h i sxca r e
DE LA
Naiflance & du Progrez-da *
KOU AKERI SMEj
A V È G
Celle de fes Dogmes.
A CoLOGNEj
Chez PIERRE MARTEAU.
1 69 2,
PREF AC £.
Œrfonne que je fâche
V^Jà) n'ayant -encore écrit
l'Hifloire des Kouakre^
qui font beaucoup de
bruit aujourd'hui , particulière-
ment en Angleterre, qui eftleur
lieujiatal, leur centre & leur nid,6c
où malheureufement ils ne fe mul-
tiplient que trop à la faveur des tri-
lles & déplorables divifions qui la
déchirent , tant en matière de Re*
ligipn que de gouvernement civil ,
dont chaque parti tache de fe ren-
dre maître abfolu 5 &qui ont pro-
duit de tems en tems des fouleve-
mens entiers de toute la nation, Se
changé la face de l'Etat, je m'af-
feure qu'on fera bien aife de lire
celle-cy que je donne au public
Comme je fuis fur les lieux, 8c
qu'il y a déjà un tems confiderable
# & que
PREFACE^
que je demeure à Londres où il y a
plus de Kouakres que dans tout le
refte du Royaume, & que je con-
verfe fouvent avec quelques-uns
d'entre eux, mais qui n'ont pas
encore mangé la Pâque, ni renon-
cé à Jefus fils de Marie, à [efus
crucifié, au ieul& véritable Chrift
mort pour nous, rtffufciié des
morts , & régnant en Corps &
en ame au Ciel, &quinelaifient
pas de connoître tout le fond de la
Se£le : fans dire que j'en connois
les Chefs, que je les ay fouvent
converfé fur leurs opinions, &que
j'en ay apris tout le fejretpar l'a-
dreffe d'un peu de complaiiance
comme fi j'entrois fort dans leurs
fentimens: ayant enfin lû tous leurs
meilleurs livres, 6c ceux de leurs
plus fameux Do&eurs, dont les
perfonnes ne me font pas même in-
connues, l'on doit s'afieurer que
mon Hiftoire fera véritable, fidelle
&fincere , pijifqu'elle vient d'un
homme qui les connoît intime-
ment,
PREFACE,
ment, & qui eft très informé de
tous les myfteres de leur Cabale.
Il eft jufte , il eft neceflaire mêine,,
d'arracher le mafque à ces infâmes
.hypocrites-, & à ces deteftabl-es
hnpofteursqui feduifent une infi-
nité du fimpies par leurs apparen-
ces trompeufes de pieté & de
Sainteté, Scquineanmoinsenont
renié la force &. lu vérité. Il eft du
devoir d'un bon Chrétien de dé-
couvrir les horribles & profondes
impietez de ces faux Prophètes qui
fous le nom & fous l'apparence
d'un Chrift imaginaire tâchent de
détruire la foy d u véritable Chrift ,
du Chrift de l'Evangile , de Jefus
fils de Marie mort & reflufcité des
morts.
L'Aiitheur du Froteftant Paci-
fique eft le feul & le premier qui ait
écrit en nôtre langue PHiftoire des
Dogmes de cette Seéte. Mais par
le portrait flatté qu'il en fait l'on
voit aflez qu'il eft de leurs amis,
ou qu'il s'eft laifle tromper comme
, ■ * | beau-
PREFACE.
beaucoup d'autres aux apparences
de Religion qu'ils affeétent afin de
fe cacher & de feduire. Il leur prê-
te des excufes & des couleurs fi fa-
des qu'on n'a qu'à foufler defius
pour les effacer. Ce que j'y trouve
d'aflez divertiffant eft que fur le
Chapitre de leur orgueilleufe in-
civilité, & de leur manière bruta-
le de boire & de manger, il ne fait
pas de façon de pafler condamna-
tion pour eux, & de permettre
qu'on les traitte de fous 6c d'infen-
fez. Mais les Kouakres ne l'enten-
dent pas ainfi , Se ils fe fbavent
trop bon gré de s'être enfin ac-
quis cette liberté infolente de
■ traitteravec mépris & avec fierté
le refte des mortels , & de s'être
ainfi élevez au deflus de tous pour
permettre qu'on les traitte pour
cela de fous & d'extravagens. S'il
y a de la folie, il y a encore plus
i d'orgueil & de vanité. Et ils veu-
lent bien qu'on le fâche. Car ces
| gens qui font tant les doux & les
fini*
PRE F A C Eï
fimples , ne fouffrent pas chez
eux que leurs Serviteurs leur par-
lent autrement que tête nue Se
chapeau bas, & en termes refpec-
tueux. Et quand l'exemple des
maîtres fait émanciper les Servi-
teurs à dire tu €r toj^ & à leur parler
la tête couverte , on fçait bien leur
dire d'un ton de maître que cela
n'apartient qu'aux ami?, c'eft à dire
auxKouakres. Je fçay desHiltoi-
res fort £lailantes là deflus, mais
qui font plus propres à être débi-
tées dans une converfation libre
d'amis, qu'à être inférées iey.
Je ne doute point qu'ils ne fe ré-
crient & ne fe foulevent contre
moy de ce que je découvre leurs
myfteres abominables, St de ce
que j'exhorte les Chrétiens à les
avoir en horreur, & les Magiftrats
à les reprimer. Leurs amis Scieurs
fauteurs, les libertins & les Déi-
fies du temps , ne pourront foufrir
qu'on attaque ainfi leurs chers
Compagnons , & les complices
* 4 de
PREFACE,
de leur conjuration contre le Chri-
ilianifme. Mais je leur déclare que
je tiens leur toierance où dcfenfe
du Kouakcrifme pour le comble
de l'impiété & pour une véritable
confpiration deDeïftespour per-
dre la Religion Chrétienne. Et je
promets qu'en donnant une fécon-
de partie de cette Hiftoire qui fera
celle des autres principales Sectes
d'Angleterre & de Hollande, &
en particulier celle du Socinianif-
mej je la commencera)1 par la ré-
futation exafte du profane Com-
mentaire Philofophique fur ces paro-
les de Jefus Chrift contrains les
d'entrer. En vérité ceux qui com-
pofent ces ouvrages dangereux
ôc pleins de poifon 5 ne profi-
tent pas mal des conférences
qu'ils ont avec les Sociniens, les
libertins & les Spinofiftes dont la
Hollande abonde.'
Par avance & pour me juftifier
je diray icy fur ce fujet la que ces
nouveaux Authcurs en voulant
que
PREF AC E.
que le Migiftrataccorde toute Im-
punité & toute liberté à toute forte
d'hérétiques jtifqu'aux Deïiïes 5 &
en luy ôtant le pouvoir de les repri-
mer fur tout dans les Herefiarques,
& dans les Dodeurs, fe déclarent
contre un droit qui eft fondé fur la
nature. Car tout Magiftrat a pour
le moins fans contredit autant
d'authorité dansTEtat qu'un pere
de famille en a naturellement;
dans fa famille. Or il eft permis à
un pere de famille de reprimer qui-
conque voudroit en abolir le régi-
me Se la Religion, Il a droit de les
en chaffer & de leur défendre d'y
rentrer. Au commencement du
monde les Chefs de familles
avoientlafuprême direction de la
Religion & du gouvernement po-
litique. Auffi tous les peuples du
monde font convenus que les Ma-
giftrats & les Roys eiiffent Fin-
fpeâion & l'intendance fur l'wn &
l'autre. Et même les premiers Rois
du monde ctoieiit& Rois & Sou-
f 5 veraius
PREFACE,
verains Pontifes tout enfeixi*
ble.
Je ne dis pas qu'il foit permis de
tuer 5 de brûler , ou de pendre qui-
conque ne veut pas par un principe
deconfciencefefoumetreàla Re-
ligion établie parles loix&par les
Souverains, à moins qu'ils ne for-
ment des faftions , & ne confpi-
rent contre l'Etat. Mais il eft du
devoir de tout Prince Religieux
d'étouffer d'abord toutes les fe-
mences de divifion qui commen-
cent à s'élever, & d'empêcher
qu'elles ne prennent de fi profon-
des racines, & ne fe multiplient fi
fort qu'il foit après cela impoffiblc
de les arracher feurement, & fans
expofer l'Etat à de grands maux,
Stades defordres très dangereux.
Il faut veiller fans cefle fort foi-»
gneufement fur la conduitte des
Doéteurs & des Prédicateurs ; &
fî-tôt qu'on voit quelqu'un s'écar-
ter trop du droit chemin, & de la
Doélrine reçûë & authorifée, il
faut
PREFAC E.
faut luy impofer filence, ôcs'il ne
veut pas obéir , & qu'il feme fes
Doctrines en fecret il le faut re-
primer tout à fait, & l'arrêter en
le mettant en lieu de fureté, &àla
garde de perfonnes qui répondent
deluy&defaconduitte, ou le re-
léguer hors du Royaume & en
lieu d'où l'on n'en craindra plus
rien. Si l'on avoit pu ainfi répri-
mer un Simon le Magicien, un
Mânes , un Marcion , que de maux
& quededelordresn'auroiton pas
épargné à TEglife de J. C. que de
milliers d'ames n'auroit-on pas
fauvé? fi l'on en avoit fait autant à
unPafcateRadbert, & à tous les
autres, anciens ou modernes qui
par leurs inventions téméraires ôc
impies ont renverfé les fondemens
duChriilianifme, & introduit un
T» C. inconnu à l'Evangile , in-
connu à toute FEgliie primitive,
ou fouillé la pureté de la Religion
par je ne fçay combien d'erreurs
folles. Se. pleines d'impiété & de
* 6 co.n-
PREFACE,
contradiéiion, & par une infinité
de cultes fuperilieux & criminels ,
que de maux , qae de guerres , que
de defordres , n'aufoit-on pas pré-
venu ?
Mais fi les Magiftrats ont droit
naturellement de reprimer ceux
qui cherchent àrenverfer la Reli-
gion foie Chrétienne parmi les
peuples Chrétiens, foit naturelle
parmi les autres nations du monde,
ou qui en detruifent l'eflence & en
corrompent la pureté par des cul-
tes fupérftitieux & impies , ils font
auflî obligez de laifler à leurs fujets
une très grande liberté dans tout
ce qui n'eft pas de l'eflence de la
Religion & du culte public: &de
les reftreindreàtréspeu d'articles,
très peu de principes, & très peu
de pratiques, par ce moyen là les
Efprits curieux ont toute la liber-
té honefte de s'exercer, &de Phi-
lofopher fans danger de choquer la
Religion , ni de troubler l'Etat par
des fchifmes & par des divifions ca-
pa-
PREFACE,
pables de le perdre : au lieu qu'en
ne reftreignant pas ainfi la Reli-
gion à un petit nombre d'articles
neceflairesSc eflentiels Ton tombe
dans la Tyrannie 6c Ton met les
Efprits dans une fervitude infupor-
table, qui caufe enfin les mêmes
defordres que Ton vouîoit éviter.
Peut on nier que Dieu n'ait for-
mé les hommes également pour vi-
vre en foeieté comme pour fado-
rer? On ne le fçauroit nier. Par
confequent s'il adonné aux Prin»
css le droit & le pouvoir de repri»
mer ceux qui violent la foeieté , il
leur a auffi donné celui de repri-
mer tousceux qui voudroient in-
troduire l'impiété.
Et ne me dites pas que chaque
hérétique accu'fe réciproquement
fon adverfaire d'introduire l'im-
piété & de ruiner Peffence de la
Religion? Car il très facile de
voir fi cela eft ou non. Si les uns &
les autres conviennent de tout ce
qu'il y a de clair dans la Religion,
*. 7 • & de
PREFACE.
&: de ce que tous les Chrétiens par
exemple font toujours convenus y
& conviennent encore mainte-
nant, ilsconfervent les uns&z les
autres Feflcnce de la Religion ,
quelque diverfité d'opinions qu'il
y ait entre eux, &en comparant
ces opinions à ce qu'il y a de clair,
& de reconnu de tous les partis,
l'on aperçoit d'abord fi elles fe con-
tredirent manifeftement & direc-
tement. Ainfi la régie delà véri-
table tolérance eft toujours claire
& nette \ permis néanmoins à tous,
ceux qui croyent de bonne foy que
telle ou telle opinion eft une er-
reur capitale & mortelle de fe fe-
parer de ceux qui la défendent..
Mais il ne faut pas légèrement ni
inconfiderément juger de la natu-
re des dogmes. Il ne faut écouter là
deflus ni les partions , ni les préju-
gez. Il faut j uger avez un efprit im-
partial , & fe fouvenir toujours que
dans les cas douteux il faut panener
du coté de l'indulgence plutôt que
PREFACE.
du côté de la rigueur. Que lî après
avoir examiné iong-tems &meurc-
ment un dogme, Ton ne peut s'em-
pêcher de le prendre pour une er-
reur mortelle , l'on peut fe feparer ,
mais fans pafler outre. Les loix de
l'Evangile & de la charité Chré-
tienne n'obligent plus à conferver
dans la communion & dans la fra-
ternité ceux que l'on a reconnu
après un long & ferieux examen
défendre avec opiniâtreté des dog-
mes que Ton ne fçauroit s'empê-
cher de regarder comme des
erreurs Capitales. Toute Société
Chrétienne a ce droit là, Scc'eft
l'Evangile qui le luy donne.
Mais l'Evangile ne donne au-
cun droit à quelque Société que ce
foit de chafîér de fon fein & de fa
fraternité ceux qui n'ont point de
ces fortes d'erreurs mortelles, &
qu'elle fçait parfaitement n'en
avoir aucunne. Comme il n'efi
permis d'excommunier, &• de
chaffer de la fraternité que ceux
qui
P R E F A C E.
qui tombent & perfevercnt dans
des péchez fçandaieux & incom-
patibles avec le nom Chrétien, il
n'eft pas permis non plus de re-
trancher de la Société fi-nonceux
qui violent manifeftement les
fondemens de la Religion. Au-
trement c'eft introduire la Tyran-
nie dans l'Eglife, & vouloir do-
miner fur la foy des Chrétiens.
C'eft ruiner la charité Chré-
tienne & le fuport des foibles qui
nous eft fi fort recommandés c'eft
faire dépendre la Religion du ca-
price humain, de l'intérêt, du
préjugé, & de la paffion. Et de
quel front peut-on chafier de fa So-
ciété ceux que l'on eft convaincu
qui apartiennent à la Société de
J.C.? peut-on chafler de la table
ceux que l'on fçait que J. C. reçoit
à la fienne? N 'eft-ce pas une impie-
té horrible, & une in juftice crian-
te à des Chrétiens de chafler de
leur famille des perfonnes que
nous réconnoiffons apartenir veri-
ta-
PREFACE,
tableraient à la famille de Jefos
Chrift? Ou trouvera-t-on que les
Apôtres & les premiers Chrétiens
en ayentuzé autrement? Où trou-
vera-t-on qu'on ait jamais fongé
à ces deux fortes de retranche-
ments, un qui retranche de la So-
ciété, & point de la Communion
Chrétienne, ou de la Table de Je-
ius Chrift 5 & un autre qui re-
tranche de' toutes les d'eux? Les
premiers Chrétiens n'ont jamais
chaflë de leur Société ou de i'Egli-
fe que ceux qu'ils excommu-
nioient tout à fait , & qu'ils chaf-
foicnt delatabîeîacreedej. G. ou
qu'ils croyoient avoir mérité d'être
retranchez du Corps des frères ôc
des fidèles.
Je conclus de là que c'eft une
Do&rine Anti-Chrétienne que
celle du Pape adoptée par quelques
nouveaux Théologiens , qui veu-
lent faire les Papes chacun dans
fon party , que de foutenir qu'il
eft permis à des Sociétés Chrétien-
nes
PREF AC E.
Des- de fe liguer enfemble & de
fe ■ confederer pour enfeigner cer-
tains dogmes qui ne font pas néan-
moins de leur propre aveu effen-
tiels à la Religion, & qui très fou-
vent ne font que des erreurs très
grofîîeres & très pernicieufes, &
de chafler de leur fein & de leur
communion ceux qui ne pourront
I?as fe refoudre d'embrafler ou
d'enfeigner ces Doctrines 5 fans
prétendre néanmoins en les chaf-
fantainfï, de les chafler du Corps
de l'Eglife& de la famille de J. G
C'eft là l'Antkhriftianifme tout
pur> c'eft authoriferpar fa propre
conduite la Tyrannie de TEglife
Romaine, & fermer la bouche aux
Proteftans, &les empêcher de fe
plaindre de la rigueur qu'elle leur
a teniie en les chaflant de la com-
munion pour des chofes non ne-
eeflaires & capitales. C'eft chan- '
ger la Religion deJ.C. en une pu-
re Se6te dePhilofophes quifefub-
divifent enfuite en autant de bran-
ches
PREFACE.
ches qu'il y a de partages d'opi-
nions. C'eft introduire la licence
& la divifion dans le Chriftianifmc3
les tins fe cantonnant contreles au-
tres, &fechaflant mutuellemeat
de leur communion. C'eft fomen-
ter toutes les divifions qui y font
déjà , & les rendre irrémédiables.
C'eft renoncer à la loy royale de ïa
charité, vous qui êtes forts fu-
portez les foibles en la foy* por-
tez les charges les uns des au-
tres , & accomplirez ainfi la loy
Royale de J. C C'eft enfin intro-
duire l'hypocrifie & la difïimula-
tion dans la Religion , en ce que
ceux qui auront des fentimens par-
ticuliers n'ozeront pas les déclarer
ou ne le feront qu'en cacheté, Se
pour fe conferver dans la Société
prêcheront contre leur propre
eonfeience , & feindront de croire
ce qu'ils ne croyent pas.
Mais pour revenir à nos Koua-
Icres & à leurs defenfeurs, je dis
en particulier à l'Autheur du Com-
PREFACE.
fventaire Phdofophique que le droit
desMagiftrats Chiênensde repri-
mer par voye d'authorité les Doc-
teurs& les fondateurs de ces héré-
Jîes qui ruinent toute l'efîence de
la Religion n'eft nullement fondé
fur ces paroles Contrains les â" entrer y
mais furl'aciion du maître du ban-
quet des nopces.
Cesnopces&ce banquet repre-
fentent du confentement de tout
le monde FEgiife Chrétienne, fon
etabiifîement par la prédication de
FEvangile. C'eftle Royaume des
Cieux ou le Royaume de J.C. qu'il
a formé & où il régne. Parmi ceux
qui y entrent il s'en trouve un qui
n'a point la robe nuptiale , c'elï-à-
dire qui n'a point ce qu'il faut avoir
pour pafler pour Chrétien , & pour
un des conviez. Que fait le maître
ayant aperçu cet étranger & cet ef-
pion ou cet ennemi? Il s'en va droit
à luy , & luy dit , qui t'a fait fi bardy
que d'entrer ici & de te fourrer
parmi les conviez fans avoir pris la
robe
"il
PREFACE,
obe nuptiale -, Et que viens tu faire
ci n'étant pas du nombre ni de la
jualité de nous tous? qu'on me
prenne cet homme là 5 & qu'on me
e jette pieds & poings liez hors
ficy ? qu'on le jette dans îès ténèbres de
iehors ou il y a pleur & grincement de
iens. c'eft à dire hors de l'enceinte de
l'Eglilè ^& du Chriitianifme parmi les
oenples infidelles qui lont dans les ténè-
bres en comparaifon des Chrétiens qui
compofent un Royaume de lumière.
Je ne dis pas qu'il rai le faire entrer dans
le Chriftianiime les hommes à coups
d'épée ou de bâton, il faut les preffer,
& les foliciter inftamment d'y entrer.
Mais s'ils veulent y entrer, & s'ils y en-
trent erFe&ivement fous îe mafque d'hy- -
pocnfie , & que l'on découvre à la fin
qu'ils n'ont pas la robe nuptiale, c'efi-à-
dire qu'ils n'ont rien de Chrétien finon le
nom & le privilège d'être bien vetus,nou-
ris & entretenus aux dépens des Chré-
tiens, aux dépens de J. C. même, à la
table de qui ils font grand chère tout en
fe moquant de luy & de fa Religion, il
eft du devoir du Magiftrat Chrétien qui
rcprefente iaperfonnede J. C. & qui eft
le maître de la Salle & du feftin des nop-
ces de leur demander qui les a rendu fi
har-
PREFACE.
hardis que d'entrer dans la Salle, & de
s'y mettre au rang des conviez & à la ta-
ble du feflin fans avoir la robe nuptiale,
c'eftà dire fans avoir les qualitez requi-
fes pour jouyr du droit de Bourgeoise
Chrétienne & de manger à la table de
J. C. de les faire failïr & jetter dehors par
les épaules. Eft-il jufie que J. C. & les
Chrétiens foufrent que des Athées, des
libertins & des profanes faflênt grand
chère à leurs dépens, &au milieu d'eux
pendant qu'ils fe moquent mfolemment
de toute leur Religion & de fon autheur ?
S'ils ne font pas Chrétiens & s'ils ne veu-
lent pas l'être , n'eft- il pas j ufte qu ils ail-
lent chercher fortune ailleurs, & fe re-
tirent pnrmy leurs femblables ?
Il en faudroit faire autant à ces impo*
fleurs de Kouakres & à tant d'autres qui
confpirentenfemblede faper les fonde-
mens du Chriftianifme3 & de perdre
TEglife de J. C . fi l'on reprimoit ces four-
bes là & tous ces autres Doâeurs & pré-
dicateurs qui quoi que très convaincus
dans leur aine qu'ils n'enfeignent que des
impollures grolTieres, ne lailTent pas
néanmoins de les enfeigner, & d'y en-
tretenir les peuples crédules, l'onferoit
une œuvre de juftice & de charité tout
enfemble fort agréable à Dieu, de jufti-
ce en reprimant des importeurs qui n'ont
aucu-
P R E F A C E.
aucune pieté ni aucune Religion , qui
déshonorent le nom de j. G. & qui le
blalphement fans cefTe : de Charité, en
fauvant les peuples lèduits , qui revien-
droient auffitôt à eux mêmes s'ils n'a-
voient plus leurs feduéteurs à leur tête.
Un jour nous en dirons davantage &
nous découvrirons le Deïfme ou plutôt
l'Atheïfme caché du CommcntateurPhi-
lofophique , & de fes partifans , & je leur
prouverai d'une manière invincible que
leur principe outre vajufqu'à la toléran-
ce de l'Atheïfme , & qu'ils ne fçauroient
s'en défendre, quoy qu'ils demeurent
d'accotd que le Magiftrat eft en droit &
même dans l'obligation indifpenfable de
rcprimer l'Atheïfme & les Athées. 11
ne m'en faudra gueres davantage pour
ruiner leur principe , & pour les pouffer
u[que,admetam non loquù En particulier
je prouveray cela demonftrativement
contre le Commentateur Fhilojbphiquc , &
par fes propres écrits. Pour cet effet il
faudra que la dernière Comète r eparoiffe
à nos yeux, mais il n'en faudra rien crain-
dre. Au refte cette Hiftoire du Kouakerif-
me peut pafièr pour une véritable apolo-
gie de la Religion Chrétienne, en mon-
trant la neceffité qu'il y a de l'embraffer
telle que Jefus fils unique & Eternel de
Dieu 3c de même nature que luy , & vrai
Dieu
PREFACE.
Dieu auûY bien que luy, & un Dieu bénit
éternellement, leion i'£fpritde ramifi-
cation, & fils de David & de Marie fëlon
la Chair, nous l'a enleignée luy même
pendant ra vie mortelle icy bas, &
pour le foutiende laquelle Religion il a
ibufert la mort infâme de la croix; telle
que res Apôtres nous l'ont prêchée par
fon ordre , telle que les livres de l'Evan-
gile nous la reprefèntent, & telle enfin
que la tradition confiante & perpétuelle
de t'Eglife de J. C. l'a fait palier jurques
a nous. Cartoutlemyfterede l'Apofta-
fie Kouakerienne coniîfie à infyirer du
mépris pour cejefiis fils de Dieu & fils de
Marie , Dieu & homme tout enfemble i
& le médiateur & rédempteur des hom-
mes par le prix de fon fang précieux pour
oejefos, dis-je,corporel & luteralA pour
toute ra Religion telle que la lettre de
l'Evangile nous le propoic; &à le me-
tamorphofer en je ne rçai quel Chrift
fpirituel , univerfel , & chimérique , au-
quel le vrai Jelus ni res Apôtres n'ont ja-
mais pente , Se qui n'eft qu'un renver-
rement entier & diabolique du vrai
Ghriftianifine.
HISTOI-
HISTOIRE
ABREGEE
DELA
Naiflance 6c du Progrcz du
KOUAKER I SME.
AVEC
Celle de fes Dogmes.
CHAPITRE PREMIER.
George Fox Autheur des Kouakres.
Cefl Mahomet refufche. Con-
formité' du Kouakcrifme avec le
Mahometifme.
^J|E Leâeur ne trouvera pas
Ml .mauvais, je m'aifeure, iï
(ê^i avant ^uc ^'entrcr dans
l'examen desDogmes par-
ticuliers des Kouakres , je
fais ici en peu de mots THiftoire de
A l'Origi-
2, Histoire
f origine de cette maudite à damnabïe
Secte, & que je croi être le dernier ef-
fort du Démon pour perdre le nom
Chrétien. Iî y a environ 48 ans qu'elle
a commencé , & c'eft dans l'Angleter-
re qu'elle a pris naiffance.
Il n'y a perfonne qui ne fâche que
les Anglois généralement parlant ont
beaucoup de panchant à la mélancolie,
& qu'ai nfï ils font -d'un tempéraments
*raire des Enthoufiaftes , des Phanati-
ques & des Fous. Auffi n'ont ils ja-
mais manqué des uns & des autres.
Toute rifle e(l pleine de ces Anaba-
tiftesàvifions à à révélations, &qui
le donnent une liberté toute entière de
reformer la Religion , & l'Etat même.
Le Kouakcrifrné n'eft à bien parler
qu'une Secle d'Anabatiftes , fort
iemblables quant aux vidons, aux révé-
lations, &aux inlpirations , aux pre-
miers Anabaptiftes de Hollande & de
Murîfîef . Et tous ceux qui connoiffënt
à fond cette Secte là , & qui fçàvent
auffi ce que font les Illuminez d'Efpa-
grie demeurent d'accord que c'eft une
même chofe. ' 9
Si l'Angleterre n'a jamais manqué
de vifionaires , elle n'a jamais manqué
de fous non plus. Ses plus beaux hôpi-
taux ne font que des Morïhih) c'eft à
dire
RU K O U A K E II I S M E . 3
dire des petites maifons , où l'on ren-
ferme les fous. La plupart même de
fes hôpitaux ne font que pour les fous ,
& ne font remplis que de fous , fans
parler de ceux qui font répandus dans;
toute flfle , mais que les familles ca-
chent & renferment chez elles pour ne
pas publier leur honte & leur ignomi-
nie. Comme les Anglois font auffi na-
turellement fort, gourmands & adon-
nez à leur ventre , & fur tout grands
mangeurs de Chair, qu'ils dévorent
toute fanglante , il n'eft pas ponible
que ce fuc groffier & terreftre n'envoyé
au Cerveau quantité de vapeurs noi-
res, qui jointes à celles de leur char-
bon peftilentiel, & qui infectent per-
pétuellement l'air , & par confequent
les poumons , ne troublent toute l'œ-
conomie des Efprits , ce n'en perver-
ti {ïent les mouvemens & les opéra-
tions. C'eft pourquoi il ne faut pas s'é-
tonner fi toute l'Angleterre fourmille
de fous & de fanatiques , de gens qui
fe noyent, qui fe pendent de fang
froid , & qui fe coupent la gorge pour
le moindre fujet. On n'entend parler
auffi par tout que de Virions, de Pro-
phéties , & d'Aftrologics. Si les per-
sonnes qui ont du panchant à la folie
ont quelque pieté & quelque connoif-
A 2 fance
:
4 Histoire
lance des chofes de la Religion, leur
folie & leur mélancolie dégénèrent en
enthoufiafme , & phanatiïme , eu lon-
ges, en virions. Dieu, j. C. fon fils
bien aimé, fes Anges, fes Apôtres
leur aparoillenr, leur parlent, & les
avertirent de tout ce qui doit leur arri-
ver, &cela avec amant de certitude
<^ue Jeretnie prediioit le fac de Jerula*
ïerri & la Captivité des Juifs. Nous en
connoiflbns de cesfongeurs & de ces
viiionaires , qui au relie paroi fient
aflèzfages & allez retenus, mais qui
des le moment que vous les mettez lur
le chapitre du Songe & de la Prophétie,
le découvrent aufii-tôt & extravaguent
i\ fort que vous ne fçavez (i vous en de-
vez rire ou pleurer.
Un de ces nouveaux Illuminez
tomme George Fax ou le Renard , di-
gne nom de ce fameux impofteur, a
-été le père & le Fondateur des Koua-
kres ou 1 rembkurs. Cet homme cft
encore vivant, 6c iî a le plaifîr de le
voir le Patriarche de cette nouvelle
Secte. G'eft un miierabîc fans lettres ,
lans feience & fans aucune véritable
pieté, né de la dernière lie du peuple,
fans éducation, ni indruètion, & que la
fiupidité&la bafièflë de fon Elprit fit
reléguer aux champs parmi les pour-
ceaux ,
DU-KOUAKERIS M E« f
ceaux, pour en être le porcher. Eu
.effet il les garda fort ^ long-temps.
Mais comme ie régne Tyrrauique de
Cromwel étoit un régne d'indepeii-
dantifrne,& où l'on le croyoit tout per-
mis en matière de Religion, le porcher
s'ennuya de garder fes pourceaux , &
voulut devenir Prophète, à l'iniita-
tion d'un Amos qui de bouvier devint
Prophète. 11 quitta donc là porcherie,
& fc mit à courir les Champs, arrê-
tant les palTans , & ceux qui le vou-
loicnt bien écouter , & leur difant que
Dieu Tav oit envoyé pour exhorter le
monde à la pénitence , au recueille-
ment & a renoncer à eux-mêmes pour
écouter la voix & la lumière intérieu-
re de Dieu qui les enfeignoit. 11 n'y a
point encore la de mal; auffi le fou-
froit-on prêcher patiemment.
Pendant qu'il court ainli l'Angle-
terre, irrencontre une vefve de Juge
de Paix allez bien faite & fort riche ,
qui le voyant gros & gras & robafte de
là perfonne, fc perfuada qu'il valoir
bien la peine d'être acheté. Elle en de-
vint amoureufe; Et nôixe fin Renard
fçût fi bien l'engager tout ruftaut qu'il
fût qu'il l'obligea à Tépoufer. Il ne
manqua pas de faire à croire à cette
femme qu'il étoit inipiré de Dieu, &
A 3 ^ ll
S Histoire
qu'illedeftinoità une œuvre extraor-
dinaire. Il ne lui parloir que dcJLw-
toUrtt ôc d'Efprh, & contrefaiibit fi
bien l'homme infpiré& agité de Dieu
par fesfoûpirs, par fes trembîemens
de Corps , ( & c'eft de la qu'on leur
Pà donné le nom de Quaker , e'eft à
dire Uremblmr, ) oc par Tes oraifbns eja-
culatoires, qu'à la fin elle donna dans
le panneau, & lui abandonna tous fes
biens pour en faire comme il jugeroit
à propos. Etluis'enfervit à faire des
Difcipks. Ainfî il attira fous prétexte
de Charité quantité de païfens & de mi-
ferables,que laneceifîté auroit fait Ma-
iwmtam auffi-bien que Trcmblcurs.
Il me femble que voilà quafi l'Hi-
ftoirc de Mahomet. C'efi: un mile-
table efclave qui garde les troupeaux
aux champs, qui a la paffion de deve-
nir Prophète. Le deftin lui fait trou-
ver une riche maîtreflè qui l'époufe
après la mort de fon mari. Il lui fait
acroire que le mal caduc dont il eft
tourmenté eft un effet de l'agitation
du St. Efprit, qui lui parle intérieure-
ment. Ilfefertdesbiensde là femme
pour faire des Sénateurs, & pouffe
ainfi fa fortune. 11 y a beaucoup de
gens parmi les Trembleurs , qui
Croycnt laoréexijlcncc t la tranjhiyrra-
DU KOUAKERISMF. 7
tipn des- amzs. S'ils veulent réfléchir
tant foit peu fur f hiftoire de leur F ox ,
ils n'auront pas grand peine à croire
que famé du Prophète Arabe a voulu
reparoître au monde dans le Corps &
dans la perlonne de nôtre Renard.
