7
SE
:
HISTOIRE
- LACADEMIE
| ROYALE
DS SCIENCES.
ANNÉE M. DCCXXXIP.
PAVec les Mémoires de Mathématique & de Phyfque;
pour la même Année,
Tirés des Repiflres de cette Académie.
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DE LIMPRIMERIE ROYALE.
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PHYSIQUE GENERALE
Ur l'Eectricité. Page r
Sur les Congellations artificielles. 9
Obfervations de Phyfique générale. 15
ANATOMIE.
Sur la Fiflule lacrimale. 39
Diverfes Obfervations Anatomiques. 4T
C'EPINM TE
Sur l'Analife des Plantes. 47
Sur le Sel de Soufre. 48,
Sur le Sublimé corrofif. 49
Sur l'E‘méticité de l'Antimoine, du Tartre E‘métique ;
7 du Kermès Minéral. IS 2,
Sur le Mercure. 55!
BOTANIQUE. 58
GEOMETRIE. s8
T'A:B'LYE
AS T-R'OYNFO°M-TE.
Sur la détermination de la Figure de la Terre par la Parallaxe
de la Lune. s9
Sur l'Inchinaifon des Orbites des Plantes par rapport à
l'Equateur de la Révolution du Soleil. 63
Sur l'Atmofphere de la Lune. 68
Sur la Grandeur des Satellites de Jupiter. 70
Sur ime Méthode nouvelle pour trouver la hauteur du Pole, 772
Sur la Perpendiculaire à la Méridienne de Paris. 74
Sur l'Obliquité de T'E cliptique. 77
MENC EF ANT OQ UFE,
Sur les Figures que les Planetes prennent par la Pefanteur. 83
Machines ou Inventions approuvées par l'Académie
en 17 34 105
Eoge de M. de Lagny. 107
r
Æflai d'Analife des Plantes. Pax M. BouLpuc. IOI
LES MEMOIRES.
ETHODE de vérifier la Figure de la Terre par les
Parallaxes de la Lune. Par M. MANFREDI. Page 1
Comparaifon des deux Loix que la Terre &r les autres Planetes
doivent obferver dans la figure que la pefanteur leur fait prendre.
Par M. BoucuEr. 2£
Recherche Chimique fur la compofition d'une L'iqueur trés-volatile,
connuë fous le nom d'ETHER. Par M pu HAMEL
& GROSSE. 4E
Sur les Figures des Corps Céleffes. Par M. DE MAUPERTUIS.
55
De l'Inclinaifon du Plan de l'Echiptique à de l'Orlite des
Planetes par rapport à l'E’quateur de la Révolution du Soleil
autour de fon Axe. Par M. Cassini. 107
Anemometre qui marque de lui méme fur le Papier, non feulement
les Vents qu'il a fait pendant les 24 heures, &7 à quelle heure
chacun a commencé à fini, mais auffi leurs différentes viteffes
ou forces relatives. Par M. D'ONS-EN-BRAY. 123
De la Fiflule lacrymale. Px M. PETIT. 135
Sur les Lignes Courbes qui font propres à former les Voures
en Domes. Par M. Bouc UER. 149
Æxperiences [ur les différents degrés de froid qu'on peut produire,
en mélant de la Glace avec différents Sels, ou avec d'autres
matiéres , [oi folides, [oit liquides ; à" de divers ufages
Hi 1 * jij
T ABLE.
utiles auxquels ces experiences peuvent fervir. Par M. DE
REAUMUR. 167
Solution de plufieurs Problemes où il s'agit de trouver des Courbes
dont la propriété confifle dans une certaine relation entre leurs
branches, exprimée par une E‘quation donnée. Pax M.
CLAIRAUT. 196
Recherches fur le Tour. Premier Mémoire. Pa M. DE LA
CoOoNDAMINE. 216
Sur le Sublimé corrofif ; à à cette occafion, fur un article de
l'Hifloire de l'Académie Royale des Sciences de l'année 1 6 9 9,
où il s'agit de ce Sublimé. Par M. LÉMERY. 259
Recherches fur le Tour. Second Mémoire. Par M. DE LA
CoOoNDAMINE. 295
Cinquième Mémoire fur l'Eleétricité, où l'on rend compte des
uouvelles découvertes fur cette matière , faites depuis peu par
M. Gray; à où l'on examine quelles font les circonflances
qui peuvent apporter quelque changement à V'E‘lectricité pour
l'augmentation ou la diminution de Ja force , comme la tem-
pérature de l'air, le vuïde, l'air comprimé, &v. Par M
pu Fay. 341
De la grandeur des Satellites de Jupiter, à? des erreurs qui Je
gliffent dans les Olfervations de ces Satellites. Par M.
MaARALDI. 362
Sur les Courbes Tautochrones. Par M. FONTAINE. 371
Anabfe des Plätras. Pax M. PETiT le Médecin. 380
Probleme. Quatre points ou quatre objets étant donnés fur un
plan, placés comine on voudra, trouver un cinquiéme point,
duquel ayant tiré des lignes aux quatre objets, les trois angles
formes par ces quatre lignes foient égaux , ou dans tel rapport
… donné qu'on voudra. Par M. Pirozr 405$
Méthode nouvelle de trouver Ta hauteur du Pole. Par M.
GopDin. 409
Mémoire fur l'E‘meticité de l'Antimoine, fur le Tartre émétique,
a fur le Kermès minéral. Pax M. GEOFFROY 417
——
homme RS die. és ot"
\ TABLE.
De la Perpendiculaire à la Méridienne de Paris ; prolongée vers
l'Orienr. Par M. Cassini. 434
Remarques fur les Monfires. 2.4 Partie. Px M, WinsLow.
453
Que l'Obliquité de l'Ediptique diminuë , à" de quelle maniere ;
à que les Nœuds des Planetes font immobiles. Pax M.
Gopin. 491
Sixiéme Mémoire fur l'E‘kdricité, où l'on examine quel rapport.
il.y a entre l'Eledriité 7 la faculté de rendre de la Lu-
miere, qui eff commune à la plüpart des corps életfriques, &
ce qu'on peut inférer de ce rapport. Par M. pu Fax. 503
Probleme. Une Courbe étant donnée, trouver celle qui feroit dé-
crite par le fommet d'un Angle dont les côtes toucheroient conti-
auellement la Courbe donnee ; & réciproquement la Courbe
qui doit être décrire par le fommet de l'Angle, érant donnée,
trouver celle qui fera touchée par les côtes. Pax M. FONTAINE.
À s2
Remarques fur la Méthode de M. FONTAINE, pour réfoudre
le Probleme où il s'agit de trouver une Courbe qui touche les
côtés d'un Angle conflant dont le fommet gliffe dans une
Courbe donnee. Par M. CLAIRAUT. 53E
Réponfe aux Remarques précédentes. Par M. FONTAINE.
538
Sur le Mercure. Par M. BOERRHAVE. S39
Suite des Obfervations du Thermometre, faites à l'Ifle de Bourbon,
par M. CossIGNY, Correfpondant de l'Académie ; Er
de Réfultat de celles de chaque mois, faites à Paris pendant
l'année 17 34, avec un Thermometre parvil à celui de M.
Coffigny. Pa M. DE REAUMUR. 53
Olfervations Météorologiques faites à Utrecht pendant l'annee
1734, extraites d'une Letrre de M. MUSSCHEMBROEK.
Par M. pu Fay. 5 64
Journal d'Obfervations des Aurores Roréales qui ont été viës à
Paris, ou aux environs, à Utrecht, à à Peterfbourg, dans
»
_ TABLE |
Je cours de l'année 17 34« Avec quelques Obfervations de la
Lumiére Zodiacake. -Pax M. DE MAIRAN. s67
Méthode d'obferver la Variation de T'Aïguille aimantée en Mer.
Par M. GoDIN. 590
Obfervations Mééorologiques faites pendant l'année 17 34. Pax
. M. MARALDI. 594
Addition au Mémoire qui a pour titre, Nouvelle Maniére
d'obferver en Mer la Déclinaifon de l'Aiïguille aimantée,
- Extrait @'une Lettre de M. DE LA CONDAMINE, de
Saint-Domingue, le r $ Juillet 173 5: 597
né HISTOIRE
CORP
” ui sit
MÉSLCOIRE
L’'ACADEMIE ROYALE
DES SL N, CiE.S
Année M. DCCXXXIV.
LOSC DRAP MACRO ROAD LCR DEN
PHISIQUE GENERALE.
DORELIELECTRICITE.
SOUS avons fait en 173 3 * l'Hifloire abrégée y. Les M.
B] de nos connoiflances fur Electricité, matiére p. 341. &
qui eft prefque encore toute neuve, & qui ni æ
depuis le peu de temps qu'on seft avifé de la RD ER
traiter, n’a ceflé de fournir des Phénomenes des
plus furprenants. Cette Hiftoire ne s’eft pas bornée à ce qui
appartenoit à la France, ou plütôt à M. du Fay, elle a compris
aufli ce qui appartenoit à l'Angleterre, & principalement à
Hifi 1734. | e
1]
2 HisTOIRE DE L'ÂCADEMIE RoyALE
M. Gray, & comme ils ont continué à travailler tous deux
en même temps, &, qui plus eft, d'intelligence, leurs vüës
fe font ou aidées ou rectifiées mutuellement, & ce qui
réfulte de leur accord, où même de leur oppofition, sil s'en
trouve, en doit être plus précieux aux Phificiens.
M. Gray a découvert, & M. du Fay la vérifié, qu'il n’eft
pas néceflaire , quoique nous ayons dit en 1733, que tous
les corps foient frottés pour être Electriques. Il en faut du
moins excepter les corps fulphureux ou réfineux, tels que
le Soufre, la Cire, la Poix, la Gomme-acque, &c. Ondes
fait fondre, & en cet état ils n'ont aucune vertu électrique ;
quand on les a laifiés refroidir précifément au point de pou-
voir être frottés , ils n’en acquiérent aucune par le frotte-
ment, mais s'ils font entiérement refroidis, & fans qu’on y
ait touché, ils ont parjeux-mèmes beaucoup de vertu.
Et il y a plus. Is {a confervent long-temps, pourvû qu'on
les enveloppe dans du Papier, dans de la Flanelle. On n'a
encore de certitude que d'un an & demi, ce n'eft pas que
la vertu {e foit éteinte en ce temps-là, c'eft que l'obfervation
n'a encore duré qu'un an & demi, & on ne fçait jufqu'où
elle pourra aller. Le Tourbillon Ele&rique ne fe diffippe
donc pas fi aifément qu'on le croyoit, & que nous lavions
dit. Il eft même étonnant qu'il fe conferve par une enve-
loppe appliquée au Corps, on simagineroit qu'il devroit
plütôt en être rompu & détruit. Et en effet on verra ici
qu'un Cone de Soufre qui s’eft formé dans un Verre à boire,
& qu'on en tire aifément quand on veut, eft beaucoup plus
électrique quand il n'a pas cette efpece d'enveloppe que
quand il l'a.
La vertu Electrique, pour fe tranfimettre à une grande
diftance, n'apas autant de befoin que nous avions infinué
en 1733 d'un corps exaétement continu qui la conduife.
Cette continuité peut ètre interrompuë , & Pinterruption
peut aller, felon M. Gray, jufqu'à 47 pouces Anglois. Si l'on
y prend garde, on s'appercevra que les obfervations nou-
velles, que nous rapportons, vont toutes à augmenter le
-règés
«Sale 4
DES S'CHENCES 3
Merveilleux de l'Eleétricité, & non à le diminuer, éomme
on le fouhaiteroit naturellement. Cependant on peut fe
flatter que l'on avance un peu, & M. du Fay a eu le plaifir
dé voir que fon hipothefe hardie des deux Elericités con-
traires, l'une vitrée, l'autre réfineufe, s'accordoit bien avec
un fait fingulier dont M. Gray lui-même étoit farpris.
M. Gray ayant mis dans une pofition verticale un Cerceau
de 20 poucés de rayon, dont le plan étoit traverfé par une
corde ou ficelle aflés longue qui pañloit par fon centre, &
portoit à une de fes extrémités une Boule d’yvoire, il appro-
cha le Tube de Verre bien frotté de ce Cerceau, & par-là
donna la vertu éleétrique, non feulement à toute fa circon-
férence qui avoit plus de 1 20 pouces ou de ro pieds, mais
€ncore à la ficelle, & jufqu'’à la Boule, qui attiroit fortement
un fil. En faifant couler cette Boule, comme on le pouvoit,
le long de la ficelle jufqu'au centre du Cerceau, elle n'atti-
roit plus le fil, elle le repoufloit. D'où venoit cela? l'hipo-
thefe de M. du Fay en rend raïfon. Deux Corps, qui ont
pris deux Electricités de même nature, {e repouffent ; le fif
préfenté à la Boule placée à l'extrémité de la ficelle n’avoit
point d'Eletricité, & étoit attiré par la Boule qui en avoit,
mais quand cette même Boule étoit au centre du Cerceau,
1 falloit que le fil pour s'en approcher entrât, fe plongeit
dans le fort du Tourbillon éleétrique du plan du Cerceau,
il y prenoit de léleétricité, & Ia même qu'avoit la Boule,
& par conféquent il devoit être repouffé par elle, puifqu'il
m'étoit pas aflés fort pour la repouffer lui-même.
_ Reprenons maintenant l’hiftoire des recherches de M.
du Fay, après nous être arrêtés quelque temps en chemin,
#oit pour confidérer celui qui étoit déja fait, foit même
pour faire quelques pas en arriére. A la fuite de-ce que nous
avons rapporté en 1733, M: du Fay a examiné quels chan-
‘gements pouvoient apporter aux phénomenes de F'Ele@ri-
cité les différentes circonftances de la température & de la
rarefaétion ou condenfation de Air.
* Les nouvelles expériences ont confirmé que humidité
A ÿj
HisToiRE DE FÂACADEMIE ReyALE
de FAir nuit beaucoup à la vertu Electrique, & cela à tel
point qu'une journée que lon croira féche, ne le fera pas
aflés, parce que les précédentes auront été fort humides.
Le grand chaud eft contraire auffi à cette vertu, & même
les heures les plus chaudes d’un jour ordinaire. L’eüt-on
deviné, après avoir vü que les Corps chauflés avant le frot-
tement en devenoient plus Electriques ? Peut-être cependant
cela vient-il, non de la part du Corps frotté, mais de
l'Homme qui le frotte, dont la tranfpiration alors trop
abondante & trop chaude a quelque chofe d'oppolé aux
écoulements, aux Fourbillons éleétriques.
Un jour médiocrement chaud, ferein & fec, un vent de
Nord, font jufqu'à préfent les circonftances les plus favo-
rables. La Gelée a été éprouvée, & pourroit ne le ceder à
aucune autre.
La plus grande merveille eft que Air ou fort rarefié ou
fort condenfé diminuë également la vertu Electrique, elle
a befoin de l'air libre & ordinaire, & les deux extrémités
oppolées entre elles lui font auffi oppofées. Cela eft bien-
“tôt dit, mais on ne peut voir que dans le récit de M. du
* V.PHift.
de 1707.
p- 2. & 3-
Fay combien il a fallu d'invention & d'adrefle pour par-
venir à faire les expériences de l'Ele@ricité dans un air où
extrémement rare, ou extrêmement denfe. L'art de faire
lobfervation eft fouvent une découverte auffi difficile que
celle qu'on cherche par l'obfervation.
Après tout cela, M. du Fay eft venu à l'examen d'un
phénomene des plus frappants. On fçait que la plüpart des
Corps devenus Eleétriques par le frottement, deviennent
auffi lumineux par le même frottement, du moins pendant
qu'il dure. C'eft cette propriété que M. du Fay confidere
préfentement.
Le fameux Diamant, dont M+ Boyle à fait un Traité,
auroit feu fuff pour engager M. du Fay à commencer fes
recherches par les Diamants. On fçavoit déja qu'il ne luifoit
dans l'obfcurité que comme les autres font auffi étant frottés*,
le privilege que M. Boyle lui avoit attribué n'étoit plus un
la = =
DES SCHENCES, s
privilege, & il left encore beaucoup moins aujourd’hui,
depuis que M. du Fay a trouvé qu'il étoit commun à tous
les Diamants de couleur &c aux Pierres précieufes, quoiqu’en
différents degrés.
I y a plus, & fans comparaifon plus. Quantité de Dia-
mants, quelques Pierres précieufes, le Criftal de Roche, &
plufieurs autres Corps dont on fe douteroit encore moins,
n'ont pas befoin de frottement pour luire dans l'obfcurité,
il leur fut, comme à de vrais Phofphores, comme à Ia
Pierre de Boulogne, de s'être abreuvés de lumiére pendant
un temps, non pas néceflairement au Soleil, mais feulement
à l'ombre durant le jour. Quel chemin depuis le Diamant
de M. Boyle jufques-là ! M. du Fay fe rélerve à l'examen
particulier de ce fujet, qui doit être piquant par fà nouveauté,
mais qui n'appartient pas à l'Eleétricité dont il s’agit ici,
car ces nouveaux Phofphores ne font nullement Electriques,
il leur manque la condition effentielle d’avoir été frottés. Is
ont dù furprendre, s'il eft arrivé par hazard qu'on en ait
tranfporté brufquement quelqu'un du Soleil ou du jour dans
un lieu aflés obfcur, on aura vû une lumiére dont on ne
connoifloit aucune caufe, & de-là feront venus les contes
de l'Efcarboucle, un peu plus fondés que de fiers Philofophes
ne penfoient.
Dans les Corps électriques & lumineux en même temps
par le frottement, la matiére qui fait l'électricité ou le T'our-
bilon éleétrique doit être différente de celle qui fait la lu-
miére. C'eft-là ce qu'indiquent plufieurs expériences où l’on
voit ces deux propriétés varier différemment l'une de l’autre
dans les mêmes fujets & dans tes mêmes circonftances, l’une
augmenter tandis que l'autre diminuë, mais ce qui décide
promptement & nettement, c’eft qu'un Diamant mouillé
ou fimplement humeété avec fhaleine, perd auffi-tôt toute
fon électricité, & conferve toute fa lumiére auffi long-temps
qu'il l'eüt confervée naturellement.
La lumiére excitée par le frottement eft plus vive & plus
abondante dans le Vuide que dans l'air libre.
À iÿ
6 HisToiRE DE L'ACADEMIE ROYALE
Q'un globe de verre dont on a pompé Fair foit tourné
rapidement fur fon axe, il ne faut que toucher avec la main
fa furface extérieure, auffi-tôt il paroïît lumineux dans tout
fon intérieur, & il ne le paroïîtra pas davantage quand on
appuyera Ja main avec plus de force, quoiqu'alors le frotte-
ment foit plus fort. Si le globe étoit plein d'air, & tourné
de même, & frotté, on en verroit fortir de petites parti-
cules brillantes qui iroient s'attacher aux corps voifins. La
lumiére fe porte ou au dedans ou au dehors du globe, &
fous une forme différente, felon que le globe eit vuide ou
plein d'air.
Si on frotte dans l’obfcurité avec la main une Pomme
de canne qui foit d'Ambre, qu'on retire enfuite la main
brufquement de deffus la Pomme fans la gliffer, & qu’enfin
on approche le bout du doigt de cette Pomme, même fans
la toucher, il part aufli-tôt de l'Ambre un petit Cilindre
de fumiére qui va frapper le doigt, retourne du doigt à
YAmbre, & fe divife fur fa furface, s’'éparpille en petits
rayons, & difparoït dans l'inftant. Il femble que le frottement
ait produit fur la furface de Ambre une lumiére confufe,
un petit chaos lumineux, que le doigt en {e portant vers là,
ou en s’y plongeant, a obligé quelques parties à prendre
quelque arrangement plus régulier, peut-être à fe mouler
fur lui, après quoi tout le refle du phénomene s’entendroit
avec moins de peine. :
Ce qu'il y a de bien certain, c'eft que fi on me fe fert
pas de fon doigt pour faire fortir de l Ambre ce petit cilindre
de lumiére, & qu'on employe quelque autre corps pour cé
mème effet, l'effet fera plus foible où même nul, felon que
ce corps fera d'une électricité plus approchante de celle de
YAmbre, ou, comme il a été dit enr733, plus propre à
être repouñé par Ambre, ou même moins propre en général
à s'électrifer. Rien n’eft plus contraire à la vertu éleétrique
que l'humidité; le doigt & pareïllement tout autre corps qui
pourra tirer de l'Ambre ce jet de Jumiére, le tirera mieux
s'i eft mouillé. Ce que nous difons de lAmbre, il le faut
DE -SUSVENRREUN. € E à, >
entendre aufli de la Gomme Copal, de Ja Cire d'Efpagne,
du Soufre.
Tous les Diamants que M. du Fay a éprouvés font de-
venus par le frottement électriques & lumineux, tantôt plus
électriques que lumineux, tantôt au contraire, mais toüjours
lun & l'autre, & avec des variétés qui ne fe rapportent
conftamment, ni à leur grofleur, ni à leur netteté, {eule-
ment peut-être à leur forme, ceux qui font plats & ont
une grande table font moins électriques & moins lumineux
que les Brillants élevés. Il en va de même des Diamants de
couleur & des Pierres précieufes pour la quantité de variétés
bizarres en apparence, & difhciles à réduire fous quelque
ordre.
Nous nous contenterons de rapporter encore les deux
plus remarquables expériences qui appartiennent à l’éledri-
cité lumineule, la 1€ düë aux Anglois, da 2de à M. du Fay.
Si ce globe de verre vuide d'air, & tourné rapidement {ur
fon axe, qui paroît lumineux en dedans lorfqu’on y applique
la main, étoit de plus enduit intérieurement de Cire d'Ef
pagne (on apprendra dans le Mémoire de M. du Fay com-
ment fe fait cet enduit) on verra un fpectacle auquel on ne
fe feroit certainement pas attendu, l’image de la main qu'on
tenoit appliquée fur le globe, peinte fur la furface intérieure
& concave de la Cire d'Efpagne, comme fi la main étoit
lumineufe, & la Cire d'Efpagne tranfparente. Il faut qu'on
- ait réfervé deux endroits du globe, comme les deux Poles,
exempts de l'enduit de Cire, afin qu'on puifle voir par-là.
Si le globe vuide d'air n’avoit point eu l'enduit de Cire en
dedans, lapplication de a main y auroit fait paroître une
Jumiére plus vive dans les endroits touchés que par tout
ailleurs, & cette lumiére eût été continué. Reprenons main-
tenant enduit de Cire, & fuppofons qu'il fera pénétré par
la matiére lumineufe.qu’on peut imaginer fortie de la main,
ou au moins pouflée par la main, il y aura dans es inter-
valles des doigts des interruptions à la lumiére qui eût été
. continué, & des interruptions figurées , d’où l'on voit que
8 HisToiRE DE L'ÂCADEMIE Royazr
s'enfuit l’image de la main fur la jurface concave de l’enduit.
Voilà ce que penfe M. du Fay fur cette repréfentation ff
furprenante. D'autres matiéres appliquées fur le globe au lieu
de la main, ou ne font point du tout la lumiére, ou ne la
font pas à beaucoup près fi bien.
La feconde expérience va prouver que fa lumiére des
Corps électriques peut aller jufqu'à être un feu, ou fe com-
mencement d’un feu. On fufpend une perfonne par des cordes
de foye , afin qu'elle foit ifolée de toutes parts, & que le
Tourbillon de matiére électrique qu'on va lui donner ait
toute fon étenduë, & ne foit point détourné ou altéré par
des Corps voifins. On lui donne enfuite ce Tourbillon par
le Tube de verre qui l'éerife, après quoi fi lon approche
la main de la perfonne fufpenduë & électrilée, il fort d'elle,
à l'endroit le plus proche de la main, une étincelle de feu
plus vive, plus brillante que les lumiéres de toutes les autres
expériences, & , ce qui la diftingue encore, elle fort avec
un bruit fenfible, & ce n'eft pas tout, elle caufe aux deux
perfonnes en même temps une douleur femblable à celle
d’une picqueure ou d’une brülure légere,
Un Animal vivant, comme un Chat, mis de même en
expérience, réuflit également. Il eft à remarquer que fi
Animal étoit mort, on ne verroit plus Fétincelle brillante
& brufque, mais une lumiére pâle & uniforme, &, pour
ainfi dire, lugubre. |
Les matiéres qui font les plus électriques, le Verre,
Ambre, font les moins propres à tirer de l’Animal éleétrifé
cette étincelle par l’attouchement, & au contraire les matiéres
qui la tirent le mieux font les moins électriques, les métaux,
les corps mouillés, le bois, les corps vivants. Apparemment
on ‘eft préfentement accoûtumé à ces convenances fondées
non fur la reffemblance, mais fd’oppofition. Combien tous
ces faits fi finguliers ont-ils demeuré de temps enfevelis dans
le fecret de la Nature? combien d’autres pareils y font encore?
& en fortiront-ils jamais tous?
SUR
DES SCIENCES. 9
u
SUR LES CONGELATIONS
ARTIFICIELLES.
IEN n'eft fi connu que la maniére de faire geler des . 1es M.
R Liqueurs, malgré le chaud de la Saïfon, & ce feroït p. 167.
eut-être une expérience fimplement curieufe, renfermée
chés les feuls Philofophes, fi elle ne produifoit ces Glaces
que notre délicatefle nous rend fi néceflaires en Eté, &
même en Hiver , quoïqu'avec moins de raifon. I n’eft pas
encore bien réglé quels font les Sels les plus propres à donner
ou le plus grand froid, ou le froid que l’on veut, quelles
font à cet égard les différentes vertus des Sels, en quelles
dofes ils doivent être avec la Glace pilée* ou pulvérifée que
l'on employe à cette opération ; cependant on n’a pas laïflé
de faire de belles expériences fur ce fujet , mais on s’eft preffé
d'aller aux curieufes, & on a paflé légerement par deflus les
fondamentales , qui font celles que M. de Reaumur a entre-
prifes ici.
I y a été invité par fon nouveau Thermometre dont
nous avons parlé en 1730 * & 1731*. Ï avoit en main *p.9
tine nouvelle mefure du froid aufli-bien que du chaud, plus & fuiv.
exaéte & plus füre que l'ancienne, & c'étoit précifément ce gg,
qu'il lui falloit pour ces expériences fondamentales des Con-
gélations artificielles. Le nouveau Thermometre, qui a été
cônftruit fur une de ces Congélations, devient énfuite la
regle, & en quelque forte le juge de tout ce qui Fa fait
naître. On le plonge dans la Liqueur qu’on a glacée, & on
voit par fa defcente quel eft le degré du froid, degré que
Yon peut aifément & fûrement comparer à quelque autre
degré de froid que ce puifle être, obfervé avec un autre
Thermometre de même conftruétion. On part toûjours ici
du point de cés Thermoméetres qui marque la Congélation,
parce que c'eft la premiére & la moindre congélation de
Yeau, celle qui n'attaque encore que fa fuperficie, après cela
B
Hifi. 1734 :
10 HISTOIRE DE L'ACADEMIE RoYaLrE
les degrés marqués font toûjours ceux d'un plus grand froid,
Le Salpêtre pafle communément pour le Sel Je plus pro-
pre aux Congélations artificielles, mais les expériences de
M. de Reaumur nous jettent bien-loin de-là. Le Salpêtre le
plus raffiné, employé dans l'opération, ne fait defcendre le
Thermometre qu'à 3 + degrés au deflous du terme fixe que
nous venons de pofer, & sil eft moins raffiné, il le fait
defcendre plus bas. Ce qui caufe cette plus grande defcente,
ou ce plus grand froid, c’eft donc la partie du Salpêtre qui
le rend alors moins pur, moins Salpêtre , & quelle eft cette
partie ? c’eft prefque uniquement du Sel Marin, qu'on lui ôte
en le purifiant par les trois Cuites qu’on lui fait confécuti-
vement.
En effet M. de Reaumur ayant mêlé dans des jours très-
chauds deux parties du Sel Marin qu'on fert fur les tables
avec trois parties de Glace pilée, le Thermometre eft dans
l'inftant defcendu de 1 $ degrés, & il faut fçavoir que dans
le violent Hiver de 1709, le plus rude qu’ait v la géné-
ration préfente, le nouveau Thermometre, qui n'exiftoit pas
encore, n'eût pas été plus bas que 14 + degrés. On le fçait
par le rapport connu de ce Thermometre à ceux qui étoient
alors à l'Obfervatoire.
Si le Salpêtre moins pur, plus mélé de Sel Marin , fait
plus baifler le Thermometre, voilà donc une maniére nou-
velle & fort fimple d’en éprouver la qualité. Le meilleur ne
donnera que 3 + degrés de froid, les autres plus mauvais en
donneront toüjours davantage. Il auroit pü d’abord paroître
étrange que la vertu de caufer une grande inflammation, qui
eft celle qu'on recherche tant dans le Salpètre, on eût voulu
la reconnoître par fa vertu refroidiffante. La Poudre à Canon
n'eft prefque que du Salpétre, car elle en a-trois parties fur
une qui eft de Soufre &.de Charbon en portions égales.
Auffi la Poudre à canon mife à la même expérience que le
Salpêtre at-elle fait de même, & vü l'incertitude & les dé:
fauts des autres Eprouvettes, il y a apparence que celle-ci
feroit préférables
io Es 0S CPU CE 5: ar
M. de Reaumur a bien profité de fon Thermometre pour
voir au jufte quels étoient les différents degrés du plus grand
froid que puifient produire les différents Sels, la dofe conve:
nable pour chacun étant toüjours fuppofée. Aucun Sel con-
cret ou moyen n'a égalé le Sel Marin, qui, comme nous
lavons vû , donne 1 $ degrés de froid. Dans la Claffe des
Alkalis le Sel Armoniac qui pafle pour fi actif à cet égard,
m'a été qu'à r3 degrés, la Soude au même degré que le Sat,
pètre bien raffiné, Un plus grand détail nous feroit inutile,
i fuffit que l’on voye, & on le verra aifément , que par ces
fortes d'expériences faites en aflés grand nombre, on pourroit
drefler des T'ables où le degré du plus grand froid que puiffe
donner chaque Sel lui feroit afligné , après quoi on caractéri-
eroit chaque froid, obfervé d’ailleurs, par le nom de fon Sel,
ce qui feroit quelque chofe de plus particulier & de plus
diftinétif que le nombre d’un degré de Thermometre.
Nous n'avons encore confidéré ce fujet qu'avec des yeux
de Phificiens, &‘à continuer de cette forte, il ne feroit
queftion que d'aller toüjours plus loin d'expérience en expé-
rience. Mais l'Art de faire des Glaces n’eft pas étranger ici,
& il eft bon de s’y arrêter un peu, & de faire des réfléxions
qui lui conviennent. Il ne s’agit point dans cet Art d'avoir
1e plus grand froid qu'il {e puiffe, on ne veut pas des Glaces
d'une extrême ni même d’une grande dureté, au contraire
on les veut légeres, & qui ne foient, comme on dit, que
des Neiges. C’eft pour cela qu’on s’accommodoit fi-bien du
_ Salpêtre, il avoit même l'avantage, dont on ne s'apperce-
"voit peut-être pas, qu'étant mauvais il en valoit mieux pour
cet ufage. Il eft rarement néceflaire que des Glaces fe faflent
fort promptement, mais il left, fur-tout pour les Marchands,
qu'elles fe confervent un aflés Iong-temps fans fe fondre,
Enfin le prix des Sels qu'il faut employer n’eft pas tout-
à-fait indifférent. Ces différentes conditions fe combinent
différemment enfemble & forment ainfi comme autant de
petits Problemes que M: de Reaumur réfout. Si l’on veut
des Glaces qui fe faffent très-vite, & foient très-froides &
B ij
12 HisToire DE L'ACADEMIE ROYALE
très-fortes , il faut le Sel Marin, elles ne feront que trop
fortes & trop froides, mais elles coûteront cher en ce païs-ci,
& ce qu'on n’auroit peut-être pas crü, elles fe conferveront
u. Au contraire la Soude d’Alicant donnera des Glaces
du degré de froid qu’on les veut ordinairement, qui fe con-
ferveront aflés, & ne coûteront guere, mais qui fe feront
formées plus lentement. M. de Reaumur a trouvé une autre
matiére à beaucoup meilleur marché que la Soude, & qui
fait à très-peu près les mêmes effets, & au même degré, une
matiére à laquelle on ne s’aviferoit pas de s'abbaïfer dans
une recherche où l'on eft parti du Salpètre & du Sel Marin,
c'eft de fimple Cendre de bois, pourvü que ce bois foit neuf.
On voit par toutes les expériences, & jufqu'à préfent fans
exception, que le mélange d'une matiére quelconque avec
la Glace pilée ne caufe un nouveau froid que parce qu'il fait
fondre cette Glace. Quand on trouve moyen d'empêcher
qu'il ne la fafle fondre, nulle produétion nouvelle de froid.
Reprenons maintenant la pure Phifique, & ne nous
arrêtons plus à des pratiques, & à des opérations qui peuvent
avoir d’autres vüés que les fiennes. Nous n'avons encore
parlé que des Sels ou concrets ou Alkalis, qui font les uns
& les autres en forme féche, mais nullement des liqueurs
fpiritueules & Acides qui fe tirent des Sels concrets, & qui
apparemment participent à leur vertu de produire du froid.
Elles font plus qu'y participer, elles Font à un plus haut
degré. De l'Efprit de Nitre, qu'on aura eu foin de refroidir
jufqu'au point de la Congélation du Thermometre, étant
verfé fur de la Glace pilée, dont le poids foit environ double
du fien, on verra aufli-tôt le Thermometre defcendre avee
vitefle jufqu’à 19 degrés, & par conféquent on aura unfroiïd
de 4 degrés plus fort que celui qu'avoit donné Ie Sel marin,
le plus efficace des Sels concrets.
On peut donner & à l'Efprit de Nitre & à la Glace pilée
un plus grand froid que celui de la Congélation, il n’y a
qu'à environner ces deux matiéres de Glace mêlée avec du
Sel Marin, & fi après les avoir ainfi préparées on Îes éprouve,
D Es S'cuABiNAC: ES 13
on trouve qu'on a.produit un froid de près de 24 degrés,
c'eft-à-dire, qui eft à celui de 1709 prefque comme 1 2 à 7.
En fuivant cette même voye, en refroïdiflant davantage le
mélange d’'Efprit de Nitre & de Glace, on aura encore de
plus grands degrés de froid. M. de Reaumur n’en'a pas trouvé
le terme, il voit feulement que les augmentations du froid
vont toüjours en décroiflant, ainfr qu'il étoit raifonnable de
le conjecturer.
Mais ce qu'on n'eût pas deviné, c’eft que le Sel Marin
étant fi fupérieur au Salpêtre par rapport à l'effet dont il
s'agit, l'Efprit de Sel eft cependant inférieur à l'Efprit de
Nitre. Quelle bizarrerie, qui n’en eft pourtant pas une au
fond ! Le vrai Sifteme n’en admet pas.
C’en eft encore une de même efpece que le froid caufé
par une liqueur qui ne paroît être qu'un feu liquide, par
TEfprit de vin. Employé précifément de la même façon que
TEfprit de Nitre, il s’en faut peu qu'il n'en égale la force
pour une produétion qu'on n'eût pas crü leur devoir être
commune.
: Le mélange d’une matiére quelconque avec la Glace pilée
ne caufant, comme nous l'avons dit, un nouveau froid que
parce qu’il fait fondre la Glace, il s'enfuit d'abord que c'eft-là
dans chaque opération le moment du plus grand froid , car
après cela l'air extérieur, qu'on fuppofe toüjours plus chaud,
ne peut plus que diminuer toûjours ce froid étranger & forcé.
TL fuit encore que plus la fonte de la Glace fera prompte,
plus le froid fera grand ; il feroit à fouhaiter que cette fonte
pôt être inftantanée, toutes les parties de la Glace donne-
roient leur plus grand froid en même temps, & pour cela
il faudroit que chaque particule de Glace fût attaquée en.
même temps par une particule de Sel capable de la fondre,
ce qui demande que la Glace & le Sel foient atténués, pul-
vérifés jufqu'à un certain point, car ils ne peuvent l'être à
Yinfni, ou autant que la derniére perfection l'exigeroit.
De-là naït une Regle, non pas abfolument précife; mais
fufffante, pour déterminer à peu-près la dofe du Sel qu'on
ilj
14 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE
mêlera avéc la Glace. On fçait par expérience combien une
certaine quantité d'eau peut fondre d'un certain Sel ; fi fon
pouvoit divifer la Glace & le Sel en parties infiniment
petites, il faudroit mettre le Sel en même quantité que la
Glace, ou fi lon veut ici une plus grande exactitude géo-
métrique , & concevoir les infiniment petits de la Glace &
ceux du Sel inégaux, il faudroit mettre le Sel dans la dofe
indiquée par la quantité de ce que l'eau en peut fondre.
Mais comme on ne va pas jufqu’à l'infiniment petit, il faudra
que cette dofe foit plus forte, & même aflés confidérable-
ment. Comme les particules de Glace ne feront attaquées
qu'en différents temps, il faudra du moins que la force dont
feront attaquées celles qui le feront, répare ce defavantage.
Quand on aura trouvé quelle eft la meilleure dofe pour
le Sel Marin, il fera aïfé de voir que d’autres Sels, dont l’eau
ne peut pas fondre une aufli grande quantité, devront être
employés en moindres dofés, & au contraire.
Les Liqueurs qui, auffi-bien que les Sels, font capables
de produire du froid, les Efprits Acides, F'Efprit de vin,
font, pour ainfi dire, plus libres dans leur action, & exercent
avec plus d’aifance que les Sels, ils pénétrent en un inftant
la Glace, & l'attaquent vivement de toutes parts. Seulement
il eft indifpenfable, pour la produétion du froid, que de
ces Liqueurs & de la Glace fonduë il fe faflé un nouveau
liquide parfaitement liquide, ou dont les parties foient bien
mélées. Des Huiles fondront bien la Glace, mais elles ne fe
méleront pas avec l'eau qui lui fuccédera, & il n’y aura
aucun nouveau froid.
M. de Reaumur, après s'être procuré des moyens fi faciles
& fi fürs de produire & ER les plus grands froids,
voulut en jouir par des expériences qui lui appriffent quelque
chofe ou d'intéreflant ou de curieux, par exemple, quel degré
de froid eft néceffaire pour tuer certains Infeétes, c’eft-à-dire,
pour geler les liqueurs qui font leur vie ; il eft bien für
qu'alors leur corps perd toute fi molleffe, toute fa foupleffe,
& devient tout roïde,
DE $x S CHEN CE « 15
«y a quelques efpeces de Chenilles qui gelent à 7 ou 8
degrés de froid, d'autres plus petites, & abfolument fort
petites, & très-délicates en apparence, foûtiennent fans fe
geler 17 degrés, 3 degrés de plus que le froid de 1 709
Malheureufement celles-ci font les plus communes, & font
celles qui font le plus de ravage. Il n’y a donc pas lieu de
fe confoler de la rigueur d’aucun Hiver par l’efpérance qu'il
exterminera ces Chenilles. ;
Cependant le fang de ces fortes d'Animaux ne paroît
guere qu'une liqueur aqueufe, qui devroit être très-fufceptible
de congélation. Le fang des grands Animaux le paroît beau-
coup moins, & left réellement beaucoup davantage. Quand
fçaura-t-on dans ces matiéres-là plus que les faits, qu'il eft
pourtant toüjours très-curieux & très-important de fçavoir?
OBSERVATIONS
DE PHISIQUE GENÉFRALE.
I.
M HELVETIUS à communiqué à l’Académie la Re-
lation fuivante, qui lui avoit été envoyée par le
Gouverneur de Surinam ps parent. Elle a été faite par M.
de Treytorens, Médecin, témoin oculaire.
H y avoit, au temps que la Relation a été écrite, oouro
mois qu'une Néprefle efclave , grande & bien faite, & qui
avoit déja eu quelques Enfants, en accoucha d’un qui parut
fort fingulier. 11 étoit grand, bien formé, très-blanc, couleur
qui lui a toûjours duré. Toute fa phifionomie, tous les traits
de fon vifage, étoient d’un Negre, les Levres grofles &
relevées, le Nés écrafé & camus. De plus ä avoit comme
les autres Negres de la Jaine à la tête, mais une laine auffi
blanche que de la Neige. Quoique fort expofé au Soleil
pendant tout le temps où ceci eft renfermé, il mavoit point
tougi, non plus que la laine de fa tête. Le blanc de fes yeux
16 HisToire DE L'ACADEMIE RoyALE
étoit fort clair, ce qui n’eft pas rare, mais fon fris étoit d'un
rouge fort vif, & couleur de feu, marbrée feulement de
quelques traits blancs tirants fur le bleu ; la Prunelle que nous
ne connoiflons que noire, & qui doit l'être puifque c’eft
un vuide, étoit aufli très-rouge. Cet Enfant ne vouloit pas
ouvrir les yeux quand il faifoit un Soleil vif & violent, hors
de-là il les ouvroit, & voyoit dans un lieu peu éclairé.
Lorfqu'il vouloit fixer la vûë fur quelque objet, fon Iris &
fa Prunelle prenoient un mouvement extrêmement rapide,
comme d'un tournoyement autour de leur centre, & il
fembloit que l'Enfant fe füt mis tout d’un coup à chercher
quelque chofe des yeux avec beaucoup d'inquiétude. I avoit
le Piam, maladie ordinaire aux Negres, & n'en avoit encore
rien perdu de fon embonpoint. Ses dents continuoient de
poufler, & il en avoit déja cinq. I paroïfloit peu intelligent,
& deftiné à être imbecille.
La grande queftion eft de fçavoir qui étoit fon Pere. Ce
n'étoit pas un Noir, paie la Mere le dit. IL eft bien vrai
que les Enfants des Noirs naïflent blancs, à l’exception d'un
peu de noir aux parties génitales & à la racine des Ongles,
mais quelques jours après leur naïflance, ils changent, &
deviennent noirs. S'ils font Mulitres, enfants d’un Blanc &
d'une Noire, ils deviennent rouges. On reconnoïît à ces
marques les différentes origines, & elles ne peuvent être
long-temps douteufes, Quant à Enfant dont nous parlons;
il étoit encore parfaitement blanc à 9 ou 10 mois.
Son Pere n'étoit pas non plus un Blanc. D'où lui feroient
venus tous ces traits de Negre fr marqués, cette laine au lieu
de Cheveux? D'ailleurs la Mere avoit déja fait un Mulitre,
& n'avoit pas caché qu'il étoit venu d’un Blanc, pourquoi
lauroit-elle caché cette fois-ci comme elle faifoit obftiné-
ment ? II eft conftant encore que les Noires fe tiennent ho-
norées d’un commerce avec les Blancs, & ne manquent pas
de s'en vanter.
I eft parlé dans quelques Relations d'Afrique de certains
peuples blancs, ou du moins s'ils font en trop petit nombre;
de
DES SCIENCFES T
de certains hommes blancs, qui habitent dans le païs des
Noirs. On remarque particuliérement qu'ils ont la vüë extré-
mement foible, qu'ils ne peuvent prefque pas foûtenir le
jour, & qu'ils ne fortent que la nuit de leurs Cavernes ou
taniéres Les Noirs ne les traitent pas d'hommes, & les
chaflent comme des Bêtes. On voit affés la reflemblince que
l'Enfant de la Négrefle pourroit avoir avec eux, & ce qui
fémbleroit d'abord confirmer cette idée, c’eft que 11 Relation
de Surinam porte expreflément que de vieux Negres amenés
de la Côte de Guinée, ont dit qu'ils ont vû en cette contrée :
des Enfants blancs dans des endroits où il ne va jamais de
Blancs, mais que leurs Chefs les font bien-tôt périr. On
conçoit bien qu'un Blanc d’Afrique auroit rencontré la Né-
grefle en Afrique, & que de-là feroit venu l'Enfant, mais
comment l'aura-t-il rencontrée en Amérique? comment ÿ
feroit-il venu ? ne l'y auroit-on pas vü ! il eft vrai que quel-
ques-uns difent qu'il y a de ces Blancs en Amérique. On à
encore bien des éclairciffements à fouhaiter fur ce Pere qu'il
feroit fi curieux de connoître.
PRr'it > it: bass
M: le Duc de Richemont a écrit à M. du Fay que le:$1
Novembre de cette année, à 3 heures & demie après minuit,
il y eut un tremblement de terre à Chichefter dans la Pro-
vince de Suflex'en Angleterre. Toutes les Maifons, les Lits,
les Meubles, ont tremblé, des portes fe font ouvertes, des
Cloches ont fonné, ce qui étoit pofé fur dés bords de Che-
minées eft tombé. On difoit que le tremblement avoit été
encore plus fenfible à Portfmouth & à Arondel. On obférva
que cétoit moins un tremblement qu'un balancement du.
Nord au Sud femblable au tangage d'un Vaïfleau en ce:
fens-là; car tous ceux qui étoient couchés dans la-direction
du Nord au Sud fentirent-wn mouvement de la tête. aux
ieds , & ceux qui étoient couchés dans la direction de l'Eft
à l'Oueff, ne fentirent qu'un mouvement femblable au roulis
d'un Vaifleau, ou à celui du Berceau d’un Enfant.
«M: Bouguer; qui étoit au Havre, a écrit qu'on y: fentit
Hi 1734 -
73 HisTOIRE DE L'ACADEMIE Royare
le méme jour, entre 3 & 4. heures du matin, trois ou quatre
légeres fecouffes. On en fentit auffi de l’autre côté de Ia
Seine. On n’a point eu d’autres nouvelles fur ce fujet, & il
n'y à pas d'apparence que lé tremblement ait eu plus d’éten-
duë en France. H n'aura été que le foible commencement de
celui d'Angleterre.
Ge année parut un Livre de M. de Réaumur, intitulé
<s Mémoires pour fervir à l'Hiffoire des {nfectes. Tome 1. Sur
es Chenilles, & Jur les Papillons. On comprend aflés par ce
Titre que M. de Reaumur a en vüûë un deffein fi grand &
f: vafte, qu'il ne prétend pas le remplir entiérément, mais
feulement aider à le remplir, fr on peut entreprendre quel-
que jour, & que cé qu'il donné préféntement au Public n’eft
qu'une partie de ce qu'il lui donnera.
Les /nfedtes, felon la force du mot, ne font que les Ani-
maux dont lé corps et comme coupé par des efpeces d’An-
neaux qui en divifent la longueur, mais l’ufagé commun
étend ce mot plus loin, on appelle /fecfes tous les petits
Animaux très-différents des grands par leurs figures, mé-
prifables par leur petiteffe, ou haïffables par les dommages
qu'ils nous caufent. Ils font peut-être auffi-bien définis par
ce mépris & par cette haine, que par une définition plus
réguliére qui féroit apparemment très-difhcile.
Cépendant fi lon jugeoit que les Animaux que Ja Nature
a eu principalement deffein de produire font ceux qu'elle a
produits en plus grand nombre, je dis plus grand mème par
rapport aux différentes efpeces, if f trouveroit que cette
forte de prédileétion de la Nature feroit toute éntiéres &
prefque infinie en faveur des Inféétes. H-y a des Infectes
fur da Terre, dans l'Air, dansroutes fes Eaux, & il y a dans
chacun de ces trois Eléments fans comparaifon plus d’Infeétes
que de grands Animaux qui leur appartiennent.
On pourroit croire que les Infectes font en plus grand
nombre, parce qu'étant beaucoup plus petits, ils font plus
DIE S CHMENCÆS: EH vx)
aifés à nourrir, mais cette raifon w’auroit lieu que pour la
multitude des Individus, & non pour celle des différentes
Efpéces, beaucoup plus grande que dans'aucun Genre connu
.des grands Animaux. Pourquoi tant de foin de varier les
Efpeces dans des Genres qui par eux-mêmes.feroient des
objets peu importants? "
Mais, ce qui fera encore beaucoup plus fort, pourquoi la
Nature a-t-elle employé tant d’art à la formation des Infedes,
que les grands Animaux paroiflent prefque en comparaifon
des ouvrages négligés? N'y eût-il que les Métamorpholes ou
transformations communes à da plus grande partie des In-
ectes, elles demandent une plus fine Méchanique, plus de
- reflources d'invention que les Machines des grands Animaux,
_toüjouxs conflantes & invariables pendant leur durée.
Encore plus. Les grands Animaux, ou font totalement
privés d’induftries particuliéres, comme les Bœufs, les Che-
vaux, les Moutons, ou s'ils en ont quelques-unes, comme
les Oifeaux pour da conftruction de leurs Nids, elles ne font
“pas comparables à celles d'une infinité d’Infectes, aux Ruches
des Abeïlles, aux Coques des Chenilles, &c. Si l’on veut
“bien honorer du nom d’efprit les inftinéts naturels des Ani-
maux, des Infeétes font certainement ceux qui ont le plus
.d'efprit, &c fi cet efprit dépend, comme en nous, des difpo-
- fitions organiques du Cerveau, les Infectes font ceux de tous
les Animaux dont le Cerveau eftle plus & le mieux travaillé.
ds font donc bien éloignés d’être des ouvrages de là Na-
. ture méprifables, ou même peu dignes de notre attention.
“Les yeux des Philofophes fçavent bien leur rendre plus de
juftice, ils découvrent en eux les plus furprenantes merveilles
-que la fouveraine Intelligence ait répanduës fur notre Globe,
& la profonde admiration qu’on lui doit, en redouble.
Mais outre cette utilité plus que philofophique, & qui va
- jufqu'au théologique, l'étude des Infeétes peut en avoir d’au-
tres plus grofliéres, & par conféquent plus frappantes pour
: Je commun des hommes. Si on avoit dédaigné d’obferver
une efpece de Chenilles, nous ferions privés LA lSoye, &
EN rh
20 H1STOIRE DE L'ÂACADEMIE ROYALE
quelle perte ne feroit-ce pas pour les commodités & les
agréments de la vie, même pour la Médecine, qui {çait tirer
de la Soye un fi bon remede ? Ce font des Fourmis des
Indes qui nous donnent la Laque, des efpeces de Punaifes
d'Amérique qui fourniflent la Cochenille, & fans entrer dans
un plus long dénombrement des différents profits dont nous
font aétuellement les Infectes, ne fera-ce pas une autre forte
de profit toute contraire & auffi avantageufe que de fçavoir
détruire ceux qui nous font nuïfibles, quand nous les aurons
aflés étudiés ? M. de Reaumur a déja trouvé ce fecret à
# V. les M. l'égard des Teignes qui gâtent nos Etofles de Laine *. Les
œ 17260 connoiflances qui demeureront inutiles par rapport à ces
En 11. ufages fenfibles & populaires, car aflürément ilen demeurera,
& fuiv. feront la portion & le domaine propre des Philofophes.
Ce n'eft que depuis aflés peu de temps que l'on s’eft mis
à étudier les Infectes bien férieufement, & avec méthode,
& il eft facile de compter ceux qui s’y font appliqués. Dans
cette Science naiflante & peu cultivée, M. de Reaumur a
trouvé beaucoup à faire, & beaucoup plus que n'en peut
faire un feul homme, & un feul Siéde, même en fe ren-
fermant dans quelques efpeces particuliéres d’Infeétes. Ce
font une infinité de petits faits qui fe cachent aux yeux pour
la plüpart, qui, s'ils fe montrent, pañlent en un inftant, &
alors même s’enveloppent encore dans une forte de miftere,
Un moment manqué pour l'obfervation ne fe retrouve plus,
& il n'y a qu'un hazard heureux qui puiffe non feulement
le donner, mais enfeigner quel eft ce moment important
qu'il faut attendre, & enfuite faifir. Il eft très-difficile de
bien voir, & très-difficile de fçavoir feulement où l'on doit
principalement porter fa vüë. Les yeux qui le plus fouvent
ont befoin d'être armés d’une Loupe ou d'un Microfcope,
ont encore plus de befoin de l'être d’un efprit pénétrant qui
apperçoive au de-là des Microfcopes & des Loupes. A peine
linduftrie d'un Homme peut-elle bien découvrir toute celle
d'une Chenille qui travaille à fa Coque.
On verra dans tout le Livre de M, de Reaumur jufqu'à
À
D'E su" S'EMEMNTOE) 6. 2x
uel point il a porté l'afliduité, la patience, a fagacité de
Yobfervation. Il fait le récit des difhcultés qu'il a trouvées,
des expédients qu'il a imaginés pour les vaincre, des hazards
qui l'ont ou traverfé ou favorifé, de ce qui lui a fait ou
prendre ou rejetter certaines idées, enfin de toutes fes aven-
tures, pour ainfi dire, & de toute fa conduite danse païs
peu connu où il s'étoit engagé, & qu'il défrichoit pour la
plus grande partie. Cette Relation du Voyage, agréable par
elle-même, fera de plus inflructive pour d’autres Voyageurs
qui viendront après lui,
Ce Volume qui eft gros, & qui fera fuivi de plufieurs
autres, ne regarde que les Chenilles. Tout le monde les
connoît, & {çait grofliérement leur Hifloire. Elles fe chan-
gent en ce que le peuple appelle Fées, & les Naturaliftes
Chrifalides, où Aurélies, où Nimphes. Enfin elles deviennent
Papillons, & ne fongent à la propagation de leur efpece qu’en
ce dernier état.
Quand un Naturalifte veut parler du Bœuf, du Cheval,
du Mouton, &c. il n’a qu'à le nommer, on connoît l’Ani-
mal dont il parle, & on lui applique fans peine tout ce qu'on
jen apprend. Mais quand un Naturalifte parlera d’une Che-
nille, comme il y en a une infinité d'efpeces très-différentes
entre elles, on ne fçaura de quelle Chenille il parle, & on
era hors d'état de vérifier, de fuivre, de rectifier, s’il le faut,
ce qu’il aura dit, à moins qu'il n'ait fi-bien défigné & carac-
térifé fa Chenille, qu'on la puifle retrouver fürement.
Pour cela il faudroit avoir fait fur les Chenilles ce que
de grands Botaniftes ont fait fur les Plantes, des diftributions
en Chafles, Genres & Efpeces. On entendra nettement ces
trois termes, pourvû qu’on fe fouvienne que dans une diftri-
bution parëille qui regarderoit les giands Animaux , les Qua-
drupedes , par exemple, feroient une Cafe, les Chiens un
Genre, les Dogues, les Lévriers, &c. des Efpeces. Les carac-
îeres les plus propres à bien défigner ces trois ordres, ce font
les plus fenfibles, les plus frappants, les plus populaires, ceux
qui f manifeftent le plus vite, car il faut que er le monde
C ï
J2 HisToIRE DE L'ACADEMIE2ROYALE
puifle reconnoitre ce dont il s'agit, fans héfiter, & le plus
promptement qu'il fe puifle.
M. de Reaumur s’eft tourné de tous les côtés pour tâcher
de diftribuer les Chenilles en Clafies, Genres & Efpeces,
{oit par leur figure, & par les proportions de leur corps, foit
ar Le nombre de leurs Anneaux, foit par celui de leurs
Jambes écailleufes où membraneufes, foit par certaines
Cornes qu'elles ont quelquefois vers la tête, quelquefois vers
le derriére, foit par des tubercules ou mamelons femés quel-
quefois fur leur peau, foit par les poils qu'elles ont fouvent,
& dont elles font quelquefois privées, foit par la pofition
des touffes ou bouquets de ces poils, foit par les couleurs
difpofées fur leur peau ou en long ou en travers, foit par
les Plantes qui leur fervent d’aliment préférablement aux au-
tres, foit par leur genre de vie, ou folitaire, ou en fociété, &c.
Tous ces principes de différence , très-nombreux par eux-
mêmes, fe combinent fi diverfement enfemble, & fe foû-
tiennent fi peu dans chaque combinaifon, qu’on diroit que
les Chenilles ont voulu fe dérober à tout ordre artificiel de
la Philofophie. Cependant M. de Reaumur n’a pas faiflé
’établir fept Clafes, fous lefquelles il indique comment on
pourra ranger des Genres & des Efpeces. II a déja les moyens
de caractérifer aflés bien les Chenilles, dont il traite, pour
les rendre aifément reconnoiffables.
Ce font-là de ces endroits d’un ouvrage qui ont appa-
remment le plus coûté, & qui intéreflent le moins la pläpart
des Lecteurs. Combien de gens peu curieux devoir jamais
les Chenilles de M. de Reaumur, fe contenteront d'apprendre
& de croire fur fa parole qu’il y en a qui ont telles & telles
propriétés, qui font telles & telles opérations tymais il faut
que des Naturaliftes plés curieux & mieux inftruits travaillent
pour ces gens-là mêmes, &.c’efkpour faciliter le travail des
Naturaliftes que l’on entre dans des difcuflions qui ne font
que pour eux. ee
Nous ne prendrons de tout le Livre de M. de Reaumur
que ce qui peut être du goût de ce plus grand nombre de
D'E:sM:S CNE ce Es 23
Lecteurs, les faits principaux que nous dépouillerons même de
Tingénieux & agréable détail des explications Méchaniques.
I nous meneroit beaucoup trop loin, & fouvent ces faits ainf£
dépouillés feront comme des efpeces d’Enigmes propoées
ar la Nature, & dont le mot ne fera pas aifé à trouver.
Les Chenilles ne paroiffent qu'au Printemps , lorfqu'une
bonne provifion d'aliments différents, felon le goût des diffé-
rentes efpeces, les attend de tous côtés.
Quelques efpeces vivent en communauté, elles fe mettent
plufieurs enfemble à ronger la même feuille; d’autres veulent
vivre folitaires, & ronger chacune leur feuille à part.
à y en a, j'entends des efpeces, qui ne mangent que la
nuit, & fe vont cacher fous terre pendant tout le jour, de
#orte qu'un Jardinier qui a laiflé vers le foir une Plante bien
“exempte de Chenilles, bien faine, eft fort furpris de la re-
trouver le matin toute ravagée fans y découvrir les ennemis.
Quelques efpeces de Chenilles n’ont point, comme toutes
les autres, la faculté d'étendre & de reflerrer, d’allonger &
de raccourcir leurs anneaux, elles ont le corps roide, &
quand ellestfe font accrochées fur une branche par leurs pre-
miéres jambes, elles peuvent s’y foûtenir pendant une heure
entiére, le corps pofé en haut verticalement, de maniére
qu'on les prendroit pour un petit brin de bois. Quelle force
ne faut-il pas à leurs Mufcles pour une attitude fi contrainte!
Elle peut durer encore après leur mort, ce qui augmente {a
merveille. I leur faut encore fans comparaifon plus de force
pour fe foûtenir horifontalement, comme elles font quand
il leur plaît.
If y'a des Chenilles fi voraces, qu'en moins de 24 heures
iles mangent plus du double du poids de leur corps. Les
grands Animaux font bien fobres en comparaifon. Aufl
croiflent-elles extrêmement vite.
M.Malpighi a découvert que les Chenilles refpiroient l'air
ar 1 8 Poumons dont les T'rachées avoient leurs ouvertures:
“extérieures difpofées le long du corps fur deux lignes paral-
iles. Ce qui a prouvé à ce grand & ingénieux Obfervateur
94 HISTOIRE DE L'ÂCADEMIESROYALE
que ces ouvertures qu'il appelle Srigmates, font des ouver-
tures de Trachées, c’eft qu'en y appliquant de l'Huile qui les
bouchoit, il voyoit les Chenilles mourir étouffées. Il à cru,
& même fur quelques expériences, que l'air refortoit enfuite
par les mêmes endroits par où il étoit entré, ainfi que dans
les grands Animaux , mais M. de Reaumur, qui a eu le mé-
rite de vouloir encore, après une f1 grande autorité, s’en
convaincre par lui-même, a trouvé, en tenant des Chenilles
fous l’eau, où elles vivent des heures entiéres, que tout leur
corps fe couvre de bulles d'air, & beaucoup moins aux en
droits où font les Stigmates, & que par conféquent l'air fort
de toute l'habitude du corps par des ouvertures infenfibles,
comme la matiére de notre tranfpiration. Il a été réduit en
particules extrèmement fubtiles par fon paflage dans des
canaux auffi fins que ceux qui ont fait les rameaux, & les
rameaux de rameaux de Trachées aufi déliées dès leur ori-
gine. De plus, les Chenilles ne fe gonflent point, comme
les autres Animaux, dans la Machine du Vuide , marque que
Yair contenu dans leur corps s'en échappe aifément.
Elles vivent des deux ou trois jours dans ce Vide, quelque
parfait qu’on l'ait pû faire, mais fans aucun mouvement. Dès
u’on leur rend l'air, elles fe raniment. , ;
M. Malpighi a cru que les Chenilles avoient tout le Iong
& au milieu de leur corps un grand nombre de Cœurs
aufli-bien que de Poumons, mais autant qu'on en peut
juger dans une Anatomie fi délicate, & qui approche tant
d’être impofible, M. de Reaumur croit que cette fuite
apparente de Cœurs n’eft qu'une longue Artere droite, qui,
à la vérité, a des étranglements qui femblent la divifer en
différentes parties, mais des étranglements caufés par. des
compreffions de corps voifins, & tels qu'on-peut les faire
difparoître. sis :
Tous les ans les Quadrupedes & les Oifeaux muent , c’eft-
à-dire, changent de poils ou de plumes. Les Infectes font
plus, tous ceux que M. de Reaumur connoît, & il en connoît
Beaucoup, changent de peau une fois au moins en eur vie,
les
DES SCIENCES. 23
les Vers à foye jufqu'à quatre fois, la plûpart des autres Che-
milles autant.
Quand les Chenilles fe préparent à muer, elles ceffent de
fe nourrir, tombent dans une grande langueur, & perdent
l'éclat de leurs couleurs , & quelquefois quelques-unes de ces
couleurs mêmes.
En général leur artifice pour fe dépouiller confifte à
gonfler & à contracter alternativement leurs Anneaux,
moyennant quoi leur ancienne peau tiraillée en divers fens
fe détache de la nouvelle déja toute formée au deflous, &
vient à fe fendre en quelque endroit par où le corps de Ia
Chenille à un commencement d'ifluë. Le refte eft facile à
imaginer.
Mais la merveille eft d’un côté la perfection de l'ancienne
peau, de l’autre celle de la nouvelle. La dépouille eft fi par-
faite, qu'elle comprend les Dents, les Ongles, & jufqu'au
Crâne, qui eft aflés dur & écailleux. La nouvelle peau eft
fr parfaite, que dans les Chenilles veluës elle a les poils tout
pareils à ceux qui font reftés fur l'ancienne, difpofés de la
même maniére , aufli longs , & quelquefois plus, & cela dès
que f Animal paroît dans fon renouvellement. On ne peut
donc pas penfer que les nouveaux poils fuffent logés dans
les anciens comme dans des Etuis, d’où ils fe feroient dé-
gagés ; M. de Reaumur s’eft encore aflüré de la faufieté de
cette idée, en coupant bien exactement tous les poils à une
Chenille toute prête à muer, il eût coupé néceflairement
aufli les poils de la nouvelle peau, mais elle n’en fut pas
moins couverte. Tout ce qui refte à penfer, & on peut s’en
affürer par fes yeux, c’eft que les nouveaux poils bien formés
& ayant toute leur étenduë, fe tiennent couchés fur la nou-
velle peau, parce que l’ancienne les y oblige tant qu’elle n’eft
as détachée. On conçoit même que l'effort qu’ils font pour
fe redrefler doit aider à la féparation des deux peaux, fans
compter une liqueur aflés abondante qui fe répand alors
entre elles. |
. M. de Reaumur 2 trouvé que le nouveau Cräne étoit
Hif. 1734: : D
36 HisToiRE DE KWACADEMIE ROYALE
prefque toujours confidérablement plus grand que l'ancien,
& comment at-il été renfermé fous l’ancien ? ce feroit encore
une queftion quand il ne feroit qu'égal. I faut qu'étant plus
mol & plus fléxible , il fe foit un peu accommodé au lieu
qui le renfermoit, & que quand il a été libre, il ait pris
par fon reflort fa figure naturelle, & en même temps fa
confiftance & fa dureté par le defléchement de Fair.
Ï eft à remarquer que les couleurs de la nouvelle peau
ne font pas toûjours les mêmes que celles de l'ancienne, &
par conféquent , fi on jugeoit par les couleurs, on pourroit
croire qu'une même Chenille en feroit deux différentes, ou
au contraire.
Quelque temps après leur derniére peau, il leur arrive
encore un changement beaucoup plus confidérable, elles de-
viennent ce qu'on appelle communément Æéve, & dans la
langue des Naturaliftes Crifalide, où Aurélie, où Nimphe.
Les noms de Crifalide ou d’ Aurélie viennent de la couleur
d'or dont quelquefois tout le corps de quelques elpeces, ou
quelques endroits du corps, brillent dans leur nouvel état.
Le nom de Nimphe vient de ce qu'elles font alors comme
voilées, & convertes de la maniére dont l’étoient ancienne-
ment les époufées. I eft pourtant vrai qu'elles reflemblent
davantage à des Momies d’'Egipte. Tout le monde connoît la
figure de quelques Crifalides, ne füt-ce que de celles des Vers
à foye. Toute Crifalide eft fi différente de la Chenille qu'elle
étoit auparavant, qu'on n'auroit jamais cru que ce füt le
même Animal. Elle n'a même prefque plus aucune apparence
d'Animal, nul mouvement, nul befoin de nourriture, nul
figne de vie, fi ce n'eft quelque fenfibilité dans la partie
poftérieure de fon corps, quand on la touche.
Pour fe garantir des accidents contre lefquels elles n'ont
point de défenfe dans cet état de foibieffe & de langueur,
les Chenilles, qui femblent le prévoir, {e filent des Coques
où elles s'enferment, & font à l'abri de tout. Les Vers à foye
s'en font de très-fortes, de très-épaiffes, & d’une belle ma-
tiére qui eft une richeffe pour nous, D’autres Chenilles ne
ET
- DES SCIENCES 27
fe filent que des Coques peu garnies , au travers defqueiles
on les voit, & dont la matiére eft mauvaife. D'autres, qui
ont peu de matiére à fournir, rempliflentles vuides de leur
tiflu de foye par de petits grains de terre fort adroitement
tranfportés & placés où il faut, frrés & battus autant qu'il
Ta fallu. D'autres prennent une feuille pour la cage de leur
édifice, Ja plient & la roulent très-induftrieufement en forme
de Cornet par le moyen de fils de foye qu'elles attachent d'un
bord à l’autre de la feuille. D’autres enfin, tant la varicté eft
grande, fe pañlent de Coques, & fe retirent feulement dans
des lieux de fûreté, ou bien même plus hardies ou moins
révoyantes, elles fe tiennent à l'air fous 1a dangereufe forme
de Crifalides.
De celles-ci quelques-unes ont l'art de fe fixer contre un
corps folide, fufpenduës feulement par la queuë, la tête en
embas ; d’autres, par un art encore plus étonnant , fe font
entouré le milieu du corps d'un cordon de foye qui les tient
fufpenduës, & les affüre dans cette fituation. Si on fait bien
réfléxion à ces deux derniéres induftries ; on fentira combien
elles doivent être difficiles. Il y a bien fà, auffi-bien que dans
beaucoup d'autres chofes du même genre, de quoi exercer
Yadrefle du Phificien pour trouver les moyens de voir cè qui
fe peut voir de ces fortes de manœuvres, & fa fagacité pour
fuppléer par raifonnement à ce qu'il n'aura pas vû.
! Quand la Chenille doit devenir Crifalide ; elle s'y préparë
par quelque temps de jeûne, peut-être eft-ce un jeûne forcé
par des douleurs qu'elle fouffre. Les peaux qu'elle a quittées
ucceflivement jufques-là ne couvroient qu'une Chenille, ne
laifloient voir en tombant qu'une Chenille, mais la derniére
peau n'en couvroit plus, & n’en laifle plus voir une, c'eff.
un Animal d'une figure & d’une confitution toute différente,
une Crifalide. dal: 1 re
-2 La Chenille, après avoir ceffé de prendre de {a nourriture,
#e vuide abondamment. Ontrouve dans fes excréments des
portions d'une Membrane que M. de Reaumur a réconnuë
pour être celle qui doubloit le*canal de leur Effémac & de! 1
D
“
# p. 16.
28 HisToiRE DE L'ACADEMIE ROYALE
leurs Inteftins. Elles la rejettent comme font les Ecrevifles
dont il a été parlé dans l'Hifloire de 1709* d'après M.
Geoffroy.
Les mouvements & les efforts néceflaires pour quitter le
dernier fourreau de Chenille, font plus grands que ceux qui
l'ont été pour les précédentes dépouilles, Cependant cette
opération difficile eft fort prompte. Toutes les actions de la
Chenille ont été expofces dans le détail le plus exact & le
plus curieux. |
Quelquefois le fourreau de Chenille lui refte attaché par
embas en un petit endroit, elle ne le peut plus fouffrir, &
elle ufe d’une induftrie nouvelle pour achever de s’en défaire
entiérement.
Và la grande diverfité des efpeces de Chenilles, on s'at-
tend bien que les Crifalides feront de figures fort différentes.
Elles ont auffi une durée fort différente jufqu’à la transfor-
mation qui les attend encore. Quelques-unes ne font Crifa-
lides que 10 jours, d’autres le font pendant tout l'Hiver &
une partie du Printemps. Ce font-là les deux extrêmes.
En quittant le fourreau de Chenilles, les Crifalides Y
hiflent leurs 1 8 Stigmates bien marqués & même plus aifés
à obferver & à examiner par rapport à leur ftructure, qu'ils
ne l'étoient auparavant. Mais elles en ont d'autres prefque
femblables fur leur nouvelle enveloppe de Crifdide. I y a
donc lieu de croire qu’elles refpirent, quoique mortes en
apparence; elles refpirent en effet, mais ce qu'il ya de fin
gulier, c’eft qu’elles perdent par degrés & jufqu'à un certain
point où elles s'arrêtent , leur faculté de refpirer, & le befoin
qu'elles en ont. Dans les premiers jours tous leurs Stigmates:
leur font néceflaires, enfuite ceux d’embas fe bouchent, &
elles fe contentent de ceux d’enhaut, quelques-uns de ceux-ci
fe bouchent aufii, & il ne refte enfin-que les plus hauts, &
ils leur fufhfent. Comment a-t-on pà pénétrer jufqu'à ces
particularités ? Des Crifalides de différents âges ont été
plongées dans de l'Huile à différentes hauteurs par M. de
Reaumur, & il a vû jufqu'à quelle hauteur il falloit plonger
ct D péri
minimiser rando À me due
D'E sit S CHPEUNCCHE :S 2
chacune d’elles pour lui Ôter la refpiration, & la faire mourir,
c'efl-à-dire, la priver entiérement du fentiment qui lui reftoit,
Quand une Crifalide eft plongée dans l'eau, on ne voit
plus fon corps fe couvrir de bulles d'air, horfinis à l'endroit
des Stigmates, comme il feroit arrivé lorfque lamême Cri-
falide étoit Chenille, ce ne font plus que les Stigmates qui
rendent de l'air, ceux qui ne fe font pas encore fermés. If
eff fort naturel que l'enveloppe prefque toute écailleufe de
la Crifalide ne laiffe pas échapper l'air comme une peau molle
& tendre, mais lair a donc pris dans le corps de la Crifalide
des routes qu'il ne fuivoit pas auparavant. C’eft une conclu-
fion étonnante qu’il faut pourtant admettre.
La circulation de ce qu'on doit appeller Sang dans ces
Animaux, change aufli. Cette longue Artere droite, dont
nous avons parlé, poufle dans la Chenille fa liqueur du
dérriére vers la tête, dans la Crifalide c’eft le contraire.
Dans la Machine Pneumatique, la Crifalide, à caufe de fa
dureté & de la fermeté de fon enveloppe extérieure, ne peut
pas augmenter de groffeur, mais elle augmente de longueur,
es Anneaux qui étoient emboîtés les uns dans les autres, fe
déboîtent & s’écartent, tant il eft vrai que l'air s’échappoit
du corps des Chenilles, & ne peut plus s'échapper de celui
des Crifalides.
Après que celles d’entre les Crifalides qui font dorées, &
qui même le font le mieux, ont quitté leur enveloppe pour
devenir Papillons, leur dépouille ne conferve rien de fa belle
couleur d’or qui la rendoit fi magnifique, elle n’eft plus que
d’une couleur très-commune. Sur cela M. de Reaumur ima-
gina qu'elle pouvoit reflembler à nos Cuirs dorés, qui le
font fans aucun or. Tout ne confifte qu’en un Vernis d’une
couleur brune, quand ïl eft en mañle, mais s’il eft étendu
fur des feuilles d’un très-beau blanc, bien polies, ce blanc vi
au travers du Vernis paroït le plus bel or. Il fe trouva en
effet que la premiére peau très-fine de la Crifalide étant
tranfparente, a fous elle ou une membrane ou une liqueur
defléchée, qui eft d'un très-beau blanc, Cette premiére peay
D iij
o HisTOIRE DE L'ACADEMIESROYALE
fait l'office du Vernis des Cuirs. Si on la détache feule avée
adrefle du corps de la Crifalide, & qu'on fétende fur de
Y'argent bien bruni, €'eft de l'or. Si on l’enleve avec fa ma-
tiére blanche, da dorure fe perd dans quelques heures, appa-
remment parce que cette couche de blanc fe defléche à l'air,
& par conféquent fe ride, & perd le poli néceflaire ; ce qui
le perfuade bien, c'efl qu'il ne faut que la mouiller pour faire
renaître l'or, & cela autant de fois qu'il a difparu. Mais la
dorure de l'enveloppe quele Papillon a quittée naturellement
ne revient pas ainfi pour être mouillée. Quand le Papillon
s'eft dégagé, il eft arrivé des changements à la couche de
blanc, peut-être les efforts qu'il a faits l’ont-ils ou détachée,
ou trop altérée par le mélange de quelque autre matiére qui
eft furvenuë à leur occafion.
H faut que Animal fubiffe encore une métamorphofe,
qu'il prenne la forme de Papillon, très-différente des deux
premiéres. Îl la prend ou dans fa Coque même, ou dans la
petite retraite qui lui en a tenu lieu, s’il ne s'eft pas fait de
Coque. Dans ce 24 cas il n’y a pas de difhculté à com=
prendre comment il fort, il n’y en a pas non plus quand fa
Coque eft fort mince , une gaze très-légere & tranfparente,
on le voit qui la perce avec fa tête, mais quand la Coque
eft très-épaifle & très-ferrée, comme celle du Ver à Soye;
on ne voit que, l'Animal forti, la Coque percée à l'endroit
de la tête, & on ne fçait comment il a fait pour forcer fa
prifon. Après tant d'autres mifleres de cette efpece qui fe
font laïflé pénétrer par M. de Reaumur, celui-là s’eftrefufé
à lui. Seulement il a conjecturé que Finftrument tranchant
ou divifant, dont le Papillon s’étoit fervi, car il en faut un,
& la tête n’en peut faire la fonction par elle-même, pouvoit
être fes Yeux. Le paradoxe paroît violent, mais-ces yeux,
dont nous parlerons tantôt un peu plus au long, font tels
que toute leur convéxité eft remplie d’une dentelure très-
fine & proportionnée aux fils de Soye qu'elle couperoit les
uns après les autres , & fur lefquels elle agiroit comme une
Line fur du bois. Enfin c'eft fürement la tête qui opere, ce.
PRET ITU
fi is - Se dde Le 2
D'E SANS? CNEUNL c: €) 8 31
m’eft pas le total de la tête, c'en eft donc quelque partie, il
faut la trouver.
IL y a des efpeces de Chenilles qui ne jettent pas les Na-
turaliftes dans cet embarras, elles laiflent leurs Coques ou-
vertes, & en fortent fans peine. Elles font doné;, pendant
tout le temps qu'elles font Crifalides, expofées fans aucune
défenfe à toutes les attaques, à toutes les infultes des autres
Infectes leurs ennemis? Non. Elles ont fait une efpece de
Labirinthe où FInfecte étranger s'égareroit fans arriver juf-
qu'à la Crifalide, Un Poiffon entre aifément jufqu'au fond
de la Nafle, & n'en peut prefque plus fortir, elles ont ren-
verfé l'artifice de la Naffe dans eur Coque, l'Infecte étranger
m'y peut prefque pas entrer, & le Papillon en fort fans
* difficulté.
. Hneft pas befoin d’obferver bien finement une Crifalide
pour y voir le Papillon comme emmuillotté, C’eft un petit
paquet difpofé & arrangé de façon que le volume en foit le
moindre qu'il fe puifie, & qu'aucune partie ne foit ni blefte,
ni trop génée. Les quatre Aïîles, par exemple, deux fupé-
rieures & deux inférieures, font appliquées tout de leur long
des deux côtés du corps, les deux Antennes, qui font deux
efpeces de longues Cornes que le Papillon porte fur le de-
vant de fa tête, font renverfées de devant en arriére &
étenduës fur le dos. La Trompe dont il doit fe fervir pour
fuccer les fleurs, & qui eft longue, peut être roulée en Spi-
rale, & s'étendre auffi de fon long.
… L’enveloppe de Crifalide, cartilagineufe commé elle eff,
& même écailleufe, eft affés dure, & quand le temps prefcrit,
où le Papillon doit en fortir, eft arrivé, il a befoin de plus
grands efforts que ceux qui lui ont fuff, quand il étoit
Chenille, pour {e dégager fucceflivement de chacune de fes
eaux.
+ De la Chenille au Papillon ä n’y a point de vraye méta-
morphofe. II eft vifible que de la Crifalide au Papillon il
ny en a point, c'eft un fimple développement qui-fe pafñle
fous nos yeux, c’eft donc toüjours la même chofe dans le
> HisTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE
total, ou de la Chenille au Papillon; le Papillon étoit enve-
loppé dans la Chenille avec fes Aïîles, fes Antennes, fa
Trompe, &c. mais rien de tout cela n'y étoit vifible ; üf
n'y a que le bas de fon corps, encore divifé en Anneaux,
qui fe fente de fa premiére forme de Reptile, D'un Œuf à
un Poulet, quel changement ! Ce n’eft pourtant qu'un dé-
veloppement dont on fe peut donner le Spectacle d’un bout
à l'autre, & voir toutes les différentes Décorations fe fucce-
der, La Chenille peut être regardée, fr lon veut, comme
YŒuf du Papillon. I n’eft point abfolument néceffaire qu'un
Œuf, pour être véritablement Œuf, ne prenne point de
nourriture.
La premiére chofe que fait le Papillon, c’eft de fe vuider
copieufement. Deftiné deformais à des aliments plus délicats,
il ne conferve rien de fes anciens aliments groffiers. Ces
excréments font quelquefois rouges , & accompagnés de
quelques gauttes de cette couleur. Sur cela M. de Reaumur
fe fouvient d’un trait de la vie du celebre M. de Peirefcs
On vit un matin dans la Campagne des environs d'Aix un
grand nombre de taches ronges femées en différents en-
droits; on s’imagine auffi-tôt que c'eft une pluye de Sang
tombée du Ciel, & on s’allarme de cet horrible préfage.
M. de Peirefc diffipa feffroi par différentes remarques
dignes d’un bon Phificien, & principalement en montrant
de ces Taches dans de petits creux où une pluye n’auroit
jamais pû tomber. On reconnoït bien là un accident caufé
par les Papillons dont nous venons de parler. Un Papillon,
dont la tête a de l'air d’une tête de mort, a répandu encore
bien de la terreur, quand il a paru dans des contrées déja
afHigées de quelque calamité. L’ignorance de la Phifique eft
fouvent un grand mal pour le Genre humain.
H y a des Papillons qui ne volent ou ne volent guere
que le jour, & d'autres au contraire que la nuit. On appelle
les 1°'s urnes, & les 245 no@urnes, où Phalenes. Les nocturnes
font en beaucoup plus grand nombre que les diurnes.
Les nocturnes, qui apparemment craignent donc le jour,
vont
D ESS CMERMME ES 39
vont cependant la nuit fe rendre à toutes les lumiéres, quoi-
que très-vives, qu'ils voyent, & même s'y brülent, fource
très-commune de comparaifons poëtiques. M. de Reaumur
ayant remarqué qu'il n'y a guere que les Mäles des Phalenes
qui foient attirés la nuit par la lumiére, & voltigent à l'en-
tour, foupçonne qu'ils cherchent leurs femelles , brillantes
peut-être, comme celles des Vers luifants *, de quelque lu-
miére, mais beaucoup plus foible, & vifible feulement pour
eux. L'expédient des petits Phares que portent des femelles,
employé par la Nature pour avertir leurs Mâles du lieu où
elles font, pourroit bien avoir été employé plus d’une fois.
Quand le Papillon eft forti de fon enveloppe de Crifalide
& de fa Coque, il eft comme tout étonné de fon nouvel
état, & il lui faut quelque temps pour s’y accoütumer, ou,
à parler plus précifément, pour fe fécher à Fair, & fe défaire
d'une humidité fuperfluë qui lengourdifioit. I commence
à étendre fes Aïles. On pourroit s'imaginer qu'elles étoient
pliées comme un Eventail fous le fourreau qu'il a quitté,
mais non, elles étoient feulement fort petites, mais en ré-
compenfe fort épaifles, leurs vaifleaux qui étoient génés,
contournés les uns fur les autres, pleins d’obftruétions, vont
fe mettre en liberté, prendre les directions que demande le
cours des liqueurs, & augmenter la fuperficie totale en di-
minuant à proportion l'épaifleur.
Les Aïles des Papillons, & cela leur eft particulier , font
couvertes d’une efpece de pouffiére ou de farine, qui s'attache
aux doigts, quand on y touche. On a vû avec le Microfcope
que chaque atome de cette poufliére eft une petite plume
inférée par un pédicule dans le corps de lAïle, M. de
Reaumur croit que le nom d’écaille lui convient mieux, &
le prouve. Ces écailles, qu'il a obfervées avec grand foin,
font d'une infinité de figures différentes foit fur les Ailes de
différents Papillons, foit fur les Aïles du même. C’eft d'elles
que viennent & toutes ces couleurs, & tous ces comparti-
ments de couleurs, quelquefois diftribuées fi agréablement
& fi heureufement, qu'elles donnent un grand prix à ces
Hi. 173 44 -
* V. PHifts
de 1723.
P: 9«
H1STOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE
Aïles, & les rendent un objet de paflion pour quelques
Curieux.
Les Yeux des Papillons, auffi-bien que ceux des Mouches,
des Scarabés, & de divers autres Infeétes, font une merveille
des plus finguliéres. Aux deux côtés de la tète font deux
petites plaques arrondies, luifantes, de confiftance aflés ferme,
qu'on ne peut s'empêcher de prendre pour des Yeux, ou du
moins pour leur Cornée. Mais ces Cornées, car nous leur
en laifferons le nom , vüës au Microfcope, font un Réfeau
qui a une infinité de mailles reétilignes le plus fouvent, &
fort réguliéres, & du milieu de chacune s'éleve une petite
Lentille, que les plus grands Obfervateurs en cette matiére,
& qui ont le plus confulté l'expérience, s'accordent à prendre
pour un Criftalin. En les comptant, il n’y a pas, felon M.
Puget, moins de 173 2$ Criftallins fur chaque Cornée d’un
Papillon. Nous fommes des Aveugles en comparaifon de
ces Infectes-là. La Nature fi prodigue pour eux à cet égard
n'aura pourtant pas été follement prodigue, elle ne leur aura
donné que ce qui leur étoit néceffaire, mais pour quels ufages,
pour quels befoins? c’eft ce que nous ignorons, ainfi que
beaucoup d’autres chofes. Il faut qu'une ignorance fe confole
à la vüe du grand nombre de fes pareilles. Ce font les fur-
faces convexes de chaque Cornée du Papillon que M. de
Reaumur a cru propres à fcier la Soye de la Coque.
Les Antennes font encore une partie du Papillon très-
remarquable par fa ftruéture, & dont l'ufage eft ou ignoré,
ou très-incertain. Elles font en général mobiles fur leur bafe,
en quoi elles different des Cornes des grands Animaux, &
de plus articulées & divifées par des efpeces de Vertebres,
de forte qu'elles peuvent fe courber, f contourner au gré
de Animal, du refte différemment conformées, différem-
ment terminées, lifles ou à poils, & ces poils font quelque-
fois au Microfcope des barbes de Plumes, mobiles elles-
mêmes fur leur bafe, &c. fouvent les Antennes paroiïffent des
tuyaux creux. Tant que l'on n’a guere examiné les Papillons,
on a pü comparer les Antennes au Bâton des Aveugles, mais
range era
CT 7 OST
HPAPDE : SMS CANBNI GE S: 35
a comparaifon ne peut plus conveñir à des Animaux à qui
Jon connoît tant dé milliers d'Yeux, &, ce qui prouvé
mieux, c'eit que les Papillons vont fouvent les Antennes
toutes droites, & ne s'en fervent nullement comme d’un
Bâton pour tâter leur chemin, ou reconnoître ce qui fe
préfente devant eux. Les Antennes feroient plütôt 1és Or-
ganes de lOdorat des Papillons , qui apparemment en ont
befoin pour le difcernement des Plantes & de leurs fucs. Mais
après tout, pourquoi n'y auroit-il dans l'Univers que les cinq
Sens dont nous fommes doués? S'il y en a d’autres, dont
quelques-uns foient tombés en partage à des Animaux de
notre Globe, certainement nous ne reconnoïîtrons pas les
Organes qui leur appartiendront. Un Sourd devineroit-il
l'ufage d'une Trompette ?
Celui de la Trompe des Papillons, quand ils en ont une,
car ils n’en ont pas tous, du moins fenfiblement, eft incon-
teftable, elle leur fert à fuccer les Fleurs, c’eft leur unique
Bouche. Ce Tuyau peut avoir jufqu’à 3 pouces de long. Son
teflort naturel le tient roulé, & en cet état il trouve une
efpece d'Etui où fe loger, il ne fe déroule & ne s'étend en
Tongueur que par la volonté ou une action de l'Animal. I
eft compofé d’Anneaux qui ne peuvent guere être faits que
pour un mouvement vermiculaire, pour des contraétions &
des dilatations fucceflives, qui conduiront de la fleur jufqu’au
corps de l Animal une petite parcelle d’iliment prife par le
bout de la Trompe. Ce n’eft pas que la fimple fuétion ne
püût fuffire pour faire monter une goutte de liqueur le Iong
d'un canal infléxible, qui n’aidera point à la poufler, mais
dans le cas préfent il faudroit que la goutte fût toüjours
extrêmement fine, & incapable de s'attacher aux parois inté-
tieures du canal, & cela peut très-aifément ne fe pas ren-
contrer. La fuétion & l'action du canal f joindront fort
bien enfemble, & n'en feront chacune que plus füres de
leur effet.
La Trompe, qui au fimple coup d'œil n’eft qu'un canal,
beaucoup mieux obfervée par M. de Reaumur, fe trouve en
E ÿ
6 HisToiIRE DE L'ACADEMIE RoYALE
être trois difpofés fur un même plan ; celui du milieu étant
le plus gros, & en ayant à fes côtés deux égaux entre eux.
M. de Reaumur s’eft fufhfamment afüré que la liqueur nour-
ricicre tirée des fleurs ne monte que par le canal du milieu.
A quoi ferviront donc les deux autres ? A recevoir l'air né-
ceffaire pour la refpiration , & apparemment auffi à le rendre.
La Trompe fera en même temps ŒÆfophage & Trachée.
Par ce même canal du milieu qui fait monter la liqueur
nourriciére de la fleur à Animal, M. de Reaumur a vü auf
defcendre une liqueur, & defcendre à plein canal, fans qu'il
y eùt d'ailleurs aucun indice que ce fût une efpece de vo-
miffement, fans aucun effort extraordinaire du Papillon, qui
continuoit toüjours tranquillement à fe nourrir d'un petit
morceau de Sucre, auquel il fut obftinément attaché pendant
deux heures après un long jeûne. Ce fut a nature de ce
Sucre qui fit deviner à l'Oblervateur de quoi il s’agifloit.
Cet aliment, agréable d'ailleurs au Papillon, étoit pourtant
trop dur & trop fec, il lhumectoit & fe l'aflaifonnoit par
une liqueur qu'il fournifloit lui-même, & en effet le Sucre
fe trouva amolli, & comme mouillé dans les endroits piqués
par la Trompe. Saus doute les Papillons en font autant dans
toutes les occafions pareilles, mais elles pafient toùjours fi
rapidement qu'on n'y peut rien voir, & M. de Reaumur ne
dut cette découverte qu'à un pur hazard, hazard cependant
de la nature de ceux qui ne font que pour les Obfervateurs
très-aflidus, & aufli intelligents qu'affidus.
Si on conçoit la Trompe divifée en deux moitiés égales
par un plan où foit compris axe qui fait fa longueur, ces
deux moitiés n'appartiennent point, comme on l'auroit cru
naturellement, à une même membrane continuë, ce font
deux demi-canaux appliqués fimplement l’un contre l'autre
pour en faire un total, qui fe féparent aifément, horfmis vers
la tête, & fi aifément qu'ils font quelquefois féparés d’eux-
mêmes ou par quelque leger accident, & qu'il faut que le
Papillon travaille à les remettre enfemble. S'i n’y réufit
pas, fa mort eft aflürée, faute de nourriture. Mais comment
D'E SMSTEMMEMNCE SIT 8%
temet-il enfemble ces deux moitiés ? de la même maniére
dont on y remet des barbes de Plume dont on a rompu la
continuité en defengrainant les uns d’avec les autres les petits
fils qui les compofent ; il ne faut que paffer un peu la main
fur ces barbes, en rapprocher les parties féparées, & dans
un inftant heureux , qui par conféquent n'arrive pas toüjours,
tout l’engrainage fe rétablit. Les deux moitiés de la Trompe
s'unifient ainfi par des poils dans leur partie fupérieure. 1
ne faut point craindre que la Trompe ne foit mal fermée,
&me-laïffe échapper ou l'air ou les liqueurs, les barbes des
Plumes, impénétrables à l'air & à l'eau, répondroient bien
nettement à cette difficulté.
M. de Reaumur ne s’eft pas moins appliqué à imaginer
un ordre pour les Papillons que pour les Chenilles. Comme,
un Papillon a été Chenille, & continuë fous la forme de"
Papillon d’être le même Animal qu'il étoit , il feroit à fou-
haïter que dans cet ordre qu'on imagineroit, on lui püût
affigner une certaine place pour toute fa vie. Mais c'eft ce
qui ne fe peut, on n'a point encore aflés d’obfervations ; &
peut-être n'en aura-t-on jamais affés pour fçavoir quel Pa-
pillon viendra d'une telle Chenille , ou de quelle Chenille
eft venu un tel Papillon. Au contraire on voit quelquefois
que de deux Chenilles qu’on ne peut s'empêcher de rapporter
au même Genre, viennent deux Papillons qu'on ne peut
rapporter au même. Et pour le dire à cette occafion, 2h
beauté des Chenilles, car elles en peuvent avoir une, & bien
marquée, ne tire nullement à conféquence pour celle des
Papillons, & réciproquement. Il faut donc renoncer, du
moins quant-à-préfent, à l'ordre continu, qui comprendroit
tout de fuite les Chenilles & leurs Papillons, & fe contenter
de l'ordre interrompu , qui les regardera comme différents
Animaux.
Les Papillons diurnes & les noéturnes font d'abord deux
Clañiés , qui fe préfentent d’elles-mêmes. Pour les fubdivi-
fions fuivantes, qui demandent auffi des caracteres fenfibles,
M. de Reaumur les regle par la figure des Antennes, par
E ii
V. les M.
P-553-
V. les M.
p- 564.
V. les M.
p. 567:
V. les M.
p- 590.
V. les M.
P- 594«
V. les M.
P: 597:
38 HisTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE
celle des Trompes, par celle des Aîles, & encore plus par
le port des Aïles, car il eft très-différent en différents Pa-
pillons , quelques-uns les portent paralleles au plan fur lequel
ils font polés, d'autres les portent perpendiculaires, es uns
en Toit aigu, d’autres en Toit écrafé, &c. Enfin toutes les
marques , toutes les diftinctions extérieures, où l’on peut fe
rendre , étant faifies, M. de Reaumur parvient à établir
fept Clafles de Papillons diurnes, & fept de nocturnes, &
dans la $me Clafie de ceux-ci jufqu'à 10 Genres.
Ce n'eft que dans l'état de Papillon que ces Infeétes fon-
gent à la multiplication de leur efpece, mais ce 1°* Tome
de M. de Reaumur ne va pas jufques-là. Il faut en attendre
la fuite, à qui l'on ne peut guere fouhaiter rien de mieux
que d'en être digne.
Ous renvoyons entiérement aux Mémoires
L'Ecrit de M. de Reaumur fur des Obférvations
du Thermometre faites par M. de Coffigni dans fIfle de -
Bourbon.
L’Ecrit de M. du Fay fur les Obfervations Météorolo-
giques de M. Muffchembroek faites à Utrecht en 1734.
Le Journal des Obfervations d'Aurores Boréales en 1734
par M. de Mairan.
La Méthode de M. Godin pour obferver la variation
de lAiguille.
Les Obfervations Météorologiques de 1734 par M.
Maraldi.
Et une Addition de M. de la Condamine à fon Mémoire
fur la Déclinaifon de l'Aiguille.
Sont
ER
DCE MUST C'NRONCNE: S 39
ANATOMIE.
SUR LA FISTULE LACRIMALE.
ee y a dans Œil une Glande placée entre la partie fupé-
rieure du globe de l'Œïl & la voute de l'Orbite. Dès
que l'Œil fe meut, il frotte contre cette Glande, & en
exprime une liqueur qui fert à enduire fa furface, à la rendre
pluslifle, plus polie & plus mobile, de forte que ce mouve-
ment-là même produit ce qui doit le faciliter. La liqueur
fortie de la Glande fe répand en petits ruifleaux très- fins
fous la furface interne de la Paupiére fupérieure, & für la
furface de lŒüil, d'où elle tomberoit naturellement au plus
bas de Œil, & en fortiroit bien-tôt pour aller mouiller {a
Jouë, fi deux efpeces de Goutiéres que les bords des Pau-
piéres forment avec le globe de l'Œil, fur lequel ils appuyent,
ne ramafloient la liqueur, & ne fa conduifoient vers le grand
angle del Œif, où elle aura fa décharge. Ce font deux petites
ouvertures, que l’on appelle Points lacrimaux, ouvertures de
deux canaux fort courts, qui s'étant réunis, portent la liqueux
dans un Réfervoir commun, nommé S4c lacrimal, affés fpa-
tieux d'abord par rapport à ces parties-là, mais qui va toûi-
jours diminuant, & fe termine par un petit canal étroit &
court, appellé Canal nafal, parce qu'il s'ouvre dans le Nés,
& y jette la liqueur. Quand elle eft en fi grande abondance
qu'elle ne peut pas s’'écouler toute par le Nés, & que l'Œif
trop plein en laifle tomber une partie fur la Jouë, ce font
les Larmes plus proprement dites que quand elles ne s’extra-
valent pas.
M. Petit le Chirurgien, d’après qui nous parlons, croit
que les Paupiéres qui fe meuvent fouvent, & bien plus fou-
vent qu'on ne penfe, pouflent toüjours par ces mouvernents
V. les M.
P- 135:
40 HISTOIRE DE L'ÂCADEMIE RoyALE
fréquents & très -brufques la liqueur des Larmes vers le
grand angle de l'Œïif, d’où elle fe rendra dans le Nés. I
n'eft pas même néceflaire que dès qu'elle eft arrivée au grand
angle, elle enfile la route des Points lacrimaux , elle peut
fans inconvénient s’amaffer en une certaine quantité avant
ue de couler, & M. Petit détermine le lieu où elle s’amafera.
” Mais il regarde comme caufe principale du paffage de a
liqueur dans le Nés un jeu de Siphon qu'il trouve qui réfulte
de Ia pofition que les Points lacrimaux ont entre eux & avec
le Sac lacrimal. La liqueur pompée par un canal plus court
tombe dans un plus long pour être verfée où il faut. Cette
action de Siphon s’unit à celle des Paupiéres , & y fupplée
quand il en eft befoin, comme pendant le fommeil, où les
Paupiéres n’agiflent pas, & où il fufht d’une feule caufe pour
poufler les Larmes, puifqu'alors l'Εl en exprime moins de
la Glande lacrimale.
* Toute cette ftruéture fi délicate, & qui le paroïtroït encore
beaucoup plus, fi nous en faifions une defcription plus
exacte, ne doit pas ètre fort difficile à déranger. Si par
quelque caufe que ce foit, il furvient une obftruétion au
Canal nafl, qui, par fon extrême finefle, en eff aflés fuf
ceptible, les Larmes, qui ne pourront plus fe dégorger dans
le Nés, féjourneront dans le Sac lacrimal, & s’y amafferont
en trop grande quantité. Si elles font douces, & une efpece
d’eau pure, elles créveront le Sac par la feule force que leur
quantité leur donne; fr elles font âcres & falées, elles ron-
geront, corroderont quelque endroit du Sac, par où elles
s’échapperont, & cela pourra même arriver avant qu'il s’en
foit fait un grand amas. Alors par la mauvaife nature des
Larmes, il {e fait une fermentation qui produit du pus,
dont la corrofion eft encore plus forte, & ce pus fe creufe
une efpece de trou caverneux, qui efkuné vraye fiffule, que
Ton appelle /acrimale. Dans le premier cas où les Larmes
étoient douces, il eft bien vrai qu'il y à auffi une ouver-
ture par. où elles s’échappent, mais cette ouverture n’eft pas
fltuleufe, où fiftule. Senlement elle le peut devenir aflés
ñ | aifément,
D = SES € PNG Es, At
aifément, car les Larmes peuvent saigrir par leur féjour
dans le Sac Jacrimal. I faudra avoir foin de le vuider fouvent,
en le comprimant.
M. Petit compte une 3m efpece de maladie qui feroit
Fiftule fans être facrimale. C’eft lorfqu'il fe forme au coin
de FŒïl un petit Abfcès fi proche des Points lacrimaux,
qu'il les bouche par fon inflammation. Alors les Larmes,
qui ne peuvent entrer dans les premiers canaux où elles
devoient être reçüës, fe répandent néceflairement au dehors,
comme elles feroient dans une Fiftule lacrimale, & c’eft ce
ui a pü faire croire que cette maladie en étoit une, mais
réellement les Larmes ne fortent point par une ouverture
fiftuleufe. I y a cependant une Fiftule, qui eft l Abfcès, mais
les Larmes n'en fortent point, & dès que cet Abfcès eft
percé, les Larmes reprennent leur cours naturel, & tout
le mal eft guéri.
Toute cette Théorie de la Fiftule lacrimale n’eft faite que
‘pour amener un point de Pratique important, une opération
paticuliére que M. Petit employe dans cette maladie depuis
plufieurs années, car il ne l'a pas trouvée d’abord, & elle
eft le fruit de fon expérience & de fes réfléxions. II aflüre
qu'elle lui a toüjours réufi, & en effet fa grande fimplicité
& les raifons phyfiques fur quoi elle eft fondée, s'accordent
fort avec cet éloge. f
DIVERSES OBSERVATIONS
ANATOMIQUES.
L
N jeune homme, âgé de 24 ans, d’une bonne famille
de Schafhoufe, ayant été fur Mer dans des temps
extrémement chauds, & ayant fait beaucoup d'excès de Vins
très-violents, devint fol pendant la Canicule de 1733, &
Hif. 1734 =
42 HIisToiRE DE L'ACADEMIE RoYyaALE
quelquefois furieux, mais fans fiévre. Il étoit alors à Venife,
& il fut mis entre les mains de M. Michelotti, célébre
Médecin de cette Ville, qui a pañlé les bornes de fa pro-
feflion par des ouvrages d'une profonde Géométrie. Il feroit
‘inutile de fuivre jour par jour l'hiftoire de la Cure, que M.
Michelotti, Correlpondant de l Académie, lui a envoyée.
H fufhra de dire qu’elle ne confifta qu'en de fréquentes &
abondantes Saignées & au Pied & au Bras & aux Temples
par les Sangluës, & fur-tout en un ufage extraordinaire &
prefque excefff d'eau froide & de Glace. Le peu de nourri-
ture, & de nourriture trèslegere qu'on lui donnoit, des Jus
de Graine de Melon, par exemple, ou d'Amandes douces,
déja très-rafraichiflants par leur propre fubftance, avoient
encore été refroidis-extérieurement autant qu'on lavoit pû.
Quand le Malade étoit plongé dans un Bain d’eau très-froide,
ce qui lui arrivoit fouvent , on lui verfoit encore brufque-
ment & impétueufement de l'Eau à la glace fur la Tête,
qu'on avoit rafée exprès. Comme la folie confifte phifique-
ment en ce que les Efprits animaux trop abondants & trop
agités ne fuivent plus dans le Cerveau les routes qui leur
font marquées, qu'ils ne fe meuvent plus qu'irréguliérement,
‘en confufion, & comme des Torrents qui n’ont point de lit,
l'intention de M. Michelotti étoit de diminuer d’abord le
volume, & par-là la force de ces Torrents, & enfuite de les
obliger à rentrer dans leurs canaux naturels, en reflerrant
par un grand froid toutes les parties où ils pouvoient s'être
débordés. Cette intention lui réuffit, & dès le premier jour
de Septembre le Malade bien guéri partit pour retourner en
fon Païs, dont de Climat lui devoit mieux convenir que le
Climat chaud de Venife.
H n'eft guére poffible que le froid ait eu un fi grand effet
par une autre raifon que celle qui vient d'être rapportée, &
M. Michelotti a droit d'en conclure que l'Hellébore, fi vanté
par les Anciens pour da guérifon de la Folie, auroit été mal
placé, du moins dans celle-ci. II caufe des irritations très-
ton
_—
DES SCIENCES. 43
violentes dans Effomac & dans les Intéftins, & il n’auroit
fait qu'augmenter le defordre & les tempêtes qu'il s'agiffoit de
calmer. L'Opium paroît y avoir affés contribué.
jus
Le Cerveau eft enfermé dans une efpece de Boîte dure
& folide, compolfée de plufieurs Piéces, engrainées feulement
enfemble par leurs contours, afin qu’elles puifent fe laifler
foûlever doucement par le Cerveau à mefure qu'il s'augmen-
tera, & qu'elles fe prêtent fans réfiftance à cette augmen-
tation, tant qu'elle durera. Quand le temps en eft paflé, ces
Piéces, qui font les Os du Cräne, fe foudent enfemble, &
n'ont plus ce peu de mobilité qui leur étoit néceflaire aupa-
ravant. M. Hunauld à fait voir à l Académie le Cräne d’un
Enfant de 7 ou 8 ans, où il ne paroifloit aucun veftige de
la Suture Sagittale & de la Coronale ni en dehors, ni en
dedans, & par conféquent FOs Coronal, & les Pariétaux
s'étoient réunis avant le temps, & outre que leur réunion
prématurée eût pù les empêcher de s'étendre fufffamment,
cllewéfiftoit à Faccroiffement que le Cerveau devoit encore
_prendre. C’eft-là une fuite de la Méchanique du développe-
ment des Os du Crâne, que M. Hunauld avoit expliqué en
1730*. Dans la furface concave du Coronal & des Pariétaux
de cet Enfant, il s’étoit creufé des traces plus profondes qu'à
Fordimaire des circonvolutions du Cerveau qu'elles fuivoient.
M. Hunauld a vü dans plufieurs autres Sujets plus jeunes
cette foudure prématurée de ces mêmes Os du Crâne déja
commencée de maniére à ne pas laifler douter qu’elle ne fe
fût achevée, & bien des Crânes qu'il a entre les mains lui
perfuadent qu’elle n’eft pas rare. On connoît trop l'impor-
tance du Cerveau pour ne pas voir qu'il ne peut fans un
extrème danger, ou fans de grands inconvénients, être gêné
dans fon accroiflement, ou dans fes opérations. Dans de
pareïls cas l'Art de la Médecine n'aura pas tort de ne pas
deviner les caufes, & quand il les devineroit, quel remede ?
F ji
* V.PHift.
de1711.
Pr27-iéc
1713-p.21.
H1sToiRE DE L'ACADEMIE ROYALE
Nous avons parlé ailleurs d’offifications très-différentes*,
ce font des formations d'Os étrangers dans le Cerveau. M.
Hunauld y a adjoûté l’hiftoire d’un Homme de 3 $ ou 40 ans,
attaqué d’Epilepfie depuis quelques années. Rien ne le foula-
geoit que de grandes Saignées, comme de 40 Onces. Quand
il fut mort, on lui trouva dans une des parois latérales du
Sinus longitudinal fupérieur de petits Os hériflés de pointes
qui s’engageoient dans le Cerveau, & devoient le picoter:
Par les grandes & fréquentes Saignées, le Cerveau qui con-
tenoit moins de Sang, diminuoit un peu de volume, & fe
déroboit à l’action des petites pointes.
ET
M. Hunauld à fait voir auffi le Crâne d'un Enfant de
3 ou 4 ans, dont les Os avoient prefque par-tout 7 ou 8
lignes d'épaifleur. Is étoient aflés mols, & en les preflant
on en faïloit fortir du Sang & de la Limphe en abondance.
Les Vaifleaux Sanguins étoient fort apparents.
LM:
L'Académie a vû auffi la démonftration que M. Humauld
lui a faite d’un Rameau de Nerf affés confidérable, qui,
partant du Plexus gangliforme femilunaire de M. Vieuflens
tout auprès du grand Plexus Méfenterique, remonte du bas-
Ventre à la Poitrine, & va fe perdre à l'Oreillette droite
& à la Bafe du Cœur où il fe diftribuë. Il avoit déja obfervé
l'année précédente la même chofe dans un autre Sujet, &
elle en devenoit plus füre. Comme ce font les Nerfs qui
portent le fentiment dans les parties, & qui font que quel-
quefois des parties fort différentes & affés éloignées font en
commerce de fenfations, on entendra par ce nouveau Nerf
celui qui fe rencontre fouvent entre les Vifceres/du bas-
Ventre, & le Cœur. : %
V. ;
Dès 1732, M. Hunauld avoit fait voir à l’Académie,
dans le Poumon de l'Homme, les Vaifleaux Limphatiques,
_
DES: SCIENCES. 45
que vrai-femblablement on n’avoit encore vüs que dans les
Animaux, où il eft quelquefois affés facile de les découvrir.
Ii les a fuivis en 173 3 & cette année, & il les a conduits
en préfence de la Compagnie depuis le Poumon jufqu'au
Canal Thorachique.
Ette année, M. Mai, Démonftrateur d'Anatomie dans
l'Univerfité de Strafbourg , a fait voir à l’Académie
diverfes préparations Anatomiques, dont deux ont princi-
palement attiré fon attention.
La r'° contient l'Organe de l'Ouie qu'il a décompolé en
16'piéces, où l’on voit beaucoup d'art dans les coupes, &
une grande induftrie dans les moyens qu'il a employés pour
faire voir l'aflemblage & le jeu de certaines parties.
La 24e eft un Crâne dans lequel fix coupes très-fines &
bien ménagées démontrent différentes vüës & différents
rapports de parties, de forte que dans le même Crâne il
donne la commodité d’obferver des particularités qui ordi-
nairemént ne fe démontrent que dans plufieurs portions de
différents Crânes. |
Ces deux Piéces, jointes à des Injections que M. Mai a
fait voir, ont montré fa fagacité pour les préparations Ana-
tomiques. k
Ette année, M. le Cat, Chirurgien de l'Hôtel- Dieu
de Rouen, a envoyé à l'Académie F'hiftoire des opé-
rations de la Taille latérale qu'il a faites tant à Rouen qu'à
Dieppe. Elles ont toutes réuffi, au nombre de 10, fans aucun
mauvais fuccès, qui en ait interrompu {a fuite. M. le Cat
avoit réformé le Lithorome Anglois, & y en avoit fubftitué
un de fà façon. Il a vû de très-bons effets du Bain d'eau
chaude, quand fes Taïllés étoient menacés d’inflammation,
il.en a fauvé trois de tout accident par ce moyen.
E üïf
\
* V. les M.
P. 144
V. les M,
B- 453:
46 HisToiRE DE L'ACADEMIE RoyaLE
Depuis les opérations de la Taille latérale par la méthode
de M. Chefelden, dont M. Morand a donné fhïftoire en
1731*, ilena fait 4 dont 3 ont réuffi. Elle a été pratiquée
& à Paris & dans le refte du Royaume, & même à Cadis,
& au Caire, par des Chirurgiens qui avoient vü opérer
M. Morand, & il a trouvé, en faifant le calcul de tout ce qu'il
a raflemblé depuis 173 x, que de 2 $ opérations, 22 ont eu
un bon fuccès. Il n'y compte pas celles de M. Chefelden en
Angleterre, qui continuënt toüjours avec un grand éclat.
N Ous renvoyons entiérement aux Mémoires
Les Remarques de M. Winflow, fur les Montres.
D ENSW 09 C'DERRE ES. 7 Mr
EE I A LP a PR a De A PI Pa do Po a D Aa A
VEINES ES
CHIMIE
SUR L'ANALISE DES PLANTES.
Lie DÉMIE dans {es commencements s’eff aflés long-
temps occupée d’Analifes de Plantes, M. Bourdelin,
comme nous l'avons dit en 1 609*, faifoit ces Analifes en
diftillant les Plantes en leur entier, & en examinant les
différents produits que le feu donnoit. On ne manqua pas
de s’appercevoir que ces produits du feu étoient trop altérés
par fon action, nous l'avons déja dit en 170 1*, & Ton ne
compta plus guére fur un très-grand nombre d’Analifes qui
avoient coûté bien du temps.
Certainement il yen a d’autres, plus adroites, pour ainfi
dire, qui tireront des Plantes leurs principes moins changés
& plus purs. M. Boulduc en a eflayé ‘une qui lui a réuffi
fur la Bourache, Plante fort employée dans la Médecine,
& par-là plus intéreffante. [| n’a travaillé que fur des Sucs
ou Décoétions, & le feu n’a fervi qu'à tirer ces Sucs, ou
à caufer quelques évaporations.
M. Boulduc a trouvé aifément & très-fenfiblement dans
la Bourache, l’Acide Nitreux, & celui du Sel Marin, ou
plütôt le Salpètre & le Sel Marin bien formés & bien diflinés,
& de plus un Tartre vitriolé. Comme le Tartre vitriolé eft
un Acide du Vitriol engagé dans un Sel Alkali fixe, -les
trois Acides Minéraux, celui du Salpètre, du Sel Marin,
& du Vitriol, {ont donc en même temps contenus dans une
même Plante, ce qui peut paroître remarquable. Ce n'eft
pas cependant que le Tartre vitriolé exifte naturellement
tout formé dans la Bourache, il s’y forme de l' Acide vitrio-
lique dégagé par les opérations que l'on a faites, & du Sel
Alkali que la Plante fournit.
V. les M.
p:I1O1I.
* p°122,
* p. 68.
P
& fuiv.
* p. 52e
& fuiv.
8 HisToiRE DE L'ACADEMIE ROYALE
M. Boulduc ne doute pas que beaucoup d’autres Plantes
traitées comme la Bourache, ne donnent les mêmes prin-
cipes. Mais y aura-t-il une différence fenfible entre les prin-
cipes des Plantes les plus différentes par les effets, des Plantes
falutaires & des venimeufes? jufqu’à préfent on n’en a pas
trouvé, peut-être eft-ce la faute des Analifes. M. Boulduc
ne défefpere pas de pouvoir un jour décider la queftion.
Si elle fe décidoit pour l'afhrmative, on y perdroit un para-
doxe agréable, & qu’on peut aimer à faire valoir.
SUR: LES SEM PD ER RNOLFER E:
TOus avons dit en 1730*, que M. le Févre, Médecin
d'Uzès, & Correfpondant de l'Académie, avoit en
quelque façon changé le Soufre en Sel, ou tout au moins
tiré un Sel du Scufre. De quelque façon que ce füt, la chofe
étoit aflés nouvelle & aflés finguliére, pour mériter d'etre
approfondie, & l'Académie ayant voulu fçavoir de M. le
Févre tout le détail de fes procedés, elle les a fait répéter
& examiner par Mr du Hamel & Grofle. Is accordent à
M. le Févre que fon Sel en avoit effectivement affés la forme.
C'eft une concrétion criftalline que M. Stahl a vüé, mais
qu'il n’a traitée que de femblable à un Sel. Elle n'en eft pas
réellement un, puifqu'elle ne fe diffout prefque pas à l'eau
foit froide, foit chaude, fans compter un grand nombre
d'autres épreuves que nous fupprimons, auxquelles elle ne
répond point comme un‘véritable Sel. M.r: du Hamel &
Grofle ne croyent pas même que ce foit un Sel Alkali,
mais feulement un vrai Soufre allié d’un peu de terre, ou
une efpece d'Æepar Sulfuris, de Foye de Soufre, fait avec
la terre de la Chaux. Cependant il faut avouer que l’Acide
du Soufre a un peu agi fur la terre à laquelle il s'eft uni,
& y a fait une petite & légére diffolution, d'où il a réfulté
quelque chofe de falin, mais en trop petite quantité pour
permettre l'examen, quoique fon ait employé dans cette
opération
À DE SMS: c AICLE: s
opération plus de Soufre que M. le Févre n’en demandoit.
A l'endroit ci-deflus cité de 1730, nous avons dit que
M. le Févre croyoit que les Eaux Minérales & Sulphureufes
des environs d'Uzès s’étoient chargées d’un Sel femblable
au fien. M.'s du Hamel & Grofle trouvent cette conjecture
probable. D'un côté ils la fortifient par quelques raifonne-
ments ou exemples, & de l'autre ils la reftraignent par quel-
ques obfervations délicates. En même temps ils ont rendu
compte à l'Académie de leurs expériences fur des matiéres
tirées de ces Eaux minérales, & envoyées par M. le Févre.
SUR LE SUBLIME CORROSIF.
. A le monde fçait que le Sublimé corrofif eft un
Mercure tout pénétré des pointes d'un Acide. Le
Mercure très-volatil par lui-même séleve facilement à la
moindre chaleur, & comme il eft alors hériffé, armé d’une
infinité de pointes pénétrantes & incifives, il eft propre à
des actions vives, & en quelque forte pénibles que d’autres
Agents n'exécuteroient pas, à détruire des chairs baveufes,
à emporter de vieux ulcéres, à faire tomber des Efcarres, &c.
Ce même Sublimé corrofif, adouci, refrené, & devenu ce
qu'on appelle Mercure doux, où Panacée Mercurielle, eft un
excellent remede interne, néceflaire dans une Maladie qu'on
f plaît à rendre fort commune.
I feroit donc de l'intérêt public qu’on ne le fophiftiquât
pas, & d'autant plus que fi on le fophiftique, ce fera par
YArfenic, du moins eft-ce lopinion établie, & en ce cas
ce remede feroit un poifon. En 1699*, on a vü que
M. Barchufen avoit condamné une épreuve du Sublimé
corrofif qui confifloit à y jetter de l'Huile de Tartre par
V. les M,
Pr299. .
* p. 54e
défaïllance, dans la penfée où l'on étoit que f1 le Sublimé
étoit bon il rougiroit, & que s'il étoit altéré ïl noirciroit ;
que M. Barchufen avoit foutenu que l'épreuve étoit inutile
& fauffe, parce qu'en y mettant quelque Sublimé que ce
G |
Hif. 1734 ;
o HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE
fût, il jaunifloit d’abord, puis rougifloit, & enfin expofé
quelque temps à l'air, noircifloit; que feu M. Boulduc ayant
répété les opérations de M. Barchufen, avoit trouvé qu'à
la vérité Huile de Tartre faifoit le même effet {ur quelque
Sublimé que ce füt, mais qu'il étoit faux que le Sublimé,
quel qu'il fût, noircit à la fin. I ne sagifloit que de cette
derniére circonftance entre M. Barchufen & Boulduc, du
refte ils convenoient fur l'inutilité de l'épreuve, ce qui étoit
l'efléntiel.
M. Boulduc ne s’étoit pas tout-à-fait fié à M. Barchufen
für les faits, M. Lémery ne s’eft pas fié non plus à M. Boulduc,
& s’eft engagé dans un long travail, dont tout le but a été
de connoître bien fürement les changements de couleur qui
arrivent au Sublimé corrofif par l'Huile de Tartre. Dès que
les opérations font délicates, les plus habiles gens, en fup-
pofant toüjours toute la bonne foi qui convient à leur ca-
ractere, fe défient légitimement les uns des autres, & veulent
voir par leurs propres yeux; on ne fe fert que trop de ceux
d'autrui. Quand M. Lémery commença à examiner cette
matiére, il sapperçût bien vite que le fait avancé par M.
Boulduc contre M. Barchufen étoit fort douteux, cependant
TAcadémie Favoit vü, à ce que rapportoit fon Hifloire,
ainfi il étoit important pour elle que ce fait füt approfondi,
ne fût-ce que pour le retraéter, s’il le falloit, & ne pas donner
lieu au Public de tomber dans une erreur.
Comme M. Lémery s’attendoit bien que les expériences
varieroient beaucoup felon les différentes circonftances, que
peut-être fe contrediroient-elles, de forte que ceux qui au-
roient affirmé & nié auroient raifon en même temps, il a
voulu embraffer fon fujet dans une certaine généralité à
laquelle il füt difficile que rien échappât. D'un côté le Sublimé
corrofif {e peut faire de différentesfaçons, de l'autre on peut,
pour l'épreuve, y verfer d'autres Alkalis que l'Huile de Tartre,
toutes ces différences vont être confidérées.
On peut faire le Sublimé avec le Mercure, ou crud &
coulant, ou déja pénétré des Acides Nitreux, ou vitrioliques.
DES SCIENCE s. st
Le Sel Marin y eft toûjours abfolument néceffaire. Dans
certains procedés on ne peut fe pafler du Vitriol, dans d’autres
il facilite l'opération, mais il eft abfolument inutile quand
le Mercure eft déja pénétré d'Acides Vitrioliques.
On peut verfer fur le Sublimé, non-feulement l'Huile de
Tartre, mais de la Solution, ou de Sel de Soude, ou de
Cendres gravelées, ou de Potaffe, ou de tel autre Alkali
de cette nature qu'on voudra. M. Lémery a porté le fcrupule
fi loin fur cet article, qu'il diftingue entre les premiéres
Solutions de ces Alkalis, & les fecondes, qui fe font en faifant
évaporer les premiéres, & rediflolvant leurs Sels. Le fcrupule
eft d'autant plus grand que la différence des premiéres &
des fecondes Solutions eft ordinairement aflés légére. Nous
paflons fous filence beaucoup d’autres attentions ; comme
celle de remarquer f1 le Tartre étoit anciennement ou nou-
vellement fait. On fçait aflés que des-changements de cou-
leur tiennent ordinairement à des caufes aflés imperceptibles,
11 femble que M. Lémery fe foit plu à épuifer toutes les
-combinaifons qui fe pouvoient faire des différents Sublimés
avec les différents Alkalis, le tout jufque dans les plus petites
circonftances qui pouvoïent donner lieu à quelque diverfité,
I réfulte de ce détaïl prefque immenfe, 1.° Que dans toutes
les expériences le noir dont il s’agit ne manque prefque
jamais de paroître, mais ordinairement précédé du rouge,
_ qui l'avoit été du jaune. 2.° Que quelquefois ce noir paroît
attaché au corps du Mercure, & quelquefois ne confifte
qu’en ‘une efpece de pouffiére qui-nage dans la liqueur où
eft le Mercure, & qui eft venuë comme par hazard à ren-
contrer fa furface, & à s’y attacher légerement. 3.° Que fur
: 1e Mercure uniquement pénétré des Acides Nitreux la fuc-
ceffion des trois couleurs peut être fi prompte que l'œil ait
Peine à la fuivre, de forte que l’on ne croira voir que le
noir, & cela dès le premier inftant. 4.° Que cette fucceffion
peut être auffi extrêmement lente, de forte que le noir ne
* paroïtra qu'au bout de 24 heures. $.° Qu'en ce cas-là ï eft
plus ou moins fort. 6.” Qu'un Sublimé corrofif fait par
G ïi |
* V_PHift.
de 1700.
P. 56.
V. les M.
P- 417:
52 HISTOIRE DE L'ÂCADEMIE ROYALE
M. Lémery fans mélange d’Arfénic, a fait voir d'abord du
noir, qui n'a été précédé ni de rouge, ni de jaune,
Par-à £ découvre aifément a fource des erreurs où l'on
peut être tombé. On aura fait des expériences où l’on n'aura
pas vû le noir, parce qu'on ne laura pas attendu aflés long-
temps, & on aura conclu généralement qu'il n'en paroifloit
point. Dans d'autres expériences on aura vû ce noir paroître
tout d'abord, & fi on a été prévenu de Ja conclufion tirée
des expériences précédentes, on aura jugé qu'on étoit dans
un cas extraordinaire, & que le Sublimé étoit fophiftiqué
par de l'Arfénic. I eft donc préfentement bien fur que le
noir ne porte fur ce point aucun indice.
On pourroit avoir la curiofité de fçavoir d'où il vient,
M. Lémery croit que c'eft en partie cette matiére terreufe
que feu M. Homberg tiroit, mais en petite quantité, du
Mercure le plus net *, elle noircifloit l’eau où on f'avoit
jettée. Comme elle eft aflés finguliére, & qu'il eft aflés fur=
prenant qu'elle fût contenuë dans le Mercure, M. Homberg
n'épargnoit point fon temps ni {es peines pour la forcer à
fe montrer, mais M. Lémery en eft venu à bout par un
procédé infiniment moins long & moins pénible. Peut-être
quelque autre matiére provenuë des Alkalis aïde-t-elle à la
production du noir dans le Sublimé corrofif, :
SUR L'EMETICITE DE L'ANTIMOINE,
DU TARTRE EMETIQUE
- ET DU KERMES MINERAL.
’ANTIMOINE eft un remede dont la bonté feroit
prefque fuffifamment prouvée parles puiflants obflacles
qu'elle lui a fait furmonter. Il eft moderne, & il ne refte
plus qu'à lui donner la précifion moderne, dont jufqu'à
préfent il a befoin, car on ignore aflés quel eft le degré de
force des différentes préparations qu'on en fait; & comme
à LA LD E: SU CORNE © € 53
c'eft un remede violent, il eft dangereux qu'il agifle tro,
dangereux même qu'il n'agifle pas aflés, & qu'il n'ait fait
qu'une impreflion vive, & cependant inutile par rapport à
ce qu'on s’étoit propofé. On envoye dans les Campagnes,
par ordre du Roi, des Remedes Antimoniaux bien faits,
mais fouvent différemment faits, & dont ceux qui les em-
ployeront ne peuvent connoître les différentes vertus. C’eftà
ce que M. Geoffroy a entrepris de régler autant qu'il étoit
poñlible.
Selon lui l’Antimoine eft compofé d’une Terre métallique
sitrifiable, d'un Acide vitriolique femblable à l'Efprit de
Soufre, & d’une matiére bitumineufe ou huileufe qui avec
cet Acide peut former un Soufre commun brülant.
. Le Soufre commun n’eft certainement pas émétique,
TAcide vitriolique, quoiqu'uni à des liqueurs huïleufes, ne
Yeft pas non plus, l’Antimoine réduit par la plus violente
calcination à une fimple Terre, cefle d'être émétique ; en
quoi confifte donc fon éméticité, quand il eft en fon entier?
T1 faut que ce foit dans l'union de quelques principes, &
puifque celle de l’ Acide avec une matiére fulphureufe ne feroit
rien, c’eft donc celle du Soufre avec la Terre vitrifiable. Ce
Soufre étendu, rarefié par la chaleur, prêt en quelque forte
à prendre feu, enlevera les petites parties de la Terre, qui
par leur roideur picotteront, ébranleront les Nerfs, & exci-
teront le vomiffement.
: HA faut por cela que la quantité du Soufre foit en une
certaine proportion avec celle de la Terre. Trop de Soufre
envelopperoit toutes les particules de la Terre, & leur feroit
un enduit mollafle, qui les empêcheroit d'agir aflés vive-
ment. Dei vient que le Régule d'Antimoine, qui n'eft autre
chofe que ce Minéral dépouillé d’une partie de fes Soufres,
eft plus émétique que l'Antimoine crud, & que le Verre,
plus parfait à cet égard que le Régule, eft encore plus émé.
tique. Si enfin ce n’étoit plus qu'une pure Terre fans Soufres,
il n'y auroit plus d'éméticité, puifque les parties de cette
Terre, quelque dégagées qu'elles fuffent, de a plus
: iij
%
p- 50.
& fuiv.
$s4 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE
de véhicules pour les enlever, & les mettre en action.
IL eft prouvé par des expériences de M. Geoffroy, que
dans le Tartre émétique qui fe fait avec la Crême ou les
Criflaux du Tartre unis à l’Antimoine, il y a un Acide
végétal qui fe charge de la partie réguline de YAntimoine,
la corrode, & Ia rend par-R plus propre à picoter le genre
Nerveux. L
Mais comme enfin c’eft dans l'Antimoine que réfide la
vertu émétique, plus il y aura dans un Tartre émétique de
ce qui rend FAntimoine émétique, c’eft-à-dire, plus la quan-
tité de fa partie réguline fera forte par rapport à l'autre, feu-
lement pourtant jufqu'à un certain point, plus ce Tartre fera
émétique. Ainft M. Geoffroy ayant trouvé le moyen de
mefurer la quantité de partie réguline d’Antimoine qui fera
dans un T'artre émétique quelconque, il fçaura combien ce
Tartre eft émétique, & quel eft le rapport de-fa force à
celle de tout autre. Nous n'entreprenons point le détail des
expériences & des faits, qui doit être réfervé à M. Geoffroy.
Il traite auffi du Kermès Minéral, autre préparation d'An-
timoine dont nous avons parlé en 1720 * fous le nom de
Poudre des Chartreux. Le Kermès ne doit pas être aufii vo-
mitif que lAntimoine, ou Ie Tartre émétique, on veut
mème le plus fouvent qu'il ne le foit pas, qu'il ne foit qu'un
fondant , un purgatif doux, où qu’il n'agifle que par tranfpi-
ration. L'opération qui le produit confifte à tirer, du moins
on le croit communément , un Soufre de l’Antimoine par
Je moyen de l'Alkali du Nitre fixé par les Charbons. Mais
M. Geoffroy prétend que le Soufre brûlant de l'Antimoine
à changé de nature dans le Kermès, & que la poudre qu'on
a pü y prendre pour du Soufre, eft 11 partie métallique &
réguline de lAntimoine. Et comme l'opération du Kermès
Minéral demande beaucoup defoins qu'on peut n’y apporter
pas toûjours , M. Geoffroy en propofe une équivalente à
celle du Kermès, & bien plus facile, puifqu'on n'y employe
que lAntimoine crud fans addition de matiéres étrangeres,
qui multiplient néceflairement les attentions, & caufent tout
DE SMS: CHRISINLC: ES
l'embarras. Tout fe réduit à pulvérifer très-finement l'An-
timoine, de forte que fa partie réguline foit prefque infini-
ment atténuée ; on le reconnoït en ce qu'en applatiflant
cette poudre avec un Couteau, on n’y voit plus au grand
jour aucun brillant, tel que celui des Aiguilles ou des facettes
de l'Antimoine. M. Geoffroy rend témoignage des expé-
riences qu'il a faites ou qu'il a vüës de ce Remede, & avertit
en même temps de ce qu'il faut obferver en le pratiquant.
H y a toûjours une préfomption avantageufe pour ce qui
eft plus fimple.
MUR LE MLCREURE.
UE a Chimie pût parvenir enfin à changer quelque
Métal en Or, il eft fort douteux que ce füt un bien
pour le Genre humain, ni même pour le Particulier qui en
auroit trouvé le fécret. Mais certainement c'eft un grand
mal que cette ancienne efpérance de le trouver, dont tant
d'Impofteurs ont abufé pour engager des perfonnes crédules
& avides, à des travaux infinis, & à des dépenfes ruineufes.
Nous avons déja parlé ailleurs des fupercheries de la Pierre
Philofophale*. Ce feroit rendre un grand fervice aux
Hommes que de leur Ôter cette efpérance qui, pour le moins,
a trompé jufqu'ici tous ceux qui s’y font livrés.
Comme c’eft principalement le Mercure que l’on prétend
transformer, parce qu'on le croit Ja bafe de tous les Métaux,
M. Boërhave a travaillé fur le Mercüre de la même maniére
que sil avoit été vivement perfuadé de la pofhbilité de fa
transformation, & pofiedé de la plus forte paflion d'en venir
à bout. I n’y a plaint ni foins, ni dépenfe, ni temps. Il
faut en faire autant que les Alchimiftes pour être pleinement
en droit de les condamner.
M. Boërhave a pris du Mercure le plus pur, qu'il a encore
purifié avec tout le foin poñlible, car nous ne répéterons pas
après Jui le détail de {es opérations. Il la mis en digeftion
|:
V. les M,
P: 539:
* V. PHif,
de 1722.
p.37. &
fuive
56 HISTOIRE DE L'ACADEMIE RoYaALe
fur un feu dont la chaleur élevoit le Thermometre à plus
de 100 degrés, au lieu que dans les Mines où fe trouvent
les Veines des Métaux, la chaleur n'eft guére que de 70,
& pour imiter, autant qu'il fe pouvoit, la Nature qui appa-
remment ne produit les Métaux qu'avec beaucoup de lenteur,
il a tenu fon Mercure fur ce feu, toüjours égal, pendant
plus de 15 ans. I eft vrai que les Alchimiftes difent qu'il
en faudroit 1000, mais comment le fçavent-ils? & fi cela eff,
le Mercure ne fera donc jamais transformé ou fixé en Métal
que par une opération qui aura duré 1000 ans fans inter-
ruption, qui aura commencé fous Charlemagne, & finira
aujourd'hui, M. Boërhave ayant vü qu'au bout de plus de
1 5 ans fon Mercure étoit toüjours auffi fluide & auffi volatil,
qu'il ne s'y étoit fait aucune féparation que d'un peu de
pouffiére noire flottante fur fa furface, mais qui {e revivifioit
aifément en Mercure, qu'il ne paroïffoit pas la moindre
génération d’un atome de Métal, pas le moindre commen-
cement de fixation métallique, il en a conclu hardiment,
& avec beaucoup de raifon, que le Mercure eft immuable,
inaliérable, & ne peut jamais être que du Mercure, quoiqu'il
puifle prendre des formes capables de le faire méconnoître,
Dans tout le cours de opération, l'Air eut toüjours un
accès libre au Mercure, & parce qu'on s’en peut prendre à
cette circonftance de ce que le fuccès n’a pas été tel qu'un
Alchimifte Feût defiré, M. Boërhave à répété l'opération
avec des Vaifleaux bien fermés, & le fuccès en a été abfo-
lument le même. A Ia vérité le temps ne fut que de 6 mois,
mais il n'y avoit nulle apparence de rien efpérer d'un plus
long temps.
Hpourroit étre impoffible de changer le Mercure en Métal,
& il ne le feroit pourtant pas que le Mercure uni à quelque
principe inconnu, à quelque Soufre particulier, entrât dans
la formation des Métaux, & en füt tiré par l'art de la Chimie.
M. Boërhave ne laifie feulement pas cette reflource à ceux
qui s’en flatteroient. Le Plomb feroit, felon eux, 1e Métaf
qui rendroit le plus aifément fon Mercure, il a fait fur le
4 Plomb
D'EMSNS CAC E s7
Plomb des opérations de près de 20 mois où rien n'a été
oublié, & pas une goutte de Mercure wa paru. Ça été la
même chofe avec l'Etain, qui devroit aufli permettre affés
facilement à l'Art de pénétrer jufqu'à fes principes.
Mais le Mercure, felon quelques-uns, n’entre pas feulement
dans la compofition des Métaux, if eft auffi leur Diffolvant,
c’eft une Eau où les Métaux naiflent, meurent, renaiffent, &
peut-être par une longue digeftion du Mercure avec le
Plomb, & par une diftillation violente, entreroit-il intime-
ment dans le Plomb quelque portion de Mercure. L'opé-
ration a été faite par M. Boërhave, elle a duré près de 3
ans, & le poids du Plomb n'a point augmenté, quoique
celui du Mercure fût un peu diminué. Il s’en étoit fait une
très-petite diffipation, & fes yeux même appercevoient ce
qu'il étoit devenu, mais le Plomb n'en avoit rien pris. Même
fuccès fur Etain.
_ Et fi Von croyoït que le mouvement feul, long-temps
continué, püt faire difloudre Etain par le Mercure, M.
Boërhave oppofe encore à cette erreur l'expérience d’une
Bouteille pleine de Mercure & d'Etain, attachée à un Moulin
à Foulon qui travailloit nuit & jour fans relâche, & dont
elle a fuivi le mouvement pendant près de 2 ans. Ï s’étoit
tout au plus détaché de Etain quelques petites parties ful-
phureufes & grafles qui s'étoient unies au Mercure, mais
ni le Mercure ne les avoit difloutes, ni elles ne s’'étoient
changées en Mercure. Les vrais Chimifles ne laïfferont aux
Alchimiftes que le refuge d'une opiniâtreté invincible, re-
fuge toûjours ouvert à qui veut en profiter, & où en efet .
une infinité de gens fe cantonnent fiérement.
Ous renvoyons entiérement aux Mémoires
L’Ecrit de Mr: du Hamel & Groffe fur une Liqueur
très-volatile, nommée E#her.
Celui de M. Petit le Médecin fur 'Analife des Plâtras,
Hifi. 1734 ; H
V. les M,
P- 41.
p. 380.
V. les M.
P: 149:
p. 196.
P- 369-
p- 405-
P: 527-
s3 H1STOIRE DE L'ACADEMIE RoYaALE
ETS RS NN EN TAN
RS 2 A X SFY 4 N S & 3
RDA RG RO A RUR RUAT RU RTANTA RUE
BOTANIQUE.
Marchant a 1 la defcription du Zribulus terreftris,
. Cüceris folio, frutlu aculeato. Cafp. Bauh. Pin. 3 50.
Tribule.
