier gris et aboyeur, n'est
donc aussi pour nos contrées qu'un simple passager ; il commence à se
montrer en août, et les passages continuent jusque vers la fin de
septembre et môme parfois jusqu'en octobre; il repasse en avril et
mai, mais on ne le voit alors généralement qu'en petit nombre. Il a
des habitudes semi-nocturnes, aussi ne voyage-t-il le plus souvent
que pendant la nuit, et il vole alors à une grande hauteur soit isolé-
ment, soit par couples ou par petites troupes de trois à sept individus,
plus rarement de dix à vingt. Des sujets isolés se mêlent parfois à des
bandes de petits oiseaux de rivage dont ils deviennent alors les chefs
défile ; de tous ses congénères, il est le plus prudent, le plus méfiant
et par conséquent le plus propre pour remplir le rôle de guide.
Le Chevalier à pieds verts habite peu les côtes maritimes, car il
préfère les eaux douces et surtout les bords des lacs, des rivières, des
étangs, des marais, etc. Il évite les forêts et les buissons et ne se
lient que dans les endroits découverts d'où il peut voii- de loin
l'approche d'un ennemi. Lors des passages, il s'arrête souvent durant
plusieurs jours dans les localités qui lui plaisent, mais il s'en éloigne
dès qu'il a été troublé et n'y retourne plus. Partout où il se montre il
recherche les endroits vaseux et surtout les langues de terre vaseuses
qui s'avancent loin dans l'eau ; jamais il ne se cache dans les lier-
- 192 —
bages : il s'envole à l'approche d'un homme ou d'un chien, mais se
tapit à terre au passage d'un rapace, sachant fort bien que celui-ci le
prendrait plus facilement dans l'air que sur le sol. Il dort près de
l'eau, le plus souvent perché sur une patte et la tête cachée entre les
plumes du manteau, mais son sommeil est si léger que le moindre
bruit suffit pour le réveiller ; il prend généralement son repos vers le
milieu du jour, rarement pendant la nuit et seulement quand le ciel
est sombre.
C'est un oiseau vif, agile, gai et d'une prudence à toute épreuve ;
son maintien est gracieux et fier; il marche vite, court quand c'est
nécessaire avec une extrême agilité, et aime à entrer dans l'eau
jusqu'au ventre. Il nage en franchissant parfois un espace assez
considérable, et sait plonger en cas de danger, nageant même sous
l'eau en se servant de ses ailes comme de rames. Il vole généralement
en ligne droite en battant fortement des ailes ; souvent aussi il décrit
des courbes élégantes et finit par se laisser tomber brusquement, ne
ralentissant son impulsion que quand il est près du sol.
De tous ses congénères, c'est assurément le plus prudent et le plus
méfiant. Il est fort difficile de l'approcher à portée de fusil, car dès
qu'il voit quelqu'un de loin, il reste immobile, observe les mouvements
de celui qui se présente à sa vue, et s'il y a lieu de s'en méfier il
s'envole à grands cris. Plus l'endroit est solitaire, et plus il est pru-
dent; quand il se trouve non loin d'une route assez fréquentée, il se
montre moins craintif, et la vue d'un homme ou d'un cheval ne
l'effarouche pas autant ; mais en général il craint et fuit tout ce qu'il
n'est pas habitué de voir. Sa sociabilité a ses limites : jamais on ne
le voit en troupe, mais on rencontre parfois quelques individus
ensemble vivant en bonne harmonie; les sujets isolés se joignent
généralement à d'autres oiseaux de rivage, ou plutôt ce sont ces
derniers qui arrivent au cri d'appel du Chevalier, le prennent pour
guide et le suivent partout aveuglément.
La voix de cet oiseau est un sifflement clair et perçant que l'on
peut rendre assez bien par tjia tjia ou tjiu\ c'est surtout en volant
et dans les moments d'effroi que l'oiseau fait entendre ce cri, ne le
répétant toutefois que deux ou trois fois de suite. Son vrai cri d'appel
est dick dick dick ; à l'époque de la reproduction le mâle fait entendre
d'une voix douce, une phrase ressemblant à dahudl dahudl.>.. qui
représente son chant d'amour.
La nourriture de cet oiseau se compose de divers petits animaux
— 193 -
tels que larves, insectes, vers, mollusques, petits poissons, têtards de
grenouilles, etc. Bien que cette espèce soit très farouche, elle s'ap-
privoise cependant en peu de temps et peut vivre en captivité pendant
plusieurs années.
Reproduction. — En Ecosse l'époque de la reproduction commence
en mai et la ponte a lieu dans la seconde quinzaine du même mois ;
dans les contrées du nord de l'Europe et de l'Asie, la ponte n'a lieu
que vers le milieu de juin. Ce Chevalier prend un soin extrême à cacher
son nid, aussi ne découvre-t-on celui-ci que par hasard ou après de
longues recherches ; il est habituellement caché entre des bruyères ou
des herbages courts, et se compose d'une dépression garnie de brins
secs oa de feuilles mortes. Parfois aussi, le nid est placé tout près de
l'eau, ou encore sur une proéminence gazonnée entourée d'eau ; le plus
souvent il est construit dans les mêmes conditions que le nid du Plu-
vier doré ou du Bécasseau variable. Au moment de la reproduction,
les couples se séparent pour aller nicher à d'assez grandes distances
les uns des autres. La ponte est de quatre œufs placés avec leur pointe
à l'intérieur, comme cela a lieu chez la plupart des oiseaux de rivage.
Ces œufs sont d'un blanc crème, d'un fauve pâle ou d'un cendré
verdâtre clair avec des taches plus ou moins étendues d'un brun
rosâtre et cendrées, et d'autres, supérieures, d'un brun un peu
roussâtre, mais les grandes taches foncées sont ordinairement plus
abondantes vers le gros bout. Ils mesurent environ 51 millim. sur 33.
203. — Le Chevalier Stagnatile.
TOTANUS STAGNATILIS, Bcchst.
(PI. 203)
ToTANUS STAGNATILIS, Bechst. Om. Taschenb. p. 292 (1803).
ToTANUS TENUiRosTRis, Horsf. Trans. Lin7i. Soc. XIII, p. 192 (1822).
Trynga guinetta, Pall. Zoogr. Rosso-As. II, p. 195 (1831).
Der Teich-Wasserlaufer, en allemand.
The Marsh Sandpiper, en anglais.
De Poel Ruiter, en flamand.
Taille : 0,18 ; ailes 0,136 ; bec 0,04 ; tarses 0,057.
Description du mâle et de la femelle adultes en été. — Dessus de la tête et du
cou d'un cendré blanchâtre avec de larges raies longitudinales noires ; man-
teau, scapulaires et les plus longues des couvertures des ailes d'un cendre
rougeâtre avec de grandes taches noires, les unes longitudinales, les autres
Tome II. —1889. 25
— 194 -
transversales, ces dernières surtout sur les couvertures et les scapulaires ;
bas du dos d un blanc pur ; petites et moyennes couvertures des ailes d'un brun
cendré ; rémiges d'un brun noir, la baguette de la première blanche ; raie
sourcilière et côtés de la tête blancs tachetés de noir ; parties inférieures
d'un blanc pur, avec de petites taches noires ovalaires au cou et à la poi-
trine et des taches angulaires de même couleur sur les flancs ; queue blan-
che, les rectrices médianes et le bord externe des latérales cendrés et toutes
plus ou moins barrées de brun noirâtre ; sus-caudales blanches barrées de
même couleur que les rectrices ; sous-caudales également blanches avec
quelques taches brunes, les plus longues barrées comme les supérieures. Bec
noir ; pattes d'un noir rougeâtre; iris brun.
Les deux sexes en hiver. — Parties supérieures d'un gris cendré, chaque
plume plus ou moins bordée de blanc et marquée d'une strie noire longitudi-
nale au centre ; petites couvertures des ailes brunes, les autres de la couleur
du dos ou un peu plus foncées et bordées de blanchâtre, les longues plumes
qui recouvrent les rémiges barrées extérieurement de noir ; queue comme
en été, mais plus blanche ; face et toutes les parties inférieures d'un blanc
pur, avec de petites stries noires sur les côtés du cou et de la poitrine.
Jeune. — Parties supérieures d'un brun cendré, varié de blanc et strié de
noir sur la tête; dos, scapulaires et couvertures des ailes marqués de petites
taches blanchâtres sur les bords des plumes ; poitrine cendrée avec une strie
brune au centre des plumes ; gorge, ventre et sous-caudales d'un blanc pur.
Pattes d'un brun verdâtre.
Hah. — Le Chevalier stagnatile est peu répandu en Europe et c'est
plutôt un oiseau asiatique. Sur
notre continent il ne paraît guère
dépasser au nord le 50'', et il n'a
jamais été observé aux îles Bri-.
tanniques (1). M. Gâtke le men-
tionne comme ayant été capturé
accidentellement à Helgoland.
Suivant de Nordmann, cet oiseau
est commun, surtout au prin-
temps, dans les parages de la mer Noire ; « c'est au mois d'avril, dit
cet auteur^ qu'il arrive chez nous ; les bandes souvent très nombreuses
de ces Chevaliers, se répandent sur toute la Nouvelle Russie, et l'on
en tue beaucoup qu'on vend ensuite sur le marché aux oiseaux
(1) Aucun auteur anglais ne signale de capture de cette espèce sur le sol britannique.
C'est donc probablement par erreur que Schlégel mentionne, dans son catalogue du Musée
des Pays-Bas, un spécimen provenant d'Angleterre.
— 195 —
d'Odessa. Il est plus que probable qu'il niche chez nous, car je sais
positivement qu'à la mi-mai on en trouve encore dans la Bessarabie
et dans le gouvernement de Kherson ». Il n'est pas rare non plus en
Turquie et en Asie Mineure (Robson) et il est même commun à Corfou
(Lilford). En Grèce il arrive en grand nombre à la suite des ouragans
qu'amène l'équinoxe du printemps, et y séjourne dans les prairies
marécageuses jusque vers la mi-mai [Lindermayer). Il est rare aux
deux passages en Pologne {Taczanowski) , et M. J. von Frivaldsky a
assuré à M. Dresser qu'il niche en Hongrie; en Autriche on le prend
quelquefois près du Danube {Hinterberger), et en Allemagne il se
montre accidentellement en Silésie, dans le Wurtemberg, près du
Mein, en Thuringe, près du lac salé de Mannsfeld [Naumann) et près
du Rhin {Boeck). Feu mon père a signalé cet oiseau comme se
montrant accidentellement en Belgique, et M. de Selys-Longchamps
confirme cette mention. Ce Chevalier est de passage irrégulier dans
le nord et dans quelques autres localités de la France : on l'a tué
près de Dunkerque, de St-Omer, d'Abbeville, de Dieppe, dans le
département de l'Aube et dans le midi de la France {Begl. et Gerbe) ;
M. Besson pense qu'il niche près d'Hyères; il est rare en Savoie
[Bailhj) et près de Nice {Salvadori). En Italie il est de passage régu-
lier en Lombardie, en Vénétie, en Ligurie, en Romagne, en Toscane,
dans la province de Naples, en Sicile {Salvadori , Giglioli, Malherbe)
et à l'île de Malte [Wright), et de passage irrégulier ou accidentel en
Piémont, en Sardaigne {Salvadori, Bonomi) et dans le Tyrol {Altham-
mer). En Espagne il est de passage dans les provinces de Murcie,
de Valence, de Saragosse et de Gérone {Reyes).
En Asie, cette espèce paraît être assez répandue dans la partie
méridionale du Caucase : M. Radde dit qu'au commencement d'avril,
on voit souvent de ces oiseaux sur le marché de Tiflis, qu'il en a
rencontré pendant son voyage au lac Tschaldyr et que l'espèce niche
dans les régions du Terek et du Kuban. Il est commun et niche
dans le Turkestan {Severtzoïo) et dans la Sibérie méridionale
{Radde); Middendorff n'a tiré (ju'un seul sujet sur la côte méridio-
nale de la mer d'Ochotsk ; Dybowski en a trouvés à l'époque de la
nidification dans les steppes du bord de l'Argun; Radde et Prze-
walski le citent du pays de l'Ussuri. Il est rare en Chine {David) et
à P^ormose {Swinhoe). On on a pris à Bornéo {Sclnoancr), à Java
{Srhlégcl), à Halmahera {Wallace) et dans hi nord de l'Australie
{GoiUd, Rarimijj). Il est plus ou moins abondant, en hiver, dans le
496 —
sud-ouest de l'Asie, dans l'Inde [Jerdon) et à Ceylan [Legge).
Cette espèce habite également, pendant la saison d'hiver, une
grande partie de l'Afrique, l'Algérie {Loche), l'Egypte {Shelley), la
Palestine {Tristram), la Nubie, l'Abyssinie, le Kordofan, le Sennaar
et surtout les marais qui avoisinnent le Nil bleu et le Nil blanc à
l'est du Kordofan {de Heuglin). Elle a également été observée à
Natal {Ayres) et dans la colonie du Cap {Layard) ; elle est assez
répandue dans le pays de Damara {Andersson). A la côte occidentale,
cet oiseau a été pris dans l'Aschanti {Pel), en Gambie {Rendall) et à
la Côte d'Or {Schlégel).
Mœurs. — Cet oiseau paraît émigrer très tôt des contrées de
l'Europe, car de Heuglin dit l'avoir vu près d'Alexandrie dès les
premiers jours du mois d'août; c'est en avril et mai qu'on le voit le
plus souvent dans les contrées européennes où il est de passage.
Suivant Naumann, ce Chevalier ressemble beaucoup, par ses
mœurs et même par sa voix, au T. glottis, ce qui fait supposer qu'il
est comme ce dernier plus nocturne que diurne. Il préfère les eaux
tranquilles des étangs et des mares aux eaux courantes, bien qu'on
le rencontre parfois aussi sur les bords des rivières. C'est le plus
gracieux et le plus élégant des Chevaliers ; il court et vole avec une
extrême agilité; ses mouvements d'ailes ne diffèrent guère de ceux
de ses congénères, mais son vol est plus rapide. Il est aussi très
farouche et prudent.
« Dans le N.-E. de l'Afrique, dit de Heuglin, jai rencontré cet
oiseau sous ses divers plumages. On ne le voit le plus souvent
qu'isolément ou par couple, quelquefois mélangé à d'autres oiseaux
de rivage. Il évite le voisinage de la mer, mais il aime les lacs, les
étangs et les mares des régions boisées. »
Voici ce que de Nordmann dit au sujet de cette espèce : « Dans
plusieurs individus vieux, en Uvrée de noces complète, que je tuai
au printemps, je trouvai la couleur des pieds d'un noir rougeâtre
avec une légère teinte verte aux articulations. Il semble donc que la
teinte verdâtre n'appartient qu'aux jeunes sujets. La forme et les
mouvements de cet oiseau ont beaucoup de grâce et d'élégance ; à son
arrivée au printemps il ne montre point de crainte et, lorsqu'on sur-
prend plusieurs individus se promenant sur le rivage de quelque
étang, à moins qu'on ne les chasse brusquement, ils se jettent dans
l'eau, se tenant serrés les uns contre les autres, et se sauvent à la
nage plutôt que de recourir à leurs ailes. Le Chevalier stagnatile est
— 197 —
aussi bon nageur que les Phalaropes, avec lesquels il a, dans sa
manière d'être, plusieurs rapports, sans compter ceux qui existent
dans la forme du bec long et excessivement grêle.
« La cliair de cet oiseau est un mets d'une délicatesse exquise ; au
printemps tout son corps est entouré d'une couche de graisse presque
fondante qui, bien qu'épaisse, se détache facilement de la chair, ce
qui fait qu'en le dépouillant, il faut user de beaucoup de précaution ».
La nourriture principale de cet oiseau paraît se composer de larves
et d'insectes aquatiques ainsi que de petits mollusques.
Repy^oduction. — Le Chevalier stagnatile niche au bord des étangs
et des mares, de la même manière que ses congénères. Il pond quatre
œufs d'un jaune roussâtre terreux, avec des taches profondes cendrées
et d'autres, de diverses grandeurs, brunes et rougeâtres. Ces œufs
mesurent environ 39 millim. sur 29.
204. — Le Chevalier sombre.
TOTANUS FUSGUS, Beclist. ex Brus.
(PL 204)
LiMOSA FUSCA, Briss. Ornith. v. p. 277 (1760).
ScoLOPAx FUSCA, Liii. Sijst. nat. I, p. 243 (1766).
ScoLOPAX MACULATA, Tunst. Om. Brit. p. 3 (1771).
ScoLOPAx CANTABRiGiENSis, Lath. Gen. Syn. suppl. I, p. 292 (1787).
ScoLOPAXNiGKA, cuR0NiCAetTRiNGAATRA,Gmel.5î/s<. nat. I, pp. 659, 669, 673 (1788).
ScoLOPAX NATANS, Otto, Uehers. Buff. Ybg. XXVI, p. 234 (1797).
ToTANUs MACULATUS, Fuscus, NATANS, Bechst. Om. Tasckefib. pp. 284, 286 (I803">.
Tringa longipes, Leisl. iVac/?<r. Bechst. yat. Deutschl. 11, p. 189 (1813).
Tringa TOTANUS, Mey. Vog. Liv. und Esthl. p. 200 (1815).
Totanus raii, Leach, Syst. Cat. M. B. Br. Mus. p. 31 (1816).
Erythroscelus fuscus, Kp. Natiirl. Syst. p. 54 (1829).
Totanus ater, Brm. Isis, 1830, p. 990.
Totanus obscuru.s, C. Dub. PI. col. ois. Belff. 11, p. 189 (1857).
Der dunkelfarbige Wasserlaufer, en allemand.
The dusky redshank, en anglais.
De Zwarte Ruiter, en flamand.
Taille : 0,22 ; ailes 0,165; bec 0,058 ; tarses 0,056.
Description des deux sexes adultes au printemps. — Tête, cou, poitrine et
abdomen d'un j,'ris ardoise foncé, les plumes de l'abdomen très légèrement
terminées de blanc; tour des yeux blanc; manteau et scapulaires d'un brun
noir à reflets pourpres, mais toutes les plumes légèrement bordées de blanc
et marquées sur les côtés de petites taches également blanches ; couvertures
des ailes d'un brun noirâtre varié de cendré, chaque plume bordée et tachée
— 198 —
latéralement de blanc; rémiges brunes; bas du dos blanc; sus et sous-cau-
dales barrées alternativement de brun noirâtre et de blanc; rectrices bru-
nâtres, les médianes lavées de cendré, toutes barrées de blanc sur les bords.
Bec noir avec la base de la mandibule inférieure rouge ; iris brun ; pattes
d'un brun rougeâtre.
En hiver. — Parties supérieures d'un gris cendré, les plumes légèrement
bordées de blanc ; lorums brunâtres; raie sourcilière, tour de l'œil et joues
d'un blanc assez pur, mais les dernières variées de cendré ; bas du dos blanc
devant du cou, côtés et haut de la poitrine d'un cendré varié de blanc ;
gorge, bas de la poitrine et abdomen d'un blanc pur; ailes et queue comme
en été mais d'une teinte plus grise et plus pâle. Pattes d'un rouge orangé.
Jeune. — Parties supérieures brunes, le dos tacheté de blanc ; lorums
bruns ; raie sourcilière et tour de l'œil blancs ; joues striées de cendré ; gorge
d'un blanc pur; les autres parties inférieures blanchâtres, avec des mèches
cendrées au cou et à la poitrine et des raies transversales en zigzags de
même couleur sur l'abdomen ; ailes et queue comme chez l'adulte. Pattes
rouges.
Poussin. — Dessus de la tête, milieu du front et lorums d'un brun noirâ-
tre ; larges raies sourcilières d'un cendré blanchâtre se réunissant derrière
la nuque; une autre raie blanchâtre, plus étroite, passant au-dessus de la
précédente pour se terminer derrière l'œil ; joues blanchâtres ; une raie noire
derrière l'œil, aboutissant à une bande de même couleur couvrant la nuque ;
côtés du cou cendrés ; dos noir varié de cendré roussâtre avec deux bandes
latérales de cette dernière couleur ; ailes noires, variées et bordées de cen-
dré ; flancs et duvet de la queue variés des mêmes teintes ; parties inférieures
blanchâtres, l'extrémité du duvet brunâtre.
Hab. — Le Chevalier sombre ou Arlequin habite, en été, tout le
nord de l'Europe et niche jus-
que sous le 70'' 1. N. {Collett) ;
mais il ne paraît pas avoir été
observé aux îles Féroë, enislande
et au Groenland. A l'époque des
migrations il est plus ou moins
abondant dans toute l'Europe
ï^!] centrale, mais rare aux îles Bri-
tanniques {Seebohm). Il est géné-
ralement commun en Belgique, lors des passages, aussi bien sur nos
côtes maritimes que près des cours d'eau et des marais. Il est rare
en Portugal {du Bocage) ; en Espagne il est de passage et hiverne
mais n'est pas abondant {Saunders) ; dans le midi de la France il est
— 199 -
de passage en automne, en hiver et au mois d'avril, et il est même
alors commun dans le département des Pyrénées-Orientales (/.«croï^r);
il est également de passage régulier en Italie et y hiverne [Salvador i,
Gigliolï) ; en Grèce il est de passage mais rare, et ne paraît pas
avoir été vu sur les îles de l'Archipel {Lindcrmayer). Cet oiseau
passe par la Russie méridionale deux fois par an ; dès le mois de
mars et en septembre et octobre, et il est alors commun dans les
parages de la mer Noire et de la Caspienne, où l'on peut alors voir
des troupes composées de soixante à quatre-vingts individus [de Nord-
mann) ; dans l'arrondissement d'Uman du gouvernement de Kiew,
cet oiseau est de passage régulier mais peu abondant ; il passe
quelquefois déjà le 7 août, mais jamais plus tard que le 7 octobre
[Gœbcl).
En Asie on rencontre ce Chevalier depuis les monts Oural s jusqu'au
Kamtschatka [Stejneger) et le Japon ; il est de passage dans les con-
trées du centre et hiverne dans le Sud, mais ne paraît pas se montrer
en Asie Mineure, eu Palestine et en Perse. Il est assez répandu
dans l'Inde pendant l'hiver [Jerdon), et on le voit même à Ceylai;
[Layard) et dans l'Indo-Chine [Seebohm). L'abbé David dit que pen.
dant la saison chaude on le voit dans la Sibérie Orientale, le Japon,
la Chine et la Mongolie où il l'a rencontré assez fréquemment ;
M. Swinhoe l'a trouvé également aux environs de Canton, de Tientsin
et de Shangaï.
On ne voit cet oiseau en Egypte et en Nubie qu'en petit nombre
[Shelley); il est de passage accidentel en Algérie (Z/oc/^e) et se montre
probablement encore accidentellement dans d'autres parties de l'Afri-
que, car M. Layard en prit un exemplaire dans la colonie du Cap,
près de Knysna.
Mœurs. — La migration d'automne a lieu pendant la nuit et par
groupes composés souvent de vingt à trente sujets et même davantage.
C'est vers la rai-août que le départ commence dans le Nord, et on
rencontre alors de ces Chevaliers jusqu'en octobre et novembre dans
toute l'Europe centrale ; ils hivernent dans les pays qui entourent la
Méditerranée et dans le sud de l'Asie comme nous avons vu plus
haut. Les passages du printemps ont lieu entre la mi-mars et le
milieu de mai, mais ces oiseaux sont alors généralement fort rares,
aussi bien en Allemagne qu'en Belgique; on les rencontre à cette
époque isolément ou par couples. En automne ils voyagent souvent
en société du Chevalier à pieds verts ou autres espèces voisines ; les
— 200 —
troupes d'une certaine importance sont ordinairement formées de
jeunes de l'année, tandis que les vieux préfèrent voyager isolément
ou par couples, s'arrêtant volontiers des journées entières dans les
localités qui leur conviennent. Si la nuit est très sombre, ils s'abattent
près d'une eau quelconque et y attendent, dans le repos, les premières
lueurs de l'aurore pour continuer leur voyage.
Le Chevalier sombre ne se montre sur les côtes maritimes que
pendant les migrations, et encore ne Ty voit-on qu'en petit nombre ;
il recherche les eaux intérieures, les rivières, les lacs, les étangs et les
marécages, et on le voit même près des mares qui se trouvent non
loin des routes et des villages. Il lui faut cependant des eaux décou-
vertes ; il n'aime pas celles qui sont bordées d'arbres ou de buissons
ou garnies de roseaux ou de joncs, aussi se tient-il éloigné de tout
endroit trop ombragé ou garni de hautes herbes ; ce qu'il préfère ce
sont les marécages où il peut facilement patauger dans la boue.
C'est également près de l'eau qu'il cherche le repos, mais il ne se
livre au sommeil que pendant le milieu de la journée ou durant une
partie des nuits sombres ; son sommeil est léger et souvent interrompu,
car il se réveille au moindre bruit.
Sa démarche est élégante, régulière, mais quand il le veut, il sait
courir avec une extrême agilité ; lorsqu'il entre dans l'eau, il y marche
aussi longtemps que ses jambes le lui permettent, puis il continue sa
route à la nage et se montre alors fort habile nageur ; il plonge même
quand un danger le menace, pour revenir à la surface dans un autre
endroit. Son vol est gracieux et rapide et ressemble entièrement à celui
du Chevalier à pieds verts ; quand l'oiseau a un grand trajet à franchir
il s'élève généralement très haut. Il est très farouche, mais moins
prudent que les précédents, sans cependant négliger de prendre son
vol à l'approche d'un chasseur. Il se montre plus sociable, lors de la
migration d'automne, que les autres grands Chevaliers ; les troupes
restent unies durant tout le voyage, aussi bien à terre que dans
l'air, et si une cause quelconque vient à séparer les individus, ils
ne tardent guère à se réunir de nouveau en s'appelant les uns les
autres. Les sujets isolés se joignent souvent à d'autres espèces, mais
il est rare qu'ils se mettent à la tête de bandes de petits oiseaux de
rivage.
La voix de cet oiseau est sonore et sifflante et peut être entendue
de loin; son cri peut se rendre par tjoït ou tjuit, rarement répété
sans intervalle; son cri de ralliement est tick, tick ou tack.
- 201 —
Sa nourriture se compose surtout de mollusques, de têtards de gre-
nouilles, de larves et d'insectes aquatiques ainsi que de vers. Comme
cette espèce s'apprivoise facilement, on peut nourrir les sujets captifs
d'abord de vers de terre, ensuite on mélange ces derniers, coupés en
morceaux, à du pain blanc trempé dans du lait, les habituant insen-
siblement à se contenter de cette dernière nourriture ; on ne doit pas
négliger de leur donner beaucoup d'eau fraîche.
Reproduction. — Nous résumons ci-dessous les observations faites
par WoUej, en Laponie, sur la manière d'être de cet oiseau pendant
la durée de la reproduction.
Le Chevalier sombre revient en Laponie dès la fonte des neiges
et se prépare bientôt à faire son nid. Il se tient alors dans les
lieux découverts de la forêt, souvent loin de l'eau, choisissant
surtout les endroits où l'on a brûlé du bois et où la végétation est
rare. Les couples se tiennent fort éparpillés et c'est à peine si on en
rencontre deux ou trois pendant une journée de marche. Le nid se
trouve dans une clairière entourée de sapins, à une grande distance
des marécages, et le plus souvent sur une éminence ou au sommet
d'une colline. Le terrain dans lequel cet oiseau creuse une légère
dépression, s'il n'en trouve de naturelle, est ordinairement couvert
de courtes bruyères et autres petites plantes croissant parmi des
lichens ; la petite fosse qui sert de nid est elle-même garnie d'une
légère couche d'aiguilles sèches de sapins. La femelle couve avec
persistance en tenant le cou rentré et en découvrant son croupion dont
la blancheur frappe le regard de loin ; aussi le chasseur est-il tenté
de s'emparer de l'oiseau et s'en approche avec mille précautions.
Mais l'animal s'envole à temps, ou court par-ci par-là avant de
s'élever, puis il décrit des cercles au-dessus de l'intrus en faisant
de temps en temps entendre son cri d'angoisse ; parfois il va se
percher sur un arbre voisin. La ponte, qui est de quatre œufs, a
lieu vers la fin de mai. Ces œufs sont d'un vert olivâtre plus ou moins
foncé, parsemés de taches d'un cendré brunâtre au-dessus desquelles
on aperçoit un grand nombre de petites et de grandes taches,
allongées ou arrondies, d'un brun rougeâtre ou noirâtre; ils me-
surent environ 48 millim. sur 33.
Wolley a constaté que les parents se montrent surtout inquiets
quand ils ont des jeunes ; à son approche l'oiseau planait au-dessus
de lui ou se tenait à ses côtés en hochant la tête et ouvrant et fermant
alternativement le bec. Jamais la femelle ne vous permettra de dé-
ToME II. —1889. 26
— 202 -
couvrir sa couvée, car elle parviendra toujours à vous dérouter ; ce
n'est que par hasard que l'on peut trouver son nid.
205. — Le Chevalier gambette
TOTANUS CALIDRIS, Bechst. ex Lin.
(PL 205)
ToTANUs STRIATUS et NŒVius, Bi'iss. Ortiith. V, pp. 196, 200 (1760).
Tringa gambetta, Lin. Fauna Suec. p. 63 (1761).
SCOLOPAX CALIDRIS Ct TrINGA GAMBETTA et STRIATA, Liii. S. N. p. 245 et 248 (1766).
ToTANUs CALIDRIS, Bectist. Omith. Taschenb. II, p. 284 (1803).
Gambetta calidris, Kp. Nat. Syst. p, 54 (1829).
ToTANUs littoralis, Brm. Isis, 1830, p. 990.
Totanus gr^cus et meridionalis, Brm. Yogelf. p. 312 (1855).
TOTANUS GAMBETTUS, C. Dub. PI. col. Ois. Belfj. II, p. 188 (1857).
Der Gambett-Wasserlaufer, eu allemand.
The common Redshank, en anglais.
De Tureluur, en flamand.
Taille : 0'",22 ; ailes 0,155; bec 0,040 ; tarses 0,052.
Description des deux sexes adultes en été. — Parties supérieures et joues d'un
brun cendré olivâtre varié de rougeâtre, avec une raie noire longitudinale au
centre des plumes de la tête, du cou et du dos; sur ce dernier, ainsi que sur
les scapulaires, on remarque également des raies noires transversales sur-
montées d'une raie d'un rougeâtre clair ; partie moyenne et inférieure du dos
d'un blanc pur; couvertures des ailes d'un cendré olivâtre, les plus grandes
barrées de noir et terminées de blanc ; rémiges primaires brunes, leur bord
interne blanc pointillé de brun, la baguette de la première blanche, la moi-
tié terminale des secondaires d'un blanc pur ; sus et sous- caudales ainsi que
les rectrices, blanches barrées de noir; parties inférieures blanches avec des
taches brunes, de forme allongée sur le devant du cou et à la poitrine et
transversales sur les flancs. Bec brun, rouge à la base ; iris brun ; pattes
d'un rouge vermillon.
En hiver. — Parties supérieures d'un cendré rembruni sans taches, avec
les bordures des plumes d'une teinte plus claire ; joues blanchâtres marquées
de brun ; sourcil et tour de l'œil blancs ; côtés du cou et de la poitrine d'un
cendré brunâtre ; petites et moyennes couvertures des ailes brunes, bordées
de blanc d'une manière peu apparente ; parties inférieures blanches, plus ou
moins rayées longitudinalement de brun sur le devant du cou et à la poi-
trine ; flancs et sous-caudales plus ou moins tachetés de brun ; le reste comme
en été. Il est à remarquer, qu'en hiver, les raies et les taches des parties infé-
rieures disparaissent de plus en plus à mesure que l'oiseau avance en âge.
203 —
Jeune. — Dessus de la tête brun avec les bordures latérales des plumes
d'un jaune brunâtre pâle ; joues blanches, marquées de brun en arrière ;
sourcils, tour de l'œil et gorge blancs; lorums bruns; nuque grise, rayée longi-
tudinalement de brun grisâtre ; haut du dos, épaules et couvertures des ailes
d'un brun foncé tacheté de blanc jaunâtre ; parties inférieures blanches,
lavées de cendré et striées de brun sur le devant et les côtés du cou, sur le
jabot ces stries prennent la forme de petites taches allongées ; côtés de la
poitrine lavés de roussâtre et marqués de quelques taches angulaires ou
transversales ; sous-caudales avec une strie centrale brune ; le reste du plu-
mage comme chez l'adulte. Base du bec et pattes oranges.
Poussin. — Sur le vertex calotte étroite d'un roux sombre, encadrée de
noir, dont les extrémités aiguës descendent jusqu'à la naissance du bec et au
commencement du cou ; front et côtés de la tête d'un gris fauve, portant de
chaque côté un trait noir qui part de la mandibule supérieure; traverse le
orum, l'œil, la région auriculaire et se dilate sur les côtés de la nuque ; par-
ties supérieures d'un gris roussâtre par places, coupés par quatre bandes
noires longitudinales sur le dos, qui présente ainsi une bande centrale grise,
et marqué de taches irrégulières noires ; plumeau caudal varié de brun et
de roux ; gorge et ventre blancs ; poitrine, devant du cou et abdomen d'un
fauve pâle ; bec noir avec la mandibule inférieure plus pâle à la base ; pieds
d'un jaune terne [J. Vian). ,
Hah. — Le Chevalier gambette est généralement répandu en
Europe et en Asie ; en été, il est
commun en Islande {Faber) et
très commun dans le nord de
l'Europe jusqu'au 70° {Wallen-
gren), mais à l'est de la mer
Blanche il ne paraît pas dépasser
le 58" et en Sibérie le 55^ [See-
bohm). Sur notre continent, il
niche à peu près dans tous les
lieux qui lui conviennent depuis sa limite septentrionale, la Grande-
Bretagne, l'Irlande, les îles Hébrides, Orkneys et Shetland jusque
sur les côtes de la IMéditerranée et le nord de la Grèce {Lacroix,
Saunders, Giglioli, Lindermayer, etc.); mais en été il est toujours
moins abondant dans les contrées du Midi et manque môme complè-
tement dans certaines régions. Il est sédentaire en Angleterre et en
Irlande [Seebohm) et à partir du midi de la France {Degland). Il est
probable qu'il niche en petit nombre dans les marais du nord de la
Belgique, mais je n'en suis pas certain; il (îst cependant commun eu
— 204 —
avril et à la fin de l'été près de la mer, le long de l'Escaut et dans
les polders, mais selon M. E. Claes, il est peu abondant dans les
marais du Limbourg belge ; on l'a tué plusieurs fois sur la Meuse
près de Namur {Fallon).
En hiver on observe également cet oiseau dans le nord {Loche,
Irby, Salvin, etc.,) et le nord-est de l'Afrique. 11 fait son apparition
dans le Delta dès le commencement du mois d'août, remonte ensuite
le Nil et ses afluents et longe les côtes de la mer Rouge jusque vers
le 10° l.N. ; il est commun depuis septembre jusqu'en décembre dans
le Kordofan oriental ainsi que près du Nil Blanc et du Nil Bleu ; en
Abyssinie on le voit encore jusqu'en avril, et durant tout l'été on
rencontre en Egypte, en Nubie et sur les côtes de la mer Rouge
des individus isolés ou des couples {de Heuglin). On l'observe égale-
ment en Sénégambie {Rendall), dans l'Aschanti [Pel), à la Côte d'Or
{Ussher) et en petit nombre au cap de Bonne-Espérance {Layard),
ce qui fait supposer qu'il se montre sur toute la côte de l'Afrique
occidentale.
En Asie cet oiseau a été observé presque partout, à partir du 55%
depuis les monts Ourals jusqu'à la mer d'Ochotsk (Middendor/f) ,
mais pas au Japon. 11 hiverne en Palestine, en Asie Mineure, en
Perse, dans l'Inde, àCeylan {Jerdon, Layard, etc.), aux îles Andaman
{Walden), en Chine {David) et on l'observe même dans l'Indo-Chine,
en Malaisie, aux Philippines, à Bornéo, à Célèbes et à Java, carie
musée de Leyde possède, d'après Schlégel, des sujets de ces diverses
provenances.
Mœurs. — Le Chevalier gambette quitte les contrées du Nord
vers la fin d'août, et les passages continuent jusqu'en octobre. Ceux
qui nichent en Allemagne, dit Naumann, quittent parfois déjà les
lieux de la reproduction dès la seconde moitié de juin, aussitôt que
les jeunes sont en état de voler, et au plus tard en juillet ; ils errent
alors au loin en attendant le moment du départ définitif. Au prin-
temps ces oiseaux repassent à partir de la mi-mars et les passages
se poursuivent jusque dans la seconde quinzaine d'avril. Les
migrations ont lieu pendant la nuit ou un peu avant le coucher ou le
lever du soleil, mais rarement en plein jour. Les jeunes voyagent
ordinairement en famille ou par troupes de vingt à trente sujets ; les
adultes passent isolément ou par groupes de trois à cinq individus.
Mais sur les côtes maritimes on voit souvent des bandes plus ou
moins nombreuses ; Naumann pense que ces bandes se composent
— 205 —
des individus venant des contrées septentrionales et qui, par con-
séquent^ ont un plus long trajet à franchir.
Lors des passages, on rencontre ces Chevaliers le plus ordinaire-
ment dans les pays plats et marécageux, surtout dans les prairies
humides, dans les pâturages entrecoupés de flaques d'eau, près des
lacs, des étangs, des marais et des rivières ; on le voit alors en grand
nombre près de TEscaut et dans les mares des polders. Il se tient
aussi près de la mer, et dans le Nord il niche souvent dans son voisi-
nage. Il recherche partout un terrain vaseux où il peut patauger dans
la boue, et ne séjourne jamais longtemps là où l'eau est claire et
limpide.
C'est également un oiseau assez nocturne, car il ne se livre au
sommeil pendant la nuit que quand celle-ci est très sombre ; il prend
son repos vers le milieu du jour, ne dormant cependant que d'un
sommeil léger, car le moindre bruit suffit pour le réveiller. C'est du
reste un oiseau farouche et prudent qui ne se laisse jamais approcher
à portée de fusil, mais qui sait fort bien distinguer le passant inoffensif
du chasseur.
Le Chevalier gambette a une démarche élégante et mesurée, et il
sait courir avec une grande vitesse quand c'est nécessaire. Il entre
parfois dans l'eau jusqu'au ventre, mais ne plonge qu'en cas de
danger pressant, et seulement quand une blessure à l'aile l'empêche
de voler ou qu'il se voit guetté par un rapace. Il nage avec facilité,
vole avec autant de rapidité que de légèreté et plane parfois long-
temps sans agiter les ailes. Il lui arrive souvent, dans les lieux où il
se sent en sûreté, de voler très bas en rasant le sol ou l'eau ; s'il a été
effrayé, il s'élève de suite très haut, mais c'est pendant les mi-
grations qu'il vole surtout à une grande hauteur. Il est rare de voir
un do ces oiseaux dans une volée composée d'autres espèces, à moins
que ce ne soit une bande do Chevaliers à pieds verts, dont le cri
d'appel ressemble beaucoup à celui de l'espèce qui nous occupe ;
mais on voit assez souvent des jeunes Chevaliers gambettes isolés
servir de guide à des bandes de petits oiseaux de rivage.
D'après Naumann, le cri de cet oiseau est sifflant et peut se
rendre par dja dja djaa ou dja da da ; au repos il fait entendre de
temps en temps un djaa unique, et ne le répète plusieurs fois de suite
que pour témoigner sa satisfaction ou pour appeler ses semblables ;
c'est (lu reste un oiseau assez bruyant (|ui se fait entendre en toute
occasion. 11 a encore un autre cri, celui do tuck, tuck, tack, qui est
— «06 —
commun à plusieurs espèces de son genre ; son chant d'amour est
très caractérisque et ressemble à daelicll dlidl dlidl
La nourriture de cet oiseau ne diifère guère de celle des autres
espèces de son genre: larves et insectes aquatiques et terrestres,
petits mollusques et vers ; il avale du gravier pour faciliter sa
digestion et enfonce parfois la tête dans l'eau afin de fouiller dans la
vase et en retirer les petits êtres dont il se nourrit.
Reproduction. — Dans l'Europe centrale, la reproduction a lieu
en avril et l'on trouve des œufs dans la seconde moitié de ce mois et
en mai ; plus au Nord la ponte a lieu plus tard, et dans la partie la
plus septentrionale de la Norwège elle n'a lieu que dans la seconde
quinzaine de juin. Ces Chevaliers sont à cette époque extrêmement
sociables et nichent non loin les uns des autres.
Le nid est placé tantôt dans une toulFe de joncs entourée de vase,
tantôt dans un pâturage ou au bord d'un marais, plus rarement dans
un pré, et le plus souvent dans le voisinage de l'eau. Ce nid ne con-
siste également qu'en une simple dépression garnie de quelques brins
ou d'un peu de mousse. Il n'est pas difficile à découvrir si Ton veut
observer les oiseaux de loin ; en s'approchant lentement, l'anxiété des
parents trahit bientôt la place de leur couvée. La ponte est de quatre
œufs ; mais si ceux-ci ont été enlevés et que la femelle se trouve ainsi
obligée de faire une nouvelle ponte, elle ne déposera plus que trois
œufs. Ceux-ci sont de couleur assez variable: on en trouve d'un
jaune grisâtre ou brunâtre, de rougeâtres ou d'une teinte olive
passant plus ou moins au brunâtre ; ils sont parsemés de taches pro-
fondes cendrées et roussâtres et de taches superficielles brunes de
différentes grandeurs ; ils mesurent environ 44 millim. sur 31.
La femelle couve avec assez de persistance, surtout dans les der-
niers temps, et l'éclosion a lieu au bout de quatorze à seize jours.
Les poussins quittent leur nid dès qu'ils sont bien séchés, et suivent
aussitôt leur mère qui leur apprend sans tarder à trouver leur nour-
riture. En cas de danger, ils savent fort bien se cacher et se laissent
parfois écraser plutôt que de quitter leur cachette. La mère est du
reste pleine de dévouement pour ses petits et n'hésite pas à les
défendre au péril de sa vie ; le père se montre aussi bon protecteur,
mais il est moins courageux que sa compagne. Pour plus de sûreté,
la femelle conduit sa progéniture dans les marécages où elle court
moins de danger et où elle a plus de facilité pour se cacher ; vers le
soir, toute la famille se rend parfois dans un endroit plus découvert.
— 207 —
mais les petits ne s'aventurent sur le rivage que quand ils savent bien
voler.
206. — Le Chevalier Sylvain
TOTANUS GLAREOLA. Tem. ex Lin.
(PI. 206.)
Tringa GLAREOLA, Lin. Sijst. 7iat., l; p. 149 (1758)
Tringa ochropus, p. GLAREOLA, Lin. Si/st. nat. 1, p. 250 (1766).
Trynga littorea, Pall. Zoogr. Rosso-As. Il, p. 195 (1811).
Tringa grallatoris, Mont.Orn. dict. suppl. App. S. (1813).
ToTANUS GLAREOLA, Temm. 3£an. cVOrn.^ p. 421 (1815).
ToTANUS AFFiNis, Horsf. Trans. Linn. Soc. XII, p. 191 (1822).
ToTANUS GRALLATORIS, Stepli. Shaw's Gen. Zool. XII, pt. I, p. 146 (1824.)
Rhyacophilus GLAREOLA, Kp. Nat. Syst.., p. 140 (1829).
ToTANUS SYLVESTRis, PALUSTRis et KUHLii, Briiî, Isis 1830, p. 990.
ToTANUs GLAREOLOiDES, Hodgs. in Gray, ZqoI. Mise. p. 86 (1844).
AcTiTis GLAREOLA, Blyth. Ccit. B. Mus. As. Soc. p. 167 (1849).
Rhyxchophilus GLAREOLA, Brm. et Paessl. Eier cl. Eur-Voeg, texte de la pi. 30 (1863
ToTANUs GLAREOLas, Rosenb. Reist. naar Geelvinkl. p. 8 (1875).
Der Bruch-Wasserlaufer, en allemand.
The Wood-Sandpiper, en anglais.
De Boschruiter, en flamand.
Taille: O'^IT; ailes 0,122; bec 0,028; tarses 0,38.
Description des deux sexes adultes en été. — Parties siipéi-ieures d'un brun
noirâtre et marquées de stries blanches sur la tête et à la nuque et de taches
marginales blanches sur le dos et sur les scapulaires ; bas du dos noirâtre ;
raie sourcilière et côtés de la tête blancs, ces derniers tachetés de brun
lorums bruns ; parties inférieures blanches ; devant et côtés du cou avec
des taches allongées brunes; côtés de la poitrine variés de cendré et marqués
de taches brunes ; flancs avec des taches transversales de même couleur mais
moins nombreuses ; couvertures des ailes brunes, les plus rapprochées des
scapulaires tachées do blanc ; rémiges brunes, la baguette de la première
blanche ; croupion et sus-caudales d'un blanc pur, les plus longues des der-
nières tachées de brun à leur extrémité; queue blanche barrée de brun noi-
râtre ; sous-caudales blanches, les plus latérales avec une strie brune plus
ou moins large. Bec noir: iris brun; pattes d'un vert olive tirant plus ou
moins sur le cendré.
Les deux sexes en hiver. — Ressemblent beaucoup aux sujets en plumage
d'été, mais les taches blanches des parties supérieures sont plus grandes et
souvent lavées légèrement de roussâtre, surtout sur la tête et à la nuque; les
parties latérales et antérieures du cou sont davantage lavées et ondulées
208 —
de cendré fauve et moins tachées; les flancs sont également moins marqués
de brun.
Jeune. — Ressemble à l'adulte en hiver, dont il diffère surtout par le
dessus de la tête et la nuque d'un brun noir avec les plumes finement bordées
de blanchâtre ; par les autres parties supérieures d'un brun noir avec de
légers reflets verts et pourpres, et de nombreuses taches triangulaires et
allongées d'un roux jaunâtre passant par-ci par-là au blanc.
Poussin. — Dessus de la tête noir avec une raie centrale blanchâtre ; face,
côtés du cou et une large raie sourcilière se terminant à la nuque, d'un blanc
varié de fauve ; une strie au milieu du front, lorums, une grande tache cou-
vrant la région parotique et milieu de la nuque, noirs ; parties dorsales d'un
fauve varié de roussâtre, avec trois bandes longitudinales noires, dont celle
du milieu est la mieux marquée ; ailes blanchâtres avec une grande tache
noire ; flancs et partie caudale noirs variés de fauve ; parties inférieures
blanches.
Hab. — On rencontre le Chevalier sjlvain dans toute l'Europe
jusqu'au 70° l.-N. (Wallengren),
mais il est rare dans certaines
régions, par exemple en Belgi-
que, où on en voit cependant
chaque année, au passage d'avril,
dans les marais des environs de
Burght ; il se montre aussi, mais
accidentellement, dans les marais
delaCampine. Il est sédentaire (?)
et niche régulièrement dans le département des Pyrénées-Orientales
{Lac7^oix) ; de passage en Espagne, mais quelques couples s'y repro-
duisent {Saunders) ; il en est de même en Italie {Giglioli, Vallon). La
Grèce. paraît être le seul pays de l'Europe où cette espèce hiverne
régulièrement {Lindermayer).
Cet oiseau hiverne principalement dans le nord et le nord-est de
l'Afrique et probablement dans tout le continent noir, car il a été ren-
contré en Palestine {Trùiram), en Egypte, en Nubie, en Abyssinie,
au Kordofan {de Heuglin), en Sénégambie, à la Côte d'Or {Schlégel),
à Casamanze, au Gabon [Verreaux), à Benguela (Dresser), à Damara
{Anderson), au Cap {Layard), à Natal {Ayres) et au Zambèze [Kirk).
En Abyssinie il a été rencontré près de mares situées à 10.000 pieds
d'altitude.
Il est également répandu dans toute l'Asie jusqu'au 70° 1. N.
[Middendorff), au Japon [Siehold) et au Kamtchatka {Kittlitz). Il
— 209 -
hiverne dans les contrées méridionales : l'Asie Mineure (Kriiper), la
Perse, le Beloutchistan {Blanford, St-John), l'Inde {Jerdon), Geylan
{Leggé), Tempire Birman {Wardlaio-Ramsay), Malacca {Mus. Bruœ.)
et le sud de la Chine [David)- Il pousse parfois ses migrations jus-
qu'aux Philippines {Cuming, Everett), les îles Andaman {Wardlaw-
Ramsay), Bornéo, Java {S. Miiller, Mottley), Timor {Wallacé),
Togian, Célèbes [Meyer), Ternate, Goram [von Rosenherg) et
Amboine {Forsten).
Mœurs. — Le Chevalier sjlvain émigré des contrées du Nord dans
la seconde quinzaine d'août^ mais l'on remarque des passages jusque
vers la fin de septembre. Les émigrants entraînent parfois ceux de
leur espèce qu'ils rencontrent sur leur route et finissent par former des
bandes de plus de cent sujets ; mais d'ordinaire les troupes sont moins
nombreuses et formées parfois d'une dizaine d'individus seulement.
Au printemps les passages ont lieu du 15 avril à la fin de mai. Ces
oiseaux voyagent pendant la nuit et volent alors généralement très
haut, faisant retentir l'air de leurs cris.
Le nom de sylcain conviendrait mieux au T. ochropus qu'à l'espèce
qui nous occupe, car celle-ci ne se montre qu'exceptionnellement près
des bois et ne se perche que rarement sur les arbres ; M. Seebohm dit
cependant avoir tué, dans la vallée de la Petchora, un Chevalier Syl-
vain qui se tenait sur un mélèze mort à plus de 60 pieds de hauteur,
d'où il lançait ses notes joyeuses. Il est cependant certain que cet
oiseau doit surtout son nom à la confusion des deux espèces ; certains
auteurs disent encore de nos jours, d'après les anciens ouvrages,
que le Chevalier Sylvain niche parfois sur les arbres dans des nids
abandonnés. Il est cependant bien prouvé aujourd'hui que le Cul-blanc
{T. ochropus) est le seul Chevalier qui niche sur les arbres.
Le Chevalier sylvain recherche de préférence les grands marais
découverts, mais on le rencontre aussi près des lacs, des étangs et
des rivières si leurs bords ne sont pas trop ombragés par des
arbres ; il est probable qu'il visite parfois aussi les grandes mares
et les étangs qui se trouvent sur les lisières des bois. On le voit
souvent dans les lieux fréquentés par des Combattants et des Che-
valiers gambettes.
Par son attitude et sa démarche, cet oiseau ressemble à la plupart
de ses congénères, dont on peut facilement le distinguer de loin à
sa petite taille. Son naturel est gai, leste et agile ; quand on s'en
approche et qu'il vous a aperçu, il reste d'abord quelques instants à
Tome II. —1889, 27
— 210 —
vous observer, puis s'élève obliquement et s'envole droit devant lui
avec la rapidité d'une flèche. Il est rare de le voir raser l'eau ou le
sol, car il s'élève de suite à une assez grande hauteur et se laisse des-
cendre presque verticalement dans l'endroit où il veut s'arrêter. Il est
assez sociable mais ne recherche que la société de ses semblables ; si
le hasard le met en présence d'autres oiseaux de rivage, il ne se
mêle point à eux, reste avec les siens et ne tarde point à s'éloigner
des autres ; c'est avec le Chevalier gambette qu'il s'entend encore le
mieux, mais les deux espèces ne restent jamais longtemps ensemble.
Les Chevaliers sylvains se montrent toujours très farouches, et plus
ils sont nombreux, plus ils sont craintifs. Comme ils se tiennent tou-
jours dans des endroits découverts et qu'il leur est ainsi facile d'aper-
cevoir de loin le danger qui les menace, ils peuvent s'envoler avant
qu'on soit à portée de fusil. Leur cri, d'après Naumann, est clair et
sonore et peut se rendre par guiff guiff guiff, oujiffjiff; c'est surtout
en volant qu'ils se font entendre; M. Seebohm rend leur cri par
til-il~il et le cri d'alarme par tyii. Leur nourriture se compose de
larves et d'insectes aquatiques, de vers et de petits mollusques avec
ou sans coquille qu'ils cherchent généralement dans la vase.
Reproduction. — Naumann nous apprend que cet oiseau niche à
partir du centre et du nord de l'Allemagne; suivant M. Seebohm, des
œufs authentiques auraient été trouvés en Angleterre parM. Hancock,
le 3 juin 1853, mais il est probable que ce n'est pas un cas excep-
tionnel; nous avons vu plus haut que des couples isolés nichent
également dans certaines contrées du Midi, probablement dans les
régions élevées. Le nid est toujours si bien caché qu'on ne le découvre
le plus souvent que par hasard. Il est placé soit dans un marais,
soit dans un pré. mais jamais loin de l'eau et fréquemment dans le
voisinage d'un saule rabougri sur lequel l'oiseau va quelquefois se
percher.
Ce nid consiste en une simple dépression garnie de brins ou de
quelques feuilles de graminées. La ponte a lieu vers la fin de mai ou
en juin et se compose de quatre œufs. Ceux-ci sont d'un vert olivâtre
tirant parfois sur le brunâtre, avec des taches et des points gris, roux
et noirâtres, généralement plus nombreux vers le gros bout; ils
mesurent environ 40 millim. sur 27.
La durée de l'incubation est de quatorze à seize jours. Les poussins
quittent leur nid dès qu'ils sont bien séchés et suivent aussitôt leur
mère qui leur témoigne les soins les plus affectueux.
— 211 —
207. — Le Chevalier cul-blanc
TOTANUS OCHROPUS Tem. ex Lin.
(PL 207.)
Tringa OCHROPUS, Lin. Syst. nat. I, p. 250 (1766.)
ToTANUs OCHROPUS, Tem. Man. d'orn. p. 420 (1815.)
Helodromas OCHROPUS, Kp. Nat. Syst. p. 144 (1829.)
ToTANUs RivALis et LEUCUROS, Brm. Isis., 1830, p. 990.
ToTANUS PUNCTULATUS, G. Dub. PI. col. ois. Belg. II, p. 186 (1857.)
AcTiTis OCHROPUS, Jei'd. B. India III, p. 698 (1863.)
Der punktirte Wasserlaufer, en allemand,
The green Sandpiper, en anglais.
Het Witgatje, en flamand.
Taille: 0,18; ailes 0,14; bec 0,033; tarses 0,036.
Description des deux sexes en été. — Parties supérieures d'un brun olivâtre
à reflets, avec des stries blanchâtres sur la tête et surtout à la nuque, et de
nombreuses petites taches blanches sur les bords et à l'extrémité des plumes
du manteau et des ailes ; une raie blanche entre le bec et l'œil au-dessus des
lorums, ces derniers pointillés de brun ; joues blanches striées et pointillées
de brun ; parties inférieures d'un blanc pur, avec des taches brun-olive au
cou et à la poitrine, la teinte brune dominant même sur les côtés de cette
dernière ; croupioli et sus-caudales blancs ; queue blanche avec cinq larges
bandes transversales brunes, mais diminuant en nombre et en étendue
jusqu'à la plus externe, qui est à peine marquée d'une petite tache près de
son extrémité externe; rémiges noirâtres, toutes les baguettes brunes. Bec
noir, verdâtre à la base de la mandibule inférieure; iris brun; pattes d'un
gris ardoise, verdâtres aux articulations.
Eîi hiver. — Dans cette saison, l'oiseau ne diffère presque pas du plumage
d'été : les stries du dessus de la tête et de la nuque disparaissent presque
entièrement et les taches blanches du manteau et des ailes deviennent plus
petites et d'un blanc plus sombre. Les sexes, en toutes saisons, n'offrent
aucune différence.
Jeune. — Se distingue de l'adulte en hiver par la coloration des parties
supérieures qui est plus sombre, et les taches qui sont rousses et non
blanches.
Poussin. — Front blanc avec des taches noires ; dessus de la tête, lorums
et un trait derrière l'œil noirs ; joues blanchâtres ; les autres parties supé-
rieures d'un roux rougcâtre soral)re varié do noir; une bande dorsale et une
autre sur les flancs noires; régions inférieures blanches.
— 212 —
Hab.
Ce Chevalier est répandu, en été, dans le nord de l'Europe
et de l'Asie jusqu'au cercle
polaire, et niche à partir du nord
de l'Allemagne. Il est de passage
régulier aux îles Britanniques
et dans l'Europe centrale. En
Belgique il est assez abondant
près des eaux douces lors des
passages, c'est-à-dire en avril
ainsi qu'en août et septembre.
Il hiverne dans le midi de l'Europe, en Asie Mineure [Kruper) et en
Palestine [Trish^am). Il arrive en Egypte en août et septembre et on
le voit alors le long du Nil et de ses affluents et dans les terrains
inondés, mais peu sur les côtes de la mer Rouge; il se montre aussi
en Nubie, en Abyssinie et dans les régions marécageuses de l'Abiad
jusqu'au 8° 1. N.; il disparaît de ces pays en mars et au commence-
ment d'avril [de Heuglin). Cet oiseau hiverne également dans le nord
de l'Afrique {Loche, Favier), à la Côte d'Or {Shclley), à Angola {Mon-
teiro), au Gabon {Schlégel), et il est même abondant au sud de
V Afrique [Layar cl); d'après M. Seebohm, on le rencontre en hiver
dans toute l'Afrique.
Cet oiseau niche également dans les parties septentrionales de
l'Asie jusqu'au delà de l'Amour [von Schrenk) et au Japon [Siehold).
Il hiverne en Perse [De Philippi), dans le Beloutchistan [Blanford),
dans l'Inde i^Jerdon), à Ceylan {Schlégel), en Chine [David), à For-
mose [Swinhoe) et dans l'Indo-Chine [Dy^esser, etc.)
Mœurs. — Lors de la migration d'automne, cet oiseau séjourne
souvent des semaines entières dans les endroits qui lui conviennent,
ce qui fait qu'on le voit parfois jusqu'à la fin de septembre. Il voyage
toujours pendant la nuit, s'arrête souvent quelques moments près des
eaux qu'il rencontre, mais ne tarde guère à continuer son voyage
jusqu'à l'aurore; alors il s'abat dans un endroit à sa convenance et
y séjourne, s'il n'y est pas inquiété, jusqu'au coucher du soleil. Il
est à remarquer qu'au printemps il fait des stations bien moins
longues qu'en automne, car alors il a hâte d'arriver aa lieu de la
reproduction. Les migrations ont lieu par individus isolés ou par
couples, rarement par volées de six à huit individus, et jamais en
troupes plus nombreuses.
Le Chevalier cul-blanc n'aime ni les bords de la mer, ni ceux des
- 213 —
grands lacs et des fleuves découverts et ne s'y montre qu'exception-
nellement ; ce qu'il recherche, ce sont les marais, les étangs et toutes
les eaux abondamment pourvues de roseaux, de joncs, de buissons, de
grands herbages ou bordées d'arbres ; on le voit même dans les bois
prés des mares et des fossés inondés. Il ne visite les eaux découvertes
que pendant les migrations et seulement durant la nuit. Sa démarche
esL gracieuse et mesurée ; il ne court que rarement, mais hâte le pas
chaque fois qu'il s'agit de saisir une proie se montrant à proximité. Il
nage bien, mais jamais sans nécessité, et quand il est poursuivi il
peut au besoin plonger et rester sous l'eau pendant quelques instants.
Son vol est gracieux extrêmement rapide et l'oiseau sait franchir
un grand espace sans mouvoir ses ailes d'une manière visible. Son
maintien comme ses allures ressemblent beaucoup à ce que l'on voit
chez les autres espèces du même genre, mais il aime les endroits
ombragés, perche fréquemment sur des arbres et n'est pas sociable
du tout. Il vit seul, évite autant ses semblables que les autres petits
échassiers, et il est rare de voir un couple ensemble en dehors de l'épo-
que de la reproduction. Môme les jeunes, qui voyagent parfois par
volées de six à huit individus, se dispersent sur un grand espace dès
qu'ils prennent terre, mais ils se réunissent de nouveau, en s'appelant
les uns les autres, quand l'heure du départ est arrivée.
D'un naturel farouche et prudent, il sait reconnaître l'ennemi de
loin et l'éviter à temps ; seulement, comme cet oiseau se tient d'habi-
tude entre les herbages, il lui arrive parfois de ne pas apercevoir le
chasseur qui s'approche et d'être surpris à l'improviste ; alors, si la
chose est encore possible, il fuit en silence entre les herbes et les buis-
sons jusqu'à ce qu'il arrive à un endroit découvert, puis il s'envole à
tire-d'aile, et ce n'est qu'à ce moment qu'il fait entendre son cri stri-
dent de détresse : dih ! dih ! — La voix de ce Chevalier est agréable,
sonore, sifflante et argentine, et peut se rendre, d'après Naumann,
par dluidluidlui, les syllabes se succédant avec rapidité quoique bien
vocalisées. C'est le soir, et surtout en volant, que l'oiseau se fait
entendre, et son chant vient ranimer d'une façon charmante le calme
des soirées d'été. A terre il jette parfois aussi le CTiàe dick, dick.
Sa nourriture est la même que celle des autres petits échassiers :
insectes et larves aquatiques et terrestres, araignées, vers, etc.,
mais c'est principalement dans la vase qu'il cherche sa proie.
Reproduction. — C'est dans sa manière do nicher que le Chevalier
cul-blanc se distingue de tous ses congénères ; au lieu de mettre ses
— 214 —
œufs à terre dans une petite excavation, comme le font les autres
oiseaux de son genre, il les dépose sur des arbres ou des arbustes dans
des nids abandonnés d'autres oiseaux et même d'écureuils, ou simple-
ment sur un lit de feuilles mortes, de mousse ou de lichens se trouvant
par hasard dans la bifurcation des grosses branches d'an arbre.
C'est à W. Hintz que l'on doit les premiers renseignements précis
sur le mode de nidification de cette espèce. Ses observations datent
de 1818, où il trouva dans le Mecklembourg les premiers œufs de cet
oiseau ; mais ce n'est qu'à partir de 1852 qu'il porta réellement son
attention sur la manière de pondre de cette espèce. Depuis cette épo-
que jusqu'en 1862, il découvrit un grand nombre d'œufs de Chevaliers
cul-blanc, et presque toujours dans des nids abandonnés de grives ;
deux fois cependant, il en trouva dans des nids de Tourterelles, une
fois dans un nid dePie-grièche [L. collurio) et une fois dans celui d'un
Ecureuil. Presque toutes les couvées observées par Hintz se trou-
vaient à une distance d'environ trois pas de l'eau et à une hauteur de
trois à six pieds. Cependant, le 10 mai 1861, il trouva sur un bouleau, à
environ trente pieds de hauteur, un vieux nid d'écureuil contenant trois
poussins à peine éclos et un œuf sur le point d'éclore. Les poussins
sautèrent du nid sans se faire de mal et allèrent se cacher dans l'herbe.
D'autres observateurs ont encore trouvé des œufs de cet oiseau dans
des nids abandonnés de Geais et de Corneilles, mais surtout dans des
nids de Merles et de Grives chanteuses, draines et litornes. Ces œufs
sont pjriformes, à écaille lisse et peu luisante, de couleur roussâtre ou
d'un blanc verdâtre, avec de petites taches et des points d'un gris
violacé, roux et bruns, mais ceux de cette dernière couleur sont les
plus nombreux. Ils mesurent 40 millim. sur 29 environ.
GENRE CXVII
GUIGNETTE. — ACTITIS.
Tringa, Briss. OrnUh. V, p. 183(1760).
AcTiTis, lUig. Prodr. tnam. et av. p. 262 (1811).
ToTANUS, Tem. Man. d'orn. p. 424 (1815).
Tringoides, Bp. Sagff. distr. met. p. 58 (1831).
GuiNETTA, Gray, List gen. B. p. 68 (1840).
Car. — Ce genre est très voisin du précédent, dont il diffère par un bec
plus court, seulement un peu plus long que la tête, et plus robuste ; une queue
ample, assez longue et dépassant les ailes; des tarses moins longs.
Hab. — Les oiseaux de ce genre sont cosmopolites.
- 215 —
208. — La Guignette vulgaire.
ACTITIS GUINETTA {BHss).
(PI. 208)
Tringa GUINETTA, Bi'iss. Om. V. p. 183(1760),
Tringa hypoleucos, Lin. Syst. nat. I, p. 250 (1766).
Trynga GUINETTA et LEucoPTERA, Pall. Zoogr. Rosso-As. II, pp. 195-96 (1811).
ToTANUS HYPOLEUCOS, Tem. Man. d'orn. p. 424 (1815).
TOTANUS GUINETTA, Leach, Syst. cat. mam. B. Br. Mus. p. 30 (1816).
AcTiTis HYPOLEUCUS, Boie, Isis, 1822, p 560.
ACTITIS CINCLUS et STAGNATILIS, Brm. /st5, 1830, P- 990.
Tringoides HYPOLEUCUS, Bonap . Sagy. distrib. metod. p. 58 (183 Ij.
GuiNETTA HYPOLEUCA, Gray, List gen. B. p. 68 1840).
AcTiTis EMPUSA, Gould, Proc. zool. Soc. 1847, p. 222.
AcTiTis MEGARHYNCHOS, Brm. Vogelf.p. 314(1855).
AcTiTis scHLEGELi, Bonap. Comptes, rend. t. XLIII, p. 597 (1856).
Tringoides empusa, Sclat. Journ. Proc. Lin. Soc. II, p. 170 (1858).
ToTANUS empusa, Gray, Cat. B. N. Guinea, p. 52 (1859).
Der Fluss-Uferlaufer, en allemand.
The common Sandpiper, en anglais.
De Oeverlooper, en flamand.
Taille: 0,15; ailes 0,106; bec 0,027; tarses 0,025.
Description du mâle et de la femelle adultes. — Parties supérieures d'un brun
olivâtre à reflets, avec une strie brune au centre des plumes ; tour de l'œil
et une raie entre ce dernier et le bec d'un blanc assez pur ; couvertures des
ailes de la couleur du dos, mais barrées de brun et terminées par un fin
liséré blanchâtre, les plus grandes largement terminées de blanc ; rémiges
brunes, la deuxième et les suivantes avec une grande tache blanche
sur la barbe interne ; côtés du cou et de la poitrine lavés et striés de brun
olivâtre ; couvertures de la queue barrées comme celles des ailes mais d'une
manière moins apparente ; parties inférieures d'un blanc pur ; rectrices
médianes d'un brun ohvâtre, les latérales blanches avec des raies irrégulières
brunes. Bec brun avec la base de la mandibule inférieure roussâtre ; iris
brun ; pattes d'un gris verdâtre, couleur chair aux articulations.
Jeune. — Même coloration que l'adulte, mais les plumes du manteau, du
dos, les scapulaires, les couvertures des ailes et les rectrices bordées de cen-
dré roussâtre, et ces bordures sont divisées par des taches noirâtres ou
brunes, ce qui donne à ces parties l'apparence d'être rayées en zigzag de roux
et de brun.
Poussin. — Tête et parties supérieures d'un gris roussâtre finement maculé
de noir ; bande médiane de cette couleur descendant du vertex au bas le la
nuque ; de chaque côté de la tête un trait noir commençant derrière les
— 216 -
narines et traversant le lorum, l'œil et la région auriculaire jusqu'à la nuque ;
bande diffuse de cette couleur sur l'épine dorsale ; dessus du cou d'un gris
rembruni à la base et à l'extrémité du duvet ; plumeau caudal varié de noir
et de roux ; toutes les parties inférieures d'un blanc pur ; bec brun, plus pâle
à la base de la mandibule inférieure ; pieds d'un gris verdâtre ; iris brun.
(J. Vian).
Hab. — La Guignette vulgaire a une aire de dispersion très
étendue, comprenant l'Europe,
l'Afrique, l'Asie et TOcéanie.
Elle habite en été toute la zone
de l'ancien monde qui s'étend à
peu près du 42° l. N. au cercïe
polaire, mais elle est toujours
plus abondante dans les parties
WX\ septentrionales ; elle n'a été ob-
servée ni en Islande, ni au
M
Groenland. Elle est commune aux îles Britanniques, y compris les
îles Orkneys, Shetland et Hébrides. En Belgique elle arrive dans la
seconde quinzaine d'avril et niche sur les îlots de l'Escaut et de la
Meuse ; elle est de passage plus ou moins régulier dans les autres
parties du pays. Cet oiseau est sédentaire à partir du midi de l'Es-
pagne {Saunclers), de la Sardaigne {Giglioli), de la Sicile {Malherbe)
et de la Grèce [Lindermayer).
Il serait trop long d'énumérer toutes les contrées de l'Afrique et de
l'Asie où cet oiseau a été observé, car il se montre presque partout ;
dans l'Afrique australe on l'a capturé jusqu'au Cap, au Transvaal et
au Zambèze ; il est aussi commun à Madagascar que chez nous et se
montre également aux îles Comores, Seychelles, Mascareignes, Cana-
ries, Madère, Açores, etc.
En Asie nous rencontrons cette Guignette jusqu'au Kamtschatka
et le Japon {Siebold), et elle est très commune en hiver dans tout le
sud de l'Asie, à Ceylan et à Formose.
Dans l'Archipel Indien cet oiseau a été signalé principalement dans
les îles suivantes: Philippines [Cuming), Fe]ew {Gode ff roi/), Sumatra,
Bornéo, Jobi, Arou {Bcccari), Bangka {van den Bossche), Labuan
{Mottley), Jb-yb. {Schfégel), Flores, Timor {Wallace), Célèbes {Meyer),
Waigiou, Moluques {Bernstein), Salawatti {Bruyn), Nouvelle-Guinée
{von Rosenberg), Salomon {Sclater) et autres îles voisines, ainsi qu'en
Australie et en Tasmanie {Gould, Ramsay).
- 217 -
Comme on vient de le voir, notre Guignette se rencontre presque
partout, sauf en Amérique où elle est remplacée par une autre
espèce, dont il sera parlé plus loin.
Mœurs. — Cet oiseau revient dans l'Europe centrale vers le
17 avril et émigré en août et septembre. Il voyage pendant la nuit
par couples ou par groupes de cinq à liuit sujets, rarement davantage ;
il arrive cependant parfois que plusieurs groupes se rencontrent et
qu'ils font alors ensemble un certain trajet jusqu'à la prochaine halte,
où ils se séparent. Il n'est donc pas très sociable, et il est fort rare
de le rencontrer avec d'autres oiseaux de rivage.
On rencontre les Guignettes près des grands fleuves, des rivières et
des ruisseaux, mais seulement dans les endroits où les rives sont cou-
vertes de roseaux et de buissons ou bordées de pâturages ; pendant les
migrations on les voit aussi près des lacs, des étangs, des marais et
même près des mares en partie cachées par des arbres et des buis-
sons. Elles affectionnent surtout les eaux ombragées par des massifs
de saules sous lesquels elles aiment à courir, et il n'est même pas
rare de les voir se percher sur ces arbustes.
Les allures de cet oiseau diffèrent notablement de celles des vrais
Chevaliers : il tient le corps dans une position horizontale, court rapi-
. dément en trottinant et en hochant continuellement la queue ; là où
les eaux sont couvertes de nénuphars, on le voit souvent courir avec
légèreté sur les feuilles de ces plantes. Son vol est léger, facile, rapide
et recti ligne, mais l'oiseau s'élève rarement haut, sauf pendant les
migrations; au besoin il nage et plonge avec facilité. La Guignette
vit dans les herbages où il est difficile de bien l'observer, bien qu'elle
ne cherche nullement à se cacher. Elle est cependant prudente,
méfiante et très craintive, ce qui ne l'empêche pas de s'établir parfois
non loin des habitations ou près d'un chemin assez fréquenté ; mais
elle se tient toujours sur ses gardes et sait fort bien faire la dis-
tinction entre les gens qu'elle doit craindre et le passant inoffensif.
Sa nourriture se compose de larves, d'insectes, d'araignées et de
vermisseaux.
Le cri de la Guignette ressemble beaucoup à celui du Martin-
pêcheur, mais il est plus bas de ton; c'est un sittlement clair, haut,
perçant, qui peut se rendre par liididi, hididi, mais son intonation
varie plus ou moins suivant que l'oiseau est gai, triste, etïrayé, etc.
Le mâle fait entendre à l'époque des amours une sorte de trille com-
posée à pou près des mêmes syllabes mais répétées un grand nombre
Tome m. — 1889. 28
- 218 -
de fois, comme titihidi, titihidi, titihidi et ainsi de suite. Ce chant
commence doucement, va en augmentant d'intensité, puis en dimi-
nuant et n'est nullement désagréable à Toreille ; le mâle ne chante
jamais au repos, mais en volant en zigzags autour de sa compagne.
Reproduction. — LaGuignette vulgaire niche en mai dans l'Europe
centrale, un peu plus tard dans les pays du Nord, et toujours, paraît-il,
près des rivières ou des fleuves et dans un endroit garni de saules, de
buissons et d'herbages. Les couples arrivent tout formés, choisis-
sent un emplacement convenable pour leur nid et ne tolèrent aucun
autre couple dans leur voisinage immédiat. Le nid est ordinairement
caché dans un buisson, de préférence dans un fourré de saules, et
toujours à l'abri de la crue des eaux ; il consiste en une petite excava-
tion proprement garniede brindilles, de chaumes et de feuilles mortes.
Ce nid est si bien caché qu'on a de la peine à le découvrir, malgré
l'inquiétude que témoignent les parents et qui en trahit la présence.
La ponte est de quatre œufs, très volumineux par rapport à la taille
de l'oiseau, pyriformes, d'un fauve pâle ou un peu roussâtre, avec
quelques taches d'un cendré violacé et d'autres, accompagnées de
points, d'un brun roussâtre, ordinairement plus nombreux et plus
étendus au gros bout. Ils mesurent environ 36 millim, sur 25.
La durée de l'incubation est de quinze jours; le mâle et la femelle
couvent alternativement. Quand les poussins sont bien séchés, leur
mère les conduit dans les fourrés et leur apprend à trouver des
insectes et des larves. Au bout de huit jours les rémiges apparaissent
et à l'âge d'un mois les petits peuvent prendre leur vol.
209. — La Guigne tte grivelée
ACTITIS MACULARIUS, Boie ex Lin.
(PI. 208b )
Tkinga turdus aquaticus, Briss. Ornith. V. p. 255 (1760).
Tringa macularia, Lin. Syst. nat. I, p. 249 (1766).
ToTANus MACULARIUS, Tem. Man. d'Orn. p. 422 (1815).
AcTiTis MACULARIUS, Boie, Isis, 1826, p. 979.
Tringoides macularia, Gray, Gen. B. III, 574 (1846).
Tringites MACULARIUS, Scl. et Salv, Proc. Zool. Soc. 1873, p. 309.
Tringoides macularius, Scl. et Salv. Nomenclator p. 146 (1873).
Tringoides hypoleucos, var. Macularius, Ridgw. Anv. Lyc. N.-Y. X, 1874, p. 384.
- 219 —
Der Drossel-Uferlaufer, en allemand.
The Spotted Sandpiper, en anglais.
De Gevlekte Oeverlooper, en flamand.
Taille : 0,™155 ; ailes 0,104 ; bec 0,023 ; tarses 0,025.
Description du mâle et de la femelle adultes. — Parties supérieures d'un brun
olivâtre à reflets un peu In'onzés, avec des stries noirâtres sur la tête et à la
nuque, et des raies transversales également noirâtres sur le dos et sur les
ailes ; lorum brun ; raie sourcilière et tour de l'œil blanchâtres ; joues et
côtés de la poitrine lavés de cendré ; parties inférieures blanches avec des
taches noirâtres plus ou moins orbiculaires et assez larges, mais petites et
arrondies à la gorge ; rémiges brunes terminées par un fin liséré blanchâtre,
la troisième et les suivantes marquées d'une grande tache blanche sur la
barbe interne, les rémiges secondaires blanches à leur base et à leur extré-
mité ; les quatre rectrices médianes de la couleur du dos mais unicolores,
les suivantes de même couleur mais terminées de bhanc et barrées de brun
vers l'extrémité, laphis externe blanche extérieurement mais barrée de brun.
Bec brun, jaunâtre à la base de la mandibule inférieure ; iris brun ; pattes
d'un jaune rougeâtre.
Jeune. — Parties supérieures comme chez l'adulte mais presque unicolores,
le bord des plumes scul(;ment un peu plus foncé; couvertures des ailes
barrées de brun et de cendré ; parties inférieures d'un blanc pur, lavées de
cendré sur les côtés de la poitrine. — Un peu plus tard les taches commen-
cent à se montrer sur les régions inférieures, et les raies noirâtres sur le
manteau.
Tant que le jeune a le dessous du corps immaculé, il est fort difficile de
le distinguer de l'espèce européenne.
Ilah. — La Guignette grivelée est aussi répandue en Amérique que
la Guignette vulgaire l'est dans
^l'-
ancien monde. Dans l'Amérique
du Nord elle se montre en été
•y,j jusqu'au cercle polaire ; elle hi-
verne dans le sud des Etats-Unis,
au Mexique, aux Antilles, dans
1 ' Amérique centrale ( Baird ,
Coues, Audubon, etc.) jusqu'au
Brésil {ron Pclzcln) et le Pérou
sept(!n(ii(»iial oii elle liabiLe la zone monlagncuse des Cordillères,
mais rarement la côte [Tschudi).
Cet oiseau se montre accidonteUomcni en Europe; M. I[artiii,u'
— 220 —
signale dix-neuf captures faites aux îles Britanniques (1) ; M. Gurney
trouve ce nombre exagéré, vu qu'il n'est pas prouvé que tous ces
oiseaux appartiennent à l'espèce qui nous occupe; M. Saunders pense
que quatre sujets seulement sont bien authentiques. Il est cependant
à remarquer, qu'à l'époque de la migration d'automne, les jeunes sont
encore dépourvus de taches et qu'il est alors fort difficile de les dis-
tinguer des Guignettes européennes ; il est certain que l'on doit
prendre sur notre continent plus déjeunes que d'adultes, mais que
les premiers passent inaperçus. M. Giitke signale une capture de
cette espèce à Helgoland. Suivant Naumann, quelques sujets auraient
été pris en Allemagne près du Rhin, du Main et de la mer Baltique ;
Borggreve mentionne une capture dans la Hesse. Feu mon père dit
en avoir trouvé trois, en mars 18-17, chez un marchand de gibier de
Bruxelles : « elles étaient encore jeunes, avaient très peu de taches
et une était même immaculée (2). » Il est à remarquer qu'à cette
époque les chemins de fer étaient encore peu étendus, et qu'on ne
voyait sur nos marchés que des oiseaux pris en Belgique. Il y a
quelques années (vers 1883 ou 1884?) un individu adulte fut tué près
d'Anvers; cet oiseau, que j'ai eu en main, se trouve dans la collec-
tion de M. Ch. délia Faille, qui a malheureusement négligé de tenir
note de la date de la capture.
Schlégel rapporte, d'après des auteurs italiens, qu'une petite colonie
vit à l'état sédentaire en Italie, dans la vallée du Pô, et s'y reproduit
régulièrement (3) ; plusieurs auteurs ont répété ce fait, mais M. Giglioli
dit que la Guignette grivelée n'a jamais été prise en Italie (4).
Mœurs. — Les mœurs de cette espèce ne diifèrent guère de celles
de la Guignette indigène. Voici ce qu'en dit Wilson, l'auteur améri-
cain bien connu (5) :
« C'est une espèce américaine très commune, qui arrive en Pen-
sylvanie vers le 20 avril, se montrant d'abord le long des rives de
nos grandes rivières; à mesure que la saison avance, elle se dirige
vers l'intérieur en longeant nos criques et nos ruisseaux. Ces oiseaux
abondent en été le long des rivières Schuylkill et Delaware et de
(i) J. E. Ilartiug, Handbook of Brilish Biriis,\). 139.
(2) Ch. F. Dubois, PL col. des Ois. de la Belg. II, p. 185a.
(3) Schlégel, Muséum d'histoire naturelle des Pays-Bas {^Scolopaces) p. 84.
(4) Giglioli, Avi/aitna italica, p. 393 (1886).
C5) Alex. Wilson, American Ornithology, with a continuation by Ch. L. Bonaparte,
vol. IL p. 350.
— 221 -
leurs affluents. Ils se font remarquer par le mouvement continuel de
leur queue, môme quand ils courent à terre, sur les palissades ou
dans l'eau, et les jeunes, à peine sortis de l'œuf, montrent déjà une
tendance à imiter ce mouvement.
« Ils volent ordinairement à une faible hauteur et en rasant la
surface de l'eau, leurs longues ailes formant un angle considérable ;
tout en volant ils font entendre le cri de ouite, ouite, ouite (selon la
prononciation anglaise : loeet, loeet, loeet), et en voltigeant ils se
dirigent rarement en ligne droite vers le haut ou le bas du fleuve,
mais font un grand détour circulaire s'étendant au loin, pour revenir
insensiblement vers la rive. Ces oiseaux se montrent parfois aussi
près des marais qui avoisinent la mer et nichent dans les champs de
blé des environs, mais se mêlent rarement aux autres petits oiseaux
de rivage. Ils nous quittent vers le milieu d'octobre pour les contrées
du Sud, mais à ma connaissance ils n'hivernent pas dans les Etats
de l'Atlantique. »
Reproduction. — Je continue la traduction du texte de Wilson :
« Vers le milieu du mois de mai, les Guigne ttes se rendent dans les
champs de blé du voisinage pour y nicher, et c'est là que j'ai sou-
vent observé et trouvé leur nid. Celui qui se trouve devant moi
est composé uniquement de brins de paille sèche ; il était placé dans
un champ de maïs sur un terrain élevé. Les œufs, au nombre de
quatre, sont d'une couleur crème ou d'une nuance d'argile pâle,
marqués de grandes taches noires irrégulières et peu serrées, et
d'autres d'une teinte plus pâle. Ces œufs sont volumineux par
rapport à la taille de l'oiseau, très épais au gros bout et se terminent
brusquement en pointe à l'autre extrémité; ils mesurent 1 1/4 pouce
de longueur.
« Les poussins courent avec une rapidité surprenante dès qu'ils
sont sortis de l'œuf, et ils sont alors couverts d'un duvet couleur
marron terne, marqué d'une seule raie noire le long de l'épine dorsale
et d'une autre derrière la région des oreilles. Leur voix est faible et
plaintive.
« A l'approche de quelqu'un, les parents montrent une grande
frayeur, font semblant d'être estropiés et voltigent on rasant la terre
avec une difficulté apparente. A la vue d'un chien cette agitation
augmente encore, et il est intéressant de; voir avec quelle adresse la
mère le détournera de ses poussins en se jetant à dilfcrentes reprises
devant lui, s'en volant de quelques pas et se tenant toujours hors de
222
sa portée et dans la direction contraire de celle où se trouve sa
couvée sans défense. Mon vénérable ami, G. Bartram^ m'a dit avoir
vu an de ces oiseaux défendre ses jeunes pendant un temps assez
long contre les attaques répétées d'un écureuil terrestre. La scène
de l'action avait eu lieu au bord d'une rivière. A chaque effort que
faisait l'écureuil pour saisir les poussins qui se tenaient derrière leur
mère, celle-ci levait ses ailes dans une position presque verticale,
prenait l'aspect le plus formidable et s'élançait au devant du rongeur;
celui-ci, intimidé par cette brusque attaque battait en retraite, mais
pour revenir à la charge d'un autre côté. Cette lutte inégale durait
bien depuis dix minutes, les forces de la pauvre mère commençaient
à s'épuiser et les attaques de l'écureuil devenaient de plus en plus
fréquentes, quand mon ami vint au secours de la petite famille en
chassant l'assaillant dans son trou. »
SOUS-FAMILLE.
DES SCOLOPACINÉS. — SCOLOPAGINiE.
Car. — Mandibule supérieure sillonnée jusque près de son extrémité, qui
est plus ou moins flexible, renflée, rugueuse et creusée d'avant en arrière par
un sillon médian : mandibule inférieure sillonnée latéralement et divisée par
un sillon médian ; tarses scutellés en avant, réticulés en arrière ; quatre
doigts, les antérieurs le plus souvent libres; yeux gros et reculés vers l'oc-
ciput.
GENRE CXVIII.
BÉCASSINE. — GALLINAGO.
ScoLOPAX, Briss. Ornith. V, p. 298(1700).
Gallinago, Guerini, Orn. meth. Di;j. IV, p. 59 (1773).
Telmatias, Boie, Isis, 1826, p. 980.
Lymnocryptes, Pelorychus, Enalius, Kp. Naturl. Sijst. pp. 118-121 (1829).
Philolimnos, Brm. Isis, 1830, p. 989.
AscALOPAx, Keys. et Blas. Wirhelth. Eur. p. 77 (1840).
Car. — Bec très allongé, parfois double de la longueur de la tête, droit,
grêle, arrondi, plus haut que large à la base et l'inverse à l'extrémité, qui
est renflée et pourvue de rugosités ; narines basales, latérales, petites et ova-
laires ; ailes médiocrement allongées, sub-aiguës; queue courte, conique, à
rectrices de largeur variable, résistantes ou flexibles ; partie nue des jambes
peu étendue ; tarses médiocres ; doigts libres, le médian uni seulement à
l'externe par un pli membraneux très petit ; pouce bien développé mais ne
reposant sur le sol que par son extrémité .
Hah, — Ce genre est cosmopolite.
^28
210. — La Bécassine double.
GALLINAGO MEDIA, Guer. ex Frisch.
(PI. 209).
ScoLOPAS MEDIA, Friscli, Yog . Detitschl. pi. 228 (1763).
Gallinago MEDIA, Gucr. Ornith. melh. Dig. IV, p. 59 (1773).
ScoLOPAX MAJOR, Gm. Sysl. nat. I, p. 661 (1788).
ScoLOPAX PALUSTRI.S, Pall. ZoogT. Rosso-As. II, p. 173 (1811).
Gallinago m.uor, Leach, Sijst. Cal. etc., p. 31 (1816).
Telmatias major et nisoria, Rrm. Isis, 1830 p. 989.
ScoLOPAx LEUCURUS, Swaiiis. Fann. bor . Am. Il, p. 501 (1831).
Gallinago montagui, Bp. Comj). list B. p. 52 (1838).
AscALOPAX MAJOR, Keys. et Bl. WirbelUi. Eiir. p. 78 (1840).
ScoLOPAx soLiTARiA, Macg. (iiec Hoclgs. ) Man. Brit. B. II. i). 102 (1842).
Telmatias brachyptera et uliginosa, Brm. Vogelf. p. 305 (1855).
Die grosse Sumpfschnepfe, en allemand.
The GREAT Snipe, en anglais.
De Poelsnip, en flamand,
Taille: 0™,19; ailes 0,14; boc 0,0G1 ; tarses 0,011.
Description du mâle et de la femelle adultes. — Parties supérieures noires
tachées de roux : dessus de la tôte noir avec quelques taches rousses et une
bande médiane d'un blanc jaunâtre ; raies sourcilièrcs et joues d'un blanc
jaunâtre tachetées de brun noir ; lorums de cette dernière couleur; plumes
du cou et de la nuque largement bordées de blanc jaunâtre terreux ; celles
des côtés du dos et scapulaires bordées de même et variées de taches et de
raies transversales en zigzag de couleur roussâtre ; bas du dos et sus-cau-
dales bruns barrés de cendré roussâtre ; petites couvertures des ailes
d*un brun noirâtre terminées de cendré blanchâtre, les moyennes terminées
de blanc et les plus grandes barrées de cendré roussâtre et terminées de
blanchâtre ; rémiges d'un brun noir avec les baguettes des premières blan-
ches ou blanchâtres et celles des suivantes brunes ; couvertures des pri-
maires terminées de blanc ; parties inférieures d'un blanc un peu jaunâtre,
mais fortement lavées de cendré roussâtre au cou et à la poitrine, et marquées
de grandes taches transversales brunes ayant plus ou moins la forme d'un V
dont les deux branches seraient très écartées ; milieu du ventre presque uni-
colore ; rectrices médianes noires à la base, largement et irrégulièrement bar-
rées de roux dans leur seconde moitié et terminées de blanc ; les quatre
rectrices latérales de chaque côté, blanches avec dou.\ ou trois barres foncées
à la base des barbes externes. Iris brun ; boc rougeâtre, brun à sou extré-
mité ; pattes d'un cendré rougeâtre.
11 n'y a pas de différence entre les sexes, mais la femelle est ordinairement
un peu plus grande que le niAlo.
— 224
En automne les teintes sont généralement plus foncées et l'oiseau est
moins coloré ; les plumes des ailes sont noires, ce qui fait davantage res-
sortir les bords blancs.
Jeune. — Ne diffère presque pas des adultes en automne ; les parties infé-
rieures sont plus blanches, le blanc des ailes est moins étendu et moins pur.
Poussin. — Fond de la robe d'un gris fauve, teinté de roux assez vif aux
parties supérieures, un peu rembruni à la poitrine; sur la tête une bande
longitudinale noire du bec à la nuque ; sur les côtés une bande sourcilière
blanche et deux traits noirs, épanouis et réunis sur la région auriculaire,
dont l'un traverse le lorum et l'œil, et l'autre forme demi cercle au-dessous ;
dos et dessus des ailes absorbés en partie par des taches et des bandes noires,
mais rehaussés par un semis de petits flocons blancs. Bec et pieds gris de
plomb. (/. Vian).
Haï). — L'aire géographique de celte espèce est fort remarquable :
en été elle s'étend depuis la
Scandinavie jusqu'à la vallée du
Jenesay, et en hiver elle se réduit
au bassin de la Méditerranée et
au continent africain. Cette
Bécassine niche donc dans le
nord et surtout dans le nord-
est de l'Europe, ainsi que dans
l'ouest de la Sibérie et dans les
régions élevées du Caucase où elle atteint souvent une altitude de plus
de 6000 pieds (Radcle) ; elle niche également dans les parties maréca-
geuses de la Bessarabie {fie Norchnann). Dans le nord de l'Europe on
la rencontre jusqu'au 70° 1. N.; dans les vallées de la Petchora et de
rOb elle ne dépasse guère le 67 1/2", et dans la vallée de Jenesay on
ne la rencontre plus au delà du 66 1/2*^ [Seebohm).)
Cet oiseau est de passage en Allemagne, mais des couples isolés
nichent souvent dans les parties septentrionales (Borggreve) ; il est
cependant rare dans le sud de ce pays et de l'Autriche (Frisch, Bru-
sina, etc.), mais de passage régulier dans la Dobrodja et la Bulgarie
[Alléon). Cette Bécassine est assez rare en Belgique : on la ren-
contre parfois au printemps et en automne dans les marais de la Cam-
pine et de l'Ardenne, plus rarement dans les autres parties du pays.
De passage régulier en Hollande {Schlégel) et en France {Degland,
Lacroix), mais très rare en Suisse [Tschudi] ; elle est peu commune
en Italie {Salvadori, Giglioli), abondante en Sicile [Mallierbe), rare en
— 35n _
Portugal {du Bocage), de passage en Espagne, surtout sur la côte de
l'est, car on en tue tous les ans dans les environs de Valence, mais
elle n'est jamais abondante dans l'Andalousie (iSâ^wnc/er^); elle arrive en
grand nombre en Grèce avec la Bécassine ordinaire et y hiverne, mais
c'est un oiseau de passage pour les îles de l'Archipel {Lindermayer).
Cet oiseau est très rare aux îles Britanniques, mais on en a pris dans
différentes parties du pays, aussi bien sur les côtes qu'à l'intérieur et
y compris l'Irlande et les îles Orkneys et Shetland (Seehohm).
En Afrique nous rencontrons cette espèce, en hiver, au Maroc
{Drake) et en Algérie (Loe/ie),mais elle ne se montre qu'irrégulièrement
en Egypte {de Heuglin) et en Nubie {Hempr. et Ehrenb.), et, chose
singuhère, elle hiverne au Natal {Layard) et au Transvaal où elle
réside depuis septembre jusqu'en février [Ayres). Aux deux passages
elle traverse en grand nombre le détroit de Gibraltar, ce qui fait sup-
poser qu'elle doit se disperser en Afrique ; il est du reste certain que
pour arriver dans le Sud de ce continent, elle doit le traverser dans
toute sa longueur, soit en longeant les côtes, soit en longeant les
fleuves pour s'éparpiller dans les vastes marais de l'Afrique centrale.
Elle a également été observée à Madeiro {Ileinecken), à Damara
{Andersson), et dans le nord de la Perse {St-JoJin).
Mœurs. — Cette espèce paraît plus sensible au froid que ses congé-
nères, car elle émigré plus tôt et retourne plus tard dans les pays où
elle niche. Elle quitte les contrées du Nord à partir de la mi-août
jusque vers le 15 septembre, et n'y retourne jamais avant la seconde
moitié d'avril; il arrive même qu'on ne la revoit pas avant la première
quinzaine de mai. Cet oiseau voyage pendant la nuit et isolément
ou par couples, mais ces derniers ne s'observent qu'au printemps.
La Bécassine double habite les prairies humides, les pâturages
entrecoupés de mares ou traversés par un ruisseau ou une rivière,
ainsi que les marais, mais évite les endroits garnis de roseaux et de
joncs. Elle recherche moins l'eau que la Bécassine ordinaire et se con-
tente souvent d'un endroit humide où l'herbe est courte et serrée,
surtout si le terrain ofïre des irrégularités et de petites fosses dans
lesquelles elle puisse se cacher pendant la journée.
Cet oiseau marche avec agilité, mais ne court généralement pas
vite, car il préfère se servir de ses ailes chaijuo fois qu'il veut
franchir une certaine distance. Son vol est assez rapide, mais en
général plus lourd (]ue celui des autres Scolopacidés ; sa direction est
toujours rectilignc et l'oiseau ne s'élève jamais bi(>n haut, si ce n'est
TuMEii. — 188U. -^^
— 226 -
pendant la nuit. D'un naturel assez paresseux, il ne se déplace pas
volontiers sans nécessité, ce qui tient surtout à ses mœurs plus noc-
turnes que diurnes; il est, du reste, beaucoup moins remuant que
l'espèce ordinaire. En cas de nécessité il sait un peu nager, mais il ne
se sauve à la nage que quand il ne peut pas faire autrement.
Cette Bécassine est craintive mais peu farouche; il est vrai qu'on
la voit rarement pendant le jour, car elle se tient alors blottie dans
une petite excavation ou entre les herbes, et ne quitte sa place que
quand elle doit fuir devant un danger. Ce n'est qu'au crépuscule
qu'elle se met en mouvement, mais sans chercher la société d'autres
individus, car elle n'est pas sociable. Il est rare d'entendre sa voix;
au printemps elle jette parfois en s'élevant un cri étoufiPé ressemblant
à baed, haed, haed. Sa nourriture se compose d'insectes, de larves,
de vers, de mollusques avec ou sans coquille, qu'elle cherche le plus
souvent dans la vase.
Reproduction. — La Bécassine double niche dans les prairies et les
pâturages humides, dans les marais ou près dés étangs et des mares.
Son nid est une simple dépresssion garnie de feuilles de graminées,
et contient quatre œufs dans la seconde quinzaine de mai ou au
commencement de juin. Ces œufs sont d'un gris jaunâtre ou d'un brun
olivâtre garnis de taches cendrées et, plus superficiellement, de taches
et de points plus ou moins nombreux brims et noirâtres; ils mesurent
en moyenne 45 millim. sur 32. La durée de l'incubation est de dix-sept
ou dix-huit jours.
211. — La Bécassine ordinaire.
GALLINAGO CŒLESTIS, Bress. ex Frenz.
(PI. 211).
ScoLOPAX GALLINAGO, Briss. Omith. V, p. 298 (1760).
ScoLOPAX CŒLESTIS, Frenzel, Beschr. Yog. u. Eier. Wittenb. p. 58 (1801).
Gallinago MEDIA, Leach (nec Frisch et auct. plur.) Syst. cat. M. B. Br. Mus. p. 30
(1816).
ScoLOPAX MEDIA et SARHALiNA, Vieill. iV. Dict. cVMst. nat. III, pp. 358-59 (1817).
Scolopax brehmii, Kp. /sw, 1823, p. 1147.
ScoLOPAX SABiNi, Vig. Trans. Linn. Soc. XIV, p. 557 (1825).
Telmatias GALLINAGO, Boie, Isis, 1826, p. 979.
Pelorychus BREHMII et Enalius SABINI, Kp. Nat. Syst pp. 119, 121 (1829).
Telmatias fœrœensis, brehmii, stagnatilis, septentrionalis et peregrina, Brm.
Isis, 1830, p. 989.
;227
Gallinago brehmii, Bp. Icon. Faun, It. Ucc. introd. (1832).
Gallinago uniclavus, Hodgs. Journ. As. Soc. Beng. VI, p. 492 (1837).
Gallinago scolopacinus et sabini, Bp. Comp. List. p. 52 (1838).
ScoLOPAx PEREGRiNA, Tem. Man. d'orn. IV, p. 435(1840).
AscALOPAx SABINI et GALLINAGO, Keys. et Blas. Wirbelt. Eur. p. 216 (1840).
Gallinago gallinago, Licht. Nomencl. av. p. 93 (1854).
Telmatias robusta, salicaria, petenyi, lacustris, brachypus, Brm. Yogelf. pp.
304-307 (1855).
Gallinago japonioa, nilotica, burka, lamottii, pygm.ea, picta et vegyptiaca,
Bonap., Compt. rend. XLlII,p. 579 (1856).
Gallinago vulgaris, G. F. Dub. PI. col. ois. Bely. II, p. 182 (1857).
Gallinago russata, Gould, B. Gt. Brit. Introd. p. 118 (1873).
Gallinago cœlestis, Dress. B. ofEur. VII, p. 641 (1880).
Die gemeine Sumpfschnepfe, en allemand.
The common Snipe, en anglais.
De W^atersnip, en flamand.
Taille: 0"'17 ; ailes 0,127; bec 0,067; tarses 0,030.
Description du mâle et de la femelle adultes. — Dessus de la tête noir tacheté
de roux, avec une bande médiane et de larges raies sourcilières d'un blanc
roussâtre ; lorums bruns ; joues et gorge blanchâtres, les premières tachées
de brun ; nuque rousse avec des stries noires ; haut du dos noir avec des
taches rousses et deux bandes latérales roussâtres se rajaprochant en arrière;
scipulaires noires, bordées de blanc roussâtre et barrées de l'oux; bas du
dos noir barré de blanc ; croupion et sus-caudales d'un cendré roussâtre
barrés de noir ; petites couvertures des ailes brunes avec des taches d'un
blanc un peu roussâtre sur les bords et à l'extrémité, les plus grandes noi-
râtres et terminées de blanc ; rémiges noirâtres, la première avec son bord
externe blanc, les secondaires terminées de blanc ; cou et poitrine d'un cen-
dré roussâtre, le premier avec des taches allongées brunes, la seconde avec
des raies transversales de même couleur ; ventre blanc ; flancs barrés de
brun ; queue noire à la base, d'un roux ardent au milieu avec une bande et
des taches subterminales noires, et toutes les rectrices terminées de blanc ou
de blanchâtre ; sous-caudales d'un blanc lavé de roussâtre et barrées de noir.
Bec brun, plus pâle à la base et plus foncé à son extrémité ; pattes brunes ;
iris couleur noisette.
Au printemps les couleurs sont plus vives et le noir du dos offre de légers
reflets verdâtres. — Le plumage du mâle ne diffère pas de celui de la femelle,
mais cette dernière est généralement un peu plus grande.
Jeune. — Ne diffère de l'adulte que par des teintes moins vives; son bec
est très mou et les pattes sont d'un gris verdâtre.
Poussin. — D'un roux marron, assez vif sur la face, mais généralement
rembruni par la base noire du duvet, avec une tache sur le front, une bande
longitudinale sur la tête, un trait sur l'ceil, un autre au-dessous, et des mar-
brures sur le dos, les ailes et les cuisses d'un marron très foncé, le tout
— 228 —
rehaussé par des flocons blancs, groupés en couronne autour de la tête et
semé irrégulièrement sur le vertex et les autres parties supérieures ; bec
brun foncé, avec la base de la mandibule inférieure jaunâtre; pieds bruns ;
iris noirâtre. (J. Vian).
Hab. — La Bécassine ordinaire habite l'Europe et l'Asie jusqu'au
70M. N. Elle n'est pas rare en
Islande où quelques individus
paraissent même hiverner près
des sources chaudes, car Faber
dit en avoir rencontré encore
trois dans les premiers jours
de février, mais dans la partie
méridionale de l'île. Elle est
commune aux îles Foeroé et se
montre parfois au Groenland {Holbôll).
Pour l'Europe centrale c'est un oiseau de passage régulier, bien que
quelques couples nichent jusqu'en Angleterre, en Hollande, en Bel-
gique et dans le nord de la France. Ces Bécassines passent l'hiver
dans le midi de l'Europe et on en voit alors des essaims innombrables
dans les marais Pontins près de Rome. Elles hivernent également
dans le nord de l'Afrique [Loche, Drake), jusqu'au fleuve Gambie à
l'ouest {Seebohm) et l'Abjssinie à l'est {Blanford). En hiver on les
rencontre aussi aux îles Madeire, Canaries et Açores,en Asie Mineure
et dans toute l'Asie centrale et méridionale jusqu'au îles Andaman,
Ceylan, Formose, Philippines et la presqu'île de Malacca. Elles sont
de passage au Japon {Blakiston).
Cet oiseau est remplacé en Amérique par une espèce très voisine
{Gallinago Wilsonï), qui n'est probablement qu'une race climatérique
du type européen.
Mœurs. — La Bécassine ordinaire est donc pour la Belgique un
oiseau de passage régulier ; quelques couples se reproduisent même
chaque année dans les marais des provinces de Namur, de Luxem-
bourg, etc., et particulièrement dans les fanges de l'Ardenne.
Si l'on rencontre parfois un grand nombre de ces oiseaux dans une
même localité, on ne peut en conclure que l'espèce soit vraiment
sociable, car les individus se tiennent non loin les uns des autres
sans s'inquiéter de leurs voisins, et chacun vit pour soi. Ils voyagent
aussi isolément et pendant la nuit, quoiqu'il arrive souvent que
plusieurs suivent la même direction.
229 —
Les passages ont lieu dès que la température se radoucit, c'est-à-
dire depuis la fin de février jusqu'au milieu d avril, mais c'est dans la
seconde moitié de mars qu'ils sont le plus abondants.
Ces Bécassines ne reviennent dans le sud de la Finlande que tard
en avril, en Laponie, pas avant la fin de mai, et ce n'est que dans la
première huitaine de juin qu'elles font leur apparition sous le cercle
polaire. A l'arrière-sàison les passages commencent vers la mi -août et
durent jusqu'en octobre; ils y en a qui séjournent toute Tannée dans
notre pays.
On n'observe ces oiseaux que dans les endroits humides et maréca-
geux, tels que marais, étangs et prairies parsemés de mares et de
bas-fonds inondés ; ils aiment surtout les lieux herbeux ou garnis de
joncs et autres plantes qui leur procurent un gîte bien caché. Ce qui
leur convient surtout, ce sont les marais et les j)rairies inondés silués
près d'une forêt et bordés de buissons d'aunes et de hêtres; ils mènent
là une vie silencieuse sans attirer Tattention.
La Bécassine ordinaire a des mœurs plus diurnes que la Bécasse,
mais c'est cependant au crépuscule qu'elle se montre le plus active.
Elle se repose vers le milieu de la journée, le reste du temps est
employé à courir par-ci par-là à la recherche de sa nourriture. Celle-ci
se compose de larves, d'insectes, de vers, de petites limaces et autres
mollusques.
Sa démarche est aisée mais peu accélérée ; son vol est rapide ; en
s'élevant l'oiseau décrit d'abord plusieurs zigzags, puis s'élève haut
dans l'air, s'éloigne en battant précipitamment des ailes, décrit un
grand arc de cercle, revient à peu près à l'endroit d'où il est parti,
ferme les ailes et se laisse tomber obliquement dans le marais. En cas
de danger elle nage avec aisance, et plonge même quand il s'agit
d'échapper aux poursuites d'un rapace.
Son cri ordinaire est skètsch ou guètsch d'une voix rauque que
l'oiseau répète plusieurs fois en prenant son vol. Pendant ses voyages
nocturnes, la Bécassine fait entendre un son rauque ressemblant à
greckguekguè,&ViW\SiBSQz souvent d'un cri plus élevé, rarement répété,
et qu'on peut rendre par tzip. A l'époque de la reproduction, les deux
sexes font entendre des sons qui diffèrent complètement du cri habi-
tuel ; ce sont des cris élevés, clairs et sifflants que l'on entend de
loin et qui ressemblent à tik/mp, tikkup, tikkct.
Son naturel est craintif e( diMiant, mais eu même temps gai et assez
remuant; ce n'est que quanti l'oiseau est très gras qu'il devient un
— 230 -
peu paresseux. « Peu de temps avant l'accouplement, dit Naumann,
le mâle s'anime, s'élève dans les airs, obliquement d'abord, puis en
décrivant une spirale allongée, et si haut que l'œil a de la peine à le
suivre. A cette hauteur il décrit des cercles, puis, les ailes étendues
et immobiles, il se laisse tomber verticalement ; il descend, remonte
en formant une ligne ondulée et avec tant de force que les extré-
mités de ses grands rémiges en vibrent et produisent un son singulier,
tremblé, qui ressemble beaucoup au bêlement d'une chèvre. Revenu
dans les hautes régions, il recommmence à tourner en cercle pour
décrire de nouveau une seconde ligne ondulée, en produisant le même
bruit. Ce manège se continue sans interruption pendant un quart
d'heure ou une demi-heure ; quant au bruit qui l'accompagne, il dure
environ deux secondes, et se répète à des intervalles de six à huit
secondes ; plus tard, quand les forces commencent à diminuer, à des
intervalles de vingt à vingt-cinq secondes. On pourrait rendre ce bruit
par les syllabes : doudoudoudoudoudou , prononcées aussi vite que
possible. Le mâle se livre à ces exercices le matin et le soir, et même
pendant la journée quand le ciel est parfaitement pur^l'air tranquille ; on
peut alors, si l'onest doué d'une bonne vue, voir les vibrations de l'extré-
mité des ailes, et reconnaître que c'est là la seule cause de ces bruits. »
Plusieurs ornithologistes tels que Macgillivray, Hancock, Saxby,
Jardine, Blyth et autres, partagent la manière de voir de Naumann
au sujet de ce bruit; Altum, Meves et autres auteurs récents, l'attri-
buent, au contraire, aux rectrices externes mises en vibration pendant
le vol ; Legge pense que c'est le résultat d'une action combinée des
rémiges et des rectrices. A. Brehm fait remarquer que Meves, de
Stockholm, a imité ce bruit en sa présence, et d'une façon parfaite,
en agitant rapidement un bâton à l'extrémité duquel il avait fixé des
rectrices de Bécassine.
Reproduction. — A l'époque de l'accouplement les allures du mâle
changent complètement ; il s'élève et descend d'un vol tremblant et
saccadé, se perche sur les arbres, devient jaloux, attaque et livre com-
bat aux autres mâles. « Ce manège, dit Naumann, continue souvent
jusqu'au moment où, de la surface du sol, parfois du haut d'une pierre
ou de quelque motte de terre, retentit le doux cri d'appel de la
femelle. A peine le mâle l'a-t-il entendu, qu'il met fin à ses ébats et
se laisse tomber presque verticalement comme une pierre à côté de sa
compagne. Le dernier acte, les herbes et les broussailles empêchent
l'observateur d'en être témoin. »
— 231 -
La Bécassine ordinaire niche dans nos contrées du 15 avril au 15
mai ; dans la région polaire la ponte n'a jamais lieu avant le milieu
de juin. Le nid consiste en une simple fosse creusée ordinairement
dans une petite éminence placée dans un marais et entourée d'her-
bages et d'eau. Cette fosse est grossièrement garnie de feuilles de gra-
minées et contient quatre œufs, finement grenus, lisses, d'un jaune
olivâtre, verdâtre ou brunâtre, semés de taches cendrées, brunes et
noirâtres, souvent rassemblées au gros bout ; ils mesurent environ
40 millim. sur 28. La femelle les couve seule pendant quinze à
dix-sept jours, mais père et mère se partagent les soins que réclament
leurs petits ; ceux-ci se cachent bientôt dans les herbages où il est
difficile de les découvrir.
212. — La Bécassine minime ou Jacquet
GALLINAGO GALLINULA, Bp. ex Lin.
(PI. 210)
SCOLOPAX GALLINAGO MINOR, Bi'iss. Or)iilh. V. p. 304 (1760).
ScoLOPAx GALLINULA, Lin. Syst. nul. I, p. 244 (1766).
Gallinago minima, Leach, Syst. cat. Mam. B. Br. M tes. p. 31 (1816).
Lymnocryptes GALLINULA, Kp. NaticH Syst. p. 118 (1829j.
PhILOLIMNOS GALLINULA, STAGNATILIS et MINOR, Bpin. /stS, 1830 p. 989.
Gallinago gallinula, Bonap. Comp. list B. p. 52 (1838).
AscALOPAX GALLINULA, Keys. et Blas. Wirbelt. Eur. p. 77 (1840).
Telmatias GALLINULA, Droste, Yog. Bork. p. 234 (1869j.
Die kleine Sumpfschnepfe, en allemand.
ThE Jack Snipe, en anglais,
De Doover ou Klein Snepke, en flamand.
Taille: 0'"16; ailes 0,11 ; bec 0,039; tarses 0,022.
Description du mâle et de la femelle adultes. — Dessus de la tête noir taché
de roux ; larges raies sourcilières d'un blanc jaunâtre, se prolongeant jusque
sur la nuque et bordées inférieurement de taches noires ; loruni brun avec
une bande d'un blanc jaunâtre au-dessous ; nuque d'un cendré brunâtre et
tachetée de brun ; haut du dos noir avec des taches rousses et deux bandes
latérales d'un jaune d'ocre ; scapulaires noires avec des taches et des bandes
rousses, un petit liséré terminal blanchâtre et une large bande d'un jaune
d'ocre sur le bord externe, les plus longues brunes avec des bandes transver-
sales rousses sur le bord externe; sur la ligue médiane du dos et sur le bord
interne des scapulaires, on remarque des reflets bronzés et violets très appa-
rents ; l)as du dos noir à reflets violacés et plus ou moins rayé de blanchâtre;
- 232 -
sus-caudales brunes, tachées de roux et bordées de jaune d'ocre; couvertures
des ailes brunes, bordées de cendré roussâtre ; rémiges brunes terminées do
blanchâtre ; côtés du cou variés de gris, de blanchâtre et tachés de brun ;
parties inférieures blanches, mais variées de roux et tachées de brun
sur le devant du cou, la poitrine et les flancs ; queue conique, brune, les rec-
trices bordées de roux ; sous-caudales blanches avec une strie brune. Iris
brun ; pattes d'un gris rougeâtre ; bec de même couleur mais noirâtre à son
extrémité.
Les Jeunes ne différent que fort peu des adultes ; le plumage est moins
brillant.
Poussin. — Parties supérieures d'un roux châtain, absorbé en partie par
des taches, des bandes et des traits noirs, notamment sur le front, le vertex,
1< s lorums et les joues ; tête, dos, dessus des ailes et des cuisses semés de petits
flocons blancs, formant par agglomération des bandes sur le dos et sous les
yeux et présentant un aspect demi-deuil ; gorge roux pâle ; poitrine roux
rembruni ; ventre gris fauve ; bec noirâtre, avec l'extrême pointe rousse ;
pieds bruns; iris noirâtre. (J. Vian).
Hah. — La Bécassine Jacquet est très irrégulièrement distribuée,
en été, dans les régions arctiques
depuisl'Atlanlique jusqu'au Paci-
fique. Middendorf dit, qu'en Sibé-
rie,il l'a trouvée nichant près du
Boganida (70° I. N.), que les
premières furent observées le 8
juin et que les dernières furent
tirées le 31 août ; il est certain
cependant que l'espèce est rare
dans la Sibérie orientale {Taczanowsky) et qu'on ne la voit qu'acci-
dentellement au Japon {Whitely). Elle est inconnue en Islande, aux
îles Fœroé et au Groenland, mais il est probable qu'elle niche un peu
partout en Europe et en Asie entre le 60° et le 71° 1. N. Lors des
migrations, elle est plus ou moins commune dans toute l'Europe
septentrionale et centrale ainsi que dans la Sibérie occidentale
{Finsch), le Turkestan [Severtzoïu), etc. Pour la Russie, Bogdanow
dit ce qui suit: « habite le toundra et la plus grande partie de la région
du sapin jusqu'au 60° 1. N. vers le Sud ; le toundra et la partie septen-
trionale de la Sibérie ; plus au Sud, c'est partout un oiseau de passage. »
En Belgique elle est généralement commune au deux passages, surtout
dans les parties marécageuses.
Cette Bécassine hiverne en grand nombre dans l'Europe méri
— 233 -
dionale, dans le nord de l'Afrique {Favier, Loche) et en Egypte
{de Heuglin). En Asie, elle hiverne en Asie Mineure, en Perse {Blan-
ford), en Afghanistan, dans l'Inde, à Ceylan et en Birmanie {.Terdon,
Seebohm, etc.), et se montre accidentellement en Chine [David) et à
Formose [Sivinhoe).
Mœurs. — Cet oiseau est de passage dans nos contrées depuis la mi-
mars jusqu'au commencement de mai, et repasse en août et septembre.
On le rencontre donc à peu près aux mômes époques que la Bécassine
ordinaire, mais plus tard au printemps et plus tôt à l'arrière-saison.
Cette espèce voyage aussi pendant la nuit et isolément, comme les
autres du môme genre ; mais elle est parfois si abondante, qu'on voit
au matin un nombre assez considérable de ces oiseaux éparpillés sur
un espace relativement restreint, sans cependant s'inquiéter les uns
des autres.
Le Jacquet, comme on l'appelle vulgairement^ habite les marais et
les endroits marécageux, les prairies et les champs inondés, ainsi que
les eaux stagnantes bien pourvues sur leurs bords d'herbages et de
buissons ; on ne le rencontre jamais près de la mer ou aux bords des
grands fleuves, car il lui faut des eaux peu profondes et boueuses.
Pendant le jour il ne se montre jamais sans nécessité, car il se tient
alors caché dans les herbages. En Grèce, où cette Bécassine hiverne,
on voit souvent, suivant von der Mûhle, des milliers de ces oiseaux
dans les champs couverts d'eau à la suite de pluies prolongées. Lin-
dermayer ajoute qu'on peut les tuer quand ils sont posés, mais qu'après
un coup de feu, il s'élève une véritable nuée de Bécassines ordinaires
et minules qui désorientent complètement le chasseur.
Le vol de cet oiseau diffère beaucoup de celui des deux espèces
précédentes : il est plus léger, plus silencieux et plus incertain, mais
assez rapide et l'oiseau sait facilement changer de direction ; il n'aime
pas à s'élever haut et se contente souvent de voleter au-dessus d'un
marais à la façon d'une chauve-souris ; ce n'est que pendant les
migrations qu'il s'élève haut dans les airs.
C'est la moins farouche des Bécassines ; elle ne se décide parfois
à s'envoler que quand son ennemi n'est plus qu'à quelques pas. Elle
est aussi peu sociable que ses congénères et ne prête aucune attention
aux autres oiseaux, môme quand ils appartiennent à son espèce. Il est
rare qu'elle fasse entendre sa voix ; vers le soir, en prenant son vol,
elle pousse parfois un cri perçant qui ressemble à kit:^ ou kutz ; elle a
également un cri sourd ressemblant à èhtch ; son chant d'amour au
Tome ii. — 1890. 30
— 234 -
printemps peut se rendre, d'après Naumann, par tettettettettet
sans interruption pendant quatre à six secondes.
La nourriture est la même que pour les Bécassines précédentes,
sauf que les aliments de nature animale sont mélangés à des graines
de diverses plantes.
Reproduction. — La Bécassine Jacquet niche en mai dans les con-
trées les plus septentrionales ; il paraît cependant, suivant Brehm et
Paessler, que cet oiseau niche quelquefois en Poméranie et en West-
phalie. Le nid est placé entre les herbes d'un marais : c'est une simple
excavation garnie de quelques brins et creusée au haut d'une petite émi-
nence. Les œufs, au nombre de quatre, ressemblent entièrement à
ceux de la Bécassine ordinaire, mais ils sont un peu plus petits et plus
lisses ; ces œufs sont très gros en proportion de la taille de l'oiseau :
ils mesurent environ 36 millim. sur 26.
GBNRE CXIX.
BÉCASSE. — SCOLOPAX.
ScoLOPAx, Briss. Orn. V. p. 292 (1760).
RusTicoLA, Vieill. N. dict. d'hist. nat. III, p. 348 (1816).
Car. — Bec beaucoup plus long que la tête, droit, un peu dilaté à son
extrémité qui est rugueuse sur les côtés ; narines basales, latérales, allon-
gées et s'ouvrant dans une membrane ; ailes de longueur moyenne, assez
amples, sur-aiguës ; queue courte, arrondie, recouverte en grande partie par
les sus-caudales ; jambes complètement emplumées ; tarses assez courts,
robustes ; doigts libres ; yeux gros et placés très en arrière.
Hab. — Ce genre est représenté en Europe, en Asie, en Océanie,
dans l'Amérique du Nord et dans l'Afrique septentrionale.
213. — La Bécasse ordinaire
SCOLOPAX .RUSTICOLA, Lin.
(PI. 212).
ScoLOPAX RUSTICOLA, Lin. Syst. nat. I, p. 243 (1766).
RusTicoLA vuLGARis, Vieill. N. dict. dliist. nat. 111. p. 348 (1816).
ScoLOPAx SYLVESTRis et piNETORUM, Brin. Isis, 1830, p. 289.
RusTicoLA EUROP^A, Less. Traité d'orn. p. 555 (1831),
ScoLOPAX iNDicus, Hodgs. Joum. As. Soc. Beng. II. 1, p. 490 (1837) .
— -23o ^
ScoLOPAX coMMUNis, Selby, Cat. gen. subg. aves, p. 43(1840).
RusTicoLA SYLVESTRis, Macg. Man. Brit. B. II, p. 105 (1842).
ScoLOPAx TORQUATA et oRiENTALis, Ri*m. Yogelf. p. 304 (1855).
ScoLOPAX scoPARiA, Bp . Compt.-rencl. XLIII, p. 579 (1856).
Die GEiMEiNE Waldschnepfe, en allemand.
The Woodcock, en anglais.
De Houtsnip, en flamand.
Taille : 0^23 ; ailes 0,17 ; bec 0,074 ; tarses 0,042.
Description des deux sexes adultes. — Plumage fort bigarré et difficile à
bien décrire. Front et partie antérieure de la tête d'un cendré nuancé de
brunâtre ; une bande brune du bec à l'œil ; occiput et nuque noirs, traversés
de bandes jaunâtres ondulées de brun ; manteau et scapulaires variés de
marron, de roussâtre, de cendré et marqués de grandes taches, de points et
de zigzags noirs ; couvertures des ailes d'un roux marron avec des barres
transversales d'un cendré brunâtre, bordées elles-mêmes irrégulièrement de
noir; rémiges brunes, avec des taches triangulaires rousses sur la barbe
externe; gorge blanche ; parties inférieures d'un roux jaunâtre, avec des raies
transversales brunâtres ; sous la gorge et sur les côtés de la poitrine des
taches rousses et noires; bas du dos et sus-caudales d'un roux assez vit
avec des raies transversales et en zigzags noires ; queue noire terminée de
cendré en dessus et de blanc en dessous, avec la barbe externe des rectrices
marquée de taches triangulaires rousses. Bec d'un gris rougeâtre, brun à
son extrémité ; iris brun ; pattes d'un gris livide.
La femelle n'est pas à distinger du mâle : les caractères qu'on a cru pou-
voir lui assigner ne sont pas constants, mais elle est toujours un peu plus grande
que le mâle.
Jeune. — Même plumage que les adultes, mais plus sombre et les couleurs
moins pures.
Poussin. — Robe fauve, pâle sur la gorge, plus foncée sur la poitrine, large-
ment marquée de bandes et de taches d'un marron plus ou moins vif, dont une
grande sur la tête, touchant par ses ramifications le bec, la nuque et les yeux,
trois bandes longitudinales et parallèles sur le dos, une très foncée sur le
lorum, et d'autres variables sur les ailes, les cuisses, le bas du cou et les côtés
do la tête ; bec jaune à la base, d'un noir plombé vers la pointe; pieds jaunes,
ongles bruns; iris brun foncé. {J. Vian.)
Variétés accid. — Ou rencontre parfois des sujets d'un blanc pur ou tachés
de blanc, mais ils sont rares; on en connaît d'un jaune ijaillc avec les dessins
à peine marqués ; d'autres sont roussâtres, couleur café au lait ou Isabelle
avec les taches plus ou moins marquées ; eulin, on eu rencontre qui ont les
rémiges ou l;i quruc d'un blanc pur.
— 236 —
Hab. — La Bécasse habite en été toute la zone froide et tempérée
de l'ancien monde : en Scandi-
navie jusqu'au cercle polaire,
dans la Russie occidentale jus-
qu'au 65o, mais dans la Russie
orientale et en Sibérie elle ne dé-
passe pas le 60° 1. N. (Seeàohm).
Elle nicbe en petit nombre aux
îles Britanniques {le même), dans
le centre et le nord de la France
{Degl. et Gerbe) (en Belgique, en Suisse {Tschudi), dans les Carpathes,
ainsi que dans les montagnes boisées des îles Canaries, Madeire et
Açores {Godman, etc.), où elle est sédentaire.
Cet oiseau hiverne dans le midi de l'Europe, au Maroc (Drake),
en Algérie {Taczanoioski), en Egypte {de Heuglin), en Palestine
{Trish^am), en Perse {Blanford), dans l'Inde {rJerdon), à Ceylan
{Legge), en Birmanie {Beavan) et en Chine {Swinhoe) ; il hiverne
également dans la partie chaude du Caucase, où il niche dans les
montagnes boisées jusqu'à une altitude de 3000 à 4000 pieds {Radde)]
il en est de même au Japon {Wliitely). La Bécasse n'a été observée
ni en Islande, ni au Groenland, et n'a été capturée qu'une fois ou
deux aux îles Foeroë {Feilden) ; on l'a également prise accidentelle-
ment dans l'Amérique du Nord {Laivrence), où elle est remplacée par
une espèce voisine : Scolopax ^minor.
Mœurs. — La Bécasse est de passage régulier en octobre et en
novembre, et repasse vers la fin de février et en mars, parfois jus-
qu'au commencement d'avril. Si l'hiver est doux, une partie hiverne
en Belgique ; quelques couples nichent régulièrement dans nos bois,
surtout dans ceux de l'Ardenne.
Ces oiseaux voyagent en général isolément ou par couple, jamais
en troupe, mais on voit quelquefois un assez grand nombre suivre la
même direction, sans pour cela former un groupe uni par la volonté.
Ils émigrent pendant la nuit, interrompant leur voyage durant les
tourmentes et les nuits sombres ; quand ils sont surpris par une
bourrasque, ils s'abattent au premier endroit venu, même au milieu
des champs et y attendent le lever du soleil pour gagner les endroits
buissonneux ou boisés. Lorsqu'ils prévoient des intempéries, ils
demeurent dans la localité jusqu'à ce que le calme renaît. Les
Bécasses paraissent d'ailleurs très sensibles aux influences atn^os-
- 237 —
phériques, et c'est à ces influences qu'on doit attribuer l'irrégularité
de leurs passages et de leurs allures pendant les migrations. Il arrive
souvent que les Bécasses se montrent une année en abondance dans
une région qui paraît leur plaire ; puis, plusieurs années de suite,
pas une seule ne s'y montrera.
La Bécasse est un oiseau forestier qui n'a de préférence pour
aucune espèce d'arbres ; elle vit aussi bien dans les bois de conifères
que dans les autres, mais elle préfère toujours les grandes forêts aux
bois de moindre étendue, probablement parce qu'elle y trouve un abri
plus assuré ; il lui faut cependant un sol humide où il y a beaucoup
de terreau, bien ombragé et buissonneux. Dans les contrées déboisées
on ne la voit qu'aux passages, et elle s'abat alors souvent dans les
jardins ou dans les haies qui bordent les champs ; il est rare de la
rencontrer dans les prés, les marécages ou près des eaux.
Elle est craintive et défiante au plus haut degré, et passe la plus
grande partie de la journée à dormir dans un endroit sombre ; ce
n'est qu'au crépuscule qu'elle commence à se montrer dans des lieux
découverts et à courir de côté et d autre. Sa démarche est lente, trot-
tinante et peu soutenue, aussi préfère-t-elle voler pour franchir une
petite distance que de courir. Son vol est généralement assez lent,
mais elle sait à volonté le ralentir ou l'accélérer. Elle ne vole pas
aussi vite qu'une perdrix, mais elle est plus adroite pour changer de
direction, s'élever ou s'abaisser et pour traverser un fourré sans se
heurter aux branches. Quand elle part d'un taillis ou qu'elle veut fuir
un danger, son vol devient rapide, saccadé et souvent bruyant ; elle
tourne avec une grande légèreté autour des buissons et des arbres,
pour aller ensuite s'abattre au loin. Si on l'clfraye, elle s'élève en
produisant un bruit sourd bien connu des chasseurs, et va gagner
le côté opposé du buisson près duquel elle était, de façon à être tou-
iours séparée du chasseur par un touffu quelconque. Elle feint sou-
vent de s'abattre, mais fait aussitôt un crochet, court entre les
buissons, s'envole ensuite dans une autre direction pour s'abattre dans
un endroit où l'on ne songerait guère à la poursuivre. Ceci prouve bien
que la Bécasse est aussi prudente que rusée et qu'elle n'est pas aussi
stupide qu'on le croit ; elle sait du reste fort bien que les couleurs de
son plumage se confondent avec celles du sol, et qu'en se couchant
parmi dos feuilles sèches, des morceaux de bois ou d'écorce, elle
échappe le plus souvent aux yeux du chasseur.
11 a été dit plus haut que cet oiseau n'est pas sociable et qu'il aime
— 238 -
la solitude ; les autres oiseaux lui sont indifférents, mais il s'en défie.
« Lorsque deux Bécasses mâles se rencontrent dans l'air, dit Brehm,
elles se livrent bataille, se poursuivent en cherchant à se frapper
avec leur bec ; quelquefois elles se saisissent mutuellement et s'em-
pêchent de voler. Il est arrivé que trois Bécasses formant ainsi une
véritable pelote sont tombées à terre. Ces luttes, ces combats doivent
être attribués à l'influence des amours, mais il est singulier qulls
commencent pendant les migrations, à une époque où la Bécasse ne
songe pas à nicher. Dans les premiers temps ces combats durent peu,
mais plus tard, quand ces oiseaux arrivent dans leur patrie, ils sont
plus soutenus, mais ils prennent généralement fin à la tombée de la
nuit. »
La Bécasse quitte sa retraite au crépuscule, vole vers les endroits
découverts et marécageux des forêts, et même dans les pâturages et
les champs qui se trouvent près des bois. Là elle trouve de la nourri-
ture en abondance en fouillant la bouse, les détritus ou les tas de
feuilles mortes qu'elle retourne pour découvrir les larves et les
insectes cachés en dessous ; souvent aussi elle perce des trous dans le
sol humide pour en retirer les vers. D'ordinaire elle ne reste pas long-
temps à la même place, vole d\in endroit à l'autre, visitant tout ce
qui peut lui procurer des larves et des insectes.
La voix de cet oiseau est assez variée et se compose de sons rau-
ques et de sons étouffés qui n'ont rien d'harmonieux. En s'élevant il
fait souvent entendre le cri de katch ou dack répété une ou deux fois ;
son cri d'appel est ètche ou atche d'une voix sourde. Au temps des
amours le mâle pousse un sifflement bref : pssiep, qu'accompagne
souvent un son sourd : yourrk ou youarrk, paraissant sortir du fond
de la poitrine, auquel la femelle répond par pip pip, pipip pip /
C'est un gibier fort recherché, mais qui a de nombreux ennemis :
les rapaces, les renards, les fouines, les putois, les belettes et les
chats en détruisent énormément ; dans les forêts où il y a beaucoup
de renards les Bécasses sont toujours rares. Pris jeune, cet oiseau
s'apprivoise avec facilité, devient confiant, reconnaît bientôt son
maître et arrive à son appel ; mais il ne procure guère d'agrément à
cause de ses mœurs nocturnes.
Reproduction. — La Bécasse niche dans la plupart des forêts de
l'Europe centrale, mais c'est surtout dans le Nord qu'elle se reproduit
en abondance.
Cet oiseau niche dans les parties boisées des montagnes et dans
- 239 -
les forêts tranquilles, mais il recherche de préférence les lieux où des
vallées et des clairières alternent avec des taillis touffus, évitant la
futaie proprement dite. Après l'accouplement, c'est-à-dire vers la fin
d'avril ou en mai, la femelle cherche un endroit convenahle pour
nicher, soit dans la mousse ou dans l'herbe, soit derrière un buisson,
une vieille souche ou entre des racines; elle profite d'une dépression
naturelle ou en creuse une elle-même, la garnit de feuilles sèches,
d'herbes, de mousse ou autres matériaux analogues qui se trouvent
aux alentours, et y dépose bientôt quatre œufs, jamais plus, rarement
trois. Ces oeufs sont moins pyriformes que ceux des Bécassines ; ils ont
une teinte jaunâtre et des taches cendrées et rousses plus ou moins
nombreuses, surtout au gros bout, et mesurent environ 46 millim.
sur 34.
La femelle couve durant dix-sept jours. Le mâle s'inquiète peu de
la couvée et ne se tient même pas dans son voisinage. Les poussins se
mettent à courir quand ils sont à peine séchés et ils ont parfois
encore des fragments de la coque adhérents à leur duvet. La femelle
leur témoigne beaucoup d'attachement, et le mâle vient rejoindre sa
petite famille pour veiller sur elle. A l'approche d'un ennemi, les
parents s'envolent avec inquiétude en poussant des cris de détresse
et en décrivant des cercles au-dessus de l'endroit où les petits sont
cachés ; mais ceux-ci se tiennent cois, et il faut le flaire du renard ou
d'un bon chien de chasse pour les découvrir. A trois semaines ils
commencent à voleter ; ils quittent leur mère et se dispersent avant
même de savoir bien voler.
Il est généralement admis que la Bécasse ne niche qu'une fois par
an, à moins qu'on no lui ait enlevé ses œufs ; mais il paraît cepen-
dant qu'elle peut élever deux couvées quand la saison est favorable.
SOUS-FAMILLE
DES LIMOSINÉS. — LIMOSIN^
Car. — Les oiseaux de cette division ressemblent aux précédents par leur
bec long et sillonné, mais ils en diffèrent par des jambes plus longues et plus
dénudées, des ailes plus allongées, ainsi que par leurs mœurs, ce qui les
rapproche des Totaninés.
GENRE cxx
BARGE. — LIMOSA
LiMiiSA, Briss. Ornith., v. p. 202 (1700).
ScoLOPAX, Lin. Sijst. nal. [, p. 245 (1766).
TûTANUS, Hcclist. On,. Taschoib. 11, p. 287 (1S03).
- 240 —
AcTiTis, Illig. Prodr. p. 262 (181 1).
LiMicuLA, Vieill. N. dict. 111, p. 249 (1816).
Fedoa, Steph. Gen. Zool . XII, 1, p. 73 (1824).
Car. — Bec très long, ayant au moins le double de la longueur de la tête,
flexible, épais et droit à la base, légèrement retroussé à son extrémité:
narines basales, latérales, oblongues; ailes allongées, sur-aiguës; queue
courte, égale; jambes assez longues, emplumées sur la moitié de leur
étendue; tarses longs, grêles, scutellés en avant, réticulés en arrière ; doigts
médiocres, l'externe uni au médian par une membrane qui ne dépasse pas la
première articulation.
214. — La Barge à queue noire (1)
LIMOSA MELANURA, Leid.
(PI. 213)
ScoLOPAx LIMOSA, Lin. Sijst. nat. 1, p. 245 (1766).
ScoLOPAx BELGicA, Gm. Syst. nat. 1, p. 663 (1788).
ToTANUS LIMOSA, Bechst. Orn. Taschenb. 11, p. 287 (1803).
AcTiTis LIMOSA, Illig. Prodr . , p. 262 (181 1).
LiMOSA MELANURA, Leisl. Naclilv. Bechst. Naturg. II, p. 153 (1813).
LiMicuLA MELANURA, Vieill. N. dict. d'hist. nat. III, p. 250 (1816)
Feda MELANURA, Steph. S/uiio's Gen. Zool. Xll, I. p. 73 (1824).
LiMOSA isLANDiCA, Bi'm. /si's, 1830, p. 989.
ToTANUS MELANURUS, Socb. Brit. Birds. III, p. 162 (1885).
LiMOSA ^GOCEPHALA, auctorum plurimorum (nec Lin.).
Die Schwarzschwanzige Uferschnepfb:, en allemand.
The black-tailed Godwit, en anglais.
De Grutto, en flamand.
Var. Melanuroides.
LiMOSA ^GOCEPHALA, Pall. (nec Lin.), Zoogr. t. 11, p. 178 (1811).
LiMOSA MELANURA, Horsf. (nec Leisl.), Trans. Linn. Soc. XIII, p. 193(1821).
LiMOSA MELANUROIDES, Gould, Proc. Zool. Soc, 1864, p. 84.
Totanus melanurus MELANUROIDES, Seeb. Brit. B. III, p. 163 (1885).
LiMOSA /EGOCEPHALA MELANUROIDES, Stejn., Bull. of the U. S. nat. Musetcm, n» 29,
p. 316 (1885).
LiMOSA BREViPES, auctorum plurimorum (nec Gray).
Taille: 0,31 ; ailes 0,21 ; bec 0,105; tarses 0,08 J.
(i) M. H. Seebohm fait remarquer avec raison (A history of Brit. Birds III, p. 162) que
c'est bien à tort que plusieurs ornithologisfes modernes ont rapporté à la Barge à queue noire,
l'oiseau décrit par Linné sous le nom de Scolopax agocephala . La description de ce dernier se
rapporte, en effet, à la Barge rousse ; le doute est d'autant moins possible que Linné décrit les
pennes de la queue : « niqricantes albo striatœ » ce qui est bien un des caractères du Limosa ru fa.
- ^41 -
Description des deux sexes adultes en été. — Tête, cou, haut de la poitrine
d'un roux vif, plus pâle à la gorge, avec de larges stries noires sur la tête,
d'autres plus étroites et moins apparentes sur les joues et sur la nuque, et des
raies transversales noirâtres sur la poitrine; raies sourcilières d'un blanc rous-
sâtre ; manteau et scapulaires noirs avec les plumes barrées et terminées de
roux ; bas du dos noirâtre ; croupion et sus-caudales d'un blanc pur, mais les
plus longues des dernières terminées de noir ; couvertures des ailes cendrées
avec des bordures plus claires, les plus grandes terminées de blanc ; rémiges
noirâtres avec un miroir blanc ; abdomen et sous-caudales blancs rayés de
brun et de roux, les plus grandes des sous-caudales immaculées ; c[ueue noire,
blanche à la base, le blanc dominant sur les rectrices latérales et diminuant
graduellement d'étendue sur les suivantes. Bec roussâtre, brun à l'extrémité ;
iris brun ; pattes noirâtres.
Mâle et femelle en hiver. — Parties supérieures d'un cendré brunâtre ; raie
sourcilière, tour de l'œil et gorge blanchâtres ; devant du cou et haut de la
poitrine d'un cendré clair ; les autres parties inférieures d'un blanc pur ; bas
du dos, queue et rémiges comme en été.
Jeune. — Dessus de la tête brun avec les plumes bordées de roux clair ; cou
et poitrine d'un roux cendré clair; plumes du manteau et scapulaires noirâ-
tres, bordées de roux; couvertures des ailes cendrées, bordées par une
teinte d'un blanc roussâtre ; raies sourcilières, gorge et abdomen d'un blanc
pur; le reste comme chez les adultes, mais la queue terminée de blanc.
La var. Melanuroides ne diffère de la forme européenne que par une
taille plus petite (1).
Hab. — Cette espèce peut se diviser en deux races ou variétés,
dont l'une habite l'Orient, l'autre
l'Occident. Cette dernière, qui
représente le type, est répandue
depuis le sud de l' Islande (i^^^Z^c^r)
et les îles Févoé{Fei/den) jusqu'à
la vallée de l'Obi en Sibérie, sans
dépasser à l'Est le 60*^ 1. N. ; en
Scandinavie on l'observe jusqu'au
68 1/2" 1. N. [Mahngren). Elle se
montre aussi, mais rarement, au Groenland [Holbull).
Cette Barge est de passage aux îles Britanniques sans y être com-
mune ; on la voit régulièrement sur la côte orientale de l'Angleterre,
plus rarement de l'Ecosse et accidentellement en Irlande ySeebolim).
(1) Plusieurs auteurs rattachent à cette variété la f.iinosa brevipes de Gray, qui est une variété
de la Limosa r'ija, comtue uous le verrous plus loiu.
Tome II. — 1890, 31
— 242 —
Outre les contrées du Nord, elle niclie aussi en Hollande {Schlégel),
dans le Jutland {Kjaerbôlling), dans le nord de l'Allemagne {Borg-
grevé), en Pologne {Taczanowski), en Russie {Bogdanow), dans le
Turkestan occidental (Severtzoïo) et dans les steppes inondées du
sud-ouest de la Sibérie {Finsch). Elle est de passage régulier en
Belgique et dans toute l'Europe centrale, hiverne dans l'Europe
méridionale et dans le Nord de l'Afrique {Loche, Irby). On rencontre
cette espèce par troupes de 10 à 50 individus dans les lagunes, les
marais et les prairies inondées de la basse Egypte ; beaucoup séjour-
nent dans le Delta et dans l'Egypte moyenne, d'autres suivent le
cours du Nil et de ses affluents pour se disperser dans les marais du
Kordofan, du Nil Bleu et du Nil Blanc, sans dépasser au Sud le 12°
1. N.; on en rencontre aussi un grand nombre en Abyssinie près du lac
Tana, et même jusqu'à la mi-mai ; il n'est donc pas impossible que
quelques couples y passent l'été {de Heuglin). Vierthaler en a vus à la
même époque près de Karthoum. Elle se moutre accidentellement aux
îles Canaries et Madeire. A l'Est cette espèce hiverne dans le Bélout-
chistan et sur le littoral du golfe Persique {Radde), dans l'Inde et
àCeylan {Seebohm).
La var. Melanuroides est répandue depuis l'Obi ou le Jenissei
jusqu'au Kamtchatka {Stejneger) sans dépasser le 55". Elle niche dans
l'Altaï, près du Baikal et dans la vallée de l'Amour, se montre aux
passages en Mongolie et au Japon, et hiverne en Chine, en Birmanie
{Seebohm), dans la presqu'île de Malacca {Hume), à Bornéo {Diard),
à Java {Horsfleld), à Halmahera {Bernstein), à Céram {Hoedt), dans la
Nouvelle-Bretagne {Finsch) et dans le nord de l'Australie {Gould,
Ramsay).
Mœurs. — La Barge à queue noire se montre régulièrement dans
notre pays deux fois par an : en mars et avril et dans le courant du
mois d'août et en septembre; elle est alors assez abondante, surtout
près de l'Escaut et dans les polders, mais assez rare dans le Limbourg
et dans le centre du pays. Les migrations ont lieu pendant la nuit et
par bandes composées souvent de plusieurs centaines de sujets; il
arrive parfois, à l'époque des passages, qu'on reste plusieurs jours
sans voir un seul de ces oiseaux, puis tout à coup une nouvelle bande
arrive, reste quelques jours dans la localité et continue ensuite son
voyage.
C'est un véritable oiseau de marais, qui recherche les eaux douces
et surtout les mares et les prairies inondées. Ses tarses allongés lui
— 243 —
permettent de patauger dans les étangs et dans les marais ayant par-
fois de l'eau jusqu'au ventre, mais il ne nage et ne plonge que dans
les cas d'urgence extrême. Sa démarche est aisée quoique assez lente,
mais il, sait fort bien courir quand il le veut. Son vol est élégant,
léger, vigoureux et ressemble beaucoup à celui des grands Chevaliers;
l'oiseau s'élève ta,ntôt haut dans les airs, tantôt vole en rasant presque
l'eau ou le sol.
Cette Barge n'est pas d'un naturel fort gai, sans cependant être
apathique, car elle est farouche, défiante et fuit l'homme de loin ;
elle l'attend d'abord jusqu'à une certaine distance, puis s'envole à
tire-d'aile jusqu'à perte de vue. Les Jeunes et ceux qui ont des petits à
protéger, se hâtent moins à fuir et se laissent parfois approcher à portée
de fusil; il en est de même dans les contrées où l'oiseau se sait en
sûreté. Cette Barge se rapproche beaucoup des ('hevaliers par ses
allures, surtout du Chevalier gambette avec lequel elle se rencontre
souvent dans les mêmes endroits. Elle est assez sociable et se tient
même au milieu d'autres petits échassiers. Sa voix est pure, sifflante
et sonore et ressemble aussi à celle de certains Totaniens; son cri
peut se rendre, d'après Naumann, par djo, djodjo ou lodjo, mais
l'oiseau ne se fait pour ainsi dire entendre que dans le voisinage du
nid et tout en décrivant des cercles au-dessus des marais. Sa nour-
riture consiste en insectes, larves, vers, mollusques avec ou sans
coquille, frai de poissons et de grenouilles et petits têtards.
Reproduction. — Cet oiseau niche sur une petite éminence placée
dans un marais, et y creuse une fossette qu'il garnit de brins et
de radicelles ; c'est sur cette litière que la femelle dépose, à la fin
d'avril, quatre œufs de grandeur et de couleur très variables. La
teinte générale est d'un gris verdâtre, jaunâtre, d'un vert brunâtre
ou d'un brun olivâtre et toujours sans brillant ; ces œufs sont marqués
de taches de diverses grandeurs, de stries et de points plus ou moins
apparents et variant du cendré au jaune terreux, au brun et au roux ;
ces maculatures sont généralement plus apparentes et plus nombreuses
près du gros bout. Les œufs mesurent de 54 à 60 millimètres sur
36 à 38.
Les deux sexes couvent alternativement et témoignent beaucoup
d'attachement à leurs petits, mais ceux-ci les quittent dès qu'ils
commencent à voler.
- 244
215. — La Barge rousse
LIMOSA RUFA, Briss.
(Pi. 214)
LiMOSA GRiSEA, MAJOR, FuscA, RUFA et RUFA MAJOR, Briss. OrmtJi . V. pp. 272-284
(1760).
ScoLOPAX LAPPONicA et .EGOCEPHALA, Lin. SijsL nat. I, p. 246 (1766).
ScoLOPAX LEUCOPH^A, Lath. Ind.orn. II, p. 719 (1790).
ToTANUS ^GOCEPHALUs et LEUCOPH^us, Bechst. Orn. Taschenb. II, pp. 288, 289 (1803).
ToTANUs FERRUGINEUS, Mey . TascJienb. II, p. 374 (1810).
LiMOSA MEYERi, Leisl. Nachtr. Bechst. Natury. II, p. 172 (1813).
LiMicuLA MEYERI et LAPPONICA, Vieil!. N. dict. d'hist. nat. 111, pp. 249, 2ô0 (1816).
LiMOSA JADRECA, NOVEBORACENSis, ^GOCEPHALA, Leach, Syst. cat. m. Birds Br. Mus.
p. 32 (1816).
Fedoa MEYERI, RUFA, PECTORALis, Steph. Skaio's f/en. Zool. '^11, \}t. 1. pp. 75-79
(1824).
LiMOSA FERRUGiNEA, Pall. Zoogr . Rosso-As. II, p. 180 (1826).
ToTANUS RUFUS, Seebohm, Brit. Birds, III, p. 156 (1885).
Die rostrothe Uferschnepfe, en allemand.
The Bar-tatled Godwit, en anglais.
De rosse Grutto, en flamand.
Var. Baueri.
LiMOSA BAUERI, Naum. Voy- Deiitschl. VIII, p. 429 (1836).
LiMOSA BREVIPES, AUSTRALASIANA, Gr. (1) List. B. Br. Muf. III, pp. 95-96 (1844).
LiMOSA LAPPONICA vciv. Nov.e-Zealandle, Gr Yoy. Ereb. and Terror, Birds., p. 13
(1846).
LiMOSA NOv^-ZEALANDi^, Gr. Gen. B. 111, p. 570 (1844).
LiMOSA UROPYGiALis, Gould, Proc. Zool. Soc. 1848, p. 38.
LiMOSA Foxii, Peale, U. S. Expl. Exp. p. 231. pi. 65 (1848).
LiMOSA RUFA, Temm. et Schl. Faun. Jap. av. p. 114 (1849).
LiMOSA LAPPONICA, Gass. Pr. Acad. Philad . 1858, p. 196.
Gallinago punctata, Ellm. Zooloyist., 1861, p. 7470.
LiMOSA LAPPONICA UROPYGIALIS, Seftb. Brit. B III, p. 157 (1885).
LiMOSA LAPPONICA BAUERI, Stejn. BulUt . u. s. nat. Muséum, n" 29, p. 122 (1885).
LiMOSA RUFA UROPYGIALIS, Seeb. Geoyr. distr. Charadriidœ, p. 387 (1887).
Taille: 0,25; ailes 0,205; bec 0,079; tarses 0,05.
(Ij M. Seebohm fait remarquer avec raison, qu'il est étrange que Gray ait donné trois noms au
même oiseau, ce qui a fait croire à plusieurs auteurs que la Limosa brevipes devait se rapporter à
laZ. Melannroidcs . Mais le type, conservé au Musée britannique, est bien une Barge rousse.
Gray reconnut lui-même, deux ans plus tard, que le choix de la dénomination laissait à désirer, et
il la transforma en L. N'ovœ-Z.ealandiœ, dénomination inscrite sur l'étiquette du même sujet.
Quant au type de la L. australasiana, il est également au Musée de Londres : c'est la var. Baueri
en plumage d'hiver, offrant quelques raies peu distinctes sur les rectrices.
— 24o —
Description du mâle adulte en été. — Tête, cou et parties inférieures d'un
beau roux rougeâtre foncé, plus pâle à la gorge, aux raies sourcilières et à la
base des jambes ; dessus de la tête marqué de larges stries brunes ; nuque et
région des oreilles avec des stries semblables mais plus étroites ; lorums poin-
tillés de brun ; dos et scapulaires d'un brun noirâtre avec des taches rousses ;
bas du dos et croupion blancs, plus ou moins marqués de taches brunes ;
sus-caudales blanches barrées de brun ; couvertures des ailes cendrées, bor-
dées de blanc et marquées d'une strie centrale brune ; rémiges noirâtres,
marbrées intérieurement de blanc ; queue rayée alternativement de blanc et
de brun, mais terminée de blanc. Bec brun, plus pâle à la base; iris brun ;
pattes noires.
Femelle en été. — Elle n'est jamais d'un roux aussi vif que le mâle ; les
parties inférieures sont d'un roux plus clair avec le milieu de l'abdomen
varié de blanc ; côtés de la poitrine, flancs et sous-caudales marqués de traits
bruns. — Cette espèce varie beaucoup suivant les sexes, lage et les saisons.
Les deux sexes en hiver. — Sommet de la tête, lorums, joues et cou d'un
cendré clair strié de brun ; raies sourcihères, gorge, poitrine et ventre d'un
blanc pur varié de cendré sur les côtés de la poitrine ; manteau et scapu-
laires d'un gris cendré avec les plumes bordées de blanc et marquées d'une
strie centrale brune ; bas du dos et sus-caudales d'un blanc pur, les der-
nières avec quelques taches brunes ; ailes à peu près comme en été ; queue
d'un gris cendré uniforme, légèrement marbrée à la base (chez les individus
non entièrement adultes la queue est plus ou moins barrée).
Jeune. — Ressemble au plumage d'hiver, mais les parties supérieures sont
plus brunes ; raies sourcilières, gorge et ventre d'un blanc pur ; cou, poitrine
et flanc d'un cendré roussâtre ; queue barrée comme l'adulte en été.
Poussin. — Entièrement vêtu, excepté sur les côtés du cou, d'un duvet
assez abondant, barbelé sur les deux tiers de sa longueur, filiforme et aigu
au delà, soyeux au toucher, assez long sur le corps et le cou, moitié moins
sur la tête, partout brun à sa base, accusant un peu la queue ; gorge et
abdomen blanchâtres ; tête d'un blanc fauve, avec une large calotte d'un brun
foncé sur le vertex, prolongée en deux branches étroites, l'une sur le front,
l'autre sur la nuque ; un trait noir couvre les lores, se divise pour border les
paupières et s'épanouit au-dessus des oreilles ; dos, dessus des ailes et du
cou marbrés confusément par masses, de fauve et de noirâtre ; devant du cou
et parties inférieures d'un fauve un peu roux sur les flancs ; côtés du cou nus
carné jaunâtre ; bec brun de corne avec la base de la mandibule inférieure
jaune ; pieds bruns ; ongles noirs ; iris brun roux. (J. Vian).
La var. Baueri difi'ère du type européen par les taches du bas du dos et du
croupion qui sont plus étendues : chez la variété c'est le brun qui domine à
ces parties, tandis que chez le type c'est le blanc qui domine.
Eab. — La Barge rousse habite, pendant la saison des amours, toute
la zone boréale depuis la Laponie
(Co//e^^) jusqu'aux toundras delà
Sibérie occidentale (74° 1. N.).
Il paraît certain que c'est à tort
que Bogdanow (1) et Seebohm
(2) étendent l'aire géographique
de cette espèce jusqu'au Kamt-
schatka, les îles de la mer de
Behring et l'Alaska, car ni Stej-
neger (3), ni Taczanowski (4), ni Nelson (5) ne comprennent la Barge
rousse parmi les oiseaux de ces pays, mais bien la var. Baueri ou Uro-
pygialis.
La Barge rousse n'a été observée ni au Groenland, ni en Islande,
ni aux îles Féroé, mais elle est de passage le long des côtes de la
Scandinavie {Collett, Nilsson), de la Russie {Bûchner), de l'Alle-
magne {Naumann), du Danemark (^en^on), de la Hollande (Schlégel),
de la Belgique, des îles Britanniques {Seeboh?n), de la France
(Degland), de l'Espagne [Reyes) et du Portugal [Smith), et remonte
souvent le cours des fleuves jusque loin dans l'intérieur des terres.
Elle est de passage irrégulier en Italie [Giglioli) et se montre rare-
ment en Grèce [Lindermayer) et dans le sud de la Russie près de la
mer Noire [de Nordmann). Pallas, Eichwald et Ménétries la men-
tionne comme étant de passage au Caucase, mais M. Radde ne l'y a
jamais rencontrée. En Sibérie elle ne dépasse probablement pas le
Jenissei. Elle hiverne en partie dans le nord de l'Afrique où elle est
abondante aux deux passages ; à l'Ouest cet oiseau se montre en hiver
jusqu'au fleuve Gambie (Hartlaub et Finsch); à l'Est on le rencontre
par petites troupes sur les côtes de la mer Rouge depuis septembre
jusqu'en décembre, mais jamais dans la région du Nil [de Heuglin).
La var. Baueri niche dans le nord-est de la Sibérie [Middendorf)
et dans l'Alaska [Nelson). Elle est de passage au Japon [Siebold], dans
la Sibérie orientale, en Mongolie et en Chine, et quelques individus
séjournent même pendant tout l'hiver dans le sud du Céleste Empire
(1) ConspectHS avinin imperii Rossici, p. 86.
(2) BriL Birds, III, p. 156.
(3) ResuUsoforn. explor. inthe Commander isl. and Kamtschatha, p. 122.
(4) Rev. crit. de la faune orn. de la Sibérie or. (Bullet, Soc. Zool. Fr. I, p. 255).
(5) Birds of Alaska, p. 115.
— 247 —
(David). Cette variété hiverne également à Formose, à Hainan {Swin-
hoé), aux Philippines, à Bornéo [Everett), à Java {van Hasselt), à
Timor {S. Millier), à Célèbes (Forsten), à Halmahera (Bernstein), à la
Nouvelle-Guinée, aux î]es Arou (von Rosenheiy), à la Nouvelle-Bre-
tagne (Fmsc/0, aux îles ^dlomon [Richards), en Australie {Gould,
Ramsay), à la Nouvelle-Zélande {Buller), à la Nouvelle-Calédonie
{Layard), aux Nouvelles-Hébrides [Gray), aux îles Samoa [Peale),
Fidji (Grd/jt'e), etc.
Mœurs. — La Barge rousse émigré par troupes dès la lin du mois
d'août et les passages durent jusqu'en octobre ; les individus qui
nichent dans le nord de l'Europe émigrent en suivant les côtes euro-
péennes pour hiverner en Afrique (1); la race orientale suit les côtes de
la Sibérie, du Japon et delà Chine pour passer l'hiver en Océanie.
Le retour n'a lieu qu'en avril et mai ; ces oiseaux ne restent réel-
lement qu'un peu plus de deux mois dans les lieux de la reproduction.
Ces Barges voyagent ordinairement pendant la nuit, plus rarement
en plein jour, et sont souvent accompagnées de divers Bécasseaux.
En automne elles s'arrêtent partout où le pays leur convient, y passent
quelques jours et continuent ensuite leur voyage ; c'est ce qui fait
qu'elles sont souvent surprises par les premières gelées qui les obligent
à hâter leur retour au quartier d'hiver. Le trajet se fait toujours plus
rapidement au printemps. On les voit arriver sur les côtes occiden-
tales du Jutland et près des bouches de l'Elbe en quantités énormes ;
« des myriades de Barges, dit Naumann, arrivent comme une nuée
d'au delà de la mer et s'abattent dans les prés ; la côte en est
couverte ; la bande s'avance tranquillement, chaque oiseau cherchant
sa nourriture, et couvrant bientôt une étendue que l'œil ne peut
embrasser d'un seul regard. Ce spectacle est presque indescriptible ;
une pareille bande vue de loin au moment où elle s'envole, ressemble
à une fumée qui s'élève. »
Des troupes nombreuses de ces oiseaux séjournent sur les côtes de
la Baltiqup jusque dans la première huitaine de juin ; à peine les der-
niers ont-ils disparu, que déjà, en juillet, on voit revenir quelques
sujets isolés : ce sont probablement des individus trop vieux pour la
(1) Suivant M. Seebohni, ces oiseaux suivraient aussi les grands fleuves de la Russie orientale e
de la Sibérie occidentale pour ai river près de la mer Caspienne. Mais en dehors des renseigne-
nientsassez vaguesde Pallaset de Mcnétries, aucun auteur lécent ne signale cette espièce près de
cette uicr.
— 248 —
reproduction, ou des jeunes qui se sont laissés évincer par d'autres
plus expérimentés,
La Barge rousse ne quitte que rarement le rivage de la mer ; on la
voit cependant quelquefois remonter le cours des tieuves et s'avancer
assez loin dans l'intérieur des terres ; c'est ainsi qu'elle se montre de
temps en temps, pendant les passages, près d'Anvers. Elle se tient
volontiers sur les bancs de sable mis à sec par la marée basse, et
revient à terre à la marée haute pour visiter les marécages et les prai-
ries humides des environs. Vers l'heure de midi elle s'éloigne de l'eau
pour se livrer au repos ; il n'est alors pas rare d'en voir quelques-unes
ensemble, perchées sur une patte, la tête cachée dans les plumes du
dos et dormant paisiblement.
Ces oiseaux ont les allures des Chevaliers : ils marchent comme eux
pas à pas, entrent souvent dans l'eau jusqu'au ventre, mais ne nagent
jamais sans nécessité. Leur vol est léger, rapide et rectiligne, mais ils
le ralentissent quand ils s'élèvent haut dans les airs. Quand plusieurs
Barges veulent se rendre d'un endroit à un autre, elles volent sans
ordre. Dans leurs migrations, au contraire, elles forment une longue
file, et si elles sont très nombreuses, elles volent sur deux lignes
formant un angle aigu.
Les individus isolés se montrent souvent peu craintifs, mais la plu-
part évitent le chasseur et savent le reconnaître d'avec les personnes
inoffensives ; en troupes ces oiseaux sont toujours défiants, et plus ils
sont nombreux, plus ils se montrent craintifs.
On a pu voir de ce qui précède que les Barges rousses sont très
sociables ; pendant les migrations il n'est pas rare de voir un de ces
oiseaux conduire une troupe composée d'autres petits échassiers, ou
même plusieurs Barges se réunira d'autres espèces. Leur cri varie
suivant les circonstances et ressemble à kjeou, kewkewkew, keu-
keukeu ou keikeikei, mais on n'entend leur voix que quand elles sont
en bandes ; leur cri d'amour est plus flûte et peut se rendre par tabié,
tablé.
Leur nourriture consiste en larves, insectes, vers, annélides marins,
mollusques et petits crustacés, frai et têtards de grenouilles.
Reproduction. — Cette espèce niche dans les toundras de la région
arctique de l'ancien monde. Suivant Wolley, qui découvrit des œufs
de cet oiseau en 1858, le nid est bien caché dans un marais et le plus
souvent au pied d'une colline. La ponte, qui est de quatre œufs, a lieu
à la fin de mai ou en juin ; Wolley trouva des œufs en Finlande le
— 249
29 mai. Le nid est une simple dépression garnie d'herbages. Les œufs
sont d'un brun olivâtre plus ou moins foncé, tachetés et mouchetés de
brun et marqués de taches profondes grises. Ils mesurent environ 50
millim. sur 35.
SOUS-FAMILLE
DES NUMÉNIINÉS. — NUMENIIN^.
Car. — Bec arqué, deux à trois fois plus long que la tête, mais
de longueur variable suivant les individus, dur et obtus à l'extrémité,
tarses allongés, presque entièrement réticulés ; quatre doigts, assez
courts, les antérieurs réunis à la base par une double membrane.
GENRE CXXI.
COURLIS. — NUMENIUS.
NuMENius^ Briss. Ornith. V, p. 311 (1760).
CuRLiRius, Rafin. An. de la nat. p. 71 (1815).
Ph.eopus, Cuv. Règne an. I, p. 485 (1817).
Cractiornis, Gray, List gen. and subg. B. p. 88(1841).
Car. — Bec beaucoup plus long que la tête, arqué, grêle, comprimé à l'ex-
trémité, la mandibule inférieure un peu plus courte que la supérieure;
narines basales, latérales, linéaires et placées dans une rainure : ailes
longues, pointues ; queue courte, égale ou légèrement arrondie ; tarses allon-
gés, scutellés en avant sur une étendue variable suivant les espèces, réti-
culés supérieurement et sur la face postérieure ; doigts relativement courts,
le médian beaucoup plus court que le tarse ; ongles robustes, peu allongés,
celui du doigt médian assez dilaté et festonné sur son bord interne.
H(th. — Ce genre a des représentants dans les cinq parties du
monde.
210. — Le Courlis arqué ou cendré
NUMENIUS ARQUATUS.
(Pi. 215)
ScoLoi'AX ARQUATA, Lin. S. N . I, p. 115 (1758) ; I, p. 242 (176G).
NUMENIUS MAUAGASCARIENSIS, Bri.ss. Oniith. V, p. 322 (1700).
Tome II. — 1890. 32
— 250 -
■ ScoLOPAx MADAGASCARiENSis, Lin. Synt. nat. I, p. 242 (1766) .
NuMENius ARQUATA, Lath . , Gen. syn. snppl. I, p. 291 (1787).
NuMENius MAJOR, Steph. , iVmio'i' Gen. Zool. XII, I, p. 26 (1824).
NuMENius viRGATUs, Cuv. Règne an. I, p. 521 (1829).
NuMEMUs MEDIUS, Brm. /sîs, 1830, p. 989.
NuMEXius ASsiMiLis, RUFESCENS et LONGiROSTRis, Brm. Nciumannia, 1855, p. 291.
Der GROSSE Brachvogel, en allemand.
The common Curlew, en anglais.
De groote Wulp, en flamand.
Var. Lineatns
NuMENius ARQUATA (part.) Pall . Zooyr. Il, p. 168(1811).
NuMENius LINEATUS, Cuv. Rèy . a?i. I, p. 521 (1829),
NuMENiusNASicus, Tem. ilfaTî. cZ'on^. IV, p. 293 (1840).
NuMENius ARQUATULA, Hodgs., Gr. Zool. Miscel. I, p. 86 (1844).
NuMENius CASSiNi, Swinh., Ibis, 1867, p. 398.
Taille: 0^^1,38; ailes 0,30; bec 0,12 environ; tafses 0,08.
Description des deux sexes adultes. — Tête, cou et haut de la poitrine
d'un cendré roussâtre, avec des stries brunes devenant de plus en plus larges
à mesure qu'elles se trouvent plus près du dos ou de la poitrine ; raie sour-
cilière blanchâtre finement striée de brun ; gorge d'un blanc pur ; manteau
brun, toutes les plumes bordées de cendré roussâtre, les bordures des scapu-
laires barrées de brun ; bas du dos blanc avec de petites taches brunes ; sus-
caudales blanches avec le centre des plumes brun et quelques petites taches
de même couleur sur les bordures, les plus grandes barrées de brun; couver-
tures des ailes brunes bordées de cendré blanchâtre ; rémiges d'un brun noir
avec des taches blanches sur la barbe interne; bas de la poitrine et abdomen
blancs avec des taches allongées brunes ; sous-caudales blanches avec des
taches ou des stries brunes ; queue blanche barrée de brun, les rectrices
médianes lavées de cendré roussâtre. Bec brun, plus pâle à la base de la man-
dibule inférieure; iris brun; pattes d'un gris de plomb.
Il est impossible de reconnaître les sexes avec certitude : le mâle est ordi-
nairement un peu plus grand que la femelle et son boc cLt plus long que
celui de cette dernière.
Jeune. — Ressemble à l'adulte, mais les teintes sont moins rousses et le
bec est plus court.
Poussin. — Parties supérieures d'un roux pâle, marqué de taches brunes
irrégulières ou longitudinales, la principale sur le vertex en forme de trapèze,
dont h s angles aigus descendent l'un sur le front, l'autre sur la nuque, une
autre diffuse sur les oreilles et un irait sur les commissures ; parties infé-
rieures d'une teinte fauve, presque rousse sur la poitrine et l'abdomen. Bec
noir avec la moitié basale de la mandibule inférieure jaune. (/. Vian.)
- 2ol
La var. Lineatus diffère du type européen par l'absence de taches sur le bas
du dos et sur les plumes axillaires, et par les bordures des scapulaires et des
plumes du haut du dos qui sont presque blanches. — Ces caractères ne sont
pas toujours constants, car on rencontre souvent des sujets intermédiaires.
Hab. — Cette espèce peut se diviser en deux races ou variétés
climatériques, dont l'une habite
l'Europe, l'autre l'Asie . La variété
orientale a souvent été confondue
avec le type européen, et bien
des auteurs ne l'ont pas admise;
il est vrai qu'elle est peu carac-
téristique.
La forme occidentale habite
toute l'Europe jusqu'au cercle
polaire ; elle visite les îles Fêroé en automne et en hiver {Feildcn) et
se montre accidentellement en Islande {Faber). Elle niche en grand
nombre dans toute la zone septentrionale de notre continent; quelques
couples nichent également dans divers comtés des îles Britanniques
{Seebohw), en Allemagne {Borggreve), en Hollande {Schlêgel) et pro-
bablement en Belgique, où l'espèce est très commune et presque
sédentaire. M. de Selys-Longchamps pense que ce Courlis niche dans
les terrains sablonneux et arides de notre pays, car il en a reçu de
l'Ardenne en été, et en a vu d'autres à Ostende en aoiït. Dans les
observations ornithologiques de 1885 et de 1886, les chefs-gardes de
nos phares annoncent avoir vu de ces oiseaux en juillet et en août.
M. A Croegaert affirme que cette espèce est très abondante près de
l'Escaut à Anvers en hiver et aux passages. M. A. Lacroix dit, qu'en
France, elle est sédentaire et de passage dans le département de
l'Hérault et qu'elley niche régulièrement. En Italieon la voitôgalement
pendant toute l'année mais elle n'y nicherait pas {Giglioli); en Espa-
gne elle ne se montre qu'en hiver et aux passages {Saundcrs). Il est
probable que cet oiseau hiverne plus ou moins dans toute l'Europe
centrale et méridionale, mais qu'il ne niche qu'exceptionnellement
dans les contrées situées au sud des Pays-Bas.
Le Courlis cendré hiverne aussi dans le nord de l'Afrique (Loche),
en Egypte et en Nubie {'%cllt\>/) jusqu'au 10" 1. N., et il est surtout
abondant sur les côtes de la mer Rouge et dans lo golfe d'Aden, où
on l'observe pendant toute l'année mais isolément en été [de Heuglin).
252
11 visite accidentellement les îles Açores ; il est de passage au Cau-
case {Radde), en Asie Mineure et en Perse {Scelwhm).
La var. Lineatus niche dans la Sibérie centrale, mais pas au delà
de la Daourie et des affluents méridionaux de l'Amour ; elle est de
passage dans le Turkestan {Severtzow) et se montre accidentellement
sur les côtes orientales de l'Afrique, mais elle hiverne surtout dans
l'Inde, à Ceylan,dans l'Indo-Chine, à Malacca {Seebohm), à Sumatra,
à Bornéo et à Java {Vordermann).
Mœurs. — Il a été dit plus haut que le Courlis arqué ou cendré est
presque sédentaire en Belgique ; mais il est surtout commun aux
époques des passages, c'est-à-dire depuis la seconde quinzaine du
mois d'août jusqu'en octobre, et en avril jusqu'au commencement de
mai. Ces oiseaux voyagent généralement par troupes plus ou moins
considérables et aussi bien pendant la nuit que djirant le jour ; ils
s'écartent souvent des côtes maritimes et des rivières et franchissent
même des montagnes assez élevées.
Ce Courlis se plaît un peu partout et il a bientôt trouvé un endroit
à sa convenance ; on le rencontre près de la mer, des lacs et des
rivières, dans les marais, dans les champs et les prés, et même dans
les plaines arides, mais jamais dans des endroits boisés. Les toundras
sont cependant sa vraie patrie, car c'est dans les tourbières énormes
des régions septentrionales que la plupart ont pris naissance. Il
ne séjourne jamais longtemps près de l'eau, mais il s'y rend plusieurs
fois par jour ; il aime le changement et passe volontiers d'un endroit
humide à un endroit sec ou aride ; il témoigne cependant une certaine
préférence pour les terrains sablonneux, surtout quand ils se trouvent
non loin de l'eau.
Cet oiseau aime à patauger et nage avec facilité, même sans y être
forcé ; il marche à grands pas, mais avec légèreté et élégance, et
pour aller vite il allonge le pas davantage ; son vol n'est pas très
rapide, mais il est régulier, facile et l'oiseau exécute sans fatigue des
détours remarquables; pour l'accélérer il multiplie les battements des
ailes; parfois il plane quelques instants. Pour descendre d'une grande
hauteur il ferme presque les ailes, tombe bruyamment jusque près du
sol, ralentit alors sa chute en étendant les ailes, etne se pose qu'après
s'être encore balancé quelque temps au-dessus de l'endroit où il veut
s'abattre.
C'est un oiseau extrêmement farouche et méfiant ; toujours attentif,
fuit de loin tout ce qui lui paraît suspect, mais il sait fort bien dis-
- 253 -
tinguer l'ennemi d'un être inoffensif ; c'est pour cette raison qu'il ne
se hâte pas trop de fuir à l'arrivée d'un cavalier, d'une voiture, d'une
femme ou d'un enfant ; c'est surtout quand il est en société qu'il est
difficile de l'approcher à portée de fusil, ce qui fait souvent le désespoir
du chasseur. Il est du reste très sociable ; lorsqu'il se trouve seul, il
jette son cri d'appel pour attirer l'attention de ses semblables, qui lui
répondent aussitôt. Suivant de Heuglin, on le rencontre fréquemment,
en Afrique, au milieu d'une troupe de Barges, de Pluviers ou de Bécas-
seaux, auprès desquels il remplit souvent le rôle de guide. Sa voix se
compose de notes pleines, arrondies et sonores que l'on peut rendre
par les syllabes tau, tail, tJauit ; quand plusieurs oiseaux jettent à la
fois leur cri d'appel, on croirait entendre les sons d'un orgue dans
le lointain. Réunis en grand nombre ils poussent souvent les cris de
tici twi ou tiou tivi, mais c'est toujours en volant qu'ils se font enten-
dre, rarement au repos. Le chant d'amour du mâle est court et com-
posé des divers sons indiqués plus haut, mais dont les notes se fondent
les unes dans les autres d'une façon singulière mais pas désagréable.
L'inquiétude et l'angoisse leur font jeter des cris rauques ressemblant
à krèh ou kruh.
La nourriture du Courlis cendré se compose de larves, d'insectes,
de vers, de mollusques, de petits crustacés et de substances végé-
tales, principalement de baies. Les jeunes ne mangent que des insectes
et des larves.
Cet oiseau s'habitue bientôt à la captivité, surtout quand on le
laisse courir librement dans un jardin, où il rendra même des services.
On le nourrit d'abord de vers et de larves, l'habituant insensiblement
à de la viande hachée. Il lui faut toujours de l'eau fraîche car il boit
beaucoup. Sa chair est assez estimée.
Reproduction. — Ce Courlis niche dans une légère excavation,
cachée entre les herbes et les bruyères, et garnie de brins et de
feuilles de graminées. La ponte a lieu au commencement de mai et
se compose de quatre œufs. Ceux-ci ont une écaille épaisse presque
sans luisant et sont d'un vert olivâtre passant au jaunâtre ou au bru-
nâtre et marqués de taches profondes cendrées et d'autres, superfi-
cielles, plus ou moins nombreuses, d'un brun assez foncé ; ils
mesurent environ (u niillini. sur 18. 11 paraît probable que les deux
sexes couvent alternativement, car tous deux t('nu)ignen( Ir niémo
attachement à leurs petits.
— 254 —
217. — Le Courlis à bec grêle.
NUMENIUS TENUIROSTRIS, Vieill.
(PL 216).
NuMENius TENUIROSTRIS, Vieill. Nouv . dict. dliist. nat. VIII, p. 302 (1817).
NuMENius SYNGENiGos, V. d. Mllhle, Orn. Griechenl. p. 111 (1844).
Der DtiNSCHNaBLiGE Brachvogel, en allemand.
The slender-billed Curlew, en anglais.
De Dunbek-Wulp, en flamand.
Taille : 0,33 ; ailes 0,26 ; bec 0,085 ; tarses 0,067.
Description des deux sexes adultes. — Dessus de la tête bran avec les
plumes bordées de cendré roussâtre ; sourcils et côtés de la tête blanchâtres
striés de brun ; gorge blanche ; cou d'un cendré blanchâtre, légèrement lavé
de roussâtre à la nuque, avec des stries brunes assez larges^, manteau brun,
les plumes bordées de cendré brunâtre, les scapulaires plus ou moins barrées
de brun ; couvertures supérieures des ailes brunes bordées de blanchâtre,
les plus grandes avec des taches blanches sur les bords ; rémiges brunes, les
5« et 6« avec des taches blanches sur les bords ; couvertures inférieures des
ailes et plumes axillaires d'un blanc pur ; poitrine d'un blanc faiblement lavé
de cendré et marquée de 'taches allongées brunes; les autres parties infé-
rieures d'un blanc pur, marquées sur l'abdomen et sur les flancs de grandes
taches de même couleur en forme de fer de lance; sous-caudales blanches avec
une petite strie brune à l'extrémité ; queue blanche avec des barres transver-
sales brunes. Bec brun, de couleur pâle à la base de la mandibule inférieure;
iris brun ; pattes gris de plomb.
Le jeune diffère peu des adultes et se reconnaît principalement à son bec
plus court.
Cette espèce est souvent confondue avec le Numenius phœopus
dont elle est assez voisine. Voici les caractères qui la distinguent à
première vue de son congénère :
N. tenuirostris.
Bec grêle. — Couvertures inférieu-
res des ailes et plumes axillaires d'un
blanc pur sans taches.
Abdomen et flancs blancs avec de
grandes taches brunes en forme de fer
de lance.
Tarses mesurant 0,067 millim.
N. phaeopus.
Bec relativement robuste. — Couvertu-
res inférieures des ailes et plumes axil-
laires d'un blanc pur avec des taches
et des raies transversales brunes.
Abdomen d'un blanc pur avec des
raies transversales sur les flancs.
Tarses mesurant 0,076 millim.
— iJ5o -
jjab. — Ce Courlis appartient au bassin de la Méditerranée mais
son aire géographique est peu
étendue. Il est de passage en
Italie et hiverne en Romagne,
en Sicile et en Sardaigne(<S«/ya-
dori) ; de passage régulier dans
le midi de la France ei accidentel
dans le nord : on en a capturé
près de Montpellier, de Nîmes,
de Marseille, aux environs de
Calais (fév. 1840), sur les plages maritimes du Calvados, en Picardie
{Degland et Gerbe), et il a été tué plusieurs fois le long de la Saône
jusqu'à Châlons {Olphe-Galliard)'^\\ est de passage régulii r en automne
et au printemps dans les départements de l'Aude, du Gers, de l'Hérault,
de Tarn, de Tarn-et-Garonne et quelques sujets passent l'hiver dans
le département des Pyrénées-Orientales {A. Lacroix). En Espagne cet
oiseau est également de passage régulier {Saunders), il est com-
mun en hiver en Andalousie {h-bi/) et niche souvent non loin de la
côte entre Valence et Barcelone (/. Liditenstein) et régulièrement aux
îles Baléares {von Ilomeyer) ; il est de passage en Portugal {Ca.tcdogo
de Gir aides) et se montre accidentellement en Galicie (Rios), en l)al-
matie et sur le littoral autrichien [Naumami).
En Grèce il est plus répandu que le N. phœopus: von der Miihle
dit qu'il doit nicher dans ce pays, car il a rencontré de ces oiseaux en
été et a eu l'occasion de tuer des jeunes en août ; d'après cet auteur
l'espèce quitte la Grèce en septembre. Ce Courlis est commun à 1 île
de Malte {Wright), passe aux doux saisons dans la Dobrodja et la Bul-
garie {Alléon) et se montre parfois dans le Monténégro [FritscJi). A
l'Est on l'observe en Crimée, dans la Nouvelle-Russie, dans la région
du Tchernozem et dans la région Aralo-Caspieune [Bogdanow) ; il
niche dans les steppes d'Oronibourg [Ecersinann).
Le Courlis à bec grêle se montre très accidentellement en Belgique;
mon père en a signalé deux captures : Tune près de Louvain en 185 1
et l'autre non loin d'Ostende en 1856; j'ai moi-même mentionné en
1885, un sujet qui avait été tiré à Lillo près d'Anvers, le G février
1884, par M. Louis van Delft qui le conserve dans sa collection.
M. le baron de Selys-Longchamps rapporte (1) que MM. Bovie et
(l) Naiiinanniii, 185(', p. W.H.
— 256 —
«
Roberti lui ont dit que cette espèce a niché une fois près de St-Trond,
mais cela me paraît peu probable. Un individu a aussi été tué près
de Spaarndam, en Hollande, le 5 décembre 1856 {Schlégel), et un
autre à l'île de Sylt sur la côte danoise {von Preen) .
Cet oiseau hiverne dans le nord de l'Afrique {Loche, Salviné) ; en
Algérie, dans la province de Constantine, il est peu commun près de
la côte, mais excessivement abondant près des lacs situés entre Batna
et Constantine {Taczanoioski). On l'observe également en Egypte,
en Nubie, en Palestine {Tristram) et en Asie Mineure {Dresser).
Mœurs. — On ne possède que fort peu de renseignements sur les
mœurs de cette espèce, ce Ces oiseaux vivent, écrivait feu mon père,
tantôt dans le voisinage des eaux courantes, tantôt dans celui des
eaux stagnantes, mais ils vont rarement sur les bords de la mer. Il
est à remarquer qu'ils quittent journellement le voisinage des eaux
pour se répandre dans les prairies, les pâturages et les champs en
friche, où ils semblent se plaire davantage car ils y restent plus long-
temps. Toutefois, ils ne peuvent se passer d'eau, car ils boivent
beaucoup et se baignent fréquemment. Pour les chasseurs c'est un
gibier difficile à atteindre, car ils ne se laissent point approcher. Leur
chair, d'un goût agréable, est estimée en Italie où on en fait le plus
grand cas. »
Aux îles Baléares, dit M. A. von Homeyer, ce Courlis séjourne
volontiers dans les prés humides et il entre souvent dans l'eau jusqu'au
ventre; dans la Dobrodja, M. Alléon l'a toujours observé dans les
champs, jamais dans les terrains humides. M. Taczanowski le dit
moins farouche que ses congénères. Suivant Malherbe, cet oiseau est
le plus commun des trois espèces qui fréquentent la Sicile. « On en
voit beaucoup au printemps du côté de Messine et de Palerme, et il
est répandu tout l'hiver dans les diverses parties de la Sicile, notam-
ment aux environs de Catane et de Syracuse. » Selon M. Salvador!,
il arrive en Sardaigne en automne et émigré au printemps.
Reproduction. — « Niche dans les plaines marécageuses,au milieu
des herbes, en compagnie du Combattant et des Bécassines et pond
quatre ou cinq œufs d'un blanc laiteux ou d'un blanc nuancé de jau-
nâtre, marqués de points bruns et de taches irrégulières, les unes
brunes, les autres cendrées, plus larges et plus nombreuses sur le
gros bout ; quelques-unes sont confluentes ; ils mesurent 55 à 57 mil-
limètres sur 38 à 42 millimètres, » {Degland et Gerbe.)
20/
218. — Le Courlis pluvial ou Corlieu
NUMENIUS PHyEOPUS, Lath. ex Lin.
(PI. 217).
ScoLOPAX PH.EOPUS, Lin. Syat. nat. I, p. 146 (1758) et I, p. 243 (1766).
NuMENius MiNOR, Briss. Ornith. V, p. 317 (1760).
NuMENius PH.îîOPUs, Lath. Geyi. syn. suppl. I, p. 291 (1787).
Ph^opus ph.eopus, Cuv. Rèc). an. I, p. 485 (1817).
Ph.eopus vulgaris, Hem. Phil. zool. II, p. 254 (1822).
Ph.eopus arquatus, Steph. Shaw's Gen. zool. XII, 1, p. 36 (1824).
NuMENius melanorhynchus, Bp. Comp. rend. XLIIl, p. 1021 (1856).
NuMENius H^siTATUS, Hartl. Ornith. Westafr., p. 233 (1857).
NuMENius PLUviALis, C. F. Dub. PI. col. Ois. Belg. III, p. 193 (1860).
Der Regen-Brachvogel, en allemand .
The Whimbrel, en anglais.
De Regenwulp, en flamand.
Var. Variegata
Tantalus variegatus, Scop. Del. FI. Faun. Ins. II, p. 92 (1786).
ScoLOPAX LUZONIENSIS, Gm. Sijst. nat. I, p. 656 (1788).
Numeniusluzoniensis, Lath. Ind. orn. II, p. 711 (1790).
NuMENius PH.EOPUS, Pall. Zoogr. Rosso-As. II, p. \Q^ {IBW) ai auct. plur.
NuMENius atricapillus, ViciU. Nouv. Dict. dlmt. nat. VIII, p. 303(1817).
NuMENius UROPYGiALis, Gould, Pr . zool. Soc. 1840. p. 175.
NuMENius VARIEGATUS, Salvad. Ann. Mus. civ. Gen. XVIH, p. 330 (1882).
NuMENius PH.EOPUS VARIEGATUS, Seeb. Brit. B. III, p. 101 (1885).
Taille : 0™,32; ailes 0,25; bec 0,087; tarses 0,076
Description des deux sexes adultes. — Dessus de la tête brun avec une raie
médiane irrégulière blanchâtre ; nuque cendrée avec des stries brunes ; man-
teau brun, les plumes bordées de cendré brunâtre ; bas du dos blanc, taché
de brun sur le croupion ; sus -caudales blanches barrées de brun ; cou-
vertures des ailes brunes avec des taches blanchâtres sur les bords ; scapu-
laires de môme couleur avec des barres plus foncées mais peu apparentes et
plus ou moins bordées de blanchâtre extérieurement ; rémiges brunes, les
secondaires tachées de blanc ; couvertures inférieures des ailes et plumes
axillaires d'un blanc pur avec des barres brunes ; sourcils et côtés de la tête
blanchâtres striés de brun ; lorums bruns variés de cendré ; gorge l)lanche ;
cou et poitrine d'un cendré blanchâtre avec des stries brunes ; abdomen, jam-
bes et sous-caudales d'un blanc pur, mais ces dernières avec quelques stries
brunes ; lianes marqués de stries et de taches transversales brunes ; queue
d'un cendré brunâtre pâle avec des bandes transversales brunes. Bec noi-
râtre, plus pâle à la base de la mandibule inférieure ; iris hnin ; [) ittes (l'un
gris ardoise.
T.. ME II. - 1890. 33
~ 258 —
Jeune âge. — Ressemble à l'adulte mais d'une teinte plus fauve: les plumes
du manteau et les scapulaires ont des taches fauves sur leurs bords ; les cou-
vertures des ailes sont également tachées de fauve. Bec plus court et moins
arqué.
Poussin. — Teinte générale d'un gris blanchâtre, faiblement lavée de
roux aux parties supérieures, très pâle sur les côtés de la tête et sur les par-
ties inférieures, presque blanche sur le ventre ; sur le vertex calotte noirâtre,
de forme triangulaire, descendant en pointe sur la nuque, et reliée au bec par
une bande qui traverse le front; trait noir discontinu sur les lorums, les yeux et
les oreilles ; bande sourcilière blanche; taches longitudinales noires sur le dos
et sur les ailes ; bec noir, avec la base de la mandibule inférieure jaunâtre ;
pieds gris de plomb ; iris brun foncé (J. Vian).
^ Var. Variegata. — Cette variété se distingue de la forme européenne par
des taches brunes plus grandes sur le bas du dos, le croupion, les sus-caudales
et sur les couvertures inférieures des ailes, mais ce caractère ne paraît nulle-
ment constant. Beaucoup d'auteurs n'ont pas admis cette variété.
Hab. — Le Gouiiis corlieu habite, en été, le Groenland et le nord
de l'Europe depuis l'Islande
jusqu'en Sibérie, probablement
jusqu'au Jenissei. 11 est alors
plus ou moins commun en
Islande {Faber), aux îles Féroé
[Feilden), Orknej et Shetland,
dans le N.-O. de l'Ecosse {See-
bohm), sur les côtes et les îles
de la Finmark {Collett), dans la
Russie septentrionale jusqu'au 66° 1. N. et la Sibérie occidentale
jusqu'au 65» {Bogdanoio).
A l'époque des passages, on rencontre de ces oiseaux sur toutes les
côtes européennes, et ils sont alors assez abondants sur celles de
Belgique et même près de l'Escaut. Ils hivernent dans le midi de
TEspagne {Saunders),dQ l'Italie {Giglioii)ei en Grèce {Li7idermayer).
Cette espèce hiverne également dans le nord de l'Afrique, mais
elle paraît être plus rare dans le N.-E. de ce continent, où elle a
cependant été observée en Egypte, près de Karthoum {de Heuglin),
sur le Nil Bleu {Vierthaler) et sur les côtes de l'Arabie {Hempr. et
Ehrenb.), Elle a également été observée à la Côte d'Or {Schlégel),
au Transvaal (A^r^.s), au Cap de Bonne-Espérance [Layard), aux
îles Canaries {Bolle), Açores {Qodman), Seychelles [Newton), Mada-
- 2o9 -
gascar {Grandidier) et Maurice {Verreaux)', il y a donc lieu de sup-
poser que cet oiseau se montre sur toutes les côtes africaines.
La var. Variegata habite en été le Kamtchatka jusqu'au détroit
de Behring [Stejnegey-) ; il est de passage dans la Sibérie orientale
{Bogdanow), au Japon {Siebold), en Chine [David), à Formose [Swin-
hoe) et hiverne aux Philippines [Everett), à Malacca, Bornéo, Java
(Vorderman), à Sumatra, Célèbes et à la Nouvelle-Guinée [S. Mul-
ler), aux Moluques [Bernstein) et autres îles de l'Océanie, en Aus-
tralie, en Tasmanie (Gould), aux îles Carolines, Ponapé [Finsch),
Pelew [Kubary], etc.
Mœurs. — Cet oiseau quitte les régions septentrionales en août,
et passe par nos contrées vers la fin du même mois et en septembre ;
quelques sujets séjournent parfois dans notre pays jusqu'en octobre ;
il repasse à la fin d'avril et en mai, et à cette époque il est assez abon-
dant sur l'Escaut. Cette espèce se montre au printemps avec une
grande régularité, ce qui lui a vallu, dans le pays flamand, le nom de
Mei-wulp; c'est pour la même raison que les Anglais l'appellent vul-
gairement May-bird. Naumann dit qu'en Allemagne on voit des
sujets adultes dès la tin de juillet, des jeunes jusqu'à la mi-août, et
que les retardataires qui se montrent encore en septembre sont
rares.
Ces Courlis émigrent en suivant les côtes maritimes ; ils voyagent
généralement pendant la nuit et par troupes plus ou moins considé-
rables, formées souvent de plusieurs centaines d'individus. Ils volent
alors habituellement très haut, se suivant à la file en formant deux
lignes disposées en angle aigu ; il est rare d'en voir loin dans
l'intérieur des terres.
Cet oiseau vit principalement sur les bords de la mer, recherchant
de préférence les bancs de sable et les endroits où il peut facilement
patauger dans l'eau. Dans les lieux de la reproduction, il s'éloigne
davantage de la mer, fréquente les bords des lacs, des fleuves, des
rivières et autres eaux découvertes, d'où il se rend souvent dans des
endroits secs et même arides. L'eau ne lui est pas indispensable ; il
s'en éloigne souvent pour visiter les prés, les pâturages et même les
plaines couvertes de bruyères situées à une grande distance d'un
endroit aquatique. Il se tient généralement près de l'eau durant la
nuit, mais pendant le jour il paraît préférer les endroits secs, dont il
ne s'éloigne que pour se désaltérer ou se baigner.
Par ses allures, son vol et ses mreiirs, cet oiseau ressemble complè-
— 260 —
tement au Courlis arqué ; comme ce dernier, il nage avec aisance et
sans nécessité, et plonge même en cas de danger. A l'approche du
mauvais temps et pendant la pluie, il devient inquiet, bruyant et
il perd alors de sa méfiance. D'habitude il n'est guère moins farouche
que son congénère le grand Courlis, mais les jeunes se laissent plus
facilement attirer par celui qui sait bien imiter leur cri. Les adultes
fuient l'homme de loin ; quand une troupe nombreuse s'abat dans
un endroit, on voit toujours aux alentours des individus isolés, faisant
fonction de sentinelles, qui donnent l'alarme au moindre danger ; ils
savent cependant reconnaître l'ennemi et ne s'envolent pas à la vue
d'un être inoffensif, à moins qu'il ne leur soit suspect.