Mais parce que la fituation des affai-
res du monde* & fur tout l'Etat de
l'Angleterre ne permettoit pas qu'il fe
fervît des armes & de la guerre comme
autrefois parmi les Arabes, il a jugé
qu'ilétoità proposée changer de bat-
terie, &defefervirde la peau de Re-
nard en attendant qu'on puiife avoir
celle de Lyon. D'ailleurs le fuccez
tragique des Ènthoufiaftes de Mun-
(ter & du refte de l'Allemagne font
rendu fage. Sans cela nous verrions au-
tant de Pvois Anabaptiftes & fanatiques
que de Villes où il . y aaroit des Koua-
kres, & qui s'y pouroient canton-
ner. Pcn le feroit Roy de Londres,
auffi-bien que de fa Philadelphie , Bar-
clay fe feroit Roy d'Edimbourg , &
Furlhy deRotterdam.Certainernentje
ne voirien de fi conforme à Mahomet
que Fox, ni de Religion auffi-plus
aprochante du Mahometifme que la
fiea-ne. Il eft confiant qu'ils tiennent
les Mufalmans pour meilleurs Chré-
tiens que tous ceux qui portent le
A 4 nom
8 Histoire
nom de Chrétien. Et ils n'en exclu-
roieat aucun de leur Secte , pourveu
qu'il en adoptât les marques extérieu-
res , & iï€ parlât que d'Elpn't & de Lu-
mière. Au cdntraiaë ils feroient les
très-bien venus, & leurs plus chers
amis. Car ils ne difènt jamais que tu &
toy , même à leur Prince , & ils ne fè
decoëfent jamais pour (àluërqui que
ce fok. lis ne veulent pas non plus
Batifer ni faire la Cene. Er n'eft-ce
pas le Kouakerilme tout pur? Vous
me diiez quej'ay tort de dire que Fox
éîëk un fin Renard , puifque je l'ai re-
preiënté comme un grolîier & un ftu-
pide. Mais ne fçait on pas que les plus
grolîier s réiUMent quelque fois mieux
dans leurs deflèins que les plus fub-
tiîs ? Ce qui arrive parce qu'on les mé-
prife d'abord , & qu'on les laille faire
dans la penfée qu'ils ne feront rien qui
vaille.
Outre cela le Démon fe fert de ces
organes pour mieux jouer fon jeu , &
les trouvant propres il ne manque pas
de leur inlbirer tous les moyens qui
peuvent avancer fes deflèins. QuM'qii s
ces malheureux n* fuient que des enfàw
de Ténèbres , ils font plus païens néan-
moins dans ce quils entre Vrenmw; que les
en/ans de Lumière.
Enfin
D U KOUAKE R I S M E. 9
Enfin qui ne fçait que les dcflcins
les plus groffiers reufiffcnt quelquefois
mieux que les mieux concertez & les;
piusfpecieux? Eil-ii rien par exemple
de plus groffier que la Prophétie de
Mahomet i Voyez cependant comme
les circon (lances des tems, des lieux, 6c
des perfonnes lui ont été favorables ,
&quei iliccez il a eu ? Eft il rien de û
iniènfé que les dogmes de l'ubiquité
du Corps de J. C & de la preience
réelle de ce Corps dans un mor-
ceau de pain ? voyez néanmoins com-
bien de peuples, & de Gens doctes
même donnent la dedans ?
CHAPITRE II.
Quelles autres caiifes ont contribue
rétMijfementdu Koualzerifme.
OUtre les divifions de l'Angleter-
re fous laTvrannic de Cromwel
& la liberté de Prophetifcr,& de fonger
& d'avoir des vifions, qu'il donnent
a un peuple enclin naturellement a ces
chofes, afinderamufer, & dominer
cependant avec affeurance, je trouve
cinq chofes qui ont extrêmement cou;
■ A" S tr*ue
îo Histoire
tri bue à Fétabîilîèmeàt de cette Secte.
La première a été la grande apparen-
ce de pieté que Fox & Tes Sectateurs
montroient au commencement , cela
fkifeït croire que Dieu les infpiroit
effectivement, comme fi les Anges - &
ies Apôtres- de Satban ne fçavozent pas fe
tr an for mer en Apôtres de Chrifi & en An-
ges de Lumière,
La féconde a été le chagrin & la
îaffitude qu'on avoit des diiputes de
Religion entre les Epifcopaux & ies
Presbytériens , & tant d'autres Sectai-
res dont fourmille l'Angleterre , les
Kouakres retranchant tout cela tout
d'un coup^ & ne s'attachait , di-
îbiënt ils , qu'au pur efprk du Chiftra-
nifme. Ce qui n'a pas empêché qu'ils
ne foient venus à difputer tout comme
les autres dans la fuite du temps.
La troifîéme a été cette liberté
charmante accordée à chaque parti-
culier de fe dire Prophète , & illuminé
& infpiré immédiatement de Dieu , &
fur cela de débiter les virions & les chi-
mères de fon cerveau. Rien ne pou-
voit flatter davantage l'Efprit Anglois ,
-& l'engager dans le Kouakerifme.
La quatrième a été l'orgueil qui eft
encore la palîîon dominante de la Na-
tion, qui croit être née du fang des
Dieux
BU KOUÂK ER I SME. Il
Dieux au prix du relie des mortels,
pour qui quels qu'ils foient ils n'ont
que du mépris & de l'averfion. Ce
qu'ils ne font que trop paroître par la
manière barbare & brutale, avec la-
quelle ils reçoivent les étrangers chez
eux , qu'ils ne traitent pas comme
amis , mais comme ennemis , fans
hônêteté, ni civilité , ni douceur , & à
qui même ils font payer tribut , tant en
entrant qu'en fortant. Or quel orgueil
plus grand que de n'ôter pas fon cha-
peau devant qui que ce foi t, non pas
même;devant leRoy?Quei orgueil que
de le tïaiter de tu èr toy , de pair à pair ?
Quel orgueil que de fe vanter d'être
immédiatement envoyez de Dieu
pour les reprendre de leur mauvaile
conduite , & de leur parler d'un ton
auffi fier & auffi hardi que iî c'étoit
Jefus-Chrit qui leur parloit ?
La cinquième a été l'adrefiè d'avoir
Fçû engager particulièrement les fem-
mes dans la Seâe , en leur donnant la
liberté de prêcher publiquement, &
de fe dire Prophetcfiès. L'on fait affe£
la demangeaifon qu'elles ont naturel-
lement déparier. Rien donc ne pou-
voit mieux les engager que cette liber-
té que Fox leur donnoit. AulTi ne
manquent elles pas de s'en prévaloir
• > A 6 conr
Histoire
comme il faut. Car pour un Prophète
&pour un Prédicateur du genre maf-
culin , il y en a cent du féminin , tant
il eft vrai que c'eft Dieu &fon Efprit
qui les agitent. Car apparemment il
doit préférer un fexe à l'autre. Parla
les femmes deviennent maltreffes de
leurs maris , & en fecoiient le joug
impunément , mais qu'elles prennent
garde que l'cfprit marital ne fe réveil-
le , & n'oppofe vifion à vifion , & pro-
phétie à prophétie. Gar alors le fort
l'emportera fur le foibic, & il y aura
grand danger que le fexe ne foit obligé
de rentrer dans fon devoir & dans fon
état naturel.
CHAPITRE III.
T Es femmes Kouakeriennes ont fçû
fi bien fe prévaloir du droit d'in-
fpiratîon qu'elles ont érigé des Con-
grégations , où il n'y a qu'elles qui
parlent & qui prophetifent. Je m'ima-
gine que ;ç'cff quelque chofe de beau
avoir
DU KOU AKERiS ME. 13
avoir que ces femmes ainfi allemblées,
nous l'avons veu & nous le voyons
tous les jours , non dans leurs parti-
culières Congrégations , mais dans les
ordinaires , où on leur donne toute
liberté ; c'eft à qui fe lèvera la première
pour s'emparer du bureau %l pour pro-
phetifer. Et quand quelqu'une le tient
c'ell aOeurement pour long-temps.
Les hommes ont voulu diliiper ces
Congrégations feparées, mais où leur
a oppoie f Efprit qui les avroit établies ,
& il n'y a point eu de réplique à cela.
Ils y ont voulu entrer, alléguant que
puis qu'ils permettoient bien aux fem-
mes de venir dans les leurs & d'y par-
ler , on dévoie auffi permettre aux
hommes de venir dans celles des fem-
mes & d'y parler. Mais point de nou-
velle. Le St.Efprit a fuggeré le con-
traire.
Les maris pouvaient infifter , & dire
auffi que le St. Efprit leur diftoitd'y
aller & d'y parier. Mais il ne faut pas
fitôt faire combattre le St. Efprit con-
tre le St. Efprit, ni donner aux Anti-
Kouakers le plaifir de voir la divifion
dans cette nouvelle Babel. Il faut donc
prendre patience & foufrir quelque
temps l'empire des femmes , & leur
iurifdiâion bâtarde.
A 7 Ce
14 Histoire
Ce qu'il y a de plus divcrtiilànt, c'eft
que tous leurs mariages doivent palier
par leurs mains, fans cela il ne s'en
fait aucun, ii faut que celui qui recher-
che une tille ie preiente devant ce nou-
veau Sénat avec lamaitrefie, ocpafiè
par 1 examen avant qu'on conclue fon
mariage. Si par hasard ou par malheur
il n'agrée pas à quelqu'une des Prophe-
teflès , le St. Eiprit renvoyé le pauvre
galant chez lui fans maitreUe , &ibu-
vent même fans efperance d'en retrou-
ver une autre après un refus fi public &
fï? honteux. En recompenfe fi la fille
n'agrée pas aux hommes, devant qui
il raut auffi fe prefcnter , ils la ren-
voyent chez elle fins galant. Et elle
doit s'afïèurer que ce premier refus re-
butera tous ceux qui auroient pu avoir
defTein de la rechercher. Etc'eftainfi
que l'Efprit des Prophètes eitfoûmis
aux Prophètes.
Les femmes interrogent le galant
pourquoi il recherche fa maîtreflë en
mariage. Et s'il eft affcz fimpîepour
répondre que c'elî parce qu'il la trou-
ve belle ou jolie , & à fon gré , ou
parce qu'elle a du bien , on lui déclare
auffitôt que ces motifs de la chair & du
fang ne vallent rien , & qu'il doit at-
tendre que Dieu lui en inlpire de meil-
leurs.
DU KOUAKERISME. 1$
leurs. Les hommes demandent la mê-
me chofe aux filles-, & II elles répon-
dent qu'elle aiment un tel & un tel par-
ce qu'il a du bien, qu'il eft bien fait,
& propre aux devoirs du mariage , on
leur reprefente que des Kouakres,
c'eft à dire des hommes tout fpiritueis
ne font pas lùfceptibles de ces fortes
de parlions balles & animales , qu'ainfi
elles doivent prier Dieu que fon Efprit
vienne les purifier, &leur infpirer de
meilleurs motifs que ceux qu'elles ont
découvert.
CHAPITRE IV.
Divifîon parmi les Kouakres.
I'Ai appris que la divifîon s'eft mife
parmi eux il y a quelque années , &
qu'il y en a qui foûtiennent que c'eft
une folie d'attendre à tout moment
que le St. Efprit vienne vous dire à
l'oreille , faites ceci ou cela, priez,
prêchez, exhortez, &c. & qu'il fuffi.c
d'avoir une véritable affeurançe que
vous êtes régénérez , & que Dieu vous
a appelle à faire les fondons du mi-
niftere. Et ils ont raifon, mais c'eft
16 Histoire
auffi ruiner le fondement unique du
Kouakerifrnc, & eu difiiper peu à peu
les illufions. il y en a même qui ioû-
tiennent qu'il n7eit nullement necef-
faire d'avoir une révélation ou infpi-
ration linguliere pour tout cela, &
qu'il fuffit que Dieu vous ait donné les
dons & les talens neceflàires pour
vous en bien acquitter, pourveuque
vous y joigniez une véritable pieté. Et
cela eit encore vrai, mais c'ell tout à
fait faper les principes de la Secte, &
la ramener au droit chemin. Le Nord
de l'Angleterre eft tout plein de ces
Kouakresîà, & ceux de Londres les
regardent comme des excommuniez.
Je ne doute point que Dieu ne dé-
truite amfi la Seâe par elle-même > &
qu'il ne fufeité des gens parmi eux qui
en recpnnoifïànt I'impoflure n'en
adouciflènt les Dogmes , & ne les faf-
fent revenir à ceux des autres Chré-
tiens. Car enfin toute fiante que le Père
Celefte n*a point plantée fera arrachée
jufcjrfà la racine.
J'ai fouvent pehfé en moi-même ce
qui pouvoit porter les Kouakres à dé-
fendre û opiniâtrement leurs révéla-
tions immédiates, & quel étoitlebut
où ils vouloient venir : &je ne fçavois
qu'en dire. Cependant je ne pouvais
croire
DU KOUAKERISME. 17
croire qu'ils voulurent fe tenir fi fer-
mes fur ce point fans avoir quelque
veuë fecrete, & quelque deflèin pro-
fond & caché. Car enfin je veux qu'ils
ayent des révélations immédiates , &
tant qu'il leur plairai cela n'aboutit à
rien. Car ces révélations ne font que
pour ceux à qui elles font faites, à
moins qu'on ne les confirme extérieu-
rement par des miracles. Sans cela je
ne fuis nullement obligé de croire
qu'ils en ont. je ne voyois donc pas le
rinde leur prétention.
Mais quand j'ai comparé leur opi-
niâtreté fur ce point là avec celle des
Catholiques Romains qui infiftent fi:
fort fur la ncceffité des traditions non
écrites, afin de faire paffer à la faveur
de ces Traditions un Purgatoire, une
TraniTubftantiation , une infallibihté
Papale , & le refte , j'ai découvert que
les Kouakrcs vouloient bien pofe'r d a-
bord la neceffité & le principe de leurs
révélations immédiates , afin que lors
qu'on en feroit une fois demeuré d'ac-
cord, on les laiiTât faire tout ce qu'ils
voudroient en matière de Religion,
établir tels Dogmes qu'il leur plairoit ,
& rejetter tous ceux qui leur deplai-
roient , à la faveur de leurs prétendues
révélations. Voilà où ils en vouloient
venir ;
1 8 Histoire
venir; & où ils en font venus en effet.
Et ils feroient allé bien plus loin fi Je
péril eminent & évident que caufoit
cette hypothefe, & fes fuites funeftes
oc mortelles à la Religion de Jefus-
Chrift telle qu'il l'a inftituée, n'avoient
arrêté lesprogrez de ces fanatiques , &
fait ouvrir les yeux à tout ce qu'il y a de
gens de bien parmi eux , & dans qui
Jefus-Chrift conferve quelque relie &
quelque étincelle de fa foy & de fa cha-
rité. Les fuites de leur principe al-
loient fi loin qu'elles leur en ont don-
né de l'horreur, & ont fait trembler
les Trembleurs mêmes , ceux du
moins qui n'ont pas encore mangé la
Pâque , c'eft à dire renié tout-à-fait
Jefus-Chrift la Pâque des Chrétiens-
CHAPITRE V.
Ce que c'eft que manger la Pâque fé-
lon les Kouakres fç avant s,
A Fin de fçavoirceque c'eft que de
• ^ manger la Pâque Chr&ienne fé-
lon les Kouakres, il faut fe fouvenir
que leur Seâc eft proprement une
branche d'Anabatiftes , mais d'Ana-
batiftes
DU KOUAKERISME.
batiftcs rafinez & fpirituels qui rnépri-
fant la lettre 6c fécorce de la Religion
& de l'Ecriture , c'eft à dire en bon
François fe moquant de THiftoire lit-
térale & réelle de Jefus - Chrift , de
fa Vie , de fa Mort , de fa Refur-
reâion , & de fon Âfïcenfion au Ciel ,
ne s'attachent qu'à la moiielle & à l'Ef-
prit qui donne la vie , c'eft à dire qui
tournent toute l'Hiftoire de Jefus-
Chrift en pure allégorie : &enunfens
miftique , dont tout le fin coniifte à vi-
vre en Trembleurs , & à fe croire les
•feuls élus & les leuls parfaits-
Un certain Henri de Nicolas
d'Amfterdam eft celui qui a le plus
travaillé à fpiritualifer ainiî toute la
Religion Chrétienne, dans le deflein
de l'abolir fous main , & fous le pré-
texte du St. Amour , dont il fe van-
toit d'être le reftaurateur par l'étabîif-
fement de la Société , qu'il apella la
famille du St. Amour r & où perfonne
n'étoit admis qu'il ne renonçât à la
lettre & à fécorce de l'Ecriture, &à
la Chair de Jcfus-Chrift : c'eft à dire
en bon François qui ne reniât Jefus-
Chrift afin d'ail egorifer.
Quand Fox parut & fe mit à prêcher
la lumière intérieure, il y eut planeurs
de ces familiftes qui fe joignirent à lui ,
ce
20 Histoire
& comme c'étoient des fourbes rufez
lis lui firent croire que leur Efprit & le
iienfympatifoicnt, & n'étoient qu'un
même Efprit. Ce furent eux qui lui
aprircnt à batifcr du nom de Chrift
cette lumière intcykure à la voix de la-
quelle il rapelloit tous les hommes , &
quîn'cft autre chofe que nôtre propre
raifon, nôtre ame, ou nôtre elprit,
en tant qu'éclairé de certaines notions
qui font uni verfelles , où dans tous les
hommes. C'étoit déjà lui faire faire un
grand pas pour détruire tout le fond du
Chnfîianifme , & faire de Jefus-Chrift
une pure chimère.
Apres ce pas ils en lui en firent faire
un autre qui étoit que précisément par-
lant la connoifîance de la lettre & de
l'Hiftoire de j. G. n'étoit nullement ne-
ceiïàire au falut , non feulement eu
égard aux peuples qui n'en ont jamais
oui parler , mais même à ceux qui
flaiflènt & qui vivent parmi les Chré-
tiens, parce qu'il fuffit de s'attacher à
la moiielie & à l'Efprit de Chrift, &
que c'efl FEffrit ficul qui vivifie. Car la
lettre tuë9 & la chair ne fie aux oit vivi-
fier. Au contraire ce qui cft né de la
chair cft chair, c'efl à dire mortel &
corruptible, & il faut crucifier '& mor-
tifier la chair 9 aria que l'Efprit feul ré-
gne
DU KOU^KERISME. 2Î
gne & agi lie. Et ce fécond pas efc une
lùite du premier. Car fi îe vrai Ghrift ,
le Chrilt vivifiant & ialutaire n'eu: à
nôtre égard que cette lumière intérieu-
re qïu 'çft au dedans de chacun de
nous 5 comme il eft certain & évident
que cette efpece de Chrift ne refiemble
en quoique ce foit au Chrift littéral &
corporel de l'Evangile, & ne nous en
aprënd rien naturellement , il s'enfuit
de là manifestement qu'il ne fe faut pas
beaucoup mettre en peine de l'E-
vangile ni du Chntfiamfme tel que
l'HiftoirédeJ. C nous le reprefente.
Et de là eft vernie toute V Apoftafie
Kouakeriennc , que les habiles & les
initiez d'entre eux appellent la man-
da cation de la Pâque. Car félon ces
hypothefes qu'il faut lailler là la lettre
& l'écorce de l'Ecriture &de 1 niftoi-
re, & fe défaire de la chair , y renon-
cer & la crucifier , afin de ne s'atta-
cher qu'à l'Elbrit, la véritable célé-
bration de la Pâque avec J. C. ou
manger J. C. PAngncau [ans tâche
confifte à immoler fa chair, à la
crucifier à mettre J. C au tombeau ,
& à ne le plus connoître félon la
chair, mais feulement félon l'Efprit,
c'efi à dire à fe moquer de la mort vé-
ritable de J. C& à y renoncer. Nous
voici
^..Histoire
voici mfenfiblement venus à l'examen
des dogmes particuliers à cette Seâe
CHAPITRE VI.
Le Kouakerifme anéantit U fer*
fonne de f. C.
T E premier Chef, comme vous
- voyez du Kouakerifme attaque
la Perfonne même de J. C. qu'ils nient
être , ou avoir été un véritable homme
compofë de chair & de fang. Et en
confequence de cette impieté il y en a
eu qui ont impudemment ioûtenu
dans des Conférences publiques , &
même dans des livres qu'il n'a pu
Mourir, ni être Crucifié, niparcon-
fequent auhl Rellùfciter des mort s , &
que toute l'hiftoirede la Crucifixion,
de la Mort, de la Sépulture & de la Rc-
fure&ion de J. G n'eft qu'un emblème
de ce qui fe doit faire en nous fpirituel-
lement. Il n'y a point la de calomnie ,
car on voit encore de leurs livres An-
glois où ces impierez paroiflènt. Et
ils n'ont jamais dit Anatheme aux
familiftes du St. Amour , encore moins
les ont ils chaffésde leurs alTemblées.
Au
BU KOUAKERISME. 2J
j Aureftejen'envclopepasle (impie
peuple dans cette impiété, ni quanti-
té d'autres, mais feulement ceux qui
en font les Chefs & les Conducteurs,
& qui s'imaginent poffeder le fin du
Kouakeriûne. ïlsdifentàla vérité de
bouche que J. G. eft Mort, Refiùfci-
té, & monté au Ciel, mais ils l'en-
tendent comme il leur plaît. Le Chrift
qui eft mort , qui a été cloué à la croix ,
& qui a été enfeveli, c'eft le Chrift
charnel , c'eft à dire l'homme de chair
& de fang , le péché. Et ce Chrift la
eft demeuré cloué à la croix, & dans le
tombeau , pour faire place au Chrift
fpirituel , ou au Chrift Efprit , & Lu-
mière, à l'Homme nouveau, l'A-
dam Celefte qui eft l'Efprit vivifiant.Et
ce Chrift n'eft autre chofe que nôtre
propre régénération , ou nôtre Efprit
entant que renouvelle , & renouveî-
lé à la Kouakerienne , en forte qu'il
eft monté au Ciel & qu'il règne fur tout
l'univers , qui de plain droit apar tient
aux Kouakres feuls.
Et ne penfez pas qu'ils expliquent
cela allegoriquement, j e veux dire qu'il
ne faut pas s'imaginer que les Trem-
bleurs expliquent allegoriquement cet-
te nailfance deJ.C. dans nos cœurs , la
nouvelle formation du fécond Adam „
&
24 Histoire
& la mort du vieil, point du tout ;
ce Chrift qui naît dans nos cœurs &
qui s'y forme de nouveau eft un Chrift
réel , & fa formation cft une véritable
& réelle formation, de forte que ce
qui palTe chez les autres Chrétiens
pour une véritable allégorie , cft pour
eux le fens propre, comme au con-
traire ce qui pafie pour fens propre par-
mi nous , n'efl pour eux qu'une pure
allégorie, ou une action parabolique
& emblématique.
C'eft pourquoi vous ne trouverez
jamais dans leurs livres qu'ils propo-
iênt aux Chrétiens comme des points
de Foy neceflàircs au falut, la mort
deJefus-Chrift, faRefurreâion , fon
Afcenfion au Ciel , & fon retour fur
la terre pour juger les Vivans & les
Morts. Et quand quelqu'un le dii oit,
on n'auroit aucun droit de l'attribuer
à fous les autres. Car ils font tous li-
bres également, & ils ne feraient plus
Kouakres s'ils s'aftreignoient à une
certaine profeffion de Foi. Cela eft con-
traire à la liberté de l'Efprit, & ce fe-
loit retourner four la pédagogie de la
Loy , <fcr aux vains & yoibles élcmcns
de ce monde. Ce fer oit finir par la
Chair après avoir commencé par 'CE-
C'eft
PU KOUAK ERlSME. 2£
C'eir pourquoi encore quelques-uns
d'entre eux, & entre autre le- fameux
Barclay , dans fon Apologie pour les
Trembleurs expliquent la glorifica-
tion de J. C comme font les Ubiqui-
taires ; qui prétendent que l'Afianlion
de J. C. & fon exaltation n'a été autre
chofe qu'une difiùfion ou diflipatiom
de fa fubftance humaine dans tous les
çfpacesduCiel&delaTerre, fi bien
que par cette diiïblation fon humanité
s'eft comme abîmée dans rinhnenfité
de l'effènce Divine du Verbe, & ren-
due prefente par tout. Car félon les
Ubiquitaires & Barclay fi j. C hom-
me demeurant en fon état naturel
d'homme tel qu'il étoit quand il mou-
rut & quand il refïùfcita, c'eftàdira
avec un Corps greffier & borné >
avoij: voulu monter au Ciel , il ne fe-
roit pas encore à moitié chemin , iî
n'auroit pas encore paifé les étoiles
fixes , quelque rapide qu'eût été fon
tranfport.
Enfin je pofe en fait , ( & je le fçai
de fçience certaine, fans me nom-
mer, ni nommer ceux de qui je le
fçai) que fi un homme qui ne croiroit
point du tout en J. C. un franc Deïïle ,
s'adreflbit aux Kouakres, & leur de-
claroît que Dieu , que la lumière inte-
B mw$%
2.6 Histoire
ricure, la parole & l'Efprit lui ont ïtvj
ipiré de s'unir à eux parce qu'il cft p&m
fuadé qu'ils ont l'Efprit deDieU,& que
c'eft la l'unique choie neccliaire au
falut, le Chnll Littéral , Hiftorique
ou Corporel & Charnel, n'étant que
l'écorce de cet Efprit Divin ; non une
écorce qui le cache & qui le contient,
ipais qui ne fait que Amplement le
figurer, (ans le communiquer, par-'
ce que la chair ne profite de rien , & que
PEJprit feu! vivifie , qu'ainfi , il faut
la laiffir là : je pofe en fait, dis-je, qu'ils
recevroient un tel homme à bras ou-
verts , & qu'ils lui feroient croire mal-
gré qu'il en eût, qu'il croit effective-
ment en J. C comme il y faut croire ,
parce qu'il a l'Efprit de Chrift habitant
en lui , & parce que-cet Efprit & J. C.
ne font qu'une feule & même choie.
En effet cela eft parfaitement con-
forme à leurs principes , & en eft une
fuite neceflàire. Car ils ne diftinguent
point ce Chrift du Verbe, ni le Vérbe
de l'Efprit de Dieu, ni cet Efprit des
lumières de la droite raifon. Par con-
tinuent quiconque obéît à ces lumiè-
res, il obéît au véritable Chrift, & à
l'Efprit de Dieu. C'eft la le moyen
d'étendre leur Secte au long & au lar-
ge, & la groffir de toutes les autres.
C'eft
bu Kouak.eri.sme. 1J.
ITeft: Je fecret de devenir un jour les
maîtres du monde ; & puis nous ver-
rons fi l'Efprit de Munller ne revivra
;>as dans les aigneaux d'aujourd'hui ,
^ui ne le font que parce qu'ils ne peu-
vent être des Lyons.
CHAPITRE VIL
Les autres Chefs du îCouakerifme^
Les Komkres nient le mjjiere de
la Trinité.
T E fécond Chef de V A'poflafie de ces
' malheureux eft de nier le myftere
adorable de la tres-Sainte Trinité : qui
confifte félon la confeffion de tous les
Chrétiens Ortodoxes à croire en un
feul Dieu , lePere, en J. C fon Fils
éternel, vrayDieu & vray Homme,
& au St. Efprit un feul & même Dieu
avec le Pere & le Verbe bénit éternel-
lement.
Premièrement il eft confiant qu'ils
ne veulent point ouïr parler des termes
d'eUence & de perfonne ou d'hypcila-
fe , ni foufrir qu'on dife qu'il n'y a
qu'un feul Dieu en effence ou en fub-
ftance , mais diftingué en trois Perfon-
B i nés
i8 Histoire
ou trois Hypoftafes.Ils apellent ces ter-
mes des termes Barbares,& qui ne font
point venus de l'Efprit ni de la Lumiè-
re intérieure , aufli apclleiit-ils le My-
ilere de la Trinité de la manière que
nous l'expliquons un JMyJiere de Mcta-
fhifique, & d'Ecole ou d'Académie.
Il n'eft rien de fi aifé que de les con-
vaincre d'Apoftafîe fur ce fujet : car il
ïi'eft rien de li aifé que de les convain-
cre d'être de purs Sabelliens , & de
nier la diverfiîé qui doit être pofée en-
tre le Fere , fon Verbe Etemel , & la
perfonne du Saint Efprit.
Selon eux le Verbe Eternel , qui
cft la Divinité qui s'eft unie àPHom-
me Jciùs , eft h même chofe que le
Saint Efprit, & cet Elprit la même
chofe que ce Verbe Divin. Et l'un &
l'autre ne font qu'un fcul & même
Dieu fans diftinâion de perfonnes.
En voici la preuve tirée de leur Cate-
chifme Anglois, ou Confeiïion de Foy
publiée par"Robert Barclay fan 1673.
* Comment eft-ce que l'Ecriture exprime
la amjmâion P unité du Vils Eternel ,
dans & avec l'homme J-. C. \ Réponfe.
Et celte parole a été faite chair , 4fi elle a
habité avec nous pleine de grâce os' de vé-
rité. Jeh. c. 1. 14. Car
*Catech. ch. 3. Q^y. pa*. 15-, EJit.
Lflt. de Rotterdam l'an 1 676.
DU KOUAKERISME- 29
Car celui me Dieu a envoyé annonce
les paroles de Dieu , if Dku ne lui donne
f oint f on Ej frit par ?ncfure. Jeh. 3. 34.
Dieu a oint Je fus de Nazaret du St.
'B[pritifdefapmffance. Car Dieu , (&
cela eft en Caractères Italiques pour
marquer que c'eft la preuve d^ la ques-
tion , ) étoit avec lui.
■ Il a plu au F ère que toute plénitude
■habitât en lui. &c. N'eft-il pas vinble
que toute l'union de la Divinté avec
l'homme Jefus n'a été félon nos Apof-
tats qu'en ce que Dieu la rempli de lès
donsCeleftes, &de (on Efprit Saint
& Eternel. Ce qui eft une incarnation,
fort facile à expliquer , & abfolument
femblable à lareferve de quelques de-
grés à celle qui fe fait dans tous les fi-
dèles, qui font félon St. Paul remplis
de, la plénitude de Dieu , & félon St.
Pierre participant de la nature Divine.
C'eft pourquoi il n'y a point de Trern-
bîeur qui ne s'égale en quelque forte à
J.C.&qui ne fe croye une perfonne
Divine ou Déifiée par le moyen de
TEfprit habitant en loti Ame , & du
nouvel enfantement du Chrift inté-
rieur & Ceîëfte dans fon cœur .Cela eft
encore pis que tout le Socinianifme.
il ne faut donc pas s'étonner 11 toutes
- fortes d'Hérétiques Amkrinitaires font
B 3 bien
3o Histoire
bien venus parmi les Kouakres, Sa-
beîhens, Ariens, Sociniens, & tout
ce qu'il vous plaira. La plupart font
Sabclliens & Ariens. Il y a en fort peu
de Sociniens, à moins qu'on ne les
confonde avec les SabelJiens , à qui
ils reflembient parfaitement. Le grand
Ponfite des Kouakres & leur Chef
quant au Spirituel & quant au Tempo-
rel , iy Hypocrite Fcn cil pur Sabellien ;
& il fut mis à la Tour fous le Règne de
Charles II. pour avoir fait un livre
contre la Trinité, lequel il fut obligé
deretra&er pour lortir de priibn. Or
Sabellius & les véritables Sabelliens
nioient formellement la Trinité des
Perfonnes Divines, au fens que i'E-
glife a toujours entendu le mot de Per-
lbnne. Et St. Athanale nous apprend
qu'ils ne vouloient point de véritable
•génération en Dieu , à caufe de la iim-
plicitéà de l'indivifibilité de fa iub-
fiance : C'eft pourquoi ils avoient tou-
jours cette fentence à la bouche Ver-
Jam fempcr in Pâtre exifteus opération efl
in Jcfu : & foûcenoient que Jefus fik
de Marie n'étoit qu'un pur' homme
quantàlbnciTeiice.
C H A-
DU KOUAKERISME. 31
G H A P i T R E VII L
Les Tremb leurs anéantirent le My-
fi ère de la Croix du F ils de Dieu.
NQus avons veu cy-deffiis com-
ment ils tournent toute l'Hiiloi-
ra de la Mort & de la Relurrection de
J. G. en pure allégorie, d'oùileit ai-
fé de conclure qu'ils ne croyent pas
que nous foyons obligez à y croire
comme à des chofes necefïàire à nôtre
falut. Cette Hereiie eft aufii une fuite
neceifaire de leur Chrifl intérieur , ou
de la lumière intérieure qu'ils apellent
ainfi , & à qui il fuffit félon eux de fai-
re attention , afin de palier pour de
vrais Fidèles, & d'obtenir le falut.