Et du Senecio minor vulgaris. Cafp. Bauh. Pin. 131.
Senecon.
DE 0 TT ET 0 0 NT 0 En QUE 0 ET ET
SR me ne memes ne ms = — me =
AT 0 El APRES EE 0 EG ER D SO IS ES
GEOMETRIHE.
à Nés renvoyons entiérement aux Mémoires
L’'Ecrit de M. Bouguer fur les Courbes propres à
former les Voutes en Dome.
Celui de M. Clairaut fur des Courbes dont la propriété
confifte dans une certaine relation entre leurs Branches expri-
mée par une Equation donnée.
Celui de M. Fontaine fur les Courbes Tautochrones.
Un Probleme de M. Pitot fur le Point d'où l'on verra
fous des angles égaux quatre points donnés.
L'Ecrit de M. Fontaine fur la Courbe décrite par le
fommet d’un Angle dont les côtés toucheroient continuel-
lement une Courbe donnée, & réciproquement, &ce
p 531. Celui de M. Clairaut fur le même fujet:
p.538. Et une Réponfe de M. Fontaine.
ES e
D'Eisw S CH E UN: C:E-$ s9
SÉRRARNNREN NN
ASTRONOMIE.
SUR LA DETERMINATION.
DE LA FIGURE DE LA TERRE
PAR LA PARALLAXE DE LA LUNE.
O° ne voit peut-être pas du premier coup d'œil comment
la Parallaxe de la Lune peut tirer à conféquence pour p. 1.
la figure de la Terre. La Parallaxe de la Lune mefure la
diftance de la Lune à la Terre, c'eft à cela uniquement
qu’elle a été employée de tout temps par tous les Aftronomes,
mais cette diftance de la Lune à la T'erre, quel rapport a-t-elle
à la figure de.la Terre? par où deux chofes de nature.fi
différente peuvent-elles fe trouver liées? on le va voir d’après
M. Manfredi quides a rapprochées par un tour aflés fubtil,
mais folidement fubtil, car autrement l'infléxible Géométrie
ne lui feroit pas de grace.
La Parallaxe, ou plus précifément le Triangle Paralladtique
eft formé de trois droites dont deux font un angle au centre
de la Lune, da premiére étant tirée du centre de la Terre,
& la feconde d’un point quelconque de a furface de la Terre
où fe trouve l'Obfervateur ; quant à la troifiéme droite, bale
. de l'anglede la Parallaxe au centre de la Lune, c’eft néceffaire-
ment un demi-diametre de la Terre, puifque c’eft une ligne
qui joint le centre & un point de la furface.
Ce néceffairement fappofe que la Terre foit fPhérique,
comme on l'a d'ordinaire fuppolé jufqu'à ces derniers temps,
fans héfiter le moins du monde, mais fi cela n’eft pas, il
arrive quelque changement dans le Triangle Parallaétique,
& c'eft-là le fin de la Théorie de M. Manfredi.
H ij
V. Les M.
À
6o HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE
IL eft clair qu'il faut que ce Triangle foit dans un plan
Vertical pour l'Obfervateur, & qui pate par fon Œil, &
par le centre de {a Lune. Ce plan eft donc perpendiculaire
à la furface quelconque de la Terre Sphérique ou Elliptique.
Dans cette incertitude on ne peut plus compter que ce plan
continué au dedans de la Terre aille à fon centre, ni que
par conféquent la bafe de l'angle de la Parallaxe foit, comme
elle l’étoit, un demi-diametre de la Terre. On ne fçait pas.
même jufqu'où il faut continuer ce plan, où il faut le borner
pour y trouver la nouvelle bafe qu'on cherche. Dans la figure
Sphérique on étoit bien für qu'il falloit s'arrêter au centre.
L’'Analogie feule fait voir que dans la figure Elliptique
il ftudra s'arrêter à l'Axe autour duquel aura tourné l'Ellipfe
qui a produit, par fa révolution, la furface à laquelle le plan
dont il s'agit eft perpendiculaire. Il n’eft plus queftion que
de connoiître les lignes qui, dans ce plan, feront les bafes de
Fangle de la Parallaxe felon les différents cas.
Qu'on imagine une Ellip{e infmiment allongée, ou dont
le petit axe foit infiniment petit, le grand étant fini, il eft
vifible que les perpendiculaires tirées fur cette Ellipfe qui
ne fera alors qu'une ligne droite, ou fon propre.grand axe,
tomberont toutes fur des points différents de cet axe, &r
toutes enfemble en occuperont toute l'étenduë. Si le petit
axe devient fmi, quelque petit qu'il foit, l'Ellipfe devient
une Courbe, les perpendiculaires qu'on lui tire, & qu'on
prolonge jufqu'au grand axe, n’en occupent plus toute l'é-
tenduë, & en laiflent les deux extrémités vuides. Les portions
de ces perpendiculaires comprifes entre la Courbe & fon
grand axe commencent à être finies, la plus grande eft au
milieu du grand axe, & de-là les autres des deux côtés vont
en décroïffant. Celles de chaque côté appartiennent au quart
d'Ellipfe qui leur répond. Sie petit axe croît encore, les
perpendiculaires tiennent moins d’étenduë fur le grand axe,
& fe ferrent davantage vers le milieu, leurs portions font
plus grandes, mais toüjours difpofées dans le même ordre,
& croiflantes ou décroiffantes de même. Que fi enfin le
DES SCIENCE Ss. 6x
petit axe devient égal au grand, auquel cas 'EÏip£ eft un
Cercle, les perpendiculaires qui s’étoient toûjours jufques-là
ferrées de plus en plus vers le milieu, fe ferrent enfin infi-
niment, puifqu'elles concourent à ce milieu, ou au centre,
& toutes les portions inégales de perpendiculaires deviennent
égales, & des rayons d'un même Cercle.
Si après cela il arrive, ce que j'appellerai la 24° }iporhefe
par rapport à la 7’ qu'on vient de voir, que l'axe jufqu’à
préfent plus petit ou égal à l’autre devienne plus grand, les
portions de perpendiculaires qui avoient toüjours avancé
vers le centre, & enfin s’y réunifloient toutes, commencent
à pañler au delà, & à tenir plus d’étenduë fur l'axe où elles
tombent, de forte que celles qui viennent d’un certain quart
de l'Ellipfe tombent fur une partie de l'axe qui appartient au
quart fuivant. Cela ne fe trouvoit jamais dans la 1° hipo-
thefe, où toutes les portions de perpendiculaires d’un quart
d'Ellipfetomboient en de-cà de celle du milieu la plus grande
de toutes ; au contraire dans la 24e hipothefe elles pañlent
au de-là, & par conféquent font plus longues que celle du
milieu, & vont en croiffant vers les deux extrémités de l'axe
qui a été déterminé.
I eft vifible que la 1° hipothefe eft celle de la Terre
Sphéroïde allongé, & la 2de, celle de la Terre Sphéroïde
applati ; la Sphere eft entre les deux. L’'Axe de la Terre
auquel il faut tout rapporter, n’eft point indéterminé, comme
ille feroit dans une figure purement géométrique, c’eft ici
celui de la révolution diurne d'Orient en Occident ; s’il eft
plus grand que fon conjugué, qui eft le diametre de l'Equa-
teur, la Terre eft un Sphéroïde allongé ; s’il eft plus petit,
elle eft un Sphéroïde applati.
L'Obfervateur de la Parallaxe de la Lune étant dans un
plan vertical fur un point de Ja furface de la Terre, la ligne
comprife dans ce plan, & qui va de ce point jufqu’à l'axe
de la Terre, eft la bafe de l'angle de la Parallaxe, c'eft elle
qui mefure la différence du centre de Ja Lune và d’un point
de la furface de la Terre au même centre vû d'un point
H iij
# p. 100.
62 HisTôiñe DÉ L'ACADEMIE Roôyare
correfpondant de l'axe. Plus cette bafe eft grande, plus La
Parallaxe eft grande. I ne s’agit ici que de Ia Parallaxe hori-
fontale, la plus grande de toutes. C’eft bien tout ce que peut
füire la plus grande Parallaxe que de fuffre au deffein préfent.
Si la Terre eft Sphérique, fur quelque point de fa furface
que J'Obfervateur foit pofé, la bafe de angle de là Parallaxe
eft toûjours un demi-diametre de la Terre, & par conféquent
les Parallaxes font toûjours égales, bien entendu que la Lune
ne sapprochera, ni ne s'éloignera de la Terre, où qu'on
tiendra compte de ce changement de diftance. On ne confi-
dére que les changements qui arriveront par les différentes
pofitions de FObfervateur fur la furface de la T'erre, & parce
ue l'on ne concevoit la Terre que Sphérique, on n’a pas
dû penfer jufqu'à préfent que ces différentes pofitions euflent
aucun effet par rapport à la Parallaxe de Ia Lune.
Si la Terre eft un Sphéroïde allongé, & que l'Obferva-
teur, placé d’abord fur un point de l'Equateur terreftre, aïlle
toûjours enfuite vers un Pole, faifant, fi l’on veut, diverfes
Stations, il eft clair par ce qui a été dit, que la bafe de
Vangle Parallaétique qu'il obfervera, diminuera toüjours, &
que ce fera le contraire fi la Terre eft un Sphéroïde applati.
Donc on peut reconnoître par les Parallaxes horifontales
de l1 Lune obfervées en différents lieux, fi la Terre eft une
Sphere ou un Sphéroïde, & fi ce Sphéroïde eft allongé où
applati.
Plus deux obférvations feroient faites dans deux lieux
éloignés en latitude, plus la conclufron qu'on en tireroit
feroit füre. Il feroit même à fouhaiter qu’ils euflent la mêmé
longitude. M. Manfredi juge que la meïlleure méthode pour
obferver des Parallaxes, eft celle des Parallaxes horaires in-
ventée par feu M. Caflini, & que nous avons expliquée
en 1706 *. C'eft donc cellé qu'il voudroit qu'on employât
pour 1 Lune. Refte à fcavoir fr elle donneroit une aflés
grande précifion , & des réfultats aflés fenfibles. M. Manfredi
fait le calcul des erreurs inévitables aux meilleurs Obferva-
teurs, ou du moins des doutes qu'ils ne peuvent entiérement
DE Su C PENCHE Se. 7 63
lever, & on voit qu'il eft permis d'efperer ici une exacti-
tude fuffifante; mais une méthode nouvelle & ingénieufe,
demeurit-elle d’abord fans effet, à droit d’en attendre quel-
ques-uns d’imprévûs, ou au moins aura-t-elle toûjours le prix
que lui donnent fa nouveauté & fa finefle,
SUR L'INCLINAISON DES ORBITES
DES PLANETES
Par rapport à l'E quateur de la Révolurion du Soleil.
LAcés fur la Terre comme nous fommes, il faut que
L_ toutes nos Oblervations, toutes nos Melures partent de
ce point de vüë, de ce point fixe néceflaire, & que nous
n'avons pas choif. Nous avons voulu fçavoir fi les autres
Planetes, qui aufli-bien que la Terre tournent autour du
Soleil, fuivoient ou ne fuivoient pas la même route, la même
Oxbite que la Terre, & pour cela nous avons dû pofer la
nôtre, notre Ecliptique, comme un plan unique ou principal
auquel fe rapporteroient tous les autres, mais nous n’avons
pas prétendu lui donner par-là aucun avantage, aucune pré-
éminence réelle, & dès que l’on fçait que le Soleil tourne
autour de lui-même, comme toutes les Planetes tournent au-
tour de lui , on fent même avant que de raifonner, & par
une efpece d'inftinét philofophique, que le grand Cercle de
k révolution du Soleil, fon Equateur, fera le plan dominant .
auquel il faudra rapporter ceux de toutes les autres révo-
ltions.
On avoit déja La pofition, l'inclinaifon de toutes les Or-
bites des Planetes à l'égard de l'Ecliptique, & ce qui en eff
une fuite néceffaire, les lieux de tous leurs Nœuds, c’efl-à-dire
des points où FEcliptique ef coupée par ces différentes
Orbites. On a {çû. par les Taches du Soleil que fon Equa-
teur étoit incliné de 7° + fur le plan de l'Ecliptique, & que
leurs Nœuds étoient au 10m des Gémeaux, & à lOppofite,
V. les M.
P. 107.
x 0 .
& Res
64 HISTOIRE DE L'ACADEMIE RoyAzr
Avec ces connoiflances & le fecours de la Géométrie, ‘on
parviendra aflés facilement à tranfporter, pour ainfi dire, fur
Equateur du Soleil ces mêmes plans qu'on n’avoit déter-
minés que par rapport à lEcliptique, & on pourra même
reconnoitre qu'on les a tirés d’un état qui ne leu“étoit pas
naturel pour les y remettre. En effet la rotation du Soleil
fur lui-même doit, felon toutes les apparences, être le prin-
cipe de tout le mouvement de Tourbillon du SiftemeSolaire,
& par conféquent toutes les Planetes doivent ou circuler
toutes dans le plan de l'Equateur du Soleil, ou ne s’en laiffer
que peu écarter par quelque efpece de violence. Or les
Orbites des Planetes rapportées à l'Equateur du Soleil s’en
éloignent prefque une fois moins de part & d'autre qu'elles
ne s'éloignent de l'Etcliptique fi on les y rapporte. Elles font
plus ferrées vers le plan d'où elles n'auroient pas dû fortir.
H eft à remarquer que c’eft la Terre qui s’écarte le plus de
cet Equateur, elle en eft à 7° +, & Mercure qui s’écarte
le moins en eft à 3° 10". On entend aflés que ces plans
tranfportés à l'Equateur du Soleil ne le coupent pas dans
les mêmes points où ils coupoient notre Ecliptique, que les
Noœuds d’une certaine Orbite qui étoient, fi Fon veut, au
x d'Ariès, lorfqu'on la rapportoit à l'Ecliptique, n’y font
plus, & en peuvent être même affés loin, lorfqu'on la rap-
porte à l'Equateur du Soleil.
I s'agit maintenant de fçavoir, & c’eft-là le plus fin de
cette Théorie de M. Caffini d’après qui nous parlons, fi ces
Noœuds ont un mouvement fur cet Equateur, & quel eft
ce mouvement. Toute cette matiére des Nœuds eft aflés
épineufe, ils pourroient être fans mouvement réel, & en
avoir un apparent, ils pourroient en avoir un réel, & n'en
avoir point d'apparent, ceux des Orbites des Planetes avec
YEcliptique & leurs mouvements font très-diffciles à con-
flater, & la difficulté doit être fans comparaifon plus grande
pour les Nœuds de ces mêmes Orbites avec l'Equateur du
Soleil. Tout cela va s'expliquer.
Nous avons dit aflés au long en 1708 * comment l'axe
de la
D ESS CEMMCE S 6;
de la Terre ou de l'Equateur terréftre tournant autour de
Jaxe immobile de FEcliptique, caufoit apparence d'un
mouvement que les Etoiles fixes auroïent fur les Poles de
‘JEcliptique, en confervant toüjours & entre elles, & à
l'égard de Ecliptique, les mêmes diftances. Chaque point
du Firmament , fans avoir aucun mouvement réel, paroîtra
donc décrire en un certain temps ou l'Ecliptique , OÙ UN
Cercle parallele à l'Ecliptique. Or tout Nœud d’une Orbite
de Planete avec l'Ecliptique eft un point du Firmament,
donc fans avoir aucun mouvement réel, il en aura un appa-
rent. On fçait que ce mouvement eft d'Occident en Orient,
& des 1” feulement en une année.
+ Si l'on concevoit que les Nœuds euffent un mouvement
vréel égal à l’apparent que leur donne le mouvement de l'axe
de l'Equateur terreftre autour de l'axe de l’'Ecliptique, mais
que ce mouvement réel füt en fens contraire de l'apparent, il y
auroit un mouvement réel qui ne feroit nullement apparent.
Mais dans le 1°* cas tous les Nœuds m’auroient que le
même mouvement, ce qui le rendroit bien légitimement
fufpect de n'être qu'une apparence, & dans le 24 cas où tous
des Nœuds feroient immobiles, on n’imagineroit guére qu'ils
pufñlent avoir un mouvement réel, & il ne feroit nullement
wvraifemblable qu'ils euflent tous le même, & que de plus
ils l'euflent tous directement en fens contraire du mouve-
ment apparent des Fixes.
«+ Que les Nœuds ayent un mouvement réel, mais inégal
à l'apparent des Fixes, plus vite ou plus lent que de $ 1"
<nun an, & toùjours du même fens, alors le mouvement
réel fe découvrira fûrement par fon inégalité à l’apparent des
Fixes. S'il eft plus grand que‘de s 1” il fera toûjours direct,
ou d'Occident en Orient; sil eft moindre, il paroîtra retro
grade. Il fuffit qu'il déméle, qu'il fe dégage de quelque
façon que ce foit d'avec cet apparent qui pourroit l'effacer.
D'ailleurs le mouvement réel des Nœuds fera différent en
différentes Orbites, plus ou moins.vîte dans les unes que dans
les autres, ce qui fera encore une grande marque de réalité.”
He 173 4 :
*
p. IOÏ.
& fuiv.
2 Edit.
66 HISTOIRE DE L'ACADEMIE RoyALE
Auffi les Aftronomes en font-ils communément perfuadés,
cependant on eft encore dans quelque incertitude fur ce fujet,
faute de pouvoir déterminer affés exactement par les obfer-
vations les mouvements des Nœuds. Comme ils ne font
certainement que fort lents, il n’y a qu'une fuite de Siécles
qui puifle les rendre fenfibles, & malheureufement on n’a
pas lieu de f fier aflés aux anciennes obfervations, elles
n'avoient pas la précifion néceflaire à cette recherche. I
n'y a peut-être rien dans l'Aftronomie fur quoi les Aftro-
nomes foient moins d'accord, parce qu'il eft aflés arbitraire
d'adopter ou de rejeiter certains Elements qui entreront dans
cette Théorie.
Tout ceci n'eft que pour le mouvement des Nœuds des
Orbites rapportées à notre Ecliptique, mais que fera-ce quand
elles feront rapportées à l'Equateur du Soleil? les Orbites
des Planetes & l'Ecliptique font connuës depuis un grand
nombre de Siécles, il n'y a prefque qu'un Siécle que l'on
connoît un Equateur au Soleil, & avec quelle fubtilité a-t-if
fallu parvenir à déterminer la pofition de l'Ecliptique par
rapport à cet Equateur! on en a vü l'hiftoire en 1701*,
& pour peu qu'on y fafle réfléxion, on fentira fi les obfer-
vations de ces différentes demi-Ellipfes, que les Taches pa-
roiffent décrire fur le difque du Soleil, peuvent donner une
grande précifion. On n’a même eu aucun autre moyen qui
pût fervir concurremment avec celui-là, & y fuppléer. Si
Jon ne connoît qu'à peine, & fans une entiére aflürance
les Nœuds de l'Equateur Solaire avec notre Edliptique, &
par conféquent avec les autres Orbites, comment découvrira-
t-on aflés fürement fi ces Nœuds fe meuvent ou non? ce
né fera du moins qu'à la faveur d’une longue fuite de Siécles.
Si ces Nœuds font immobiles, nous leur verrons le mou-
vement apparent de $ r” par an, que leur donnera, comme
à tout le Firmament, le mouvement réel de l'axe de l'Equa-
teur terreftre autour de l'axe immobile de l’Ecliptique.
Si ces Nœuds fe meuvent réellement, il faudra concevoir
que l'axe de l'Equateur terreflre fe meut autour de l'axe de
PRES —
Le CRE
:
DES S$S C'HEUMNICES 67
FEdliptique, non plus immobile, comme il l'étoit, mais qui
fe meut lui-même autour de l'axe immobile de Equateur
Solaire. 11 eft aifé de voir la néceffité de ce changement,
pourvû qu'on parte de cette confidération, que ce n’eft plus
ici notre Ecliptique à laquelle on rapporte les pofitions &
les Nœuds des Oxrbites des Planetes, mais l'Equateur du
Soleil. Ainfi il n'appartient qu'à cet Equateur d’être immo-
bile, & c'eft à notre Ecliptique, comme à toute autre Orbite
dont il s'agira, à fe mouvoir autour de ni, puifqu'on fup-
pofe que les Nœuds qu'elle a avec lui, fe meuvent réelle-
ment, c'eft-à-dire, qu'elle va le couper fucceflivement en
différents points.
- | Dès que FEdliptique, ou plütôt fon axe, fe meut, il fe
fait un grand changement dans le Ciel. Le mouvement des
Fixes de 5 1” en un an, les laïfle toutes fur les mêmes Cercles
paralleles à 'Ecliptique, parce qu'il fe fait fur l'axe immobile
‘de YEdcliptique. La latitude ou diftance des Fixes à FEclip-
tique demeure donc toûjours la même, mais non la longi-
tude qui varie toüjours, & ne reviendra au même point
qu'au bout de 25000 ans. Mais fi l'axe de l’Ecliptique &
-meut, la latitude des Fixes change, quelque peu que ce foit
en plufieurs années à caufe de la grande lenteur du mou-
vement.
+ Tycho-Brahé s’étoit apperçà de quelques variations de Ja
latitude des Fixes, & Képler, pour expliquer ces variations,
avoit ifnaginé l'hipothefe d’une rotation du Soleil dont l'axe
auroit une certaine pofition par rapport à l'axe de l'Eclip-
tique. H déterminoit mal cette pofition & le lieu des Nœuds,
faute d'avoir connu ou aflés obfervé les Taches du Soleil;
mais manquant de cette connoiffance, ä ne haïffoit pas d'aller
bien près du but, & de deviner l'effentiel par la force de
fon génie. On peut remarquer à {à gloire qu'il a beaucoup
deviné, & merveïlleufement ; les deux Loïix, aujourd’hui
fi fameufes & fr-bien établies dans 'Aftronomie Phifique,
appartiennent à une efpece d’infpiration qu'il a eüë.
++ On pourra donc un jour eonclurre des mouvements
li
68 HisToiRE DE L'ACADEMIE ROYAIE
apparents des Fixes les mouvements réels, s'ils exiflent, des
Nœuds des Oxrbites Planétaires avec l'Equateur du Soleil,
En attendant des déterminations bien conftatées & irrévo-
cables, M. Caffini en tire de deux différentes hipothefes,
J'une de l’immobilité des Nœuds de FEcliptique , l'autre de
leur mouvement égal en fens contraire au mouvement appa-
rent des Fixes. Certainement il arrivera de grands change-
ments dans le Ciel, & ce feront des fpectacles intéreffants
pour les Aftronomes, leur curiofité impatiente les prévient
autant qu'elle peut.
SUR L'ATMOSPHERE DE LA LUNE.
F5 Philofophes inclinent aflés unanimement à ne point
donner d'Atmofphere à la Lune, mais ce n'eft pas
encore une queftion tout-à-fait décidée, on y a fait entrer
plufieurs conjeétures différentes, & M. Grandjean prétend
l'amener à des termes plus précis, en ne la traitant que par
Géométrie.
Si la Lune a une Atmofphere, fon diametre apparent,
&, pour mieux dire, la circonférence apparente de fon difque
en eft augmentée, fur-tout quand elle eft pleine, & cette
augmentation fera proportionnée à la hauteur de cette At-
mofphere. Si elle doit avoir un éclat différent de celui du
corps de la Lune, du moins lui verra-t-on une efpece de
bordure qui fe fera remarquer. Or le diametre de la Lune
pleine n’eft jamais que ce qu'il doit être par rapport à la
diftance où la Lune eft de la Terre, nulle augmentation
d’ailleurs, point de bordure au difque. r
Si la Lune a une Atmofphere, cette Atmofphere fera
certainement plus denfe que l'Ether, fans quoi elle ne feroit
pas Atmofphere, elle rompra donc les rayons du Soleil en
les approchant de la perpendiculaire, c’'eft-à-dire, en leur
donnant plus de direction qu'ils n'en avoient vers le centre
du globe total de la Lune & de fon Atmofphere, ces rayons
DES ScCcreNcCE < 6ÿ
ainfi rompus, entreront dans l’efpace qui ne devroit être
occupé que par l'ombre de la Lune éclairée de l'autre côté
par le Soleil, l'efpace occupé par l'ombre eft donc diminué,
& fi la Terre y doit pañler, ce qui arrive dans nos Eclipfes
de Soleil, l'Eclipfe en commencera plus tard, & finira pluf-
tt, ou fera plus courte qu'élle n'eût été naturellement. Or
c'eft ce qu'on ne remarque point, même en le cherchant,
lEclipfe eft toûjours conforme au calcul Aftronomique, qui
n'a point fuppofé d'Atmofphere à la Lune, ou fi elle n'y efE
pas exaétement conforme, on s'apperçoit aifément qu'il a
tenu à quelque autre chofe.
Si les Eclipfes de Soleil étoient accourcies par l'Atmo-
fpheré de la Lune, ïl y auroit telles circonftances où une
Eclipfe qui auroit du être très-courte, ne feroit point.
H en faut dire autant des Eclipfes des Fixes par la Lune,
fon Atmofphere les accourciroit.
Rien de tout cela n'arrive, & par conféquent la Lune n’a
point d’'Atmofphere, ou elle en a une qui nous eft infen-
fible, foit par fon peu de hauteur, foit par la foiblefe de
fes réfrattions.
Voilà les raifonnements fur ce fujet qu'on peut appeller
géométriques, & qui le font encore beaucoup plus de Ia
maniére dont M. Grandjean les traite. Mais il y en a d’autres
phifiques, & qui par leur nature font plus douteux. Nous
avons rapporté en 171 $ * un des plus forts qu’on ait encore
faits pour l’Atmofphere de la Lune, nous rapportâmes auffi
une réponfe aflés fatisfaifante , mais il faut avoüer que ce
nétoit-là que laifler ce point dans l'incertitude. Elle fera
encore plus grande fi l'on ÿ veut joindre ce qui a été dit
en 1723 * fur la maniére dont l'Ombre fe jette derriére les
Corps éclairés. On y verra des accidents fi imprévûs, quoi-
que réglés & conftants, & tout le géométrique tellement
dérangé par le phifique, qu’on ne fe preffera pas de prétendre
rien déterminer de fixe fur lexiftence ou 11 non-exiftence
d'une Atmofphere de la Lune, & fur les chan gements qu'elle
apporteroit aux phénomenes,
\ üj
* p- 49e
& fuive
* p. 90
& fuiv.
7o Histoire DE WACADEMIE Royare
SUR LA GRANDEUR DES SATELLITES
D'ENSSAEP IT ER
UPITER, à caufe de fon grand éloignement, nous
paroît fr petit, même avec les meïlleures Lunettes, &
dans fà plus grande proximité de la Terre, qu'il a fallu que
feu M. Cafini ait inventé une Méthode aflés fubtile pour
déterminer précifément que fon diametre apparent étoit de
5 1 Secondes. Que fera-ce donc de fes Satellites, qui font
beaucoup plus petits ? Quelle induftrie pourra faifir les extré-
mités de leurs diametres, en forte qu'il y refte un milieu
fenfible ?
. M. Caffini, à qui l'Aftronomie doit plufieurs Méthodes
très-fines & très-ingénieufes, en a trouvé une pour la gran
deur de ces Satellites. Ils paflent tous devant le difque lumi-
neux de Jupiter, & difparoifient effacés par fa lumiére,
quand ils y font entiérement plongés, mais ils font quelque
peu de temps à s'y plonger, & autant à s’en dégager entié-
rement. Leur mouvement étant alors fuppolé uniforme, &
il le fera toùjours aflés pendant une fi petite portion de leur
révolution autour de Jupiter, il eft certain que le temps
qu'ils mettront à fe plonger entiérement dans le difque de
Jupiter, ou à en fortir entiérement , fera au temps qu'ils
mettront à pafler invifibles devant. le difque de Jupiter, f
cependant ils ont paflé devant fon centre, comme leur dia-
metre eft à celui de Jupiter, que lon connoiïtra d'ailleurs.
La circonftance de pafier devant le centre de Jupiter eft
rare. Ï left fort aufli que Jupiter foit dans fa plus grande
proximité de Ja Ferre, c’eft-à-dire, en oppofition avec le
Soleil, & en même temps dans fon Périhélie, car quand Ja
Terre eft entre lui & le Soleil, ce qui fait fon oppofition,
& approche beaucoup de 1 Ferre , il ne lui refte plus,
pour être le plus près de la Terre qu'il fe puifle, que d’être
aufli le plus près du Soleil. La réunion de ces circonftances,
ana test cut ne EE à.
ble.
TL © ist
D -d
Donne rem. "+ à
D'E SMS COMEMMICiEL sr TT ex
rares chacune en particulier, étant encore beaucoup pius
rare, & cependant prefque abfolument néceffaire pour la
détermination des grandeurs des Satellites, il n’eft pas éton-
nant que l’Aftronomie héfite encore fur ce fujet.
M. Maraldi avouë qu'il y a travaillé fans fuccès. Souvent
le Satellite qu'il fuivoit n’étoit pas à moitié plongé dans le
difque de Jupiter, qu'il devenoit invifible, parce que fa
partie qui auroit dû encore fe faire voir étoit trop petite
étant feule. Souvent c'étoit la même chofe renveriée dans
une Eméifion , une partie déja fortie n’étoit pas aflés grande
pour être vüë. Cependant M. Maraldi trouve dans les Re-
giftres de l'Obfervatoire des Obfervations aflés exactes fur
ces Immerfions & Emerfions, & principalement trois de feu
M. Cafini en 169$ fur les trois 1°"s Satellites. Parà les
diametres du 1°° & du 24 font à celui de Jupiter comme 1
à 20, & celui du 3° comme 1 à 18. Le 4me Satellite
manque à cette Théorie, mais M. Maraldi fupplée par un
autre tour au défaut d’obfervations pareïlles, & trouve le
diametre de ce Satellite comme celui des deux rers. Le 3me
Satellite eft donc le feul inégal, & il eft le plus grand. Si
nous voyions de Jupiter les trois qui nous paroiïffent égaux,
ils cefleroient apparemment de l'être.
On ne doute plus préfentement que le diametre de Ju-
piter ne foit dix fois plus grand que celui de la Terre, ainfi
le diametre du plus grand Satellite eft à celui de la Terre
comme 10 à 18, ou 5 à 9. H eften même temps beaucoup
plus grand que celui de la Lune, qui n'eft à celui de la
Terre qu'environ comme r à 4.
S'il éft encore néceflaire de prouver combien les obfer-
vations des Satellites font délicates, nous rapporterons une
remarque de M. Maraldi. De ces obfervations que l'on à
faites en même temps à Greenwich & à FObfervatoire, on
en a tiré la différence de ces deux Lieux, & ïl fe trouve
que cette différence eft toûjours plus grande par les Immer-
fions que par les Emerfions comparées enfemble, & c’eft
dans un très-grand nombre de comparaifons que cela fe
\
V. les M.
P:409e
73 Histoire DE L'ACABEMIE Rovatr
foûtient toûjours. I! y a de l'erreur de l'un des deux côtés,
& une erreur d'habiles gens, c'eft tout ce que nous voulons
conclurre, quoique M. Maraldi conjeéture aflés finement
de quel côté elle vient.
SUR UNE NOUVELLE METHODE
POUR TROUVER
DA-C H AU EU RADU. P 0 LE
|: y a deux Méthodes principales pour déterminer la
hauteur du Pole, ou 1a latitude d’un Lieu.
La 1e eft par les hauteurs Méridiennes du Soleil, ou de
quelque Etoile fixe. Le jour du Solftice d'Eté, où l'on fçait
que le Soleil eft à 23 degrés de l'Equateur, car pour plus
de facilité je ne prends que des nombres entiers, on a ob-
fervé fa hauteur Méridienne de 6 3 degrés, delà on conclut
que le Soleil eft éloigné du Zénit du Lieu de 27 degrés,
27 & 23 font so degrés dont le Zénit du Lieu eft éloigné
de l'Equateur , & c'eft-à fa latitude ou fa hauteur du Pole,
Il eft clair que toute Fixe fervira au même ufage que le
Soleil, pourvû que lon connoifie fa diftance à l'Equateur,
ou fa declinaifon , comme l'on connoifloit dans cet exemple
celle du Soleil.
La 2de Méthode eft bornée aux Fixes circompolaires, c’ef-
à-dire, dont on peut voir du Lieu où l'on eft une révolution
entiére autour du Pole, ou qui ne fe couchent point. A une
plus grande latitude on en voit toüjours un plus grand
nombre. Elles ont dans une feule révolution deux hauteurs
Méridiennes, l’une fupérieure par rapport au Pole, l'autre
inférieure, on les a toutes deux par obférvation, on prend
l'arc du Méridien compris entre elles, il eft für que le point
du milieu de cet arc eft le Pole, & que la hauteur fupé-
rieure obfervée moins la moitié de cet arc, ou l'inférieure
plus cette même moitié eft Ja hauteur du Pole fur l'Horifon.
Le
DES SCIENCE Ss 73
Le défaut de la premiére Méthode eft qu'elle demande
la connoiffance exacte des déclinaifons, foit du Soleil, foit
des Fixes, & les meïlleurs Aftronomes ne font pas d'accord
entre eux fur ce point, fans compter que l’on commence à
appercevoir dans les Fixes, des irrégularités , des changements
de pofition qui, jufqu’à préfent, paroïflent fort bifarres.. I
eft clair aufi que les hauteurs Méridiennes varient par es
Réfractions, dont la jufte mefure ne pourra apparemment
être jamais bien établie. Le feul remede feroit de prendre
ces hauteurs fr grandes que les Réfraétions y puflent être
negligées. x
La 2de Méthode eft fujette auf aux Réfraétions, & c’eft
fon feul défaut qui jufque-là lui eft commun avec la rere,
mais elle a de particulier que comme il lui faut deux hauteurs
différentes, elle tombe deux fois dans l'inconvénient des
Réfractions qui même font inégales.
* Hne faut pas croire cependant que quand les opérations
font auf bien faites qu'elles peuvent l'être, fur-tout quand
on en a fait un grand nombre pour un même fujet, if puiffe
refter beaucoup d’incertitude. M.'s Caffini & Maraldi ont
fixé la latitude de l'Obfervatoire à 48° so’ 10", M. de
Hire à 48° 5 o' feulement, il ne s’agit que de 10”, de = 3
du tout, mais M. Godin juge que comme une latitude eft
un élement très-important qui entre dans une infinité de
calculs, il eft bon de Favoir encore, s'il fe peut, dans une
plus grande précifion, & il en a imaginé le moyen.
N choïfit une Etoile circompolaire dont la plus grande
hauteur Méridienne foit telle que la Réfraction y foit nulle
ou infenfible, & il prend exactement cette hauteur. L'Etoile
étant en deçà du Pole par rapport à lObfervateur, & plus
élevée fur FHorifon , il eft certain que fi de fa hauteur
Méridienne connuë on ête fa diflance au Pole encore in-
connuë, on aura la diftance cherchée du Pole à l'Horifon.
Chaque Quart de l'Equateur, à compter d’un Méridien
quelconque; eft égal à da diftance de Equateur au Pole,
& de même à caufe de l'uniformité de la Sphere, chaque
Hifl. 1734 K
V. les M.
P-4+34-
* V.lHift.
de 1733:
P- 46
H1isToIRE DE L'ÂCADEMIE ROYALE
Quart du Parallele décrit par une Etoile en 24 heures, eft
égal à la diftance de cette Etoile au Pole, puifqu'elle eft
toüjours très-exactement pendant 24 heures fur la circon-
férence de ce Parallele, düt-elle avoir d'ailleurs de grandes
régularité. On la voit pendant toute une révolution, on
peut donc la prendre & 6 heures avant, & 6 heures après
{on paflage par le Méridien, elle aura décrit précilément la
moitié de la circonférence de fon Parallele, il n’y a plus qu'à
mefurer par les Inftruments la quantité de degrés de cet arc,
dont la moitié {era la diftance de la Fixe au Pole.
Il eft vrai que‘quand elle a été dans fes deux plus grands
éloignements du Méridien, elle a dû être aflés bafle pour
être fujette aux Réfractions, & alors par conféquent on l'a
vûë trop élevée, & la moitié de fon Parallele à paru plus
courte qu'elle n'étoit réellement. M. Godin n'a garde d'en
difconvenir, mais il fait remarquer & prouve par un Exemple,
que fes opérations le menent à um Calcul où l'erreur qui vient
des Réfraétions mal connuës, eft la moitié moindre que celle
qui naïtroit des opérations ordinaires. De plus il trouve la
hauteur du Pole par une Etoile fixe, fans avoir befoin d'en
connoître auparavant la déclinaifon. H femble préfentement
que tous les grands pas font faits dans les Sciences, & qu'on
ne peut plus avancer que par de petits pas, qui n'en feront
que plus difficiles, & plus à eftimer.
MUR LA. PER PE NET COTE A PRES
A LA ME'RIDIENNE DE PARIS.
cr qui fut commencé en 173 3 pour la Perpendiculaire
à la Méridienne de Paris du côté de l'Occident *, a été
continué & fini cette année du côté de l'Orient, quoiqu'au
miliéu d’une Guerre très-vive. M. Caflini, parti de Paris à
la tête de la même" Froupe que l'année précédente, à pouffé
cette Perpendiculaire jufqu'à l'extrémité Orientale de la
France, jufqu'à Strafbourg.
DES SCTENCES. LA:
Si lon fe fouvient de ce qui a été dit en1721* {ur +, 66
cetté forte de travail en général, & dessattentions qu'iley & fuiv. :
faut apporter, il ne reftera plus qu'à en faire l'application à
quelques cas particuliers qui fe trouvérent dans ce dernier
ouvrage; par-exemple, quand on fut fur les confins de da
Lorraine & de l’Alface, la Perpendiculaire jetta les Géometres
dans de grands Bois, où il n'y avoit ni Objets remarquables
qui puffent être difingués des autres pour la foimation des
Triangles, ni Routes par où d’autres que des Chafleurs
puffent guére pañler, incommodités auxquelles on ne s'atten-
doit point dans des païs tels que ceux-ci, & qu'on n'avoit
oint encore éprouvées, du moins à ce point-à, dans de
aréttes entréprifes. Il fallut fe faire & des Objets & des
Routes, on fe partagea pour allumer en différénts endroits
‘& en des temps dont on étoit convenu, de grands feux qui,
par l'éloignement, n'étoient prefque plus que des points où
fe forinoient des fommets d'angles. Quelquefois, quoiqu'il
fuffit de partir d'une bafe aétuellement: melurée; après quoi
tout le refte f éoncluoit par le calcul Trigonométrique, om
à mefuré aétuëllement d'autres bafes où côtés de Frianglés
pour fuppléer au défaut de quelque angle que l'on n'avoit
pas, car fi lon n'a pas les trois angles d'un Triangle, il faut
avoir plus d’un côté,
‘On eft parvenu de, Paris à Strafbourg par une fuite de
29 Triangles, ce qui eft remarquable, puifqu'il en a fallu
3 0 pour aller feulement de Paris à Dunquerque. Nous avons
dit en 1721 pourquoi le petit nombre de Triangles, & Ia
grandeur'des angles font des avantages. Ici on a eu ces deux
avantages à Ja fois, & ces grands Bois fi incommodes y ont
apparemment contribué. On a été obligé de fe faire des
Objets, & on fe les eft faits Les plus éloignés qu'on a PÜx
& faifant entre eux les plus grands angles.
* On à fini ce travail de la même maniére que les autres,
par la mefure actuelle d'une bafe qui, fur une longueur de
‘3 341 Toifes 4 pieds, ne s'eft trouvée que de 4 pieds plus
courte que la bafe réfultante des 29 Te | ri
| K ij
6 Histoire DE L'ACADEMIE ROYALE
La diftance de Paris à Strafbourg eft de 20 $ 120 Toifes
en ligne droite, ce qui fait près de 90 Lieuës communes
de 2282 Toifes. Cette même diftance prife fur la Perpen-
diculaire n’eft que de 204990. Strafbourg eft au Midi de
la Perpendiculaire, & en eft éloigné de 7326 Toiles, ou
de plus de 3 Lieuës.
Si aux 204990 Toiles de difance de Paris à Strafbourg
prifes fur la Perpendiculaire, on joint les 148460 Toiles
ou 6 5 Lieuës, qui font fur la même Perpendiculaire la diftance
de Paris à Granville, on aura 353450 Toiles, ou près de
‘155 Lieuës pour la longueur de cette ligne qui s'étend fu
toute la France de l'Oueft à l'Eft en paflant par Paris.
On avoit {a diftance terreftre de Paris à Strafbourg, il
ne reftoit plus qu’à avoir la diftance célefle, c'eft-à-dire, Ia
grandeur en degrés de Parc d'un Parallele compris entre Paris
& Strafbourg, ou entre leurs Méridiens. Pour cela les Satel-
lites de Jupiter étoient néceflaires, mais le temps extrème-
ment pluvieux étoit très-contraire à lobfervation, & d’ailleurs
on n'eût pas pü la fuivre long-temps, car Jupiter étoit prêt
à fe plonger dans les rayons du Soleil. Mais M. Hertenftein,
fameux Profefleur de Mathématique à Sirafbourg, fuppléa
à ce défaut par de bonnes obfervations des Satellites, faites
par M. Eifenfchmid fon Prédecefleur, & qu'il communiqua
à M. Caffimi.
H parut bientôt par-R qu'à la latitude de Strafbourg, les
degrés de longitude étoient plus petits qu'ils ne doivent être
dans l'hipothefe de la Terre Sphérique, & que cela emporte
que la Terre foit un Sphéroïde allongé. Nous avons trop
traité cette matiére dans l'année précédente pour en rien
répéter ici. M. Eifenfchmid n'étoit engagé dans aucun parti
fur la Queftion de la figure de la Terre, & il n’y a pas
d'apparence que dans fes obfervations des Satellites il ait
fongé à favorifer le Sphéroïde allongé, plütôt que l'applati,
& d’ailleurs, quoique fort habile, il eût peut-être eu de Ja
peine à trouver bien fürement comment il devoit s'y prendre,
mais enfin ces obfervations fe font trouvées fi favorables au
D E 99 $C MIBINNCYE. s TT
Sphéroïde allongé, que M. Caffini a eu la modération de
n’en pas vouloir tirer tout l'avantage qu'il eût pü à la rigueur,
& de s'en retrancher une partie.
SUR L'OBLIQUITE DE L'ECLIPTIQUE.
UANp l'obliquité de lEcliptique feroit toûjours dé-
croiffante, comme quelques-uns commencent à le
‘croire, ce feroit de fr peu & fi lentement, que l’on n’auroit
pas tort d'en douter encore aflés long-temps. Nous avons
déja traité le pour & le contre de cette matiére en 17 1 6*,
& depuis ce temps-là nous ne pouvons pas avoir acquis de
grandes lumiéres fur un point de fait dont f'éclaircifiement
demande plufieurs Siécles. Cependant on peut avoir une
impatience aflés légitime de prévenir, autant qu'il fera pof
fible, un éclairciflement fi tardif, & ceux qui la fentiront
le plus, auront apparemment déja pris le parti du décroifie-
ment de l’obliquité de FEcliptique, car pour les autres 1eur
hipothefe eft la dominante, ils font en poffeffion, & ils
peuvent y demeurer encore long-temps tranquillement.
M. Godin, comme pour tenir les chofes prêtes au Sifteme
du décroifiement, a voulu voir de quelles caufes il pourroit
proceder, quels effets il produiroit, quelles feroient toutes
des marques qui le feroient reconnoître. Pour bien entendre
toute cette Théorie aflés neuve, & peut-être un peu abftraite,
il faut, remonter jufqu’à la Préceffion des E quinoxes, que nous
avons expliquée en 1708*, felon le Sifteme de Copernic.
L’axe. de l'Equateur & celui de lEcliptique, partants
tous deux du centre de la Terre, perpendiculaires chacun
au plan de fon Cercle, font inclinés l'un à l’autre du même
angle, dont l'Equateur & l’Ecliptique le font l'un à l'autre,
de 23° à peu-près. Si fon conçoit que ces deux axes
foient immobiles l'un par rapport à l'autre, nous ne verrons
jamais aucun changement dans l'inclinaifon de l’Equateur
& de lEcliptique, ni dans toutes les pofitions des Etoiles
ë K ii
V. les M.
P+ 491.
*%
p. 48.
& As
* _
P: 03»
& fuiv. :
@ HisToire DE L'ACADEMIE RoyALE
entant qu'elles fe rapportent à l'un ou à l’autre de ces deux
Cercles, toutes les déclinaifons qui fe rapportent à l'Equa-
teur, toutes les latitudes qui fe rapportent à l'Ecliptique,
{eront invariables, les Fixes, quelque mouvement qu'elles
puifent avoir d’ailleurs feront toüjours à la même diflance
de ces deux Cercles, & ne fe mouvront que parallelement
à eux. Il eft évident que ce fera le mouvement en longitude
ui {eur fera entiérement libre.
Mais fi l'on fuppofe que des deux Axes lun fe meuve
par rapport à l'autre, que ce foit Axe de l'Equateur qui
fe meuve par rapport à celui de l'Ecliptique immobile,
décrivant un cercle autour de lui fans changer l'angle de
23 + qu'il fait avec lui, nous avons expliqué en 1708
comment alors on verroit les Fixes changer de déclinaifon,
puifque l'axe de l'Equateur fe meut, & non pas de latitude,
puifque l'axe de l'Écliptique ne fe meut pas. En même
temps les Fixes auront un mouvement en longitude d'Oc-
‘cident en Orient für les poles immobiles de l'Ecliptique, ou
plütôt l'apparence de ce mouvement caufée par le mouve-
ment circulaire réel de l'axe de l'Equateur autour de celui de
YEcliptique. La vitefle de ce mouvement réel déterminera
celle de l'apparent. On a vü comment de-à venoit la pré-
ceffion des Equinoxes. C’eft uniquement pour l'expliquer,
que tout ce que nous venons de dire a été imaginé. On y a
toûjours confidéré l'angle de FEtcliptique avec l'Equateur
comme conftant.
S'il ne l'eft pas, & c'eft de quoi il s’agit ici, quelle addi-
tion faut-il faire à cette Théorie? car ce fera une addition,
& non pas un changement, la préceffion des Equinoxes, &
tout ce qui en dépend doit fubfifter en entier. ,
Puifque l'angle diminuë , les deux axes ne confervent plus
entre eux cette même diflance qu'ils confervoient aupara-
vant, ou, ce qui eft le même, leurs plans ne la confervent
plus. Mais lequel des deux fe met en mouvement vers l’autre?
Voilà ce que M. Godin fait reconnoïître par les phénomenes
qui arriveront,
Dix Sur OR GHINENN, CE S 79
… Si l'Equateur fe meut vers l'Ecliptique immobile, tout
ce qui fe rapporte à l'Equateur, les déclinaifons des Fixes
changeront, & non les latitudes. I femble que nous venions
déja de le dire dans une autre hipothefe, maïs au fond ce
n’eft nullement la même chole. Quand Faxe de l'Equateur
tourne autour de celui de l'Ecliptique fans changer d'angle,
les Fixes prennent néceffairement par cette caufe un mou-
vément apparent en longitude, parallele à 'Edliptique, &
qui par conféquent ne l'étant pas à l'Equateur, fait changer
les déclinaifons. Mais fi outre céla l'Equateur f meut en
s'approchant de FEdcliptique, tout ce qui fe rapporte à
TEquateur, & par conféquent les déclinaifons font encore
en mouvement, & changent par ce nouveau principe, mais
ceft un changement qui s'ajoûte au premier, & n’en change
pas la nature. On ne doit pas manquer d'y faire attention.
: Si l'Ecliptique fe meut vers l’Equateur immobile, les
latitudes changent, puifqu'elles fe rapportent à l'Ecliptique,
& les déclinaifons ne changent que par le premier principe,
par le fimple mouvement de l'Axe de lÉcliptique autour
de celui de FEquateur.
Par les obfervations que l’on peut avoir jufqu'à préfent,
M. Godin croit pouvoir conclure que l'obliquité de 'Eclip-
tique a diminué de 55" en 80 ans, ce qui fera à très-peu
près 1'en 90 ans. C’eft-là le mouvement qui appartiendra
ou à l'Equateur vers l'Ecliptique, ou à FEclptique vers
* IEquateur. Le premier ou ancien mouvement par lequel
TAxe de Equateur tournoit autour de celui de l'Ecliptique
fans s'en approcher, ni s'en éloigner, fubfifte toüjours tel
que M. Caffii la déterminé de 1 degré en 70 ans. II eff
donc au fecond ou nouveau, comme ios à 1. Le fecond
eft d'une prodigieufe lenteur, s'il n’eft que la 2 partie du
premier, qui étoit déja bien lent, & il ne faut pas s'étonner
que ce fecond ait attendu toute la jufteffe & toute la fubtilité
de l'Aftronomie moderne pour fe faire feulement foupçon-
ner. On avoit peine à concevoir, & nous l'avons dit en
1708, que l'Axe de l'Equateur tournant autour de celui de
So H1STOIRE DE L'ACADEMIE.RoYyaLrE
lEcliptique püût conferver le parallelifme avec lui-même
qu'il eft obligé de garder dans toutes fes fituations felon le
Sifteme de Copernic, cette difficulté ne fubfifte plus dès que
le parallelifme n’a plus befoin d'être exact, & qu'au contraire
ÿ faut qu'il ne le foit pas.
La diminution de l’obliquité de l'Ecliptique étant admife
ou fuppofée, ou l'axe de l'Equateur fe meut vers l'Ecliptique
d'un mouvement de 1'ergo ans, outre le mouvement de
rotation qu’il a autour de,ce même Axe de 1 degré en 70
ans, ou bien l Axe de l’Ecliptique a un mouvement de 1°
en 90 ans vers l'Equateur; on a maintenant à fe déterminer
entre ces deux partis.
Il eft plus naturel que ce foit pour le fecond. L'Axe de
Equateur eft déja chargé d'un mouvement, & s’il falloit
que l'autre lui appartint encore, l'Axe de l'Ecliptique feroit
d'une immobilité difficile à admettre dans la Nature, vû
tout ce que lon-en connoît aujourd'hui. Mais M. Godin
employe un raifonnement plus fçavant & plus ingénieux,
qu'il reconnoît avoir tiré de Tycho.
Si l'Ecliptique fe meut vers l'Equateur, les latitudes des
Fixes changent toûjours, & comme il faut des temps extré-
mement longs pour donner en cette matiére quelque chofe
de fenfible les plus anciennes latitudes obfervées avec affés
de fûreté, fèroient celles que on compareroit aux latitudes
d'aujourd'hui. Mais ce que nous avons de plus ancien fur.
ce fujet, ce font feulement les déclinaifons de quelques Fixes
données par Ptolémée fans leurs latitudes. M. Godin a fup-
pléé à ce défaut pour la Claire de l’Aigle en tirant fa lati-
tude au temps de Ptolémée de la déclinaifon qu'elle y avoit,
du mouvement connu des Fixes, de l’obliquité qu'avoit
alors l'Ecliptique, & des obfervations de M. Godin lui-même
fur la longitude de cette Etoile. Le Calcul vient enfin à
donner fa latitude plus grande au temps de Ptolémée qu’elle
n'eft aujourd’hui, &, ce qu'il y a de remarquable, plus
grande prefque précifément autant que l'étoit l'obliquité de
l'Ecliptique, parce que la Claire de l'Aigle eft placée prefque
fur
> oi
Dr SES" COPENNIC ES 8 :
Jüur le Colure des Solftices, au point où la mefure de fa
latitude & celle de lobliquité de l'Ecliptique ne font que
la même.
Dans ces fortes de Calculs M. Godin a égard aux Re-
fractions que les Anciens ne connoïfloient pas. I a même
égard aux différents Lieux où les Anciens ont obfervé, car
c'eft encore là un principe de variation pour les Refraétions,
& feu M. le Chevalier de Louville paroït n’en avoir pas
tenu compte, quoiqu'on le doive dans une matiére où ï
n’eft queftion que de fort petites grandeurs, qui échapperont,
fi l'on en perd rien.
Par toutes les preuves de M. Godin, l'apparence eft juf-
qu'ici, car peut-être fuffit-il de dire apparence, que l'angle de
lEquateur & de l'Ecliptique diminué, & que c'eft FEdlip-
tique qui s'approche de l'Equateur. Mais f1 cela eft, voici
un grand changement dans le Ciel. Tout le monde fçait ce
que c'eft que les Nœuds de l'Ecliptique avec toutes les Or-
bites des Planetes, rien n’eft plus important ni plus néceffaire
‘ dans l'Aflronomie que Îa détermination de ces Nœuds, de
Jeurs lieux, de leurs mouvements, parce que ces points étant
les feuls communs à notre Orbite & aux autres, c’eft dans ces
points que les mouvements des Planetes doivent être mieux
comparés à celui de la Terre, & c'eft de-là que nous devons
partir pour fuivre tous ces mouvements étrangers, ou du
moins ce font dans tous ces mouvements des points princi-
paux & très-remarquables. Si l’on fe repréfente l'Ecliptique
coupant chaque Orbite de Planete en deux points placés
différemment en chaque Orbite, on concevra auffi-tôt que
fi l'Edliptique étoit immobile, tous ces différents Nœuds le
feroient auf, & paroîtroient fixes, du moins & ce chef, &
que s'ils avoient ou paroïfloient avoir du mouvement, cela
leur viendroit d'ailleurs | mais que fi l'Ecliptique fe meut, if
eft impoffble que devenant füucceflivement différents plans
différemment polés, elle ne vienne à couper toûjours en
d'autres points les Orbites des Planetes, & que par-là les
Noœuds n’ayent un mouvement apparent, Or ce mouvement
Hi, 173 4 :
82 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE
des Nœuds caufé par celui de F'Ecliptique m'a jamais été
connu, & ce feroit une réforme importante à faire dans
leur Théorie.
IL eft vrai que cette Théorie n’eft pas encore bien aflürée.
Elle l'eft fi peu que quelques Aftronomes font {e mouve-
ment de certains Nœuds direct, & celui de quelques autres
rétrograde, ce qui manque abfolument de vrai-femblance,
& auroit befoin d'être, pour ani dire, plus que prouvé.
C'eft l'extrême lenteur du mouvement des Nœuds, & {a
grande rareté d'Obfervations heureufes , qui caufent l'incer-
titude où l'on demeure fur ce point.
Dans cet état, M. Godin prend le parti de croire que
les Nœuds n’ont aucun mouvement réel, mais un apparent
caufé par le mouvement réel de l'Ecliptique vers l'Equateur
terreftre. Le phifique de cette Théorie eft extrêmement
fimple, dégagé de toute idée forcée, ou ajuftée au befoin,
néceflaire même fuppofé 1à diminution de lobliquité de
YEcliptique & le mouvement de l'Ecliptique vers l'Equa-
teur. Mais ce ne feroit pas aflés, il faut encore que les
Obfervations s'accordent avec l'hipothefe, qui paroït d'abord
hardie, & c'eft ce que M. Godin s'attache à faire voir d’une
maniére aflés fatisfaifante. Il promet d'étendre encore cette
recherche plus loin fur les mêmes vüës. Nous l'avons déja
dit, l s'en faut bien que les faits de l’Aftronomie ne foient
aflés conftatés. On ne doutoit pas que l'angle de l'Ecliptique
& de l'Equateur ne füt toûjours le même ; s'il ne left pas,
c'eft dans tout le corps de l'Aftronomie un changement
prefque incroyable.
DES, SC REN,CE S.
MECHANIQUE
SUR : LB E AG U R EM
QUE LES PLANETES PRENNENT
PAR LA PESANTEUR.
UAN D on recherche en Philofophe les figures des
KZ Planetes, il eft aflés ordinaire & fort naturel de con-
fidérer ces Corps, quoique folides, au moins dans une grande
partie de leugtout,. comme ayant été originaiement de
grands Fluides, ou des efpeces de Pâtes très-molles, que la
Pefanteur a, pour ainfi dire, pétries, en les obligeant de
prendre les figures que fon aétion demandoit, pôur s'exercer
enfuite continuëment, également, & fans obftacle. Ia donc
fallu que toutes les parties de la Planete ayent été amenées
à un équilibre, qui ef le feul état permanent; il faut, pour
cet équilibre, que toutes les Colomnes du Liquide fe dif
pofent entre elles de façon à fe foûtenixr les unes les, autres,
& à fe contrebalancer exactement. Cette exactitude 1eft
_ néceflaire que dans le temps où le Corps de la Planete {croit
en liqueur, ou en pâte, car alors le moindre excès de Pefan-
teur qu'une Colomne auroit fur les autres les feroit foulever,
& altéreroit la figure du tout; ce ne fera plus la même
chofe, quand cette liqueur fe fera, fi l'on veut, congelée,
ou que cette pâte fe fera durcie; léquilibre.eft exact entre
les parties de nos Mers, mais non pas entre celles des Terres,
qui. pourroient n'avoir été originairement qu'une pâte.
Pour déterminer l'équilibre des Colomnes, il.eft befoin
de connoître, du: moins géométriquement, c'eft-à-dire, de
pouvoir réduire aux.expreflions,, & au Calcul de l'Algebre
tout ce qui appartient à la Pefanteur »prife ou en elle-même ;
1]
V. les M,
p.21.
84 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE
ou par rapport à fon action, ou par rapport à l'altération
u’elle peut recevoir de caufes compliquées avec elle.
Elle peut être en elle-même ou conftante ou variable.
Conftante, elle agira toûjours avec la même force, à quel-
que diflance que foit le point vers lequel elle poufie un
Corps; variable, elle agira avec plus ou moins de force felon
une proportion quelconque à cette diftance. Conftante, elle
agira toûjours de même felon quelque direction qu'elle agifle
fur ce corps; variable, elle agira différemment felon difié-
rentes directions.
Et de-là naiflent deux différentes maniéres dont la Pe-
fanteur peut être conftante en un fens, & variable en un
autre, Si fon action eft 11 même à quelque diflance que foit
le point où elle tend, & f1 en même temps elle eft différente
{lon la différente direétion ; ou fi, au contaire, l'action
eft la même pour toutes les direétions, mais non pas pour
toutes les diftances du point où elle tend, la Pefanteur fera
imparfaiteñent conftante & variable, & il eft aifé de voir
quand elle fera parfaitement lun ou l'autre.
Elle peut ne poufler toutes les parties du Corps qu'elle
meut que vers un point unique, qui fera alors un centre,
ou les poufler chacune vers un point différent d’une même
ligne, qui fera un axe.
Quand le Corps fuppolé fe meut fur fon centre, où, ce
qui eft le même, fur un axe, la Pefanteur qui tend toüjours
ou vers ce centre, ou vers cet axe fe complique néceffaire-
ment avec la force Centrifuge qui tend à s’en éloigner.
Mais pour confidérer ces deux forces comme contraires, il
né faut prendre que ce qu’elles onf d’abfolument oppolé dans
leurs directions, décompofées s’il en eft befoin. Si dans le
Fluide qui tourne, la force Centrifuge étoit plus grande que
la Pefanteur, tout ce Fluide fe diffiperoïit, & feroit bien
éloigné de pouvoir prendre une figure durable. Si les deux
Forces étoient égales, elles fe détruiroient l’une l'autre, &
il ne fe formeroit point encore de figure. Il faut pour cela
que la Pefanteur foit la plus grande, ce n'eft que ce qui
D'E.s1:8"c:) NICE à 8$
n'efl pas détruit par faction de la force Centrifuge, fon
antagonifte, ce n'eft que ce qu'elle peut encore conferver,
qui agit pour produire une figure, ce n'eft que cet excès,
ce refte, qui eft le poids «fuel des Corps.
M. Bouguer exprime algébriquement dans Ia plus grande
généralité poffible, & la Pefanteur, & fon a&tion, & fa
modification. Il y a quelquefois dans ces fortes d'expreffions
plus que F'art ordinaire; par exemple, on peut remarquer
celui qu'employe M. Bouguer pour défigner différemment
la Pefanteur variable par une différente diftance au point où
elle tend, ou par une différente direction,
Le Fluide indéterminé, que M. Bouguer confidére, tourne
fur fon axe vers lequel la Pefanteur poufle toutes les Colomnes
‘ qui le compofent, & puifque leur équilibre déterminera {a
figure que le Fluide total prendra, il faut trouver une Equa-
tion où une certaine Colomne déterminée contrebalance
toute autre Colomne quelconque, ou, ce qui eft le même,
lui foit égale en force. Il y a dans ce Fluide, une Colomne
unique, dont la Pefanteur n’eft point altérée par la force
Centrifuge, c’eft celle qui eft l'axe du mouvement de cir-
culation du Fluide; elle comprend tous les points d’où les
forces Céntrifuges tendent à s'éloigner, & par conféquent
elle ne peut avoir elle-même de cette efpece de force. Cette
Colomne déterminée mile en égalité avec toute autre indé-
terminée foumife à toutes les conditions du Probleme, four-
nira lEquation que lon cherche, fufceptible enfuite de
toutes les déterminations particuliéres poffibles. On entend
aflés qu’il fortira de là des valeurs d’Abfciffes & d'Ordonnées
d'une Courbe, qui fera toûjours celle de la figure cherchée
du Fluide, & qui variera {lon les différentes hipothefes
qu'on aura faites arbitrairement. «
+ I feroit aflés naturel de croire qu'après cela tout eft fait,
. mais le Probleme bien approfondi, renferme encore une
confidération qui en augmente la difficulté, & par conféquent
la beauté, & qui pourroit échapper à moins que d’une grande
attention.
L ii
86 Histoire DE L'ACADEMIE RoYALE
| L'équilibre des Colomnes aflure bien, dit M. Bouguer,
Je repos intérieur de toute la mafie du Fluide, mais-non pas
l'extérieur, celui de fa furface, qui peut encore n'être pas de
niveau, & par conféquent couler de côté & d'autre, &
n'avoir pas une figure arrêtée. Mais, dira-t-on, ce qu'on
appelle ici l'extérieur, n'eft-ce pas l'intérieur même fiffant,
& fi tout l'intérieur eft tranquille , comment cet extérieur
ne le fera-t-il pas? C’eft que l'équilibre des Colomnes n'a
fait qu'en régler les différentes longueurs, telles qu'elles de-
voient être, afm que l'une d’entre elles n'en. foülevät pas
une autre par un plus grand poids, c'eft que faction quel-
conque de la Pefanteur n’a été difhribuée que par rapport à
ces longueurs, & n’a eu, pour aïnfi dire, d'autre objet que
de les déterminer. Pour cela il n'étoit pas néceffaire que les
directions de cette action fufient perpendiculaires à la fur-
face qui formoit, mais il faut qu'elles le foient à cette
furface formée, fr on veut qu'elle fe maintienne, car autre-
ment de deux Colomnes qui précifément par leur longueur
faifoient équilibre, fr la premiére reçoit perpendiculairement
Jaétion de la Pefanteur, tandis que la feconde ne la reçoit
qu'obliquement, il eft certain que la premiére l'emportera
fur la feconde, & la foûlevera. |
M. Bouguer cherche une nouvelle Equation, qui exprime
Ja figure ou la furface d'un Fluide dont tous les points foient
prefiés perpendiculairement par la Pefanteur, ou, ce qui
revient au même, foient de Niveau. I lui vient une Equa-
tion aflés différente de celle qui donnoit l'Equilibre des
Colomnes, ce qui marque déja que les deux cas font plus
différents qu'on n'auroit cru. Is le font au point que l'un
exclut quaft toüjours l'autre, & qu'il ny a que peu de
moyens de les réunir, c’eft-à-dire, que quand on veut que
les deux Equations deviennent-la même, ce qui ne fe peut
qu'en égalant entre elles les quantités par où elles different,
on voit qu'il n'y a qu'un petit nombre d'hipotheles qui
puiffent produire cette égalité. Une de ces hipothees eff
celle de la Pefanteur conftante felon quelque direction qu'elle
DES SCIENCE 87
agile, & à quelque diftance que foit le point où elle tend ;
alors la Planete eft une Sphere. Ce n'eft-plus la même chofe
fon met la moindre variation dans la Pefanteur. Combien
étoit-on éloigné du vrai, &-combien étoit-on éloigné de
s'en douter, quand à caufe de la nobleffe de {a figure Sphé-
rique, on croyoit que les Corps Céleftes ne pouvoient étré
que Sphériques !
Les figures du Solide formé für le feul principe de l'Equi-
libre des Colomnes, ou fur Le feul principe du Niveau,
peuvent aller jufqu'à différer autant que celles d'un Solide
infini en étenduë &-d'un autre fini, tous deux d’une mafle
finie.
Apparemment il eft rare dans l'Univers qu'il y ait des
Planetes parfaitement Sphériques , & par conféquent des
Pefanteurs parfaitement conftantes, car, felon la préfente
Théorie, elles auroient arrondi entiérement ces Planetes,
fuppolé qu'elles les euflent trouvées dans leur premiére ori-
gine parfaitement obéiffantes à leur impreflion. Mais comme
ce point-là demeurera toüjours indécis, &c que le Probleme
de M. Bouguer n’a pas compté fur aucune réfiftance de Ja
matiére des Planetes à l’action de la Pefanteur, if ne fera pas
poflible d'arriver par cette voye à une grande certitude fur
leurs figures.
Toûjours peut-on penfer avec beaucoup de vraifemblance
qu'il eft très-diffcile que jamais l’action de la Pefanteur fur
la furface d'aucune Planete lui foit aufli géométriquement
perpendiculaire qu’il le faudroit pour tenir dans un parfait
repos des Liquides, les Mers qui s’y trouveront, & fi ce
reposin'eft pas parfait, la furface de ces Mers fera par elle-
même, & fans aucune caufe étrangere dans une petite agi-
tation continuelle. Seroit-il bien incroyable que ce mou-
vement de liquidité, dont on ne connoît peut-être pas encore
tout-à-fait la véritable origine, eût en partie celle-là? En
ce cas ce feroient les Calculs d'Algebre qui auroient conduit
à des vüés de Phifique, où les faits ni les expériences ne
conduifoient pas.
98 HisroiRe DE L'ACADEMIE*ROYALE
2 VlsM. M. de Maupertuis * qui avoit déja traité ce fujet dans
p.55: fon Livre de la Figure des Aftres * le reprit à l'occafion de
* V.l'Hif. Ja Théorie de M. Bouguer, & tomba dans les mêmes con-
Hp clufions. Il avoit embrafié la matiére dans toute fon étenduë,
AE en appliquant à la Queftion de la Figure des Planetes toutes
les hipothefes fur la Pefanteur qui ont été jufqu'à préfent
reçüës par les plus grands Philofophes.
Galilée, Defcartes & Huguens l'ont regardée comme
tendant vers un centre, & avec une force égale à quelque
diftance qu'il füt. C’eft la premiére idée qu'on a dû prendre
fur toutes les expériences faites autour du Globe terreftre,
les feules qu'il nous foit permis de faire. C’eft-là le premier
Sifteme.
Lorfqu’enfuite on a conçû que ce qui faifoit tourher tous
les Corps céleftes autour de quelque centre, ou plûtôt ce
qui les empêchoit de s’en écarter, quoiqu’ils le duffent na-
turellement, ce qui les y rappelloit toùjours, devoit être
üne Pefanteur, non feulement analogue à celle qui s'exerce
fur la Terre, mais précifément de la même nature, l'idée
de la Pefanteur eft devenuë & plus générale & plus vraye,
& comme on la prenoit fur les mouvements des Corps
céleftes réglés par les Loix de Képler, on a vü qu'il fuivoit
de ces Loix que la Pefanteur agit en raifon renverfée des
+ V. DH, quarrés des diftances au centre*,. 24 Sifteme.
de 1728. Le 3me eft que toutes les parties de la matiére s'attirent
ne 54 & mutuellement les unes les autres, mais différemment felon
? les mafles & les diflances, & que la Pefanteur ne confifte
ou ne paroît confifter que dans la fupériorité de tendance
que les unes prennent fur les autres vers certains points, à
la fin, pour ainfi dire, de ce combat général. C’eft-là pro-
prement le Sifteme de M. Newton. II eft bien vrai que tout
le 24 yentre, & s’il y entroit feul, il feroit très-raifonnable
de dire qu’en attendant la connoïffance des caufes Phifiques
ou Méchaniques de ces Pefanteurs on en confidere les effets,
& qu'on eft en droit de donner à ces caufes inconnuës des
poms commodes. Mais outre tout ce que nous appellons
le 24
Plat.
rte
DES SCreNcESs. Ci
e 24 Sifeme, celui de M. Newton, comprend les véritables
attractions, il demande que des Corps pefants fe meuvent
plus rapidement vers des centres, parce que ces centres font
occupés par de plus gros corps, qui attirent plus puifiam-
ment. Croit-on de bonne foi qu’il fe puife jamais trouver
de caufe Méchanique à cet effet, & une objection très-légi-
time & très-fondée contre M. Newton, ne tâche-t-on pas
adroitement à l'éluder en la payant d’une réponfe qui ne
convient qu'à une autre objection qu'on ne lui fait pas, ou
qu’on ne doit pas lui faire ? Tout cela bien mis au net, on
{era plus en état d'entendre ce que nous avons à dire.
On ne peut traiter la queftion de la Figure des Aftres ou
Planetes qu'en employant l'action de la Pefanteur, & par
conféquent cette queftion ne peut être traitée dans le rer
Sifteme, où la Pefanteur feroit la même par tout l'Univers
que fur la Terre, & il y a tout lieu de croire qu'elle ne
T'eft pas. De plus elle feroit toûjours la même dans fon ation,
indépendante des diftances du point central, & il eft certain
que dès qu’on la tranfporte aux Corps céleftes, elle n’eft plus
conftante dans fon action, mais variable en raifon renverfée
des quarrés des diftances.
En fe renfermant donc dans ce 24 Sifteme, on trouve
que ha figure des Corps céleftes foit toûjours fluides, comme
les Soleils, foit d’abord fluides, & enfuite endurcis, comme
les Planetes, eft uniquement le réfultat de la combinaifon
de deux Eléments qui fe combattent, de Ia Pefanteur, qui
tend à raffembler toutes les parties d’un Corps autour d'un
centre, & de la Force Centrifuge qui tend à les en écarter,
parce que ce Corps eft toûjours fuppolé circuler. Nous avons
déja dit que fr la Force Centrifuge étoit plus forte que la
Pefanteur, les parties du Corps { diffiperoient, & la figure
fe détruiroit ; fi elle étoit égale, ä ne fe formeroit point de
figure; il faut donc qu'elle foit plus foible, & alors l'Equa-
teur de la circulation ou rotation eft néceflairement plus
grand que fon axe, c’eft-à-dire, que la figure eft celle d’un
Sphéroïde applati.
Hi. 1734: M
o HISTOIRE DE L'ÂACADEMIE RoYyALE
Les Soleils autour defquels tournent des Planetes, des
Planetes autour defquelles tournent d’autres Planetes fubal-
ternes, portent avec eux & nous offrent des indices bien
marqués de la Pefanteur qui regne dans les Régions de l'Uni-
vers où ils {e trouvent. La Force des mouvements dont ils
font les centres, ou plutôt celle dont les Corps qui tendent
vers eux y tendent, eft la mefure de cette Pefanteur, &c
pour la connoitre il n'y a qu'à décompofer leur mouvement
de circulation, & comparer la Force qui leur feroit décrire,
f: elle étoit feule, un certain mouvement en ligne droite en
un certain temps, & la Force qui dans le même temps les
empêche de fuivre cette droite, & les retire d’une certaine
quantité vers un centre. Plus eft grand ce rapport de la
24e Force à la 1e, plus la Pefanteur eft grande, & il eft
vifible que la Géométrie fera aifément cette détermination.
Si nous étions fur une autre Planete que celle où nous
fommes, nous reconnoîtrions par le mouvement de la Lune
autour de la Terre quelle feroit la Pefanteur à la Région de
la Terre. Mais parce que nous y habitons, nous la connoif-
fons, nous la mefurons par des expériences plus immédiates,
On voit par-là qu'il n'y a de Pefanteurs étrangeres, pour
ainfi dire, dont nous puifions avoir connoiffance, que celles
du Soleil, de Jupiter & de Saturne, parce qu'il fe fait autour
d'eux des révolutions connuës. Mercure, Venus & Mars
nous échappent.
Il eft bon de pouvoir rapporter ces Pefanteurs étrangeres
à notre Pefanteur terreftre, dont l'effet bien conftaté eft de
faire parcourir à un Corps, qui tombe proche de la furface
de la Terre, 1 $ pieds dans la r'° Seconde de fa chüte. On
fçait quelle eft la quantité dont Jupiter, par exemple, eft
tiré vers le Soleil par fi Pefanteur en une Seconde, & puifque
la Pefanteur croît en raifon inverfe des quarrés de la diftance,
on fçait quel chemin il feroit en une Seconde, fi au lieu
de tendre fimplement vers le Soleil, il étoit réellement tranf
porté fur fa furface, or il feroit alors environ 360 pieds,
au lieu qu'il n'en eût fait que 1 $ fur la furface de la Terres
D
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|
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+
DES SCIENCrS. or
Donc la Pefanteur eft 24 fois plus grande fur fa furface du
Soleil. On trouvera de même en tranfportant un Satellite
fur la furface de Jupiter, que la Pefanteur y eft à peu-près
double de ce qu'elle eft fur la furface de la Terre.
Avec la Pefanteur d’un Soleil ou d’une Planete, il faut,
pour avoir leur figure, connoître aufi leur Force Centrifuge,
quitéépend , comme on fçait, du rapport de la grandeur
de Equateur de la rotation à la vitefle de cette rotation.
De la combinaïfon de ces deux principes réfulte la Figure
chérchée, qui eft toüjours celle d’un Sphéroïde applati,
puifque la Pefanteur eft toûjours plus grande que la Force
Céntrifuge , mais d'un Sphéroïde plus ou moins applati. La
- Force Centrifuge eft dans le Soleil environ 6 fois plus petite,
&' dans Jupiter 6o fois plus grande que fur la Terre. On
fçait par expérience que fur la Terre elle eft 289 fois
moindre que la Pefanteur.
Afin que la figure d’un Corps célefte puifle être déter-
minée par cette Théorie, il faut donc qu'il ait ces deux
conditions, & que d’autres Corps faflent autour de lui des
révolutions connuës, & qu'il en ait une fur lui-même. Le
Soleil & Jupiter ont les deux conditions, on y peut mettre
la Terre, fr l'on veut; Saturne n'a que la 1°r° condition,
Venus & Mars n'ont que la 2de, encore Venus ne Ta-t-ellé
pas encore bien fürement, Mercure manque de toutes
les deux. !
+1 M. de Maupertuis a été furpris de fe trouver arrivé par
fa Théorie & fon calcul à la même proportion de 1 $ à 14
que M. Caffini avoit trouvée, par des obfervations très-
délicates, entre l’E‘quateur & l’Axe de Jupiter. Selon Ia
même Théorie, cette proportion des deux diametres doit
être abfolument infenfible dans le Soleil, quoique non pas
nulle, auffi aucune obfervation ne la peut-elle découvrir.
+ Quand une Théorie abflraite, compliquée de plufieurs prin-
cipes différents, vient de fi loin rejoindre jufte des faits où
il n'étoit pas trop néceflaire qu'elle arrivät, ce ne peut guére
être un effet du hafard. | : |
M ïi
2 HisToiRe DE L'ACADEMIE ROYALE
I eft à propos d'oblerver que fr d'un côté les deux
diametres des Corps céleftes ne peuvent aller jufqu'’à l'égalité
pufaite, ce qui auroit fort étonné les Anciens, d’un autre
côté l'Equateur toüjours plus grand que l'Axe, ne peut être
plus grand que felon la raifon de 3 à 2, du moins dans le
Sifeme où nous fommes préfentement.
li pourroit naître de cette Théorie de M. de Maupertuis
un avantage imprévu, & que l'on jugeroit même impoflible,
celui de déterminer quelle eft une rotation que lon ne voit
point du tout, celle de Saturne; par exemple, que Saturne
eût fes deux diametres d’une inégalité fenfible, & bien ob-
fervée, on auroit par eux le rapport de Ia Pefanteur de
Saturne connuë d’ailleurs à fa Force Centrifuge, & par fa
Force Centrifuge connuë alors la viteffe de fa rotation. S'il
arrivoit que l’on vint enfuite à avoir d’autres preuves, ou
feulement d’autres indices de cette même rotation, ce feroit
bien alors qu'une Théorie auroit droit de triompher.
Dans le Livre que nous avons cité, M. de Maupertuis
avoit expliqué felon fes principes, la formation de l Anneau
de Saturne, phénomene le plus fingulier de tout le Ciel
connu. Il y revient encore pour en donner un nouveau
Calcul algébrique, & il pafle de-là à d’autres phénomenes
qu'on pourroit appeller récents, parce que depuis peu ils ont
été plus curieufement & plus exaétement obfervés que jamais
par l'iluftre M. Derham, de fa Societé Royale de Londres.
Ce font les Etoiles qu'on nomme Mébuleufes. Si ce
n'étoient ou que des Etoiles enveloppées d’une Atmofphere
fort grande par rapport à elles, & fort lumineufe, ou diffé-
rents amas de petites Etoiles qui, comme celles de la Voye
Ladée, ne fe rendroient vifibles que par leur nombre, ïl
n'y auroit rien à cela de fort remarquable. Mais M. Derham
trouve qu'il y en a plufieurs auxquelles ces deux idées ne
peuvent convenir. Leurs prétenduës Atmofpheres font trop
grandes pour n'ètre que des Atmofpheres, ou de petites
Etoiles qui devroient être en nombre infini. Il vaut mieux
que ce foient de grandsefpaces, de grandes Régions lumineufes
*
RU os OS
DES 48 CNRC: €: & 93
par elles-mêmes, & d’une maniére peut-être dont nous n'avons
point d'exemple ailleurs, car qui fçait fi cette énorme éten-
duë de l'Univers vifible à nos yeux en eft plus d’un point
par rapport à tout ce que nous n'en voyons pas, & en ce
cas-là quelle infinité de chofes dont nous n’aurions pas d'idée?
M. Derham ne croit pas même aller trop loin dans le païs
immenfe de la poflibilité, en conjecturant que ces grandes
Régions lumineues pourroient n'en être pas, mais feufement
de grands Vuides, par où l’on appercevroit des portions du
Ciel Empirée qui eft au de-là, tout brillant de fa propre
lumiére. Il croit bien que les T'héologiens ne l'en dédiront
pas, mais du moins les Géometres ne lui pafleront pas avec
tant de facilité, de mettre aflés arbitrairement fes Nébuleufes,
quelles qu'elles foient, autant au de-là des Etoiles fixes, que
celles-ci font au de-là de Ia Terre.
En fuppofant qu'entre ce qu'on appelle Neébuleufes, il y
en ait qui foient des amas, des Tourbillons tout lumineux,
ces Tourbillons prendront des figures, foumifes comme
toutes les autres à la Théorie de M. de Maupertuis, puifqu'il
fe trouvera À & Pefanteur & Force Centrifuge. Mais il n'eft
pas für que cette Pefanteur foit la même que celle fur laquelle
nous avons raifonné jufqu'ici, & qui appartient à ce que
nous avons nommé le 24 Sffeme, celle qui n'agit que felon
un rapport des diftances des points centraux où elle tend,
& qui en particulier dans tout notre T'ourbillon Solaire eft
déterminée: à agir dans la raifon inverfe de ces diftances.
Quant à la Force Centrifuge on ne la peut concevoir que
d'une feule efpece.
Si, pour tout embraffer, on prend la Pefanteur telle que
nous l'avons repréfentée dans le 3° Sifteme, car c'eft tout
ce qui refte à imaginer, s’il peut s’imaginer, il eft vrai qu'on
aura plus de facilité à expliquer certaines chofes, parce qu'on
auroit, outre l'action des principes déja pofés, tout ce qui
pourroit naître de Fattraction mutuelle des Corps. Dès que
certains Corps pañleroient plus près de quelques autres, il
fe feroit des changements confidérables dans les mouvements,
M ii
+
p: 112
& fuiv,
+ V. lHift.
de 1726,
CRETE
Hi1STOoIRE DE L'ÂCADEMIE RoyarE
dans des directions, dans les vitefles, dans les pofitions des
Centres de gravité, quelquefois même dans les Figures, mais
ce fera alors employer la véritable attraction bien dévoilée,
dont nous avons ébauché une petite Théorie en 1732*. If
n’eft prefque pas croyable combien ce feul principe de plus
rend les calculs plus longs & plus difficiles. Si l'attraction
Newtonienne n’étoit pas vraye, on feroit en droit d’avoir
regret au furcroît de peines qu'elle donne. M. de Maupertuis
a déterré un fait curieux, & qui peut furprendre. Dans le
Siécle pañlé, & avant M. Newton, deux de nos plus illuftres
François ont eu la même idée que lui fur la Pefanteur. Ils
ne l'ont pas embraffée, ni réduite en Sifteme, mais enfin ils
lont euë, l'ont jugée pofible, & s'en font même expliqués
en termes plus forts que M. Newton & fes Difciples. M. de
Maupertuis a-t-il voulu revendiquer une gloire à fa Patrie,
ou juftifier un peu les Anglois à nos dépens?
Ette année 1734, M. l'Abbé de Molieres publia le
commencement d'un Recueil de Leçons de Plifique
dictées par lui au College Royal, comme il avoit déja publié
en 1726 {es Leçons de Mathématique *,
Les Leçons de Phifique en contiennent les Elements de-
terminés par les feules Loix des Méchaniques , & ces expreflions
miles en titre, où il peut paroître une affectation inutile &
vitieufe, car ne fçait-on pas bien que les Elements de la
Phifique ne peuvent être déterminés que par les loix des
Méchaniques? ne difent pourtant rien que de raifonnable
& même de remarquable depuis que de très-grands Philo-
fophes ont voulu introduire dans fa Phifique des Principes
qu'ils reconnoifloient eux-mêmes pour n'être nullement
Méchaniques. On aura donc ici une Phifique entiérement
purgée des principes hétérogenes, pour ainfr dire, qui la
défigureroient, non pas cependant une Phifique tout-à-fait
Cartéfienne, mais établie fur les fondements dé Defcartes,
qui font les feuls, mieux employés feulement, & mieux mis
en œuvre.
D'E:s; $ CE Nc Er à 95
-Nous ne nous arrêterons pas aux Loix générales du Mou-
vement, que M. l'Abbé de Molicres pofe telles que tous
les Modernes les adoptent, après avoir reétifié les erreurs
de Defcartes. C'eft prefque uniquement des Tourbillons
Cartéfiens dont il s’agit, de ces T'ourbillons qui fe préfentent
fi agréablement à F'efprit philofophique, qui en effet ont eu
d’abord tant d'approbateurs, & de partifans zélés, & enfüite
des ennemis fi redoutables.
Tous les mouvements célefies fe font par des Cercles,
ou au moins par des Courbes rentrantes en elles-mêmes ;
de plus ils fe font tous en même fens, tous d'Occident en
Orient; de-là l'idée très-naturelle d’un grand Tourbillon
de matiére fluide qui, tournant d'un certain fens, emporte
avec lui tous les corps plus folides, que nous appellons corps
céleffes. Sans cela, pourquoi iroient-ils tous du même côté?
Qu'on les imagine difperfés dans un grand Vuide, d’où
tireront-ils cette direction de mouvement commune?
Certainement l'Auteur de Univers y a voulu introduire
le mouvement d’une maniére durable, S'il eût donné à fes
différentes parties des mouvements en ligne droite du même
{ens, où feroient-elles enfin parvenuës? elles ne pouvoient
_pas fortir de l'Univers. S'il leur eût donné des mouvements
en différents fens, les mouvements contraires fe feroient
détruits, & bientôt tout feroit tombé dans un repos général,
ou du moins dans une langueur toûjours plus grande. Le
feul expédient étoit que la matiére füt divifée en une infinité
de grandes mafles rondes, qui fans fortir de la portion de
Fefpace où elles étoient placées, & fans fe troubler les unes
les autres, fe mûflent chacune fur fon centre avec la vitefle
néceflaire pour produire, chacune dans fon enceinte, les
phénomenes ordonnés par l’Auteur de la Nature. A ce moyen,
H y a le moins de mouvements contraires qu'il fe puifle,
& le plus de directions en même fens, d’où fuit le moindre
déperifiement poflible de la quantité de mouvement pri-
mitivement imprimée,
Puifque tout fe réduit à des T'ourbillons, M. l'Abbé de
96 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE
Molieres entreprend une Théorie démontrée de tout ce qui
leur appartient, & c'eft-là proprement une Phifique générale
qui procedera par démontitration. Delcartes lui-même s’eft
mépris à cette Théorie, peut-être parce qu'il en étoit l'in-
venteur ; après lui plufieurs autres l'ont ou attaquée ou défen-
duë, & M. de Molieres a paru fouvent dans nos Hiftoires
comme défenfeur, fans compter tout ce que nous avons
rapporté d'ailleurs fur le même fujet, mais tout cela, ce ne
font que des morceaux détachés & épars, qui ne peuvent
guére produire de conviction ni d’éclairciflement en com-
paraifon d’une Théorie entiére, dont toutes les parties fe
foûtiendroient par leur mutuelle liaifon.
+ p.97. & Nousavons vû en 1728 *, qu'un T'ourbillon quelconque,
fuiv.
comme notre Tourbillon Solaire, étant néceflairement en
équilibre, puifque s'il n'y étoit pas, il faudroit qu'il sy mit
bientôt, cet équilibre emporte que les forces centrifuges des
différentes Couches Sphériques qui le compofent, car le
Tourbillon eft fuppolé de cette figure, foient toutes égales
entre elles. On peut partir de R pour toute Ia Théorie de
M. l'Abbé de Molieres.
De cette égalité des forces centrifuges des Couches Sphé-
riques, on voit naître auffi-tôt les rapports des vitefles des
différentes Couches entre elles, & ceux que les diftances au
centre du mouvement ont avec les temps des révolutions.
H eft furprenant que les faits Aflronomiques foient auf
exactement conformes qu'ils le font à des conféquences tirées
d'une pure fpéculation, & il n’eft pas peut-être moins fur-
prenant qu'on ait fait entrer des Attractions inintelligibles
dans une matiére où l’on pouvoit voir que les feules Forces
Centrifuges bien connuës & bien avérées fuffifoient.
La preffion que chaque Couche Sphérique, en vertu de
f1 Force Centrifuge, exerce fur celle qui lui eft immédia-
tement fupérieure, eft dirigée felon un rayon de la Sphere,
& de-A vient qu'un T'ourbillon, qui tend toüjours à s'étendre
ou à s’aggrandir, n'y tend pas avec plus de force du côté
de l'Equateur, que du côté des Poles, ou que, ce qui revient
au même,
|
|
}
DE SUIS C1 FONIGUE s. 97
au même, il réfiftera également de tous côtés à une com-
préflion extérieure. Ainft l'Univers étant conçû comme
formé de grands Tourbillons difpofés entre eux par une
efpece de hafard, & fans aucune régularité, ils fe foûtien-
dront toüjours, quelle que foit cette difpofition, en s’arc-
boutant les uns contre les autres par leurs points d’attouche.
ment, & fi quelqu'un en enfonce un autre, ce ne fera pas
précifément en vertu de leur difpofition, ou parce quel’Equa-
teur de lun aura attaqué les Poles de l'autre.
Quand un T'ourbillon s’aggrandit, c’eft que fes derniéres
Couches ayant plus de viteffe que les derniéres d’un Tour-
billon voiïfin, celles-ci ont été forcées à fuivre le mouve-
ment & la direction des autres. Mais alors le T'ourbillon
aggrandi a donc fes derniéres Couches plus éloignées du
centre qu'auparavant, & par conféquent müës avec moins
de vitefle que les derniéres Couches précédentes, & le T'our-
billon aggrandi eft affoibli à cet égard, & il pourroit étre
plus aifé à enfoncer par un autre, & peut-être par celui-là
même qui lui avoit cedé, & qui étant devenu plus petit en
eft devenu plus fort par fes derniéres Couches. Puifque
Yafloiblifiement fuit toüjours ainfi l'aggrandiflement, & au
contraire, il eft aifé de voir combien la forme de l'Univers
divifé en Touïrbillons doit être durable, combien elle eff
propre à maintenir l'équilibre, ou à le rétablir promptement,
P q P 4
À quelques accidents finguliers linterrompoient.
… En cas qu'un Touwrbillon Sphérique foit preffé felon un
de fs diametres plus qu'en tout autre endroit par deux
Tourbillons voifins, & oppolés, il eft certain qu'il s'allongera
{elon le diametre perpendiculaire au diametre preflé, & de-
viendra Elliptique, mais il ne conférvera pas cette figure,
les deux extrémités du grand axe plus éloignées du centre
que celles du petit ayant moins de Force Centrifuge qu'elles,
eur céderont, feront par conféquent obligées à fe rapprocher
du centre, & le Sphéroïde Eliptique redeviendra une Sphére.
Ondevinera fans doute que c’eft-là le principe de l'Elafticité
qui vient s'offrir de Jui-même. |
Hif. 1734 UN
8 Hi1sToIRE DE L'ACADEMIE RoYALE
Un Corps ne pouvant jamais communiquer du mouve-
ment qu'à un autre Corps qui en a moins que lui, & les
Couches inférieures d’un Tourbillon ayant toùjours plus de
vitefle réelle que les fupérieures, il n’y a que les inférieures
qui puiffent agir fur les fupérieures, ou augmenter leur
mouvement, 1 elles n’en ont pas aflés pour l'équilibre, ou,
pour le dire en autres termes, le mouvement ne peut fe com-
muniquer dans un T'ourbillon que du centre à la fuperficie.
Tout cela appartiendroit au Sifteme de Defcartes, quoique
bien rectifié, mais voici une addition très-confidérable que
le feu P. Malebranche y à faite, addition, & non correction,
au contraire fimple extenfion, mais prefque infinie, & fi
naturelle d'ailleurs, qu'on a quelque peine à pardonner au
premier Inventeur de n’y avoir pas penfé.
Notre grand T'ourbillon Soiaire , l'un de ce nombre infini
de T'ourbillons qui compofent l'Univers, contient bien cer-
tainement d’autres Tourbillons moindres, & pareils à lui,
ceux de la Terre, de Jupiter & de Saturne. Cet exemple fr
réel, que la Nature nous préfente, n'invite-t-il pas les Philo-
fophes à imaginer encore des Tourbillons plus petits toutes
les fois que l'explication des Phénomenes les y conduira ?
Et quelles bornes prefcrirat-on à leur petitefle ? on n'en
connoît point de néceflaires à la divifion de la matiére. M.
T Abbé de Moliéres dit que comme les Géometres pouflent
les différents Ordres d’Infiniment grands ou petits aufi loin
que le demande la Solution des différents Problemes , ainfi
il fera permis aux Phificiens d'établir différents Ordres de
Tourbillons felon le befoin des explications. Tout l'Univers
ne fera donc que de la matiére divifée & fubdivifée en
Tourbillons prefque à l'infini, & en effet les raifons que
nous avons d'abord apportées en faveur des grands Tour-
bilons, la durée qu'ils affärent au mouvement général, ces
équilibres qu'ils maintiennent fi facilement, & qu'ils fçau-
* p. 109. rojient rétablir ft vite, font des raïfons aufli fortes pour les
& fuiv.
* p. 87.
X fuiv.
petits T'ourbillons que pour les grands. Nous avons vü en
1715* &1729 * en quels embarras Defcartes s'étoit jetté
#
.
| bee D'EusSuUS c'e: Es 09
pour n'avoir pas fuivi jufqu'au bout l'idée des Tourbillons,
& comment un leger changement de fes Globules élémen-
taires durs en petits Touxbillons remédioit à tout dans le.
moment. .
Le Tourbillon fimple feroit celui qui feroit formé. d'une,
matiére fluide dont chaque particule élémentaire {eroit folide.
ou dure, c'eft ainfr que nous avons conçü jufqu'à préfent
les grands Tourbillons du 1°* ordre, ou qui font la rre di-
vifion de toute la mafle de la matiére. Mais ces T'ourbillons
funples ou n'exiftent point, parce qu’il n’y a point de par-
ticules élémentaires dures, ou s’ils exiftent, nous n'avons pas
befoin de poufler notre fpéculation jufque-là ; tous les T'our-
billons feront compofés de T'ourbillons moindres difpofés
par Couches concentriques, comme auroient été des Glo-
_ bules durs, & qui circulent chacun autour de fon centre
particulier, en fuivant les mêmes loix que nous avons recon-
nuës dans le T'ourbillon fimple. M. ? Abbé de Moliéres donne
Les loix du T'ourbillon compolé, & en voici les principales.
. Chaque petit Tourbillon aura deux mouvements, l'un
commun, qui lui viendra du grand Tourbillon, & aura la
vitefle déterminée par la diftance du centre du petit Tour-
- billon au centre du grand, l'autre particulier, indépendant
du général, & qui aura la vitefle quelconque dont le petit
Fourbillon tournera autour de fon centre. Le 1°’ mouve-
nt.ne fera que celui du centre du petit T'ourbillon, le 24
t être confidéré comme appartenant à fa fuperficie. IE
fautqu'il y ait équilibre dans le Tourbillon compolé, aufi-
bienique dans le fimple, or cet équilibre trouvera cer-
tainement, fr un Tourbillon fimple formé de Globules durs
étant conçü en équilibre, parce que es Couches concentri-
_ ques de ces Globules auront les vitefles requifes, on conçoit
_à la place de chaque Giobule dur un petit Tourbillon égal,
_ dontle centre & la fuperficie ayent la même vitefle qu'avoit
de centre du Globule, car on n'a rien changé à ce qui caufoit
Yéquilibre. Puifque l'équilibre eft une chofe unique, & qui
ne fe fait pas. de deux façons, fi l'équilibre fe Es Un
+
%oo HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE
ce cas-h, il ne fe trouve dans aucun autre, & par confé-
quent dans un Tourbillon compolfé la viteffe de la fuperficie
de chaque petit Tourbillon eft la même que celle de fon
centre, c'eft-à-dire, que fi le diametre du petit Tourbillon
éft la room partie du diametre du Cercle que le centre du
petit Tourbillon décrit dans le grand en 100 Secondes, un
point de la fuperficie du petit T'ourbillon circulera en une
Seconde.
I fuit de-là que dans le Tourbillon compofé il y a plus
de mouvement, plus de force que dans le fimple. M. l'Abbé
de Moliéres démontre que chaque petit Tourbillon a deux
fois plus de Force Centrifuge que n’auroit eu le Globule dur,
qui auroit tenu fa place dans un Tourbillon fimple.
S'il arrive qu'une Couche de petits Tourbillons'ait plus
de vitefle qu'elle n'en devroit avoir à raifon de fa diftance
au centre du grand Tourbillon, elle communiquer: de fon
mouvement aux Couches inférieures » Qui quoiqu'elles ayent
naturellement le plus de vitefie, n’en ont pas alors affés pour
Féquilibre, puifque celle dont il s'agit en a trop. Ainfi le
mouvement pañlera de la fuperficie au centre, au lieu que
dans le Tourbillon fimple il ne pouvoit pafer que du centre
à la fuperficie.
Le Tourbillon compolé ne perd pas pour être compolé,
les propriétés qu'il auroit eüës étant fimple. Ainfi dans le
Tourbillon compofé le mouvement peut pañler & du centre
à la fuperficie, & de la fuperficie au centre, & par confé-
quent de quelque maniére que l'équilibre vint à fe rompre,
il feroit promptement rétabli. C’eft une des chofes à quoi
ceux qui conftruifent l'Univers doivent avoir le plus d'atten-
tion, qu'à fe ménager des reflources pour la longue durée
de ce grand Edifice. H ne leur fiéroit guére de dire que le
fouverain Architeéte y remettra la main dans le befoin.
Si les petits Tourbillons d'un même Tourbillon compofé
font de différentes grandeurs ou mafles, il faudra, pour
Yéquilibre, que puifque les petits Tourbillons plus éloignés
du centre commun auront moins de vitefle, ils ayent en
DES, S c1ENNCE s. tot
récompenfe plus de mafle, & par conféquent {es plus petits
Tourbillons feront plus proches du centre commun, & les
plus grands plus éloignés.
Nous avons toüjours fuppofé que les Tourbillons tant
grands que petits étoient Sphériques, mais du moinsles grands
ne le font certainement pas, & cela même a fait naître une
grande difficulté dont nous avons rendu compte d’après M.
de Molieres, à l'endroit de 1729 ci-deflus cité. On y a vû
que les petits T'ourbillons fubftitués aux Globules durs, fai-
{oient difparoître tout d'un coup l'inconvénient terrible que
produifoit la forme Elliptique de notre grand Tourbillon
; _ - Solaire; c'eft leur extrême facilité à s'aggrandir, ou à s'appe-
| « tiffér, à acquérir, ou à perdre de la vitefle, toûjours felon
es Regles générales prefcrites, c’eft le fifflement & refaffe-
ment perpétuel qu'ils caufent dans la matiére du T'ourbillon,
qui les rend fi propres à y entretenir, pour ainfi dire, une
wie immortelle. Le.
.… Au refle, notre grand Tourbillon Elliptique left fi peu
qu'il peut toûjours pañler pour Sphérique, horfmis dans les
“cas où l'extrême précifion feroit néceflaire, & où il feroit
permis d'y atteindre, AETE
Nous n'avons confidéré jufqu'ici qu'une matiére divifée
_& fubdivifée en Tourbillons, & à proprement parler, une
__-matiére fluide qui compoferoit l'Univers, mais elle ne le
* compofe pas entiérement, il y a auffi des Corps folides &
, quoiqu’à la vérité ils ne faffent tous enfemble qu'une
ie de cet Univers prefque infiniment petite. Quand des
ticules de matiére font en repos les unes auprès des autres,
_& fe touchent immédiatement, elles font comprimées en
“tous fens par les Forces Centrifuges des petits T'ourbillons
- qui les environnent, & auxquels elles ne réfiftent par aucune
Force, c’eft-là le principe de la Dureté & de la Solidité, &
il eft facile de voir quelles en feront les modifications.
… … Si lon imagine un Corps parfaitement dur, pofé dans
une Couche quelconque d’un Tourbillon fimple, il n’y a
#ien qui l'empêche de fuivre le mouvement a La de
N ii
De she adm
Re
10% Histoire DE L'ACADEMIE RoyALE
cette Couche, il le fuivra, rien ne l'empêche de prendre fa
Force Centrifuge, il la prendra, & fera enfin comme une
portion de cette Couche de mème volume que lui. Mais
fi le Tourbillon où il nage étoit compolé, alors le volume
de matiére égal au Corps dur auroit deux Forces Centrifuges,
June comme portion d’une Couche qui circule autour du
centre de tout le Tourbillon, l'autre comme étant un amas
de petits Tourbillons qui circulent chacun autour de leur
centre particulier, ainfi que nous l'avons vû. Le Corps dur,
qui n’eft point formé de petits Tourbillons, ne pourroit
prendre que la 1'° Force Centrifuge, & faute de prendre
la 2de, il auroit moins de tendance vers la circonférence du
Tourbillon qu'un volume égal de fa Couche, & par confé-
quent feroit pouffé vers le centre, & y tomberoit aéluelle-
ment. Voilà la Pefanteur bien naturellement déduite des petits
Tourbillons du P. Malebranche, & il eft à remarquer qu'ils
donnent avec une égale facilité, & pour mieux dire, avec
une égale néceffité, le Reflort, la Dureté, & la Pefanteur,
trois propriétés des Corps fi bien liées enfemble dans ce
Sifteme, qu'il ne paroît pas que la Nature elle-même ait pà
y mettre une plus forte liaifon.
Pour nous en tenir à la Pefanteur avec M. l'Abbé de
Molieres, on voit par-là que s'il n’y avoit point de petits
Tourbillons, il n’y auroit point de Pefanteur, & par confé-
quent elle n’eft pas eflentielle aux Corps. Et en effet fa
feule définition ne le dit-elle pas? n’eft-ce pas une tendance
des Corps vers un certain point? & comment veut-on qu'ils
tendent effentiellement vers ce certain point quel qu'il foit?
ne faute--il pas aux yeux que cette tendance ou le mouve-
ment qu’elle produit, ne peuvent être que la fuite & l'effet
de quelque arrangement, de quelque difpofition particuliére
du Monde?
Il y a donc de la matiére qui pefe, & de la matiére qui
ne pefe point. L’Ether, ce grand Fluide immenfe, compolé
d'une infinité de petits Tourbillons, & qui par fon mous
vement général de Tourbillon emporte toutes nos Planetes,
D''E: SUIS (CM EME ‘s2 - roy
ne pefe point, au contraire toutes fes parties tendent à fa
circonférence au lieu de tendre au centre, mais des Corps,
étrangers en quelque forte, qu’il renferme, nos Planetes, ne
peuvent pas, à caufe de leur contexture, avoir autant de
Force Centrifuge que lui, & par- ils font pouflés vers le
centre, & nommés pefants. Qui les retient toûjours à une
certaine diftance de ce centre vers lequel ils font toûjours
ouffés? Pourquoi Saturne, Jupiter, &c. ne tombent-ils
pas dans le Soleil! c'eft ce qui fera éclairci dans la fuite que
M. Y Abbé de Molieres donnera de fa Théorie.
. On peut voir comment en 173 1*, il fatisfit pleinement + p. 66,
#elon les idées que nous venons d’expofer, à la plusformidable & fuiv.
objeétion de M. Newton contre le Sifleme Cartéfien.
L'’Ether non-pefant ne réfifte point au mouvement horifontal
ou circulaire des Corps pefants, ou des Planetes.
De ce que la Pefanteur eft une modification accidentelle
des Corps, il s'enfuit qu'elle doit être fufceptible de plus ou
de moins, non pas dans le fens que de Or eft plus pefant
que du Bois, mais dans ce fens que le même Corps qui,
fur la furface de la Terre, parcourt par fa pefanteur r $ pieds
dans la 17° Seconde de fa chüte, pourroit, s'il étoit placé
ailleurs, parcourir dans le mème temps plus ou moins de
(x 5 pieds. Comme fa viteffe vers un centre lui eft imprimée
- par da Couche du Tourbïllon où il eft contenu, & que les
4 vitefles des différentes Couches font différentes felon leurs
diftances au centre, il aura dans la 17€ Seconde de fa chûte
moins de vitefle s'il part d’une Couche plus éloignée, & au
contraire. On voit d’un coup d'œil toutes les conféquences.
* Quand on 2 bien faifi ce Sifteme Cartéfien tel qu'il eft
ici rédigé & rectifié par M. l'Abbé de Molieres, quand on
a conçù cette matiére immenfe divifée & fubdivifée en
Tourbillons, où s’exercent à la fois une infinité de mouve-
ments qui ne s'embarraffent, ni ne fe troublent, où tout eft
plein d'action, de vie, & de reflources, s’il en eft befoin,
| où rien n'agit que par des caufes, dont l’exiftence nous eft
| . bien conftante, & Fidée bien familiére ; il femble qu'on ne
V.lJes M,
p' 1280000
p. 216, &
29$°
104 Hisrorne DE L'ACADEMIE Rôrare
puifle plus, fans fe faire quelque violence, fe figurer un
Univers qui n'eft qu'un Vuide, un Néant infini en compa-
raifon de quelques Atomes en très-petit nombre qui y font
difperfés çà & à, & qui n'ont d'autre moyen d'agir les
uns fur les autres qu'une propriété incompréhentible qu'on
leur attribué,
M Gobert préfenta à l Académie, un Mémoire dans
al
equel il déterminoit la vitefle que doit prendre une
Rouë de Moulin, celle de la Riviére, & le Poids que la.
Machine met en mouvement, étant connus. On trouva que
YAuteur entendoit très-bien cette partie de la Méchanique,.
tant par la maniére dont il réfolvoit fon Probleme, que par
Yapplication qu'il en faifoit à quelques cas particuliers, entre
autres aux Machines propres à remonter les Bateaux, dont
il comparoit très-bien Îa force avec celle des Machines
immobiles.
Ous renvoyons entiérement aux Mémoires :
L'Ecrit de M. d'Ons-en-Bray, fur un Anémometre,
Celui de M, de la Condamine, fur le Tour,
MACHINES
Cr! L
.
DE SES, CAEN: E ro$
MACHINES OU INVENTIONS |
| APPROUVEES PAR L'ACADEMIE
à Op NNURE NM MAIDO CR XXI.
| L. =
NE efpece de Vielle ou petite Fpinette à jeu de Viole
- du Sr François Cuifinier, ci-devant Facteur d’Inftru-
ments. Dans celui-ci il y a une Rouë qui fait l'office d’Ar-
chet, & qu’on fait tourner de la main gauche avec une
manivelle, pendant qu’on jouë de la main droite fur les tou-
ches, comme fur un Clavecin. Cet Inftrument va à deux
Oaves entiéres, & a un ton de plus, & joué fur cinq tons
différents. I a paru commode, & d'une harmonie agréable,
avec plus d'étenduë & de variété que la Vielle ordinaire.
-IT.
Un Inftrument de M, de Quercineuf pour trouver en
- Mer la variation de l’Aiguille aimantée. On n'a point befoin
d'attendre l’inftant du lever ou du coucher du Soleil, on peut
* avoir la variation à toutes les heures du jour, ne que cet
Me . A
i Jeu , pourvu
. Anftrument donnera toûjours la Méridienne du
_…. que latitude en foit connuë. Ïl a paru ingénieux, & digne
LS qu'on s’en affürat encore par des expériences faites en Mer,
_ für-tout l'Auteur étant en état de lever les petits inconvé-
‘nients qui pourroient {€ rencontrer dans l'ufage, & de porter
fon invention à toute la perfection dont elle eft capable,
Ray TITI
Un Inftrument univerfel de "M. le Carlier, Lieutenant
_ particulier au Baïlliage de Laon, pour connoître la hauteur
% | du Soleil dans l'inftant qu'il marque l'heure pour telle latitude
__ qu'on voudra depuis o jufquà 60 degrés. Cet inftrument
- a été trouvé ingénieux. Sa précifion dépendra de celle aveg
Jaquelle il aura été divifé.
Hife 1734 9
L
-
2.
%o6 Histoire DE L'ACADEMIE Rôyaze
sé I V. “1
Une Pendule fonnante & à répétition de M. Larfé, Maître
Horloger à Paris. I y a-deux fortes de Pendules qui font ces
deux fonctions, les unes ne les font qu'avec deux Roüages,
les autres àvec un feul, les 1° font plus-compofées, cepen-
dant on les préfere communément aux 2des, dont ka fimpli-
cité a beaucoup d’inconvénient dans Fufage. Celle que M.
Larfé a propofée eft du moins auffi fimple, & exempte d’in-
convénient. On y en foupçonnoit quelqu'un qu'on a trouvé
compenfé par un avantage. L'invention a paru nouvelle,
k À 7 ;
Un Vaiffeau de M. Limofin qui iroït en temps calme par
e moyen de Rames. Les Rameurs n’y feroient pas appliqués
immédiatement, comme ils le font d'ordinaire, mais à des
Manivelles qui les feroient mouvoir, moyennant quoi ils
agiroïent tous également. On eft convenu de cet avantage
qu'auroit la Manœuvre de M. Limofin fur la Manœuvre
commune, le nombre des Hommes étant égal de part &
d'autre, mais l'avantage feroit anéanti, & au de-à, par la
difficulté d'employer un nombre fuffifant de Rameurs, par
les frottements inévitables de cette Machine, par la force
perduë à mettre de grandes Piéces de bois en mouvement,
par le coup de Rame qu’une Machine donne toûjours plus
imparfaitement que la main des Hommes, & enfin par les
difficultés d'emmancher & d’ôter des Rames, & de manœu-
vrer commodément pendant un gros temps, ou un Combat.
Ces défauts n’ont pas empêché de reconnoitre beaucoup d'art
& de génie dans cette Méchanique. : |
M,
5 E pv
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DE SDS: CUIR ENNLC. E. S, 107
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DE UMMID'ErGLIA GG N
ji eme FANTET DE LAGNY nâquit à Lyon
de Pierre Fantet, Sécrétaire du Roy à la Chancelferie
de Grenoble , & de Jeanne d’Azy, Fille d'un Docteur en
Médecine de Montpellier. I fut élevé dans fa premiére jeu-
L nefle par un Oncle paternel, Chanoïne & Doyen de Joüarre,
& continua fes études aux grands Jéfuites de Lyon, toûjours
de premier de fa Claffe. Il compofoit des vers Grecs dès la
Quatriéme, lorfqu'à peine fes Camarades fçavoient lire le
Grec. Il ne faïlifloit pas feulement mieux que les autres
l'inftruétion générale qu'on leur donnoït à tous, il la pré-
venoit fouvent, & les Leçons qu'il avoit recüës lui faifoïent
deviner celles qui alloient fujivre. I acheta un jour par hafard,
ou par inftinét, fi on veut, l'Euclide du P. Fournier, &
lAlgebre de Jacques Pelletier du Mans. Dès qu'il eut vü
de quoi il s'agifloit dans ces deux Livres-là, il ne s’occupa
__ plusdautre chofé, mais fecrettement. La grande avance qu'il
__ avoit dans fes Clañes, le don de retenir par cœur ce qu'il
avoit entendu réciter une fois, celui de compofer en Latin
GI: _à mefure qu'on lui diétoit le fujet de la compofition en
- François, tout cela lui faifoit trouver beaucoup de temps
. pour. fon plaifir, c'eft-à-dire, pour cette étude cachée, bien
_ plus difficile que Pautre,
S'il facrifioit les Belles Lettres aux Mathématiques, on
de peut aifément juger qu'il ne traita pas mieux la Philofophie
. delEcole, au moins celle de ce temps-Rà, d'autant plus in-
A: fupportable à un efprit Géometre, qu'elle prétend raifonner,
au lieu que l'Eloquence & la Poëfie ne prétendent guére
‘que flatter ou remuer l'imagination. La, Jurifprudence, à
daquelle on le deftinoit, car quel eft le Pere qui aimät affés
# ia € Ti
108 HisToIRE DE L'ACADEMIE Royarr
peu fes Enfants pour les deftiner aux Mathématiques ? La
Jurifprudence n'eut pas plus d’attraits pour lui. Après avoir
fait trois années de Droit à Touloufe, il réfifta aux promefles
les plus flateufes d’une puiflante proteétion que lui ft M.
de Fieubet, premier Préfident de ce Parlement, pour l'atia-
cher à fon Barreau. I réfolut de fe livrer entiérement à fon
goût, & de venir à Paris, où il avoit en vüë une place dans
T Académie des Sciences.
I étoit déja digne d'y penfer. A l’âge de 1 8 ans, avec
les deux Livres Elémentaires que nous avons nommés, &
que l'on ne connoît prefque plus, parce que d’autres plus
parfaits & plus inftructifs ont pris leur place, fans aucun
autre guide, fans Maître, fans un ami à qui il pût feulement
parler fur ces matiéres, il avoit jetté les fondements des
grandes Théories qu'il a depuis étenduës & perfeétionnées,
d'une nouvelle Méthode pour la réfolution des Equations
réduétibles du 3e & du gme degré, de la Quadrature du
Cercle infiniment approchée, de la Cubature de certaines
portions Sphériques. IL eft vrai que quand il lui fut enfuite
permis d'avoir des Livres, & qu'après avoir étudié la Géo-
métrie , il étudia les Géometres, il trouva, peut-être avec
autant de joye que de déplaifir, qu'il avoit été prévenu, mais
feulement en partie, fur quelques-unes de fes décoiertes.
La gloire en étoit un peu diminuée, mais non pas le mérite,
& il apporta toûjours à Paris ce fonds qui avoit tant produit
de lui-même, & qui ne pouvoit que devenir plus fécond
par les fecours étrangers. fe
Les talents dénués de fortune afpirent tous à Paris, ils
s'y rendent prefque tous, & s’y nuifent les uns aux autres,
Il arrive le plus fouvent qu’on y trouve toutes les places
prifes. M. de Lagny ne put entrer dans l’Académie qu'en
169$, mais parce que fon pofte pouvoit être encore long-
temps infruétueux, M. l'Abbé Bignon, le Protecteur général
des Lettres, le fit nommer en 1 697 Profefeur Royal d'Hi-
drographie à Rochefort. Il fe défendit d’abord d'accepter
get emploi, en repréfentant qu’il n'entendoit pas la Marine,
PRE PU Es
CRE SIMS" MEINEUE 6 109
rais fon Bienfaicteur, qui fentit bien le prix d’un refus fi
modefte & fi-defintéreflé, le raffüra contre f prétenduë
ignorance, & lui garantit qu'il lauroit bientôt furmontée.
Cependant M. de Lagny, pour une plus grande füreté, &
par un extrême fcrupule fur fes devoirs, demanda au Roy
R permiffion de faire une Cämpagne fur Mer, afin de .
connoître par lui-même le Pilotage. Le Roy le lui accorda,
& de plus, refpeétant en quelque forte un Génie né pour
de plus grands objets que l'Hidrographie , if eut la bonté de
lui donner un autre Hidrographe qui travaillât fous lui, &
c'eft le même qui dans la fuite lui a fuccédé,
Supérieur à fon emploi autant qu'il l'étoit, il eut tout le
temps néceflaire pour de plus hautes fpéculations. Il envoyoit
fes découvertes à l'Académie, dont il étoit toûjours membre,
mais les circonftances, quoique légerès, ont toûjours ur
certain pouvoir dans les chofes mêmes qui fembleroient em
devoir ètre les plus indépendantes. On lifoit peut-être fes
Mémoires avec moins d'attention que fi on les lui avoit
entendu lire. C'étoit aflés fa coûtume de fuppofer dans'un
Mémoire ce qui étoit établi dans un autre que l'on n'avoit
pas, tout étoit bien lié, mais feulement pour lui, & on
fufpendoit fon jugement, on arrétoit limpreffion naturelle
que chaque partie auroit faite, jufqu'à ce qu'on eût vü le
tout enfemble. I1 n'a plufieurs fois avoué lui-même que ce
tout enfemble, if eût eu bien de la peine à le former ; fes
_ nouvelles idées étoient en trop grand nombre, trop vives,
top impatientes de fe placer, pour fouffrir un arrangement
bien régulier & bien tranquille. Enfin dans fe temps du féjour
de M: de Lagny à Rochefort , l'Académie commençoit à
s'occuper beaucoup de 11 Géométrie nouvelle, & tout ce
qu'il donnoïit appartenoït à l'ancienne, quoique pouflée plus
loin. I ne parloit que de chofes dont les autres avoïent parlé,
& quoiqu'il en parlât fort différemment, la curiofité étoit
moins piquée que fi les chofes elles-mêmes avoient été plus
neuves. La nouveauté ne perd guére {es droits fur nous, &
O ii
‘x1o HisToIRE DE L'ACADEMIE RoyaLE
il faut convenir qu'elle en avoit en cette occafion des plus
forts qu'elle puiflé jamais avoir. 144
M. de Lagny ennuyé de Rochefort, malgré les occupa-
tions de fa place, malgré fes études particuliéres, malgré le
plaifir d'y réuffir flon fes fouhaits, car le moyen qu'il ne
fe fentit toüjours propre à un plus grand Théatre ? faifoit
de temps en temps des voyages à Paris, pour épier les occa-
fions d'y refter. Ce ne fut qu'au commencement de Ia Ré-
gence que feu M. le Duc d'Orléans l'y arrêta, en le faifant
Soudirecteur de la Banque Générale, de la même maniére
à peu-près, & par des mêmes motifs que lon donna en -
Angleterre {a Direction de là Monnoyÿe de Londres à M.
Newton. On jugea, & là & ici, que la grande Science du
Calcul, ordinairement aflés ftérile par rapport à l'utilité des
Etats, feroit tournée avantageufement vers ce grand objet,
& qu'en même temps les deux Géometres, à qui elle avoit
coûté de longs travaux, en feroient récompenfés par de
femblables poftes. Tous deux fe trouverent tout-à-coup dans
une richefle qui leur étoit nouvelle, tranfportés du milieu
de leurs Livres fur des tas d'Argent, & tous deux y confer-
verent leurs anciennes mœurs, cet efprit de modération &
de defintéreffement, f: naturel à ceux qui ont cultivé les
Lettres. Mais la fortune de M. Newton fut durable, & celle
de M: de Lagny ne le fut pas ; les affaires changerent en
France, la Banque cefla, mais avec honneur pour M. de
Lagny ; tous fes Billets furent acquittés, & il laïffa dans
Vordre le plus exact tout ce qui avoit appartenu. à fon admi-
niftration. Le Philofophe fut heureux de n'avoir pas perdu
dans une fituation pañlagere le goût de fimplicité qui lui
devoit être d'un plus long ufage. |
Rendu entiérement à l’Académie, il ne lui fut pas difficile ‘
d'en bien remplir les devoirs. IL fe trouvait riche de plus
de 20 gros Porte-feuilles ä1-folio, pleins de fes réfléxions,
de fes recherches, de fes calculs, de fes nouvelles Théories,
iln'avoit qu'à y choifir ce qu'il lui phaifoit, & à l'en détacher,
/
4
Ua
DES SeiIEeNCESs. TTL
Tout cela tendoit principalement à uneréforme, ou refonte
entiére de l'Arithmétique, de l’Algebre, & de li Géométrie
commune. Il s'étoit rencontré avec M. Leïbnitz, car les
preuves de la rencontre ont été bien faites, fur l'idée fingu
liére d’une Arithmétique qui n’auroit que 2 Chiffres, au dieu |
que la nôtre en a ro. L’Algebre, fans comparaifon plus
étenduë & plus compliquée, & qui left d'une maniére à
effrayer, changeoït entiérement de forme entre fes mains:
tout fe réfolvoit par des Progreffions arithmétiques de fon
invention, qui naïfloient des E‘quations propofées ; le fameux
Cas irréduétible, ce Nœud Gordien, cet Ecueil qui fubfiftoit
depuis la naïffance de Y Alsebre, où difparoïfloit, ou n’em-
barrafloit plus. La Mefure des Angles, dont il faifoit une
Science à part fous le nom de Goniometrie,méritoit cet hon-
neur par la nouveauté dé la Théorie quid'établifloit, & de-fà
fe tiroit une Trigonométrié, beaucoup plus fimple que celle
dont on fe contente jufqu'à préfent, & délivrée de toutes
ces Tables de Sinus, T'angentes & Sécantes, attirail incom-
mode, toûjours borné, quelque vafte qu'il foit, & qui de-
mande qu'on fe repole avec une confiance ‘aveugle fur le
travail d'autrui. Enfin un des grands objets de M. de Lagny
étoit fa Cyclométrie, où Mefure du Cercle. H la trouvoit par
des Séries ou Suites infinies de Nombres, telles que leurs
fommes, fi on eût pû les avoir, l’euffent donnée exacte-
ment, ou que du moins chacun de leurs termes, ou les
fommes d'un nombre fmi de ces termes, la donnoient toû-
jours avec moins d'erreur, de forteque l'erreur dimimuoit tant
‘qu'on vouloit. I s’étoit encore rencontré avec M. Leibnitz
fur une Série donnée en cette matiére par ce grand Géo-
metre, & qui fit du bruiten fon temps, mais, quoiqu'in-
génieufe, elle a le défaut d'être trop lente dans tôtit fon.
‘cours, au lieu que le mérite de ces fortes de Séries ‘confifte
à être fort rapides dans leur marche à eur origine, &enfuite
‘fi lentes vers leur extrémité, «qu’on puiffe fins -erreurfenfible
négliger tous leurs derniers ‘termes, quoiqu'en nombre in-
fini. H avoit fouverainement Yat deformerices Séies avec
\
+ V.THift.
. 89. &
MA
tre Histoire DE L'ÂACADEMIE ReyaE
facilité, de leur donner une certaine élégance dont elles font
fufceptibles, & qui eft une efpece d'agrément de furéroga-
tion, de leur faire prendre enfin, felon les différents befoins,
différentes foimes fans en altérer le fond. Comme les mé-
diocres Géometres ont fouvent le malheur de trouver la
Quadrature exacte du Cercle refufée aux autres, & qu'ils ne
manquent pas «d'apporter à l’Académie leurs magnifiques
affertions, M. de Lagny les réprimoit dans le moment, en
leur faifant voir, par le moyen de fes Séries, des Quadratures
plus exactes que les leurs, & plus exactes à l'infini.
Il avoit peut-être mal pris fon temps de ne travailler qu'à
de nouveaux fondements du grand édifice de la Géométrie,
quand on ne fongeoit prefque plus qu'à en conftruire le
Comble par la fublime & fine Théorie de l'infini. Mais ce
Comble une fois mis, il femble que les fondements polés
ar M. de Lagny conviendroient mieux à tout l'édifice, tel
qu'il fera alors. Non feuléèment toutes les vüës qu'il a don-
nées fe lieroient facilement avec l’Infini, elles y percent déja,
& yentreroient, quand mème il ne l'auroit pas voulu.
Nous avons rendu un compte aflés détaillé de fes tra-
vaux; à chaque occafion qu'il nous en a donnée dans nos
Volumes, où il s'agit fi fouvent de lui. Pour rapporter
cependant quelques traits particuliers de fon génie, aflés
courts pour trouver place ici, nous en choifirons deux, fans
prétendre qu’ils foient abfolument préférables à beaucoup
d’autres, k u
Il a donné à l'Académie en 170$ * l'expreflion Algé-
brique de Ja Série infinie des Tangentes de tous les Arcs
ou Angles multiples d'un premier Arc ou Angle quelconque
connu , & cela d’une maniére fi fimple, qu'il n'avoit befoin
que de deux Propofitions très-élémentaires d'Euclide. Def
cartes a dit que ce qu'il avoit le plus défiré de fçavoir dans
la Théorie des Courbes, étoit la Méthode générale d'en
déterminer les Tangentes qu'il trouva, & je fçai de M. de
Lagny qu'il avoit eu le même defir de trouver le Théoreme
énoncé, dont il voyoit l'utilité extréme pour toute fa-
à Goniométrie
D. EUSUS.C 1 EMAICHE.s. Tr
Goniomitrie & fa Cyclométrie. La fameufe joye d'Archi-
mede s’eft de temps en temps renouvellée chés les Géome-
“tres, plus fouvent pour la vivacité du fentiment, mais aflés
fouvent auffi pour la beauté & l'importance des découvertes.
La Cubature de la Sphere, ou la Cubature des Coins &
des Piramides Sphériques que lon démontre égales à des
Piramides rectilignes *, eft encore un morceau de M. de
* V. les M.
Lagny, neuf, fingulier, & qui feul prouveroit un grand de 1714
Géometre. I l'eût choïfi pour orner fon Tombeau, qui en
eût imité plus.parfaitement celui d’Archimede, où la Sphere
entroit aufr.
Quand fes forces baïferent affés fenfiblement, il demanda
la Vétérance, qu'il avoit bien méritée. On faifoit alors un
Recueil général des anciens Ouvrages de F Académie, & on
jugea à propos d'y faire entrer un grand Traité d'Algebre
Manufcrit qu'il avoit fait, beaucoup plus étendu , plus com-
plet & plus neuf que celui qu'il avoit publié en 1 697. Mais
il fallut que ce füt un de fes Amis, M. l'Abbé Richer,
. Chanoïne de Provins, fort au fait de ces matiéres; & plein
des vüës de M. de Lagny, qui fe chargeñt du foin de revoir
ce Traité, d’éclaircir ce qui en avoit befoin, de perfectionner
l'ordre du tout, & même il y ajoûta beaucoup du fien.
M. de Lagny mourut le 12 Avril 1734. Dans les der-
niers moments, où il ne connoifloit plus aucun de ceux qui
étoient autour de fon lit, quelqu'un, pour faire une expé-
rience philofophique, s’'avifa de lui demander quel étoit Le
* quarré de Douze ; il répondit dans l'inftant, & apparemment
fans fçavoir qu'il répondoit, Cent quarante-quatre.
I n’avoit point cette humeur férieufe où fombre, qui fait
aimer l'étude, ou que l'étude elle-même produit. Malgré fon
grand travail il avoit toûjours affés de gayeté, mais cette
gayeté étoit celle d’un homme de Cabinet. Elle eut cet
avantage, que comme elle étoit fortifiée par des principes
acquis dans ce Cabinet même, elle fut indépendante non
feulement d'une plus grande ou moindre fortune, mais encore
des évenements littéraires, fi fenfibles à ceux qui n’ont point
Hifi, 1734. -
pee
-ir4 Hisr. DE L'ACAD. ROYALE DES Sciences.
d'autres événements dans leur vie. Il voyoit fort tranquil-
lement que la plüpart des Géometres, qu'un certain torrent
emportoit loin de lui dans des Régions où il n'avoit pas pris
la peine de pénétrer, en fuflent moins touchés de ce qu'il
produifoit, & jamais il ne partit de lui aucun trait ni de
chagrin ni de malignité contre la nouvelle Géométrie. Se
fût-il poffédé jufqu'à ce point-là, fi fon ame eût reçü quelque
atteinte? Nous laifons l'éloge d’une autre qualité de fon ame
aux regrets de quelques pauvres Familles que la médiocrité
de fa fortune ne l’empêchoit pas de foûtenir.
H a été honoré de l'amitié particuliére de M. le Chancelier,
& de M. le Duc de Noailles aujourd'hui Maréchal de France,
deux noms qu’il fuffit de prononcer.
M. le Duc d'Orléans lui fit l'honneur de s'aider de fes
Tumiéres, & de plufieurs travaux qu'il lui ordonna, lorfqu'il
voulut s'inftruire à fond fur tout ce qui regarde le Com-
merce, les Changes, les Monnoyes, les Banques, les Finances
du Royaume, connoiflances qui ne feroient pas moins né-
ceflaires à ceux qui font à la tête de tout, qu'à ceux même
chés qui elles paroiffent jufqu'ici prefque- entiérement ren-
fermées, & qui en fçavent tirer tant d'utilité, Û
M. de Lagny a été marié deux fois, & n’a laïflé qu'une:
Fille qui eft du premier lit,
: és
on
Extrait d'une Lettre de M. de la Condamine
à M. de Maïran, écrite de Quito au Perou
le 15 Juin 1736, fervant d’Avertiflement
pour le Mémoire de M. de la Condamine,
imprimé dans le Vol. de 1733. p.294.
J Æ vous prie, Monfieur, s’il en eff temps encore,
d'empêcher que l'on imprime le Mémoire que je lus
_à l'Académie avant que de partir, fur la maniére de
tracer fur la Terre, par le moyen d’un inftrument,
un Cercle parallele à l'Equateur ; ou, fi ce Mémoire
eft imprimé, de faire inférer dans le Volume fuivanr
la déclaration que je fais par cette Lettre, que je
ne. fuis trompé, lorfque j'ai dir qu'avec la Lunette
mobile on déterminoit tous les points vifibles du
Parallele fur lequel on avoit fait la premiére ftation ;
je rm'étois fondé fur la fauffe fuppofition que tous les
points qui font dans le plan de ce Parallele appar-
tiennent au Parallele, au lieu que cela n'eff vrai que
dans le cas du Niveau parfait. Le moyen que je dis
auffi dans ce Mémoire, m'avoir été fourni par M.
Godin pour vérifier l'infrument, n'eft pas fuffifant .
parce que la Lunette tournant dans un plan parallele
a l'Equateur, ne répondra pas dans le Ciel au parallele
de la méme latitude. Vous verrés pareillement que je
me donne à la fin de ce Mémoire une peine très -
inutile pour corriger les Réfradlions, qui ne peuvent
mire en aucune maniére. Enfin je vous prie de té-
moigner à l'Académie que je reconnois l'erreur dans
laquelle je fuis tombé, à que je la fupplie de trouver
bon que mon defaveu paroiffe dans le Vol. de 1734,
en cas que mon Mémoire ait été imprimé dans celui
de 1733.
Fautes à corriger dans les Mémoires de 1729.
| * Page Lignes Lifes
PTE 27e Fun ou l'autre.
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MEMOIRES
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MATHEMATIQUE
DD PE Y SLOU.E.:
PRES DES REGISTRES
de l’Académie Royale des Sciences,
. De l'Année M'DCCXXXI V.
ÈS
]
METHODE DE VERIFIER
la figure de la Terre par les Parallaxes de la Lune.
Par M. MANFREDI.
2 À figure de la Terre ayant été déterminée par 24 Mare
les Aftronomes de l’Académie Royale des 1734.
Sciences, fur des mefures immédiates, prifes
avec le plus grand foin, & avec la plus grande
+ éxactitude poflblé, il Pb qu'on ne devroit
point douter de leurs déterminations pour attribuer à la
Mem, 1734 e A
Fig. 14 2: 3e
2. MEMoIRÉS DE L'ACADEMIE ROYALE.
Terre d'autres figures qu'on n'a pas établies par obfervation,
mais qu'on a feulement déduites de quelques hypothefes,
peut-ètre fufceptibles de limitation dans les cas particuliers de
‘quelqu'un des corps auxquels on croit les pouvoir appliquer.
Cependant il n’eft pas inutile de chercher fi par quelque
autre méthode, fondée auffi fur des obfervations, on pour-
roit acquérir de nouvelles lumiéres touchant cette figure,
& par ce moyen s’aflürer de celle qu'on lui a trouvée, ou
découvrir la véritable.
Parmi les méthodes qu'on y peut employer, je me fuis
avifé de chercher fi l'on pouvoit en venir à bout par le
moyen des Parallaxes de la Lune, en obfervant cet aftre de
concert en divers lieux de la Terre. Je vais expofer ce que
j'ai médité à ce fujet, après que j'aurai éclairei quelques
principes fondamentaux touchant la théorie des Parallaxes
en général. |
Selon l'idée que les Aftronomes nous ont donnée de Ia
Parallaxe, elle eft l'angle compris dans le centre d’un aftre
par deux lignes droites, dont fune part du centre de la
Terre, & l’autre du point de la furface d’où on obferve
cet aftre. Ayant été conçüë dans Îa prévention commune
de la figure fphérique de la Terre, elle paroît tre limitée
à cette feule hypothefe, & on ne fa trouve pas fort com-
mode ni fort utile, lorfqu'on peut ou qu'on veut douter
de la vérité de cette fuppofition. Ainft il femble qu'il vaut
mieux prendre la chofe d’une autre façon, en expliquant ce
que c'eft que Parallaxe, d’une maniére qui convienne éga-
lement à toutes fuppofitions raifonnables touchant la figure
de la Terre.
J'appellerai donc Parallaxe d’un afre fitué dans un point
quelconque L { Fig, 1. 2. 3.) à Végard auffi d'un point
quelconque de la furface de la Terre À, l'angle qui eft com-
pris dans le centre de l'aftre par les lignes droites AZ, EL,
dont la premiére part du lieu À, & Fautre du point Æ, dans
lequel l'axe de la Terre SPF eft coupé par la ligne verticale
de ce lieu ZAE, qui eft perpendiculaire à la furface de la
DES SCIENCES 3
Terre. IL eft évident que fi la Terre eft fphérique /Z3g, 1.)
le point de concours Æ de la verticale ZA£ avec l'axe PS
{ confond avec le centre de la Terre C, & l'angle ALE,
que j'appelle parallaxe, devient À LC, qui eft la parallaxe
dans la fignification commune ; ainfi la définition qu'on
donne icine changé rien à l'idée qu'on a déja de la Parallaxe
dans lhypothefe de la figure fphérique, qui eft la feule à
laquelle elle ait été attachée.
Ce point de concours Æ / Fig. 1.2. 3.) de la verticale
du lieu avec l'axe de la Terre peut être appellé centre ima-
ginaire à l'égard du lieu , & il le feroit aufli à l'égard de tous
autres lieux de la l'erre qui font dans le parallele du lieu 4,
Par la mème raifon la portion AE de cette verticale pourra
s'appeler demi-diametre imaginaire de la Terre ; & s'il étoit
Fig. Le
Fig. 1.2. 3e
néceflaire de donner un nom au plan O£ parallele à Fho- :
rifon phyfique ZR qui touche la Terre en 4, on pourroit le
nominer #orifon rationel imaginaire, toùjours par rapport au
point À, pendant que le plan QC, mené par le véritable
centre de la Terre, parallele à ces deux plans, en eft le
véritable horifon rationel.
Si {a Terre eft un Sphéroïde allongé /Fig. 2.) c'eft-à-dire,
f: c'eft le grand axe du Méridien P AS qui pafle par les
poles P, 5, & convient avec l'axe de la Terre, à ors le centre
imaginaire Æ tombera entre le véritable centre C & le pole P
le plus proche du lieu À. Mais fi c'eft le petit axe du Mé-
ridien /Fig. 3.) qui pafe par les poles, ou fi la Terre eft un
Sphéroïde applati, ce point Æ tombera au de-là du véritable
centreC, vers le pole S le plus éloigné-du lieu À. Tout cela
eft aifé à entendre par les propriétés des perpendiculaires de
YEllip{e, dont les Méridiens doivent à peu-près imiter la
figure, fi la Terre n’eft pas fphérique.
On pourroit me demander par quelle raifon je prends
pour bafe de l'angle de Ia Parallaxe plûtôt la portion À Æ
(Fig. 2. 3.) de la ligne verticale du lieu, qu’une plus grande
ou plus petite portion de cette même ligne, ou bien toute
autre droite qui partiroit du point À, par exemple, celle
i A ij
Fig. Zo
Fig. 3°
Fig. 2, 3,
4 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
qu'on meneroit de À au véritable centre C, ainfi que la dé-
finition commune de la parallaxe le veut.