Cet oiseau est sociable, mais il ne recherche que la société des
individus de son espèce, et il est rare de le voir en compagnie du
grand Courlis. Sa voix ressemble à celle de ce dernier, mais elle est
d'un ton plus haut. Il se nourrit de larves, d'insectSS, de petits crus-
tacés, de vers, de limaces et de baies.
Reproduction. — Le Courlis corlieu niche dans le voisinage du
cercle arctique vers la fin de mai et en juin. A ce moment il perd en
partie son naturel craintif et devient plus confiant ; il est vrai que
dans ces régions désertes il n'a guère beaucoup à craindre de l'homme.
Le nid est une simple dépression, garnie de brins et de feuilles
mortes, cachée par une touffe d'herbes ou par un saule nain. Ce nid
n'est pas diflâcile à découvrir, car les oiseaux en trahissent eux-mêmes
la présence par leur agitation et leurs cris de détresse. La ponte est
de quatre œufs, rarement de trois. Ceux-ci sont piriformes et entière-
ment semblables à ceux du Courlis arqué, mais plus petits : ils
mesurent 56 à 60 millim. sur 42 à 44 millim.
Il est probable que les deux sexes couvent alternativement, car on
a constaté une tache incubatrice aussi bien chez le mâle que chez la
femelle. Tous deux se montrent fort attachés à leur couvée, et quand
on s'en approche, dit Graba dans son voyage aux îles Féroé, la
femelle vole autour de l'intrus en poussant les cris de krururukru-
rurukru...., pendant que le mâle s'élève dans les airs en faisant
entendre le cri de u-tueu.
Les œufs éclosent ordinairement dans la seconde quinzaine de juin.
Les petits grandissent rapidement et se séparent de leurs parents en
juillet.
- 261 -
SOUS-FAMILLE
DES PHALAROPIXÉS. — PHALAROPIN.'E.
Car. — Bec droit, de longueur moyenne; ailes longues et suraiguës, la
première rémige étant la plus longue ; tarses relativement courts ; doigts au
nombre de quatre, les antérieurs réunis par une demi-palmature, bordés,
en outre, de lobules cutanés s'étendant d'une articulation phalangienne à
l'autre, et dont le bord convexe est finement dentelé. Cette conformation
des pieds rapproche ces oiseaux des Foulques, mais par le restant de leur
organisation ils sont plus voisins des Tringidés.
GENRE CXXII.
PHALAROPE. — PHALAR0PU3.
Phalaropus, Rriss. Om. VI, p. 12 (1760).
Crymophilus, Vieill. An. nouv. orn. élém. p. 62 (1816).
LoBiPES, Cuv. Règ. an. I, p. 495 (1817).
Steganopus, Vieill. N. dict. dliist. nat. XXXII, p. 136(1819).
HoLOPODius, Bonap. Comp. reyid. XLIII. p. 420 (1856).
Car. — Bec droit, de la longueur de la tête ou un peu plus long ; narines
basales, latérales, linéaires, placées dans une rainure ; ailes allongées mais
ne dépassant pas la queue, suraiguës ; queue moyenne, cunéiforme ; les
plus grandes sous-caudales atteignant l'extrémité des rectrices ; jambes
emplumées aux deux tiers environ ; tarses relativement courts, scutellés ;
doigts réunis à leur base par une membrane s'étendant au delà de la pre-
mière articulation, garnis de lobes latéraux dans le reste de leur étendue,
comme chez les Grèbes et les Foulques ; pouce grêle.
Uah. — Lr's trois espèces connues de ce genre habitent l'hémi-
sphère boréal, et particulièrement la zone polaire.
219. — Le Phalarope platyrhynque.
PHALAROPUS FULICARIUS, Bp. ex Lin.
(PI. 218 et 219, fig. 1.)
Tringa fulicaria. Lin. S\j!^t. nat. I, p. 148 (1758) ; I, p. 249 (1766).
Phalaropus rufescens, Briss. Or7i. VI, p. 20 (1760).
Phalaropus lobatus, Tiinst. Orn. Bril. p. 3 (1771).
Phalaropus rufus, Bcchst. Nat. Deutschl. IV, p. 381 (1809).
Phalaropus platyrhvnchus, Tem. Man. d'orn. p. 459(1815).
Phalaropls grisecs, Lcach, Sysl. cat. M. Birds Br. Mus. p. 34 (1816).
Crvmophiu's rufcs, Vieill. .V. dict. dlust. nni. VIII, p. 521 (1817).
Phalaropus fulicarius, Bonap. Comp. Ust B. p. 54 (1838).
Phalaroim^s pi.ATVRosTRis, Nonlm. iJrmirf. Voif. Russie mrr. III, p. 250 (1840).
262 —
Phalaropus asiaticus. Hume, Stray Feath. I, p. 246 (1873).
Crymophilus fuligarius, Stejn. Bull. U. S. nat. Mus. n" 29, p. 140 (1885).
Der plattschnablige Wassertreter, en allemand,
The grey Phalarope, en anglais.
De rosse Franjepoot, en flamand.
Taille: 0,16 mâle; 0,18 femelle; ailes 0,12 à 0,137; bec 0.022;
tarses 0,020.
Description des deux ssxes adultes en été. — Front, dessus de la tête, nuque,
tour du bec et gorge d'un brun noirâtre ; joues et raies sourcilières
blanches ; manteau et scapulaires noirs, mais toutes les plumes bordées de
roux jaunâtre ; bas du dos blanc ; croupion roux ; sus- caudales d'un roux
jaunâtre avec une strie brune au centre ; couvertures des ailes cendrées, bor-
dées de blanchâtre, les plus grandes largement terminées de blanc, ce qui
forme une bande blanche sur l'aile ; rémiges brunes ; rectrices médianes
brunes, les autres d'un cendré brunâtre lisérées de blanchâtre ; devant et
côtés du cou ainsi que toutes les parties inférieures, y'compris les sous-cau-
dales, d'un roux rougeâtre sombre. Bec épais, trigone à la base,déprimé dans
toute son étendue, rétréci vers le milieu, élargi vers son extrémité, d'un
jaune olive à extrémité noirâtre ; iris brun rougeâtre ; pattes olivâtres.
La femelle ne se distingue du mâle que par une taille plus forte ; ses cou-
leurs sont aussi généralement plus vives.
Les deux sexes en hiver. — Face et côtés de la tête ainsi que les parties
inférieures d'un blanc pur ; partie moyenne de la nuque et occiput noirâtres;
et cette teinte se prolonge en une bande latérale jusqu'au-dessus de l'œil ;
bande noirâtre derrière l'œil ; dos, scapulaires, croupion et sus-caudales
d'un beau gris bleuâtre, avec les scapulaires terminées par un liséré blan-
châtre ; ailes et queue comme en été.
Jeune. — DiÔere surtout de l'adulte en plumage d'hiver, en ce que toutes
les parties dorsales sont brunes avec les plumes bordées de roux jaunâtre pâle.
Bab. — Le Phalarope platyrhynque est un habitant de la zone
p^ polaire arctique, où il niche
entre le 68'^ et le 80" 1. N. Il
paraît peu répandu en Islande
{Faber), mais il est commun dans
le nord du Groenland et dans le
détroit de Davis (Holbôll), au
Spitzberg, même dans les parties
les plus septentrionales {Malm-
gren), et probablement dans la
Nouvelle-Zemble, bien que de Heuglin ne l'y ait pas rencontré. 11 est
également commun dans le Taimyr et dans tout le nord de la Sibé-
— 263 — '
rie {Middendorff), dans le détroit de Behring (Stejneger), à la pointe
de Barrow et aux îles du Commandeur [Nelson], ainsi que dans toute
l'Amérique boréale jusqu'au 82 l/2o.
En automne, cet oiseau émigré vers le Sud, mais ne quitte qu'acci-
dentellement la zone froide; on le voit alors en Norvi'ège (Collett), en
Suède [Nilsson], en Danemark [Kjarbôlling], près des côtes occiden-
tales de la Russie [Buchner), dans le nord de l'Allemagne {Borggrevé)
et aux îles Britanniques {Seebohm). Il se montre accidentellement en
Pologne [Taczanowski), en Bohême [Fritsch), en Tyrol [Althamer),
en Suisse [Schneider-] et en Belgique, où un individu a été tiré en 1855
près de Louvain et deux autres près d'Ostende (C F. Dubois)',
M. de Selys-Longchamps dit qu'il est de passage accidentel dans les
marais de la Campine et sur les côtes de Flandre, mais seulement
pendant les hivers rigoureux. Il est de passage irrégulier dans le
nord de la France : en octobre 1834, un grand nombre d'individus
ont été capturés à Dunkerque, et on en a tué à cette époque tout le
long de la mer jusqu'à Bayonne, par suite d'une tourmente et d'un
vent impétueux qui a duré plusieurs jours {Degland et Gerbe). Des
captures accidentelles ont également été faites enFortugal [du Bocage),
en Espagne, où un sujet a été tué le 20 septembre 1871 dans la
lagune de Janda entre Cadix et Tarifa [Irby], en Savoie [Bail l y), près
des lacs du nord de l'Italie {Savi), et deux spécimens ont été pris près
de Naples en décembre 1869 et en janvier 1870 (Salvadori); on
signale même une capture au Maroc près de Tanger (Drake).
Cette espèce a également fait des apparitions accidentelles dans le
sud de l'Asie : elle a été capturée près de Calcutta {Bl(/th), dans les
golfes d'Oman et Persique, ainsi que sur la côte de Mekran {Hume).
En Amérique on le voit parfois aux Etats-Unis où on a pris des sujets
dans le Nouveau-Brunswick, dans l'Etat de New- York, dans le
Kentucky, l'Ohio et dans la Nouvelle-Jersey [Audubou).
Mœurs. — Ce Phalarope, d'après liolboll, ne revient au Groenland
que (|uan(l la saison est déjà avancée, car on ne l'y voit jamais avant
le commencement de juin. « Tant que notre marche fut enrayée par
les banquises, dit liolboll (1), nous vîmes constamment de ces oiseaux
nager entre les glarons. Cette espèce est rare dans le sud du Groen-
land, où on ne la voit qu'à l'époque des passages ; mais dans le nord
de ce pays, à partir du 68" 1. N., elh; est très commune et niche sur
(1) C. IlulboU, Omit h. Biitra^' :,ur Faiina Grocn'.aïuis. \^. 41.
_ 264 —
toutes les îles qui possèdent des étangs. Elle ne niche jamais à l'inté-
rieur des fjords, ce qui la distingue de son congénère, qui se reproduit
près des côtes ; pour le reste, les deux espèces ont à peu près les
mêmes moeurs. Les jeunes commencent à voler en août ; en sep-
tembre on les voit réunis aux adultes, en plumage d'hiver, voltigeant
dans les roseaux et autour des îlots; ils quittent ces parages vers la
fin de ce mois et on les rencontre alors par petites troupes près des
îles du sud du Groenland. »
C'est sur la mer que ces oiseaux passent la mauvaise saison, et la
mer leur fournit une nourriture tellement abondante, qu'il s'engrais-
sent au point qu'on peut à peine les dépouiller. Audubon dit qu'ils
aiment à s'abattre sur les algues flottantes, et qu'ils y sont très occu-
pés, sans doute à chercher leur nourriture. Ce qui est certain, c'est
qu'ils ont tout à fait les allures de vrais pélagiens et qu'ils nagent
aussi bien que des palmipèdes. « Ces oiseaux, dit Â7 E. Brehm, sont
on ne peut plus attrayants; ils sont admirablement doués et ont des
mouvements légers et gracieux; ils se plaisent sur la terre ferme
comme dans les marais, dans l'eau comme dans l'air. Leur démarche
ressemble à celle des Tringidés et ils vivent paisiblement au bord des
eaux; le cou un peu rentré, ils trottinent, courent, se meuvent avec
agilité au milieu des roseaux et savent parfaitement s'y cacher; leur
vol est rapide. Ils nagent avec facilité, élégance et une célérité
remarquable, et leur corps semble à peine effleurer l'eau ; ils ont
alors le plumage serré au corps et ils rament vigoureusement, mais
ne plongent jamais. Quand ils sont blessés, au lieu de disparaître
sous l'eau, ils se dirigent à toute vitesse vers les roseaux où ils se
cachent à merveille. De l'eau ils s'élèvent dans l'air^ et de même, ils
se laissent retomber de fort haut à la surface de l'eau. Ils vaquent,
en nageant, à toutes leurs occupations, cherchent leur nourriture,
mangent, se pourchassent, s'accouplent même. Peu leur importe que
l'eau soit tranquille ou agitée, chaude ou froide.
« Leurs sens sont fins et leur intelligence est très développée.
Pleins de confiance, ils laissent l'homme les approcher jusqu'à une
dizaine de mètres ; s'il ne les effraye pas, il peut les observer à son
aise, mais s'il fait mine de les chasser, ils deviennent prudents, et le
premier coup de feu les rend défiants. Ces oiseaux ne paraissent pas
s'inquiéter des autres créatures, du moins dans la saison des amours :
c'est pour eux-mêmes qu'ils vivent. Cependant l'amour exerce aussi
sur eux son empire et détermine des combats entre les mâles eu
- ^6o -
l'honneur des femelles. Ces luttes commencent clans l'eau et se conti-
nuent dans l'air. Un mâle qui arrive dans le domaine que s'est choisi
un couple, excite la jalousie du légitime possesseur; les deux oiseaux
nagent l'un contre l'autre, puis s'élèvent dans l'air, se battent jusqu'à
ce que l'intrus soit mis en fuite. Les deux sexes se témoignent beau-
coup d'amour, restent toujours l'un près de l'autre et se quittent
rarement. » Il se peut que, sur les grands étangs, plusieurs couples
nichent à quelque distance les uns des autres ; mais pour les petits
étangs, il paraît que chaque couple en occupe un et n'y tolère aucun
autre.
Suivant de Heuglin, qui a observé cette espèce au Spitzberg (1), ce
ne serait qu'à la seconde année qu'elle pourrait se reproduire. Les
sujets d'un an vivent par petites troupes de cinq à dix individus,
prenant leurs ébats dans la mousse, dans l'herbe, dans les endroits
tourbeux, près des rivières et des étangs, et principalement dans les
lieux non accidentés, rarement dans les endroits escarpés ou rocail-
leux du rivage. Ils se poursuivent en jouant, tant à terre que dans
l'eau, mais il est rare d'en voir sur la mer pendant l'époque de la
reproduction. Leur cri d'appel ressemble à celui des Bécassines, mais
de Heuglin ne l'a entendu qu'au moment où les oiseaux s'envolaient.
Leur vol, toujours d'après le môme observateur, est élevé, rapide et
troublé, et l'oiseau décrit de nombreux zigzags. 1 a nourriture se
compose de petites mouches, de larves, d'araignées et de vers.
Malmgren dit, qu'au Spitzberg, ce Phalarope se nourrit presque
exclusivement d'une petite algue, qui est là très commune. En volant,
dit Faber, il fait entendre un cri ressemblant à ihm ihm.
Reproduction. — Cet oiseau niche, suivant de Heuglin, aussi bien
dans des endroits secs que marécageux, et souvent sur une colline
inaccessible aux renards. Il se creuse une petite fosse dans le sable
près du rivage, ou dans l'herbe sur un monticule émergeant d'un
marais ; cette excavation est protégée par des pierres et garnie parfois
de quelques brins d'herbe. La ponte, qui a lieu vers la mi-juin, se
compose de quatre œufs d'un brun olive pâle, marqués de taches plus
foncées et d'auti-es noirâtres et noires, souvent contluentes vers le gros
bout. Ces œufs ressemblent à ceux du Phalarope hyperboré, mais ils
sont généralement plus gros : ils mesurent de 28 à 32 millim. sur t'I.
Il est probable que les deux sexes se partagent les soins de l'incu-
(1) voa Heuglin, Reisen nacli dcin Nordpûlarmcer I, p. lO'J et IH, p. 122.
To.ME IL— 1890 34
— 266 —
pation, car tous deux portent des taches incubatrices ; de Heuglin n'a
vu couver que des femelles.
220. — Le Phalarope hyperboré.
PHALAROPUS CINEREUS, Briss.
(PL 218 et 219 f. 2).
Phalaropus CINEREUS et Fuscus, Briss. Ornith. VI, pp. 15, 18 (1760).
Tringa lobata et hyperborea. Lin. Syst. nat. I, p. 249 (1766).
Phalaropus hyperboreus, Tunst. Orn, Brit. p. 3. (1771).
Tringa fusca, Gm. Syst. nat. I, p. 675 (1788).
Phalaropus vulgaris, Bechst. Orn. Taschenb. II, p. 317 (1803).
Phalaropus williamsii, Simm. Trajis. Linn.Soc. VIII, p. 264 (1807).
LoBiPES hyperborea, Steph. Shaw's Gen. Zool. XII, I p. 169'(T824) .
Phalaropus ruficollis et cinerascens, Pall. Zoogr. Rosso-As. II, pp. 203-4 (1826).
Lobipes CINEREUS, Landb. Syst. Aufz. Yog. Wilrtemb. p. 65 (1834).
Phalaropus angustirostris, Naum. Yog. Deutschl. VIII, p. 240 (1836).
Phalaropus lobatus, Salvad. Ucc. cTItal. II, p. 210 (1871).
Lobipes tropicus. Hume, Stray Feath., 1873, p. 247.
Lobipes lobatus, Baird, Brew. et Bidgw. Water-Birds N. Amer. I, p. 330(1880).
Der schmalschnablige Wassertreter, en allemand.
The Red-necked Phalarope, en anglais.
De (jraauwe Franjepoot, en flamand.
Taille: 0,14 à 0,15 ; ailes 0,112; bec 0,21 ; tarses 0,018.
Description des deux sexes adultes en été. — Tête, nuque et parties dorsales
d'un brun cendré velouté, avec quelques taches allongées roussâtres sur le
haut du dos et sur les scapulaires ; gorge et une petite tache sur l'œil d'un
blanc pur ; large collier, interrompu sur la nuque, d'un roux ardent cou-
vrant le haut de la poitrine et remontant latéralement vers la région de
l'oreille ; côtés de la poitrine d'un brun cendré ; ailes brunes avec une bande
transversale blanche ; rémiges noirâtres avec les baguettes blanches ; queue
brune, les rectrices latérales lisérées de blanc ; parties inférieures blanches
avec des taches d'un cendré brunâtre sur les flancs et sur les couvertures
latérales de la queue. Bec grêle, pointu, comprimé, noir ; iris brun ; pattes
d'un cendré brunâtre avec les lobes des doigts blanchâtres.
La taille de la femelle est un peu plus forte que celle du mâle et ses cou-
leurs sont plus vives.
Les deux sexes en hiver. — Parties supérieures cendrées, plus foncées au
centre des plumes ; front, raie sourcilière, côtés du cou et parties inférieures
d'un blanc pur ; une bande d'un cendré foncé derrière les yeux ; côtés de la
poitrine cendrés ; couvertures supérieures des ailes cendrées et lisérées de
— 267 -
blanchâtre, les plus grandes largement terminées de blanc et formant une
bande transversale blanche sur l'aile ; le reste comme en été. Pattes d'un
gris clair, avec les parties membraneuses d'un jaune pâle (1).
Jeune. — Dessus de la tête, nuque et parties dorsales d'un brun noirâtre,
avec les plumes du dos et les scapulaires bordées de roux jaunâtre clair ; ailes
comme chez les adultes en hiver, mais plus foncées ; région des oreilles et
côtés de la poitrine cendrés ; front, raie sourcilicre, côtés du cou et parties
inférieures d'un blanc pur avec quelques stries cendrées sur les flancs ; le reste
comme chez l'adulte en hiver.
Poussin. — Parties supérieures d'un roux jaunâtre varié de noir sur le
haut du dos ; calotte noire, se prolongeant en pointe vers la nuque ; région
de l'oreille et lorums bruns ; raies sourcilières et côtés de la tête blanchâtres ;
milieu et bas du dos noirs avec deux bandes blanchâtres piquetées de rous-
sâtre; gorge jaunâtre ; parties inférieures cendrées, variées de blanc sur le
milieu de l'abdomen ; ailes, flancs et queue variés de noir et de roux.
Hab. — Le Phalarope hyperboré habite toute la zone arctique et
niche entre le 62° et le 75° 1. N.,
rarement plus au sud ; il se repro-
duit cependant parfois dans
l'extrême nord de l'Ecosse et sur
les îles voisines {Dresser), mais
sur les côtes de l'Angleterre on
ne le voit que très rarement et
seulement en hiver (Harting). Il
est commun en Laponie, mais
ne se montre que rarement pendant les migrations dans le sud de la
Scandinavie (M/.s'.von, Colleft); il habite également, en été, les toundras
aussi bien de la Russie européenne que de la Russie asiatique, ainsi
que les îles russes de l'Océan Pacifique; dans le reste de la Russie
et de la Sibérie c'est un oiseau de passage {Bogdanow). Il n'a pas été
observé au Spilzberg, mais de Heugliii l'a trouvé par petites troupes
à Waigatsch, ce qui lui lait supposer qu'il existe aussi à la Nouvelle-
Zemble. Au Danemark et dans le nord do l'Allemagne, on voit cet
oiseau irrégulièrement en automne et en hiver. Dans les autres parties
de l'Europe cette espèce ne se montre que très accidentellement et seu-
lement pondant les hivers très rigoureux; elle a été observée sur les
côtes de la Hollande [Tcmminck) et de la France [Dcglandei Gerbe),
près des lacs et des fleuves de la Suisse {Meisner et Schinz), et quatre
(1) La figure 2 de notre planche 219 représente le /(V/z/f et non IW/z/Ze' eu hiver.
— 268 -
ou cinq captures ont été faites en Italie {Salvadori); un individu de
cette espèce a été pris en Bohême le 6 novembre 1844 et un autre le
18 septembre 1853 {Tschusi-Schmidhofen) ; elle a également été
capturée à diverses reprises en Prusse [Boeck), en Silésie {Gloger), en
Hongrie (Jukoioits), dans le Siebenburgen [Jickeli), en Ga'icie
{Zioadzki) et dans le sud de la Russie [de Nordmann). En Belgique il
est encore plus rare que le précédent sur nos côtes maritimes et seu-
lement pendant les hivers rigoureux {de Selys-Longchamps) .
En Asie on rencontre cet oiseau dans toutes les parties septen-
trionales jusqu'au Japon {Perry). Il a été observé en hiver au
Turkestan [Severtzoïv), sur les côtes de la mer Caspienne [Radde), de
la Perse {Blanford), et jusque sur celles de l'Inde {Jerdon), de la
Chine [David) et des îles Célèbes [Reinwordt), Moluques {Foi^stcn),
Amboine [Hocdt), Nouvelle-Guinée [Cha/ lenyer)^^ Avou. [Wallace],
Nouvelle-Bretagne [Finsch) et même de l'Algérie {Loche).
En Amérique nous trouvons ce Phalarope dans toute la zone
septenirionale; en hiver on le rencontre parfois sur les côtes méri-
dionales des Etats-Unis, et il pousse parfois ses migrations jusqu'au
Guatemala [Sclater, Salvin) et aux îles Bermudes {von Martens).
Mœurs. — Cet oiseau est de retour en Islande et au Groenland
entre le 20 et le 25 mai ; il émigré à la lin du mois d'août.
Dans la zone polaire, on rencontre ce Phalarope près des eaux
garnies de roseaux qui se trouvent non loin de la côte. Holboell dit
que ces oiseaux quittent tous les soirs les étangs pour se rendre dans
les fjords, y nager et y chercher leur nourriture. Celle-ci consiste en
insectes, larves et annélides, qu'ils prennent aussi bien dans l'eau que
sur la terre. Quand ils nagent, on les voit constamment baisser la
tête pour saisir les insectes qui se tiennent à la surface de l'eau.
Le Phalarope hyperboré ne ditFère guère du précédent par ses
mœurs; comme ce dernier, c'est un véritable oiseau marin qui ne se
montre près des eaux douces que pendant la saison des amours ; mais
Faber dit qu'il s'avance plus profondément dans les terres et qu'il en
a vu, en Islande, nager dans des sources chaudes où l'on avait de la
peine à tenir la main. Comme cet oiseau ne se laisse pas vite intimider,
on peut facilement s'en approcher pour l'observer. Le cri d'appel,
suivant de Heuglin, est inie-ununioi ; celui des vieux mâles ressemble
au cri des Bécassines, mais il est beaucoup plus doux.
Reproduction. — Ces oisenux quittent la mer vers la tin de mai et
se mettent aussitôt en quête d'un endroit convenable pour la nidifi-
- 269 —
cation. Le nid est une simple petite fosse creusée entre les herbes,
soit au bord d'un étang, soit sur un petit monticule émergeant de
l'eau. La femelle y dépose, dans les premiers jours de juin, quatre
oeufs sur une litière formée de brins ou de feuilles mortes. Ceux-ci
sont piriformes, peu luisants, d'un vert ou d'un brun olivâtre, marqués
de taches profondes d'un cendré violacé et de nombreuses taches
brunes et noirâtres qui recouvrent en partie les précédentes. Ces
oeufs mesurent environ 30 rniHimètres sur 20, et éclosent au bout de
quinze à dix- sept jours.
Les petits, dès leur naissance, suivent leurs parents et vont chercher
leur première nourriture dans les herbages. Père et mère veillent
avec le plus grand soin sur leur progéniture, et rien n'égale leur
inquiétude lorsque quelqu'un s'en approche. Il paraît que le mâle
partage avec sa compagne les soins de l'incubation. Les poussins ont
les allures des jeunes Tringidés, avec cette diâférence, dit A. Brehm,
qu'ils nagent parfaitement; Faber et Holboell prétendent le con-
traire.
FAMILLE DES RÉGURVIROSTRIDÉS
Car. — Bec long, grêle, aminci en avant, aigu, plus ou moins
retroussé et plus ou moins sillonné ; ailes longues, atteignant l'extré-
mité de la queue ou la dépassant, aiguës; queue courte; jambes nues
sur les deux tiers au moins de leur étendue, réticulées ; tarses aussi
longs ou plus longs que le bec, réticulés ; doigts antérieurs plus ou
moins palmés; pouce très petit, élevé ou nul.
Hah. — Cette famille a des représentants dans les parties tempé-
rées et chaudes des cinq parties du monde.
Mœurs. — Ce sont des oiseaux d'un naturel paisible et sociable,
qui se plaisent près des eaux douces ou saumâtres, ou sur les plages
limoneuses. Ils nagent avec facilité et se nourrissent surtout de petits
animaux a(jiiati(|ues.
GENRE CXXIII.
AVOCETTE. — RECURVIROSTRA.
IIecurviuostra, Lin. .S'. N. I, p. 151 (1758); I, p. 256 (17G0).
AvocETTA, liriss Ondik. VI, p. 538 (1700).
MiMANTOPUS, Seeb. Brit. Hin/s, III, p. 73 ^l^^^S).
Car. — Bec long, lloxible, sillonné à la l)iise, déprimé dans sa partie anté-
rieure (jiii e.st fortomeut retrnusséc et très niinee ; narines l)asales, latérales,
— 270 -
linéaires; ailes allongées, aiguës, dépassant légèrement la queue; celle-ci
courte, presque carrée ; jambes nues sur les deux tiers de leur étendue ; tarses
de la longueur du bec, grêles, réticulés ; doigts antérieurs réunis par une
palmature échancrée qui se prolonge jusqu'à leur extrémité ; pouce presque
rudimentaire et ne reposant pas sur le sol.
Hab. — Les parties tempérées et chaudes des cinq parties du
monde.
221. — La Récurvirostre avocette
RECURVIROSTRA AVOCETTA, Lin.
(PI. 220).
Recurvirostra AVOCETTA, Lin, Syst. nat. I. p. 256 (1766).
ScoLOPAx AVOCETTA, Scop. Ann. I. Hist. nat. p. 92 (1769) .
Recurvirostra europ.ea, Dumont, Dict. se. nat. III, p. 339 (1816).
Recurvirostra fissipes, C. L. Brehm, Isis, 1831 p. 992.
Recurvirostra helebi, A. E. Brehm, Journ. f. Orn., 1854 p. 84.
Recurvirostra helevi, C. L. Brehm, Vogeîf. p. 326 (1855).
Recurvirostra sinensis, Swinh. /6w, 1867 p. 401.
Himantopus AVOCETTA, Seebolim, Brit. Birds, III, p. 74 (1885).
Der Sabelschnabler, en allemand.
The Avocet, en anglais.
De Kluit, en flamand.
Taille : 0,33; ailes 0,225; bec et tarses 0,080.
Description du mâle adulte. — D'un blanc pur; dessus de la tête, milieu de
la nuque, scapulaires les plus rapprochées du dos, petites et moyennes cou-
vertures des ailes ainsi que les rémiges d'un noir profond. Bec noir; iris
rougeâtre; pattes d'un gris bleuâtre.
Femelle. — Semblable au mâle, mais les parties noires tirent fortement
sur le brun.
Jeune. — Ressemble à la femelle, mais le blanc est moins pur; scapu-
laires et couvertures des ailes plus ou moins bordées de cendré ; bec plus
court et taille moins forte que les adultes.
Poussin. — Duvet soyeux, barbelé, épais ; dessus de la tête, haut des ailes,
dos et croupion lavés de cendré et de fauve et semés de taches et de bandes
irrégulières noirâtres, dont une forme demi-cercle autour du bassin; cou d'un
cendré rembruni à la base du duvet; gorge, ventre et extrémité des ailes
d'un blanc pur; abdomen d'un fauve pâle ; bec noir, bleuâtre vers la base;
pieds gris de plomb ; iris brun (J. Vian).
- 271
L'Avocette, quoique répandue dans presque toute l'Europe, ne se
reproduit guère sur notre conti-
nent que dans peu de localités ;
elle niche parfois dans les îles
des côtes du Danemark {Kjaer-
bôllmg), sur les côtes du nord de
l'Allemagne [Borggrevé), plus
fréquemment sur celles de Hol-
-^ lande [Schlégel) et de Borkum
{von Droste), accidentellement
près de l'Escaut en Belgique, communément près des bouches du
Rhône à la Camargue {Jauàert et Lapommeray), en petit nombre
dans le sud de l'Espagne {Saunders), près des lacs de la Dobrodja et
de la Bulgarie {Alléon) et en abondance dans les lagunes et les
marais salés qui avoisinnent les mers Noire et d'Azow (Bogdanoïc).
Dans toutes les autres parties maritimes et fluviatiles de l'Europe, au
sud du 58° 1. N., cet oiseau ne se montre qu'aux passages ou très
accidentellement, suivant les localités.
Au commencement de ce siècle, d'après M. Seebohm, l'Avocette
était commune, en été, près des côtes orientales de l'Angleterre et y
nichait en grand nombre; mais aujourd'hui, ce n'est plus qu'un oiseau
de passage irrégulier que l'on voit quelquefois au printemps, et moins
souvent en automne, dans les lieux où ses ancêtres se reproduisaient.
Les captures sont encore plus rares en Irlande et en Ecosse, mais on
a tué de ces oiseaux jusqu'aux îles Orkney {Edmonston) et Shetland
{Saxhy). On n'observe aussi cet oiseau que très accidentellement dans
le sud de la Scandinavie {NiJsson, Collett), en Pologne, où un sujet
unique a été tué dans le midi du gouvernement de Lublin [Tacza-
nowski), près des grands lacs de la Hongrie et dans rintérieur de
l'Allemagne et de l'Autriche {Naumann), ainsi qu'en Suisse {Meisner
et Scldnz). L'Avocette est de passage régulier sur les côtes belges, et
elle est même alors abondante sur l'Escaut : un couple nichait, il y a
une vingtaine d'années, dans les remparts do l'ancien fort Calloo, non
loin de la Tête-de-Flandre {A. Crocgaert). Elle est plus rare sur les
côtes septentrionales de la France {Dcghind et Gerbe) ; en Italie, elle
est, suivant les localités, rare ou commune, de passage ou sédentaire
{Giglioli) ; elle est de passage en Portugal {Reyes), aux îles Baléares
{Barcelo), en Grèce {Lindermaycr), mais ne visite que rarement l'ilo
de Malte {Wrighf).
272
En Afrique on rencontre cet oiseau, en hiver, sur presque toutes
les côtes et près des grands fleuves, depuis l'Algérie {Loche), le Maroc
{Favier) et le Congo {Tuckey), jusqu'au Zambèze {Livingstoné) et le
cap de Bonne-Espérance {Layard), et il est sédentaire dans beaucoup
de localités ; il est même commun à Madagascar {Grandidier).
L'Avocette se montre en Asie depuis la région Aralo-Oaspienne
{Raddé) jusqu'au sud du Japon {Scebohm), et depuis le sud de la
Sibérie, de la Daourie et de la Mongolie [Radde, Bogdanoio) jusqu'à
QQy\^u{Layard)\ elle est sédentaire en VdlQ^imQ [THstram) et en
Perse {Blanford), hiverne dans l'Inde {Jerdon), dans le midi de la
Chine [David), à Formose et à Hainan {Siainhoe); en Asie Mineure,
elle est principalement de passage, mais un petit nombre d'individus
hivernent dans ce pays.
Mœurs. — L'Avocette arrive en Europe en avril et émigré à la fin
d'août ou en septembre. Elle vit près des côtes maritimes, à l'embou-
chure des fleuves et aux bords des lacs salés ou saumâtres, aussi,
pendant les migrations, les bandes d'Avocettes suivent-elles toujours
les bords de la mer, volant très haut et voyageant la nuit comme le
jour. Ces jolis oiseaux, à la démarche élégante, se plaisent surtout sur
les plages coupées de nombreux bras de mer où abondent les fonds
vaseux et les flaques d'eau, qu'ils aiment à fouiller avec leur long bec
pour y prendre les petits animaux marins dont ils se nourrissent. Il
est rare de les voir près des eaux douces à l'intérieur des terres, et
ils n'y séjournent jamais bien longtemps.
Ces charmants oiseaux vivent en troupes et mènent une existence
paisible et inoffensive ; la faiblesse de leur bec ne leur permet du
reste ni l'attaque ni la défense, ce qui les oblige à éviter les espèces
querelleuses. Ils vivent donc en paix avec tous les oiseaux, mais ne
recherchent que la société de leurs semblables. Ils sont craintifs et
fuient l'homme de loin ; si l'on s'en approche, ils deviennent d'abord
inquiets, s'éloignent dans l'eau en marchant ou en nageant et s'envo-
lent bientôt pour ne s'arrêter que hors de portée. Si l'un d'eux a été
blessé, ses compagnons volent en cercle autour de lui en poussant les
cris de tut, tut, tu-it, tu-it. Leur voix est sifllante, plaintive, sans être
désagréable ; le cri d'appel est quoui ou dult, le cri d'amour est un
kliou plaintif répété plusieurs fois avec rapidité.
L'avocette se tient le plus souvent dans l'eau, s'y promenant lente-
ment, baissant et relevant sans cesse la tête pour saisir sa nourriture ;
celle-ci se compose de petits crustacés^ de vers, de larves et d'insectes
- 273 -
aquatiques, entremêlés d'un peu de gravier pour faciliter la digestion.
« Elle se sert de son bec comme d'un sabre, dit Naumann, elle le
porte rapidement à droite et à gauche, prend les animaux qui nagent
et qui demeurent adhérents aux sillons de la face interne ». Le D""
Bodinus a eu l'occasion d'étudier ces oiseaux au Jardin zoologique de
Cologne, et voici ce qu'il dit de leur manière de chasser : « Jamais
mes Avocettes captives n'ont fait entendreles sons flûtes qu'elles pous-
sent en liberté. Par contre, j'ai pu observer comment elles prennent
leur nourriture. On admet généralement qu'elles y procèdent d'une
façon toute singulière, en agitant leur bec latéralement. On dit que ces
mouvements se font le bec ouvert, que les petits animaux se prennent
entre les mandibules et que l'oiseau les avale ensuite. D'après mes
observations, qui excluent toute idée de doute, l'Avocette exécute ces
mouvements le bec fermé, et cela sur terre comme dans l'eau. Je
croirais volontiers qu'elle le fait pour effrayer les petits animaux dont
elle se nourrit, tout comme les Mouettes et les Flamants frappent le
sol de leurs pattes. La vase est agitée, les animaux qui y sont cachés
sont mis à découvert, et l'oiseau peut alors les saisir et les avaler.
C'est là ce que fait l'Avocette en portant son bec à droite et à gauche.
Jamais je n'ai vu une de mes captives prendre sa nourriture comme
on le supposait; j'ai observé, au contraire, qu'elles la saisissaient
avec la pointe du bec, tout comme un Pluvier ou un autre oiseau
analogue. »
Reproduction. — Peu après leur retour dans les lieux de la repro-
duction, les Avocettes se séparent par paires et vont nicher dans des
endroits couverts d'un court gazon, plus rarement dans des champs
de céréales, mais toujours dans le voisinage de la mer, d'un lieuve
ou d'un lac à eau saumâtre. En mai, la femelle creuse une exca-
vation qu'elle garnit plus ou moins de brins et de radicelles, mais
elle ne se donne aucun mal pour caclier sa couvée. La ponte a
lieu vers la fin de mai^ un peu plus tard dans l'Europe orientale, et
se compose de trois, rarement de quatre et parfois seulement de deux
œufs. Ceux-ci sont plus ou moins piriformes, mats, d'un jaune
terreux pâle ou olivâtres, semés de taches cendrées et d'autres brunes
ou noirâtres couvrant en partie les premières; ils mesurent 47 à
53 millim. su^" 31 à 31.
Les deux sexes couvent alternativement pendant dix-sept ou
dix-liuit jours.
Tome II. — 1890. 35
— i>74 —
GENRE CXXIV.
ECHASSE. — HIMANTOPUS.
HiMANTOPUs, Rriss. Ornith. V, p. 34 (1760).
Charadrius, Lin. Syst. nat. I, p. 255 (1766).
Macrotarsus, Lacép. Mém. de VInst. III, p. 518 (1801).
Hypsibates, mizsoh, Encijcl. XVI, p. 150 (1827).
Car. — Bec d'un tiers environ plus long que la tête, grêle, arrondi à la
base, très légèrement retroussé, sillonné dans la moitié de son étendue, à
mandibules infléchies l'une vers l'autre à la pointe ; narines latérales,
linéaires ; ailes très longues, aiguës, dépassant la queue ; cette dernière de
longueur moyenne ; jambes plus longues que le bec, réticulées ; tarses grêles,
atteignant, chez les adultes, une longueur double de celle du bec, réticulés ;
doigts assez longs, grêles, le médian et l'externe réunis par une membrane
jusqu'à la première articulation, l'interne n'est réuni aurtnédian que par un
simple repli membraneux ; pouce nul.
Hab. — Ce genre a des représentants dans les parties chaudes et
tempérées des cinq parties du monde.
222. — L'Echasse blanche.
HIMANTOPUS PLINII, Gerini.
(PI. 221.)
Charadrius himantopus. Lin. Syst. nat. I, p. 151 (1758); I, p. 255 (1766).
HiMANTOPUS HIMANTOPUS, Briss. Om. V, p. 34 (1760).
Himantopus Plinii, Gerini, Or7i. meth. Dig. IV, p. 67 (1773).
Himantopus candidus, Bonnat. Tabl. encycl. I, p. 24 (1790).
Himantopus vuLGARis, Bechst. Om. Taschenb. II, p. 325(1803).
Cursorius himantopus, Turton, Bril. Faun. p. 62 (1807).
Himantopus rufipes, Bechst. Naliirg. Deutschl. III, p. 446 (1809).
Himantopus atropterus, Mey.et Wolf, Taschenb. Deut. Yogelh. II, p. 315 (1810).
Limosa himantopus, Pall. Zoogr. Rosso-As. II, p. 186 (1811).
Himantopus melanopterus, Mey. Ann. Wetter. Gesellsch. III, p. 177 (1814).
Himantopus albicollis, Vieill. N. dict. d'hist. nat. X, p. 41 (1817).
Hypsibates himantopus, Nitzscli, Ersche u. Grub. Encycl. XVI, p. 150 (1827).
Himantopus longipes, Brehm, Isis, 1830, p. 992.
Himantopus asiaticus, Less. Rev. Zool. 1839, p. 44.
Himantopus intermedius, Blyth, Cat. B. Mus. As. Soc. p. 265 (1849).
Himantopus melanocephalus, nigricollis, leucocephalus et brevipes, C. Brehm,
Naumannia, 1855, p. 293.
Himantopus minor (Natt.), Hartl. Journ. f. Om. 1860, p. 170.
Himantopus albus, EUman, Zoologist., 1861, p. 7470.
Himantopus EUROP^us (Sander) et automnalis, Gray, Hand-list ofB. III, p. 47 (1871).
— 275 —
Der grauschwanzige Stelzenlaufer, en allemand.
The BLACK- wiiVGED Stilt, en anglais.
De Steltkluit, en flamand.
Taille : 0,27 ; ailes 0,25 ; bec 0,064 ; partie nue des jambes 0,086 ;
tarses 0,128.
Description du mâle et de la femelle adultes. — D'un blanc pur, lavé de
rose à la poitrine ; calotte noire sur la tête, s'étendant jusqu'aux régions
parotiques; manteau, scapulaires et ailes d'un noir à reflets verdâtres; queue
d'un cendré clair en dessus. Bec noir ; pattes rouges; iris cramoisi.
La calotte noire disparaît insensiblement avec l'âge, et les vieux mfdes ont
la tête entièrement blanche.
Adolescent. — D'un blanc moins pur, lavé de cendré à la nuque et sur les
côtés inférieurs du cou ; calotte d'un cendré brunâtre varié de blanc, man-
teau et scapulaires bruns ; ailes d'un noir verdâtre.
Jeune. — Blanc, varié de cendré à la nuque ; calotte, manteau et scapu-
laires bruns, mais toutes les plumes bordées de blanchâtre ; ailes noires, les
couvertures bordées de cendré ; pattes couleur orange.
Poussin. — Dessus de la tête, dos, ailes et appendice caudal d'un gris rous-
sâtre, moucheté de noir et portant deux bandes longitudinales et parallèles
de cette couleur sur le dos et une sur le vertex ; trait noir sur les lorums
prolongé en arrière des yeux ; dessus du cou cendré, avec la base du duvet
noirâtre ; parties inférieures blanches, unies latéralement aux parties supé-
rieures par une teinte graduellement fauve ; bec noir avec l'extrême pointe
blanchâtre ; pieds d'un jaune rembruni. (/. Vian.)
Remarque. — Plusieurs auteurs considèrent les sujets à manteau
brun comme des femelles, et ceux à tête blanche comme étant en
plumage d'hiver. Mais il paraît que la seule diâôrence sexuelle réside
dans la taille; la femelle est toujours plus petite et moins brillante.
La calotte noire disparaît avec lïige chez les mâles, mais jamais com-
plètement chez les femelles, où elle est variée de blanc.
Hab. — L'Echasse blanche ne se reproduit en Europe que dans
certains marécages, lacs ou
étangs à eau saumâtre des con-
trées méridionales et orientales;
elle niche donc en Portugal, en
Espagne {Saundcrs, Irby), à
rombouchure du Rhône {De-
(jland et Gerbe), en Hongrie
{Nau7nann), au sud du Danube
^^^^^^^.^^.^ ...... ,:i^^ifk^ii;..<^^... .:,:.. .,/; j„squ'aux marais salés de Kus-
tondji on Turquie {T),-esfirr), dans la Dobnxlja, notamment près du
— 276 —
lac de Tuzla {Alléon), ainsi que sur tout le littoral de la mer noire
{de Nordmann). Partout ailleurs, sur notre continent, cet oiseau ne
se montre qu'aux passages, et s'il niche parfois dans le midi de
l'Allemagne ce n'est qu'exceptionnellement, comme cela peut se
présenter dans d'autres pays encore.
L'Echasse se montre accidentellement aux îles Britanniques {Har-
ting), dans le nord de la France, en Belgique, en Hollande, dans le
nord de l'Allemagne {Borggrevé), en Autriche [de Tschusi) et en Polo-
gne [Taczanowski). Elle est de passage plus ou moins régulier dans
le sud-ouest de la France, toujours par bandes ne dépassant pas vingt-
cinq sujets; elle niche en petit nombre dans les départements de
l'Aude et de l'Hérault, ainsi que dans celui des Pyrénées orientales
où elle est sédentaire sur quelques points [Lacroix). En Italie elle est
de passage régulier ou irrégulier suivant les localités [Salvadori), et
il en est de même en Grèce [Lmdermaycr) et en Asie Mineure
[Krûper), mais elle est sédentaire en Palestine [Tristram).
L'Afrique paraît être la véritable patrie de cet oiseau, car il y est
commun, surtout en hiver, près de toutes les eaux qui lui conviennent,
et niche en beaucoup d'endroits ; on le rencontre également en assez
grand nombre à Madagascar [Grandidier).
En Asie on observe l'Echasse européenne depuis le Caucase
[Radde) jusqu'en Chine (au sud du 40° 1. N.) où elle est cependant
rare [David), et depuis les lacs salés avoisinant l'irtisch au sud de la
Tartarie [Pallas) jusqu'à Ceylan [Legge) et l'Indo- Chine [Seebohm).
Les captures signalées aux Philippines, à Bornéo, à Timor et à la
Nouvelle-Zélande, appartiennent probablement à une espèce voisine
[Rimant opus leucocephalus y Gould).
Mœurs. — L'Echasse blanche n'est donc, dans la majeure partie
de l'Europe, qu'un oiseau de passage, et il est rare de la voir dans
nos contrées en dehors des mois de mai et d'août. Elle voyage aussi
bien pendant la nuit que durant le jour, mais son vol est très élevé
dès que le soleil s'élève au-dessus de l'horizon.
Cet oiseau n'est pas véritablement une espèce maritime, car il ne
visite le plus souvent les plages que pendant les migrations. Ce qu'il
recherche, ce sont les marais, les lacs, les mares et les étangs inté-
rieurs, et de préférence les eaux salées ou saumâtres. 11 est d'un
naturel paisible et sociable et on le reu contre souvent avec des Avo-
cettes ; il vit par troupes de six à dix sujets, mais dans les contrées
africaines il n'est pas rare de rencontrer, en hiver, des bandes com-
— 277 —
posées de deux à trois cents Echasses. Ce n'est qu'au moment de la
reproduction que les bandes se divisent par couples qui vont nicher
chacun de son côté.
Ses mœurs ressemblent beaucoup à celles des Chevaliers ; l'Echasse
fréquente à peu près les mêmes lieux, mais ses longues jambes lui
permettent de patauger dans des eaux plus profondes; elle vit du reste
plus dans l'eau que sur le sol où on ne la voit que rarement. A terre,
sa démarche est aisée : elle avance à grands pas sans se hâter et d'une
manière fort gracieuse. Elle nage en cas de nécessité mais pas avec
une grande aisance. Son vol est léger, élégant, rapide, mais peu élevé
en dehors des migrations ; l'oiseau bat rapidement des ailes, mais à
une certaine hauteur son vol devient plus lent, plus posé, et avant de
s'abattre, il décrit en planant une ligne ondulée. Pendant le vol il
étend toujours ses longues pattes en arrière, ce qui permet facilement
de le reconnaître. Il n'est pas rare d'entendre sa voix, surtout au
moment de s'envoler. Son cri peut se rendre par kit, kit, kit ou hit,
hit, hit, accompagné parfois d'une finale rogue ressemblant kpeurrre;
le cri d'alarme est tèhr ou trèh.
L'Echasse se nourrit de petits poissons, de têtards et frai de gre-
nouilles, de mollusques, de larves, d'insectes, d'araignés et de vers ;
de Heuglin dit avoir souvent trouvé l'estomac et le jabot de ces
oiseaux remplis de petits poissons, mais qu'avec ce régime leurs
intestins fourmillent de vers.
Reproduction. — Cet oiseau niche dans les marécages sur un petit
monticule entouré d'eau ou de boue. C'est là que la femelle creuse
une petite fosse qu'elle garnit de brins et autres substances végétales,
et c'est sur cette litière qu'elle dépose, dans la première quinzaine de
juin, quatre œufs piriformes, quelquefois seulement trois. Ces œufs
sont d'un gris jaunâtre ou roussâtre ou d'un vert olivâtre tirant plus ou
moins sur le jaune olive; ils sont marqués de taches d'un gris violacé
peu nombreuses, et d'autres superficielles, arrondies, d'un brun rou-
geâtre et noirâtres. Ils mesurent environ 41 millim. sur 33.
DEUXIÈME SOUS-ORDRE.
LES ÉCHASSIERS MACRODACTYLES.
Car. — Bec rarement plus long que la tôle ; narines s'ouvrant
généralem<mt dans de larges fosses nasales qui atteignent ou
dépassent lu milieu du bec ; ailes concaves, assez courtes, parfois
- 278 -
armées d'un éperon (espèces exotiques) ; doigts allongés, libres, le
médian ayant au moins la longueur du tarse ; pouce bien développé et
reposant plus ou moins sur le sol.
La plupart des oiseaux de ce groupe vivent solitaires et cachés au
milieu des herbes des prairies humides et des marécages.
FAMILLE DES RALLIDÉS.
Car. — Bec plus haut que large surtout à la base, comprimé ;
front souvent protégé par une plaque lisse plus ou moins aplatie ;
ailes assez courtes ; jambes peu dénudées ; tarses généralement
médiocres ; doigts antérieurs lisses ou bordés latéralement d'une
membrane de forme variable ; ongles relativement courts, recourbés.
Hah. — Cette famille a des représentants dans l^s parties chaudes
et tempérées des cinq parties du monde.
Mœurs. — Ce sont des oiseaux de taille moyenne ou petite, remar-
quables par l'élégance de leurs formes et par la vivacité de leurs
mouvements. Ils sont d'un naturel doux et paisible, aiment la solitude
et se tiennent généralement cachés pendant le jour.
Ils sont aussi bons coureurs que mauvais voiliers, aussi n'entre-
prennent-ils pas de longs voyages et sont plutôt erratiques que
migrateurs. Ils vivent près des eaux et dans les lieux humides, savent
plus ou moins nager et quelques-uns plongent parfaitement.
GENRE CXXV.
RALE. — RALLUS.
Rallus, Briss. Ornith. V, p. 151 (1760).
ScoLOPAx, Gmel. Reîse Russl. III, p. 90 (1774).
Aramus, Gray, Hand-list, III, p. 59 (1871).
Car. — Bec plus long que la tête, le plus souvent grêle, élevé à la base,
comprimé latéralement, légèrement infléchi ; narines latérales, allongées,
n'atteignant pas le milieu du bec et placées dans un large sillon occupant
les deux tiers de la mandibule ; ailes courtes, subaiguës ; queue courte, coni-
que, à rectrices souples ; jambes à peine dénudées près de l'articulation ;
tarses médiocres, robustes, scutellés ; doigts allongés, grêles, libres, le
médian aussi long que le tarse ; pouce relativement court, pourvu d'un ongle
très petit.
jjah. — Ce genre est représenté dans les cinq parties du monde.
— 279 —
223. — Le Râle d'eau.
RALLUS AQUATICUS, Briss.
(PI. 222)
Râllus AQUATICUS, Briss. Ornith.Y^ p. 151 (1760).
ScoLOPAX OBSCURA, Giiiel. Reise d. Russl. III, p. 90, pi. XVII (1774).
Rallus sericeus, Leach, Syst. cat. M. B. Brit. Mus., p. 33 (1816).
Rallus germanicus, Brehm, Isis, 1830, p. 992.
Rallus minor et fuscilateralis, Brehm, Yogelf. p. 328 (1855).
Aramus AQUATICUS, Gray, Eand-list, 111, p. 59 (1871).
Der Wasserralle, en allemand.
The Water-Rail, en anglais.
De Waterral, en flamand.
Var. Indiens.
Rallus indicus, Blyth, Journ. As. Soc. Betu/. XVIII, p. 820(1849).
Rallus aquaticus, Tem. et Schl. Fauna Jap. Aves, p. 122 (1850).
Rallus aquaticus, var. indicus, Bonap. Tabl. des Ecliass. p. 18 (1856).
Rallus aquaticus, var. japonicus (Schl.), Bonap. ibidem.
Taille: 0^,25 ; ailes 0,112 ; bec 0,037 ; tarses 0,038.
Description du mâle et de la femelle adultes. — Dessus de la tête, du cou
et du corps, scapulaires, couvertures des ailes et de la queue, noirs, mais
toutes les plumes largement bordées de brun olivâtre, sauf sur la tête où ces
bordures sont peu apparentes ; lorums noirâtres ; gorge blanchâtre ; raies
sourcilières, côtés de la tête et parties inférieures jusqu'aux jambes d'un
beau cendré bleuâtre ; bas-ventre roussâtre ; flancs noirs traversés de
bandes blanches ; sous-caudales blanches, en partie recouvertes par d'autres
qui sont noires rayées de blanc et terminées de roux ; rémiges et rectrices
d'un brun noirâtre. Bec rougeâtre nuancé de brun en dessus et à la pointe ;
iris rouge ; pattes d'un brun rougeâtre.
Jeune. — Il est plus petit et a le bec moins long. Sur les parties supé-
rieures la teinte brune olivâtre domine davantage; gorge blanche ; sourcils,
côtés de la tête et du cou, poitrine et abdomen d'un cendré olivâtre pâle ;
flancs bruns avec des bandes d'un blanc jaunâtre.
Poussin. — Duvet d'un noir uniforme.
Var. Indicus. — Diffère du type par une taille un pou plus forte (0,2s), et
par son bec et ses tarses plus robustes. ISou plumage est absolument lo
même que celui du Râle d'Europe.
— 280 -
Eab. — Le Râle d'eau habite toute l'Europe centrale et méridio-
nale et s'élève, dans le nord de
la Scandinavie, jusqu'au 66"
{Collett). Il est sédentaire en
Islande {Fonder) et probablement
aussi aux îles Foeroé, où, sui-
vant von Millier, il ne serait que
de passage. Il est plus ou moins
répandu dans l'Europe centrale
où il hiverne en petit nombre
jusque vers le 55" 1. N. En Belgique il est assez commun dans les
régions marécageuses, surtout à l'époque des passages. Il est séden-
taire dans tout le midi de notre continent,où il est en général commun,
surtout en hiver. Il en est de même dans le nord de rAfrique (Favier,
Loche) et en Palestine {Tristram) ; en hiver cet oiseau est abondant
dans la basse Egypte (Shelley), et il a été trouvé jusque dans les
prairies d'Adoua en Abyssinie {Lefchvrc).
A l'Est, on observe le Râle d'eau dans toute la Russie depuis les
parties méridionales des régions du sapin (60") et de l'Oural; il est
plus ou moins commun au Caucase, dans les régions Aralo-Gas-
pienne et du Tian-Chan {Bogdanow), au Turkestan (Severtzow), en
Afghanistan, en Perse {Blanford) et en Asie Mineure.
La var. Indiens remplace l'espèce type dans la Sibérie orientale,
depuis la région du Baical jusque dans la vallée de l'Amour au S. du
50° {Bogdanoiv), au Japon {Schlégel), en Chine {David), dans l'Indo-
Chine, dans les parties méridionales et orientales de l'Inde et à Cey-
lan {Jerdon, Seebohm, etc.).
Mœurs. — Le Râle est, pour nos régions, un oiseau migrateur qui
arrive en mars et avril pour émigrer en octobre et en novembre. Bien
qu'en partie sédentaire dans notre pays, il est cependant toujours
plus abondant aux époques des passages qu'en tout autre temps. Il
voyage pendant la nuit, isolément et par petites étapes. Les sujets qui
hivernent chez nous, cherchent un refuge pendant les grands froids
près des eaux qui ne gèlent pas, et on en rencontre alors parfois près
des sources et autres endroits où ils ne se montrent pas d'ordinaire. En
Islande, où l'oiseau est sédentaire, car il lui serait difficile de franchir
d'une seule traite l'espace qui sépare cette île du continent, il hiverne,
d'après Faber, près des sources chaudes du sud de l'île.
Cet oiseau vit surtout dans les marécages et près de toutes les eaux
- 281 -
bordées de buissons et de hautes herbes, dans lesquels il trouve un
abri assuré. On le rencontre même près des mares et des eaux qui
existent sur la lisière des bois ou à l'intérieur des forêts, pourvu
qu'elles soient couvertes de roseaux et de joncs, ou bordées de buis-
sons d'aunes et de saules entremêlés d'herbages touffus, car il évite
avec soin toute eau découverte. Lors des migrations, on l'observe
parfois loin des lieux aquatiques, mais toujours dans des endroits
buissonneux ou couverts de hautes herbes.
Le Râle est plus nocturne que diurne, et c'est au crépuscule, qu'il
est le plus actif ; jamais, de son plein gré, il ne se montrera pendant
la journée, car c'est le moment consacré au repos, souvent même au
sommeil; mais dès que le soleil est à son déclin, l'oiseau s'anime,
court par-ci par-là, vole d'une eau ou d'un endroit à l'autre, s'agite
sur les végétaux flottants ou traverse un étang à la nage.
En marchant, il tient le corps horizontal, le cou rentré, la queue
relevée; aperçoit-il quelque chose de suspect, il redresse le cou et
hoche la queue. Il court avec agilité, nage parfaitement même sans
y être forcé, mais vole avec difficulté, les ailes bien étendues et conti-
nuellement en mouvement, ce qui donne à son vol quelque ressem-
blance avec celui d'une chauve-souris. « Sa démarche, dit Naumann,
est légère et gracieuse ; il court avec rapidité, franchit tous les
obstacles sous lesquels il ne peut se glisser, passe sur la vase la plus
ténue, sur les feuilles flottantes comme sur les branches mortes
éparpillées sur le sol ; il se fait un passage au milieu des fourrés de
plantes aquatiques les plus entrelacées. Grâce à son corps mince, il
passe entre les herbes sans les toucher, et jamais on ne peut recon-
naître à l'agitation des plantes la direction de sa fuite. L'entrevoit-on
par hasard, on croit voir un rat plutôt qu'un oiseau, et il a disparu
aussi vite qu'on l'a aperçu. Arrive-t-on sans bruit à l'endroit où il
se tient, y demeure-t-on longtemps immobile, on peut se donner la
satisfaction d'observer de près ses allures silencieuses. Je sais des cas
où cet oiseau inoffensif a vaqué à toutes ses occupations, à quelques
pas d'un observateur immobile, soit qu'il ne le vit pas, soit qu'il le
prit pour quelque objet inanimé. Le Râle prend alors les posi-
tions les plus gracieuses, exécute les mouvements les plus
élégants. Lui fait-on soupçonner quelque danger, il s'allonge, hoche
vivement la queue et se prépare à disparaître au milieu des herbes. Il
nage facilement et avec gi"âce, s'aventure dans les endroits les plus
profonds des marais, mais évite toujours de franchir des surfaces
ToMK II.— 1890 3G
282
étendues et entièrement découvertes. Le surprend-on à ce moment,
il s'enfuit, moitié volant, moitié courant à la surface de l'eau, pour
gagner le fourré le plus proche ; est-il serré de trop près, il cherche
à se sauver en plongeant. » Son cri est sonore et s'entend de loin,
mais l'oiseau ne le fait entendre que dans la soirée et en volant ; on
peut le rendre par krrili ou lirrih\ son cri d'appel ressemble à wouit.
Le Râle n'est nullement sociable et ne vit avec sa femelle qu'à
l'époque de la reproduction. Il n'est pas intelligent non plus, mais
farouche par nature. Brehm père raconte qu'un de ses amis chassait
dans un fourré de joncs, lorsqu'il vit un Râle d'eau qui cherchait à
se sauver en courant; il tira, mais le manqua. L'oiseau s'envola et
alla s'abattre dans un champ voisin, où le chasseur put le prendre
sans peine avec la main. Quand il est surpris, cet oiseau perd la tête
et ne sait plus comment se sauver.
La nourriture du Râle se compose de larves et d^nsectes aquati-
ques ou terrestres et de petits mollusques avec ou sans coquille ; en
hiver, il vit presque uniquement de graines de graminées et surtout
de graines de roseaux et de joncs.
Reproduction. — Cet oiseau niche près des eaux douces ou dans un
marais et toujours dans un endroit bien caché. Le nid se trouve ordi-
nairement dans un fourré de joncs, de roseaux ou d'autres herbages,
où il est fort difficile de le découvrir, mais les parents trahissent géné-
ralement sa présence par leurs cris de détresse. Ce nid est assez profond
et lâchement construit avec des feuilles sèches de joncs et de roseaux
et diverses graminées. La ponte a lieu au commencement de juin, et
se compose de six à douze œufs ressemblant beaucoup à ceux du Crex
des prés, mais ils sont plus petits. Ces œufs ont une coquille solide et
lisse, d'un jaune roussâtre ou d'un blanc rosâtre sale, marquée de
taches grises profondes et d'autres, superficielles, d'un brun rougeâtre
ou couleur cannelle, mais peu nombreuses et rapprochées seulement à
l'extrémité du gros bout. Ils mesurent environ 35 millim. sur 24. La
durée de l'incubation est d'environ vingt jours. Les petits quittent leur
nid dès qu'ils sont séchés, et courent dans les herbes près de leur mère,
qui les rappelle quand ils s'éloignent trop ; ce n'est que quand ils savent
suffire à tous leurs besoins que la mère les abandonne à eux-mêmes.
«^s?.
GENRE CXXVI.
CBEjX. — CREX.
Rallus, Briss. Ornith. Y, p. 159 (1760).
Gallinula, Lath. Ind. orn. II, p. 766 (1790).
Crex, Bechst. Orn. Taschenb. p. 336(1803).
Ortygometra, Leach, Sijst. cat. M. B . Br. Mus. p. 34 (1816).
Car. — Bec plus court que la tête, presque conique, haut à la base, com-
primé latéralement, à arête arrondie; narines latérales, allongées, étroites,
atteignant le milieu du bec ; ailes de longueur moyenne, couvrant la majeure
partie de la queue, sub-aiguës ; queue courte, à rectrices flexibles ; jambes
peu dénudées, réticulées ; tarses assez longs, épais, scutellés en avant et en
arrière, réticulés latéralement aux extrémités; doigts médiocrement allongés,
le médian plus court que le tarse ; pouce bien développé et portant à terre
par son extrémité ; ongles courts;
Hab. — Ce genre, dont on ne connaît ([u'ime seule espèce, est
propre à l'ancien monde.
224. — Le Crex des prés ou Râle de genêt.
CREX PRATENSIS, Bechst.
(PL 223).
Rallus genistarum sive ortygometra, Briss. Ornith. V. p. 159 (1760).
Rallus crex, Lin. Syst. nat. I, p. 261 (1766).
Gallinula crex, Tunst. Orn. Brit. p. 3 (1771).
Crex pratensis, Bechst. Orn. Taschenb. Deutsehl. p. 337(1803).
Ortygometra crex, Leach, Syst. cat. M. B. Br. Mus. p. 34 (1816).
Crex herbarum, alticeps, Brehm, /«s, 1830, p. 992.
Die Wiesenralle, en allemand.
The Corn-crake or Land-Rail, en anglais.
De Kwartelkoning, en flamand.
Taille du mâle 0,20; ailes 0,143; bec 0,022 ; tarses 0,041 ; femelle
0,17; ailes 0,127.
Description du mâle adulte en été. — Parties supérieures d'un brun olivâtre
clair avec le centre des plumes d'un brun noirâtre ; large raie sourcilière,
joue.s, devant du cou et poitrine d'un gris bleuâtre ; une bande fauve du bec
à l'oreille ; gorge et milieu de l'abdomen blancs ; flancs et sou>-c:uulales bar-
rés de brun, de roussâtre et de blanchâtre; couvertures des ailes d'un beau
loux de rouille : rémiges brunes, la barbe externe tirant sur le roux, sauf celle
de la ])r('mière (jui est blancliAtre ; queue d'un brun noirâtre avec les rectrices
— 284 —
bordées de cendré olivâtre. Bec et pattes d'un brun pâle ; iris noisette.
Femelle. — Kessemble au mâle mais elle est plus petite ; le gris de la poi-
trine est plus pâle et moins pur ; le roux des ailes moins vif et les grandes
couvertures portent quelques petites taches blanchâtres.
En automne. — Le gris des parties inférieures est remplacé par du cendré
roiissâtre pâle, mais les raies sourcilières grises persistent.
Jeune. — Ressemble au plumage d'automne, mais les raies sourcilières sont
d'un cendré roussâtre pâle, la teinte générale est plus rousse, les bordures des
plumes sont plus larges et cachent davantage la partie centrale noire.
Poussin. — D'un noir fuligineux, plus pâle en dessous ; bec noir à extré-
mité blanche ; pattes brunes.
Hab. — Le Crex des prés, plus connu sous les noms de Râle de
genêt et de roi des Cailles,
habite, en été^^toute l'Europe et
les îles Britanniques, y compris
les îles Hébrides, Orkney, Shet-
land, St-Kilda et Channels [See-
bohm); il visite également les
îles Foeroé. En Scandinavie il
niche jusqu'au de là du cercle
polaire {Collett), mais il a été
observé, en 1868, près de Tromsœ (69"40') par le professeur Holin-
gren. En Russie il dépasse rarement le 60° {^abanàeff) ; on l'observe
en été dans les parties méridionales des régions du sapin et de l'Ou-
ral, la région du Tchernozem, la Crimée, le Caucase, les vallées de
quelques fleuves de la région Aralo-Caspienne, la Songarie russe (la
vallée du fleuve Irtysch) et le Tian-Chan [Bogdanow): il est commun
dans les monts Altaï mais ne paraît pas dépasser à l'Est le Jénissei,
où il ne s'élève pas au delà du 59° 1/2; d'après Pallas, il atteindrait
cependant la vallée de la Lena. Il niche en Turkestan (Severtzow), est
sédentaire en Asie Mineure {Krûper) et en Palestine {Ty^istram),
hiverne en Perse (St-John), en Afganistan et se montre jusque dans le
nord-ouest de l'Inde {Jerdon).
Cet oiseau est assez répandu en Belgique comme dans le reste de
l'Europe centrale et méridionale; mais en Espagne, dans le sud de
l'Italie, en Sicile et en Grèce, on ne le voit qu'aux passages. 11 visite
accidentellement les îles Acores, Canaries et Madeire [Harcourt, etc.).
Il est de passage au Maroc {Favier), mais quelques couples nichent
dans les plaines humides de l'Algérie {Loche). Le Crex arrive en
— 285 —
Egypte et en Arabie à la fin d'août et au commencement de septem-
bre; pendant le dernier mois il fut observé près de Khartoum [de
Heuglin) et en Abyssinie [Lcfèbvré) ; il hiverne également dans
l'Afrique orientale jusqu'au cap de Bonne-Espérance [Layard] et le
Natal {A)jï^es). Pendant les migrations, les vents contraires semblent
chasser parfois quelques sujets vers les côtes américaines, où on en
a pris au Groenland [Schlégel), sur les côtes occidentales des Etats-
Unis [Daird) et aux îles Bermudes {vo7î Martens) ; un individu paraît
même avoir été tué près de Nelson en Nouvelle-Zélande {Dresser).
Mœurs. — C'est un oiseau migrateur qui arrive dans nos contrées
en avril ou mai, suivant l'état de la saison, et émigré en septembre;
mais on en voit encore passer en octobre, si l'automne est beau et
chaud. Pour la Belgique, c'est surtout un oiseau de passage, plus ou
moins abondant suivant les années, mais quelques couples restent
nicher dans le pays. Il voyage isolément pendant la nuit, traverse
l'espace à une grande hauteur, mais accomplit une partie de sa route
en courant. Les anciens croyaient que le Crex servait de guide aux
Cailles, qui arrivent vers la même époque, d'où son nom vulgaire de
Roi des cailles; rien cependant ne le rapproche de ces oiseaux, dont
il ne recherche pas même la société.
Le Crex vil dans les prés et les champs, mais il lui faut un terrain
qui ne soit ni trop sec, ni trop humide. Il séjourne dans les prairies
jusqu'au moment de la fenaison et se rend ensuite dans les champs
de céréales, de trèfle ou de luzerne pour y demeurer jusqu'à la
moisson. Plus tard, quand les prés et les champs sont fauchés, il
cherche un refuge dans les buissons et les herbages. Dans le même
arrondissement et sans raison appréciable, il est tantôt rare, tantôt
commun.
Cet oiseau se distingue des autres Rallidés par ses mœurs terrestres,
qui le tiennent éloigné des eaux et des lieux humides. Il est plus
nocturne que diurne : c'est au crépuscule et à l'aurore, ainsi que
pendant les nuits claires et chaudes, qu'il se montre dans toute son
activité, mais il se repose toujours vers le milieu de la nuit. On ne
le voit que rarement durant le jour, car il se tient alors caché dans
les herbes, et le milieu de la journée est même consacré au sommeil.
C'est pendant les belles soirées de juin que l'on peut entendre le mâle,
car c'est alors l'époque de la reproduction et il faut plaire à sa
compagne; son chant d'amour n'est C(^pendant guère agréable, il se
résume à quelques cris rauques r(iSSoml)lant à arp-srhnarp ou kncrp-
— 286 —
knerrp, rerp-i^erp qu'on peut entendre presque sans interruption
pendant des nuits entières. Les sexes s'appellent par un léger kju,
kjo, kjé, mais après la ponte ils deviennent muets ; cependant, quand
ils sont supris, ils jettent un cri d'angoisse ressemblant à tzîh.
Le Râle de genêt, comme on le désigne souvent, a des formes
élégantes et des mouvements fort gracieux ; il court avec une rapidité
étonnante, la tête baissée, le cou rentré, le corps horizontal, et se
faufile entre les herbes avec une agilité extrême et presque sans les
agiter; aussi peut-on entendre le cri de cet oiseau tantôt dans un
endroit, tantôt dans un autre, sans rien remarquer de sa course.
Il vole assez rapidement en rasant le sol en ligne droite, mais ne va
jamais loin ; il sait qu'il est plus en sûreté au milieu des herbes que
dans l'air, et ce n'est qu'à l'approche d'un chien qu'il se décide à
s'envoler; il faut cependant un bon chien d'arrêt pour le faire lever,
et encore déjoue-t-il souvent les poursuites du chasseur. Son vol est
lourd et fatigant ; pendant les migrations il s'élève haut dans les airs
et profite le plus possible d'un vent favorable quand il a une mer à
traverser; arrivé à terre, il continue sa route autant en courant qu'en
volant.
Le Crex n'est nullement sociable, et ne recherche pas plus la société
des siens que celle d'autres espèces; les jeunes quittent même leur
mère et se dispersent dans les champs avant de savoir voler. C'est
un pillard de nids des plus dangereux : il tue les petits passereaux qui
nichent dans les champs pour leur manger la cervelle ; les mulots et
les campagnols ne sont pas davantage à l'abri de ses atteintes, car il
leur a bientôt troué le crâne à coups de bec.
Cet oiseau se nourrit d'ordinaire d'insectes, de larves, de chrysa-
lides, d'araignées, de vers, de petits mollusques à coquille, plus
rarement de graines et presque uniquement de graines de graminées.
Il avale également du gravier et de petites pierres pour faciliter sa
digestion. Il boit beaucoup et se baigne volontiers.
Reproduction. — Le Crex des prés ne commence la construction
de son nid qu'à la fin de mai ou au commencement de juin. C'est au
milieu des herbes d'une prairie ou dans un champ de trèfle ou de
luzerne, que la femelle creuse une petite fosse qu'elle garnit grossiè-
rement de brins d'herbes, de feuilles, de mousse et de radicelles.
La ponte est ordinairement de sept à neuf œufs, mais ce nombre peut
s'élever jusqu'à douze ; si la première couvée a été enlevée, la seconde
ne sera plus que de cinq œufs. Ceux-ci ont une coquille finement
— 287 —
grenue, lisse, brillante, de couleur grisâtre ou rosâtre, et marquée de
taches et de points violacés et d'un jaune rougeâtre ou brun; ils
mesurent environ 38 millim. sur 27.
La femelle couve pendant trois semaines et avec une telle ardeur
qu'on peut l'enlever de son nid avec la main sans qu'elle songe à fuir.
Les poussins quittent leur nid le lendemain de l'éclosion, et suivent
aussitôt leur mère pour apprendre à trouver leur nourriture; ils
répondent à son appel par des piaillements qui ressemblent aux cris
des jeunes moineaux.
OENRE CXXVII
MARQUETTE. — POEZANA.
Rallus, Briss. Or7i. V, p. 155 (17GU).
Gallinoila, Lath. Ind. orn. II, p. 772 (1790).
PoRZANA, Vieill. Analyse, p. 61 (1816).
Ortygometra, Zahornia, Leach, Syst. cal. M. B. Dr. Mus. p. 34 (1816).
OcTOGOMETRA, Zaporina, Forst, Syn- Cal. Br. B. pp. 27, 59 (1817).
Crex, Licht. Verz. Doubl. p. 80 (1823).
PHAL.A.RIDION, Kp. NuluH. Syst., p. 173 (1829).
Phalaridium, Meves, Joum. f. Orn. 1875 p. 433.
Car. — Bec plus court que la tête, atténué à la pointe, comprimé latérale-
ment ; narines latérales, oblongues, étroites, atteignant le milieu du bec ;
ailes médiocres, sub-aiguës ; queue courte, conique, à rectrices souples et
assez étroites ; tarses médiocres, robustes, scutellés ; doigts longs, grêles, le
médian plus long que le tarse ; pouce bien développé et portant à terre.
ILib. — Ce genre a des représentants dans l'ancien monde et en
Océanie.
225. — Marouette tachetée
PORZANA MARUETTA, Bonup. ex Leach.
(PI. 204)
Rallus aquaticus minor, Briss. Ornillt . v. p. 155 (1760).
Rallu.s PORZANA, Liii. Syi<t. nat. I, p. 202(1766).
Rallis KULicrLA, Scop. Ann. I. Hist. nat. p. 108 (1769).
Gallinl'LA ocHRA,Geriiii, Ont. virih. Di;i. V, p. 2, pi. 484 (1776).
Gallinula PORZANA, Latli. liai. Orti 11, p. 772(1790).
Oktygometka MARUETTA, Leucli, .S'//s7. L'ut. B. Br. Mus. p. 34(I81G).
()( loiidMKTKA MARUETTA, VoTst , :Sy>iopl. Cal. Uni. B. [). 27 (1HI7),
CuEX PORZANA, Liclit, Vcrz. DouOletlt'/i, \). 80 (1S23).
OuTYGo.METKA PoRZANA, Stcpli. ^/taio's (Jeu. Zool. XII, 1, p. 233 (1S24).
Gallinula maculata et I'unctata, G. Brehm, [sis 1830 p. 992.
- 288 —
Zapornia porzana, Gould, B. of Eur. pi. 343 Cl 837),
PoRZANA MARUETTA, Bonap. Cat. metod. Ucc. Eur., p. 64 (1842).
Ortygometra arabica, Licht. Nomencl. avimn, p. 96 (1854).
Gallinula leucothorax et gracilis, L. Brehra. Naum. 1855 p. 293.
Porzana maculata, G. F. Dub. PI. col. Ois. Belg. III, p. 211 (1860).
Das gesprenkelte Sumpfhuhn, en allemand.
The spotted Crake, en anglais.
Het Porceleinhoentje, en flamand.
Taille : 0^18 ; ailes 0,117 ; bec, 0,021 ; tarses, 0,033.
Description des deux sexes adultes. — Dessus de la tête, nuque, manteau
et scapulaires d'un brun olivâtre avec le centre des plumes noirâtre, des
mouclietures blanches sur la nuque et des stries de même couleur longitu-
dinales sur le manteau et transversales sur les scapulaires ; bas du dos noir,
chaque plume terminée de brun olivâtre et tachetée de blanc sur les côtés ;
lorums noirs ; front, larges raies sourcilières, gorge et poitrine d'un gris
foncé ; région paro tique, côtés du cou et de la poitrine lavés de brun olivâ-
tre et les côtés du cou et de la poitrine mouchetés en outre de blanc ; couver-
tures des ailes d'un brun olivâtre avec des raies et des taches blanches
bordées de noir ; rémiges et rectrices brunes ; flancs barrés de brun
olivâtre, de blanc et de noir ; sous-caudales et milieu du ventre blancs. Bec
d'un jaune verdâtre avec la base rouge ; pattes verdâtres ; iris brun.
La femelle ressemble au mâle, mais le gris de la tête et de la poitrine est
moins pur et moins étendu. En automne la poitrine est fortement lavée de
brun olivâtre da,ns les deux sexes.
Jeune. — Aspect général des adultes en automne ; gorge et milieu du ven-
tre d'un blanc varié de cendré olivâtre ; raies sourcilières et poitrine d'un
brun olivâtre et tachetées de blanc ; raies blanches des flancs plus étroites ;
sous-caudales lavées de roussâtre ; bec et pattes d'un brun verdâtre.
Poussin. — Duvet d'un noir uniforme ; bec et pattes d'un blanc rougeâtre,
les dernières un peu plus grisâtres.
Hab: — La Marouette tachetée est généralement répandue dans
toute l'Europe ; en été on l'ob-
serve en Scandinavie jusqu'au
65", mais dans la Russie occi-
dentale elle ne dépasse guère le
64% dans l'Oural le 58° et dans
la Sibérie occidentale, le 55°.
Aux îles Britanniques elle est
plus ou moins répandue partout,
hiverne même dans quelques régions et se montre parfois aux îles
- 289 -
Orkney et Shetland [Seehohm). Elle est assez commune et niche dans
certaines localités de la Belgique, surtout dans les polders de la
Flandre.
Cet oiseau est abondant et sédentaire dans les pays qui entourent
la Méditerranée, y compris le Maroc [Dymke] et l'Algérie {Loche). En
hiver, on l'observe en Egypte, en Nubie, sur les côtes de la mer
Rouge, dans la région du Nil Bleu et du Nil Blanc {de Heuglin), en
Abyssinie {Ruppell) et aux îles Canaries {Berthelot).
A l'Est on rencontre cette espèce dans la région Aralo-Caspienne,
dans les vallées de l'Irtysch et de TOuroungou, dans la Songarie,
dans la région du Tian-Chan [Bogdanoio), en Turkestan {Severtzow),
en Perse {Blan/o?'d), en Asie Mineure {Strickland), et son habitat
s'étend vers l'Est jusque dans l'Inde [Jerdon) et la Birmanie
[Seebohm).
Mœurs. — Cet oiseau nous revient à la fin de mars ou en avril
et émigré en septembre. Il voyage isolément pendant la nuit et tra-
verse l'espace à une grande hauteur, car il lui est plus facile de voler
dans les hautes régions que près du sol. Mais ces voyages lui occa-
sionnent toujours beaucoup de fatigue, aussi est-il souvent obligé de
prendre terre pour se reposer ; à ce moment, il est parfois tellement
abattu qu'il se laisse prendre avec la main.
La Marouette tachetée vit dans les prairies humides, dans les
marais, près des étangs et des fossés inondés, et elle se dissimule
dans les herbes, les joncs et les carex ; jamais on ne la rencontre près
de grandes eaux découvertes, car il lui faut toujours des herbages
pour se cacher. Elle n'aime cependant pas les endroits couverts de
roseaux et de massettes, et ne s'y rend que momentanément, alors
qu'il n'y a rien de plus convenable aux environs. Pendant le jour elle
se tient tranquille et silencieuse ; au crépuscule elle se met en mou-
vement, s'anime, vole d'un endroit à l'autre et continue ses ébats
jus({u'au lever du soleil. C'est surtout vers le milieu du jour qu'elle se
livre au sommeil.
Cette Marouette ressemble beaucoup par ses allures au Râle de
genêt; elle marche à grands pas en tenant le corps horizontal, le dos
voûté, la queue pendante et les jambes cachées dans les plumes, ce
qui lui donne l'apparence d'avoir les pattes plus courtes qu'elles ne le
sont réellement. Mais quand elle S(^ croit en sûreté, elle allonge le
cou et les jambes et accompagne sa inarche d»» niouvciiioiiis tle tète;
à la course elle est d'une agilité étoimauie, et son pas est alors (\\n\o.
Tome IL— 1890 W?
— 290 -
longueur démesurée. Sa légèreté lui permet de se glisser entre les
herbes presque sans les toucher et de courir sur les feuilles de nénu-
phars qui flottent à la surface des eaux. Elle nage avec aisance et
sans contrainte et paraît même se plaire à cet exercice ; par contre,
son vol est lourd, difficile et de courte durée, aussi l'oiseau ne s'en-
vole-t-il que rarement sans nécessité. C'est dans les herbages que la
Marouette vit et se cache, et ses ennemis ne parviennent que diffici-
lement à la dépister ; elle ne s'envole que quand elle est surprise ou
serrée de près par un chien ou par tout autre carnassier. Elle mène
une vie solitaire, et on ne voit le mâle avec sa femelle qu'à l'époque
des amours. Pendant le jour on ne l'entend jamais, mais bien dans la
soirée et pendant la nuit ; son cri ressemble à quit ou whit.
La nourriture de cet oiseau consiste en insectes, larves, petits
mollusques avec ou sans coquille, vers, matières végétales vertes et
graines ; il avale en même temps du sable et du gravier. C'est surtout
près de l'eau ou dans leau qu'il cherche sa nourriture.
Reproduction. — La Marouette tachetée niche dans les marais,
dans les prairies humides, dans les fossés inondés ou autres endroits
semblables. Le nid est placé sur un tas de plantes renversées et piéti-
nées et toujours sur un sol humide ou marécageux ; il est volumineux,
assez profond, formé de feuilles sèches de carex, de joncs et de roseaux
légèrement enchevêtrées et retenues par des brindilles aux herbes
environnantes; l'intérieur est garni de fines graminées et de duvet
végétal. Ce nid est difficile à trouver, car la femelle a soin d'inchner
les herbes et les carex qui l'entourent, de façon à lui former une
sorte de toit de verdure qui le cache aux yeux des oiseaux de proie ;
elle peut ainsi couver sans être inquiétée, car elle ne trahit jamais sa
présence par des cris.
La ponte a lieu à la fin de mai ou au commencement de juin, et se
compose de neuf à douze œufs. Ceux-ci sont brillants, d'un roux
jaunâtre pâle et parsemés de taches arrondies et de points d'un gris
bleuâtre et d'un brun rougeâtre ; ils mesurent environ 34 millim.
sur 23.
La femelle couve pendant trois semaines avec une telle ardeur,
qu'elle ne songe à fuir que quand l'ennemi est près d'elle. Ce n'est que
quand la première couvée a été détruite, qu'elle fait une seconde
ponte, mais celle-ci ne se compose alors que de six à huit œufs. Les
poussins se cachent avec adresse et quittent leur mère avant de savoir
bien voler.
— 291 —
226. — La Marouette poussin (1).
PORZANA PARVA, Dubois ex Scop.
(PI. 225).
Rallus parvus, Scop. Ann. I. hist. nat. p. 108 (1769).
Rallus pusillus, Cim. (nec Pall.) Syst. nat. I, p. 719 (1788).
Rallus mixtus, Lapeyr. Mam. et ois. de la Haute-Garonne., p. 38 (1799).
Gallinula pusillus, Bechst. Ornith. Taschenb. p. 340 (1803).
Gallinula minuta. Mont, (nec Pall.), Orn. Dict. mppl. G. 2, fol. 9 (1813).
Gallinula foljambii, Mont, ibidem fol. B b. (1813).
Zapornia minuta, Leach, S^ii. C«i. mam. Brit. Mus. p. 34 (1816).
Zapornia minuta, Forst, Synop. Cat. Br. i?. p. 59 (1817).
Rallus peyrousei, Vieill. N. Dict. dliist. nat. XXVlll, p. 562(1819).
Crex pusilla, Licht., Yerz. Doubletten p. 80 (1823).
Ortygometra olivacea, Leach, Sliarcs Gen. Zool. XII, 1, p. 226 (1824).
Phalaridion pusillum, Kaup, Nat. Syst. d. Europ. Thierio. p. 173 (1829).
Ortygometra pusilla, Bonap. Comp. List. p. 53 (1838).
Ortygometra minuta, Keys. et BL, Wirbelth. Eur. p. LXVIII (1840).
Porzana minuta, Bonap. Ucc. Eur. p. 65 (1842).
Gallinula parva et mixutissima, Brehra, Naumannia, 1855, p. 293.
Porzana pusilla, C. Dubois, PI. col. Ois. Belg. 111, p. 212(1860).
PoRZ.\NA PARVA, A. Dubois, Consp. aviurn Ettrop. p. 26 (1871).
Crex parva, Seeb. Brit. Birds, II, p. 547 (1884).
Das Kleine Sumpfhuhn, en allemand.
The Little Crake, en anglais.
Het Kleinste waterhoen, en flamand.
Taillo : 0■^17 ; ailes 0,102; tarses 0,031.
Description du mâle en été. — Parties supérieures d'un brun olivâtre avec
des taches noires variées de quelques petites taches blanches sur le dos ; cou-
vertures des ailes d'un cendré olivâtre sans taches ; rémiges et rectrices
(i) Beaucoup d'auteurs désignent cette espèce sous le nom de /'. minuta (Pall.) ou de P. pusilla
(Pall.), mais ces dénominations n'appartiennent pas à la Marouette poussin.
Pallas a décrit en 1776 un oiseau provenant de Daourie sous le nom de Rallus pusillus, et en
181 1 il décrivit le même oiseau sous le nom de Rallus minutus. C'est la Marouette api>elée par
Vieillot llallus Baillonii et par Naumann Crcxpy^nuca. Le P paii'a n'existe pas en Daourie.
La dénomination de Porzana p'isilla appartient donc de droit à la Marouette de Bâillon, et
non à l'espèce qui nous occupe. Bogdanow fait remarquer que dans sa Zoo^n-ap'iia (ÏI, p. 155),
Pallas cite sa première description, en changeant le nom de R. pusillus en /?. minut'is et
impr>sece dernier nom, en ajoutant aux caractères spécifiques « venter testaccus .•» « Il est probable,
ajoute Bogdanow, c|ue l'exemplaire recueilli en Daourie adisjiaru, et que Pallas a contrôlé sa pre-
mière description sur un sujet à ventre trstaceus mais ap]iartenant ;\ une autre esjjèce; de manière
(|ue dans sa Zooi^rapliln, il a com]X)sé la descriiition du R. minuUis d'après deux oiseaux appar-
leiianl à dillcrentes espèces. » — C'est jwur éviter toute confusion, que j'ai rendu ;\ la Marouette
]xiussin le nom de /«ry(Z donné |wr .Sc(ii><)li (Voy. mon Conff>. a-'iinn «v/r. p. 26., 1S71 ). M.M.
Dresser (1878), Bogdanow et Seel)ohtii (1X84) ont suivi ma manière de voir.
— 292 —
brunes ; sus-caudales d'un roux olivâtre ; front, sourcils, côtés de la tête,
devant et côtés du cou, poitrine et abdomen, d'un gris bleuâtre ; les plumes
du bas-ventre plus foncées et terminées de blanc ; sous-caudales noires
barrées de blanc. Bec d'un beau vert avec la base rouge ; iris rouge carmin ;
pattes vertes.
Femelle. — Parties supérieures comme chez le mâle ; front, sourcils et joues
d'un gris bleuâtre ; gorge et une partie du devant du cou blanchâtres ; bas du
cou, poitrine et abdomen d'un blanc roussâtre, plus roux sur les flancs; bas-
ventre et sous-caudales noirâtres, toutes les plumes tachetées de blanc, ce qui
forme à ces parties des barres irrégulières.
Le plumage d'hiver, dans les deux sexes, diffère peu de celui de la femelle
adulte en été.
Jeune âge. — Ressemble également à la femelle, mais le front, les sourcils
et les joues sont, comme les parties inférieures, d'un blanc roussâtre ; côtés de
la poitrine barrés de brun.
Poussin. — Revêtu d'un duvet noir à reflets verdâtfés sur la tête et sur
une partie du cou.
Hab. — Cet oiseau ne dépasse pas, au Nord, le sud de la Suède et
sp»^j'^^'?^H^^^^?f:f^^f^^^ff^l n'a pas été observé en Norwège:
^|: i i| I i ! iJ i âr^P4i^Jj| il a niché accidentellement, en
i^ ; ' '• ' ^y^^p juin 1862, dans la partie méri-
M kj-rK'^T' . ' •■ ' 'fwrtlH dionale de Kolmar Lâne, en
mpM-!-'^: .^^'^'i^^^^q Suède {Westerlund) ; il ne se
t-F+ -M^trrtH^tS'rr;. montre aussi qu accidentelle-
\l-^i-~.::-^Yài^u-:{:\^^-^^^m±\xt,:^^^^-^:.. mont aux lies Britanniques
L-;! !-ji i.--.--|fc+:^-^l-t|H-|--m^^ (Seebohm). Il est moins rare en
u_^^ ^ Danemark; en Allemagne il est
plus répandu dans les parties méridionales que dans le nord [Nau-
'inann) ; en Russie on l'observe dans les parties méridionales des
régions du Tchernozem et de l'Oural, en Crimée, au Caucase, dans
les régions Aralo-Caspienne et du Tian-Chan {Bogdanow). Il est plus
ou moins répandu, en été, dans l'Europe centrale et méridionale ;
mais il est rare et de passage irrégulier en Belgique. Il est séden-
taire en Algérie (Loc/ze), mais ne se montre jamais dans le nord-est
de l'Afrique.
En Asie, on observe cette Marouette en Turkestan {Severtzow), en
Afghanistan [Seebohm] jusque dans la partie nord-ouest de l'Inde
{Hume), mais elle n'a été observée ni en Asie Mineure, ni en Pales-
tine, ni en Perse. Il est probable que cette espèce hiverne dans les
parties les plus méridionales de l'Europe.
— 293 —
Mœurs. — La Marouette poussin ne revient dans sa patrie que
dans le courant de mai et émigré en septembre. Elle vit dans les
marécages, les prairies humides, les fossés inondés, près des lacs et
des étangs et se montre même, pendant ses voyages, près des fleuves
et des rivières. Crespon dit que l'on prend chaque année quelques
individus dans les jardins et les basses-cours des environs de la ville
de Nîmes. Cet oiseau se plaît surtout dans les herbages croissant dans
un sol boueux ; il recherche du reste toutes les eaux fangeuses gar-
nies de joncs, de roseaux, de massettes et autres plantes aquatiques,
ou bordés de buissons de saules et d'aunes. Il se tient si bien caché
qu'il est fort difficile de l'apercevoir, et c'est peut-être la raison pour
laquelle il est si rare ; il court avec une telle vitesse dans les herbages
qu'il est presque impossible de le faire lever, si l'on n'a pas un chien
bien dressé à ce genre de chasse; il fatigue tellement l'ennemi qui le
poursuit, que dans le midi de la France on l'a surnommé le crève-
chien. Poursuivi à outrance, il se jette à l'eau, luit à la nage et plonge
aussitôt que le chien est sur le point de l'atteindre.
Ses mœurs et ses habitudes sont analogues à celles de l'espèce pré-
cédente, mais la Marouette poussin ne rentre pas les jambes dans son
plumage. Dès qu'elle entend un bruit suspect, elle allonge le cou,
relève l'extrémité des ailes, étale et hoche la queue et ne tarde pas à
disparaître dans un fourré. Elle nage avec autant de facilité que d'élé-
gance; là où l'eau est couverte de plantes aquatiques, elle court avec une
légèreté admirable, la queue relevée et étalée, et en accompagnant
presque chaque pas d'un mouvement de la tête; aucun obstacle ne
l'arrête dans sa course, car elle trouve toujours un moyen pour le
franchir.
Son vol est très mouvementé et de peu de durée, mais l'oiseau ne se
sert de ses ailes qu'en cas de nécessité. On n'entend son cri que dans
la soirée et pendant la nuit et celui-ci ressemble à un kihik sonore
et sifflant ; parfois aussi, c'est une série de kik, kih, kik.... que l'oi-
seau fait entendre. Sa nourriture consiste en insectes, larves, mollus-
ques, vers, graines et autres substances végétales.
Reproduction. — Cet oiseau niche à la fln de mai ou en juin, dans
une toufle de roseaux, de joncs ou autres plantes aquatiques émer-
geant de l'eau ou de la vase ; parfois aussi dans les carex d'un endroit
humide. Le nid est assez vaste et grossièrement construit à l'aide de
feuilles de carex et de joncs entrelacées; l'intérieur est garni de gra-
minées sèches. La feuKdle a soin de pencher sur son nid les lierbes ([ui
— 294 —
Tentourent, afin de le rendre invisible de toute part. La ponte est de
huit à dix œufs, d'un brun jaunâtre terne, avec des taches plus foncées
formant plutôt des nuages que des macules ; ils mesurent environ 30
millim. sur 21. La durée de l'incubation est de trois semaines.
227. — La Marouette Bâillon. (1)
PORZANA FUSILLA, Bogd. ex Pall.
(PI. 226.)
Rallus pusillus, Pall. (nec auct. plur.) Reise Russ. Reichs^ III, app. p. 700 (1776).
Rallus minutus, Pall. (ex parte) Zoogr. Rosso-As. 11, p. 273 (1811).
Rallus Bailloni, Vieill. N. dict. d'hist. nat. XXI II, p. 548 (1819).
Gallinula Bailloni et stellaris, Tem. Man. d'Or. 11, pp. 692, 693 (1820-40).
Crex Bailloni, Licht. Verz. Douhletten, p. 80 (1823).
Ortygometra Bailloni, Steph. Shaw's Gen. Zool. XII, p. 228 (1824).
Gallinula pygm.ï;a, Naum. in Brehm, Lehrh. Nat. eiir. Yog. ICI). ^41 (1824).
Phalaridion pygm.eum, Kaup, Nat. Syst. p. 173 (1829).
Crex Foljambei, Eyt, (nec Mont.), Cat. Brit. B. p. 46 (1836).
Crex pygm^a, Naum. Yog. Betitschl. IX, p. 567 (1838).
Ortygometra pygm^a, Keys. et Blas. Wirbelt. Eicr. p. LXIII (1840).
PoRZANA PYGM^A, Bonap. Cat. met. Ucc. Eur. p. 64 (1842).
Zaporina pygm^a, Bonap. Cat. Parz. p. 15 (1856).
PoRZANA Bailloni, C. Dubois, PL col. ois. Belg. 111. p. 213 (1860).
Ortygometra minuta, Radde, Reiseim Sud. v. Ost-Sib. II, p. 311 (1863).
? Phalaridium pusillum, Meves, Journ. f. Orn. 1875, p. 433.
Porzana pusilla, Bogd. Consp. Avium Imp, Ross. p. 54 (1884).
Das Zwerg-Sumpfhuhn, en allemand.
The Baillon's Crake, en anglais.
Het Bâillon Waterhoen, en flamand.
Taille :0,U\ ; ailes 0,088; tarses 0,028.
Description du mâle adulte au printemps. — Parties supérieures d'un brun
olivâtre, avec le centre des plumes de la tête, du dos et des scapulaires
noir; manteau, scapulaires et quelques-unes des grandes couvertures forte-
ment maculés de blanc ; front, larges raies sourcilières, lores, joues, côtés et
devant du cou et poitrine d'un gris bleuâtre, plus pâle à la gorge ; jambes,
flancs, abdomen et sous-caudales noirs barrés de blanc ; rémiges et queue
brunes, mais le centre des rectrices noir. Bec vert, plus sombre à son extré-
mité ; iris rouge carmin ; pattes roussâtres.
Femelle. — Elle diffère peu du mâle ; lores et région des oreilles d'un brun
roussâtre ; gorge et devant du cou blanchâtre ; le gris des parties inférieures
plus pâle ; sa taille est aus?i un peu plus petite.
Jeune. — Parties supérieures comme chez les adultes, mais plus pâles et
(i) Voir la note à la page agi.
— 295 —
moins marquées de blanc; pas de gris à la tête, cette teinte étant remplacée
par du brun olivâtre; gorge blanche; poitrine d'un blanc roussâtre varié de
cendré olivâtre ; le reste comme chez l'adulte.
Poussin. — Duvet épais, soyeux, noir, avec des reflets verts et violets.
Bec blauc tirant sur le jaune; pieds noirs, à Vàge de deux jours [Marchand.)
Remarque. — Cette espèce ressemble beaucoup à la Marouette
poussin, dont il est cependant facile de la distinguer aux caractères
suivants : cette dernière est d'une taille un peu plus forte et n'a pas
de taches blanches sur les scapulaires ; la Marouette Bâillon a les
flancs, les jambes, le ventre et les sous-caudales très distinctement
barrés de noir et de blanc, tandis que chez l'espèce précédente, les
jambes et les flancs sont unicolores comme la poitrine, le bas-ventre
d'un gris sombre avec les plumes légèrement terminées de blanc,
mais ne formant pas des barres distinctes, et les sous-caudales noires
barrées de blanc ou de roussâtre.
Hab. — Cette Marouette habite l'Europe centrale et méridionale,
pp^^^^™^^^^P^^^|j mais son aire géographique ne
^"Nfesia '' P^^^^^ P^s dépasser au Nord les
4 U ' côtes allemandes de la mer Bal-
■■I I ^■^^^'^ tique ; quoique sédentaire dans
Hfpvnj quelques localités, elle est rare
-^•' en Angleterre et ne se montre
w*^i H. qu'accidentellement en Ecosse
.. ^*C et en Irlande [Harting). Elle est
^^.^^^^z; p^^g ^^ j^^-^g ^^^^ ^^^g l'Europe
centrale et on ne la voit qu'irrégulièrement en Belgique à l'époque
des passages. En France on l'observe à peu près partout à son
passage d'automne ; en août, elle quitte les départements septen-
trionaux pour se porter plus au midi, et y revient en avril et mai
pour se reproduire [Degl. et Gei^be)', elle est sédentaire dans plusieurs
départements du midi de la France {Lacroix), en Espagne {Saiinders)
et en Portugal. En Italie, elle arrive en mars et en avril et émigré
en septembre {Giglioli), mais elle est sédentaire en Grèce dans les
marais du Péloponèse, en Roumélie [Lindermayer) et aux Cyclades
{Erhard).
A l'Est, on observe cette espèce en Russie, dans les parties méridio-
nales des régions du Tcheriiozcm (50° 1. N.) et de !'( )ural, en Crimé«\
au Caucase, dans la région Aralo-Casi)ienne, dans le Tian-Chan,
dans lu bassin de l'Irtych, en l):iuurie, dans le pays Uubsouricu
— 296 —
{Bogdanoio), en Tuikestan d'où il émigré en Perse (Severtzow), dans
l'Inde {Jerdon), au Kashmir {Hume), au Népaul (Hodgson), à Ceylan
[Laym-d), aux îles Andaman (Davison), en Birmanie {Seehohm) et
jusqu'aux Philippines {Irhij) et l'île de Bornéo (Sharpe); elle est
abondante en Chine {David) et a même été observée au Japon {Schlê-
gel). Il y a donc lieu de supposer que cet oiseau est répandu dans
tout le sud-est de l'Asie. D'après Schlégel, le musée de Leyde possède
un sujet de cette espèce, acquis à Verreaux, comme provenant
d'Australie.
Cet oiseau ne paraît pas avoir été observé en Palestine, en Asie
Mineure et dans le sud-ouest de la Sibérie. Mais il est probable qu'il
est répandu dans toute l'Afrique, car on le rencontre aussi bien dans
le midi que dans le nord du continent noir. Il doit cependant être fort
rare en Egypte, Riippell paraît être le seul voyageur qui l'y ait
observé; AI. Dresser assure cependant avoir reçu un spécimen
d'Alexandrie ; de Heuglin dit avoir observé assez souvent cette espèce
en mai, à la pointe N.-E. des lacs Birket el Qarn dans le Fajum, et
généralement par couples, ce qui fait supposer qu'elle y niche. Dans
l'Afrique occidentale, elle a été observée depuis leDamara {Andersson)
jusqu'au cap de Bonne-Espérance {Layard). Elle est rare et de pas-
sage à Madeire {Harcourt) et se trouve également dans l'est et au
centre de Madagascar [Grandidier).
Mœurs. — Cette espèce est, pour l'Europe centrale, un oiseau d'été
qui arrive en mai et émigré en août, isolément et pendant la nuit;
dans les parties du midi de la France où il n'est pas sédentaire, il
arrive du 15 au 30 mars et émigré tin septembre. Ses mœurs ne
diffèrent guère de celles de l'espèce précédente : il vit dans les
marécages et autres lieux aquatiques, et se tient caché pendant le jour
dans les herbes et les buissons, ou prend ses ébats sur des feuilles
flottantes. « Il aime à se promener sur les feuilles de nénuphars, dit
M. Ad. Lacroix; j'ai vu, fin septembre 1868, cinq Râles Bâillon
s'amuser sur un grand amas de feuilles de la plante citée plus haut;
il m'est impossible de décrire la manière agile dont ils parcouraient
en tous sens cette espèce de radeau que forment les nénuphars. Je
suis resté caché prés d'une heure ; ils n'ont cessé de se poursuivre et
de s'amuser que lorsque je me suis montré, alors ils ont plongé et
sont allés se mettre en dessous des feuilles, d'où ils sortaient la tête
hors de l'eau en soulevant les dites feuilles. Je me suis caché de
nouveau, et, peu de temps après, ils ont recommencé leurs amuse-
ments. »
- 397 —
Cette Marouette met autant d'adresse que ses congénères pour
éviter le chasseur et les chiens, et ne s'envole qu'à la dernière extré-
mité, mais seulement pour aller se cacher dans un fourré plus éloigné.
Elle paraît un peu plus sociable que les précédentes ; le soir et pendant
la nuit, on peut entendre son cri de Mk, kik, kik. M. de Heuglin dit
que les Marouettes qu'il a observées en Afrique, se tenaient dans des
eaux à fond de sable, non loin du bord et dans le voisinage de buissons
de tamarin. Elles se montraient farouches pendant le jour etfuj^aient,
quand on approchait, pour aller se cacher dans des amas de racines
qu'elles n'abandonnaient pas de sitôt. Pendant la nuit et au lever du
soleil, elles prenaient leurs ébats sur des eaux découvertes.
La nourriture de cet oiseau consiste en vers, larves, insectes divers,
araignées et petits mollusques; il saisit avec adresse les mouches qui
viennent se poser sur les feuilles.
Reproduction. — Cet oiseau niche de la même manière et dans les
mêmes endroits que la Marouette poussin, et son nid ne diffère guère
de celui de cette dernière, mais il est plus petit ; on le trouve ordi-
nairement dans les parties marécageuses où les joncs ont été coupés
et parmi les jeunes pousses. M. René Martin dit qu'il est fait, comme
celui de ses congénères, avec des carex et de menus roseaux secs,
mais qu'il est du double moins vaste que celui des espèces voisines.
En Europe la ponte a lieu fin mai ou en juin, mais dans l'Inde,
d'après Hume, elle ne se fait qu'en juillet et août. Brehm et Paessler
font remarquer que quand la première couvée a été détruite, les
oiseaux construisent un second nid, et parfois même un troisième, ce
qui fait que l'on trouve quelquefois encore des nids de cette Marouette
jusqu'en août. La ponte est de quatre à huit œufs, mais le plus ordi-
nairement de six; ceux-ci sont d'im gris jaunâtre terreux, tachés et
pointiUés de cendré et marqués superficiellement de taches d'un brun
rougeâtre éparpillées sur toute la surface ou plus nombreuses au gros
bout. Ces œufs mesurent en moyenne 26 millim. sur 19.
GENRE CXXVIII
POULE D'EAU. — GALLINULA
Gallinula, Briss. Ornith. VI, p. 3 (1760.)
FuLiCA,Lin. Sijst. nat. I, p. 258 (1766.)
Hydrogallina, Lacép. Mém. de l'Inst. III, p. 51S (ISOl.)
Rallus, Savi, Orn. Tosc. II, p. 382 (1829.)
Stagnicola, Brclim, Isis, 1830, p. 992.
Car. — Bec un peu moins long «iiio la tête, épais, comprimi', un peu rcnllé
ToMK II.— 1890 38
— ^>98 —
en dessous vers la pointe, arrête se prolongeant et se dilatant sur le front en
une plaque lisse qui s'étend jusqu'au-dessus des yeux ; narines latérales,
oblongues, atteignant le milieu du bec et percées dans de larges fosses
nasales ; ailes médiocres, sub-aiguës ; queue courte, arrondie, à rectrices
larges et assez résistantes ; partie nue des jambes scutellée ; tarses assez
courts, robustes, scutellés en avant, réticulés en arrière ; doigts longs, bordés
sur les côtés d'une membrane étroite, le médian plus long que le tarse ;
pouce allongé et reposant à terre.
Hab. — Ce genre a des représentants dans les cinq parties du
monde.
228. — La Poule d'eau ordinaire.
GALLINULA CHLOROPUS, Lath. ex^Lin.
(PL 227).
FuLiCA FUSCA et CHLOROPUS, Lin. Syst. nat. I, p. 257-58 (1766).
Gallinula CHLOROPUS et FUSCA, Lath. Ind. Orw, pp. 770-71 (1790).
Rallus CHLOROPUS, Savi, Orn. Tosc. II, p. 382 (1829).
Stagnicola SEPTENTRiONALis, CHLOROPUS et MiNOR, Brelim, Isis 1830, p. 992.
Stagnicola FLAviPEset FiSTULANS, Brchm, Vog. Deiclschl. p. 705 (1831).
Stagnicola parvifrons, Brehm, Naumannia, p. 293 (1855).
Gallinula communis, C. F. Dubois, PI. col. Ois. Belg. III, p. 200 (1860).
Das gemeine Teichhuhn, en allemand.
The Moorhen, en anglais.
Het Waterhoentje, en flamand.
Var. Pyrrhorrhoa.
FuLiCA CHLOROPUS, Desj . Proceed. zool. Soc. 1831, p. 45.
Gallinula chloropus, Auct. plurimorum.
Gallinula pyrrhorrhoa, A. Newt. Proceed. zool. Soc. 1861, p. 18.
Gallinula CHLOROPUS var. Pyrrhorrhoa, Grandid. Rev. etMag. de Zool. 1868
Var. Galeata.
Crex galeata, Licht. Yerz. Boubletlen, p. 80 (1823).
Gallinula galeata, Bonap. Am, Orn. IV, p. 128 (1832).
Gallinula CHLOROPUS var. Galeata, (Hartl. et Finsch), Ridgw. Ann. Lyc.N. Y. X,
1874, p. 387.
Var. Sandvicensis .
Gallinula sandvicensis, Streets, Ibis., 1877, p. 25.
Taille : 0,26 ; ailes 0,18 ; tarses 0,058.
Description des deux sexes adultes. — Tête, cou, poitrine et abdomen
d'un gris ardoise foncé, avec les plumes des flancs marquées d'une large
strie blauche ; dos;, scapulaires, couvertures des ailes et sus- caudales d'un
— 299 -
brun olivâtre lustré : rémiges brunes ; rectrices d'un brun noirâtre ; plumes
du bas-ventre terminées de blanc; sous-caudales blanches, les médianes
noires. Plaque frontale et bec d'un rouge vif, ce dernier jaune à sa partie
terminale ; iris rouge carmin ; partie nue des jambes rouge ; pattes d'un
vert jaunâtre.
La femelle est un peu plus petite que le mâle, sa plaque frontale est moins
étendue, ses teintes sont plus claires et les stries blanches des ilancs moins
nombreuses.
Jeune. — Parties supérieures d'un brun légèrement olivâtre^ plus sombre
au bas du dos ; gorge, devant du cou et milieu de l'abdomen, blancs ; poitrine
cendrée ; flancs d'un brun olivâtre plus pâle que le dos ; ailes et queue
brunes ; sous-caudales d'un blanc jaunâtre, les médianes noires ; plaque
frontale peu développée et, de même que le bec, d'un brun olivâtre; iris brun;
pattes d'un vert plus sombre que chez l'adulte.
Poussin. — Duvet d'un noir uniforme ; tour de l'œil, région des oreilles et
gorge variés de blanc ; partie interne des jambes blanches.
Var. ace. — On rencontre parfois des sujets variés de blanc ou d'un blanc
pur.
La var. Pyrrhorrhoa ne diffère de la forme type que par ses sous-caudales
qui sont roussâtres et non blanches.
La var. Galeata ne se distingue que par la plaque frontale plus large, non
arrondie en arrière mais coupée presque carrément.
La var. Sandvicensis ressemble à la var. Galeata, dont elle diffère par la
plaque frontale plus étendue, des ailes plus courtes et par l'absence de blanc
à l'abdomen .
Hab. — La Poule d'eau ordinaire est presque un oiseau cosmopolite ;
mmm^^mst^^mmm^^mm^w^^^^^^i ^^^^'^ l'ancien monde on la ren-
contre jusqu'au delà du G5^ 1. N.
En Europe elle est généralement
commune partout jusqu'au 55°.
Le Marquis de Wavrin m'a dit
avoir vu, lors de son voyage au
cap Nord, deux Poules d eau en
vie, qui avaient été prises à
Gjesvaer, île de Margero, à 71°
1. N. vers la fin de mars 1885 ; c'est la première fois que cette espèce
a été signalée sous une latitude aussi boréale. Un individu a été
capturé dans le sud de l'Islande le 4 avril 1882 [Grondai). Elle est
commune et sédentaire en Belgique.
En Afrique on rencontre cet oiseau depuis le Maroc, l'Algcrie et
— 300 —
l'Egj^pte {Loche, Shelley, etc.) jusqu'au cap de Bonne-Espérance
{Sharpé) ; M. Barboza du Bocage dit qu'il n'est pas rare dans
l'Angola et surtout dans les régions maritimes du Benguela ; à l'Est
du continent noir sa présence à été signalée à Mozambique, en
Abyssinie,etc. {de Heuglin) ; on rencontre également cette espèce aux
îles Açores, Madères et Canaries {Du Cane Godman).
En Asie, cette Poule d'eau est également répandue presque partout :
sa présence a été constatée au Turkestan, dans l'Inde, la Chine, la
Sibérie orientale, le Japon, etc. {David, Schlégel), et même aux Phi-
lippines, à Célèbes, à Bornéo, à Java et à Sumatra {Schlégel, Dresser).
La var. Pyrrhorrhoa habite Madagascar et l'île Maurice ; aux Sey-
chelles, au contraire, on trouve la forme à sous-caudales blanches
{G^mndidier),
La var. Galcata habite toute l'Amérique depuis 1êl50° 1. N. jusqu'au
40^ 1. S., c'est-à-dire du Canada [Mus. Bruœ.) au Chili {Coues).
La var. Sandvicensis habite l'île d'Oahu, l'une des îles Hawaï {Streets).
Mœurs. — Cette espèce émigré des régions septentrionales en sep-
tembre, et les passages continuent pendant tout le mois d'octobre ;
les jeunes des dernières couvées ne passent souvent même qu'en
novembre et hivernent près des eaux qui ne gèlent pas. Ces oiseaux
voyagent par couples, pendant la nuit et en volant. Au printemps, ils
retournent dans le Nord en avril; le mâle et la femelle arrivent géné-
ralement la même nuit, pour reprendre possession de l'étang qu'ils
ont occupé l'année précédente ; Naumann a cependant remarqué que
c'était tantôt la femelle, tantôt le mâle qui arrivait le premier. Dès
qu'un couple a pris possession d'un étang, il ne s'inquiète plus des
clameurs de ses semblables qui passent dans les airs ; mais s'il n'y a
qu'un seul individu, il les invite par ses cris à venir auprès de lui.
En Belgique on rencontre la Poule d'eau dans tous les marais des
Flandres et de la Campine, sur les étangs des environs de Bruxelles,
près des cours d'eau et presque partout où il y a des mares et des
étangs. Elle est sédentaire dans notre pays, car elle n' émigré que
dans les hivers les plus rigoureux, et pour autant qu'elle ne trouve
pas de sources chaudes ou de rivières qui ne gèlent pas.
La Poule d'eau recherche de préférence les petits étangs et les
mares dont les bords sont garnis de roseaux et autres herbages, ou
ombragés par des buissons. Chaque étang n'abrite qu'une seule paire,
à moins qu'il ne soit très étendu, et dans ce cas, les différents couples
se tiennent toujours éloignés les uns des autres, chacun défendant le
— 801 -
domaine qu'il s'est choisi. Il arrive bien quelquefois qu'un mâle fasse
une incursion dans le domaine de son voisin, mais il en est aussitôt
chassé par les propriétaires légitimes, qui unissent leurs efforts pour
éloigner l'intrus.
On rencontre également cet oiseau près des lacs, des petites
rivières et dans les marais, mais il paraît toujours préférer les endroits
où l'eau est assez profonde, pourvu qu'une partie soit couverle de ro-
seaux et de joncs, ou que les bords soient garnis de buissons de saules
ou d'aunes.
La Poule d'eau est un charmant oiseau qui s'établit souvent dans
le voisinage de l'homme, et se laisse facilement observer quand on ne
le poursuit pas. Ses mouvements sont gracieux et son naturel est
doux, paisible et joyeux, mais peu sociable ; la vue d'un objet l'in-
trigue-t-elle, elle allonge le cou, projette son corps en avant et agite
la queue. C'est véritablement un oiseau diurne, qui s'éveille dès l'au-
rore et ne se livre que tard au repos. Sur les étangs éloignés des
habitations, la Poule d'eau se tient cachée dans les roseaux pendant
toute la journée, et ne se montre dans les endroits découverts que le
soir et le matin. Mais elle devient plus hardie là où elle sait que
l'homme la protège. Nauinann cite doux de ces oiseaux qui habitaient
un étang près de son jardin, et qui étaient presque aussi apprivoisés
que des animaux domestiques ; ils savaient distinguer les personnes
qu'ils connaissaient de celles qui leur étaient inconnues ; mais ils ne
supportaient pas qu'on les observât longtemps.
La Poule d'eau nageavec aisance et on la voitramer avec dextérité,
malgré l'absence totale de membranes natatoires. De temps à autre
elle s'arrête, se repose sur un morceau de bois flottant, sur un îlot,
sur un tas do roseaux renversés ou sur quelque branche basse ; elle
nettoie et lisse alors son plumage, l'oint de la matière grasse que
sécrètent les glandes du croupion, puis s'en va fouiller les roseaux et
les herbes. Elle plonge parfaitement, sait nager entre deux eaux en
s'aidant de ses pattes et de ses ailes ; lorsqu'elle est chassée, elle tient
le corps sousl'eau caché entre les roseaux, et ne laisse sortir que la par-
tie antérieure de la tête pour pouvoir respirer. Grâce à ses formes
sveltes, elle jxMit se gliss(U' au milieu des fourrés les plus épais; ses
longs doigis lui primetlent de courir facilement sur les feuill(\s des
nénuphars ou sur la b'gère couche d'herbes ou de joncs qui couvre la
surface de l'eau ; ils lui servent aussi à grimper le long des roseaux
dont clic peut cnihiasscr plusieurs tiges, et à se percher sur les bran-
— 302 -
ches des arbres qui bordent les eaux. M. A. Duvivier dit avoir
remarqué, que quand les étangs sont entourés de grands arbres, par-
ticulièrement de mélèzes, les Poules d'eau se cachent fréquemment
entre les branches de ces arbres et paraissent même en affectionner la
cime, surtout en hiver {Omis, J890, p. 338), A terre cet oiseau
marche avec aisance et rapidité, et en présence du danger il court
aussi vite que le chien qui le poursuit.
La Poule d'eau vole péniblement en battant rapidement des ailes
et en tenant le cou et les pattes étendues ; ce n'est que quand elle a
atteint une certaine hauteur que son vol devient plus facile et plus
rapide. Il est cependant certain qu'elle ne s'envole pas volontiers et
seulement quand, serrée de près, elle ne peut faire autrement. Sa
voix est sonore et s'entend au loin; elle fait habituellement entendre
un son ressemblant à h7^&r ou ker ei k kurrk\ son cri d'appel est
plutôt kirkrekreck; le danger lui fait jeter leTi^i de kertettet, et
pendant ses voyages elle fait souvent eutendre le cri de keckeckeck ou
kickickick', la femelle appelle ses petits par gourr gourr.
La nourriture de cet oiseau consiste en insectes, larves, vers, mol-
lusques et matières végétales, et c'est le plus souvent en nageant
qu'il cherche ses aliments.
Reproduction. — C'est en mai qu'a lieu la reproduction, et les
mâles se livrent alors de violents combats. Dès qu'un couple a fait
choix de l'emplacement du nid à construire, mâle et femelle unissent
leurs forces pour le défendre contre les attaques d'autres mâles. Le
nid, qui est assez volumieux, repose ordinairement sur un tas d'her-
bageSj de joncs ou de roseaux renversés, ou entre plusieurs souches
de joncs et au-dessus delà surface de l'eau; il est rarement établi à
sec sur quelque éminence du sol. Mâle et femelle travaillent de concert
à sa construction et y mettent plus ou moins de soins. Ce nid a la
forme d'une coupole profonde et il est fait de feuilles de roseaux, de
joncs et de carex adroitement entrelacées et disposées par couches les
unes au-dessus des autres. La ponte dure une quinzaine de jours et
se compose de huit à onze oeufs, relativement grands, à coquille fine-
ment grenue, lisse, terne, d'un jaune roux pâle et parsemée de taches
et de points d'un gris violet et d'un brun rougeâtre.Ils mesurent environ
45 millim. sur 32. Les deux parents les couvent pendant dix-neuf à
vingt et un jours. Après l'éclosion, les poussins restent encore environ
vinQ:t-quatre heures dans le nid; la femelle les conduit ensuite à l'eau
et le mâle les accompagne en poussant des cris de joie. Au bout de
- 303 —
quelques semaines ils savent suffire à leurs besoins, et les parents
se préparent alors à faire une seconde couvée.
« Au moment, dit Naumann, où les poussins de la seconde couvée
arrivent sur l'eau, les jeunes de la première, à demi adultes mainte-
nant, accourent, les reçoivent avec amitié, leur prêtent secours, les
guident. Grands et petits, jeunes et vieux, ces oiseaux ne font tous
qu'un cœur et qu'une âme, si j'ose m'exprimer ainsi. Les aînées font
avec leurs parents l'éducation de leurs jeunes sœurs; elles leur témoi-
gnent amour et sollicitude, leur cherchent des aliments, les leur
apportent et les déposent devant elles, tout comme les parents l'ont
fait autrefois pour elles-mêmes. Le spectacle est des plus charmants
quand toute la famille vaque sans crainte à ses occupations sur la
surface d'un petit étang. Chacune des aînées est tout aifairée à donner
à manger à l'une de ses jeunes sœurs ; celles-ci suivent tantôt leurs
parents, tantôt une de leurs sœurs ; leurs piaillements indiquent
qu'elles ont faim, et elles acceptent à manger de celle qui leur apporte
des aliments la première. D'ordinaii'e, le nombre des jeunes de la
seconde couvée étant inférieur à celui de la première, et les parents
ne se lassant pas de leur venir en aide, il en résulte souvent qu'un
poussin de la seconde couvée a deux guides qui veillent sur lui et
pourvoient à ses besoins. Il nage entre les deux, en recevant à tour de
rôle des caresses et des aliments. En cas de danger, ce sont encore les
jeunes de la première couvée qui avertissent les autres et les font
cacher. »
GENRE CXXIX
FOULQUE. — FULICA.
FuLiCA, Briss. Ornith. VI, p. 23 (1760).
LuPHA, Reichenb. Naturl. Syst. p. XXI (I85I).
Car. — Bec plus court que la tète, convexe, conqirimé latéralement, pro-
longé sur le front en une plaque assez large, nue, lisse, parfois surmontée en
arrière par deux tubercules membraneux ; mandibule inférieure anguleuse ;
narines latérales, linéaires, s'ouvraut chacune clans une large fosse ovalaire;
ailes médiocrement allongées, amples, subaiguës; queue très courte, arrondie;
jambes peu dénudées; tarses épais, ])ea allongés; doigts bordés d'une mem-
brane découpée en lobes dont le nombre est en rapport avec celui des arti-
culations, le médian un ])eu plus long (pie le tarse; pouce bien développé et
l)ortant à terre, grêle, meml)raneux en dessous.
n<d>. — Le genre Foulque a des représentants dans toutes les
parties ihi inonde.
304 -
229. — La Foulque noirâtre
FULICA ATRA, Lin.
(PI. 228)
FuLiCA MAJOR, Briss. Orniih. VI. p. 28(1760).
FuLiCA ATRA et ATERRiMA, Lin. Sijst. nat. I, pp. 257-58 (1760).
FuLicA FULiGiNOSA et (?) ALBivENTRis, Scop. Ann. I. Hist . nat. p. 104 (1769).
FuLiCA LEUCORYX et ^THiops, Sparpin. Mus. Caris., pi. 12, 13 (1786).
FuLiCA ATRATA et PULLATA, Pall. Zoogr. Rosso-As. II, pp. 158-59 (1811).
FuLiCA PLATYUROS, BrehiTi, Isis, 1830, p. 992.
FuLiCA LUGUBRis, S, MiilL, Yerh. nat. gesch. Nederl. Bezitt. III, p. 454 (1839-44).
FuLicA AUSTRALis, Gould, Proc. Zofll. Soc. 1845, p. 2.
FuLiCA ATRA JAPONiCA, Tem. et Schl. Fauna Jap. p. 120, pi. 77 (1850).
FuLicA ciNEREicoLLis (M'Clel.) Schleg. Mus. P.-B. RalU. p. 62 (1865).
Das Wasserhuhn, Blasshuhn, en allemand.
The common Coot, en anglais.
De Meerkoet, en flamand. . —
Taille : 0,35, ; ailes 0,225 ; tarses, 0,069.
Description du mâle et de la femelle adultes. — Tête et cou noirs, fuligineux
à ]a gorge; dessus du corps d'un gris noirâtre ; dessous d'un cendré sombre;
ailes noirâtres, rémiges secondaires terminées de blanc ; queue et sous-cau-
dales noires. Plaque frontale blanche; bec blanc rosé, bleuâtre à la pointe ;
pattes cendrées, lavées de verdâtre et de jaunâtre; bas des jambes rougeâtre ;
iris rouge cramoisi.
Jeune. — Moins foncé en dessus; côtés de la tête, dessous du cou, jabot et
une partie de la poitrine, blanchâtres.
Poussin. — Duvet d'un noir fuligineux, sauf au front et aux côtés de la
tête cil il est d'un roux ardent; côtés du cou parsemés de soies blanches.
Plaque frontale nulle.
Hab. — La Foulque habite toute l'Europe jusqu'au 68° 1. N.
qu'elle dépasse même quelque-
fois; pendant l'automne de 1857,
deux individus ont été observés
près de Vardo (70° 20') en Fin-
mark {Collett). Elle est séden-
taire en Grande-Bretagne, en
Irlande, aux Hébrides exté-
rieures et aux îles Orkneys, de
^^ passage aux îles Pœroe, et ne
visite qu'accidentellement les îles Shetland [Gray, Seehohm, etc.) et
l'Islande (Faber).
— 3Û0 -
Cette espèce est commune en Belgique, comme dans toute l'Europe
centrale, mais la majorité émigré en automne ; elle est sédentaire
dans le midi de notre continent, où elle est cependant plus abondante
en hiver qu'en été. Elle est généralement répandue en Asie Mineure
{Kriipe?") et en Palestine {Tristram)] visite régulièrement en hiver,
par bandes considérables, les canaux, les marais et les lagunes de
la Basse-Egypte et de l'Egypte moyenne, mais des sujets isolés
remontent le Nil et ses affluents jusque dans le Kordofan [de Heu-
glin). Ses apparitions en Sénégambie restent douteuses ; elle est rem-
placée dans ce pays, comme dans le reste de l'Afrique, par la Fulica
cristata.
En Asie on rencontre la Foulque commune dans toute la Sibérie
jusqu'au 660 1. N., et son aire géographique s'étend vers l'Orient
jusqu'au détroit de Behring [Bogclanow), la Chine [David), Formose
{Swinhoe) et le Japon {Schlégel). Elle hiverne dans le sud de l'Asie,
en Perse, dans l'Inde et l'Indo-Chine. Elle habite également les
îles de Java {S. Muller) et de Bornéo ( Vorderman), ainsi que l'Aus-
tralie {Gould).
Mœurs. — Les Foulques n'habitent pas nos contrées toute l'année :
à l'arrière-saison elles se rassemblent sur les grandes eaux et éinigrent
dès que celles-ci se couvrent de glace ; ces oiseaux nous reviennent
au printemps, peu après la fonte des neiges. Les époques du départ,
et du retour varient suivant la température de la saison ; en général,
cependant, les Foulques émigrent entre le 15 octobre et tin novembre
et nous reviennent dans le courant de mars; quelques-unes paraissent
hiverner dans le pays, car, malgré les rigueurs de cet hiver (1890),
on en a tuées jusque fin décembre. Elles voyagent pendant la nuit,
isolément ou par troupes disséminées, et volent haut, assez vite et
en ligne droite, tout en poussant leurs cris.
Cet oiseau habite les eaux stagnantes d'une certaine étendue et en
partie couvertes de roseaux et de joncs ; on ne l'observe que rarement
sur les petits étangs et les rivières. En Belgique il est assez commun
dans les polders et dans les marais des Flandres et de la Campine.
La Foulque noirâtre ou macroule se tient presque constamment sur
l'eau, elle ne vient à terre que pour le repos de la nuit ou pour lisser
son plumage, et encore pré(ère-t-elle un ilôt qui lui offre un abri plus
sûr. Elle court assez lestement, mais nage à la perfection, car ses
pieds lobés sont des rames excellentes ; elle plonge avec autant de
facilité qu'un palmipède, descend à de grandes profondeurs et nage
ToMïIl.— 1891 89
- 306 -
entre deux eaux sur une assez longue distance. C'est au fond de l'eau
qu'elle cherche en grande partie sa nourriture, et c'est en plongeant
qu'elle échappe à ses ennemis. Quand elle est chassée, elle s'accroche
aux végétaux à l'aide des pattes et attend sous l'eau que le danger ait
disparu, ne laissant sortir que la partie antérieure de la tête pour
respirer ; si l'eau n'offre pas de végétaux entre lesquels elle puisse se
cacher, elle cherche à échapper à son ennemi par des plongeons suc-
cessifs. Son vol, quoique plus facile que celui de la Poule d'eau, est
cependant lourd et fatigant, aussi l'oiseau ne s'envole-t-il que quand
il y est contraint ; pour s'élever, il prend un fort élan, court en vole-
tant à la surface de l'eau qu'il frappe de ses pieds, et s'élance enfin
dans les airs pour filer sans bruit droit devant lui. Suivant M. See-
bohm, la Foulque se perche parfois aussi sur des arbres, sautant de
branche en branche à la façon des gallinacés. La Foulque n'est véri-
tablement pas farouche, mais très prudente, se défie de l'homme et
l'évite de loin ; elle sait pourtant distinguer le chasseur d'un être inof-
fensif, ne témoigne aucune crainte pour ce dernier, et se fixe même
dans le voisinage de lieux habités. Elle est très sociable : en dehors
de l'époque des amours, les Foulques se réunissent en troupes et
même en bandes nombreuses. Dans leur quartier d'hiver, dit Brehm,
elles couvrent littéralement des surfaces énormes de grands étangs,
des surfaces qui ont parfois plus d'un kilomètre carré ; mais ces ban-
des n'aiment pas la société d'autres espèces aquatiques, surtout des
canards, qu'elles chassent toujours loin d'elles.
Le cri de cet oiseau est plaintif et perçant : il peut se rendre par
hœ ou ku ; quand l'animal est excité, il répète ce cri plusieurs fois de
suite et l'on croirait alors entendre l'aboiement d'un jeune chien. Sa
nourriture se compose de larves, d'insectes, de vers, de mollusques et
surtout de jeunes feuilles, de bourgeons, de graines et de radicelles
de diverses plantes aquatiques.
La Foulque s'apprivoise facilement, et l'on peut fort bien la garder
en captivité si l'on peut mettre une pièce d'eau à sa disposition. On la
nourrit de vers, de pain, de pommes de terre et de légumes cuits, de
viande hachée, de céréales et surtout d'orge.
Reproduction. — La construction du nid n'a lieu que quand les
roseaux et les joncs sont assez élevés pour le cacher, ce qui n'arrive
ordinairement qu'à la fin d'avril. Les couples s'installent en attendant
sur les pièces d'eau et cherchent à conquérir un domaine, ce qui n'a
pas toujours lieu sans luttes. « Là où vivent plusieurs de ces oiseaux,
— 307 -
dit Naumann, leurs disputes, leurs poursuites, leurs cris, leurs
clapottements n'ont pas de fin; l'un d'eux dépasse-t-il ses limites,
ses voisins fondent aussitôt sur lui pour le chasser. Ces combats
sont très intéressants à observer, car on voit alors se manifester toute
la colère de l'oiseau ; le corps ramassé, frappant l'eau de leur bec, les
Foulques nagent l'une vers l'autre, se portent des coups de bec,
d'ailes, de pattes, jusqu'à ce que l'une d'elles batte en retraite. »
Chaque mâle n'a qu'une femelle dont il se montre fort jaloux ; il
l'assiste à construire le nid, à couver, et plus tard, à élever et à pro-
téger les petits. Le nid est placé entre des roseaux ou des joncs non
loin du bord de l'étang, et repose sur de vieilles souches de roseaux
ou flotte librement à la surface de l'eau, mais toujours protégé par des
roseaux qui Tempéchent d'aller à la dérive. Il se compose de chaumes,
de feuilles de roseaux et de joncs bien entrelacés ; l'intérieur est
proprement garni des mêmes substances mais plus fines, d'herbes
sèches et de feuilles ; cette cavité est assez profonde et bien arrondie.
La femelle rassemble généralement au-dessus de son nid les her-
bages qui l'entourent, afin qu'il soit couvert et caché. La ponte a lieu
dans le courant de mai et se compose de sept à huit œufs, parfois
même de douze à quatorze. Ceux-ci sont relativement grands, à coquille
épaisse, finement grenue, un peu luisante, d'un jaune d'ocre pâle
tirant plus ou moins sur le cendré, tachetée et pointillée de gris et de
brun ; ils mesurent de 50 à 56 millim. sur 36. La durée de l'incubation
est de vingt à vingt et un jours.
Les parents conduisent et nourrissent leurs petits, les avertissent
de l'approche du danger et les défendent avec courage ; mais dans les
lieux qui leur semblent à l'abri d'une surprise, toute la famille se mon-
tre tellement confiante, qu'elle ne fuit pas même à l'approche d'une
personne.
FAMILLE DES GRUIDÉS.
Car. — Bec de la longueur de la tête ou un peu plus long, médio-
crement fendu, pointu, à arête dorsale mousse; narines médianes, per-
cées de part en part dans de larges fosses nasales; cou long et mince;
tête petite ; lores garnis de plumes sétacées ; ailes longues et aiguës;
queue courte; jambes allongées, nues; tarses très longs; doigts assez
courts, l'externe et le médian réunis à la base par une petite mem-
brane, le pouce médiocre, inséré très haut et touchant à i)(Mn(' le sol ;
ongle du doigt externe très arqué et le plus robuste.
- 308 —
Hah, — Cette famille est représentée dans toutes les parties du
monde.
Mœurs. — Les Gruidés se rapprochent des Rallidés par leurs
mœurs et leur conformation ; malgré leur grande taille, qui paraît les
unir aux Hérodiens, leur squelette ressemble peu à celui de ces
oiseaux.
Les Gruidés habitent les plaines marécageuses et sont surtout her-
bivores et granivores, car les Graes ne prennent qu'accessoirement des
insectes, des vers, des reptiles et des batraciens. Ce sont des oiseaux
migrateurs très sociables, qui vivent en paix avec tous les échassiers.
Ils nichent dans les marais et ne pondent que deux oeufs, rarement
trois. Leur grande pi'udence les garantit de bien des dangers, aussi
est-il fort difficile de les surprendre.
GENRE CXXX.
GRUE. — GRUS. ^-
Ardea, p. Lin. Syst. nat. I, p. 234 (1766).
Grus, Bechst. Ybg. Deutschl. III, p. 60 (1793).
Anthropoïdes, Vieill. N. Dict. II, p. 163 (1816).
Antigone, Reichenb. Syst. av. p. XXII (1851).
Scops, G. R. Gray, List ofGen. nnd snbg. of B. p. 113 (1855).
Leucogeranus, Bonap. Cat. Parzud. p. 9 (1856J.
Car. — Bec plus long que la tête, légèrement fléchi et obtus à l'extré-
mité ; narines eHij^tiques, percées dans un large sillon s'étendant au delà de
la moitié du bec ; ailes longues et sub-obtuses, les dernières rémiges secon-
daires allongées, larges, courbées, à barbes décomposées et formant panache
sur la queue qu'elles recouvrent complètement ; queue très courte ; jambes
allongées, la partie nue réticulée ; tarses très longs, robustes, scutellés en
avant, réticulés en arrière ; doigts courts ; pouce court, ne touchant à terre
que par l'extrémité de l'ongle .
Hab. — Ce genre est cosmopolite.
230. — La Grue cendrée.
GRUS COMMUNIS, Bechst.
(PI. 229.)
Ardea grus, Lin. Syst. nat. I, p. 234 (1766),
Grus communis, Bechst. Yog. Deutschl. III, p. 60 (1793).
Grus cinerea, Bechst. Nat. Yog. Deutschl. IV, p. 103 (1809).
Grus vulgaris, Pall. Zoogr. Rosso-As. II, p. 106 (1811).
Grus canorus, Forst. Syn. Cat. Br. B. p. 58 (1817).
- 309 -
Grus cinerea longirostris, Tem. et Schl. Fauna Jap. p. 117 (1850).
Grus cineracea, Brehm, Naumannia, p. 289 (1855).
Grus communis, var. orientalis, Blyth, Nat. hist. Crânes^ p. 59 (1881).
Grus grus orientalis, Stejn. Bull. n° 29 U. S. nat. Mus. p. 317 (1885).
Der Gemeiner Kranich, en allemand.
The commun crâne, en anglais.
De Kraan, en flamand.
Taille : P40 ; ailes 0,66; bec 0,11; tarses 0,27.
Description du mâle et de la femelle adultes, — Front, occiput et lorums
noirs ; vertex nu et rouge, garni seulement de quelques poils noirs ; haut de
la nuque, bas des joues, gorge et devant du cou d'un brun noirâtre; une
bande blanche part de l'œil, couvre les côtés de la tête et la partie postérieure
du cou; bas du cou et le restant du corps d'un gris cendré; rémiges noires,
quelques-unes des secondaires allongées, larges vers le milieu, à barbes
décomposées, formant panache sur la queue^ les supérieures d'un cendré
foncé mais terminées de noir; queue cendrée à extrémité noirâtre. Bec d'un
noir verdâtre avec l'extrémité d'un brun de corne ; iris d'un brun rougeâtre ;
pattes noires.
Jeune. — D'un gris cendré rembruni et presque uniforme ; gorge noirâtre;
tête entièrement emplumée, d'un brun roussâtre surtout à la nuque ; les
lémiges secondaires en panache n'existent pas encore ; rémiges primaires
noires.
Poussin. — Parties supérieures d'un roux assez vif, tournant au marron
sur le vertex, le dessus des ailes, et par trois taches oblongues, en ligne sur
le dos et sur le croupion ; côtés de la tête, devant du cou, côtés de la poitrine,
flancs et cuisses d'un roux plus pâle ; gorge et milieu du ventre blancs ; bec
carné rembruni, avec la base plus pâle et le marteau blanc ; pieds d'un jaune
sombre. (J. Vian).
Hab. — La Grue cendrée niche dans la zone qui s'étend, en
jg^yg&i^^P^'^ ^^ffl^^ "-fff^xffj^^ Europe et en Asie, entre le 53°
et le 65°, mais elle se montre
parfois jusqu'au 68 1/2° {Malm-
gren). Au sud de cette zone elle
se reproduit dans les grands
marais de la Poméranie [Borg-
greve), de la Pologne, surtout
^___^ sur la rive droite de la Vistule
,-,,L,^.-.;.i>a£^^ (7V.c^«noi^5;fee), en Podolie, en
Volhynie, en Bessarabie {de Nordmann) et sur certaines îles maré-
cageuses du Danube (Finsc/i). Partout ailleurs en Europe, ainsi que
dans l'Asie cenlralo, elle est de passage plus ou moins régulier
- 310 —
suivant les pays, mais ne passe qu'accidentellement aux îles Fœroé.
Quelques couples cependant, nichent en Espagne dans les grands
marais du Guadalquivir, où MM. Saunders et Irby ont trouvé des
œufs ; il en est de même dans les vastes marais de la Vénétie [Giglioli)
et de la Macédoine {Ekoes et Buckley). En Belgique elle passe par
troupes entre le 20 mars et le 15 avril, et repasse en octobre, mais
ne s'arrête que peu ou point dans le pays.
Cet oiseau hiverne dans le midi de l'Espagne {Lilford) et de l'Italie
{Giglioli), mais on ne le voit qu'accidentellement en Portugal
(Barboza du Bocage) ; il hiverne également en grand nombre dans
le nord de l'Afrique {Loche, Salvin, etc.), en Palestine {Tristram),
en Egypte, en Nubie, au Sennaar, au Kordofan jusqu'en Abyssinie
{de Heuglin).
A l'Est, on observe la Grue cendrée jusque dans la Sibérie orien-
tale {Bogdanow), le Kamtschatka {Pallas, Stejneger) et le Japon
{Schlégel). Elle passe parfois au-dessus des plaines de Pékin et plus
fréquemment le long des montagnes occidentales de la Chine {David),
et hiverne dans le midi de cet empire, à l'île Hainan {Sioinhoe), en
Perse {Blanford), dans le nord et le centre de l'Inde {Jerdon) et
probablement dans l'Indo-Chine.
Mœurs. — La Grue est donc pour nos contrées un oiseau de passage
régulier. Elle voyage à toute heure du jour et de la nuit, et vole alors
à une grande hauteur, surtout en plein jour. Quand ces oiseaux sont
en petit nombre, ils volent le plus souvent à la file en décrivant
une ligne oblique ; mais lorsqu'ils sont nombreux, ils forment géné-
ralement un angle représentant un V ou mieux un Y renversé [x),
ce qui leur permet de franchir l'espace avec plus de facilité. Avant
d'entreprendre leur long voyage, les Grues se rassemblent dans des
localités déterminées, d'où elles partent toutes à la fois en faisant
retentir l'air de leurs cris perçants; cette bande en rencontre une
autre, le nombre des sujets augmente de plus en plus à mesure que
la troupe avance, et celle-ci finit par se composer de centaines d'oi-
seaux. Arrivées près de la mer, les Grues descendent à terre pour
prendre du repos et des forces ; les oiseaux des difierentes bandes se
rassemblent sur des îlots ou sur la côte, et attendent un vent favo-
rable pour faire la traversée. A l'île de Rugen on voit souvent, au
printemps, des milliers de Grues attendre le moment propice pour
franchir toutes ensemble la mer Baltique. Ces bandes voyageuses
suivent chaque année une route déterminée et traversent à peu près
— 311 —
les mêmes endroits. Avant de s'abattre pour chercher leur nourriture
ou prendre du repos, les Grues décrivent dans l'espace des cercles
désordonnés en poussant de grands cris, mais elles ne séjournent
jamais longtemps dans la même localité.
La Grue cendrée fréquente les plaines et surtout les champs culti-
vés situés non loin de marécages et éloignés de toute habitation ; en
été, on la rencontre aussi dans les bois marécageux bordés de champs,
mais jamais dans des endroits touiFus. En Afrique et dans le sud de
l'Asie, elle hiverne en bandes nombreuses sur les îlots qu'offrent les
grands fleuves, et il n'est alors pas rare de la voir mêlée à des oiseaux
appartenant à des espèces voisines. Chaque matin la troupe se rend
dans les champs où les Grues trouvent une nourriture abondante, et
comme elles sont surtout granivores, elles occasionnent parfois de
grands dommages dans les pays où elles séjournent; après s'être bien
repues, elles retournent sur leurs îlots où elles passent la nuit. Ce
sont donc des oiseaux de rivage en hiver et des oiseaux de marais en
été, mais elles n'aiment pas les marécages couverts de roseaux élevés
qui les empêchent de porter leurs regards au loin.
La Grue est essentiellement diurne : elle se repose pendant la nuit
dans des endroits découverts, car elle est extrêmement prudente et
difficile à surprendre. Elle est bien conformée et admirablement
douée sous tous les rapports ; sa grande taille ne l'empêche pas d'être
fort gracieuse dans ses mouvements, et tous ses actes démontrent des
facultés intellectuelles très développées, aussi a-t-elle conscience de
ses qualités. Sa démarche est légère et mesurée, au besoin elle
allonge le pas et sait courir avec agilité. Après un bond ou deux elle
s'élève sans efl'ort, vole comme les cigognes en tenant le cou et les
pattes étendus, et quelques coups d'ailes l'ont bientôt transportée dans
l'espace; là, elle plane souvent en décrivant de grands cercles, tout
en s'élevant de plus en plus dans les airs et finit par disparaître à la
vue. Rien n'est plus beau que de voir voltiger une troupe de Grues,
décrivant mille cercles en tous sens et à des hauteurs diverses, les
unes en planant, les autres en battant vivement des ailes. Une autre
fois, c'est sur le sol qu'elles prennent leurs joyeux ébats : elles
sautent, dansent en tournoyant les unes autour des autres, prennent
les poses les plus grotesques, mais tous leurs mouvements restent
gracieux et attestent de leur bonne humeur. Leur prudence est
extrême, aussi est-il fort difficile de les approcher à portée de fusil,
môme dans les lieux où elles sont abondantes. Une bande s'abat-elle
— 312 -
quelque part pour y passer la nuit ou pour y chercher de la nourri-
ture, des sentinelles sont aussitôt postées pour veiller au salut
commun ; ont-elles été dérangées dans un endroit, elles n'y retournent
qu'après avoir envoyé des éclaireurs chargés d'examiner le terrain.
« C'est avec un véritable plaisir, dit Brehm, que j'ai vu la prudence
des Grues se manifester en Afrique, lorsqu'elles eurent connu nos
procédés hostiles. Elles envoyaient un éclaireur, puis plusieurs;
ceux-ci examinaient tout, cherchaient s'il n'y avait plus rien de
suspect et retournaient vers la communauté qui n'avait pas toujours
pleine confiance; alors d'autres éclaireurs étaient envoyés comme pour
contrôler les rapports des premiers ; puis enfin la bande entière
arrivait. »
La Grue est donc très sociable, contracte amitié avec les espèces
voisines et vit même en bons rapports avec les autjgs échassiers, mais
sans les rechercher; le mâle voue à sa compagne une fidélité inébran-
lable. Son cri est, suivant les circonstances, crou, crou, kourr, hurry^
ou kirr; les jeunes crient schiep, schiep, d'une voix stridente.
La nourriture de cet oiseau se compose surtout de matières végé-
tales : jeunes céréales et autres graminées, pois, fèves, baies, fruits,
graines, etc. ; il prend également des vers, des larves, des insectes,
des lézards, des grenouilles, des souris, des campagnols, etc.
La Grue s'apprivoise bientôt et se reproduit même en captivité ;
elle se fait à tous les régimes, mais elle préfère les pois, les fèves et
le pain aux céréales; elle aime aussi les pommes de terre cuites et la
viande fraîche. « Autant, dit encore Brehm, elle évite l'homme tant
qu'elle est libre, autant elle s'attache à lui une fois qu'elle est réduite
en captivité. Il n'y a pas d'oiseau, à l'exception des perroquets les
plus parfaits, qui contracte aussi intimement que la Grue amitié avec
l'homme, qui comprenne aussi bien tous ses gestes, qui sache lui être
plus utile; elle ne voit pas dans son maître celui qui la nourrit, mais
un ami et elle cherche à le témoigner. Elle s'habitue à la maison plus
facilement qu'aucun autre oiseau; elle connaît chaque pièce de
l'habitation, estime le temps, juge à quel degré d'intimité se trouvent,
dans la maison, des personnes ou des animaux étrangers ; elle a pour
l'ordre une véritable passion, ne supporte dans la cour aucune
dispute, garde le bétail tout comme le ferait le chien le mieux dressé ;
elle punit ceux qui lui veulent du mal, en poussant des cris perçants,
en les frappant à coups de bec ; elle témoigne au contraire sa recon-
naissance et ses bons sentiments par des inclinations de corps, des
danses; elle se plaît avec les personnes qui lui font du bien, recherche
- 313 -
leur société; mais elle ne souffre aucune injure et en garde le souve-
nir pendant des mois, des années; »
Repï'oduction. — A peine de retour dans sa patrie, chaque couple
reprend possession de l'endroit où il a niché l'année précédente et ne
tolère aucun autre couple dans un certain rayon. La ponte n'a cepen-
dant lieu que tard en avril ou en mai, alors que la végétation est déjà
bien avancée.
La Grue cendrée niche dans les marais entrecoupés de buissons de
saules et d'aunes et dans un endroit bien caché. Le nid repose soit
sur un monticule gazon né entouré d'eau ou de boue, soit sur un tas
d'herbages secs et piétines, soit enfin, dans un buisson peu élevé,
mais toujours à sec et dans un endroit à l'abri des surprises. Le nid
est vaste, aplati et d'une construction très sommaire ; il se compose
d'un tas de branches mortes recouvertes de brins, de feuilles de
roseaux, de joncs et d'herbes diverses, le tout bien sec et disposé de
façon à ménager une excavation centrale. La femelle y dépose deux
œufs, rarement trois. Ceux-ci sont d'un cendré verdâtre, tantôt plus
verts, tantôt plus bruns et même parfois d'un vert grisâtre clair ; ils
sont plus ou moins tachés de brun rougeâtre et les plus grandes
taches sont parfois confluentes et effacées sur les bords ; on trouve
même des œufs dont les taches sont peu apparentes. Ils mesurent
environ 96 millim. sur 57. Mâle et femelle couvent alternativement
et défendent courageusement leurs petits en cas d'attaque.
Les Grues prennent un soin extrême à cacher leur nid. « Ce grand
oiseau, dit Naumann, facile à apercevoir, laisse à peine soupçonner
à l'observateur l'existence de son nid dans le marais ; il n'y arrive
qu'à pied et de loin, se tenant courbé, masqué par des buissons, et
des plantes élevées. La Grue, en train de couver, se glisse de môme
inaperçue hors de son nid quand un danger la menace, et elle ne se
montre à découvert que loin de là; souvent même, si l'ennemi ne
s'avance pas trop près, elle ne se dérange même pas. L'emplacement
du nid est par conséquent dithcile à trouver, et ce qui augmente encore
cette difficulté, c'est la peine qu'on éprouve à s'avancer dans les
marais; il faut donc pour trouver un nid de Grue être favorisé parle
hasard. »
Les jeunes, à leur retour au printemps, mènent une vie errante,
sans s'éloigner beaucoup des lieux liabités par leurs parents ; ils ne
sont en état de se reproduire qu'à l'âge de deux ans.
Tome II. — 1801. 40
- 314 -
TROISIÈME SOUS-ORDRE
LES HÉRODIENS.
Car. — Cette division comprend en général des oiseaux d'assez
grande taille, à tête petite et à cou long et mince.
Bec allongé, fort, droit ou recourbé, exceptionnellement élargi en
forme de spatule ; lorums et parfois la face et une partie du cou nus ;
ailes bien développées; queue courte à rectrices assez étroites; jambes
emplumées à peu près sur la moitié de leur longueur ; tarses allon-
gés ; doigts au nombre de quatre, tous bien conformés, les antérieurs
réunis par une courte membrane et munis d'ongles robustes.
Mœurs. — Les Hérodiens habitent les marécages ou le bord des
eaux courantes, rarement les lieux secs. Ils se nourrissent de petits
vertébrés, d'articulés, de mollusques et de vers, et cherchent souvent
leur nourriture dans l'eau. Ils nichent dans des endroits élevés, sou-
vent sur des arbres, et leurs petits sont nourris dans le nid.
FAMILLE DES ARDÉIDÉS.
Car. — Bec plus long que la tête, fendu au moins jusqu'au-dessous
de l'oeil, droit, fort, déprimé à la base, à bords des mandibules tran-
chants ; narines basales, placées dans des sillons plus ou moins allon-
gés et assez profonds ; lorums nus ; ailes allongées, larges et obtuses ;
queue courte, arrondie, formée de dix à douze rectrices ; tarses allon-
gés, scutellés en avant; doigts antérieurs longs et déliés, le pouce
allongé et portant sur le sol dans toute son étendue ; membranes
interdigitales peu développées; ongles comprimés, aigus, celui du
doigt médian pectine sur son bord interne.
Les sexes ne diffèrent guère extérieurement entre eux que par la
taille, mais les jeunes sont très différents des adultes.
Hab. — Cette famille est cosmopolite.
Mœurs. — On rencontre des oiseaux de cette famille depuis les
côtes maritimes jusqu'au haut des montagnes, mais toujours dans le
voisinage de l'eau, uelques-uns préfèrent les bords de la mer,
d'autres les cours d'eau, d'autres les marais. De leurs sens c'est la vue
qui parait le plus parfait.
Leur naturel est généralement haineux, méchant et craintif : ils
craignent les animaux plus forts qu'eux et se montrent cruels vis-à-
— 315 -
vis de plus faibles. Ils se nourrissent de proies vivantes, et nichent
souvent en colonies sur les arbres.
GENRE CXXXI.
HÉRON. — ARDEA.
Ardea, Briss. Ornith. V, p. 392 (1760) et auct.
Car, — Bec plus long que la tête, robuste, conique, à arête plus ou moins
arrondie ; mandibule supérieure échancrée vers le bout, sillonnée jusque près
de son extrémité, à sillon nasal large; narines allongées, plus larges en
arrière ; lorums nus ; ailes sub-obtuses ; queue courte, ne dépassant que
peu ou point les ailes, égale, à rectrices assez raides ; jambes emplumées à
peu près sur la moitié de leur étendue, la partie nue réticulée ; tarses allon-
gés, robustes, scutellés en avant, réticulés en arrière et sur les articula-
tions : doigt médian beaucoup plus court que le tarse, uni à l'interne par un
petit repli membraneux et à l'externe par une large membrane qui s'étend
jusqu'à la première articulation ; tous les doigts légèrement bordés. Cou long
et grêle.
Hah. — Ce genre est cosmopolite.
231. — Le Héron cendré.
ARDEA CINEREA, Briss.
(PI. 230).
Ardea, ardea cristata, ciNEREAet n^:via, Briss. Ornith. pp. 392-410 (1760).
Ardea major et cinerea, Lin. Syst. nat. I, p. 236 (1766).
Ardea rhenana, Sander, Naturforscher., XIII, p. 195 (1779).
Ardea johann.e, Gmel. Syst. nat. I, p. 629 (1788).
Ardea griseo-alba, Rich. et Bern. Actes Soc. hist. nat. de Paris, p. 117 (1792).
Ardea cineracea, Brehm, his, 1830, p. 988.
Ardea brag, S^'-Hil., Jacquem. Voy. dans l'Inde, IV, p. 85 (1844).
Ardea leucoph^ba, Gould, Proc. Zool. Soc. 1848, p. 58.
Der Fisch-Reiher, en allemand.
The Common Héron, en anglais.
De Blauwe Reiger, en flamand.
Taille : O'^SO ; ailes 0,45; bec 0,11 ; tarses 0,14.
Description des deux sexes adultes. — Tête blanche ; vertex, à partir des
yeux, et occiput d'un beau noir bleuâtre mais recouverts, sur le dessus do la
tête, par les longues plumes blanches et étagécs qui partent de la partie anté-
rieure du vertox ; plumes occipitales allongées et formant une huppe tom-
bante composée de deux à cinq longues plumes très effilées et noires ; cou
— 316 —
■blanc lavé de cendré et marqué sur sa partie médio-antérieure de taches
oblongues d'un noir bleu ; plumes du bas du cou en partie longues, effilées et
d'un cendré blanchâtre, et en partie plus longues, subulées et d'un blanc
lustré ; partie postéro-inférieure du cou, dos, ailes et queue d'un cendré
bleuâtre, avec de longues plumes effilées d'un cendré plus clair sur les scapu-
laires ; rémiges noirâtres ; épaules, poitrine, jambes, milieu du ventre et
sous-caudales d'un blanc assez pur ; côtés de la poitrine et flancs d'un noir
bleuâtre profond. Bec, iris et lorums d'un beau jaune ; pattes d'un brun
rougeâtre, lavées de jaunâtre aux articulations et sous les doigs .
Jeune. — Pas de huppe, ni de plumes effilées ou subulées aux scapulaires
et au bas du cou. — Dessus de la tête d'un gris noirâtre; joues blanchâtres;
gorge blanche ; cou cendré, blanc en avant avec des taches oblongues noires
sur la ligne médiane ; dessus du corps d'un gris cendré assez foncé ; dessous
blanc terne, avec quelques taches noirâtres sur la poitrine ; flancs cendrés.
Bec brun, la mandibule inférieure jaunâtre ; lorums d'un jaune verdâtre.
Poussin. — Lorums et tour des yeux nus, d'un brun fancé ; devant du cou,
centre du ventre, abdomen, région anale, dessous des ailes et des cuisses éga-
lement nus, mais jaunâtres; gorge, joues et côtés du cou semés de gaines
aiguës, blanches sur la gorge et les joues, rousses sur le cou; tout le dessus
de la tête couvert d'un duvet relativement épais, gris à la base, mais for-
mant par torsion des fils blanchâtres, forts et longs, atteignant jusqu'à quatre
centimètres au vertex, plus ou moins ondulés ; les autres parties à demi-
vêtues d'un duvet long, mais très clairsemé et laissant entrevoir la peau
brune ; duvet gris sur le manteau et les ailes, blanc sur les cuisses et les
côtés du ventre ; mandibule supérieure brune, avec teinte olivâtre au centre
et marteau blanc à l'extrémité ; mandibule inférieure olive ; pieds et ongles
gris de fer, avec une teinte jaunâtre aux genoux ; iris d'un jaune verdâtre
très pâle (J. Vian).
Hab. — Le Héron cendré habite presque toute l'Europe, l'Asie et
l'Afrique, ainsi que les îles qui
entourent ces continents. En
Scandinavie il s'élève jusque
sous le 68° 1. N., en Russie jus-
qu'au 6i° et en Sibérie il ne
dépasse guère le 57". En Europe
il est généralement commun ; il
est sédentaire en Belgique, en
Grande-Bretagne, en Irlande,
dans une grande partie de l'Allemagne et dans toutes les autres con-
trées du centre et du Midi.
- 317 —
En hiver il paraît généralement répandu dans toute l'Afrique, il
niche même en Algérie [Loche) et dans le sud du continent noir,
surtout dans la colonie du Cap [Layarcï). Il a été observé au Maroc
(Dtrike), au Tripoli, en Egypte, en Nubie, en Abyssinie et sur les
côtes de la mer Rouge {de Heufflin), à Mozambique (Pe^ens), à Zanzi-
bar, en Sénégambie, à la côte d'Or, au Gabon, dans l'Angola et le
Benguéla {Hartlaub, Verreauœ, etc.), dans le Damara [Andersson). Il
est de passage aux îles du Cap Vert [Dohm), hiverne aux Canaries
(Bolle), est sédentaire aux Açores [Godman) ; il est commun à Mada-
gascar [Grandidier), et a même été observé aux îles Comores et
Maurice (Hartlaub). — 11 paraît que les Hérons cendrés de l'Afrique
australe et de Madagascar sont notablement plus grands que ceux
d'Europe.
Cette espèce habite également la majeure partie de l'Asie, où sa
limite boréale ne paraît pas dépasser le 57"* 1. N. ; son aire géogra-
phique s'étend à l'Est jusqu'au Japon [Schlégel). Elle hiverne dans
tout le sud de l'Asie: en Perse [Blanford), dans l'Inde [Jerdon], à
Ceylan (Holdsivorth), dans l'Indo-Chine, en Chine {David), aux îles
Haïnan et Formose {Sioinhoé) et même à Bornéo, à Sumatra ( Vorder-
man) et à Java {Schlégel), ainsi que dans le sud de l'Australie {Gould}.
Mœurs. — Le Héron cendré est donc, pour nos contrées, un oiseau
sédentaire; mais il émigré des pays du Nord en septembre ou octobre
pour passer l'hiver dans le Midi ou en Afrique ; il retourne dans sa
patrie en mars et avril. Les migrations ont lieu par troupes de vingt
à cinquante individus ou par familles, et le plus souvent pendant la
nuit ; les oiseaux volent alors très haut dans les airs, lentement et en
formant une ligne oblique.
Le Héron cendré ou commun est assez abondant en Belgique sur
l'Escaut et sur la Meuse, dans la Campine, dans les polders de
Hoboken et des Flandres, et, en général, près de toutes les eaux
poissonneuses ; en hiver il se retire près des eaux qui ne gèlent pas ;
il est surtout abondant à l'époque des passages, et il n'est pas rare
d'en voir alors des volées de vingt-cinq à trente individus.
Cet oiseau aime surtout les eaux claires et on le voit aussi bien
près des étangs que près des fleuves et des rivières, pourvu que l'eau
ne soit pas profonde près des bords; dans les pays où il hiverne, il
séjourne souvent sur les côtes maritimes et près des lacs ; en été, il
recherche surtout les eaux qui traversent une forêt ou qui sont bordées
de grands arbres; on peut dire d'une manière générale, que cet
— 318 —
oiseau fréquente toutes les eaux, qu'elles soient courantes ou
stagnantes, douces ou salées, pourvu qu'elles soient poissonneuses,
car le poisson forme sa principale nourriture. Il lui arrive cependant
parfois de s'éloigner de l'eau pour errer dans les prés et les champs ;
il est probable que cela a lieu surtout quand sa pêche n'a pas été
fructueuse, et qu'il se voit obligé de faire la chasse aux grenouilles et
aux petits animaux des champs.
C'est sur les grands arbres que le Héron cherche généralement le
repos et passe ses nuits ; pendant les heures les plus chaudes des
journées d'été, on le voit parfois aussi dormir près d'un étang soli-
taire, dans un pré ou dans un champ éloigné de toute habitation. Il
dort généralement le cou rentré et les deux pieds reposant à terre ou
sur la branche, s'il est perché. Ses mouvements témoignent de la
nonchalance, et il reste souvent des heures entières immobile et
affaissé près de l'eau ou au sommet d'un arbre; mais dès qu'un bruit
suspect se fait entendre, il allonge aussitôt le cou, tourne la tête de
côté et d'autre et s'envole au moindre danger. Sa démarche est lente,
inquiète, et il ne sait pas courir bien vite; quand une blessure l'em-
pêche de s'envoler, il ne cherche guère son salut dans la fuite, mais
attend l'ennemi de pied ferme, se défend à coups de bec, visant surtout
les yeux de l'assaillant, ce qui le rend très dangereux. Il nage mala-
droitement et seulement quand il y est forcé, mais s'empresse de
gagner la rive au plus vite ; par contre, il aime à marcher dans l'eau
mais sans que celle-ci atteigne son plumage. Son vol est facile, assez
uniforme et caractéristique; l'oiseau tient le cou recourbé, de façon que
la tête repose sur la base du cou, et les pattes étendues en arrière.
Le Héron cendré est fort craintif et plus défiant qu'aucun de ses
congénères, aussi est-il fort difficile de surprendre un sujet adulte ;
il connaît le danger, tout homme lui paraît suspect et il le fuit à
temps. Un coup de tonnerre le remplit d'effroi et lui fait pousser des
cris de terreur; la pluie le rend triste. A certains moments, il prend
les poses les plus grotesques qui n'ont rien de gracieux. Il vit souvent
en troupes composées de diverses espèces de la même famille, mais ne
se montre guère sociable, car son naturel est haineux et méchant ;
parfois sans raison, il lance un coup de bec à un voisin trop confiant,
ou l'empêche de manger sans profit pour lui-même. Il se montre
cependant un peu plus sociable à l'époque de la reproduction, et l'on
observe alors dans certains pays, des colonies de Hérons formées de
plus de cent couples nichant les uns près des autres. Sa voix est un
— 319 —
cri rauqiie, guttural et retentissant ressemblant à krèïk\ son cri
d'avertissement est bref et peut se rendre par ka.
La nourriture du Héron se compose surtout de poissons ayant de
dix à vingt centimètres de long, de grenouilles, de têtards, de
lézards, de serpents, de larves, d'insectes et de vers; à l'occasion, il
prend des poussins d'oiseaux aquatiques, pille les nids des oiseaux
qui nichent dans les champs et fait la chasse aux mulots, aux campa-
gnols et aux musarai,2:nes. Pour pêcher, le Héron entre dans l'eau, s'y
promène à pas lents, le cou fléchi, le bec incliné sur l'onde ; à chaque
poisson qui passe, le cou s'allonge avec la rapidité d'un ressort qui
se détend, le bec ou la tête entière disparaît sous l'eau et le poisson
est pris ; celui-ci est avalé aussitôt ou retourné de façon à pouvoir
l'engloutir la tête la première.
Reproduction. — Dans certains pays, les Hérons nichent donc en
nombreuses sociétés et forment çà et là des colonies ou héronnières.
On rencontre de ces héronnières surtout en Hongrie, en Bulgarie^ en
Pologne, etc. En France, on n'en connaît que deux ou trois dont
la principale appartient au comte de Sainte-Suzanne ; elle est située
dans son parc d'Ecury (Marne), à proximité du grand marais de
Champigneulles. A l'époque de la reproduction on voit là de cent
cinquante à deux cents nids, placés sur un groupe d'arbres, la
plupart des aunes. En Belgique le Héron niche par couples isolés.
Baldamus a décrit une héronnière qu'il a visitée en Hongrie. Sur
des saules et des peupliers qui s'élèvent çà et là dans une plaine
immense, nichait toute une colonie de Hérons de diverses espèces ; les
nids étaient répartis sur cent à cent cinquante arbres, mais plusieurs
de ces arbres portaient de dix à vingt nids. Sur les branches les plus
fortes des saules les plus grands se trouvaient des nids de Hérons
cendrés; puis à côté, souvent bord à bord, ceux des Bihoreaux; des
branches plus faibles et plus élevées supportaient ceux du Héron
garzette et du Cormoran nain, tandis que plus bas étaient les petits
nids du Blongios. Tout à coup de grandes clameurs partent de la
colonie : c'est un Milan, dont l'aire se trouve non loin de là, qui
enlève tranquillement un jeune Héron. « La mère quitte son nid,
menaçant, grognant, mais elle laisse le ravisseur s'éloigner, quand
d'un seul coup de son bec formidable, elle pourrait le mettre à mort.
Quelques Bihoreaux poursuivent leur ennemi en criant; mais de
nouveaux cris plus forts les rappellent : ici une Pie, là une Corneille
ont profité de leur absence pour enlever quelques œufs ; les voisins
— 320 —
de l'individu pillé poussent des clameurs formidables, tandis que
d'autres pillards, mettant à profit le tumulte, se précipitent sur les
nids abandonnés un instant et s'enfuient avec leur butin. »
Il n'y a rien de plus mouvementé et de plus curieux à voir qu'une
pareille héronnière, mais il faut pouvoir supporter ces cris assourdis-
sants et continuels, cette odeur infecte résultant des excréments qui
couvrent le sol et les arbres et détruisent le feuillage ; ajoutez à cela
l'odeur des poissons qui n'ont pas été dévorés et dont la putréfaction
empoisonne l'atmosphère, et vous aurez une idée des désagréments
que procure le voisinage d'une colonie de Hérons.
En Chine, selon le père David, où personne ne songe à molester le
Héron, il établit ses héronnières un peu partout, sur des tours aban-
données, sur de grands arbres et jusque dans l'intérieur de la ville de
Pékin. _
Plusieurs auteurs mettent en doute que dans les contrées plates et
dépourvues d'arbres, le Héron place parfois son nid dans les roseaux;
c'est pourtant ce qui a lieu, suivant de Nordmann, dans les vastes
steppes de la Russie méridionale. Le baron d'Hamonville dit qu'en
Lorraine, les Hérons nichent isolément sur les grands étangs en
forêt, et que leur nid n'a aucun rapport avec celui de leurs similaires
vivant en société ; ils le placent au milieu d'un grand massif de
roseaux, sur un buisson de saules rabougris, ou simplement sur les
roseaux qui s'inclinent sous le poids, et le construisent fort négligem-
ment à l'aide de ces mêmes roseaux. Dans ces conditions, la ponte
serait de cinq ou six œufs, rarement moins.
C'est en avril que les Hérons construisent leur nid ou réparent
l'ancien. Ce nid a de 60 centimètres à un mètre de largeur; il est
ordinairement plat, grossièrement construit avec des branches sèches,
des brindilles, des roseaux, des feuilles, de la paille; l'intérieur est
garni de poils, de laine, de plumes et de fines brindilles. Les œufs,
au nombre de trois ou quatre, sont d'un vert pâle, sans taches et à
coquille épaisse et lisse; ils mesurent environ 61 millim. sur 45.
La femelle couve seule pendant trois semaines, et durant ce temps le
mâle lui procure en grande partie les ahments nécessaires.
Les poussins paraissent en proie à une faim dévorante et ils absor-
bent des quantités incroyables d'aliments, mais en rejettent beaucoup.
Leur séjour au nid est d'un peu plus de quatre semaines, mais les
parents ne les abandonnent que quand ils savent bien voler. Tous se
séparent alors et la héronnière est abandonnée.
- 321 -
232. — Le Héron pourpré.
ARDEA PURPURASCENS, Briss.
(PI. 231)
Ardea purpurasckns, a. cristata PURPURASCENS, A. BOTAURUS MAJOR, Briss. Omith.
V, pp. 420, 424, 455(1760).
Ardea purpurea. Lin., Syu. nat. I. p. 236 (1766).
Ardea rufa et variegata, Scop., Ann. I. Hist. nat. pp. 87, 88 (1769).
Ardea CASPiA, Gmel. Reise Russl. Il, p. 193, pi. 24 (1774).
Ardea RUTILA, Lath. Gen. syjt. siippl. 1, p. 291 (1787).
Ardea botaurus et purpurata, Gmel. Syst. nat. I, pp. 636, 641 (1788).
Ardea monticola, Pic. de la Peyr , Mam, Ois. de la Haute-Garonne., p. 44 (1799).
Ardea caspica, Turt. Brit. Fauna, 1., p. 54 (1807).
Ardea purpurea var. Manilensis, Mey. Nov. actor. Acad. Caes. Leop. Car. nat.
CUR. 1834, p. 102.
Ardea pharaonica, Bonap. Consp. gen. aviuni, II, p. 113 (1857).
Der Purpur-Reiher , en allemand.
The Purple Héron, en anglais.
De Purper-Reiger, en flamand.
Taille : 0^78 ; ailes 0,37 ; bec 0,12 ; tarses 0,13.
Description des deux sexes adultes. — Dessus de la tête d'un noir verdâtre
avec deux longues plumes effilées, subulées et tombantes à l'occiput ; gorge
blanche ; côtés de la tête et cou d'un roux vif nuancé de roux clair ; une raie
noire partant de la commissure du bec et se dirigeant vers l'occiput, une
autre médiane sur la partie postérieure du cou et passant au gris vers le bas,
et deux autres raies noires latérales ; devant du cou marqué de longues taches
noires sur un fond blanc roussâtre ; jabot orné d'une touffe de plumes lon-
gues et effilées grises, blanchâtres et rousses ; dessus du corps, ailes et
queue d'un cendré sombre à reflets verdâtres et nuancé de roux sur le bord
des couvertures ; scapulaires formées en partie de longues plumes décompo-
sées cendrées et d'un roux vif ; poitrine d'une teinte pourpre ; ventre d'un
cendré sombre à reflets verdâtres et nuancé supérieurement de pourpre ;
flancs d'un cendré clair; jambes, bord de l'aile et couvertures sous-alaires
roux ; rémiges brunes ; sous-caudales d'un gris sombre et en partie avec une
strie blanche au centre. Bec, lorum et iris d'un jaune orangé ; pattes d'un
brun noirâtre, rougeàtres aux articulations, aux membranes et sous les
doigts.
La coloration de la femelle est en général moins vive, les plumes effilées
de l'occiput moins longues et la taille un peu plus petite ; il est cependant
fort difficile de reconnaître le sexe au plumage.
Jeune. — D'un roux clair, plus pâle en dessous, avec les plumes du dos
et des ailes d'un cendré brunâtre au centre ; dessus de la tête d'un brun
Tome h.— 1801. 41
— 322
pourpré, noirâtre au front ; gorge blanche ; devant du cou avec des taches
allongées brunes. Point de plumes effilées à la nuque, aux scapulaires et au
bas du cou.
Poussin. — Lorum, tour des yeux, devant du cou, centre du ventre et de
l'abdomen, région anale, dessous des ailes et des cuisses nus, d'un jaune
nuancé, assombri sur la face ; dessus de la tête semé de tiges ondulées, lon-
gues, sans toutefois excéder 25 millim., fortes, brunes et un peu barbelées à
la base, fines et blanches à leur extrémité ; duvet des côtés du cou, du dos et du
dessus des ailes brun ; celui de la poitrine et du ventre blanc ; bec d'un
corné jauûâtre, avec les deux pointes et le marteau blancs ; pieds et ongles
jaunes [J. Vian.)
Hab. — L'aire géographique du Héron pourpré est bien plus éton.
due que celle du Héron cendré,
mais elle ne paraît guère dépas-
ser le 53° 1. N. Nilsson signale
cependant une capture faite le
y 18 avril 1853 dans le sud de la
Suède prés de Ostra Torp. En
à\ été, il séjourne régulièrement
'j^îj dans tout le midi de l'Europe, y
" compris le littoral des mers
Noire et d'Azow, les cours inférieurs du Dnieper et du Don, la Cri-
mée, le Caucase, la région Aralo-Caspienne, le Tian-Chan et la Son-
garie russe {Bogdanow). Il est plus ou moins commun dans le sud de
l'Allemagne, en Autriche et surtout près du Danube, en Bulgarie
{Elwes et Buckley) et dans les grands marais de la Grèce {Linder-
Tïiayer) ; il est plus rare en Bohême [Spatny). Il se montre irrégulière-
ment dans le nord de l'Allemagne {Borggreve), mais il niche cependant
dans les marécages de la moyenne et de la basse Silésie {Gloger), et
M. A. von Homeyer a même trouvé un nid sur un îlot du Rhin, près
de Darmstadt. Cet oiseau ne visite aussi qu'irrégulièrement la Hollande
{Schlégel), la Belgique, ainsi que les départements du nord et de
l'ouest de la France, mais il se reproduit en assez grand nombre
dans le midi de ce pays {Degl. et Gerbe). Le Héron pourpré n'hiverne
pas en Europe ; Malherbe dit cependant qu'en Sicile on observe
encore pendant l'hiver quelques-uns de ces oiseaux dans les marais
de Catane. Pour l'Angleterre c'est un oiseau de passage accidentel,
se montrant surtout dans les parties méridionales et orientales ; deux
captures seulement ont été signalées en Ecosse et une en Irlande
{Seebohm).
— 323 -
En Afrique on rencontre cette espèce dans toutes les parties qui lui
conviennent, depuis l'Algérie {Loche) et l'Egypte {Shelley) jusqu'au
cap de Bonne-Espérance [Layard), et du Congo {Mus. Brux.) au
Zambèze {Chapman). Il n'est pas rare à Madagascar {Grandidier) et
sa présence a également été signalée aux îles Comores {de Heuglin).
Ce Héron habite aussi, soit en été, soit à l'état sédentaire, toute
l'Asie tempérée et chaude, depuis le Turkestan {Severtzow) jusqu'en
Chine {Dcœid) et au Japon {Hartlaub, Finach). Il habite également les
îles Andaman {Walden), Sumatra, Célèbes {Seebohm), Bornéo, Java
{SchlégeJ) et les Philippines {Steeré).
Mœurs. — Le Héron pourpré n'habite donc l'Europe qu'en été;
c'est à la fin de mars ou au commencement d'avril qu'il reprend posses-
sion de son ancien domaine, car il retourne toujours dans les lieux
qui l'on vu naître. Il émigré en septembre, voyageant en plein jour
par petites troupes qui traversent l'espace à une grande hauteur,
mais les individus volent à la file en formant une ligne oblique.
Cet oiseau a des mœars assez différentes de celles de son congénère
et qui le rapprochent plutôt du Butor, Il se tient de préférence dans
les marais et dans les endroits marécageux, et ne se montre près des
eaux courantes que quand elles sont bordées d'herbages ou de buis-
sons de saules et d'aunes ; il affectionne surtout les lieux couverts de
roseaux et de joncs entre lesquels il peut se cacher. Jamais on ne le
rencontrera près d'une eau découverte, et il est rare de le voir dans des
herbages moins hauts que lui ; il aime cependant les espaces libres
que l'on rencontre par-ci par-là dans les forêts de roseaux quand,
bien entendu, l'eau n'y est pas trop profonde et qu'il peut s'y promener
sans mouiller son plumage. Il se montre aussi dans des endroits sim-
plement humides et entourés de buissons, mais jamais dans les prés
et les champs. Il est rare qu'il aille se percher sur un arbre, et quand
il le fait, il a soin de se cacher dans la partie toufïue. Par sa démarche
et son vol il ressemble assez au Héron cendré, mais il se montre en
général moins lourd.
Son naturel est moins haineux et moins faux que celui de son con-
génère, mais il est aussi moins craintif. « Là où il est peu chassé, dit
de Nordmann, il ne montre aucune défiance ; à l'approche d'un homme
il ne prend pas la fuite, mais cherche à se soustraire aux regards par
toutes sorlos de gestes bizarres et do postures contraintes; au reste
c'est un oiseau solitaire, inoffensif et même stupide. y II ne sort guère
de sa retraite que vers le soir et de grand matin, et alors il est dans
- 324 -
toute son activité ; mais il est rare de le rencontrer dans la journée,
et si on le voit, c'est qu'un ennemi quelconque l'a forcé de quitter ses
roseaux et ses joncs.
En plein jour il sait rester des heures entières à la même place et
presque sans bouger. Il ne s'inquiète guère des autres oiseaux qui
vivent autour de lui, et se montre assez sociable avec les individus
de son espèce. Son cri ne diffère pas de celui du Héron cendré,
mais il est moins sonore, et de loin il ressemble à s'y méprendre
au cri du Canard sauvage, mais l'oiseau ne le fait entendre qu'en
volant.
La nourriture de cet oiseau se compose principalement de poissons,
de grenouilles et de têtards, mais il prend aussi des insectes, des
larves, des vers, des mulots et autres petits rongeurs.
Il paraît que les jeunes qu'on élève n'attaquent pas à coups de bec
les personnes et les chiens qui les approchent, comme le font le Héron
cendré et le Butor.
Reproduction. — Le Héron pourpré ne nicho régulièrement en
Europe que dans les parties méridionales et sud-est du continent, et
dans les localités où l'espèce est abondante, il n'est pas rare de voir
plusieurs nids non loin les uns des autres.
Le nid est généralement construit dans les grands massifs de
roseaux, plus rarement dans un buisson ou sur un arbre. Gôbel
trouva un nid dans un buisson, et le major Legge dit qu'à l'île de
Ceylan cet oiseau niche en colonies sur des arbres et souvent en
société de l'Aigrette blanche. Dans les marais le nid repose soit sur
un petit monticule émergeant de l'eau, soit sur de vieilles souches de
roseaux ou de joncs. Il est formé de roseaux, parfois entremêlés de
bûchettes, et le tout est recouvert d'un mélange de joncs, de chaumes
et de diverses graminées; au centre de cette grossière construction,
qui a au moins soixante centimètres de diamètre, se trouve un enfon-
cement pour les œufs.
L'époque de la ponte varie suivant les contrées : en Europe elle a
lieu en mai, et dans les parties les plus méridionales, vers la mi-
avril ; dans l'Inde, d'après Hume, on trouve des œufs frais depuis
avril jusqu'en août suivant la région ; le major Legge trouva des
œufs en décembre dans le nord de Ceylan, et des poussins en mars
dans le sud de la même île. M. Hume dit avoir observé, dans l'Inde,
environ une centaine de nids de Hérons pourprés, qui se trouvaient
invariablement sur une litière de roseaux ou de joncs, et qu'il n'a
- 32?i -
jamais vu cet oiseau nicher en société d'autres Hérons (1). Au Trans-
vaal M. Ajres a souvent remarqué cinq ou six couples nichant en
société ; M. Oates a vu en Birmanie, de grandes colonies de ces
oiseaux nichant dans les roseaux en juillet et août. Ce qui précède
démontre que l'époque de la reproduction et la manière de nicher de
ce Héron varient suivant les pays.
La ponte est ordinairement de trois ou quatre œufs, quelquefois de
cinq, mais quatre est le nombre le plus ordinaire. Ceux-ci sont d'un
bleu verdâtre et rudes au toucher ; ils mesurent de 54 à 56 millim.
sur 40 à 41, et ressemblent entièrement aux œufs du Héron commun,
mais ils sont généralement un peu plus petits.
GENRE CXXXII
AIGRETTE. — HERODIAS.
Akdea, Briss. Ornith. V, p. 392 (1760) et auct. plur.
Herodias, Boie, /«s, 1822, p. 559.
Egretta, Bonap. Comp. List, p. 47 (1838).
Erodius, Macg. Mœi. Brit. B. Il, p. 134 (1842).
Garzetta, Bonap. Consp. av. Il, p. 118 (1857).
Car. — Les Aigrettes ont les mêmes caractères que les Hérons, mais leur
bec est relativement plus mince et moins élevé à la base ; leurs formes sont
plus sveltes ; les jambes sont dénudées sur une plus grande étendue. Elles se
distinguent encore par ini plumage d'un blanc pur à toutes les époques de
leur vie, et par les aigrettes que forment, à la saison des amours, les plumes
du dos et des scapulaires, d'où leur est venu le nom qu'elles portent.
Hab. — Comme le précédent ce genre est cosmopolite.
233. — L'Aigrette blanche ou Héron aigrette.
HERODIAS ALBA, Reichenb. ex Lin.
(PL 232).
Ardea candida, Briss. (part.) Ornilh. V, p. 428(1760).
Ardea alba, Lin. Syst. nal. I, p. 239 (1766).
Arde.v egrettoides, Gmel. lieis'^ Russi. II, p. 139, pi. 25 (1774).
Ardea egretta, Bechst. (necGrael.), Naluri/. Beiilsc/i''. III, p. 41 (1793).
Herodias egretta, Boie (nec Gmel.) Isis, 1822, p. 559.
Ardea flavirostris, Wagl. Syst. avium, Ardea, sp. 9 (1827).
Egretta melanorhynciia, Wagl. Isis, 1829, p. 659.
(l) A. Hume, Xfs/s ami eg^'S [ndian Birds, p. 6ii. Calcutta, 1S75.
— 326 —
Herodias CANDiDA, Brehm, Isis, 1830, p. 988.
Ardea TORRA etPUTEA, (Buch.) Frankl. Proceed. Zool. Soc. 1831, pp. 123, 124,
Ardea TiMORENSis (Cuv) Less. Traité d'Orn. p. 575(1831).
Leptorodas FLAViROSTRis, Hempp. Ehr. Symb. Phys. fol. m. (1832).
Ardea modesta, Gray et Hardw. III. Ind. Zool. II, pi. 49 (1834).
Ardea longicollis, Meyen, Nov. act. Acad. Caes. Leop. Car. nat. cur., 1834, p. 104.
Egretta alba, Bonap. List. B. Eur. N. Am. p. 47 (1838).
Ardea orientalis, Keys. et Bl. Wirbelth. Eur. p. 218 (1840).
Erodius VICTORIA et ALBUS, Macg. 3Ian. Brit. B. pp. 131, 134 (1842).
Herodias flavirostris, Gray, Voy. Ereb. and Terr. p. 12 (1843*.
Herodias modesta, Gray, List. spec. B. Br. Mus. III, p. 77 (1844).
Herodias strmatophorus, Gould, B. ofAustr. VI, pi. 56 (1848).
Herodias alba et syrmatophora, Reichenb. Syn. aviutn, ûg. 1028-29 et 2407 (1851).
Herodias Latiefii et ? BRACHYRHYNCHus, A. Breh. Journal/. Orn. 1854, p. 80.
Egretta syrmatophora et modesta, Bonap. Consp. av. II, p. 117 (1857).
Ardea syrmatophora, Gray, Proceed. Zool. Soc. 1858, p. 197.
Ardea intermedia, Finsch (nec Wagl.) Joiirn. f. Orn. 1867, p. 332.
Egretta Rupelli (Bonap.) Gieb. Thés. orn. I, p. 409 (1872).
Herodias torra, Salvad. Cat. Ucc. Born. p. 347 (1874).
Ardea alba var. Modesta, Briigg. Yerh. nalurw. Ver. Brem. 1876, p. 96.
Der Silberreiher, en allemand.
The Great white Egret, en anglais.
De Groote Zilverreiger, en flamand .
Taille .-O'^Sl ; ailes 0,41; bec 0,116; tarses 0,16.
Description des deux sexes en été. — D'un blanc pur dans toutes ses parties ;
plumes de l'occiput et du bas du cou assez allongées ; scapulaires très lon-
gues, à baguette blanche, raide, droite, aplatie et à barbes rares, décom-
posées et filiformes, formant un panache dorsal qui dépasse la. queue de
plus de 25 centim. Parties nues des côtés de la tête d'un vert tendre et jau-
nâtre; iris jaune; bec noir; pattes brunes, la partie nue des jambes plus
pâle et tirant sur le jaunâtre.
En hiver. — Plumes de l'occiput et du bas du cou plus courtes, et absence
complète du panache d'aigrettes dorsales. Bec jaune et non noir.
Jeune. — Comme en hiver, mais d'un blanc plus terne et le bec d'un jaune
plus pâle.
La femelle est plus petite que le mâle et le jeune est ordinairement d'une
taille inférieure à celle de la femelle.
Poussin. — Face, gorge, une partie du cou et flancs nus et d'un jaune
assez intense; toutes les autres parties couvertes d'un duvet blanc, filamen-
teux, très long et droit sur la tête. Bec jaunâtre ; pattes roussâtres.
Remarque. — Les auteurs sont peu d'accord sur les espèces d'Ai-
grettes à adopter, et l'analogie qui existe entre plusieurs d'entre elles
a produit une grande confusion. Pour Schlégel, le H. alba n'existe
— 327 —
qu'en Europe, dans le nord de l'Afrique et dans les parties occiden-
tales de l'Asie; le H. egretta habiterait rAmérique,le reste de l'Afrique,
l'Asie et l'Océanie. Or, cette dernière espèce se distingue des sujets
de l'ancien monde, par son bec jaune en toutes saisons, tandis que les
Aigrettes d'Europe, d'Asie, d'Afrique et d'Océanie ont le bec noir en
été et Jaune en hiver et pendant le jeune âge; au moment de la mue
on rencontre des individus qui ont le bec en partie noir et en partie
jaune. Le H. egretta est donc une espèce purement américaine.
Il reste à comparer la forme type alba à celle désignée, suivant les
auteurs, sous les noms de torra, ^modesta, syrmatophora, etc. Pour
les uns, cette dernière forme est une espèce distincte, pour les autres
ce n'est qu'une race un peu plus petite de Valba, d'autres enfin, ne la
distinguent en aucune façon de la forme type, et je partage cette
manière de voir. 11 est certain que la forme orientale ne diffère des
sujets d'Europe que par une taille un peu plus faible. Mais si l'on
mesure un certain nombre d'Aigrettes de diverses provenances, on
trouvera des dimensions bien différentes, et toutes les proportions
entre les oiseaux les plus grands et les plus petits (1). Cette différence
de taille est donc sans valeur spécifique, comme l'ont déjà reconnu
Blyth, Jerdon, David, Hartlaub, Grandidier, A. Milne Edwards et
bien d'autres. Si l'on veut tenir compte de la taille, on doit, pour être
logique, ériger en espèce le Héron cendré de l'Afrique australe et de
Madagascar, qui est notablement plus grand que celui de nos contrées.
Hab. — L'Aigrette blanche habite le sud-est de l'Europe, le
^^^^^fW^Î midi de l'Asie, l'Archipel Indien
lîr f&-^^|^^ I jusqu en Australie et toute
M&iuJ^J l'Afri
Afrique ; elle se montre acci-
" 1 dentellement dans l'Europe occi-
dentale et centrale.
M. J. E. Harting mentionne
j dix-huitcaptures faites à diverses
époques en Angleterre, et le
^ D bundstrom en signale cinq
pour le midi de la Suède. On voit cet oiseaux assez fréquemment dans
le sud- est de l'Allemagne, surtout en Silésie où il a môme niché
{Borggrevé) ; un individu a été tué près do Berlin en 18:31. 11 est
(i) Si les mesures données par Bullcr sont i.xaclcs, c'est à lii jSouVi lle-Zclaude que se trouve-
rait la race la plus grande.
— 328 -
assez répandu dans certaines parties de l'Autriche et de la Hongrie,
{Naumann), dans la Dobrodja et la Bulgarie [Alléon), mais on ne le
Yoit qu'accidentellement en Pologne {Taczanoioski). Schlégel ne
mentionne qu'une seule capture pour la Hollande, en 1855 ; la même
année, dans le courant du mois de mai, un beau sujet adulte fut tué
en Belgique près de Mon s, un autre fut pris quelques temps après
près de Tongres (C. F. Dubois) ; le Marquis de Wavrin me signale
une troisième capture faite dans notre pays, il y a une vingtaine d'an-
nées, à Corroy-le-Grand. Cette espèce est aussi très rare en France:
Bâillon indique une capture près d'Abbeville, Degland en signale une
autre près de Montreuil- sur-Mer et une sur la Nied à quelques lieues
de Meiz, le 13 décembre 1822 ; Crespon a vu plusieurs de ces oiseaux
qui avaient été pris dans les marais qui avoisinent le Rhône à son
embouchure ; M. Lacroix dit qu'il connaît trois captures authentiques
aux environs de Toulouse, qu'un sujet a été pris-Je 17 février 1866
près de Gimont, et que quelques couples se reproduisent de loin en
loin dans les marais du département des Pyrénées-Orientales.
L'Aigrette paraît aussi être rare en Espagne ; elle a été observée
dans diverses localités et surtout près de Gérone {Vayreda) ;
M. Saunders ne l'a observée qu'une seule fois, le 2 mai 1868, dans les
marais du Guadalquivir, mais il dit qu'elle est moins rare sur les côtes
de l'est. Elle est aussi moins rare dans certaines parties de l'Italie,
où elle hiverne, surtout en Vénétie et en Toscane [Giglioli), et passe
souvent par bandes nombreuses dans l'intérieur de la ^\c\\q [Malherbe)',
elle est plus rare en Grèce, quoiqu'elle paraisse y être sédentaire
[Lindermayer), mais elle est très commune dans les marais de la
Macédoine {Ehves et Buckley) et dans tous les pays qui entourent le
Pont Euxin, oîi elle séjourne depuis le commencement de mars
jusqu'à la fin de septembre [de Nordmann) ; on la rencontre du reste
dans une grande partie de l'empire russe : le littoral des mers
Noire et d'Azow, la Crimée, le Caucase, la région Aralo-Caspienne,
le Tian-Chan, la Songarie russe, la Daourie, le pays Oussourien et le
bassin du fleuve Amour [Bogdanoiv) ; Dybowski en a rapporté de
l'Argun et du port de Strielok. Elle est commune dans toute la Chine
(David) et habite tout le sud de l'Asie jusqu'à Ceylan [Leggé), Formose
{Swinhoe) elle 3si^on{Siebold). Elle habite également la plupart des
îles de l'Archipel Indien {Millier, Bernstein, Wallace, etc.), la Nou-
velle-Guinée [Beccari), l'Australie, la Tasmanie [Gould) et la Nouvelle-
Zélande [Buller).