Ilsdifent bien tous à la vérité que
nous fommes juftifiez ou reçus en
grâce par le moyen de laFoy. Mais
ils fe donnent bien de garde de dire que
cette Foy fc doit tourner vers J. G.
mort pour nos péchez, & Reflufcité
pour nôtre juftification, comme vers
fon objet naturel & principal , m de
dire avec St. Paul./z tu crois en ton Cœur,
& fi tu cmfeffcr de ta huche queJ.C,
cft Mort & qu'il eft nrjfujfité des
Morts tu feras Sauvé. Ils ne difentja-
g 4 mais
32». Histoire
mais non plus que la foy qui nous juflfJ
fie eil là Foy au San? de J. C. comme
parle le même Apotre. Ceft pour la
même raifonauffi qu'ils ont aboli, &
îc Batême, & t'Euchariftie, dont les
Cérémonies n'ont été infatuées auc
par raport à la Mort & a la Reluredion
. de j. C & afin que les pratiquant nous
fifîions une profeffion ouverte de Tune
& de l'autre, &quec'eft en vertu de
l'une & de l'autre que nous femmes
fèuvez & juftifiez, Ïgywc% v6us, dit
5t. Paul, que nous tous qui avons été
tyff$% en J. C. avons tous été Ba*
tife^ m fa mort. Nous avons été enjévclis
avec lui en fa mort par le Batême. Voi-
là dans quel deflein le Batême a été
inftitué. Et pour ce qui eft de l'Eucha*
riftie, toute la cérémonie parle d'elle-
même , qu'elle n'a été ordonnée que
pour figurer la mort du Fils de Dieu,&-
pour l'annoncer dans tous les fîecles
de l'Eglife, faites ceci, dit J. C, en
Mémoire de moy; c'eft à dire félon fon
Apôtre, toutes les fois (jue vous man-
gerez de ce Pain & que vous boire*
du Calice du Seigneur , vous annoncerez
famort jufqu'à ce quil revienne. Mais
nous parlerons de'ccla plus au long
après avoir raporté les autres Chefs de
rApoftafie Kouakerieane.
C H A-
D U K O V A K E R I S M E. 33
C H A P I T RE IX.
JDe rEnthoufiafme des KoHakres.
UN des grands Chefs de l'Apo-
flafie cie ces miferables, eft de
croire qu'ils font inipirez tout de mê-
me que Jems-Chrift & que les Apô-
tres i'étoient , & que leurs révélations,
& leurs infpirations prétendues font
auffi Divines & auffi infaîlibles que
celles du Fils de Dieu & de fesDilci-
pîes. Ils tiennent celte abominable
Poètrine des Anciens Anabatiftes &
des Skhuenfeldiens. C'eft pourquoi
ils ont un fi grand mépris pour les fam-
tes Ecritures. Car de quoi peuvent el-
les fervir à des gens qui font auffi Divi-
nement infpirex que ceux qui en font
les autheurs , & qui nous les ont iaïf-
fées? Et n'eit-cc pas la ruiner &&per
tout d'un coup les fondemens du
Chriftianifme ? Il eft vrai qu'ils dilent,
& qu'ils croy eut , ou font femblant îde
croire que il leurs infpirations ne font
pas conformes à la droite ration, ni a
la révélation de l'Evangile, elles font
f aufîes & à rejetter. Mais cela n'empê-
che nullement qu'elles ne ruinent ab-
lblument la pieté Chrétienne. Car par
B s exeirr
34 Histoire
exemple fi l'Efprit vient à ihipirer à un
Kouakrc d'immoler à Dieu là femme
qui l'aura peut être déshonore , ou
qu îlfoupçonnera d'infidélité, il dira
que Ton infpiration n'eft point contrai-
re à la droite raifon ni à l'Evangile.
Car ni la droite raifon ni l'Evangile ne
s'oppofent point au droit que Dieu a
fur la vie des Hommes. -Et Abraham
auroit immole fans crime fon fils Ifac
fi Dieu ne l'en eût lui-même em-
pêche. Et Jephté n'eft point blâmé
pour avoir immolé fa tille. Si l'Efprit
iuggereàun autre d'offrir fon fils eu
Holocaufte , ilfejuftifiera de même.
Et fi on lui remontroit que Dieu dé-
clare expreffement qu'il a en abomina-
tion ces fortes de facririces, il répon-
dra que Dieu ne les detefte que lors
qu'ils font offerts fans fon ordre , & à
d'autres qu'à lui, comme à Baal ou à
Molok : ou s'ils étoient trop frequens,
pareequeeeladetruiroit le genre hu-
main. Et il eft inconteftabie que fi
Dieu avoit effeâivement commandé
ces chofes il les faudroit faire , & elles
ne choqueroient ni la droite raifon ni
ï'Evângiîç non plus que le Sacrifice
d'Abraham & celui de Jephté.
C H A-
DU KoUAK'ERlS ME. $$
CHAPITRE X.
Combien efi dangereux ce Principe
des Koîtakres de -ne rien faire en
matière de Religion que par in-
fyiration.
N3n feulement les Kouakres ren-
verfentdefond en comble toute
l'authorité des Saintes Ecritures ou de
la révélation Divine par l'égalité , pour
ne pas dire la préférence qu'ils don-
nent à leurs propres Révélations ou à
leurs infpiration prétendues , mais^ ils
vont encore bien plus loin en foute-
nant qu'il ne faut rien faire en matière
de Religion, pas même prier Dieu*
ni exhorter ion prochain fans fentir
que Dieu vous y poulie par une infpi-
ration particulière & déterminée.
C'eft la détruire tous les principes de
la Ipieté Chrétienne, ou plûtôt c eft
détruire tous les principes de la pieté
en gênerai , de celle même que la Re-
ligion naturelle dicte à tous les hom-
mes raifonnables. Car fur ce pié là un
Athée & un Profane caché ne priera ja-
mais Dieu , & ne l'adorera jamais ; Eî
s'excuièiaiurcequil ne fent pas que
3^ Histoire
Dieu ou le St. -Efprit l'y pouffe.
II en fera de même de tous les au-
très Kouakres , qui quoique fort con-
vaincus qu'il y a un Dieu & qu'il le
faut adorer & invoquer, peu à peu
néanmoins tomberont dans l'impiété
& dans le libertinage. Par ce que s'ils
n'adorent jamais Dieu que lors qu'ils
s'y fendront pouffez par une infpi ra-
tion finguliere , ils s'expofent manife-
stement au danger de tomber dans l'ir-
reHgion , Dieu les abandonnant à eux-
mêmes, puifque ils ne veulent pas
même fe donner la peine de le cher-
cher. Au contraire c'eft par ce que
nous fentons que fon Efprit Divin
nous manque qu'il faut prier & le de-
mander fans celle à Dieu , félon le
précepte de J.C. qui nous affeure que
fon Pere Celelîe ne manque pas de le
donner à ceux qui le demandem.Matt.
7. Demande^, dit -il, & il vous fera
donné. Cherche* & vous trouvère
Trap'^àr r on vous ouvrira. Car quicon-
que demande reçoit , & quiconqtie cher-
che trouve. Et fon ouvre à quiconque fr a-
ftf Et plus bas,/ï donc vous qui êtes mau-
vais fçaveq donner de bonnes chofes à vos
enfans, combien plus votre Pere Celefte
4km donncra-t'il les biens que vous lui
demande^ ; ou comme il y a dans Sait*
Luc,
DU KOUAKERISM E. 37
Luc , combien plus donner a-t-il le $t.
Efprît à ceux qui le lui demandent. Si
quelqu'un a befoin de Sapience qu'il la
demande a Dieu qui donne libéralement
fans reprocher à1 elle lui fera don-
née. ■/ ■ ...
C'eft une pernicieufe maxime que
celle de n'adorer jamais Dieu, ni le
prier , ni le remercier quelque oc-
casion & quelques fujetsqueia Pro-
vidence? nous en prefente , fi l'on
ne s'y fent pouffé & déterminé par
un mouvement fenfible de i'Efprit
de Dieu. Parce que c'eft un principe,
d'illufion , les mouvemens de I'Efprit
de Dieu n'étant pas toujours feniibles,
& le Démon ayant très fouvent ( par
la permimon de Dieu ) le pouvoir d'a-
gir fur nos fens & fur nôtre imagina-
tion, c'eft à dire fur tout ce qu'il y a
de fenfible en nous. ■ C'eft pourquoi les
plus grands maîtres en la pieté nous
avertnTent fans celle de méprifer la dé-
votion fenfible, comme étant ordi-
nairement un fentiment naturel,& une
opération d'imagination plutôt qu'une
opération de I'Efprit de Dieu. -Ainfi
le plus feureft de faire fon devoir, &
de fuivre la Providence dans les fujets
& dans les oecafions qu'elle nous of-
fre à tout moment d'adorer Dieu , de
B 7
?S Histoire
lebemr, de le prier, de le remercier,
iàns attendre des mouvemens & des
infpirations fenfibïes de l'Efprit de
Dieu pour s'acquitter de ces devoirs.
C'eft la le chemin Royal , & où Ton
nefçauroit s'égarer. C'eft le chemin
que Dieu lui-même nous a marqué
en nous ordonnant de l'invoquer dans
nos affrétions , afin qu'il nous en tire ,
& qu'en fuite , nous le glorifions.
Quelqu'un, dit un de fes Apôtres,
eJHl dam la triflejfe quil prie. Quel-
qu'un eft-il dans la jeyc qu'il chmî^des
Cantique:.
Mais l'Evangile des Kouakres dit
tout au contraire, foyez ou dans la
trifteflè ou dans la joye , tout cela eft
égal, & vous pécherez mortellement
fi l'une ou l'autre vous font prier
Dieu ou le remercier. NMajoye ni la
îriftene, ni les châtimens ni les bien-
faits de Dieu ne doivent jamais vous
porteravousadrefferàlui, fi vous ne
vous y fentez pouffez par un mouve-
ment & par une infpiration toute fin-
guliere. Aufii c'eft la plus déplorable
&la plus deteftable chofe du monde
que de voir comment ces miferables
paffent leur vie. Ils fe lèvent & fe cou-
chent, ils fe mettent à table & en for-
tent comme des bêtes brutes, fans ci-
vilité ,
DU KOU AKERISME. Jg)
vilité, fans aucune marque de Reli-
gion \ femblabîes à ces pourceux qui
ne lèvent jamais les yeux pour regar-
der d'où le gland leur tombe à terre.
Tous ne font pas fi laies , ni li bru-
taux, mais pas un d'eux ne condamne
ces vilaines & fçandaleufes manières
d'agir.
N'eft ce pas un beau fpcfctacle a voir
qu'unKouakrequifemetà table fans
prier Dieu,qu'il beniffe & qu'il famine
les alimens qu'il va prendre : Et qui
même a l'impudance de fe tenir cou-
vert & affis lors que tout le monde eit
de bout & tête nue & priant Dieu ?
mais c'eft que l'Efpritne lui diète pas
de prier avec les autres. Et pourquoi
donc ces infâmes Hypocrites ne fçau-
roient ils fouffrir que les autres ne fe
mettent pas en pofture de Supliants
quand ils prient eux-mêmes ?" Pour-
quoi quand ils font enfemble , & que
l'un d'eux vient à prier, tous les au-
tres le fuivent-ils, & prient-ils avec
lui? Eli il dit & écrit dans le livre des
deftinsoudes Infpirations qu'auffitôt
qu'un Kouakre en aura une quand il
fera.avecdesKouakres, la même m-
fpiration qu'il aura fera donnée a tous
les autres ? Que d'orgeuil , que de pré-
emption l ^
40 Histoire
CHAPITRE XL
Si le tremblement de corps ejl une
bonne "preuve du mouvement inté-
rieur de VEffrit de Dieu.
fp Es fourbes polir mieux impofer au
monde, & engager les fimple*
dans leur Cabale attectoient fort au
commencement de trembler de tout
leur Corps , de ne parler qu'avec
une voix trcmblante,de ibûpirer à tout
moment, dejetter des cris & des hé-
las, de pleurer même. Enfin ils con-
trefaifoient fi bien les infpircz que les
fimpJes & les crédules y étoient trom-
pez. Et cette adreffe n'a pas peu con-
tribué à grofiir & à multiplier leur Sec-
te. Mais tous ceux qui cppnqiflent le
génie de la vraye pieté , & qui ont
quelque expérience dans les voyes de
Dieu n'elliment pas fort tous ces mou-
vemens extérieurs qui fentent l'enfant
& la femme, &qui font très fouvent
un pur effet du tempérament & de 1%
imagination plutôt que de la grâce Di-
viue.Outre cela peribnne n'ignore qm
ces fortes d'aétions & de mouvements
extérieurs font naturellement conta-
gieux/
DU KoUAKERlSME. 4.1
gieux , & fe répandent en un moment
iùr tous les fpecïateurs. Un pleureur
fait pleurer, tout de même qu'un rieur
fait rire , un bailleur fait bailler. Ain il
il ne faut fouvent qu'une pleureufc ce
une tremblcufe parmi cinq cens Koua-
kres pour les faire tous pleurer & trem
bler/
Enfin le Diable fe mêle à tout cela ,
&c il oPcre avec efficace dan; tous cet
enfans de révolte & de rébellion. Car
par le moyen de ces mouvemens exté-
rieurs & de ces tremblemens de corps
il les fçait fi bien enchanter , & leur
fçait fi bien perluader qu'ils font effec-
tivement touchez de TEfprit Divin
qu'ils n'en doutent nullement ; Et
qu'il n'y a rien qu'ils ne fiffent dans ces
momenslàli Dieu permettoit que le
malin Efprit le leur infpirât. Il faut fe
défier de tout ce que la nature toute
feule peut produire, de tout ce que le
démon peut imiter, de ce qu'un ef-
fort d' Efprit ou d'imagination eft ca-
pable d'exciter, de tout enfin ce qu'une
hypocrifie profonde peut contrefaire.
Les Kouakres commencent à ne
plus tant trembler, mais comme le
tremblement eft ce qui a donné origi-
ne en quelque forte à leur Seôe ,& que
c'efl de la qu'on les a nommez Kpua-
f H i s x o i r >:
kçrs, ceftadireTro»*W ilferoit
malnome d'y renoncer tout à fait
& de rentrer dans un état plus fimple &
Plus naturel, ou dans l'état de con-
formité avec tous les autres. Afin donc "
de ne démentir pas le nom & le carac-
tère propre de leur Secte ils affectent
de tems en tems des mouvemens de
Corps extraordinaires, des tranfportl
&deshelans d'Enthoufiaftes. Mais
auffi depeur qu'on ne fc moque trop
peuvent mCnaSent le mieux qu'ils
Ce que je trouve de plus plaifant
danscesFanatique,c'eftqu'ilscroyent
tout de bon ou du moins ils nous veu-
lent perfuader qu'ils le croyent tout de
bon, que le St.Efprit donne le tremble-
Khwi r C0^l?0Xil une marque infal-
liblede fon aâion&defon opération
intérieure, & que les Prophètes onï
clairement & expreffement prédit la
venue des Trembleurs. On ne m'en
croirait pas lije ne le faifois voir.
C H A-
DU KOUAKERISME. 43
CHAPITRE XI L
De quel tremblement les Saintes
Ecritures nous parlent.
VOici ce que leur confeffion de Foi
nous aprend fur ce fujet.
Demande. Dieu exige donc que les
hmmes [oient Trembleurs , qu'ils trem-
blent à [a farole l. Et y a-t-il eu des Trem-
bleurs autrefois parmi les Saints1. Ré-
ponfè.jpe regarde au pauvre &â celui qui
a FEfiprit contrit, & qui tremble à ma pa-
role,Efaic66.z. Alors quiconque trembloit
aux paroles du Dieu cTlfrael, fe joignit
àmoy , Efdr. 9 Faifons donc maintenant
■ alliance avec notre Dieu fuivant fin cm-
feil ; & celui de ceux qui tremblent à fis
préceptes. Quel abus & qu'elle profa-
nation de la parole de Dieu , comme
fi le St. Efprit parloit des tremblemens
du Corps, & non de ceux du Cœur ou
'dei'Efprit, qui confident en ce qu'il
reconnaît fon néant & la grandeur
fuprëme de Dieu , & fe foûmet à tous
fes ordres avec un profond refpeét.
Et de quel front ces malheureux ci-
tent-ils ces pàfîàges des Prophètes , &
fe mettent-ils en leur compagnie , eux
qui ont un Souverain mépris pour
toutes
44 Histoire
toutes les Saintes Ecritures? Com-
ment ofent-ils fe vanter qu'ils trem-
blent aux paroles de l'Eternel , 6c à Tes
préceptes , eux qui ne les traitent que
de lettre morte & qui tue , que tfccol
ce ians moelle & fans fubftancc, eue
de chair incapable de vivifier? Quel
felpéct peuvent-ils avoir pour une pa-
role qu'ils enfeignent tout ouverte-
ment qui n'ell point la règle parfaite
« entière de nôtre Foy & de nôtre
conduite, qui ne fçauroit nous éclai-
rer, m nous tirer de l'erreur? Com-
ment, dit leur Catechifme, l'Apètre
4fjtmgUG~rtl U Loy intérieure de l'exté-
rieure* Réponce. La Loy dePEfbrit de
je qui eft en J. C. me deUvcra de U Loy
de péché & de mort. Ainft félon eux
toute 1 Ecriture foit ancienne foit nou
veîle n eft qu'une Loy de péché & de
m°.rt,Vc,cft à dire une fëttre qui tuè\
maislhfpritoula Loy de l'Efprit eft
une Loy d'Efpit & de Vie. Vous vovffc
queparlàilsoppofentfans celle i'Ef-
pnt a la parole de Dieu, à la Révéla-
tion extérieure , même à celle de J. G.
oc de fes Apôtres, comme fi rËfprit
deDieu&de J. G. y éroit contraire,
pu qu'il enfeiguât des vérités oppoiecs
a celles qu'il nous a révélées lui-mê-
me par fes Prophètes. Une autie de-
man-
DU KOUAKERISME. ., 4f
raande va encore mieux juftifier l'im-
piété de ces Antechrifts. •
' Demande. Les Ecritures [ont dons a
eflimer parce qu'elles viennent du St. Ef-
frité Parce quelles rendent témoignage
que ce n'eft pas elles, mais l'Ejpritfctd
qui nous conduit en toute vente ? pour
quelle rdifon J. C. commande-t-il que
l'on fonde les Ecritures! Réponfe. Son-
de? les Ecritures, par ce que vous vous
imaginez c\ue vms fouve% acquérir la
Vie éternelle par leur moyen. Et fur cet
endroit le Catechittc fait cette remar-
que, qu'il a mis À l'impératif le Verbe
four s'accommoder à l'interprétation de
Ces adversaires , quoique pas une le mette
à L'Indicatif, ce qui femble être plus:
conforme au texte. Voilà en quelle elh-
me les Kouakres ont la parole de
Dieu , & par confequent de quelle ma-
nière ils tremblent à cette parole.
Il ne faut pas nier que le St. Liprit
en touchant nôtre ame n'exite au mê-
me tems dans nos corps des tranlports
6c des mouvemens fort îinguliers , <X
ne nous porte louvent à gémir , a pleu-
rer, àfoûpirer, à trembler même.
Mais une marque infalhble que ces
opérations fenfiblcs viennent de Dieu,
efeft qu'elles font excitées ordinaire-
ment par la lcSure , par l'ouïe , & par
4<5 Histoire
la Méditation de la parole de Dieu &
£££££ fom ainfi ^SiS
«euremci t & extérieurement n'oppo-
ration & d amour pour elle, & la ré-
ardent comme le canal P'ar lequel
IWpnt le communique à nous &
comme l'inftrument dont il fe'fen
Pour nous toucher &Pour nous émoïï
de ï k;Cneft à caufede«ttcun,on
oe i Jilpnt D]vm avec la parole eue
S/fel^^«ifontdonneL?oLme
f M'r ' • f *»» * *i dites
{e ofef ^' f c»e"ousregene:
S Ffn sS " l0in donc d'oppofer le
bUzfpm a cette parole , il fout les unir
avec I Jiiprit. Si Efpritde Dien
fee a arevoIut»on enterieure dont il
n!-Lr Ur> l ona^oitraifbnde les
délie fr,lne je pcut rcnm /tliJêJ
hJZL**^ lmnme *fi
ixlu 1 Lfp/k de "Homme ou du
Diable qui pu die être un Efpdt dou-
ble,
DU KOUAKERISME. 47
3Îe , & fouffler d'une même bouche le
chaud & le froid , le doux > & l'amer ;
& tel eft l'Efprit Trembleur.
CHAPITRE XIII.
m la Religion Chrétienne ne doit
avoir aucune Cérémonie.
Rien ne fait tant éclatter le mépris
que les Kouakres ont pour la per-
fonne de jefus:Chri(r , pour l'Hiftoire
de fa Vie, de fa Mort , & de fa Refur-
reclion, en un mot pour tout fon ou-
vrage du rachat des Hommes , &tout
eniemble pour fa Divine parole , pour
fes Ordres, fesLoix, & les préceptes
de fes Saints Apôtres & leurs prati-
ques , comme d'avoir par un attentat
Diabolique aboli dans leur Secte mau-
dite les deux Cérémonies duBatême
& de la Sainte Cene. Peut-on voir fans
horreur & fans indignation que ces
faux Prophètes exterminent ces deux
pratiques dé la Religion Chrétienne ,
& ayent encore l'impudence de fe dire
Chrétiens, & Difciples de J. C. lui
qui les a fi formellement &fiexprefic-
ment commandées à fon Eglife ?
4Sr< Histoire
-en vam quelques-uns tâchent de les
exculer en difept qu'ils ne voyent
pas que ces deux Cérémonies font
commandées effectivement par T C
avec intention d'obliger tous fesDif-
apies a les pratiquer durant tous les
âges de 1 Lglife.
N'eft-ce pas la une belle exeufe ? 11$
n ont qu'à tuer , & à le venger de leurs
ennemis , & de s'en tenir quittes pour
dire que J. C. ne leur a pas commandé
Je contraire? Ils n'ont qu'à proftitucr
leurs femmes, & les rendre commu-
nes parmi eux, & dire pour exeufe
qu ils ne voyent pas encore que la Re-
ligion de J. G. le défende ? Et ainiide
toute la Morale. Ces infignes Apo-
itats fe feroient plutôt pendre que de
ne pas dire tu & toy , & de fe découvrir
devantquiquccefoit, même devant
leurs Princes & leurs Rois. Etoùeft
ce que J.C. leur a ordonné ces chofes ?
II paroit bien par là que ce font de
francs rnipofteurs qui préfèrent leurs
brutales extravagances aux Loix for-
melles de J.C. £t pourquoi? afin de
le difiinguer par un excez d'orgueil in-
fuportable, du refte des mortels , &
d avoir la vanité de s'élever au-deflùs
de tout le genre humain, affrétant de
palier pour plus fages & plus éclairez
que
DU KOUAKERISME. 49
que tous les hommes du monde.
S'ils Batiloient & s'ils Gommu-
nioient comme le refte des Chré-
tiens , ils ne feroient plus rien , 6c
l'on ne parleroit pas d'eux com-
me l'on en parle. Il faut donc fe fin-
guîarifer & fe diftinguer par quelque
chofe de hardy : & de téméraire. II.
y a autant de crime a ne pas voir un
précepte aucune défenfe formelle &
expreiTe , qu'il y en a à la violer quand
on la voit , fur tout quand l'un & l'au-
tre font fi clairement propofez qu'il
faut s'aveugler volontairement pour
ne les pas voir. Car c'eft alors une
ignorance affeclée & maîitieufe , &
par confequent inexeufabîe devant
Dieu & devant les Hommes.
Il efl vray que les ordonnances du
Batême & de la Cene ne font pas pre- ,
cifement & par elles mêmes capitales.
Mais le deviennent à quiconque affec-
te de n'en pas voir l'inftitution , afin
de faire une nouvelle Seéte , Se de bâ-
tir une nouvelle Religion qui vous
diilingue Se vous fepare du commun
des Chrétiens. Et puis quelle audace à
ces iniolens d'avoir aboli des Cérémo-
nies inftituées par une authorité Divi-
ne, Se cela fous prétexte que ce ne font
que des Ceremonies,& que laiieli^ion
C de
SO Histoire
de Jefus Chrift , eft une Religion
toute d'Efprit? il faudroit du moins
qu'ils euflent une authorité égale à
celle qui les a inftituées. Car il n'a-
partient qu'au Prince, ou a une au-
thorité égale ou fupericure à la Tienne
d'abroger les Loix qu'il a ordonnées.
Ce même j. G. qui les inftituoit ne
fçavoit il pas mieux que nos Kouakres
que fa Religion étoit une Religion
d'Efprit & de Vie ? ne l'avoit il pas dit
lui même fur lefujetde lamanduca-
iïon de fa chair , la chair ne profite de
rien, c\ft PEffrit qui vivifie. Les pa-
roles que je vous ay dites font Efprit àr
Viel Cependant il ne laifîepas enfui-
te d'infdtucr fon Euchariftie. Et pour-
quoi ? pour nous aprendre que toute
Cérémonie n'eft point oppoféc à l'Ef-
prit de J. C. & moins encore celle
qu'il n'inftitue qu'afin de nous appren-
dre à ne chercher rien que cet Efprit
& de nous en reprefenter les aâions
& les fruits , comme fait la Sainte
Euchariftic, qui par des chofes fen-
iibles nous élevé à des chofes pure-
ment intelligibles & fpirituelles.
JedislemêmeduBatême, qui n'a
été inftitué que pour nous engager à
adorer Dieu en Efprit &en vérité par
L C pour avoir part à ce Divin Efprit,
&
DU KOU AKERlSMt }T
& pour représenter par un action fenii-
ble & corporelle , une a&ion toute
intérieure & fpiritucllc , tant s'en faut
donc que l'on puilTe prendre les Koua-
kres pour des Chrétiens , qu'il faut
au contraire les avoir en execcratiori
comme des Apoflats du Chriftianiir
me & des ennemis déclarez de fon Di-
vin inftituteur , vous fere%, avoit dit-
il , vrayement mes Difcfples & mes amk
fi vous garde% mes f recettes. Et quand
il envoyé fes Apôtres prêcher l'Evan-
gile, aile* , dit-il , enfeigne^ toutes les
nations , les butinant au nom du F ère du
fis if duSt.Effrit, & leur prenant â
obferver toutes les chofes que je vsus ay
ordonnées. Remarquez bien qu'il leur
enjoint d'aprendre à tous ceux qu'ils
Batiferont de garder tout ce qu'il leur
avoit commandé, & qu'il dit cela'
après l'ordonnance du Batême , qu'il
«e leur recommande pas d'une autre
manière que tout ce qu'il leur enjoint
de faire obferver. Maisilsnevoyent
pas, dit-on encore , que ce foit la
un précepte formel & perpétuel. Tarn-
pis s'ils ne le voyent pas. Car qui les
empêche de le voir, linon leur igno-
rance affeétée & criminelle ou .plutôt
le mépris extrême qu'ils ont pour J. G*
& pour fa Religion?
G a Mais
S*-- Histoire
Mais je luis feur, qu'ils le voyent
fort bien & que néanmoins comme ils
prétendent avoir autant d'authorité&
de S.Etprit que J.C. ils ne s'en metteur
pas en peme,& le meprifent.Ceft pour
cela que Barclay afin de fe tirer de ce
mauvais pas a adopté toutes les fauffès
fubtilités & lesglofesinlenfécsdeSo-
cin qu'on a refutées fi clairement & fi
folidement qu'aujourd'hui tous les
Socimens , en ont honte pour lui ; & y
ont renoncé.
Pour ce qui eft du peuple il ne con-
noit gueres ces fubalitez impies , ni
ces profondeurs deSaihan. Il fe con-
tente de dire que c'eft une Cérémonie,
& qu'il ne faut pas s'attacher à des Cé-
rémonies , mais à l'Elprit.
Barclay dit après Socin que J.C. ne
commande pas pofitivemët de Batifer,
parce qu'il n'a pas dit alle% & Batifc,
mais alle% enfeigne^ toutes les Nations ,
les Battant. On ne peut rien avancer
de plus impertinent, ni qui fe detruife
plûtôt que cette Chicanerie. J. C. dit-
il a les Apôtres enfeigpe$ aux Nations à
garder tout ce que je vous ay ordonné ?
point du tout. Ce n'eft pas ainfi qu'il
parle, allez; dit-il , enfeigne* toutes
les Nation? les liarijant au nom du Perc
&c.& en leur aorenam à garder tout ce
que
DU KOUAKERISME. f$
Îue j c vous ay ordonné. Elt-ce donc que
. C. ne leur a point commandé d'en-
leigner aux Nations à pratiquer tous
fes préceptes ? Et les Apôtres s'en pou-
voient-ils légitimement difpenfer auffi
bien quedeBatifer ? Si les nouveaux
Chrétiens ont tant d'averfion pour
toute forte de Cérémonies , pourquoi
donc ont-ils tant d'attache à tenir leur
chapeau fur la tête , comme s'il y étoit
cloué , & à ne jamais dire que tu &
toy ? que ne vont-ils téte nue comme
faifoient jadis les Juifs & les Romains,
qui n'avoient garde d'ôter le bonnet m
le chapeau de dcfïus leur tête , puis
qu'ils n'en portaient jamais que pour
lègarentir âe la plùye? pourquoi ces
grands & mortels ennemis de toute
Cérémonie fc font-ils plutôt pendre &
mettre en pièces que de ne pas s'alïem-
blcr ? Où eft ce que J. C a commandé
que l'on s'affemblePoù îa-t-il comman-
dé plus expreiïement que le Batême &
î'Euchariftie ? pourquoi gardent ils
encore la mode de prêcher ? Tout ce-
la n'eft-il pas Cercmoniel? Ils ne
manqueront pas de répondre que c'eft
pour entretenir l'Efprit de la Religion
&de^la pieté. Et c'eft auffi ce qu'on
leur dit fur le fujet du Batême & de la
Sainte Cene, qui font formellement
C 3 or»
J4 Histoire
ordonnées par J. C. au lieu que ces au-
tres chofes comme de s'affemblcr &
de prêcher ne le font, pas de la même
manière.
Mais voici le nœud de î'afTaire,c'cft
que ces Apoftâts jugent bien que fans
aûèmblée, & fans fermons ils n'a van-
ceroient pas leur nouvelle Se&e , c'eft
pourquoi il faut mourir plutôt que d'y
yenoncer au contraire elle fc détruiroit
s'ilsvenoientà Batifer & à Commu-
nier. Cela difïipcroit leur troupeau,
& le feroit retourner dans les autres fo-
cictea Chrétiennes d'où il eft forti > &
où l'on Célèbre ces deux Cérémonies.
En un mot les Kouakres retourne-
roientauChriftianifme , en revenant
au droit commun.
CHAPITRE XIV,
Quels font les prétextes des Koua-
kers four rejetter le Batcme <p*
VEuchariftie.
T E premier prétexte dont ils fe fer-
vent pour rejetter ces deux Céré-
monies eft pris du mot de Sacrement y
& des définitions que les Proteftans
en
du KouakeriSme. SS
en donnent dans leurs Ecrits , même
dans leurs Confeffions de Foy & dans
leurs Catéchismes. Ils fbûtiennent
qu'il n'y a pas le moindre mot de tout
cela dans les Saintes Ecritures ; qu'on
n'y trouve pas même le terme de Sa-
crement , bien loin d'y trouver toutes
les définitions que les Théologiens en
donnent. Et fi Ton réplique que la
chofe lignifiée par le mot de Sacre-
ment y eû contenue, ils répondent
que cyejl une pure pétition de principe ,
& fapofer gratis ce qui eft en quejîion. Ep
que cela n'exeufe nullement les Proteftans'
qui croient d'ailleurs que toute la volonté
de Dieu efl contenuï dans F Écriture ,
ni ne leur donme pas le droit de rejetter
les termes expre% de l'Ecriture pour cher-
cher dans les mafares de la tradiétior*
Romaine , ce dont ils font une par-
tie fi ejfentielle de la foy. Mais c'eït bien
la de quoi il s'agit ? Il eft bien queftion
de facremens & s'il faut ai nii appel 1er
ou non les Cérémonies Reîigieufes &
Saintes que J. G. a infîituées ? Il ne
s'agit que ce que J.G.a fait & a inftitué,
de ce que fes Difciples , ont pratique ,
& de ce que tous leurs Succelïèurs
ont lailTc de main en main , & qui a été
pat tout, toujours , & coniîamment
pratiqué , & qui l'eft encore aujour-
G 4 d'hui?
j6 Histoire
d'hui ? que les Kouakres lailîent la le
mot de Sacrement & qu'ils en laiflent
difputer les Doâeurs des Académies
& des Umvcr&tci tant qu'ils vou-
dront, tous les véritables Chrétiens
n'en feront nullement fçandalifez,
pourveu qu'au relie ils Batifent com-
me J. C. l'ordonne , & fallent la Sainte
Cene comme il la infatuée.
Le fécond prétexte dont ils fe fer-
vent pour réjetter ces deux Cérémo-
nies eft qu'il y auroit autant de raifon
à pratiquer le lavement des pieds qu'à
les célébrer , puifquc J. C. n'a pas
moins expreiTement commandé àfes
Difcipîes de fe laver les pieds les uns
aux autres, quedeBatifer & de faire
la Cene. Mais où eft ce qu'il eft dit du
lavement des pieds qu'il le faut prati-
quer jufqu'à ce que J. C vienne, com-
me cela eft dit de la Célébration de
l'Euchariftie ? Et qui ne voit que J.