Mais il eft ailé de répondre que le point conftant que l'on
doit choifir pour terme de la bafe de cet angle, doit être tel
qu'à l'égard de ce point le mouvement diurne de 'aftre pa-
roifle régulier & uniforme, tel qu'il eft en foi-même, au
moins en fuppofant que l'aftre ne change ni de diftance au
centre de la Terre, ni de parallele à J'Equateur pendant ce
mouvement ; ce qui ne peut fe vérifier de quelque autre
point que ce foit pris hors de l'axe PS. D'ailleurs on ne
fçauroit choïfir ce point hors de la ligne verticale du lieu;
car c’eft la feule ligne au dedans de la Terre qui foit donnée
de pofition à l'égard de lobfervateur, la direction où fe
trouve le centre €, auffi-bien que celle de tout autre point
imaginable de l'axe, lui étant inconnuë,
En effet un Aftronome qui eft placé en À, & qui ignore
la véritable figure de la Terre, voyant la régularité des
mouvemer:5 des Etoiles fixes par des cercles paralleles entre
eux, & comparant leurs apparences avec celles de la Lune,
ou des autres aftres qui ont parallaxe, trouvera que les
voyages apparents de ces aftres fe détournent d’un parallele
à ces cerclesstoüjours dans un fens qui porte à les éloigner
du Zénith , & de la ligne verticale. C'eft pourquoi il ne
pourra choifir que cette ligne pour terme des irrégularités
caufées par la parallaxe ; & s’il vouloit chercher un centre à
l'égard duquel ces irrégularités s’évanouiffent, il ne fçauroit
fe déterminer à le chercher ailleurs que dans cette ligne,
où il en trouvera un en effet. I pourra même prendre ce
point pour le véritable centre de la Ferre, tout de même que
fi elle étoit une fphere 44 d décrite autour de ce centre £,
par le point À où il fe trouve. Il y imaginera fon Equateur bd,
fes Méridiens & fes paralleles, il conclura de-là les diverfes
apparences de cet aftre qui conviendront aux diverfes lati-
tudes de cette Zèrre imaginaire, & il ne pourra fe détromper
de cette imagination que par la comparaifon des obferva-
tions faites en d’autres lieux de la véritable Terre PAS.
PR C7 LES Vie
DES SCIENCES.
Après tout cela, fi quelqu'un vouloit retenir à {a rigueur
Ja définition commune de la Parallaxe, même dans la fup-
potion que la Terre ne foit pas fphérique, & prendre pour
bafe de cet angle la droite AC, je ne m'y oppoferai point,
mon intention n'étant pas de changer les fignifications dés
mots qui font établies par l'ufage, mais feulement d'expliquer
en quel fens je me fervirai de ce nom de Parallaxe dans
cette recherche : ce que j'efpere qu'on me permettra, d’au-
tant plus que fi l’on ne change un peu la fignification de ce
mot, il faudra changer tous les Théoremes, & les Problemes
fondamentaux qu'on a démontrés touchant les Parallaxes,
comme l’on verra bientôt.
Ayant établi pour bafe de l'angle de {a Parallaxe, pris dans
mon langage, la portion de la ligne verticale A £, il eft
évident que l'effet de la Parallaxe fera toüjours d’abbaïfier
en apparence l'aftre au fpeétateur À, fans le détourner jamais
du plan vertical dans lequel il {e trouve; ce qui eft auffi une
propriété des Parallaxes prifes à l'ordinaire dans l'hypothefe
de la Terre fphérique : mais elle ne le feroit pas en retenant
la définition commune pour lappliquer à la figure fphéroïde,
c'eff-à-dire, en prenant pour bafe de la Parallaxe la ligne AC.
IL eft auffi facile de voir qu’en fuppofant la même diftance
de l'aftre L Æ, au centre imaginaire Æ (quelle que foit fa
diftance au véritable centre C) les finus des. parallaxes qui
lui conviennent par rapport à un même lieu À, ou bien à
une même latitude terreftre, à laquelle ce centre appartient,
feront entr'eux comme les finus des diftances apparentes au
Zénith ZAL ; & qu'ainfi au Zénith la parallaxe fera nulle,
& que la plus grande parallaxe fera l’horifontale, c’eft-à-dire,
celle qui convient à l'aftre, lorfqu’il eft à lhorifon phyfique
du lieu R AJ, ce qui s'accorde encore avec les Théoremes
communs des parallaxes, mais qui ne f vérifiéroit pas en
retenant la définition ordinaire dans une autre hypothefe que
de la figure fphérique.
L'on voit au contraire / F3. 4.) qu’en fuppofant conftante
la diftance CL, de l'aftre L,, au véritable centre de la Terre C,
À iij
Fig. 4.
6 MEMoIREs DE L'ACADEMIE RoyaLE
la diflance du centre imaginaire £, au même aftre ZL, peut
changer, fi l'aftre change de déclinaifon, ou de diftance au
pole, qui eft melurée par l'angle LC. Par conféquent,
la parallaxe horifontale d'un aftre L qui fe trouveroit toû-
jours dans la furface d'une fphere O VL, concentrique à
la Terre, ne feroit pas conftante, mème par rapport à une
latitude déterminée comme celle du lieu À, à moins que
Jaftre ne fe trouvât toüjours dans un mème cercle AL G,
parallele à Equateur. Car en ce cas, la ligne CL tournant
autour du centre €, & l'angle L CV demeurant conftant,
la ligne Æ L le {eroit de même, auffi-bien que l'angle LEY.
On peut appeller cet angle LEV, diflance imaginaire de l'aftre
au pole, au lieu que l'angle ZCV en eft la véritable diflance ;
& on peut nommer la différence decesanglesCLE, Parallaxe
des centres, qui dans cette derniére fuppofition eft un angle
conftant.
I eft clair que cet angle CL Æ étant toüjours dans un
plan VLC qui pañle par laxe de la Terre PS, & la paral-
laxe À LE toüûjours dans un plan £Z L qui pañle par la
verticale Z AE, ces deux angles ne peuvent fe trouver dans
un même plan, l'aftre étant ailleurs que dans le Méridien.
Alors ces deux angles compoleront l'angle ALC, qui feroit
la parallaxe fuivant la définition ordinaire, l'angle À LC
étant pour lors, ou la fomme, ou bien la différence de ce
que j'appelle Parallaxe de l'aflre AL Æ, & de la parallaxe
des centres £ LC.
Enfin, ileftévident que la parallaxe horifontalequi convient
au même aftre en deux lieux de la Terre qui ont différentes
latitudes, fe trouvera différente, quand même la ligne tirée |
des centres imaginaires à J'aflre feroit de même longueur;
à caufe que la ligne À Æ qui foûtend les parallaxes ne peut
être de même mefure, fi les deux lieux n’ont même latitude.
Si la figure de la Terre eft un Sphéroïde allongé, & elliptique
à peu-près, la parallaxe horifontale fera plus petite aux lieux
plus proches des poles de la Terre qu'aux plus éloignés,
parce que dans l'Ellip£e, la perpendiculaire AZ eft plus petite
D'E 5429: T'ES
dans les premiers que dans ceux-ci. Le contraire arrivera
fi la figure eft applatie, & aufi elliptique à peu-près.
Il faut remarquer ici que fuivant {a définition commune
qui donne pour bafe aux angles des parallaxes, un demi-
diametre de la Terre, la parallaxe horifontale eft l'angle fous
lequel on voit ce demi-diametre du centre de l'aftre par une
ligne qui touche la Terre; ce qui fe vérifie auffi de la pa-
rallaxe horifontale prife de la maniére que je la prends ici
à l'égard du demi-diametre imaginaire, mais non pas du
demi-diametre réel de la Terre, à moins qu'elle ne {oit
fphérique.
Si, dans les autres hypothefes de fa figure, on vouloit
prendre pour parallaxe horifontale, l'angle fous lequel on
voit du centre de F'aftre un de fes demi-diametres réels, par
une ligne qui touche la furface de la Terre, cet angle feroit
indéterminé, quand même la pofition de l'aftre feroit donnée;
parce que l’on pourroit tirer de Faftre plufieurs lignes qui
toucheroient Ja Terre aux extrémités de plufieurs demi-
diametres différents de longueur & de pofition. Maïs fi, entre
les demi-diametres, l'on fe déterminoit à choïfir celui qui eft,
par exemple, dans le plan d’un même Méridien avec l'aftre ;
alors en fuppofant la figure de Sphéroïde allongé, la parallaxe
horifontale feroit plus grande, à mefure que l'extrémité de
ce demi-diametre ( qu'on ne verroit pourtant d'ordinaire
qu'obliquement) c’eft-à-dire, le point touchant fur la fur-
face de la Terre, feroit plus proche du pole; & au contraire
en fappofant la figure applatie.
C’eft donc ainfi, fi je ne me trompe, que M. le Chevalier
INewtoh a confidéré la parallaxe horifontale de là Lune,
dans Ja derniére édition de fes Principes, qui eft de l'an
1726, de Londres. Car dans l’hypothefe qu'il fuit de la
figure apphfie, en fuppofant la moyenne diftance de la Lune
au centre de la Terre, telle qu'il la trouve dans les Syzygies,
& la parallaxe horifontale fous le Cercle équinoétial étant
de $7’ 20”, il la fait à la latitude de 30 degrés de $7' 16”,
à 38 degrés de 57’ 14", à45 degrés de 5712", à 52 degrés
8 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royarr
de 57" 10", à 60 degrés de 57'8", & à 90 degrésde 57'4”,
c'eft-à-dire, toûjours plus petite en allant vers les poles.
En revenant aux parallaxes prifes à ma maniére, on entend
aflés ce qu'il eft nécefaire de fçavoir, & ce qu'il faut faire,
pour réduire les lieux apparents des aftres qu'on détermine
par l'obfervation immédiate aux lieux véritables qu'on ob-
ferveroit du centre de la Terre C, quelque figure qu’on lui
donne. Car la parallaxe horifontale qui convient à la latitude
du lieu étant donnée, ou, ce qui revient au même, étant
connuë, le rapport entre le demi-diametre imaginaire À £,
& la diftance du centre imaginaire à l’aftre £ L étant auffr
connus, fi l'on obferve fa diftance apparente au Zénith Z AL,
en quelque plan vertical que ce foit, on pourra dans le trian-
gle LAË, trouver fa parallaxe ALE, pour cet inflant, qui
étant retranchée de l'angle Z AZ, donnera l'angle LEZ, qui
fervira à l'ordinaire avec la hauteur du pole du lieu, & avec
quelque autre mefure donnée par obfervation, à trouver ff
J'on veut, le lieu de laftre par rapport aux cercles mobiles
de la Sphere.
L’afcenfion droite de l'aftre qu'on déterminera de cette
maniére en fera la véritable afcenfion, telle que fi on l'ob-
fervoit du centre de la Terre C ; car le plan du cercle d'af
cenfion droite, dans lequel l’aftre {e trouve, paffant par l'axe
de la Terre CF eft le même plan dans lequel on le verroit,
tant du point Æ, que du point C, qui font fitués dans ce
même axe. Mais pour la déclinaifon, ou diftance de l'aftre
au pole, celle qu'on déduira fera l'angle LÆV, qui aura
befoin de correction, fi l’on veut la véritable diftance au
pole LCV. Cette correction fe trouvera aifément, pourvû
qu’on fçache la figure & les dimenfions de la Terre, ce qui
eft indifpenfablement néceflaire fi elle n’eft pas fphérique.
Car ces dimenfions donnant le rapport des droites £A4, EC,
& fuppofant auffi connu le rapport de EL à EA, qui eft
celui du rayon au finus de la parallaxe horifontale de l’'aftre
pour le lieu À, on en déduira le rapport de £L à EC, qui
avec l'angle CE L, fupplement de L EF, donnera dans le
triangle
mi Et SM ASC TE ANNENE 16 ÿ
triangle CE L, Yangle LCV qu'on cherche, & donnera
aufi {a parallaxe des centres £ LC.
Je ne n'arrêterai point à expliquer ce qu'il faudroit faire
fi Von cherchoit la diftance apparente au Zénith Z AZ, la
véritable pofition de l'aftre étant donnée ; car on voit aflés
qu'il n'y auroit qu'à faire les mêmes calculs avec un ordré
contraire. -
Pour ce qui regarde la maniére de trouver par obfervation
les parallaxes horifontales d’un aftre, dans quelque lieu que
ce foit de la Terre, on fçait que dans l'hypothefe de fa
fphéricité, la méthode la plus fimple, Ka plus facile, &
même la plus füre eft celle de les chercher par le moyen des
arallaxes horaires, ce qui s'exécute par un feul obfervateur,
& dans un feul lieu, de la maniére qui a été inventée, &
expliquée par feu M. Caffini, dans fon Traité de la Comete de
11680. Cette méthode non-feulement peut s'appliquer à une
hypothefe quelconque, mais fi on ignore la véritable figure
de la Terre, elle eft peut-être la feule qu'on puifle pratiquer.
U faut feulement remarquer que tout ce que M. Caffini dit,
en expliquant cette méthode, à l'égard de la Terre, de fon
ÆEquateur, de fes cercles horaires, & d’autres, doit être appli-
qué à la Sphere imaginaire Abd, qui a pour centre le point £,
& doit fe rapporter à l'équateur de cette Terre 24, & à fes
autres cercles; & que la Sphere dans laquelle il fuppofe que
'aftre eft placé ne doit pas être O VA, qui a fon centre en C,
mais ANH qui l'a en Æ, dont l'axe eft {a droite VC, auffr-
bien que de l'autre, & qui la coupe dans le cercle HLG,
c'eft-à-dire, dans le parallele de Faftre, le rayon de cette
Sphere imaginaire étant £ L, & non pas CL. La parallaxe
horifontale qu’on trouvera de cette maniére, fera celle qui
convient au lieu À, & à la diftance EL de l'aftre au centre
imaginaire Æ}; & Ie rapport qu'on découvrira du finus de
cette parallaxe au rayon fera celui du demi-diametre ima-
ginaire À Æ à la ligne £ L. Un autre obfervateur placé dans
un autre lieu de la Terre à différente latitude, & qui feroit {es
obfervations au même temps, trouveroit à cet aftre une autre
Mon, 173 4x - B
10 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE RoYyALE
quantité de parallaxe horifontale, & découvriroit le rapport
du demi-diametre de fa Sphere imaginaire à la diftance du
centre de cette Sphere à F'aftre.
Cela polé, pour venir de plus près à ce qui regarde ma
méthode, il eft clair que fi par le moyen de la feule paral-
laxe horifontale déterminée en À, on vouloit découvrir
celle qui convient en même temps à l'aftre dans quelqu'autre
lieu de différente latitude, par exemple, fous le cercle équi-
noétial en , il faudroit abfolument fçavoir le rapport du
demi-diametre AE au demi-diametre de l'équinoétial CX, &
auffi le rapport de la diftance de l'aftre LE à la diftance LC,
qui dépend de la diftance des centres EC, c'eft-à-dire, qu'il
faudroit connoître les véritables dimenfions, & la véritable
figure de la Terre.
Mais fi au contraire au même temps qu’on cherche par
obfervation la parallaxe horifontale d’un aftre dans le lieu 4,
on en fait de même dans le lieu Ÿ, ou bien dans quelque
autre lieu de la Terre fitué fous le cercle équinoétial, &
qu'outre cela on détermine dans fun & l'autre lieu les angles
LEV, LCV, de la maniére qu'on a indiquée ci-devant, il
eft clair qu’on pourra s’'appercevoir par-là de la figure de la
Terre. Car fi elle eft fphérique, les points Æ, €, fe réuniffant
en un feul €, les angles LEV, LCV, fe trouveront égaux.
Si elle eft fphéroïde allongée, le point de l'axe Æ, tombant
entre C & P, l'angle LE V de diftance au pole vifible pour
le lieu À, fera plus grand que l'angle LCY, qui convient au
lieu X, pris fous l’équinoctial; & fr elle eft applatie, LEV
fera plus petit que LCY, le point de l'axe, Æ, tombant pour
lors au de-là de C, vers l'autre pole.S. :
Suppofé que l’on trouve de la différence entre ces deux
angles, cette différence fera la parallaxe des centres CLE,
& dans le triangle CLE, tous les angles étant connus, on
aura la proportion de la ligne CE, aux lignes LC, LE. Or
comme par {a parallaxe horifontale de Y'aftre-en À, on fçait
déja la proportion de LE à EA, & par la parallaxe hori-
fontale en X, on fçait auf celle de LC à CX, on aura en
D ESS CA MEMNNCUE 15: 11
mêmes mefures les droites C , CE, E A, c'eflà-dire, le
diametre de l'Equateur, la portion de axe depuis le centre
jufqu'à la rencontre de la perpendiculaire, & la longueur de
cette même perpendiculaire ; ce qui fuffit, dans la fuppofition
que la courbe # A P foit une ellipfe, pour déterminer la
longueur de l'axe de la Terre CP, & pour décrire lellip{e,
l'angle A£P, complément de la hauteur du pole en À, étant
donné. On pourroit même vérifier l’efpece de cette cour-
büre, fi fon avoit de femblables obfervations faites dans
d’autres lieux fitués à diverfes latitudes.
Ce que j'ai expofé par avance, montre déja comment {a
feule obfervation dés Parallaxes peut fervir de fondement
géométrique pour trouver la figure &c les dimenfions de la
Terre. Ce n'eft pas pourtant que je prétende qu'on entre-
prenne cette recherche de la maniére que je viens de dire.
Cela demanderoit trop de fubtilité dans les obfervations.
Mon intention.n’eft donc pas de déterminer, mais feulement
de vérifier cette figure & ces dimenfions, :& cela d’une
maniére afiés fenfible, comme il paroïtra par la méthode que
je vais deformais expliquer.
Je propofe donc que l'on choïfiffe deux lieux pour y faire
de concert pendant quelque temps des obfervations de la
Lune, les parallaxes de cet aftre étant beaucoup plus fenfibles
que celles de tout autre. Soit l'un des lieux / Fig. 5.) par
exemple Paris au point À, & autre, que nous fuppoferons
d'abord, pour une plus grande facilité, fous le Cercle équi-
noctial, & fous le mème Méridien de Paris, au point
On obfervera à Paris les Parallaxes horaires de la Lune aux
jours qu’on aura concertés, par la comparaifon de fon paflage
par un même cercle horaire avec une Etoile fixe, & on en
déduira la parallaxe horifontale fuivant la méthode de M.
Caffini. Cette parallaxe fera celle qui convient pour lors au
demi-diametre imaginaire de la Terre 4 Æ. On obfervera
aufii fa diftance apparente au Zénith Z AL, au temps de fon
paflage par le Méridien, & par le moyen de la parallaxe hori-
lontale qu'on aura trouvée; on calculera l'angle de parallaxe
B ïj
Fig. 53
72 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE
abfoluë ALEÆ qui convient à cette diftance apparente. Enfin
on déterminera éxactement par le Micrometre, ou par les
filets horaires & obliques, la différence apparente des paral-
Jeles entre la Lune & cette même Etoile fixe, ou bien un
autre quelconque #, pour le temps du pañlage de la Lune par
le Méridien, ce qui donnera l'angle AZAL, dans le plan du
Méridien, qui melure la diftance de ces paralleles.
L'autre obfervateur en ÆX déterminera auflr au même
temps par fes obfervations {a parallaxe horifontale de la Lune
qui convient au demi-diametre CX, & obfervera de même
la diftance apparente de la Lune à fon Zénith FL, lorf
qu’elle paflera par le Méridien, pour calculer par ce moyen
la parallaxe LC, au temps de ce pañlage. Enfin il mefu-
rera exactement l'angle L AN, qui fera pour ce temps, la
différence des paralleles de la Lune, & de la même fixe Æ,
qu'on aura obfervée en 4.
Par la comparaifon des obfervations faites dans les deux
lieux, on connoîtra auffi-tôt l'angle AL, car il fera toû-
jours égal à la différence des angles obfervés A7AL, NXE,
fi la fixe dans les deux lieux a paru de même côté par rap-
port à la Lune, ou bien à leur fomme, fi elle a été vüé de
divers côtés, ce qui eft facile à démontrer par le parallelifme
des lignes AM, XN, qui vont fenfiblement à un même
point infiniment éloigné, où le parallele de la fixe coupe
le Méridien. A
Les trois angles ALE, CLX, ALX, étant donc connus,
il fera facile de voir s’il y a une parallaxe fenfible des centres
ÆLC, c'eft-à-dire, fi le point £ eft différent du point €.
Car lorfque la fomme des parallaxes ALE, XLC, fe trou-
vera égale à angle AL, la Lune paflant entre les deux
Zéniths Z, F, ou bien lorfque la différence de ces parallaxes
fera auffi égale à l'angle AL, la Lune étant au de-là de 7
dans l’hémifphere méridional, il eft clair que les deux lignes
‘EL, EC, n’en feront qu'une, le point Æ tombant fur €,
& la figure de la Terre fera fphérique.
Si la fomme des parallaxes dans le premier cas, ou bien
amant. ht
\
è
FRERE
DIE: SPAS TC MEET ES: 1 13
leur différence dans le fecond n'égale pas l'angle ALX, il y
‘aura une parallaxe des centres £LC. Alors la différence des
angles connus AL, CLX, fi Ia Lune eft entre les Zéniths
Z, Y, ou leur fomme fi elle eft au delà de Y, donnera
Vangle 4 LC. En l'un & l'autre cas, fi cet angle eft plus
grand que la parallaxe 4 L EF, le point Æ tombera au de-çà
du centre C, vers le pole ?, le plus proche du lieu À, & fa
Terre fera un Sphéroïde allongé; mais fi: À LC'eft plus petit
que AL E, le point Æ, tombera au de-à de C, vers l'autre
poleS, & da figure de la Terre fera un fphéroïde applati.
Je n'ai pas imis à compte le cas où la Lune fe trouve au
de-çà du Zénith Z vers le pole }”, car cela n'eft pas poffible,
le lieu À étant à Paris; & il ne feroit pas même avantageux de
prendre pour le point À un lieu où ce cas pourroit arriver,
c’eft-à-dire, entre les Tropiques de la Lune, parce que l'an-
gle CLE ne pourroit alors être que fort petit, quand même
la Terre auroit affés fenfiblement la figure fphéroïde.
On pourroit aufli s’'appercevoir de la figure de la Terre
par la feule comparaifon des parallaxes horifontales trouvées
en À, & en Ÿ, la parallaxe horifontale en X, devant fe trouver
égale à celle en À, fi la Terre eft fphérique, ou plus grande, f
elle eft allongée, & plus petite, fr elle eft applatie. Mais il
eft plus für de la déduire des angles parallactiques qui fe font
en L, dela maniére qu’on a dit, parce que la différence des
parallaxes horifontales en À, & en X, ne peut pas être auffr
fenfible ni aufi évidente que la parallaxe des centres LE C
le doit être, quelle que foit la figure de la Terre.
On a fuppofé d'abord les lieux 4, , fous un même
Méridien, mais il eft facile-de voir que cela n’eft pas né-
ceflaire, quoiqu'il foit à propos que la différence des Méri-
diens ne foit pas trop grande ; car en obfervant dans lun
des lieux le changement horaire de la Lune en dédlinaifon
apparente, ce qu'on peut faire avec le Micrometre par rap-
port à la même fixe À, & la différence des Méridiens étant
connuë, on trouvera la réduction qu'il y aura à faire aux
obfervations de ce lieu, tant de là diftance apparente au
B ii
*14 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE, RoyALE
Zénith, pour lui afligner fa parallaxe AL E, que de la
différence des paralleles de la Lune, & de la fixe, pour la
réduire au Méridien de l'autre lieu.
. On a aufli fuppofé, pour faciliter l'explication de la mé-
thode , que l'un des deux lieux eft placé fous le cercle équi-
noctial ; mais on peut dans la pratique s'épargner la peine de
chercher un tel lieu, non feulement fans préjudice de l'exaéti-
tude, mais avec avantage, comme l'on verra bientôt.
Mais parce qu'en fait de méthodes aftronomiques il eft
‘important de fçavoir les limites de précifion, & de certitude
que l'on peut efperer d'atteindre en les pratiquant ; ce qui
dépend d'une eftimation exacte des petites erreurs qui font
inévitables dans les obfervations, voyons fi par la méthode
que j'ai expofée, on pourra au moins s'appercevoir évidem-
ment de la figure de la Terre, en cas qu'elle foit telle que
M. Caffini le fils Ya déduite des mefures qu'on a prifes
actuellement.
Ayant calculé la Tongueur de Ja ligne CÆ pour la latitude
de Paris, fur les dimenfions des axes du Sphéroïde allongé
qu'il a données dans fon excellent ouvrage de la grandeur
& de la figure de la Terre, je la trouve de $ o parties, dont
le demi-diametre de Equateur CX eft 325 5. C'eft pour-
quoi l'angle € Æ L étant droit, ce qui arrivera lorfque la
Lune fe trouvera à peu-près dans le cercle équinoétial, la
parallaxe des centres £ LC, doit être à peu-près la 6 $.me
partie de la parallaxe horifontale qui convient au demi-
diametre de léquinoétial CX. En fuppofant cette parallaxe
de 61 minutes, comme elle l'eft quelquefois, on trouvera
l'angle ELC de 57 fecondes , qui eft un angle aflés fenfible
pour être apperçü par des Aftronomes éxaéts. Si l'angle
LEC eft de 120 degrés, c'eft-à-dire, fi la Lune eft dans fa
plus grande déclinaifon {eptentrionale, l'angle ÆELC fera un
peu moindre, c'eft-à-dire, de $o fecondes; & fi dans cette
fuppofition la parallaxe horifontale n'étoit que de $ 4 mi-
nutes, l'on trouverdit encore l'angle ÆLC de 42 fecondes,
& ceft le moindre qu'on le puifle trouver, la Lune étant
p'Eistr8 cf emRienr:s is
dans lhémifphere feptentrional, fr la Terre a la figure qu'on
fuppofe. Si la Lune étoit au deà de Equateur, cet angle
pourroit être plus petit; d'où l'on voit qu'il eft avantageux
d'avoir 1 Lune le plus proche de: l'Equateur, & le plus
proche auffi de la Terre qu'il eft poffible.
Si au lieu de choifir Paris pour l’un des deux lieux À;
pour y faire ces obfervations, on les faifoit dans un autre lieu
qui eût une plus grande latitude, en fuppofant toûjours
l'autre obfervateur fous le cercle équinoétial en #, cet angle
devroit encore fe rendre plus fenfible. Je trouve qu’en pre-
nant tout l'avantage des circonftances ci-deflus marquées,
dans la latitude de 60 degrés, la parallaxe des centres ELC
feroit d'une minute 7 fecondes, & dans la latitude de 75
degrés, d'une minute 1 $ fecondes, Si l'on pouvoit faire ces
-obférvations fous le pole P, on trouveroit C £ de 68 des
mêmes parties, dont OX eft3255, & la parallaxe des
centres d’une minute 17 fecondes.
Mais fi en prenant pour le point À tel lieu qu’on voudra
dans l’hémifphere feptentrional, on ne choïfit pas pour le
point *, un lieu placé fous léquinoctial, mais au de-là de
T'équinoétial vers le midi, [a détermination & le calcul des
angles parallactiques, qui fe font dans le centre de la Lune Z,
iront tout de mème que ci-devant, & cependant on pourra
gagner beaucoup dans Ia grandeur de la bafe CE, le point C
n'étant plus pour lors le centre de la Terre, mais le centre
imaginaire du lieu méridional où l’on fera les obfervations,
ce qui rendra plus grand Fangle £ LC, que lon pourra
encore, f1 l'on veut, appeller parallaxe des centres. Je ne
m'arrêterai point à en dire davantage, parce qu'il eft évident
qu'on peut par ce moyÿen doubler cet angle, en choïfiffant
le point #, avec autant de latitude anftrale que le point 4 en
aura de boréale, & par-là rendre cétte détermination plus
fenfible, & plus füre.
Les découvertes des Terres Auftrales n'ayant pas encore
été pouflées auffi loin que celles des Boréales, on pourra
néantmoins trouverune bafe ÆC, affés grandépour foûtendre,
36 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE RoYALE
dans les circonftances qu'on a dit étre les plus avantageufes,
une parallaxe des centres EL C, d'environ deux minutes.
Comme fi lon prenoit pour le point 4, Upfal, ou Peters-
bourg, ou Archangel, & pour X, le Cap de Bonne-Efperance,
dont la longitude n’eft pas même fort différente de celle de
ces lieux ; ou bien fi en choïfiffant pour 4, Quebec, lon
prenoit pour Ÿ, le Détroit de Magellan, ces deux lieux
étant dans les Cartes de M. Delifle prefque fous un même
Méridien.
Examinons donc fi la fomme des erreurs qu'on peut
craindre dans les obfervations néceflaires à cette détermina-
tion, peut aller aflés loin pour rendre douteufe toute cette
différence de deux minutes, qu'on doit trouver dans cette
hypothefe , & dans ces circonftances, pour parallaxe des
centres; ou bien fi, toutes les erreurs étant évaluées, ïl doit
refter encore quelque chofe de fenfible qui rende évidente
cette parallaxe. On s'aflürera de cela, en cherchant les plus
grandes méprifes où un obfervateur éxaét pourroit tomber
dans les mefures des angles ALN, ALE, CLX, qui font
les feuls qu'on employe immédiatement pour trouver a
parallaxe des centres Æ LC: |
En commençant par l'angle À L X: comme il réfulte de
la fomme ou de la différence des deux AZAL, NXEL, qui
font les différences de déclinaifon de la fixe 4, & de la Lune,
au temps de fon paflage par le Méridien, on n’y peut foup-
çonner qu'autant d'erreur qu’on pourroit en commettre dans
la détermination qu'on feroit de ces différences avec le Mi-
crometre. Or il eft certain que les Aftronomes déterminent
par cet inftrument les différences apparentes de déclinaifon
à 5 fecondes près; & quand même on prétendroit qu'on
ne pourroit s’en affürer qu'à 10 fecondes, ayant égard au
diametre de la Lune, qu’il faut obferver au même temps, pour
réduire cette différence au centre, & qu'outre cela on vou-
droit fuppofer que la fomme de ces erreurs refteroit toute
entiére dans la mefure qu’on déduiroit des obfervations de
Jangle AL, les erreurs ne fe compenfant point l’une l'autre,
: cet
D ristS" CÉREMMNAES Er se 17
cet angle ne feroit douteux que de 20 fecondes tout au plus.
Il eft vrai que les deux lieux À, X, n'étant pas exacte-
ment fous un même Méridien, il faudroit dans l'un des lieux
donner à cette différence une correétion pour la réduire au
Méridien de l'autre lieu ; ce qui demande que la différence
des Méridiens foit connuë, & que le mouvement apparent
de la Lune en déclinaïfon le foit aufli. Mais en obfervant
plufieurs fois la Lune, & la fixe pendant une ou deux heures,
on peut s'affurer de ce mouvement, & de fes inégalités, en
forte qu'on ne fe méprendra que de fort peu, & d’une
quantité prefque infenfible dans la réduction qui convient à
la différence fuppofée des Méridiens, pourvû qu’elle foit affés
petite; & le doute qu'on peut avoir fur la véritable mefure
de cette différence n’allant pas d'ordinaire à une minute
d'heure, le changement de déclinaifon apparente dans ce petit
temps ne fera auffi que fort petit, & je crois qu'on ne doit
mettre en compte pour tout cela que 10 fecondes d'erreur
dans la réduétion, qui font en tout 3 0 fecondes d'incertitude
dans l'angle AL,
Pour l'angle ALE, qui eff la parallaxe abfoluë de Ia Lune
au Méridien dans le lieu À, fa mefure dépend premiérement
de Ja diflance apparente au Zénith Z AL, qu'on aura obfervée.
Cette obfervation étant faite avec foin, ne peut être dou-
teufe tout au plus que d’une minute, & une minute de doute
dans la diftance au Zénith n'en coûté jamais qu'un d’une
feconde dans 1a parallaxe de hauteur, en fuppofant connuë la
parallaxe horifontale ; mais on peut compter deux fecondes,
à caufe de l'incertitude d’une autre minute qu'on pourroit
foupçonner dans Fangle ZA L, pour les irrégularités des
réfraétions.
La parallaxe AL E dépend outre cela de la parallaxe hori-
fontale qu'on aura trouvée par les obfervations des parallaxes
horaires faites dans le lieu 4. Dans la détermination de
cette parallaxe horifontale on prend pour un des éléments
du calcul {a hauteur du pole du lieu ; mais quand même on
Mem, 1734 Aa €
38 MEMoIREs DE L'ACADEMIE ROYALE
fe tromperoit dans cette hauteur de 2 minutes ( ce qui
n'arrive jamais en faifant l'obfervation avec foin ) cela
ne feroit rien de fenfible dans les parallaxes. On employe
encore dans ce calcul la déclinaifon apparente de la Lune
ui eft donnée par la différence qu’on en obferve à celle
d’une fixe, & dans cela même deux ou trois minutes d'erreur
(qu'on ne peut commettre que par négligence) ne change-
roient de rien la parallaxe horifontale qu'on cherche. Enfin
il entre dans ce calcul la différence de temps qu'on obferve
à diverfes heures d'une même nuit, entre les pañlages de la
Lune & d’une fixe par les mêmes cercles horaires à quelque
diftance au Méridien, & la différence de ce temps, qu'on
devroit obferver dans les mêmes cercles, fr la Lune n’avoit
point de parallaxe, ce qui dépend du mouvement véritable
de la Lune en afcenfion droite, qu’on déduit de fes paffages
par le Méridien, obfervés deux ou trois jours de fuite.
J'avouë que cette détermination eft fort délicate, & que
c'eft-là où il eft plus facile de fe méprendre qu'ailleurs. Je
crois pourtant que les Aftronomes m'accorderont qu'on peut
après tout cela s'affurer de la parallaxe horifontale qui en
réfuite, dans une demi-minute de cercle; & je remarque de
plus qu'une demi-minute d'erreur dans da parallaxe horifon-
tale trouvée au lieu À, ne doit pas refter toute entiére
dans la parallaxe ALE, qui répond à la diftance au Zénith
dans le Méridien, mais qu’elle doit devenir moindre en raifon
du finus de cette diflance au rayon ; c'eft-à-dire, que
fr la diftance méridienne de la Lune au Zénith du lieu À
ne pafie pas 60 degrés (diftance au delà de laquelle ïl ne
feroit pas für d'entreprendre la recherche de la parallaxe
horifontale , lirrégularité des réfraétions dans des cercles
horaires pouvant altérer l'effet des parallaxes) cette demi-
minute d'incertitude dans la parallaxe horifontale n’en
donnera tout au plus que 26 fecondes dans langle À LE:
& y adjoûtant les deux fecondes trouvées ci-deflus, on
conclura que cet angle ne fçauroit être douteux que de 28
de bone
DE - Lars
D #81 C1 EN Es, 19
fecondes tout au plus ; mais on peut le fuppofer de 30.
: Enfin pour l'angle CLX, on fera lemême raifonnement
qu'on vient de faire pour l'angle ALE,, & l'on trouvera auffi
la même limite d'incertitude d'environ 3 0 fecondes, la Lune
n'étant éloignée du Zénith du lieu #, que de 60 degrés.
Où il eft à remarquer que la diftance de 11 Lune au Zénith
étant dans lun des lieux de 60 degrés, elle ne peut être
qu'au deflous de cette quantité dans l'autre, qui eft dans
Thémifphere oppofé, à moins que les deux lieux ne foient
éloignés entreux de 120 degrés ou environ, & qu'ainf
il feroit fort difficile que l’un & l'autre de ces angles à la
fois fuffent fautifs de toute cette quantité de 30 fecondes.
Ceferoientdoncenfmleslimitesdecertitudeentre lefquelles
des Aflronomes habiles & exercés pourroient fe promettre
de déterminer leurs mefures des trois angles ALX, ALE,
CLX; & comme il y a la même facilité de tomber dans
chacune de ces erreurs par excès, ou par défaut, il feroit diff-
cile d'y tomber dans toutes à la fois en. tel {ens qu'il feroit
néceffaire, pour qu’en faifant les fommes ou les différences de
ces trois angles de la maniére qu'on a vû, la faute de l'un
ne compenfat pas en partie celle de l'autre, & que la fomme
des trois erreurs dût fe trouver toute entiére dans l'angle
ÆLC, qui doit rélulter de ces fommes & de ces différences.
Néantmoins en fuppofant que cela arrive, on voit que
cette fomme ne va qu'à une minute 30 fecondes, c’eft-à-dire,
à une demi-minute pour chacun des trois angles. Or l'on a
trouvé que fuivant les dimenfions de la T'erre de M. Caffini,
l'angle ELC, en choïfiffant des lieux connus & acceflibles,
peut monter à 2 minutes, donc il refte toûjours une demi-
minute qui doit fe manifefter dans l'angle ZLC, & rendre
pa-à fenfible Ia figure de fphéroïde allongé qu'il a trouvée
à la Terre; & cela d'autant plus, que fi au contraire cette
figure eft applatie, comme de grands Géometres le préten-
dent, cet angle Æ LC, bien-loin de fe trouver dans ces
circonftances d’une demi-minute, doit être, pour ainfi dire,
C ji
20 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE
négatif, le point Æ tombant au de-là du point C, vers Ie
pole S.
Il feroit de l'induflrie des Aflronomes qui entrepren-
droient cette recherche, de concerter les temps propres à
ces obfervations, en cherchant les pofitions de {a Lune les
plus favorables, & qui devroient rendre plus fenfible effet
de la figure de la Terre dans les Parallaxes. II femble qu'en
pratiquant cette méthode plufieurs fois, par exemple, à tous
les retours de la Lune vifibles, pendant une année ou deux,
à une même fixe qu'on auroit choifie, on pourroit mettre
la chofe dans une entiére évidence.
Mem.de l'Acd.1734. pl 1 pag. 20.
Pimonraut Seulp
Jimonnaus Jeulp
Do: . a MAT
Dem dse4 1737 pl 2 - Pa:
n Wem.de [Acid 1734 pl 2. pPag.20
Fig ÿ RE
DES SCIENCES. 23
EEE need
COMPARAISON
Des deux Loix que la Terre 7 les autres Planetes
doivent obferver dans la figure que la pefanteur
leur fait prendre.
Pa M BouGuER.
Ne Planete confidérée comme Fluide ne peut conferver
conftamment la même figure, que lorfque toutes les
colomnes dont on peut fuppofer qu'elle eft formée, & qui
aboutiffent à fon centre, font d’une égale pefanteur ; fans
cela, toutes ces colomnes ne fe contrebalanceroïent point,
& les plus pefantes ne manqueroient pas de foûlever par
embas celles qui le feroient moins. Maïs il faut encore qu'une
autre condition foit remplie, il faut que les directions de
la pefanteur foient exactement perpendiculaires dans tous
des points de la furface ; afin que les molecules du Fluide
m'ayent aucune pente à couler vers un côté ou vers un autre.
L'obfervation de ces deux loix eft également néceflaire,
Tune aflüre, en quelque façon, le repos dans l'intérieur,
pendant que l'autre Fétablit au dehors, & ce n'eft que le
concours des deux qui rend état de fa Planete toüjours
permanent. Entre plufieurs Mathématiciens d’un grand nom
qui ont tourné leur vüë vers cette matiére, M. Huguens &
M. Herman font les feuls qui ont appliqué en mème temps
les deux loix; ils ont trouvé qu'elles s’accordoient à donner
à la Terre une même figure dans les fuppoñitions particuliéres
d’une pefanteur originairement conflante, & d'une pefanteur
proportionnelle aux diftances au centre, Perfonne, que je
RD n'a pouffé depuis l'examen plus loin, fur le concert
des deux principes dont il s’agit, & il fe peut faire qu’on ait
crû qu'ils étoient fécrettement les mêmes, ou que l'obferva-
tion de l’un renfermoit toüjours implicitement È obfervation
ii
31 Mars
1734
Fig. 1.
»2 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLE
de d'autre. Cependant, en les confidérant avec attention,
on s'apperçoit qu'ils ne. peuvent guéres fe concilier que par
quelque efpece de hafard; car le premier, ou l'équilibre entre
les colomnes, dépend principalement de la pefanteur des
parties intérieures, & de la pefanteur de toutes ces parties;
au lieu qu'il ne s’agit dans l'application de l'autre, que de la
pefanteur actuelle qu'ont les feules parties fituées vers la fur-
face. H refte donc à examiner d’où peut naître la convenance
parfaite qui fe trouve dans les cas confidérés par les Auteurs
ue nous venons de citer. L'exercice des deux loix tombe
fr des fujets trop différents, pour qu’elles puiffent s'accor-
der toùjours, & elles ne le doivent faire que dans certaines
circonftances particuliéres qu'il eft, fans doute, curieux de
découvrir. D'ailleurs fr, malgré les tentatives des Philofophes,
nous ne connoiflons pas encore le vrai fyftême de la Pefanteur,
il eft toûjours avantageux pour nous, de mieux connoître
au moins toutes les propriétés qu'ont les Hypothefes que
nous embraflons ordinairement.
Recherches fur l'obférvation du premier principe, ou fur
l'équilibre entre les Colomnes.
L
H n'eft pas fortdifficile de trouver la forme AXBL (Fig. 1.)
que doit prendre une Planete confidérée comme fluide, pour
qu'il y ait un parfait équilibre entre toutes les colomnes
dont on peut fuppofer qu'elle eft formée. Nous allons cher-
cher cette figure, & afin de donner une plus grande géné-
ralité à notre Solution, nous fuppoferons que les directions
KC, MG, mg, &c. de la pefanteur primitive, au lieu dé
concourir dans un même point €, viennent fe rendre en
différents points de l'axe AB de la Planete AX BL, & que
ces directions font perpendiculaires à la fuperficie d'un Sphé-
roïde engendré par une ovale quelconque 4 DB E,, dont C
eft le centre, & À B Taxe. I faut remarquer que nous
difons que AG & mg font les direétions de /4 pefanteur
ÉRONNRERRES |
LD Sal
LS X à
D Bis 2 SAC EAN CIE: S 2:
La 3
primitive, afm de diflinguer cette pefanteur de /4 pefanteur Fig. x.
aduelle, qui eft celle qu'on éprouve toûjours, & qui n'eft
autre chofe que la pefanteur primitive, altérée par la force
centrifuge que produit le mouvement de la Planete fur fon
axe. Si la Planete AX BL étoit dans un parfait repos, on
n'expérimenteroit que la pefanteur primitive {ur fa furface,
& un corps pefant fitué en 7 ne tendroit à tomber que
{lon MG, & qu'à proportion qu'il feroit pouñlé par la
pefanteur primitive. Mais la Planete ne peut pas tourner
fur fon axe, fans que toutes fes parties ne faffent un effort
continuel pouf s'en éloigner; & quelque foible que foit
cet effort centrifuge, il doit non-feulement diminuer toû-
jours un peu la pefanteur primitive, il doit changer encore
un peu fes directions.
Je nomme # les parties FG, fg, des directions AG, mg,
qui font interceptées entre l'axe 4 B, & la courbe ADFBE,
à laquelle elles font perpendiculaires, z marquera les ordon-
nées }7 de cette courbe, & » les parties GB de l'axe. La
courbe ADBE étant indéterminée, les valeurs de #, de z
& de z le font auf, & nos Recherches s’appliqueront par
conféquent à toutes les diverfes fituations qu'on pourra attri-
buer aux directions de la pefanteur. Nous nommons de plus
p la pefanteur primitive, variable ou conftante qui s'exerce
fur chaque direction 4/6 ; ou plûtôt, comme il peut arriver
que cette pefanteur ne foit pas égale fur toutes les directions,
& qu'il fe peut faire qu'elle foit plus ou moins forte vers
TEquateur, ou vers les poles, indépendamment même de
la force centrifuge, nous la défignerons par &p; expreffion
dans laquelle € fera quelque puiffance ou quelque fonction
du fmus de angle A1GB, formé par la direction & par l'axe
de la Planete; ou, fi Yon veut, € fera quelque fonction de
FI=3% La force centrifuge qui réfulte du mouvement de
révolution à la diflance 4 de l'axe, fera marquée par f. Enfin
y fera la longueur des directions A4G de la pefanteur, depuis
la furface AK BL de da Planete jufqu’à l'axe, & 5 les ordon-
nées OP. Ainfi il n'eft queftion que de déterminer la valeur
54 Memorres DE L'ACADEMIE Royare
de y ou de 5, par rapport aux autres quantités que nous
venons de fpécifier, & nous fçaurons la figure AK BL que
doit prendre la Planete dans chaque hypothefe particuliére
de pefanteur.
Si nous faifons maintenant attention à équilibre qui doit
fe trouver entre les colomnes dont la Planete peut être
fuppofée formée, nous reconnoîtrons que la colomne #g
doit fe contrebalancer exaétement avec la partie B g de la
colomne qui eft couchée dans l'axe, puifque #13 & Bg abou-
tiflent dans le même point g. La colomne 41G doit fe
contrebalancer par la même raifon avec BG, de même que
XC le doit faire avec la colomne entiére BC. NH eft évident
d’un autre côté que la pefanteur des parties de BC n’eft point
altérée par la force centrifuge. Aïnfi pdu étant la pefanteur
des parties infiniment petites G g (—= du) qui fervent d'élé-
ments à cette colomne, nous aurons /pdu pour le poids
de fes parties fenfibles Bg ou BG. Mais ce n'eft pas la
même chofe de la pefanteur des colomnes #g où MG ;
dy défignant les parties infiniment petites dont eft formée
la hauteur y de chaque colomne, & Ëp défignant la pefan-
teur primitive dans chaque point, nous aurons Cpdy pour
le poids de chaque petite partie, & /Ëp dy pour le poids
d'une colomne entiére, ou plütôt Ë/pdy, parce que & eft
conftante dans chaque direction. Mais il faut remarquer,
conformément à ce que nous avons dit, que cette intégrale
Ü [p dy n'exprime la pefanteur actuelle que lorfque la Pla-
nete eft dans un parfait repos, & que fes parties n’ont aucune
force centrifuge qui fe complique avec la pefanteur primi-
tive. Ainfi il nous faut chercher l'effort que fait la colomne
GM pour s'éloigner de l'axe AB, & voir quelle eff Ia partie
de cet effort qui s'exerce felon G 47 en fens direétement
contraire à la pefanteur.
Mais nous pouvons trouver immédiatement cette partie,
en confidérant, avec M. Huguens, qu'elle eft égale à la
force centrifuge abfoluë qu'auroit une colomne 47 P de
même groffeur, qui feroit perpendiculaire à l'axe. If eft vrai
qu'il
D ESS. G'IVEMNIGUE € 25
qu'il y a plus de matiére en G/4 qu'en PA dans le rapport Fig. r.
de GM à PM, & que GM à par conféquent plus de force
centrifuge que PA dans le même rapports Mais il fe fait
ici une compenfation : car comme la force centrifuge ab-
foluë des parties de GAZ tend à les faire s'éloigner de l'axe
AB felon des perpendiculaires à cet axe, il n'y a qu'une
portion de cette force qui s'exerce félon GAZ, & qui eft
contraire à la pefanteur, & cette portion eft plus petite que
la force abfoluë, précifément dans le même rapport de GAZ
à PM; ce qui la rend parfaitement égale à la force centri-
fuge de PM. Or f défignant Ia force centrifuge à la dif
tance a de l'axe AZ, nous aurons LE pour a force centri-
fuge en M à Ia diftance AMP—5, puilque Îa force centri-
fuge eft proportionnelle aux rayons des cercles tracés par
les mobiles de même maffe, aufli-tôt que ces cercles font
décrits dans un temps éval, comme ils le font tous ici. Nous
n'aurions donc qu'à multiplier 422 par = pour avoir
\
% d'effort total, fi Ia force centrifuge étoit la même tout le
à long de AP : mais comme elle eft de plus petite en plus
petite à mefure qu'on confidere des points plus proches de
l'axe AB, & qu'elle diminuë exaétement en progreffion
arithmétique, il ne faut multiplier 41P que par la moitié
de =. Il nous vient de cette forte = pour la force cen-
trifuge abfoluë de toutes les parties de AP; force totale
‘ou abfoluë qui eft égale, felon le Lemme de M. Huguens,
à toute la force centrifuge relative de GAZ, qui agit de G
vers M en fens exaétement contraire à la pelanteur. Mais
Ê/pdy étant la pefanteur primitive de toute la colomne
CAL, & == a force centrifuge qu'on en doit retrancher,
on trouve Ëfpdy — _ pour la pefanteur actuelle de
MG; & fr nous l'égalons à la pefanteur [pdu de BG,
nous aurons l'équation Ë [pd J — LE — Jpdu, dans
24
Mem. 173 4e : D
>6 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Rorare
laquelle les variables font féparées, & qui marque d'une
maniére très-générale la relation qu'a la courbe AKBL ou
la figure de la Planete, avec la courbe AD BE qui détermine
la fituation de toutes les diretions de la pefanteur primitive.
I! eft à propos de fubftituer dans cette équation, la valeur
_- de 5, que donne l'analogie GF—1 : F1=7:: GM=—=y
: MP=S5; on aura Efp dy —-L2 —/pdu, quon
peut appliquer aifément, comme on le voit, à toutes les
hypothefes poffibles. I n'importe en effet, que les pefanteurs
foient proportionnelles à quelque puiflance où à quelque
fonction de y, l'équation fera prête à être conftruite, & ne
contiendra que deux feules variables, puifque la nature de
la courbe À DBE fournit toüjours la relation que?, z & w
ont entr'elles. Or auffi-tôt qu'on aura découvert Îa valeur
de y, il n'y aura qu'à la porter depuis G jufqu'en A1, &
de cette forte, on trouvera autant de points 47 de la furface
de la Planete, qu'on cherchera de diverfes valeurs de y.
Si l'on fuppofe que la pefanteur eft par-tout abfolument
conftante, qu'elle eft non-feulement la mème dans tous les
points de chaque direction, mais qu'elle ne fouffre auffi
aucun changement d’une direétion à une autre; il n'y aura
qu'à mettre l'unité à la place de Ë, & Féquation générale
Efp dy — Er —=/fpdu fe réduira à py — LT — pu;
z2at
2 2 "el LLLSE 2 ES À
qui donne y— SÉRIE Eure . On a doncici,
t
en termes connus, la valeur que doit avoir GAZ, afin que
toutes les colomnes foient exactement en équilibre, & cela
pour toutes les diverfes difpofitions que peuvent avoir les
directions aufli-tôt que la pefanteur eft conftante,
ere em 5 €
mm D
LE nn
DES SCTEUN CES !! y
Recherches fur l'obfervation du fecond principe, ou far
de niveau que routes les parties de la furface
doivent prendre,
1F
II nous faut maintenant examiner le fecond principe, &
voir la figure que doit prendre la Planete, pour que toutes
les parties de fa furface foient exaétement de niveau; ou,
ce qui revient au même, pour qu'elles foient exactement
perpendiculaires aux directions de la pefanteur. J ne s'agit
plus ici du poids entier des colomnes, mais feulement de
la pefanteur actuelle d'un grave fitué à la finface. Cette
pefanteur réfulte, ainfi que nous l'avons déja dit, de Ja com-
Plication de Ia pefanteur primitive & de la force centrifuge.
Comme la Planete eft cenfée tourner continuellement fur
fon axe, le grave placé en 47, en même temps qu'il eft
{ollicité par fa pefanteur primitive à tomber {lon 4/G, il
eft follicité par fa force centrifuge à s’écarter felon 4ZR,
& ces deux efforts joints enfemble, forment par leur com-
pofition, la pefanteur actuelle felon 417: H fuit de là que -
MG & MR, repréfentant les deux premiers efforts, Ia
diagonale A1S du parallelogramme RMGS, repréfentera
non-feulement la pefanteur actuelle, mais encore fa direction,
& c'éft par conféquent 42$ qu'on doit regarder comme
exactement verticale, & qui feroit indiquée par un fil à plomb
“appliqué en 4£ Afin donc que la petite partie Am de la
furfice de la Planete foit parfaitement de niveau, il faut
qu'elle faffe un angle droit avec MS; & pour cela, f A27°
eft perpendiculaire au point 47 de la furface de la Planete,
& que de l'extrémité G de la diredion de la pefanteur
primitive, on éleve la perpendiculaire GS à l'axe jufqu’à la
rencontre de ZT, il faut qu'il y ait même rapport entre
la pefanteur primitive & la force centrifuge, qu'entre 4/G
& GS. Aïnfi il nous refte à chercher la relation qu'il y 4
entre ces deux derniéres lignes,
D ij
Fig. 1,
Fig. 1.
#8 MEMGIRES BE L'ACADEMIE RoyALE
Mais on pourroit aifément s'engager dans un aflés Jong
calcul, pour trouver une expreflion fimple de ce rapport;
au lieu qu'une confidération un peu attentive de h figure,
nous donnera cette expreflion prefque tout d’un coup, &
sous fournira en même temps un Lemme qui fera quelque-
fois d'ufage dans les Problemes qui appartiennent à l'inverfe
des tangentes. Du point #, j'abbaifle les petites perpendi-
culaires mO & mN, fur PM & fur GA. L'angle MmO
fera égal à l'angle GS 7, puifqu'ils font égaux l'un & l'autre
à l'angle PMT ; & d'un autre côté, l'angle //mAN fera égal
à l'angle GMT, puifque les deux côtés de l’un font perpen-
diculaires aux deux côtés de l'autre. Aïnfi dans le triangle
GMS où les côtés GA & GS, font entr'eux comme les
finus des angles oppofés GST' & GMS, ces mêmes côtés
font en même raifon que les finus des angles 1/10 & MmN,
& ils font, par conféquent, aufli en même raifon. que les
petites lignes 10 & MN, qui repréfentent les finus de
ces deux derniers angles, pendant que la petite partie A7"
de la courbe fert de finus total. (On démontreroit de la
même maniére, s'il en étoit befoin, que AG eft toujours
à la partie 7 G de axe, interceptée entre 47G & Ia per-
pendiculaire AT à la courbe, comme #0 eft à MN.)
Mais puifqu’il y a même rapport entre 1/6 & GS, qu'entre
les petites lignes 47/0 & ATN; au lieu de comparer la
pefanteur primitive & la force centrifuge à 2/G & à GS,
nous n'avons qu'à comparer ces deux puiflances aux deux
petites lignes 410 & MAN, qui font toüjours en même
raifon.
La petite ligne 4/0 eft exprimée par ds, puifqu’elle eft
la différentielle des ordonnées PM=—s, & la petite ligne
MN eff la différentielle des FM (=GM—GF)=y—1;
de forte que MN— dy — dr. Nous avons d'un autre
côte Ep pour l'expreffion de la pefanteur primitive, & nous
avons déja vû ci-devant que ee. eff la force centrifuge en 4£,
à Ja diftance 42P (5) de l'axe A B. Nous ayons donc, en
D‘. En: Su 1 © L'E AN GE S> 29
termes analytiques, Ep : À :: ds: dy—=dt, dont nous Fig r,
.. fsds miÊe A7. , RE Cr :
urons = — —Cpdy— Ep dr. C'eft-Rà Yéquation en
premiéres différences de la courbe ou de la figure AXBL,
qui rend toutes les parties de la furface de la Planete par-
faitement horifontales.
Si l'on fuppofe la pefanteur primitive abfolument conftante,
& qu'on mette, comme ci-devant, l'unité à la place de 6,
on trouvera, en intégrant £ à —=py—pt; & introduifant
à la place des, fa valeur <Z tirée, comme nous l'avons
déja vu, de la reflemblance des triangles GFI & GAME, il
viendra PC = py—pt, dont on déduira
= LPENEP Era fre. Cette valeur de GAZ étant
ainfi déterminée, on ne peut guére manquer de Ia rapprocher
ape HiVa pr apfur
ÿ ÎT
l'autre principe. On verra qu'elles font différentes, & qu’ainft
3 il faut toüjours abfolument qu'il y ait au moins un des deux
Han principes que nous examinons, qui foit violé dans la ren-
contre préfente.
que nous a fourni
de celle de VE
Comparaifon des deux Principes.
TIIL
- Maïs ce n’eft pas dans cet unique cas, ce n'eft pas fim-
plement lorfque la pefanteur primitive eft abfolument conf
tante, qu'il fe trouve une pareille incompatibilité entre les.
deux loix dont il s'agit : elles dépendent fi peu l’une de
2% * autre, qu’elles font prefque toûjours en contradiction ; elles
th {e donnent l’exclufion mutuellement, & il fuffit Le plus fou-
… vent que l’une foit obfervée pour que l'autre ne le {oit pas.
Pour le dire en un mot, les circonftances font ff rares dans
lefquelles elles s'accordent à donner une même figure à la
D ü
::
v
Fig, 1°
30 Memoires DE L'ACADEMTE Rorare
Planete, que c'eft fouvent un Probleme difhcile à réfoudre,
que de déterminer quelqu'une de ces circonftances. Nous
avons trouvé dans le premier article l'équation générale
Cfpdy — Le = fpdu, où Efp dy — = fpdu,
en prenant pour principe l'équilibre des colomnes. Nous fa
différentions cette équation, en faifant attention que & doit
être regardée comme variable, parce qu'il s'agit ici des
changements qui fe font d’une direction à une autre : if
vient dC f[pdy + Üpdy — ER du, & nous fui
donnons cette forme = — 4£ fpdy +-Cpdy —pdu,
afin de pouvoir la comparer plus aifément à l'autre équation
générale LI — Epdy — Cp dt que nous venons de
a
trouver en employant le fecond principe. Or pour que ces
deux équations primordiales Po —=dÜfpdy+Cpdy
— pdu & sise == Gpdy — pdt foient identiques, ou
pour qu'elles puiffent donner la même courbe AK BL ; il
faut, puifque les deux premiers membres font égaux entre
eux, que les deux feconds le foient auf, c’eft-à-dire, qu'il
faut qu'on ait dE fpdy+-Cpdy—pdu —Üpdy—Cpdi,
ou dE fpdy + Cpdt=—=pdu. Ainfi nous pourrons nous
fervir toûjours de cette derniére équation, pour reconnoître
fi les deux équations primordiales font les mêmes, ou pour
juger de l'accord qui peut fe trouver entre les deux prin-
cipes qui influent fur la figure de la Planete.
Nous voyons déja, en effaçant dans cette formule Îe
terme qui contient 4Ë, & en mettant l'unité à la place de 6,
que fi la pefanteur eft abfolument conftante, il faut que
dt— du, & par conféquent 1 =". Mais :/GF) ne peut
pas ètre continuellement égale à 4 /GB) à moins que Ja
courbe ADBE qui fert à déterminer la fituation des di-
rections primitives de la pefanteur, ne foit un cercle comme
dens la Figure 2, & que toutes ces directions ne concourent
\
D'E:SuuS CG L'EAN CHE "en
dans un même point qui fera le centre du cercle. I eft donc
démontré qu'auili-tôt que la pefanteur primitive eft tout-à-
fait conftante, il faut qu'elle n'ait qu'un unique point de
tendance, où qu'un point central, pour que lobfervation
d’un de nos deux principes entraine néceflairement lobfer-
vation de l’autre. Car fi z n’étoit pas égale à v, ou fi les:
directions tendoient dans différents points, l'équation
défpdy-+Cpdt=pdu, qui fe réduit à pdt —pdu,
lorfque 6 eft conftante , ne fubfifteroit plus, & il fuivroit
de-là que les deux équations primordiales feroient différentes.
C'eft ce qu'on éprouve aufli, lorfqu'on compare entr'elles
les deux valeurs de GAZ que nous avons trouvées dans les
deux articles précédents, en admettant cette hypothefe par-
an Va pe Lea fpuet
1 LL Puz
ticuliére de pefanteur. Ces valeurs TIR Core
& apé+iVe p° —2afpty
ei,
dans le cas où 7 =.
On peut auffi réfoudre divers Problemes, en fuppofaint
connuës quelques-unes des quantités qui font contenuës dans
l'équation dE fpdy + Épdt—pdu, & en tâchant de
découvrir la valeur des autres, valeur qui rendra toûjours
compatibles les deux principes que nous examinons. Parmi
tous ces Problemes, nous nous contenterons d’en réfoudre
un feul : nous regarderons comme donnée la fituation des
directions , de même que la maniére dont la pefanteur
s'exerce fur chacune, & nous chercherons la valeur de €,
ou le changement que la pefanteur doit recevoir d’une di-
rection à une autre. Pour rendre notre Solution plus géné-
rale, nouûs fuppoferons que la pefanteur primitive P, au lieu
d'être conftante fur chaque direction 476, eft proportion-
nelle à une puiflance quelconque » des diflances GF,
GM, &c. à l'axe. Nous aurons de cetté forte p—y", où
plütôt p= Ér-., en obfervant la loi des Homogenes, & en
ne font jamais les mêmes que
prenantune quantité conftante g pour marquer la pefanteux
|
Fig, ï«
32 MeEnoires DE L'ÂCADEMIE RoyALE
à fa diftance 4 du point G. Si lon conçoit après cela une
diredion 4 V infiniment proche de l'axe, laquelle doit être
comme toutes les autres, perpendiculaire à lacourbe ADBE,
il eft évident que conformément à l'hypothele préfente, il
n'y aura que les parties qui feront compriles depuis Z ou
depuis à jufqu'en F, qui auront de la pefanteur, & une pe-
fanteur réglée fur les diftances au point F. Toutes les autres
parties qui font fituées fur FC feront fans poids ; par la
même raifon que la pefanteur felon 4/G ne s'exerce que fur
ha ligne /G, & non pas fur fon prolongement de Fautre
côté de AB. Aïnfi pdu qui défigne le poids des petites
parties Gg de l'axe, fera nulle dans cette rencontre, &
l'équation dEfpdy+-Epdt=—p du, dont dépend l'identité
des deux figures ou des deux équations primordiales, fe
réduira par conféquent à 46 /pdy = — Épdr. Je fubftituë
maintenant LT à Ja place dep, dans cette derniére équation,
ÿ a: jm MT
& il me vient dE [ 2 — — en ou 82740
m+1x a"
Sri Ugy” dt AR en LS m—1x(dt
= —-<2,— , dont je tire 3= — 7—, 5
En fubftituant pareillement #- à la place de p dans une
de nos deux équations générales, dans celle, par exemple
Cfpdy — LE = fpdu, où Efpdy — = fpdu,
que nous a fourni l'équilibre des colomnes, nous Ia chan-
620 (RS :
gerons en —E— — LE — /p du, que nous pouvons
7 “El ue m +1 2,2 xs
encore changer en 77 a — LÉ —, en
m1 x a” j m+1xa"
que, m4 ps ë
mettant une quantité conftante —82— à Ja place de l'in-
m1 x a" .
tégrale fp du, parce que cette intégrale ne défigne ici que
la pefanteur conftante de la portion BY de colomne. Or il
fuffit à préfent d'introduire dans cette équation 227
m3 x a"
ne
a.
Hi
DES SCTENCES 33
LErSÉ
ARR : 6 MON ns ERA PO nr dy Fer.
d
2at
m+1xa
trouvée il n’y a qu'un moment, & nous aurons l'équation
MEtE m+z UE 2 4 F 2 2 2 LES
M —1 x g dr MH1 x di go+
se 3 =
——
m1 x a dE* m1 x da" d
a" — 4 7 mm 1 2y2 2 Libent À
OÙ — m—1 NOTE dE Te SE Car dE
2t
DELES d LEZ
=—, qu'on peut regarder comme ne contenant
—
—
MSA 4
que deux variables € & ?, puifqu'auffi-tôt que nous con-
noiflons la nature de {a courbe ADB, nous avons la rela
tion des t/—GF) & des 7(—F1). MH ne refte donc plus
qu'à réfoudre cette équation par approximation ou autre-
ment, & on aura a valeur particuliére de € qu'on vouloit
découvrir : on fçaura felon quelle loi {a pefanteur primitive
doit changer d’une direction AG à une autre.
On voit que, généralement parlant, la quantité € doit
être variable, & qu'ainfi il faut que la pefänteur primitive
loit différente fur toutes les directions, pour que lobfer-
vation d’un de nos deux principes renferme implicitement
lobfervation de autre. Mais fi lon veut déterminer dans
quel cas particulier fa pefanteur doit être la même fur toutes
les lignes 416, on n'a qu'à effacer les termes qui contiennent
la différentielle 26 de € fuppofée conftante. On trouve
M mL
En Aux gé à dé =0o; &onen tire
M—— 1; ce qui montre que parmi la multitude infinie
Lp TZ. 2 4 ds Q ,
d'Hypothefes différentes repréfentées par p = +, il n'y a
uniquement que celle p — #—- , ou celle d’une pefanteur
en raifon inverfe des diflances au point de concours G;
dans laquelle € doit être conftante, ou dans laquelle 11 pe-
fanteur doit s'exercer précifément de la même maniére far
toutes les directions,
Mem 1734 + E
Fig. 1:
34 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
I =]
Au fürplus l'équation —= mr x g£"*?gr"t"
EE A Éd GLS Clé gpu+s At
2 = <———— devient
3 M1
beaucoup plus: fimple , aufli-tôt que le rayon BV du cercle
ofculateur de la courbe 4 DB eft nul ou infiniment petit
en À & en B, comme il left aux deux extrémités de la
cycloïde & d'une infinité d'autres lignes courbes. La pefan
teur de 2V étant alors nulle, on doit effacer le terme où
eee
M ==]
trouve &, &ona —m—r x gt
MHI1X re ta dé dE
MH 2 11 AS
1 mn I)
on
a
, qui fe réduit à — m—1
aë
2 pt dires mn + Len) FAO t à
KE —— = BLEU « & à — m—1
& dt( 2 — ) — “4L, Or comme les variables
Mix fT çm—s
font ici féparées , & qu'on peut intégrer, on a
Es
D x
Am x aG = 0m — 1 [dr ( 2gr =
m+ixfé
a 1m
2
& CE E 1 Lormll [dt( 281 |) RE ;
: 1—m Xx 4 m+ixfT
formule qui nous fera connoître &, lorfque nous introdui-
rons dans le fecond membre la valeur de 7 exprimée ent,
après que nous aurons tirée de équation de Ia courbe
ADBE, qui fert à déterminer la fituation des directions
de la pefanteur. On voit que & n’a qu'une valeur déterminée,
& il faut remarquer toûjours que fi les affetions que fouffre
la pefanteur ne répondent pas exaétement à cette valeur,
les deux principes, de l'équilibre des colomnes & du niveau
de la furface, au lieu de concourir à donner à la Planete
une même figure, tendront néceflairement à lui en donner
de différentes.
DS
ST LS. 2 +
Lot ne PR
o D'E SM1S CARE ZN CIE: QU |:
Examen du cas particulier dans lequel toures les directions
de la pefanteur primiive rendent à un même point.
IV.
Enfin comme nous avons! rendu les rechérches ‘précé-
dentes aflés générales, il eft clair qu'elles comprennent fe
cas particulier que répréfente fa Figure 2 , dans lequef toutes
les directions de la pefanteur concourent dans un même
point. La courbe ADB FE qui eft perpendiculaire à toutes
ces directions, étant alors un cercle, toutes les lignes GB(u)
& GF(r) front égales entrelles : nous pourrons Les indi
quer par la conftante a, & ül eft évident que leur différen>
tiellé 41 & du feront nulles. Nous ne nous arrétons pas à
examiner les équations plus fimples auxquelles fe réduifent
dans cette circonftance nos deux équations primordiales
Cfp dy — EE —fpdu &Cpdy —Cpdt— ÊE ; mais
a
fi nous confidérons d’abord 11 formule 7 Cfpdy +Ë pd F
—pdu qui réfulge de leur compardifon, & qui fe réduit
à dEfpdy—0, nous reconnoitrons que les deux premiétes
équations ne fe trouvent maintenant identiques que lorfque
la quantité différentielle 46 /p 4 y eft nulle. Le:
… Mais'il eft évident que 26 /p dy ne peut être évale X zéro
que lorfque 7Ë left déja, & que lorfque par.conféquent &
eft conflante, Aïnfi on voit que contreice qui arrive prefque
. toüjours, lorfque les directions de la pefanteur «n’ont pas
un même point de concours, les deux loix de l'équilibre
des'colomnes &'du niveau de fa fürfaceine contribuënt ici
à donner une-même forme à la Planete que lorfque larpe-
fanteur primitive s'exerce exaétement de là même maniéré
Aur toutes les lignes AG, ou qu'elle eft la même vers
TEquateur & vers les poles. On voit auf maintenant à
zaïfon pour laquelle Mrs Huguens &-Herman ont trouvé
un parfait accord entre les deux loix dans fes cas particuliers
qu'ils ont examinés, & pourquoi ces mêmés foix doivent
fe concilier encore dans toutes Ies Hÿpothelés ténférmées
E ji
Fig. 24
Fig. 2.
* Dans fon
Difcours fur
Ja figure des
Aflrise
36 MEMOGIRES DE LAÂCADEMIE ROYALE
dans la Solution que M. de Maupertuis vient de donner *,
H nimporte en effet que la péfanteur foit conftante ou
variable, qu’elle foit proportionnelle à quelque puiflance,
ou même à quelque fonétion des diftances au centre, aufli-
tôt que G eft conflante, ou, pour parler d’une maniére
moins limitée, auffi-tôt que les pefanteurs primitives de
deux colomnes voifines C A1 & Cm ne différent que par
la petite partie VA, ou auffi-tôt que Cm & CN, qui font
de même longueur, ont précifément la même pefanteur pri-
mitive Ë [p dy. Mais dans tous les autres cas la quantité
dEfpdy-+ Gpdt n'eft pas égale à pdu, ou en particulier
dE [p dy n'eft pas égale à zero, & les deux équations pri-
mordiales € f/p dy — fo —=/pdu, & 2e — Cpdÿ
2ar°
— pdt, qui marquent a nature de la figure de la Planete,
donnent diverfes courbes.
I! ne nous refte plus maintenant qu'à voir dans quelque
exemple particulier jufqu'où peut aller la différence des
figures. Nous feindrons pour cela que la pefanteur fuit fur
chaque direction le rapport des puifiances # des diftances
au centre, & qu'elle change d’une direétion à une autre
felon la puiflance » du finus F7/7) de l'angle A/CB que
forme chaque direction avec l'axe À B. Nous aurons de
cette forte 7” y” pour l'expreffion de la pefanteur Ëp ; mais
LU
au lieu de 7” y”, nous prendrons €, afin de conferver
a
THomogénéité. Si nous introduifons enfuite cette valeur
fTr"
dans l'équation € {p dy — 22 — fp du que nous a
2 at
fourni le premier principe, & qu'à la place de ? nous y
fubfituïons à, & à celle de fpdu une grandeur conftante
EE — af, ou, fr Von veut, fimplement 4°, on aura
n mi +T 2 2
POELE NOR GE à = —= b* qui marque pour une infinité
mix a+
d'Hypothefes la relation des finus 77/7) & des longueurs y
que doivent avoir Jes diretions CAL
“
cs
DES SCrEeNcEs. |‘ às
= Cette équation fe réduit à EAP RINENTT Le —= bd", lorf
que les expofans »m & n font égaux à l'unité, ou lorfque {a
pefanteur primitive fuit la raïfon compotée dés diftances au
. centre C, & des finus des angles 7CB que font les directions
, , LA PE CRE TR 24ab ,
avec l'axe; & on en déduira y —= —— FE qui nous ap-
prend que la Planete a dans ce cas la figure d’un Sphéroïde
infiniment long /Æig. 2.) engendré par la révolution d’une
courbe conchoïdale AX MB autour de fon afymptote 42,
Nous n’examinons pas les fymptomes de cette courbe, mais
il eft évident qu’elle a l'axe de a Planete pour afymptote ;
car fi l'on fuppofe que le finus F7 /z) devienne infiniment
petit, alors CM (;) deviendra infinie. Il eft d’ailleurs facile
de voir que la chofe doit être ainfi, à la confidérer phyfi-
quement : car la colomne qui eft dans l'axe, ne peut faire
équilibre avec les autres, que lorfqu'elle eft infiniment longue,
puifqu'elle eft fujette à une pefanteur qui dépendant du fmus
F] fe trouve infiniment petite fur l'axe.
Mais ce n'eft encore là que la figure que doit prendre Ja
Planete en conféquence du premier principe. Pour trouver
maintenant la figure qu'exige l’obfervation du fecond, nous
n'avons qu'à nous fervir de équation £e —=Cpdy— pdt,
qui fe réduit ici à _—— —=Cpdy, parce que dr eft nulle,
& qui change en LÉ —_% D 4y, lorfqu'on
fubftituë à la place de s fa valeur 2 /— E7 ire ). Or
fi Ton met %— à la place de Ëp dans cette équation,
FT
nm,
274 z d « .
on aura #tdt+-frrar — Le qui étant divifée par
AN 1 Zn ,1—n pin
4 ÿ fe change en CE DEN ls LAC RO, ue ,
x Ê a
dont le premier membre eft toüjours intégrable, & dont
le fecond qui ne l'étoit pas, le devient. On trouve, en
rendant les intégrales complettes prie : ic ,
CLÉS | Eu 272 X a
ms D £A
TR CEE TE
Dents x at
Fig. 3,
Fig. 3°
Fig. 3. & 4n
38 MEMOIRES DE L'ACADEMIERoYyALE
Cette équation qui marque la nature de la figure que doït
prendre fa Planete, pour que toutes les parties de la furface
{oient de niveau, eft, comme on le voit, fort différente de
fautre. Auffi arrive-t-il que lorfque les expofans #1 & » font
égaux à l'unité, ou que les pefanteurs fuivent le rapport des dif
tances au centre & des finus des angles A/CB, cette équation
fe réduit à fyz— a f—agy— ag, & ày— EE,
qui nous montre que la Planete doit être formée par la
révolution d’une portion de Section conique, dont le foyer G
fert de point central. C'eftune portion AK d'elliple /F3g. 4)
tant que g> f, le grand axe AY de cette ellipfe eft à l'in
tervalle qu’il y a entre les deux foyers € & Y comme g eft
à f; & le diametre XL de la Planete mefuré dans le fens
de Equateur eft à fon axe À B meluré d'un pole à l'autre,
comme g eft à g—f. Ainfi lorfque g (la pefanteur) eff
fort grande, par rapport à la force centrifuge f, les deux
diametres À L & AB, approchent beaucoup d'être égaux;
au lieu que dans la Figure 3, l'axe AB eft encore alors inf-
niment long par rapport au diametre XL. |
Après cela la différence des figures eft aflés confiatée :
mais nous devons fatisfaire enfin à une queftion qui s’eft
fans doute déja préfentée plufieurs fois à l'efprit. Qu'arri-
veroit-il fi la pefanteur étoit réellement telle que nous la
fuppofons ; fi au lieu d'être égale par-tout, elle étoit origi-
nairement plus grande ou. plus petite vers Equateur que
vers les poles ? La Planete ne pourroit pas prendre la forme.
repréfentée dans la Figure 3 : car pendant que l'équilibre
entre les colomnes feroit exaétement obfervé, la furface ne,
feroit pas horifontale, ou elle ne feroit pas perpendiculaire
aux diretions AS de la pefanteur actuelle, les parties
fluides de la Planete couleroient ici des poles vers l'Equateur,,
& la figure changeroit fans cefle. D'un autre côté la forme
repréfentée dans la Figure 4 ne feroit pas plus permanente,
puifqu'il n’y auroit aucun équilibre entre les colomnes, &
que celles qui font voifines de l'axe ne feroient pas affés.
DT E SAS ICT ENMELE S 9
pelantes pour contrebalancer celles qui font proche de
d'Equateur. De cette forte aucune des deux loix ne pourroit
être obfervée, parce qu'elle en feroit continuellement em-
pêchée par Fautre, & cependant chacune, comme caufe
Méchanique ou Phyfique, feroit fans cefe effort pour regner
feule. La Planete ne pourroit donc embrafler aucune figure
déterminée, elle en prendroit alternativement de plus ou de
moins approchantes de lune ou de l'autre extrême repré-
fentée dans les Figures 3 & 4, & toutes fes parties fluides
{eroient, non pas dans une fimple agitation, mais dans un
bouleverfement continuel.
Ce ne feroient pas feulement les Mers étenduës comme
motre Ocean , ou les Atmofpheres qui peuvent environner
des Planetes qui féroient expofées à ce mouvement, ce fe-
roient aufli les liqueurs contenuës dans les plus petits vaif-
feaux. Pour s'en convaincre, on n’a qu'à fuppoler le Vafe
de la Figure $ appliqué dans l'endroit 47 de la Planete, &
concevoir la ligne XYZ parallele à la petite partie A7»
de la Figure 3, & T° parallele à la petite partie A1» de
la Figure 4, il eft évident que Q/ étant inclinée du côté
de 1 par rapport à 7’, la liqueur coulera de Q vers AZ
pour rétablir le niveau, & prendre une fituation plus appro-
chante de WT, en même temps que les colomnes de liqueur
qui font proche de CM, & qui font trop pefantes par
rapport à celles qui font proche de GQ, feront foûlever
celles-ci, & tendront à donner à Ia furface Q 41 Ia fitua-
tion #Z. Aiïnfi.on voit que la liqueur fera fans cefle agitée,
qu'il y aura une circulation continuellement établie felon
Q, M,C,G, Q, & cela toüjours fimplement, en confé-
quence d’une pefanteur originaire qui n’eft pas égale par-tout.
IH eft vrai que ces effets ne doivent être très-marqués que
lorfque l'inégalité dans 1a pefanteur eft confidérable. Mais f
la gravité de nos corps pefants eft produite par la force
centrifuge du Tourbillon qui nous environne, comme le
veulent les Cartéfiens, ou fi elle a quelqu'autre caufe mé-
chanique qui foit une fuite des feules loix ordinaires de la
Fig. s,
4o MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
communication des mouvements, il eft bien difficile qu'elle
puifle être précifément la même vers les poles & vers
J’Equateur. Le Tourbillon ne fera pas exactement fphérique,
il fera plus preflé, & il pouffera auffi plus vers un côté que
vers un autre, & la force centrifuge qui réfultera de Ba
mouvement , & qui ne fera pas égale par-tout, n’influera pas
feulement fur l'effet de la pefanteur, elle influëra auffi fur la
caufe, & faltérera différemment. Or il fuffit toûjours,
comme nous l'avons démontré, qu'il y ait la moindre in-
égalité dans la gravité primitive, pour qu’il naïfle aufli-tôt
entre les deux principes une incompatibilité aflés grande
our produire l'agitation dont nous parlons. Les parties
folides, les Terres, les Rochers, &c. conferveront leur même
fituation à caufe de leur adhérence : mais les molécules des
fluides n'ont qu'à avoir une grande facilité à être müës par
Ja maniére dont elles font détachées les unes des autres,
elles ne manqueront pas de fentir la plus petite pente, qui
les déterminera à avancer vers un certain côté, pendant qu'il
fe fera toüjours un autre mouvement pour rétablir l'équi-
libre des colomnes, qui détruira encore le niveau de la
furface. C’eft affés pour tout cela que les deux figures diffé-
rent feulement dans la pofition de leurs furfaces de quelques
fcrupules de fecondes, où qu'elles foient inclinées Fune par
rapport à J'autre , de quelques parties de pouce fur une
étenduë de chaque lieuë. Nous n’ignorons pas qu'on afligne
plufieurs caufes au mouvement de liquidité des liqueurs ;
cependant il fe pourroit faire que celle-ci, quoiqu'elle dé-
pende d'un principe très-fimple, & qu'on n'en avoit pas
foupçonné, y eût auflt quelque part. Il eft toñjours vrai
qu'outre les effets extérieurs qu'elle eft capable de produire,
&c que nous avons confidérés, elle eft capable d'en produire
encore d'intérieurs & d’inteftins que nous pourrons examiner
dans la fuite. . x
LR
RECHERCHE
| Soie OPA D
DE $: 5! c'1'ENNAGLE 5. 41
… RECHERCHE CHIMIQUE
SURVLA COMPOSITION
D'UNE LIQUEUR TRES-VOLATILE,
a
Connuë fous le nom d'ÉTHER.
Par M Du HAMEL & GROSSE.
L y a environ cinq ans que cette liqueur eft connuë en
L'Angleterre, & quelques années auparavant elle avoit déja
FM qu'elle produit, fuivant raies circon{tances, l'ont
“renduë recommandable dans tous les pays où il fe trouve
des Phyficiens.
A l'égard du nom d'Eer ou de Liqueur éthérée fous le-
} que on la connoît , il lui a été donné par fon Auteur, fans
. doute à caufe de fa grande volatilité qui furpafñe de beau-
_ coup celle des Huiles, qu'on appelle en Chimie Huiles effen-
tielles où éhérees, telles que l'huile de Romarin, celle de
joue. d'Afpic, & autres qui fe tirent par la difhillation
avec l'eau.
- M. Frobenius, Chimifte Allemand, à qui l'invention de
cette liqueur paroît être düë, en envoya plufieurs petits
flacons il ÿ a environ quatre ans à feu M. Geoffroy, &
peu de temps après M. Grofle en reçut-deux pareils de M.
Godfrey Hanckwitz, aufli Chimifte Allemand, établi à
Londres depuis le temps de l'illuftre Boyle. GE unes
étoient accompagnés de deux feuilles manufcrites dans lef-
quelles l’auteur de'Ether indique les différentes propriétés
- de cette liqueur, comme, par exemple, fon extrème lége-
_reté, fa grande + la propriété qu'elle aide ne
/ fe point mêler avec l'éau ni avec la plüpart des liqueurs tant
…. acides qu'alkalines, celle de tirer la teinture des Végétaux,
Mem, 1734: Hd
AT
fait du bruit en Boheme & à Mayence, car les effets fingu-
$s Maï
2755
42 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
& plufieurs autres propriétés encore plus intéréffantes pour
la Phyfique. A la fin de ce Manufcrit, M. Frobenius femble
défigner en peu de lignes la compofition de l'Ether, mais
ce qu'il en dit nous a paru jufqu'à préfent fi énigmatique,
qu'il n'a pû nous conduire à fa découverte de la compofition
de cette liqueur. Voici les propres paroles de M. Frobenius :
Paratur ex fale volatili urinofo, plantarum phlogiflo , aceto valde
Jubtil, per fammam fermentationem cunéis fubtilifimé refolwis
d unitis, Ainfr, fuivant le Manufcrit, l £'#her eft compolé
d'un iel volatil urineux, du phlogiftique des végétaux &
d'un acide extrèmement fubtilifé, le tout réfous & réuni
par une grande fermentation.
Pour rapporter exactement tout ce qui eft venu à notre
connoiflance au fujet de FEther, il conviendroit d’adjoûter
ici la traduétion de ce que M. Godfrey Hanckwitz a fait
inférer dans les Franfictions Philofophiques, à la fuite du
Mémoire concernant les expériences faites avec la Liqueur
éthérée de M. Frobenius, en Mai 1730. N.° 41 3. p. 288.
» Que cette Liqueur éthérée ait été autrefois très-eftimée
» & recherchée, cela paroït par une expérience que j'ai faite
» autrefois pour M. Boyle, mon cher maitre, par le moyen
» d'une folution métallique, nommément par la diflolution
» de Mercure crud, uni au phlogiftique du Vin ou de quelque.
» autre végétal, & j'ai féparé cet Ether par l'entonnoir, de
» deflus la folution qu'il furnageoit. M. le Chevalier Ifaac
» Newton connoifloit auffi très-bien cette liqueur, mais fx
» mort a empêché qu’elle ne füt portée à fa perfection, &
» ne Jui a pas permis d’en faire une certaine quantité. Quand
» M. Frobenius vint dans mon Laboratoire pour en faire la
» quantité dont il avoit befoin pour fes expériences, il voulut
» confulter ce que M. Newton en avoit dit dans fes ouvrages,
» & nous trouvâmes qu'il lavoit fait avec l'huile de Vitriol &
» l'efprit de Vin.
» Cette liqueur du Chevalier Newton eft un efprit de Vim
» éthéré, elle différe feulement de celle de M. Frobenius par
» le procédé : la Liqueur éthérée (je crois qu'il veut parler
me" y
= it, Micraict dés
œ=
D ES SE rIEN CES.
de celle de Frobenius) eft faite avec partie égale en mefure
& non en poids, la liqueur jaune qui furnage eft féparée
de la fulfureufe non-ardente par l'entonnoir ; la liqueur
inférieure eft rejettée, & la fupérieure jaune eft mife dans
une cornuë pour être diflillée par une chaleur très-douce,
& on continuë la diftillation de ce liquide éthéré jufqu’à ee
que l’hémifphere fupérieur foit devenu froid, & la cornuë
étant frappée dans la main, on trouve dans le récipient un
(gas) ou réfidence vinofulfureufe très-éthérée : faites préci-
piter le foufre, en adjoûtant un alkali qu'il faut jetter dedans
petit à petit jufqu'à ce que toute ébullition cefle, & la
liqueur ne frappera plus elle-même contre la main, mais
elle l'attirera violemment ; alors l’alkali tombera au fond de
lui-même, & fe précipitera dans l'eau commune.
” Ce procédé eft très-obfcur ; aufli M. Hellot, qui a beau-
“coup travaillé fur cette matiére, a fuivi fcrupuleufement ce
procédé des Tranfattions fans aucun fuccès.
Les grandes propriétés que M. Frobenius attribuë à fa
Liqueur éthérée dans le Mémoire manufcrit dont nous avons
parlé, & la réputation qu’elle a dans les différents pays où
M. Frobenius en avoit envoyé, étoient des motifs fufhifants
pour nous engager à faire tous nos éfforts pour en décou-
vrir la compofition, vû qu'on en a fait jufqu'à préfent un
myftere, & que je crois qu'il ny a qu'un feul homme en
Angleterre qui la fçache bien précifément ; auffi avons-nous
été plufieurs qui avons fait chacun en notre particulier diffé-
rentes tentatives à ce fujet, mais le fuccès étoit réfervé à
M. Grofie, qui, comme on le verra dans la fuite de ce
Mémoire, eft le feul qui foit enfin parvenu à avoir l'Ether
dans toute fa perfection.
* L'odeur aromatique de cette liqueur, fa grande inflam-
mabilité, fà Kgérété, fa non-mifcibilité avec l'eau, & Ia
définition énigmatique que M. Frobenius en donne, firent
d'abord penfer à feu M. Geoffroy, & depuis j'ai cru comme
lui, que l'Ether étoit une huile effentielle extrêmement
atténuéé par quelque fermentation, & convertie par-R qn
Fi
44 MEMOIRES DE L'ÂACADEMIE ROYALE
un efprit ardent d'une nature très-finguliére; M. Geoffroy
avoit foupçonné que cette huile eflentielle pouvoit être
celle de Romarin. Suivant ces idées, nous avons féparément
travaillé fur les Huiles eflentielles ; j'ignore quel a été le
travail de feu M. Geoffroy, mais en apportant les précau-
tions néceflaires pour prévenir l'inflammation des huiles,
fur-tout quand j'employois de lefprit de Nitre, j'ai mêlé
différentes huiles eflentielles avec différents acides, dans le
deffein d’atténuer les huiles par l'action des acides que j’em-
ployois, & j'ai enfuite tenté de retirer ces huiles, ou fim-
plement par la diftillation, en y adjoûtant de l’eau, ou en
les incorporant, tantôt avec le fel de T'artre, & tantôt avec
a Chaux, avant que de les difliller, tant pour confommer
une partie de l'huile grofhiére qui avoit été comme brülée
par les acides, que pour abforber les acides que j'avois em-
ployés, & avoir ainfi les huiles entiérement dégagées de
leur partie la plus groffiére. Mais toutes ces expériences que
j'ai fuivies aflés loin, & qui m'ont offert plufieurs phéno-
menes finguliers, ne m'ont rien donné qui approchät de a
Liqueur éthérée que je cherchois : ainfi il feroit inutile de
m'y arrêter davantage. M. Grofle s'eft propolé de chercher
la compofition de cette liqueur par d’autres voyes, car en
réfléchiflant fur les effets & les propriétés de cette liqueur
rapportées dans le Manufcrit de M. Frobenius, & après avoir
fait différentes expériences avec l'Ether qui lui avoit été
envoyé d'Angleterre par M. Hanckwitz, il s’eft enfin arrêté
aux propriétés fuivantes qui l'ont conduit infenfiblement à
la découverte de fa compofition. Ces propriétés font,
1. D'être fi volatile, & de, s'évaporer fr vite, qu'il
femble qu'elle ne mouille pas le doigt qu'on y a trempé.
2.° De s’enflammer très-aifément, & de prendre feu, quoi-
qu'aflés éloignée d’une lumiére. 3.° De reffembler par fon
odeur à l'eau de Rabel bien faite, long-temps gardée, & de-
venué rouge; auffi M. Groffe avoit-il remarqué qu'en difti-
lant de l'efprit de Vin fur une légere difiolution d'Alun , il en
vgnoit une liqueur d'une odeur fuave, douce, aromatique,
DE s.1 SCO E MMEUErS. 4$
approchante de celle de l'Ether. Ces obfervations e perfua-
dérent qu'il falloit chercher cette liqueur dans le mélange
de l'efprit de Vin avec l'huile de Vitriol, & ent 731 il pria
M. Geoffroy le cadet de communiquer cette idée de fa part
à l'Académie.
Le même M. Geoffroy m'a fait voir depuis quelques
jours une feuille manufcrite de la main de M. fon Frere,
par laquelle il paroït que feu M. Geoffroy avoit auffi tourné
fes vüës du côté de Fhuile de Vitriol & de Fefprit de Vin :
quoiqu'il en foit, cet avis de M. Grofle renouvella l'impa-
tience que J'avois de connoïtre une liqueur qui me paroif-
{oit fi précieufe pour la Phyfique ; je fis différents mélanges
d'huile de Vitriol & d’efprit de Vin, je les diftillai tantôt
Æeuls & tantôt fur des fels alkalis, ou {ur de la Chaux, mais
fans fuccès.
M. Hellot, dont nous avons déja parlé, a fuivi encore
plus loin fes expériences, ce qui lui a fourni plufieurs obfer-
vations finguliéres ; il a même eu une liqueur fort appro-
chante de l'Ether, mais il étoit réfervé à M. Groffe d'avoir
cette liqueur auffi parfaite que l'Ether de M. Frobenius, &
même beaucoup meilleure que celle de plufieurs flacons qui
ont été envoyés d'Angleterre; car M. Geoffroy le cadet n'a
fait voir chés lui qu'il y en avoit qui fe décompoloit avec
Yeau, & qui s’y méloit enfin entiérement , au lieu que celui
de M. Groffe s’en fépare totalement, & même fort promp-
tement : mais fans m'écarter davantage, je vais commencer
par rapporter les procédés de M. Grofle, tels qu'il me les
a diétés lui-même ; je rendrai compte enfuite du travail du
Chimifle que j'ai cité, après quoi je ferai part à l’Académie
de plufieurs expériences curieufes que nous avons faites M.
Grofle & moi avec-cette liqueur » ce qui nous mettra en
état de former quelques conjectures fur la théorie de cette
opération. ,
Mais avant que de parler du travail de M. Grofle, il eft
bon qu'on ne fe prévienne pas à F'occafion de la fimplicité
de fes procédés, car on auroit peut-être de la peine à lui
iij
x. Maniére
de faire
VE ther.
26 MEmoires DE L'ACADEMIE RoyALE
fçavoir gré des foins qu'il s'eft donnés pour avoir une liqueur
‘qui paroît maintenant fi aifée à obtenir. Le peu de fuccès
de notre travail commun, & le grand nombre de tentatives
que M. Groffe a faites inutilement en particulier, paroïtroïent
fufhre pour prouver combien cette découverte étoit difficile,
Cependant ceux qui voudront fuivre les procédés que je
vais décrire, feront encore bien mieux convaincus de cette
difficulté, puifque l'exactitude dans les proportions, dans le
choix des matiéres & dans l’execution, font de Îa derniére
conféquence pour la réuflite; je fuis même perfuadé que
quoique M. Grofle le déclare ici avec toute la fincérité &
Y'exaétitude pofible , plufieurs bons Artiftes le tenteront fans
réuffir , faute d’en obferver toutes les circonftances.
Voici donc différents procédés par lefquels M. Groffe eft
parvenu à faire PEther.
Comme j'étois prefque certain (c’eft lui-même qui parle)
ainfi que je Favois fait annoncer à l’Académie en 1731,
qu'il falloit chercher l'Ether dans le mélange de l'huile dé
Vitriol & de lefprit de Vin, je commençai alors à faire
différentes combinaifons de ces deux liqueurs, qu'il efl
inutile de rapporter, il fuffit de dire que quand j'ai mêlé
trois parties d'huile deVitriol fur une d’efprit de Vin, c'eft-
à-dire, fix onces de cet acide fur deux onces d’efprit de Vin,
j'en ai retiré par une diftillation bien conduite, plufieurs
liqueurs qui ne reflemblent pas à lEther; mais en même
temps il eft monté une huile quelquefois rouge, quelque-
fois verte, & quelquefois affés blanche : c'eft cette huile que
plufieurs Auteurs, depuis Paracelfe, ont appellée Huile de
Vitriol douce, & dont je me propofe de parler dans une autré
occafion, ainfr je reviens à lEther. 3
Après plufieurs tentatives qui rouloient toûjours fur les
différentes proportions de l'huile de Vitriol & de Fefprit
de Vin, je n’en ai pas trouvé qui n'ait mieux réuffi que
celle qui fuit. |
J'ai pris une partie d'huile de Vitriol bien redifiée &
très-blanche, par exemple, une livre, & deux parties, ou
D TS
|
DE Sw AS CHE MIEL -s, | 47
deux livres d’efprit de Vin auff très-redifié, je les ai mélés
petit à petit dans une cornuë, verfant Fefprit de Vin fur
huile de Vitriol pour ménager le vaifleau qui, fans cela,
feroit en rifque de fe cafler, à caufe de Ja grande chaleur
qui s'excite dans ce mélange quand les liqueurs font bien
concentrées, comme elles le doivent être pour la réuffite
de l'opération ; j'ai enfuite bouché la cornuë, j'ai laïffé ces
liqueurs en digeftion pendant deux jours ou environ : ordi-
nairement ce mélange prend peu à peu une couleur rouge,
ce quieft un indice avantageux pour le fuccès de l'opération;
après-cette digeftion, j'ai diftillé le mélange au feu de fable;
dans le commencement, il monte un peu d'efprit de Vin
#ès-odorant; à cet efprit de Vin fuccede une liqueur en
vapeurs blanches; puis, en continuant la diftilation, il en
vient une autre très-fulfureufe & volatile qui frappe vive-
ment l’odorat, & fuffoque même la refpiration ; enfin il
monte un flegme acidule, & dans la cornuë il refte une
mafle très-noire pareille à la réfidence que feu M. Homberg
a trouvée après la diftillation & la réfolution du foufre par
Thuile de Therebentine, & que Kunckel a aufli eue après la
diftillation de Fhuïle de Vitriol mêlée avec l'efprit de Vin.
J'étois bien perfuadé que l'Ether exiftoit dans les liqueurs
que j'avois diftllées, leur odeur, & quelques autres circon-
ftances ne me permettoient pas d'en douter. Je me propofai
donc del'en retirer, & j’employai pour cela différents moyens;
quelquefois je me fervois de la folution de {el ammoniac,
pour fubftituer l'acide du fel marin, que l’on fait être très-
bon pour la reétification des huiles, à celui du Vitriol,
auquel je prefentois un: alkali volatil. Maïs cette tentative
n'eut pas tout le fuccès que je m'en étois promis. Enfin entre
les différents eflais que j'ai tentés, la plüpart inutilement,
je me fuis imaginé d'employer l'eau commune comme un
moyen des plus fimples d’affoiblir l'acide fulfureux, & l'efprit
de Vin, que je regardois comme les feuls obftacles à a
féparation de FEther, me fondant fur une des propriétés de
cette liqueur, qui eft de ne fe mêler jamais avec l'eau, mais
48 MEMOIRES DE L'ACADEMTE ROYALE
de fe mêler très-vite à l'efprit de Vin: je verfai donc béau-
coup d’eau fur les liqueurs dont j'ai parlé, & prefque dans
le moment je vis la féparation de la Liqueur éthérée, qui,
par fa grande légereté, fe portoit vivement à la furface ;
ainfi une fimple addition d'eau commune me réuffit mieux
que tout ce que j'avois tenté par beaucoup d’autres moyens.
Voilà donc l'Ether en partie féparé des autres liqueurs,
auxquelles il étoit joint. Je dis en partie, car il n'étoit pas
encore aufli fec & auffi volatil qu'il le doit être; ce qui
marque qu’il étoit encore un peu allié avec les fubftances
dont nous venons de parler; cela n'a engagé à verfer de
nouveau de l'eau deflus, pour en emporter une partie; mais
ce qui me réuffit beaucoup mieux, ce fut d'employer une
folution de fel de Tartre qui, abforbant le refte de l'acide
volatil fulfureux, acheve d'en dégager l'Ether, & par ce
moyen je lai eu fort fec & aufli volatil que celui qui m'a
été envoyé d'Angleterre.
Cependant, en refléchiffant fur les différentes liqueurs
qui m'étoient venuës par la diflillation, je me propofai de
les examiner plus particuliérement, pour connoitre celle qui
contenoit l'Ether, ce qui devoit me donner encore plus de
facilité pour en faire la féparation. Afin de fuivre cette idée,
& exécuter ce deffein, il falloit féparer chaque liqueur à
mefure qu'elle pafloit par la diflillation ; pour cela je nv'avifai
de piquer avec une épingle, la veflie qui lutte le récipient
au bec de fa cornuë, afin de difcerner par l'odorat, les diffé
rentes liqueurs, à mefure qu'elles fe fuccéderoient.
La premiére, comme je fai dit, ne fentoit prefque que
l'efprit de Vin, & ç'en eft un très-rectifié qui cependant a
quelque chofe qui approche de l'eau de Rabel.
La feconde paffe en vapeurs blanches, & fent beaucoup
l'Ether, ce qui me fit juger qu'elle étoit la feule qui le
contenoit, & que les autres ne fervoient qu'à abforber.
La troifiéme avoit une odeur de foufre des plus péné-
. trantes, & en ayant une fois refpiré un peu trop, je penfai
être fufloqué,
Ces
DES SCcrENCES.
Ces différentes obfervations m'ont conduit à faire l'Ether
de la maniére fuivante.
Obfervant les mêmes proportions que j'ai rapportées ci-
deflus, je diftillai jufqu'à ce que j'apperçüs à la voûte de la
cornuë les vapeurs blanches dont j'ai parlé, alors je ceffai
le feu, car il refte affés de chaleur pour faire pañer le refte,
de cette liqueur qui feule contient l'Ether, qui eft, comme
l'on fçait, très-volatil, & la liqueur fulfureufe refte en bonne
partie dans la cornuë ; ainfi l'on a par ce moyen la liqueur
qui contient l'Efer, feulement un peu mêlé d'efprit de Vin
qui pafle d'abord, & quelquefois d’un peu d'efprit fulfureux
qui vient enfuite malgré la ceffation du feu. En ce cas,
pour avoir J'Ether feul, il faut employer l'eau commune
pour le féparer, comme nous favons dit dans le premier
procédé ; mais fi l'on ne trouve pas encore cet Ether affés
fec, on peut le rectifier par une lente diftillation , & alors
JEther monte avant l’efprit de Vin, qui cependant pañloit
toûjours le premier dans les premiéres opérations ( circon-
flances finguliéres dont nous eflayerons de rendre raifon
dans la fuite).
Ces méthodes de faire ’Ether font très-promptes, mais
elles ne réuffffent pas toûjours : elles n'ont quelquefois
manqué , fans que j'en aye pû attribuer la caufe qu'aux qua-
lités différentes de l'acide vitriolique, ou encore plus à celles
des efprits de Vin que j'ai employés, quoique très-rectifiés,
& très-bons pour d’autres ufages. C’eft ce qui m'engage à
rapporter ici un troifiéme procédé qui m'a toûjours réufir.
Par ce procédé on peut avoir l’Ether très-fec, fans em-
ployer pour le reétifier, aucun mélange d’eau ni de fels alkalis.
Pour cela, quand on 2 ceffé bien à propos la diftillation,
c'eft-à-dire, lorfqueles vapeurs blanches commencent à
paroître, il faut mettre dans une cornuë ce qui eft pañlé
dans le récipient, & diftiller très-lentement à un feu de
lampe : l'Ether, qui eft ici dégagé de fa liqueur füulfureufe,
pañle le premier dans Ia diftillation & avant l'efprit de Vin,
de même qu'avant le peu de liqueur fulfureufe qui y eft
Mem, 173 4 ° G
2.4 Maniéré
de faire
l'Ether,
3. Maniére
de faire
l'Ether,
>»
>
so MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
reftée, & quand on a diftillé Ia moitié de a liqueur, ou
tout au plus les deux tiers, il faut cefler l'opération , fans
uoi il fe feroit un nouveau mélange. Cette derniére mé-
thode a cela d'avantageux que, comme je l'ai dit ci-devant,
elle n'a toùjours réufli, au lieu que les deux autres m'ont
quelquefois manqué.
Outre les trois maniéres de faire l'Ether dont je viens
de parler, je fuis perfuadé qu’on peut encore l'obtenir par
d’autres moyens, peut-être même plus courts, & j'ai encore
fur cela des vüës que je communiquerai à l Académie fi
elles réuffifient.
Ce feroit ici le lieu de rapporter les expériences que j'ai
faites avec mon Ether, pour prouver fa conformité avec
celui de M. Frobenius, mais je réferve ce détail pour un
autre Mémoire : je me contenterai de dire pour le préfent,
que jufqu’ici je n'ai pas reconnu dans cette liqueur des pro-
priétés bien avérées pour la Médecine, quoiqu'un étranger,
qui eft depuis quelques années à Paris, attribuë de grandes
vertus à un Ærher rouge dont quelques malades aflürent
méme s'être bien trouvés.
Cette liqueut rouge reflemble beaucoup à l'Ether tant
par fon edeur que par fon‘inflammabilité, & fa non-mifci-
bilité avec beaucoup de liqueurs, j'en ai retiré l'Ether par
la diflillation , & il m’eft refté une matiére rouge d’un goût
& d’une odeur affés agréable, mais j'ignore quel eft ce mé-
ange, qui d’ailleurs me paroit très-curieux, n'ayant encore
pü parvenir à colorer mon Ether, quoique je l'aye tenté
de différentes maniéres.
Pour fuivre le plan que je me fuis propofé dans ce Mé-
moire, après avoir fait la lecture des différents procédés par
lefquels M. Grofle eft parvenu à avoir l'Ether, je vais
rendre un compte abrégé de ce qu'a fait à ce fujet M. Hellot,
qui a travaillé à cette recherche de concert avec nous. Voici
l'extrait d'une Lettre qu'il m'a écrite à ce fujet.
J'& fait différents mêlanges d’un efprit de Vin très-rectifié,
& d'huile de Vitriol blanche très-concentrée. Tous mes
ELA ODPE: Sv 414$ :C1"E MN GE 6 J St
æffais ont été du poids de 3 onces d'huile de Vitriol, mais fe
poids de l'efprit de Vin a été tantôt de 9, de 12, de 1 $ onces,
quelquefois de 6.onces, une feule fois de 3 onc. c’efl-à-dire,
de poids égal; &.enfin je l'ai fait felon le Mémoire"de M.
Godfrey, de Londres, à mefure égale d’efprit de Vin &
d'huile de Vitriol. J'ai obfervé qu'en verfant l'huile de Vitriol «
{ur l'efprit de Vin, il s'éleve des vapeurs, par la chaleur du
mélange, & que ces vapeurs condenfées donnent un efprit
de Vin véritable très-fubtil, que j'ai reverfé toûjours au bout
de deux jours de digeftion à froid, dans l’alambic de verre .
tubulé & bouché d’un bouchon de criftal, dont je me fuis
fervi pour tous mes eflais, parce qu'on voit mieux ce qui
fe pafle dans le chapiteau, qu'on ne le voit dans la voûte
d'une cornuë. J’oblerverai auffi que pendant la digeftion
. de tous ces mélanges, il fe dépofe une poudre blanche, &
c'eft apparemment de cette poudre dont Kunckel a parlé
dans {on Ladoratorium Chymicum , & far le moyen de 13-
quelle il a dit qu'il pouvoit faire voir que huile de Vitriol
contenoit du Mercure coulant, en lamalgamant avec de la «
chaux d'Or, ce qui ne n'a jamais réufli; car j'ai filtré un
de mes mêlanges après le dépôt formé de cette poudre .
blanche, & l'ayant lavé, je l'ai triturée dans un mortier de
verre échauffé avec une portion de Chaux d’or des Aff-
neurs, mais je n'ai pû parvenir à faire cet amalgame ; aufi
cette poudre me paroit n'être qu’une fimple terre, car en ,
ayant mis depuis fur un charbon allumé que j'ai foufflé avec
un chalumeau, elle s’y eft calcinée fans aucune vapeur, & |
eft reftée fixe comme une pure terre.
J'ai diftillé tous mes mêlanges à feu de lampe, me fervant
des lampes que vous me connoiffés, & par le moyen def-
quelles je fuis le maître de la chaleur pendant 12 ou 15
heures. Les mélanges où il y avoit trois, quatre ou cinq
paties d’efprit de Vin contre une d'huile de Vitriol ont
toûjours donné des ftries perpendiculaires dans lé chapiteau.
Ceux dont le poids des deux liqueurs approchoit davantage
‘de Jégalité, donnoient moins de ces flries, & lorfque: Le <
Gi
»
æ
$2 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
récipient étoit exactement uni au bec du chapiteau par le
moyen de la membrane intérieure détachée du gros 1obe
des veflies de carpe, je n’y appercevois aucune flrie, pas
mème la moindre marque d'humidité, parce que l'air exté-
rieur n’avoit aucune communication avec les vapeurs fub-
tiles qui s’élevoient. A l'occafion de cette netteté du cha-
piteau (que je regarde comme la marque certaine que l’Ether
monte actuellement ) je crois que M. Grofle, à qui la dé-
couverte de la compofition de l'Ether eft dûë, ne trou-
vera pas mauvais que je vous fafle obferver que fans la pi-
quüre d’épingle qu'il fait à fes veflies, je crois qu'il n’auroit
pas vü les vapeurs ou tourbillons blancs dont il parle. Car
depuis que de fon confentement vous n'avés communiqué
fon procédé, j'ai fait une rectification d'Ether avec les pré-
cautions qu'il prefcrit. Je me fuis fervi d'une cornuë de
criftal de Londres, dont le col a été ufé avec l'embouchure
de fon récipient par le moyen de l'Emeril, de forte qu'elle
ferme très-exactement. À un feu de lampe extrêmement
doux, j'ai vu diftiller lEther aflés vite, mais fans vapeurs
blanches ; j'ai defferré le récipient, en le tournant un peu
fur le col de la cornuë, en forte que l'air extérieur pût s’y
introduire , aufli-tôt les vapeurs blanches ont paru ; j'ai ref
ferré le récipient, ces vapeurs ont difparu. Enfin j'ai répété
cela cinq fois de demi-heure en demi-heure, & j'ai toüjours
fait paroître & difparoïître alternativement les vapeurs en
queftion. J'offre à M. Grofie de lui prêter ce vaifleau pour
vérifier mes expériences. Si elles lui réufliffent, comme je
n’en doute pas, vous fçaurés bien rendre raifon de ce phé-
nomene qui me paroit aflés fingulier. Je crois que j'aurois
eù l'Ether dès le mois de Novembre 173 1, fi j'avois eu les
yeux de M. Grofle pour Fappercevoir. J'avois diftillé une
affés bonne quantité de cette premiére liqueur qui contient
VEther ; & croyant que je pouvois Ia rectifier fans feu, je
la verfai fur des cendres gravelées bien féches que j'avois
miles dans une bouteille cylindrique de verre blanc, je Fy
Jaiflai pendant huit jours en digeftion, la liqueur fpiritueufe
4 <
eu
D'E 18 MISYCÉE MG s0 s : 1 #
ÿ prit une belle couleur de jonquille, & ile fit une fépara- &
tion du flegme ; je furvuidai la liqueur jaune-dans une autre «
fiole, & je verfai deflus une demi-once d’huïle de Vitriol, «
il fe fit une fermentation très-vive, une partie de ladiqueur «
fe coagula en une matiére faline formée en flocons qui fe «
précipiterent. La liqueur prit le goût acide d'une eau de
Rabel, mais beaucoup plus aromatique. J'en mis dans une
cuillere d'argent; toute acide qu'elle étoit , elle y brûla fans
daifler de réfidu aqueux. Enfin je la diflillai de nouveau, les
gouttes fe fuccéderent prefque fans intervalle entr'elles. «
Ayant éteint le feu, quand les ftries commencerent à fe
former, je trouvai dans le récipient une liqueur qui n’étoit
plus acide, qui avoit la vraye odeur de l'Ether, comme vous
en avés jugé vous-même, mais qui n'étoit pas féche comme
le véritable Ether ; faute d'avoir imaginé le véritable tour
de main, il étoit refté dans la cucurbite une liqueur rouge
extrêmement acide.
: Quant aux flocons falins dont j'ai parlé ci-devant , les
ayant diflous dans de l'eau chaude, je les laïffai en repos
pendant quatre heures, au bout defquelles j'apperçüs deux
liqueurs très-diftinétes : celle qui furnageoïit l'autre, étoit
plus diaphane’; elle étoit encore acide, elle brûla comme la
premiére fans réfidu. J'ai laiflé criftallifer la liqueur d’au-
deflus, & un mois après je trouvai des criflaux figurés «
comme le Tartre vitriolé, fur lefquels je n’ai rien à dire
de plus.
J'ai tenté la rectification de la même liqueur que je
jugeois qui contenoit l’Ether, fur du colcothar, mais elle
s'y décompole tellement, qu'on n'en retire qu'un véritable
elprit de Vin. à
Par le fel de Glauber calciné, j'ai approché davantage de
la véritable rectification.
Par les fleurs de Zinck, encore davantage. «
Enfm ne pouvant obtenir une liqueur éthérée qui ne fe «
mélit point à l’eau, nous crûmes, comme vous fçavés, «
Monfiew, qu'il falloit y introduire fa liqueur huileufe qui «
G ii
»
2»
»
»
»
2
ÿ4 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyarE
vient de la même fource, & qu’on nomme l'okwm Vitriole
dulce Paracelf, ainfi ayant raflemblé de cette huile environ
une demi-once, & reétifié trois onces de liqueur fpiritueu{e
par les fleurs de Zinck, je mêlai les deux liqueurs enfemble,
l'union parfaite en fut faite dans l'inftant, je verfai deflus
de l’eau commune, & je vis auffi-tôt une féparation de deux
liqueurs : j'agitai le mélange, & les deux liqueurs fe fépa-
rerent de nouveau ; j'aurois juré que je tenois l’'Ether, &
d’autres l’auroient cru comme moi, d'autant plus que la
liqueur furnageante faifoit fur les diflolutions métalliques
prefque les mêmes effets que l’Ether. Au bout d’onze jours
je fus détrompé, & obligé d'avouer que je n'avois plus
l'Ether. En voici la raifon : entre mes deux liqueurs il y
avoit une pellicule argentée extrèmement déliée : toute dé-
licate qu'elle étoit d'abord, elle devenoit plus fine de joux
en jour, & le dixiéme jour on ne l'appercevoit plus, elle
s'étoit dépofée au fond du flacon en forme d’un fédiment
un peu feuilleté. La féparation des deux liqueurs fe voyoit
encore en les regardant avec attention, mais les ayant agitées,
elles fe mélerent f parfaitement, que je n'ai pu les Fe
depuis. Il paroît par cette expérience, que cette huile douce
ne doit pas entrer dans 'Ether. J’aurois quelques obferva-
tions à vous communiquer fur l’extrème élafticité de cette
huile, mais comme cette propriété regarde la phyfique de
YEther, & qu’il n’eft queftion ici que de fa compofition , je
me réferve à vous en entretenir dans une autre occafion.
J’a l'honneur d’être, Monfieur, &c.
nr vD'E:sS COLE Nous: Gy
FAAFER :
SURMES EG OEsS
D.E SAOIO,R D SieC..E".L,E SMS:
Par M. DE MAUPERTUIS.
LES donné dans lé Difcours fur la figure des Aftres,
quelques propofitiogs générales fur les figures que
doivent prendre des amas de matiére fluide qui circulent
autour d’un axe. Je ne me propofois dans cet ouvrage que
de faire voir en général, qu'il pouvoit y avoir dans les Cieux,
des Fixes ou des Planetes fort applaties, & autour de quelques-
unes, des Anneaux fort minces; je tentois par-là d'expliquer
quelques phénomenes qui n'avoient point encore été expli-
qués d’une maniére fatisfaifante.
- IT. Non-feulement il doit y avoir dans les Cieux, des
Fixes & des Planetes applaties, mais tous les Corps céleftes
généralement doivent être applatis, s'ils font ou ont été
fluides, s'ils font formés d’une matiére homogéne, fi leurs
parties pefent vers un centre, ou les unes vers lesautres, & fi
enfin ils ont un mouvement de révolution autour d’un axe.
II. Quant à la Planete que nous habitons, perfonne
mignore qu'on difpute encore aujourd'hui, fi la l'erre eft
un Sphéroïde applati ou allongé? Si elle s’eft trouvée dans
les circonftances dont nous venons de parler, elle devroit être
applatie; mais les mefures actuelles de différents arcs d'un
Méridien, comparées aux différences de latitude, paroiïflent
lui donner la figure d’un Sphéroïde allongé vers les poles.
Je n’examine point ici cette maniére de déterminer la figure
de fa Terre par les mefures géographiques & aftronomiques,
qui eft peut-être la plus füre, & qui l’eft certainement,
{1 la différence de la Terre à une Sphere eft affés grande pour
furpañler tout ce qui peut réfulter des erreurs qu'on peut
commettre dans les obfervations,
56 MEMoREs DE L'ACADEMIE Rôyare
Je reviens à examiner les figures que les loix de la Statiqué.
& de l’'Hydroftatique doivent donner aux Corps céleftes,
& j'entrerai fur cette matiére dans un plus grand détail que
je n'ai fait dans le Difcours fur la figure des Aftres.
IV. Pour qu'une Planete formée d’une matiére fluide &
pefante, conferve une figure permanente, pour que toutes
fes parties foient les unes par rapport aux autres, dans un
état de repos, il faut que toutes les colomnes du fluide fe
foûitiennent les unes les autres, & foïent en équilibre. Il faué
auffi que la ligne felon laquelle ehaque partie de la Planete
pefe, foit perpendiculaire au plan tangent de la Planete en
ce point. Le premier de ces principes eft clair de foi-même;
le fecond fe démontre auffi facilement; car fi les Corps
pefoient obliquement fur ce plan tangent, un Corps flotant
fur le fluide de la Planete, ou une partie du fluide même,
feroit entraîné dans le fens de la direction de fa pefanteur,
& le fluide ne feroit plus dans l'état de repos où on le
fuppoe. À
Ces deux principes doivent déterminer la figure de la
Planete, qui doit être telle que l'un & l'autre y foient oblervés
en même temps, il faut donc qu'ils s'accordent lun avec
Vautre; fans cet accord, l'un changeroit continuellement a
figure que l'autre donneroit à la Planete, & fes parties feroient
dans un flux & reflux continuel.
V. M. Huygens, lorfqu'il détermina la figure de la Terre,
fe fervit d’abord du fecond principe, de celui de la perpen-
dicularité des directions des Corps à la furface ; mais comme
il eut befoin de Ja Méthode inverfe des tangentes, peu connuë
dans ce temps-là, il prit, pour achever fa Solution, le pre-
mier principe, celui de l'équilibre des colomnes dont M:
Newton s’étoit déja fervi. En effet, confidérant Ja pefanteur
comme la confidere M. Huygens & plufieurs autres Philo-
fophes, c’eft-à-dire, comme uniforme & fe faifant vers un
centre ; il eft indifférent de fe fervir de Fun ou de Fautre
principe, & l'on trouvera toüjours la même figure pour la
Planete,
VL
D D OR RUES TS : ès
* VI. Enfin dans toutes les Hypothefes de pefanteur qui
ont été propolées dans le Difcours fur la F igure des Afres;
les deux principes reviennent encore au même, & fe trouvent
d'accord dans les figures que nous avons détérminées, non-
feulement pour les Planetes & les Etoiles » Mais encore pour
les Anneaux.
VIT. Cet accord des deux principes ne fubfifteroit pas
dans toutes les hypothefés qu'on pourroit faire. M. Bouguer
lut il y a quelque temps, dans nos Aflemblées, un Mémoire
dans lequel il recherchoit ce qui arriveroit fi l’on faifoit
d'autres hypotheles fur I pefanteur. On peut faire une in-
finité de ces hypothefes dans lefquelles es deux principes
féroient en contradiétion, la figure d’une Planete qu'on
trouveroit par l’un, toûjours détruite par l'autre, & où les
parties de la Planete feroient dans un defordre & dans un.
mouvement cContinuel. è
VII Mais par-là même on voit que pour déterminer
la figure d'une Planete, fi l'on {cait que fes parties font
actuellement en repos, l'examen de l'accord des deux prin-
. cipes éft inutile, lun d'eux fuffit, puifque le repos des parties
eft un fait qui affüre de l'autre , quelle que foit la maniére
dont la pefanteur agit.
IX. Cependant comme la recherche des cas où les deux
principes s'accordent, & de ceux où ils ne s'accordent pas,
eft curieufe, je la ferai éncore ici d’une maniére différente
de celle de M. Bouguer.
Ce Mémoire contiendra quatre parties. \
Dans la premiére, j'examinerai ce qui arrive fi lon fup-
pofe queles parties du Sphéroïde pefent vers différents points
def'axe, & que leurpefanteur varie de colomne en colomne,
-& varie encore dans la même colomne fuivant quelques loix
données.
Dans la feconde, je m’attacherai en particulier aux hypo-
, thefes de pefanteur vers un centre. On m'a fouvent objetté
contre l'applatiflement des Planetes, que fi la force centri-
fuge les avoit applaties, cette même force ayant auffi applati
Men. 1734 ” LE
Q MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE RoYALE
le Soleil, qui a comme elles une révolution fur fon axe,
nous devrions voir fün Difque ovale, car noùs fommes
prefque dans le plan de l'Equateur de fa révolution (ce plan
ne faifant ave@W'Etcliptique qu'un angle d'environ 7 degrés),
cependant le Difque du Soleil nous paroît circulaire. Comme
cette objection n'a été faite par des perfonnes que je refpeéte
beaucoup, j'examinerai dans cette feconde partie jufqu'où
doit aller Fapplatifiement du Soleil, & s'il eft aflés grand
pour pouvoir. être fenfible aux obfervateurs.
Dans la troïfiéme partie, j'examinerai les figures que
peuvent avoir en général les Corps céleftes; j'examinerai
quelques découvertes qu'on a faites dans le Ciel, & l'on verra
combien elles font conformes à ma théorie, & combien
elles paroifient la confirmer.
Enfin pour ne rien omettre de ce que j'ai à dire fur cette
matiére, j'examinerai dans la quatriéme partie, la figure de
la Terre & des autres Aftres, réfultante de la pefanteur
univerfelle des parties de la matiére les unes vers les autres,
& je tâcherai d'éclaircir ce que M. Newton a dit fur cela,
qui n'eft ni un des moins beaux éndroits de fon Livre, ni un
des plus faciles à entendre.
PREMIERE, PARTIE,
Dans laquelle on examine ce qui arrive, fi l'on fiprofe
que les parties d’un Sphéroïde formé d'une mariére fluide
pefent vers différents points de l'Axe, à que leur
pefanteur varie de colonme en colomne, à varie encore
dans la même colonne fuivant quelques loix données.
TX. Soit le Sphéroïde formé par la révolution de la
courbe PAQ autour de l'axe PQ. |
La pefanteur vers À dans toute la colomne DR dépen-
dante de la diftance PR au pole, & cette dépendance donnée
par une fonétion de PR.
Et par rapport aux différentes parties d'une même co-
lomne DR, foit la pefanteur appellée p, de forte que la
DES SCIENCES. $9
pefanteur en général Hi @Que
foit repréfentée par .
[PART r.
Soit le rapport du
finus de l'angle DRP
au rayon :: }: 1;
foit la force centri-
fuge donnée en À, &
—=f, onauralaforce 4K
centrifuge en G, en TE L RC AR de
difant f. f" :: CA. LG— (à caufe de LG, RG::}.1)
ARG; d'où l'on tire la force centrifuge en G ou f — ee
Müis cette force agiflant fuivant GH, ne diminué la force
füivant GR que de ce qu’elle agit dans la direction oppofée
G D : pour trouver donc la force fuivant G D, on à
GH.GK, où 1.4 :: __ 4 id ni hr c'eft a
force qui tire le petit cylindre G gou dRG füivant GD.
On aura donc pour le poids vers R de la colomne DR
[PR] fp.dR G— [fi RGARC (là fonction [PR] pré-
cédant le figne /, parce qu'elle doit. demeurer conftante
pendant l'intégration) ; & fi lon fait ce poids égal à celui
de 1 colomne PR, on aura [PR] /p.dRG— f FRERE
—=/p. dPR, où (faïfant CA —4, PR=— 3%, DR=r, &
obfervant que 4 doit demeurer conftant pendant l'intégra-
tion) [g] fpdr — fr 7 æ C'eft l'équation que
donne le principe de l'équilibre des colomnes. I ne faut plus
que connoître l'inclinaifon des.colomnes DR par rapport à
eur diftance du pole, ce qui doit être donné par la relation
entre z &/, & connoître encore la valeur de p par quelque
équation entre p & 7, 4, r, pour chaffer z & p de cette équa-
tion, & lon aura la courbe qui eft le Méridien du Sphéroïde
donnée par une équation entrer & 4. C.Q. FT.
H ïj
60 MEMOIRES DE L'ACADEMIE-RoYyALE
XT. Cherchons maintenant le Sphéroïde par l'autre
principe, par la perpendicularité de la ligne des Tendances
à la furface.
Soient encore les A
mèmes lignes nom-
mes de la mème ma-
nicre ; foit la pefan-
teur en À) vers R
= [el y, & repré
fentée par DO, & la
force centrifuge en
D, repréfentée par
: hr
DP— fn | à
Je décompofe la force DO en deux autres DS & DN,
dont l’une tire dans le fens de l'axe, & l’autre lui eft per-
pendiculaire, & j'ai DR.RE:: DO. DS, ou 1.V/1—##
cu zlr ; DÉS |? Vi—hh; j'ai de mème DN
— [x] pA.
Retranchant de Ia force D'N la force centrifuge DZ qui
lui eft oppolée, la force fuivant D E fe réduit à DY
= [p4—f 2. Quant à la force DS, elle demeure
dans fon entier = [7] pVA —hh.
C’eft donc maintenant comme fi chaque particule du
P
EC R C Q
Sphéroïde étoit pouflée par les deux forces DV & DS, & :
qu'elle tendît à tomber par la diagonale DT de ces forces.
Or puifque cette tendance DT doit être perpendiculaire
à la courbe PD au point D, les A DST, DMd, doivent
être femblables, & on doit avoir DY, DS :: dM. MD,
ou [z] p#— Lt [31] pV1—hh ::d(PE). d(DE),
ou 2 d(a—rVi—4hh) . d(hr), ou : : dz —
pe PNG VERSER Ÿ pre Bdr.-t-1r.d'hy0euter
1h
Es
DIE MAS UOTE NdiS » : 11 8
da Vi — dr hhdr + hrdh. (dr rdh)
x Vi—hh; & faifant la multiplication, on a [7]p4# dr
AMP corn NEA Le 25
— [elpdr+ [cl phhdr + [r]phrdh;: où [x] pdr
2 [zl p dz Vi = EE + Prat . Ceft
l'équation que donne le principe de la perpendicularité des
T'endances.
XII. En comparant cette équation avec celle que nous
avons trouvée art. précéd. on voit d'abord qu'elles font
différentes : cependant pour bien juger de leur différence,
il faut avoir égard à ce qu'elles ne font pas actuellement dans
le même état. Cette derniére eft une équation différentielle,
& l'autre eft cenfée intégrée. Il faut donc différentier la
premiére [7] fodr — re — /pdz, & Von a d{z] fpdr
+ [z]pdr— pdz — Éhrar + ue Comparant
alors les équations qui viennent de l’un & de l'autre prin-
cipe, on voit qu'elles ont plufieurs termes communs, &
qu'afin que l'une & l'autre foient la même, il faut que
dal fpdr — pd —[;]pdz Vi — 41. Cette der-
niére équation prefcrit toutes les relations qui doivent être
entre 7, r, &p, pour que les deux principes s'accordent
à donner la même forme aux Sphéroïdes.
III. Si lon veut que les pefanteurs f faflent vers
différents points dé l'axe, & foient par-fout uniformes tant
danis la même colomne que de colomne en colomne, [7] &p
deviennent des quantités conftantes 4 [z]—=0, & l'équr
tion qui exprime les relations entre 7, 7, 4 & P?, devient
ady— bd; Vi — hh, d'où l'ontire PS HOME
c'eft-à-dire, l'angle DR P conflant, ce qui exclut le Sphéroïde,
& fait voir que la pefanteur étant uniforme dans là même
H iij
Figure de la
P0EE 59°
62 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
colomne, & de colomne en colomne vers différents points
de l'axe, les deux principes ne fcauroient s’accorder. ?
XIV. Si l’on veut que toutes les parties du Sphéroïde
efent vers le même point; on a 7 conflant, d7— 0, &
d[z] = 0; & léquation qui exprime la relation entre 7,
r, h & pa tous fes termes détruits ; d’où l’on voit qu'alors
les deux principes s'accordent à donner la même forme aux
Sphéroïdes, quelle que foit la loi felon laquelle la pefanteur
varie dans chaque eolomne.
X V. Si lon veut que la pefanteur fe fafle vers différents
oïints de l'axe, & foit proportionnelle à une puiflance 7"
de Ia diftance à ces points; & qu'on cherche commént
elle doit varier de colomne en colomne pour que les deux
principes s'accordent; foit conçüëé une colomne #7 infini-
ment proche de Paxe, il n'y aura que les parties de l'axe
comprifes entre P & r qui auront de {a pefanteur ; cette
pefanteur fera mefurée par {a puiffance » de leur diflance
au point r, & elle ne s’exercera point fur le refte de Ia
colomne rC, comme la pefanteur fur DR ne s'exerce point
fur fon prolongement par delà À; ainfi le terme pd qui
exprimoit le poids de chaque partie de la colomne qui
répond à Faxe, fera nul dans l'équation qui exprime les
relations néceflaires pour l'accord des deux principes, &
cette équation {era d [7] fpdr = {;] pdz V1—%h, ou
(mettant pour p fa valeur 7) = d[c] = — [7] r”
— [7] 4 Vi TF3
dr] "IE
Si maintenant on met cette valeur de r dans l’une ou l’aîftre
des équations trouvées pour le Sphéroïde, art. 10 & 11, on
aura une équation qui ne contiendra que [7] d Le} l, dh & dg.
Si maintenant on a Ja direction des T'endances des colonmes,
c'eft-à-dire, la relation entre 4 & 7, on chafferi dz de cette
équation, & on la réduira à une équation entre [7], d[7],
h & dh, qui déterminera la valeur de [7], c’eft-à-dire, la
loi de la variation de là pefanteur de colomne en colomne,
a —————
dz Vi 4h; d’où lontirer—m+ 1 x
D" ET SV IS COÉT ENT QUE se 63
$€::Mais fi l’on veut quela pefanteur ne varie point decolomne
en colomne, & qu'on cherche felon quellérpuiffance » de
la diftance des parties aux points centraux, la-pefanteur doit
varier dans chaque colomne; on a [7] conftant, 4[7|—0o,
& l'équation d kl/rdr={tlrdr V1 44, où
d'où l'on voit qu'alors pour que les deux principes s’accor-
dent, il faut que da pefanteur dans chaque colomne foit en
raifon fimple inverfe de la diftance à fon point central.
= 0 donne m——1:
XVI: On pourroit parcourir une infinité d’autres hypo-
thefes, qui deviennent fr faciles à examiner par la méthode
que j'ai fuivie, que j'aime mieux pafer à d'autres chofes,
Je ferai feulement une remarque fur l'hypothefé que nous
avons fuivie d’une pefanteur tendante à différents points de
Yaxe, variant de colomne en colomne; par rapport aux dif-
tances PR d'un point donné aux points centraux, & variant
encore dans li même colomne, par rapport aux diftances GR
des parties de chaque colomne à fon point central. Nous
avons fuppofé tout le poids de li colomne qui répond à
Yaxe, réuni en P, de forte que les parties comprifes dans
le refte de l'axe depuis r ne pefent plus ; ic’eft ce qui a le
plus d’analogie avec la fuppofition qu'on fait.des pefanteurs
des colomnes vers les points:À, mefurées par les puïflances
des diftinces à ces points. Cen’eft cependant qu'une fiction .
géométrique, qui eft hors de toute apparence d'avoir lieu
dans la Nature.
Me SRE ON D FR AR TUE
Dans laquelle on examine différents Syflemes de pelanteur,
à où l'on dérérmine les figures des Corps télefles
qui réfulrent de ces Syflemes.
i
RUE Après avoir examiné quelles font des conditions
néceflüires pour que des deux principes, celuide Féquilibre
6x MEmoiRes DE L'ACADEMYE-Royarr
des colomnes, & celui de la perpendicularité des Tendances
s'accordent dans la formation d'un Sphéroïde, je vais dans
cette feconde partie, confidérer la pefanteur felon les fyflemes
les plus généralement fuivis. La plüpart des Philofophes la
confiderent comme une force toujours diri gée vers uncentre,
foit qu'on là fuppole uniforme, & par-tout la même à quel-
que diftance,qué ce foit, comme a fait M. Huygens; foit
qu'on la fuppofe variable, & fuivant la proportion de quel-
que puiflance de fa diflance au centre.
Les autres, avec M. Newton, la confiderent comme uné
foïce répanduë dans la matiére, dont nous avons donné les
Loix dans un Mémoire qu'on trouve dans le recueil de 173 2.
XVIII. Au refte M: Newton n’eft point l’auteur dé
cette maniére de confidérer la pefanteur ; mais il eft le premier
qui ait déduit fAttraction des Phénomenes, & qui en ait
calculé les effets.
Sans parler des opinions des anciens philofophes fur J'At-
traction, fans parler de Képler , précurfeur de M. Newton;
qui a trouvé les deux loix de a Nature qui devoïient fervir
de fondement au fyfteme du monde, deux hommes illuftres
du fiécle paflé, paroiffent ne s'être pas écartés de l’idée d'une
Attraction tout-à-fait la même que celle de M. Newton. Voici
comme ils parlent des différents fyflemes fur la Pefanteur.
Fermat, Var. La commune opinion eff que la pefanteur eff une qualité qui
ee à réfide dans le corps même qui tombe.
LetredeM. D'autres font d'avis que la defcente des corps procede de
Rare Es l'Attrattion d'un autre corps qui attire celui qui defcend, comme
M. de Fermat. /4 Terre.
Îl y a une troifiéme opinion qui n'ef? pas hors de vrai-femblance ;
Que c'efl une Attrachon mutuelle entre les corps catfee par un
defir naturel que les corps ont de s'unir enfemble, comme il eff
évident au Fer ér à l'Aimant, lefquels font tels que fi l'Aimant
eff arrêté, le Fer ne l'étant pas, l'ira trouver; © fi le Fer e
arrété, | Aimant ira vers lui ; àr ff tous deux font libres, ils S'ap-
procheront réciproquement l'un de l'autre , en forte toutefois que le
plus fort des deux fera le moins de chemin, &c. ùn
Ceux
D' EU Sax 18 CUT EAN 1€ 19 ME
Ceux que le mot d’Arrracion blefle, & qui reprochent
à M. Newton d'avoir ramené les qualités occultes, & d’avoir
replongé la Philofophie dans les ténébres, verront que le
terme dont on fe fert ici, de defir naturel, par lequel cepen-
dant on n’entend que Zendance, eft plus fort & plus dur que
tout ce que M. Newton a jamais dit fur cette matiére.
On ne s’en tient pas à dans l'endroit que nous venons
de citer, on y examine la maniére dont les corps doivent
tomber dans l'intérieur d’une Sphere en vertu de cette
pefanteur ; on fait voir qu'ils feroient tirés par des forces
d'autant moindres qu’ils approcheroient plus du centre, parce
que les parties de la Sphere fupérieures au corps, attirent
dans le fens oppolé, & détruifent une partie de l’Attraction
des autres, & c'eft précifément ce qui réfulte de la théorie
de M. Newton. Cependant lorfqu'on traitoit cette opinion
fur la pefanteur de vrai-femblable, on ne fçavoit point encore
combien elle fe trouvoit conforme à tous les autres phéno-
menes de la Nature.
On dira peut-être que lorfqu’on parloit ainfi, les Syftemes
de M.': Defcartes & Huygens, {ur la pefanteur, n'avoient
pas paru ; mais lorfqu’on rejette l’Attraction, ce n'eft pas
parce qu’on a fans elle des explications fatisfaifantes des
phénomenes, c’eft qu'on trouve abfurde d'attribuer cette
force à la matiére. J'ai dit fur cela ce que je penfois dans
le Difcours fur la Figure des Aftres.
. XIX. De tout temps les Philofophes ont cherché la
caufe de la pefanteur ; fi nous la connoiffions, nous fçaurions
fi les corps terreftres tendent vers un point unique ou vers
plufieurs points différents ; ou fi la pefanteur n’eft produite
que par une Tendance des parties de la matiére les unes
vers les autres. Je crois qu'après tant de fiécles écoulés, &
après les efforts de tant de grands hommes, fi lon ne doit
pas defefpérer de trouver la caufe de la pefanteur , il eft
toüjours plus raifonnable de s'appliquer à en connoître les
effets ; car connoiffant bien quels font fes effets dans une
occafion, on peut déterminer quels effets elle aura dans une
Mem. 1734 s I
66 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
autre; on peut même, par le moyen des expériences, décou-
vrir felon quelles loix elle agit, & c’efllà, ce me femble,
tout ce qu'il y a à defirer en Phyfique ; c’eft du moins, à
cé que je crois, tout ce qu'il y a à efpérer.
XX. De ce que la Terre eft à peu-près fphérique, &
que par-tout les corps tombent par des lignes perpendicu-
laires à fa furface, on voit que la force qui les fait tomber,
la force que nous appellons pefanteur, eft par-tout dirigée
vers le centre, ou à peu-près vers le centre.