- 329 -
En Afrique cet oiseau paraît répandu partout où il y a des marais
et des eaux qui lui conviennent : il a été observé aussi bien dans les
parties septentrionales [Loche] qu'au cap de Bonne-Espérance
[Layard], à la Côte d'Or [Pel] et au Benguela [Anchieta] qu'à Mozam-
bique [Peters] et en Egypte {de Heuglin) ; il n'est même pas rare à
Madagascar [Grandidier).
Mœurs. — Ce bel oiseau arrive en Europe en avril ei émigré en
septembre. Il voyage en plein jour, vole très haut et en troupes plus
ou moins nombreuses ; dans les contrées où l'espèce est commune, il
émigré en bandes composées de vingt à trente individus,
L'Aigrette blanche habite les mêmes localités que le Héron cendré :
les eaux découvertes, les cours d'eau, les étangs et les marais, mais
recherche toujours les endroits les plus tranquilles; en hiver elle se
tient autant dans les pâturages que dans les marais, mais on ne la
voit jamais sur les côtes maritimes.
Ses mœurs ressemblent aussi à celles du Héron cendré ; comme ce
dernier elle prend les postures les plus singulières, cache sous ses
plumes la tête, le cou et une patte, et de loin on ne distingue alors plus
qu'une masse blanche reposant sur un mince support. Mais tous ses
mouvements sont plus gracieux que ceux du Héron, sa démarche est
plus légère, son vol plus beau mais bruyant. L'Aigrette est assez
sociable, vit en bonne intelligence avec les autres oiseaux, mais reste
indifférente à leurs avances. Elle n'a ni la ruse, ni la méchanceté de
la plupart des autres Ardéidés, et ne se montre pas très farouche dans
les lieux où elle se croit en sûreté; à Pékin, dit l'abbé David, on en
voit souvent sur les pièces d'eau qui a voisinent le palais impérial.
Elle est cependant prudente et craintive et choisit toujours pour s'y
fixer, les endroits où elle sera le plus à l'abri des dangers. Naumann
croit qu'elle est plus facile à tirer que le Héron cendré ; A. Brehm est
d'un avis contraire, il a toujours vu cet oiseau très méfiant ; il a d'ail-
leurs, dit Brehm, de bonnes raisons pour l'être, car dans sa patrie on
le chasse avec ardeur pour ses belles plumes dont on fait des parures
de grande valeur. Aux yeux des Hongrois et des Valaques, c'est
chose méritoire que d'avoir pu surprendre un oiseau aussi prudent.
La nourriture du Héron aigrette se compose de poissons, de gre-
nouilles, d'insectes, de larves, de vers ; il aime aussi à faire la chasse
aux mulots, aux campagnols et même aux rats, (Quoiqu'il ait quelque
difficulté à les avaler. Suivant le docteur Radde, l'Aigrette se montre
très adroite à cette chasse, et elle tue les rats en leur donnant un
Tome u. — 18'J1 -l-
— 330 —
violent coup de bec sur la tête ; elle les jette ensuite dans l'eau pour
les mouiller et les avale ainsi avec plus de facilité, la tête toujours la
première ; ceci démontre la grande dilatabilité de son œsophage.
Reproduction. — L'Aigrette blanche niche aussi bien sur les arbres
que dans les marais. En Hongrie elle établit son nid dans les fourrés de
roseaux qui couvrent les marais, mais sans éviter les arbres ; elle
agit suivant les lieux, c'est-à-dire qu'elle construit son nid sur un
arbre dans les endroits où elle se trouve à l'abri de tout danger,
dans le cas contraire elle se fixe dans les roseaux. Dans l'Inde, suivant
Hume, l'Aigrette niche sur les arbres en société d'autres espèces de
Hérons, d'Ibis et de Cormorans pygmées; les nids de ces différentes
espèces sont disposés par groupes de cinq ou six, l'un touchant parfois
l'autre, et l'on voit souvent vingt à trente de ces nids sur le même
arbre. En Chine, dit l'abbé David, les héronnières de l'Aigrette
sont assez nombreuses dans les environs de Pékitr; sur les grands
arbres qui entourent les pagodes.
Baldamus, qui explora les provinces danubiennes dans la saison de
la ponte, ne vit pas d'Aigrettes dans les héronnières établies sur les
arbres ; il découvrit un nid dans les roseaux du Marais-Blanc, et il
émit l'opinion que l'espèce ne niche jamais sur des arbres. Jusqu'en
1863, on n'avait jamais vu d'Aigrettes nicher en Allemagne ; mais
cette année-là, deux-couples vinrent s'établir aux environs de Glogau,
qu'habitait alors von Homeyer, qui en fut bientôt informé par
l'inspecteur des forêts. Après avoir constaté le fait par lui-même, von
Homeyer alla visiter la héronnière tous les deux jours, et le 21 mai
il vit qu'il n'y avait plus que deux Aigrettes, mais elles couvaient. Le
nid était construit sur un assez gros pin et reposait sur une forte
bifurcation, tout près de la cime ; sa structure était grossière et peu
compacte ; quelques branches le dépassaient de cinq à sept pieds sur
les côtés, mais tout était libre au-dessus. Le nid le plus voisin de Hé-
ron cendré en était distant de huit pieds et il était plus élevé ; sur le
même pin, mais beaucoup plus bas, se trouvait un nid de Cresserelle.
Continuant ses observations, von Homeyer constatait le 28 juin que
les jeunes étaient éclos depuis quelques jours, et qu'ils criaient forte-
ment: keck,keck, keck,c>omïn.Q les jeunes Hérons cendrés, mais avec une
voix moins rauque.ll put suivre leur croissance jusqu'au 10 juillet ; ce
jour-là l'un des jeunes était debout au bord du nid,un autre était debout
dans le nid, le plus petit était encore accroupi ; deux jours plus tard, le
plus âgé quittait son gîte, s'envolait sur un arbre voisin et y passait
- 331 —
presque toute l'après-midi ; le second restait sur une brandie à côté
du nid, le troisième n'en était pas sorti; le soir tous trois étaient de
nouveau réunis dans leur demeure. Mais à partir de ce jour, le major
von Homeyer ne put plus continuer ses observations, son régiment
ayant reçu l'ordre de se porter sur la frontière de Pologne. Le 28 juil-
let, les trois jeunes Aigrettes quittent leur nid et sont tuées.
Le nid est grossièrement construità l'aide de bois mort, les plus fines
bûchettes à l'intérieur; mais quand il est placé dans un marais, il est
formé de roseaux secs recouverts d'autres végétaux aquatiques. Chaque
année les oiseaux reviennent à leur ancien nid et le réparent pour une
nouvelle couvée. La ponte est de trois ou quatre œufs, quelquefois de
cinq. Ceux-ci sont d'un vert bleuâtre, à grain rude et sans brillant ;
ils mesurent environ 61 millim. sur 43. Il est impossible de distinguer
ces œufs de ceux des Hérons précédents, mais ils sont généralement
un peu plus volumineux.
231. — L'Aigrette garzette.
IIERODIAS GARZETTA, Boie ex Lin.
(PI. 233).
Akdea EciKETTA, Briss. (necGm.) Ornith, V, p. 431 (1700).
Ardea GARZETTA, Lin. S>/st. nat. 1, p. 237 (1766).
AuDEA NivEA, Grael. Reise Russl. 1, p. 164 (1770).
Ardea SANTODACTYLOS, (jïael., ibidem 111, p. 253 (1774).
Ardea xanthodactyla, Kafin. Caratteri, p. 5(1810).
Ardea ^equinoctiaus (Lin.) Leach,5y*'<. cat. Mam. B. llrit. Mu.^., p. 33 (I.SIO).
HeRODIAS GARZETTA, BoiG, /sis, 1822, p. 559.
Ardea melanopus, Wagl. Isis, 1829, p. 660.
Herodias jubata et nivea, Brehm, Isis, 1830, p. 988.
Ardea nigrirostris et orientalis, Gray, Zool. MiscelL, pp. 19, 20 (1831).
Egretta nigrirostris, orientalis et GARZETTA, Bonap. Conn}t. List B. p. 47 (1838).
Ardea NiGRiPES, Tem. Man. cfOrt?. 111, p. 377 (1840).
Ardea candidis.sima, Kittl. (nec Gmel.), Luthe Vny. III, p. 327.
Erodius GARZETTA, Macg. Man. Brit. B. Il, p. 135 (1842).
Herodias iMMACULATA, Gould,P. ofAuslr. VI, pi. 59(1848).
Egretta nivea, Bonap. Rev. crit. de VOrn. Enr., p. 189 (1850).
Herodias LiNDEiiMAVERi, Breh. Joiirn. f. Orn. 1854, p. 80.
Garzetta IMMACULATA, Bonap. Compt. rend. XL, p, 722(1855).
Egretta JUHATA, Lindekmayeri, Brehm, Naumannia, 1855, p. 290.
Garzetta ejiretta, orientalis, nigripes, Bonai). Consp. av. pp. 118, 119(1857).
Herodias MELANOPUS, Gould, Ilandh. B. Austr. II, p. 304 (1865\
Hekodia.s Mr;iui-E.s, Wal.l. Trnns. Zool. Soc Vlll, 2, p. 99(1872).
382 —
Ardea GARZETTA vnT. NiGRiPES, Briigg. Ahliancll. naturw. Ver. Brem, V, p. 96 (1876).
Garzetta nia'ea, Tacz, Bull. Soc. Zool. de France., II, p. 15'J (1877).
Der Silber-Reiher, en allemand.
The Little Egret, en anglais.
De Kleine Zilverreiger, en flamand.
Taille : 0'"52 ; ailes 0,295 ; bec 0,093 ; tarses 0, 1 13.
Description des deux sexes adultes en été. — D'un blanc pur ; une petite huppe
occipitale avec deux ou trois plumes très longues, étroites, subulées et pen-
dantes; bas du cou orné à la partie antérieure d'une touffe de plumes à
extrémité très étroite et lustrée ; scapulaires composées de plumes dont la
baguette est grêle et relevée au bout, les barbes rares, très longues et fila-
menteuses ; ces plumes aigrettes forment un panache qui couvre une grande
partie du dos mais ne dépassant que peu la queue. Bec noir, la base de la
mandibule inférieure parfois jaunâtre; lorums nus, d'un beau violet; iris
d'un jaune plus ou moins vif, parfois blanc; jambes et tarses noirs, doigts et
base des tarses jaunâtres. La femelle est toujours un peu plus petite que le
mâle.
En automne. — Point de longues plumes à l'occiput, ni de panaches au
jabot et au dos.
Jeune. — Comme l'adulte en automne, mais d'une taille moins forte, d'un
blanc plus terne et un peu jaunâtre ; lorums d'un vert olivâtre; doigs d'un
jaune verdâtre.
Hab. — Cet oiseau habite les mêmes régions que le précédent,
mais il ne s'aventure jamais
dans les contrées septentrionales,
et ne paraît pas dépasser le 52°
1. N. En Europe, il niche en
Espagne, dans le delta du Rhône,
en Sardaigne, en Sicile, dans la
vallée du Danube, en Grèce, en
Bessarabie, en Moldavie et dans
les quatre provinces russes de
la mer Noire ; M. Giglioli pense qu'il est sédentaire en Sardaigne,
mais pour l'Italie continentale ce n'est qu'un oiseau de passage régu-
lier ou irrégulier suivant les régions {Salvador i) ; il est également de
passage régulier dans le midi de la France, mais on ne le voit qu'acci-
dentellement dans les départements du centre et du nord [Degl. et
Gerbe). En Belgique on ne connaît que quelques captures : feu mon
père en signale une près de la frontière hollandaise, et une près de
Namur vers la fin d'avril 1857 , plus récemment un individu de cette
— 333 —
espèce fut tué, en 1874, sur un banc de sable de l'Escaut. Il visite
quelquefois les lacs intérieurs de la Suisse {de Tschudi). Suivant
M. Harting, la Garzette aurait été prise dix fois en Angleterre, une
fois en Ecosse et une fois en Irlande ; mais M. J. H. Gurney dit que
cinq de ces captures sont douteuses. La présence de cette espèce en
Hollande n'est qu'accidentelle (Schlérjel); il en est de même dans la
haute Silésie et le centre de l'Allemagne {Naumann) ; elle a été vue
à plusieurs reprises près du lac de Trachenberg dans la propriété du
Comte de Hatzfeld {v. Homeijer); elle est plus rare que la grande
Aigrette eu Bohême {Fritsdi), et très rare en Pologne [Taczanoioski);
mais elle est très commune dans la Dobrodja et la Bulgarie {Alléon)
ainsi que dans le sud de la Russie {de Nordmmm) et en Hongrie dans
la vallée du Danube {Naumann).
Le Héron garzette habite également, du moins en hiver, toute
l'Afrique ; il a été observé jusqu'au cap de Bonne-Espérance
{Layard), et de la côte occidentale (Sénégambie, côte d'Or) à la côte
orientale (Mozambique, Zanzibar). M. de Heuglin pense qu'il niche
dans la basse Egypte, car il l'y a rencontré pendant l'époque de la
reproduction, c'est-à-dire d'avril en juin. Il n'est pas rare à Mada-
gascar {Grandidier).
A l'Est on rencontre cette espèce en Asie Mineure {Danford), en
Palestine {Tristram), au Caucase {Raddé), dans la région Aralo-
Caspienne, le Tian-Chan {Bor/danoid), dans tout le sud de l'Asie
depuis la Perse {Blanfovd) jusqu'en Chin,e {David) et au Japon
{Siebold). Elle est commune dans l'Inde {.1er don), à Ceylan {Legge)
dans l'Indo-Chine et aux îles Andaman {Tweddalé) et Formose
{Sivinhoe) ; elle est abondamment répandue dans la Chine entière et
ne quitte pas en hiver les provinces centrales et méridionales de
l'empire ; dans le sud elle est même plus commune que la grande
Aigrette, qui domine au contraire aux environs de Pékin {David).
Dans l'Archipel la présence de cet oiseau a été constatée aux Philip-
pines {Stcere), à Bornéo, Sumatra, Java {Schlégcl), Célèbcs {Mcf/er),
aux Moluques {Bernstein), à la Nouvelle-Guinée et îles voisines
{v. Rosenhe)-g) ainsi qu'en Australie {Gould, Rarnsat/).
Mœurs. — Ce bel oiseau arrive dans le midi de l'Europe en avril et
émigré en septcmbi'C. Il fréquente les marécages et les étangs décou-
verts, le bord des lacs et des eaux courantes et les marais à eau sau-
nâtre ; il paraît également aimer les bords de la mer, car Lîndermayer
dit (ju'à leur arriv(''(i au piintoin[)S, on Grèce, ces Aigrettes séjournent
— 334 —
quelque temps sur les côtes maritimes, qu elles ne quittent qu'au
bout d'un mois environ pour aller se reproduire sur les eaux douces
de l'intérieur.
L'Aigrette garzette se tient de préférence dans les eaux peu pro-
fondes, à fond sablonneux, où elle pêche toute la journée, s'inter-
rompant à peine pendant les heures les plus chaudes. Elle marche
dans l'eau avec légèreté, le corps horizontal, le cou et la tête rentrés ;
elle aime à se reposer sur les arbres, visite souvent les prairies
humides et généralement les lieux animés par des bandes d'autres
oiseaux aquatiques. A Java, dit Schlégel, cette espèce se tient dans
les mêmes lieux que la grande Aigrette ; sa marche est plus préci-
pitée et en général elle a dans tous ses mouvements plus de vivacité
que cette dernière. L'oiseau relève parfois son panache flexible et le
développe dans toute sa splendeur par des tremblements accélérés et
répétés huit à dix fois de suite ; c'est bien l'oiseauTe plus élégant et
le plus gracieux de la famille, ei comme il ne montre point de
défiance, on peut l'observer avec assez de facilité ; suivant Naumann,
il est assez prudent pour fuir le chasseur et se mettre hors de sa
portée, et assez intelligent pour distinguer le chasseur d'une personne
inoffensive. Son cri d'alarme est ali, ark et ork.
Le Héron garzette se nourrit comme ses congénères de petits pois-
sons, de gi'enouilles, de vers, etc. En Afrique de Heuglin trouva
vingt-cinq petits poissons dans le jabot et dans l'estomac d'un de ces
oiseaux.
Reproduction. — Cet oiseau niche le plus souvent en colonies dans
les massifs de joncs et de roseaux, dans des buissons ou sur des
arbres suivant les localités, et le plus ordinairement en société d'autres
espèces de la même famille; il est rare de trouver un couple de
Garzettes solitaire. Quand le nid est bâti sur un arbre, il est formé de
bois mort lâchement entrelacé, et l'on peut parfois apercevoir les
œufs au travers. Ailleurs, il est construit à l'aide de roseaux secs,
recouverts de feuilles de diverses graminées, de joncs, de foin et
autres matières végétales. Il ressemble en général aux nids des
Hérons précédents, mais il est plus petit.
L'époque de la ponte varie selon le pays : en Europe elle a lieu en
mai, dans le nord de l'Inde, d'après Hume, en juillet et août, dans le
sud de ce pays en décembre, et à Ceylan en avril. La ponte est de
trois à six oeufs d'un vert bleuâtre uniforme. Ils mesurent environ
44 millimètres sur 32.
— 335 —
Pendant que la femelle couve, le mâle pêche pour elle et la
pourvoit du nécessaire ; plus tard, il aide sa compagne à élever les
petits ; ceux-ci séjournent dans le nid jusqu'au moment où ils savent
bien voler, et ils sont alors en ctat de chercher eux-mêmes leur nour-
riture.
GENRE CXXXIII.
CRABIER. — ARDEOLA.
Ardea (part.) auctorum plurimorum.
Ardeola, Boie, Isis, 18ii2, p. 559.
BuPHUS, Boie, Isis, 1826, p. 356.
Cancrophagus, Kaup, Nat. Syst. p. 42(1829).
Egretta (part.), Swains, Classif, B. II, p. 354(1837)
BoTAURUS (part.), Macg. Man. Br. B. II, p. 125 (1842).
Car. — lîec de la longueur de la tête, droit, aigu, à arête assez vive ;
narines linéaires ; occiput garni d'une touffe de plumes rubanaires et tom-
bantes ; cou de longueur médiocre ; ailes subobtuses, les quatre premières
rémiges les plus longues ; pkuiies du dos longues et filamenteuses, dépassant
la queue ; celle-ci courte, égale; jambes emplumées sur les deux tiers de leur
longueur ; tarses plus courts que le doigt médian (l'ongle compris), scutellés
en avant, réticulés en arrière et aux articulations; doigt externe uni au
médian par une petite membrane qui s'étend jusqu'à la première articulation.
Hab. — Ce genre a des représentants dans le midi de l'Europe et
de l'Asie jusqu'aux îles de la Sonde, en Afrique et à Madagascar.
235. — Le Crabier chevelu
ARDEOLA RALLOIDES, Boie ex Scop.
(PI. 234).
Ardea botaurus minor, cancrofagus, cancrofagus rufus n.kvius, cancrokagus
LUTEUS, Briss. Ornith. V. pp. 452, 466, 471, 472 (1760).
Ardka RALLOIDES, Scop. Ann. I. Hist. nat. p. 88 (1769)-.
Ardea castanea, Gmel. Reise Russl. I, p. 165 (1770).
Aroea MARSiGLi et PU.MiLA, Lcpcch. Nov. Comm. Petrop. XIV, p. 502(1770).
Ardea comata, Pall. Reise Riiss. Reichs, II, {). 715 (1773) et auctor. plur.
Ardea squaiotta, erytiiropus et senegalensi.s, Ginel. Si/st. nat. I, pp. 634, 645
(1788).
Ardea griseo-alba, Bosc. Act. Soc. hist. nat. Paris, I, N" 59 (1792).
Ardea audax, Lapeyr. Neice schiced. Ab/i. III, p. 106 (1794).
Ardea botauhulus, Schr. Fauiia Doica, I, p. 221 (1798).
Ardea deaurata, Merr. Ersch. u. Griib. Encyd. V. p. 173 (liS20).
Ardeola kalloides, Boie, Isis, 1822, p. 55V).
CA.\ORoi'iiAGU.s rallomjes, Kaup, Nat. Syst. p. 42 (1829).
— 336 —
BuPHUs COMATUS, CASTANEUS, RALLOiDEset iLLYRicus, Brehm, Isis, 1830, p. 988.
Nycticorax ralloides, Hempr. et Ehr. Symb. pliys. Aves^ fol. m. (1833).
Egretta comata, Swains. Classif. B. II, p. 354 (1837).
BoTAURUS COMATUS, Macgill. Man. Brit. B. 11, p. 125 (1842).
BuBULCUs RALLOIDES, (Brm) A. Dubois, Consp. Avium Eur. p. 27 (1871).
Der Schopf-Reiher, en allemand.
The Squacco Héron, en anglais.
De Ralreiger, en flamand.
Taille : 0M4; ailes 0,24; bec 0,067; tarses 0,065.
Deseription des deux sexes adultes. — Dessus de la tête et du cou d'un
jaune d'ocre, avec les plumes allongées, lancéolées et bordées de brun noi-
râtre ; une touffe occipitale de longues plumes tombantes, blanches bordées
de noir ; gorge blanche ; devant et côtés du cou, jabot et scapulaires d'un
jaune d'ocre; haut du dos et les scapulaires supérieures d'un roux rougeâtre ;
bas du dos, ailes, queue et parties inférieures d'un blanc pur. Bec d'un bleu
cobalt à la base, noir à l'extrémité ; lorum et tour de Ijoail verts ; iris jaune ;
pattes d'un vert jaunâtre.
Jeune. — Point de longues plumes occipitales blanches. Tête et cou
jaune d'ocre terne avec de longues stries brunes, mais la partie médiane
antérieure du cou d'un blanc jaunâtre sans stries ; haut du dos et scapulaires
d'un brun cendré; le reste du plumage d'un blanc assez pur. Bec d'un jaune
verdâtre à la base, noir vers l'extrémité.
Poussin. — Face, région périophthalmique, derrière et devant du cou,
ventre et dessous des ailes glabres, jaunâtres ; duvet du dessus de la tête
bien fourni, barbelé et fauve à la base, filiforme, blanc et brillant dans sa
plus grande longueur, atteignant 17 mm. et formant bien la huppe; côtés
du cou, manteau et dessus des ailes d'un gris vineux pâle ; ventre, abdomen
et cuisses blancs; bec jaune avec le marteau blanc; pieds d'un jaune rem-
bruni, ongles jaunes. (J. Vian).
Hab. — Le Crabier habite le midi de l'Europe, le sud-ouest de
l'Asie et l'Afrique. On le ren-
contre au Portugal {Barboza du
Bocage) et il est assez abondant
dans les grands marais de l'Es-
pagne, surtout dans ceux de
Valence (Saunders) ; dans le
;J midi de la France il est de pas-
w sage annuel ou irrégulier suivant
les régions {Jaubert, Lacroix),
mais ne se montre qu'accidentellement dans les départements du
centre et du nord [De gland) ; il est plus ou moins abondant en Italie
oo i
suivant les localités, ainsi qu'en Sardaigne, en Corse [GiglioU). en
Sicile [Malherbe) et à l'île de Malte {Wriffht); il en est de même en
Grèce {Lindermayer). 11 niche en abondance dans la vallée du Da-
nube jusqu'en Dalmatie {Naumann), dans la Dobrodja, la Bulgarie
[Alléon) et à l'embouchure de tous les fleuves de la Russie méridio-
nale (c/e i\rjrc?m«nn). Cet oiseau visite régulièrement la Bohême et
il est probable qu'il y niche [Fritsch), se montre assez souvent en
Silésie, accidentellement dans l'Anhalt [Naumann), en Prusse près
du Rhin [Boech), dans le Mecklembourg [von Preen), dans le Holstein
et le Jutland [ReinharcU). Un individu a été tué à Kralingen près de
Rotterdam et l'espèce nicherait même, d'après Schlégel, près de
l'embouchure de la Aieuse, mais cela me paraît peu probable. Il est
très rare en Belgique où il a été tiré accidentellement près de Tour-
nai, de Huy, de Namur et dans les Ardennes. Vingt- trois captures
ont été signalées aux îles Britanniques de 1778 à 1867 [Harting), et
plus récemment, trois individus ont encore été tués en Irlande, le
dernier datant du 23 novembre 1881 [Seebohm). On ne l'observe que
très accidentellement en Pologne [Taczanowski) et jamais en Scandi-
navie et dans le nord de la Russie.
A l'Est, on rencontre cet oiseau au Caucase [Raddé), dans la région
Aralo-Caspienne [Bogdanotv), en Perse [Blanford), en Asie Mineure
[Krûper), en Palestine [Tristram) et en Arabie [Einpr. et Ehrenb.).
Le Crabier paraît habiter également toutes les régions humides de
l'Afrique : il a été observé au Maroc {Favier), en Algérie [Loche), sur
les rives du Nil et de ses alïluents [de Heiiglin), à Zanzibar, au
Zambèze [Kirk), au Transvaal [Ayres), au Natal [Gurney)y à Caza-
manze (Verreaux), à la Côte d'Or [Reichcnoio), en Gambie [Rcndall),
au Sénégal [Ilartlaub), etc. Il est de passage aux Canaries [Bol le)
et habite également Madagascar {Grandidier) et les îles Comores
[de Heuglin).
Mœurs. — Le Crabier chevelu fait son apparition en Europe dans
la dernière semaine de mars et émigré en septembre. Suivant le
comte von dcr Miihle, il arrive en Grèce par centaines et en bandes
à la même époque que la Garzette, mais fréquente d'autres endroits.
C'est dans les pâturages marécageux qu'il se tient de préférence à
son arrivée, courant et cherchant sa nourriture au milieu des bétes à
cornes où il est assez difficile de le tirer. Après un court séjour en
Morée, il continue sa route vers les lieux de la reproduction.
On rencontre également cet oiseau dans les grands marais, près
Tome il— 1801. 43
— 338 —
des lacs, des claiigs et des cours d'eau bordés de roseaux et de buis-
sons de saules et d'aunes ; mais il n'aime pas ces vastes marécages
couverts de plantes aquatiques et sans espaces libres. On le voit aussi
près des lacs à eau saumâtre et dans les pâturages qui avoisinent la
mer, mais seulement à l'époque des passages. Il paraît préférer les
eaux bourbeuses parsemées de louiïes de roseaux et de joncs et les
prairies humides entourées de buissons ; en pleiu jour il visite même
les eaux découvertes où il se rencontre souvent avec les deux espèces
d'Aigrettes. Naumann dit avoir vu sur un lac près de Szurcsin en
Syrnie, plusieurs centaines de Hérons Aigrettes et Crabiers, ces
derniers formant les deux tiers, et prenant leurs ébats au milieu de
milliers d'oiseaux aquatiques, tant Ecliassiers que Palmipèdes. Le
Crabier est d'ailleurs fort sociable et pas farouche du tout, et il n'est
difficile à tirer que quand il se meut au milieu des bestiaux qu'on est
exposé à atteindre. Il passe ses journées ent'ères à chercher sa nour-
riture et ne fait que rarement entendre sa voix, qu'on peut rendre
par krah krah, selon von der Mijhle; Naumaun rend ce cri par harr
ou charr ; il est du reste difficile de bien le noter, car l'oiseau est
extrêmement silencieux.
Pendant les fortes chaleurs, le Crabier se repose durant les heures les
plus chaudes à l'abri d'un buisson ou d'une touffe de roseaux; surpris
dans son sommeil, il se réfugie d'abord dans un touffu quelconque,
mais si on continue à le poursuivre, il s'envole vers un arbre sur
lequel il se perche et où il est alors facile de l'abattre. Sa démarche
est un peu plus leste que celle des autres Hérons, et quand il vole, il
rentre moins la tête, mais rejette toujours ses jambes en arrière; son
vol est silencieux et assez rapide.
Le Crabier est essentiellement diurne et passe la nuit dans le repos.
C'est uniquement pendant le jour qu'il fait la chasse aux petits
poissons, aux jeunes grenouilles, aux têtards, aux insectes, aux
larves, aux petits crustacés, aux mollusques et aux vers dont il se
nourrit.
Bien que d'un naturel doux et inoifensif, il paraît que pris jeune,
il devient si querelleur qu'il harcelle tous ses camarades de captivité,
sans tenir compte de leur taille ni des moyens de défense dont ils
disposent; c'est du moins ce qu'a observé le comte Alléon.
Reproduction. — Le Crabier niche comme les précédents dans les
roseaux et les joncs ou sur les arbres suivant les lieux qu'il habite, et
son nid est fait sur le même modèle que celui du Héron garzette et
du Bilioreau, mais il est plus petit. Quand il est place sur un arbre,
le nid est i'urmé de bûchettes si lâchement entrelacées qu'on sait
apercevoir les œufs au travers. La ponte a lieu dans la première
quinzaine de juin et se compose de quatre à six œufs, d'un vert un
peu plus pâle que ceux dos Hérons précédents; ils mesurent 38 à
40 millini. sur 28 à 20 millim.
M. Seebohm fait remarquer que dans la vallée du Danube on ne
voit jamais de nids do Crabier ailleurs que sur les arbres, tandis que
dans le nord de l'Afrique cet oiseau niche toujours sur le sol, proba-
blement à cause de l'absence d'arbres convenables.
GENRE CXXXIV
BLONGIOS. — ARDETTiJ
Arde.v (part.) aiictorum pUirimornm.
BoTAURUS (part.), Boie, /sis, 1822, p. 559.
Cancroph.vgus (part.), Kanp, Nat. SysL p. 42 (1829).
Ardeol.v (part.}, Boiiap. Comp. List B. p. 48 (1838).
Ardetta, Gray, List. Gen. B. Appoid. p. 13 (1842).
Erodiscus, Glog. Lliuid- iind LLilfsb. d. Naturg. I, p. 410 (1812).
Ardeiralla, (Verr.) llarti. Oni. W. Afr. p. 224 (1857).
BuTOROiDES, (Blyth) Goukl, Hnulb. B. Austr . Il, p. 31 1(1856).
Car. — Bec de la long levir do hi tète, un psii plus long que le t^rse, droit,
aigu, finement dentelé vers le bout ; fcillon.s nasaux assez profonds ; ailes
aiguës, les trois premières rémiges à peu près égales; queue courte, foiméo
de dix rectrices peu résistantes; jand)cs entièrement emplumées; doigt
médian, l'ongle compris, de la longueur du tarse, l'interne plus long que l'ex-
terne et le pouce bien développé.
Ilah. — Ce genre habite les parties chaudes et tempérées des cinq
parties du monde.
2'.](') — Le Blongios nain.
ARDKTTA MLXUTA, Gray ex Lin.
fPl. 23")
ArDEA AHDEOI.ACt A. AUDEOLA N.EVIA, Bi'is-^. Om. \', pp. 497, 500 (1700).
Ardea minuta. Lin. S\il. nat. I, p. 240 (17Gii).
BoTAURUS MIN'UTUS, Roio, /.vif, 1822, p. 559.
Cancroimiaous MiNUTus, Kaup, Nul. S)/si. p. 42(1829).
BoTAURUS PCSiLLUS, BreliiTi, Lis, 1830, p. 989.
BtTOR MiNUTUS, Swains, Cl'ssif. /?, Il, [>. ;î5 1 (1837).
— 340 -
Ardeola minuta, Bonap. Comp. List B. Eur. Am. p. 48 (1838).
Ardetta minuta, Gray, List Gen. B. Appetxd. p. 13 (1842).
Ardeola ntevia et fusilla, Brehm, Naumannia, 1855, p. 290.
Die Kleine Rohrdommel, en allemaad.
The little Bittern, en anglais
De Kleine Puitoor, en flamand.
Var. Fusilla.
Ardea fusilla, Y\q\\\. Noicv . Dict. (Thist. nat. XIV, p. 432(1817j.
Ardetta fusilla, Gould, B. Austr. VI, pi. 78 (1848).
Ardeola fusilla et fodiceps, Bonap. Consp. gen. av. Il, p. 134 (1857).
Ardea Payesii, Verr. Journ. f. Ornith. 1858, p. 42.
Ardea podicefs, Hartl. Journ. f. Om. 1860, p. 168.
Ardetta fodicefs, Gurn. Ibis, 1863, p. 330.
Ardea minuta australis, Schleg. Mus. P.-B. (Anlece), p. 39 (1863).
Botaurus minutus subsp. Pusillus, Reichenow, Joicrn. f. Om. 1877 p. 243,
Ardea minuta var. Podicefs, M. Edw. et Grand. Eist. Mada^. t. XII, Ois. p. 559, pi.
229a (1879).
Taille : 0,25; ailes 0,15; bec 0,049; tarses 0,045.
Description du mâle adulte. — Dessus de la tête, dos, scapulaires, sus-cau-
dales, queue et rémiges secondaires d'un noir verdâtre; côtés de la tête et
du cou d'un cendré vineux ; gorge blanche ; les autres parties d'un jaune
ocreux ; côtés de la poitrine bruns avec les plumes bordées de jaune ocreux ;
grandes couvertures des ailes d'un gris pâle, lavées de jaunâtre sur les bords;
rémiges noirâtres; sous-caudales blanches. Bec jaune, brun en dessus ; iris,
tour des yeux et lorums jaunes ; pattes d'un vert jaunâtre.
Femelle. — Dessus de la tête et queue d'un noir verdâtre; plumes du dos
et scapulaires d'un brun foncé légèrement bordées de jaune d'ocre ; dessus du
cou couleur marron fauve ; gorge blanche avec une raie médiane ocracée ;
côtés de la tête, devant et côtés du cou et couvertures des ailes d'un jaune
ocreux fauve ; une tache rousse à l'épaule; côtés de la poitrine bruns avec les
plumes bordées d'ocre ; abdomen et flancs d'un blanc roussâtre, ces derniers
avec une raie brune au centre des plumes ; le reste comme chez le mâle.
Jeune. — Plumes du dessus de la tête noirâtres et plus ou moins bordées
de roux ; celles de la nuque d'un roux marron varié de jaunâtre ; celles du
dos et scapulaires brunes bordées de jaunâtre ; couvertures des ailes d'un
jaune fauve, brunâtre au centre et d'un roux marron à l'épaule ; gorge
blanche avec une raie médiane fauve ; les autres parties d'un blanc rous-
sâtre, les plumes du cou et des flancs brunâtres au centre; sous-caudales
blanches. Brun du bec plus étendu.
Poussin. — Lorums, tour des yeux, derrière du cou, poitrine et dessous des
ailes nus, d'un jaune faiblement lavé de verdâtre ; toutes les autres parties
vêtues à claire- voie d'un duvet très fin, un peu plus long au vertex, de teinte
341 -
Isabelle, tournant au roux sur les parties supérieures ; bec et pieds jaunes ;
iris jaune très pâle (J. Vian).
Hab. — Le Blongios nain habite, en été, l'Europe centrale et méri-
dionale; on ne l'observe qu'ac-
jas ^^^;tfëi5o^vflgt2^^i
Ut>voteoi3mtoi.wofaotiia»QfùTi
cidentellement en Danemarck
{Collin) et dans le sud de la
Suède {Nilsson). Il est assez
abondant dans certaines parties
marécageuses de la Belgique
et y niche. En Angleterre on ne
le voit que bien rarement et il
ne visite qu'accidentellement
l'Ecosse et l'Irlande {Seebohm). Cet oiseau est sédentaire aux Açores,
à Madeire [Gocbnan), au Maroc {Favier), dans la régence de Tunis
{Kœnig) et en Egypte {de Heuglin) ; en hiver, on l'observe en Nubie,
au Sennaar, en Abyssinie [de Heuglin), au Gabon [Yerreaux) et dans
l'Afrique centrale ; il est cependant difficile d'indiquer au juste sa
limite méridionale, car la var. Pusilla est souvent confondue avec la
forme type.
A l'Est on observe le Blongios nain en Palestine {Tristam), en Asie
Mineure {Krilper), en Perse et dans le Beloutchistan {Blanford),
au Cachemire, dans le nord-ouest du Turkestan [Severtzoïo) et dans
l'ouest de l'Himalaya. Le D"" Henderson l'a trouvé nichant au Cache-
mire, et M. Hume dit qu'on le rencontre dans beaucoup de localités
de l'intérieur de l'Himalaya, mais qu'on ne le voit qu'accidentellement
dans le nord de l'Inde, d'où il ne connaît qu'une seule capture faite
aux environs de Larkliana.
La var. Pusilla est propre à l'Afrique australe, à Madagascar
{Grandidier), au sud de l'Australie [Gould) et à quelques îles de la
Polynésie {Reichenoio).
Mœurs. — Le Blongios nain n'habite donc les contrées euro-
péennes qu'en été : il arrive à la tin d'avril ou dans la première hui-
taine de mai et émigré en septembre ; il est rare d'en voir encore
passer en octobre, et ce ne sont alors le plus souvent que des jeunes.
Il voyage pendant la nuit, isolément ou en famille.
Cet oiseau vit dans les marais et près de toutes les eaux couvertes
de roseaux ou bordées de buissons et d'arbres. Mais il se tient de
préférence dans les roseaux, dès que ceux-ci ont atteint une certaine
- 842 —
hauteur, si non il se cache sur les arbres de hauteur moyenne et dans
les buissons de saules et d'aunes.
C'est un oiseau nocturne qui ne se montre que rarement en plein
jour ; il dort presque toute la journée, mais son sommeil est si léger
que le moindre bruit le réveille ; si quelqu'un approche de son gîte, il
baisse les tarses, mais redresse le corps, lo cou et la tête en se ren-
dant aussi mince que possible, et reste ainsi immobile jusqu'à ce qu'on
soit passé ou qu'il ait été forcé de s'envoler ; dans cette attitude, il
ressemble à s'y méprendre à un pieu ou à une toulîe de roseaux secs,
et celui qui le voit ainsi pour la première fuis, ne se douterait guère
à première vue que c'est un oiseau. Quand les roseaux ont toute leur
hauteur, il est impossible d'en déloger le Blongios, même à l'aide
d'un bon chien ; on a beau jeter des pierres ou frapper les roseaux à
coups de bâton, l'oiseau ne bouge pas; le danger devient-il menaçant,
le Blongios se sauve en courant dans les parties les~plus touffues où
le chien ne peut le suivre ; souvent même, perché au sommet d'un
roseau, il attend et brave son ennemi qui ne peut l'atteindre à cette
hauteur. Ce n'est que vers le soir qu'il se montre volontairement à
découvert, mais seulement dans les lieux où il se croit en sûreté. A
ce moment il vole souvent en rasant la surface de l'eau pour gagner
un autre endroit. Il est du reste en mouvement pendant toute la
nuit, mais ne néglige jamais de veiller à sa sécurité car il est
extrêmement farouche et prudent. D'ordinaire il tient le cou
recourbé en S, la tête inclinée vers la terre et il paraît alors plus
petit qu'il n'est réellement. Il marche avec légèreté en hochant la
queue, et sait courir très vite quand c'est nécessaire ; il sait aussi
grimper le long des tiges de roseaux avec une adresse remarquable.
11 vole avec autant d'aisance que de rapidité et peut changer de direc-
tion assez brusquement ; il volette en s'élevant et plane quelques
instants avant de reprendre terre ; pendant le vol il laisse pendre les
jambes un peu obliquement.
« Bien que le Blongios soit plus vif et plus sociable en apparence
que le Butor et la plupart des Ardéidés, ditNaumann, on se tromperait
si on voulait se fier à ses façons débonnaires, car il est au fond aussi
méchant et aussi courageux que les autres. Si on le presse de trop
près, sans qu'il puisse se sauver, il lance brusquement le cou en avant,
porte de vigoureux coups de bec dirigés vers les yeux, contre les mains,
et il peut ainsi devenir dangereux. Etendre subitement son cou et le
ramener avec la môme promptitude est l'affaire d'un instant. Ce mou-
- 343 -
veinent brusque et subit paraît d'autant plus singulier, que l'oiseau se
tient ramassé sur lui-même comme une masse inerte ; cette créature,
en apparence courte et trapue, s'allonge subitement, devient grêle et
prend une taille double. Au besoin il sait se défendre vigoureusement
jusqu'à son dernier souffle. »
Le Blongios n'est guère plus sociable que le Butor; il s'inquiète peu
des autres oiseaux, mais si de plus faibles que lui se trouvent à sa
portée, ils sont exposés à recevoir de violents coups de bec. A l'épo-
que de la reproduction, le mâle fait souvent entendre, pendant la nuit,
son cri d'un ton bas et étouffé, qu'on peut rendre selon Naumann, par
pouonm ou poumb ; ce cri, que l'oiseau répète deux ou trois fois de
suite, ressemble assez bien à celui du Crapaud sonneur [Bomhinator
homMnus) ; quand un danger menace sa couvée, la femelle crie d'un
ton plaintif: gaeth, gacth ou get, gel, get,... en hochant la queue
et se montrant pleine d'angoisse.
Cet oiseau se nourrit comme les précédents d'insectes, de larves, de
vers, de petits poissons, de jeunes grenouilles, de têtards et de frai de
batraciens et de poissons.
Pris jeune, le Blongios supporte bien la captivité, s'apprivoise avec
facilité, s'habitue bientôt à son maître et accourt à son appel ; mais il
conserve toujours son naturel défiant et il est bon de ne pas trop s'y
fier. Il exige un assez grand espace et des endroits où il puisse se
cacher. « En tient-on plusieurs dans une même volière, dit Brehm,
ils deviennent très amusants par la facilité avec laquelle ils prennent,
comme au commandement, les postures les plus diverses et les conser-
vent un certain temps. Un spectacle très plaisant s'observe quand on
entre dans leur volière : ils se lèvent aussitôt et restent droits comme
des piquets ; s'approche-t-on d'eux, ils ne bougent pas, mais leur
regard demeure attaché sur chaque mouvement que l'on fait et leur
cou se tourne en spirale autour de son axe ».
M. A. Crocgaert raconte ce qui suit au sujet de la captivité de cet
oiseau : « Dans ma jeunesse, mon père éleva une nichée de quatre
petits Blongios, dont le seul survivant avait contracté une alliance
intime avec un singe Cercopithèque. Le soir, ce dernier regardait
d'un œil anxieux si son ami n'ari'ivait pas, et quand à la fin l'oiseau
s'y décidait, le singe le prenait dans ses bras, le serrait près de son
corps, prenait ensuite sa couverture et savait si bien s'en entourer
(ju'on ne voyait [)lus v\o\\ ni du singe, ni de l'oiseau. C'est ainsi qu'ils
passaient la nuit d la même scène se répétait tous les soirs ».
— 344 -
Reproduction. — Le Blongios nain niche en petit nombre dans
divers marais et étangs de la Belgique et parfois même aux environs
de Bruxelles. M. A. Croegaert dit avoir trouvé à diverses reprises des
nids de cet oiseau au fort Calloo près de la Tôte-de-FIandre (Anvers);
M. A. Duvivier assure qu'il nichait, il y a quelques années, à Dieghem-
lez-Bruxelles dans les roseaux de l'étang situé près de la gare du
chemin de fer ; il paraît qu'il se reproduit aussi dans certaines loca-
lités de l'Ardenne et des Flandres, ainsi qu'aux environs de Louvain.
Le nid est ordinairement établi dans les endroits les plus inaborda-
bles et au milieu des fourrés de joncs et de roseaux; il est générale-
ment construit au-dessus de l'eau sur de vieilles souches de roseaux,
sur des joncs et des roseaux renversés, plus rarement dans un buisson
de saule ou sur la tête d'un saule peu élevé et incliné sur l'eau. Il
paraît môme que l'oiseau se sert quelquefois d'un vieux nid de Pie,
quand celui-ci $e trouve sur un arbre près de l'eau. Xe nid du Blongios
est volumineux et grossièrement construit à laide de joncs et de
roseaux secs, parfois entremêlés de bûchettes ; l'intérieur est garni de
feuilles, de roseaux, de joncs et d'herbes diverses; le tout forme une
masse peu compacte mais solide. Dans nos contrées la ponte n'a lieu
qu'au commencement de juin, et se compose de cinq à neuf œufs, d'un
blanc tirant sur le bleu verdâtre, mais cette teinte disparaît bientôt et
l'œuf est alors d'un blanc pur ; il mesure environ 35 millim. sur 28.
La femelle couve avec ardeur pendant seize à dix-sept jours. Les
parents élèvent leurs petits en commun, ils leur apportent la nourriture
dans leur jabot et la rejettent au bord du nid. Là où ils ne sont pas
dérangés, les petits Blongios demeurent au nid jusqu'au moment de
prendre leur essor, mais quand on les trouble, ils se jettent bientôt
dans les roseaux où ils se tirent fort bien d'affaire, grâce à la protec-
tion et à la tendresse de leurs parents. « Ces oiseaux, dit Naumann,
tiennent tellement à leur couvée, que la femelle ne se laissera guère
chasser du fourré qui abrite son nid avec les œufs. S'approche-t-on de
ce dernier, elle accourt et se met contre son habitude à découvert,
s'agite et grimpe le long des roseaux, crie d'un ton ^\B.mt\î gaeck,
gaech, gaeck en hochant la queue à la façon du Râle, et se montre
pleine d'angoisse et de désespoir. Quand elle a des petits, trop faibles
encore pour fuir, elle s'approche si près de l'assaillant que celui-ci
peut parfois la tuer d'un coup de canne. Le mâle se tient plus à l'écart
et se borne à observer Fennemi de loin ; il fait bien entendre de temps
en temps un cri de détresse, mais il ne s'expose que bien rarement. »
— 345 —
GENRE CXXXV.
BUTOR. — BOTAURUS.
Ardea, Briss. , Lin.
BoTAURUs, Steph. Sl/aic's G en. Zool. XI, p. 593 (1819).
Nycticorax, Ehrenb. Symb. phys. Av. fol. m. (1832).
Butor, Swains. Classif. B. II, p. 354 (1837).
Car. — Bec de la longueur de la tête, avec une petite échancrure à
l'extrémité de la mandibule supérieure qui est un peu fléchie; sillons nasaux
larges et profonds ; cou médiocre, garni de duvet en dessus, les plumes laté-
rales longues, larges et convergeant en arrière ; ailes amples, sub-obtuses;
queue courte, formée de dix rectrices peu résistantes; jambes aux trois quarts
emplumées; la partie nue réticulée; tarses relativement courts, scutellés en
avant, réticulés en arrière ; doigts longs, le médian, ongle compris, plus long
que le tarse et réuni à l'externe par une petite membrane, doigt interne plus
long que l'externe.
Had. — Ce genre a des représentants dans les cinq parties du
monde.
237. — Le Butor vulgaire ou étoile.
BOTAURUS STELLARIS, Stcph. ex Lin.
(PI. 236).
Ardea botaurus, Briss. Ornith. V, p. 444 (1760).
Ardea stellaris, Lin. Syst. nat. I, p. 239 (1766).
Botaurus stell.\ris, Steph. Shaws Gen. Zool. XI, p. 593 (1819).
Botaurus lacustris et arundixaceus, Brehm, Isis, 1830, p. 989.
Nycticorax stellaris, Hempr. Ehr. Symb. phys. Aves, fol. m. (1832).
Butor stellaris, Swains. Classif. B. II, p. 354 (1837).
Botaurus vulgaris, C. F. Dub. PL col. Ois. Belg. III, p. 206 (1860).
Ardea stellaris capensis, Sclileg. Mus. P.-B. Anleœ, p. 48 (1863).
Die grosse Rohrdo.m.mel, en allemand.
The Bittern, en anglais.
De Roerdomp, en llamand.
Taille: 0™G0 ; ailes 0,315; bec 0,074; tarses 0,09.
Description des deux sexes adultes. — D'un roux jaunâtre clair varié de
roux rougeâtre ; dos et scapuluires marqués de taches noirâtres longitudi-
nales et d'autres plus petites et irrégulières sur les bords des plumes ; dessus
de la tête et front noirs ; raies sourcilicrcs, joues et côtés du cou d'un roux
jaunâtre, ces derniers barrés de raies noirâtres en zigzags ; gorge d'un blanc
roussâtre avec une raie médiane rousse et bordée latéralement d'iiia' bande
noirâtre partant do la commi.ssure du bec; devant du cou plus pâle et marqué
de quatre bandes irrégulières et longitudinales d'un roux tacheté de brun ;
Tome u. — 1891 44
346
couvertures des ailes avec des raies noirâtres transversales et en zigzags ;
rémiges brunes barrées irrégulièrement de rougeâtre ; parties inférieures
d'un roux jaunâtre pâle, avec de grandes taches noires à la poitrine, des
stries rousses tachetées de brun sur l'abdomen, et des raies en zigzags sur le
bas-ventre ; sous-caudales blanchâtres avec des stries brunes ; queue rous-
sâtre et marquée d'un grand nombre de taches et de zigzags noirâtres. Bec
brun en dessus, d'un jaune verdâ,tre en dessous et sur les bords ; iris jaune ;
lorums et pattes d'un jaune verdâtre.
Le mâle ne se distingue extérieurement que par une taille un peu plus forte.
Jeune. — Comme l'adulte, mais les teintes plus pâles et moins pures, les
plumes du cou plus courtes, le dessus de la tête, les côtés de la gorge et les
taches du dos bruns. Iris blanchâtre ; lorums jaunes ; pattes plus sombres.
Poussin. — Toutes les parties nues, jaunes; duvet très long, soyeux et de
couleur rousse.
Hab.
Le Butor étoile est répandu en Europe, en Asie et en
Afrique, mais il ne dépasse que
très rarement le 61° 1. N. Il a
été pris accidentellement dans le
sud de la Finlande (Palmên),
est très rare dans le midi de la
Suède {Nilsson) et ne se montre
pas en Norwège. Il est égale-
ment rare au Danemark {Benzon)
et dans le nord de l'Allemagne
{Borggreve)\ on le voit accidentellement dans toutes les parties
marécageuses des îles Britanniques, mais il est cependant probable
qu'il niche en petit nombre dans les grands marais, particulièrement
de l'Ecosse et de l'Irlande [Seehohm). En Russie on l'observe jusqu'au
61° 1. N. {Bogdanow) et il est môme abondant sur tout le littoral du
Pont-Euxin,où il passe l'hiver sur la côte méridionale (de Nordmann).
On ne le voit dans l'Europe centrale qu'en été, mais il est sédentaire
dans le centre et le midi de l'Italie {Giglioli)', il hiverne en Portugal,
en Espagne, dans le midi de la France et de la Grèce. En Belgique
il est assez commun dans les polders et dans les marais de la Cam-
pine ; à l'époque des migrations, on le voit de temps à autre sur la
Meuse et sur les étangs de l'intérieur.
Cet oiseau hiverne dans toutes les parties de l'Afrique où il trouve
des lieux convenables à ses mœurs ; il est sédentaire dans le sud du
continent noir {Lai/aîxl) où les individus ont, suivant Schlégel, une
— Ul —
taille moins forte. On le voit dans le Delta du Nil jusqu'en avril
{de Heuglin).
On observe également cette espèce aux îles Baléares {von Homeyer),
de Malte [Wright], Açores {Godman), Madère {Zuchold) et Canaries
{Bolle).
A l'Est, le Butor est répandu dans la région Aralo-Caspiennc, le
Tian-Chan,la Songarie russe et dans toute la Sibérie jusqu'au 59° 1. N.
{Bogdanoio); il se trouve également au Japon {Schlégel).\)3iTis le sud
de TAsie, cet oiseau hiverne en Asie Mineure {Krûper), en Palestine
{Tristram), en Perse {St-John), au Turkestan {Sevcrtzoïo), dans l'Inde
centrale et septentrionale {Jerdon), en Chine {David) et en Birmanie
{SeeboJwî).
Mœurs. — Le Butor émigré des contrées du Nord en septembre et
octobre et y retourne vers la fin de mars ou en avril. Si Thiver est
doux, il arrive parfois que des sujets passent cette saison dans
certaines parties de l'Allemagne et en Belgique, mais le plus ordinai-
rement, ils ne quittent ces pays que quand la neige et les gelées les
obligent à chercher un climat plus doux. Les migrations ont lieu
pendant la nuit, et probablement par individus isolés qui traversent
l'espace à une grande hauteur en jetant do temps en temps leur cri
rauque et retentissant.
Cet oiseau habite les plaines marécageuses, les lacs, les étangs, les
cours d'eau, et en général toutes les eaux dont les bords au moins sont
garnis de roseaux, car ceux-ci lui sont indispensables. Ce n'est, qu'au
printemps, quand les roseaux et les joncs sont encore trop bas pour
l'abriter, qu'il cherche un refuge dans les buissons de saules et d'aunes
et parfois sur les arbres.
C'est un oiseau nocturne, qui se tient caché pendant le jour dans les
fourrés de roseaux les plus impénétrables ; au coucher du soleil, il se
réveille, lisse son plumage, étend les ailes et vole vers les endroits de
pêche en faisant retentir l'air de ses cris lugubres. Dés l'aurore il
retourne à son gîte, dont il n'est pas facile de le faire sonirsans un bon
chien, car son sommeil est fort léger et au moindre bruit il se met sur
ses gardes. Est-il surpris, il s'assied sur ses tarses, se fait aussi mince
que possible, redresse le corps, le cou, la tête et le bec, de manière à
ce que le tout ne forme qu'une ligne droite presque vcrticale,et il reste
ainsi immobile en observant les niouxcnionts de l'onncnii. Dans cette
position on le prendrait, à quelque distance, pour un objet inerte,
d'autant plus que ses teintes jaunâtres et son ininiobiliié le font
— 348 —
ressembler à un morceau de bois fiché en terre ; le danger devient-il
pressant, le Butor se glisse entre les roseaux, fait mille détours et
parvient souvent à échapper au chasseur. Il surpasse tous les Hérons
dans l'art de prendre les postures les plus singulières. Au repos, il
penche un peu son corps en avant, retire son cou de façon que sa tête
semble reposer sur la nuque ; en marchant il porte souvent le cou en
forme d'S, et quand il est excité, il gonfle tout son plumage, hérisse
les plumes de la tête et du cou et se tient prêt à l'attaque ; s'il a été
blessé et qu'il ne peut plus s'envoler, il se couche sur le dos et se
défend à coups de bec et d'ongles jusqu'à son dernier souffle. C'est
d'ailleurs un oiseau peu sympathique : il est paresseux, craintif et
méfiant et en même temps rusé, prudent et méchant. « Il ne vit que
pour lui, dit Brehm, et semble haïr tous les autres êtres; les animaux
de petite taille sont pour lui des proies et il les tue; ceux qui sont
trop grands, il les attaque avec fureur quand ils l^pprochent de trop
près. Il bat en retraite devant un adversaire plus fort que lui aussi
longtemps que cela est possible, mais s'il se trouve acculé, poussé à
bout, il fond sur lui avec une témérité incroyable et lui lance des coups
de bec avec autant de force que d'adresse. Ses coups sont dirigés de
préférence contre les yeux ; l'homme lui-même est obligé de se tenir
sur ses gardes s'il ne veut recevoir de graves blessures. La captivité ne
modifie pas ses instincts : les jeunes Butors que l'on élève présentent
tous les défauts de leurs semblables en liberté; leurs allures, leurs
postures si comiques sont incapables d'apaiser les haines qu'ils ne
tardent pas à faire naître. »
La démarche du Butor est lente, ses pas sont mesurés et il ne court
jamais; ses longs doigts lui permettent de marcher sur la vase et de
saisir plusieurs roseaux à la fois quand il veut y grimper, ce qu'il ne
pourrait faire sur un roseau unique, trop faible pour le porter. Il ne
sait patauger que dans les eaux peu profondes, vu la brièveté de ses
tarses, aussi se tient-il le plus souvent dans des endroits vaseux, sur
des souches de roseaux ou sur des herbages flottants ; sa place favorite
est toujours dans le touffu des roseaux, ce qui l'oblige, quand il veut
s'envoler, d'en saisir quelques-uns et de grimper jusqu'à leur sommet
afin d'avoir la place nécessaire pour déployer ses ailes. Il est rare de
rencontrer plus d'un couple de Butors dans un même étang; ce n'est
que dans les marais et les étangs d'une grande étendue qu'on peut en
voir plusieurs.
Le vol de cet oiseau ressemble assez à celui d'un grand Hibou, et,
- 349 -
comme le vol de ce dernier, il est silencieux, mais lent et maladroit
en apparence ; l'oiseau bat nonchalamment ses grandes et larges ailes,
et ce n'est qu'au moment de s'élever dans l'air que les coups d'ailes se
précipitent un peu. Il ne s'élève dans les hautes régions de l'atmos-
phère que pendant la nuit et après avoir décrit quelques spirales en
voletant ; il descend de la même manière jusqu'au niveau des roseaux,
puis il ferme les ailes et se laisse choir verticalement ; pendant le jour
il ne fait que raser le sommet des roseaux pour se porter d'un endroit
à l'autre, et cela seulement quand c'est nécessaire à sa sécurité.
Son manque de sociabilité est proverbiale ; il ne supporte dans sou
voisinage aucun autre couple de son espèce, et les autres oiseaux qui
ont l'imprudence de s'en approcher, ne tardent guère à en subir les
brutalités.
Le cri d'appel du Butor est rauque et retentissant et ressemble à
celui du Corbeau ; on peut le rendre par krat ou kraou. Pendant la
reproduction, le mâle fait souvent entendre des beuglements formi-
dables qui ressemblent à ceux du bœuf, et que Naumann rend par
ou u, uproumb, uproumb, uproumb. Quelquefois, mais rarement, le
proumb est suivi de bouh. Quand on est près, on perçoit un autre
bruit, analogue à celui qu'on produirait en frappant l'eau avec un bâton.
Le Butor commence ses beuglements au crépuscule et les prolonge
jusqu'à l'aurore, ne s'interrompant que lorsqu'il est fatigué. Naumann
s'est donné beaucoup de peine pour découvrir la cause de ces beugle-
ments, mais sans y parvenir. Le comte Wodzicki fut plus heureux;
il eut la patience de rester des heures entières dans l'eau, immobile
comme une statue, pour observer un couple de Butors. C'est long-
temps avant la ponte que le mâle fait entendre ses beuglements, qui
forment son chant d'amour ; dans le principe, il les pousse non seule-
ment la nuit mais aussi le jour, se taisant dès qu'il soupçonne qu'on
l'observe. « Le mâle était là, dit Wodzicki, debout sur ses deux pattes,
le corps horizontal, le bec dans l'eau. Au moment où les beuglements
se faisaient entendre, l'eau rejaillissait de tous côtés. Après que l'oiseau
eut lancé quelques notes, j'entendis entin le lo signalé par Naumann ;
le Butor releva la tête, la lança en arrière, puis enfonça rapidement
le bec dans l'eau, et les beuglements commencèrent avec une telle
violence que j'en fus effrayé. Un fait m'était prouvé : ces notes, hautes
au début, l'oiseau ne les fait entendre que quand il a son bec plein
d'eau et qu'il lance cette eau avec beaucoup de force. La musique
continua, mais le Butor ne rejeta plus le cou en arrière, et je n'entendis
— 350 —
plus ces notes élevées. Il semble donc que ce cri soit l'expression de sa
plus grande ardeur, et qu'il ne le répète plus, une fois ses désirs satis-
faits. Après quelques accords, il lève la tête et regarde prudemment
de tous côtés Au moment des amours, le Butor étoile ne se tient
pas au plus épais du fourré de roseaux, il cherche, au contraire, des
endroits découverts mais de peu d'étendue ; il faut que la femelle puisse
le voir et l'admirer. Le bruit, comparable à celui qu'on fait en frappant
l'eau avec un bâton, est produit par le mâle qui, au moment où il
lance ses notes hautes, frappe l'eau deux ou trois fois de son bec avant
de l'y enfoncer. D'autres bruits, bruits aquatiques, s'il m'est permis
de m'exprimer ainsi, sont produits par la chute des gouttelettes d'eau
qui sont restées adhérentes à son bec. Le dernier son, un houh étouffé,
s'entend quand l'oiseau, en retirant le bec, rejette au dehors l'eau
qui le remplissait. »
La nourriture de cet oiseau se compose principalement de poissons
et de leur frai; il prend également des grenouilles, des têtards, des
mulots, des insectes et des larves aquatiques, des annélides, etc.
Reproduction. — Le Butor niche dans les roseaux et dans un
endroit des plus inaccessibles, mais il trahit presque toujours par ses
cris la présence de sa couvée. Le nid est ordinairement placé sur de
vieilles souches de roseaux et au-dessus de la surface de l'eau, où il
flotte quelquefois, s'élevant et s'abaissant en même temps que le
niveau de l'eau ; il n'est cependant pas exposé à aller à la dérive, car
il est toujours fixé aux roseaux voisins. Parfois aussi, il repose sur
un petit îlot ou sur un tas d'herbages, mais toujours au milieu des
roseaux. Sa structure varie d'après l'emplacement : tantôt c'est une
grande masse informe composée de divers matériaux, tantôt il est
plus petit, mieux soigné, arrondi, plus ou moins aplati et formé de
bûchettes, de roseaux et de joncs secs, et garni à l'intérieur d'herbes
et de feuilles sèches.
La ponte a lieu dans la seconde quinzaine de mai ou dans le cou-
rant de juin, suivant la contrée, et se compose de trois à cinq oeufs à
coquille assez mince, d'un gris fauve uniforme. Ils mesurent environ
54 millim, sur 38.
La femelle couve seule et avec ardeur durant vingt-un à vingt-trois
jours; pendant ce temps, le mâle pourvoit à sa subsistance et cherche
à la distraire par ses beuglements. La mère témoigne beaucoup de
sollicitude à ses petits et le mâle aide à les nourrir. Dans les localités
où il ne sont pas dérangés, les jeunes séjournent longtemps dans
— 351 —
le nid ; mais quand il sont troublés, ils le quittent plus tôt pour
aller se cacher dans les roseaux où ils se tiennent cramponnés aux
tiges.
OËNRE CXXXVI
BIHOREAU. — NYCTICORAX.
Ardea, Briss. et auct. plur.
Ntcticorax, Forst. Syn. cat. Br. J5., p. 59 (1817).
Nyctiardea, Swains. Classif. B. Il, p. 355 (1837).
Ntcterodius, Macg. Man. Brit. B. II, p. 127 (1842).
ScoTAEUs, Heugl. Syst. Uebers. p. 59 (1856).
Car. — Bec de la longueur de la tête, épais, comprimé latéralement, à
arête recourbée vers le bout ; sillons nasaux profonds ; yeux grands ; nuque
ornée de longues plumes subulées ; cou assez court; ailes sub-obtuses;
queue courte, à douze rectrices; jambes aux trois quarts emplumées, la partie
nue réticulée ; tarses de la longueur du doigt médian ou un peu plus courts,
scutellés en avant, réticulés en arrière ; doigt médian réuni à Texterne par
une courte membrane qui s'étend jusqu'à la première articulation.
Ilab. — Parties chaudes et tempérées des cinq parties du monde.
238. — Le Bihoreau d'Europe.
NYCTICORAX GRISEUS, Gray ex Briss.
(PL 237).
Ardea grisea, A. mexicana cristata, A. botaurus naevius, A. nycticorax, Briss,
Onnth. V, pp. 411, 412, 462, 493 (1760).
Ardea kwakwa et A. ferruginea, Gmel. Nov. Comm. Petrop. XV, pp. 452, 456
(1771).
Ardea CYANOCEPHALA, Molina, Sagg. Slor. Nat. Chili, p. 344 (1782).
Ardea naevia, Bodd. Tabl. PI. enl. p. 56, n" 939 (1783).
Ardea jamaicensis, A. hoactli, A. g-^rdeni, A. maculata, Gmel. Syst. nat. pp. 625.
630,645(1788).
Nycticorax infaustus, Forst. Syn. Cal. Br. B. p. 59 (1817).
Nycticorax europ/eus, Steph., Shaws Gen. Zool. XI, p. 609 (1819).
Ardea SEXSETACEA et A.TAYAZAGUiRA, Vieill. Tabl.encyc'.mèth. 111, p. 1130-31 (1823).
Nycticorax orientalis, N. badius, N. meridionalls, Brehin, Isis, 1830, p. 988.
Nycticorax gardenii, Jard. Wits. Am. orn. III, p. 5 (1832).
Nycticorax vulgaris et N. brevihes, Heinpr. Elir. Synib.phys. Aves, fol. m. (1833).
Ardea discoks, Nutt. Man. urn. U. S. II, p. 54 ^1834).
NVCTIAKDEA BUROI'.KA, SwaillS. Cl'UiSif. B. II, p. 355 (1837j.
Nycticorax americanu.s, Bonap. Comp. lisi. B. p. 48(1838).
Nycticorax ardeola, Tem. Man. (TOrn. I\', p. 384 (1840).
Nycterodius nycticorax, Macjj'. Man.^Brit. B. U, p. 127 (1842).
- 352 —
Nycticorax griseus et N. n^yius, Gray, Geti. B. III, p. 558 (1847).
ScoTAEUs NYCTICORAX et S. GUTTATus, Heugl. Sijst. Uebers . p. 59(1856).
Nyctiardea gardeni, Baird, B. N. Am. p. 678 (1858).
BoTAURUS NYCTICORAX, C. F. Dub. PL col. Ois. Belij. III, p. 205 (1860).
Nyctiardea nycticorax, Swinh. Proc. Z. S. 1871, p. 413.
Nycticorax ^gyptius, Gurn. Anderss. B. of Damara, p. 293 (1872).
Nyctiardea grisea Var. N^via, Allen, Bull. M. C. Z. III, p. 182 (1872).
Nyctiardea grisea Yar. Gardeni, Ridgw. An. Lyc. N-Y. X. p. 386 (1874).
Die nachtliche Rohrdommel, en allemand.
The Night-Heron, en anglais.
De Nacht-Reiger, en flamand.
Taille: 0M8 ; ailes 0,29; bec 0,075; tarses 0,072.
Description des deux sexes adultes. — Dessus de la tête, partie supérieure
de la nuque, manteau et scapulaires d'un noir à reflets verdâtres et bleuâtres ;
à l'occiput trois à cinq longues plumes blanches subulées ; front, joues, raie
sourcilière, côtés du cou et de la poitrine d'un cendré'cîair ; gorge, devant
du cou, milieu de la poitrine, abdomen, sous-caudales et jambes, d'un blanc
assez pur ; bas du dos, ailes, sus-caudales et queue d'un gris cendré. Bec
noir, jaunâtre à la base de la mandibule inférieure ; lorums, tour des yeux
d'un jaune verdâtre ; iris rouge; pattes dun brun rougeâtre clair, jaunâtres
aux articulations et sous les doigts.
Jeune. — Point de plumes subulées à la nuque ; parties supérieures d'un
brun cendré terne avec une strie blanchâtre au centre des plumes, et les cou-
vertures des ailes avec une grande tache arrondie blanchâtre à leur extré-
mité ; rémiges cendrées, avec une tache blanchâtre à leur extrémité ; gorge
blanche ; parties inférieures d'un brun cendré clair, avec une longue mèche
blanche au centre des plumes ; sous-caudales blanches. Bec d'un jaune pâle,
brunâtre en dessus ; iris jaune ; pattes d'un vert brunâtre, les articulations
jaunes.
Poussin. — Lorums, région périophtalmique, derrière du cou et dessous
des ailes nus, jaunâtres ; dessus de la tête bien couvert de tiges barbelées et
rousses à la base, lihformes, blanches et brillantes dans leur plus grande
longueur, atteignant 25 millimètres et formant bien la huppe; côtés du cou,
manteau et dessus des ailes d'un brun vineux pâle ; ventre et cuisses blancs ;
bec jaune avec les pointes brunes et le marteau blanc ; pieds d'un jaune
terne ; ongles jaunes. (J. Vian).
Hah. — Le Bihoreau est répandu dans l'Europe centrale et méri-
dionale, en Afrique, en Asie, dans l'Archipel indien et en Amérique.
Il ne se montre que très accidentellement au nord de la Baltique : un
jeune mâle fut pris en juillet 1870 aux îles Fœroé près de Nordedhal
dans l'île de Stromoe {Dresser), et en 1863, une jeune femelle a été
3o3 -
tuée dans le sud de la Suède [Sundstrôm). Ses apparitions au Dane-
mark [CoUin] et dans la Russie centrale sont très irrégulières. Il est
très rare aux îles Britanniques : plusieurs captures de cette espèce
ont été faites en Angleterre, surtout dans les parties méridionales et
fff^^ffffnP orientales, ainsi qu'en Irlande, et
l'on compte également trois ou
quatre captures en Ecosse {See-
bohm). En Allemagne cet oiseau
ne se montre le plus souvent
qu'isolément et irrégulièrement
(Brehm), cependant, en 1863,
Wicke découvrit une colonie de
ces Hérons près de Gœttingue ;
il est ordinairement rare et de passage irrégulier en Pologne, mais il
y a des années où il est assez commun en automne [Taczanoioski).
En Russie il habite, en été, la Crimée, le Caucase, la partie méridio-
nale de la région du Tchernozem (les vallées des grands Heuves), la
région Aralo-Caspienne, le Tian-Chan et la Songarie russe [Bogda-
now). Il est surtout abondant dans les provinces Danubiennes et sur
1(3S bords de la mer Noire et de la mer Caspienne ; il paraît être assez
répandu en HoWdinàe (Schlêgel), mais il est rare et de passage irrégu-
lier en Belgique. Dans l'Europe méridionale, il est plus ou moins
commun partout où il y a des eaux, qui lui conviennent, soit en été,
soit à l'époque des passages, et il niche dans beaucoup de localités.
Suivant M. Giglioli, il serait sédentaire dans certaines parties de
l'Italie.
Cette espèce habite également toute l'Afrique, où elle niche dans
beaucoup d'endroits, et elle n'est même pas rare à Madagascar
{Grandidier). A l'Est on la rencontre dans tout le centre et le sud de
l'Asie jusqu'à Ceylan, l'Indo-Chine et le Japon {Siebold). Elle est
commune en Chine, où elle établit ses héronnières sur les grands
arbres jusque dans l'intérieur de la ville de Pékin {David). Sa présence
a également été signalée à Formose {Swinhoé), aux Philippines
{Steere), à Java, à Bornéo, à Célèbes [Schlégel) et à Céram {de Heu-
glin).
Le Bihoreau est aussi très répandu en Amérique : on le rencontre,
en été, depuis les Etats-Unis et le Nouveaii-Bruns\vick,et il hiverne
dans les Etats du Sud, au Mexique, dans l'Amérique centrale et dans
l'Amérique méridionale jusqu'au Chili {Danciti), la République Argen-
ToME II. — 1891 45
— 354 —
tine {Frantzius) et le Paraguay {de Heuglin); on l'observe donc en
Amérique du 50" 1. N. au 30° 1. S., tandis qu'il se montre en Europe
jusqu'au 55*^ 1. N. et même au delà, mais en Asie il ne paraît pas
dépasser le 48° 1. N.
Mœurs. — Le Bihoreau est pour l'Europe un oiseau migrateur; il
apparaît dans les contrées du Midi en avril et dans celles du centre
en mai ; il émigré en septembre et octobre, généralement par individus
isolés ou en famille.
Cet oiseau séjourne de préférence dans les marécages couverts de
roseaux et de joncs, se trouvant à proximité d'un bois, à moins qu'ils
ne soient bordés ou entrecoupés de grands arbres. On le voit aussi
prés des cours d'eau, des lacs et des étangs garnis de roseaux et
d'autres herbages, mais il n'aime pas les eaux qui n'ont pas d'arbres
dans leur voisinage. Dans les contrées où les marais se trouvent loin
des parties boisées, il passe la journée dans ces deraières et se rend le
soir près de l'eau ; il est alors parfois obligé de franchir un grand
espace avant d'atteindre les régions aquatiques où il peut se livrer à
la pêche. Sa prédilection pour les parties boisées provient de ce qu'il
passe généralement ses journées à dormir sur les arbres. C'est sur une
grosse branche de hauteur moyenne qu'il se tient habituellement
caché au milieu du feuillage; là on le voit le cou rentré, la tête repo-
sant entre les épaules et dans une immobilité parfaite, aussi est-il
difficile de l'apercevoir. Jamais le Bihoreau ne se montre volontaire-
ment à découvert pendant le jour, mais dès que le soleil a quitté
l'horizon, notre oiseau reprend ses ébats jusqu'à l'aurore, car il est
essentiellement nocturne.
Il est plus sociable que la plupart des autres Hérons, et dans les
pays où l'espèce est commune, on les voit par bandes composées d'une
centaine d'individus et plus. Il se rencontre souvent avec des Aigrettes
et autres Hérons, mais il ne s'en inquiète pas. Quand la nuit est
tombée, le Bihoreau se montre vif^ actif et prudent; il évite l'homme
avec crainte, et s'il a été chassé, il devient fort méfiant. « Au crépus-
cule, dit Brehm, les oiseaux endormis se réveillent, sautent avec
agilité d'une branche à l'autre, gagnent peu à peu la cime de l'arbre,
et tout à coup, au milieu de cris ou plutôt de croassements, toute la
bande s'envole et se dirige vers un marais voisin. Une bande se joint
à l'autre, et l'on voit ainsi réunis des milliers d'oiseaux, sans que l'on
sache d'où ils viennent. Un tel spectacle se montre non seulement en
Egypte, mais encore dans le centre de l'Afrique. » Pendant leur
sommeil on peut souvent approcher jusqu'au pied de l'arbre. sur
lequel ils se tiennent perchés, mais alors ils s'envolent vers d'autres
arbres ou se jettent dans les roseaux où il n'est pas facile de les
déloger.
Les mouvements du Bihoreau sont lents et ses pas mesurés, ce qui
ne l'empêche pas d'être adroit et agile, et de se mouvoir avec facilité
au milieu des branches et des roseaux. Son vol est silencieux et s'exé-
cute par des coups d'ailes relativement rapides, et l'oiseau plane un
instant avant de se poser. En volant, il tient le cou replié et les pattes
étendues en arrière. Dans l'obscurité on le distingue facilement du
Butor étoile, par ses formes plus sveltes, ses ailes plus étroites et ses
mouvements plus rapides. Sa voix est rauque et retentissante et rap-
pelle le croassement du Corbeau ; son cri ressemble à koau, Jioa,
kiouak; son cii d'alarme est ka-ioak. C'est en général un oiseau
silencieux, ne se faisant entendre que la nuit et en volant, et surtout
à l'époque de la reproduction.
Il se nourrit comme les précédents de petits poissons, de grenouilles,
de têtards, de frai, de lézards, de crustacés d'eau douce, d'insectes et
de larves aquatiques, de vers, de sangsues et de mollusques. 11 est à
remarquer que quand le Bihoreau a des jeunes, il est forcé de pêcher
aussi pendant le jour, afin d'apaiser la faim insatiable de ses
petits.
Reproduction. — La saison des amours varie suivant le pays : dans
la vallée du Danube l'oiseau niche en mai et en juin; le capitaine
Legge trouva des œufs à Ceylan en mars ; au Cachemir, Brooks l'a
vu nicher en avril et mai, mais dans les plaines du nord-ouest de
rinde, Hume trouva des œufs de cet oiseau jusqu'au 21 août. Ce
hérodien se reproduit assez régulièrement en Hollande, rarement en
Allemagne mais plus souvent qu'on ne le croit généralement; le mar-
quis de Wavrin m'informe qu'un couple a niché en Belgique près de
Thisselt en 1885. Dans les héronnières de la Hongrie, le Bihoreau
est toujours l'espèce la plus nombreuse; ainsi, sur un même saule,
Baldamus compta onze niils de Bihoreaux sur seize.
Le Bihoreau niche donc en société sur les arbres et dans les héron-
nières formées par diverses espèces de Hérons. Le nid est placé sur
iHK! biCiucation à liaulrMir moyenne, mais jamais au somnuM de l'arbre.
Il est grossiorenicnt construit à l'aide de bois mort recouvert de
feuilles et d'herbes sèches; il ressemble du r(\sle au nid du Héron
cendré mais il est plus petit. La plupart des auteurs ([iii ont observé
- 356 —
cet oiseau, sont d'accord à dire qu'il niche sur les arbres, mais il
paraît qu'il y a des exceptions. En Russie, selon de Nordmann, il
établit son nid tantôt sur un saule, tantôt sur des joncs et des roseaux
plies; dans le midi de la France, disent Jaubert et Barthélémy, il le
place tantôt à terre, tantôt dans les trous des rochers, sur les arbres
ou dans les buissons, quelquefois au milieu des joncs. — La ponte est
de trois à cinq oeufs d'un vert bleuâtre clair, mais ils sont plus pâles
que ceux du Héron cendré; ils mesurent environ 47 millimètres
sur 35.
« Quand aucun oiseau de proie ne vient les déranger, dit Balda-
mus, les Bihoreaux trouvent assez d'occasions de se harceler entre
eux, de se poursuivre en cfiant, de se mettre sur la défensive. Ils
prennent les postures les plus singulières, les plus comiques, et crient
continuellement. Une femelle qui cherche à enlever une branche à un
nid voisin et qui éprouve de la résistance, se met à^crier; le mâle qui
est auprès d'elle profite du moment pour donner à son voisin un coup
de bec dans les pattes; celui-ci étale ses ailes, ouvre son bec et
cherche à se défendre; son agresseur placé au-dessous de lui, le
poursuit de branche en branche jusqu'au haut de l'arbre ou jusqu'à ce
qu'il ait abandonné la place. La disproportion entre les efforts de
ces oiseaux et les maigres résultats qu'ils obtiennent est vraiment
comique ; ils ont le bec grand ouvert, poussent sur tous les tons leurs
cris rauques, leurs yeux injectés de sang brillent de rage et de fureur,
leurs ailes se lèvent menaçantes, ils lancent la tête en avant et la
retirent, ils se démènent de tous leurs membres, redressent et rabattent
leur huppe ; on dirait qu'ils vont se battre à mort, et c'est à peine s'ils
se touchent, encore n'est-ce que du bout des ailes, jamais avec le bec.»
Swinhoe a fait une intéressante observation dans une héronnière
établie près du grand temple Honam à Canton, en Chine. Il se fit
apporter trois des nids qui se trouvaient à cet endroit : deux conte-
naient des oeufs, le troisième, deux poussins et un oeuf. A en juger à
leur taille, l'un de ces oisillons devait être né au moins trois jours
avant l'autre ; l'oeuf contenait un poussin en vie qui n'aurait pu éclore
que deux jours après. En examinant les embryons des autres œufs,
Swinhoe eut la conviction que la différence entre ces embryons
devait être de six jours, et certainement pas moins de trois. Il en
résulte que la mère doit se mettre à couver dès la ponte de son pre-
mier œuf et sans attendre les autres, et que l'éclosion de ses œufs
n'a lieu que successivement, avec quelques jours d'intervalle.
- 357 —
FAMILLE DES CICONIIDÉS
Car. — Bec long, droit, conique ou cunéiforme, parfois un peu
retroussé vers le bout, comprimé vers la pointe, fendu jusqu'à l'œil,
à mandibule supérieure convexe à la base ; narines basales, placées
dans un sillon plus ou moins apparent ; menton nu ; une partie de la
face plus ou moins dénudée; ailes longues et larges; queue courte,
arrondie, formée de douze rectrices ; partie nue des jambes et tarses
réticulés,, ces derniers robustes; doigts courts, les antérieurs reliés
par une palmature qui embrasse la première phalange du médian et
de l'externe et qui est moins étendue entre le médian et l'interne ;
pouce assez court ; ongles épais, échancrés, sauf le médian.
Hab. — Cette famille a des représentants dans toutes les parties
du monde, mais surtout dans la zone tropicale.
Mœurs. — Les oiseaux qui forment cette famille préfèrent généra-
lement les plaines humides aux lieux secs et élevés ; ils recherchent
les forets, car la plupart aiment de passer la nuit sur les arbres ou
dans des endroits élevés, et quelques-uns nichent même sur les toits
des habitations. Les espèces qui habitent le Nord émigrent à l'approche
du froid, celles qui vivent dans les pays chauds errent à certaines
époques à travers la contrée.
Ces oiseaux se tiennent droit, le cou légèrement replié en S et
marchent avec une certaine dignité ; leurs longues jambes leur
permettent d'entrer fort avant dans l'eau, mais ils ne nagent que
quand ils y sont contraints ; ils volent avec facilité, planent
fréquemment et s'élèvent souvent à une grande hauteur. Leur voix
est une sorte de sifflement, mais le plus souvent ils font entendre
un claquement du bec.
Ces oiseaux s'apprivoisent avec facilité. Ils sont en général carni-
vores et insectivores et font la chasse à tous les animaux plus faibles
qu'eux; il y en a même qui vivent de charognes. Ils nichent sur les
arbres, sur les édifices ou sur les rochers.
Tous les Ciconiidés doivent être considérés comme des oiseaux utiles.
GENRE CXXXVII
CIGO&NE. — CÏCOxMA.
CicoNiA, Rriss. Ornitit. V. p. 365 (1700).
Ardka, part. Lin. 5. N. I, p. 2:^5 (ITOCi).
Si'HENOHHYNCiius, Hempp. Ehreiib. Symb. phys. av. t. 2 (1832).
! unr^
- 358 —
Melanopelargus (Reichenb.) Bonap. Consp. av. II, p. 105 (1857).
Abdimia, Bonap. Co?tsp. av. II, p. 106 (1857).
Car. — Bec très robuste, plus long que la tête, droit, pointu ; narines
basales, étroites, oblongues, percées de part en part; partie nue de la face
plus ou moins chagrinée ; ailes allongées, amples, sub-obtuses; queue courte,
arrondie, composée de douze rectrices ; jambes dénudées sur plus de la
moitié de leur étendue ; tarses très longs, robustes, réticulés; pouce court,
mince et portant en partie sur le sol ; ongles courts, larges et aplatis .
Hab. — Ce genre est représenté dans les cinq parties du monde.
239. — La Cigogne blanche.
CICONIA ALBA, Briss.
(PI. 238).
CicoNiA ALBA, Briss. Ornith. V. p. 365 (1760) et auct. plur,
Ardea CICONIA, Lin. Syst. nat. I, p. 235 (1766).
CicoNiA ALBESCENs, NivEA et CANDIDA, Brohm, Isis., 1830, p. 988.
CicoNiA MAJOR, Brehm, Naumannia, 1855, p. 289.
CicoNiA ALBA var . Major, C. azreth, C. alba asiatica, Severtz. Turkest. Jevotn. pp.
68, 145 (1873).
CicoNiA MYCTERioRHYNCHA, Sevortz. Joum. f. Om. 1875, p. 182.
CicoNiA ALBA t5ar. Orientalis, Severtz. Stray Feathers, 1885, p. 431.
Der weisse Storch, en allemand.
The white Stork, en anglais.
De OoiEVAAR, en flamand.
Taille : 0™95 ; ailes 0,59 ; bec 0,18 ; tarses 0,23.
Description des deux sexes adultes. — D'un blanc pur ; scapulaires, grandes
couvertures et rémiges noires ; partie nue des lorums et des orbites noire ;
peau nue du menton d'un noir rougeâtre. Bec rouge à pointe jaune ; iris brun ;
pattes rouges. — La femelle est légèrement plus petite que le mâle.
Jeune. — Noir des ailes nuancé de brun et moiré de cendré, surtout sur
les barbes externes des rémiges secondaires. Bec et pattes d'un rouge plus
pâle, ces dernières tachées de noirâtre.
Poussin. — Revêtu d'un duvet blanc, épais, pas très long, barbelé et lai-
neux ; bec et pattes noirâtres, mais l'extrémité de la mandibule supérieure
et le dessus des doigts d'un blanc jaunâtre.
Hab. — La Cigogne blanche habite, en été, la majeure partie de
l'Europe jusqu'au 61° 1. N., mais elle ne niche pas au delà du sud
de la Suède (JSilsson) ; elle se montre accidentellement dans le sud
de la Finlande, et son habitat ne s'étend pas à l'Est au delà des
— 359 —
parties occidentales de la Rusie. Dans le midi de la Norwège elle est
généralement de passage régulier
par petites troupes atteignant
parfois jusque trente individus,
mais elle n'a jamais été rencon-
trée plus au nord que Bergen
{Collelt). En Russie on la ren-
contre dans les parties occiden-
tales, mais on ne la voit qu'acci-
dentellement dans le nord du
gouvernement de St-Pétersbourg {Bac/mer) et elle ne paraît pas
dépasser, à l'Est, la vallée du Dnieper {Bogdanow) ; elle est rare en
Crimée et n'y niche pas [Kessley-), mais commune au Caucase (Radde).
Cet oiseau niche ou est simplement de passage dans toute l'Europe
centrale et méridionale, mais il est rare en Angleterre, où on ne
le voit qu'irrégulièrement lors des passages dans les comtés du
Sud-est ; il visite accidentellement l'Ecosse et il n'a été vu qu'une
seule fois en Irlande, en 1846 [Seebohm).
La Cigogne ne fait que passer et ne séjourne plus dans plusieurs
paj'^s, soit parce qu'elle y a été inquiétée pendant la reproduction, soit
parce qu'elle a été effrayée par le bruit du canon et des fusillades lors
des dernières guerres d'Italie et de France. Suivant Degland, elle nichait
anciennement à Valenciennes, à Douai, à Cambrai, à Bergues et
en d'autres endroits du nord de la France, En Espagne, par contre,
elle est répandue presque partout pendant la belle saison {Saunders).
En Hollande, où elle est également protégée, elle est généralement
commune ; Schlégel dit cependant, que depuis que ces oiseaux ont été
surpris à leur retour par-un ouragan qui lus a jetés sur la côte occi-
dentale de la France (vers 1839), où ils ont péri en grande partie,
ils n'ont plus jamais été aussi abondants dans les Pays-Bas. En Grèce
les Cigognes se répandent surtout dans les villes qui possèdent d'an-
ciennes ruines : « partout, dit Lindermayer, où la domination turque
s'est prolongée, où la révolution grecque n'a pas tout nivelé, les
Cigognes demeurent en possession de leurs palais ; c'est ce qui
arrive, par exemple, dans l'ile Eubée. Mais là où, dès les premiers
jours de la révolution, s'est établi l'hellénisme, là aussi les Cigognes
ont disparu ; il n'en existe plus à Nauplie, à Fatras, à Syra, à Athè-
nes. » En Turquie ces oiseaux sont au contraire très communs {Elices
et Bucklei/); il en est de même dans la Dobrodja et la Bulgarie, où
— 360 —
l'on voit nicher dans chaque village un couple ou deux [Alléon).
En Belgique c'est un simple oiseau de passage ne s'arretant que peu
ou point dans le pays.
A l'Est, on rencontre cet oiseau en Palestine [Tristram), en Syrie,
en Asie Mineure (Kruper), en Perse {Blanford), en Turkestan
{Severtzow), dans le Tian-Chan occidental, le Boukhara {Bogdanow),
la vallée supérieure de l'Irtysch (Karelin), et il hiverne dans l'Inde,
mais rarement dans le sud de ce pays {Jerdon, Blyth). La Gigogne
niche également dans le nord et le nord-est de l'Afrique ; de Heuglin
a rencontré des troupes de ces oiseaux en Egypte, en Nubie et en
Arabie pendant les mois d'avril, de mai, juin, juillet et septembre, et
particulièrement dans les prairies sèches et les champs en friche. Elle
hiverne en Sénégambie {Lichtenstein), à Damara {Andersson), dans la
colonie du Cap [Layard), à Natal [Gurney) et dans toute l'Afrique
orientale jusqu'au Soudan {Seebohm). Elle est probablement séden-
taire dans le midi de l'Afrique où elle niche. Dans l'Asie orientale et
au Japon, habite une Cigogne très voisine de la nôtre {Ciconia
boyciana), qui n'en diffère que par son bec noir et par les parties nues
des lorums et des orbites d'un beau rouge vermillon.
Mœurs. — La Cigogne blanche est donc un oiseau migrateur qui
quitte les pays du Nord au commencement du mois d'août. A cette
époque, tous les individus d'un môme canton se rassemblent dans une
prairie marécageuse, et leur nombre augmente de jour en jour.
Enfin, le moment du départ est arrivé, toute la bande s'élève dans
les airs comme à un signal donné, décrit quelques cercles au-dessus
de la prairie qu'elle abandonne et se dirige à lire-d'aile vers la région
des nuages où on la perd bientôt de vue. 11 paraît que les individus
incapables d'entreprendre le voyage sont parfois tués par les autres.
Les Cigognes qui partent les premières s'arrêtent souvent plusieurs
jours dans des lieux déterminés, afin d'y attendre l'arrivée de nouvelles
troupes. On connaît des marécages où, chaque année, se réunissent
des centaines de ces oiseaux, et qui disparaissent un beau matin subi-
tement comme ils sont venus. Le voyage se fait toujours pendant le
jour, et toute la bande se repose la nuit, le plus souvent sur les arbres
d'une forêt. Ces oiseaux volent à une grande hauteur, sans battre
visiblement des ailes, et en formant de longues files irrégulières.
Naumann parle de vols de Cigognes de deux mille à cinq mille sujets ;
Brehm dit avoir vu en Afrique des bandes parfois si nombreuses,
qu'elles couvraient entièrement de grandes surfaces et qu'elles rem-
— 361 —
plissaient tout le champ visuel au moment où elles s'envolaient.
Les passages se poursuivent jusqu'en septembre. Au printemps, on
les voit revenir dès les premiers jours de mars, et les bandes se
succèdent jusqu'en avril. Quand un couple arrive près de l'endroit où
il a habité l'été précédent, il se détache de la bande et on le voit
descendre d'une hauteur considérable en décrivant d'élégantes
spirales, se poser sur le toit de son ancienne demeure et se montrer
aussi familier avec les lieux comme s'il ne les avait jamais quittés.
La Cigogne vit dans les plaines basses entrecoupées de cours
d'eau et de marécages ; elle évite les endroits secs et les pays monta-
gneux, visite souvent les champs et montre une grande prédilection
pour les lieux habités par l'homme. Partout où elle est bien accueillie,
elle niche sur les toits des maisons et des bâtiments élevés; ailleurs,
elle construit son nid sur les arbres d'une forêt non éloignée de l'eau.
On la voit du reste souvent perchée sur une forte branche décou-
verte, car elle ne se cache ni dans le feuillage, ni dans les roseaux et
les hautes herbes des marais. Elle a dans tout son être quelque chose
de digne, et ne prend jamais les poses singulières et ridicules des
Hérons; elle tient ordinairement le corps assez relevé, le cou légère-
ment en forme d'S et la tête un peu inclinée. Sa démarche est lente et
mesurée, et l'oiseau parcourt avec gravité les prés et les champs ; elle
entre souvent dans l'eau aussi profondément que le lui permettent ses
longues jambes. Son vol ressemble à celui des Grues, mais il a lieu
avec moins de battements d'ailes : il est assez lent, mais beau,
majestueux et remarquable parles spirales élégantes que l'oiseau décrit
dans les airs. La Cigogne ne se fatigue guère à voler, car elle sait à
merveille profiter des courants aériens ; elle plane souvent, et tout en
planant, elle peut monter ou descendre, grâce à la facilité avec
laquelle elle dirige sa queue qui lui sert de gouvernail. En volant
elle tient le cou droit devant elle et les pattes dirigées en arrière, le
tout presque dans la même ligne.
La confiance que la Cigogne témoigne à l'homme est plutôt indivi-
dueP.e que générale, car elle ne se fie pas à tout le monde, il faut
qu'on lui ait donné des preuves de bienveillance. En Allemagne, en
Hollande, dans les pays mahométans, elle est presque partout bien
accueillie et parfois même vénérée ; dans beaucoup d'endroits les
habitants facilitent l'installation de son nid : tantôt c'est une vieille
roue de voiture fixée à plat sur un bâtiment, tantôt c'est un panier,
une caisse ou simplement des planches c m attache sur le toit des
ToMK II. — 1891 46
— 362 -
maisons et qui attirent les Cigognes, complètement rassurées par ces
bons procédés. Loin de son nid, c'est un oiseau prudent, méHant et
qui ne se laisse guère approcher à portée de fusil par un chasseur ;
cette méfiance augmente encore pendant les migrations, et même
quand quelques sujets seulement se trouvent réunis. En Afrique, la
Cigogne fuit plus vite à l'approche d'un blanc que d'un nègre, parce
qu'elle sait qu'elle a peu à craindre de ce dernier.
« La Cigogne, dit Naumann, possède beaucoup de qualités intellec-
tuelles et elle est très intelligente. Elle sait se faire aux gens et se
plier aux circonstances, et surpasse en cela presque tous les autres
oiseaux ; elle sait immédiatement apprécier dans quelle disposition
sont à son égard les habitants de tel ou tel endroit, et remarque
bientôt si on la tolère, si sa présence est agréable. Quelques jours
auparavant, elle était prudente, craintive, fuyait l'homme et se défiait
de tout ; maintenant elle voit une roue installéé^sur un toit, sur un
arbre, qui l'invite à y construire son nid ; elle perd alors toute
crainte, en prend possession, et devient bientôt assez confiante pour
se laisser observer de près. Elle apprend à connaître son hôte, les per-
sonnes qui lui veulent du bien de celles qui pourraient lui être dan-
gereuses ; elle sait si on l'aime, si on la voit avec plaisir ou si on la
regarde avec inditférence ; elle observe tout, et jamais son expérience
n'est en défaut. »
Brehm père raconte que, n'ayant pas encore cette espèce dans sa
collection, il voulait tuer la femelle d'un couple qui avait niché sur un
un chêne. « Quand je m'approchai, dit-il, elle quitta le nid; c'était
pourtant la nuit, au clair de lune, et elle ne revint que longtemps
après. Mais mon fusil rata (c'était encore du temps des fusils à silex);
néanmoins, les étincelles produites par le choc de la pierre firent
une telle impression sur la Cigogne, que je l'attendis en vain jusqu'à
onze heures du soir, bien que j'eusse pris le soin de me cacher parfai-
tement. Deux années après, cette femelle se rappelait encore cette
chasse et elle ne me laissait pas approcher à soixante pas de son nid.»
La Cigogne est principalement Carnivore et fait la chasse à tous les
animaux dont elle peut s'emparer : grenouilles, lézards, orvets, ser-
pents veuimeux ou non, poissons, jeunes oiseaux, petits mammifères
tels que mulots et taupes, insectes divers et leurs larves, mollusques et
vers; elle tue par aversion tous les crapauds qu'elle rencontre, mais ne
les mange pas. Avec un pareil régime, on ne peut nier qu'elle occa-
sionne des préjudices; elle détruit une quantité de batraciens utiles,
- 363 —
avale des poissons longs comme la main, pille les nids des oiseaux
qui nichent sur le sol et enlève les levrauts à leur mère. Mais si l'on
considère, d'autre part, les services qu'elle rend à l'agriculture en
détruisant des quantités énormes de petits rongeurs, en poursuivant
à outrance les dangereuses vipères et une foule de petits animaux
malfaisants, on doit reconnaître que les dégâts qu'elle produit sont
bien compensés. Altum lui-même, tout en condamnant la Cigogne,
nous en donne une preuve. Il raconte en effet avec force détails, qu'en
août 1872, une grande bande de Cigognes séjourna quelque temps
dans l'arrondissement de Liepe. Après leur départ, on trouva à
l'endroit où s'étaient tenus ces oiseaux, une telle quantité de pelotes
formées des parties non digérées et régurgitées, qu'elle aurait pu
suffire à la charge d'un grand chariot à deux chevaux! Ces pelotes
mesuraient jusqu'à 70 centim. de longueur, 55 de largeur et 30
d'épaisseur. Après avoir examiné la composition d'un grand nombre
d'entre elles, Altum constata qu'elles étaient formées en majeure
partie de poils de campagnols mélangés à des débris d'insectes (1). On
comprend quelle quantité énorme de campagnols et mulots ces
Cigognes ont dû détruire, pour que ce qu'elles aient rejeté, après
digestion, soit encore suffisant pour former la charge d'un grand
chariot.
« La Cigogne, dit Naumann, n'est pas aussi inoffensive qu'elle le
paraît. La manière dont elle se nourrit lui fait du meurtre une habi-
tude, et elle l'exerce parfois sur des sujets de son espèce. On a des
exemples que des Cigognes, arrivant d'autres lieux, se précipitaient
sur dos nids de leurs semblables pour se jeter sur les petits et les
égorger, malgré la défense énergique des parents, et qu'elles répé-
taient cette cruauté sur plusieurs nids de la localité. On sait qu'elles
luent leurs semblables malades au moment de l'émigration, et qu'elles
tuent aussi les sujets captifs qui refusent à les suivre ou qui en sont
incapables. Irrite-t-on une Cigogne apprivoisée, celle-ci s'élance
aussitôt sur son adversaire; un individu blessé se défend jusqu'à son
dernier souffle en donnant de violents coups de bec, dirigés surtout vers
les yeux du chasseur ou des chiens qui l'attaquent, et peut ainsi être
très dangereux. »
Le même auteur dit plus loii^ : « Le natiii'ol dos Cigognes Idanches
diffère beaucoup suivant les individus ; les unes sont sociables et souf-
(1) \'i>v<'/ : hu. H. Altim, /'orstzoalojiii'. II, p. 5^3
— 364 —
frent que d'autres nichent dans leur voisinage ; d'autres, au contraire,
s'entêtent à régner seules sur une certaine région. Divers motifs,
parmi lesquels surtout la crainte des dangers, déterminent les Cigo-
gnes à se réunir pour voyager; mais ce n'est qu'entre elles qu'elles
sont sociables ; jamais une Cigogne isolée ne se joindra à d'autres
oiseaux, pas même à une bande de Cigognes brunes. »
Il est singulier qu'un aussi grand oiseau soit presque privé de voix,
car c'est à peine s'il fait entendre une espèce de sifflement rauque,
impossible à rendre par la plume ; par contre, il manifeste ses senti-
ments en faisant claquer son bec sur tous les tons, et en produisant à
volonté des claquements longs ou brefs, rapides ou lents, suivant les
circonstances. Les jeunes, quand ils sont affamés, crient fitschut,
schut schut schut . .
La Cigogne blanche s'apprivoise facilement, surtout quand elle
est prise jeune. Elle apprend vite à comprendre les gestes et même
les paroles de son maître et arrive à l'appel de son nom. Elle connaît
bientôt les habitants de la maison, témoigne de l'attachement à ceux
qui lui veulent du bien, de l'aversion à ceux qui la taquinent; bref,
c'est un des oiseaux les plus agréables à avoir en captivité, car il ne
tarde guère à se faire aimer par son intelligence, mais on ne doit pas
le tourmenter.
Reproduction. — Les Cigognes contractent leur union pour toute
la durée de leur vie, et les conjoints sont en général très fidèles l'un
à l'autre, les exceptions sont fort rares. Au printemps c'est d'ordir
naire le mâle qui revient le premier au nid, mais sa compagne l'y
rejoint au plus tard au bout d'un jour ou deux. On ignore combien
d'années le même couple vient occuper le même nid ; mais on admet,
non sans raison, que la vie de la Cigogne est relativement fort longue
et que le nid change rarement de propriétaire. Il est singulier que ces
oiseaux, nichant d'habitude sur les arbres, préfèrent étabhr leur nid
sur un toit, dès qu'on y a fixé une vieille roue, un panier ou quelques
planches pour les y inviter. « Il est étonnant, dit Naumann, que des
Cigognes élevées à l'étranger, malgré toute leur défiance naturelle,
reconnaissent aussitôt qu'on les voit d'un bon oeil, comprennent la
signification des bâtises que l'on fait pour elles et cèdent au désir de
l'homme. Une paire de Cigognes apparut un jour aux environs de
ma demeure et s'y établit sur de hauts peupliers, entre deux villages
voisins. Le propriétaire de la chasse ne comprit pas ce signe, tira
dessus, mais les manqua; elles s'en allèrent aussitôt à un quart de
— 365 —
lieue plus loin. Là régnait à leur égard un autre sentiment ; on établit
une vieille roue sur le haut d'un toit de chaume, et aussitôt les Cigo-
gnes acceptèrent l'invitaiion. Au bout de quelques jours elles y
avaient construit et achevé leur nid, et tous les ans elles y revien-
nent régulièrement.
« Quelle est la raison de cet attachement pour l'homme? Il serait
difficile de le dire, mais ce qui doit certainement y contribuer beau-
coup,c'est la sécurité dont jouissent les Cigognes dans le voisinage de
l'homme, pour elles et pour leurs petits. Leur confiance dans la pro-
tection de l'homme est d'ailleurs si grande, que quand des Cigognes se
préparent à nicher sur des arbres, elles les abandonnent dès que sur
quelque toit on fait des préparatifs pour les y recevoir. On peut même
les attirer dans des endroits où elles ne se montrent pas d'habitude, en
leur préparant sur des toits une base convenable pour leur vaste nid,
mais pour autant, toutefois, que la localité leur convienne (1). »
Le nid est donc toujours construit dans des lieux élevés et bien à
découvert; il se trouve le plus souvent sur de hauts bâtiments, des
toits, des cheminées, des tours, des ruines ou dans la couronne d'un
grand arbre. Là où l'homme n'a pu prendre soin de lui établir une
base solide, le nid est parfois renversé par la tempête.
Peu après leur retour, les jeunes couples commencent la construc-
tion de leur nid. Les Cigognes qui ont déjà niché, se bornent à réparer
leur ancien nid, y apportent de nouveaux matériaux, et la construction
augmente ainsi en volume d'année en année, jusqu'à atteindre parfois
la hauteur d'un homme ; sa base primitive, en partie pourrie par l'humi-
dité du temps, finit par n'être plus assez solide pour supporter une
pareille masse, et celle-ci est alors emportée au premier coup de vent.
Ce nid est loin d'être élégant mais il est solidement construit : c'est un
amas de grosses branches, d'épines et de mottes de gazon entremêlées
de terre qui en forme la base ; des branches plus fines, des feuilles de
roseaux et des joncs forment une seconde couche, au-dessus de laquelle
en existe une troisième, composée d'herbes sèches, de paille, de fumier,
de chiffons, de plumes, etc., et celle-ci sert de berceau aux petits ; son
diamètre est de 0,90 cent, à lni80,et la profondeur de son excavation
est d'environ 0,10 cent. ; la première année sa hauteur ne dépasse
guère 0,30 cent., et encore est-elle bientôt réduite par le poids des
parents et des petits. Mâle et femelle travaillent ensemble, mais cette
(i) Nauinann, Nattir^. der Vo^çel Deutschlands, IX, p. 261.
— 366 —
dernière y met toujours plus d'ardeur et un nouveau nid est fait en huit
jours ; la réparation d'un ancien ne prend pas plus de trois jours.
La ponte a lieu, suivant les localités, entre la dernière huitaine de
mars (Algérie) et la seconde quinzaine de mai (Danemark) ; le nombre
des œufs varie selon l'âge de la pondeuse : une jeune femelle n'en
pondra que trois, tandis qu'une femelle d'un âge plus avancé en aura
quatre ou cinq et parfois six. Ces oeufs sont lisses, peu brillants, fine-
ment grenus, d'un blanc pur, et mesurent environ 74 millimètres sur
50. La femelle couve presque sans interruption durant 28 à 31 jours,
et ne quitte que rarement son nid ; le mâle la nourrit pendant ce
temps, veille sur elle et la protège. Quand les jeunes sont éclos, la
sollicitude des parents redouble et jamais, dans les premiers temps,
ils ne quittent le logis ensemble : quand l'un va à la chasse, l'autre
reste près des poussins. La première nourriture consiste en vers,
sangsues, larves et insectes, que les parents mettent dans le bec de
leurs petits; plus tard, ceux-ci reçoivent une nourriture plus substan-
tielle, qui est déposée devant eux ; les parents apportent également
dans leur jabot de l'eau pour abreuver la nichée. Il faut deux bons
mois avant que les jeunes Cigognes soient en état de suivre les
auteurs de leurs jours.
240. — La Cigogne brune.
CICONIA FUSCA, Briss.
(PI 239)
CicoNiA FUSCA, Briss. Ornith. v. p. 362 (1760).
Ardea nigra, Lin. Syst. nat. I, p. 235 (1766).
Ardea chrysopelargus, Licht. Cat. Rer. nat. rar. sp. 284 (1793).
CicoNiA nigra, Pallas, Zoor/r. Eosso-As. II, p. 114 (1811).
Melanopelargus NIGER, Reichenb. Si/st. Av. pi. 165, f. 453, 545 (1850).
Der schwarze Storch, en allemand.
The BLACK Stork, en anglais.
De zwarte Ooievaar, en flamand.
Taille : 0'",85 ; ailes 0,53 ; bec 0,165 ; tarses 0,20.
Description des deux sexes adultes. — D'un brun noirâtre à reflets métal-
liques violets, bleus, verts et pourpres ; rémiges noires ; bas de la poitrine,
abdomen et sous-caudales d'un blanc pur ; queue brune. Bec, lorum, tour de
l'œil et menton d'un rouge vif ; pattes également rouges avec les ongles
bruns ; iris brun.
— 367
Jeune. — Tête et cou d'un brun cendré, l'extrémité des plumes d'un cendré
blanchâtre ; dos et ailes d'un brun foncé à reflets verdâtres : parties abdo-
minales blanches. Bec d'un vert olivâtre ; pattes d'un vert olivâtre, bleuâtres
aux articulations.
Poussin. — Dos et dessus des ailes d'un cendré pâle, les autres parties
d'un blanc pur, excepté le menton, une partie de la face, le jabot et le centre
du ventre, qui sont nus ou à peu près nus ; bec roux avec le marteau blan-
châtre ; peau du menton jaunâtre ; pieds d'un roux terne ; iris brun très
foncé (J. Vian).
Hab. — La Cigogne brune est plus ou moins répandue en Europe
jusqu'au sud de la Scandinavie,
mais ne dépasse guère au Nord
le 60''. Elle niche en petit nom-
bre dans le midi de la Suède
{Nilsson), mais ne se montre
qu'accidentellement dans les
^^ parties méridionales de la Nor-
j wége {Collett) et de la Finlande
{Sundstrôm). Elle n'est pas rare
au Danemark [Fischer), dans les parties N.-E. de l'Allemagne, surtout
sur le plateau de la Poméranie, mais paraît manquer dans les provinces
occidentales [Borggrevé); Naumann dit qu'on la rencontre dans toutes
les parties de l'Allemagne, mais qu'elle n est nulle part aussi abon-
dante que la Cigogne blanche ; Borggrevé dit avoir observé dans un
marais près de l'Oder, une bande de plus de cent sujets ; elle n'est pas
rare non plus dans les provinces Danubiennes mais bien en Pologne,
quoiqu'elle niche en petit nombre dans les grandes forêts des diverses
parties de ce pays {Taczanoioski) ; en Russie on l'observe dans toute
les' régions boisées sauf dans l'extrême Nord {Bogdanow).
Cet oiseau se montre très accidentellement en Angleterre [Seebohm) ,
mais ne paraît pas avoir été observé dans les autres parties des îles
Britanniques. On le voit parfois lors des passages en Plollande
{ScJilégel), mais très rarement en Belgique et dans le grand duché de
Luxembourg ; il visite assez régulièrement, à son passage d'automne,
les départements septentrionaux de la France ; on en a tué plusieurs
fois près de Lille, de Dunkerque, de Boulogne, de AIontreuil-sur-Mer
et d'Abbeville [Degl. et Gerbe) ; dans le midi de la France il est do
passage régulier ou irrégulier suivant les localités [Lacroix).
Cette Gigogne est assez rare en Espagne, quoique répandue
— 368 —
dans tout le pays {Saunders), mais elle n'est que de passage irré-
gulier en Portugal (Rei/es) et en Italie {Giglioli) ; en Grèce on la voit
plus souvent en automne qu'au printemps {Lindey^mayer). Elle niche
en Turquie et en Palestine [Tristram), mais ne paraît se montrer en
Asie Mineure qu'aux passages. Elle est plus ou moins sédentaire dans
l'intérieur du Caucase et elle est surtout abondante dans les bois de
Lenkoran {Radde). Plus à l'Est, on observe cette espèce dans toute la
Sibérie, sauf dans l'extrême Nord et au Kamtchatka {Bogdanow), au
'ïu.vke^i3iTi{Severtzow), en Perse {De Filippi), au Cachemir [Adams),
dans le centre et le N.-O. de l'Inde (Jerdon), ainsi qu'en Chine et en
Mongolie {David).
Il est probable que cette Gigogne hiverne dans la majeure partie de
l'Afrique, peut-être même partout où les lieux lui conviennent, car elle
a été observée dans le Nord de ce continent comme dans le Midi et aussi
bien dans les pays occidentaux qu'orientaux. Voici les contrées où
la présence de cet oiseau a été constatée : le Maroc {Irhy), l'Algérie
{Loche), l'Egypte, la Nubie, le Sennaar, le Kordofan et l'Abyssinie
{de Heuglin), le Zambèze {Chapmann), le cap de Bonne-Espérance
[Layard), le Benguéla, l'Achanti (T^e/) et la Sénégambie {Hartlaub).
Mœurs. — La Cigogne brune, aussi appelée Cigogne noire bien
qu'elle ne soit pas de cette couleur, est un oiseau migrateur, mais qui
paraît mieux supporter le froid que son congénère ; elle revient dans
l'Europe centrale vers la fin de mars ou en avril. En août ces oiseaux
se rassemblent souvent par troupes de douze à trente sujets, qui dispa-
raissent dans le courant de septembre pour aller hiverner en Afrique;
mais on voit encore passer des retardataires jusque dans la première
huitaine d'octobre. Ils voyagent pendantle jour et traversent l'espace
à une très grande hauteur.
C'est un oiseau très farouche, qui fuit le voisinage de l'homme pour
vivre dans les bois et même dans les parties boisées des montagnes ;
Radde dit l'avoir rencontré sur le plateau arménien à plus de 6000
pieds d'altitude, où il nichait dans une forêt d'épicéas {Abies Nord-
TYianniand) ; il fait remarquer que cette Cigogne arrive dans ces
parages vers le 15/27 mars, alors que les montagnes sont encore cou-
vertes de neige.
Dans les pays plats, la Cigogne brune fréquente toujours de préfé-
rence les bois qui bordent les fleuves et les rivières, ainsi que les
forêts humides parsemées d'étangs, de mares et de marécages ; elle
visite également les pâturages où elle se tient surtout près des fossés
— 369 —
inondés et des ruisseaux ; on la voit parfois aussi dans les champs,
mais elle n'y séjourne jamais longtemps ; il en est de même près des
côtes maritimes, car elle n'aime pas plus l'eau de la mer que celle des
marais salants de l'intérieur. C'est sur les grands arbres d'une forêt
qu'elle passe la nuit dans un repos absolu, dût-elle franchir une
grande distance pour y arriver ; là, on la voit perchée sur une forte
branche en partie dégarnie et située à mi-hauteur de l'arbre ; l'oiseau
ne cherche guère à se cacher et se tient immobile sur une patte, la tête
enfouie dans les scapulaires.
Dans sa démarche, son vol et son naturel, cet oiseau ne diffère pas
de la Cigogne blanche, et les sujets apprivoisés, quand on les prend
jeunes, se montrent aussi intelligents que ceux de cette dernière;
mais la Cigogne brune est plus sauvage et compte parmi les oiseaux
les plus farouches, car elle évite l'homme en toute occasion et se mon-
tre toujours sur ses gardes. Sa prudence l'oblige à se tenir dans des
endroits où sa vue peut porter au loin, afin d'éviter toute surprise; ce
n'est que dans les localités où l'arrivée d'un homme estpeu à craindre,
qu'elle se tient près d'une eau entourée de buissons ou de roseaux
qui lui cachent les alentours. Son amour pour la solitude la rend peu
sociable, car chaque couple se ménage un certain domaine dans
lequel il ne souffre la présence d'aucun autre de ses semblables. Les
migrations se font également par couples ou par individus isolés ; ce
ne sont ordinairement que les jeunes qui voyagent par petites troupes.
Les poussins crient comme les jeunes Cigognes blanches ; ils font
entendre un sifflement rauque que l'on peut rendre par tschiUschut-
schutschut, tschutschut... et ainsi de suite. Dès qu'ils ont quitté leur
nid et qu'ils n'ont plus besoin de l'assistance de leurs parents, les
jeunes perdent la voix et se bornent à faire entendre des claquements
de bec sur tous les tons, comme le font les adultes.
La Cigogne brune est Carnivore et insectivore et se nourrit des
mêmes animaux que l'espèce précédente ; elle rend de grands services
en Afrique en détruisant des quantités énormes de criquets voyageurs,
quoiqu'elle préfère toujours les petits vertébrés aux insectes.
Reproduction. — Cet oiseau niche ordinairement sur les grands
arbres d'une forêt, à quatre ou cinq mètres du sol; le nid repose sur
la bifurcation d'une forte branche horizontale. Les conjoints, qui
paraissent être unis pour la vie, reviennent chaque année nicher sur
le même arbre tant qu'ils n'y ont pas été dérangés, mais ils se conten-
tent le plus souvent de réparer leur ancien nid, sans que celui-ci
Tome II. — 1801 47
- 370 —
augmente notablement de volume. L'aire abandonnée d'un grand
rapace sert parfois de base au nid; mais celui-ci est toujours formé
d'une couche de branches sèches assez fortes sur lesquelles se trou-
vent d'autres branches plus fines, le tout maintenu par des mottes
de terre humide; puis vient une couche de graminées et de joncs, au
centre de laquelle est ménagée une cavité garnie de radicelles, de
paille, d'herbes et de feuilles sèches, de fumier, de poils, de plumes,
etc. Bien que ce nid atteigne souvent plus d'un mètre de diamètre, les
conjoints le terminent en peu de jours, car ils y travaillent sans
relâche et cherchent ensemble les matériaux nécessaires.
La ponte a lieu en avril ou en mai, suivant la température de la
saison ; elle se compose de trois à cinq œufs d'un blanc uniforme et à
grain fin mais visible ; ils mesurent environ 66 millimètres sur 48 ;
ils sont donc plus petits que ceux delà Cigogne jilanche. La durée
de l'incubation est d'environ vingt-huit jours.
Les parents ne songent guère à défendre leur couvée ; ils s'envolent
quand on est encore à deux cents pas de l'arbre qui porte leur nid et
observent de loin le danger que court leur progéniture. Mais celle-ci
est en sûreté dans sa demeure, car le nid se trouve le plus souvent
hors des atteintes de l'homme.
Dans les pays montagneux ces oiseaux nichent souvent sur des
rochers escarpés, comme l'àbbé David l'a constaté en Chine ;
MM. Elwes et Buckley ont fait la même observation en Bulgarie.
FAMILLE DES PLATALÉIDÉS.
Car. — Bec long, large et en forme de spatule, ou plus ou moins
arrondi et recourbé de la base à l'extrémité ; tête et haut du cou en
partie ou en totalité nus ; ailes amples ; tarses allongés ; doigt médian
plus court que le tarse.
Had. — Ces oiseaux habitent les parties chaudes et tempérées des
cinq parties du monde.
Mœurs. — Les oiseaux de cette famille ont un naturel doux et
sociable; les diverses espèces vivent en bonne intelligence entre elles
et forment parfois de grandes colonies. Ils fréquentent les marais, les
étangs, les bords limoneux des cours d'eau, etc. Ils émigrent des con-
trées tempérées à des époques déterminées et nichent sur les arbres
ou dans les roseaux et les joncs.
On divise ce groupe, suivant la forme du bec, en deux sous-familles:
les Plataléinês et les Ibidinés.
- 371 —
SOUS-FAMILLE
DES PLATALÉINÉS. — PLATALEINyE
Car. — Bec droit, comprimé, les deux mandibules dilatées à leur
extrémité en forme de spatule très aplatie.
GENRK CXXXVIII
SPATULE. — PLATALBA
Platalea, Lin. Syst. nat. (1735 et 1766).
Platea, Briss. Ornith. V, p. 352 (1760).
Spath.erodia, ajaja, leucerodia, Reichenb. Av. Syst. nat.^ p. XVI (1852-53).
Plateibis, Bonap. Consp. av. II, p. 149 (1857).
Car. — Bec droit, aussi haut que large à la base, plat dans le reste de son
étendue, flexible, dilaté et arrondi en forme de spatule et terminé à la pointe
par un faible onglet; narines dorsales, rapprochées, basales, oblongues,
bordées par une membrane; ailes amples, aiguës; queue courte; jambes à
moitié dénudées; tarses longs, robustes; doigts antérieurs réunis jusqu'à la
deuxième articulation par une membrane profondément découpée, le médian
plus court que le tarse ; face et menton plus ou moins nus chez les adultes.
Hab. — Comme la famille.
241 . — La Spatule blanche
PLATALEA LEUCORODIA, Lin.
(PI. 240)
Platalea leucorodia, Lin. Syst. nat. I,p. 231 (1766).
Platea leucopodius, Gmel. Rcise Russl. p. 163 (1770).
Platea leucorodia, Leach, Syst. cat. main. B. Br. Mus. p. 33 (1816).
Platalea nivea, Cuv. Règne anim. I, p. 482 (1817).
Platalea leucerodius, Glog. Schles. Fatma., p. 50 (1833).
Platalea pyrrhops, Hodgs. Gray's Zool. Miscell. p. 86 (1844).
Platalea leucerodia, Reichw. Journ. f. Orn. 1877, p. 159.
Der Weisse Loffler, en allemand.
The Spoonbill, en anglais.
De Lepelaar, en flamand.
Var. Major.
Platalea ma.ior et minor, Tem. et Schleg. Fami. Jap. p. 119, pi. 75 et 76 (1850).
Platalea leucorodia, Swinh. Ibis., 1860, p. 65.
Platalea leucorodius, Radde, Reise im S. von Ost-Sib. Il, p. 345 (1863).
Platalea japonica, Reichenow, .Journ. f. Orn. 1877, p. 159.
Taille: 0"'76 ; ailes 0,40; bec 0,20; tarses 0,14.
Description des deux sexes adultes. — D'un blanc pur ; plumes de l'occiput
très allongées, étroites et formant mw huppe touffue ; un large plastron d'un
jaune roussâtre couvre la poitrine et les extrémités do ce plastron se réu-
— 37i>
nissent pour former une bande de même couleur qui contourne la base du
cou; nudités des yeux et de la gorge d'un jaune pâle. Bec noir, mais bleuâtre
dans le creux des sillons et à extrémité d'un jaune d'ocre ; iris rouge car-
miné ; pattes noires.
La femelle est un peu plus petite que le mâle, a la huppe moins longue et
le plastron moins développé.
Jeune. — D'un blanc pur, sans huppe et sans plastron d'un jaune rous-
sâtre ; bec plus court, près du front et en dessous couleur chair, le dessus de
la spatule d'un gris rougeâtre ; iris d'un gris bleuâtre .
Poussin. — Toutes les parties nues jaunes ; duvet laineux, court, assez
épais et d'un blanc pur ; bec et pattes jaunes ; iris brun.
La var. Major se distingue du type européen par des pattes plus longues»
un bec plus développé, et par l'espace dénudé de sa gorge moins étendue.
Hab. — La Spatule blanche niche en Espagne [Saunders], en
sffs^fi Hollande {Schlêgel), en Hongrie
{Naumann) éTdans tous les pays
M^^ : i Tiin qui entourent la mer Noire (c?e
No?^dmann). Elle est de passage
plus ou moins régulier dans les
autres parties de l'Europe, mais
elle est rare en Italie [Salvadori,
PI Giglioli), en Suisse {Meisner et
Schinz), en Allemagne [Reiche-
noio) et en Autriche, sauf dans la vallée du Danube. Elle passe
régulièrement en France et n'est pas rare, en automne et au printemps,
sur les côtes maritimes de la Picardie, de la Normandie, de la Bretagne
et on l'a également observée dans plusieurs départements du centre
et du Nord [Degl. et Gerbe) ; elle se montre aussi régulièrement en
Grèce [Lindermayer) ai sur les côtes maritimes de la Belgique, où on
la voit souvent dans les marais des Flandres et de la province
d'Anvers, mais très rarement sur les eaux de l'intérieur du pays.
Cet oiseau se montre accidentellement aux îles Britanniques y com-
pris les îles Hébrides,Orcades et Shetland (^>eZ>o/im); il en est de même
en Pologne {Taczanoioshi), en Finlande (Malmgv^en) et dans le nord
de la Russie, où une troupe de huit sujets a été vue près d'Archangel
il y a quelques années {Henck). On ne connaît que deux captures en
Norwège : l'une près de Jarlsberg en 1846 et l'autre dans le Ryfylke
en \S4& {Wallengren) ; il est moins rare en Suède {Nilsson).
Dans l'empire russe, on rencontre surtout la Spatule sur le littoral
de la mer Noire et de la mer d'Azow, en Grimée, au Caucase, dans
— 373 —
la région Aralo-Caspienne, dans le Tian-Chan et sur les bords du lac
Balkhach {Bogdanow) ; le V octobre 1887, un jeune sujet fut tué
près de Peddust sur Moon sous le 58° 53' 1. N. [von Ekesparré). On
rencontre également cette espèce en Turkestan [Severtzow),Qi\ Perse,
et elle niche dans l'Inde (Jerdon) et à Ceylan (Legge) ; en Asie
Mineure et en Palestine elle paraît se montrer surtout aux passages
(Tristra77t).
En Afrique cet oiseau habite le Maroc (Drake), l'Algérie (Loche) et
il est commun en Egypte et en Nubie [Shelley) ; il niche probablement
dans les parties orientales du delta du Nil, mais on ne le voit qu'en
hiver dans la Haute-Egypte ; il niche également près de la mer
Rouge sur les côtes égyptienne et arabe, ainsi que dans l'Archipel
de Dahalak sous le 16° 1. N. [de Heuglin). Il visite accidentellement
les îles Açores, Madère, Canaries et du Cap Vert {Bolle, Heuglin, etc.).
La var. Major a d'abord été signalée au Japon {Temminck) ; elle a
été rencontrée plus récemment en Daourie,dans V kmo\\v\dindi{Radde),
sur le lac Chanka {Przewalski), en Mantchourie et en Chine où
elle semble assez rare [David], ainsi qu'à Formose (Sioinhoe) ; mais
les sujets de l'Asie orientale appartiennent-ils bien à la var. Major?
Mœurs. — Les Spatules qui nichent en Europe, hivernent princi-
palement dans le N.-E. de l'Afrique ; elles quittent ces régions vers
la fin de mars, arrivent en Espagne vers le milieu d'avril, mais ne font
leur apparition en Hongrie qu'au commencement de mai, car elles
s'arrêtent partout où elles trouvent des lieux qui leur plaisent. Elles
émigrent en septembre. Ces oiseaux voyagent pendant le jour par
troupes plus ou moins considérables formant une ligne simple ou
double et parfois un angle irrégulier ; en volant ils tiennent la tête,
le cou et les pattes étendus horizontalement.
La Spatule blanche ne recherche pas véritablement les côtes mari-
times ; elle se plaît, au contraire, près des lacs, des cours d'eau et
des marais ; on la rencontre cependant aussi dans des endroits où la
mer est peu profonde et où la plage est vaseuse, ainsi que dans les
marais qui avoisinent la mer. Selon Radde, elle préfère les marais
salants aux eaux douces, mais l'oau salée ne lui est pas indispensable.
Elle évite les rives et les endroits couverts de roseaux ou de hautes
lierbes, et paraît rechercher de préférence les bords vaseux des cours
d'eau.
C'est un oiseau d'un naturel doux, prudent et sociable ; en Egypte,
il n'est pas rare de rencontrer en liiver, près du Nil, des troupes
— ;j7i ~
formées de centaines de Spatules, vivant entre elles dans un accord
parfait. « C'est avec une véritable satisfaction, dit Brehm, que j'ai vu
deux de ces oiseaux se rendre des services réciproques, se lisser
mutuellement les plumes du cou. On ne peut assister à un spectacle
plus intéressant. Ils restent plusieurs minutes serrés l'un contre
l'autre, dans le seul but, semble-t-il, de se caresser. Jamais des
querelles ne s'élèvent dans une bande de Spatules; la jalousie
cependant peut se mettre parmi elles, et un individu affamé poursuivre
un de ses compagnons qui, plus heureux, a capturé une proie, mais
elles n'en arrivent pas à la menace. Je crois pouvoir conclure de mes
observations, qu'une Spatule ne peut vivre sans la société de ses
semblables ; je ne me rappelle pas en avoir jamais vu une isolée. Au
milieu des autres oiseaux qui partagent son habitat, la Spatule blanche
vit inofïensive et paisible ; elle conserve de bons rapports avec tous et
semble heureuse quand on la laisse en paix. Jamais elle ne se laisse
aller à tourmenter ou à agacer ses compagnes. »
Par leurs mœurs comme par leur structure, les Spatules ressem-
blent beaucoup plus aux Ibis qu'aux autres hérodiens; comme les
Ibis, elles sont confiantes là où elles se sentent en sûreté, mais
excessivement craintives et prudentes partout où on leur fait la
chasse. Ce sont des oiseaux diurnes qui passent la nuit sur des arbres,
des rochers ou sur des îlots sablonneux ; cependant, par un beau clair
de lune il leur arrive parfois de se mettre en quête de pâture, mais
habituellement ils se livrent au repos dès le coucher du soleil pour ne
reprendre leur activité qu'au matin.
La Spatule blanche a une démarche grave et mesurée ; d'ordinaire
elle tient le cou fléchi de façon que la tête semble reposer sur les
épaules; ce n'est que quand un bruit suspect a frappé son attention
qu'elle tend le cou pour se rendre compte du danger qui pourrait la
menacer. Au repos, elle se tient volontiers sur une patte, le cou
rentré, le bec caché dans les scapulaires. Son vol est élégant, facile
et plus mouvementé que celui de la Cigogne ; elle plane parfois en
décrivant des cercles.
Tant qu'elle cherche sa nourriture, la Spatule marche à pas
comptés, la poitrine inclinée vers le sol, portant son bec alternative-
ment à droite et à gauche, fouillant l'eau et la vase. Elle se nourrit de
frai, de crustacés, d'insectes, de larves, de vers, de mollusques et de
plantes aquatiques telles que Lemnacées; mais sa nourriture de
prédilection paraît être le poisson; elle prend très adroitement les
— 375 —
petits poissons avec son bec, les retourne et les avale, la tête la
première.
On entend rarement la voix de cet oiseau, et celle-ci est si faible
qu'on ne peut l'entendre qu'à une très courte distance; par contre, il
fait souvent claquer son bec, mais d'une façon peu bruyante.
Les jeunes s'habituent facilement à la captivité et se font à un
régime moitié animal, moitié végétal ; ils s'entendent fort bien avec
les oiseaux de basse-cour.
Reproduction. — La Spatule blanche niche, suivant les circons-
tances, sur un arbre, dans un buisson ou dans les roseaux et les
joncs; de Heuglin dit avoir vu en Egypte, une troupe de ces oiseaux
dont les nids se trouvaient sur une côte sablonneuse garnie d'herbes
raides. C'est cependant sur les arbres que cet oiseau niche le plus
souvent, et le même arbre porte quelquefois autant de nids qu'il peut
encontenir. Ces nids sont grossièrement faits^ mais solidement, àl'aide
de branches sèches, et leur cavité est garnie de feuilles mortes et de
joncs. La ponte est de deux à quatre oeufs. Ceux-ci ont une coquille
blanchâtre marquée de petites taches d'un brun roux plus ou moins
intense, plus nombreuses et un peu agglomérées au gros bout; ils
mesurent environ 68 millimètres sur 46. Hume dit avoir trouvé dans
l'Inde des oeufs de cette espèce pendant le mois d'août; dans le sud de
Ceylan, Legge en a recueilli dans le courant de mars.
Les jeunes séjournent longtemps dans le nid; dès qu'ils ont pris leur
essor, les parents les conduisent dans un marais et leur apprennent
à chercher leur nourriture.
SOUS-FAMILLE
DES IBIDINÉS. — IBIDIN.Î:.
Car. — Bec très long, recourbé en forme de faucille, diminuant
d'épaisseur de la base à la pointe, presque cylindrique, à mandibule
supérieure profondément sillonnée longitudinalement presque jusqu'à
l'extrémité.
GENRE CXXXIX
FALCINELLE. — PALCINELLUS
NuMENius (part.), Briss. Omith., v. p. 326 (1760).|
Tantalus (part.), Lin. Sijst. nat. I, p. 241 (1766).
ScoLOPAx (part.), Scop., Afin. I. IHst. nat., p. 87 (1769).
Falcinellus, Bechst., Gem. Nat. (1803). — Illig. Prodr. p. 26) (1811).
Ibis (part.), Tem., Ma7i. crorn., p. 385 (1815).
Plegadis, Kanp, Nat. Si/st., p. 82 (1829).
— 376 —
Tantalides, Wagl. /sis, 1832, p. 1231.
Plegadornis, Brehm, Nauma7i7na, 1855, p. 290.
EuDOCiMUS, Barb. du Boc, Journ. f. Orn. 1876, p. 300.
Car. — Bec long, arqué, relativement mince ; tour des yeux et lorums nus
chez les adultes; narines basales, petites, se prolongeant dans le sillon;
ailes médiocres, assez larges, arrondies, deuxième et troisième rémiges les
plus longues; queue courte ; tarses peu robustes,- plus longs que le doigt
médian; doigts antérieurs réunis par une membrane jusqu'à la première
articulation.
Hab. — Ce genre est presque cosmopolite.
242. — Le Falcinelle éclatant ou Ibis falcinelle
FALCINELLUS CASTANEUS, A. Dub. ex Briss.
(PI. 241.)
NuMENius viRiDis, N. CASTANEUS, N. MEXiCANUS, N. IBIS, Briss. Om. V, p. 326,
329, 333, 347 (1760).
Tantalus FALCINELLUS, ScoLOPAX GUARAUNA Llii. Sijst. nat. 1, p. 241, 242 (1766).
ScoLOPAi RUFA, Scop. Ann. /. Hist. nat.., p. 87 (1769).
NuMENius iGNEUS, N. VIRIDIS, Gmel. Novi Comm. Acad. Petrop. 1770, pp. 460, 462.
Tantalus castaneus, Mùll. Natur. Syst. §uppl.^ p. 112 (1776).
Tantalus igneus, Lath., Gen. syn. suppl. I, p. 291 (1787).
Tantalus manillensis, mexicanus, Gmel. Syst. nat. Il, pp. 649, 652 (1788).
Ibis falcinellus, Savign. Description de VEgyp. Ois. pi. VII, (1809).
NuMENius FALCINELLUS, 'P&W., Zoogr. Rosso-As. II, p, 165 (1811).
Ibis sacra, Tem., Man. d'Orn., p. 385(1815).
Ibisignea, Lèach, Syst. cal. mam. etc., Br. Mus., p. 33 (1816).
Numenius chihi, Vieill., N. Dict. dliist. nat. VIII, p. 303 (1817).
Ibisfuscata, Vieill. Encycl. méth. orn. III, p. 1146 (1823).
Tantalus chalcopterus, Tem. Pi. col. III, pi. 511 (1824).
Ibis guarauna, Wagl.,5?/s^ avium, sp. 8 (1827).
Plegadis FALCINELLUS, Kaup, Nat. Syst., p. 82 (1829).
Ibis castaneus, Brehm, Isis, 1830, p. 989.
Ibis cuprea, Breh. Vdgel Deutschl., p. 1018 (1831).
Tantalides falcinellus, Wagl. Isis, 1832, p. 1231.
Ibis erythrorhyncha, Gould, Proc. zool. Soc, 1837, p. 127.
Ibis ordii, Bonap., Comp. List. B.. p. 49 (1838).
Falcinellus igneus, Gray, List. gen. 5., p. 87 (1841).
Ibis brevirostris, Peale, U. S. Exped.Ylll, p. 219 (1848).
Plegadornis falcii^ella, major, minor, Brehm, Naumannia, 1855, p. 290.
Falcinellus BENGALENSis, F. peregrina (Miill.), F. mexicanus, F. erythrorhyncha,
Bonai)., Consp. av. U, pp. 158, 159(1857).
Falcinellus ordii, Goues, Proc. Ac.nat. Se. Phil., 1866, p. 96.
Falcinellus autumnalis, A. Dubois (ex Hasselq.), Comp. av. E<ir., p. 28 (1871).
Ibis falcinellus var. ordii, Goues, B. of. N. W. Am., p. 517 (1874).
Ibis thalassina, Ridgw. Am. nat., 1874, p. 110.
. — 377 —
Falcinellus ridgwayi, Allen, Bull. Mus. comp. zool. Cambr,, p. 355 (1876).
EuDOCiMUS FALCINELLUS, du Boc, Joum. f. Omitli.., 1876, p. 300.
Falcinellus RUFUS, Reichw., Journ.f. Ornith., 1877, p. 146.
Falcinellus guarauna et thalassinus, EU,, Proc. zool. Soc, 1877, pp. 505, 507.
Falcinellus castaneus, A.Dubois, Bull. Mus. roy. d'hist.nat. deBelg.lY.,^ 19(1885).
Der dunkelfarbige Sichler, en allemand.
The glossy Ibis, en anglais.
De bruine Ibis, en flamand.
Taille : 0™46; ailes 0,26; bec 0,122; tarses 0,086.
Description des deux sexes adultes en été. — Vertex brun noirâtre à reflets
verdâtres ; cou, partie antérieure du manteau, petites couvertures des ailes,
poitrine, abdomen et jambes d'un roux marron vif; partie postérieure du man-
teau d'un brun sombre à reflets verdâtres et pourpres ; bas du dos, sus et
sous-caudales d'un vert sombre mais brillant; flancs d'un brun pourpré; ailes
et queue d'un vert sombre à reflets pourpres et bronzés ; rémiges d'un vert
bronzé. Bec d'un brun verdâtre ; iris brun ; pattes d'un gris verdâtre. — La
femelle ne diffère du mâle que par une taille plus petite.
En hiver. — Tête et cou bruns striés de blanc ; parties inférieures brunes ;
dessus du corps et ailes d'un brun verdâtre à reflets bronzés et pourpres, le
manteau toujours plus sombre.
Jeune. — Diff'ère peu des adultes en hiver, mais leur plumage ne présente
pas autant de reflets métalliques.
Poussin. — Duvet noir sur les parties supérieures avec un bandeau trans-
versal blanchâtre sur le vertex entre les yeux ; parties inférieures d'un brun
fuligineux avec quatre bandes blanches sur le bas du cou ; bec court, jau-
nâtre, avec deux bandes transversales noires ; pattes jaunes.
Remarque. — Le plumage, la taille et la longueur du bec sont
plus ou moins variables suivant l'âge et l'habitat; mais il est impos-
sible d'établir des distinctions constantes entre les individus des diffé-
rentes parties du monde. Suivant Schlégel, les teintes du bec et des
pattes présentent également des variations et tirent quelquefois au
rougcâtre, même chez les individus de l'Europe.
Ilab. — Le Falcineile éclatant ou Ibis falcinelle est presque cosmo-
polite mais très localisé, et se montre avec plus ou moins de régu-
larité dans la plupart des pays chauds et tempérés. En Europe,
il niche en Espagne {Sau7iders), en Hongrie dans la vallée du
Danube {Naumami), près des grands lacs de la Dobrodja et de la
Bulgarie {Alléon) et sur tout le littoral de la mer Noire ; de Nordmann
dit qu'il n'y a guère, sur ce littoral, de marais ou d'étang où l'on
n'en trouve quelques couples, et qu'un grand nombre de ces oiseaux
se propagent annuellement dans l'Abasie et la Mingrélie, dans les
Tome ii. — 1891 ^^
378 —
ba^-fonds du Boug et du Dnieper, sur le Danube, sur le Pruth et
dans les parties centrales de la
Bessarabie. Il niche également
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sur le Volga inférieur jusqu'au
48° 1. N. (Seebohm), ainsi que
dans les plaines basses du Cau-
case (Radde).
Dans les autres parties de
l'Europe méridionale et centrale,
cet oiseau ne se montre qu'aux
passages soit régulièrement, soit irrégulièrement, mais il ne visite
que très accidentellement la Belgique, ainsi que la Suisse {Meisner
et Schinz), la Hollande {Schlégel), l'Allemagne (Borggreve), le Dane-
mark (Co///r^,), la Pologne (Taczanoivski) et la Norwège où un indi-
vidu fut tué en 1835 près de Bodoe sous le 64 1/S^ 1. N. {Collett). Il
est moins rare, lors des passages, en Autriche (Reichenow) ainsi que
dans le midi et le centre de la Suède {Niisson). Pour les îles Britan-
niques, c'est également un oiseau de passage accidentel, mais il a
été observé, surtout en automne, en Angleterre, en Irlande, en
Ecosse, ainsi qu'aux îles Shetland et Orkney {Seebohm); il a même
été capturé aux îles Fœroé (H. C. Millier) et en Islande {Collin).
En Afrique, cet Ibis a été observé un peu partout : il niche dans la
partie nord-ouest [Seebohm) et hiverne en Egypte, en Nubie, dans le
Kordofan, au Sennaar et en Abjssinie [de Heuglin) ; sa présence a
encore été signalée sur presque toutes les côtes africaines : à Mozam-
bique, au Zambèze, dans la République d'Orange, à Natal, au Congo,
au Gabon, dans la Sierra-Léone, au Sénégal [auct. plur.) et même sur
toutes les côtes de Madagascar [Grandidie?^). Cet oiseau se trouvait
également dans une collection recueillie par M. le capitaine Em. Storms
dans la région du lac Tanganyka (Congo oriental).
En Asie, le Falcinelle éclatant est plus ou moins répandu dans les
parties centrales et méridionales et il fait des excursions jusqu'au
48° 1. N. ; mais il n'a pas encore été observé dans la Sibérie orientale
et ses apparitions en Chine sont fort douteuses, car aucun voyageur
ne l'y a observé. Il hiverne dans l'Inde [Jerdon), à Ceylan [Leggé)^ et
visite parfois en hiver la Birmanie [Seebohm) et la Gochinchine
[von Hïigel). En Océanie on trouve cet oiseau à Sumatra [Raffles), à
Bornéo [Croockeioit), à Java [S. Millier), à Célèbes [Forsten), à la
Nouvelle-Guinée [d'Albertis) et en Australie [Gould, Ramsay).
— 379 -
Enfin, sur le continent américain, on rencontre le Falcinelle dans
toute l'Amérique du Nord jusqu'au Massachusetts, l'Ohio {Coues) et
le Connecticut {Hart Merria7n), et dans l'Amérique du Sud jusqu'au
Chili {Temminck), le Paraguay {Burmeister) et Buenos-Ayres
[deHeuglin).
Mœurs. — On ne voit le Falcinelle en Europe que pendant l'été ;
Lindermayer dit qu'il arrive en Grèce après l'équinoxe du printemps,
qu'il y séjourne en quantités énormes jusque vers le 10 ou le 15 mai,
et que tous disparaissent alors le même jour et presque en même
temps. M. Irby dit ne l'avoir vu arriver à Gibraltar que tard en avril.
Suivant de Nordmann, c'est un des oiseaux de passage les plus tar-
difs, qui n'arrive dans le midi do la Russie que rarement avant la
mi-mai; il repart à la fin d'août ou au commencement de septembre.
Dans ce but, les Ibis s'attroupent souvent par plusieurs milliers,
volant tous à côté les uns des autres et formant ainsi une longue file
qui va plus ou moins en serpentant et qui traverse l'air obliquement.
Cet oiseau habite les marécages, les mares, les bords vaseux des
étangs et des lacs et autres eaux bourbeuses riches en roseaux et en
herbages divers. En dehors de l'époque de la reproduction, les bandes
qui habitent une contrée aiment à changer de demeure, volant d'un
marais à l'autre et visitant parfois les pâturages et les champs, même
ceux qui se trouvent loin de l'eau. C'est d'ailleurs un oiseau très
sociable, qui vit constamment en troupes plus ou moins nombreuses,
aussi est-il rare de n'en voir qu'un couple ou un sujet isolé.
Le Falcinelle ressemble assez aux Courlis par ses formes, mais sa
structure et ses moeurs le rapprochent davantage des Cigognes et
surtout des Spatules. Il marche tranquillement mais à grands pas, le
cou rentré et recourbé en S, le bec incliné et le corps relevé par
devant. En cas de nécessité, il sait nager d'un endroit à l'autre en
s'aidant des pieds et des ailes, mais cet exercice ne paraît pas lui
plaire beaucoup. Son vol ressemble à celui du grand Courlis, mais il
est plus lent; en volant, l'oiseau étend le cou et les pattes, bat assez
rapidement des ailes, plane quelque temps, puis donne un nouvel élan;
il peut avec aisance changer brusquement de direction, décrire d'élé-
gantes ondulations et s'abattre d'une grande hauteur avec une extrême
rapidité ; il vole en général très haut et par bandes qui s'avancent
d'une manière fort gracieuse. « C'est, dit Naumann, un charmant
spectacle que celui d'une longue bande de Falcinellos fendant les airs.
Ils semblent glisser, comme poussés par la brise. La ligne qu'ils for-
— 380 —
ment n'est pas absolument droite, elle s'incline, s'infléchit de la façon
la plus élégante, la plus variée, montant, descendant, variant à
chaque instant: tantôt c'est le centre, tantôt l'aile droite ou l'aile
gauche qui s'avance, se laisse distancer, s'élève ou s'abaisse; les
ondulations de cette ligne varient donc beaucoup, mais celle-ci
demeure toujours continue, chaque oiseau reste à côté de son voisin.
Quand la bande va s'abattre, aussitôt la ligne se fragmente, les
oiseaux se séparent, planent, décrivent des cercles, des spirales, puis
ils s'abattent bruyamment, successivement, l'un après l'autre près de
l'eau. Il est tout aussi intéressant de voir leur ligne se reformer; les
oiseaux s'élèvent décrivent de nouveau des cercles qui montent de plus
en plus, grandissent, puis tout à coup de leurs amas désordonnés se
forme une ligne transversale, qui s'accroît à chaque extrémité par
l'adjonction de nouveaux arrivants. A mesure que la ligne s'avance,
on voit d'autres Falcinelles qui viennent s'y joindre et la prolonger à
chaque extrémité, et enfin toute la bande s'éloigne en traversant l'air
à une grande hauteur (1). »
Naumann pense que ces oiseaux ne volent ainsi que pendant les
migrations, mais A. Brehm affirme que c'est leur allure normale
chaque fois qu'ils volent en troupe.
Cet Ibis est un oiseau diurne extrêmement prudent et craintif, mais
intelligent, gai et enclin à provoquer ses semblables ; il vit en paix
avec les autres oiseaux, mais sans prendre part à leurs ébats. Au
lever du soleil il se rend dans les marécages pour y chercher sa
nourriture et y reste toute la matinée; vers le milieu du jour il prend
quelque repos à terre ou sur un arbre et recommence sa chasse dans
l'après-midi ; toute la bande s'envole au crépuscule pour passer la
nuit sur des arbres. Sa nourriture consiste en vers, larves, insectes,
crustacés, mollusques, ainsi qu'en reptiles et poissons de petite
taille; cet oiseau rend de grands services, en Afrique, en détruisant
des quantités énormes de criquets dont il est très friand. Pour cher-
cher sa nourriture, il entre souvent dans l'eau aussi profondément
que ses pattes le lui permettent.
Malgré sa vivacité et sa sociabilité, le Falcinelle ne se fait entendre
que bien rarement; ce n'est, pour ainsi dire, que quand il est surpris
ou dans un moment de frayeur qu'il jette un cri rauque et faible
ressemblant à rrha ou rrâ, et encore ne le perçoit-on qu'à une très
(1) Naumann, Vùgel Deuischlamis, t, VIII, p. 554.
- 381 -
courte distance; les jeunes font parfois entendre un sifflement
particulier.
Dans certains pays, on chasse ces Ibis pour leur chair qu'on dit
excellente.
Reproduction. — Le Falcinelle niche ordinairement sur les arbres
des héronnières, et parfois en compagnie des Hérons, des Bihoreaux,
des Aigrettes et des Cormorans nains. Le nid est placé à hauteur
variable et il est construit sur le même modèle que celui des Hérons;
l'intérieur est garni de tiges de roseaux et autres herbages. Dans
certaines localités, cet oiseau niche sur des monticules boueux émer-
geant des marais ou sur de vieilles souches de plantes aquatiques;
dans ce cas le nid est formé de tiges et de feuilles de roseaux. La ponte
a lieu à la fin de mai et se compose de trois ou de quatre œufs, de
forme plus ou moins allongée et d'un vert bleuâtre sans taches; ils
mesurent environ 51 millimètres sur 37.
M. Doig trouva des nids dans l'Inde en juin, et M. Legge en vit à
Cevlan en mars.
ORDRE VIII
LES I>A.LM:ii>ÈI>ES
Car. — Les Palmipèdes se reconnaissent à première vue à leurs
pieds palmés. Le plus souvent ce sont les trois doigts antérieurs qui
sont réunis par une palmature (Canards, Mouettes, Plongeons); par-
fois cependant, les quatre doigts sont ainsi réunis (Pélicans, Cormo-
rans). La palmature peut être entière ou incomplète, c'est-à-dire
n'être qu'à peine échancrée antérieurement, comiiie chez la plupart
des oiseaux de l'ordre, ou l'être profondément comme chez les
Grèbes. Les jambes et les tarses sont courts.
Quant au bec, aux ailes et à la queue, ils varient à l'infini. Les
ailes sont le plus souvent bien développées, mais chez quelques-uns
(Manchots) elles sont tellement imparfaites, qu'elles ressemblent plus
à des nageoires qu'à des ailes.
Les femelles ont parfois un plumage différent de celui des mâles ;
certaines espèces varient aussi de plumage suivant les saisons.
Hah. — Les Palmipèdes sont répandus dans le monde entier, mais
principalement dans la zone froide.
Mœurs. — Tous les Palmipèdes sont de bons nageurs ; beaucoup
d'entre eux sont des voiliers de premier ordre, mais il y en a aussi
qui ne savent pas voler et qui ne marchent qu'avec la plus grande
diflâculté. Ce sont en général des oiseaux très sociables, et ceux qui
habitent les zones froides, émigrent pour la plupart à l'approche de
l'hiver.
Ils se nourrissent généralement d'autres animaux proportionnés à
leur taille, très peu se contentent d'un régime purement végétal.
Les Palmipèdes sont plus ou moins féconds, mais il y en a beau-
coup qui ne pondent qu'un seul oeuf. Ils nichent le plus souvent sur
le sol, très peu construisent leur nid sur des arbres.
Classification. — On divise cet ordre en six sous-ordres, savoir :
1. Lamellirostres \ 2. Totipalmes; 3. Longipennes ; 4. Tubinaires-,
5. Pygopodes\ 6. Impennés.
- 383 —
PREMIER SOUS-ORDRE
LAMELLIROSTRES
Car. — Bec droit, large, légèrement bombé, pourvu d'un onglet
corné à l'extrémité des deux mandibules et garni sur ses bords de
lamelles également cornées ; ce bec est recouvert d'une membrane
molle pourvue de nerfs, ce qui en fait un organe de tact des plus
sensibles; mandibule inférieure plus ou moins cachée par la supé-
rieure ou découverte; narines percées de part en part; langue
grande, charnue mais cornée à son extrémité antérieure qui est fran-
gée et dentelée. Tête relativement volumineuse; cou plus ou moins
allongé, parfois très long; corps trapu, un peu allongé; ailes géné-
ralement étroites, aiguës, de longueur moyenne; queue courte,
arrondie ou conique, les rectrices médianes dépassant rarement les
autres de beaucoup ; pattes de longueur moyenne ou courtes ; doigts
au nombre de quatre, les trois antérieurs réunis par une palmature;
pouce petit, souvent pinné, ne portant sur le sol que par son extrémité.
Le plumage est serré, lisse et imperméable.
Ce sous-ordre ne comprend qu'une seule famille, les Anatidés, qui
se subdivise en cinq sous-familles : les Ansérinés, les Cygninés, les
A7iafiné.s, les Fuligulinés et les Merginés, qui ont toutes des repré-
sentants en Belgique.
FAMILLE DES ANATIDÉS
Car. — Ceux du sous-ordre.
Hab. — Les oiseaux de cette famille ont des représentants dans
toutes les parties du monde.
Mœurs. — Tous les Anatidés nagent avec agilité et sans fatigue,
beaucoup plongent avec aisance; ces oiseaux marchent avec plus ou
moins de facilité ; quelques espèces perchent volontiers et paraissent
se plaire au milieu des branches. La plupart volent bien et rapide-
ment, mais ils ne peuvent s'élever sans un grand effort; jamais ils ne
planent et ils sont obligés de battre constamment des ailes.
Ces oiseaux sont en général doux et sociables, mais prudents; au
besoin, ils déploient une ruse et un jugement dont, à première vue,
on ne les croirait pas capables. Les sens de l'ouïe, de la vue et du
toucher sont bien développés; l'odorat et le goût paraissent assez
parfaits. Ils se nourrissent de substances animales et végétales.
— 384 —
Tous les Anatidés sont monogames, mais leur fidélité conjugale
laisse parfois beaucoup à désirer. Les petits naissent couverts de
duvet; ils quittent le nid dès qu'ils sont secs et croissent très rapi-
dement.
Un grand nombre de ces oiseaux . vivent et se reproduisent en
domesticité; les espèces voisines se croisent souvent entre elles et
produisent des métis parfois féconds,
SOUS-FAMILLE
DES ANSÉRINÉS. — ANSERIN/E.
Car. — Bec aussi long ou moins long que la tête, convexe supérieu-
rement, aplati en dessous, plus haut que large à la base, diminuant
en hauteur d'arrière en avant ; mandibule inférieure découverte; ailes
assez larges, longues, atteignant souvent ou dépassant même l'extrémité
de la queue, armées au poignet d'une tubérosité dure, qui, chez quelques
espèces, se transforme en un vigoureux éperon ; jambes insérées vers le
milieu du tronc; tarses de longueur moyenne, médiocrement comprimés;
doigts antérieurs réunis par une palmature entière, parfois échancrée, mais
l'extrémité des doigts est rarement libre; ongles courts, forts, légèrement
recourbés ; queue courte, arrondie, égale, formée de quatorze à vingt
rectrices.
Hah. — Cette division a des représentants dans toutes les parties
du monde, mais chaque partie du globe terrestre a des espèces qui
lui appartiennent en propre.
Mœurs. — Les Ansérinés sont moins aquatiques que les autres
Lamellirostres et passent une grande partie de leur vie sur la terre
ferme ; quelques-uns sont même arboricoles {Chenalopeœ, Nettapus),
se reposent et nichent sur les arbres. Ils sont aussi plus agiles et mar-
chent mieux que les autres membres de la famille, mais ils nagent
moins vite et plongent moins volontiers. Ils volent avec légèreté et
franchissent d'une traite des espaces considérables.
Ces oiseaux se défient de l'homme et l'évitent en toute occasion ;
mais une fois captifs, ils se soumettent à leur sort et s'apprivoisent
bientôt. Quelques-uns sont querelleurs et despotiques, mais la plupart
sont très sociables, du moins vis-à-vis de leurs semblables. Il est vrai
qu'il y a souvent des combats entre les mâles pour la possession d'une
femelle ; mais une fois que chacun a conquis sa compagne, les divers
couples vivent en paix et nichent les uns à côté des autres. Brehm dit
— 385 -
que le mâle témoigne à sa femelle une fidélité inébranlable, et que
les unions ne sont dissoutes que par la mort de l'un des conjoints.
Tous les oiseaux de ce groupe sont herbivores : ils vivent d'her-
bages, de feuilles, de fruits, de baies et de céréales; là où ils sont
nombreux, ils peuvent occasionner des dégâts assez sérieux.
GENRE CXL.
BERxVACHE. — BRANTA.
Anser, Briss. Ornith. VI, p. 304 (1760).
Anas, Lin. St/sl. mit. I, p. 198 (1766).
Branta, Scop. Ann. I. Hiit. nat. p. 67 (1769).
Bernicla, Boie, Isù^ 1822, p. 563.
RuFiBRENTA, Bonap. Comp.rend. XLIII, p. 048 (1856).
Car. — Bec petit, beaucoup plus court que la tête, plus haut que hirge a
la base, droit, convexe, légèrement déprimé en avant des narines et terminé
par un onglet fortement recourbé ; lamelles complètement cachées par la
mandibule supérieure ; narines elliptiques, latérales, percées dans une mem-
brane à égale distance du sommet et de l'extrémité de la mandibule ; ailes
longues, aiguës ; queue courte, arrondie ; bas des jambes emplumé ; tarses
robustes, un peu plus longs que le doigt médian.
Hab. — Les espèces de ce genre habitent, en été, la zone polaire;
elles hivernent sur les côtes de la zone tempérée.
243. — La Bernache ou Oie à joues blanches
BRANTA LEUCOPSIS, Bann. ex Bechst.
(PI. 242)
Anser bernicla et A. Bernicla minor, Briss. Ornith. VI, p. 300-302 (1760).
Anas bernicla, (part.) Lin. Si/st. nat. I, p. 198 (1766).
Anas leucopsis, Bechst. Ornith. Taschenb. Il, p. 424(1803).
Anser leucopsis, Bechst, Nutury. Deictschl. III, p. 921 (1809).
Bernicla leucopsis, Boie, Isis., 1822, p. 563.
Anser erythropus, Degl. (necLin.) Orn. eur. II, p. 402 (1849).
Branta leucopsis, Bannist. Proc. Acad. nat. se. Philad. 1870, p. 131.
Die Weisswanuen-Gans, en allemand.
The Bernacle Goose, en anglais.
De Brandgans, en flamand.
Taille: 0,6G ; ailes 0,44; bec 0,031.
Description des deux sexes adultes. — Front, joues et gorge blancs avec
une légère teinte d'un roux jaunâtre mais peu apparente; lorums, vertex.
Tome II. — 1891. 49
386 —
cou, haut (Je la poitrine et du dos d'un beau noir lustré; scapulaires et cou-
vertures supérieures des ailes d'un gris cendré, terminées par une large bande
noire suivie d'un bord blanc; rémiges noires, bordées extérieurement de gris
sur la majeure partie de leur étendue; bas du dos, croupion, queue et bas
des jambes, noirs ; sus-caudales et toutes les parties inférieures à partir de la
poitrine, d'un blanc assez pur avec quelques bandes cendrées sur les flancs.
Bec et pattes noires; iris brun. — La femelle est toujours un peu plus petite
que le mâle.
Jeune de Vannée. — Se distingue de l'adulte par les lorums tachés de brun
noirâtre, le noir de la tête et du cou tirant sur le brun, les bordures blanches
des scapulaires et des couvertures des ailes plus larges, et en général par des
teintes moins pures. Bec et pattes d'un brun noirâtre.
jjab. — La Bernache à joues blanches passe la belle saison dans la
^ partie la plus septentrionale de
l'Europe, c'esi^-dire au Spitzberg
tisj^tlf If : M. 'UfS^M-itlii^i i (^^ Heuglin) , à la Nou velle-Zem-
|, Li[|^^|P|Ai"i:>^:f^,M ble {Nordenskiôld) et peut-être
A dans le nord de l'Islande (Faber)
et du Groenland ; c'est donc une
espèce polaire. A l'approche de
^3 l'hiver elle émigré et se montre
alors par bandes dans le sud du
Groenland {Holbôll) et de l'Islande {Faber), ainsi que sur les côtes de
la Norwège (Co//e^^) et de la Suède [Nilsson), mais elle est rare sur
celles de Finlande [Buchner) et de la Russie occidentale; dans la vallée
de l'Oural elle est cependant plus abondante, lors des migrations, que
rOie à front blanc, et on la voit alors souvent sur les lacs environnants
{Sabanàeff')', elle est rare en Pologne {Taczanowski). Cet oiseau se
montre régulièrement sur les côtes du Danemark, du nord de l'Alle-
magne, de la Hollande, de la Belgique et du nord de la France,
surtout pendant les hivers rigoureux, mais ne visite que très acciden-
tellement les plages du midi de la France {Gerbe) et de l'Espagne, où
il a été capturé près de Séville {Irby, Saunders) et dans la province de
Gérona {Vayreda) ; on l'observe régulièrement sur les côtes belges de
novembre à mars, mais rarement à l'intérieur du pays: on l'a cepen-
dant capturé sur la Meuse près de Namur {de Selys), prés de Hasselt
{Claes) et plus souvent près d'Anvers [Croegaert).
Cet oiseau est de passage accidentel aux îles Féroé {Feilden) et
hiverne communément aux îles Britanniques, surtout sur les côtes
occidentales de l'Ecosse ; il est plus localisé en Irlande ou on l'observe
- 387 —
particulièrement dans les parties septentrionales et nord-ouest {See-
bohm) ; il visite également les îles Shetland {Saœbî/).Ssi présence dans
l'intérieur de l'Europe est toujours un fait accidentel, c'est ainsi que deux
captures ont été faites en Bohême (Fritsch) et une en Italie {Giglioli).
Cette Bernache se montrerait aussi accidentellement en Amérique
dans la baie d'Hudson {Coues), et plus accidentellement encore dans
le nord de la Caroline {Lawrence) ; mais, suivant Baird, l'apparition
de cette espèce dans l'Amérique du Nord serait fort douteuse.
Mœurs. — Cette Bernache, aussi appelée Bernache nonnette,
quitte les contrées boréales en septembre et y retourne en avril. Faber
dit qu'elle arrive en Islande vers la fin de la première quinzaine
d'avril et qu'elle visite alors en troupes les vallées, les prés et les
champs jusque vers la fin de mai; elle disparait alors complètement
de l'île, car on ne l'y a jamais vue en été; il se peut, cependant, que
quelques couples nichent sur des plages désertes du nord de
l'Islande. Elle revient par bandes dans les premiers jours de septembre
pour disparaître de nouveau vers le milieu d'octobre ; c'est donc,
pour l'Islande, un oiseau de passage.
Les migrations ont lieu graduellement à mesure que le froid
devient plus intense et se font le plus souvent le long des côtes mari-
times ; il est rare que les bandes suivent le cours des fleuves, et c'est
la raison pour laquelle ces oiseaux sont si rares dans le centre de
l'Europe. Les Bernaches voyagent donc par troupes ou en bandes plus
ou moins nombreuses et toujours en plein jour ; les individus isolés se
joignent souvent à des bandes d'Oies cendrées ou des champs qui les
entraînent alors parfois à l'intérieur du continent loin des bords de
la mer.
Cet oiseau ressemble aux vraies Oies par sa manière d'être : il
marche avec facilité et court même assez vite quand c'est nécessaire ;
en nageant, il tient ordinairement le cou droit et le corps peu enfoncé
dans l'eau. Son vol est facile et gracieux, l'oiseau décrit avec aisance
dans les airs les courbes les plus capricieuses, même quand il y a
grand vent. Il se plaît surtout près de la mer, mais visite souvent les
lacs, les cours d'eau et les marais du voisinage et cherche surtout sa
nourriture dans les prés et les champs.
La Bernache à joues blanches est assez farouche, mais moins que la
plupart des Oies; elle est sociable sans cependant rechercher la
société d'autres palmipèdes, à moins qu'elle ne se trouve isolée de ses
semblables ; c'est ainsi que M. CoUott a vu un individu nager dans le
- 388 -
Porsatigerfjord au milieu d'une troupe d'Eiders. Son cri est rauque et
ressemble à kah prolongé suivi de kak, liak d'un ton bref, mais elle ne
se fait pas entendre souvent et répète rarement son cri, sauf quand
elle voyage en bande.
La nourriture de cet oiseau consiste principalement en substances
végétales qu'il trouve dans les prés et les champs ; il vit surtout d'her-
bages, de bourgeons, de graines diverses, de céréales et de préfé-
rence d'avoine. Suivant Naumann, il mange aussi des algues marines,
des larves aquatiques, des vers et des insectes. En captivité on peut
le nourrir comme les Oies domestiques.
Reproduction. — Cette espèce ne se reproduit que dans les parties
les plus boréales de l'Europe, c'est-à-dire au Spitzberg, à la Nouvelle-
Zemble, et peut-être dans le nord du Groenland et sur la côte nord-
ouest de la Sibérie près de la mer de Kara.
M. Collett dit avoir reçu en 1S70 de M. Irgens,'1îeux œufs trouvés
à Borgevaer, l'une des îles Lofoten les plus septentrionales (68°15'),
et provenant d'une Oie « ayant les joues blanches, le restant du plu-
mage et les pieds de couleur sombre et ressemblant un peu à un Cor-
moran. » Ces œufs, que M. Collett croit pouvoir attribuer à la Ber-
nache qui nous occupe, avaient une coquille épaisse, poreuse, d'un
blanc brillant avec une légère teinte jaunâtre ; ils mesuraient 67 mm.
sur 45 et 46 1/2. — Suivant Brehm et Paessler (1), la Bernache à
joues blanches niche au bord des fleuves et des lacs, ainsi que dans
les marécages; la femelle déposerait de six à dix œufs lisses, peu lui-
sants, à grain fin et d'un blanc un peu jaunâtre; les tigures qu'en
donne Baedeker mesurent 72 à 77 millim. sur 47 à 51 millim.
Comme on le voit, on ne connaît encore rien de bien certain sur la
propagation de cette espèce ; Brehm et Paessler ne disent pas la source
de leur renseignement et la ponte qu'ils indiquent paraît exagérée.
244. — La Bernache à collier ou cravant.
BRANTA BRENTA {BHss.)
(PI. 243)
Anser BRENTA, Briss. Ornilli. VI. p. 304 (1760).
Anas bernicla, Lin. Syst. 'iint. I, p. 198 (1766).
Branta bernicla. Soop. Ann. I. Hist . vit., p. 67' (1769).
Anas brenta, Tnnst. Orn. Brù., p. 4 (1771).
(i) Baedeker, Die Eier d. Eui-op, Va-^eL texte de la pi. 63.
— 389 —
An AS MONACHUs, Bescke, Beitr. Naturg. Vogel Kurlands, p. 45 (1792).
Amser torquata, Bechst. Naturg. Deiitschl. III, p. 911 (1809).
Anser bernicla, \W.\g. Prodr., p. 277 (1811).
Bernicla torquata, Boie, Isis, 1822, p. 563.
Bernicla brenta, ^iQ)^\i. Shaxo's Gen. Zool. XII, 2, p 46 (1824).
Bernicla glaucogaster, micropus, platyuros, collaris, Brehni, Ids, 1830, p. 996.
Bernicla melanopsis, Macgill. Mm. Brit. Om. II, p. 151 (1842).
Bernicla pallida, Bi-ehm, Naumannia, 1855, p. 2.17.
Brenta bernicla, Heagl. Reisen Nordpolarmeer, III, p. 132 (1874).
Anser brenta glaucogaster, Seeb. Bril. B. IH, p. 508 (1885).
Die Ringelgans, en allemand.
The Brent Goose, en anglais.
De Rotgans, en flamand.
Var. Nigricans
Anser nigricans, Lawr. Anyi. Li)c. X. Y. IV, p. 171 (1846).
Bernicla nigricans, Cass. ILl. B. of Cnl., Ter. elc , p. ,52, pi. 10 (1856).
Branta nigricans, Bann. Proc. Phil. Acad., 1870, p. 131.
Branta bernicla var. Nigricans, Coues, Key, 1872, ]i. 284.
Anser bernicla (part.), Schleg. Mus. des P.-B. Anseres., p. 103 (1866).
Trdlle -. 0"'50 ; ailes 0,33 ; bec 0,034 (à partir du front).
Deserlptiondes deux sexes adultes. — Tête, cou. haut à>^ la poitrine d'un noir
un peu grisâtre, avec un espace blanc maculé de noir de chaque côté à
la partie supérieure du cou; manteau, scapulaires et couvertures des ailes
d'un cendré brunâtre avec les plumes bordées d'une teinte plus claire; poi-
trine, abdomen et flancs d'uti cendrô plus pâle que le dos, avec les
plumes des flancs terminées de cendré blanchâtre; rémiges et queue
d'un brun noirâtre; croupion noirâtre; bas-ventre et côtés du croupion
d'un blanc pur; sus et sous-caudales blanches et atteignant l'extrémité de
la queue qu'elles cachent presque complètement. Bec et pattes noirs ; iris
brun foncé. — La femelle est plus petite et les parties inférieures du corps
sont plus pâles.
Jeune. — Tête, cou et haut de la poitrine d'un gris plus b'unâtro et moins
brillant que chez l'adulte; dessus du corps d'un gris cendré foncé avec les
phimes plus ou moins bordées de cendré clair; rémiges et rectrices noirâtre,^,
CCS dernières terminées de blanchâtie ; les taches blanches des côtés du cou
n'existent pas encore ou sont à peine marquées. Pattes d'un noir rougeâtre.
Var. Nigricans. — Cette variété diffère du type européen par ses teintes
plus sombres et pai- les bordures blanchâtres des plumes des flancs phis
larges; elle se distingue surtout par les deux espaces blancs du cou, qui se
réunissent en avant pour former im collier complet interrompu seulement sur
la nufpie. A eu juger par l'individu (lue j'ai sous les yeux (un mâle de l'île'
Vancouver), le bec est aussi un peu plus robuste (pie cIk/. les sujets de
l'Europe.
— 390 —
Remarque. — Suivant M. Seebohm, les sujets de la côte nord-
ouest du Groenland se distingueraient de ceux de l'Europe boréale,
par la coloration des parties inférieures qui serait, à partir de la
poitrine, presque d'un blanc pur. Il désigne cette race, d'après
C. Brehm, sous le nom de Glaucogaster (1).
Des individus de cette variété se montrent accidentellement sur les
côtes des îles Britanniques, et Brehm a signalé une capture près de
Ilmenau sur l'Elbe (Hanovre).
Hab. — L'Oie à collier, ou Bernache cravant, niche dans la zone
m polaire au-delà de 70" 1. N. Au
Spitzberg elle est bien plus
commune que l'espèce précé-
dente et se montre jusque dans
les parties les plus septentrio-
■^l nales, ainsi que sur toutes les
côtes de la Nouvelle-Zemble {de
Hcuglin); elle niche également
à l'embouchure du Taimyr et du
Boganida {Middendorff). Au Groenland elle ne niche qu'au nord
du 73" {de He^iffh'n), et il en est peut-être de même aux îles améri-
caines de la mer Polaire.
Lors des migrations, ces palmipèdes visitent par bandes plus ou
moins nombreuses les îles Féroé (Feilden), les côtes de la Scandinavie
[CoUett, Nilsson), de la Russie occidentale {Palmèn) et l'Islande, où
ils sont cependant rares [Faber). Ils hivernent sur les côtes du nord
de l'Allemagne [Borggreve], du Danemark, de la Hollande, de la
Belgique, des îles Britanniques et du nord de la France, mais ils
sont beaucoup plus rares sur les côtes du midi de la France. On
n'observe cette espèce que très accidentellement sur les côtes de
l'Espagne {Vayreda), du Portugal [Reyes], de l'Italie [Salvadori,
Giglioli), et on l'a même capturée sur les côtes de l'Algérie {Loche),
de l'Egypte {de Heu g lin) et de la Palestine {Tristram), mais ses
apparitions sur les côtes de la Méditerranée sont toujours extrême-
ment rares et il est probable qu'elles coïncident avec des hivers
exceptionnellement rigoureux. On cite également quelques captures
accidentelles en Transylvanie [Danfoy^d et Harwie-Brown), en
Bohême (Fritsch), en Hongrie (Afw.9. de Vienne), en Pologne {Tacza-
[\j il. "Sieh nnw, Ih-tt.ish Jîirds, ill, ji. 50> (1685.)
— 394 —
nowski. En Belgique cette Bernaclie se montre par bandes sur les
côtes de Flandre et sur l'Escaut.
Dans le nord-est de l'Amérique, on observe cette espèce, durant
l'hiver dans la baie d'Hudson et sur les côtes de l'Atlantique ; elle
pousse parfois ses migrations jusque sous le 35° 1. N, [Baird, Coaes).
La var. Nigricans niche probablement dans les îles polaires du
nord-ouest de l'Amérique et près du cap de Barrow; elle est de
passage dans l'Alaska (Turner) et hiverne sur les côtes américaines
du Pacifique, accidentellement sur celles de l'Atlantique [Coues) et
dans le nord du Japon (Seebohm) ; elle est de passage aux îles
Comandores {Stejneger).
Mœurs. — Ces Bernaches quittent les régions polaires dès que le
froid y devient intense, et apparaissent alors en novembre par milliers
sur les côtes de la Baltique et de la mer du Nord, volant autant au-
dessus de la pleine mer que le long des côtes; ce n'est qu'accidentel-
lement que quelques sujets s'égarent pi'ès des tieuves et des lacs de
l'intérieur, car ce sont essentiellement des oiseaux marins.
Ce sont aussi des oiseaux très sociables entre eux, mais ne se
mêlant pas aux Bernaches à joues blanches; comme les deux espèces
fréquentent les mêmes lieux, elles doivent évidemment se rencontrer
souvent, mais elles ne se confondent pas, chaque espèce forme un
groupe à part. La Bernaclie cravant se montre du reste indifférente
à l'égard des autres oiseaux et ne demande qu'à vivre en paix. Elle
arrive généralement sur nos côtes un peu plus tard que la Bernache
à joues blanches, mais elle les quitte aussi après le départ de cette
dernière.
De même que l'espèce précédente, la Bernache cravant se fait
remarquer par ses formes élégantes, ses mœurs paisibles et la finesse
de ses sens; elle marche et nage avec aisance, et plonge avec plus
de facilité que les vraies Oies; elle vole aussi plus aisément que ces
dernières, et émigré généralement par bandes désordonnées, rare-
ment disposées en angle aigu. En volant elle produit un bruissement
très prononcé et fait entendre des cris ressemblant au bruit d'une
crécelle; quand une bande s'élève dans les airs, elle produit un bruit
assez semblable au roulement du tonnerre dans le lointain.
A la fin de l'été, dit de Heuglin, ces oiseaux aiment à s'attrouper
en bandes énormes sur les écueils et les bancs de sable, d'où ils
errent aux alentours, sur teri'e et sur mei', pour chercher leur nourri-
ture. Celle-ci se compose surtout de substances végétales : zostères.
— 392 —
algues marines et plantes diverses croissant dans un terrain aride
imprégné de sel; ils prennent aussi des mollusques, des larves
aquatiques et des annélides ; il est probable que ces oiseaux mangent
aussi des graines diverses et des céréales, car en captivité on les
nouri'it fort bien de blé et surtout d'avoine.
Le calme qui règne dans les contrées polaires est cause que cette
Bernache est peu craintive; tant qu'elle n'a pas eu à subir les pour-
suites de l'homme, elle se laisse approcher sans défiance et on peut
môme parfois la tuer à coups de pierres; mais dès qu'on lui fait une
chasse active, elle devient méfiante et fuit à l'approche du chasseur.
Reproduction. — Cet oiseau niche donc dans la zone polaire et
surtout au Spitzberg et à la Nouvelle-Zemble, et construit son nid
sur la terre ferme aussi bien que sur les récifs.
Dans son voyage au pôle Nord, de lieugiin dit avoir trouvé un nid
de cette Bernache non loin de nids d'Eiders etjde Mouettes bourg-
mestres. Ce nid se trouvait sur une saillie de rocher à proximité des
falaises, et consistait en une excavation assez étroite et peu profonde,
garnie de mousse et de duvet; il contenait, le 18 juin, deux œufs
fortement couvés. — Le major Feilden trouva dans la troisième
semaine de juin, sous le 82 Ys» 1. N., une demi-douzaine de ces nids
avec des œufs. Ces nids étaient installés sur la pente d'une colline
dans de petites dépressions garnies d'herbe, de mousse et de tiges de
saxifrages, le tout recouvert d'une bonne couche de duvet. Chacun
de ces nids contenait quatre ou cinq œufs d'un blanc crème, finement
graines, peu brillants et mesurant 2.87 à 2.65 pouces sur 1 .95 à 1.75
(mesure anglaise), soit une moyenne d'environ 70 miUim. sur 42. —
Middendorlf trouva des poussins déjà assez avancés le 15 juillet, près
du Boganida,
M. J. Murdoch dit que la var. Nigricans pond de cinq à six œufs.
GENRE CXLI
OTE. — ANSER.
Anser, Briss. Ornith . YI, p. 262 (1760).
Anas, Lin. Syst. nat. I, p. 197 (1766).
Branta, Seop. Ann. I. Uist. nat. p. 69 (1769).
Car. — Bec épais, à peu près de la longueur de la tête, conique, très
élevé à la base et terminé par un onglet large et recourbé ; lamelles épaisses,
dentiformes, débordant la mandibule supérieure; narines elliptiques,
percées dans une membrane et situées à égale distance des deux extrémités
— 393 —
du bec ; ailes aiguës, atteiguant parfois l'extrémité de la queue ; celle-ci de
longueur moyenne et arrondie sur les côtés ; tarses très robustes, à peu près
de la longueur du doigt médian, ongle compris ; pouce élevé, ne touchant
le sol que par l'extrémité de son ongle.
Hab. — Les Oies habitent la zone boréale pendant l'été, et hiver-
nent dans la zone tempérée.
245. — L'Oie cendrée
ANSER CINEREUS, Meij. et Wolf.
(PL 244)
ANSEa sEPTENTRiONALis SYLVESTRis, Briss. Oniith. VI, p. 269(1700).
Anas ANSER, Lin. Sysl. nat. L p. 197 (1766).
Anser CINEREUS, Mey. u. "VV. Taschenb. deutsch. Vôgelk. II, p, 552(1810).
Anser vuLGARis, Pall. Zoogr. liosso-As. II, p. 222 (1811).
Anas ANSER ferus, Temm. Man. d'Orn., p. 526 (1815).
Anser médius, Mey. Zus. te. Ber. z. d. deutsch. Vogelk p. 231 (1822).
Anser ferus, Steph., Shaw's Gen. Zool. XII, 2, p. 28 (1824).
Anser palustris, Flem. Brit. An., p. 126 (1828).
Anser sylvestris, Brehm (nec Bi-iss.) Isis, 1830, p. 996.
Anser cinereus var. Rubrirostris, Swinh. Pr. Zool. Soc. 1871, p. 416.
Die Grau-Gans, en allemand.
The Grey-lag Goose, en anglais.
De Wilde Gans, en flamand.
Taille: 0"',79; ailes 0,46; bec 0,66.
Description des deux sexes adultes. — Base de la mandibule supérieure
bordée de petites plumes blanches ; tête et cou d'un cendré brunâtre avec
les bordures des plumes plus claires, mais la teinte sombre dominant sur les
parties moyennes du cou; manteau et scapulaires d'un brun cendré foncé,
chaque plume terminée par un bord blanchâtre assez large; milieu et bas du
dos d'un cendré bleuâtre ; sus-caudales blanchâtres ; petites couvertures des
ailes d'un cendré bleuâtre clair et bordées de blanc ; les autres semblables
aux scapulaires; rémiges primaires noires, nuancées de cendré sur la barbe
externe, avec les baguettes blanches ; les secondaires brunes bordées de
blanchâtre; poitrine d'un cendré clair ondée de blanchâtre sur les côtés;
abdomen et sous-caudales d'un blanc assez pur, avec des taches noirâtres
éparses sur le premier ; lianes d'un brun cendré mais les plumes terminées de
blanchâtre ; rcctrices médianes brunes bordées et terminées de blanc, les laté-
rales entièrement blanches. Hec d'un rouge orange livide très pâle et unico-
ToME IL — lb92 50
- 394 —
lore; iris brun clair ; pattes de couleur clinir livide(l). — La femelle ne diffère
du mâle que par une taille plus petite et des formes plus grêles, mais il est
difficile de la distinguer.
Jeune. — Ne diffère des adultes que par l'absence de plumes blanches à la
base du bec et de taches noires sur les parties abdominales.
Poussin. — D'un jaune terne ; vertex et dos d'une teinte cuivrée assez
sombre, la base du duvet étant brune à ces endroits ; extrémité du duvet
glacée, surtout aux parties supérieures ; bec noirâtre avec l'onglet blanchâtre;
pattes brunes lavées de jaune, surtout aux membranes.
Hab. — Cette Oie niche sur les côtes occidentales de l'Ecosse et sur
Bf«^^ les îles voisines, ainsi que sur
le lac de GastleCoole en Irlande;
dans les autres parties des îles
Britanniques^lle se montre plus
ou moins régulièrement aux pas-
sages {Seebohm). Sa présence en
Islande est douteuse, mais elle
H niche aux îles Féroé {Millier),
en Scandinavie, dans le nord de
la Russie sans dépasser le cercle polaire, en Danemark, dans le nord
de l'Allemagne, dans la vallée du Danube, au Caucase, et parfois
dans d'autres pays encore. Elle est commune, Jors des passages,
dans toute l'Europe centrale, et quand l'hiver est doux, elle hiverne
en Belgique dans les polders près d'Anvers, mais les passages sont
toujours nombreux près de nos côtes maritimes. Elle hiverne dans
certaines parties du midi de la France [Lacroix), en Espagne (2), en
Portugal, en Italie {Giglioli), en Turquie, en Grèce [Kriiper), en
Palestine (Tristram), en Algérie [Loche) et au Maroc [Favier).
L'Oie cendrée est aussi fort répandue en Asie où ou la rencontre
jusqu'aux frontières de la Sibérie orientale [Taczanowski), ainsi que
dans l'Amourland [Schrenck) et la Mongolie [Przewalski), mais en
Asie elle ne paraît pas dépasser le 55° 1. N. Elle hiverne dans l'Asie
(i) La couleur du bec et des pattes permet de distinguer à première vue les différentes espèces
d'Oies qu'on observe dans le pays :
A. Bec jaune ou rosé au milieu, ( pattes jaunes A. sylvcstris.
noir à la base et à l'extrémité. ( pattes roses A.bracliyrhynchiis.
B. Bec et pattes couleur chair livide A. cinercns.
C. Bec et pattes jaunes, front largement blanc A. alhifrons.
(2). M.. Reyes dit que l'Oie cendrée hiverne dans un grand nombre de localités de l'Espagne;
le colonel Irby dit qu'elle y niche et qu'il a obtenu des œufs de ce pa}s.
- 395 —
tempérée, en Chine {David) et jusqu'au centre de l'Inde [Jerdon) et
probablement de la Perse.
Mœurs. — Nous venons de voir que l'Oie cendrée quitte les pays
du Nord à l'approche du froid pour hiverner dans la zone tempérée.
Ces oiseaux émigrent en famille, les parents avec leurs jeunes, mais
plusieurs familles voyagent ordinairement ensemble ; la troupe tra-
verse l'espace en formant un angle aigu, et le plus âgé des mâles se
met ordinairement en avant pour la guider. Ces Oies annoncent leur
retour au printemps par des cris joyeux, et les couples ne tardent
guère à faire leurs préparatifs pour nicher.
Cette espèce ressemble par ses allures à l'Oie domestique qui en des-
cend ; mais l'habitude d'une vie indépendante lui donne un port plus
fier et des mouvements plus dégagés et plus rapides. Bien que les
individus sauvages se tiennent sur la terre ferme la majeure partie de
leur existence, ils savent cependant nager pendant longtemps, sans
fatigue, et ils s'aventurent même en pleine mer ; en cas de danger ils
plongent avec aisance mais ne savent pas rester longtemps sous l'eau;
ils plongent aussi en jouant avec leurs petits, et ceux-ci, dit Nau-
mann, se livrent volontiers à cet exercice depuis leur naissance jus-
qu'au moment où ils savent se servir de leurs ailes. Pour s'élever dans
les airs, cet oiseau donne de vigoureux coups d'ailes qui produisent un
certain bruissement, mais une fois à une certaine hauteur il vole bien,
assez vite et d'une manière assez soutenue ; en s'abattant il occa-
sionne le même bruissement, auquel se joint le clapotement de l'eau,
si l'oiseau descend à sa surface. Quand un couple s'envole vers un
autre endroit, la femelle précède généralement le mâle.
C'est un oiseau méfiant et prudent; il fuit Ihomme de loin, mais il
est assez intelligent pour distinguer le chasseur du passant inoffensif;
il ne se montre en aucune circonstance moins bien doué que la plupart
des autres oiseaux, et le proverbe « bête comme une Oie » n'est nul-
lement justifié. Il est sociable avec les individus de son espèce, mais
ne se montre que bien rarement avec d'autres. « Je ne connais aucun
exemple, dit Naumann, d'Oie cendrée qui se soit jointe à d'autres
espèces du môme genre, et l'Oie dos moissons semble lui inspirer une
antipathie toute particulière ; quand celle-ci a})parait en septembre
dans une localité où des Oies cendrées ont niché, ces dernières lui
font place immédiatement et disparaissent. Seules les Oies domes-
tiques ont le don de les attirer, car elles s'approchent souvent d'elles
dans les pâturages et qu(dques-unes se mêlent même à leur troupeau.
— 396 —
Il est arrivé plus d'une fois que quelques-unes d'entre elles se soient
laissées conduire avec des Oies domestiques jusqu'auprès du village
et ne se soient envolées qu'au moment d'y entrer. Il est arrivé aussi
que des mâles sauvages se soient accouplés avec des femelles domes-
tiques, mais l'inverse ne paraît pas avoir été observé (1). »
La voix de cet oiseau ressemble tellement à celle de l'Oie domes-
tique, qu'il faut être bon connaisseur pour pouvoir la reconnaître; pen-
dant ses occupations aussi bien qu'en volant, il fait entendre
des tattattattat ou àe^ daddaddaddat qui n'en finissent pas; son cri
d'appel, qu'il pousse le plus souvent en volant, ressemble à
kâhkâhhâhh, parfois aussi kihik. Les jeunes ont le même cri que les
poussins des Oies domestiques. Quant au régime, il ne diffère pas de
celui de ces dernières et se compose de graines, de bourgeons, de
jeunes feuilles, d'herbes tendres, de jeunes pousses de céréales, de
trèfles, etc. —
Prises jeunes ou adultes, les Oies cendrées s'apprivoisent toujours
assez vite, mais si on ne les retient pas de force, elles émigrent dès
que le moment est arrivé ; il y en a bien qui reviennent parfois à la
ferme où elles ont été élevées, mais c'est rare. Boie raconte cependant,
qu'une Oie cendrée apprivoisée quittait chaque automne la ferme
qu'elle habitait et revenait au printemps, privée et confiante dès le
premier jour, mangeant dans la main, ne craignant personne; il en
fut ainsi treize années de suite, et pendant ces treize années, jamais
elle n'apparut avant le l*^^"" avril, ni plus tard que le 4, par conséquent
toujours plusieurs semaines après les autres Oies sauvages. Comme
les sujets domestiques peuvent atteindre un âge très avancé, plus de
60 ans dit-on, il est probable que les individus sauvages jouissent du
même privilège.
Reproduction. — Cette espèce niche dans les marécages, les
étangs, les fossés inondés qui bordent les pâturages, pourvu que les
lieux soient bien garnis de roseaux et de divers herbages élevés. Dans
l'Europe centrale ces Oies reviennent ordinairement dans la première
quinzaine de mars ; les adultes, accouplés antérieurement, se mettent
aussitôt à la recherche d'un endroit convenable pour la construction
de leur nid. Les mâles de deux ans, qui se reproduisent pour la pre-
mière fois, se livrent souvent de violents combats pour la possession
d'une femelle, se frappent des ailes, se mordent au cou jusqu'à ce que
(1) Vô^el Deutschlands, XI, p. 246.
— 397 -
l'un des deux adversaires abandonne la place. Les femelles assistent
d'ordinaire à la lutte en faisant entendre leur bruyant babillage, mais
paraissent peu s'intéresser au résultat du combat. Quant aux jeunes
de l'année précédente, et encore incapables de se reproduire, ils se
rassemblent dans une autre partie du marais où ils se livrent insou-
ciants à leurs joyeux ébats.
Chaque mâle no prend qu'une femelle et cette union ne cesse qu'à
la mort de l'un des conjoints. Certains mâles se permettent bien quel-
quefois, mais c'est l'exception, d'aller trouver des femelles non accou-
plées, surtout quand leur compagne est occupée à couver ; mais en
général, le mâle fait ardemment la cour à sa compagne, tourne autour
d'elle dans une attitude fière et en hochant la tête, la suit partout,
veille soigneusement à sa sécurité et l'avertit du danger. Il se montre
aussi jaloux que fidèle et attaque courageusement tout mâle céliba-
taire qui s'approche de sa femelle.
L'emplacement du nid est choisi avec grand soin dans les parties les
plus cachées et les plus inaccessibles des marais. Les différents couples
nichent l'un près de l'autre, mais chacun a son petit domaine dans
lequel il ne tolère aucun intrus. La femelle rassemble activement les
matériaux nécessaires à son nid; le mâle l'accompagne pas à pas, mais
ne prend aucune part au travail. La base du nid est formée de bran-
chages, de tiges et de feuilles de roseaux, de joncs, etc., le tout gros-
sièrement entrelacé ; l'excavation ménagée au centre est garnie de
matériaux plus fins et parfois de mousse. Ce nid a de 60 à 90 centi-
mètres de diamètre sur 30 à 40 de hauteur ; mais à force de le fouiller
la femelle l'aplatit de plus en plus, de façon à en réduire considéra-
blement la hauteur. L'époque de la ponte varie suivant le climat :
dans le nord de l'Allemagne elle a lieu dans le courant de mars, en
Norwège en mai, et sous le cercle polaire plus tard encore.
Quand la femelle commence à pondre, elle dépose journellement un
œuf, et chaque fois qu'elle quitte son nid, elle recouvre les œufs du
duvet qu'elle s'est arraché. Les femelles qui pondent pour la première
fois ne donnent que cinq ou six œufs, colles qui sont plus âgées en
déposent de sept à dix ; il est fort rare de trouver des nids avec un
plus grand nombre d'œufs, mais une femelle, d'un certain âge peut
déposer jusqu'à quatorze œufs. Ceux-ci ne sont presque pas à distinguer
de ceux do l'Oie domestique : ils soiii d'un blanc jaunâtre, tirant
légèrement sur l'olivâtre et mesurent environ 85 millimètres sur 62.
Les jeunes écloseiit au bout do vingt-huit jours; ils quittent leur
— 398 —
nid vingt-quatre heures après leur naissance pour suivre leur mère,
qui les conduit à l'eau et leur apprend à chercher leur nourriture ;
celle-ci consiste d'abord en lemmacées (lenticules) et autres plantes
aquatiques; plus tard, ils vont paître dans les champs et les prés.
Au coucher du soleil, tous retournent au nid, tant que celui-ci est en
état de les contenir. La vigilance du mâle augmente encore avec la
paternité, il suit sa famille partout, la tête haute, regardant de tous
côtés, inquiet sur la siîreté des siens, et en cas de danger c'est lui le
premier qui donne le signal de la fuite.
246. — L'Oie des moissons
ANSER SYLVESTRIS, Briss.
(PI. 245) "^~
Anser SYLVESTRIS, Briss. Ornith. VI, p. 265 (1760).
Anas fabalis, Lath., Gen. Syn. Suppl. I, p. 207 (1787).