C. par fon précepte de fe laver mu-
tuellement; les pieds n'a voulu nous
commander *uitre chofe finon que
dans toutes les occafions où nos frères
fe trouveront avoir befoin de nôtre
charité quand ce feroit même dans les
chofes les plus falles& les plus abjec-
tes , nous devons leur en donner des
marques , & pratiquer , en même
temps
DU KOUAKERI SMÊ. f'f
temps la vertu de l'humilité , deuffions
nous nousabaifîerjufqu'à laver leurs
pieds, quand même nous ferions in-
finimerjt au deflus d'eux à plus forte
raifon quand nous fommes ou leurs
égaux ou leurs inférieurs. Je fuis très
perfuadé que le précepte de la charité
& de l'humilité Chrétienne s'étand
jufqucs là , aulfi eft il pratiqué à la let-
tre dans tout l'Orient & le Midi parmi
les Chrétiens qui y font. Il eft encore
pratiqué dans l'Eglife Romaine, & très
fouvent même dans la plupart de leurs
Congrégations Religieufes: quoique la
coutume de nos derniers fîecles qui eft
d'aller chauffez, & non pas nuds pieds
comme l'on faifoit j'adis par tout , tant
dans l'Orient que dans l'Occident,foit
une jufte raifon pour ne plus pratiquer
le lavement , & y fubftituer tous les au»
très exercices de charité & d'humilité
qui peuvent y être fubftituez ; quoi-
qu'il y ait des occafions aÛés fréquen-
tes de le pratiquer à la lettre , comme
toutes les fois que quelqu'un de nos
frères , en un mot quelque Chrétien a
fait un long chemin à pied , & qu'il eft
fort fatigué, ce xjui arrive tous les
jours. Car alors nous fommes dans le
cas marqué par nôtre Divin Législa-
teur, & nous pouvons pratiquer tout
C s à la
?8 Histoire
à la fois & la charité & l'humilité
Chrétienne, en lavant les pieds pou-
dreux & laffe2 de nôtre frère , <5c en
lui recréant les Efprits par ce pieux de-
voir. Car rien ne delafic tant que de
fc laver les pieds quand on eft fort fa-
tigué , & couvert de poudre fi les
Chrétiens ne font rien de cela , ce n'eft
que par orgueil ; ou parce qu'ils ont
honte de fuivre l'exemple de leur maî-
tres, & dont ils fedifent les Difciples
a faufils enfeignes.
Letroifiéme prétexte des Kouakres
cft que s'il falloit Batifer & faire l'Eu-
chariftic à l'exemple des Apôtres , il
faudroit auffi s'abftenir du fang & des
chofesl étoufées puifque les Apôtres
jugèrent qu'il étoit necefikire que les
Chrétiens s'en abftinfent. Mais enco-
re une fois, eft- il dit de ce précepte
Apoftoîique qu'il le faut garder jufqu'à
ce que J. C. revienne, comme cela
cft dit de la Sainte Euchariftie? Et les
préceptes que font emanés,deJ.C mê-
me n'ont-ils pas plus de force & d'au-
thorité que ceux des Apôtres ; Enfin
je dis que fi nous étions dans le cas des
premiers Chrétiens , qui étoient au
milieu des Juifs dont les Cérémonies
n'avoient pas encore été abolies & au
milieu des Gentils qui offroient le
DU KOU AKERISME. S9
fang & les chofcs étoufées aux Dé-
mons, nous ferions tenus de nous ab-
ftenir de leur précepte étant indifpen-
fable dans ces fortes de circonftanc es :
principalement quand les ennemis de
nôtre Religion nous tendent des piè-
ges , & cherchent à nous cngagerjdans
leurs cultes & leurs pratiques impies
& facrileges : ou même quand en u-
fant des droits de nôtre liberté dans ces
fortes de chofcs, nouspourions fçan-
dalifer quelqu'un de nos frères , fai-
ble en lafoy, & en la connoifiànce de
la libcrtéChrêtienne.Dans tous les au-
tres cas nous pouvons ufer de nôtre
liberté , & manger de tout indifférem-
ment fans nous en enquérir pour la
Confcicnce. Et St. Paul nous aprend
en termes exprex que nous fommes
rendus libres par j. C du joug de tou-
tes ces fortes de pratiques : Et que
nous devons feulement prendre garde
d'abufer de nôtre liberté,& de la chan-
ger en* libertinage. Tout m'eft permis ?
ait-il , mais tout m rrfeft pas avanta-
geux. Tout m? eft permis , mais tout ri fé*>
di fie pas , que nul ne cherche fa propre Jar
tisfaBion , mais l e bien des autres . Mat£
de tout ce qui fe vend à la boucherie 9
fans vous enquérir droù il vient par un
fcrupule deConfciencecar la terre #* tout
C 6 e§
6o Histoire
ce qu'elle contient ejl au Seigneur, fi un
dnfidelle vous pie à manger che% lui ,
& que vous y voulie^ aller , mange* de
tout ce qu'on vous fervira [ans vous en-
quérir d'où il vient par fcrupule de Con-
fcience, mais fi quelqu'un vous dit ,\ceci a
été immolé aux Idoles rien mangés pas
m caufe de celui qui nous a donné cet avis^
4? aujftdepeur de bleffer non nôtre Con-
fcience , maïs celle d'un autre. Et finit
par cette belle & admirable fentence
ne donnons point de fçandale ni aux juifs ,
ni aux gentils , ni a l'Eglife de Dieu
quand St. Paul aura parlé du Batêmc
& de la St. Euchariftie , comme il a
parlé de ces autres préceptes , perfon^
ne ne condamnera les Kouakres pour-
veu qu'ils ufent de liberté félon les rè-
gles que le même Apôtre donne.
Le quatrième prétexte des Koua-
Kres dont ils célèbrent leur rejeelion
du Batéme & de l'Euchariftie,eft que fi
îl les faut obferver il faut donc auffi ob-
lèrver la pratique d'oindre les malades
d^huile au nom du Seigneur: Car St.
Jaques eft formel fur cela, quelqu'un
cft~ il infirme ou malade parmi vous,
qu'il faffe venir les prêtres de T'Elit fe &
qu'ils prient pour lui , en V oignant d'hui-
/? au nom du Seigneur , &* leur pricre
(faite avccfay fauvera le malade,) Je
dis
BU KOUAKERISME. 6î
dis premièrement qu'il n'y a la aucun
précepte, mais feulement un Con-
feil au un vois laiflc à la liberté des ma-
lades. Je dis en fécond lieu que J. G.
n'a rien commandé de femblable,
qu'ainiî il n'y a aucune comparaifon à
-faire entre le Baîême & TEuchariftie,
& à cette onétion. Je dis en troifiéme
lieu que je confens & que tous les
Chrétiens confentir ont que les Trem-
bleurs pratiquent cette onction s'ils
croyent avoir la puiffànce de guérir
miraculeufement par fon moyen les
malades fur qui ils la pratiqueront.
Enfin pourquoi ne la pratiqueroient-
ils pas , & pourquoi les autres Chré-
tiens ne la pratiquent-ils pas à l'exem-
ple des anciens fidèles , & de toute
l'Eglife Latine & Grecque qui la pra-
tique encore à prefent ? mais le don
desgucrifons miraculeufes n'eft plus
maintenant, & fon temps eft paffé il y a
bien des Siècles. Il n'eft palTé que pour
ceux qui croyent que les miracles
ne doivent pas être perpétuels dans^l'E-
glife de J. C. pour ceux qui n'ont au-
cune foi véritable , & qui par confe-
quent ne fçauroient obtenir par leurs
prières aucune grâce extraordinaire iî
nous en avions feulement auffi gros
qu'un grain de moutarde, nous pou-
C 7 rions
62 H I s t 0 I K e
nous pourions aifcment tranfporter
les montagnes, à plus forte raifori
pourions nous guérir une petite fièvre.
Il ne faut donc pas s'étonner fï prefque
tous les Chrétiens n'opèrent aucun
aâe miraculeux , puifqu'ils s'imagi-
nent que le temps des miracles eft paf-
fé, & qu'il n'eft pas en nôtre pouvoir
d'avoir le moindre degré de cette foi
qui fait des miracles mais je foûtiens
que c'eft une erreur & une illufion très
danger eufe , & qui n'eft venue que du
Diable afin de ruiner le fondement de
laReligion de J.C. & d'en empêcher la
propagation parmi les infidclles. Car
comment croiront-ils en lui fans mi-
racles ? Comment fe perfuaderont-ils
fortement de toutes fes merveilles,
s'ils n'en voyent faire aucune pour les
prouver? Comment même conferver
la Religion parmi les Chrétiens fans
miracles ? Comment convaincre tant
d'impies & tant de libertins & d'in-
crédules, qui s'en moquent, & qui
difent qu'elle n'a pas plus fait de mira-
cles jadis qu'à prefent? J.C. difok
aux Juifs {fiftit n'aur oient -point eu depe-
cké , c'eft à dire qu'ils n'auroient point
été coupables de ne pas croire en lui ,
fils ne lui eurent veu faire des miracles.
Ce dont tant de gens rejettent la Reli-
gion
DU KOUAKERISME. 63
gion Chrétienne eft parce qu'ils ne la
voyent appuyée d'aucuae miracle \
qui les convainque eux-mêmes de fa
vérité & de fon excellence, c'eft la
faute des Chrétiens mêmes, & non pas
la leur. C'eft parce qu'il n'y a plus de
Foi fur la terre, auffij. C. difoit que
quand il reviendroit il n'en trouveroit
plus penfe\ vous que lors qtte le fis de
ly Homme viendra il trouve encore de la
Toi fur la terre ? Point du tout. Ce
Divin Sauveur envoyant les Apôtres
prêcher fon Evangile pat tout le mon-
de nous affeure que ces fignes ou ces
merveilles accompagneront ceux qui
auront cru. Ils Chajferont, dit-il, les
Démons en mon nom. Ils parleront de
nouvelles langues. Ils manieront impû*
nément les Serpens * s'ils boivent quel-
que bruvage mortel^it ne leur fera point de
mahils imposeront les mains fur le smala-
des èr ils feront guéris. J. C. ne détermi-
ne aucun temps prefix à tous les mira»
des: Et c'eft aller contre fon inten-
tion & contre fon Eprit que de 1ère-
ftreindre à certains fiecles; comme fi
les uns dévoient être plus privilégie^
que les autres. Il dit généralement &
indeterminement que ceux qui croiront
en lui feront des merveilles. Et comme le
précepte d'aller par toute la terre & de
s i Histoire
Prêcher à toutes les Nations du mon-
de ion Evangile, eft perpétuel , & n'eft
point encore accompli, y ayant une
infinité de Gentils à convertir, pour
^oïlapromeilc de la grâce attachée
a la £01 de tous ceux qui fe converti-
ront ne feroit elle pas auffi générale &
perpétuelle ? C'cft pour cela que je ne
doute pointque par tout ou l'Evangile
du Fils de Dieu cft prêché il ne s'y raf-
le quelque miracle, ou par celui-ci
ou par celui-là; ou par quclqu'autre
manière comme Dieu le juge à pro-
pos.
.Quant à ccjque l'on dit qu'il n'eft pas
en notre pouvoir d'acquérir la Foi des
miracles, on le dit gratis. Carjecroi
tout le contraire, J. C.nous montre
que nous pouvons acquérir cette Foi
en parlant ainiï à les Difciplcs, en vert-
te je vous dû que fi vous avie% autant de
Foi qu'un grain de moutarde eft gros vous
pourieq dire à cette montagne tranfporte
toi d'ici, & te précipite dans ta" mer,
V* cela arriveront ; leur parler ainlî c'é-
toit Jleur faire entendre qu'il ne te-
noit qu'à eux d'avoir autant de Foi :
c étoit les eihorter à l'acqueris : c'é-
tait leur reprocher leur peu de Foy ,
O Gens de peu de Foy , 0 Nation tnf
crédule jufqu'à quand vous Juporterdi
DttKoUAKERlSME. 6|
/e? Or fi les Apôtres pouvoient acqué-
rir cette Foi , pourquoi non tous les
ridelles?
Apres tout le même Jefus ne nous
permet pas de douter de cette vérité ,
& l'Hiftoire duFiguier feché du foir au
lendemain en vertu de la malédiction
de J. G. eft trop expreffe fur cefujet,
St. Marc nous raconte au Chap. des
que le Lendemain du jour auquel J. C.
le maudit, Jefus & fes Difciples paC-
iantauprez, ils le virent feché juiqu'à
la racine alors Pierre fe rciTouvcnant
de ce que Jefus avoit fait, lui dit ,
Maître le Figuier jue vous ave% maudit v
Je voici tout fiche, & Jefus lùirépon-
. dit, aye^laToi de Dieu, En vérité je
vous dis , quiconque commandera à cette
montagne & lui dira ote ui d'ici, &fe
jette en la mer , s* il ne doute aucunement
dans fin cœur , mais croit au contraire
fermement que tout ce qu'ils dit arrivera ,
tout ce qu'il aura dit , arrivera effective-
ment ; je vous avertis de croire que vous
recevrez tout ce que vous demande^ a
Dieu lif alors Dieu vous P accord r a. Il
n'yapointladereftridion, ni de pri-
vilège pour ceux-ci plus que pour
ceux-là , & pour un certain tems plus
que pour un autre. Par confequent il
ne tient qu'à nous d'aquerir cette Foi.
gS 9 H I S T O I R E
MU ce n a été que pour nous mieux a-|
prendre qu'il nous eft facile de l'ac-i
quérir que J. C s'eftfervidclacom-'
paraifon du petit grain de Moutarde
comme s'il nous difoit, il faut fi peu de |
1 01 pour faire des merveilles , que ce- 1
la n eft quafi rien de ce que vous pou- i
nez acquérir fi vous le vouliez. Il n'en i
faut pas plus gros qu'un grain de mou-
tafaen étes vous donc pas bien mifé-
rablcs & bien malheureux fi le pei?
vous manque par vôtre faute, car qui
vous empêche de l'acquérir que vôtre
propre incrédulité , vôtre parefiè,
votre négligence, vôtre ftupidité?
ÎJj exigeois de vous que vous culTiez,
autant de Foi qu'un chameau eft gros >
vous le trouveriez peut être étrange.
Mais j'en exige fi peu que vous ne
fçauriez vous exeufer pourquoi vous
ne lavez pas, puifque )ene vous en
demande qu'autant qu'eft gros le plus
petit de tous les grains, & la plus pe-
tite de toutes les feemences. Je con-
clus de là qu'il n'y a que l'incrédulité
oc 1 infidélité volontaire & criminelle
des Chrétiens qui les empêche de faire
des miracles , & par confequent d'o-
pérer des guerifons miracuieufes par
les împofitions de leurs mains, & par
les On&ions d'huile pratiquées fur les
ma-
DU KOUAKERISME. 6j
malades. Etqu'ainfiriennedoit em-
pêcher les Tremblcurs de pratiquer les
onâions, eux qui feT vantent ii i fort
des opérations Divines du St. JUprit,
eux qui le croyent les feuls vrais fi-
dèles les feuls Elus, & régénérez,
eux enfin qui fe font tant vantez en
Angleterre d'avoir fait des miracles
par leurs prières ,par leurs imposions
des mains, & par leur feul attouche-
ment. r .
S'ils font véritablement perfuadefc
que cette pratique eft également com-
mandée comme leBatême & la Sainte
Cene , ils font obligez de les obferver
toutes également.Et il eft bien plus lui
pour eux de joindre enfemble 1 obier-
vation, de toutes les trois que de les
rejetter toutes , tout à fait fous prétexte
que les unes ne font pas plus authon-
fées que les autres, Car dans 1 un il n y
a aucun péril, & dans l'autre Ton s ex-
pofe évidemment à celui de violer les
LoixexpreffesdeJ.C en égalant en-
tre elles des pratiques qui ne doivent
peut être pas l'être.
Le cinquième prétexte des Trem-
bleurspourlarejeâion du Bateme &
de la Cene , eft que la liberté Chré-
tienne nous afranchit de toutes fortes
de Cérémonies, faas aucune excep-
tion 3
? Histoire
non , finis allèguent fur ce fuiet le
paroles de l'Apôtre, Le Royaume à
Vieu n eftini viande nibruvage , mais /,
juftice, laPaix, ^ la Joye far le Si
ïjprit.Queperfcnne donc ne vous condan
ne pour le manger & four le boire, ei
prlefuj et des jours de Fête, des nouvel
les Lunes & des Sabats. Si donc vom
êtes morts avec J. C. à ces éiemensdn
Monde , comment vous laiffe^ veus im-
fojer des Loix comme fi vous viviez en-
core au Monde, ne mange % pas de ceci
ne goute$ pas de cela : ne touche? pas l
cela* & Cependant ce [ont des choies qui
Pmffm toutes par Fufage qu'on en fait
*f ne font que des ordonnances & des tra-
ditions humaines. Ces paroles , dit
tfarclay, font extrêmement formel-
les & expreflès, & auffi formelles
four authorifer l'abolition des Cérémonies
du Batême & de la Cene qu'elles le font
four authorifer celle des Cérémonies léga-
les. En vérité l'on a befoin d'une gran-
de patience pour écouter ces faux Pro-
phètes, fans s'emporter d'une jufte co-
lère contre ces infâmes profanateurs
ce la Sainte Ecriture , fi les Apôtres a-
voient crû que les cérémonies duBaté-
rne & de la Sainte Cene inffituées par
J. C. dévoient être mifes au rang des
autres Ceicmonies légales, pourquoi
ne
DU KOUAKERISME. 6$
: nous en auroient-ils rien dit ? Pour-
loi auroient-ils toûjours reftreint
urs difcours à ces feulesCeremonies?
DUiquoi praiiquoient-ils , & faifoicnt-
î pratiquer à tous celles de J.C ? pour-
uoi en parlant de la Cene en parties
cr, ne donnent-ils point d'autre ter-
le prefix à là célébration que celui de
I consommation des fiecles jufqu'au
tfour de J.C
Outre cela St. Paul ne parle qu'aux
îentils convertis , quand il leur dit ce
ue nous avons allégué , & nullement
ux Juifs mêmes,cV des plus attachez à
îurs Cérémonies , elles n'obîigeoient
ullement les Gentils , à moins qu'ils
e voulurent être profelitesdelaju-
ice , & être inferez & incorporez au
euplede Dieu.
De plus ne faut il pas être tout à fait
mpie pour comparer enfemblc les
receptes Ceremoniels de juge dont
>n ignoroit alors prefque univerfelle-
aent toutes les raifons , & ceux de
. C. dont il n'y a perfonne qui ne con-
loiffe parfaitement les raifons ?
N'eft-ce pas une autre impieté que
e traitter de rudiments du monde des
Cérémonies qui expriment fi vive-
nent 6c ti fimplemcnt tout enfemble
es plus grandes veritez, & les plus
iablïmcs miftéres de la Religion
70 Histoire
Chrétienne, & même tout ce quel
Dieu fait, & tout ce qu'il opère au
dedans de nous par fon Efprit Divin.
& tout ce qu'il y opérera un jour de)
plus admirable & de plus glorieux r|
comment encore comparer aux an-j
ciennes Cérémonies, qui étoient un,
joug pesant, un joug continuel, &j
qui s'étendoit a toutes les aérions de la
Vie, & qui à caufe de cela étoit unj
jouginfuportable, deux fimplcs Ce-
remonies qui n'ont rien ni de difficile ,|
ni d'onéreux, &qui ne fe pratiquent!
que quelque fois ? deux Cérémonies
qui font prifes de ce qu'il y a de plus]
fimple & de plus naturel dans toute lai
Vie, & dont l'une nefe pratique ja-
mais qu'une feule fois, & l'autre feu-|
lement quand l'occafîon, s'en pre-j
fente, &que vous le juges, à propos ?|
deux Cérémonies enfin qui relTem-|
blent suffi -peu àcellesdeMoyfe quel
le ciel à la terre & le jour à la nuit ?
Enfin n'eft-ce pas vomir un blafphêmej
excecrable contre la perfonne Divine
de J. Ç. que dWr apeller des élcmens
du monde des chofes que la fagefle
Eternelle a inftituée elle-même, &
des inftitMtions humaines celles qu'unj
Dieu a voulu établir lui-même.
Leur fixieme prétexte eft de direl
tou-j
DU KOUAKERISME. Jl
duchant le Batêmc que le Batême
i*cau n'eft: pas le Batême de J. C.
nais bien celui de S. Jean fon précur-
seur, au lieu que le Batême de J. C.
:'eft le Batême d'Efprit & de feu je
vous Batife d'eau , dit-il, mais celui
qui vient après moy vous Batifera d'Éf-
frit & de feu. Et touchant l'Euchariftie
que le pain que nous devons manger
n'eft pas un pain matériel, mais un
paincelefte, fçavoir J.C.même, ce
pain vivifiant qui eft defcendu du CieL
Et fur cela il citera encore ces paroles
de St. Paul , comme il n'y a qu'un [eut
fainr nous ne fommes tous auffî qu'un
feul Corps , quoique nous foyonsplujïeurs.
Parce que nous participons tous à un jeu l
pain. Autre profanation horrible des
Saintes Ecritures. Je dis dont qu'il eft
vrai que le Batême de J. C propre &
particulier à J.C eft le Batême d'Ef-
prit, mais on ne fçauroit nier auffi
qu'il n'ait pas Batifé ou fait Batifcr
d'eau ceux qui fc rangeoient fous fa
Difcipline , & croy oient en lui. On
ne peut pas nier non plus qu'il ne l'ait
ordonné à fes Apôtres , & que les
Apôtres ne l'ayent obfervé, & fait
obferver» Et pourquoi? parce qu'ils
avoient veu que leur maître ne le re-
jettoit pas. Parce qu'ils avoient du
ref-
7* Histoire
refpeâ pour une chofe qu'ils fça-
voicnt avoir été inftitucc par lui-mê-
me. Parce que le Batéme d'eau étoit
très propre à exprimer d'une manière
fenhble le Batême d'Efprit , bien-loin
de les oppofer l'un à l'autre.
Et pour ce qui cil de l'Euchariftie
c'eft tordre manifeftement l'Ecriture à
fa propre condamnation , que d e d ire
queJ.C. if ordonne point à fes Difci-
ples de manger d'autre pain que celui
dont il parle aux Capernaïtes , à moins
qu'on ne deftingue ici , en avouant
que J.C. n'ordonne point à fes Fidè-
les de manger par la Foi d'autre pain
que lui-même qui eft le pain defeendu
du^ Ciel , ordonnant néanmoins on
même temps de manger quelquefois
de la bouche du corps de vrai pain afin
de figurer par ce pain Terreftre le
pain Celefte que famé feule peut man-
ger & digérer. Et les Trcmbleurs ne
le peuvent coutelier. Car Bardai dc-
demeurc d'accord que J. C inftitua
l'Euchariftie, & l'a recommanda à fes
Difciples. j. C. dit-il , ari-Jl inftitué
la Cérémonie de franger du pain èr de
boire du vin en Ça Commémoration ? Ré-
ponfc ce aue pat reçu du Seigneur, je
vous l'ai [au (]i aprir c'rft à fç avoir que
h Seigneur en la nuit en laquelle il fut
trahi
ï> U KOUAKERISME. 7J
trahi &c. Pourquoi donc tant chicaner?
& pourquoi oppofer perpétuellement
ces fortes de chofes à celles qu'elles
reprefenterent , puis qu'elles n'ont été
inftituées qu'afin de les reprefenter , &
de nous toucher davantage ?
Mais voici le miftere de l'iniquité de
ces Antechrifts ? C'eftque l'ufagc da
ces Cérémonies n'a du durer que juf-
qu'après la Pentecôte. Ceft à dire jus-
qu'au temps de l'effafion du St. Efprit
qui efl: le feu dont les Difciples dé-
voient être Batifez, & k véritable
pain celefte dont ils dévoient être
nourris. G'eft Bardai qui nous a de-
couvert ce fecret ; mais il ne le fait
qu'à demi , depeur d'effaroucher trop
ies Efprits. Demande. Quel eji ce feul
"Batcme. Réponfe. Ceft le Batems
qui nous fauve r non $ as celui qui nettoyé
la chair de fes falete% , mais celui qui
rfejl que Valeur ance £une honne con-«
feience devant Dieu* Demande que dit
Jean Batifle du Batême de Chrift, &
comment le diftinguent-ils du fien ? Ré-
ponfe. A la vérité je vous Batiçe iïEau y
mais celui qui vient après moy vous B*-
tifera du St. Efprit & du feu. Deman-
[ de. Efl-ct que J . C. même * fait cette dif~
\tinftion* Réponfe. Jefus ordonna à fes
Pifciplesdenepas fvrtir de Jcrufalem:
J) mais
74 Histoire
mais bien cCy attendre la promejfe du Pe*
re que vous ave% ouïe de moy. Car Jean a
Sâtifé d'eau à la vérité r mais dans -peu
de jours vous fer e% Batije^du St. Efpit*
M'eft-ce pas enfeigner clairement que
le Batême d'eau ne devoit durer que
jufqu'a la Pentecôte, & que depuis
cetemslaleBatêmed'Efprita pris fa
place; ainfî les Kouakres en fçavent
bien plus que les Apôtres y qui ne laif-
ferent pas de Batifer toujours depuis,
& qui commencèrent même à le faire
le propre jour de la Pentecôte, c'eft à
dire le jour même du premier & du
lolemnel Batême d'Elprit & de Feu-
Gar St. Luc raporte qu'il y eut prés de
trois mille perfonnes qui furent con-
verties à J.C. en ce jour la par la pré-
dication de St. pierre , & qui furent
Batife^, if fuit recurent le don du St.
Èffrit.
Mais quand même nos Sts. Apôtres
n'auroient pas fçû ce qu'ils failoient en
retenant la pratique du Batême depuis
3a Pentecôte , du moins nos Koua-
kres ne les peuvent blâmer de Batifer
d'eau d'abord les perfonnes qui vien-
nent à croire en J. C & qui n'ont pas
encore reçu le St. Efprir, c'en: à dire
qui n'ont pas encore été Batifez du St.
Efprit. Car le premier Batême doit
durer
PU KOUAKERÎSME.
durer julqu'au tcms du fécond. Or il
cft confiant que tous les fidèles paffent
depuis le premier jufqu'au dernier fous
î'œconomie de Jean avant que d'être
Batifez du St. Efprit. Et par confe-
quent ils doivent auffi paffer par fou
Batême d'Eau afin de pouvoir paffer
fous celui du St. Efprit. Il eft très cer-
tain encore que le don du St. Elprit
n'étoit que pour ceux , généralement
parlant, qui avoient déjà crû, & qui
même avoient été Batifez d'eau au
nom de J. C & cela étoit félon l'ordre
de J.C. qui n'accorde le don des mira-
cles qu'a ceux qui aurmt cru if auront
été Batife%. C*eft pourquoi le Prince
des Apôtres exhortant les Juifs qu'il
avoit touchez par fon fermon à fe faire
Chrétiens leur difoitR^p ente ^ vomjroi-
la le langage & l'économie du Precur-
feur Jean Batifte , àr que. chacun de
womfbkBdtïfé au nom de J. C. Voila
le premier Batême , le Batême d'Eau \
ou le Batême de Jean , & vous recevre^
ie don du St. Efprit , voila le fécond Ba-
tême, le Batême propre à J. C. le Ba-
tême du St. Efprit. C'eft pourquoi
l'Hiftoire Apoftolique nous aprend
]ue pérfonne n'avoit part au Batêmè
d'Efprit qu'il n'eût été déjà Batifd
«PEauaunomde J.G.
D z Les
76 Histoire
Les Trembleurs n'enfeignent pas
înoins clairement que la célébration
de l'Euchariftie ne devoit durer que
jufqu'aujour de la Pentecôte, à l'é-
gard des Apôtres, & jufqu'au tems
quej. C.le nouveau fœtus du Koua-
kerilmefoit formé dans nos ames, à
l'égard de tous les autres fidèles. Parce
que ce tems ft eft pour eux leur vérita-
ble Pentecôte. Demande. Combien de
tems la Cérémonie de l'Euchariftie devoit
elle durer l Réponfc, toutes les fois que
vous manger e% de cefain & que vous toi*
re% de cette coupe vouspiblig^ la mort du
Seigneur jufqu'a ce qu'il vienne. De-
mande. J. C. promit il de revenir à [es
Apôtres} Réponfe. Je ne vous Userai
foint orphelins ,je reviens à vous ; J. C.
refondit & lui ait fi quelqu'un m'aime if
garde ma parole 9 mon pere l'aimera , nous
viendrons à lui, & nous demeurerons
che% lui* Demande. Cet avènement
fut-il interne ? Réponfe. Ce jour la vous
fç aurez que je fuis dans mon? ère, que
vous êtes en moi, i? que je fuis en vous..
Or peut-on douter que J. C ne vint à
eux particulièrement le jour de la Pen-
tecôte, parlemoyenduSt.Efpritqui
defcenditrur eux, & qui habita dan 9
leurs cœurs? C'eft toujours comme'
vous voyez îa même profanation de
là
DU KOUAKERISME. 77
la Sainte Ecriture. Car il eft plus clair
que le jour que la vernie de J. C. dont
St. Paul parle eft celle qui fe fera
quand il defeendra du Ciel , & vien-
dra juger les hommes fur la Terre.
C'efî: à ce feuî là que nous conduit
J. C.mêmeennousavertifïantde fai-
re fonEuchariitie en mémoire de lur,
afin de nous fouvenir de lui, deforte
que les fimboîes miftiques font com-
me un gage facré qu'il nous a laiffé
pour nous faire fouvenir de lui, & pour
nous confoler de fa chère prefence f
& enfin pour vous afïurer qu'il revien-
dra un jour à nous félon fa pro méfie*
D'ailleurs cette vc^uë fpirituelîe de
J. C à nous , par le moyeu de la régé-
nération n'a rien d'oppofé ni d'imeon-
patibîe avec la Cérémonie de îa Cene ,
au contraire elle s'ajufte & elle s'ac-
corde admirablement avec elle;elle eft
même toute propre à y contribuer. Et
elle en représente toute îa force& toute
l'efficace. Nos Ste. Apôtres n'ont nul-
lement entendu que cette Cérémonie
dut finir après îa Pentecôte , puif-
qu'iîs l'ont toujours pratiquée depuis,
& non-feulement eux , mais auffi tous
leurs lùccefîèurs jufqu'a nous. Par
confequent ils n'ont point du tout en-
tendu l'avènement de J. C. dont St.
D 3 Pa&1
78 Histoire
Paul parle, & jufqu'au tems duquel il
vent qu'on faffe l'Euehariftie & qu'on
célèbre la mémoire de la mort de J. C*
de f avènement fpirituel, mais feule-
ment de celui qui fera le retour glo-
rieux de J.C fur la Terre. EtJ.C.ne
parle ni de l'un ni de l'autre , quand il
dit à fes Apôtrçs je ne v$us laiflerai pas
comme des Orphelins. Je reviens à vous,
i\ ne parie que de la perte qu'ils
alloient faire de lui par la mort r
mais qui feroit bientôt fuivie d'un
prompt retour par le moien de fa reûi-
reélion, encore un -peu de tems ,• <&r U
monde ne me verra plus : mais pour vous
vous me verre ^ parce que je fer ai vivant,
if que vous aujfi un jour vous vivre%
■comme moi. En ce jour là, quand vous
me verre % retourner en vis, vous connoi-
tre% que je fuis en mm Pere &c. Et s'il
faut étendre cela plus loin, on peut
l'appliquer au j our de la dernière rciu-
re&ion. C'eft ainfi que les Kouakres
interprètent l'Ecriture.
Il y a encore une autre infigne four-
berie dans toutes ces allégations. La
voici. Ils nous difent que le pain que
nous devons manger n'eft que ce pain
celefte & vivifiant qui eftj. C. même I
. & puis pour nous infinuer que c'eft de
ce pain la que St. Paul parle auxCo-
riri-
DU KOUAKERISME. 79
rjxithicns quand il leur reprefente Vin-
ftitution de l'Euchariftie , &de quelle
manière ils doivent 1$ célébrer , non
en la faifant feparement les uns des,
autres, mais tous enfemblc , parce
que c'eft à cette union que l'Eucha-
riftie même les invite,, en ce qu'elle
ne fe fait que par le moyen d'un feul
pain , dont on dilinbue des morceaux,,
à tous; le pain , dit-il, que nous rom~
pons n'eft-il pas la communion du corps-
de Chrifi.Puifque ce neft qiiun painyious
qui Jommes plufuurs nous ne devons être
qu'un feul corps , parce que nous ne par"
ticipons tous au a un feul pain : pour in-
finu.er dis-jeque l'Apôtre parle de ce
pain fpirituel qui cfr lui-même -, ils
joignent immédiatement fes paroles à
celles de J. C. aux Capernaites, quel-
qu'un me mange il vivra par mon moyen*
Celui qui mangera du ce pain il vivra;
éternellement. Comme c'eft un f ml pain >
nous quoique plusieurs ne fommes néan-
moins qu'un feul corps-, car nous parti-
cipons tous a ce feul pain. Ce n'eft pas
qu'il ne foit très vrai que J. C n'eil
qu'un feul pain, & que nous tous ne
participions qu'à ce feul pain quant au
fens myftique & figuré , mais il eft
vifible que St. Paul n'a entendu parler
que du pain rompu & diftribué à tous
D 4 l££
8o Histoire
les fidèles dans la Cérémonie de la Ce.f
ne; & l'impofteur de Bardai eft oblige
d'en demeurer d'accord, parce qu'il
reconnoit, malgré qu'il en ait, que l'E-
glife de Corinthe a Célébré la Céré-
monie de la Cene après l'avènement
intérieur & fpirituel de J. C. mais il
femble, dit-il, que l'Eglife Corinthien--
ne a pratiqué cette Cérémonie après cet
avènement intérieur de J. C* Et il n'a
oié dire que non 7 ni qu'elle ait mal
fait.