Par la maniére dont tombent les corps vers la Terre, par
le temps qu'ils employent, les efpaces qu'ils parcourent, &
les accélérations qu'ils éprouvent, on voit que la force qui
les follicite à tomber, eft toûjours la même pendant tout le
temps de leur chüte ( du moins à toutes les diftances où il
nous eft permis de faire des expériences).
Et fi l'on fuppofe qu'à quelque diftance que ce foit du
centre de la Terre, les chofes fe paflent de la même maniére
que là où nous fommes en état de faire des expériences, on
pourroit conclurre que la pefanteur des corps vers fa Terre
froit par-tout uniforme; & fi elle étoit uniforme vers la
Terre, on pourroit croire qu’elle le feroit auffi vers les autres
Planetes, ou vers les autres amas de matiére qui circulent
autour d’un axe comme notre Terre.
Cette hypothefe d'une pefanteur uniforme eft celle qu'a
fuivie M. Huygens, & celle qu'on conclut par ce qui arrive
aux petites diftances où nous pouvons faire nos expériences.
XXI. Mais on peut poufler la vüë plus loin, & cher-
cher ce que paroît être la pefanteur, par ce qui arrive à des
diftances plus grandes. ER
Le mouvement de la Eune autour de la Terre, comparé
à À chûte des corps vers la Terre, nous fait voir que fi la Lune
eft retenuë dans fon orbite par la même force de la pefanteur
qui fait tomber les corps, cette force depuis la Terre jufqu’&
la Lune décroït dans le même rapport que le quarré de la
diftance à la Terre augmente, c’eft-à-dire, que la pefanteur
vers la Terre eft en raifon inverfe du quarré de la diftance,
'.
D' ES MSA CAMENMNLEL ST y
Nous ne pouvons point expérimenter comment les corps
tomberoient vers la furface des autres Planetes, mais nous
pouvons déterminer da loi de leur pefanteur par le mouve-
ment des Satellites de celles qui en ont; & ces mouvements
comparés entre eux, nous font voir une même loi de pefan-
teur vers leur Planete principale, que celle que nous avons
trouvée vers la Terre. |
Enfin les mouvements de toutes les Planetes autour du
Soleil donnent encore la même loi de pefanteur vers le
Soleil.
- Sidonc on ne regarde point la pefanteur comme pro-
duite par la Tendance mutuelle des parties de la matiére, &
u’on la regarde comme fe faifant vers les centres autour
defquéls elle s'exerce indépendamment de la matiére des
corps centraux , & fuivant au dedans de ces corps la même
doi qu'on lui voit obferver au dehors, on pourroit conclurre
qu'elle fe fait par-tout en raifon inverfe du quarré de la
diftance au centre.
- XXII Ces deux hypothefes doivent pañler pour Îles
plus vrai-femblables, lorfqu'on n'admet point l'attraction
mutuelle des parties de la matiére.
Si d'on prend la premiére, qu'on ne détermine point la
pefanteur par ce qui arrive dans le mouvement des corps
céléftes, qu'on n’en juge que par ce que nous voyons arriver
dans la chûte des corps vers la Terre, & qu'on la prenne
pour uniforme, il n’eft pas difficile de déterminer la figure
des Planetes & des Soleils, ou plütôt il n’eft pas difhcile de
juftifier les figures qu’on voit qu'ils ont.
Quoiqu'ils doivent être tous applatis, cet applatifiement
dépend du rapport qui eft entre la pefanteur & la force cen-
trifuge de leurs parties ; & ce rapport (même dans les Pla-
netes dont on connoît le temps de la révolution fur l'axe,
excepté la Terre) demeure à-notre choix. Nous pouvons
fuppofer la quantité de la pefanteur telle qu'il nous plaît, car
on ne peut pas exiger qu'on la croye fur les autres Planetes,
da même .que fur notre Terre, Nous la pouvons fuppofer
l'ij
683 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
fi grande par rapport à la force centrifuge, que les Planetes
& le Soleil différeroient auffr peu qu'on voudroit de Îa
Sphere. Nous fommes alors les maîtres de déterminer ce
rapport dans chaque Aftre par la figure actuelle que nous
-voyons qu'il a. Si la différence des deux diametres perpen-
diculaires du difque du Soleil eft infenfible dans les obferva-
tions, nous pouvons déterminer facilement quelle doit être
la grandeur de la pefanteur par rapport à la force centrifuge
des parties du Soleil dans fon équateur pour que cette diffé-
rence foit infenfible. Si Jupiter nous paroït fenfiblement
applati, & que fon axe foit au diametre de fon équateur,
comme 14à 15, nous fommes en état de déterminer quelle
eft la pefanteur dans cette Planete par rapport à fa force
centrifuge, afin qu'elle ait une telle figure. Enfin il n'y a
que pour la Terre que nous ne puiffions pas difpofer de ce
rapport , car nous fçavons par des expériences certaines que
la pefanteur y eft environ 289 fois plus grande que {a force
centrifuge.
X XIIL. Nous avons trouvé dans le Difcours fur la figure
des Aftres, p. s 3. Que nom- A
mant le rayon de l'équateur
CA—a, le rayon variable
CD=—r, le finus de l'angle
DCP—} pour le rayon —1,
la pefanteur en 4—=p, &
la force centrifuge au même
point —=f, & fuppofant que
la pefanteur vers le centre C
étoit proportionnelle à une
puiflance » de la diftance; nous
avons trouvé, dis-je, pour l'é-
quation qui exprime la nature
du Méridien des Sphéroïdes
2pr —(n+ 1) fhha B
rr—=(2p—nf —f) a *".
La même équation fe peut déduire auffi facilement des
DE 1512 SAC AIR EUNET nn)
‘équations que nous avons trouvées dans la-r."e partie de ce
Mémoire, art. 10. & 1 1. Ces équations’ étoient [7] /pdr
— Phi — fpdr; & [x] pdr— [dl pda Vi — #4
— fhhrdr fe fhrrdh ]
Dansceséquations [7] repréfente ici Ia quantité conftantep:
pdr repréfente - fp dy le poids conftant de a colomne
CP qui eft Te a; &[z]pdz Vie eft zero,
à caufe de 7 conitant. |
Si l’on fubftituë ces valeurs dans ces deux équations, on
aura (après avoir intégré la feconde )} la même équation
apr —(n+i1)fhha 'rr = (2p—nf-—f) a".
De cette équation, on tire aifément le rapport de l'axe
au diametre de l’équateur ; car faifant 4 — 0, le rayon r
devient alors CP, & Von a 2pr° 7 = (2p—nf—f) a
ou CA. CP Map}. (2p—nf— fier.
. XXIV. Dans l'hypothefe particuliére dont il s’agit ici
d'une pefanteur uniforme, on a CA.CP::2p.(2p—f}).
D'où l'on voit que fi notre Sphéroïde repréfente le Soleil,
on peut augmenter la pefanteur p par rapport à la force
centrifuge jufqu’à ce que la différence entre CA & CP foit
infenfible, eu égard aux moyens dont les Aftronomes fe
fervent pour la mefurer.
S'il eft queftion de Jupiter, & qu’on ait obfervé que forr
axe eft au diametre de fon équateur, comme 14 à 15, ona
A$-14::2p.2p—f, ou 30p—15f—28p, ou
2p=—=15.f, & Von concluroit que fur cette Planete la pe-
fanteur feroit fept fois & demie plus grande que la force
centrifuge.
Quant à la Terre, il ne dépend pas de nous de fuppofer
le rapport de la pefanteur à la force centrifuge, tel que nous
e voulons. On fçait, par des expériences, que la pefanteur
ii}
[A
jo MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
eft 289 fois plus grande que la force centrifuge, d'où il fuit
que CA. CP:: 578. 577, comme M. Huygens l'a trouvé,
© XXV. Si lon prend maintenant l'autre hypothefe fur
Ja pefanteur, fi on lui attribuë le mouvement des Corps
céleftes, ou plûtôt la détention de ces Corps dans leurs orbites,
& qu'on juge de ce qu'elle eft par ces effets ; les phénomenes
nous font voir qu'autour du Soleil, & autour de chaque
Planete qui à des Satellites, elle eft en raïfon inverfe du
quarré dé la diftance au centre de la révolution.
Ces mouvements ne nous donnent pas feulement Ia loi
que fuit la pefanteur felon les diverfes diftances des centres,
âls nous mettent en état de comparer les unes avec des autres,
les pefanteurs vers différentes Planetes.
Nous connoifions les diftances & les temps des révolu-
tions des Planetes; nous connoiflons les arcs que chacune
parcourt dans un tèmps donné; nous connoiflons les fléches
de ces arcs ; Or fi c'eft la pefanteur qui retient les Planetes
dans leurs orbites, ces fléches font les quantités dont elle les
fait tomber vers le centre; & dans de petits arcs décritsen
même temps par différentes Planetes autour du Soleil, ou
par des Satellites autour de leur Planete principale, les pefan-
teurs vers le Soleil, ou vers les Planetes principales font
proportionnelles aux fléches des arcs décrits. On a donc par-là
Je rapport de la pefanteur que chaque Planete éprouve dans
le lieu où elle eft vers le centre autour duquel elle fe meut;
on a, par exemple, le rapport de la pefanteur de Venus
ou de la Terre vers le centre du Soleil, à la pefanteur de là
Lune, ou d’un Satellite de Jupiter, ou de Saturne vers le
centre de fa révolution : Et comme on fçait que les pefan-
teurs croiflent comme les quarrés des diftances diminuënt,
on a Îe rapport de a pefanteur que Venus éprouve à où
elle eft, vers le centre du Soleil, à la pefanteur qu'elle éprou-
veroit fur la fuperficie; on a Le rapport de la pefanteur qu'un
Satellite éprouve à où il eft, vers le centre de fa Planete
à da pefanteur qu'il éprouveroit fur la fuperficie. Ë
XXVI. Tout ce que nous venons de dire de la pefanteur
D E Si: $:C 1 EN C:E:5, tr ‘su
peut s'appliquer à la force centrifuge d'un corps placé fux
l'équateur de quelque Aftre qui a une révolution autour de
fon axe. Les forces centrifuges dans différents Aftres font
proportionnelles aux fléches des petits arcs décrits dans le
même temps par un point de leur équateur,
Or on fçait par les Théoremes de M. Huygens, que la
force centripete ou centrifuge d’un corps qui décrit un cercle
eft en raifon directe du rayon, & en raifon inverfe du quarré
du temps périodique: Si lon appelle donc la diftance d’une
Planete au centre du Soleil, ou d’un Satellite au centre de fa
Planete = D, le temps de fa révolution périodique =T, le
rayon de l’Aftre autour duquel elle fait fa révolution = À, la
pefanteur qu'elle éprouve vers le centre de la révolution dans
lélieuoùehleeft, feracomme -2- ; & cette pefanteur augmen-
tant en s’approchant du centre de la révolution comme le
quarré de a diftance diminuë, on a la pefanteur que la Planete
éprouve dans le lieu où elle eft, à la pefanteur qu’elle éprou-
veroit fur la fuperficie de l'Aftre qui eft au centre de fa
révolution, comme RR à DD; d’où l’on a pour la pefanteur
que la Planete ou tout autre corps éprouveroit fur la fuper-
ficie de l Aftre central Pcomme Tr Et l’on a par-là les
différents poids de corps égaux, placés fur le Soleil, ou fut
différentes Planetes.
XXVIT Maintenant la force centrifugé qu'un corps
éprouve, placé dans l'équateur d'un Aftre, étant en raifon
directe du rayon de l'Aftre, & en raifon inverfe du quarré
du temps périodique de la révolution de l'Aftre autour de
fon axe : fr l'on nomme le temps de la révolution autour
de Paxe —G, on a Fcomme _ D'où l'on tire ce Théo-
reme général pour le rapport de Ia pefanteur dans chaque
Aflre à la force centrifuge fur l'équateur P : F:: D'GG
Sn TT.
: Si l'on prend pou la diflance moyenne de Venus au Soleil
72 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Rorarr
D—=15906 demi-diametres de la Terre; pour le temps de
la révolution de Venus autour de lui 7 — 224i 7; pour
le demi-diametre du Soleil À — 100 demi-diametres de a
Terre, & pour le temps de la révolution du Soleil autour
de fon axe G— 2 $ +, on trouvera P: Fou D'GG: RTT
::52016:1, c'eft-à-dire, la pefanteur fur la furface du Soleil
plus de 50000 fois plus grande que la force centrifuge fur
{on équateur.
Sid'on prend pour la diftance du 4. Satellite à Jupiter,
D — 23 demi-diametres de Jupiter, telle que M. Caffini
Ta trouvée; pour le temps de la révolution de ce Satellite
autour de lui 7 = 16; 16-£h; pour le demi-diametre de
Jupiter R=— 1; & pour le temps de la révolution de Jupiter
autour de fonaxeG=—=9h 5.6", on trouvera P:F:: 7,48 15
c'eft-à-dire, la pefanteur feulement environ 7 + fois plus
grande que la force centrifuge fur l'équateur de Jupiter.
Si l'on prend pour la moyenne diftance de la Lune à Ia
Terre D — 6o demi-diametres de la Terre; pour le temps
de la révolution de la Lune autour d'elle T— 27; 7h43";
pour le demi-diametre de la Terre R=— 1 ; & pour le temps
de la révolution de la Terre autour de fon axe G— 23h
56’ 4", on trouvera la pefanteur environ 288 fois plus
grande que la force centrifuge fur l'équateur.
Ce rapport nediffere prefque pas de celui que M. Huygens
a trouvé de 289 : 1, & qu’il a déterminé par des principes
différents, s'étant fervi du temps de la chüte des corps,
ou, ce qui revient au même, de la Iongueur du pendule
à fecondes ; fur quoi cependant il eft facile de commettre
quelque erreur.
XXVIIT. Pour déterminer maintenant la figure du Soleil,
de Jupiter, & de Ia Terre, il faut reprendre notre équation
2PP — (nr) fhha rr= (2p—nf—f) a",
ou fimplement la proportion du diametre de l'équateur à
l'axe CA: CP :: (2p)° +": (2p—nf—f)"+" qui dans
l'hypothele
S DE S::8@ L'ENCRE S. 73
Thypothefe prélente den——2,'eft CA:CP :: 2p+-f: 2p,
ouCA—CP;:CP::f:2p, où CA—CP:CP:: RTT
:2D°GG.
Si donc on prend pour chaque Aftre les rapports que
nous venons de trouver de la pefanteur à la force centrifuge,
on trouvera pour le Soleil CA—CP:CP::1: 104032;
d'où l'on voit que le diametre de l'équateur du Soleil ne
doit pas furpañler l'axe de 2." partie, différence bien
éloignée d’être perceptible par aucune obfervation.
Pour Jupiter on a CA—CP:CP::1:14,96, ce qui
donne la différence du rayon de l'équateur de Jupiter à fon
emi-axe, f1 approchante de celle que M. Caffini le pere a
obfervée de 1 : r 5, & qui a été confirmée par M. de la Hire,
que cet accord doit paroître fngulier dans des chofes qui
dépendent d'un fr grand nombre d'éléments; car l'axe de
Jupiter étant prefque perpendiculaire au plan de l'Ecliptique,
les grandeurs apparentes des deux diametres de fon difque
doivent être vüës de la Terre dans, Îe même rapport que
fon axe eft au diametre de fon équateur.
M. Newton confidérant Jupiter comme formé d'une ma-
tiére uniforme , trouve que la différence du diametre de fon
équateur & de fon axe devroit être à fon axe comme 1 :9+;
& comme ce rapport s'éloigne aflés de celui que M. Caffmi
aobfervé, & même de celui qui réfulte des obfervations de
M. Pound, dont les termes moyens feroient le diametre de
J'équateur de Jupiter à fon axe comme 1345 : 1247, (ce
Hifi. de l'Acs
Royale des Ste
a, 1691;
‘qui approche bien plus de notre rapport que de celui de
M. Newton) M. Newton a recours à une denfité inégale
dans Jupiter plus grande vers le plan de l'équateur que vers
les poles ; d'où s'enfuivroit une figure moins applatie que
celle que lui avoit d'abord donné fa théorie, & plus appro=
chante de la figure obfervée. * 4
Enfin pour la Terre on a CA—CP:CP::1:576;
d'où réfulte que la Terre feroit moins applatie que ne la
fait M. Newton , mais.un peu plus que ne la fait M.
Huygens. ;
Mem, 1734 "KR
74 MEMÔIRES DE L'AÂCADEMIE ROYALE
XXX. Quant aux autres Planetes, Mercure, Venus,
Mars & Saturne, & toutes les Planetes fecondaires, nous
ne pouvons pas déterminer leur figure par cette théorie,
n'ayant pas le rapport de la force centrifuge des parties fur
leur équateur à la pefanteur.
Nous ne connoifions point le temps de [a révolution de
Mercure autour de fon axe, & cette Planete n'ayant point
de Satellites, nous ne connoiflons point non plus la pefan-
teur des corps vers elle.
© Nous avons bien le temps de la révolution de Venus &
de Mars autour de leur axe, ce qui, leurs diametres étant
connus, nous donneroit le rapport de la force centrifuge
fur ces Planetes à la force centrifuge fur la Terre; mais
comme elles manquent aufli de Satellites, nous ne fçaurions
avoir le rapport de la pefanteur qu'y ont les corps, avec la
pefanteur qu'ils ont fur la Terre. À
C’eft le contraire pour Saturne. Nous connoïffons la
pefanteur des corps fur cette Planete par le mouvement de
fes Satellites ; mais comme nous ne fçavons point le temps
de fa révolution autour de fon axe , nous ne fçaurions dé-
terminer la force centrifuge fur fon équateur.
Si nous avions par quelque obfervation le rapport du
diametre de fon équateur à fon axe, nous pourrions déter-
minér fa force centrifuge fur fon équateur, & par-là on dé-
couvriroit le temps de fa révolution.
XXXI. Dans le Difcours fur la figure des Aftres, j'ai
déterminé Ja figure que doivent prendre les Anneaux qui fe
peuvent former autour des Planetes, en vertu d’une pefan-
teur vers le centre, en raifon de quelque puiflance au centre,
& d'une autre pefanteur encore des parties vers des centres
pris dans Anneau. Suppofant, comme dans ce Livre, que
AD PadQ À foit la feétion de l Anneau faite par un plan
perpendiculaire à la révolution qui pafle par le centre y.
Nommant Ja pefanteur des parties en À vers le centre de
da Planete, æ , la pefanteur en À vers un autre point C'pris
dans | Anneau p, la force centrifuge en À, f; AC, a; C+, b;
D E 5" 1SCT'EMelE a": | 75
CG,r; le finus de lan-
gle D CP, k, pour le
rayon 1. Nous avons trou-
vé pour féquation de Ia
courbe AD PadQA,
mi
T(bb+2bhr+rr) ©?
Re
STE fhhr __ fhhrr
Hi] a+ Î 2{(a+-b)
RU pe
m+1 n +1
fab faa
D LA OÙ;
dans le cas préfent, que
p=0, à m—= — 2,
x (ab)? fbhr
Ti sbhr em) ait
fhhrr re fab
2(a+b) - a +6 É 5
Lee sd Bail
2l{a+b}° À. »7 À
Cette équation détermine a figure des Anneaux en
général dans notre hypothefe. On a par obfervation la lon
gueur Aa de la coupe de l'Anneau de Saturne, & la dif-
tance ay du bord le plus proche au centre. Si l'on avoit
l'épaifleur de Anneau par quelque obfervation fuffifante,
en cherchant dans la courbe 4 D Pad Q A fà plus grande
largeur, & {a faifant égale à l'épaifleur de f Anneau, on
détermineroit le rapport entre + & f, c'eft-à-dire, entre
la pefanteur & la force centrifuge , & l’on découvriroit
par-là le temps de la révolution de Anneau autour de Sa:
turne. Au refte l'épaifleur de l'Anneau n'eft pas tout-à-fait
mconnuë, Hevelius 1a fait de 600 milles d'Allemagne; du
moins peut-on fe flater de fa connoître un jour plus exacte-
ment, en l'obfervant avec de grandes Lunettes.
Cette révolution de l' Anneau auffi- bien que celle du
sorps de Saturne, font des chofes fi éloignées de notre
Ki
6 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
portée, qu'il femble qu'on ne les pourra découvrir. que par
des moyens aufli extraordimaires que ceux-ci.
LROMBSIREME , PAR AUS,
Où l'on examine quelques découvertes qu'on a. faites dans
le Ciel, qui paroïiffenr confirmer certe théorie ; à où
l'on tente d'expliquer quelques phénomenes.
XXXII. La loi de la pefanteur, fuivant la proportion
renverfée du quarré de la diftance au centre, paroït géné-
ralement obfervée dans tout notre fyfteme folaire; & fi elle
a lieu au dedans des corps célefles, comme nous croyons
qu'elle la au dehors, & comme on peut le croire très-rai-
fonnablement, lorfqu’on ne la regarde pas comme dépen-
dante de l’Attraétion des parties de la matiére, j'ai déterminé
les figures des Aftres de notre fyfteme folaire, dans lefquels
nous-avons pü connoître le rapport de la force centrifuge
à la pefanteur. :
Suivant cette loi tous les Aftres font applatis, quoique fa
Terre & für-tout le Soleil le foient très-peu, le diametre de
Yéquateur de la Terre ne furpaflant fon axe que d'environ
327. partie; & le diametre de l'équateur du Soleil ne fur-
pañlant fon axe que de € partie. Cet applatiflement
peut diminuer à l'infini felon la petitefle de fa force cen-
trifuge, & les Aftres toûjouts approcher de plus en plus de Ja
figure fphérique. Mais il ne peut pas augmenter fans bornes ;
le rapport de CA:CP::2p+f: 2p nous fait voir qu'il
fera le plus grand qu'il foit poffible, lorfque le diametre de
l'équateur fera à l’axe comme 3 à 2; car la force centrifuge
ne fçauroit être plus grande que la pefanteur, autrement
T'Aftre feroit détruit.
Dans notre fyfteme folaire, il y a donc un terme à fa
diverfité de figure des Aftres, & nous obfervons que tous
ceux qui nous font connus font encore fort éloignés d’appro-
cher de ce terme.
. XXXII. Mais dans les autres fyftemes, autour des Etoiles
D'E SNS OL EMI QRmS1:M
fixes , ou des autres Soleïls, 1a même loi de pefanteur s'ob-
ferve-t-elle ? nous n'avons rien qui puifie nous en afiürer.
Dès qu'on ne regarde pas la pefanteur comme dépendante
d'une propriété univerlelle de la matiére, & que fa caufe
nous eft inconnuë , nous ne fçavons plus quelle loi elle peut
obferver dans d’autres régions de l'Univers.
Une infinité de ces loix donneroient aux Affres des figures
beaucoup plus variées que celles que donne la pefanteur en
raifon inverfe du quarré de la diftance ; une infinité per-
mettroit des Applatiflements fans bornes.
XXXIV. Qu'il y ait des corps céleftes d’une autre
figure que fphérique, cette idée auroit déplû aux anciens
Philofophes dans les temps où l’on manquoit de théorie &
d'obfervations ; la perfection de la figure fphérique, & celle
qui doit être dans l'Univers, étoient dans ces temps-là de
trop fortes preuves pour qu'on eût ofé croire que tous les
Affres ne fuflent pas des Globes. :
Mais dans ces derniers temps, non feulement on 2
découvert que quelques Planetes de notre fyfteme folaire
n'étoient pas des Globes parfaits. On a porté la vûë jufque
dans le ciel des Etoiles fixes, & par le moyen des grandes
Lunettes, on a trouvé dans ces régions éloignées des phé-
nomenes qui femblent annoncer une aufi grande variété
dans ce genre, qu’on en voit dans tout le refte de la Nature.
..XXXV. J'avois expliqué dans fe Difcours fur la figure
des Afres, comment il {e pouvoit former dans les Cieux, des
Aftres fort applatis. Des amas de matiére fluide qui ont un
mouvement de révolution autour d’un centre, doivent,
felon une infinité de loix de pefanteur, former de ces Aftres
applatis en forme de Meules, qu’on rangera dans la claffe
des Soleils ou des Planetes, felon que la matiére qui les .
forme fera lumineufe par elle-même, ou opaque, & capable
de réfléchir la lumiére ; foit que la matiére de ces Meules
foit par-tout de même nature, foit que pefant vers quelque
Afre d’une nature différente, elle l'inonde de toutes parts, -
-& forme autour un Sphéroïde applati qui renferme l’Aftre,
iij
78 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyarE
Qu'il y ait dans les Cieux des Amas de matiére lumi-
neufe, ou capables de réfléchir la lumiére, qui forment des
Sphéroïdes fort applatis ; outre qu'on en voit la pofhbilité
en général, il femble que quelques découvertes qu'on a faites
dans le Ciel nous apprennent qu’il y en a en effet de tels.
XXXVI. On trouve dans les Tranfaétions Philofophiques
de la Société Royale de Londres, N.° 428, un Mémoire
curieux que M. Derham, Chanoine de Windfor, donna
Fannée pañlée : comme il contient des obfervations nouvelles
& finguliéres, & qui doivent être fort exactes par l'habileté
de celui qui a obfervé, & par l'efpece & l'excellence du Telef
cope dont il s'eit fervi, & qu'il eft écrit en Anglois, je crois
qu'on fera bien aife que je le rapporte ici; cela me difpenfera
de parler des obfervations à peu-près femblables, dont la
premiére fut faite par M. Huygens dans la conftellation
d'Orion, & de quelques autres faites par M. Halley, qui
font citées dans ce Mémoire.
XXX VII. » Ayant l'Automne dernier, fait quelques
» obfervations füres fur ces apparences céleftes qu'on appelle
» Etoiles nébuleufes, avec mon T'elefcope catoptrique de 8 pieds,
» je crois à propos d’en rendre compte à cette illuftre Société,
» afin d’exciter les autres à les obferver davantage, parce que
» je les crois beaucoup plus dignes de la recherche des Curieux
» qu'on ne l'a imaginé jufqu'ici, & parce que je crains de ne
» pouvoir pourfuivre beaucoup plus loin mes obfervations,
» mon miroir commençant à perdre fon excellence & fon
» grand effet, & commençant à fe ternir.
» Mais fi quelqu'un veut bien voir ces Nébuleufes, il faut
>» abfolument qu'il fe ferve d'excellents verres, autrement il
perdra fa peine, comme je l'ai appris par mon expérience.
» On 2 donné à ces apparences céleftes le nom d'Æoiles
nébuleufes; mais elles ne font ni des Etoiles, ni des corps
» qui répandent la fumiére’& qui la réfléchifient, comme
» font le Soleil, la Lune & les Étoiles; & elles ne font pas
» non plus des amas d'Etoiles, comme la Voye lactée ; mais ce
ÿ
ÿ
» font des Aires blancheîtres femblables à des amas de vapeurs
» Nébuleufes, d'où elles tirent leur nom.
AT E: Su 010 AE Meur © 79
+ Il y en a plufieurs difperfées dans diverfes parties du Ciel. «e
Leur catalogue (que j'ai tranfcrit du Prodrome d'Aftronomie «
d'Hevelius) peut être utile à ceux qui ont deflein de faire «
- cette recherche, a
Les lieux des Nébuleufes. «
[24
- Leur afcenfion | Leurdéclinaifon| «
LIEUX DES NEBULEUSES. | droite pour pour
lan 1660. lan 1660.
Dans la ceinture d’Andromede. ...... 64 445"| 39127 $7"N] «
Dans le front du Capricorne... ....... 300 25320 : 53S1<«
Une autre précédant l’œil du Capricorne. | 301 $9 $$ {19 11 30 8. | «
Une autre qui le fuit. ...... SRE 30215 5% 9 M9 360191 “
Une au-deflus de celles-là, qui joint)... , Fe
l'œil du Capricorne. . TOL EL ESS 302 25 31118 48 5851 4
Celle qui précéde au deflus de la ce «
du Cygne, & la derniére de fon pied. UE A7) 4 20 7. «c
Une fé eft après une Etoile au-deflus) «
de la queué du Cygne, hors de QU 10 5153 520),
COMIÉENADONE ireiuslolee se tasse ele ve
H ù L< 4
Au CH du pied ges d'Hercule...|264 52 46 [48 o 10 N. #
Dans la jambe gauche d'Hercule. ..... 265 38 37 138 5 so A. a
Sur le fommet de la tête d’Hercule. ...| 252 24 3 |13 18 37 N] «
AMoreñlede/Perafe.....4l.. 2 332.38 45 | 3 312 «
Aubordoccidentaldu bouclierde Sobieski. | 272 32 34 ! 1423 35 S | «
Sur le fleau de Ja Balance... ........ 219 26 15 | 9 16 27 S. | «
Au-deflus du dos de la grande Ourfe..….| 183 32 41 |60 20 33 NV. ©
Sur la troifféme jointure de la queuë du ? “
Srapierb.s cie angiu db à à LSRTET NE RUE &
; - # long. S. lat.
Entre la queué du Scorpion, & l'arc du €
Sagittaire elec RME À FER ERER FD INR
# long, S.lar.| €
à c
Outre celles-là, le Docteur Halley a fait mention d’une « Phil Tranÿ,
dans l'épée d'Orion ; d’une autre dans le Sagittaire ; d’une « Ma47s
troifiéme dansle Centaure(qu'on n'ajamais vü£en Angleterre); «
d'une quatriéme qui précéde le pied droit d'Antinoüs ; d’une «
L:
So MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE
cinquiéme dans Hercule, & de celle de fa ceinture d’An«
dromede.
J'en ai obfervé cinq de ces fix avec mon excellent Te-
lefcope catoptrique de 8 pieds, & elles m'ont toutes paru
des phénomenes fort femblables, excepté celle qui précéde
le pied droit d'Antinoüs, qui n'eft pas une Nébuleufe, mais
un amas d'Etoiles, & quelque chofe de femblable à ce qui
eft dans la Voye late.
Entre les quatre autres, je ne trouve point de différence
eflentielle, fi ce n’eft que les unes font plus rondes, les autres
d’une forme plus ovale, fans qu'il y ait dedans aucune Etoile
fixe qui produife leur lumiére. Seulement dans celle d'Orion
il fe trouve quelques Etoiles qu'on ne voit qu'avec le Te-
lefcope, mais qui ne font point capables de caufer la lumiére
de cette Nébuleufe. Ces Etoiles cependant n'ont fervi à
appercevoir d'abord que la diftance de la Nébuleufe étoit
plus grande que celle des Etoiles fixes, & à faire la même
recherche fur les autres. J'ai pü vifiblement & pleinement
difcerner que chacune d'elles eft à une diftance immenfe au
de-là des Etoiles fixes qui paroiffent auprès, foit de celles
qu'on apperçoit à la*fimple vüé, foit de celles qu'on ne
voit qu'avec le Telefcope. Elles paroiffent même être auf
loin par de-Rà les Etoiles fixes, qu'aucune de ces Etoiles eft
éloignée de la Terre. '
Et maintenant, par ce que je viens de rapporter de bonnes
& fréquentes obfervations des Nébuleufes, je conclus cer-
tainement qu'elles ne font point des corps lumineux qui
nous envoyent leur lumiére comme le Soleil & la Lune;
qu'elles ne font point auffi la lumiére combinée de quelques
amas d’Etoiles comme la Voye laétée : mais je les regarde
comme de vafles Aires, où régions de lumiére, infailliblement par
de-là les Etoiles fixes, &r qui ne renferment point d'E’roiles.
Je dis des Régions, entendant par-là des efpaces d'une
étenduë affés vaite, pour nous paroître de quelque grandeur,
à une auffi grande diftance qu'ils font de nous.
Et puifque ces efpaces font vuides d'Etoiles, & que
dans
D! E 57-18: c\1 E NN Rs, JS:
dans Orion les Etoiles ont une très-petite proportion à fa
Nébuleufe, & que vifiblement elles ne la peuvent caufer, je
laifle à la grande fagacité & pénétration de cette illuftre
Société, à juger fi ces Nébuleufes font des efpaces particu-
liers de lumiére, ou plütôt s'ils ne peuvent pas fort proba-
blement être des vuides ou des ouvertures à une région
immenfe de lumiére par de-là les Etoiles fixes ; parce que je
trouve que dans tous les temps il y a eu plufieurs Sçavants
dans cette opinion ( je puis ajoûter les T'héologiens aux
Philofophes ) qui jufqu'ici fe font accordés à penfer qu'il y
a une région par dela les Etoiles fixes. Ceux qui ont ima-
giné des Criftallins ou des Orbes folides , ont crû qu'il ya
un Ciel empyrée au de-là d'eux, & le premier mobile : & ceux
qui n'admettoient point ces Orbes, mais qui penfoient que
les corps céleftes flottoient dans l'Air, imaginoient que fa
région des Etoiles. n'étoit point l'extrémité de l'Univers,
mais qu'il y avoit une région au de-là d'elle qu'ils ont
appellé la troifieme Région & le troifiéme Ciel.
* Pour finir, il faut remarquer que dans les Nébuleufes
d'Hevelius, quelques-unes femblent être plus grandes &
plus remarquables que les autres : mais fi elles le font réel-
lement ou non, je confefle que je n'ai pas eu la commo-
dité de l'obferver, excepté celle de la ceinture d'Andromede
qui eft aufli confidérable qu'aucune que j'aye vüë. Dans fes
Cartes, les conftellations les plus remarquables font les trois
vers l'œil du Capricorne, celle dans le pied d'Hercule, celle
dans le troifiéme nœud de la queuë du Scorpion, & celle
entre la queuë du Scorpion & l'arc du Sagittaire. Mais fi
quelqu'un défire de bien voir ces Nébuleufes, ou quelques-
unes des autres, il faut abfolument qu'il fafle ufage d’excel-
lents Verres, autrement il perdroit fa peine, comme je l'ai
moi-même éprouvé, & comme je l'ai déja dit. .
XXXVIIL Je fuis fort éloigné de révoquer en doute
les obfervations de M. Derham, je les regarde comme les
plus füres, mais mes idées font fort différentes des fiennes
fur la nature des phénomenes qu'il a obfervés..
Mem. 1734: », L
62 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
Toutes fes obfervations font voir que fi quelques Nébu-
Jeufes ne font que des Amas d’Etoiles femblables à celles
de la Voye lactée, dont la lumiére confonduë caufe ces
apparences, les autres Nébuleufes paroiflent de grands efpaces
lumineux dont les uns font ronds, les autres ovales. Des
cinq Nébuleufes qué M. Derham a obfervées, quatre étoient
des phénomenes de cette derniére efpéce.
XXXIX. J'ai expliqué comment il pouvoit y avoir
dans les Cieux des Mañles de matiére foit lumineufe, foit
réfléchiffant {a lumiére, dont les formes fuflent des Sphé-
roïdes de toute efpece, les uns approchants de la fphéricité,
les autres fort applatis. De tels Aftres doivent caufer des
apparences femblables à celles qu'a obfervées M. Derham.
Ceux qui approchent de la fphéricité feront vûs comme
des efpaces circulaires, quelqu’angle que faffe l'axe de leur
révolution avec le plan de Edcliptique; les autres, dont la
figure eft applatie, doivent paroître des efpaces circulaires
ou ovales, felon la maniére dont le plan de leur équateur fe
préfente à l'Ecliptique. Is peuvent même nous préfenter des
figures plus irréguliéres, fi plufieurs de ces Mafles, diverfement
inclinées & placées à différentes diftances, ont quelques-unes
de leurs parties dans une ligne droite qui pafe par la Terre.}
XL. Quant à la matiére dont font formées ces Mafles,
il n'eft guere permis de prononcer fi elle eft auffi lumineufe
que celle des Etoiles, & fi elles ne brillent moins que parce
qu'elles font plus éloignées.
Si ces Mafles font formées d’une matiére auffi lumineufe
que les Etoiles, il faut que leur grofieur {oit énorme par
rapport à celle des Etoiles, pour que, malgré leur éloïgne-
ment beaucoup plus grand que-celui des Etoiles, que fait
voir la diminution de leur lumiére, on les voye au Télefcope
avec grandeur & figure.
Et fi on les fuppofe d'une groffeur égale à celle des
Etoiles fixes, il faut que la matiére qui les forme foit moins
lumineufe que celle des Etoiles, & qu’elles foient infiniment
plus proches de nous que les Etoiles, pour que nous les
D E S US,CNT ENMEE 8:
puiflions voir au Telefcope avec une grandeur fenfible, On
_ prétend cependant qu'elles n'ont aucune parallaxe , & c’eft
un fait qui mérite d'être obfervé avec foin.
XLTI. Mais les Etoiles dont parle M. Derham, qu'on
obferve dans l’efpace lumineux d'Orion, & qu’on obferveroit
peut-être dans plufieurs autres de ces efpaces , ces F'toïles
{ont-elles au de- ou en de-çà des corps dont nous parlons?
C'eft ce que l'Optique nous apprend que nous ne fçau-
rions déterminer ; & quoique M. Derham prétende qu'il a
pü difcerner que ces efpaces lumineux étoient à une diftance
immenfe par de-là ces Fixes, il eft für que paffé un certain
éloignement, qui n'eft pas confidérable, il n’eft pas poffible
de décider fur {a diftance de deux objets qui n'ont ni l'un
ni l'autre de parallaxe, à moins qu'on n’en juge par {es di-
minutions de lumiére ou de couleur. Mais lorfque les degrés
de lumiére des deux corps font inconnus, il n’y a plus aucun
moyen de juger lequel de deux objets qu'on voit eft le plus
éloigné. Si la matiére des Mafles eft diaphane ou de la même
nature que font les Queuës des Cometes, on pourra voir au
travers des Etoiles, quoiqu'elles foient plus éloignées qu’elles,
Malgré toute la confidération que j'ai pour M. Derham,
-& l'autorité des Philofophes & des Théologiens qu'il cite,
je ne fçaurois m'empêcher de croire qu'il eft plus vrai-fem-
blable que ces efpaces lumineux qu'il a découverts font les
Dilques de quelques corps céleftes, tels que ceux dont j'ai
parlé, que de penfer que ce foit réellement des trous ou des
fenêtres par où l'on voit l'Empyrée.
XLIT Nous avons vû dans la feconde partie que la diffé-
rence entre l'axe de notre Soleil & le diametre de fon équa-
teur étoit fr peu confidérable, qu’elle étoit fort éloignée de
pouvoir nous être fenfible. Mais nous avons vû auffi dans
la feconde partie & dans celle-ci, que d’autres Soleils pour-
roient être fort applatis. Toutes ces figures s'accordent auffi-
bien avec les loix de la Statique que celle d’un Sphéroïde
plus approchant de la Sphere, II n’y a que la fphéricité par=
faite qui ne s’y accorde pas. '
L ij
84 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
XLIIIL On ne connoît jufqu'ici la figure des Etoiles
fixes par aucune obfervation'; nous ne les voyons que comme
des points lumineux dont l'éloignement immenfe nous
empêche de difcerner les parties. On peut raifonnablement
penfer que dans leur multitude il fe trouve des figures de
toute efpece. Qu'il me foit permis de répéter ici une con-
jeéture que j'ai donnée dans le Difcours fur la figure des
Aftres, parce qu'elle appartient à cette théorie, qu'elle en
eft une fuite néceilaire, que dans l'ouvrage que je viens de
citer, elle n'a peut-être pas été affés approfondie, & que je
ne penfois pas alors qu’elle dût être fi-tôt utile.
XLIV. Cette conjecture fert à expliquer comment
quelques Etoiles ont paru s'allumer dans les Cieux, y durer
pendant quelque temps, puis cefler d'être apperçüës, &
comment d'anciennes qu'on appercevoit ont ceffé de luires
Tout le monde fçait la difparition d’une des Pléïades. On
obferva du temps de Tycho une nouvelle Etoile qui vint
paroître dans la Cafliopée, qui lemportoit en lumiére fur
toutes les Etoiles du Ciel, & qui après avoir duré plus d’un
an, difparut. On en avoit vü une dans la même conftellation
en 945 fous l'empire d'Othon. Il eft fait mention d’une qui
parut encore vers la même région du Ciel en 1264; &
ces trois pourroient aflés vrai-femblablement n'être que la
même.
On obferve dans quelques conftellations, des Etoiles dont
la lumiére paroït croître & diminuer alternativement ; ül
s'en trouve une dans le col de la Baleine qui femble avoix
des périodes réglées d'augmentation & de diminution, &
qui depuis plufieurs années occupe les obfervateurs. Le Ciel
& les temps font remplis de ces phénomenes.
X LV. Je dis maintenant que fi parmi les Etoiles il s’en
trouve d’une figure fort applatie, elles nous paroïtront
comme feroient des Etoiles fphériques dont le diametre
feroit le même que celui de leur équateur, lorfqu'elles nous
: préfenteront leur face; mais fi elles viennent à changer de
fituation par rapport à nous, f elles nous préfentent leur
DES IS1C MEME :S) 1 6
tranchant, nous verrons leur lumiére diminuer plus ou moins
felon la différente maniére dont elles fe préfenteront, &
nous les verrons tout-à-fait s'éteindre, fi leur applatiffement
& leur diftance font aflés confidérables.
De même des Etoiles que leur fituation nous avoit em-
pèché d'appercevoir, paroitront, lorfqu'elles prendront une
fituation nouvelle, & ces alternatives ne dépendront que du
changement de leur fituation par rapport à nous.
XLVL [ne faut plus qu'expliquercomment il peut arriver
du changement dans la fituation de ces Etoiles applaties.
Tous les Philofophes d'aujourd'hui regardent chaque
Etoile fixe comme un Soleil à peu-près femblable au nôtre,
qui a vrai-femblablement fes Planetes & fes Cometes, c’eft-
à-dire, qui a autour de lui des corps qui circulent avec
différentes excentricités. Quelqu'une de ces Planetes qui cir-
culent autour d’un Soleil applati, peut avoir une telle excen-
tricité, & fe trouver fi près de fon Soleil dans fon périhélie,
qu’elle dérangera fa fituation, foit par la pefanteur que cha-
que Planete porte pour ainfi dire avec elle, felon le fyfteme
de M. Newton, qui fait que dès qu’elle pafle auprès de fon
Soleil, la pefanteur de fon Soleil vers elle, & la pefanteur
d'elle vers lui, ont un effet fenfible; foit par la preffion qu’une
telle Planete cauferoit alors au fluide qui fe trouveroit reflerré
entre elle & fon Soleil, felon le fyfteme des Tourbillons.
XLVII. De quelque caufe que vienne la pefanteur, on
peut aflürément fuppofer qu'il y a autour de chaque Planete
une force qui feroit tomber les corps vers elle comme
celle que nous éprouvons fur notre Terre. Une pareille force
{uffit pour changer la fituation d’un Soleil, lorfqu'une Planete
: pañfe fort proche de lui, & cette fituation changera felon la
maniére dont le plan de lorbite de la Planete coupera le
plan de l'équateur de fon Soleil.
XLVIIL. Le pañage des Planetes dans leur périhélie
auprès des Soleils plats, doit non feulement leur faire pré-
fenter des faces différentes de celles qu'ils préfentoient ; it
peut encore changer abfolument la fituation de leur centre,
L iÿ
86 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royarr
& lés déplacer entiérement. Mais on voit aflés que quand le
centre de ces Soleils feroit avancé ou reculé de la diftance d’un
ou de plufieurs de leurs diametres, ce changement ne pourroit
pas nous être fenfible dans des Etoiles dont le diametre ne
nous left pas. Ainfi quand on auroit obfervé avec exaétitude
que le lieu de ces Etoiles fujettes au changement a toûjours
été le même dans le Ciel, il n’y auroit rien en cela qui fût
contraire à notre théorie. On a prétendu cependant avoir re-
marqué quelque changement de fituation dans quelques-unes.
Les Etoiles dont les alternatives, d'augmentation & de
diminution de lumiére, font plus fréquentes, comme l'Etoile
du col de la Baleine, feront environnées de Planetes dont
les révolutions feront plus courtes.
L'Etoile de Caffiopée, & celles dont on n’a point obfervé
d’alternatives, ne feront dérangées que par des Planetes dont
les révolutions durent plufieurs fiécles.
Enfin dans des chofes aufii inconnuës que nous Ie font
les Planetes qui circulent autour de ces Soleils, leurs nom-
bres, leurs excentricités, les temps de leurs révolutions , les
combinaifons des effets de plufieurs Planetes, on voit qu'il
n'y aura que trop de quoi fatisfaire à tous les phénomenes
d'apparition & de difparition , d'augmentation & de dimi-
nution de fumiére.
QU'A RI EME) PARADIS,
Où l'on effaye de déterminer les figures des Affres dans
le fyfleme d'une pefanteur dépendante de l'Arrrattion
mutuelle des parties de la matiére les unes vers les
autres ; à où l'on explique ce qu'a dit M. Newton fur
la figure de la Terre.
XLIX. Après avoir déterminé dans les Sections pré-
cédentes les figures des Afres en général, & en particulier
la figure de la Terre, de Jupiter & du Soleil ; en confidérant
la pefanteur à la maniére de M. Huygens, c'eft-à-dire,
comme uniforme & vers un centre; & après avoir déterminé
DES SCclENCEÆE.s. 87
les mêmes chofes dans l’hypothefe des autres Philofophes
plus modernes qui la confidérent comme fe faifant vers un
centre en raifon inverfe du quarré de la diflance au centre,
fans la faire dépendre de l’Attraction des parties de la matiére,
Afin de rendre cet ouvrage plus complet, je vais, dans
cette quatriéme partie, examiner les figures que doivent avoir
les Aftres dans le fyfteme de M. Newton, c'eft-à-dire, fi
leurs figures dépendent de la Tendance mutuelle de leurs
parties les unes vers les autres, & fi la pefanteur que nous
éprouvons n’eft que l'effet de cette Tendance.
Je vais commencer par expliquer ce que M. Newton a
donné fur la figure de la Terre. 1 s’eft contenté de trouver
le rapport entre fon Axe & le Diametre de fon Equateur,
fans déterminer fa figure entiére, qu'il a regardée comme ff
elle étoit formée par la révolution d’une Ellip{ autour de
fon petit Axe, & la Terre en effet ne doit pas différer fen-
fiblement de cette figure.
Dès qu'on regarde les parties de [a matiére comme s’atti-
rant les unes les autres, la figure d’un Sphéroïde dépend
bien de lAttraétion de fes parties, mais cette Attraction
dépend elle-même de Ia figure qu'a le Sphéroïde, & c’eft
ce qui rend difficile fa détermination du rapport de Axe
au Diametre de l'Equateur,
L. Soit l'Ellipfoïde-
APBQ formé par la
révolution de l'Ellipfe
autour de fon petit
axe PQ.
Soit un Atome ou
un très-petit corps
placé en D fur l'axe
prolongé , & qu'il
faille trouver l'Attrac-
tion que l’Ellipfoïde
applati exerce fur lui,
en fuppofant que l'attraction répanduë dans les parties de {a
89 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare -
matiére, fe fafle en
raifon renverfée du
quarré de leur dif-
tance ?
Ayant tiré d'un
oint G lordonnée
GE&Yordonnée in-
finiment proche ge,
& conçû l'Ellipfoïde
compofédestranches
ou des petits cylin-
dres que terminent
ces deux ordonnées pendant la révolution de l'Ellipfe autour
de l'axe PQ, je cherche F'Attraétion que chacun de ces
cylindres exerce fur le corpufcule qui eft en D.
Ayant tiré la ligne DF dans une fituation quelconque,
& la ligne D f infiniment proche, le corpufcule eft attiré
par le petit anneau formé par la révolution de Ff; & cette
attraction eft en raifon directe de la fuperficie attirante, &
en raifon renverfée du quarré de Ia diftance, c’eft-à-dire,
comme IE Mais cette attraction fe fait fuivant DPF,
& on veut l'avoir fuivant DC ; il faut donc multiplier Ia
quantité précédente par Lee & l'on aura Êe SE DIE
Les À femblables DEF, Fhf, donnent Ff: fh:: DF
:EF)JouFfe= DFE. & fubftituant cette valeur de FF
dans l'attraction du petit anneau , on a SLR ou (à caufe
que f# eff la différentielle de DF) LE; 922.
On aura l'attraction du plan circulaire formé par fa révo-
lution de lordonnée GE, en prenant F'attraétion de la mul-
titude des anneaux Ff, c'eft-à-dire, en intégrant — ;:
en faifant DE conftante, ce fera 1 Te
Faifant
DE! SMS ic 1 'E IN CUE si 89
Faifant donc DP=e, PE—x, EG=y, l'attraction
du plan circulaire formé par la révolution de G Æ fera
ie)
vV{e+x +3)
Si maintenant on appelle le demi-axe de l'Ellipfe PC, a;
& l'autre demi-axe AC, b, Yéquation de lEllipfe fera
LED — ve (2ax— xx) ; & mettant cette valeur de yy
(e+x)
I —
dans l'attraction du plan, on a 1 —:
ets qe Éb faae=ss)
panh l'attraétion du plan dans lEllipfoide,
0 Et: multipliant la quantité PE par Æ£e ou dx;
on a x ..(e+x) dx
‘arpeul 3 (zax— xx)
Si le corpufcule eft placé en P, c’eft-à-dire, au pole,
la diftance e eft zero, & l'expreflion précédente devient
PACE CERTES LE Pere SERRE PRE donnera
Vzabb#—(bb—aa) xx
l'attraction totale que le corpufcule fouffe de fEllipfoïde
vers C, ou la pefanteur.
- Pour A cette quantité, je lui donne cette forme,
C # dx" ;
dx — Ta * Vs) où dx + =
- _abb. à
QÙ 7527 dx — “dx 1 Le LEP
Mamans Tin) À Eds dont
Vs V(bb— aa) V( EEE Lo) ,
2abb :
Labs eft ee PS] V(R== x— xx) EM
abbdx ‘
ANSE 2) = À L F4
TIRE fs a 5)" ou (ee pour l'arc de
abb
cercle dont le rayon — & le finus verfe —x) on
—— bb—aa’
Ts V2 abbx—(bb—aa) xx
me) Hit
Men. 173 4s : M
a pour l'intégrale x +
90 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
Cette quantité étant zero, lorfque x — 0, il n'y faut tien
ajoûter; & lorfque x—2, elle devient 7 = nn )Q
ou par Q j'entends Farc de cercle, dont le rayon étant
ab b
7— bb—aa
La pefanteur donc qu'éprouvera un corps placé au pole
fur l'Elipfoïde applati fera exprimée par cette quantité, &
dépendra, comme on voit, des différents rapports qui peu*
vent être entre l'axe & le diametre de l'équateur.
, Le finus verfe et — 2 a,
LI. Cherchons maintenant la pefanteur qu'un corps
éprouvera placé à l'extrémité de l’axe de l'Elipfoïde allongé:
On aura pour Ja différentielle de Vattraction la même
expreflion qu’on vient de trouver dx — drds j
Vial + (aa— bb) xx
mais dans laquelle a > b.
Pour l'intégrer , je la mets fous cette forme,
dx
Vaa— 50) y Estsx) ?
114 a
7 4 —— ; dxxdx) Las
D PEN PV ae à a Ge 20
ou dx {aan} 7 EtT7] RE) "TT ya—1h VE ++)”
aa—bb aa—bb
Ts a 2abb
dont l'intégrale eft x — D VESTE x + xx)
aabb ab 2abb
7 x + V sx x).
aa—bà
Comme cette quantité doit s'évanouir lorfque x —0,
on a pour l'intégrale corrigée
a 24abb aabb abb
— aa) Va Nom (RE À
Bb 41 bb
mme 77207 7 un EL Val xxx).
aa—bb
Et lorfque x = 24, elle devient
aabb YÉSETUE LA ESTSR 24abb
re à TUE D TUE LE T
D 5 S'CTETN CIE S or
On voit par les calculs précédents, que la pefanteur au
pole d’un Ellipfoïde applati dépend de {a quadrature du cercle,
& qu'au pole d'un Ellipfoïde allongé, elle dépend de Ia
quadrature de Fhyperbole.
LII. Au pole d'un Elipfoïde qui n'eft ni allongé ni
applati, c'eft-à-dire, d’une Sphere, la pelanteur ne dépend
ni de la quadrature de lhyperbole, ni de celle du cercle,
En effet, lorfque 4— 6, l'attraction du petit cylindre que
axds
Vaabbx(—bh+aa) xx
EYE. qui s'intégre facile-
nous avons trouvée (art. 50.) dx —
r : | d
devient dx— 2%, ou dx —
24% 214
ment, & donne x — ET , & pour la pefanteur de Ia
Sphere entiére 2 a — LEA ou + a:
LIT. Ayant trouvé les pefanteurs au pole, dans l'Ellipfoïde
applati, dans l'Ellipfoïde allongé, & dans la Sphere, on peut
facilement comparer ces pefanteurs ; & c’eft par des calculs
femblables que M. Newton a trouvé,
Que fi le petit axe
de lEllipe PAQB
étoit au grand, c’eft-
à-dire, a à b, comme
1ooù101, la pefan-
teur en ? fur l'Ellip-
foïde applati, feroit à
la pefanteur en P fur la
Sphere dont le rayon
feroit zou CP, :: 126
CG EAT
Et que la pefanteur
en À fur l'Ellipfoïde allongé, feroit à la pefanteur en À fur
1a Sphere dont le rayon feroit b ou CA :: 125$ : 126.
LIV. L’Eliploïde applati formé par la révolution de
TEllip{e autour de laxe PQ repréfentant la Terre, il faut
M ji
2. MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
maintenant chércher le rapport de la pefanteur au pole P
ou Q à la pefanteur en À fur Féquateur.
LV. La folidité de l'Ellipfoïde applati qui repréfente Ja
Terre, eft moyenne proportionnelle entre la Sphere circon-
fcrite, dont le rayon eft CA, & l'Ellipfoïde allongé formé
par la révolution de YEllipfe autour de l'axe AB.
Car concevant la Sphere circonfcrite, A.
& l'Ellipfoïde formés Fun & l'autre pa y SRE
Ja révolution du cercle A MR & delEE #
lipfe AG P autour de l'axe AC, divilés
dans leurs petits cylindres formés. par
la révolution des ordonnées ME, me,
GE &ge, ces cylindres dans la Sphere © ? C
feront aux cylindres dans l'Elliploïde, comme ME£*àGE*,
parce que leur hauteur Ee étant la même, ils font comme
leur bafe ; & comme dans l'Ellipfe le rapport de A7E*° à
GE: eft un rapport conflant, & celui debbàaa, la fommé
de ces cylindres dans la Sphere, eft à la fomme dans l'EI-
lipfoïde allongé :: 48: aa, ou {Spher.) : ( Ellipf. all.)
::0b:aa.
Concevant maintenant la Sphere circonfcrite & T'Ellip-
foïde applati formés Fun & l'autre par la révolution du
cercle AMR & de YEllipfe AG P autour de l'axe PC, di-
vifés dans leurs petits tuyaux formés par la révolution des
ordonnées ME, me, GE, ge, autour de l'axe PC, ces tuyaux
dans la Sphere feront aux tuyaux dans l'Elliploïde applati
comme leur longueur ME & GE, parce que leur épaïtieur
ÆEe & leur rayon C Æ font les mêmes ; & comme le rap-
port de ME à GE eft conftant, & celui de à à a, la
fomme des tuyaux dans la Sphere eft à la fomme dans l'EI-
lipfoïde-applati :: & : a, où (Spher.) : (El. app.) ::b :a;
ou ( Spher.) : (EN. app. )* :: LB : aa. Donc ( Spher. )
: (EI, all.) :: (Spher. )* : ( El. app. )'; & ( EN app.)
= V/{Spher.) * (Elall)
1: +00! & SrS 10 JEANIGUE s
LVTI. Et comme les pefanteurs qu'un corps éprouve en À,
de la Sphere, du Sphéroïde applati & du Sphéroïde allongé
peuvent pafler pour proportionnelles aux quantités de ma-
tiére de ces trois corps ; la pefanteur qu'un corps éprouve de
la Terre placé en À fur l'Equateur terreftre eft moyenne
proportionnelle entre la pefanteur qu'il éprouveroit de 1a
Sphere & du Sphéroïde allongé.
LVII Nommant donc cette pefanteur qu'un corps
éprouveroit fur Equateur terreftre. ...... eee UTP
La pefanteur en P fur le Sphéroïde applati......., — p,
La pefanteur en P fur la Sphere dont le rayon et CP—5. :
La pefanteur en À fur le Sphéroïde allongé... .... —.
La pefanteur en À fur la Sphere dont le rayon eft CA =,
RS NE AO Test
Ras. 2 Uss 12 6,
Ou mettant entre les deux termes de cette proportion un
moyen Ms on a
me TS 25 ir 215,5 11 25 Lou £: 1257: 126.
LVIIT. De plus la pefanteur qu'un corps éprouve,
placé fur la furface de deux Spheres différentes eft en raifon
directe du rayon de ces Spheres (art. 52.) on a donc
5%: 100 101:
LIX. Et joignant ces trois proportiôns
OS 20: 12%
S':T:: 126 : 125L
HE 100): HT ON
OnaP:T:;::126»%x 126% 100: I2$XI2$2XIOISs
où P:T:: 1587600 : 15844371.
ou P:T':$01 : so.
C'eft-à-dire, que la pefanteur au pole de a Terre eft à fa
pefanteur fous l’Equateur, comme SOLà $00.
_ LX. M. Newton a démontré (Liv. I. prop. XCI.
Coroll. 3.) Que dans un Ellipfoïde, FAttradion qu'un
corps placé fur un diametre éprouve, ft en raifon directe
de fa diflance au centre, Cela pofé,
M if
On a par (art. 53.)
94 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
. Concevant le demi-diametre de l'équa-
teur AC & le demi-axe PC divifés dans
un même nombre de parties £e, H4, qui »
{feront entr’elles comme le demi-diimetre
de l'équateur & le demi-axe ; puifque la
pefanteur au pole eft so, & fur l'équateur
; Ë : L SrotCA
500, la pefanteur P en A fera P=— À.
De même la pefanteur æ en Æ fera 7 — NE Voilà les
forces réfultantes de l'attraétion, qui tirent les parties H#, Ee,
vers le centre.
LXT. Mais la Terre tournant autour de l'axe PC, les
parties qui font dans AC pendant qu'elles font tirées vers ©
par la force 7, font repouflées vers 4 par la force centri-
fuge que le mouvement de révolution leur donne ; & cette
force en chaque point £ eft proportionnelle aufi à fa diftance
au centre C £.
Si donc cette force en À eft f, on a ce qu'elle eft en
PA fx CE
er «
Concevant donc PC & CA comme deux colomnes du
fluide qui forme la Planete, on aura le poids vers C du petit
cylindre HA; en le multipliant par fa force accélératrice,
ce fera SN CHRER., ou pile ser ; & l'on aura le
poids vers Cdu petit cylindre £°e, en le multipliant par fa force
accélératrice seecE-ficE, ce fera (2%) CEd (CE).
LXII La fomme des poids des cylindres A} fera en
intégrant & le poids de la colomne entiére PC
fera s°' CP,
2
La fomme des psids des cylindres £e fera se pCE
2 CA
& le poids de la colomne entiére AC fera pop,
Puifque le fluide de la Planete eft dans un état permanent,
il faut que ces deux colomnes fe foûtiennent; c'eft-à-dire,
as
P hH (e
n° Er sv SC EN CHE Sc | M
ilfaut que 521: — 601 CA | où (àcaufe deCP:CA
:: 100:101)ilfautquesor x100—={$00—f) x 101;
d’où on tire f— #22 = 4
Donc dans une Planete qui auroit le diametre de l'équa-
teur à l'axe, comme 101 à 100, & où la force centrifuge
de chaque partie feroit à fon poids comme 4 à sos, les
colomnes féroient en équilibre,
Or dans cette Planete, la force centrifuge qui eft “+ du
poids, rend chaque partie de la colomne C À plus longue
que les parties de la colomne CP de -, & fait élever le
fluide dans l'équateur de -2=.€ partie du demi-axe PC.
LXIIT I faut donc dire, en comparant la Terre à
cette Planete; fi la force centrifuge dans la Planete où elle
eft la -#—. partie de la pefanteur, fait élever chaque cylindre
dans l'équateur de =, la force centrifuge fur la Terre qu'on
{çait être dans la colomne CA Ia -5.€ partie de la pefanteur
fera élever chaque cylindre de =; d'où l'on voit que le
diametre de l'équateur fera à l'axe comme 230 à 2 29. Le
demi-diametre moyen de la Terre, felon M. Picard, étant
de 19615800 pieds, la Terre fera plus élevée à l'équateur
qu'aux poles de 85472 pieds, le demi-diametre de fon
équateur fera de 19658600 pieds, & fon demi-axe-de
19573000 pieds.
LXIV. Comparant maintenant les autres Aftres avec
la Terre; appellant la pefanteur & la force centrifuge fur la
Terre, P & F, & fur les Aftres æ & @; on a pour trouver
la différence du demi-diametre de leur équateur à leur demi-
PNIDE AR ONERE 2 Te PO PRE
AXE 5 : 7°: 32ÿ : CEE différence = pe
La pefanteur fur la fuperficie de différentes Planetes étant
en raïfon compofée de leur denfité & de leur rayon ; & les
forces centrifuges étant en raifon compofée de la directe du
rayon, & inverfe doublée du temps périodique de la révo-
lution autour de l'axe; fi l'on nomme fur la T'erre la denfité
=D, le rayon =, le temps périodique = 7; & fux
d6 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE
fes autres Planetes A, p, $, on aura la différence du demi-
‘ £ é OU PER
diametre de l'équateur au demi-axe SIN F EE D *x R x es
VÉRARREESS D'xTx TES 0 IST CA
1229 dxpx op Jx#s; d'où lon voit,
LXV. Que fi lAfffe eft plus grand ou plus petit que
Ja Terre, & que fa denfité & le temps de fa révolution foient
les mêmes, la figure de l’Aftre eft la même que celle de
Ja Terre.
Mais fi le temps de la révolution n’eft pas le même, la
différence du diametre de l'équateur à l'axe changera en raifon
inverfe du quarré des temps.
Enfin, fi la denfité augmente ou diminuë, la différence
du diametre de l'équateur à l'axe augmentera ou diminuéra
en raifon inverfe de l’augmentation ou de Ia diminution de
la denfité. 7
LXVI. On peut par-à facilement comparer les figures
de la Terre, de Jupiter, & du Soleil. Car le temps de la
révolution de la Terre autour de fon axe étant de 23h 56”
4", & celui de Jupiter de 9h 56’, on a TT: 58 à peu-près
:: 29 : $, & la denfité de la Terre étant (felon € qu'a
trouvé M. Newton, Prop. VIII. Liv. III.) à la denfité de
Jupiter, ou D : A :: 400 :94+,ona la différence entre
le diametre de l’équateur de Jupiter & fon axe, à fon axe,
; 29 4, _400 Lol: net pr fr ESPN AT Un
MEN mer 2 : 13 OU à tiès-PEu-Près :: I : 9 +
Comme cette différence eft beaucoup plus grande que
celle qui réfulte des obfervations de M. Caffini, & que celle
qui réfulte des obfervations de M. Pound, M. Newton
conjecture que Jupiter eft plus denfe vers le plan de fon
équateur que vers les poles. Cetexcès de denfité feroit que
la colomne qui eft dans le plan de l'équateur, pour être en
équilibre avec celle qui répond au pole, doit être plus courte
que cette Théorie ne la détermine, & par conféquent le
diametre de l'équateur différeroit moins de l'axe, & fon
‘apport à l'axe approcheroit plus du rapport obfervé.
LXVITL
1,5 ESS CI EN NME & “
LXVIL Pour trouver la différence dont le diametre de
T'équateur du Soleil furpañle l'axe; le temps de la révolution
du Soleil autour de l'axe étant de 25 +i, on a 17°: 58
:: 1: 650+, & la denfité de la T'erre étant à Ka denfité du
Soleil (Prop. VII. Liv. IL.) ou D : A :: 4 :1, on aura
la différence entre le diametre de l’équateur du Soleil & fon
axe, à fon axe, :: Be * 4X335:13 OU::1:37226,
différence beaucoup plus grande que celle qui réfulte de
l'hipothefe de la pefanteur vers le centre en raifon renverfe
du quarré de fa diflance, mais cependant imperceptible à
toute obfervation.
LXVIIL Je reviens à la figure de la Terre. II fuit de
l'équilibre qui eft entre les colomnes, que prenant des parties
femblables de ces colomnes en À & en 2, A
ces parties pefent également. Pour cela, il F
faut que la force qui anime celle qui eft en D E
A vers C, que j'appelle /4 pefanteur réduite,
foit à la pefanteur de celle qui eft en P,
comme la partie de la colomne qui eft en P,
eft à la partie de la colomne qui eft en À,
ou comme CP à CA; & c'eft la même chofe pour les
colomnes obliques CD.
LXIX. D'où lon voit que les différents poids d'un
même corps , dans différentes régions de la Terre, font en
raifon inver{e des longueurs des colomnes, ou des diftances
au centre de la Terre,
Si donc on avoit avec aflés d’exaétitude le rapport des
différents poids d’une même quantité de matiére aux diflé-
rentes latitudes ( ce qu'on peut avoir par les longueurs des
Pendules ifochrones, ou par le retardement des Pendules de
même longueur vers f Equateur) on détermineroit les lon-
gueurs de toutes les colomnes pour quelque angle qu'elles
faflent avec l'axe, c’eft-à-dire, la figure entiére de la Terre,
&. c'eft la feule maniére dont M. Gregori la détermine.
Et fi la figure de la Terre eft donnée, on peut par elle
Mem. 1734: a
P hH C
98 MEMOTIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE
déterminer les différents poids d’un même corps à différentes
latitudes, ou, ce qui revient au même, les différentes lon-
gueurs du Pendule ifochrone.
En effet, confidérant la Terre comme un Ellipfoïde, ïl
eft facile de démontrer le Théoreme de M. Newton, Que
l'augmentation des poids, en allant de l'équateur au pole, appro-
che fort du rapport du quarré du finus de la latitude.
LXX. Car foit À D P le quart de #
TEllipfe qui repréfente le Méridien de
la Terre, & AMR un quart de cercle
décrit du rayon C À, demi-diametre de
TE quateur terreftre. On a par la propriété
de l'Ellipfe RP : MG :: CR : EM,
ou MG —= TRE Mais à caufe que RP
les triangles DMG, EMC, font femblables, lorfque V'Ef-
lipfe approche fort du cercle (comme fait 'Ellip{e qui fert
de Méridien à la Terre) on a MG : MD :: MC: ME,
__ MDxMC RPxME __ MDxMC
où MG= —ÿjg — Ona donc = y,
M
ou MD — Ê? 2 ae ; C'eft-à-dire, 21D à RP commele
quaïré du finus dé l'angle ACAZ au quarré du finus total,
ou (comme À P eft conftant) 47 D comme le quarré du
finus de l'angle ACM, ou du fmus de la latitude.
Mais il eft vifible que le poids d’un corps fous l'équateur
étant repréfenté par CD, le poids du même corps placé
en D eft repréfenté par CA ; l'augmentation du poids, en
allant de l'équateur vers le pole, eft donc repréfentée par
MD, cette augmentation eft donc proportionnelle au quarré
du finus de la latitude. .
C’eft d’après ce Théoreme que M. Newton a calculé fa
Table des différentes longueurs des Pendules répondantes
aux différentes latitudes.
LXXTI. Cette détermination de la figure de la Terre
n'eft qu'une approximation ; auffi M. Newton ne la donne-
t-il pas pour une détermination exacte, Les erreurs font
D ES, SC J'EÆENIGUE s, 99
d'autant moindres, que la figure des Aftres approche plus de
lElliploide, & que fEllipfoïde approche plus de la Sphere.
LXXII Si lon vouloit une folution plus exacte de
ce Probleme; ou que la méthode précédente , qui fappofe
que le Sphéroïde terreftre approche beaucoup de la Sphere,
ne püût pas fervir, comme il arriveroit fi la Terre étoit fort
applatie; voici comme on pourroit réfoudre le Probleme. I
faudroit , après avoir trouvé l’attraétion qu'éprouve un cor-
pufcule en 2 au pole du Sphéroïde formé par la révolution
d'une Ellip autour de l'axe PQ dans laquelle des deux axes
a & b feroient indéterminés, il faudroit chercher l'attraétion
qu'un corpufcule éprouveroit en À placé dans l'équateur de
ce Sphéroïde.
Pour cela, il faudroit dans Île A
Sphéroïde PAQB, formé par a
révolution de l'Ellipfe PAQ au-
tour de l'axe PQ, chercher l’At-
traction qu'un corpufcule éprouve
de chaque Ellipfe qui eft la fe&tion D
du Sphéroïde par un plan XX, :
parallele à l'axe; & multipliant
cette Attraction par Æ£e, difié-
rentielle de AB, on auroit l At-
traction d’un pessgylindre à bafe
elliptique, terminé par les deux
plans 44, XK; & fi Von pouvoit vaincre les longueurs
& les difficultés de ce calcul, on auroit, en intégrant, lAt-
traction qu'éprouveroit le corpufcule placé en À fur léqua-
teur du Sphéroïde.
Ayant donc la pefanteur en P par une fonétion [44] des
axes de l'Ellipfe, & la pefanteur en À par une autre fonc-
tion (a) ; ayant de plus la force centrifuge en A—f, on
auroit ( puifque dans l'Ellip{oïde, la pefanteur fur chaque
cnlomne eft en raifon directe de Ia diftance au centre: &
que la force centrifuge dans la colomne AC fuit la même
N ji
B
400 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
proportion ), on auroit la pefanteur en AH — [aë] ; e 3
& la force qui tire Ee vers C mise ue &
pour les poids vers € des petits cylindres [ab] -CERAICER
& ((ab) — f) x» RE Et puifque les deux co-
lomnes CP & CA font en équilibre, LA [CH *x d{CH) =
(=) [CE x d(CE), ou [ab] x CP=((ab)}—f) x CA.
Mettant dans cette équation, a pour CP, & & pour CA,
on aura a [ab] — 6 {(ab) —f); & f étant donnée, cette
équation déterminera la relation entre a & b, c'eft-à-dire,
le rapport entre l'axe & le diametre de l'équateur.
#
DES S CT E NE & 10
ms,
ESS AI D'ANALISE
DNPRS PA TA NT ES
Par M. Bouzpuc.
Uoïrqu’un habile Chimifte de cetté Académie f&
foit occupé pendant plufieurs années à l'analife des
Plantes, & ait eflayé par-là de découvrir, fi par la recherche
de la différente proportion de leurs principes on pourroit
juger de leurs différentes propriétés; après en avoir analifé
un très-grand nombre avec toute l'exactitude & la précifion
pofible, on ne s’eft affüré, comme le dit feu M. Homberg,
dans un Mémoire donné à l'Académie, d'autre chofe, fmon
que cette voye que l'on avoit cru la feule de fûre pour y
parvenir, y étoit entiérement inutile, & qu'il falloit l'aban-
donner, puifque le produit des Plantes les plus falutaires ne
différoit pas , ou de peu de chofes, du produit de celles qui
étoient les plus venimeufes, le feu que l'on étoit obligé
d'employer pour ces analifes changeant entiérement & dé-
naturant leurs principes, en forte qu'ils n'étoientplus qu'en
partie des créatures du feu, & non pas les principes que la
Nature avoit employés à leur compofition.
Le peu de réuffite de ces analifes m'a fait imaginer, qu'en
€xaminant non feulement les Plantes dans leur entier, ou leur:
marc, mais aufli les fucs ou les décoctions de ces mêmes
Plantes , on pourroit peut-être rencontrer dans l'examen de
leurs fels eflentiels ce que l'analife connuë & ufitée avoit
refufé. Dans cette idée, j'ai commencé par examiner une
feule Plante fort employée dans la Médecine, qui eft Ja
Bourache.
_ J'ai donc pris une bonne quantité de décodtion de
Bourache, que j'ai féparée en trois parties égales. J'ai fait
N iij
30 Janvier
1734:
102 MEMOIRES DE L'AÂCADEMIE Royare
évaporer la premiére jufqu'à pellicule, ou en confiftence de
firop ; elle étoit d’une couleur fort noire, étant chargée de
beauçoup de parties huileufes, en forte que l'ayant laïffée en
repos dans Îe temps chaud, elle fe couvrit en peu de jours
d’une peau affés épaifle, laquelle étoit recouverte de moi-
fiffure. Ayant enlevé cette peau, je trouvai au deflous une
aflés bonne quantité de criftaux en aiguilles fines & déliées,
confondus avec un grand nombre d’autres petits criflaux
falins, aflés irréguliers pour ne pouvoir en déterminer la
figure, le tout nageant dans une portion de liquide gras où
fuupeux. Je détachai quelques-uns de ces criftaux Ionguets
& en aiguilles, & les ayant mis fur une pelle rougie, ils
s'y enflammerent comme auroit fait le Salpètre mêlé avec
quelque corps gras ou fulphureux ; & en effet ce Salpètre
avoit encoreun enduit de la partie grafle de cette décoétion.
Cette obfervation avoit déja été annoncée par M. Lémery,
qui a cité R-deflus M.de Reflons. Voilà donc l’Acide ni-
treux démontré dans cette Plante, & de plus Z Mirre y eft
dans tout fon entier, puifque quand j'ai verfé de l'huile de
Tartre fur ce nouveau Nitre diflous, elle n’en a rien préci-
pité, comme elle l'auroit fait fi l'acide nitreux avoit eu pour
bafe une fimple matiére terreule.
J'ai pris la deuxiéme portion de ma décoétion que j'ai
pafñlée fur de la Chaux vive, afin de la dégraiffer, enfuite
de quoi je l'ai fait évaporer à lente chaleur, & jufqu'à une
légere pellicule, & l'ayant laiflée en repos pendant plufieurs
jours , jy ai trouvé des criftaux en aiguilles, plus diftinéts,
mieux formés & moins roux que ceux de la premiére por-
tion, ils étoient vrayement nitreux ; & au deflous de ces
criflaux longuets j'ai trouvé une bonne quantité de criflaux
cubiques que je n'eus point de peine à reconnoître pour des
criftaux de Sz/ marin.
J'ai pris de ces criftaux en aiguilles, que j'ai mis fur le
charbon allumé, & qui y ont fufé comme ceux de a pre-
miére portion de ma décoction : & pour ceux qui étoient
: DES SCIENCES. 103
de figure cubique, outre qu’ils décrépitoient au feu fans sy
enflammer , c’eft qu'en ayant fait fondre dans de eau, &
ayant verfé cette diflolution fur celle d'argent faite par
l'efprit de Nitre, il s’y faifoit fur le champ un caïllé blanc,
lequel amaffé, lavé & expofé au feu, fe changeoit en argent
corné, tranfparent, & fe coupant au coûteau,
Voilà donc l'Acide nitreux & Y Acide du Sel commun,
où plütôt le Sapétre & 1e Se/ marin bien avérés dans la même
Plante.
J'ai enfin pris la troifiéme portion de ma décoction de
Bourache que j'ai paflée fur des cendres de bois neuf ie à
l'ayant fait évaporer de même que les deux premiéres, &
l'ayant laiffée en repos quelques jours, JY ai trouvé plus
de Nitre que dans les deux précédentes portions , plus
blanc ou moins roufsâtre. II y a toute apparence, que cette
plus grande quantité de Nitre qui fe trouve dans cette troi.
fiéme portion, vient de ce qu’une partie d'acide nitreux
n'ayant été unie, ou qu'avec une portion de fimple terre,
où qu'avec la matiére grafle qui eft abondante dans cette
Plante, rencontrant dans la leflive le {el alkali fixe des cen-
dres, s'y joint, & fe corporifie avec lui, ce qui augmente
le produit du Salpétre.
J'ä dit, que j'avois enlevé de deffus la premiére portion
de la décoétion de la Plante évaporée, & qui n'avoit point
été pañlée ni fur les cendres ni fur la chaux, une peau grafle
& couverte de moififfure, laquelle defféchée au feu & mie
en charbon, sy enflammoit de même que fi j'euffe mis dans
un creufet au feu du Nitre mélé de la poudre de charbon
ordinaire, parce que cette peau grafle en retenoit encore,
ayant pas permis au Nitre de s'en débarafler entiérement,
* Après ces premiéres expériences faites fur la décoction
de la Bourache, j'ai voulu voir ce que le Marc ou la Plante
entiére brülée me donneroit de plus en fel.. J'en ai donc
féché à Pombre, je l'ai enfüite fait brôler dans un pot de
grès à petit feu, & le vaifleau couvert elle s'y eft convertie
To4 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYyaALE
en charbon, que j'ai après calciné à feu ouvert pour Îé
réduire en cendres, & pour en faire une lefive, avec 1a-
quelle j'ai voulu faire quelques expériences avant que de
Tévaporer pour en retirer les fels qu’elle pourroit contenir;
& perfuadé que le fel alkali n'y manqueroit pas, les cendres
des Plantes en fourniffant ordinairement, j'ai mêlé la leffive
avec du firop violat, qu'elle n'a que très-légerement &
même à peine verdi ; de plus cette couleur verte n'a point
tenu, & le frop a repris fa premiére couleur en très-peu de
temps, ce qui m'a fait juger, ou que le fel alkali s'y trouvoit
en très-petite quantité, ou qu'il y étoit confondu & em-
baraflé avec d’autres {els qui s’oppofoient à fon eflet fur le
firop violat, & événement n'en a éclairci; car en faïfant
évaporer cette leffive jufqu'à pellicule, & la laïffant enfuite
en repos dans un lieu frais, je n'ai point tardé d'y apper-
cevoir des criftaux de Zartre vitriolé très-diftinéts, très-bien
figurés, & de toutes les propriétés qui caraétérifent ce fel ;
j'ai retiré la liqueur qui furnageoit, & l'ayant de nouveau
laïflé un peu évaporer, j'y ai trouvé une autre portion du
même fel, dont les criftaux étoient moins gros que les
premiers, mais dans leur petitefle bién connoiflables pour
être le même fel à tous égards.
J'ai enfuite continué d'évaporer la leffive jufqu’à environ
Ja diminution de fa moitié, & l'ayant laïffée en repos, Ty.
ai trouvé au bout de quelque temps des criftaux cubiques,
lefquels , bien examinés, font un vrai Sel marin qui s’étoit
confervé malgré la forte calcination; le refte de la leffive a
alors changé le firop violat dans un beau verd d’émeraude
qui a duré, & ne s'eft point perdu, comme j'ai dit que
cela étoit arrivé à cette même leffive avant qu'elle eut été
concentrée & privée des deux fels moyens dont je viens
de parler.
Je crois donc pouvoir dire avec certitude, que la Bou-
rache peut fournir quatre fels différents ; fçavoir, le Salpètre,
le Sel marin, le Tartre vitriolé, & enfin un Sel alkali fixe;
&
D'Ess M$2CIT EN QUE vos!
& ce qui, à monifens, eft une chofe partieuliére, é’eft de
voir que:les:trois Acides minéraux fe trouvent en même
temps dans une même Plante. Hg}
Je ne penfe pas que le T'artre vitriolé foit formellement
dans cette Plante: on ne peut pourtant pas douter que l'acide
vitriolique n’y exifte ; mais commeil étoit enveloppé avant
Ja calcination de la matiére grafle ‘qui: y eft abondante, il
m'étoit pas ailc de le connoïtre : cette matiére graflerau
contraire ayant été diflipée par le feu, & l'acide vitriolique
devenu libre, rencontrant le fel alkali que la Plante fournit,
ou le Nitre fixé qui refte après da déflagration, il s'y unit,
dont il réfulte le Tartre vitriolé , de la même façon que
du mêlange d’un fel alkali & du foufre commun, il fe forme
un l'artre vitriolé après que l'on a chaffé par la calcination
la partie inflammable du foufre.
H ne fera pas hors de propos de dire ici, à l'occafion du
Tartre vitriolé, qu'il y.a déja long-temps qu’en travaillant
avec M. Grofle fur là Potafle, que fon a communément
regardée comme un fel alkali, nous y trouvâmes une bonne
quantité de vrai Tartre vitriolé, & depuis nous avons vü
que ce fait avoit déja été annoncé par Cardilucius ; cependant
cela mous a rendus attentifs à ne pas négliger l'examen des
Cendres de différentes Plantes, & je puis aflürer qu'en faifant
les fels alkalis fixes, & quelquefois feulement à ce deflein,
nous avon® retiré, des cendres de différentes Plantes ameres
& aromatiques, un vrai Vartre vitriolé, ce qui peut du moins
confirmer, que l'acide vitriolique, quoique le plus fixe des
acides minéraux, ne laifle pas de s'élever, &, felon toute
apparence, de fe trouver dans un plus grand nombre de Plantes
qu'on ne La penfé jufqu'ici. Je conjecture de plus qu’il fe
trouve peu de fels fixes tirés des Plantes, qui foient purement
alkalis, & cela après en avoir fait & examiné un grand
nombre : il n'y a que le fel de Tartre qui me paroifie être
le plus parfait alkali, n'y ayant pü reconnoître jufqu'ici
aucun mélange d’autres fels,
Mem. 1734 . O
106 MEMOIRES DE L'AÂCADEMIE RoyALE
J'ijoûterai encore qu'iln'y a point d'apparence, que d'au-
tres:Plantes, qui, païoiïflent avoir du nitreux: en: général,
comme font la Poirée, le Chardon-benit ; le: Cerfeuil, 1e
Concombre fauvage, la Paritaire, & d’autres ne puflent
également fournir, les quatre Sels dont j'ai parlé, fr on les
traitoit fuivant les:mêmes procédés que j'ai expofés.
Après l'examen, de la Bourache, reconnuë dans la Méde-
cine pour une Plante falutaire, mon deflein feroit d'en exa=
miner, fuivant les mêmes procédés, une ou plufieurs de
celles qui font regardées comme venimeufes ; & fi de ce
travail on peut tirer quelques lumiéres , quand ce ne feroit
que pour la Phyfique, je le continuërai.
D'E SIMSTCAHE NUE ES, 107
DE L'INCLINAISON DU PLAN
DEN ENOMT PT QUE
ENRODNPOL ORPI ENMDES) PLANETES
Par rapport à l'Equareur de la Révolurion du Soleil
autour de fon Axe.
Par NM'CASSINI.
Usou’A préfent les Aftronomes ont détérminé l'incli-
naifon de l'Orbite des Planetes, a fituation & le mou-
vement de leurs Nœuds par rapport à l'Ecliptique, que le
Soleil, dans les Syftemes de Ptolémée & de T'ycho, décrit
autour de la Terre par fon mouvement propre de l'Occident
vers l'Orient, & que la Terre au contraire, dans le fyfteme
de Copernic } décrit dans le même fens autour du Soleil par
fa révolution annuelle; parce que dans l’une ou autre de
ces hypothefes, le Soleil & a Terre étant tous les deux fur
le plan deTEcliptique, il eft néceffaire d'y rapporter le lieu
des Planètes qui font tantôt au deflus où au deflous de ce
plan.
On a pour cet effet choifi principalemeut les temps où
les Planetes fe rencontroient près du plan de lEcliptique
fans aucune latitude fenfible, car calcuant pour lors leur vrai
lieu, vû du Soleil, on a eu le vrai lieu du Nœud de ces
Planetes à l'égard du Soleil, lequel dans les fyftemes de T ycho .
& de Copernic eft au foyer des Planetes principales qui font
les feules que nous confidérons dans cé Mémoire, la Lune
étant, fuivant l'opinion de {a plüpart des Aflronomes &
Philofophes, qu'une Planete du fcond ordre qui fait fa ré-
voôlution autour de la Terre, &-doit être affujettié à d’autres
loix dans fes mouvements. © ae ;
Le vrai lieu du Nœud des Planetes fur l'Ecliptique à
O ji
3 Avril
1734
108 MEMOIRES-DE LÂCADEMIE ROYALE
l'égard du Soleil étant connu , on a cherché le temps où
ces Planetes, vüës du Soleil, devoient être à la diftance de
o ‘de ces Nœuds, & obfervant pour lors leurs latitudes
vüës de la Terre, on les a réduites à feurs latitudes vuës du
Soleil, qui mefurent alors l’inclinaifon de leurs Orbites à
l'égard du plan de FEcliptique.
Enfin, comme on s’eft apperçû, par la comparaifon des
Obfervations anciennes avec les modernes, que les Nœuds
des Planetes & les termes de leurs plus grandes latitudes ne
répondoient pas toüjours aux mêmes degrés de l'Ecliptique,
on a comparé la fituation de ces Nœuds obfervée en divers
temps les plus éloignés les uns des autres qu'il a été pofi-
ble, & on en a déduit la quantité de leurs mouvements,
dont les Aftronomes ne font pas bien d'accord enfemble,
tant à caufe de la lenteur de ce mouvement, qu'à caufe du
défaut d'exactitude dans les Obfervations anciennes que l'on
employe pour les déterminer.
L'on fuppole pour cette recherche, en premier lieu, que
les Orbites des Planetes confervent toûjours la même incli-
naifon à l'égard du plan de l'Edcliptique qu’elles coupent en
des points diamétralement oppofés. En fecond lieu, que ces
points d'interfeétion ou Nœuds s'avancent fuivant la fuite
des Signes uniformément , c'eft-à-dire, dans la proportion
des temps qui fe font écoulés entre les obfervations.
Ces deux fuppofitions doivent être admifes dans le fyfteme
de Fycho, parce que dans cette hypothefe les Planetes prin-
cipales faifant leur révolution autour du Soleil, pendant que
cet aftre tourne autour de la Terre fur le plan de l'Ecliptique,
. ce plan auquel fe rapporte le mouvement de tous Les corps
céleftes, doit être confidéré comme fixe & immobile.
Il ne paroît pas qu'il en foit de même dans le fyfteme
de Copernic. Le Soleil y eft placé au centre du Monde, &
c'eft autour de cet aftre que toutes les Planetes du premier
ordre, y compris la Terre, font leurs révolutions fuivant
une regle conftante obfervée par Képler entre leurs diftances
& la quantité de leurs mouvements ; de forte que dans cette
CR 7.
D'Ets NAS CNE Mein se 109
hypothefe, l'Ecliptique n'eft que l'Orbite de la Terre qui fe
trouve inclinée diverfement aux Orbites des autres Planetes,
fans qu'on voye plus de raifon pour faire mouvoir les Or-
bites des autres Planetes autour de la Terre, que lOïbite de
la Terre autour de celle d'une autre Planete ou d’un plan
quelconque pris à volonté.
I doit cependant réfulter de ces divers mouvements des
apparences bien différentes ; car fr au lieu de fuppofer que
les Orbites des Planetes fe meuvent autour du plan del'Ecli p-
tique avec des degrés égaux de vitefle & une inclinaifon
conftante, comme on l'a fait jufqu’à préfent, on leur attribuë
un mouvement uniforme autour d'un autre plan à l'égard
duquel elles confervent une mème inclinaifon, on appercevra
des inégalités dans le mouvement de leurs Nœuds fur lEclip-
tique, de même que des variations dans les inclinaifons de
leurs Orbites.
Comme par les raifons que nous venons d’expoler, il n’y
a rien qui doive faire préférer l'Orbite d’une Planete à celle
d'une autre pour y rapporter leurs mouvements , il paroît
qu'il eft plus convenable de les confidérer toutes, fans en
excepter l'Orbite de la Terre par rapport à l'Equateur de
la révolution du Soleil autour de fon axe, que l’on peut avec
beaucoup de vrai-femblance regarder comme le principe de
la direction du mouvement des Planetes.
Nous nous conformons en cela au fentiment de Képler,
qui, quoique la révolution du Soleil autour de fon axe ne
füt pas encore connuë, ne laifla pas de juger que cet aftre
tournoit autour d'un axe qui lui étoit particulier, & qu’à
diffance égale des deux poles du Soleil il y avoit une Eclip-
tique fixe à l'égard de laquelle les Orbites des Planetes , y
compris celle de la Terre, étoient inclinées , & avoient
chacune un mouvement particulier.
La révolution du Soleil autour de fon axe, les Nœuds
de fon équateur avec l'Ecliptique & fon inclinaifon que
Képler avoit déduits de diverfes conjeîures, & qu'il n'avoit
déterminés qu'imparfaitement, étant préfentement connus
q P
O ii
/
yro MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE RoYALE
depuis la découverte des Taches dans le Soleil , nous fommes
plus en état que lui d'examiner ce qui doit réfulter du mou-
vement de lOrbite de la Terre autour de l'Ecliptique.
Par l’obfervation afliduë des Taches du Soleïl, on a re-
marqué qu'elles paroïfioient décrire fur le difque du Soleil,
tantôt des lignes droites, tantôt des lignes courbes ou Ellip{es
lus où moins étroites, & qu'après avoir fait une révolution
autour du Soleil dans l'efpace de 27 jours + ou environ,
elles retournoient aux mêmes endroits où lon avoit com-
mencé à les appercevoir. On a aufli reconnu par la variété
des apparences qu'elles forment fur le difque du Soleil où
elles paroiflent larges vers le milieu de ce difque, & étroites
vers les bords, qu'elles étoient adhérentes à fa furface, &
qu'ainfi le mouvement qu'on y appercevoit, devoit s’attri-
buer à celui du Soleil autour de fon axe. Pour déterminer
la pofition de cet axe, on a obfervé les temps où ces Taches
paroifloient décrire des lignes droites, ce qui arrive lorfque
le Soleil eft au 10.° degré des Gemeaux & du Sagittaire,
avec la différence que lorfqu'il étoit dans la premiére de ces
fituations, ces lignes s’élevoient vers le Septentrion à l'égard
de Edliptique, & que dans li feconde elles s’'abbaifloient
vers le Midi, avec une inclinaifon de part & d'autre de 742,
d'où lon a conclu que le Nœud boréal de l'équateur du
Soleil répondoit au 10.° degré des Gemeaux, & le Nœud
auftral au 10.° degré du Sagittaire, & que cet équateur étoit
incliné à l'Edliptique de 744. Enfin lon a remarqué que
lorfque le Soleil étoit au 10.° degré des Poiflons & de la
Vierge, les Ellipfes que décrivoient les Taches étoient dans
leur plus grande largeur, de maniére cependant que dans
k premiére de ces pofitions, la convexité de cette Ellipfe
regardoit le Septentrion, & que dans la feconde elle étoit
tournée vers le Mädi, d’où lon a reconnu que le pole boréal
du Soleil répondoïit au ro.° degré des Poifions, & le pole
auftral au 10. degré de la Vierge.
Suivant ces Elements, on déterminera le lieu des Nœuds
de Orbite de chaque Planete à l'égard de l'équateur de la
PDF ETSN TS ICO UE MNEME LS Irf
révolution du Soleil & fon inclinaifon, en cette maniére,
Soit À BD TEcliptique, DAC l'équateur du Soleil qui
lui eft incliné de 7{+, & la coupe en À au 10.° degré des
Gemeaux ; 2: le lieu du Nœud boréal d'une Planeté fur
VE cliptique, telle, par exemple, que Saturne qui eften
224 $6' 0", plus avancé de 424 56" que le lieu du Nœud
de l'équateur du Soleil.
On fera l'angle ABC de 204 30° 3 $” égal à l'inclinaifon
de lOrbite de la Planete à l'égard de Ecliptique, & on
prolongera ZC jufqu'à ce qu'il rencontre l'équateur du Soleil
en C} Farc BC repréfentera lOrbite de Saturne, & le
oint © le lieu de fon Nœud à l'égard de l'équateur du
Soleil DAC, qui eft auftral ou defcendant, à caufe que la
Planete pafle de la partie feptentrionale de l'équateur du
Soleil à fa païtie méridionale ; l'angle AC B mefurera auf
linclinaifon de l'Orbite de la Planete à l'égard de l'équateur
que lon trouvera de même que le lieu de fon Nœud. Car
dans le triangle fphérique BAC, l'arc BC, diftance du Nœud
de ‘la Planete au Nœud de l'équateur du Soleil, étant connu
de 424 s 6", l'angle ABC inclinaifon de l'Orbite de la Pla-
néte à l'égard de lEtcliptique de 24 30° 35", & l'angle
BAD inclinaïifon de l'équateur du Soleil à l'égard de 'Eclip-
tique de 74 30’, ou fon fupplément BAC de 1724 30’,
on trouvera l'angle BCA qui mefure l'inclinaifon de l'Or-
bite de Saturne à l'équateur du Soleil de 54 4’ 57", & Farc
AC diftance du Nœud de cette Planete au Nœud de l'équa-
teur du Soleil de 164 50° 30", qui étant retranchés du 1 0.°
des Gemeaux, donnent le lieu du Nœud de l'Orbite de
Saturne à l'égard de l'équateur du Soleil en # 2349'30".
Pour une plus grande exaétitude, on réduira l'arc AC qui
eft de 164 so’ 30" à l'Ecliptique, pour avoir l'arc AE de
164 43° 13”, qui étant retranché du 10." degré des
Gemeaux, donne le lieu du Nœud de lOrbite de cette Pla-
nete fur l'équateur du Soleil, réduit à lEcliptique, en ÿ
2 34 I é’ 4 3 nu ;
On trouvera de la même maniére les Nœuds des autres
Fig. 16
112 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
Planetes & l'inclinaifon de leurs Orbites à l'égard de l'équä=
teur.du Soleil, tels qu'on les a marqués dans {a Table fui-
vante, où l'on voit que l'inclinaifon de Jupiter à l'égard de
YEcliptique, qui eft de 14 19° 39", la plus petite de celle
qu'on obferve dans les Planetes, fe trouve à l'égard de
l'équateur du Soleil de 64 22/, la plus grande de celles que
Jon a calculées, & que tout au contraire Findlinaifon de
Mercure à l'égard de lEcliptique qui eft de 64 $ $’ plus
grande que dans les autres Planetes, fe trouve à l'égard de
l'équateur du Soleil de 34 10° 6” plus petite que toutes les
autres, en forte néantmoins que de a plus grande à Ja plus
petite inclinaifon des Planetes à l'égard de l'équateur du Soleil
il y a une différence beaucoup moindre que par rapport à
TE ciiptique.
Pour ce qui eft du Nœud des Planetes fur l'équateur de
la révolution du Soleil, ils fe trouvent rangés en fens
contraire à l'égard de l'Ecliptique, ceux qui étoient plus à
TOrient étant vers l'Occident, & ceux qui étoient vers
VOccident fe trouvant à Orient, Il faut feulement remar-
quer que le lieu du Nœud des Orbites des Planetes, y com-
pris celle de la Terre à l'égard de l'équateur du Soleil eft
Auftral, au lieu qu'il eft Boréal par rapport à l'Ecliptique.
mr nt
INELERAISON LIEU AB NEEUE Moto Y Em ER
s
Orbites des Planetes. | Orbites des Planetes des Nœuds des Planetes.
cn 1700.
ASSET E NE
, 04 À E 04
À l'égard A'égard Sur Sur l'E’quateur Sur À l'égard À l'égard
ne EE l'Ecliptique du Soleil l'Ecliprique. | des Etoiles | ie
J'Ecliprique. | l'E‘quateur Bora TETE es l'Equateur
du Soleil. É ” du Soleil.
SATURNE..
JUPITER...,
MERCURE..
2d30f 35/15 55 ol 22456 |@ 23417 lo’ so"dir. | 8dir: |16/retr.
1 19 39 [6 22 0ÏS 8 o|n 424| 24 dir.|27 retr. 8 dir.
1 50 54 |5 50 o |@ 17 45 | H 16 so 36 dir. |r5 retr. | 4 dir.
H 10 o sr dir.| o retr.| o
27 $ |4 ‘6. o'F' 14 79 |H 6 25 34 dir. [17 retr. |12 di
a:16 7] 47 dir. |ro retr. | 4 dir.
A l'évard
Le.
DES:ScTENCEs, YI
À l'égard du mouvement annuel des Nœuds des Planetes
fur lEcliptique, nous trouvons celui de Saturne de o’ 59",
de Jupiter de 24", de Mars de 3 6”, de Venus de 34", & de
* + Mercure de 41". Mais il faut confidérer que fuivant le
fyfteme de Copernic, les Etoiles que l'on nomme fixes, à
caufe qu'elles gardent toüjours entr'elles la même fituation,
font réellement immobiles & invariables dans le Ciel , &
que le mouvement que l'on y apperçoit par da fucceffion des
temps n'eft qu'apparent, produit par celui de l'axe de la
Terre autour des poles de lEcliptique de l'Orient vers
l'Occident. If en eft de même de tout autre point fixe dans
le Ciel ; ainfi fi l’on fuppofe les Nœuds des Planetes immo-
biles, on doit y appercevoir un mouvement apparent fem-
blable à celui des Etoiles fixes & d’une égale quantité; & s'ils
{ont mobiles, leur n@uvement apparent doit être plus grand
ou plus petit que celui des Etoiles fixes. Leur mouvement
vrai eft donc mefuré par la différence entre leur mouvement
apparent & celui qu'on attribuë aux Etoiles fixes. Il eft direct,
lorlqu'il excede s 1”, & rétrograde, lorfqu’il eft moindre.
Dans cette hypothefe, le mouvement vrai des Nœuds
de Saturne, qui, fuivant les obfervations des Caldéens com=
parées aux nôtres, eft de 59” fuivant la fuite des Signes,
n'eft feulement que de 8” du même fens, & il eft nul ou
infenfible fuivant les obfervations de Ptolémée, qui ne le
donnent que de $ 1 minutes. |
À l'égard du mouvement des Nœuds de l'Orbite de Ju-
piter, que l’on a trouvé de 24", il eft réellement rétrograde
de 27". On obferve une femblable rétrogradation dans les
Noœuds des autres Planetes, dont le mouvement apparent
eft, moindre de 51”, & dont le vrai mouvement eft par
conféquent rétrograde, dans Mars de 1 5”; dans Venus de
17", & dans Mercure de 10”.
L'inclinaifon des Orbites des Planetes à l'égard de l'équa-
teur du Soleil, la fituation de leurs Noœuds fur cet équateur,
& leur mouvement par rapport à l'Ecliptique étant ainfr
connus, il conviendroit préfentement de déterminer 14
Men, 173 4 Pb
4
114 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE RoyALE
quantité du mouvement de ces Nœuds à l'égard de l'équa-
teur du Soleil. Mais cette recherche demande que l'on foit
aflüré fi les-Nœuds de l'Orbite de la Terre font fixes fur
Yéquateur du Soleil, & de la quantité de leur mouvement,
s'ils font mobiles ; ce que lon n'a pas pû encore reconnoître
à caufe que la révolution du Soleil autour de fon axe ne fe
peut déterminer que par le moyen de fes Taches, & que
leurs découvertes n'étant que depuis l'invention des Lunettes,
on n'a pas eu jufqu'à préfent d'intervalle affés grand pour
pouvoir difcerner s'il y a quelque mouvement dans les
Noœuds de 'Ecliptique à l'égard de l'équateur du Soleil.
Au défaut de cette connoiflance, nous avons fuppofé que
Les Nœuds de 'Ecliptique ou de Orbite de la Terre à l'égard
de l'équateur du Soleil font immobiles, c’eft-à-dire, fuivant
qu'on l'a remarqué ci-deffus, que fonmouvement apparent
eft de 5 1 fecondes égal à celui des Etoiles fixes, & moyen
entre ceux que divers Aftronomes ont attribués à ceux des
autres Planetes ; & fuppofant le mouvement de leurs Nœuds
à l'égard de 'Ecliptique, tel qu'il eft marqué ci-deflus, on
a calculé le mouvement de leurs Nœuds à l'égard de l'équa-
teur du Soleil dans l'intervalle de 1200 années avant ces
temps-ci, c'eft-à-dire, vers lan $00, où l'on à diverfes
obfervations de conjonétions de Planetes avec les Etoiles
fixes, qui ont fervi à déterminer leurs Nœuds.
Suivant cette fuppofition on a trouvé que le mouvement
des Nœuds de Saturne, qui étoit de 8“ direct fur FEcliptique,
fe trouvoit rétrograde fur l'équateur du Soleil de 6”; qué
tous les autres au contraire qui étoient rétrogrades fur ŸE-
cliptique, fe trouvent direéts fur l'équateur du Soleil, fçavoir
celui de Jupiter de 8", celui de Mars de 4”, celui de Venus
de 12", & celui de Mercure de 4".
En comparant les divers mouvements des Nœuds des
Orbites des Planetes tant fur l'Ecliptique que far l'équateur
du Soleil, de la maniére que nous venons de les déterminer,
paroît qu'ils font plus uniformes fur l'équateur du Soleil,
puifque du plus grand au plus petit il ny a qu'une différence
DES SCIENCES. 115
£ 18”, au lieu que fur l'Ecliptique elle eft.de 3 s”, ce qui
nd lhypothefe du mouvement des Planetes fur l'équateur
du Soleil plus vrai-femblable que fur l'Ecliptique.
Si au lieu du mouvement des Nœuds que nous avons
trouvé par nos obfervations, on avoit employé ceux qui
font dans les Tables de divers Aftronomes, comme par
exemple de M. de la Hire, où le mouvement vrai du Nœud
de Saturne à l'égard des Etoiles fixes eft de 2 r” direct, celui
de Jupiter de 37" rétrograde, celui de Mars de 14” rétro-
grade, celui de Venus de $" rétrograde, & celui de Mercure
de 34’ direct, on auroit trouvé leurs mouvements vrais à
» Jégard de l'équateur du Soleil aflés différents de ceux que
Fon avoit déterminés ci-deflus, ce qui fait voir combien ïl
eft difficile de fixer la quantité dont les Nœuds des Orbites
des Planetes fe meuvent à l'égard de l'équateur du Soleil.
On remarquera ici que le mouvement des Nœuds de
TOrbite de Mercure que nous avons déterminé de 10"
rétrograde, fe trouve, fuivant les Tables de M. de la Hire;
de 34" direct, & qu'ainfr, fi l’on fuppofoit le Nœud de cette
Planete immobile, le mouvement apparent qui en réfulte
fe trouveroît entre ces différentes déterminations; ce qui
urroit donner lieu de conjeéturer que le mouvement que
on a apperçüjufqu’à préfent dans les Nœuds des Orbites des
Planetes n'eft qu'apparent , produit de même que les Etoiles
fixes par le mouvement de l'axe de la Terre autour des poles
de lEcliptique:, & que les différences qu'on y a oblervées
doivent être attribuées au défaut d'exactitude des obfervations
que l'on a employées pour déterminer leurs fituations:
Si cependant on juge, comme il y a bien de la vrai-
mblance, qu'il y ait quelque réalité dans ce mouvement,
: que FOrbite de la Ferre n’en foit pas exempte, il fuit
ue les Etoiles fixes doivent paroître changer de latitude
lans fa fucceflion de témps. Car foit ABDC le plan de Fig. 2.
‘équateur de la révolution du Soleil autour de fon axe, dont
pole boréat eft en S ; 4 NCL, le plan de PEdliptique
qui lui eft incliné de 74 +, de maniére qu'il conferve toûs
P ij
116 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
jours à fon égard la mème inclinaifon avec un mouvement
direct ou retrograde, de telle quantité qu’on le jugera à
propos ; Æ le pole boréal de l'Ecliptique projetté fur le
plan de l'équateur du Soleil, placé à la diftance de 74 + du
point S. Le pole boréal de la révolution du Soleil répondant,
comme on l'a marqué ci-deflus, au 10. degré des Poiffons
à l'égard du pole Æ de 'Ecliptique. Le pole boréal de
TEdcliptique répondra au ro.° degré de la Vierge, & par la
même raifon, le Nœud boréal de l'Ecliptique fera au ro.
degré du Sagittaire, oppofé au Nœud boréal de l'équateur
du Soleil qui coupe FEcliptique au 1 0. degré des Gémeaux.
Si l’on fuppofe préfentement que ce Nœud ait retrogradé
d'un Signe par un mouvement qui lui eft propre, le pole
boréal de l'Ecliptique qui eft toüjours éloigné de 3 Signes
de fon Nœud aura auf retrogradé d’un Signe, & répondra
au point F, éloigné du point £ de l'arc £F, de 30 degrés.
Si donc l’on fuppofe une Etoile fixe placée d’abord en Æ
au pole de FEcliptique; lorfque ce pole fera parvenu de Æ
en 7, elle en fera éloignée de l'arc £F qui mefure fur un
grand cercle le complement de fa latitude qui ira en augmen-
tant jufqu'à ce que ce pole, après avoir fait une demi-révo-
lution, foit arrivé en G où il fera éloigné de l'Etoile fixe
de 15 degrés d'un grand cercle, qui font mefurés par le
double dela diftance SE du pole de l'Ecliptique au pole de
l'équateur du Soleil, de la même maniére que dans le fyfteme
de Copernic, une Etoile placée dans le pole du Monde;
paroit s'en éloigner, par la fucceffion des temps, d’une quan-
tité qui monte à 47 degrés, & eft mefurée par le double de
la diftance du pole de l'Equinodial au pole de l'Ecliptique.
On verroit les mêmes apparences dans une Etoile placée
dans l’un des Nœuds de l'Ecliptique avec l'équateur du SoleiE
comme en À, qui, lorfque le plan de l'Ecliptique auroit
été tranfporté de L' AN en X BK, à la diftance d'un Signe,
paroîtroit s'être éloignée d’une quantité À 7 proportionnée
à l'inclinaifon de l'Orbite de la Terre que l’on trouvera être
de 14 $2' 30” dans l'efpace d'environ 2100 ans.
LS
hi em ie
D ES $S C1E N er ss. 11%
C'eft conformément à cette hypothefe, que Képler ex-
plique les variations que Tycho avoit obfervées dans les
latitudes des Etoiles fixes, où il avoit remarqué que celles
qui étoient placées vers le point du Solftice d'Eté, étoient
de fon temps plus près du pole de l'Ecliptique que du temps
de Fimocharis & de Ptolémée; que les Méridionales quiré Li. 7:
pondoient au même point de l'Ecliptique s’en approchoïent; 7212:
que le contraire arrivoit vers le point du Solftice d'Hiver,
& qu'on netrouvoit aucune différence {enfible dans la latitude
des Etoiles qui répondoient au point du Bélier & de la
Balance. Il donne aufli la raifon des variations qu'il jugeoit
avoir trouvées dans l'obliquité de l'Ecliptique, en fuppofant
outre cela que l'axe de la révolution de la Terre a une in-
clinaifon conftante à l'égard de celui de la révolution du
Soleil; c’eft-à-dire, que le cercle fur lequel le pole du Monde
fe meut à l'égard des Etoiles fixes a pour centre le pole de
la révolution du Soleil. En fecond lieu, que le pole de
TEcliptiqué ou de FOrbite de la Terre fe meut avec plus de
vitefle contre la fuite des Signes, que les poles de l'Equi-
noctial terreftre.
Comme on ne connoifloit point encore la quantité de
Tinclinaifon de axe de l'Ecliptique à l'égard de l'équateur
du Soleil, ni le lieu de fes Nœuds, Képler détermina cette p.977
inclinaifon de 14 47’ 40", ce qu'il ne donne que comme
des conjeétures qu’il a déduites de diverfes raifons de conve-
nance; & ayant fixé une époque au temps de la création
du Monde où cette obliquité étoit de 244 1 7' 40", moyenne
entre la plus grande & la plus petite, auquel temps les poles
de la Terre étoient, felon lui, à égale diftance du pole de
l'équateur du Soleil & du pole de 'Ecliptique ; il trouve
que cette obliquité a dû diminuer, ce qu’elle continuëra de
faire jufqu'à ce qu'elle foit réduite à 224 30/, après quoi
elle augmentera jufqu'à ce qu’elle foit parvenu à la quantité
de 264 s' 20”.
À l'égard des Nœuds de l'Orbite de Ja Terre, il fTOUVEQUE. 5: 55}
celui qui étoit afcendant répondoit vers le Signe du Capri-
à af
418 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
corne, & le Nœud defcendant vers le Signe de lEcreviffe;
que le terme boréal eft versle Bélier, l'auftral vers k Balance,
ce qui ne s'éloigne pas beaucoup de celui que l'on trouve
préfentement par lobfervation des Taches.
: Pour nous qui connoiflons plus précifément que Képler
a quantité de l'inclinaifon de l'Ecliptique à l'égard de lé-
quateur du Soleil & le lieu de fes Nœuds, nous avons cru
devoir examiner fi ce qui réfulte du mouvement de FOrbite
de la Terre autour de l'équateur de la révolution du Soleil,
s'accorde aux obfervations des Etoiles fixes. |
On confidérera pour cet effet, que lOrbite de la Ferre
étant emportée contre la fuite des Signes de l'Orient vers
FOccident, autour des poles de l'équateur du Soleil, le pole &
de l'Edliptique, aufli-bien que le pole P de fEquinoctial
de la Terre, confervant entr’eux la mème fituation, doivent
fe mouvoir dans le même fens autour des poles de l'équateur
du Soleil, fans cependant avoir aucun mouvement apparent,
parce qu'étant immobiles l'un à l'égard de l'autre, ils répon-
dent toüjours aux mêmes points du Zodiaque. À Fégard
des Etoiles fixes, elles doivent toutes, fans en excepter celles
qui font aux poles de l'Ecliptique, paroître avoir un mou-
vement en fens contraire, & d’une égale quantité, fuivant
h fuite des Signes.
Ainfi, fi lon fuppofe le mouvement de lOrbite de la
: Ferre autour de l'équateur du Soleil, égal précifément à celui
que l'on attribuë aux Etoiles fixes, mais en fens contraireÿ
il n’eft nullement néceflaire d'attribuer d'autre mouvement
à l'axe de la Terre autour des poles de T'Ecliptique, pour
repréfenter leur mouvement en longitude dans l’efpace de
2$000 ans; mais on appercevra, comme on l'a remarqué
ci-deflus, un mouvement dans leur latitude, différent em
différentes Etoiles, fuivant la fituation où elles fe trouvent à
Y'égard des poles de FEdliptique, & qui, dans les mèmes
Etoiles, fera tantôt plus prompt, tantôt plus lent, fuivant:
qu'eiles s’éloignent plus ou moins de l'interfection de PEcli
tique avec l'équateur du Soleil.
Ê
|
(
.
|
|
-
DES SCIENGES, 191
Une F'îoile, par exemple, placée en £ aupole de l'Eclip-
tique, à la diftance de 234 30° du pole P terreftre, & de
74 30* du pole S'de l'équateur du Soleil; lorfque le pole Z
de lEcliptique fe fera avancé d'un degré de Æ en O, contre
la fuite des Signes, dans l'efpace de 70 ans, paroîtra s’en
être éloignée de l'arc ÆO qui mefure le complement de fa
latitude, qui eft d'un degré fur le petit cercde £FG, &
que l'on trouvera de 7° 30" d'un’ grand cercle qui mefurera
le complement de fa latitude qui fera par conféquent de 894
52" 30". Il en eft de même de toute autre Étoile placée
fur la ligne £ FC, dont la longitude répond au 10.° degré
des Gemeaux & du Sagittaire, à quelque diftance qu'elle fe
trouve de l'Ecliptique. Car le pole £ de FEtcliptique, par
fon mouvement d'Orient en Occident, s’approchant de
celles qui font au 1 04€ degré des Geméaux, &s’éloignant de
celles qui fe trouvent au 1 0.° degré du Sagittaire, fuivant {a
même direction; on doit y appercevoir uh mouvement en
latitude fenfiblement égal à celui du mouvement des poles de
YEdliptique qui, comme on l'a dit, eft de 7’ 30" en 7o ans.
On ne doit point appercevoir les mêmes variations dans
es Etoiles placées dans les Signes de la Vierge ou des Poiflons,
comme en #7 & en M, pourvü qu'elles foient éloignées de
plufieurs degrés du pole de l'Edcliptique. Car ce pole étant,
par exemple, parvenu de Æ en F, la diftance FH où FM
des Etoiles fixes à ce pole, qui mefure le complement de
leur latitude, ne differe pas fenfiblement de la diftance £H
où E M de ces Etoiles au pole de l'Ecliptique lorfqu'il étoit
en Æ, Dans les autres fituations des Etoiles, entre le lieu
des Nœuds de l'Ecliptique & des poles, on doit appercevoir
des variations dans leur latitude plus ou moins grandes, fui-
vant que ces Etoiles s'éloignent plus ou moins de ces poles,
Ces variations des Etoiles en latitude ne font pas les feules
qui doivent réfulter du mouvement des poles de l'Ecliptique
autour de ceux de Féquateur du Soleil, il doit y en avoir
auffi dans leur mouvement en longitude, à quoi il ne paroît
pas que Képler ait fait attention. Une Etoile, par exemple,
420 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
placée au point #, fort près du pole de l'Ecliptique, & qui
{e trouve dans la ligne £C qui répond au r0.° degré des
Gemeaux, lorfque ce pole fe fera avancé de Æ vers F,
paroïtra toüjours répondre au même point du Zodiaque,
& par conféquent n'aura point eu de mouvement fenfible
en longitude, pendant que ce pole aura parcouru un ou
plufieurs degrés. On appercevroit des variations plus {en-
fibles dans une Etoile placée près du pole de l'Ecliptique
entre ce pole & celui de l'équateur du Soleil, comme en 7;
car pendant que cette Etoile paroîtroit fe mouvoir de
Occident vers l'Orient, autour des poles de léquateur du
Soleil de T'vers À, les poles de l'Edliptique fe mouvant en
{ens contraire de Æ vers F, elle paroïtroit avoir un mouve-
ment contraire autour des pôles de l'Ecliptique de l'Orient
vers l'Occident, dont la viteffe feroit d'autant plus grande que
cette Etoile feroit plus près du pole de l'Ecliptique que de
l'équateur du Soleil. Dans les autres Etoiles, on apperce-
vroit une variation dans leur mouvement en longitude,
fuivant les différentes fituations où elles fe trouveroient à
F'égard des poles de l'équateur du Soleil & de ceux de l'E-
cliptique; de même que l'on en remarque dans les afcenfions
droites des Etoiles dont le mouvement furpafle, oueft
moindre que celui de leur longitude, & fe trouve quelque-
fois en fens contraire dans les Etoiles fituées entre les poles
de V'Ecliptique & ceux de l'équateur terreftre.
Voilà ce qui réfulte du mouvement des Nœuds de l'Orbite
de la Terre égal en fens contraire au mouvement apparent
des Etoiles fixes.
Si lon fuppole avec Képler, que le pole de FOrbite de
la Terre fe meut avec plus de vitefie que les poles de la Terre
dans un rapport qui eft comme 4 à 3, ce qu'il employe
pour expliquer la variation de l'obliquité de FEcliptique qui
réfulte des obfervations anciennes comparées aux modernes,
on trouvera à peu-près les mêmes variations qui, dans certaines
Etoiles fixes, peuvent fe monter à 24 $o' en latitude, pen-
dant que d’autres auroient toujours confervé la même, ce
que
DÉS SCIENCES. I26
que lon ne peut point concilier avec les obfervations,
On ne doit donc point admettre cette hypothefe, à moins
de fuppofer que FOrbite de la Terre ne fe meut pas autour
de l'équateur de la révolution du Soleil, mais autour d’un
autre plan invariable quelconque, moins incliné à l'Eclip-
tique, à l'égard duquel les Orbités des autres Planetes feroient
auffr leurs révolutions; ce qui pourroit avoir quelque vrai-
femblancé, puifque nous voyons que les Nœuds de fa Euné
ne fe meuvent pas autour du plan de Féquateur que la Terre
décrit par f1 révolution journaliére, mais autour du plan de
l'Ecliptique qui en décline de plus de 23 degrés.
Cependant comme la Lune n’eft qu'uné Planete du fecond
ordre, dont les mouvements ne doivent point être tirés à
conféquence pour ceux des Planetes qui font léurs révolutions
immédiatement autour du Soleil; nous avons cherché s'il
n'y avoit pas d'autre moyen d'expliquer les variations que
Ton a pü appercevoir tant dans la latitude des Etoiles fixes
que dans l’obliquité de lEcliptique.
Nous fuppoferons pour cet effet, de mêmé que dans le
fyfteme de Copernic, que l'axe de la Terre fe meut autour
des Poles de 'Eliptique de l'Orient vers l'Occident, mais
avec une viteffe un peu moins grande que celle que Fon
apperçoït dans le mouvement des Etoiles fixes, de forte
que, par exeinple, au lieu d’un desré en 70 ans, cet axe
employe 8o ans à le parcourir. Nous attribuons en même
temps un mouvement dans le même fens, c’eft-à-dire,
retrograde aux Nœuds de l'Orbite de la Terre autour de
Féquateur folaire, mais beaucoup plus lent, qui foit, par
exemple, d'un degré en 600 ans, ou de 6" par année.
Par ce mouvement, l'axe de l'Ecliptique fra emporté
autour des poles de la révolution du Soleil avec une viteffe
égale qui fera auffi de 6" par année für le petit cercle que
cet axe décrit, dont le rayon eft de 7d' 30"; réduifant cé
mouvement à un grand cercle, on aura 45" pour la mefuré
du mouvement des poles de l’Ecliptique dans le cours d'un
année, dont le pole boréal: s'approcheroit des Etoiles fixes
Mem. 1734 z Q
322 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYyALE
qui répondent au 10.° degré des Gemeaux, c'eft-à-dire, du
lieu du Nœud auftral de l'Orbite de la Terre, pendant qu'il
s'éloigneroit de la même quantité des Etoiles qui répondent
au Nœud boréal qui eft au 10.° degré des Poiflons; ce qui
paroît s’accorder à la remarque de Tycho, que les Etoiles
boréales qui répondent au Signe de l'Ecrevifie avoient aug-
menté de latitude depuis Ptolémée, au lieu que celles qui
répondent au Signe du Capricorne en avoient une moindre,
endant que les Etoiles qui font vers le commencement
du Bélier ou de la Balance ont confervé à peu-près la même
latitude qu'on y avoit obfervée.
A l'égard de la variation de l'obliquité de l'Ecliptique,
il feroit néceflaire pour l'expliquer, au cas que celle qui a
été déterminée par Hipparque & Ptolémée füt exacte, de
fuppofer que le pole de l'axe de la Terre n'a point participé
au mouvement du pole de l'Ecliptique autour du pole de
J'équateur du Soleil, & qu'ainfi il s’en eft trouvé plus proche
par la fuite des temps.
Nous n’entreprendrons point ici de faire voir le rapport
de cette hypothefe avec les obfervations des Etoiles fixes
faites en différents temps, nous nous contenterons de remar-
quer qu’il y en a beaucoup qui s’y accordent ; mais comme
il y en a auf d'autres, quoiqu'en beaucoup moindre quantité,
qui s’en éloignent, on ne peut pas encore s'afiürer fi ces
différences font réelles, ou fi l'on doit les attribuer au défaut
d’exactitude des obfervations anciennes. I nous fuffira d’avoir
remarqué ici les lieux où ces différences doivent être les
plus fenfibles, afin que les Aftronomes foient attentifs à les
obferver; le mouvement des Etoiles fixes à l'égard defquelles
on détermine les lieux des Planetes, & l'obliquité de l'Eclip-
tique à laquelle il eft néceflaire de réduire les diftances ob-
fervées, en afcenfion droite & en déclinaifon, devant être
confidérés comme les principaux fondements de lAftro-
nomie, dont il eft néceflaire de reconnoître Îa fituation, de
même que la quantité de leur mouvement.
ATEXS
DER
C 10
em. de Ltend'1784. MgPas 122
Fe
imonneue feu."
D ES !'SYCNI ENNIQUE s. ‘123
ANAEMM:O M E TIME
Qui marque de lui-même fur le Papier, non-feulement
les Vents qu'il a fait pendant les 24 heures, à
à quelle heure chacun a commencé à fini, mais
auffi leurs différentes viteffes ou forces relatives.
Pa M D'ONS-EN-BRAY#.
A Navigation & les Moulins à vent nous procurent
8 chaque jour des avantages très-confidérables, que nous
devons aux moyens qu'on a imaginés de profiter de l'im-
pulfion de l'Air, ou de fa force du Vent, qui eft un fi puif
fant moteur, & qui ne nous coûte rien à entretenir. Nous
tirerions encore de plus grands avantages de cette force, ff
mous la connoïflions mieux ; aufli ai-je cru qu’il feroit très-
utile de trouver des Machines qui nous miffent en état de
mefhrer mieux la force relative du Vent qu'on ne l'a fait
jufqu'ici, & qui püflent même nous conduire à connoître
fa force abfoluë.
I n’étoit pas moins eflentiel de connoître toutes les va-
riétés des Vents dans différents pays; auffi plufieurs Auteurs
“ont-ils écrit de leur origine & des caufes de Icurs variétés.
Le Chancelier Bacon, dans fon Hiftoire des Vents, après
avoir parlé de l'origine, des caufes & des variétés des Vents,
fait connoître la néceflité d’avoir des obfervations dans
différents pays : mais il ne dit rien fur les moyens dont on
pourra fe fervir pour faire ces obfervations.
. Le Capitaine Guillaume Dampier, Anglois, à la fin de
{on fecond tome du Voyage autour du Monde, a donné un
T raité des Vents qui regrent dans toute la Zone torride; il
. efktrès-utile pour les grandes Navigations.
Tout ce qu'on trouve, foit dans Rohault, foit dans M.
Mariotte, ne font que des explications générales fur la
Q ji
5
224 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLE
mature & les caufes phifiques de l'origine & des variétés
des Vents.
En dernier lieu nous avons eu une Difiertation fur les
caufes & les variations des Vents par le P. Sarrabat, Jefuite,
qui a remporté le Prix à l'Académie de Bordeaux en 1730;
mais comme toutes ces réfléxions ou difiertations ont eu
pour objet principal la Théorie plütôt que la Pratique, qui
n’en peut tirer qu'un leger avantage, j'ai cru n'en pouvoir
mieux prouver k certitude, qu'en conftruifant cinq Machines
différentes, dont chacune a des avantages particuliers dans
Tufage, pour fervir de preuve à ce que nous propofons.
La premiére, que nous nommons Anémometre à levier,
fera connoïître la force relative du Vent. Nous parlerons
dans fa defcription d'un Anémometre décrit par M. Wolf,
& de celui que propole Georges Leutman.
La feconde, que nous appellons Anémometre à fufée, fera
connoître la force abfoluë du Vent.
Par la troifiéme Machine, qui eft une efpece de Romaine,
on pourra pefer, pour ainfi dire, la force abfoluë du Vent,
ou la force de fon impulfion fur la furface d’un pied quarré.
La quatriéme ef faite pour l’ufage de la Navigation, afin
de connoitre fur un Vaifleau la viteffe ou la force du Vent
fur les Voiles.
Nous réfervons pour nos Affemblées particuliéres la de-
fcription & l'ufage de ces quatre Machines, que le temps ne
nous permet pas de donner, & qui nous ont procuré diffé-
rents moyens pour nous confirmer & nous aflurer de la
précifion de la cinquiéme Machine qui fait l’objet de ce
Mémoire.
Cet Anémometre, que nous nommons Anemometre à
Pendule, eft compolé de deux parties qui font menées par la
rouë des heures de la Pendule À placée entre les deux, &
qui va 30 heures. Ce qu'il y a de plus fingulier à cet Ané-
mometre , c'eft qu'on n’a pas befoin de fe tenir auprès pour
obferver , & qu'on trouve marqué fur le papier tous les
changements qui font arrivés, foit de direction, foit de viteffe
FT ESS ete ee sir cf 125$
du Vent, l'heure de ces changements, & la durée de chaque
Vent. On verra, par exemple, à quelle-heure un Vent a
commencé à fouffler, fon nom ou fa direction; à ‘viteffe
relative, combien il aura continué, & combien il £ fera
pailé de temps fans qu'il y ait eu de Vent. Enfin nous avons
tâché de rendre cet Anémometre plus parfait & plus utile
que tous ceux qu'on a propolés jufqu'ici, & tel, qu'il nous
inflruisit de tout ce que nous pouvons avoir befoin & envie
de fçavoir par rapport aux Vents. I fe placera dans une
chambre où un cabinet, où il fera ornement, fans qu'on
{oit obligé de le tenir à fair,
DESCRIPTION.
. L'Anémometre fait fon effet par trois moteurs différents.
Le premier eft une Pendule ordinaire à fecondes & à poids,
placée au milieu, dont la rouë des heures engraine dans les
deux rouës /r) & (2), dont l'une eft à droite, & l'autre à
gauche, par le moyen defquelles Les deux cylindres où bo-
bines /3) & (24) à qui elles correfpondent, font égälement
deux tours par heure.
Le fecond moteur, qui eft placé à droite, eft une longue
tige (4) qui perce le long du mur jufqu'au deflus du toit,
portant une girouette / 5), dont la grandeur doit être telle,
1 qu'une petite force de Vent puifle faire tourner la tige, &
eft important de choïfir des endroits où la diredtion
du Vent fur la girouette ne fera pas interrompuë par des
hauteurs plus grandes que celle de la girouette.
- Cette tige entre par fon bout d'en bas dans un cylindre
marqué (8), dont les bafes ont un pouce & demi de dia
metre, & la hauteur ou longueur eft de s à 6 pouces. Ce
cylindre porte de haut en bas 32 chevilles pour fervir à
marquer les 3 2 airs où rumbs de Vent, Comme cette piéce
€ft importante, voici le détail de fa conftruétion.
Nous avons divifé Jes circonférences des bafes du cylin-
dre (6) en 3 2 parties égales, de façon que les divifions de
chaque bafe fe répondent direétement, & nous avons tiré
Q ni)
126 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
d'un point à l'autre des lignes droites fur la furface du cylindre;
cela fait, nous avons divifé toutes ces lignes ou {a Iongueur
du cylindre en 32 parties égales par des cercles paralléles
aux bafes du cylindre.
Ayant choifi une de ces lignes droites pour ir, on a
marqué un point à fon extrémité ; l’interfection de la 3de
ligne & du 1°" cercle en defcendant défigne le 24 point, celui
de la 3° Jigne & du 24 cercle dénote le 3m point, & aïnft
des autres jufqu’au 3 2M€ point pour les 3 2 airs de Vent.
La fuite de tous ces points forme fur la furface du cylindre
une fpirale ou helice /7) femblable à un pas de vis, ils
font percés d’un trou pour y loger un des bouts des chevilles,
& pour en émpécher le dérangement.
Chaque cheville eft fixée par le milieu au bout d'un petit
reflort de 9 à ro lignes de long, & ces reflorts font arrêtés
par deux vis fur la furface du cylindre. L'une de cès vis
tient {e bout du reflort fixe, & l’autre, en la vifflant plus
ou moins dans le cylindre, fert à régler la diftance conve-
nable dont l’autre bout de chaque cheville, deftiné à fervir
de crayon, doit être écarté du cylindre pour pouvoir glifler
& marquer fur le papier fans le déchirer.
Il y a derriére le cylindre /6) trois autres cylindres mar:
qués (2) (8) & (9) où bobines placées en forme de triangle
entre les deux platines de la Machine C.
Une longue bande de papier, large de $ à 6 pouces, &
longue de 1 8 à 20 pieds, eft d'abord enveloppée autour de
la bobine verticale marquée 3), cette bande pañle fur le
cylindre /8) pour être crayonnée par les pointes du cylin-
dre (6) qui fe préfentent, & va enfuite fe rouler autour
de la bobine /9). | |
Le temps qu'il faut pour que toute la bande de papier
fe déroule d’une bobine fur l'autre eft de 30 heures.
C’eft le mouvement de k bobine /2) qui occafionne Ie
développement du papier pour aller fe rouler fur la bobine
(y. Ce mouvement eft réglé par le renvoi d'un axe qui a
une rouë fixe à chaque bout, dont l'une marquée /r) qui
| DE Sy S CUT EN CErS ul P27
a:16 dents, engraine à la rouë des heures de Ja Pendule 4,
& l'autre marquée /10) qui a 32 dents, engraine à une
rouë {1 1) de 16 dents, qui eft fixe à la bobine (3); par
ce moyen cette bobine /3) fait deux tours par heure aufii-
bien que la bobine /9), au haut de laquelle eft une autre
rouë (1 2) qui engraine dans une rouë de champ /7 3) avec
une corde & un poids, pour tenir toüjours le papier tendu. .
Quoique les tours de la bobine /3) fe faflent en temps
égaux, . puifqu'elle eft menée par la rouë des heures de la
Pendule, chaque tour fournit cependant une longueur in-
égale de papier, fuivant qu’il y en a plus ou moins autour
de cette bobine.
.. Pour remédier à cet inconvénient qui nous ôteroit la
connoiflance de l'heure qu'a commencé un tel Vent, de fa
durée & de fa fin, nous avons placé fur fa platine d'en haut
. marquée Z, un marteau qui eft levé par un double limaçon
attaché au bout de fa bobine /3), & qui frappe un coup
tous les quarts d'heure contre une pointe qui fait un trou
au haut du papier; ainfi on aura les longueurs parcouruës
par le papier en temps égaux, ou à chaque quart d'heure,
qu'on pourra divifer en demi-quart, & méme en minutes,
fans erreur fenfible.
Ufage de la Machine C.
T1 fut en premier lieu urienter l'Anémometre, ou con-
noître le rumb de Vent, vis-à-vis duquel il {era tourné,
Suppofons ici qu'il fera placé vis-à-vis de l'Oueft, alors la
girouette regardant du côté de l'Eft, comme fi elle étoit
pouffée par un Vent d'Oueft, l’Aiguille du cadran à Vent 2,
marquera l'Oueft, & la premiére pointe à reflort du cylin-
dre /6) touchera le papier ; ainfi cette 1.'° pointe dans ce
cas fera celle qui marquera toûjours l'Oueft fur le papier;
& en général la 1.'e pointe marquera toûjours le rumb de
Vent vis-à-vis duquel la Machine fera tournée : fi elle étoit
tournée au Nord, Ja r.'e pointe marqueroit le Nord.
1, La 2.4 pointe marquera le rumb fuivant, en allant de
128 MEMOIRES DE L'ACADEMLE RoYyALE
lOueft au Sud, ainfi de fuite les autres pointes marquéront
les autres airs de Vent dans le même ordre de haut en bas
ou de bas en haut, 2
Une ou deux pointes frottent toûjours contre le papier,
ces pointes ne le déchirent pas, étant arrondies & polies par
le bout, & n'appuyant contre qu'autant qu'on veut donner
de bande aux reflorts fur lefquels elles font attachées.
A mefure que le papier fe devide, la pointe qui le touche
marque un trait en ligne droite, & pour que le trait foit
bien vifible, il faut que le papier ait été frotté avec de la
poudre de corne de Cerf calcinée & bien porphirifée; par
ce moyen chaque trait fera femblable à un trait de crayon
qu'on pourra effacer aïfément, pour faire fervir le papier
plufieurs fois.
Cette façon de préparer le papier eft fort avantageufe,
nous la tenons de M. Winflow, & Fon peut s'en fervir com-
modément pour des tablettes de poche.
La Machine étant difpofte, comme on vient de lexpli-
quer, & étant mife en expérience, on trouvera, pour ainfr
dire, en écrit fur le papier tout ce qui fera arrivé, l'heure
& la durée de chaque Vent qui aura regné, & généralement
toutes les variétés qui feront arrivées aux Vents pendant
30 heures.
Car r.° le temps étant marqué fur le papier, comme
nous avons dit, de quart d'heure en quart d'heure, on
connoîtra le moment qu'une telle pointe a commencé à
marquer fur le papier, ou le commencement d'un tel Vent,
2.° La longueur du trait fait par une pointe fur le papier,
marquera la durée de ce Vent.
.” Si deux pointes ont marqué le papier en même temps,
c'eft figne que le Vent aura été entre ces deux quarts de
rumb, en forte que par-là on aura les demi-quarts de rumb,
ou les Vents fur les 64 divifions de l'horifon.
4° Si plufieurs pointes ont marqué, le Vent aura fauté
Jufieurs rurmbs.
s* Si les Vents ont fait, comme l'on dit, le toi: du
Cadran,
D'E SAS /C'TENN GE. S 120
Cadran, toutes les pointes auront marqué de fuite, & on
fçaura l'heure de tous ces changements.
Pour trouver aifément le nom du Vent correfpondant à
chaque pointe, nous avons fait faire la regle / 74), laquelle
préfente 3 2 dents à même diftance l'une de l’autre que celles-
qui forment les traits des 32 pointes; les noms des Vents
font écrits vis-à-vis de chaque dent, en forte qu’il n’y a
qu'à préfenter cette regle fur le papier de haut en bas, pour
{çavoir tout d’un coup le nom du Vent marqué fur le papier :
cette regle reflemble aflés à un peigne.
Pour trouver aufii avec facilité la valeur des traits, &
comme chaque trait qui marque la durée du Vent, com-
mence & finit rarement aux points qui diftinguent les quarts
d'heure, & que les intervalles en font inégaux, nous avons
fait faire une regle proportionnelle, pour pouvoir divifer
tout d'un coup en 1 $ minutes, les diftances inégales des
quarts d'heure : cette regle marquée /47) eft faite en triangle
“ifofcele, tronqué par une regle divilée en 1 $ minutes, de
même que la regle qui forme fa bafe. Ces deux regles font
paralleles, elles ont pour longueur les plus grandes & les
plus petites diftances que forment fur le papier les points qui
marquent les quarts d'heure, & nous avons tendu des foyes
d'une divifion à l’autre. H eft évident que ces foyes diviferont
‘tous les intervalles moyens entre le plus grand & le plus
petit; ainfi avec cette regle, on connoïtra à la minute près,
le moment qu'un Vent quelconque a commencé & fini.
IL nous refte préferitement à donner la defcription du
troïfiéme moteur & de {es effets fur la Machine D, pour
connoître la force & la vitefle relative du Vent.
Ce moteur F qui tourne toûjours du même fens, à tel
Vent que ce foit, eft un Moulin horifontal, appellé com-
munément Moulin à la Polonoife, & qu'on place fur le toit.