Anas segetum, Gmel., Syst. nat. I, p. 512 (1788).
Anser segetum, Mey. et W. Taschenb. deut. Yogelk. II, p. 554 (1810).
Anser RUFESCENS, Breh., Beitr. z. Vogelk. 111, p. 871 (1822). .
Anser ferus, Flem., Brit. anim.^ p. 126 (1828).
Anser PLATYUROS, arvensis et obscurus, Brehm, Isis, 1830, p. 996.
Anas paludosus, Strickl., Ann. Mag . nat. Hist. séries 3, 111, p. 124, pi. 4, fig. 1
(1859).
Die Saatgans, en allemand.
The Bean-Goose, en anglais.
De Rietgans et Wullegans, en flamand.
Var. Serrirostris
Anser grandis, Midd. (nec Pall.) Sibir. Reise, p. 225, pi. XX, f. 1 (1847).
Bernicla GRANDIS, Gray, Ge7t. ofB. 111. p. 608 (1849).
Anser segetum car. Serrirostris, Swinh. Proc. zool Soc, 1871, p. 417.
Anser Middendorffi, Severtz. Turhest. Jevoln, p. 225, pi. XX, f. 1 (1873).
Anser segetum serrirostris. Seeb., Brit. B., III, p. 494 (1885).
Anser segetum Middendorffi, Stejn., Bull. oftheU.S. nat. Mus.,n<^ 29, p. 141
(1885).
Taille : 0™,69; ailes 0,45; bec 0,062.
Description des deux sexes adultes. — Base de la mandibule supérieure plus
ou moins bordée de petites plumes blanches, mais qui disparaissent complè-
tement dans un âge avancé ; tête et cou d'un cendré brunâtre tirant sur le
roux, plus foncé au vertex et à la nuque ; manteau d'un brun cendré avec les
plumes terminées de cendré roussâtre ou blanchâtre ; bas du dos brun
— 399 —
scapulaires et petites couvertures des ailes brunes bordées de blanchâtre, les
autres couvertures d'un cendré gris et terminées de blanc ; rémiges noires
avec leur baguette blanche, les plus externes bordées extérieurement de
cendré gris ; sus-caudales blanches ; rectrices brunes lisôrées et terminées de
blanchâtre ; part.'es inférieures d'un cendré clair avec les bordures des plumes
blanchâtres ; flancs bruns avec les plumes bordées de cendré roussâtre ; bas-
ventre et sous-caudales d'un blanc pur. Bec noir à la base et à l'onglet, jaune
orange au milieu ; pattes d'un jaune orange; iris brun (1).
Jeune. — D'une teinte en général plus pâle et le blanc qui borde la base du
bec plus étendu, surtout au front.
Poussin. — Ne diffère guère de celui de l'Oie cendrée.
La var. Serrirostris est en général d'une taille plus forte (0,87 ; ailes 0,40),
son bec est plus long et ses tarses sont également plus longs; elle se distingue
encore par la teinte de la tête et de la nuque qui est d'un brun fortement
roussâtre (2).
Hab. — L'Oie des moissons niche en Islande [Faber], à la Nouvelle-
Zemble {de Heuglin) et dans le
nord de l'Europe sans dépasser
au Sud le 64M. N. Elle est de
passage ethiverne en partie dans
j^ toute l'Europe centrale et aux
îles Britanniques ; pendant Thi-
% ver elle est généralement très
abondante dans les Flandres et
près de l'Escaut, mais rare dans
les autres parties de la Belgique. Cet oiseau hiverne aussi communé-
ment dans tout le midi de l'Europe, y compris la Grèce, l'Asie Mi-
neure, la Palestine et la Transcaucasie ; pendant les hivers rigoureux,
il pousse parfois ses migrations jusqu'au Maroc [Favier) et l'Algérie
{Loche), mais on ne l'a pas encore observé dans le nord-est de
l'Afrique; l'île Madère paraît être la limite méridionale de ses
migrations.
Itfc
; I I 1 Llj Lil
wrffo%f>\saMn;Batn»1»>toto70m»a.t*»
(i) Chez ccrlains individus la teinte jaune orange du hec prédomine et le noir est moins
régulier ; c'est la race peu caractéristique désignée par Brehm sous le nom de .-/, arvi'nsis.
(2) l'alla déclare ne pas connaître l'/l. _i;raiii//s ; il en parle d'après Gmélia et Stcller. l'our
Brandt, Sevcrtzow et Seebohm, cet oiseau se rapiiorlerait à l'.-l. cvi^itoUes ; Middendortï,
Schlégel et Radde ne sont pas de cet avis, pour eux c'est une espèce distincte voisine de
Va. se!retiim.'SW\s il jiarait (jue l'rzewalski a retrouvé récemment VA. i,'-ran./is, rall.(nec. Midd.)
sur le lac Chanka. (Voy. l'rzcw. /.a Afont^olie et le pays des Titiit; (en russe) II,]). 150, 1S76 et
Taczanowski, Bull. Soc. Zool. de France, II, p. 42).
— 400 —
En Asie nous rencontrons cette espèce dans toute la Sibérie
{Middendorff, von Schrenk), dans le N.-E. du Turkestan [Severtzow),
en Chine [David), au Japon [Swinhoe) et au Kamtchatka {Stejneger),
mais dans TAsie orientale elle est remplacée par sa var. Serrirostris .
Mœurs. — L'Oie sauvage ou des moissons passe par nos contrées à
partir de la seconde quinzaine de septembre et cela par bandes plus ou
moins considérables, qui attirent l'attention par leurs clameurs autant
que par leurs évolutions aériennes. Là où elles s'arrêtent, elles
s'établissent dans le voisinage des lacs, des cours d'eau et des étangs
découverts pour se répandre ensuite dans les champs des environs
qu'elles se mettent à brouter, visitant tantôt Tun, tantôt l'autre. A
l'approche du printemps ces Oies se montrent inquiètes, volent dans
un plus grand rayon, s'attroupent par-ci par-là dans les champs de
pois, de fèves et d'avoine fraîchement ensemencés, et disparaissent
vers la fin d'avril. —
Ces palmipèdes supportent un froid très vif, car ni les fortes gelées,
ni les neiges passagères ne peuvent les décider à fuir ; ce n'est que
quand la terre se recouvre d'une épaisse couche de neige, que le
manque de nourriture les oblige à se rendre dans un climat plus doux;
ils s'envolent alors en grande hâte mais en bon ordre.
Cette Oie n'airne ni la mer, ni ses plages, mais bien les eaux inté-
rieures; elle est d'ailleurs peu aquatique et passe la plus grande
partie de sa vie dans les champs. Il est à remarquer que la même
troupe s'arrêtera chaque année dans la même localité, à moins que la
culture n'y soit changée : ce sont les céréales qui ont le pouvoir de les .
retenir. Au coucher du soleil, toute la bande s'envole pour passer la
nuit sur l'eau, sur un banc de sable ou sur un îlot.
L'Oie des moissons ressemble par ses allures à ses congénères ; elle
vole vite et avec facilité, mais ne s'élève pas sans efforts. Les troupes
composées de quarante à cinquante individus forment en volant un
angle aigu ; quand il n'y en a que douze ou quinze, elles se suivent
à la file en ligne oblique, les plus âgées toujours en tête. Sa sociabilité
ne lui permet cependant pas de se joindre à d'autres espèces du même
genre. Elle est bien douée sous le rapport de la vue et de l'ouïe; dans
l'obscurité pourtant, elle ne sait pas se guider aussi bien que certains
Canards, mais elle entend d'autant mieux. Elle est très farouche, mé-
fiante et prudente et veille constamment à sa sécurité, aussi est-il fort
difficile de l'approcher. Sa voix est sonore et perçante ; Naumann rend
son babillage par taddadadat ; quand une bande s'envole, toutes les
— 401 —
Oies qui la composent se mettent à crier à la fois keiak, kaiajak,
keiakak, keirra, kjiikjik! ces clameurs s'entendent de fort loin surtout
quand la bande est nombreuse.
Le régime de cet oiseau est purement végétal et se compose de
racines, de feuilles tendres, de bourgeons, de graines, de graminées et
de céréales fraîchement sorties de terre; c'est surtout le blé, l'orge et
l'avoine que cette Oie préfère, aussi occasionne-t-elle de grands dégâts
dans les pays où elle est abondante.
Cet oiseau se laisse facilement apprivoiser, mais il reste craintif et
se tient le plus loin possible des Oies domestiques qui partagent sa
demeure; il ne se reproduit que rarement en captivité.
Reproduction. — Cette espèce ne se reproduit, comme il a été dit
plus haut, que daiis la zone froide, et ne fait ses préparatifs pour
nicher qu'après la fonie des neiges, c'est-à-dire en juin. Elle construit
son nid dans les toundras sur une éminence émergeant de l'eau, sur un
îlot ou sur un banc de sable. Le nid consiste en une simple excava-
tion creusée dans le sol et garnie d'herbes sèches, de mousse et de duvet
de la mère ; la ponte est de trois ou quatre œufs d'un blanc un peu
jaunâtre et mesurent environ 84 millim. sur 56 (1).
Middendorff dit avoir trouvé le l"'" juillet en Sibérie, sous le 74"
1. N., un nid d'Oie des moissons qui contenait quatre œufs. Ce nid se
trouvait sur un monticule gazonneux de deux pieds de haut placé près
de l'eau, et consistait en une dépression garnie de brins d'herbe secs
et d'un peu de duvet. Suivant cet auteur, l'émigration a lieu dans
l'extrême Nord du 8 août au 19 septembre.
247. — L'Oie à bec court.
ANSER BRACIIYRHYNCHUS, Baill.
(PI. 246)
Anser brachyrhynchus, Baill, Mèm. Soc. roy. d'émulation d'Abbeville, 1833, p. 74.
Anser brevirostris, Thieii. (nec Breh.) Fortpfimiz. Yogel Eur. p. 25 (1838).
Anser phœnicopus, Bartlett, Froc. zool.Soc. 1839, p. 3.
Anser segetum var. Bpachyrhyncuus, Malmgr., Oeff'oers pp. 309, 412 (1804).
Anser segetum (part.j Schleg. Mtis. P.-B. Anseres p. 112 (1860).
Taille: 0'"G0; ailes 0,42; bec (à partir du front) 0,04; tarses 0,08.
Description des deux sexes adultes. — Tète et cou d'un liruii un pou lous-
sâtre, plus clair au cou ; manteau ceudié, chatjue plume terminée de brun et
(1) Suivant M. J. Vian, la ponte serait de dix à dovizc œufs {Bull, de la Soc. Zool. de Fr., t. XII,
p. 405); mais d'après Middendorff et autres, qui ont reouielli des reufs de cette Oie dans les
contrées de reproduction, la ponte ordinaire n'est «juc de trois ou quatre œufs.
T(j.Mb: Il — l»y2 51
— 402 -
d'un bord blanc roussâtre ; couvertures des ailes cendrées et bordées de
blanchâtre, les plus extérieures d'une teinte plus grise ; rémiges brunes avec
les baguettes blanches ; bas du dos d'un cendré brunâtre ; sus-caudales d'un
blanc pur ; queue cendrée, les rectrices bordées et largement terminées de
blanc ; poitrine et abdomen d'un cendré plus pâle que le manteau avec les
plumes largement bordées de cendré clair; flancs bruns, les plumes égale-
ment terminées de cendré clair ; bas-ventre et sous-caudales d'un blanc pur.
Bec (d'après de Heuglin) noir, derrière l'onglet, qui est également noir, une
bande transversale d'un rouge orange (rosée d'après Seebohm) ; iris brun ;
pattes rosées ou d'une couleur vineuse.
Les jeunes ont la base du bec plus ou moins bordée de petites plumes
blanches.
Remarque. — Les auteurs ne sont pas d'accord sur la valeur spé-
cifique de cette Oie : pour les uns c'est une bonne espèce, pour les
autres ce n'est qu'une variété climatérique ou sous-espèce de Y Anser
sylvestris. Elle a, en effet, de grands rapports avec cette dernière (et
non avec l'Oie cendrée comme le dit M. Dresser), mais en diffère par
des caractères importants : sa taille est plus petite que celle de l'Oie
des moissons, son bec beaucoup plus court, ses tarses sont moins longs,
ses pattes rosées et non jaunes, et les couvertures des ailes plus grises.
Si ces caractères sont constants, comme on a lieu de le croire, il est
certain que l'Oie à bec court doit être admise comme espèce distincte;
c'est l'opinion de la majorité des auteurs.
Hab. — L'aire géographique de cette espèce est encore peu connue,
car beaucoup d'auteurs ont confondu cette Oie avec la précédente. Ce
qui est certain, c'est qu'elle est très abondante sur la côte occidentale
du Spitzberg,mais assez rare dans les parties nord et nord-est de ces
îles [Malmgren, de Heuglin)', elle niche également dans le nord de
l'Islande (Newton). Selon de Heuglin, l'existence de cette espèce à la
Nouvelle-Zemble n'est nullement prouvée; il n'a rencontré dans ce
pays que des A. segetum à pattes d'un jaune orange, et celles-ci y
étaient très abondantes (1). L'oiseau de la Nouvelle-Zemble décrit
antérieurement par de Heuglin (2), ne peut nullement être rapporté à
Va. hrachyrhynchus, comme le fait M. Dresser, puisqu'il a des pattes
jaunes. Baer mentionne également 1'^. segetum comme vivant à la
(1) Th. de Heuglin, Rcise nach dciii Nordpolartneer III, pp. 128, 131 (1874).
{2) yourn. f. Ornith. 1872, p. 122,
- 403 -
Nouvelle-Zerable (1); mais Malmgren suppose que cet auteur a fait
erreur, que c'est l'Oie à bec court qui habite ce pays (2).
Il n'est pas certain que l'espèce qui nous occupe niche dans le nord
de la Norwége, car les sujets observés en juin 1867 près de Nordvi,
dans la Finmark orientale, peuvent fort bien avoir été retardés pen-
dant leur retour au Spitzberg. M. Collett se borne à signaler encore
un individu tué le 20 septembre 1865 près de Christiania, et deux
autres abattus dans les environs de Trondhjem en octobre 1871 ; ceci
ferait supposer que cette Oie n'est que de passage accidentel en Nor-
vège ; mais il est difScile d'admettre que ces oiseaux suivissent dans
leurs migrations une autre voie que les côtes norwégiennes ; M. See-
bohm dit d'ailleurs que cette espèce est de passage régulier sur les
côtes Scandinaves et danoises. Sa présence en Suède n'est qu'acciden-
telle et l'on n'y connaît que trois captures : une sur l'île Tjôrn le 24
octobre 1851, et deux près de Jockmock le 1 1 octobre 1866 {Cnattin-
gius); Middendorff dit qu'un sujet a également été pris près de
St-Pétersbourg.
L'Oie à bec court visite communément les îles Britanniques en
hiver, particulièrement les côtes orientales de l'Angleterre et les
Hébrides extérieures, mais il n'est pas certain qu'elle se montre en
Irlande et aux îles Shetland (Sccbohm). C'est par erreur que Macgil-
livray a dit que cette Oie se propage aux Hébrides ; d'après M. Elwes
il y a eu confusion avec l'Oie cendrée. L'Oie à bec court est de passage
régulier sur les côtes occidentales du Danemark, ainsi que sur celles
de la Hollande [Sclilégel) et de la Belgique : M. Groegaert dit, en
effet, que tous les ans on en tire quelques-unes sur l'Escaut aux envi-
rons de Kieldrecht et à Walsoorden (3). Elle se montre quelquefois
aussi en Allemagne près de la mer du Nord {Reichenow) et acciden-
tellement sur les côtes septentrionales de la France : on en a tué
quelques-unes en 1829, 1830 et 1838 aux environs d'Abbeville, et on
en a trouvé sur Icsmarchés de Dunkcrqueet de Calais (Df^^Z. et Gerbe)',
M. L. Olphe-Galliard signale encore pour la France des captures
dans la Seine-Inférieure en décembre 1871 {Lemettcil) et sur la
Manche [Le Mcnnicier). Un individu a également été pris en Alsace,
en février \^^i{K7-oener).
(1) Beiir. z. R'cnntniss d. russ. Rciches VIII, p. 237.
[2) /oiirn.J, Ornith. 1870, p. 291.
(■T) Il est certain que M. Croctfaert ne confond pas cette Oie avic la précédente, puisqu'il
ajoute : « On les confond avec l'/l. set^rtunt, mais elles sont très reconnaissables à leur bec plus
petit et aux pattes roses. » {Bull. Mus. roy. d'hist, nat. de Bel^. V. p. 150)
— 404 —
Je crois que de Heiiglin a tort de considérer comme des A. hrachy-
rhyncuus les Oies capturées par Middendorff près du Taimyr et du
Boganida ; cet auteur, en donnant leur description, dit en effet que le
bec est en partie orange et que les pattes sont également oranges sauf
les membranes interdigitales qui sont de couleur livide. Middendorff
les considère comme intermédiaires aux A. arvensis et segetum:
« ces oiseaux se rapportent, dit-il, d'après les descriptions de Nau-
mann, à 1'^. arvensis par leur bec, et à 1'^. segetum par la longueur
des ailes (1). »
Jerdon dit que l'Oie à bec court a été prise dans le Punjab et dans
l'Inde occidentale; M. Swinhoe dit en avoir reçu une de Hakodadi
(Japon), mais qu'il ne l'a jamais observée en Chine. L'existence de
cette Oie en Asie me paraît cependant encore douteuse.
Mœurs et reproduction. — Les mœurs de cette espèce ressemblent
à celles de la précédente; d'après de Heuglin, elle-êtrrive au Spitzberg
au commencement de l'été et broute aussitôt le gazon et la mousse des
endroits dégarnis de neige ; mais bientôt les troupes se séparent et les
couples se rendent séparément sur la côte occidentale et dans les fjords
pour y nicher. Elle est très farouche et prudente et se laisse difficile-
ment approcher.
Cette Oie niche, d'après Malmgren, sur les parties saillantes des
rochers, parfois sur des saillies qui s'avancent au-dessus d'un torrent,
et toujours dans le voisinage de l'eau et des prés; elle niche souvent
aussi à l'intérieur des :Qords près de la mer. Le nid est placé à une
hauteur suffisante pour que les parents puissent voir une grande éten-
due de terrain et fuir à temps le danger. Quand la femelle couve, le
mâle reste près d'elle et veille à la sécurité commune .
La ponte a lieu en juin sur une litière de mousse et se compose de
quatre ou cinq œufs blancs, à coquille assez épaisse, et plus petits
que ceux de X A. segetum; ils éclosent du 10 au 15 juillet (2). L'éclo-
sion ne doit pas toujours être aussi tardive, car de Heuglin dit avoir
rencontré le 18 juin plusieurs couples accompagnés de trois ou quatre
poussins, qui tous différaient assez bien de taille.
(1) Middendorff, Sibir. Rfisc II, p. 226.
(2) Malmgren,yciw;-«. f. Ornith. 1865, p. 21 1.
— 40o —
248. — L'Oie rieuse ou à front blanc
ANSER ALBIFRONS, Berhst. ex Scop.
(PI. 247)
Anser sei'tentrionalis sylvestris, Ri'iss. Ornith. VI, p 26'J (1760).
Branta ALBipniONS, Scop. Ann. /. liist. nat. p. 69 (1769).
Anas albikrons, Lath., Gen.Syn. Supnl. I. p. 297 (1787).
Anser ALBiFROss, Bechst. Nalurij. D''ui.sc!iL IV, p. 898 (1809).
Anser eryturopus, Flein. (iiec Liti.) Brit. An. p. 127 (1828).
Anser .MEDIUS, Bruiih, /«s, 1828, p. 732.
Anser BRucHii, Rrehm, Isis, 1830, p. 996.
Anser intermedius, Naura. Viig. Dentscld. XI, p. 310 (1842).
Anser gambeli, Hartl. llnv. et mai/, de zooL, 1852, p. 7.
Anser albifrons koseipes, Schlog. Nnnma?inia 1855, p. 254.
Anser pallipes, de Selys-Long. Naumannia 1855, p. 264.
Anser KR0NTALI8, Baird,i?. N. Am. p. 562(1858).
Anser albifrons i;'/r. gambeli, Coues, Kei/ N. Am. B. p. 282 (1872).
Anser albikrons gambeli, Ridgw. Proc. U. S. nat. Mus. 1880, p. 203.
Die Blassgans, en allemand.
The White-fronted Goose, en anglais.
De Kolgans, en llamand.
Var. Erythropus
(OIP: DK TEMMINCK pi. 247b).
Anas erythropus. Lin. Si/st. fiat. 1, p. 197 (1766).
Anasfinmarchicus, Gunn. Leem. Beskr. Frn:n. Lap. p. 264 (1767).
Anser Temminck.1, Boie, f.us, 1822, p. 882.
Anser CINERACEUS, Brehm, Lehrb. Nattcrg. VoV/. II, p. 772(1824'.
Anser bretirostris (Heckel) Brehm. Yog. Deutschl. IX, p. 836 (1831).
Anser minutus, Naum. Vog. Deutschl. XI, p. 365, pi. 290 (1842).
Anser erythropus, Newt. Proc. Zool Soc, 1860, p. 341 .
Anser albifrons var. Erythropus, Dubois, BuU. Mus. roy. cVhist. »at. de Bel/. H',
p. 19(188.5).
Anser albikrons minutus, Seeb. /?r<<. 7>. III, p. 505 (1885).
Taille : (type alhifronR) 0'"67; ailes 0,411 ; (var. Eri/thropus)0,bb\
ailes 0,381.'
Description des deux sexes types. — Front et partie antérieure des joues d'un
blanc pur l)(>rdé de brun ; tête et cou d'un brun cendré nuancé de roussàtre ;
manteau et scapulaires d'un brun cendré foncé, toutes les plumes terminées
de cendré roussàtre ou de blanchâtre; bas du dos d'un brun noirâtre terne ;
sus-caudales blanches ; queue brune avec les rectrices bordées et terminées
(l(î bluiic ; |»('titos couvertures des ailes d'un 1>riin terne, faiblement bordées
de cendré clair, les luoyenni'S d'un cendré grisâtre et terminées de blauc J
rémiges primaires noirâtres à bord externe cendré à la base, les baguettes
blanchâtres; rémiges secondaires noires; dessous du corps blanchâtre; bas de
la poitrine et abdomen marqués de grandes taches irrégulières, transversales
noirâtres ; flancs bruns avec les plumes bordées de blanchâtre ; bas-ventre
et sous-caudales d'un blanc pur. Iris brun ; bec d'un jaune orange avec l'on-
glet blanc; pattes d'un jaune orange. — La femelle est un peu plus petite que
le mâle, le blanc du front est moins'étendu, et les taches noirâtres des parties
inférieures sont moins nombreuses ; il est cependant difficile de distinguer les
sexes d'après le plumage.
Jeune. — Diffère principalement de l'adulte par l'absence plus ou moins
complète de blanc au front et de taches noires sur les parties inférieures.
Var. Erythropus. — Se distingue du précédent par une taille notablement
plus faible, un bec plus court, le blanc du front plus étendu et montant entre
les yeux jusqu'au-dessus de la tête, enfin par des couleurs plus sombres sur-
tout au bas du dos qui est presque noir. Bec couleur chair pâle.
Remarque. — L'Anser gambeli, de l'Amérique du Nord, ne diffère
de l'Oie à front blanc d'Europe que par une taille un peu plus forte et
un bec plus long. Mais il a été constaté que la taille et surtout les
dimensions du bec sont très variables chez l'Oie rieuse ; on trouve en
Amérique des sujets ayant absolument les mêmes proportions que
ceux d'Europe, et vice versa. M. Coues reconnaît lui-même qu'il est
difficile de séparer la forme américaine de celle de l'ancien monde.
Hab. — Il est assez difficile d'établir d'une manière exacte l'aire
géographique du type et de sa
variété, car les deux races ont
souvent été confondues. Il paraît
cependant que le type albifrons
est remplacé en grande partie
dans le nord de la Scandinavie,
de la Russie et de la Sibérie par
sa YâT. Erythropus; mais il est
certain que ces contrées ne sont
pas complètement privées d'Oies rieuses, puisque Middendorff en vit
près du Taimyr et du Boganida, quoiqu'on moins grand nombre que
les Oies de Temminck.
L'Oie rieuse ou à front blanc niche en Islande (Faber) et plus ou
moins dans toute la zone arctique, sans dépasser les côtes continen-
tales et le 75° 1. N.; on ne la trouve donc ni à la Nouvelle-Zemble,
ni au Spitzberg. Lors des migrations, on l'observe sur les côtes de la
Norwège [Collett), et accidentellement sur celles de la Russie occi-
— 407 —
dentale (Buchner); elle se montre régulièrement dans le nord de
l'Allemagne, surtout sur les côtes maritimes {Reichenow), en Dane-
mark {Collin), en Hollande {Schlégel), en Belgique, dans le nord et
l'ouest de la France où elle est commune {Degl. et G^er&é'),mais on ne
la voit que tout accidentellement dans le midi de la France [Lacroix],
en Portugal (du Bocage), en Espagne [Rei/es] et en Italie {Giglioli).
Elle hiverne en grand nombre aux îles Britanniques où elle est cepen-
dant assez localisée, elle est surtout abondante en IrlSinàQ {Seehohm) ,
Cette Oie hiverne également en Grèce [Lindermayer), dans la Russie
méridionale [de Nordmann), dans les parties centrales de la Trans-
cau-casie (Radde), en Asie Mineure {Antinori), et surtout en Egypte
{Shell ey)^
En Belgique, elle est commune en hiver près des bouches de
l'Escaut, et remonte souvent ce fleuve jusqu'au delà d'Anvers, mais
elle n'apparaît que très rarement dans l'intérieur du pays. Comme
cette espèce suit souvent, durant ses migrations, les vallées creusées
par les grands fleuves, il arrive parfois que des sujets s'égarent bien
loin dans l'intérieur des continents. C'est ainsi qu'on en capture par-
fois en Pologne {Taczanoicaki), dans le centre de l'Allemagne
[Naumann), en Bohême [Fritsch), en Transylvanie [Danford], en
Turquie [Elioes et Buckley), etc.
Les sujets du N.-O. de l'Asie traversent ordinairement le Turi^es-
tan [Severtzoïd) pour hiverner dans le N.-O. de l'Inde {Jerdon); ceux
de l'Orient hivernent au Japon {Swinhoe) et en Chine [David), après
avoir côtoyé le Sibérie orientale.
En Amérique nous trouvons l'Oie rieuse au Groenland jusqu'au
68° 1. N. [Neioton) et dans le nord du continent américain; elle
hiverne aux Etats-Unis et se montre accidentellement à Cuba
[Coues).
La var. Erythropus niche communément dans le nord do la Scan-
dinavie [Collett], et émigré le long des côtes de la Finlande [Palmcn).
En hiver on l'observe accidentellement sur les côtes de Suède (Xils-
son), dans la Russie centrale, en Pologne [Taczanoicski), dans le
nord de l'Allemagne [Reichenoiv), au Danemark [Collin), en Hollande
[Schlégel), en Belgique [C.-F. Dubois) et dans le N.-O. de la France
[Dcgland), ainsi qu'en Autriche-Hongrie [Naicmann], en Bohême
[Fritsch) et en Grèce [Lindermayer). D'après feu mon pèi'O, un sujet
fut tiré en Belgique en novembre 1850 ; il en trouva un second
sur le marché de Bruxelles pendant l'hiver de 1858. Cette variété n'a
— 408 —
été observée ni aux îles Britanniques, ni dans le midi de l'Europe,
mais M. J,-H. Gurney a signalé une capture faite en janvier 1875 à
Damiette dans la Basse-Egypte ; Antinori dit en avoir trouvé un cou-
ple, en 1858, sur le marché de Smyrne, parmi un grand nombre d'Oies
à front blanc. Aux passages cette Oie est commune près de l'Oural et
du Volga inférieur aux environs d'Astrakhan [Bogdanow); ellespassent
par milliers dans le dislrict de Shadrinsk {Sahandeff), hivernent
dans le S.-E. de la Transcaucasie {Radde) et accidentellement dans le
N.-O. de l'Inde [Huwé). Middendorif dit qu'elle est commune dans le
nord de la Sibérie, près du Taimyr et du Boganida ; elle passe en
grand nombre au Tarei-Nor en automne [Radde); elle est rare dans la
région de Kultuk, mais Zébrowski l'a souvent observée dans l'Irkutsk
[Dybowski). Elle hiverne au Japon et en Chine où de grandes bandes
se montrent en février ei mars sur les lacs des provinces orientales et
principalement du Kiangsi [David). ■"
Mœurs. — L'Oie à front blanc n'arrive dans l'Europe centrale que
vers la fin d'octobre, environ un mois plus tard que l'Oie des moissons,
et retourne dans le Nord en mars et avril. Elle s'entend assez bien
avec cette dernière, l'accompagne dans ses pérégrinations mais les
troupes restent distinctes, les deux espèces ne se confondent pas. Celle
qui nous occupe en ce moment recherche de préférence le voisinage
de la mer et paraît préférer l'eau salée à l'eau douce; c'est pour cette
raison, qu'en hiver elle est commune sur nos côtes maritimes et près
de l'Escaut, tandis qu'elle ne se montre que fort rarement sur les
eaux de l'intérieur du pays. 11 n'en est cependant pas de même
partout. M. Radde dit en effet que, de toutes les Oies sauvages, c'est
l'Oie rieuse que l'on observe le plus en hiver près des lacs du centre
de la Transcaucasie, et que sur le marché de Tiflis on la trouve bien
plus souvent que les Oies cendrées et des moissons. Comme ces der-
nières, l'Oie rieuse fréquente les champs, les pâturages et les prés
marécageux, et passe la nuit sur les lacs et les étangs. Ses mœurs ne
diffèrent du reste pas de celles des espèces précédentes, mais sa voix
est caractéristique et rappelle assez bien celle de la Grue. Naumann
rend le cri de cet oiseau par klick klick, klaeck klaeck, ou kling kling,
ou encore klaeng klaeng ; ces ions diversement modulés résonnent
d'une façon singulière, et quand plusieurs de ces palmipèdes crient en
même temps, l'ensemble de leurs voix a quelque analogie avec le rire,
d'où le nom vulgaire donné à cet oiseau.
Quant au régime, il est principalement végétal, mais il paraît que
— 409 —
cette Oie aime beaucoup les plantes qui croissent clans un sol imprégné
de sel; Naumann a trouvé des débris de coléoptères dans Testomac de
deux individus; M. Turner dit également avoir trouvé dans l'estomac
de sujets de l'Alaska, des insectes et des larves aquatiques.
Cette espèce s'apprivoise aussi facilement que les autres et supporte
bien la captivité.
Reproduction. — L'Oie rieuse niche dans la zone arctique. Mid~
dendorff a trouvé le 10 juillet près du Taimyr, sous le 74" 1. N., un
nid avec deux œufs ; ce nid consistait en une excavation creusée au
sommet d'un monticule gazonneux, et les œufs reposaient sur une
épaisse couche de duvet. Dali, dit M. Seebohm. a observé cette espèce
dans l'Alaska, où elle nichait en grand nombre sur des bancs de sable
du fleuve Yukon ; les nids étaient de simples excavations creusées
dans le sable ; mais plus à l'Est, à l'embouchure du fleuve Andersen,
Mac Farlane trouva des nids bien garnis d'herbes sèches, de plumes
et de duvet. La ponte ordinaire est de cinq à sept œufs, mais Dali en
a trouvé jusqu'à dix dans le même nid. Ces œufs sont d'un blanc un
peu jaunâtre et mesurent en moyenne 82 mill. sur 53.
M. J. Vian dit que les œufs de la var. Erylhropus sont beaucoup
plus petits (72 à 73 mill. sur 49 à 50), moins variables dans leur
volume et qu'ils se distinguent par la finesse de leur grain, tandis que
ceux de 1'^. albifrons ont été, au contraire, signalés comme les plus
grenus.
SOUS-FAMILLE
DES CVGNINÉS. — CVGNIN/E
Car. — Bec de la longueur de la tête; loruras nus; cou très long; corps
volumineux ; ailes n'atteignant pas l'extrémité de la queue ; tarses courts ;
membranes interdigitales très larges.
Ilah. — Les oiseaux de cette famille sont particulièrement abon-
dants dans le nord de l'Europe, de l'Asie et de l'Amérique, et les
espèces européennes émigrent jusque dans le nord de l'Afrique ; on
en rencontre également dans l'Amérique du Sud el en Australie.
Mœurs. — L'eau est le véritable domaine des Cygnes; ils ne vont
pas volontiers à terre et ne volent pas sans nécessit('. Leurs pattes,
insérées très en arrière du corps, no permettent pas à ces oiseaux de
marcher facilement, aussi leur démarche semble-t-elle lourde et
vacillante. Leur voix varie suivant les espèces. Ils sont prudents,
judicieux, aussi intelligents que les autres lamellirostres et règlent
leur conduite suivant les circonstances.
TuMK II.— 1892 52
— 410 -
Les mâles se livrent entre eux de violents combats pour la posses-
sion d'une femelle, mais dès qu'ils sont accouplés, les deux sexes ont
l'un pour l'autre une grande fidélité et leur union est pour la vie.
Leur nid est très vaste et il est .construit sur un îlot ou sur l'eau ; la
femelle seule se charge de sa construction. Les parents témoignent
beaucoup de tendresse à leur progéniture.
GENRE CXLII
CYGNE. — CYGNUS
Cygnus, Briss. Ornith. VI, p. 288(1700).
Anas, Lin. Syst. nat. I, p. 194 (1766) .
Olor, Wagl. Isis, 1832, p. 1234.
HoLOR, Olphe-Gal., Conlrib. à la faune orn. Eitr. occ.,fasc. V. p. 2 (1885).
Car. — Bec de la longueur de la tête, épais à la base, déprimé et arrondi
à l'extrémité, à lamelles peu saillantes et à onglet large^t recourbé ; narines
latérales, à peu près médianes, oblongues ; ailes amples, n'atteignant pas
l'extrémité de la queue ; celle-ci courte, arrondie ou plus ou moins carrée ;
tarses épais, de la longueur du doigt interne ; doigts largement palmés ;
pouce très court touchant à peine le sol par l'extrémité de son ongle.
Hab. — Comme pour la sous-famille.
249. — Le Cygne sauvage.
CYGNUS FERUS, Briss.
(PI. 248)
Cygnus férus, Briss. Ornith. VI, p. 292 (1760).
Anas cygnus, a férus, Lin. Syst. nat. I, p. 194 (1706).
Cygnus musicus, Bechst. Natury. Deutschl. Ill, p. 830 (1809).
Cygnus melanorhynchus, Mey., Taschenb. dent. Yuyelk. II, p. 498 (1810).
Cygnus islandicus, Brehm, Isis^ 1830, p. 996.
Olor musicus, Wagl., Isis, 1832, p. 1234.
Cygnus xanthorhinus, Naum. Yog. Deutschl. XI, p. 478, pi. 296 (1842).
Olor cygnus, Bonap. Cat. Parz., p. 15 (1856).
HoLOR musicus, Olphe-Gal-, Contrib. Faune orn. Eur. occ, fasc. V. p. 3 (1885).
Der Gelbnasige Schwan, en allemand.
The Hooper Swan, en anglais.
De Wilde Zwaan, en flamand.
Taille du mâle : l'"48; ailes 0,62; femelle : 1"^18; ailes 0,60.
Description des deux sexes adultes. — D'un blanc pur avec la tête teintée
de roux jaunâtre. Lorums et partie antérieure du bec jusqu'aux narines,
jaunes, le reste du bec, noir ; pattes noirâtres ; iris brun foncé.
Jeune. — D'un gris clair. Lorums et base du bec couleur chair livide ;
— 411 —
pattes d'un gris brun. A mesure que l'oiseau avance en âge, le blanc domine
de plus en plus.
Hab. — Le Cygne sauvage niche en Islande {Faber) et, à partir
du 62°, dans le nord de l'Europe
et de l'Asie jusqu'au 74 1/2°1.N.
{Middendorff) ; il se montre quel-
fois au Groenland et y niche
près de Gotthaab [Reinhaert).
Certains auteurs indiquent éga-
lement le Spitzberg; mais de
-^^ Heuji'lin fait remarquer qu'il n'est
nullement prouvé que les Cygnes
observés à diverses reprises sur les côtes occidentales du Spitzberg
soient des C. férus', von Bar l'indique comme se trouvant à la Nou-
velle-Zemble, ce qui n'a pas été confirmé non plus. Il est probable
qu'il y a eu confusion et qu'on a pris le C. minor pour le C. férus.
Cet oiseau hiverne dans le sud de l'Islande (F«^er) et plus ou moins
dans toute l'Europe, quoiqu'il soit très rare dans les contrées du Midi
et dans beaucoup de paj^s du centre où il est plutôt de passage. Il
est de passage irrégulier en Espagne [Reyes) et en Italie [Giglioli),
mais se montre régulièrement en Grèce: von der Mûhle assure qu'il
niche régulièrement dans les marais des Thermopyles ; Lindermayer
confirme le fait et indique divers lacs de la Grèce où cette espèce est
sédentaire.
En Belgique il est généralement rare : pendant les hivers rigou-
reux on le voit souvent sur nos côtes et sur l'Escaut, nageant entre
les glaçons et remontant le fieuve jusqu'au delà d'Anvers; on a
remarqué des passages jusqu'au centre du pays. Il est assez commun,
en hiver, sur les côtes dos îles Britanniques {Scebohm), mais il est
surtout abondant sur le Danube, près de la mer Noire (Fùisch) et
près de la mer Caspienne, les grands froids l'éloignent cependant des
côtes maritimes {Radde).
Pendant la mauvaise saison, on observe également ce Cygne sur les
côtes de l'Asie Mineure et de la Palestine {Tristram), dans la Basse-
Egypte, mais en moins grand nombre que le C. olor [de Ileuglin),
ainsi qu'en Algérie {Loc/w).
En Asie notre oiseau hiverne en Sibérie jusqu'en Perse (B/anford)
et en Chine {David) ; il est assez commun au Japon, {Hhikiston) et
il paraît ([u'ila même été vu au Népaul [Seebolim).
- 412 -
Mœurs. — Le Cygne sauvage quitte la zone arctique en septembre
en se dirigeant plus ou moins de l'E. au S.-O. ; il reprend son
voyage vers le Midi à mesure que le froid augmente et que les eaux
se couvrent de glace ; ce n'est ordinairement qu'en octobre qu'il fait
son apparition sur les côtes septentrionales de l'Allemagne, mais on
le voit rarement chez nous avant les mois de novembre et de décem-
bre. En mars il retourne dans le pays qui l'a vu naître, mais sans se
hâter, s'arrêtant quelques jours là où les lieux lui conviennent. Ces
Cj'gnes voyagent généralement pendant le jour, parfois aussi la nuit,
en famille ou en troupes plus ou moins nombreuses, composées parfois
de cinquante à quatre-vingts sujets. Quel que soit leur nombre, ils
volent toujours à la file sur un seul rang en formant dans l'espace une
longue ligne oblique, dont la longueur varie suivant le nombre des
individus.
Bien que ce palmipède ne soit pas un oiseau marin, il aime cepen-
dant les côtes maritimes et se plaît à nager dans la mer; mais il
recherche aussi les eaux douces, les fleuves, les rivières, les lacs, les
étangs et surtout les endroits marécageux riches en herbages divers.
Par ses allures, il diffère de presque tous les palmipèdes, tout en
tenant des Oies et des Canards. L'eau est son véritable domaine, il
marche peu et ne vole pas sans nécessité. D'ordinaire il tient le cou
presque droit, et le recourbe rarement autant que le Cygne domes-
tique ; il est du reste dans son ensemble moins élégant que ce dernier,
mais lui ressemble par son vol. Il ne s'élève pas sans difficultés: avant
de prendre son essor, il étend le cou presque horizontalement, bat
des ailes, frappe la surface de l'eau de ses larges pieds et moitié
courant, moitié volant, il franchit bruyamment une assez grande
distance avant de pouvoir s'envoler; une fois à une certaine hauteur,
il vole bien, assez vite, tenant le cou droit devant lui, les ailes large-
ment étalées et frappant l'air de coups redoublés en produisant un
bruissement qui s'entend de loin, surtout quand plusieurs de ces
oiseaux volent de concert.
Ce Cygne est aussi méfiant que prudent, et sait éviter avec adresse
les embûches tendues par le chasseur. Schilling raconte qu'un de ces
oiseaux, ayant eu l'aile cassée d'un coup de feu , parvint à se sauver
en courant vers un grand étang où il se mêla à une bande de Cygnes
apprivoisés ; on le poursuivit en vain, car il se tint constamment au
milieu des sujets domestiques qu'on aurait pu atteindre en tirant sur
lui: sa présence d'esprit le sauva. Il est sociable mais n'aime que la
- 413 -
société de ses semblables; d'après Brehm, il serait peut-être de tous
ses congénères le plus despote, le plus querelleur: « j'ai toujours vu
ceux qu'on mettait avec des Cygnes domestiques, dit cet auteur, atta-
quer ces derniers et les mettre en fuite après de longs combats. »
Le Cvgne sauvage se distingue surtout par sa voix forte et harmo-
nieuse. Naumann rend son cri ordinaire par kilkliih et son cri plus
doux par ang, que la femelle fait entendre dans un ton plus élevé.
Faber dit que cet oiseau mérite bien de conserver le nom de C. musi-
cus : « quand de petites bandes de ces Cygnes traversent les airs à
une grande hauteur, ils font entendre leur voix harmonieuse et
mélancolique, semblable à des sons de trompe dans le lointain. »
Selon Schilling, sa voix est forte, riche en notes pures et variées, et
il la fait entendre à toute occasion : c'est un cri d'appel, d'avertisse-
ment. « Quand il est réuni à ses semblables, dit cet observateur, il
paraît causer avec eux ou rivaliser à qui chantera le mieux. Lorsque,
par les grands froids, la mer est couverte de glace dans les endroits
non occupés par les courants, que les Cygnes ne peuvent plus se
rendre là où Teau peu profonde leur garde une nourriture abondante
et facilement accessible, alors on voit ces oiseaux se rassembler par
centaines sur les points où des courants maintiennent la mer libre,
et leurs cris mélancoliques racontent leur triste sort; souvent alors,
dans les longues soirées d'hiver et pendant des nuits entières, j'ai
entendu leurs cris plaintifs retentir à plusieurs lieues. On croit
entendre tantôt des sons de cloches, tantôt des sons d'instruments à
vent, ces notes sont même plus harmonieuses; provenant d'êtres
animés, elles frappent nos sens bien plus que des sons produits par
un métal inerte. C'est bien là la réalisation de la fameuse légende du
chant du Cygne ; c'est, en elïet, souvent le chant de mort de ces
superbes oiseaux. Dans les eaux profondes où ils ont dû chercher un
refuge, ils ne ti'ouvent plus de nourriture suffisante ; atfamés,
épuisés, ils n'ont plus la force d'émigrer vers des contrées plus pro-
pices, et souvent on les trouve sur la glace, morts ou à moitié
morts de faim et de froid. Jusqu'à leur trépas ils poussent leurs cris
mélancoliques. » Voilà donc l'explication de la légende; l'oiseau ne
chante pas en expirant, mais son dernier râle a encore le timbre
harmonieux qui caractérise sa voix.
La nourriture du Cvfjrne est à la lois animale et végétale, et se
compose de végétaux ;i(|u,'iii(|uos, r.Miill(\s (cndres, graines, ladifrlles,
insectes et larves a(|uatiques, nioilnsques, vers, têtards, jeunes
- 414 -
grenouilles et petits poissons, mais il préfère toujours les substances
végétales.
C'est un oiseau courageux, ayant conscience de sa force, pouvant
d'un coup d'aile casser le bras ou la jambe d'un homme, aussi ne se
laisse-t-il pas vite terrasser par un animal carnassier; les Pygargues
et les grands Aigles sont les seuls oiseaux qui osent l'attaquer, et
encore ne fondent-ils le plus souvent que sur déjeunes Cygnes. Mais
c'est toujours l'homme qui est son plus grand ennemi; celui-ci le
poursuit pour ses plumes et surtout pour son duvet qui est très estimé
comme fourrure légère. Les jeunes seulement sont mangeables.
Reproduction. — « Le nid, dit Faber, est grand et large, formé de
joncs et autres plantes aquatiques, et il est parfois construit au milieu
de l'eau comme celui du Grèbe cornu. La femelle y dépose au com-
mencement de mai de cinq à sept œufs. Le mâle se met souvent sur
le nid à côté de sa compagne, mais sans prendre part à l'incubation. »
MM. Seebohm et Harvie-Brown trouvèrent plusieurs nids dans le
delta de la Petchora du 19 au 30 juin; c'étaient de grandes construc-
tions formées de glaïeuls et d'herbages grossiers, qui ne contenaient
que deux à quatre œufs. Ceux-ci sont d'un blanc jaunâtre, tirant un
peu sur le verdâtre ou sur le brunâtre et mesurent environ 110 millim.
sur 76.
250. — Le Cygne Bewick ou d'Islande (^)
CYGNUS MINOR, Keys. et BL ex Pall.
(PI. 250)
Cygnus olor, p. MiNOK, Pall. Zoogr. Rosso-Âs. II, p. 214 (1811).
Cygnus bewickii, Yarr. Trans. Linn.Soc. XVI p. 453 (1833).
Cygnus minor, Keys. et Blas. Wirbelth. Eur. p. LXXXII (1840).
Cygnus melanorhinus, Naum. Yog. Deutschl. XI, p. 497, pi. 297 (1842).
Cygnus musicus minor, Schleg. Rev. crit., p. CXII (1844),
Olor minor, Bonap. Cat. Parz., p. 15 (1856).
Cygnus islandicus, C.-F. Dub. (nec Brehm) Pi. col. Ois. Belg. III, p. et pi. 298(1860).
Cygnus altumii (Baedeok.), Schleg. Mus. des P.-B., Anscres, p. 82 (1866).
HoLOR minor, Olphe-Gal. Contr. faune orn. Eur. oec, fasc. V, p. 15 (1885).
Der Schwarznasige Schwan, en allemand.
The Bewick's Swan, en anglais.
De Kleine Zwaan, en flamand.
Taille : 1»10 à l'^SO; ailes 0,52.
Description des deux sexes adultes. — D'un blanc pur avec la tête lavée de
(1) 1^ nom Aq C^'i^iie d'Jslaitde s. éié donné improprement à cette espèce, vu qu'eUe n'habite
pas rislande. Le C . islandicus de Brehm n'est qu'un Cygne sauvage ordinaire de petite taiUe
et non uu C. minor, comme l'ont cru Naumann, Keyserling, Blasius, Schlégel et autres auteurs.
- 41 o
jaune roussâtre. Bec noir jusqu'au delà des narines ; lorums et base du bec
jaune, mais cbez les mâles adultes le bec est entièrement noir avec une large
tache ovalaire jaune occupant, de chaque côté, la base de la mandibule supé-
rieure ; iris brun foncé; pattes d'un noir grisâtre tirant sur le bleu.
Jeune. — D'un gris clair. Lorums d'une teinte hvide et plus ou moins
emplumés ; base du bec également livide.
Cette espèce est toujours facile à distinguer de la précédente à sa petite
taille.
Hab. — Pallas découvrit ce Cygne en Sibérie au commencement
^ de ce siècle, mais il le considéra
! comme une simple variété du
J C. férus; Naumann l'observa en
'H 1823 en Allemagne et lui donna
le nom de C. melanorJiinus ;
enfin, un an plus tard, Yarrell le
'^tsm-'W^ découvrit à son tour en Angle-
"tiJ ^^^^"^ ^^ ^^ décrivit sous le nom
de 6. Bewickii : c est sous ce
dernier nom que les Anglais le désignent le plus généralement.
Autant que l'on sait aujourd'hui, ce Cygne niche dans les toundras
qui s'étendent à l'est de la mer Blanche, et principalement près des
embouchures de la Petchora, de l'Obi, du Yenissoy et de la Lena,
ainsi que sur les îles de l'océan Arctique ; il n'est pas rare à la Nou-
velle-Zemble et à Waigatsch {de Heuglin), et visite ibrobablement le
Spitzberg où l'on a vu des Cygnes sans que l'on sache au juste à
quelle espèce ils appartiennent.
Il se montre accidentellement on Norwège [Collett) et en Finlande
{Pahnén), rarement au Danemark {Collin), mais il n'est pas très rare
en hiver dans le nord de l'Allemagne (Borggveve) où il paraît se
montrer le plus souvent près du Wéser et de l'Ems {Naimiann); il
visite régulièrement la Russie occidentale {Bûchner) et n'est pas rare
sur les côtes des îles Britanniques : on observe cet oiseau sur les
côtes do l'Angleterre, de rp]cosse, des îles Hébrides, Orkneys, Shet-
land et pi-obablement des îles Channels, mais il est surtoutabondant dans
la partie occidentale de l'Irlande {Secbohm). Il est étrange que le
Cygne Bewick, (|ui est si rare dans l'Europe centrale, le soit si peu
aux îles Britanniques; où nicheraient bien les individus qui hivernent
en Iilande et dans les îles voisines, puisqu'ils ne se reproduisent pas
en Laponie l
- 416 —
Ce n'est que pendant les hivers bien rigoureux que quelques-uns
de ces oiseaux visitent la Hollande {Schlêgeî), la Belgique et la
France; on en a tué assez bien en Belgique pendant les hivers de
1(S31, 1838 et 1855; le musée de Bruxelles possède trois sujets pris
dans le pays ; M. A. Croegaert mentionne un exemplaire tué en 1880
dans le polder d'Austruweel. M. Olphe-Galhard signale plusieurs
départements de la France où l'on a pris de ces oiseaux ; d'après
M. A. Lacroix, on en aurait même tué, pendant les hivers de 1869,
1870 et 1871, dans les départements de l'Aude, de Hérault, des
Hautes-Pyrénées et du Tarn-et-Garonne. Naumann mentionne plu-
sieurs captures faites en Allemagne et même en Saxe. Trois ou quatre
sujets ont également été abattus en Italie {Giglioli).
Les individus qui nichent dans le nord de la Sibérie émigrent en
suivant les grands fleuves asiatiques pour hiverner près de la mer
Caspienne, auTurkestan {Severtzow),Qn Mongolie^en Chine {David),
dans la Sibérie orientale {Taczanowski),àn.n^ les hautes steppes de la
Daourie {Raclde) et au Japon {Blakiston, Pryer). Comme on le voit,
c'est surtout une espèce asiatique ; un sujet a même été tué au
Népaul (Humé).
Mœurs et reproduction. — Ses mœurs ne diffèrent guère de celles
de l'espèce précédente. Le Cygne Bewick est aussi farouche que le
Cygne sauvage et, comme ce dernier, il ne recherche que la société
de ses semblables. Naumann rend son cri par kouck kouck kouck et
kuck kuck ; en nageant il fait aussi entendre un son ressemblant à ang,
et en volant haut dans les airs il jette souvent le cri de kloung, réson-
nant comme un son de trompe. Tous ces cris, dit Naumann, modulés
sur différents tons, produisent une musique mélancolique mais non
désagréable.
Il est probable que cet oiseau construit un nid à peu près analogue
à celui du Cygne sauvage. Les œufs sont semblables à ceux de ce
dernier, mais ils sont plus petits.
251. — Le Cygne à bec tuberculeux
CYGNUS MANSUETUS, Sal. ex Lin.
(PI. 249)
Anas CYGNUS, p. MANSUETUS, Lin. Syst. nat. I, p. 194 (1766).
Cygnus MANSUETUS, Salerne, Orniih. ou Traité des Ois., p. 404 (1767).
Anas olor, Gmel. Syst. nat. I, p. 501 (1788).
Cygnus gibbus, Bechst. Natury. Deutschl. III, p. 815 (1809).
- 417 —
Cygnus sibilus, Pall. Zoogr. Rosso-As. II, p. 215 (1811).
Cygnus olor, Vieill. iV. Dict. d'hist.nat. IX, p. 37(1817).
Cygnus immutabilis, Yarr. Proc. Zool. Soc. 1838, p. 19.
Cygnus olor immutabilis, Schleg. Rev. crit. p. CXII (1844).
Cygnus TUBERCULiROSTRis, C.-F. Dub. PL col. Ois. Belg. III p. 300 (1860).
Cygnus unwini, Hume, Ibis., 1871, p. 413.
Der Hoker Schwan, en allemand.
The Mute Swan, en anglais.
De Gewone Zwaan, en flamand.
Taille : 1"^46; ailes 0,58.
Description des deux sexes adultes. — D'un blanc pui" avec le sommet de la
tête lavé de roux jaunâtre. Lorums et un tubercule frontal, noirs; bec rouge
avec l'onglet, les narines et'les bords des mandibules, noirs ; iris brun foncé ;
pattes noires. La femelle est d'une taille un peu plus petite et son tubercule
frontal est moins développé.
Jeune. — D'un cendré brunâtre, plus foncé sur la tête ; bec d'un gris livide ;
pattes d'une teinte plombée.
Poussin. — Parties supérieures d'un gris cendré pâle, un peu plus rem-
bruni sur le dos et sur les ailes où l'extrémité du duvet prend une teinte
fauve ; gorge et ventre blancs. Bec noirâtre ; pattes d'un brun roussâtre.
Remarque. — Yarrell a décrit comme espèce distincte un oiseau ne
différant réellement pas du Cygne domestique. Le C. immutabilis,
Yarr. se distingue de ce dernier par un tubercule moins développé et des
pattes gris de plomb; le jeune est d'un blanc pur et non cendré, avec
un bec couleur chair livide. La grosseur du tubercule et la couleur
des pattes ne sont qu'une question d'âge, et il arrive parfois de trou-
ver un individu tout blanc dans une nichée dont les autres ont la
teinte corniale cendrée,
liab. — Le Cygne tubercule vit dans une demi-domesticité sur la
'^"-l plupart des lacs et des étangs
fiH^ti^J ^^ l'Europe tempérée, d'où il
il'.r '^^■^' s échappe souvent pour se rendre
^ 'rr .! sur les cours d'eau voisins ; il en
résulte ([u'il est fort difficile de
. dire où il est réellement de pas-
sage. Ce qui est certain, c'est
.; qu'il ne se montre pas au delà
du 58 1. N.
Cet oiseau habile en été le midi de la Suède {Nilsson), mais on ne
connaît que deux captures dans le sud de la Norwège : deux jeunes
T.jME 11. — IbOi; 53
— 418 —
ont été tirés, l'un en décembre 1869, et l'autre en 1870 dans le même
mois [Collett). Il niche dans beaucoup de localités du Danemark
[Collin), ainsi que sur les grands lacs de la Prusse, de la Poméranie,
du Mecklembourg(iV(2wm6!^nn),de laSilésie {Gloger)ei à l'île de Rugen
{v. Homeyer), mais, lors des passages, il est plus rare sur les côtes
que le vrai Cygne sauvage ; suivant Naumann, beaucoup de Cygnes
tuberculeux hivernent en Allemagne quand la saison n'est pas trop
rigoureuse. Il visite probablement les îles Britanniques {Seebohm), la
Hollande {Schlégel), la Belgique et la France, car dans tous ces pays
on a tué des sujets pendant l'hiver qui étaient sans doute de passage;
on a même tiré de ces oiseaux dans le midi de la France [Lacroix] , en
Espagne dans les provinces de Valence (Vidal) et de Gérona [Vay-
reda), en Portugal [Reyes) et dans plusieurs localités de l'Italie
[Giglioli], Dans l'est de l'Europe, on le voit en hiver sur les grands
fleuves du midi de la Russie [de Nordmann), accidentellement en
Pologne {Taczanowski) et en Bohême {Fritsch), mais il est sédentaire
et pas rare sur le Danube, surtout à l'embouchure de ce fleuve, ainsi
que sur certains lacs de la Dobrodja, de la Bulgarie {Alléon) et de la
Turquie (Elwes et Buckley). On l'a également observé en Grèce
{Krûper), en Transylvanie {Danford) et à l'île de Malte [Wright).
Cette espèce ne paraît pas rare non plus dans le nord de l'Afrique,
où elle a été observée au Maroc (Favier), en Algérie (1) et dans la
basse Egypte ; dans le delta du Nil, et surtout sur le lac Menzalah,
elle séjourne parfois depuis le mois d'octobre jusqu'au commence-
ment de mai [de Heuglin). On rencontre également cet oiseau en
Asie Mineure, en Syrie et près de la mer Caspienne, mais rarement à
l'intérieur de la Transcaucasie [Radde] ; on le voit aussi en Tur-
kestan (Severtzoïo), et il visite annuellement le fleuve Jubbée et la
partie occidentale de la vallée de Peshawur [Hume). Les sujets obser-
vés en Mongolie [Seebohm) et en Daourie [Radde) appartiennent
probablement à une autre espèce : le C. Davidi, Swinh.
Mœurs. — Il est fort difficile de dire si le Cygne tubercule doit
réellement être compris parmi les oiseaux observés en Belgique, car
il vit chez nous, comme en France, en Angleterre et partout, dans une
demi-domesticité sur la plupart des lacs et des étangs ; de là il fait
souvent des excursions sur les fleuves et les rivières du voisinage, où
les chasseurs le tirent parfois, croyant avoir aflaire à un individu sau-
(i) M. le baron d'HamonviUe dit avoir trouvé, en 1854, un nid de cet oiseau sur le lac
Haloulach en Algérie. (La vie des oiseaux, p. 347.^
- 419 ~
vage. M. Croegaert dit Tavoir souvent vu sur l'Escaut, mais il présume
que ce sont des sujets apprivoisés ; « en 1880, dit-il, un couple des
Cygnes du parc d'Anvers allait régulièrement faire le matin une
excursion sur l'Escaut. » Mais comme cette espèce émigré des con-
trées plus septentrionales, il est plus que probable qu'il visite parfois
notre pays lors de ses migrations, surtout quand l'hiver est rigoureux;
mais cela est difficile à prouver, vu que rien ne distingue les sujets
sauvages de ceux qui sont apprivoisés et qui mènent parfois une vie
assez vagabonde, quand on ne les empêche pas de s'envoler.
Ce palmipède émigré en octobre par familles ou par troupes com-
posés parfois de trente à soixante individus, et retourne dans sa patrie
en mars. Il voyage plus souvent le jour que la nuit, et dans l'obscu-
rité on peut reconnaître le passage d'une bande au bruissement que
produisent leurs ailes.
Cette espèce ne diffère guère des précédentes par ses moeurs, et elle
se montre partout où vit le Cygne chanteur. Son attitude est cepen-
dant plus élégante, et elle tient davantage le cou recourbé en S. Le
Cygne tubercule passe sa vie sur l'eau sans jamais plonger ; comme
ornement de nos pièces d'eau, aucun autre oiseau ne peut lui être com-
paré. Il rend des services en débarrassant les eaux des végétaux cryp-
togamiques et autres, et empêche ainsi la formation des miasmes qui
engendrent les fièvres paludéennes.
C'est à tort, dit Naumann, qu'on donne souvent à cet oiseau le nom
de Cygne muet, car sa voix est aussi forte que celle de son congénère,
mais il ne la fait jamais entendre en volant, et rarement en nageant.
Ce n'est réellement que dans les lieux de reproduction qu'on peut
l'entendre, surtout au printemps quand la couvée court un danger ;
son cri est sonore et ressemble assez à celui de la Grue ; Naumann le
rend par kgiurrr pour le mâle et par keiorr pour la femelle dans un
ton plus élevé. Outre ce cri, les deux sexes font encore entendre un
certain bourdonnement, qui devient plus sonore à l'époque de l'accou-
plement.
Ce palmipède se nourrit comme les précédents de plantes aqua-
tiques, de racines, d'herbages divers, de graines, d'insectes et de larves
aquatiques, de mollusques, de vers, de têtards, de grenouilles, mais
rarement de poissons, parce qu'il n'est pas assez adroit pour les attra-
per. Il peut atteindre un grand âge : Naumann dit qu'on ados exem-
ples de Cygnes qui ont atteint et même dépasse cent ans.
On sait que chez les Cygnes l'union est pour la vie, et que les con-
— 420 -
joints sont très attachés l'un à l'autre. M. Radde nous en donne deux
exemples. En mars 1874, quelques amis chassèrent pendant plusieurs
jours près de Zarskie Kolodsi. Ils tuèrent un Cygne, mais ils furent
poursuivis et harcelés, durant plusieurs jours, par le conjoint survi-
vant; celui-ci s'élevait dans les airs à une hauteur considérable, pour
s'abattre ensuite avec une grande impétuosité sur les chasseurs, dont
il évitait les atteintes par une fuite rapide. Un autre cas s'est présenté
à l'île Sari, mais il eut une fin plus tragique; après s'être plusieurs
fois laissé tomber de tout son poids sur les chasseurs, le Cygne fut
frappé de mort subite.
Reproduction. — Cet oiseau niche sur les lacs, les étangs, dans les
marais parsemés d'eaux découvertes. Les couples construisent leur nid
dès leur retour au printemps, mais ils ne se reproduisent pas avant
l'âge de deux ans. Les mâles qui s'accouplent pour la première fois
doivent conquérir une femelle, ce qui ne se fait pas sans luttes ; ils
doivent parfois aussi combattre pour avoir une place convenable pour
leur nid, tandis que les couples unis les années précédentes, repren-
nent simplement possession de leur ancienne demeure, dont ils chas-
sent les intrus; tout ceci occasionne des luttes continuelles aussi long-
temps que les différents couples n'ont trouvé à se caser.
Le nid est construit sur un îlot ou sur des souches de roseaux et
de joncs, mais toujours très près de l'eau et dans un endroit difficile
à aborder. Comme les roseaux sont encore peu élevés à cette époque
de Tannée, il est facile d'apercevoir de loin la vaste construction que
la femelle élève sans le concours du mâle; ce dernier se borne à
l'accompagner quand elle cherche les matériaux nécessaires et à
veiller sur elle. Quand le nid est placé sur la terre ferme, il demande
moins de travail, mais lorsqu'il a pour base de vieilles souches ou un
tas de roseaux brisés et entassés, il importe qu'il ait assez de solidité
pour supporter le poids de la couveuse, sans être exposé à s'en aller
à la dérive. Le plus souvent c'est le nid de l'année précédente qui
sert de base, et la construction augmente ainsi en volume d'année en
année, en s'entassant de plus en plus, comme cela a lieu pour le nid
de la Cigogne. Quand il est construit de toute pièce, la femelle
commence par rassembler en tas des racines, des vieilles tiges de
roseaux et de joncs ainsi que des branchages, sur lesquels elle
entasse des bottes d'herbaû,es aquatiques avec les racines qu elle
cherche dans l'eau ; le tout est recouvert de matières sèches, compo-
sées en grande partie de feuilles mortes, de brins d'herbes, de joncs
..- 421 —
secs, etc.; la cavité centrale est peu profonde. Ce nid mesure alors
0"'90 à 1"25 de diamètre et 30 à 40 centimètres de hauteur.
La ponte a lieu vers la mi-avril et se compose de cinq à huit oeufs,
suivant Tâge de la pondeuse; ceux-ci sont ovalaires, d'un blanc ver-
dâtre uniforme et mesurent environ 107 millim. sur 74. D'après
Naumann, la durée de l'incubation est de trente-six à trente-neuf
jours. Les poussins ne quittent leur nid que le second jour; les
parents les conduisent alors sur l'eau, leur montrent la nourriture
qui leur convient, et le soir toute la famille retourne au nid, tant que
celui-ci est en état de les contenir ; la mère abrite ses petits sous ses
ailes, et le père veille près du nid à la sécurité commune.
SOUS-FAMILLE
DES ANATINÉS. — ANATTN^
Car. — Les Anatinés ou Canards se distinguent des précédents par un cou
beaucoup plus court, et des Oies par des jambes moins hautes.
Bec de la longueur de la tête ou un peu plus court, d'égale largeur dans
toute son étendue ou plus large à son extrémité, à crête dorsale bombée ;
lorums emplumés ; cou et ailes de longueur moyenne, ces dernières étroites,
aiguës, à seconde rémige la plus longue; queue courte, large, arrondie ou
pointue ; jambes insérées très en arriére, courtes, emplumées jusqu'à la
naissance du tarse; celui-ci médiocre, comprimé latéralement; doigt médian
plus long que le tarse; ongles faibles.
Plumage variant ordinairement suivant le sexe, l'âge et la saison; le
duvet est très abondant.
lîah, — Cette division a des représentants sur toute la surface
du globe.
Mœur^i — Les Canards sont des oiseaux essentiellement aqua-
tiques, qui vivent sur la mer ou sur les eaux douces. Ceux qui
habitent les zones froides, émigrent en automne et se rassemblent
dans ce but en bandes considérables, plusieurs espèces voyageant
souvent ensemble. Ils se mettent ordinairement en route au coucher
du soleil, volent pendant quelques heures, puis s'abattent sur l'eau
pour y passer le restant de la nuit; au matin, ils continuent leur
voyage. Ils dorment la tète cachée sous les scapulaires, perchés
sur une patte, ou couchés sur le ventre, ou flottant sur l'eau.
Ces palmipèdes marchent plus ou moins bien, nagent à la perfec-
— 422 -
tion mais ne plongent qu'exceptionnellement. Ils volent bien, à coups
d'ailes précipités et en produisant un bruissement plus ou moins fort.
Leur voix varie suivant les espèces, et le cri du mâle est toujours
différent de celui de la femelle. Leurs sens paraissent bien développés.
Ils sont tous craintifs, prudents, rusés et intelligents, et leur pru-
dence augmente encore quand ils sont réunis en grand nombre. Leur
régime est aussi bien animal que végétal.
Les Canards sont monogames, mais leur ardeur les entraîne sou-
vent à enfreindre les devoirs conjugaux et même à contracter des
unions hybrides. Ils nichent généralement en société et construisent
leurs nids très près les uns des autres. La plupart nichent sur le sol
ou dans des trous creusés en terre, parfois aussi dans des crevasses
de rochers; quelques-uns font leur nid dans des troncs d'arbres creux,
d'autres sur des arbres et parfois dans le nid abandonné d'un oiseau
arboricole. La ponte est de six à seize œufs et la durée de l'incubation
est de vingt à vingt-quatre jours,
La mère témoigne une grande tendresse à ses petits et les conduit
sur l'eau dès qu'ils sont secs; les poussins ne tardent guère à se
montrer très agiles, ils prennent joyeusement leurs ébats et courent,
nagent et plongent avec habileté.
GENRE CXLIIl
TADORNE. ~ TÂDORNA
Anas, Briss. Ornith. VI, p. 344 (1760).
Tadorna, Flem. Phil. of Zool. II, p. 260 (1822).
Casarca, Bonap. Comp. List, p. 56 (1838).
VuLPANSKR, Keys. et Blas. Wirbelth. Eiir. p. LXXXIV (I840j.
Car. — Bec plus court que la tête, plus haut que large à la base, aplati et
légèrement retroussé à l'extréinité qui est un peu plus large que la base du
bec; onglet large, recourbé et faisant retour eu arrière; mandibule inférieure
presque entièrement cachée par la supérieure, dont les lamelles sont un peu
saillantes vers le miheu du bec ; narines presque médianes, espacées, larges,
ovales; ailes allongées, aiguës ; queue courte, légèrement arrondie; bas des
jambes très peu dénudé ; tarses robustes, de la longueur du doigt médian,
l'ongle compris ; doigts relativement courts.
Hdb. — Ce genre a des représentants en Europe, en Afrique, en
Asie, en Australie et aux îles océaniennes.
— 423 —
252. — Le Tadorne ordinaire.
TADORNA CORNU TA, Gray ex Gmel.
(PI. 251)
Anas TADORNA, Lin. Syst. nat. I, p. 159 (1766).
Anas cornuta, Gmel. Eeise Russl. II, p. 185, pi. 18 (1774).
Tadorna familiaris, Boie, Isis, 1822 p. 564.
Tadorna bellonii, Steph. SJtaw'sGen. Zool. XII, 2, p. 72, pi. 45 (1824).
Tadorna vulpanser, Flem, Brit. an. p. 122 (1828).
Tadorna gibbera, littoralis, maritima, Brehm, /sts, 1830, p. 997.
Vulpanser tadorna, Keys. et Blas. Wirbelth. Eur. p. LXXXIV ('1840).
Tadorna schachraman, Breh. Naumannia, 1855, p. 297.
Tadorna cornuta, Gray, Hand-listofB. III, p. 80 (1871)^
Die Brand-Ente, en allemand.
The common Sheldrake, en anglais.
De Bergeend, en flamand.
Taille. •0,-^hO; ailes 0,«'35.
Description du mâle adulte. — Tête et majeure partie du cou d'un vert
noirâtre ; base du cou, dessus du corps, couvertures des ailes, flancs, sus-
caudales et jambes d'un blanc pur; un large ceinturon d'un roux ardent
couvre la poitrine et le haut du dos ; scapulaires et partie médiane de la poi-
trine et du ventre, noires; rémiges secondaires d'un vert pourpré à l'extérieur,
les plus supérieures d'un roux pourpré extérieurement, blanches à l'intérieur,
et ces deux couleurs sont séparées par une large raie brune ; rémiges primaires
noires ; queue blanche avec l'extrémité noire; sous-caudales roussâtres.
Bec rouge, surmonté d'une forte protubérance frontale arrondie de même
couleur, mais qui disparaît insensiblement après l'époque des amours ; iris
brun ; pattes couleur chaii*.
Femelle. — Ressemble au mâle par ses teintes, quoiqu'elles soient moins
vives ; sa taille est plus petite et le bec est dépourvu de la protubérance fron-
tale.
Jeune. — Dessus de la tête, joues et partie supérieure du cou d'un brun
cendré foncé tacheté de blanchâtre; face, gorge, toutes les parties inférieures,
bas du dos, sus-caudales blancs ; côtés de la poitrine et base du cou en
dessus d'un roux terne avec les plumes lisérées de cendré brunâtre ; haut du
dos d'un brun cendré ; couvertures des ailes blanches, les moyennes terminées
de cendré, les plus grandes presque entièrement de cette couleur; scapulaires
d'un cendré brunâtre mais terminées de blanc ; rémiges secondaires ou miroir
d'un vert doré plus sombre que chez l'adulte ; rémiges primaires d'un brun
noirâtre et terminées de blanc; queue blanche terminée de brun ; sous-cau-
dales roussâtres. Bec d'un rouge brunâtre ; pattes couleur chair livide.
Poussin. — Duvet bien fourni, pas très long; vertex, nuque, une petite
— 424 -
tache sur les oreilles, deux bandes dorsales très larges descendant l'une sur
les ailes et l'autre sur les cuisses, ainsi que queue, d'un brun cendré; front,
côtés de la tête, cou, deux bandes transversales sur le dos et parties inférieu-
res d'un blancpur. Bec brun, l'onglet plus pâle, mandibule inférieure jau-
nâtre ; pattes d'un brun varié de jaunâtre.
jlfji^j)^ — Ce bel oiseau est plus ou moins répandu sur toutes les côtes
^ ,^^,.^^^îSEf^ de l'Europe, et il niche depuis
^^^W^^X' y ^^ °^^^^ ^® ^^ France {Lacroix)
'W\ 'M^'iS'^M^^-'^^^ et les îles Britanniques (<See5oAw)
^■^j^f^4 jusqu'en Norwège sous le 70°
^^iq 1. N. {Collett). Il est sédentaire
sur toutes les côtes de l'Europe
tempéréejusqueprèsdeSi^l. N.,
ii f-M-^i !H mais on ne le voit qu'en hiver en
Espagne {Reyes), où quelques
couples paraissent cependant nicher {Saunders), en Portugal {du
Bocage) et en Italie {Giglioli) ; il est très rare en Sicile {Malherbe), de
passage en Grèce {Lhidermayer), mais c'est le Canard le plus commun
dans la Dobrodja où il niche partout {Alléon); il est également
sédentaire sur les autres côtes de la mer Noire et sur celles de la mer
Caspienne {Raddé), mais rare dans le golfe de Finlande {Bilchner). On
ne le voit qu'accidentellement en Pologne sur la Vistule {Tacza-
nowski), en Bohême {Fritsch), en Transylvanie {Danford), en
Autriche-Hongrie, dans l'intérieur de l'Allemagne {Naumann) et en
Suisse {Meisner et Schinz) ; c'est surtout sur les eaux saumâtres qu'on
le voit à l'intérieur des terres et il y est souvent sédentaire si l'hiver
n'est pas trop rigoureux. En Belgique, ce Canard est plus ou moins
commun en hiver sur les côtes maritimes et à l'embouchure de
l'Escaut, surtout si la saison est rigoureuse, et il est probable qu'il
niche chez nous aussi bien que sur les côtes voisines, mais il ne se
montre qu'accidentellement dans l'intérieur du pays.
Le Tadorne ne paraît pas habiter en Asie une latitude aussi boréale
qu'en Europe, car ni MiddendorlF, ni von Schrenk ne l'ont observé
dans le nord de la Sibérie. M. Radde l'a rencontré dans les hautes
steppes salines de la Daourie et au Tarei-nor, et le D"" Finsch l'a
observé dans la Sibérie occidentale près du Sassyk-Ala-Kul et du
Aul-Uwanas; il habite également les eaux salines du Turkestan
{Seoertzow) et visite régulièrement en hiver la Mongolie, la Chine
{David), Formose {Swinhoe) et Tlnde {Jerdon, Simson), mais sans
dépasser au Midi le 22" 1. N. {Seebohm) ; il est probablement séden-
taire au Japon {von Siehold).
En Afrique, on voit cette espèce dans les parties septentrionales
[Loche) et il est commun dans la basse Egypte; de Heuglin est per-
suadé qu'il y niche, car il a rencontré des sujets adultes en mai et au
commencement de juin, et des Bédouins de la région du lac Horn lui
ont assuré que ce Canard niche dans les rochers qui avoisinent les
ruines de l'ancienne ville de Thmé. Il niche également en Syrie
{de Heuglin).
Mœurs. — C'est en octobre que les Tadornes des régions septen-
trionales se réunissent en bandes sur les côtes et sur les lacs, pour
émigrer vers un climat plus clément ; ces bandes sont parfois com-
posées de centaines d'individus, qui voyagent le plus souvent la nuit
en volant à la file ou en deux lignes disposées en angle aigu ; les
adultes et les jeunes ne voyagent ordinairement pas ensemble. Ils
retournent en mars dans leur patrie.
Ce Canard n'habite pour ainsi dire que les rivages de la mer, les
lacs salés et autres eaux saumâtres ; il se montre peu sur les eaux
douces, et principalement quand il a des poussins, parce que ceux-ci
ne sont pas assez robustes pour lutter contre les flots delà mer, tandis
qu'ils peuvent nager sans crainte sur une eau tranquille.
Parmi les Canards, le Tadorne est l'un des plus beaux et des plus
élégants ; dans son attitude il ressemble à l'espèce ordinaire
{A. hoschas), mais il porte le cou fortement courbé en S. Il se tient
plus à terre que la plupart des autres espèces de la famille, marche
avec faciUté et sait mémo courir assez vite ; au repos il se tient sur
une patte, la tête cachée dans les scapulaires, ou bien couché sur le
ventre. Il vole bien, en ligne droite et rapidement, et nage à la perfec-
tion. Il est très sociable avec ceux de son espèce, les autres lui sont
indifférents; <à l'époque de la reproduction il y a bien quelques
querelles entre les mâles au sujet des femelles, mais cela n'est pas de
longue durée.
C'est un oiseau craintif et prudent, mais il s'aperçoit bientôt si
l'homme a de bonnes ou de mauvaises intentions à son égard; quand
il se sent en sûreté, il devient très confiant et prend possession des
nids qu'on a disposés pour lui.
Le Tadorne se nourrit de végétaux aquatiques, de larves, d'in-
sectes, de vers, de mollusques, de petits poissons, de crustacés
ainsi que de graines ; en captivité il exige une nourriture végétale et
ToMi: II. — I89i 51.
— 426 —
animale, mais se contente de viande crue hachée en menus morceaux,
d'herbages et de graines.
Comme chez la plupart des Canards, la voix diffère selon le sexe :
la femelle fait entendre un quack quack quack, tandis que le cri du
mâle est plus profond et ressemble à korr, korr\ lors de l'accou-
plement, le mâle fait aussi entendre une sorte de sifflement, que Nau-
mann a essayé de rendre par tiuwiaiuies . . . .
Reproduction. — Le Tadorne ordinaire niche dans des cavités
souterraines, et non à découvert comme les autres Canards; il recher-
che de préférence des terriers de lapin, de blaireau et même de
renard, ce qui le conduit parfois jusque dans les bois assez éloignés
de la côte ; quand il ne trouve pas de terrier ou de cavité naturelle
qu'il puisse aménager, il se creuse un couloir dans un terrain meuble,
et ce couloir a parfois plus d'un mètre de profondeur; son extrémité
est recourbée et évasée de façon que le nid ne puisse être vu de l'exté-
rieur. Il paraît que ce bel oiseau ne s'approprie pas seulement des
terriers abandonnés, mais qu'il s'installe aussi dans ceux qui sont
occupés par leur légitime propriétaire ; la chose se comprend encore
quand il s'agit du gîte d'un timide lapin, mais la société d'un renard
ou d'un blaireau n'est guère rassurante; et cependant, des observateurs
consciencieux et dignes de foi ont à plusieurs reprises constaté qu'un
renard et des Tadornes habitaient le même terrier,et que jamais ceux-ci
n'étaient attaqués par le carnassier. « Mais pourquoi le renard, dit
Brehm, qui ne respecte presque aucun animal plus faible que lui,
fait-il une exception en faveur de ce Canard ? La raison en est, je
crois, dans le grand courage que déploie cet oiseau, et grâce auquel
il impose à son ennemi. Ce courage n'est pas seulement l'apanage des
adultes, mais encore des jeunes. J'ai vu des Tadornes, éclos depuis
quelques jours à peine, montrer le bec à des oiseaux plus grands
qu'eux, à de petits chiens, à des lapins. Au lieu de se sauver, ils
s'arrêtaient vaillamment, étendaient le cou, regardaient avec des
yeux pleins de colère leur ennemi, et ne reculaient que pour éviter le
coup qui leur était porté. Chez les adultes, qui vivent par paires,
c'est le mâle surtout qui se charge du rôle de combattant , il se met
en position, pousse un sifflement particulier, et attaque courageu-
sement quiconque fait mine de vouloir le troubler. A-t-il mis l'assail-
lant en fuite, il revient vers sa femelle, laquelle souvent partage ses
périls et le secourt vaillamment, bien qu'elle soit moins prompte à
l'attaque. » — 11 est probable qu'une autre raison encore met les
— 4^27 —
Tadornes à l'abri des atteintes du renard ; on sait, en effet, que ce
dernier est fort prudent et qu'il n'enlève jamais les volailles des fermes
qui se trouvent aux environs immédiats de son terrier, afin de ne pas
attirer l'attention sur lui. C'est peut-être pour la même raison qu'il
juge prudent de vivre en paix avec les canards qui habitent avec lui.
C'est donc dans un terrier que la femelle du Tadorne dépose ses
œufs à la fin d'avril, sur une litière de mousse et d'herbes ; il arrive
cependant parfois que diverses circonstances retardent le moment de
la ponte, et que celle-ci n'a lieu que dans le courant de mai ou même
dans les premiers jours de juin. La ponte est de sept à douze œufs,
parfois davantage; Naumann dit, que si on lui enlève successivement
ses œufs, comme cela arrive dans certaines localités, la femelle peut
pondre de vingt à trente œufs; elle les entoure de duvet et les recouvre
soigneusement quand elle les quitte. Ces œufs sont très lisses, grais-
seux, d'un blanc de crème et mesurent environ 63 millim. sur 45. La
durée de l'incubation est de vingt-six jours. Dès que les poussins sont
éclos, la mère les conduit sur une eau calme des environs où ils peu-
vent alors se cacher dans les roseaux et les herbages. Quand l'eau
est trop éloignée du terrier où les petits sont éclos, la femelle, dit
Naumann, les y transporte un a un dans son bec ; ceci demande con-
firmation.
Le même auteur raconte qu'à Sylt. et dans d'autres îles de la côte
du Schleswig, on construit pour les Tadornes des terriers artificiels.
A cet effet, on creuse dans les dunes des couloirs qui se croisent au
centre, et où ces oiseaux viennent nicher ; à chaque emplacement
destiné à recevoir un nid, on adapte un couvercle en gazon, fermant
exactement, mais pouvant être retiré à volonté, ce qui permet de visi-
ter le nid et d'enlever successivement les œufs ; ceux ci sont estimés
bien que leur goût ne plaise pas à tout le monde. Quant à la chair
des Tadornes, elle a une odeur désagréable et un goût rance ou
huileux, aussi ne l'utilise-t-on pas.
GENRE CXr.IV
SOÏÏCEIET. — SPATULA
Anas, Lin. Syst. nat. I, p. 200.
Spatula, Boie, Isis^ 1822, p. 564.
Rhynchaspis, Steph. Sh'no's Gen. Zonl. XII, 2 p. 111 (1824).
Spathulea, Fiera. JM<. a;/., p. 123 (1828).
Clypkata, Less. Man. cVOrn. II, p. 410(1828).
Car. — Bec plus long (jue la tête, plus haut que large à la base, élargi en
— 428 —
forme de cuiller dans sa moitié antérieure ; lamelles de la mandibule supé-
rieure très saillantes à la base du bec ; onglet petit, saillant ; narines situées
près de la base, petites, ovales ; ailes assez longues, aiguës, la première
rémige la plus longue ; queue cunéiforme, les rectrices médianes aiguës et
dépassant un peu les autres ; tarses comprimés, de la longueur du doigt
interne ; pouce petit, membraneux en dessous.
Hab. — Les espèces de ce genre sont réparties en Europe, en
Asie, en Afrique et en Amérique.
253. — Le Souchet spatule
SPATULA CLYPEATA, Boie ex Briss.
(PI. 252).
Anas CLYPEATA, Briss. Ornith. VI, p. 329 (1760). - — -
Anas MEXiCANA, RUBENS ct JAMAiCENSis, Guiel. Sijst. nat. I, p. 529 (1788).
Spatula CLYPEATA, Boie, 7i'2>, 1822, p 564.
Rhynchaspis CLYPEATA, Steph. Shaw's Gen. zool. XII, 2, p. 115 (1824).
Spathulea CLYPEATA, Flem. Brit. an. p. 123 (1828).
Clypeata macrorhynchos, platyrhynchos, pomarlna et BRACHYRHYNCHOS, Brehm,
Isis, 1830, p. 997.
Rhynchaspis macrorhynchos, platyrhynchos, pomarina, brachyrhynchos et
PLATYUROS, Brehm, Naumannia, 1855, p. 298.
Rhynchaspis spathulata, C.-F. Dub., PI. col. Ois. Belg. 111, p. 276 (1860).
Die Loffelente, en allemand.
The Shoveller, en anglais.
De Slobeend, en flamand.
Taille : 0'"45 ; ailes 0,26; la femelle est un peu plus petite.
Description du mâle adulte en plumage de noce. — Tête et haut du cou d'un
vert foncé brillant ; bas du cou et poitrine d'un blanc pur ; manteau brun, les
plumes bordées de cendré ; dos, sus et sous-caudales d'un noir verdâtre avec
reflets d'un vert plus vif sur les bords des plumes ; scapulaires blanches, les
plus longues d'un gris bleu clair ou blanches avec les bords d'un noir verdâtre;
petites couvertures des ailes d'un gris bleu clair, les suivantes brunes termi-
nées de blanc; miroir d'un vert doré brillant ; rémiges primaires brunes;
parties inférieures d'un roux marron, plus sombre en avant, les côtés de la
région anale blancs ; rectrices médianes brunes, les suivantes brunes variées
de roussâtre et bordées extérieurement de blanc, les plus externes presque
entièrement de cette dernière couleur. Bec noir ; iris jaune ; pattes oranges.
Femelle. — Tête et cou d'un roux clair, marqués de taches allongées noires,
plus larges au vertex ; manteau brun noirâtre, avec les bordures des plumes
d'un roux clair et blanchâtres ; bas du dos brun, les phimes légèrement bor-
- 429 —
dêes de cendré ; sus caudales et rectrices brunes, barrées de blanc ; petites
couvertures d'un gris bleuâtre sombre, les suivantes brunes terminées de
blanc; miroir brun à reflets verdâtres et terminé de blanc ; rémiges brunes ;
poitrine et flancs roussâtres avec de grandes taches brunes en croissants; ven-
tre d'un roux rosâtre.
Mâle en été. — A cette époque le mâle prend un plumage analogue à celui
delà femelle, mais plus sombre; il conserve cependant les ailes de son plu-
mage de noce, dont l'éclat permet de distinguer facilement le mâle de la
femelle. (Voyez plus bas la remarque).
Jeune. — Les jeunes des deux sexes ont le même plumage, et celui-ci ne
diffère guère de celui de la femelle adulte, il est seulement un peu plus som-
bre ; le miroir du mâle est cependant plus brillant et à reflets verts.
Poussin. — Longue calotte elliptique sur le vertex, ailes et toutes les par-
ties supérieures d'un brun roux, avec une tache fauve longitudinale de chaque
côté du dos; côtés de Li tête d'un roux enfumé, coupés par une bande brune
qui s'étend du bec à la nuque, en traversant l3S lorums et les yeux, et laisse
une longue bande sourcilière pâle au-dessous de la calotte ; souvent une tache
brune sur les joues ou sur la région auriculaire; parties inférieures d'un fauve
pâle sur le ventre, grisâtre sur la gorge et le devant du cou, et sombre sur la
poitrine, surtout latéralement. Mandibule supérieure brune, avec l'onglet
roux pâle, l'inférieure jaune; pieds jaunâtres, les membranes brunes (J.Vian).
Remarque. — Le Souchet opère sa première mue en octobre pour
prendre sa robe nuptiale; cette mue est ordinairement terminée vers
la fin de novembre, mais l'oiseau conserve de son ancien plumage les
ailes et la queue, sauf les rectrices médianes qui sont remplacées par
d'autres plus pointues. En juin commence la seconde mue, qui enlève
au mâle son brillant plumage. Vers la fin de ce mois, ou au commen-
cement de juillet, tous les Souchets mâles abandonnent les eaux
découvertes, parce qu'ils perdent à ce moment, dit Naumann, la
faculté du vol, par suite de la chute simultanée de leurs rémiges ; ce
n'est qu'à la fin de juillet que leur mue est terminée et qu'ils peuvent
de nouveau s'envoler sur les eaux. Le mâle seul perd toutes ses
rémiges à la fois, elles ne tombent chez la femelle que les unes après
les autres et celle-ci conserve toujours la faculté de voler: ses ailes
lui sont indispensables pour réchaufîer et protéger ses petits.
IlaJ). — C'est une espèce circompolaire qui habite, en été, le Nord
des deux hémisphères jusque sous le G5o 1. N., quoiqu'elle ne soit
pas abondante sous cette latitude; le professeur Malmgren dit qu'elle
niche près d'Uleaborg (65'').
Le Souchet spatule est plus ou moins répandu dans toute l'Europe,
430 -
KiwOTSwfWiit^
soit comme oiseau d'été ou d'hiver, soit comme oiseau de passage,
mais il ne niche pas souvent au
sud du 50°. Pour la Belgique,
c'est un oiseau de passage régu-
lier, assez commun au printemps
et en automne. Il hiverne dans
le sud de l'Europe, mais dans le
midi de la France il ne fait que
passer dès les premiers froids,
et repasse en mars et au com-
mencement d'avril [Lacroix). Il hiverne également en Palestine
[Tristram] et dans le nord de l'Afrique jusqu'en Abyssinie {^de Heu-
glin), mais il est sédentaire dans le N.-E. de l'Afrique [Shelley).
En Asie, cet oiseau hiverne principalement en Perse, clans l'Inde,
[Jerdon), à Ceylan [Holdswo7'th), en Chine {David), à Formose
[Swinhoe) et au Japon [Temminck)\ il est de passage dans l'Asie cen-
trale et niche dans les parties septentrionales.
En Amérique, il niche depuis l'Alaska et hiverne dans les Etats du
Sud, au Mexique, au Guatemala, à Cuba, à la Jamaïque [Coues) et à
l'île de la Trinidad. Il se montre assez régulièrement à cette dernière
île, où il arrive vers le mois de décembre ou de janvier, pour la quitter
en avril ou mai [Léotaud).
Mœurs. — Ce Canard est assez sensible au froid, aussi abandonne-
t-il les contrées du Nord dès le mois d'octobre, mais les passages
continuent jusqu'en novembre; en mars, et le plus souvent en avril, il
regagne les lieux où il est né. Les Souchets voyagent le plus souvent la
nuit, par couples ou en petites troupes de six à vingt sujets, rarement
en bandes plus nombreuses.
Cette espèce recherche de préférence les endroits vaseux des eaux
douces, barbote volontiers dans la vase des mares et des marais où
elle trouve des vers et des larves en abondance, ce qu'elle préfère à
toute autre nourriture ; lors des migrations, on la voit fréquemment
près de la mer, mais seulement où celle-ci est peu profonde ; sur les
cours d'eau, elle ne se tient non plus que dans les endroits peu pro-
fonds et bien pourvus de roseaux, de joncs et d'herbages flottants.
Par ses mœurs et ses habitudes, le Souchet ressemble aux autres
Canards. Il nage facilement mais ne plonge qu'en cas de nécessité ;
son vol est rapide, peu bruyant ; sa voix, qu'il ne fait pas entendre
souvent, est coassante : le cri du mâle ressemble à quaak ou ivoak,
— 431 —
celui de la femelle à quauk, d'un ton plus bas; en s'envolant il jette
un cri guttural ressemblant à puck puck.
C'est l'un des lamellirostres les moins farouches ; il se laisse faci-
lement surprendre et se montre parfois même stupide ; mais il devient
plus prudent quand il a été chassé, et il cherche alors à éviter le
chasseur. Naumann a remarqué que cet oiseau est plus prudent au
printemps, quand il a son plumage de noce, qu'à l'époque où son
plumage ressemble à celui de la femelle. Il est moins sociable que
d'autres espèces et se réunit rarement en grandes troupes.
La nourriture de cet oiseau consiste en insectes aquatiques, larves,
vers, frai de poissons et de grenouilles, mollusques et en plantes
d'eau à feuillage tendre.
Le Souchet ne se conserve pas longtemps en captivité, probable-
ment parce qu'il est difficile de lui procurer toujours la nourriture qui
lui convient. Brehm a reconnu que les mâles résistent mieux que les
femelles, qui meurent généralement peu de temps après leur capture.
Ce Canard, désigné sur les marchés de France sous le nom àQ Rouget de
rivière, est fort recherché pour sa chair qui est délicate et savoureuse.
Reproduction. — Ce palmipède niche sur les lacs et les étangs
d'une certaine étendue, dans les marais et en général au bord de
toutes les eaux douces pourvues de roseaux et d'herbages, et qui ne
sont pas ombragées par de grands arbres.
C'est sur ces eaux que les luttes s'engagent au printemps entre les
divers mâles qui ambitionnent parfois la même femelle; celle-ci s'en-
vole souvent bien haut dans les airs, entraînant à sa suite tous ses
prétendants, jusqu'à ce que la fatigue l'oblige à redescendre sur
l'élément liquide où elle s'abandonne à l'un d'eux ; l'accouplement a
lieu sur l'eau. Mais le calme ne règne parmi les Souchets que quand
ils sont tous accouplés; si, cependant une cane quitte momentanément
son nid, elle est aussitôt poursuivie par tous les mâles dont les
femelles couvent dans le voisinage. « Ce Canard, dit Naumann,
paraît ignorer ce que c'est que la fidélité conjugale ; j'ai même vu
plus d'une fois un Souchet mâle poursuivre une cane de Canard sau-
vage, tout comme s'il se fût agi d'une de son espèce. >
Le nid, que la femelle construit seule, est établi dans les roseaux
d'un étang ou d'un marais, sous un buisson au bord d'un fossé, dans
les herbes d'une prairie humide, et parfois même dans un champ de
céréales, si celui-ci n'est pas trop éloigné de l'eau. Il est en général
bien caché et formé de roseaux, de joncs et autres herbages secs
— 432 -
maladroitement entrelacés ; ce nid est arrondi, sa cavité assez pro-
fonde et garni de duvet dont la femelle recouvre les oeufs chaque fois
qu'elle les quitte.
Dans l'Europe tempérée la cane ne commence à pondre que vers la
mi-mai, et dans le Nord pas avant la mi-juin. La ponte est de sept à
neuf œufs, exceptionnellement de dix à quatorze; ceux-ci sont ovoïdes,
lisses, d'un blanc fauve ou légèrement olivâtre, et mesurent environ
54 millim. sur 37. Il n'y a qu'une ponte par an; mais si, dans la
première quinzaine, celle-ci a été détruite, la femelle fait une nou-
velle ponte qui ne se compose alors que de cinq ou de six œufs. La
durée de l'incubation est de vingt-deux à vingt-trois jours; les cane-
tons commencent à voleter à l'âge de quatre semaines.
GENRE CXLV
CANARD. — ANAS. _
Anas, Briss. Ornith. VI, p. 307 (1760)
BoscHAS, Swains. Classif. of Birds, II, p. 367 (1837).
Car. — Bec un peu plus long que la tête, médiocremeut élevé à la base,
déprimé et dilaté à son extrémité qui est arrondie; onglet médiocrement
courbé, ne faisant pas saillie; lamelles courtes, celles de la mandibule supé-
rieure un peu visibles à la partie postérieure du bec et dirigées en arrière ;
narines presque basales, assez rapprochées, ovales ; ailes de longueur
moyenne, aiguës ; queue médiocre, légèrement cunéiforme ; tarses épais, de la
longueur du doigt médian.
jjab. — Ce genre a des représentants dans les cinq parties du
monde.
254. — Le Canard sauvage.
ANAS BOSCAS, Lin. (1).
(Fl. 253).
Anas boschas, Lin., Syst. nat. p. 127 (1758).
Anas fera, Briss. Ornith. VI, p. 318 (1760),
Anas boschas et adunca, Lin., Syst. nat. I, p. 205(1766).
Anas domestica, Gmel., Syst. nat. I, p. 538(1788).
Anas boscas, Forst. Syn. Cat. Br. B., p. 35 (1817).
Anas archiboschas, suBBoscHAset conboschas, Brehm. , /sis, 1830, p. 997.
Die Marzente, stockente, en allemand.
The Mallard, en anglais.
De Wilde Eend, en flamand.
Taille: 0'"52; ailes 0,29.
Description du mâle en plumage de noce. — Tête et une partie du cou d'un
(i) La vraie orthographe est ^mcas et non boschas.
beau vert foncé à reflets bleuâtres et pourpres, suivi d'un collier blanc inter-
rompu en arrière ; bas du cou en avant et poitrine d'un brun marron; haut du
dos brun pointillé de cendré; scapulaires d'un cendré brunâtre avec des zig-
zags gris blanc très lins, les plus externes ombrées de brun marron ; bas du
dos d'un brun noirâtre ; croupion, sus-caudales et les quatre rectrices
médianes noirs à reflets verdâtres, ces dernières relevées et recourbées en
avant; couvertures des ailes d'un cendré brunâtre, les plus grandes termi-
nées de blanc avec un bord terminal noir ; miroir d'un beau vert brillant,
suivi d'une bande noire et d'un bord blanc ; rémiges d'un brun cendré, les
tertiaires cendrées, lavées de brun marron près du miroir ; parties inférieures
blanchâtres, finement linéolées de brun cendré pâle ; rectrices latérales cen-
drées mais blauches extérieurement ; sous-caudales d'un noir bleuâtre. Bec
d'un vert jaunâtre ou olivâtre avec l'onglet noir; iris brun; pattes oranges.
Femelle. — Tête et cou d'un cendré roussâtre avec des taches noirâtres,
plus larges et dominant au vertex; gorge d'un blanc roussâtre; dessus du
corps brun avec les plumes bordées de roussâtre et une longue tache de
même couleur sur la barbe externe des scapulaires ; ailes comme chez
le mâle ; poitrine d'un roux varié de brun ; abdomen cendré roussâtre
taché de cendré brunâtre; flancs avec de grandes taches brunes en fer-
à-cheval et une tache lancéolée au centre des plumes ; queue sans rectrices
relevées, brune avec les bordures des pennes et des raies transversales d'un
blanc roussâtre. Bec d'un gris verdâtre foncé, d'un jaune rougeâtre sur les
bords et l'onglet noir.
Mâle en été. — A cette époque le mâle ressemble à la femelle, mais ses
teintes sont plus foncées, le bas du dos est presque noir, les rectrices sont plus
blanches et le bec de couleur- plus sombre.
Jeune mâle. — N'est presque pas à distinguer de la femelle adulte.
Poussin. — Parties supérieures d'un brun olive ; côtés de la tête d'un jaune
d'ocre, avec une raie brune traversant l'œil et une autre couvrant les oreilles;
parties inférieures jaunâtres ; une bande brune sur les flancs, mais laissant
une tache jaune sur les côtes de la queue ; ailes traversées par une bande jau-
nâtre. Bec d'un brun olivâtre, l'onglet plus pâle, la mandibule inférieure
jaune ; pattes brunes variées de jaune.
Remarque. — Le mâle revct sa robe de noce en octobre et la con-
serve jusque vers la tin de juin; il opère alors sa mue qui le rend
presque semblable à la femelle; le plumage d'été est donc de très
courte durée.
M. le Baron d'Hamunvillo a conslaié, (ju'en perdant son beau plu-
mage, le mâle perd également pendant quelque temps la faculté de
voler; ses rémiges, grandes et petites, tombent toutes presque eu même
T..mf:II.- IS'.l-^
55
434
temps, laissant l'aileron à nu. Il a été dit précédemment que le Souchet
spatule mâle est dans le même cas.
jjfjf^jj _ Le Canard sauvage habite toute la zone circompolaire
jusqu'au 70° 1. N. Il est commun
en Islande en toutes saisons et
hiverne près des eaux qui ne
gèlent pas {Faber) ; dans le midi
de la Suède et dans les parties
septentrionales de l'Allemagne il
est plus ou moins sédentaire ; il
est commun pendant toute l'année
en Belgique où il est surtout abon-
dant au commencement et à la fin de l'hiver. Il est également commun
et sédentaire dans les autres parties de l'Europe centrale et méridio-
nale, ainsi qu'aux îles Britanniques. En hiver, on le rencontre éga-
lement dans le nord de l'Afrique {Loche, Draké), aux îles Canaries
{Bolle), Açores et Madère [Du Cane Godman), ainsi qu'en Egypte, en
Nubie {Shelley) et en Abyssinie {Rûppell).
Cet oiseau est également très répandu en Asie depuis les monts
Ourals jusqu'au Kamtschatka [Stejneger) et au Japon {Blakiston), et
depuis le nord de la Sibérie {MiddendorfJ')]Vi^(\^' s^m Cachemir(5roo/?5),
le nord de l'Inde {Jerdon), la Chine {David) et Formose {Swinhoé).
En Amérique on observe cette espèce depuis l'Alaska (Twrner) et le
Groenland (Z?em/i«rc?^) jusqu'aux Antilles et Panama {Coues); elle est
abondante en hiver aux îles Aléoutiennes {Turner).
Mœurs. — Cet oiseau émigré en octobre et novembre des contrées
les plus septentrionales; les Canards sauvages se rassemblent alors
en grandes bandes, pour quitter les pays que les rigueurs de l'hiver
rendent inhabitables pour eux. Lorsqu'ils sont surpris par de fortes
gelées, ils cherchent autant que possible à empêcher partiellement la
congélation de l'eau en s'y agitant vivement; mais quand cela ne leur
réussit plus, ils émigrent vers le Sud jusqu'à ce qu'ils rencontrent une
eau qui leur permette de nager et d'y trouver leur nourriture. Les émi-
grants retournent dans leur patrie en mars, et même plus tôt si la
saison est favorable. Ils voyagent le plus souvent la nuit ; ils volent
alors très haut et à la file ou en formant un angle aigu. Si le but de
leur voyage n'est pas éloigné, ils volent parfois sans ordre et à une
faible hauteur.
Ce palmipède vit aussi bien sur les côtes maritimes que près des
— 43o -
eaux douces, mais ces dernières ont sa préférence; du reste, il n'est
guère difficile sur le choix de son domaine, toutes les eaux lui con-
viennent, grandes ou petites, courantes ou stagnantes, qu'elles soient
dans une forêt ou entourées de prés et de champs, ou qu'elles se
trouvent près de lieux habités. Il se cache volontiers pendant le jour
dans les roseaux, les joncs et les buissons, aussi recherche-t-il de
préférence les eaux en partie couvertes par des fourrés de roseaux et
autres plantes aquatiques, car il y trouve toujours une abondante nour-
riture .
Le Canard sauvage est la souche de celui qui vit en domesticité,
aussi en a-t-il les habitudes et les allures ; il marche, nage, plonge et
vole comme ce dernier, mais en mettant plus de vigueur et de force
dans ses mouvements. D'un seul coup d'aile il s'enlève de terre aussi
bien que de l'eau, monte perpendiculairement une dizaine de mètres
pour se diriger ensuite horizontalement ; c'est de tous les Canards
celui qui a le vol le plus régulier, mais avec des battements d'ailes un
peu tremblottants; quand une troupe traverse l'espace, le sifflement
des ailes s'entend à une certaine distance, surtout pendant la nuit.
Audubon estime que cet oiseau peut franchir jusqu'à cent-vingt milles
à l'heure, du moins quand il veut déployer toute la puissance de son
vol. Ses sens sont subtiles, fins, surtout le goût et l'odorat; ses facultés
intellectuelles sont très développées : il est rusé, prudent, défiant et
fuit l'homme de loin, surtout quand il a été poursuivi ; cela n'empêche
qu'il s'établit souvent dans le voisinage des lieux habités et qu'il s'y
montre même donfiant dès qu'il a constaté qu'il est bien accueilli, sur-
tout quand les personnes qui l'approchent lui jettent du pain ou des
vers ; mais il conserve toujours son indépendance, et il faut le pren-
dre jeune et l'élever au milieu de sujets domestiques pour pouvoir
l'apprivoiser. Il est d'ailleurs très sociable et vit en bonne intelligence
avecles autres oiseaux aquatiques. Sa voix ne diffère pas de celle des
races domestiques ; comme chez ces dernières, le cri de la femelle est
plus retentissant et celui du mâle plus sourd.
Cet oiseau est un des plus voraces et semble toujours affamé; il se
nourrit de jeunes pousses do divers végétaux, de bourgeons, de
graines, de céréales, do fruits, de racines, de plantes aquatiques, de
larves et insectes de toutes espèces même les plus gros, de vers, do
limaces et autres mollus([ues, de frai de batraciens et de poissons, et
même de reptiles, de petits poissons et de jeunes grenouilles. Dans les
endroits où il peut vivre en paix, il passe presque toute la journée à
— 436 —
fouiller clans la vase à la recherche d'aliments; mais dans les lieux où
il ne se croit pas en sûreté, il se tient caché pendant le jour et ne se
met en quête de nourriture qu'au coucher du soleil, prolongeant ses
recherches jusqu'au matin et ne prenant presque pas de repos de la
nuit.
Ce Canard est lort recherché pour sa chair, aussi le chasse-t-on par-
tout avec ardeur en employant tous les moyens qui permettent d'en
abattre le plus grand nombre possible; dans certains pays on le prend
même à l'aide de tilets (1).
Reproduction. — Les bandes de Canards sauvages se dispersent
peu après leur retour au printemps, et l'accouplement a lieu dans le
courant ou vers la fin de mars sur l'eau ou dans son voisinage ; c'est
cette circonstance qui a fait donner à cet oiseau le nom allemand de
Marzente (Canard de mars), car c'est le seul qui se reproduit sitôt dans
l'année. Les sujets adultes reviennent généralem'éht accouplés, mais
les jeunes mâles doivent conquérir une femelle. Ils sont monogames,
mais les mâles sont si ardents qu'ils enfreignent parfois les devoirs
conjugaux en s'adressant encore à d'autres femelles ; les conjoints de
celles-ci défendent naturellement leur compagne, ce qui engendre des
cris et des luttes qui ne finissent qu'avec la fuite du séducteur. Dans
leur désir de satisfaire leur passion, les mâles ne regardent pas tou-
jours si la femelle à laquelle ils s'adressent est de leur espèce ou non;
c'est ainsi qu'ils s'accouplent parfois avec des femelles de Canard pilet,
de Chipeau, de Sarcelle, et même de Canard musqué et de Souchet
spatule; en Amérique ils s'unissent encore avec d'autres espèces. (2)
Le nid est bien caché dans les roseaux, sous un buisson d'aune ou
de saule, dans les herbages d'un marais ou d'une prairie, dans un
champ de céréales, dans le creux d'un saule et toujours le plus près
possible de l'eau; ce Canard niche même quelquefois sur les arbres, et
il prend alors possession de l'aire abandonnée d'un rapace ou du
nid d'une corneille ou d'une pie. La cane construit son nid sans
le concours du mâle, à l'aide de bûchettes, de feuilles mortes et
d'herbes sèches lâchement entrelacées ou simplement amoncelées ;
Tintérieur est garni de duvet. La ponte a lieu, suivant le pays, à la fin
de mars, en avril, parfois même au commencement de juin, comme en
(1) Voy. pour les différents modes de chasse : Olphe-Galliard, Contributions à 1:0 faune
ornithologique de VEurope occid., fasc. IV, p. 80 (1888).
(2) Les Anas maxima. Gosse, purpureoviridis, Schinz, bicolor, Don., Breweri, Aud.,
Auduhoni, Bor\s,p., iopareia, Phil. et Fuligula viola, Bell, ne sont que des hybrides de 1'^,
hoscas avec d'autres espèces.
- 437 -
Finlande; elle se compose de huit à quatorze, rarement de quinze ou
seize œufs, ovoïdes, lisses, d'un gris olivâtre ou jaunâtre pâle, et
mesurant environ 56 millim. sur 40. La femelle les couve pendant
vingt-quatre à vingt-huit jours, et quand elle doit momentanément les
quitter elle les couvre soigneusement du duvet qui les entoure.
Après leur naissance, les poussins restent encore un jour danslenid,
puis la mère les conduit à l'eau. Si le nid se trouve à une faible hau-
teur,les petits en sautent ou la Cane les pousse dehors sans qu'ils aient
à souffrir de leur chute; « jamais, dit Brehm, leur mère ne les des-
cend dans son bec comme on l'a prétendu. » Naumann affirme cepen-
dant, que quand la cane a pondu dans un nid d'oiseau de proie ou de
corneille placé sur un arbre élevé, la mère prend ses petits dans son
bec et les descend un à un. Ceci paraît être confirmé par l'observation
du comte H. Thun, qui a dit à M. von Tschusi zu Schmidhoffen, avoir
vu une cane de Canard sauvage transporter ses petits un à un dans
son bec d'un étang â un autre qui se trouvait dans le voisinage du pre-
mier. Il me semble peu probable que les poussins puissent tomber
sans accident du haut d'un arbre.
La mère et les jeunes se témoignent réciproquement beaucoup
d'attachement, mais le père ne s'occupe pas de sa famille : quand sa
femelle se met à couver, il en cherche une autre et s'il n'en trouve
pas, il va rejoindre ses semblables et errer avec eux,
GENRE CXLVl
CHIPEAU. — CHAULELASMUS
Anas, Lin. Syst. nal. I, p. 200 (1766)
Chauliodus, Swains. Classif. ofB. II, p. 366 (1837).
Chaulelasmus, (Gray) in Bonap. Lisf. /?. p. 56 (1838).
Ktinorhynchus, Eyt. Mon. Annt. p. 137 (1838).
QuERQUEDULA, Macg. Man. BrU. B. Il, p. 169 (1840).
Chauliodous, Olphe-Gal. Contr. Faune ornith. Eur. occ. fasc. IV, p. 49 (1888).
Car. — Bec plus court que la tête, un peu plus liant que larp^e à la base,
déprimé, de même largeur dans toute son étendue, l'onglet courbé et saillant:
lamelles de la mandibule supérieure visibles sur les deux tiers de leur éten-
due; mandibule inférieure entièrement cachée par la supérieure; narines
basales, assez rapprochées, ovales; ailes allongées, aigu<'s; queue courte,
conique; tarses comprimés, de la longueur du doigt interne ; pouce petit et
faible.
ITrf/r — (>~)uimo pourrespèci^ suivante.
- 438 -
255. — Le Chipeau ou Canard strépère.
GHAULELASMUS STREPERUS, Qray ex Lin.
(PI. 254)
Anas stbepera, Lin. Sijsl. nat. I, p. 200 (1766).
Anas cinerea et kekuschka, Gm. Reise, II, p. 184, III, p. 249 (1774).
Chauliodus strepera, Swains. Classif. ofB. II, p. 366 (1837).
Chaulelasmus streperus, Gray, in Bonap. Geogr. and comp. List. B. p. 56 (1838).
Ktinorhynchus strepera, Eyt. Monogr. Anat. p. 137 (1838).
Querquedula strepera, Macgil. Jfare. Brit. B. Il, p. 169 (1840).
Chaulelasmus cinereus, amebicanus, Brehm., Naumannia, 1855, p. 297.
Chaulelasmus capensis, Bonap. in Schleg. AIus. P.-B. Anseres, p. 48 (1866).
Chauliodous streperus, Olphe-Gal., Contr. Faictie ornith. Eur. occ. IV, p. 50 ('1888).
Die Schnatterente, en allemand.
The Gadwall, en anglais.
De KRAAKEEND,en flamand.
Taille : 0"'i6 ; ailes 0,29. La femelle est un petTplus petite.
Description du mâle adulte en plumage de noce. — Vertex, occiput et une
bande médiane le long du cou d'un brun roussâtre maculé de noir; front,joues
et partie supérieure du cou d'un blanc sale nuancé de roussâtre et tachetés
de brun ; bas du cou, baut du dos et de la poitrine noirs avec des bandelettes
blanchâtres ; bas de la poitrine blanchâtre avec des croissants noirs ; scapu-
laires d'un brun cendré lesplus petites brunes rayées transversalement de gris,
les plus longues cendrées et bordées de blanc: bas du dos, sus et sous-cau-
dales noirs â reflets verdâtres; petites couvertures des ailes d'un cendré brun
avec des raies transversales d'un blanc roussâtre,les suivantes d'un brun mar-
ron vif, les plus grandes noires ; miroir d'un blanc pur ; rémiges d'un brun
cendré; flancs bruns avec des bandelettes blanchâtres; abdomen d'un blanc
nuancé de jaunâtre et marqué de taches cendrées; queue d'un cendré brunâtre.
Bec noir; iris brun clair; tarses et doigts oranges avec les membranes
noirâtres.
Femelle. — Elle ressemble beaucoup à la femelle du Canard sauvage, dont
elle se distingue par la teinte rousse plus pâle et tirant sur le cendré, et par
son miroir d'un blanc terne.
Mâle en été. — Ressemble au jeune dans son premier plumage, mais s'en
distingue par le miroir qui est comme au printemps, et par les moyennes cou-
vertures qui ont un peu de brun marron; le manteau est intermédiaire à celui
des sujets en noce et des jeunes; les parties inférieures sont comme chez ces
derniers mais les taches sont plus petites.
Jeune. — Avant la première mue le mâle ressemble à la femelle. — Le
miroir blanc bordé de noir en avant permet de reconnaître facilement les
sujets de cette espèce, quel que soit leur sexe et leur âge.
Poussin. — N'est presque pas à distinguer de celui du Canard sauvage.
- 439
Hah.
-fr A
Le Canard strépère, aussi appelé Chipeau bruyant et
Ridenne, a la même distribution
géographique que l'espèce précé-
dente, mais il n'est nulle part
aussi abondant et ne dépasse pas
i'»j le 61° 1. N.; il paraît cependant
nicher accidentellement en Is-
lande,mais Faber ne l'ya observé
qu'une seule fois. Il se montre
accidentellement en Norwège où
un mâle a été tué près de Bergen en novembre 1872 {Collett): il est
rare dans le midi de la Suède {Nilsson) mais y niche {Mevesy, en Russie
il n'a pas été observé au delà du lac Ladoga {Meves); il n'est pas rare
et niche en Danemark {KjaerbôUing).
Il semble, d'après M. Seebohm, que cet oiseau est moins rare aux
îles Britanniques qu'on ne le croit généralement et qu'il s'y montre
chaque hiver ; d'après cet auteur, il niche môme régulièrement dans
plusieurs localités du Norfolk où il aurait été introduit ; en hiver, il
visite en petit nombre les îles Orkney et Shetland, les côtes orientales
et occidentales de l'Ecosse, les Hébrides et l'Irlande, mais il est rare
en Angleterre. Il niche en Hollande {Temminck), en Allemagne [Nau-
mann) et dans les autres pays de l'Europe placés sous les mêmes lati-
tudes. Ce Canard est assez commun, aux passages, dans les polders
de la Belgique, et il hiverne en plus ou moins grand nombre en Por-
tugal {Reyes), en Espagne {Saunders), en Sardaigne, en Sicile, à Malte
{Salvador i) et en Grèce {Lindermayer), ainsi que dans le nord de
l'Afrique {Loche, Lilford), en Egypte, en Nubie {Shelley) jusqu'en
Abyssinie {deHeuglin). Il paraît qu'il s'égare parfois jusqu'au sud de
l'Afrique, car le musée de Leyde possède un sujet rapporté par J. Ver-
reaux du fleuve Orange ; mais ni Layard, ni aucun autre explorateur
n'a rencontré cette espèce sous une latitude aussi australe.
En Asie, on observe cette espèce dans le midi de la Sibérie jusqu'à
la côte méridionale de la mer d'Okhotsk, 57° (Mc?rfcn(ior/r) et au Japon
{Schl('(jel)\ elle hiverne en petit nombre en Chine {Darid) et dans le
nord de la Birmanie {Seebohm), plus abondamment en Turkcstan
{Severtzoïo), dans l'Inde {Jerdon), en Asie Mineure et en Palestine
{Tristra.m).
En Amérique, ce Canaiil habite depuis La Nouvell-Bretagne (?57" 1.
N.) jusqu'aux Antilles {H. A/brecht), les lies Bevmudos {von Marteas),
le Texas et le Mexique {Coues).
— 440 —
Mœurs. — Le Canard strépère émigré des contrées du Nord et du
centre en octobre et novembre, et retourne dans sa patrie en mars et
avril. Il voyage la nuit par couples, par petites troupes de huit à vingt
sujets, rarement plus, et parfois isolément; ces oiseaux volent alors
assez haut, les uns derrière les autres en formant une ligne oblique
et en faisant retentir l'air de leurs cris.
Cet oiseau vit particulièrement dans les marais et sur les eaux tran-
quilles riches en roseaux et en herbages divers ; on ne le voit sur les
fleuves, les rivières et sur la mer que dans les endroits peu profonds
et vaseux. Pendant le jour il se tient vers le centre des lacs et des
grands étangs, n'approchant des bords quq là où ils sont garnis de
roseaux et de buissons;ce n'est qu'au coucher du soleil qu'il se hasarde
aux environs et sur des eaux de moindre importance. Par ses mœurs,
ses allures et sa voix, il ressemble complètement au Canard sauvage,
mais ses mouvements sont plus lestes et il se montre un peu moins
farouche; la nourriture est aussi la même que pour ce dernier.
Le Ghipeau s'apprivoise facilement quand on le prend jeune, mais
il vaut encore mieux faire couver ses œufs par une cane domestique.
Reproduction. — Cet oiseau niche sur un îlot, dans un massif de
roseaux ou de joncs entouré d'eau, dans un buisson de saule ou dans
une prairie humide. La femelle cache son nid avec soin ; ce nid, d'une
construction très sommaire, est formé de roseaux, d'herbes et de joncs
secs, et présente au centre une cavité garnie au dernier moment
du duvet que la cane s'arrache pour en couvrir ses œufs. La ponte a
lieu à la fin d'avril ou au commencement de mai, et se compose de
neuf à douze œufs; ceux-ci sont généralement ovalaires, lisses, un peu
lustrés et d'un blanc jaunâtre tirant sur le vert; ils mesurent environ
54 millim. sur 37. La durée de l'incubation est, d'après Naumann,
de vingt ou vingt-un jours.
GENRE CXL.V1I
MARÈQUE. — MARECA.
Anas, Lin, Syst. nat. I, p. 202 (1766).
Mareca, Steph., Shaws Gen. Zcol. XII. 2. p. 130 (1824).
Pénélope, Kaup, Nat. Syst. p. 31 (1829^.
Marica, Olphe-Gal., Coutr. Faune, ont. Eur. occ. fasc. IV, p. 4 (1888).
Car. — Bec plus court que la tête,presque aussi haut que large à la base,
à peu près d égale largeur sur les deux tiers postérieurs, puis se rétrécissant
insensiblement jusqu'à l'extrémité ; lamelles assez larges, à peine visibles
vers le milieu du bec ; onglet assez large, courbé ; narines presque basales,
latérales, ovales ; ailes aiguës ; queue courte, cunéiforme, les rectrices
médianes pointues et dépassant les autres ; tarses robustes, comprimés, de
la longueur du doigt interne.
Hab. — Les quatre espèces connues de ce genre sont réparties
dans les cinq parties du monde.
256. — Le Canard siffleur.
MARECA PENELOPE, Selbij ex Lin.
(PI. 255)
Anas PENELOPE, Lin. Syst. nat. p. 12G (1758) et I p. 202 (1766).
Anas FiSTULARis, Briss. Omith. VI, p. 391 (1760).
Anas cogolca, Gmel. Reise Russl. I,p. 70 (1770).
Anas kogolca, Gmel. Nov. Com. Pelrop. XV. p. 468, pi. 21 (1771).
Mareca FISTULARIS, Steph. ShnvDs Gen. Zool. XII, 2, p. 131 (1824).
Mareca PENELOPE, Selby, Bril. Orn. Il, p. 324 (1833).
Mareca KAJOLKA et fistulans, Brehm, Nawnannia, 1855 p. 297.
Marica FISTULARIS, Olphe-Gal., Contrib. Faune orn. Eur. oec.,fasc. IV, p. 4 (1888).
Die Pfeifente, en allemand.
The Wigeon, en anglais.
De Smient, en flamand.
Taille : 0,45 ; ailes 0,27.
Description du mâle en plumage de noce, — Tête et haut du cou d'un brun
roux, légèrement pointillé de noirâtre sur la ligne médiane de la nuque et
autour des yeux; front et milieu du vertex d'un blanc roussâtre ; parties dor-
sales d'un brun cendré, rayées transversalement de zigzags blanchâtres ;
les plus longues scapulaires cendrées à l'intérieur, d'un beau noir à l'exté-
rieur avec un bord externe blanc ; les plus longues sus-caudales noirâtres
bordées extérieurement de blanc ; couvertures des ailes blanches, les plus
grandes terminées de noir ; rémiges secondaires d'un cendré brunâtre à l'in-
térieur avec une bande d'un vert doré suivie de noir à l'extérieur ; le vert
forme donc un miroir limité en avant et en arrière par une bande noire ;
rémiges primaires et rectrices brunes, ces dernières lisérées de blanc ; bas
du cou en avant et haut de la poitrine d'un cendré lie de vin; les autres
parties inférieures blanches, mais les lianes rayés de zigzags d'un brun
cendré ; sous-caudales noires. Bec d'un gris ai'doise, noir à l'extrémité ; iris
brun; pattes d'un gris bleuâtre, les membranes plus sombres.
Mâle en été. — Dans cette saison, le plumage ditlorc principalement du
précédent par la coloration des parties dorsales ; les plumes des parties supé-
rieures sont d'un brun foncé, bordées do roux et barrées de blanc jaunâtre ;
ToM II. — 1802. 56
— 442 —
le haut de la poitrine est d'un brun jaunâtre clair avec des stries transversales
noirâtres ; les flancs sont d'un brun roussâtre. presque uniforme.
Femelle. — Tête et cou roussâtres tachetés de noir, surtout au vertex ; dessus
du corps d'un brun noirâtre avec les plumes bordées de cendré roussâtre ;
petites couvertures des ailes brunes frangées de cendré, les suivantes et les
rémiges secondaires brunes plus ou moins bordées de blanc ; rémiges pri-
maires et rectrices brunes, ces dernières bordées de blanchâtre à l'extérieur;
bas du cou, haut de la poitrine d'un cendré roussâtre avec des taches trans-
versales brunes ; flancs, jambes et sous-caudales d'un cendré roussâtre, les
dernières tachées de blanc ; poitrine et abdomen blancs.
Jeune. — Ressemble à la femelle, mais chez le mâle on voit déjà le vert
métallique du miroir.
Poussin. — Tête rousse, jaunâtre à la gorge, avec une bande brune au
milieu du vertex ; dessus du corps brun ; parties inférieures jaunâtres ; deux
bandes claires sur les côtés dont une traversant l'aile; bec^noirâtre,la mandi-
bule inférieure variée de jaune ; pattes brunâtres.
Remarque. — La principale mue du mâle a lieu à la fin de juin ou
au commencement de juillet ; à ce moment il perd presque en même
temps toutes ses rémiges et ses rectrices, ce qui ne lui permet plus de
voler ; il se tient alors soigneusement caché dans les roseaux jusqu'à
ce que ses rémiges soient complètement développées, ce qui n'arrive
qu'à la fin de juillet. En octobre il opère sa seconde mue, qui est par-
tielle et qui lui rend son plumage de noce. La femelle ne perd jamais
la faculté de voler.
Rah. — Cette espèce habite, en été, la zone polaire de l'ancien
monde jusqu'aux limites conti-
nentales, ainsi que l'Islande
{Faher) et Waigatsch {de Heu-
glin). En Europe elle niche ra-
rement au sud de 55° 1. N., mais
il y a des exemples où elle a
niché dans la vallée du Danube,
en Allemagne, en Bohême et
même en France ; elle est de
passage régulier dans toute l'Europe centrale ; en Belgique elle est
commune lors des passages, surtout sur les côtes, sur l'Escaut et dans
les marécages des parties septentrionales du pays; feu M. Meuris dit
en avoir vu un individu avec sept jeunes à Rouge-Cloître près Bru-
xelles, mais il n'indique pas l'époque.
- 443 -
Le Canard siffleur hiverne en grand nombre dans tout le midi de
l'Europe à partir du 43° 1. N. environ, ainsi qu'en Asie Mineure
{Sperlmg), en Palestine {Tristram), dans le nord de l'Afrique {Loche,
Favier), à Madeire {Harcourt), en Egypte, en Nubie et sur les côtes
de la mer Rouge {de Heuglin) et il pousse parfois ses migrations jus-
qu'en Abyssinie {Rïippell).
Cette espèce est aussi commune en Asie qu'en Europe, et on la ren-
contre dans toutes les parties septentrionales jusqu'au Kamts'chatka
{Stejncger) et au Japon {Schlêgel). Elle hiverne jusque dans l'Inde
{Jerdon), le sud de la Chine et Formose {Swinhoe). Lors des passages,
elle s'égare souvent sur les côtes américaines de l'Atlantique et parfois
au Groenland; elle a été observée accidentellement dans leWisconsin,
rillinois et aux îles Prybilow {Coues).
Mœurs. — Le Canard siffleur quitte la zone polaire vers le
20 septembre et y retourne en avril. Il voyage par bandes composées
parfois de plusieurs milliers d'individus, volant en rangs serrés et très
haut ; quand ils sont moins nombreux, ces oiseaux volent souvent
aussi à la file en formant une ligne oblique parfois très longue, mais
rarement un angle aigu. Ils voyagent aussi bien la nuit que le jour,
mais pendant la nuit ils volent généralement moins haut.
Cet oiseau fréquente aussi bien les bords de la mer que les eaux
douces, mais il visite ces dernières particulièrement pendant la
nuit. Durant les migrations, il se montre plus ou moins sur toutes les
eaux, même sur les étangs et les mares situés dans le voisinage de
lieux habités; sur les côtes on voit alors des quantités prodigieuses
de ces Canards et, au moment du reflux, des bancs de sable très éten-
dus en sont complètement couverts. Ce sont d'ailleurs des oiseaux
extrêmement sociables, vivant toujours en bandes et se tenant pressés
les uns contre les autres, aussi bien au repos qu'en volant. Ils vivent
en bonne harmonie avec les autres espèces, sans cependant se mêler
intimement à elles, aussi n'est-il pas rare de voir au milieu d'eux de
petites troupes de Sarcelles, de Filets et autres. Pendant le jour ils se
tiennent ordinairement sur Peau et loin du bord ; quand ils ne sont que
quelques-uns, ils se rapprochent de ce dernier et sortent même de
l'eau s'ils ne çont pas observés ; ils se montrent d'ailleurs beaucoup
plus farouches quand ils sont attroupés que lorsqu'ils sont par couples
isolés. Leur démarche et leur vol u' offrent rien de particulier ; ce der-
nier est rapide, léger et les coups d'ailes répétés produisent un bruis-
sement très accentué.
— 444 —
La nourriture de cette espèce est la même que pour les précédentes:
larves et insectes aquatiques, mollusques divers et annélides, plus
rarement du frai de poissons et de grenouilles, mais beaucoup de
substances végétales telles que racines tendres, jeunes pousses,
algues, graines de diverses plantes aquatiques, etc.
Le Canard siffleur se reconnaît entre tous par son cri retentissant
qu'il fait entendre à tout propos ; c'est un sifflement aigu ressemblant
à huijuh pour le mâle, huik pour la femelle, qui le prolonge souvent en
huikrrr ou chrrahr.
Cet oiseau s'apprivoise facilement, surtout quand on le met sur un
étang en société de Canards domestiques et autres, après lui avoir
coupé une aile pour Tempêclier de s'envoler. Sa chair est très estimée:
il paraît qu'on la mange en carême, comme chair maigre!
Reproduction. — Ce Canard niche dans les marais, au bord des
eaux ou sur un îlot, entre des roseaux ou autres herbages ou sous un
buisson, mais le nid est toujours bien caché. Ce nid est formé de
feuilles sèches de roseaux, de joncs ou autres feuilles mortes, ainsi
que de diverses graminées ; c'est une construction assez compacte avec
une grande excavation au centre. La ponte a lieu vers la mi-juin ; elle
se compose de huit à dix œufs d'un blanc jaunâtre, parfois un peu
verdâtre, luisants, et mesurant environ 54 millim. sur 40.
La mère, comme chez d'autres espèces, s'arrache du duvet pour en
couvrir ses œufs chaque fois qu'elle doit les quitter. Le mâle laisse à
sa compagne les soins de la construction du nid et de l'incubation,
mais il reste près d'elle pendant les premiers temps. Bientôt cependant,
la mue l'oblige à la quitter, encore avant que les jeunes ne soient
éclos. Ceux-ci naissent après vingt-quatre ou vingt-cinq jours d'incu-
bation. Dès que les poussins sont séchés et réchauffés, la mère les
conduit à l'eau, où ils savent fort bien se cacher entre les herbages
à la moindre apparence de danger
GENRE CXLVIII
PILET. — DAFILA.
Anas, Lin. S. N. I, p. 202 (1766).
Dafila, Steçh.' Shaw's Ge7i. Zool. XII, p. 127 (1824).
Trachelonetta, Kaup, Natûrl. Syst. p. 115(1829).
Phasianurus, Wagl., Isis, 1832, p. 1235.
QuERQUEDULA, Selby, Brit. Orn. II, p. 311 (1833).
Car. — Bec à peu près de la longueur de la tête, un peu plus haut que
large à la base, s'élargissant insensiblement d'arrière en avant, à onglet
arrondi et peu saillant et à lamelles invisibles sur les côtes ; mandibule
inférieure presque complètement cachée par la supérieure ; narines presque
basales, rapprochées, ovales; ailes allongées, aiguës; queue conique, les
deux rectrices médianes très allongées et pointues ; tarses robustes, com-
primés, de la longueur du doigt interne, qui est muni d'une étroite mem-
brane externe. Cou long et grêle.
Hab. — Ce genre a des représentants en Europe, en Asie, dans le
nord de l'Afrique et dans toute l'Amérique jusqu'en Patagonie et aux
îles Falkland.
257. — Le Canard pilet ou à queue effilée.
DAFILA ACUTA, Eyt. ex Lin.
(PL 256)
Anas ACUTA, Lin. Sijst. nat. (1758; et I, p. 202 (1766) .
Anas longicauda, Briss. Ornilh. VI, p. 369(1760).
Anas alandica, Sparrm. Mus. Caris. III, pi. 60 (1786).
Anas Sparrmanni, Lath. Ind. Orn. II, p. 876 (1790).
Anas caudacuta, Steph., Syst. Cat. M. and B. Br. Mus., p. 38 (1816;.
Dafila caudacuta, Steph., Shaw's Gcn. Zool. XII, p. 127 (1824).
Trachelonetta ACUTA, Kaup, Natilrl. Syst. p. 115 (1829).
Anas caudata, Brehm, Isis, 1830, p. 997.
Phasianurus acutus, Wagl., Isis, 1832, p. 1235.
QuERQUEDULA ACUTA, Selby, Br. Orn. II, p. 311 (1833).
Dafila acuta, Eyt. Cat. Br. .B. p. 60 (1836).
QuERQUEDULA CAUDACUTA, Macg. Man. Br. B. II p. 170 (1840),
Dafila longicauda et caudata, Brehm, Naumannia, 1855 p. 297.
Dafila acuta var. Americana, Bonap. Compt.-Rend. XLIII, p. 650 (1856).
Die Pfeilente ou Spitzente, en allemand,
The Pintail, en anglais.
De Pijlstaart, en flamand.
Taille du mâle : 0"W; ailes 0,27; femelle : 0^43; ailes 0,25.
Description du mâle en plumage de noce. — Tête, gorge et partie antéro-
supérieure du cou bruns, nuancés de violet et de pourpre sur les côtés;
vertex tacheté de noir; nuque noire avec une bande blanche de chaque côté;
le reste du cou blanc en avant et sur les côtés, cendré et pointillé de gris en
arrière ; manteau, dos, côtés de la poitrine et flancs rayés alternativement
de zigzags noirs et grisâtres ; scapulaires noires, les plus longues bordées
de cendré plus ou moins blanchâtre ; couvertures des ailes cendrées, les plus
grandes terminées de roux fauve ; miroir d'un vert sombre pourpré et noir,
suivi d'une bande blanche ; rémiges primaires brunes ; sus-caudales noires
extérieurement et cendrées à l'intérieur ; rectrices brunes bordées de cendré,
les deux médianes très allongées et noirâtres; sous-caudales noires, les plus
latérales avec un bord externe blanc ; milieu de la poitrine et ventre blancs.
Bec et pattes d'un gris bleuâtre ; iris jaune.
Femelle. — Tête et cou roussâtres avec des taches allongées noires ; gorge
blanchâtre; dessus du corps brun, marqué de taches irrégulières en crois-
sants roussâtres, les scapulaires bordées par la même couleur ; couvertures
des ailes cendrées plus ou moins bordées de blanchâtre, les plus grandes
largement terminées de blanc ; miroir d'un brun roussâtre, terminé de noir
et de blanc; rémiges brunes; rectrices brunes, bordées et barrées de blanc
roussâtre, les médianes dépassant peu les autres ; milieu de la poitrine et
ventre d'un blanc jaunâtre ; flancs d'un cendré brunâtre avec de grandes
taches blanches en V ; bas-ventre et sous-caudales variés de cendré brunâtre
pâle. Iris d'un jaune brunâtre. Le plumage de la femelle pâlit avec le temps,
il est toujours plus sombre en automne.
Mâle en été. — Diffère peu de la femelle dont il se distingue par des cou-
leurs d'un roux plus sombre, par le miroir de Taile à reflets métalliques, et
par l'iris jaune. L'oiseau conserve ce plumage de juillet en septembre.
Jeune. — Ressemble à la femelle adulte, mais les teintes générales tirent
davantage sur le gris ; le mâle se reconnaît toujours à sa taille plus forte.
Poussin. — Parties supérieures brunes, roussâtre à la nuque, avec quatre
taches blanches disposées en carré sur le dos ; joues et sourcils gris ; côtés
du cou, gorge et ventre blancs; poitrine et abdomen grisâtres.
Hab. — Le Canard pilet habite toute la zone boréale jusqu'au
70° 1. N.; en été on l'observe en
Islande (Faber), aux îles Féroé
{Millier), en Scandinavie {Collett,
Sundstrôm), dans la Russie sep-
tentrionale et il niche jusque
dans le nord de l'Allemagne
{Borggrevé) et le centre de la
1^4-^1 j^r^^ Russie, mais il est toujours rare
de le voir nicher au sud du
SS** 1. N. Il est de passage dans l'Europe centrale et se montre alors
en grand nombre sur les eaux de la basse Belgique; il est encore de
passage dans le midi de la France {Lacroiœ), mais il hiverne en grand
nombre en Portugal [Barboza du Bocage), en Espagne {Saunders),
dans le midi de l'Italie (Salvadori), en Bulgarie, en Turquie {Elwes
et Buckley), en Grèce {Lindermayer), aux îles Ioniennes {Lilford) et
sur toutes les côtes de la mer Noire [de Nordmann). Il hiverne égale-
— 447 —
ment au Caucase {Radde), en Asie Mineure {Krûper), en Palestine
{Tristram), en Egyipie jusqu'au Kordofan (de Heuglin), dans le nord
do l'Afrique [Loche, etc.); Schlégel indique aussi le Sénégal, mais ceci
mérite confirmation.
En Asie, on observe cet oiseau à travers toute la Sibérie jusqu'au
Kamtschatka [Stejneger) et au Japon. Il est de passage dans les con-
trées du centre et hiverne dans le Midi jusqu'à Ceylan {Hartlaub), la
Chine (David) et Formose (Sivinhoe).
En Amérique, cette espèce habite à partir de la zone boréale ; elle
hiverne depuis les parties tempérées des Etats-Unis jusqu'à Panama
(Lawrence) et les Antilles (Sclater).
Mœurs. — Le Canard pilet émigré en octobre et novembre des
contrées septentrionales et y retourne vers la mi-mars ou en avril,
suivant la saison. Il voyage par bandes plus ou moins considérables
et le plus souvent pendant la nuit.
Cet oiseau fréquente les mêmes endroits que le Canard sauvage,
mais il préfère toujours les grandes eaux découvertes garnies de
roseaux et d'herbages; il ne s'arrête pas volontiers sur les petits étangs
et les mares cachés dans les bois, ni sur les fleuves, sauf cependant
aux endroits peu profonds et vaseux ou offrant des marécages aux
environs. Il se montre aussi dans les prairies inondées et même dans
les champs; ce palmipède a, du reste, toutes les habitudes et les
allures du Canard indigène; il plonge avec facilité, nage parfois assez
longtemps sous l'eau pour dépister l'ennemi qui le poursuit, vole
avec rapidité, se montre aussi sociable avec les siens qu'avec d'autres
espèces, et c'est le Canard qui s'accouple le plus souvent avec le
Canard sauvage. Son cri ressemble aussi à celui de ce dernier, mais
il est d'un ton plus élevé; quand le mâle s'envole effrayé, il jette un
cri rauque particulier qui ressemble fort à celui que poussent les
jeunes Freux encore au nid; d'après Naumann, pendant l'époque de
la reproduction, le mâle ferait encore entendre un son particulier et
étouffé ressemblant à kluck.
Le Pilet se nourrit comme le Canard sauvage, mais il détruit moins
de frai et de petits poissons. En captivité, on peut le nourrir comme
l'espèce domestique, il mange alors de tout et se contente d'avoine,
de pain, de navets et d(3 carottes mis en menus morceaux.
On chasse beaucoup cet oiseau pour sa chair qui est excellente, sur-
tout celle des jeunes.
Reproduction. — Ce Canard niche entre les roseaux et les joncs
— 448 ^
qui croissent près des eaux et des fossés inondés, ou bien sur un îlot,
entre les herbages d'une prairie et même dans un champ de céréales.
De même que chez les Canards sauvages, les mâles doivent com-
battre pour conquérir une femelle et pour pouvoir la conserver, car
les célibataires sont peu scrupuleux et ne se gênent nullement pour
enlever les compagnes des autres.
La femelle choisit elle-même un emplacement convenable pour son
nid et le construit sans le concours du mâle. Ce nid est une masse
informe composée de roseaux et de joncs secs, de paille, de feuilles
mortes et de foin ; au centre se trouve une excavation assez profonde
garnie de duvet au moment de la ponte ; celle-ci a lieu dans la seconde
quinzaine d'avril ou au commencement de mai, un peu plus tard dans
les pays du Nord. La femelle dépose de sept à dix œufs un peu lus-
trés, d'un blanc roussâtre, parfois un peu verdâtre, et mesurant
environ 57 millimètres sur 39. La durée de l'incubation est d'environ
vingt-cinq jours. Les parents se comportent avec leurs petits comme
ceux du Canard sauvage.
GENRE ÇXLIX
SARCELLE. — QUERQUEDULA.
QuERQUEDULA, Briss. Ornith. VI, p. 427 (1760).
Anas, Lin., Syst. nat. 1, p. 204 (1766).
BoscHAS, Sw. Classif. B. II, p. 367 (1837).
Cyanopterus, Eyt. Mon. Anat. p. 130 (1838).
Petrocyanea, Bonap. Cat. met. Ucc. Eur. p. 71 (1842).
EuNETTA, Bonap. Comp.-Rend. XLIII, p. 650 (1856).
Car. — Bec un peu moins long que la tête, plus haut que large à la base,
droit à partir des narines, convexe en dessus, légèrement élargi vers l'ex-
trémité ; lamelles invisibles sur les côtés ; onglet arrondi, dépassant les
bords de la mandibule qui cachent la mandibule inférieure; narines basales,
rapprochées, ovales; ailes allongées, aiguës ; queue courte, conique ; tarses
robustes, un peu plus courts que le doigt médian.
Hab. — On rencontre des Sarcelles dans toutes les parties du monde.
258. — La Sarcelle d'été.
QUERQUEDULA CIRCIA, Steph. ex Lin.
(PI. 257)
Anas circia, Lin. Syst. nat. (1758) et I, p. 204 (1766).
QuERQUEDULA ..ESTivA, Briss. Ornith VI, p. 445 (1760).
Querquedula circia, Steph. Gen. Zool. Xllf, p. 143 (1824).
— 449 —
QuERQUEDULA GLAUCOPTEROs et scAPULARis, Brehm, Isis, 1830, p. 997.
BoscHAS ciRCiA, Swains. Cla^sif. B. II, p. 367 (1837).
Cyanopterus CIRCIA, Eyt., Mon. Anat. p. 130 (1838).
Pterocyanea CIRCIA, Bonap. Cat. met. Ucc. Eur. p. 71 (1842).
Anas humeralis, s. MuUer, Verhandl. nat. Gescided. p. 159 (184?).
Querquedula humeralis, Gray, Gen. of Birds, III, p. 616 (1849).
Pterocyanea glaucopteros et scapularis, Bpehm, Naum. 1855 p. 298.
Cyanopterus querquedula, v, Heugl, Syst, Uebers, n» 692 (1856).
Anasglaucoptera, C.-F. Dub. Pi. col. Ois.Belg. III, p. 274(1860).
Pterocyanea querquedula, v. Heugl. Faun. Rolh. Meer, n^ 286 (1881).
Die Knaekente, en allemand.
The Summer Teal, Garganey, en anglais,
De Zomertaling, en flamand.
Taille du mdle : 0°'31; ailes 0,20: femelle : 0"^26; ailes 0,18.
Description du mâle en plumage de noce. ■ — Dessus de la tête et ligne
médiane de la nuque d'un brun noirâtre, avec de petites stries roussâtres sur
le front ; une large bande blancLe, qui prend naissance au-dessus de l'œil,
longe de chaque côté le brun de la nuque en se rétrécissant ; jouus et la
majeure partie du cou d'un brun rougeâtre strié de blanc ; gorge noirâtre ;
manteau, dos et sus-caudales bruns avec les plumes bordées de cendré clair;
scapulaires d'un gris bleuâtre et lisérées de blanc, les plus internes avec
une longue bande centrale blanche bordée de noir à reflets verts ; petites
couvertures d'un gris bleuâtre, les plus grandes cendrées mais terminées par
un large bord blanc, formant une bande blanche à travers de l'aile ; miroir
d'un vert cendré brillant avec une raie blanche terminale ; rémiges brunes
avec un liséré externe cendré et les baguettes blanches; queue brune, les
rectrices bordées de cendré clair ; bas du cou et poitrine noirâtres avec des
croissants d'un cendré roussâtre, mais prenant la forme de bandes trans-
versales au bas de la poitrine ; les autres parties inférieures blanches, mais
les flancs et le bas-ventre ornés de raies noires en zigzags ; sous-caudales
d'un blanc jaunâtre et tachées de brun. Bec noirâtre; iris brun clair ; pattes
d'un cendré rougeâtre.
Femelle. — Elle est plus petite que le mâle. Dessus de la tète et nuque
d'un brun foncé ; raie sourciliére, côté de la tète et partie supérieure du cou
d'un blanc jaunâtre tacheté de brun ; gorge et un espace situé de cluuiue
côté à la base du bec, de même couleur mais immaculés; parties supérieures
brunes avec les plumes plus ou moins bordées de cendré ; ailes comme chez
le mâle, mais les scapulaires d'un brun noirâtre, bordées extérieurement de
blanc ; bas du cou et poitrine d'un blanc roussâtre avec des taches brunes,
dont quelques-unes en forme de croissants ; les autres parties inférieures
blanchâtres avec des taches brunes sur les flancs et sur les sous-caudales ;
queue brune, les rectrices légèrement bordées de cendré.
Mâle eu etc. — Même plumage que la t'emelk' adulte, niais d'une teinte
Tu.M II. — 1892. 57
- 450 -
générale plus sombre et les parties ventrales plus blanches ; se reconnaît
facilement à sa taille plus forte.
Jeune. — Bessemble également à la femelle adulte, mais il est d'une teinte
plus sombre, la poitrine est plus rousse, la gorge et les parties ventrales sont
plus blanches, surtout chez le mâle, les couvertures des ailes et le miroir
sont d'une couleur plus cendrée .
Poussin. — Dessus de la tête brune ; front, raie sourcilière et le restant
de la tête jaunâtres ; une bande traversant l'œil, une tache allongée près
de la mandibule inférieure et une autre derrière l'oreille, brunes ; parties
dorsales brunes, avec quatre bandes obliques jaunâtres sur les côtés, dispo-
sées en carré ; jambes et flancs bruns ; toutes les autres parties inférieures
jaunâtres.
ffab.—Lsi Sarcelle d'été habite l'Europe centrale; elle visite acciden-
tellement l'Islande [Newton), les
îles Féroé {Seebohm) et la Nor-
wège, où un individu a été cap-
turé près de Christiania en mai
1862 (Collett), mais elle niche
régulièrement en Suède jusqu'au
60« 1. N. {Wallengren). En Fin-
lande on l'a observée jusqu'à
Uleaborgh (65») où elle paraît
nicher [Dresser) ; elle est du reste plus ou moins répandue dans toute
la Russie jusqu'à Archangel. Elle est très localisée aux îles Britan-
niques, niche dans quelques localités du sud de l'Angleterre, mais elle
est rare en Ecosse et en Irlande et ne visite qu'accidentellement les
îles Shetland [Seedohm). Elle niche abondamment au Danemark
[Kjaerholling), en Allemagne, en Autriche [Naumann, etc.), en Polo-
gne [Taczanowski) et dans toute l'Europe centrale.
Cet oiseau est commun en Belgique lors des passages et niche en
petit nombre dans les grands marais du pays ; il en est de même dans
le grand-duché de Luxembourg [de la Fontaine), en YYnxiQQ[Degland),
en Suisse [Meisner et Schinz), en Italie [Salvadori) et aux Thermo-
pyles {von der Mûhle). Il est sédentaire ou hiverne en Portugal [A. C.
Smith), en Espagne [Retjes), dans le midi de l'Italie {Giglioli) et en
Grèce [Lindermayer) ; il hiverne également dans le nord [Loche) et le
nord-est de l'Afrique jusqu'au 10° 1. N. {de Heuglin), ainsi que sur les
côtes de la mer Rouge.
En été on rencontre cet oiseau au Caucase [Raddc), au Turkestan
451 —
{Severtzoïo) et en Sibérie jusque vers le 60<^ 1. N. ; il est très rare
dans les provinces de l'Amour, commun au Tarei-Nor {Radde), et
von Middendorff l'observa près des bouches de l'Uda; il est assez
rare dans les parties méridionales de la Chine {David) et à Formose
{Siainhoe), hiverne au Népaul {Hodgson), dans l'Inde {Jerdon), ainsi
que dans Tlndo-Chine, aux Philippines, à Célèbes et à Java
{Sdilégel).
Mœurs. — C'est un oiseau d'été qui émigré de nos contrées en
octobre ou dans la première quinzaine de novembre, si la température
ne s'est pas trop refroidie ; il nous revient à la fin de mars ou en avril.
Les migrations ont lieu par couples ou en petites troupes et le plus
souvent pendant la nuit.
La Sarcelle d'été ne se tient que sur les eaux douces ; pendant ses
voyages, elle s'arrête bien parfois au bord de la mer dans des endroits
fangeux, mais ce n'est jamais pour longtemps. A l'intérieur des terres
on la voit nicher sur toutes les eaux stagnantes ou courantes, mais
principalement près d'un étang, dans des marécages, et partout où il
y a abondance de roseaux, de joncs ou de buissons; elle recherche
toujours de préférence les eaux vaseuses riches en algues et en
plantes flottantes, ainsi que les prairies inondées; il lui arrive aussi
parfois de s'aventurer dans les pâturages et dans les champs, même
s'ils sont à quelque distance de l'eau.
Ses moeurs et ses allures ne diffèrent guère de ce que nous voyons
chez les autres Canards : elle marche, nage et plonge avec aisance, et
son vol est léger, silencieux et rapide. Elle est moins bien partagée
que les autres Canards au point de vue des facultés, aussi est- elle peu
farouche et même parfois un peu niaise ; elle est très sociable et se
mêle souvent à d'autres espèces.
Le cri de cette Sarcelle ressemble à knèck, rarement répété plus de
deux fois de suite, c'est d'ailleurs un oiseau peu bruyant; au printemps,
à l'époque de l'accouplement, le mâle fait souvent entendre un cri
ronflant comme krrreb et ayant quelque analogie avec celui de la
Grive draine ; outre ces cris, les deux sexes en font encore entendre
un autre qu'on peut rendre ^2iV jèkjèkjèck, prononcé très rapidement.
Quant à la nourriture, elle est la même que pour les précédents :
matières végétales, larves, insectes, vers, frai de poissons et de gre-
nouilles, têtards, etc.
C'est un oiseau d'un naturel très doux, aussi se laissc-t-il facile-
ment apprivoiser. Sa chair est très estimée.
— 452 —
Reproduction. — Cette Sarcelle niche partout où il y a de l'eau avec
des roseaux et des herbages, même sur les étangs qui se trouvent à
l'intérieur des forêts. Les préliminaires de la reproduction se passent
comme chez le Canard sauvage, mais une fois que les couples sont
unis, les conjoints se montrent plus fidèles. La femelle choisit pour
son nid un endroit bien caché dans les roseaux et les joncs, soit au
bord de l'eau, soit sur un îlot; elle niche parfois aussi dans les her-
bages d'une prairie, dans un champ de céréales, dans un fossé, sous
un buisson, mais toujours à peu de distance de l'eau. La cane fait son
nid dans une petite fosse qu'elle remplit de divers végétaux secs :
roseaux, graminées, feuilles mortes, paille, etc., selon ce qu'elle a pu
se procurer; ces matériaux sont simplement amoncelés et entassés,
mais de manière à enlacer plus ou moins les roseaux ou les herbages
environnants, de façon à ce que le nid soit un peu couvert au-dessus
et que la femelle puisse couver sans être trop vue d'en haut.
Ce n'est généralement qu'au commencement de mai que la cane
commence à pondre ; elle dépose alors de huit à douze oeufs, parfois
môme quatorze, qui sont plutôt ovalaires qu'ovoïdes et d'un blanc
crème un peu lustré; ils mesurent environ 45 millimètres sur 33. Dès
que la femelle commence à couver, elle s'arrache le duvet nécessaire
à couvrir ses oeufs, chaque fois que les nécessités de la vie l'obligent à
les quitter. La durée de l'incubation est de vingt et un à vingt-deux
jours.
Le mâle reste près de sa compagne pendant les premiers temps ;
mais bientôt sa sollicitude diminue, et il va alors se distraire sur l'eau
avec d'autres mâles, jusqu'au moment où la mue l'oblige à se cacher,
ne pouvant plus se servir de ses ailes déplumées. La mère est donc
obligée de pourvoir seule aux exigences de sa progéniture.
259. — La Sarcelle d'hiver ou Sarcelline.
QUERQUEDULA CRECCA, Steph. ex Lin.
(PI. 258)
Anas CRECCA, Lin. Syst. nat. (1758) et I, p. 204 (1766).
QuERQUEDULA MiNOR, Briss. Omilh. VI, p. 436 (1700).
Anas hina, Gmel. Sy&t. nat. I, p. 523 (1788).
QuERQUEDULA CRECCA, Steph. G en. Zool. XII, 2 p. 140 (1824).
Nettion CRECCA, Kaup, Natilrl. Syst. p. 95 (1829).
QuERQUEDULA SUBCRECCA et CRECcoiDES, Brehm, Isis, 1830, p. 998.
- 4o3 —
BoscHAS CRECCA, Swa'ins., Classif. B. II, p. 307 (1837).
Die Kruck-Ente, en allemand.
The common Teal, en anglais.
De Wintertaling, en tlaniand.
Var. Caroîinensis.
Anas carolinensis, Gm. Si/st. nat. I, p. 533 (1788).
Anas CRECCA, AVils. Am. Orn. VllI, p. 101 (1814).
Anas AMERiCANA, Vieill. Enc. meth. p. 155 (1823).
QuERQUEDULA CAROLINENSIS, Stepli. Geu. Zool. XII, p. 148 (1824).
Nettion CAROLINENSIS, Baird , J5iVcZs JV. A. p. 777 (1858).
QuERQUEDULA AMERICANA, Mui*. EcUnb . Neuw. PkU. Journ. V, p. 230 (1859).
Taille: 0,30; ailes 0,18.
Description du mâle en plumage de nocp. — Tête et les deux tiers du cou
d'un brun marron, avec une raie blanchâtre concave à la base du bec; un
grand espace d'un vert foncé brillant entoure l'œil, couvre les côtés de la
tête et se confond sur la nuque avec une bande médiane noire ; la partie
inférieure de la bande verte est bordée de blanc ; gorge brune ; partie infé-
rieure du cou, côtés de la poitrine, manteau, la plupart des scapulaires
et flancs avec des raies en zigzags alternativement blanches et noires; les
scapulaires les plus externes blanches avec un large bord noir ; bas du dos
brun plus ou moins pointillé de cendré ; couvertures supérieures de la queue
brunes bordées de cendré roussâtre ; couvertures des ailes d'un brun cendré,
les plus grandes terminées de blanchâtre passant au fauve clair ; miroir
d'un beau vert brillant, placé entre deux bandes noires, la plus inférieure
avec un petit bord blanc; rémiges brunes lisérées de cendré; poitrine d'un
blanc roussâtre,marquée de taches arrondies noirâtres; abdomen blanc; sous-
caudales noires, les latérales roussâtres avec la base noire ; queue brune, les
rectrices lisérées de cendré. Bec noirâtre; iris brun noisette; pattes cendrées.
Femelle. — Dessus de la tête brun avec les plumes bordées de cendré rous-
sâtre ; le reste de la tête d'un blanc roussâtre tacheté de brun, gorge presque
immaculée ; manteau d'un brun noirâtre avec les plumes bordées de cendré
et de roussâtre ; bas du dos et sus-caudales de même couleur, mais les plu-
mes bordées de cendré; ailes comme chez le mâle, mais les couvertures bor-
dées de cendré et les scapulaires externes brunes et noires bordées de blanc ;
poitrine variée de cendré et de roussâtre et marquée de taches brunes en
croissants ; ventre blanc avec des taches brunes et roussâtres sur les flancs ;
sous-caudales blanches avec des taches cendrées ; queue brune, les rectrices
bordées de blanchâtre.
Mâle en etc. — Ressemble à la femelle, mais d'une teinte générale plus
sombre ; il conserve ce plumage de juillet â octobre, et commence sa seconde
mue dans ce dernier mois.
454
Jeune. — Ressemble à la femelle et les sexes ne sont alors presque pas à
distinguer, mais le mâle est toujours un peu plus grand et plus foncé que la
femelle.
Poussin. — N'est pas à distinguer du poussin de la Sarcelle d'été, si ce
n'est à la forme de l'onglet ; celui-ci est en forme de triangle équilatéral
chez cette dernière, en ruban étroit chez la Sarcelle d'hiver,
Var. Carolinensis. — Diffère principalement de la forme européenne par
l'absence de plumes scapulaires blanches à bord noir ; la bande verte de la
tête descend plus bas sur les joues, où elle présente, sous l'œil, une petite
tache d'un blanc roussâtre ; les rayures du dos sont aussi plus serrées. La
femelle ne diffère en rien de celle du type d'Europe. (Caractères relevés sur un
couple du Mexique.)
Hab.
Ce palmipède habite l'ancien monde, mais il est remplacé
eu Amérique par une variété
très voisine [tfor. Carolinensis)
(|ue Schlégel réunit à la forme
européenne: « les caractères,
dit-il, assignés aux individus
américains, paraissent être en
grande partie empruntés à des
individus dont le plumage n'a
pas encore acquis la perfection
complète des teintes, ou ils sont de si peu de stabilité qu'il est impos-
sible de reconnaître celte soi-disant espèce sans indication de la
localité... »
La Sarcelle d'hiver ou Sarcelline niche en Islande {Faber) et dans
tout le nord de l'Europe et de l'Asie jusqu'au 70^ 1. N. ; elle est plus
ou moins sédentaire en Grande-Bretagne, niche en petit nombre en
Angleterre {More) et plus communément en Ecosse [Dresser) ; elle
niche encore au Danemark, en Hollande, dans les parties septentrio-
nales de l'Allemagne, en Pologne et dans la Russie centrale, mais
cela devient plus rare dans les contrées plus méridionales; cependant,
quelques-uns de ces Canards sont sédentaires dans le midi de la
France {Lacroix), en Espagne [Saunders), en Italie [Giglioli), dans
le nord de la Grèce {Lindcrmayer) et même aux îles Açores {God-
Tiian) et Madeire (Harcourt).
Cette Sarcelle est très abondante dans la basse Belgique en
automne et en hiver, et hiverne dans tout le midi de l'Europe, y
compris les îles Canaries [Balle) et de Malte [Wri[/hf). Elle hiverne
— 4oo —
également dans le nord et le nord-est de l'Afrique jusqu'en Abys-
sinie {de Heuglin), en Palestine [Tristraw) et dans le sud de l'Asie
jusque dans l'Inde {Jerdrm); elle passe également l'hiver à Cejlan,en
B\vmd.me [Seebohon), en Chine [David) et à Formose [Swinhoé). Dans le
nord de l'Asie, elle niche dans toute la Sibérie jusqu'au Kamtschatka
[Stejnege?^) et le Japon {Temminck). Elle se montre accidentellement
sur les côtes de l'Amérique orientale et au Groenland {Reinhardt).
La var. Carolinensis habite toute l'Amérique du Nord et le Gi'oën-
land ; elle hiverne dans les Etats du Sud, au Mexique, jusqu'au Hon-
duras et l'île de Cuba [Coues).
Mœurs. — Bien que cet oiseau soit moins sensible au froid que le
précédent, il émigré cependant des contrées septentrionales pour
hiverner dans un climat moins rigoureux. Les migrations commencent
en octobre et continuent pendant tout le mois de novembre, ou plutôt
jusqu'aux premières neiges accompagnées de gelées. Au printemps il
retourne très tôt dans sa patrie, car les passages commencent déjà
dans la première quinzaine de mars, mais se poursuivent jusqu'au
commencement de mai. Les voyages se font toujours par bandes plus
ou moins considérables, et plus souvent durant la nuit que pendant le
jour; ces Canards volent en rangs serrés et sans ordre, mais quand
ils ont un grand espace à franchir, ils se placent à la file pour former
une ligne oblique simple ou double suivant leur nombre ; dans ce
dernier cas, ils volent toujours à une grande hauteur et en formant un
angle aigu.
Cette espèce ne visite les bords de la mer qu'aux endroits fangeux
et peu profonds, et encore no l'y voit-on qu'à l'époque des passages;
elle n'aime pas non plus les grands lacs et les larges fleuves, et si elle
s'y arrête ce n'est jamais pour longtemps; ce qu'elle aime surtout, ce
sont les étangs, les mares et les marais bien garnis de roseaux et
d'herbages; comme elle est peu farouche, il n'est pas rare de la ren-
contrer sur les étangs environnés d'habitations ou placés à côté d'une
chaussée assez fréquentée.
Cette Sarcelle ressemble complètement, par ses mœurs, à la précé-
dente ; les jeunes, avant de savoir voler, montrent une extrême dex-
térité à la nage et plongent avec une facilité remarquable, nageant
souvent assez longtemps entre deux eaux, faculté que les adultes
paraissent perdre, du moins en partie. Son vol est léger, rapide et
silencieux.
E]l(> osf peu Caroiicli.' (;L très sociable. Son cri ressemble à hnèk ou
— 456 —
vêk, rarement répété deux fois de suite; c'est le cri d'appel qui est
propre aux deux sexes ; un autre cri, également isolé, qu'on entend
particulièrement au printemps, peut se rendre par kruck ou py^ut.
Quant à la nourriture, elle est la même que pour l'espèce précé-
dente.
Cet oiseau s'apprivoise facilement, mais il est plus difficile à conser-
ver que la Sarcelle d'été. Sa chair est excellente.
Reproduction. — Cette Sarcelle se comporte entièrement comme la
précédente pendant toute la durée de la reproduction ; elle niche de la
même manière et dans les mômes endroits. Il est impossible de distin-
guer ses oeufs de ceux de la Sarcelle d'été, mais le duvet qui garnit
le nid permet toujours de reconnaître l'espèce qui les a pondus. La
ponte est de neuf à quatorze oeufs, d'un blanc crème un peu lustré et
mesurant environ 45 millim. sur 33. La durée de l'incubation est de
vingt et un à vingt-deux jours.
Faber dit avoir trouvé des jeunes en Islande dès le 28 juin ; d'après
cet auteur, le mâle resterait auprès de ses poussins et leur témoigne-
rait autant de sollicitude que la femelle. Il est cependant probable qu'il
quitte sa famille au moment de la mue, car la perte simultanée
de ses rémiges l'empêche de voler pendant une partie du mois de
juillet.
260. — La Sarcelle formose.
QUERQUEDULA FORMOSA, Steph. ex Georgi.
(PI. 258i>)
Anas FORMOSA, Georgi, Reise Russ. Reich. p. 168 (1775).
Anas glocitans, Pall. Act. HoLin. XL, pi. 33, f. 1. (1779).
Anas baikal, Bonnat. Table encycl. 1, p. 158 (1791).
QuEKQUEDULA FORMOSA, Steph. Gen. Zool. XII, p. 151 (1824).
QuERQUKDULA GLOCITANS, Vig. Trans. Lin H. Soc. XIV, p. 559 (1825).
Anas torquata (Messerschm.), a. picta (Stell.), Bonap. Rev. crit. p. 103 (1850).
EuNÉTTA FORMOSA, Bonap. Compt.-rend. Ac se. XLIII, p. 650 (1856).
Anâs bimaculata, aactorum plurimorum nec Pennant (1).
Die Gluckente, en allemand.
The Baikal Teal, en anglais.
De Aziatische Taling, en flamand.
(1) L.'Anas èimaatlaia, Penn. {Qiierquedula bimaculata, Bonap.) admise par plusieurs auteurs
comme espèce distincte, par d'autres comme synonyme de VA. formosa, n'est en réalité
qu'un hybride de VA. Iwscas et du Qiwupicdnla crccca.
; - 4b7 —
Taille : 0,36 ; ailes 0,2i. La femelle est un peu plus petite.
Description du mâle adulte en plumage de noee. — Front et dessus de la tête
noirs; une raie sourcilière blanche prend naissance en avant de l'œil et con-
tourne l'occiput; une grande tache ovalaire d'un roux jaunâtre pâle couvre
chaque côté de la face; une large bande noire, bordée de blanc, descend
sous l'œil, contourne la tache précédente et couvre la gorge; derrière cette
bande noire il s'en trouve une autre plus large, d'un roux jaunâtre pâle,
bordée de blanc et qui couvre la partie antérieure du cou ; de chaque côté
du cou, derrière cette dernière, existe une bande d'un noir bleuâtre ; enfin,
derrière l'œil, part une large bande d'un vert bronzé qui couvre la partie
postérieure du cou, descend enferme de taux sur les côtés où elle est limitée
par une bande blanche se prolongeant autour de la bande noii'o; manteau,
dos et sus-caudales d'un brun cendré jaunâtre, plus sombre au centre des
plumes; côtés supérieurs du manteau et les scapulaires les plus rapprochées
de l'épaule, d'un gris bleuâtre pointillé de noir; couvertures des ailes d'un
cendré brunâtre, les plus grandes terminées de roux ; miroir d'un vert
bronzé, suivi d'une bande noire et d'un bord blanc; les plus longues scapu-
laires noires au centre, blanches intérieurement et rousses à l'extérieur ;
rémiges et rectrices brunes avec un liséré plus pâle ; poitrine couleur lie de
vin avec des taches arrondies noires ; flancs vermiculés de noir et de blanc,
les plumes les plus rapprochées de la queue avec un large bord blanc;
abdomen d'un blanc plus ou moins lavé de jaunâtre; sous-caudales noires,
les latérales bordées extérieurement de roux rouge. {Individu de V Amour).
Bec d'un noir bleuâtre ; iris et pattes d'un brun clair (1).
Mâle en mue tué en Belgique. — Même plumage que l'adulle ci-dessus,
mais les plumes du dessus de la tête bordées de brun roussâtre ; parties rous-
sâtres des joues tachetées de noir, tandis que la gorge et les autres parties
noires de la tête sont tachetées de blanc ; taches noires de la poitrine moins
visibles, et les belles scapulaires effilées commencent seulement à se montrer.
Femelle adulte. — Dessus de la tête et partie postérieure du cou brun noi-
râtre, avec les plumes bordées de roux à la nuque et sur le cou; une tache
arrondie blanchâtre sur les côtés de la mandibule supérieure surmontée d'une
tache brune piquetée de noir ; une raie brune derrière l'œil; gorge blanche;
les autres parties de la tête et du cou blanchâtres, lavées de cendré roussâtre et
tachetées de brun; manteau d'un brun noirâtre, avec les plumes plus ou moins
bordées de cendré roussâtre; les scapulaires largement bordées de cendré
jaunâtre ; bas du dos d'un brun gris avec une strie noire au centre des
plumes; sus-caudales de même couleur mais bordées de cendré jaunâtre; ailes
(1) Middendorfl' dit que les pattes du mâle adulte sont d'un gris bleu clair ; l'individu tué
en I>elgi<iuc, et (|uc j'ai reçu en ci;air. avait les siennes d'un bnm clair
ToM II. — 1892. 58
- 4S8 ^
comme chez le mâle; poitrine et flancs d'an roux brunâtre, plus pâle vers le
ventre, tachés de noir, mais les taches étant beaucoup plus grandes sur les
flancs, où certaines plumes ont une tache blanchâtre au centre; ventre blan-
châtre, avec des taches brunes au bas-ventre et sur les sous-caudales; queue
brune, les rectrices lisérées de cendré jaunâtre pâle. {Individu de l'Amour.)
Mâle en été. — Ressemble à la femelle dont il est difficile à distinguer;
cependant le manteau est d'un brun cendré jaunâtre, à peine plus pâle au
bord des plumes, tandis que chez la femelle cette partie est d'un brun noi-
râtre avec le bord des plumes d'un roux jaunâtre {von Middendorff).
Jeune. — M'est inconnu ; il ressemble probablement à la femelle avec le
miroir en moins.
Hab. — Ce bel oiseau habite, en été, le nord-est de la Sibérie jus-
qu'au 70° 1. N., et bien qu'il soit
le canard le plus commun du Bo-
ganida, il ne se montre pas jus-
qu'au Taimyr {v. Middendorff);
il habite également le Japon
Temm. et Schleg.); il est très
répandu en Chine pendantl'hiver
et surtout à l'époque de son
passage {David), ainsi qu'à
Formose {Swinhoe). Il se montre accidentellement dans le nord-est
de l'Inde {Jerdon) ; Blyth trouva un sujet sur le marché de Calcutta.
C'est donc uue espèce essentiellement asiatique et commune dans les
parties orientales.
En Europe, cette Sarcelle n'a été prise qu'en France et en Bel-
gique ; voici ce que dit M. Gerbe au sujet des premières captures ;
« Vers la fin de novembre 1836, cinq individus ont été tués, à quel-
ques jours d'intervalle, sur les bords de la Saône près d'Epervans,
par le nommé Sauvin, chasseur de profession. Quatre d'entre eux
furent vendus pour la table, en qualité de Sarcelle ordinaire, à un
maître d'hôtel de Châlons, le cinquième, heureusement préservé de la
destruction par un collectionneur intelligent, fut préparé par M. Mar-
tin, pharmacien à Châlons. Ce précieux spécimen fait aujourd'hui
partie de l'intéressante collection du docteur de Montessus.
« L'apparition de cet oiseau dans le bassin de la Saône eut lieu à la
suite de vents impétueux et de pluies torrentielles qui avaient occa-
sionné de grandes inondations. D'après M. Canivet, l'espèce s'est
aussi montrée dans le bas pays de la Manche, vers les bords de la
— 4o9 —
mer. Deux individus, un mâle et une femelle, qu'un chasseur des
environs de Carentan lui avait fournis, ont été cédés par lui à M. le
comte de Steade, qui les compte parmi les richesses de sa belle galerie
d'histoire naturelle (1) ».
J'ai signalé récemment dans YOrnis (t. VI, 1890, p. 340) la capture
d'une Sarcelle formose ou Canard glousseur en Belgique. Un mâle en
mue a été tué sur l'étang de La Hulpe (en Brabant), le 21 novembre
1888, par le garde-chasse de M. le chevalier de Bosschaert, et ce
dernier eut l'amabilité de me l'envoyer aussitôt pour le Musée de
Bruxelles.
Cette capture est réellement extraordinaire, et ma première pensée
a été que c'était un évadé du jardin zoologique d'Anvers ; mais, infor-
mation prise, cet établissement ne possédait à cette époque aucun
sujet de cette espèce; du reste l'oiseau ne paraissait pas avoir vécu
en captivité. C'est grâce à M. L. Vander Snickt, l'intelligent rédac-
teur en chef de Chasse et Pêche, que cette Sarcelle a échappé à la
destruction. Il se trouvait justement chez M. de Bosschaert quand le
garde apporta le produit de sa chasse, et il vit de suite que ce n'était
pas une Sarcelle ordinaire ; au lieu de la laisser porter à la cuisine, il
la demanda pour le Musée, et je lui en suis très reconnaissant.
MoiU7\s. — Les voyageurs qui ont observé ce Canard en Asie, ne
disent presque rien de ses mœurs; on peut toutefois admettre que
celles-ci ne diffèrent pas beaucoup de celles des Sarcelles d'Europe.
D'après von Middendorff, cet oiseau n'apparaît près du Boganida que
vers le 12juin; le 3 juillet, ce naturaliste trouva, au bord du lieuve
sous un buisson, un nid contenant sept œufs fraîchement pondus, qui
étaient d'un jaune bleuâtre et dontle plus petit mesurait 50 mm. sur 35.
Les poussins montrèrent leurs premières plumes le 24 juillet, mais
ils n'étaient pas encore en état de voler le 4 août. Le 28 juillet on
tira un mâle qui avait déjà son plumage d'été, et le 23 août les der-
niers avaient quitté la région du Boganida. Ces oiseaux se montrent
très farouches quand ils sont attroupés, mais les couples isolés sont
peu craintifs. Us sont fort bruyants et ne cessent de faire entendre
leurs cris perçants et sonores (2).
Le D"- Radde,qui a visité le S. -E.de la Sibérie, a constaté la présence
de ces oiseaux près du Tarei-nor, dès le 2^ mars (185G). Vers la mi-
(1) Deglandet Gerbe, Oruithulo(/ie europèi-nnc, t. II, \>. b2b.
(2) von Middendonï, Sihi,- Ur.ise, ]-> 2'M).
— 460 —
avril il rencontra, un matin, dans un petit marais, des Anas boscas,
crecca, formosa, clypeata, acuta et quelques A. penelope qui, tous,
après leur repas, se tenaient couchés et serrés les uns contre les
autres; grâce aux herbages élevés, l'auteur put s'approcher de l'en-
droit où reposaient ces Canards, sans être vu des oiseaux. Le premier
couple ne fut observé dans le Sajan oriental, non loin de Tunka, que
le 10 avril (1859), et le dernier avait disparu dès le 7 mai. Dans la
région du lac Baïkal, cette espèce est fort rare et on ne l'y voit jamais
en été (1).
L'abbé A. David dit qu'au printemps des bandes nombreuses de
Canards glousseurs animent les fleuves et les lacs de la Chine en
compagnie d'autres Canards, dont ils se distinguent facilement par
leur plumage et par leur voix singulièrement retentissante (2).
SOUS-FAMILLE ^
DESFULIGULINÉS. — FULIGULIN^.
Car. — Bec de longueur moyenne, souvent plus large à la base que vers
l'extrémité ; ailes courtes, concaves, les deux premières rémiges les plus
longues; jambes courtes, emplumées jusqu'à la naissance du tarse, placées
très en arrière du corps ; tarses courts, très comprimés latéralement ; doigts
allongés, l'externe ordinairement aussi long que le médian, pouce largement
bordé en dessous ; palmure large. Tête volumineuse ; cou assez court et gros ;
corps court et massif.
Hab. — Les espèces de ce groupe sont dispersées dans les diverses
parties du monde.
Mœurs. — Ces palmipèdes sont d'excellents plongeurs et vivent
généralement sur des eaux profondes, libres de végétation ; la plupart
ne se tiennent que sur la mer et ne gagnent les eaux douces qu'au
moment de la reproduction ; quelques-uns se reproduisent même sur
les côtes maritimes et sur des îlots en pleine mer.
Ce sont des oiseaux essentiellement aquatiques et dont la marche
est lourde et difficile ; par le fait de l'insertion très en arrière de leurs
jambes, ils doivent, pour se tenir en équilibre, redresser leur corps et
garder cette position en marchant. Ils sont moins bons voiliers que
(1) G. Radde, Reisen iyn Siiden von ost-Sïbiiçien, II, p. 368.
(2) David et Oustalet, Les Oiseaux de la Chine, p 503.
— 461 —
les Canards, mais une fois qu'ils ont atteint une certaine hauteur, ils
peuvent voler assez rapidement, en donnant des coups d'ailes préci-
pités. Par contre, ils nagent et plongent avec une aisance remar-
quable ; ils plongent souvent à une i^rande profondeur et font parfois
un assez long trajet en nageant entre deux eaux.
Peu d'entre eux sont herbivores; la plupart se nourrissent de mol-
lusques, d'annélides, de crustacés, d'insectes et de poissons, qu'ils
cherchent souvent au fond de l'eau ou à une certaine profondeur.
Ils sont très sociables et nichent en formant parfois de véritables
colonies. «Assez souvent, dit A. E. Brehm, deux femelles, appartenant
même à des espèces différentes, pondent dans le même nid, y couvent
en commun, se partagent l'éducation des petits, sans qu'aucune
d'elles fasse de différence entre ceux qui lui appartiennent et ceux qui
lui sont étrangers. Beaucoup de femelles couvent avec une véritable
passion et se dérobent mutuellement les œufs ; ou bien elles attirent et
appellent des poussins d'autrui pour les élever. »
GENRE CI-
MORILLON. — FDLIGULA
Anas, Lin. Sijst. nat. I, p. 203 (1766).
Nyroca, Flem. PJdl. of Zool. Il, p. 260 (1822).
Aythya, Branta, Boie, /sis, 1822, p. 564.
FuLiGULA, Steph. Gen. Zool. XII, p. 187(1824).
Platypus, Brehm, Lehrb. Naturrj . Eiir. VôV/. II, p. 828(1824).
Netta, Kaup, Natûrl. Sijst. p. 102 (1829).
Callichen, Breh. Isis, 1830, p. 999.
FuLix, Sundev. K. Yel. Ak. Randl. 1835, p. 129.
Mergoides, Eyt. Coi. lirit. B. p. 57(1836).
Marila, Mrtopiana, Bonap. Compt.-roul. XLII, 2, p. 651 (1850).
Certains auteurs ont un peu trop multiplié les genres. Nous réunis-
sons sous le nom générique de Fuligula les cinq genres et sous-genres
adoptés par Gray, en prenant pour type le Fuligula cristata.
Car. — Bec de la longueur de la tête, légèrement élevé à la base, déprimé
à Textrémité, ordinairement un peu plus large vers l'extrémité qu'à la base, a
onglet ovale, recourbé; lamelles larges, entièrement cachées; mandibuh-
inférieure visible seulement à son origine (luund le bec est fermé ; narines
sul)-médianes, latérales, distantes, étroites ; ailes de longueur moyenne,
aiguës; queue très courte; tarses plus courts que le doigt interne, (pii est
bordé.
Ilah. — Ce genre a des représentants dans les cin([ pai'iies du
niondi', mais piincipalement dans la zon*^ froide.
- 462 —
261. — Le Morillon à huppe rousse.
FULIGULA RUFINA, Steph. ex PalL
(PI. 259)
Anas FiSTULARis CRiSTATA, Briss, Ornitli.. VI, p. 398 (1760).
Anas RUFINA, Pall. It. II, app. p. 713 (1773).
Branta RUFINA. Boie, Isis, 1822, p. 564.
FuLiGULA RUFINA, Steph. Shaw's Gen.Zool. XII, p. 188 (1824).
Netta RUFINA, Kaup, Naturl. Syst. p. 102 (1829).
Callichen ruficeps, rufinus, subrufinus et MiCROPUS, Brehm, Isis, 1830, p. 999.
Platypus rufinus, Brehm, VôV/. Deu'schl.^ p. 922 (1831).
Mergoides RUFINA, Eyt. Rar. Brit. B. p. 575 (183G).
Aythya RUFINA, Macg . Man. Br. B p. 191 (1846).
Callichen rufescens, Breh. Vor/elf. p. 379 (1855).
FuLiGULA RUFiCRiSTA, C. F. Dub. PL col. Ow. Belr/. III, p. 277 (1860).
Die Kolben-Ente, en allemand.
The Red-crested Pochard, en anglais. ^"^
De Krooneend, en flamand.
Taille : 0'"44 ; ailes 0,26.
Description du mâle adulte en plumage de noce. — Tête d'un rouge bai, ornée
d'une liuppe touffue nuancée de jaunâtre, les joues, la gorge et les côtés du
cou tirant sur le rose ; manteau d'un cendré vineux avec un grand espace
blanc sur les côtés de la partie supérieure du dos; bas du dos et sus-caudales
d'un brun noirâtre ; épaule et pli de l'aile blancs: les autres couvertures et
les longues scapulaires d'un cendré un peu brunâtre; rémiges secondaires
blanches, terminées de brun et d'un liséré blanc ; les primaires blanches
avec leur bord externe et leur extrémité bruns; couvertures des primaires
également bruns; partie inférieure du cou, poitrine, ventre et sous-caudales
d'un brun noir lustré ; flancs blancs ; queue d'un brun cendré. Bec d'un rouge
vif; iris rouge groseille; tarses et doigts d'un rouge brique avec les mem-
branes noirâtres.
Femelle. — Dessus de la tète jusque sous les yeux et nuque d'un brun roux ;
dessus du corps d'un brun cendré, le croupion noirâtre et les sus-caudales
d'un cendré brunâtre; joues et haut du cou d'un blanc sale; bas du cou,
poitrine et flancs d'un brun cendré avec les bordures des plumes plus claires ;
ventre d'un blanc grisâtre ; sous-caudales blanchâtres; ailes comme chez le
mâle, mais les teintes moins pures; queue brune. Bec d'un brun rougâtre;
iris jaune rougâtre: tarses et doigts d'un jaune sale.
Mâle en été. — Ressemble à la femelle dont il se distingue par un plus
grand développement de la huppe, par la couleur du ventre, des sus et des
sous-caudales qui sont d'un brun noir, par le miroir plus blanc et par la
couleur rouge du bec et des pattes {d'après Naumann).
— 463 —
Jeune. — Ressemblp également à la femelle adulte, mais chez le jeune mâle
la poitrine et le manteau sont plus foncés.
Poussin. — Toutes les parties supérieures d'un brun glacé de roux à la
pointe des tiges; sur le dos quatre taches blanches disposées comme les quatre
angles d'un quadrilatère ; poitrine et abdomen d'un blanc grisâtre ; ventre,
gorge, devant et côtés du cou et faces latérales de la tête blancs, avec un
trait brun en arrière des yeux ; mandibule supérieure noirâtre avec l'onglet
jaune, l'inférieure jaune ; pieds bruns avec des bandes jaunes sur les pahnures
le long des doigs. (J. Vian.)
Hab. — L'aire géographique de cette espèce est fort peu étendue:
l'Europe méridionale et centrale
jusqu'au 50° 1. N., le nord de
l'Afrique ou le sud-ouest de
l'Asie. Ce Morillon se montre
très accidentellement aux îles
Britanniques où l'on compte,
depuis 1818, une vingtain'e de
captures {Harting) ; il visite
aussi accidentellement le Dane-
mark {KjaerhÔlling), la Pologne {Taczanowski), le nord de l'Alle-
magne {Borggreve), la Hollande {Schlégel), les marais des Flandres
{de Selys), le Grand-Duché de Luxembourg [de la Fontaine), le nord
de la France [Degl. et Gerbe) et l'Autriche près du Danube [Hinter-
berger); il niche quelquefois en Bohême {Fritsch), en Silésie, dans le
Mecklembourg et près d'Eisleben {Baldamus, etc.), visite réguliè-
rement en octobre certains lacs de la Suisse et j séjourne jusqu'à la
fin de mars, parfois jusqu'en mai {Meisner et Schinz) ; dans les
départements français de l'Aude, de l'Hérault et des Pyrénées Orien-
tales, il est de passage régulier en hiver sur les côtes maritimes
[Lacroix).
Cet oiseau est commun et sédentaire dans certaines parties de
l'Espagne [Saunders], dans le midi de l'Italie [Salvadori), en Sicile
[Malherbe), mais il est rare en Grèce et ne visite que les marais de la
Roumélie et du Péloponèse [Lindermayer) ; il n'est pas rare en Tur-
quie (Ehves et Bue/dey), de passage dans la Dobrodja [Alléon), et se
trouve sur tout le littoral russe de la mer Noire, mais, cà ce qu'il
paraît, seulement par couples ou en petites compagnies {de Nord-
mann). Il est également coiniinin sur lo littoral ào. la mor Caspienne
surtout près de Lonkoran où il hivtîfuo (lùidde) ; plus à l'Est, on
- 464 —
l'observe en Turkestan [Severtzoïv) et il hiverne dans l'Afghanistan
{Seehohm) et dans l'Inde {Jerdon). Il ne paraît pas avoir été observé
en Perse et en Asie Mineure, mais il est commun dans le nord de
l'Afrique [Tristram) et se montre accidentellement en Egypte {Schlé-
gel, de Heuglin) et à Malte [Wright).
Mœurs. — Le Morillon à huppe rousse émigré des contrées du
centre en octobre et novembre et y retourne à la fin de mars et en
avril. Pendant ses voyages, il vole en petites troupes, très haut et en
formant une ligne oblique.
Ce bel oiseau fréquente les marécages, les lacs et les étangs, pourvu
que leurs bords soient bien garnis de roseaux et autres herbages; on le
voit même sur les' eaux situées dans les bois, mais il ne se montre
que momentanément sur les cours d'eau, et principalement à l'époque
des passages. Il se tient généralement loin du bord, et de préférence
dans les endroits où il y a beaucoup de plantes-su bmergée s et flot-
tantes. En marchant comme au repos, il tient le cou recourbé en S et
le corps horizontal, mais quand son attention est mise en éveil, il
relève fortement le corps en avant et se dirige ainsi vers l'eau, s'il
soupçonne un danger. Il nage et plonge avec aisance, vole avec la
même facilité que les Canards, en produisant un bruissement facile à
percevoir.
Ce Morillon est sociable, craintif et méfiant; il fuit l'homme de loin,
mais revient bientôt à la place qu'il a quittée ; plus ces oiseaux sont
nombreux, et plus ils sont farouches, mais ils ne recherchent pas la
société d'autres espèces, bien qu'ils vivent en bonne intelligence avec
elles. Le cri, d'après Naumann, est profond et ressemble plutôt à
celui des Freux qu'à celui d'un Canard, mais l'oiseau ne se fait guère
entendre souvent; Hume rend ce cri par kurr d'une voix profonde.
Cet oiseau se nourrit surtout de végétaux aquatiques, tels que
potamots, myriophylles, cornifles, charagnes, etc., mais il prend
aussi des insectes, des larves, des vers, des mollusques, du frai et
même des jeunes grenouilles, mais plus rarement des petits poissons.
Reproduction. — Ce Morillon, aussi appelé Morillon roussâtre et
Sifileur huppé, niche dans les marais et les étangs, mais paraît pré-
férer ceux dont l'eau est saumâtre.
Le D'" Baldamus a eu l'occasion d'observer la reproduction de cet
oiseau, en Allemagne, près du lac salé de Mansfeld. Voici, en
résumé, ce qu'il en dit : (1)
[^\) Jonni.. fur Ornith., ia7U, p. t'i'i.
— 465 —
Le nid se trouve dans les roseaux et les joncs, et le plus souvent
sur un monticule s'élevant au-dessus de leau, ou sur de vieilles
souches de roseaux. Il est formé, comme ceux des Canards, de
vieilles tiges sèches de roseaux et de joncs, de feuilles mortes, etc.,
avec une couche de duvet servant à couvrir les œufs chaque fois que
la mère s'en éloigne. La ponte est de sept à neuf œufs, rarement dix,
d'un vert olivâtre et mesurant 56 à 60 millim. sur 40 à 43. La durée
de l'incubation est de vingt-quatre jours.
Le D'" Baldamus recueillit des œufs de cette espèce en Allemagne
et en Hongrie, du 12 mai au 1°"* juillet, suivant les années, mais le
plus ordinairement vers la mi-mai.
262. — Le Morillon huppé.
FULIGULA CRISTATA, Steph. ex Leach.
(PI. 260)
Anas glaucium minus, Briss, Ornith. VI, p. 411 (1760).
Anas FULIGULA, Lin. Syst. nat. I, p. 207 (1766).
? Anas scandiaca, Gm. (hybride ?) Syst. nat. p. 520 (1788).
? Anas colymbis, Pall. (jeune?), Zoogr.Rosso-As. II, p. 266 (1811).
Anas cristata, Leach, Syst. Cat. M. and B. Br. Mus. p. 39(1816).
Nyroca FULIGULA, Flem. Phil. of Zool. II, p. 260 (1822).
Aythya FULIGULA, Boïe, Isis, 1822, p. 564.
FuLiGULA CRISTATA, Stepli. Sfiaws Gen. Zool. XII, 2. p. 190 (1824).
Platypus fuligulus, Brehm. Lehrb. d. Nat. Eur. Yog. II, p. 833 (1824).
Aythya cristata, Brehm, Isis., 1830, p. 998.
Platypus cristatus, Dyb. Journ. f. Orn. 1868, p. 339.
FuLix cristata, David, N. Arch. du Mus. Bull. VII, n" 453 (1871).
Œdemia cristata, Dress. Ibis., 1876, p. 420.
FuLix FULIGULA, Gigl. Avifauna Ital. p. 316 (1886).
DiB Reiherente, Haubenente, en allemand.
The Tufted Duck, en anglais.
De Kuifeend, en flamand.
Taille : O'SS ; ailes 0,20.
Description du mâle en plumage de noce. — Tête, Imppo et haut du cou d'un
noir brillant à reflets violets et verdâtres ; bas du cou, poitrine, sus et sous,
caudales noirs ; les autres parties supérieures d'un noir à reflets d'un vert
bronzé, surtout sur les ailes; milieu du dos et scapulaircs légèrement ponc-
tués de blanchâtre ; miroir de l'aile très oblique, blanc, borné en arrière par
une bande noire; rémiges d'un cendré brunâtre, bordées extérieurement et
terminées de brun noirâtre; queue brune; abdomen et flancs blancs. Bec
TiJM II. — 1892. 59
— 466 —
d'un gris bleuâtre avec Fonglet noir; iris jaune; pattes bleuâtres avec les
palmures noires.
Femelle. — Huppe beaucoup moins développée ; tête et cou d'un brun noi-
râtre ; bas du cou, poitrine et flancs d'un brun roussâtre ; manteau d'un brun
noirâtre légèrement pointillé de blancbâtre, avec les bordures des plumes
d'une teinte plus rousse ; les autres parties supérieures, y compris les ailes,
d'un brun noirâtre ; rémiges secondaires à reflets bronzés ; miroir d'un blanc
moins pur que chez le mâle; abdomen blanc; bas-ventre et sous-caudales
d'un blanc entremêlé de brun ; queue brune
Mâle en été. — Se distingue de la femelle par un plumage tirant plus sur
le noir que sur le brun, et par une huppe plus développée.
Jeune, — Ressemble à la femelle, mais les bordures des plumes d'une
teinte plus claire ; base du bec entourée d'une bande de plumes blanches ;
rémiges secondaires sans reflets bronzés ; poitrine tachetée de brun et de
roussâtre; parties inférieures plus ou moins blanches^vec le bas-ventre
varié de brun et les flancs de brun roussâtre.
Poussin. — Toutes les parties supérieures d'un brun fuligineux foncé, glacé
à la pointe des tiges ; côtés de la tête, cou, poitrine, flancs et abdomen de
même couleur mais un peu plus pâle ; gorge et ventre d'un blanc fauve ; man-
dibule supérieure noirâtre avec l'onglet roux, l'inférieure marbrée de jaune et
de roux; pieds bruns, avec des bandes d'un jaune terne sur les membranes,
le long des doigts (J. Vian).
Hah. — Le Morillon huppé habite, en été, toute la zone septen-
trionale de l'Europe et de TAsie
comprise entre le 53 1/2° et le
70° l. N.; il niche en Europe à
partir du Mecklembourg [Nau-
mann) à l'Ouest et du gouver-
nement de Perm (Russie) à l'Est
{Sabandeff); il niche parfois
aussi en Grande-Bretagne (Z)r^5-
ser) et accidentellement aux îles
Féroé {Collin), mais il n'a été observé ni en Islande, ni au Groen-
land. 11 hiverne plus ou moins dans toute l'Europe centrale et méri-
dionale, ainsi qu'aux îles Britanniques. 11 est très commun en Bel-
gique lors des passages, surtout dans les grands marais des Flandres
et de la Campine, et un certain nombre passe l'hiver sur les eaux qui
ne gèlent pas. Il est aussi très commun en hiver dans toutes les con-
trées du midi de notre continent, ainsi qu'en Asie Mineure, en Pales-
tine {Tristram), en Egypte {Schelley)., en Nubie et visite même
- 467 -
l'Abjssinie [de Heuglin) ; il est également commun en Algérie {Loche) ^
comme dans tous les pays qui entourent la Méditerranée.