Enfin quand l'on accorderoit que
cette Cérémonie ne. doit durer que
jufqu'au temps de leur prétendu ave-
iiement fpirituel & intérieur de J. C.
(jans chaque ridelle \ ils feroient néan-
moins obligés de la pratiquer julqu'a-
lors. Or pas un Kouakre ne la Célè-
bre. 11 faut donc de toute neceffité
qu'ils foutiennent que J. C. ne man-
que jamais de venir dans chacun deux
fans exception de perfonne , ni d'âge ,
nidefexe. Ainii ils nainent tous dans
la grâce , & dans l'Efprit d'adoption :
ils naiffent tous des Chrifts Celeftes ,
&des hommes nouveaux tout formez
en un moment. Au moins s'ils ont
tant de privilèges , ils ne devroient pas
tant déclamer contre les autres Chré-
tiens qui ne font encore que fort grof-
DU K Ù UA KÉRISMË. Sf
fiers & fort charnels , & à qui par con*
fequeîit ce Jefus intérieur n'eft paint
encore venu. Ils ne font donc que leur
devoir quand ils Célèbrent l'Euchari-
flie eu attendant ce bien heureux mo-
ment auquel le nouveau fœtus du
Kouakerifine fe fera tout à fait formé
en eux.
Voici encore une autre difficulté.
C 'eft que comme il eft certain que la
formation du nouvel homme ou du
Ghriftcelefte a divers degrez & divers
Périodes, les Trembleurs nous de-
vraient im peu inftruirequel eft le de-
gré ou le période après lequel il ne faut
plus penfèr à la mort de J. C. ni l'a Cé-
lébrer en remerciant Dieu de ce qu'il
a bien voulu livrer fon Fils Unique
afin de nous fauver de la mort éternel-
le. Car enfin les Apôtres étoient fidel-
tes & régénères , même avant te Pen-
tecôte r avant même l'Euchariftie
qu'ils célébrèrent avec leur maître.
t> $ C H A-
§2r Histoire
CHAPITRE X V,
Dernier prétexte des Kouahrespouv*
rejetter le Batême €r VEuchari-
jt/e. S erpcnt d'Airain 5 emhlêmet
illujlrede Crucifié.
ÏJNfîn nos faux Prophètes difent:
^ pour dernier prétexte qu'on a abu-
fç fi criminellement de ces deux Céré-
monies , particulièrement de l'Eucha-
rifhe, en l'ayant transformée en une.
véritable idole , qu'il ne faut pas trou-
ver étrange s'ils les ont abolies , & que*
c'étoit ce' qu'ils dévoient faire pour
couper ces montres d'erreur & d'im-
piété par la racine , & prévenir le mal
qui en pouroit arriver fi on les obfer-
voit encore. Qu'Ezechias ne fit pas
difficulté de brifèr le Serpent d'Airain
lorfqu'ilvit les Juifs fc porter à l'ado-
rer & à l'encencer , quoique ce fimula-
cre fût un monument magne de la.
guéri fon miracuîeufede leurs Ancc-
lires faite au defert par fon moyen ,
lors qu'étant mordus des Serpens ils*
tournoient laveué vers lui.
je fuis ravi que cette excufë appuyée
de i'aftion d'Ezecbias qui bjiû le Ser-
pent
DU K OU A KER ISME. '8j
pcnt d'Airain me donne occafîon de
montrer îa neceffité qu'il y a de croire
en J. G. mort & crucifié pour nous,
& de jetter fans celle les yeux fur cet
objet falutaire afin de guérir nos ames
des playes du péché, c'eft à dire des
morfures de l'Ancien ferpent dont il
nous eit prefque impoffibîe d'éviter les
blelfures , tandis que nous fommes er-
cans dans les deferts de ce monde.
Il n'y a point de Chrétien qui puiflè
douter que l'élévation & la fufpention
du Serpent d'Airain faite au Defert par
Moyfe n'ait été un Jeroglife & un em-
blème admirable & tout enfembie une
prediétion très expreffe de la Crucifi-
xion du Meffie.il y a entre l'un & l'au-
tre tant de fi beaux rapports qu'il faut
fe fermer les yeux pour ne les pas voir.
Etjenefçaurois fur ce fujet nfempê-
cher de déplorer l'aveuglement extrê-
me des Juifs de ne pas reconnoître
dans ce Divin Emblème nôtre Divin
Cruciflé,qui quoi qu'il ne fût qu'un A-
gneau innocent & fans tâche, le St.& le
juftervoulut bien néanmoins prendre la
forme d'un vil & miferâble efcîavc, &
même du plus grand pécheur & du plus
criminel de tous les hommes r & fut
traité demême-, ayant été attaché au
gibet , &ayant fouftèrt la mort honteu-
D 6 &
84 Histoire
fe de la Croix, qui étoit le fuplice des
cfclaves & des plus grands fçelerats.
N'étoit ce pas la prendre la forme &
le cacher fous l'apparence d'un ferpent
plein de vevin & de malice, & n'en
avoir néanmoins que la feule apparen-
ce, puifqu'au lieu de faire du mal en
cet état, il n'eft capable que de faire
du bien, en gueriffant toutes nos in-
firmiez & nos langueurs, en donnant
même la vie aux morts : à condition
que les malades & les morts cher^
chent chez lui leur guerifon & leur re-
lurcâion en tournant fans celle les
yeux fur J. C mourant en croix, ils
le prient avec ardeur & avec confian-
ce de leur obtenir de Dieu la Remif-
fion de leurs péchez. Car ce n'eft qu'à
cette condition là que J. C. nou& veut
procurer le falut & la vie , comme Mot-
pr dit-il, éleva le Serf ent £ Airain au
Dejèrt, il faut que le Fils de f Homme fiit
élevé r & pourquoi , afin que quicon-
que croit en lui ait la vie éternelle , c'efl
adiré afin que quiconque contemple
jefu s attaché fur la croix , & a recours
à lui- en cet état, foit guéri de Tes pé-
chez : tout de même que le Serpent
d'Airain ne fut élevé au Defert,& atta-
ché à une perche, & planté au milieu
du Camp> qu'afm que tous ceux qui
fa
BU KOUÂKERISME. îf
feroient mordus des ferpens jettaffenî
les yeux fur lui, & fufient guéris. Et
qui eft-ce qui acft pas pécheur l. qui
eft ce qui ne fente que trop fouvertè
les morfures du SerpentPOu qui eft-ce
qui n'en ait pas été mordu quelque-
fois? Et par confequcntquieit ce qui
n'ait pas befoin de regarder perpétuel-
lement vers j.C mourant pour nous
fur la croix , vers celui que nos pèches
ont percé ? Les Kouakres n'ont- ils
donc pas véritablement apoftafié de J.
G enmeprifant fa mort,en enfeignant
à la tourner toute en pure allégorie , &
en n'exhortant jamais perfonne à de-
mander pardon à Dieu de fes péchez
au nom & par la croix du fils de Dieu ?
Mais pour venir à la folution de la
difficulté , je dis premièrement qu'il
n'y a point d'abus fi criminel dans la
pratique des Loix & des Cérémonies
Divinement inûituées q&'il donne le
droit aux hommes de les abréger* Ce*
la n'appartient qu'à Dieu même & à
l'inftituteur des Cérémonies. Il falloit
donc attendre fur cela la volonté de
Dieu & la déclaration expreflede J. C.
je dis de J. C. vivant & régnant au ciel?
&y demeurant en corps & en ame9
& devant un jour vifîblement en def-
cendre pour juger les hommes à &
D 7 son
§5 Histoire
lion du Chrilt intérieur des Kouakrcs T
qui n'a jamais été crucifié, &qui ne
içauroit jamais l'être réellement & de
fait , & qui léul leur a di£té d'abolir la
Cérémonie myftique & limbolique de
lamort réelle & corporelle de nôtre
Divin Jefus, le feuLChrift véritable j &
dont le nom feul a été donné aux
hommes pour les fauver;car enfin c'eft
le Chrift corporel, & qui eft mort &
reiTuffité corporellement , & qui eft
monté corporellement au Ciel, lequel
la ordonnée à fon peuple,
Je répons en fécond lieu que les
Juifs n'avoient aucun ordre ni aucun
précepte de garder le Serpent d'Airain
depuis qu'ils étoientfortis du Defert &
entrez dans la Terre de promiflîon :
que par conièquent Ezechias avoit
droit de le brifer,non feulement quand
il vit que le peuple en abufoit, mais
quand, même il n'en auroit pas abufé,
Or l'Eglife Chrétienne a un précepte
formel de Célébrer la mémoire de la
mort deJ.C.parl'Euchariftie: & les
Apôtres ont tranfmis cette pratique à
leurs fucceflèurs & leurs fuccelleurs
nous l'ont donnée de main en main»
C'eft en vain que l'on répliquerait
qu'il n'y avoit que les Ap ôîres obligez
i la faire , J. C. ne parlant qu'a eux.
Car
D U KOUAK E R I S M E. 8^
Car St. Paul montre qu'ils fe crurent,
©bligex à la faire obferver à tous les.
Chrétiens qu'ils raifoient; Et cela
jufqu'aia confommation des iïecles t.
puiiqu'il veut qu'on la Célèbre jufqu'a.
ce que J. C revienne à nous en fa pro-
pre perfonne. Et rien n'eft plus con-
forme au but & aux paroles de J.C car
eft-ce que ce Divin Sauveur n'auroit
ordonné qu'a fes premiers Difciples de
fefouvenirdelui, & de Célébrer de
tems en tems la mémoire de fa mort ?
n'y a-t-il qu'eux qui foient dans l'obli-
gation de remercier J.G. de ce que par
excez d'amour & de bonté pour eux &
pour nous tous f il a voulu mourir fur
un infâme poteau ? Par confequent
J. C. padoit à toute l'Eglife & à tous
les fîecks du Chriftiamfme , en leui
parlant &en leur ài&nt faites ceci en
mémoire de mey.. Auffi il n'y a jamais
tu d'Eglife fondée par les Apôtres ^
ni par leurs fucceffeurs qui n'ait cou-
fiamment Célébré l'Euchariftie juf-
qu'a nous-
Les premiers hérétiques mêmes 9
& les plus grands & les plus dangereux
que f'Eglife ait jamais eu v & qui réf.
fembloient parfaitement à nos Koua»
kers r comme les Knoffiques> & les
Maarionites-, & les Manichéens dont
f% HISTOTKE
2e Chrift Celefte eft tout pur Efprit , Se
qui par confequent n'a jamais été réel-
lement crucifié , & qui félon Mar-
cion & Mânes n'étoit qu'une produc-
tion émanée du Pere inconnu & une
portion de fon Efprit ou de fa fubftan-
ce éternelle & incorporelle, répan-
due par tout par portions , & princi-
palement répandues dans nos ames
pour y germer,& y faire naître l'Hom-
me Celefte,&pour le dégager des liens
de la chair & du fang de l'hommeTer-
sreftre, & de la fubftance du Dragon, &
du Prince des ténèbres , a fervi de mo-
delleauxKouakres pour former leur
nouveau Chrift, univerfellement ré-
pandu dans tous les hommes, &qui
eft félon eux une véritable portion on
un véritable rayon de la fubftance di-
vine,* du principe de la lumière, mal-
heureufement engagée dans la fubftan-
ce tenebreufe du péché. Les Ancien»
Hérétiques , dis-je , tout Knoftiques &
tout fpirituels qu'ils étoiët,ne laifloient
pas de Célébrer l'Euchariftie, même
avec le pain & le vin , excepte le* Ma-
nichéens qui rejetterent le vin , ce qui
fburniffoitaux autres Chrétiens un ar-
gument invincible contre kur Chrift
Celefte.& phantaûique ,. & qm prou-
voitcttroémetemsy &lg vérité de la
BU KOUAKERISME. 8£
mort du fils de Dieu, du Chrift véri-
table, &lancceflité d'en Célébrer la
mémoire, & d'y avoir recours com-
me au feul antidote capable de nous
guérir de tous nos maux. Ces Héréti-
ques difoient que J. G. avoit voulu par
fon Euchariftie adopter un corps fenfi-
bie, que pour cet effet il avoit pris le
pain pour fon Corps, & le vin pour
fon fang, & avoit ordonné à tous les
Chrétiens de ne lui en donner point
d'autres que le pain & le vin myiti-
ques , qu'il falloit confiderer comme
tenant la place d'un corps compofé de
chair & de fang: Et que c'étoit la le
feul Chrift corporel , qui devoit de-
meurer parmi nous jufqu'a la fin du
monde. Aiafi les Anciens Hérétiques
plus fubtils & plus doâes fans com-
paraifon que tous nos Kouakres, qui
ne font que des paifans , & de mifera-
bles ignorans , pour la plupart, av oient
encore plus de refpeâ pour nôtre J. C.
& pour fes inftitutions qu'ils n'en ont.
Enfin la raifon qui donna lieu au
Serpent d'Arain ayant ceffé dés que
les Ifraëlites quittèrent les deferts d'A-
rabie , & entrèrent en la terre de Ca^
naan, il devint une chofe indifféren-
te. Mais îa raifon qui a donné lieu à
l'Euchariftie eft une raifon qui fubfiltc
au-
$o Histoire-
aujourd'hui de même qu'au tems des
Apôtres. Et cette raifon eft que nous
devons nous fouvenir de fa perfonne r
& de Célébrer la mémoire d'une
mort, de l'efficace de laquelle nous
avons befoin tous les jours, & dont
aufîî nous refièntons tous les jours les
effets falutaires. Quand J. C. fera ve-
nu, quand ii nous aura retiré des
deferts brûlants de ce monde 3 & qu'il
nous aura tranfporté dans la Canaan
Celefte , il en fera alors de fon Sacre-
ment comme du ferpent d'airain après
qu'on n'en eut plus befoin, &que les
Ifraelites furent entrez dans la Terre
de Canaan. Si ce peuple étoit encore
aujourdhui dans le Defert,& au milieu
des Serpents, perfonne n'oièroit bri-
fer le Serpent d'Airain qui feroit pour
eux un Antidote toûjours prefent.
Perfonne n'auroitofé non plus le bri-
fer du tems deMoïfe,lorfqu'ils étoient
au Defert , quand même il feroit arri-
vé que quelques uns fe fuffent avifez,
de l'adorer & de l'encenfer , dans k
perfualïon que quelque Ange s'y te-
Jioit caché, &y gueriflbit tous ceux
qui y jettoient les yeux après avoir été
mordus. Si cela étoit arrivé Moïfe fe
feroit contenté de leur ordonner de
ceffer de l'adorer, & de défendre fous
quel-
BU K O UÀRER1 S ME-
quelque peine qu'on l'adorât à l'ave-
nir* Et lî tout le peuple fe fût porté
à l'adorer il auroit confulté Dieu mê-
me , l'Oracle de Jehova, pour fçavoiî
ce qu'il voudroit qu'on Mt. Or tous
les Chrétiens font encore aujourdhui
dans le defert, & au milieu des fer*
pens dont ils font mordus de tems en
tems , & le fcul baume que Dieu
.nous a donné contre ces bleflûres,
eft J. C attaché à la croix , fur qui
par confequent nous devons fans
ceflejetter les yeux, & pour cet effet
célébrer auffi fans ce{fe la mémoire de
fa mort en la manière qu'il nous à or-
donnée. Les Koakers ne pechent-iîs
jamais , & n'ont ils jamais péché?
Pourquoi donc ne recourent-ils pas à
la mort de J. C afin d'être guéris *
Et pourquoi banniflènt-ils lesmonu-
mensfacrez qu'il nous à laiffés de ià
mort. L' Avènement intérieur deJ.C
dans nos ames a-t-il quelque chofe
d'incompatible avec le recours qu'el-
les ont à J. C Crucifié , & avec la
Célébration de la mémoire de fa
mort ? La véritable raifon donc qui
àfaitrejetter cette fainte Cérémonie
à nos Trembleurs , eft qu'ils font des
ennemis déclarez du Chrift corporel,
du fils de Dieu fait chair , du véritable
Chriife
H I S T O I R X
ynri" fait homme comme nous, &
de toutes fes a&ions corporelles & hu-
maines, jufqu'a fa mort & à farefu-
rethon glorieufe. Et comme il n'y
aurait eu que le diable le vieux ferpent,
quiauroitpû pouffer quelque Ifraëlitê
duDeferta aller brifer le Serpent d'Ai-
rain qui y étoit élevé, ouàl'ôter de
la , afin de faire pertir tout le peuple .
il a yaeuaulîî que le diable dont J. c'
a écrafe la tête & mouran t fur la croix,
« dont il a glorieufement triomphé
lur elle, qui ait pû fuggercr à ces
abominables fedaires de renier T. C
crucifié, & d'abolir les précieux mo-
numens de fa mort. Ce n'eft dont
qu un prétexte frivole que celui qu'ils
allèguent qu'on a changé en une idole
le iacrement de l'Euchariftie , qu'ainfî
*e plus feur eft de l'abolir tout à fait
pour prévenir l'abus qu'on en pourok
toujours faire fi on la confervoit. Car
aquoiafervicette abolition? a-t-elle
etefuiyiepar les autres Chrétiens?
lesCathohques ont ils ceffé d'adorer
ie J>t Sacrement depuis qu'ils ont veu
les Kouakres ne plus communier?
les autres proteftans qui ne l'adorent
pas, font ils tombez dans l'abus cri-
minel des Catholiques, en conti-
nuant de célébrer l'Euchariftie? Enfin
qu'y
DU KOUAKERÎSME.
sju'y avait il à craindre desKouakers
mêmes,quand ils auroient retenu cette
cérémonie ? rien afïèurement , & ils
n'auroient pas couru plus de danger
que le refte des Chrétiens , qui ne vou^
lent pas adorer le facrement.
CHAPITRE XVI.
ZjCsKouakcrs ne croient pas que P a*
dotation de f. C. prefent au Sa*
crement foit une véritable IdeU*
trie % bon mot de Pen fur ceU*
CE qui découvre encore mieux
l'impofture & l'impiété de ces
faux prophètes fur la matière que nous
traitions, eft qu'ils ne croient pas ve*
f itablement que les Catholiques Ro-
mains foient de véritables Idolâtres en
adorant J. C. prefent au Sacrement,
ils croient au contraire qu'on fe peut
mieux fauver dans la communion de
TEglife Romaine qu'en aucune autre f
à caufe de la liberté qu'elle donne de
devenir vifionaires, Myftiques, Spi-
rituels, & fanatiques. C'eft pour cela
que dés le commencement de leur
Sefte jufqu'a prefent il y a 5eu une très
grande liaifdiiemre eux & les Catho*
ligues
f4 ^Histoire
liques Romains. Et fous te Roy Ja
qucs ils agilîoient de concert avec lui
avec le Nonce, & les autres Catholi
qucs pour fuivre la Religion Prote
(tante, &pour s'élever les uns & le
autres fur fes ruines. Nous parlerons
ce cela plus amplement après que
lious aurons achevé de confondre ces
miferablesApoftâts.
Une première marque ou preuve
qu'ils ne croient pas que l'adoration
du St. Sacrement fuit une véritable &
formelle idolâtrie, une idolâtrie dam-
nable, c'eit qu'ils ne l'ont jamais dit
m déclaré publiquement dans leurs li-
vres. Barclai n'en a jamais rien - dit
ni dans fon Apologie, ni dans fon
Catechifîne.
Une féconde preuve eft que îor£
que des Catholiques veulent entrer
dans leur fe&e ils n'en obligent aucun
à renoncer à la prefence réelle, &à
l'adoration du Sacrement. Ils n'obli-
gent même perfonne à aucune efpece
d'abjuration. Tout le monde eft bien
venu chez eux de quelque Herefie
qu'ils viennent , pourrai qu'ils s'ac-
couftument bien à dire tu & toy , à
n'ôter jamais ni te chapeau ni le bon-
net, à clabaudercommedes infenfez
<4ans les rues, les carfours, & les
mar-
J>VJK OUÀK E R I S M E, 9?
ïïarchex & à ne parler que de la lu.
miere & du Chrift intérieur.
Une troifiéme preuve eft qu'ils di-
[cnt tout ouvertement qu'ils aime-
roient mieux être obligez de fe faire
Catholiques que proteftant, & que
leur Religion & la Religion Catholi-
que font au fond une feule & même
Religion. C'eft pourquoi Pen étant
un jour interrogé par le Roy Jaques
qu'elle différence il mettoit entre la
religion Catholique & la fîenne iî ré-
pondit que la même différence qui
ëtôit entre le flhftpeau du Roy , & le
lien étoit celle qui étoit entré la Reli-
gion du Roy Jaques 6c celle de Wil-
lem Pen. C'eft que le Chapeau du
Roy étoit orné & embelli de plumes ,
& d'autres ornemens non necefîàircs z
au lieu que le fien de lui Pen étoit uni
& fans aucun ornement. Vous voye^
par là ce qu'ils penfent de la Religion
Romaine , & qu'ils n'en regardent les
Cérémonies que comme des orne-
mens inutiles , mais qui n'altèrent pas
plus fa fubftance & fon eflènee que les
plumets du chapeau du Roy Jaques ea
gatoient ou la forme ou la bonté.
Une quatrième preuve eft qu'ils
tint reçû à bras ouverts & qu'ils ont
adopté toutes les fubtilitez impies &
$ é Histoire
toutes les défaites de f autheur du pr o*
teftant pacifique qui a pris plaifîr à fai-
re l'apologie de toutes les feâes, &
en particulier de celle des Kouakres.
Il y en a même parmi eux qui ont
adopté cette rêverie que J.C. ferend
.prefent à nou$,& fe communique fub-
îlantiellement à nous d'une manière
très réelle & corporelle, par voye
d'irradiation» oud'effofion& d'ema-
nation des parties infenfibles du Chrift
celefte, & qui font fa chair & ton
&ng.
D autres embraflènt le fentiment
de penfer , que la toi que les Cath. Ro-
mains ont que le corps de . J C. efl pre*
fentdans le St. incrément, pourveu
qu'elle foit ferme , & forte , a le pou-
voir & la force de l'y rendre effective-
ment prefent par la même voye d'irra-
diation que nous avons expliquée, &
dont nous parlerons encore plus am-
plement dans la fuitte. Enfin un de
Jeurs grandsDocleurs nommé George
Kcits croit & enlèigne que J. C. faifoit
manger à fesDifciples fa chair &fon
fang d'une manière très réelle, & mê-
me que tout maître & tout précepteur
communique effectivement à fes Dif-
ciples fà propre chair & fen propr#
fang à caufe de l'union d'eux avec lui ,
&de
DUKOUAKERI S ME. Ç>7
& de leur mutuelle correfpondance.
Qui peut donc empêcher ces gens làde
célébrer l'Euchariftie ? Car s'il eft
.vraiquelesDifciplesde j. C partici-
pent à fa fubftance en ce qa'ils font fes
Difciples, ne feroit il pas vrai de dire
que J. G. auroit voulu inftituer la Cè-
ne, afin que le pain & le vin qu'on y
prendroit, fuflènt les véhicules qui
.porteraient jufques au dedans de nous
, cette divine fubftance & dont il veut
nous vivifier? mais en vérité tout ce-
la n'eit que chimères ce illufions.
Commençons par celle de Monfieur
Poiret.
CHAPITRE XVIL
Si la foi d'un bon Catholique Ro*
main eft capable d'opérer la f ré-
gence réelle CT la Tranfubftance.
Plaifante vijion du Sr. Poiret.
A Fin de bien entendre l'opinion de
ce nouveau Docleur illuminé,
il faut fçavoir qu'elle confifte en deux
chofes.
La première eft que c'eft un princi-
pe indifputable, félon lui, que la foi eft
E un
98 t Histoire
un principe tout puiffant àquoyDieu
s'eft obligé de fe conformer, & de
faire agir félon elle & fes diffçrensdé-
grez fa puiffance divine, par elle tou-
tes chofes font pofîibles au croyant
jufqu'à tranfporter des montagnes dit
J. C même , tout ce que Ton délire
en foy , & avec confiance en Dieu,
fur tout lorfqu'on affermit fon defir &
fa foy par la .confideration de fes paro-
les , de fes promcflès ? de fa toute
puiiïànce, & de fa charité, tout cela
dis-je fera fait , & Dieu le vérifie à pro-
portion de Ja diveriïté & des dégrés
de la foy i de chacun. Ainfi lorfqù une
$me picufe d'entre les Catholiques aban-
donne la foy à la toute puiffance divine
dans la confiance de la préfence corporelle
de fin humanité , la finecrité <kr la gran-
deur de fa foy luy fait venir réellement la
fub fiance du corps de J.C.& détermine
Dieu & fa toute puijjance à réalifer ce
que fa foy embrafe. C'eft à dire en
deux mots*, & en bon François, que
la foy qu'un Catholique Romain a de
la préfence réelle & de la Tranfubhran-
tiationopere l'une & l'autre, parce Mil
eft fait à chacun fclcn fa foy. Voilà Je
principe du Sr.Poiret. "Maisnevous
imaginés pas qu'il foit fi peu habile que
4e prétendre , que cette foy opère de
telle
DU KOUAKERISME. 99
telle forte la prefence réelle & fubftari-
tielle du corps de J. G. que tout fon
corps, &foname, toute fa perfonoe
s'y viennent rendre prefents , &
qu'ainfy un feul & même corps, une
feule & même ame eft tout à la fois
préfente en des millions de lieux diffè-
re ns ? non voîcy donc qu'elle prefen-
ce il établit.
Il dit qu'en toutes chofes il y a
deux fubltances , l'une craiTe & impu-
re , ôc l'autre folide , fubtile & dé-
liée, dont la première efi: l'écume 6c
la craffe ; que c'eft cette première fub-
ftance impure & fenfibîequi demeure
au pain confacré , l'autre étant chan-
gée au corps de J. C. par le moyen des
parties fubtiles de ce divin corps qui
s'infinuent au pain , & qui comme
une teinture Chimique très puiflante
& très operative transforment les par-
ties les plus fubtiles du pain en fa pro-
pre fubfiance, tout de même que nos
Efprits transforment les parties déliées
des alimens que nous avons pris, en
chair & fang, & puis en des Efprits mê-
me ; tout cecy eû aflez divertulànt ,
& ne vient pas à nôtre fujet. Il pa-
roît que Mr. Poiret ne fçauroit fouf-
frir qu'on dife qu'un même corps en
nombre foit prefent tout à la fois en
E z des
icc Histoire
des lieux diflèrens. Le Proteflant pa-
cifique, & les autres Reconciliateurs
ne fçauroient fouifrir non plus cette
prefencè Chimérique d'un ieul & mê-
me fujet en une infinité de lieux tout
à la fois. Mais venons a Mr. Poiret.
Je dis premièrement que fon prin-
cipe efl: tout à fait ruineux. Car quand
j. C. parle de la nature de lafoy, &
qu'il luy attribue le pouvoir de iranf-
porter même des montagnes , il ne
parle que des chofes naturelles , &de
celles qui n'enveloppent aucune con-
tradiction.
Le premier efl: clair defoy même,
le corps de J. C n'étant en aucune
manière en la difpofition des hom-
mes, quels qu'ils foient. Cen'eftni
une montagne à tranfplanter , ni un
arbre à fecher, ni une maladie à gué-
rir.
Le fécond ne l'efl pas moins , puif-
que la Tranfubflantiation de Mr. Poi-
ret ne fçauroit fc faire que par une di-
minution perpétuelle du corps de J. C
à mefure qu'il tranfpire dans le lac re-
ment des parties inlènfibles de fon
corps , qui pafîent enluïte dans le
corps des communians & par leur
vnion avec luv, & leur aâion fur fa
fub-
DU KOUAKERISME. EO|
iabftance la changent suffi en celle
de j. C ou en une quinteflènce qui
en aproche fort. Ou bien il faut fou-
tenir que le corps de J. C: tout gk>
rieux & immortel qu'il eft aujour-
dhuy, eft encore affujetti àlaneceffité
du boire & du manger, ou de quelque
autre aliment quel qu'il (bit. Car $ d'un
côté il perd à tout moment des par*
ties de fon corps , il faut de l'autre
qu'il les repare en quelque manière.
Ou bien enfin ces parties retournent
àluy, & reviennent à nous par une
circulation perpétuelle,
En fécond lieu U foy des miracles
ne doit agir & faire éclatter fon pou-
voir que dans des cas rares & extraor-
dinaires v & en des occafions fingu-
lieres, & neceiïaires en quelque forte
pour confirmer la vérité de la Reli-
gion * & vaincre l'incrédulité des
hommes. Or fi la foy de la Tranfub-
ftahtïàtioti s'operoit elle même , ce
feroit une foy de miracles ordinaires
de continuels fans qu'il y euit aucune
neceffité ni utilité de les faire zinii
tous les jours.
En troi^me Heu, il y aune diffé-
rence infinie entre la foy qui veut o-
perer un miracle , & la foy qui fans
pente r à en faire un, m à délirer qu il
E3 en
102 Histoire
en (bit fait un , fupofe feulement la ve-
nté & l'opération d'un miracle déjà
tout fait. Or la foy d'un Papifte , ou
Fade de fa rby ne tombant point fur
l'opération du miracle delaTranfub-
ftantiation comme fur une chofe qui
eft à faire, ce n'eft niundelïr, ni un
vœu, ni une volonté en luy que ce
changement fe faiTe : au contraire fa
foy luppofe abfolument qu'il eft fait,
& elle s'y attache comme à une chofe
déjà opérée & effectuée par la feule
volonté de J. C. fans le concours d'au-
cun autre que de celle du Prêtre qui
confacre , & qui feul a le pouvoir &
l'authorité félon eux deconfacrer, &
par confequent d'opérer le miracle de
la Tranfubftantiation , defarte que fi
le Prêtre eft un impie, un méchant,
un infidelîe, il ne fe fait aucune me-
tamorphofe ; & l'on n'adore que du
pain au Sacrement.
En quatrième lieu les parties fubtiles
& infenfibles du corps de J. C. ne luy
fçauroient plus apartenir dés qu'elles
s'en font defunies & détachées. Car
tout ce qui fe détache d'un corps, &
s'unit à un autre corps, devient partie
de celuy auquel il s'unit, & celle d'ap-
partenir à celuy dont il s'eft feparé,
tout de même que les parties infenfi-
bles
DUKOUAKERÏSME. IOJ
bles que nous tranfpirons à tout mo-
ment, celle nt par la tranfpiration d'ê-
tre de véritables parties de nous mê-
mes , & ne nous apartiennent plus ;
parce que ce détachement les unit à
d'autres corps dont elles font oWi?
gées de fuivre la nature, les mouve-
mens & les modifications. Les par-
ties infenfibles qui fe detachoient du
corps de JL C vivant fur la terre, ce
que le vent ou la rapidité de la matiè-
re, fubtilc du premier Elément écar-
toit de mille & mille lieux differens,
n'êtoient plus des parties véritables de
ce corps , & ne pouvoient. plus luy
apartenir.
En cinquième lieu les parties fubtir.
les s infenfibles M impalpables du
corps de J. C. ne font ni chair , ni
fang. Elles n'en n'ont ni la nature
ni les qualitex , encore moins font el-
les toute cette chair , & tout ce fang.
Or J. G. dit du pain qu'il eft fon corps*
& non pas une partie de fon corps,
& moins encore une partie invifîble
& infenfible de fon corps. Il dit du
vin que c'eft fon fang , & non une
partie de fon fang , ou une partie in-
fenfible de ce fang.
En fixiéme lieu il efl: fi vifiblement
faux que j. C ait eu defiem & intcn-
E 4 mh
io4 Histoire
non d'mfinuer dans le pain des parties
mfenhbles de Ton eorps , & d'en chan-
ger leulement la fubftance la plus fub-
tue , & la plus déliée , comme le
Sr. Foiret le prétend; qu'au contraire
ee n eft que de îa fubftance palpable
gfoffiere & fenfible du pain qu'il a dit
qu'elle étoit fon corps: Cecy, ce pain
matériel , cet objet vifible que vous
touchez & que je vous prefeme , ce
pam5dis-je,que je vous ordonne de bri-
fer, de mâcher, & de manger , eft
mon corps. Si donc J. C. opère un
changement de fubftance, c'eft le feul
changement d'une fhbftance^viftble,
fenfible & palpable. Car c'eft préci-
fement cette fubftance vifible qu'il
apelle fon corps. Et tant s'en faut auf-
û qu'il vueille changer ce pain &
ce vin en une fubftance inviftble, ou
en des parties infènfibîes de fa chair
& de fon fang, que tout au contrarie
il déclare que ce pain eft fon corps vi-
nble, & que ce vin eft un fang fenft-
ble>y Cecy , dit- il , efl mon corps' rompu ?
brifé, immolé, livré à îa mort, cecy
efl mm faw* répandu. Eft- ce que les
parties infenfiblcs de fa chair & de fon
fang qu'il donna êtoient un corps bri-
fé, rompu, immolé , un cadavre en.
un mot? étoient-elîes un fang fcparé
<iu corps , & yerle fur la terre ? En
I) U KôU AKÊRîSME. IDf
En feptiéme lieu il fous prétexte que
toutes choies font poffibles au croyant
ia foy d'un bon Catholique fait venir
ici bas la iùbftance de J. G. pourquoi
un Manichéen qui croyoit fermement
que J.G. habitoit dans le Soleil, n'y
auroit-il pas auffi placé J. G. par fa
foy? direz-vous que les Manichéens
n'avoient aucun jufte fujet de croire
une telle prefence de J. C.'dans le So-
leil, l'Ecriture ne leur en donnant pas
le moindre foupçon ? C'eir tout ce que
l'on peut répliquer. Mais c'eft auffi ce
qui ruine l'erreur du Sr. Poiret & la
metamorphofe de ces Catholiques
croyants. Car J. C. a-Hl donné le
moindre foupçon d'une prefence ex-
pliquée à la manière de Poiret? Et
quand il en auroit donné quelqu'un,
cil-ce qu'un abus greffier & palpable
^es paroles deJ.C. peut authorifer les
extravagances & les folies des Chré-
tiens ?