L'axe de ce Moulin eft aflés long pour entrer dans le
grenier, afin de tenir hors de pluye & de neige, un pignon
qui eft au bout de cet axe. |
Ce pignon marqué /1 5) qui a 21 aîles, engraine dans
Men. A2 4 RE
130 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaALE
la rouë /16) de 84 dents, dont l'arbre porte une vis fans
fin /17) qui mene la rouë /r8) de 100 dents, ainfi le
pignon porté par l'axe du Moulin fait 400 tours pour faire
faire un tour à la rouë de 100; l'axe de cette même rouë
de 100 porte une Aiguille qui marque le nombre des tours
du Moulin depuis 1 jufqu'à 400, fur un Cadran fixe mar-
qué (19). Nous avons aufii appliqué un limaçon /20)
contre la rouë /7 8) pour foûlever le levier /2 r) qui retombe
à chaque 400 tours du Moulin, dont nous verrons l'ufage
ci-après fur la Machine D que nous allons décrire.
Cette Machine eft placée à gauche de la Pendule, elle
eft en partie femblable à la Machine C, dont nous venons
de donner la defcription, elle porte parcillement trois cy-
lindres ou bobines.
Sur la premiére bobine à gauche, marquée /22) eft
roulée une bande de papier de 18 à 20 pieds de long, &
large d’un pouce & demi, cette bande pafe fur la bobine /2 >}
& vient fe rouler fur la bobine /24), allant comme celle de
la Machine C, de gauche à droite. Le temps que toute cette
bande employe pour paffer d’une bobine fur l'autre, eft de
30 heures; ce mouvement eft reglé comme celui de Îa
Machine C, par un renvoi d'un axe portant une rouë à
chaque bout, dont lune qui a r6 dents, & marquée /2)
engraine à la rouë des heures de la Pendule, & l'autre /2 ;)
qui a 32 dents, mene la rouë /26) de 16, & qui eft fixe
à la bobine 24, pour lui faire faire un tour par demi-heure.
L’axe de cette bobine eff traverfé en bas par une longue
goupille marquée /27), laquelle en tournant leve à chaque
demi-tour, ou à tous les quarts de tours, un pointeau /28)
par la queuë qui eft en plan incliné, lequel venant à tomber
dès que la goupille quitte la queuë du pointeau, marque
un point au bas de la bande de papier tous les quarts d'heure;
par ce moyen, le papier fe trouve divifé en temps égaux,
par des points de quart d'heure en quart d'heure, & à
diflance pareille que fur le papier de la Machine C.
Le levier (21) qui eft placé vers le Moulin, & dont
DES SCIENCES. 131
nous venons de parler, foüleve par un cordon ou un fil
de leton, un petit marteau /29), & comme ce levier re-
tombe lorfque le limaçon /20) qui le foûleve à fait fon tour,
ce qui arrive, comme nous avons dit, à chaque 400 tours
du Moulin, ce marteau en tombant, frappe fur un poin-
teau (7 0) qui marque un point au haut de Ia bande de papier;
ainfi {e nombre des tours du Moulin eft marqué au haut du
papier par des points de 400 en 400 tours, & au-deffous
chaque quart d'heure étant aufli marqué par un point, il
fera aifé de connoître par le plus ou le moins de points
qu'il yaura au haut de la bande de papier, d’un quart d'heure
à l'autre, combien de fois le Moulin aura fait 400 tours,
& par a diffance d'un point à l'autre, on fçaura,
1. Si la force ou vitefie relative du Vent a été égale.
2.° Un plus grand nombre de points dans l'efpace qui
marque un quart d'heure, dénote que plus il y en aura,
plus le Vent a eu de force.
3° Comme il y a toûüjours une des pointes du cylindre
(6) qui crayonne le papier de la Machine €, foit qu'il fafle
Vent, ou qu'il n’en fafle point du tout, on regardera le trait
comme nul pendant tous les quarts d'heure, ou pendant le
temps qu'il n’y aura pas de points marqués au haut de la
petite bande de papier de la Machine D.
Une force ou vitefle de Vent quelconque ne pouvant fe
déterminer que par un nombre d'expériences fuivies &
réitérées, quoique nous en ayons déja fait une quantité,
nous nous propofons de les continuer pour nous en aflürer
davantage, & nous les donnerons avec la defcription des
autres Anémometres dont nous avons fait mention au com-
mencement de ce Mémoire.
Avant que de finir, je dois obferver qu'il eft à propos
d'avoir deux Machines pareilles à celles marquées € & D,
_ afin d'en avoir toûjours deux prêtes & garnies de leurs pa-
piers, pour les fubftituer aux deux autres que l’on ôtera au
bout de 2 4 heures, quand on remontera {a Pendule. Il faudra
aufli avoir foin de marquer au commencement de chaque
R ij
132 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
papier, l'heure qu'il eft à la Pendule, pour trouver, en
comparant les deux papiers, toutes les variétés ou tous les
changements de direction, de durée & de vitefle relative
des Vents, dont on fera un état ou un journal, comme les
papiers journaux des Pilotes.
On marquera, par exemple, fur une 1. colomne les
heures du jour, dans la 2.4 colomne-les noms des Vents
qui auront régné, dans la 3.me leur durée, dans la 4.me fe
nombre des tours du Moulin, pour avoir les vitefles rela-
tives, &c.
On pourra joindre à ces obfervations, celles du Barometre
fur la pefanteur de l'air, & même celles fur la température
de l'air, en chaud & en froid, en fec & en humide, par
le Thermometre & l'Hygrometre.
Les Phyficiens fçavent les relations que toutes ces chofes
ontentreelles, & combien, pour ainfi dire, elles font dé-
pendantes les unes des autres.
Des obfervations faites en différents pays, & fur-tout dans
les Ports de Mer feront très-avantageules : on fera en état de .
faire l'hifloire des Vents, de comparer les Vents de Terre
aux Vents de Mer, ce qui pourra influer fur la Navigation,
& peut-être pourra-t-il réfulter de toutes ces obfervations,
des lumiéres & des idées plus certaines, pour connoître la
caufe & l'origine des Vents & des autres Météores.
NOMS des Pieces qui compofent l’Anémometre |
à Pendule.
À, PEnvure ordinaire à heure, minute & feconde.
B, CADRAN à Vent.
C, MACHINE à droite de la Pendule, pour connoître
la dire&tion & la durée du Vent.
D, MACuINeE à gauche de la Pendule, pour connoïtre
la force relative du Vent.
Æ, PLATINE fupérieure de la Machine C4
F, Mouz1n à Vent horifontal,
182,
PEL
14,
16,
P
21,
1213)
23
24,
2ÿ»
26,
DE: SAS YCALE "NT CRE; S 133
Roues de 16 dents chacune, menées à droite &
à gauche par la rouë des heures.
CxziNprE ou Bobine menée par la rouë 7.
LonNGuUE TIGE qui va le long du mur gagner le
toit, & qui porte par le haut la girouette +, &
par le bas le cylindre 6.
GIROUETTE.
CxLiNDRE qui porteles 3 2 chevilles, pour marquer
fur le papier les 3 2 airs de Vent.
HEL1ICE ou Spirale formée par les 32 chevilles
fur le cylindre 6.
CyziNDres ou Bobines fur lefquelles pañle &
roule le papier de la Machine C.
Roue de 3 2 dents fur le même axe que la rouë 7,
qui engraine à la rouë 7 z de 16 dents. =
RouE de 16 dents fixe à la bobiné 2.
ROUE FIXE au haut de la bobine 9.
Rouz DE CHAMP menée par la rouë 7 2.
REGLE ou Peigne, pour connoître tout d’un coup
le nom du Vent.
PiGNoN de 21 aïles fixe à l'axe du Moulin. :
RouE de 84 dents menée par le pignon 7 ÿ.
Vis sANS FIN fur l'axe de la rouë 76.
RouE de ro0 dents menée par la vis fans fine
CaADRaAN fixe divifé en 400.
LimAGÇoN fur la rouë 79.
LEvieRr foülevé par le limaçon 20.
PREMIÉRE BOBINE à gauche de la Machiné D,
fur laquelle eft d'abord roulée la petite bande
de papier.
BoBiNE du milieu fur laquelle pañle le papier.
BoBineE fur laquelle la petite bande de papier
s’enveloppe.
RouE de 32 dents, fixe fur le même axe de fa
rouë 2, qui eft menée par la rouë des heures, \
RouE de 16 dents, fixe fur a sy 24
ii
1354 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE RoyALE
27, GOUPILLE qui fait lever le pointeau à queuë 22.
28, POoINTEAU à queué en plan incliné.
_29, MARTEAU qui frappe à chaque 400 tours du
Moulin.
30, POINTEAU qui fert à marquer au haut de la petite
bande de papier, un point à chaque 400.
31) CouLissEs avec des vis, pour faire avancer ou
reculer les cylindres £ & 24.
32 PoinNTEAU de la Machine C.
33, AIGUILLES portées par les cylindres > & 24,
lefquelles marquent les minutes fur les cadrans > 4.
-_ 34, CADRANS divifés en minutes.
35, Dougce LimAÇON porté par le cylindre >, pour
faire battre le marteau >6 à chaque quart d'heure.
26, MARTEAU qui frappe fon coup à chaque quart
d'heure.
37» FUSÉES fur lefquelles s'enveloppent les cordes qui
foûtiennent les poids pour tenir les papiers tendus,
38, Porps.
39» PLATINE fupérieure de Ia Machine D.
49, PIGNON au haut de la bobine 22, qui engraine
dans la rouë de champ 47, fixe fur l'axe de la
fufée 37.
Ar, RouE DE CHamr.
42; CORDES qui tiennent le papier tendu, au moyen
des poids.
43r REGLE proportionnelle pour connoître les minutes
de la durée des Vents.
44, ROUES de 30 dents fixes au bas des bobines > &
24, pour tenir les papiers en-état fur les Machines
de rechange, par le moyen d’un verroux.
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DE LA FISTULE LACRYMALE.
PareMuPE-T.1 T.
- TE divile ce Mémoire en trois parties. Dans la premiére 20 Février
je traite fuccinétement de lufage des Larmes ou de {a
liqueur lacrymale, & des parties qui la filtrent, qui la répan-
dent, qui la raffemblent, & qui la conduifent dans le Nés,
Dans la feconde partie, Je tâche de découvrir en quoi la ftru-
éture de ces organes fe trouve changée, lorfqu'il furvient
fiftule ; & dans la troifiéme, je propole la maniére de guérir
cette maladie, par le moyen d'une opération qui m'eft parti-
culiére, & qui nra toûjours réufir.
BRPMIERE, PARUMITE
- Tout le monde fçait que le principal ufage de la liqueur
Jacrymale eft de mouiller Le globe de l'œil & les paupiéres,
pour faciliter le mouvement de ces parties. La glande Æ,
ui filtre cette liqueur, eft placée entre la partie fupérieure
du globe de l'œil & la voüte de l'orbite. En conféquence
de cette fituation, chaque fois que l'œil fe meut, cette
glande eft légerement comprimée, les larmes en découlent
par plufieurs petits conduits, & l'œil eft mouillé. C’eft ainfi
que le mouvement de l'œil favorife l'écoulement des larmes,
& que les larmes, en s'écoulant, facilitent le mouvement
de l'œil.
Les conduits excréteurs de la glande lacrymale étant placés
fous la paupiére fupérieure , les larmes qui en découlent,
mouillent d'abord fa partie fupérieure, & enfuite, par leur
pente naturelle, elles fe répandent univerfellement fur tout
de refle du globe; mais comme l'œil eft fphérique, & que
de cartilage des paupiéres eft arrondi par le bord qui touche
de globe de l'œil, l'angle qui réfulte de cet attouchement
forme une gouttiére à chaque paupiére, &ces gouttiéres ÆF,
1734
|
ge
h
»
Fig. 1;
Fig. 1.
136 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
conduifent les larmes vers le grand angle de l'œil. Les farmes
peuvent même s’amafler en aflés grande quantité dans ces
gouttiéres, fans qu’il s’en répande, parce que le bord extérieur
des paupiéres eft enduit d’une humeur grafle, qu'on nomme
Chaffie; & l'on fçait que dans un verre gras, on peut mettre
de f'eau beaucoup au deflus des bords, fans qu’il s'en répande.
Quand les paupiéres font ouvertes, & qu'il coule beaucoup
de larmes, il en defcend par gouttes de la paupiére fupérieure
à inférieure, ce qui forme fur la furface de l'œil autant de
ruifleaux ; mais quoique ces différents ruifleaux de larmes
oient affés près pour fe toucher en s'épanouifiant en nape,
le milieu de chacun de ces ruiffeaux en nape, étant plus
épais que fes bords, la nape totale qui en réfulte ne feroit
point d'égale épaifleur par-tout, f1 la paupiére à chaque
inftant ne s’'abbaïfloit, & ne fe relevoit fubitement. Ces
mouvements pref que imperceptibles étendent uniformément
les larmes, & rendent la nape totale plus unie, de façon que
les rayons vifuels n'en fouffrent point de réfraction inégale.
Pendant le fommeil, ou quand les paupiéres font fermées,
comme leur bord interne eft arrondi, elles ne fe touchent
que par leur bord extérieur; alors la gouttiére de la pau-
piére fupérieure & celle de l'inférieure fe touchent, & n'en
font qu'une, qui eft plus grande, & qui, appuyée fur
le globe de l'œil, fait avec ce globe un canal triangulaire,
par lequel les Jarmes coulent de l'angle externe vers l'angle
interne. C’eft-à que les larmes forment une efpece de lac,
en rempliflant l’efpace qui fe trouve entre l'angle interne
des paupiéres & le globe de l'œil; car l'angle interne des
paupiéres eft éloigné du globe de l'œil, de plus de deux
lignes. C'’eft cette diftance qui fait la longueur du lac GZ, où
s'affemblent les larmes. Au bord interne de cet efpace s’éleve
un monticule charnu Æ7, par-deflus lequel pañlent les pau-
piéres, lorfqu’elles fe ferment. Ce monticule charnu, ou cette
caroncule, tient les paupiéres foûlevées, & empêche qu'en
fe fermant, elles ne s’approchent du globe, de forte qu’en
cet endroit il refte un efpace entre les paupiéres & le globe;
&
D ES TSICAIEIN EEE. x
& cet efpace, que rempliflent les larmes, fait fa profondeur
du lac, qui eft mefurée par l'élévation de la caroncule. Dans
ce lac font, pour ainfi dire, plongées deux petites ouvertures
AA, qui font percées au fommet de deux petits monticules
qu'on remarque au grand angle des paupiéres, l’un au bord
de la paupiére fupérieure, & l’autre au bord de la paupiére
inférieure. Ces ouvertures nommées Points Lacrymaux, font
les embouchures de deux petits canaux qui s’uniflent, & ne
forment plus qu'un canal 2, lequel va s'ouvrir dans le fac
lacrymal €. Ce fac devient plus étroit, & formant ce qu'on
nomme le canal nazal D, fe prolonge dans le nés, où il
dépofe les farmes que les points lacrymaux ont pompées dans
de lac, où les gouttiéres des paupiéres les ont conduites.
Les points lacrymaux font toüjours ouverts, parce qu'ils
font cartilagineux ; s'ils étoient membraneux, la moindre
compreflion les afaifferoit, & ils ne feroient pas toüjours
dans l'état où il convient qu'ils foient, pour recevoir con-
tinuellement les larmes, à mefure qu’elles s’affemblent au lac
lacrymal. De plus, ces ouvertures font naturellemént tournées
du côté de l'œil, & elles s'y tournent encore davantage,
lorfque nous fermons l'œil ; de maniére qu’elles ne font point
bouchées par l'approche des paupiéres.
Quand l'œil eft fermé, le point lacrymal fupérieur &
Yinférieur fe touchent, mais fans fe boucher lun l'autre,
parce qu'ils ne fe touchent que par la portion qui regarde
le bord externe des paupiéres. Chacun des points lacrymaux
fe trouve aïnfi ouvert à l'extrémité de la gouttiére de la pau-
piére dans laquelle if eft percé, & tous deux font plongés
. dans la gouttiére commune, à l'endroit où elle s'élargit pour
former le fac.
Après tout ce qui a été dit, on conçoit bien que, pen-
dant que les yeux font fermés, la gouttiére commune que
forme l'approche des paupiéres, le lac qui fe trouve à fon
extrémité interne, & tout lefpace qu'il y a entre les pau-
piéres & le globe de l'œil, font un lac commun occupé
par les larmes, qui coulent continuellement de a glande
Men 1734 15
138 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE
lacrymale, & qui fe dégorgent par les points lacrymaux dans
le fac facrymal & dans le nés.
Pour connoître quelles font les forces qui pouffent ainfi
les larmes dans le nés, je commence par fuppofer les points
lacrymaux bouchés, pendant que l'œil eft fermé, & je
demande ce qui doit arriver, fi les larmes coulent toüjours
entre l'œil & les paupiéres. Dans ce cas, les larmes ne
pouvant fe dégorger dans le nés, ouvriront les paupiéres,
& tomberont fur la jouë, fi l'aétion des mufcles & l’adhé-
fon des paupiéres ne font pas capables de leur réfifter : or Fon
fçait que l'aétion des mufcles tient les paupiéres rapprochées,
& que de plus elles {ont coliées lune à l'autre par la chaflie,
qui regne fur le bord par lequel elles fe touchent; par confé-
quent tant que Îles mufcles & cette adhéfion feront capables
de réfifter, les larmes rempliront les paupiéres, les foùle-
veront, & les écarteront du globe de l'œil fans les ouvrir. Si
Yinterruption du cours des larmes par les points lacrymaux
continué , à la fin les larmes forceront ladhéfion des pau-
piéres, & fe répandront fur la jouë : mais fi, dans le temps
même que l'action des mufcles & adhéfion des paupiéres
font près de céder à l'effort des larmes, les points lacrymaux
viennent à s'ouvrir ; alors les larmes ayant leur cours libre par
le nés, les paupiéres ne feront point forcées de s'ouvrir ; au
contraire elles poufferont les larmes dans les points lacrymaux
avec toute la force d'un reflort qui fe débande.
Ces fuppofitions ne font pas inutiles, puifqu’elles font
voir que l'action des paupiéres peut, au moins dans certains
cas, avoir quelque part au paflage des larmes par les points
lacrymaux : ainfi les paupiéres étant fermées, ont avec les
larmes action & réaétion, c'eft-à-dire, que les larmes peu-
vent foûlever les paupiéres, & que le reflort des paupiéres
peut pouffer les larmes. Quoiqu'il femble que les paupiéres
ne peuvent avoir cet ufage que pendant le fommeil , cepen-
dant fi lon obferve bien le mouvement prefque impercep-
tible que font à chaque inftant les paupiéres ; mouvement
auquel j'ai déja donné pour ufage d'égalifer & d'applanir les
D'ÉGUIS C'MEMN "CET 139
armes fur la furface du globe ; fi, dis-je, on obferve ce
mouvement, on remarquera qu'il n'eft pas toûjours complet,
c'eft-à-dire, que toutes les fois qu'il fe fait, les paupiéres
ne fe touchent pas exactement; mais que le plus fouvent
elles fe touchent auffi parfaitement que pendant le plus
profond fommeil. Il eft vraï que cet attouchement ne dure
qu'un inftant, mais il dure aflés pour rapprocher les gout-
tiéres, comprimer les larmes, & les poufler dans les points
lacrymausés
Ce mouvement des paupiéres eft fi fubit, que quoïqu’on
le fañlé plufieurs fois pendant la leéture d’un feuillet, cette
lecture n’en eft point interrompuë. Ce mouvement eft plus
fréquent dans ceux qui ont f'œil larmoyant, que dans les
autres ; & tout le monde eft obligé machinalement de Ie
faire avec plus de force, & de lui donner plus de durée,
toutes les fois que l'abondance des larmes excite une cer-
taine fenfation qui occafionne ce mouvement ; mouvement
auquel on ne fait prefque point d'attention ,: quoiqu’on
puifle lobferver à chaque inftant, tant fur foi que fur les
autres.
La feconde caufe du pañlage des larmes, & celle que je
regarde comme la principale, ceft, la difpofition des points
lacrymaux, du fac lacrymal, & du canal qui s'ouvre dans
le nés.
I ne faut que jetter les yeux fur la figure 3, qui repréfente
les points lacrymaux 44, leur conduit commun 2, le
fac lacrymal €, & le canal nazal D. Toutes ces parties font
une même continuité de canal qui, par fa figure & fon
ufage, mérite le nom de Sihon, & je le nommerai doref-
navant le Siphon lacrymal. Deux chofes font eflentielles à
ce fiphon, pour qu’il pompe les larmes ; la premiére qu'il
foit plein du fluide, & la feconde que la branche, qui trempe
dans le fluide, foit plus haute que celle qui le dépolfe.
Soit AAB la branche la plus haute du fiphon, dont les
ouvertures À À font plongées dans le lac lacrymal, & BCD,
la branche la plus baffle qui s'ouvre dans le nés ; je dis que
S if
140 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoôyaLE
ce fiphon étant une fois plein de larmes, & les ouvertures
AA toüjours préfentes au fluide du lac facrymal, Les larmes
couleront fans interruption de la branche la plus haute dans
la plus bafle ; & cela fufht pour que les larmes coulent
continuellement dans le nés.
J'adjoûte que comme il y a une liqueur muceufe, qui
mouille toüjours la membrane du nés, il y a lieu: de croire
que l’adhéfion des larmes avec ce mucus, doit encore favorifer
leur écoulement. -
J'aurois encore bien des chofes à dire fur l'écoulement
des larmes, fr je l’examinois dans toutes les attitudes diffé-
rentes où les yeux peuvent fe trouver; mais comme ces
recherches curieufes ne font préfentement d'aucune utilité
à mon fujet, je pafle à la feconde partie de ce Mémoire.
SECONDE -PART HE
En guoy les organes qui fervent à l'écoulement des larmes
font changés, lorfqu'ils font attaqués de la
Fiflule lacrymale:
J'appelle Fiftule, tout ulcere dont l'entrée ef étroite &
le fond large, dont les bords & les environs font durs &
calleux. La fiftule lacrymale eft un ulcere de cette efpece,
qui attaque le fiphon lacrymal, & qui l'ayant percé, permet
aux larmes de fe répandre fur la jouë. Quoique cette de-
fcription ne puiffe convenir qu'à la fiftule lacrymale, on
appelle cependant de ce nom, deux autres maladies bien
différentes, dont l’une eft à la vérité lacrymale, maïs elle
n’eft point fiftule; & l'autre eft fiftule, mais elle n’eft point
lacrymale.
La premiére eft une petite tumeur, qui s'élève au-defus
du bord de l'orbite, entre l'angle interne des paupiéres &
la racine du nés. Cette tumeur eft pour l'ordinaire une fuite
de lobftruétion du fiphon lacrymal du côté du nés ; les
larmes que les points lacrymaux y conduifent ne pouvant
s'écouler dans le nés, s'accumulent & font effort pour dilater
D' ES. SAC ULELN -C.E.,S: nr 14
ce fiphon; mais parce que la partie étroite & baffe du fiphon
eft renfermée dans un canal offeux, elle réfifte, & tout l'effort
que font les larmes; fe pañle fur la partie large appelée fac.
Ce fac n'a que fa moitié interne renfermée dans une gouttiére
ofieufe; l'autre moitié, qui n'eft couverte que de membranes,
obéit & céde à l'effort des larmes, qui, en s’accumulant en
ce lieu, le dilatent, l'étendent, & le pouffent au dehors.
Quand on comprime cette tumeur, elle difparoït, parce
que cette compreflion oblige les larmes renfermées dans Ja
tumeur, de repaffer dans le grand coin de l'œil par les points
lacrymaux; mais quelque temps après elle reparoït, à mefure
qu'il rentre des larmes à la place de celles que l'on a obligé
de fortir. è
Quoique cette maladie ne {oit,à proprement parler, qu'une:
rétention de larmes, qu'elle ne {oit le plus fouvent accom-
pagnée ni d'ulcération , ni de dureté, ni de callofité, on lui a
cependant donné le nom de Fiftule lacrymale ; peut-être
parce qu'elle eft fouvent la caufe de cette fiftule; peut-être
auffi parce que, lorfqu'on a donné ce nom à cette maladie,
ne connoiffant pas encore les points lacrymaux, on a pris
pour un trou fiftuleux, celle de ces ouvertures naturelles par
laquelle on voyoit {ortir la matiére, à mefure que l’on prefloit
la tumeur. Ce qui pouvoit d'autant mieux tromper, c'eft
que fouvent il fort avec les larmes une matiére blanche affés
femblable à du pus, ce qui n’eft cependant que des larmes
qui ont féjourné; & lon voit même fortir du pus.bien formé,
dans celles de ces tumeurs auxquelles il eft furvenu inflam-
mation. Cette maladie, qui n’eft point fiftule lacrymale, doit
être nommée Retention de larmes, & Yon ne peut lui refufer
ce nom, fi l'on fait attention au rapport qu'elle a avec 11
rétention d'urine. En effet, les points lacrymaux dépofent
les larmes dans le fac lacrymal, comme les ureteres dépofent
les urines dans la veflie. Le canal nazal conduit les larmes
dans le nés, comme luretre conduit les urines au dehors.
L'obftruction de celui-ci eft caufe de la rétention des urines
dans la vefie, & l'obftruction du conduit nazal, qui empêche
S ii]
142 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royarr
es larmes de couler dans le nés, les retient dans le fic
Jacrymal.
Dans la premiére partie de ce Mémoire, j'ai regardé l'ac-
tion des paupiéres comme une des caufes qui oblige les larmes
à couler dans les points lacrymaux; fi l'on pouvoit douter
de cette vérité, on en trouveroit une preuve bien fenfible
dans la rétention des larmes. En effet, on ne peut pas nier
que dans cette maladie, les larmes n’entrent dans le fac 1a-
crymal; & lon ne peut pas dire qu'elles y entrent par le
méchanifme du fiphon lacrymal, puifque ce fiphon eft bor-
ché : mais comme faction des paupiéres eft dans ce cas,
l'unique caufe capable de déterminer les larmes à entrer dans
les conduits lacrymaux, il en faut néceflairement conclurre
que l'action des paupiéres eft réellement une des caufes qui
pouflent les larmes par les points lacrymaux & dans le fac
lacrymal.
L'écoulement des larmes ne fe faifant plus du côté du nés,
ce fac en eft rempli, & par la fuite il eft fi confidérablement
dilaté, qu'il forme cette tumeur lacrymale du grand angle,
que j'ai dit être mal-à-propos nommée Fiftule lacrymale,
Ce qu'il y a de particulier, c'eft que la force avec laquelle
les paupiéres pouffent les larmes, & qui paroït peu de chofe,
foit cependant capable de dilater le fac lacrymal, & de forcer
fon reflort jufqu'à le percer & le rompre. On ftroit étonné
de ce fait, fi l'on ne fçavoit que les fluides qui font pouffés
par une petite ouverture dans un lieu fpacieux, comme dans
une veflie, agiflent fur chaque partie de cette veflie égale
à l'ouverture, avec la même force qui pouffe le fluide dans
cette ouverture; de forte que fi le fluide qui entre a un
degré de force, & que la furface de la veffie ait 1000 parties
égales à l'ouverture, la veffie fera dilatée par 1600 degrés
de force, quoique la liqueur ne foit pouffée que par un degré.
Ainfi la force, avec laquelle les larmes font pouffées dans
les points lacrymaux, fera à celle par laquelle le fac eft dilaté,
comme le diametre des points lacrymaux eft à la capacité
du fac.
DIE ,5,4 9, GRIVE,N CE Se 143
Pour que la tumeur caufée par la rétention des larmes,
telle que je viens de la décrire, fe change en fiftule lacry-
male, il faut qu'elie dégénére en ulcere, & que les bords
de cet ulcere, & même les environs, durciffent & devien-
nent calleux. Souvent toutes ces chofes fe fuivent fi prompte-
ment, qu'on n’a pas le temps d'appercevoir l'ordre de leurs
fuccefions ; mais il eft des cas dans lefquels la lenteur a
permis de les examiner. Comme mon deffein n'eft pas de
traiter à fonds cette matiére, Je me contenterai de rapporter
Fordre ordinaire des principaux changements.
Les larmes retenuëés font une tumeur, qui, dans certaines
perfonnes, fubfifte pendant plufeurs années, fans leur caufer
d'autre incommodité que Îe larmoyement. Ceux qui font
affligés de cette tumeur, font obligés de la preffer plufieurs
fois par jour, & elle diminuë à proportion de a quantité
de l'humeur qui fort par les points lacrymaux. Dans l'efpece
dont il s'agit, s’il ne fort que des larmes, c’eft lorfqu'elles
font douces & fans falure; ce qui fait qu’elles féjournent fans
fermenter, & fans caufer de douleur, ni d'inflammation,
D'ailleurs le fac fouvent vuidé par la compreffion, ne foufre
point d’extenfion extraordinaire: & la tumeur eft lon g-temps
fans augmenter, fur-tout f1 le Malade n'a pas naturellement
beaucoup de larmes. Il n’en eft pas de même de ceux qui
ont beaucoup de armes, ni de ceux en qui les larmes font
falines.
Dans les premiers, le fac fe remplit plus fouvent que
dans les autres, & les Malades font obligés de le vuider
prefque toutes les heures. C’eft à quoi ils peuvent bien être
attentifs pendant le jour ; mais la nuit, n’étant point avertis
de la néceffité de comprimer le fac, ils abandonnent à la
puiflance des larmes qui, continuellement pouflées dans les
points lacrymaux, forcent les parois du fac, le déchirent
-& le percent à la fin. Les larmes fe répandent alors fous la
peau des paupiéres ; & j'ai quelquefois vü paroître au reveil,
-
_ces fortes de tumeurs fous la forme d’un œdeme ou d'une
bouffiffure, qui, par le fecours de la comprefflion, diminué
544 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
& difparoït quelquefois entiérement; car cette premiére
crevafle n’eft pas confidérable ; mais elle augmente les nuits
fuivantes ; l'œdeme alors eft plus confidérable, & la com-
preflion peut bien le diminuer, mais elle ne peut faire qu'il
difparoifle entiérement. C’eft ainft que de jour en jour le
mal augmente, que l'œdeme s'enflamme, qu'il fuppure &
forme un ulcere caverneux.
Ceux qui ont les larmes âcres, quoiqu'en médiocre quan-
tité, peuvent, en comprimant pendant le jour, empêcher
le féjour des larmes, & par ce moyen éloigner linflam-
mation ; mais la nuit les larmes féjournent, & par leur âcreté
elles irritent & enflamment le fac, qui eft pour lors d'autant
plus fufceptible d'irritation, qu'il eft plus tendu & plus dilaté
par la rétention des armes ; le fac enflammé fuppure; l'abcès
eft ouvert, ou s'ouvre de lui-même; & voilà encore un
ulcere caverneux, par lequel fortent enfemble & le pus &
les larmes. L'un & Fautre, je veux dire le pus & les larmes,
par fucceffion de temps endurciffent la peau & les chairs;
alors voilà une vraye fiftule lacrymale.
La troifiéme maladie à laquelle on donne ce nom, eft
celle que j'ai dit être fiftule fans être lacrymale; c'eft la fuite
d'un petit abcès au coin de l'œil, lequel s'ouvre fouvent de
lui-même; & il devient fiftuleux, comme le deviennent
les abcès du bord de Fanus, & plufieurs autres qu'on laiffe
percer par le pus, & qu'on néglige d'ouvrir. Ce qui a pu
faire croire à quelques-uns, que cette fiftule eft lacrymale,
c'eft que dès le commencement de la maladie, il y a tou-
jours larmoyement, parce que les points lacrymaux font
fi voifins qu'ils font bouchés par l'inflammation ; mais l'abcès
étant percé, l'inflammation fe diflipe, les points lacrymaux
s'ouvrent, & les larmes coulent à l'ordinaire. La fiftule dont
je veux parler n’eft point lacrymale, parce que les larmes
ne coulent point par l'ouverture fiftuleufe; & elles ne coulent
point par cette ouverture, parce que le fac lacrymal n'eft
point percé, comme j'ai fait voir qu'il l'eft dans les deux
gutres cas,
Comme
DES SCctEnNCcEs. ‘14
Comme ce Mémoire ne renferme point une hifloire
complete de la Fiftule lacrymale, je ne dirai rien des fignes
qui caractérifent chacune de ces maladies ; je paflerai même
fous filence toutes les caufes capables d’obftruer le canal
nazal. I me fuffit de faire remarquer que cette obftruétion
eft la principale caufe de tous les dérangements qui arrivent
aux organes qui fervent à l'écoulement des larmes ; & que
pour guérir la Fiftule lacrymale, ne la regardant que comme
une maladie organique, ïl eft eflentiel, non feulement d’ou-
vrir la fiffule, mais de déboucher le canal nazal, & de le
conferver ouvert après la guérifon.
TROISIEME PARTIE.
De l'opération de la Fiffule lacrymale.
Ayant pañlé fous filence les caufes premiéres de cette
maladie; je me difpenferai aufhi de rapporter les remedes
dont on fe fert ordinairement pour combattre ces caufes;
faifant donc abftraction de tout ce qui peut être étranger
à mon fujet, il ne s’agit plus que de rétablir une machine
hydraulique dérangée; machine dont on connoît la future,
ainfi que la caufe immédiate de fon dérangement.
Les larmes ne coulent point dans le nés, elles tombent
fur la jouë , elles font retenuës dans le fac lacrymal, elles
dilatent ce fac, elles y caufent tenfion, inflammation, rupture
& fiftule. La caufe de tous ces effets eftl'obftruction du fiphon
lacrymal. Pour détruire ces effets, il ne s’agit donc que de
déboucher ce fiphon, puis les larmes couleront dans le nés,
& alors plus de larmoyement, plus de rétention de larmes,
plus d’inflammation, de rupture ni de fiftule.
Pour déboucher ce fiphon, je fais une incifion au fac
lacrymal, j'y introduis une fonde canelée, je la poufle juf-
ques dans la narine, & par ce moyen je débouche le canal.
La cannelure ou gouttiére de cette fonde me fert à conduire
dans la voye qu'elle vient de retracer, une bougie avec
laquelle je tiens ce canal ouvert. Je change tous les jours
Mem, 1734 a à
Voyes la Fig: 43
146 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
cette bougie. J'en ceffe l’ufage, quand je crois que la furface
interne du canal eft bien cicatrifée; alors les larmes repren-
nent leur cours naturel de l'œil dans le nés, & la playe exté-
rieure fe réunit en deux ou trois jours.
Voilà en peu de mots l'opération que j'ai pratiquée avec
fuccès depuis plufieurs années. Je n’entre point dans le détail
du manuel, perfonne ne doute que la parfaite exécution ne
dépende de la dextérité de l'opérateur.
Toute difficile que paroïffe cette opération, elle eft cepen-
dant fi fimple & fi conforme aux loix naturelles, que je
me difpenferois d’infifter fur les raifons de préférence, ff
les autres façons d'opérer ne trouvoient encore des partifans ;
mais comme on ne peut en juger que par comparaifon, je
vais rapporter fuccinétement celles de ces méthodes qui font
ou qui ont été les plus ufitées.
Avant que le Siphon lacrymal fût connu, on fe conten-
toit de faire l'ouverture de la fiflule. L'ignorance où l’on
étoit fur le méchanifme de cette partie ne permettoit pas de
porter les vüës plus loin ; aufli ne réuffifloit-on pas, à moins
qu'il n'arrivât quelqu'un des hafards dont nous parlerons
ci-après. Mais il eft étonnant que depuis qu'on a connu les
points lacrymaux, le fac Jacrymal & le canal nazal, on fe
{oit contenté pendant plufieurs années de faire à cette fiftule,
pour toute opération, une fimple ouverture. C’eft fans doute
parce que lon ne foupçonnoit pas que l'obftruétion du canal
lacrymal füt la caufe du larmoyement ; ceux qui depuis l'ont
connu ou foupçonné, ont imaginé de pratiquer un trou, du
fac nazal dans le nés, pour ménager le pañlage des larmes. Ce
trou fe faifoit à la hauteur des points lacrymaux, foit avec
un poinçon, foit avec un fer pointu rougi au feu. Le premier
moyen ne réuffifloit jamais ; & fr le fecond a réufii quel-
quefois pour la fiftule , il reftoit toujours un larmoyement.
Le poinçon ne faifant fon trou qu’en écartant les parties, il
devenoit inutile, parce que la réunion s'en faifoit même aflés
promptement. Le fer rouge faifoit mieux, parce qu'en brüû-
lant, il occafionnoit une perte de fubftance qui laïfloit un
LA
ms à VOTES 28 1 LE NE CE 147
trou par lequel on efpéroit que les larmes fe procureroient
d’elles-mêmes un paflage dans le nés ; mais voyant que mal-
gré cela le larmoyement fubfiftoit, on a cru qu'après la
guérifon de la fiftule, ce trou fe bouchoit ; & qu'il ne fe
bouchoit, que parce que l'on ne lavoit pas confervé ouvert
pendant tout le traitement , ou du moins jufqu'à ce qu'il
fût cicatrifé au point que les chairs en croiflant ne puflent
le boucher. C’eft pour cela que depuis on a fait tout ce que
Yon a pû pour conferver l'ouverture, foit avec des tentes
de linge, foit avec des fondes, ou des cannules de plomb,
d'or ou d'argent.
J'ai moi-même fait cette opération, & j'étois bien perfuadé
que le nouveau conduit que j'avois pratiqué s’étoit confervé,
puifqu'après la guérifon de da fiftule, le malade en fe mou-
chant faifoit fortir l'air par les points lacrymaux; cependant
je n'eus point la fatisfaction d’avoir remédié au larmoyement.
Ayant réfléchi fur ce fait, je me perfuadai que, pour que
les larmes coulaffent librement dans le nés, un canal quel-
conque ne fufhfoit pas, & qu'il en falloit un, tel que la Nature
nous l'a donné. En effet, en perçant un trou à la hauteur
des points lacrymaux, le nouveau canal 4 4 BN abolit a
fonétion du fiphon lacrymal ; la longue branche de ce fiphon
BD, devient inutile, & les larmes perdent la pente qui
les conduifoit dans le nés. Par mon opération, je ne change
point la conftruétion naturelle du Siphon, fa branche infé-
rieure conferve toute fa longueur, & les larmes toute Ia
pente qui des conduit dans le nés.
Si par la méthode ordinaire quelqu'un a paru guéri fans
larmoyement, il ne faut point l’attribuer à cette méthode,
Il y à des perfonnes qui ont l'œil moins larmoyant que
d'autres, & celles-là peuvent bien fe paffer de quelqu'une des
caufes qui facilitent l'écoulement des larmes. De plus, cela
dépend aufi de Ia direétion qu’on donne à l'inftrument avec
lequel on perce; car, fi au lieu de lui donner une direction
horifontale, on le pouffe obliquement de haut en bas, alors
on forme un canal plus long, & la pente des larmes en eft
T ÿ
Fig. 3,
148 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
moiñs diminuée. D'ailleurs fr par cette méthode l’on a vû des
malades guéris fans larmoyement, ce peut être parce que le
canal nazal s’eft débouché naturellement, dans le mème temps
que le nouveau trou s'eft fermé: ce qui a rétabli la fonétion
du fiphon lacrymal. I n'efl point douteux que le canal nazal
ne puifle quelquefois fe déboucher fans opération. On en a
exemple dans ceux à qui on guérit la tumeur lacrymale,
par le moyen d'un bandage compreffif; & c’eft fans douteaufit
parce que ce canal peut fe déboucher naturellement, que la
tumeur, & même la Fiflule lacrymale fe font quelquefois
guéries fans y rien faire. Ces cas ne font pas fans exemple.
UC ty
À
NN
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Mers. de Lead 1734. Pl Hpas 148
Man de Vial 1584 Pl 0 pay 148
p'lrx sua ice) d'A INC GES: 5 149
SUR LES LIGNES COURBES
QUI SONT PROPRES À FORMER
LES TAÆSIME NN... D O0 M E.
Pa M BoucuEenr.
p£:: IEURS perfonnes ont traité avec beaucoup de
foin des Voutes en fimple Arc : les derniers Volumes
des Mémoires de Académie contiennent d’excellents mor-
ceaux fur cette matiére, entre lefquels on doit citer avec
diftinétion ceux de M. Couplet. I ne refte que les Voutes
en Dome que perfonne, que je fçache, n’a examinées.
L'utilité que peut avoir cet examen, me l'a fait entreprendre :
l'ufage des Domes eft très-fréquent dans plufieurs de nos
Edifices. Je montrerai qu'une infité de lignes courbes font
propres à former ces fortes de Voutes, & j'indiquerai en
même temps la maniére de les choifir. Je fuppolerai toû-
jours que les pierres ou les Voufloirs ont leurs furfaces imfi-
niment polies : fi un Dome doit fe foûtenir dans cette fup-
pofition, on n’en fera que plus für qu’il fe foûtiendra dans
Tétat actuel où font les chofes, lorfque les Voufloirs ne
peuvent glifler les uns contre les autres qu'avec une affés
grande difficulté.
Bb A (Fig. 1.) eft la courbe qui forme le Dome par fa
révolution autour de fon axe, la verticale AD. Cette ligne
courbe pañle dans tous les points 2, &, &c. par le milieu
de l'épaifleur XL, H1, &c. de fa Voute, épaifieur que nous
regardons ici comme très-petite , & qui l’eft toûjours en effet
par rapport aux dimenfions du Dome. Tous les joints,
comme ÂL, 1, &c. des Voufloirs font auffi fuppofés ici
perpendiculaires à la même courbe 244, comme ils le font
ordinairement. Si lon confidere après cela une partie A A4
du Dome, il eft évident qu'elle pouffera tous les Voufloirs
19 Mai
175%
Fig, 1°
150 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyarE
HL qui font immédiatement au deflous, felon la perpen-
diculaire 2 C au joint 47, ou lon le prolongement du petit
côté 6 D de la courbe. Mais à mefure qu'on confidérera des
points plus bas, la direction doit changer , parce que la
pefanteur de chaque affife s'adjoûte fucceffivement à l'effort
que fait la partie fupérieure. Cette partie pouffe au point 4
felon LC, & l'effort eft exprimé, fi on le veut, par C même.
Müis fi l’on fuppole toute la pefanteur du Voufoir 4 L
réunie dans le point », ce qu'il eft permis de faire auffi-tôt
que l'épaiffeur 2 4 des Voufloirs eft infiniment petite, on
n'aura qu'à repréfenter cette pefanteur par la petite verticale
BF; &fi on la compole avec l'effort 4 C que fait la partie
fapérieure, on aura dans la diagonale 2G du parallelogramme
CbFG la direction de Feflort total que fait la partie fupé-
rieure augmentée par en bas d’une aflife, c’eft-à-dire, l'effort
que fait toute la partie X A4. La direction de la preffion {e
trouve ainfr continuellement détournée ; elle forme une
courbe, qui peut fe confondre avec fa courbe AGZ B, mais
qui peut auffi en être différente, comme elle l’eft ici.
Cette différence eft fufceptible de plufieurs cas. 1.° Si fx
partie 2 6 de la courbe qui forme le Dome fe trouve fituée
par rapport à #G, comme dans la Figure premiére, la Voute
doit fe foûtenir, pourvû que la courbe 4 4 B n'ait aucune
partie horifontale, Car le joint XL étant perpendiculaire à
la courbe, il fera oblique par rapport à la direction de
Yeffort G que fait le Voufloir AL, tant par fa propre
pefanteur que par la preflion de Ia partie fupérieure de la
Voute. Mais la maniére dont la direttion & G eft oblique
par rapport au joint XL, eft caufe que l'effort 4G ne tend
qu'à faire avancer le Voufloir AL vers le centre du Dome,
ou à le faire tomber en dedans ; & c’eft ce qui ne peut point
arriver, puifque tous les autres Voufloirs de la même affife
sy oppofent, en faifant un égal effort. En un mot toute
la partie de l'effort 4G, qui ne tombe pas fur le joint ÆZ,
tombe fur les joints montants ou verticaux, & en eft foû-
tenuëé, & il n'y a point par conféquent ici d'écroulement à
= ——
DES SCIENCES. 151
craindre, comme il y en auroit dans une Voute à fimple Arc,
où l'effort que font les Voufloirs n’eft porté que par les feuls
joints horifontaux. Or il fuit de-là que toutes les lignes
courbes, fans en excepter une feule, qui tournent leur con-
véxité vers leur axe, font propres à former des Domes,
pourvû que par leur extrémité Z elles ne deviennent pas
tont-à-fait paralleles à l’horifon.
2.° Le petit côté & B peut être fitué précifément fur 4C,
prolongement de Gb, c'eft-à-dire, que la ligne 44 B peut
être droite, & alors la Voute, qui fera parfaitement conique,
& qui prendra le nom de Flèche ou d’Aiguille, n'en fera pas
moins ftable , car l'effort à B ne tendra encore qu'à faire
entrer le Voufloir, & c'eft ce que fa figure & ce que fon
équilibre avec les autres de la même aflife doivent empêcher.
Ainfr nous voyons encore que toutes les Voutes en Aiguilles
font parfaites, & qu'elles doivent fe foûtenir, fans qu'il
importe quel angle aigu ou obtus faffent au fommet les côtés
du cone.
Enfin 3. fi le petit côté à B de la courbe, au lieu d'être
“extérieur par rapport à 2 C comme dans Îes Voutes repré.
fentées par la premiére Figure, ou au lieu d’être fitué fur 8€,
comme dans les Voutes coniques, lui eft intérieur comme
dans la Figure 2; la Voute fe foûtiendra encore, pourvü
que 2 B ne foit pas en même temps intérieur par rapport
à 4G. La petite ligne 2C eft toûjours le prolongement du
petit côté 64, & repréfente l'effort que fait la partie fupé-
rieure du Dome, pendant que & F repréfente la pefanteur
particuliére du Voufloir AL, & que 2G, diagonale du pa-
rallelogramme C F, repréfente l'effort compolé qui réfulte
des deux. Or ce dernitr effort s’occupe encore ici à poufler
le Voufloir en dedans, & quand même 4 2 f{eroit fitué exacte-
ment fur G, il n’y auroit encore aucun rifque, puifquetout
l'effort que feroit le Voufloir AL ne tendroit qu'à l'appliquer
fortement contre le Voufloir inférieur, en agiflant felon une
direétion perpendiculaire au joint XL. Mais ce ne feroit pas
la même chofe fi la courbüre augmentoit trop fubitement,
Fig. le
Fig. 29
/
752 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
où fi b B devenoit intérieur par rapport à 2G: Alors le
Dome tomberoit, parce que les Voufloirs, comme FL,
feroient pouflés en dehors, & qu'aucun obftacle ne les em-
pécheroit de fuivre ce mouvement. Quoi qu'il en foit, il eft
clair que comme 4 B peut avoir une infinité de diverfes
fituations entre LC &0G, il peut y avoir auffrune infinité
de courbes convexes propres à former des Domes, & que
celle qui a le plus de courbüre, ou qui eft la plus convexe,
& qu'on peut regarder comme la derniere de toutes, a fes
petits côtés, comme 4 P, exaétement fitués fur les directions
bG. Les joints verticaux ne fupportent dans celle-ci aucune
partie de l'effort, puifque les Voufloirs ne font point poufés
en dedans. Aufli le moindre agent extérieur eft-il capable
de renverfer cette derniére Voute; & quoiqu'elle fe foûtienne,
elle eft toûjours prête à tomber.
H réfulte de tout ce que nous venons de dire, qu'il ne
peut y avoir de difhculté à choifir les lignes courbes qui ont
l'ufage que nous demandons, que lorfqu'elles tournent leur
convéxité en dehors. Toutes les lignes courbes qui font
concaves, comme dans Ja Fig. 1 , peuvent ètre employées
avec fuccès, de même que les lignes droites, fans qu’il im-
porte quel angle elles faflent au fommet 4. Mais lorfque la
courbe eft convexe, comme dans la Fig. 2, il faut qu'elle ne
foit pas trop courbe, il faut que le petit côté 2 B ne foit
point intérieur par rapport à bG, ou, ce qui revient au
même, il faut que la petite ligne CB, interceptée entre la
courbe & fa tangente, ne foit pas plus grande que CG, il
faut que CG 2 CB, & c'eft ce qu'on ne peut gueres vérifier
que par le calcul.
Si nous prolongeons le côté &6 fufqu'à la rencontre 47
de l'axe, & de la tangente tirée de l’autre côté du Dome,
& que prenant l'efpace AN pour repréfenter la pefanteur
de toute la partie A 44 de la Voute, nous décompofions
cette pefanteur en achevant le parallelogramme WOZP,
nous aurons AO pour lexpreffion de l'effort que fait la
Voute fur le Voufloir AL, en pouffant perpendiculañement
au
Re—
DES SCIENCES. 1°
au joint 77; & on voit que fi 4C eft égal à cet Fax
comme nous l'avons fuppolé ci-devant , la petite ligne 4e
* qui eft parallele à l'axe, & qui eft égale à J\ 4, fera égale
à //Q qui repréfente là pefanteur de a partie À A de fa
Voute. Or nous n'avons qu'à nommer x les abfciffes ou les
parties de l'axe AD, y les ordonnées, comme ZD, & e les
épaifleurs 1, XL, de la Voute, nous aurons 4e ou Ed?
BE — dy; 1B— V4y dx, & eV dy + dx pour
le petit trapeze AL, que nous n'avons qu'à multiplier par
l'ordonnée y, pour avoir Ja quantité ey V4 + dx qui
peut défigner la pefanteur de chaque Vouffoir, pendant que
l'intégrale f'ey V4 3° dx défignera la pefanteur de {4
partie entiére 74 de Ta Voute. Nous n'avons que faire de
dire que nous ne multiplions par y, que parce que les Vouf_
foirs qui fupportent la partie AA {ont plus larges à mefure
que la circonférence du Dome fe trouve plus grande. Main-
tenant fr nous faifons attention que la petite ligne CG ou
BF repréfente la pefanteur du Voufloir AL, pendant que
BC repréfente l'effort que fait Ja partie fupérieure, & que 4e
repréfente la pefanteur de cette partie, nous pourrons faire
cette proportion, la pefanteur fey Vdy + dx de HA eft
à be DE — dx, comme la pefanteur ey dy + dx
du Voufloir AL eft à48F—CG— CIC TA + Enfin
JeyVdy* dx
comme la petite ligne CP, interceptée entre la courbe & la
tangente, eft la différentielle des Zx, pendant que les 4y
font conftantes, nous aurons -22* V4" + 4x" 2 ddx pour
JeyVay® + dx°
lexpreffion analytique de CG > CB. Cette formule nous
fera connoître toutes les courbes dont on peut fe fervir pour
former des Voutes en Dome, & Parmi toutes ces courbes
Men, 17344 °V
Fig, 2,
Fig. 2.
154 MEMOIRES DE: L'ACADEMIE RoyALE
ep dx Vdy?- da
fes Va +4
convexe, ou la derniére qui y eft propre.
l'équation —= dd x nous indiquera Ja plus
Cette formule fe change en TER 2
fes V4 y°+- dx qui nous fuggere une nouvelle remarque
fur la propriété des courbes dont il s'agit ici. La formule
fous la premiére forme nous apprenoit qu'il faut exclure,
ou ne point employer les lignes dont la courbüre eft trop
fubite, les lignes dont les branches ne s'ouvrent point aflés.
Elles peuvent s'ouvrir de plus en plus, jufques-là qu'elles
peuvent devenir prefque horifontales : mais de l'autre côté
elles ont un terme, leurs branches ne doivent pas trop fe
fermer, ou ne doivent pas tendre trop promptement au
parallelifme avec l'axe. Maintenant nous voyons. que ces
courbes qui font trop convexes, donnent à la partie fupérieure
de la Voute une trop grande pefanteur fey Vdy + dx°;
& il eft très-facile de voir, en jettant les yeux fur la Figure,
qu'un de ces inconvénients revient à l'autre. Si lon aug-
mente trop la pefanteur de la partie fupérieure ZA, Yeffort
BC devient trop grand par rapport à la pefanteur Z Æ° du
Voufloir H L, l'angle C& B devient trop petit, & alors la
direction 4 G de l'effort compolé fe trouve extérieure par
rapport à 4 B, ce qui montre que le Voufloir eft plus pouflé
en dehors par la preffion felon 4C que fait la partie fupé-
rieure de la Voute, qu'il n'eft follicité à avanær en dedans
par fa propre pefanteur. Or dans ce cas l'aflife entiére doit
faillir en dehors, & le Dome doit tomber. La pefanteur de
chaque partie ZA a donc un certain terme qu'elle ne doit
point pafler : mais notre formule nous montre que cette
même pefanteur peut être aufir petite qu'on le veut, &
qu'elle peut même être nulle fans inconvénient. En effet,
fi l'on fupprimoit toute la partie fupérieure du Dome, il eft
+
DES SCIENCES 55
évident que le refte fe foûtiendroit également, par la raifon
que chaque affife étant circulaire , 1e Dome eft, pour ainfr
dire, plus Voute que les autres Voutes.
Pour montrer maintenant lufage de notre formule, nous
commencerons par la folution d'un Probleme qu'on peut
regarder comme le premier, dans lequel connoiffant la
courbe, il s’agit de- trouver 'épaifleur qu'on doit donner
en chaque endroit. Nous pouvons repréfenter la formule
épds Vdÿ +d S PARA CeyVdyÿ+ds# s ddx
PE LL — = par
Je» Vay +da® : fe» Vaÿ +4 #
l'équation RCATTENTS == == ue <e , en prenant £
fer Va [y + dx°
pour une quantité variable quelconque, qu'il fufñit de ne
faire ni décroiffante ni négative, & qu'il n’y aura fimplement
qu'à rendre conftante, afin de faire difparoître le terme Li L
lorfqu'on voudra avoir le cas extrème marqué par l’équa-
ey Vdy+ dx ___ ddx
[er Vayÿ + dx de
Lfey VAE rt = Ldx+- Lit, où plûtôt
Lfey Vay + dx — La=Ldx=ELdy+ Lt, en
rendant l'intégraie exaéte par le moyen des conftantes 4
& dy. Cette même intégrale fe réduit par la propriété des
logarithmes à Z, Jonarar — LE Re àL eyVdy + dx"
a
tion . Si lon integre, on aura
Fe RO
=“ A - Redefcendant après cela aux différentielles, on aura
ep Vaÿ + dx° ___ dtdx+tddx Se Enfu 2 adtdrs+atddx -
: a 455 d d PT Î
“ dy Vdÿ+dx
qui nous fournit en grandeurs entierement connuës toutes
les diverfes épaifleurs # que peut avoir 1e Dome. H n'y a
de mettre à la place de + quelle puiflance ou quelle
onétion ‘on voudra de y où dé x; & de cette forte or
Vi
Fig. 2e
x56 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
conveïtira l'expreffion précédente en d’autres qui feront
encore abfolument générales, dans ce fens-là, qu'on pourra
les appliquer à toutes les diverfes courbes.
ep Vdy' + ds Ss ddx
fer Vay* + ds Aer
2 2
ey Vay + dx — Le > #2 ; nous pou-
fes Vay +dx°
vons encore la repréfenter, quoiqu’avec quelque limitation,
Au lieu de rendre notre formule
par l'équation
2 z s
par l'équation < va CES 22 , pourvü que nous
fes Va + dx°
prenions pour p un nombre conftant quelconque, qu'il fuffit
de ne pas faire plus petit que l'unité. Or en procédant pré-
cifément comme nous venons de faire, c’eft-à-dire, en in-
tégrant, fi on le veut, par le moyen des logarithmes ; en
paflant des logarithmes aux grandeurs mêmes, en redefcen-
dant aux différentielles, & en dégageant e, on trouvera
_pad#"""dd# _ Lour l'épaifleur que doit avoir la Voute. Il
s dy? Vay + dx
eft toûjours facile de réduire cette expreffion, de même que
la premiére, à des grandeurs purement finies ; & on voit
addx
y dy. Vdy*+dx"
dans l'une on traite : comme une quantité conflante, & que
dans l'autre on fait p—1.
Si l'épaifleur au contraire eft donnée, & qu'il s'agiffe de
reconnoître fi un Dome conftruit fous une forme propofée
ourra fe foûtenir, ce fecond Probleme confidéré générale-
ment eft plus difficile que le premier ; il appartient à la Géo-
métrie tranfcendante, parce que l'application de la formule
qu'elles donnent également e —
, Jorfque
eydx Vayÿ + dx
__ 2 fey V4 y*+-dx° fuppofe quelon puiffe
trouver la valeur de l'intégrale fe y Vdy + dx". Si nous
D'1ES ii 18 20 4 .E ENT € ME 2 157
examinons, par exemple, le Dome elliptique RAT (Fig. 3.)
dont la hauteur AS — a eft la moitié du grand axe de
Tellip{e, & la largeur RAT — 26, le petit axe ; nous aurons,
en prenant le centre S de l'ellipfe pour l’origine des abfcifies,
dx = 2 & jdx— D. & fubiliuntiecs
BV —y° A
404 d dy + dx S
valeurs dans notre formule générale de VAT HA. à
re = x Vue pe
Jey V dy ds", if nous viendra ————
2 Jeydy pe efpece d'équation dont {a
y
réfolution parfaite dépend de [2 quadrature de l'ellipfe,
aufli-tôt que l'épaifleur e de la Voute eft par-tout la même,
La difficulté ne vient au furplus que de ce qu'on ne peut
pas trouver la fuperficie d'un ellipfoïde, ainfi ce ne fera pas
. da même chofe fr on rend le Dome fphérique. Les deux
demi-axes a & à fe trouveront égaux; on aura y Va
ET L 4243, & le fecond membre fera intégrable ; on aura
a —y*
D ee Gaiun 3”, dont on tire
aV—:+V£i2y. On voit donc que {es Domes fphé-
riques font bons, mais qu'on ne doit pas employer lhe-
milphere entiére, & qu’on ne doit en prendre tout au plus
qu'une partie BAB, dont la demi-largeur BD foit égale à
aV— 3 V4; c'efkà-dire, que fi le rayon de la fpheré,
dont la Voute eft une portion, eft fuppofé de 1000 , la
largeur BB du Dome ne doit être tout au plus que de 1 572
parties, & fa hauteur AD de 3.82; ce qui donne un peu
moins de 5 2 degrés pour la plus grande étenduë que peut
avoir l'arc AB depuis la Clef jufqu'au bord de la Voute.
V ii
Figa 3°
Eig, &e
158 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE
Mais dans les cas mêmes où il ne fera pas poflible d’in-
tégrer fey Vdy + dx’, il fera fouvent afés facile, à l'aide
des Séries, de tirer de la formule générale Lai Lee
2 fey Vdy + dx prefque toutes les connoïflances qu'on
voudra. On n’a qu'à réduire le dernier membre en une fuite
convergente dont les termes foient alternativement pofitifs
& négatifs. On fçait que dans une pareille fuite l'excès caulé
par l'addition d’un terme trop grand eft toüjours corrigé en
partie par la fouftraétion du terme qui vient après, & que
la fomme d’un nombre impair de termes, comme de 3,
des, de 7, &c. furpafle toujours fa jufte valeur de la quan-
tité que la Série entiére doit exprimer. Ainfi fr la fomme
d'un nombre impair de termes eft ici moindre que la quan-
tité Ce , ce fera une marque certaine que lin-
tégrale fey V4 y dx fera auf moindre que cette
quantité, & on fera für par conféquent que la ligne courbe
propofe fera propre à l’ufage que nous avons en vüë. Pour
éclaircir ceci par un exemple, nous n'avons qu'à examiner
17 NL
les paraboles dont l'équation eft x— a” y", Introduifant
les valeurs ma" y" dy de dx, & m x m—1 a"
De 2
3° T° dy” de dax dans notre formule générale ; & fuppofant
lépaïfeur e conftante, nous trouverons. . . . . = — x
Ge À
RE EE RE
ra Wim 7 2 #2 fydy 4 mA FUEL
Je réduis le dernier membre en une Série convergente
conditionnée comme je l'ai dit, & je trouve . . « 1! %
M —1
2 2 2m2 2/2 = LL 2 2 22/1 2/——2%
# Vin a y Z 2) Vin at RER
m X MA X Fr em "
RTS. se + +
é Visa er pins
DES SCIENCES, r59
——————————
Fan "4 sm +3 x m2 a pt mm x méatT 4" y4"T?
A —— ——————— —————— ————— — Ke,
s
2 2—2m 2m—2 À
24 X 1m 4 J
Or fi fans aller jufqu’au troifiéme terme, on fe borne fim-
L
TL
plement au premier, on déduira de . . . .. x
——
2 LE _— 2 2 22 211—
y VA km a di £lé LE y DATE # à ” 2
que 3 2 m; ce qui nous apprend que toutes les paraboles
exprimées par l'équation x —a' ” y", dans lefquelles
lexpofant # ne furpafle pas 3 , peuvent fervir à faire des
Domes. Il y en a de cette forte une infinité : car fans parler
des deux paraboles cubiques, de la conique ou de celle
‘ d'Apollonius, & de la ligne droite qu’on peut regarder dans
cette rencontre comme la premiére des paraboles, chaque
genre nous en fournira un grand nombre. Le cinquiéme
degré, par exemple, nous fournit les trois indiquées par lés
LE), S RE. des 5
ÉMANONS 210, xd: x | Y,
OMa/tes Next pu dx y (Le/7.né dévré
nous donne de même les quatre paraboles 4* x? — y,
a x—y, ax = y, ax =y, & ainf de tous les autres
degrés à l'infini.
Enfin nous allons pañler à la Solution d'un troifiéme
Probleme : nous allons chercher cette ligne courbe qui eft
la derniére de toutes celles qui peuvent nous fervir, & nous
füivrons pour cela une Méthode qui nous fera encore joindre
à la multitude infinie de celles que nous avons déja indi-
quées, une infinité d’autres. On fe reffouviendra que nous
éy Vay +dx° s ddr
fe» Vaÿ + dx Rte
par deux différentes équations, l’une entiérement générale,
Ar re dd 2 EE TE on
NE — dd RL, & l'autre uès-étendhé,
| Lo Vaÿ + ds
avons rendu notre formule générale
Fig, 5;
Fig, 2,
z6o MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyArE
ey Vdy +-dx° _— pdds
Se Me Nous
fes Vay + d#
pouvons nous fervir avec fuccès de l'une ou de l'autre, &
même en opérant deffus précifément de Ia même maniéré.
quoique moins univerfelle,
er Vi RE rs dt
Je Vay+dx
nous ne pourrions pas manquer de trouver encore une
infinité de figures propres à l'ufage que nous demandons,
puifque cette équation les renferme abfolument toutes, de-
uis Le cone dont l'angle au fommet eft le plus obtus, juf-
qu’au conoïde le plus convexe qui fert de terme de l'autre
ey Vdy + dx
Jey Va y + dx
, parce que fans qu'il foit néceffaire de faire aucune
Si nous réfolvions la premiére
côté. Cependant nous préférons l'équation
: > pdds
TET Ve
hypothefe, elle nous fournira une fuite réglée de courbes. En
intégrant cette équation, & en la rendant exacte, on trouve
ee E P 3. x
Lever +er . . C'eft d'ici d’où nous partons pour
découvrir la relation des coordonnées x & y.
Nous prenons pour cela une nouvelle variable 7 que nous
fuppofons égale à fey Vdyÿ + dx* : nous déduifons de cette
fuppofition dy=eyV dy" + dx° & dx — VIRE
& par le moyen de ces valeurs, nous transformerons l'équa-
Li
ERA 2
: f Ways =hde. dx dj —é y dy .
tion _ 2 = — dy? en _… = DE qui
fe réduit à eg y" dÿ = a x dy —ey dy, &à
2 2 a
ex? y dj =a? dÿ —a? y dy, dont on tire
eydÿ
DES SCIENCES. 161
| FE 2 : Ed
ey dy = ©, Or comme les variables font ici
ar +zr
féparées, & fi l'on connoît l'épaiffeur e en y, on pourra
toüjours trouver par cette derniére équation la relation qu'il
ya entre y & 7, & il n’y aura plus qu'à introduire la valeur
? 1224 —<Y dy =
de y dans l'expreffion ——,, —— de dx pour pouvoir
découvrir x. Lorfque la Voute eft par-tout de même épaif-
{eur , on peut mettre l'unité à la place de e ; l'équation
z Li
P d P à
ÿdy= "=? done y = 2 /— TT &
2 2 2 2
aP +HzP a? +zr
J= V4 2[ — 22t —, formule qui nous fournit y,
Subftituant enfin les valeurs de y & de dy dans
d*X = . , on aura la féconde formule
La
à zP dt
2
Li
Die — / or ot
RER
1 : PPREr
que nous ne connoïflions pas immédiatement Îa relation
qu'ont entrees les coordonnées , auffi-tôt que nous fçavons
la relation qu'elles ont avec une troifiéme quantité 7 à {a-
quelle nous n'avons qu'à attribuer fucceflivement différentes
valeurs.
. I n'importe
X—=
Si nous voulons nous fixer à la derniére de nos lignes,
nous n'avons, conformément à ce que nous avons dit,
qu'à faire p —1. Alors nous aurons pour formules
Mem. 1734: "m0. 4
Fig. 2»
Fig. 2e
162 MEMmorREs DE L'ACAHEMIE RoyaLe
adz z47
= 2 & x=f
7 Va + Va+s 2f—2dt
Va +
qui nous annoncent une courbe méchanique. Nous nous en
fommes aflürés, en cherchant la valeur des foutangentes
DM par les regles ordinaires du calcul différentiel ; nous
avons fait cette proportion,
comme
VS
ge:
ai + t ? À
Li
= 7 Qu
3 et à DM — 21 ; Jes foutangentes ont donc ici un
a P
rapport tranfcendant avec les ordonnées, & il fuit de-fà
que notre courbe eft méchanique. IL eft clair que les fou-
tangentes ont dans cette rencontre un rapport tranfcendant
avec les ordonnées, puifqu’elles font égales ou proportion-
nelles au produit de ces mêmes ordonnées & de la quantité
dont la relation dépend de la quadrature de l'hyperbole,
comme nous le montre la formule y — va 2 [——
Ve + e
Cette tranfcendance de relation doit fubfifter dans tous les
:
P dy
2 23
aP +2P
dire, qu'elle doit non feulement avoir lieu, lorfque p eft
autres cas où
n’eft point intégrable, c'eft-à-
DES SCIENCES. 163.
égal à à l'unité, mais encore forfque p défigne tout nombre
impair. Ce que nous apprenons ici touchant la derniére de”
nos courbes, nous perfuade que nous ne pouvons réuflir à
la mieux connoître que par approximation : ainfi nous ne
fommes que trop autorifés à faire pour cela ufage des Séries.
ï
— —
Nous réduifons d'abord la quantité 4° + 7* ‘ dans
: 1 à 1.37 Mes ze -
be es D ne 7 vtr de. QUE
nous multiplions par 4dg, & nous avons —%% — 4
a +T
; Ld , - v.37#d7 1. 64
— Lt + Lite — Hire + &c. qui étant
intégrée & multipliée par 2, nous donne 2 Jr, De (==> 7
, Va + au =
_ ah 1:30 i.3.507
De nt — ET + cc. Or.
déduifant de cette derniére Serie, par la méthode 4 retour
r 0 . # 2
des jrs, la valeur de 7 née en y, NOUS aurons 7 = À—
cs RES + — Frère + &c. dont Ia différen-
tielle FAR RU PU, + 0 te &c. étant
divifée par 1/ 2 [—<%2 —y, nous donne dt
pr 2 ei Von
Vè+s
= dy É2-+ Paie —+- &c. Je multiplie cette
2.44
derniére Serie par = HR pe ee Le Hz + Ge.
Wu 4
il vient é t = RE I + ge.
af adyz AAQES
2 2
+
Enfin multipliant par ——"— == , mais convertie dans la fuite
Cas
X ÿ
164 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
2
1 ré 1, LES » 3187
Tai 24 2.44 2.4.6a7 &c. & exprimée
2
Ka 4 SE 61y
en ypa > 2.4a) TE 2.4.0.827 2.4.6.8.10,1247 + &c.
d 2
nous aurons tt #4 , dy
er 2 2.4.6a
Va + V 3 {180 F
Va+r d
En —— + &ec. & c'efl-là la valeur de 7x.
[4 . . Ke 4 .
Ainfi il ne nous refte plus qu'à intégrer pour avoir dans la
Je d 3 7
Série x — I°t = 7 + 2 —
1e DATES .34 2.4. 6.7 a
COR 74 ER ——
+
PE) Tr " Lun Lu 97
F 2.4.6. 8. 10.11 4 Ù &c. où x — 6a 336 4
11 15 19 23
3 Ÿ 2 j ? — —+ ?
Ù 422400 L 96768007 353009666404 18802409472004
= &c. la relation qu'ont entre elles les coordonnées x &y
de notre courbe. Le Probleme eft de cette forte entiére-
ment réfolu, & le calcul qu'exige la Solution eft d’autant
moins difficile que la Série eft affés convergenté. Cependant
j'ai cru qu'à caufe de l'utilité qui en pouvoit réfulter, je ne
devois laiffer au Lecteur aucune forte de fupputations à faire;
c’eit pourquoi j'ai conftruit la T'able fuivante, en fuppofant
4—= 100000, ji
Ÿ
ÿ
Le
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À .
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TE Men de Lead 8 plss pag 16 ]
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D'E:s 1: S CE NICE S 165
TABLE
Des Dimenfions de la dérniéré de routes les Lignes courbes,
qui eff propre à former des Domes.
RE TARA POP RP TO CN EC CIC ER CR ED
HAUTEURS HAUTEURS
LARGEURS|depuis le fommet LARGEURS|depuis le fommet
jufqu’à juiqu'à
du Dome. chaque point du Dome. chaque point
de l'axe,
de l'axe.
1495
5
= 1721
& 1986
T 2216
5 2476
+ 2668
+ 2878
5 3107
3 3357
4 3630
+
Le Dome formé fur ces dimenfions aura toutes fes aflifes
dans un parfait équilibre; & par cette raifon il n'aura pas
pour fe foûtenir contre l'action des agens extérieurs, préci-
fément autant de force qu’en ont les autres Domes que nous
avons indiqués. Il en aura cependant toûjours aflés, puifque
X ii
166 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
les joints des Voufloirs ne font jamais infiniment polis; &
d’ailleurs comme ïil fera le plus convexe, & que fes côtés
s'éloigneront de l'axe le moins qu'il fera poffble, il aura
auffi l'avantage particulier d’avoir une pouffée moins grande,
Une remarque que nous devons encore adjoûter, quoiqu'elle
n'appartienne point à la Géométrie, c’eft qu'en traçant par
les nombres de notre Table la figure d’un Dome, nous nous
fommes aflürés qu'elle faifoit un fort bel effet à la vüë.
Enfin fi lon vouloit laiffer une ouverture au fommet, &
y placer un autre petit Dome ou une lanterne, on n’auroit
u’à donner à cette lanterne la même pefanteur qu’à la partie
retranchée de la Voute, ou une pefanteur moindre.
| DITES" 48 Ci E Nic MS: 167
{ 0 -
no: FRS AAENR JEAN CE N
Sur les différents degrés de froid qu’on peur produire,
en mélant de la Glace avec différents Sels, ou avec
d'autres matiéres, foi folides, foit liquides; èr de
divers ufages utiles auxquels ces expériences peu-
_ vent fervir.
Par M. DE REAUM U R.
VEc du feu aftuel, avec du feu fenfible appliqué
contre des matiéres que nous nommons inflammables,
nous fçavons produire de nouveau feu. Cette production du
feu fi facile, & qui nous eft fi néceffäire, nous paroîtroit
un des plus merveilleux phénomenes de Ia Nature, fi nous
étions moins accoûtumés à la voir. Rien ne devroit nous
paroître plus furprenant que de ce qu'au moyen d'une étin-
celle on peut transformer des mafles immenfes dans une
matiére prodigieufement active, pareille à celle de l'étincelle
même. Ce qu'’eft pour nous du feu actuel pour la produétion
de nouveau feu, la glace Feft pour la production de nou-
velle glace. Avec de la glace, mélée avec certaines matiéres,
avec certains fels, on gele, on transforme en un corps folide,
en glace diverfes efpeces de liqueurs aqueufes.
La pratique connuë & ufitée pour faire de Ia glace, lorf-
que l'air n'eft pas aflés froid pour geler l'eau, fuppofe donc
de la glace déja faite. On met dans un vafe mince , tel qu'un
vafe de fer blanc, la liqueur qu'on veut convertir en glace,
On pofe ce vafe dans un autre vafe plus grand ; & on rem-
plit de glace pilée & mélée avec quelque fel F'efpace qui eft
entre les parois intérieures du grand vafe & les parois exté-
rieures du vafe qui contient la liqueur qu’on veut faire geler.
Cette voye de produire des congélations, qu'on peut
Aommer arfficielles, a fourni aux Phyficiens une ample
s Mai
1734e
168 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLE
matiére à des expériences curieufes. Pour prendre une idée
fuflifante de toutes celles qui ont été faites fur ce füjet, &
fur beaucoup d’autres fujets de Phyfique, on n'a qu’à lire
la Traduétion Latine que nous a donnée depuis peu M.
Mufichenbroeck des Effais de Académie de Florence. Ce
fçavant & laborieux Auteur Ta accompagnée d’additions
confidérables, où il a raffemblé avec un très-grand foin les
expériences les plus finguliéres qui ont été faites par d'au-
tres, ou par lui-même, fur chacun des fujets traités dans le
corps de l'ouvrage depuis 1 667, c'eft-à-dire, depuis le temps
où il fut imprimé pour la premiére fois.
Malgré pourtant le grand nombre d'expériences qui ont
été faites fur les congélations artificielles, j'ofe dire que c’eft
une matiére qui neft encore qu'ébauchée ; les expériences
les plus fimples, qui font pourtant les fondamentales, nous
manquent encore ; d'autres plus recherchées, les ont fait
népliger.
On fçait que l'eau qui commence à bouillir, a pris le plus
grand degré de chaleur qu'elle puiffe prendre, mais il n’en
eft pas de même du degré de froid qu'a pris l'eau qui com-
mence à fe geler, ou de la glace qui n’a que le degré de froid
qu'il ui faut pour refter glace : elle eft fufceptible d’une fuite
de dégrés de froid de plus grands en plus grands, dont nous
ignorons le terme. Différents fels mêlés avec la glace, ou
le même fel mêlé avec la glace en différentes proportions,
font naître des degrés de froid fupérieurs à celui qu’elle avoit,
lorfqu'elle a été formée, & ces degrés de froid font plus
grands felon la nature du fel qui a été employé. Ce que
j'appelle les expériences fimples & fondamentales, font celles
qui doivent nous apprendre quel degré de froid peut pro-
duire chaque fel, & la proportion dans laquelle ïf doit être
mêlé avec la glace pour produire le plus grand des froids
qu'il eft capable de faire naître. Ces expériences font les
points d’où nous devons partir pour arriver à des expériences
plus curieufes, & elles nous fourniront quelques réfultats
utiles auxquels nous nous arrêterons principalement ici
J'ai
D'ERS® PSACUR EUNt Cas 169
» J'ai donné dans les Mémoires de 1730, la conftruétion
de Thermometres dont les degrés font comparables, c’eft-
. à-dire, de Thermometres tels que fi on en place plufieurs
les uns auprès des autres, ils marqueront par un même
nombre de degrés, l’état du froid ou du chaud de Pair qui
les environne, & en degrés qui ne font pas des portions du
‘ tube prifes arbitrairement, mais qui font chacun des portions
égales d’un volume connu d'une liqueur connuë. Comme
de pareils Inftruments étoient abfolument néceflaires pour
nous donner des mefures connuës des degrés de refroidifie-
ment, il étoit en revanche abfolument néceffaire de produire
de très-grands degrés de froid, & de les faire foûtenir à ces
Thermometres, pour mettre leur marche hors d'état d’être
troublée par les froids des plus rudes hivers auxquels ils
peuvent être expofés; car‘il y a long-temps que des Phy-
ficiens ont obfervé que la marche des Thermometres à efprit
de Vin étoit quelquefois dérangée par de grands degrés de
froid. J'ai établi ailleurs que le dérangement qui y arrive
étoit produit par l'air qui s’en échappe, & j'ai cherché à
mettre leur efprit de Vin en un état tel que les plus grandes
chaleurs de l'air que nous refpirons, ne puffent occafionner
Féchappement d'aucunes bulles d'air de leur liqueur. I n’eft
pas moins certain que le grand froid, comme le grand chaud,
donne occafion à des bulles d'air de fe dégager de l'efprit
de Vin, & ce font les bulles qui s’en échappent pendant le
grand froid, qui troublent alors les marches des Thermometres.
Les obfervations qui ont été faites fur ces T'hermometres par
un attentif obfervateur *, dans un Voyage aux Indes Orier:-
tales, nous ont déja appris qu’on peut pafler la Ligne, vivre
fous les'Tropiques, & près de la Ligne fans être expofés
à des chaleurs auffi infupportables qu'on les imagine dans
des endroits où les rayons du Soleil font dardés prefque à
plomb. : Les obfervations faites pendant plus de 16 mois,
tant aux Îfles de Bourbon, de France & de Madagafcar, que
” dans la route pour y arriver, & par conféquent fous {a Ligne,
ont fait voir que dans ces 1 6 mois il n’y avoit pas eu un jour
Mem. 1734 '
* M. Coffigny.
170 MEMOIRÈS DE L'ACADEMIE ROYALE
dont la chaleur n'eût été au moins inférieure d'un degré où
deux à celle que nous avons eué à Paris dans certains jours de
nos étés les plus chauds. Il feroit de même curieux de fçavoir
fi les plus rudes froids des pays habités près des poles, ne:
font pas inférieurs à ceux que nous avons éprouvés dans le
mémorable hyver de 1709, ou s'ils leur font de beaucoup
fupérieurs : mais pour cela il faut être für que la liqueur des
Thermometres ne fera aucunement altérée par un froid plus
grand peut-être que ceux qu'on a jamais reflentis dans aucun
des pays où les hommes ayent pénétré.
Nous fommes maîtres de faire naître prefque dans un
inftant de ces prodigieux degrés de froid, Avant que de parler
des moyens par lefquels on les produit, nous dirons que
Lorfqu'on s'eft fervi de ces grands froids pour regler le Ther-
mometre, on peut enfuite lui faire foûtenir les mêmes degrés
de froid fans qu'il en foit dérangé le moins du monde. Mais
il nous fufft aétuellement de fçavoir que nous avons dans
nos Thermometres des inftruments propres à mefurer tous
les degrés de froid. Nous nous en fommes d’abord fervi pour
reconnoître celui que pourroit produire chaque fel, & pour
régler mieux les rangs dans lefquels on doit mettre les fels par
rapport à cet effet, qu'ils ne l'ont été jufqu'ici, Nous aver-
tirons encore que toutes nos expériences ont été faites dans
des temps où l'air n’étoit pas aflés froid pour geler l'eau, &
où la glace n’avoit que le degré de froid néceflaire pour la
conferver dans fon état de glace.
Le Salpêtre a été regardé comme un des fels des plus
efficaces pour produire des congélations artificielles ; tous
les Traités qui ont été faits fur la glace concourent à nous
en donner cette idée. M, de la Hire, dans le Traité qu'il
publia en 1673, fu la formation de la Glace, & où il
l'attribuëé à une efpece de fel très-volatil, contenu en plus
où moins grande quantité dans les {els concrets, prétend
que le Salpêtre ou le Nitre a beaucoup plus de ce fel volatil
propre à geler que le fel marin. On a recours au Nitre pour
expliquer divers phénomenes finguliers de congélation. Si
| D ES: SiCHI:EN CES. Vzt
des Riviéres prennent à Ja Chine à des hauteurs de poles &
dans des faifons où le froid ne fembleroit pas devoir être
capable de geler, on en attribué la caufe au Nitre ou au
Salpètre dont font imprégnées les terres des pays où ces
Riviéres ont leur cours. Il eft vrai auffi que le Sdpètre eft
+ propre à produire des congélations, mais il s’en faut bien
qu'il puifle faire naître des degrés de froid aufli grands que
* ceux que peuvent produire d'autres fels.. Avec quelques foins,
en quelques proportions que j'aye mêlé avec la glace, du
Salpètre bien raffiné, tel que celui de la troïfiéme cuite, ou :
du Salpètre des Indes, le froid qui a réfulté du mélange n’a
fait defcendre fa fiqueur de nos Thermometres que 3 degrés L
au-deffous-du terme de la congélation artificielle, c’eft-à-dire
au-deflous du froid qui fuffit pour geler l'eau; & nous ver- :
rons bientôt que des {els dont on n'a pas une fi grande idée
par rapport au vefroidifiément, font capables de faire def
cendre plas bas la liqueur du Thermometre.
. Le fl marin für-tout, le {el de table a bien une autre
efficacité pour la produ@tion du froid. Si on le mêle dans
les proportions convenables avec la glace, c'eft-à-dire, fr on
mêle une partie de ce {el avec deux parties de glace, ou
encore mieux deux parties de fel avec trois parties de glace,
au milieu des plus grandes chaleurs de l'été, on fait naître
dans l'infant un degré de froid plus confidérable que celui
que l'hiver de 1709 fit fentir dans ce pays. Par des com-
paraifons d’obfervations faites en différents temps fur le T'her-
mometre de FObfervatoire, le plus violent degré de froid
de cette année eût fait defcendre 1a liqueur de nos Ther-
mometres à 14 degrés + ou environ, &.le fel marin mélé
avec la place pilée fait defendre la liqueur du T'hermometre
à 1 5 degrés complets. .
: I eft vrai que le froid de la boule du Thermometre eft
alors bien grand; fi on la retire du mélange où elle l'a pris,
les gouttes d'eam qu'on fait tomber fur cette boule font
gelées prefque auffi-tôt qu'elles Pont touchée; Un certain
degré de chaleur tel que celui de la falive, ne retarde pas
Y ï
172 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLE
fenfiblement cet effet ; un crachat qui tombe fur la boule n’a
pas le temps d'y couler, il eft folide dans l'initant. Sion
plonge alors la boule dans de l'eau, elle eft fur le champ
enduite d'une calote de glace, & on l'envelopperoit ainfi
fucceflivement d’une couche de glace très-épaifle, comme
on couvre une mêche du fuif dans lequel on la plonge.
Le Salpètre ne peut donc produire qu'un degré de froid
déterminé par trois degrés & demi de notre Thermometre,
pendant que le Sel marin en produit un de 1 $ degrés. Les
degrés, qui font les mefures de l'efficacité du froid de chaque
fel, feront commodes pour nous donner des degrés fixes de
froid ; car en mêlant chacun de ces fels dans des proportions
conftantes avec la glace, on parvient conftamment à avoir
le même degré de froid. D'où il fuit que dès que d’autres
fels que ceux que nous venons d'examiner, nous donneront
d'autres degrés de froid intermédiaires, nous ferons en état
de mieux déterminer les degrés de froid de différents jours
d'hiver & de différents païs, de les caractérifer en quelque
forte. Les uns pourront être défignés par le froid produit
par le Salpêtre; les autres par le froïd produit par le Sel
marin; & les autres par des froids d’autres fels dont nous
parlerons dans la fuite; au moyen de quoi il fera toûjours
aifé de ramener les degrés de froid marqués par un Ther-
mometre quelconque aux degrés de froid du nôtre.
La différence connuë des efficacités du Sel marin & du
Salpêtre peut être employée à un ufage qui paroîtra plus
important à bien des gens, & qui généralement paroîtra plus
fingulier. Pendant la guerre, tout ce qui y a rapport eft ce
qui nous touche le plus. La Poudre à canon eft le grand &
le principal agent des opérations militaires; il importe extré-
mement de faire de bonne Poudre, & par la même raifon
il importe extrêmement d'avoir des moyens de s’aflürer de
la qualité des Poudres. On en a enfeigné plufieurs moyens;
on a imaginé & conftruit diverfes efpeces d'éprouvettes ou
de machines pour reconnoître les forces des différentes
Poudres. Toutes ces machines font faites pour mefurer, foit
DES S €elE N C'E:s. Fi 1928
létenduë de la dilatation de la Poudre qu'on effaye, foit {a
force avec laquelle elle fe dilate. Mais ceux qui font le plus
au fait de l’Artillerie, fçavent combien toutes les épreuves
de la Poudre qu'on a propolées jufqu'ici font incertaines.
Quoique je vienne de préparer à la propofition que je vais
avancer, peut-être ne s’attend-on pas encore que je pro-
pofe comme le meilleur moyen d’éprouver la Poudre à :
canon, qu'on n'a jamais confidérée que par rapport à fon
inflammabilité, que je propole, dis-je, de l’éprouver par le
froïd qu'elle peut produire. Toute paradoxe que femble cette
propolition, elle paroîtra bientôt certaine, au moins pour
l'épreuve de la plus eflentielle des matiéres qui entrent dans
la compofition de cette Poudre, pour le Salpètre. II paroïtra
tout aufli fingulier que le Salpètre, qui eft d'autant plus par-
fait, qu'il eft plus inflammable, ne puifie pas être éprouvé
auffi fürement par le feu qu'il le peut être par la glace. Des
notions fimples & familiéres à ceux qui ont quelque con-
noiflance des Sels, & fur-tout de la maniére dont on raffine
le Salpètre, fufffent pour faire voir la certitude du nouveau
genre d'eflai du Salpêtre que je propofe. On fçait que le
meilleur Salpètre eft le plus rafñiné, & que raffiner le Salpêtre
n'eft prefque que lui ôter une partie du Sel marin avec le-
quel il étoit mêlé : on lui en ôte une quantité confidérable
par la premiére cuite; on lui en ôte par la feconde cuite;
& on lui en ôte encore par la troifiéme ou derniére cuite,
Rappellons-nous à préfent nos deux premiéres expériences
fur l'efficacité des fels pour produire du froid ; rappellons-
nous que le Salpêtre bien raffiné ne produit que 3 degrés &
demi de froid au deflous de la congélation, & que le Sel
marin en produit 15, & on ne pourra s'empêcher d'en
conclure qu'un Salpètre qui ne fra pas bien raffiné, qui
gontiendra plus de Sel marin que n’en contient celui qui
ne peut faire defcendre la liqueur du Thermometre qu'à 3!
degrés & demi au deflous de la congélation; que ce Saf-
pètre, dis-je, moins raffiné, fera defcendre la liqueur du
Thermometre au deflous de 3 degrés & demi; qu'il Ja fera
| Y ii
174 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyarE
defcendre d'autant plus bas qu'il fera moins raffiné, où qu'il
contiendra plus de fel marin. Cela ef fi évident , que je ne
crois pas même qu'il faille avoir recours aux expériences
pour le prouver. Auffi me bornerai-je à en citer deux qui
donneront quelque idée de ce qu'on peut attendre de ce
genre d'épreuves.
Dans la premiére, j'ai mélé du Salpêtré de la premiére
cuite avec de la glace pilée, dans es mêmes proportions que
favois mêlé du Salpètre bien raffmé avec de pareille glace.
La Hiqueur du Thermometre mis dans ce nouveau mélange
à defcendu à 8 degrés & demi. Du Salpètre plus raffiné ne
leût fait defcendre que de 3 degrés & demi. Dans une fe-
conde expérience J'ai employé du Salpêtre encore moins
épuré ; la EE fonte a defcendu à 1 1 degrés.
Si on a eu fi grande idée du froid que le Salpêtre peut pro-
duire, c’eft qu'on n'a pas été difhcile fur le choix, lorfqu’on
a voulu l’employer pour faire de la glace, & qu'on aura fou-
vent pris le moïns parfait , le moins falpêtre, qui heureu-
fement étoit le plus efficace pour la produétion du froid.
Je ne m'arréterai point aétuellement à faire voir plus au
long combien ïl eft facile de déterminer par cette voye le
degré de perfeétion de tout Salpètre donné. I eft clair que
fi on prend la peine de raffiner du Salpêtre autant qu'il eft
poffible; que fi on l’amene à un point où il necontienne plus,
ou au moins il puiffe être cenfé ne plus contenir de fel marin;
É qu'on fe fera afluré du point où ce Salpêtre peut
ire defcendre Ja liqueur du Thermometre, fi on mêle en-
fuite avec ce même Salpétre du fel marin en différentes pro=
portions toûjours de plus grandes en plus grandes, & qu'on
s'aflüre du degré de froïd que peut produire le Salpêtre mêlé
avec chacune de ces différentes dofes de fel marin, on aura
une Table des qualités des différents Salpêtres, exprimées
en degrés du Thermometre; & cette Table apprendra en-
fuite la quantité de fel marin que contiendra tout Salpètre
dont on éprouvera la qualité,
Je ne crois donc pas qu'on puiffe avoir tme meïlleure
21 D'E GN S CUT'EN GIE | 117$
maniére d'eflayer le Salpêtre que par le froid qu'il peut pro-
duire, Le même genre d'épreuve ne paroïtra pas moins con-
venir à la Poudre à canon, lorfqu'on fçaura qu'elle eft les
trois quarts falpètre; car les dofes ordinaires de fa compofition
font de trois parties de Salpètre, d’une demi-partie de charbon
pilé, & d'une demi-partie de foufre, Le charbon & le foufre
ne font par eux-mêmes aucunement capables d'augmenter
ou de diminuer le froid de la glace, & combinés avec Le
Salpêtre, ils n'en altérent point l'effet; en voilà des preuves
décifives. J'ai mélé une partie de bonne Poudre à canon bien
pulvérifée avec deux parties de glace ; le froid qui a été excité
par ce mélange a fait defcendre la liqueur du Thermometre
dvprès de 3 degrés +, comme elle y füt defcenduë, fi du
Salpètre eût été mêlé avec la glace.
Mais pour m'aflürer des différents degrés de froid que la
Poudre à canon produiroit felon la différente mi du Sal,
pêtre qui feroit entré dans fa compofition, j'ai fait moi-même
deda Poudre avec du Salpêtre de la troifiéme cuite, & ma
Poudre a eu le même effet que la bonne Poudre que j'avois
achetée. J'ai fait d'autre Poudre avec du Salpêtre de la pre-
miére cuite; j'en ai mêlé une partie avec deux parties de glace
pilée ; ce mélange a fait defcendre a liqueur du Thermo-
metre à 8 degrés +, c'efl-à-dire, à $ degrés + plus bas que
n'eût fait la Poudre compofée de Salpêtre bien raffiné,
De la Poudre à canon faite avec de bon Salpêtre pourroit
pecher en ce qu'on n'auroit pas fait entrer aflés de ce fel
dans fa compofition, parce qu'on auroit employé le charbon
& le foufre en trop grandes dofes. Notre épreuve avec la
glace nous mettroit encore en état de connoîtrel'imperfection
de cette Poudre; mêlée en même quantité & en même pro-
portion avec de la glace, elle ne produiroit pas autant de
froid que de bonne Poudre en produiroit dans les mêmes
mise nee :
vrai qu'on pourroit combiner de mauvais Salpêtre
# des dofes plus fortes de charbon pilé & de foufre, de
maniére que de la Poudre qui pecheroit, & par des dofes,
176 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
& par la qualité du Salpètre feroit capable de faire naître le
même froid que fait naître la bonne Poudre, fi on les méloit
l'une & l'autre en même proportion avec la glace pilée. Mais
le rapport du poids & du volume de la mauvaife Poudre,
au poids & au volume de la bonne, pourroit aider à re-
connoître la tromperie, pour peu qu'on l'eût foupçonnée. I y
auroit même un moyen für de la découvrir. On feroit diflou-
dre de cette Poudre avec une fufhfante quantité d'eau, l'eau
fe chargeroit de fon Salpêtre. Après avoir filtré cette eau, on
la feroit évaporer, & on auroit le Salpètre de cette Poudre.
Par l'effai de la glace, on reconnoîtroit aifément fa qualité,
comme on peut reconnoître celle de tout Salpêtre. Aïnfi il
ne paroït pas qu'il puifle y avoir aucune mauvaife manœuvre
dans la fabrique de la Poudre, que notre épreuve par la glace
ne découvre. Sans aucun appareil, on parviendroit même à
reconnoître la Poudre dans laquelle feroit entré le mauvais
Salpètre; on n'auroit qu'à la mêler en grande dofe avec la
glace, par exemple, à parties égales; elle produiroit alorsun
froid plus grand que celui qu'elle avoit produit dans de la
glace, y étant mêlée dans une moindre proportion, un froid
de plus de 3 degrés+. La Poudre au contraire faite avec le bon
Salpêtre ne fera jamais naître plus de 3 degrés + de froid
au-deffous de la congélation.
Mais, pour reprendre la fuite de nos eflais des fels, &
pour déterminer en même-temps les degrés de froïd de notre
Thermometre qui leur répondent, nous fuppoferons que
nous les avons mêlés chacun avec la glace dans la propor-
tion la plus avantageule, nous dirons ailleurs quelle eft cette
proportion la plus avantageufe pour chacun d'eux. Les degrés
dont nous parlerons feront toüjours des degrés au-defious
du terme où l’eau commence à fe geler.
Quoiqu'on regarde le Soufre comme propre à refroidir
l'eau, il n’a nullement refroidi la glace. Le Charbon pilé ne
Ya aufli aucunement refroidie.
Le Borax n'a donné à la glace qu'un demi-degré de froid
au-deflous de la congélation. AT
Les
DLEt sm 16 0 bR EC GE 820: Vi
-: 0 Le Vitriol verd ou de Mars donne 2 degrés de froid au
deflous de la congélation. Le fel de Glauber n'en donne
pas davantage. :
Mais le Sucre a fait defcendre la fiqueur du T'hermometre
à s degrés au-deflous de la congélation; il eft capable de
produire un froid plus grand d'un degré & demi que celui
du Salpêtre bien raffiné.
Le fel de Verre, qui eft un fel moyen de {a nature du
fel marin, a fait defcendre la liqueur du Thermometre à
10 degrés.
Les effais précédents ent été faits avec des fels moyens;
des fels d’une autre nature, des fels alkalis méritoient d’être
éprouvés. L'effet du fel de Tartre eft aflés confidérable , il
a fait naîtreun froid plus grand de 10 degrés que celui qui
fuffit pour geler l'eau.
Le Natron d'Egypte, quieft une efpece de fel alkali naturel
qui fe trouve mêlé inégalement avec le fel marin, a auffi
donné un froid de 10 degrés.
Tous les fels alkalis ne font pas capables de produire
autant d'effet ; celui que j'ai tiré de la Soude n’a pû faire
defcendre la liqueur du Thermometre qu'à 6 degrés + au
deffous du terme de la congélation. 3
La Chaux même, malgré la chaleur qu’elle produit, quand
l'eau la pénétre, augmente d’un degré & demi le froid de 1a
glace avec laquelle elle eft mêlée.
- La Soude, c'eftà-dire, cette cendre de la Plante appellée
Kai ; la Soude, dis-je, qui eft employée à tant d'ufages ,'
d'où a été tiré l’efpece de fel dont nous venons de parler,
fait defcendre la liqueur du Thermometre un peu plus de
3 degrés au deflous de la congélation.
+ Le goût pour ces liqueurs glacées que nous nommons
des Glaces, va tous les jours en augmentant. Le temps où
ane chaleur exceffive nous porte à chercher à nous rafrat-
<hir, l'Eté n'eft plus la feule faifon qui leur foit confacrée;
on n'eft plus étonné de les voir paroître fur les tables au
milieu de l'Hiver fous des formes variées & recherchées, &
Men. 1734. . Z
178 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
avec des couleurs différentes. Quoi qu'il en foit du bon ou
du mauvais ufage que nous faifons des liqueurs glacées, le
grand ufage que nous en faifons füt-il l'effet d’un luxe poufié
trop loin, plus cet ufage s'étend, & plus il importe de pou-
voir faire les glaces à moins de frais, en tout temps, &
en tous lieux ; le réfultat de notre derniére expérience nous
en donne un moyen. On fçait déja que ceux dont la pro-
feflion eft de les vendre, les ont mifes à un prix exceflif
par rapport à celui qu'elles leur coûtent. La plus grande
dépenfe à laquelle elles engagent, eft celle du fel marin,
du fel de table qu'on y empleye ordinairement. Si on s'en
eft tenu à ce fel, quoique cher à Paris, c’eft qu'il l'eft encore
moins que le Salpètre. Si le Salpêtre ne coûtoit que deux
ou trois fols la livre , les faifeurs de glaces fe donneroient
bien de garde d'employer le fel marin. Nous avons dans la
Soude une matiére capable de produire à peu-près autant
d'effet que le Salpêtre bien raffiné, & une matiére à fi bon
marché, qu'on lemploye même pour les leflives ordinaires.
Ne doutant nullement du fuccès , j'ai donc eflayé de
faire des glaces avec la Soude mêlée avec de la glace ordi-
naire ; l'expérience a réuffi felon mon attente toutes les fois
qu'elle a été répétée, quoique je l’aye faite dans des endroits
auffi chauds que le font pendant l'Eté ceux où lon fait des
glaces.
Puifque le fel marin eft capable de produire un degré de
froid fi fupérieur à celui du Salpètre & de la Soude, il fem-
bleroit que le {el marin devroit être employé avec beaucoup
plus d'avantage que la Soude, & avec un avantage qui com-
penferoit la différence du prix. Mais lorfqu’il eft fimplement
queftion de produire des glaces telles que celles que nous
prenons, il n'eft pas néceflaire d’avoir recours aux matiéres
qui peuvent donner les plus grands degrés de froid. Quel-
ques remarques fur la petite manœuvre de la fabrique des
glaces, nous feront voir même qu'un degré de froid exceffif
ne répondroit pas aux vüës qu’on fe propofe. Les glaces defti-
nées à nous être fervies, ne doivent pas avoir la dureté des
, EC ?
DES SCIENCES. '
morceaux de glace, nous les voulons femblables à fa neige’;
pour louer même des glaces bien faites, nous les appellons
des neiges. On fçait que l'eau qui touche les parois du vafe,
fe gele la premiére, c'eft l'endroit le plus proche des matiéres
qui produifent le refroïdiffement, & l'endroit qui fe refroi-
dit le premier. Pour parvenir à avoir de la glace rare, de la
glace en neige, on ratifle de temps en temps avec une
lame de coûteau ou avec quelque inftrument équivalent Ja
couche de glace qui's’eft formée contre les parois intérieures
du vafe ; on la divife ainfi en petites parties qui viennent
nager dans’la liqueur. Plus on ratifle fouvent, plus on eft
attentif à emporter des couches minces, & mieux on réuflit
à avoir une glace bien en neige. Si les matiéres qui produi-
fent le froid, produifent trop fubitement un froid exceffif,
des couches épaiffés fe forment trop vite, on ne réuffit pas
à faire une glace fi parfaite pour nous.
‘Une autre confidération encore, c’eft qu’il eft difficile de
compafler le temps néceffaire à faire des glacés, de manicre
qu'elles ne foient faites que dans celui où on les veut pren-
dre. On eft fouvent obligé de les garder pendant plufieurs
heures, & alors on eft en rifque de les perdre, fi on ne
revient, & quelquefois à bien des reprifes, à {és entourer
de nouvelle glace mêlée avec du fel. La glace d’eau, celle
qui a fervi à les produire f fond, elle s'échauffe, & les
liqueurs glacées ont lé même fort, I ne fuffit donc pas que
la matiére qu'on employe donne un grand degré de froid,
il vaut mieux qu'elle donne un degré de froid moindre, &
qu'elle le donne perdant un temps plus long. D'où il füit
” que lorfqu'on veut faire des glaces, & les conferver pendant
quelque temps, la préférence peut être accordée pour cetté
opération à des fels qui produifent un moindre degré de
froid, s'ils le produifent pendant un temps plus long. Les
fels qui mêlés avec la glace, font naître un plus grand dégré
defroid, & généralement toutes fes matiéres qui font naître
un froïd plus fubit, fondent plus fubitément Ex glace. Si {a
Soude ne produit pas un degré de froid auffi confidérable
Z ij
180 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLE
que celui du fel marin, degré de froid qui n'eft pas nécef-
faire pour notre opération, & qui peut même nuire à un
fuccès parfait, elle a fur le fel marin l'avantage confidérable
de ne pas faire fondre auffi promptement la glace, & de Ja
maintenir plus long-temps dans le degré de froid qui fufft
our empêcher les liqueurs qu'on a gelées de fe fondre.
II réfulte de tout ce que nous venons de dire, que quand
on veut faire des glaces promptement, qu’on veut les faire
en cinq ou fix minutes, comme on s'en pique aujourd’hui,
il faut avoir recours à un {el capable, comme le fel marin,
de produire fubitement un froid exceffif ; mais que fi on
aime mieux les faire à moindres frais, quoique ce foit en
plus de temps, on doit {e fervir de la Soude, & qu’on doit
l'employer par préférence, lorfqu'on a befoin de conferver
fes glaces pendant plufieurs heures, pendant des demi-
journées.
Heureufement il en eft encore ici de la Soude comme du
Salpêtre, la meilleure, je veux dire la plus eftimée comme
Soude, & la plus chere, celle d’Alicante eft la moins efficace
pour la production du fel. Cette Soude vaut quelquefois
jufqu'à quatre fols la livre chés les marchands, & ils ont, ou
au moins ils ont eu, & ils auront, quand on voudra, des
Soudes, dont ils ne trouvoient pas le débit, qu’ils ne ven-
dent qu’un ou deux fols la livre; ces mauvaifes Soudes font
capables de produire 9, 10, & même 12 degrés de froid
au deflous de celui de la congélation , c’eft-à-dire, un froid
capable de faire des glaces aflés promptement.
Mais veut-on encore une matiére plus fimple & à meilleur
marché que les Soudes les moins cheres, & dont on fe fer-
vira avec fuccès, pourvû qu’on ne foit pas preflé par le temps,
& une matiére qu'on peut trouver par-tout; c’eft la Cendre
ordinaire. On n’a qu'à prendre celle qui fe trouve en toute
cheminée où on a brûlé du bois neuf. Cette cendre mêlée
avec la glace, à peu-près à poids égal, donne un degré de
froid de 3 degrés au deffous de la congélation, un degré
de froid peu inférieur à celui du Salpêtre rafhiné, & peu
’
DES: S'C'YE N C'Eis A à
différent de celui de la Soude d’Alicante. Sileréfroidiffément
-qu'elle produit n’eft pas bien fubit, elle a au moins l'avan-
tage de conferver pendant long-temps le degré de froid
qu'elle eft capable de faire naître : fa matiére terreufe boit
l'eau qui fort de la glace qui {e fond ; cette matiére terreufe
devient une efpece de pâte qui arrête mieux les impreffions
de l'air extérieur, & qui eft plus difficile à échauffer que ne
feroit de l’eau.
Mais fi on veut abfolument faire des glaces en auffi peu
de temps qu'on les fait avec le fel marin, les faire avec un fel
capable de produire un auffi grand degré de froid, nous trou-
verons encore un fel plus cher à la vérité à Paris que la Soude
ordinaire, mais moins cher que le fel marin, qui méritera
d'être préféré à ce dernier. Le fel dont nous voulons parler
eft encore une efpece de Soude; on fçait qu’en général les
Soudes font des cendres qui font extrêmement chargées de
fel fixe. Il y a de ces efpeces de cendres qui font prefque
tout fel, & qui font faites de bois ordinaires brûlés dans des
efpeces de fours, & avec certaines précautions que noûs ne
devons pas expliquer ici. Ces efpeces de foudes, ou de fels,
font appelées des poraffes ; elles nous viennent d'Allemagne,
& on en peut faire par-tout où on a trop de bois. On les
vend à Paris au plus huit fols, & quelquefois fix fols la
livre, & on pourroit les y avoir à très-grand marché. Quel-
ques-unes de ces potafles font aflürément préférables au fel
marin pour faire promptement des glaces. J'en ai eflayé qui
ont produit un degré de froid de 17 degrés ?, c’eft-à-dire,
un froid de 2 degrés + plus grand que celui du fl marin.
De moins bonnes que celles dont je viens de parler, m'ont
encore donné un degré + de froid de plus que le fel marin,
16 degrés +.
«Les différences confidérables qui font entre les efficacités
des différentes Soudes pour la produétion du froid, nous
fourniffent un genre d’épreuve pareil à celui dont le Salpêtre
nous a donné occafion de parler, pour reconnoïître les diffé-
rentes qualités de ces fels. ds
… Zi
182 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
Le fel ammoniac eft celui de tous des fels à qui on a
accordé le premier rang par rapport aux congélations , cepen-
dant dans un très-grand nombre d'épreuves, & dans les pro-
portions les plus favorables de fon mélange avec la glace,
il ne n'a jamais produit que 1 3 degrés de froid, c’eft-à-dire,
2 degrés de moins que le fel marin.
Le fel marin capable de faire naître 1 $ degrés de froid
au deflous de la congélation , eft le fel de table dont nous
“nous fervons à Paris, celui qu’on tire des Marais falants de
Brouage, & de ceux des pays voifins ; mais il peut y avoir,
& il y a des fels marins qui ne produiroient pas d’auffi grands
effets, & il peut y en avoir, & il y en 2 qui en produifent
de plus grands.
Le fel marin ou le fel de même nature qui f trouve au
fond des chaudiéres dans lefquelles on rafhine le Salpètre, a
pourtant fait defcendre la liqueur , comme notre {el de table,
à r 5 degrés au deflous de la congélation. Mais du fel gemme,
qui, comme on fçait, eft un fel foffile de la nature du fel
marin, a produit plus de froid que le fel marin de nos tables,
I à fait defcendre la liqueur du Thermometre à 17 degrés,
à 2 degrés plus bas que le fel marin ordinaire.
Avec des efprits, avec des liqueurs fpiritueufes tirées de
ces mêmes fels dont nous avons éprouvé la puiffance, on
parvient à faire naître de prodigieux degrés de froid. C’eft
fur quoi on a déja fait de curieufes expériences, mais que
nous avons eu befoin de répéter pour en déterminer les
effets en degrés de notre Thermometre.
Qu'on prenne de la glace pilée très-fine, & réduite pref-
qu'en neige, qu'on mette un de nos petits Fhermometres
dans cette glace, contenu elle-même dans un vafe de capa-
cité proportionnée à celle du Thermometre. Qu'on prenne
une quantité d'efprit de Nitre dont le poids foit environ
égal à la moitié de celui de la glace, & à qui om ait ew
foin de donner le degré de froid de la congélation, en le
tenant pendant quelque temps au milieu de la glace. Tout
étant ainfi préparé, verfés l'efprit de Nitre fur la glace;
La
—#
DES SCcrENCES 183 .
vous verrés defcendre la liqueur du Thermometre avec beau-
. coup de vitefie, & elle ne s'arrêtera que lorfqu'elle fera à
environ 19 degrés au deflous de la congélation. Voilà done
4 degrés de froid par de-là les 1 $ que donne le fl marin,
On ira pourtant plus loin ; on produira un degré de froid
beaucoup plus grand, fi avant que de verfer lefprit de Nitre
fur la glace, on a fait prendre à cette glace & à l'efprit de
Nitre un plus grand degré de froid que celui de Ja congé-
lation. Je les ai refroidis fun & Pautre au point d’avoir le
degré de froid de 14 degrés, en les environnant de glace
mêléeavec du {el marin. Cet efprit de Nitre, déja très-froid à
verfé fur de la glace très-froide, a produit un froid qui à
fait defcendre la liqueur du Thermometre à 23 deprés _
- Si on avoit refroidi la glace & l'efprit de Nitre à ce
prodigieux degré de froid , c’eft-à-dire, fi on avoit fait
prendre à la glace 22 à 23 degrés de froid, & fi on avoit
fait prendre le même depré de froid à l'efprit de Nitre, du
mélange de cet efprit de Nitre fi prodigieufement refroidi
avec de la glace également refroidie, il en naîtroit une nou-
velle augmentation de froid que j'ai ainfi pouffée jufqu’à
2 5 degrés. On ne voit point le terme où le froid pourroit
être porté, en verfant de F'efprit de Nitre de plus froid en
plus froid avec de la glace de plus froide en plus froide.
C'eft pourtant une progreffion qui -va en décroiffant, &
même en décroiffant aflés vite.
L'efficacité du fel marin étant fi fapérieure, par rapport
à la prodution du froid, à celle du Salpêtre , il fmbloit
qu'on devoit attendre que l'efprit de Sel €mployé avec les
mêmes précautions que lefprit de Nitre, feroit naître un :
degré de froïd beaucoup plus confidérable. Mais plus on
fait d'expériences, plus nous avons de preuves que nous ne
devons pas trop nous fier aux premiéres apparences. L’efprit
de Sel a produit un peu moins de froid que l'efprit de Nitre
n'en avoit produit, trois quarts de degré de moins.
* S'il eft fimgulier que l'efprit de Sel ne foit pas capable de
produire un plus grand degré de froid que celui que l'efprit
184 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyarE
de Nitre peut produire , if doit le paroître bien davantage
qu'une liqueur inflammable, qu'une liqueur que nous regar-
dons comme tout feu, que l’efprit de Vin en un mot foit
propre à produire un degré de froid à peu-près égal à
celui que font, naître les efprits acides les plus violents.
Les Phyficiens fçavent pourtant que Fefprit de Vin verfé
fur de la glace, produit fur le champ un refroidifiement
qui eft fupérieur à celui de fels affés efficaces. Mais, pour
mieux connoître tout ce que peut l'efprit de Vin pour la
produétion du froid, je lui ai fait prendre à lui-même
19 degrés de froid, en environnant la bouteille, dans la-
quelle il étoit, de glace refroidie à ce point. Je Fai verfé
fur de la glace refroidie au même degré ; la liqueur du
Thermometre qui étoit dans cette glace, eft defcenduë à
2 1 degrés +, ceft-à-dire, qu'il ne s’en eff fallu que 2 degrés
que le froid produit par l'efprit de Vin n'ait été égal à celui
qui eft produit par l'efprit de Nitre dans les mêmes circon-
ftances.
Nous nous fommes fait une loi de ne nous point arrêter
à donner des explications qui pourroient paroître incer-
taines, dans un Mémoire où nous ne pourrons même rap-
porter qu'une petite partie des faits que nos expériences nous
ont fournis. Les explications que nous pourrions donner,
devant être tirées des faits, le détail des faits doit les pré-
céder. Un fait que nous pouvons prendre pour certain, c’eft
que fi on mêle une matiére quelconque avec la glace, ce
mélange ne produit de froid qu’autant qu'il occafionne la
fonte de la glace. C'eft un principe que M. de Mairan n’a
pas manqué de faifir dans fon Traité de Ja Glace, & dont
il a bien fçù faire ufage. Dans la vüë de démontrer la vérité
de ce principe, j'ai fait une expérience dont le fuccès eût
furpris ceux à qui ce principe n'eût pas été connu. J'ai fait
prendre à de la glace bien pilée 1 2 degrés de froid ; j'ai jetté
fur cette glace du fel marin froid lui-même de 1 2 degrés,
La glace & le fel froids à ce point étoient très-fecs l'un &
l'autre ; le fel devoit toucher la glace, être mêlé avec elle
fans
,7
DES SCIENCES. 185!
fans la fondre. Je les ai mélés enfemble avec un inftrument
très-froid; il ne s’eft fait aucune fufion, aufli ne s’eft-il fait
aucune nouvelle produétion de froid. La Jiqueur du Ther-
mometre qui auroit dû defcendre à 1 $ degrés par l'effet du
mélange du fel & de la glace, a refté à 1 2 degrés, c’eft-à-dire,
au degré qu'avoient la glace & le fel avant que d'être mélés.
J'ai pourtant cru qu'avec de la glace & du fel refroidis
on pouvoit produire des degrés de froid plus grands que
ceux qu'ils donnent lorfqu’on les mêle enfemble » n'ayant
chacun que le froid de la congélation, ou un froid moindre.
J'ai mêlé enfemble de la glace & du fel marin qui avoient
chacun 14 degrés de froid; la liqueur du Thermometre eft
reftée à ce terme. Pendant qu'elle y paroifloit fixe, J'ai verfé
fur la glace, de l'eau chargée de {el marin, & froide de 8
à 9 degrés. Le but que je me propoois ef aifé à voir, je
voulois mettre le fl marin concret & la glace en état de
fondre. La glace & le fel fe font auffi fondus, & fur le champ
le froid des matiéres qui fe fondoient a augmenté. Non
feulement la liqueur du Thermometre a defcendu à r s degrés,
terme ordinaire du froid de la glace & du fel marin, elle eft
defcenduë 2 degrés plus bas, à 174 D'où il fuit qu’au
moyen de cet expédient, on pourroit avec de Ja glace & du
fel refroidis de plus en plus, produire des degrés dé froid
de plus grands en plus grands. Cette manicre de faire ufage
des fels, & les combinaifons que j'ai tenté de faire de diffé-
rents fels les uns avec les autres, m'ont déja appris qu'avec
des {els concrets on peut produire des degrés de froid prefque
auffi confidérables que les plus grands qui ayent été produits
avec les plus forts efprits acides. Avec du falpêtre, du fei
marin & du fel ammoniac refroidis, mélés fucceffiyement
avec la glace, en dofes convenables, j'ai fait naître un degré
de froid de 22 degrés. Partant de-là pour faire ufage des
efprits acides, quel froid ne produiroit-on pas!
La meilleure & la plus précife maniére de mefurer les
degrés du froid, eft aflürément par les degrés de condenfa-
tion qu'il produit dans la liqueur du Thermometre; il en eft
Mem, 173 4 Aa
186 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLE
encore une autre qui a quelque chofe de moins exaét, mais
de plus fatisfaifant, c’eft celle qui nous détermine leur puif-
fance pour geler, pour faire prendre de fa folidité à des
liqueurs. L'eau eft gelée par un degré de froid que nous
prenons pour le terme d’où nous commençons à compter les
degrés qui vont en augmentant. Il y a des liqueurs qui con-
fervent leur fluidité, quoiqu'on leur faffe prendre les plus
grands degrés de froïd que nous ayons produits ; tel eft
heureufement l'efprit de Vin de nos Thermometres. Si on
Yaffoiblit en le mêlant avec de l'eau, on donne plus de prife
au froid pour le fixer, pour le rendre folide. Dans mes
différentes épreuves j'ai mis dans le mêlange de glace & de
fel de petits tubes de verre remplis chacun d'efprit de Vin
affoibli en différentes proportions. Tout ce qu'a pü faire
le froid de 23 degrés +, c'eft-à-dire, ce prodigieux froid
qui naît de Fefprit de Nitre refroidi, verfé fur la glace re-
froïdie, a été de faire geler l’efprit de Vin, tel que celui de
nos Thermometres, mêlé en parties égales avec l’eau. Un
mélange de trois parties du même efprit de Vin & de deux
parties d’eau a confervé fa fluidité au milieu de ce grand
froid. Mais ce mélange: de trois parties d'efprit de Vin &
de deux parties d’eau a été converti en glace par un degré
de froid de 2 5 degrés, que j'ai produit en verfant de l'efprit
de Nitre très-refroidi fur de la glace très-refroidie.
Le froid de 1 $ degrés, celui que produit le fel marin,
ne peut geler qu'un mélange fait d’une partie d’efprit de Vin
& de trois parties d’eau.
Nous ne fommes pas furpris que les liqueurs inflamma-
bles, telles que l'efprit de Vin, & peut-être ne le devons-
nous pas être encore, que les puiffants efprits acides, que les
eaux mêmes chargées de beaucoup de fels confervent leur
liquidité contre des froids exceffifs. Mais la Nature fçait
compofer des liqueurs qui ne font nullement inflammables,
qui n'ont pas d’acidité fenfible pour nous, & qui cependant
font en état de réfifter à de très-grands froids. Je veux parler
de Fefpece de fang qui circule dans des Infe6tes de tant
DES S CHEN CR 187
d'efpeces ; par fa couleur, par fon goût, nos fens grofliers
le jugeroient de l'eau , ou au moins une liqueur extrêmement
aqueufe. Les canaux dans lefquels il circule, nous conduifent,
à la vérité, à en prendre une autre idée. H m'a paru curieux
de fçavoir quels degrés de froid étoient capables de foûtenir
les liqueurs des Infeétes fans fe geler. S'il eft un état de
mort, c'eft aflurément celui où toutes les liqueurs font
gelées, où toùt leur mouvement, même leur mouvement
inteftin, eft arrêté. Quand Fhyver nous fait fentir un froid
que nous trouvons trop rude, ce feroit une efpece de confo-
lation de fçavoir qu'il nous délivre de certaines efpeces
d'Infectes ; qu'il fait périr telle efpece de Chenilles qui pen-
dant l'été auroit dépouillé les arbres de nos jardins de leurs
feuilles ; qu’il en fait périr une autre qui auroit ravagé les
choux ou d’autres légumes. J'ai mis dans des tubes de verre
des Chenilles de différentes efpeces & d’autres infeétes, &
cela pendant l'hyver, & au commencement du printemps.
J'ai placé ce tube de verre dans un mélange de glace & de
fel propre à faire naître un grand degré de froid, qu'un
Thermometre placé dans la même liqueur me faifoit con-
noître. Je réferve le détail de ces expériences pour un autre
ouvrage, pour lhiftoire des Infectes où il doit fe trouver:
je me contenterai d'en donner ici quelques réfultats. Huit
degrés de froid au-deflous de la congélation ont été néceffaires,
mais ils ont fuffi pour geler parfaitement des Chenilles de
quelques efpeces. Ces 8 degrés de froid les ont renduësroides,
& auffi dures que la plus dure glace, on ne pouvoitles couper
que comme on. coupe une pierre tendre; auffr toutes ces
Chenilles étoient-elles bien mortes, & ne { font jamais
donné de mouvement depuis.
J'ai expofé au même degré de froid, & enfuite à de plus
grands degrés de froid, des Chenilles qui, quoiqu’elles
dûffent devenir d’une grandeur médiocre, c’eft-à-dire, lon-
gues de plus d’un pouce, & grofles à proportion, n’avoient
que deux ou trois lignes de longueur , & n'étoient guere
plus grofles que de grofles épingles. Si jeunes , & par
a i]
188 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE
conféquent fi délicates, elles ne fembloient pas être en état de
réfifter à un froid bien rude ; il y en a pourtant eu à qui
j'ai fait foûtenir un froid de plus de 17 degrés, plus grand
de près de 3 degrés que celui de l'année 1709. Quand je les
ai eu retirées de l'endroit où regnoit un fi furieux froïd, elles
fembloient mortes, mais elles ne l’étoient pas ; leur corps
avoit fa premiére foupleffe, ii cédoit fous le doigt , il fe
laifloit plier. Enfin ces Chenilles réchauffées peu-à-peu,
c'eft-à-dire, d’abord dans de la glace ordimaire, ont com-
mencé à fe mouvoir, & ont paru aufli vigoureufes qu'elles
Tétoient avant que d’avoir été mifes à une fi rude épreuve.
Le fang & les principales liqueurs qui fe trouvent dans le
corps de ces infeétes, toutes aqueufes qu'elles nous femblent,
font donc d’une nature à foûtenir un froid exceffif fans fe geler.
Je vois bien qu’on peut foupçonner que ce que j'attribuë à læ
nature de leurs liqueurs, a peut-être pour caufe la chaleur
qui regne dans l'intérieur de l'infecte, & la rapidité avec
laquelle les liqueurs y circulent. Quoiqu’après une diette de
trois à quatre mois qu'avoient faite les Chenilles dont je parle,
la vitefle de la circulation dût être bien affoiblie, & 1a chaleur
intérieure bien diminuée, j'ai pourtant craint que les deux
caufes dont je viens de parler, ne produififfent l'effet que
j'attribuois à la qualité de leurs liqueurs. Le doute étoit aifé
à lever par une expérience. J'ai tué plufieurs de ces Chenilles,
& bien mortes, je {es ai mifes dans le tube de verre que j'ai
tenu pendant un temps fufhfant au milieu du mélange qui
produit un froid de 1 7 degrés; quand je les en ai euretirées,
j'ai vû que leurs corps étoient auffi fouples que l'étoient, après
la même épreuve, ceux des Chenilles qui l'avoient foûtenuë
vivantes. Les liqueurs du corps des mortes n’avoient donc
été aucunement gelées par un fi grand froid ; ce n’eft donc
ni la chaleur intérieure de leur corps, ni le mouvement rapide
de leurs liqueurs qui empêche ces liqueurs de fe geler.
Nous ne pouvons donc pas efpérer que les plus grands
froids de notre climat nous délivrent, ni même qu'ils dimi-
nuent le nombre des Chenilles de l'efpece dont je viens de
———
DES SCIENCES ‘189
parler, & malheureufement c'eft celle qui fait le plus de
ravage; dans certaines années, le nombre de:fes individus
égale peut-être en. France celui des individus! d’un millier
d'autres efpeces , aufii avons-nous nommé cette elpece /z
Commune. C’eft celle qui pañle l’hyver dans des nids de toiles
qui paroïflent fur les arbres, mieux qu'en tout autre temps,
lorfque leurs feuilles font tombées.
Il n'eft pas für même que l'hyver nous délivre des efpeces
de Chenilles dont les liqueurs font gelées par 7 à 8 degrés
de froid, lorfque le froid de Fair devient plus confidérable.
Le grand Maître qui a fait Les Chenilles, a plus fongé à les
conftituer comme elles le devoient être, qu'à les conftituer
comme nous voudrions qu'elles le fuflent. Quantité d’efpeces
pañlent Fhyver fous la forme de crifalides. Il y a de ces
crifalides qui, pendant cette rude faifon, font attachées contre
des murs, contre des entablements d’édifices, contre des
branches d'arbres ; qui y font nuës, c’eft-à-dire, qui ne font
point couvertes d'une coque de foye. J'ai fait fouffrir à de
pareilles crifalides de très-grands degrés de froid, fans que
leurs liqueurs fe foient gelées, fans qu'elles ayent paru en
fouffrir. Dautres crifilides au contraire ont été durcies par
un froid de 7 à 8 degrés, & elles ont péri; mais ces derniéres
étoient des crifalides venuës de Chenilles qui étoient entrées
en terre, qui s'y étoient conftruit des coques dans lefquelles
elles s’étoient métamorphof&es. Ainfi les infectes qui reftent
expofés à de grands degrés de froid font ceux qui les peu-
vent braver. Ceux qui font plus fenfibles aux impreffions du
froid, agiflent comme-s’ils prévoyoient celui qui doit regner
pendant lhyver fur Ia furface de la terre, & auquel ils ne
fçauroient réfifler ; je dis qu'ils agiflent comme s’ils le pré-
voyoient, parce que ce ne font pas les approches de l’hyver,
le froid actuel qui détermine les Chenilles à entrer en terre,
il y a des Chenilles qui s’y enfoncent dans les mois de Juillet
& d'Août, & d’autres même dès le commencement du prin-
temps. Peu après y être entrées, elles s'y transforment en
crifalides, & y xeflent quelquefois des neuf à dix mois, &
a li
r90 MEMOIRES DE L'ÂACADEMIE ROYALE
même près d'une année. Ce n’eft que l’année fuivante qué
Vinfede fort de terre fous la forme de Papillon.
Au refte le fang des grands animaux, celui des oifeaux,
celui des quadrupedes & le nôtre même non feulement fe
coagulent aifément, mais ils font bien plus aifés à geler que
celui des infeétes. Le fang d’un Pigeon qu'on à fait couler
tout chaud dans un tube, a été réduit en glace très-dure
par 7 à 8 degrés de froid, & eût pü être gelé par un moindre
froid. Le fang d’un Agneau a foûtenu, fans fe geler, 3 degrés
de froid, mais $ degrés l'ont rendu de la glace. Les grands
animaux ont dans leurs corps une chaleur & un principe
de chaleur qui ne fe trouvent pas dans ceux des infeétes.
Les grands animaux n'avoient donc pas befoin d'avoir un
fang qui gelât auffi difficilement que gele celui des infeétes.
Pour avoir des Thermometres dont la marche foit Îa
même, dont les degrés foient exaétement comparables, ils
doivent être remplis d’une même liqueur, d’un efprit de Vin
également dilatable , auffi la difficulté qui nous a arrêté le
lus, a été de trouver un moyen de nous aflürer de la
dilatabilité de l’efprit de Vin. Pour y parvenir, nous avons
cherché combien différents efprits de Vin condenfés par le
froid de la congélation artificielle de l'eau qui commence
à fe geler, pourroient être dilatés par le plus grand degré de
chaleur que l'efprit de Vin puifle prendre fans bouillir. Lorf-
que nous avons enfeigné la maniére de faire cette épreuve,
nous avons averti qu’elle eft extrêmement délicate, qu'elle
demandoit à être faite par quelqu'un qui y apportât toute
fon attention, & même qui s’y füt exercé plus d'une fois.
H y a à craindre, lorfqu'on chauffe un peu trop brufquement
Peau, de faire bouillir l'efprit de Vin avant que de lui avoir
fait prendre tout le degré de chaleur qu'il peut prendre fans
bouillir, lorfqu'il eft échauffé plus doucement. Quand
l'épreuve eft bien faite, l’efprit de Vin le plus redtifié fe
dilate davantage que celui qui left moins. Tel efprit de Vin,
dont le volume condenfé par la congélation de l'eau eft à
1000, a un volume de 1090, lorfqu'il eft dilaté par le
D'E S$:4S:C TE N CES 197
9
. plus grand degré de chaleur qu'il puiffe prendre fans bouillir.
Dans le même cas le volume d'un autre efprit de Vin plus
foible fera de 108 5; & nous avons choifi pour nos Ther-
mometres l'efprit de Vin, dont le volume condenfé par la
congélation étant 1000, devient 1080 rarefé par le plus
grand degré de chaleur qu'il puifle prendre fans bouillir,
Si le même degré de chaleur rarefie davantage lefprit
de Vin le plus rectifié, le même degré de froïd condenfe
davantage cet efprit de Vin qu'il n'en condenfe un plus
foible. Au lieu de caraétérifer l'efprit de Vin par fon degré
de dilatabilité, nous pouvons donc le caraétérifer par fon
degré de condenfabilité. On a deux efprits de Vin différents
dont le volume eft réduit à ro00 par le degré de froid de:
la congélation de l'eau ; fi on met des boules de Thermo-
metres faits de ces différents efprits de Vin, dans un mélange
convenable de fel & de glace, l’efprit de Vin le plus foible
ne defcendra pas auffi bas dans fon tube que l'efprit de Vin
le plus fort defcendra dans le fien. Nous avons vû, par
exemple, que l'efprit de Vin ordinaire de nos Thermometres,
Yefprit de Vin dont nous les rempliflons, eft defcendu à 1 S
degrés dans un mélange de fel & de glace fait dans les rap-
ports de 1 à 2 & de 2 à 5. J'ai mis dans un autre Thermo-
metre un efprit de Vin rectifié, de celui que je fais affoiblir
en le mêlant avec l’eau, avant que d’en remplir les Thermo-
metres, cet efprit de Vin a defcendu à 17 degrés 1, Ja
boule du Thermometre ayant été mife dans un pareïl mé-
lange de fel & de glace. Aiïnfi le rapport de condenfabilité
de ces deux efprits de Vin eft comme 1 $ à 174 La dila-
tabilité de ces deux efprits de Vin, prife au-deflus de la
congélation, étoit comme 80 à 90, comme 8 à 9, & leur
condenfabilité comme 1 sè17+, ce qui ne donne pas un
rapport aufli différent qu'on auroit pà l'attendre:
La commodité de ce genre d’épreuve, c'eft qu'elle ne
demande d'autre attention que celle de bien mêler lefel &
la glace; on n’a point de bouillonnements à craindre: elle
peut être aifément répétée. Si les réfultats des différents effais
192 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLr
font les mêmes, ou varient peu, on eft für d'avoir bien
opéré. À la vérité on n'a pas une auffi grande fuite de degrés
de condenfabilité que celle des degrés de dilatabilité, mais
ce defavantage eft plus que compen{é par le peu d’incon-
vénients auxquels cette épreuve expofe. Il eft très-aifé de la
faire avec précifion. On pourroit même prendre une aflés
grande fuite des degrés de condenfabilité, fi au lieu de faire
l'épreuve à un froid de 1 $ degrés au deflous de la congé-
lation dans notre Thermometre ordinaire, on la faïfoit à
un froid de 22 à 23 degrés.
Mais, pour revenir aux expériences par le moyen def
quelles nous produifons des augmentations de froid , il eft
clair que la matiére qu'on mêle avec la glace y doit être
mêlée en une certaine proportion & avec certaines précau-
tions. Des regles générales feront aifées à déterminer, fi on
fe rappelle l'expérience qui a prouvé inconteftablement que
Je refroidiffement ne fe fait qu'à l’occafion de la fonte de Ia
glace; elle apprend, cette expérience, qu'il faut employer
la quantité, foit de matiére folide, foit de liquide, nécefaire
pour fondre la glace, & qu'il ne faut en employer que cette
quantité. Si on n’employe pas le fel marin, par exemple, en
quantité fufffante, le degré de froid qui fera produit ne fera
pas auffi confidérable qu'il peut l'être. Si on mêle au contraire
e fel marin en trop grande proportion avec la glace, il en
arrivera encore que l'on n'aura pas un auffi grañd degré defroid
qu'on auroit eu, fi on l'eüt employé dans une moindre dofe.
Ce n’eft pas feulement la glace qui doit fe fondre, le fef
doit fe fondre en mème temps; c’eft la liqueur qui vient
de la glace & du fel fondu qui a un plus grand degré de
froid que la glace. Le fel & la glace qui ne font pas fondus,
font moins froids que la liqueur compofée de glace nou-
vellement fonduë & de fel ; d'où il fuit que le fel excédent
qui a été employé, ne fert qu'à réchaufler les parties qui
fe fondent & qui fe mêlent par la fufion.
Deux expériences, dans l'une defquelles le fel marina
été employé en trop petite quantité, & dans l'autre defquelles
é° ce
Z 2 er.
11m ES 1S* CAEN TRES. 193
te fel a été mis en trop grande quantité, donneront les
preuves de ce que nous venons d'avancer. La plus petite dofe
dans laquelle j'ai employé le fel marin , a été d’une feule
partie de ce fel contre dix de glace. I n'a pas laiflé de ré-
fulter de cé mélange un froid confidérable , il a été de 8
degrés +, moindre pourtant de 6 degrés+ que celui qui eût
été produit par la combinaifon la plus avantageufe. Dans
une autre expérience, j'ai mêlé le fel avec la glace en parties
à peu-près égales, huit parties de fel avec neuf de glace; le
froid qui a été produit, n'a été que 13 degrés +, moindre
par conféquent d'un degré + que celui qui eût été donné
par la proportion la plus favorable.
La proportion a plus efficace du mélange d’un fel avec
l'eau feroit aifée à déterminer, fi le {el pouvoit être mêlé par
dés parties indéfiniment petites avec Îa glace prodigieufe-
ment divifée; la quantité de fel feroit alors à peu-près égale
ou peu fupérieure à la quantité de ce fel que l'eau peut tenir
en diflolution. Mais comme le fel eft toujours employé en
gros grains, que la glace même, füt-elle prife en neige, eft
toûjours en gros molécules, pour que la glace foit le plus tou-
chée qu’il eft poffible par le fel, pour que la fufion foit opérée
4e plus promptement qu'il eft poffible , la quantité du fel qui
- doit être employée, doit furpafler celle que cette eau tien-
droit en diflolution. Ainfi, quoique l'eau ne puifle tenir
qu'un peu plus du tiers de fon poids de fel marin diflous, j'ai
trouvé qu’il falloit mêler une partie de fel marin en grains
avec deux parties de glace. Il y a mème fur tout cela des
Jimites d’une affés grande étenduë ; deux parties de fel mêlées
avec trois parties de glace, ont produit le même effet qu'une
partie de fel mêlée avec deux parties de glace.
Mais au moins réfulte-t-il de ces obfervations, que pour
produire les plus grands degrés de froïd pofibles avec diffé-
xents fels, on employera en moindres dofes que le fel marin
es fels dont l’eau ne peut pas tenir en diflolution une auf
grande quantité que celle qu'elle tient de ce fel; & qu'on
gmployera au contraire en plus grande proportion les {els
Mem. 1734 :
194 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLE
dont l'eau peut difoudre davantage que de fel marin.
Enfin, on voit qu'il faut faire le mélange de la glace &
du fel le plus parfaitement & le plus promptement qu'il eft
poffible, pour produire le plus grand degré de froid pofible.
Plus le froid tarde à naître, & moins il eft grand, parce
que la chaleur des matiéres extérieures a plus le temps d'agir
avec fuccès contre le mêlange. La meilleure maniére de
méler enfemble la glace & le fel, m'a paru être de {es pofer
June & l'autre par couches autour du vafe qu'on veut refroi-
dir, & de remuer enfuite le tout avec quelque inftrument
de fer bien refroidi. La pratique de quelques faifeurs de
glace eft de mêler la glace & le fel enfemble dans un grand
vafe, d'où ils la tirent bientôt pour la mettre dans un vale
plus petit où eft celui qui contient la liqueur qu'ils veulent
geler ; mais il eft évident que ce procédé fait perdre une
partie du froid. Pendant qu'on mêle Ja glace avec le fel, ü
s'éleve une fumée très-épaifle, femblable à celle d’un feu
qu'on vient d'éteindre, la vapeur qui ne peut s'élever que
très-lentement dans un air très-froid, s’y raflemble fous la
forme de fumée.
Quoiqu'il femblât que plus le fel feroit pulvérifé & réduit
en grains fins, & plus fon effet feroit prompt, j'ai pourtant
obfervé qu'on réuffifloit fouvent moins bien en employant
le fel marin, par exemple, extrèmement pulvérifé, qu'en
Temployant après avoir fimplement écrafé fes grains, ou en
eur laiflant même toute leur groffeur. Ce n'eft pas qu'il ne
oit certain que le meilleur des procédés eft celui de mêler
da glace & le fel par les plus petites parties qu'il eft poffble,
mais il arrive que lorfqu'on a jetté du {el en poudre très-fine,
il fe trouve bientôt dans fa glace par mafles plus grofles que
celles des grains écrafés, ou dans leur entier, l'humidité lie
enfemble des ainas de ces petits grains.
Moins de circonftances s’oppofent à ce que l'efprit de Vin,
les efprits acides, & généralement tous les liquides propres
à faire naître du froid, en produifent les plus grands degrés
qu'ils font capables de produire. Ils fe mêlent bien plus
7
DES SCIENCES, 195
parfaitement avec la glace, ils la touchent & fattaquent dans
un inftant de toutes parts.