En Asie, on rencontre cet oiseau dans toute la Sibérie (M'c?G?enc?or/f,
von Schrenk), au Kamtsctiatka [Stejneger), en Chine {David) et au
Japon {Schlégeiy, il hiverne dans les parties méridionales jusqu'au sud
de l'Inde {Jerdon).
Mœurs. — Bien que ces Morillons soient peu sensibles au froid, ils
émigrent cependant des contrées du Nord dès que les eaux se couvrent
de glace. Vers le commencement d'octobre, ils commencent à se ras-
sembler sur les eaux d'une certaine étendue, et leur nombre augmente
de jour en jour; c'est par bandes formées de plusieurs milliers d'in-
dividus qu'ils émigrent au début des fortes gelées, et ils voyagent
alors le plus souvent pendant la nuit.
C'est un oiseau très sociable qui fréquente en troupes les eaux stag-
nantes, surtout pendant la belle saison ; aux autres époques de l'an-
née on le voit le long des côtes maritimes et de préférence à l'embou-
chure des fleuves, dans les lagunes et sur les grands lacs de l'intérieur.
Il n'est pas rare, lors des migrations, de le voir sur des mares de peu
d'étendue, même à proximité des villages et des routes assez fréquen-
tées. Ce n'est que quand la plupart des eaux sont couvertes de glace,
qu'il s'abat sur les rivières et les fleuves, tant que ceux-ci ne sont pas
obstrués par des glaçons.
Le MorilJon huppé nage avec aisance et vole avec une grande rapi-
dité, en ligne droite et en produisant un certain bruissement ; par
contre, il ne paraît pas marcher volontiers. C'est sur l'eau qu'il déploie
toute son agilité ; plonger est pour lui un véritable plaisir, aussi le
voit-on à tout instant disparaître dans l'eau, nager à une certaine
profondeur et ne revenir à la surface que pour respirer ; souvent
même il se contente de venir respirer, en ne sortant de l'eau que le
bec jusqu'au delà des narines, et disparaît aussitôt. Il n'est réellement
craintif que sur les grandes eaux où il lui est facile d'échapper aux
atteintes du chasseur, mais il se montre beaucoup moins farouche
sur les petits étangs, bien qu'il y soit plus exposé. Son cri est peu
sonore et ressemble à karr, karrkarr ou kœurr, kœurr, kœurrr, mais
l'oiseau ne le fait pas entendre souvent ; c'est au moment de s'envoler
ou quand il est inquiet qu'il crie le plus ordinairement.
Cet oiseau se nourrit principalement d'insectes, de larves, de crusta-
cés, de vers, de frai, do jeunes grenouilles, de petits poissons et
surtout de mollusques nus ou à coquille; accessoirement il mange
aussi des herbages aquatiques, des jeunes pousses et des graines. Ce
Morillon est très gras en automne, mais sa chair est sans valeur
parce qu'elle a un goût rance, ce qui provient d'une nourriture plus
animale que végétale.
Reproduction. — Ce Morillon niche sur un îlot, au bord de l'eau
ou dans une prairie, éloignée parfois de soixante à cent mètres de
l'eau; le nid est ordinairement placé dans une excavation au milieu
des joncs et des herbages ou sous un buisson de saules ou d'aunes. Il
est formé de joncs, de roseaux et de brins d'herbes, et garni intérieu-
rement de duvet. La ponte a lieu en mai ou en juin et se compose de
huit à douze œufs, d'un brun olivâtre pâle un peu lustré, et ils mesu-
rent de 56 à 60 millim. sur 38 à 42. La femelle témoigne la plus grande
sollicitude à ses poussins ; le mâle, au contraire, ne s'inquiète guère
de sa progéniture, et bien avant l'éclosion des oeufe, il abandonne sa
compagne pour aller s'amuser avec d'autres mâles sur les eaux envi-
ronnantes; mais bientôt la mue les éloigne des eaux et les mâles se
tiennent alors cachés dans les roseaux et les hautes herbes.
263. — Le Morillon milouinan.
FULIGULA MARILA, Steph. ex Lin.
(PL 261
Glaucium minus striatum, Briss. Orniifi. VI, p. 416 (1760).
Anas MARILA, Lin. S\)si. nai. I, p. 196 (1766).
Anas subterranea, Scop. Ann. I. Hist. nat. p. 67 (1769).
Anas fr/enata, Sparrm. Mus. Caris. II, pi. 38(1787).
Aythya MARILA, Boie, Isis., 1822, p. 564.
Fuligula MARILA, Stcpli. Skaws Gen. Zool. XII, 2, p. 198 (1824).
Platypus marilus, C. Brehra, Leherb. Nat. eitr. Vôg. II, p. 830(1824).
Nyroca maeila, Flem. Brit. anim. p. 122 (1828).
Aythya ISLANDICA et leuconotos, C. Brehm, Isis, 1830, p. 998.
Fuligula gesneri, Eyt. Cat. Brit. B. p. 58 (1836).
Marila frenata, Bonap. Comp. Rend. XLII, 21 p. 651 (1856).
FuLix MARILA, Baird, B. of N. Ani. p. 791 (1858).
Aythya marila nearctica, Stejn. Bull. U. S. Nat. Mus., n» 29, p. 161 (1885).
Die Bergente, en allemand.
The Scaup, en anglais.
De Toppereend, en flamand.
Var. Affinis.
Anas marila, Forst. (necLin). Phil. TVaws. LXII, n" 44 (1772).
Fuligula marila, Audub. Orti. Biog. III, p. 226 (1835).
- 469 -
FuLiGULA AFFiNis, Eyt. Mon. Anat. p. 157 (1838).
FuLiGOLA MARiLoiDES, Vig. Zool. voy . Blossom, p. 31 (1839).
FuLiGULA MiNOR, Bell, Proc. Ac. Nat. Se. Phil. I, p. 141 (1842).
Marila affinis, Bonap. Compt.-Rend. sept. 1856.
FuLix AFFINIS, Baird, Birds N. Am. p. 791 (1858).'
FuLiGULA MARILA (part.) Seeb. Brit. B. III, p. 579 (1885).
Taille: 0,47; ailes 0,23.
Description du mâle en plumage de noee. — Tête et partie supérieure du
cou d'un noir brillant à reflets verts ; bas du cou, haut du dos, poitrine, bas
du dos, sus et sous-caudales, noirs; partie moyenne du dos et scapulaires
supérieures d'un blanc assez pur avec des raies noires en zigzags, plus lar-
ges postérieurement ; couvertures des ailes d'un gris noirâtre et tachetées de
blanc ; miroir blanc sous forme d'une bande oblique bordée de noir ; en ar-
rière du miroir, les rémiges sont d'un noir verdâtre à reflets ; rémiges pri-
maires et rectrices d'un brun noirâtre ; abdomen et flancs d'un blanc pur, ces
derniers plus ou moins vermiculés de cendré ; l)as-ventre avec des raies en
zigzags brunes. Iris jaune ; bec d'un gris bleuâtre ; pattes grises, les mem-
branes noirâtres.
Femelle adulte. — Elle est un peu plus petite que le mâle ; un grand espace
blanc entoure le bec et une tache de même couleur se trouve à la région
auriculaire ; le restant de la tête, cou, haut du dos et poitrine d'un brun
foncé, les bordures des plumes un peu plus pâles ou blanchâtres à la poitrine;
partie moyenne du dos, scapulaires et flancs d'un brun noirâtre avec des raies
blanches en zigzags ; bas du dos noirâtre ; sus-caudales d'un brun fuligineux ;
couvertures des ailes d'un cendré brunâtre et pointillées de blanc d'une ma-
nière peu apparente; les plus grandes scapulaires d'un brun uniforme; miroir,
rémiges et rectrices comme chez le mâle ; abdomen blanc ; bas-ventre et
sous- caudales brunâtres plus ou moins tachetés et rayés de blanc, surtout
sur les sous-caudales.
Mâle en été. — Ressemble à la femelle, mais il a moins de blanc à la base
du bec et la tache blanchâtre près de l'oreille est phis petite et souvent
nulle; la teinte de la tête et de la poitrine est plus foncée. Il reprend son
beau plumage en octobre et novembre.
Jeune. — Ressemble également à la femelle, mais les parties dorsales sont
d'un brun roussâtre sans raies blanches en zigzags; l'espace blanc qui entoure
le bec est moins étendu et moins pur. Après la première mue, on voit appa-
raître, chez les mâles, les plumes noires à reflets verts de la tête, et le blanc
du bec se réduit à une tache placée de chaque côté à la base de la mandibule
supérieure; les raies en zigzags du dos commencent aussi à se montrer.
Poussin. — Parties supérieures d'un brun roussâtre ; côtés de la tête d'un
iaune sombre ; gorge et ventre d'un jaune plus clair ; poitrine, flancs et
abdomen d'un brun pâle ; bec brunâtre ; pattes d'un brun oHvâtre.
470 -
Var. A/finis. — Taille plus petite (0,36 ; ailes 0,20); se distingue en outre
par les reflets de la tête et du cou qui sont pourpres et non verts ; la région
auriculaire offre cependant des reflets verdâtres.
Haà. — Le Morillon milouinan niche en IslsLïide [Faber) et dans la
zone polaire arctique jusqu'au
70° 1. N. Il hiverne à partir des
îles Féroé où quelques couples
passent parfois l'été [Feilden), et
du midi delà Scandinavie [Collett,
Nilsson) ; en hiver il est surtout
abondant sur les côtes allemandes
de la Baltique et, en plongeant,
ces oiseaux s'embarrassent dans
les filets des pêcheurs qui en prennent ainsi par centaines (^orp-p-re^je^.
Il hiverne également en grand nombre sur les côtes du Danemark, de
la Grande-Bretagne, de l'Irlande, de la Hollande, du nord de la
France et de la Belgique ; il est moins abondant sur l'Escaut près
d'Anvers et rare sur les eaux de l'intérieur du pays. Dans le midi de la
France il est de passage plus ou moins régulier, mais toujours en petit
nomhvQ (Lacroix)] il est rare sur les côtes de l'Espagne (ir%),du Por-
tugal (Barboza du Bocage) et de l'Italie, ne se montre qu'acciden-
tellement en Sardaigne et jamais en Sicile [Giglioli). Dans le centre
de l'Europe, cet oiseau est généralement rare; il se montre cepen-
dant par petites troupes et assez régulièrement en hiver sur diffé-
rents lacs de la Suisse [Meisner et Schinz) et de l'Allemagne, surtout
près de Eisleben (Naumann), et on l'a même capturé en Saxe (Meyer
et Eelm]\ il visite la Bohême en automne, rarement au printemps
{Fritsch), est commun en Pologne lors des passage [Taczanowski) et
hiverne en Transylvanie [Danford), sur les côtes de la mer Noire
[de Nordmann), de la mer Caspienne {Radde), de l'Asie Mineure, de
la Palestine (Tristram) et de la Grèce [v. d. Mûhle).
Ce palmipède hiverne également en Algérie [Loche ) et dans les
lagunes de la basse Egypte, où on le rencontre souvent en grandes
bandes ; il se montre également près du Caire, dans l'Arabie pétrée,
près de Djedah, et un couple a même été observé, en décembre, en
Abyssinie {de Heuglin). En Asie, on rencontre cette espèce dans toute
la zone septentrionale {Middendorff) jusque dans la Sibérie orientale
{Taczanowski), le Kamtschatka (Stejneger) et le Japon {Whitely) ; elle
hiverne sur certains lacs du Caucase, dans le sud de la Sibérie {Radde)^
— 471 —
sur les côtes de la Chine et de Formose {Swinhoé), mais elle est plus
rare que le Morillon huppé à Pékin et sur les eaux douces de l'inté-
rieur de la Chine {David) ; elle n'a encore été observée ni au Turkes-
tan, ni dans les provinces de l'Amour, mais quelques couples hiver-
nent en Perse au sud de la mer Caspienne, et accidentellement au
Népaul {Jerdon),
Ce Morillon habite également toute l'Amérique du Nord et le
Groenland (Coues) et hiverne dans les Etats du Sud jusqu'au Mexique
[Dresser).
La var. Affmis habite également toute l'Amérique du Nord, mais
hiverne jusqu'au Guatemala [Coues) \ elle descend donc plus au Sud
que la forme type. Il paraît aussi que la var. Af finis habite principa-
lement l'intérieur de l'Amérique, tandis que le vrai Milouinan se
trouve plus particulièrement sur les côtes, mais ceci n'est pas
démontré. Stejneger complique encore la question en admettant quatre
variétés, formant deux espèces : 1. Aythya affmis (de l'Amérique);
\ h. A. af finis mariloides (des côtes asiatiques du Pacifique et du
Japon); 2. A. marila (d'Europe); 2 b. A. marila nearctica (de l'Amé-
rique). Ainsi, d'après Stejneger, le vrai F. marila n'existerait pas en
Amérique (1). M. Seebohm n'admet pas la var. Affmis, parce qu'en
Amérique elle n'occupe pas une région géographique distincte et que
ses caractères peuvent n'être qu'individuels.
Mœurs. — C'est au commencement d'octobre que les Milouinans
se rassemblent en grandes troupes pour émigrer dans le courant du
même mois, en longeant le plus souvent les côtes maritimes. Ils
voyagent ordinairement pendant la nuit, en bandes plus ou moins
nombreuses, et retournent dans le Nord en mars et avril.
Ce Morillon préfère la mer aux eaux douces, et il ne la quitte que
pendant les tempêtes ; on le voit cependant aussi sur les lacs salés et
môme sur les fleuves, les rivières, les étangs et dans les marais, mais
il est toujours plus abondant dans les baies fangeuses peu profondes;
il évite cependant la pleine mer. Il plonge avec une rapidité remar-
quable et sait rester près de deux minutes sous l'eau ; ses habitudes
ressemblent, du reste, à celles de son congénère le Morillon huppé,
et ce qui a été dit de ce dernier est vrai pour le Milouinan. Celui-ci
est au moins aussi sociable que le premier, il n'est pas craintif du
tout, même sur les grandes eaux, et son cri est rauque et ressemble
à karr, karrkarr
(1) Uullat. U. a. national Mus. no 20, p. ICI (1S85).
— 472 —
Ce palmipède se nourrit principalement de mollusques à coquille,
de crustacés, de vers, d'insectes et de larves aquatiques, de têtards
et de petits poissons qu'il va souvent chercher à plusieurs mètres de
profondeur; ce n'est qu'accessoirement qu'il prend des substances
végétales. Ce régime animal donne à sa chair un goût rance assez
désagréable.
Reproduction. — Cet oiseau niche dans le courant de mai ou plus
tard, suivant la latitude ; dans le sud de l'Islande, la ponte a lieu à
la fin de mai; M. Seebohm dit avoir trouvé des œufs frais dans la
vallée de la Petchora le 25 juin et le 4 juillet. Le nid est placé près
de l'eau, souvent sur un îlot, et sous un buisson d'angéliques, de
genévriers, de saules ou entre les hautes herbes ; il est formé, comme
pour les précédents, de joncs, de roseaux et d'herbes diverses, et
l'intérieur est garni de duvet. La ponte est de six à neuf œufs d'un
gris verdâtre clair et mesurant environ 65 millimTsur 44.
La femelle couve avec persévérance, et on peut alors l'approcher
de très près avant qu'elle songe à fuir; le lendemain de la naissance
de ses petits, ou un peu plus tard, elle les conduit sur l'eau et leur
apprend à trouver leur nourriture, mais les ramène souvent à terre
pour se reposer ; si on les surprend à ce moment, tous se jettent à
l'eau et gagnent le large en toute hâte, sauf la mère, qui les suit à
distance en battant des ailes et en poussant les cris de arry% arrr
d'une voix stridente ; elle ne se décide à rejoindre ses poussins que
quand elle les croit en sûreté. Il arrive souvent que plusieurs femelles
pondent dans le même nid ; dans ce cas, elles couvent alternativement
et élèvent les petits en commun.
264. — Le Morillon milouin.
FULIGULA FERINA, Steph. ex Lin.
(PI. 262)
Anas PENELOPE, Briss. (nec Lin.) Ornilh. VI, p. 384 (1760).
Anas FERINA, Lin. Syst. nat. I, p. 203 (1766).
Anas ruficollis, Scop. Ann. I, p. 66 (1769).
Anas lurida et erythrocephala, Gmel. ReiseRussl. I, pp. 70, 71 (1770).
Anas rufa, Gmel. S^jsi. nat. II, p. 515 (1788).
Nyroca FERINA, Flem., Phil. Zool. II, p. 260 (1822).
Aythya FERINA, Boie, Isis, 1822, p. 564.
FuLiGULA FERINA, Steph. Gen. Zool. XII, 2, p. 193(1824).
Platypus ferinus, Brehm, Lehrb. Nat. Eur. Vôg. II, p. 828 (1824).
- 473 —
Aythya erythrocephala, Brehin, Isis, 1830, p. 999,
Anas marila, Malh. (aec Lin.), Faune orn. de la Sicile, p. 220 (1813).
FuLiGULA HOMEYERi (aberration), Baedecker, Naumannia, 1852, p. 12, pi. 1.
Aythya homeyeri, Brehm, Nutimannia^ 1855, p, 208.
FuLiGULA ERYTHROCEPHALA, C. F. Dub. PI. col. Ois. DelfJ. III, p. 278 (1860).
FuLix FERiNA, Salvad. Faun. liai. Uccelli^ p. 265 (1872).
Die Tafelente, en allemand,
The Pochard, en anglais.
De Tafeleend, en flamand.
Var. Araericana.
Anas ferina, Wils. Am. Orn. VIII, p. 110 (1814).
FuLiGULA FERINA, Bonap. Syn. p, 392 (1828).
Nyroca ferina, Woodh. Sitgr. Rep. p. 104 (1853).
Aythya erythrocephala, Bonap. (necBreh.) Comp. List., p. 58 (1838).
Fuligula americana, Eyt. Mon. Anat. p. 155 (1838).
Nyroca americana, Gray, Gen. B. III, p. 621 (1849).
Aythya americana, Bonap. Comptes-Rend. XLllI, sept. (1856),
Nyroca erythrocephala, Heerm. P. R.R. Rep. X, pt VI, p. 70 (1859),
Fuligula ferina var. Americana, Coues, Keij. p. 289 (1872).
Aythya ferina var. Americana, Allen, Bull. M. C.Z. III, p. 183 (1872).
Taille: 0'^38; ailes 0,215.
Description du mâle en plumage de noce. — Tête et cou d'un roux rougeâtre
vif et lustré; haut du dos, poitrine., bas du dos, sus et sous-caudales d'un
brun noir; manteau, scapulaires et flancs d'un blanc grisâtre et rayés trans-
versalement de fins zigzags noirâtres très serrés ; couvertures des ailes cen-
drées et pointillées de gris ; rémiges secondaires grises plus ou moins
pointillées de blanc et terminées par un bord blanc; rémiges primaires cen-
drées à extrémité brune ; rectrices brunes ; abdomen blanchâtre avec des
ondulations cendrées mais peu apparentes, sauf au bas-ventre où elles sont
très visibles et assez larges. Bec d'un gris bleuâtre mais noir aux extré-
mités ; iris orange; pattes grises, noirâtres aux articulations, les membranes
noires.
Femelle. — Dessus de la tête d'un brun foncé, rougeâtre à la nuque et sur
le cou, d'une teinte plus pâle sur les joues; gorge blanchâtre; haut du dos
et poitrine d'un brun roussâtre avec les bordures des plumes plus pâles ;
manteau, scapulaires et flancs d'un brun foncé avec de fines raies irrégu-
lières en zigzags d'un gris blanchâtre ; bas du dos, sus-caudales et bas-vontre
d'un brun noirâtre; ailes comme chez le mâle mais un peu phis foncées;
abdomen d'un cendré blanchâtre ; queue brune. Iris jaune citron.
Mâle en été. — liessemblo à la femelle, mais il a la tête et le cou d'une
teinte plus rousse, le bas du dos et les sus-caudales plus noirs, le manteau
plus clair et l'iris orange et non jaune.
To.'i II. — 1892. GO
474
Jeune. — Ressemble également à la femelle, mais le manteau, les scapu-
laires, la poitrine et les flancs sont d'un brun foncé avec les bordures des plu-
mes plus claires et sans raies en zigzags. Iris d'un brun clair.
Poussin. — Occiput et dessus du corps ])runs; c^uatre taches blanchâtres
disposées en carré sur le dos; front, côtés de la tête et cou jaunâtres, avec
une tache brime à l'oreille ; gorge blanchâtre ; parties inférieures d'un blanc
jaunâtre sale varié de cendré au bas-ventre.
Var. Americana. — • D'une taille un peu plus forte que les sujets de l'an-
cien monde; pas de noir à la base du bec ; le dos plus gris ; la nuque pour-
prée; abdomen blanc sans ondulations.
Hab.— Le Morillon milouin habite l'Europe centrale et ne se mon-
tre que très accidentellement en
Islande {Newton) et aux îles
Féroé {Reiahardt) ; il est rare
dans le sud-^e la Scandinavie
{Colleit, Nilsson) et de la Fin-
lande [Palmén), mais niche à
partir du 62» J. N. près du lac
Ladoga {Malmgren), quoiqu'il
soit rare dans le gouvernement
de S'-Pétersbourg [Buchner); il est commun dans la Russie méridio-
nale {de Nordmann).
Aux îles Britanniques j on le voit surtout en hiver et il est alors
commun en Ecosse, aux îles Orkneys, Shetland et Hébrides, mais il
niche dans plusieurs comtés de l'Angleterre et de l'Irlande {Seebohm).
Cet oiseau visite, lors de ses passages, le Danemark {Kjaerhôlling)
et le nord de l'Allemagne, mais il niche isolément ou en petit nombre
sur certains lacs de la Poméranie, du Mecklembourg {Borggreve),
de la Silôsie {Gloge?"), du Brandebourg, du Lausitz, de l'Anhalt, de
la Ssixe{Naumann), de l'Autriche, delà Bohême {Fritsch), de la Tran-
sylvanie {Danford), etc. A partir de novembre, il est abondant sur les
lacs de la Suisse qu'il quitte en mars {Meisner et Schinz); il en est de
même en Hollande {Schlégeï) et en Belgique, où il est très commun
aux passages sur les côtes maritimes et dans les marais des polders
et de la Campine ; en France il hiverne surtout dans les parties méri-
dionales {Lacroix). Il hiverne également en Portugal {Reyes), en
Espagne, où quelques couples se reproduisent parfois {Saunders), en
Italie, et il est surtout abondant en Sardaigne, en Sicile {Glglioli), à
Malte {Wright), aux îles Ioniennes {Lilford), dans le Péloponèse, en
Rouméiie {Lindermayer), en Turquie {Elwes et Buckley), mais ne se
4/0
montre pour ainsi dire qu'aux passages dans la Dobrodja, en Bul-
garie [Alléon] et en Pologne, où il niche cependant en petit nombre
{Taczanowski).
En Asie, ce Morillon a été observé en Turkestan {Severtzow) et
dans la région du Baïkal où il niche dans le delta de l'Angara supé-
rieur [Raddé), mais il est rare dans la Sibérie orientale {Taczanowski)\
il hiverne au Caucase {Radde), en Asie Alineure, en Palestine {Tris-
tram), en Perse, dans T Afghanistan {Seehohm), dans l'Inde entière,
quoiqu'il soit toujours plus abondant dans les parties occidentales
qu'au Bengale {Jerdon), en Chine {David) et au Japon {Schlégel).
En Afrique, on rencontre cet oiseau en hiver au Maroc {Favier), en
Algérie {Loche) et dans les autres parties septentrionales; en Egypte
on le voit par petites troupes dans le delta, près du lac Chanka et
près de la mer Rouge {de Heug lin) jusqu'en Nubie {Shelley).
La Var. Americana habite toute l'Amérique du Nord, proba-
blement jusqu'au delà du 55° 1. N., car en été elle est commune au
Canada dans la province de Manitoba {Thompson); aux Etats-Unis elle
est surtout abondante dans les parties N.-E. {Coues); elle hiverne dans
les états du Sud jusqu'au Mexique et aux Antilles {Sclater, Salvin)
ainsi qu'aux îles Bahamas {Bryant).
Mœurs. — Le Morillon milouin émigré des contrées septentrio-
nales vers la fin d'octobre et en novembre, par bandes plus ou moins
considérables, composées ordinairement de trente à cinquante indivi-
dus et même davantage ; quand l'hiver n'est pas rigoureux, un certain
nombre hiverne dans nos contrées et même encore plus au nord ; ce
n'est du reste qu'à mesure que le froid augmente qu'il se dirige de
plus en plus vers le midi. Il voyage généralement en troupes et sans
ordre, plus rarement en un rang oblique. Il retourne en mars dans le
pays qui l'a vu naître.
Ce palmipède ne se montre sur les côtes maritimes et sur les fleuves
qu'à l'époque des migrations; en d'autres temps il préfère les lacs, les
grands étangs et les marais bien garnis de roseaux, d'herbages et de
buissons, d'où il visite souvent les petits étangs et les mares des envi-
rons. 11 est généralement plus actif la nuit que le jour, car il passe
une bonne partie de la journée dans un repos absolu.
Le Milouin marche mieux que la plupart de ses congénères, quoi-
que sa démarche soit lourde et fatigante; par contre, il nage et plonge
avec une extrême facilité, vole à grands coups d'ailes ot bruyamment
mais sans fatigue. Il ne compte pas parmi les oiseaux les plus farou-
— 476 —
ches, mais des poursuites répétées le rendent prudent et il sait alors
fort bien éviter le chasseur. La voix du mâle est un cri ronflant qu'on
peut rendre par charr charr charr; le cri de la femelle est plus rauque
et ressemble à chœurr, chœurr.
Cet oiseau se nourrit presque exclusivement de substances végé-
tales, telles que racines, feuilles et herbes tendres, algues, graines
de plantes aquatiques, etc.; accessoirement il prend des larves, des
insectes, des vers, des mollusques, des têtards et des petits poissons.
C'est le seul Morillon dont la cliair soit réellement savoureuse et
recommandable, grâce au régime végétal; au printemps, cependant,
le manque de végétaux oblige cet oiseau à se nourrir surtout de petits
animaux, ce qui donne de suite à sa chair un goût huileux désagréa-
ble; c'est du reste le cas pour la plupart des Canards, mais à un degré
plus ou moins prononcé. Le Milouin s'habitue facilement à la captivité.
Reproduction. — A leur retour en mars, ces~^ Morillons restent
encore quelque temps en société et se réunissent même à d'autres
espèces avec lesquelles ils prennent leurs ébats, sans s'inquiéter de la
reproduction. Ce n'est qu'à la fin d'avril que les mâles commencent à
devenir agités, plus bruyants, car l'époque de Taccouplement appro-
che. Les mâles ne se livrent pas de luttes entre eux, ils se bornent à
suivre une femelle à la nage, à l'agacer par leurs cris d'amour, à faire
tout leur possible pour lui plaire, jusqu'à ce qu'elle se donne à l'un
d'eux. D'après Naumann, la femelle choisit librement son époux, et
part aussitôt avec lui pour chercher un endroit convenable à la repro-
duction.
Cet oiseau niche près des eaux stagnantes bordées d'herbages et de
buissons, ou sur un îlot verdoyant. La femelle construit son nid, sans
le concours du mâle, au milieu des roseaux et des joncs, soit sur l'eau,
soit au bord d'un fossé ou dans les herbes d'une prairie, mais toujours
à peu de distance de l'eau. Le nid est formé de feuilles sèches, de
roseaux, de joncs, de carex et de graminées, le tout assez bien entre-
lacé ; l'excavation est, comme toujours, garnie de duvet. Pour pou-
voir bien cacher son nid, la femelle est obligée d'attendre pour le
construire, que la végétation soit assez avancée; aussi fait-elle rare-
ment sa ponte avant la mi-mai, mais le plus souvent à la fin du mois
et même en juin. La ponte est de huit à treize œufs assez ternes, d'un
gris jaunâtre ou d'un gris olivâtre pâle; ils mesurent de 56 à 60millim.
sur 41 à 45. Naumann dit qu'en lui enlevant successivement les œufs
au début de la ponte, mais en ayant soin d'en laisser toujours un ou
— 477 —
deux dans le nid, on peut amener la femelle à pondre jusqu'à quarante
œufs.
Tant que la femelle pond, le mâle reste à ses côtés, veille sur elle,
l'avertit à grands cris de l'approcho d'un danger, mais a soin de se
sauver le premier. lU'abandonne dès qu'elle s'est mise à couver et va se
joindre à d'autres mâles, sans s'inquiéter de ce que sera sa progéni-
ture. La durée de l'incubation est de vingt-deux à vingt-trois jours.
Aussitôt éclos et sécliés, les poussins vont à l'eau et se mettent immé-
diatement à plonger, mais ils vont souvent se reposer dans les fourrés
de roseaux, où la mère leur prépare des lieux de repos à l'abri de tout
danger. La femelle se dévoue entièrement à ses petits et les défend
au péril de sa vie. Quand les jeunes commencent à voler, les mâles
vont rejoindre leur famille et tous se réunissent de nouveau en
société.
265. — Le Morillon à iris blanc
FULIGULA NYROCA, Steph. ex Gilld.
(PI. 263.)
Anas NYROCA, Giilden. Nov. Conim. Petrop. XIV, p. 403 (1769).
Anas africana, a. ferruginea, Gmel. Syst. nat. pp. 522, 528 (1738).
Anas LEUCOPHTHALMUS, Bechst. Ornilh. Taschenh. p. 405 (1803).
Anasglaucion, Pall. Zoor/r. II, p. 268 (1811).
Aythya NYROCA, Boie, /.v«.<f, 1822, p. 564.
Marila NYROCA, Flem. Phil. Zool. Il, p. 260 (1822).
FuLiGULA NYROCA, Steph. Geïi. Zool. XII, 2, p. 201 (1822).
Platypus LEUCOPHTHALMUS, Bpehtn, Lehrb. Nat. eur. Vogel. 11, p. 834 (1824).
Aythya leucophthalmos, Bpehm, Isis, 1830, p. 999.
NvROCA LEUC0PHTH.\LM0S et OBSOLETA, Bfehm, Naumannia, 1855, p. 298.
FuLiGULA LEUCOPHTHALMA, C. Dub. Pi. col. Ois. Bclg . III, p. 279 (1857).
Nyroca FERRUGINEA, Dress. BirdsEur. VI, p. 581 (1872).
FuLix NYROCA, Salvad. Fauna cVIlal. Uccelli, p. 265(1872).
Die Moorknte, en allemand.
The White-eyed pochard, en anglais.
De Witoogeend, en flamand.
Taille: 0°37; ailes 0,185, la femelle un peu plus petite.
Description du mâle en plumage de noce. — Tète, cou et poitrine d'un brun
rougeâtre; une tache blanche au menton ; dessus du corps et un collier au
bas du cou d'un brun noirâtre, le manteau finement pointillé de roussâtre ;
bas du dos et sus-caudalos noirs avec de légers reflets vordâtres; couvertures
des ailes d'un brun cendré, les plus grandes à reflets bronzés; miroir blanc,
suivi d'une bande brune ; rémiges primaires ])runes sur la barbe externe et
— 478 -
à l'extrémité, blanchâtre sur la barbe interne; flancs d'un brun roussâtre ;
abdomen blanc; bas-ventre brun nuancé de cendré; sous-caudales blanches;
queue d'un brun foncé. Bec d'un gris noirâtre avec l'onglet noir ; iris blanc ;
pattes d'un gris noirâtre, les membranes noires.
Femelle. — Côtés de la tète d'un brun roussâtre, parfois la base du bec
blauchâtre; menton d'un blanc jaunâtre ; dessus de la tête, nuque et parties
dorsah s d'un brun foncé ; poitrine et flancs bruns avec le bord des plumes
plus roux; ailes comme chez le mâle, mais sans reflets bronzés; abdomen
blanc taché de brun ; bas-ventre brun nuancé de cendré ; sous-caudales
blanches; queue brune. Cette femelle a les caractères généraux du mâle,
dont elle ne diffère que par un plumage plus sombre, et ne peut être confon-
due avec aucune autre.
Mâle en été. — Ne diffère de la femelle que par une taille un peu plus forte,
des teintes moins sombres, la poitrine d'un brun plus rougeâtre et moins
tachée, le ventre d'un blanc pur.
Jeune. — Pas de blanc au menton; tête et cou d'u'n^brun roux foncé;
dessus de la tête et nuque d'un brun noir luisant ; manteau d'un brun noi-
râtre avec les plumes plus ou moins bordées de brun clair; bas du dos et
sus-caudales noirâtres; poitrine et flancs d'un brun foncé, le bord des
plumes plus clair ; abdomen blanc varié de brun ; bas-ventre et jambes bruns;
sous-caudales blanches. Iris gris.
Poussin. — Front, côtés de la tête, devant du cou et parties inférieures
jaunâtres; dessus de la tète, nuque, dessus du corps, ailes, jambes et queue
bruns ; une raie jaunâtre peu distincte traverse le milieu du dos et les ailes ;
une tache de même couleur de chaque côté du croupion; bec uoii'âtre,
l'onglet plus pâle, la mandibule inférieure jaune.
Hab. — Le Morillon à iris blanc habite l'Europe centrale et
méridionale et ne dépasse que
rarement le 56° 1. N.; sa limite
normale est le Danemark à l'ouest
[Kjaerbôlling) et la latitude de
Moscou et de Kazan à l'est
(Sabanaëff) ; Faber l'a cependant
vu en Islande en 1820 et 1821,
et il pense que cet oiseau y
niche (I); en Russie il a été
observé jusque dans l'Arkhangel {Meves). Sa présence n'a pas'encore
(1) Beaucoup d'auteurs croient que Faber s'est trompé et que cet oiseau ne se montre pas eu
Islande; c'est possible, mais il est à noter que sa présence a été constatée dans la Sibérie occi-
dentale jusque sous le cercle polaire, comme l'a fait connaître le D'^ Finsch.
— 479 -
été constatée en Scandinavie, mais bien en Finlande (Palmén).
On ne voit que rarement cet oiseau aux îles Britanniques, et le
plus souvent dans les parties orientales de l'Angleterre, mais on ne
connaît que deux captures en Ecosse et quatre en Irlande {Seebohm).
Il niche dans diverses localités de l'Allemagne, de l'Autriche, de la
Hongrie et de la Pologne ; il est commun dans ce dernier pays et y
hiverne quelquefois (Taczanowski). Il est de passage en Suisse
{Meisner et Schinz), en Hollande {Schlégel) et se montre accidentelle-
ment dans le Grand-Duché de Luxembourg {de la Fontaine). En
Belgique, ce Morillon est de passage irrégulier, mais paraît nicher
quelquefois dans le pays, comme ]e cas s'est présenté àDilsen en 1879,
d'après ce que m'a dit M. le marquis de "Wavrin. Il est de passage
régulier dans les départements septentrionaux de la France, acciden-
tel dans ceux de l'Est, de l'Ouest {Degland) et du Midi {Lacroix)^ il
est rare en Portugal [Reyes), commun en Espagne en été {Saunders)y
et hiverne dans la province de Valence [Vidal) ; il est également com-
mun en Italie [Salvadori) et sédentaire dans les parties méridionales
{Giglioli) et en Sicile [Malherbe)'., aux iles Ioniennes il est plus abon-
dant en été qu'en hiver [Lilford) ; Lindermayer dit ne l'avoir vu en
Grèce que pendant les mois de mars et d'avril, mais pour von der
Mùhle il serait sédentaire dans ce pays, quoique moins abondant en
été qu'en hiver. Il hiverne également en Turquie, en Asie Mineure
{Robson), en Palestine [Tristram) et en Egypte où il suit le Nil jus-
qu'en Nubie [de Heuglin), au Maroc [Favier], en Algérie [Loche) et
sur toute la côte septentrionale de l'Afrique.
En Asie, la répartition de cette espèce est assez singulière : tandis
qu'à l'Ouest elle s'élève jusque sous le cercle polaire, où elle a été
observée à Obdorsk près de l'Obi [Finsch), à l'Est elle ne paraît pas
dépasser le nord de la Chine ; sa présence a aussi été signalée dans
le gouvernement de Tobolsk [Finsch). Cet oiseau se rencontre égale-
ment au Caucase [Radde), au Turkestan [Severtzow), en Perse [Blan-
ford), dans l'Inde où il est commun dans le Nord et le centre, plus
rare dans le Midi [Jerdon), au Népaul [Uodgson) et en Chine; il passe
l'hiver en assez grand nombre dans ce dernier pays, et au printemps
il est commun sur les lacs et les cours d'eau de la province de Pékin
{David); on l'observe également au Japon [Dlakiston, Pi-tjer).
Il est certain que l'aire géographique de cette espèce est plus
étendue en Asie qu'on ne le croit; il est plus que probable ([u'elle
niche en Corée, en Mandchourie et dans la vallée de l'Amour, mais
sa présence n'a pas encore été constatée dans ces pays. Léotaud
signale une capture à l'île de la Trinidad (Antilles), mais cela doit
être une erreur (1).
Mœurs. — Ce Morillon quitte l'Europe centrale vers la fin d'octobre
ou au commencement de novembre, mais toujours avant l'apparition
des gelées et des neiges ; il retourne à la fin de mars au pays de la
reproduction, voyageant par petites troupes désordonnées de cinq
à huit individus ; dans les pays où il est abondant, on rencontre ce-
pendant parfois des bandes composées de plus de cinquante sujets.
C'est un palmipède d'eau douce qui ne se montre que rarement sur
les côtes maritimes, et encore ne l'y voit-on le plus souvent que pen-
dant les migrations, et seulement dans les endroits fangeux et peu
profonds. Il vit principalement sur les eaux stagnantes, et de préfé-
rence sur les lacs et les étangs bien garnis de roseaux et de joncs,
ainsi que dans les marais; il aime surtout les eaux couvertes de
plantes submergées et flottantes, comme celles appartenant aux
genres Myriophyllum, Chara, Lemna, Potmnogeton, Nymphœa, etc.
Le Morillon à iris blanc ressemble à ses congénères par ses allures
et ses mouvements ; il ne marche pas -volontiers, mais quand il le
faut, il sait aller assez vite ; il nage et plonge à la perfection, vole
avec facilité. Il est moins prudent et moins farouche que beaucoup
d'autres de la famille, mais quand il se trouve sur un étang avec des
oiseaux craintifs, ceux-ci l'entraînent généralement dans leur fuite.
Ce n'est pas un oiseau fort sociable : il vit en petites troupes et ne
recherche que la société de ses semblables ; même les individus isolés
ne se joignent pas volontiers à d'autres espèces. Son cri ressemble à
celui d'autres Morillons et peut se rendre par kœurr, kœurr, kœurrr,
pour le mâle, et krèkrèkrè... dans un ton plus élevé, pour la femelle.
La nourriture de cet oiseau est plus végétale qu'animale, et se
compose surtout de plantes aquatiques tendres, de racines, de bour-
geons et de graines; mais il prend aussi des mollusques à coquille,
des larves et des insectes aquatiques, du frai, des têtards et des jeunes
grenouilles. Sa chair est assez succulente, surtout en automne.
Reproduction. — L'accouplement n'a lieu qu'à la fin d'avril; comme
les femelles sont généralement moins nombreuses que les mâles,
ceux-ci doivent combattre entre eux pour conquérir une compagne.
Ces luttes sur l'eau sont parfois si opiniâtres, que ces oiseaux oublient
(1) A. Léotaud, Le: Oiseaux de l'île de la Trinidad, p. 524 (1866).
— 481 —
toute prudence, et sans les cris d'alarme des femelles, ils devien-
draient parfois la proie d'un ennemi. Il arrive aussi que la femelle,
pourchassée par plusieurs mâles, doive se réfugier dans un fourré.
Lorsqu'un mâle a enfin conquis une compagne, il la mène au plus vite
dans un lieu écarté caché au milieu des herbages ; quant aux céliba-
taires qui n'ont pu trouver de femelle, ils deviennent souvent gênants
pour ceux qui ont été plus heureux et dont ils troublent la tranquillité;
mais ils finissent cependant bientôt par s'éloigner, et la paix règne
alors de nouveau sur 1 étang.
Le nid est construit dans les roseaux et les herbages, soit au bord
d'un îlot, soit dans une dépression du sol sous un buisson de saules
ou d'aunes. Il est ordinairement placé de façon à être complètement
caché du côté de la terre ferme, et que la femelle ne puisse y arriver que
du côté de l'eau. Il est fait de la même manière que les nids des
espèces précédentes. La ponte a lieu vers la fin de mai et se compose
de neuf à douze œufs d'un gris jaunâtre; ils mesurent 52 millim.
sur 37.
Le mâle est au commencement plein de prévenance pour sa com-
pagne, mais il l'abandonne dès qu'elle s'est mise sérieusement à
couver. La durée de l'incubation est de vingt-deux jours. La femelle
est bonne mère et se dévoue complètement à l'éducation de ses petits.
GENRE CLI
GARROT. — CLANGULA.
Anab, Lin. Syst. nat. I, p. 199 (1766).
Clangula, Boie, Isis, 1822, p. 564.
FuLiQULA, Bonap. Sijnop. p. 393 (1828).
Glaucion, Kaup, Natiirl. Syst. p. 53 (1829).
BucEPHALA, Baird, B. of N. Am. p. 795 (1858).
Glaucionetta, Stejn. Pr. Un. St. Nat. Mus. p. 40W (1885).
Car. — Bec plus court que la tête, très élevé à la base, s'atténuant d'ar-
rière en avant, un peu plus large au niveau des narines que dans le reste de
son étendue ; mandibule supérieure bordée latéralement par un sillon strié ;
onglet arrondi, peu saillant ; mandibule inférieure et lamelles cachées laté-
ralement par la mandibule supérieure ; narines médianes, latérales, étroites,
allongées ; ailes de longueur moyenne, aiguës ; queue relativement assez lon-
gue, conique; tarses courts; doigts allongés, l'interne au moins aussi long
que le tarse ; pouce bien développé, muni d'une large membrane.
Hab. — La zoae circompolaire.
ToM II. — 1892. 61
— 482 —
266. — Le Garrot ou Morillon sonneur.
GLANGULA GLAUGION, Brehm ex Un.
(PI. 264)
Anas GLAUCiuM, Briss. Ornith. VI, p. 406 (1760).
Anas clangula et a. glaucion, Lin. Syst. nat. I, p. 201 (1766).
Anas peregrina, Gmel. Reise Russl. II, p. 183 (1774).
? Anas hiemalis, Pall. Zoogr. Rosso-As. II, p. 270 (1811).
Clangula clangula, Boie, Isis, 1822, p. 564.
Clangula chrysophthalmos, Steph. Gen. Zool. XII, 2, p. 182 (1824),
FuLiGULA clangula, Bouap. Ann. Lyc. nat. hist. N. York, II, p. 393 (1826).
Clangula tulgaris, Flem. Brit. An. p. 120 (1828).
Glaucion clangula, Kaup, Naturl. Syst. p. 53 (1829).
Clangula glaucion, peregrina et leucomelas, Brehm, Isis, 1830, p. 999.
Clangula americana, Bonap. Comp. List. B. p. 58 (1838).
Clangula chrysophthalma, Macg. Hist. Brit. B. V, p. 174X1.852).
BucEPHALA americana, Baird, Birds N. Am. p. 796 (1658).
BucEPHALA clangula, Swinh. Pr. Zool. Soc. 1871, p. 419.
Clangula glaucium americana, Ridgw. Proc. U. S. nat. Mus. 1880, p. 204.
Glaucionetta clangula et G. clangula americana, Stejn. Pr. U. S. Nat. Mus.
1885, p. 409.
Die Schellente, en allemand.
The Golden-eye, en anglais.
De Brileend, en flamand.
Taille du mâle : 0,45 ; ailes 0,23 ; femelle: 0,36 ; ailes 0,195.
Description du mâle en plumage de noce. — Tête et haut du cou d'un vert
foncé brillant à reflets pourprés, avec une grande tache blanche arrondie sur
les côtés de la base du bec ; dos, croupion et sus-caudales d'un noir profond;
scapulaires blanches avec le bord externe noir ; les couvertures des ailes les
plus rapprochées du bord antérieur de celles-ci et les quatre rémiges secon-
daires les plus proches du corps, noires; les autres couvertures des ailes
et rémiges secondaires blanches, ces dernières noires à leur base, mais le
blanc de ces pennes se continuant presque sans interruption avec celui des
couvertures; bas du cou, poitrine et abdomen d'un blanc pur, mais des
mèches noires sur les barbes internes des plus longues plumes des flancs ;
côtés du bas-ventre et jambes d'un brun noir ; rémiges primaires noirâtres ;
queue d'un brun cendré. Bec d'un noir bleuâtre ; iris d'un beau jaune; pattes
d'un jaune d'ocre avec les palmures noirâtres.
Femelle. — Plus petite que le mâle; tête et haut du cou d'un brun rous-
sâtre foncé, suivi d'un collier blanc varié de gris; manteau et scapulaires
d'un brun noirâtre avec les bordures des plumes cendrées ; bas du dos et sus-
caudales noirâtres ; bas du cou, haut de la poitrine et flancs d'un gris cendré
avec les plumes bordées de blanchâtre ; les autres parties inférieures d'un
— 483 —
blanc pur ; couvertures des ailes blanches tachées de noir ; rémiges secon-
daires blanches, quelques-unes avec la barbe interne noirâtre; rémiges pri-
maires et queue d'un brun noirâtre. Bec noir terminé par une tache rousse,
qui manque parfois.
Mâle en été. — Diffère principalement de la femelle par une taille plus forte
et par les couvertures des ailes qui sont d'un blanc pur sans taches.
Jeune. — Ressemble à la femelle. Après la première mue, les mâles se distin-
guent par une taille plus forte et la tête plus grosse ; les deux taches blanches
commencent à se montrer sur les côtés du bec, mais elles sont tachetées de
brun ; les parties dorsales sont plus foncées ; les couvertures des ailes sont
cendrées ; la poitrine est d'un blanc varié d'un peu de cendré.
Poussin. — Tête jusqu'au-dessous des yeux, nuque, dos, jambes et queue
d'un brun lustré; joues, gorge et haut du cou d'un blanc pur; une tache
blanche sur l'aile, une autre au-dessus de celle-ci, de chaque côté du dos, et
une sur les côtés du croupion, également blanches ; haut de la poitrine cen-
dré ; les autres parties inférieures blanches.
Hab. — Le Garrot sonneur est une espèce circompolaire fort com-
mune, qui niche en Europe dans
la zone qui s'étend à peu près
entre le 53° et le 71° 1. N., du
moins jusqu'à la limite des
arbres; plus au Sud il ne niche
qu'accidentellement. 11 hiverne
en grand nombre aux îles Bri-
tanniques et sur toutes les côtes
«■i3«ns».*^„,.. ^^ l'Europe centrale et méridio-
nale jusqu'en Sicile {Malherbe) et en Grèce {Lindermayer)\ il est
assez rare à l'intérieur des pays. En Belgique, cet oiseau est surtout
abondant à l'époque des passages, et on en voit alors un grand nom-
bre sur les côtes maritimes et sur l'Escaut, mais il hiverne sur la
plupart des eaux qui ne gèlent pas. Il se montre accidentellement
dans le N.-O. de l'Afrique {Loche); Brehm l'indique comme hivernant
dans le delta du Nil, mais ni de Heuglin, ni le capitaine Shelley ne
l'ont observé en Egypte.
En Asie cette ospcco est répandue dans toute la Sibérie {Middcn-
rfor/f, etc.) jusqu'au Kamtschatka (-S'^c/ne^er); elle hiverne dans le
Turkestan russe {Severtzoïo), mais surtout dans le sud de la Sibérie
près du lac Baïkal où elle est sédentaire {Raddé) et dans le nord de la
Chine où elle est très commune aux environs de Pékin {David); elle
hiverne également au Japon {Schlêgel).
— 484 —
Cet oiseau est tout aussi répandu en Amérique depuis l'Alaska
{Turner) et l'Amérique anglaise (Thompson); il n'est pas commun
aux îles Aléoutiennes et hiverne dans l'Unalashka [Turner), ainsi
qu'aux Etats-Unis {Baird) jusqu'au N.-O. du Mexique (Grai/son) et à
Cuba (Gundlach). Au Groenland et en Islande il est remplacé par le
(C. islandica).
Mœurs. — Le Garrot ou Morillon sonneur ne quitte les régions
les plus septentrionales qu'en octobre et novembre, et il y retourne
en mars ou avril, mais au-delà du cercle polaire on ne le revoit qu'en
mai ; il hiverne cependant partout où il trouve des eaux libres de
glace. Cet oiseau voyage généralement pendant la nuit, en petites
troupes ou en bandes plus ou moins considérables.
Le Garrot vit aussi bien sur les eaux douces que salées, et on le
voit près de la mer comme sur les fleuves, les rivières, les lacs et les
grands étangs découverts, mai c'est toujours présides eaux douces
qu'il niche. Il aime surtout celles qui longent une forêt ou qui sont
entourées de vieux arbres, sur lesquels il va parfois se percher; en
hiver, il se montre souvent sur les eaux les plus insignifiantes, du
moment qu'elles ne sont pas gelées.
Ce palmipède marche lourdement et avec difficulté, mais en
revanche il nage et plonge avec une dextérité remarquable; quand
on observe une petite troupe de ces oiseaux, on voit constamment
l'un ou l'autre disparaître dans l'eau. Il vole bien, mais avec de
grands battements d'ailes, ce qui occasionne un bruit ressemblant
assez bien à une sonnerie, ce qui a valu à cet oiseau le nom de son-
neur, en allemand Schellente. Naumann dit que ce bruit est propre
aux deux sexes, mais qu'il est plus prononcé chez les adultes, surtout
chez les vieux mâles, que chez les jeunes; selon Palmén, ce bruit
n'est produit que par les mâles.
Cet oiseau est peu farouche dans les localités où il se reproduit,
mais en hiver il de^dent fort craintif et prudent, aussi se tient-il
habituellement vers le centre des eaux; quand par hasard il se
trouve près du bord, il s'en éloigne aussitôt que quelqu'un se montre
au loin. Il est, du reste, attentif à tout ce qui lui paraît suspect et
se sauve à la moindre apparence de danger; ses cris attirent sou-
vent l'attention des autres oiseaux aquatiques, qui prennent alors la
fuite par imitation.
La nourriture du Garrot se compose principalement de mollusques
à coquille, crustacés, larves et insectes aquatiques, petits poissons,
frai, têtards, jeunes grenouilles et matières .végétales. Sa chair est
très grasse en automne, mais d'un goût rance très prononcé.
Reproduction. — Les Garrots sont généralement accouplés à leur
retour aux lieux de la reproduction, et ils ne tardent alors guère à
faire leurs préparatifs pour nicher. Mais, ce qui est remarquable
pour des Canards, c'est qu'ils font leur nid dans le creux d'un arbre.
Voilà la raison pour laquelle ils recherchent de préférence les eaux
d'un bois ou celles qui longent ou traversent une forêt. La hauteur
du trou leur importe peu, car M. Seebohm dit avoir vu, dans la
vallée de la Petchora, un nid de Garrot placé à vingt-cinq pieds de
hauteur. Ce mode de reproduction est fort bien connu des peuples du
Nord, qui en font leur profit. Ils fixent aux arbres, de distance en
distance et à des hauteurs variables, de petites caisses en bois dans
lesquelles les Garrots vont nicher; ils enlèvent ensuite successive-
ment les œufs, dont ils sont très friands, mais en ayant soin d'en
laisser toujours un dans le nid. Ce fait a été observé dans la Russie
septentrionale par M. Seebohm et en Laponie par le D"" Krùper.
Suivant ce dernier, les Lapons font des caisses à nicher d'une façon
fort simple : ils coupent par portions égales le tronc d'un gros arbre
complètement creux, et il paraît qu'on en trouve beaucoup dans leur
pays, clouent devant chacune des ouvertures un morceau de planche,
pratiquent ensuite une ouverture allongée suffisante pour le passage
de l'oiseau, et la caisse est faite (1).
Là où il n'y a pas d'arbres creux, les Garrots nichent dans un trou
de rocher, sous des pierres ou dans les roseaux. Naumann dit que
quelques couples nichent dans le Mecklembourg, le Brandebourg, la
Silésie, dans les grands étangs près de Eisleben et en Saxe, et qu'ils
établissent leur nid dans les roseaux et les joncs, sous un buisson,
ou sur la tête d'un vieux saule en têtard. Naumann ignorait que la
manière de nicher qu'il décrit est l'exception et non la règle; mais,
une dizaine d'années plus tard, le garde général des forêts Wiese
découvrit dans la basse Pomôranie, un nid de Garrot établi dans un
trou d'arbre creusé par un Pic noir (Picus martius).
Quand cet oiseau niche dans le trou d'un arbre, il dépose simple-
ment ses œufs sur les détritus de bois qu'il y trouve; dans les
roseaux, il construit un nid sur le môme modèle que celui des Moril-
lons, mais la femelle recouvre ses œufs dans tous les cas de duvet
(1) Voy. Naiimannia, 1857, p. 41 <-ii note.
- 486 -
quand elle s'en éloigne. La ponte est de dix à dix-neuf œufs, ordinai-
rement dix à douze, mais quand on lui enlève successivement sa
ponte, la femelle en produit bien davantage ; Naumann dit que, dans
ce cas, elle peut pondre jusqu'à quarante oeufs ; le même auteur a
observé que la ponte est quelquefois trop considérable pour la cavité
du nid, et que quelques œufs roulent parfois dehors ; dans un nid
contenant dix-neuf œufs, trois étaient tombés dans l'eau. Il se pourrait
bien que deux femelles aient déposé leurs œufs dans le même nid,
comme cela se présente chez d'autres espèces. Les œufs sont d'un
gris verdâtre pâle tirant au bleuâtre et assez lustrés ; ils mesurent
55 à 58 millim. sur 41 à 42. La durée de l'incubation est de
vingt-deux jours.
Le mâle ne s'occupe plus de sa femelle dès que celle-ci s'est mise
à couver. Quand les poussins sont éclos et bien séchés, la mère les
conduit à l'eau ; s'ils sont nés dans un trou d'arbre, elle les porte uii
à un, non pas dans son bec, mais en les serrant entre son bec et sa
poitrine, comme l'a observé le pasteur Bjôrkman, d'après ce que nous
apprend Wallengren (1).
Il paraît que la femelle du Garrot, quand elle n'a pas de couvée,
s'empare parfois des poussins d'une autre femelle de son espèce.
Palmén dit avoir vu une femelle nageant avec rapidité vers une
couvée et prenant tout à coup son vol pour se précipiter sur la mère
des poussins. Attaquée aussi subitement, cette dernière s'envola,
toujours poursuivie par la première, et décrivit des cercles nom-
breux en poussant des cris. Pendant ce temps, les petits s'étaient
réunis, et, comme leur mère ne put parvenir à les rejoindre, elle fut
obligée de les abandonner à l'autre femelle, qui était probablement
plus forte (2).
C'est ici que le Garrot ou Morillon de Barrpw (Clangula islandica,
Gm. C. bari-'oioi, Sw.,) figuré pi. 265 devrait prendre place. Mais
c'est par erreur que cette espèce a été introduite dans la liste des
oiseaux observés en Belgique, et il n'y a donc pas lieu de l'y main-
tenir.
M. le baron de Sélys-Longchamps disait en 1842, en parlant de cet
(1) Naumannia, 1854, p. 276.
(2) Palmén, Finland''s Fogîar, p. 475.
— 487 —
oiseau : « J'en ai vu un exemplaire tué sur le Geer; M. de Meeze-
maker en possède un tué en mai près de Bergues ; le D"" Degland
l'a aussi recueilli aux environs de Lille (1). » — Gomme cette espèce
ne figure plus dans la dernière liste des oiseaux de Belgique publiée
par M. de Sélys (2), j'ai prié mon savant confrère de bien vouloir me
donner un mot d'explication à ce sujet; voici ce qu'il me répond, sous
la date du 19 septembre 1892 : « Je l'avais indiqué en 1842, après
avoir examiné un exemplaire femelle chez M. de Meezemaker, à
Bergues (département du Nord), qui me faisait remarquer uue bande
noire partageant en deux le miroir blanc des ailes ; je retrouvai ce
caractère sur une autre femelle, tirée sur le Geer. C'était alors le
caractère que les ornithologistes donnaient de la femelle pour la dis-
tinguer du Clangula glaucion\ mais je n'ai pas tardé à reconnaître
qu'il n'était pas suffisant pour les femelles, et c'est pourquoi je n'ai
pas hésité à supprimer le C. islandica dans la liste de Patria
belgica. »
Il paraît d'autant plus certain que cet oiseau n'a visité ni la Bel-
gique ni la France, c'est que partout en Europe on n'a signalé que des
captures de femelles ; celles-ci ne différent de celles du Garrot sonneur
que par une taille un peu plus forte, et peut-être par un bec plus
robuste; il est donc facile de se tromper. Le mâle se distingue de
celui de l'espèce commune d'abord par une taille plus forte, mais
surtout par la bande noire qui divise le blanc de l'aile, et par la tache
blanche placée à la base du bec, qui remonte plus haut en prenant
la forme d'un croissant.
Le Morillon de Barrow n'habite, en Europe, que l'île d'Islande où
il est sédentaire. Selon M. Seebohm, il n'a jamais été pris aux Iles
Britanniques. Naumann le décrit dans son ouvrage sur les oiseaux
d'Allemagne, mais ne signale aucune capture et se borne à dire : « //
paraît qu'il s'est aussi montré sur les côtes septentrionales de l'Alle-
magne et que des jeunes ont été pris sur le Rhin. » Le D'' Ant.
Reichenow ne le comprend pas dans sa liste des oiseaux de l'empire
Allemand (3).M. Dresser dit posséder un jeune mâle capturé en Espagne,
près de Valence (4); mais si ce sujet vient réellement d'Espagne, il
est certain ({ue ce ne peut être un C. islandica.
(1) de Sélys-Long. Faune belge, p. 146.
(2) Alam.f Ois. et liept. de Belgique, dans Patria belgica, t. i, p. 277 (1873).
(U) Reichenow, Hyslematisches Vcrzcichnis der Vogel DeiUschlaiids (1889).
(4) Dresser, liirds uf Eui\, t. VI, p. GU4.
— 488 —
La véritable patrie du Garrot de Barrow est l'Islande, le Groenland
et l'Amérique polaire.
Une autre espèce à supprimer de notre faune est le Morillon ou
Garrot histrion, figuré pi. 266 (Clangula histrionica, Lin.). M. de
Sélys a mentionné un exemplaire qui, d'après M. de Meezemaker, a
été pris près de notre frontière, sur la côte de Gravelines, mais sur
territoire français ; M. Ch. van Kempen a signalé la capture d'un mâle
adulte près de Dunkerque (1). Les ornithologistes anglais ont égale-
ment mentionné quelques captures en Grande-Bretagne ; il n'est donc
pas impossible que cet oiseau ait déjà visité les côtes de Belgique;
mais, comme aucun sujet n'a été pris dans notre pays, du moins à
ma connaissance, je crois convenable de le supprimer de notre
faune.
C'est une espèce circompolaire ; elle a été prise accidentellement
dans le Hanovre, près de Hambourg, sur les cotes occidentales du
Holstein et en Tyrol (Reichenow); M. de Sélys m'écrit qu'il a vu,
en 1838, dans un musée d'Aix-la-Chapelle, un Garrot histrion mâle
qu'on lui a dit avoir été tué entre cette ville et la frontière belge.
GENRE CLII
MIQUELON. — HARELDA.
Anas, Lin. Syst. nat. I, p. 203 (1766).
Clangula, Boie, Isis, 1822, p. 564.
Harelda, Steph. in Shaw's Gen. Zool. XII, pt. 2, p. 175 (1824).
Platypus, Brehm, Lehrb. eur. Yôg. 11, p. 840 (1824).
FuLiQULA, Bonap. Synop. p. 395 (1826).
Pagonetta, Kaup, Natùrl. Syst. p. 66 (1829).
Crymonessa, Macg. Man. Br. B. II, p. 186 (1842).
Car. — Bec plus court que la tête, plus large que haut à la base, à onglet
arrondi et formant crochet; lamelles saillantes, dentiformes, débordant la
mandibule supérieure dans plus de la moitié de son étendue ; narines situées
près de la base du bec, latérales, écartées, ovales; ailes de longueur moyenne,
aiguës ; queue conique, à rectrices terminées en pointe, les médianes très
allongées chez les mâles, étroites et canaliculées ; tarses à peu près de la
longueur du doigt interne.
Hab. — La zone polaire arctique.
(1) Bull, de la Soo. xool, de France, 1889, p. 105.
- 489 —
267. — Le Miquelon glacial.
HARELDA GLACIALIS, Steph. ex Lin.
(PI. 267).
Anas longicauda islandica, Briss. Ornith. VI, p. 379 (1760).
Anas hyemalis et glacialis, Lin. Syst. nat. 1, pp. 202-203 (1766).
Anas miclonia, Bocld. Tahl. PI. enl. p. 58 (1783).
Anas brachyrhynchos, Beseke, Yôg. Kurl. p. 50, pi. 6 (1792).
Anas longicauda, Leach, Syst. Cat. etc. Br. Mus. p. 37 (1816).
Clangula glacialis, Boie, Isis, 1822, p. 564.
Platypus glacialis, Brehm, Lehrb. eur. Vog. II, p. 840 (1824).
Harelda glacialis, Steph. Shavos Gen. Zool. XII, pt. 2, p. 175(1824).
Fuligula glacialis, Bonap. Ann. Lyc. Nat. Eist. N.-York II, p. 395 (1826).
Pagonetta glacialis, Kaup, Nalilrl. Syst. , p. 66 (1829).
Clangula hiemalis, faberi, megauros et brachyrhynchos, Brehm, Isis, 1830, p. 999.
Crymonessa glacialis, Macg. Man. Br. B. II, p. 186 (1842).
Harelda hiemalis, faberi, brachyrhynchos, megauros et mqsica, Brehm, Nau-
mannia, 1855, p. 299.
Fuligula hiemalis, Reichw. /Syst. Vers. Vog. Deutschl. p. 57(1889).
Die Eisente, en allemand.
The Long-tailed Duck, en anglais.
De IJsep.'md, ea llamand.
Taille du mâle : 0,50 (y compris les filets de la queue) ; ailes, 0,22 ;
femelle: 0,33; ailes, 0,21.
Description du mâle adulte en hiver. — La majeure partie de la tête et
du cou, ainsi que le haut du dos et de la poitrine blancs ; côtés de la tête
d'un gris rougâtre clair, avec le tour de l'œil blanc ; une grande tacbe allon-
gée brune sur les côtés du cou; dos d'un noir fuligineux; sus-caudales
noires; scapulaires blanches, les plus longues eifilées et atteignant presque
l'extrémité des ailes ; couvertures de celles-ci d'un noir fuHgineux ; rémiges
brunes ; poitrine d'un brun de suie ; abdomen et sous-caudales d'un blanc
pur; queue blanche, sauf les quatre rectrices médianes, qui sont brunes,
effilées, très longues, et dont les deux centrales dépassent les pennes blan-
ches de 16 à 18 centimètres. Iris jaune; bec orange, mais sa base jusqu'aux
narines et Tonglet noirs ; pattes d'un gris de plomb clair, noirâtres aux arti-
culations et aux membranes.
Mâle en etc. — Tête et cou d'un brun noirâtre ; côtés de la tête d'un cendré
brunâtre; un espace blanc autour de l'œil ; poitrine brune ; dos, sus-caudales
et couvertures des ailes noirâtres ; scapulaires roussâtres, les plus longues
brunes au centre ; abdomen, sous-caudales et queue comme pour le plumage
d'hiver (1).
(1) La pi. 207 de l'atlas jxjrtc par erreur jeune mâle au lieu de mdlc en l'U.
TOM. II. — 1892. 62
- 490
Le plumage d'été n'est pas d'une aussi courte durée que chez les Morillons
précédents ; la première mue a lieu vers la fin d'avril, et l'oiseau conserve
son plumage sombre jusqu'en octobre.
Femelle. — Tête et cou blancs, avec le dessus de la tête, à partir de la
base du bec, la nuque et un grand espace sur les côtés du cou bruns ; haut
du dos et côtés de la poitrine d'un brun cendré roussâtre, le milieu de la poi-
trine plus pâle ; scapulaires et couvertures des ailes brunes bordées de roux
et de cendré roussâtre ; bas du dos et sus- caudales noirâtres, avec les plumes
terminées de cendré roussâtre, surtout sur ces dernières; rémiges brunes;
rectrices également brunes, mais lisérées de blanchâtre, sauf les deux
médianes ; point de longues plumes effilées dans la queue ; abdomen et sous-
caudales blancs.
Jeune. — Ressemble à la femelle, dont il diffère surtout par l'absence de
roux aux scapulaires, par le blanc de la tête et du cou moins pur et par les
parties brunes plus pâles. Bec noirâtre; iris brun; pattes plus sombres que
chez les adultes.
Poussin. — Large capuchon, descendant en avant sur les côtés de la tête
jusqu'aux commissures, dessus du cou, ceinture en haut de la poitrine, tout
le dessus du corps, des ailes et des cuisses d'un brun fuligineux, faiblement
glacé aux pointes du duvet, avec deux ou trois petites taches blanches autour
des yeux; gorge blanche; devant et côtés du cou, partie basse des côtés de la
tête, ventre et abdomen d'un blanc un peu assombri par la base brune du
duvet. Bec brun avec les onglets plus pâles; pieds brun roussâtre, avec des
bandes jaune terne sur les membranes, le long des doigts (/. Vian).
Il est à remarquer que cette espèce varie beaucoup suivant les sexes, l'âge
et les saisons. L'iris, de brun foncé chez le jeune, passe par toutes les teintes
intermédiaires jusqu'au jaune, mais ce n'est que chez les vieux sujets qu'il
est d'un beau jaune.
Hab. — Le Miquelon glacial habite la zone circumpolaire entre le
60° 30' et leSOM. N. Ilesttrès
commun au Groenland, en Is-
lande, en Finmark, dans le nord
de la Russie, à Waigatz et à la
Nouvelle-Zemble, mais peu abon-
dant au Spitzberg {de Heuglin) ;
en automne il émigré aux îles
Féroé {Feilden), en Scandinavie
[Collett, Nilsson), sur les côtes
de la Baltique {Borggreve), dans le golfe de Finlande [Bûchner), mais
il se montre rarement dans la Russie centrale (Sàbandeff). Il visite
L'Otf ni.«tf «) l5Ql2011DiOOBf
— 491 -
régulièrement, en hiver, l'Ecosse et les îles Orcades et Shetland,
mais irrégulièrement les parties méridionales et orientales de l'Angle-
terre, et rarement l'Irlande {Seebohm) ; on le voit aussi assez régu-
lièrement en Hollande {Schlégel), mais ce n'est que pendant les hivers
rigoureux qu'on le voit sur les côtes de Belgique et du nord de la
France. Pendant les hivers très rigoureux, on en prend quelquefois
en Suisse {Meisner et ScJiinz) et dans l'intérieur de l'Allemagne
{Reichenow) ; c'est ainsi qu'on en a pris aussi sur le lac de Chumetz
(Fritsch) et sur celui de Neusiedler {von Pelzeln). C'est également
pendant des hivers exceptionnellement rigoureux que quelques sujets
ont été tués dans le midi de la France (Lacroix), en Espagne, dans la
province de Gérone [Vayreda) et dans diverses parties de l'Italie,
notamment à Venise (1885), près de Nice (1878), en Toscane (1872),
sur le lac de la Garde (1865), etc. (Giglioli).
En Asie, cet oiseau hiverne dans le sud de la Sibérie, surtout sur
le lac Baïkal (Radde); il se montre également au Japon {Whitely), et
un jeune a été tué à Takou en Chine {David).
En Amérique, il niche daas l'extrême Nord et hiverne jusque près
du 40° 1. N. Il est commun en hiver dans la Nouvelle-Ecosse, au Nou-
veau-Brunswick et dans l'Etat de Maine {Coues).
Mœurs. — Les froids précoces de la région polaire obligent ces
oiseaux à émigrer assez tôt, car dès la fin d'octobre on les voit arriver
par petites troupes sur les côtes de la mer Baltique ; ce n'est cepen-
dant que vers la mi-novembre que les troupes deviennent plus nom-
breuses, et en décembre certaines baies de la Baltique donnent asile
à des centaines et même à des milliers de Miquelons ; c'est alors
l'espèce la plus commune des côtes allemandes et danoises. Si le froid
devient trop intense, beaucoup d'entre eux émigrent davantage vers
le Sud et se montrent alors sur nos côtes et parfois sur l'Escaut. Ils
retournent dans le Nord en avril et mai par bandes nombreuses, voya-
geant principalement durant la nuit.
Cette espèce, comme on vient de le voir, est très sociable et vit sur
la mer comme sur les eaux douces, mais c'est sur ces dernières qu'elle
se reproduit ; en été on la voit donc presque uniquement sur les lacs^
les étangs et les marais de la zone polaire, tandis qu'en hiver elle se
tient davantage sur la mer et sur les fleuves.
Le Miquelon nage avec légèreté, le corps très enfoncé dans l'eau,
et plonge presque sans discontinuer, nageant souvent entre deux
eaux sur un assez long trajet. Il est peu farouche, mais il est difficile
— 49i> -
à tirer à cause de sa grande agilité ; il ne s'envole pas volontiers
quand il est sur l'eau et c'est le plus souvent en plongeant qu'il évite
le plomb du chasseur ; est-il blessé, il plonge encore, et si sa blessure
est mortelle, il se laisse souvent mourir au fond de l'eau où il reste
parfois accroché aux plantes aquatiques. Il vole avec aisance, vite et
haut, mais avec de grands battements d'ailes. Faber dit que la femelle
chasse souvent de son nid celle du Morillon milouinan et qu'elle couve
ensuite les œufs de cette dernière en même temps que les siens. Entre
eux ils se querellent sans cesse, aussi bien en volant qu'en nageant,
et font constamment entendre leurs cris de aou-aou-lik, â-â-aou-lik,
toujours d'après le même observateur.
Cet oiseau se nourrit principalement de mollusques à coquille
simple ou bivalves, d'annélides,de crustacés et de petits poissons qu'il
pêche en plongeant ; sur les eaux douces, il prend aussi des larves,
des insectes, des vers, des têtards, des bourgeons, des graines et
autres substances végétales.
On ne chasse guère ce palmipède pour sa chair, car celle-ci a un
goût huileux fort désagréable.
Reproduction. — M. de Heuglin pense que cet oiseau niche sur les
rochers qui avoisinent les lacs et les étangs d'eau douce de la zone
polaire, mais il n'a pas trouvé de nid. M. Seebohm a été plus heureux
dans la vallée de la Petchora, où son guide trouva sur des lacs quatre
nids de Miquelons, en partie abrités sous des buissons de saules et de
bouleaux nains; ces nids, découverts dans la seconde moitié de juin
et en juillet, contenaient respectivement trois, cinq, six et sept œufs.
Deux nids, ne contenant que du duvet, ont été trouvés au nord de
Dvoinik; ils étaient placés dans une excavation protégée par des
herbes et au milieu de débris laissés par la marée haute.
Cet oiseau niche généralement fort tard. M. Seebohm dit avoir
reçu de M. Eagle Clarke, un jeune qui était moitié en duvet et
moitié en plumes, et que ce dernier avait tiré en Islande le 16 sep-
tembre. Les œufs sont d'un gris jaunâtre ou verdâtre pâle; ils mesu-
rent environ 53 millim. sur 39.
OENRE CLIII
EIDER. — SOMATERIA.
Anser, Briss. Ornith. VI, p. 294 (1760).
Anas, Lin. Syst. nat. I, p. 198 (1766).
SoMATERiA, Boie, Isis, 1822, p. 564.
FuLiGULA, Steph. Shavo's Gen. Zool. XII, 2, p. 206 (1824).
- 493 —
Macropus, Nutt. 3Ian. Orn. U. S. II, p. 451 (1834).
PoLYSTiCTA, Eyt. Ilist. var. Brit. B. p. 79 (1836).
Stellaria, Bonap. Comp. List. p. 57 (1838).
Eniconetta, Gray, List. Gen. ofB. p. 95 (1840).
Harelda (part.) Keys et Blas. Wirhelth. Eur. p. 230 (1840).
Heniconetta, Agass. Nomencl. Zool. Lnd. Univ. p. 178 (1846).
Car. — Bec de la longueur de la tête, élevé et convexe à la base, un peu
déprimé en arrière de l'onglet, dilaté sur les bords de la mandibule inférieure
qui est presque cachée par la supérieure; lamelles espacées, entièrement
cachées, celles de la mandibule supérieure petites, peu saillantes; plumes du
front s'avançant sur la base du bec en formant un angle aigu, celles des
lorums se prolongeant également en angle aigu jusque sous les narines; ces
dernières elliptiques, situées vers le milieu du bec; onglet très large, voûté,
occupant toute l'extrémité du bec; ailes courtes, étroites et aiguës; queue
courte, conique; tarses plus courts que le doigt interne, placés très en arrière
du corps; pouce bien développé, grêle, muni d'une large membrane en dessous.
Eah.— Les espèces de ce genre sont propres à la zone polaire
arctique et émigrent en hiver dans la zone tempérée.
268. — L'Eider vulgaire
SOMATERIA MOLLISSIMA, Boie ex Lin.
(PI. 268.)
Anas MOLLISSIMA, Lin. Syst. nat. p. 124 (1758) et I, p. 198 (1766;.
Ansek LANUGiNOSUS, Briss. Omitli. VI, p. 294(1760).
Anas cutberti etFARNENSis, Salerne, Omith. p. 415 (1767).
Somateria MOLLISSIMA, Boie, /sîs, 1822, p. 564.
Anser mollissimus, Bonnat. Encycl. meth. I, p. 119 (1823).
Platypus mollissimus et leislert, Brehm, Lehrb. pp. 809, 813 (1824).
Somateria danica, norwegica, platyuros, fœrœensis, megauros, isl.\ndica,
BOREALis, LEiSLERi et PLANIFRONS, Breh. Isis, 1830, p. 998.
Somateria st. cutberti, Eyt. Cat. Brit. B. p. 58 (1836).
Flligula MOLLISSIMA, de Selys, Fcainc belge, p. 143 (1842).
Somateria vulgaris, C. Dub. PI. col. Ois. Belçj. III, p. 289(1860).
Somateria thulensis, Malmgr. Konyl. Yt't.-Ak. Œfo. p. 380 (1864).
Die Eidergans, en allemand.
The Common Eider, en anglais.
De Eidereend, en flamand.
Var. Drosseri.
Anas mollissima, Wilson, Am. Or». VIII. p. 122. pi. 71 (1814).
Fi:ligi;la mollissima, Aiuliil). Ont. lit»;/. III, \>. 314 (1835).
Somateria mollissima, Bonap. Lis/. />'. p. 57 (1838).
— 494 -
SoMATERiA DRESSERi, Sharpe, Ann. Mag. N. H. p. 51 (1871).
SoMATERiA MOLLissiMA var. DRESSERI, Coues, Birds N. W. p. 580 (1874).
SoMATERiA MOLLissiMA DRESSERI, Seeb. Brit. B. III, p. 616 (1885).
Taille du mâle : 0™57; ailes 0,32; femelle : 0,45; ailes 0,28.
Description du mâle en plumage de noee. — Dessus de la tête d'un noir violet
velouté, divisé en arrière par une bande médiane d'un blanc verdâtre, s'éten-
dant en avant sur la mandibule supérieure en formant trois pointes : l'une
médiane courte, les autres latérales se prolongeant jusqu'aux narines; partie
supérieure de la nuque d'un vert clair bordé latéralement de blanc ; côtés du
haut du cou du même vert clair soyeux; joues, gorge, cou, manteau, petites
couvertures des ailes, scapulaires et une grande tache de chaque côté du
croupion, d'un blanc pur; bas du cou et poitrine d'un blanc teinté de nuance
aurore; bas du dos, couvertures de la queue, grandes et moyennes couver-
tures des ailes, abdomen, flancs et sous-caudales d'un noir plus ou moins pro-
fond; rémiges et queue d'un noir fuligineux. Bec d'un vert olivâtre sombre;
iris brun; pattes d'un vert olivâtre clair, plus sombre aux membranes.
Femelle. — Tête et cou d'un roux jaunâtre, striés de brun noirâtre, les
stries du vertex plus compactes; dos et scapulaires d'un brun sombre avec les
plumes bordées de roussâtre; couvertures des ailes brunes, bordées de gris
roussâtre, les plus grandes terminées de blanc; rémiges secondaires de même
couleur et également terminées de blanc, ce qui forme deux raies blanches sur
l'aile; rémiges primaires et queue brunes; poitrine et flancs roussâtres, mar-
qués de raies transversales noirâtres, plus larges sur les flancs; abdomen
d'un cendré roussâtre.
Jeune mâle. — Dessus de la tête d'un cendré brunâtre varié de noir; côtés
de la tête et haut du cou noirs, les plumes finement terminées de cendré; bas
du cou varié de blanc; parties dorsales d'un brun noirâtre, les plumes plus ou
moins bordées de cendré roussâtre; ailes brunes avec deux raies blanches
plus ou moins apparentes; parties inférieures cendrée?, avec des raies trans-
versales brunes et d'un roux jaunâtre; queue brune.
Mâle en été. — Il entre en mue dés qu'il a quitté sa femelle, mais il ne
conserve son plumage d'été qu'un peu plus d'un mois. Il ressemble alors
presque entièrement au jeune décrit ci-dessus, il est cependant rare de voir
des individus dont le plumage ne soit pas plus ou moins varié de blanc.
Poussins. — Toutes les parties supérieures d'un brun fuligineux foncé ;
gorge et ventre d'un gris pâle, poitrine et abdomen d'un gris sombre, les
teintes foncées et les teintes pâles fondues sur les flancs ; bande sourcilière
grise du bec à la nuque, bordée en dessous par une bande noirâtre, qui se
dégrade jusqu'au gris, en descendant sur les joues; bec brun avec les onglets
roussâtres; pieds brun olivâtre avec les palmures brunes (J. Vian).
Var. Dresseri. — Le mâle difî'ère de l'espèce ordinaire par la cire qui est
— 495 —
plus large, très ridée et largement arrondie en arrière; la teinte verte de la
tête est plus étendue et accompagne ordinairement le noir jusque près du
bec. La femelle n'est pas à distinguer de celle de l'Eider d'Europe.
Hab. — L'Eider vulgaire habite les côtes de l'Océan Glacial jus-
qu'à la mer de Kara à l'Est et
dépasse vers le pôle le 81° 1. N;
des volées de centaines de sujets
furent observées, en juillet, sous
le 81° 10' par l'expédition scien-
tifique suédoise au pôle Nord.
Sa véritable patrie comprend le
Spitzberg, la Nouvelle-Zemble
[de Heuglin), les côtes et les îles
de la Norwège {Colleit), de l'Islande {Faber), du Groenland (Holbôll)
et de la baie de Baffin [Baird); il niche également aux îles Féroé
{Wolley), Orcades et Shetland, sur les îles et les côtes occidentales
de l'Ecosse [Seebohm) et sur divers points du Danemark comme à
Hesselo, Samso, Christiansô et à l'île de Sylt {Kjaerbôlling), soit
jusqu'au 53^
Cet oiseau se montre en hiver sur les côtes de la Suède (Nilsson), de
l'Allemagne [Naumann^ Reichenoio) et de la Hollande {Schléffel),
mais rarement sur les côtes occidentales de l'Angleterre, et acciden-
tellement sur celles de l'Irlande {Seebohm). Ce n'est que pendant les
hivers rigoureux qu'on voit quelques-uns de ces oiseaux sur les côtes
de Belgique et de France; dans ce dernier pays, des captures isolées
ont même été faites dans la Brenne {R. Martin), dans le Dauphiné
{Bouteille), le Gard {Crespon), les Landes {Dubalen), l'Aude, l'Hérault
et sur les côtes du département des Pyrénées-Orientales {Lacroix).
Les ouragans chassent parfois des Eiders encore plus vers le Midi, ou
loin dans l'intérieur des terres, car on en a capturé en Alsace
[Kroener), en Lorraine {Godron), en Suisse {Scimiz), en Tyrol
{Althammer), sur plusieurs points de l'Italie et même en Dalmatie
{Giglioli) et en Bohême près de Plan à l'ouest de Pilsen {Fritsch).
La var. Dresseri niche au Labrador, à Terre-Neuve et dans la baie
d'Hudson, et hiverne probablement sur les côtes du Maine, du Nou-
veau-Brunswick et de la Nouvelle-Ecosse.
Mœurs. — L'Eider est sédentaire en Islande et dans quelques par-
ties les plus méridionales de son aire de dispersion, où les courants
empêchent la mer de geler; plus au Nord, il émigré régulièrement en
— 496 —
septembre et octobre, mais les mâles paraissent partir avant les
femelles et leurs jeunes; « à cette époque, dit A. Brehm, ces oiseaux
se rassemblent dans certaines localités où ils trouvent une nourriture
abondante, et ils couvrent littéralement la mer sur des surfaces de
plusieurs kilomètres carrés. A partir du mois d'avril, ils retournent
vers le Nord, toujours réunis en bandes tellement considérables, que
le chasseur peut plusieurs fois décharger et recharger son arme avant
que le passage soit terminé. >
C'est un oiseau essentiellement marin, n'aimant que l'eau salée et
ne visitant les eaux douces que quand elles se trouvent dans le voisi-
nage de la mer, et encore ne se montre- t-il le plus souvent que sur les
fleuves non loin de leur embouchure. Il ne se tient pas seulement
près des côtes, mais encore en pleine mer à plusieurs kilomètres du
rivage. Sur terre il ne se meut que difficilement, en vacillant et tombe
à chaque instant sur sa poitrine, aussi ne march-e^-il guère volon-
tiers. Son vol est également pénible et les coups d'ailes continuels
qu'il est obligé de donner le fatiguent beaucoup ; il ne vole générale-
ment qu'à une faible hauteur et en ligne droite. Nilsson dit qu'un
Eider qui s'égare au milieu des terres se laisse prendre à la main ;
en avril 1841 il a obtenu un exemplaire vivant qui volait en rasant la
terre, mais tomba bientôt et se laissa prendre sans difficulté ; il en a
obtenu ainsi plusieurs au printemps, ramassés sur des terres labou-
rées non loin de Lund, sans qu'ils cherchassent à fuir. L'eau est le
vrai élément de cet oiseau ; il nage en enfonçant peu le corps et avec
plus de rapidité que les Morillons, et plonge à une plus grande
profondeur que ces derniers. En hiver il est sauvage et craintif, se
tient en grandes troupes, les mâles mêlés aux femelles ; au printemps
les Eiders se séparent par couples, perdent alors de leur timidité, et,
quand ils s'aperçoivent qu'on est bien disposé à leur égard, ils se
comportent souvent comme des oiseaux domestiques, surtout les
femelles. Ils se montrent sociables même avec d'autres espèces, mais
au moment de la reproduction, les mâles se querellent et luttent
entre eux pour la possession d'une femelle.
Le cri du mâle peut se rendre par aho, aho, aho; celui de la
femelle par krr, korr, ou korrerr. L'Eider se nourrit surtout de
moules et autres mollusques à coquilles, de crustacés, d'annélides,
de frai et de petits poissons qu'il pêche souvent à plus de dix mètres
de profondeur; ce genre de nourriture donne à sa chair un goût
détestable.
— 497 —
On sait que ce sont les Eiders qui donnent ce précieux duvet appelé
édredon; celui-ci est enlevé du nid à deux reprises : une fois au
moment de la ponte et une seconde fois après 1 eclosion des œufs ;
pour faire une livre d'édredon, il faut en moyenne le contenu de
douze nids. On comprend que ces oiseaux sont d'un rapport considé-
rable pour les peuples septentrionaux qui devraient les ménager
davantage; ils en tuent malheureusement beaucoup pour leur con-
sommation et enlèvent même les œufs. Holbôll dit que le sud du
Groenland produit en moyenne par année 5807 livres d'édredon, et
le nord environ la moitié, soit en tout environ 8710 livres, ce qui
représentait, en 1840, une valeur de 195,975 francs (1).
Reproduction. — D'après de Heuglin, qui a observé les Eiders au
Spitzberg et à la Nouvelle-Zemble, la ponte a lieu, suivant les loca-
lités, en juin ou en juillet, mais on trouve souvent encore des œufs
jusqu'à la mi-août, probablement de femelles dont la première cou-
vée a été détruite.
L'Eider niche sur des îles rocheuses et dans les dunes ; les nids
sont éparpillés ou quelques-uns réunis sur un petit espace, et ils sont
placés entre des pierres, dans des excavations creusées dans le sable
ou dans la partie à sec d'un marais non loin d'un étang ; ces excava-
tions sont garnies d'un peu de mousse et de feuilles de saxifrages, le
tout recouvert d'une épaisse couche du précieux duvet, dans lequel
les œufs sont complètement enfouis (2). La ponte est de cinq à six
œufs d'un vert olivâtre clair et mesurant de 77 à 82 millim. sur 50
à 53. M. Collett dit que, quand le contenu d'un nid dépasse six œufs,
(et on en trouve souvent huit et une fois il en vit quatorze dans un
même nid) ces œufs n'ont pas tous été pondus par la même femelle.
Malmgren dit que les femelles dont on a enlevé les œufs, s'emparent
souvent de ceux d'une autre femelle appartenant parfois à un autre
genre d'oiseaux, d'une Bernache par exemple. La durée de l'incuba-
tion est de vingt-cinq à vingt-six jours.
< Au Labrador, dit Audubon, c'est vers la dernière semaine de
mai que les Eiders commencent à nicher; les nids sont construits sur
des îles entre de maigres touffes d'herbes, sous des branches basses
de pins, et l'on trouve parfois de cinq à huit nids sous le même buis-
son. Beaucoup sont placés sur la pente des rochers qui se projettent
(1) Holbôll, Ornith. Beitrag zur Fauna Groenlands, p. 69.
(2) Voy. von Heuglin, RcUen nach dam Nord Pularmeer , I, p. 105 et III p. 137.
ToM II. — 1892. 63
— 498 -
à quelques pieds au-dessus de la limite des hautes eaux.... Enfoncés
en terre autant que possible, ils se composent d'herbes marines, de
mousses et de brindilles sèches, croisées et entrelacées avec assez de
soin, pour donner un air de propreté à la cavité centrale, qui
n'excède pas cinq pouces en diamètre. La ponte commence aux pre-
miers jours de juin, et tant qu'elle dure, le mâle ne quitte pas sa
femelle.... >. Audubon oublie le duvet qui forme cependant la partie
essentielle du nid. La femelle conduit ses poussins à la mer dès qu'ils
sont secs et souvent le jour même de leur éclosion, et ils nagent et
plongent aussitôt; c'est d'ailleurs sur la mer qu'ils sont le plus en
sûreté et le plus à l'abri des Faucons, des Corbeaux et des Goélands,
leurs ennemis les plus à craindre. Si la mère est tuée avant que les
jeunes puissent se passer d'elle, une autre les adopte, les prend sous
sa protection et les traite comme ses propres petits.
« Peu de jours après la ponte, dit A. Brehm, la femelle couve déjà
avec persévérance ; là où elle est habituée à l'homme, elle n'aban-
donne pas ses œufs quand on l'approche ; elle se contente de baisser
la tête contre le sol, d'ouvrir un peu les ailes pour se rendre invisible.
La couleur de son plumage s'harmonise généralement si bien avec
celle du sol, qu'un œil inexpérimenté l'aperçoit difficilement. J'y ai
souvent été trompé, et j'étais fort étonné de me sentir tout à coup
pincer violemment par une femelle d'Eider que je n'avais pas vue. Dans
les îles même qui sont éloignées de toute habitation, les Eiders se
laissent approcher de très près avant de s'envoler. Quant à ceux qui
nichent près des habitations, on peut les prendre, regarder leurs œufs
et les remettre sur leur nid, sans qu'ils songent à s'envoler. Je me
suis souvent amusé à m'asseoir à côté d'un de ses oiseaux, à le cares-
ser, à glisser ma main sous son ventre, entre lui et ses œufs, et très
souvent l'Eider ne songeait pas à s'enfuir. Quelques-uns mordaient
mes doigts, comme en jouant ; d'autres ne donnaient pas le moindre
signe de mécontentement. J'en enlevai du nid et les portais un peu
plus loin ; ils y revenaient comme si rien ne leur était arrivé ; ils
mettaient le duvet en ordre et, en ma présence, reprenaient leur
fonction de couveuses. Les plus craintifs se sauvaient et toujours
souillaient leurs œufs de leurs excréments; mais jamais ils ne volaient
loin, et ils ne tardaient pas à revenir prendre place sur leurs œufs. Si
rien ne la dérange, la femelle quitte son nid le matin, mais avant de
s'éloigner, elle a soin de recouvrir les œufs de duvet. Elle s'en va
vers la mer aussi rapidement que ses moyens le lui permettent ; elle
- 499 —
ploDge avec activité pendant environ une demi-heure, remplit outre
mesure son jabot de coquillages et revient à son nid.
« Les mâles sont toujours plus craintifs, même au commencement
de la ponte, quand ils accompagnent les femelles à terre et qu'ils
montent la garde auprès du nid, S'approche-t-on d'eux, ils s'agitent
beaucoup, lèvent et baissent la tête, appellent leur femelle, se sauvent
moitié volant, moitié culbutant, jusqu'à la mer. »
L'Eider à tête grise ou royal {Somateria spectahilis, Lin.) figuré
pi. 269, n'a pas encore été pris en Belgique. C'est sur deux jeunes
sujets tués l'un près de Boulogne, l'autre sur nos côtes il y a une cin-
quantaine d'années, que repose l'introduction de cette espèce dans la
faune belge. Mais comme les jeunes ressemblent beaucoup à ceux de
l'Eider commun, il est plus que probable qu'il y ait eu erreur de déter-
mination ; je crois donc prudent de le supprimer de mon ouvrage. Il
est cependant à noter que quelques exemplaires de l'Eider royal ont
été tués sur les côtes d'Angleterre et d'Ecosse, ainsi qu'aux îles Orcades
et Shetland et même en Irlande {Seebohm). Il n'est donc pas impossi-
ble que l'on prenne un jour ce bel oiseau sur nos côtes, d'autant plus
que M. Ch. van Kempen signale la capture d'une paire adulte près de
Dunkerque.
OENRE CLIV.
MACREÏÏSE. — OIDEMIA.
Anas, Briss. Orn. VI, p. 420 (1768) ; Lin. S. N. I, p. 196 (1766).
OïDEMiA, Flem., Phil.Zool. II, p. 260 (1822).
Melanitta, Boie, Isis, 1822, p. 564.
Platypus, Brehm, Lehrb. II, p. 820 (1824).
FuLiGULA, Nutt, Ma7i. Orn. II, p. 422 (1834i.
Œdemia, Coues, Key, p. 293 (1872).
OïDEMA, OIphe-Gal., Conlrïb. Fn. Orn. fiisc. III, p. 22 (1888).
Car. — Bec plus court que la tête, robuste, élevé, large, à mandibule supé-
rieure renflée ou gibbeuse à la base, déprimée à l'extrémité, Tonglet très
large et couvrant l'extrémité de la mandibule; lamelles larges, espacées, peu
ou point visibles ; narines submcdianes, ovales ; ailes de longueur moyenne,
aiguës ; queue courte, conique, les rectrices terminées en pointe, les médianes
dépassant un peu les autres; jambes placées très en arrière du corps; tarses
pins courts que le doigt interne.
Ilab. — Ce genre est réparti dans la zone circompolaire, et les
quelques espèces qui le composent hivernent sur les côtes des pays
tempérés.
— 500 —
269. — La Macreuse noire.
OIDEMIA NIGRA Flem. ex Briss.
(PL 270).
Anas NIGRA, Lin. Syst. Nat.,^^. 123 (1758) ; I, p. 196 (1766).
Anas cinerascens, Bechst. Orn. Taschenb., p. 437 (1803).
Anas ATRA,Pall. Zoogr. Rosso-As. II, p. 247 (1811).
OïDBMiA NIGRA, Flem. PJiil. Zool. II, p. 260 (1822).
Melanitta NIGRA, Boie, Isis, 1822, p. 564.
Platypus NIGER, Brehm, Lehrb. Nat: eur. Vôg. II, p. 820 (1824).
Melanitta nigripes, megauros et gibbera, Brm. Isis^ 1830, p. 998.
FuLiGULA NIGRA, Degl. Orn. eur. II. p. 470 (1849).
OïDEMiA nigripes, megaurus et GIBBERA, Brm. Naumannia, 1855, p. 298.
SoMATERiA NIGRA, de Selys-Long., Patria Belgica, I, p. 277 (1873).
OïDBMA NIGRA, Olphe-Gal. Contrib. Faune Orn. Eur. occ, fasc. III p. 22 (1888).
Die Tbaubrente, en allemand.
The Common Scotkr, en anglais. —
DeZwarte Zeeëend, en flamand.
Var. Americana.
Anas americana, Wils. Am. Orn. VIII, p. 135, pi. 72 (1814).
FuLiGULA (Oidemia) NIGRA, Bonap . Syn. p. 390 (1828).
OïDEMiA americana, Sw. 6t Rich. Faun. Bor.-Am. II, p. 450 (1831).
FuLiGULA (Oidemia) americana, Nutt. Mon. Orn. II, p. 422 (1834).
Melanitta americana, Eyt. Mon. Anat. p. 144 (1838).
FuLiGULA americana, Audub. Orn. Biog. V. p. 117 (1839).
Œdemia americana, Coues, Key N.-Am. B. p. 293 (1872) .
Œdbmia NIGRA var. Americana, Ridgw. Ann. Lye. N.-Y. X, p. 390 (1874).
Taille. — 0'^48; ailes, 0,24.
Description du mâle adulte. — D'un noir uniforme brillant, avec de légers
reflets bleuâtres et violacés à la tête et au cou ; ailes sans miroir. Bec noir,
la partie moyenne de la mandibule supérieure, les narines et le sillon qui
divise la protubérance d'un beau jaune orange ; iris brun ; pattes d'un brun
cendré, les palmures noires.
Femelle. — Gibbosité du bec moins développée ; dessus de la tête, nuque et
partie postérieure du cou d'un brun sombre ; joues, gorge, devant et côtés de
la moitié supérieure du cou d'un cendré clair varié de blanc et tacheté de
brun ; dessus du corps d'un brun noirâtre avec les bordures des plumes d'un
cendré roussâtre; bas du cou, haut de la poitrine, flancs et sous-caudales
bruns, les plumes bordées de cendré roussâtre ; bas de la poitrine et abdomen
d'un brun cendré, le bord des plumes plus pâle ; rémiges et rectrices d'un
brun sombre.
Jeune. — Ressemble à la femelle, mais les teintes plus sombres et le bec
d'un noir uniforme.
501 -
Poussin. — Capuchon ample, descendant jusqu'au niveau des commis-
sures, derrière du cou, manteau jusqu'à l'extrémité des tiges caudales, dessus
des ailes et des cuisses d'un brun enfumé; poitrine et flancs de cette couleur,
mais un peu plus pâles; gorge, devant et côtés du cou, ventre et abdomen
gris, fondus latéralement avec la teinte brune; mandibule supérieure d'un
noir plombé avec l'onglet roux ; mandibule inférieure d'un brun roux ;
pieds brun olivâtre, les membranes plus foncées ; iris brun (J. Vian).
Var. Amerieana. — Ne diffère du type européen que par la coloration de
lagibbosité placée à la base du bec: celle-ci est noire chez les sujets d'Europe,
jaune chez ceux d'Amérique.
Hab.
La Macreuse ou Morillon noir habite, en été, toute la zone
.^ polaire de l'Europe et de l'Asie
il i jusqu'au 74° 1. N. (Middendorff),
y compris l'Islande {Faber), le
sud-ouest de la Nouvelle-Zem-
ble, Waigatz (de Heuglin) et les
les Féroé {Feilden); elle est
abondante sur les nombreux lacs
de la Finlande {Palmén), et
quelques couples nichent égale-
ment en Ecosse {Seebohm) ; elle est commune aux passages dans la
Russie centrale et se montre à cette époque sur les lacs et sur l'Oural
{Sabandeff). En hiver cet oiseau visite en grand nombre toutes les
côtes et les fleuves de l'Europe occidentale jusque dans le nord de la
France, et il est alors commun sur nos côtes maritimes et sur l'Escaut.
On le voit en petit nombre dans le midi de la France {Lacroix), et
accidentellement en Espagne [Saunders], en Italie [Giglioli) et en
Grèce {Lindermayer). Pallas dit qu'il hiverne aussi sur la mer Noire
et sur la mer Caspienne, mais aucun naturaliste récent ne l'a observé
sur ces mers ; mais il visite avec assez de régularité les îles Açores
{Godman), le Maroc [Favier), l'Algérie {Loche) et la Palestine
{Tristram).
En remontant le cours des fleuves, cette Macreuse arrive parfois
loin dans l'intérieur des terres: c'est ainsi qu'on l'a observée en
Pologne {Taczanoivski), en Bohême {Fritsch), en Suisse {Fatio), en
Alsace {Krœrier), etc.
La var. Amerieana habite les côtes et les grandes eaux intérieures
de l'Amérique septentrionale (Coues) et du Kamtschatka {Stejncgcr).
Elle ne paraît pas exister au Groenland ; mais elle est commune dans
— 502 —
l'Alaska, aux îles Aléoutiennes et dans le détroit de Behring {Nelson).
Mœurs. — La Macreuse noire émigré en septembre des contrées
polaires, mais elle ne devient abondante sur nos côtes qu'à la fin
d'octobre et en novembre. D'après Naumann, les vieux partiraient
plus tôt, car on en voit déjà en août sur la Baltique; mais le D' Rei-
chenow fait remarquer qu'on observe souvent, en été, quelques su-
jets isolés le long des côtes allemandes. Le retour vers le Nord a lieu
en mars et avril, mais les passages se prolongent parfois jusqu'en mai.
C'est surtout un oiseau marin, mais il niche dans les marais et
près des étangs et des lacs qui se trouvent dans le voisinage de la
mer; en hiver, il remonte souvent le cours des fleuves et on le voit
alors parfois loin des côtes maritimes: c'est ainsi qu'on en tire chaque
année sur l'Escaut et parfois aux environs de Bruxelles; il recherche
toujours de préférence les grandes eaux profondes, douces ou salées,
et dépourvues d'herbages. —
Cette Macreuse marche avec autant de difficulté que les précédents,
mais elle nage avec une grande aisance, plonge avec facilité et peut
rester sous l'eau plus longtemps qu'aucun autre Canard plongeur;
c'est aussi en plongeant qu'elle pêche les petits animaux dont elle se
nourrit. Son vol est fatigant et bruyant, et quand plusieurs s'envolent
en même temps, elles se suivent ordinairement à la file. Elle est très
sociable et se lie même à d'autres espèces, sans toutefois se mêler à
celles-ci. Elle est aussi prudente que farouche; à l'approche d'un danger
sérieux, elle est toujours la première à donner le signal de la fuite.
Les mâles adultes ne se tiennent généralement pas avec les femelles
et les jeunes, et forment de petites bandes à part.
Pendant la durée des amours, le mâle fait entendre un cri ressem-
blant, d'après Naumann, à skruck luck ; Faber dit que le mâle jette
souvent un cri sifflant mais peu sonore, qu'on peut rendre par
tu-tu-tu-tu, auquel la femelle répond par re-re-re.
La Macreuse noire se nourrit de coquillages, de crustacés, de petits
poissons, de larves, d'insectes et de matières végétales ; ce genre de
nourriture donne à sa chair un goût huileux et rance fort désagréable.
Reproduction. — Cet oiseau ne niche que dans l'extrême Nord. En
Islande, dit Faber, il ne niche qu'en petit nombre et seulement près
du lac Myvatn ; là, on trouve le nid au bord de l'eau, caché sous un
buisson de saules ou de bouleaux. Il construit parfois son nid près
d'une eau fort éloignée de la mer, mais toujours dans un endroit tran-
quille et éloigné de toute habitation humaine. Le nid est formé de
— 503 -
joncs, d'herbes et de feuilles mortes, le tout formant un tas dont l'exca-
vation est garnie de duvet. En Islande la ponte a lieu vers la mi-juin;
dans le nord-est de la Russie, M. Seebohm ne trouva des œufs frais
qu'en juillet. La ponte est de huit a dix œufs d'un fauve pâle et
mesurant environ 63 millim. sur 43.
Le mâle abandonne généralement sa compagne au moment de la
couvaison, sans s'inquiéter de sa progéniture, et va rejoindre sur la
mer les autres mâles.
270. — La Macreuse brune ou lugubre.
OIDEMIA FUSCA, Flem. ex Lin.
(PI. 271).
Anasfosca, Lm.Syst. nat. p. l'23 (1758), I, p. 196 (1766).
Anas nigba major, Briss. Ornith. VI, p. 423 (1760).
Anas fuliginosa, Bechst. Naturg. Deutschl. III, p. 962 (1809).
Anas carbo, Pall. Zoogr. Rosso-As. Il, p. 244 (1811).
Melanitta FUSCA, Boie, Isis, 1822, p. 564.
OïDEMiA FUSCA, Flem. Phil. Zool. II, p. 260 (1822).
Platypus fusgus, Brehm, Lehrb. Naturg. eur. Vôg. II, p. 822 (1824).
Melanitta hornschuchii, megapus, platyrhynchos, Breh. Isis, 1830, p. 998.
FuLiGULA FUSCA, Degl. Om. Eur. II p. 472 (1849),
FuLiGULA LUGUBRis, C. Dub . PL col. Ois. Belg. III, p. 283 (1860).
Somateria fusca, de Selys-Loag. Palria Belgica, I. p. 277 (1873).
Die Sammetente, en allemand.
The Velvet Scoter, en anglais.
De Grootb Zeeëend, en flamand.
Var. Deglandi.
Anas fusca, Wils. Am. Om. VIII, p. 137, pi. 72 (1814).
OïDEMiA FUSCA, Sw. et Rich. Faun. bor. Am. II, p. 449 (1831).
FuLiGULA FUSCA, Audub. Orn. Biog. II, p. 454, pi. 247 (1835).
FuLiGULA BiMACULATA, Herb. (j^une), Field Sports., 2» éd. II, p. 366 (1848) .
OïDEMiA deglandi, Bonap. Rev. crit. p. 108 (1850).
OïDEMiA velvetina, Cass. Pr. Philad. Acad. V. p. 126 (1850).
Melanitta deglandi, Bonap Comp. Rend. sept. (1856).
OïDEMiA (Pelionetta) BIMACULATA, Baird. Birds N. Am. p. 808 (1858).
Melanitta velvbtina, Baird. B. N. Am. p. 805(1858).
FuLiGULA FUSCA VELVETINA, Scob. Brit. B. 111, p. 605 (1885).
Taille du mâle : 0'"47 ; ailes 0,29 ; femelle 2,45; ailes 0,27.
Description du mâle adulte. — D'un noir profuiul, avec une tacho blanche
sous l'œil et uu miroir bluuc sur l'aile. Bec orauge, les narines, la protubc-
— 504 —
rance, deux traits prenant naissance au bord extérieur de celle-ci et abou-
tissant aux côtés de l'onglet, angles et bords des mandibules, noirs; iris
blanc ; tarses et doigts rouges, les membranes noires.
Femelle. — Brune en dessus ; lorams et une tache sur la région paroti-
que blanchâtres ; un miroir blanc sur l'aile ; parties inférieures brunes avec
les plumes bordées de blanchâtre. Bec d'un brun noirâtre, sans protubérance;
iris brun ; tarses et doigts d'un jaune olivâtre.
Jeune. — Ressemble à la femelle adulte, mais les plumes du manteau
bordées de cendré clair et les parties inférieures plus blanches. Tarses et
doigts d'un gris jaunâtre chez la femelle, d'un gris rougeâtre chez le mâle ;
ce dernier a la tête d'un brun uniforme sans taches blanchâtres.
Mâle en été. — Son plumage ressemble alors probablement à celui de la
femelle, dont il doit se distinguer par la protubérance de son bec, la couleur
rouge des pieds et par son iris blanc {Palmén).
Poussins. — Capuchon complet descendant au-dessous des yeux, en avant
jusqu'aux commissures, remontant en arrière, au-dessus des oreilles, d'un
brun noirâtre ; manteau relié au capuchon par une bande sur le derrière du
cou, tiges caudales, dessus des ailes et des cuisses et plastron sur la poitrine
d'un brun un peu moins foncé; quatre taches pâles mais à peine visibles sur
le dos ; gorge et ventre blancs; côtés postérieurs de la tête de cette couleur,
mais assombris par une petite tache sur les oreilles, et par les pointes brunes
du duvet ; abdomen gris ; bec brun avec les onglets plus pâles ; pieds d'un
brun olive ; iris gris brun. (J. Vian).
Var. Deglandi. — Elle a les plumes du front qui descendent davantage
sur le bec, et la tache blanche sous l'œil est plus grande, mais les traits
noirs qui se dirigent de la protubérance du bec à l'onglet n'existent pas
chez la variété.
Hab.
La Macreuse brune
habite en été le nord de la Scandi-
navie, la Laponie (Collett), Wai-
gatz, la Nouvelle-Zemble, le
Spitzberg (de Heuglin), tout le
nord de la Russie et de la Sibérie
{Middendorff) ainsi que le Japon
{Swinhoé). Elle n'existe pas en
Islande, mais visite parfois le
Groenland (Seebohm) et les îles
Féroé {Mûller). En hiver on la
voit régulièrement aux îles Britanniques, mais elle est peu abondante
sur les côtes méridionales et orientales de l'Angleterre et rare
sur celles de l'Irlande {Seebohm). Pendant la saison froide, cet oiseau
- 505 -
se montre communément sur les côtes du Danemark, de l'Allemagne
et de la Hollande, quoique en moins grand nombre que la Macreuse
noire ; en Belgique et dans le nord de la France on ne la voit géné-
ralement qu'en petit nombre, et elle devient de plus en plus rare à
mesure qu'on approche delà Méditerranée. Elle est donc plus ou moins
rare dans le midi de la France {Lacroix), sur les côtes du Portugal
{Barhoza du Bocage), de l'Espagne où, d'après M. Dresser, Lord
Lilford observa une petite troupe en mai 1876 dans le port de San-
tander, en Italie [Gigrlioli) y en Grèce [Lindermayer), aux Cyclades
{Erhardt) et sur la mer Noire {de Nordmann).
Cette Macreuse visite souvent aussi l'intérieur de l'Europe, et elle
n'est même pas rare en hiver sur les lacs de la Suisse {Meisnerei
Schinz)', en France, on l'a capturée dans le Morbihan {Taslê), dans
les départements delà Sarthe {Gentil), de la Seine-Inférieure {Hardy),
du Rhône {Olphe-Gallia?'d), de la Charente-Inférieure et de la Loire
{Beltrém), de l'Indre {Martin), de la Gironde {Dubalen), du Gard
{Crespon), en Savoie {Bally), etc. En Allemagne on la voit chaque
année sur le lac de Eislebe et même parfois dans l'Anhalt {Naumann)
et en Alsace {Kroener), ainsi qu'on Bohême {Fritsch), en Autriche,
en Hongrie {von Pelzeln) et en Pologne {Taczanowski).
Cet oiseau se montre aussi accidentellement au Maroc, en Algérie
{Loche) et dans les lagunes de la Basse-Egypte {de Heuglin).
Outre les parties septentrionales de l'Asie, on rencontre encore
cette espèce, au passage ou en hiver, près de la mer Caspienne
{De Filippi, Raddé), au Turkestan {Severtzoïo), dans la Sibérie orien-
tale {Taczanoioski), dans le nord de la Mongolie {Radde), en Chine
{David) et au Japon. D'après M. Stejneger, les sujets de l'Asie orien-
tale appartiendraient à la var. Deglandi ; mais M. Swinhoe dit que
les deux formes se montrent en Chine et au Japon.
La var. Deglandi habite particulièrement les côtes et les grandes
eaux intérieures de l'Amérique septentrionale {Coues) et le Kamt-
schatka {Stejneger).
Mœurs. — Les grands froids obligent cette Macreuse à émigrer à
l'approche de l'hiver; c'est fin octobre et en novembre qu'elle quitte
la zone polaire pour y retourner fin février et en mars. Le voyage se
fait ordinairement la nuit et par troupes, tous volant à la tilo et en
ligne obli(j[ue.
Cet oiseau vit sur la mer comme sur les eaux douces, et il se
montre même sur les rivières et les lacs situés parfois loin des côtes
TOM. II. — 1893. 64
— 506 -
maritimes ; il évite cependant les eaux douces garnies de joncs et de
roseaux, car il lui faut une surface d'eau étendue et libre. Son cri
ressemble à arr, arr, arp! 11 se nourrit comme l'espèce précédente.
La Macreuse brune ou double Macreuse est très sociable et se mêle
souvent aux bandes de Macreuses noires. Elle marche et vole lourde-
ment mais nage et plonge avec une grande aisance. Plusieurs auteurs
disent qu'elle est peu farouche et qu'elle se laisse prendre aux pièges
les plus grossiers; A. Brehm affirme le contraire: « je puis certifier,
dit-il, d'après mes propres observations, qu'en Norwège du moins,
c'est le plus timide de tous les fuligulidés. Ce fut à DovreQeld que je
vis les premières Macreuses; elles étaient par paires, car c'était l'épo-
que des amours. Je cherchai, mais en vain, à en tuer. Il est vrai que
l'habitude qu'elles ont de toujours se tenir au milieu de l'eau, contri-
bue puissamment à rendre leur chasse fort difficile. Plus tard, en
Laponie, j'en rencontrai de nombreuses familles fumais toujours ces
oiseaux se montraient fort prudents. Tous ceux que| j'ai pu observer
vivaient pour eux-mêmes sans s'inquiéter des autres oiseaux. »
Reproduction. — La Macreuse brune niche fin juin ou en juillet, au
bord des étangs assez voisins de la mer. Le nid est ordinairement
établi au milieu des hautes herbes, près d'un monticule ou d'une
pierre, ou sous un buisson de saules ou de bouleaux. Il est grossière-
ment fait de branches, de chaumes et de feuilles mortes, et l'intérieur
est garni de duvet. La ponte est de huit à dix œufs d'un blanc jau-
nâtre ou grisâtre, et ils mesurent environ 73 millim. sur 47.
Aussitôt que les poussins sont éclos, ils suivent leur mère sur l'eau
qu'ils ne quittent presque plus; ils se reposent sur des pierres s'élevant
hors de l'eau ou sur le dos de leur mère. Ils passent d'ailleurs les pre-
miers temps de leur existence dans des endroits peu profonds et
où il y a abondance de crustacés et de mollusques ; Gadamer dit que
les jeunes prennent aussi très adroitement des mouches et autres
insectes, et qu'ils font parfois de grands sauts pour les attraper.
271. — La Macreuse à lunettes.
OIDEMIA PERSPICILLATA, Steph, ex Lin.
(PI. 272)
Anas PERSPICILLATA, Lin. Syst.nat. I, p. 201 (1766).
Anas latirostris, Bodd. Tabl. PL col. p. 58 (1783).
Melanitta PERSPICILLATA, Boie, Isis., 1822, p. 564.
Platypus perspicillatus, Brehm, Lehrb. Naturg. eur. Yôg. Il, p. 823 (1823).
— 507 -
OïDEMiA PER3PICILLATA, Steph. Shaw's Gen. Zool. XII, 2, p. 219 (1824).
FuLiGULA (Oidemia) perspicillata, Bonap. v1?î. Lî/c. Nat. Hist. N.Y. II, p. 389 (1826).
Macroramphus perspicillatus, Less. Man. (TOrn. II, p. 414(1828).
Pelionetta perspicillata, Kaup. Naturl. Si/st. p. 107 (1829).
FuLiGULA perspicillata, Aud. Orn. Biocjr. IV, p. 161, pi. 317 (1838);
Somaterla. PERSPiciLL-iTA, Holb. Om. Beitr. Fauna Groenl. p. 77 (1846).
Pelionetta trowbridgii, Baird, B. N. Am. p. 806 (1858).
Œdemia PERSPICILLATA, uar. trowbridgei, Cou.es, Key N. Am. B., p. 295(1872).
Œdemia PERSPICILLATA, Coues, B. Northwest., p. 582 (1874).
Die BkiLLENENTE, en allemand.
Thb Surf- Scotter, en anglais.
De Brillen Zeeëend, en flamand.
Taille : 0'"45 ; ailes 0'"245.
Description du mâle adulte. — D'un noir uniforme, sans miroir sur l'aile,
avec une grande tache blanche sur le devant de la tête et une autre de même
couleur occupant presque toute l'étendue de la nuque ; rémiges et queue noi-
râtres. Bec jaune varié de rouge, avec une grande tache noire, de forme
presque carrée, sur chaque protubérance latérale ; iris blanc ; pattes rouges,
les membranes noires.
Femelle. — D'un brun tirant sur le cendré, plus sombre en dessus, avec
une calotte noirâtre sur la tête ; une tache blanchâtre devant l'œil et une
autre couvrant la région des oreilles ; milieu de l'abdomen d'un blanc
grisâtre ; rémiges et queue d'un brun noirâtre. Bec brun, sans renflements
latéraux ; iris gris ; pattes d'un gris rougeâtre, les membranes noires.
Cette femelle ressemble beaucoup à celle de la Macreuse brune, mais s'en
distingue à première vue par l'absence de miroir blanc sur l'aile.
Jeune. — Ressemble à la femelle.
Hab. — La Macreuse ou Morillon à lunettes est une espèce amé-
ricaine qui habite, en été, toutes
les côtes et les grands lacs de
l'Amérique du Nord entre le 50**
et le 70" 1. N. ; elle hiverne sur
les côtes et les lacs de Etats du
Sud jusque dans la Basse-Cali-
fornie, la Floride et la Jamaïque
(Coucs). Elle est rare au Groen-
land [IlolbOll) et se montre très
accidentellement aux îles Bermudcs {Scehohm), Féroé {Collin), Hel-
gokind {de Srlijs-Longchatnps) et aux îles Britaniiiqut^s.
M. llarting signale douze captures en Grande-Bretagne de 1847 à
— 808 —
1868 ; depuis cette époque deux sujets furent tués aux îles Orcades
en 1875 et 1879, un autre à l'île Hoy en 1872, deux autres près de
Stromness en 1872 et 1880; la même année on fit encore une capture
en octobre près de Clontarf en Irlande; enfin le 9 décembre 1882,
une femelle fut tuée sur le Ribble {Seehohm). Sur le continent, cette
espèce a été prise plusieurs fois en Laponie {Malmgren) ; Nilsson
mentionne un sujet tué en 1833 près de Karesuando et un autre près
de Calmar en 1846 ; le D"" Palmén signale également deux captures :
l'une près d'Aeland en 1866 et une près de Pojo en 1867, et le pro-
fesseur Malmgren a constaté une troisième capture dans la même
région. Feu mon père a annoncé qu'une femelle de Macreuse à lu-
nettes avait été tuée sur la côte de Belgique en 1845. Pour la France,
Degland dit : « On la rencontre sur les côtes maritimes de l'Artois,
de la Picardie et de la Normandie ; un jeune sujet a été tué près de
Calais dans l'hiver de 1835; en 1841, un autre -mijet a été trouvé,
dans la même saison, sur le marché de Caen. » Dans la nouvelle
édition de V Ornithologie européenne, M. Gerbe ajoute : « On l'ap-
porte assez souvent sur le carreau de la Vallée à Paris : nous l'y
avons vue en 1845, 1846 et 1852 ; en 1864, quatre ou cinq individus
y ont été rencontrés dans le courant de l'hiver. » Naumann signale
avec doute la capture d'une femelle sur le Rhin.
Mœurs. — Cette Macreuse émigré en septembre de l'Amérique
boréale pour hiverner sur les côtes et les grandes eaux intérieures
des Etats du Sud, mais elle séjourne sur les grands lacs jusqu'à ce
que la gelée les ait couverts de glace. En hiver elle est commune
sur toutes les côtes orientales depuis la Nouvelle-Ecosse jusqu'à la
Caroline. C'est un oiseau très sociable qui voyage souvent en compa-
gnie de Miquelons et de Macreuses américaines.
A mesure que le froid augmente, les bandes se dirigent de plus en
plus vers le Sud, mais dès le mois de février commence graduellement
le retour vers le Nord ; en avril ils sont de nouveau dans les lieux de
la reproduction.
La Macreuse à lunettes vit aussi bien sur la mer que sur les eaux
douces, on la rencontre dans les toundras comme dans les contrées
boisées parsemées de lacs et d'étangs ou arrosées par une rivière. Elle
se nourrit principalement de coquillages et autres mollusques, ainsi
que de petits poissons, larves et insectes aquatiques.
Reproduction. — Cet oiseau niche entre les herbages ou sous un
buisson, au bord d'un étang ou dans un marais sur une légère éleva-
— 509 -
don à l'abri de l'eau. Le nid est formé de bûchettes, de feuilles et
d'herbes sèches et l'intérieur est garni de duvet. La ponte est de cinq
à huit œufs, couleur café au lait ; ils mesurent environ 58 millimètres
sur 43.
SOUS-FAMILLE
DES MERGINÉS. — MERGIN/E.
Car. — Bec mince, aussi long ou plus long que la tête, rarement plus
court, droit, épais et déprimé à la base, puis effilé et cyUndrique jusqu'à
l'onglet ; lamelles représentées par des dents cornées dirigées en arrière et
visibles quand le bec est fermé, mais ces dents ne ressemblent pas à celles
des autres vertébrés, ce sont simplement des lamelles dentiformes ; narines
latérales, elliptiques ; ailes de longueur moyenne, aiguës ; jambes placées en
arrière du corps; tarses plus courts que le doigt interne; pouce élevé, muni
d'un lobule.
Plumes de la tête plus ou moins allongées et formant une huppe.
Cette division ne comprend qu'un seul genre, celui des Harles. "
Hab. — La zone froide des deux mondes.
Mœurs. — Les Harles sont plus ou moins marins, mais ils se repro-
duisent près des eaux douces. Ils nagent et plongent à la perfection
et se nourrissent principalement de poissoDs et autres petits animaux,
qu'ils vont parfois chercher au fond de l'eau ; leurs mœurs ont du
reste de grands rapports avec celles des Fuligulinôs. Comme certains
de ces derniers, ils nichent sur le sol ou dans des arbres creux.
GENRE CLV
HARLE. — MERGUS.
Mergus, Lin. Syst. nat. (1758j et 1, p. 208 (1766).
Mekganser, Briss. Omith. VI, 231 (1760j.
Mergellus, Selby, Cat. Gen. B. p. 47 (1840).
Car. — Ceux de la sous-famille.
272. — Le Harle blanc ou piette.
MERGUS ALBELLUS, Lin.
(PI. 273.)
Merganser cristatus minor et m. stellatu-s, Hiiss. Ormth. VI, pp 243, 252 (1760).
Mergus ALUELLUset minutus, Lin.^'y^. nat. I, p. 20'J (1766).
- 510 —
Mergus albulus et pannonicus, Scop. Ann. I. Eist. nat. pp. 71, 72 (1769).
Merganser albellus, Bodd. Tabl. PL enl. p. 27 (1783).
Mergellus albellus, Selby, Gen. and subgen. B. p. 47 (1840).
Der Kleine Sager, en allemand.
The Smbw, en anglais.
Het Nonnetje, en flamand.
Taille du mâle : 0^37; ailes 0'"21; femelle : 0°^32; ailes 0^18.
Description du mâle en plumage de noce. — Tête et cou d'un blanc pur, avec
une grande tache noire sur les côtés de la tête et contournant l'œil, et une
bande de même couleur de chaque côté de l'occiput et recouvertes en partie
par les longues plumes blanches de la huppe ; poitrine blanche ; manteau, dos
et deux longs croissants de chaque côté de la poitrine, noirs; scapulaires
blanches, mais à bord externe noir, les plus longues d'un cendré noirâtre 5
petites couvertures des ailes noirâtres; les moyennes blanches,les plus grandes
noires terminées de blanc; rémiges primaires noirâtres, les secondaires
noires terminées de blanc; sus-caudales cendrées ; queue^'un brun cendré ;
parties inférieures blanches, les flancs barrés de zigzags cendrés. Bec d'un
gris bleuâtre ; iris d'un blanc bleuâtre ; pattes gris de plomb avec les mem-
branes noirâtres.
Femelle. — Tête jusqu'au dessous des yeux et nuque d'un roux sombre ;
gorge, devant et côtés du cou d'un blanc pur ; bas du cou d'un cendré rous-
sâtre; manteau, dos, scapulaires et sus-caudales d'un cendré brunâtre, plus
sombre au manteau; petites couvertures des ailes cendrées, les moyennes
blanches, les plus grandes noires terminées de blanc; rémiges primaires noi-
râtres, les secondaires noires terminées de blanc; parties inférieures blan-
ches,les côtés de la poitrine et les flancs cendrés; queue d'un cendré brunâtre;
iris brun clair.
Mâle en été. — Ressemble à la femelle, mais la huppe plus développée, le
manteau plus sombre, le jabot d'un gris clair avec les bordures des plumes
plus pâles ; l'iris blanc.
Jeune. — Ressemble également à la femelle, mais ses teintes sont moins
pures, la huppe nulle, les couvertures blanches des ailes sont en partie grises;
iris brun foncé.
Poussin. — Large capuchon descendant au-dessous des yeux jusqu'aux
commissures, derrière du cou, manteau, faces externes des ailes et des cuisses
d'un brun noir, varié par des bordures aux ailes et quatre taches blanches
disposées sur le dos comme les quatre angles d'un carré ; haut du dos et
plastron sur la poitrine d'un brun plus pâle; gorge, joues, ventre et abdomen
d'un blanc pur; bec noirâtre avec les onglets d'un jaune roussâtre; pieds d'un
brun olivâtre avec les membranes plus foncées, mais bordées de gris le long
des doigts. (J. Vian.)
- 511 —
Hah.
Ce bel oiseau habite le nord de l'Asie et de l'Europe,
^f^ depuis l'île de Behring dans le
' " Pacifique {Stejneger)^ la Sibérie
îjj et la Russie jusqu'aux mers Bal-
ly tique et du Nord, sans dépasser
le cercle polaire arctique. Il est
commun dans le nord de la
Russie et dans les gouverne-
ments de Kasan, d'Orenbourg,
de Saratow, de Simbirsk et de
Moscou {Bogdanow, etc. )y mais ne paraît pas nicher au suddu 55°1. N.;
Bogdanow l'a trouvé nichant dans la vallée du Kama et du Volga
inférieur. Il est assez rare en Finlande {Palmén), dans la région de
St-Pétersbourg [Bûchner) et sur les côtes de la Suède {Xilsson), mais
ne visite que très accidentellement le midi de la Norvège [Collett).
Il est rare aux îles Britanniques, qu'il ne visite qu'en hiver, et on le
voit le plus ordinairement sur les côtes et les eaux intérieures des par-
ties orientales de l'Ecosse et de l'Angleterre, irrégulièrement sur les
côtes occidentales et en Irlande {Seebohm).
En hiver, le Harle piette est plus ou moins commun en Pologne
(rûe^«noi^5;fez), en Autriche-Hongrie {Hinterberger, Bonomi, Kocyan),
en Allemagne (Naumann), au Danemark {KJaerbôllmg), en Hollande
(Schlégel), en Belgique, ainsi qu'en Suisse {Meisner et Schinz).
Il est de passage dans le nord de la France {Degland), mais ne se
montre dans le midi que pendant les hivers très rigoureux [Lacroix);
il en est de même en Espagne [Saunders, Yayreda) et en Portugal
{du Bocage), mais il se montre plus régulièrement en Italie, surtout
dans le nord, en Sardaigne {Giglioli), en Sicile [Malherbe), à l'île de
Malte [Wright), en Grèce [Lindermayer), en Turquie [Elives et
Buckley), en Bulgarie et dans la Dobrodja [Alléon); il hiverne en
grand nombre près de la mer Noire {de Nordmann) et au Caucase où
il séjourne jusqu'à la mi-avril [Radde).
En Afrique, on ne voit cet oiseau que tout accidentellement au
Maroc [Irby), en Algérie [Loche) et en Palestine [Tristram).
En Sibérie ce Harle est commun ^^^^viowi [Taczanonski); il hiverne
au Turkestan [Severtzow) et jusque dans le nord de l'Inde {Jerdon);
il est très commun sur les fleuves et les lacs de la Chine centrale et
passe en grand nombre à Pékin à la fin de la saison froide {David);
il hiverne également au Japon [Temminck et Schlégel).
— 512 —
Mœurs. — Le Harle piette arrive dans nos contrées en novembre
et en décembre suivant les rigueurs de la saison, et nous quitte en
février ou mars. Il voyage par petites troupes et le plus souvent pen-
dant la nuit.
Cet oiseau ne montre aucune prédilection pour la mer, et s'est tout
au plus s'il se montre à l'embouchure des fleuves et dans les anses où
la mer est peu agitée. Ce sont les eaux douces qu'il recherche, et de
préférence les eaux courantes; pendant ses voyages, il suit ordinai-
rement le cours des fleuves et des rivières, dont il s'écarte parfois
pour visiter les lacs et les étangs. Chez nous, il est assez abondant
pendant les hivers froids dans les marais du nord de la Campine, dans
les polders, sur l'Escaut et sur la Nèthe, et on le voit même parfois
sur les eaux des environs de Bruxelles.
Au repos comme en marchant, ce palmipède tient le corps hori-
zontal, le cou recourbé en S; la huppe est ordinairement couchée,
mais l'oiseau la redresse souvent, surtout quand il est excité. Il nage
avec le corps très enfoncé et se meut entre deux eaux avec la plus
grande agilité; quand il plonge, il se dirige dans l'eau en tout sens
pour poursuivre sa proie, et ne revient à la surface que beaucoup plus
loin, parfois à quarante ou cinquante mètres de l'endroit où il a fait le
plongeon. Son vol est rapide, rectiligne et silencieux. En toute occa-
sion ce Harle se montre vif et actif, et les plus grands froids ne
peuvent lui enlever sa bonne humeur; il est cependant prudent,
défiant, fuit l'homme de loin et lui échappe le plus souvent en plon-
geant.
L'attachement que cet oiseau témoigne au Garrot sonneur est vrai-
ment remarquable, aussi est-il rare de voir des Harles piettes qui ne
soient pas accompagnés d'un Garrot ou deux ; cette amitié, dit
Brehm, résiste même à la captivité, et l'on a vu plus d'une fois dans
des jardins zoologiques, des Harles piettes venir s'établir volontaire-
ment sur l'étang occupé par des Garrots. Pendant l'hiver cet oiseau
est assez silencieux; son cri ressemble à kr, kr d'une voix rauque. Sa
chair n'est pas recommandable.
La nourriture de ce Harle consiste en crustacés, insectes et larves
aquatiques, petits poissons et jeunes grenouilles, et généralement
c'est dans l'eau qu'il poursuit sa proie. « C'est, dit Naumann, un diver-
tissement fort agréable que de voir une troupe de ces Harles en train
de pêcher. Ils nagent serrés les uns contre les autres, disparaissent
tous à la fois, et l'on voit les bouillonnements de l'eau qu'ils agitent.
- ol3 —
Bientôt ils reparaissent l'un après l'autre, mais séparés et souvent à
trente ou cinquante mètres de l'endroit où ils avaient plongé. Ils se
rassemblent, plongent de nouveau, et continuent longtemps ce
manège. Une ouverture dans la glace, de quelques pieds carrés à
peine, leur suffit pour plonger et pour pécher leur nourriture sous la
couche glacée qui recouvre la rivière; ils retrouvent toujours cette
ouverture pour respirer et sortir, ce qui prouve bien qu'ils voient par-
faitement sous l'eau. Si le cours d'eau qu'ils habitent n'est pas assez
poissonneux, ils en fouillent le fond pour prendre des grenouilles,
des larves et des insectes. Des Harles piettes réunis sur un petit
étang riche en menus poissons, y font l'eiïot do poissons volants, ils
s'élancent hors de l'eau, y plongent de nouveau et produisent un tour-
billonnement continuel. Ces oiseaux ont pour habitude de plonger
tous ensemble, et cela afin de surprendre les poissons et les pour-
suivre dans toutes les directions; ce qui échappe à l'un devient la
proie de l'autre. >
Reproduction. — Cet oiseau niche au bord des eaux dans des
arbres creux ou dans les petites caisses disposées pour faciliter la
reproduction des Garrots, mais on ne connaît pas grand' chose sur la
construction du nid. Ni M. Wolley, ni MM. Harvie-Brown et See-
bohm ne parvinrent à trouver des nids, lors de leur voyage dans le
nord de laRussie, mais ils finirent par se procurer des œufs trouvés par
d'autres dans des arbres creux ou dans des caisses disposées pour
des Garrots. La ponte paraît être de six à huit œufs, huit à douze
d'après A. Brehm, qui reposent sur une couche de duvet. Ces œufs
sont d'un blanc crème et mesurent environ 55 millim. sur 38.
273. — Le Harle bièvre.
MERGUS MERGANSER, Lin.
(PI. 274).
Merganser et merganser cinereus, Briss. Omith. VI, p. 231, 255 (1760)
Mergus merganser et m. castor, Lin. Syst. nat. I, pp. 208, 209 (1766).
Mergus gulo, Scop. Ann. 1 . Eist. nat. p. 69(1708).
Mergus rubricapillus, Gm. Syst. Nat. I, p. 5-15 (1788).
Mergus baucedula, Bonnat. Encyd. p. 101 (1790).
Merganser raii et m. gulo, Leach, Syit. Cat. Mam. D. Bf. Mks. p. 36 (1816)
Merganser castor, Bonap. Co»ip. List Ij. p. 59 (1838).
Mergus orientalis, Goukl, Proc. Zool. Soc. 1845, p. 1.
TumU.— 1893. 65
- 514 -
Mergus AMERiCANUS, Câss. Proc. Ac. ncit.sc. Philad. 1853, p. 187.
Mergus castor AMERICANUS, Bonap. Comp. Rend. XLIII, p. 652 (1856)
Mergus major, C. F. Dub. PL col. Ois. Bel<j. III pi. et p. 268 (1860).
Mergus squamatus, Gould, Proc. Zool. Soc. 1864 p. 184.
Mergus merganser americanus, Ridgw. Proc. U. S. Nat. Mus. III, p. 205 (1880).
Der grosse Sager, en allemand.
The Goosander, en anglais.
De Groote Zaagbek, en flamand.
Taille : 0",54 ; ailes 0,29. La femelle est un peu plus petite.
Description du mâle en plumage de noce. — Tête et cou d'un noir verdâtre
à reflets, tirant au noir à la gorge, les plumes du vertex allongées et formant
une huppe touffue ; base du cou blanc ; haut du dos et scapulaires supérieures
d'un noir profond ; le reste du dos, croupion et sus-caudales d'un gris cendré,
le croupion varié de zigzags blanchâtres; couvertures des ailes blanches,
teintées de jaune orangé très clair; la majorité des scapulaires blanches,
lisérées extérieurement de noir ; bord de l'aile et rémiges ^imaires noirâtres;
queue d'un brun cendré ; dessous du corps d'un blanc teinté de nuance aurore
(cette teinte aurore disparaît chez les individus conservés dans les collections
et les parties inférieures deviennent alors complètement blanches). Bec et
pattes rouges ; iris d'un brun rouge.
Femelle. — Tête et cou d'un roux vif, les plumes du vertex et de la nuque
longues, effilées et formant une huppe d'une teinte plus sombre; gorge blan-
che; bas du cou en arrière, dos, croupion, sus-caudales et scapulaires supé-
rieures d'un cendré foncé au centre des plumes et d'une teinte plus claire sur
les bords ; couvertures des ailes et le reste des scapulaires d'un cendré plus
clair, les dernières lisérées extérieurement de noirâtre; rémiges secondaires
blanches, les primaires et le bord de l'aile noirâtres ; queue d'un brun cendré;
parties inférieures blanches ; côtés de la poitrine et flancs cendrés avec les
bordures des plumes blanches.
Mâle en été. — Il ressemble à la femelle, mais la huppe est moins déve-
loppée, les parties dorsales sont d'un gris ardoise, le jabot d'un gris clair
avec les plumes bordées de blanc, et les parties inférieures entièrement blan-
ches.
Jeune. — Ressemble également à la femelle, mais les teintes sont plus
ternes et il est privé de huppe.
Poussin. — Dessus de la tête et nuque d'un brun roussâtre foncé; lorums
blancs ; une raie rousse part de la mandibule supérieure, passe sous l'œil et se
confond avec la teinte rousse de la région auriculaire et des côtés du cou ;
dessus du corps d'un brun cendré avec trois grandes taches blanches de
chaque côté du dos dont une sur les ailes ; gorge et les autres parties infé-
rieures d'un blanc pur. Bec noirâtre avec l'onglet jaune ; pattes d'un brun
jaunâtre.
— 515 —
Hab. — En été, cette espèce est plus ou moins répandue dans toute
la zone polaire jusque vêts le
70o 1. N. Elle est sédentaire en
Islande {Faber) et dans toutes
les localités septentrionales où
elle trouve des eaux en partie
libres de glace, jusque dans le
nord de l'Allemagne où elle
niche en petit nombre. En hiver
ce Harle est assez commun dans
la plupart des contrées tempérées de l'Europe, même dans celles de
l'intérieur comme la Suisse, où on le voit chaque hiver sur les lacs
par troupes de cinq à dix sujets [Meisner et Schinz). Ce n'est que
pendant les hivers très rigoureux qu'on l'observe en Espagne
{Saunders), en Portugal {du Bocage), en Italie {Giglioli) et en Grèce
{Lindermayer). Il se montre régulièrement sur le Danube, dans la
Dobrodja et la Bulgarie {Alléon), en Turquie {Elives et BucJilcy), mais
accidentellement sur le Bosphore et dans le midi de la Russie
{de Nordmann) ainsi qu'en Bohême (Fritsch)- En hiYer, il est a.ssez
commun en Belgique, aussi bien sur les côtes maritimes que sur
l'Escaut et sur les rivières de l'intérieur qui ne gèlent pas. Il visite
très accidentellement le Maroc {Famer) et l'Algérie {Loche).
Le Harle bièvre est aussi répandu en Asie qu'en Europe : on le
rencontre dans le Nord et dans le centre depuis l'Oural jusqu'au
Kamtschatka {Stejneger) et au Japon {Temminck et Schlegel). Dans
le Midi on l'observe au Caucase {Radde), au Turkestan {Severtzoïo) et
il est commun en Mongolie et en Chine {David) ; lors des hivers
rigoureux, il se montre jusque dans le centre de l'Inde {Jerdon-,
Hume), mais il ne paraît pas avoir été vu en Perse et dans le S.-O.
de l'Asie.
La forme américaine, que certains auteurs ont vouhi ériger en
espèce, est répandue dans toute l'Amérique du Nord {Baird), depuis
l'île de Behring {Stejneger), les îles Aléoutiennes {Dali) et l'Alaska
(Tterner) jusqu'au Texas {Dresser) et au Mexique {Finsch) ; on l'a
môme vue aux îles Bormudes {Seebnhm). Sa limite méridionale paraît
être, en Amérique, le 30« 1. N., et en Asie, le 2A° 1. N. (Tropique du
Cancer).
Mœurs. — L(> Ilarlo bièvre apparaît dans nos contrées phis ou
moins tard suivant les rigueurs de Li saison ; l'iiiver est-il précoce,
— ol6 -
l'oiseau se montre dès le courant de novembre, mais le plus souvent
on ne le voit pas avant la mi-décembre ou le commencement de jan-
vier; il nous quitte dans les mêmes conditions entre le 15 février et
les derniers jours de mars. Comme cet oiseau supporte bien le froid,
il séjourne partout où il trouve une eau libre de glace. Il émigré par
troupes et pendant la nuit ; ces bandes volent alors très haut en for-
mant une ligne oblique; mais si le nombre des individus est trop con-
sidérable, ceux-ci se placent sur deux rangs disposés en angle aigu.
Ce Harle se plaît aussi bien sur la mer que sur les eaux douces,
mais il préfère ces dernières, surtout les fleuves et les rivières à cou-
rant rapide. On le voit d'ailleurs sur toutes les eaux, même sur les
étangs et dans les marais, mais il aime particulièrement les eaux
claires, profondes et courantes, bordées d'arbres et de buissons ou
traversant une forêt. Sa démarche est lourde et vacillante et il tient le
corps dans une position horizontale ; son vol est rapide, bruyant et
ressemble à celui de beaucoup de Canards. « Lorsqu'il nage paisible-
ment, dit A. Brehm, il frappe l'eau lentement de ses larges pieds et
avance rapidement; poursuit-il quelqu'un de ses semblables pour lui
enlever la proie qu'il vient de capturer, il frappe la surface de l'eau
avec une telle violence que le bruit s'en entend au loin, et qu'il sur-
passe en vitesse tous les autres oiseaux nageurs. Il plonge très aisé-
ment, presque sans bruit; il nage entre deux eaux avec une telle
rapidité qu'on croirait voir un poisson. Il reste parfois deux minutes
sous l'eau; mais son immersion dure ordinairement un peu plus d'une
minute, et dans cet intervalle il a, en tours et détours, parcouru une
distance d'au moins cent pas. »
C'est un oiseau très intelligent et dont tous les sens sont bien déve-
loppés; sa grande prudence et sa déûance lui font bientôt reconnaître
le danger, qu'il peut ainsi éviter à temps. S'il voit un ennemi, il
plonge aussitôt, pour ne reparaître à la surface de l'eau qu'à une
cinquantaine de mètres de l'endroit où il s'est enfoncé; de cette
manière on ne sait jamais où l'oiseau se montrera, et celui-ci a le
temps de faire un nouveau plongeon avant qu'on ait pu le viser. Ce
n'est que dans les lieux de la reproduction qu'il se montre un peu plus
confiant, surtout dans les pays du Nord où l'homme ne le poursuit
pas trop. Il est très sociable, ne recherchant toutefois que la société
de ses semblables; mais quand on observe une troupe de ces Harles,
on constate bientôt que l'harmonie ne règne pas toujours parmi eux,
car leurnaturel envieux et jaloux se manifeste en toute occasion; ils
~ ol7 —
se prêtent bien un mutuel appui dans leurs chasses et se rabattent
les poissons les uns aux autres, mais au fond chacun travaille dans
son intérêt et non pour rendre service à ses compagnons.
La nourriture de cet oiseau consiste surtout en poissons de dix à
quinze centimètres de long, mais à l'occasion il ne dédaigne pas les
grenouilles, les têtards^ les larves et insectes aquatiques, ainsi que
des vers et des mollusques. Nilsson a observé en Suède, qu'en
automne cet oiseau se tient en petites troupes sur les lacs très pois-
sonneux. La troupe se dispose sur une ligne courbe et forme ainsi une
sorte de filet qui va toujours en s'avançant. Ils chassent devant eux
les poissons en plongeant continuellement et en frappant l'eau de leurs
ailes, et les poussent vers l'extrémité du lac ou dans une baie où ils
s'accumulent, et où les Harles peuvent plus facilement les prendre.
Quelquefois ils ne s'accordent pas entre eux et s'arrachent la proie
les uns aux autres.
La voix de cet oiseau est un grondement sonore qu'on peut rendre
par liarr karrr ou kœurr kœurrr\ c'est surtout en s'envolant ou à
l'époque de l'accouplement que l'oiseau se fait entendre.
Reproduction. — Le Harle bièvre ou grand Harle niche dans les
contrées du Nord et même dans les provinces septentrionales de
l'Allemagne, particulièrement en Poméranie, dans le Mecklembourg
et le Holstein, et accidentellement près de Berlin, comme l'a constaté
M. Hausmann d'après ce que nous apprend M. C. Vangerow (1).
D'après le D"" Schinz, il niche parfois aussi en Suisse; il a du moins
constaté le fait près de Bregenz (Tjrol) en 1812 et 1813.
Ces oiseaux sont accouplés quand ils reviennent aux lieux de la
reproduction; mais les jeunes mâles qui se reproduisent pour la pre-
mière fois, choisissent leur femelle dans leur patrie, ce qui ne se fait pas
sans cris et sans luttes. En Danemark et en Allemagne ils nichent
vers la fin d'avril ou en mai, mais plus au Nord la ponte n'a lieu
qu'en juin.
Ce Harle niche dans des endroits très divers, et l'on dirait que
l'emplacement du nid dépend plutôt de la fantaisie de la femelle que
de l'aspect du terrain. Il paraît cependant qu'elle choisit de préfé-
rence le creux d'un arbre, môme quand cette cavité est placée à huit
ou neuf mètres de hauteur. Le nid se trouve souvent aussi dans une
excavation et entre dos herbages ou sous un buisson, ou bien entre
{\) Journal f. Ornith. 185.5, p. :i4r).
— 548 —
des troncs d'arbres, sous des pierres ou sur la tête d'un saule en têtard;
parfois l'oiseau se contente de déposer ses œufs sur des arbres dans
l'aire abandonnée d'un rapace ou dans un vieux nid de Corneille ou de
tout autre grand oiseau. Il arrive aussi que le nid est construit sur un
îlot ou au bord de l'eau, d'autres fois il se trouve à une distance plus
ou moins grande de l'eau et parfois à près d'un kilomètre. « Au Tana-
Elf, dit A. Brebm, je vis sur tous les arbres de grandes caisses, à
ouvertures triangulaires, destinées à loger des Harles bièvres et des
Harles huppés, et disposées de façon à ce qu'on pût prendre les œufs.
Ces caisses sont très en usage chez les Lapons et les Finnois, et les
Harles vont régulièrement s'y installer ». Quand le nid est construit
par le Harle lui-même, il est grossièrement fait à l'aide de bûchettes,
de chaumes, de feuilles mortes, de lichens et autres matériaux secs ;
au moment de la ponte l'intérieur est garni de duvet. Le nombre des
œufs est de huit à douze, mais il paraît que ce nombre peut être
doublé quand on enlève les œufs à mesure qu'ils sont pondus. Ces
œufs sont lisses, peu luisants et d'un fauve clair; ils mesurent environ
68 millimètres sur 47.
La femelle couve seule et élève ses petits sans le concours du mâle,
mais celui-ci revient plus tard se joindre à sa famille. Les poussins
naissent-ils à terre ou à une faible hauteur au-dessus de l'eau, la
mère les précipite sur l'onde, dès qu'ils sont séchés. Si, au contraire,
ils sont nés sur un arbre, la femelle les porte à terre l'un après l'autre,
en les tenant serrés entre son bec et sa poitrine, comme le fait le
Garrot et comme le font probablement tous les anatidés qui nichent
dans des endroits élevés. Les poussins croissent très rapidement et
deviennent bientôt indépendants.
Suivant Brehm, la femelle est tellement ardente à couver, que
quand on lui enlève ses œufs elle va couver le premier nid de Canard
qu'elle trouve ; elle en chasse la mère légitime et élève une progéni-
ture qui lui est étrangère.
274. — Le Harle huppé.
MERGUS SERRATOR, Lin.
(PI. 275).
Mergus SERRATOR, Lin. Syst. Nat., p. 129 (1758) ; I, p. 208 (1766).
Merganser CRiSTATUs, Briss. 0/•/^. VI, p. 237 (1760).
Mkrgus CRISTATUS, Briinn. Orn. bor. p. 23 (1764).
— 519 —
Mergus NIGER et M. LEUCOMELAS, Gmel. Syst. nat. I, p. 546 (1788).
Mkrganser serrata, Steph. 5'/i«!:^o's Gen. Zool, XII, 2, p. 165 (1817).
Merganser serrator, de Selys, Patria Belgica, I, p. 277 (1873).
Der Mittlere Sagbr, en allemand.
The Red-breasted Merganser, en anglais.
Dk Middelste saagbek, en flamand.
Taille : 0'"47 ; ailes 0™245. La femelle est un peu plus petite.
Description du mâle en plumage de noce. — Tête et partie supérieure du
cou noires à reflets d'un vert bronzé, les plumes du vertex et de l'occiput
longues et effilées et formant une huppe; bas du cou blanc avec une ligne
médiane noire en arrière ; manteau et scapulaires noires ; bas du dos, sus-
caudales et flancs d'un blanc grisâtre vermiculé de noirâtre ; couvertures des
ailes blanches, coupées transversalement par deux bandes noires ; rémiges
primaires noirâtres ; les secondaires noires à la base, blanches à l'extrémité ;
les tertiaires blanches lisérées extérieurement de noir; jabot roussâtre avec
des taches noirâtres ; plumes des côtés de la poitrine larges, blanches et large-
ment bordées de noir profond ; poitrine, abdomen et sous-caudales d'un
blanc pur ; queue brune, les rectrices médianes variées de blanc sur leurs
bords . Bec d'un rouge vif, la mandibule inférieure plus orange, l'onglet brun ;
pattes d'un rouge orangé ; iris d'un jaune rougeâtre.
Femelle. — Dessus de la tête d'un brun roussâtre, la huppe peu développée;
côtés de la tête et haut du cou d'un roux vif; gorge blanche, lavée de brun
jaunâtre clair; dessus du corps d'un gris brun foucé, la tige des plumes noire
et les bords de ces dernières d'un gris cendré clair ; couvertures des ailes
comme le dos ; rémiges primaires d'un brun noirâtre ; les secondaires noires
à la base, blanches à l'extrémité ; parties inférieures blanches, les flancs cen-
drés ; queue d'un brun cendré .
Mâle en été. — Ressemble à la femelle, mais il a la huppe plus courte et le
dessus du corps d'un gris ardoise.
Jeune mâle. — llessemble également à la femelle, mais sa huppe est plus
courte; dessus du corps d'un gris cendré tirant un peu au jaunâtre ; iris d'un
brun jaunâtre ; bec d'un noir rougeâtre ; pattes d'un rouge jaunâtre.
Poussin. — Suivant M. J. Vian, le poussin du llarle huppé a la même
coloration que celui du Harle bièvre; tous deux ont la poitrine blanche, mais
chez le dernier le duvet est blanc dans toute sa longueur, tandis que chez le
Ilarle huppé il est brun dans sa moitié basale.
Les femelles et les jeunes mâles ressemblent beaucoup aux sujets
du même sexe et âge du Harle bièvre, et peuvent facilement être con-
fondus avec ce dernier ; la différence de taille ne permet cependant
pas de les confondre, le Harle huppé étant plus petit.
520 —
^^j. — Le Harle huppé est plus ou moins répandu, en été ou en
hiver, dans toute la zone des
deux mondes qui s'étend entre le
32o et le 73° 1. N. 11 s'élève
donc un peu plus au Nord que le
Harle bièvre, mais ne descend
pas aussi bas vers le Sud. En
été, il est commun en Islande
{Faber)y au cap Nord {CoUett) et
dans toutes les contrées situées
au nord de la Baltique, Il niche également dans les provinces septen-
trionales de l'Allemagne où il est en partie sédentaire {Borggrevé),
et il en est de même en Ecosse [Seebolmi).
En hiver, cet oiseau est commun aux îles Britanniques et sur toutes
les côtes de l'Europe occidentale et méridionale, jusqu'en Portugal
{du Bocage), eii Espagne {Saunders), à Gibraltar (Irby), en Italie
{Giglioli), en Sardaigne {Cara), en Corse {Whitehead) et en Sicile
(Malherbe) ; mais il est peu commun à Malte {Wright), rare en Grèce,
plus rare dans le Péloponèse et ne se montre jamais dans l'Archipel
{Lindermayer). Il n'est pas rare en Turquie {Elwes et Buckley), dans
la Dobrodja et la Bulgarie {A Iléon) et dans le midi de la Russie
[de Nordmann).
Bien que cette espèce soit toujours, lors des migrations, plus abon-
dante sur les côtes maritimes que sur les eaux intérieures, on la
rencontre cependant sur les lacs et les rivières des pays les plus
éloignés de la mer, mais le plus souvent pendant les hivers rigoureux ;
c'est ainsi que sa présence a été signalée dans le Grand-Duché de
Luxembourg [de la Fontaine), en Lorraine {Godron), en Alsace
(Kroener), en Suisse [Meisner et Schinz), en Tyrol {Althamer), en
Bavière (Koch), en Bohême {Fritsch), en Autriche [Hinterberger],
en Pologne {Taczanowski), etc. En hiver, ce Harle est commun en
Belgique, aussi bien sur les côtes que sur l'Escaut où on le rencontre
par grandes troupes {Croegaert); il est plus rare dans les autres
parties du pays, mais il se montre parfois jusqu'aux environs de
Hasselt [Bamps) et de Bruxelles.
Cet oiseau visite accidentellement le nord de TAfrique [Loche) et la
Basse-Egypte {de Heuglin); il est moins rare en Palestine {Tristram)
et surtout au Caucase {Radde). Plus à l'Est, on rencontre cette espèce
dans toute la Sibérie {Middendorff, Radde, Maack), au Kamtschatka
— 521 —
{Stejneger), au Japon (Temminck) et en Chine {David), mais il ne
paraît visiter ni le Turkestan, ni l'Inde.
En Amérique, on observe cet oiseau dans toute la zone septen-
trionale : du Groenland {Holbôll) et du Labrador à la Caroline du
Nord {Coues), et de l'Alaska et des îles Aléoutiennes {Turner) à la
Californie [Dresser).
Mœurs, — Le Harle huppé émigré des contrées du Nord quand
les eaux commencent à geler, mais il séjourne partout où il trouve
des eaux en partie libres de glace. C'est en octobre que ces oiseaux
se rassemblent en bandes sur les bords de la mer, et en novembre ils
commencent à apparaître dans les contrées plus tempérées ; il paraît
que les jeunes partent plus tôt que les adultes, car ces derniers ne se
montrent généralement qu'en décembre. Il est aussi à remarquer que les
mâles adultes ne s'éloignent pas autant des pays froids que les jeunes,
car plus on se dirige vers le Midi, plus les vieux mâles deviennent
rares. Dès le courant de mars, tous regagnent les pays de la repro-
duction. Ils voyagent surtout pendant la nuit, et quand ils le font en
plein jour ils volent toujours très haut, en formant une longue ligne
oblique, dont la longueur dépend naturellement du nombre des
individus.
Cet oiseau fréquente principalement les côtes maritimes et se montre
même en pleine mer, mais il visite volontiers les lacs, les fleuves et
autres eaux courantes. En hiver, il se montre un peu sur toutes les
eaux non gelées ; en été, il aime les eaux riches en roseaux et en
herbages élevés ou bordées d'arbres et de buissons, même quand elles
se trouvent non loin de lieux habités.
Les moeurs de cette espèce ne diffèrent guère de celles du grand
Harle, mais elle est peut-être encore plus agile que ce dernier dans
l'art de nager en tous sens entre deux eaux à la poursuite des pois-
sons. Quand on observe une troupe de Harles huppés, on les voit
souvent disparaître tous à la fois sous l'eau, pour ne revenir à la
surface qu'au bout d'une couple de minutes, et bien loin de l'endroit
où ils ont plongé. Leur vol ressemble à celui de certains Canards : il
est facile et rapide et le battement des ailes occasionne un léger bruis-
sement ; la forme allongée de ces oiseaux permet de les distinguer
facilement au vol des autres lamellirostres.
Ce Harle est très farouche et défiant; il évite ordinairement le coup
de fusil en plongeant, mais quand l'oau est pou étendue, il s'envole <à
tire-d'aile, ne tardant cependant pas a revenir à son point de départ,
TOM. II. — 1893. 66
— 52-2 —
ce qui occasionne souvent sa perte. Il se montre moins défiant dans
les contrées du Nord, surtout quand il a constaté qu'on ne lui veut
pas de mal. Il est très sociable et se plaît dans la société des Canards,
des Macreuses et même des Plongeons ; de Heuglin dit avoir vu en
septembre dans une baie de Waigatz, des bandes de plusieurs cen-
taines d'oiseaux aquatiques, composées en grande partie de Harles
huppés, de Garrots et de Macreuses. Son cri, d'après Naumann, res-
semble à koerrr ou guerrr, et l'oiseau le fait entendre surtout en
volant. Quant à sa nourriture, elle se compose principalement de
poisson; il mange également des larves et insectes aquatiques, des
vers, moins souvent des grenouilles, que la nécessité Foblige
parfois à aller chercher, en hiver, dans la vase au fond des étangs.
Reproduction. — Cet oiseau niche ordinairement près des eaux
douces qui ne sont pas trop éloignées de la mer ; mais comme il tient
à ce qu'elles soient garnies de roseaux ou que leurslbords soient plus
ou moins boisés, il est parfois obligé de les chercher bien loin des
côtes maritimes. Il niche de préférence dans des arbres creux ou dans
des caisses fixées aux arbres à leur intention, parfois aussi dans un
nid abandonné de rapace, de Corneille ou de tout autre grand oiseau,
même quand ce nid est placé sur un arbre à une grande hauteur et
loin de l'eau. D'autre fois, il fait une construction grossière formée de
matériaux secs, bûchettes, feuilles mortes, chaumes, etc., que la
femelle entrelace tant bien que mal, et dont elle garnit l'intérieur
d'une couche de duvet. Ce nid est alors placé soit à terre près de
l'eau, dans une excavation protégée par des pierres, des herbages
ou un buisson, soit dans un trou de rocher.
La ponte a lieu en mai ou en juin, suivant la latitude, et se com-
pose de neuf à douze œufs, parfois même de quatorze, mais elle peut,
d'après Naumann, s'élever jusqu'à trente si on lui enlève ses œufs
successivement. Ces œufs sont lisses, peu luisants, de couleur café au
lait clair et mesurent environ 63 millim. sur 43.
Le mâle quitte sa compagne dès que celle-ci se met à couver, mais
rejoint sa famille plus tard après sa mue. La mère conduit ses petits
à l'eau dès qu'ils sont bien séchés, et agit en toutes circonstances
comme la femelle du Harle bièvre.
DEUXIÈME SOUS-ORDRE
TOTIPALMES.
Car. — Bec plus ou moins long, large ou arrondi, crochu ou ter-
— 523 —
miné en pointe, les deux branches de la mandibule inférieure reliées
par une membrane nue et dilatable; tête relativement peu volumi-
neuse; cou plus ou moins allongé; ailes assez longues, parfois très
longues et aiguës; queue de forme variable, plus ou moins allongée;
tarses courts; doigts longs, tous quatre réunis par une large palma-
ture, ce qui distingue ces oiseaux de tous les autres palmipèdes.
Ce sous-ordre se divise en cinq familles: les Frégatidés,les Phaê-
tontidés, les Pélécanidês, les Phalacrocoracidés et les Plotidés, Deux
de ces familles sont représentées en Belgique,
FAMILLE DES PÉLÉCANIDÊS.
Car. — Bec plus long que la tête, souvent très long, droit et
conique, ou large, aplati et terminé par un onglet crochu; la mandi-
bule inférieure donne souvent attache à un vaste sac se prolongeant
jusque sur le cou; ailes allongées, plus ou moins aiguës; queue de
longueur moyenne, arrondie ou conique; tarses courts et robustes;
doigts longs, le pouce réuni aux doigts antérieurs dans une même
palmature.
Hab. — Cette famille a des représentants dans toutes les parties du
globe, mais principalement dans la zone tropicale.
Mœurs. — Ces oiseaux diffèrent plus ou moins de mœurs suivant
les espèces; les uns sont marins, les autres ne vivent que sur les
eaux douces, mais tous se nourrissent de poissons et sont très voraces.
Ils nichent, suivant les espèces, dans les marais, sur des arbres ou sur
des rochers et ne pondent qu'un petit nombre d'œufs.
GENRE CLVI.
FOU. — SDLA.
SuLA, Briss. Ornith. VI p. 494 (1760).
Pelecanus (part.) Lin. Syst. nat. I, p. 217 (176G).
Dtsi'Orus, lUig. Prodromus, p. 279 (1811).
MoRis, Loach, Syst. C".t. Brit. Mns. p. 35 (1816).
Car. — Bec fort, droit, coniiiue, plus haut que large à la base, très
fendu et fléchi à son extrémité, les bonis des mandibules finement dentelés ;
mandibule supérieure avec un long sillon latéral et semblant formée de trois
pièces, l'inférieure à l^ranchcs séparées jusque prés de leur extrémité; nari-
nes linéaires; lorums et gorge nus; ailes allonîjjées, aiguës, atteignant pros(]ue
Tcxtrémité de la ({ucue; celle-ci coni([uo, composée de douze rectrices, les
— 524 -
médianes dépassant un peu les autres; tarses courts, épais ; doigts longs,
Tongle du médian pectine sar son bord interne.
Hdjy^ — Des sept espèces connues de ce genre, quatre habitent les
tropiques, une le sud de l'Afrique, une la Nouvelle-Zélande et une
l'Europe.
275. — Le Fou blanc ou de Bassan.
SULA BASSANA, Briss.
(PI. 276.)
SuLA MAJOR et S. BASSANA, Briss. Omith. VI. pp. 497, 503 (1760).
Pelecanus bassanus, Lin. Syst. nat. I, p. 217 (1766).
Pelecanus punctatus, Sparrm, Mus. Caris, pi. X (1786).
Pelecanus maculatus, Gmel. Syst. nat. I, p. 579 (1788).
SuLA ALBA, Mey. Taschenb. Deuts.Yôgelk. II, p. 582 (1810).
MoRis BASSANA, Leach, Syst. Cat. Brit. Mus. p. 35 (1816).
MoRUS bassanus, Vieill. N. Diction. XII, p. 39 (1817).
SuLA AMERiCANA, Bonap. Comp. List. B. p. 60 (1838).
Dysporus bassanus, Naum. Voy. Deutschl. XI, p. 14 (1842).
SuLA LEFEVRi, Baldam. Naumannia, 1851, fasc. IV, p. 38.
Der Bass-Tolpel, en allemand.
The Gannet, en anglais.
De Jan van Gent, en flamand.
Taille: 0™80; ailes 0,49.
Description du mâle et de la femelle adultes. — D'un blanc uniforme, le des-
sus de la tête et du cou d'un jaune d'ocre ; rémiges primaires noirâtres. Bec
d'un gris bleuâtre pâle, jaunâtre à la pointe; parties nues de la face noires;
iris jaune ; pattes d'un vert noirâtre avec les scutelles d'un vert clair. (1)
Jeune. — Parties supérieures d'un brun cendré, chaque plume terminée
par une petite tache blanche en forme de fer de lance, ces taches sont natu-
rellement plus nombreuses et plus rapprochées à la tête et au cou ; bas de la
poitrine et ventre blanchâtres avec les plumes bordées de cendré brunâtre;
(i) On rencontre parfois des sujets dont les quatre ou les deux'rectrices médianes, ainsi qu'un
plus ou moins grand nombre de rémiges secondaires, sont noirâtres. C'est le Sula lefevri de
Baldamus. Mais ce sont simplement de jeunes sujets qui ont pris pour la première fois le plumage
adulte, et dont quelques pennes de leur ancien plumage leur sont restées. Il est aussi possible que
ces pennes soient repoussées une dernière fois avec leur couleur primitive. Le Musée de Bruxelles
possède un de ces oiseaux dont l'une des rectrices médianes est noirâtre, tandis que l'autre est
blanche ; parmi les rémiges secondaires se trouvent également quelques pennes en partie noirâ-
tres. Ceci prouve bien que le S. lefevri n'est qu'un jeune oiseau qui a pris imparfaitement le
plumage d'adulte.
— 525 -
rémiges et queue noirâtres. Bec brun cendré, la pointe blanchâtre ; iris
blanc ; pattes d'un gris de plomb. Ce n'est qu'à l'âge de trois ans qu'il prend
complètement le plumage de l'adulte.
Poussin. — Duvet épais^ cotonneux, d'un blanc pur ; parties nues de la
tace d'un gris de plomb; bec de même couleur avec la pointe blanchâtre;
pattes d'un gris noirâtre, les scutelles blanchâtres.
Rab. — Le Fou de Bassan niche en Islande (Faber) et sur cer-
taines îles rocheuses situées
autour de l'Ecosse, notamment
sur les îles Bass, Ailsa Craig,
St-Kilda, Lundy, Skellig, etc.,
{Dresser). La colonie la plus
importante (estimée à 150,000
couples), paraît être établie sur
le rocher de Sula S'Geir, et une
autre (estimée à 25,000 cou-
ples) occupe l'île Stack, près des Orcades {Seebohm).
Ces oiseaux quittent leurs rochers en octobre pour errer sur les
côtes de l'Europe occidentale. On les voit alors en plus ou moins
grand nombre sur toutes les côtes des îles Britanniques et sur celles
de la Norvège, mais ne dépassant que rarement l'île de Lofoten
(68° 1. N.), bien qu'on ait vu quelques égarés jusqu'au Cap Nord et
sur les côtes de la Laponie russe {Collett). Ce n'est qu'accidentelle-
ment qu'on en voit en Suède {Nilsson). Ils sont plus ou moins com-
muns, en hiver, sur les côtes du Danemark {Collin), de Helgoland
(Cordeaux), de l'Allemagne {Naumann, Borggreve), de la Hollande
{Schlégel), de la Belgique (mais rares sur l'Escaut), de la France
{Degland), du Portugal (Reyes), de l'Espagne {Saunders) et de Gi-
braltar {Trb>/) ; on en voit accidentellement au Maroc {Favier), et une
ou deux captures seulement ont été faites sur les côtes italiennes
Giglioli).
Cet oiseau n'existe pas en Asie, mais il est commun sur certaines
îles rocheuses de l'Amérique du Nord, du côté de l'Atlantique, et en
hiver on l'observe sur les côtes américaines depuis le Labrador, jus-
qu'au golfe du Mexique {Baird)\ il visite irrégulièrement le Groen-
land [Holbôll).
Mœurs. — C'est un oiseau plus ou moins sédentaire, mais les colo-
nies se dispersent en octobre ol les l'ous se montrent alors par
troupes sur toutoe les côtes de l'Europe occidentale; en avril, ils
— 526 —
reprenneni possession de leurs rochers. Ces oiseaux vivent par mil-
liers et même par centaines de mille sur certaines îles rocheuses et
sur des points déterminés des côtes rocailleuses. Jamais ils ne s'éloi-
gnent volontairement de la mer, mais il arrive parfois que des oura-
gans les jettent loin dans l'intérieur des terres ; ils se montrent alors
si affolés qu'on peut les prendre sans difficulté ; c'est ainsi qu'on en
a capturés à Neuwied, dans le Mecklembourg, dans l'Oldembourg et
dans le Munsterland {Borg grevé).
Ils passent généralement la nuit près de leur nid ou sur des
rochers escarpés qui s'élèvent parfois au milieu de la mer ; mais ils
ont cependant leur préférence, et choisissent plutôt certains rochers
à d'autres qui paraissent être dans les mêmes conditions.
Le Fou de Bassan est un voilier de premier ordre et, comme l'Al-
batros et la Frégate, il passe dans les airs la plus grande partie de la
journée. Son vol est très remarquable : après quelques coups d'ailes
successifs l'oiseau file droit devant lui, fend les airs avec la rapidité
d'une flèche, puis tournoie, décrit des cercles variés, plane presque
sur la surface de l'eau et s'élève de nouveau à des hauteurs prodi-
gieuses, tout cela avec élégance et presque sans donner des coups
d'ailes. Est-il fatigué et ne voit-il pas de rocher au voisinage, il
s'abat sur l'eau où il se laisse ballotter au gré des flots; il s'endort
souvent ainsi, la tête cachée dans les scapulaires, et son sommeil est
parfois si profond que l'approche d'un vaisseau ne le réveille même
pas. Il nage relativement peu et, malgré le développement de ses pal-
matures, il préfère se laisser pousser par le vent. A terre il marche
assez bien, mais lourdement, en vacillant et en laissant traîner la
queue.
Les Fous se montrent aussi sociables avec les autres oiseaux de
mer qu'avec leurs semblables, ce qui n'empêche qu'ils soient assez
querelleurs et qu'ils mordent ceux qui les approchent de trop près ;
du reste, les querelles et les coups de bec se succèdent sans interrup-
tion ; il est vrai qu'ils ont souvent à se défendre contre les Goélands
et les Stercoraires qui cherchent à leur enlever le produit de leur
pêche. Leur cri, dit Naumann, consiste en un son bref, profond, sac-
cadé et criard qu'on peut rendre par rab, rab, rab ; sont-ils excités,
les sons se succèdent avec plus de rapidité, comme rabrabrabrab !
M. Seebohm rend leur cri par carra, souvent répété et modifié de
différentes façons. Quant au nom qu'on a donné à ces oiseaux, ils le
méritent bien, car là où ils nichent, ils paraissent complètement
— 527 —
dépourvus de l'instinct de la conservation : on peut les tuer à coups
de bâton et les prendre à la main sans qu'ils cherchent à fuir, ils pen-
sent eifrayer l'assaillant en ouvrant démesurément leur bec.
La nourriture de cet oiseau consiste essentiellement en poissons et
en céphalopodes qu'il pêche à la surface de l'eau. Il prend sa proie au
vol, se précipite sur l'eau d'une certaine hauteur et y pénètre souvent
à plusieurs pieds de profondeur,mais revient de suite à la surface pour
avaler sa proie. Il est très vorace et consomme journellement quinze
à vingt harengs ou autres poissons de même taille ; il est vrai que sa
digestion se fait avec rapidité et qu'il vomit l'excès d'aliments, parfois
même à moitié digérés.
Reproduction. — En Europe, le Fou de Bassan ne paraît nicher
que sur les côtes et les îlots rocailleux de l'Islande et sur certaines îles
rocheuses situées près de l'Ecosse. Il a été dit plus haut qu'il vit en
colonies composées de milliers de couples, auxquels se joignent sou-
vent encore d'autres oiseaux de mer; les îles rocheuses que choisis-
sent ces oiseaux sont littéralement couvertes de nids. C'est vers la fin
d'avril que commence la construction ; les premiers couples arrivés
aux lieux de la reproduction font leur nid sur les parties saillantes,
mais bientôt toutes les saillies sont occupées et les nouveaux venus
doivent prendre possession du sommet des rochers. Là, les nids sont
souvent si rapprochés en certains endroits, qu'il est parfois impos-
sible de passer entre eux. Les premiers construits sont très grands,
mais les suivants deviennent de plus en plus petits à mesure que la
place commence à manquer, car les couples les derniers arrivés
doivent se contenter de l'espace resté libre entre les nids des premiers
occupants. Ces nids ne sont, à vrai dire, que des masses informes
composées de varechs et de zostères humides que les flots ont rejetés
au pied de l'îlot, et de diverses graminées arrachées au sommet du
rocher. Ils sont peu sohdes et les femelles doivent constamment les
réparer; aussi trouvent-elles souvent plus facile d'enlever des maté-
riaux aux nids voisins, ce qui occasionne des cris de protestation et
des luttes à n'en pas finir ; parfois les combattants, dans la chaleur
de la lutte, roulent do leur rocher et terminent leur querelle dans
l'eau. On comprend qu'une pareille colonie n'est guère agréable à
visiter; le guano s'accumule partout, des poissons abandonnés se
putréfient sous l'action du soleil, les varechs se décomposent, et tout
cela exhale une odeur inlocte qui empoisonne l'atmosphère; puis
viennent les cris assourdissants de centaines do mille oiseaux; on
— 528 —
conviendra qu'il faut avoir l'amour de la science ou être un chasseur
passionné pour s'aventurer dans un pareil milieu.
« En 1821, dit Faber, je me trouvai en Islande aux Manôe occi-
dentales et je gravis la petite île rocheuse sur laquelle cet oiseau
nichait. A mon arrivée, jeunes et vieux commencèrent une discordante
musique, qui consistait en un seul cri, un orrr rauque et dur; cepen-
dant ils ne quittèrent pas leur place, et je pus prendre à la main
autant de vieux et déjeunes que je voulus. Les nids étaient serrés les
uns contre les autres, mais les restes de harengs, de céphalopodes,
etc., jetés aux petits par les parents, avaient rendu le sol si glissant
que je faillis tomber sur la pente de l'écueil. Chose remarquable, le
tiers des nids à peu près contenait des œufs altérés que les femelles
continuaient néanmoins à couver; bien plus, trompés par leur instinct
de nourrir les jeunes, qu'ils attendaient à cette époque, les parents
avaient jeté de la nourriture tout aussi bien devant les œufs pourris
que devant les poussins C'est vers la fin d'août, à Grimsoe seule-
ment à la Saint-Michel, que les petits sont couverts de plumes, et ils
sont alors presque plus grands que les vieux, du moins plus gras ;
les habitants en prennent alors tant qu'il peuvent pour en faire des
salaisons (1). >
Chaque femelle ne pond qu'un seul œuf, de forme allongée, à sur-
face crétacée et blanchâtre; il mesure environ 81 millimètres sur 51.
Père et mère couvent alternativement pendant six semaines au moins,
et soignent ensuite leur petit en commun. Ce n'est qu'à l'âge de six à
sept semaines que le poussin est en état de suivre ses parents sur la
mer et de chercher lui-même sa nourriture.
FAMILLE DES PHALACROCORACIDÉS.
Car. — Bec plus ou moins long, fendu jusqu'au delà des yeux,
droit, comprimé, la mandibule supérieure concave au sommet et termi-
née en pointe crochue et acérée, l'inférieure arrondie à son extrémité ;
narines presque invisibles dans l'adulte; ailes de longueur moyenne,
couvrant à peine la base de la queue, subaiguës, la deuxième rémige
dépassant ordinairement un peu la troisième ; queue allongée, arron-
die, composée de douze ou de quatorze rectrices raides et élastiques ;
(1) F. Faber, Prodromus der Isldnd, Ornith. p. 86.
— o^J9 —
bas des jambes garni de plumes ; tarses courts, robustes, comprimés ;
doigt externe le plus long, l'ongle du médian pectine sur son bord
interne.
Les sexes ne diffèrent ni par leur plumage, ni par leur taille ; il
est vrai qu'on rencontre des femelles plus petites que les mâles, mais
par contre on trouve souvent des mâles dont la taille est inférieure à
celle de beaucoup de femelles de la même espèce; du reste la taille
est souvent très variable chez les sujets d'un groupe spécifique, et
c'est particulièrement la grandeur du bec qui est sujette à des varia-
tions individuelles parfois très remarquables. Les jeunes ont un plu-
mage particulier. Cette famille ne comprend qu'un seul genre.
Hab. — Les espèces sont réparties dans les diverses parties du
monde.
Mœurs. — Les Cormorans, comme on désigne les oiseaux de cette
famille, fréquentent les bords de la mer et les eaux douces, surtout les
fleuves à courant rapide. Ils volent bien, nagent et plongent à la
perfection, se perchent volontiers sur les arbres et y font souvent
leur nid.
Leur nourriture consiste surtout en poissons. Certains peuples
dressent ces oiseaux pour la pêche.
GENRE CLVII
C0R5I0RAN. — PHALACROCORAX.
Phalacrocorax, Briss. Omith. VI, p. 511 (1760).
Peleoanus (part.) Lin. Sijst. nat. I, p. 216 (1766).
Procellaria (part.), Miill. Zool. Dan. Prodr.^. 18 (1776).
Carbo, Mey. Tasclie7ib. deutsch. Yogelk. II, p. 576 (1810).
Halieus, Illig. Prodr., p. 279 (181 1).
Hydrocorax, Vieill. Nouv. Dict. Mil, p. 83 (1817).
Cormoranus, Baill. Mém. Soc. roy. d'Etnul. d'Abbev. 1833, p. 77.
Graculus, Gray, Voij. Ereb. and Terr. Birds, p. 20 (1844).
MiCROCARBO, Bonap. Cat. Parzud. p. 10 (1856).
Car. — Ceux de la famille.
27G. — Le Cormoran ordinaire.
PHALACROCORAX CARBO, Pall. c.r Lin.
(PI. 277.)
Pelecanus CARBO, Lin. Syst. Nat. 1, p. 216 (1760).
Procellaria pelecanus, Miill. Zool. Dan. Prodr. p. IS (1776).
Tome II.— IS93. 67
- 530 —
Pelecanus sinensis, Shâw., Nat. Mise. p. 529 (1790-1801).
Carbo cormoranus, Mey. Taschenb. deuts. Vogelk. Il, p. 576 (1810).
Halieus carbo, Illig. Prodr. p. 279 (1811).
PHA.LACROCORAX CARBO, Pall. Zoogr. Rosso-Ass. II, p. 297 (181 1).
Hydrocorax CARBO et SINENSIS, Vieill. iVowu. Dict. VIII, pp. 83, 86 (1817).
Phalacrocorax NOv^-HOLLANDi^ et SINENSIS, Ste pli. S/iaic's Gen. Zool. XIII, 1, p. 93
(1825).
Carbo glacialis, arboreus et subcormoranus, Brehm, Isis., 1830, p. 995.
Cormoranus crassirostris, Baill.il/em. Soc. roy. d'Emul. d'Abbev. 1833, p. 77.
? Carbo leucotis et ater, Less Traité d'Orn. p. 604 (1831).
Phalacrocorax MEDIUS, Nilss. Skand. Fauna.,Vogl. II, p. 478 (1835).
Phalacrocorax carboides, Gould, Proc. Zool. Soc. 1837, p. 156.
Carbo albiventris, Tick. Jauni. As. Soc. Beng. 1842, p. 463.
Halieus cormoranus, Naum. Vôg. Deutschl. XI, p. 52 (1842).
Graculus carbo, sinensis, MEDIUS, NOT^-HOLLANDiiE et CARBOIDES, Gray, Gcn. of B.,
p. 667(1845).
Phalacrocorax leucotis, Blyth, Cat. B. Mus. As. Soc. p. 298 (1849).
Graculus americanus, Reichb. Handb. pi. 67 (1850).
Carbo filamkntosus et capillatus, Tem. et Schl. Fauna Jap. pn29,pl. 83, 83^(1850)
Phalacrocorax glacialis, arboreus, subcormoranus, humilirostris et brachyrhyn-
CHOS, Brehm, Vogelf. p. 360 (1855).
Phalacrocorax capillatus, Bonap Comp. Rend. Ac. /Sc.XLI, (1856).
Phalacrocorax carbo major et Ph. carbo médius, Nilss. Skand. Fauna, II, p. 515
(1858).
Cormoranus communis, C. F. Dub. FI. col. Ois. Belg. III p. 228 (1860).
Phalacrocorax carbo var. Continentalis, Severtz. Turh. Jevotn. p. 70 (1873).
Die Kormoran-Scharbe, en allemand.
The Cormorant, en anglais.
De Aalscholver, en flamand.
raz7/e : 0,^79; ailes 0,34 (1).
Deseription des deux sexes après la mue d'automne. — Tête, cou, bas du dos
et parties inférieures d'un noir verdâtre brillant, les plumes de l'occiput
étroites et prolongées en forme de huppe tombante ; des plumes effilées,
soyeuses et d'un blanc argentin ornent le vertex et le haut du cou, mais lais-
sent apercevoir entre elles le plumage sombre qui est dessous; gorge et une
bande remontant vers l'œil d'un blanc assez pur ; manteau et couvertures
des ailes d'un cendré roussâtre, chaque plume bordée de noir ; une grande
tache blanche, formée de plumes longues et larges, sur les flancs au-dessus
des jambes ; rémiges secondaires d'un gris noirâtre, les primaires brunes ;
queue noire. Parties nues de la face jaunes ; iris d'un beau vert ; bec
gris, noir au-dessus et jaunâtre à la base; pattes et membranes noires.
(i) La taille de cet oiseau est très variable ; c'est surtout en Amérique, en Australie et à
la Nouvelle-Zélande que l'espèce acquiert la taille la plus forte, mais comme on rencontre
toutes les dimensions intermédiaires, il n'y a pas lieu d'admettre les différentes espèces et
variétés qu'on a créées. Les auteurs récents sont généralement d'accord sur ce point.
Il -
Au printemps le plumage est le même, mais sans plumes effilées blanches
à la tête et au cou et sans la tache blanche des flancs ; toutes ces plumes
blanches disparaissent insensiblement par l'usure, car l'oiseau n'a qu'une
mue par année.
Jeune. — Dessus de la tête et du cou ainsi que les flancs d'un brun foncé ;
mant(^au d'un cendré brunâtre à reflets verts et bronzés,chaque plume bordée
de noirâtre ; bas du dos d'un noir verdâtre ; rémiges secondaires d'un brun
bronzé ; le^ primaires et la queue noires ; gorge et tour du bec jusqu'à l'œil
blanchâtres; devant et côtés du cou bruns avec les plumes légèrement bor-
dées de blanchâtre; poitrine et abdomen blancs, mais les plumes plus ou moins
terminées de brun ; sous-caudales brunes. Bec d'un gris brunâtre passant au
blanc rougeâtre à la base ; iris brunâtre.
Poussin. — Nu à sa naissance, mais au bout de quelques jours il est
1 evêtu d'un duvet court, épais et d'un noir fuligineux avec quelques mèches
blanches sur les ailes ; parties nues de la face d'un jaune orange; bec brun,
blanchâtre à la base ; iris brun ; pattes d'un gris noirâtre.
Hab. — Le Cormoran ordinaire est plus ou moins commun et séden-
taire aux îles Britanniques et
dans toute l'Europe, ainsi qu'en
Islande {Faber), au cap Nord et
dans la Laponio russe {Collett).
En Belgique il est commun et sé-
dentaire sur les côtes maritimes
et sur l'Escaut, et il se montre
parfois jusque sur les eaux des
environs de Bruxelles; M. A.
ji..jgg..;o»bl
ir
ii(LJ
Groegaert dit que tous les ans il y en a qui nichent sur le fort du
Nord (Anvers).
En Afrique, cet oiseau est sédentaire dans les contrées les plus
septentrionales [Tjoche, etc.), mais il ne paraît visiter qu'en hiver les
autres parties du continent noir; il est alors commun en Egypte
(rfe /Tew^/m) jusqu'au Soudan {A. Brehm)\ il est cependant probable
qu'il se montre en Afrique un peu partout, car il a été observé en
Sénégambie [Lichtetistein), au Damaras {Andersson) et dans la répu-
blique d'Orange {Barratt).
Il paraît également habiter toute l'Asie jusqu'au Kamtschatka
'wïdwsiyameïii {Taczanowski) et au Ja])on{Sfh/égel); dans le Sud, on
le voit en Perso {Blanfny^d), dans l'Inde {Jcrdnn), à Ceylan {Secbohm),
dans riiKJo-Chiiio {Hume), en Chine {Darid), à Formose {Swifi/toc),
à Malacca et à Sumatra {Vurdemian). Il est aussi plus ou moins
- 532 —
commun à la Nouvelle-Zélande (Buller), en Australie et en Tasmanie
{Gould, etc.).
En Amérique on observe cet oiseau sur les côtes de l'Atlantique,
au Groenland {Holbôll) et depuis la mer d'Hudson et le Labrador
{Baird) jusque dans la Caroline et la Géorgie {Dresser). Comme on
vient de le voir, cette espèce est presque cosmopolite.
Mœurs. — Le Cormoran ordinaire habite les côtes maritimes, de
préférence les îles rocheuses et les falaises, ainsi que les fleuves, les
lacs et autres grandes eaux poissonneuses entourées de bois ou situées
dans le voisinage d'une forêt. Quand une localité lui convient, il y
retourne tous les ans et en nombre toujours plus considérable, car il
aime la société, aussi le voit-on rarement seul ; c'est par centaines et
même par milliers qu'on observe ces oiseaux dans certains endroits
où ils se sentent en sûreté. Ce n'est pas, à vrai dire, une espèce
migratrice, mais en automne elle quitte généralement l'endroit où
elle a niché pour errer dans les pays voisins, et alors elle entreprend
parfois de longs voyages qui la conduisent jusque sous les tropiques,
car tous les climats lui conviennent.
A terre, cet oiseau paraît indolent ; il marche avec difficulté, mais
pas beaucoup plus mal que les fuliguliens, et tient le corps assez
droit. Il se repose de préférence sur les arbres et sur les rochers, et
se montre même plus adroit au milieu des branches que sur le sol.
Mais c'est dans l'eau qu'il déploie toute son agilité : il nage à la
perfection et vite, plonge à une grande profondeur et se meut entre
deux eaux avec une célérité incroyable; Naumann dit qu'il peut
rester trois à quatre minutes sous l'eau sans respirer. Lorsqu'il se
voit poursuivi, il plonge une fois ou deux, ne revenant chaque fois
à la surface qu'à une cinquantaine de mètres de l'endroit où il a fait
le plongeon ; mais s'il s'aperçoit qu'on continue à le poursuivre, il
prend son vol et s'éloigne à tire-d'aile. « Quand sur mer, dit A. Brehm,
on s'approche en bateau d'une île de rochers sur lesquels sont per-
chés des centaines de Cormorans, on les voit tout d'abord allonger le
cou et remuer la tête, puis piétiner maladroitement à droite et à
gauche et enfin partir tous ensemble. Quelques individus de la bande
s'élèvent dans les airs, volent, puis glissent en planant droit devant
eux; quelques autres commencent par s'élever en tournoyant à des
hauteurs plus considérables ; la plupart d'entre eux sautent dans la
mer à peu près à la manière des grenouilles, plongent et reparaissent
à la surface le plus loin possible de l'endroit où ils ont plongé; ils
— 533 —
surveillent le bateau, et, s'il avance trop à leur gré, plongent de nou-
veau et fuient jusqu'à ce qu'ils se trouvent suffisamment en sûreté...
Sous l'eau, ils nagent avec une telle rapidité que c'est à peine si la
meilleure barque, conduite par les rameurs les plus exercés, peut les
atteindre ; outre cela, ils plongent longtemps et à des profondeurs
considérables, reparaissent un instant à la surface, respirent rapide-
ment et disparaissent de nouveau. Quand ils poursuivent leur proie,
ils s'allongent et donnent de larges coups de rame avec une telle
énergie que leur corps est lancé à travers l'eau comme une flèche;
en un mot, ils dominent leur élément de la manière la plus parfaite. »
C'est donc un oiseau prudent, rusé et méfiant, mais il se montre
aussi agressif et méchant envers les autres oiseaux, surtout quand la
jalousie et la voracité sont en jeu. Son bec est une arme dangereuse
et il blesse parfois jusqu'au sang l'oiseau auquel il a cherché querelle ;
un individu blessé et incapable de se sauver, se défend courageuse-
ment contre les chiens et même contre l'homme, dirigeant e-urtout
ses coups de bec vers les yeux de l'assaillant ; même les coups qu'on
reçoit sur la main laissent parfois des traces profondes.
En volant, l'oiseau tient le cou droit devant lui, les ailes largement
étalées ; il vole avec beaucoup d'aisance tantôt en battant des ailes,
tantôt planant en décrivant des cercles à une hauteur considérable ;
son vol est du reste variable et ressemble par moment à celui d'un
Sterne, d'autres fois à celui d'un Corbeau et parfois même on croirait
voir un Canard. Le Cormoran est en général un oiseau peu bruyant;
son cri est rauque et ressemble assez à celui du Corbeau et on peut le
rendre par kra, kra, krau et krav.
La nourriture de cet oiseau se compose uniquement de poissons.
C'est surtout le matin qu'il se livre à la pêche, poursuivant sa proie
jusqu'à vingt-cinq à trente mètres de profondeur ; quand il est bien
gorgé et qu'il lui est impossible d'avaler encore une victime, il va se
percher sur un arbre ou sur un rocher, se repose, digère et sèche son
plumage au soleil. C'est un oiseau extrêmement vorace dont on ne peut
tolérer la présence près des eaux intérieures, car une bande do Cor-
morans détruit énormément de poissons et occasionne plus de dégâts
qu'une Loutre.
En Chine, on dresse ces oiseaux àla pêche, mais on ne se sert que
de sujets nés en captivité, car les Chinois font couver des œufs de
Cormorans par des poules domestiques. Un Cormoran bien dressé
saute à l'eau sur l'ordre de son maître, plo[ige et rapporte le poisson
— 534 —
qu'il a pris, car on a soin de lui mettre autour du cou un anneau de
métal qui l'empêche d'avaler le produit de sa chasse ; mais après
avoir travaillé pendant quelque temps, son maître lui enlève l'anneau
et lui donne le fretin pour récompense.
Reproduction. — Ce Cormoran niche dans des endroits divers :
près de la mer, il choisit les îles rocheuses, les falaises, et construit
son nid dans les trous et dans les crevasses des rochers ; près des
eaux douces, il niche sur des arbres élevés ou sur la tête d'un saule,
moins souvent dans les buissons; enfin, dans les marais, il est obligé
de faire son nid dans les joncs et les roseaux. Là où les Hérons ont
leurs colonies et où nichent également des bandes de Freux, les Cor-
morans cherchent à s'emparer de nids de ces oiseaux ; les Freux sont
facilement expulsés de leur propriété, mais il n'en est pas de même
des Hérons qui sont de force à se défendre ; ce n!est qu'après un
combat acharné que les Cormorans parviennent à prendre possession
de quelques nids de Hérons.
« Au printemps de 1812, dit Naumann, quatre couples de Cormo-
rans se montrèrent dans une propriété non loin de la ville de Lutjen-
bourg et voisine de la mer, et s'établirent dans un bois sur de grands
hêtres, qui servaient depuis des années aux colonies de Hérons et de
Freux. Ils expulsèrent quelques familles de Hérons pour se servir de
leurs nids, firent deux couvées, la première en mai, l'autre en juillet,
et, réunis en une bande d'une trentaine d'individus, ils quittèrent la
contrée en automne. Ils revinrent au printemps de l'année suivante
et de toutes les années qui suivirent, en nombre toujours plus consi-
dérable, qu'on put bientôt évaluer à 7,000 couples. F. Boie, de qui
je tiens le fait, compta en juin 1815, sur quelques arbres placés dans
un petit rayon, 50 nids de Cormorans; la quantité de ces oiseaux qui
allaient et venaient mêlés à des Hérons et à des Freux, remplissaient
les airs de leurs cris sauvages qui vous assourdissaient; les arbres
comme leur feuillage étaient blanchis par les excréments, et l'air
était empesté par les poissons pourris tombés des nids. Ce ne fut
qu'après plusieurs années de chasses actives et ininterrompues, qu'on
parvint à se débarrasser de ces pillards qui finirent par se diviser en
plusieurs bandes pour aller s'établir près de la mer (1) »
C'est ordinairement en avril que ces oiseaux reviennent aux lieux
de la reproduction ; à ce moment ils ont encore leur beau plumage,
(1) Naumann, Vôgel DeuUchl. xi, p. 78.
— o3o —
quoique déjà plus ou moins usé; mais à partir de ce jour, l'usure des
plumes blanches devient de plus en plus visible, et quand les jeunes
éclosent, les parents n'ont plus de trace de leur parure d'automne.