De plus les Manichéens fe fondoient
fur un; texte affez plaufible Gaffez ap*
parent , m foie p,\uu tabcwaculum fuum%
il atendufQQ pavillon dans le Soleil.
Mr. Poiret jufiifî#ra-t-il le Manichéen,
de peur d'être obligé de condamner
les Catholiques Tranfubftantiateurs ?
Çeftk plus court pour lui. Mais auffi
E s flous
io6 Histoire
nous voilà tous dans la liberté d'ado-
rer le Soleil tout de même qu'on nous
permet d'adorer le St. Sacrement. Car
ce qui fera permis au Manichéen le
doit être à tout le monde fans exce-
ption. Et fi Mr.Poiret le condamne,
îur quoy fa condamnation lera-t-elle
fondée ? dira-t-it que le Manichéen
abule de l'Ecriture, & qu'elle n'a pas
le fens qu'il y donne? mais on lui dira
la même chofe. de fes Catholiques
Tranfiibftantiateurs. Et de plus il fe-
ra obligé d avouer que la vertu de la
foy, & fon pouvoir doivent luivre la
nature de la révélation & y être con-
formes , ce qui ruinera également &
la foy Manichéenne, &la foy Tran-
fubitantiatrice.
En huitième lieu je foutîens, & Mr.
Poiret en demeure d'accord , que ce
ifeft pas allez pour faire desMiracles,
d'avoir une foy telle qu'elle. Il en faut
du moins autant qu'un grain de mou-
tarde. Il ne fuffit donc pas auffi pour
©perer la Tranfubftantiation d'en avoir
Ja foy telle qu'elle. Et quand je dis une
foy telle qu'elle, je parle d'une véri-
table foy. Il faut donc que la foy qui
opère ce grand Miracle foit dans un
certain degré de force & d'énergie ca-
pable de l'opérer. Les Apôtres" vou-
loient
t> U K O U A K E R I S M E» 'tôf
îoient chaffer un diable muet&fourd
ils vouloient ferieufement le Chaffer
& ilsavoient la foy, ou la perlùafioti
qu'ils le chafferoient, car fans cela ils
n'auroient pas entrepris de le chaÛer.
Ils n'en purent pourtant jamais ve-
nir à bout, parce que leur foy n'étoit
pas afîèz grande ni alïèz, forte pout
donner la chaffe à cette efpece de dia-
bles. Quel eft donc le degré de gratis
deur & de force neceffaire à la foy
Tranfubftantiatrice afin de devenir
Tranfubftantiatrice ? Mr. Poiret le
fçait-ii i s'il le fçait qu'il nous l'appren-
ne ; qu'il l'aprenne du moins à fes Ca-
tholiques croyants , afin qu'ils ne s'y
•trompent pas 5 car fans ce degré dè
force ils auroient beau croire une
Tranfubftantiation , ou vouloir en1
opérer une , ils ne feroient que de^
efforts de foy inutiles, & cette Tran-
fubftantiation fi neceffaire pour reéti-
■fier & légitimer leur adoration du Sa*
crement , ne fe feroit jamais.
En neufviémc lien toutes les Eucha-
riftiesdu Chriftianifmc , & de tous les
■iiïeclcsde l'Eglife Chrétienne ne font
que des fuittes, ou des renouvellement
& des répétitions de la première, faite
par J.C Si donc J.C n'a point voulu
tranfubâantier la première , l'on au-
E 6 ra
108 H I S T O I R E
ra beau fe per fuader que les autres font
des transftibiïanîiations, elle ne le fe-
ront pas pour cela. Or J. C en infti-
tuant Ion EucharifHe n'a jamais penfé
à cette metamorphofe chimérique,
car ii n'en avoit pas befoin. Ses Dif-
ciples n'en avoient pas befoin non plus
que lui. Onmen trouve pas la moin-
dre trace dans tout l'Evangile. St. Paul
ne s'eit aufîi jamais avifé de nous en
parler. Au contraire 5 quand il parle
<ie l'Euchariflie, il ne nous la repre-
lente que comme un gage & un monu-
ment de J.C sbfènt;, toutes Us- fois qut
vous mangerez* de ce foin vous publierez
la mort du Scignmr jufquà ce quil vien-
ne. Et s'il nous exhorte d'adorer J.C.
ceu'eirque comme élevé à la dextre
de la Majellé Celefle. Et fï les Apôtres
ont crû une prelence réelle de J. C.ici
bas, ils n'ont crû qu'une prefence de
fa Divinité. Ce que je remarque ex-
prez pour prévenir ce que M. P. pou-
roit dire 3 que les Apôtres & les pre-
miers Chrétiens n'ont pas crû à la véri-
té la Transfubftantiation groffiere &
contradictoire de l'Ecole Romaine,
mais feulement la fienne. C'elt une
di(lin6tionqu!ils ont tous ignorée, &
qui n'a aucun apuy dans les monn-
•mens de la première Antiquité. Les
par-
3) U KO UAK-ERISME» TO^
parties fubcilesdes Corps, & les tein-
tures Chimiques des fubftances dont
on nous parle tant , n'étoient point
connues alors.
En dixième lieu J.C penfok fi -peu
à cette nouvelle metamorpbofe que
bien loin de vouloir donner à fesDifci-
pies «la fubftance de fon corps vivant
afin de les vivifier , il ne leur donne
qu'un corps mort , une chair inanimée,
privée de vie & de fang , & par confe-
quentfans aucune vertu de vivifier. J»
C. ne nous donne donc pas, non plus
aujourdhui une iubitance animée vi-
vante & vivifiante tout enfernble, #a
bien nôtre Eucharillie n'eft pas la mê2-
me que celle que J. C. inftitua & cé-
lébra* le premier.
En onzième lieu ce divin Sauveur
déclare lui même que l'Efpritfeul op-
pofé.à la chair , oppofé à fa chair mê-
me , à cette chair qu'il nous ord on-
noit de manger , > & dont il donna le
fymbole à manger à Tes Difciples, eft
cerqui nous vivifie ; U Chair , dit-il ^
fie profite de rien , éreft l\f prit qui vivifie.
-Et ce qu'il ajoute , la parole? que je vous
ni dites, font Efprit if Vis, anneantit
encore cette imaginaire transforma-
tion. Car fi les paroles de J.C fe doi-
vent entendre d*une manière fpintuel-
E 7 le>
"P Histoire
le, «capable de vivifier, il faut donc
neceirairernent les prendre en un fens
formellement oppofé à celui d'unepre-
ience corporelle, quelle qu'elle ibit,
puiique cet Efprit & cette vie ne fe doi-
vent raporter qu'à ce qu'il venoit
nnrQ V U C>W m ï*&* de riCn > ^Jî
tmmmm vivifie , ce qui feroit
feux de : la dernière ftufleté fi fa chair
a ftèr&i oudes Parties infenfibles
de fa chair & defon fang, emanoient
perpétuellement de fon Corps, & en-
voient dans le Sacrement pour le
Changer, & pour nous en -vivifier. Ou
fcen ia chair à le fang de J. C font de-
venus Efprit .& Vie , .& ne font plus
ni chair flftbg, Et iî elles ne font Plus
ni chair ni fang , c'eft en vain qu'on
tous parle de les manger & boire com-
me chair & fang.
Mais ce qu'il yadeplusdano-ereuT-
c-âncria maxime de M. P. c'eft qu'elle
juftifie l'idolâtrie la plus cralîe & la
plus honteufe qui fe commette en l'E-
ghfe Romaine , au fujet des images
m tout des images de la Sainte Vierge.
Car aflèurément le peuple crédule
s imagine fortement qu'il y a des ver-
tus divines en elles j & dans les unes
bien plus que dans les autres. Ce qui
a produit les Nôtre-Dame de Liefle,
DU KOUAKERISME. I T î
de Lorette , destiardilliers , & une
infinité d'autres. Voilà donc Dieu
engagé par la foy de tous ces idolâtres
à ratifier & à vérifier toutes leurs ex-
travagances. Et qui pis efl le voilà obli-
gé a taire une chofe que cette même
Eglife a folenuellement improuvée
& condamnée en termes exprés dans
un Concile Oecumenique,defendant à
tous les Chrétiens de croire de telles
vertus dans les images , en traitant d'i-
dolatrie une telle imagination. Mais
Dieu, dira-t-on , a dérendu le culte
des Images. Mr., P. n'o^eroit le di-
re, car il n'a garde decondannertous
fes dévots & tous Tes Saints de l'Eglife
Romaine qui pratiquent ce culte tous
les jours. Et Dieu n'a-t-il pas auffi dé-
fendu d'adorer le Sacrement qui n'eft
que du pain , & une image morte &
inanimée, d'une chofe morte & ina-
nimée, je veux dire l'image du Corps
mortdeJ.C Et puis où feroit l'ido-
lâtrie de nos peuples crédules ? Car
fi leur foy attire des vertus divines dans
les images qu'ils adorent , ils n'ado-,
rent plus proprement ces images mê-
mes , mais les leules vertus celeftes qui,
y rerident,
' Non feulement fa maxime juftifie
toute l'idolâtrie Romaine , elle juftifie
même
*t* Histoire
même toute l'idolâtrie des gentils qui
adorent le 5oieii , & les innuiacres
de leurs Dieux. Car apurement Us y
eroyoïeat une vertu divine attachée;
& : celafeul qu'ils l'y croyaient atta-
chée 1 y attachoit eifeétivement. La
plupart d'eux croyoit auffi la prefen-
ce des intelligences cekfces dans tous
les corps lumineux pour les mouvoir
* qu'ils le cruflènt pour
obliger Dieu a y envoyer ces mêmes
intelligences, quand même elles n'y
auraient pas déjà été. Ne me dites pas
que Dieu a détendu exprciiemem l'a-
doration du Soleil , & de toute l'armée
des cieux. Car cette défenfe n'a été
faire proprement qu'aux Hébreux, &
par confequent ne regardoit en aucune
manière les autres peuples du monde
bi les Hébreux même avant qu'elle
leur eût été faite, par confequent ils
adoroient innocemment le Soleil, &
parmi les Qildéens, & parmi les Egy-
ptiens. Voilà donc toute la Région
iuDîeuMithra, ou desPerfès, celle
ce Vefra, ou des Romains, & acné.
raJement celle de tous les Gentils hru-
tement & pleinement juflifiée. Pour-
quoi donc job à oui Dieu n'avoit
jamais fcktfe&hfë dsadorer le Soleil
& fçait il fi bon gré'de ne Favoir pas
ado-
bu Kquakerisme. i t 3
adoré? Et pourquoi reconnoit-iî qu'il
■auroit été criminel , s'il l'avoit adoré ?
pourquoi Dieu vient-il défendre une
adoration § fainte & ii innocente en
elle même ?
Les Ifraëlites , dit M. P. avoient
apris de leurs anceftres , qu'il avoit
les idoles en abomination. Il parle des
Ifraé'lites fort i s d'Egypte , & idolâ-
trais au defert. Premièrement ces An-
cêtres ne montent pas fort haut , puis-
que ceux d'Abraham les adoroient,
& que ce grand homme a long-temps
fuivi l'exemple de fes Pères. Mais en-
core une fois comment & pourquoi
Dieu art-il en abomination le culte des
idoles ? Gar celles de Laban, par exem-
ple étoient des images d'Anges, de
Chérubins , & de Séraphins , & des
images qui rendoient des oracles. Que
Jacob ne les adoroîr-il aufïï-bien que
Laban? il y auroit fait deicendre pac
fa foyces légions de Séraphins, à qui
fon culte le feroit adreilé, ce qui
pour marque qu'ils l'auroiené eu pour
agréable , y auraient rendu des ora-
cles quand il en auroit eu befoinv
La ' diflinâion. de M. P. de fubftan*
ce tefle & fenrible , & de fubftance
fubtiie& déliée eft une plaifante Phi*-
lofophie , comme fi les mêmes fubftan-
. . ces
"4 Histoire
ces n etoient pas tantôt fenfiblesà pal-
pables , & tantôt infenfibles & inpal-
pables, lelonladiverfitéde leur nou-
vement , ou de leur repos. Mais ce
n elt pas a cela que je veux m'arrêter i
je dis feulement que la Tranfubftan-
tiation de M. P. ruine abfolument cel-
Je de! Eghfe Romaine, confirmée par
les Docteurs , par fes Prêtres, & par
tous les Saints. Je voudrais bien fca-
voir n ies Dévots & les Saints de l'È-
gUte Romaine , qui ne croyent que
celle qui a été définie par les Conciles,
oc qui s enfeigne dans l'Ecole , qui n'en
croyent point d'autre , & qui n'ont
garde d en croire une qui eflexprcilé-
ment foudroyée par tes anathémesde
leur Eglife ; telle qu'eft celle de M.
r- ne laifïent pas néanmoins de l'opé-
rer toute abfurde qu'elle eft? Car en-
fin il n'en1 fait à chacun que félon fa rby;
& comment des parties infenfibles &
impalpables font elles de la chair &
dufang? Car J.C. nous aprend qu'il
n y a que les Efprits qui foient invi-
fibles & inpalpabîes, voye\ & manieç
moi, unEjpràna ni chair ni os, corn*
me vous voyc^ qwfcnayï
Quelle neccffité de faire venir !es
parties du corps de J. C. dans le Sacre-
ment pour le changer? ne les peut-il
pas changer fans cela ? Ou-
DU KOUAKERISME. II j
Outre cela je pofe en fait que lafub-
ftance fubtile & déliée du pain & du
vin , n'eft point transformée en celle
de J. G puifque l'on peut en extraire
par la diftillation les parties les plus
fubtiles, & en tirer des Efprits & mê-
me des Éfprits ardens , n'eft-ce pas là
une preuve certaine & invincible que
cette iub (lance déliée n'a point été
changée en celle de J. G. ou bien ce
feroit cette dernière que Ton tireroit
par l'aîembic , & qui feroit affeurément
le plus grand & le plus divin de tous
les remèdes , le baume fouverain , &
la feule panacée.
Enfin cette belle transformation ne
fçauroitjuftiâer l'adoration da Sacre-
ment. Voici comment la plus grande
peine des nouveaux Catholiques eft de
fe voir obligé d'adorer le St. Sacrement
quand il eltexpofé fur les Autels, pré-
senté à la Communion r porté aux ma-
lades , & promené par les rues en
pompe & en Cérémonie. Car après
tout la foy ne fait ce miracle feîoa
M. P. que pour celui qui l'a, & nul-
lement pour celui qui bien loin d'avoir
une telle foy , la detefte comme une
abomination. Quand donc un Refor-
mé communie , il ne fe fait aucune
transformation , & par confequent , il
n'ado-
ti6 Histoire
n'adore que du pain. Quciï deux bons
Catholiques s'aprochent de la table
moo m troifiéme qui fera Huguenot,
& qu'il faille , comme cela arrive allez
fouvent 5 partager l'hoftie en trois
pour les Communier tous trois : d'a-
bord les dévots Catholiques remplit-
fent par leur foy toute cette hoirie des
parties du corps dej. C. qui comme
une teinture Chymique la plus efficace
& la plus aéiive de toutes change tou-
tes les parties fubtiles de l'Hoirie, &
eeîîesde la Chair de j. C. mais fi-tôt
qu'on vient à la partager , il faut de
toute neceffité que toutes ces parties
changées avec celles du corps de J.
C.paiTent au moment de la diviiîon &
h portion qui fera donnée aux Catho-
liques, delorte que le Huguenot n'en
reçoit aucune , & ne mange que la
lubllance crafle , ou l'écume du pain.
Car il cft fait à chacun félon fa foy.
Comme donc la foy d'un boa Catholi-
que opère la prefence de J. C. & le
changement dupainenfon Corps, de
même la foy d'un bon Huguenot qui
detefte ce! te prefence, & qui ne croit
qu'une abfènce réelle, n'opérera auffi
^ue cette abfence.
CHA-
DU KOUAKERISME. ?f|
CHAPITRE XVIII.
Examen de la préfence corporelle
de Y» C. par voye d'irradiation.
OUoique ce que je viens je dire
^contre la vifion de Mr. F. dé-
truiieauffi, cette préfence corporelle
par voye d'irradiation , je ne îailîerai
pas de la combattre encore ici. Mais
il faut toujours remarquer avant tou-
tes chofes que cette prclence réelle que
nos pacificateurs & ^conciliateurs
font îèmblant de défendre n'eft point
du tout celle de fEglift Romaine.
Car ils rejettent cette prefence corpo-
relle qui multiplie une infinité de fois
le corps entier de j. C. & qui eft cer-
tainement la plus grande contradi-
âion qu'on pût imaginer, fi bien que
voila les fentimens de Sçot& de Tho-
mas rejettes, tout d'un coup. En effet
ce font deux extravagances (enlibles.
L'un dit que le corps de J. C. efl:
préfent au Sacrement, pareeque Dieu
l'y amené du ciel. Il y vient difent-iîs
par voye JadduBion , mais pourtant fans
quitter le ciel, nipafïèr par les airs,
ou par les efpaces qui font entre le ciel
& la terre. Cette manière de préfen-
* ce
n8 Histoire
ce eft inexplicable & contradifloi-
re. Outre cela elle eft extrêmement
funefte au pain ou à ià fubftance qui
n en peut jamais. Car au moment que
J. C s'y vient rendre , il l'anéantit.
ht pourquoy, eft-ce que ces deux fub-
f tances ne pouroient pas bien vivre en-
femble dans un même lieu & dans un
même fujet? Il n'en faut pas douter,
puifqtie tous les Catholiques tiennent
la pénétration des corps, & queceluy
de J. C. en particulier pénétra celle
de Marie en venant au monde , & celle
de la pierre de ion tombeau cnrelîù-
fcitant. C'eft donc feulement afin
que la fubftance du pain ceflant d'être
en celle de J. C. venant à prendre fa
place l'on puifïè dire qu'il s'y fait une
tranfubftantiation , c'eft à "dire un
changement de fubftance en une au-
tre fubftance. Mais c'eft la fe former
une plaifante efpece de converfion de
fubftance en fubftance. Dans toute
converfion véritable & proprement
dite, telle que le Concile de Trente
a déterminé être celle du pain au
corps de J. C. le fujet qui fe change
fublifte toujours , & ne perd que fa
forme fubftantielle . en fe transfor-
mant en une autre fubftance. Il faut
donc avoir perdu lcfenspourfoutenir
qu'une
DU KOUAKERISME. 1 1^
qu'une fubftance qui tombe dans le
néant fe convertit effectivement &
proprement en une autre.
L'Ecole de Thomas d'Acquia
voyant ces abfurdite^ explique la pre-
fence réelle par voye de reproduction
du corps de j. G. tombant ainii d'une
extrémité en l'autre ,
Dum finit i vitant vitïa in contraria
currunt.
Car comment concevoir qu'une chofe
qui eft déjà toute produite, 6c quifub-
fiiie depuis pluiieurs fîecles , le produi-
re encore tous les jours de nouveau?
Eft*ce que la première production,
ou la première cxifience ne lui fuffic
pas? Et cette nouvelle produ&ion lui
aportc-t-elle quelque choie de nou-
veau? Il cela eft, ce n'eftplus la mê-
me choie , ni le même être. Et fi el-
le ne luyaporte rien de nouveau, elle
eit inutile. Et qui peut comprendre
qu'une feule fubftance ait plufîeurs
exiftances fans devenir plufîeurs
fubflances véritables ? Car après tout
l'exigence de la fubftance n'eft autre
chofe que la fubftance même conçeiie
comme exiftente. L'exiftence n'en
eft ni un mode , ni une qualité qui
puiiTent fe conçevoir fans elle \ ou fans
qui ellefe puiflè conçevoir.
î20 Histoire
Le comble d'extravagance qui fe
trouve dans cette explication Thomi-
ftiqùe elt que ce prétendu corps de
j.C prefent au St. Sacrement, eftun
j. C. inconnu à l'Evangile, un corps
nouveau , à qui n'a jamais été Cru-
cifié pour nous. Gâi Je vrai corps de
J. G. n'a été formé que du Lang de Ma-
rie, & celui-cy eiï formé d'une lub-
ftance de pain, qui efl une fubftance
toujours nouvelle, & qui n'a jamais
été celle de Marie, ni lefi^etdel'o*
peration du St. Efprit. On ne fçau-
roit donc imaginer d'autre prefence
réelle du corps de J. C- ici bas qui foit
explicable & intelligible que celle qui
fe feroit par voie d'irradiation 3 & qui
a été adoptée ou inventé par le Prote-
ftant pacifique , faut-il donc , dit-il ,
fent fur la terre ? Comme s'il difoit,
faut-il dont que J. C. quitte le Ciel
pour fe rendre prefent à nous? Ce qui
inimuë évidemment que comme le fo-
leii fe rend prefent fur la terre par l'en-
voy de fes raions, & de fa chaleur,
J. C. de même demeurant toujours au
ciel, fe rend prefent à nous par des
émanations divines de fon Corps im-
mortel & glorieux , & qui eft prefen-
ternent comme un foleil 5 ou plûtôt
le foleil quitte fin ciel peur être pie-
un
DU KOU A.KERISME. OË
un Occean de lumière, de vie & de
gloire.
Mais quelque explicable que foitcc
fèntiment il ne lahTe pas d'être tout op~
poféâ la nature de i'inftitution de l'Eu-
chariftie. Car le Seigneur, en donnant
ton Corps & fon Sang ne parle point
d'une fubftance impalpable & infenlï-
ble, qui ne feroit ni chair ni fang, fî
elle étoit telle, & qui feroit plutôt ou
la matière première d'iiriftote qui n'a
ni quantité, ni qualité, ni rien de tout-
ce qui détermine les êtres: Or pour
parler plus jufte.& félon les maximes
de nôtre grand Maître , le Seigneur Je-
fus , le Prince des Philofophes, elle fer
roitunpur Efprit, car félon fa doctri-
ne ce qui ne fepeut voir ni manier eft
un Efprit qui n'a ni chair ni os. S'il.fal-
loit donc entendre à la rigueur de la
lettre les termes de j. G. il fàudroit
croire que le pain & le vin feroient ef-
fectivement de la chair & du faftg , ou
une fubflance' modifiée en chair & en
fang, &que cela feroit ainf] quoique
nos yeux n'en viflènt rien. Ce feroit
même une chair brifée, & un fang ré-
pandu, J.C/di&ntque le pain eiïfon
corps rompu, & le vin, fon fang ré-
pandu.
Et ne dites pas que la forme de chair
F &
122 Histoire
&defangne iert de rien au corps de
J. C. ou à fa fùbftâûce pour nous vivi-
fier ? Car cette fubftance ne vivifie
pas davantage en qualité de fubftance ,
ou Amplement comme fubftance. Il
faut pour qu'elle vivifie , qu'elle foit
accompagnée de quelque propriété^
c'eit-'à-dire animée de l'Efprit divin.
Puifque c'eft donc une chair fans vie
&fansfang, elle eft incapable de vi-
vifier. Auffi j . C. comme je l'ay tait
voir, ne veut pas nous vivifier par la
chair de l'Eucnariftie, c'eit par fon
Efpritfeui, c'ejWejprit, dit-il, qui vi-
vifie. El comment auroit il- eu cette
penfée , lui qui dit non qu'une fub-
jiance invifible & infenfible devient
line autre fubftance invifible & infen-
fible , mais d'un fujet villbîe, fenfible &
palpable, qu'il en devient une fenfible
& palpable. Car J.C parlant du pain
& du vin, & les nommant fon corps
& fon fang , parloir d'un fujet fenfibie
& palpable , & leur donnoit le nom
d'un autre fujet fênfible & palpable.
S'il étoïtHonc vray qu'il fallût prendre
ces paroles à la lettre, ceci efl mon cerpr ,
il eft plus clair que le Soleil que J. C.
auroit voulu dire que cet objet vifible
qu'il tenoit en fes mains, & qu'il pre-
lêntoit a les Apôtres étoit fon Corps,
& fon
. BU KOUAKERISME. 117
& Ion Corps viiibie & palpable , defor-
te que tous ceux qui ne prendraient pas
cet objet virïble pour le Corps de J.C.
ne feraient pas bons Romains , & s'é-*-
lorgneraient de leur prétendu fens lit-
téral des termes de J.C.
Les Cartéfiens Catholiques font de
monfentiment;car comme ils ne cro-
yent aucun accident fub&iant fans fu-
jet, & confondent enlcmbie corps,
fubiiance , étendue , 6c matière , il£
prennent toute cette étendue vifible ,
& fénrible; & tout cet objet qui frapë
leurs lens pour J. C. même, qui veut
bien félon leurs hypothéfes le changer
en -un pain apparant en leur faveurau
lieu de chair & de fang. Car que de-
viendrait l'étendue du pain ? s'annéan-
tiroic-ellef mais il implique contradi-
ction lelon les hypôrhèTes Cartélien-
nés que le moindre : 'arôme ou la moitié
dre partie de la matière ou de f érenduè*
periliè fans que tout periflè. Autrement
il y aurait un iefpaçe vuide , fçavoir
celui qui étoit rempli de la portion de
matière qui ferai: anéantie. On ne
peut pas non plus félon ces mêmes hy-
pothefe donner de nouvelles étendues
au Corps d e J. Ç. car où fe placer oient
elles , puifque tout eft plein , & que
rien ne fçauroit faire place à une nou^
F a velle
124 ^ Histoire-
velle étendue que Dieu crééroit? Et
ie Corps de J. C. pourok-il avoir de
nouvelles étendues , fans ie multiplier
quanta la fubflance, puifque étendue
& corps font une feule & même chofe?
Et puis croyez que ces Meilleurs les
Cartcfkiis. font bons Tramubftantia-
teurs ? & qu'on a grand tort de les
tramer d'hypocrites & de diiTimuia-
teurs ? Ils répondent que Dieu fait par
le moyen du Corps de J.Cprefcnt au
Sacrement fous les aparences de pain
les mêmes impreffions fur nos fens,
& nous caule les mêmes fenfations
que cauferoît l'étendue du pain fi elle
fubfiilo;:, c'eilàdire que la iageile&
la vçrité même nous fait une perpé-
tuelle illufion. Et moi je leur dis,
qu'ils font des 'impofteurs qui veulent
faire iunfipn au monde , mais fràtnmU
heur pour eux c'eit qu'il n'y a que les
fois qui s'en laiiTenc ébîouïr.
Une autre puifîànte rai.fbn contre la
fubftance inviftble du Corpi> de J. C-
prefente par voye d'irradiation, fetire
déférât auquel étoit le Corps de J.
quand il-.ihûkua fon Sacrement. C'é-
toic un état de mortalité & de corrupîi-
bilité. Son Corps n'étoit alors que
chair & fàng, & par confequent il ne
pouvoir donner cjae de h chair & du
DU KOUÀKER 1 S Kl E. î if
lang, & tien d'immortel & d'incor-
ruptible. - ,
Enfin je demande 1] cette fubfîance
invnibiequin'eft ni chair ni'fang, fe
peut manger & boire ? la belle choie
que ceferoit que de manger & de boire
desEfpiits, ou des Corps aufil invisi-
bles que des Eipriis ? J'aimerois autant
qu'on nie dit que l'on boit & que Ton
mange la lumière, encore cil elle vi~
lible : ou la matière, fubtik du premier
clément de Defcartes. Et pourquoi ne
la mangeroit on pas , & ne la boir oit-
on pas , puifque celle de J. C. qui doit
être à prélent auffi fubîile & auffi dé-
liée, pour le moins qu'elle , fe mange
bien & fe boit bien ? ii l'on dit qu'on
ne la mange pas, l'on contredit J. C.
qui ordonne expreffément de manger
fa chair & de boire ion lang. Que fi en-
fin l'on réplique que ce boire & ce man-
ger doivent être entendus meraphori*
quement , pourquoi non auffi les ter-
mes de chair ce de fang ? Car peut on
manger & boire métaphoriquement 5
c'ell à dire en un fens figuré, & nulle-
ment littéral , de vraye chair & de
vray fang ?~ En dépit donc des Catho-
liques Romains, &de tous leurs plus
fbbtils Apoiogiftes toute la proportion
de J, C.le trouve métaphorique & figu-
xi6 Histoire
ice. Les termes démanger & déboi-
re le font ; car on ne fçauroit man-
ger ni boire proprement & à la lettre
nneiubltanceinvifible, & aulïi invifi-
ble que des Eiprits. Donc auffi le ter-
me de chair eft métaphorique, car au-
trement fi c'étoit une chair véritable &
proprement dite on îa verroit, on la
toucheroit , on la fentiroit , & par
confequent on la manger oit auffi à la
lettre. Donc toute la proportion de
].JÇ. eft métaphorique, impropre & fi-
gurée. Or comparons je vous prie la
propofition de J.C. figurée & métapho-
rique des Catholiques Romains avec
celle des Protcftans , & Ton verra que
Tune eft fi forcée & fi contraire à la foy
& à laraifon qu'on ne la peut foufrir,
& que l'autre eft fi facile, fi naturelle &
fifimple qu'on ne les fçauroit rejette*
fans fe faire violence.
CHA-
DU KOUAKERISM E. ïlj
CHAPITRE XIX. .
Examen de l'opinion vijtonaire de
George Keits 5 fameux Kouakre.
JE ferois tort à mon Lecleur , &
j'aurois trop mauvaife opinion de
Ion jugement lï je m'amafoisà réfuter
ferieufement la peniée extravagante
de George Keits, que tous les Maî-
tres & tous les Doéteurs font manger
leur chair & boire leur fang à tous
leurs difciples , à moins qu'on ne pren-
ne cela en un fens fort allégorique,
fort myitique &Quakerifte, c'eit une
véritable extravagance. Et fi on l'en-
tend allegoriquement ce n'eft encore
qu'une pure chimère. Car entrer dans
les fentimens d'un maître & recevoir
avec docilité les inftruâions font des
chofes toutes fpirituelles , & qui par
confequent donneraient bien lieu de
dire qu'on prend fonEfprit , & qu'on
y participe par ce moyen là plutôt que
de dire qu'on mange fa chair. Car en-
fin la fentence de J.C.eft d'une vérité
éternelle & univerfelle , La chair ne
profite de rien, cvjl FEftrit feu l qui vi-
vifie. Ou bien il faudra, diftinguer
F 4 fcue
•Jtflfl Histoire
une chair en un fang purement cor-
porels, terreftres &grofliers, & par là
incapables de vivifier , 6c une chair
& un fang fpiritueîs & ceieftes^ c'eft
à dire qui ne font qu'Efprit & vie. Et
alors on dira -que J. G. n'a pas feule-
ment fongé à cette diftinétion, & qu'il
i toujours oppofé purement & fina-
lement l'Efprit à Ja chair 6c au fang,
même à fa chair & à fon fang. Mais
fans m'arêter d'avantage à réfuter cette
viiion, on fera bien aife de fçavoirce
qui a donné lieu à l'inventer. L'oc-
mfaéqm la fait naître a été une ob-
jection tirée du 6. de St. Jean où J. G.
parle fi au long de manger fa chair &
de boire fon fang. Le grand Apo-
logie & Panegirifte desKouakres, ou
l'Autheur impie du Proteftant paci-
fique prefle. fort cette obje&ion & fou-
tient que manger la chair & boire le
fang de J. G. ne fîgnifienr pas croire
feulement en luy; if qu'on ne trmvera
jamau dam quelque Autheur que ce foity
jacré ou profane, un langag: femblable ,
m que quelqu'un commande de marner
ja chair if de boire fon fan? pour fïgnft
fer qu'Haut qu'on fu'h* •fa difc'ïp line
4$ fa doctrine, & que l'on s'y fnm<?ttc.