Une remarque que nous avons faite, c’eft que pour pro-
duire de nouveaux degrés de froïd, il faut que de la glace
fonduë & de là matiére foit folide, foit liquide, qui a été
employée, il fe fafle un nouveau liquide. De-là naït une
regle pour connoître les liqueurs, qui mélées avec la glace,
font incapables d'y produire du froid. Toutes les liqueurs
huileufes qui ne peuvent pas fe mêler avec feau, feront
employées fans fuccès. Auffi ai-je éprouvé que des huiles
grofhéres, telles que l'huile de Lin , ou des huiles plus fub-
tiles, comme l'huile & lefprit de Térébenthine, feront jettées
inutilement fur la glace; elles la peuvent fondre, mais elles
ne peuvent fe mêler avec l’eau qui naît de la fufion, & par-là
elles font incapables de produire des degrés de froïd. II en
eft de même de toute matiére, foit grafle, foit terreufe, de
forme folide qui ne pourra être tenuë en une parfaite difo-
lution par l'eau, qui ne forme pas avec elle un nouveau
fluide. J'ai inutilement fait mêler de la glace avec de la graïfle,
& avec des matiéres terreufes qui contiennent peu de fels
dont l’eau puifle fe faifir, telle que la Craye; il ne s’en eft
fuivi aucun refroidiflement.
& fine Bb i
196 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
Sub. T ss
DE PEUSIEURS PROBLEMES
Où il s'agit de trouver des Courbes dont la proprieté confffle
dans une certaine relation entre leurs branches,
exprimée par une Equation donnée.
Par M. CLAIRAUT.
D" les Courbes dont on parle dans ce Mémoire,
il ne fuffit pas, comme dans la plüpart des autres, de
confidérer un de leurs points quelconques, où une partie
infiniment petite de la Courbe pour la déterminer toute
entiére. Les propriétés de celles-ci demandent néceflairement
qu'on prenne à la fois plufieurs points à des diftances finies
les uns des autres, & dans des branches différentes.
Les Problemes que je vais donner, & ceux qui font de
la mème efpece, feroient fort faciles, fi, pour trouver les
Courbes qui en font la folution, on fe contentoit de prendre
deux ou plufieurs branches de différentes Courbes, au lieu
de trouver une feule Courbe qui les comprenne toutes.
Prenant une branche d’une Courbe quelconque, en en
trouveroit aifément d’autres par les méthodes ordinaires, qui
aurojient avec cette premiére la relation demandée. Mais
pour faire enforte que les différentes branches appartiennent
toutes à la mème Courbe, il faut néceffairement avoir recours
à d'autres méthodes qui adjoütent de plus grandes difficultés
à ces Problemes.
I n’y a eu jufqu'ici, du moins que je fçache, que très-
peu de Problemes de cette nature, on peut dire même qu'il
n'y a d'expliqué que le fameux Probleme des Trajeétoires
réciproques, dont M.'s Bernoulli, Pembreton & Euler ont
donné des folutions dans les A@tes dé Leipfic, années 1718,
CO OR,
DTEuSY :SLCUL'E Nr CAES :
97
2719 & 1720, & dansie TomelIl. des Mémoires de l’Aca:
démie de Peterfbourg.
Dans les autres Problemes, dont je parlerai tout à l'heure,
on ne trouve que quelques-unes des Courbes qui ont la
propriété demandée, fans montrer la méthode, ou du moins
fans donner le détail néceflaire pour la faire bien entendre.
DÉFINITIONS.
On doit fçavoir que par fonétion d'une variable, on
entend une quantité compofée de cette variable & de con-
ftantes, de quelque maniére qu'elle en foit formée, par
» es font des fonétions
de x. Je me fervirai de différents fignes comme Ilx, dx,
Ax, &c. pour exprimer différentes fonétions en général.
Lorfque je parlerai dans ce Mémoire, d'équations où deux
quantités font la même fonétion, ce fera des équations où
on peut mettre une de ces deux quantités à la place de
l'autre, fans que l'équation en foit changée, par exemple,
ya, + a, bx + by + cxy + + = d,
font de ces fortes d'équations.
LEMME:
Si dans une équation où deux quantités font la mêmé
fonction, lon fubftituë à la place de l'une de ces quantités
A+ BP, & à la place de l'autre A—_B (4 &B marquent
tout ce que l’on veut), il arrivera toüjours dans le rélultat
qu'il ne reftera plus que des puiffances paires de B. Par
exemple, dans l'équation dx by cxy—d, fi on met
pour x, AB, & pour y, A—B, il viendra 24 4-+cAA
— cBB=—d, où B éft au quarré; dans x°+-y =, on
trouvera 2 A+ 6ABB—a, &c.
La même chofe arrivera fi lon met pour les deux quantités
exemple, x°, x?, xŸ+ ax?
Aura 41 p 104 ep AYC+B .
LS ES RPM ET SD TE
général, fi on employe deux quantités qui ne différent
entre elles que par le figne + ou -— qu'on donnera à 2.
Bb ïij
198 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyAtE
Mais fi l’on fait les mêmes fubftitutions dans une équation
où les deux quantités ne font pas la même fonétion, les
puiflances impaires de B ne s'en iront point.
Dans les Journaux de Leipfic (années 1 696 & 1697),
le célébre M. Jean Bernoulli donne un Mémoire qu'il in-
titule Supplementum defetlus Geometriæ Cartefianæ circa inven-
tionemt locorum, y remarque que d'autres courbes que le cercle
peuvent avoir cette propriété, que d'un point extérieur tirant
une infinité de droites fécantes, le produit des fegmens eft
toüjours conftant, & il donne une équation qui renferme
quelques-unes des courbes qui ont cette propriété, mais fahs
montrer fa folution.
IL imagine enfuite que les fécantes, au lieu de partir d'un
point fixe, foient toutes paralleles entre elles, & terminées
par une droite donnée de pofition, & il donne quelques-unes
des courbes dans lefquelles le produit de ces fegmens eft
conftant, enfuite il prend pour la propriété des fegmens
que leur fomme foit conftante, au lieu de leur produit.
Et il propofe aux Géometres, de trouver des Courbes
dans lefquelles la fomme de deux puifflances quelconques
des fegmens foit conftante. M." Leïbnitz, Jacques Bernoulli,
& le Marquis de Hôpital réfolurent ce Probleme , en
donnant chacun une équation qui renfermoit quelques-unes
des courbes demandées, mais fans démonftration, excepté
M. Jacques Bernoulli dont la folution n’eft autre chofe
que de prendre une équation y = a x” + bx”, dont les
coëffcients & les expofants font arbitraires, & de les trouver
enfuite par la méthode des indéterminées, de façon que
la courbe ait la propriété demandée; mais il eft aïfé de voir
que cette méthode n’eft pas directe. Il n’en eft pas de même
d'une folution de ces Problemes que M. Newton a mife
dans le même Journal, on voit bien par le peu qu'il donne,
qu'il avoit le véritable chemin pour les réfoudre; mais fa
méthode eft fi peu expliquée que j'ai cru qu'onfverroit
avec plaifir la folution fuivante, qui, au fonds, eft, je crois,
1 même que celle de M. Newton, mais avec toute l'étenduë
. da réfout pour avoir la valeur de l'ordonnée
DIE S. SC EZN QUE 5, .l{ 90
i m'a paru néceflaire pour Ja rendre claire & applicable
à tous les Problemes de la même nature.
Les deux premiers des Problemes fuivants ne font unique-
ment que ceux de M. Bernoulli pris plus généralement ; mais
letroifiéme eftextrémement différent, & beaucoup plus diffi-
cile. 11 ne paroît pas d'abord de la même forte, on pourroit
croire-même qu'il eft de ceux qui font réfolus par une feule
équation, mais cependant il y a une infinité d'équations
de formes différentes qui le réfolvent, & je donne la maniére
de les trouver: La principale difficulté de ce Probleme con-
fiftoit à trouver ce qu'il avoit de commun avec les deux
premiers, j'efpere que la méthode au j'employe pour cela
pourra fervir à beaucoup d'autres Problemes,
PROBLEME L
On demande la courbe MON, que chacune, d'une infinité
de droites PMN, paralleles entre elles, &r terminées par l'axe AP,
coupe de façon que la relation entre PM dr PN Joit exprimée
par une équation donnée !
| SOLUTION.
Puifque les droites PAZN, qui font les
ordonnées de la courbe MON, font ren-
contrées en deux points 47 & N\, l'équation
de cette courbe doit être telle que fi on
exprimée en abfcifle, on trouve deux va-
leurs en même temps, l’une de PA, & À
Yautre de PN. Je cherche donc ce qui peut entrer dans
Texpreflion de l’ordonnée pour qu'elle puifle avoir deux
valeurs, ce ne peut être que quelque quantité radicale. Ainfi
de Probleme fe réduit à trouver des quantités dans lefquélles
il y ait des radicaux qui, felon que l’on prendra le ligne +
ou le figne -— donnent deux valeurs telles qu'étant fubfti-
tuées dans l'équation donnée, l'une à 4a place de PM, &
Tautre à la place de 2N, elles réfolvent cette équation
00. MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
Pour cela, on n'aura qu'à prendre une pi
forme de fonction dans laquelle il y ait
un radical qué lon fuppofera inconnu,
& toutes les autres quantités connuës &
prifes à volonté, puis fubftituer les deux
valeurs que lon peut avoir en prenant
ce radical en + ou en — dans lé Z% P
quation donnée, & chercher la valeur
de ce radical, comme on fait pour dégager une inconnuë ;
enfuite ayant trouvé ce radical, on le mettra dans la fonction
qu’on avoit choifie pour la valeur de l’appliquée de la courbe
cherchée. Alors fi on prend le figne + on aura l’équation
de la branche compofée des points W, & fi on prend le
figne — on aura celle des points 7, ou au contraire.
Et en faifant évanouir les radicaux, on aura l'équation de
la courbe entiére. [
Suppofons, par exemple, qu'on veuille trouver la courbe
où PM°+ PN°—aa. Je nomme AP, x; PM, y; PN, y’,
j'imagine que l'ordonnée de la courbe foit exprimée en
général par la quantité & u H V7 où $ # exprime une
quantité quelconque compofée de # & de conftantes, &
V4 un radical que je vais déterminer. Par ce que je viens
de dire, y' fera du 7, &y, Du —Vz; fubftituant
ces deux valeurs dans l'équation PM°+ PN°= aa,
ou-yy + y'y —aa, on aura 2/Ÿ ut} + 27—=aa;
d'où l'on tire 7 —+aa—/bu)* qui étant remis dans la
valeur de l'ordonniée donnera y = 1 + VT£aa—[&u)],
&y=Du—VÎiaa—/du)], & en fafant évanouir
des radicaux y y — 2y Du—+aa—2/$u)", &
yyY— 27 Du—Taa— 2/$u)" qui font les mêmes,
‘& qui font voir que les deux branches 47/0, NO, font
à fa même courbe, & ont là propriété demandée. Il en
fera ainfi des autres, quelque forme de fonétion que lon
imagine avec des radicaux, réfoudra le Probleme, s'il peut
être réfolu. Mais il y a bien des cas où il eft impoflible de
trouver des courbes dans lefquelles P47 & PN ayent certaine
relation
£
g
DES, SIC IN GES 20H
relation entre elles. Ces cas font ceux où la relation entre
PM & PN n'eft pas exprimée par une équation dans laquelle
ces deux quantités faflent la même fonction, il n'y a point
de courbes qui réfolvent le Probleme alors.
La démonftration de tout ce que nous venons de dire
eft évidente par le Lemme précédent; car les quantités dans
lefquelles il entreun radical font dans le même cas que À -+-
& A—B, dont j'ai parlé dans ce Lemme: ainfi en les fub-
ftituant dans une équation où PAZ & PN font la même
fonction, les puiflances impaires du radical V2 que l'on a pris
s'évanouiront, & il n'y aura plus que des 7, de maniére qu'en
dégageant le 7 de ces équations, on en aura une valeur dont
la racine quarrée pourra être mife à la place de y%. Mais
fl PM & PN ne font pas la même fonction, les Vz ne
s'en iront pas par-tout, & l'on ne trouvera pas pour y? une
valeur qui ne foit purement qu'un radical, il y entrera des
quantités rationnelles auxquelles on ne pourra pas donner
à volonté le figne -p où ——. Pour mieux faire voir
par un exemple comment il eft impoñfible de trouver des
courbes où PM & PN ne faflent pas la même fonétion,
fuppofons que l’on demande des courbes où PM 2PN
a; faïlant PM Gu +2 & PN—Du— 77, on
aura 3®u—V7—a, d'où l'on tire ÿz— 3%v — à, qui
n'eft pas une quantité radicale, & qui ne peut pas par con-
féquent donner deux valeurs différentes à PM & PN. Si
Yon vouloit trouver des courbes où 214 FH PN x b—aa;,
en fuppofant toûjours 2A1—% uvre & PN—= uv,
on aura (Du) 2bu Ver + Du —4 = a à)
dans laquelle 1a quantité % fe trouveroit égale à un radical
plus une quantité rationnelle, & par conféquent elle ne
pourroit pas être fubflituée pour 47 dans la fonction & u
= V3. Mais dans toutes les équations où PA & PN entrent
de la même maniére, les termes où front V3 fe détruiront,
il n'y aura que des 7, & par conféquent après avoir dégagé
ces 7, on aura une valeur de ÿz qu'on pourra prendre en +
ou en — pour avoir les valeurs de 24 & de PN,.
Mem 1734 . Cc
202 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE
EXEMPLE.
Pour faire quelque application de notre Probleme, {up-
pofons qu’on demande la courbe où PM x PN— A.
Faifant PM ou PN en général = ®x + yz, on
aura {D x)*—7—= À, qui donnez —/®x) — A; d'où
l'équation de la courbe eft y—=®x + y[/dx) — A], ou
faifant évanouir les radicaux pour avoir l’équation de la
courbe entiére y y — 2y® x + A—o qui renferme une
infinité de courbes, car on peut mettre à la place de &x
telle fontion compolée de x & de conftantes qu'on voudra.
Si x eft feulement x, on aura J}— 2x) + À qui
exprime une hyperbole.
Si bx— x", on a yy—2yx" + A— 0.
Si au lieu de fuppofer y—%$x 73, on l'avoit fait
== 4 Px + 7), le Probleme auroit été réfolu de même,
& l'on auroit eu y°”— 2 y” x + 4" — 0.
Si l’on veut que le produit des fegments, au lieu d'être
conftant , foit égal au produit des :
fegments PA & PB, la méthode
fera la même, au lieu de fuppofer
(Ex +-Vr) x (bx—vr) = A, i À E
faudra l'égaler à — /bx— xx), GE
(b étant la valeur de AB). Je mets
cette quantité en moins, parce que
dans la Figure la partie P N eft en deffous, & par confé-
quent négative.
Par la réduétion , il viendra x°—7——2x+xx,
d'où l'on tire 7 —/Dx)—xx-1+Bx, & par conféquent
J=dDx EVI/Dx) —xx + bx] ou yy—27dx
—6bx— xx qui exprime une infité de courbes qui ont la
propriété demandée. On en trouvera encore autant d'autres
que l’on voudra, felon les différentes formes de fonctions
qu'on imaginera, où il entrera un radical. Dans cette équa-
tion, pour que à exprime la droite AB qui eit rencontrée
hEspise
DES SCTENCES 203
aux points À & B par la courbe demandée, ül faut que fr
lon faitx—o &—b, y ait dans ces deux cas, une valeur
= 0, c'eft ce qui arrive effetivement, car l’on a, foit que
X—O ou —b, yy—2y®x—0, d'où lon tire y—20x
0 PER
Pour trouver le cercle parmi toutes les courbes précé-
dentes, il faut faire 5x — a, & lon a JJ — 2ay—=bx
— xx qui exprime un cercle, quand l'angle A/PA eft droit.
Si lon vouloit que PM x PN füt égal en général à
quelque fonétion que ce foit de x & de conftantes , a mé-
thode iroit encore, & même on pourroit fappofer de plus
la relation entre P/Z & PN telle que l'on voudroit, pourvû
que ces deux quantités fiflent la mène fonétion dans l'équa-
tion qui exprimeroit leur relation.
RO BL E M Er:lf
Soit À un point fixe que Ton prendra pour le pole d'une inf-
sité de droites comme À MN, on demande les courbes MN
que toutes ces droites coupent en deux points M & N, de telle
façon que la relation entre AM € AN Joit exprimée par une
équation où elles faffent la méme Jonction.
S O L'U T I O N:
On prendra la droite AP pour N
axe, & l’on abbaifiera des points
M & N des perpendiculaires AP
& NQ; AP, x, & PM, y, feront
les coordonnées du point M, &
AQ, x’, &QN, y’, feront celles du
point W. À P Q
- Enfüte on nommera # la quantité FL où 7 qui
exprime la tangente de l'angle ALAP, & par conféquent
la pofition de la droite AMN. On nommer: auffi es droites
A “1 & AN qui font les fegments de Ia fécante AMN,
u & uw’,
Cci
-
204 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE
Cela fait, pour avoir des cour- .
bes où À M & MN ayent la N
relation donnée, on fuppofera
que # en général eft une fonction
de‘: qui ait deux valeurs en
même temps, c'eft-à-dire, une
fonction où il entre des radicaux ; < P
& fubftituant à la place de # & œ
de u’ les deux différentes valeurs que l'on a en prenant le
figne +- ou le figne — , on déterminera le radical comme
dans le Probleme précédent, de forte que l'on aura une
valeur de z enr. Si on fe contentoit d’une équation de
cette nature pour exprimer a courbe MN, le Probleme
feroit réfolu. Mais fi on veut avoir l'équation en x &
en y, on fe fervira des équations xx + y y—=uu & = —t
par le moyen defquelles on chaffera # & z.
Suppofons que IT# foit la valeur de 7, on aura
= Ir ea. tIlr : US a
*= 77 JA ui peuvent fervir à exa
miner la courbe, & à déterminer le nombre de fes branches,
aufli-bien que l'équation en x & en y.
EXEMPLE.
Suppofons que l’on veuille trouver les courbes où (AM
+ (AN)" = 1, on prendra 2"—=@r+ V7 &u"—@r
— Vz, qui étant fubftitués, donneront 2 ®r— 1 où ül
n'y a point de7, ce qui marque qu’on peut prendre pour z
tout ce que lon veut, ainfi #”"—=+;=+V/A1) marque une
infinité de courbes qui ont la propriété demandée.
En faifant évanouir les radicaux, on aura #°”* —#"
+= At dans laquelle fi Ton met à la place de v &
de t leurs valeurs en x & en y, on aura l'équation de la
courbe exprimée par fes coordonnées. Si on veut que l'équa-
tion foit femblable à celle que M. Bernoulli donne pour
ces courbes dans les Journaux de Leipfick 1 696 & 1697,
où les hypoténufes des coordonnées fervent d'ablcife, les
L'AF SM MO ICNT ER QUE oi: 28
ordonnées étant confervées les mêmes ; je fuppoferai que #,
au lieu d'exprimer la tangente de l’angle AZ4P, en exprime
le fmus, ce qui peut fe faire à caufe que le finus marque
auffi-bien la pofition.de la droite 4/7 que la tangente, alors
lordonnée PMy fera — ut, d'où l'on tire 12, qui
étant fubftitué dans l'équation précédente, donnera 2°”— 1"
sf 2 )— 3% qui eft infiniment plus générale que celle
de M.': Bernoulli, Leibnitz & de l'Hôpital. Qu'on fuppofe
feulement / A 2) mn +. ++, on aura a — 4"
— by, qui eft celle de M. Leibnitz, & en faifant
(AZ)=E 2 HE, ona nu "— 4" — By, qui
4"
eft celle de M.'s Jacques Bernoulli & de Hôpital.
Dans cet exemple, on a pris #”—& +77 qui a donné
un calcul fort fimple. Si on avoit pris feulement :— ©
+ V7, comme cela étoit plus naturel d'abord, on auroit
eu (dr+ V2)" + (%t— 9)" —xr, de laquelle on ne
fçauroit tirer la valeur de 7 en général. Et il y a bien d’au-
tres cas de relations entre PAZ & PN où on arriveroit par
la fuppofition de # égale à une quantité, comme ®:+- VZ
a des équations de cette nature. Cependant comme on eft
bien für que fi elles étoient réfoluës, on auroit pour 7Z
des valeurs purement radicales, on peut regarder l'équation
précédente & celles qui arrivent en pareïl cas, comme réfol-
vant le Probleme, quoiqu'on n’en puifle pas dégager le z
pour avoir l'équation de la courbe cherchée. On peut bien
voir même qu'elle peut fervir à décrire la courbe, quel que
foit #1, car par la géométrie de Defcartes on peut apprendre
à réfoudre par des conftruétions géométriques une équation
comme la précédente, ce qui prouve la généralité de la
méthode.
Cci
06 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royer
PROBLEME IIL
Trouver les courbes M O N autour defquelles faifant glhffer
l'équerre MEN, le fommer C de cetté équerre Joit toüjours
dans la courbe donnée EC.
SO: LU! POP OUNT
Soient 41 & N deux
différents points de la . = die
courbe AON touchés
par les deux jambes de
Yéquerre MCN ; MP,
PA, NQ, QA, les coor-
données correfpondan-
tes à ces deux points;
MRm & SN, leurs
triangles différentiels ;
CB & AB, les coordonnées de li courbe EC pour le
point C, qui eft le fommet de l'équerre, & en même temps
un point quelconque de la courbe £C, HCL, une parallele
à l'axe AP.
Je fais AP = x AG
PM= y QN = y.
RM= dx SN = dx.
Rm = dy Sr = — dy.
AB —=n, BC, qui eft lordonnée de Ia
courbe ÆC, fera donné en #, ainfi je le fais —®w, d'où
vient HC—x—1u IC = 3x"
HM=7y—œ% IN= y — du.
Enfuite les triangles CM, RMm, NnS, CIN, donnent
= EE RH
dx Gr N— 4 U —
où (5) Lt,
Et l'angle MCN étant droit, les triangles RMm, NnS,
feront femblables, ainfi l'on aura 4 y:dx:: dx": — dy,
AN
DE HS 4 COÂ'E Ni Que is 1207
donc —— dy dy —=dx dx, où /C) + x . = — 14
| Cette équation avec les deux autres ne fuffit pas pour
avoir celle de la courbe MON, car ïf y a cinq variables.
On voit bien que fi l'on avoit de plus une équation entre
l x & y qui exprimât la branche de la courbe qui eft touchée
par le côté 1C de l'équerre, on auroit l'équation de l'autre
branche, dont les coordonnées font x’ & y’. La difficulté
du Probleme eft donc de trouver une équation entre x & y
telle que celle qui en proviendra entre x’ & y pare réfultat
des équations précédentes foit {1 même,
Pour exprimer cette derniére condition du Probleme,
j'abandonne pour un moment la façon ordinaire de prendre
les équations des courbes ; j’en cherche une entre la quan-
tité LA & la quantité #, c’eft-à-dire, que je prends la droite
AB pour abciflé, & la tangente de l'angle AC M pour
ordonnée. I eft bien für que lorfqu'on aura cette équation,
on en trouvera une entre x & y avec le fecours des équations
précédentes. Je fuppofe que cette équation m’eft donnée,
& j'examine quelle propriété elle doit avoir: elle doit être
telle que, pour un même #, on trouve à la fois deux valeurs
de 2 , Tune qui exprime la tangente de l'angle ACM que
j'ai déja appellé fimplement 2 , & l'autre qui foit la valeur
de la tangente de Fangle ZCN que j'ai appellé #., c'eft-
ä-dire, qu'en réfolvant cette équation, on doit trouver pour
la valeur de 2 en général, une fonétion de # fufceptible
% de deux valeurs qui ayent entr’elles {a relation exprimée par
l'équation /C). Je cherche enfuite quelle forme doit avoir
cette fonction de 1.
Pour cela, je prends, aïinfi que dans les Problemes pré-
cédents, une quantité où les radicaux entrent de la façon
la plus fimple, c’eft-à-dire, une fonction compofée de.
deux membres, dont l'un foit un radical, & l'autre une
208 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royarr
quantité quelconque fans radicaux, ou au moins dans laquelle
il n'entre que des radicaux impairs. J'écris ainfi cette
quantité © u +- Vz qui donnera pour fa feconde valeur
Ou— V7, & je cherche à déterminer z de façon que ces
deux valeurs mifes à la place de ne & de A réfolvent
l'équation (C}).
Les fubftitutions faites donneront /O 4) —7—=—1,
«d’où lon tire 7=—= (Ou) +1, & remettant cette valeur
à la place de 7 dans + y, elle deviendra Ou +
V[(@u) +1] = #. &Ou—V|(Ou) +1) = Lis”
c'eft-à-dire, que la quantité > eft en général dans la courbe
Ou v{[(Ou) + 1). Ce qui donne une 4."€ équation,
qui avec les trois 4, B, C, réfoudra entiérement leProbleme.
Pour le bien démontrer, nous allons, par le moyen de
cette équation & de l'équation /4), trouver les valeurs de x
& de y en ” ; & de même par le moyen de l'équation que
donne la valeur de A & de l'équation / 2) nous trouve-
rons les valeurs de x’ & de y’ en #, & Ton verra alors que
les valeurs de x & de y ne différeront de celles de x’ & de y
que par les fignes + & — des quantités radicales, & qu'en
les faifant évanouir, les équations qui en viendroient feroient
abfolument les mêmes.
Comme les équations À & B ont abfolument la même
forme, il fuffra de fe fervir de l'équation À & de la valeur
de 2 en général; & pour abréger, au lieu de la fonction
dy=OuVv(@ +1), nous mettrons fimplement IT.
LAN: E dy ___ y—Du CS
Nous aurons donc 52 —TIlx & 52 = 2, d'où
Yon tirera (Æ), xTIu—uIlu—=y—%4 & 2 À ÿ7
ou dy —=dxlTlu.
En différenciant la premiére de ces deux équations, & y
fubftituant pour dy la valeur que donne la feconde , on aura
dxII4
DES /S'c/riR/N etes 209:
dxTlu—Nudu—=UMudx—du=u—xduAu+-udu At
(je fuppole que du Au & du’Æu foient les différences de
Ilu & de du) ou à caufe que Zx IT # fe détruit de part
Ü & d'autre, & que toute l'équation fe divife par du
| Ex = ee qui étant fubftituée dans l’'équa-
tion (Æ) donnera /G) y — Ar AE , ce qui
donne la réfolution générale de équation A. Il n’y a plus
qu'à remettre dans ces équations pour Il fa valeur ©
EE V[(@u)"+1], & lon aura, felon que lon prendra
le figne +- ou le figne — des quantités radicales, la valeur
de x & de y ou de x’ & de y, & en faifant évanouir les
radicaux & chaffant , une équation qui exprimera égale-
ment les deux branches de la courbe HON.
no 18e REMARQUE.
Dans la façon précédente de traiter les équations À &
ue
ire.
paroït d’abord néceffaire pour les réfoudre, & même dans
un autre chemin qui fe préfente pour parvenir à la folution,
on arrive à une équation entre y &x, dx & dy, qui fem-
bleroit demander bien plus vifiblement le calcul intégral,
Ce chemin eft de réfoudre par le moyen de l'équation
T4, on évite le calcul intégral, cependant ce calcul
D TI], la valeur de ven = & enfuite de la fubftituer
dx
dans l'équation À, alors on arrive à une équation en
+ dx, dy, y, x, dont l'intégrale devroit être la folution
w ; LES
g des équations À & % — II, cependant cette folu-
à tion, par le calcul intégral, ne peut pas être la même que
la précédente, car elle doit renfermer une conftante que l’on
ajoûte toûjours en intégrant. Ilrefte à voir fi cette équation
intéorée ne feroit point plus générale que celle que lon à
par l'autre méthode, & fr elle ne la renfermeroit pas par la
détermination de la conftante ajôütée ; mais comme on ne
peut pas fuivre cette feconde méthode en général, à caufe
Men. 173 4: . Dd
210 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
que l’on ne connoiît la quantité Ty que dans chaque exemple
particulier, il vaut mieux reprendre la premiére méthode,
& examiner fr quelque chofe pourroit empêcher d’être
générale.
Premiérement le procédé du calcul jufqu'à l'équation
x Audu —Tludu—udu Au = —#% u du n'empêche
fürement pas cette équation d'être aufli générale que tout
« : #2 L : dy ;
ce qui peut provenir des équations À & 2 —Ilu. Mais
dans Ja réduétion de cette équation à xAu—TTu —uAu
= — Zu qui fe fait en divifant tout par du, on prend
une équation qui n'eft pas la feule, car on pourroit aufli tirer
du —=o, ceflà-dire, u— à une conftante quelconque 4.
Remettant donc pour cette valeur dans l'équation Æ, on
aura x [1a—alle—y—%4 qui appartient toüjours à
une ligne droite, & ne renferme point les équations trouvées
par la premiére méthode. Aïnfi il fe rencontre dans ce cas
deux folutions à la fois des mêmes équations, différentes
Tune de l'autre. Mais la premiére eft la feule qui foit vérita-
blement la folution du Probleme précédent ; car la feconde,
au lieu de donner les courbes touchées par l’équerre, n'ex-
prime que les droites qui font les branches de cette équerre.
Préfentement je vais donner quelques exemples où lon
verra encore mieux comment le calcul intégral ne donne
jamais que les lignes droites exprimées par l'équation géné-
rale xITIa—alla—y—a, & comment les équations
trouvées par la premiére méthode échappent à l'intégration.
Suppofons que les fonctions IT # & 4 foïent chacune
fimplement v, Au & Æu feront égales à r, d'où les équations
D Nu & 2 — 2% fe changeront en Z—#
& dy __ y—u
= qui donneront x dy dx — dy = ydx°,
À —41
— dydx où dy — dydx=—ydx", & par conféquent
—xdydx
dy ps A, Et = dx V—y+()] où
DES SCIENCES. 2 ny;
pe Le
x ; dont l'intégrale eft x a —
1H *
Vis + (22 )"]
— 2 Vl— y + ()T, ou en réduifant 24X — 2x
A1
- p
à la ligne droite, qui eft pofitivement la même que celle
que l'on auroit trouvée par la fubfitution de a à la place
de ITa &de ® a dans x[1a—aTla—y—a que l'on a
A2 2h g » o ES = pi . q pe
prouvé être l'équation générale qui proviendroït par l'in-
tégration des équations À & _ —= 114, ä y a feulement
à remarquer que la lettre 4 ajoütée n’eft pas la même, mais
= — 4ÿ#H1—aa, OU (——<) x —= y + , équation
2
‘que la de l'une vaut = de l'autre. ,
Mais fi l’on fe fert de Ia premiére méthode, en fubfti-
tuant # pour ITz & Du, on aura par les équations générales
F&G, x—=2u — 1 & y —uu, d'où lon tirera
4Y—=XX 2% I qui eft à une parabole,
Si l'on reprend maintenant l'équation
ape dx E
dx ———"— qui par fon intégration a donné
A D PU reg
une ligne droite, on verra que la parabole de l'équation
AY —=XXHIx + 1 ya réfout aufi, quoiqu'elle ne
foit point renfermée dans l'intégrale ; car en fubftituant
3—= (=)? que donne cette équation à la parabole dans
2
équation différentielle, le numérateur & le dénominateur
“deviennent zero, à caufe que le premier eft la différentielle
du fecond,.& de cette façon dx peut être égal au quotient,
d'où l'on voit donc que l'équation xdydx — dy = y dx
«— dy dx provenuë des équations La Éamer),) De 4 PE
étoit fufceptible de deux folutions différentes, dont l’une fe
trouve renfermée dans intégration, & l'autre en eft indé-
‘pendante.
F Dd ij
212 ne DE L'ACADEMIE ROYALE
Soit II 1 —=
& Du —0o, on aura par les équations
y dx
L— ———
— [lu & 2 2 =, ® MËrs dy
f—4 PAUTREL ydx
A HXx —
d
rer
où a dy + x dy —ydydx—= xdxdy — dx ou
Axis = — )dx—— te , d'où l'on tire
dy+ydy _— + 4*y+44a9
Ale — oc — dy TE + és Te
2ydx—s dy dj = dy Ur — 233-233 — 40)
= dl)" —-44], où À VT( + —Vr)—4a]
— _2ydh—vdy—ydy Lu } 2 y
= ie > ou (a) — -
Lx — Vi — 44]
dont l'intégrale eft
she ie ls a — 44],
ou en repaflant aux nombres & y — rs — y +
VI( — —V}) — 4a] qui donne, après la réduétion,
Bby—2bx + 2by— —4a, équation à une ligne
droite. Mais fi l'on reprend l'équation (a), on verra que le
numérateur étant la différence du dénominateur, le dénomi-
nateur peut être fuppofé = 0, & l'équation br —Vy=V4a
qui en provient, réfout auffi l'équation (a), & exprime une
ligne courbe. Si on fubftituë dans les formules F'& G, à la
place de ou & deTI, leurs valeurs, & qu'on les réduife
enfuite, on arrivera à la même équation, de mème que
l'équation générale x [Ta— 411a—y——Da ne contien-
droit que la ligne droite exprimée par l'équation 2 by — 2 8x
+ 20y—=—4a.
Il en feroit de même, quelque fonction que l’on prit
pour [Tu & œu. Je fuis entré dans ce détail d'exemples,
DES SCIENCES 21
pour mieux faire voir la généralité des formules F & G. C'’eft
une digreflion dans le Probleme que nous traitons dans ce
Mémoire , mais J'ai été bien aife de montrer cette fingula-
_ rité de calcul qui s’eft préfentée d'elle-même ; on pourroit
l'énoncer, indépendamment du Probleme préfent, de cette
maniére. [Il ÿ a des équations différentielles capables d’avoir
deux folutions différentes fune de autre, dont l'une
(& même dans ce cas-ci la plus générale) n’a pas befoin du
calcul intégral ; telles font les équations précédentes x 4y dx
— dy —=ydx"—dydx à laquelle 4y=xx ax tr
& 24x—2xX—— 4y—+1— aa fatisfont également,
& adyÿ +xdyÿ—ydydx—xdx dy — ydx* qui donne
pour folutions -— y =V4a & bby—2 bx + 20y
= — 44
En général Sur —= à une fonction quelconque de
#, y, dx, dy, feroit de cette nature ; intégrée, elle donne-
roit une équation, & fans aucune intégration ® xy — o
feroit l’autre.
Il y a encore d’autres Problemes où cette fingularité fe
rencontre, mais ce feroit fortir de lobjét de ce Mémoire
que de s'étendre davantage R-deflus. Je réferve un plus long
détail pour un autre Mémoire.
ExEmMPLE L
Suppofons que la courbe £C CA Q
devienne la ligne droite ACP
pour avoir les courbes HONWN; De N
autour defquelles faifant gliffer ii
Yéquerre MCM, le fommet C N
_de cette équerre foit toüjours
‘dans fa droite PQ, ïl faudra faire €
évanouir la quantité Du, & par conféquent aufi Æ 4 dans
les équations précédentes F & G, parce que cette valeur
exprimoit l'ordonnée BC qui eft devenué nulle, les équations
Dd ii
Sr4 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLE
fe réduiront à x = y & y — EX, dans lef
quelles fubftituant pour IT # quelqu'une des fonétions expri-
mée généralement par 1 =Ey{1+-0 1)" que nousavons
trouvé précédemment ; & pour À 4, la différence de cette
antité dont on a Ôté le /u, on aura deux équations,
d'où ayant chafié v, il en viendra une en x & y qui expri-
mera une courbe qui aura la propriété demandée.
De cette maniére les formules À & G deviendront, en
fuppofant que du u foit la différence de ow, :
GE Eee LE (Eh en [ou vi (œ@u))] *
mn VE CUT qui détermineront une des courbes cher-
chées aufli-tôt que l’on aura mis pour ®# une fonction de
quelconque, & pour Zv fa différence dont on aura Ôté 41.
En prenant le figne +, on aura la branche touchée par un
côté de léquerre, & en prenant le figne —, ce fera
J'autre. Mais en faifant évanouir #, on aura l'équation en x
& en y qui exprimera toute la courbe entiére.
Que ®&w foit fimplement #, les équations deviendront
su EV (ion) & y = [4 Vi un) x Vi un).
tX—1
———, qui étant fubflituée
dans la feconde, donnera y = <# qui exprime une
parabole dont la directrice eft AC & le fommet © diftant
de la directrice de +.
Si l'on fait &u —uu, & par conféquent Zu — 24, on
aura M & y —uu (1 ui)] x EE
24
On tire de la premiére # —
au V{itu#) +3 + ut
24
l'équation d’une autre courbe qui fatisfait au Probleme, &
ainfr des autres.
a
—
; d'où faifant évanouir #, on aura
. Taxe foit AP, le fommet
DES SCTE-N Cc-Rs 215.
EXEMPLE Il
Soit pris pour la courbe P B PE
‘ÆC, une parabole dont
À, & le parametre 1, ©
fera égale à un, & Zu
à 2w; ainfi mettant ces
valeurs dansles équations
F&G, elles deviendront
x == on &
22 uIl ; |
Je Eau qu lefquelles il ny a plus qu'à
mettre pour TT quelqu'une des fonctions exprimées par
Eu VTi + (Eu 7°]: Je me fervirai encore de # +=
V(i-+-uu) Qui donne Ay — +0) » & qui change
V(i--uu)
par conféquent les équati récé —panti#s
P q quations précédentes en x == au)
À Ji 2UU — y V{1-+uu), d'où faifant évanouir 4,
On aura une équation entre x & y qui fera celle d'une courbe
autour de laquelle faifant glifler une équerre, le fommet eft
toüjours dans une parabole. On en trouvera une infinité
d'autres, en mettant À {a place de IT # d’autres fonétions ren-
fermées dans l'expreffion générale Eu 4-14 (&u°].
216 MEMOIRES DE L'ACABEMIE RoyALE
RECHERCHES SUR LE TOUR.
PREMIER MÉMOIRE.
Par M. DE LA CONDAMINE.
Deféription à7 Ufage d'une Machine qui ünite
les mouvements du Tour.
8 Juille Et Tour femble n'avoir été imaginé que pour donner
1733: une parfaite rondeur aux ouvrages auxquels cette forme
pourroit convenir. Cette Machine en fournit un moyen fur
& commode.
Mais ce qui a pañlé d’abord pour le chef-d'œuvre de l'Art,
eft devenu bientôt une pratique ordinaire & commune.
Toute l'adrefle & l’induftrie des Artifles ne s’eft prefque
employée depuis qu'à s'éloigner de plus en plus dans les
ouvrages du T'our, de la forme circulaire qui avoit été le but
de l'inventeur dans la premiére découverte.
LeTour a été porté depuis un fiécle, & fur-tout de nos
jours , à une grande perfection. Nous avons des ouvrages
qu'on a peine à concevoir que le Tour puifle executer , mais
qu'on imagine encore moins qui ayent pü fe faire fans le
fecours du Tour. Plufieurs ouvriers habiles & divers parti-
culiers qui fe font appliqués à cette ingénieufe méchanique,
ont trouvé en différents temps le fecret de faire fur le Tour
» Payë la De. des chofes nouvelles & finguliéres *, mais la plüpart tenoient
pre 4 + leur pratique fecrette, dans la vüë de faire plus admirer ou
Grollier de Sa- xechercher leurs ouvrages.
piéress Le P. Plumier, Minime, publia en 1701 fon Livre de
l'Art de Tourner, dans lequel il révéla les plus fecrets myfteres
de cet art, ou du moins donna des moyens d'executer ce
qu'on avoit vû de plus fmgulier dans ce genre. C'eft le feul
Auteur François, venu à ma connoiffance, qui ait approfondi
cette
@-. wo. VUS
DH SV SICN.ELN CES 217
cette matiére, & qui foit entré dans un auffi grand détail
fur les ufages du Tour fimple & du Tour figuré. Je ne parle
point de ce que M. de Ia Hire a donné en 1719 dans les
Mémoires de Acad. qui ne peut être d’ufage que pour le cas
particulier des Polygones à pans droits auquel il s’eft borné.
La conftruétion & l’ufage du T'our font aflés connus, fur-
tout aujourd’hui qu’il eft devenu un amufement à la mode.
Cependant en faveur de ceux à qui la méchanique du Tour
n'eft pas bien familiére, on rappellera en peu de mots ce qui
eft néceflaire pour l'intelligence de ce Mémoire.
On appelle Tour fimple, celui qui ne fert qu'à tourner en
rond. Le Zour figuré et celui dont on fe fert pour tourner
toute autre figure que le Cercle. Je ne parle point du Zour
ovale, qui a fa conftruction particuliére , quoiqu'on puifle
tourner un ovale quelconque avec le feul fecours du Tour
figuré.
La principale piéce qui caraétérife le T'our figuré, eff celle
qu'on nomme la Ro/erte ; c’eft elle feule qui fournit le moyen
de tracer les différentes figures qu'on peut donner aux ou-
vrages du Tour ; fans elle , avec tout le refte de l'appareil
du Tour figuré, on ne pourroit décrire que des Cercles.
La Rofette, comme on fçait, eft un morceau de fer plat
de trois ou quatre lignes d'épaiffeur à peu-près, & d'environ
deux ou trois pouces de diametre. Son contour eft ordinai-
rement à pans, tantôt fimples, tantôt ondés ou goderonnés.
H peut y en avoir d'une infinité de figures différentes fuivant
le goût & la fantaifie de l'ouvrier.
Cette Rofette eft percée dans fon centre d’un trou quarré,
Yarbre du Tour eft auffi équarri pour la recevoir & lui fervir
d'effieu. La Rofette ainf ajuftée, tourne avec l'arbre, & le
bord de la Rofette, en tournant, rencontre une pointe de
fer moufle, qu'on appelle Touche*. Cette Touche eft fixe &
© # La Touche, pour une plus grande commodité dans l’execution, eft
ordinairement garnie d’une Roulette; maïs pour ne point trop compliquer cette
defcription, on fuppofe, quant à préfent, la Touche fimple, & ne portant
fur la Roferte gen un point, comme lorfqw’elle eit taillée en coin, ce qui
Æ pratique aufli quelquefois,
Men. 1734 . Êe
‘
Voy. l'Art de
Tourner, du P.
Plum. part. 6.
Chi I.P.1245
218 MEMOIRES DE L'AÂCADEMIE ROYALE
inumobile, mais l'arbre qui porte la Rofette peut fe mouvoir
parallelement à lui-même, & par conféquent s'approcher &
s'éloigner de la Touche contre laquelle il eft continuellement
prefié par un reflort difpofé pour cela. |
Ainfi tandis que la Rofette tourne, elle porte toüjours
par {on côté fur la Touche, y étant contrainte par la force du
reflort ; le centre de la Rolette s'approche donc ou s'éloigne
de la Touche felon que le permettent les inégalités du contour
de cette Rofette, qui préfente fucceffivement tous fes points
à la Touche. Par la même raifon, le centre de la piéce qu'on
travaille qui eft ajuftée & centrée comme la Rofette, mais
à l'autre extrémité de Farbre, s’approchera & s’éloignera de
la pointe de l'outil qu'on lui préfente, à mefure que la Ro-
fette s'approchera ou s’éloignera de la Touche; l'outil mor-
dra donc fur la piéce, tantôt plus près & tantôt plus loin de
fon centre, & par conféquent tracera fur la piéce un contour
dépendant de celui de la Rofette.
On ne parle point d’un autre mouvement qu'on peut pro-
curer à l'arbre du Tour dans la direétion de fon axe, & qui
fert à pratiquer des creux & des reliefs fur Fouvrage. H n’eft
ici queftion que des contours qu’on peut tracer fur une fur-
face plane.
Au premier coup d'œil on pourroit être tenté de croire
que la même Rofette ne peut produire qu'une même figure;
jufqu’à préfent les T'ourneurs n’ont été guere plus loin, du
moins on peut dire qu'avec la mème Rofette ils tracent à
peine deux contours vraiment différents, lun à peu-près
femblable à celui de la Rofette, l'autre qui eft, pour ainff
dire, la contre-partie du premier.
Le premier deflein femblable ou prefque femblable au
contour de la Rofette, éft l'effet de la Touche placée du
même côté de l'arbre que l'outil, parce que dans cette fitua-
tion l'arbre par fon mouvement de parallelifme s'approche
& s'éloigne de l'outil & de la Touche en même temps.
L'autre deffein eft l'effet de la Touche placée à l'oppofite
de l'outil, de l'autre côté de l'arbre, parce qu'alors l'arbre
DES: SLEUTIEAN HR . 219
s'éloigne de l'outil, quand il s'approche de la Touche, &
réciproquement ; ce qui doit nécellairement changer les arcs
concaves de la Rofette en convexes fur {a piéce, & les
convexes en concaves. Voilà, à peu de chofe près, jufqu'où
s'étend la pratique des ouvriers, & le P. Plumier lui-même,
qui a raflemblé dans fon Livretout ce qu'il a recueilli chés
les plus habiles Tourneurs, & ce que fa propre expérience .
lui a fourni, n’en dit pas davantage.
Mais en y regardant d’un peu plus près, on découvrira
que la même Rolfette peut donner un très - grand nombre
de contours différents ; que ce n’eft que dans un cas unique
que le contour tracé eft parfaitement femblable à la Rofette,
& qu'alors il ui .eft auf égal ; enfin que quelques Rofettes
fort fimples donnent en certains cas des figures fort bifarres,
comme des courbes nouées & entrelacées , chofes inouies
chés les T'ourneurs.
IL feroit donc utile de connoître les différents contours
que peut produire la même Rofette, & jufqu'où peut s’éten-
dre leur variété, en un mot, de fçavoir, une rofette étant
donnée, tout le parti qu'on en peut tirer. Ce n’eft pas encore
tout : avec un grand nombre de Rofettes différentes, & une
connoiflance exacte de tous leurs effets poffibles, on ne
{croit pas plus avancé, fi on avoit à tracer quelque figure
qui ne pût être produite par aucune des Rofettes dont on
connoïtroit la capacité.
IL eft vrai que comme l'on fait qu'il y a un cas où la
Rofette & la figure font femblables & égales, on pourroit
quelquefois réuflir, en employant pour Rofette la figure
mème qu'on veut tracer, mais le plus fouvent la figure
propolée feroit peu commode, pour les raifons que nous
dirons ailleurs, & quelquefois auffi il feroit impoffible d'en
faire ufage ; par exemple, fi le trait de la figure étoit entre-
‘cé, comme dans celles qui ont des nœuds, qui peuvent
cependant fouvent être produites par le moyen d'une Ro-
fette à fimple contour.
+ I ne füuffit donc pas de pouvoir connoître tous les effets
Ee ij |
* M. Gram-
mare, Prefid.
au Gren. à Sel
de Harfieur.
* V. l'Hift.
del'Ac.1729.
Por.
2320 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
poffibles d'une Rofette propofée. Pour n'être jamais arrêté,
il faudroit avoir encore le moyen de trouver toutes les
Rofettes poffibles qui peuvent produire la figure que on
peut tracer ; car alors parmi toutes ces Rofettes on feroit
en état de choifir la plus convenable pour 1a facilité de
Vexecution. J’avois entendu parler d’une Machine que fon
Inventeur * tenoit fort fecrette, & qui fervoit, difoit-on,
à l'un & à l'autre de ces deux ufages ; premiérement, une
Rofette étant donnée, à connoîïtre toutes les figures qu’elle
peut décrire ; fecondement , un contour étant donné, à
trouver toutes les Rofettes qui peuvent fervir à tracer ce
contour. J'ai cherché quellé pouvoit être la Machine qui
produifoit ces deux effets, en voici une que j'ai imaginée.
M. du Fay, par qui j'ai été invité & encouragé à faire
cette recherche, a aufi travaillé à deviner ou à remplacer
la Machine myftérieufe. Je compte que le plus grand mérité
de celles que j'ai à propoler eft le rapport qu'elles ont avec
celle de M. du Fay, qui depuis a abandonné ce travail. C’eft
en 1729 que je préfentai à f Académie, dont je n'avois pas
encore l'honneur d'être Membre, mon premier eflai fur cette
matiére * fur laquelle j'ai fait depuis de nouvelles réfléxions.
J'ai attendu, pour en parler dans nos Mémoires, que je pufle
y joindre l'examen géométrique de la nature des Courbes
du Tour, qui n'étoit alors qu'ébauché. C’eft le fujet d’un
fecond Mémoire, qu’on trouvera dans ce même volume.
Par la méchanique du Tour figuré que nous venons
d'expliquer, on conçoit que l'arbre du Tour a deux mou-
vements : premiérement , il fermeut circulairement fur fon
axe, c'eft ce qu'il a de commun avec l'arbre du Tour fimple;
& de plus il fe meut horifontalement en ligne droite pour
s'approcher ou s'éloigner de la Touche, felon que l’exigent
les éminences ou les creux du contour de la Rofette, & c'eft
en quoi le Tour fimple differe du Tour figuré.
Si l'arbre du Tour figuré n’avoit de mouvement que fur
fon axe, & qu'au défaut du mouvement horifontal de l'arbre
qui {ert à l'approcher & à l'éloigner de la Touche, la Touche
DÉ ES SV CNE E NE QUE 224
ÿ fuppleit en s’'approchant ou s’éloignant elle-même du
centre de la Rofette pour fuivre les inégalités de fon contour,
il eft aifé de voir que l'effet feroit abfolument le même,
puilqu'il importe peu que l'arbre s'approche de a Touche,
ou que la Touche s'approche de l'arbre, pourvû que dans
le cas de la Touche mobile, la pointe de l'outil ait le même
mouvement que la Touche, & s'approche ou s'éloigne du
centre de l'ouvrage à mefure que la T'ouche s'approcher: ou
s'éloignera du centre de la Rofette, & c’eft précifément l'effet
de la Machine dont voici la conftruction.
: Un mouvement de Pendule à reflort caché par les platines
AAA, BBBB, & dont le rouage fe voit marqué Fo. x.
fait lui feul toutes les opérations, après avoir préparé deffus
les piéces convenables ; € /Fig. 1.) eft l'arbre du remontoir,
D eft l'encliquetage, Æ F° eft une détente qui retient Le
volant G. Cette détente étant levée, laïfle le volant libre,
& par conféquent le rouage qui tourne de toute la force
dont le reflort eft capable. L'arbre du pignon que le barillet
fait mouvoir, eft prolongé de part & d'autre au dehors des
platines ; l'extrémité Z d'un côté / Fig.1.) porte une piéce
platte Æ qui repréfente la Rofette du T'our qu'on fuppofe ici
quarrée , & de l'autre côté /F3g. 1.) le tambour ZL ; l'un &
l'autre étant fixes à cet arbre, font néceffairement entraînés
par les révolutions du pignon. La petite piéce A7 /Fig. r. )
qui porte fur les bords de la Rofette, eft ce qui tient ici
lieu de fa touche du Tour, la partie qui frotte eft taillée en
couteau. Cette touche qui tient à fa piéce ON fe peut ôter
quand l'on veut, pour fubftituer à fa place une autre touche
platte que l'on fixe fur le quarré #, & dont on parlera dans
la fuite. La piéce ON eft attachée par deux vis fur une fe-
conde piéce pareille unie à deux montants PQ, RS, qui
gliflent librement dans les quatre tenons Z. Ces piéces &
ces montants fervent à contenir & à empêcher de balotter
ka touche 77 qui haufle & baïfle alternativement fuivant que
lRofette A, tournant fur fon centre, préfente fes angles ou
fes pans , ileft clair que les angles de la Rofette foüleveront.
Ee iij
Planche III,
Fig. x.
Planche I,
Fig. 1.
Planche I.
Fig. I.
Planche II,
Fig. VI:
Fig. VIIL.
222 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
la touche 47, en la repouflant en haut avec la piéce ON
& les montants PQ, RS. Le tout tend à defcendre non
feulement par fon propre poids, mais encore par le moyen
d'un petit barillet 7’ adapté fur la platine derriére la Rofette,
& d'un fil roulé fur le barillet & attaché à la petite fiche 9,
en forte que la touche porte toùjours fur les bords de la
Rofette dans toutes {es fituations. À cette même piéce ON
eft encore fixée une efpece de broche ou tringle platte YF
qui traverfe le mouvement, & qui monte & defcend avec
1a touche dans les deux rainures L L des deux platines. Cette
tringle a fon autre extrémité coudée & marquée par les
lettres VXF (Fig. vi.). C'eft à cette extrémité que lon
ajufte le crayon 4, b, c, d, qui repréfente l'outil, & qui
trace la figure fur le plan Z L. Le crayon peut fé placer
dans différents points, à droite, à gauche, haut & bas, par
le moyen des rainures faites dans le milieu des bras a, b, f, c,
qui glifient l'un fur l'autre, & qu'on arrête fixement où lon
veut avec la vis e,
Fg eft un crochet fous lequel eft un reffort r qui repoufle
toûjours le crochet en avant ; ce crochet eft mobile fur fon
point d'appui f, à peu-près aux trois quarts de fa longueur ;
fon autre bout caché derriére le tambour ZL porte une
dent qui traverfe la platine, & arrête une rouë qui tient à
l'arbre du pignon pour le fixer quand il a fait une révolution
entiére, fans quoi le même contour fe répéteroit à chaque
révolution du tambour, & le crayon repaferoit fans cefle
fur le mème trait. Lorfqu'on voudra faire agir la Machine,
on obfervera de dégager la dent, en pefant fur le bout g,
après qu’on aura détourné la détente Æ qui eft à la platine
oppofée (Fig. 1.) & qui retient le volant G.
Le tambour ZL eft mobile fur une plaque ronde 7K
fermement attachée fur la platine par deux vis, Fune en p,
& l'autre du côté oppolé vers f. Le bord de cette plaque
repréfenté à part (Fig. 111.) & plus diftinétement, eft divilé
en parties égales, en faifant répondre l’alhidade A1 à chaque
tour du tambour fur différentes divifions également diftantes..
*, Prat des ni
DES SCIENCES. 22
Le même deflein fe répéte en fe croifant fous tel angle
qu'on veut, ce qui forme des traits entrelacés & fimmétri-
ques qui peuvent faire un effet agréable à la vüé.
La feconde Planche contient le développement des-parties
de la Machine,
ABC (Fig, vri.) eft le porte-crayon avec fes coulifles
& fa douille À C dans laquelle entre la tringle ou broche
platte Y XV, qui d’un côté tient la touche 47 qui lui eft
attachée par des vis ON, & de l'autre le crayon À. Elle
porte auffr un bout de tringle quarrée Æ dont l'ufage fera
expliqué.
KH (Fig. vrrr.) eft le cercle dont on a parlé, divifé &
fixé fur la platine. C'eft fur ce cercle que tourne le tam-
bour /L, dans l’épaiffeur duquel font plufeurs cartons ou
papiers fur lefquels da figure fe trace. On enleve ces papiers
lun après l’autre avec la pointe d'une épingle, chaque fois
qu'on veut changer de deflein , ou répéter le même fur un
autre papier. On taille tous ces papiers à la fois avec un
emporte-piéce.
M eft l'alhidade mobile fur les divifrons du cercle XH.
NN eft le canon qui tourne fur l'effieu du cercle mobile,
OP (Fig. 1x.) eft un cercle de cuivre plein, coupé dans
fon milieu par deux rainures difpofées à angle droit, & fur
lequel eft une petite piéce QR mobile au point À, qui
s'ajufte le long des côtés des rainures À, X, R, Z, pour tirer
des lignes qui fe croifent à angle droit dans le centre du
papier fur lequel on veut tracer une figure. Ces deux lignes,
lune verticale, Fautre horifontale, fervent à prendre les
dimenfions pour placer lé crayon dans les difpofitions conve-
nablés ; pour cet effet, on fait entrer la douille Zc, adhérente
au cercle de cuivre, à la place de la pareille piéce ZC du
porte-crayon, fur la piéce YX difpofée pour la recevoir.
S TV (Fig. r1.) eft un aflemblage de trois piéces qu’on
adapte fur le quarré X de la Fig. r. On fait entrer ce quarré
dans l'ouverture £, dans laquelle on l’arrète par le moyen
_de la vis O.
Planche II.
Fig. VIL.
Fig. VIIL,
Fig. 1x.
Planche EL
Fig, 11
Planche I.
Fig. 11.
Planche II,
Fig. VII.
224 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLE
Si l'on veut voir les effets de a touche platte TS, on
détache le côté S Y & Farc F7; en lâchant l’écrou Z, &
on fait porter la plaque TS à plat fur les côtés de la Rofette;
fi on veut une touche platte inclinée, on remet en place
Taflemblage 7Y, VS, au moyen de la vis 7, & des deux
pointes qui entrent dans les deux tous #, fon incline plus
ou moins VS fur ZS, à l’aide de la vis 7, mobile dans la
rainure de l'arc V7:
On voit que les mouvements de cette Machine font abfo-
Jument équivalents à ceux du Tour. L'arbre du Tour qui
porte la Rofette & l'ouvrage, tourne fur lui-même, ce que
fait dans la Machine l'eflieu qui porte la plaque & le tam-
bour. Toute la différence confifte en ce que dans le Tour
Yarbre a un fecond mouvement parallelement à lui-même,
qui lui permet de s'approcher & de s'éloigner de l'outil &
de la touche, l'un & l'autre fixes, au lieu que dans la Ma-
chine, c’eft la tringle, portant à fes deux bouts la touche
& le crayon, qui fe meut parallelement à elle-même & à
leffieu qui repréfente arbre, & qui porte la plaque & le
tambour. Il a été plus fimple & plus commode, dans une
machine d’Horlogerie, de laïfler fixe le pivot qui porte les
rouës, & de tranfporter dans la tringle le mouvement de
parallelifme, du refte il eft clair que cela revient au même.
I faut encore obferver que le mouvement de parallelifme
fe fait d'ordinaire horifontalement fur le Tour, au lieu qu'il
a paru plus commode de l'executer verticalement dans la
Machine, ce qui ne change rien à l'effet.
On à fait faire (Fig. v11.) un coude en X à la tringle
mobile pour faire approcher plus près. du centre le bout 47
qui porte fur la Rolette, fans être obligé de rendre les Ro-
{ettes plus grandes. Ce coude n’empêche pas que la tringle
ne fe meuve parallelement, & il n'apporte aucun change-
ment efleñtiel à la conftruction de la Machine, il en réfulte
feulement une plus grande commodité en plufieurs cas.
On fe fervira indifféremment dans ce Mémoire du mot
d'outil ou de crayon, puifque le crayon repréfente ici l'outil,
du
D: BIS VSNCAIAENR RES, 22%
‘du Tour, par la même raifon on entendra fa même chofe
* par l'extrémité de la tringle mobile que par le terme de souche.
Le premier ufage de cette Machine, & celui qui fe pré-
fente d'abord, eft de trouver par fon moyen quelles font
les différentes figures qu'on peut faire tracer à l'outil avec
la même Rofette, ce qui eft très-facile à executer, dès qu’on
a en cuivre ou en fer un modele de la Rofette qu'on veut
eflayer ; car ayant placé & aflujetti ce modele, ou cette
laque de cuivre, comme nous avons dit, à une des extré-
mités / (Fig. 1.) de l'arbre du grand pignon, le crayon ajufté
à l'autre extrémité a / Fig. v'I.) qui par le moyen des rainures
ae, fc, peut fe placer dans tous les points différents du
papier, tracera dans toutes les différentes pofitions qu'il peut
recevoir, tous les defleins poflibles que peut fournir la Ro-
fette donnée, & cela dans la derniére précifion, fi la Machine
æft bien faite.
On eft furpris de l'extrême différence qui fe trouve entre
certaines figures produites par la même Rofette ; peut-être
“auffi paroîtra-t-il fingulier que ce foient d'ordinaire les Ro-
ettes les plus fimples qui donnent les figures les plus bizarres.
TI eft certain, du moins, que les Rofettes qui ont un grand
nombre de côtés, ne produifent dans aucun cas des defieins
auffi différents d’elles-mêmes, qu'une Rofette fimplement
triangulaire ou quarrée, & cela doit être ainfi.
Pour en rendre la raifon plus fenfible, & en même temps
pour donner quelqu'idée de ce premier ufage de la Machine,
nous allons.examiner fes effets dans quelques cas particuliers,
réfultants des différentes pofitions du crayon ; & afin de
rendre la chofe plus fimple, nous prendrons d’abord pour
exemple la Rofette quarrée , telle que nous Favons propoée
dans la defcription de Ia Machine.
. Dans toutes les figures fuivantes, on fuppofe les plans
paralleles de la Rofette & du deffein projettés l'un fur l'autre,
de centre de la Rofette & celui de la figure feront par con-
féquent le même point C /Fig. r.); le trait ponétué mar-
quera le contour de la Rofette, l'autre trait marquera K
Mem, 1734 Î ë
Planche III.
Fig. 1.
Planchelll,
Fig: 14
226 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Rovare
deflein qui réfulte de cette pofition , 7 le point de hRofette
où porte la touche, & O le point du papier où le crayon
répond au même inftant.
Si on place le crayon © au deflus du centre C, & à Ja
même diftance de l'axe que la touche 7, c'eft-à-dire, à l’en-
: droit même où feroit l'autre bout de la tringle , fr elle n'étoit
pas coudée, il eft clair qu’il tracera alors une figure égale &
femblable à la Rofette, puifque la tringle fe meut parallele-
ment à elle-même, & qu'ainfi fes deux extrémités doivent
faire le même chemin ; par conféquent l'une des deux ne
quittant jamais le contour de la Rofette, l'autre doit tracer
fur le plan qu’elle rencontre une figure égale & femblable à
la Rofette. Ici le defiein & le contour de la Rofette étant
femblables, le trait plein & le trait ponctué fe confondent
en un feul.
Ainfi, par exemple, dans Îa pofition du crayon que nous
venons d'examiner, une Rofette quarrée fera tracer au crayon
un trait quarré de même grandeur, C’eft-là ce cas unique &
le plus fimple de tous dont on a déja parlé, où la figure
tracée eft toûjours égale & femblable au contour de la Ro-
fette ; mais pour peu qu'on écarte le crayon de ce point, &
qu'on le place ailleurs, la figure tracée ne fera plus un quarré,
& chaque pofition du crayon caufera de grandes variations
dans la figure.
On peut diftinguer toutes les diverfes pofitions du crayon
en deux efpeces différentes. L'une, lorfque le crayon eft
placé dans alignement de la rainure où gjlifle la tringle
mobile, c’eft-à-dire, lorfque la touche 7, le centre C & le
crayon © font däns la même ligne, qui eft pofée verticale-
ment dans la Machine. L'autre, lorfque le crayon © eft hors
de cet alignement. J'appelle les premiéres pofitions directes, &
les derniéres pofitions obliques. Commençons par la premiére
efpece.
Quoiqu'il y ait autant de pofitions directes du crayon qu’il
y a de points dans l'alignement dont nous venons de parler,
on peut cependant confidérer fept pofitions qui renferment
DIET SN 28 108€ NT xt oi 711 sé
toutes les autres, & qui produifent les effets les plus diffé:
rents. La premiére eft celle dont le crayon copie exaétenent
le contour de la Rofette; c'eft celle dont nous venons de
parler. |
Si on éloigne le crayon du centre en droite ligne au de-à
du point où il étoit fixé dans la pofition précédente, mais
toûjours en de-çà du centre, if tracera une figure plus grande
que la Rofette, dont les quatre côtés feront bombés ou fége-
rement cintrés dans leur milieu, la convexité en dehors de
l figure. C’eft l'effet de la feconde pofition.
La troifiéme eft celle où le crayon fera plus près du centre
que la touche, mais de telle forte qu'en defcendant à fon
plus bas, le crayon ne puifle qu'approcher du centre fans ÿ
atteindre. En ce cas la figure tracée fera, à la vérité, qua-
drangulaire, mais fes côtés feront des lignes concaves par
dehors qui s’approcheront du centre dans leur milieu, plus
le crayon fera pofé près du centre, pourvû que ce foit toû-
jours en de-çà, en forte que la concavité deviendra un angle
rentrant qui approchera à la fin de angle droit.
: Quatriéme pofition. Si le crayon eft dans fa même ligne
au de-là du centre, maïs à telle diflance qu'en montant à
fon plus haut point, il ne puiffe qu’approcher du centre fans
pouvoir y atteindre, il tracera encore une figure quadran-
gulaire, mais dont les angles feront rentrants, & les côtés,
quatre arcs convexes par dehors, & dont la convéxité fera
d'autant plus grande, que le crayon aura été placé plus près
du centre, maïs toûjours au de-là. I faut remarquer que ce
font ici les angles de la Rofette qui font les angles rentrants
de la figure, au lieu que dans la précédente ils font produits
le milieu des côtés de Ia Rofette.
Entre les deux pofitions précédentes du crayon, il y en'a
une moyenne, qui eft de le placer fur le centre même du
tambour , mais il peut y être placé dans trois cas différents,
car comme les angles & les côtés de la Rofette font hauflér
& baïfler alternativement le crayon porté par la tringle, le
centre peut être rencontré par lé cyon, _. Quand le
1]
Planche IL
Fig. 2.
Fig. 36 !
Fig. 4e
Planche 1 V.
Fig. $-
Fig. 6.
228 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
crayon eft au point le plus bas où il puifle defcendre, &
c’eft l'inftant où la touche eft fur le milieu du côté de la
Rolette. 2.° Lorfque le crayon eft au point le plus haut où
il puiffe monter, ce qui arrive Îorfque la touche porte fur
l'angle de la Rofette. Enfin, & c'eft le troifiéme cas, le
crayon peut rencontrer le centre dans fa route , je veux dire
en-paflant du point le plus haut où il monte, au plus bas
où il defcende, la touche portant entre l'angle & le milieu
du côté. Ces trois pofitions donnent encore trois figures
différentes.
Dans le premier cas, les quatre côtés de la figure qui
n'étoient que concaves , quand le crayon ne defcendoit pas
jufqu'au centre du deflein, fe réuniffent & fe confondent
par leurs milieux en un feul point dans le centre, alors la
figure tracée reffemblera à quatre feuilles oblongues difpofées
en fautoir : c'eft l'effet de la cinquiéme pofition directe du
crayon.
Dans le fecond cas, ce ne feront pas les milieux des côtés,
mais les quatre angles rentrants de la Figure 4, qui fe réuni-
ront au centre dans un feul point ; les quatre côtés feront
parvenus à leur plus grande convexité, & la figure refiem-
blera à un trefle à quatre feuilles difpofées en croix. Tel eft
l'eftet de la fixiéme pofition directe.
Enfin, & c'eft la derniére des fept pofitions direéles, fi
le crayon ‘ne rencontre le centre ni au plus haut point, ni
au plus bas de la ligne droite qu'il parcourt, mais en paffant
de l'un à l’autre, comme alors il monte au deffus du centre,
& qu'il defcend au deflous, il raffemble les deux cas pré-
cédents, aufli décrit-il les deux figures précédentes qui fe
croifent, de telle forte que les quatre feuilles oblongues en
fautoir de la premiére fe trouvent placées dans les intervalles
des quatre feuilles en croix du trefle de la feconde, & que
le crayon trace les deux fortes de feuilles alternativement
une à une jufqu'à ce que toute la figure compofée des huit
feuilles foit entiérement tracée. :
Si le crayon fait plus de chemin au deflous du centre
DÉES : SCALE INT CE 229:
qu'au deffus, les feuilles du trefle feront plus hautes que les
feuilles oblongues, & s’il en fait plus au deffus qu'au deflous,
les feuilles du trefle feront les plus petites. |
Enfin, fi le crayon rencontre le centre précifément à
moitié chemin, les deux efpeces de feuilles feront de même
hauteur ; mais foit qu'il rencontre le centre à moitié chemin
” ou non, toutes les fois que la figure aura huit feuilles, les
hauteurs des deux différentes feuilles, prifes enfemble, feront
égales à la hauteur que lune ou l'autre feuille auroit euë
féparément dans les deux pofitions précédentes où la figure
n'avoit que quatre feuilles, au lieu de huit,
Ce font-là les principales pofitions du crayon qui renfer-
ment toutes celles que j'ai nommées directes , c’eft-à-dire,
toutes celles où le crayon eft placé dans l'alignement de la
rainure où glifle la tringle, foit en de-cà, foit au delà du
centre. Il nous refle à examiner les pofitions obliques du
crayon, qui font celles où il eft hors de cet alignement, foit
à droite, foit à gauche, en de-çà, en de-à, ou au niveau
du centre; mais pour défigner exaétement ces fituations du,
crayon, il eft à propos de définir quelques termes.
Il eft indifférent que la rainure où gliffe la tringle mo-
bile, ait une direction plûtôt qu'une autre, il fuffit que fon
alignement tende au centre ; mais dans la Machine, telle
qu'elle eft conftruite, cette rainure eff verticale, ainfi l’aligne-
ment de la rainure ou le diametre vertical feront deux ter-
mes finonimes dans ce Mémoire’; j'appellerai la ligne qui
coupe à angles droits cette perpendiculaire, en paffant par
le centre. du tambour, le diametre horifontal ou le niveau du
centre. C'eft par rapport à ces deux lignes feulement que l'on
peut défigner les pofitions obliques du crayon dans lefquelles
le crayon ne fe meut plus dans le diametre vertical comme
dans les pofitions directes, mais parallelement au diametre
vertical, ce qui fait qu'il ne rencontre plus jamais le centre,
mais feulement le niveau du centre, ou le diametre horifontal.
La plüpart des nouvelles figures que donnent les pofitions
obliques du crayon auront quelque rapport aux précédentes,
ii
Planche IV.
Fig. 8.
Fig. 9°
230 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
mais elles auront une infléxion de côté ou d'autre, felon
que le crayon fera à droite ou à gauche du diametre vertical.
Par exemple,
Si le crayon eft placé hors du diametre vertical, en forte
qu'il ne puifle pas defcendre jufqu'au diametre horifontal,
les côtés de la figure ne feront plus concaves dans le milieu
des deux angles, comme Figure 3, mais leur concavité fera
plus près de lun des deux, fuivant le différent côté où fera
placé le crayon.
Si le crayon eft fort près du centre, les quatre côtés de
la figure reflembleront à des dents de rochet , & tout le refte
étant égal, le biais fera d'autant plus fenfible que le crayon
fera plus écarté du diametre vertical, & l'angle d’autant plus
aigu que le crayon fera plus voifin du diametre horifontal,
ce qui eft commun à toutes les figures obliques.
Les trois contours de la Figure 8& répondent aux différentes
diflances du crayon au centre toûjours dans ce même cas.
Cette figure eft l'effet de la premiére pofition oblique du
crayon, & répond à la troifiéme pofition direéte. Les figures
qui réfultent des deux autres pofitions obliques qui répondent
à la premiére & feconde pofition directe, ne différent pas
aflés du trait extérieur de cette derniére figure pour en faire
une particuliére.
Si le crayon eft placé au de-à du centre hors de laligne-
ment de la rainure, mais de telle forte qu'il ne puiffe jamais
remonter au niveau du centre, c’eft-à-dire, dans les mêmes
circonftances où il traçoit dans la pofition directe la figure
réguliére {à quatre côtés convexes /Fig. 4. ); la figure fera
compofée de quatre goderons d'autant plus inclinés que le
crayon fera plus écarté du diametre vertical, & d’autant plus
fenfibles qu'il fera plus près du diametre horifontal. En appro-
chant le crayon du centre, les goderons fe fermeront, &
deviendront des boucles.
Nous n'entrerons pas dans le même détail à l'égard des
autres pofitions obliques ; les figures où feront marquées dans
chaque cas les pofitions refpectives de la touche ou de l'outil,
fuffront pour voir l'effet de chaque pofition,
Des Set EN ONE 5) 23%
»« Les pofitions obliques /Æ3g. 1 o. &" r 1.) qui répondent Planche1V.
à la cinquiéme & fixiéme pofition directe font peu différentes Fig: 10.
des deux précédentes huit & neuf ; elles ont feulement leurs SR
angles & leurs goderons plus aigus & plus marqués, par la
raifon déja alléguée, que dans celles-ci le crayon eft plus près
du diametré horifontal, puifqu'il l'atteint dans l'une & dans
Y'autre. d
La cinquiéme & derniére pofition oblique ef celle où le
crayon fait une partie de fon chemin au deflus & l'autre au
deffous du diametre horifontal. Elle répond à la feptiéme
pofition directe. Au lieu de la figure à huit feuilles de la
premiére, celle-ci produit une figure à huit boucles, de hau-
teur égale, entrelacées deux à deux, qui forment quatre
nœuds ou lacis, & fait reflembler la figure entiére à cet
ornement de blafon qu'on nomme cordeliére. On a remarqué
dans la pofition directe, correfpondante à celle-ci, que les
deux efpeces de feuilles dont elle eft compofée, n'étoient
égales que lorfquêle crayon faifoit également de chemin au
deffus & au deffous du centre; cette analogie fe conferve
dans la poñition oblique correfpondante, & la figure dont on
vient de parler n’eft tracée que lorfque le crayon fait égale-
ment de chemin au deflus & au deflous du diametre hori-
fontal, autrement les proportions de la figure changent ; &
fi le crayon fait plus de chemin au deflus qu’au deflous, on
aura lun des traits de la Figure 1 3, felon que le crayon, à Fis.13.
diftance égale du diametre horifontal, fera plus où moins
éloigné du diametre vertical : fi au contraire le crayon fait
plus de chemin au deffous qu'au deffus de l’horifontal, lon planche V.
aura Fun des traits de la Figure 1 4. Fig. 144
Ces trois derniéres figures ne font bien fenfibles que lorf.
que le crayon eft fort près du diametre vertical ; plus on
Yen éloigne, quoiqu'on conferve la même diftance au dia-
metre horifontal, plus les nœuds fe rappetifient & fe con-
fondent avec le contour de la figure, en forte qu'à une
certaine diflance du diametre vertical, par exemple, à la
longueur du rayon de la Rofette, les trois derniéres pofitions
Fig. 12,
Planche V.
Fig. 15°
232 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
du crayon , au lieu de la figure précédente, en donnent une
que l'œil ne diflingueroit pas du cercle, tant elle en differe
eu fenfiblement. Nous en verrons bien-tôt {a raifon.
Voilà quelles font les principales figures que peut donner
la Rofette quarrée; je dis les principales, parce que je n'ai
parcouru que les pofitions du crayon les plus différentes
entr'elles, & qu'entre les deux plus voifines de celles dont
on a parlé, il y en a autant que de points où on peut
placer Îe crayon ; mais celles qui viennent d’être détaillées
fufhifent pour donner une idée des autres qui font toutes
comprifes dans quelques-uns des cas que nous avons exami-
nés, en forte que quelque figure qu'on prenne qui faffe l'effet
d'une Rofette quarrée, elle fera fmblable où à peu-près
femblable à quelqu’une des précédentes, ou ne s’en éloignera
que pour reflembler mieux à quelqu'autre de celles dont nous
avons donné pareïllement la defcription.
La diverfité & 1a bizarrerie apparente de toutes ces figures
n'eft caufée que par la différente combinäïfon des deux mou-
vements, droit & circulaire, de Ja Machine, qu'il faut avoir
bien préfents pour en démèëler les effets compliqués. Le
crayon porté à l'extrémité de la tringle mobile n'a que fon
mouvement en ligne droite, & ce mouvement fe fait, ou
dans l'alignement de a rainure, c'efl-à-dire, dans le diametre
vertical, ou hors de cette ligne, mais parallelement à elle:
dans lun ou dans l'autre cas le crayon ne fait que haufer
& baïfler alternativement, felon que les angles de la Rofette
foûlevent la tringle qui porte le crayon, ou que le reflort
repoufle la tringle fur les pans ou dans les creux de la Rofette.
Par exemple, dans le cas de la Rofette quarrée, le crayon
” qui s'éleve chaque fois qu'un angle pañle, & qui fe baifle
enfuite, monte quatre fois, & defcend autant de fois alter-
nativement pendant une révolution de la Rofette, en parcou-
rant à chaque fois un chemin égal en ligne droite; & comme
les deux extrémités de cette ligne font d'une le plus haut
point, & l’autre le plus bas où defcende le crayon, & qu'il
w'eft à fon plus haut point que lorfque la touche porte fur
Yangle,
7.
J DES SCIENCES. 233
Fangle, & à fon plus bas que lorfque la touche porte fur fe
milieu du côté, il s'enfuit que la mefure de cette ligne eft
la différence du plus grand au plus petit rayon de la Rofette,
c'eftà-dire, fi elle eft quarrée, l'excès de {a demi-diagonale
fur la demi-hauteur. Si le tambour étoit immobile, le crayon
allant & revenant fur fes pas, ne traceroit jamais que cette
petite ligne droite : fi le crayon au contraire étoit immobile,
& que le tambour feulement fe mût fur fon centre, le crayon
ne traceroit jamais qu'un cercle ; mais comme pendant que
le crayon f meut, le tambour tourne, il s'enfuit que le
crayon montant ou defcendant en ligne droite, trace fur le
tambour, mû circulairement, une ligne ordinairement courbe,
compofée de ces deux mouvements, & c’eft cette courbe
répétée autant de fois que la Rofette a de côtés, qui compofe
la figure tracée ; je dis une ligne ordinairement courbe, &
on verra Îa raifon de cette reftriction. HE
I eft aifé d'appliquer à cette méchanique le principe
ordinaire qui fert à expliquer les mouvements compolés;
en examinant quelles font à chaque inftant les deux déter-
minations que reçoit le crayon; car quoiqu'il n'ait réelle-
ment de mouvement que celui qu'il reçoit de la tringle en
ligne droite, le mouvement circulaire du'tambour fait, eu
égard à la ligne tracée, Ie même effet que fi le crayon; ‘outre
fon mouvement direct; étoit lui-même emporté circulaire-
ment autour du tambour du fens oppofé à celui dont le
tambour fe meut ;4lans ce cas on conçoit qu'à chaque inftant
le crayon recevroit deux déterminations, fune füivant une
portion infiniment petite de la circonférence du cercle où
il fe trouve alors, & qu’il décriroit fr fon mouvement: en
ligne droite étoit fufpendu, & ce petit côté peut être con
fidéré comme une ligne droite; l'autre fuivant une partie
infmiment petite de la ligne droite, fuivant laquelle monte
ou il defcend, il décriroit donc à chaque inftant, pour fatis-
faire en même temps à ces deux impreffions, la diagonale
d'un: petit: parallelogramme dont ces deux’ petités dignes
feroient les côtés, mais les côtés infiniment petits d'un cercle:
Mem. 1734 . Gg
234 MEMOIRES DE L'ACADEMI1E- RoyArE
changent à chaque inftant de direction. Donc quoique les
petites portions de là ligne droite, le long de laquelle le
crayon monte & defcend, ayent la même direction, les
diagonales réfultantes de chacune d'elles, & de chaque petit
côté correfpondant du cercle ne doivent pas moins changer
de direction à.chaque inflant; & par conféquent leur fomme
doit compofer une courbe, à moins que la combinaifon des
deux mouvements, droit & circulaire, ne foit telle que les
eôtés des parallelogrammes compofés des portions infimiment
petites de la ligne droite parcouruë par le crayon, & des
portions infinifnent petites de la circonférence où: il pañfe
fucceflivement, né fuivent entre eux une même proportion
d’accroiflement ou de diminution; auquel cas toutes ces
petites diagonales bout à bout l’une de l’autre, compoferont
une ligne droite. C’eft ce qui arrive dans la -pofition unique
qui fait copier exactement au crayon le contour de la Rofette,
& par conféquent décrire des lignes droites quand la Rofette
eft à pans droits; d'où ilréfulte un paradoxe affés fingulier,
qui eft qu'un corps mû.en ligne droite, & dont la trace fur
un plan immobile feroit néceflairement une ligne droite,
peut, fans changer de vitefle ni de direction, tracer aufii
une droite für un plan mü ciroulairement.
Un peu de méditation fur la pofition refpeétive du crayon
& de la touche, & fur la combinaifon des deux mouvements,
dioit & circulaire, relativement à cette pofition, éclaircira
toutes les difficultés qui peuvent fe préfenter à l'infpection
des figures, & de feur extrême différance d'avec les Rofettes.
Etil n'y aura aucun point de la courbe ou de la figure tracée,
qu'on ne puifle afligner, en confidérant quelle portion de
fon cercle le tambour a décrite pendant que le crayon eft
monté ou defcendu en ligne droite d’une certaine-quantité,
Nous n'éntrons pas dans le détail qui feroit infini, nous
nous contenterons d'indiquer une caufe générale qui peut
fervir à rendre raïfon de ce qu'on a pü remarquer de plus
bizarre & de plus fingulier dans les figures que nous:avons
examinées.
Le
DES SCIENCES. 235$
+ Soit que le crayon foit près ou loin du centre, 1e tambour
“acheve toüjours fa révolution dans le même temps, par
conféquent le grand cercle que traceroit le crayon, s'il étoit
placé loin du centre, & que la machine n’eût que le mou-
vement circulaire, s’'acheveroit dans le même temps que le
petit cercle que traceroit le crayon dans la même fuppoñition,
S'il étoit plus près du centre; & cela quelque différence qu'il
puifé y avoir de grandeur entre les rayons de ces deux cercles,
D'un autre côté, la ligne droite que parcourt le ciayon,
foit en montant, foit en defcendant, ne change point par
la diftance du crayon au centre; la courbe tracée ft donc
le réfültat de deux mouvements, dont Fun, sil étoit feul,
feroit parcourir au crayon une ligne droite, d'une grandeur
conftante, & autre pendant le même temps, s'il étoit {eul
auffi, un arc deicercle toüjours du même nombre de degrés
à la vérité, mais dont la longueur feroit tantôt plus grande,
tantôt plus petite felon la diflance du’crayon au centre, on
voit bien ‘que a figure de (la courbe ‘qui {era tracée dans
chacune dé ces deux différentes combinaïons doit.être fort
différente. ‘ NE SEE DIEPPE
En effet, quand lecrayon-eft loin du centre, la longueur
de Tarc que le mouvement circulaire feul feroit décrire au
carton, emporté de beaucoup fur la longueur ide la petite
ligne droite qu'ilidécrit par fon mouvement propre ; lemou-
vement circulaire domine alors fur le mouvement direct, &
da courbe décrite approche bien plus d’un arc de cercle. Au
contraire quand le crayon eft fort voifim du centre, la petite
ligne droite que fon mouvement lui faifoit décrire en mon-
tant ou-en défcendant, toute courte qu’elle eff, devient plus
Tongue que l'arc de cercle que le feuk mouvement. circulaire
du carton lui feroit tracer, le mouvement direct l'emporte
alors fur le mouvement circulaire, & la courbe décrite eft
d'autant plus différente d'un arc de cercle. y
* Orh figure tracée par le crayon n’eft, comme-onl'adit,
autre chofe que la même courbe répétée autant defois que
la Rofette a de côtés; par:conféquent plus ladigne-droite que
D Re UE
* Voy. le Jecond
Memoire fur le
Tour.
236 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
parcourt le crayon par fon mouvement propre fera petite
par comparaifon à l'arc de cercle que le carton parcourt dans
le mème temps, plus la figure tracée ou la portion corref-
pondante de la figure tracée approchera du cercle,
Qu'on applique ce raifonnement aux divers cas qu'on.a
précédemment examinés, on reconnoitra clairement que ce
qu'on a pü remarquer de bizarre & de fingulier dans les effets
d'une même Rofette, en eft une conféquence néceffaire: Par
exemple, que c'eft ce qui fait qu'en général les pofitions du
crayon voifines du centre, donnent les plus grandes variétés,.
& que pañlé une certaine diftance du centre, un. peu plus
ou-un peu moins d'éloignement ne change pas beaucoup la
figure. On ne fera d'application particuliére de ce principe
qu'au cas de la Figure 1 $, où l'on a vû que le crayon guidé
par une Rofette quarrée traçoit un cercle ou plûtôt une figure
qui ne differe pas fenfiblement du cercle,
La premiére fois que je rencontrai cette figure, j'avois
placé mon crayon au hazard, j'avouë que fur le rapport de
mes yeux, je ne doutai pas dans le premier moment que la
figure tracée ne fût un cercle, & je ne voyois aucun inconvé-
mient à le fuppofer. À la vérité, il me paroïfloit fmgulier
qu'une Rofette quarrée pût faire décrire à l'outil une figure
circulaire, mais je n'en voyois pas encore limpofñbilité, .
Cependant la conféquence devenoit délicate, je connoif
fois en général la nature & les propriétés de la courbe du
Tour qui, dans le cas préfent, me paroiffoit à la vüë un cercle,
& je {çavois que cette courbe étoit quarrable toutes les fois
que l’on pouvoit quarrer fa bafe*, qui dans cet exemple étoit
une ligne droite; donc fi la courbe étoit réellement un cercle
on avoit fa quadrature. Cette conféquence très-évidente me
fit défier de mes yeux, & un peu de réfléxion. fur les deux
mouvements qui produifent cette courbe, m'eut bientôt
convaincu qu'elle n'étoit rien moins qu'un cercle.
En effet, un cercle & une ligne droite, & même plufieurs
cercles & une ligne droite, de quelque façon que le tout
foit combiné, ne peuvent jamais produire un cercle. Si le
"ME
Pr ENS SLEPÉ EN Ge & 237
crayon étoit immobile, nous l'avons déja remarqué, il dé-
criroit un cercle {ur le carton tournant; mais dès-Ià que le
crayon a un mouvement propre quel qu'il puifle être, à
moins que ce ne fût un mouvement circulaire qui lui fit
décrire la même circonférence qu'il traceroit par le. feul
mouvement du carton, il eft clair que la courbe tracée ne
peut être un cercle. L1%
Mais cette courbe peut s'éloigner ou s'approcher plus ou
moins de la figure circulaire, felon la pofition & la mefure
de la ligne droite que parcourt le crayon par fon mouvement
propre en montant & defcendant alternativement, :
Premiérement, la pofition de cette ligne contribuë beau-
coup au plus ou au moins de refiemblance que 1a figure
tracée aura avec le cercle; car fi le crayon eft placé de forte
que cette droite coupe la circonférence du cercle, que le
crayon fuppolé immobile, décrivoit fur le carton tournant,
on conçoit que la figure tracée doit être beaucoup plus
éloignée de la circulaire que fi la ligne droite, au lieu de
couper ce cercle, lui étoit feulement tangente. En effet da
tangente s'éloigne moins du contour du cercle que toutes
les fécantes poffibles, & de toutes les fécantes, c’efl la fécante
perpendiculaire ou le rayon qui eft le moins propre à fe
confondre avec la circonférence. Enfin. il n'eft pas moins
clair que plus un cercle eft grand, moindre eft fa courbüre,
& par conféquent plus fa tangente approche de fa circon-
férence. |
= C'eft en réuniflant ces circonftances, qu’on peut donner
au crayon la fituation la plus avantageufe, pour que la figure
tracée approche du cercle le plus qu'il eft pofüble,, & ce
font celles que nous avons obfervées, en plaçant le crayon
-où nous avons dit, pour lui faire décrire une figure fenfi-
-blement ronde avec une Rofette quarrée. ALTER
Secondement, plus cette ligne droite fera petite, moins
“elle altérera la figure circulaire que traceroit le crayon, s'il
“étoit immobile, & comme elle devient plus courte à mefure
“que le nombre des côtés du polygone croit, il eff clair que
Gg ii
Planche V.
Fig. 16.
238 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
dans la fituation du crayon où le quarré même donne une
figure qui {enfiblement ne differe pas du cercle; tous les
autres polygones, hors le triangle, donneront une figure plus
approchante du cercle que le quarré, & d'autant plus qu'ils
auront plus de côtés : mais non-feulement la ligne droiteen
queftion, qui n'eft que la différence du plus grand au plus
petit rayon de la Rofette, devient plus courte à mefure que
le nombre des côtés du polygone croit, j'adjoüte qu'elle dé-
croît dans une plus grande raifon que les arcs dont les côtés
du polygone font les cordes, la démonftration en eft fort
fimple.
La différence CD du grand rayon AO au petit rayon OC
d'un polygone, eft ce qu'on appelle la Feche, je dis que les
fleches croiffent ou décroiffent dans une plus grande raifon
que leurs arcs. La fleche CD de l'arc entier AD eft, comme
on fçait, le fmus verfe de la moitié AD ou BD.
Soit l'arc AZN variable, double de A. Soit APla fleche
de Farc AN, & le finus verfe de l'arc AZ, foient fuppofés
égaux les accroiflements différentiels Pp, px de AP, Je
les nomme 4x, on fçait que les accroiflements JZR ou wr,
dy des ordonnées qui répondent à chaque 4x, vont en dimi-
nuant dans toutes les courbes concaves vérs leur axe; donc
les atcs infiniment petits ww, m1 ou ds, qui font des
hipoténufes des petits triangles différentiels, vont pareïllez
mént en diminuant; donc la fomme de ces hipoténufes,
c'eft-à-dire, le demi-arc AM augmente par des différences
décroiflantes, tandis que la fleche À P s'accroît uniformé-
ment; donc la fleche croît én plus grande raifon quees arcs.
Hne paroîtra done plus étonnant que les Rofettes les plus
fimples, donnent quelquefois les figures les plus bizarres &
les plus différentes de la Rofette qui les produit ; j'entends
par les Rofettes les plus fimples, celles qui ont le moins de
côtés, comme le triangle ou le quarré. On voït par ce que
nous venons de dire, que leurs fleches étant plus grandes
à proportion que dans les autres polygones, & par conféquent
le crayon pouvant s'approcher & s'éloigner plus du centre,
DES 28104 EN CUBES 1 239
pendant une portion égale de la révolution du tambour,
la figure tracée doit avoir fes angles ou fes goderons plus
faillants ou plus rentrants que les figures tracées parle fecours
d’autres Rofettes; & qu'en général, par la même raifon, il
doit s'y faire des combinaifons plus variées des deux mou-
vements, circulaire & direct; d'où on à fait voir que dépend
la diverfité des figures.
IL paroït d'abord extraordinaire que ces efleis finguliers
de Rofettes auffi fmples que le triangle & le quarré, ayent
jufqu'ici échappé aux Tourneurs, mais l'obfervation précé-
dente, dont il fuit que les figures produites par les autres
polygones, font plus femblables à leurs Rofettes que celles
qui ont pour Rofettes le triangle & le quarré, indique affés
la raifon qui a empêché jufqu'ici les T'ourneurs d'exécuter
fur le Tour, les contours finguliers dont nous avons parlé,
& plufieurs autres de la même efpece, quoique les Rofettes
qui les donnent ne foient pas fort recherchées.
- Les Rofettes les plus commodes dans la pratique, font
celles qui ont un plus grand nombre de côtés, les angles
en font plus obtus, & la Rofette en gliffe plus aifément fur {a
touche, au lieu que des angles fort aigus cauferoient des
fauts à larbre*. A la verité, il n’eft pas impoflible de
remédier à cet inconvénient, mais il étoit encore plus court
de n'y pas tomber. C'eft pour cette raifon. que les Rofettes
qu'on: employe dans l'ufage ordinaire, n’ont guéres moins
de-huit côtés, fur-tout quand les côtés font droits, & c’eft
encore pour cela que le plus fouvent elles en ont un bien
plus grand-nombre, & plûtôt à goderons qu'à pans droits,
telles font celles dont le P. Plumier donne des modeles dans
fon Livre. Les figures qui ont paru les phisfinguliéres parmi
celles que nous avons remarquées ; font produites «par les:
Rofettes qui ont un petit nombre de côtés, troisiou quatre,
par exemple. If n'eft donc pas étonnant que lesouvriers qui
merafnent ordinairement que fur les commodités de pratique,
trouvant les Rofettes qui ont le plus.de pans owdegoderons
les plus cemmodes, ne {e foient pas obftinés gratuitement
* V. les Mers
de l'Académie;
a. 17193
DESS
240 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyarE
à en eflayer de celles qu'ils fçavoient être füjettes à quelques
inconvénients, & dont ils ignoroient les avantages.
Il y a apparence que c’eft encore par la même caufe qu'ils
ont peu varié la fituation de l'outil, & qu'ils ne font pas
dans l'ufage de le pofer hors de l'alignement de la touche
& du centre qui répond dans la Machine au diametre vertical
du tambour. Nous avons vü que quand la Rofette eft quarrée,
les pofitions obliques du crayon & de loutil opéroient, dans
les différents cas, ces goderons obliques, ces dents de rochet
& ces boucles entrelacées ou nœuds dont on a parlé; mais
on a remarqué auffi que quand la Rofette a un plus grand
nombre de côtés, toutes les figures précédentes réfultantes
des différentes pofitions obliques du crayon, devenoient
beaucoup moins fenfibles. En effet, il ne refte alors à chaque
infléxion de la figure qui répond à chaque pan de la Rofette,
qu'un biais moins fingulier que choquant à la vüë, qui loin
de donner aucune grace, cauferoit plütôt une difformité à
l'ouvrage. Si la Rofette eft mélée de pans droits & de gode-
rons, la figure n’en fera que plus irréguliére par ce mélange
de différents biais qui s’y trouveront. On va donner le moyen
de tirer parti de toutes ces diflormités apparentes, & de
rendre les figures où ellesfe rencontrent, réguliéres & fim-
métriques, mais il ne faut pas s'étonner fi Je premier coup
d'œil ayant fait appercevoir aux Tourneurs, un biais dans
la figure, quand, par hazard, ils ont placé leurs outils hors
de l'alignement du centre & de la touche, ils ont évité avec
foin toutes les pofitions obliques.
Le moyen de fauver toutes ces irrégularités, & même de
les tourner en agrément , c’eft, après qu'on a tracé le premier
contour avec tous les biais qui en réfultent, de placer l'outil
de l’autre côté, à pareille diftance & du diametre vertical &
de Yhorifontal, on tracera alors un pareil deflein avec des
infléxions en fens contraire qui croïféront les premiers, &
déguiferont la figure en la rendant réguliére, fans lui faire
perdre rien de fa fmgularité. C’eft ainfr que du trait intérieur &
redoublé dela Fig. 1 rt irréguliére, on peut faire la Fig. 8.
Pour
DES ISERE NN CES 241
© Pour faire une figure chargée d'ouvrages & d’ornements
avec ‘un trait fort fimple, il n’y a qu'à fa répéter fur elle-
même, en la faifant fe croifer deux, trois ou quatre fois,
felon le deffein, fous des angles égaux , ce qui fe peut exécuter
aïfément par le moyen du cercle gradué, en faifant répondre
Yalhidade M (Fig. v111.) à chaque révolution du tambour
qui répéte le deflein à autant de points diférents de la cir-
conférence également diftants les uns des autres. De cette
maniére, avec la Figure 4 répétée quatre fois, en faifant
répondre l'alhidade à chaque révolution fucceflive aux points
1,2, 314; diftants Fun de l'autre d'un feiziéme de a cir-
conférence, on aura la Figure 1 9.
+ Une autre maniére d’orner la figure, de la déguifer, &
d'en multiplier les traits, fans qu'il foit befoin de la répéter,
c’eft de fe fervir d’un outil à plufieurs pointes ou dents en
forme de peigne ; autant l'outil aura de dents, autant tra-
cera-t-il de traits différents. Ces traits feront quelquefois
écartés Fun de l'autre, & quelquefois ils fe réuniront en un
feul. Souvent il ne fera pas befoin , même dans les pofitions
obliques, de répéter la figure en fens contraire. Le biais qui
fe trouve dans ces traits entrelacés, n’en a quelquefois que
plus de grace & de fingularité. Au refte tout ceci n’eft pas
de pure théorie, comme on le pourroit croire ; toutes ces
figures ont été exécutées, non feulement fur la Machine
qu'on vient de décrire, mais fur le Tour même de M. Gram-
mare *, & la plüpart ont été admirées des connoifleurs en
ouvrage du Tour à qui on les préfentoit comme des Pro-
blèmes en ce genre, ce qui a donné lieu aux recherches qui
font l’objet de ce Mémoire. ;
: Jufqu'ici nous avons fuppofé la Rofette quarrée, & cette
feule Rofette à produit toutes les figures que nous avons
parcouruës, fans toutes les figures intermédiaires dont nous
n'avons point parlé. On peut juger par le quarré de l'effet
des autres polygones pris pour rofettes, avec les reftriétions
convenables , mais la Rofette n’eft pas bornée aux fimples
polygones, elle peut être compofée de lignes courbes aufli-
Mem, 173 4 . Hh
Planche IT.
Fig. VIIL,
* If cft mort
en 1731. M.
le Duc eft en
poffeffion de 14
Machine dont
on a parlé, du
Tour de M.
Grammare, &
de toutes fes
inventions.
Planche V.
Fig. 20.
Fig. 21.
Fig. 22.
242 MEMOIRES DE L'ÂACADEMIE RoyALE
bien que de lignes droites, ou des unes & des autres à Ia
fois, enfin de telle figure qu'on veut, & lon voit bien que
chacune en particulier pourra {ervir à tracer un grand nombre
de defeins différents.
Le quarré & les autres polygones n'étant compofés que de
lignes droites, font peu propres à donner une idée de l'effet
d'une Rofette dont les côtés feroient des lignes courbes ;
c'eft pourquoi, avant que de pafler au fecond ufage de la
Machine, nous allons, pour fervir d'exemple aux autres cas
des Rofettes courbes, parcourir feulement les effets de Ovale
ou de l'Ellipfe prife pour Rofette, & ceux du cercle pris aufft
pour Rofette, quand ï eft excentrique, je veux dire quand
le Cercle-rofette tourne fur un autre point que fur fon centre,
çar s'il tournoit fur fon centre, il eft clair que le crayon,
quelle que füt fa pofition, ne traceroit jamais que des Cercles.
Nous fuivrons le même ordre en parcourant les pofitions
du crayon que nous avons fuivi en examinant les effets de
la Rofette quarrée, mais nous n’entrerons pas dans un fi
grand détail.
Suppofons d'abord la Rofette de figure elliptique, & com-
mençons par les cas où le crayon eft dans le diametre ver-
tical que nous fuppoferons répondre au grand axe de l’Ellip{e.
Le crayon, dans la premiére des pofitions directes, c'eft-
à-dire, polé à même diftance du centre que la touche, & du
même côté du centre, tracera un contour égal & femblable
à celui de la Rofette. Comme en pareil cas la Rofette quarrée
donnoit un quarré égal à elle-même dans cette pofition,
quelle que foit la Rofette, la figure tracée lui eft entiérement
femblable, par les raifons que nous avons dites.
Dans la feconde pofition directe, c’eft-à-dire, f1 on éloigne
du centre le crayon, en forte qu'il en foit plus loin que la
touche & du même côté, l'Ellipfe, ou plûtôt la Courbe
tracée fera plus grande que l'Ellipfe de la Rofette, mais moins
allongée à proportion, & plus renflée vers fon petit diametre.
Si, au contraire, on rapproche le crayon du centre en
ligne droite, en forte qu'il foit plus près du centre que
DES MISTOTILEUN (QUE NS; 243
Ta touche, pourvû qu'il ne puiffe pas defcendre jufqu'au
centre, ce qui ef la troifiéme pofition directe du crayon;
la figure tracée fera plus petite que la Rofette, & plus étroite
à proportion de fa longueur. Si on continuë d'approcher fe
crayon du centre, la figure fe rétrécira par fes deux flancs,
& formera deux angles rentrants aux deux extrémités du
petit diametre; elle reflemblera alors à un corps de violon
long & étroit, ou à un 8 de chiffre qui ne feroit pas achevé
de fermer dans fon milieu, & plus le crayon fera près du
centre fans pouvoir y atteindre, plus k figure approchera
d'un 8 de chiffre jufqu’à ce qu'elle lui foit entiérement fem-
blable, ce qui arrivera dans fa quatriéme pofition , lorfque
le crayon O, à force d’être approché du centre, latteindra
en defcendant à fon plus bas point o, c’eft-à-dire, au mo-
ment que la touche qui portoit fur le grand diametre en 7°
portera fur le petit en r.
Dans les deux fituations du crayon oppofées aux deux
précédentes qui formeront la cinquiéme & fixiéme pofition
directe ; je veux dire, quand le crayon eft placé au delà du
centre, & toûüjours dans le diametre vertical, fans jamais
monter aflés haut pour atteindre le centre, & lorfque le
crayon placé pareïllement au de-là du centre, ne atteint
précifément que lorfqu'il eft monté à fon plus haut point
la touche portant fur le plus grand diametre de la Rofette;
les deux figures différentes entr'elles feront aflés femblables
chacune à l’une des deux précédentes, avec cette feule difé-
rence que celles-ci: feront plus larges & plus courtes, & les
autres plus étroites & plus allongées, & que l'axe de celles-ci
couperoit à angle droit celui des autres, ce qui provient de
ce que la touche porte fur le petit diametre dans le dernier cas,
dans le moment où elle porte fur le grand dans le premier.
Enfin, & ce fera la feptiéme & derniére des pofitions
directes , fi le crayon rencontre le centre entre le point le
plus haut où il monte, & le plus bas où il defcend; foit au
milieu de la route ou non, il raflemblera les deux cas diffé-
rents où il auroit tracé les deux 8-de chiffre, l'un plus étroit,
Hi ji
Planche V,
Fig. 23.
Fig. 24
Planche VI,
Fig. 25.
Fig. 26.
Fig. 27°
Planche VI.
Fig. 28.
&29.
Fig. 30.
244 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
l'autre plus large, & il les tracera effletivement tous deux
chacun dans fa pofition , de telle forte qu'ils fe croiferont
à angle droit, ce qui formera une efpece de trefle à quatre
feuilles, dont deux feront différentes des deux autres, fçavoir
deux plus étroites qui feront dans la direction verticale, &
deux plus larges dans l'horifontale.
I faut remarquer qu'ici, comme dans la figure à huit
feuilles du quarré, les deux 8 qui compofent la préfente
figure feront égaux en hauteur, quoique non en largeur, fr
le crayon fait autant de chemin au deffous du centre qu'au
deflus, finon ils feront inégaux auffi en hauteur, mais de
façon ou d'autre les deux 8 pris enfemble n'auront que la
même hauteur qu'un feul auroit eu dans les cas précédents
où il n'y en avoit qu'un.
Ü n'y a que trois fituations obliques du crayon qui mé-
ritent attention, quand la Rofette eft elliptique : quand il eft
au deflus du diametre horifontal, & qu'ilne l'atteint point
à fon plus bas, ou lorfqu'il ne fait que l'atteindre fans pafler
outre, la touche portant fur le petit diametre, car les deux
figures dans ces deux cas font à peu-près femblables. La
feconde, quand le crayon eft plus bas que le diametre hori-
fontal, & qu'il ne remonte pas jufqu'au niveau du centre,
ou du moins qu'il ne pafle pas ce niveau, qu'il atteint feu-
lement quand Ja touche eft fur le grand diametre, car les
réfultats font aufi à peu-près les mêmes; & la troifiéme,
lorfque le diametre horifontal partage en deux parties le
chemin que le crayon fait verticalement.
Dans la premiére de ces trois pofitions obliques, la figure
eft fort irréguliére, elle approche de celle d’un concombre
eu d'un citron, dont les deux bouts feroient inclinés en
fens contraires. Cette reflemblance, fur-tout la derniére, eft
d'autant plus marquée que le crayon ef plus voifin du centre.
Dans la feconde pofition oblique, la figure reflemble à
ces offelets d’yvoire avec quoi jouent les enfants, ou à un
double bec de corbin dont les deux bouts feroient fort re-
courbés en fens contraires.
DES SCT EN; CiE16, 3
Dans la troifiéme pofition oblique, la figure reffemble
. aflés à la précédente, avec cette différence qu'elle a toüjours
_ des boucles, ce qui ne manque pas d'arriver, quelle que foit
la Rofette, dès que le crayon placé hors du diametre vertical Planche VE,
monte au deflus & defcend au deflous du niveau du centre. Fig 31:
Ces boucles font plus ou moins hautes, felon le plus ou le
moins de chemin que fait le crayon defflus ou deflous le
diametre horifontal, ainfi qu'on Fa remarqué en examinant
les effets de la Rofette quarrée.
.… Il n'eft pas befoin de remarquer qu'on peut, dans Ia pof-
tion précédente, tracer une figure fort approchante du Cercle,
fur-tout fi le crayon fait précifément autant de chemin au
deffus du diametre horifontal qu’au deflous. Avec la Rofette
quarrée nous avons dans le même cas tracé une pareille figure,
& nousavons obfervé, qu'au triangle près, le quarré de tous
les polygones réguliers y étoit le moins propre. L’Ellipfe
n'ayant point d'angles, y conviendra mieux pour cet effet
que le quarré, à moins que a différence de fes deux diametres
ne füt plus grande que celle du demi-côté du quarré à fa
demi-diagonale. |
Le Cercle excentrique ou tournant fur un autre point que
fon centre étant pris pour la Rofette, les figures qu’il produit
méritent quelque attention, quoique moins variées que celles
qui font produites par l’Ellip{e. Premiérement, fi le point À,
fur lequel on fait tourner le Cercle, & que nous nommerons
centre de rotation , eit fort près du centre C, la diverfité des
figures doit être fort peu fenfible. En fecond lieu, fi le centre
de rotation eft à une diftance fuffifante du centre du Cercle,
il n’y a que deux ou trois cas où la figure qui en réfulte
ait quelque fingularité remarquable. u
On indiquera les diverfes pofitions pour le moment où
la touche eft le plus près du centre de rotation, comme on
a fait dans l'examen des effets du quarré pris pour Rofette.
Le diametre vertical fera celui qui pañlera par le point 7;
où porte la touche & le centre de rotation R. Pour éviter les
répétitions, on défignera ici les diverfes pftes du crayon
jij
Planche VI.
Fig. 32.
Fig, 33.
Fig. 34.
Fig. 35e
246 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE
par leurs correfpondantes dans le cas de la Rofette quarrée.
La premiére pofition direéte donne, comme on fçait,
dans tous les cas poffibles, une figure égale & femblable au
contour de la Rofette.
La 24e, Ja 3me & la 4me pofition directe donneront ici
des figures très-peu différentes du Cercle. Celle qui réfulte
de la 3me pofition, eft celle qui s'en éloigne le moins. Son
diametre vertical eft plus long que Fhorifontal, au contraire
des deux autres, dont la derniére a fes diametres encore plus
inégaux.
La $me & la 6m pofition directe donneront une figure
qui refiemble à la coupe d’une cerife. L’axe vertical de une
& de l'autre figure fera égal à la diftance entre la touche &
le crayon, qu'on a fuppofée ici égale au tiers du diametre
du Cercle-rofette. La feule différence des deux figures. eft
que celle de la 6me pofition eft plus large que l’autre.
La 7e pofition, où le crayon monte ou defcend au
deflus & au deffous du niveau du centre de rotation ou du
diametre horifontal, eft compofée des deux figures précé-
dentes, raccourcies & renfermées l'une dans l'autre ; elles font
de hauteur égale, & cette hauteur eft moitié de celle de
chacune des deux figures précédentes, quand OR eft moitié
de OT, ou quand le crayon fait autant de chemin au deflus
u’au deffous de l’horifontale, plus le chemin du crayon au
deffus & au deflous de cette ligne eft inégal , plus le contour
extérieur croît, tandis que l'intérieur décroît, en forte qu'il
devient un anneau qui étoit réduit à un point dans les deux
figures précédentes, mais de façon ou d'autre la fomme des
deux hauteurs eft toujours la même.
Les pofitions obliques du crayon ne caufent ici qu'un
biais à la figure, & ne fournifient rien de remarquable.
Les exemples précédents des effets de l'elliple & du cercle
excentrique, pris pour Rofette, fufhifent pour donner‘une
idée de ce que peuvent produire les différentes Rofettes
courbes, comme le quarré a pü faire juger de l'effet des autres
polygones à pans droits pris pour Rofettes. Ainfi quelle que
D'Es S'CTEN CE 8 2
#oit maintenant la Rofette propofée, en confidérant la fitua-
tion refpective de la touche & de l'outil ou du crayon, &
fe rappellant ce qui a été obfervé, on pourra juger de fes
effets, à quelque chofe près, & l'épreuve qu'on en fera fur
la Machine, déterminera avec précifion ce que l’on en doit
attendre fur le Tour.
Les différentes fituations de loutil, qui caufent tant de
diverfités dans les figures produites par la même Rofette, le
changement même des Rofettes qui n’a point de bornes, ne
font pas encore les feules fources de variété dans les deffeins.
La touche que nous avons jufqu'ici fuppofé ne porter
fur la Rofette qu'en un point, peut par fes changements de
figure, en caufer de grands dans l'ouvrage; on peut fuppofer
par exemple, que la touchesft platte, & qu'elle s'applique
dans toute fa longueur fur les pans de la Rofette; on la peut
fuppofer concave où convexe, on peut lincliner en forte
qu'elle fe préfente obliquement à la rencontre de la Rofette,
en ne faifant pas un angle droit avec le rayon vertical; tous
ces changements doivent en taufer-dans la figure, & nous
ne pouvons nous difpenfer d'en toucher quelque chofe.
H eft ordinaire aux T'ourneurs Allemands, de fe fervir de
touche platte, elles font peu d’ufage, & prefque inconnuës
en France aux ouvriers. Le P. Plumier dans {on Livre, en
a donné plufieurs defleins; on s'attend peut-être que cette
forme différente de la touche doit caufer un grand change-
ment dans les figures, & il eft vrai que dans les mêmes
pofitions du crayon, l'effet de la touche platteeft fort différent
de celui de {a touche pointuë; cependant quand la Rofette
eft telle, que tous les points de la touche platte peuvent
rencontrer tous les points de la Rofette, ce qui arrive quand
celle-ci eft à pans droits, il importe peu qu’on fe ferve d’une
touche platte ou d’une touche pointuë, puifqu’avec lune ou
autre, l'effet fera fenfiblement le même, en obfervant feu-
‘lement dans l’un des deux cas, de placer l'outil du côté
P
oppofé à celui où on le placeroit dans l'autre, en forte que
fe fervir de fune de ces deux touches, au lieu de Fautre,
Planche VII.
Fig. 36.
i
248 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
c’elt à peu-près la même chofe que ff, fans changer detouche,
on changeoit l'outil de place, en le portant de l’autre côté
du centre de la Rofétte.
Dans les effets de la Rofette quarrée, par exemple, on
a pù remarquer que les figures à angles faillants fe traçoient
quand le crayon étoit du même côté que la touche & en
de-cà du centre, & les goderons quand le crayon étoit du
côté oppofé à la touche & au de-là du centre. Avec la touche
platte, au contraire, les goderons fe forment en plaçant l'outil
en de-çà du centre, & les angles faillants en le plaçant au
de-là.
Avec la touche pointuë, ce font les angles de la Rofette
qui font les angles faillants ou rentrants de la figure, & ce
font les pans qui en font les côtés, foit convexes, foit con-
caves. Avec la touche platte, au contraire, les angles de Ja
Rofette, en paflant fous la touche, font tracer au crayon les
arcs convexes ou concaves de la figure, & fes angles fe tfacent
quand la touche eft appliquée fur un des côtés de la Rofette.
Cette différence vient de c qu’en fe fervant de l’une des
deux touches, le mouvement circulaire domine fur le mou-
vement direct, précifément dans le temps où le mouvement
direct l'emporteroit {ur le circulaire, fi on avoit employé
l'autre touche, & réciproquement. Par exemple, dans le cas
de la touche pointuë, c’eft lorfque l'angle de la Rofette pafñe
fous la touche, que le mouvement dire& eft le plus rapidé,
& c’eft tout le contraire dans le cas de la touche platte. Pour
s'en convaincre, foit fuppofée d'une part la touche pointuë
portant fur le milieu du côté Æo de la Rofette au point 7;
& dans la même figure, pour mieux comparer les effets des
deux touches, foit fuppofée encore la touche platte 42,
appliquée dans le même moment à plat fur le côté Ko; faifons
maintenant tourner la Rofette fur fon centre de B vers A.
Quand le point o, angle de la Rofette aura décrit Farc o 7;
la touche aiguë qui portoit für le point 7 de la Rofette aura
gliflé, en montant, le long du côté To, & fera parvenuë
au point >. Si on s’eft fervi de la touche platte AB, elle
fera
DES S'CYEN GES" | 249
{ra alors en 4? b?, par conféquent dans l'un & dans l’autre cas
le crayon placé dans un point quelconque 7 de la figure,
“& fe mouvant ou dans la verticale 7C, ou parallelement à 2C,
fera monté dans le même temps d'une quantité égale à T'?,
chemin de la touche qu'on peut prendre indifféremment
pour le chemin du crayon qui lui eft égal. Mais pour re-
connoître dans quelle différente proportion ce mouvement
direét fe combine avec le circulaire dans les deux différentes
hypothefes de la touche aiguë & de Ia touche platte, voyons
quelles portions de la ligne droite T'>, chemin total du
crayon, répondront dans lune & dans autre hypothefe à
“chaque arc correfpondant de la circonférence que décrit
Jangle o de la Rofette. Soit pour cet effet l'arc o } divifé en
trois arcs égaux 01, 12,23, Compris entre les rayons Co,
Cr, C2, C ze
Commençons par le cas de la touche pointuë, le côté To
de la Rofette, en tournant, va foûlever la touche 7, & Ia
faire monter dans la verticale 7}, en forte que dans les
moments où l'angle o répondra aux points 7, 2, 3, ou, ce
qui eft le même, dans les moments où les points Lo du
bord de la Rofette, pris fur les rayons terminés aux points
#3, 2, 1, 0, pañleront fous la touche, la touche répondra aux
points HQ ; de la verticale 7'>. Les parties du chemin total
T'; de la touche & du crayon correfpondantes aux arcs égaux
or, 12, 23, font donc 7H, HQ, Q;, que lon voit qui
vont en croiflant d'autant plus rapidement que l'angle o
approche de la touche au point 2.
Tout le contraire arrive dans la fuppofition de Ia touche
platte; car fans répéter en détail ce qui vient d'être dit, on
peut voir d'un coup d'œil, .que la touche platte AB, foûlevée
d’abord par l'angle o de la Rofette, parviendra fucceffivement
dans des fituations ab", a*b°, a? b?, pendant que l'angle ou
le point 0; en tournant, répondra aux points 7, 2, 3. Les
parties du chemin total 7'} de la touche & du crayon, cor-
refpondantes aux arcs égaux 07, 12, 23, feront donc dans
le cas de la touche platte F7 , E2, D3, «TZ, ZD, D},
Mem, 17 3 4 k Si
Planche VIT,
Fig. 37°
250 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE RoYALE
qui, coïnme on voit, vont dans une propreflion fort dé-
croiflante, à mefure que l'angle o approche du point 3.
I eft donc vrai que dans les deux fuppoñitions de la touche
platte & de la touche aiguë, le mouvement direét du crayon,
eu égard au mouvement circulaire, va en diminuant dans
V'une précifément quand il augmente dans l'autre ; & comme
ceft de cette différente combinaïifon de ces deux mouve-
ments, qu'on a prouvé que réfultoit la diverfité des figures,
c'eft cette oppofition dans les mouvements des deux touches
qui fait que leurs effets font abfolument oppofés dans les
pofitions femblables du crayon.
Au lieu de divifer Farc o > en trois, on pourroit. le divifer
en tel nombre de parties qu'on auroït voulu, on eût tiré
les mêmes conféquences.
La figure précédente parle aflés aux yeux, mais voici une
démonftration géométrique.
On vient de voir que l'accélération de a touche & du
crayon, dans le cas de la touche pointuë, eft mefurée par
les lignes TH, HQ, Q3, c'eftà-dire, qu'elle fuit la raïfon
des accroiffements fucceffifs 7, TQ, T'} de la ligne qui
devient enfin 7}, ou, ce qui revient au même, les accroifle-
ments RL=TH, SM=TQ, VO—T;} des fécantes
CL, CM, CO des arcs égaux 7R, RS, SV, & que dans
le cas de la touche platte, il n’eft queftion que de prouver,
1.” Que les finus verfes décroifient en plus grande raifon
que leurs arcs, ce qui a déja été prouvé. 2.° Que l'excès de
la fécante d’un arc quelconque fur le rayon, croît dans une
raifon plus grande encore que le fmus verfe correfpondant
du mème arc ne décroit; pour le démontrer,
Soit l'arc TR quelconque CT, fon rayon TM, fa tan-
gente en 7, CM fa fécante, RE fon finus droit, ZE fon
finus verfe, & RM Yexcès de la fécante fur le rayon CR.
Suppofons que ZE croifle de la quantité Æe quelconque ;
tirés er parallele à £R, & d'arc Mn du rayon CM, l'arc
TR fera crû de fa quantité. Rr, & la 'fécante CM de la
quantité zum, Orje dis que rma une plus grande raifon à
Sd à
=, +
D ES : $ CE NC ES 251
RM que Te à TE, TirésrF parallele à RM, on aura PAZ,
& par conféquent fon égale rF. RM :: Te.TE; mais
rm eft plus grand que r F. Donc, &c. €. Q. F. D.
Quand je dis que les figures font les mêmes avec la touche
platte qu'avec la touche pointuë, & feulement dans un ordre
renverfé, j'entends les mêmes à l'œil fenfiblement ; car on
démontrera dans Îe fecond Mémoire, que les courbes tracées
dans ces deux cas, font d’une différente nature. Je réferve
aufh pour la difcuflion géométrique, l'examen de la différence
qu'il y a entre l'effet de la touche platte, quand elle eft plus
longue ou plus courte que le côté de la Rofette. Ici où il
n'eft queftion que de pratique, on ne s'attache qu'aux dif-
férences qui peuvent frapper les yeux.
La touche platte difpofée obliquement, ne caufe d'autre
changement, finon que la figure tracée par la touche oblique,
croifera l’autre figure fous le même angle que les deux touches
font entre elles, il refte à examiner les touches courbes.
Nous avons déja remarqué que les Tourneurs fe fervoient
ordinairement d’une touche qui porte à fon extrémité une
petite roulette, dont le mouvement fur fon centre rend celui
du Tour plus doux, en diminuant le frottement; on conçoit
que le côté de la Rofette touchant cette roulette en différents
points de fa circonférence, l'effet ne doit être le même que
lorfque le côté de la Rofette porte toüjours fur un même
point, comme dans le cas de la touche aiguë. On verra dans
le fecond Mémoire, quelle eft la courbe qui en réfulte ; ïl
fuffit de remarquer ici que la roulette étant très-petite, la
figure eft fenfiblement la même que fi la touche étoit pointuë.
Les touches concaves ni les touches convexes, fi ce n’eft
celles à roulettes, ne font point ufitées, ainfi l'examen de
leurs effets n’eft que de pure curiofité. Si les touches font
petites & convexes, elles ne différent pas fenfiblement des
touches rondes ou à poulies; fi elles font petites & concaves,
le côté de la Rofette s'applique fur les deux extrémités à la
fois de l'arc dont ce côté de la Rofette devient la corde, ce
qui retombe dans le cas de la touche platte, hors pour le
liïi
252 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
temps où l'angle de la Rofette entre dans la concavité de
la touche. Enfm fi la touche eft fort grande, fon arc, foit
convexe, foit concave, en approche d'autant plus de la ligne
droite; le peu de différence qui fe trouve, caufe peu de
changement à la figure, & la courbe paroîtra encore fen-
fiblement la même, que fi la touche étoit platte. Tous ces cas
feront examinés géométriquement dans le fecond Mémoire.
I nous refte un mot à dire du fecond ufage de la Machine.
Nous lui en avons attribué deux, l’un de faire connoître avec
exactitude tous les effets différents de la Rofette qu'on veut
employer, c'eft cé que nous avons jufqu’ici examiné. L'autre
de faire trouver quelles font les Rofettes les plus commodes
pour exécuter un deffein quelconque; c'eft maintenant de
quoi il eft queftion.
Quand il y a un modele de Rofette ajufté fur Ja Machine,
ce modele, comme nous avons vü, guide une extrémité
de la tringle, & le crayon attaché à l’autre extrémité trace
une figure. Il n’y a donc qu'un des bouts de la tringle de
conduit, & le crayon adapté à l'autre bout qui ne porte fur
rien, trace néceflairement un contour réfultant du chemin
que fait le bout qui eft conduit; la dépendance eft donc
réciproque entre la Rofette & le deffein qu'elle produit. Par
conféquent quand on a un deffein pour lequel on cherche
une Rofette, après avoir placé & aflüré le crayon dans l’en-
droit le plus convenable, il n’y a qu'à le conduire à la main
fur le defiein dont on cherche la Rofette, & l'autre bout
de la tringle, dont l'ufage ordinaire eft d'appuyer fur le bord
de la Rofette, tracera en ce cas la Rofette qu'on n’a point
& qu'on cherche. Pour cet effet, au lieu de modele de
Rofette, on fera porter un fecond carton à cette extrémité
de l'arbre, & le bout de la tringle fait pour appuyer fur la
Rofette, dans le premier ufage, portera dans ce casun crayon
qui tracera le contour de la Rofette cherchée.
Pour conduire Fun des deux crayons fur le deflein ,
fuffira de le haufler & baïfler à propos, ce qui eft aifé au
moyen de la tringle qui gliffe librement dans fes rainures, le
512 TDITET SM 187 CHE: NE © EN 25%
mouvement circulaire du carton fera le refte ; & comme ce
mouvement circulaire du carton n’eft pas fort rapide, &
qu’on peut aifément le ralentir, en caufant quelque petit
frottement au rouage, on aura tout le temps de hauffer ou
baiffer le crayon pour qu'il ne quitte pas le contour du deffein
donné, & lun des deux crayons, car il n’importe lequel,
ainfi conduit fur un contour quelconque, fera tracer à l'autre
crayon le contour de la Rofette, qui fera différent fuivant
les différentes pofitions qu'on donnera au crayon.
H faut avouer cependant que quelque jufte que foit la
Machine, l'exactitude du contour pourroit être un peu
altérée par le fecours de la main qu'on eft obligé d'employer
dans ce fecond ufage, ce qui ne fe peut guere fans qu'il y
ait quelque vacillation dont le trait fe reflent infailliblement.
A la vérité, on pourroit remédier à cet inconvénient, en
faifant limer un modele du deflein donné en cuivre, dont
on fe ferviroit comme on a fait des modeles de Rofettes.
Ce modele conduiroit fürement la tringle fans le fecours
de Ja main, mais cela demanderoit trop de temps & d’appa-
reil, fur-tout fi le deffein étoit irrégulier & d'un contour
difficile. H feroit donc à fouhaiter qu'on pût trouver la Ro-
fette d'un deflein qu'on veut executer fans être obligé de
rien conduire à la main, & fans perdre le temps néceflaire
pour limer en cuivre un nouveau modele à chaque eflai.
Cette perfection manque à notre premiére Machine ; auffi
pour ce fecond ufage je préfere de me fervir d’une efpece
de Compas dont on trouvera la conftruction dans le fecond
Mémoire. Ce Compas, propre à tracer d’un mouvement
continu toutes es Courbes du Tour, peut fervir indiffé-
remment à tracer ou le deffein ou fa Rofette, l'un des deux
étant donné ; il remplace par conféquent & peut tenir lieu
de la Machine tenuë fecrette, & propre à ces deux ufages,
qui a donné lieu à ces recherches.
Quelques particuliers ont déja fait une application très-
fimple & très -heureufe à eur Tour, de la Machine qu'on
vient de décrire, & par ce moyen, d'un Tour fimple dont
1 T'ï ii
254 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
l'arbre n’a que le feul mouvement de rotation fur fon axe,
on fait un Tour figuré en rendant la touche & l'outil, ajuftés
fur un fupport, mobiles d'un mouvement commun qui tend
au centre, & tient lieu du mouvement de parallelifme que
l'arbre n'a pas.
EXPLICATION DES FIGURES
des trois premiéres Planches de ce Mémoire.
PLANCHE I.
L A Figure r repréfente la Machine, vûë par la platine
poftérieure BBBB. :
C eft l'Arbre du remontoir.
D eft l'encliquetage.
EF, Détente qui retient le volant G, laquelle étant levée,
laïfle courir le rouage.
G, le Volant.
H, piéce platte qui repréfente la Rofette du Tour. Elle
eft fuppofée ici quarrée.
1, un des bouts de Arbre du pignon que la rouë du
barillet fait mouvoir. On fixe à ce bout la Rofette par le
moyen d'un écrou. Cet arbre du pignon repréfente l'arbre
du Four.
Æ, Arbre quarré, rivé fur la piéce NO, pour y adapter
la touche platte, comme il fera expliqué ci-après.
L, Rainure faite dans la platine BBBB, pour laifier
monter & defcendre la broche ou tringle platte W qui tra-
verfe les deux platines du mouvement.
M, piéce taillée en couteau, qui repréfente la Touche
du Tour. Elle eft fixée à la piéce NO.
NO, piéce platte qui s'attache avec deux vis fur Ia tra-
verfe d’aflemblage des deux regles ou montants PQ, RS,
laquelle traver{e fait corps avec la tringle platte W-
PQ, RS, Regles ou Montants ci-deflus expliqués.
T', petit Barillet à reflort, dont l'effet eft de rappeller à
#
ke
DES" 1840 Â'Æ M xs 255
lui là piéce NO tirée par,un fil attaché d'un bout au tam-
bour, & de l'autre au crochet marqué 9 fur cette piéce NO,
ZZZZ, Venons à coulifle dans lefquels glifent les
regles PQ, RS.
La Figure 11 eft compofée de deux Regles plattes TS,
SY, mobiles, fur deux Pivots ou Crochets en S, où elles
peuvent même fe féparer, lorfqu'on ne veut qu'une touche
platte, non oblique, & jointes à leur autre extrémité par un
arc de cercle refendu d’une rainure dans laquelle s’engage la
regle SF, de maniére qu’au moyen de l’écrou 7, on tient
la regle SY plus ou moins inclinée fur la regle S'7: Cette
regle porte dans fon milieu un Tenon percé d'un trou
quarré E qui s'ajufte fur l'arbre marqué À /Fig. 1.) fur lequel
on d'arrête par la vis D.
La Figure r1r repréfente en grand la piéce NO qui porte
les Touches. (Sn
Figure 1v, Rofette quarrée.
Figure y, Rofettes ronde & ovale.
PMANCEAE. IL
La Figure vr eft laMachine vûë par la platine antérieure.
ae, fc, font deux Regles plattes refenduës chacune d’une
raïnure , lefquelles au moyen d'un pivot mobile 3, qu'on
fixe par la vise, peuvent prendre telle indlinaifon qu'on
fouhaite.
d'eft un Crayon placé à l'extréinité d'une de ces regles,
lequel par conféquent peut répondre à tel point qu'on veut
du plan ZL.. Ce crayon repréfente l'outil du T'our.
Fg eft une Détente fous laquelle un reffort r eft placé.
Cette détente.eft mobile fur fon point d'appui Æ, & porte
à fon extrémité cachée une dent ou cheville qui traverfe la
platine, & arrête le rouage lorfqu'une figure eft tracée. On
lui rend fa liberté de courir ;.en appuyant le doigt fur le
bout g de la détente.
256 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
i left un Tambour mobile dans l'épaifieur duquel on
place plufieurs papiers l'un für l'autre fur lefquels fe tracent
les figures. Ce tambour eft ajufté à frottement fur un canon
goupillé au bout de l'arbre du pignon, dont on a vü dans
la Figure z que l'autre bout 1 portoit la Rofette, & repré-
fentoit l'arbre du Tour, en forte que cet arbre, la rofette &
le tambour tournent d'un mouvement commun imprimé
par le rouage.
HK eft un Cercle divifé en parties égales quelconques,
attaché à la platine par des Vis en f & en p, avec la précau-
tion que le tambour lui {oit concentrique, tellement qu'après
chaque tour du tambour mû par le rouage, fi l'on fait
tourner à la main ce tambour d'une valeur quelconque,
YAlhidade A qui répondra à des divifions différentes du
Cercle HK, fera connoître fous quel angle il faut faire
croifer le même deflein pour avoir des contours fimmétriques
& agréables à la vüë.
L eft la Raïnure de la platine dans laquelle coule Ia Trin-
gle platte W qui a été dite traverfer les platines du mouve-
ment (Fig. 1. ).
V XY eft l'extrémité de cette tringle platte coudée en
cet endroit, pour ne pas gêner le tambour. C'eft fur cette
éxtrémité Ÿ qu'entre la douille du crayon.
La Figure v1r eft le développement de Taffemblage du
trayon dé la tringle platte & de la piéce qui porte les touches,
ABC et le Porte-crayon avec fes coulifles, & fa douille
‘BC qui entre fur la tringle platte en F.
YXW eft la tringle platte coudée en Æ
‘M eft la Touche taillée en couteau.
K eft la Tringle quarrée fur laquelle s'attache fa touche
patte.
ON font les Vis qui attachent la piéce AK à la tringle
platte YXW.
Figure vrrr. KH eft le Cercle gradué qui tient à fa
platine. |
| IL
DES Se CSL'E.N. GE Se BA
JL repréfente le Tambour qui peut tourner d’un mou-
vement propre fur le canon auquel il tient à frottement,
lorfqu'on le fait mouvoir à la main, mais qui eft cependant
emporté d'un mouvement commun avec la Rofette, dorfque
c'eft le rouage qui le meut.
M eft Y Alhidade qui tient au tambour.
1L eft la coupe du tambour.
AN eft le Canon fur lequel il tourne à frottement.
N bis repréfente le Plan du canon & de l'arbre du pignon
fur lequel il s'en-arbre quarré ément. |
Figure IX. OP eft un Cercle de cuivre plein, à la réferve
qu'il “eft coupé par deux rainures perpendiculaires l’une à
Yautre, dont l'interfection eft le centre du cercle. I porte
une petite Regle Q@R mobile au point À, laquelle s'ajuite au
long des deux rainures, de maniéré qu’elle fert à tirer des
lignes qui fe conpent- à angles droits au centre du Papier du
tambour. : :
bc eft fa Douille, qui f-place comme celle du crayon.
fur la piéce VX de la tringle platte.
PLANCHE. IIL
La Figure. x eft le développement du rouge.
A, Arbre du remontoir.
_B, Rouë du barillet, de 84 dents.
C, Arbre qui repréfente Farbre du Tour fur equel font
fixés la Rofette & le tambour mobile.
D, Pignon de 20 qui eft rnené par la rouË B, & qui a ‘
pour tige Tarbre C.
Æ, Rouë de 54, fur laquelle ef rivé £ Le pignon D.
F, Pignon de 6, mené par la rouë Æ,
G, Rouë de 48, en-arbrée fur la même tige Le le
pignon À.
H, Pignon de 6, mené par ia rouë F.
Î, Rouë de 42, en-arbrée fur la tige du pignen 2.
L, Pignon de 6, mené par la rouë Z.
Men, 1 73 ke : Kk
258 MEMOIRES DE L’ACADEMIE ROYALE
M, Rouë de 36, en-arbrée fur la tige du pignon L.
N, Pignon de 6 pour le volant mené par la rouë AZ
O, Trou percé dans la rouë Æ pour-recevoir la dent ow
cheville de a détente FG /Fig. vi.) qui fert à arrêter le
rouage, lorfqu'il s'eft fait une révolution du tambour ZL
(Fig. vi.).
PPPP, Trous pour recevoir les piliers de fa cage.
Q, Raïnure dans la platine pour laïffer hauffer & baïfler
tringle platte /F3g. z. SFr).
em. de lead :73g pl 15 pag. 258
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Fig 9
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Mem. de Licad. 1734 . plirpag .268.
Fig.15
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Meme. de Tea 7783 pl 28! pag.258
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Men. de Chad 1784 pl.
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Mon. de Acad 173$ pli. pag. 2158
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hé DES SCIENCES 259
SUR LE SUBLIME CORROSIF;
ET A CETTE OCCASION,
Sur un article de l'Hiftoire de l'Académie Royale
des Sciences de l'année 1699, où il s'agit
de ce Sublimé.
Par M. LÉMERY.
OO fçait que le Sublimé corrofif ordinaire peut fe faire,
& fe fait auffi de différentes maniéres ; on peut même
dire qu'outre celles qui font connuës & pratiquées, on en
peut encore imaginer & exécuter d’autres qui, en produifant
le même Sublimé, c'eft-à-dire, blanc & corrofif, auront
à certains égards, des avantages & des inconvénients qui
pourront les faire préférer en quelques cas, & rejetter en
d’autres.
J'ai imaginé un nouveau mélange pour faire du Sublimé
corrofif : je de donnerai d’autant plus’ volontiers dans la fuite
de ce Mémoire, qu'il n'a fort bien réuffi, & qu'il peut avoir
{on utilité.
Dans chacun des procedés ufités pour Ia fabrique du
Sublimé corrofif, le fel commun, ou du moins fon acide
y entre tojours & néceflairement, & fa feule différence
qu’il apporte à ces procedés, c'eft que dans les uns il en
faut moins, & dans les autres davantage, à proportion du
Mercure qui y a été employé.
L'état différent du Mercure qu'on mêle aux différents
ingrédiens avec lefquels on fait du Sublimé corrofif, apporte
encore une différence particuliére aux procedésde ceSublimé;
car ou l’on y employe le Mercure crud & coulant, c’eft-à-
dire, fous fa forme naturelle, ou fous celle de Sel concret
qu'il'a acquife par l'efprit de Nitre, ou par l'huile de Vitriol
dont il a été diflout, & dont on a enluite fait évaporer la
© Kki
26 Mai
1734»
60 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE Royarr
partie aqueufe; or dans ces différents cas, le mélange des
autres ingrédiens, & la manœuvre de l'opération, varient
néceffairement plus ou moins. Enfin le Vitriol dont on a
coûtume de fe fervir dans les procedés les plus ufités du
Sublimé corrofif, n’eft pas tojours fi néceffaire pour ia for-
mation de ce Sublimé, qu'on ne puille fouvent dans fa pré-
paration, ou s'en palier tout-à-fait, où y fubfhituer un autre
intermede équivalent. Nous entrerons une autre fois plus
avant dans le détail & l'explication phyfique de ces différents
procedés, dont nous ne parlons quant à préfent que par
occafion, & qu'autant qu'il eft néceflaire pour l'intelligence
de ce que nous avons à dire dans la fuite.