Près de la mer, les nids sont ordinairement construits à l'aide
d'herbes marines, mais la base est autant que possible composée de
branches mortes et de tiges herbacées. Quand ces oiseaux nichent
sur des arbres, leur nid demande toujours plus de travail, et c'est
pour le rendre moins pénible qu'ils s'emparent de nids de Hérons ou
de Corneilles, qui leur servent alors de base ; les deux sexes les appro-
prient en y ajoutant des bûchettes, des joncs, des roseaux et autres
matériaux grossiers. La ponte est de trois à cinq œufs elliptiques,
granulés, d'un bleu verdâtre pâle, mais ils sont recouverts d'une sub-
stance calcaire blanche qui laisse cependant entrevoir la couleur de
la coquille ; ils mesurent en moyenne 63 millim. sur 39.
Mâle et femelle couvent alternativement et les œufs éclosent au
bout d'un mois. Les parents témoignent beaucoup d'atïection à leurs
poussins et leur apportent une quantité de petits poissons qu'ils jettent
dans le nid. Vers la mi-juin les jeunes peuvent prendre leur vol et
suffire à leurs besoins; les parents se préparent alors à faire une nou-
velle couvée, du moins ceux qui habitent la zone tempérée. Il est
cependant à remarquer que, par suite de certaines circonstances, la
première ponte est parfois retardée, et dans ce cas iln'est pas possible
aux oiseaux d'avoir une seconde couvée.
277. — Le Cormoran huppé.
PHALACROCORAX GRACULUS, Pall. ex Lin.
(PI. 278)
Phalacrocorax minor, Briss. Ornith. VI, p. 516 (1760).
Pelecanus GRACULUS, Lxn.Syst. 7ial.l, p. 217 (1766).
Procellaria GRACULUS et CRiSTATUs, MuU. Zool. Dan. Prodr, p. 18 (1776).
Pelecanus cristatus, Fab Faun. Gfoenl. p. 90 (1780).
Carbo GRACULUS, Mey. Tascitenb. deuiscli. Yiiyelh II, p. 578 (1810).
Ph.vlacrocoraxgraculu.s, Pall., Zoogr. Rosso-As. II, p. 299(1811).
Hydrocorax cristatus, Vioill. iV. Dict. (Thist. nat. VIII, p. 89(1817).
Carho cristatus, Tem., Man. d'Orn. II, p. 900 (1820).
Halieus GRACULUS, Liclit. Verz. Loubl. p. 80(1823).
Phalacrocorax cristatus, Steph., S/iaw's G^'n. Zool XIIIl, p. 83 (1825).
Carbo desmaresti, Payraud. Ann. iSc. Nat. 1826, p. 460.
Carbo bbachyuros, Brehm., 7sis, 1830, p. 995.
IIali.eus leucoqastek, Gara, Eknc. degl. Ucc. Sr.rd. p. 100 (1842).
536 —
Carbo graculus mediterraneus, Schleg. Rev. crit. p. CXXIII (1844).
Graculus cristatus, linn^ii et desmarestii, Gray. Gen. Birds, III, p. 667 (1845).
Phalacrocorax desmaresti, Brehm, Naumannia, 1855, p 296.
CoRMORANUS CRISTATUS, C.-F. Dub. PL col. Ois. Belg. III, p. 229 (1860).
Die Krahenscharbe, en allemand.
The Shag, en anglais.
De geruifde Aalscholver, en flamand.
Taille : 0"^55 ; ailes, O'^BS.
Description des deux sexes adultes. — D'un vert noirâtre uniforme à reflets
bronzés, les plumes des ailes et du haut du dos bordées de noir velouté ;
rémiges et queue noirâtres ; plumes du vertex allongées, recourbées en avant
et formant une large huppe qui disparaît après l'incubation ; parties nues de
la face d'un brun jaunâtre passant au noir au menton. Bec noir; iris d'un
beau vert ; pattes noires.
Jeune. — Ressemble à celui du Cormoran ordinaire, mais il est plus petit,
a plus de blanc aux parties inférieures et n'a que douze pennes dans la queue,
tandis que le précédent en a quatorze.
Poussin. — Face et gorge dénudées, d'un jaune sale; duvet brun, plus
foncé sur la tête et au cou. Bec brun à base jaunâtre ; iris d'un gris bleuâtre ;
pattes blanchâtres, grises à l'extérieur.
Hab. — Ce Cormoran est assez répandu et sédentaire en Islande,
surtout sur les côtes méridionales
et occidentales {Faber), aux îles
Féroé {Graba), Hébrides et sur
toutes les côtes des îles Britan-
niques {Seebohm) et de la Nor-
wège jusqu'au cap IS or d{Collett)
et la Laponie russe; il ne se
montre pas dans les pays bai-
gnés par la mer Baltique. Il
visite accidentellement les côtes occidentales du Danemark {Collin)^
du nord-ouest de l'Allemagne où plusieurs sujets ont été tués à
l'embouchure de l'Elbe {Naumann), de la Hollande {Schlégel) et très
accidentellement de la Belgique et du nord de la France, mais, sur
les côtes de la Normandie il est plus fréquent que le Cormoran ordi-
naire {Gadeau de Key^ville). Cet oiseau niche en grand nombre sur les
rochers de Jobourg (et non Isbourg) qui bordent les côtes des envi-
rons de Cherbourg, ainsi que sur les îles Jersey, Guernesey, Aurigny
{Canivet, Begland), sur les îles de la Bretagne {Lemetteil) et il n'est
pas rare à Hendaye {Olphe-Galliard). Cet oiseau se montre aussi
— 537 —
accidentellement sur les côtes d'Espagne [Saunders), de Gibraltar
{Irby), du Portugal {Reyes), de Ligurie et de Toscane, mais il niche
sur les côtes rocailleuses de la Sardaigne {Salvadori), de la Corse
{Giglioli) et du sud de la Dalmatie {Kolomhatovic) ; il est de passage
en Sicile {Malherbe). Il est également commun et sédentaire en Grèce
{Lindermayer) et aux Cjclades {Erhard), visite les côtes de l'Asie
Mineure [Lord Lilford) et se montre parfois au printemps et en
automne dans les parages du Pont-Euxin [de Nordmann). 11 est
sédentaire, mais rare au Maroc [Favier) et en Algérie [Loche).
Mœurs. — Le Cormoran huppé ou Nigaud est plus sédentaire que
le précédent ; en automne, il voyage d'une côte à l'autre en troupes
plus ou moins considérables, non pour chercher un climat plus doux,
mais dans un simple but de déplacement, aussi fait-il rarement un
long voyage. Il est essentiellement maria, n'habite que les îles
rocheuses et les falaises et ne se montre que rarement sur les eaux
douces de l'intérieur, et jamais très loin des côtes, à moins d'avoir été
emporté par une tempête. Là où il niche, on le voit généralement par
bandes composées de centaines d'individus, établissant leur demeure
sur des rochers arides et escarpés.
Cet oiseau a des habitudes et des moeurs assez semblables à celles
du Cormoran ordinaire ; il marche diflScilement, ne reste pas long-
temps debout, mais s'accroupit de suite sur ses tarses, tout en tenant
le corps assez droit ; il se tient ainsi parfois des heures entières à une
faible hauteur sur une saillie de rocher et la tête dirigée vers la mer ;
il est vrai que son plumage prend beaucoup d'eau et qu'il faut du
temps pour le sécher. Au premier coup de feu, toute la bande se jette
à l'eau et disparaît dans les flots. Ce Cormoran nage avec vigueur,
mais il n'enfonce pas autant le corps que l'espèce précédente ; sous
l'eau il est d'une agilité incroyable, plonge à de grandes profondeurs
où il poursuit les poissons en tout sens, et il peut, d'après Graba,
rester submergé trois à quatre minutes sans respirer. Son vol est facile
et varié, mais l'oiseau ne vole pas beaucoup et rarement bien loin, car
c'est toujours en plongeant qu'il cherche à échapper à ses ennemis,
mais si l'on continue à le poursuivre, il s'envole au loin. C'est, du reste,
un oiseau prudent et farouche, mais il se montre moins détiant près
de son nid et quand il se trouve isolé ; il aime la société, même celle
d'autres oiseaux aquatiques comme les Cormorans ordinaires, les
Eiders, etc. Son cri ressemble à celui de l'espèce précédente : il est
rauque et guttural, mais l'oiseau no le fait pas entendre souvent.
TuM. II. — 1WU3. 68
~ 538 —
Le Cormoran huppé se nourrit, comme son congénère, essentielle-
ment de poissons qu'il va chercher, d'après Graba, jusqu'à une pro-
fondeur de cent à cent cinquante pieds, où il trouve des Cottus scor-
pio, Clupea sprattus, de jeunes Pleuronectes hypoglossus et autres
poissons (1).
Reproduction. — Cette espèce ne niche pas en troupes aussi nom-
breuses que la précédente, et cela tient surtout à ce qu'elle établit
son nid de préférence dans des trous et dans des crevasses de rocher,
qui ne peuvent pas toujours en contenir beaucoup et qui sont souvent
assez espacés les uns des autres. A défaut de cavités, elle niche sur
des saillies de rochers, comme Graba l'a constaté aux îles Féroé. Le
nid est grand, assez élevé au début, enfoncé au centre et composé
uniquement de fucus, de zostères et autres plantes marines; c'est, en
un mot, une masse compacte, humide et malpropre, surtout quand
elle se couvre d'excréments et de déjections.
La ponte a lieu vers la fin d'avril ou en mai et parfois en juin;
M. CoUett dit avoir vu au cap Nord, le 26 juin 1872, des nids qui
avaient encore des œufs, tandis que d'autres contenaient des jeunes à
moitié ailés. Faber a fait la même remarque en Islande. La femelle
dépose trois ou quatre œufs qui ne diffèrent guère de ceux du Cor-
moran ordinaire, mais ils sont un peu plus petits : ils mesurent envi-
ron 58 millim. sur 35. Les deux sexes les couvent alternativement
pendant vingt-quatre à vingt- sept jours, mais il arrive souvent que
l'un des œufs se gâte.
Les jeunes crient beaucoup et paraissent toujours affamés, bien que
leurs parents ne les laissent manquer de rien.
TROISIÈMK SOUS-ORDRE
LONGIPENNES.
Car. — Bec de longueur moyenne, comprimé latéralement, crochu
ou pointu; ailes très longues, pointues et plus ou moins étroites;
queue de longueur et de forme variables, composée ordinairement
de douze rectrices; les trois doigts antérieurs réunis par une mem-
brane parfois échancrée. Tête médiocre; cou court; corps assez volu-
mineux ; plumage serré et abondant, de couleur assez uniforme et
variable suivant l'âge et les saisons.
(1) C. J. Graba, Tagebuch, Reise nach Fàrô, p. 161.
— 539 —
Mœurs. — La majorité des Longipennes sont essentiellement ma-
rins et peuvent défier l'océan et ses tempêtes ; ils aiment la pleine
mer quand le temps est beau, mais les ouragans les chassent vers les
côtes. Les uns sont sociables, les autres ont des habitudes plus soli-
taires. L'air est leur élément favori, car ce sont des voiliers de premier
ordre; ils nagent plus ou moins bien, mais peu savent se mouvoir
sous l'eau; leur marche est en général facile. Ceux qui vivent près
des côtes se montrent prudents, intelligents et méfiants ; ceux, au
contraire, qui vivent habituellement en pleine mer, paraissent stu-
pides et imprudents. Ils se nourrissent de toutes espèces d'animaux,
parfois de cadavres et de charognes.
Ces oiseaux nichent généralement à terre, dans des marais, sur
des rochers, dans des trous, etc. Ils pondent, suivant les espèces, de
un à quatre œufs ; les jeunes ne sont conduits à l'eau que quand ils
savent voler.
Ce groupe se divise en deux familles : les Sternidés et les Laridês.
FAMILLE DES STERNIDÉS.
Car. — Bec le plus ordinairement de la longueur de la tête, droit,
la mandibule supérieure fléchie vers la pointe, ailes très longues,
étroites, aiguës, la première rémige la plus longue ; queue assez
longue, plus ou moins fourchue et formée de douze rectrices; tarses
courts ; quatre doigts, les antérieurs réunis par une palmature plus
ou moins échancrée ; ongles assez acérés.
Ilab. — On observe des oiseaux de cette famille dans toutes les
parties du monde.
Mœurs. — Les Sternidés vivent sur les côtes maritimes ou près des
eaux douces. Ce sont des oiseaux élégants, vifs, agiles et toujours en
mouvement; ils volent toute la journée avec une agilité prodigieuse,
et ce n'est pas sans raison qu'on leur a donné le nom à' Hirondelles de
mer; leur vol est aussi rapide que celui des vraies Hirondelles, et,
comme ces dernières, les Sternes se reposent peu et jamais longtemps.
Au repos, leur corps prend une position horizontale, la tête rentrée
entre les épaules et les ailes un peu relevées en arrière. Elles marchent
en général mal et en trottinant; sur l'eau elles flottent comme un mor-
ceau de liège, mais elles sont incapables de nager vite. Ces oiseaux
se nourrissent, suivant leur taille, de petits poissons, do divers petits
animaux marins, de vers, de larves et d'insectes; les grandes espèces
— 540 —
poursuivent souvent des oiseaux et des petits mammifères, mais toutes
saisissent leur proie en plongeant ou en fondant sur elle.
Elles nichent en société, mais le plus souvent chaque espèce forme
des colonies séparées; les unes font leur nid dans les marais, les au-
tres déposent simplement leurs oeufs dans une petite excavation
creusée dans le sable au bord de la mer; quelques-unes nichent sur
des arbres ou déposent plutôt leurs œufs dans les crevasses des
écorces ou à la bifurcation d'une branche.
Tableau analytique des espèces indigènes (1)
A. Queue fourchue (genre Sterna.)
a. Taille forte, bec rouge, pieds noirs (ailes 400 ™™.) 5. caspia
b. Taille moyenne :
. . (bec entièrement noir (ailes 335 ™™.) S. angliea
1. pieds noirs, | bec noir à pointe jaune (ailes 310 ™'°.) . . . . S. cantiaca
. . ( bec rouge à extrémité brun foncé (ailes ^0 ™™.) . S.fluviatilis
l. pieds rouges, | bec entièrement rouge (ailes 275 "''".) S.paradisea
3. pieds oranges, bec noir (ailes 230 "'^i.) S. dougalU
c. Taille petite, pieds oranges, bec jaune à pointe noirâtre (ailes 180 °"".) S. minuta
B. Queue peu fourchue, palmature fortement échancrée (genre Hydrochelidon.)
_, . j ( noires (ailes 215™™.) H. leucoptera
Couvertures du ( bec rouge (ailes 230-™.) H. hybrida
dessous de 1 aile ( blanches ou gris pale, j bec noir (ailes 210™™.). H. nigra
GENRE CLVIII.
STERNE OU HIRONDELLE DE MER. — STERNA.
Sterna, Briss. Ornith. VI, p. 202 (1760).
Thalasseus et Sternula, Boie, Isis, 1822, pp. 563-64.
ViRALVA, Steph. Shaw's Gen. Zool. XIII, I.p. 174 (1825).
Thalass.îîa, AcTOCHELiDON,HYDROPRoaNE, Kaup, Natilrl. Syst. pp. 31, 91, 97 (1829).
Syluchelidon, Gelochelidon, Brehm, Isis, 1830, p. 994.
Planetis, Helopus, Haliplana, Laropis, Onychoprion, Wagl. Isis^ 1832, pp. 1222-
1277.
Thalassites, Swains. Classif. Birds II, p. 372 (1837).
Hydrocecropis, Boie, Isis, 1844, p. 179.
Thalassipora, Riipp. Syst. Uebers. p. 140 (1845).
Anous, Less. Descr. Mani. et Ois. p. 255 (1847).
Car. — Bec aussi long que la tête ou un peu plus long, comprimé, presque
droit ou à arête légèrement arquée, plus haut que large et diminuant insen-
siblement de la base à l'extrémité; narines basales, latérales, oblongues ; ailes
très longues, la première rémige dépassant les autres; queue de longueur
(1) Ce tableau facilite la détermination des sujets adultes ; pour les jeunes dont le bec et
les pattes n'ont pas encore leur couleur définitive, la dimension des ailes est un bon guide,
quoique les ailes soient toujours un peu plus courtes chez les jeunes que chez les adultes.
— 341 -
moyenne, plus ou moins fourchue, composée de douze rectrices; tarses courts;
doigts courts et grêles; membranes interdigitales médiocrement échancrées.
jlg;ff — Ce genre est cosmopolite.
278. — La Sterne tschégrava.
STERNA CASPIA, Pall.
(PI. 279.)
Stkrna CASPIA, Pall. Nov. Comm. Petrop. XIV, p. 582 (1769-70).
Sterna TSCHEGRAVA, Lepech. Nov. Comm. Petrop. XIV, p. 500 (1769-70).
Sterna caspica, Sparrm,' M^/s. Cari. II, fase. 3, n° 72 (1788).
Sterna MEGARHYNCHOS,Mey. Taschenb. Deutsch. ydgelk. II, p. 457 (1810).
Thalasseus caspius, Boie, Isis, 1822, p. 563.
Hydroprognf ;aspica, Kaup, Sk. Entw. eur. Thier. p. 91 (1829).
Sylochelidon balthica, Schellingii et caspia, Brehm, Isis, 1830, p. 994.
Helopus caspius, Wagl. /sn-, 1832, p. 1224.
Thalassites melanotis, Swains. B. W. Afr. II, p. 253 (1837).
Sylochelidon strenuus, Gould, Pr. Zool. Soc. 1846, p. 21.
Sylochelidon melanotis, Bp. Compt.-rend. 1856, p. 772.
Sterna melanotis, Hartl. Orn. W. Afr. p. 254 (1857).
Sterna major, Ellman,Zoo^. 1861, p. 7472.
Die Raub-Meerschwalbe, en allemand.
The Caspian Tern, en anglais.
De Reus-Zeezwaluw, en flaman''
Taille: O^^SO (1); ailes 0,40.
Description des deux sexes adultes en été. — Front, dessus de la tête jus-
qu'aux yeux, et les plumes allongées de l'occiput d'un noir profond satiné;
lorums, cou, bas du dos, sus-caudales, blancs; manteau et ailes d'un gris
bleuâtre pâle ; rémiges primaires cendrées, à bords et extrémité noirâtres,
les baguettes blanches ; joues et parties inférieures d'un blanc pur; queue
blanchâtre. Iris brun; bec rouge vermillon, passant au rouge brun à la pointe ;
pattes noires.
En hiver. — Se distingue par la coloration de la tête: front blanc mou-
cheté de gris noirâtre; lorums avec de petites stries noires, formant une tache
noire devant l'œil; dessous de l'œil et région des oreilles noirs variés de gris;
le reste de la tête blanchâtre, mais chaque plume terminée de noir; les
autres parties comme en été.
Jeune. — Calote d'un noir brunâtre, mais chaque plume plus ou moins
(1) La longueur totale est toujours i>rise du sommet de l.i tête à l'extrémitc «les pointes de l.i
queue, mais elle n'est qu'approxiu.ativc. ne pouvant prendre la mesure sur des sujets en chair.
par contre, la longueur des ailes peut Cire donnée avec exactitude
— 542 —
bordée de blanchâtre ; dos, scapulaires et couvertures des ailes d'un gris
bleuâtre clair, les bordures des plumes un peu jaunâtre, et devant celles-ci
un croissant d'un brun clair en zigzag; joues, gorge et parties inférieures
blanches. Bec d'un rouge pâle; pattes d'un gris brunâtre.
Poussin. — Vertex et côtés de la tête d'un gris cendré, un peu plus foncé
à la base du duvet; manteau, dessus des ailes et des cuisses d'un cendré rem-
bruni à la base et à la pointe des tiges, mais sans taches déiSnies; devant du
cou et poitrine gris; gorge, ventre et abdomen blancs; bec rouge pâle, avec
une tache noire près la pointe de chaque mandibule et le marteau blanc;
pieds d'un jaune rougeâtre (J. Vian.)
Hab.
mipBfM
La Sterne tschégrava ne paraît pas dépasser en Europe le
-^-^. .„ ,^^,,^^,„. 62*' 1. N. Elle niche sur les côtes
|l de la Suède {Nilsson), se montre
parfois sur celles du sud de la
Norwège (Co//e^^), de la Finlande
{Palmén), près de St-Péters-
'^ ] bourg {Bûchner), et niche sur
quelques îles danoises et du nord
de l'Allemagne, notamment à
^ l'île de Sylt. Jusqu'en 1860,
quelques petites colonies existaient sur les côtes et les îles de la Bal-
tique et de la mer du Nord; mais en enlevant constamment les œufs
de ces oiseaux, on a fini par les chasser presque partout. Quand, en
1819, Naumann visita l'île de Sylt, il estima à près de trois cents le
nombre des couples de Sternes caspiennes qui y nichaient ; en 1874,
M. Durnford n'y trouva plus que vingt-cinq couples environ.
Cet oiseau n'a été observé ni en Ecosse, ni en Irlande, mais il visite
accidentellement l'Angleterre : de 1825 à 1869 on compte treize cap-
tures pour ce pays {Harting). Il se montre aussi très accidentellement
en Hollande {Schlégel) et en Belgique : un individu a été pris près de
Tournai [de Selys), un autre a été tué sur un étang à Bruxelles le
24 juillet 1865 {G. Vincent), et un jeune a été tiré il y a une tren-
taine d'années dans les polders d'Anvers, près de la Tête-de-Flandre
{Croegaert). Il est aussi très rare en France : M. Gadeau de Ker-
ville signale quelques captures sur les côtes de la Normandie,
d'autres ont été faites sur celles de l'Atlantique {Olphe-Galliard) et
dans les départements de l'Aude, de l'Hérault et des Pyrénées orien-
tales {Lacroix); il est moins rare en Espagne, surtout sur les côtes
de l'est {Saunders) et en Portugal {du Bocage); il niche sur quelques
îles désertes de la Sardaigne {Cantraine), mais il est rare dans les
— 543 -
autres parties de l'Italie {Salvadon, Giglioli) et à Malte [Wright). II
niche dans l'Archipel grec [Lindermayer), dans la Dobrodja {Âlléon),
sur les côtes de la mer Noire {Seehohm) et de la mer Caspienne, sur-
tout à l'île Sari [Radde). Dans l'intérieur de l'Europe, cet oiseau a été
capturé accidentellement près de Varsovie {Taczanowski), en Autri-
che, près de Seefeld {von Pelzeln), en Suisse près de Genève
(Fatio), etc.
En Afrique, on rencontre probablement des sujets de cette espèce
sur toutes les côtes : elle a éié observée en Algérie (Loche), au Maroc
[Favier), sur la côte occidentale depuis la Sierra-Leone jusqu'au Da-
maras [Andersson) et au cap de Bonne-Espérance [Layard) ; elle esl
sédentaire dans la Basse-Egypte et sur les côtes de la mer Rouge
jusque dans le golfe d'Aden, mais le long du Nil et de ses affluents,
ainsi que dans les marais de la Haute-Egypte, de la Nubie et du Kor-
dofan on la voit surtout en hiver [de Heuglin); on l'a encore observée
en Abyssinie [Finsch et Eartlaub), au Zambèze où elle niche [Kirke),
à Mozambique, à la baie d'Algoa [Brehm) et à Madagascar [Hart-
lauh).
Plus à l'Est, on rencontre cette Sterne sur les côtes de la Palestine
[Tristram) et de l'Asie Mineure [Krilper), au Turkestan [Severtzoïo),
au Béloutchistan [Blanford), sur les grands lacs qui avoisinent
rindus {Hume), sur les côtes de l'Inde [Jerdon), de Ceylan [Holds-
worth), de la Birmanie [Seebohm), du sud-est de la Sibérie près des
bouches du Dséja [Radde), de la Chine et même sur les lacs et les
cours d'eau de l'intérieur [David), à Formose [Swinhoé), sur les côtes
de l'Australie, de la Tasmanie [Gould) et de la Nouvelle-Zélande
[Buller).
Enfin, en Amérique, on observe cet oiôeau accidentellement sur les
côtes de l'Alaska (AWson) jusque sur celles de la Californie et du
nord du Mexique, et du Labrador à la Floride [Seehohm).
Mœurs. — La Sterne tschégrava, ou Hirondelle de mer Caspienne,
est un oiseau migrateur : elle quitte ordinairement les régions du
nord dans le courant de septembre et y retourne en avril ; elle ne doit
cependant pas être très sensible au froid, car Naumaun dit qu'on
a déjà vu de ces oiseaux à l'île de Rugen vers le milieu de février.
Cette Sterne vit surtout près des côtes maritimes, mais elle visite
aussi les tleuves et les lacs situes à quelques kilomètres de la mer. En
hiver, cependant, elle se montre souvent sur les eaux de l'intérieur des
continents, car de Heuglin et A. Brehm l'ont souvent observée dans
— 544 —
le Soudan, où cet oiseau demeurait assez longtemps près des lacs et
des fleuves de l'Afrique centrale. Ce sont cependant des exceptions
qui ne se présentent que là où l'oiseau peut suivre le cours d'un très
large fleuve comme le Nil, et il faut tenir compte aussi de la
rapidité avec laquelle il franchit en peu de temps des distances
énormes.
Cet oiseau nage plus volontiers que les autres espèces du genre,
mais sans adresse ; il sait courir assez vite, vole en donnant de lents
mais vigoureux coups d'ailes et plane souvent comme les Mouettes ;
il vole ordinairement à une quinzaine de mètres au-dessus de l'eau,
sur laquelle il se laisse de temps en temps tomber obliquement. Pour
se reposer, pendant la nuit comme le jour, il choisit un endroit
sablonneux du rivage, et là il forme souvent avec ses semblables une
lon<^ue ligne serrée, et tous les individus qui la composent sont cou-
chés sur la poitrine, la tête toujours dirigée du côté' de l'eau. Il est
craintif, déliant, peu sociable el ne se réunit en bande qu'au moment
de la reproduction ; en tout autre temps, chacun vit pour soi et ne
rejoint ses semblables que pour le repos de la nuit. En cas d'attaque,
il se défend avec courage, donne de vigoureux coups de bec et par-
vient à mettre en fuite les plus grands Goélands. Il est moins bruyant
que ses congénères, mais sa voix est plus forte et plus rauque ; c'est
surtout en volant et près de son nid qu'il fait entendre son cri res-
semblant, d'après Naumann, à krraeik-krraeike et krraei !
C'est un oiseau très vorace, se nourrissant surtout de poissons; il
prend aussi des crustacés et même de petits oiseaux, car il enlève sou-
vent les couvées des espèces aquatiques qui nichent sur le rivage,
malgré l'énergique défense des parents; de Heuglin dit qu'il s'avance
parfois loin dans les steppes pour y faire la chasse aux sauterelles,
aux jeunes oiseaux et aux souris,
Reproduction. — Cette Sterne niche ordinairement en colonies sur
le rivage de la mer. Il résulte des observations que Naumann a faites
à l'île de Sylt, que cet oiseau fait sa ponte dans la seconde quinzaine
de mai et qu'il dépose simplement ses oeufs dans une petite excavation
creusée dans le sable. Les couvées ne sont pas éloignées les unes des
autres de plus de deux pieds ; elles se composent de deux œufs,
quelquefois trois, mais jamais plus. Ces œufs ont la forme et la gros-
seur de ceux du Canard domestique; ils sont assez lisses, presque
mats, d'un blanc jaunâtre ou brunâtre et parsemés dépeints et de
petites taches arrondies, les unes profondes, d'un gris violacé, les
— 545 —
autres superficielles, d'un brun plus ou moins foncé ; leur teinte géné-
rale comme leurs taches sont d'ailleurs très sujettes à varier; ils
mesurent de 60 à 68 millimètres sur 44 à 48 millimètres.
A Sylt on enlève les œufs plusieurs fois, car ils ont un goût fort
agréable; ce n'est que huit ou quinze jours avant la St-Jean qu'on
laisse les oiseaux couver en paix. Quand on s'approche d'un nid, on
se voit aussitôt assiégé par les parents qui jettent de grands cris, mais
le mâle se montre encore plus hardi que la femelle. Cette dernière
interrompt souvent l'incubation, et en somme elle couve plus long-
temps que ses congénères; lorsqu'elle a été effrayée, elle ne revient
qu'assez tard à son nid. Les poussins courent sur le sable quelques
heures après leur naissance et les parents les nourrissent de petits
poissons. Pendant que la femelle couve, le mâle lui apporte souvent
des vivres.
279. — La Sterne hansel.
STERNA ANGLICA, Mont.
(PI. 280)
?Sterna nilotica, Gmel. Syst. nat. I, p. 606(1788).
Sterna anglioa, Mont. Orn. Dict. suppl. (1813).
Sterna aranea, Wils. Am. Orti. VIII, p. 143, pi. 72, f. 6 (1814).
Sterna akfinis, Horsf. Trans. Linn. Soc. 1820, p. 199.
Sterna risoria, Brehm, Beitr. z. Yogelk. III, p. 650(1822).
Thalasseub anglicus, Boie, Isis, 1822, p. 563.
Viralva ANGLICA, Steph. Shaws Gen. Zool. XIII, 1, p. 174 (1826).
Gelochelidon balthica, agraria. meridionalis, Brehm, Isis^ 1830 p. 994.
Gelochelidon aranea, Brehm, Vog. Deutschl. p. 775 (1831).
Laropis ANGLICA, Wagl. Isis, 1832, p. 1225.
Sterna MACROTARSA, Gould, Proc. Zool. Soc. 1837. p. 26.
Gelochelidon anghca et aranea, Bonap. Comp. List. B.p. 61 (1838).
Viralva aranea, Gould, Voy. Beagle, III, p. 145 (1841).
Gelochelidon palustris, Maogill. Man. Urit. B. II, p. 237 (1742).
Gelochelidon macrotarsa, Gould, Handb. B. Austr. II, p. 403 (1805).
Gelochelidon nilotica, Gray, Hawl-lisl, III, p. 119 (1871).
Die Lach-Mberschwalbe, en allemand.
Thk Gull-Billed TERN,en anglais.
De Lach-Zeezwaluw, en flamand.
Taille: O^Sl; ailes 0,33.
Description des deux scxc^ adultes en été. — Dessus de la tête et nuque d'un
noir profond; parties supérieures, ailes et dessus de la queue d'un gri-
bleuâtre pâle; rémiges d'un cendré brunâtre, plus foncé à la pointe, les l)ar-
ToMK II.— 1893. 69
— 546
bes internes d'un cendré blanchâtre sur une partie de leur étendue ; côtés de
la tête et du cou, gorge et toutes les parties inférieures d'un blanc pur. Iris
brun ; bec et pattes noirs.
En hiver. — Comme en été, mais le dessus de la tête blanc avec des stries
noires à la nuque.
Jeune. — Dessus de la tête blanchâtre ou d'un gris bleuâtre clair, strié de
brun ; une tache noirâtre sur la région parotique ; lorums blanchâtres, striés
de brun noirâtre formant tache au devant de l'œil ; dessus du corps et cou-
vertures supérieures des ailes variés de brun, de cendré et de jaunâtre ; des-
sous du corps blanc ; rémiges d'un cendré brun. Bec et pieds bruns, avec la
base du bec jaunâtre et la pointe noirâtre (Degland et Gerbe).
Poussin. — Toutes les parties supérieures d'un blanc fauve, faiblement
assombri sur le front et varié de mouchetures brunes, vagues et peu nom-
breuses sur le dos et au bas de la nuque ; devant du cou d'un brun enfumé
pâle; gorge, ventre, flancs et abdomen d'un blanc pur. Bec jaune; pieds
d'un jaune sombre. {J. Vian). —
jjab. — La Sterne hansel est une espèce méridionale. Elle niche
cependant en petit nombre en
Danemark et sur quelques îlots
des côtes danoises {Collin); elle
est de passage sur les côtes de la
Poméranie, à l'île de Rugen, et
niche sur la petite île de Lips
{Naumann); un couple a même
niché non loin de Munich près
de risar ( Wagler)ei-près d'Augs-
bourg {Leu). Elle visite accidentellement l'Angleterre, mais jamais
l'Ecosse et l'Irlande {Seebohm); elle se montre irrégulièrement en
Hollande {Schlégel) et très accidentellement en Belgique : plusieurs
individus ont été tués en Flandre et aux environs de Tournai
[de Selys-Longchamps); ses apparitions sont également rares ou acci-
dentelles sur les côtes de France [Degland), et une capture a été
signalée en Suisse près de Genève [Fatio). On l'observe parfois en
Portugal [Reyes), mais elle est abondante en Espagne dans la
Marisma du Guadalquivir et niche près de San-Lucar [Saunders). En
Italie, cet oiseau se montre surtout en Vénétie, en Ligurie, en Tos-
cane, dans la Romagne et en Sardaigne [Salvador i) et niche proba-
blement en Toscane [Giglioli), mais il est rare en Sicile [Malherbe);
il est assez répandu en Grèce [Lindermayer), et sa présence a été
constatée en Transylvanie [Danford et Hay^vie-Brown), en Hongrie
- 547 —
près du lac Neusiedel {Tschusi-Schmidh) et en Turquie ; dans la
Dobrodja il niche près du lac Razem {Alléon)-, on le rencontre égale-
ment en Bessarabie [de Nordmann), en Crimée et sur les côtes de la
mer Caspienne [Radde).
En Afrique, cette espèce niche dans les parties septentrionales
(Loche) et dans les lagunes de la basse Egypte ; on la rencontre dans
la vallée du Nil jusque dans les marais et les steppes du Kordofan,
mais le long de la mer Rouge et en Abyssinie elle paraît être de
passage {de Heuglin); on ne l'a observée dans aucune autre partie de
l'Afrique.
En Asie, cet oiseau est plus ou moins commun sur les lacs salés du
Turkesiàn (Sevei^izoîv), duCachemir, du sud delà Mongolie {Seebohm)
et du sud-est de la Sibérie près du Tarei-nor (Radde): il hiverne en
Perse, dans l'Inde (Jerdon), à Ceylan (Holsioorth), dans l'Indo-Chine,
à Sumatra (S. Millier), à Bornéo (Mottley), à Java (Schlégel), à Hal-
mahera (Bernstein), à la Nouvelle-Guinée et aux îles Salomon (Ram-
say), et niche dans diverses parties de l'Australie (Gould).
Enfin, en Amérique, on rencontre cette espèce sur les côtes de
l'Atlantique depuis le Connecticut (Baird) jusqu'au Texas (Dresser),
les Antilles (Gundlach, Léotaud), le Brésil (Sclater) et le nord de la
Patagonie (Darwin); du côté du Pacifique, elle n'a été observée jus-
qu'ici qu'au Guatemala (Salvin).
Mœurs. — C'est un oiseau migrateur qui revient en Europe en
avril et mai et émigré en septembre. Il vit sur les côtes maritimes, à
l'embouchure des fleuves et sur les lacs salés, plus rarement près des
eaux douces ; il aime en général les plages sablonneuses.
Cette espèce a les mêmes allures que ses congénères : son vol est
léger, adroit, rapide, et c'est dans les airs qu'elle passe la plus grande
partie de la journée, car on la voit rarement en repos; à terre, elle
marche et trotte avec facilité, mais elle n'aime pas à nager. Quand elle
s'abat sur l'eau, c'est plutôt pour se reposer, car elle ne rame presque
pas et se laisse balotter par les vagues. C'est un oiseau sociable avec
ceux de son espèce; il vole par couples ou en petites troupes non seule-
ment au-dessus des eaux, dit de Heuglin, mais encore dans les champs
et les prés et même dans les savanes et dans les steppes à plusieurs
lieues de l'eau ; il fréquente du reste beaucoup les champs et les
friches, où il fait la chasse aux sauterelles et aux lézards.
Cette Sterne est prudente et farouche dans les lieux où on la chasse,
mais ailleurs elle se nionlre assez conliante, tout on veillant à sa
— 548 —
sécurité; quand elle est blessée, elle se défend courageusement en
donnant de violents coups de bec. Son cri, d'après Naumann, ressem-
ble au rire d'une personne et peut se rendre par hai hai hai ou
haihaihai, d'où son nom allemand de Lach-Meerschwalbe (Hirondelle
de mer rieuse). Sa nourriture favorite consiste en insectes : elle
attrape très adroitement au vol des orthoptères, des libellules, des
coléoptères et des lépidoptères, se jette sur l'eau pour saisir des petits
poissons, des têtards de grenouilles, des larves et des insectes aqua-
tiques ; à terre elle fait la chasse aux araignées, aux vers, aux lézards,
pille les nids d'oiseaux plus faibles et dévore aussi bien leurs œufs que
leurs jeunes, elle poursuit même les petits mammifères.
Reproduction. — Cette Hirondelle de mer niche en mai ou au
commencement de juin près de la mer et des lacs salés, et exception-
nellement près des eaux douces. Les nids sont assez rapprochés,
mais consistent en une simple fossette creusée dansîe sable et garnie
de quelques brins ou radicelles. La ponte ordinaire est de deux œufs,
rarement trois, et quatre est l'exception ; ces œufs sont ovoïdes, assez
aigus au petit bout, à grain fin, d'un fauve verdâtre pâle tirant tantôt
sur le jaunâtre, tantôt sur l'olivâtre, et parsemés de points et de petites
taches arrondies ou irrégulières, les unes profondes peu nombreuses
mais plus étendues et d'un gris violacé, les autres superficielles d'un
brun plus ou moins foncé. Ils mesurent en moyenne 49 millimètres
sur 35.
280. — La Sterne caugek.
STERNA CANTIACA, Gmel.
(PI. 281)
Stebna sandvicknsis, Lath. Gen. Syn. Suppl. p. 296 (1787).
Sterna CANTIACA et AFRicANA, Gmel Syst. nat. 1, pp. 605-6 (1788).
Sterna boysii, Lath. Ind. Om. II, p. 806 (1790) .
Sterna STUBBERiCA, Bechst. Naturg. Deutschl. IV, p. 679 (1809).
Sterna canescens, Mey. Taschenb. Deutsch.Yogelk. II, p. 458 (1810).
Thalasseus CANTiACUS, Boie, Isis., 1822, p. 563.
AcTOCHELiDON CANTIACUS, Kaup, Sk. Entw. EuT. Th., p. 31 (1829).
Thalasseus canescens et candicans, Brehm, Isis, 1830, p. 994.
Sterna acuflavida, Cabot, Pr. Bost. Soc. II, p. 257 (1847).
Thalasseus acuflavidus, Coues, Pr. Phil. Ac. 1862, p. 540.
Die Brandseeschwalbe, en allemand.
The Sandwich Tern, en anglais.
De Groote Zeezwàluw, en flamand.
Taille : 0'"34 ; ailes O'^Sl.
— 549 —
Description des deux sexes adultes en été. — Capuchon jusqu'aux yeux d'un
beau noir lustré, les plumes de l'occiput prolongées en pointe ; une bande
partant des narines, joues, cou et parties inférieures d'un blanc pur; parties
dorsales et ailes d'un cendré bleuâtre ; rémiges cendré bleuâtre en dehors,
uue bande étroite plus sombre le long de la tige à l'intérieur, le reste de la
barbe interne et tige blancs ; queue très fourchue, blanche, d'un cendré
bleuâtre sur la barbe externe. Bec noir à pointe jaunâtre ; iris brun; pattes
noi-es.
En hiver. — Front blanc, dessus de la tête blanc taché de noir, plumes
de l'occiput noires ; manteau et ailes comme en été mais d'une teinte plus
pâle ; rémiges d'un gris noirâtre saupoudrées de gris bleuâtre, leur bord
interne blanc; le reste comme en été.
Jeune. — Capuchon d'un gris noirâtre avec les plumes bordées de cendré
roussâtre; dos et scapulaires d'un blanc nuancé de jaunâtre et marqués de
larges bandes noirâtres ; cou et parties inférieures blancs ; ailes d'un cendré
bleuâtre, les petites courertures bordées de brun, les moyennes et les grandes
terminées de blanc ; rémiges à peu près comme en hiver ; rectrices médianes
d'un cendré bleuâtre, légèrement tachées de brun à l'extrémité, les autres
d'un cendré noirâtre à leur extrémité avec la pointe blanche ; à cet âge la
queue est peu fourchue. Bec d'un brun livide ; pattes noirâtres.
Poussin. — Toutes les parties supérieures d'un fauve pâle et striées longi-
tudinalement de noir ; parties inférieures blanches. Bec jaune varié de brun ;
pattes brunâtres.
jjab. — Cet oiseau habite, en été, un grand nombre de côtes des
ij^mms^^^^in^^^^^^Wr^-'^"-' - îles Britanniques, du Danemark
[i I Jl ! ^■'' et du nord de l'Allemagne, mais
il est rare sur la mer Baltique,
. ne visite qu'accidentellement le
midi de la Suéde (Nilsson), et
une capture a été faite en Nor-
wège près de Namsos {Collett).
Il est plus ou moins abondant
sur toutes les côtes de l'Europe
occidentale et très commun, au printemps et en été, sur celles de
Belgique et sur l'Escaut jusqu'à Anvers. Pour l'Italie c'est plutôt
un oiseau de passage peu commun, mais il est sédentaire en Sicile
et en Sardaigne [Giglioli) ; il est rare eu Grèce {Lindermai/cr), mais
commun sur les côtes do la mt'r Noire {Kliccs et Buckley)^ moins
abondant sur celles de la mer Caspienne (Radde).
Les sujets d'I^ui-djn' \\m\ hiverner siii' les côtes N. et N.-E. de
**v.
-t
- 550 —
TAfrique, et on en rencontre alors sur toutes les côtes de l'Afrique
occidentale jusqu'au cap de Bonne-Espérance {Layard). Cette espèce
est sédentaire aux Canaries {Berthelot). Sa limite orientale est
l'Asie Mineure, la Perse {Blanford), le Beloutchistan et l'Inde près
des bouches de l'Indus [Humé).
En Amérique, cette Hirondelle de mer est plus ou moins répandue
en été sur les côtes de l'Atlantique depuis la Nouvelle-Angleterre
jusqu'aux îles Bahama, Cuba, Jamaïque et l'Amérique centrale
[Coues] ; en hiver on la voit plus au Midi jusque sur les côtes brési-
liennes de Bahia {von Pelzeln, Seebohm)\ du côté du Pacifique elle
ne paraît avoir été observée qu'au Guatemala.
Mœurs. — La Sterne caugek aime la pleine mer et ne se montre
presque jamais loin des côtes ; il lui arrive parfois cependant de
remonter les grands fleuves pendant quelques lieues et même de
nicher près des lacs qui ne sont pas trop éloignés de la mer, comme
le comte Alléon l'a constaté dans la Dobrodja, où cette espèce niche
près du lac Razem. Elle arrive dans nos eaux vers la fin d'avril et
émigré en septembre.
Cette espèce se réunit en grandes troupes et parfois par milliers
sur les plages maritimes, où elle passe la nuit couchée sur sa
poitrine; elle prend peu de repos pendant le jour et ne nage que
rarement; par contre, elle vole sans discontinuer, lutte avec succès
contre les tempêtes qui ne parviennent que rarement à la chasser
dans l'intérieur des terres. C'est un oiseau extrêmement prudent et
plus farouche qu'aucune autre Sterne ; il vit en bon voisinage avec
les autres oiseaux de mer, mais sans se mêler à leurs bandes. Il est
fort bruyant, et près des nids les clameurs de ces gracieux oiseaux,
quand ils sont très nombreux, vous assourdissent; ces cris sont
diversement modulés et ressemblent à kréj krré, kirreck, kerreck,
keikkeik, etc. Sa nourriture consiste en petits poissons que l'oiseau
saisit au vol, en fondant sur sa proie avec la. rapidité d'une flèche.
Reproduction. — Il est rare de voir cette Sterne nicher en petites
colonies ; d'ordinaire elles se rassemblent par milliers dans un même
endroit, et leurs nids sont si rapprochés les uns des autres qu'on ne
peut marcher entre eux sans écraser des œufs. La femelle dépose en
juin deux ou trois œufs dans une légère excavation creusée dans le
sable ou sur les pierres nues d'un rocher. Ces œufs sont ovoïdes, mats,
à pores visibles, d'un blanc roussâtre ou d'un blanc crème, et sont
parsemés assez régulièrement de petites taches d'un brun plus ou
— 551 -
moins foncé et d'autres, plus rares et profonds, d'un gris ardoise;
ils mesurent environ 50 millim. sur 36.
La femelle couve pendant toute la nuit, mais peu durant le jour,
et jamais quand le soleil est ardent ; il lui arrive souvent de ne pas
retrouver son nid et de se mettre sur les œufs d'une autre femelle,
ou bien de voir son nid occupé et alors elle va couver les œufs d'une
voisine. La durée de l'incubation est de trois semaines. La femelle
se montre bonne mère et élève ses petits avec tendresse.
281 . — La Sterne arctique
STERNA PARADISEA, Brun.
(PL 282).
Stebna PARADISEA, Briinn. Ornith. Bor. p. 42(1764).
Sterna hirundo, Lin. (part.) Syst. nat. L p. 277 (1766) et auct. plur.
Sterna MACRURA, Naum. Isis, I8I9, p. 1847.
Sterna arctica, Tem. M an. d'om. II, p. 742 (1820^.
Sterna argentata, Brehm, Beitr. III, p. 692 (1822).
Sterna nitzschii, Kaup, Isis, 1824, p. 153.
Sterna brachytarsa, Graba, Tageb. Reise nachFdro., p. 219(1830).
Sterna argentacea et macroura, Brehm, Isis, 1830, p. 994.
Sterna MARINA, Eyton, Cat.Brit. B. p. 55(1836).
Sterna brachypus, Swains. B. W. Afr. p. 252 (1837).
Sterna pirei, Lawr. Ann. Lyc. New-York^ VI, p. 3 (1853).
Sterna hirundo, Dress. Birds of Eur. VIII, p. 255 (1872).
Sterna portlandica, Ridgw. Am. Nat. VIII, p. 433 (1874).
Sterna fluviatilis, Dub. (nec ^a,am.), Bull. Mus. roy. d'hist. nat. lY, p. 21 (1885).
Die Kusten-Meerschwalbe, en allemand.
The Arctic Tern, en anglais.
De VLOEDZBEZWALUW,en flamand.
Taille : 0,'"32 ; ailes 0,275.
Description des deux sexes adultes en été. — Cai)uchoii d'uu beau noir
satiné, limité par une bande blanche qui part du bec; nuque, dessus du
corps, ailes, poitrine et la partie antérieure de l'abdomen d'un gris cendré
clair, mais plus foncé que dans le S. fluviatilis ; croupion, bas-ventre, sus et
sous-caudalcs ainsi que la queue d'un blanc pur, mais les deux rectrices les
plus externes bordées extérieurement de gris ; première rémige d'un gris
foncé avec un large bord blanc sur la barbe interne, les suivantes grises
poudrées de cendré pâle, le bord de la barbe interne en partie blanc, les
baguettes également blanches. Bec et pattes rouges ; iris brun.
En hiver. — Front blanc; un trait noir devant l'œil; dessus de la tête varié
de taches noires; partie occipitale ot nuque noires; le reste comme en été.
— 552 -
Jeune. Tête à peu près comme les adultes en hiver ; lorums blancs
tachetés de noir; gorge, joues, devant du cou, croupion et parties inférieures
blancs; parties supérieures d'un gris cendré, plus clair sur les ailes, les
bordures des plumes roussâtres ; au devant de celles-ci se trouve sur les
scapulaires et les ailes une bande transversale brune en forme de croissant ;
petites couvertures des ailes d'un gris ardoise ; rémiges cendrées, d'un gris
ardoise à leur extrémité mais terminées de blanc ; queue blanche, les rec-
trices latérales avec leur bord externe cendré, toutes terminées de gris
roussâtre. Bec brun noirâtre, orangé à sa base et aux commissures; pattes
d'un brun rougeâtre.
Poussin. — Tout le front et la gorge d'un noir enfumé; tour des yeux,
espace entre le front et le vertex d'un cendré uniforme ; les autres parties
supérieures marbrées de cendré et de noir, si confusément qu'il est difficile
de préciser la couleur dominante; poitrine et ventre d'un blanc pur; abdo-
men et dessus des cuisses d'un gris très pâle ; bec jaune à la base, brun au
delà des narines ; pieds jaunes. {J. Vian.) -^
jjoi^l)^ — Cette espèce habite en été les côtes et les îles de l'Europe
septentrionale jusqu'en Islande
{Faber), la Nouvelle-Zemble et le
Spitzberg (80° 1. N.) où elle est
généralement répandue {de Heu-
glin)\ elle est commune sur les
côtes de la Scandinavie (Nilsson^
Collett), de la Finlande [Dresser),
de la Russie occidentale, du
Danemark [Benzon), des îles
Britanniques, Orcades et Hébrides (^S'ee&o/im), des îles Féroé {Feilden),
mais elle est peu commune sur les côtes du nord de l'Allemagne
[Borggreve], et ne visite celles de la Hollande [Schlégel] et de la Bel-
gique que pendant les passages, et on la voit alors parfois aussi sur
TEscaut. M. de la Fontaine signale deux captures sur la Moselle dans
le grand-duché de Luxembourg, l'une en 1856, l'autre en 1861. Elle
est de passage régulier sur les côtes maritimes du nord de la France
et s'avance parfois jusque dans la Méditerranée {Deglandei Gerbe);
M. Gadeau de Kerville l'indique également comme étant de passage
régulier sur les côtes de Normandie. Ses apparitions sur les côtes
portugaises et espagnoles doivent être bien accidentelles, car les
faunes de ces pays ne mentionnent pas cette Sterne, seul le colonel
Irby cite une capture dans le détroit de Gibraltar; cependant elle
hiverne aux îles Açores et Canaries, au Maroc (Irby) et en Algérie
— 553 -
{Loche), et longe les côtes africaines jusqu'au cap de Bonne-Espé-
rance {Layard), mais, est-ce bien le S. paradisea qu'on voit dans le
sud de l'Afrique ?
En Asie, cet oiseau niche près du fleuve Taimyr {Middendorff), et
plusieurs exemplaires furent tués le 31 juillet dans le delta de l'An-
gara supérieur {Radde), mais M. von Homejer pense qu'il s'agit d'une
autre espèce. D'après M. Seebohm, son habitat s'étendrait à l'Est
jusqu'aux vallées de la Petschora, de l'Obi, du Jenissey et de la Lena.
En Amérique on rencontre cette espèce dans toute la zone polaire
depuis le Groenland {Holbull) et l'Alaska (iVe/son) jusqu'à la Nouvelle-
Angleterre {Baird), et du côté du Pacifique jusqu'à la Californie,
40° 1. N. {Coues);Q\\Q longe parfois les côtes jusqu'à Bahia (Saunders),
traverse accidentellement l'isthme de Panama pour descendre jusqu'au
nord du Pérou [Taczanoivski).
Mœurs. — La Sterne arctique est un oiseau migrateur, qui ne se
montre sur les côtes des pays du Nord que dans le courant d'avril ou
au commencement de mai ; elle émigré dès le mois d'août et il est
rare d'en voir encore en septembre sur les côtes allemandes. Les
migrations se font généralement pendant la nuit et par troupes plus
ou moins considérables qui volent à une grande hauteur.
C'est un vrai oiseau de mer vivant près des côtes maritimes, et ne
visitant que rarement les fleuves et les lacs et jamais ceux qui sont
loin dans l'intérieur des terres. Il aime les îles rocheuses et les plages
sablonneuses, vit, suivant les pays, en colonies nombreuses ou par
groupes de quelques couples, et passe la journée à voler en tout sens,
car l'air est son véritable élément; pendant les tempêtes, il se repose
dans un endroit abrité contre le vent, et parfois dans une prairie ou
dans un champ. Son vol est léger et rapide, et ses allures ressemblent
beaucoup à celles de la Sterne vulgaire avec laquelle la Sterne arc-
tique a longtemps été confondue (1).
Cette dernière est confiante et peu farouche, mais colérique, et
dans sa colère elle s'élance parfois sur un ennemi dont elle peut
devenir la victime. Son cri est doux et plaintif; Naumann le rend
par kier ou krier\ en se rencontrant dans les airs, elles se saluent
par les cris de Id, kiki kieh, krieh, ou gib gib, gih gib gib gle gich\
en se querellant, ce sont des rrh rèh tetêtctterieh, r-ich qu'elles font
entendre. La nourriture se compose de petits poissons et de crustacés.
(l) Voyez le tableau analytique des Sternes iiidi^jènes, à la page 540.
TOM. II. — I8i)3. 70
— 5S4 —
Reproduction. — Cette Hirondelle de mer niche en colonies et de
préférence dans une île déserte, mais les nids ne sont jamais placés
parmi ceux d'autres espèces de Sternes, quoique notre oiseau partage
volontiers son emplacement avec des Pluviers, des Canards, des
Eiders, etc.; il aime même à nicher au milieu de ces bandes de genres
différents où il se trouve en sûreté. La ponte a lieu au commence-
ment de juin ; les deux ou trois œufs que pond la femelle reposent
sur la terre nue, rarement sur une faible litière de brins, de radicelles
ou de feuilles mortes. Ces œufs sont très variables et ressemblent
entièrement à ceux de la Sterne vulgaire, mais ils sont un peu plus
petits : ils mesurent environ 37 millim. sur 29. Mâle et femelle
couvent alternativement pendant une quinzaine de jours, mais peu
pendant les heures chaudes de la journée; quand l'un est sur les
œufs, l'autre lui apporte souvent des aliments. Les parents témoi-
gnent une grande sollicitude à leur couvée et défendent courageuse-
ment leurs poussins.
282. — La Sterne vulgaire
STERNA FLUVIATILIS, Naum. (1).
(PI. 284.)
Sterna major, Briss. Ornith. VI, p. 203 (1760).
Sterna hirundo (part.) Lin. Syst. nat. I, p. 227 (1766) et auct. plurim.
Larus bicolor, sterna et columbinus, Scop., Ann. I. hist. nat.^ p. 82 (1769).
Sterna fluviatilis, Naum. 7sîs, 1819, p. 1847.
Sterna pomarina, Brehm, Isis, 1830, p. 994.
Sterna marina, Eyt. Cat. Br. B., p. 55 (1836).
Sterna senegalensis, Swains. B. W. Afr. II, p. 250 (1837).
Sterna wilsoni, Bonap. Comp. List B., p. 61 (1838).
Hydrocecropis hirundo, Boie, Isis, 1844, p. 179.
Sterna chelidon, Licht. Nomencl. av., p. 97 (1854).
Sterna blasii, Brehm, Naumannia, 1855, p. 295.
Sterna vulgaris, C. F. Dub., PI. col. ois. Belg. III, p. 255 (1860).
Sterna macrodactyla et macroptera, Blas. Journ. f. Orn.., 1866, pp. 75, 76.
Sterna dougalli, Lay. (nec Mont.) B. S. Afr., p. 369 (1867).
(i) Sous le nom de Slerna hirundo, Linné a confondu deux espèces parfaitement distinctes,
et ce n'est qu'en 1819 que Naumann reconnut l'erreur ; pour qu'elle soit évitée à l'avenir, il donna
le nom de S. macrura à Tune de ces espèces et de S. fluviatilis à l'autre. La plupart des auteurs
ne tinrent cependant pas compte de cette rectification, et continuèrent à désigner sous le nom de
S. hirnndû tantôt l'une, tantôt l'autre de ccsiespèces. Il est certain que le terme linnéen ne peut
être conservé pour aucune de ces espèces.
— 555 —
Sterna major, Olphe-Gal., Contrib. Faune orn., fasc. XI, p. 28 (1886)
Die Fluss-Meerschwalbe, en allemand.
The common Tern, en anglais.
Het Vischdiefje, en flamand.
Taille : 0^28; ailes 0^27.
Description des deux Fexes en été. — Capuchon et nuque d'un noir profond;
dessus du corps et ailes d'un cendré bleuâtre, ave^ les scapulaires plus ou
moins terminées de blanc ; une bande partant des narines, joues, côtés du
cou, gorge, sus et sous-caudales d'un blanc pur; poitrine et abdomen d'un
blanc lavé de cendré clair; rémiges primaires cendrées à la base, noirâtres à
leur extrémité et un large bord blanc sur la barbe interne, les baguettes
également blanches; rémiges secondaires delà couleur du manteau, avec un
bord blanc interne; queue blanche, les rectrices latérales avec leur barbe ex-
terne cendrée. Bec rouge, le tiers terminal brun ou noirâtre ; pattes rouges ;
iris brun. ■'/
En hiver. — Lorums et partie antérieure de la tête d'un blanc pur, avec une
tache noire devant Tœil ; plumes de l'occiput blanches terminées de noir ;
nuque noire; le reste comme en été.
Jeune. — Il ressemble à l'adulte en hiver, mais toutes les plumes du man-
teau et les couvertures des ailes ont une bordure jaunâtre précédée d'une
bande étroite plus foncée ; petites couvertures de l'épaule noirâtres bordées
de blanchâtre ; partie postérieure de la tête et nuque d'un noir brunâtre;
rémiges primaires les phis courtes bordées de blanc jusqu'à leur extrémité.
Bec d'un brun rouge, noirâtre dans sa partie antérieure; pattes d'un jaune
d'ocre sale.
Poussin. — Parties supérieures d'un cendré pâle et maculées de brun noir;
gorge d'un cendré brunâtre ; les autres parties inférieures blanches. Bec
jaune à pointe brune; pattes jaunes.
Hab. — A l'exception de l'Islande et des îles Féroé, cette Sterne
habite toute TEurope, mais sans
dépasser le cercle polaire, et
elle est généralement commune.
En Belgique, c'est l'espèce la
plus répandue du genre.
En Afrique, on l'observe sur
"' %/'■ . < les côtes de la Méditerranée et
"; ; •; •;^ - ■ '■ dans Ic dclta du Nil, mais on la
^iÀèàiimmùmi^^^wH^^r^^^,^^^ ^^i^ rarement dans le sud de
l'Egypte {de Eeuglin) ; on la voit également sur les côtes occidentales
d(; l'Afrique (5ï^?rtm5on) jusqu'au cap de Bonne-Espérance {Lai/ard).
— 556 -
Elle est sédentaire aux îles Macàère (Har court), Açor es (Godman),
Canaries (Bolle) et de Malte ( Wright).
En Asie, on rencontre cette espèce dans le midi de la Sibérie sans
dépasser au nord le 64" ; Dybowski a rapporté de ces oiseaux du
Baikal et de la Daourie qui ne diffèrent en rien de ceux d'Europe.
Cette Sterne habite également le Turkestan [Severtzow), la Perse
(De Filippi), l'Inde (Jerdon), Cejlan {Saunders), la Mongolie et la
Chine centrale [David), mais elle n'a pas été observée dans l'Indo-
Chine. Au Thibet et dans l'est de la Sibérie elle est remplacée par la
S. tibetana.
Enfin, en Amérique, la Sterne vulgaire habite les côtes de l'Atlan-
tique depuis le Labrador (57°) jusqu'au Texas [Lawrence] et la Flo-
ride. Suivant M. Seebohm, on la verrait en hiver sur les côtes orien-
tales de l'Amérique du Sud jusqu'à Bahia.
Mœurs. — La Sterne vulgaire ou Pierre-Garin nous revient en
grand nombre à la fin d'avril ou en mai et nous quitte en septembre.
Elle voyage ordinairement par troupes de vingt à quarante sujets,
aussi bien pendant le jour que la nuit, mais les migrations ont lieu le
plus souvent après le coucher du soleil.
C'est de toutes les Sternes celle qui se plaît le mieux près des
eaux douces, aussi la voit-on voler sur les fleuves, les rivières, les
lacs et les étangs, même sur les eaux qui se trouvent loin de la mer;
c'est ainsi qu'on la voit communément sur les 'lacs de la Suisse et sur
les grands étangs du centre de la France. Elle aime cependant les
côtes maritimes, surtout les plages couvertes de gravier, car c'est
près de la mer et à l'embouchure des fleuves que ses colonies sont
toujours plus abondantes. Bien que très remuante, elle se repose plus
souvent que ses congénères, surtout pendant les tempêtes ; pendant
le jour elle se pose souvent sur une pierre émergeant de l'eau, sur un
poteau, mais rarement sur l'eau car elle nage peu. Son vol est léger
et rapide ; parfois elle reste planer au même endroit pour observer les
êtres qui s'agitent dans l'eau, et si la proie lui convient, elle s'abat
sur elle avec la rapidité d'une flèche en faisant jaillir l'eau autour
d'elle.
Cet oiseau est peu farouche ; quand on visite une colonie de ces
Sternes à l'époque des nichées, on est bientôt poursuivi par plusieurs
d'entre elles, et à mesure qu'on approche, leur nombre augmente et
le vacarme devient assourdissant ; elles finissent même parfois par
fondre sur la tête du visiteur. M. F. Droste-Hiilshoff a remarqué une
— 557 —
particularité qui distingue cette espèce : c'est son extrême curiosité;
on n'a qu'à jeter en l'air un objet quelconque pour l'attirer à l'instant.
Son cri ressemble à krick-kri-kri-kri, d'autres fois elle pousse celui de
kriè, kriiè ou kliièh. Sa nourriture consiste en petits poissons, jeunes
grenouilles, têtards, vers, insectes et larves aquatiques, surtout de
larves de dytiques et de libellules, dont elle s'empare en plongeant.
Les jeunes Sternes vulgaires deviennent souvent la proie du Fau-
con, mais les adultes, grâce à leur rapidité, lui échappent facilement.
Naumann a vu plusieurs fois de ces Sternes chassées pardes Faucons:
« Elle évite admirablement bien, dit-il, les attaques de ce rapace, et
à chaque attaque elle s'élève davantage dans l'air; quelquefois, elle
se laisse tomber verticalement ou exécute brusquement quelques cro-
chets hardis; en même temps, elle se rapproche de plus en plus des
nuages, jusqu'à ce que, épuisé, l'oiseau de proie soit contraint d'aban-
donner ses poursuites. Mais s'il ne peut réussir à s'emparer des
adultes, le Faucon prend les jeunes sans beaucoup de peine. »
Reproduction. — La Sterne vulgaire niche sur des îles basses, des
bancs de sable, au bord des rivières, des lacs et des étangs, et surtout
dans les endroits où le sol est couvert de gravier. M. René Martin
dit que dans la Brenne, en France, pays sauvage, mal cultivé et
parsemé de quatre cents étangs de un à deux cents hectares, les
nids de cette Sterne sont parfois si nombreux à certains endroits,
qu'en une journée un paysan lui apporta plus de cinq cents œufs de
cette espèce, qu'il avait ramassés sur les grèves de quatre ou cinq
étangs et sur les gros tas de joncs flottants.
Quand ces oiseaux sont nombreux, les nids ne sont jamais aussi
rapprochés les uns des autres, comme cela se voit chez d'autres
Sternes; ils sont ordinairement éparpillés au milieu de nids de Sternes
naines et de Pluviers à collier. La femelle fait sa ponte à la fin de
mai, et dépose deux ou trois œufs dans une petite excavation creu-
sée dans le sable ou dans le gravier, sans se donner la peine de la
garnir de brins ou de tonte autre substance ; parfois, cependant, les
œufs sont déposés au milieu d'une touffe de plantes aquatiques ou sur
des tas d'herbes. Ces œufs sont très vai-iables : en général, ils sont
plus ou moins ovoïdes ou piriformes, mats, finement grenus, d'un
gris jaunâtre, roussâtre ou olivâtre, parsemés de points et de taches
arrondies ou irréguliéres plus ou moins nombreuses, tantôt répandues
assez uniformément, tantôt rassemblées au gros boni ; les taches
profondes sont d'un gris violacé, les autres brunes ou noires; ces
— 558 -
œufs mesurent en moyenne 40 millim. sur 31. Il arrive souvent
qu'une crue subite des eaux vient noyer des milliers d'oeufs; si cet
accident arrive de bonne heure, les oiseaux ont une seconde couvée,
mais si la destruction arrive plus tard, ils restent une année sans
progéniture.
La durée de l'incubation est de seize ou dix-sept jours ; la femelle
couve la nuit, le mâle la relaye pendant le jour, mais quand le soleil
est ardent, c'est lui qui est chargé dé réchauffer les oeufs. Les pous-
sins croissent rapidement et commencent déjà à voleter au bout
d'une quinzaine de jours.
283. — La Sterne de DougalL
STERNA DOUGALLI, Montag.^
(PI. 283.)
Sterna DOUGALLI, Montag., Orn. Dict. suppl. (1813).
Thalass^a DOUGALLI, Kaup, Naturl. Syst., p. 97 (1829).
Sterna paradisea, Keys. et Rlas. (nec Briinn ), Wirbelth. Eur.^ p. xcvii (1840) et
auctorum plurimorum.
Sterna macdougalli, Macgill, Man. Brit. B. II, p. 233 (1840).
Hydrocecropis dougallii, Boie, Isis, 1844, p. 179.
Sterna gracilis, Gould, Proc. Zool. Soc, 1847, p. 222.
Sterna bicuspis, Licht., Nomencl. Av.^ p. 98 (1854).
Sterna melanoryncha, Newt., Ibis, 1863, p. 460.
Sterna douglasii, Schl., Mus. P.-B. {Sternœ), p. 24 (1863).
Sterna tenuirostris (Licht.), Blas., Joum. f. Orn., 1866, p. 80.
Stkrna korustes, Hume, Stray Feath. Il, p. 318 (1874).
Die Dougalls-Meerschwalbe, en allemand.
The Roseate Tern, en anglais.
De Dougall Zeezwaluw, en flamand.
Taille : 0,33; ailes 0^23; rectrice latérale 0,132.
Description des deux sexes en été. — Capuchon et nuque d'un noir profond ;
dessus du corps et ailes d'un cendré bleuâtre très clair ; les sus-caudales
blanchâtres; première rémige noirâtre, les suivantes cendrées, mais d'une
teinte plus foncée sur la barbe interne, toutes avec la tige et un large bord
interne, blancs ; une bande partant des narines, joues, côtés du cou, gorge et
les autres parties inférieures d'un blanc pur, mais lavé de rosé sur la poitrine
et le ventre; queue très longue, blanchâtre. Bec assez grêle, noir, rougeâtre
aux commissures ; pattes d'un jaune rougeâtre ; iris brun.
En été. — Front et vertex d'un blanc pur, ce dernier taché de noir en
arrière; occiput et nuque noirs; le reste comme en été.
- 559 —
JfeMwe. — Front blanchâtre ; occiput noir avec les plumes bordées de rous-
sâtre; dessus du corps d'un cendré bleuâtre, les plumes bordées de gris roux
jaunâtre et cette bordure est précédée d'une tache transversale brunâtre ;
dessous du corps blanc.
Poussin. — Parties supérieures d'un fauve taché de blanc et de gris ; par-
ties inférieures d'un blanc pur. (Seebohm).
Hab. — Ce bel oiseau fut découvert sur une île écossaise par le
^ D' Mac Dougall, et décrit pour
la première fois par le colonel
Montagu dans son OrnWiolo-
jq gical Dictionary. 11 niche peut-
être encore sur diverses îles
rocheuses de l'Ecosse et de l'Ir-
lande, mais ne visite que rare-
'V^ ment les côtes anglaises. M. See-
bohm dit qu'il est douteux que
cette espèce niche encore aux îles Britanniques, mais qu'une capture
a encore été faite sur la côte de Norfolk en 1880. Cette Sterne a été
observée, mais rarement, au Danemark (Benzon), sur la côte occiden-
tale du Schleswig {Naumann), à Helgoland {Gâtke) et à Borkum
{Droste); en Belgique elle est de passage accidentel sur nos côtes
maritimes, vers l'embouchure de l'Escaut, en août et septembre
(de Selys-Longchamps): un jeune individu a été tiré aux environs
d'Anvers en septembre 1880 {Croegaert). Cette espèce est de passage
irrégulier dans le nord de la France, mais se reproduit en grand
nombre dans les îles de la Bretagne, particulièrement dans celles dites
Iles aux Dames [Degl. et Gerbe); elle n'est pas signalée en Portugal,
mais elle a été capturée en Espagne dans la province de Gérone
[Vayreda) et deux fois en Italie: prés de Gênes, le 22 juin 1822
(Salvadori), et près de Massaciuccoli, en 1835 {Giglioli); von der
Miihle dit avoir capturé un jeune individu en Grèce, mais Linder-
mayer n'a pas observé cette espèce dans ce pays. Le Baron Tristrani
a tué un sujet en pleine mue près des îles Baléares.
Cette Sterne ne paraît pas se montrer sur les côtes occidentales de
l'Afrique, car, suivant M. Saunders, les sujets rapportés du Damaras
sous le nom de S. doagalli sont en réalité des S. fJariatilis ; mais le
musée Britannique possède des sujets du Cap de Bonne-Espérance, et
M. Saunders en a plusieurs de Natal. Cette espèce est d'ailleurs com-
mune sur les rochers et les bancs de sable di' l'ilc Cargados, au noi'd
— 560 —
des îles Maurice et Rodriguez {Pollen), et elle a également été obser-
vée aux îles Bourbon, Maurice {Newton) et Madagascar {Grandidier).
Plus à l'Est, on rencontre cet oiseau au Bengale {Schlégel), à Cey-
lan {Legge), au Tenassérim {Hume), aux îles Andaman où il niche
{Saunders), aux îles Obi {Bernstein)Q), Nouvelle-Guinée (Rosenberg),
Arou {Wallace), Salomon {Cockerell), en Australie {Gould, etc.), à la
Nouvelle-Calédonie {Latjard) et aux îles Tongo et Paumotu {Gray).
Cette espèce paraît être répandue plus régulièrement en Amérique,
où on la rencontre sur les côtes de l'Atlantique depuis le Massachu-
setts jusqu'à la Floride, l'Amérique centrale et aux Antilles {Coues,
Salvin, Léotaud); elle habite également les îles Bermudes {Seehohm).
Mœurs. — La Sterne de Dougall ne paraît habiter que les bords
de la mer ; elle émigré à la même époque que ses congénères et
voyage souvent dans leur société. On ne connaît pas grand' chose de
ses moeurs qui, d'après Léotaud, seraient semblables à celles de la
S. cayennensis à laquelle il renvoie ; voici donc ce que cet auteur dit
de cette dernière: « Cet oiseau est toujours en troupe, soit au moment
de la pêche, soit au moment du repos. Son vol est soutenu, gracieux
et assez rapide. Il a des places de prédilection où, sans doute, il trouve
plus facilement les petits poissons dont il se nourrit. Il les guette
d'une hauteur peu élevée et quand il s'abat pour les saisir, il ne
plonge que le bec dans l'eau. De temps en temps, il jette un petit cri
qui semble un cri de ralliement, car c'est alors que toute la troupe
s'assemble et se met à tourbillonner dans un très petit rayon. Si l'un
d'eux tombe sous le coup du chasseur, les cris redoublent et toute la
bande vient voltiger au-dessus de la victime : c'est une larme accor-
dée au malheur. Après la pêche, la troupe va se reposer soit sur un
petit banc de sable séparé du rivage, soit sur un rocher, soit sur un
tronc d'arbre échoué à l'embouchure d'une rivière ; l'un se presse
contre l'autre et tous babillent en commun (1). » D'après Naumann,
son cri ressemble assez bien à celui de la Sterne vulgaire.
Selon Brewer, la Sterne de Dougall arrive sur les côtes des Etats-
Unis, non loin de New-York, dans le milieu de mai et commence à
pondre vers le P'^juin; les jeunes sont en état de voler vers le
20 août.
Reproduction. -— De même que ses congénères, cet oiseau ne fait
pas de nid, mais dépose ses œufs dans une dépression creusée dans
(1) Léotaud, Oiseaux de l'Ile de la Trinidad (Antilles), pp. 539, 537. Port-d'Espagne, 1866.
— 561 —
le sable ou dans le gravier, qu'il garnit au préalable, d après Brewer, de
radicelles et de brins. Naumann trouva un nid sur l'île Amrom, l'une
des îles situées à l'ouest du Schleswig ; les œufs, au nombre de deux,
étaient déposés dans une touffe de gramioées maigres mélangées £\
des bruyères, dont le centre était piétiné par l'oiseau et formait ainsi
un nid arrondi très convenable.
La ponte est de deux ou trois œufs. Ceux-ci présentent les mêmes
variations que les œufs des S. fluviatilis et paradisea dont il n'est
presque pas possible de les distinguer.
284. — La Sterne naine.
STERNA MINUTA, Lin,
(PI. 285.)
Sternaminor. Briss. Om. VI, p. 206(1760).
Sterna minuta, Lin. Sijsl. nat. I, p. 228 (1766).
Sterna METOPOLEUCOS, Gm. Nov. Comm. Petrop. XV, p. 475(1771)
Sterna parva, Penn. Brit Zool., p. 144 (1776).
Sternula minuta, Boie, Isis, 1822, p. 563.
Sternula fissipes, pomarina et danica, Brehm. Isis^ 1830, pp. 994-95.
Sterna antarctica, Forst. Descr. Anim. It. Mar. Auslr., p. 107 (1844).
Sternula danubiaus et meridionalis, Brehm, Naumannia, 1855, p. 295
Die Zwerg Meerschwalbk, en allemand .
The Lesser Tern, en anglais.
De Dwerg-Zeezwaluw, en riamand .
Taille : 0"'20 ; ailes 0,18.
Description des deux sexes adultes en été. — Frout blanc, et cette couleur
se prolonge latéralement au-dessus des yeux, mais sans les dépasser; vertex.
occiput, nuque et lorums noirs; dessus du corps et ailes d'un cendré bleuâtre
pâle; joues, côtés du cou et parties inférieures d'un blanc pur; les trois pre-
mières rémiges noirâtres, les baguettes brunes, le bord interne blanc, les
suivantes d'un cendré bleuâtre uu peu plus foncé que le manteau, avec le
bord interne blanc; queue blanche. Bec jaune à pointe noire; iris noirâtre;
pattes oranges.
En hiver. — Comme en été, mais le vertex mélangé de quelques plumes
blanches.
Jeune. — Front et lorums d'un blanc jaunâtre; vertex taché de brun; nuiiuo
et une bande remontant vers l'œil qu'elle entoure, noirâtres, mais les plumes
terminées de cendré roussâtre; dessus du corps et ailes d'un cendré nuancé
de roussâtre, chaque plume avec un bord brun suivi d'un liséré cendré;
petites couvertures de l'épaule d'un gris noirâtre; rémiges prinnures d'un
Tome II. — 1893. 71
- 562 -
cendré foncé; joues, côtés du cou et parties inférieures d'un blanc assez pur;
queue également blanche, mais chaque rectrice porte une tache brune près de
son extrémité Bec d'un rose jaunâtre à pointe noirâtre ; pattes couleur chair.
Poussin. — Parties supérieures de couleur Isabelle, uniforme sur le front et
autour des yeux, mais semée de petites stries noires sur la tête, le dos et les
ailes; toutes les parties inférieures d'un blanc très faiblement teinté de jaune.
Bec jaune à pointe brune; pieds jaunes.
Hab. — La Sterne naine est plus ou moins répandue en Europe
jusqu'au 60° 1. N. Elle niche
dans le midi de la Suède {Nils-
son), mais rarement dans le gou-
vernement de St-Pétersbourg,
où Th. Pleske trouva cinq ou six
couples nichant à l'île Kotlin au
milieu d'une cïrtonie de Sternes
vulgaires, mais c'est le seul
endroit du nord de la Russie où
la reproduction de cette espèce a été constatée {Buchner) ; elle niche
plus communément dans les gouvernements de Moscou et de Toula
[Menzhier)., et en grande abondance dans le midi de la Russie {de
Nordmann). On ne connaît que deux captures en Norwège, faites
près de Jaederen pendant l'automne de 1864 {Collett). Plus au sud,
c'est-à-dire dans tout le reste de l'Europe, cet oiseau est plus ou
moins commun, aussi bien sur les côtes que près des fleuves, des
rivières et des lacs de l'intérieur; en Belgique il est assez commun,
en été, sur les côtes maritimes, plus rare sur l'Escaut, et ne se montre
qu'accidentellement sur la Meuse et sur les autres eaux de l'intérieur
du pays. Aux îles Britanniques il n'est nulle part très abondant.
L'habitat de cette espèce s'étend à l'Est jusqu'en Asie Mineure
{Krûper), en Palestine {Tristram), en Turkestan {Severtzow), en
Perse {De Filippi) et dans l'Inde occidentale {Jerdon); au delà, vers
l'Est, elle est remplacée par la S. sinensis, que plusieurs auteurs ont
confondue avec la S. minuta. Cette dernière est sédentaire dans la
moyenne et la Basse-Egypte, ainsi que sur les côtes de la mer Rouge
{de Heuglin) et dans le nord de l'Afrique {Loche, etc.) ; en hiver on la
voit sur les côtes occidentales de ce continent {Weiss) jusqu'au cap
de Bonne-Espérance {Saunders), et elle a même été capturée aux
îles Seychelles {Newton) et Madagascar {Hartlaub). Elle est rempla-
cée en Amérique par une espèce voisine: la S. antillarum.
- 563 —
Mœurs. — La Sterne naine est, pour l'Europe, un oiseau d'été,
qui nous revient en mai pour nous quitter en août, et il est rare d'en
voir encore à la fin de ce mois. Elle émigré par couples ou en petites
troupes, tantôt pendant la nuit, tantôt en plein jour et vole alors
généralement très haut, mais elle voyage en faisant de nombreuses
stations en route. Elle vit sur les côtes maritimes et près des eaux
douces, surtout près des grands fleuves, et choisit comme séjour des
endroits sablonneux ou des bancs de gravier au milieu de l'eau, mais
il faut que cette dernière soit claire car elle évite généralement les
lieux bourbeux.
Cet oiseau est aussi gracieux et aussi élégant que ses congénères,
dont on le distingue facilement à sa taille beaucoup plus petite. Son
genre de vie n'offre rien de particulier et ressemble à celui des autres
Sternes : comme celles-ci, il vole constamment, se repose peu et
nage rarement, mais il compte parmi les espèces les plus agiles et
les plus remuantes. « Deux de ces oiseaux se rencontrent-ils, dit
Naumann, leurs cris perçants semblent exprimer la joie qu'ils
éprouvent de se revoir; bientôt arrivent un troisième, un quatrième,
les cris deviennent plus forts, plus variés, plus précipités ; ils com-
mencent à se jouer, à s'agacer en exécutant au vol les manœuvres
les plus gracieuses. Ces scènes de gaîté et de bonheur se reprodui-
sent plusieurs fois par jour, aussi ces oiseaux se font-ils bientôt
remarquer et aimer, même par des personnes peu sensibles aux
beautés de la nature. Ces jeux dégénèrent rarement en véritables
querelles, et si elles ont lieu, elles se bornent à un instant de tumulte
bien vite dissipé. Mais, dans toutes ses actions, l'oiseau ne perd pas
l'homme de vue ; il n'abandonne sa défiance ordinaire que là où il
voit beaucoup de monde et n'en est pas chassé. » Cette Sterne est
moins sociable que la plupart de ses congénères et ne niche pas en
aussi nombreuses colonies. Elle se fait souvent entendre, surtout
dans les lieux de la reproduction ; son cri ressemble à chreh ou kreck,
quelquefois à krèik, et en poursuivant ses semblables, l'oiseau Jette
le cri de keckèrrek, kickerek.
La nourriture de cet oiseau consiste surtout en petits poissons,
mais il prend aussi des crustacés, des larves et des insectes aqua-
tiques; il fait également la chasse aux sauterelles et aux libellules
qu'il attrape au vol avec beaucoup d'adresse. Il plane souvent au-
dessus de l'eau, et quand il voit une proio à sa convenance, il s'abat
avec la rapidité d'uno tlf'rhf^, la saisit nt l'omporte, poursuivi par
— 564 -
ses compagnons moins heureux qui cherchent à lui ravir sa capture.
Reproduction. — La Sterne naine niche lin mai ou au commence-
ment de juin dans des endroits couverts de gravier, soit près de la
mer, sur un îlot ou un banc s'élevant au-dessus de l'eau, soit au bord
d'un fleuve ou d'un étang. Elle niche dans la société de la Sterne
vulgaire et de petits Pluviers, dont les nids sont éparpillés entre
ceux de la Sterne naine ; tandis que quand d'autres Sternes nichent
dans les mêmes parages, chaque espèce a sa colonie séparée de celles
des autres. Les nids sont le plus souvent assez éloi,:nés les uns des
autres, ce qui fait qu'ils occupent un rayon assez étendu. Les œufs
sont déposés sur le gravier dans une légère excavation ou sur un tas
de coquilles que la mer rejette au loin. La ponte est de deux, trois ou
quatre œufs ovoïdes, aigus au petit bout, à grain fin, mats, de couleur
variable tirant sur le jaune, le roux, l'olivâtre ou le gris, et parsemés
de points et de petites taches arrondies, parfois aussi de stries,
souvent rassemblés au gros bout ; les taches profondes sont d'un
gris vineux, les superficielles d'un brun noirâtre plus ou moins foncé.
Ils mesurent environ 32 millim. sur 24.
Mâle et femelle couvent alternativement pendant une quinzaine de
jours, mais très peu pendant la journée quand le temps est beau ; ils
élèvent également leurs poussins en commun.
GKNRE ÇLIX
GDIFETTE on HYDROCHÉLIDON. — HTDROCHELIDON
Sterna, Briss. Ornith. VI, p. 211 (1760) et auctorum plurimorum.
Hydrochelidon, Boie, Isis, 1822, p. 563.
Anous, Viralva, Steph. Shaio's Geu . Zool XIII, I. pp. 142, 167 (1825).
Pelodes, Kaup,iVa«. Syst. p. 107 (1829).
Car. — Bec à peu près de la longueur de la tête, comprimé, plus haut que
large, pointu; narines allongées, latérales, s'avançant jusqu'au premier tiers
du bec ; ailes très longues et dépassant de beaucoup les rectrices latérales ;
queue très peu fourchue; tarses courts ; doigts grêles, le médian de la lon-
gueur du tarse, l'ongle non compris ; membranes iiiterdigitales, notamment
celle qui unit le doigt médian à l'interne, étroites et profondément échan-
crées; ponce bien conformé.
Hab. — Ce g nre est représenté dans les parties chaudes et tempé-
rées des cinq parties du monde.
— o6o —
285. — La Guifette ou Hydrochélidon noirâtre.
HYDROCHELIDON NIGRA, Boie ex Briss.
(PI. 286)
Sterna NIGRA et NiEviA, Briss. Ornith. VF, pp. 211, 21(5 (1760).
Sterna NIGRA, NiiîviA et FissiPES, Lin. Syst. nat. I, pp. 227-28 (1766).
Larus MEUULiNUS, Scop. Ann . I, Hist nat. n'^ 108 (1769).
Stkrna kusca, Tuiist. Or)i. Brit. ]>. 3 (1771).
Sterna surinamensis et ohsciika, Ginel. Syst. nat. 1, pp. 604, 608(1788).
Sterna plumbea, Wils. Am. Orn. VII, p. 83, pi. 60 (1813).
Sterna brunnea, For.st. Syn. Cnt. Br. B. p. 63 (1817).
Hydroi'hei.idon NIGRA, Boic, Isis, 1822, p. 563.
Viral VA NIGRA et Anousi'LUmbea, Steph.iS'AaioVGen. Zoo/. XIII, l,pp. 142, 167(1825).
Hydrochélidon nigrican.s et obscura, Brehm, /sis, 1830, p. 995.
Hydrochélidon nigrum, Bonap. Comp. List p. 61 (1838).
Hydrochélidon fissipes, Gray, Gen. B. III, p. 660 (1849).
Hydrochélidon pallida, \M-e\xm., Naumanvia., 1855, p. 295.
Hydrochélidon surinamensis et plumbea, Bonap. Compt. rend. 1856, I, p. 773.
Pelodes surinamensis, Gray, Hand-li.'^t B. III, p. 122(1871).
Hydrochélidon lariformis, Coiies, />'. of. N. W. p. 704(1874).
Hydrochélidon lariformis surinamensis, Ridgw. Nom. N. Am B. p. 53 (1881).
Hydrochélidon nigr.v surinamensis, Nels. Rep. Nat. Hist. coll. marie in Alaska.,
p. 60 (1887).
Die schwarze Seeschwalbe, en allemand.
The black. Tern, en anglais.
De zwarte Zeezwaluw, en flamand.
Taille: 0^20; ailes 0,22.
Description des deux sexes adultes en été. — Tète, cou et gorge noirs; toutes
les autres parties supérieures, y compris les ailes et la queue, d'un gris cen-
dré assez foncé ; couvertures du dessous des ailes blanches; poitrine et abdo-
men d'un gris noirâtre ; région anale et sous-caudales d'un blanc pur. Boc
noir avec les commissures rouges; iris brun foncé; pattes d'un brun
rougeâtre.
En hiver. — Partie antérieure de la tête, joues, gorge, nuque et toutes les
parties inféiieuies d'un blanc puf ; occiput l't tour des yeux noirs: dos, ailes
et ({ueue comme en été.
Jeune. — iM-ont blanc; dessus de la tête d'un gris noirâtre varié de l)run
clair; manteau brun cendré avec les bordures des plumes d'un brun roussâtre;
scapulaires cendrées, bordées largement de brun roussâtre; couvertures des
ailes cendrées, bordées de fauve et marquées d'une bande brune ; croupion
et sus-caudales d'un gris clair ; rémiges et rectrices d'un gris foncé avec un
li.>-é ('; blanrhâtre; nn^pii-. ( ùtés du cou, joue»!, gorg - et toutes les ])arties infé-
rieures d'un lilanc pur. Bec brun ; iri^ noii-; pattes livides.
Poiis.sin. — Pariies supérieures fauves avec des taches irrégulières noires,
566 -
sauf au front; parties inférieures blanches, fauves à l'abdomen. Bec brun ;
pattes jaunâtres.
Ho.h. — La Guifette noirâtre est plus ou moins répandue dans
toute l'étendue de l'Europe jus-
qu'au 60" 1. N. qu'elle dépasse
rarement, aussi n'est-ce que très
accidentellement qu'on la voit en
Finlande {Palmén); mais dans le
gouvernement de St-Pétersbourg
elle est déjà très abondante sur
le lac Peipus (Portschinski), et
elle niche dans le sud de la
Suède ( Wallengren), en Danemark {Kjaerhôlling), et visite la Nor-
wège au passage {Collett). Cet oiseau ne se montre~~aux îles Britan-
niques qu'au printemps et en automne, lors des passages ; ancienne-
ment il nichait en grand nombre dans diverses parties de l'Angleterre,
mais depuis vingt-cinq ans on n'a plus trouvé de nids; il se montre
plus rarement en Ecosse et accidentellement en Irlande {Seehohm).
En Belgique, cette epèce est généralement commune, surtout dans
les grands marais de la Campine, sur l'Escaut, la Meuse, et elle
visite même les eaux des environs de Bruxelles. Elle est plus ou moins
sédentaire dans le midi de l'Europe.
En Afrique on observe cette espèce dans les parties septentrionales
{Loche, Drake) et en Egypte jusqu'au Kordofan {de Heuglin) et les côtes
de la mer Rouge (i?Mppe//); plus au Sud elle ne paraît se montrer qu'ac-
cidentellement et seulement en hiver : sa présence a été constatée en
Gambie {Rendall), à la Côte d'Or {Peel), dans la région de Fanti
{Sharpe) et dans le Damaras {Andersson). M. Ayres a également
signalé une capture au Transvaal, mais, d'après M. Saunders, cet
oiseau serait un jeune H. leucoptera. A l'Est on observe cette Gui-
fette en Palestine {Tristram), au Caucase {Radde), au Turkestan
{Severtzow) et dans le sud-ouest de la Sibérie jusqu'à l'Altaï {Finsch).
Quanta la forme américaine, dont quelques auteurs ont fait, bien à
tort, une espèce distincte sous le nom de S. surinamensis, elle est
répandue depuis l'Alaska où elle est rare (Dali) jusqu'aux Antilles,
l'Amérique centrale et le Chili (Sclater et Salvin); elle doit cependant
êfre bien rare dans certaines parties de l'Amérique du Sud, car
Taczanowski ne l'indique pas dans son Ornithologie du Pérou.
Mœurs. — L'Hjdrochélidon noirâtre nous revient au commence-
— 567 —
ment du mois de mai et nous quitte à la fin de septembre. Cette espèce
voyage la nuit comme le jour, par couples ou en petites troupes, mais
là où elle est commune, c'est par bandes de plusieurs centaines d'in-
dividus qu'elle opère ses migrations. Quand ces oiseaux traversent
une contrée sèche, ils volent toujours très haut, mais quand ils longent
un fleuve ou une rivière qui leur promet une abondante nourriture,
ils volent bas, par étapes et s'arrêtent parfois des journées entières
dans lamêmelocalité,visitant les marécages et les étangs des alentours.
Cette Guifette, vulgairement appelée Epouvantail, ne se montre
que peu près de la mer, mais elle passe sa vie près des lacs, des
étangs et des rivières, ainsi que dans les marais ; elle aime surtout
les eaux bourbeuses, riches en herbages et couvertes de nénuphars, de
potamots, de lenticules, etc. ; c'est là, loin du bord, qu'elle se livre
au repos de la nuit sur un monticule sortant de Teau ou sur un tas de
végétaux flottants. De même que ses congénères, elle marche et nage
aussi mal que les Sternes ; par contre, elle a le vol extrêmement
facile, léger et varié, mais moins impétueux et moins vacillant que ces
dernières ; mais quand le vent est violent, elle est fort contrariée dans
son vol, parce que ses ailes sont trop longues relativement au poids
de son corps et à la puissance de ses muscles. Elle passe ses journées
dans un mouvement continuel, vole et chasse constamment. « Nous les
voyons voler tout le jour au-dessus des eaux, dit M. R. Martin, planer
sur place en battant des ailes, courir des bordées au moindre coup de
vent, par moment s'abattre tout d'un coup sur l'eau, plonger à demi
et saisir un insecte pour repartir aussitôt. Elles se posent peu suj-
l'eau, plus souvent sur les tas de joncs et sur les rivages, se laissant
alors approcher avec quelque difficulté, tandis qu'au vol elles s'appro-
chent du chasseur à portée de bâton et, s'il est près des nids, tournent
et retournent autour de lui en poussant leurs cris aigus et répétés.
Ces cris attirent toutes les Guifettes de l'étang, et l'homme se trouve
entouré d'une nuée d'oiseaux multipUant leurs clameurs pendant des
heures entières. Les coups de fusil ne les effrayent pas, on a beau en
tirer, elles continuent leur tapage. >
Comme on vient de le voir, c'est un oiseau très sociable et les mem-
bres d'une même bande sont très attachés les uns aux autres, sans
s'inquiéter des autres oiseaux. 11 se nourrit principalement d'insectes
et de larves aquatiques ou terrestres, plus rarement de petits poissons,
déjeunes grenouilles, de têtards et de vers. Il ne fond pas sur sa proie
comme les Sternes, mais rase la surface do l'eau, plane quelque temps
- 568 -
et, quand il aperçoit une proie, descend obliquement, la saisit avec son
bec sans plonger entièrement mais avec une grande rapidité. Sa voix
est douce et ressemble à gick, gik entremêlé parfois de kirr.
Reproduction. — La Guifette qui nous occupe niche au commen-
cement de juin dans les marais et les étangs. Les nids sont souvent
placés les uns près des autres sur des mottes gazonnées qui émergent
au-dessus de l'eau, dans des touffes d'herbes et de joncs, sur des tas
de plantes flottantes ou sur des feuilles de nénuphar. Les nids sont
grossièrement faits de feuilles sèches, de joncs et de roseaux, de brins
d'herbes, de radicelles, etc. La ponte ordinaire est de trois oeufs, rare-
ment de deux et exceptionnellement de quatre ; ils sont ovoïdes ou
piriformes, à grain fin, mats, d'un gris roussâtre ou olivâtre et
marqués de points, de stries et de taches d'un brun foncé, plus nom-
breux au gros bout, et ces taches couvrent en partie les macules
profondes qui sont grisâtres; ces œufs mesurent environ 34 millim.
sur 25 ou 26. La durée de l'incubation est de quatorze ou quinze
jours. M. R. Martin dit que beaucoup de ces œufs ne sont pas
fécondés et qu'un cinquième au moins ne vient pas à éclosion (1).
Les jeunes abandonnent leur nid au bout d'une quinzaine de jours
et c'est à ce moment qu'ils commencent à voleter. Leurs parents con-
tinuent cependant à veiller sur eux et à leur donner à manger jusqu'à
l'époque de la migration.
286. — La Guifette ou Hydrochélidon leucoptère.
HYDROCHELIDON LEUCOPTERA.
(PI. 287)
Sterna fissipks, Pall. (nec Lin.^, Zoogr.Rosso-As. II, p. 336 (1811).
Sterna LEUCOPTERA, Schinz, Yôg. der Schweiz, p. 264 pi. (1815).
Hydrochélidon leucoptera, Boie, Isis, 1822, p. 563.
ViRALVA LEUCOPTERA, Steph . Shaw Gen. Zool. XIII, 1, p. 170 (1825).
HYDROCHELrooN LEUcopTERUM, Bonap. Conip. List. p. 61 (1838).
Hydrochélidon nigra (nec Briss. et Lin,), Gray, Gen. of. Birds, III, p. 660 (1849).
Hydrochélidon subleucoptera, Brehm, Nauniannia, 1855, p. 295.
Hydrochélidon javanica, Swinh. (nec Horsf.) Ibis, 1860, p. 68.
Sterna nigra, Schleg. Mus. P.-B. {Sternœ) p. 31 (18^3).
Hydrochélidon niger, Severtz. Turk. Jevotnie, p. 70 (1873).
Die weissflugelige Seeschwalbe, en allemand.
(1) René Martin, Cata.ague aez Oiseaux de a Brenne (Bull, de la Soc. zool. de France, XI
1887) p. 83.
- 569 —
The White-winged black Terx, en anglais.
De Witvleugelige zeezwaluw, en flamand.
7V^///e.- 0-20; ailes 0,215.
Description des deux sexes adultes en été. — Tête, dos, scapulaires et
toutes les parties inférieures, noirs ; petites et moyennes couvertures des
ailes blanches, les plus grandes et les rémiges cendrées, les deux premières
rémiges noirâtres sur leur barbe externe et à l'extrémité, les tiges blanches ;
couvertures du dessous des ailes noires ; queue, sus et sous-caudales ainsi
que la région anale, blanches. Iris noir; bec rouge sombre; pattes rouge
écarlate.
En hiver. — Dessus de la tête^ région des oreilles et nuque noirâtres variés
de blanc ; une petite tache noirâtre devant l'œil ; front, joues, parties infé-
rieures et queue d'un blanc pur; manteau d'un gris bleuâtre clair; couver-
tures du dessous des ailes blanches variées de noirâtre. Bec noirâtre; pattes
oranges.
Jeune. — Ressemble en général à celui de VH. nigra, mais d'une teinte
plus claire (1).
Poussin. — Dessus de la tête d'un roux vif, avec des taches noires irré-
gulières à l'occiput et sur la nuque ; tour des yeux blanchâtre ; dos et flancs
noirs variés de mèches d'un roux jaunâtre ; ailes rousses avec une tache
noire à l'épaule ; menton blanc ; devant et côtés du cou bruns ; parties infé-
rieures d'un cendré roussâtre,sauf le milieu de la poitrine qui est blanchâtre.
Hab. — La Guifetto leucoptère est une espèce méridionale qui n'a
été observée ni en Finlande, ni
en Norvège, mais un sujet a été
I tiré en Suède, près de Lnnd,
jr en 1835 {Wal/engren)\ elle se
montre accidentellement en Da-
-^1 ncmark [KJaerbulling), en Ang'le-
' terre et en Irlande où, d'après
j M. Harting, onze captures ont
-"^ été faites do 1811 à 1871 ; depuis
cette époque, cinq individus ont encore été abattus dans une bande
de douze près de Hickling Broad, le 30 mai 1873 {Stevenson), et un
autre fut tué le 10 juin 1883, près de Norfolk (Chase). Ses appari-
tions en Allemagne no sont également qu'accidentelles, mais on l'a
observée jusqu'en Silésie et en l'oméranic^ {Naumann) et elle a niché
(1) L'adulte, en été, est facile à reconnaître par les couvertures noires du dessous des .ailes,
mais les plumages d'hiver et du jeune ressemblent beaucoup à ceu.x de VU. nigra.
TUM. II. — 18U3. 72
— 570 —
en Bavière en 1860; elle se montre plus régulièrement dans le midi de
l'Allemagne, en Autriche, en Hongrie et surtout sur les eaux qui
avoisinent le Danube. En Belgique on ne connaît qu'une ou deux
captures : un individu a été tué dans un marais près de Tournai en mai
\843{du Bus) ; elle se montre aussi accidentellement en Suisse [Schinz]
et dans le nord de la France, mais elle est assez commune sur les
côtes de la Méditerranée {Degland et Gerbe) et très commune en
Brenne où elle niche dans la société des deux autres espècs {R. Mar-
tin); elle est également commune dans diverses parties de l'Espagne
{Reyes) et aux îles Baléares {Saunders), où elle niche probablement.
Elle niche aussi dans diverses parties de l'Italie [GiglioU), en Sar-
daigne {Gara), en Corse {Whitehead). en ^ïq'ûq [MoJherbe). en Grèce
{Lindermayer) et probablement en Turquie ; elle passe en grand nom-
bre dans la Dobrodja et la Bulgarie aux deux saisons^(^//6%n). Elle est
commune dans le midi de la Russie {de Nordmann), mais ne paraît
pas dépasser, au nord, le gouvernement de Moscou, où on ne la voit
du reste que très accidentellement {Menzbier).
Cet oiseau habite également le Maroc {Irby), l'Algérie [Loche] et
Madère {Harcourt); il est sédentaire dans le Delta du Nil jusqu'à
la région de Wadi-Halfa, et descend parfois jusqu'au Kordofan {de
Heugliyi). 11 a également été observé en Abyssinie [Saunders), au
Transvaal [Ayres) et au Damaras {Andersson), mais il est probable
qu'il ne visite ces contrées qu'accidentellement.
A l'Est, on observe cette espèce en Palestine {Tristram), en Asie
Mineure, au Caucase' (Radde), en Perse {Blanford). au Turkestan
{Severtzoto), dans le sud de la Sibérie {FinscJi, Radde), dans la région
de l'Amour {von Schrenck), en Mongolie et en Chine [David], et acci-
dentellement à Célèbes {Schlégel), à la Nouvelle-Zélande [Buller]
et dans le nord de l'Australie [Saunders].
Le D'' E. Goues signale une seule capture dans l'Amérique du
Nord, faite près du lac Koskonong dans le Wisconsin,le 5 juillet 1873;
l'oiseau était en plumage de noce.
Mœurs. — C'est également, pour l'Europe, un oiseau d'été qui
émigré, suivant la région, entre le commencement d'août et les pre-
miers jours d'octobre, et revient dans le courant de mai en même
temps que ses congénères. Il émigré souvent dans la société de l'es-
pèce précédente, et habite avec celle-ci les mêmes localités, c'est-à-
dire les marais et les étangs, mais séjourne peu près des eaux cou-
rantes et rarement près de la mer.
— o71 -
Ce qui a été dit sur les mœurs de la Guifette noirâtre, se rapporte
également à la Guifette leucoptère, que Schinz fut le premier à dis-
tinguer comme espèce distincte en 1815; avant lui, cet oiseau était
généralement confondu avec l'H. nigra.
La Guifette leucoptère est peu farouche et se montre même assez
hardie ; elle vole, par couple ou en petite troupe, très bas au-dessus
des eaux, des prés et des steppes pour y chasser les mouches, les
cousins, les coléoptères, les hbellules et les sauterelles; elle se nourrit
également de larves et de vers et devient généralement très grasse.
Son cri est sonore et ressemble, d'après Naumann, à cherrr ou kerrr.
Reproduction. — Cet oiseau se reproduit dans les mêmes lieux et
dans la société de l'espèce précédente. Son nid est construit de la
môme façon et contient généralement trois œufs, rarement quatre, qui
ressemblent également à ceux de la Guifette noirâtre et otfrent les
mêmes variations de couleur; ils mesurent en moyenne 33 millim.
sur 24.
287. — La Guifette cendrée ou Moustac.
HYDROCHELIDON HYBRIDA, Gr. ex PcUL
(PI. 288.)
Sterna hybrida, Pall. Zoo(jr. Rossu-Ay., Il, p. 338 (1811).
Sterna leucopareia (Natt.) Tem. Man. cCOr/i. II, p. 746 1 1820).
Sterna javanica et grisea, Horsf. Trans. Linji. Soc. XIII, pp. l'J8-0'J (1820).
Sterna delamotta, Vieill. Enc. méth. p. 350 (1823).
Viralva indica et leucopareia, Steph., .S/taio's Ge«. Zool. XII, [>. 109 (1825).
Pelodes leucopareia, Kaiip, Natûrl. Si/st. p. 107 (1829;.
Hydrochelidon leucopareja, Brehrn, Isis, 1830, p. 995.
Sterna similis, Gr. et Hardw. III. Ind. Zool. I, pi. 70, f. 2 (1832) .
Hydrochelidon fluvi.vtilis, Gouki, Proc. Zool. Soc. 1842, p. 140.
Hydrochelidon' hybrida, grisea, similis, javanica et indica, Gray, Gen. Birds lll
p. 660(1846j.
Hydrochelidon leucogenys, niloticagI meridionalis, Brrn, Yorjelf^ p. 351 (1855).
Hydrochelidon DELALANDii, Bp. Co»iijt.-R"nd. XLII, p. 773(1850).
Hydrochelidon cinerea, C. Diib. PI. col. Ois. Bdg. III, p. 258(1800).
Sterna innotata, Beav. Ihis., 1868, p. 404.
Gelochelidon innotata, Gr. Huiul-list. Ul, p. 119(1871).
Pelodes hybrida, indica, kluviatilis, delalandi^Gi-. ^a»^/-/. Ill,pp. 121-22 (1871).
Sterna leucopteka, (laps, cal.) Buckl. Ibis, 1874, j). 391.
? Sterna melanauchen, Salv. Ann. Mus. Civ. Gen. VIII, p. .385 (1876).
Die Weisshautige Seeschwalbe, eii alloinand.
The Whiskered Tern, en anglais.
De (iUAUWE Zeezwaluw, en llainaiid.
Taille : 0">:^1; ai 1rs 0,:i:).
572
Description des deux sexes adultes en été. — Capuchon, nuque et lorums
noirs; dessus du corps, ailes et queue d'un gris cendré, plus sombre au man-
teau; barbe externe delà première rémige noirâtre; gorge et joues blanches;
devant et côtés du cou ainsi que le haut delà poitrine d'un gris bleuâtre plus
ou moins foncé ; le reste de la poitrine et l'abdomen d'un cendré noirâtre ;
région anale et sous-caudales blanches; la rectrice la plus externe blanche,
mais grisâtre à son extrémité. Bec et pattes rouges; iris noir.
En hiver. — Front blanc ; dessus de la tête et nuque d'un noir varié de
blanc ; parties supérieures d'un gris cendré plus pâle qu'en été ; rémiges ter-
minées de cendré brunâtre; toutes les parties inférieures blanches.
Jeune. — Front d'uu blanc roussâtre ; dessus de la tête, nuque et manteau
noirâtres avec les plumes bordées de roux clair ; couvertures des oreilles et
une tache devant l'œil noirâtres; scapulaires cendrées à la base, puis noi-
râtres avec les bords et une tache centrale d'un roux jaunâtre pâle ; ailes d'un
cendré clair, les couvertures bordées de roux jaunâtre pâle; rémiges et queue
comme chez l'adulte en hiver, mais les rectrices d'un brun cendré vers leur
extrémité et terminées par un bord blanchâtre; bas du dos et sus-caudales
d'un cendré clair, la bordure des plumes roussâtre ; parties inférieures blan-
ches variées de roux jaunâtre sur les côtés de la poitrine. Bec brun avec la
base rougeâtre ; pattes couleur chair.
Poussin. — Front noirâtre ; parties supérieures et flancs d'un roux clair
varié de mèches irrégulières noirâtres; parties inférieures blanches; bas-ven-
tre d'un roux clair. Bec brun; pattes jaunâtres.
Hab. — Cette espèce ne paraît pas s'être montrée au delà du
55° 1. N. On ne connaît que cinq
captures pour l'Angleterre et
l'Irlande (Harting) et une pour
le Schleswig-Holstein [Kjaerhôl-
ling). En Allemagne on ne
signale non plus que quelques
captures (Naumann), et je n'en
connais qu'une pour la Belgique,
celle de l'individu tué près d'An-
vers en 1853 et signalé par feu mon père (1). La Guifette cendrée a
été tuée accidentellement en Normandie, notamment près de Dieppe
{Gacleau de Kervillé), mais elle niche abondamment en Brenne
{R. Martin), rarement ou accidentellement dans le midi de la France
{Lacroix) et quelques couples se reproduisent régulièrement dans les
(1) Ch. F. Dubois, Planches col. des Ois. de la Belg. III, p. 258.
V- « '.1
— o/o —
parties basses de la Camargue [Jaubert et Lapom.). Elle est commune
dans certaines parties de l'Espagne [Saunders, Reyes) et en Portugal
{Barba za du Bocage), TCiBi?.e\\e ne se montre qu'irrégulièrement en
Italie {Glgliolï) où elle a été capturée en Piémont, en Lombardie, en
Vénétie, en Toscane, en Romagne et en Sicile [Salvadorï), mais elle
se montre assez régulièrement à Malte {Wright). Cet oiseau niche en
Bohême près de Pardubic {Ostrdal), et communément dans le sud de
la Hongrie (iVawm<:mn, Fritsch), en Transylvanie {Danfurd et Harvie-
Brown), en Grèce {Lindermayer), en Turquie {Dresser') et accidentel-
lement dans la Dobrodja {Alléon), mais il est commun dans le midi
de la Russie {de Nordmann).
Plus au Sud, cette espèce habite l'Asie Mineure {Kriiper) et la
Palestine {Tristram); elle est sédentaire en Egypte et en Nubie, et
quelques individus se montrent en hiver jusqu'au Bahr-el-Abiad et
le fleuve des Gazelles {de Heuglin). En été elle est plus ou moins
abondante dans le nord de l'Afrique {Loche, Favier) ; en hiver elle
paraît commune dans le sud du continent noir, et il est probable
qu'elle y niche, car Andersson l'y a prise en plumage de noce en
avril {Saunders) ; elle a également été capturée au Damaras {Anders-
son).
A l'Est, cet oiseau habite le Caucase {Radde), la Perse {Blanford),
le 'V\ivk.QS,i2iX\{Severtzow), l'Inde {Jerdon, IIume),Gey\siïi {Holdsworth),
rindo-Chine {Blyth, etc.) ; Prjewalsky l'a trouvé nichant dans la
vallée du Hoang-Ho dans le sud-est de la Mongolie, Styan l'obtint
du Yang-tsi-Kiang dans la Chine centrale, et Saunders de Formose.
Cet oiseau a également été observé aux Philippines {von Martens),
à Bornéo {Doria, Schwaner), à Sumatra {Raffles), à Java {Horsfield),
à Célôbes {Forsten), aux Moluques à Salavatti {de Bruyn), à la Nou-
velle-Guinée, Sorang {D'Albertis) et en Australie, particulièrement
dans le Queensland {Gould, Ramsay).
Mœurs. — La Guifette cendrée ou Moustac est donc aussi une
espèce méridionale ; elle revient en Europe à la lin d'avril ou dans
les premiers jours de mai, et émigré du 27 septembre au 6 octobre.
Elle vit, comme ses congénères, dans les marécages, près des étangs
et des rivières, mais ne se montre que rarement près de la mer ; elle
aime les eaux fangeuses riches en herbages et couvertes de nénu-
phars, de lenticules et autres plantes flottantes. Cet oiseau a du reste
le mémo genre de vie et les mêmes liabitiulos (|ue les Guileties pi'éce-
dentes, et il est tout aussi sociable. Sa nourriture consiste en larves
— 574 —
aquatiques et insectes divers qu'il chasse particulièrement en volant
au-dessus des eaux; il prend également des petits poissons, des
têtards, des jeunes grenouilles et des vers.
Reproduction. — La Guifette cendrée niche sur un monticule
émergeant de l'eau ou sur des tas de vieux joncs ; le nid est formé,
comme ceux des précédentes, de fragments de joncs et de roseaux
secs entremêlés de graminées; il contient deux ou trois œufs, rare-
ment quatre, moins sombres que ceux des autres Guifettes et un peu
plus grands. Ils sont ordinairement ovoïdes ou légèrement piriformes,
à grain fin, presque mats, d'un gris fauve ou d'un gris verdâtre pâle,
parsemés de taches profondes rares et d'un gris vineux, et de points
et de taches superficiels d'un brun plus ou moins foncé mais varié de
roux. Ils mesurent en moyenne 39 millim. sur 28.
FAMILLE DES LARIDÉS
Car. — Bec de longueur moyenne, fendu jusqu'aux yeux, robuste,
crochu, comprimé latéralement, à arête de la mandibule supérieure
droite jusqu'au milieu, puis insensiblement recourbée vers le bas ;
mandibule inférieure plus ou moins anguleuse à la rencontre de ses
branches ; narines percées généralement vers le milieu du bec ; ailes
longues, larges, mais aiguës à la pointe; queue ordinairement égale,
rarement conique ou fourchue, formée de douze rectrices assez larges ;
tarses de hauteur moyenne; doigts antérieurs unis jusqu'aux ongles
par les membranes ; pouce libre, rarement réduit à un simple tuber-
cule.
Ces oiseaux ont une taille qui varie entre celle d'un pigeon et celle
d'un aigle de moyenne taille ; leur poitrine est large, le cou court, la
tête assez grande et leur plumage est très épais.
Hah. — Les Laridés sont répandus sur toutes les mers, mais ils
sont toujours plus abondants dans la zone septentrionale.
Mœuy^s. — Ces oiseaux, que l'on désigne généralement sous les
noms de Goélands et de Mouettes, ressemblent aux corbeaux par cer-
taines particularités de leurs mœurs, et ce n'est pas sans raison que
certains auteurs les ont surnommés des Corbeaux de mer.
Ils vivent, en général, sur la mer sans s'éloigner beaucoup des
côtes,^ aussi leur présence près d'un navire est-elle un indice, pour les
marins, que la terre n'est plus bien éloignée. Ils suivent souvent le
cours des fleuves, passent d'un fleuve à une rivière et séjournent par-
— 575 —
fois longtemps loin dans l'intérieur des contrées. Ce sont, en général,
des espèces migratrices ou errantes ; certaines d'entre elles arrivent
en grand nombre sur nos côtes et sur l'Escaut à la suite de tempêtes et
disparaissent de nouveau quelques jours après.
Tous les Laridés font du poisson leur principale nourriture, mais
ils ne plongent pas ; beaucoup se nourrissent aussi d'insectes et d'une
foule d'animaux marins, et s'abattent même sur de petits vertébrés
terrestres, sur des cadavres et des charognes : de même que pour les
Corbeaux, toute matière animale leur convient et ils sont extrême-
ment voraces.
Ces oiseaux sont en général prudents, intelligents, sociables et
courageux, mais aussi jaloux et méfiants; ils dévorent sans pitié
leurs congénères plus faibles et enlèvent les couvées de leurs compa-
gnons de ponte. Ils nichent en sociétés nombreuses sur les rochers
et les falaises, construisent des nids grossiers et pondent de deux à
quatre œufs. Mâle et femelle couvent à tour de rôle et tous deux
élèvent leurs petits avec beaucoup de sollicitude.
Tableau analytique des espèces indigènes (1)
I. Ailes mesicraiit au moins 40 centimètres.
A. Rémiges noires ou noirâtres au moins à leur extrémité, à pointe plus ou moins
blanche (adultes).
1. Manteau couleur ardoise ou noirâtre :
a. Doigt médian, ongle compris, ne dépassant pas 52 millimètres. L. fuscus
b. Doigt médian, ongle compris, dépassant 52 millimètres . . . L. marinvs
2. Manteau et base des rémiges gris bleuâtre, les dernières noires a leur
extrémité mais à pointe blanche L. orqentatus
B. Rémiges brunes ou noires :
3. Manteau d'un brun plus ou moins foncé, mais les plumes bordées de
blanc ou de blanchâtre (jeunes).
a'. Doigt médian, ongle compris, ne dépassant pas 52 millimètres. L. fuscus
h'. Doigt médian, dépassant 52 millimètres :
c. Hauteur du bec à la base des narines
c'. ne dépassant pas 17 millimètres . L. a)yentntus
c". dépassant 17 millimètres. ... L ))iivi)/t(x
(i) Pour faciliter la détermination, nous laissons ici toutes les espèces dans le même .ccnie,
mais on verra plus loin que quelques-unes appartiennent à des genres différents ; beaucoup d'au-
teurs n'ont pa.s tenu compte des différences génériques.
— 576 —
C. Rémiges blanches ou blanchâtres ;
1. Manteau gris pâle (adultes) ou rayé de brunâtre (jeunes).
a. Ailes mesurant 40 à 41 centimètres L. leucopterus
b. Ailes mesurant 42 à 44 centimètres L. glnucus
II. Ailes viesuranf inoins de 40 centimètres.
A. Pouce bien distinct :
. . . ) ailes 33 à 35 centimètres . . . . L. canus
'° ' P ) ailes 28 à 31 centimètres L- ridibundus
2. Rémiges gris pâle terminées de blanc; ailes 23 centimètres. . . . L. m>nuf,us
3. Rémiges blanches ou avec une petite tache subterminale noirâtre;
ailes 33 centimètres L. eburneus
B. Pouce réduit à un simple tubercule; ailes 28 à 31 centimètres . . L. tridactylus
Remarque. — En tête de la famille des Laridés, devrait prendre
place la Mouette de Sabine {Xema Sahinei) figaré©--pl. 297 de notre
atlas, vu qu'elle se rapproche des Sternidés par sa queue fourchue.
C'est une espèce circompolaire habitant les côtes maritimes, les
fleuves, les lacs et les rivières, mais dont on ne signale que bien peu
de captures en Europe. On en a pris une quinzaine de sujets aux îles
Britanniques {Seebohm), une à l'île Helgoland {Gaetke), six en
France : Seine-Inférieure (Hardi/), Rouen, Dunkerque, 1847
(De gland), Bretagne, août 1872 [Bureau), St-Jean-de-Luz, 1880 et
Hendaye, 1884 [Olphe-Galliard). M. de Sélys-Longchamps signale
encore une capture sur les côtes de Hollande et une sur le Rhin ;
d'après feu mon père, une Mouette de Sabine en plumage d'hiver a
également été prise sur la Meuse, non loin de Maestricht, mais
aucun sujet, autant que je sache, n'a été capturé à l'intérieur des
limites politiques de la Belgique. C'est pour cette raison que je crois
devoir supprimer cette espèce de notre faune, quoiqu'il ne soit pas
impossible qu'on la prenne un jour dans notre pays.
OENRECIiX.
GOELAND OU MOUETTE. — LARUS (1).
Larus, Gavia, Briss. Ornith. VI, pp. 160, 189 (1760).
Leucus, Icthyaetus, E.YT)KocohŒ.vs, Kâup, Ndtûrl. Syst.T^p. 102, 113(1829).
Laroides, Brm. Isis, 1830, p. 933.
(1) On désigne généralement sous le nom de Goéland, les grandes espèces {Larus fusctis,
tnarimis, ai-gen/atiis, glaiicus eileifcoptenis), et sons celui de Mouette, les espèces dont les ailes
mesurent moins de 40 centimètres.
— o7T —
Chroicocephalus, Eyt. Cat. Brit. Mus. p. 63 (1836).
Glaucus, Dominicanus, Bruch, Journ. f. Orn. 1853, pp. 100, 101.
Gavina, Gelastes, Meligavia, Bp. Naumannia, 1854, p. 212.
CLUPEiLARUS,Bp. Consp. av , II, p 220 (1857).
Kroikocephalus, Jerdon, B. ofind. II, p. 831 (1863).
Chroocephalus, Sel. et Salv., Pioc. Zool. Hoc. 1872, p. 576
Car. — Bec plus court que la tète, plus ou moins robuste, très comprimé
dans toute son étendue; mandibule supérieure crochue, l'inférieure plus
courte et comme taillée en biseau de l'angle à la pointe; narines oblongues,
étroites, découvertes; ailes longues et pointues ; queue généralement carrée ;
bas des jambes peu dénudé ; tarses médiocrement allongés, scutellés en
avant; doigts- unis jusqu'aux ongles i)ar les membranes; pouce libre, petit,
pourvu d'un ongle faible.
Hab. — Ce genre est cosmopolite.
288. — Le Goéland ou Mouette glauque.
LARUS GLAUCUS, Brûnn.
(PI. 289).
Larus glaucus, Briinn. Orn. Bor. p. 44 (1764).
Larus giganteus (Temm.), Benicke, Ann. Wetter. Gesellsch. 111, p. 140 (1814).
Lakus leuceretes, Schleep., A". Ann. Wetter. Gesellsch. I, p. 314(1819).
Larus consul, Hoie, Isis, 1822, p. 875.
Larus ISL.A.NDICUS, Edm. Menu Wern. Soc. IV, p. 185 (nec p. 506) (1823).
Larus leucopterus, Vieill. (nec Faber), Encycl. p. 346 (1823).
Larus gl.*.cialis, Macg. Mem. Wern. Soc. V, pi. 1, p. 270 (1824).
Leucus glaucus, Kp. Natûrl. Syst. p. 86 (1829).
Larus minor, Brehm, Isis, 1830, p. 993.
Larus HUTCHiNsn, Richards. Faitn. bor. Am. II, p. 419(1831).
Plautus glaucus, Reiclib. Nat. Syst. Av. loityip. p. 5 (1852).
Glaucus consul, Bruch, Journ. /". Orn . 1853, p. 101.
Laroides GLAUCUS, Bruch, Jowr». f. Orn. 1855, p. 281.
DieEis-Meve, BiiRGERMEiSTERMovi:, Cil allemand.
The glaucousGull, en anglai.s.
De Burgemeester, en flamand.
Taille: 0»'60 ; ailes 0,42.
Description des deux sexes adultes en été. — Tête, cou, queue et les parties
intérieures d'un l»lanc pur; manteau, scapulaires, couvertures des ailes et
rémiges d'un gris bleuâtre pâle; rémiges primaires dans leur quart postérieur
et extrémité des scapulaircs et des rémiges secondaires ainsi que les baguettes
blancbes. Bec jaune, blanchâtre à son extrémité et une tache rouge vers
Tome II. — lt<93. 73
578 -
Tangle de la mandibule inférieure; tour de l'œil orange ; iris brun jaunâtre ;
pattes couleur chair livide.
En hiver. — Comme en été, mais des -stries d'un cendré brunâtre sur la
tête, la nuque et les côtés du cou.
Jeune. — Tête et cou d'un blanc sale varié de cendré ; les autres parties
supérieures blanchâtres avec des taches irrégulières transversales d'un cendré
brunâtre; rémiges primaires d'un cendré blanchâtre à extrémité blanche;
parties inférieures d'un cendré clair varié de blanc. Ce plumage s'éclaircit à
mesure que l'oiseau avance en âge, mais ce n'est qu'à la quatrième année
qu'il a son plumage d'adulte. Bec noirâtre ; iris brun; pattes couleur chair.
Poussin. — Tête d'an cendré pâle, marquée irrégulièrement de petites
taches noires peu nombreuses et de formes diverses ; dos et dessus des ailes
marbrés confusément de brun et de cendré et très faiblement lavés de roux ;
poitrine cendrée et ventre blanc sans taches; bec noir à sa base jusqu'au delà
des narines, d'un jaune terne vers la pointe ; pieds jaunâtres. (/. Vian).
Hab.
ky|- -
OtlOK>iT* î!5"0 60Si 4o'fa^ >y
— Ce Goéland est une espèce circompolaire qui s'élève
vers le pôle jusqu'au 82° 1. N. Il
est généralement commun au
Spitzbergjà la Nouvelle-Zemble,
à Waigatz et îles voisines {de
Heuglin), moins abondant sur les
côtes occidentales de la Finmark
{CoUett) et du nord de la Russie;
il est commun au Groenland (^o/-
bôll) et sédentaire en Islande
{Faber), mais ne niche que rarement au sud du cercle polaire. En
hiver on voit quelquefois cet oiseau en Suède {Nilson) , dans le golfe
de Finlande [Palmén), sur les côtes septentrionales de l'Allemagne
{Naumann), plus régulièrement sur celles de Norwège, du Danemark
{Kjaerbôlling)y des îles Féroé (Feilden), Shetland, Orcades et sur la
côte orientale de l'Ecosse {Harting), plus rarement sur celles de l'An-
gleterre et de l'Irlande {Seebohm). Ce n'est que pendant les hivers
rigoureux qu'on voit quelquefois des jeunes sur les côtes de Hollande
{Schlégel), de Belgique [de Sêlys-Longchamps) et du nord de la France
{Gadeau de Kerville); deux sujets ont également été capturés en
Italie : l'un vers 1853, l'autre, une femelle adulte, a été tué près de
Gênes le 10 avril 1877 (Giglioli); Meisner et Schinz disent que les
sujets adultes ne se montrent que très accidentellement sur les lacs
de la Suisse, mais qu'il n'est pas rare d'y observer des jeunes en
août et septembre, quoique toujours isolément (1). Une capture a
aussi été faite à Tanger [Famer).
Sur les côtes septentrionales de l'Asie, cette espèce niche rarement
au sud du 74° 1. N. {von Middendorff); on l'observe également au
Kamtschatka(T'«c^«no^(;5/^^■) et au Japon, car M. Saunders dit avoir
vu des spécimens rapportés de Hakodadi parle capitaine Blakiston.
Cet oiseau habite également toutes les mers de l'Amérique boréale,
et hiverne le long des côtes de l'Atlantique jusqu'à l'île Long, sous le
41M.N. (Cowe5).
Mœurs. — Le Goéland glauque est donc un oiseau peu répandu
sur les côtes européennes, et il ne se reproduit que dans les régions
boréales au delà du cercle polaire. Dans ses migrations il dépasse
rarement les mors Baltique et du Nord.
C'est un vrai oiseau marin, aimant la pleine mer et les côtes rocail-
leuses et ne visistant qu'accidentellement les eaux douces. Ses mœurs
ressemblent complètement à celles du L. marinus que nous expose-
rons plus loin. Son vol est facile, léger, et les mouvements des ailes
sont lents et parfoisimperceptibles.Cet oiseau est malicieux et prudent,
mais moins sociable que la plupart de ses congénères. Son cri, d'après
de Heuglin,ressemble à gogiu-gogiic-gogiu, parfois à gaggag ourogro-
grogro, et se termine souvent par une sorte d'aboiement rauque.
C'est un pillard qui enlève aux autres oiseaux les œufs et les pous-
sins ; il se contente, du reste, de ce qu'il trouve : poissons, crusta-
cés, mollusques, cadavres divers surtout de cétacés, charognes, et
Ton a même trouvé dans son estomac des fucus et des conferves ; avec
un pareil régime il ne doit pas être souvent embarrassé pour sa nour-
riture.
Reproduction. — La reproduction a lieu vers la mi-juin. 11 est
rare, dit de Heuglin, que beaucoup de couples nichent ensemble dans
le même endroit, ils se dispersent, au contraire, dans les falaises et
sur les rochers. Le nid, d'après cet auteur, est assez artistement fait
à l'aide de mousse, les bords en sont élevés et le centre est plus ou
moins recouvert d'un mélanges d'herbes, de tiges, de saxifrages, de
terre et de plumes. La ponte est ordinairement de trois œufs, mais si
la couvée a été déiruite, la femelle n'en pond plus que deux. Ces œufs
sont généralement d'un olivâtre pâle ou d'un gris roussâti'c, parsemés
de points et de taches, parlois rassemblés en couronne au gros bout ;
(1) Mcisiier et Scliiiiz, Dir Vns^el der Schi-eiz. p. 2ôS.
- o80 —
les taches profondes sont d'un gris violacé plus ou moins pâle, les
superficielles d'un brun noirâtre ; ces oeufs mesurent en moyenne
82 millim. sur 53.
Les parents défendent leur couvée avec courage et font tout ce qui
est possible pour en éloigner l'ennemi, en attirant son attention sur
un autre endroit.
289. — Le Goéland ou Mouette leucoptère.
LARUS LEUCOPÏERUS.
(PI. 290.)
Larus ARGENTATus, Sabine (nec auct.), Trans. Linn. Soc. XII. p. 546 (1818).
Larus leucopterus, Faber, Prodr. Isldnd. Ornith. p. 91 (1822).
Larus glaucoides (Tem.) Boie, Isis, 1822, p. 562.
Larus islandicus, Edmonst., Mem. Wern. Soc. IV, p. 506 (1823).
Larus arcticus, Macgill., ibidem., V, p. 268 (1824).
Laroides glaucoides, leucopteros et subleucopteros, Brehm, Isis, 1830, p. 993.
Glaucus leucopterus et glacialis, Bruch, Journ. f. Orn. 1853, p. 101.
Larus chalcopterus, Licht. Nomencl. av. p. 99 (1854).
Laroïdes chalcopterus et glacialis, Bruch, Journ. /'. Or/i. 1855, p. 282.
Leucus chalcopterus, arcticus et leucopterus, Bonap. Consp. av. II, p. 216(1857).
Die Polar-Meve, en allemand.
The Iceland Gull, en anglais.
De kleine Burgemeester, en flamand.
Taille : 0M7 ; ailes 0,40.
Description des deux sexes adultes en été. — D'un blanc pur; manteau et
ailes d'un gris bleuâtre pâle; rémiges primaires de la couleur du manteau à
leur base, blanches à leur extrémité, les baguettes également blanches. Bec
jaune, une tache rouge à l'angle de la mandibule inférieure ; iris jaune ; pattes
d'un blanc rosâtre.
En hiver. — Comme en été, mais le dessus de la tête et du cou strié de
brun clair.
Jeune. — Blanc avec des taches brun clair, allongées sur la tétc et la nu(iue,
transversales sur le manteau et les ailes, irréguhères sur la (pieue; rémiges
d'un blanc sale ; parties inférieures d'un blanc sale varié de cendré. Bec
livide à la base, noir dans sa moitié terminale ; iris brun ; pattes d'un blanc
grisâtre.
Hab. — Cette espèce n'habite que l'océan Glacial arctique ou elle
est commune en Islande {Faber), au Groenland {Holbôll) et sur les
côtes américaines, mais manque complètement au Spitzberg et à la
;i -
Nouvelle-Zemble ; elle est également commune à l'île Jean Mayen
(Fisrher et von Pelzeln). Elle vi-
site chaque hiver les côtes occi-
dentales de la Finmark jusqu'à
Tromsô {Collrtt), mais ne se
montre que rarement plus au
sud. Trois sujets ont été tués en
décembre 1859 sur Tîle Hidden-
sée, à l'ouest de l'île de Rugen
{Quistorp), et on l'a capturée à
deux reprises prés d'Helsingôr {Kjaerbfdling). Peu de temps après
que Faber eut découvert cette espèce en Islande, le I)"" Edmonston la
captura aux îles Shetland (1823) et lui donna le nom de L. islandicus ,
dénomination qu'il avait d'abord donnée au L. glaucus.
La Mouette leucoptère ne visite les îles Britanni(|ucs que très irrégu-
lièrement, mais elle a ceci de commun avec le Jaseur et le Cassenoix,
c'est que quand elle vient passer l'hiver en Ecosse et aux îles voisines,
c'est généralement en grand nombre et en société de la Mouette glau-
que ; elle est cependant toujours rare en Angleterre et ne se montre
qu'accidentellement en Irlande {Seebo/im)-Le Baron von Droste-Hiils-
hofF a eu plusieurs fois l'occasion d'en tirer sur les côtes de la mer du
Nord, principalement sur celles de Netherland. Pendant les hivers
bien rigoureux, cet oiseau se montre accidentellement sur les côtes de
Hollande [Schlégel), de Belgique {de Sélys-Longchamps) et du nord
de la France: plusieurs sujets ont été tués sur la [)lage de Dunkerque,
dans la baie de Cancale, (hxns la baie de la Somme {Degland et Gerbe)
et à Biarritz {Dubaï en).
La véritable patrie de cet oiseau est l'Amérique boréale, où il est
surloui aboiidanl dans le détroit de Davis, dans la baie de Baffin, à
l'île Melville (Sioainson) et dans la mer de Behring sur les côtes de
l'Alaska {I)all)\ il hiverne au Labrador et longe les entes de l'Allan-
li([ue jusqu'à l'île Long sous le IL' 1. N. [Coues). MiddendorlF croit
avoir vu cet oiseau prés du Taimyr sous le 75° 1. N., et M. Saunders
dit, avoii' vu un sujet rapporté du Jai)on par \o cajutaine Blakiston.
Md.'a?'^. — Faber nous a[)[)rtMid ([ue le Goéland leucoptère hiverne
en Islande mais (ju'il ne s'y reproduit pas; il arrive sur les côtes de
cette île vers le milieu do septembre et les quitte à la tin de mai. « Ce
sont (les oiseaux très ("amilici-s, dit i'o\ .-lutcur. qui venaient souvent
prés de mon eanipemeiit i)oiir atliapei- bvs déchets que l'on jetait, et
— 582 —
les disputaient vigoureusement aux Corbeaux (Corvus corax). J'avais
apprivoisé l'un de ces Goélands au point qu'il venait chaque matin à
heure fixe devant ma porte pour recevoir quelque nourriture; il annon-
çait sa présence par des cris.
« Le L. glaucus plonge peu, mais c'est un grand pillard; le L. leu-
copterus, au contraire, est aussi bon plongeur que les L. triclactylus
et Sterna ff.uviatUis. Par sa faculté de plonger, ce Goéland indique
aux chasseurs de phoques le lieu où se trouvent ces animaux, car illes
suit toujours en grand nombre et en poussant des cris continuels ; les
phoques, et en particulier le Phoca groenlandica, font venir du fond
de la mer à la surface les sardines et autres poissons, sur lesquels
fondent sans cesse ces Goélands en les capturant sous l'eau. Ils
suivent aussi les bancs de morues, afin de s'emparer des petits poissons
que ces dernières chassent vers la surface de l'eau pendant l'hiver
de 1820 à 1821, je séjournai à Drebakke au sud de l'île, et je n'aper-
çus pas un seul L. leucoptcrus, parce que cet oiseau se tient ordinai-
rement pendant cette saison sur la côte septentrionale, tandis que le
L. glaucus habite la côte méridionale. On n'apercevait que quelques-uns
de ces derniers sur la plage qui était presque dégarnie de Mouettes le
1er mars 1821 ; mais en sortant de mon habitation, le lendemain
matin, l'air était rempli de Goélands. Etonné de cette apparition
subite, je m'approchai et je reconnus bientôt les L. leucopterus, qui
étaient arrivés en grand nombre pendant la nuit. Les Islandais con-
clurent de l'apparition de ces oiseaux, que les morues qu'ils avaient
attendues avec impatience étaient arrivées, et en effet, leur prévision
était exacte car les morues se trouvaient en grande quantité... (1). »
Le cri de cet oiseau diffère de celui de l'espèce précédente, et peut
se rendre par ik-knirrr, et ressemble parfois aussi à gi-ouw, d'un ton
plus bas que le cri du L. warinus.
Reproduction. — Dali a rencontré cette espèce en grand nombre
dans l'Alaska où elle nichait sur les plages sablonneuses. Le nid était
une simple dépression creusée dans le sable; la femelle dépose ordi-
nairement trois œufs du 5 au 10 juin. D'après L. Brehm et Paessler,
le nid serait construit sur des saillies de rochers, parfois a leur som-
met, et formé d'herbes marines, de tiges et de feuilles sèches, et l'in-
térieur serait garni de graminées. Il est probable que ce Goéland ne
niche dans le sable que dans les endroits où il n'y a pas de rochers. Les
(ij Faber, Prodrovius dér Islàndischen Ornithologie,'^, (^â^.
— 883 —
œufs varient du vert bleuâtre pâle au brun olivâtre ; ils sont marqués
de taches arrondies plus ou moins nombreuses, dont les inférieures
sont grises et les supérieures brunes, et les taches sont souvent plus
nombreuses au gros bout. Ces œufs mesurent environ 68 millim.
sur 47.
290. — Le Goéland à manteau noir
LARUS MARINUS, Lin.
(PI. 291.)
Larus NIGER, VARius et SKUCA, Briss. Ornith. VI, pp. 158, 167 (1760).
Larus MARINUS et NiBvius, Lin. Syst. nat. I, p. 225 (1766).
Larus maculatus, Bodd. Tabl. PI. enl. p. 16 (1783).
Larus maximus, Leach., Sysl. Cat. Brit. Mus., p. 40 (1816).
Leucus MARINUS, Kaup, Naturl. Syst.^ pp. 86, 196 (1829).
Larus mulleri et fabricii, Brehm, /«s, 1830, p. 993.
DoMiNiCANUS MARINUS, Bruch, Journ. f. Orn. 1853, p. 100.
Larus nigripallus, C. F. Dub., PI. col. Ois. BeUj. III, [.. 240(1860).
Die Mantel-Meve, en allemand.
The GREAT BLACK.-BACKED GuLL, en anglais.
De Mantelmeeuw, eu flamand.
Taille : 0™52 ; ailes, 0^47, à 0'"49.
Description des deux sexes adultes en été. — D'un blanc pur, y compris le
croupion et la queue ; manteau, bas du dos, scapulaires et couvertures supé-
rieures des ailes d'un noir d'ardoise foncé ; les plus longues scapulaires ter-
minées de blanc; rémiges noires avec l'extrémité blanche. Bec jaune avec
une tache rouge vers l'angle de la mandibule inférieure; paupières rougeâ-
tres ; iris jaune ; pattes couleur chair pâle.
En hiver. — Occiput, nuque et côtés du cou avec des stries longitudinales
d'un brun clair ; le reste comme eu été.
Jeune. — Tête et cou d'un blanc grisâtre et striés de brun ; dessus du corps
et ailes d'un blanc nuancé de roussâtre et de grisâtre et varié de taches
brunes irrégulières de diverses formes; rémiges d'un luuu noirâtre; front vt
parties inférieures du corps blancs; côtés de la poitrine et lianes maniués de
taches plus ou moins apparentes d'un cendré brunâtre et en forme de lance ou
transversales; queue blanchâtre marbrée de brun noirâtre, lu couleur sombre
dominant sur les rectrices médianes et, à l'extrémité de la ([ueue, ces taches
forment une ou deux bandes subterminales assez régulières. Bec noirâtre,
couleur chair livide à la base de la mandil)iile inférieure; iris brun, mais pas-
sant bientôt au brun jaunâtre et devenant «le pins en |)lns pâle; pattes couleur
chair livide teintée de bleuâtre. Ce plumage se moditic eon^idérablement a\t'C
— o84 —
l'âge, car ce n'est qu'à l'iiutomne de la troisième année que l'oiseau prend
son plumage d'adulte.
Poussin. — Parties supérieures d'un cendré pâle, marbrésurle dos détaches
brunes difTuses et sur la tête de taches noires circonscrites, mais variables,
dont une de forme carrée sur le front; ventre d'un blanc pur; abdomen et
})oitrine d'un cendré rembruni par la base foncée du duvet ; mandibule supé-
rieure brune à la base, jaune à l'extrémité, l'inférieure brune au centre,
jaune aux deux extrémités; pieds brun roussâtre. (J. Vian).
Ij^f^^ — L'aire géographique du Goéland à manteau noir s'étend, en
Europe, jusqu'en Islande où il
est sédentaire {Faber), et au Cap
Nord [Collett), et à l'Est jusqu'à
la Petschora (Seebohm) ; cet
oiseau niche sur presque toutes
les côtes au delà de 55° de 1. N.,
ainsi que sur celles del'Ecosseet
îles voisines, de l'Angleterre
{Seebohm), et quelques individus
se reproduisent môme sur les côtes françaises delà Normandie {Gadeau
de Kerville); mais il ne niche pas en Irlande et dans le nord de l'Alle-
magne, où il est cependant commun du mois d'octobre au mois de mars
(Reichenow). Il est assez rare sur les côtes de Finlande [Palmén) et
dans le golfe de Finlande [Bilchner), mais abondant sur les rives
russes de la Baltique [B. Meyer); il est généralement commun, en hiver,
sur les côtes de Hollande {Schlégel) et de Belgique, et après les tem-
pêtes on en voit souvent sur l'Escaut jusqu'au delà de la ville d'An-
vers; à cette époque de l'année il est également abondant sur les côtes
occidentales de la France, mais plus au Sud on ne rencontre généra-
lement que des jeunes isolés, comme c'est le cas en Espagne, en
Portugal {Reyes), en Algérie (L(9c/ze),dansla Basse-Egypte {de Heuglin)
et aux Canaries {Bolle).
Cette espèce ne visite que très accidentellement V\id\iQ{Salvadori),
la Sardaigne {Cara), la Sicile {Doderlein) et la Grèce {Lindermayer),
mais elle ne parait pas avoir été observée en Turquie {Robson). A la
suite de grandes tempêtes, il arrive parfois que des sujets, chassés
par le vent, se montrent bien loin de la mer; on en a vu ainsi jus-
qu'au centre de l'Allemagne {Naumann), en Volo^nQ {Taczanoioski),
sur le Danube (Tschusi-Sc/wiidhofen), en Tyrol {Althammer), en
Suisse [Meisner et Schinz), etc.
~ 585 —
Ce Goéland est rare dans le nord du Groenland {Reinhardt) où il
ne dépasse pas le 68", mais il est commun au Labrador et sur les
grands lacs de l'Amérique orientale, et hiverne sur les côtes améri-
caines de l'Atlantique jusqu'à l'île Long {Coues) et la ¥\oT\àe{Baird)\
il se montre accidentellement aux îles Bermudes {Reid). Cette
espèce est remplacée dans l'Alaska et sur les côtes septentrionales du
Pacifique, par le L. schistisagus, que certains auteurs ont confondu
avec le L. marinus ; mais, d'après M. Saunders, ce dernier existerait
cependant au Japon,
Mœurs. — Après la reproduction, les Goélands à manteau noir
mènent une vie errante et se dispersent sur d'autres côtes de plus en
plus méridionales, à mesure que le froid s'accentue, sans avoir d'époque
bien fixe pour la migration. Les tempêtes persistantes et les migra-
tions en bandes de certains poissons, sont également des causes de
déplacement pour ces oiseaux, qui se montrent alors souvent dans
des lieux où on ne les voit pas d'habitude. C'est ou automne qu'ils
font généralement leur apparition sur nos plages, et les tempêtes les
jettent parfois sur les eaux de l'intérieur, mais très rarement sur la
Meuse. Les jeunes qui ne sont pas encore en âge de se reproduire,
errent isolément ou deux à quatre ensemble, et on les rencontre un
peu sur toutes les côtes, même sur la côte de Flandre, et cela à toutes
les époques de l'année mais surtout après les tempêtes. Ceux qui ont
passé l'été dans le Nord, voyagent par couples ou par troupes de cinq
à dix sujets, rarement en bandes plus nombreuses.
Ce Goéland est un vrai oiseau de mer, car il ne la quitte presque
jamais volontairement. C'est l'une des espèces les moins turbulentes
et les plus calmes, ce qui ne l'empêche pas d'être très agile et actif
malgré son tempérament un peu flegmatique. Il marche avec facilité et
dignité, barbote volontiers dans l'eau, nage beaucoup et avec plaisir
même quand la mer est agitée, et dort souvent sur l'eau en se laissant
ballotter par les vagues. En volant, il déploie largement les ailes,
mais les mouvements de celles-ci sont lents ; il piano on tourbillon-
nant, vole souvent contre le vent, et quand il aperçoit une proie, il
fond sur elle d'une hauteur assez grande et s'enfonce dans les flots
pour la saisir. Il est plus courageux que la plupart de ses congénères,
mais il est aussi plus fort, plus pillard et plus vorace. II se repose
d'habitude sur des bancs do sable ou sur des rochers, mais se montre
toujours prudent et méfiant et ne se laisse pas facilement approcher
à portée de fusil, aussi est-il considéré comme l'un des plus farouches
Tome II. — 1893. 74
- 886 —
du genre; près du nid, cependant, il défend sa couvée avec courage
et hardiesse.
Le cri de cet oiseau ressemble à celui des Goélands glauque,
argenté et à pieds jaunes, dont les cris ne différent que par leur ton
plus ou moins élevé; celui de l'espèce qui nous occupe est profond et
rauque et peut se rendre par ag-ag-ag-ag-ag ; la frayeur ou l'excita-
tation lui fait jeter un cri sonore ressemblant à kjauvis ou kjan.
Cet oiseau se nourrit de poissons, de cadavres de divers animaux,
de charognes, de petits mammifères, de crustacés, de mollusques et
autres animaux marins; il pille les nids de divers oiseaux aquatiques
dont il dévore les œufs et les poussins, et enlève même aux autres
Mouettes le produit de leur pêche, bref, toute matière animale lui con-
vient. Dans la pêche il ne se monire pas très habile, mais il se con-
tente volontiers des poissons malades ou morts qui-4lottent à la sur-
face de l'eau. Ces Goélands rendent donc des services en dévorant les
cadavres et les charognes que les Ilots rejeteraient près des côtes,
où leur putréfaction pourrait engendrer des maladies.
Reproduction. — Ce Goéland niche principalement dans les con-
trées du Nord, sur les falaises et les rochers, et souvent dans la société
d'autres Goélands, mais sans se mêler à eux; les nids occupent souvent
le sommet herbeux des rochers et se trouvent parfois assez loin de la
mer; les couples de son espèce qui nichent ensemble ne sont jamais
bien nombreux. Le nid est grand et formé d'un mélange d'herbes
marines, de terre et de cochléarias; le centre est plus ou moins garni
de graminées sèches. La femelle dépose au commencement de mai
deux ou trois œufs, rarement quatre. Ceux-ci sont d'un gris jaunâtre,
olivâtre ou roussâtre, parsemés de points et de taches d'un gris vio-
lacé et d'un brun plus ou moins foncé ; ils mesurent en moyenne
79 millim. sur 54.
A. Brehm raconte qu'il a rencontré, lors de son voyage en
Norwège, une île à Porsangerfjord, qui était habitée par plusieurs
centaines de Goélands à manteau noir et de Goélands argentés. «Les
nids se trouvaient sur les terres marécageuses, pas trop rapprochés,
mais rarement éloignés les uns des autres de plus de cinquante pas ;
les nids de l'une des espèces étant au milieu des nids de l'autre,
comme si toute la colonie eût été de la même espèce. Quelques-uns
de ces nids étaient faits avec beaucoup de soin et garnis de petites
nattes, tandis que d'autres étaient construits avec plus de négligence. . .
Les œufs étaient gardés avec une inquiète sollicitude par les deux
— o87 —
parents. Des clameurs inouïes s'élevèrent au moment où je pénétrai
dans l'île. Ceux des oiseaux qui étaient à ce momenl occupés à couver
ne bougèrent pas, et me laissèrent approcher à quelques pas, comme
s'ils avaient espéré que ceux qui étaient chargés de la garde auraient
le pouvoir de me faire reculer. D'autres d'entre eux s'étaient levés
avec des cris perçants et m'environnèrent de très près, fondant sans
cesse sur moi, puis s'élevant de nouveau pour se livrer à une nouvelle
attaque. A plusieurs reprises, ils tourbillonnèrent de si près autour
de ma tête qu'ils me touchèrent du bout de leurs ailes, sans avoir
l'audace cependant de m'attaquer de leur bec acéré. Je trouvais dans
plusieurs nids des petits, qui, à mon approche, cherchèrent à se
cacher au milieu des nattes et des brins d'herbes et qui y parvinrent
parfaitement. >
Mâle et femelle couvent à tour de rôle pendant quatre semaines,
et font ensemble l'éducation des jeunes ; ils les nourrissent d'œufs
d'oiseaux, de poussins de diverses espèces aquatiques, de poissons et
de petits animaux marins. A la mi-juin les jeunes ont atteint la moitié
de leur taille, mais ils ont encore leur duvet; ils ne sont complète-
ment emplumés que vers la fin de juillet et ne savent voler que dans
la première quinzaine d'août. Quand ils ne sont pas troublés, ils
séjournent dans le nid jusqu'à l'apparition des plumes, mais s'ils ont
été chassés, ils savent fort bien, en cas de danger, se cacher derrière
des monticules ou derrière des pierres.
291. — Le Goéland à pieds jaunes.
LARUS FUSCUS, Un.
(PI. 292.)
Larus griseus, Briss. Omith. VI, p 162 (17()0).
Larus kuscus, Lin. 5(/s'. itit. I, \i. 223(17(30).
Larus flavipes, Mey. Taschenb. Vôij. DeutschL. II, p. 460 (1810).
Larus cinereus, Leach,5//s<. Cat. ^fam. etc. Br. Mus. p. 401 (1816).
LEUcas KUscus, Kaup, Natàrl. Syst. p. 86(1829;.
Laroiues .melanotos, harent.orlim et FU^5(;us, HriTi. his, 1830, p. 003.
DoMiMCANUS KUSCUS, Bruch, Jt»wr// . f Or/t. 1853, j». 100.
Laroides kuscescens, NKiRiDORSALis et ASSIM1L1S, Hrm. N'iumainii't, 1855, p. 294.
Clui>eil.\rus FUSCUS, Bonap. Consp. av. Il, p. 220 (1857).
Die Herinqs-Meve, ea allomand.
TiiE Lesser hlak.-»ai'kkd Gull, en anglais.
I)K Ki.EiNK Mantei.meeuw, en llamaïui.
Taille- U"'10; ailes 0,41, doigt mt'dian, ongh^ ('(uniM'is, O.O.M.
Description des deux sexes adultes en été. — Manteau et ailes d'un noir
ardoisé; tête, cou, croupion, queue et parties inférieures d'un blanc pur;
scapulaires et rémiges secondaires terminées de blanc ; rémiges primaires
noires, la première avec une grande tache blanche près de son extrémité»
les autres terminées par un petit liséré blanchâtre. Bec jaune avec l'angle
inférieur rouge ; tour de l'œil orange ; iris jaune ; pattes également jaunes.
En hiver. — A cette saison l'oiseau offre des stries longitudinales brunâtres
sur la tête et le cou.
Jeune. — Variable suivant l'âge ; tête et dessus du cou d'un brun cendré
varié de blanc ; gorge et devant du cou blancs avec des stries brunâtres ; par-
ties supérieures brunes avec les plumes bordées de blanchâtre ou de roussâtre ;
croupion et sus-caudales blancs avec des barres brunes; rémiges noirâtres ;
queue noire, avec des raies blarches irrégulières et transversales à la base et
le bord terminal )lanc, sur .es rectrices latérales le blanc domine ; parties
inférieures d'un cendré blanchâtre avec des taches brunes. Bec noir; iris
brun ; pattes d'un blanc rougeâtre, mais toutes ces partîfes passent insensi-
blement au jaune. Ce n est qu à l'automne de la troisième année que le jeune
prend le plumage de l'adulte.
Poussin. — Tête cendrée, variée de taches et de traits irréguliers noirs,
dont plusieurs autour des yeux et un très étroit sur le front ; parties supé-
rieures d'un gris faiblement lavé de roux et marqué de taches brunes un peu
diffuses; gorge blanchâtre; les autres parties inférieures de teinte fauve,
rembrunie à la poitrine par la base foncée du duvet et au ventre par un semis
de petites mèches brunes ; bec noirâtre sur sa moitié basale, jaune au delà ;
pieds d'un brun roux. (/. Vian).
Hab. — Ce Goéland est plus ou moins commun sur toutes les côtes
septentrionales et occidentales
de l'Europe, jusqu'au cap Nord
{Collett) et Arkhangel prés de la
mer Blanche à l'Est (Saunders),
mais on ne le voit pas en Islande.
Il est sédentaire aux îles Bri-
tanniques {Seebohm) et plus ou
mollis sur toutes les côtes de
l'Europe occidentale et méridio-
nale, même sur celles de l'Italie {Giglioli), mais il est rare en Grèce
{Lindermayer). Il est commun près des plages belges, surtout après
les tempêtes et à l'époque du passage des sardines, mais il ne paraît
pas se reproduire chez nous, bien qu'on en voie à toutes les époques,
même en juillet, mais il est rare sur l'Escaut. Cet oiseau visite sou-
— o89 —
vent aussi les eaux de l'intérieur, c'est ainsi qu'on voit souvent des
jeunes sur les lacs de la Suisse [Meisner et Schinz), dans l'inté-
rieur de l'Allemagne {Naumann), en Bohême, en Auirkh.e {Tschusi-
Schmidhofen) et en Pologne où il est même parfois commun, surtout
en mai [Taczanoioski). 11 est également commun dans la Russie
méridionale {de Nordmann), dans la Dobrodja et à Constantinople
[Alléon).
En hiver, on voit ce Goéland en Asie Mineure, en Palestine [Tris-
tram) et il est peut-être sédentaire dans la Basse-Egypte et sur les
côtes de la mer Rouge jusqu'au golfe d'Aden {de Ileuglin) et la région
du Nil Bleu et ^\si\\c{Finsch et Hartlaub); il niche en Algérie {Loche),
à Madère et aux Canaries {Godman), et descend au sud jusqu'au
Sénégal {Saunders).
L'oiseau que Jerdon s'est procure dans le Decan est probablement
un L. afjinis et non un jeune L. fuscus. M. Dresser dit que Dybowski
a trouvé ce dernier en Daourie, mais Taczanowski ne le mentionne
pas dans sa Faune de la Sibérie orientale; quant aux sujets recueillis
par M. Swinhoe sur les côtes de Chine, il est démontré que c'étaient
des L. crassirostris, aussi le père David n'a pas mentionné le L. fus-
cus dans son ouvrage sur les oiseaux de la Chine. On a également
signalé des captures de Goélands à pieds jaunes sur les côtes améri-
caines, mais le D"" Coues les considère comme extrêmement dou-
teuses.
Mœurs. — C'est également un oiseau marin aimant la pleine mer,
mais il se rend aussi sur les eaux intérieures. Dans la Russie méri-
dionale, de Nordmann a constaté que cet oiseau fréquente les abattoirs
des villes et qu'il se jette, avec les chiens et quelquefois avec des
Mouettes cendrées, sur la tripaille et les restes de boucherie. Il
n'émigre réellement que des contrées les plus septentrionales, soil
en troupe, soit isolément, et il suit alors souvent les phoques et les
squales qui lui amènent à la surface de l'eau une foule de petits
poissons.
Par ses mœurs et ses allures, ce Goéland ne ditïere guère des
précédents : il aime à se reposer sur le rivage, barbotte volontiers
dans l'eau et fait même des excursions dans les prés, les pâturages
et les chami)S. Il vole et nag»; avec aisance, se montre prudent, mais
il est moins farouche que bien d'autres, car en volant il s'a[)proche
parfois témérairement de l'iiomme. Il est plus vif et plus remuant que
les Goélands à manteau noir et argcntt's, mais se montre tout aussi
— 590 —
sociable. Sa voix ressemble à celle de l'espèce précédente, mais les
cris sont plus précipités et dans un ton plus élevé.
Cet oiseau se nourrit de divers animaux marins ou terrestres et de
charognes ; mais le poisson forme toujours la base de son alimentation
et il fait surtout une chasse active aux harengs et aux sardines; quand
ces poissons sont abondants, il en prend tant que son estomac et son
œsophage en peuvent contenir. Dans les prés et les champs il fait la
chasse aux sauterelles, aux libellules et autres insectes, aux souris,
aux campagnols, etc.
Reproduction. — Le Goéland à pieds jaunes niche en société et de
la même façon que l'espèce précédente ; son nid est formé d'herbes
marines et terrestres, et il est parfois aussi grand que celui du
Goéland à manteau noir. La femelle pond deux ou trois œufs au
commencement de juin. Ceux-ci sont d'un brun plus ou moins foncé
ou passant au verdâtre et parsemés de taches profondes d'un gris
brun et de taches superficielles d'un brun rouge ou noirâtres. Ils
mesurent environ &Q millim. sur 48. Les parents couvent et élèvent
leurs petits en commun et témoignent la plus grande sollicitude à
leur progéniture.
292. — Le Goéland argenté
LARUS ARGENTATUS, Brûnn.
(PI. 293.)
Larus cinereus, Briss. Omith. VI, p. 160 (1760).
Larus ARGENTATUS, Briiii. Om. bor. p. 45 (1764) .
Larus fuscus, Penn. (nec Lin.), Brit. Zool. II. p. 131 (1768).
Larus argentatus, Gm. Syst. nat. I, p. 600 (1788).
Larus marinus, var. B. Lath. Ind. Orn. II, p. 814 (1790).
Larus glaucus, Retz, (nec Briin.), Faun. Suec. I, p. 156 (1800).
Larus argentatoides, Brm. Beitr. Yogelk. III. p. 791 (1822).
Larus argenteus, Macgil. Mem. Wern. soc. V, p. 264 (1824).
LaROIDES major, ARGENTATUS, ARGENTEUS, ARGENTATOIDES, ARGENTACEUS et AMERI-
CANUS, Brm. /sis, 1830, p. 993.
Glaucus argentatus et argentatoidks, Bruch, Journ. f. Orn. 1853, p. 101.
Larus marinus, Gundl. (nec Lin.) Journ. f. Orn. 1857, p. 236.
Larus smithsonianus, Coues, Pr. Phil. acad. 1862, p. 296.
Larus argentatus var. smithsonianus, Coues, C/<ecA-/is<, 1874, p. 103.
Die Silber-Meve, en allemand.
The HERRiNG-GuLL,en anglais.
De Zilvïrmeeuw, en flamand.
— S91 —
Var. Cachinnans.
Larus cachinnans, Pall. Zoogr. Rosso-As. II, p. 318 fl811).
Larus arhentatus, Bonap. le. F. Ital. Uccelli, Introd. (1833-41), et au?,t. plar.
Glaucus michahellesii, leucoph/eus (Licht.) et borealis (Brandt), Bruch, Journ. f.
Orn. 1853, p. 101.
Laroides michahellesii, cachinnans et BousALis, Bruch, Journ. f. Om. 1855,
p. 282.
Larus epargyrus et lkucoph.îîus, Licht., Nomencl. av. Mus. Berol. p. 99 (1854).
Laroides leucoph^us, Bp. yaumfi7inia, 1854, p. 212.
Larus fuscescbns, Sclat. Proc. Zool. Soc. 1867, 315.
Larus argentatus cachinnans, Seeb. Brii. B. III, p. 327 (1885).
Taille : 0"^51 ; ailes, 0M7.
Description des deux sexes adultes en été. — D'un blanc pur ; manteau et
ailes d'un gris bleuâtre, les scapulaires et les rémiges secondaires terminées
de blanc ; rémiges primaires d'un gris bleuâtre à la base, puis noires et ter-
minées par un large bord blanc. Bec jaune avec l'angle inférieur rouge; tour
de l'œil orange; iris jaune; pattes couleur chair livide.
En hiver. — Après la mue d'automne, l'oiseau offre des stries cendrées à
la tête, sur la nuque et à la poitrine.
Jeune. — Tête et cou d'un blanc sale avec des tach(!S allongées d'un cendré
brunâtre; gorge blanche ; parties supérieures et ailes brunes, les plumes
bordées de blanc lavé de roussâtre ; rémiges brunes, les secondaires avec un
petit liséré blanc à leur extrémité; queue brune avec des barres et des mar-
brures irrégulières blanches à la base et un bord blanc à l'extrémité, mais le
blanc domine sur les rectrices latérales ; dessous du corps blanchâtre avec
des taches d'un cendré brunâtre, surtout à la poitrine et sur les flancs. Bec
noir, plus ou moins rougeâtre à la base ; iris brun, pâlissant avec l'âge ;
pattes livides. — Ce plumage se modifie chaque année, mais ce n'est qu'à
l'automne de la troisième que l'oiseau prend le plumage de l'adulte.
Le jeune du Goéland argenté est facile à confondre avec celui du L. mari-
nus et du L. fuseus; ce dernier a le doigt médian plus court; le L. marinus a
le bec plus haut à la base des narines, où il mesure 20 à 21 millimètres, tan-
dis que celui du L. argentatus ne mesure à la même place que 17 millimètres
environ. (Voy. le tableau analytique des espèces, p. 57.').)
Poussin. — Diffère de celui du Goéland à manteau noir par son bec moins
fort et par la présence d'une tache noire longitudinale sur le front ; sou duvet
est aussi un peu plus barbelé et moins filamenteux.
Var. Cachinnans. — Diffère du type jiar la teinte du manteau qui est un
])eu plus sombre, et par la couleur des pattes qui est jaune ; le tour île l'œil
est rouge.
Î592 -
jjf^l,^ — I,a Mouette argentée est plus ou moins sédentaire sur les
côtes de la Scandinavie jusqu'à
la frontière russe [Collett, Nils-
son), dans le golfe de Finlande
et le delta de la 'Nevsi{Bûchner),
niche même sur les bancs de
sable du Volga, du Kama et des
lacs voisins [Bogdanow), ainsi
que sur toutes les côtes des mers
Baltique et du ^ovdi[Reichenow),
aux îles Féroé et aux îles Britanniques {Seebohm). Elle est plus ou
moins sédentaire et de passage sur les côtes de Belgique, et se montre
parfois sur l'Escaut et même sur la Meuse ; il en est de même en
Normandie {Gacleau de Kerville) et elle se reproduit dans toutes les
hautes falaises de Dieppe, sur les côtes de Bretagne, aux îles Auri-
gny. Jersey, Ouessant, Belle-Ile, etc. [Degl. et Gerbe), ainsi que sur
les côtes de l'Andalousie {Seoane) et du Portugal {du Bocage). En
hiver, elle est commune dans le détroit de Gibraltar {Saunders}, en
Algérie {Loche), et se montre parfois sur les côtes occidentales de
l'Afrique, où on l'a observée à Angola et au Benguela jusqu'au
15° 1. S. {Barhoza du Bocage). Elle visite également les îles Açores
(où elle niche), Madère et Canaries {Godman).
En Amérique, cette espèce habite toutes les côtes jusqu'au cercle
polaire; elle est assez répandue dans l'Alaska {Dali, Bannister) et
descend au Sud jusqu'au Mexique; du côté de l'Atlantique, on l'ob-
serve du Labrador au Texas, et en hiver elle visite l'île de Cuba et
les îles Bermudes {Saunders). Elle est rare au Groenland {Rein-
hardt).
La var. Cachinnans, souvent confondue avec le type argentatus,
remplace ce dernier dans la Méditerranée, dans les mers Noire et
Caspienne, sur les lacs d'Aral et Baïkal, dans la vallée de l'Amour
{Seebohm) et sur les côtes de la Sibérie orientale {Taczanowskï)', elle
visite, en hiver, les côtes de la mer Rouge {de Heuglin),de la Perse, de
l'Inde, de la Chine et du Japon {Saunders); elle se montre également
dans l'Alaska {Nelson). Le Havre est le point le plus septentrional de
ses pérégrinations sur les côtes européennes {Saunders) ; elle est com-
mune à Hendaye {Olphe-Galliard).
Mœurs. — Le Goéland argenté est, comme les précédents, un
oiseau marin, mais il remonte davantage les fleuves et se montre plus
— S93 -
fréquemment sur les eaux intérieures, mais sans y séjourner long-
temps; loin de la mer, on ne rencontre pourtant que des sujets
égarés et surtout des jeunes. C'est aussi un oiseau plutôt errant que
migrateur, mais il quitte cependant les régions septentrionales pour
passer l'hiver sur des eaux moins froides, quoiqu'il soit déjà séden-
taire à partir du nord de l'Allemagne.
C'est l'un des Goélands les plus communs dé l'Europe, aussi le
voit-on généralement en grand nombre, surtout dans les endroits où
le rivage est sablonneux ou pierreux. A l'intérieur des contrées, il
recherche les grandes eaux libres, les fleuves et les lacs Ses mœurs
ressemblent à celles de ses congénères ; il est très sociable, et, là
oîi il y a abondance de nourriture, les Goélands argentés se rassem-
blent par centaines et vivent même en bonne intelligence avec d'autres
Mouettes.
C'est un oiseau intelligent, méfiant et assez bruyant près du nid ;
son cri est sonore et ressemble à kjau ou kian ; en volant il fait enten-
dre une sorte de rire rauque ressemblant à ha-ha-ha ou han-han-han.
Sa voracité est très grande et il vit beaucoup de rapine ; il se nourrit,
comme les précédents, de poissons, de petits mammifères, de poussins
et d'œufs d'oiseaux, de crustacés, d'annélides et d'insectes, plus rare-
ment de cadavres d'animaux.
Reproduction — Ce Goéland niche en colonies plus ou moins nom-
breuses et composées parfois de plusieurs milliers de couples; les nids
sont établis dans les hautes falaises, dans les anfractuosités de rochers
coupés souvent à pic et inabordables, ou au pied même des rochers
et sur le sable ; il arrive parfois que des nids placés sur la plage trop
près de l'eau sont enlevés par les hautes marées. La construction des
nids commence vers la mi-mai ; ceux-ci sont formés de matériaux
divers plus ou moins abondants, mais il arrive aussi que les œufs
reposent dans une simple fossette creusée dans le sable. Les nids sont
ordinairement formés d'un amas de fucus, do zostères et autres plan-
tes marines, et l'intérieur est garni de quelques maigres végétaux
terrestres. Audubon a vu, en 1823, sur une île delà baie de Fundy,
des Goélands argentés qui avaient fait leur nid au sommet d'un arbre,
probablement parce qu'ils avai<Mit été dérangés sur le sol; la même
observation a été faite vingt ans plus tard par Rrewer.
La ponte est de deux ou trois œufs d'un vert brunâtre plus ou moins
foncé et mar([ués de taches profondes d'un gris cendré et de laciies
superficielles brunes assez grosses, arrondies ou sans forme distincte
TOM. II. — 1893. 75
— 594 —
mais assez réguliéreinent réparties; ils mesurent environ 70 millim.
sur 50. Ives parents, qui semblent fort attachés l'un à l'autre, couvent
à tour de rôle pendant quatre semaines et témoignent beaucoup d'af-
fection à leurs poussins. Ceux-ci séjournent souvent une couple de
jours dans le nid et même davantage, mais il arrive aussi qu'ils le
quittent aussitôt qu'ils savent marcher ; ils se couchent alors derrière
des accidents de terrain ou entre des pierres. Ce n'est qu'à l'âge d'un
mois qu'il commencent à voler et qu'ils peuvent suivre leurs parents.
Suivant Naumann, on a remarqué que les Mouettes argentées ne
quittent pas toujours les lieux quand on leur enlève les oeufs, mais
qu'elles repondent dans le même nid ; si cependant une autre femelle
en a pris possession, les œufs sont déposés dans le premier nid vacant.
« Il a également été constaté, continue Naumann, que quand les
œufs ont été enlevés à plusieurs reprises, il se produit un tel désordre
dans la colonie, que beaucoup de couples changent de nid, couvent
parfois des œufs pondus par d'autres, et il arrive même que deux
femelles pondent dans le même nid. D'autres couples abandonnent des
lieux aussi peu hospitaliers et vont nicher ailleurs. »
293. — La Mouette cendrée.
. LARUS CANUS, Lin.
(PI. 294.)
Larus CANUS, Lin., Sijst. nat.., I, p. 224 (1766).
Larus cinereus, Scop., Ann. I. Hist. nat., p. 80 (1769).
Larus hybernus, Tunst., Orn. Brit., p. 3 (1771).
Larus procellosus, Bechst., Orn. Taschenb , p. 373 (1803)
Larus cyanorynchus. Mey., Taschenb. d. Deutsch. Vôgelh., Il, p. 480 (1810).
Laroides procellosus et L. canescens, Brm. Isii, 1830, p. 994.
Glaucus CANUS et G. lacrymosus (Licht.), Bruch, Journ. f. Orn., 1853, p. 102.
Gavina CANUS, Bruch, Journ. f. Orn., 1855, p. 284.
Larus DELA WARENSis, Coues (nec Ord.), Pr. Ac. N. Se. Phil., 1861, p. 246.
Larus audouini, Tristr. (nec Payr.), /6îs, 1868, p. 330.
Die Sturm-Meve, en allemand.
The common Gull, en anglais.
De kleine ZEEMEEUw,en flamand.
Var. Major.
Larus niveus, Pall. (nec Bodd.), Zoogr. Rosso-As., Il, p. 320, pi. 86 (1811).
Larus canus, var. Ma.ior, Middend. Sib. Reise, II, p. 243 (1853).
Larus HEiNEi, Uomo.y.., Ncmmannia, 1853, p. 129.
— 090 —
Gavina kamtschatschensis, Bonap., Naicmannia, 1854, p. 215.
Gavina heinei, Bruch, Journ. f. Or)i., 1855, p. 283.
Larus canus major, Schl., ']\fus. P.-B. Lan, p. 26 (I863j. »
Larus suckleyi, Schl. (nec Lawr.), ibidem, p. 27 (1863).
Larus canus var. niveus, Coues, B. N. W. Am., p. 638 (1874).
Larus canus niveus, Seeb., Brit. Birds, III, p. 316 (1885),
Larus kamtschatchensis, Stejn., Bull. U. S. N. Mus., n» 29, p. 73 (1885).
Taille : O^^Sô; ailes 0,35 (de Belgique).
Description des deux sexes adultes en été. — D'un blanc pur ; manteau et
ailes d'an cendré bleuâtre clair, les scapulaires et les rémiges secondaires
terminées de blanc ; rémiges primaires noires avec plus ou moins de gris à
la base, la première, et quelquefois aussi la seconde, avec une grande tache
blanche près de son extrémité. Bec jaune, un peu verdàtre à la base ; iris
brun ; tour de l'œil rouge orange ; pattes d'un jaune clair.
En hiver. — Se distingue par des taches d'un cendré brunâtre qui occupent
la tête, le cou et le haut de la poitrine. Pattes d'un gris'bleuâtre.
Jeune. — Tête et nuque blanchâtres avec des stries d'un brun cendré ;
manteau et couvertures des ailes d'un brun cendré., les plumes bordées de
blanc sale un peu roussâtre ; sus-caudales blanches avec des taches cendrées ;
rémiges primaires d'un brun noirâtre sans tache blanche sur l'externe;
gorge blanche ; les autres parties inférieures blanches avec des taches d'un
cendré orunâtre ; queue blanchâtre, le tiers postérieur d'un brun noir mais
terminé par un liséré blanc. Bec couleur chair un peu jaunâtre, noirâtre à
l'extrémité; iris brun; pattes gris de plomb ou livides.
Poussin. — Parties supérieures d'un cendré faiblement teinté de fauve,
semées de taches noires irrégulières mais nettes, surtout à la tête, dont une
envahit le front et encadre la mandibule supérieure à sa base ; gorge blanche,
limitée inférieurement par des taches noires ; cuisses et devant du cou d'un
brun assombri par la base noirâtre du duvet ; les autres parties inférieures
blanches, mais lavées de fauve sur la poitrine et l'abdomen ; bec rougeàtre,
avec bande transversale noire vers la base et marteau blanc ; pieds rou-
geâtres, les membranes plus pâles; iris gris. (J. Vian).
Var. Major. — Se distingue du type canus par une taille jjIus forte, un bec
plus robuste, des tarses et des doigts plus allongés.
Ilab. — Cette Mouette est pins ou moins commune sur toutes les
côtes de l'Europe occidentale ju.squ'au cap Nord {CoUctt), mais elle est
très rare en Islande {Sdundcrs) et no paraît pas nicher régulièrement
au sud de la mer Baltiqu(3 (1). Dans la lliissie orientale et la Sibérie
(i) Deglaïul dit (|u'elle se reproduit sur les eûtes et dans les rochers des environs de Cher-
bourg, et quelquefois dans le Boulonnais. M. Cîadcau de Kcrville dit qu'un certain nombre
d'individus sont sédentaires en Normandie. D'après M.Salvadori.cettc Mouette serait aussi séden-
taire dans le nord de l'Italie ; mais nichc-t-elle rcLjulièrcment en France et en Italie ?
— 596 —
occidentale, elle ne dépasse pas le 680. Elle niche également dans
diverses parties de l'Ecosse et
de l'Irlande, aussi bien sur les
côtes que près des eaux intérieu-
res, ainsi qu'aux îles Orcades,
Shetland et Hébrides, mais ne
visite l'Angleterre . qu'en hiver
et émigré à ce moment de l'ex-
trême nord de l'Ecosse [See-
hohm). La Mouette cendrée est
très commune sur les côtes de Belgique et sur l'Escaut, depuis l'au-
tomne jusqu'au printemps, mais elle est moins abondante dans le
midi de l'Europe, On rencontre donc cette espèce dans toute TEurope,
aussi bien près de la mer que sur les grandes eaux intérieures, bien
qu'elle ne soit pas toujours de passage régulierjians les pays du
centre.
Cet oiseau visite également l'Asie Mineure {Kruper) et la Palestine
{Tristram) ,mdiis il est rare en Egypte {de Heuglin); on le voit aussi en
Tunisie {Kœnig) et en Algérie (Loche). Une capture a été faite au
Labrador [Coues) (1). Il est difficile de dire jusqu'où cette espèce
étend son aire de dispersion vers l'Est, car beaucoup d'auteurs la
confondent avec la var. Major \ il paraît cependant qu'elle visite le
Turkestan {Severtzow) et la Sibérie occidentale (Finsch), peut-être
jusqu'au lac Baïkal. Toujours est-il que la var. Major habite la Sibérie
orientale {Taczanowski), au Nord jusqu'au Kamtschatka et l'île de
Behring {Stejnege?-), ei qu'elle descend régulièrement chaque hiver
sur les côtes du Japon et de la Chine, mais ce n'est qu'au fort de
l'hiver qu'elle visite les côtes méridionales de cet empire [David).
Mœurs. — La Mouette cendrée hiverne depuis les côtes de la
Baltique et de la mer du Nord, où elle est plus ou moins sédentaire
jusqu'aux côtes hollandaises (52°), mais plus au Sud on ne la voit
généralement qu'à partir de l'automne. M. Collett dit bien qu'elle est
sédentaire partout sur les côtes deNorwége, mais il est probable qu'il
s'agit des parties méridionales de ce pays, car si elle n'émigrait
pas des contrées boréales, on n'en verrait pas, en hiver, de si grandes
quantités dans les pays plus tempérés.
(1) Le sujet capturé au Labrador a été indiqué sous le nom de L. delawarensis, mais
M. Saunders, qui l'a eu en mains, le consideie comme un L. caîius . (Voy, Proc. Zoul. Soc.
1878, p. 178).
— 597 —
Cette Mouette se plaît surtout près de la mer, mais elle n'est pas
rare sur les cours d'eau, les lacs et même sur les étangs d'une cer-
taine étendue ; ce n'est cependant qu'à l'époque des passages qu'on en
voit quelquefois sur les eaux du centre de l'Europe, comme en
Suisse, enAuiriche et en Pologne, ou quelques jeunes sujets séjour-
nent alors plus ou moins longtemps. A l'approche des tempêtes, elle
s'éloigne de la mer et pénètre très loin dans l'intérieur des terres où
elle reste souvent quelques jours sur les eaux douces. Elle n'évite pas
les grands arbres et se repose même parfois sur les grosses branches
de même que sur des poteaux.
Cet oiseau nage volontiers et dort souvent sur les eaux tranquilles ;
son vol est doux, léger et gracieux et sa démarche aisée. Il se montre
confiant ou farouche suivant les localités; près des lieux où il niche,
il est en général très défiant, mais il distingue fort bien le chasseur
du pêcheur et du passant inotîensif. Sa sociabilité est très grande,
aussi voit-on souvent des bandes composées de centaines et même de
milliers de ces Mouettes, surtout en hiver. Leur cri d'appel est skiah!
quand elles sont inquiètes, elles jettent le cri de skak ou kak. Quant à
la nourriture, elle consiste en poissons, crustacés, annélides, mollus-
ques, vers de terre, larves et insectes divers ; dans les champs, cet
oiseau fait la chasse aux limaces et aux petits rongeurs tels que mulots
et campagnols.
Reproduction. — La Mouette cendrée niche en colonies plus ou
moins considérables soit près de la mer, à terre ou sur des rochers,
soit près des lacs ou autres grandes eaux de l'intérieur. M. Collett dit
qu'en Norwège elle niche souvent près des eaux situées dans les
montagnes à une altitude de 3.000 pieds, et souvent à une distance
considérable de la côte; le même auteur rapporte que pendant l'été de
1868, un couple de ces oiseaux se trouvait près d'un lac d'eau douce
non loin de Trondhjem, où il avait pris possession d'un vieux nid de
Corneille cendrée, placé sur un sapin; les œufs ayant été enlevés, une
seconde ponte fut laite dans le même nid.
Dans les localités où ces Mouettes sont [)cu nombreuses, elles
nichent souvent dans la société d'autres Mouettes ou de Sternes. Les
nids se trouvent soit dans des ench-oiis marécageux au milieu des
herbes et des joncs, soit dans les bruyères ou dans un champ de blé,
moinssouvcntsur la terre nue. Le nid est bientôt construit et consiste
en unamasplus ou moins considérable d'herbes diverses, de bruyères,
de radic(dlcs,de i>;iille, (!<' léuilles morlc;s, de iiuni«M',de zostères.etc,
— 598 -
suivant ce que les constructeurs ont pu trouver; le tout est mêlé à de
la terre et forme une masse compacte arrondie, avec une excavation
au centre. La ponte, qui est de deux ou trois œufs, a lieu vers la mi-
mai dans les contrées tempérées, un mois plus tard sous le cercle
polaire. Ces oeufs sont d'un gris verdâtre ou d'un gris roussâtre par-
semés de taches profondes cendrées et d'autres superficielles de cou-
leur brune ; les taches sont souvent confluentes ou en couronne au
gros bout. Ces oeufs mesurent environ 57 millim. sur 41.
Les parents se comportent avec leurs petits comme les espèces
précédentes. Quand les poussins ne sont pas dérangés, ils séjournent
longtemps dans le nid ou dans ses environs, et se cachent dans les
herbages ou entre des pierres.
294. — La Mouette rieuse.—
LARUS RIDIBUNDUS, Lin.
(PI. 295.)
Larus cinerarius (hiver) et rtdibundus (été), Lin,, Syst nat. I, pp. 224, 225(1760).
Larus ERYTHROPLis, Lath., Gen. Syn., suppl. I, p. 296 (1787).
Larus canescens, Bechst., Orn. Taschenb., p. 370 (1803).
Larus atricilla, Pall. (nec Lia.), Zoogr. Rosso-As., II, p. 324 (18II).
Larus n^vius, Pall., tom. cit. , p. 327.
Larus capistratus, Tem., Man. d'orn., II, p. 785 (1820).
Xema RIDIBUNDUS et CAPISTRATUS, Boie, Isis, 1822, p. 563.
Xema ridibundum, pileatum et capistratum, Brm. /«s, 1830, p. 994.
Chroicocephalus capistratus, Eyt. Hist. Rarer Brit. B., p. 63 (1836).
Chroicocephalus RIDIBUNDUS, Eyt , C'^t. Brit. B., p. 53 (1836).
Gavia RIDIBUNDUS et CAPISTRATUS, Bonap., Naumannia, 1854, p. 213.
Chroicocephalus pileatus, Brm., Naumrimna., 1855, p. 295.
? Larus brunneicephalus, Cass., Perri/s Exp. Japan, II, p. 233 (1856).
Larus cahirinus et L. cahiricus, Hemp. et Ehr., fide H. Saunders, P. Z. S., 1878,
p. 201.
Die Lach-Meve, en allemand.
The black-headed Gull, en anglais.
De Capmeeuw, en flamand.
Taille: mâle 0^30; ailes 0,31 ; femelle 0,28; ailes 0,28.
Description des deux sexes adultes en été. — Tête, gorge et haut du cou
liruns, l'œil entouré d'un cercle blanc; le restant du cou, sus-caudales, queue
et les parties inférieures d'un blanc pur, ces dernières teintées de rose (mais
cette teinte rose disparaît chez les sujets préparés); manteau, scapulaires et
couvertures des ailes d'un gris bleuâtre pâle ; les quatre premières rémiges
— 599 —
blanches, terminées et bordées de noir en dedans, la première ayant en outre
un liséré noir sur une certaine étendue de la barbe externe, et chez les 3®, 4®
et 5° rémiges une tache blanche termine souvent le noir à la pointe; chez les
rémiges secondaires le blanc est remplacé par du gris. Bec et pattes rouge
laque ; iris brun.
Hiver. — Comme en été, mais sans capuchon brun : la tête est blanche
avec une petite tache noirâtre devant les yeux et une autre plus étendue à la
région parotique.
Jeune. — Front, gorge et une tache sur les côtés de la tête blancs ; le reste
du dessus de la tête jusqu'à la nuque brun varié de roussâtre; bas du cou
d'un blanc terne ; manteau et scapulaires d'un brun plus fonce avec les
plumes bordées de roux jaunâtre clair; bas du dos cendré, les phimes termi-
nées de roux jaunâtre clair; sus-caudales et parties inférieures du corps d'un
blanc terne; haut de la poitrine roux jaunâtre clair; petites couvertures
d'un cendré bleuâtre, les moyennes brunes bordées de jaune roussâtre, les
suivantes et la plupart des rémiges secondaires d'un gris cendré, les plus
rapprochées du dos brunes et terminées de roux clair ; rémiges primaires à
peu près comme chez les adultes ; queue blanche avec une bande subtermi-
nale d'un brun noirâtre. Bec livide à pointe noire ; iris brun clair ; pattes
jaunâtres.
Poussin. — Duvet d'un roux pâle, moucheté sur toutes les parties supé-
rieures et au bas de la gorge de taches noires, irréguliéres, mais bien accen-
tuées, dont une encadre au front la base de la mandibule supérieure, sans
taches sur les autres parties inférieures. Bec d'un jaune terne avec le marteau
blanc; pieds d'un jaune roussâtre. (J. Vian.)
La Mouette rieuse habite en été l'Europe tempérée, sans
dépasser, au Nord, le sud de la
Scandinavie {Nilsson) et de la
Finlande {Palmén), mais elle est
rare en Norwège (Col/ett); vers
le 15 avril, elle est très abon-
dante dans le golfe de Finlande
[Bnchner), mais assez rare sur le
liUjiin: t, ; il lac Novaja-Ladoga [Liljeborg,
Aï'tigy^iëiiv'mviitiiièt-'^îr rH irff^-^7y-i)>»w.jim»iM».H>.i»«..wr,£l j^cvQs) ciul paraît èlro sa limite
septentrionale. D'après Wallengren, elle niche rarement au delà
du 56", mais s'avance d'environ deux degrés plus au Nord du côté do
l'Est. p]lle niche en grandes colonies en Danemark {Collin),ei elle est
généralement commune dans toute Dùirope centrale, aussi bien sur
h^s cotos (|Uo sur les eaux intérieures.
- 600 —
Cette espèce est très abondante en Belgique sur les côtes, dans les
Polders et sur l'Escaut ; il y a une dizaine d'années, elle était rare
aux environs de Bruxelles, mais depuis elle a fait son apparition
dans les prairies le long de la Senne entre Vilvorde et Malines, et
elle a même remonté cette rivière jusque dans les prairies de Mon-
plaisir, sur les territoires de Laeken et d'Evere. On en voit quelque-
fois sur les étangs des environs de Bruxelles et, d'après les frères
Athimus et Macédone, deux individus ont même été tués, en 1885,
sur un étang à Carlsbourg (Luxembourg belge). Cette Mouette est
sédentaire aux îles Britanniques, moins en Ecosse [Seeholun), et elle
hiverne à partir de la Hollande et de l'Allemagne centrale. En
Espagne et en Portugal, elle ne se montre qu'en hiver {Saunders,
Reyes), et il en est de même dans toutes les contrées qui entourent la
Méditerranée ; il paraît cependant qu'elle est sédentaire dans le nord
de l'Italie, comme en Vénétie, en Lombardie et en Piémont
[Gigliolï).
Cette Mouette est également abondante, en hiver, dans le nord de
l'Afrique, en Algérie [Loche), en Tunisie [Kœnig), dans le delta du
Nil et le long de ce fleuve et de la mer Rouge jusqu'en Nubie {de
Heuglin). A l'Est, nous la rencontrons en Palestine [Tristram], en
Asie Mineure (Krûper), près de la mer Caspienne (Radde), et à travers
tout le sud de la Sibérie [von Schrenck, Taczanoioski) jusqu'au
Kamtschatka (Stejneger) ; elle hiverne en Perse, dans l'Inde centrale
{Jerdon), en Birmanie {Saunders) et en Chine, particulièrement dans
les provinces septentrionales [David), ainsi qu'au Japon [Blakiston).
Il est fort douteux, quoi qu'en dise Schlégel, qu'elle visite le sud de
l'Afrique.
Mœurs. — La Mouette rieuse émigré donc en automne des contrées
septentrionales et y retourne au commencement d'avril, parfois vers
la fin de mars ; mais il est à remarquer que les adultes partent et
reviennent toujours plus tôt que les jeunes qui ne sont pas encore en
état de se reproduire. Elle voyage en bande en plein jour et vole alors
généralement très haut. Au printemps, les troupes voyageuses ne
s'arrêtent dans une localité que le temps nécessaire à apaiser la faim
ou pour y passer la nuit, car elles ont hâte d'arriver aux lieux de la
reproduction. Ces oiseaux habitent plus l'intérieur des terres que les
côtes maritimes, qu'ils ne recherchent d'habitude qu'en hiver ; il est
rare qu'ils se reproduisent dans les falaises ou sur une île, car ils pré-
fèrent toujours les eaux douces ou saumâtres entourées de champs et
— 601 —
de prairies, comme les fleuves, les rivières, les lacs, les grands étangs
et les marais, et ils passent la nuit sur l'eau loin des bords.
Cette Mouette est très remuante, fort gracieuse et tous ses mouve-
ments sont lestes et légers. Elle marche avec facilité et longtemps, et
suit souvent le laboureur pour prendre les larves et les vers que la
charrue fait venir à la surface du sol ; dans le nord de l'Afrique, elle
visite les rizières et les steppes pour y faire la chasse aux sauterelles,
ce fléau des cultivateurs d'au delà de la Méditerranée ; Naumann a vu
de ces oiseaux voler autour du sommet des arbres pour y poursuivre
les insectes. Il résulte de ce qui précède, que la Mouette rieuse est
un oiseau fort utile pour la campagne et qu'il est de l'intérêt de Tagri-
culteur de la protéger. Elle vole mollement en tenant les ailes très
étendues ; à chaque instant elle interrompt sa course pour voltiger ou
pour décrire dans les airs les courbes les plus capricieuses, presque
sans remuer les ailes. Elle est prudente et méfiante, mais dans les
lieux où on ne le chasse pas, elle se montre confiante et rôde sans in-
quiétude autour des personnes qui lui veulent du bien ; dans une foule
de localités on la considère comme un oiseau à demi-domestique, et
les jeunes qu'on élève en captivité deviennent bientôt très familiers,
d'une douceur remarquable et ils suivent souvent leur maître comme
de petits chiens. Ce sont du reste des oiseaux extrêmement sociables,
vivant en troupes considérables et en assez bonne intelligence avec
les Guifettes.
La nourriture de cette Mouette consiste donc surtout en insectes et
larves aquatiques ou terrestres, limaces, vers, etc.; à l'occasion, et
surtout en hiver, elle prend des petits poissons et même des mulots et
des campagnols qu'elle sait fort bien mettre en pièces. Elle s'empare
des petits poissons soit en plongeant brusquement, soit en rasant
l'eau : elle use du premier procédé sur la mer, et de l'autre sur les
eaux douces. Les sujets élevés en captivité se contentent de pain et
de viande coupée en menus morceaux. La voix de cet oiseau est
criarde et rappelle celle de la Corneille, ce qui lui a valu le surnom
de « Corneille de mer » ; elle se compose de sons divers ressemblant
à kr, hit, Iwh, krau, kru, kri-ah, keckèckè/i; ces cris variés jetés par
plusieurs individus produisent une sorte de rire rauque, d'où le nom
de Mouette trieuse.
Rep/vduction. — Cette Mouette niche vers la fin d'avril sur les eaux
douces, en colonies plus ou moins nombreuses composées parfois
de milliers d'individus. Les nids sont placés au milieu de l'eau
Tome II. — 1893. 76
— 602 —
sur de vieilles souches de roseaux ou de joncs, sur un petit îlot
garni d'herbe, ou dans un marais, et toujours dans un endroit diffi-
cilement accessible ; ils occupent un espace relativement restreint et
sont très rapprochés les uns des autres. Le choix de leur emplace-
ment ne se fait pas sans disputes et sans cris, mais bientôt renaît un
calme relatif, et chacun travaille à la construction de son nid. Celui-ci
est formé de feuilles mortes, de roseaux et de joncs, de paille,
de foin, etc., et consiste en une masse plus ou moins élevée et légè-
rement enfoncée au centre. Il arrive aussi que la femelle dépose sim-
plement ses œufs dans l'herbe ou sur le sable, sans la moindre litière
spéciale. La ponte est de deux ou trois œufs, rarement de quatre ;
ceux-ci varient du vert bleuâtre clair au gris olivâtre ou brunâtre, et
sont marqués de taches profondes grises tirant plus ou moins sur le
rouge, et de taches et de points superficiels d'un brun olivâtre ou
noirâtre ; il arrive parfois que l'un des œufs diffère des autres par sa
coloration ou par son système de taches. Ces œufs mesurent en
moyenne 53 millim. sur 37.
Mâle et femelle couvent alternativement pendant dix-huit jours,
mais quand la plaine est ensoleillée, ils abandonnent au soleil le soin
de chauffer les œufs. Les poussins restent au nid pendant les pre-
miers jours, mais ils croissent assez vite et au bout d'un mois ils sont
à peu près à même de mener une vie indépendante; jusque-là, les
parents veillent constamment sur leurs petits et cherchent à prévenir
les dangers qui les menacent.
295. — La Mouette pygmée.
LARUS MINUTUS, Pall.
(PI. 296.)
? Larus albus, Scop. Ann. I. hist. nat. p. 80 (1769).
Larus MINUTUS, Pall. Reise Russ. Reichs, III, p. 702 (1776).
Larus atricilloides, Falk, Russ. Reise III, p. 355, pi. 24 (1785).
Xema MINUTUS, Boie, Isis, 1822, p. 563.
Larus orbignyi, Aud. Hist. nat. de VEgypte, pi. 9, f. 3, Expl. p. 271 (1825).
Hydrocolœus MINUTUS, Kaup, Nat.Syst. p. 1 13 (1829).
Larus nigrotis, Less. Traité d'Orn. p. 619 (1831).
Chroicocephalus MINUTUS, Eyt. Cat. Br. B. p. 54 (1836).
Gavia minuta, Macgill. Hist. Brit. B. V, p. 613 (1852).
Die Zwerg-Meve, en allemand.
The little Gull, en anglais.
De Dwergmeeuw, en flamand.
Taille : 0'^24; SLiles, 0,23.