Et il a raifon , mais pour le démê-
ler de cette objection il n'etoit nul-
lement
DU KOU AKER I SME- E2gl
îement neceiiàire de dire que Ton
mange réellement la chair de JC &
que tout ce qu'il y a de Maîtres au
Monde font manger leur chair & boi-
re leur fang à tous leurs difciples, fiir
tout à ceux qui entr'ent dans leurs fen-
timens s une penfée auffi vifîonaire que
celle-là & qui fourmille d'abiurditez ,
n'ell point à propos , & ne fçauroit
refoudre l'objection qui ne parle que
d'une chair fenfible & palpable , d'une
chair vifible & qui a été crucifiée , d'u-
ne chair en un mot toute oppofée à ce
qu'on apelle Efprit. Il falloir donc fe
prendre autrement à réfoudre l'ob-
jection.
Il falloit dire qu'il n'y a point de
Maure qui relîembie àj. G. ni de dif-
ciples qui doivent faire à l'égard de
leur Maître ce que nous devons faire
pour J. C Gkft jin Maître qui fe don-
ne à la mort &qui s'immole tout en-
tier pour fauverfes difciples de la mort;
il répand fon fang afin qu'il foit l'ex-
piation d e tous leurs péchez ; & nous,
nous fommes des difciples qui pour
avoir part à cette expiation fommes
obligez de méditer fans cefîë cette
mort , .& d'admirer l'excez de la bonté
& de l'amour du fils de Dieu qui la
porté à mourir pour nous. Pourquoy
£ S uns
130 Histoire
une méditation comme celle là ne fe-
roit elle pas nommée une manduca-
îion,de la chairdej.C.? nelêroitce
pas bien parler , & élégamment même
que de dire de ceux qui fe laiffoient
charmer des plaifîrs fanglans du cir-
que & de l'Arène j & qui y atta-
choient leur cœur autant que leur&
yeux 7 qu'ils y mangeoient la chair
que le couteau y coupoit, & qu'ils y
buvoient à longs traits le fang qui s'y
répandoit. St. Auguftin dit cela mê-
me en parlant de la fureur avec laquel-
le fon cher ami Alipius fe poitoit a voir
ces cruels fpeéfocles.
Outre cela je trouve deux chofes
qui juftifient l'innocence des expref-
lions de j. C La première eft l'engage-
ment où il fe trouva en dilçourant avec
ceuxdeCapernaum, & où la deman-
de qu'ils luy firent de leur donner une
viande à manger qui les empêchât de
mourir, lejetta. Car comme ils luy
eurent propofé la manne , J. C. qui
vouîoit les détacher de ces idées baffes
d'aliment terreftre, & pour les enga-
ger à luy, s'oppofa luy même à cette
manne, comme l'objet de leur atta-
chement & de leur foy. Et c'eft ce qui
l'obligea à parler dans la fuitte , éà cet
attachement comme d'une efpece de
manger & de boire. La
DU KOUAKERIS MÉ. ïjr
La féconde eft que J.C. ayant dé-
claré qu'il donneroit un j ouf fa Chair four
la vie du monde , c'eft-à-dirc qu'il la-
livreroità la mort, & par conléquent
fe infant conliderer fous l'idée de vi-
ctime immolée pour eux , il étoir
naturel que pou liant cette idée il fe
fervit des expreffions qu'elle pouvdit
faire naître naturellement. Les Ca-
pernaïtes fçav oient que dans les facri-
ëces on mangeoit une partie de la
chair de la victime pour marque &
pour gage qu'on avoir part à l'expia-
tion qu'elle avoit faite. J. C. donc
s'oppofant à ces anciennes cérémo-*
nies , & nous voulant apprendre qu'il
falloit s'attacher à luy coniidcré com-
me une victime facrifiée pour nous ,
pouvoit fort bien exprimer l'adi om de
nôtre attachement par les termes de
manger fà chair & de boire fon fang r
puifqu'ii eftvray que fans cet attache-
ment à la mort du fils de Dieu l'on
n'y a aucune part.
Mais je veux qu'il y ait de la dureté
dans les expreffions de j. G. eft- ce qu'il
n'eft pas un allez, grand maître , un
maître allez extraordinaire pour au-
thorifer des exprelfions inouies & ex-
traordinaires?
Âpres toutperfonne ne pouvait s'y.
F 6 troiiv*
*3? Histoire
tromper, car la im de ce difcours fi
étrange porte la chef qui en ouvre l'in-
telligence, quefera-ce don: y dit J.C.,
jw/wzr/ ^ wrr^ le fils de l'Homme mm
tWï là où il huit auparavant. C'était
aflèz leur dire qu'ils ne dévoient pas
prendre à la lettre fes expreffions ,
puiiqu'il dé voit un jour quitter la terre
& retourner au ciel, qu'ai nfi fon corps
ce Ion fang ne feroient pas en état d'ê-
tre mangé ni bu. La chair , pour-
filit-il, ne profite de rien, c'eft PEfpiï»
qui vivifie. Les paroles que je vont ay di-
tes font Ejprit 4? vie, quelqu'un après
ces ccîairciffemens pouroît-if fe
tromper dans l'intelligence de tout
ce qui^ paroit de plus rude dans
les expreflïons du Sauveur ? non
affeurément. C'ed pourquoi toute
l'Antiquité qui a conftamment inter-
prété ce Chapitre fixiéme de l'Eucha-
riftie, ou qui le luy a appliqué, ne s'y
eft point inéprife. Et St. AuguQin écrit
formellement que manger la chair de
'J-..C.& boire fon fang figni fient, par un»
façon de parler figurée, que mus devons
méditer perpétuellement] a mort, & nom
reffouvenir fans cetfe que fa chair a été
crucifiée, & que fon fang a été répandu
pur nous : que même ce Teroit aceufer
J. G. de nous commander une aclion
cri-
/
3} V liOUAKE RIS M E* 1 33
criminelle n l'on entendoit les paroles
à la rigueur de la lettre. Mais. comme
lesKouakres font profefiion de mëpri*
fer la croix du fils de Dieu , cette ex-
plication de fes expreifîons n'e ft pas à
leur goût: Et ils aiment mieux expli-
quer une allégorie par une autre allé-
gorie , ou inventer des vilions abfurdes
que de conlentir qu'on explique les
pareks de J. C. d'une manière qui
nous remette devant les yeux la necef-
iîté qui nous eft impofée de recourir à
la mort du fils de Dieu, comme au
feul antidote que Dieu nous a donné
pour nous guenr , & pour nous vivifier.
CHAPITRE XX.
La véritable canfe pourquoi les )
Kouakjes ne célèbrent pas VEu-
chariflie .Origine cachée duKouœ*
kerifme,
ENfrn il eft temps de découvrir la
véritable Caufe , pour laquelle les
Koaakres ont d'abord refuië de célé-
brer l'Euchariftie , & pourquoi ils ré-
futent encore à prefent de la célébrer.
C'eft que les premiers Kouakres. leurs
F 7 Au-
î 34 Histoire
Autheurs, leurs f ondateurs, & leurs
Prédicateurs étoient , & font encore
pour la plupart des Catholiques Ro-
mains , des Prêtres , cks Religieux ,
desjelûites, qui n'avoient garde de fe
porter à faire la CéneàlaProteftante,
eux qui avoient déjà dit la M elle de
bon matin, & qui regardent l'Eucha-
riftiedesProteftans comme une profa-
nation de la véritable Euchariftie de
J.C &une pure chimère, où l'on né
■mange & où l'on ne boit que des appa-
rences de chair & de fang, des êtres
figuratifs. Car fi au commencement
de cette hiltoire j'ai ditqueFoxa été
leur Fondateur , tout ce que j'ai dit n'a
été que l'hiftoire de l'origi ne apparente
& extérieure du Kouakerifme. L'ori-
gine cachée & fecrette eft venue des
Catholiques Romains , des Prêtres ^
des Religieux, & des Jefuites Anglois
qui fe joignirent à leur Renard , & for-
mèrent cette Seâe toute ennemie des
Proteftans, & toute amie fecretement
de la Religion Catholique. Et voici
comment la chofe arriva quand Crom-
Wel eut chaffé toute la famille Royale,
& qu'il fe rut rendu maître abfolu du
Royaume, il voulut obliger tous les
Anglois à prêter ferment qu'ils renon-
çoient à pur & à plein jj & à toûjours à
l'obeïf-
DU KOUAKEKISME. l$f
robeïflance qu'ils dévoient aux légiti-
mes héritiers de la Couronne , & à
la forme de gouvernement qui avoir
iubfiftéfous le Royaume. Ilfaifoit en-
core jurer fur les Saints Evangiles
qu'on renonçoit à toute la Religion Ca-
tholique, & à toute liaifon & tout
commerce avec les Catholiques. Pour
s'exempter de prêter ces fermens là, les
Catholiques , & particulièrement les
Prêtres, & les Jefuitces ne trouvèrent
point de meilleur expédient que celui
de renouveller cette branche d'Ana*
baptiiinequi détend toute forte de fer-
ment : pour cet etfet ils s'unirent avec
Fox , & réfutèrent fous prétexte de
Religion de prêter les fermens qu'on
exigeoit d'eux. Cela n'eft point une
fable , c'eft une vérité certaine, & con-
nue de tous les fçavans de l'Angleter-
re. Etjclafçai des Kouakres mêmes,
&.du plus grand Philofophe de nôtre
fiecle, & un membre il luftre de là So-
ciété Royale de Londres. C'eft pour
cela qu'il y a eu tant de perfonnes qui
ont affeuré qu'après avoir veu dire la
Meiïe à des Jefuites dans quelque liea
-écarté a dans quelque chambre dé
Catholiques à Londres , ils avoient veu
les mêmes dans les mkines ou affenr?
blées des Trembleurs y faire le mé-
i#3 Histoire
tierce Prédicateurs & de Prophètes
C'en pourquoi encore Ion a tou-
jours remarqué une (i grande (ympa*
taie des Kouakies avec les Catholique
Komams, que les Koakres proteifent
hautement qu'ils efliment plus les Ca-
tholiques que les Proteftans , & aue-
s ils voulaient changer de Rehgion/ils
le f croient Catholiques plutôt que Pro-
ie! ans. En revanche les Catholiques
le tout Kouakres fans peine, &on les
reçoit dans la ie&e a bras ouverts , fins
exiger d eux aucune abjuration des er-
reurs du Papifme. Et les Kouakres de
•leur côré fe font Catholiques Romains
avec la même facilité. Car on ne le*
oblige pas non plus à renoncer auKcua-
kenlme, qui n'eft dans le fonds que le
pur Quiétilme, & la Religion rafinée
desmyfliquesde l'Eglife Romaine.
C eft pour la même raifon que le
Roy jaques a déclaré di verfes fois qu'il
preferoit les Kouakres à tous le.s Pror
îellans , & qu'il aiineroit mieux fe fai-
re de leur Secle (comme s'il n'en étok
pas déjà fecrétement en étant de la
Congrégation des Jcfuïtes) que de cel-
le des Epi feopaux ou des Presbiterien*.
I ell pour cela enfin qu'on a |$>$.
jours remarqué que les Kouakres, quels
■quilstuilent, prenoient à tâche d'atta-
quer
1> U KOUAKERISME. 137
qncr fans cefiè les pauvres Proteftans ,
tantôt les Epifcopaux , & tantôt Je$
Presbite^ens , & d*inve£tiver contre
la reformation faite par Luther, Cal-
vin, Zuingle 6c les autres ; en fou te-
nant que ce n'eft qu'un ouvrage impur,
imparfait , & qui a plus fait de tort à la
Religion qu'il ne lui aaporté davantage.
Mais ce qui eft de plus divertiffant,c'eft
qu'ils ont été les premiers à tourner
l'Apocalipfe contre la Reformation 6ç
les Reformateurs mêmes. Les uns ont
dit que la Babylone & îa proftituée
compreuoient toutes les nouvelles
Se&es. Les autres ont dit que le faux
Prophète aux deux cornes de l'Agneau
font les deux Teftamens, l'ancien ÔV
le nouveau donc les Reformateurs
font tout leur bouclier. D'autres ont
ditquec'dtoit le Lutheranifme avec fa
métropole Vitemberg , & le Calvinil-
me avec la fienne qui eft Genève. Il
ne faut donc plus s'étonner fi les Koua-
kres n'ont eu garde de célébrer la fain-
te Euchariftie dans leurs Congréga-
tions , puisqu'elles ne fe faifoient & ne
fe régloîent que par dts Catholiques
Romains , & par des Jefuites deguitèz,
afin de fe cacher, de fe dérober à la per-
fécunon>& de mieux jouer leur jeu,
qui étoit de diviiër & d'aiïbiblir les Pro -
te dan s 3
*38 Histoire
teltans, & rendre méprifable &odieu*
le toute la reformation. Et pour Te
mieux cacher ils ont lai Té entrer dans
teSecle toutes fortes de Phanatiques.
Tout y eft bien venu pourveu qu'on en
prenne bien l'Efpnt, qui eft un efprit
ce haine & d averfïon pour le corps
des Profitons. Et ils reilemblent en
cela parfaitement au Papifme qui ou-
vre fonfein à toutes fortes de perfon-
nes , quelque opinion qu'ils ayent
pourveu qu'ils le conforment lente-
ment à fon extérieur ; & au gouverne-
ment déjà établi, & qu'au relie ils lâ-
chent bien invectiver contre les Prote-
ftans, & déclamer contre la reforma-
tion. L'on a fouvent ouï dire àPen,
que bien des gens foûtiennent être un
vrayjefuite, & qui dit qu'un Kouakre
eft Jefuite , dit qu'il dit la MelTe de bon
marin à fes Catholiques , & puis qu'il
va prêcher aux Kouakres : & qui fût
conftamment arrêté la première fois à
Wittehal fous le nom d'un Jefuite,
peu de temps après l'éleclion du nou-
veau Roy : L'on a dis-je fouvent ouï
dire à ce fameux Kouakre que fi on laif-
foit faire Innocent XI. ou que s'il pou-
yoit vivre allez de temps pour cela,
il feroit avec Molinos une Reforma-
tion véritable , & meilleure incompa-
rablement
BU KOUAKERISME. IJ9
rablement que celle de Luther & de
Zuuigle.De ia vient que tous les Koua-
kres eltiment infiniment Molinos,&
çous les myltiques de i'Egïife Romai-
ne , comme Taulite , Sufo , à Kem-
pis, St. Therefe, Jean de la Croix,
Malaval , Mr. de Bernieies Louvigni
& les autres. Ainfi cette Secfe eft une
Arche de Noé où toutes fortes d'Ani-
maux, mondes & immondes font
bien reçus, à condition qu'on devien-
ne fort Anti-proteftant.
Toute l'Angleterre n'a confideré
jufqu'ici cette Secte , que comme une
fentine ou s'amafleoient tous les Efr
prits impurs v inquiets & chagrins de la
nation. Et comme elle n'en a voula
juger que par fes dehors, & parce qu'el-
le fait profeffion de croire & de dire
généralement parlant , elle ne la ja-
mais voulu tenir pour une Société de
Chrétiens, mais plutôt pour une con-
fpiration ouverte & formée contre le
Chriftianifme, & en particulier con-
tre la reformation , & la Religion Pro-
teftante , comme des ennemis & de
J.C.&de l'Etat, qu'il falloit profcri-
re, & abandonner à toute la rigueur
des loix , de la proteâion defquelles ils
étoient indignes. C'efï pourquoy ils
firent tant de feux de joye à l'avéne-
men
Mo histoire
ment de Jaques à la Couronne oarro
SS' ^thonfée: Comme et,
S ne manqua pas de le faire fi-tA
qu h fut monté fur le tr<W 7 V .1
*e eePnnee les conte %S*i&$gl
f s te crurent tout à fait perdus, voyan
WBtûei & Presbytérien,. & au plus zélé
qu"inve4rdde
rri.ices Proceftans. Afin donc de s'infti
ment des Propneties qui avoient clai-
rement prédit fa deteente
VrS^r"^ lls l«t ou-
vrirent libéralement leur bourfè , &
ils ne furent pas réfutez. Ils luy deman-
dèrent fi proteâion , qu'illeur.accor-
oa i en les renvoyant néanmoins au
Fanement pour la tolérance qu'ils fou-
Jiaittoient qui leur fûr accordée.
i^e premier Parlement de ce nou-
veau règne adeliberé très lon-temps
mr cette affaire, &Peu s'en Ift faiL
quonne ksautoutàtaitprofcrirs, &
déclarez indignes de toute tolérance.
Nous coanoiffonsdes Seigneurs de la
Chsm-
T) U KO UAKERISM E. -Î4Î
Zîhambre haute , & des membres de la
Chambre balle., qui leur ont demandé
pis étoient Chrétiens , & par où ils
Douroient prouver qu'ils le font puif-
pdiis rejettoient le Baptême & TEu-
chariuie, & qu'ils avoient un foùve-
rain mépris; poux.les S aiutes Ecritures^
puifqu enfin ils rejettoient ->e rnyîlére
adorable de la Sainte Trinité ; Et
qu'au lieu de tout cela ils préchoient
un Chrift qui ne reiïembleen rien au
Chrift véritable propofé dans l'Evan-
gile, un Chrift : imaginaire 4om tous
les Deïites , les Payens , les Mahomer
tans , tous les Hérétiques y tous les Phi-
losophes mêmes fe peuvent accom-
moder &ns croire en Jefus fils de Ma-
rie, en jefus Crucifié , au jefus de
fEvâtigiîe.' On leur propofë donc que
s'ils vouloient que le; Parlement .leur
accordât quelque tolérance , il falloic
qu'ils iè deciaraireut Chrétiens , &iqug
pour cet effet ils figaaffpnt ce. formu-
laire.
Je N.croydè tcèur t* jeconfejje que le?
Saintes Ecritures forit dh>ine s , & qtCeU
les nous miP \étè lai ffe.es par des hàïknes
infpire% de Dieu : Et tytdlfit fent la rè-
gle de nôtre foy.& de nor métier s.'- . t |
Item , je déclare que jeàroy en unfetît
J>iw^ue^hFcre^ieçrûy m % C. pf
m , Histoire
& au St. Efpnt , avec le Pere & le TU
mJeul&memeDteu bénit éternellement
Ce formulaire les a fort chagriné à
fort embaraflëimais enfin ils fe fi>2
tefolusdeleligner^^entenduneaS'
moinsqu ils l'expliqueront comme ,1
leur plaira. Benjamin Furby qui étoit
leur grand & continuel Solliciteur au-
prez du parlement, &qUieIt un pur
Déifie , fut tort choqué du formulaire,
niais quoi ce qu, étou écrit, étoit
écrit «& le Parlement leur étoit trop
peu favorabie pour y nen reforme?.
Il a doue fallu en pafierpar là, quit-
te a 1 entendre au lens qui leùriera
favorable, & a le glofer en jeluitte.
CHAPITRE XXI.
Les Kouakres fai ts Chrétiens par au.
t honte ' de Parlement Pourquoi
tolères cr non Us Catholiques,
sivu falutatre aux Catholiques
four obtenir la tolérance.
QU 7 qu'il en foit voila nos Koua-
^ me, d Angleterre faits Chrétiens
pat autnorué de Parlement. Les im-
pies
DU KOUAKERISME. Î43
pies & les libertins qui ibnt parmi eux
n'en déviendront pas meilleurs pour
cela ; & l'authomé du Parlement
n'aura pas plus de force ni de poids
chez eux que celle de toute l'Eglife,
celle de l'Evangile & de j.Cmêrric
fon inûituteur. Cela ne laiffera pas
de produire un très bon effet. Premiè-
rement en ce que ces impies n'oze-
ront plus prêcher contre les plus Augu-
ftes myfteres de la Religion Chrétien-
ne, ce qui arrêtera le progrez de leur
impieté 5 en fécond lieu cela obligé*
ra tous les lîmples d'entre eux qui ne
connoiiiènt point tous les myfteres de
la ieâe , à faire réflexion far l'état
dangereux où ils font en y demeurant ,
puiique toute une nation en corps s'ac*
eufe de n'être pas Chrétienne , &
qu'elle lauroit proferite , fi elle ne
fe fut réfoluë de fe déclarer Chré*
tienne. Ils verront parla que les
gens <fEi>rit , & les plus fages &
les plus éclairez de toute la nation
ont de juftes fujets de foupçon*
ner leur feâe du crime d'ApofUfie-j
qu'aimi ceux qui y font déjà, ou qui
veulent y entrer doivent -bierf prendre
garde à eux & à ne pas s'y engager té-
mérairement, mais l'examiner meu-
remeni , non par Les dehors , mais par
fes
144 j Histoire
les dedans & par fon fond lècret qu'el-
le ne découvre que peu à peu 6c par
Gegrez a mefure qu'elle reconnofc
qu on entre dans ion Efprit.
Mais pourquoi les Anglois & leurs
Parlements n'accordent ils pas la to-
lérance aux Catholiques, qui fout ou-
vene profcfflon de la Religion Chré-
tienne? Ëlhxé que lesKouakres méri-
tent mieux cette- tolérance qu'eux?
nullement. Au contraire ceux-cy hi
mentent , 6c ceux-là en font ab blu-
ment indignes ; mais c'en qu il y va
de la Politique de ne pas aumônier pu-
bliquement l'exercice d'une Religion
qui fait dépendre toute la. ûacikc de
fesSeébteurs d'un Prince Etranger ,
fçavoir le Souverain Pontife, qui°pré-
tend avoir le droit, 6c qui elt recon-
nu par la plufpart des Catholiques
•avoir ce d roi t. , de difpenfer de tous 1er-
mens prêtez à des hérétiques. Ceft
la feule -chofe à parler franchement
qui empêche îe Parlement de leur ac-
corder une tolérance publicue , par-
ce que cela fait qu'on ne peut prendre
aucune précaution à leur égard , ni
.s'alTe^re; jamais de leur hdeîuë.
\Si donc tous les Catholiques d'Au-
gtetene s'uniiïoient enfemble, 6c de-
ciaroient folemnelleinent , qu'ils re-
non-
BU KOUAJCERI8ME. 14f
noncent, je ne dis pas à la commu-
nion du Pape y mais à l'authorité qu'il
s'auroge , Proteftans qu'ils croyent
qu'il n'a aucun droit d'abfoudre les
fujets de leurs fermens de. fidélité
qu'ils ont prêté à leurs Princes, quels
qu'il foient , & que Ton pouvoir ne s'é-
tend en aucune manière , ni directe-
ment ni indirectement fur le temporel
des Rois , quels qu'ils foient , ni fur
leur Juridiction, le feul obftacle qui
s'oppofe à leur tolérance feroit levé.
Et les Catholiques Anglois font en
droit de faire une pareille déclaration ;
car ils ne font pas de pire condition
que l'Egiife Gallicane qui l'a faite. Et
s'ils étoieut figes & bien confeillex ,
ils rcroient ce pas là , & l'Angleterre
n'auroit après cela plus rien à craindre
d'eux. Mais il faudroit pour cet effet
que tous leursEcclelïaftiques fifîent une
pareille déclaration fans refèrve a ni
reftriâion , ni limitation quelconque.
Le plus feur même pour eux feroit de
chaffer tous les Moines fans exception ,
& -de n'avoir que des Pxêtres feculiers
Anglois.
Si l'on «s'imagiiioit que c'eft parce
qu'on tient les Catholiques pour idolâ-
tres qu'on leur refufe la tolérance pu-
blique , l'on fe tromperoit fort Car
G leur
146 H I S T O i R -E
leur idolâtrie quelle qu'elle (bit,
eiî un péché bien moins criant & fean-
daleux que celui de PApoftafïe des
Kouakres. Un franc Kouakre qui n'a-
dore plus & n'invoque plus ]. C. & qui
ne met plus fa confiance en la mort&
en l'intcrccffion de ce divin Sauveur ,
cil hors de tout état de làlut : au lieu
qu'un pauvre Catholique idolâtre peut
toûjouri,tout idolâtre qu'il cii, obtenir
k pardon de lés péchez, & de celui
de ion idolâtrie en particulier , en ado-
rant & en invoquant). C en mettant
fa confiance en la mort, & au mérite
de Ton intercefïion , & en fuppliantee
bénin médiateur de lui pardonner tous
fes péchez connus & inconnus. Et je ne
veux pas douter qu'il ne pardonne le
vice & le défaut qui le trouve dans le
culte des Catholiques , à tous ceux qui
ont le cœur d roit & iinecre , & qui ont
une véritable foy & une véritable cha-
rité ; mais il n'a garde de pardonner ja-
mais à des malheureux qui font gloire
defe moquer de fa religion, qui la tour-
nent en pure allégorie > & qui ne le re-
connoinent plus pour le véritable
Chrift envoyé de Dieu , & qui bien
loin de lui demander pardon en vertu
du lang qu'il a verféfur la Croix pour
nous , s'en raillent iafolemment, &
qui
DU KOUA KER 1 S ME- 147
qui pis eft tâchent de faire Apoftafier
fesElus. vous voyez par là que je ne
tiens pas que l'idolâtrie des Catholi-
ques qui adorent j. Cau St. Sacrement
foit une idolâtrie mortelle. Elle eft bien
mortelle en elle même, & par fa na-
ture , du moins il y a des raifons fortes
de la croire telle , mais après tout, elle
ne donne pas effectivement la mort , à
cauf- de l'antidote que les Catholiques
prennent avec elle , & qui empêche
qu'elle ne donne la mort. Et cet anti-
dote eft le recours à la mi fer i cor de de
Dieu par J . C. & à J. C. même affis fur
le trône de la grâce , & pardonnant ge-
nereufement aux pêcheurs repentans
tous les péchez qu'ils ont pu commet-
tre quels qu'ils foient, quand ils s'ad-
dretient à lui avecFoy , avec Charité,
avec Contrition. Car comme J.C. ne
pardonne jamais à demi , en pardon-
nant aux pêcheurs repentans leurs au-
tres péchez , il leur pardonne auffi tous
ceux dont ils ne fe croyent pas coupa-
bles, par erreur , & par aveuglement, &
dont par confequeot ils ne peuvent
demander pardon expreftement. Mais
ils lui en demandent pardon en gêne-
rai , & interprétativement , en le con-
jurant de leur pardonner tous leurs pé-
chez quels qu'ils loientj connus &in-
G 2f COR-
148 Histoire
connus, & lui proteftant qu'ils forg
dans la .difpo&ion de cœur de lui de-
mander pardon lïncerement de tous
ceux qu'ils pourroient découvrir.
Mais j'oferai bien dire que s'il y a
desraiions de prendre l'adoration du
Sacrement pour une véritable idolâ-
trie, il y enaauflidetrés fortes de ne
le pas prendre pour telle. Il eft vray
que l'opinion de la prefence réelle, de
îa manière que les Catholiques l'expli-
quent ne fçauroit légitimer leur ado-
ration. Ils dirent, du moins c'eft la
doctrine reçue dans leurs écoles , que
le corps de J.C. eft prefent au Sacre-
ment comme un corps mort , non
en figure ou myiliquement , ils di-
roient vray s'ils le difbient,, mais ils
l'entendent proprement& à la lettre,,
croyant que le corps de J. C. y eft
làns aucune d iftinclion de parties, fans
aucune étendue locale , làns aucun
mouvement vital, de forte que c'eft
un corps , en qui ni le fang , ni les
efprits , ni les humeurs n'ont aucune
circulation , & par confequent un
corps mort & pire même qu'un cada-
vre , en qui il y a toujours quelques
reftes de vie > qui y font naître des
animaux parfaits & vivans. Et un tel
corps mérite- t-il d'être adoré ? Il le
me-
D U KO UAKER1S M Ë. P49
mérite moins que le pain du Sacre^
ment qui eft uni au verbe & à la divi-
nité. Et ne dites pas que l'union du
Sacrement avec le verbe n'efï pas per-
fonnelîe. Car peut-il être uni à l'elièn-
ee du verbe fans l'être à là perfonne ,
l'efïènce & la perfonne étant dans le
vqrbc une ièule & même chofe , ou du
moins l'une étant infeparable de l'au-
tre i Au contraire l'union eiTentieîîe
ou à Te/Tence divine devroit plutôt
faire adorer le fujet qui y feroit ainiï
unr, que l'union qu'on appelle per-
ibnnelle, parce que ce qu'on appelle
perfonne ou hypoftafen'a rien de di-
vin ni d'adorable que par l'eiTence.
Mais3dira-t-on, J. G. après tout voit
teusles hommages qu'on rend à fon
corps caché dansThoftie, & celafuf-
fit. Et qui vous a révélé que J. G.
ait agréables ces hommages rendus à
fon corps caché dans l'hoihe de la ma-
nière que vous le croyez ? Au con-
traire s'il l'y rendait ainn* prelent ce
feroit une marque infaillible qu'il ne
voudroit pac qu'on l'adorât. Et pour-
quoi vous expofez vous ainn* au péril
évident de faire un pêche d'idolâtrie
en adorant une chimère de corps, un
mon (Ire de corps plutôt qu'un corps?
qui vous obligea croire ces extrava-
G 3 gan-
150 Histoire
gances? Si vous croyez que le corps
de J. C. peut être prefent au Sacre-
ment , vous devez croire qu'il y cft
prefênt tel qu'il eft , c'eft-à-dire vivant,
glorieux & immortel , & par confe-
lèquent digne de tous vos homma-
ges. Je luis affeuré que les peuples
croyent cela , & les autres auffî%&
qu'ils ne font aucune réflexion à la ta-
ble facréefur leurs folles opinions de
l'Ecole.
La première raifon qui peut faire
croire que l'adoration de J. C au Sr.
Sacrement n'eft pas criminelle , eft
qu'elle a quelque fondement fpecieux
& apparent , fçavoir la déclaration
expreflè de J. C. Et quoique cette dé-
claration ruine toute prefence fub-
flantielledu corps de J.C. quand ou
l'approfondit, néanmoins l'authorité
de tant d'anciens Docteurs qui ont
crû une prefence à peu prez fembla-
ble , & les préjugez dans lefquels tous
les Catholiques font élevez, y don-
nent du poids & delà probabilité. Ou-
tre qu'il n'eft pas impofiible que J. C.
s'y rende prefent par voye d'irridiation
ou d'émanation , 6c de refoudre tou-
tes les objections que j'ai faites con-
tre elle cy-delTus.
hi féconde eft que les Catholiques
n'er-
BU KOUAKERISME. 15*1
n'errent aucunnement dans le droit.
CarJ.C qu'ils veulent adorer ell ef-
fectivement adorable.. Ilsnefe trom-
pent qu'au fait,le croyant prefent d'une
certaine manière là où il ne Pdft pas de
cette manière là 3 quoy qu'il y ioiî
toujours véritablement & réellement
preiênt , mais d'une autre manière ,
là où deux en trois [ont affemble^ en mon
nom , là je fuis au milieu a eux i Et je
fois avec vous j'jjhuà la cenjommation
des ficela. Ainû c'eft- toujours J. C.
qu'ils adorent véritablement. Un ma-
nichéen quiadorok J. C dans ie foleil
fe trornpoit au droit & au fait. Car
le Jefus qu'il adoroit n'écojt nullement
le véritable Jefus , nôtre jefus né de la
fubftance de Marie, mort lur une croix,
■& reffufcité des morts , & monté au
ciel. Ils n'ador oient qu'un certain
Jefus fantaftique , & forti des eîemens
inerces, & de la ftbftancc lumineu-
fedubon principe, un Jefus pendu à
tous les arbres i, & caché dans la fub-
ftance de tous les fruits de la terre. Ils
navoient aucun fondement non plus
de croire que J, C- habitoit dans le fo-
leil, J.C. n'en ayant jamais rien dit»
Et de plus fi les manichéens en adorant
J-C- dans le foleil enflent voulu ado-
res le véritable Jefus que nous adorons
G4 tous,
if 2. Histoire
tous, &fi avec cela ils feuiTent auffi
adoré comme régnant au ciel, &affis
a la dextre de Dieu, je doute fort fi
leur culte auroit été fort criminel; &
quand il l'auroit été, J. Cafleurément
\ auroit éxcufé, & le leur auroit par-
donné. Et lien montant au ciel il
avoit dit à lés difcipies en leur montrant
kfojeiîj Cecy cftmon corps ^om lignifier
quefon corps alloit devenir auffi éclat-
tant de lumière que le ibleii , ou pour
■lignifier que le foleil leur feroit défor-
mais un fymbole qui les ferait fouvenir
îuy , comme l'Arc en Ciel eft un
fymbole de l'alliance que Dieu a trai-
tée avec nous en la perfonne de Noé :
ie Manichéen auroit eu quelque pré-
texte ïpacieux de croire qu'il auroit
voulu infirmer qu'il y placeroit fon
corps glorieux. Mais les Catholiques ,
dira quelqu'un, errent auffi quant au
droit & quant au fait. Ils adorent un
Jeius inconnu à l'Evangile, auxApfr-
très, à l'ancienne Eglife. Et ils- l'a-
dorent là où il ne doit pas être adoré,
je répons que les Catholiques ne
croyent pas que ce Jefus foit un autre
que le véritable ; ils rejettent & ils dé-
tellent nos conséquences au lieu que
ic Manichéen & le Kouakre veulent ef-
fectivement adorer un autre Jefus eue
'le
DU KOUAKERISME. If 3
k nôtre. Et après tout les Catholi-
ques au même temps qu'ils adorent
J, C. au Sacrement , adorent auffi le
vray Jefus, affis à la dextre de Dieu.