H y a peu de temps qu'on voit plus clair qu’on ne faifoit
auparavant fur la maniére dent les différentes matiéres qui
entrent dans la compofition du Sublimé corrofif, agiflent
les unes fur les autres pour la formation de ce Sublimé; on
peut même dire que malgré les éclairciflements qu'on a tirés
de quelques expériences nouvelles & anciennes, on n'eft
point encore parfaitement inftruit, ni de la méchanique de
l'opération du Sublimé corrofif, ni du contingent que le
Mercure tire de chacun des Sels qui ont été mêlés avec lui.
Les Chimiftes qui font venus, ou qui ont écrit avant les
éclaircifiements dont on vient de parler, donnoïent à peu-
près & indiftinétement le même emploi aux acides de tous
les Sels qu’on faifoit fervir à la production du Sublimé cor-
rofif; ils regardoient ce Sublimé comme un Mercure hérifé
des pointes de tous ces acides, & s’imaginant que plus if
en étoit chargé de différents, plus il étoit corrofif; lorfqu'au
lieu du Mercure diflout par l'efprit de Nitre, ils employoient
e Mercure crud, ils avoient fouvent foin d’adjoûter dans le
mêlange des ingrédiens du Sublimé corrofif, une portiorr
de Salpêtre dont ils comptoient que les acides fe joindroient
à ceux du Sel commun & du Vitriol, pour fe réunir dans
Te Sublimé corrofif qui en devoit naître, & ils n'imaginoïent
pas que le Vitriol même eût d'autre ufage dans l'opération.
de ce Sublimé, que celui qui vient d'être allegué.
| D'E SNS CE EN CES 26
Mais depuis qu'on a découvert l'action du Vitriol ou de
fes acides fur ceux des autres Sels qui y ont été mélés, ou
plûtôt depuis que la difficulté qu'on à trouvée jufqu'ici à
expliquer méchaniquement certains phénomenes chimiques,
que nous ferons voir en temps & lieu être très-fufceptibles
d’une explication de cette nature ; depuis, dis-je, que la
difficulté apparente d'expliquer méchaniquement certains
phénomenes, a donné lieu d'imaginer pour cela, & d'intro-
duire en Chimie le fyfteme des Attractions, qui, à dire vrai,
eft moins une explication qu'un aveu ou une declaration
formelle de limpoffbilité où l'on croît être de rendre une
raifon claire & fatisfaifante, des effets dont il s'agit; enfin
depuis que le fyfteme des Attractions a fait naître l’idée d'afh-
nités, de rapports plus où moins grands entre différentes
fubftances, d’où, dit-on, dépendent les mouvements cachés
qui fuivent le mélange des corps, on a conclu afhrmative-
ment en conféquence de cette idée, que quelles que foient
les différences des mélanges avec chacun defquels on fait
-du Sublimé corrofif, dès que le Sel commun ou fon acide
ne manque jamais dans tous ces mélanges d’être un des in-.
grédiens, le Sublimé corrofif qui réfulte de chacun d'eux
doit toûjours être parfaitement le même, & n'avoir admis
dans fa compofition que le Mercure & les feuls acides dû Sel
commun qui, fuivant la fuppofition, ayant plus de rapport
avec le Mercure que tous les autres acides, y doivent être
recûs par préférence, fur-tout quand on employe le Mercure
crud; & lorfqu'on fe fert de celui qui eft déja chargé des
acides du Nitre ou du Vitriol, ceux du Sel commun, en
vertu de leur plus grand rapport avec te Mercure, en chaffent
aufli-tôt les autres acides, ou les en trouvent délogés à leur
arrivée, parce que ces autres acides qui ont plus de rapport
avec la matrice du Sel commun qu'avec le Mercure, aban-
donnent lun pour s'établir dans l'autre, & cédent par-là
d'eux-mêmes la place aux acides du Sel marin, d’où fl fuit
que quand on fe fert du Mercure pénétré par les acides dw
Nitre, ou par ceux du Vitriol, ce ne doit pas être dans 14
Kk ii
262 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
vûë de faire un Sublimé plus fort, ou différent de celui
our lequel on ne fe fert que du Mercure crud, mais pour
la facilité de l'opération, & en faveur de celui qui travaille
à incorporer enfemble par la trituration, le Mercure, ie Sel
& le Vitriok; car outre qu'il eft fort long-temps à en venir
à bout, il fe trouve encore expofé pendant tout ce temps
à-une pouffiére incommode, & même dangereufe qui s'éleve
du mélange.
Quoiqu'une grande partie des faits qu’annonce ce fyfteme
fe trouve vérifiée par l'expérience, & conforme à ceux d’un
autre fyfteme plus méchanique & plus vrai, dans Îe détail
duquel nous entrerons lorfqu'il s'agira d'expliquer la forma
tion du Sublimé corrofif, & toutes les fngularités qui s’ob-
fervent dans les différents procedés de cette opération, on
ne trouve pas la même certitude dans l'autre partie des faits
de la fuppofition alleguée, fuivant laquelle on prétend que
le Sublimé corrofif en général ne contient d'autres acides
que ceux du Sel.commun, & que celui qui a été fait avec
le Mercure diflout auparavant par Fefprit de Nitre, ou par
Fhuïle de Vitriol, n’a rien retenu des acides de ces liqueurs,
& eft en tout parfaitement femblable à celui qui a été fait
avec le Mercure crud. Et comme l'expérience. eft fa pierre
de che des fpéculations chimiques, l'amour de la vérité
n'a déterminé d’abord à y avoir recours pour la vérification
de cette fuppolition, & Je Fai fait d'autant plus volontiers,
qu'outre que cette vérification eft par elle-même curieufe
& intéreflante pour la Phyfique, & qu'en travaillant fur le
Mercure, il eft rare qu'on n'y apperçoive pas quelques nou-
veautés, qui ne font à la vérité que de fimples curiofités
tant qu’elles font ifolées, mais qui deviennent fouvent utiles
par l'ufage & l'application qu’on s'avife d'en faire, foit pour
l preuve de quelques vérités, foit pour fe garantir de quel-
ques erreurs, ce qui va être prouvé par umexemple qui fait
le prihcipal fujet de ce Mémoire; il eft encore vrai qu'il eft
dé la derniére importance pour la Médecine; de connoitre
à fond la compofition intérieure de: chacun des Sublimés
DES SCTENCE,s, 263
eorrofifs qui ont été faits fuivant des procedés différents.
Quoique cette préparation chimique foit le plus grand
de tous les poifons, & qu'en cette qualité elle ferve à tuer
quantité de bêtes incommodes, elle n’en eft pas moins utile
dans la pratique de la Médecine, foit pour l'extérieur, foit
pour l'intérieur. On fçait que c'eft un grand efcarrotique
propre à manger les chairs baveufes , à confumer les callofités
les plus obftinées dans les ulcéres, les glandes endurcies, les
verruës; qu'on en fait avec lefprit de Vin, une efpece d'huile
propre pour les chancres vénériens menacés de gangrene ;
& avec l’eau de Chaux, eau phagédenique dont on fe fert
pour nettoyer les vieux ulcéres; qu'elle entre dans les tro-
chifques de Minium, remede incomparable pour difloudre
& enlever, par la voye de la fuppuration, des glandes fcro-
phuleufes. Mais on fçait de plus qu'elle eft 1a bafe du Mercure
doux & de la Panacée mercurielle, deux des plus grands
remédes que nous ayons en Médecine, & pour la meilleure
préparation defquels nous ne devons négliger aucune des
inftructions que la Chimie eft capable de nous procurer.
Si elle nous fait voir dans la fuite, que tous les Sublimés-
corrofifs ne font compofés que de Mercure & des acides du
Sel commun, nous nous fervirons indiftinétement & fans.
fcrupule de tous ces Sublimés pour d'intérieur & pour l'ex-
térieur ; mais frelle nous dit tout de contraire fur cette com
ofition, fr elle nous avertit qu'il y a des Sublimés corrofifs,
plus corrofifs & moins faciles à être adoucis que d'autres.
mous ne nous fervirons des uns ou des autres que dans les
cas où ils conviendront davantage, & nous n’employerons,
furtout pour les préparations de Mercure doux & de la Pa-
nacée, que ceux avec lefquels l'expérience nous aura appris
u’on en doit faire, & qu’on en fait de meilleurs.
C’eft pour remplir les vüës qui viennent d’être propofées,
que j'ai commencé par faire huit différents Sublimés corro-
fifs, & que j'en ai tenté quelques autres qui ne m'ont pas
réufli comme les premiers, quoique pour un d'eux j'eufle
travaillé fur Ja foi d’un Auteur de réputation, Les premiéres
264 MEMOIRES DE L'ACADEMI3E RoyaLE
expériences que j'ai faites fur trois de mes Sublimés, n’ont
pas feulement juftifié mes doutes fur la différente compofi-
tion des Sublimés corrofifs qui réfultent de différents mé-
anges ; elles m'ont encore fourni un éclairciflement & une
décifion parfaite fur un article de l'Hiftoire de l’Académie
Royale des Sciences de l'année 1 699, dans lequel il s'agit
de la falfification du Sublimé corrofif par l'Arfénic, & d'un
moyen rapporté par différents Auteurs pour la reconnoïtre
far le champ. Nous nous arrêterons, quant à préfent, à ce
dernier article; & à égard du premier qui, pour être traité
à fond, demande un plus grand nombre d'expériences que
nous n’en avons encore faites, quoique nous en ayons déja
fait beaucoup, nous le remettons à un ou à plufeurs autres
Mémoires qui viendront dans la fuite.
Si le Sublimé corrofif ne fervoit qu'à faire périr différentes
bêtes qui nous incommodent, ou s'il n'étoit employé en
Médecine que pour l'extérieur &c.en qualité de topique, on
ne s’inquiéteroit peut-être pas tant que l’on fait, des ma-
tiéres arfénicales qu'on peut faire entrer dans fa compofition :
il eft cependant vrai, & plufieurs Auteurs célebres ont ob-
fervé que le fimple ufage extérieur de l'Arfenic étoit très-
dangereux ; que des foibleffes, des fyncopes, la fiévre, le
délire, des inquiétudes & des mouvements involontaires
dans les membres en avoient fouvent été la fuite, & que
plufieurs en étoient morts ; par confequent fi le Sublimé
corrofif, foupçonné de contenir des matiéres arfénicales , eff
fi fort à redouter, même pour l'extérieur, que n'en devroit-on
pas craindre, fi on l'employoit pour les deux remedes inté-
zieurs dont il a déja été parlé, qui préparés avec du Sublimé
corrofif bien & fidélement fait, font auflr doux & auffi
efficaces qu'ils feroient dangereux & funeftes, s'ils favoient
été avec du Sublimé corrofif mêlé d’Arfenic.
Pour être dans une parfaite fécurité fur la compofition du
Sublimé corrofif deftiné à faire des remedes extérieurs ou
intérieurs, il faudroit que tout Apothicaire fit lui-même
cette préparation ; mais malheureufement la peine qu'elle
j donne,
DIE 5 SCI EIN C'EIS 265
donne, & qui ne laifle pas d'être grande, fe trouve en pure
perte pour l’Artifte, auquel il coûte encore plus à faire, qu'à
acheter tout fait des Droguiftes qui le tirent de Hollande
& de Venife à très-bon compte; & cela, foit parce qu'il
y a dans ces lieux de grandes manufaétures de Sublimé
corrofif, & que ce qui fe fait en grand revient en général
à bien moins que la même chofe faite en petit, foit parce
que les Hollandois & les Venitiens étant poftés au milieu
de la Mer, & à portée d'avoir à bon compte chacune des
drogues néceflaires pour la fabrique du Sublimé corrofif,
ils le font à beaucoup moins de frais que chaque particulier
parmi nous, & ils peuvent auffi le lui donner à un prix
fort au-deflous de celui qu'il trouveroit à le faire chés foi.
Cela étant, il n’en faut pas davantage pour engager, au moins
le commun des Apothicaires, à acheter plûtôt le Sublimé
corrofif tout fait, qu'à le faire eux-mêmes.
Je remarquerai ici à l’occafion des manufactures de Su-
blimé corrofif de Venife & de Hollande, auxquelles le bon
marché a fait, &, fuivant toute apparence, fera toujours
avoir recours, qu'on pourroit en établir de femblables en
France, où le Sublimé corrofif fe fegoit non-feulement à
bon compte, mais encore à la vüë du Public, & par confé-
quent avec fidelité, ce qui nous difpenferoit d'avoir recours
à celui des Etrangers, dont nous ne fommes pas d'ailleurs
auffi fürs que nous le férions du nôtre. On n’auroit pour
cela qu'à choïfir un lieu fur le bord de la Mer, des eaux
de laquelle on auroit permiffion de fe fervir, ce qui épargne-
roit déja la dépenfe du fel commun, & à l'égard du Vitriof
ui eft un des ingrédiens de l'opération commune du Su-
blimé corrofif, quoique ce fel ne coûte pas beaucoup, pour
épargner encore fur cet article, je lui fubftituérois le Bol ou
YArgille, qui font toûjours d’un prix fort au-deflous de celui
du Vitriol, & avec lefquels je fçais, par ma propre expérience,
qu'on peut faire de très-bon Sublimé corrofif. I eft même
plus aifé, quand on fe fert du Mercure crud , de l'éteindre
avec le Bol ou l’'Argille qu'avec le Vitriol. Cette fubftitution
Mem. 1734 PAT
266 MEMOIRES DE L'ACADEMI1E RoyALE
pourroit toûjours fervir à diminuer le prix du Sublimé cor-
rofif, qui d'ailleurs fe faifant à la fois en grande quantité,
&, pour ainfi dire, fous nos yeux, non feulement pourroit
fe donner à bon marché, mais encore feroit moins fufpect
que celui qui vient de loin, & qui pañle par différentes mains
plus avides les unes que les autres de gain, & dont plufieurs
peuvent fe déterminer par ce motif à falfifier après coup avec
Y'Arfenic le Sublimé corrofif même forti des manufactures
de Hollande & de Venife.
Mais, dira-t-on, qu'importe qu'on le faffifie, f: par un
eflai chimique tout des plus faciles, on en peut découvrir
fur le champ la falfification ; il n’y a qu’à l'éprouver par cet
eflai avant que de l'employer. Cet expédient fera toûjours
lus aifé, & coûtera moins que s’il falloit préparer foi-même
tout le Sublimé corrofif dont on a befoin pour en faire des
remedes internes ou externes.
I eft vrai que plufieurs Auteurs, ou qui n'ont fait que fe
copier , ou qui ont été féduits par la comparaifon de quelques
expériences mal examinées, comme on le fera voir dans la
fuite, avancent, comme une vérité certaine, que la marque
infaillible du Sublimé corrofif fophiftiqué, c'eft de noircir
comme de l'encre quand on y verfe de l'huile de Tartre par
défaillance, & que celle du Sublimé corrofif qui eft bon, &
tel qu’il doit être pour fa compofition , c'eft de jaunir comme
Tor avec la mème huile de T'artre.
Mais Barchufen, dans un Livre intitulé Pyro/ophia, rejette
l'épreuve dont on vient de parler, & dit pour cela avoir
obfervé que tout Sublimé corrofif, fophiftiqué ou non,
arrofé d'huile de Tartre, jaunit, puis rougit, & enfin expolé
à l'air quelque temps, noircit. à
Quoique l'obfervation de Barchufen differe, comme on
le fera voir, de l'épreuve dont il s’agit par une circonftance,
& laiffe encore par-là quelque chofe à defirer fur la preuve
de la faufleté de cet eflai, qui ne peut être mife dans tout
fon jour que par quelques autres obfervations que j'ai nou-
vellement faites, & que je vais donner dans ce Mémoire;
DES SctrENcErE:s 267
on peut toüjours conclure aflés clairement de celle de
Barchufen, que la couleur noire qui furvient au Sublimé
corrofif arrofé d'huile de Tartre, & qu'on regardoit comme
le figne d’un mêlange arfénical, ne doit point paffer pour tel;
qu'on le reconnoïtroit plütôt, ce mélange, par une odeur
puante que l’Arfenic communique aux corps avec lefquels
il eft mêlé, & qui s'attache fortement aux doigts qui tou-
chent ces corps; qu'enfin, en attendant la découverte de
nouveaux eflais qui nous annoncent auffi fürement & avec
autant de facilité l Arfenic qui peut être mêlé avec leSublimé
corrofif, que la Noix de galle déclare le Fer ou le Vitriol
qui {e trouve dans certaines eaux , la feule marque infaillible
pour diftinguer la vérité du fait, c’eft la revivification ou
Yanaly{e.
Qui croiroit que des faits rapportés par un Auteur de
nom, tel que Barchufen, pour réfuter les prétendus moyens
de diftinguer le Sublimé corrofif fophiftiqué, faits d’ailleurs
auffi fimples & auffi faciles à répéter & à appercevoir, que
je vais démontrer qu'ils font vrais, ayent pü, je ne dis pas
{eulement être foupçonnés , mais taxés de faux, du moins en
partie, par un Chimifte de réputation & de très-bonne foi,
qui a cru être en droit de le faire dans un Mémoire pour
lequel j'ai confulté les Reoïftres de l’Académie, parce qu'il
n'a été imprimé qu'un extrait de ce Mémoire dans l'Hiftoire
de l’Académie Royale des Sciences de l’année 169 9. Ce
Chimifte, qui eft feu M. Boulduc, après avoir verfé un
grand nombre de fois de l'huile de Tartre fur du Sublimé
corrofif ordinaire, & fur un autre qu’il avoit fait avec deux
onces de Sublimé corrofif ordinaire & demi-once d’Arfenic
fublimés enfemble, dit n'avoir rien remarqué de différent
“dans lun & dans l’autre Sublimé, qu'ils-ont jauni tous deux
par le mélange de l'huile de Tartre, moins d'abord, & en-
fuite davantage ; & comme ïl trouve jufque-là parfaitement
a même chofe que Barchufen, il conclut auffl comme lui
-que l’huïle de Tartre n’apportant à lun des deux Sublimés
d'autre altération que celle qu'elle communique à l'autre,
Li ij
268 MEMOIRES DE L'ACADEM1IE ROYALE
elle ne peut être regardée comme un moyen de diftinguer
le Sublimé corrofif fophiftiqué d'avec celui qui ne l'eft point,
& doit être rejettée comme une épreuve faufle, & qui ne
peut fervir qu'à tromper.
Mais notre Auteur, après avoir declaré ce qu'il trouve
de bon & de vrai dans les faits de Barchufen, c’eft-à-dire,
de conforme à ce qu'il a obfervé, nie formellement la cou-
leur noire que contracte à l'air le Sublimé corrofif abbreuvé
d'huile de Tartre, & il la nie fur un très-grand nombre
d'expériences qui lui ont fait voir le contraire dans l'un &
dans l'autre Sublimé. 11 adjoûte même, au fujet de celui où
il étoit entré de l'Arfenic, qu'ayant commencé à jaunir avec
l'huile de Tartre, il avoit plütôt enfuite blanchi que noirci
à l'air, ce qu'il a fait voir à la Compagnie.
Si fes expériences, au lieu d'avoir été faites fur du Sublimé
corrofif en mafle, l’euflent été fur du Sublimé corrofif en
liqueur, c'eft-à-dire, diflout auparavant par ce qu'il lui faut
d’eau pour cela, je ne ferois point furpris qu’il n’y eût point
apperçü la couleur noire que cite Barchufen, & qui vient,
comme on le verra par la fuite, d’une poudre noire & très-
fine qui tombe & fe répand infenfiblement fur a furface
de la petite maffe du Sublimé, & qui, fouvent par fa finefe,
refte fufpenduë dans la liqueur furnageante, ce qui fait que
le Sublimé conferve alors fa couleur jaune ou rouge; mais
quand cette poudre tombe entiérement fur le Sublimé, &
qu'il y en a une aflés grande quantité pour couvrir toute
fa furface, on n'y apperçoit alors que du noir, & la liqueur
furnageante eft claire, au lieu qu'elle eft noirâtre, auffi-bien
que le Sublimé, quand une partie de la poudre fe précipite,
& que l'autre refte fufpenduë dans la liqueur.
Ce n’eft point à la quantité de cette poudre, mais à f
fineffe, & à la groffiéreté des parties du Sublimé corrofif,
comparées à celles de la poudre fine, & employées fous une
forme féche, qu'eft dûë la couleur noire qui fuccede en quet-
que forte à la jaune, ou à la rouge : carfi celles du Sublimé
gorrofif étoient auffi fubtiles, & avoient autant de furfaces
DES SCIENCES 269
ue les autres, comme la quantité du Sublimé furpañe in-
not celle de la poudre noire, les parties de ce Sublimé
qui feroient auffi infiniment plus nombreufes que les autres,
bien loin d'en pouvoir être alors recouvertes, commeilarrive
quand elles font plus groffiéres & plus ramafées, recouvri-
roient fi fort elles-mêmes les autres, ou les écarteroient
tellement les unes des autres, qu'elles les offufqueroient en
quelque forte, & elles les feroient fi bien difparoître à la vüë,
qu'on n'appercevroit alors que la couleur rouge ou jaune
du Sublimé, qui {e trouveroit abondamment entre chacune
des petites parties noires : aufli lorfque le Sublimé devenu
jaune par l'huile de T'artre a eu le temps de devenir noirâtre,
de la maniére qui a été dite, fi feulement avec les doigts,
on écrafe & on divife la matiére, & qu'on la délaye avee
de nouvelle eau, elle reprendra fa couleur jaune ou rouge,
qu'elle communiquera à tout le liquide, & le noir difparoîtra
d'autant plus qu'il fera plus étendu par le liquide, & que
le Sublimé aura été plus exaétement divife.
Par conféquent, lorfque le Sublimé corrofif dont on fe
fert pour faire Fexpérience, a été auparavant diflout dans
Peau, toutes fes parties y font dans une divifion extrême,
puifqu'elles y font invifibles, & quand l'huile de T'artre vient
enfuite à les précipiter fous une couleur jaune ou rouge,
quoique moins fubtiles alors, puifqu’elles fe font appercevoir,
elles compofent toûjours une poudre qui eft au moins aufü
fine que la noire, & les parties de.cette poudre noire qui,
relativement à la quantité de celles du Sublimé, font peut-
être un fur-cent, doïvent d'autant mieux difparoître, où
être moins fenfibles , que la quantité du liquide qui regne
pour lors, & qui ne fe trouvoit pas de même dans l'autre
expérience, étend & éloigne davantage ces parties noires
les unes des autres, les difperfe. & les confond plus exacte-
ment dans toute la mafle du précipité qui eft auffi lui-même
plus étendu. .
* On voit par ce qui a été dit, qu'en fuppofant que les expé-
riences de Barchufen ont été faites fur le Sublimé corrofif
LI ii
270 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE RoyarE
en fubftance, & celles de notre Auteur fur le Sublimé cor-
rofif en liqueur, ül eft facile de rendre raifon de la diffé-
rence de leurs obfervations; mais mal-heureufement notre
Auteur dit pofitivement avoir fait fes expériences comme
Barchufen, c'eft-à-dire, en verfant quelques gouttes d'huile
de Tartre fur le Sublimé corrofif en fubftance, ce qui lui
a fait voir le contraire de ce qu'a vü Barchufen, & le té-
moignage de l'Académie qu'il cite, & dont il s’'appuye,
joint à fon exacte probité, ne permet pas de douter un
moment de la verité des faits qu'il allegue.
1 réfute feulement de la différence de ces faits, & de
ceux de Barchufen, que des expériences très-fimples, & qui
paroiflent entiérement femblables & les mêmes, tant par
la maniére de les faire, qué par les ingrédiens dont on s'eft
fervi, peuvent avoir des différences très-{enfibles, & capables
d'en impofer à leurs Auteurs.
Que Barchufen eût fü, par exemple, les expériences
de notre Auteur, dans lefquelles le Sublimé devenu jaune
demeure tel, & ne noircit point à l'air; n'auroit-il pas eu
autant & plus de droit, de taxer ces expériences-là de faux,
qu'en avoit eu notre Auteur fur les fiennes, de nier formelle-
ment celles de Barchufen? Je dis autant & plus, car j'ai
remarqué à cette occafion , ‘par l'examen fcrupuleux d'un
très-grand nombre de faits, que tout concourt à juftifier
ceux de Barchufen, au lieu que rien, ou prefquerien ne parle
en faveur de ceux de notre Auteur. J'ai obfervé partout
que le Sublimé devient ou noir, ou brun-foncé tirant fur
4e noir, ou noir en plufreurs endroits & par points, ou fr
je Sublimé conferve fa couleur jaune ou rouge, la liqueur
qui le furnage eft chargée d’une poudre noire qui le fait,
de maniére que, fuivant mes obfervations, ce qui armive le
plus généralement, pour ne pas dire toüjours ou prefque
toûjours, eft entiérement conforme à ce qu'a obfervé Bar-
chufen; & à l'égard des faits de notre Auteur, je les regarde
comme une exception à la regle générale & ordinaire. C'eft
cependant fur ces faits qu'on a voulu donner lexclufion
aux autres.
DIE.S SCIENCES. 275
- Avant que d'entrer dans le détail de ceux qui ont été
annoncés dans ce Mémoire, pour rétablir & confirmer la
vérité des obfervations de Barchufen, il eft à propos de faire
fentix ce qui manque à ces obfervations pour être une preuve
décifive, & tout-à-fait concluante contre le prétendu moyen
de diftinguer le Sublimé corrofif fophiftiqué, de celui qui
ne l'eft pas.
Les différents Auteurs qui enfeignent & prefcrivent ce
moyen, & dont j'en ai lü plufieurs, s'expliquent tous de
même, fur la maniére de difcerner le bon Sublimé, du mau-
vais. Cette découverte, felon eux, eft prompte, & fe fait
fur le champ, par quelques gouttes d'huile de Tartre verfée
fur le Sublimé. Ils ne difent pas que le Sublimé fophiftiqué
commence par jaunir & rougir, & ne noircifle enfuite
qu'après avoir été expofé quelque temps à l'air; en ce cas,
l'épreuve ne fe feroit pas fur le champ, & feroit bien plus
longue qu'elle ne paroït l'être par l’expofition qu'ils en font.
Is difent tout fimplement qu’en verfant de l'huile de Tartre
{ur le Sublimé, s'il eft bon ül jaunit, & s’il eft alteré il noircit;
& comme le bon jaunit auffi-tôt qu'on y verfe l'huile de
Tartre, le fophiftiqué doit auffi noircir par-là dans l'inftant,
S'ils euffent prétendu que le Sublimé fophiftiqué ne noircit
qu'après être devenu jaune & rouge, & dans un certain
efpace de temps, ils n'euffent pas manqué de le dire, ou
plütôt comme l'épreuve n'auroit pas été momentanée, ils
euflent pà voir par eux-mêmes, que tout, ou prefque tout
Sublimé corrofif arrofé d'huile de Tartre noircit à la longue,
& le peu d'apparence qu'ils euflent trouvé à fuppofer en
conféquence, que tout Sublimé qu'on expofe en vente eût
été mêlé d’Arfenic, leur auroit donné occafion d’examiner
la chofe de plus près, & d'en découvrir la verité. Mais il
y a lieu de croire, comme on le fera voir dans la fuite,
que quelques expériences leur avoient fait voir d’abord un
Sublimé corrofif qui, fans avoir jauni & rougi auparavant,
étoit devenu tout d'un coup noir par le mélange de l'huile
de Tartre; & comme ils fçavoient que le Sublimé corrofif
272 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royarr
ordinaire, & qui eft bien fait, jaunit toüjours auffi-tôt avec
l'huile de Tartre, & qu'ils ne s’étoient pas donné le temps
d’appercevoir la couleur noire qui vient enfuite par deflus
la jaune ou la rouge, ils avoient conclu de ces deux expé-
riences faites à la hâte, la marque alleguée du bon & du
mauvais Sublimé.
En effet, s'ils n’euflent jamais eu d'exemple de Sublimé
corrofif capable de devenir noir dès qu'on y jetteroit de
l'huile de Tartre, & cela fans jaunir auparavant, ils n’euffent
jamais imaginé ce fait, & ils l’euflent encore moins donné
comme une regle pour reconnoître le mauvais Sublimé cor-
rofif. Or comme l'obfervation de Barchufen ne roule que
fur des expériences dans lefquelles le Sublimé corrofif jaunit
& rougit toüjours avant que de noircir, peut-être dira-t-on
que l'induétion qu'il en tire contre l'épreuve du Sublimé
corrofif arfenical où le noir vient d’abord fans avoir été
précédé de jaune, peche dans fon principe, c'eft-à-dire, par
le défaut de conformité, & n'étant point par-là applicable
à cette épreuve, elle eft incapable de lui faire aucun tort;
tout ce qu'on en peut induire, adjoûtera-t-on, c'eft que
dans tous les cas où le noir vient à la fuite du jaune ou du
rouge, ce noir ainfi précédé n’eft point un indice d’arfenic.
Il eft vrai que, fuivant les expériences de Barchufen, &
même de fon antagonifte, le Sublimé corrofif fophiftiqué
ou non, reçoivent l’un & l’autre de l'huile de Tartre, pré-
cifément & en tout les mêmes altérations, ce qui fembleroit
devoir décider, qu’inutilement a-t-on recours à lhuile de
Tartre, pour reconnoître le bon ou le mauvais Sublimé,
& que cette épreuve ne peut qu'induire en erreur, à quoi
peut-être répondra-t-on encore que fi l'huile de Tartre ne
manifefte point l’efpece de mêlange arfénical que notre Au-
teur a fait entrer dans fon Sublimé corrofif fophiftiqué, elle
en découvre d’autres plus fufceptibles de l'épreuve de cette
huile, ce qui pourtant, à vrai dire, eft plütôt un échappatoire
qu'une réponfe; mais enfin pour ne rien laifler à defirer fur
Ja vérification de cette épreuve, & pour fouftraire, s’il eft
poffible,
* DES "SCI EUN CES C4 À
poffible, toute reffource à la chicane qui n’en manque guéres,
füur-tout lorfqu'il s'agit de préjugés établis de longue main,
& quiont acquis une efpece de titre de loi en vieilliffant;
il feroit à fouhaiter qu'on püt découvrir la maniére de faire
un Sublimé corrofif que l'huile de Tartre ne jauniroit, ni
ne rougiroit point, mais qu'elle noirciroit aufi-tôt; a con-
noiflance qu'on auroit de la compofition de ce Sublimé,
jufqu’ici inconnuë pour cet effet, apprendroit bien-tôt fr
l'Arfenic auroit part ou non à la couleur noire qui arriveroit
d'abord, & fans avoir été précédée de jaune ou de rouge.
J'efpere qu'on trouvera un éclairciflement entier fur ce fujet
dans plufieurs des expériences qui vont être rapportées.
J'ai commencé mes expériences fur deux Sublimés cor-
rofifs, dont l'un avoit été fait avec parties égales de Vitriof
calciné, de Sel décrépité & de Mercure diflout par Fefprit
de Nitre, & réduit en fel par lévaporation ; & l’autre avec
parties égales de Sel décrépité & de Mercure diflout par l'huile
de Vitriol: mais comme j'ai lieu de foupçonner que dans les
deux Sublimés réfultants des deux mêlanges rapportés, le
Mercure n'eft pas pénétré des feuls acides du Sel commun,
mais d’une Eau régale dans Fun, & dans l’autre d'un mêlange
d'acide vitriolique & d'acide du Sel commun ; & comme je
voulois voir & comparer ce que mes effais feroient auffi {ur
le Mercure pénétré par les feuls acides nitreux, & fur celui
qui n’en contient point d’autres que ceux du Sel commun;
je me fuis fervi pour l'un, de la maffe blanche qui refte après
la diflolution du Mercure par l'efprit de Nitre, & l'évapo-
ration de la partie aqueufe de cette diflolution, & j'ai em-
ployé pour l'autre un Sublimé fait avec deux parties de Sel
commun décrépité, deux parties de Vitriol calciné, & une
partie de Mercure coulant, le tout bien mêlé par la tritu-
ration avant que de le faire fublimer. Je fçais bien qu'on
pourra dire que le Vitriol qui fait partie du mélange, peut
communiquer. quelques-uns de fes acides au Mercure, qui
en réunira par-là de deux fortes ; mais en attendant que
de nouvelles: expériences m'ayent donné lieu, de vérifiez
Mem, 1734 . Mm
274 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
parfaitement ce fait, je puis toûjours dire, fur de bonnes
preuves , que fi dans cette opération le Vitriol a fait pafler
dans le Mercure quelques-uns de fes acides, ils n'y font pas
en grand nombre, & que ce Sublimé eft celui de tous où
Yon peut moins foupçonner alliage des acides du Sel come
mun avec ceux d'autres fels.
J'ai donc fait ufage de ce Sublimé pour mes expériences,
mais il eft à remarquer que qui le feroit refublimer une où
plufieurs fois encore, après l'avoir mêlé chaque fois avec de
nouveau Vitriol calciné & de nouveau Sel décrépité, don-
neroit lieu aux eflais d'y produire toüjours de plus en plus
des effets différents, & qui rentreroïent dans ceux des autres
Sublimés corrofifs dont il a été parlé ; & comme nous
n'avons befoin, quant-à-préfent, que des effets dont ce
Sublimé qui ne l’a été qu'une fois eft fufceptible, ce fera
particuliérement fur le produit de cette premiére fublimation
que nous nous exercerons.
À l'égard du fel de Tartre & des autres fels fixes qui ont
été mélés les uns après les autres avec chacune des quatre
préparations mercurielles dont on vient de parler ; prévenu
déja par d'autres expériences & obfervations rapportées dans
deux Mémoires fur les différentes cotileurs des précipités
du Mercure, imprimés dans les Mémoires de Académie des
années 1712 & 1714; prévenu, dis-je, par ces expériences:
& ces oblervations, que les différentes couleurs qu’acquiert
le Mercure par le mêlange des différents Sels alkalis qu'on y
mêle, viennent toûjours de quelque chofe que ces Sels
communiquent au Mercure, fans quoi il paroîtroit fous une
forme blanche qui eft celle qu’il a naturellement & indé-
pendemment des Sels alkalis, quand il eft pénétré d’acides;
fçachant d'ailleurs, & par la différence des expériences de
notre Auteur & de celles de Barchufen, &par quelques autres
de ma façon, que deux fels fixes d’une même efpece, & qui
ne paroiffent avoir entr'eux aucune différence, en apportent
fouvent de très-fenfible dans les mêmes expériences où
chacun d'eux a été employé; j'ai obfervé avec foin ce que
D'E'S: SC EN CES) 27$
chaque efpece de Sel fixe pris en différents états, étoit
capable de faire avec chacune de nos préparations mercu-
rielles. J'ai diflingué du fl de Tartre anciennèment fait,
d'autres fels de Tartre faits nouvellement par moi-même, &
cela parce que dans quelques cas j'y ai apperçü des variétés
d'effets qui feront remarquées.
J'aï calciné du Fartre blanc & du Tartre rouge, de chacun
defquels j'ai tiré un fel parfaitement femblable par fa nature,
& qui la été auffi par fes effets ; ainfi cette diftinétion n’en-
trera plus en ligne de compte pour nos expériences.
J'ai encore fait du fel de Fartre de deux façons. Dans
Tune, après que le Tartre avoit été bien brûlé & calciné,
j'avois fait bouillir la matiére avec beaucoup d'eau, dans une
baffine de cuivre, puis j'avois pafié la liqueur au travers d'un:
filtre, & je m'en étois fervi de cette maniére pour mes expé-
riences. Maïs faifant enfuite réfléxion, r.° Qu'on pouvoit
foupçonner la liqueur qui avoit bouilli dans un vaiffeau de
cuivre, d'en avoir détaché quelques parties capables d’'influer
dans les expériences: par leurs effets qu'on attribuéroït mal
à propos aux fels. 2.° Qu'il eft très-poffible que les fes
fixes de là liqueur, en bouillant avec le mate du Tartre,
chargent de quelques matiéres noires & fuligineufes que Le
feu en avoit féparées, & qui s’y rejoignent pendant l'ébul-
lition ; j'ai fait recalciner de nouveau T'artre, je l'ai mis dans
une terrine de grès, j'y ai verfé de l’eau toute bouillante &
qui venoit de bouillir dans un grand coquemarre de terre
non vernifié. J'ai enfuite coulé Îa liqueur, qui comparée
pour fes effets à l’autre folution de fel de Tartre, à bierr
produit quelques variétés, mais rien d'eflentiellement diffé:
rent, en un mot lune & l'autre folution ont noirci le Su-
blimé corrofif; ce qui ne peut être imputé aux parties de
cuivre communiquées à la folution , car fr cela étoit, celle
qui n'a point été faite dans des vaifleaux de cuivre, ne devroit
pas produire de noir comme elle le fait. If eft vrai qu'er
quelques cas elle en produit moins que l'autre folution, &
lenoir n'arrive pas fl promptement, parce que n'ayant pas
m i}
276 MEMOIRES DE L'ACADEMYE ROYALE
bouilli de même avec fon marc, elle n’en a point enlevé Ta
même quantité de parties noires propres à couvrir & noircir
le Sublimé : & en effet qu’on faffe bouillir de l’eau dans un
oëlon, qu’on la verfe enfuite dans une terrine de grès fur
du Tartre bien brülé & calciné, qu'on ne l'y fafle pas bouillir,
mais feulement infufer, qu’on coule enfuite la liqueur, &
qu'on la mette en œuvre, on remarquera qu'elle fera parfai-
tement la même pour fes effets que celle dont l'eau, après
avoir bouilli d’abord dans un vaifieau de terre non-vernifié,
a été verfée & laiffée en infufion fur une autre portion du
même Tartre brülé & calciné de l'expérience précédente ; &
fr après avoir fait bien bouillir du Tartre calciné dans un
vaifieau de terre non-verniflé avec de l'eau , on compare la
folution filtrée qui en réfulte avec celle du même Tartre qui
a été faite dans un vaifleau de cuivre où elle à bouilli de
même, & d’où on l'a verfée auffi-tôt après pour la filtrer,
on reconnoitra encore dans l’une & dans Fautre folution par-
faitement les mêmes effets ; d’où il paroît que le cuivre n'a
aucune part à ceux de la folution du {el de T'artre ou de tout
autre fel fixe qui y a bouilli, & que c’eft au marc de Ja
matiére & à l'ébullition, que ce qu'il y a de particulier dans
ces effets doit être attribué.
Enfin, quand après avoir calciné du Tartre, ou toute
autre matiére végétale, on en a féparé le fel par le moyen
de l'eau qu'on a bien fait bouillir fur la matiére, comme il
eft très-poffible que la folution qui en réfulte, toute limpide
qu'elle eft devenuë par la filtration, ait tiré du marc de a
Plante, & contienne des parties qui fe diffipent, & ne fe
retrouvent plus, du moins auffi abondamment qu'auparavant
dans le fel tiré par évaporation de cette folution, & redifiout
dans de nouvelle eau, où, en formant une feconde folution,
il y a preuve qu'il dépofe toûjours quelque chofe qui fe
fépare de cette feconde folution lorfqu'on la filtre; j'ai cru
que ces deux folutions d'un même fel pourroient bien ne
pas toüjours produire parfaitement les mêmes effets, &
méritoient par-là d'être diflinguées, & miles en œuvre
= ET
DiErs SCT EN C'ÉNSI 277
féparément; qu’enfin la feconde folution dont on vient de
parler, pourroit bien avoir une grande conformité d'effets
avec une premiére folution, qui n’auroit point bouilli, mais
fimplement infufé fur le marc de fa même Plante, dont
cette feconde folution auroit tiré fon fel. On verra dans 12
fuite fi l'expérience s'accorde avec cette idée, ainfi quand je
parlerai dorefnavant de la premiére & de la feconde folution
du Tartre, de la Soude, de la Potafle, de la Cendre gravelée,
je n’entends par-là que ce qui a été dit.
J'ai encore calciné quelque temps & aflés fortement dans
un creufet, une portion de fel de Tartre reftée après l’éva-
poration de la premiére folution de ce fel, & je n'ai point
trouvé que ce fel recalciné & fondu dans l'eau, ait produit
alors d'autre effet remarquable fur nos préparations mercu-
rielles, que celui du fel que je n'ai point fait recalciner,
& que j'ai fait fondre de même dans de nouvelle eau.
Expériences fur le Sublimé coïrofif fair avec le Sel commun,
de Varriol, à le Mercure pénérré des acides
de l'efprit de Nitre.
La premiére folution d'un nouveau fel de Tartre, faite
parvébullition, a jauni te Sublimé, & peu de temps après,
la liqueur furnageante a commencé à fe charger d'une poudre
noire qui, augmentant en quantité, a rendu cette liqueur
noirître, elle étoit telle vingt-quatre heures après & dans
1 fuite, pendant que la male étoit, au bout de ces vingt-
quatre heures, & dans la fuite auffi, d'un jaune d’or, mais
un peu fali par le noir de la liqueur : cette folution un pew
ancienne n'a plus agi fi vite ni fi fort pour ce qui regarde
a couleur noire, qu'elle faifoit auparavant. -
La feconde folution du fel de Tartre, recalciné dans un
icreufet, a jauni, puis rougi le Sublimé, qui eft enfm de-
wenu noir, la liqueur furnageante étant un peu rougeâtre,
À caufé d’une petite portion de poudre rouge qui y étoit
reftée fufpenduë. ; ; |
M m iij
278 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLE
La folution d’un ancien fel de Tartre, a fait en cette
occafion-ci, à très-peu près, la même chofe que la feconde
du nouveau.
La premiére folution du {el de Tartre rouge, & celle du
fel de T'artre blanc, faites lune & l'autre fans avoir bouilli,.
& par fimple infufion, après avoir jauni & rougi le Sublimé
l'ont auffi noirci, fans répandre de poudre noire dans la
liqueur qui en contenoit même un peu de rouge. :
La premiére & la feconde folution du fel de la Potañle
ont fait encore à peu-près de même en tout que la feconde
folution du fel de Tartre.
La premiére folution du fel de Soude à jauni en couleur
d'or le Sublimé, & dans le même temps la liqueur furna-
geante s’eft chargée d'une pouffiére abondante d'un verd-
brun ou noirâtre, dont une partie a retombé & voltigé fur
la matiére qu'elle a falie beaucoup; mais dont elle n’a point
abfolument empêché la couleur d’or de paroïtre, quand on
remuoit la matiére, & qu'on la découvroit, en quelque
maniére, de la poudre noire qui étoit tombée, & qui glifloit
fur fa furface.
I faut remarquer que cette premiére folution du fel de
Soude ayant été gardée quelque temps, la produétion de
la poudre noire n'a été ni aufli prompte, ni aufli abondante
que quand la folution étoit nouvellement faite.
La feconde folution du fel de la Soude a d’abord rendwæ
le Sublimé fort rouge, fans que la liqueur furnageante füt
d'un verd-brun ou noir, comine avec la premiére folution;
dont le Sublimé étoit toüjours refté de couleur d'or; vingts
quatre heures après, le Sublimé de cette feconde folution
de la Soude s’eft trouvé recouvert en quelques endroits d'un:
peu de noir, & dans les autres, il avoit une couleur rouge
rouflâtre. :
La premiére folution de la Cendre gravelée a donné une
couleur jaune & orangée au Sublimé; vingt-quatre heures
après, la liqueur furnageante étoit d'un pareil jaune, mais
la matiére qui étoit au fond étoit parfemée de noir, & le
piles sr 18 OAUE 1 CBS] 279
jaune qui étoit à côté du noir étoit plus terne & plus ob{cur
qu'auparavant.
La feconde folution de la Cendre gravelée a produit, à
peu-près, le même effet que la premiére pour le rouge, fur
lequel elle a enfuite répandu une couleur brune-grifatre, ce
qui, avec le rouge, faifoit un rouge gris-brun.
La Pierre à cautere eft, comme on fcait, le fel de la
Cendre gravelée, animé des parties de feu de la Chaux,
avec laquelle on le fait tremper & bouillir dans l'eau ; 1a
folution de cette pierre verfée fur le Sublimé, lui a donné
une couleur jaune très-orangée, & n’a differé en cette occa-
fion-ci de la fimple folution de la Cendre gravelée, qu'en
ce que vingt-quatre heures après, la matiére du Sublimé étoit
un peu moins parfemée de noir, & d'un jaune un peu plus
apparent que celle de la folution de la Cendre gravelée, Ia
liqueur furnageante le Sublimé de 1x folution de {a Pierre
à cautere, étoit auffr d'un jaune-orangé & non noire.
La folution du Nitre fixé par les charbons, a jeuni, puis
rougi le Sublimé qui, dans la fuite, eft devenu très-noir.
En verfant la folution de chacun des Sels fixes, dont on
vient de parler, fur le Sublimé corrofif fait avec le Sel com-
mun& le Mercure pénétré des acides vitrioliques, & répé-
tant de la même maniére fur ce Sublimé, toutes les expé-
riences qui ont été faites fur l'autre, dont on vient de parler,
tout y eft fi exaétement femblable, & toutes les circonftances
fe trouvent fr fort les mêmes dans chacune des expériences
faites fur lun & fur l'autre, que d'avoir rapporté ce qui s’eft
paflé dans les mélanges de l'un des deux Sublimés avec diffé-
rents Sels, c'eft annoncer ce que ces différents Sels font.
capables de produire fur fautre; nous ne nous étendrons:
donc pas davantage fur fon fujet. love
:: Quand on confidére que de noir de chacune des expé-
riencesquiontété rapportées, différe en quantité, en qualité,
€ par la partie du mélange où il fe loge, & que cette diffé-
sence répond non-feulernent aux différents Sels qui ont été
‘employés, mais encore aux différents états d’un même Sel,
* Pag, 190.
& Jui.
80 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
à la différente provifion, ou à la perte qu'il a pû faire de
certaines parties qu'il dépofe plus ou moins abondamment,
& qui plus ou moins légéres, couvrent la furface du Sublimé,
ou fe tiennent confonduës avec le peu de liqueur qui le
furnage, on eft porté à croire que tout le noir qui furvient
au mélange, vient des fels qui y font entrés. Cependant,
comme on fçait par une longue expérience faite & rapportée
par feu M. Homberg, dans les Mémoires de l'Académie
de l’année 17 1 0*, que le Mercure même qui a été revivifié
du Cinabre, tout net qu’il paroifle, contient & donne par
chaque livre, près de deux gros d’une matiére terreule, légére,
gris-de-fouris, fans aucune faveur ni odeur, & que cette
matiére, délayée dans l'eau, la rend trouble & noire, on peut
croire auffi que le noir de chacune des expériences rapportées,
vient de cette matiére grife qui, dans chaque expérience, fe
détache plus où moins abondamment du corps du Sublimé
qui, quoique fait avec du Mercure revivifié du Cinabre, a
toûjours confervé cette matiére grile & terreufe.
Pour répandre quelque éclaircifiement fur cette difficulté,
j'ai commencé par féparer de l'un & de l’autre Sublimé dont
il a été parlé, la matiére grife dont il s'agit, & cela par une
voye bien plus courte & plus facile que celle de M. Homberg,
& qui donne tout au moins autant, pour ne pas dire beau-
coup plus de matiére grife que la fienne. Voici de quelle
maniére je m'y fuis pris.
J'ai mis une demi-once deSublimé corrofifdansun mortier
de marbre, j'y ai verfé en cinq reprifes différentes, dix onces
d’eau, c’eft-à-dire, deux onces chaque fois, remuant à chacune
l'eau & le Sublimé enfemble, pour en opérer la diffolution;
après quoi je verfois par inclination la liqueur, avec ce qui
avoit été diflout, remettant enfuite fur la matiére une égale
quantité de nouvelle eau, & répétant toûjours la même
manœuvre jufqu’à la fin de la diffolution totale du Sublimé,
que j'ai faite par partie, au lieu de la faire toute à la fois en
verfant tout d’un coup les dix onces d’eau fur la demi-once
de Sublimé, & cela pour appercevoir à chaque fois la couleur
de la
DES: 1ÉNCATLEUNT ci ENS! 28%
de la matiére reflée dans le mortier, après que Îes deux
derniéres onces d'eau qui venoient d'y pafler en avoient
enlevé une portion, & pour examiner par-là plus exaétement
toutes les circonftances de cette expérience, qui confiftent
en ce que dès qu’on a eu verfé en deux fois quatre onces
d’eau {ur le Sublimé, la maffe reftante a paru moins blanche
qu'elle ne l'étoit auparavant ; qu’elle la paru encore moins
après qu’on a eu verfé en trois fois fix onces d’eau ; qu'après
huit en quatre fois elle eft devenuë noirâtre, & qu'aprègdix,
il eft refté au fond du mortier une matiére terreufe LT
indiffoluble , & parfaitement femblable à celle de M. Hom-
berg, mais qui la pafloit de beaucoup en quantité. J'ai cru
que cette voye prompte & aifée de féparer exactement du
Mercure les parties terreufes & étrangeres qui y font mélées,
pouvoit avoir fon utilité en certains cas, & méritoit d’être
rapportée, fuppofé qu'elle ne lait point été jufqu'ici, ce que
j'ignore parfaitement ; tout ce que je fçais, c’eft que je ne
Y'ai apprife de perfonne. :
Le Sublimé corrofif purifié de cette maniére, & réduit
fous une forme folide par f'évaporation des parties aqueufes
qui le tenoient en diflolution, a été mêlé en cet état à-
chacun des différents fels fixes auxquels il avoit déja été
avant fa purification, & dans le temps qu'il contenoit tout
ce qui en a été féparé depuis ; & il s'eft trouvé que tout
purifié qu’il étoit, chacun des différents fels fixes mis en
œuvre de toutes les maniéres dont ils l'avoient été précé-
demment, y ont porté toute, ou à très-peu-près la même
altération qu'ils avoient fait avant fa purification.
. Je dis à très-peu près, car je ne voudrois pas affûrer
pofitivement que le noir des expériences faites fur le Sublimé
corrofif purifié, le füt exaétement autant, ou aufli abondant
qu'il favoit été dans le Sublimé non purifié, ce qui don-
neroit lieu de conjecturer que ce noir pourroit venir de
deux fources plus ou moins copieufes, fçavoir 1.” de chacun
des fels fixes qui feroient employés, & qui ne font pas tous
&. en toute forte de fituation également chargés de parties
Mem. 173 4 , Nn
282 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALr
noires ou grifes-brunes, 2.° du Sublimé corrofif qui peut
être auffi plus ou moins chargé des mêmes parties.
Expériences faires fur le Mercure diffout par l'efpri
de Nitre, à réduit par l'évaporation fous la forme
d'un Sel concret.
Ce qui m'engage à rapporter les expériences que j'ai
fiteggtr le Mercure diflout par l'efprit de Nitre, & réduit
en ff concret par l'évaporation de la partie aqueufe de la
liqueur, c'eft qu'outre les preuves nouvelles qu'elles four-
niflent, du noir qui vient à la fuite du jaune & du rouge
dans le Mercure pénétré d'acides, elles nous font encore
appercevoir infiniment mieux que nous n'avons fait jufqu'ici
par les expériences précédentes, jufqu'où va la différence
des premiéres & des fecondes folutions de quelques fels, &
ces faits font aufli curieux qu'ils font clairs & évidents.
Je remarquerai d’abord, pour abréger fur les circonftances-
inutiles, que du Nitre fixé par les charbons , des fels de
Tartre blanc & rouge, anciennement & nouvellement faits,
des fels de Potafle, de Soude, de Cendre gravelée, retirés
chacun par évaporation de la premiére folution qui les avoit
enlevés au marc terreux avec lequel ils avoient été calcinés,
& étoient devenus alkalis ; que ces fels, dis-je, refondus dans.
de nouvelle eau, formant par-là chacun une feconde folu-
tion, & verfés en cet état féparément fur différentes por-
tions de Mercure pénétré des acides nitreux, y ont agi
£comme ils avoient fait fur les deux Sublimés corrofifs dont
il a été parlé précédemment, c'eft-à-dire, qu'ils l'ont promp-
tement jauni & rougi, & que le paflage du jaune clair au
jaune plus foncé, & du jaune plus foncé au rouge, a été auffi
prompt & rapide que celui du rouge au brun où au noir
a été lent & tardif.
En effet, dans le mêlange de ces fecondes folutions, avec
toutes les préparations mercurielles dont il a été parlé, y
&ormpris celle dont nous parlons aétuellement, il a prefque
D ES USIC MEN GERS 283
toûjours fallu plufiewrs heures pour le paflage du rouge au
brun ou au noir, & ce n’a fouvent été qu'après vingt-quatre
heures que la matiére a bruni ou noirci jufqu'à un certain
point, ou autant qu'elle pouvoit le faire.
D'ailleurs il eft à remarquer que toutes les fecondes folu-
tions de nos fels fixes, bien filtrées, ne répandent pas ordi-
nairement de poudre noire voltigeante dans Ia liqueur, &
que les premiéres folutions de plufieurs de ces fels qui ont
été faites avec ébullition, & qui font nouvelles, ou du
moins qui n’ont point été trop long-temps gardées, mêlées
aux deux fublimés fur lefquels nous avons travaillé, commen-
cent à peine à les jaunir, qu'elles noirciflent aufli-tôt la
liqueur qui devient dans la fuite plus ou moins noire fuivant
la quantité de la poudre de la même couleur qui s’y affemble
infenfiblement. Mais il faut bien confidérer que c’eft ordi-
nairement là tout l'effet de ces premiéres folutions fur les
deux Sublimés qui demeurent toüjours vifiblement jaunes,
& feulement falis par la poudre noire voltigeante & paffa-
gere qui tombe fur {eur furface, & qui s’en fépare facilement,
& que les fecondes folutions des mêmes fels, qui ordinaire-
ment ne répandent point de poudre noire dans la liqueur,
portent , s’il eft permis de le dire, tout leur effet de noir
ou de brun fur la mafle même des Sublimés , fur la furface
de laquelle le brun ou le noir, bien plus inhérent, cache
bien davantage la couleur jaune ou rouge qu’avoit acquis le
Sublimé avant l'arrivée du noir où du brun. C’eft-Rà ce qui
fait la différence principale des effets des premiéres & des
fecondes folutions des mêmes fels fur les deux Sublimés ; &
quoique cette différence foit affés légere, & par cela même
ne frappe guere, elle paroît d'autant plus fmguliére, quand
on la cherche dans ce qui peut la produire, qu'elle vient de
deux liqueurs aufft femblables que le font une premiére &
une feconde folution d’un même fel par la principale partie
‘de leur compoñition, je veux dire par leur partie faline, en
conféquence de lhomogénéité de laquelle une conformité
Nn i
284 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
plus grande d'effets fembleroit devoir naturellement fe ren:
contrer dans ces deux liqueurs.
Mais fi l'on à lieu d’être furpris de cette différence d'effets
des premiéres & des fecondes folutions des mêmes fels, quand
on la confidere fur les deux Sublimés corrofifs dont il a été
parlé, on a bien un autre fujet d'étonnement, quand c’eft fur
le Mercure pénétré des acides du Nitre qu'on obferve l'action
& la différence d'effets de ces premiéres & de ces fecondes
folutions.
On à déja remarqué que les fecondes folutions n'y faifoient
que ce qu’elles avoient fait fur les deux Sublimés, c'eft-à-dire,
qu'elles opéroient toûjours dans les unes & dans les autres
préparations mercurielles , un pañlage lent & tardif du rouge
au noir ou au brun, & qu'ordinairement elles ne répandoiïent
point de poudre noire dans la liqueur furnageante qui par-là
reftoit claire, ou fimplement chargée d'une petite poudre
rouge.
Pour fentir préfentement toute la différence de ces effets
des fecondes folutions d’avec ceux des premiéres fur te Mer-
cure pénétré des acides nitreux, & de combien cette diffé-
rence l'emporte dans le cas préfent fur celle qui a été obfervée
dans le cas des deux fublimés ; il n’y a qu'à confidérer que
Yaétion des premiéres folutions fur le Mercure pénétré des
acides nitreux, ne fe borne pas alors, comme dans l'autre cas,
à répandre un peu plus ou un peu moins de poudre noire
dans la liqueur furnageante prefque auffi-tôt que la matiére
devient jaune, & à différer déja par-là de l’aétion des fecondes
folutions fur la même préparation mercurielle; les premiéres
folutions ont encore ceci de particulier dans le cas préfent,
c'eft qu'elles noirciflent vrayement la matiére aufli-bien &
même beaucoup mieux que ne le font les fecondes folutions,
& de plus, avec cette différence, que la noirceur qui par les
fecondes folutions n'arrive qu'après plufieurs heures, ne de-
mande fouvent qu'un inftant fort court pour arriver par le
moyen des premiéres folutions, ce qui forme un fpeétacle
DIE :S1S:C/ITIENN GE sa 29%
curieux & fingulier ; car auffi-tôt que quelques gouttes de la
premiére folution ont été verfées fur la préparation mercu-
rielle, on voit, pour ainfi dire, en trois inftants différents la
matiére devenir d'abord jaune, paffer enfuite au rouge, &
enfin du rouge au noir, & encore à un noir abondant qui
rend la liqueur comme de l'encre, & qui s'empare fi bien
du petit tas de matiére folide qui eft au fond, qu'ordinai-
rément il en fait difparoître tout le rouge, & n’en laiffe à
la vûë aucun veftige, à moins qu'on ne verfe beaucoup d'eau
fur la matiére, & qu’on ne l’écrafe fortement avec les doi gts,
comme il a déja été dit ci-deffus. :
I eft cependant à remarquer que fuivant 1a nature de {a
matiére brülée, dont on a tiré la premiére folution dont on
fe fert, & auffi füivant que cette premiére folution eft plus
ou moins nouvelle, linftant du paflage du rouge au noir
eft plus ou moins court. Mais quoique ce paflage fe fafle
quelquefois un peu attendre, il eft cependant toûjours aflés
prompt, & même infiniment rapide, quand on le compare
& à celui qu'excitent les fecondes folutions fur les Sublimés
& fur notre préparation mercurielle, & à celui qu'excitent
fur les Sublimés les premiéres folutions elles-mêmes.
Quand ce paffage n’eft pas fi vif, comme il n'eft jamais
long avec certaines folutions dont il fra parlé, on n’en
apperçoit que mieux les trois couleurs qui fe fuccedent, &
qui prennent en quelque maniére la place les unes des autres;
mais quelquefois ce paflage qui fe fait comme celui d'un
éclair, éblouit & permet à peine d’entrevoir les trois cou-
leurs qui femblent à la vüë s’aller perdre & noyer au plütôt
dans le noïr.
I eft encore à remarquer que les premiéres folutions de
toute matiére végétale quelconque ne produifent pas le paf
fage fubit du rouge au noir dont on vient de parler. La pre-
miére folution entr'autres de la Potafle, du moins celle dont
je.me füis {ervi, n’a agi fur le Mercure pénétré des acides
nitreux, & même fur les deux Sublimés, que comme le font
toutes les fecondes folutions des {els dont il a été parlé,
Nniy
286 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLE
Parmi les premiéres folutions avec lefquelles j'ai vû opérer
le paflage fubit du rouge au noir, quand elles ont été faites
avec ébullition, celle qui m'a toùjours paru demander un
peu plus de temps que les autres pour fon opération, c'eft
la premiére folution de la Cendre gravelée ; le noir même
qu'elle répand dans la matiére, eft moins abondant que celui
des autres, & c’eft pour cela que la liqueur furnageante de
cette expérience, au lieu d'être noire, étoit claire.
Avec les premiéres folutions de fel de Tartre & de fel
de Soude, verfées féparément fur deux portions de la pré-
paration mercurielle, l’arrivée du jaune &g le paflage du jaune
au rouge, & du rouge au noir, fe font faits plus vite que
dans l'expérience précédente , mais ils fe font daiflé diftin-
guer ; & dans ces deux mélanges le noir a été encore bien
plus abondant que dans le précédent , auffi la matiére du
fond en 2-t-elle été toute recouverte, & la liqueur en eft-elle
devenuëé comme de l'encre.
Je remarquera à cette occafion que la premiére folution
de fel de Soude avec laquelle J'ai fait la premiére fois l'expé-
rience dont on vient de parler, me manquant prefque, &
n'agiflant plus avec la même vivacité que devant, parce
qu’elle étoit devenué ancienne; j'ai fait bouillir à différentes
reprifes dans l'eau une même quantité de la Soude que j'avois
déja mife en ufage, & j'ai fcrupuleufement obfervé pour
chacune de ces premiéres portions de fel de Soude , la même
manœuvre dont je m'étois fervi d’abord, cependant il eft
arrivé, malgré cette attention, que deux de ces premiéres
portions n'ont pas plûtôt fait venir le noir dans l'expérience
dont il s’agit, que le fait la feconde folution du {el de Soude,
ce qui prouve combien les circonftances qui font réuflir cette
expérience font délicates & faciles à manquer.
Enfin de toutes les liqueurs, celle avec laquelle j'ai vû le
noir fuccéder le plus promptement aux deux autres couleurs,
c'eft la folution de la Pierre à cautere. Dès qu'on a mélé
quelques gouttes de cette liqueur à notre préparation, on
apperçoit bien un peu le jaune qui vient d'abord, mais le noir
, DE s ,:S'C/LE NN CE S 28
fe prefle fi fort d'arriver enfuite, qu'il pafle, pour ainfi dire,
par deflus le rouge, & le fait difparoître dans l'inftant ; ce
n'eft cependant pas par l'abondance du noir qu'excite la
folution, que ce noir arrive fitôt, mais par la vivacité &
l'action brülante du fel que contient la folution; & en effet,
après l'expérience qui dure bien peu de temps à fe faire, la
liqueur qui furnage la matiére du fond, fe trouve claire, &
cette matiére fe trouve auffi moins noire que celle de la
premiére folution de la Soude ou de celle du T'artre.
On remarquera que malgré tout ce qui vient d’être rap-
porté de la folution de la Pierre à cautere, ce n’eft point
une premiére folution, ce n’en eft réellement qu'une feconde,
& qui agit plus vivement qu'une premiére, mais il faut ob-
ferver que le fel de cette folution étant celui de la Cendre
gravelée, il contient déja les parties de feu que ce fel à
amaflées, & il y réunit encore celles qu'il a tirées de 1a
Chaux avec laquelle il a été mêlé, ce qui lui donne {a pro-
priété âcre & brülante qu'il n’avoit pas, du moins dans un
auf haut degré, étant fimplement {el de Cendre gravelée,
& que n'ont point auffi tous les autres fels fixes. Par cette
opération de la Pierre à cautere, la Cendre gravelée, dont
la premiére folution agifloit avec moins de promptitude pour
1 production du noir, que les premiéres folutions du fel de
Tartre & de celui de Soude fur le Mercure pénétré des acides
nitreux, devient, comme on voit, plus aétive à.cet égard que
ces deux Solutions, ce qui m'a paru mériter d'être remarqué,
Expériences fur le rroifiéme Sublimé fait avec le Mercure
coulant , le Vicriol êr le Selcommun, fuivanr les dofes
+ cy-devant rapportées.
Voici encore d’autres expériences nouvelles, très-diffé-
rentes de toutes celles qui les ont précédées, & abfolument
néceflaires pour l'éclairciflement complet que je me füis
propofé de donner dans ce Mémoire fur l'épreuve prétenduë
du Sublimé corrofif.
288 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
J'ai donc fait, ainfr qu'il a été dit, du Sublimé avec le
Mercure coulant, le Vitriol & le Sel commun. J'ai verfé {ur
différentes portions de ce Sublimé, qui étoit fort blanc,
toutes les liqueurs alkalines employées dans les expériences
précédentes ; la plus grande partie de ces liqueurs l'ont for-
tement noirci tout aufli-tôt, quelques-unes n’ont fait que le
brunir, & encore après un peu de temps, mais elles l'ont
toûjours rendu par-là très-différent de ce qu'il étoit aupa-
ravant ; & avant que le noir ou le brun fuccédit au blanc de
toute la matiére, & en prit la place, aucune de ces liqueurs,
ce qui eft à remarquer, n'y a fait naître du jaune ou du
rouge, ni rien qui en approchât, comme dans les expériences
précédentes.
I n’a point été queftion avec ce Sublimé, de ladiftinétion
d'effets des premiéres & des fecondes folutions à l'égard de
la liqueur furnageante, & de la petite maffe qui étoit au
fond ; c’eft le Sublimé feul qui en a reçû l'impreflion, & le
noir s’eft fi peu répandu dans la liqueur qui le furnageoit,
& a été fi peu en état de s’y répandre & d'y demeurer,
qu'en verfant encore un peu d’eau fur la matiére, l'écrafant
& la remuant avec les doigts, la liqueur n’en a pas acquis
pour cela la couleur du Sublimé, comme elle le fait en pareil
cas, avec les deux autres Sublimés dont il a été parlé, &
dans lefquels il fe forme toûjours une pouffiére fine & aflés
légere, pour occuper, du moins pour un temps, l'étenduë de
la liqueur, & ne s’en pas précipitéésæhinftant.
Les premiéres & fecondes folutions qui ont véritablement
noirci le Sublimé, & qui l'ont fait fur le champ, ce font
celles 1.” de plufieurs fels tirés depuis peu & de différentes
maniéres du Tartre rouge & du Tartre blanc, 2° les deux
folutions du fel de Ia Cendre gravelée qui avec les autres
Sublimés ne produifoient prefque point de noir, 3.° celles
du Nitre fixé par les charbons, & enfin celles du fel de la
Soude, qui eft celui qui a d’abord noirci plus que tous les
autres, & dont le degré de noirceur eft toüjours refté Le
même par rapport à celui qu'avoient excité les autres fels.
La
le
a%
DES SCIENCES 28
La folution de la Pierre à cautere a aufli noirci d’abord
le Sublimé, mais moins que n’avoit fait le fel de la Soude,
& d'une nuance moindre que n'avoit fait auffi le fel de Ia
Cendre gravelée. ù
La premiére folution de la Potafle n’a d'abord rien fait
fur le Sublimé , mais quelque temps après elle l'a fortement
bruni, & en eft reftée [à dans la fuite, à la différence de Ia
feconde folution du même fel qui a promptement noirci le
Sublimé.
Je ne puis paffer ici fous filence une autre fingularité ou
bifarrerie d'expériences, qui m'a paru d’autant plus digne de
remarque, qu'elle donne naturellement lieu à une confé-
quence qui va bientôt trouver une jufte application.
Je viens d’obferver que les premiéres & les fecondes {o-
lutions de plufieurs {els de T'artre que j'avois fait depuis peu,
avoient d’abord & fortement noirci notre troifiéme Sublimé.
Cependant un fel de Tartre très-alkali, que j'avois fait auffi,
mais anciennement, & qui a fervi fous le titre d’ancien {ef
de Tartre dans les expériences précédentes, verlé fur ce
troifiéme Sublimé, incapable de jaunir & de rougir, & fuf-
ceptible feulement de noirceur par les fels fixes & lixiviels,
n'y a d'abord rien fait, & l’a feulement bruni à la longue,
mais moins que n'avoit fait la premiére folution de la Potafle ;
& ce qui fait encore paroître davantage le fingulier& l’extra-
ordinaire de ce fait, c’eft que cet ancien fel de Tartre qui,
en comparaifon des reséilés & fecondes folutions du nou-
veau fel de T'artre, fait peu de chofes fur le troifiéme Sublimé,
noircit beaucoup & autant les deux premiers Sublimés, que
le fait la feconde folution du fel de Tartre nouveau, & plus
que la premiére du même fl, & qu’encore plufieurs autres
premiéres folutions d’autres fels, qui en récompenfe agiffent
bien davantage, & plus fortement que l’ancien {el de T'artre
fur le troïfiéme Sublimé, qui femble les dédommager de ce
qu'elles ont de moins, & de ce que l'ancien fel de Tartre
a de plus qu'elles fur les deux autres Sublimés.
Mem, 1734: . Oo
290 MEMOIRES DE L'ÂACADEMIE Royare
I n’eft pas aifé de rendre raifon de cette fingularité,
non plus que de quelques autres qui ont été rapportées
dans ce Mémoire; il nous faudroit pour cela de nouveaux
faits, & de nouvelles obfervations, qui viendront peut-être
dans la fuite nous éclairer; ce n'eft que par les lumiéres
expérimentales, qu'on peut voir clair dans la Phyfique, &
ce n'eft qu'avec de pareils fecours qu'un Chimifte doit fe
permettre d'interpreter la Nature.
IE nous refte préfentement à faire ufage, & à tirer de
juftes conféquences de toutes les expériences dont il a été
parlé dans ce Mémoire.
1.” Le fait allegué par Barchufen, du noir qui fuccéde
au jaune & au rouge dans le Sublimé corrofif ordinaire arrofé
d'huile de Tartre, fe trouve parfaitement juitifié par l'aflem-
blage & le concours unanime de la multitude d'expériences
qui ont été faites fur les deux premiers Sublimés, & fur le
Mercure pénétré des acides nitreux, & cela non-feulement
avec une fimple folution du fel de Tartre, mais encore avec
ce fel confidéré en plufieurs états différents, & avec plu-
fieurs autres {els fixes confidérés aufli en différents états,
& qui tous, fans fe démentir, atteftent la vérité de ce fait ;
de maniére que fr, par une efpece de mal-entendu, il a
été profcrit, & en quelque forte dégradé dans nos Mémoires,
il s’y réhabilite par la foule d’autres faits qui dépofent claire-
ment en fa faveur.
2.° Si, fuivant nos obfervations, le fl de la Cendre
gravelée, & celui de la Pierre à cautere qui, à proprement
parler, font deux fels de Tartre, excitent bien moins de
noir dans les deux premiers Sublimés, que les autres fels
de Tartre dont il a été parlé, pourquoi le hazard n'a-t-il
pes pü faire tomber entre les mains de feu M. Boulduc, un fe
de Tartre qui y a fait encore moins que ceux de la Cendre
gravelée, & de la Pierre à cautere, c’eft-à-dire, rien du tout,
ou fi peu de chofe que l'effet n’en a point été fenfible? Le
mème hazard a bien fçù me faire retrouver un ancien fel
D Es: 181 CA: Ex NN CE 6 291
_deTartre de ma façon, qui, fur le troifiéme Sublimé feule-
ment, fait prefque l'oppolé d'autres fels de Tartre que j'ai
faits depuis; du moins, au lieu de noircir ce troifiéme
Sublimé dès qu'il y a été verfé, comme le font les autres
els de Tartre, il y demeure long-temps, ainfi que nous
venons de le remarquer, fans paroître y rien faire, & il
n'y produit à la longue qu'un petit effet en comparaifon
des autres.
Le fel deTartre de notre Auteur a donc pü être à
peu-près à l'égard de celui de Barchufen fur le Sublimé
corrofif ordinaire, qui eft celui fur lequel nos premiéres
expériences ont été faites, ce qu'a été notre ancien {el de
Tartre à l'égard du nouveau fur le troifiéme Sublimé. Cette
conjecture foûtenuë des expériences qui viennent d’être
alleguées en faveur du fait de notre Auteur, tout contra-
dictoire qu'il eft à celui de Barchufen, dont nous avons
pris la deffenfe; cette conjecture, dis-je, devient une cer-
titude, quand on fait réfléxion que M. Boulduc à fait voir
en pleine Académie, la vérité du fait avancé contre celui
de Barchufen.
Enfin les expériences faites fur notre troifiéme Sublimé
ui ne contient point d'Arfenic, & qui cependant noircit
d'abord, & fortement, dès qu'on y verfe la folution de
quelque fel fixe, non-feulement nous fourniffent une preuve
complette & décifive de la faufleté du moyén dont on s'étoit
avifé de fe fervir, poux diftinguer & reconnoître le Sublimé
corrofif fophiftiqué d'Arfenic, mais elles nous indiquent
encore de quelle maniére, & par quelle avaniure cette erreur
a pü fe glifler, & s'établir, comme elle a fait, pour une
vérité. Suppofons qu'un Sublimé parfaitement femblable à
notre troifiéme Sublimé, foit tombé entre les mains de
quelque Chimifle, capable d'en impofer par fa réputation
de probité, & que de fhuile de Tartre répanduë par cas
fortuit fur ce Sublimé l'ait aufli-tôt noirci; ce Chimifte qui
avoit fait plufieurs fois du Sublimé corrofif ordinaire avec
Oo ij
2902 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
le Vitriol, le Sel commun, & le Mercure diffout par l'efprit
de Nitre, & qui avoit remarqué que dans l'inftant qu'on
verfoit de l'huile de Tartre fur ce Sublimé, il ne noircifloit
pas, mais jaunifloit ou rougifloit, n’a pas manqué de faire
fes réfléxions fur la fingularité du nouveau fait qui, pour
ainfi dire, s’étoit préfenté de lui-même à fa vüë, & fans
qu'il l'eût cherché; & la prévention bien ou mal fondée où
Yon a toûjours été, & où l’on eft encore, de la fophiftica-
tion du Sublimé corrofif par l’Arfenic, lui ayant fait ima-
giner que ce nouveau Sublimé qui ne jaunifloit ni ne rou-
gifloit point par l'huile de Tartre, pourroit bien ne devoir
fa couleur noire, qu'au mêlange de l'Arfenic ; il y a lieu
de croire que cette idée lui a tellement plü, qu'il a trouvée
fi jufte, & l'a faifie de maniére qu'il n’a pas même daigné
la vérifier par l'expérience, & que la confiance avec laquelle
il la diftribuée comme un fait conftant, & une découverte
de fa façon, a pü faire croire aux autres, qu'il s’étoit affuré
par l'expérience, de la vérité de la chofe, & qu'il feroit
dorefnavant inutile de la vérifier de nouveau. C'eft appa-
remment ainfr que l'huile de Tartre eft devenuë l'épreuve
du Sublimé corrofif; celui qui en a d’abord été noirci, a
été taxé d’être arfenical, & chaque Auteur ayant avancé
Ja même chofe fur la foi les uns des autres, cette erreur
méconnuë, & prife pour une vérité conftante, s’eft ainff
perpétuée jufqu'à nous, & pourroit fubfifter encore telle,
fi le hazard ne s’en étoit peut-être mêlé, c’eft-à-dire, fi la
fuite de quelque expérience faite à loccafion de toute autre
chofe que de cette erreur, ne fe füt heureufement trouvée
propre à jetter de la défiance fur fon compte, à la faire
entrevoir pour ce qu'elle eft, & à donner lieu à de nouvelles
expériences, dont les conféquences conftatafient davantage
cette erreur. Quant à moi, je fçais parfaitement que dans
prefque toutes les expériences que j'ai faites & avancées,
foit pour la juftification de Barchufen, foit pour démontrer
la fauffeté de l'épreuve du Sublimé corrofif par l'huile de
DIET s: 1-01 ENT CEST 6 29
Tartre, je n'avois pour objet, en les faifant, ni la jufifr-
cation de Barchufen, ni l'épreuve en queftion.
Quoique le noir fubit qu’acquiert notre troifiéme Sublimé
par l'huile de Tartre, ne prouve rien moins qu'un mélange
arfenical dans ce Sublimé, il peut cependant être regardé
comme une preuve certaine que ce Sublimé peche par un
autre endroit. Et en effet, quand on lexamine, on découvre
qu'il n'eft point difloluble par l'eau, & qu'il a bien moins
de force & de corrofion que celui qui s'y diflout. Qu'enfin
quand on le fait refublimer affés de fois, & toûjours avec
du Vitriol calciné, & du Sel décrépité, les nouveaux acides
qu'il acquiert par-là le rendent alors difloluble dans l’eau,
beaucoup plus corrofif qu'il n'étoit auparavant, & fuf
ceptible à f'inftant, comme les autres Sublimés corrofifs,
de la couleur jaune & rouge, par le moyen de l'huile de
Tartre; de maniére qu'à proprement parler, la couleur noire
qu'excite d'abord cette liqueur fur un Sublimé, ne prouve
autre chofe, finon qu'il eft trop peu chargé d'acides pour
être difloluble, & avoir le degré d'activité & de force du
Sublimé corrofif ordinaire; aufli voyons-nous que le Su-
blimé corrofif le plus fort, le plus aifément diffoiuble dans
l'eau, & celui qui jaunit & rougit davantage par l'huile
de Tartre, ayant été adouci par la perte de fes acides, &
devenu par-là indiffoluble dans l'eau, tel que le Mercure
doux, & a Panacée, ne contraéte plus à l’'inftant ni jaune
ni rouge, mais une couleur très-noire, par la folution du
fel de Tartre, ce qui arrive encore de même au précipité
blanc qui, faute d'un affés grand nombre d'acides, ne fe
foûtient plus dans l'eau, comme il faifoit avant fa précipi-
tation, & lorfqu'il en contenoit davantage.
Je finirai ce Mémoire par une réfléxion, c’eft. qu'il eft
tout-à-fait trifte que la voye des expériences, dont on
tire de fi grands éclairciffements, quand on fçait en faire
ufage, donne fouvent lieu à de faufles induétions, & par
conféquent à des erreurs d'autant plus dangereufes qu'elles
o ii
_
294 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLrE
s'établiffent fur le pied de vérités inconteltables : & quoique
la découverte de ces erreurs foit moins brillante, & flate
moins fon Auteur, que celle de quelque vérité; foit pure-
ment curieufe, foit utile, foit l'un & l'autre à la fois; ce-
pendant fi lon pefoit d’une part les inconvénients de ces
erreurs, & de l'autre les avantages de certaines vérités, on
reconnoitroit peut-être qu'il vaudroit fouvent mieux fe
défaire des unes, que de faire Ne in des autres.
89%
MORT
plats 'SACILIEN CE 295
RECHERCHES SUR LE TOUR.
SEOGOOND MÉMOIRE.
Par M. DE LA CONDAMINE.
Examen de la nature des Courbes qui peuvent fe tracer
par les mOuventents du Tour.
N°: fappoferons dans ce Mémoire toutes les notions
préliminaires que nous avons données dans le précé-
dent, concernant le Tour figuré, & fa principale piece
appellée Rofctte.
Outre toutes les différentes fituations qu’on peut donner
à l'outil, qui changent, comme on a vü, la figure tracée
en confervant la même Rofette, le contour de la Rofette
pouvant lui-même être varié à l'infini, il eft clair par ce qui
a été expliqué, que l’on peut tracer fur le T'our une infinité
de Courbes différentes; mais comme la Courbe tracée quelle
qu'elle puifle être, a dans toutes fes fituations poffibles de
Toutil, un rapport néceflaire & dépendant du contour de
la Rofette qui la produit, c’eft ce rapport qu'on fe propofe
d'examiner ici, & par-là de connoître en général la nature
des Courbes qu'on peut tracer fur le Tour, en regardant
comme connuës celles qui forment le contour de la Rofette.
Outre le mouvement de rotation fur l'axe qui fait l’eflence
du Tour fimple, & qui eft commun à tous les Tours, &
le mouvement de parallelifme qui eft particulier au Tour
figuré ordinaire, qu'on peut nommer Zour à Rofette; j'ai déja
remarqué que l'arbre du Tour pouvoit recevoir un troifréme
mouvement dans la direction de fon axe. Ce mouvement,
à l’aide d'une feconde touche, d’un fecond reflort, & d’une
piece appellée Couronne, qui fait en ce fens l'office de Rofette,
fertà exécuter des creux & des reliefs für le plan de l'ouvrage.
296 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
La plüpart des Tours figurés ont ce troifiéme mouvement,
& cette méchanique eft à peu-près celle d’un Tour fort in-
génieux & commun en Allemagne, ‘dont on fe fert pour
- copier des médailles. On conçoit que dans un Tour qui a
* Recherches
Jar les Courbes à
double courbure,
Paris. 1730.
ces trois mouvements, & qu'on peut appeller Zour à Rofette
& à Coironne, la pointe de l'outil change de plan, & que
par conféquent la Courbe tracée devient à double courbure.
Le principal but qu’on fe propofe dans ce Mémoire, eft
d'examiner la nature des Courbes planes que l'outil trace dans
le Tour figuré ordinaire, fur un plan parallele à celui de
la Rofette, en faifant abftraétion du troïfiéme mouvement
qui feroit changer de plan à l'outil; & c’eft cette efpece de
Courbe plane que nous entendrons deformais fous le nom
de Courbe du Tour.
Si l’on defire quelque chofe de plus, après avoir trouvé,
comme on le peut en décompofant les mouvements du Tour,
quelles font dans un Tour qui a les trois mouvements, les
deux courbes qui feroient tracées chacune à part; lune fur
un plan parallele à l'axe, en faifant abftraétion du moute-
ment de parallelifime; Fautre fur un plan perpendiculaire à
Yaxe, en fupprimant le mouvement direct de l'arbre : on
pourra, par Ja méthode de M. Clairaut*, trouver la courbe
à double courbure qui réfultera de la combinaifon de ces
deux courbes planes confidérées comme fes projettions.
Quant à préfent c’eft des courbes planes qu'il eft queftion.
Pour commencer par le cas le plus fimple, on fuppofera d’a-
bord la touche pointuë, c'eft-à-dire, telle qu'un feul & même
point de Ia touche porte fucceflivement fur tous les points
du contour de la Rofette. On examinera enfuite les effets
des touches plattes, convexes, concaves, à roulette, &c. dont
Vufage eft réel ou poffible; mais jufqu’à ce que nous faflions
une nouvelle fuppofition, il eft bon d’avertir que tout ce
qui fuit doit s'entendre dans l’hypothele de la touche pointuë.
I faut encore obferver que par le nom d'outil, nous n’en-
tendons qu'une feule pointe qui ne trace qu'un fimple trait,
telle que l'outil que les Tourneurs nomment grain d'orge. :
Le
4 DES ScrEeNcEs 297
Le rapport de la courbe tracée par l'outil au contour de
la Rofette, n’eft difficile à appercevoir que parce que l'outil ‘
opere fur un plan différent de celui de la Rofette, & de
plus mobile d'un double mouvement. Pour lever ces deux
obftacles, 1.” nous rapporterons Îa courbe tracée par l’outil
au plan de la Rofette, comme on a fait dans les figures du
premier Mémoire. 2.° On fuppofera que farbre, & par
conféquent que la Rofétte! n'a plus aucun mouvement, ni
de parallelifme, ni deïôtation, & on les remplacera par des
mouvements équivalents qu'on donnera à l'outil. Tout ceci
fe concevra mieux par un exemple.
. Soit la Rofette quarrée 7 © 0, dont le centre & celui
de arbre du Tour eft C. 1..° Le plan de l'ouvrage fur lequel
l'outil trace la figure Oo Q, plan qui, dans la conftruétion
ordinaire du Tour, ef fitué à l’autre extrémité de l'arbre,
parallelement à la Rofette, fera ici fuppofé, rapproché &
projetté fur le plan même de la Rofette TO 0, tel qu'on
Planche II.
Fig. 1,
le voit dans la figure. Cette fuppofition ne change rien
d’effentiel à la conftruétion du Tour, c’eft feulement comme
f la longueur de Farbre qui n'eft faite que pour la com-
modité de louvrier, étoit réduite à un point, en forte que
la furface de l'ouvrage ou le plan fur lequel l'outil travaille, -
f£ trouvât contigu au plan de Ia Rofette.
If eft à propos, d’obferver que comme il a été plus com-
mode dans la Mathine du premier Mémoire, de faire faire -
le mouvement de parallelifme dans la ligne verticale, au lieu
que dans la conftruction ordinaire du Tour, l'arbre fe meut
horifontalement|; on fuppofera ici dans toutes les figures,
la touche en T'au-deflus, & non à côté de la Rofette en r,
ce qui ne change rien à l'effet.
2. L'axe de l'arbre réduit à un point étant repréfenté -
dans la figure par le centre C, le mouvement du point C,.
dans le plan de l'ouvrage, le Iong de la ligne CT, repré-
fentera le mouvement de parallelifme de l'arbre du Tour
ordinaire; pour remplacer ce mouvement, en fuppofant la
Rofette immobile, il faut concevoir que la touche 7, &
Men 1734 | “PP
298 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYyALE
Voutil O font adhérents au plan de l'ouvrage devenu par
la fuppofition précédente, contigu au plan de Ja Rofette, &
que ce même plan qui porte la touche & l'outil, eft mobile,
en forte que fon centre peut décrire la ligne C,
Pour fe bien repréfenter ce mouvement, iln’y a qu'à
imaginer que le plan contigu à la Rofette, dans lequel nous
avons fixé la touche & l'outil, porte une rainure ou coulifle
dans la direction ZC, qui lui permet d’aller & venir le Jong
de cette ligne, en s’approchant ou s'éloignant du point C,
pris fur le plan de la Rofette devenuë immobile. De cette
maniére, quelle que foit la pofition de la touche 7° & de
Voutil O, ce mouvement du plan de l'ouvrage remplacera
celui qu'a le centre de la Rofette le long de la même ligne
TC, ou tC, dans la conftruction ordinaire du Tour.
3° Enfin, au lieu que le plan de la Rofette TO,
tournoit fur fon centre C, la touche & l'outil demeurant
immobiles en 7 & en O, ce fera le plan parallele à la Rofette,
& contigu, qui porte la touche & l'outil 7 & ©, que nous
ferons tourner fur le centre €, en rendant la Rolfette fixe,
ce qui eft encore abfolument la même cholfe,
La rainure 7°C du plan contigu à la Rofette permettant,
par la feconde fuppofition, à la touche 7, fixée fur ce plan,
de s'approcher & de s'éloigner du centre fixe C de la Rofette,
& par la derniére, le même plan étant mobile fur fon centre,
il eft aifé de concevoir que ces deux uvements réunis
donneront la facilité de promener la touche T'{ur les bords
de la Rofette, en fuivant les inégalités de fon contour ; l'outil
O, entrainé par le même plan qui le porte, décrira le même
trait que dans la conftruction ordinaire du Tour.
Tout ceci bien entendu, la folution de ces Problemes,
dont l'un eff l'inverfe de l’autre, fe préfente d'elle-même.
PROBLEME X
Le contour d'une Rofette quelconque, ér-la pofition refpecfive
du centre de la touche ér de L'outil fur un même plan étant donnés ,
trouver [ur ce plan tous les points du deffein qui en réfultera?
DES SCIENCES. 299
PROBLEME IL
Un deffein ou un contour quelconque étant donné avec la
pofition du centre de la touche à de l'outil, trouver fur le même
plan tous les points du contour de la Rofette qui doit produire
un pareil deffein !
Soit tout ce qu'on a déja fuppofé dans la figure précé-
dente, l'outil répondant au point © fur le plan de la Rofette,
dans le moment où la touche porte fur le bord de la Rofette
au point 7: Que le plan contigu à la Rofette fur lequel 1a
touche & l'outil font fixés, commence à tourner fur fon
centre, en forte que la touche partant du point 7, porte
toûjours, en tournant, fur le bord de la Rofette; il eft clair
qu'elle répondra fucceflrvement aux points 7;f,r, 0, © ; mais
par l même raïifon, outil partant du point O répondra
dans le même ordre aux points O, 0, o, w, Q : car, quand Ia
touche fera arrivée au point T’fur l'angle de la Rofette, la
ligne 7'C dans laquelle fe meut le centre du plan qui porte
k touche & Loutil, la ligne TC, dis-je, fera tranfportée
fur 7 C; & la diftance de a touche à l'outil étant toüjours
la même, en prenant fur 7C, TO égal à TO, on aura
le point O où répondra alors l'outil; on trouvera pareïlle-
ment tous les points 00% Q de l'outil, correfpondants aux
points #, r, 0, ©, dela touche, on aura donc dans cette pofi-
tion de l'outil, la figure O Oo 0 © Q, femblable à la Fi. Je
du premier Mémoire, où les pofitions de a touche & de
loutil'étoient les mêmes.
Avec la même Rofette 7+ 0©, fi l'outil ou le-crayon
eft placé de l'autre côté de la touche T'au point © dans la
ligne 7C, prolongée au de-R du centre, on trouvera pareïlle-
ment tous les points O, O, 0, 0, ©, Q, de la courbe que doit
tracer l'outil dans cette fituation, en ouvrant le compas de
l quantité 7'O, égale à l'intervalle qu'on a voulu mettre
entre la touche & l'outil, & portant cette ouverture du
compas 7°O de chaque point 7,4,r, &c. du contour de la
Rofette en O,0,0, &c. fur les rayons prolongés TO, 10, + 0.
Ppi
Fig. 2.
Fig.
3
300 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE ROYALE
Dans cet exemple, la courbe tracée fera pareille à celle de
la Fig. 4. de Yautre Mémoire.
Si la touche étoit entre le centre & l'outil; par exemple,
fi l'outil étoit au point Q, plus loin du centre quela touche,
il n'y auroit pas plus de difficulté pour trouver les points
de la courbe, & on s’y prendra toüjours de la même maniére,
tant que le crayon & fa touche feront dans l'alignement du
centre, {ur quelque point de la droite 7€, prolongée ou
non prolongée, que foit placé l'outil. Si on le fuppole placé
en Q, la touche étant en 7, on trouvera la courbeQ A BCE,
femblable à celle de la Fig. 2. du premier Mémoire, qui avoit
été tracée avec la Machine, dans de pareilles circonftances.
Dans les exemples précédents, on a toüjours fuppofé l'outik
dans l'alignement du centre & de la touche. Quand Ia po-
fition de l'outil eft oblique, c'eft-à-dire, lorfqu'il eft placé
hors de cet alignement, le cas devient un peu plus compo,
mais on ne laiflera pas de trouver les points de la courbe
tout aufli exactement.
Suppofons, par exemple, l'outil placé hors de l'alignement
de la touche & du centre au point O dela Fig. 7, la touche:
étant en 7: Quand la touche fera parvenuë en 7, on trouvera
la place de l'outil ou crayon, en prenant le point O à même
diftance de la touche 7°, qu'étoit le point O de T, & fur
la ligne 7°O qui fait le même angle avec le rayon TC, dans
lequel eft maintenant la touche 7’ que faifoit 7 O, dans fa
premiére fituation, avec le rayon 7C. Par la même raifon,
quand la touche fera arrivée au point #, en tirant #0 qui
fera avec rC le même angle que TO avec TC, & prenant
{ur 10 prolongée, la diftance 10 égale à TO, on trouvera le
point o, & ainfi des autres, la fuite des points O, ©, 0, 0, w,
formera un contour femblable à celui de la Fig. 9. du pre-
mier Mémoire.
On trouvera de la même maniére tous les points de Ia
courbe, en quelque point que foit placé l'outil hors de Faligne-
ment de la touche ou du centre, & nous retrouverions ici,
en parcourant toutes les pofitions de la touche & de l'outil,
DIE s11$ ChENCESs 30
toutes les figures du premier Mémoire, tracées dans les
mêmes circonftances. Les trois exemples que nous venons.
d'alleguer , fufhfent pour faire voir que dans tous les cas,
foit que la pofition de l'outil foit directe ou oblique, on à
un moyen fur pour trouver tous les points de la figuré
tracée, ce qui eft la réfolution du premier Probleme propofé,
_paflons au fecond.
On fuppofe maintenant que le contour que doit tracer
Toutil, eft donné, les pofitions refpectives du centre de la
touche & de loutil font pareïllement déterminées : on
cherche la Rofette qui, dans ces circonftances, produira le
deflein donné. Il n'y aura pas plus de difficulté que dans
Vautre cas.
Pour en donner un exemple fenfible & différent des pré-
cédents, -je fuppofe que fon cherche la Rofette qui feroit
tracer à l’outile contour O 00 de Ia tête de profil repréfentée
par la Fig. 4. le centre commun de la Rofette cherchée &
du deflein donné étant fuppofé en C, & la touche en 7,
quand foutil eft en O.
De chaque point O, ©, 0, 0, ©, &c. pris fur le contour
du deflein, on tirera par le centre C, les droites OC, OC,
oC, oC, wC, prolongées indéfiniment, & portant une des
pointes du compas ouvert de la quantité O T' fucceflivement
{ur tous les points O, O, &c. l'autre pointe marquera fur
les lignes OC, OC, &c. prolongées, les points T, 7, r;
T, +, 8, ©, qui formeront le contour de la Rofette cherchée ù
& l’on aura la réfolution du fecond Probleme propofé..
Autrement, fi lon promene l'extrémité O de Ia ligne
droite O T'fur le contour O, O, o, &c. en forte que li même
ligne OT s'applique fucceffivement fur les lignes OT or,
OT, w0, (©, en paflant toüjours par le centre C, l'autre
extrémité Z' de Ia ligne mobile O T' tracera le contour de
la Rofette T 77, &c. d’un mouvement continu.
. C'eft ce qui a donné l'idée de l'inftrument dont on va
donner la defcription.
Si la touche étoit fuppofée hors de l'alignement du centre
_ Pi
Fig. 4ù
302 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE à
& de l'outil, par exemple, au point 7, lorfque Foutil eft
en O, en forte que O T'fit un angle avec OC au point O,
au lieu de ne faire avec O C qu'une même ligne droite, il
faudroit, pour trouver tous les points 7, #,r, &c. de la Ro
fette, obferver de faire faire à cetteligneOT, mefure de la
diftance de la touche à l'outil dans fes différentes pofitions
OT, of, or, &c. un angle aux points O, 0, 0,w, ©, avec les
lignes OC, oC, oC, wC, QC, toüjours égal à celui que fait
OT avec OC dans fa premiére pofition, comme on l'a ob-
fervé dans l'exemple de la pofition oblique /F3g. 3.).
Chacune de ces deux Rolettes eft l’unique qui puife faire
tracer à loutil le contour du profil OOo dans les fituations
données des points C, 7,0, mais on conçoit que tous les
changements poffibles de Ia fituation de Fun de ces trois
points, feront trouver une Rofette différente, capable de
faire tracer à l'outil le même contour, fr on a Ia liberté de
prendre ces trois points à volonté, & que le deflein feule-
ment étant donné, on cherche la Rofette la plus propre à
le produire. Parmi les diverfes pofitions refpeétives des points
C,T &O, qui donneront autant de différentes Rofettes, on
choifira, pour la facilité de l'exécution, celle qui donnera
le contour le plus coulant & Île moins anguleux, & celui
dont les angles feront les moins aigus.
C'eft dans cette vüë, & en même temps pour plus de
fimplicité, qu'à moins de quelque raifon particuliére, 1° on
prendra le centre € à peu-près au milieu de la figure.
2.° On préférera la pofition directe ou en droite ligne
TCO de la touche du centre & de l'outil /Fäg. 30. du rer
Mlem.) à la pofition oblique TCO (Fig. 31. du 1.47 Mem.}
3.” On placera la touche & Foutil des deux côtés op-
pofés du centre en 7 & en ©, plûtôt que du même côté
du centre.
4° On:prendra le plus petit intervalle TC de là touche
au centre, plus grand que le moindre CO du centre à l'outil,
afin que le contour de la Rofette foit par-tout plus éloigné du
centre commun que celui du deffein, & puifle lembraffer.
"7
DIE S SCIENCES. 303
En fe rappellant ce qui a été obfervé plus haut, & dans
le premier Mémoire, fur les diverfes pofitions de la touche
& de l'outil, on trouvera facilement les raifons du choix de
ces circonftances, quelle que foit la fituation refpective de
la touche, & de l'outil, foit droite, foit oblique par rapport
au centre; nous avons donc un moyen certain pour trouver
tous les points de la figure cherchée fur le plan de la Rofette
donnée, ou tous les points du contour de la Rofette qu'on
cherche, fur le plan où eft tracée la figure prefcrite, ce qui
eft la réfolution du double Probleme que nous nous étions
propolé préliminairement, pour mieux reconnoître le rap-
port qu'ont entre eux les deux contours.
Avant que de pañler à cet examen purement géométrique,
il nous refte à donner la defcription de l'inftrument dont
on vient de parler, qui fournit un moyen court & facile
de trouver fur le champ, & de tracer d'un mouvement
continu, tous les contours poffibles des Rofettes, propres
à exécuter un defléin donné, & réciproquement tous les
deffeins poflibles que peut produire une Rofette donnée ;
& cela fans être obligé de limer des modeles en cuivre,
comme dans la Machine décrite dans le premier Mémoire.
Cet infrument a les mêmes ufages, & peut tenir lieu
de la Machine de M. Grammare, dont on 2 parlé dans le
premier Mémoire, qu'il appelloit fon Oracle, & de laquelle
on n'a pü avoir aucune connoïflance.
. ABCD eft une regle de trois pouces de long, percée
d'une rainure dans fa longueur, la partie À eft percée de
plufieurs trous en écrous, afin d'approcher ou d'éloigner
plus ou moins la pointe B, dont la tête eft faite en vis:
cette regle eft embraflée par les tenons £,G, d'une feconde
regle aufli percée d'une rainure ; la premiére peut glifler
fous la feconde qui porte un petit barillet L, dont le reflort
tire toûjours à lui la regle de deflous qui lui eft attachée
avec un fil en D, cette même regle porte une feconde
pointe V, qui, par conféquent, tend toujours à s'approcher
du’centre P, ce centre et déterminé par une troifiéme
Planche I,
Fig. À,
Planche I.
Fig. B.
304 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
pointe P qui traverfe les deux regles, & qui eft fixée fur
la regle de deflus £G, au point où l’on veut, avec l’écrou Z..
Voici comme on fe fert de cette Machine. |
Soit le contour de profil d’une tête 7, pour lequel om
cherche la Rofette la plus convenable; après avoir découpé
ce profil en carte, on le colle fur une autre carte RS, enfuite
on prend à volonté un point 7” pour centre au dedans du
contour de la tête; on perce les deux cartes en ce point,
& on les attache fur un plan, en y enfonçant la:pointe P;
après quoi on pole la pointe A fur le contour de relief de
la tête découpée; on tourne enfüuite à la main, toute la
Machine, en faifant toûjours porter la pointe A fur le bord
de la découpure, ou mieux encore, on ne fait que tourner
d'une main la carte fur fon centre, en tenant de d'autre la
Machine fixe, & en ayant attention que Îa pointe NV ne
quitte pas le bord de la carte découpée. Dans l'un & autre
cas, la pointe Z portant fur la grande carte RS, y trace
le trait VX qui eft le contour de la Rofette cherchée: la
pointe AN, rappellée fans cefle vers le centre P, par l'effort
du reflort L, & repoufiée par le relief du profil découpé,
en fuit aifément le contour, tant que ce contour ne s'éloigne
pas du centre en ligne droite, c'eft ce qu'il faut éviter autant
qu'il eft poffible, en choïfiflant au dedans de ce contour,
un centre pour placer la pointe fixe P. Si on ne peut em-
pêcher que la pointe W n’accroche en quelqu’endroit, comme
au-deflous du nés, par exemple, & que le contour découpé
ait la pente trop roide, pour repoufler la pointe Ven gliflant,
if faudra aider un peu avec la main; mais on pourra fauver
encore ce petit inconvénient, fi on retrace le même trait
en tournant le carton d’un fens oppolé; de cette maniére,
Ha pointe qui ne pouvoit, par exemple, remonter fans le -
fecours de la main, de la narine vers la pointe du nés, glifiera
fans difficulté, & fera rappellée par la force du reflort, de
la pointe du nés vers la narine. En changeant de centre P,
ou en éloignant plus ou moins les deux pointes 3. & AN,
on fera différents contours, & on choifira le plus coulant
& le
DES SCIENCES 350$
& le plus praticable fur le Tour, pour fervir de modele à
la Rofette; avant que de la tailler, il eft à propos de la vé-
rifier, en découpant une carte fur le trait !°X de la Rofette
trouvée, & faifant porter une pointe fur le contour, pour
voir fi l’autre pointe /V redonnera exactement le contour
de la tête 7° qu'on fe propole d'exécuter.
Dans cet inftrument on à fuppofé la touche, le centre 8&
l'outil en ligne droite, parce que cette fituation eft plus
fimple & plus commode pour la pratique. Si on étoit curieux
de voir l'effet des pofitions obliques , il feroit aïfé, en adjoû-
tant à l'extrémité 4-de fa regle AD un petit bras mobile
fur un clou qui lui ferviroit de centre, de tranfporter hors
de l'alignement du centre & de la touche la pointe 3 qui
trace la Rofette, & de lui faire faire un angle quelconque
avec cet alignement.
Nous voici parvenus à notre objet principal. II eft quef-
tion de découvrir la nature de la Courbe tracée par l'outik
du Tour. Le trait de la Rofette & celui du deffein étant
rapportés fur un même plan, comme on en a donné les
moyens, leur rapport va fe manifefter de lui-même.
Commençons par le cas le plus fimple, & toûjours dans
lhypothefe de 1a Touche pointuë.
Soit la droite AB (Fig. 6.) le côté d'une Rofette dont C
foit le centre ; foit 72°O pris en ligne droite fur CT’, la
diftance de l'outil © à la Touche 7: De l'ufage expliqué de
linftrument précédent & de fes mouvements démontrés
équivalents à ceux du Tour, il s'enfuit que tandis que\la
Touche 7 parcourt le côté AB de Ia Rofette, l'outil O de-
meurant toùjours dans Valignement de la Touche & du
centre, & confervant fa même diflance 70, TO, à la
Touche 7°, décrira
r,” La courbe 0 OO concave à l'égard du centre C, fr
Voutil eft plus éloigné du centre que la Touche 7, & fitué,
par exemple en O, de l'autre côté de la ligne 42.
2° La courbe 0'O'O';, convexe parrapport au centre C;
Mem. 1734
Fig. 6
06 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RovALr
{i l'outil eft plus près du centre que la Touche 7, & placé
comme en O' en de-çà de la ligne A2.
3.” Enfin la courbe rentrante 0" O0" 0", fi l'outil eft
fitué, par exemple en O”" de l'autre côté du centre € que la
Touche 7; |
On voit que les trois cas ont cela de commun que les
inis 0,0”, O", font toüjours dans les lignes TE, TC, pro-
ngées ou non-prolongées, & que les lignes 70, TO,
font égales entr'elles, ainfi. que 70’, TO’, & 70”, TO”.
On reconnoit déja cette courbe tant à fa figure qu'à la
maniére de la décrire pour la Conchoïde de Nicomede,
dont C centre de la Rofette fera le pole, A B côté de la
Rofette, la La/e, dont 7° la Touche fera le point parcourant,
Q l'outil le point décrivant, & OT diftance de Fun à l'autre
la mefure. Ceci n'a pas befoin de démonftration, c’eft une
conféquence évidente de ce qui a été précédemment expofé.
I faut obferver que fi d'ordinaire fous le nom de Con-
choïde de Nicomede on n'entend que la premiére de ces trois:
courbes, c'eft-à-dire 000, ou quelquefois la fecondeO'0O'0"
produites lune & l'autre en prenant des parties égales 70:
ou TO’ fur les rayons tirés du pole C foit en de-cà foit
au de-là de la bafe AB, il n’en eft pas moins vrai que la
courbe O0" O" O” qui a une portion en de-çà, & Fautre
au de-R du pole €, & qui fe décrit de la même maniére & .
avec les mêmes conditions que les deux autres, eft précifé-
ment la même efpece de courbe, & que ce troifiéme cas
eft renfermé comme les deux premiers dans l'équation de
Ja Conchoïde de Nicomede.
Mais deux circonftances diftinguent Ia courbe du Tour
généralement prife de la Conchoïde de Nicomede, l’une que
celle-ci a toùjours pour bafe une ligne droite, au lieu que
le côté de la Rofette qui fert de bafe à Hi courbe du Tour
La être une courbe quelconque ; l'autre, que dans la Con-
oïde de Nicomede le point décrivant qui trace la courbe
eft toûjours dans l'alignement du pole & du point parcou-
nt, au lieu que.dans, kx eourbe du Toux la pointe de l'outil
DES :SC'I'EN CES
TT
peut ètre fituée hors de l'alignement du centre & de la
‘Touche, comme dans les pofitions que nous avons nommées
obliques , & dont on a donné des exemples.
La courbe du Tour, prife en général, n’eft donc pas une
Conchoïde de Nicomede ; mais comme les différences qu’on
vient de remarquer n’alterent point le principe de généra-
tion, qui, au fonds eft toüjours le même, la courbe du Tour
peut être confidérée comme une forte de Conchoïde plus
générale que celle de Nicomede.
En effet foit la bafe AB (Fig. 7.) repréfentant le bord de
la Rofette, une courbe quelconque, au lieu d'une droite,
comme dans l'exemple précédent. Soit le point € 1e centre
de la Rofette, & 7 le lieu de la Touche ; fi l'outil eft fitué
au point O fur TC prolongée, il ne manquera à la courbe
O 0° 0 qu'il tracera, pour être une Conchoïde de Nico=
mede, que d'avoir une bafe droite; mais fr Foutil eft fitué
au point © hors de la'ligne 7'C, en forte que la ligne TO,
diftance de la Touche à foutil qu'on a nommée la wefure;
fafle un angle conftant avec la ligne TC qui paffe toûjours
par le pole C, & que nous nommerons la Regke ; la courbe
QQ° Q° tracée par le point Q fera une autre efpece de
Conchoïde différente de la premiére.
De tout ce qui vient d’être obfervé, on peut tirer les
conféquences fuivantes, qui font générales dans l’hypothefe
préfente de la Touche pointuë , & qui, vi ce qui précede,
paroîtront évidentes.
1. Toute figure tracée Jur le Tour eff compofée d'autans
d’arcs de Conchoïdes prifes au fens que nous venons d'expliquer,
qu'il y a de lignes droites ow courbes qui compofenr le: contour
de la Rofette.
2. Chacun de ces arcs de Conchoïde a pour bafe la partie
du contour de la Rofette, le long de laquelle la Touche a gliffé
pendant que l'outil traçoit la courbe. |
# 3° Par conféquent ces arcs feront égaux on femblables entre
eux, fe les côtés de la Rofette font égaux ou femblables, ou ils
aerle: feront pas, fi les côtés: de la Roferte font Sn jo
Ke dy
Fig. 74
Fig. 7.
308 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
4." Le Pole de tous ces arcs de Conchoïdes qui compofenr
la figure tracée par l'outil, eff le centre de l'ouvrage ou du plan
Jur lequel la figure eff tracée, r ce centre répond & celui de la
Rofette , chacun des deux étant un point de l'axe de l'arbre du Tour.
5" Le point décrivant 4e toutes ces Conchoïdes eff la pointe
de l'outil qui, bien qu'immobile dans la conftruétion ordinaire
“du Tour, trace fur le plan de l'ouvrage, au moyen du mouvement
de l'arbre, la même ligne qu'il décriroit fi l'arbre etoit immobile,
comme nous l'avons fuppofe, à" que fes mouvements fuffent palfés
dans la toucher dans l'outil,
6. Le point parcourant des mêmes Conchoïdes , c'efFà-dire,
de point qui, dans la defcription de ces courbes, parcourt la ligue
qui leur fert de bafe, eft repréfenté fur le Tour par la pointe de
la touche qui, quoiqu'immobile, fait le même chemin fur les bords
de la Rofette tournante, qu'elle feroit fi elle étoit promenée fur le
contour de la Rofette immobile, comme on l'a fait voir. Ainfi dans
Ja conffruéion ordinaire du Tour, le point parcourant de la courbe
tracée n'eft pas fitué fur la même furface où eff tracée la courbe,
c'eff-à-dire, fur le plan de l'ouvrage, mais fur le plan de la Roferte,
Zequel lui eff parallele. On a donné le moyen de rapporter le contour
de la Rofette & celui de la figure fur le même plan.
7. La mefüure de la Conchoïde, ou la diflance entre le point
décrivant € /e point parcourant e/f toéjours fur le Tour, l'in-
tervalle entre la pointe de la touche la pointe de l'outil, rapportées
Sur le plan de la Rofette, ou fur tout autre plan parallele, &r cela
quelle que foit la pofition de la touche à de l'outil, foit droite,
foit oblique.
8.° Enfin la regle de ces mêmes Conchoïdes, ou la ligne tirée
du point parcourant, paffant par le pole, &r prolongée indéfr-
niment, fera fur le Tour la ligne tirée de la touche par le centre
de la Rofetre.
Pour diftinguer les deux efpeces de Conchoïdes 0? 0° O
&Q'Q°Q /Fig. 7.) on nommera Conchoïde directe, la pre-
micre 00O, dans laquelle la mefure TO eft prile fur 1
regle 7C'prolongée ; ayant déja nommé #rede, cette pofition
de l'outil O dans l'alignement de la touche 7° & du centre €,
DES SCIENCES. 09
‘on nomméra par la même raifon, Conchoïde oblique, la feconde
AQQ, dans laquelle Ia mefure 7Q fait un angle Q TC
avec la regle ZC, cette pofition de l'outil O hors de Fa-
lignement de la touche 7° & du centre € ayant été déja
nommée po/irion oblique. :
Dans l'hypothefe la plus fimple que nous examinons aétuel-
lement, c’efl-à-dire, dans lhypothefe de la touche pointuë,
dont un feul & même point touche les bords de la Rofette,
ce font donc généralement parlant, des arcs de Conchoïde
que décrit l'outil. Mais pour voir plus particuliérement
quelles différences réfultent dans la courbe tracée, des diverfes
duppofitions qu'où peut fire, tant fur la figure de la Rofette,
que fur la pofition refpective de la touche & de l'outif,
mous allons parcourir les divers cas que donne f'hypothefe
de la touche pointuë, avant que de pañier aux effets des autres
touches ; cela nous donnera lieu en même temps, de rappeller
ce qui a été fait fur cette matiére, plufieurs des courbes dont
il eff ici queftion, s'étant préfentées en diverfes rencontres
à de célébres Mathématiciens, qui ne les ont pas toûjours
‘onfidérées fous lafpet de Conchoïdes, fous lequel elles
£ réuniflent.. à
Je diftingue trois cas principaux qui comprennent tous
les cas particuliers. ,
Le premier eft celui où le côté de la Rofette eff une droite,
L'outil étant dans une pofition dire, ou dans l'alignement du
centre à de la touche.
Le fecond, celui o4 le côté de la Rofette eff courbe, l'outil
“étant pareillement dans une pofition directe.
Soit que le côté de la Rofette [oit droit ou courbe, je n’en
fais qu'un feul cas, orfque la pofition de l'outil ef? oblique, où
hors de l'alignement de la touche é7 du centre ; ce cas qui eff
de troifiéme, eft le plus général, & renferme tous les autres;
.& quoique les Fourneurs n’ayent pas jufqu'ici donné com-
-munément de pofition oblique à l'outil, on a fait voir dans
de premier Mémoire, quels étoient fes ufages & fes avantages.
Dans lepremier cas, la courbe du Tour ef une Conchoïde
Qq ii
Sp.s6.
Fig. 8.
* Mem. de
l'Acad. 1 70 8,
p. 208.
310 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLE
de Nicomede, on la vü, & cela eft évident /Fig. 6.)
Dans le fecond il faut diftinguer, car les côtés de la Rofette
#ont des arcs de cercle, ou des portions d’une autre courbe.
Si ce font des arcs de cercle, il y a encore plufieurs fubdi-
vifions à faire, car le centre fur lequel tourne la Rofette
peut être pris, ou fur un point de la circonférence, ou en
dedans, ou en dehors du Cercle-Roferte, & dans tous ces cas
Ja diflance de la touche à l'outil peut être égale au diametre
ou au rayon du même cercle, & plus grande ou plus petite
que Jun & l'autre; on va voir pourquoi nous diftinguons
chacun de ces différents cas.
Si le contour de la Rofette eft circulaire, que le centre
fur lequel tourne la Rofette foit pris fur un point de la cir-
conférence du Cercle-Rofette, & que la diftance de la touche
à l'outil foit égale au diametre du même cercle, la courbe
du Tour fera celle fur laquelle M. Carré a donné un Mémoire
en 1705*.
Pour le démontrer, il fufht d’obferver que la courbe de
M. Carré n’eft autre qu'une Conchoïde dont là bafe eft un
cercle PBGB, le pole un point de la circonférence P, &
Ja mefure PG un diametre du même cercle. M. Carré cite
fur cette courbe un M. Koërfma, à cela près, il la donne
pour nouvelle. Cependant M. de Reaumur a démontré *
que c'étoit une portion de Cycloïde géométrique, ce qui
n'empèche pas que ce ne foit aufli une Conchoïde, car ül
eft vrai que M. Carré abandonne fa courbe au point €,
prefque à fon origine, ne faifant parcourir à extrémité B
du diametre mobile PG qui devient BP, Bc & PC, que
la demi-circonférence GBP en dedans du cercle, fans doute
parce que, pour parcourir autre P4G, il eût fallu que le
diametre mobile parvenu en PC, quittât le point fixe ou
pole P, ce qui n’étoit pas un obftacle, pourvû que fon aligne-
ment prolongé paflât toujours par le pole. En continuant
de faire parcourir avec cette condition, l'autre demi-circon-
férence PBG, au mème point 2, parvenu en ?, du diametre
mobile, par le côté extérieur du cercle, l'autre extrémité €
Le
DES SCIENCES, 311
de ce diamètre décrira la portion C c F de la courbe juf-
qu'en F'; alors le point G ayant été tranfporté fucceffive-
ment en £, B, ?, B, b & G, aura décrit la circonférence
entiére du cercle étant parti du point G, & revenu au même
point. I n'y aura cependant. encore que la moitié de la
gourbe tracée, car faifant parcourir une feconde fois la cir-
conférence au même point 4 du diametre mobile actuelle-
ment revenu en #G, en faifant prendre fucceflivement à ce
diametre les pofitions Bx, PC, Bc, GP, telles que ce dia-
metre mème ou fon prolongement pafle par le pole P, on
aura autre moitié ponctuée F'x CcP égale & femblable à
la premiére, & les deux enfemble compeferont la courbe
entiére, dont on voit une moitié décrite dans le Traité de
M. de la Hire fur les Conchoïdes *, duquel nous allons
bientôt parler.
Cet Auteur remarque dans le même endroit *, qu'il y a
Tong-temps que cette efpece de Courbe a été examinée par
M. de Roberval ; il faut même que M. de Roberval ne fût
pas le premier qui en eût parlé, puifqu'il la nomme le
Limagon de M. Pafchal. Au furplus, quoique la Courbe
dont il eft proprement queftion dans l'endroit cité de M.
de la Hire, foit à l'œil un peu différente de la précédente,
comme on peut voir par la Figure*, elle eft au fonds ab{o-
lument la même. L'une & l'autre ont pour bafe un cercle,
pour pole un point pris fur la circonférence, toutes deux ont.
une mefure fixe. Leur feule différence confifte en ce que M.
Carré prend pour mefure une ligne égale au diametre PG,
#& que M.'s Pafchal & Roberval prennent une ligne égale
au rayon SP qui fait que leur courbe SCPCF rentre au
dedans du cercle, ce qui ne change point la nature de la
courbe. D'où il fuit que la Courbe de M, Carré & le Li-
maçon de M. Pafchal font deux cas particuliers de le même
courbe.
Quant à l'application de cette derniére au Tour, on voit
que la diffance entre la touche & Foutil étant prife égale au
rayon, au lieu du diametre, comme dans le cas précédent,
* Mem. de
l'Acad. 1 70 8,
P-5 0.fig. 9.
*P:40.f8. @
* Mem, 1708,
ibid, fg. 6x
12 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
& le refte de la fuppofition demeurant le même, d'outil,
au lieu de tracer la Courbe de M. Carré, tracera le Limaçon
de M. Pafchal.
On voit bien qu'en difant que foutil trace telle courbe,
on entend toüûjours la portion de cette courbe correfpon-
dante à l'arc de la Rofette qui fert de bafe. :
Tant que le pole fera pris fur la circonférence du cercle,
la figure de la courbe s'éloignera peu des deux précédentes.
Si la mefure ef prife plus grande que le diametre, la courbe
aura dans fon contour un point de rebrouflement comme
dans la Fig. 8. où la mefure étoit égale au diametre. Sielle
eft plus petite, comme Æg. 9. le point de rebrouflement
de la courbe deviendra un nœud d'autant plus petit que la
mefure fera plus grande,
Si le pole eft pris au dedans du cercle, tant que la mefure
fera plus grande que le diametre, la figure de la courbe diffé-
rera peu de la Fig. 8. Elle commencera à avoir un nœud,
quand la mefure fera plus petite que le diametre, & à appro-
cher de la F9, 9. Les Figures dans ces deux cas feront les
mêmes que les Fig. 3 3. 34. &c. du premier Mémoire, qui
appartiennent au Cercle excentrique pris pour Rofette. Il eft
évident qu'on a dû, pour ce qui concernoit Ia pratique du
Tour , fe borner dans le premier Mémoire à ces deux fup-
pofitions, puifqu'il ne feroit plus poffible de tourner fi le
centre de rotation étoit pris hors du contour de la Rofette.
On a vû que pour tracer la courbe entiére, quand le pole
étoit pris fur la circonférence du cercle bafe, il falloit que
la mefure parcourut deux fois cette circonférence, & non
feulement lorfque la courbe avoit un nœud en dedans, mais
ors même qu’elle n’avoit qu'un fimple contour. Quand le
pole eft pris au dedans de la circonférence, il arrive tout le
contraire, & foit que la courbe foit fimple, foit qu'elle ait
un nœud, une feule révolution de la mefure autour du pole
fufñt pour la tracer.
Enfin fi le pole eft pris hors de la circonférence , Ia
eourbe aura un grand nombre de différentes figures felon les
différents
a
DES SCIENCES. 313
différents rapports qu’auront entr'eux [a mefure, {e diametre
du cercle & la diftance du pole au centre de ce même cer-
cle. Mais la courbe aura toüjours deux portions fermées &
rentrantes en elles-mêmes ; la plus voifine du pole pourra
avoir la figure d’un 8 de chifre, d'un fer de lance droit ou
renverfé, d’une amande, d’un ovale, d’un éventail, &c. la
plus éloignée du pole aura conftamment une figure aflés
approchante d’une 4nule, dont la largeur fera d'autant moin-
dre, & les angles d'autant plus aigus, que la mefure fera
plus grande. Tant que la mefure furpañlera le rayon, les deux
portions de la courbe feront ifolées. Elles commenceront à
fe toucher, fi la mefure eft prife égale au rayon, & fi on
la fait plus courte, elles fe croiferont.
Toutes ces courbes qui ont un cercle pour bafe, un
ole & une mefure conftante, font, comme on voit, des
Conchoïdes du cercle. Quoique j'aye parcouru toutes leurs
diverfes combinaifons, je ne donne pas ici les figures de cha-
cune en particulier, pour éviter un trop long détail. J'ai déja
remarqué que plufieurs avoient été examinées & confidérées
fous un autre afpect. Outre ce qui a été cité, on retrouvera
trois de ces Courbes dans une piece de M. Jean Bernoulli,
inférée dans les Mémoires de Leipfick, année 1 69 5, page 9,
à l'occafon d’un Probleme fur la Courbe le long de laquelle
doit être fufpendu un poids pour retenir un Pont-levis en
équilibre dans toutes fes fituations poffibles.
M. de Reaumur, dans le Mémoire déja cité, applique à
toutes les Courbes poffibles, prifes pour bafe, I même prin-
cipe de génération que M. Carré n'avoit employé que pour
le Cercle. De plus M. de Reaumur Jaïffe la liberté de placer
à volonté, en un point quelconque du plan, le point fixe
que M. Carré plaçoit feulement fur la circonférence de fon
cercle, & par ces deux généralifations non feulement ïül
renferme les cas du Limaçon de M.'s Pafchal & Roberval,
la Courbe de M. Carré, & toutes celles du même genre qui
ont un cercie pour bafe, mais il embrafie une infinité d'au-
tres courbes.
Mem, 173 4: *oRr
314 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
Ainfi non feulement la Courbe du Tour eft celle de M.
de Reaumur, lorfque le côté de la Rofette efk un arc de
cercle; mais encore quelle que foit la courbüre de la Rofette,
& en quelque point que foit pris le centre de rotation, ce
qui s'étend à tout le fecond cas, c’eft-à-dire, à routes les
pofitions directes de l'outil, la Rofeite étant à pans courbes , &
ce qui renferme éminemment le premier cas o4 les côtés de
la Rofette font Juppofes droits.
. I refte le troifiéme, qui eft le plus compofé, & qui les
comprend tous. C'eft celui de la pofition oblique de l'outil,
foit que la Rofette foit à pans droits ou courbes. Et on à fait
voir que la courbe tracée dans ce cas étoit la nouvelle efpece
de Conchoïde prife au fens qui a été expliqué.
Après m'être aflüré que la Courbe du Tour étoit une
Conchoïde prife dans un fens plus étendu qu’on ne la prend
ordinairement ; avant que de m'engager plus avant dans
Vexamen de fa nature & de fes propriétés, je voulus voir fr
perfonne n’en avoit traité. C'eft en parcourant les Mémoires
de l'Académie que j'ai trouvé ce que je viens de citer de
Mrs Carré & de Reaumur. Je tombai enfuite fur le fçavant
Mémoire de M. de la Hire fur es Conchoïdes en géneral, La
Conchoïde en général , fuivant le réfultat de fa définition, ef
une Courbe tracée fur un plan immobile par un point quelconque
d'un plan mouvant, dans lequel il y a une ligne droite donnée de
pofition qui palle todjours par un point fixe du plan immobile,
tandis que l'extrémité de cette droite parcourt une bafe droite ou
courbe tracée fur le même plan.
Ma furprife fut extrême, en voyant par cette définition
qui comprend ce que nous avons nommé Conchoïde dirette,
& ce qu'on a appellé Conchoïde oblique, que cette courbe
dans le point de vüë fous lequel M. de la Hire la confidére,
eft précifément celle dont nous venons de parler, c'eft-à-dire,
une Conchoïde renduë plus générale que celle de Nicomede,
par le retranchement de ces deux conditions particuliéres,
la bafe droite, & le point décrivant pris dans la regle, lefquelles
reftreignoient la courbe de l'ancien Géometre. La Conchoïde
DES SCIENCES 315
de M. de la Hire eft donc éxaétément la courbe du Tour 7m.
qu'il n'avoit pas alors en vüé; il eft aflés fingulier qu'en /: 709.
fuivant fon objet, il n'ait généralifé la Conchoïde ni plus ni 7 7°"
moins , mais autant précifémént qu'il étoit néceffairé pour
rencontrer la courbe du Tour, à laquelle éft applicable tout
ce qu'il dit de fes Conchoïdes.
Je ne parle point ici d’un fçavant ouvrage dé Géométrie
du R. P. Pierre Nicolas, Jéfüuite, publié em 1 697, fous là
titre De Conchoïdibus 7 Ciffoidibus, cet Auteur ayant adopté
un autre principe de génération pour fes Conchoïdes, dént
la mefure n’eft conftante que lorfque leur bafe éft un cercle,
ce qui fait qu'il n’y a que ce feul cas où fa Conchoïde foit
la même couïbe que là nôtre.
* Lestermies de af, de pole, demeure, de point parconranr,
& de point décrivant que j'ai employés; Font été dans le mêmé
fens par tous les Géometres ; j'ai emprunté de M. de la Hire
celui de regle, Vayant regardé non-feulemient comme le plus
propre, mais comme confacré en ce fens par l'ufage qu'en
a fait cet illuftre Académicien. Les feuls termes nouveaux
dont je me fuis fervi, font ceux de Conchoïde dire“e, & de
Conchoïde oblique, pour évitér une longue périphrafe.
* L'ouvrage de M. dé la Hire, dans lequel il donne des
méthodes pour trouver les tangentes, les reétifications & les
quadratures d’un grand nombre de courbes, à encore ce
mérite particulier, qu'il éft prefque tout fynthétique, & qu’ip
a par conféquent dû coûter beaucoup plus à l'Auteur.
I refte peu à glaner dans un champ moiflonné par des
mains aufli habiles, cependant comme tout ce qu'a donné
M. de la Hire ne regarde fa courbe du Tour, que dans le
cas de la touche pointuë, les'cas de là touche platte, & de
la touche courbe nous reftent tous entiers. D'ailleurs M. de
la Hire n'a pas donné le moyen de trouver en général le
lieu des Conchoïdes, foit diredtes, foit obliques, & il paroît
même qu'il a au moins douté que ces dérniéres fuffent géo-
métriques, à en juger par ces paroles du Mémoiïre déja cité*, * p ,5,
toutes Jes Conchoïdes qui ont pour bae des lignes géométriques
ï Rri
Fig. 10.
16 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
font auffi des lignes géométriques, pourvé que dans la deféription
de la Conchoïde, la mefure foit jointe directement à la regle.
Avant donc que de pafler aux effets des touches droites
& courbes, on fera voir que toutes les Conchoïdes, foit
direes, foït obliques, fans exception, qui ont pour bafe des
lignes géométriques, font auffi géométriques, en donnant le
moyen d'en trouver toüjours l'équation en ce cas, ainfi que :
leurs tangentes, & les éléments de leur rectification & de
leur quadrature; on fera aufli l'application de la méthode à
V'exemple de M. de la Hire où il prend le cercle pour bafe,
ce qui donnera lieu à quelques obfervations.
PROBLEME IIL
La bafe TN (Fig. 10.) étant donnée, trouver la Conchoïde
directe OM, ou la courbe tracée par le point © pris dans la
regle OL, mobile fur le point fixe ou pole C, en forte que dans
les diverfes pofitions OL, MQ &e la regle, la mefure, c'eft-à-dire,
la partie OT, MN @e la regle comprife entre les deux courbes
{bit toijours égale à une grandeur donnée !
S'O2L: UT 1 ON:
On cherchera deux équations qui expriment le rapport
des coordonnées CR, r; RN, s de la bafe aux coordonnées
CP,1t; PM, u de la courbe cherchée. On tirera de ces
équations les valeurs de 7, s en ? & u; & fubflituant ces
valeurs dans l'équation donnée de la bafe, on aura celle de
la courbe cherchée.
EXEMPLE
Soit la mefure ou ligne conftante OR, où MN—a,
les triangles femblables CRN, CPM fourniront les deux
analogies fuivantes
CM, Vituu. CP,t:: NM,a.PR,t—1r
at
Le »y OÙ É ——
Vittus tt+uu
== /e
d'où l'on tire t—7r=—
DES SCIENCES 317
CP,?. PM, ui: CR,1——2 >, RN, 5}
{au
LU ——
x . 14 : r
d'où l'on tire EL Le
vr 1+4xu
H ne refte plus qu'à fubffituer ces deux valeurs de 7 & de s
dans équation de la bafe TN,
Soit cette courbe un cercle dont le diametre foit C T, e,
& l'équation par conféquent er—7r—55; les valeurs
précédentes de 7 & de s étant fubftituées, on aura
(= fu en 2,
IAENTE tt+uu Viit+un
Et divifant tout par 1 — -< divifeur commun, on
tt+uu
QUEA Et (tm ——) ou (u — 2 ), où
tt+un Vér-E où
PER a pq Où CETEPT
Vtt+uu Vit+uu
+277, ou enfin ti Hu arr a;
Vir+uu f
équation à la Conchoïde OM, & plus fimple que celle que
M. de la Hire* donne pour le même cas, & que voici * Mem. de
l'Ac. 1708,
XX) arr 2ry = 47 y xx 479 three
SI +4
ce qui provient d’une réduétion que M. de la Hire a népligé
de faire : car en ordonnant ainfi fon équation x x 39
ar} xx arr 21ÿ— 2 on verra
PP +ux
qu'en la divifant par Var JJ—27r, racine quarrée
- LA L] + AUME TS
du premier membre, elle fe réduira à V5 XX — 27
=, & enfin à 21)=)y tx — 27 Vyy xx
Vy+xx
qui deviendra précifément la même que la nôtre, en appelant
Rr iüï
# Mem. de
f'Ac. 1708,
#53:
Fig. 11,
318 MEMOIRES DE L'ACADEMYE Royarr
r & u, tes coordonnées CP, CM, que M. de da Hire 2
nommé dans fon: calcul y & x, en nommant e le diametre
CT qu'il nomme 27, & enfin appellant 4 la mefure MN
u'il nomme encore 27, la fuppofant égale au diametre,
L'équation de cette courbe, de laquelle les inconnuës
montoient à fix dimenfions, fuivant M. de a Hire*, peut
donc s’abbaifler au quatriéme degré, & par conféquent cette
Conchoïde dans le préfent cas, eft du même ordre que la
Couchoïde de Nicomede.
PROBLEME IV.
. La-Conchoïde direéte OM (Fig. 1 1.) décrite par le point M
Jur le pole € étant donnée, trouver le lieu de la Conchoïde oblique
décrite: par le point S, perpendiculaire fur la regle CM au point
décrivant M de la Conchoïde directe !
SOLUTION.
On cherchera deux équations qui expriment le rapport
des coordonnées CP, r; PM, 2 de la Conchoïde direte OM
aux coordonnées. CQ, x; @s, y de là Conchoïde oblique
cherchée. De ces deux équations, on tirera les valeurs de z
& u en x & y, on les fubftituëra dans l'équation donnée de
Ja Conchoïde directe, & on aura l'équation de la Conchoïde
oblique que l’on cherche:
EXEMPLE.
On nommera a la perpendiculaire AZS donnée, & on fera
CS (xx+yy) = CM (1t+uu) + MS (aa).
Donc #t—uu—xx+-yy—aa. (P.r équation À.)
CPt.. PM, ui: CQx QV, =
CLlus CHV ir Eu i: MS, a. VS; A TETE
De ces deux analogies, on tirera
| QF, ux eee VS L'AETT — @S, » ; ou
£
DES SCIENCE S.. 319
ty —=UXx + a Vit un. (S.de équation 2.)
De l'équation À, je tire VU ax y aa un
& fubftituant dans 2, j'aurai y VAT + y) —qa—uu
ux a Var yy—aa, ou PV Tu ux +7;
en faifant, pour abréger le calcul, xx+-yy—4aa— Zt; d'où
l'on peut tirer la valeur de z en x & en 7: caren quarrant,
ON AA YYTT —UUYVY—=UUXXHL2AUXZHAdaZ7;
& réfolvant léquation , on aura après les réductions,
u— EE qu'il faut fubflituer dans une des premiéres
équations pour en tirer la valeur de dégagée de y. On choifira
l'équation 2 où # n'aura qu'une dimenfion, fi on prend 1x
précaution de mettre à la place de 17 uu fon égale
xx +-yy — aa, où pour le plus court 77; c'eft donc
dans 1y—=ux—+ay qu'il faut fubflituer la valeur de
PR ln LL TA rès Z . —— LNH ayz
RE En © & on aura après les réductions RE TES TN
qu'il n'y a plus qu'à fubftituer, en rétabliffant 11 valeur de 27
dans l'équation de la Conchoïde directe qu'on fuppole
donnée, pour avoir la Conchoïde oblique, qui eft ce qu'il
falloit trouver. ï
PROBLEME V.
La bafe TN (Fig. x r.) feulement étant donnée, le pole étant C,
la regle CM, trouver la Conchoïde oblique, ou la courbe tracée
par un point quelconque S, fitué hors de la regle, la mefure faifant
au point N avec la regle CM un angle conflant MNS.
SOLUTION I
On tirera une perpendiculaire SZ du point décrivant S
fur la regle CAZ, cette ligne fera connuë étant lé finus de
Yangle A2NS donné. On cherchera par le Probleme III.
le lieu à Ja Conchoïde directe, décrite par le point 47 de
la regle, rencontré par la perpendiculaire SA, cette courbe
Fig, 11e
320 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLr
une fois connuë, on trouvera par le Probleme précédent,
la Conchoïde oblique cherchée.
SoLuTion Il
Pour réfoudre le Probleme directement, & trouver Ïa
Conchoïde oblique, fans chercher la directe, il n’y a qu'à
fubftituer les valeurs + & # des coordonnées de la Conchoïde
directe, trouvées en x & y par le Probleme précédent, dans
les valeurs r—1 — 2 &f—u— —<{"— des
: tt+uu V£ 1+uu
coordonnées de la bafe quelconque {Probl. 171.). Subftituant
donc 1— Er dans cette valeur der, en fe reflouvenant
que Vi uni xx + yy— aa, où 77 pour la facilité
du. calcul., «on, aura ,r == T1" Het tr...
24+99
& rétabliflant la valeur de 7; on aura
ay ue +yy—aa— ax Vrx+ Iÿ— ad 04ÿ—a4%
=
#X +99
A ., . _ LY— ER
De la même maniére, en fubftituant # = 0 oÉ
dans f = u — 27 ; on trouvera
Vrt+uu
1 =} — - AAN—ANV#X+ÿy—aa—ayVrx4+yy—aa—d4dy .
AX+IY
Ces deux expreffions en x & y des coordonnées r & f
de la bafe, ferviront de formule générale pour trouver la
Conchoïde oblique décrite par un point quelconque S, fans
chercher la Conchoïde directe décrite par le point 4, ïl
n'y aura qu'à fubftituer ces deux valeurs dans l'équation de
la bafe, & on aura l'équation de la Conchoïde oblique
cherchée.
PROBLEME
DES ScrENCESs 321
PROBLEME VI.
La bafe TN (Fig. 11.) 4 pol C, la melure NS,
l'ange MNS de la mefure avec la regle étant donnés, trouver
immédiatement la Conchoïde oblique, fans fe fervir des valeurs
des coordounées de la Conchoïde dirètte.
SOLUTION.
On pourra trouver direétement deux équations entre les
coordonnées r & f de la bafe & les coordonnées x & y de
la Conchoïde oblique; on en tirera les valeurs de r & de [
en x, & les fubftituant dans l'équation de {a bafe, on aura
la Conchoïde oblique cherchée.
EXEMPLE.
Ayant nommé MN, a; MS, b; CR, r; RN, J: CP, x;
QS, y. Pour trouver le rapport de CR, r & RN, [ à CQ, x
& QS, y, on cherchera deux équations comme, par exemple,
celles qui fuivent,
QV+HVS—=QS, & CV+VM—CN= NM,
dont on trouvera les expreffions algébriques par les analogies
fuivantes,
CRE Cult OO x: OP,
CR, r.CN, Var: MS. vs,
CR, r. CN, Vrr ff :: CQ, x. CV, = Ver ff
CR,r.RN, [ ::MS6.VM A.