- 603 -
Description des deux sexes adultes en été. — Tête et cou noirs, avec un
petit croissant blanc plus ou moins apparent derrière les yeux; manteau et
ailes d'un gris bleuâtre pâle ; sus-caudales et queue d'un blanc pur; rémiges
primaires comme le manteau, mais plus foncées sur le bord interne, toutes
terminées de blanc, les baguettes blanchâtres ; parties inférieures d'un
blanc lavé d'une teinte aurore qui disparaît chez les sujets préparés. Bec
d'un rouge sombre ; iris brun ; pattes d'un rouge cramoisi.
En hiver. — Comme en été, mais la tête est blanche avec l'occiput, la
nuque et la région auriculaire d'un gris noirâtre.
Jeune. — Vertex, occiput et région auriculaire d'un cendré noirâtre; des-
sus du corps gris brun, les scapulaires bordées et terminées de blanchâtre ;
front, région ophthalmique, devant et côtés du cou ainsi que les parties infé-
rieures blancs; petites couvertures des ailes blanchâtres, tachetées de gris
et de noirâtre, les moyennes noirâtres bordées de brun clair; les quatre pre-
mières rémiges noires en dehors et à leur extrémité, blanches en dedans, les
suivantes cendrées avec la pointe et la barbe interne blanche ; queue termi-
née par une bande noire. Bec noirâtre; pattes couleur chair.
Poussin. — Duvet des parties supérieures d'un gris enfumé et tacheté de
noir, plus pâle et uniforme aux parties inférieures. Bec jaune à pointe brune;
pattes d'un jaune pâle.
Hab. — La répartition géographique de cette Mouette est assez
curieuse, car elle habite, en été,
la Russie centrale et méridio-
nale, ainsi que la Sibérie jus-
qu'au sud de la mer d'Okhotsk,
tandis qu'elle passe l'hiver dans
l'ouest de l'Asie, le midi de
l'Europe et le nord de l'Afrique.
Elle se reproduit à partir des îles
suédoises de Oeland et de Gott-
land dans la mer Baltique, mais ne visite que rarement les côtes de
la Suède {Xilsson); clic est commune en Finlande {Palmchi), surtout
sur le lac Novaj a-Ladoga, au Nord jusqu'à Arkhangel {Liljeborg) et
paraît étendre son habitat d'été à travers l'empire russe jusque dans la
Sibérie orientale, où on la trouve \)^vio\\i {Taczanoioski)\ dans le
midi de la Russie, les rivages des lacs salés sont animés par des colo-
nies entières de ces oiseaux, qui y nichent {de Nordmann). Elle
paraît être de passage au Turkestan (Severtzow) et sur la mer Cas-
pienne {Radde); et une capture a été faite dans l'Inde (Irbi/).
Dans l'Europe occidentale, cette espèce ne fait que dos apparitions
— 604 -
irrégulières plus ou moins fréquentes ; elle a été observée accidentel-
lement à l'île Helgoland {Gatke), au Danemark {Kjaerhôlling) et en
Pologne {Taczanowski), mais elle se montre parfois en assez grand
nombre sur les côtes allemandes, particulièrement près de l'embouchure
de l'Elbe [Naumann), et en 1850 elle nichait encore sur la côte prus-
sienne de la Baltique (5oec^). Cette Mouette visite aussi irrégulièrement
et en petites troupes les côtes de la Hollande [Schlégel) et de la Bel-
gique: plusieurs sujets ont encore été tués dans les premiers jours de no-
vembre 1888, près d'Ostende, par le comte Max de Lalaing, et M.Croe-
gaert signale deux captures sur l'Escaut àdes époques antérieures.Aux
îles Britanniques on ne la voit non plus qu'irrégulièrement : elle a été
observée dans diverses parties de l'Angleterre, de l'Ecosse et de l'Ir-
lande, sans dépasser au nord les îles Shetland {Seebohm). Elle visite
accidentellement les côtes de Normandie [Noury), de la Seine infé-
rieure {Hardy), ainsi que les autres côtes de la France^^t de l'Espagne,
[Vayreda), de même que Gibraltar {Irby), et elle était même assez
abondante pendant quelques jours à Malaga, en 1868 [Saunders).^\\Q
est rare sur les côtes de la Sardaigne et a été observée dans diverses
parties de l'Italie {Giglioli), mais elle est assez répandue sur les côtes
de la Sicile, où elle paraît sur le littoral dans le courant de septem-
bre et le quitte au milieu de l'hiver pour se rendre sur les lacs et les
étangs de l'intérieur; au mois d'avril, elle se rapproche des côtes et
quitte définitivement la Sicile en mai {Malherbe); elle est parfois aussi
abondante à l'île de Malte (Wright) et en Grèce ; von der Muhle dit
ne l'avoir vue dans ce pays qu'en hiver, tandis que Lindermayer ne l'y
a observée qu'en été, ce qui fait supposer qu'elle est plus ou moins
sédentaire en Grèce. Il en est peut-être de même en Turquie où elle
est généralement répandue {Cavendish Taylor); dans la Dobrodja, elle
passe en abondance au printemps, s'arrêtant sur les lacs pour pêcher
{Alléon).
Cette Mouette n'est pas rare en hiver et au printemps sur les côtes
égyptiennes de la Méditerranée et sur les lacs voisins, mais ne
paraît pas se rencontrer sur le Nil {de Heuglin) ; on la voit aussi en
Algérie {Loche) et probablement au Maroc.
Mœurs. — Cette gracieuse petite Mouette niche donc dans le Nord-
Est de l'ancien monde, d'où elle émigré vers la fin d'août, et elle
quitte ses quartiers d'hiver en mai. Pendant l'été, elle vit à l'inté-
rieur des terres sur les eaux douces, mais en hiver elle fréquente
surtout les bords de la mer. Ses moeurs ressemblent à celles de la
— 60o —
Mouette rieuse. Elle nage moins que la plupart de ses congénères,
mais vole davantage, et cela avec légèreté et rapidité ; elle plane aussi
avec aisance en décrivant des cercles dans l'espace, tout en s'élevaiit
à une grande liauteur.
C'est l'un des oiseaux les plus remuants du genre et il se montre
très sociable; dans les lieux de la reproduction, on voit souvent un
grand nombre de ces oiseaux réunis à des Mouettes rieuses et à des
Guifettes, et vivant tous en bonne intelligence. La Mouette pygmée se
nourrit surtout d'insectes, de larves et de vers, et elle attrape souvent
sa proie au vol ; en hiver, elle vit de petits animaux marins et de
petits poissons.
M. Alléon fait remarquer que dans cette espèce les femelles pren-
nent leur plumage de noce plus tôt que les mâles ; ainsi, à la fin du
mois d'avril on a des femelles en parfait plumage d'été, tandis que
les mâles sont encore en mue.
Reproduction. — La Mouette pygmée ou naine niche en colonies
près des eaux douces, et les nids sont rapprochés les uns des autres ;
on les trouve dans les marécages, mais le plus souvent sur des tas
de végétaux accumulés et formant des îlots flottants. Le nid est
formé d'herbages divers, de roseaux et de graminées, les plus fines
réservées pour la cavité centrale. La ponte est de trois ou quatre
œufs ; ceux-ci varient du gris fauve au brun olivâtre, les taches super-
ficielles sont brunes ou noirâtres et les inférieures grises; ils mesu-
rent environ 41 millim. sur 30. Les deux parents concourent à l'incu-
bation.
GENRE CLXI
RISSE (MOUETTE). — RISSA
L.vRtrs, auctonun pluriraorum.
Gavia, Boie, Isis, 1822, p. 563.
RissA, Steph. Shaw's Gen. Zool. XIII, 1. p. 181 (1825).
Chkimonia, Kaup, Nat. Syst. p. 84 (1829).
Laroides, Rrehm, Isis, 1830, p. 904.
Car. — Caractères généraux des Lariis dont ce genre diffère par un bec
plus court, corapiimé et arqué, des tarses relativement plus courts, et par
l'absence de pouce proprement dit, cet organe étant remplacé par un tuber-
cule généralement dépourvu d'ongle ; queue un peu échancrée chez les
jeunes, égale chez les adultes.
Hab. — Les côtes septentrionales de rAllantique et du Paci-
fique.
— 606 —
296. — La Mouette ou Risse tridactyle
RISSA TRIDACTYLA, Macgill, ex Lin.
(PI. 298)
Labus RISSA et L. tridactylus, Lin. Syst. nat. I, p, 224 (1766).
Larus albus, p. L. s. Miill. Natursyst. p 108 (1776).
Larus ciNERARius, Fab. (nec Lin.), Faun. Groenl. p. 101 (1780).
Larus riga, Gmel. Syst. nat. I, p. 594 (1788).
Larus n^vius, Schiiff. Mus. Orn. p. 64 (1789).
Larus torquatus et gavia, Pall. Zoogr. Rosso-As. II, pp. 328, 329 (1811).
Gavia tridactylus, Boie, Isis., 1822, p. 563.
RissA BRUNNiCHii, Steph. Sliaw's Gen. Zool. XIII, 1. p. 181, pi. 21 (1825).
Cheimonea tridactylus, Kaup, Nat. Syst. eur. Th. pp. 84, 196 (1829).
Laroides tridactylus, rissa et minor, Brm., Isis, 1830, p. 994.
RissA ciNEREA, Eyt. Cat. Br. B. p. 52 (1836).
Rissa tridactyla, Gray, List. Gen. Birds, p. 79 (1840).
Rissa brachyrhynchus, Bruch (nec Gould) Journ. f. Orn. 1853, p. 103.
Rissa nivea, Bonap. (née Pall.), Naumannia, 1854, p. 112.
Rissa borealis et gregaria, Brm. Naumannia, 1855, p. 294.
Rissa kotzebui, Bonap. Consp. av.. II, p. 226 (1856).
Larus tridactylus var. Kotzebui, Coues, Key, 1872, p. 314.
Rissa tridactyla pollicaris, Baird, Brew. et Ridgw., Water-Birds N. Am. II,
p. 202 (1874).
Die Dreizehen Meve, en allemand.
The Kittiwake, en anglais.
De Drieteenige Meeuw, en flamand.
Taille : O-^SS ; ailes 0^29.
Description des deux sexes adultes en été. — D'un blanc pur ; manteau et
ailes d'un gris bleuâtre, les scapulaires et les rémiges secondaires terminées
de blanc ; rémiges primaires noires à leur extrémité, la première avec la
barbe externe également noire. Bec d'un jaune verdâtre, plus clair à la
pointe ; iris brun ; pattes noirâtres, les membranes tirant sur le brun.
En hiver. — Partie postérieure du vertex et nuque d'un gris bleuâtre, ainsi
qu'une tache de même couleur plus ou moins apparente devant l'œil; 3®, 4°
et 5® rémiges primaires avec une tache blanche à l'extrémité de la partie
noire; le reste comme en été.
Jeune. — Tête et parties inférieures blanches, une tache grise plus ou
moins apparente devant l'œil; région parotique cendrée ; haut du dos noi-
râtre varié de blanc; manteau et ailes d'un gris bleuâtre, mais une large
bande d'un brun noirâtre traversant le haut de l'aile dans sa longueur ; bord
externe de l'aile également brun ; rémiges primaires d'un brun noirâtre avec
le bord interne blanc ; queue blanche avec une bande terminale d'un brun
noirâtre. Bec d'un noir olivâtre ; iris brun ; pattes olivâtres.
Poussin. — Tête, cou et parties inférieures d'un blanc pur ; parties
— 607 —
supérieures d'un gris cendré sans taches. Bec brun jaunâtre; pattes d'un
brun roussâtre.
jy^^^ — La Mouette tridactyle est une espèce circumpolaire qu'on
rencontre jusqu'au delà du 82°
1. N. (Parry). Elle est com-
mune, en été, aux îles Féroé
{Graba), en Islande (Faber), au
Spitzberg, à la Nouvelle-Zemble
[de Heuglin) et sur toutes les
côtes de l'Océan Glacial; elle
niche aussi sur les côtes de la
Norwège jusque vers le 62°,
ainsi que sur les côtes rocailleuses de l'Angleterre, de l'Ecosse et de
l'Irlande, aux îles Orcades, Shetland, Hébrides et de St-Kilda
(Seebohm). En Asie elle niche jusque sous le 45° (Iles Kouriles) et
en Amérique jusqu'au 53° environ.
Cette espèce hiverne à partir des côtes septentrionales de la mer
du Nord, plus rarement prés de la Baltique [Reichenoio) où elle
monte cependant quelquefois jusqu'au sud de l'Esthonie {B. Meyer),
mais elle ne paraît pas avoir été observée dans le golfe de Finlande.
A l'époque des passages, elle est extrêmement abondante sur toutes
les côtes de l'Europe occidentale, mais on ne l'observe qu'acciden-
tellement sur celles de l'Italie {Giglioli) et de la Grèce {Lindermayer).
En été, après certaines tempêtes, on en voit quelquefois en abon-
dance sur les côtes de Belgique, et M. A. Croegaert dit qu'elle se
montre alors par quantités innombrables sur l'Escaut près d'Anvers,
tandis qu'elle y est rare en d'autres temps ; on cite, dit-il, un de
ces passages en été, où ces oiseaux, exténués de fatigue, se lais-
saient prendre à la main sur tous les navires. Cette espèce hiverne
également aux îles Açores, Madeire et Canaries [Godman), sur les
côtes de l'Espagne {Saunders), du Portugal {Rcyes), du Maroc
{Favier) et de l'Algérie (Loche), mais elle ne visite qu'irrégulièrement
la côte égyptienne [de Heuglin)', à l'ouest de l'Afrique elle se montre
parfois jusqu'au SénésB\{Hartlaub). Elle est rare sur la mer Noire
au sud de la Russie [de Nordmann) et Ménétries la mentionne sur
la mer Caspienne, mais Radde ne l'y a jamais observée. On la
voit aussi en Pologne dans les diiïcrcntes saisons, mais rarement
(rac:ranoi^5/«); en hiver elle visite quelquefois la Bohême [Fritsch),
les lacs de la Suisse {Mcisner et ^chinz) et autres pays de l'intérieur.
— 608 —
mais par sujets isolés qui sont probablement emportés par des coups
de vent.
En Asie, la Mouette tridactyle habite la zone boréale, le Kamt-
schatka {Stejneger), les îles Kouriles [Seebohm) et probablement la
Sibérie orientale, où Taczanowski signale le R. brachyrhyncha qui
ne peut être l'oiseau décrit sous ce nom par Gould. M. Seebohm dit
qu'elle se montre aussi au Japon, ce qui ne paraît pas impossible,
mais, d'après M. Saunders, on ne la verrait en hiver ni au Japon,
ni en Chine. En Amérique, elle habite le Groenland {Holbôll) et la
zone boréale en été, les côtes des Etats-Unis en hiver {Baird), proba-
blement jusqu'au 30" 1. N.
Mœurs. — La Mouette tridactyle habite les côtes maritimes, mais
elle se montre aussi sur les eaux intérieures, car elle remonte parfois
très haut le cours des fleuves, surtout lors des tempêtes. Elle émigré
des régions septentrionales lin septembre pour se rendre sur les mers
libres de glaces, et on la rencontre alors souvent en pleine mer très
loin des côtes ; elle retourne dans le Nord au commencement de mars.
Cet oiseau est surtout marin. Naumann a remarqué que les sujets
qu'on rencontre dans les champs loin de la mer, sont tellement épuisés
qu'ils meurent souvent de faim; il a même trouvé des individus morts
dont l'estomac était complètement vide, alors qu'il y avait près de là
une eau qui leur offrait une nourriture abondante. Ceci paraît démon-
trer que ces oiseaux ont été chassés par une tempête qui les a empê-
chés de pêcher. Par ses mœurs, la Mouette tridactyle ressemble
engénéral aux espèces précédentes. Elle marche peu et avec diflîculté,
nage d'autant mieux et beaucoup, vole avec légèreté et vite, tantôt
haut, tantôt bas en décrivant des ondulations les plus capricieuses, ou
plane en cercle au-dessus de l'eau. Elle est moins remuante que la
plupart des autres Mouettes, fort paisible et excessivement sociable,
aussi la voit-on toujours par troupes composées parfois de milliers
d'individus ; elle vit aussi en bons rapports avec les autres palmipèdes
qui se tiennent dans son voisinage. Dans le Nord, elle ne témoigne
aucune crainte de l'homme, mais dans nos contrées elle se montre plus
défiante, sans être cependant aussi farouche que bien d'autres.
< Il est impossible, dit A. Brehm, de ne pas admirer la douceur de
ces êtres, et on est ravi de voir l'harmonie dans laquelle vivent des
milliers d'individus piaillant et criant, il est vrai, mais sans se dis-
puter ; et toute la peine que chacun d'eux se donne pour conserver,
au milieu de cette multitude, la place que les circonstances lui ont
- 609 —
assignée. La Mouette triclactyle ne s'occupe guère des autres oiseaux;
d'autres laridés vivent sur la même montagne, sans qu'il y ait de
confusion, car, de même que la bande reste étroitement resserrée sur
la mer, de même aussi les individus qui couvent, occupent une partie
déterminée de la montagne. En dehors de l'époque des amours,
l'espèce est des plus silencieuses de sa famille; mais, durant cette
période, elle ne cesse de pousser divers cris : tantôt elle fait entendre
des ta, ka, kai ou taia, tantôt encore dack, dack, ou bien elle imite
les cris d'un enfant qui pleure, ou enfin, le bruit d'une petite trom-
pette. » Cet oiseau se nourrit d'animaux marins, tels que petits pois-
sons, crustacés, annélides-, mollusques, etc., mais il ne touche pas
aux animaux morts.
Reproduction. — La Mouette tridactylo niche en grandes colonies
sur les saillies et dans les anfractuosités des rochers, et souvent en
société d'autres laridés et même de G aille mots ; Malmgren dit que sur
les montagnes occupées uniquement par des Mouettes, la tridactyle
prend possession de la partie moyenne, le L. glaucus du sommet, et
le Pagophila eburnea s'installe à la partie inférieure, c'est du moins
ce qu'il a observé dans la baie Murchison. '.< Dans les montagnes du
Grimsoes en Islande, dit Faber, il niche une telle quantité de ces
Mouettes, qu'elles cachent le soleil quand elles prennent leur vol,
couvrent complètement les rochers quand elles sont posées, vous
assourdissent par leurs cris, et qu'elles colorent en blanc, au moment
de l'incubation, le tapis vert de cochléarias qui garnit les rochers. »
« Celui qui n'a jamais vu une montagne d'oiseaux occupée par les
Mouettes tridactyles, dit HolbôU, ne peut pas se faire une idée de leur
nombre. On pourrait peut-être comparer une pareille localité à un
gigantesque colombier habité par des millions de pigeons de même
couleur. Le mont Janjuatuch a une longueur d'une demi-lieue, et
dans toute cette étendue il sert de demeure à différentes espèces de
Mouettes, et cela jusqu'à une telle hauteur, que les oiseaux les plus
élevés ne semblent être que des points blancs. » A, Brehm a vu ime
montagne semblable en Laponie: « ... Je n'oublierai jamais, dit-il, le
jour où je traversai le promontoire de Svarholtt, non loin du cap
Nord. J'assistai à ce spectacle après que mon affectionné ami, le capi-
taine du Potsdam, m'eût charge'' un de ses fusils pour effaroucher les
Mouettes. J'aperçus une muraille colossale qui me sembla être une
gigantesque ardoise couverte de millions de petits points blancs;
aussitôt après le coup de fusil, ces points se détachèrent en partie de
Tome II. — 1893. 77
— 610 -
leur fond sombre, s'avancèrent, prirent l'apparence d'oiseaux, de
Mouettes brillantes, et s'étendirent sur la mer, mais en masses si
épaisses et si denses qu'il me sembla qu'une avalanche de neige s'était
détachée tout à coup et tourbillonnait en immenses flocons qui tom-
baient du ciel ; ce fut, pendant quelques minutes, une véritable neige
d'oiseaux, et la mer en fut couverte sur une étendue que l'œil ne pou-
vait mesurer. Malgré cela, la muraille semblait tout aussi garnie
qu'avant... »
Dans la construction du nid, cette espèce opère, suivant Malmgren,
avec beaucoup plus d'art qu'aucune autre Mouette. Une étroite saillie
ou une crevasse sur le flanc d'un rocher sert de base au nid, formé d'un
mélange de mousse et d'argile bien maçonné; d'en bas, ce nid a l'ap-
parence d'une écaille élevée, dont un côté arrondi dépasse la saillie
rocheuse, tandis que l'autre est solidement maçonsé dans le roc. Ces
nids sont ordinairement construits à une hauteur de cent à deux cents
pieds au-dessus de la mer. La ponte a lieu vers la mi-juin (1) ; celle-ci
se compose de deux à quatre oeufs ovoïdes, parfois ventrus, mats, d'un
blanc grisâtre, jaunâtre, verdâtre ou roussâtre, avec des points et des
taches de forme variable, dont les profondes sont d'un gris vineux,
les superficielles d'un brun plus ou moins roussâtre. Ils mesurent en
moyenne 53 millim. sur 40.
Mâle et femelle couvent alternativement pendant trois semaines.
Au commencement de juillet les petits sont éclos et les parents sont
alors très occupés à les nourrir, surtout quand ils deviennent plus
grands ; à ce moment les poussins joignent leurs cris à ceux des
adultes, et l'on comprend ce que doivent être les clameurs qui
s'échappent de millions de gosiers ! Vers la mi-août, les premiers nés
peuvent prendre leur vol et s'éloignent bientôt avec leurs parents des
lieux où ils ont vu le jour.
Remarque. — Dans ma dernière liste des Vertébrés de la Belgique
(2), j'ai encore mentionné, mais avec doute, la Mouette blanche ou
sénateur {Pagophila ehurnea). Je ne trouve réellement aucune cap-
ture indiquée pour notre pays, ce qui m'engage à la supprimer.
En 1842, M. le Baron de Selys-Longchamps la signale dans sa
Faune belge d'après des indications de chasseurs, mais il déclare qu'il
n'est pas certain que cette espèce ait été tuée en Belgique. C'est pro-
(1) Voy. Malmgrren,/o«r«. f. Orniih. 1863, p. 375 et 1865, p. 203.
(2) Cette liste se trouve à la fin de mon petit ouvrage sur les Animajix nuisibles de la Belgique,
p. 190 (1893).
— 611 —
bablement sur ces renseignements douteux que feu mon père a cru
devoir faire figurer cette espèce dans son ouvrage sur les oiseaux
indigènes, car il n'indique aucune capture. Le Baron F. Fallon paraît
avoir suivi les auteurs précédents.
La présence de la PagophUa ehurnca (figurée pi. 299) sur nos
côtes n'est cependant pas tout à fait impossible, car, tout en étant
sédentaire dans la zone polaire, elle visite accidentellement les îles
Britanniques, et il paraît qu'elle a même été capturée sur les côtes de
Hollande et de France.
GENRE CLXII.
STERCORAIRE. — STERCORARIUS.
Stercorarius, Briss. Omith. VI, p. 150 (1760).
Larus (part.) Lin, Syst. nat. I, p. 226 (1766).
Catharacta, Fab., Faun. Groenl. p. 103 (1780).
Catarractes, Pall. Zoogr. Rosso-As. II, p. 309 (1811).
Lestris, lUig. Prodr. p. 273 (1811).
Megalestris, Bonap. Cat. Farz. p. 11 (1856).
BuPHAGUs, Coues, Pr. Acad. nat. se. Phiktd., 1863, p. 125.
Car. — Bec peu comprimé, revêtu d'une sorte de cire qui s'étend au delà
de la moitié de sa longueur; mandibule supérieure crochue, l'inférieure plus
ou moins anguleuse à la rencontre de ses branches; narines en fente étroite,
percées à l'extrémité de la cire, plus près de l'extrémité que de la base ; ailes
aiguës ; queue plus ou moins cunéiforme, les deux rectrice.s médianes parfois
très allongées à l'âge adulte ; quatre doigts, pouce élevé ; ongles recourbés,
aigus, creusés en dessous. Teinte dominante brune.
Ilab. — Ce genre est presque cosmopolite, mais il est particuliè-
ment représenté dans les zones polaires,
297. — Le Stercoraire brun.
STERCORARIUS CATARRHACTES, Vielll. ex. Lin.
(Pi. 300.)
Larus kuscus, Briss. Orn. VI, p. 165 (17G0).
Catharacta .SKUA, Briinn. Oim. Bor. p. 33 (1764).
Larus catarractes, Lin. Sijsl. nat. I, p. 226 (1766).
Larus keeask, Lath. Ind. Or?/. II, p. 818 (1700).
Lestris catharractes, Uli;,'. Prodr. p. 273 (1811).
Lestris catarractes, Tcni. Man. d'Orn. \>. 511 (1815).
Catarracta ku.sca, Lcach. .S'. Oit. M. li. Ur. Mus. p. 10 (1816\.
Stercorarius cATAKKiiAiTEs, Vioill. A'. Dict. d'hisi. nai. \\\II, |i. 154 (1810).
612
Catarractes vulgaris, Flem. Hist. Brit. An. p. 137 (1828).
• Lestris skua, Brm. Isis, 1830, p. 992.
Stercorarius pomarinus, Vieill. (nec Tem.(, Gai. Ois. p. 220, pi. 288 (1834).
Stercorarius cataractes, de Selys, Faune belge, p. 155 (1842).
Megalestris catarrhactes, Bp. Cat. Parzudaki, p. 11 (1856).
Lestris fusca, C. F. Dubois, PI. col. ois. Belcj . III, p. et pi. 238 (1860).
BuPHAGUS SKUA, Côues, Proc. Ac. Nat. Se. Philad., 1863, p. 125.
Stercorarius fuscus, A. Dubois, Consp. syst. geogr. Av. Eur., p. 33 (1871).
Megalestris skua, Ridgw. Nom. N. Arn. Birds, p. 53 (1881).
Die grosse Raubmeve, en allemand.
The GREAT Sk.ua, en anglais.
De groote Jager, en flamand.
Taille: 0M2; ailes 0,39.
Description des deux sexes adultes. — Capuclion d'un brun foncé ; parties
supérieures de même couleur, mais marquées de stries et de taches d'un roux
jaunâtre ou blanchâtre ; rémiges d'un brun noirâtres-lés cinq premières
blanches à la base jusqu'à la partie moyenne, leur baguette également blan-
che, la première avec la barbe externe noirâtre ; gorge brune ; les autres
parties inférieures d'un brun roussâtre fauve, le cou et la poitrine striés de
jaunâtre et les plumes des flancs bordées de blanc jaunâtre ; queue brune,
blanche à la base, mais le blanc est caché par les couvertures. Bec d'un noir
verdâtre à la base, noir à son extrémité ; iris brun ; pattes noires.
Jeune. — D'après Naumann, il est de couleur plus uniforme avec des stries
claires au cou et sur la poitrine, et d'autres moins distinctes sur les couver-
tures des ailes.
Poussin. — Duvet épais, mou et assez long, d'un gris brunâtre uniforme
et à peine plus sombre sur la tête et le dos; bec d'un gris noirâtre; iris gris-
brun ; pattes grisâtres (Naumann.)
jldl)^ — Cet oiseau ne paraît nicher qu'en Islande {Faber), aux îles
Féroé et Shetland {Graba), ainsi
qu'à l'île Lofoten près de la côte
norwégienne (Saunders) entre
le 68° et le 69M. N. qui est sa
limite septentrionale ; il est rare
sur les côtes de la Norwège
(Collett), du Danemark {Kjaer-
bôlling), mais visite en hiver les
côtes allemandes de la mer du
Nord, plus rarement celles de la Baltique {Naumann). Il visite avec
plus ou moins de régularité les côtes de l'Ecosse et de l'Angleterre,
plus rarement celles de l'Irlande {Seebohm). Il se montre accidentel-
— 613 —
lement, après de violentes tempêtes, sur les côtes de Hollande [Schlé-
gel), de la Belgique, de la France {Degl. et Gerbe), de l'Espagne, du
Portugal, et on en voit chaque hiver dans le détroit de Gibraltar {Irby).
Sa présence dans la Méditerranée est tout à fait accidentelle: M. A.
von Homeyer dit en avoir vu quelques-uns, pendant l'été de 1861,
entre les îles Baléares et Barcelone.
L'individu capturé à l'île de Malte et signalé par M. Wright serait,
d'après M. Saunders, un S. pomarinus et non un S. catarrhactes. Un
sujet a été tué à coups de pierres en Bohême près de Sadova en sep-
teptembre 1865 [Fritsch), et deux autres, non adultes, ont été tués en
Moravie en septembre 1851 {Tschusi-Schmidhofen). Enfin, d'après le
colonel Irby, Favier aurait observé un individu de cette espèce près
de Tanger, en décembre 1852.
Ce Stercoraire se montre également au sud du Groenland {HolbOll),
mais ses apparitions en Amérique paraissent accidentelles; Bernard
Ross dit cependant l'avoir trouvé près des bouches du Mackenzie et
sur le grand lac des Esclaves, au nord duquel il serait très rare ; il
est donc probable que cet oiseau habite les côtes de la baie d'Hudson,
mais les auteurs américains sont peu d'accord à ce sujet. Baird dit
posséder un individu provenant des côtes de Californie,
Mœurs. — Le Stercoraire brun, aussi appelé Labbe cataracte, est
un oiseau sédentaire et errant; après la reproduction, un certain
nombre de ces oiseaux quittent leur séjour d'été pour errer à l'aven-
ture; d'autres demeurent dans le Nord et cherchent leur nourriture
aux endroits où la mer n'est pas prise par les glaces. Il arrive, cepen-
dant, que de violentes tempêtes en chassent parfois sur les côtes et
même à l'intérieur des pays de l'Europe centrale et cela à différentes
époques de Tannée; c'est ainsi que, d'après Naumann, on a capturé
un de ces oiseaux près de Breslau en juillet, et un autre près de
Mayence en avril.
Ce Stercoraire ne vit d'habitude que sur la pleine mer et on le ren-
contre souvent à plusieurs lieues des côtes; ce n'est qu'au moment de
la reproduction qu'il séjourne sur les rochers et dans les dunes. Il
tient à la fois des lariens et des oiseaux de proie ; son maintien, sa
démarche et ses mouvements ne diffèrent pas de ce que nous offrent les
Goélands; il court vite, nage bien, la poitrine très enfoncée, se repose
parfois longtemps sur l'eau et s'élève des liots avec la plus grande ûici-
lité. Son vol est varié, rapide et rappelle davantage, par ses allures
brusques et inattendues, celui de certains rapaces; l'oiseau plane par-
fois longtemps sans mouvoir ses ailes et en décrivant de grands cercles
— 614 —
dans l'espace, comme le fait l'Aigle. Il ressemble encore aux oiseaux
de proie par la conformation de son bec, et par son naturel envieux,
malicieux, méchant, vorace éternel; il ne vit en bonne intelligence
avec aucun autre oiseau et il est un objet de haine générale. « Il se
nourrit, dit Graba, de tout ce qui est chair, qu'elle soit vivante ou
morte. Je l'ai vu d'un seul coup de bec briser la tête d'un Macareux ;
il arrache même les yeux aux agneaux nouveau-nés et leur ouvre le
crâne pour dévorer leur cervelle, pille les nids de tous les oiseaux de
mer, enlève les œufs et les poussins, d'où la haine qu'il inspire aux
autres palmipèdes. Aucun oiseau ne niche dans ses environs, et aucun
ne séjourne sur les lacs intérieurs où des Stercocaires ont l'habitude
de se reposer; les plus courageux l'attaquent partout où il se montre,
chacun le regarde avec eifroi quand il fait sa ronde sur les côtes, et
ceux qu'il poursuit se jettent dans les flots pour lui échapper en plon-
geant. Ce Stercocaire attaque même avec opiniâtreté l'homme et les
mammifères qui s'approchent de son nid, et leur donne de violents
coups de bec sur la tête ; les habitants des îles Féroé, pour se préserver
de ses atteintes, tiennent un couteau pointu au-dessus de leur coiffure
sur lequel les plus hardis viennent s'embrocher. Plus l'on s'approche
des nids et plus les vieux Stercoraires entourent le visiteur, sur lequel
ils finissent par fondre obliquement (1) ». Faber a constaté le même
fait en Islande, et il ajoute que son chien a eu beaucoup à souffrir des
coups de bec de ces oiseaux.
« Son goût pour la pillage, dit Naumann, est surtout prononcé à
l'époque où il a lui-même des jeunes. Le Stercoraire brun pille alors les
nids qui se frouvent par milliers sur ce qu'on appelle les montagnes
d'oiseaux, et enlève les oeufs et les poussins pour les porter à sa
propre couvée. Un cri d'effroi général est jeté par mille gosiers à la fois
aussitôt que cet audacieux voleur s'approche d'un pareil lieu de repro-
duction; cependant, malgré ces démonstrations, il n'y a pas un seul
oiseau qui ose s'opposer sérieusement à ses projets pervers; il s'em-
pare du premier jeune qui s'offre à lui et s'éloigne, tandis que la mal-
heureuse mère crie inutilement et le poursuit un instant au vol. Dès
qu'il n'est plus poursuivi, il descend sur l'eau, tue sa victime, l'avale
et se dirige vers ses petits auxquels il la donne après l'avoir régur-
gitée. Cela ne le gêne pas de se rendre plusieurs fois par jour à une
montagne d'oiseaux, même quand celle-ci se trouve à une distance de
deux lieues de son nid. » Sa voracité est en rapport avec son besoin
(i) Graba, Tagebuch gef. auf einer Reise nach Far'o, p. 187.
— 615 -
incessant d'action, aussi chasse-t-il aussi bien en volant qu'en
nageant. Dès qu'il aperçoit des oiseaux pêcheurs, il s'en approche,
les observe et attend qu'ils aient capturé une proie; mais alors il fond
sur eux avec une audace incroyable et les force à lui abandonner leur
butin.
Le cri de ce déprédateur ressemble à celui de certains Goélands :
en volant il fait entendre le cri de ag ag, au repos celui àejia et pen-
dant l'attaque celui de hoo Iioo.
Reproduction. — C'est en avril que le Stercoraire quitte l'Océan
pour se rendre à l'endroit de la reproduction, qui est souvent près
d'une eau douce de l'intérieur, parfois éloignée d'un bon kilo-
mètre de la mer. Il niche en colonies, mais les nids sont toujours
éloignés les uns des autres de plusieurs mètres, et sont placés soit
sur les plateaux des montagnes, soit sur les versants recouverts
d'herbe et de mousse, soit encore sur un banc de sable. Ce no sont
cependant pas de véritables nids, car la femelle se borne à piétiner
l'herbe ou la mousse et de former ainsi une excavation arrondie, dans
laquelle elle fait sa ponte vers la mi-mai; parfois aussi, elle dépose
ses deux œufs, jamais plus, dans une simple fossette creusée dans le
sable et plus ou moins garnie de quelques brins. Ces œufs ressemblent
à ceux des Goélands, mais sont plus ventrus ; leur couleur est d'un
vert olivâtre clair passant tantôt au brunâtre, tantôt au vert bleuâtre,
et marqués de taches et de points olivâtres, cendrés ou bruns ; ils
mesurent de 67 à 72 milUmètres sur 49 environ.
Mâle et femelle couvent alternativement pendant quatre semaines.
A la fin de juin on trouve des jeunes en duvet que les parents nour-
rissent de mollusques, de vers, d'œufs d'oiseaux, etc.; un peu plus
tard ils leur apportent des jeunes oiseaux, des poissons et autres
animaux de petite taille, qu'ils doivent parfois capturer fort loin. 11 a
été dit plus haut avec quel courage les parents défendent leurs petits
contre les attaques de l'homme et des carnassiers.
298. — Le Stercoraire pomarin.
STERCORARIUS POMARINUS, Vieill. ce Tc„i.
(IM. :-!()i.)
STERCORARIUS STRiATUS, Briss. Ornith. VI, p. 152, pi. 13, fii,'. ?, juv. (1760).
Larus parasiticus, Mey. (ncc auct.), T>iscltenb. der dfitt. Voijclh. II, p. 490 (ISIO).
Catahracta parasita, var. Camtschatica, Pall. Zooip-. Rosso- As.U, p. 312 (1811).
— 616 —
Lestris pomarinus, Temm ilfaw. d'Oni. p. 514 (1815).
Stercorarius pomarinus, Vieill. N. Dict. dliist.nat. XXXII, p. 158 (1819).
Cataractes pomarina, Steph., Shaw's Gen. Zool. XIII, p. 216 (1826).
Cataractes pomarinus, Selby, III. Brit. Om. II, p. 517 (1832).
Lestris sph^riuros, Brm. Isis, 1830, p. 993.
Lestris striatus, Eyton, Hist. rar. Brit. B. p. 53 (1836).
CopROTHERES POMARINUS, Reichb. Nat. Syst. Vôg. p. V (1852).
Catarracta POMARINA, Bljth, J. A^. Soc. Reng. XXVIII, p. 406 (1859).
Lestris arctica, C. F. Dubois, PL col. Ois. Belg. III, p. et pi. 237(1860).
Lestris pomerinus, Newt. Proc. Z. S., 1861, p. 401.
Lestris pomarhinus, Prey. Reise Isl. p. 417 (1862).
Lestris pomatorhinus, Sclat. Ibis., 1862, p. 297.
Stercorarius pomatorhinus, Newt. Baring-Gould's Icel. p. 418 (1863).
Stercorarius pomarhinus, Malmgr. Spitzb. Fogl. p. 411 (1864).
Die Mitti.ere Raubmeve, en allemand .
The Pomarine Skua, en anglais.
De Middelste Jager, en flamand.
Taille : 0'M4 jusqu'à l'extrémité des rectrices médianes; ailes 0,37.
Description des deux sexes adultes. — Dessus de la tête, loruras et partie
antérieure des joues d'un brun noirâtre, les plumes occipitales un peu effilées;
cou et côtés postérieurs de la tête d'un jaune d'ocre pâle; gorge d'un blanc
jaunâtre ; manteau, dos, ailes et queue d'un brun cendré foncé; rémiges noi-
râtres, blanchâtres à la base du bord interne, les baguettes également blan-
ches, sauf à leur extrémité qui est brune; parties inférieures blanchâtres, la
poitrine et les flancs avec des bandes transversales brunes; bas-ventre, sous-
caudales et bas des jambes d'un brun cendré; rectrices blanches à la base de
leur bord interne, les deux médianes larges, de même largeur dans toute
leur étendue et dépassant les autres de 50 à 60 millim. Bec d'un gris de
plomb avec l'extrémité noirâtre; iris brun; pattes noires.
Ou rencontre parfois des sujets presque unicolores : parties supérieures
d'un brun noii'âtre, le dessus de la tête presque noir; parties inférieures plus
claires et de teinte fuligineuse sur l'abdomen.
Jeune. — Dessus de la tête brun, les bordures des plumes d'un cendré rous-
sâtre; côtés de la tête d'un cendré jaunâtre légèrement varié de brun; toutes
les autres parties supérieures d'un brun foncé avec les bordures roussâtres;
gorge blanchâtre tachetée de brun; parties inférieures d'un blanc roussâtre
barré de brun, cette dernière couleur domine sur la poitrine et sur les flancs;
sous-caudales barrées alternativement de brun et de blanc, mais leur extré-
mité est d'un blanc roussâtre; ailes et queue comme chez l'adulte, mais les
rectrices médianes ne dépassant pas les autres. Bec d'un gris verdâtre, noi-
râtre à l'extrémité; iris brun; tarses d'uu gris bleuâtre, bases des doigts et des
membranes d'une teinte plus pâle, le reste noirâtre.
Poussin. — D'un brun de suie uniforme, un peu plus pâle aux parties infé-
rieures iSeebohn).
— 617 —
Hah. — Le Stercoraire pomarin habite, eu été, toute la zone
polaire où on l'observe à cer-
tains endroits jusque sous le
82° {Parry). Il est rare au Spitz-
berg, mais généralement répandu
près de l'ile des Ours et de la
Nouvelle-Zemble, où il est moins
commun dans les parties septen-
trionales que sur les côtes méridio-
nales et à Waigatz [de IIeuglia)\
il ne paraît pas nicher sur les côtes septentrionales de l'Europe;
M. Collettdit cependant que, d'après M. Nordvi, cet oiseau nicherait
dans les marais des montagnes de l'intérieur de la Finmark, aussi
lion à l'est qu'à l'ouest de ce pays; ce qui paraît confirmer la chose,
c'est que MM. Newton et Simpson ont observé de grandes troupes de
ces oiseaux près du cap Nord en juin 1855. Ce Stercoraire est rare
et de passage dans le golfe de Finlande {BUchner), sur les côtes de la
Suède {ISilsson), de l'Allemagne {Naumann), mais moins rare au
Danemark {KjuerhOlling). Il est rare mais niche en Islande (Faber), et
visite en hiver les îles situées au nord do l'Ecosse et, avec plus ou
moins de régularité, les îles Britanniques où il se montre parfois en
bandes nombreuses {Seebohm). Il est de passage irrégulier en
Hollande [SclUégel) et en Belgique, et après de fortes lempêtes on en
voit parfois sur l'Escaut jusque près d'Anvers; il en est de même en
France; mais, d'après M. A. Lacroix, cet oiseau séjourne une bonne
partie de l'année sur les étangs et les côtes maritimes du département
des Pyrénées-Orientales, et M. L. Olphe-Galliard ajoute qu'il n'est
pas rare en hiver près de Ilendaye. Ce Stercoraire se montre irrégu-
lièrement sur les côtes du l'urLugal [Reyes) et de l'Espagne où, en
décembre 1867 il fut très abondant pendant quelques jours à Malaga
{Saunders)\ M. A. von Homeyer dit en avoir observé ([uelques-uns entre
Barcelone et les îles Baléares, et sa présence a égalonieni été observée
sur les côtes de la pr()vin(;e de ( lérona ( Vayrcda). 11 ne se montre
cependant qu'accidentellement dans la Méditerranée: on signale des
captures en Piémont, en Lombardie, en Vénéti(\ en Ligurie, en
l'oscanii, en Emilie {^a/c(ulo)-i), en Modene [Dunderlein), en Sardai-
gne, en Sicile et à Malte [(iiglioli).
(,)u('Iqn('s ciiiiures accidentelles ont également tké faites en Bohême
{Kritsch), en Autriche {c(j»t. Pclzcln), en Hongrie {Prcyer) et dans
TuMi: II. — 18U3. 78
— 618 —
diverses parties de l'Allemagne comme en Silésie, en Saxe, en Thu-
ringe, sar le Rhin, le Mein, l'Elbe, l'Oder, etc. {Naumann).
En Afrique il a été capturé près de Tanger [Favier) et sur diffé-
rents points de la côte occidentale jusque sous le 23° 1. S., où An-
dersson tua deux sujets dans la baie de Wolwich. En Asie, ce Ster-
coraire niche sur les îles et les côtes de la Sibérie septentrionale
{Middendorff), et des captures accidentelles ont été faites au Japon
{Seebohm), près de Moulmein sur la côte du Ténasserim sous le
16^22' 1. N. {Blyth) et au cap York, la pointe septentrionale de l'Aus-
tralie [Saunders]-
Cet oiseau habite également le Groenland {Holbôll) et l'Amérique
polaire, la baie d'Hudson {Richardson), le Labrador {Coues) et il se
montre en hiver jusqu'à New- York et la Pensylvanie {Baird). A
l'ouest on l'observe dans l'Alaska jusqu'à la pointe^de Barrow, mais
c'est la moins commune des trois espèces qui vivent dans ces parages
[Murdoch). D'après M. Seebohm, on l'aurait également pris sur des
lacs du Mexique et sur la côte du Pérou.
Mœurs. — Le Stercoraire poraarin est donc une espèce arctique qui
se montre en hiver jusque dans la zone tropicale; il émigré plus
régulièrement que le précédent, surtout quand la saison est rigou-
reuse, et les jeunes se montrent alors parfois très loin à l'intérieur
des terres. Pendant certaines années, il arrive par bandes nom-
breuses, et c'est par milliers qu'on en a vu durant l'automne de 1879
et de 1880 sur les côtes anglaises du Yorkshire.
Par ses mœurs, cet oiseau ressemble beaucoup au Stercoraire brun,
et il est tout aussi vorace, mais comme il est plus petit il est aussi
moins fort ; il se nourrit de la même manière que ce dernier, poursuit
également les oiseaux pêcheurs pour leur enlever leur butin, pille les
nids, dévore les œufs et les poussins ainsi que tous les animaux qu'il
peut maîtriser; les jeunes qui s'aventurent dans les champs y font la
chasse aux vers, aux insectes, aux larves, aux mulots et aux campa-
gnols. Dans les toundras de la zone polaire, dit de Heuglin, il fait la
chasse aux lemmings qui composent, en été, sa principale nourriture;
il guette sa proie d'un endroit élevé ou s'abat sur elle du haut des
airs. Dans la première quinzaine de septembre, ces oiseaux se ras-
semblent par troupes composées de dix à trente individus pour se
rendre dans les rochers des côtes ; leur cri est grèh, parfois ivew wew,
ce qui ressemble assez, dit Faber, au jappement d'un petit chien.
Reproduction. — Cet oiseau niche dans les toundras de la zone
— 619 —
polaire. Middendorffl'a trouvé en grand nombre près du fleuve Tai-
mjr, où ces oiseau firent leur apparition le 6 juin; le 7 juillet il
trouva les premiers œufs sous le 74° 1. N. Ceux-ci sont déposés
dans la mousse au nombre de deux, sans litière particulière. Ces œufs
varient du brun olivâtre à l'olive pâle, et sont marqués de taches
brunes de formes diverses et ordinairement plus nombreuses au gros
bout où elles sont confluentes, les taches profondes sont d'un gris
cendré ; ils mesurent environ 63 millim. sur 46.
La coloration des parties ventrales n'est nullement un caractère
sexuel; on voit parfois des individus à abdomen foncé accouplés avec
des S|UJets à abdomen blanchâtre, et entre ces deux extrêmes on ren-
contre tous les intermédiaires.
299. — Le Stercoraire parasite.
STERCORARIUS CREPIDATUS, Vieill. ex Banks.
(PI. 302 )
Catharacta cei'Phi'S et coprotheres, Rriiii. Orti. bor. p. 30 (17fi4).
Laris CREPIDATUS, Banks, Hovkesioorth'f; Voy. II, p. 15 (1773).
Stercorarius parasiticus, Schaeff. Mus. Orn. p. 62, pi. 37 (1780).
Larus parasiticus, Bodd. (nec Lin.) Tab. PI. enl. n» 991 (1783).
Lestris CREPIDATUS. lUig. Prodr. p. 273 (1811).
Catarracta CEPPHUS, Leach, St/^t. fat. mam. B. Br. Mus. p. 39 (1816).
Stercorarius crepidatus, Vieill. A'^. DicL (h/nst. nnt XXXII, p. 155(1810).
Lestris parasitica, Fab. Prodr. Isl Orn., p. 105 (1822).
Cataractes parasiticus, Flem. Brit. an. p. 138 (1828).
Stercorarius cepphus, Swains. Faun. bor. Am. p. 432 (1831).
Lestris richardsoxi, Swaing. ibidem., pi. 73 (1831).
Lestris Bo.ii, Schi.eepii et Brnickii, i^rm. Yiir/. Deut^chl. pp. 719,720, 723 (1831).
Lestris parasita, Koys. et Blas. Wirbeli. Eur. p. XCV (1840).
Cataractes richardsoni, Macg. il/a». Brit. B. II, p. 257 (1842).
Lestris spinicaudus, Hardy, R''v. et M<i<i. de zool. 1854, p. 657.
Lestris parasiticus, L. parasiticus xmr. coprotheres, Bp. Consp. av. II, pp. 208-
209(1857).
Lestris thuliaca, Pvey. li'-i se ?/. LU. p. 418 (1S62).
Stercorarius richardsoni, Coues, Pr. Acad. nat. Se. Phil. 1863, p. I.'î5.
Stercorarius parasiticus var. Tepiiras, Malraj^r. Bihanij tillhrrôtt. o>u df^n Svenska
exped. p. 8 (1804).
Stercorarius tephras, Malragr. Journ. f. Orn. 1865, p. 1^92.
Stercorarius spinicauda, Lay. Birds S. Afr. p. 360(1867).
Stercorarius asiaticus. Hume, Stray Feath. p. 269(1873).
DiK Schmarotzer-Raurmeve, on allemand.
Tue Iviciiardson's Skua, en anj:;lais.
Dk Ki.kine .I.vuer, en (lamand.
— 620 —
Taille : 0™44 jusqu'à l'extrémité des rectrices médianes, celles-ci
dépassent les autres de 0,08 à 0,11 ; ailes 0,32.
Deseription des deux sexes adultes. — Dessus de la tête, manteau, dos,
ailes et queue d'un brun cndré foncé; cou et côtés delà tête d'un jaune
d'ocre clair, blanchâtre à la gorge ; poitrine plus ou moins cendrée lavée de
jaunâtre ; côtés de la poitrine, flancs, bas-ventre et sous-caudales d'un cen-
dré brunâtre plus pâle que le dos; bas de la poitrine et abdomen blancs;
rémiges brunes, noirâtres à l'extérieur, toutes les baguettes des primaires
blanches. Bec d'un gris sombre ; iris brun; pattes noirâtres.
On rencontre très souvent une variété d'un brun de suie uniforme, mais
un peu plus pâîe en dessous (1).
Jeune. — Tête d'un cendré brunâtre, les bordures des plumes jaunâtres ;
une tache noire devant l'œil ; nuque et côtés du cou d'un cendré jaunâtre
striés de cendré foncé ; goige cendrée, plus claire en ayant, les plumes fine-
ment bordées de jaunâtie ; manteau, dos et ailes brun foncé, les bordures des
plumes d'un cendré jaunâtre; sus-caudales brunes, barrées de blanc ; queue
brune, les rectrices médianes dépassant à peine les autres; poitrine, abdomen
et jambes blanchâtres avec des taches et des raies d'un cendré brunâtre, ces
raies sont mieux accentuées sur les sous-caudales. Bec d'un gris de plomb
clair, noirâtre à la pointe; tarses et base des doigts bleuâtres, le reste des
doigts et les membranes noirs.
Poussin. — Duvet long et doux, d'un gris brunâtre, un peu plus clair en
dessous.
Hab.
Ce Stercoraire habite également la zone polaire en été. On
le trouve alors communément au
Spilzberg, à la Nouvelle-Zemble
[de Heuglin), sur les côtes de la
Fin mark, de la Norwège ( Collett)
et du nord de la Russie jusqu'au
82o2' 1. N. [Parry); il est moins
répandu sur les côtes de la
Suède {Nilsson) et rare dans les
golfes de Finlande [Bûchner) et
de Bothnie {Palmén); il est peu répandu en hiver au Danemark
{Kjaerbôlling) et sur les côtes allemandes, bien qu'il soit de tous les
Stercoraires celui qui s'y montre le plus fréquemment, et on l'a même
(1) Cette variété est figurée sur notre planche (fig. 1), qui porte par erreur « plumage d'été. »
L'oiseau adulte a le même plumage en toutes saisons.
— 621 —
capturé dans le Holdenbourg, le Hanovre, le Holstein, le Mecklem-
bourg, la Poméranie, la Silésie, le Lausitz, le Brandebourg, la Saxe
et dans la province Rhénane [Naumann). Il se montre assez irrégu-
lièrement sur les côtes de Hollande et de Belgique, mais après les
tempêtes d'hiver on le prend quelquefois sur l'Escaut jusqu'au delà
d'Anvers. Il niche en Islande {Faber), aux îles Féroé [Feilden), aux
Hébrides extérieures, aux îles Orcades et Shetland, et lors des migra-
tions on le voit sur les côtes de l'Ecosse et de l'Angleterre orientale,
plus rarement sur les côtes occidentales et méridionales ainsi que sur
celles de l'Irlande {Seebo/mi). Il visite régulièrement les côtes de
France et n'est pas rare eir automne prèsdeHendaye [Olphe-Galliard);
il se montre aussi régulièrement sur celles du Portugal {Reyes) et de
l'Espagne; M. Saunders dit en avoir eu de Malaga, tant adultes que
jeunes de l'année, dès les premiers jours d'août ; mais il ne visite que
très accidentellement l'Italie où l'on ne signale que quelques captures
{Giglioli), et il en est de même en Transylvanie [Dcmford et Harvie-
Broivn). Cet oiseau se montre parfois, à la suite de tempêtes, bien loin
à l'intérieur des terres; c'est ainsi qu'on en a prisa Moscow {Sabanaefll'),
en Pologne (Taczanouski), en Hongrie sur le lac Neusiedler
{von Pelzeln), en Saxe près de Halle et de Loeberitz {Rey), en Suisse
{Fatio), en Savoie [Hardy), etc.
Ce ne sont généralement que de jeunes sujets qui s'aventurent à l'île
Sainte-Hélène [Hardy), à Tanger [Irby) et sur les côtes occidentales
de l'Afrique jusqu'au cap de Bonne-Espérance, où ils sont même assez
communs de décembre à février [Layard).
En Asie, on rencontre cette espèce au nord de la Sibérie [Midden-
rtfor/f) jusqu'au Kamtchatka et les îles du Commandeur, où la variété
foncée est la plus abondante [Stejneger). En hiver on la voit aux îles
Kouriles («S'noz^j) et parfois sur les côtes du Mékran et de l'Inde occiden-
tale jusqu'à Bombay [Hume); ou l'a m<une capturée à la Nouvelle-
Zélande Bulle?').
Ce Stercoraire habite également le Groenland {Holboll) et toute
l'Amérique boréale jusqu'au 82"; il est comnuin dans le détroit de
Behring, aux îles Aléoutes [Nelson) et dans l'Alaska [Turnci-); il
hivcine sur les côtes des Etats-Unis et paraît se montrer accident(dle-
UKMit au Sud jusqu'à Rio-do-Janciro [Sanmlers).
Mœurs. — C'est de tous les Stercoraires celui (|u'oii observe le plus
souvent sur les côtes de l'Europe occidentale ; il quitte la zone polaire
en septembre et y i'«M.)unn' vers la lin d'avril ; on voit cependant (luel-
^22
quefois sur nos mers de jeunes sujets en plein été, mais seulement
après de fortes tempêtes.
Cet oiseau vit par couples et se montre souvent dans les golfes pro-
fonds et à l'embouchure des fleuves, qu'il remonte parfois jusqu'à plu-
sieurs lieues de distance de la mer; ceci se voit surtout de septembre
à novembre. Il s'aventure fréquemment loin dans l'intérieur des terres,
même dans des endroits où il n'y a pas d'eau ; là on le voit courir dans
les champs et les prés à la recherche de vers, de larves, d'insectes et
surtout de tipules qu'il attrape très adroitement. Il se nourrit en outre
d'oeufs et de jeunes oiseaux, ainsi que de poissons qu'il enlève le
plus souvent aux petites Mouettes et aux Sternes. Les jeunes et les
sujets non accouplés vivent en bandes et errent à travers la campagne.
D'après de Heuglin, le cri de cet oiseau est héian ou guerok-guerok\
Faber le rend par ki-auio.
Reproduction. ■ — Ce Stercoraire niche entre le 58° et le 82° 1. N.,
mais jamais en colonies. L'accouplement a lieu vers la fin de mai. Les
nids sont éparpillés soit dans les plaines non loin des montagnes habi-
tées par des Sternes et autres oiseaux de mer, soit sur des collines
et de préférence sur celles occupées par des Eiders. La ponte a lieu en
Islande en juin, plus au Nord en juillet.
Les deux œufs que pond la femelle sont simplement déposés dans
l'herbe ou dans la mousse sans la moindre litière sèche. Ces œufs sont
d'un gris olivâtre avec des taches d'un brun noirâtre, plus abondantes
au gros bout; ils mesurent 56 millim. sur 41 environ. Quand on s'ap-
proche d'un nid, les parents s'avancent à votre rencontre et cherchent
par tous les moyens à attirer l'attention sur eux et à vous éloigner de
leur couvée ; au besoin ils usent des procédés les plus téméraires.
II a été dit plus haut que cette espèce présente deux variétés : l'une
à ventre blanc, l'autre à ventre brun, mais elles ne peuvent former
des races distinctes. Fai3er dit, en eifet, que les deux variétés s'accou-
plent fréquemment, et que tantôt un mâle à ventre blanc s'unit à une
femelle à ventre brun, tantôt c'est l'inverse. Il est du reste à remar-
quer qu'entre les formes extrêmes on rencontre tous les intermédiaires-
300. — Le Stercoraire à longue queue.
STERCORARIUS LONGICAUDUS, Briss.
(PI. 303.)
Stercorarius longicaudus, Briss Oniith. VI, p. 155 (1760).
Larus parasiticus, Lin. Faun. Suec. p. 55 (1761) ; Syst. nat. I, p. 226 (1766).
— 6'2:^ —
Catharacta. parasitica, Briin. Orn. Bor. p. 37 (1764).
Catarractes parasita, Pall. Zoogr. Rosso-As. II, p. 310 (1811).
Lestris parasitica, m. Prodr. j). 273 (1811).
Lestris parasiticus, Tem. Mwii. (COrn. p. 512 (1815)
Stercorarius longicaudijs, Vieill. A'. Dût. XXXll, p. 157 (1819).
Lestris crepidata, Brm. (nec Hanks), Beilr. z. YoyeLk. III, p. 801 (1822).
Lestris buki'oni, Boie, /«s, 1822, pp 562, 874.
Stercorarius cepphus, Steph. Shaw's Gen. Zool. XIII, 1, p. 211, pi. 23 (1826).
Lestris macropteros et microrynchus, Brm. Yn(j. Deutschl. pp. 721,725 (1831).
Lestris lessoni, Degl. Méni. Ac. r. Lille., p. 108 (1838).
Lestris cephus, Key.s. et Blas. Wirbeli. Eur. j). XCV, (1840).
Stercorarius longicaudatus, He Selys-Long. Faune helye, p. 156 (1842).
Lestris longicaudatus, Thomps. Nat. Hist. Ireland, III, p. 399 1851).
Lestris hardyi, Bp. Tabl. U.--Lonyipen. {Compc. Rend. Xl.II (1856).
Stercorarius buffoni, Coues, Pr. Acad. nat. se. Philad. 1863, p. 136.
Lestris longicaudata, v. Heuglin. Ibis., 1872, p. 65.
Stercorarius parasiticus, Saurid. Pr. Zool. Soc. 1876, p. 330.
Die Kleixe Raubmeve, en allemand.
The Buffon's Skua, en anglais.
De Kleinste Jager, en flamand.
Remarque. — La dénomination spécifique de para.siticus {para-
sitica ou parasita) a été employée, par divers auteurs, pour désigner
tantôt le ,S. crepidatus, tantôt le S. longicaudus et même le S. po-
marinus, comme le démontre la synonymie que nous donnons de ces
espèces.
La plupart des auteurs (Gray, Gould, de Sélys-Longcliamps,
Lawrence, Blakiston, Degland et Gerbe, Coues, Newton, Anders-
son, Hume, Bullor, Sharpe, etc.) onl pensé que le nom linnéen se
rapporte au crepidatus do Banks {richardsoni, Sw.), mais c'est là une
grave erreur. Linné a décrit son Larus parasiticus d'une manière
précise en 1761 dans sa Fauna succica, et c'est à ce \\\^o (|ue se
rapporte la descripiion du aS'_^6-^. nat. Les caractères qu'il (l()nn(> dans
sa Fauna des rémiges et des rectrices, ne permettent pas de douter de
l'espèce qu'il avait on vue ; il dit en efïet : « rémiges nigr;e, rachi
i,2nivea; cauda nigra rotundata, rectrices duœ intermedia^ ensi-
formes duplo longiores (p. 55, n° 156). > Ces caractères ne peuvent
se rapporter (ju'aii S. Imujicaudus, dont, les rectrices méiliancs attei-
gnent en elîet une longueur double des autres, et dont l<\s deu.\
premières rémiges seulenx'ut ont leur baguette blanche.
J'ai conserve'' la dénomination de /r>n^/>;«î<(/a.v, adoptée par IJiisson
et \'i('ill()i, alin d'éviter (jUi' l'on confonde encore le .S^. parasiticus
de Lintii'' (cl de lîninnich, l 'allas, Illigcr, Temminck, Audubon,
624 -
Meyer, Saunders, etc.) avec le S. parasiticus {crepidatus) des auteurs
mentionnés plus haut.
Taille : 0,34 sans les Ulets de la queue qui dépassent les rectrices
latérales de 16 à 22 centimètres ; ailes 0,30.
Description des deux sexes adultes. — Même système de coloration que le
précédent, mais de taille un peu plus petitp, les rectrices médianes beaucoup
plus longues, et le manteau d'une teinte plus claiie. Dessus de la tête d'un
brun noirâtre ; cou et côtés de la tête d'un jaune d'ocre ; gorge blanchâtre;
manteau, dos, sus-caudales, base des rectrices médianes et ailes d'un cendré
brunâtre ; rémiges et queue d'un brun noirâtre, la base de cette dernière
d'un brun cendré, baguettes des deux premières rémiges primaires blanches,
passant au noirâtre à leur extrémité ; poitrine et haut de l'abdomen d'un
blanc un peu jaunâtre ; bas-ventre et sous-caudales cendrés. Bec d'un gris
sombre, noirâtre à son extrémité ; iris brun ; tarses etjjase des doigts d'un
gris de plomb, le restant des doigts et membranes noir.
Jeune. — Variable suivant l'âge. Dessus de la tête d'un cendré jaunâtre
clair, tacheté de brun; cou, côtés de la tête et gorge d'un blanc jaunâtre
sîde avec des stries brunes sur les joues ; rémiges comme chez l'adulte ;
queue brune, les rectrices médianes dépassant à peine les autres ; poitrine
d'un cendré brunâtre, les bordures des plumes plus claires; abdomen et
sous-caudales barrés alternativement de brun et de blanc roussâtre, mais
les bandes sont plus larges au bas-ventre et sur les sous-caudales.
Hab. — Le Stercoraire à longue queue est également une espèce
polaire ; il habite, en été, le
Spitzberg {Malmgren), mais il
est bien plus abondant sur les
côtes occidentales et méridio-
nales de la Nouvelle-Zemble et
même en pleine mer ; mais il
est moins abondant à Waigatz
[de Heuglin) et n'existe pas en
Islande, mais bien aux îles Féroé
{Muller). En Finmark il est plus abondant à l'intérieur de la région
de l'Est où il niche rarement au sud du 68° {Collett) ; il est également
commun sur toutes les côtes et les îles de la Russie septentrionale
{Seebohm et H. Broivn), mais il ne visite qu'accidentellement les
côtes de la Suède et de l'île Gottland {Nils. , Andr.), de la Finlande
(Palmén) et les bouches de la Neva [Bilchner). Cet oiseau se montre
isolément sur les côtes du Danemark {Kjaerb.), de Helgoland {Gâtke)
— 625 —
et du nord de l'Allemagne, et on l'a capturé très accidentellement en
Silésie, dans le Mecklembourg, en Saxe, dans la province Rhénane
(Nau/nann), et même en Suisse (Meisner et Schinz) et en Alsace
[Ky-œner). Il est rare, lors des migrations, sur les côtes des îles
Britanniques (Seebohm), de la Hollande {Schlêgel) et de la Belgique,
mais on ne signale qu'une capture sur l'Escaut, et une autre aurait été
faite à Dilsen (Limbourg belge) en novembre 1879. Il est également
peu fréquent sur les côtes de France, quoique M. Olphe-Galliard dise
qu'il n'est pas rare près de Hendaye. M. Saunders ne le comprend
pas dans sa liste des oiseaux de l'Espagne, mais il dit ailleurs que
ce Stercoraire longe parfois les côtes de l'Europe occidentale jusqu'au
détroit de Gibraltar et au Maroc ; on signale aussi quelques rares
captures en Italie {Giglioli).
En Asie, cet oiseau habite toute la zone polaire [Middend.)']^^'
qu'au Kamtschatka, les îles Kouriles et Pribylow {Stejneger, Seeh.),
En Amérique on l'observe également dans toute la zone polaire et au
Groenland jusqu'au 74° {de Heuglin). Du côté du Pacifique, il est
commun dans l'Alaska et à la Nouvelle-Arkhangel {Nelson) ; il est
probable qu'on le voit en hiver jusqu'à l'île Vancouver; du côte de
l'Atlantique, au contraire, il descend en hiver jusqu'au A0° {Saundey^s).
Mœurs. — C'est, comme les précédents, un oiseau essentiellement
marin, mais il ne s'éloigne pas autant de la mer que le Stercoraire
parasite, bien que les couples isolés recherchent volontiers des ter-
rains accidentés. Mais les tempêtes le chassent quelquefois loin dans
l'intérieur des terres où il se trouve perdu, et les circonstances l'éloi-
gnent parfois de plus en plus du rivage, ce qui arrive surtout aux
jeunes sujets. Cela n'empêche cependant, pas qu'il visite volontiers
les prés et les champs qui ne sont pas trop éloignés de la mer ; il a
cela de commun avec les autres espèces du genre, dont il a également
les mœurs. Il est cependant d'un naturel plus doux et se montre
moins farouche.
Il vole tantôt haut, tantôt bas avec une grande légèreté ; de Heuglin
dit ne l'avoir jamais vu attaquer dos Mouettes pour leur enlever leur
butin, ni faire la chasse aux lemmings ; mais M. Nelson dit le contraire,
d'après des observations faites dans l'Alaska : c'est avec adresse, dit
cet auteur, et une grande dextérité qu'il se jette sur des Sternes et des
petites Mouettes pour leur faire rendre Je produit do leur pêche.
Sa nourriture consiste en larves, insectes divers, œufs d'oiseaux,
campagnols et lemmings, petits poissons, crustacés et autres petits
Tome II. — 18^3, 79
— 626 —
animaux marins. En automne, il se nourrit aussi des baies de la cama-
rine {Empetrum nigrum), ce qui donne à ses excréments une teinte
bleu foncé; le Stercoraire parasite mange aussi volontiers de ces baies.
Malmgren dit que si le Stercoraire à longue queue ne dédaigne pas
les œufs des Bécasseaux et autres petits oiseaux qui nichent à terre,
on ne le voit cependant jamais près des montagnes occupées par ces
masses de palmipèdes dont il a été parlé précédemment. Nelson dit
qu'en volant, le cri de cet oiseau ressemble à phéu-phéu-phéu-phéo,
et quand il poursuit l'un de ses semblables, il fait souvent entendre un
quâ; à d'autres moments, son cri est hr-r-r-r, kr-r-r-r, kri, kri-
kri-kri, cette dernière syllabe est stridente et plaintive et souvent
suivi du son traînant de phéu, phéu et dans le même ton; de Heuglin
rend le cri de cet oiseau par wieh ou zieh, parfois wieh-wi-wi-wi.
Le même auteur dit que, malgré sa force relativement faible, ce Ster-
coraire montre cependant un grand courage, qu'il se jette parfois sur
l'homme, et qu'il a vu un couple de ces oiseaux s'abattre téméraire-
ment sur un Renard polaire [Canis lagopus) qui s'approchait de leur
couvée.
Reproduction. — Comme les précédents, cet oiseau dépose, vers
la mi-juin, deux œufs dans l'herbe ou dans la mousse sans autre for-
malité. Ces œufs ont la même coloration que ceux du -S', pomarinus,
mais ils sont plus petits : ils mesurent de 51 à 56 millim. sur 36 à 38.
Les poussins, dit von Middendorff, ont déjà leurs plumes dans la
première ou dans la seconde semaine de juillet.
FAMILLE DES PROCELLARIDÉS.
Car. — Bec à téguments cornés profondément suturés sur les
côtés, terminé par un crochet fortement recourbé ; narines s'ouvrant
dans des tubes, qui sont complètement séparés l'un de l'autre et
placés sur les côtés du bec, ou bien soudés et placés sur le dessus de
cet organe; ailes étroites, suraiguës; tarses comprimés sur les côtés;
pouce nul ou peu développé.
Hab. — Les oiseaux de cette famille habitent particulièrement les
régions froides arctiques et antarctiques; en hiver ils émigrent vers la
zone tempérée, mais ils sont rares dans la zone tropicale.
Mœurs. — Ces oiseaux sont essentiellement marins et ils ne recher-
chent pour ainsi dire les côtes que pour y nicher. Ils volent et nagent
bien, mais marchent avec diflSculté; leurs sens les plus développés
- 627 —
sont la vue et l'ouïe. Ils se montrent en général audacieux et insou-
ciants du danger, et, pressés par la faim, ils se laissent prendre au
premier appât venu attaché à un hameçon ; leur voracité est étroite-
ment liée à la jalousie et aux instincts de rapine, et les plus faibles
obéissent à la loi du plus fort. Ils se nourrissent de toutes les subs-
tances animales qui flottent à la surface- de la mer, cadavres d'ani-
maux, poissons morts ou vivants, mollusques, crustacés, vers, etc.
Ces oiseaux nichent ordinairement sur des rochers isolés et ne
pondent qu'un œuf, relativement grand et volumineux.
SOUS-FAMILLE
DES DIOMÉDÉIXÉS. — DIOMEDEIN^.
Car. — Narines s'ouvrant à l'extrémité de deux tubes très courts
et placés de chaque côté de la mandibule supérieure ; doigts longs ;
pouce nul ; taille très forte.
OENRE CLXIII
ALBATROS. — DIOMEDEA.
DioMEDEA, Lin. Sijst. nat. L 214 (1766).
Phoebastria, Phoebetria et Thalassarche, Reichb. Nat. Syst. d. Yijgel, p. V (1852).
Car. — Bec allongé, très robuste, droit, assez élevé et comprimé ; man-
dibule supérieure à arête arrondie, sillonnée de chaque côté dans presque
toute sa longueur et fortement recourbée et crochue à la pointe; l'inférieure
droite, un peu dilatée verticalement à son extrémité et tronquée ; tubes
nasaux courts, latéraux; ailes très longues, étroites, suraiguës; queue
courte, arrondie ou cunéiforme; tarses courts, épais, réticulés; doigt médian
plus long que le tarse; pouce nul ; ongles médiocres.
Rab. — Ce genre a des représentants dans les mers australes,
l'océan Indien, l'océan Pacifique et dans les mers de la Chine jusqu'au
Kamtschatka.
301. — L'Albatros hurleur.
DIO^IEDEA EXULANS, Un.
(PI. 303b-)-
DioMEDEA EXULANS, Lin. Syst. tint. I, p. 211 (1766).
Dio.medea spadicea, Omcl. Syst. tint. I, p. 5(>7 (1788).
DioMEDEA AiiiisTA, Tsrh. Jouf/i. f. Oin. 1856, p. 157.
I)EK iiKossE alhatro.s.s. CM ailciuand.
The WANDERiNTf A1.HATRO.SS, CI» anjj;lais.
— 628 —
Taille: l'"05; ailes, 0,68; bec 0,17.
Description des deux sexes adultes. — D'un blanc uniforme, les plus
grandes scapulaires avec une tache externe noirâtre ; rémiges primaires
noirâtres, blanches sur une partie de leur bord interne, les secondaires
blanches, souvent avec une grande tache noirâtre terminale, occupant
surtout la barbe externe; queue blanche. Bec d'un blanc jaunâtre; iris
brun; pattes rougeâtres.
Age intermédiaire. — Blanchâtre, le dessus de la tête et du cou
varié de brun, le dos avec des raies pointillées brunes en zigzags ; bas du
dos, ailes et queue bruns, les bordures des plumes plus claires; côtés de la
tête, front et gorge d'un blanc assez pur ; parties inférieures du corps blan-
ches, la poitrine et les flancs marqués de zigzags bruns.
Jeune. — D'un brun fuligineux, les ailes et la queue d'un brun noirâtre ;
front, côtés de la tête et gorge blancs.
Ces descriptions sont faites sur des sujets du Musée de^ruxelles ; l'un des
jeunes que j'ai sous les yeux a le ventre blanc,pointillé de brun sur les flancs,
tandis que le reste du plumage est brun, ce qui ferait supposer que ce sont les
parties ventrales qui se couvrent de plumes blanches en premier lieu.
Remarque. — Dans un rapport sur la Biologie des oiseaux, que
M. E. Oustalet a communiqué au Congrès ornithologique interna-
tional de Budapest en 1891, notre savant confrère fait la remarque
suivante : «... Quelques spécimens de Diomedea exulans que possède
le Muséum de Paris, et qui ont été rapportés de l'île Campbell par
M. Filhol, sont des plus instructifs. Ils permettent de suivre les trans-
formations de l'oiseau couvert d'un duvet blanc, floconneux, aérien,
en un oiseau revêtu de plumes serrées, blanches et noires. Mais à
côté de ces exemplaires, il en est d'autres, qui semblent pourtant
appartenir à la même espèce et qui portent une livrée brune, plus ou
moins foncée, tirant parfois au blanc sur le front. Qu'est-ce que ces
spécimens?... » Je crois pouvoir répondre à cette question à l'aide des
sujets de notre Musée royal d'histoire naturelle. M. Oustalet reconnaît
que des poussins prennent directement le plumage blanc de l'adulte,
tandis que d'autres, qui semblent appartenir à la même espèce, sont
bruns dans leur jeune âge. Pour moi, je suis bien convaincu que l'Al-
batros se présente dans son jeune âge sous deux formes différentes :
l'une blanche et noire, l'autre brune, et que cette dernière passe par
tous les états intermédiaires jusqu'à ce qu'elle ait atteint son plumage
définitif. Les descriptions ci-dessus de \âge intermédiaire et du jeune
k ventre blanc paraissent prouver la chose. Mais pourquoi cette difFé-
— 639 -
rence clans les jeunes? — Elle résulte probablement d'une cause acci-
dentelle, à moins d'admettre, avec M. Filhol, « que les Albatros bruns
sont des représentants d'une race locale, parce qu'ils constituent dans
les parages de la Nouvelle-Zélande une exception au milieu des Alba-
tros blancs, parce qu'ils sont plus rares au sud qu'au nord de cette
terre et qu'ils manquent complètement à l'île Campbell. » Mais s'il
s'agissait d'une race locale, ces oiseaux ne deviendraient pas blancs à
l'âge adulte ou tout au moins prendraient un plumage particulier, ce
qui n'a pas lieu. Je ferai encore remarquer que M. Buller [Manual of
theBirds of New Zoaland,"^. 82),décrit le jeune de la Nouvelle-Zélande
comme étant brun à face blanche et ne dit mot déjeunes à plumage
blanc; ceci me fait supposer que ces derniers forment l'exception, tandis
que les jeunes à plumage brun se prosentent le plus généralement.
Hab. — L'Albatros hurleur, vulgairement nommé Mouton du Cap,
habite les mers australes entre
le 60° et le 30» de lat. S. Il niche
aux îles Campbell {Ross), Ker-
guelen (Kidder), du Prince-
;J Edouard {Hutton), Tristan d'A-
^^'H^ cunha {Carmichael) , à la Nou-
■A velle-Géorgie du Sud ( Weddell)
ot sur quelques autres îles de la
région antarctique. Pendant son
jeune âge, il reste près d'une année sédentaire dans ces stations, mais,
quand ses ailes ont pris tout leur développement, il quitte ces terres
pour se répandre au loin, voyage sans cesse et fait presque le tour du
globe, mais dépasse rarement, vers l'équateur, le 30° 1. S. Il abonde
aux environs du cap de Bonne-Espérance {Lai/ard), des îles Saint-
Paul et d'Amsterdam {Schlégel), sur les côtes méridionales de l'Aus-
tralie {Gould)À la Nouvelle-Zélande [Bidler) et au cap hlorn{Dcff/and).
Ce n'est qu'irrégulièrement ou accidentellement qu'on le voit dans le
canal de Mozambique {ScJdégel) ainsi que sur les cotes du Congo
{Tuckey)A^ Chili et du Pérou {Sclater et Salvin) ; M.Alphonse Milne
Edwards dit que le Muséum de Paris en a reçu plusieurs des envi-
rons des îles Sandwich vers le 10° 1. N. Les captures en Europe sont
très peu nombreuses : une a été faite en France près de Dieppe vers
1829 {Degland), un sujet a été abattu à coups de rames sur l'Escaut
près d'Anvers en septembre 183)^ {Drapiez), et plus récenmient, dans
la matinée du 27 avril 1887, un Albatros endormi sur un brise-lames
— 630 —
de la côte de Blankenberghe, fut tué à coups de bâton par un ouvrier
du port; voilà donc deux captures faites en Belgique. Brimnich signa-
lait même, en 1764, un sujet qui aurait été tué en Norwège, dont la
tête et les pattes étaient conservées de son temps au Musée de Co-
penhague.
Bonaparte dit que l'Albatros hurleur visite accidentellement les
côtes des Etats-Unis d'Amérique, et Latham le mentionne comme
abondant, en été, dans le nord du Pacifique aux environs des îles
Kouriles, mais aucun auteur américain ne confirme ces faits; il paraît
certain que cet oiseau a été confondu avec le D. hrachyura qui lui
ressemble beaucoup et qui habite le nord du Pacifique.
Mœurs. — L'Albatros mouton ou hurleur est un oiseau de pleine
mer qui dépasse, par sa taille, tous les autres palmipèdes; il atteint
jusque quatre mètres d'envergure et la vitesse de sojdlvoI esttelle qu'il
peut franchir, d'après Gould, un espace de plus de 200 milles anglais
en vingt-quatre heures. « C'est un beau spectacle, dit Bennett, de voir
cet oiseau magnifique, plein d'énergie et de grâce, doué d'une force
exceptionnelle, voguer dans les airs. C'est à peine si l'on remarque un
mouvement des ailes après le premier essor et l'élan qui porte ce
puissant oiseau dans les airs ; on suit son ascension et sa descente,
dont les différents mouvements semblent opérés par une même puis-
sance, à laquelle il ne paraît appliquer en rien sa force musculaire.
Il frôle presque en planant le gouvernail des bateaux, et cela avec
une hardiesse incroyable. Quand il voit un objet flotter, il fond sur lui
les ailes largement déployées, s'en empare, nage quelque temps, puis
se relève, se met à tournoyer et reprend son exploration Dans ses
mouvements, dit plus loin le même auteur, l'on ne remarque aucun
effort, mais de la force et de l'énergie réunies à une grâce toujours
égale. Il sillonne les airs très gracieusement, rase les vagues mou-
vantes de si près qu'il semble y mouiller ses ailes ; puis il se remet à
planer avec la même liberté et la même facilité d'allures. Son vol est
si rapide,qu'on ne l'aperçoit plus que dans le lointain quelques instants
après qu'il a passé devant le navire, montant et descendant avec les
flots, et franchissant un immense espace en quelques minutes. »
Par un temps orageux, l'Albatros vole tantôt dans la direction du
vent, tantôt contre lui, et paraît heureux au milieu des vagues soule-
vées par l'ouragan. « Quoi qu'il lui arrive quelquefois, dit Gould, de
se reposer sur les eaux par un temps serein, on le voit bien plus sou-
vent voler. Par un temps calme, il flotte avec assurance à la surface
— 631 -
des mers, et par les plus fortes tempêtes, il s'élance avec la rapidité
d'une lièche. » Il nage avec aisance, mais plonge maladroitement et
ne peut s'enfoncer dans les flots qu'en se lançant de très haut. A terre
il est maladroit, il se dandine lourdement et sait à peine se mouvoir.
Il n'est pas sociable, chacun semble poursuivre son vol sans s'occuper
des autres ; il passe sa journée à chercher de la nourriture, à se repo-
ser et à voler; le vaste océan étant son domaine, il peut poursuivre
son vol sans s'inquiéter des distances, grâce à la puissance de ses
ailes. D'après Gould, l'Albatros n'éprouve aucune fatigue à suivre un
bateau, tout en se livrant à des évolutions de plusieurs lieues, et tou-
jours il revient dans le sillage pour attraper ce que l'on jette par des-
sus bord. Tschudi fit enduire de goudron la tête et le cou d'un de ces
oiseaux et lui rendit ensuite la liberté. Il put constater que l'oiseau
ainsi marqué suivit six jours pleins le bâtiment, et ne disparut que
quatre fois de son horizon pendant ce temps, et jamais pour plus
d'une heure. Le septième jour, au matin, l'oiseau partit au large et
dès lors on ne le revit plus.
Comme l'Albatros n'a pas souvent l'occasion de se trouver en pré-
sence de l'homme, il se montre confiant et même téméraire, car sa
A'oracité lui fait souvent oublier toute prudence; il se laisse prendre
à l'hameçon avec ]a plus grande facilité, surtout quand une tempête
de longue durée l'a empêché de trouver de la nourriture. Il est d'une
voracité insatiable et sa digestion est fort rapide ; sa principale nour-
riture consiste en céphalopodes et autres animaux marins mous, qu'il
prend à la surface de l'eau, mais il ne paraît pas capable de prendre
des poissons ; il dévore également des substances diverses et même
des cadavres de poissons et de cétacés en putréfaction. On a souvent
comparé sa voix au cri de l'âne ; mais Tschudi dit que c'est une exa-
gération et que cet oiseau fait entendre des cris perçants, criards et
souverainement désagréables ; Kôler rapporte qu'il claque du bec
quand il est en colère ou qu'il a peur.
Reproduction. — L'Albatros se reproduit en novembre. D'après
les observations faites par Gould et Cornick, il niche sur les versants
couverts d'herbes des collines et des rochers. Son nid est composé
d'herbages grossiers, d'herbes sèches, de fouilles mortes, le tout entre-
mêlé de terre ; il mesure à sa partie inférieure une circonférence de
près de deux mètres, son diamètre supérieur est de soixante-quinze
centimètres environ et sa ii.iuteur de cinquante centimètres. La ])onte
n'est que d'un seul œuf, d'un blanc un peu jaunâtre et mesurant
— 632 —
132 mill. sur 84. Sur environ cent nids, Cornick n'en trouva qu'un
qui contint deux œufs.
Il a été dit plus haut, que les jeunes ne peuvent se servir de leurs
ailes que plusieurs mois ou même un an après leur naissance, et les
observateurs sont d'accord sur ce point. Quelques jours après son
arrivée à l'île Campbell, au mois de septembre, le D"" Filhol a ren-
contré en effet de jeunes Albatros qui avaient la taille d'un oiseau
adulte, mais dont le corps était encore en majeure partie revêtu d'un
duvet blanc floconneux, cachant le plumage normal. Sur la foi de
Harris, Hutton avait supposé que le jeune Albatros était abandonné,
peu de mois après sa naissance, par les parents qui regagnaient la
haute mer et y restaient jusqu'en octobre, époque à laquelle ils reve-
naient dans leur station, chassaient le jeune de l'ancien nid dans
lequel la femelle s'installait bientôt pour effectuer une nouvelle
ponte. Les jeunes seraient donc livrés à eux-mêmes pendant six à
huit mois sans nourriture, ou vivant de leur propre graisse, comme le
croyait un vieux capitaine de marine. Harris, qui a fait un long séjour
à l'île Tristan d'Acunha, avait en effet remarqué qu'il se passait des
mois entiers sans qu'un seul Albatros adulte se montrât dans le voisi-
nage du nid. Le D"" Filhol voulut avoir la clef de ce mystère, et il finit
par découvrir qu'un oiseau adulte venait chaque jour de grand'matin
apporter de la nourriture à son poussin et s'éloignait aussitôt, de
façon que ses visites pouvaient passer inaperçues. La dissection d'un
poussin lui permit de constater d'autre part, que celui-ci était nourri
principalement de poulpes, dont on retrouvait dans l'estomac les
débris nageant dans une huile fétide, et que la digestion, à cette épo-
que de la vie, s'opérait avec beaucoup' de lenteur ; ceci explique que le
jeune peut rester un jour entier et même plusieurs jours sans recevoir
de nourriture.
SOUS-FAMILLE
DES PROCELLARINÉS. — PROCELLARIN.E.
Car. — Narines s'ouvrant à l'extrémité d'un tube unique ou de deux
tubes soudés et situés en avant du front; pouce court, immobile et
muni d'un ongle droit et robuste.
GENRE CL.XIV.
PÉTREL. — PULMARUS.
Pkocellaria, Biiss., Ornilh. VI, p. 143 (1760).
FuLMARUS, Leach, Cat. Mam. B. Br. Mus. p. 40 (1810).
— 633 —
Rhantistes, Kaup, Naturl. Syst. p. 105 (1829).
Wagellus, Gray, ListofGen. of B. p. 78 (1840).
Car. — Bec plus court que la tête, épais, droit, renflé à la base, robuste
et très crochu; tube nasal divisé par une cloison mince; ailes allongées,
aiguës, la première rémige dépassant les autres ; queue courte, arrondie, à
14rectrices; tarses médiocres, comprimés, réticulés; doigts antérieurs réu-
nis par de larges mem])ran(.s, le médian plus long que le tarse.
Hab. — Ce genre a des représentants dans les mers arctiques et
antarctiques, et ceux-ci visitent, en hiver, les mers delà zone tempérée.
302. — Le Pétrel glacial.
FULMARUS GLACIALIS, Steph. ex Lin.
(PI. 304)
Procellaria cinerea, Briss. Ornith. VI, p. 143 (1760).
Procellaria GLACIALIS, Lin, Syst. nat. I, p. 213 (1766).
Procellarlv GROENLANDICA, Guniî., Lesnv. Beskr. Finm. Lapj). p. 273 (1767).
FuLMARUs GLACIALIS, Steph. Shaw^s Gen. Zool. XIII, 1. p. 234, pi. 27 (1825).
Rhantistes glacialis, Kaup, NaLûrl. Syst. p. 105 (1829).
Procellaria hiemalis, Brm. Isis.^ 1830, p. 995.
Procellaria minor, Kjaerb. Danm. Fugle, p. 324 (1852).
Procellaria borealis, Bi-m. Nawnan?iia, 1855, p. 296.
FuLMARUS MINOR et F. AuDUBONi, Boiiap. Consp. II, p. 187 (1857).
FULMARUS GLACIALIS RODGERSI, StejQ. Auk. 1884, p. 233.
Der Eis-Mevensturmvogel, en allemand.
The Fulmar Pétrel, en anglais.
De Noordsche Stohmvogel, en flamand.
Var. Glupisoha.
Procellaria glacialis, Pall. (nec Lin.), Zoogr. Rosso-As. II, p. 312 (1812).
ProcELLARiA PACiFiCA, Audub. (nec Gmel.), Orn. Biogr. V. p. 331 (1839).
FuLMARUS GLACIALIS var. Pacifica, Bonap. Consp. av. II, p. 187 (1857).
Priocella te.nuirostris (part.) Nelson (nec Audub.), C»'Mi>e Corwiti, [t. 112 (1883).
FuLMARUS GLACIALIS GLUPISCHA, StCJU. Auk. 1884, p. 234.
Taille: O'°40; ailes 0,34 (ces mesures sont approximatives, car le
Pétrel est de taille très variable).
Description des deux sexes adultes. — Tête et cou blancs, avec une
tache noirâtre au-devant des yeux; dessus du corps et ailes d'un cendré
bleuâtre clair, ces dernières un peu plus foncées ; rémiges d'un brun cendré;
sus-caudales, (jueue et toutes les parties inférieures blanches. Bec JMunâtre,
To.ME II. — 1894. 80
— 634 —
gris à la base, le crochet presque orange, le tube nasal d'un gris plus ou
moins sombre; iris brun ; pattes d'un gris perle lavé de rougeâtre.
Jeune ? — Dessus et côtés de la tête, cou, bas du dos et toutes les parties
inférieures d'un gris cendré clair, les côtés de la poitrine et les flancs mar-
qués de raies plus foncées ; manteau d'un cendré plus foncé, les plumes fine-
ment terminées de blanc et les plus grandes avec un croissant brunâtre mais
peu distinct et les tiges noirâtres; rémiges d'un gris noirâtre avec le bord
interne cendré et la pointe blanche : queue d'un gris cendré clair, plus foncée
à l'extrémité et terminée par un petit bord blanc. Iris brun ; bec d'un jau-
nâtre sale, plus jaune à la pointe, le tube nasal d'un gris de plomb sombre
(Naumann) .
Poussin. — Duvet long, épais et mou, dont la gorge seule est ordinairement
privée, d'un gris brunâtre clair, plus pâle à la poitrine qui est parfois blan-
che. On rencontre aussi des sujets dont le duvet est tantôt d'un blanc pur
uniforme, tantôt avec une légère teinte grisâtre sur les parties supérieures.
Iris gris clair ; bec d'un gris rougeâtre pâle, blanc à la pointe ; pattes gri-
sâtres, les membranes blanchâtres {Naumann).
Var. Glupiseha. — Très semblable au type glacialis, mais à bec plus faible,
la taille un peu moins forte et le plumage d'un gris brun uniforme (ScMégel).
Remarque. — M, Dixon a observé à Saint-Kilda, à côté des indi-
vidus à plumage clair, qui sont de beaucoup les plus communs,
quelques individus à plumage foncé. La plupart des auteurs consi-
dèrent les sujets foncés comme des jeunes, et M. Malmgren dit même
qu'au Spitzberg on rencontre tous les intermédiaires entre les deux
plumages {Journ. f. Orn. 1865, p. 209). Mais M. Dixon assure,
d'après des habitants dignes de foi de Saint-Kilda, que le premier plu-
mage ne diffère pas de celui des adultes {Ibis, 1885, p. 92). Suivant
M. Seebohm, un sujet de la collection de M. Hargitt, rapporté des îles
Féroé par M. H. C MûUer, semble en effet prouver que le jeune,
dans son premier plumage, ressemble à l'adulte.
Les auteurs américains admettent deux variétés ou races : l'une de
couleur claire, de l'Atlantique, l'autre foncée, du Pacifique. D'après
M. Stejneger, cette dernière est très commune dans le Pacifique,
tandis que la forme claire y est rare et n'offre que quelques petites
colonies isolées. M. Stejneger fait remarquer, en outre, que dans la
var. Glupiseha, tous les individus, clairs ou foncés, ont toujours le bec
de couleur pâle, assombrie seulement un peu aux bords des lamelles et
près du tube nasal, qui lui-même est de couleur claire et non gris
comme chez les individus de l'Atlantique. {Results of Ornith. explor.
in the Commander Isl. and Kam,tschatka, p. 91).
6>>3
Gomme il est reconnu qu'il y a des poussins blancs et d'autres d'un
gris brunâtre dans les deux océans, c'est-à-dire dans les deux races,
il est probable que ces oiseaux conservent leur couleur générale pri-
mitive pendant toute leur vie, d'où des sujets de couleur claire domi-
nant en Europe, et des sujets foncés particulièrement abondants dans
le nord du Pacifique. Il y a donc lieu d'admettre que ces Pétrels
nous offrent un phénomène de dimorphisme analogue à celui qu'on
observe chez certains oiseaux de proie, chez la Hulotte par exemple,
qui présente dans les deux sexes et dans tous les âges des individus
cendrés et d'autres roux.
Hab. — Le Pétrel glacial niche en grand nombre au Spitzberg,
u^^,^.,,c,^^^^.-*^^i.^^n^^^^^~>.^-.^k>.^-.^.>,^^^_«^ surtout dans la baie de Bran-
11 1 i I iMfci 1 J g ' 1 1 '1 n¥gf 1 1 Li rLrn""rPi"TT!
iJJJJjBÉffiBi' I IJ! I m fflÉrTMi^ 1! dywine sous le 80o24' {Malm-
i'%\i
'^'° gren), à la Nouvelle-Zemble, à
j Waigats, à l'île des Ours {de
f^^flini^ I j ! " Heuglin), au Groenland mais
iiM:Ï!Mîi :J£^ nas au sud du fi9° (Rp.inhn.rdfX
^i^^---P-
pas au sud du 69° {Reinhardt),
lllh lltfr|44T|f fi îfHjfli '1^ ^'^i {Feilden), à Saint-Kilda et autres
_.^^A^^j^^.^^..^±.^_.,.u=^.^^A^.^,.,^^^.i. ,j^^ rocheuses situées à l'ouest
4-li:^2^|i':q en Islande [Faber), aux îles Féroé
■ft l»l^'lg»W> 1» H». I;'
des Hébrides {Bixon et autres) et probablement sur certaines îles et
côtes voisines du cap Nord, où on le voit, en été, presque partout et
généralement en grand nombre {ColletV). En hiver, cet oiseau visite en
plus ou moins grand nombre les îles Shetland (-S^ir&j/) ainsi que les îles
et les côtes du nord de l'Ecosse, rarement les côtes de l'Angleterre et
accidentellement celles de l'Irlande, où l'on n'a encore signalé que
trois captures [Thompson). Ce n'est aussi que tout accidentellement
qu'on a capturé cet oiseau sur les côtes méridionales de la Norwège
et de la Suède {Nilsson), sur celles de l'île Ilelgoland et du nord de
l'Allemagne {Naumann), de la Hollande {Schlégel) et de la Belgique
jusqu'en Picardie et en Bretagne (c?e Séli/s-Longchamps).M. A. Lacroix
dit avoir reçu un sujet de Cette (Hérault) le 18 décembre 1S60. Sur
les côtes américaines de l'Atlantique, il est très commun des deux
côtés du détroit de Davis, et en hiver il n'est pas rare sur les côtes
depuis la Nouvelle-Ecosse jusqu'à New-York et il est très abondant
sur les bancs de Terre-Neuve (Audubon).
La var. Glupischa habite le nord du Pacitique au-delà des îles Kou-
riles et Aléoutes et particulièrement le détroit de Behring. On la ren-
contre [),ir myriades à l'est dt; l'ilt; Unalaska, et en moins ^randes
— me -
masses près des îles Segnam, Kiska, AmcMtka, Atkha et surtout
près de SémicM, la race foncée dominant partout (Turner), mais elle
est rare sur certaines côtes de l'Alaska {Nelson). M. Stejneger dit
avoir observé la race foncée aux îles du Commandeur en quantité
innombrable, et que ni dans la colonie qui niche à l'île de Behring,
ni dans celle qui occupe la partie rocheuse du nord de l'île Copper,
il ne put rencontrer un seul sujet de la race claire; M. Stejneger a
remarqué aussi que la race foncée est relativement rare du côté des
côtes américaines du Pacifique, tandis qu'elle domine sur les côtes
asiatiques, au sud jusqu'au Kamtschatka, En hiver on voit parfois cet
oiseau jusqu'au Japon (Seebohm) .
Mœurs. — Le Pétrel glacial est un oiseau pélagique, qui ne s'ap-
proche que rarement des côtes en dehors de l'époque de la repro-
duction. Il redoute cependant les grandes masses de glace qui
l'empêchent de trouver sa nourriture; aussi est-il obligé, en hiver, de
quitter les mers polaires pour se rendre un peu plus vers le sud; mais
il séjourne partout où la mer est partiellement libre, sans dépasser
vers le sud le 50° 1. N., et encore doit-il avoir été chassé par une vio-
lente tempête pour qu'on le voie dans des parages aussi méridionaux.
Par un temps de brouillard, on observe souvent de ces oiseaux repo-
sant par groupes sur des glaçons flottants; ils dorment aussi en
société sur la mer, quand elle est calme, la tête cachée dans les plu-
mes du manteau et se laissent ainsi ballotter par les vagues. Le vol du
Pétrel est léger et ressemble à celui de la Mouette blanche; tantôt
l'oiseau bat rapidement des ailes, tantôt il glisse mollement au-dessus
des flots en suivant leurs ondulations, les ailes largement déployées
et presque immobiles, et il lutte ainsi avec énergie contre les plus
fortes tempêtes ; il sait aussi plonger, mais il ne le fait pas sans néces-
sité. A terre il est maladroit, marche avec difficulté les tarses forte-
ment inclinés. Ces oiseaux sont toujours abondants dans les endroits
où l'on dépèce des baleines et des phoques, car ils sont très avides du
lard de ces animaux, mais ne touchent pas à la chair saignante; '.< ils
sont parfois si audacieux, dit HolbôU, qu'on pourrait en tuer des mil-
liers à coups de rames. > Il ne sont d'ailleurs nullement farouches et
leur confiance dégénère même en stupidité, car ils se laissent enlever
de leur nid sans chercher à fuir. Ces oiseaux sont très sociables et
vivent en troupes innombrables ; ils se montrent indifîerents envers
les autres oiseaux et ne cherchent pas aies troubler; leur naturel esi
du reste doux et patient, et ils ne paraissent guère se servir de leur
— 637 —
ormidable bec comme d'une arme offensive. Ils ont cependant un
autre moyen de défense, c'est de pouvoir faire remonter à volonté de
leur estomac, un liquide jaune, huileux et fétide qu'ils lancent avec
force de leur bec à près d'un mètre de distance. Ils exhalent aussi une
odeur pénétrante et repoussante qui se transmet même aux œufs.
La voix du Pétrel est rauque et ressemble, d'après de Heuglin, à
gaggerara-gaggag-gagga. A défaut de lard de cétacés ou de phoques,
cet oiseau se nourrit de toute espèce d'animaux marins mous et même
de méduses; Faber dit que pendant l'incubation, il vit surtout des
cochléarias qui croissent sur les écueils, et que, par ce régime, sa
chair devient assez agréable. Au moment où les jeunes commencent
à voler, les Islandais en prennent par milliers et les salent pour
l'hiver; malgré cela, le nombre des Pétrels paraît plutôt augmenter
que diminuer.
Reproduction. — Suivant Faber, c'est au milieu de mars que ces
oiseaux s'approchent des lieux choisis pour la ponte. Dans les pre-
miers jours de mai, et quelquefois déjà à la mi-avril, les femelles
pondent un œuf unique qu'elles déposent à nu sur les rochers dans
des crevasses ou sur des aspérités. L'œuf est rude, crayeux et d'un
blanc uniforme ; il mesure 85 miliim. sur 64 environ. En Islande,
selon Faber, le petit n'éclot pas avant les premiers jours de juillet, et
à la fin du mois il a atteint la moitié de sa taille; à ce moment il sait
déjà, comme les vieux, lancer un jet de liquide huileux contre celui
qui veut le prendre.
Malmgren a observé au Spitzberg dès le 18 juin des jeunes en état
de voleter, tandis que la majorité des œufs n'étaient pas encore éclos,
ce qui démontre que les femelles ne pondent pas toutes à la même
époque.
GENRE CLXV
THALASSIDROME. — fROCELLARIA.
pRocELLARi.v, Lin. Stjst. tiat. I, p. 212 (1766).
Hydrofjates, Boie, /sis, 1822, p. 562.
Thalassidroma, Vig. Zool. Journ. Il, p. 405 (1825).
OcEANODROMA, Reichb. Nat. Syst. d. Vôgel, p. IV (1852).
Cy.mochorea, E. Coues, Proc. Nat. Hist. Soc. Phil. 1864, p. 76
Thalassidkomas, Olphe-Gal. Contr. à la Faune Orn., fasc. IX, p. 1 1 (1886).
Car. — lioc plus court que la tête, comprimé et crochu, le tub' iia^al
atteiirnant la moitié de la longueur du bec; ailes très longues et aiguës, 1 1
seconde rémige la plus longue; (jueue de longueur moyenne, tantôt égale et
carrée, tantôt fourchue; tarses grêles; doigts antérieurs longs, faibles et réu-
— 638 —
nis par des membranes entières; pouce ayant l'apparence d'une verrue
armée d'un ongle.
Ce genre comprend les plus petits palmipèdes connus.
Hah. — Les océans Atlantique et Pacifique.
303. — Le Thalassidrome tempête.
PROCELLARIA PELAGICA, Lin.
(PI. 305 )
Procellaria PELAGICA, Lin. Syst. nat. l, p. 212(1766).
Hydrobates PELAGICA, Boie, Isis, 1822, p. 562.
Thalassidroma PELAGICA, Vig. Zool. Joum. II, p. 405 (1825).
Hydrobates faeroeensis et pelagicus. Brm. Isis^ 1830, p. 995.
Thalassidroma melitensis, Schembri, Orn. del Gruppo di MtîUa, p. 118 (1843).
Thalassidroma tenuirostris, minor, faeroeensis et albifasciata, Brm. Naumannia,
1855, p. 296.
Procellaria lugubris (Natt.) et melanonyx (Nils.), Bonap. Consp. av. II, pp. 196-97
(1857).
Thalassidroma wiLSONi. Heugl. (nec Bp.), Faun. Roth. Meer, n° 293 (1859).
Procellaria melitensis, Wright, Ibis, 1864, p. 154.
Thalassidroma oceanica, Lay. (nec Kuhl), Birds S. Afr. p. 359 (1867).
Der Kleine Schwalbensturmvogel, en allemand.
The Stormy Pétrel, en anglais.
Het Stor.mvogeltje, en flamand.
Taille: 0"13; ailes 0,117.
Description des deux sexes adultes. — Parties supérieures d'un brun noir
brillant; parties inférieures d'un brun de suie ; grandes couvertures des ailes
et rémiges secondaires terminées de blanchâtre, ce qui forme sur l'aile une
bande oblique de cette dernière couleur, plus ou moins distincte suivant
l'usure des plumes; sus-caudales blanches, les plus longues terminées de noir;
rémiges et queue noires, les trois rectrices latérales à base blanche; sous-
caudales comme les autres parties inférieures, mais les plus latérales et les
côtés du bas-ventre en partie blancs, c'est-à-dire que ces plumes sont blan-
ches sur leur bord supérieur et brunes sur l'inférieur. Ailes dépassant sensi-
blement la queue et celle-ci se termine carrément. Iris brun ; bec et pattes
noirs.
Jeune. — Ne diffère de l'adulte que par la teinte générale plus fuligineuse.
Poussin. — Face, gorge et côtés de la tête nus et rougeâtres ; les autres
parties garnies d'un duvet long, épais et d'un gris brunâtre, un peu plus
court et plus clair en dessous. Bec jaune à extrémité noire; pattes jaunes.
- 639 —
Hab. — Ce petit oiseau habite l'océan Atlantique et se montre par-
fois jusqu'au 69° 1. N. {Collett),
mais il est rare sur les côtes de
Norwège où on le voit quelque-
fois après des tempêtes ( Wallen-
gren) ; il visite parfois aussi
l'Islande, mais n'y niche pas
(Faber).
Le Thalassidrome tempête
niche, en Europe, sur les rochers
des îles Féroé {Graba), de différentes îles des côtes du pays de Galles
et de l'ouest de l'Ecosse, des îles du groupe de St-Kilda, des Orcades,
des îles Shetland et sur certaines îles des côtes de l'Irlande [Seebohm)\
il niche également en France sur les rochers de l'île Rougie près de
Morlaix {Degland), sur les îlots rocheux de l'Espagne, surtout sur las
Hormigas, la Isla Grossa et autres en dehors de la Mare xMenor
{Saunders), ainsi que sur certaines îles rocheuses de l'Italie [Giglioli).
En automne et en hiver, on observe plus ou moins cet oiseau sur
toutes les côtes de l'Europe occidentale, et surtout sur celles des îles
Britanniques; il est cependant très rare sur la mer Baltique, plus
fréquent sur les côtes allemandes de la mer du Nord [Xaumann) et
sur celles du Danemark {Kjaerbôlling). On le voit irrégulièrement en
Hollande [Schlégel] et en Belgique, mais parfois en grand nombre et
on l'observe alors aussi sur l'Escaut; on a même pris un sujet en 1854
aux environs de Bruxelles (1) et un autre en novembre 1878; M. de
Sélys-Longchamps dit que deux individus se sont laissé prendre à la
main après la tempête du 30 octobre 1835, l'un à Namur sur les bords
de la Meuse, l'autre au centre de l'Ardenne sur un étang. Sur les
côtes de France, d'Espagne et du Portugal, on le voit un peu partout
à la suite des tempêtes. 11 est commun à Malte et surtout sur la petite
île de Filfola, dont il no s'éloigne que quand la mer devient orageuse,
et on en prend souvent dans les ports de la Sicile {Malherbe). Ce Tha-
lassidrome se montre également près des îles Baléares {F. Fallon),
sur la mer Ionienne {Lilford), près des îles Canaries [BoUé) et Madeire
[Har courut).
On a vu plus haut que les tempêtes les chassent souvent loin dans
l'intérieur des terres'; des captures ont même été faites dans le centre
(1) cil. F. \h\ho\i, Jourii.jûr Oniith. 18ô5, p. Hd.
— 640 —
de l'Allemagne {Naumann), près de Vienne {von Pelzeln), en Moravie
[Jeitteles), en Suisse {Meisner et Schinz), -etc.
Cet oiseau paraît également visiter toutes les côtes africaines ; il
niche sur diverses îles rocheuses des côtes de l'Algérie {Loche), et de
Heuglin l'a observé dans le Bab-el-Mandeb près des côtes d'Aden.
A l'ouest de l'Afrique, il a été capturé sur les côtes de Fantee {Sharpe)
et du Damara {Andersson), à l'est, sur celles du Zambèze et de Zan-
zibar {Sperling)^ et il ne paraît pas rare au cap de Bonne-Espérance
{Layard), d'où le D^' von Horstock en a rapporté plusieurs sujets
dont trois se trouvent au Musée de Leyde. — Il paraît moins
répandu sur les côtes américaines de l'Atlantique, mais on l'observe
cependant sur les bancs de Terre-Neuve {Baird), où il niche proba-
blement.
Mœurs. — Ce Thalassidrome est le plus petit'^es palmipèdes ; il
habite toujours la pleine mer et ne visite pour ainsi dire les îlots cou-
verts de rochers qu'à l'époque de la reproduction, à moins d'y être
chassé par une violente tempête. C'est donc loin des côtes qu'on ren-
contre ces oiseaux, soit isolément, soit en troupes, que le temps soit
beau ou tempétueux. « On les voit voler, dit le prince Max de Wied,
des journées entières au-dessus des flots, tantôt s'élevant dans les airs
comme des Hirondelles, tantôt planant au milieu des vagues dont ils
suivent exactement les ondulations sans jamais toucher l'eau. Aper-
çoivent-ils à la surface de la mer quelque chose qui puisse leur servir
de nourriture, ils étendent leurs pieds délicats, étalent leurs palmures
et marchent un instant sur l'eau tout en battant des ailes et en étalant
la queue, jusqu'à ce qu'ils aient saisi l'objet convoité. On ne les voit
presque jamais nager, mais la puissance de leur vol égale au moins
celle de nos Martinets. Une volée de quatre vint tournoyer autour de
notre vaisseau et nous accompagna quelque temps, même pendant la
nuit par un clair de lune. Cette puissance dans le vol est réellement
admirable, car ils ne paraissent jamais fatigués. Quand le vent était
fort, des troupes de plus de vingt sujets se réunissaient derrière le
vaisseau dont ils suivaient en silence le sillage. Parfois, cependant,
surtout pendant la nuit, ils faisaient entendre un petit cri bref (l). »
— « Ils volent littéralement des journées entières sans se reposer,
dit A. E. Brehm, ou se reposent en prenant une autre allure, par
(i) Journ. fiii' Ornith, 1859, p. 251.
- 641 -
exemple en battant des ailes après avoir plané, ou réciproquement.
Il n'y a que les tempêtes de longue durée qui puissent les épuiser, et
cela, non point parce que la lutte contre le vent les fatigue, mais parce
que l'ouragan rendant plus difficile la recherche de la nourriture, la
faim finit par les aifaiblir. »^
Ce sont des oiseaux très inoffensifs, qui vivent en paix entre eux et
ne s'occupent pas des autres. Dès qu'ils se trouvent à l'intérieur des
terres, ils sont complètement désorientés et finissent presque toujours
par mourir de faim. Leur nourriture consiste en mollusques, annélides,
petits crustacés et peut-être aussi en très petits poissons; ils se mon-
trent aussi très avides des substances grasses et huileuses qui flottent
sur la mer. Graba dit n'avoir jamais trouvé dans les estomacs des
Thalassidromes qu'il a examinés, qu'une huile jaune sans traces de
restes d'animaux. De môme que les Pétrels, ces petits oiseaux ont la
faculté de pouvoir lancer de leur bec des jets de ce liquide jaune
et huileux dont leur estomac est rempli. Graba rend leur voix par
wihb, wihb, wih, ua, ua\ parfois ils font aussi entendre un cri res-
semblant à kekerek-i, Vi prononcé d une voix plus sonore.
Reproduction. — « Plusieurs semaines avant la ponte, dit Graba,
les couples se rendent dans des grottes et des crevasses non loin de la
mer ; ils y creusent dans la terre un trou qui a parfois un ou deux
pieds de profondeur, et complètent leur nid à l'aide de quelques brins
d'herbes déposés au fond ; c'est sur cette faible litière que la femelle
dépose à la fin de juin un œuf unique. » Cet œuf est de forme plus ou
moins ovalaire, à coquille mince d'un blanc laiteux mat avec despoints
d'un brun rougeâtre vers le gros bout, le plus souvent disposés en
couronne; il mesure environ 27 millim. sur 22. Il est probable que
tous les Thalassidromes d'une localité ne nichent pas à la même
époque, à moins qu'ils aient deux couvées par année, car, d'après
M. J. Vian, le capitaine Loche aurait recueilli des œufs de cette
espèce sur les côtes de Provence de mai à septembre.
M. Seebohm, qui a observé ces oiseaux sur une petite île de la côte
du comté de Kerry, dit n'avoir jamais eu la chance de les voir voler
pendant le jour, mais qu'à la tombée de la nuit, il put voir au clair
de lune des Thalassidromes volant comme des chauves-souris vers
leurs petits pour leur apporter leur nourriture ; autant qu'il a pu en
juger, celle-ci ne se composait que d'huile, et dans l'estomac des
jeunes il n'a jamais trouvé d'aliments solides.
Tome 11. — 1W4. 81
642 —
304. — Thalassidrome de Leach
PROCELLARIA LEUCORRHOA, Vieill,
(PI. 306)
Procellaria pelagica, Pall. (nec Lin). Zoogr. II, p. 316 (1811.)
Procellaria leucorhoa, Vieill., N. Dict. dliisl. nat., XXV, p. 442(1817.)
Procellaria leachii, Temm., Man. d'Orn. II, p. 812 ('1820.)
Hydrobates leachii, Boie, Isis, 1822, p. 562.
Procellaria bullockii, Flem. Bnt. Anim., p. 136 (1828.)
Thalassidroma bullockii, Selby, Bnt. Orn. II, p. 537 (1833.)
Thalassidroma leachii, Bonap. Comp. List. B., p. 64 (1838.)
Cymochorea LEUCORRHOA, Coues, Pr. Acad. Nat. Se. Phil.., 1864, p. 76.
Thalassidroma leucorrhoa, Degl. et Gerbe, Orn. Eur. II, p. 387 (1867.)
OcEANODROMA LEUCORRHOA, Stejn., Results oforn. Explor.Com. Isl. and Kamtschatka,
p. 97 (1885.)
Der Gabelschwanzige Schwalbensturmvogel, en allemand.
The Leach's fork-tailed Pétrel, en anglais.
Het TALE Stormvogeltje, en flamand.
Taille .-0^16; ailes 0^144,
Description des deux sexes adultes. — D'un brun foncé, un peu plus pâle en
dessous ; petites couvertures des ailes d'un brun noirâtre, les autres d'un brun
cendré, les plus grandes terminées par une teinte plus claire ; sus-caudales
blanches ; sous-caudales de la couleur des autres parties inférieures ; un peu
de blanc sur les côtés de la région anale ; rémiges et queue noires ; ailes ne
dépassant pas sensiblement la queue, cette dernière fourchue.
Cette espèce se distingue donc facilement de la précédente par sa taille
plus forte et surtout par sa queue fourchue.
Jeune. — Comme l'adulte, mais d'une couleur générale plus brune.
Poussin. — Couvert d'un long duvet d'un gris brunâtre, un peu plus pâle
en dessous.
Hab. — Ce Thalassidrome ne paraît nicher, en Europe, qu'aux îles
Britanniques, et seulement sur
les rochers du groupe de Saint-
Kilda et de l'île Rona sur la
côte occidentale de l'Ecosse
{Seebohm). De là il erre sur le
vaste océan et se montre, à la
suite des tempêtes, sur les
diverses côtes de l'Angleterre,
de l'Irlande, de l'Ecosse et des
îles voisines, plus rarement sur celles du sud de la Norwège {Collett)\
— 643 -
ce n'est que très accidentellement qu'on le voit à Helgoland [Gaetké),
dans l'Allemagne occidentale {Reichenow) où un sujet a même été pris
à Francfort-sur-Mein {Naumann), et au Danemark {Kjaerbôlling).
Ce n'est aussi qu'accidentellement qu'on l'observe en Hollande
{Schlégel) et en Belgique; dans notre pays, les ouragans l'ont jeté
plus d'une fois bien loin dans l'intérieur : un individu a été pris aux
environs de Louvain en février 1837, un autre sur l'Escaut à Anvers,
un troisième à Namur et un quatrième à Liège en 1840 [de Selys-
Longchmnps)\ en 1853, on prit vivant un oiseau de cette espèce dans
un champ de blé près de Vilvorde (C. F. Dubois), enfin, un autre sujet
fut capturé en décembre 1885 près de Bruxelles, dans le faubourg de
Saint-Gilles. Il est de passage irrégulier sur les côtes de France
{Degland) et du Portugal {Barhoza du Bocage)-, il a été assez souvent
observé sur les côtes de la Provence et quelques individus furent
trouvés morts sur la plage de Cette, après un fort orage [Jaubert et
Bay^th'). On l'a observé accidentellement sur les côtes de l'Algérie
[Loche) et de Madeire [Harcourt).
En Amérique, du côté de l'Atlantique, on rencontre cet oiseau au
sud du Groenland jusqu'au 65° [Holbôll) et depuis le Massachusets
jusqu'à la baie de Baâîn [Baird); il est commun sur les côtes du
Nouveau-Brunswick dans la baie de Fundj [Dresser) et sur les bancs
de Terre-Neuve [Max von Wied) ; suivant Baird, le musée du Smithso-
nian Institution possède des sujets capturés près de Washington en
août 1842. Du côté du Pacifique, le D'" von Schrenk l'a observé près
des îles Kouriles, BischofF le trouva en abondance près de Sitka, et
Dali le vit nicher sur des îlots rocheux près de Attu et dans les mon-
tagnes de Kyska et de Amchitka, à l'ouest des îles Aléoutes où
Nelson le trouva en abondance en mai et en octobre ; dans le groupe
des lies Comandores, il niche à l'île Copper {Stejneger).
Mœurs. — De même que son congénère, le Thalassidrome de
Leach ne se rencontre qu'exceptionnellement sur les côtes en dehors
de l'époque de la reproduction ; ses mœurs ne diffèrent d'ailleurs pas
de colles du précédent. Son vol est léger et ressemble à celui de
l'Hirondelle, mais l'oiseau vole généralement bas en suivant les
ondulations des vagues; parfois il se repose sur l'eau et nage quel-
ques instants, mais seulement quand la mer est calme; il s'approche
souvent aussi des vaisseaux, i)lane alentour et les accompagne durant
quelque temps, môme la nuit, car il est plus ou moins nocturne. C'est
un oiseau silencieux dont on entend rarement la voix ; Holbôll dit
— 644 —
cependant que « quand on approche des îles du Groenland, c'est-à-
dire des bancs de poissons, ces oiseaux entourent souvent le bateau
pendant les nuits claires de l'été, surtout par un temps calme, et font
entendre leur voix sifflante analogue aux cris des souris. » Le même
auteur dit qu'il est surtout abondant près de l'île Kock devant la baie
de Godthaab, et que cela l'étonnerait fort si ce Thalassidrome ne
nichait pas sur l'une ou l'autre des centaines d'îles qui se trouvent
dans ces parages, d'autant plus qu'on l'observe dans le détroit de
Davis depuis le commencement de mai jusqu'à la fin d'août; quand
Holbôll quitta le Groenland, en octobre, il ne vit plus un seul de ces
oiseaux dans le détroit.
La nourriture de cette espèce se compose également de petits
animaux marins, et surtout des matières grasses et huileuses qui
flottent à la surface de l'eau et qui proviennent principalement des
déchets de baleines et de phoques. Quand on prend en main un de
ces oiseaux, il dégorge également une substance huileuse d'une
odeur musquée très prononcée.
Reproduction. — Le Thalassidrome de Leach niche également par
petites colonies dans les crevasses des rochers ou dans des galeries
souterraines dont la longueur varie de deux à cinq pieds, et qu'il
creuse lui-même dans un terrain meuble; ces galeries ont parfois
deux entrées. Le nid, placé au fond de la galerie, est formé d'herbes
sèches, d'un peu de mousse ou de lichen ; on trouve ordinairement
plusieurs nids non loin les uns des autres. La ponte a lieu en juin et
juillet et ne se compose que d'un seul oeuf, qui ne diffère de celui du
Thalassidrome tempête que par les dimensions ; sa coquille est très
fragile, calcareuse et sans luisant ; il mesure environ 44 millim.
sur 33.
Les deux sexes couvent alternativement, mais il paraît qu'on
trouve plus souvent le mâle sur le nid que la femelle.
GENRE CLXVI
PÏÏPFIN. — PUFFINUS.
PuFFiNUS, Briss. Ornith. VI, p. 131 (1760).
Procellaria, Briinn. Orn. bor. p. 29 (1764).
Nectris, Keys. et Blas. Wirbelth. Eur. p. XCIV (1840).
Cymotomus, Macg. Man. Or. II, p. 13 (1842).
Car. — Bec de la longueur de la tête, grêle, droit, déprimé à la base,
comprimé à son extrémité et crochu ; mandibule inférieure un peu emboîtée
— 645 —
sous les bords de la supérieure ; narines basales, ovales, s'ouvrant dans deux
tubes séparés par une cloison; ailes longues, aiguës, dépassaut la queue ;
cette dernière courte, composée de douze rectrices ; tarses très comprimés,
de la longueur du doigt médian; pouce rudiinentaire, mais pourvu d'un
ongle.
Hab. — Les océans Atlantique et Pacifique des hémisphères
boréal et austral.
305. — Le Puffin des Anglais.
PUFFINUS ANGLORUM, Boie ex Tem.
(PI. 307 )
Procellaria. PUFFINUS, Bi'unn. Om. bor. p. 29 (1764); Lin. 5". N. I, p. 213 (1766).
Procellaria puphinus, Tunst. Orn. Brit. p. 4 (1771).
Procellaria ANGLORUM, Tem. Man. d^orn. II, p. 807 (1820).
PuFFiNUS ANGLORUM, Roie, Isis^ 1822, p. 562.
PuFFiNUS ARCTicus, Faber, Prodr. Isl. Orn. p. 56 (1822) .
Procellaria yelkouan, Acerbi, Bihl. Ital. CXL p. 294 (1827).
Thalassidroma ANGLORUM, Swaius. Classif. Birds, II, p. 374 (1837).
Nectris PUFFINUS, Keys. et Blas. Wirhelth. Eur. p. XCIV, (1840).
Cymotomus ANGLORUM, Macg. Man. Orn II, p. 13 (1842).
PuFFiNus BAROLii (Boiiel.) , Bonap. Compt.-rend. XLII, p. 769 (1856).
PuFFiNUS YELKOUAN, Bonap. Consp. av II, p. 205(1857).
PuFFUNUs YELCUANUS, Coucs, Proc. Accid. Philcul. 1864, p. 137.
Nectris ANGLORUM, ^Glog.) et Barolii, Rey, Sijno7iymik, p. 150 (1872).
Der Nordische Tauchersturmvogel, en allemand.
The Manx Shearwater, en anglais.
De Noordsche Pijlstormvogel, en flamand.
Taille : 0,27 à 0,38; tarses 0,043 à 0,052 (d'après M. J. Vian);
ailes 0,215 à 0,235.
Description des deux sexes après la mue d'automne. — Cette mue ne paraît
tenuinée que vers la tin de janvier. Parties supérieures, ailes et queue d'an
brun noir lustré; parties inférieures à partir du menton d'un blanc pur, les
côtés de la région anale et les barbes externes des sous-caudalcs latérales
d'un brun noirâtre. Be3 d'un noir verdâtre; tarses couleur chair, leur face
postérieure et le doigt externe bruns, membranes d'un blanc rosâtre veinées
de brun; iris brun foncé.
M. J. Vian, dans une Causerie omiiJiologique fort intéressante (1), nous
apprend, qu'à l'époque des amours, les deux suxes portent sur l'occiput, à la
nuque, et surtout à l'arrière du cou, des filets blancs terminés on pinceau;
ces tiges très déliées, très fragiles, poussent entre les plumes et les excèdent
de quelques millimètres, mais ne doivent durer que fort peu de temps. Le
même auteur a constaté que les sous-caudales latérales sont très variables :
(1) Bulletin de la Soc. tool. de France, III (1878), p. 51
- 646 —
il a vu des sujets qui présentaient un assortiment de plumes blanches, de
plumes brunes ou noirâtres, de blanches mouchetées de brun, de plumes
demi-blanches, demi-noires, et enfin de plumes grises, avec cette distinction
toutefois que les sous-caudales suivent généralement la teinte du manteau.
Plumage d'été. — Bien que la mue soit simple chez ce Pufiin, les parties
noirâtres se décolorent cependant à mesure que l'été avance, et finissent par
devenir d'un brun unicolore tirant plus ou moins au roux. C'est le plumage
que beaucoup d'auteurs décrivent pour le jeune. Il est probable que dans le
Nord la décoloration est moins rapide et moins accentuée.
Jeune. — Ressemble à l'adulte, mais d'une teinte plus brune, les sous-cau-
dales et les flancs lavés de brun.
Poussin. — Entièrement vêtu d'un duvet brun cendré, formant sur la tête
une toque saillante, dont les tiges recouvrent en tombant le front et les yeux ;
ce duvet, un peu plus pâle aux parties inférieures, y est divisé longitudina-
lement de la gorge à la région anale par une bande blanche, plus large et
plus accentuée sur l'abdomen. Bec noirâtre; pieds jaune orange avec mar-
brures noires sur la face postérieure des tarses et sur les doigts externe et
médian (/. Vian).
Remarque. — Dans la même Causerie dont il est parlé plus haut,
M. Jules Vian considère les Pufflnus anglorum, yelkouan, haroli et
obscurus comme appartenant à une seule et même espèce. Je suis
d'accord avec mon savant confrère en ce qui concerne les trois pre-
miers ; quant au P. obscurus des mers tropicales, il forme une espèce
distincte. Ce dernier n'a été pris que deux fois en Europe et seule-
ment aux îles Britanniques (1). Quant au P. assimilis des mers du
Sud, il doit être rapporté au P. obscurus dont il ne diffère que par
une taille plus petite.
Hab. — Le Puffin des Anglais ou Manks est fort répandu aux îles
Britanniques, où il niche sur les
rochers d'un grand nombre d'îles
des côtes occidentales de l'Ecosse
et de l'Angleterre, j compris le
groupe de St-Kilda, les îles Or-
cades, Shetland et Scilly ; en
automne et en hiver, ces oiseaux
s'éloignent en partie des lieux
où ils sont nés, et on les voit
alors en plus ou moins grand nombre sur toutes les côtes britanniques
(1) C'est par erreur que certains auteurs ont dit que le P. obscurus avait été pris accidentelle-
ment dans la Méditerranée; les captures sur lesquelles reposaient leurs indications étaient tout
simplement des Puffins manks de petite taille et non des P. obscurus.
- 647 —
{Seebohm). Cet oiseau niche également en Islande [Faber), aux îles
Féroé [Gro.ba) et visite quelquefois en hiver les côtes méridionales du
Groenland {Newton) et du S.-O. de la Norwège {Collett) ; il n'a pas
été observé sur la mer Baltique, mais après les tempêtes on le voit
parfois sur les côtes occidentajes du Danemark {Kjaerbôlling), à Hel-
goland et sur les côtes N.-O. de l'Allemagne {Naumann), sur celles de
la Hollande [Schlégel) et de la Belgique, mais il est toujours rare pour
notre faune et il en est de même pour la France {Degland et Gerbe).
Il est moins rare sur les côtes du Portugal {Barboza du Bocage) et il
est même abondant et niche sur plusieurs îlots rocheux de l'Espagne
{Saunders), et se montre communément en automne dans le détroit
de Gibraltar {Irby). Cet oiseau est sédentaire sur la Méditerranée où
il est plus ou moins abondant suivant les localités et surtout près des
îles et des côtes rocheuses, mais il est rare sur TAdriatique [Giglioli);
à l'Est il s'étend dans l'Archipel et sur les côtes de la Grèce {Linder-
TYiayer), il est commun sur le Bosphore [Alléon) et à l'entrée de la mer
Noire [Taylor).
On observe également ce Puffin sur les côtes de la Palestine {Tris-
tram), de l'Asie Mineure, de la Syrie {de Heuglin), de l'Egypte (Dres-
ser), de l'Algérie {Loche), du Maroc (Favier), des îles Madère,
Canaries {Berthelot) et Açores {Godman). En Amérique il habite, du
côté de l'Atlantique, depuis le Labrador et la Terre-Neuve jusqu'au
40<> 1. N. {auct. amer.), et visite parfois les îles Bermudes à la suite
de tempêtes {Bar tram).
Mœurs. — Le Puffin manks ou des Anglais n'est pas un vrai migra-
teur, mais en automne et en hiver il erre au loin sur le vaste océan et
on le voit alors près des côtes de l'Europe occidentale et méridionale
où il ne niche pas. C'est, comme les procellariens précédents, un
oiseau pélagique qui ne vient à terre qu'à l'époque de la reproduction, à
moins qu'une violente tempête ne le chasse au delà des flots. Il est
plus nocturne que diurne, surtout en été, et vit en troupes plus ou
moins nombreuses, car il est sociable, de mœurs paisibles et ne
s'occupe guère des autres oiseaux qui vivent dans son voisinage. A
l'époque de la reproduction, il se tient caché pendant le jour dans des
creux naturels ou dans des galeries qu'il creuse lui-même à l'aide de
son bec et de ses ongles dans les ilancs des montagnes et des rochers
escarpés, où il est souvent fort difficile de le dénicher.
Ce Puffin nage et plonge à la perfection, surtout quand le temps est
calme, mais pendant les tempêtes il déploie davantage la puissance de
son vol. Par un temps serein il nage beaucoup, puis, relevant tout à
coup les ailes, il disparaît dans les flots, nageant entre deux eaux avec
une grande dextérité, en s'aidant à la fois des pieds et des ailes. « Je
ne connais aucun oiseau de mer, dit Brehm, qui vole avec une pareille
impétuosité. On le voit souvent nager tranquillement, puis plonger
dans les flots ; souvent aussi, en volant sans planer, il se lance sur les
vagues et les traverse. Il se précipite avec une incroyable rapidité
de battements d'ailes, que je comparerais volontiers à des coups de
marteau secs et répétés. Il tourne et se meut non seulement de tous
les côtés, mais aussi de haut en bas, de telle façon que tantôt on aper-
çoit son dos de couleur sombre, tantôt son ventre blanc. Il s'élance
contre les vagues, gravit leurs cimes et glisse dans leurs sinuosités,
puis, s'élevant tout à coup à trois ou quatre mètres de hauteur, il fond
en droite ligne sur les flots, disparaît au milieu d'eux, nage comme
les Pingouins, fait mouvoir ailes et jambes en même temps, franchit
une certaine distance, puis s'élance de nouveau dans les airs, souvent
pour respirer seulement, et disparaît encore. Si les autres oiseaux de
mer ont un vol plus gracieux, aucun d'eux ne se meut avec autant de
variété et de rapidité que le Puffin des Anglais. Cette diversité de
mouvements frappe d'autant plus qu'on rencontre le plus souvent
cette espèce en grand nombre, et que les individus qui forment une
bande agissent à la fois, sans cependant exécuter les mêmes mouve-
ments; ainsi, tandis que les uns disparaissent dans les vagues, les
autres s'élancent d'un peu plus loin, passent au-dessus de ceux qui
plongent et disparaissent à leur tour, alors que les premiers se mon-
trent de nouveau. Ces changements continuels captivent l'observateur;
pour moi ces jeux des Puffins m'ont réellement enthousiasmé. Je ferai
encore remarquer que, malgré toutes ces évolutions, les Puffins fran-
chissent des étendues immenses, car ils ne s'arrêtent jamais et pour-
suivent toujours leur vol, bien qu'ils décrivent parfois de grandes
courbes qui les ramènent à leur point de départ. »
La nourriture de cet oiseau consiste en petits poissons, céphalo-
podes et autres mollusques marins. Son cri peut se rendre, d'après
Donald, par kitty-coo-roo, kitty-coo-roo.
Comme la plupart des Procellariens, le Puffin se montre peii
farouche, mais son infatigable activité empêche toute poursuite
sérieuse ; quand on se trouve au milieu d'une de leurs bandes, on peut
cependant en abattre beaucoup les uns après les autres, mais il est
fort difficile de les tirer lorsqu'ils volent. Il paraît cependant que
— 049 -
cette espèce est si abondante à St-Kilda, que pendant la bonne
saison on peut en tuer plusieurs centaines en une seule nuit.
Reproduction. — Le Puffin manks niche au fond d'une galerie qui
a de trois à cinq pieds de pr^ofondeur, et qu'il creuse horizontalement
dans la terre sur les flancs des montagnes et des rochers battus par
la mer, et généralement un peu au-dessous des plates-formes garnies
d'herbes. Sur les mêmes montagnes nichent souvent des quantités
innombrables d'autres oiseaux marins. La galerie du Puffin ressemble
plus à un terrier de lapin qu'à un nid d'oiseau ; le fond de ce couloir
est un peu élargi, et c'est là que la femelle dépose un œuf unique sur
une légère litière de brins d'herbes. Cet œuf est arrondi, d'un blanc
uniforme et mesure environ 59 millim. sur 40.
La ponte a lieu depuis le mois de mai jusqu'en juin, et les deux
sexes se partagent les soins de l'incubation. Les jeunes sont excessi-
vement gras et sont fort recherchés par les habitants de certaines îles.
CINQUIÈME SOUS-ORDRE
LES PYGOPODESO)
Car. — Bec de forme variable : tantôt allongé et plus ou moins
conique, tantôt élevé et très comprimé latéralement ; ailes courtes,
étroites et pointues ; jambes placées très à l'arrière du corps ; tarses
courts, comprimés latéralement; doigts antérieurs réunis pardes mem-
branes parfois lobées, le pouce plus ou moins développé ou absent;
queue courte ou nulle. — Corps de forme allongé, robuste; cou de
longueur moyenne avec la tête plus ou moins grande ; plumage épais,
abondant et justré.
Mœurs. — Ce sont de vrais plongeurs, qui vivent sur l'océan ou
sur les eaux douces. Leur mode habituel de locomotion est la nata-
tion, aussi passent-ils la plus grande partie de leur vie à nager et à
plonger ; c'est également dans l'eau qu'ils cherchent leur nourriture.
Beaucoup d'entre eux volent bien, quoique leurs ailes paraissent
quelquefois trop faibles pour porter le poids du corps, aussi sont-ils
obligés de donner des coups d'ailes répétés et fatigants.
Les Pygopodes marchent en général avec difficulté en tenant le
corps assez droit. La plupart sont sociables, d'un naturel paciîique
(i) Nous avons oublié de mentionner à la p. 626 le 4" sous-ordre, celui des Tuoi-
naires, qui a pour caractères ceux de la famille des Procellaridés, la seule du groupe.
Tome II. — IWH. 82
— 650 —
et stupide ; ce sont d'ailleurs les oiseaux qui occupent le dernier rang
de la classe, leur organisation générale étant la moins parfaite.
On divise ce sous-ordre en trois familles : les Alcidés, les Colym-
bidês et les Podicépidés .
FAMILLE DES ALCIDES.
Car. — Bec de forme assez variable, comprimé, la mandibule
inférieure emplumée jusque près delà rencontre de ses branches; ailes
étroites, aiguës; queue courte, formée de douze rectrices ; tarses com-
primés ; doigt externe un peu plus court que le médian ; pouce nul.
Ces oiseaux ont la tête volumineuse, le cou épais et court, le corps
robuste.
Hab. — Les Alcidés habitent la zone arctiqué^t se montrent en
hiver dans les régions tempérées.
Mœurs. — Ce sont des oiseaux marins qui vivent continuellement
sur l'eau et ne séjournent sur la terre ferme que pour la reproduc-
tion. Ils nagent et plongent avec la plus grande facilité, volent assez
bien, et marchent le corps droit et en s'appuyant sur les tarses. Ils
se nourrissent de petits poissons, de crustacés et de mollusques. Ils
nichent sur des rochers et ne pondent généralerùent qu'un seul œuf,
mais très volumineux relativement à l'oiseau.
OKNRE CLXVII.
GUILLEMOT. — URIA.
Uria, Briss, Ornith. VI, p. 70 (1760).
CoLYMBUs, part. Lin. S. N. I, p. 220 (1766).
Cepphus, Pall. Spicil. Zool. V, p. 33 (1769).
Mergus, Tunst. Orn. Brit. p. 3 (1771).
Grylle, Steph. Gen. Zool. XII, 2. p. 250 (1824).
LoMviA, Coues,Pr. Ac. nat.sc. PhiL, 1868, p. 75.
Car. — Bec plus court que la tête, droit, un peu recourbé vers la pointe,
comprimé, convexe en dessus, anguleux en dessous, emplumé à la base ;
narines étroites, en grande partie fermées par une membrane emplumée ;
ailes de longueur moyenne, aiguës; queue très courte, arrondie; tarses
courts, assez grêles, réticulés ; ongles recourbés, pointus ; pouce nul.
Hab. — Comme la famille.
— 651 -
306. — Le Guillemot gryllé.
URIA GRYLLE, Lath. ex Lin.
(PI. 308).
Uria minor nigra, U. minor striâta, Briss. Ornith., VI. pp. 76-78 (1760).
CoLYMBUS GRYLLE, Lin. Syst. nat. I. p. 220 (1766).
Cepphus lacteolus, Pall. Spicil. Zool. V, p. 33 (1769).
CoLYMBUS GRYLLUS, 0. F. Miill. Zool. Dan. Prodr. p. 18 (1776)
CoLYMBUS LACTEOLUS, Gmel. Syst. nat. I, p. 583 (1788).
Uria grylle et lacteola, Lath. Ind. Orn. II, p. 798 (1790).
Uria nivea, Bonnat. Encycl. meth. Orn. p. 37 (1790).
Uria leucoptera, Vieill. Nouv. Dict. XIV, p. 35 (1817).
Uria scapui.aris et Grylle scapularis, Steph. Shaws Gen. Zool. XII. 2, pp. 250,
252(1824).
Uria arctica et meisneri, C. L. Breh. Lehrb. eur. Vog. II, p. 923(1824).
Cephus grylle, arcticus, meisneri, faeroeensis, cl. Breh. Isis, 1830, p. 1001.
Uria groenlandica, Gray, List. Gen. B. p. 98 (1840).
Grylle groenlandicus, Gray, Liât Gen. B. p. 77 (1841).
Grylle COLOMBA, Bonap. (nec Pall.) Ucc. Eur. p. 82(1842).
Uria faeroeensis, Brm. Naumannia, 1855, p. 300.
Die gryll-Lumme, en allemand.
The BLACK Guillemot, en anglais.
Ds ZWARTE Zeekoet, en flamand.
Var. Mandtii.
Uria MANDTii, Licht. Verz. Doubletten, p. 88 (1823).
Uria glacialis, Brm. Lehrb eur. Vog. II, p. 1008 (1824).
Cephus glacialis, Brm. Vôg. Deutschl. p. 991 (1831).
Grylle mandtii, Bonap. Ucc. Eur. p. 82 (1842).
Uria grylle mandtii, Schl. Rev. crit. p. G VII (1844).
Uria grylle var. Mandtii, A. Dubois, Contip. av. Eur. p. 34(1871).
Cepphus mandtii, Turn. Contrib. Nat. Hist. of Alaska, p. 121 (1886).
Taille : 0'^32; ailes 0,19. — La femelle est un peu plus petite.
Description des deux sexe."; en été. — D'au noir u informe avec les grandes
et les moyennes couvertures des ailes d'un blanc pur, mais noirâtres à leur
base ; bord interne des rémiges primaires blanc à la base ; couvertures du
dessous des ailes et axillaires d'un blanc pur. Bec noir, rouge à la base ; iris
brun; pattes d'un rouge vermillon.
En hiver. — Tête et cou d'un blanc varié de noirâtre ; joues ot gorge
blanches ; une tache noirâtre derrière les oreilles ; dos, scapulaires et couver-
tures supérieures delà queue noirs, mais chaciue plume terminée de blanc;
croupion et parties inlV'ricurcs d'un blanc a.ssez pur; ailes comme en été.
Jeune. — Front, lorums et dessus de la tète brun noir; joues et gorge d'un
652 —
blanc grisâtre ; nuque brun noirâtre varié de blanc ; dos noirâtre ; scapu-
laires, croupion et sus-caudales également noirs mais plus ou moins barrés
de blanc ; ailes noires, les couvertures blanches bordées de noir ; parties
inférieures blanches, mais la poitrine et les flancs ont leurs plumes plus ou
moins bordées de noir.
Poussin. — Duvet d'un brun foncé, plus clair aux parties inférieures.
Var. Mandtii. — Diffère du type européen par un bec plus grêle, et les
couvertures blanches des ailes n'ont pas de base noire.
Hab. — Le Guillemot gryllé est sédentaire et niche sur les côtes de
l'Islande [Faber), des îles Féroé
(Graba), de l'Ecosse, du nord de
l'Irlande, des îles Hébrides,
Orcades et Shetland {Seebohm),
du Danemark {Collin), de la
Norwège jusqu'au cap Nord
(Collett), de la Suède et des îles
suédoises de la Baltique {Nilson),
ainsi que sur les côtes finlan-
daises de la mer Blanche (Palmén). En hiver on le voit accidentelle-
ment sur les côtes russes de la Baltique {Bûchner), assez régulière-
ment sur celles de l'Allemagne et d'Helgoland, mais rarement sur
les côtes allemandes de la mer du Nord (Naumann); en hiver on le voit
aussi assez souvent sur les côtes britanniques où il ne niche pas, mais
il ne se montre qu'accidentellement sur celles de Hollande, de la
Belgique et du nord de la France où il a été observé sur les côtes de
Normandie {Nou7''y), de la Seine-Inférieure [Lemetteil) et du Calvados
[Le Sauvage). — En Amérique cette espèce niche au sud du Groen-
land [Holbôll), à la Terre-Neuve {Seebohm) et se montre en hiver
jusqu'à la Nouvelle-Jersej [Baird).
La var, Mandtii est reléguée dans la zone polaire : elle habite le
Spitzberg, Waigats, la Nouvelle-Zemble {de Heuglin) et îles voisines,
et probablement les îles et les côtes septentrionales de la Russie et de
la Sibérie; elle a été observée à l'île Herald et sur la terre de Wran-
gel, et elle niche en grand nombre à l'île Bennett [Seebohm). En
Amérique on la rencontre sur les côtes de l'Alaska dans le détroit de
Behring (Nelson), et dans toute la région polaire jusqu'au nord du
Groenland, la baie d'Hudson et le Labrador {Baird, Ridgioay, etc.).
Il est à remarquer que, par suite de la grande analogie des deux
formes et de la confusion qui en est résultée, il est assez difficile d'in-
— 653 —
diquer exactement les limites géographiques du type et de sa variété.
Ce qui est certain, c'est qu'en Amérique, du côté de l'Atlantique, on
observe ce Guillemot entre le 44" et le 80" 1. N., et que la var.
Mandtii occupe la zone la plus septentrionale. M. de Heuglin dit que
le D^ Finsch lui a affirmé que les deux races vivent au Groenland et
souvent dans la même localité.
Mœurs. — Ce Guillemot est un oiseau plus ou moins sédentaire; en
automne cependant, beaucoup voyagent au loin en longeant les terres
ou en volant d'une île à l'autre, sans trop s'éloigner des côtes, à
moins d'être chassés par une tempête, ce qui arrive assez souvent. Il
airae une mer calme et y passe une grande partie de sa vie ; il dort
souvent sur l'eau, même pendant la nuit, mais le plus ordinairement
il cherche le repos sur un rocher. Quand les eaux sont trop agitées,
il cherche également un refuge dans les falaises ou sur des glaçons
flottants et y reste souvent des heures entières. Dans la zone gla-
ciale, il vit en grandes troupes, mais jamais en bandes aussi consi-
dérables que le Guillemot troïle; sous nos climats, on ne voit jamais
ces oiseaux que par couples ou par groupes de cinq ou six sujets.
Cet oiseau nage avec aisance, le corps peu enfoncé, et quand il
veut aller vite il élève fréquemment ses pieds au-dessus de l'eau ;
pour plonger, il donne un vigoureux coup des deux pieds, fait la cul-
bute avec rapidité et sans bruit, puis il étend les ailes et nage rapide-
ment entre deux eaux en ramant à la fois des pieds et des ailes; il ne
peut cependant rester plus de deux minutes sous l'eau. Son vol est
rapide, soutenu et plus léger que celui des autres Guillemets ; l'oiseau
volegénéralementdroitdevantlui,avec de rapides battements d'ailes et
celles-ci sont largement déployées. Il lui faut un petit élan pour s'éle-
ver de l'eau, mais il ne vole pas volontiers haut, quoiqu'il sache fort
bien s'élever jusqu'au sommet des montagnes. Au repos il appuie sur
les tarses, tient le corps droit et marche également ainsi, mais avec
difficulté. Dans sa manière d'agir, ce Guillemot se montre doux et
bienveillant, aussi bien avec ses semblables qu'avec les autres
oiseaux de mer et vit volontiers dans leur société ; dans les lieux de
la reproduction, on le voit souvent au milieu de Pingouins, de Maca-
reux, de Mouettes et autres oiseaux qui nichent en colonies sur les
rochers. A l'approche de l'homme, la plupart de ces oiseaux s'envo-
lent ou se jettent à la mer, mais le Guillemot gryllé se laisse appro-
cher et on peut souvent le tuer à coups de bâton ou l'enlever de son
nid : on dirait réellement (ju'il oublie t{u'il a des ailes.
— 654 —
La nourriture de cet oiseau se compose de petits poissons, de crus-
tacés, de mollusques, d'arénicoles, de méduses et autres animaux
mous ; d'après de Heuglin, on trouve aussi du gravier dans son esto-
mac. Graba compare son cri à celui de la souris et le rend par un iihp
siflBlant
Reproduction. — Le Guillemot gryllé niche dans des crevasses ou
des fissures de rochers et pond un ou deux œufs, quelquefois trois,
qu'il dépose plus ou moins profondément sur des rocailles ou sur la
terre nue, sans la moindre litière. Il parait cependant qu'à l'occasion
il profite aussi de trous creusés dans des montagnes sablonneuses;
Faber dit, en effet, avoir observé sur la côte septentrionale de la
petite île de Beirœ, dans le Cattegat, une dizaine de couples de ces
Guillemets nichant dans des trous de falaises. Ces trous avaient été
creusés par des Hirondelles de rivage, très abondactes à cet endroit,
et avaient ensuite été élargis et occupés par des Etourneaux ; les
Guillemets les avaient enfin appropriés à leur propre usage (1).
Suivant de Heuglin, la forme type niche en Norwège à une faible
hauteur au-dessus de la mer, mais toujours assez haut pour que la
couvée soit à l'abri des flots ; au Spitzberg, au contraire, la var.
Mandtii niche toujours entre 400 et 1800 pieds au-dessus du niveau de
la mer, mais à la Nouvelle-Zemble les nids ne sont pas établis à une
si grande hauteur, mais toujours plus haut qu'en Norwège (2). En
Ecosse, la ponte a rarement lieu avant la fin de mai ou la première
semaine de juin, mais elle a lieu un peu plus tard dans l'extrême Nord.
Les œufs sont de forme ovoïde, mats, à pores visibles, d'un blanc
verdâtre ou d'un blanc jaunâtre et présentent des taches générale-
ment petites, arrondies et uniformément distribuées, ou plus grandes,
irrégulières et agglomérées vers le gros bout; les taches profondes sont
d'un gris vineux et brunes, les superficielles noires ; ces œufs mesurent
environ 58 millim. sur 39.
Les deux époux se témoignent beaucoup d'affection et se becquètent
comme de vrais pigeons ; ce sont d'ailleurs des oiseaux d'une dou-
ceur remarquable qui méritent bien leur nom vulgaire de Colombe de
mer. Les deux sexes couvent avec ardeur et à tour de rôle pendant
vingt-quatre jours. Ils veillent ensuite sur leurs poussins et les
nourrissent jusqu'à ce qu'ils sachent voler ; alors ils les conduisent sur
l'eau et leur apprennent à plonger et à chercher leur nourriture.
(1) Faber, Isis, 1829, p. 719.
(2) von Heuglin, Reùen nach dem Nordpolarmeer, III, p. 162 (1874).
— 655 -
307. — Le Guillemot Troïle.
URIA TROILE, Lath. ex Lin.
(Pis. 30.9 et 309b.)
Uria lomvia, ringvia et alga, Çriinn. Orn. bor. pp. 27, 28 (1764).
CoLYMBUS TROILE, Lin. Syst. nat. I, p. 220 (1766).
Mergus LOMVIA et M. LOMVIA MiNOR, Tunst. Om. Brit. p. 3 (1771).
CoLYMBUS MINOR, Gmel. Syst. nat. I, p. 585 (1788). •
Uria troïle, Lath. Ind. Orn. Il, p. 796 (1790).
Uria troïle leucophthalmos, Fab. Prodr. Isl. Orn. p. 42 (1822).
Uria lacrimans, La Pyl. m. Choris, Yoy. pitt. autour du monde., pi. 23 (1822).
Uria leucophthalmos, Fab. Isis, 1824, p. 126.
Uria minor, Steph. Shaws Gen. Zool. XII, 2 p. 246 (1824).
Uria leucopsis et norwegica, Brm. /sis, 1830, p. 1001.
Uria intermedia, Nilss. Skand. Faun. II, p. 549 (1858).
Uria leucotis, C. F. Dub. PI. col. Ois. Belg. III, p. 262 (1860).
Catarractes troïle et ringvia, Bryant, Proc. Bost. Soc. N. H. 1861, pp. 136, 139.
Aloa LOMVIA, Schleg. Mus. P.-B. Urinatores, p. 16 (1867).
Lomvia troïle et ringvia, Coues, Proc. Acad. N. Se. Phil. 1868, p. 75.
Die Trottellumme, en allemand.
The common Guillemot, en anglais.
De Zeeroet, en flamand .
Var. Californica.
Uria brunnichii, Heerm. (uec Sabine), Pacific R. R. Rep. X. p. 75 (1859).
Catarractes californicus, Bryant, Proc. Bost. Soc. N. H. 1861, p. 11.
Lomvia californica, Coues, Proc. Ac. N. Se. Phil. 1862, p. 79.
Lomvia troïle var. Californica, Coues, Key N. Am. B. p. 346 (1872).
Uria troïle californica, Baird, Brew. et Ridgw. Water-Birds N. Amer. II, p. 483
(1884).
Taille : O'^SS; ailes 0""! 9.
Description des deux sexes en été. — Tête, cou, dos, ailes et queue d'un brun
noirâtre velouté; un trait noir derrière l'œil descendant sur les côtés du cou;
rémiges secondaires terminées de blanc ; parties inférieures d'un blanc pur,
avec des taches allongées noirâtres sur les flancs et les côtés des jambes.
Bec noir; iris brun ; pattes d'un brun olivâtre. — On rencontre souvent des
sujets avec un cercle blanc autour des yeux qui se continue eu arrière avec
une ligne de môme couleur longeant la région auriculaire : c'est la forme
ringvia. (Voyez la remarque ci-dessous).
En hiver. — Parties supérieures plus noires; occiput tacheté de blanc;
côtés de la tête, gorge, devant et côtés de cou d'un blanc pur; une bande
noire descend de l'œil et se dirige en arrière en se rétrécissant et en formant
une courbe ; le reste comme en été.
Jeune. — Ressemble à l'adulte en hiver, mais les parties supérieures sont
— 656 —
nuancées de brun cendré ; bas du cou et poitrine de couleur cendrée ; bec plus
court et d'une teinte plus claire.
Poussin. — Tête, gorge, parties supérieures et flancs d'un brun cendré;
duvet de la tête et du cou entremêlé de soies blanches ; poitrine et ventre
blancs.
Var. CaUfornim. — Ne diffère du type européen que par un bec un peu
plus allongé.
Remarque. — Les auteurs sont peu d'accord au sujet des formes voi-
sines de Vu. troile ; les uns admettent quatre espèces, d'autres deux et
enfin M. Seebobm les réunit toutes en une seule espèce, qu'il divise
en quatre races. Je n'ai pas sous les yeux un nombre suffisant d'indi-
vidus de ces différentes formes pour me faire une opinion, mais je
pense qu'il y a lieu d'admettre deux espèces : 1° YU. troile avec sa
var. Californica ; 2» XU. brunnichii, Sab. auquel il faut rapporter à
titre de variété VU. arra, Pall. Ces derniers ont le bec plus court et
plus robuste.
Quant à VU. ringvia, ce n'est qu'une variation individuelle ou
plutôt un cas de dimorpbisme. Il s'accouple très souvent avec le type
Itroile, et se rencontre partout où habite ce dernier, mais il est plus
rare. Il serait intéressant de savoir si la raie blanche, qui caractérise
a fo rme ringvia, ne s'observe jamais chez la var. Californica..
Hab. — Le Guillemot troïle est propre au nord de l'Atlantique : il
^ssœp niche en Islande {Faber), aux
îles Féroé {Graba), sur différents
points des côtes britanniques, y
compris les îles Hébrides, Orca-
des, Shetland et Saint-Kilda(/See-
bohm), ainsi que sur les côtes de
Norwège jusqu'au cap Nord et
iiiiitiii'lt' ^iiilWltt ^^^ cotes orientales de la Laponie
et hiverne dans les fjords du Sud
{Collett). Dans l'arrière-saison, il se montre quelquefois sur les côtes
de la Suède (Nilsson) et de la Finlande {TAlljeborg), mais pas dans le
golfe de Finlande; il est commun en hiver sur les côtes du Dane-
mark, où il niche même dans certaines localités {Collin), ainsi qu'à
l'île Helgoland [Reichenow) ; il est rare sur les côtes allemandes de la
Baltique, mais commun sur celles de la mer du Nord [Naumann), de
la Hollande {Schlégel) et de la Belgique, où les tempêtes le chassent
parfois jusqu'au delà d'Anvers. Cet oiseau est également commun, en
— 657 —
hiver, sur les côtes du nord de la France, et il se reproduit même en
grand nombre aux Aiguilles d'Etretat, à 18 kilomètres de Fécamp,
dans les falaises de Jaubourg, à Aurigny, quelquefois dans le Bou-
lonais, sur toutes les côtes et les îles de la Bretagne {Degland et
Gerbe) et visite accidentellement les côtes du midi de la France
[Lacroix), de l'Espagne [Saunders),à^ ^OYi\x^2i\{Barboza du Bocage),
et le détroit de Gibraltar (Irhy). (1).
En Amérique, du côté de l'Atlantique, le Guillemot troïle niche
dans la baie de Fundy, à la Nouvelle-Ecosse, au Labrador et au
Groenland au sud du 64° [Coues, Seebohm), et se montre probable-
ment en hiver jusqu'au 40°. — La var. Californica est propre au
Pacifique, sans dépasser au Nord les îles Pribylov ; elle est peu com-
mune à l'île de Behring {Stejneger), mais abondante aux îles Aléoutes,
Sitka, Kadiak et aux îles Comandores (Nelson), et se montre en hiver
jusqu'à San Francisco en Californie [Seebohm).
Mœurs. — Le Guillemot troïle émigré en bandes nombreuses des
contrées du Nord à mesure que le froid devient plus vif, mais il est
sédentaire près des côtes du nord de la France, de l'Angleterre et
même dans le sud de l'Islande et autres lieux tempérés.
C'est un oiseau de haute mer qui n'approche des côtes qu'à l'époque
de la reproduction. Ses moeurs ressemblent à celles de l'espèce précé-
dente. Il nage et plonge à la perfection et rame sous l'eau des pieds
et des ailes avec beaucoup de dextérité ; il vole rapidement en produi-
sant avec ses ailes un certain siiiiement, mais il ne va jamais loin
d'une seule traite et ne ffiit que raser les flots ; quand il doit
rejoindre son nid au sommet d'une montagne, il sait cependant
s'élever sans difficulté à une grande hauteur. Sur la terre ferme sa
démarche est fort pénible, il n'avance qu'en glissant sur ses tarses;
il court parfois aussi en sautant sur les doigts et en s'aidant des ailes
pour se tenir en équilibre.
Ces Guillemets sont excessivement sociables, non seulement avec
les individus de leur espèce, mais encore avec les autres oiseaux de
mer; tous seiublont rivaliser de complaisance, si l'on peut s'exprimer
ainsi, chacun cherche à venir en aide à sou voisin, et les orphelins
trouvent bientôt des parents adoptifs. Les couples surtout sont étroi-
tement unis ; ils se caressent, se becquètent, se lissent mutuellement
(1) M. Giglioli dit que l'oiseau indiqué comme ayant été tué à Malte {/f>is, 18ti4, p. 157),
n'est jias un W. troiU, mais un AUa toria. Aucun Guillemot n'a été pris jusqu'ici dans la Médi-
terranée.
Tome II. — 1894. 83
— 658 —
les plumes, se suivent partout et pèchent en commun. Leur nourri-
ture consiste en petits poissons, crustacés, mollusques et annélides.
Graba rend leurs cris par œrrrrr, merrerrerrrr , iau, jau, jê,jirrrr,
adarèrerrrr^ eiururrèrrr .
Reproduction. — C'est en mars que les Guillemets prennent pos-
session des rochers et des montagnes battus par les flots, et qui
donnent abri à des millions d'oiseaux. Ils choisissent pour leur couvée
des rochers escarpés ou des pans de rochers isolés qui s'élèvent sur le
rivage, et qui présentent des espèces de corniches, des crevasses,
des trous et des fentes en grand nombre. Chaque couple, d'après
Graba, paraît reprendre annuellement possession de la même cavité.
Le Guillemot troïle ne fait pas de nid, mais dépose simplement son
œuf unique sur une saillie de rocher ou dans une cavité quelconque
de la montagne. Cet œuf est très volumineux, piidforme, d'un blanc
jaunâtre, roussâtre ou verdâtre, parfois d'un vert clair tirant plus ou
moins sur le bleu, et marqué de taches d'un gris vineux et d'autres,
superficielles, brunes ou noirâtres, de formes extrêmement variées; il
mesure 75 à 90 millimètres sur 47 à 52. Les deux sexes couvent
alternativement ; la durée de l'incubation serait, d'après Naumann,
de trente à trente-cinq jours.
On trouve en général des œufs vers la fin de mai et en juin, et des
poussins à la fin de juin et au commencement de juillet. Vers la fin
de juillet ou dans les premiers jours du mois d'août, le jeune quitte la
cavité où il est né pour aller à la mer. « Cet échange, dit Naumann,
n'est pas sans danger, comme le prouvent clairement les inquiétudes
et les cris de la mère. Le petit se lance d'un bond du bord du rocher
dans l'eau, suivi par ses parents, plonge aussitôt qu'il est à l'eau, et
quand il remonte il se serre avec effroi contre sa mère en poussant
des sifilements aigus, comme pour lui demander de venir à son
secours et lui permettre de monter sur son dos. Mais il doit faire
connaissance avec son nouvel élément, et après quelques plongeons,
toujours exécutés en compagnie des vieux, il devient plus confiant.
Les parents lui apprennent en même temps à pourvoir lui-même à sa
nourriture. Ils continuent à le protéger et l'accompagnent en pleine
mer, où souvent on rencontre à plusieurs lieues de la côte, des
oiseaux adultes accompagnés de leur petit à peine à moitié développé,
affrontant les vents et les flots. Le saut des rochers n'est pas toujours
heureux : les petits, en sautant, tombent quelquefois sur des pierres
et se tuent. »
— 659 —
GBNRK CLXVIII.
MERGULE. — MERGULUS.
Alca, (part.) Lin. Syst. nat. I, p. 211 (1766).
Allé, Link, Beschr. d. Natural. d. Univ. Rostock, I, p. 17 (1806).
Mergulus, Vieill. Analyse^ p. 67 (1816).
Arctica, Gray, ListofGen» B. p. 98 (1841).
Car. — Bec très court, épais, renflé, convexe , la mandibule inférieure
très anguleuse à la rencontre de ses branches ; narines ovalaires, en partie
découvertes ; ailes de longueur moyenne, sur-aiguës ; queue très courte,
arrondie; tarses grêles, de la longueur du doigt interne, scutellés en avant,
réticulés en arrière; ongles comprimés, pointus. — Taille petite.
Hab. — Pôle nord, la zone tempérée en hiver.
308. — Le Mergule nain
MERGULUS ALLE, Vieill. ex Lin.
(PI. 310)
Uria minor, Briss. Ornith. VI. p. 73 (1760).
Alca allé, Lin. Sy.st. nat. I, p. 21 1 (1766).
Allé nigricans, Link, Beschr. Nnt.-Samml. Univ. Rostock, I. p. 17 (1806)
Uria ALLE, Pall. Zoogr. Rossa- Asiat. II, p. 369 (1811).
Mergulus allé, Vieill. Analyse, p. 67 (1816).
Mergulus melanoleucos, Leach, Syst. Cat. Mam. B. Br. Mica. p. 42 (1816).
Mergulus ARCTicus, Brm. /sis, 1830, p. 1001.
Cephus ALLE, Less. Traité d'Om. p. 639 (1831)
Arctica allé, Gray, List. Gen. B. p. 98 (1841).
Der Krabbentaucher, en allemand.
The little Auk., en anglais.
De kleine Alk, en flamand.
Taille: 0"'18; ailes 0,11.
Description des deux sexes en été. — Tête, gorge, cou, dessus du corps, ailes et
queue noirs; scapulaires bordées de blanc; rémiges secondaires terminées de
blanc ; parties inférieures d'un ])lanc pur, les plumes des flancs noires sur
leur bord interne, blanches à l'extérieur. Bec noir; iris brun; pattes d'un
brun grisâtre avec les membranes d'un brun verdàtre.
Les deux sexes en hiver. — Comme en été, mais la gorge, le devant et les
côtés du cou blancs. -
Jeune. — Ressemble à l'adulte en hiver, mais les parties supérieures sont
plus ternes, le desssous du corps d'un blanc moins pur; gorge et joues blan-
— 660 —
ches ; région auriculaire et devant du cou d'un cendré noirâtre varié de blanc.
Poussin. — Duvet d'un brun de suie uniforme.
Hab. — Le Mergule nain habite le pôle Nord, où Parry l'a ren-
contré entre le 81° et le 82% et il
ne paraît pas nicher au sud du
68" 1. N. ; d'après Faber, cepen-
dant, une cinquantaine de cou-
ples nichent sur la petite île de
Grimsôe, située au nord de la
pointe septentrionale de l'Islande,
et en hiver on voit des centaines
d'individus sur toutes les côtes
de l'Islande. Sa véritable patrie est le Spitzberg, la Nouvelle-Zemble
et îles voisines {de Heuglin), ainsi que le Groenland au nord du 68°
{Newton), et partout il semble être en partie sédentaire. Plus au sud
on ne le voit qu'en hiver, car il ne niche pas même au cap Nord, mais
un grand nombre abandonnent la zone polaire pour s'éparpiller sur les
côtes de l'Atlantique. Cet oiseau est alors commun sur les côtes de la
Norwège {Collett), du nord de la Russie (Seebohm) et visite parfois
celles de Suède {Nilsson) ; on le voit aussi en hiver sur toutes les côtes
des îles Britanniques, mais plus communément des îles Orcades,
Shetland {Seebohm) et Féroé {Feilden), ainsi que sur les côtes du
Danemark {Collin), rarement sur celles de l'Allemagne {Naumann).
Ce n'est qu'accidentellement, et après des tempêtes, qu'on voit ce
petit oiseau sur les côtes de Hollande {Schlégel) et de la Belgique, et
il remonte alors parfois l'Escaut jusque près d'Anvers, où un individu
a été tué dans les polders en novembre 1866 {Croegaert); on ne le
voit non plus qu'accidentellement sur les côtes du nord de la France
{Degland), de l'Espagne, où il a été tué près de Gerone {Vayreda),
et au cap ¥m\.sièvQ{Layard)\ sa présence accidentelle a même été
constatée aux îles Canaries et Açores {Godman).
Ce Mergule niche également dans l'extrême nord-est de l'Amé-
rique {Walker, Feilden)', en hiver il visite les côtes méridionales du
Groenland, celles de la Nouvelle-Bretagne, du Labrador, de Terre-
Neuve et descend accidentellement au Sud jusqu'à la Nouvelle-Jersey
(Coues).
Mœurs. — Le Mergule nain est également un oiseau pélagique,
vivant sur la haute mer et n'approchant que rarement des côtes en
dehors de l'époque de la reproduction, à moins d'y être forcé par les
- 661 —
tempêtes prolongées de l'hiver. Il nage et plonge avec une adresse
extraordinaire au milieu des plus fortes vagues, dort même sur l'eau,
la tête enfoncée dans les plumes, et se comporte en tout comme les
Guillemets, mais il est plus remuant, plus vif et plus adroit. Il vole
avec facilité ; des bandes nombreuses s'élèvent ensemble, fendent l'air
en produisant un fort bruissement et décrivent de vastes cercles
autour des rochers. Ces oiseaux sont si abondants sur les côtes des
îles polaires, que les montagnes en sont littéralement couvertes,
tandis que d'autres, par grandes volées, traversent l'espace en
tous sens. Malmgren dit qu'au Spitzberg, on peut entendre leurs
cris à une lieue des côtes, et cela nuit et jour. Faber rend leur voix
^BX giv, try-hy-hy-hy , allll-reh-eh-eh-eh Leur naturel est aussi
sociable et aussi pacifique que celui des précédents. Ils se nourrissent
de crustacés, de mollusques et d'annélides.
Reproduction. — Ces oiseaux nichent sur les saillies des rochers,
dans des trous ou des crevasses, et déposent leur œuf unique dans le
courant de juillet sur des débris rocailleux; il y en a aussi, dit de Heu-
glin, qui creusent des galeries sous les rocailles ayant le diamètre et
la longueur d'un bras. Ces nids sont établis à des hauteurs variables,
parfois à quatre ou cinq cents pieds au-dessus du niveau de la mer,
et généralement dans les parties les plus escarpées et les plus inabor-
dables.
Le Mergule ne pond donc qu'un seul œuf, relativement volumi-
neux, d'un vert bleuâtre clair, parfois marqué de taches cendrées ou
violacées peu apparentes et pâlissant par l'incubation; il mesure
48 à 51 millim. sur 31 à 35. Les deux parents couvent à tour de
rôle et cela avec une telle persistance qu'on peut les enlever avec la
main ; tous deux aiment leur petit d'un égal amour et le nourrissent
jusqu'à ce qu'il soit complètement couvert de plumes et qu'il puisse
les suivre sur la mer. On rencontre encore des jeunes qui savent à
peine voler vers le milieu de septembre.
GENRE CLXIX.
ALC oa PINGOUIN. — ALCA.
Alca, BrisB. Ornitk. VI, p. 85 (1760).
Plauths, Briinn. Zool. Fundnm. (1771).
PiNGUiNUs, Bonnat. Tnbl. Encyc/. I, p. 28 (1790).
Utamama, I.each, Syit. Cm. Mam. B. Br. Mus. p. 42 (181(5).
Matakkoi'TERA, Glo^'. Hand- und Hilf'sb. p. 475 (1842)
Chenalopex, Gray, Hand-lisl B. 111, p. 05 (1871).
- 662 —
Car. — Bec de la longueur de la tête ou plus court, plus haut que large,
comprimé, plus élevé au niveau de l'angle maxillaire qu'à la base, à mandi-
bule supérieure échanerée et fortement recourbée à l'extrémité ; mandibule
inférieure anguleuse en dessous vers son extrémité et aiguë ; narines margi-
nales, très étroites, presque entièrement fermées par une membrane emplu-
mée ; ailes de longueur moyenne ou très courtes et impropres au vol ; queue
pointue ; tarses un peu plus courts que le doigt interne, scutellés en avant,
réticulés en arrière; pouce nul; ongles médiocres.
Hab. — Le nord de l'Atlantique; les côtes de la zone tempérée
en hiver.
309. — L'Aie ou Pingouin torda.
ALCA TORDA, Lin.
(PI. 311.) ^^
Alca minor, Briss. Ornith. VI, p. 92 (1760).
Alca torda et pica, Lin. Syst. nat. I, p. âlO, (1766).
Alca baltica, Gmel. Syst. nat. I, p. 551 (1788).
PiNGUiNUS TORDA et PICA, Bonnat. Encycl. méth. I, pp. 29, 30 (1790).
Utamania torda et pica, Leach, Syst. Cat. M. B. Br. Mus. p. 42 (1812).
Alca glacialis etiSLANoiCA, Brehm, Isis, 1830, p. 1001.
Alca balthica et microrhynchos, Brehm, Yogelf. p. 410 (1855).
Utamania balthica, glacialis, islandica et microrhynchos, Brehm, Naumannia^
1855, p. 300.
Der Tordalk, en allemand.
The Razorbill, en anglais.
De Alk, en flamand.
Taille: O^^Sl ; ailes 0,185.
Description des deux sexes en été. — Tête, gorge et toutes les parties supé-
rieures d'un noir brunâtre ; un trait blanc partant de l'œil et aboutissant à la
partie supérieure de la base du bec; rémiges secondaires terminées de blanc;
parties inférieures blanches; queue noire. Bec noir, avec trois rainures cour-
bes de chaque côté de la mandibule supérieure, celle du milieu la plus large
et blanche; iris brun; pattes d'un brun noirâtre.
En hiver. — Plumage général comme en été, mais le trait blanc devant
l'œil moins apparent; joues et gorge blanches.
Jeune. — Ressemble à l'adulte en hiver, mais plus brun à la tête, une
bande brune sous l'œil au-dessus de laquelle le blanc est moucheté de brun ;
côtés du cou d'un blanc moins pur. Bec moins élevé, plus court, plus lisse,
sans rainure blanche.
Poussin. — Duvet de la tête et du eou brun, blanc à l'extrémité ; celui des
663 —
parties dorsales et des flancs noir à pointes fauves; poitrine et ventre blancs.
Bec brun, jaunâtre à son extrémité ; pattes brunes.
Hdl)^ — Ce Pingouin est également une espèce propre à l'Atlan-
gijcj-^iriîEp tique et on le rencontre jusqu'au
TO*' 1. N., mais il est inconnu à
la Nouvelle-Zemble et au Spitz-
berg. Il niche en Islande et quel-
ques-uns hivernent sur les côtes
méridionales de cette l\e:{Faber)\
il se reproduit également aux
iles Féroé {Feilden), a-iix îles Bri-
tanniques {Dresser), sur les côtes
de la Norwège {Collet t) jusqu'à la mer Blanche {Seebohm), sur celles
de Finlande dans le golfe de Botnie {Palmén) et sur certaines îles des
côtes de la Suéde (Nilsson). En hiver on le voit en plus ou moins
grand nombre sur les côtes allemandes et danoises de la Baltique et
de la mer du Nord {Naumann), ainsi que sur celles de la Hollande
{Schlégel) et de la Belgique et, après une tempête, on l'observe quel-
quefois sur l'Escaut jusqu'au delà d'Anvers; il visite également les
côtes de la France et niche même aux Aiguilles d'Etretat, sur les
côtes de la Bretagne, de Cherbourg et à Aurigny {Degl. et Gerbe) ; il
visite parfois aussi les côtes de l'Espagne et du Portugal jusqu'à Gi-
braltar {Saunclers, Irby), pénètre dans la Méditerranée, où cet oiseau
a été capturé dans diverses localités des côtes de l'Italie et de la
Sicile, mais ne visite qu'accidentellement la mer Adriatique {Gi-
glioli). Cet Aie a encore été capturé accidentellement à l'île de Malte
{Wright) et sur les côtes de l'Algérie {Loche) et du Maroc {Facier).
C'est probablement par erreur que Pallas a mentionné cet oiseau
comme habitant le nord de la Sibérie, le Kamtschatka et les îles Kou-
riles, car aucun explorateur récent ne l'a observé dans le nord du
Pacifique ; le Musée de Leyde possède bien un individu en mue rap-
porté du Japon par von Siebold, mais sa capture sur les côtes japo-
naises paraît fort douteuse.
En Amérique, le Pingouin niche au Groenland jusqu'au 70" 1. N.,
sur les côtes du Labrador, de Terre-Neuve, de la Nouvelle-
Ecosse, et se montre en hiver jusqu'à la Nouvelle-Jersey {Newton,
Coues, etc.).
Mœurs. — L'oiseau (jui nous occupe a des mœurs fort semblables
à celles des Guillemots,avec lesquels on le rencontre presque partout.
— 664 —
Il émigré vers la mi-septembre des régions septentrionales, et on le
rencontre à partir du mois d'octobre sur la plupart des côtes de l'Eu-
rope occidentale et du nord-est de l'Amérique. Il voyage par bandes
plus ou moins considérables qui occupent un grand espace au-dessus
de la mer, et quand ils sont fatigués, ils s'abattent sur l'eau pour se
reposer. Dans les lieux de la reproduction, les montagnes et les
rochers sont couverts de millions d'oiseaux, composés en majeure
partie de Pingouins, de Guillemets et de Macareux, qui tous vivent
en bonne intelligence.
Ce Pingouin marche avec autant de difficulté que les précédents,
en se tenant debout et en s'appuyant sur les tarses et sur la queue ; son
vol est facile : tantôt il rase la surface de l'eau en passant au travers
des vagues, tantôt il s'élève avec aisance et monte dans les airs avec
une étonnante rapidité, en battant rapidement des ailes, surtout quand
il vole de bas en haut. Il nage et plonge avec une grande dextérité,
parcourt sous l'eau des distances considérables et y poursuit sa proie
avec une agilité incroyable. Il sait plonger, d'après Naumann,jusqu'à
une profondeur de 120 à 180 pieds. A.Brehm dit que pour vérifier la
profondeur à laquelle un Aie peut plonger, et pour voir combien de
temps il peut rester sous l'eau, il a attaché à l'un d'eux une mince
ficelle à la patte et l'a jeté ensuite à la mer du haut du navire. < L'oi-
seau disparut aussitôt et développa jusqu'au bout la boule de ficelle
qui avait quarante-deux mètres de long; après deux minutes et quart
environ, il reparut à la surface, respira et replongea de nouveau. Je
le retirai alors à moi et je remarquai que son corps était tout gonfié ;
un examen plus approfondi me montra qu'il était rempli d'air, au point
que la peau n'était plus adhérente qu'au cou, aux ailes, aux pattes
et près de la queue ; partout ailleurs elle était soulevée par l'air. » Sa
voix, dit le même auteur, ressemble à celle du Macareux, mais elle est
cependant encore un peu plus basse et plus rauque : c'est à peu près
oer ou arr, et par moments arr, err, querr, querr.
Cet oiseau se nourrit de crustacés et de petits poissons, principale-
ment déjeunes harengs.
Reproduction. — L'Aie torda niche également en société et de la
même manière que les Guillemets, c'est-à-dire dans des trous et des
fissures de rochers, entre des tas de pierres, et toujours du côté où la
montagne est baignée par la mer. Les derniers arrivés ne trouvent
souvent plus d'excavation pour abriter leur couvée ; ils se contentent
alors de déposer leur œuf à nu sur une saillie quelconque du rocher.
- 665 —
M. Dixon trouva un œuf d'Alc dans une galerie creusée par un Puffin,
et M. Saunders vit même une femelle couver son œuf dans le nid
abandonné d'un Cormoran. La ponte a rarement lieu avant la mi-mai,
mais les oiseaux se rassemblent dès la fin de mars et en avril sur les
montagnes où ils se reproduisent, et chaque couple prend bientôt
possession de la cavité où il a niché l'année précédente. Il est probable
que les couples, une fois unis, restent ensemble pendant toute leur
vie. La ponte n'est que d'un seul œuf que les parents couvent à tour
de rôle ; comme l'eau filtre constamment dans l'intérieur de la cavité
où l'œuf est placé, la femelle le dépose sur un amas de petits cailloux
pour le mettre à l'abri d'une trop grande humidité. L'œuf a la forme
d'un ovoïde allongé un peu piriforme; il est d'un blanc jaunâtre,
bleuâtre ou verdâtre, avec des taches profondes petites et peu nom-
breuses, cendrées ou d'un gris vineux; les taches superficielles sont
plus grandes, brunes, de forme arrondie, irrégulières et réunies sur
tout vers le gros bout ; il mesure 74 mill. sur 48 à 50 environ.
Il n'y a qu'une couvée par année, mais si on lui enlève son œuf, la
femelle en pond un second et parfois même un troisième. A peine à
moitié développé, le jeune se jette dans la mer du haut du rocher,
encouragé par les cris d'appel de ses parents ; ceux-ci lui apprennent
aussitôt à plonger et à chercher sa nourriture. Mais cette chute n'est
pas toujours sans danger, et plus d'un se tue en tombant sur des aspé-
rités rocailleuses.
GKNRE CLXX.
MACAREUX. - PRATERCULA.
Fratercula, Briss. Of-n. VI, p. 81 (1760;.
Mormon, lllig. Proclr. p. 283 (1811).
LUiNDA, (part.) Pall. Zoo(/r. 11, p. 365 (1811).
Larva, Vieill. Analyse, i^. 67 (1816).
Ceratoblepharu.m, Brandt, Bull. Ac. St-Pétersb. 1837, p. 348.
Car. — Bec très élevé, très comprimé latéralement, à arêtes vives en
dessus et en dessous, marqué de sillons larges et profonds, la mandibule
supérieure arrondie jusqu'à la pointe qui est échancrée, l'inférieure arrondie
à sa base, puis se terminant en ligne droite jusque vers la pointe, qui est
coupée obUquemeut et pourvue d'une échancrure; narines linéaires, basales,
situées près des bords du bec, percées de part en part dans une membrane
nue; commissures du bec garnies d'une peau boursouHée ; des protubérances
cornées au-dessus et au-dessous des yeux; ailes courtes et aiguës ; tarses plus
courts que le doigt interne, réticulés ; ongle du doigt interne arqué et tourné
en dedans.
ToMB II — 1894. 84
— 66Q -
Le bec des Macareux subit de véritables mues et ce phénomène
paraît être unique dans la classe des oiseaux. C'est au docteur Louis
Bureau que l'on doit cette intéressante découverte (1). D'après ce natu-
raliste, le bec des Macareux se divise en deux parties bien distinctes :
l'une postérieure soumise au phénomène de la mue, l'autre anté-
rieure, persistante. La partie postérieure est formée par l'assemblage
et la suture de neuf pièces cornées, qui se désunissent et tombent
après la saison des noces. Ce sont : à la mandibule supérieure,
V ourlet corné, la cuirasse nasale, les deux lamelles sous-nasales et
les deux lamelles transparentes. A la mandibule inférieure : les deux
lisérés cornés et la cuirasse mentonnière.
Hab. — Ce genre est propre à la zone polaire arctique et hiverne
sur les côtes de la zone tempérée.
810. — Le Macareux moine.
FRATERCULA k'RGTlGk, Leach ex Lin.
(PI. 312).
Alca arctica, Lin. Syst. nat. I, p. 211 (1766).
Alca labradorica, Gmel. Syst. nat. I, p. 550 (1788).
Alca labradora, Lath. Ind. Om. II, p. 793 (1790).
Alca canagularis, Mey. Taschenb. deut. Vogelk. II, 442 (1810).
Mormon arctica, Illig. Prodroni. p. 283 (1811).
LuNDA arctica, Pall. Zooyr. Rosso-As. II, p. 365 (1811),
Mormon fratercula, Tem. Man. d'Om. p. 614 (1815).
Fratercula arctica, Leach, Syst. Cat. Br. Mus. p. 42 (1816).
Mormon polaris et grab.e, Brehm, Isis., 1830, p. 1001.
Fratercula (Ceratoblepharum) arctica, Bi-andt, Bull. Ac. St-Pétersb. II, p. 348
(1837).
Mormon arcticus, Macg. iJ/ctw. Brit. Om. II, p. 218 (1842).
Der Nordischer Larventaucher, en allemand.
The Puffin, en anglais.
De Zeepapegaai, en flamand.
Var . Glacialis.
Mormon glacialis (Leach) Naum. Isis, 1821, p. 782, pi. 7, . 2.
Fratercula glacialis, Steph. Shcms Gen. Zool. XIII, I. p, 40 (1825).
LuNDA glacialis, Nauiïi. Yog. Deutschl. XIII, p. 314 (1853).
Mormon arcticus. Malmgr. Ofvers. 1863, p. 113.
Fratercula corniculata, Degl. et Gerbe (nec Naum.), Orn. Eur. II, p. 609 (1867).
(1) Voyez Bulletin de la Soc. zool. de France, t. II (1877), p. 377.
— 667 -
Fratercula arctica car. Glacialis, Heugl. Ibis, 1872, p. 64.
Fratercula arctica glacialis, Ridgw. ]\^om. iV. Am. B. n° 743a (1881).
Taille : Qr2S; ailes 0,18 (sujets d'Europe).
Description des deux sexes adultes en été. — Capuchon d'un cendré noi-
râtre, bordé en arrière d'une^ teinte plus pâle; côtés de la tête jusqu'au-
dessus des yeux et gorge d'un blanc grisâtre; parties supérieures, ailes,
queue et un large collier couvrant le devant du cou d'an noir lustré ; parties
inférieures blanches. Bec : ourlet corné d'un blanc jaunâtre, lisérés cornés
roussâtres, cuirasses nasale et mentonnière d'un beau gris, partie persistante
du bec rouge corail avec les sillons l)lanchâtres ; rosace de la commissure
du bec d'un jaune orange ; iris brunâtre; bord libre des paupières rouge avec
deux plaques cornées d'un gris de fer, l'une supérieure triangulaire, l'autre
inférieure et allongée; pattes rouge vermillon.
En hiver. — Même plumage qu'en été, mais les côtés de la tête plus gris.
Bec plus petit, comme tronqué au front et surtout à la mandibule inférieure,
qui forme une ligne bi isée au lieu d'une courbe régulière ; la partie posté-
rieure est brunâtre et a perdu de son épaisseur et de sa consistance ; la rosace
de la commissure du bec est réduite à une étroite bande d'un jaune pâle ; le
bord libre des paupières est décoloré et dépourvu de plaques cornées ; pattes
oranges.
Jeune. — Taille plus petite. Coloration générale comme chez l'adulte ;
lorums, partie antérieure des joues jusqu'au delà de l'œil, d'un gris noirâtre ;
gorge d'un gris cendré. Bec moins élevé, sans sillons, l'angle de la mandibule
inférieure saillant, jaunâtre à la base, brun dans le reste de son étendue ;
pattes d'un jaune rougeâtre.
Poussin. — Parties supérieures garnies d'un duvet brun, long sur le dos,
plus court sur la tête; bas de la poitrine et ventre blancs. Bec brun; pattes
jaunes, les membranes plus foncées.
Var. Glacialis. — Se distingue du type par une taille un peu plus forte et
un bec plus grand.
Hab. — Le Macareux habite le nord de l'Atlantique, mais au Spitz-
bcrg- et dans le nord du Groen-
land il est remplacé par sa var.
Glacialis {de Ueuglin) jusqu'au
80° 1. N. [Bvehm).
Le Macareux moine niche sur
-j divers points des côtes de la Nor-
wège, surtout près du cercle
^iL i^xiBfflffîfflftliifflifS arcti.,uo((W/..;0,"iaisne paraît
5B>4ii,iiii>i.>ùiB^-.».^^^ ,y;.^.^-^Wii^>.^v. jri pasnicher près delamer Blanche
où il se montre quelquefois ; il niche égnlcment en Islande [Fabcr),
— 668 —
aux îles Féroé {Graba), sur un grand nombre de côtes des îles Britan-
niques, y compris les îles Hébrides, Orcades, Shetland, etc. {Seebohm),
et en France sur les côtes de la Bretagne, à Aurigny et aux Aiguilles
d'Etretat {Degl. et Gei^be). Rn hiver, on le voit en plus ou moins grand
nombre sur toutes les côtes du nord de l'Allemagne (Naumann), plus
rarement sur celles du Danemark [Collin), et il est très rare dans la
Baltique; sur les côtes de l'Europe occidentale, on le rencontre en hiver
jusqu'au détroit de Gibraltar {Irby), mais il ne pénètre que rarement
dans la Méditerranée où quelques rares sujets ont été capturés sur les
côtes de îa Toscane, de la Romagne, de Naples,de la Sicile, de la Sar-
daigne,de Malte et accidentellement dans la mer Adriatique {Giglioli).
Il est assez rare sur les côtes de Belgique où on ne le voit qu'en hiver.
Dans cette saison il visite parfois aussi les côtes du Maroc {Favier)
et de l'Algérie [Loche).
En Amérique, cet oiseau et très commun sur les î5Ôtes et les îles du
nord de l'Atlantique, et niche en grand nombre au Groenland
[Holbôll), au Labrador, à la Terre-Neuve, à la Nouvelle-Ecosse, et se
montre en hiver jusqu'au 40° 1. N. (Baird, Coues, etc). Dans le nord
du Pacifique il est remplacé par une espèce voisine, le Fratercula
corniculata.
Mœurs. — Le Macareux n'est pas véritablement un oiseau migra-
teur, mais il gagne la pleine mer après la reproduction, et s'éloigne
alors souvent loin du lieu qui l'a vu naître, surtout pendant les tem-
pêtes; on le voit d'ailleurs rarement près des côtes en hiver, et il ne
remonte jamais les fleuves.
Par son attitude et par ses moeurs, cet oiseau ressemble aux précé-
dents et vit dans leur société; comme les Guillemets, il remue sans
cesse la tête et le cou, même au repos, comme s'il cherchait quelque
chose autour de lui. C'est surtout dans la zone arctique que ces oiseaux
sont nombreux, et c'est par centaines de mille qu'on les voit là alignés
sur les rochers devant leurs nids ou prenant leurs ébats dans la
mer. « Dans mon voyage en Laponie, dit le D"^ A. E. Brehm, je ne
rencontrai, ou plutôt je ne distinguai le Macareux moine des autres
oiseaux, qu'au voisinage des îles Loffoden. Ce qui me frappa tout
d'abord dans cet oiseau, ce fut la façon vraiment surprenante dont il
vole sur les vagues, qu'il rase sans paraître jamais en quitter la sur-
face. Il emploie à cet effet ses ailes aussi bien que ses pieds, et se trans-
porte rapidement d'une lame à une autre, comme un poisson moitié
nageant et moitié volant; il frappe Teau des ailes et des pattes tout
— 669 —
à la fois, décrit une courbe après l'autre, se pliant au caprice des flots
et avançant sans cesse avec une rapidité et une force tout à*fait mer-
veilleuse. De son bec il fouille la lame, tout en volant, et en cela il
m'a rappelé singulièrement le Bec-en-ciseaux. Quand il se lève de la
surface des eaux pour s'envoler, il le fait avec une rapidité si extraor-
dinaire et en ligne si directe que l'on tire toujours trop en arrière, au
commencement. Pour la nage, il n'est dépassé certainement par
aucun autre membre de la famille à laquelle il appartient. Il repose
légèrement sur les vagues, ou s'enfonce à volonté au-dessous de leur
surface ; il plonge sans effort et sans bruit, et reste sous l'eau deux
à trois minutes; au dire de certains naturalistes, il descendrait
à une profondeur de trente-cinq mètres environ. A terre, il marche
à petits pas et en vacillant, mais très rapidement; il peut s'enlever
dans les airs et se laisser tomber sur le sol tout d'un trait et sans
hésitation. >
C'est l'oiseau le plus actif et le moins stupide de la famille ; à la vue
de l'homme, au lieu de se précipiter dans la mer, il se glisse dans son
nid, au fond duquel il s'accule en grommelant et en lançant des coups
de bec, mais il finit toujours par se laisser prendre; il se montre plus
intelligent sur la mer, son véritable élément, et devient soupçonneux
et farouche dès qu'il se voit poursuivi. Son cri ressemble à orr, orr.
Il se nourrit de crustacés, de mollusques et de petits poissons, et
poursuit sa proie jusqu'à de grandes profondeurs.
Reproduction. — Le Macareux se reproduit en colonies et dans la
société des Guillemets et des Pingouins. C'est en mai qu'a lieu la
reproduction, mais les couples commencent leurs préparatifs dès la
fin d'avril, ou reprennent possession de leur ancien nid. Il niche dans
les crevasses, dans les anfractuosités des rochers, ou au milieu de tas
de pierres. A défaut d'une cavité naturelle, il se creuse une galerie
dans la tourbe ou dans la terre qui recouvre le rocher. Ces galeries
diffèrent considérablement entre elles par la largeur et la profondeur;
tantôt elles ne servent qu'à un seul couple, tantôt elles en abritent
deux. «Les deux sexes, dit Brehm, semblaient travailler à la construc-
tion du nid, car j\ii vu autant de femelles que de mâles autour des
trous. Ils se servaient de leur bec et de leurs pattes ; cependant, je
ne saurais dire comment ils s'y prenaient, parla raison qu'ils cessaient
tout travail aussitôt que l'on approchait. Pendanl ([u'ils creusent, ils
sont couverts d'une telle poussière, ou plutôt ils sont si couverts de
boue, que l'on peut à peine reconnaître les couleurs de leurs plumes;
— 670 —
mais ils se nettoient avec le plus grand soin avant de se mettre à
couver. »
La ponte, qui n'est que d'un seul œuf, a lieu en mai dans l'Europe
occidentale, en juin dans la zone arctique. Cet œuf est ovoïde, à coquille
mince, d'un blanc grisâtre mat, et porte souvent des marbrures ou des
taches nébuleuses d'un gris violacé ou d'un brun très pâle, générale-
ment groupées en couronne vers le gros bout; il mesure 59 à 62 mil-
lim. sur 42 à 44. Les deux parents couvent alternativement, et la
durée de l'incubation est, d'après Naumann, de cinq semaines. Le
poussin croît lentement, reste lonpctemps dans son nid et ne le quitte
que quand ses ailes sont bien développées. Si l'on enlève l'œuf, la
femelle en pond un nouveau, et si les deux parents viennent à périr,
un autre couple couve à leur place et élève l'orphelin.
FAMILLE DES COLYMBIDÉS.
Car. — Bec allongé, droit, pointu, fort, à bords rentrants et tran-
chants, à arête à peu près droite^ arrondie, rentrant entre les plumes
du front; narines oblongues, assez rapprochées du front; plumes du
front s'avançant jusque derrière les narines en formant un angle très
aigu; ailes courtes et aiguës; queue courte, arrondie; tarses très
comprimés latéralement, réticulés, enveloppés jusqu'au talon dans la
peau de l'abdomen ; doigts antérieurs réunis par une large mem-
brane; pouce court et portant un lobule ; ongles allongés à pointe
mousse.
Hab. — Les oiseaux de cette famille habitent les régions plus ou
moins froides de la zone arctique, et émigrent en partie jusqu'au delà
des régions tempérées.