Et ce Charitable Sauveur eft trop bon
& trop clément pour ne pas leur par-
donner leur bévue & leur erreur ,
quand elle fe trouve jointe avec une
vraye foy , une vraye pieté & une évi-
dente Charité.
La 3> raifon eft qu'il n'eft pas im-
probable que quoy que J. G. vueiîie
nous donner par le Sacrement un corps
mort & rompu , c'eft à dire un monu-
ment de fa mort , il s'en fert néan-
moins pour y- imprimer une vertu di-
vine capable de former en nous un gen-
re d'immortalité. Et l'on peut dire
que l'Euchariftie efl: aujourd'huy & le
myftere de la mort de J. C & celuy de
fa refureâion , ou de fa vie glorieufe
& immortelle, par confequent il peut
la remplir de (on Efprit divin & im-
mortel' pour nous communiquer une
vie divine & immortelle. Ainfi il n'y
a aucun crime à l'y adorer comme
prefent réellement & fubftanticlîe-
rcent. Si le pain comme brifé & rom-
pu îigure la chair mortelle de j. C bri-
fée& immolée pour nous, & file vint
verfé figure fon faag verfé , ce même
G s P^iû
*S4 Histoire
pain & ce même vin figurent auiîî par-
faitement par la nounture & la force
qu'ils nous donnent la vieglorieufe&
incorruptible de J. C. dont il veut
nous faire part par fon Sacrement. Et
J. C.n'eftplus aujourd'huy à bien par-
ler, nkhairnifang, màhmBjfrit m~
vi fiant , car la chair & le Jang ne fç au-
raient hériter le Royaume de Dieu.
La quatrième raifon eft que le Sa-
crement eft toujours une image du
corps de J. C. & de J. C. même tout
entier, &inftituéepar luy, pour le re-
prefenter. C'eft un gage de fa chère
perfonne à la prefence du qui il eft
toujours permis d'adorer J. C. foit
qu'il y foit prefent corporellement ou
non. Et ne m'oppofez pas ici le fé-
cond précepte qui défend de fe profter-
ner devant toute forte d'images. Car
la loy ne parle que des images faites
par les hommes, & qui plus eft elle ne
parle que des images de la divinité,
qui eft incorporelle , & des autres créa-
tures qui ne méritent aucune adora-
tion, au lieu que J. C. même entant
qu'homme mérite d'être adoré, &
d'être adoré en la prefence de l'image
qu'il a inftituée luy même. L'on pourra
donc fans péché adorer J.C aux pieds
4'un crucifi x , ou au pied d'une croix?
Et
BU KûUÀKERI S M É. I f 'y
Et pourquoy non. Luther l'adoroic
bien ainli , & il nous eft toujours dé-
peint en cette pofture ; d'ailleurs}. C.
.n'a point établi la croix m le crucifix
pourlereprefenter.
La cinquième raifon eft que s'il étoit
bien permis (i. aux Hebr.) d'adorer
Dieu en la prefence de l'Arche, pour-
quoy feroit-ce un crime d'adorer
ion ûts en la prefence de fes Symboles
my (tiques. Mais l'Arche , dit-on ,
étoit un Symbole de la prefence perpé-
tuelle de Dieu au milieu des Ifraëlitcs ,
& le Sacrement n'eft qu'un Symbole
de }. C. confideré comme abfent de
nous, toutes les fois que vous manger e%
de ce pain vous publier e% I a mon du S ' i~
gneur jufquà ce qu'il vienne. L'Arche
étoit un Symbole confiant & perpétuel,
& le Sacrement n'eft qu'un Symbole
paflager; il lé faut prendre , manger &
conlumer; & ce n'eft que dans ces mo-
mens qu's 1 eft S y mbole. Enfin l'Arche
étoit le Symboié d'un Dsca vivant &
glorieux , & le Sacrement n'eft que
l'image d'un homme mort & Sacrifié,
c'eft }. G. feul qui répond â l'Archer
Car c'eft la parole de Dieu, fon ora-
cle, l'Ange de fâ face & ceîuyenqui
habite corporellernent toute la pléni-
tude de la divinité. Et comme cette
G 6 Arche
ï>6 Histoire
Arche de la nouvelle alliance eft dans
le ciel, c'cftauffi vers le ciel que nous
devons ïeulement tourner toutes nos
adorations. Tout cela eft bien diry
mais il ne fauroit empêcher qu'on n'a-
dore légitimement J. G. 6c laprefence
du Sacrement, foit que vous dirigiez
Seulement vôtre coeur à J.C. comme
régnant au cie^foit que vous ledirigiez
tout enfémble à ce même Jefus & com-
me étant au ciel en corps &ename,
& comme étant prefent ici bas par fon
Efprit éternel, & même encore com-
me y étant prefent d'une prefence
corporelle qui vous eft incomprehen-
lible. Le Sacrement que nous man-
geons^ la Sainte Table eft un Symbole
de J. Ç. vivant 9 6c qui comme un pere
de famille nous nourit 6c nous fait
manger avec luy à fa table. Et s'il eft
lemyftere de la mort de J. C. ill'eft
a.uffi de fa vie divine 6c glorieufe. En-
fin nôtre Arche n'eft pas feulement au
ciel, mais aufii au milieu de nous, 6c
elle y fera jufqu'à la eonfommation
des hecles. Et quoy s'il nous eft per-
mis en recevant le Sacrement d'ado-
rer J. C. a îa veiie de cet objet, quoy
que nous ne l'y croyons pas prefent
fubftantiellement, comment un Ca-
tholique pêcheroitiî en faifantla mê-
me
DU5 KOUAK FRI S ME- I$J
me choie , luy qui l'y croit prefent
réellement ?
De tout cela je conclus que l'adora-
, tion des Catholiques pouvant ai nu* être
exculée &jullinée, elle ne peut palier
pour une véritable & réelle idolâtrie.
Et fi l'on m'ofajetceque l'on peut détrui-
re toutes les excufes que je viens dé-
porter , il répondrai que cela n'im-
porte, parce qu'on pouraaulli détrui-
re ces inftances : Et que déplus il me
fuffit pour mon but qu'il y ait feule-
ment de la probabilité & de l'appa-
rence dans ces excufes pour les rendre
bonnes & valables, je conclus encore
de là que les Catholiques font cent
mille fois plus tolerables que les Koua-
kres. Car ceux-cy ne doivent point
du tout être tolérez , à moins qu'ils ne
■fe déclarent Chreftiens.
( On ne manquera pas de m'objetter
que l'Eglife Anglicane fait profeffion
de croire que le culte des Catholiques
efl une véritable idolâtrie. Je l'avoue,
mais elle n'oblige per forme à croire
cela, & il y auroit de l'injuftice & de la
tyrannie à le faire. C'efî pourquoy cha-
cun efl: libre d'en croire ce qu'il luy
plaira. Et pour moy je déclare fran-
chement que je n'en croy rien , & je
connois bien d'autres- perfonnes qui
G 7 font
158 Histoire
font des membres illuftres de cette
Eglife , qui n'en croyent rien non plus
que moy. Et je remarque fur ce fujet
que les derniers Tells ou fermens les
plus rigoureux par lefquels on déclare
qu'on croit que le facrifice de la Mejjey
Jmvanù Pufa^e de fE^lije Romaine, cft un
aBe jupcrjiîticux & idolâtre , ne regar-
dent nullement le commun des ri-
delles & des membres de l'Eglile An-
glicane , non pas même les Eccleliafti-
ques , puis qu'il n'y a que les Seigneurs
du Parlement & les autres Députez
de la Chambre baffe qui foient obligez
à faire cette déclaration, ce qui n'em-
pêche pas qu'il n'y ait de finjullice à
l'exiger des uns plutôt que des autres :
Et même à l'exiger de qui que ce foit ;
parce qu'on peut être un très bon Pro-
teflant , & très zeîé pour la Religion
Proteftante , & pour la liberté du pays ,
& croire néanmoins qu'il n'y a aucune
idolâtrie à adorer J. C. au St. Sacre-
ment comme tous les Catholiques.
Il n'y a pas un Troteitant qui ne fe re-
criât contre les Parlemens de France
s'ils obiigeoient tous ceux qui vou-
droient ou pouroient y entrer à jurer,
que non feulement ils tienucnt tous
les dogmes de la foy Catholique Ro-
maine , & renoncent au Lmhera-
nifme
DU KOUAKERISME. 1 5 9
nifrnc & auCalvinifme , mais même
qu'ils tiennent fermement que tous les
Proteitants font en état de Damnation.
Il y auroit une violence & une injufti-
ce manifeile dans une telle Loy. Quoy
qu'elle fût allez conforme à l'Efprit
de la Religion Romaine , & à fes maxi-
mes cruelles.
Je remarque en fécond lieu que le
Teft qui déclare que la facriflcc de la
Méfie eft un a£te iuperftitieux & idolâ-
tre tel qu'il eft pratiqué dans l'Eglife
Romaine , fupofe manifeftement
qu'on peut adorer J.C.prefent réelle-
ment au Sacrement, pourveu^qu'on
ne l'adore pas à la manière des Catho-
liques. Car pourquoy cette reftri-
ction , fi non pour infinuer que toute
adoration de J. Cprefent réellement
au Sacrement n'eft pas une véritable
idolâtrie , & cela pour d'un côté nous
mettre à couvert , nous qui recevons
à genoux le Sacrement , c'eft 2 dire en
pôiture d'adorans ; & pour de l'autre
y mettre nos fieres d'Ausbourg qui
croyent J. C. prefent corporellement
au Sacrement, qui le reçoivent à ge-
noux , & qui l'y adorent de corps &
d'efprit. Car ils déclarent feulement
qu'ils n'adorent nullement le Sa-
crement, fi bien que les Catholiques
r6o Histoire
Romains , qui déclarent folemnellc-
ment qu'ils n'adorent nullement le
Sacrement, nous font égaux. Etcon-
ftamment ils n'adorent nullement ce
que nous apeîlons le Sacrement. Ils
n'adorent que J.G. prefent au Sacre-
ment; 6c s'ils adorent le Sacrement
ils n'entendent parla que J. C. feul à
bien parler, où ils parlent figurément,
en donnant à lachole contenue le nom
de celle qui la contient & qui la figure.
Nous ne faifonspas fcrupule de nous
encîiner& de nous proiterner devant
la table quoi qu' il n'y ait ni Croix, ni
Image, ni Sacrement, & nous nous
moquons de ceux qui nous aceufent
en cela de fuperltition & d'idolâtrie,
parce que nous difons que c'efi J. G.
ieul que nous adorons. à la veiie de la
table. A combien donc plus forte rai-
fon les Catholiques Romains feront
ils exempts d'idolâtrie quand ils fe pro-
.fternent devant J.C. à la veiie de fon
Sacrement expoié fans cefTe fur leurs
Autels ? Et s'il n'y a aucun crime à
l'adorer à la veiie du Sacrement ou de
la table Sacre'e fans l'y croire réelle-
ment prefent , comment y en pouroit-
il avoir à l'adorer dans la perfua-
fion qu'il y cil réellement prefent?
Celui qui étant dans la chambre
du
DU K.OU AKERïSME. l6l
du Roy s'ytiendrou en la mêmep'oÛurc
qu'il garderoit li leRoyyécoit, auroit
bien plus de raifon de le tenir dans cette
poilure perfuadé qu'il feroit que le Roy
feroit' prefent , bien qu'il ne le fut pas,
que celuy qui fâchant qu'il n'eft pas
prefent , feroit en la même pofture. Et
dans le fond il n'y auroit rien qui les
diiîîiiguiî que leur div^erfiié de Tenti-
ment. Or nous reconnoiffons tous
que cette divcnué de fe miment s. ne
doit pas empêcher l'union & la frater-
nité, par ce que nous n'y trouvons au-
cun venin. Il n'y a donc rien à mon
avis qui doive empêcher le prefent Par-
lement d'accorder la tolérance aux
Catholiques Romains , à condition
qu'ils prêteront le ferment qu'on apel-
Je d'alîegance , c'eft-à- dire qu'ils feront
à l'égard de Rome ce que toute la
France à fait , eu profcrivant toute
l'aurhorité exorbitante & tyran nique
des. Papes. Et c'eft là le véritable & l'u-
nique moyen de pacifier tous les trou-
bles , de reconcilier, enfembîe tous
les Efprits de la nation-, & de prévenir
tous les defordres à l'avenir. Il faudra
feulement vueiller fans celle fur leur
eonduite,arln que les loups noirs,blancs
& gris, ne reviennent dans fille, & ne
s'y multiplient. Mais il faudra encore
bien
161 Histoire
bien plus vueiller fur la conduite des
Kouaki es , & particulièrement far celle
de leur grand politique Willem Penn,
& les empêcher de propager leur Deïf-
me, &leur Jacobifme.
CHAPITRE XXII.
LeKouakerifme eft un pur Détfme.
Il permet & authonfe jufqua,
V Athétfme.
/^Omme ceux qui connoifTent le
fond du Quiétifme font fort con-
vaincus que ce n'eft qu'un pur Deïïmc
que les plus éclairez parmi les Catho-
liques Romains tâchent d'introduire
au monde , de même pour peu qu'on
pénètre les myftéres du Kouaket ihne,
l'on n'a pas beaucoup de peine à dé-
couvrir que ce n'eu: qu'un Deïfme
caché , & coloré de quelques légères
apparences de Chriaianifme. En effet
ç'eftlàoù il tend tout droit, & où il
mène infallibîement. Et je croi que
perfonnen'en doutera après toutes les
chofes que j'en ay dites. Mais afin que
ceux qui ne le connoiflent pas , ou qui
le favorifent , afin même que les Koua-
kres
D U KOUAKERIS ME. ÏÔ3
krês mêmes ne fe recrient pas contre
moi, comme contre un calomniateur;
je vais en donner icy une preuve invin-
cible & tirée de leurs propres écrits*
Cette preuve eft tirée d'une lettre de
Barclay écrite à un AmbaiTàdeur le 24.
Novembre 1676. rendue à l'Am-
bafiadeur en main propre , par Benja-
min Furly , & imprimée enfuite par le
même Furly, à la prière de Ton ami
Barclay, à Roterdam le 28. du troi*
fié me mois , comme ils affectent de
parler , c'eft-à-dire le 3. du mois de
Mars 1 678. Cet Ambaiïàdeur lui avok
envoyé cette objection , fçavoir fi
la foy en J. C. né de la Vierge Marie ,
more fur la croix pour le falut des
hommes , & reffufeitédes morts , &
enfin élevé au Ciel , eft neceffaire aa
falut de tous ceux à qui l'Evangile eft
prêché , & à qui Dieu a laiffé les Sain-
tes Ecritures,ou non. Que fi elle eft ne-
ceffaire au falut de tous ceux à qui l' E-
vangileeft prêché, il s'enfuit que tous
les Chrétiens doivent reconnoître l'E-
vangile, comme la régie de leur foy,
& comme une révélation qui nous
conduit au falut. Que fi elle n'efl pas
neceffaire, c'eft donc en vain que J.
C. eftvenuau monde afin qu'on crût
en luy comme au Meffie promis par
les
I<54 Hisioi r E
les Prophètes , c'eft en vain qu'il faic
Tpfer,^ie«ernelleàcroi^qSf
eft envoyé dep,eu, &fiU U vu "éter-
nelle de te connoure , dit Jefus à Ion Pere,
pur, lefeul Waj Dieu, & celuy que tu
aj envoyé J.c. C'en en vain qu'il dé-
clare que q.ut croit aufils il a la vie , que
f»mmt crenen luy , & fera B$ifé
jerafauve C'eften vainque fes Adô-
c ^TPrSé lafoJ™ ce Jefus cru-
« î.% ldlu*cilé- £nfin c'elten vain
que St. Paul à prononcé Ji tu rm> en
toneceur ^ fi tnconfefe de bouche que
J.C eft mort & récité des nimt tu
fft',°ril nVa que l'Evangile,
& la Prédication de l'Evangile qU
nous annonce le Jefus crucifié & rk
les Kouakres demeurant d'accord que
la lurmere interne, qu'ils nomment le
Chnlt inteneur , n'enfeigne rien de
tel, parce qu'elle n'enfeigne que des
vemez nccetfàircs & d'une venté &
à une neceffité éternelle, que par con-
feque.it l'Evangile eft le principal mo-
yen qu. nous inftruit de ces veritez fa-
îutanes. Barclay répondant à cette
ooje&on d,rt,nguc deux fortes de con-
noi^ance&detbyneccfraire au falut;.
"yen a une qui efiabfolumentne-
ccffaire,. par ce qu'eile eft neceiTaire.
d'une
DU KOUAKERI SME. lôf
d'une neceffité antécédente ou à prions
comme il parle en termes Scolaftiques
que Barclay n'ignore pas ayant étudié,
chez les Jeiuïtes à St.Omer ou à Tour-
jiay , comme l'on m'en a aflèuré , &
ayant été luy -même Jefune durant
quelques années i autre bonne -preuve
decequej'aydit cy-deiîlis que les Pa-
pilles , & l\iv tout les Jefuïtes , font du
nombre des autheurs & des fauteurs du
Kouakerifme : une ehofe félon luy eft
neceHairevainfi quand elle l'eft abfo-
lument, & cette neceffité abfoîuë eft
lacaufe pour laquelle Dieu nous la
révèle. La connoiffance , dit-il , des prin-
cipes if des maximes de la Religion na-
turelle , comme qu'il y a un Dieu quiai-
me èT qui chérit les hommes , qui les ex-
horte & qui les convie fans ceffe k venir
à luy , qu'il eft toujours tout preft à les
recevoir en g( ace &à leur pardonner tous
leurs pèche^pourveu qu'ils s' en repentent
Jinceremcnt, & mènent une vie nouvelle
a l avenir • qu'il exauce toujours les vœux
& les prières des juftes , des humbles df
{impies : qu'enfin il eft un renumerateur
magnifique de tous ceux qui auront bien
veçu & qui auront pratiqué la jufticcM*
la vertu , & tout au contraire un jufte if
fevere vendeur de tous lespeche^ & de tous
{es crimes de ceux qui ne fe font pas con-
vertis
i66 Histoire
vents à luy, & n\nt point fait de feni
tencej Et les autres maximes fanblables
font dîme nrccjjité ab[elu'è, & c'eftpour
cela que Dieu les fait connaître en Quelque
degré toujours Jurant & proportionné,
a tous les hommes du monde, & qu'il les
rcv:/e merne à ceux qui n'ont aucunes
écritures , par le moyen de cette lumière
intérieure Evanp lieue qui illumine tais
les hommes. Voila" félon les docteurs
Quakres qu'elle eft la foy & la con-
noiflance abfoltmient neceflàire à tous
les hommes , & vous voyez bien que,
ccn'cftquele pur Deïfmc par la def-
cnpuon que j'en ay faite dans les pro-
pres termes de Barclay.
Il y a auffi une coimoiflànce necef-
faire , mais feulement d'une neeeffité
conséquente ou à pojîcriori , parce qu'elle
n'eft neceflairc qu'en vertu &encon-
fequence de fa révélation. Telle feroit
la foi qu'un homme devroit avoir fi
Dieu luy reveloit que fa volonté eft
qu'il aille à Rome reprendre la tyran-
nie du Pape. La foy & laconnoiflànce
Hiftorique deJ.Cde la naiflànce, de
fa vie & le relie, ne font pas des cho-
fes abfolument neceilaires , foit, font
elles au moins necelTaires d'une ne-
eeffité de confequence , c'elH-dire
efl il necelfeire de les fçavoir, & d'y
ajou-
PU KOUAKER ISME. l6j
ajouter foy quand Dieu nous les fait
propofer par les Apôtres & les autres
prédicateurs de l'Evangile? Car il me
femble qu'en djftiîiguant comme fait
Barclay il devroit au moins avancer
que ces chofes font necellaires de cette
forte de neçeffité. Mais Jl n'a gai de.
Il dit lirnpîement que parmi, ces chofes
necejjaires d'une neceffîté de confequen-
ce U y en a qui (ont des moyens très utiles
if très propret à nous conduire au falut ,
comme eft fhiftoire de J. C. de fa vie , de
fa mort & le refte. Voyez vous à prêtent
le fonds du myftere de l'impiété Koua-
kerienne.Lafoy en J. C. tel que l'Evan-
gile nous l'enleigne n'eft qu'une choie
mile, mais nullement neceffaire à
ceux même à qui l'Evangile eft prêché.
Aufii. les impies ont l'audace de nier
que la prédication de l'Evangile foit le
moyen dont Dieu fe fert pour opérer
la foy dans nos cœurs: qu'il eft vray
que St. Paul dit, que la foy eft de fouie &
que fouie eft de la parole de Dieu. Mais
que cette parole de Dieu eft félon eux
Kouakres le verbe intérieur , qui eft
dans le cœur de tous les hommes.
Tout au commencement de la ré-
ponfe il dit d'abord à l'Ambaffadeur^
vous fupof % faujfement que Pcffl-nce de
la Religion Chrétienne confifte dans la foy
&
î68 H i s x o i r E
tedansUcmnoiifancede U naiffancc de
d • c. ^ ^ ^ ^ ^ ja rejUredim
<trdc]on âflenfity: Cette foy & cette con-
nmjànc* apartiennent bien à la 8glï%kd
Chrétienne, non pas -commis partie effen-
tic! le , fans la quel Le la ^rlijion Chré-
tienne.ne pu iSfc fubfifter , mai s* feulement
comme partie intégrante qui ne fait que
U perfedionner , comme la main ë le
pied font dans l'homme des parties inté-
grantes, fans lesquelles il ne lai Je pas
de fubfxfur. He bien, n'eft - ce pas là
dire tout ouvertement que l'on peut
etr-e^aujourdhuy bon Chrétien , un
Chrétien eiTentiellement parfait fans
croire néanmoins en J. C. en le mo-
quant dans le fonds de l'ame de tout
l'Evangile, .& de tous les miracles de
la nailiance, de la vie, de la mort & de
la refureâion de J. C. pourveu qu'on
écoute la lumière intérieure , la lumiè-
re véritablement Evangelique , le
Chrift intérieur qui -éclaire tous les
hommes du monde 3 & qui leur aprend
à croire en un Dieu , & à l'adorer &
à pratiquer la juftice & la vertu. '
Mais le comble d'impiété eft en ce
que les faux Prophètes ne croyent pas
même qu'il foit abfoîument neceflàire
de croire en un ieul Dieu, ni en un
Dieu Créateur, & confervatcur da
monde
DU KOUAKERI S M F.. l6%
monde qu'il a créé. Car pour l'unité
de Dieu ils ne l'ont jamais propofée
comme un article de foy. Et pour ce
qui eft de la Création & de la conferva-
lion du monde ils enfeignent en termes
formels que ce ne font que des choies
utiles , mais nullement néceffaires
d'une necefîîté abfolaë, non pas mê-
me d'une neceffité de confequenee,
comme û la lumière intérieure & iç
Chrift intérieur , c'euVà-dire les Lumiè-
res de la Raifon , & les principes, ou k&
maximes gravées dans le cœur de tous
les hommes n'enfeignoient rien de cet;
te création & de cette confervation;
farmi ces chofes y difënt-iîsY nccejfaires
d'une necejjité de confequence ; il y en a
qui,quoy qu'elles, ne fuient pas êbfolument
nccejfaires , font néanmoins fort utiles ?
comme efi la. foy. & connoiffance qu'il
n'y a qu'un Dieu ftul , & qu'il a crée
& qu'il gouverne le monde ifc. N'cft-
ce pas là permettre TÂtheïfrne î Car
quelle foy., quelle /connoiffance, quel-
le Religion eff ce que celle qui n'en-
feigne pas qu'il n'y a qu'un Dieu , &
qu'il a fait le monde, & "qu'il le gou-
verne par fa providence ? Mais le fonds
& l'abîme duKouakerifme va jufques
là, & il ejt dans la neceffité d'y aller
avec tout fon Chrift & fa lumière inte-
jî j icurt
i7o Histoire
ricurc. Car après tout & demeurant-
d'accord qu'on fe peutfauver dans tou-
tes les Religions du monde, dans cel-
les des Idolâtres même, qui croyent
une infinité de Dieux, & dont les uns
rejettent la Création du Monde, & les
autres la Providence , il falloit bien,
dire confequemment qu'il n'eft pas ab-
folument necclTaire qu'il n'y ait qu'un
feulDieu, & qu'il a créé & qu'il gou-
verne le monde. Et s'il n'eft pas abfo-
lument neceffaire de croire ces chofes,
p*'ell-il pas auffi clair que le jour qu'il
cft permis d'être un franc Athée. Et
puis on n'auroit pas les Kouakres en
abomination , & on ne les regarderoit
pas non feulement comme les ennemis
deJ.C. mais même comme pires que
des Démons qui fapent tous les fonde-
xnens de la Religion naturelle , en nn
mot comme des Doékurs d'Atheïf-
ïne, indignes de toute proteâion pu-
blique , & dignes au contraire d'être
exterminez par tout comme des peftes
de la Société humaine ? Croyez encore
après cela que c'eft tout de bon qu'ils
parlent quand ils vous difent qu'il y a
des principes & des maximes abfolu-
*nent neceffaires , & qui, à caufe de leur
neceffité , font révélées à tous les hom-
mes du monde, à ceux là même qui
n'ont
Dtî K ô U ÂKERlSM E. .171
liront aucune Ecriture , telles que font,
que Dieu aime les hommes , qu'il les
convie à venir à luy , qu'il recompenfe
la vertu, & punit te péché? Car com-
ment Dieu leur revéleroit-il tout cela
s'il ne leur révèle pas au même temps
-qu'il a créé le monde & les hommes,
& qu'il les gouverne par fa Providen-
ce r1 & ce fentiment que tous les hom-
mes ont que Dieu hait le vice & chérit
la vertu , qu'il recompenfe celle-cy
& punit celui-là. Ce fentiment gravé
dans le cœur de tous les peuples que
Dieu aime les hommes , & qu'il les
convie de venir à luy, n'eft-ce pas le
fentiment d'une Providence ? & par
confequent d'un Dieuconfervateur&
créateur de toutes chofes ? Le fenti-
ment d'une Providence fupofe celuy
d'une Création^ où H y mené naturelle-
ment, 6c tout de même que leiènti-
ment d'une Création mené dansceîuy
d'une Providence. Et quelle efpece de
Chrift: ou de lumière Evangeîique eli-
ce que celle-là, qui non feulement ne
"nous aprend rien de tout ce que J. C.
~&fon Évangile nous aprennent , mais
qui même n'aprend pas comme des
chofes abfoîumentneceiFaires à îafoy,
'& au falut à croire & à connoître qu'il y
■% tm Dieu unique, un Dieu Créateur
H 2 de.
172
Histoire
de l'Univers , un Dieu confervateur
de ce même "Univers, en un mot un
Dieu feul adorable ? Quelle impieté
& quel blafpheme ? Et ne faut-il pas
titre animez de PEfprit , je ne dis pas
de l'Antechrift, mais du Diable même ,
pour ofer nommer cet Efprit maudit
qu'ils apellent la lumière intérieure de
ce beau nom- là , & même du glorieux
& facré NomdeChrift? C'eitapeller
les Ténèbres Lumières, &ChriitBe-
lial. St. Jean difoit que tout Efprit qut
ne con fère pas que Jefus ejl le Chrijl, rCcfl
l'Antechrift. Ce coup de foudre tombe
juftement fur nos faux Prophètes. Car
félon eux le vray Chrifl n'eft pas nôtre
jefus , cet homme Divin né d'une
Vierge, «mort fur une croix, & ref~
fufeité des morts, c'eft unChrift qui
cft immortel , inviliblc , impaffible.
Le même Apôtre dit auiîi , qui eft An-
iechrift , finon ecluy qui divife Jefus , if
qui nie quil cft venu en chair , ou avec
une chair mortelle, paffible, & réel-
lement Crucifiée ? N'elt-ce pas un au-
tre coup de foudre lancé fur les Trem-
bleurs , & fur leur Chrift fpirituel , in-
corporel, impaifible , qu'ils divifènt
gbrmellement & réellement d u Chrift
'corporel^ ou de la perfonne divine &
J> IT K O U A. K E & I S M E. î 7j
humaine de nôtre Jefus , le fils de Ma-
rie, & le fils de David félon la chair,
mais fils de Dieu par l'Efprit de San&i-
fication , & par fa Refurreâion d'entre
les morts l. Maranatha à quiconque
n'aime pas , & ne veut pas adorer le
Seigneur jefus. Je prie Dieu néan-
moins , & ce même Jefus qu'avant
que de penfer à venir ie vanger de ces
ennemis jurez de l'Evangile , ib leur
découvre fi clairement l'impiété où
ils font tombez , qu'ils en ayent une
honte & un regret faiutaire , &que fe
tournant vers celuy qu'ils ont percé,
ce Jefus le tourne aufli vers eux \ & que
les regardant d'un œil propice & favo-
rable, il leur obtienne le faiut & la vie.
Car enfin nous ne devons crier Marar
matha que contre les impenitens & les
endurcis; peut-être que cet Ouvrage
ne fera pas inutile pour cet effet, je
m'afleure au moins que s'il n'eft capa-
ble de faire revenir les Kouakres per-
dus, & qui ont déjà mangé la Pâque
de leurs égaremens , il prémunira l'Ef-
prit des autres qui font encore un peu
Chrétiens contre leur pefte & leur poi-
fon: & empêchera que tous les (im-
pies qui (ont engagez malheureufe-
snent dans la Seéie Kouakerienne , &
H 3
174 Histoire
qui n'en connoiffènt m Je fond nuk$
inylteres, .c'eiH-dire qui neconnoil-
fènt point les profondeurs de Satan,
en auront horreur quand ils viendront
à les découvrir & tremblèrent de tout
leur corps & de tout leur efprit, de fe
voir conduits fans y penfcr fur Jes
bords d'un abîme, & fur le penchant
d'un précipice qui n'elt que l'Enfer
même. Ils s'en retireront au plus vite,
& iront chercher leur afilc aupieds,de
la Croix du fils de Dieu, & fur le Cal-
vaire, où étant arofez ou plutôt inon-
dez de fon fang , ils feront purifiez de
toutes leurs fouilleures , & à couvert
écs carreaux de la juftice Divine & de
sôusles traies enflammés du malia* ,
¥ I N*
>wp i nîoiti m- m
'1 c5Î 4fn«ff9f Cnii*
TABLE
Comment fefmt les mariages des tÇetd\
CHAPITRE IV.
DivifionfarmilesKouakres.
C H A PITRE V.
Ce que c*eft que manger la Pâque félon les
J^dua^'es fcavants. i g
CHAPITRE VI.
Le Kouaksrïfme anéantit la ferfonhe de
3^Ç* , 22
CHAPITRE VII.
autres Chefs du Kjuakerifme. Le*
J^uakres nient le myftere de la Tri-
nité. 27
CHAPITRE VIII,
"Les Tremblcurs anéantirent le Myfterv
de la Croix du Vil s de Dieu. 31
CHAPITRE I X.
De r Anthoufiafme des Roua faer. 3 3
C H ï?
DES CHAPITRES
CHAPITRE X,
Combien eft dangereux ce Principe des
JÇouakjes de ne rien faire en matière de
Religion que par inspiration. 3?
CHAPITRE XL
Si le tremblement de corps eft une lonm
preuve au mouvement intérieur de Pli f-
prit de Dieu. 40
CH.AP ITRE X I I.
De quel tremblement les Saintes Ecritures
nous parlent, 4g
CHAPITRE [XI y.
Si la Religion Chrétienne ne doit avoir &tir
cune Cérémonie. 4^
CHAPITRE XIV-
§Jtél$ font les prétextes des Kjuakers fotfr
(cjkter U Batéme & VEuchariftie. £4
CHAPITRE X V.
X>emkr prétexte i^ Kuiiikjcs peut rtja-
" W
T A B LE
ter le Batême & FEuchariftie. Serpent
d'Airain, emblème illuflre de'J Cru-
cifié.. Si
CHAPITRE XVI.
Les JÇoîiakcmic croient pas que F adora-
tion Jê j. C. prefcnt au Sacrement fait
une veritabl e Idol atrie ; bon mot de Pen
fur cela. 93
CHAPITRE XVII.
Si là foi dy un bon Cathslique Romain eft
capable d'obérer lapref ?nce réelle & U
Iranfubfîance. Plaifantevifion duSr.
Jïoiret. £7
CHAPITRE XVIII.
Examen de la fréfence corporelle de J.C.
par voye d'irradiation. j j 7
CHAPITRE XIX.
Examen de ? opinion vifionaire de George
jÇéiti , fameux Kjualirc. 127
CHAPITRE X X.
La véritable canfe pourquoi le: fetàtyef
DES CHAPITRES.
ne celèrent pas fEucharifiie. Origine
cachée du JÇpua^crîfme. 133
CHAPITRE XXL
Les JÇomfyes faits Chrétien- par authm-
tcdeParkm. w. Pourquoi tolérés , if
non les Catholiques. Avis falutaire aux
Catholiques pour obtenir la tolèran-
CHAPITRE XXII,
Le Kouakerifme eft un pur Deïjme. Il
permet ix authorife jufqu'A f AtheïÇ-
me. l(sz
Fin de la Table des Chapitres.
T