Mœurs. — Cette famille ne comprend qu'un seul genre, celui des
Plongeons. Ce sont des oiseaux qui vivent sur les eaux salées aussi
bien que sur les grandes eaux douces de l'intérieur; ils nagent le
corps hors de l'eau, ou l'enfoncent si profondément qu'il ne reste visi-
ble qu'une étroite ligne du dos ; ils plongent les ailes fermées, ce qui
les distingue des Alcidés. Quant à la marche, elle leur est interdite
et ils ne peuvent avancer qu'en rampant et en se servant à la fois
des ailes, des pieds et du bec. Leur cri est fort et perçant. Ils sont
peu sociables, construisent des nids et pondent généralement deux
œufs.
— 671 —
GENRE CLXXI
PLONGEON. — COLYMBUS.
CoLYMBUS, Lin, Sijst. nat. I, p. 221 (1766).
Urinator, Cuv. Anat. comp. I, table 2 (1799).
EuDYTES, Ulig. Prodr. p. 283 (1811).
Car. — Ceux de la famille.
311. — Le Plongeon glacial.
COLYMBUS GLACIALIS, Lin.
(PI. 313.)
Mergus major, m. major n/evius, Briss. Ornith. VI, pp. 105, 120(1760).
CoLYMBUS TORQUATUS, Brunn. Orn. Bor.p. 41 (1764).
CoLYMBUS GLACIALIS et iMMER, Liu. Stfst. nat. I, pp. 221-22 (1766),
Mergus glacialis etN^viA, Tunst. Orn. Brit. p. 3 (1771).
Urinator glacialis, Cuv. Anat. comp. I, tab. 2 (1799).
CoLYMBUS ATROGULARis, Mey. (part.) Taschenb. Deut. Yogelk., II, p. 449 (1810).
EuDYTES GLACIALIS Illig. Proclr. p. 283 (1811).
Cepphus TORQUATUS, Pall. Zooyr. II, p. 340 (1811).
CoLYMBUS MAxiMUS et HiEM.iLis, Bi'ehm, Isis, 1830, p. 1000.
Urinator immer, Stejn. Proc. U. S. nat. Mus. V, p. 43 (1882).
Der Eis-Seetaucher, en allemand.
The GREAT NORTHERN DivER, en anglais.
De Ijsduiker, en flamand.
Taille : O'"?! ; ailes 0,36.
Desenption des deux sex3S adultes en été. — Tête et cou noirs à reflets
verdâtres et bleuâtres avec une bande sur le devant du cou formée de raies
longitudinales noires et blanches, et un large collier situé plus bas, égale-
ment composé de raies longitudinales blanches et noires, mais interrompu en
avant et eu arrière ; dos et scapulaires noirs avec deux taches carrées blan-
ches à l'extrémité de chaque plume, ces taches étant toujours plus grandes
sur les scapulaires; bas du dos, sus-caudales, couvertures des ailes et flancs
noirs tachés de blanc, mais les taches sont plus petites et arrondies ; côtés du
haut de la poitrine marqués de raies longitudinales blanches et noires; par-
ties inférieures blanches ; rémiges et queue d'un brun noirâtre. Bec noir ; iris
rouge ; pattes d'un brun noirâtre.
En hiver. — Après la mue d'automne les parties supérieures et les flancs
sont d'un brun noirâtre avec des taches grisâtres sur les plumes du dos et sur
les scapulaires; bas des joues d'un blanc nuancé de cendré ; côtés du cou
d'un brun noirâtre; couvertures des ailes de même couleur avec quehjues
points cendrés ; toutes les parties inférieures blanches avec quelques taches
brunâtres,au-dessous de la gorge. Bec couleur de corne.
Jeune. — Dessus de la tête et du cou ainsi que les côtés de ce dernier d'un
— 672 —
brun noirâtre; gorge et devant du cou blancs ; parties dorsales et couver-
tures des ailes d'un brun noirâtre avec les bordures des plumes grises ; bas du
dos et flancs bruns ; parties inférieures blanches. Bec brunâtre à la base,
d'un blanc sale à son extrémité ; iris brun roux. Ce n'est qu'à la troisième
année que le jeune prend le plumage d'adulte.
L'adulte en plumage d'hiver et le jeune ressemblent beaucoup au Plongeon
à gorge noire sous les mêmes plumages, mais il est facile de reconnaître les
deux espèces à leur taille, le dernier étant plus petit.
Poussin. — Duvet d'un brun noirâtre aux parties supérieures, d'un brun
plus pâle aux parties inférieures {Seebohm).
Hab. — Cette espèce ne paraît pas se reproduire sur le continent
européen, mais il n'est pas rare
et niche en Islande {Faber). On
le rencontre jdans tous les fjords
et sur toutes les côtes de la
Norwège depuis l'automne jus-
qu'au printemps, et en plus
grand nombre au nord du fjord
de Trondhjem (63° '/g) ; des su-
jets adultes ont cependant été
observés en été dans la Finmark, et il se pourrait que quelques cou-
ples y nichassent dans les marais d'eau douce, carLilljeborg a trouvé,
le 26 août, un jeune parfaitement emplumé sur l'île de Vano près de
Tromsô (Colleté). Cet oiseau ne paraît pas se montrer à l'est de la
Finmark orientale, où il est remplacé par une espèce voisine, le
C. adamsi (1) ; il est cependant probable qu'il visite accidentellement
le N.-O. de la Russie, vu qu'on en a capturés dans ce pays.
Le Plongeon glacial se montre régulièrement en hiver dans le sud
de la Suède (Nilsson), aux îles Féroé et aux îles Britanniques, même
en Irlande {Seebohm), ainsi que sur les côtes occidentales de la
Finlande {Palmén); il visite accidentellement la Russie où quelques
captures ont été faites dans le gouvernement de Moscou, dans le
district situé entre le Volga et l'Oka {Menzbier), près d'Odessa
{de Nordmann) et en Pologne {Taczanoivski); on le voit parfois aussi
en Autriche {Hinterberger), dans le nord de l'Allemagne {Naumann),
le long du Rhin et en Moravie {Gloger), en Danemark {Collin), en
(1) Plusieurs auteurs ont signalé l'existence du C. glacialis dans le nord de la Russie et de la
Sibérie, ainsi qu'à la Nouvelle-Zemble, confondant cet oiseau avec le C. adamsi. Ce dernier est
d'une taille plus forte et se reconnaît à première vue à son bec plus robuste et blanchâtre; il
hiverne sur les côtes septentrionales de la Norwège, comme Ta constaté M. CoUett.
— 673 -
Hollande {Schlégel) et en Belgique où on ne le voit que pendant les
hivers très rigoureux et après des tempêtes, et il en est de même en
Suisse (T^chudi). Déjeunes sujets ont été pris de loin en loin dans
diverses parties de la France {Olphe-Gall.) et même dans le midi
{Lacroix), en Portugal {Barboza du Bocage), en Espagne dans la pro-
vince de Gérone {V(njredr') et cinq ou six sujets ont été tués dans
divers points de l'Italie [Giglioli). On en a également capturés en
Bohême {Fritsch), en Transylvanie (Danford), en Alsace (TTrœner), etc.
En Amérique, on rencontre cet oiseau en été au Groenland
[HolbôU), où il ne dépasse sans doute pas le 67", et sur les côtes amé-
ricaines de l'Atlantique jusqu'à la Terre-Neuve ; en hiver on l'observe
depuis le Maine jusqu'à l'extrémité sud de la Floride, et de là jusqu'aux
'bouches du Mississipi et les marais du Texas aux environs de l'île
Galveston {Auduhon). Suivant Baird, le Musée de Washington possède
des sujets du Nouveau-Mexique et des côtes du Pacifique ; mais
ceux-ci n'appartiendraient-ils pas au Colymbus adamsi, qui habite le
nord du Pacifique ?
Mœurs. — Toutes les espèces de Plongeons ont des moeurs si sem-
blables qu'il est inutile de les exposer pour chacune d'elles ; nous
parlerons donc de leur manière de vivre en nous occupant du Plon-
geon à gorge rousse, qui est la seule espèce qui se montre réguliè-
rement en Belgique.
Le Plongeon glacial est en partie sédentaire et en partie migrateur.
Il vit particulièrement sur la mer non loin des côtes et évite la haute
mer, mais il niche près des eaux douces, et les jeunes passent les
premiers temps de leur vie sur des lacs et des étangs. Son attitude et
ses allures n'offrent rien de particulier, il nage et plonge à la perfec-
tion, peut rester, d'après Holboll, environ huit minutes sous l'eau
pour ne revenir à la surface que 150 ou 200 mètres plus loin ; il vole
peu et lourdement; à l'époque de la migration, six à huit individus se
réunissent pour faire le voyage ensemble,, décrivent de grands cercles
dans l'espace en faisant retentir l'air de leurs cris, puis partent à tire
d'aile en volant très haut. C'est le plus farouche des Plongeons, il est
constamment sur ses gardes et évite le danger en s'éloignant à la
nage ou en plongeant; mais s'il se trouve sur une eau de peu d'élendue,
il cherche son salut dans la rapidité de son vol, sans cependant aller
bien loin car il revient bientôt à son point de départ. Il se montre })lus
confiant près de son nid, mais quand on l'approche de trop près, il se
défend en donnant de violents coups de bec, dirigés particulièrement
Tome II. - 1604. 85
— 674 —
contre les mains et la figure. Il n'est pas sociable, vit par couples
et ne recherche des compagnons qu'au moment des migrations ; sa
voix est retentissante et ressemble à une sorte de hurlement plaintif
que Naumann rend par houhouhouhouhou.... et hu uuu. Cet oiseau
se nourrit de poissons, de grenouilles, de larves et d'insectes aqua-
tiques.
Reproduction. — Il a été dit plus haut que cet oiseau ne se repro-
duisait que dans le voisinage du cercle polaire, mais HolbôlJ dit qu'il
est plus abondant dans le sud du Groenland que dans le nord de ce
pays, où il est même rare.
Le Plongeon glacial niche sur les lacs et les étangs d'eau douce
situés dans le voisinage de la mer et souvent sur les eaux des monta-
gnes; il cherche en général un endroit solitaire où il n'a rien à crain-
dre de l'homme. Les conjoints sont très attachés- l'un à l'autre, et
s'accouplent sur l'eau en jetant de grands cris. Le nid est construit
dans riierbe près de l'eau sur une langue de terre ou sur un îlot; il est
souvent protégé par des herbages ou par un buisson, de saules ou de
bouleaux; c'est une construction grossière d'environ. soixante centi-
mètres de diamètre et formée d'un tas de plantes aquatiques et d'her-
bes diverses.
La ponte a lieu, selon Faber, dans la seconde moitié de mai et se
compose de deux oeufs. Ceux-ci offrent un ovale allongé, régulier, les
deux extrémités presque d'égale grosseur; leur couleur est d'un vert
olivâtre plus ou moins foncé ou brunâtre, et il sont marqués de taches
profondes cendrées et de taches superficielles brunes et noires irrégu-
lièrement distribuées. Ils mesurent 91 à 98 millim. sur 53 à 57.
Mâle et femelle couvent alternativement avec ardeur; ils élèvent
leurs petits avec la plus grande sollicitude, les défendent avec courage
et se laissent tuer plutôt que de les abandonner.
312. — Le Plongeon à gorge noire.
COLYMBUS ARCTICUS, Lin.
(PL 314).
Mergus gutture nigro, Briss. Ornith. VI, p. 115 (1760).
CoLYMBUS ARCTICUS, Lit). Syst. nat. I, p. 221 (1766).
CoLYMBUs ignotus, Bechst. Naturg. Deutschl. II, p. 782 (1791).
Urinator ARCTICUS, Cuv. Anut. comp. I, tab. 2 (1799).
— 673 —
CoLYMBUs LEUCOPUS, Bechst. Ornith. Tasche)ib. II. p. 364 (1803).
CoLYMBUS ATROGULARis, Mey. (part.) Taschenb. deut. Yogelh. II, p. 449 (I8I0).
Cepphus arcticus, Pall. Zoogr. II, j». 341 (1811).
EuDYTES arcticus, Illig. Prodr. p. 283 (I8I1).
CoLYMBUS MACRORHYNCHUS et BALTHicus, Brehin, /iïs, 1830, p. 1000.
CoLY-MBUS atrigularis, Homey. Vôg. Pomm.^. 79 (1837).
Der Polartaucher, en alleraanrl.''
The Black-throated Diver, en anglais.
De Parklduiker, en flamand.
Var. Pacifica.
CoLYMBUS PACiFicus, Lawi'., BaircI, B. N. Am. p. 889 (1858).
CoLYMBUS ARCTICUS var . PACIFICUS, CouGs, Key N.-Am. B. p. 335(1872).
Urinator PACIFICUS, Stejn. Proc. U. S. Nat. Mus. V, p, 43 (1882).
Taille: 0""60; ailes 0,31.
Description des deux sexes adultes en été. — Dessus de la tête et du cou
cendré, passant au brun sur les joues ; gorge noire, terminée en bas par une
bande de raies longitudinales blanches et noires ; devant du cou d'un noir
violet bordé sur les côtés par une bande de raies longitudinales blanches et
noires ; dos d'un beau noir lustré, à reflets verdâtres vers le bas et sur les
sus-caudales ; chaque côté de la partie supérieure du dos est marqué de dix à
douze bandes transversales blanches, avec une strie noire au centre de
chaque plume; scapulaires noires, terminées par deux grandes taches blan-
ches de forme plus ou moins carrée, et formant une douzaine de larges
bandes transversales; couvertures des ailes noires parsemées de petites
taches arrondies blanches ; côtés du haut de la poitrine avec des raies longi-
tudinales blanches et noires ; parties inférieures blanclies avec les flancs noirs;
rémiges et queue noires. Bec noir ; iris brun rouge ; pattes brunâtres.
En hiver. — Après la mue d'automne, la tête et le dessus du cou sont
d'un cendré foncé ; les autres parties supérieures et les couvertures des ailes
d'un brun noirâtre, avec de petites taches blanchâtres sur ces dernières ;
joues, gorge et parties inférieures blanches; côtés de la poitrine rayés de
brunâtre; flancs marqués de larges mèches noires.
Jeune. — Dessus de la tète et du cou d'un brun cendré ; parties dorsales
et couvertures des ailes d'un brun noirâtre avec les plumes bordées de cen-
dré ; rémiges et rectrices brunes, terminées par un petit bord bhinchâtre ; bas
des joues, devant du cou et les autres parties inférieures l)lancs. Bec brun de
corne ; iris brun.
Poussin. — Duvet brun, très foncé aux parties supérieures, plus pâlo aux
parties inférieures.
Var. Pacifica. — Se distingue par ili'-^ (linirnsu)iis nioimlres, des ailes i)lus
— 676 -
courtes, les doigts et les tarses proportionnellement plus courts et le bec plus
étroit et plus court (Coues).
Hab. — Le Plongeon arctique ou à gorge noire n'habite ni l'Islande,
ni le Groenland, et sa limite sep-
tentrionale en Europe est l'île de
Waigatz {de Heuglin); il ne se
montre que très accidentellement
aux îles Féroé {Feilden). 11 est
commun en Scandinavie, mais il
est plus abondant sur les lacs
des montagnes de l'intérieur que
sur les côtes et ne visite les par-
ties méridionales de la Suède et de la Norwège qu'en hiver {Collett,
Nilsson) ; il niche également en Finlande {Palmén)ei sur bien des lacs
russes des gouvernements de Jaroslaf,de Tver,de Vladimir et du nord
du gouvernement de Moscou {Sabandeff)\ dans le sud de la Russie
on ne 4e voit qu'en hiver [de Nordmann). Cet oiseau est rare au Dane-
mark {Kjaerbôlling), mais assez commun en Pologne aux deux pas-
sages et en hiver [Taczanoioski); il niche en Poméranie [de Heuglin)
et n'est pas rare en hiver sur les côtes allemandes de la Baltique ;
on le voit quelquefois dans les vallées de l'Elbe, de l'Oder et même
sur le Rhin [Naumann), dont il remonte quelquefois le cours jusqu'en
Suisse, où on l'a parfois observé sur certains lacs [Meisner et Schinz).
On l'observe également sur les fleuves et les lacs de l'Autriche {Hin-
terberger) et de la Hongrie, et il est moins rare en Transylvanie que
l'espèce précédente [Danford et Harv. Broivn). A l'Ouest, on le voit
assez fréquemment sur les côtes et les lacs de la Hollande {Schlégel),
mais rarement sur les côtes de la Belgique. Il niche en petit nombre
sur certains lacs des îles Hébrides et des comtés d'Argjll, de Perth,
d'Inverness, de Ross et de Sutherland^ mais ne visite que rarement ou
accidentellement les autres parties des îles Britanniques {Seebohm).
En France, on ne voit guère sur les côtes et dans les marais que de
jeunes individus et encore rarement {Degl. et Gerbe) \ des captures
accidentelles ont également été faites en Espagne dans la province de
Gérone [Vayreda) et dans la Coruna {Naceyro), en Portugal [Bay^boza
du Bocage) et sur divers points de l'Italie jusqu'en Sardaigne et en
Sicile [Giglioli).
En Asie, cet oiseau habite en été toute la zone septentrionale jus-
qu'au Kamstchatka [Dgboioski) et le Japon {Wliitely) ; il est commun
— 677 -
dans le nord de la Sibérie où von Middendorf l'a vu nicher près du
Boganida et du Tairayr(l). On le trouve également sur le fleuve
Amour {von Schrenk) et accidentellement sur la ûier Caspienne [Raddé).
Il niche également dans l'Amérique du Nord et il est abondant dans
la baie d'Hudson, au Labrador, au Nouveau-Brunswik; il se reproduit
aussi en petit nombre dans le nord des Etats-Unis où les adultes
paraissent sédentaires, tandis que les jeunes émigrent quelquefois
jusqu'au Texas [Audubon). La variété Pacifica habite les côtes du
Pacifique depuis l'Alaska {Nelson) ]n^({\\Q dans la Basse-Californie
{Seebohni).
Mœurs. — Le Plongeon à gor^^e noire habite des régions moins
roides que le précédent et paraît émigrer complètement de la zone
arctique, car en hiver on le voit plus régulièrement et en plus grand
nombre dans les pays tempérés, mais par individus isolés ou par cou-
ples; les jeunes seuls voyagent en petites troupes. Il abandonne les
toundras du Nord vers le milieu de septembre et se montre un mois
plus tard sur les côtes méridionales de la Baltique; dans les premiers
jours de juin il reprend possession des étangs de la zone froide.
Cet oiseau diffère un peu du Plongeon glacial par ses habitudes :
dans ses quartiers d'hiver il recherche moins la mer et se montre da-
vantage sur les eaux douces de l'intérieur ; il niche aussi à de plus
grandes distances de la mer dont il s'éloigne souvent de plusieurs cen-
taines de lieues. Pour le reste il ressemble à son congénère. Le
D''Finsch,qui a observé ce Plongeon près de l'Obi, rend son cri d'appel
par au-a, a-ua. M. Seebohm a eu l'occasion d'entendre souvent cet
oiseau dans les vallées de la Petchora et du lénissei, et il dit que ses
cris discordants ressemblent exactement à ceux d'un enfant. Quant à
sa nourriture, elle se compose surtout de poissons, mais il mange aussi
des grenouilles, des crustacés et des mollusques.
Reproduction. - Le Plongeon arctique niche, comme le précédent,
au bord de l'eau, sur un îlot ou dans un marais et dans un endroit
garni d'herbe; deux ou trois couples nichent parfois prés de la même
eau, mais à une certaine distance l'un de l'autre. L'herbe est aplatie
et les oiseaux entassent par dessus un peu de plantes aquatiques et
des herbes sèches, et le tout peut avoir soixante centimètres de dia-
mètre; parfois aussi, la femelle se contente de faire une petite fosse
dans l'herbe ou dans la mousse, et d'y déposer ses deux œufs dans la
(1) Les sujets du Kaiutscliatka cl ilu Jaix3n pourraient bien appartenir à la variété Pacifica.
— 678 —
seconde quinzaine de juin. Ceux-ci ressemblent par leur forme aux œufs
de l'espèce précédente, mais ils sont plus petits ; leur couleur générale
est d'un vert olivâtre, d'un brun olivâtre ou d'un brun foncé, et ils sont
marqués de taches noirâtres profondes et de taches noires superficielles
de diverses grandeurs et éparpillées sur toute la surface ; ils mesurent
83 à 87 millimètres sur 50 à 52.
313. — Le Plongeon à gorge rousse.
COLYMBUS SEPTENTRIONALÏS, Lin.
(PI. 315.)
Mergus gutture rubro, Briss. Ornith. VI, p. 111 (1760).
CoLYMBUS LUMME, Guniî. Act . Niclr. I, pi. 2, fig. 2 (1761). '-
CoLYMBUs STELLATUsel BOREALis, Briinn. Orn. bor., p. 39(1764).
COLYMBUS SEPTENTRIONALÏS, Lin. Syst. nat . I, p. 220 (1766).
Mergus septentrionalis, Tunst. Orn. Brit p. 3 (1771).
CoLYMBUS GLACiALis, Phipps (iieo Lin), Voy N- Pôle (1774).
CoLYMBUS iMMER, Bodd. (nec Lin.) Tabl. PI. enl. p. 58 (1783).
CoLYMBus striatus, Gmel. Syst. nat. I, p. 586 (1788).
Urinator SEPTENTRIONALÏS, Cuv. Anat. comp. 1, tab. 2 (1799).
CoLYMBUs RUFOGULARis, Mey. Taschenb. deut. Vôgelk. II p. 453 (1810).
EUDYTES SEPTENTRIONALIS, Illig. Prodr. p. 283 (1811).
Cepphus septentrionalis et stell.vfus, Pall. Zoor/r. II, pp. 342. 344 (1811).
CoLYMBUS stellaris, Less. Traité d'orn. p. 637 (1831).
Colymbus microrhynchos, Brm N'umannia, 1855, p. 300.
Urinator LUMME, Stejn. Proc. U. S. Nat. Mus. v. p. 43 (1882).
Der Nordseetaucher, en allemand ,
The red-throated diver, en allemand.
De roodrelige Zeeduiker, en flamand .
Taille : 0'"50; ailes 0,28.
Description des deux sexes en été. — Dessus de la tête d'un gris cendré avec de
petites taches noires; côtés de la tête, gorge et la majeure partie du cou d'un
beau gris souris, la partie postérieure du cou noirâtre avec des taches allon-
gées blanches, et sur la partie antérieure se trouve une large bande longitu-
dinale d'un roux marron vif, plus large en bas qu'en haut; dessus du corps et
ailes d'un brun noir à reflets verdâtres avec quelques petites taches blan-
ches sur le haut du dos et sur les côtés de la poitrine ; parties inférieures d'un
blanc satiné ; rémiges et queue brunes. Bec d'un brun noir ; iris brun rou-
geâtre; tarses et doigts d'un brun oHvâtre, milieu des palmures blanchâtre.
En hiver. — Dessus de la tête et du cou d'un brun cendré foncé, avec des
taches noires au milieu du vertex et des taches allongées noirâtres et blan-
— 679 —
châtres à l'occiput et à la nuque ; dos, scapulaires, couvertures des ailes,
croupion et sus-caudales d'un brun noir avec une multitude de petites taches
blanches ; côtés de la tête, gorge, côtés et devant du cou ainsi que toutes
les autres parties inférieures d'un blanc pur satiné.
Jeune. — Ressemble à l'aduUe en hiver, mais les teintes générales moins
vives ; devant du cou sali de gris brun. Bec grisâtre.
Poussin. — Ventre d'un cendré blanchâtre ; toutes les autres parties vêtues
d'un duvet brun, noirâtre sur le manteau, un peu moins foncé sur la tête,
plus pâle sur les flancs, le cou et les parties inférieures, où il se fond avec le
blanchâtre du ventre ; bandeau blanc autour des yeux, une petite tache de
cette couleur au-dessus des commissures. Bec brun de corne avec le marteau
blanc ; pieds noirâtres sur la face externe des tarses et sous la plante, mar-
brés de jaune et de brun sur les autres parties; iris brun roussâtre. (J. Vian.)
Ilab. — Le Plongeon à o^or^e rousse ou cat-marin est une espèce
circompolaire qui niche jusqu'au
80°45'1.N. {Newton). Il niche, en
n Europe, depuis l'Ecosse {See-
Uj bohm)Qi\Q sud de la Scandinavie
4 {Collett), jusqu'aux îles Féroé
|j!MIU--^^-5 (Graba), l'Islande (Faber), la
'fWmM:^^ Nouvelle-Zemble et le Spitzberg
tiiiljitW tî Hrl^^-l^ i^^^ Heuglin). Il paraît qu'il niche
m^jé^s^siMÉk^r^^é^m parfois aussi en Poméranie et
même en Bohême; le D"" Fritsch dit que, d'après Firlinger, cet oiseau
a niché en 1842 et en 1850 sur un étang près de Pardubic. Il hiverne
en partie dans le sud de l'Islande et sur les côtes de la Scandinavie.
En hiver cet oiseau est plus ou moins commun sur toutes les côtes
européennes jusqu'à Gibraltar {Mnj), la mer Noire {de Nordmanii),
et la mer Caspienne {Bogdanoio).
Ce Plongeon est commun, en hiver, sur les côtes de Belgique, sur
l'Escaut, dans les marais des Polders, et se montre quelquefois jus-
qu'aux environs de Bruxelles. Dans la Méditerranée on voit quelquefois
des jeunes sur divers points de l'Italie, de la Sardaigne et de la Sicile
{Gi(jlioli)y et accidentellement à l'île de Malle {Wright) et sur les côtes
de la Turquie et de la Grèce, mais pas dans l'Archipel {Ltndermaijer)\
do Heuglin dit avoir observé des jeunes à diverses reprises dans les
lagunes de la Basse-Egypte ; on en voit aussi accidentellement sur les
côies de l'Algérie {Loche).
En Asie, cet oiseau niche dans le nord de la Sibérie {Middendorff'),
jusqu'au Kamtschatka {Dyboioski) et dans le nord du Japon {Whitely) ;
*'^h.'î.^2»s^^-Bp.d«.:!'<i»yjOjy>
- 680 —
en hiver on le voit aussi sur les côtes de la Chine {David) et de For-
mose (Swinhoe). Il niche également dans l'Amérique septentrionale
depuis l'Alaska {Bannister) jusqu'au Groenland {Holboll) et au Labra-
dor, et hiverne depuis le Massachusetts jusqu'au Potomac {Audubon),
et du côté du Pacifique jusqu'en Californie et quelquefois sur les
grands lacs {Seebohm).
Mœurs. — Le Plongeon à gorge rousse est plus migrateur que les
deux précédents, et il n'hiverne dans les pays de la reproduction que
quand ceux-ci se trouvent dans une zone assez tempérée. En octobre
il commence à émigrer par bandes plus ou moins considérables, en
suivant non seulement les côtes maritimes mais encore les voies
fluviales, comme le font d'ailleurs aussi ses congénères; il arrive
ainsi par les fleuves jusqu'au centre de l'Europe, et il n'est alors pas
rare en Suisse, dans le centre de l'Allemagne, de l'Autriche, de la
Russie, etc. Les bandes qui traversent les mers du Nord et Bal-
tique sont parfois extrêmement nombreuses ; M. Gaetke a observé de
ces bandes près de Helgoland vers la fin de 1879, qui se suivaient
durant plusieurs jours, et il estimait à près d'un million le nombre
des individus qui avaient ainsi traversé la mer. Quand une troupe de
Plongeons s'abat dans une localité, elle y séjourne tant que les eaux
ne se soient pas couvertes de glace, mais alors le manque de nourri-
ture les obUge à continuer leur voyage vers le Sud; ils retournent
dans le Nord dans le courant de mars, et volent toujours à une grande
hauteur, tant la nuit que le jour.
11 a été dit précédemment que les diverses espèces de Plongeons
ont des moeurs à peu près semblables ; celui qui nous occupe est,
comme ses congénères, un véritable oiseau de mer, mais il ne s'éloigne
que rarement du voisinage des côtes. Il ne fréquente les eaux douces
qu'aux époques de la reproduction et des migrations, mais il vit
presque exclusivement sur l'eau, franchit à la nage des distances con-
sidérables avec une grande rapidité, plonge sans effort et sans bruit,
file sous l'eau dans toutes les directions et parfois à de grandes pro-
fondeurs, et lutte de vitesse avec les poissons les plus agiles; il peut
rester sous l'eau environ huit minutes. « J'ai observé des Plongeons
en captivité, dit A.-E. Brehm, pendant des semaines entières, et très
souvent sur la terre ferme, mais jamais je ne les ai vus se tenir debout;
jamais non plus je ne les ai vus marcher sur leurs doigts ou sur leurs
tarses, mais toujours ramper avec l'aide du bec et du cou, en même
temps qu'avec le secours des ailes et des pieds. Ils volent plus facile-
— 681 —
mei)t qu'on ne le suppose, eu égard à la brièveté des ailes par rapport
au poids du corps. Ces oiseaux sont réduits toutefois à prendre un
vigoureux élan pour pouvoir s'élever, mais, quand ils ont atteint une
certaine hauteur, ils avancent très vite en donnant de rapides et con-
tinuels coups d'ailes. Leurs mouvements sont remarquablement beaux
quand ils se lancent dans la mer du sommet des falaises. Ils ne font
alors mouvoir les ailes qu'autant que cela est nécessaire pour prendre
une direction oblique; ils fondent avec un certain bruissement, se
tournent tantôt d'un côté, tantôt de l'autre, et parfois descendent
comme une flèche dans les profondeurs des eaux. »
Le Plongeon à gorge rousse ou cat-marin est en général fort
bruyant, et son cri perçant peut se rendre, d'après de Heuglin, par
gag gagera, gag-gag, gaggarau, et parfois gag-gag, gag-gag d'une
voix plus raiique. Quand il est poursuivi, il s'envole plus souvent qu'il
ne plonge; il est du reste prudent, toujours attentif à ce qui se passe
autour de lui, et évite autant que possible le voisinage de l'homme.
Il est peu sociable, vit seul ou par couples, se tient toujours éloigné
des autres palmipèdes, et il est rare de voir deux couples sur le même
étang ; ce n'est qu'au moment des migrations qu'il se réunit à ses sem-
blables. Cet oiseau ne manque pas de courage, car lorsqu'il est blessé
et incapable de fuir, il se défend vigoureusement à coups de bec, et
malheur à celui qu'il atteint. Sa nourriture consiste en poissons, crus-
tacés, grenouilles et autres petits animaux; les jeunes mangent sur-
tout des crustacés.
Reproduction. — Ce Plongeon fait sa réapparition dans le sud de
l'Islande du 7 au il avril, dans le nord dej'île seulement dans la pre-
mière huitaine de mai ; au Spitzberg on no le revoit pas avant le
mois de juin. Peu après son retour, il se rend sur les eaux douces de
l'intérieur pour nicher ; Brehm dit avoir observé aux îles Loffoden,
bien des couples de ces Plongeons sur les petits lacs du sommet des
montagnes. Son nid est composé de plantes aquatiques qu'il amoncelle
.sans art sur un monticule émergeant de l'eau d'un marais ou au bord
d'un lac, d'un étang; souvent aussi, il se contente d'aplatir la mousse
ou l'herbe en forme d'excavation, ou protîto d'une petite fosse creusée
dans la tourbe qu'il garnit de quelques débris d'herbages secs. La
ponte, qui est de deux œufs, rarement do trois, a li(Mi en Islande entre
la fin de mai et la mi-juin, mais dans le nord de la Sibérie et au Spitz-
berg elle ne se fait pas avant le mois de juillet. Si l'étang est do peu
d'étendue, il est rare de voir plus d'un couple y nicher. M. Collett
Tome II. — IH'J4. 86
- 682 —
signale avec raison comme un fait extraordinaire d'avoir trouvé en
moins d'une demi-heure en juillet 1872, sur la petite île de Tamsoe
dans le Porsanger Fjord, pas moins de quinze nids contenant chacun
deux oeufs.
Les œufs de ce Plongeon ont la forme d'un ovale allongé et sont
d'un brun plus ou moins olivâtre, parfois roussâtres ou cendi^és, et
sont marqués de taches profondes grises peu nombreuses, et de taches
et de points noirs superficiels souvent plus abondants au gros bout;
ils mesurent 71 à 75 millim. sur 45 à 47. Les deux sexes couvent
alternativement avec une égale ardeur et font en commun l'éducation
des petits. Lorsque ceux-ci sont aptes à voler, toute la famille quitte
l'étang ou le marais pour gagner la mer, où ils séjournent jusqu'au
moment du départ.
FAMILLE DES PODICIPÉDIDÉS.
Car. — Bec de la longueur de la tête ou plus court, droit, pointu,
un peu élargi à sa base, comprimé à son extrémité ; narines allongées,
ouvertes dans un sillon; ailes courtes ; tarses placés hors de l'équi-
libre du corps, enfoncés dans la peau du bas du corps, comme chez
les Colymbidés, très comprimés, largement scutellés ; quatre doigts,
les antérieurs garnis sur les côtés de larges expansions membra-
neuses lobées, l'externe aussi long ou plus long que le doigt médian ;
pouce pourvu d'un lobule; ongles larges et aplatis; queue nulle.
Tête petite, cou long et mince, corps allongé et garni d'un plumage
soyeux.
Hab. — Les oiseaux de cette famille habitent les zones tempérées
des deux hémisphères.
Mœuy's. — Les Grèbes vivent particulièrement sur les eaux dor-
mantes qu'ils ne quittent que rarement, car on, ne les voit presque
jamais à terre. Ils volent assez bien, mais ne peuvent prendre leur
essor quand ils sont sur la terre ferme ; ils nagent et plongent avec
une grande dextérité, et c'est également dans l'eau qu'ils cherchent
leur nourriture, composée de divers petits animaux aquatiques. Ils
avalent également de leurs propres plumes, et leur estomac en est
souvent rempli à tel point qu'elles y forment une pelote dans laquelle
il n'est presque pas possible de retrouver les aliments.
Ces oiseaux sont monogames ; ils construisent des nids flottants
formés de matériaux humides, et les œufs reposent dans l'humidité.
— 688 -
La ponte est de trois à six œufs. Les parents ont une grande affec-
tion pour leurs petits et les portent souvent sur leur dos.
GENRE CLXXII.
GHÈBE. — P0DICIPE3.
CoLYMBTS, Briss (pari.), Omith. VI, p. 38 (1760) rt auct. plur.
PoDiciPES, Salerne, Hist. nat. Omith., p. 377(1707'.
PoDiCEPS (1) Lath. Ge?i. Syn. suppl. U p. 294 (1787).
Dites, Pedetaithya, Lophaithyia, Kaup, Nat. Syst., pp. 41, 44, 72 (1829).
Sylbeocyclus, Bonap. Comp. List B., p. 64 (1838).
T.A.CHYBAPTUS, Reiclib. Av. Syst. nat., pi. 2 (1849).
Car. — Ceux de la famille.
Hab. — Les zones tempérées.
314. — Le Grèbe huppé.
PODICIPES CRISTATUS, Lath. ex BHss.
(PI. 316.)
CoLYMBUS CRISTATUS et CORNUTUS, Briss. Omith. YI, pp. 38 et 45 (1760).
CoLY.MBUS URiNATOR, Lin, Syst. nat. l, p. 223 (1766).
PoDiCEPS CRISTATUS, Lath. [nd. Orn. II, p. 780 (1790).
CoLYMBUS LONGiROSTRis, Bonn. Eficycl. méth. l, p. 54 (1790).
Lophaithyia cristatus, Kaup, Natûrl. Syst.. p. 72 (1829).
Podiceps mitratus et patagiatus, Brehm, Isis, 1830, p. 1000.
Podiceps australis, Gould, P>oc. Zool. Soc, 1844, p. 135.
Podiceps hectori, BuUer, Essay on Neio-Zeal. Om., p. 19 (1865).
Podiceps wiDHALMi, Goebel, Journ. f. Om., 1870, p. 312.
PodiCipes CRISTATUS, Olphc-Gal. Contrib. F?ie Orn. Eur. occ, fasc. 1, p. 90 (1884).
Der grosse Lappentaucher, en allemand.
The GREAT CRESTED GuKiiE, cn angldi--.
De Kuikouiker, en flamand.
Taille: 0'"42; ailes 0™20.
Description d'i mâle adulte en été. — Dessus de la tête et haut de la nui^ue
d'un nnii' brillant, les i)!unics de l'occiput allongées et formant, de chaque
côté, une toufïe dont l'ensemble forme une huppe; le restant de la nuipie
d'un brun cendré ; raie sourcilière d'un blanc lavé de jaunâtre; partie anté-
rieure des joues et gorge d'un blanc pur, et au-dessous une large collerette
de plumes allongées d'un roux ardent, couleur qui se fond peu à peu avec le
(i) Podiceps est une conlractioD vicieuse du mot latin Podiàpes (picJs au dciiicrc, de
poiiex, podicis et de pes.
684
brun noir de leur extrémité; dessus du corps d'un brun noirâtre, avec les
bordures des plumes brun cendré ; petites couvertures des ailes, scapulaires
inférieures et rémiges secondaires blanches; rémiges primaires brunes ; devant
et côtés du cou, ainsi que toutes les parties inférieures d'un blanc argenté,
avec une teinte brune variée de roux sur les côtés de la poitrine et de l'abdo-
men. Partie nue des lorums rougeâtre; bec d'un rouge pâle, brun eu dessus,
blanchâtre à l'extrémité ; iris rouge carmin ; tarses d'un brun verdâtro exté-
rieurement, d'un jaune verdâtre pâle à l'intérieur de même que les festons.
Femelle. — Ressemble au mâle, mais d'une taille un peu plus petite et les
ornements de la tête plus courts.
Les deux sexes après la mus d'automne. — Huppe très courte, la collerette
à peine indiquée par quelques stries foncées; dessus de la tête, nuque et
toutes les autres parties supérieures d'un brun noirâtre, avec les bordures des
plumes du dos d'un brun cendré ; ailes comme en été ; lorums, joues, gorge,
devant et côtés du cou ainsi que les autres parties inférieures d'un blanc
pur et lustré, lavé de brun cendré sur les côtés de la poitrine et du ventre.
Jeune. — Se distingue surtout du plumage d'hiver par la coloration de la
tête et du cou : ceux-ci sont blancs avec des bandes longitudinales, parfois
interrompues, d'un brun noirâtre ; nuque brune. Iris jaune ; bec d'un blanc
rougeâtre avec des taches d'un gris verdâtre, presque gris en dessus.
Poussins. — Parties supérieures, tête et cou zébrés de longues bandes
longitudinales brunes et roussâtres sur le corps, noires et blanches sur la
tête et le cou; la médiane foncée remonte du croupion à la nuque, où elle se
divise pour encadrer une longue tache blanche conique, qui a sa base au
vertex; une autre bande descend de la gorge et bifurque sur les côtés de la
poitrine ; gorge blanche avec quelques petites taches noires ; ventre et abdo-
men d'un blanc pur, un peu satiné ; grande platjue triangulaire nue sur le
vertex et lorums jaunes. Bec jaune avec ddix bandes transversales brunes et
marteau blanc ; pieds jaunes, avec la face externe des tarses et le dessus des
palmures bruns. (J. Vian.)
Hah. — Le Grèbe huppé habite la majeure partie de l'ancien monde,
sans dépasser au Nord le 63".
On le rencontre en Europe jus-
que dans le sud de la Scandi-
navie (Nilsson, Collelt) et de la
Finlande {Palmén) ; en Belgique
|: on ne le voit qu'en hiver et il est
4 alors assez commun sur nos
jy, côtes, sur l'Escaut, dans les
ëEêss^g^sl grands marais des Flandres,
plus rarement sur la Meuse et dans le centre du pays. 11 niche en
- 68o -
petit nombre dans quelques comtés de l'Anj^leterre et en Irlande, où
il est sédentaire, et visite assez régulièrement en hiver les autres par-
ties des îles Britanniques [Seebohm] ; il niche également dans beau-
coup de localités de la France [Deyland et Gerhc) et des autres con-
trées de l'Europe centrale et méridionale, jusqu'en Asie Mineure
{Krilper) et en Palestine {Tristram). Ce Grèbe quitte l'Europe cen-
trale à mesure que les eaux se couvrent de glace, et il n'est réellement
sédentaire qu'à partir du 43°, en exceptant le midi de l'Angleterre et
l'Irlande. Quelques couples hivernent cependant sur les côtes alle-
mandes {Naumann) et de Belgique, en Suisse {Meùner et Schiaz) et
probablement aussi dans bien d'autres localités au nord du 43" : il
est probable que la migration d'automne est réglée d'après les
rigueurs de l'hiver.
En Afrique, cet oiseau paraît répandu un peu partout où il y a de
Teau, car il a été observé depuis le Maroc (Favier) et l'Algérie
[Loche) jusqu'en Egypte {de Heuglin), en Abyssinie [Blanford), au
Sénégal et dans le Damaras {Anderson), et il niche communément près
du cap de Bonne-Espérance [Layard).
Cette espèce est répandue aussi dans presque toute la zone tem-
pérée de l'Asie jusqu'au Japon {Schlégel). Sa limite méridionale parait
être le Turkestan {Severtzoïo), le Beloutchistan {Seebohm) et l'Inde
entière, sauf la région subhimalayenne {Hume). Elle n'a pas été
observée dans la Sibérie orientale, mais bien en Mongo\ié{Przeoalsk}/)
et dans le sud de la Chine {Swinhoe). Elle habite également le sud
de l'Australie, la Tasmanie {Gould) et la Nouvelle-Zélande {Buller).
C'est par erreur qu'Audubon a dit, et que d'autres auteurs ont répété,
que cet oiseau habite également l'Amérique du Nord; d'après
M. T. M. Brewer [Ibis, 1879, p. 112), on ne connaît aucun sujet de
cette espèce capturé en Amérique; il est certain qu'Audubon a pris
des jeunes Podiceps griseigcna pour des P. cristalus.
Mœurs. — Le Grèbe huppé est donc un oiseau migrateur, qui
quitte le nord de l'Europe entre la fin de septembre et le courant de
novembre; M. Collett rapporte qu'en novembre 1871 un individu fut
encore tué près de Trondlijem en Norwège. Cet oiseau est rarement
de retour dans le aonl de rAllemagne avant le mois d'avril, et en
Finlande on no le revoit généralement qu'en mai. La migration
d'auioinne a li<ni par bandes composées parlbis de 50 à 60 individus,
mais le retour au prinlomps s'effectue par couples isolés ; les voyages
ont généralement lieu pendant la nuit et les oiseaux volent :\\nv< babi-
- 686 -
luellement très haut, mais une partie de la route se fait à la nage.
Ce Grèbe ne se montre qu'exceptionnellement sur la mer et sans
s'éloigner des côtes; mais il préfère les eaux douces et tranquilles de
l'intérieur, surtout les lacs et les étangs dont les bords sont garnis
de roseaux et de joncs. Pendant le jour on le voit souvent loin de la
rive, lisser et graisser son plumage, ou dormir en nageant; il passe
d'ailleurs la majeure partie de sa vie sur l'eau, et il est rare de le voir
sur la terre ferme. Aucun autre genre d'oiseau n'a des mœurs aussi
aquatiques que les Grèbes, aussi nagent-ils avec une facilité remar-
quable, et ils savent franchir sous l'eau, d'après Naumann, une dis-
tance de 60 mètres en une demi -minute.
On se demande comment un oiseau sait voler avec des ailes si
étroites et si courtes, par rapport au volume du corps, et cependant
le Grèbe vole bien et longtemps. Il ne peut prendre son essor sur la
terre ferme, mais il s'envole de la surface de l'eau p^ des élans suc-
cessifs, et s'élève de la sorte en ligne droite, atteint bientôt une cer-
taine hauteur et poursuit alors son vol avec assez de rapidité et en
battant bruyamment des ailes ; en l'absence de queue, c'est à l'aide de
ses pieds dirigés en arrière qu'il gouverne son vol et change de direc-
tion à son gré. Il est cependant certain que les Grèbes n'aiment pas
à voler et qu'ils ne se servent de leurs ailes que par nécessité ; en
automne, après la mue, ils volent au contraire beaucoup et à tout
propos, car l'époque de la migration approche et il faut s'exercer pour
le départ ; les couples avec leurs jeunes se rassemblent en même temps
sur les étangs et les lacs, où Ton voit souvent 50 à 80 sujets prenant
ensemble leurs ébats. Autant il leur est facile de se mouvoir dans
l'eau, autant leurs mouvements sont pénibles sur la terre ferme; ici
ils tiennent le corps et les tarses dans une position qui approche de
la verticale, et c'est ainsi qu'ils avancent péniblement, tombant bientôt
sur la poitrine et sur le ventre.
Les Grèbes sont des oiseaux extrêmement farouches, méfiants et
rusés ; ils n'ont confiance en aucun être humain, et si l'un de ces oiseaux
est surpris au bord d'un étang, il se glisse aussitôt entre les herbages
jusqu'à ce qu'il lui soit possible de se jeter à l'eau et de gagner en
plongeant et en nageant le milieu de l'étang, où souvent il ne montre
que la tête pour respirer et replonge aussitôt. Ils sont aussi peu socia-
bles : ils évitent les autres oiseaux aquatiques, vivent par couples et
ne recherchent la société de leurs semblables qu'à l'approche de la
migration. C'est également dans l'eau qu'ils trouvent leur nourriture,
— 687 -
qui consiste en petits poissons, jeunes grenouilles, têtards, mollus-
ques, insectes et larves aquatiques. Leur cri d'appel ressemble à keky
kek, kek; à l'époque des amours, le mâle fait souvent entendre le cri
de kraorrr, krraorrr ou kruorrr, auquel la femelle répond par un cri
semblable.
La chair de cet oiseau n'est pas mangeable, mais la peau avec ses
plumes d'un blanc satiné est très estimée et employée comme fourrure.
Reproduction. — Le mâle et la femelle s'unissent pour la vie et ils
ont l'un pour l'autre une grande affection; ils nagent de concert et si
l'un s'est irop éloigné, l'autre le rappelle à grands cris. Chaque couple
se réserve un grand espace dans lequel il ne tolère la présence d'aucun
autre, aussi, quand l'étang est petit, n'y trouve-t-on jamais plus d'un
ou deux nids. La construction de ceux-ci n'a lieu qu'en mai, alors
que les roseaux ont déjà atteint une bonne hauteur au-dessus de Teau.
Le nid est toujours placé près des joncs ou des roseaux, mais aussi
éloigné que possible de la terre ferme, parfois tout au milieu de l'eau :
c'est un nid flottant qui repose sur une vieille souche végétale ou sur
des roseaux brisés qui, enveloppés par les matériaux du nid, empê-
chent celui-ci d'être emporté à la dérive par le vent. Ce singulier nid
est construit par les deux conjoints à l'aide de plantes aquatiques
croissant au fond de l'eau, telles que diverses espèces de Potamogeton,
Ceratophylium, Myriophyllum, Chara, Uippuris, Ranunculus aqua-
tilis, etc., suivant ce que les oiseaux ont pu trouver dans leur étang,
et le tout est entremêlé, pour sa consolidation, de quelques joncs et
feuilles de roseaux. Ces végétaux sont mêlés à da la boue et amon-
celés en un tas informe et humide^ mesurant environ trente-cinq cen-
timètres de diamètre sur dix-sept de haut; la cavité ne semble creusée
que par le poids du corps de la mère. lia ponte est de trois ou quatre
œufs, relativement petits, elliptiques, d'un blanc verdâtre ou jaunâtre
mat, mais qui se couvrent pendant l'incubation de marbrures bru-
nâtres, verdâtrcs, roussâtres.. très variables d'intensité, et qui provien-
nent des végétaux sur lesquels ils reposent ; ces œufs mesurent
environ 55 millim. sur 3G. Mâle et femelle couvent avec ardeur pen-
dant trois semaines : quand l'un quitte les œufs pour chercher sa nour-
riture, l'autre le remplace aussitôt, ce qui est du reste bien nécessaire,
car l'humidité du nid exposerait les œufs à se refroidir bientôt. « Mâle
et femelle, dit A. Brehm, témoignent une alfection exti-aordinaire à
leur couvée, notammeni la lemelh;, ([ui se démène avec terreur quand
on s'(ui approche, pousse des cris plaintifs et expose sa vie sans hési-
— ^88 -
tatioTi. Dans ces circonstances, elle quitte ses oeufs, les recouvre rapi-
dement avant son départ de matières qui ont servi à construire le
nid, ne s'éloigne pas beaucoup et revient aussitôt que cela lui est pos
sible. Si on lui prend un œuf après l'autre avant qu'elle couve, on
peut l'amener à pondre vingt oeufs et plus. Les jeunes sont élevés par
les deux parents; néanmoins, le père prend les fonctions de gardien.
Au commencement, les poussins sont nourris de larves que le père et
la mère leur présentent, avec le bec; plus tard, ils laissent tomber leur
becquée dans l'eau, ce qui force les petits à l'atteindre en plongeant. »
Les parents défendent leurs poussins avec courage; au début, quand
un danger les menace, ils prennent leurs petits sous leurs ailes et dis-
paraissent avec eux dans leau. Les poussins retournent rarement dans
leur nid pour se reposer; sont-ils fatigués ou veulent-ils dormir, ils
grimpent sur le dos de leurs parents où ils trouven^un abri fort com-
mode ; pour en faciliter l'accès, la mère ou le père plonge et revient
à la surface au point même où se trouvent les petits, qu'il soulève et
reçoit sur son dos.
315. — Le Grèbe à gorge grise.
PODICIPES GRISEIGENA, Gray ex Bodd.
(PI. 317).
? CoLYMBUs vuLGARis, Scop. Afioi. I. Hi^t. nat . p. 78 (17G9).
CoLYMBus GRiSEGENA, Bodd. TcM. PI. Eul. p. 55(1783).
CoLYMBUS SUBCRISTATUS, Jacq. Beitr . z. Gesch. cl. Yôg . p 37 (1784).
CoLYMBus PAROTis, Sparmi. u7is. Caris, pi. 9 (1786).
PoDiCEPS RUFicoLLis, Latli. Gen. Syn. Suppl. I, p. 294 (1787).
CoLYMBUS RUBRicoLLis. Gmel. Syst. nat. I, p. 592 (1788).
PoDicEPS RUBRICOLLIS, Lath. Ind. Orn. II, p. 783(1790).
CoLYMBUS LONGiRosTRis, Bonnat. Encycl. mèth , p. 54 (1790).
PoDiCEPS SUBCRISTATUS, Bechst. Om . Taschenb. II, p. 351 (1803).
CoLYMBus cucuLLATUS et NyEVius, Pall. Zoogr. Rosso-As. II, p. 355 (1811).
Pedetaithya subcristata, Kaup, NatUrl. Syst. p. 44 (1820).
PoDiCEPS CANOGULARIS, Brehm, [sis, 1830, p. 1000.
PoDiCEPS LONGIROSTRIS, Boiiap. Icon. Fn. Ital. Introd. p. 1 (1833).
PoDiCEPS GRISEIGENA, Gray, Gen. B. III, p. 633 (1846).
PoDiCEPS ciNEREOriUL.^Ris, C. Dub. Pl.col. Ois. Selff. m, p. 222(1860).
Pedetaithyia GRISEIGENA, Olphe-Gal., Contr. Fne. Orn. Eur. occ I, p. 96 (1884).
Der rothhalsige Lappentaucher, ea allemand.
The Red necked Grèbe, en anglais.
Le Roodhalsfuut, eu flamand.
— 689 —
Var. Major.
PoDiCEPS RUBRicoLLis, Bonap. (nec Gmel.) Spec. comp. p. 75 (1827) et auct. plur.
PoDiCEPS RUBRICOLLIS MAJOR, Tein. et Schl. Fauna Jap. av. pi. 786 (IS49).
PoDiCEPS HOLBOELLii, Reinh. Yidensh. Meddel. p. 76 (1853).
PoDiCEPS GRiSEiGENA et cooPERi, Lawr. (nec Bodd ) in Baird's B. N. Am. pp. 892-93
(1858).
PoDiCEPS SUBCRISTATUS, Kittl. (nsc Jacq.) Denhw. Il, p. 313 (1858).
PoDiCEPS AFFiNis, Salvad. Atti Soc. Ital.Se. nat. 1866, p. 45.
PoDiCEPS GRiSEGENA vur. HoLBOLLi, A. Dub. Consp. av. Eur., p. 35(1871).
PoDicEPS SUBCRISTATUS var. MAJOR, Dybow. Journ. f. Om. 1868, p. 339.
PoDiCEPS cucuLLATUs, Tacz. (nec Pall.) Journ. f. Om. 1874, p. 336.
CoLYMBusHOLBOELLii, Baird, Brew. et Ridgw. Water-Dirds N. Am. II, p. 428 (1884).
Pedetaithyia cucullata, Olphe-Gal. Contr. Fne. Om. Eur. occ. fasc. I, p. 97 (1884),
Taille: 0™37; ailes 0,17.
Deseription des deux sexes en été. — Dessus de la tête d'un noir lustré à
reflets verdâtres, avec les plumes occipitales allongées et formant de chaque
côté une huppe touffue, courte et aplatie; joues et gorge d'un beau gris, mais
bordées de blanc; devant et côtés du cou jusqu'au haut de la poitrine d'un
roux vif; région postérieure du cou et toutes les parties dorsales, y compris
les ailes, d'un brun noirâtre avec les bordures des plumes un peu plus claires ;
rémiges brunes, les secondaires blanches, mais les plus supérieures terminées
de brun; flancs et côtés de la poitrine teintés de brun et de roussâtre; parties
ventrales d'un blanc lustré parsemé de petites taches plus ou moins appa-
rentes d'un brun cendré. Bec noir, les commissures et la base de la mandi-
bule inférieure jaunes; iris brun rougeâtre; pattes d'un gris olivâtre sombre»
d'un jaune olivâtre en dedans.
La femelle ne diffère du mâle que par sa taille un peu plus petite.
En hiver. — Sans huppe ; dessus de la tête et du corps très foncés ; gorge et
joues blanches, ces dernières d'un gris argenté au centre; cou d'un roux cen-
dré terne; mandibule inférieure jaune jusque près de son extrémité.
Jeune. — Taille plus petite ; dessus de la tête, du cou et du corps d'un
brun noirâtre; gorge et joues blanches, ces dernières avec deux bandes brunes
partant derrière l'œil, et une troisième en dessous de celles-ci, mais inter-
rompue et moins apparente; devant et côtés du cou d'un roux moins vif que
chez l'adulte; parties inférieures blanches sans taches, lavées de cendré jau-
nâtre pâle sur les côtés de la poitrine et de brun sur les flancs. Pattes d'une
teinte plus claire; iris jaune roussâtre ; bec rougeâtre pâle, la région des nari-
nes et l'arête noirâtres, la mandibule inférieure avec quelques taches.
Poussin. — Ressemble au poussin du Grèbe huppé, dont il se distingue par
l'absence de bandes longitudinales sur le dos et par la teinte d'un brun
violacé de la poitrine. — Duvet épais et soyeux; tête et cou blancs zébrés de
Tome II j— 1894. 87
— 690 —
bandes longitudinales noires; dos d'un brun noirâtre ; poitrine d'un brun vio-
lacé; ventre blanc.
jlab. — Ce Grèbe habite la Scandinavie au sud du cercle arctique
et y niche en grand nombre
{Nilsson, Collett); il niche éga-
lement dans le sud de la Finlande
(Palmên) et dans la majeure par-
tie de la Russie jusqu'à Arkhan
gel, d'où M. Dresser dit en avoir
reçu des exemplaires, mais il est
surtout commun dans le midi de
la Russie [de Nordmann); il
niche aussi en Pologne (Taczanowski), dans beaucoup de localités
de l'Allemagne {Naumann), en Autriche [Hinterberger), en Bohême
{Fritsch), dans la Dobrodja et la Bulgarie {Alléon), mais il est rare
en Transylvanie {Banford). Au Danemark c'est le plus commun des
Grèbes (Collin) et il n'est pas rare en Hollande {Schlégel). On le voit
en Belgique aux passages en automne et au printemps dans les marais
des Flandres, mais il est toujours rare. Il visite régulièrement les îles
Britanniques en hiver : on le voit en petit nombre sur les côtes
orientales de l'Ecosse, de l'Angleterre et aux îles Orcades, moins
souvent sur les côtes occidentales et aux îles Shetland {Seedohm), et
l'on ne connaît que quatre captures en Irlande [Thompson). Cet oiseau
est rare, mais hiverne quelquefois en Suisse {Meisner et Schinz) ; il en
est de même en France, où des jeunes passent irrégulièrement de
septembre à janvier {Degland) et hivernent dans les Pyrénées (L«cro2â?),
Ses apparitions en ItaUe ne sont qu'accidentelles : il a été capturé en
Piémont, en Lombardie,en Vénétie,en Ligurie {Salvadori),en Toscane
(Savi) et une fois en Sicile [Benoit). Il se montre aussi accidentellement
dans le delta du Nil [de Heuglin), mais niche au Maroc [Favier, Irby)
et visite quelquefois lAlgérie en hiver [Loche) ; la présence de cet
oiseau dans le nord-ouest de l'Afrique est d'autant plus remarquable,
qu'il n'a encore été observé ni en Espagne ni en Portugal.
En Asie nous trouvons cette espèce dans la Sibérie occidentale
[Finsch), en Turkestan [Severtzow) et dans le bassin de la mer Cas-
pienne [Radde).
La var. Major ou Holboelli^ habite la Sibérie orientale, la vallée
de l'Amour (•yon>Sc^re>iCi^) jusqu'au Kamtschatka et l'île de Behring
[Stejneger)B.mû que le Japon [Schlégel). En Amérique on la rencontre,
— 691 -
au sud du cercle arctique, depuis l'Alaska (Nelson) jnsqu' slm Groenland
[Ilolbôll); elle hiverne dans le nord des Etats-Unis, mais ne paraît
pas dépasser au sud le 42° 1. N. (New-York); elle niche cependant
dans l'Etat de Minnesota [HatcJi).
Mœurs. — Le Grèbe à gor'ge grise ou Jou-gris est un oiseau migra-
teur : il retourne dans les contrées où il se reproduit entre les mois de
mars et de mai, suivant la latitude, et émigré entre septembre et
novembre; il est cependant à remarquer, qu'il hiverne dans beaucoup
de localités de l'Europe centrale où les eaux ne se couvrent pas de
glace, et dans ces pays il est souvent sédentaire. Il voyage par cou-
ples, en famille ou par petites troupes.
Ce Grèbe a le même genre de vie que le précédent : il se tient peu
sur la mer et sur les fleuves, mais recherche les eaux tranquilles de
l'intérieur abondamment garnies de roseaux et autres herbages. Il se
distingue cependant de son congénère en ce qu'il mène une vie plus
cachée, que son vol est plus léger et qu'il est moins farouche. Bien
que peu sociable, il n'est cependant pas rare de voir plusieurs couples
nicher sur le même étang, mais toujours à une grande distance l'un de
l'autre; il se montre aussi plus tolérant envers les Grèbes appartenant
à d'autres espèces, qui nichent souvent dans son voisinage. Son cri
d'appel est keck^ keck, keck ; au printemps, les deux sexes font enten-
dre un autre cri, leur chant d'amour, mais il n'est pas possible de le
reproduire par des lettres; d'après Naumann, ce cri ressemble à celui
d'un jeune cochon. Cet oiseau se nourrit comme le précédent.
Reproduction. — Les conjoints paraissent unis pour la vie ; l'accou-
plement a lieu à grands cris sur l'eau, et à la fin d'avril commence la
construction du nid, de préférence entre les touffes de roseaux qui
croissent au milieu de l'eau. Les nids sont éloignés les uns des autres
d'une cinquantaine de mètres, et les deux sexes font une construction
analogue à celle du Grèbe précédent. Ce nid repose sur de vieilles
souches d'herbes aquatiques, ou flotte librement entre des roseaux ou
des joncs qui l'empêchent d'être emporté à la dérive; il est formé d'un
tas de végétaux aquatiques entremêlés de boue, que les oiseaux vont
chercher au fond de l'eau. La ponte a lieu en mai, dans le Nord en
juin, et se compose de trois ou quatre œufs qui reposent sur une
litière trempée d'eau. Ces œufs ressemblent à ceux du Grèbe huppé,
mais ils sont plus petits : ils mesurent 48 à 50 millim. sur 32 environ;
ils offrent les mêmes moditications après l'incubation.
Si on enlève les œufs, la femelle en pond de nouveaux, et au besoin
- 692 -
elle sait même faire une troisième ponte, mais les conjoints font chaque
fois un nouveau nid. Mâle et femelle couvent à tour de rôle, jour et
nuit, pendant trois semaines; si un danger les obligea quitter tous
deux leur couvée, ils recouvrent d'abord les œufs d'une touffe de
plantes arrachées au nid. L'attachement des pareutspourleurs petits est
aussi touchant que celui qu'ils se témoignent réciproquement. « Quand
la femelle, dit Naumann, est tuée par un coup de feu, le mâle nage
avec inquiétude autour d'elle et l'examine de tous côtés; ce n'est qu'à
l'approche de la barque ou du chien de chasse qui vient chercher la
dépouille, qu'il s'envole à quelque distance. Lorsque la femelle est
gravement blessée, elle n'abandonne pas son nid, elle se remet, au
contraire, sur ses œufs et continue à couver jusqu'à son dernier
souffle. De son côté, le mâle ne peut se décider à abandonner sa com-
pagne, il pousse des cris lamentables et s'offre en quelque sorte au
chasseur, bien que d'habitude il soit plus prudent etrplus farouche que
la femelle. » Les jeunes vont à l'eau peu après leur naissance, et
apprennent bientôt à plonger ; les parents veillent constamment sur
eux et les prennent sur leur dos quand ils se montrent fatigués.
316. — Le Grèbe oreillard (i).
PODICIPES NIGRICOLLIS {Brehm).
(PI. 318)
CoLYMBUS AURiTus, Briss. Omith. VI, p. 54 (1760).
CoLYMBUS AURITUS, [3 Lin. Syst. nat. 1, p. 223 (1766).
PoDiCEPS AURITUS, Lath . Incf. Orn. II, p. 781 (1790).
PoDiCEPS NIGRICOLLIS, Brehm, Isis, 1830, p. 1000.
PoDiCEPS REOURViROSTRA et ORiENTALis,Brra. Naumannia^ 1855, p. 299,
Dytes NIGRICOLLIS, Ridgw. Nom . N.-Am. B., n°733 (1881) .
Der geohrter Lappentaucher, en allemand.
The black-necked Grèbe, en anglais.
De geoorde Fuut, en flamand.
Var. Californica.
PoDicEPS AURITUS, Nutt., Audub., Bonap. Lawr., etc.
PoDiCEPS californicus, Heerm. Pr. Philad. Acad. 1854, p. 179.
PomcEPS (pROCTOPUs) californicus, Coues, ibidem^ 1862, p. 231 .
(1) Linné a confondu plusieurs espèces sous le nom de C.auritus, ce qui fait que les auteurs ont
adopté cette dénomination tantôt pour l'une {P. nigricollis), tantôt pour l'autre {P xornutus) . Afin
d'éviter toute confusion, il est bon d'abandonner la dénomination de Linné, comme l'ont fait
beaucoup d'auteurs modernes.
- 693 —
PoDiCEPS AURiTus, vat\ cALiFOENicus, Couôs, Key N. Am. 5. , p. 237 (1872).
Dytes NiGRicoLLis CALiFORNicus, Ridgw. Nom. N. Am. B., n°733 (1881).
PoDiCEPS NIGRICOLLIS CALIFORNICUS, Seeb., Brit. B. m, p. 466 (1885).
Taille: 0^21 ; ailes 0,125 (i).
Description des deux sexes adultes 'en été. — Tête, gorge, cou, dos scapu-
laires et ailes noirs, tirant sur le roux marron vers le bas du cou; plumes du
vertex allongées et susceptibles d'érection ; derrière l'œil part une touffe de
longues plumes étroites d'un jaune doré et rousses couvrant la région paro-
tique; rémiges primaires brunes, les secondaires blanches; poitrine et ventre
d'un blanc lustré; côtés de la poitrine et flancs d'un roux marron vif. Bec
noir; iris rouge; pattes d'un brun verdâtre en deliors, cendrées en dedans.
En hiver. — Ne diffère en cette saison du P. cornutus que par une taille un
peu plus petite et par son bec légèrement retroussé.
Jeune en mue. — Dessus de la tête d'un brun noirâtre; nuque d'un brun
cendré; dos et ailes d'un brun noirâtre; des plumes d'un roux doré entremê-
lées de plumes brunes commencent à se montrer sur les régions parotiques ;
gorge blanche tachée de brun; devant du cou cendré; parties inférieures
blanches, les flancs noirâtres.
Poussin. — Dessus de la tête et du cou, dos et flancs couverts d'un duvet
cendré brunâtre; dessus de la tête marqué de traits blancs, dont un sur le
front qui se bifurque à la base de la mandibule supérieure, deux autres tra-
cent au-dessus des yeux deux angles aigus, parallèles, dont les côtés externes
se prolongent jusqu'à la nuque, et d'autres variables sur les côtés de la tête;
gorge, devant du cou, milieu delà poitrine et du ventre d'un blanc pur.
Var. Caîiforniea. — Se distingue par un bec plus court et par l'absence de
blanc sur le bord interne des rémiges primaires voisines des secondaires.
Hab. — Cet oiseau est plus ou moins répandu dans l'Europe cen-
^^^^y^fnxïïFf^ll t^^^l^ ^^ hiverne dans l'Europe
: 1 ll4xss+ ; I y méridionale ; il est cependant
commun et sédentaire en Espa-
gne {Saundcrs) et se reproduit
aussi dans quelques localités du
midi de la France, aux environs
ti'ilti: ' ■ de Nîmes par exemple (Z)e^/a>id
f jxiiî L i I i i 1 JJ j l" "à ^^ Gerbe); mais en Italie et en
Grèce il ne parait se montrer
qu'en hiver ((je^/Zo/z, Lindermayer). EnNorwège on ne connaîtqu'uue
m
(1) Selon M. Gurney, les sujets du sud de l'Afrique seraient un jieu plus petits que ceux de
l'Europe; ceux de l'Amciiquc ont la même taille que les nôtres.
— 694 -
seule capture faite pendant l'hiver de 1863-64 dans le fjord de Tve-
destrand [Colleti); en Suède, il se montre accidentellement sur les îles
et les côtes de la mer Baltique, sans dépasser Upland au nord {Nils-
son); onne le voitnon plus qu'accidentellement en Finlande, où un couple
a été tué en 1853 près de Helsingfors {Palmén), mais il est commun
dans tout le centre et le midi de la Russie {de No?'dmann). Il est rare
en Hollande {Schlégel) et de passage irrégulier en Belgique ; il se
reproduit aux îles Britanniques, mais on ne le voit qu'accidentel-
lement en Ecosse, en Irlande et dans les parties occidentales de l'An-
gleterre {Seebohm).
En Afrique on voit cet oiseau isolément en hiver dans les lagunes
de la Basse-Egypte {de Heuglin), sur le lac Aschangi dans l'Abys-
sinie orientale {Blandford), et communément sur les lacs de l'Algérie
et de la Tunisie [Loche, etc.). Il est sédentaire dans-le sud de l'Afrique
où il niche au Damaras, aux environs de la baie de Walwich {Ande7's-
son), dans la colonie du Gap {Layard), au Transvaal {Ayres), etc.
En Asie, ce Grèbe a été observé dans le sud-ouest de la Sibérie
{Finsch),en Daourie {Dyhoicski),à^x\B la région do V\}^%m:\{Przeioalski),
en un mot depuis le Caucase (/?«(i^e) jusqu'au Japon {Whitely)\ il est
de passage, mais rare, dans le Turkestan {Severtzow), assez répandu
dans le Beloutchistan, près des bouches de l'Indus et le long des côtes
du Sinde et du Mékran {Hume), et visite en hiver toutes les provinces
septentrionales de la Chine jusqu'à Amoy et Pékin [David).
La var. Califomica habite l'Amérique occidentale, à l'ouest du
Mississipi, depuis le grand lac de l'Esclave jusqu'au Guatemala, et à
l'est jusqu'au Texas, le Dakota (Coues), l'Arkansas [Snoio) et ITllinois
{Ridgivay).
Mœurs. — Le Grèbe oreillard émigré de l'Europe centrale en
octobre et novembre et y retourne vers la fin de mars ou en avril,
mais il est plus ou moins sédentaire dans les localités où les eaux ne
se couvrent pas de glace. Il voyage généralement pendant la nuit, en
société en automne, par couples ou isolément au printemps.
Cet oiseau ressemble par ses mœurs à ses congénères surtout au
Grèbe castagneux. Il fréquente les lacs et les étangs garnis de roseaux
et de joncs, au milieu desquels il trouve un abri assuré. II nage et
plonge à la perfection, peut rester une minute sans respirer, et cela
lui suffit pour franchir sous l'eau une distance de plus de cent mètres ;
quand il est poursuivi, il plonge coup sur coup, ne montre qu'une par-
tie de sa tête chaque fois qu'il vient respirer et replonge aussitôt,
~ 695 -
jusqu'à ce qu'il ait atteint les roseaux ; il est rare qu'il s'envole, à
moins que l'eau ne soit de très peu d'étendue. Il est l'un des plus
farouches et des plus prudents de son genre : dès qu'il aperçoit quel-
qu'un, il se cache dans les herbages et ne se laisse plus ni voir, ni
entendre, aussi longtemps qu'on est en vue.
Sa voix est, d'après Naumann, sonore et sifflante, mais il ne la fait
entendre qu'aux époques de la reproduction et des migrations, et le
plus souvent dans la soirée et de grand matin. Son cri débute par bib,
bib, mais bientôt il se transforme en un trille ressemblant à bideioi-
dewideioideivide, et ces syllabes se suivent très rapidement.
La nourriture de cet oiseau consiste également en larves et insectes
aquatiques, plus rarement de frai de poissons et de têtards de gre-
nouilles ; il avale en même temps des conferves et des algues qu'on
trouve ordinairement dans son estomac ; ce dernier contient presque
toujours aussi des plumes en plus ou moins grand nombre, arrachées
à la poitrine ou au ventre et qui sont mêlées aux aliments.
Reproduction. — Le Grèbe oreillard niche de la même manière
que les précédents, mais son nid est placé plus profondément dans les
roseaux ou les joncs, quoique toujours dans un endroit où ces végé-
taux ne soient pas trop rapprochés, ce qui permet souvent de l'aperce-
voir du bord de l'étang. Ce nid est une masse compacte formée de
plantes aquatiques retirées du fond de l'eau et entremêlées de radi-
celles, de brins d'herbes et de bouo. La ponte a lieu en mai dans nos
contrées, en décembre dans le sud de l'Afrique ; elle se compose de
quatre œufs, rarement de cinq, entièrement semblables à ceux du Grèbe
huppé, mais plus petits et on ne saurait les distinguer des œufs du
Grèbe cornu; ils mesurent 44 à 46 millim. sur 29 à 30.
Mâle et femelle couvent à tour de rôle pendant trois semaines. Les
parents se comportent avec leurs petits comme les précédents.
317. — Le Grèbe cornu.
PODICIPES CORNUTUS [Gmel.)
(PI. 319).
COLYMBUS CRISTATUS MINOK et C. CORNUTUS MINOR, HrisS. Oniith. VI, pp. 42, oO
(1760).
CoLYMHUS AURiTUS, Lin. (pai't.) S i/st. nat. I, p. 222(1766).
CoLYMBUS NiGRiCANS, O^uiie) Scop. Ariti. I. Hist, liât., p. 77 (1769).
? CoLYMBUs DUPLiGATUS, P. L. S. Mull. Nalursyst. Suppl., p. 107 (1776).
- 696 —
CoLYMBUS CASPicus, Gmel. Reise d. Russl. IV, p. 137 (1784).
CoLYMBUs CRiSTÀTUs, Mohf (nec Lin.), Islandsh. Naturh. p. 39, pi. 2 (17b6).
PoDiCEPs NiGRiCANS, Lath. Ge?i. Sijnop. suppl. I, p. 294 (1787).
CoLYMBUS coRNUTUS et OBSCURUS, Gmel. Srjst. nat. 1, p. 591 (1788).
PoDicEPS OBSCURUS, CORNUTUS et CASPICUS, Lath. Ind. Om.ll, pp. 782,784 (1790).
PoDiCEPS ARCTicus, Boie, Reise durch Norw., p. 308 (1822).
Dytes CORNUTUS, Kaup, Natilrl. Syst., p. 41 (1829).
PoDiCEPS AMBiGUUS, Less. Traité d'orn., p. 595(1831).
PoDicEPS BicoRNis, Brehm, Isis, 1830, p. 1000.
CoLYMBUs ARCTICUS, Nauin. Vôg. Deutschl. IX, p. 755 (1838).
PoDiCEPS CORNUTUS ARCTICUS, Schleg, Rev. m<.,p. CV (1844).
PoDiCEPS SCLAVUS, Bonap. Compt.-Bend. XLI, p. 249 (1855).
Dytes auritus, Ridgw., Nom. N.-Am. B , n°732 (1882).
Dytes sclavus et ARCTicus,01phe-Gal. Contr. Fne. orn. Eur.occ. fasc. I, p. 100(1884).
Dkr gehornte Lappentaucher, en allemand.
The Sclavonian Grèbe, en anglais.
De HooRNDUiKEE, en flamand.
Taille : 0,30 ; ailes 0,14. ^
Description des deux sexes en été. — Dessus de la tête noir à reflets verdâ-
tres ; joues et gorge noires avec les plumes allongées formant une large colle-
rette ; une large bande d'un roux doré prend naissance aux lorums et se
termine à la région auriculaire, où les plumes sont .allongées et disposées en
touffes formant une espèce de corne de chaque côté de l'occiput ; dessus du
cou et du corps d'un brun noirâtre lustré ; couvertures des ailes moins foncées
que le dos ; rémiges primaires brunes, les secondaires blanches ; devant et
côtés du cou, jabot et flancs d'un roux marron vif, les plumes des flancs termi-
nées de brun ; poitrine et abdomen d'un blanc satiné. Bec noir, rouge à la
pointe et à la base ; iris rouge avec un cercle intérieur jaunâtre ; pattes d'un
noir verdâtre extérieurement, gris jaunâtre pâle en dedans.
En hiver. — Dessus de la tête, du cou et du corps d'un brun noirâtre avec
les plumes du dos bordées de cendré ; ailes comme en été; flancs d'un cendré
brunâtre varié de blanc ; une grande tache blanchâtre devant l'œil; joues,
côtés de l'occiput, devant du cou et toutes les autres parties inférieures d'un
blanc satiné.
Jeune. — Plus petit, moins foncé en dessus que l'adulte en hiver, d'un
blanc plus terne en dessous; gorge et bas des joues variés de roussâtre ;
devant du cou et flancs gris. Bec gris, rosâtre à la base.
Poussin. — Dos, ailes et flancs noirâtres, coupés longitudinalement par des
bandes fauves, peu visibles; tête noire, avec tache ovalaire blanche à l'occiput
et une plaque triangulaire, nue et jaune, au vertex; cette plaque est encadrée
latéralement par des bandes alternes noires et rosées, dont les supérieures
se réunissent au front en angle aigu et forment double bande sourcilière ;
gorge blanche et duvet du cou cendré pâle, mais avec des traits noirs qui
descendent jusque sur les côtés de la poitrine ; ventre blanc, abdomen gris,
- 697 -
lorums et bec jaunes, avec une tache noire et le marteau blanc ; faces externes
des tarses et dessous des membranes noirâtres, les autres parties des pieds
marbrées de brun et de jaune. (J. Vian.)
Hab. — Ce Grèbe est une espèce circompolaire, mais qui ne niche
'•?;%*^ -1 ;* ;%^^ ' "* ' ' î; i excepte en Norvège ; en Europe
on ne le voit au sud de la Bal-
tique qu'à l'époque des passages
ou en hiver. C'est donc un oi-
£-7 rti«^b2--+^"' seau d été pour l'Islande (Faber\
■ ■ ' ' ■ 'Un iiM'' ■ ' ^rwV^'^Wm^ ^^""^ ^^ partie septentrionale de
ElMfiSlMlMîMfaiS 1^ Norwège (Collett) et de la
., ,- LW
Suède (Aï/55on),pour la Finlande
(Palmên) et le nord de la Russie où il niche jusqu'au lac Ladoga
(Meves) ; en résumé, cette espèce paraît nicher au nord d'une ligne
très onduleuse qui dépasse rarement au sud le 60° 1. N. Le Grèbe
cornu est de passage aux îles Féroé {H. C. Muller), au Danemark
(CoUin), en Allemagne (Reichenotv), en Pologne (Taczanoivski), en
Autriche {Hinterherger) et en Transylvanie {Danford et H. Bi^own),
mais il niche dans les grands lacs et sur les bords du Danube, dans
la Dobrodja et la Bulgarie où il est plus ou moins sédentaire (Alléon).
A l'Ouest, on voit cet oiseau en Hollande {Schlégel), mais irréguliè-
rement dans les grands marais des Flandres belges et près de l'Es-
caut. Il ne visite les îles Britanniques qu'en hiver : il est alors
abondant sur les côtes de l'Ecosse, moins répandu sur les côtes orien-
tales de l'Angleterre, mais c'est le plus comnmn des Grèbes qui
visitent les îles Shetland; il est assez fréquent aux îles Orcades et
dans les îles occidentales de l'Ecosse, ne se montre qu'accidentelle-
ment dans le sud de l'Angleterre et en Irlande, et jamais dans les
régions occidentales de l'Angleterre (Seebohm). Ses apparitions dans
les départements du nord de la France sont très irrégulières, et rares
dans le midi {DegL et Gerbe). Le colonel Irby dit en avoir vu un sujet
tiré dans le détroit de Gibraltar en octobre 1867 ; cet oiseau no visite
que très accidentellement les provinces du nord de l'Italie (Gi-
glioli).
Cet oiseau habite en Asie les mémos latitudes qu'en Europe ; il est
commun dans la Sibérie occidentale {Finsch), assez commun sur le
Baïkal et sur les eaux de laDaourie (rac^«nmt?5Âi).Middendorff cite
une femelle tirée près d'Udskoi Ostrog; il est commun aux passages
Tome II. — 1894. 88
— 698 —
en Turkestan {Severtzow) et hiverne en grand nombre sur le lac
Kazrun en Perse {St-John) ; il a également été observé dans le sud-
est de la Mongolie {Prjevalsky), en Chine (Swinhoe), au Japon {Whi-
tcly) et accidentellement au Kamtschatka {Stejneger).
En Amérique cette espèce niche au sud du cercle arctique depuis
l'Alaska (iVe/son) jusqu'au Labrador et le Groenland {Holbôll)\ elle
est commune en automne et en hiver dans le sud des Etats-Unis, mais
rare près des côtes des régions du centre et de l'est (Audubon), et
visite accidentellement les îles Bermudes {Seebohm).
Mœurs. — Le Grèbe cornu émigré des contrées du Nord entre les
mois d'octobre et de décembre, suivant les rigueurs de la saison;
Faber dit qu'un jeune sujet fut encore tué en décembre dans le sud de
l'Islande. Le retour a lieu à partir de mars, et au commencement de la
seconde quinzaine d'avril on le revoit déjà en Islande. Il voyage la
nuit par petites troupes de quatre à sept individus ou par couples.
Cet oiseau vit également sur les eaux douces garnies de joncs et de
roseaux, et ses moeurs ne diffèrent guère de celles des espèces précé-
dentes, mais il est moins farouche. Sa nourriture consiste en insectes
et larves aquatiques, vers et mollusques; les conferves qu'on trouve
dans son estomac sont probablement avalées en même temps que des
insectes, et non comme aliment.
Reproduction. — Ce Grèbe niche dans la seconde quinzaine de mai.
Son nid est une masse flottante formée de plantes aquatiques et de
boue, que l'oiseau construit entre les roseaux et les herbages non loin
du bord de l'étang. La femelle dépose au commencement de juin, dans
l'excavation de ce nid trempé d'eau, quatre ou cinq œufs, rarement
six, qui ressemblent par leur coloration à ceux du Grèbe huppé, ils
mesurent 44 à 46 mill, sur 30. Les parents témoignent à leurs petits
la même tendresse et le même dévouement que les Grèbes précé-
dents.
318. — Le Grèbe castagneux.
PODICIPES MINOR [Briss.)
(PL 320).
CoLYMBUS MINOR et FLUviATiLis, Briss, Ornith^ VI, pp. 56, 59 (1760).
CûLTMBus AURiTUS, var. y. Lin. Syst. nat. I, p. 223 (1766).
CoLYMBUS PYRENAicus, Lapeïr. K. Vet. Ak. Nya Handl. III. p. 111 (1782).
PoBiCEPS MiNUTus et HEBRiDiALis, Lath. Gen. Synop. Suppl. p. 294 (1787).
CoLYMBUS HEBBiDicus, Gmel. Srjst. nat. I, p. 594 (1788).
— 699 —
PoDiCEPS MiNOR, Lath. Ind. Orn. II, p. 784 (1790).
CoLYMBUS PHiLiPPENSis, Bonnat. Encycl. méth. I, p. 58 (1790).
CoLYMBUS MINUTUS, Pall. Zoogr . Rosso-As. II, p. 358 (1811).
PoDiCEPS HEBRiciDUS et PYGM.EUS, Brehm, Isis, 1830, p. 1000.
Sylbeocyclus MINOR, Bonap. Comp. List, p. 64 (1838).
PoDiCEPS NOCTivAGus, Tem. Tabl. Méth. p. 100 (1839).
Sylbeocyclus europ^us, Macg. Ma7i. B. Orn. II, p. 205 (1842).
PoDiCEPS PHILIPPENSIS, Gray, Cat. Mam. B. of Népal, p. 147 (1846).
Tachybaptus minor, Reichb. Av. Syst. Nat. Nalatores pi. 2 (1849).
PoDicEPS PALLiDUS, Brehm, Vogelfany^ p. 403 (1855).
Tachybaptus minor, philippensis et capensis, Bonap. Compt.-rend. XLII, p.775(1857^
PoDiCEPS FLUviATiLis, Degl. et Gerbe, Orn. Eur. II. p. 587 (1867).
PoDiCEPS ALBESCENS (Mandelli). Blanf. Stray Feath. V, p. 486 (1877).
Der Kleine Lappentaucher, en allemand.
The little Grebe, en anglais.
De Dodaars, en flamand
Var. N ovœ-HollandiïB .
PoDiCEPS NOv.E-HOLLANDi^, Stôph. Skaw's Gen. zool. XIII, 1, p. 18(1825).
PoDicEPS gularis, Gould, Proc. .îoo/. ^oc. 1836, p. 145.
PoDiLiMiJUS gularis, Reichb. Syn. av. Natatore.s, pi. VI, f. 758-59 (1848).
Tachybaptus gularis, Bonap. Compt.-Rend. XLII, p. 775 (1856).
PoDiCEPS TRicoLOR (part.) Finsch, Neu-Guin. p. 185 (1865).
Sylbeocyclus nov.^-hollandi^, Gr. Hand-list, III, p. 94 (1871).
PoDiCEPS FLUVIATILIS (part.) Dress. B. of Eur. VIII, p. 659 (1880).
PoDiCEPS MINOR (part.), Schlégel, Seebohm,etc.
Var. Tricolor.
PoDiCEPS (SYLBEOCYCLUS) TRICOLOR, Gray, Proc. zool. Soc. 1860, p. 366.
PoDiCEPS TRICOLOR, Wall. Proc. zool. Soc. 1863, p. 20.
PoDiCEPS gularis, Rosenb. (necGould) Reis. naar Zuidoostereil . , p. 82 (1867).
Poliocephalus TRICOLOR, Gr. Iland-list, III, p. 94 (1871),
PoDiCEPS MINOR var. TRICOLOR, Briigg. Abh. Natww. Ver. Brehm. V. p. 98 (1876).
PoDiCEPS FLUVIATILIS (part.) Dress. B. ofEur. VIII, p. 659 (1880).
PoDiCEPS MINOR (part.) Schléirel, Seebolim, etc.
Var. Pelzelni.
PoDiCEPS PELZELNI, Hartl. Ornith. Beifr. z. Fauna Mndag., p. 83 (1861).
Sylbeocyclus capensis, Gr. (part.) Hand-list, p. 94 (1871).
PoDiCEPS minor var. Pelzelni, A. Milne-Edw , Hiat. phys. nat. et pol. de Madag.
Oiseaux, p. 710 (1879).
Taille : 0'^22 ; ailes 0'"105 (individus do Belgique).
Description des deux sexes adultes en été, — Dessus de la tête et partie posté-
— 700 —
rieiire du cou d'un noir plus ou moins brunâtre à reflets verdâtres; partie
antérieure des joues et gorge noires; le reste des joues, devantet côtés du cou
d'un roux marron vif; parties supérieures du corps noirâtres et luisantes;
rémiges primaires brunes, les secondaires blanches avec une grande tache
brune sur la barbe externe; poitrine et flancs d'un brun varié de roussâtre;
milieu de l'abdomen d'un cendré plus ou moins mélangé de blanc; croupion
et ses côtés d'un roux clair varié de blanc. Bec noir, jaunâtre à la pointe, les
commissures d'un jaune verdâtre pâle, partie nue des lorums plus sombre;
iris d'un brun rouge ; pieds d'un brun verdâtre en dehors, rosés en dedans.
La femelle est un peu plus petite, le roux du cou descend moins bas que
chez le mâle, et les parties ventrales sont plus claires.
Les deux sexes en hiver. — Dessus de la tête, nuque et dos d'un brun cendré
foncé, légèrement lavé de roussâtre ; ailes comme en été; gorge, poitrine et
ventre d'un blanc lustré, lavé de cendré roussâtre sur les flancs ; joues, côtés
et devant du cou d'un cendré roussâtre ; région anale grisâtre, les côtés du
croupion variés de roux. Bec brun à pointe blanchâtre, commissures et
lorums plus sombres qu'en été.
Jeune. — Ressemble aux adultes en hiver, mais plus petit; derrière l'œil
une raie noire au-dessous de laquelle se trouve une autre variée de blanc ;
joues blanchâtres; les parties inférieures d'un blanc moins pur, les flancs d'un
cendré roussâtre foncé. Bec roussâtre à pointe blanche.
Poussin. — D'un brun foncé en dessus, le devant de la tête cendré, noirâtre
près de la naissance du bec ; une raie blanchâtre derrière l'œil, une raie
rousse au-dessus et une tache de même couleur sur la tête ; cou d'un brun
foncé marqué de six bandes roussâtres, dont deux sur le devant, les deux
médianes se réunissent sur l'occiput ; quatre bandes longitudinales rousses
sur le dos et une sur les flancs ; poitrine et ventre d'un blanc pur ; bec jaune
à extrémité blanche.
Var. Trieolor. — Diffère du type ci-dessus par l'absence de noir sur la par-
tie antérieure des joues et à la gorge, ces parties étant d'un roux marron vif.
Var. Novœ-Hollandiœ. — Gorge et joues noires ou noirâtres ; une étroite
bande d'un roux marron vif prend naissance derrière l'œil, borde les joues
supérieurement en s'élargissant et couvre les côtés du haut du cou ; le reste
du plumage comme chez le P. minor.
Var. Pelzeîni. — Le mâle se distingue de ceux de l'Europe par un bec entiè-
rement noir, sans teinte claire à la pointe et aux commissures, et le ventre
est plus blanc. (Sujet d'Anjouan, l'une des îles Comores). — M. A. Milne-
Edwards dit que chez les femelles, les côtés du cou sont seuls d'un brun rouge,
les joues sont, ainsi que le menton, d'un gris clair avec une petite bande blan-
che en arrière de Fœil, et le ventre d'un beau blanc. (HisL phys. nat. et
pol. de Madag. Oiseaux, p. 711.)
— 701 -
Hab. — Le Grèbe castagneux est plus ou moins commun dans toute
^^sm=fTEm l'Europe centrale et méridionale,
mais il est rare dans le sud de
la Scandinavie où il ne dépasse
À pas le 62*' 1. N. {Collett.Mlsson) ;
À il est également très rare dans la
Russie centrale, mais se montre
accidentellement jusqu'en Fin-
I4'W lande, où un sujet a été capturé
£££5i., pj,^g ^g Helsingfors {Palmén).
En Belgique il est sédentaire et généralement commun, surtout en
hiver : dans cette saison il se retire sur les rivières et les ruisseaux à
courant rapide, et il est alors, d'après M. Groegaert, très commun sur
l'Escaut. Il est également commun et sédentaire dans tout le midi de
l'Europe.
Cette espèce est aussi plus ou moins répandue dans toute l'Afrique
jusqu'au Cap (Layard). En Asie on le rencontre depuis la mer Cas-
pienne et le Turkestan {Secertzoïv) jusqu'en Chine {David), au Japon
ISclilégel) et aux Philippines [Steere], mais sa présence ne paraît pas
encore avoir été constatée en Sibérie et en Mongolie; on Tobserve dans
tout le sud de l'Asie jusqu'à Ceylan et dans l'Indo-Chine.
La var. Novœ-hollandiœ habite l'Australie {Gould, Ramsaij) et la
Nouvelle-Guinée {D'Albertis).
La var. Tnco/or est répandue aux Moluques, à Ternate (Wallace),
à Halmahera (Bernstein), à Batjan (Finsch), à Amboine, Céram, Kei,
Arou {von Rosenherr/), à Célèbes {Meyer^Blasius), à Timor, Flores
( Wallace) et à Java (Musée. Brux.).
Enfin, la var. Pelzelni habite Madagascar {Hartlaub) et les îles
Comores {Musée Brux.).
Mœurs, — Le Grèbe castagneux émigré au commencement de
novembre des régions les plus septentrionales de son habitat, et
voyage la nuit par petites troupes, mais composées parfois de plus de
vingt sujets; au printemps il retourne dans le pays qui l'a vu naître,
mais voyage alors par couples ou isolément. Il habite les étangs et les
marais bien garnis de roseaux et de joncs, et ne so montre qu'en hiver
sur les fleuves et les rivières; il recherche surtout les eaux de peu
d'étendue et en partie couvertes de lemnacées, deconferves et d'algues.
Ce Grèbe ressemble aux précédents par ses mœurs et ses allures»
il semble cependant se mouvoir avec plus do facilité que les grandes
— 702 —
espèces, et court relativement assez bien. Dans l'art de nager et de
plonger il dépasse en agilité tous ses congénères, mais se montre
aussi rarement qu'eux sur la terre ferme. Quand il plonge, il nage sous
Teau avec une extrême dextérité, et au bout d'une minute on le voit
souvent revenir à la surface à près de deux cents mètres de l'endroit
où il a fait le plongeon. « Jamais, dit Droste-Hiilshoff, il ne quitte un
étang pendant le jour, il se laisse plutôt prendre avec la main; j'en
ai pris plusieurs fois dans des étangs mis à sec, et aucun ne cherchait
à s'envoler. » Le baron d'Hamonville rapporte un fait analogue :
« Lorsqu'à la fin de mars on lâche l'eau des derniers étangs en pêche,
dit cet auteur, ces oiseaux se trouvent à sec et, ne pouvant plonger,
cherchent leur salut dans la fuite à pied, sans essayer de s'envoler.
Plusieurs fois j'en ai pris à la main ; je les lançais en l'air, mais ils
retombaient immédiatement sur le sol; d'autres fois, j'en ai rapporté
que je lâchais sur un petit réservoir et aussitôt ils se perdaient sous
l'eau comme de véritables poissons. »
Cet oiseau vole plus mal que les- autres Grèbes, quoique assez vite
quand il a atteint une certaine hauteur, mais lourdement et avec des
oscillations rapides; on voit que ce système de locomotion le fatigue
beaucoup, aussi est-il rare de le voir voler en plein jour; quand il
veut passer d'un étang à un autre, c'est pendant la nuit qu'il y vole.
Il est extrêmement farouche et se réfugie dans l'eau dès qu'on
approche; là il se cache souvent entre les herbages flottants, ne lais-
sant sortir de l'eau qu'une partie de sa tête, et c'est ainsi qu'il attend
patiemment que le danger ait disparu ; mais on a vu plus haut com-
bien il est facile de s'emparer de cet oiseau quand il est à sec. Il se
nourrit d'insectes et de larves aquatiques, crustacés, mollusques, ainsi
que de poissons et de grenouilles de très petite taille. Il ne fait
entendre sa voix que près du nid, et seulement après le coucher du
soleil et pendant la nuit; son cri ressemble à bibi, hibib, et parfois
aussi à bhvhvib ou wit, ivit.
Reproduction, — Le Grèbe castagneux niche entre les roseaux,
les joncs ou autres hautes herbes aquatiques, mais ne cache guère
son nid; celui-ci est même parfois complètement à découvert, mais
aussi éloigné que possible du bord de l'étang. Il repose parfois sur
une veille souche ou sur des herbes renversées, mais souvent aussi
il flotte librement entre les hautes herbes qui l'empêchent d'être
emporté par le vent. Hume dit que dans l'Inde, le nid est souvent
fixé dans les branches d'un arbre suspendues sur l'eau et à une
- 703 —
couple de pieds au-dessus du niveau ; il est alors formé d'herbes
diverses (1). En Europe, le nid ressemble à celui des autres Grèbes,
mais il est relativement plus grand et légèrement excavé au sommet;
il est formé de diverses plantes aquatiques {Myriophillum, Cerato-
phyllum, Potamogeton, etc.), entremêlées de radicelles, de brins
d'herbes et de boue. La ponte est de trois à cinq œufs ; elle a lieu,
dans nos contrées, vers la fin d'avril ou en mai, suivant la saison;
au Kachmir, la ponte se fait vers la mi-mai, dans d'autres parties de
l'Inde, en juin et en août, et dans le sud de l'Afrique, en janvier.
Les œufs sont de forme assez variable, mais ressemblent à ceux des
autres Grèbes; ils mesurent 34 à 39 millim. sur 25 à 26. Mâle et
femelle couvent à tour de rôle pendant 20 à 21 jours, et se compor-
tent avec leurs petits comme les autres Grèbes.
Dans l'atlas du présent ouvrage j'ai figuré, à la suite des Grèbes,
quelques oiseaux nouvellement observés en Belgique, dont je vais
maintenant m'occuper. Leur numéro d'ordre indique la place qu'ils
doivent prendre dans la série.
4bis _ L'Aigle Bonelli
NISAETUS FASCIATUS. Dress. ex Vieill. (2)
(PI. 321).
Aquila fasciata, Vieill., Mém. de la Soc. Linn. de Paris, p. 152 (1822).
Falco bonelli, Tem., PI. col. pi. 288 (1824).
Aquila intermedia, Boitard (1825), d'après Degl. et Gerbe, Omith. Eur. I, p. 32.
Aquila bonelli, Less. Man. d'Orn. I, p. 83 (1828).
NiSAETUs GRANDIS, Hodgs, Jowti. As. Soc. Ben;/. V, p. 230 (1836).
NiSAKTUS NiVEUS, Jerd. Madr. Journ. X, p. 69 (1839).
Spizaetus grandis, Blyth, Journ. Ai. Soc. Beng. XII, p. 301 (1843).
Aquila rubriventkr, Hodgs. Gr. Zool. M'jsc.,p. 81 (1844).
EuTOLMAETUS BONELLI, Hlytli, Joiim. As. Soc. Beng. XIV, p. 174 (1845).
ToLMAETUS BONELLI, Blyth, ibidem XV, p. 5 (1846).
NiSAETUS STRENUUS, Jerd., m. Ind. Om., pi. 1 (1847).
Falco ducalis (Licht.), Bonap. Consp. I, p. 14 (1850).
Aquila wiedii, A. Brm. Naumannia (1855), p. 25.
PSKUDAETUS BONELLI, Boiiap. Cat. Parz. p. 1 (1856).
(1) .\. Hume, Nests anJ .;.v^ .'/ InUan Birds, p. (546, Calcutta, 187'V
(8) Le genre .Viscutiis se distingue des .Vigies proprement dits par dos ailt-s plus courtes
et des doigts plus longs et plus grêles, ce qui r.approche ces oiseaux des Autours, dont ils
ont aussi les mœurs et les habitudes carnassières. *^
Aquilastur bonelli et wiedii, L. Brm,, Alhj. naturh. Zeit. II, pp. 53, 54 (1856).
NiSAETUS FASCiATUS, Dress. B. of Eur. V, p. 575 (1874).
Der Habichts-adler, en allemand.
The Bonelli 's Eagle, en anglais.
De Bonelli-Arend, en flamand.
Taille : mâle O'^Sô ; femelle 0,69; ailes 0,54.
Description du mâle adulte. — Parties supérieures d'un brun noirâtre avec
quelques taches blanches à la nuque et sur le haut du dos (iDrovenant de ce
que la base des plumes est blanche), les scapulaires et les couvertures des
ailes bordées de cendré roussâtre ; région parotique d'un blanc lavé de rous-
sâtre et strié de noir ; parties inférieures d'un blanc assez pur nuancé de cendré
roussâtre sur les côtés du cou, avec une strie brune au centre des plumes, plus
large sur les côtés du cou et à la poitrine, réduite au rachis, au bas-ventre et
sur les sous-caudales; plumes des jambes et des tarses_également blanches
avec une strie brune, mais les premières largement barrées de brun roux, de
façon que cette dernière teinte domine souvent; rémiges primaires noirâtres,
les secondaires brun foncé avec un petit bord terminal blanchâtre; queue d'un
cendré brunâtre en dessus, barrée irrégulièrement de brun, terminée par une
large bande d'un brun plus foncé et un petit liséré roussâtre, bord interne des
rectrices marbré de brun sur un fond clair. Bec brun de corne ; iris d'un jaune
brunâtre ; cire et doigts jaunes. (Sujet de V Europe méridionale.)
Femelle adulte. — Ressemble au mâle, mais d'une taille beaucoup plus
forte. Les stries des parties inférieures sont plus larges, de forme lancéolée,
sur le ventre elles prennent même une forme irrégulière et sont souvent
accompagnées de taches transversales, surtout sur les sous-caudales ; plumes
des jambes d'un cendré brunâtre tachetées de roussâtre. (Sujet du Népaul.)
Jeune mâle. — Partie antérieure de la tête d'un brun noirâtre avec les
plumes bordées de cendré roussâtre ; occiput, nuque, côtés et devant du cou
d'un cendré roux avec une strie lancéolée noirâtre au centre des plumes ;
gorge blanchâtre mais avec les mêmes stries brunes ; dos et ailes d'un brun
plus ou moins foncé avec les bords des plumes plus clairs ; rémiges comme
chez l'adulte ; parties inférieures roussâtres, mais passant insensiblement au
blanc roussâtre au ventre, sur les sous-caudales et les tarses; poitrine avec une
strie noirâtre au centre des plumes, mais réduite au rachis sur l'abdomen et
sur les jambes, et disparaissant complètement au bas-ventre et sur les sous-
caudales ; les plumes des jambes offrent aussi à leur base des taches brunâtres
transversales mais peu apparentes ; queue comme chez l'adulte, mais les
barres transversales plus régulières et plus apparentes, la dernière pas plus
large que les autres. Iris brun clair. [Sujet tué à Bornhem, Belgique).
— TOo —
Hab. — Ce rapace habite le midi de l'Europe, le nord de l'Afrique
^, et l'Inde, et visite accidentelle-
lijj ment certaines parties de l'Eu-
'\ rope centrale ; c'est ainsi qu'il a
5^1 été capturé deux fois en Bohême
j {Fritsch), ainsi que près du Da-
nube inférieur (Hudleston), dans
^tirtt^P^-jii t^^p-S le midi de la Russie (de Nord-
l^Lr|lmffi.iijl44imï^ mann) et en Belgique ; dans
^..^m^'^^fë^tp^^ii^^y^-^..^'^,^,^^,,^.^.^, notre pays, un individu a ete tue
aux environs d'Esncux, près de Lioge,en septembre 1879, et un jeune
mâle a été tiré à Bornhem (prov. d'Anvers), le 23 mars 1889 ; j'ai
pu acquérir ce dernier pour le Musée de l'Etat à Bruxelles.
Dans le midi de la France, il est de passage en automne et au
printemps dans les régions limitrophes des Pyrénées, où il ne niche
qu'accidentellement {Loxroix) ; il est assez commun dans les monta-
gnes de l'Espagne qui avoisinent la mer et les marais, et niche régu-
lièrement aussi sur le rocher de Gibraltar (Saunders), ainsi qu'en
Portugal {Barboza di(, Bocage) ; en Italie il semble être de passage et
assez rare, mais il est commun et sédentaire en Sicile et en Sardaigne
{Malherbe, Broohe) et peut-être en Corse ; il habite également la Grèce
où il paraît peu abondant [Lindermai/er). Il est assez commun en Pa-
lestine (Tristram), dans l'Arabie Pétrée {A. Brehm), dans la Haute-
Egypte, en Nubie et au Sennaar [Antinori), mais peu abondant dans
la Basse-Egypte et près du Nil {de Heuglin) ; il est également commun
au Maroc {Irby), en Algérie {Loche), en Tunisie {Salvin) et on l'a aussi
capturé au Sénégal {Hartlaub).
Il est signalé au pays desDamaras par Andersson et dans la colonie
du Cap par Layard; mais d'après le D" Sharpe,les individus du sud do
l'Afrique appartiendraient à une espèce voisine (le iV. Spilogaster);
il est donc probable qu'il en est de même pour les sujets du Damaras.
L'Aigle bonelli est aussi très répandu dans l'Inde entière jusqu'aux
monts Himalaya {Jerdon) et à Ceylan {Layard).
Mo'Mvs. — Cet Aigle se tient dans les montagnes déboisées, et dans
l'Inde on le rencontre surtout dans les collines couvertes par les
jungles; des montagnes il rayonne dans les plaines plus ou moins
marécageuses des environs et quand il n'est pas retenu par la repro-
duction, il erre au loin dans les contrées voisines.
L'Aigle bonelli est très agile, courageux, hardi, impudent même; il
Tome II. — 1894. 8'J
— 706 —
a toutes les qualités de l'Autour, mais il est encore mieux doué que lui.
Son vol ressemble plus à celui des Faucons qu'à celui des Aigles propre-
ment dits; comme ces derniers, il plane en décrivant de grands cer
clés, mais en volant, dit A. Brehm, il donne des coups d'ailes bien plus
répétés, aussi a-t-il un vol plus rapide que les Aigles. Il réunit la
vigueur du Faucon à l'agilité de l'Epervier, et le courage de l'Aigle
fauve à la férocité de l'Autour, aussi ne craint-il aucun oiseau ; Krùper
vit un Nisaète bonelli attaquer un Pjgargue, qui est cependant un
adversaire bien redoutable; Brehm dit avoir assisté à ses combats
avec le Vautour cendré et l'Aigle fauve. Il attaque tous les oiseaux
et les mammifères de la taille d'un lièvre et au-dessous; c'est le plus
terrible ennemi des poules et des pigeons et occasionne de grands
ravages dans les fermes. Près des eaux, il fait la chasse aux canards,
aux poules d'eau, aux vanneaux et même aux hérons; en pleine cam-
pagne il poursuit les perdrix, les lièvres et les lapins, et enlève aux
autres rapaces la proie qu'ils ont capturée ; dans l'Inde il attaque le
Faucon dressé pour la chasse et parvient souvent à le tuer, si celui-
ci ne lâche pas de suite sa prise.
Reproduction. — Ce rapace niche dans les crevasses des rochers
les plus inaccessibles, et accidentellement sur un arbre élevé; Hume
dit avoir trouvé dans l'Inde, l'aire de cet oiseau construite sur un grand
figuier {Ficus religiosoi). L'aire, d'après cet auteur, est très vaste, et
mesure quatre à six pieds anglais de diamètre ; elle est composée de
branches et de feuilles, et au centre se trouve une cavité circulaire d'en-
viron douze pouces de diamètre, garnie d'une couche moelleuse de fines
branches et de feuilles. La ponte est de un ou deux œufs, quelquefois
trois ; dans les plaines de l'Inde elle a lieu dans la seconde quinzaine
de décembre, dans l'Himalaya en avril, en Espagne à la fin de février
ou au commencement de mars. L'œuf est, d'après Thinemann, blan-
châtre avec des taches nuageuses d'un roux violacé pâle, les superfi-
cielles plus sombres ; il paraît quOTi trouve aussi des œufs d'un blanc
gale et immaculés ou marqués de petites taches peu apparentes ; ils
mesurent environ 64 millim. sur 52. Les parents, pour défendre leur
couvée, déploient autant de courage que dans toute autre circonstance.
— 707 —
33''''. — Le Martinet alpin.
CYPSELUS MELBA, r/lig. ex Lia.
.(PI- 322).
HiRUNDO MAJOR HiSHANiCA, Briss. Omitli. II, p. 504 (1760).
HiRUNbo MELBA, Lin. Syst. nat. I, p. 345 (1766).
HiRUNDO ALPiNA, .Scop. Ann. I. Ilist. 7inl., p. 166 (1769).
MiCROPUS ALPiNUS, Wolf, Tasehenb. deut. Yikjelk. I. p. 282(1810).
Cypselusmelra, lUig. Prorlr. p. 2.30 (1811).
HiRUNDO CrULARis, Steph Shaw '5 Gen. Zool.l^^ p. 09 (1817).
Cypselusgutturalis, Vieil. Tahl. Encycl. Méth . p. 534 (1822).
Cypselus ALPINUS, Mey. Tasehenb, Zus. u. Ber., p. 255(1822).
MiCROPUS MELBA et GUTTURALis, Boie, Isis, 1844, p. 165.
Cypselus fuscicollis, Brm. Naumajmia, 1855, p. 270.
Cypselus melba alpinus, euscicollis et microriiynchos. A. Brm.. Vers. Samml.
C.L.Brehm,ii.Z.{\HQQ).
Der ALPENSEGLER, en allemand.
The alpine sm'IFt, en anglais.
De alpen-steenzwaluw, en flamand.
Taille: 0"'20; ailes 0,23.
Description du mâle adulte, — Parties supérieures, une large bande pecto-
rale, flancs et sous-caudales d'un brun cendré uniforme ; gorge, devant du
cou et les autres parties inférieures au delà de la bande pectorale, d'un blanc
pur; rémiges et queue d'un brun coirâtre ; plumes des tarses brunes. Iris
brun ; bec et pattes noires.
Femelle. — KUc ne diffère du mâle que par la l)ande pectorale qui est
moins largo.
Jeune. — Ressemble aux adultes, mais toutes les plumes des parties fon-
cées sont bordées de cendré blanchâtre.
Ilaù. — Ce M arlinet habite en été les régions alpines de rEuropo con
TtximssitMimrtti'' ^kt^ywi-" r>jtci5''V5»''Ht?p3îiii'4*ft'j(42Ç3'n iiaie eij niericiionaie • 11 6Si com—
•%^-W^
inun dans les Alpes de la Suisse
(Tschudi), i^cis rare dans colles du
-îjJ Tyrol, de la Haute-Autriche et
de Salzbourg {Hinterberger) et
^«■v visite accidentellement les con-
* trées voisines de l'Allemagne
• ' {Rcichenofc); un exemplaire a
'~- même été tué dans Julland, sur
l'Ile Mors, le 17 juin I.S04 (A7V/e/'&w//m(7),et Ratzeburg a observé une
volée à llelgoland dont quelques sujets furent tués {Borggrcve): plus
— 708 -
récemment, M. Gaetke en a également obtenu sur cette île. On ne
connaît qu'une seule capture en Belgique : « Vers la fin de septembre
1886, dit M. F. AVautier, M. J. Denis vit tournoyer autour de son
château, à Noville-sur-Méhaigne (Brabant),deux Martinets plus grands
et plus gris que ceux qu'il était habitué de voir dans son parc. Afin
d'en connaître l'espèce, il en tua un et me le fit remettre ; le second
individu n'a disparu que plusieurs jours après la mort de son compa-
gnon (1). » M. Wauthier a eu l'obligeance de m'envoyer cet oiseau et
d'en faire don à notre Musée royal; j'ai pu ainsi m'assurer que c'était
bien un C. melha. Plusieurs sujets ont aussi été capturés à diverses
époques en Angleterre et en Irlande {Seehohm).
Le Martinet alpin est assez répandu en France dans les Alpes et les
Pyrénées (Z)e^/. et Ge7-l)e), en Portugal (S«r5o^a du Bocage), en Espa-
gne [Saunders], aux îles Baléares {von Homeye?')-r-à l'île de Malte
(Wright), en Sicile, en Sardaigne et en Corse, mais il est peu abon-
dant dans les montagnes de l'Italie continentale {Giglioli); il est gène
ralement répandu dans les montagnes de la Grèce {Lindermai/er) et
de la Turquie [Ehves et Buckley), mais rare dans laDobrodja et la Bul-
garie (Alléon), par contre il est abondant dans toute la chaîne ue
montagnes des côtes sud et sud-est de la Crimée, de même que dans
les districts montagneux des provinces de la côte orientale de la mer
Noire {de Nordmann), et en Transcaucasie on Tobserve jusqu'à 9,000
pieds d'altitude, mais il est peu abondant {Raddé) ; dans les monts
Ourals on le rencontre jusqu'au 55° 1. N. {Seehohm).
Cet oiseau niche également dans les montagnes du nord de l'Afri-
que, où il est abondant lors des passages {Loche, etc.), mais il est rare
aux passages en Egypte et en Nubie {Shelley). A l'Est son habitat
s'étend jusqu'aux montagnes de l'Asie Mineure, de la Palestine, du
Turkestan occidental, de l'Himalaya occidental, et il est sédentaire
dans l'Inde et à Ceylan {Tristram, Severtzow, Jerdon, etc.). Il est
également sédentaire en Abyssinie, mais dans le sud de l'Afrique on
ne le voit qu'en automne et en hiver {Atidersso^i, Layard, Seehohm).
Mœurs. — C'est un oiseau migrateur, qui quitte les régions monta-
gneuses de l'Europe, de l'Asie centrale et du nord de l'Afrique au
commencement de l'automne ; en Suisse, dit Tschudi, il arrive com-
munément à la fin de mars, commence à nicher à la fin de mai, et part
pendant la nuit vers la fin de septembre. Dans le midi de l'Europe il
(1) Ccmipte r*ndu des observations ornitliologiqncs faites en. Bi'li^i(jiie^çw\A\é dans VOniis de 1890.
— 709 —
arrive à la même époque, probablement quelques jours plus tôt et tou-
jours avant leMartinet noir.
Le Martinet alpin est très sociable et il est rare de rencontrer un
couple isolé. Ses mœurs ressemblent à celles de l'espèce indigène ; il
est extraordinairement turbulent et agité, et par le beau temps il est
toujours lancé dans les airs, souvent à une hauteur prodigieuse, et y
exécute ses changements de front avec la rapidité de l'éclair. 11 ne vit
pas exclusivement dans les montagnes, car en Suisse on le voit nicher
sur les tours des villes et des villages et voler à travers les rues jus-
qu'à la nuit close. Spallanzani, qui a observé de ces oiseaux dans
divers pays, dit qu'au milieu de leurs ébats autour des rochers « ils
s'arrêtent et s'accrochent par les ongles aux blocs de pierre situés
dans le voisinage de leurs nids ; aux premiers qui se sont accrochés,
d'autres viennent s'attacher, et à ces derniers d'autres encore formant
ainsi une chaîne oscillante et animée. Un instant après, ils se séparent,
volent et recommencent leurs cris accoutumés. » Le cri de ce Marti-
net a quelque analogie avec celui de la Crécerelle, et consiste en un
guiri guiri guiri , diversement modulé. Sa nourriture consiste en
insectes ailés qu'il attrape au vol.
Reproduction. — Le Martinet alpin niche dans les trous et les
crevasses des rochers et des murs élevés, dans des grottes, etc.;
Malherbe dit avoir observé un couple nichant sur la digue de lave qui
forme la partie nord du port de Catane. En Suisse, c'est dans la
seconde semaine de mai qu'il commence à faire son nid ; celui-ci est
plat et formé de brins de paille, de fouilles, de chiffons, de plumes, de
fragments de papier, toutes choses enlevées par le vent et que l'oiseau
attrape en l'air, car il est rare qu'il se pose sur le sol ; le tout est
agglutiné à l'aide de salive, qui devient en séchant dure et brillante.
Hume dit que dans l'Inde on voit parfois trois ou quatre nids groupés
en une seule masse. La ponte a lieu à la fin de mai et se compose de
trois ou quatre œufs blancs, de forme allongée et mesurant 28 millim.
sur 18. La durée de l'incubation est de trois semaines, et les petits
quittent leur nid au bout de six à sept semaines, c'est-cà-diro vers le
commencement d'août. Tscluuli dit (ju'il en niche tous les ans 40 à 50
couples dans le vieux clocher de la cathédrale de Berne, et que le
gardien de la tour est chargé spécialement de protéger ces oiseaux.
- 710 —
103^i^ — Parus cœruleus.
Var. Pleskii.
(PI. 323, fig. 1, 2.)
Parus pleskii, Cab. Joum. f. Orn. 1877, p. 213, pi. 3, fig. 1.
CvANiSTES PLESKII, Cab. ibidem, 1878, p. 109 (1).
Taille : 0,114 ; ailes 0,065.
Description de T adulte (mâle?). — Front, raie sourcilière et joues d'un blanc
pur ; dessus de la tête d'un bleu azuré suivi d'une bande d'un blanc lilas qui
s'unit aux raies sourcilières ; lorum et une raie derrière l'œil noirâtres ; collier
d'un noir bleu, plus large sur les côtés, remontant jusque sous le bec, mais
les plumes de la gorge terminées de blanc; nuque, derrière le collier noir,
d'un blanc lilas; dos d'un gris bleuâtre, plus clair au croupion; couvertures
des ailes d'un bleu grisâtre, les plus grandes terminée§~de blanc ; rémiges
primaires brunes avec un bord interne blanc et la barbe externe bleue à la
base, blanche à l'extrémité ; les secondaires terminées de blanc ; queue d'un
bleu grisâtre ; côtés de la poitrine d'un jaune pâle ; milieu de la poitrine
noirâtre ; les autres parties inférieures blanchâtres (Sujet de Moscou de la
coll. de M. de Selys-Longchamps).
Femelle ? — Diffère du sujet décrit ci- dessus par l'absence presque com-
plète de jaune sur les côtés de la poitrine et par la couleur de son menton
qui est blanc, tandis qu'il est noir chez l'individu ci-dessus. (Sujet pris en
Belgique, fig. 2 de notre planche, appartenant également à M. de Selys-
Longchamps).
Hab. — Cet oiseau habite le nord-est de la Russie vers l'Oural, et
le nord-ouest de la Sibérie [Cabanis] ; il niche régulièrement, mais
eu petit nombre, dans les environs de Saint-Pétersbourg [Bûchner).
Un individu a été pris à Liège dans le jardin de M. Oscar Lamarche,
en décembre 1878 (de Selys-Longchamps).
Remarque. — Cette Mésange a été décrite par M. Cabanis comme
une espèce distincte et nouvelle. Je partage cependant plutôt l'avis
de M. le baron Edm. de Selys-Longchamps, qui la considère comme
une simple race ou variété climatôrique du P. cœruleus. La capture
d'un P. pleskii en Belgique, parfaitement semblable aux sujets
russes, pourrait même faire supposer qu'il ne s'agit que d'un cas
d'albinisme partiel qui serait assez fréquent en Russie.
(1) Voyez aussi : Edm. de Selys-Longchamps, Considêratiotis sur le genre Mésange {Bullet. de
la Soc. Zool. de France, IX, 1884, p. 69j. — E. Biichner, Die Vôgel des St-Pctershurger Gouver-
nements^ p. 26. Saint- Petersburg, 1886.
- 711 —
A la même époque où M. Cabanis décrivait cette Mésange comme
espèce, M. Severtzow la décrivait comme un hybride du P. cyaneus
et du P. cœruleus (1).
Devant cette divergence d'opinions et le manque d'observations,
il est bon de ne rien conclurQ pour le moment et d'attendre de nou-
velles observations ayant surtout rapport à la reproduction de cette
Mésange (2).
122bis. _ La Calandre nègre.
MELANOCORYPHA YELTONIENSIS, Bp. ex Forst.
(PI. 324.)
Alauda YELTONIENSIS, Forst. Phil. Trcuis. LVII, p. 350 (1767).
Alauda mutabilis, Gm. N. Comm. Ac. Se. Imp. Petrop. XV, pi. 23, fig, 2 (1771).
Alauda tatarica, Pall. Reis. Russ. Reichs, II, Anh. p. 707 (1773).
Tanagra sibirica, Sparrm. Mus. Caris. I, pi. 19 (1786).
Alauda nigra, Steph. Shaw's Gen. Zool. XIV, p. 25 (1826).
Melanocorypha tartarica, Boie, /sis, 1828, p. 322.
Saxilauda tartarica, Less., Compl. Buff. Ois. Il, p. 125 (1837).
Melanocorypha YELTONIENSIS, Bonap., Consp. I, p. 242 (1850).
Calandra NIGRA, G. F. Dub., PI. col. Ois. Belg. II, p. 102^ (1857).
NiGRiLAUDA NIGRA, Bogdanow, Ois. du Cauc. (en russe), p. 76(1879).
Die Mohrenlerche, en allemand.
The BLACK Lark, en anglais.
De zwarte Leeuwerik, en flamand.
rrtz7/e .• Mâle 0^18; ailes 0,131; femelle 0,155; ailes 0,116.
Description du mâle adulte en été. — D'un noir unifonne, les plumes du dos
(1) Voy. BitH. de la Soc. Zool. de France-, II, 1877, p. 320.
(2) Dans le Compte remlu des observations ornithologiq'ies faites en Beli^iqiie^ et publié dans
VOrnis fti\ 1890, j'ai annoncé (p. 296) qu'un Emberiza chrysophrys, l'ail, avait été pris au filet
à Evergem-lez-Gand en octobre 1877. Cet oiseau, qui fait partie de la collection de M. le comte
J. de Hemptinne, a été figuré dans l'atlas du présent ouvrage (pi. 323, fig. 4).
Or, un examen plus attentif de cet oiseau m'a démontré que ce n'est pas un jeune E. chry-
sophrys, mais bien une femelle du Zonotrichia aWicoUis de r.Vmérique du Nord. Je m'étais laissé
induire en erreur par le sourcil jaune, et je n'avais comme point de comparaison qu'un unique
sujet et adulte du vrai E. chrysopJirys, représenté sur la même planche (fig. 3).
J'ai lie:t de croire que l'oiseau capturé près de Gand est un échapi^é de volière, car il était en
assez, mauvais état au moment d'être pris, du moins sa queue était réduite à deux ou trois pennes,
et le préparateur l'avait complétée à l'aide de pennes d'un vrai Bruant. Je ne m'en occuperai donc
pas davantage. Je ferai cependant remarquer qu'un Zonotrichia albicolUi a été pris en l-ico.ase près
d'.\bcrdcen le 17 août 1807 (/'. Z. S. 1870, p. 52) et un autre Cn Angleterre ;\ Heven Dean, près
de r.riglUon, le 22 mars 1872 {P. Z. .S". 1872, p. 681), et qu'il n'est par consécpicnt pas impossible
que l'oiseau du comte de Hemptinne ne soit un énugré ; mais il faut toujours se défier de ces
oiseaux américains que l'on tient communément cn cage.
712 —
offrant souvent des bordures blanchâtres mais qui disparaissent plus ou
moins par l'usure. Bec couleur de corne claire, brunâtre à la pointe; pattes
noirâtres ; iris brun.
Mâle en hiver. — Également noir, mais toutes les plumes sont bordées de
blanc cendré, et cette teinte claire domine même parfois sur les parties
dorsales.
Femelle (1). — Parties supérieures d'un cendré roussâtre clair avec le
centre des plumes brun ; régions parotiques d'une teinte plus ocracée et
variée de brun; couvertures des ailes brunes, largement bordées de cendré
blanchâtre; scapulaires brunes bordées de blanchâtre, mais ce bord est pré-
cédé d'un liséré noirâtre; rémiges également brunes, bordées extérieurement
et terminées de blanchâtre; côtés du cou d'un blanc jaunâtre ; gorge blan-
châtre, bordée latéralement de petites taches brunes disposées en forme de
moustaches, mais peu apparentes; parties inférieures blanchâtres; poitrine
et flancs lavés de cendré roussâtre et marqués de taches brunes, plus allon-
gées sur les flancs ; queue brune, les rectrices bordées de-cendré blanchâtre
surtout les médianes.
Hab. — La Calandre nègre habite les steppes de la Sibérie occi-
dentale et émigré jusque dans
le sud de la Russie; on la voit
arriver par grandes troupes vers
l'automne, quelquefois à la fin
d'août, dans le gouvernement
d'Ekaterinoslaw et en Crimée
(deNordmann). Forsterla décou-
vrit près du lac Yelton, à l'est
du Volga, d'où le nom de Yelto-
niensis, etPallas l'a observée dans les steppes salées de la Tartarie,
ainsi que dans les régions désertes qui avoisinent la mer Caspienne ;
Bogdanow l'a aussi observée en hiver dans les steppes septentrionales
du Caucase, mais elle ne se montre qu'accidentellement près de
Lenkoran (Radde)', elle hiverne également au Turkestan {Severtzoîo),
mais ne paraît pas aller plus au sud. La patrie de cet oiseau semble
donc limitée à la zone tempérée qui s'étend entre le Dnieper et
rirtisch,et,en Asie, entre le 40° et le 55% mais sans dépasser le 50»
en Russie.
Les captures dans l'Europe centrale sont extrêmement rares : cet
oiseau a été pris dans la Basse-Autriche et en Allemagne près de
.liJ.Lll£i
(1) L'inscription de la planche porte par erreur : fig. 2, Jeune, mais c' est J'e/neik qu'il faut lire.
— 713 —
Grimmen en Poméranie {Heichenow). Au sujet des ai3paritions de
cette espèce en Belgique, feu mon père dit : « Jai trouvé une Calan-
dre nègre vers la mi-mars 1850 sur le marché de Bruxelles chez un
oiseleur, qui l'avait attrapée dans les environs de cette ville, et il
m'a assuré en avoir vu plusieurs ensemble, mais n'avoir pu en prendre
qu'une seule ; d'après l'assurance de M. Croegaert, père, on en aurait
aussi pris une dans les environs d'Anvers en 1852, et on a pu la
tenir vivante pendant plusieurs semaines. » Quand je me suis occupé
du genre Calandre, j'ai émis un doute au sujet des captures signalées
par mon père (tome I, p. 524, en note), vu que la présence de l'espèce en
question n'avait jamais été signalée dans l'Europe occidentale. Mais
le doute ne m'est plus permis à la suite d'une nouvelle capture faite
en Belgique entre 1880 et 1885. Suivant M. Ch. délia Faille, une
dizaine de ces oiseaux ont été pris près d'Anvers par un tendeur,
mais il ne se rappelle plus l'époque exacte, n'en ayant pas tenu note;
l'une de ces Calandres nègres, un mâle en été, se trouve dans la
collection de M. délia Faille et m'a été communiquée.
Mœurs. — Les mœurs de cet oiseau sont encore peu connues, mais
il est probable qu'elles ressemblent à celles des autres espèces du
môme genre. Ce qui est certain, c'est qu'il vit dans les steppes et se
nourrit surtout de graines de plantes salées. Le D*" 0. Finsch, qui a
observé cette espèce dans la Sibérie occidentale, dit que c'est un
oiseau très attrayant et confiant, qui aime à faire entendre son beau
chant en se posant sur un monticule ou sur une pierre, en laissant
ordinairement pendre les ailes tout en tenant la queue relevée. En
s'envolant, il produit un bruit d'ailes particulier et s'élève à la façon
d'une chauve-souris mais sans interrompre son chant. La Calandre
nègre est très sociable et on ne la rencontre généralement que par
petites troupes de deux à dix individus.
Reproduction. — Celle-ci doit avoir lieu en avril, car le 4 mai le
D' Finsch put se procurer un jeune au nid déjà assez développé. Le
nid, dit Brehm, est grossièrement fait à l'aide de quelques brins et
contient quatre ou cinq œufs. Ceux-ci sont, d'après Thinemann, d'un
gris rougeâtre pâle et presque entièrement couverts de petites et de
grandes taches jaunâtres et d'un brun rougeâtre ; ils mesurent 23
à 25 millim. sur 18.
GENRE ClIIbi*
COUEVITE. — CURSORIUS.
Charàdrius (part.), Gm.. Syst. tiat. I, p. 692 (1788).
To.ME II. — 1894. 90
— 744 —
CoRSORius, Lath., Ind. Om. Il, p. 751 (1790).
Tachydromus, Illig. Prodr. p. 250 (1811).
CuRSOR, Wagl. Syst. av. (1827).
Car. — Bec plus court que la tête, un peu comprimé, légèrement voûté et
courbé vers la pointe ; narines basales, ovalaires ; ailes assez longues, aiguës,
les deux premières rémiges égales et les plus longues ; queue courte, carrée ;
jambes allongées, dénudées sur les deux tiers de leur étendue; tarses longs,
grêles, scutellcs ; doigts épais, assez courts, surtout les latéraux, Tinterne
plus court que l'externe ; pouce nul.
ffab. — Ce genre est représenté en Afrique, dans le sud-ouest de
TAsie et dans l'Europe méridionale.
139bis _ Le Courvite gaulois.
CURSORIUS GALLICUS, Bonap. ex Gmel.
(PI. 182b)
Pluvialis morinellus flavescens, Gerini, Om. meth. IV, p. 69, pi. 474 (1773).
Charadrius CURSOR, Lath. Gen. Syn. Suppl. I, p. 273(1787).
Charadrius GALLICUS, Gmel. Syst. nat. I, p. 692 (1788).
CuRSORius EUROP^us, Lath. Ind. Orn. II, p. 751 (1790).
Charadrius CORRIRA, Bonnat. Tabl. Encycl. p. 23 (1790).
CuRSORius iSABELLiNUS, Mey. Taschenb. deuts. Yogelh. II, p. 328 (1810).
Tachydromus gallicus, lUig. Prodr. p. 250(1811).
Tachydromus EUROP^us. Vieill. N. Dict. d'hist. 7iat. VIII, p. 293 (1817).
CuRSOR ISABELLINUS, Wagl. Sy&t. Av. (1827).
CuRSORius GALLICUS, Bonap. Faun. Ital. Ucc. Introd. (1832),
CuRSOR EUROPyEUS, Nauiïi. Vog. Deutschl. VII, p. 77 (1834).
Tachydromus ISABELLINUS, Nilzsch, Syst. Pterylogr. p. 201 (1840),
CuRSORius PALLiDUset brachydactylus, Brehm, Yogelf. p. 279 (1855).
CuRSORius JAMESONi, Jerd. B. of India, II, p, 875 (1863).
Der europaische Rennvogel, en allemand.
The cream-coloured Courser, en anglais.
De Rknvogel, en flamand.
Taille rO-^SO; ailes 0,16,
Description des deux sexes adultes. — Front et vertex d'un roux isabelle ;
occiput cendré ; nuque noire ; large sourcil blanc se prolongeant en arrière
et contournant le noir de la nuque ; derrière l'œil une bande noire longeant
le sourcil jusqu'à la nuque ; joues d'un roux ocreux clair ; gorge blanchâtre ;
dessus du corps et ailes d'un roux isabelle plus pâle que le devant de la tête ;
rémiges et couvertures des primaires noires ; parties inférieures de la teinte
du dos mais plus pâles ; bas-ventre et sous-caudales blanchâtres ; queue de
la couleur du dos avec toutes les rectrices, excepté les deux médianes, mar-
— 715
It^^^^Ûi^liil) Cô iaw.n.^ w. ^
quées d'une tache noire à leur extrémité mais terminées de blanchâtre. Bec
noir, la base de la mandibule inférieure blanchâtre ; iris brun ; pattes d'un
gris livide.
Jeune. — Dessus de la tête d'une teinte plus jaunâtre tachetée de brun et
lavée de cendré à la nuque, mais sans noir ; raie sourcilière d'un blanc
Isabelle ; parties dorsales d'un roux jaunâtre varié, surtout aux scapulaires
et aux couvertures des ailes, de taches et de traits ani,'uleux d'un brun oli-
vâtre ; parties inférieures plus claires.
Hab. — Le Courvite gaulois n'est, pour l'Europe, qu'un visiteur
_ accidentel , car sa véritable patrie
est le nord de l'Afrique et le sud-
ouest de l'Asie. Les captures en
Europe sont cependant assez fré-
quentes : M. Harting en a rele-
vées vingt et une aux îles Bri-
tanniques, depuis que Lathem a
décrit cet oiseau. Sur le conti-
nent, on a pris le Courvite en
Allemagne près de Darmstadt, de Mecklembourg, de Metz {Borg-
greve), d'Eltfeld sur le Rhin {Bruch) et de Ravensbourg [de Heuglin),
en Suisse {Meisner et Schinz), en Hollande près d'Amsterdam {Schlé-
gel), de Dordrecht en 1858 {mn Bemmelen) et dans les bruyères
d'Oirschot en 1876 {Koller); en Belgique, «il y a quelques années, dit
M. de Selys-Longchamps, on a tiré en automne (septembre ,je pense)
un Cursorius gallicus à Othée, chez M. Pety de Thozée, gouverneur
de la province de Liège, qui en a fait gracieusement don à M. le pro-
fesseur Ed. Van Beneden pour l'Université de Liège (1). » Les appa-
ritions de cet oiseau sont plus fréquentes dans les contrées du Midi ;
en France, il a été tué aux environs de Paris, de Dunkerque, de
St-Omer, de Calais, d'Abbeville, d'Amiens, de Dieppe, de Fécamp
{Degl. et Gerbe) et dans les départements de l'Aude, de l'Hérault et
des Pyrénées^Orientales {Lacrouf) ; en Espagne, dans les provinces
de Grenade [Seoane), de Gérone {Vayreda) ei près de Malaga {^aun^
ders) ; en Italie on a fait des captures de cette espèce en Piémont, en
Lorabardie, en Vénétie, dans l'Emilie, en Ligurie, en Toscane, en
Romagne (Salvadori), en Sardaigne {liiglioli), en Sicile {Mnllwrbe),
et à Malte [Wright). Il no paraît avoir été observé ni en Turquie, ni
en Grèce, mais il visite accidentellement les provinces orientales de la
(1) Omis, 1890, i». 3;]3.
— 716 —
mer Noire {de Nordmann). Il est a remarquer que presque tous les
Courvites observés en Europe, ont été pris en automne.
Cet oiseau niche aux îles Canaries (5oZ/e),dans tout le nord de l'Afri-
que {Loche, etc.), en Egypte, en Nubie {Shelley), dans le Kordofan {de
Heuglin) et dsius l'Abyssinie {Rilppell). Son aire de dispersion s'étend à
l'Est en AvSihie{Ehrenberg), en Palestine (Tristram), en Perse, dans le
Béloutchistan (5/«n/br6?) jusque dans le nord-ouest de l'Inde {Jerdon).
Mœurs. — Le Courvite gaulois est un vrai habitant des déserts ; il
recherche les endroits les plus arides, où le sol fournit à peine de quoi
nourrir çà et là quelques maigres touffes d'herbe. Après la reproduc-
tion, il mène une vie errante qui l'entraîne parfois loin de sa patrie,
et c'est à cette cause que l'on doit attribuer ses apparitions en Europe.
Du mois de février au mois de juillet, ces oiseaux vivent par cou-
ples ; on les voit alors courir avec une rapidité étonnante, et leurs
pattes se meuvent avec une telle agilité qu'on ne peut les distinguer ;
on dirait, dit A. Brehm, un oiseau sans pattes, mû par une force qu'on
ne peut s'expliquer. Tout à coup il s'arrête, regarde autour de lui,
ramasse quelque chose à terre, puis reprend sa course ; on peut le
suivre à distance pendant des heures sans qu'il s'envole. Il est cepen-
dant bon voilier, et son vol est plus rapide que celui du Vanneau. Il
est très farouche et, dit Belle, « il fuit le chasseur dès que celui-ci
fait mine de s'avancer. Pour l'approcher, il faut tourner tout autour
de lui, en décrivant de grands cercles, que l'on rétrécit de plus en
plus, et en n'ayant pas l'air de faire attention à lui ; mais il faut encore
une grande adresse pour pouvoir le tuer lorsqu'il court. » Le Courvite
doit être un oiseau bien silencieux, car aucun auteur ne parle de sa
voix ; Favier cependant, qui a eu longtemps un de ces oiseaux en
captivité, rend son cri par re7^ere7\ C'est un insectivore qui vit d'in-
sectes, de larves, de vers et surtout de sauterelles.
Reproduction. — Elle a lieu dans le nord-ouest de l'Afrique en mai
et en juin, en Egypte en mars, et en avril dans l'Inde; Hume dit avoir
trouvé dans l'Inde des œufs de cet oiseau depuis mars jusqu'en août,
suivant la saison des pluies. Le nid est une simple dépression creusée
dans le sol, parfois garnie de quelques brins, et placée à l'abri d'une
broussaille ou d'une touffe d'herbe. La ponte est de deux ou trois
œufs. Ceux-ci sont, d'après Brehm et Paessler, d'un jaune ocreux ou
d'un jaune sable, marqués de taches et de traits cendrés et brunâtres,
rassemblés surtout vers le milieu de l'œuf où ces macules forment
une espèce de ceinture; ils mesurent environ 36 millim. sur 27.
ADDITIONS ET CORRECTIONS
1. Aquila naevia (t. I. p. 16). — Un jeune a été tué à Bernissart
en octobre 1870 [de Warrùi)^
2. Circus macrurus (t. I, p. 90). — Une femelle a été tuée le
l*"" mai 1888 à Beauvechain près de Wavre. — Un individu de cette
espèce a également été capturé le 23 avril 1866 dans les dunes de
Noordwijk, en Hollande, suivant M. Koller.
3. Lanius excubitor var. Major (t. I, p. 188). — M. Croe-
gaert m'informe qu'un L. major a été pris près d'Anvers en novem-
bre 1884, et un autre à Deurne, au commencement d'octobre 1888 ;
M. le comte J. de Hemptinne en possède un sujet tué près de Gand
en 1878. 11 y a donc lieu de supposer que cette variété se montre en
Belgique plus souvent qu'on ne l'a cru.
4. Lanius minor (t. I, p. 189). — Cet oiseau est moins rare
dans notre pays qu'on ne l'avait pensé ; il se montre assez régulière-
ment dans certaines parties du Hainaut, surtout près de Bernissart.
Suivant M. Willain, il serait de passage régulier dans les environs
de Mons. Le D'' G. Du Pré a pris deux mâles à Etterbeek en 1874.
5. Pastor roseus (t. I, p. 247). — Trois nouvelles captures à
signaler, dont une à Zwijndreclit près d'Anvers, mais déjà ancienne.
Un jeune sujet a été tué en septembre 1882 près de Bruxelles, un
autre a été pris à Ciergnon lez-Dinant, le 14 novembre 1884.
6. Turdus varius (I, p. 269). — Cette espèce a été prise sept ou
huit fois en Belgique ; les dernières captures ont été faites à Beveren
le 13 octobre 188.") et signalée par M. Crocgaert, et à Adeghem près
Eccloo en octobre 1893; ce dernier sujet est bien adulte et se trouve
dans la collection du marquis de Wavrin.
7. Turdus naumanni (I, p. 282). — Je crois, après avoir de
nouveau examiné une série de ces Grives, do voir nie rallier à la manière
do voir de MM. von Middcndorff et Radde. Pour ces naturalistes, le
T. nmcnKtnni n'est pas une espèce distincte, mais un T. ruficollis dans
son premier i)lumage de noce. Il est à reman|iior que les T. ru/icollis
dans leur premier plumage, ressemblent à s'y méprendre aux jeunes
T. fu.scaêus, mais chez ce dernier le dessous de la queue est cendré,
tandis qu'il est roux chez les 7'. ru/ico/h's et ndumanni. On ne doit
pas oublier non plus que chez les vieux T. ru/icollis, non seulement la
gorge et la poitrine sont rous.ses, mais cncoi-t^ le? flancs sont d'un loux
— 748 -
vif. En résumé, le T. naumanni est un jeune T. ruficollis dans son
premier plumage de noce, et le T. fuscatus est une espèce parfaite-
ment distincte.
8. Turdus swainsonii (I, p. 294). — Le marquis de Wavrin
possède un T. swainsonii type, pris près de Chiny (Luxembourg belge)
entre le 15 et le 20 octobre 1885. C'est la première fois que la forme
type a été prise en Belgique.
9. Turdus obscurus (I, p. 297). — Un individu, jeune encore,
a été tué au mois d'octobre 1886 à La Hulpe, à quelques lieues de
Bruxelles. Un sujet presque adulte a été pris à Mirwart près Grupont
en octobre 1891.
10. Pratincola rubicola (I, p. 316). — Un certain nombre de
ces oiseaux passent l'hiver en Belgique, quand la saison n'est pas trop
rigoureuse.
11. Ruticilla caerulecula (I, p. 329). — M.^roegaert dit en
avoir vu deux exemplaires pris aux environs d'Anvers; M. E. Claes a
annoncé une capture à Genck, Limbourg belge, au printemps de 1887.
12. Accentor collaris (I, p. 344). — Un sujet a été pris près de
Bruxelles en septembre 1884.
13. Acrocephalus aquaticus (I, p. 386). — Cette espèce n'est
pas aussi rare en Belgique que je l'avais cru. AL E. Claes l'a sou-
vent rencontrée en automne aux environs de Hasselt, où il lui est
arrivé d'en voir trois et quatre le même jour et souvent sans les cher-
cher, pendant qu'il chassait à la Bécassine. Deson côté, M. C. Fontaine
dit que cet oiseau ne doit pas être bien rare dans la vallée de la
Dendre; un couple a niché en 1875 près du moulin de Papignies, et
en 1879 une nichée se trouvait dans la même localité.
14. Regulus ignicapillus (L p. 419). — Niche communément
dans le Luxembourg belge, où le Roitelet huppé est rare et même
parfois inconnu.
15. Motacilla flava var. Melanocephala (I, p. 466). —
M. Croegaert rapporte qu'on en prend presque tous les ans en octobre
quelques exemplaires en Flandre, près de Beveren ; d'après M. G.
Vincent on Tobserve quelquefois en été aux environs de Bruxelles.
Je n'ai pas eu l'occasion de voir des sujets de cette variété pris en
Belgique, mais je suis bien convaincu que les oiseaux que l'on prend
pour des M. melanocephala ne sont que des il/, cinereocapilla à tête
foncée ou plutôt des M. horealis (voyez la remarque p. 468). La vraie
M. melanocephala ne se montre pas en Belgique.
— 719 -
16. Motacilla flava var. Rayi (I, p. 466). — M. E. Claes a
annoncé la capture d'un sujet de cette variété près de Hasselt, le
11 septembre 1884.
17. Anthus cervinus (I, p. 482). — M. de Selys-Longchamps
a signalé trois sujets de cette espèce pris à Waremme en octobre 1883
et 1885. M. Croegaert a connu trois captures faites en octobre près
de Beveren, en Flandre.
18. Anthus richardi (I, p. 494). — M. Croegaert dit qu'en sep-
tembre 1866, il a pu se procurer, en huit jours de temps, six de ces
oiseaux dans les environs d'Anvers.
19. Melanocorypha brachydactyla (I, p. 512). — Pris au
Kiel près d'Anvers en octobre 1880 {Croegaert).
20. Melanocorypha calandra (I, p. 517). — Deux sujets ont
été pris au filet près de Bruxelles en novembre 1882.
21. Otocorys alpestris (I, p. 525). — Contrairement à ce qui a
été dit, cette espèce est de passage régulier en Belgique et paraît
même hiverner en petit nombre dans les parties septentrionales du
pays. On en prend tous les ans dans les Flandres et dans le Limbourg
et souvent aux environs de Bruxelles. M. Xavier Raspail m'informe
qu'il a tué de ces oiseaux dans les prairies de Nieuport-Bains aux dates
suivantes : 20 novembre, 5, 10 et 17 décembre 1877,22 février, 25 mars
et 8 avril 1878.
•^2. Plectrophanes lapponicus (I, p. 532). — M. le comte J.
de Ilemptinne m'informe que plusieurs de ces oiseaux ont été pris en
octobre 1887 près de Comblain-au-Pont (Liège); M. A. Duvivier pos-
sède un mâle tué près d'Alost le 19 octobre de la même année, et
M. Croegaert dit qu'on en prend tous les ans en octobre quelques
exemphiircs aux environs d'Anvers.
23. Emberiza cirlus (I, p. 547). — Deux sujets de cette espèce
ont été tués près d'Anvers, mais il y a déjà longtemps.
24. Emberiza cia (I, p. 550). — Ce rare oiseau pour notre pays
a été pris, d'après M. Croegaert, deux fois aux environs d'Anvers :
au Kiel en octobre 1875 et à Deurne en octobre 1886. Un sujet a
également été pris aux environs de Bruxelles au printemps de 1887,
et un autre près de Dinant.
25. Petronia stulta (I, p. 577). — Suivant M. L. De Pauw, un
sujet de ccti*; cspiice a été pris pi'ès d'Alost en 1S7().
26. Linaria (I, p. 597). — M. Sharpe attribue erronément aux
Linottes le terme générique d'^caw^/iîA", Bechst.(Ca/. BirdsBy^t. Mus,
— 720 —
XII, p. 235). En 1803, Bechstein a donné pour type à son genre
Acanthis le Fringilla carduelis^ Lin. [Ornith. Taschenb p. 125) ;
cette dénomination générique ne peut donc nullement s'appliquer
aux Linottes et aux Sizerins, vu qu'elle a été faite pour les Chardon-
nerets.
27. Linaria montana ou flavirostris (I, p. 602). — M. L.
van Delft a écrit l'intéressante note suivante, qui complète ce que j'ai
dit au sujet du séjour de cette espèce en Belgique. « La Linotte de
montagne commence à se montrer par petites bandes de dix à quinze
individus dans le schoor de Santvliet (nord de la province d'Anvers)
vers la fin de septembre, lorsque les Salicornia herhacea sont en
semence, graine dont ces Linottes sont très friandes. Bientôt les ban-
des commencent à se réunir, et forment en octobre une masse de 600
à 800 individus. Plus tard, lorsque les Aster tripolium sont en
semence, la bande s'y jette aussi, allant des Salicornia aux Aster,.,.
Vers la fin de février, les graines de prédilection commençant à dimi-
nuer, la bande devient moins nombreuse, et en mars on ne rencontre
plus que quelques retardataires qui ne tardent pas à disparaître à
leur tour (1). » Il résulte de ce qui précède, que la Linotte de monta-
gne hiverne régulièrement et en grand nombre dans le nord de la
province d'Anvers.
28. Chrysomitris spinus (I, p. 617). — Cet oiseau niche régu-
lièrement dans la province d'Anvers, surtout à Brasschaet, et proba-
blement aussi dans les Ardennes, où on a vu des jeunes et un grand
nombre d'adultes en juillet 1887 ; durant l'été de la même année, on a
également vu des jeunes aux environs de Bruxelles. Suivant M. le
marquis de Wavrin, un nid avec six jeunes a été trouvé le 26 août
1887 à Gavere-lez-Gand.
29. Loxia curvirostra (I, p. 639). — On sait aujourd'hui que
quelques couples nichent en Belgique ; M. le marquis de Wavrin a
trouvé un nid avec quatre jeunes près de Gand le 19 février 1889 ; la
même année, plusieurs couples ont niché près d'Anvers. Les obser-
vations de ces dernières années font supposer que ce Bec-croisé est
plus ou moins sédentaire dans le pays.
30. Loxia pityopsittacus (I, p. 644). — Une petite volée de
ces oiseaux a visité la Belgique en 1887; à ma connaissance, deux
(1) Voy. Compte rendu des observ. Orn., dans le Bull, du Mus. roy. d'hist. nat. de Belg.
t. IV, p. 198.
— 721 -
mâles ont été tués à Forest-lez-Briixelles, et un couple près de Wes-
terloo.
31. Loxia bifasciata (I, p. 649). — En 1889, de petites bandes
de ces oiseaux ont été vues dans les provinces de Liège et d'Anvers.
« La première capture, dit i\L Croegaert, a été faite près d'Anvers le
8 juin, et depuis lors jusqu'à la fin de l'année on a toujours remarqué
de ces oiseaux dans les bois de sapins de Schooten et des environs ; à
plusieurs reprises on en a présenté de vivants au marché. »
32. Tichodroma muraria (I, p. 6G0). — M. Boucard a pris sur
le plateau de Koekelberg à Bruxelles, un couple de cette rare espèce:
la femelle fut prise le 7 et le mâle le 11 juillet 1891 ; ce renseigne-
ment m'a été fourni par M. J.Opdenbosch, préparateur au Musée, qui
a été chargé d'empailler ces oiseaux.
33. Picus médius (I, p. 689). — Un sujet a été tué à Deurne en
1888.
34- Picus minor (I, p. 692). — Suivant un renseignement de
M. délia Faille, ce Pic a niché à Deurne (Anvers) en 1886 et en 1887.
M. Croegaert dit qu'il y niche tous les ans.
35. Coracias garrula (I, p. 721). — Un individu de cette espèce
a été pris vivant près de Taviers en 1885 ; deux autres, dont un a été
tué, se trouvaient à Brasschaet (Anvers) le 3 juin 1889; enfin, un
magnifique exemplaire a été tué près de Liège, dans le courant de
mai 1894.
36. Merops apiaster (I, p. 731). — Dans les premiers jours de
mai 1891, m'écrit le docteur Clerfaye, une bande de dix à quinze
Guêpiers est venue s'abattre sur la lisière du bois d'Havre près de
Mons, et il m'envoie en même temps un beau mâle pour le Musée.
37. Syrrhaptes paradoxus (II, p. 27). — C'est le 11 mai 1888
que les Syrrhaptes firent une nouvelle apparition en Belgique. A cette
date, une volée d'une trentaine de ces oiseaux vint s'abattre sur le ter-
ritoire de Braine-l'Allcud, et deux femelles furent tuées ; quelques
jours plus tard on en tua encore six. Dans les premiers jours de juin
de la même année, une troupe s'est abattue aux environs du camp de
Brasschaet, et un de ces oiseaux s'est cassé une aile contre les lils du
télégraphe. Vers le 15 mai, une troupe d'une quarantaine d'individus
vint élire domicile dans les dunes d'Adinkorke. Le 19 février 1889,
un mâle et deux lèmcUes furent tues à Bouchout (Anvers). Bref, pen-
dant ces deux années on en prit un peu partout : dans le Limbourg
belge, dans le Brabant, la province d'Anvers et surtout dans les dunes
Tome II. — 1894. 91
— 722 —
de la Flandre où ils ont peut-être niché. M. L, Michels m'assure que
ces oiseaux ont niché à Lichtaert (Anvers), et M. L. De Pauw me dit
qu'ils ont également niché à Merchtem en 1889. Les Syrrhaptes ont dû
être fort nombreuXjCar l'hiver 1888-89 on en voyait chez tous les mar-
chands de volaille, et à la criée de Bruxelles on les vendait parfois
à fr. 1,20 et 80 centimes la pièce. Je n'affirme cependant pas que tous
ces oiseaux aient été pris dans le pays, car il nous arrive beaucoup de
gibier de l'étranger.
38. .^gialitis hiaticula (II, p. 113). — Niche sur nos côtes,
de même que Ïj^. cantianus ; M. X. Raspail m'écrit qu'il a trouvé
plusieurs fois les œufs de ce dernier sur la plage de Nieuport-Bains,
où ils étaient déposés sur un amas de débris de coquilles.
39. Herodias garzetta(II, p. 331).— M. X. Raspail a tué un
sujet de cette espèce le 4 avril 1878 le long du chenal de Nieuport.
40. Nycticorax griseus (II, p.351) . — M. le Marquis de Wavrin
me confirme ce qu'il m'a dit précédemment au sujet de la reproduc-
tion de cet oiseau en Belgique. Le Bihoreau a niché plusieurs fois à
Thisselt-Blaesvelt, notamment en 1885 et en 1886.
RENSEIGNEMENTS BIBLIOGRAPHIQUES
La vaste répartition géographique de certaines espèces et l'étude
des variétés climatériques, m'ont obligé à avoir recours à une quantité
de recueils périodiques et d'ouvrages d'ornithologie s'occupant d'oi-
seaux de toutes les parties du monde. Il en résulte qu'une liste biblio-
graphique équivaudrait à un catalogue général des publications
ornithologiques depuis 1766, à l'exclusion seulement de certaines
monographies. De pareils catalogues ont été faits et j'y renvoie le
lecteur (1).
Je me bornerai donc à signaler les pubhcations nationales ayant
rapport aux oiseaux de notre pays. En tête vient la Faune belge de
M. Edm. de Selys-Longchamps (1 vol. in-S», Liège 1812). C'est le
point de départ de nos connaissances sur les vertébrés indigènes, et
cette faune a considérablement facilité les travaux ultérieurs. JNI. de
Selys-Longchamps a publié depuis diverses notices sur des espèces
indigènes ou nouvelles pour le pays, qui sont dispersées dans les
Mémoires et dans les Bulletins de V Académie royale de Belgique.
Il y a encore à mentionner du même auteur : Catalogues des oiseaux
des environs de Liège (dans le Dict. géogr. de Ph. Vandermaelen,
Bruxelles 1833); Mammifères, oiseaux et reptiles de Belgique
(dans Patria helgica, Brux. 1873).
En 1851, feu mon père commença la publication de ses Planches
coloriées des oiseaux de la Belgique et de leurs œufs (3 vol. Bru-
xelles 1851-1860). Comme le titre l'indique, c'est plutôt un ouvrage
iconographique, aussi le but principal de l'auteur était de faire connaî-
tre les oiseaux et leurs œufs par de bonnes figures coloriées à la main,
et de faciliter ainsi l'étude des espèces indigènes (2); chaque planche
est cependant accompagnée 4'une page de texte comprenant la syno-
nymie spécifique et quelques renseignements sur l'habitat, les mœurs
et la reproduction.
Vient ensuite \2^ Mono g rapine des oiseaux de la Belgique itar ]e
baron F. Fallon (1 vol. in-8°, Namur, 1875) ; excellent résumé, mais
l'absence de descriptions et do figures rend ce volume peu praticjuo
(1) Voy. particulièrement: Giobcl, Thésaurus oniitholo^^iiT [Z vol. in-S«. Leii^zig 1672-77);
Zoologie al Record (Londoii 1864 à 1892).
(2) Un certain nombre de ics planches ont été utilisées dans l'atlas du présent ouvrai:;c, ainsi
que toutes celles représentant les œufs, ce (|ui e.\pli(|ue le sini^ulicr système tic numérolatîe de
ces derniers; les numéros des œufs rc.iiL-snondenf en t^lïct an numéio delà pl.inch» figurant
l'oiseau dans l'ouvrage de mon père.
— 724 —
pour les débutants. Le D' C. Bamps, dans deux brochures sur les
OiseauûG des environs de Hasselt (1883 et 1886) a fourni quelques
renseignements utiles sur les espèces observées dans son arrondisse-
ment. Parmi mes travaux personnels s'occupant d'oiseaux indigènes,
je signalerai : 1° Conspectus systematicus et geographicus avium
Europœarum (brochure in-8°,Brux.l871) ; 2° Histoire populaire des
animaux utiles de la Belgique^ mammifères, oiseaux, reptiles, batra-
ciens, insectes et arachnides (1 vol. in-12 illustré, nouv. édition, Bru-
xelles 1889) ; 3° Les animaux nuisibles delà Belgique, mammifères,
oiseaux et reptiles (1 vol. in-12 illustré, Brux. 1893).
En février 1885, les délégués belges du Comité ornithologique
international et permanent (1) adressèrent un appel à tous les ama-
teurs et connaisseurs d'oiseaux, afin d'établir dans différentes parties
du pays des stations d'observation. A la suite de cet appel, je publiai
une Revue des oiseaux observés en Belgique (danVle Bulletin du
Musée) accompagnée de quelques détails sur leur séjour dans le pays,
afin de servir de guide aux observateurs.
Peu d'amateurs répondirent à notre appel, mais en 1886 je pus
cependant publier les observations faites en 1885. Ces observations
furent continuées jusqu'en 1888, mais alors il y eut un relâchement
général et je ne pus parvenir à trouver des collaborateurs dans d'au-
tres parties du pays. Les naturalistes ou amateurs qui ont collaboré
au Compte-rendu des observations ornithologiques sont : pour An-
vers : M. A. Croegaert; pour Bruxelles : MM. A. Duvivier, Th.
Roels, G. Vincent et fils; pour Carlsbourg (Luxembourg) : les frères
Athimus et Macédone ; pour Florenne : M. l'abbé J. Cabeau ; pour
Hasselt : M. E. Claes; pour Papignies : M. C. Fontaine; pour
Taviers : M. E. Wautier; pour Waremme : M. E. de Selys-Long-
champs. Dans les phares de nos côtes des observations superficielles
ont été faites par MM. F. Liitzenrath, S. Pollet, E. Stocker, Van
Landtschoot et A. Vermorke, tous chefs-gardes des phares. Des ren-
seignements isolés m'ont encore été fournis par MM. Ch. délia Faille,
le comte J. de Hemptinne, Aug. Meuris, L. van Delft et le marquis
de Wavrin. Je réitère à tous ces collaborateurs mes sincères remer-
ciements.
Les observations de 1885 et de 1886 ont été publiées dans le Bul-
letin du Musée royal dliist. nat. de Belg. (t. IV et V), celles de
1887-89 dans VOrnis (t. VI, 1890).
(1) M. le baron Edm. de Selys-Longchamps et moi.
TABLE SYSTÉMATIQUE
DU TOME SECOND
1>A0ES
ORDRE V. — Les Girateurs ou Pigeons ... . \
Famille des Colombidés 3
Genre XCIII. — Colombe. — Columba .... .4
Colombe ramier. — Columba palumbus et Var. Cashtis 4
— colombin. — — omas et Var. Eversnianni 9
— déroche. — — livia eivdiV.Rupestris 13 et 14
Genre XCIV. — Tourterelle. — Turtur 19
Tourterelle vulgaire. — Turtur vulgaris 20
ORDRE VI. — Les Gallinacés 24
Famille des Ptéroclidés 25
Genre XCV. — Syrrhapte. — Syrrhaptes 26
Syrrhapte paradoxal. — Syrrhaptes paradoxus 27
Famille des Tétraonidés 35
Genre XCVL — Tétras. — Tetrao 35
Tétras auerhan ou urogalle. — Tetrao urogallus 36
— à queue fourchue. — tetrix 43
Genre XCVIL — Gelinotte. — Bonasa 50
Gelinotte des coudriers. — Bo7iasa betuUna ... 50
Famille des Phasianidés 54
Genre XCVIIL — Faisan. — Phasianus 55
Faisan vulgaire ou de Colchide. — Phasianus colchicus .55
— — Var. Shaioi, Persicus, Decollatus, Sladeni, torquatus .... 56
— — Var. Mo7igolicus, Chrysomelas et Forynosatius 56
Famille des Perdicidés 64
Genre XCIX. — Perdrix. — Caccabis 64
Perdrix rouge. — Caccabis rubra 64
Genre C. — Perdrix proprement dite. — Perdix 69
Perdrix grise. — Perdix cinerea g9
Genre CL — Caille. — Coturnix 75
Caille ordinaire. — Coturnix communis ... 76
ORDRE VII. — Les Ecrassiers coureurs 82
Famille des Otidés 83
Genre CIL — Outarde. — Olis. 83
Outarde barbue. — Otis tarda 84
— canepetière. — Otis tetrax 89
— de Macquocn. — Otis maqueeni 95
Famille des Charadriidés 98
(iENRK cm. — ŒDHNi-;ME. — (EoiCNEMUS. .99
Œdicnèmc criard. — Œdicnentus scolapax. . 100
Genre CIV. — Pluvier. — Charadrius 104
— 726 —
PAGES
Pluvier doré. — Charadrius aureus 105
Genre CV. — Guiqnard. — Eudromias 109
Pluvier guignard. — Eudromias morinellus 109
Genre CVI. — Gravelot. — ^GiALiTis 113
GrBiVeloi on Flayler k collier. — jEgialitis torquatus 113
Petit Pluvier à collier. — jEgialitis dubius 117
Pluvier de Kent. — J^gialitis cantianus 121
Genre CVII. — Squatarole. — Squatarola 124
Squatarole à ventre noir, — Squatarola helvetica. ... ..... 125
Genre G VIII. — Vanneau.— Vanellus 128
Vanneau huppé. — 'Vanellus vulgaris 129
Genre CIX. — Tourne-pierre. — Strepsilas 133
Tourne-pierre à collier. — Strepsilas interpres 133
Genre ex. —HuîTRiER. — H^MATOPUS 136
Huîtrier ostralège ou pie. — Hcematopus osiralegus et var. Osculans . . .137
Famille des Glaréolidés 142
Genre CXI. — Glaréole. — Glareola 143
Glaréole à collier. — Glareola torquata ' 143
Famille des Scolopacidés 148
Genre CXII. — Sanderling. — Calidris 149
Sanderling des sables. — Calidris arenaria 150
Genre CXIII. — Bécasseau. — Tringa 154
Bécasseau canut. — Tringa canutus 154
— maritime. — Tringa maritima 159
— cocorli. — Tringa subarquata 162
— variable. — — cinclus 166
— minule. — — minuta et var. RuficoUis .^ 171
— de Temminck. — Tringa temmincldi 175
Genre CXIV. — Limicole. — Limicola 178
Limicole platyrhynque. — Limicola platyrhyncha 179
Genre CXV. — Combattant. — Machetes 182
Combattant querelleur. — Machetes pugnax 183
Genre CXVI. — Chevalier. — Totanus 188
Chevalier à pieds verts. — Totomis ^fZoWts 188
— stagnatile. — Totanus stagnatilis 193
— sombre. — Totanus fuscus 197
— gambette. — Totanus calidris 202
— Sylvain . — Totanus glareola 207
— cul-blanc. — Totanus ochropus . . 211
Genre CXVII. — Guignette. — Actitis 214
Guignette vulgaire. — Actitis guinetta 215
— grivelée. — — macularius 218
Genre CXVIII. — Bécassine. — Gallinago 222
Bécassine double. — Gallinago média 223
— ordinaire. — Gallinago cœlestis 226
— Jacquet. — — galimila 231
Genre CXIX. — Bécasse. — Scolopax 234
Bécasse ordinaire. — Scolopax rusticola 234
Genre CXX. — Barge. — Limosa 239
— 727 —
, . PAGES
a queue noire. — Li7nosa nielanura et v&r. Melanuroides 240
— rousse. — — ru fa et var. Baueri 244
Genre CXXI. — Courlis. — Numenius 249
Courlis arqué ou cendré. — Numenius arquatus et var. Lineatus 249-50
— à bec grêle. — Numenius tenuiroslris 254
— corlieu. — Numenius phueopus et var. Variegata 257
Genre CXXII. — Phalarope, — Phalaropus 261
Phalarope platyrhynque. — Phalaropus fulicarius ... 261
— hyperboré. — Phalaropus cinereus. 2C6
Famille des Récurvirostridés ... 269
Genre CXXIII. — Avocette. — Recurvirostra 269
Recurvirostre avocette. — Recurvirostra avocetta .... 270
Genre CXXIV. — Echasse. — Himantopus 274
Echasse blanche. — Himantopus plinii 274
Echassiers macrodactyles 277
Famille des Ballidés 278
Gexre CXXV. — R.\i,i;. — Rallus 278
Râle d'eau. — Rallus aquaticus et \ar. Indica 279
Genre CXXVI. — Crex. — Crex 283
Crex des prés ou Râle de genêt. — Crex pratensis 283
Genre CXXVIl. — Marquette. — Porzana 287
Marouette tachetée . — Porzana maruetla 287
— poussin. — — parva 291
— Bâillon. — — pusilla 294
Genre CXXVIII. — Poule d'eau. — Gallinula 297
Poule d'eau ordinaire. — Gallinula chloropus 298
— — var. Pyrrhorrhoa^ Galeata, Sandvicensis 298
Genre CXXIX. — Foulque. — Fulica 303
Foulque noirâtre. — Fulica atrata 304
Famille des Gruidés 307
Genre CXXX. — Grue. — Grus 308
Grue cendrée. — Grus communis 308
HÉRODIENS 314
Famille des Ardéidés 314
Genre CXXXI. — Héron. — Ardea 315
Héron cendré. — Ardea cinerea 315
— pourpré. — Ardea purpurascens . 321
Genre CXXXll. — Aigrette. — Herodias 325
Aigrette blanche. — ffe>-odias alba 325
— garzette. — — garzetta 331
Genre CXXXIII. — Crabier. — Ardeola 335
Crabicr chevelu. — Ardeola ralloides ;?35
Genre CXXXIV. — Blongios. — Ardetta 339
Blongios nain. — Ardetta minuta et y os. Pusilla . . . 339-40
Ge.nre CXXXV. — Butor. — Botaurus 345
Butor vul^-'aire. — Botaurus stellaris 345
Genre CXXXVl. — Hihoreau. — Ntcticokax . . 351
Biliorcau iri''uropc. — Nycticorax (jrisens. ■ 351
Famille des Ciconiidés ■ ... 357
— 728 —
PA.OES
Genre CXXXVII. — Cigogne. — Ciconia 357
Cigogne blanche. — Ciconia alba 358
— brune. — — fusea 366
Famille des Plataléldés 370
Genre CXXXVIII. — Spatule. — Platalea 371
Spatule blanche. — Platalea leucorodia et var. Major 371
Genre CXXXIX. — Falcinelle. — Falcinellus 375
Ibis falcinelle. — Falcinellus castaneus 376
ORDRE Y III. — Les Palmipèdes lamellirostres 382
Famille des Anatidés 383
Genre CXL. — Bernache. — Branta 385
Bernache ou Oie à joues blanches. — Branta leucopsis 385
— — à collier. — Branta hrenta et var. Nigricans 388
Genre CXLI. — Oie. — Anser 392
Oie cendrée. — Anser cinereus 393
— des moissons. — Anser sylveslris et var. Serrirostris 398
— à bec court. — Anser brachyrhynchus 401
— à front blanc. — Anser albifrons et var. Erylhropus . : ^. 405
Genre CXLII. — Cygne. — Cygnus 410
Cygne sauvage. — Cygnus férus 410
— Bewick. — — minor 414
— à bec tuberculeux. — Cygnus mansuetu^ 416
Genre CXLIII. — Tadorne. — Tadorna 422
Tadorne ordinaire. — Tadorna cornuta 423
Genre CXLIV. — Souchet, — Spatula 427
Souchct spatule. — Spatula clypeata 428
Genre CXLV. — Canard. — Anas 432
Canard sauvage. — Anas boscas 432
Genre CXLVI. — Chipeau. — Chaulklasmus 437
Chipeau strépère. — Chaulelasmus streperus 438
Genre CXLVII. — Marèque. — Mareca ... 440
Canard siflleur. — Mareca penelope 441
Genre CXLVIII. — Filet. — Dafila 344
Canard pilet. — Dafila acula ' 445
Genre CXLIX. — Sarcelle. — Querquedula 448
Sarcelle d'été. — Querquedula circta 448
— d'hiver. — Querquedula crecca et var. CaroLnensu 453
— formose. — — formosa 456
Genre CL. — Morillon. — Foligula 461
Morillon à huppe rousse. — Fuligula rufina 462
— hoppé. — Fuligula cristata 465
— milouinan. — Fuligula marila et var. Affinio 468
milouin. — Fuligula ferina et \&t. Americana 472-73
— à iris blanc. — Fuligula nyroca 477
Genre CLl. — Garrot. — Clangula 481
Garrot sonneur. — Clangula glaucion 482
— de Barrow. — — islandica 486
— histrion. — — histrionica ■ . . . . 488
Genkb CLIl. — MiQUELON. — Harelda 488
PAGES
Miquelon glacial. — Harelda glacialis 489
Genre CLIII. — Eider. — Somateria 492
Eider vulgaire. — Somateria mollissima et var. Bresseri 493
— royal — — speclabilis 499
Genre CLIV. — Macreuse. — Oidemia 499
Macreuse noire. — Oidemia nigra et var. Americana 500
— brune. — — fusca et var. Deglandi 5U3
— à lunettes. — Oidemia perspicillata 506
Genre CL V. — Harle. — Mergus 509
Harle blanc ou pielte. — Mergus albellus 509
— bièvre. — Mergus merganseï' 513
— huppé. — — serralor 518
Palmipèdes totipalmes 522
Famille des Pélécanidés 523
Genre CLVl. — Fou. — Sula 523
Fou blanc ou de Bassan. — Sida bassana 524
Famille des Phalacrocoracidés 528
Genre CLVll. — Cormoran. — Phalacrocorax 529
Cormoran ordinaire. — Phakia'ocorax carbo 529
— huppé. — — graciclus 535
Palmipèdes longipennes 538
Famille des Sternidés 539
Genre CLVIII. — Sterne. — Sterna 540
Sterne tschégrava. — Sterna caspia 541
— hansel. — — >, anglica 545
— caugek. — -- cantiaca 548
— arctique. paradisea 551
— vulgaire. fluviatilis. 554
— de Dougall. DougalU 558
— naine. — — minuta . . 561
Genre CLIX. — GuiFEïTh . Hydrocheudon 564
Guifette noirâtre. — Hydrochelidon nigra ... 565
— leucoptère. — — leucoptera .... 568
— cendré ou Moustac. — Hydrochelidon hy'nt <' 571
Famille des Laridés 574
Genre CLX. — Goéland ou Mouette. — Lakus ... 576
Goéland glauque. — Larus glaucus 577
— leucoptère. — Larus letccopterus . . 580
— à manteau noir. — Larus marinus .i . . . . . 583
— à pieds jauues. — Larus fuscus ... 587
— argenté - Larus argentntus et \a.r. Cac/tinnatis . . 590-91
Mouette cendrée. - Larus canus et var. Major . . . 594
— rieuse. Larus ridibundus ... . 598
— pygraée. — Larus minu tus . . . r.02
Genre CLXI. — Risse. — Rissa i'>Oô
Mouette ou Ri.ssc tridactyle. — Rissa ttilactyUt . 006
Genre CLXII. — Stercoraire. — Stercorarius .611
Stercoraire brun. — Stercorarius catarr/iactes . .611
— poinarin. — — pomarinus . . .615
Tome II — 1894. 9?
780 —
PAGES
Stercoraire parasite. — Stercorarius crepidatus 619
— à longue queue. — Stercorarius longicauclus 622
Palmipèdes tubinaires 624
Famille des Proeellaridés 626
Genre CLXIII. —Albatros. — Diomedea 627
Albatros hurleur. — Diomedea exulans 627
Genre CLXIV. — Pétrel. — Fulmarus 632
P(iire\ glacial. — Fuhnarus y lacialis et var. Glupischa 633
Genre GLXV. — Thalassidrome. — Procellaria 637
Thalassidrome tempête. — Procellaria pelagica 638
— de Leach . — — leucorrhoa . . " 642
Genre GI.XVl. — Puffin. — Puf-finus 644
Puffin des Anglais. — Piiffimis anylorwn 645
Palmipi^des pygopodes 649
Famille des Alcidés 650
Genre CLX Vil. — Guillemot. —Uria 650
(^nïWemotgTyWè. ~ Uriagrylle eivaT.Mandtii ^ 651
— troïle. - — troile et var. Californica ....." 655
Genre CLXVllI. — Mergule. — Mergulus 659
Mergule na\n. — Merffulus aile 659
Genre CLXIX. — Alc ou PiNGoaiN. — Alca 661
Aie ou Pingouin torda. — A^ra iorrfa 662
Genre CLXX. — Macareux. —Fratercula 665
Macareux moine. — Fraterculaarciica et var. Glacialis 666
Famille des Colymbidés 670
Genre CLXXl. — Plongeon. — CoLYMBus 671
Plongeon glacial. — Colymbtis glncialis 671
— à gorge noire. — Colymhtts arcticus et var Pacifica 674
à gorge rousse. — Colymbus septentrionalis 678
Famille des Podicipédidés 682
Genre CLXXIl. — Grèbe. — PoDiciPES 683
Grèbe huppé. — Podicipes crislalus 683
— a gorge gT\&e. — Podicipes griseigena et var. Major 688-89
— oreillard.— _ nigricollis et y^v . Californica 692
— cornu. — — cornutus 695
— castagneux. — — minor 698
— v.ir. Sovœ-Hollandi(B^ Tricolor, Pelzelni. ..... 699
Supplément 703
k\g\eBonell\. ~ Nisaëia., fusciatus 703
yiavi\netal^\n. — (Jypselus melba 707
Parus Cœruleicsy av. Pleskii 710
Calandre nègre. — Melanocorypha yeltoniensis 711
Gknre CIII'^ . — Courvite. — CuRSORius 713
Co\xry\tegavi\ois.~ Cursoriusgallicics 714
Additio7is et correclions 717
Nocr^s bibliogi aphiques 723
TABLE ALPHABETIQUE
DES GENRES ET DES ESPECES DÉCRITS DANS LES DEUX VOLUMES
A-ccenteiir
Accentor aipiiais .
— collaris.
— iiiodularts .
Accipiter nisus ...
Acredula caudata .
— irbyi,
— lotifficaud i
— rosea ...
— trivirgata .
Acredule
Acrocephalus aqxuiticus .
— arundinaceus
— axistralis .
— long irost ris
— orientalis .
— palustris .
schœnobaenus
— stentorea .
strcperus .
syrinx .
— tiirduides .
Actitis guinetta .
— macularins
JEgialitii cantianns
— dubiiis .
— torquatus . .
A'vgiuthtis hornemanni
— linarius
— rufescens .
Aigle ......
Ai(.'rette. ...
Alauda arborea. .
— arvensis
Albatros . . .
Alca tarda.
Alcedo bengalensis .
— ispida .
Alouettfl . . .
Anipelis garridns .
A nas boscas ....
Anorth}ira alascensix
— borcalis
fuiuigata-
hi/nnalis
pacifica. .
tiatischa^urn
truglodi/trx.
A user albif'tinut.
— brachi/ihgncliiià
ciniTciis
— ergihrupiis
— arri-irustris
.11/lrc.itris .
Anthiis n)b'jreit.i.
38G
.'^44
718
347
80
442
443
442
442
442
442
718
371
372
372
372
379
383
372
376
373
371
21.5
218
121
117
,722
60(')
6U6
607
703
325
503
498
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I
I
I
I
II
II
II
II
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I
1
1
II
II
I
I
II
II
Anlhns campestri.
— cerviniis
— obscit7'us
— pralensis
— richardi
— spinoletta
Aquila chrysaetos
— fasciata.
— ii/Fvia .
Archibuse ....
Archibuteo lagopns.
— sancti Johantùs
Ardca cinerea .
— pxrpuvaxcens.
Ardcola ralloides
Ardettaniitifita, .
— piisilla.
Asio accijiitrinns
— amcricaniis
— brachyotiis.
— otiis .
A stur pahimbarius
Alhene glan.v.
— noctiia .
— plionipes
Autour ...
Avocette
Bnlhuz.ani.
Barge .
Béca.-^SG.
Bécasseau .
Bécassine .
Bec-croisé .
Berfreronnctte.
Bernache .
lîiboreau .
lîlongios .
Iii>>nbycilln hu)iciii ica
gnrrnla. .
liunasa bctulina.
Boudrée.
Jît.tajiriis Stella ris
Bouvreuil ....
/triiiilii brrntii
— - Irurijpxis
— nigricftn^:
Bruant . . .
Uiiliii igniirtis
— tmi.rinnis .
— tiircoiiiinni^
Bii!<ar(l .
Buse. ...
JSiitro rnh/aris
Butor .
1 1 345
I 627
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719
124
124
124
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25
26
345
732 -
Caccabis ruhra II 64
Caille II 75
Calamophile ... .... I 450
Calandre ...... I 512 II 719
Calidris arenaria II 150
Canard II 432
Gapiîmulgus europœus .... 1 145
Carduelis elegans I 613
Carpodacits eri/thrimia .... I 623
Casse-noix I 233
Cerchncis tinnnncula I 72
Certhia familiaris I 656
— mexicana I 656
Charadrius aureus II 105
Chardonneret I 612
Chmdelasiims streperus .... II 438
C'helido)i iirbica I 155
Chevalier II 188
Chevêche I 110
Chipeau II 4.37
Chrysomitris spinns . . I 617 II 720
Giconia alba H 858
— fusca II 366
Cigogne ... 1 1 357
Cincle I 255
Cinclus aquaticus ...... I 255
— melanogastey I 256
Circaète. . I 21
Circaëtos beaudonini I 22
— fasciolatus I 22
— gallicus I 22
Circiis cincrarins ..... I 95
— cyaneus I 87
— httdsonhia I 87
— mucmiriis ... I 90 II 717
— riifiis I 84
Clungula glaucion II 482
— histrionica II 488
— islandica II 486
Cochevis I 507
Coccothratistes vulgaris .... I 651
Coccyzus americantis ..... I 714
— dominice}Tsis I 714
Colombe II 4
Columba casiotis. ... . . Il 4
— eversnianni II 9
— livia. ■ II l8
— œnas ... ... II 9
— palumbus II 4
rupestris II 14
Colymbiis arcticus ... . . II 674
— glacialis ... , . II 671
— septentrionalis ... II 678
Combattant II 182
Coq de bruj'ère II 36
Coiacias gctrrula . . . I 721 II 721
Corbeau .1 212
Cormoran II 529
Corneille I 217
Corvus capellanus ...... I 221
— cinereus I 221
— collaris 1 230
— corax ....... I 212
— corone I 217
— frugilegus . . .1 225
— monedula I 230
— pastinator I 226
Coturnix communis II 76
Cotyle riparia I 164
Coucou I 705
Coulicou . . I 714
Courlis II 249
Courvite II 713
Crabier II 335
Crave 1 238
Cresserelle. I 71
Crex pratensis ... ... Il 283
Cuonlus canoroides 1 705
— canorus I 705
— rochii I 706
Cumorius gallicus II 714
Cygne 11 410
Cygnus férus II 410
— tnansueius II 416
• — minor II 414
Cyp.selus aims. . . . . 1 150
— melha II 707
■ — pallidus 1 151
— nnicolor I 151
lHafila acuta. . . ... II 445
Diomt'dea exitlans Il 627
Dur-bec _^ .... I 634
Echasse II 274
Effraye 1 118
Eider II 492
Elanion 1 40
Elanus cœruleus 1 41
Emberisa cia I 550 II 719
— cirlus .... I 547 II 719
■ — citrinella I 544
— chrysophrys Il 711
— horîulana I 553
— pallasii I 557
— pusilla 1 561
— pyrrhuloides . ... I 557
— schœniclus I 556
Engoulevent I 114
Epervier I 80
Erithacus golzii .1 339
— luscinia I 339
— rubecida ..... I 335
Etourneau .1 250
Eudromias morinellus .... II 109
l?^aisan II 55
Falcinelle II 375
Falcinellus castaneus II 376
Falco œsalon I 67
— columbarius. . ... I 67
— communis I 59
— melanogenys I 60
— minor I 60
— subbutco I 63
Faucon . 1 59
Fauvette. 1 350
Fou II 523
Foulque . . II 303
Fratercida arctica . . ... II 666
— glacialis. . ... II 666
Fringilla cœlebs I 584
montifringiUa. ... 1 589
Fulica atrata . . II 304
Fuligula afflnis .11 468
— amevicana . . . . II 473
- 733 -
Fuligtda cristata II
— ferina II
— marila II
— nyroca II
— rufina II
Fuhnarus glacialis. ... II
— glupischa . .... II
G-alerita cristata ..... T
(jallinago cœlestis . . . . II
— gallinxda II
— média II
Gallinuîa chloropus. . . .II
— galeata II
— sandvicensis .... II
Garrot II
Garrnlus atricapillus l
— branti I
— cervicalis I
— glandarius I
— hyrcanus ..... I
— japonictis I
— krynickii I
— minor I
Geai I
Gécine .... I
Gccinvs canrts .1
— Sharpei .1
— viridis I
Gelinotte II
Gerfaut .1
Glareula torquata ... . . II
Glaréole .II
Gobe-mouche I
Go.'land II
Gorye-bleue I
Graculiis ercmita I
Grand-duc. I
Gravelot ... II
Grèbe . II
Grimpcreau . I
Grive I 2G0 II
Gros-bec I
Grue II
Gi'Ks cotnmïnii» Il
Guêpier I 730 II
GuUcttP II
Guignard Il
Gui^nette II
Guillemot II
Har»nafopws osculans
— ostralcg)(s .
Ifaliai'tus alhicilla.
Ilarelda glncialis
Ilarle
Herodias alba ...
— garzi'iiii
Héron ....
Hibou . .
llievofulcu gi/rfalcu
Iliniiintuiiiis pliiiil.
Hirondelle.
Hirondelle de nier
JJirundo donieslicu.
rrylfirogastra
— giitturalis
— rustioa. .
H
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207
207
206
207
207
207
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697
50
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143
143
168
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330
238
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717
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308
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Hirundo savignii .
Hoche-queue ....
Huîtrier. .....
Hulotte. ...
Huppe
Ilydrochelidon hybrida
— leucoptera .
— nigra .
Hypolaïs ictevina
— polyglotta
Jaseur.
. . I 159
I 455, II 718
II 136
I 114
I 735
II 571
II 568
Il 565
I 364
I 368
188
189
luanùis colluria.
— excubitor .
— major .
— minor .
— rufvs .
Larus argentatus
— cachinans .
— canus .
— fuscHS .
— glanciis.
— lencopterutt
— major .
— maritius
— yninntus.
— ridibundiis
Ligurinus chloris .
Limicola platyrhyncha
Liiuicole
Limosa baueri .
— melanura .
— melani(roides.
— rufa.
Linaria brevirostj'is
— cannabina
— montana .
Linotte ......
Locustella luscinoide^
— nœvia .
Locustelle
Loriot
Loxia a)neric(ina I
— amurensis. .... I
— bifasciata ... 1 649 II
— cxrvirostra . I 6''9 11
hininliyana 1
— leucoptera. ... .1
— mcxicana 1
— pityopsittacKn 1 1)44 II
1 177
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M.acarf ux
Afachetes pvgnax
Macreuse ....
yfareca penclope.
iM.ii'ouelte . .
Martinet ....
Martin-péchour .
Marlin-roselin ....
Mtl(niocoryi>ha bimnculaUi
brachydactyla
calandra .
sibirica.
yrltonicnsis
Morcule. . .
Mi-rgulii.i al'r.
Mrrgits alheltu.'i .
150
217
512
517
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- 734
Mergus merganser II 513
— ssrrator . . .... II 518
Merops apiaster .... I 731 II 721
Mésange I 423
Milan I 45
Miliaria europœa I 540
Milvus œgyptius. . . ... I 49
— affinis I 49
— niger I 48
— rcgalis I 45
Miquelon II 488
Moineau I 564
Monticola cyanea I 305
— saxatilis I 300
Morillon II 461
Motacilla alba I 455
— boarula I 461
cinerea . 1 455
cinereocapilla I 466
— flava I 465
— lugubris I 456
— melanocephala . I 466 II 718
— rayi I 466 II 718
Moltetix I 308
Mouette II 576
Muscicapa collaris I 171
— grisola ■ I 17 i
— nigra I 168
Ntsaè'(«s fasciatus II 703
Nvcifraga caryocatactes .... I 233
Numennis arquMus . . . . II 249
— lineatus II 250
— phœopiis ..... II 257
— tenuirostris .... II 254
— variegatiis II 257
Nyctala tengmahni I 106
Nyctaie 1 106
Nycticorax griseus . . . II 351, 722
CEdicnème ........ II 99
Œdicnemus scolopax II 100
Oidemia americana II 500
— deglaîidi II 503
— fusca .... .II 503
^ nigra .... Il 500
— perspicillata II 506
Oie . II 392
Oriohis galbv.la . . ... I 243
Otis macqueeni II 95
— tarda II 84
— tetrax II 89
Otocorys alpestris ... I 525 II 719
— penicillata .1 525
sibirica. .... I 525
Outarde H 83
l'andion haliaëtus ... .1 8
— leucocephalus 1 8
Panurus barbatus I 450
Parus (emodius .... .1 427
— alpestris . . .1 437
— ■ ater .1 427
baicalensis I 437
— borealis. ... I 437
hritannicits ... I 427
— cœruleus l 431
— cristatïis I 434
Parus hamtschatkensis
— major .
— michalowskii
— mtnor .
— palustris .
— pekinensis.
— phœonotus.
— pleshii .
— rufipectïis .
— tcneriffœ
Passer domesticus .
— italiœ . .
— malaccensis
— montanns .
Pastor rosevs.
Perdix cinerea .
Perdrix
Pernis apivorns.
Pétrel
Pëtrocincle. . .
Pelronia stulta . .
Phalacrocorax carbo
— graculus .
Phalarope ....
Pha'aropns cinereus -
— fulicari^is.
Phasianus colchiciis
— • chrysomelas
— decollativs .
— formosanus
— ho'>narowii
— mongoliens
— pcrsicus
principalis
shawi .
— sladeni .
— torquatus .
Phylloscopus r^i.fus.
— sibilatrix .
— trochilus .
Pic
Pica caudata .
— mauritanica
— nnttalHi ,
Picns cabanisii .
— kamtschaticus
kamtschatcen
— leuconotus.
— major .
— médius .
minor .
numidicus
— poelzami .
syriacus
Pie
Pie-ffrièche.
Pilet".
Pingouin ...
Pinicola emicleator.
Pinson
Pipit
Platalea Icucorodia.
— major .
Plectrophane . . .
Plectrophanes lapponiciis
— nivalis . .
Plongeon ....
Pluvier
247
577
680
689
692
532
437
423
427
423
436
427
427
II 710
427
431
565
.565
572
572
II 717
II 69
II 64-69
I
34
II 6.32
I
II
II
II
II
JI
II
II
II
II
II
II
I
I
I
300
II 719
II 529
II 535
II 261
II 266
II 261
55
56
56
58
57
56
56
57
56
56
56
407
411
404
II 721
200
201
201
681
680
693
686
680
II 721
II 721
I 681
I 681
I 681
I 200
II 717
II 444
II 661
635
584
474
II 371
II 371
I 532
II 719
536
II 671
II 104
- 735
Podicipes califoraica
— cornutus .
— cristalus .
— griseigena.
— major ....
— minor ....
— iiigvicollis .
— novae-hollandiic .
— pelzelni.
— tricolor.
Porsana maruetta .
— par va ....
— piisilla .
Pouillot
Poule d'eau
Pratincola hemprichii .
— le u cura.
— maura ....
— madagascariensis
— rubetra.
— rubetraoiden .
— riihicola
— torquata
Procellaria leiicorrhoa
— jjclagica ....
Proyer
Pullin
Piiffinas angloriiiH .
Pygargue ......
Pyrrhiila major. .
— rubicilla .
C^nerquedula caroUnensis
— circia .
— crecca .
— formosa
Râle ....
Rallxs aquaticns
— indiens.
Ramier . . . . ,
lieciirvirostra avocetta.
Regains cristatun .
— ignicapillHn
— maderensis
Rissa tridactyla .
Roitelet
Rollier
Roselin
Rossignol .
Rouge-gorge . .
Rouge-ijuoue .
Rou.sserolle . . .
Ruticilla cœrulevula
— cyanecida .
— mcsuleuca .
— pliœnicura.
— titys .
.Sauderliiig. .
Sarcelle
Saxicola œninthe .
Scolupax ruslicol'i .
Scops bakkaiiurna .
— brute i .
— oapensis
— gi'i ■ ■
jajionicHS .
— tnalayaniis
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II 453
II 448
II 453
II 456
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II
II
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II
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136
Scops pennatiis . .
— ruflpennia .
Serin
Serinv.s hortulaniis
Sitta albifrons .
— ainurcnsis.
— cœsia .
— europœa .
Sittelle
bizerin ....
Sornateria dvesseri ,
— mollisfima
— spectabilis .
Souchet. ...
Soulcie
Spatula clypeala. .
Spatule
Sqiiatarola lielvetica
Stercoraire. . . .
Stercoraritiscatarrhactes
— crepidatus .
— longioaudus
— poi»arinus.
Sterna anglica .
— canliuca
— caspia .
— dougalU. .
— fluviatilis .
— minuta.
— paradisea .
Strepsilas interpres.
Strix délicat II la . .
— flammea
— furcata.
— javanica .
— perlata .
— pratincola.
— rosenbergii
Sturnus unicolor .
— vulgaris
Sxla bassana .
Surnia canadensis
— ulula .
Suruie
Hylvia alricapilla .
— cinerea ,
— garrula
— hortensis .
Syrniumalucv .
— nivicola
Syrrhapte ....
Syrrhaptes paradoxas
Tadorna cornuta .
Tadorne ...
Tarin
Tetrao tetrix . . .
— urogallua .
Tétras
TlialaBsidrome . .
Tic/iodruma inuraria
Tichodronie . .
Torcol
Totanns cnlidris .
— glareola
-- glottis
— oohrupus
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493
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576
428
371
125
611
611
619
622
615
545
548
541
558
554
561
551
133
119
119
120
119
120
119
119
251
25(1
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101
101
100
351
360
357
354
115
115
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721
423
422
720
43
36
35
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721
721
675
202
197
207
188
211
— 736
Totanus stagnatilis
Tourne-pierre.
Tourterelle. .
Traquet
Tringa canvJus.
— cinclus .
— tnariihna .
— minuta.
— ruficollis .
— subarquata
— temmincki.
Troglodyte. . . .
Turdus alicia .
— atrigularin.
— ■ daunia .
— fuscalus .
— iliacus .
lunulatus .
— mcdayanus
— tncrula . .
— musicus, .
193
133
19
312
154
166
159
171
171
162
175
397
294
279
270
281
287
270
270
260
291
Turdus naumanni. . . I 282 II 717
— obscurus ... I 207 II 718
— pilaris I 275
— sibiricus I 265
— swainsoni ... I 294 II 718
— torquatus 1 263
— ustulatus I 294
— varius .... I 269 II 717
— viscivorus I 272
Turtur vulgaris ... . . II 20
TJpupa epops I 736
Uria californica II 655
— grylle Il 651
— mandtii II 651
— troile ....... II 655
Vanellus vulgaris II 129
Vanneau . II 128
Verdier I 580
~Yuncc torquilla 1 676
CENTRAL PARK, "-^
^^ NEW YORK. A'
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FAUNE
DES
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Alphonse DUiïOIS
DOCTEUR EN SCIENCES,
• ONSiKIlVATELR AT MISKK ROYAI, d'iIISÏOIRE NATLREM.B DE ItKl.OUJI E,
IIIKVAI.IER DE l/ORDRE DE LÉOPOI.D,
MKMHRE DU COMITÉ OR.VITIIOLOGIQUE INTERNATIONAL ET PERMANENT,
MliMHRE HONORAIRE, CORRESPONDANT OU EEI-ECTII' DE PLUSIEURS SOCIÉTÉS SAVANTES.
SÉRIE DES OISEAUX
TOMb: II
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A LA LlBllAIUlIi: C. MUQUAliDT, TII. FALK S'
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