On aura donc Ja +), & = Vrr + ff
LA
b
+ Ï _Vrr+ff=a
I eft évident qu'on peut tirer de ces deux équations les
valeurs de r & f'en x & y, qui étant fubftituées dans l'équa-
tion de la bafe 7'N, donneront une équation entre x & y,
Men. 1734: S
Fig, vre
Fig. 12.
322 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
coordonnées de fa Conchoïde oblique tracée par le point S.
Ce qu'il falloit trouver.
En réfolvant ces deux équations, on trouvera les mêmes
valeurs de & fqu'on atrouvées par une autre voye/Prob, V.).
PROBLEME--VIIL
Rectifier les Conchoïdes.
So LU TION.
Soit Mm, la bafe (Fig. 1 2.); À, le pole; A MN pro-
longée indéfiniment, la regle; T#, un arc infiniment petit
de la Conchoïde, & MT qui fait en #7, avec la regle,
l'angle conftant; T'MN, la mefure de cette même Conchoïde.
Tirés TN, perpendiculaire en N fur la regle À AZN, tandis
que le point parcourant AZ décrira l'arc Am de la bafe, &
le point 7 l'arc 74 de la Conchoïde oblique, le point N dé-
crira Varc Vs d'une Conchoïde directe, dont A1N fera la
mefure. Il eft queftion de trouver la valeur des éléments V#
& T1; TM étant donné, ainfi que l'angle TAZN, on aura
MN qu'on fera —a, & TN—u.
On füuppofera que l’on ait l'équation de Ia bafe Am entre
les rayons AM, Am (y), qui partent tous du pole À, &
les arcs infiniment petits {dx} compris entre deux rayons
confécutifs AM, Am. On aura donc dx = MR, & dy
—Rm}; on aura auffi Sr = dy, car SR 'E& mn font tous
deux égaux à MN. Donc de SR & de #n, Otant mf qui
leur eft commun, on aura Rm— Sn. On fera enfuite les
analogies fuivantes, pour trouver la valeur des éléments cher-
chés. Prolongés TN & 1n qui fe rencontreront en ©, on aura
AM,y - MR,dx :: AN, a+-y NS = — Vi;
NS & Vr étant les reftes de deux quantités égales 7S & Va,
dont on a retranché deux égales TN & 1n, on aura auffi,
à caufe des triangles fmblables ANS, OSn,
MR, dx. AM, y :: SN. AN:: Sn, dy « SOLÉ2
|
Ù Title st EN C'É à MR LL
& AM, 3. Mr, dx :: TO, b+ 2. TV EE,
Or Tt=VTV EVE, & Ni=VNS Sn.
mme LU M'HLLEL LS UNE
Doncd'r = Verte) nm Y (ee),
_& Nn — Verre) dy’.
Il ne refte plus qu'à intégrer ces valeurs de 7% & Mn,
pour avoir la rectification de ces deux courbes. Mais il faut
pour cela avoir ces valeurs exprimées en une feule variable,
ce qu'on tirera de équation de la bafe qui éft füppotée
donnée. Si l'équation de la bafe fuppofoit des coordonnées
perpendiculaires, comme AP, PR, on en tireroit paï analyfe
la valeur de AM & Mr en une féule variable, |
PROBLEME VIiIl
… Quarrer les Conchoïdes.
| SOLUTION.
On fera les mêmes fuppofitions que dans le Probleme
précédent.
Pour avoir la quadrature dés courbes décrites par les
points V & T'{Fig. 1 2.) H faut trouver la valeur des deux
éléments Mm Nan & Nn Tr, dont les intégrations donne-
ront les efpaces renfermés entre la bafe Am & la Con-
choïde directe tracée par le point /V, & entre celle-ci & Ia
Conchoïde oblique tracée par le point 7.
LeTrapeze Mm Nr où MR NS qui en differe infini-
ment peu, & feulement de la différence des deux petits
triangles MR m & NSn, éft le produit de fasses x MN,
ad +ydx
Éeftadire EE 4 9, qui fe réduit à sads-ragde,
Le Trapeze Nu Tr où Sa TV eft Masse x TN,
bdx+ydy
où nn
x b, qui fe réduit à Jiasteirer
Sfi
Fig. 124
Fig. 13.
324 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
L’équation de la bafe donnée exprimant le rapport de ÿ
à dx, on tirera la valeur de l'une ou l'autre de ces deux
variables , & ayant fubftituée dans les éléments précédents,
on aura leur valeur exprimée en une feule variable, & Jeur
intégration donnera la valeur des efpaces cherchés. æ
PROBLEME 1X
Trouver les Tangentes ér les Perpendiculaires des Conchoïdes.
DUO L'DT TO N.
Les mêmes chofes fuppofées que dans les deux Problemes
précédents, pour trouver la tangente TG { Fig. 1 3.) de la
Conchoïde T'f & fa perpendiculaire 7 Q, on tirera par le
pole À, perpendiculairement fur la regle 4 A1, une ligne
qu'on prolongera de part & d'autre vers Q & vers G. Du
point 7, dont on cherche la tangente, on menera 77° paral-
lele à fa regle; : 7° prolongée rencontrera AF prolongée en
quelque point G, & on aura la valeur de la foütangente GF
par cette analogie,
TV, X=5# Vi, EEE CITY fe) 6) y + a
todx-+ydx) ya SE
s FG—= — © — qui fe réduit à [PPRSP TRS
54
FA, prolongée de l'autre côté, rencontrera la perpen-
diculaire 7 Q en un point Q, & on aura la valeur de Ja
foüperpendiculaire FQ par analogie fuivante,
Vi, ue, TV, “res :: FT, a+-y. FQ— ES
_++a : LAnts à bdx#+ydy x a+y = bdx+ydy
x -2-5 qui fe réduit D
== —-
—b+ 2%, Donc AQ ou FQ —FA — 24; d'où
il fuit que dx, MR . dy, Rm :: y, AM. 27 AQ. Ce
qui fait voir que les triangles 441Q, MRnm, font fembla-
bles, & que 4/Q eft perpendiculaire à Am, c'eft-à-dire,
DE si 18 AC TE NT CES 32$
à Ja bafe, ce qui donne cette propriété finguliére de {a
Conchoïde T'r, que fa perpendiculaire, celle de la courbe
Mim qui lui fert de bafe, & celle qui coupe la regle AM
dans le pole À fe rencontrent au même point Q, ce qui
fournit un moyen fort fimple de mener une perpendiculaire
à a Conchoïde. C’eft aufli le réfultat de la démontftration de
M. de la Hire,
Si c'eft la foûtangente Æ£ 7 de Ia Conchoïde Gree Nn
qu'on cherche, le cas fera plus fimple, la regle même 4N
tiendra lieu de la parallele 7°}, & on trouvera la foûtan-
gente AE par cette analogie,
Sn, dy. NS, LE :: AS, ay. AE Star
2
dxx a+
J4y
par celle-ci, NS, LE, Su, dy:: AS, a+y. AL
D, dyydy =. v47.
RNA Es FREE
J
Dans ces deux cas, en fe fervant de la premiére formule
une fois trouvée, & faïfant 7 N, b — 0, on trouveroit
les mêmes valeurs pour la foütangente AE & la foûperpen-
diculaire AZ que par les deux analogies précédentes.
J'ai fait l'application de ces méthodes à divers exemples,
en déterminant la bafe ; je ne les mettrai point ici, pour ne
pas {ortir des bornes d’un Mémoire. II nous refte d’ailleurs
à examiner ce que devient la Courbe du Tour dans les diffé-
rentes fuppofitions qu'on peut faire à l'égard de la Touche.
Tout ce qui précede, comme on en a averti, n'étant appli-
cable qu'à l'hypothefe de la Touche pointuë, ou dont un
feul & même point toucheroit fucceflivement tous ceux du
contour de la Rofette, ce qui eff le cas le plus fimple, mais
qui ne peut être rigoureufement vrai dans la pratique, quand
même on {e ferviroit d’une Touche pointuë.
Pour remplir l’objet qu'on s’eft propolé, il refte donc à
‘examiner les hypothefes de la Touche La Ve platte, &
ii]
, & la foûperpendiculaire À L
X a) —
26 MEMOIRES DE L'ACADEMIE R@yALE
celles de la Touche courbe. Cet examen &les différents cas
qui y font renfermés me fourniroient feuls la matiére d’un
Mémoire aflés étendu , fi le temps de nôtre départ qui
approche, & les préparatifs qu’entraïne néceffairement un
voyage *, tel que celui auquel nous fommes deftinés, me
laïfloient le loïfir de mettre en œuvre tous les matériaux que
j'ai raffemblés depuis que j'ai entrepris ces recherches. Je me
contenterai donc d'en donner ici un extrait abrégé, & d'y
joindre quelques Problemes.
Jufqu'à préfent la bafe de la Courbe du Tour a toüjours
été le contour même de la Rofette, ainfi qu'il a été dé-
montré, le point parcourant dans l'hypothefe de la Touche
pointuë n'étant autre chofe que la pointe même de Ia T'ou-
che qui fuivoit le contour de la Rofette. Mais fi on fuppofe
que la touche eft une ligne droite AT /Fig. 1 4.) ce n'eft
plus le point 7° qui appuye fur le bord de la Rofette, la
courbe qu'il décrit eft donc différente du contour de la Ro-
fette, & c’eft cette courbe qu'il faut chercher, fi l'on veut
avoir, dans les différents cas que peut fournir la touche recti-
ligne, la bafe de la Conchoïde décrite par l'outil du Tour.
La touche étant droite, le côté de la Rofette ne peut être
que droit ou courbe ; s’il eft droit, ïl peut être plus petit,
plus grand ou égal à la ligne droite qui repréfente la touche,
Qu'il foit égal ou plus petit, on verra que cela revient au
même. Si le contour de la Rofette eft courbe , 11 touche
rectiligne, fi petite qu’elle foit, eft plus Jongue qu'un côté
de la Rofette, qui alors eft infiniment petit, mais la touche
peut être ou extérieure ou intérieure à la courbe. Ce font
quatre cas différents à examiner.
* Voyage de trois Académiciens envoyés par le Roy pour faire des
@bfervations fous l'E‘quateur. |
=
Dis SEtRENÉES | 335
Hyporhefe de la Touche re&iligne.
PROBLEME x.
Trouver la Courbe décrite par le point T (Fig. 14.) inter.
Jefion de la Touche ab ér de la droite CT, le côté de la Rofette
étant AB , le centre C , à la Touche étant la droite ab égale
au côté AB de la Rofette.
SOLUTION.
Ce r'eft plus ici comme dans l'hypothefe de 1: Touche
pointuë , le côté AB, dont tous les points rencontrent fuc-
ceflivément le point 7° de la touche, ce font au contraire
les angles de la Rofette, par exemple, l'angle À qui glifle
le long de la touche, & rencontre fucceflivement tous fes
points depuis a jufqu'à & Ce mouvement peut être rem-
placé, en faifant mouvoir l'équerre 4 T°O fur les points C
& Aj, en forte que le côté TO porte toüjours fur €, & le
côté a T toûjours fur 4. H eft clair qu’en ce cas le point T°
ou le fommet de l’équerre décrira un arc de cercle fur le
point / qui partage AG en deux également. |
Si la touche a 2 étoit oblique au côté AB de Ia Rofette,
Yangle a TO ne feroit plus droit, maïs le point 7’ n’en dé-
criroit pas moins un arc de cercle (par la 23 "€ propofition
du 3.m€ Livre d'Euclide).
La courbe du Tour ou la courbe décrite par le point O
fera donc en cé cas la Conchoïde, dont l'arc de cercle dé-
crit par le point T fera la bafe. Cette Conchoïde fera Grece
ou oblique , fon que le point décrivant © fera placé où fur
la regle’ ou hors de la regle TC.
On voit que foit que la touche foit égale à 24, foit
qu'elle foit plus longue, comme FD, cela revient au même,
puifque l'angle À de la Rofette ne peut jamais rencontret
Ja touche qu'au point a, & la quitte au point 2,
Fig. 14
Fig. 15.
Fig, 16.
Fig. 15.
328 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
PROBLEME XI.
Trouver la Courbe décrite par le point T ( Fig. 15.) le côte
de la Rofette étant AB, le centre C, dr la Touche étant DE,
plus courte que AB côté de la Rofette.
SOL ULT ON.
On remarquera que ce n’eft plus ici le point 7, mais le
point D ou F qui porte fur le bord de la Rofette. Le point
D ou F eft donc le point parcourant qui fe trouve ici tranf-
porté hors de la regle. Ainfi pour avoir un mouvement
équivalent à celui du Tour, au lieu de faire tourner la ligne
TCO fur le point C, en faifant fuivre au point 71e bord
de la Rofette, c'eft l'équerre entiére O TD qu'il faut faire
mouvoir fur le même point C, en faifant décrire au point
D ou F le contour de la Rofette. Le Probleme fe réduit
donc à celui-ci.
Trouver la Courbe décrite par le fommet de l'équerre DT O
(Fig. 16.) dont la branche TO , prolongée indéfiniment , gliffe
fur le point fixe ©, tandis que le point D de la branche V D
parcourt une droite À B.
On: fera CT =a; TD,1d=b; CE, TGC—=%
GT=y; Li=a+y; dG=V Ib —yy, & on dira
LC, x. Lt, a+-y:: GT, y. 4G, VEE— y. D'où l'on
tire xV4b—yy—=ay+yy &bbxx— xxyy—aay y
+ 24ay +7", équation générale de cette courbe qui
donne pour les différents cas des figures très -différentes,
felon que a >< ou — 4. Ce détail nous meneroit trop loin.
Le point 7'/Fig. r 5.) ne décrit réellement fur le Tour
que la portion fupérieure à la ligne 4 2, commençant au
point D, & finiffant lorfque le point D de l'équerre ren-
contre le point À ou l'angle de la Rofette ; alors c’eft le
point À qui gliffe le long de la branche de l'équerre DT,
& on retombe dans le cas du Probleme X. Aïnfi lorfque la
touche
DES SCIENCES. 329
touche D F'eft plus courte que le côté 4 B de la Rofette,
le point quelconque © décrit à chaque demi-pan de la
Rofette deux portions de Conchoïde, lune qui a pour
bafe la courbe précédente, l'autre qui a pour bafe un arc
de cercle.
Si la touche D F n'étoit pas perpendiculaire à la regle
CT; fi, par exemple, elle faifoit avec CT l'angle CQF,
le fommet 7'de la fauffe équerre décriroit une courbe d’un
degré plus élevé, dont la précédente n’eft qu'un cas parti-
culier ; la recherche de cette courbe feroit abfolument étran-
gere à notre objet, & inutile pour parvenir à la courbe du
Tour décrite par le point © dans le cas même où la touche
feroit oblique. I fufht que quel que foit l'angle en 7, l’équa-
tion précédente donnera toüjours la courbe décrite par 7;
point de concours de la regle C7, & de la perpendiculaire
DT tirée du point décrivant D fur la regle, & cette courbe
fera toûjours la bafe de la Conchoïde, foit directe, foit
oblique, décrite par le point O.
PROBLEME ‘XII
Trouver la courbe décrite par le point T (Fig. 17.) la courbe
AB étant le côté de la Rofette, le centre étant C, & la touche etant
une droite quelconque DE, tangente à la Rofette fucceffivement
dans tous Jes points.
SOLUTION.
Pour remplacer ici le mouvement ordinaire du Tour, la
double équerre DTCF, compofée de la regle TC, & de
la touche DF doit fe mouvoir, en forte que le point D,
par exemple, fuive le contour 42 de la Rofette, fans que
- le côté DT coupe jamais la courbe; ce qui eft néceflaire,
puifque la touche du T'our ne peut que s'appuyer fur le bord
intérieur de la Rofette. On voit que dans ce cas, la touche
DEF, dans toutes {es fituations poffibles, fera toûjours tan-
gente à la Rofette dans le point Æ, & que la regle pañlant
Mem. 1734: ! SULE
Fig. 17.
* Recherches
Jur les Courbes
a double cour-
bâre, p.106.
Fig. 18.
330 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
toûjours par le point C, dans toutes les fituations de DFE
lui demeure toüjours perpendiculaire en 7. Or M. Clairaut
a démontré *, qu'en tirant des perpendiculaires d’un point
fixe fur les tangentes fucceflives d’une courbe quelconque,
les points de concours de ces perpendiculaires & des tan-
gentes, feront dans une Epicycloïde. Le point 7, ou le
fommet de notre équerre mobile étant le point de concours
de la tangente & de la perpendiculaire, décrira donc une
Epicycloïde, & il fuit de la même démonftration, que cette
Epicycloïde fera foüdouble de celle que décriroit le centre
de la Rofette, en la faifant rouler fur fa pareille. La courbe
du Tour, ou la courbe décrite par le point © fera donc en
ce cas la Conchoïde directe ou oblique, dont FEpicycloïde
précédente fera la bafe.
I refte un quatriéme cas dans la fuppofition de la touche
rectiligne, c’eft celui où la touche feroit intérieure à la courbe
qui fert de Rofette. Ce cas n’a pas lieu dans la pratique
ordinaire du Tour où la touche, quelle que foit fa figure,
ne porte jamais que fur le bord extérieur de la Rofette.
Mais il feroit poñlible de pratiquer un rebord de champ à
la Rofette, & en coudant la touche, de faire porter fon plat
fur ce rebord par dedans, ce qui fournit la matiére d’un nou-
veau Probleme; on va examiner ce cas, parce qu'il en ré-
fulte une nouvelle efpece de Conchoïde plus générale encore
que celle de M. de la Hire.
PROBLEME XIII
Trouver la courbe décrite par le point M (Fig. 1 8.) La courbe
AB étant le côté de la Rofette, le centre étant C, à la touche
étant une droite quelconque D' MT, qui porte toijours par un
point V fur le contour À B de la Rofette, du côté concave vers C.
SOLUTION.
On voit que la différence du cas préfent à celui de Ia
touche pointuë, confifte en ce que le point parcourant qui,
SR 3 A
& +. 212
DES :S:CAMIEUN CE SR 327
dans le premier cas, étoit pris dans la regle, comme en #7,
eft ici tranfporté hors de la regle en T, en forte que la courbe
donnéé AB n’eft pas, à proprement parler, & fuivant la
définition précédente, la vraye bafe des Conchoïdes tracées
par les points ©, 0, mais une bafe empruntée, pour ainfi dire,
que noùs nommerons fauffe bafe, pour la diftinguer de l'autre
qu'on appellera {a vraye bafe. Le Probleme fe réduit donc
à trouver la courbe que décrit le point 47, ou la tète de
l'équerre CMT, tandis que le point 7” parcourt la courbe
donnée AB.
Soit MT—a, CQ=—p, & TQ—3, coordonnées de
la courbe donnée À B, parcouruë par le point 7’; CP=—r,
& PM, coordonnées de la courbe cherchée, tracée par
le point 47, on aura M Œ re +. ff, & on fera les analo-
gies fuivantes, pour avoir les valeurs de p & 4, exprimées
en f &r.
MG Vi. MP: MT.a.TR=PQ—
. Vrr+ff
MC, Vrr+-f]. CP,r MT AIMER. 7 — ;
JHiTÉ | Vrr+ff
Or CQ—=CP+ PQ. Donc p=r+ Sr OS À 7)
Vrr+ SS
— MP— MR. Donc 4 = [+ ——.
ITS T
Ces deux valeurs de p & de g, fubftituées dans l'équation
fuppofée donnée de la faufle bafe 4 B, donneront la courbe
tracée par le point AZ, laquelle fera la bafe de toutes les
Conchoïdes tracées par les points ©, o, &c,
Si on veut trouver ces courbes O, o, directement, fans
“chercher la bafe A», on le pourra par le Probleme fuivant,
Tti
Fige 19e
332 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
PROBEEME XFWV.
La faufle bafe, ou Ja courbe AB (Fig. 19.) tracée par le
point parcourant V\, pris hors de la regle CM, étant donnee, le
pole étant C ; trouver immédiatement la courbe du Tour, ou la
Conchoïde tracee par nn point quelconque S, fans chercher préa-
lablement la courbe tracée par le point M fervant de bafe à la
Conchoïde S £.
SOLUTION.
Soit SN—a, MT—&6, MN—=c, CR=p, RT—=3;
CP=x, PS=y, PO =; on pourroit fe pafler de cette
troifiéme inconnuë, mais on introduit pour {a facilité du
calcul, & on la fera difparoître enfuite. On aura aufi PR,
où QH=p+x, & CO—= V4 x + gg On pourra
faire les analogies fuivantes,
CP;x.P0, z :CR, p . RH,
CP,x.CO,Vrx+u:: SN, a 50, VE.
CP,x. PO, > : MT, b . HM,
CPxe PO, " g :SN, & : ONE:
Ps COVaEu:MT 6 . HT, Waru,
CP,x.CO, Var x :: HQ,p+x. HO V sx + 3e
D'où l'on tirera ces trois équations
S0.+0 PPS.
Donc ELITE TERRE ou aVrx Hi = x)
2
ÉNENEREE Er
DFE SL CR EN CS 33%
RH+HT=RT.
Donc 2 EE Vax + zr— 9,
ou PH Var rx ge
ON+OH+HM=MN.
Donc <£ + 2: Vax ++ te 6;
OÙ 4-07 + px LATEST
I eft évident qu'avec ces trois équations on peut fairé
évanouir 7, & tirer les valeurs de p & g, coordonnées de 14
courbe donnée 77, en x & y, coordonnées de la courbe
cherchée S/, qu'il n’y aura plus qu'à fubftituer dans l'équation
donnée, pour avoir celle de {a courbe Sf que lon cherche.
CoOROLLAIRE.
En faïfant 4«—o, le point S deviendra le point M, &
donnera, au lieu de la Conchoïde oblique S/, la Con-
choïde direéte Vy, tracée par le point A fitué dans la regle
MCN. x
Remarqués que la courbe S/ ni fa courbe y, ne font
Conchoïdes qu'à l'égard de la courbe que trace le point AZ
qui peut leur fervir de bafe; mais confidérée par rapport à la
faufle bafe Tr, ce n'eft plus une Conchoïde, ou c'en eft une
d'une nouvelle efpece, dont les Conchoïdes de M. de 1a Hire
ne font qu'un cas particulier. Au lieu d'une ligne droite,
comme Nicoméde, lAuteur moderne prend pour bafe une
ligne quelconque, & au lieu de prendre le point décrivant
fur la regle, il le prend dans un point quelconque du plan:
Nous ajoûtons quelque chofe de plus, ou plütôt nous retran-
chons une condition qui reftreint encore la Conchoïde de
M: dela Hire; car s'il Jaifle la liberté de prendre le point
décrivant S, hors de la regle A/CN, il prend du moins fon
Ti
Fig. 20.
334 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
point parcourant A7, toûüjours dans la regle, au lieu que le
point parcourant de la nouvelle Conchoïde, peut, ainfi que
le point décrivant, être pris dans un point quelconque du
plan, fans aucune reftriétion.
On en pourra trouver les tangentes & les perpendiculaires,
foit par la méthode ci-devant indiquée, foit par celle de M.
de la Hire, en réduifant auparavant la nouvelle Conchoïde à
l'efpece dont il a traité, par la recherche de la courbe #7, qui
lui fervira de bafe, comme on l’a enfeigné Probleme XII.
Quant à la redification & à la quadrature de la nouvelle
courbe, voici le moyen d’en touver les élements, & le Pro-
bleme propolé dans toute fa généralité,
PROBLEME XV.
Trouver les élemenrs Mm, Nn, T't (Fig. 20.) des courbes
tracées ur le plan immobile, par les points M, N, T, du plan
mobile, tandis que le point S du même plan parcourt la courbe
donnée Sf. Trouver de plus la valeur des elements tTmM,
SfnN, pour avoir la quadrature des efpaces renfermés entre
les courbes Tt, Mm, Nn & Sf
SL VTTrION
Soit MT—a, MCN=—=i, NS=c, CP=x, PSY,
en aura CS — Vax y}; CN, Var y) — =,
CM= b — 7.
Le rayon étant fuppofé égal à Vunité, on trouvera Ia
tangente de Vangle SCP=— = =1. Donc la différentielle
À dt
du même angle =
de l'angle SCN— + Donc la différentielle de angle SCN
. Par la même raïfon, fa tangente
= ed u :
= —“— — ©, Donc la différentielle de l'angle
1 _” ce z 74 — € c
LA
NCEP, ou le petit angle NCn = 4 — —£it—
TEA + ce"
Di E 83 SC NÆEAN CES Mi 335
Maintenant pour avoir l'arc Ng, dont le rayon eft CW,
- dt cage à zds ALIEN
OH pri ET pd En RE
& comme "0, Na font des arcs de cercle, & que MN—mn,
il fuit que MO—ng=d3. Pour avoir 4 M, je me fers
des triangles femblables 4/M, NCg; car n/M eit fem-
blable à OrM, celui-ci à MCO, & MCO à MC; on
fera donc CN. NQ ::ul— MT .uM. Retranchant
u M de OP, j'aurai 1 O ou r/, & je trouverai mO, en faifant
Cg . Ng :: Cm. mO—IT.
Ayant les valeurs de NQ, #g, mO, OM, 11, IT, on
aura tous les éléments des courbes cherchées Mn, Mm, Tr.
Voilà ce qui regarde la Touche rectiligne, il refte à exa-
miner les effets de la Touche courbe.
Hypothefe de la Touche courbe.
Au lieu de fuppofer la touche pointuë ou reéiligne, on
peut fuppofer que c’eft une portion de courbe ; cette fuppo-
fition n’a dieu dans la pratique, qu'à l'égard du cercle, puif-
que, comme on a déja remarqué, pour rendre le mouvement
du Tour plus doux, la touche porte ordinairement à fon
extrémité une petite poulie ou roulette, contre laquelle
s'appuye le côté de la Rofette.
Tous les cas de l’hypothefe de {a touche courbe fe peuvent
réduire à deux ; celui où le côté de la Rofette eft une droite,
& celui où le côté de la Rofette eft une courbe.
Si le côté de la Rofette eft une droite, il eft clair que cette
droite fera tangente fucceflivement aux divers points de 1x
courbe qui forme la touche. Le mouvement du Tour, en
ce cas, fera remplacé, en fuppofant que l'angle mixtiligne
FTC(Fig. 21.) compofé de la courbe 7F qui repréfente
la touche, & de la regle 7 CO, fe meut en gliffant fur le
point C, en forte que le côté A B de la Rofette eft toûjours
tangent à la courbe 77.
On:voit qu'il n’y a en ce cas aucun point de la touche qui
Fig. 212
336 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
parcoure le côté AB de la Rolette; la ligne AZ n’eft done
point ici la bafe de la courbe tracée par l'outil du Tour fitué
en quelque point © ou o. Pour avoir cette courbe, il n'eft
queftion que d’en trouver une qui puiffe lui fervir de bafe, &
il fuffit pour cela de connoïtre une des courbes qui, dans le
mouvement prefcrit, feroit tracée par un des points de Ia
regle TC. Nous choïfirons comme la plus fimple, celle que
trace T, ou le point de concours de la regle OT, & de la
touche 7F.
PROBLEME XVI.
Soit la courbe VF donnée (Fig. 2 1.) attachée en T à la regle
TC, prolongée indéfiniment vers O, &r mobile [ur le point fixe C.
La droite TCO paffant toéjours par le point C, qu'on faffe mou-
voir la courbe D F Xe long de la ligne donnée AB, qui lui fera
tangente dans. fes divers points FŸ fucceffivement ; on demande
quelle eff la courbe T't tracée pendant ce mouvement par le point T.
SOLUTION.
Soient HG—x%, GT—y, coordonnées de la courbe
cherchée 74, PF—u & TP—7, coordonnées de la courbe
donnée T°F, dont on connoît par conféquent la tangente
L FT, & la foûtangente L P=—f, on aura LT —/f—7,
& la diftance donnée du point C à la ligne AB fera HC—a,
on cherche l'équation de la courbe 77.
Les triangles CTQ, CHL, LPF, LTG font fem-
blables, on aura donc
PEu.LEÆEt:: HG a.CL, <—,
EF;t LP, [= CL LT, + f—1.CQ,x
= aft+uff—ufz
On aura auf LE, 1, PF, ui: LT, [—3, GT, y
æ— Ju —uy
= r 0
Ayant
DAEUS MAMICUILE NT CE 15 37
‘Ayant les valeurs de x & y en u & 7, avec l'équation de la
courbe 77, on aura de quoi faire difparoître v & 7, & ïl
reftera l'équation de la courbe cherchée 77, qui étant prife
pour bafe, fervira à trouver toutes les courbes que peut tracer
l'outil dans fes diverfes fituations Oo, &c. On eût pü tirer
ici, comme dans {es Problemes précédents, les valeurs de #
& 7 en x & y; mais elles euflent été mêlées de : & /, tangente
& foûtangente de la courbe 7F, defquelles on n'a la valeur
qu'en # & Z.
Enfin, fi le côté de la Rofette eft une courbe, Ia touche
étant à roulette, c’eft comme fi la regle A/C0 étoit attachée
au cercle ZND, & qu'on fit rouler ce cercle fur la courbe 4Z,
en faifant gliffer la regle A1CO, fans jamais quitter le point C.
Tous les points de la regle décriront en ce cas diverfes
courbes qui feront mutuellement les bafes & les Conchoïdes
les unes des autres. Nous chercherons, comme la plus fimple,
celle qui eft décrite par le point #1, centre du cercle qui
forme la roulette de 11 touche.
PROBLEME XVII.
Trouver la courbe tracée par le point M (Fig. 22.) centre du
cercle ND, qui roule fur la courbe donnée AB, tandis que MIO,
diametre prolongé du même cercle, gliffe fur le point fixe C, [ans
jamais s'en écarter.
SOLUTION.
Le cercle ZND touche Ia courbe AB en un point quel-
conque !V, par où paffe la tangente commune LAN. Tirés LF
à volonté, pour fervir d’axe à la courbe donnée AB, & à la
courbe cherchée A1D, dont les coordonnées auront leur
origine commune au point fixe €. Soit donc CP=—x,
PM=y, CQ=u, QN=7, MK parallele à PQ, fera
u—x. NK, prolongement de QN, feray—7. Le cercle
IND, & la courbe À B étant donnés, on aura Îe rayon
MN=—=a, la perpendiculaire NS=p, & la foüperpendi-
culaire QS=—f.
Men 1734 . Vu
Fig. 22,
Fig. 22:
_
338 MEMOoIRESs DE L'ACADEMIE RoyaLE
On fera NS, p . QS, [:: MN, a « MK, u—x—"l
Donc x— u — 4.
P
NS, p. NQ,7:: MN, a. NR; pee
Donc y=7+
az.
P?-
La relation entre # & 7 étant connuë par l'équation de la
courbe donnée 4 B, on fera difparoïtre # & 7, & on aura
l'équation cherchée en x & y de la courbe A7D. Cette courbe
peut férvir de bafe à toutes les Conchoïdes décrites par les
points O, o, &c. Et en donnant la courbüre A2D à la Rofette,
&. fuppofant la touche pointuë, l'outil traceroit les mêmes
courbes que dans le cas préfent de la touche en roulette, &
de la Rofette AB.
Si la regle prolongée Z M ne pafloit pas par le centre du
cercle, mais en étoit une corde, ou fi.on fuppofoit à la touche
une autre courbüre que la circulaire, fuppofition qui n’a pas
lieu dans la pratique, on ne pourroit employer avec le même
avantage la perpendiculaire. & la foûperpendiculaire de la
courbe 4 B, Il faudroit chercher plufieurs analogies entre les
coordonnées des trois courbes, & on pourroit fe fervir des
méthodes employées dans quelques-uns des Problemes pré-
cédents; mais le calcul en feroit long, & d'ailleurs inutile au
but que nous nous fommes propolés, ainfi nous nous en
tiendrons Îà.
On a donc démontré que dans le cas de la touche pointuë,
Ja courbe tracée par l'outil du Tour étoit toujours une Con-
choïde prife fuivant la définition de M. de la Hire; & quoi-
que cela ne foit plus vrai hors de cette hypothefe, pour
ramener la courbe du Tour au même point de vüë dans
toutes les fuppofitions qu'on peut faire fur les diverfes figures
de la touche, on a donné le moyen de confidérer toüjours la
courbe tracée par outil, comme une Conchoïde, en cher-
chant dans les divers cas de la touche rectiligne ou curviligne,
LEP RER"
DES SCIENCES. 339
fa courbe qui peut fervir de bafe à celle du Tour prife pour
Conchoïde, c’eft-à-dire, pour en faire l'application au Tour, .
la courbe dont il faudroit que la Rofette eût 1a figure, pour
faire fuivre à l'outil le même trait, en fuppofant la touche
pointuë, |
Quelle que foït Ia figure de ‘la Rofette & de Ta touche, &
quelle que foit la pofition de l'outil, on a donc le moyen dé
reconnoître {a nature & Tefpece de courbe tracée par l'outil
du Tour, ce qui éft l'objet qu'on s'étoit propolé. :
Je n'ai point parlé des Tours dont l'arbre fixe par une
extrémité, n'eft mobile que par l'autre, comme un levier de
la feconde efpece. La feule différence entre l'effet de ceux-Cf,
& l'effet du Tour parallele que nous avons décrit, confifte
en ce que dans ceux dont il eff ici queftion , la figure tracée
peut, en confervant fes proportions, devenir plus où moins
grande, en approchant ou en éloïgnant feulement l'ouvrage
de la Rofette: au lieu que dans le Tour parallele, 1a diftance
de la Rofette à l'outil, n'apporte aucun changement dans les
dimenfions de la figure.
IL y a auffi des Tours dans lefquels arbre, au lieu de fe
mouvoir parallelement à lui-même, «eft porté par deux pou-
pées mobiles, fur un axe ‘commun parallele à l'arbre, en forte
que l'axe de l'arbre, au Jieu-de fe mouvoir dans un plan, fe
meut dans la fuperficie d’un cylindre, & que le centre de Ia
Rofette, au lieu de décrire une droite, comme ïl la décrit
dans fon mouvement alternatif de parallelifme, que nous
avons expliqué, décrit un arc de cercle. H eft vrai que Ja
hauteur des poupées étant d’un ou deux pieds, le rayon de ce
cercle eff fi grand par rapport au petit arc que décrit le centre
de la Rofette, que cet arc peut être pris fenfiblement pour
une ligne droite; & la conftruétion de ce T'our n’eft faite
que pour en éviter une plus compofée que demanderoit le
mouvement de parallelifme proprement dit.
… À l'égard dela courbe du Tour qui en réfuite, c'eft une
Conchoïde plus compofée encore que toutes celles dont
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340 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
nous avons parlé, puifque cette conftruétion du Tour fait à
l'égard de la courbe tracée, le même effet que fi la regle que
nous avons toüjours fuppofée droite, devenoit circulaire,
Les mêmes méthodes que nous avons employées feroient
trouver l'équation de cette nouvelle Conchoïde; le calcul
feulement en feroit plus long, & il n’a rien qui invite à en
furmonter les difficultés.
Au lieu de fuppofer la regle circulaire, on pourroit la
fuppofer courbe d’une courbüre quelconque , fuppofition
très-éloignée de la pratique, & qui ne feroit que des cas
particuliers de tout ce que nous avons donné de plus général,
ruais ce Mémoire n'eft déja que trop long.
Me. de Lead. 1734 PL 21.pag.34o .
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DES SCIENCES. 341
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CINQUIFME MEMOIRE
SUR LETECTRICITE:
Où l'on rend compte des nouvelles découvertes für cette
matiére, faites depuis peu par M. Gray;
Er où l'on examine quelles font les circonffances qui
peuvent apporter quelque changement à l'E le@riciré pour
l'augmentation où la diminution de [a force, comme la
température de l'air, le vuide, l'air comprimé, àrc.
Par M. pu Fay.
: cr que je travaillois aux expériences dont j'ai
rendu compte à f Académie dans mes précédents Mé-
moires, M. Gray a continué fes recherches à Londres, & il
a publié fes découvertes dans les Tranfactions Philofophiques,
Ness 423 & 426, je vais en donner un extrait en peu de
mots; premiérement, parce qu'ayant donné dans mon pre-
mier Mémoire, la fuite hiftorique de tout ce qui avoit été
fait fur cette matiére jufqu'au moment que j'ai commencé
d'y travailler, il eft néceflaire de faire voir les progrès qui
ont été faits depuis; & en fecond lieu, parce qu'on trou-
vera que ces découvertes font très-curieufes, & qu'elles
concourent avec les miennes pour donner quelques idées fur
les caufes de l'Eleétricité.
M. Gray a trouvé dans l'Electricité deux propriétés nou-
velles, Fune qu'elle eft permanente, c'eft-à-dire, qu'elle peut
fubfifter dans les corps très-long-temps après qu'elle y à été
- excitée, & l’autre qu'elle s’y trouve dans certains cas, fans
. que les corps ayent été frottés. Voici de quelle maniére il
a éprouvé que F Electricité étoit permanente; il a fait fondre
. dans une cuillier de fer différentes matiéres réfineufes fépa-
rément, comme de Ja réfine blanche, de la noire, de la poix,
Vu ïï
21 Juillet
1734
Tran. Pie].
N° 423.
Expériences
Phyfcomechan.
P-99.Ü'100.
342 MEMOIRES DE L'ACADEMIÉ RotALE
de la gomme-lacque, de la cire & du foufre. Lorfque ces
différentes matiéres avoient pris la forme de la cuïlier en
s'y refroïdiflant, il chauffoit de nouveau la cuillier un not
ment, afin d'en faire détacher les matiéres qui fe trouvoient
de cette maniére conferver la forme d’un fegment de fphere.
M. Gray a remarqué que lorfqu'il frotioit ces corps, tan-
dis qu'ils étoient encore chauds, ils ne devenoient point
électriques, & ils ne commençoient à avoir une vertu fen-
fible que lorfque leur chaleur étoït à peu-près celle d'un œuf
qui fort de deflous la poule. La vertu électrique augmentoit
enfuite à mefure que le corps refroidifloit, & paroifloit dé-
cuple de ce qu'elle avoit été d'abord. M. Gray enveloppoit
alors ces différents corps dans du papier, dans de la flanelle,
ou dans toute autre matiére femblable, & ils y ont confervé
leur électricité pendant plufieurs mois, & même jufqu'au
temps qu'il écrit, qui étoit environ un an & demi après fes
premiéres expériences. Il a fait la même chofe avec un cone
de foufre, & avec un cylindre de même matiére, ce.dernier
moulé dans un tube de verre, & le premier dans un verre
à boire. D'où il réfulte que l'éeétricité n’eft point une qua-
lité qui fe diffipe peu de temps après avoir été excitée,
comme on l'avoit cru jufqu'à préfent, mais qu'elle éft per:
manente, & fe peut conferver très-long-temps dansles corps:
J'ai vérifié ces expériences, qui m'ont réuffi de même qu'à
M. Gray, & j'ignore, auffi-bien quelui, quel terme on peut
affigner à la durée dela vertu éleétrique. 4
IH y a encore un fait très-curieux que M. Gray a remar
qué, qui eft qu'il y a des corps qui n'ont pas befoin d’être
frottés pour devenir éleétriques ; M. Haukfbée avoit déja
remarqué que poix étant encore chaude, attiroitiles feuilles
d'or à fa diftance d'un ‘ou de deux doigts, fans avoir été
frottée, & celaluia paru très-fingulier ; l'en eft néantmoins
demeurédà, & s'il-eût pouffé fes obférvations auffrloin que
M. Gray, il auroit reconnu qu'il y a plufieurs matiéres dans
le même cas, &ique tous des corps réfineux font de ice
nombre. Voici de quelle-maniére:on doit procéder pour s'en
appercevoir. .
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DES SCIENCES. | 343
: Après avoir fondu dans une cuillier de fer, comme nous
venons de le dire, quelque corps réfineux , comme de {a
poix, de la gomme-lacque, de la cire, &c. & l'avoir fait
fortir de la cuillier en la chauffant un moment, fi on le
Jaifle refroidir dans cet état pofé fur une table où far toute
autre matiére, il devient électrique de lui-même & fans qu'on
y touche en aucune façon, & cependant il ne commence
à le devenir que lorfqu'il eft prefque froid. Pour s'apperce-
voir, dans ces expériences, de {a plus petite électricité {en-
fible, M. Gray attache un fil très-délié & un peu long au
bout d'un bâton, & Fapprochant peu-à-peu du corps élec-
tique, on remarque très-facilement {1 moindre vertu qu'il
peut avoir.
Pour faire cette expérience avec un cone de foufie, il n'y
a qu'à verfer le foufre fondu dans un verre à boire bien fec
& un peu chauffé, on peut le laifier refroidi dans cet état
même pendant plufieurs jours, ainfi que je l'ai obfervé,, on
renverfe enfuite le.verre, & on l'enleve de deffus le cone
de foufre; fi lon en approche alors un fil, il fattire forte-
ment ; & comme on pourroit foupçonner qu'en retirant Île
verre, on feroit l'effet d’une efpece de frottement fur le. cone;
j'ai pris toutes les précautions néceflaires pour m'aflürer qu'il
n'y en avoit point, & le foufre a toñjours été électrique, &
même l'éleétricité à été fenfible à travers le verre, ainfi que
Ya remarqué M. Gray, car le fil étoit attiré ayant qu'on eût
Ôté le verre de deflus le cone de foufie, mais cette attraétion
eft très-foible, & au bout de quelques jours elle ne m'a
plus paru fenfble, tandis qu'elle étoit encore très-forte dans
le cone de foufre, Iorfque j'en ôtois le verre duquel j'avois
foin de le recouvrir pour conferver fon éleétricité qu'il a
encore depuis plus d’un an, & qu'il confervera encore très:
long-temps fuivant toutes les apparences, à en juger par Je
peu de diminution qui. y: efb arrivé pendant cet efpace. de
temps. M. Gray a auffi remarqué qu'un gâteau de foufre
d'environ douze onces, confervoit très-long-temps une foible
éleétricité fans: être enveloppé ni couvert d'aucune matiére)
LS
344 .MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
il avertit enfuite qu'il travaille actuellement fur l'attraction
du Verre & de quelques autres corps pour la rendre per-
manente de même que celle de ces premiers, & il foupçonne
que la température de l'air ÿ apporte plus de dérangement
qu'aux autres.
M. Gray rapporte à la fin de ce Mémoire les expériences
fuivantes qu'il a faites avec la Machine pneumatique. Il a
frotté une boule de verre de deux pouces de diametre, &
l'ayant renduë électrique, il Fa fufpenduë par un fil de cuivre
au haut d’un récipient, en forte qu’on la pouvoit facilement
abbaïfler ou élever pour l’approcher plus où moins de feuilles
d’or qu'il avoit placées fur un papier foûtenu par une foûcoupe
pofée fur la platine de la Machine pneumatique ; après avoir
pompé fair, il n’a trouvé dans la vertu électrique de cette
boule auéun changement fenfible, non plus que lorfqu’il y
a laïffé rentrer Vair. Il a fait la même expérience avec du
foufre, de la gomme-lacque, de la réfine & de la cire blanche,
fans que l'attraction d'aucune de ces niaticres parût moins
forte dans le vuide que dans le plein ; if a même pris pour
faire ces expériences avec précifion, toutes les mefures que
l'on peut attendre de fon exactitude & de fon attention. On
trouve dans Boyle & dans le Livre de M. Haukfbée plufieurs
expériences dans le même genre, mais nous aurons occafion
d’en parler dans la fuite de ce Mémoire, lorfque nous exa-
minerons les changements qui arrivent à l'électricité dans le
vuide. Nous devons maintenant fuivre le travail de M. Gray,
& dire un mot de fes derniéres découvertes.
On les trouve dans deux Lettres inférées dans les Tranf-
actions philofophiques, N.° 426. Dans la premiére, il
rapporte qu'ayant fufpendu un fil dans le récipient de la
Machine pneumatique, & ayant enfuite frotté ce récipient
pour le rendre électrique, après en avoir pompé Fair, le fl
avoit été attiré avec beaucoup de vigueur. Le tube életrique
attiroit auffi ce fil fufpendu dans le vuide, & on lui commu-
niquoit divers mouvements fuivant que lon en approchoit,
ou que lon en éloignoit avec plus ou moins de vitefle le
tube,
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DES SCIENCES: 345
tube, ou fimplement la main : le fil étoit paréillement attiré,
lorfqu'il y avoit deux récipients lun fur l'autre, & même
M. Wheler, au rapport de M. Gray, ayant mis l’un dans l'autre
cinq récipients, le fil étoit également attiré, quoiqu'ils fuffent
tous vuides d'air. Il eft à obferver que pour mieux réuffir
dans ces expériences, il faut que le récipient foit joint à la
Machine pneumatique avec un ciment de cire & de théré-
bentine, & non fimplement pofé fur un cuir mouillé à la
maniére ordinaire, parce qu’en pompant fair, il s’éleve de
ce cuir des vapeurs aqueufes qui diminuent confidérablement
électricité.
M. Gray a auffi remarqué que les corps opaques n'arré-
toient point la vertu électrique, en forte qu'un morceau de
liége barbouillé de miel fufpendu fous une cloche de métal
pofée fur une glace, attiroit les feuilles d'or, lorfqu'on appro-
choit le tube de la cloche. Je rapporte cette expérience de
M. Gray, quoique le réfultat n'en foit que le même que
celui de plufieurs expériences inférées dans mon troifiéme
Mémoire, mais je fuis très-aife de la conformité qui fe trouve
entre les fiennes & les miennes, cela ne peut que confirmer
la vérité des unes & des autres ; il eft même arrivé, comme
on le va voir, que nous en avons fait chacun de notre côté,
qui font prefque entiérement femblables, & il n'eft pas im-
poflible que cela ne nous arrive encore très-fouvent , fi nous
continuons l’un & l'autre à fuivre le même travail, mais cette
efpece de concurrence, dont en mon particulier je fuis extré-
mement flatté, ne peut que tourner au profit des Sciences,
& nous faire avancer plus promptement dans la connoiffance
des phénomenes de l'électricité.
M. Gray pañle enfuite à diverfes expériences fur la tranf
mifion de l'électricité au moyen de deux enfants, dont l'un
étoit fufpendu fur des cordes de crin, & l’autre avoit fous
chacun de fes pieds un gâteau de réfine de huit pouces de
diametre, & de deux pouces d'épaifieur. En approchant le
tube de Fun de ces enfants, l'électricité fe communiquoit à
l'autre, foit qu'ils fe tinflent par Ja main, ou qu'ils tinflent
Mem, 1734 . Xx
346 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
chacun un bout d’une longue perche ou d'une corde ; il les
a mis enfuite tous deux fur des gâteaux de réfine, & les a
fait communiquer l'un avec l’autre de diverfes maniéres, foit
avec le doigt, avec des cordes, ou feulement par les plis
de leurs habits. Après avoir fait ainfi plufieurs combinaifons
différentes & très-curieufes de cette expérience, il fait voix
que Félechricité fe peut communiquer fans que ce foit par
un corps continu, & pour cela il fufpend horifontalement
fur deux foyes une perche de deux piéces de 34 pieds de
long, & à deux pieds de diftance d’un des bouts de cette
premiére il en fufpend une feconde de $ pieds de long qui
fait un angle droit avec la premiére; lorfqu'on approche le
tube du bout de une de ces perches, l'électricité fe com-
munique au bout le plus éloigné de la feconde malgré le
changement de direction , & l'interruption de deux pieds qui
eft entre l'une & autre. On peut voir dans mon troifiéme
Mémoire que j'ai fait la même chofe avec des cordes, &
ce qui eft arrivé lorfque j'ai interpolé différents corps entre
les bouts des deux cordes. M. Gray finit cette Lettre par le
détail des expériences qu'il a faites, en éloignant plus ou
moins l'une de l'autre les baguettes ou les ficelles, & il a
trouvé que Fattraétion étoit encore fenfible après les avoir
éloignées à 47 pouces Anglois lune de l'autre.
Dans la feconde Lettre, M. Gray rapporte encore quel-
quesexpériences fmguliéres fur la communication de la vertu
éleétrique, fans que ce foit par un corps continu. Îl fait
pañlér une corde vers le centre d'un cerceau de 20 pouces
de diametre, fufpendu par des foyes, ou foùtenu fur un
piédeftal de réfine dans une fituation verticale, & ayant rendu
la corde électrique par l'approche du tube, tout le cerceau
Yeft devenu, quoique fa circonférence füt éloignée d'environ
ro pouces de la corde qui pañloit par fon centre. On voit
dans la fuite de cette Lettre, que la même expérience à
réuffi avec un cerceau de 40 pouces de diametre, foûtenu
verticalement par un cylindre: ou gros tuyau de verre, &
que toute fa circonférence eft devenuë aflés fenfiblement
D rs TB'er ERNEST ur
‘éleétrique pour attirer un fil blanc à un demi-pouce de
diftance.
La vertu électrique donnée par le moyen du tube à une
corde tenduë, s’eft pareillement communiquée à une boule
de liege foûtenuë par un rofeau vertical qui avoit pour pied
un entonnoir de verre renverfé, & l'attraction de la boule
a été fenfible, quoiqu’elle fût diftante de la corde d’environ
deux pieds. Enfin M. Gray termine fa feconde Lettre par
une expérience un peu diférente des précédentes, & qui
mérite attention. Il pofa fon cerceau de 40 pouces de dia-
metre fur le gros cylindre de verre dans une fituation ver-
ticale, & fit pafer à l'ordinaire une ficelle par le centre, il
approcha le tube du cerceau, alors non-feulement toute la
circonférence du cerceau devint électrique, mais la ficelle &
une boule d’yvoire qui étoit à fon autre extrémité le devin-
rent aufli; il fit enfuite gliffér la boule dans le centre même
du cerceau, mais alors le fil qu'il préfentoit, pour éprouver
la force de attraction, fut repouflé par la boule, au lieu
d’en être attiré; & lorfqu'il préfentoit ce même fil aux autres
parties de la corde, ïl en étoit attiré à l'ordinaire, comme
dans les expériences précédentes.
Ce fait qui paroît très-fingulier s'explique naturellement
par le principe que j'ai établi dans mon quatriéme Mémoire,
& on peut le regarder comme une nouvelle preuve de mon
hypothefe; car, lorfque là boule eft placée au centre du
cerceau, & qu'elle eft renduë électrique par la communica-
tion du cerceau qui left devenu lui-même par l'approche
-du tube, on ne peut approcher le fi de cette boule, qu'en
le plongeant dans le tourbillon électrique qui circule fans
cefle de la boule au cerceau ; ce fil doit donc devenir lui-
même électrique, & fuivant lhypothefe que j'ai avancée,
il fera repouflé par la boule, puïfque j'ai fait voir que deux
‘corps empreints d’une électricité de même nature fe re-
pouffent au lieu de s’attirer. Ce fil, au contraire, {era attiré
par la ficelle dans tous les points qui feront éloignés du cer-
‘ceau, parce qu'alors étant hors de l'étenduë du tourbillon
Xxi
348 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
éleétrique du cerceau, il ne contraéte aucune vertu, & par
conféquent il doit être attiré par la ficelle ou par la boule,
fi on léloigne du centre du cerceau, & qu'on le promene
le long de la corde.
Je me fuis un peu étendu fur l'explication de cette expé-
rience, parce que, comme c'eft à M. Gray que nous Ja
devons, & que mème elle lui a paru finguliére, j'ai cru qu'il
étoit important de faire voir combien elle s'accorde natu-
rellement avec mon hypothefe qui ne fe trouve jufqu'à
préfent contredite par aucune expérience, & qui, au contraire,
quadre avec toutes celles dont l'explication avoit paru juf
qu'à préfent la plus difficile.
Après avoir rendu compte des découvertes de M. Gray, :
qui, jufqu’à ce jour, font venuës à ma connoiflance, je vais
continuer le plan que je me fuis propolé de fuivre, & rap-
porter en peu de mots les obfervations que j'ai faites fur les
divers changements que la température de l'air peut caufer
à l'Eleétricité. La plüpart des Phyficiens ont remarqué que
l'air humide apportoit beaucoup d'obftacle aux expériences
de lEledricité, M. Gray fa pareillement obfervé, & ül
adjoûte dans une des Lettres dont nous venons de rendre
compte, que l'attraction du verre eft encore plus fufceptible
de ces changements que celle de l'ambre & des autres corps
femblables. J'avois deffein de faire fur ce fujet des obferva-
tions exactes, mais cela n’eft pas poffible, à caufe de plufieurs
difficultés qui font abfolument infurmontables; premiére-
ment, on ne fçauroit s’affürer de frotter plufieurs fois de fuite
le tube, ou tout autre corps électrique, d’une force à peu-
près égale, ainfi cela fait une premiére caufe d’irrégularité;
fecondement, les corps que l'on préfente pour être attirés,
font de nature à ne pouvoir pas être toüjours difpofés de la
même maniére; s'ils font fufpendus, le moindre mouvement
dans l'air les agite; s'ils font pofés fur quelque corps que
ce foit, ils y adhérent plus où moins fortement, fuivant des
circonftances qui nous font abfolument imperceptibles. Enfin
le lieu où l’on conferve le tube caufe encore des variations;
DES HSNICYE E EN CHE SR 349
s’il a été quelque temps à l'air, fa vertu eft plus difficile à
exciter que s'il a été enveloppé; la matiére dont on fe fera
fervi pour l'envelopper, apporte encore du changement,
de même que le froid ou le chaud du lieu où on l'a confervé;
toutes ces difficultés m'ont empêché de faire ces obfervations
avec autant d'exactitude que je me l'étois propolé, & je m’en
fuis tenu à celles qui font affés fenfibles pour étre facilement
apperçüës, je doute même qu’il fût d'aucune utilité de Les
faire avec plus de précifion, & je ne crois pas que cela nous
donnât plus de connoïffance fur la nature des écoulements
électriques. ï
Il eft certain que humidité nuit infiniment à l'action
des corps électriques, cet obftacle eft tel que lorfque le temps
eft humide, on frotte quelquefois le tube pendant 4 ou $
minutes, fans lui avoir communiqué aucune vertu, & même
celle qu'il acquiert, lorfqu’on s’obfline à le frotter, eft toû-
jours très-peu de chofe en comparaifon de celle qu’il a dans
un beau temps. On doit auffi obferver que quoique le temps
foit, lors de l'expérience, beau, fec, & tel qu'on le peut
defirer, on a quelquefois de la peine à exciter la vertu du
* tube, ce qui vient de ce que les jours précédents auront été
humides, & que l'humidité s'eft attachée aux parois inté-
rieures du tube, il faut alors le nettoyer foigneufement, en
y introduifant avec une baguette un peu de coton fec &
un peu chaud; il eft bon auffi de F'efluyer par dehors avec
un linge, ou une étoffe de laine un peu chauffée, cela le
met en état de devenir plus promptement électrique.
J'ai aufli remarqué que le temps chaud n’eft pas le plus
propre à l'Electricité, foit que cela vienne des vapeurs in-
fenfibles qui font alors plus abondamment élevées de la terre,
foit que l’on s’échauffe trop vite en frottant le tube, & que
la tranfpiration du corps rallentiffe le cours de la matiére
électrique, où en occupe une partie; quoi qu'il en foit, il
eft certain que les expériences ne réuffiffent jamais fi bien
dans un jour fort chaud, ni dans les heures les plus chaudes
d'un jour ordinaire.
X x ï
Exyper. Phyfco-
mechan. p. 3 9.
P. 108.
350 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
On auroit pû croire que le vent eût été un obftacle aux
écoulements électriques, on a vü cependant dans mon troi-
fiéme Mémoire, que lorfque je fis l'expérience dans laquelle
la vertu électrique fut tranfmife le long d’une corde, à
la diftance de 1256 pieds, il faifoit un vent très-violent,
ce qui n'empècha pas néantmoins qu'elle ne réufsit par-
faitement ; d’où il réfulte que l'air agité n’entraîne point fa
matiére électrique, ou du moins s’il y apporte quelque dé-
rangement, il n'eft pas aflés confidérable, pour qu'on s'en
apperçoive fenfiblement.
Enfin pour réunir toutes les circonftances qui m'ont paru
les plus favorables à l'Eledricité, il faut choïfir un temps fec
& frein, un vent de Nord, & un jour médiocrement chaud,
ou même une belle gelée, qui pourroit bien être le temps
de tous qui y feroit le plus propre, on trouvera que dans
ces circonftances, l'électricité eft infiniment plus forte que
dans les temps couverts, ou humides. Voilà tout ce dont
jai pü m'aflurer par rapport à la température de l'air, &
ces obfervations font conformes à celles de M. Haukfbée,
& de M. Gray. Voyons maintenant quels changements le
vuide, où du moins l'air extrêmement rarefié peut apporter
dans les expériences de l'Electricité.
M. Haukfbée rapporte qu'ayant ajufté à un tube de verre
un robinet, pour le pouvoir appliquer à la Machine pneu-
matique, & en ayant pompé l'air, le tube, quoique frotté
à l'ordinaire, n’avoit prefque aucune vertu fenfible, il agitoit
feulement les plus petites feuilles de laiton, lorfqu'on l'en
approchoit très-près, mais ayant laiflé‘rentrer Vair, le tube
devint tout à coup électrique, fans l'avoir frotté de nouveau,
& il attiroit les feuilles à la même diftance à laquelle il ne
leur donnoit aucun mouvement, étant vuide d'air; il n’avoit
pas cependant autant de vertu qu'à Fordinaire, mais ayant
été enfuite frotté de nouveau, il recouvra toute fon électricité.
Le même Auteur adjoûte dans un autre endroit, qu'ayant
enduit intérieurement un globe de verre de cire d'Efpagne,
& l'ayant fait tourner fur fon axe, après en avoir pompé
Di E Sy +98 C,L'E Nr CES 351
l'air, ce globe étoit devenu électrique, en pofant la main
deflus pendant fon mouvement de rotation, mais qu'il ne
l'étoit qu'aux endroits qui étoient intérieurement enduits de
cire d'Efpagne, n'ayant aucune vertu dans quelques autres
où il n’y avoit point de cire. IL eft vrai que laiflant rentrer
l'air dans le globe, les endroits enduits de cire devenoïient
encore plus électriques qu'auparavant, ce qu’il reconnoifloit
par des fils qu'il laifloit pendre librement au deflus de ce
globe,
M. Haukfbée à dit aufi qu'un tube rempli d'air libre, ou
un cylindre de verre folide, frotté dans un récipient vuide
d'air, n'acquéroit aucune vertu; d'où il conclud que l'air a
beaucoup de part aux phénomenes de l'éledricité; il penfe,
par exemple, que lorfqu’il y a de l'air dans l'intérieur du tube,
cet air empêche a matiére électrique d’y entrer fi librement,
& par conféquent la fait agir au dehors; au contraire, lorf.
que le tube eft vuide d'air, cette même matiére s'y porte
avec beaucoup de facilité, & par conféquent n’a plus d’aétion
au dehors. À égard de l'air qui environne le tube exté-
rieurement, M. Haukfbée penfe que c’eft lui qui tranfporte
les corps légers vers le tube, & qui eft caufe de tous leurs
mouvements ; d'où il conclud que fi on vient à ôter cet air
extérieur, ou, ce qui eft la même chofe, fi l’on frotte le
tube dans le vuide, tout l'effet apparent de l'électricité doit
être anéanti. Îl explique par les mêmes principes, la tendance,
ou la direétion des fils vers le centre du globe de verre rendu
élechrique, lorfque l'expérience eft faite dans l'air libre, &
la ceflation de cette tendance lorfque le globe eft vuide d'air,
ou lorfqu'en étant rempli à ordinaire, on Ôte l'air extérieur
en faifant l'expérience dans le vuide.
Ces derniéres expériences de M. Haukfbée ne paroifient
pas trop S'accorder avec celle de M. Gray que je viens de
rapporter, qui confifte à rendre une boule de verre électrique
par le frottement, & la fufpendre enfuite dans le récipient
de la Machine pneumatique, & il a remarqué qu’alors l'élec-
tricité ne fouffroit aucune diminution, foit que le récipient
Page 1 6,
352 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE
fût rempli d'air ordinaire, foit qu'il en fût vuide, ou qu'en-
fuite on le fit rentrer; ces efpeces de contrariétés m'ont en-
gagé à apporter l'attention la plus fcrupuleufe , lorfque j'ai
refait ces expériences, & même à les combiner de différentes
maniéres, ainfi qu'on le va voir.
J'ai commencé par celles de M. Haukfbée avec le tube
de verre, & elles m'ont réuffi de même qu'à lui, en forte
qu'il eft conftant que lorfque ce tube eft vuide d'air, if
n’acquiert prefque point d'électricité, & qu’il la recouvre
dès qu'on y laifle rentrer l'air, quand même on ne le frot-
teroit pas de nouveau ; j'ai obfervé de plus que lorfqu'il eft
vuide d'air, il ne produit point, à l'approche des mains,
ou du vifage, ces petillements qui arrivent toüjours lor{qu'il
eft rempli d'air à l'ordinaire, mais cette obfervation tient à
celles qui concernent la lumiére, & qui doivent faire le fujet
d'un autre Mémoire.
Pour faire avec plus de commodité & d'exactitude les
expériences dans le vuide, je me füuis fervi d’un petit Baro-
metre que M. de Mairan a eu la bonté de me communi-
quer, & qui rend toutes les expériences du vuide infiniment
lus faciles à faire qu’elles ne le font avec un récipient, au-
quel eft ajufté un Barometre ordinaire, ou même avec le
tube appliqué à la Machine pneumatique, comme cela fe
pratique en Angleterre, & dans lequel le Mercure s'éleve à
proportion que le reflort de l'air diminué dans le récipient.
Le Barometre de M. de Mairan eft femblable pour la
forme aux Barometres ordinaires, fi ce n'eft qu'il n’a en tout
que 3 pouces de ong ou environ; on le remplit tout entier
de Mercure; ainfi que la partie inférieure de la boule, &
on l'ajufte fur un petit pied, afin qu’il puiffe demeurer dans
une fituation verticale. Lorfqu'on veut connoître par le
moyen de cet inflrument, la quantité dont l'air eft dilaté
dans le récipient, on le pofe fous ce récipient fur la platine
de la Machine pneumatique; on conçoit aflés que les pre-
miers coups de pifton ne font aucun effet fur ce Barome-
tre, mais lorfque l'air eft dilaté au point que le Barometre
ordinaire
DES SCIrENCESs,.
ordinaire feroit defcendu de 24 pouces ou environ, celui-ci
commence à agir, & fi on le fait defcendre de 2 pouces,
on doit juger que le Barometre ordinaire feroit defcendu
de 26 pouces, & ainfi du refte. On ajufte à ce Barometre
une petite regle de cuivre divifée en pouces & en lignes,
& fi l'on veut que les opérations foient faites avec toute la
jufteffe que l'on peut defrer, il faut avoir égard à la hauteur
actuelle du Barometre ordinaire lors de l'expérience, mais
communément il n’eft pas néceflaire d’ apporter une fr grande
précifion. Pour celles dont il eft queftion préfentement, il
ne s'agit que de juger de la quantité d'air qui refte dans le
récipient, & il eft très-aifé de le faire, au moyen de la petite
regle de cuivre qui indique en lignes Ia différence de hau.
teur entre le Mercure contenu dans le vuide du tube, &
celui qui eft dans la boule.
On feroit de pareïls Barometres un peu plus longs, fr
on avoit befoin de connoître les degrés d'un vuide moins
parfait, mais il arrive rarement qu'on en ait befoin:; il n'ya
que ceux qui font dans Fhabitude de faire de pareïlles expé-
riences, qui puiflent connoître le prix d’une invention aufii
fimple, mais pour moi j'avouë que je l'ai trouvée d’une
commodité infinie, & j'ai cru ne pas devoir nepgliger l’oc-
cafion de Ia rendre publique.
Pour m'affürer enfuite fi les différents corps frottés dans
le vuide acquéreroient de l'électricité ou non, j'ai pris un
récipient ouvert par le haut; une boîte de bois cylindrique
d'environ 4 pouces de haut entroit dans cette ouverture
du récipient, & y étoit exactement cimentée; le fond &
le couvercle de la boîte étoient percés d'un trou d’une ligne
& demie de diametre, & elle étoit entiérement remplie de
plufieurs cuirs appliqués les uns für les autres, percés auffr
dans le milieu, & graiflés de façon que l'air ne pût s’intro-
duire ni entre les cuirs, nientr'eux & les parois de la boîte:
un fi de fer poli traverfoit d'un bout à l'autre fa boîte &
tous ces cuirs, & l’un de ces bouts qui entroit dans le réc{-
pient, étoit taillé en vis pour, au moyen d’un peu de filafle
Mim 1734 | : Yy
354 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
ajufter une boule percée d'ambre, de verre, ou tout autre
corps femblable; le bout fupérieur de ce fil de fer qui étoit
au-deflus de la boite, & hors du récipient, étoit garni d'une
petite bobine, ou poulie de bois, on faifoit tourner cette
bobine avec un archet, & par ce moyen le fil de fer &
la boule qui y étoit attachée, tournoient dans le récipient
avec beaucoup de rapidité, fans que l'air püt en aucune façon
y entrer.
Pour que cette boule püt être frottée par ce mouvement,
j'avois ajufté une efpece de pince platte & recourbée, garnie
d’étoffe qui embrafloit la boule & la ferroit foiblement, cette
pince étoit attachée fixement au tuyau de la platine de la
Machine pneumatique, enfin il y avoit des fils fufpendus
au dedans du récipient, pour pouvoir reconnoitre f1 la boule
étoit devenuë électrique.
Tout étant ainf difpofé, je commençai par faire lexpé-
rience fur une boule d'ambre, je Fajuftai pour cet effet au
bout du fil de fer, & je la fis defcendre entre les branches
de la pince garnie d'étoffe; je pompai l'air alors jufqu'à ce
que le Mercure füt defcendu dans le petit Barometre à 3 lign.
près du niveau, je frottai enfuite la boule d’ambre en faifant
tourner la bobine par le moyen de l'archet, après quoi foù-
levant la bobine, je retirai la boule d'entre les branches de
a pince, ce qui la fit rencontrer vis-à-vis des fils que j'avois
difpofés à cet effet, elle les attira fortement, & tout de
même, à ce que j'en puis juger, qu’elle auroit fait dans V'air
libre. Il rentra fi peu d'air dans le récipient pendant le cours
de cette expérience, que le Barometre ne monta que d'en-
viron une demi-ligne. J'ai répété plufieurs fois cette expé-
rience, & elle a toüjours réuffr de la même maniére, en forte
qu'il peut demeurer pour conflant que ambre frotté dans le
vuide devient électrique de même que dans l'air ordinaire.
J'ai fait la même expérience avec une boule de criftal de
roche, après avoir garni de papier les branches de la pince,
parce qu'il m'a paru que le papier faifoit mieux que l'étofte
pour le verre & les matiéres femblables; ayant pompé Fair
|
DE s1 $ CT EN C'E 8. 355
au mème point-que dans l'expérience précédente, j'ai trouvé
que la vertu éleétrique étoit confidérablement diminuée, &
qu'elle étoit rétablie, lorfqu'ayant laïflé rentrer Fair, je
frottois la boule de nouveau ; d’où il réfulte que le verre &
les corps femblables frottés dans le vuide n'acquiérent que
très-peu d'électricité, quoiqu’ils la confervent dans le vuide,
s'ils ont été précédemment frottés dans l'air libre, & que les
corps, dont l'électricité eft de la nature de celle que nous
avons appellée réfineufe, acquiérent cette vertu étant frottés
dans le vuide, de même qu’ils feroient dans l'air libre, ce
qui établit encore une nouvelle différence entre ces deux
éleétricités.
Ayant fait ces expériences dans le vuide, j'ai voulu voir
ce qui arriveroit en comprimant l'air dans le tube; & pour
connoître exactement la quantité dont l'air feroit comprimé,
J'ai cherché une machine qui me pût donner les degrés de
condenfation, comme celle que je viens de décrire me don-
noit ceux de dilatation. .
La voye la plus fimple n'eft pas pour l'ordinaire celle qui
e préfente la premiére ; il me vint d’abord des idées aflés
compliquées, & d’une execution difficile, enfin je m'arrétai
à un moyen très-facile, & plus fmple encore, s'il eftpoffible,
que le Barometre dont je viens de parler; c’eft un Tube de
s ou 6 pouces de long, de demi-ligne ou environ de dia-
metre intérieur, ouvert par un de fes bouts, & fermé par
autre. Ce Tube eft porté par une petite monture de cuivre
divifée en pouces & en lignes, & dans laquelle il peut glifier
avec un peu de force, enforte que l’on place l’une de fes
‘extrémités fur la divifion que l’on veut, & qu'il y demeure.
La monture de cuivre qui enveloppe le tube, eft fenduë fui-
vant fa longueur , en forte qu'on voit le tube d'un bout à
autre par cette fente.
J'ai vû depuis dans le Livre de M. Halès fur 'Analyfe
de l'Air, une méthode qu'il employe pour connoître a
profondeur de la Mer, qui a quelque rapport à cette ma-
chine, & qui auroit pù m'en faire naître l'idée, fi je l'avois
Yyi
356 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
connuë plûtôt, mais qui eft encore moins fimple que celle
que je propofe ici. Ayant difpofé le tout de la maniére que
je viens de le décrire, on fait entrer dans le tube une goutte
de mercure, & avec un fil de fer on la place vis-à-vis une
des divifions de la monture ; comme on peut mouvoir le
tube dans la monture, & la goutte de mercure dans le tube,
on arrange l'un & l'autre en forte que Fair compris entre
le bout fermé du tube & la furface inférieure de la goutte
de-mercure réponde à un certain nombre de lignes fur la
monture ; le tout étant difpofé de la forte, on l'ajufte fur
le canal du robinet, & on l'introduit dans le tube.
On conçoit facilement que lorfque l'air viendra à être
comprimé dans le tube, il pefera fur la goutte de mercure,
& la fera baifler dans le petit tuyau de verre jufqu'à ce que
l'air contenu fous la goutte foit dans un degré de condenfa-
tion égal à celui du tube; or comme ce degré de conden-
ation eft très-aifé à connoître par la quantité de lignes dont
le mercure defcend, on connoïît pareillement la condenfation
de l'air du grand tube,
On me peut faire une objection qui eft bien fondée, mais
qui eft de très-peu de conféquence , cependant je n'ai pas
cru devoir négliger d'y répondre. On peut dire que le poids
de la goutte de mercure comprime un tant foit peu l'air
du petit tuyau, & qu’ainfi cet air n’eft pas précifément dans
le même degré de dilatation que l'air extérieur ; on adjoûtera
que lorfque l'air eft comprimé à un certain point, cette
même pefanteur ne fait prefque plus aucun effet fur la petite
colomne inférieure, en forte que cela ne peut pas indiquer
bien précifément le degré de condenfation , mais je réponds
à cela que l'erreur eft trop légere pour mériter qu'on y faffe
attention ; de plus, pour peu que l'on voulüt s'y arrêter, il
feroit facile de la corriger par le calcul ; enfin, fi l'on veut
entiérement l'éviter, il n’y a qu'à pofer le petit tube dans une
fituation horifontale.
Avec ce petit inftrument, que j'appellerai E/aterometre;
j'ai fait les expériences fuivantes. Par un beau temps, le tube
CT
ml
DES SCIE N°C ES 357
étant fort électrique, en forte qu'à la diftance de 3 3 pouces
il attiroit un aflés gros fil fufpendu librement, j'introduifis
avec la pompe de l'air dans le tube, en forte que l'efpace
entre le fond du petit tube & la furface inférieure de a
goutte de mercure, qui étoit de 54 lignes dans fon état
ordinaire, fut réduit à 1 8 lignes, l'air étoit donc alors trois
fois plus comprimé que dans fon état ordinaire ; je fermai
enfuite le robinet, & ayant frotté le tube, ïl n'attiroit qu'à
peine le fil à la diftance de 3 pouces, mais je n’en fus pas
furpris, parce que cela me paroiffoit très-fenfiblement venir
d'une vapeur grafle que l'air avoit entraînée avec lui en
pañfant par la pompe, & qui s’étoit attachée aux parois inté-
rieures du tube ; l’ayant frotté pendant quelque temps, il a
recouvré aflés d'électricité pour attirer le fil à la diftance
de 20 pouces, ce qui n'eft néantmoins arrivé qu'après que
la vapeur, dont je viens de parler, a été diflipée, & a
monté vers le haut du tube. Jai enfuite ouvert le robinet
pour laifler fortir l'air, & le tube, après Favoir frotté,, eft
devenu auffi électrique qu'il Fétoit auparavant.
Ayant réitéré l'expérience, & comprimé l'air au même
point, il eft arrivé précifément ka même chofe que la pre-
miére fois. Quelques heures après je l'ai répétée une troi-
fiéme fois, & le fuccès a été à peu-près le même.
La quatriéme fois je comprimai l'air un peu davantage,
en forte que la goutte de mercure baiffa de 39 lignes, c’eft
dire que l'air qui dans fon état de liberté occupoit $ 4 lignes,
& dans les expériences précédentes n'en occupoit plus
que 1 8, étoit dans celle-ci réduit à 1 $, ce qui eft à peu-près
tout ce que je puis faire avec ma pompe, car les derniers
coups de pifton ne font plus. d'effet fenfible, d'ailleurs je
craindrois qu'une plus forte compreffion ne brifât le tube,
Je frottai le tube dans cet état, & il n'attira que très-foi-
blement le fil à la diftance de 3 pouces. J'ouvris alors le
robinet, & je laiflai fortir l'air avant que le nuage intérieur
fût difparu , & que la vertu fût recouvrée, comme il étoit
arrivé dans les premiéres expériences ; je voulois voir s'i
Yy i
353 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
n'attiroit pas par ce moyen le fil de plus loin fans l'avoir
refrotté de nouveau, mais cela n’arriva point, & fa vertu
refta auffr peu confidérable ; il eft vrai que venant enfuite à
le frotter pendant quelques inftants, il acquit autant d'élec-
tricité qu'il en avoit jamais eu.
I femble qu'il réfulte de-là que l'air introduit dans le tube
par le moyen d’une pompe, y porte avec lui une vapeur
grafle qui nuit à l'électricité, & on ne peut pas empêcher
que cela n'arrive, car fi l'intérieur de la pompe & le pifton
n'étoient enduits de graifle, l'air ne pourroit y être contenu
Jorfqu’on vient à le comprimer , & cet air appuyant forte-
ment contre les parois onétueufes , il fe charge néceflaire-
ment de quelques parties grafles qu'il porte avec lui dans
- Fintérieur du tube; fi lon mouilloit la pompe au lieu de la
graifler, l'air porteroit pareïllement dans le tube une vapeur
aqueufe qui nuiroit pour le moins autant que celle-ci à
l'électricité.
Ces raifons m'ont obligé d’avoir recours à d'autres moyens
pour comprimer l'air dans le tube, fans y introduire d'hu-
midité, ni de vapeurs graffes. Je me fuis d'abord fervi de
l'expédient le plus fimple de tous, qui eft de chauffer le tube
après lui avoir ôté la communication avec l'air extérieur en
fermant le robinet. I eft vrai que de cette maniére je n'aug-
mentois pas la quantité d’air dans le tube, mais je rendois
fa compreffion plus confidérable, en augmentant fon élaf
ticité; J'ai donc chauffé le tube le plus qu'il m'a été poflible,
ou plûtôt autant que j'en ai pû fupporter la chaleur au travers
du papier dont je me fervois pour le frotter, mais la com-
preffion de l'air a beaucoup moins augmenté que je ne l’aurois
cru, car la goutte de mercure n’a defcendu que de 6 lignes,
ce qui ne dénote que l'augmentation d’un neuviéme dans le
reflort de L'air; dans cet état, le tube frotté attiroit le fil à
la diftance de 36 pouces, ce qui eft de 3 pouces plus loin
que dans les expériences précédentes, mais il eft à croire
qu'une auffi petite augmentation de la compreflion ou du
reflort de l'air, n'étoit pas la caufe de ce que le tube attiroït
DES MAS IAE AN EJB UUit 1ve
le fil plus loin; il eft plus naturel d'attribuer ce fait à la
chaleur du tube, parce que j'ai remarqué que dans tous les
cas la chaleur augmentoit l'action des corps électriques; la
crainte que j'ai euë de cafler le tube en l’expofant à une plus
forte chaleur, jointe à la difficulté de le frotter quand il eft
fort chaud, a fait que je n'ai pas tenté d'augmenter davan-
tage par cette voye, le reflort de l'air intérieur, & j'ai ima-
giné de me fervir de la maniére fuivante,
J'ai fait faireun globe de cuivre creux d'environ 10 pouces
de diametre, à ce globe étoit foudé un tuyau de 3 pieds de
Tong, recourbé par fon extrémité, le tout étoit très-exacte-
ment foudé de foudure forte, & je me fervis de ce globe
de cuivre, comme d’un éolipile, pour introduire de l'air &
le comprimer dans le tube. Pour cet effet, le bout recourbé
du tuyau de cuivre portoit une vis qui s’ajuftoit au robinet
du tube de verre, & cette extrémité du tuyau étoit recourbée,
afin qu'on eût la commodité de chauffer la boule de cuivre,
& que fon tuyau étant horifontal, le tube de verre püt être:
dans une fituation verticale, & qu'ainfi on püt diftinguer
facilement les degrés de condenfation, par le moyen du petit
Elatérometre dont nous venons de parler.
Je pris d’abord toutes les précautions néceffaires, pour
que l'air qui pañleroit de la boule dans le tube ne füt chargé
d'aucune humidité, & pour cela je la fis bien chauffer d’abord
fans y ajufter le tube de verre, &c en ayant fait fortir le plus
d'air qu'il me fut poflible par ce moyen, je la retirai du few
pour la faire refroidir, mais afm qu'il n’y rentrât qu'un air
très-fec, je mis le bout recourbé du tuyau de cuivre: très-
proche du feu jufqu'à ce que la boule fut entiérement re-
froidie, & que par conféquent elle fut remplie de tout l'air
qu'elle pouvoit contenir dans fon état naturel, je bouchaë
enfuite exactement le tuyau jufqu'au moment que je fs
Yexpérience.
‘Ayant alors débouché ce tuyau, j'y ajuftai le tube garni
de fon robinet & de Elatérometre, & ayant mis la boule
für le feu, je condenfai V'air dans. le tube jufqu'à ce que le
360 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
mercure fut defcendu de 27 lignes, c’eft-à-dire, précifément
du double de ce qu'il étoit dans l’état naturel, je fermai alors
le robinet, & je détachaï le tube du tuyau de la boule, je
le frottai à l'ordinaire, & même beaucoup plus long-temps
que je n’avois coûtume de faire, il n’acquit cependant qu'une
très-médiocre élericité, je continuai à le frotter, mais fa
vertu demeura toüjours très-foible; j'ouvris alors le robinet
pour laiffer fortir l'air qui y étoit retenu, l'ayant enfuite
frotté pendant quelques inftants, il recouvra fon électricité
ordinaire, je refis trois fois de fuite la même expérience,
& elle réuflit toujours de la même maniére.
Je voulus voir ce qui arriveroit en Îa faifant dans l’obfcu-
rité; lorfque l'air fut condenfé du double de Yétat naturel,
j'eus beau frotter letube, je ne pus pas appercevoir la moindre
lumiére, & il ne parut aucune étincelle lorfque j'approchois
du tube les doigts ou le vifage, mais à peine eus-je fait fortir
Yair condenfé, que le tube devint lumineux au moindre frot-
tement, & que tous les autres phénomenes qui accompagnent
Yélectricité reparurent comme à l'ordinaire.
Il demeure donc pour conftant, que l'air comprimé dans
le tube, nuit confidérablement à fon électricité ; J'avouë que
je m'attendois à un effet tout contraire, & que je penfois
avec M. Haukfbée, que fi le tube perdoit fon électricité
Jorfqu’il eft vuide d'air, c’eft que la matiére électrique trou-
vant plus de facilité à fe mouvoir par l'abfence de Fair, fe
portoit en abondance dans l'intérieur du tube, & par confé-
quent agifloit plus foiblement au dehors ; j'inferois de-là
qu’en augmentant dans l'intérieur du tube la quantité de l'air,
on multiplioit les obftacles qui s’oppofoient aux écoulements
électriques, & que par conféquent leur aétion devoit fe
porter au dehors, & faire un effet plus confidérable que lorf-
que le tube ne contenoit que de Fair dans fon état naturel.
Lorfque je trouvois que l'expérience étoit contraire à ma
conjecture, je l'attribuois à la qualité de l'air humide ou
gras que j'avois introduit dans le tube, maïs je ne puis rien
foupçonner de femblable dans cette derniére expérience, j'ai
pris
D
LE
à "TR Te
DES SCIENCE. 36r.
pris toutes les précautions poffibles pour que Fair que j'y
introduifois füt dénué de graifle & d'humidité » & cepen-
dant l'électricité a été très-fenfiblement arrêtée, Peut-être
dira-t-on que l'air qui fort de la boule de cuivre échauffée,
porte avec lui quelques parties fulphureufes qui nuifent à
l'électricité; mais comme ce n’eft-là qu'une conjecture faite
au hazard, & que je n’imagine aucune maniére d'introduire
de l'air dans le tube gui ne foit fujette à plus d’inconvénients
que cette derniére, Je me contenterai de dire que l'air com-
primé dans le tube nuit à l'électricité, puifque toutes les
expériences concourent à me le prouver. Il eft vrai qu'il
paroîït fort fingulier que l'air comprimé & l'air dilaté pro-
duifent un effet femblable par rapport à l'électricité, & que
cet effet foit précifément le contraire de ce qui arrive dans
l'air libre; mais l'explication de ce fait tient peut-être à
quelque principe qui ne nous eft pas encore connu, & loin
d'être découragés par ces efpeces de contrariétés apparentes,
cela nous doit animer de plus en plus dans nos recherches,
nous prouver la néceflité de l'examen fcrupuleux des faits;
& nous faire tenir en garde contre les conféquences que
nous fommes fouvent tentés de tirer d’une expérience à une
autre par le rapport & l’analogie que nous croyons trouver
entrelles, & qui pourroient nous induire en erreur, parce
que ce rapport nemous eft prefque jamais connu dans toutes
fes parties,
à Men. 17 3 94 mt S LZ
362 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE
D'EL AC CRAN" D'EUPS
DES SATELLITES DE JUPITER,
Et des erreurs qui fe gliffent dans les Obférvations
de ces Sarellires.
Par M. MARALDE
Es Satellites de Jupiter font fi éloignés de Ia Terre,
qu'ils font invifibles à la vûé fimple, & ils nous pa-
roiflent même très-petits avec les plus longues & les plus
excellentes Lunettes ; l'angle que leurs images font au foyer
de ces Lunettes, ne fçauroit être mefuré par le Micrometre
dont on fe fert ordinairement pour mefurer les diametres
des corps céleftes.
Simon Marius, peu de temps après la découverte de ces
Satellites, en détermina fort groffiérement la grandeur. On
ne pouvoit pas alors avoir beaucoup de précifion. On ju-
geoit du rapport des Satellites à Jupiter feulement par eftime
& conjeélures; les Lunettes, qui venoient d'être inventées,
n’avoient pas la perfection des nôtres, & ne pouvoient pas
donner le moyen de déterminer la grandeur des Satellites
qu'elles nous fourniffent aujourd'hui. On voit par nos Lu-
nettes, les Satellites entrer fur le difque de Jupiter, & en
{ortir ; ainfi en obfervant le temps qu'ils employent à entrer
fur le difque de Jupiter, ou à en fortir, & le comparant à
celui qu'ils mettent à le parcourir, lorfqu’ils paflent par le
centre, on aura les diametres de ces Satellites. Il paroiït que
feu M. Caffini a employé cette méthode pour trouver le
temps de la demi-demeure des centres de ces Satellites fur le
difque de Jupiter, & le temps qu’ils employent à entrer fur
ce difque, & à en fortir, dont il nous a donné des Tables.
I s'en eft fervi pour trouver le rapport du diametre du 1er
Satellite au diametre de Jupiter, qu'on voit dans une Lettre
Sn. ECS
D'E'Ss" SCT EN CES 363
- écrite au P. Gottignés, imprimée à Bologne en 166 Fo
IL eft très-diffcile de faire ces obfervations avec exacti-
tude ; j'ai voulu effayer d'en faire, mais J'avouë que je n'y
ai pas réuf. La lumiére de Jupiter les rend très-douteufes.
On héfite pendant long-temps fi le Satellite touche le bord
de Jupiter, & s’il eft entiérement entré fur le difque. J'ai
fouvent perdu de vüë un Satellite qui n'étoit pas à moitié
entré fur le difque, & je n'ai pû le voir à fa fortie que
lorfqu'il étoit à moitié forti. Cependant on trouve plufieurs
de ces obfervations dans les Regiftres de FObfervatoire, qui
paroïfflent avoir été faites avec précifion. J'en rapporterai
trois faites par feu M. Caffini, qui m'ont paru les plus pro-
prés pour déterminer les diametres des Satellites.
En 169$.
Le 8 de Février, à 10h 46’ 20" le re Satellite touche le
bord de Jupiter.
10 53 20 il entre entiérement,
13 13 21 il commence à fortir.
13 20 30 il fe fépare de Jupiter.
Le 9 deFévrier, à 8 35° 30"le 2.4 Satellite touche Ie
tp, bord de Jupiter.
8 45 15 il fe cache derriére le
ifque.
11 45 o il eft à moitié forti,
11 49 35 il fort entiérement.
Leo deFévrier, à 10h 1° $5"le 3.me Satellite touchoit
| le bord de Jupiter.
10 11 45 ileftentré.
13 53 17 il commence à paroître.
14 5 23 il fe détache du bord
de Jupiter.
Jupiter étoit au temps de ces obfervations à 21° > du
Lion, à 7 degrés du nœud defcendant des Satellites, On
Zzi
364 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyarE
voit par ces obfervations que le 1.€* Satellite a employé
7 minutes à entrer fur le difque de Jupiter, & qu'il yueft
refté 2h 27'; que le 2d Satellite a été 9' 40" à entrer, &
qu'il a employé 3h 4’ 20" à parcourir le difque, & que le
36 NRA ASTRA {ortir du difque de Jupiter, & qu'il
a demeuré 3h 43" 38"; à l'égard du 4me j'ai conclu des
Tables qu'il eft environ 1 $ minutes à entrer fur le difque
de Jupiter, & qu’il lui faut $ heures pour le parcourir. Le
temps que ces Satellites demeurent fur le difque de Jupiter
étant divifé par le temps de leur entrée ou de leur fortie,
donne pour le 1°", le 24 & le 4me Satellite 20 au quotient,
& 18 un peu plus pour le 3m; d'où j'ai conclu que le
diametre du 3° Satellite eft [a 1 8€ partie du diametre de
Jupiter, & les diametres destrois autres en font {a 2omepartie,
Pour comparer la grandeur de ces Satellites à la grandeur
de la Terre, & à celle de la Lune, qui eft le Satellite de Ia
Terre, il eft néceflaire de connoiître la grandeur de Jupiter,
que divers Aftronomes ont donné différente, & comime la
différence eft grande, je rapporterai l'obfervation dont je
crois que M. Caffini s'eft fervi pour déterminer le diametre
de Jupiter, car elle eft très-rare par rapport aux circonftances
qui l’accompagnent. |
En 1690, le 27 de Septembre, feu M. Caffini ayant
mefuré la diftance entre les foyers d'une Lunette de 3 4 pieds,
il la trouva de 404 pouces, & il remarqua que l'image de
Jupiter comprile entre deux fils paralleles qui étoient au
foyer de loculaire dreflés fuivant le cercle du mouvement
journalier de Jupiter, entre lefquels il marchoit, touchant
lun & l'autre, étoit précifément la ro partie d’un pouce,
qui étant comparée à la diftance des foyers de la Lunette,
donne par la Trigonométrie un angle de $ 1 fecondes qui
mefure le diametre apparent de Jupiter.
Cette Planete avoit été le jour précédent à 7h 1 8” du foir
en oppofition avec le Soleil, & elle étoit très-proche de fon
périhélie ; deux circonftances favorables pour obferver les
diametres des Planetes : en toute autre fituation il faut avoir
À
DÂE: 519 ICE E AN GHE (9 365
égard, 1.° à leurs afpeéts avec le Soleil, car ils font plus où
moins éclairés fuivant leur éloignement, mais le défaut de
lumiére dans Jupiter ne peut jamais étre par cette raifon que
comme dans la Lune un jour avant ou après fon plein, ou
comme le finus verfe de 11 degrés, qui eft la parallaxe
annuelle de cette Planete dans les quadratures. H faut avoir
égard en fecond lieu à leur diftance à Ja Terre, car les dia-
metres apparents des Planetes varient en raifon réciproque
des diftances à la Terre. La variation du diametre de Jupiter
peut monter jufqu'à 19"; car par les hypothefes de feu M.
Caffini, la plus petite diftance de Jupiter à la Terre, qui eft
dans l'oppofition avec le Soleil qui arrive dans le périhélie,
eft à fa plus grande diflance qui eft dans la conjonétion
avec le Soleil. qui arrive dans l'aphélie, comme 43450 à
70950, où comme 29 à 47 ; & fuppolé que ce diametre
apparent foit de $ 1 fecondes quand il eft le plus grand, il
fera de 3 2 fecondes quand il fera le plus petit, de forte que
la variation qui peut arriver au diametre de Jupiter eft de 1 9:
fecondes. Mais toute cette variation ne lui fçauroit arriver
qu'en fix années, qui eft l'intervalle entre la conjonction qui
arrive à l'aphélie, & l'oppofition qui arrive au périhélie ;
cependant elle peut monter à 17 fecondes dans l’efpace de
fix mois, qui eft entre l'oppofition de Jupiter avec le Soleil
& fa conjonction, car dans cet intervalle de temps la varia-
tion de la diftance de Jupiter à la Terre, en l'année que
Jupiter eft dans fon périhélie, ef comme 43450 à 65637,
ou environ comme 4 à 6; donc la variation de fon dia-
metre fera comme 6 à 4, ou comme 51 fecondes à 34
fecondes.
Comme la différence du lieu de Jupiter au temps de cette
oppofition, au lieu de fon périhélie, n’eft tout au plus que
de s degrés, & la diftance de Jupiter à la Terre ne varie pas
fenfiblement par cet éloignement du périhélie, nous avons
fuppofé que Jupiter étoit à fa moindre diftance de la Terre
au temps de cette obfervation, & que le diametre obfervé
étoit le.plus grand qu'il eft poffible.
Zz üj
j
366 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
Or la moindre diftance de Jupiter à la Terre eft à a
moyenne diftance du Soleil à la Terre, fuivant M. Caffini,
comme 43450 à 11000, où comme 79 à 20, ou environ
comme 4 à 1. Donc le diametre de Jupiter, vü d'une dif
tance égale à la diftance moyenne du Soleil à la Terre, feroit
de quatre fois $ 1 fecondes, qui font 3° 24".
Mais le diametre de la Terre, vü de la même diftance,
felon la détermination de feu M. Caffini, qui eft à lafin
” dela recherche de la Parallaxe de Mars, eft égal à la roome
partie du diametre du Soleil, qui dans les moyennes dif
tances eft de 32° 10", ce qui fait 19” -& pour le diametre
de la Terre, d'où lon tire que le diametre de la Terre eft
un peu moins de la rome partié du diametre de Jupiter.
Nous avons trouvé que le diametre du 3° Satellite eft
la 18e partie du diametre de Jupiter, & que les diametres
des trois autres font la 2 ome partie de celui de Jupiter; donc
Jeurs diametres font au moins la moitié de celui de la Terre,
leurs furfaces font le quart de celle de a Terre, & les globes
font la 8me partie du globe de la Terre. Mais on trouvera
que les globes de ces Satellites font plus de fix fois plus
grands que celui de la Lune ; car, fuivant M. Caffini, le
diametre de la Lune eft au diametre de la Terre comme 27
à roo, les diametres des Satellites font la moitié du diametre
de la Terre; donc le diametre de fa Lune fera aux diametres
de ces Satellites comme 27 à so, les furfaces comme 729
à 2500, & les globes comme 19683 à 125000, c'eft-
à-dire, comme 1 à 6, un peu plus ; d’où il paroît que ces
Satellites font plus petits que la Terre, mais plus grands que
la Lune. ”
On a remarqué, &ileft rapporté dans plufieurs endroits
des Mémoires de l'Académie, que la proportion des Satel-
lites entr’eux ne fe trouve pas toüjours la même. Le 4me
Satellite, qui le plus fouvent paroît plus petit que les autres,
paroit quelquefois le plus grand ; le 3€, qui ordinairement
paroît le plus grand, paroït quelquefois égal aux autres, &
même plus petit. Ces Satellites paroiffent auffr plus petits,
x
1, DPErsm: SION Em GES LEZ
lorfqu'ils font proche de Jupiter, que quand ils en {ont
éloignés, ce qui fut d’abord remarqué par Galilée ; dont on
a attribué la caufe à a lumiére prochaine de Jupiter, qui
offufque à notre égard celle des Satellites, comme fait la
Lune aux Afres dont elle approche. Feu M. Caffini à de
plus remarqué que le temps qu'un Satellite met à entrer
dans le difque de Jupiter, ou à en fortir, ne paroît pas avoir
toüjours la même proportion au temps qu'il met à parcourir
le diametre de Jupiter, & la durée de limmerfion qui dans
la même conjonction devroit étre égale à la durée de f'émer-
fion, fe trouve fouvent inégale.
Il eft vrai que l'obliquité de la ligne du mouvement d'un
Satellite à la circonférence du difque de Jupiter, à mefure
qu'un Satellite paffe plus ou moins éloigné du centre, caufe
un peu de différence; comme auffi le défaut de lumiére d’un
Satellite & de Jupiter, dont ils doivent manquer vers les
quadratures avec le Soleil, comme nous avons dit ci-deflus.
Müis ces caufes n'étant pas fuffifantes pour expliquer la diffé-
rence confidérable du temps qu'un même Satellite met à
entrer fur le difque de Jupiter & à en fortir, M. Caffini a
cru pouvoir en attribuer une partie aux taches des Satellites,
comme M. Godin l'a expliqué dans l'Hiftoire de l'Académie
de 1694; il en rejette une autre partie fur la grande diffi-
culté de déterminer précifément l'inftant des phafes de ces
Satellites. Je fuis perfuadé que cette caufe eft La principale,
& qu'il fe glifle, dans les obfervations des Satellites de Ju-
piter, des erreurs qu'il eft impoffble d'éviter, & dont j'ai
remarqué un effet très-fingulier dans les différences des Mé-
ridiens qu'on conclut des obfervations des Immerfions des
Satellites dans l'ombre, & de leurs Emerfions.
La différence des Méridiens entre Greenwich & Paris,
déterminée par les Etclipfes des Satellites de J upiter, réfulte
fenfiblement plus grande par les obfervations des Immerfions
des Satellites dans l'ombre que par les Emerfions, comme
on peut voir par la comparaifon que nous avons faite des
unes & des autres. Il n’y a pas de doute que la différence
368 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLE
ne vienne des erreurs glifiées dans les obfexvations ; il paroît
que les erreurs font dans les obfervations faites à Greenwich.
Car puifque la différence des Méridiens qui réfulte des ob-
fervations des Immerfions eft plus grande que celle qu'on
conclut des obfervations des Emerfions, c’eft une marque
qu'on a obfervé à Greenwich les Immerfions trop tôt, &
les Emerfions trop tard. En voici la preuve. Greenwich eft
plus occidental que Paris, & par conféquent on compte
moins de temps dans le même inftant à Greenwich qu'à
Paris, il faut donc fouftraire le temps d’une obfervation faite
à Greenwich, du temps de la même obfervation faite à Paris,
pour avoir la différence des Méridiens ; donc la différence
fera plus grande, lorfque le temps obfervé à Greenwich fera
moindre qu'il ne doit être, & elle fera plus petite, lorfque
le temps cbfervé à Greenwich fera plus grand. Mais la plus
grande différence des Méridiens réfulte des obfervations des
Immerfions, donc le temps auquel on a marqué ces phafes
à Greenwich a été moindre qu'il ne doit être, donc on a
obfervé les Immerfions trop tôt, & la plus petite différence
des Méridiens réfulte des obfervations des Emerfions, donc
le temps auquel on a marqué ces phafes à Greenwich a été
plus grand qu'il ne doit être, donc on a vü les Emerfions
trop tard. Nous allons appliquer ce raifonnement à un
exemple tiré des deux premiéres obfervations, afm de le
rendre plus clair.
En l'année 1677 on oblerva à Greenwich l’Immerfion
du premier Satellite dans l'ombre de Jupiter le 1 6 de Juin
à 14h 546", & à Paris à 14h 1 6’ 10", qui donne la diffé-
rence des Méridiens de 10’ 24". Si au lieu d'avoir marqué
à Greenwich lImmerfion totale à 14h s’ 46”, on eût vü le
Satellite une minute plus tard à Greenwich, & qu'on n'eût
marqué l’Immerfion qu'à 14h 6’ 46", la différence ne feroit
que de 9" 24"; de même dans l'Emerfion du méme Satellite
du 1 8 Septembre de la même année, fi au lieu d’avoir vû
le Satellite à 1 1P 42° 56" à Greenwich, & à Paris à 11h
5146", ce qui donne 8’ so” feulement pour la différence
des
DES SCIENCES 365
es Méridiens, on eût vü le Satellite plûtôt à Greenwich,
_& marqué l'Emerfion à 115 41° 56, on auroit eu la diffé
rence des Méridiens de 9° so", à 26 fecondes près de celle
qui réfulte des obfervations des Immerfions, au lieu qu'il y
a une différence d’une minute 30 fecondes. Si on fuppole
que les erreurs font dans les obfervations faites à Paris, &
qu'on y applique le même raifonnement, on augmentera
l'erreur dans la différence des Méridiens, au lien de Ia di-
minuer. On m'a afluré qu'à Londres & aux environs Pair
eft moins pur qu'à Paris, ce qui peut être une fource de
ces erreurs. La différence des Lunettes pourroit auf y avoir
quelque part ; car M. Caflini, étant à Londres en 1 698,
obferva une Immerfion du 1° Satellite avec une Lunette
de 1 6 pieds, pareille à celles dont on fe fert à l'Obfervatoire
de Paris, & détermina par la comparaifon de l'obfervation
correfpondante faite à Paris, la différence des Méridiens,
entre Londres & Paris, de 9’ 41", & celle entre l'Obferva-
toire de Greenwich & celui de Paris de 9’ 10", qui s’'accor-
deroit à la différence moyenne qui réfuite de nos Obferva-
tions comparées à celles qui font rapportées dans le Livre
de l'Hiftoire Célefte de M. Flamfteed, telles qu'on les a
marquées ci-deflous.
OBSERVATIONS des E‘clpfes des Satellites de Jupiter
ET faites à Paris, ;
Avec les Correfpondantes faites à Greenwich.
IMMERSIONS.
D RSR ?
Les mêmes Differ.
Immerfons obfervées à Paris. obfervées des
à Greenwich. Merid.
Jours. He M. JS.
11677 Juin 16 14 16 10 Im.
| Juillet 2 12 29 oo Im.
1680 OŒ. 21 14 56 48 Im.
: O&. 23 9 25:44 Im.
1681 Oct. 26 12 39 46. Im.
Mem. 1734: à Ataa
RSR
#
370 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
Les mêmes
Immerfons obfervées à Paris. obfervées
à Greenwich.
1681 Nov.
Les mêmes
obfervées
à Greenwich.
JOIE)
Jours. H. M. S. Ë ui à
1677 Sept. 18 11 51.46 Em. p.|18 11 42 56 | 8 50
Sept. 12708 "78% 30"Emr|2 8 9 40| 8 50
+682 Mars 15 10 12 40 Em.s.lis 10 3, 53] 8 47
1688 Sept. 6 9 46 7Em.T.| 6 6 40 | 9 27
1690 Nov. 9 9 5$ 20 Em.pr 8! 9 12
1691 Fevr. 13 6 42 14 Em.s 8 54
Dec. 19 11 55 15 Em.s 7 58
1693 Mars 4 s DSe2iEnT"P 9 31
1694 Mai 1 9 31 51 Em.p Pa A
1095 ANS IE 12 2) 13 ENT 8 26
1696 Juin 23 10 4 $s3 Em.p 8 13
1697 Avril 27 8 33 38 Em.p 8 13
Mait172230 6 386 Em.s 8 42
1707 Nov. 8 10 25 43 Em.p 9 15
D'E S 1S:CTEIN CIE: 37%
SUR LES COURBES TAUTOCHRONES,
Par M. FONTAINE.
AR CoUrBE TAUTOCHRONE, j'entends une Courbe
dont tous les arcs, comptés du point le plus bas, feront
defcendus ou remontés dans des temps égaux.
Je diftingue deux maniéres d'être T'autochrone, parce que
quoique dans quelques hypothefes une même Courbe le foit
en même temps des deux, ül doit y en avoir une infinité
d’autres où elle ne pourra l'être que d’une feule.
On 2 la détermination de ces Courbes pour quelques cas
particuliers, mais on n’a point encore de Méthode générale
pour toutes les hypothefes de pefanteur & de réfiftance, &
voici en quoi confifte la difficulté.
Soit la Courbe AMM B, on veut
que cette courbe foit telle que tous
fes arcs AM, A M, &c. foient
parcourus en temps égaux, foit en
montant, foit en defcendant, ou
plus généralement on veut que les
temps foient commune fonction
donnée des arcs & des abfcifles
correfpondantes.
On voit d'abord que pour e
ner une origine fixe aux abfciffes,
il faut toüjours concevoir le corps
partant de À, & que pour repréfenter la defdfite, au lieu
que le milieu retarde, il n’y a qu'à imaginer qu’il accélere,
& du refte naturellement on s'y prendroit ainfi, on com-
menceroit par déterminer la vitefle dans un point quelcon-
que "m de Farc AZ, pour avoir le petit temps de "en y;
ayant ce temps, on en prendroit la FLuente, & on auroit
le temps de À en w, on fubftituéroit pour les lignes 4,
Aaza ji]
17 Février
1734»
72 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RôyALe
Ap, les lignes AM, AP, & on auroit généralement pour |
toute courbe le temps de À en A, on égaleroit ce temps
à la fonétion donnée, & cette équation détermineroit la
courbe AMM'B, mais 1.° il n'ya ‘que quelques hypothefes
où l'on puille avoir la vitefle ; 2.° Quand bien même on
auroit cette vitefle, on ne pourroit pas intégrer l'élément
du temps. Dans les cas où lon peut avoir la vitefle, voyons
ce que Mrs Newton & Bernoulli nous ont donné.
Soit, en premier lieu, le milieu fans réfiftance, & foit 1æ
force telle qu'on voudra, décrivésune courbe, telle que la partie
de cette force qui retardera le long de fes petits côtés foit
toüjours comme l'arc parcouru, cette courbe fera tautochrone..
Car foit l'arc à parcourir 444
— X, l'arc parcouru Am *,
Farc que le corps parcourt actuel-
sn dt Dust = à
lement — x, la vitefie qu'a le
corps en #1}, celle qu'il perd
de » en p — y, le temps total
de À en M—T, le temps écoulé
de À enm—t, le temps préfent
| B
—=t, & foit la force — 2x, on ne
aura (—nx).+—y, où xx My6 ps
+—yy=0, sons ASS &”
AC &y—r (X°— x°)°, donc ji 25e &
VX — x
HU a —: mais ÀL ï eft. uné,
X°— x J (=
fonction de dimenfion nulle de X & ti x; donc fi on
avoit cette FLuente, & qu'on fubftituèt pour x, 4, on
auroit 7° égal à une fonction de dimenfion nulle de #,
c'eft-à-dire, à un nombre conftant.
Soit en fecond lieu la réfifiance du milieu — 2, &.
DE1 SN: SCA EN, CiEus)) if 378
foit Ia force égale à la gravité ordinaire = z, l'abicifie
. Lu : ;
verticale Ap—7; on aura /— É H). DE Ja
Li
OU 87) *—+)y—0,
Sr
n°
MG Eee AU “x C }ÿ=—=0,
( par € j'entends le nombre dont le logarithme eft 1 ) ou
LC PT ec ere Ta)
2 — 2
ot
donc
»=V2s CV ACT" 2)EL(C "y
& => ERE
Ve. Ve Ar AE pan +
Pour que 7° foit un SE conftant, il faut r.° que la
quantité précédente foit une fonétion de dimenfion nulle
de deux autres fonctions ; 2.° que l’une de ces fonctions
devienne l’autre, lorfque x deviendra — X, & que toutes
les deux foient — 0, lorfque x & X feront — o.
Gr LA
. + Ars .
K& _: Lea 27 FA À ; 2
Soitz= rx C + x, & on trouvera
= #.
C he
V F<+X, F+x,
FL(C Z) & FL(C &)
4 { n DE FLD
fonétion de dimenfion nulle de (+= —C RE)
que eft une
— I
SES
X
& de (5<C D D re SE QUE \parr conféquent.
l courbe eft tautochrone.
* Maintenant voici une méthode qui ne demande point
qu'on ait la vitefle, & qui paroît générale pour tous les
Problemes de ce genre; mais avant tout je dois avertir que
ù | Aaäa üj
374 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
comme j'ai été obligé, dans mes calculs, de faire varier les
mêmes lignes de deux manitres différentes, il à fallu que
je défigne leurs variations différemment; j'ai marqué les unes
à la façon des Anglois par des ffuxions, les autres par des
différences, à notre maniére, en forte qu'ici dx ne fera pas
la même chofe que x, dx que x, &c.
ExEemMPpPLE L
Dans ’hypothefe de la gravité ordinaire & d'un milieu
fans réfiftance, on demande que 7
= . Soient ici les mêmes dénomi-
nations que précédemment ; & foit de
plus L=PXs PIX Q TX, &c.
on aura {— gp). ==}; Où gpx
+ y — o. Il faut à préfent faire en
forte que lorfque x deviendra = X,
# tn A bof M
PONT nt à devienne = 3. F
1
D
; À |
Pour cet effet, je prends fur la
courbe AM M B un autre arc AM
infiniment peu différent du premier, 7
& je fais ce nouvel arc à parcourir
AM' = X", le temps pour le par-
courir 7° — __ , arc parcouru
Am = x", la vitefle au point #'=y",
le petit arc m'w'—x", la vitefle que le
corps perd de =’ en w'—=y", & on aura “M
ici, comme dans l'autre arc, g p' x" > ,
RE à EF
A
+y'y =o. Soit X— XY—/1X,
x = dx, y —y=dy,x —x= 4x, ÿ—y=dy
D R:Si: Let EN GES 375
Et on aura (px +yÿ)—(6px +) =d(gpx +)
—o. Donc gpdx+gqxdx + ydy +ydy—0. Je
fuppofe dx —çdX, & par @, j'entends une fonction de X
& de x. Soit e—=y*, y—=A*, AZ=UX, &c. Donc
dx—yx4 X. Pour avoir dy, je fais la proportion fuivante
qui renferme les conditions du Probleme,
FL (Ë) : FL(É) ::T{ ou (27) :T, où (#r). Ou,
en divifant, dFL(+) : FL(S) ::mdX: X. Donc
dEL (5) =" FL (E) Donc d(2) = "X (à),
DÉS Pr UE UN Donc dy—yyd X— 22
& dy—yydX+ ayxd X — 2, Subflituons ces
valeurs dans notre équation fluxio-différentielle, & elle de-
Mes Ep JAH 840% AY) AE TE à.
Où £ (gra) x + ie J'y 0. Faifons
X
que cette équation foit la même, terme à terme, que celle-ci,
£ PX + y = o, & par-là nous aurons les deux équations
fuivantes, À — 0, IT — p. Donc à x == 0!
TX.
27 —
Donc y—"M. Donc yx=Mx Donc p— Mx+N.
Mais & doit être —o lorfque x—0, & —1 lorfque x —X:
car au commencement du mouvement, la différence des
arcs parcourus en temps proportionnels eft nulle, & à la fin
elle eft égale à la différence totale des deux arcs. Donc N—0
& M—-. Donc g——+ & y— 7. Je fubfiitué ces
valeurs dans la feconde équation, & elle devient 222 =,
2—2m
376 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Rorare
où fi——2#)p—=gqx Donc fi—an) 228, &
par conféquent {1 — 271) 1x —/1 — 2m) 173
Donc a de Eu + Donc px 718"; Le AT
Donc enfin 7287154554 Si =—=\ot, on aura
ezg—x", comme on le fçait depuis long-temps ; fi m—+,
on aura 7 x, ou en général, fi nous guflions pris la
fluente autrement, 7 x.
ERXEM PE EC TT
Suppofons à préfent que le mouvement fe fañle dans un
Milieu qui réfifte en raifon de la vitefle, & qu'on veuille
-une Courbe où tous les temps foient égaux, l'équafipn fera
{—sp ny) $ =}, OÙ SX n* +} 0, &
fa différence gpdx +-gqxdx ==nydx uxdy + ydy
+) dy—=0. Subflituons pour dx & dx, dy & dy leurs
valeurs, & nous aurons cette équation cy
mis ETRXTE 2H))X + 29)) HA x 0,
8 (PET Frs nyx + D À X+yy=0, |
4 termes, comparés avec ceux de Ja premiére, don-
neront AO & 222 —
Si on-fuit ces re équations comme dans l'exemple
précédent, on trouvera 7 = 6 2e,
ExEempPpLe TITI
Soit la réfiftance — _ , & qu'on veuille la Tautochrone
de cette hypothele, équation fera {— 3p + =") = y,
où gpx = y x+yy = 0, fa différence fera gpdx
ega di y di yxdy y dy +ydy= 0,
& après
%
Di us: SCIENCES M Ge
& après la fubftitution on aura
BPYX EIRE TV) XH2yyy HAYX 0,
É Fiy+a , ,: cher toi
ou BEST )x+(———) ) X+yy=0;
EE
DYER D 5 PF #98 VOIS
& en comparant Ce ir & 5 =,
donc 1° <yx+ax—o, donc + g+y =",
où tx TETE donc = +x—7//p + » M)
s = #
H/N, & par conféquent Ne=rNM=C " ,
& en remplifant les conditions que @ foit — 0 au com-
mencement & — 1 à la fin, on aura + »NM=—=x
+—X 22 x , .
& N+rMN=C , d'où l'on tirera
HM= 1
— /p+- 1m, & par conféquent mp — cr"
, MTS ZE — * ,
donc mpx —=mz=C x—x*x, donc m7 =
E = nd » . / .
nC — x ==n; & fi l'on veut avoir une équation
fans quantité exponentielle, il n'y aura qu'à faire
à: == Es
HurC =my En+x & HrC —
a, & on tirera Emnz =mMmIxX + x Xe
à Mem. 1734 - sb IREE
378 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
ExEempPpLe Î V.
ï ms 2 “
Soit la réfiftance — IT. & trouvons encore Îa
Tautochrone de cette hypothele, qui eft «til: de la nature,
quoiqu'apparemment cette courbe ne puilie être d'aucun
ufage, attendu que fi les ofcillations de gauche à droite
font ifochrones, celles de droite à gauche ne le feront pas,
Dans ce cas-ci, nous aurons (—gp y y) = Ÿo
ou BYE VIT Lit) 0. Prenons la diffé-
rence gpdx + gqxdi y dx yxdy = ydx
x dy + pdy + ydy —=0. Subftituons, & elle
deviendra gpy* +890 y X ZE 2 yyx
À
- se : ++)
+27) +HAÿ x—0, oug( D ke?
x yx y} —0x Comparons, & nous trouverons
les mêmes équations que dans Fhypothefe précédente, ce
qui prouve que fa T'autochrone left auf de celle-ci.
PREMIÉRE REMARQUE.
Soit en général la force le long des petits côtés de la
çourbe — f, la réfiflance = p, le temps = 7, & 47
—=SdX,.& on aura (—f—p) = Y > Où fx px
TT — 0, &kdy = y} — D), mais il arrivera très-
fouvent que les. deux équations fuxionelles qui dans les
exemples précédents ont toüjours été comparables, ne le
feront pas, alors if faudra, par te moyen de ces deux équa-
tions, faire difparoître les y; & enfuite Touz étant donné,
tâcher de déterminer autre par les méthodes ordinaires, &
en rempliffant les deux conditions de 9.
DES SCrENcCESs 379
SECONDE REMARQUE.
Ileft évident que fi au lieu de l'équation des forces, on
avoit toute autre équation entre le parametre À de la courbe
AB, Y'abfcifie totale #, l'abfciffe partiale x & l'ordonnée y,
en termes finis ou en fluxions, ïl eft évident que la méthode
précédente pourroit également fervir non feulement à trou-
ver ce que deviendroit FL { se ), mais toute autre fonction
donnée de ces lignes (comme FL {yx) où FL PRET.
ou, &c.) lorfque x deviendroit = *, ou réciproquement
à faire que cette fonction devint une quantité donnée,
x devenant — Ÿ, & qu'ainfi il peut y avoir une infinité
de Problemes qui dépendent de cette méthode fluxio-diffé-
rentielle,
Bbb ÿ
26 Juin
1734
a W. les Mem.
de l'Académie,
an. 1729.
p-22J.
b 230
P: 23 .
380 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
ANALYSE: DE Su PL ASTRA
Pa M. PETiIT le Médecin.
)
Ar donné un Mémoire? fur la précipitation du Sel maria
dans la fabrique du Salpètre, dans lequel j'ai dit P que la
liqueur qui fournit le Salpêtre eft une leffive faite avec de l'eau
paljée pluieurs fois fur des Cendres, ér des Plâtras brifés prefqu'en
pouffiére. Les Cendres fourniffent un fel fixe. Les Plätras ont
empreints de deux efpeces de fel armoniac, l'un nitreux, € l'autre
falin ; ce qui fera prouvé dans un Mémoire que je donnerai fur
cette matiere. Ce Mémoire et l’analyfe de l’eau-mere de fal-
pètre, que je m'étois propolé de donner, j'y ai travaillé; mais
jy ai trouvé tant de chofes à examiner, que je me fuis trouvé
obligé de le divifer en trois parties. La premiére fera l'analyfe
des Plâtras. La feconde fera un détail des expériences faites
fur le Sel fixe de bois neuf & de bois flotté, & de plufieurs
autres fels fixes de plantes capables de produire du falpètre
avec l'imprégnation de Plâtras, & avec l'efprit de nitre. La
troifiéme fera fur l'Eau-mere de Salpètre. Je vais donner
Yanalyfe des Plâtras.
IL s'agit d'abord de fçavoir fi le falpêtre fe trouve dans les
plâtras, comme le croyent les falpêtriers, & comme ils ont
fait croire au public, ou dans les cendres, ou bien s'il fe forme
de la combinaifon des parties falines qui font contenuës dans
lun & dans l'autre, & c’eft ce que nous pouvons découvrir
par l’analyfe de lun & de l'autre.
Les falpêtriers croyent que les plâtras contiennent du
falpêtre, parce qu'ils en ont effectivement retiré fans le fecours
des cendres, mais ils n'ont pas pris garde qu’ils avoient mis
eux-mêmes le falpêtre dans les plâtras qu'ils avoient en réferve
dans leurs hangars, & fur lefquels ils ont coûtume de jetter
les écumes & les fondrilles de leur cuitte, & le plus fouvent
leur eau-mere, Toutes ces matiéres contiennent beaucoup
S'ersir Science saut M! Sa
de falpêtre & de {el marin, qu'ils peuvent retirer fans le fecours
-des cendres. Mais comme ce falpêtre ne leur paroïfloit pas
fi beau que celui où l’on 2 employé la cendre, ils ont cru que
cette cendre ne fervoit qu'à dégraifler les plâtras. Ainfi lorf.
qu'on fe propole de travailler fur les plâtras, il ne faut pas
en prendre chez les falpêtriers, il vaut mieux prendre immé-
diatement ceux que l’on trouve dans les démolitions des
maifons ; mais il y a un choix à faire. Les falpétriers difent
que pour connoître les bons plâtras il faut en mettre fur la
langue, & que ceux qui ont le goût piquant & falé, font les
meilleurs. 11 faut joindre à cela que ces plâtras font un peu
gris, & qu'étant mis en poudre & jettés fur les charbons
ardents, ils produifent des étincelles de feu; plus ils en pro-
duifent, meilleurs ils font. Ils ont outre cela une certaine
onctuofité en les frottant entre les doigts, que les autres
plâtras n'ont pas. On les trouve dans les vieilles maifons, dans
des lieux bas, où le Soleil ne donne pas, & où l'on ne fait
point de feu, & même dans les maifons de moyen âge,
principalement fi on les prend des démolitions des murailles
d'écuries & de latrines, & ce font de ces plâtras que j'ai choifis
dans la maifon où je demeure, où l'on a été obligé d’abbattre
une cloifon de plâtre qui féparoit l'écurie des latrines. J’&
trouvé ces plâtras très-bons & très-propres à exécuter le
deflein que j'avois d'en faire l'analyfe.
J'ai pris douze livres de ces plâtras battus en poudre grof-
fiére, je les ai mis dans une grande baffine d’étain avec 18
livres d'eau, je les ai fait chauffer fur un fourneau pendant
3 où 4 heures, en les remuant de temps en temps, pour tirer
plus promptement la teinture des plâtras; je l'ai filtré par le
papier gris. On peut fe difpenfer de la faire chauffer fi l'on
weut; car foit que l'on faffe couler de l’eau froide ou chaude
deffus ces plâtras en maniére de leffive, foit qu'on les mette
tremper à froid dans des vaiffeaux de terre ou d'étain pendant
8 ou ro jours, en remuant les plâtras plufieurs fois dans la
journée, on tire toujours la même teinture, qui eft'plus où
moins forte felon la bonté des pltras, & felon la quantité
ii
382 MEMoIREs DE L'ACADEMIE RoyaLe
d’eau qu'on employe. Je l'ai fait de toutes ces maniéres, j'ai
trouvé peu de différence dans la teinture qui eft ordinaire-
ment jaune, tranfparente, amere & d'une légére äcreté.
Sa pefanteur fpécifique eft pour l'ordinaire à celle de l'eau,
comme 38 à 37, ou comme 32 à 31, & quelquefois
comme 27 à 26. |
Après bien des effais, j'ai tiré à plufieurs fois la teinture
de so livres de plâtras avec 72 livres d'eau ; j'ai filtré cette
teinture par le papier gris, je l'ai fait évaporer jufqu'à ce que
jeme fuis apperçü qu'elle étoit bien chargée de parties falines*,
ce qui eft marqué par une äcreté plus forte & une plus grande
amertume, & la couleur rougeître; fa pefanteur fpécifique étoit
à celle de l’eau comme 4 à 3; il y en avoit 4 livres, elle étoit
limpide, gris-de-lin, je Vaï fait évaporer jufqu'à confiftance
d'extrait liquide; car je n'ai pü la faire évaporer jufqu’à ficcité;
mais lorfqu'elle a été refroidie, elle s’eft trouvée plus ferme
que du beurre. Cette matiére fe réfout facilement à l'air en
une liqueur qui a la confiftance de firop. Je l'ai filtrée, fa
pefanteur efl à l'eau comme 5 à 3, & plus. Si l’on continuë de
la laifler à l'air , elle s'imbibe de plus en plus de l'humidité de
Yair, & diminuë de pelanteur fpécifique. C’eftavec cette im-
prégnation que j'ai fait les expériences fuivantes.
1." Elle rougit le papier bleu d'un rouge pourpre. Ily ades
imprégnations qui le rougiflent plus les unes que les autres,
2.° Mélée avec partie égale d’efprit de nitre, elle n'a
produit aucun changement. La même chofe eft arrivée avec
Jefprit de {el.
3+° J'ai mis une feuille d'or dans le mélange d’imprégna-
tion & d’efprit de nitre, elle fe diflout en $ ou 6 minutes, ft
on la remuë pendant ce temps-là. La liqueur étoit plus tranf£
parente deux heures après avoir mis cette feuille, qu'elle
n'étoit auparavant.
* C'eft le feul moyen de la faire | de nouveaux plâtras, l’on confome
très-forre, & l'on n’en viendroit pas | meroit beaucoup de plâtras inutiles
à bout, en reverfant plufieurs foisla | ment, & l’on perdroit 0 du temps.
même imprégnation où teinture fur
d'or, elle s'y eft difloute en 1 2 heurés, du moins elle a été
rn DES SCtENCES . 383
3 J'ai misune feuille d'or dans le mélange d'imprégnation &
d'efprit de fel, cette feuille s'eft difloute de même en $ ou
6 minutes. Je n'ignore pas que de très-habiles Chimiftes
ont cru * que l'efprit de {el feul diflolvoit l'or, mais ils n’a- : 7 Fe TER
voient pas pris garde apparemment que cet efprit de fel étoit ; 4 ie) tr
peut. être fait avec du fel marin des falpêtriers. J'ai même 7° :102.
pris de Fefprit de fel chés de fameux Chimiftes, qui diflol-
voit l'or*. Mais M. Geoffroy & M. Boulduc ont apporté * Mm. 1715:
à l'Académie , chacun en particulier, de l'efprit de fel qu'ils? ‘7:
avoient fait eux-mêmes, qui na pü difloudre des feuilles
d'or, quoiqu'on fait fait chauffer très-fort ; j'ai adjoûté de
Timprégnation de plâtras à cet efprit de {el, qui a pour lors
diflous les feuilles d’or.
4° J'ai fait diffoudre une feuille d'argent dans Fefprit de
nitre, jy ai mêlé de limpregnation. Le mêlange s’eft troublé,
il s’eft fait un précipité blanc dont une partie eft tombée au
fond de la liqueur, & l'autre a nagé deflus.
5° Notre imprégnation s'efl coagulée avec partie égale
d'huile de vitriol +, le mélange à fermenté avec une grande
chaleur, & a donné des vapeurs rouges qui fentoient l’eaw
forte, & en a donné pendant plufieurs jours toutes les fois
que j'ai remué ce mélange. Si l'on adjoûte encore de l'huile
devitriol, elle fermente avec chaleur & fumée, le tout de-
vient plus liquide & fait un précipité très-blanc'au fond de
la liqueur tranfparente.
Si fon met une feuille d'or fur ce méhinge, elle fe diflout
prelque par la vapeur qui s’en exhale.
.…- J'ai fait le même*mêlange , j'ai mis de l’eau pour difloudre
les fels, & retenir les vapeurs, je l'ai laiflé jufqu’au lendémaim,
j'ai tixé la liqueur furnageante & claire, j'y aï mis une feuille
divifée en une pouffiére très-menué b.
* BuCette huile de: vitriol étoit con- B L’efprit de nitre ñe fait aucure
centrée; & fa pefanteur fpécifique | effet fur le coagulum produit par
étoiträwleau commune comme 28 | le mélange d’imprégnation de pli:
à 15. -. ! tas avec l'huile de vitriol, il n’en
384 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
6. L’imprégnation ne s'eft point d’abord mêlée avee
l'huile de tartre par défaillance, & ces deux liqueurs fe font
tenuës féparées *, il ne s’eft pour lors exhalé aucune odeur
urineufe ; J'ai mêlé les deux liqueurs, je les ai bien remuées
avec une verge de verre, le mélange s'eft coagulé en confi-
ftance de beurre blanc, & avoit l'odeur urineule.
Si on adjoûte à ce mélange un peu de diflolution de {u-
blimé corrofif, on ne s’apperçoit plus d’odeur urineufe; la
même chofe arrive, fi au lieu d’imprégnation on fe fert de
diffolution de fel armoniac; fi l’on remuë très-fort le mélange,
elle fe fait encore fentir, mais elle cefle en adjoütant de fa
folution de fublimé corrofif: c'eft fans doute parce que l’efprit
de fel & de nitre s'unit avec les fels volatils, & les empêche
de s’exhaler; & une preuve de cela, c’eft que l'efprit de nitre
ou de {el mis à la place de la folution de fublimé, produit le
même effet, mais il fermente avec l'huile de tartre, & diffout
le coagulum, puis il fe fait un précipité falin.
Si on adjoûte de l'huile de vitriol au mélange de Fimpré-
gnation de plâtras & d'huile de tartre par défaillance, le tout
fermente avec une grande chaleur, il fe fait beaucoup de pré-
cipité.
L'efprit de nitre produit le même effet, mais il diflout le
coagulum fans laifler de précipité, à moins d'y adjoûter
beaucoup d’efprit de nitre. L'on demande la raifon pourquoi
Je mélange d'imprégnation de plâtras & d'huile de vitriol, ou
bien d'huile de tartre, produit un coagulum , je crois que cela
fait. point du tout, ni fur la liqueur
traniparente en particulier, ni fur le
précipité.
L'efprit volatil d'urine fermente
très-fort avec le mélange d'imprégna-
tion de plâtras & d’huile de virriol,
mais fans produire beaucoup de cha-
leur, tout le coagulum fe diflout, &
ne laifle qu'un très-leser précipité.
L'efprit de fel armoniac par la
chaux n’a produit qu’un peu de cha-
keur & de fumée , fans fermentation.
Si lon adjoûte de l'huile de tar-
tre au mélange d’imprégnation &
d’huile de vitriol, il fe fit une grande
fermentation , puis beaucoup de pré-
cipite,
* L’imprégnation eft tombée au
fond de l'huile de tartre, parce qu’elle
étoit plus pefante, fa pefanteur étoit
à celle de l’eau commune, comme $
à 3, & celle de Phuile de tartre étoit
comme 3 à 2, ainfi la pefanteur de
limprégnation étoit à celle de l'huile
de tartre comme $0 à 45, ou com=
me 10 à 9.
ne
DES SCIENCES. 385
ne vient que de la quantité de parties falines que ces matiéres
contiennent, mais principalement de la quantité de terre plà-
treufe qui fe trouve dans limprégnation ; & ce qui le prouve
très-bien, c’eft que fi l'on prend la diflolution de 1a matiére
qui refte dans la cornuë dans laquelle on a diftillé l'efprit de
{el armoniac avec la chaux, cette diffolution fait un coagulum
très-épais avec l'huile de tartre par défaillance ; voici encore
une autre preuve. Jai pris une once & demie de fel de chaux,
c'eft cette matiére qui fe forme fur l’eau de chaux, je l'ai mis
dans deux onces & demie d’efprit denitre qui a diflout ce {el
avec chaleur & une grande effervefcence, il s’eft fait un préci-
pité. J'ai adjoûté de l'eau, je l'ai filtrée & évaporée de maniére
qu'elle étoit bien chargée de matiére diffoute, J'en ai mêlé
avec l'huile de tartre par défaillance, je Yai bien remuée ,
elle eft devenuë épaifle comme du beurre, ce qui eft une
feconde preuve que la partie terreufe eft la principale ma-
tiére qui fait ce coagulum. On peut adjoûter à ceci que Fim-
prégnation faît un coagulum avec les fortes diflolutions de
vitriol d'Angleterre, de vitriol de Chypre, de vitriol blanc,
& avec la diflolution d’alun, toutes matiéres qui contiennent
beaucoup de terre.
J'ai dit ci-deffus qu'il faut bien remuer le mélange d’impré-
gnation & d'huile de tartre par défaillance, fans cela on ne
feroit point de coagulum, ce que j'ai voulu expérimenter,
J'ai mis de l’imprégnation dans un gobelet, j'y ai verfé partie
égale d'huï'e de tartre, Je ne les aï point remuées, ces deux
liqueurs fe font toûjours tenuës féparées fans fe mêler, on
voyoit au contact des deux liqueurs une légére coagulation.
Quinze jours après, Fimprégnation étoit féchée en un fe
blanc qui n’avoit aucune âcreté, il avoit un goût de falpêtre
terreux mêlé de lixiviel, j'en ai mis fur les charbons ardents,
ï n'a jetté que quelques étincelles, & a bouilli : ce fel en fe
formant, avoit laifé des vuides qui étoient entre des lames
& des aiguilles , ce qui marque une criftailifation. J'ai mis de
ce fel dans de l'efprit de nitre, il a fermenté comme du {el
fixe de tartre, & a produit un peu de précipité falin. L'huile
Men. 17 34 . Ccc
386 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
de tartre qui étoit au fond du gobelet, deflous le fel dont je
viens de parler, étoit devenuë jaune & âcre, elle a fermenté
avec l'efprit de nitre, comme ï huile de tartre ordinaire, & a
fait un précipité falin. J'ai brouilié enfemble ce qui me reftoit
d'huile de tartre, de fel & d’imprégnation dans le gobelet,
pour voir fr j'en formerois un coagulum en forme de beurre,
mais if ne s’en eft point produit, le {el eft tombé au fond de
la liqueur jaune, & ne s’y eft point difiout.
7° Si lon méle de l'imprégnation avec partie égale de
diflolution de fublimé corrofif, il n'arrive aucun changement,
uelqu’agitation que vous donniés à ce mélange; mais fi on
adjoüùte de l’huile de tartre par défaillance, le mêlange fe trou-
ble, & en le remuant avec un ftilet ou verge de verre, ïl
devient comme du beurre très-blanc *. Si on y adjoüte dela
folution de fublimé corrofif, il devient oranger, & à force
de le remuer il devient blancheître, & enfin fait un précipité
blanc au fond de la liqueur tranfparente. Ainfi on ne fera pas
étonné de voir que le mêlange d'huile de tartre & de folution
de fublimé corrofif, qui devient d’abord oranger, devienne
blanc après y avoir adjoûté de l'imprégnation de plâtras. On
ne fent aucune odeur urineufe dans ces mélanges, à moins
qu'on y ait mis trop peu de folution de fublimé, car pour
lors cette odeur fe fait fentir en remuant très-fort & un peu
long-temps le mêlange , mais on la fait cefler dans l'inftant,
en y adjoûtant un peu de folution de fublimé, pourles raifons
que j'ai dites ci-devant.
8.” On produit les mêmes changemens, fi au lieu d’huïle
de tartre, on employe l'eau de chaux ; elle y a de même excité
üne odeur urineufe, & toute la différence qu’il y a, c’eft que
le mêlange ne devient pas épais, comme il devient avecl'huile
de tartre, & que lorfque l’on mêle d’abord l'eau de chaux
avec la folution de fublimé, & qu'on y adjoûte après cela
* Cette expérience eft équivoque |. roit prouver que l’inprépnation con-
par rapport à la blancheur qui y arri- | tient du fel armoniac , puifqu’on pro-
ve, &fice n'étoit l'odeur urineufe | duit lamême blancheur avec la difio-
que lon y apperçoit, cela ne pour- À fution de fel marin.
|
|
DE SAS IGIAUE AN CES, 387
Timprégnation, le mêlange ne devient pas blanc avec autant
de facilité, il faut plus de temps & plus de mouvement qu'a-
vec l'huile de tartre *,
9." L'imprégnation deplätras a produit le même coagulum
avec l'efprit d'urine, qu'elle a produit avec l'huile detartre
par défaillance, mais elle n'a fait aucun coagulum avec l’ef
prit de fel armoniac fait par la chaux, ce qui n’eft arrivé que
parce que l'efprit d'urine étoit très-chargé de fel volatil, &
que l'efprit de fel armoniac en contenoit peu. On s'imagine
pour l'ordinaire que l’efprit volatil de {el armoniac ou d'urine,
& leplus vif à Podorat & le plus pénétrant, eft plus chargé
de parties falines, ce qui ne fe trouve pas vrai, car l'efprit
volatil de {el armoniac, ou l'efprit d'urine par la chaux, eft
plus pénétrant que l'efprit de fel armoniac par le {el fixe de
tartre, qui eft-plus chargé de parties falines, & que lefprit
d'urine fait fans aucun mélange.
… 10.” Si on trempe dans l'imprégnation, du linge ou
du papier, que l'on les laifle fécher, ce linge ou ce papier
allumé fufe comme s’il avoit été trempé dans da difiolution
de falpêtre, j
JL paroït-par Ja 2.4e 3.me 4ime <.me 6,me ;7.me & r1o.me
expérience que d'imprégnation de plâtras contient un fe]
armoniac falin & nitreux. Car fi l'on fubitituë la diflolution
_de felarmoniac falin, &.qu'on y adjoûte de l'efprit de nitre
#pL'eau de chaux que j'ai em- | à peu devenoit -blanche-opaque en
-ployée dans ces expériences, a été | refroidiffant, se/ étoit celui de M.
faire avec une livre de chaux-&qua- | Boulduc.
tre livres d’eau, & peloit plus que | J’obferverai encore que j'ai eu des
T'eau, {a pefanteur fpécifique étoit à |, fublimés dont une partie s’eft tenuëé
celle de l'eau comme 56 à 57. en diflolution à froid dans 12 parties
La folution de fublimé corrofif | d’eau, d’autres dans 14, d’autres
contient une partie de fublimé fur 1$ | dans 16 parties, plus ou moins: ces
-parties d’eau , .quin’en a pas putenir || difolutiens étant faites dans la même
davantage en diflolution à froid. J'ai | température d’air, les criftaux de fu-
‘eu des fublimés dont la diflolution | blimé font fort ditlérents, ily en a
étoit tranfparente, chaude oufroide, | degrêles & longs depuis 2,3,4 lignes,
. xeléroit ane du Frere Simon, Char- | jufqu’à 2 pouces ; il y en a d'autres
itreux. J'en aï eu d’autres dontladif: | plus courts qui fe forment ‘en éven-
folution étoit très-tran/parente pen- } tail, & cela arrive fuivant le plusou
dant qu’elle étoit chaude , & qui peu l le moins de fublimé qui fe criftallife.
Ccc i
388 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
empreint de fels volatils urineux à la place de l'imprégnation,
elle produit dans toutes ces expériences les mêmes chan-
gements, & toute la différence que j'y ai trouvée, c'eft que la
diflolution de {el armoniac blanchit plus vivement & plus
promptement avec la diffolution de fublimé, & elle ne fe coa-
gule pas avec l'huile de tartre par défaillance, ni avec l'huile
de vitriol, ni avec l'efprit d'urine, comme fait limprégnation
de plâtras, parce que cette folution n’eft pas fi chargée de fel
& de bitume que l'imprégnation de plätras.
Piton de Tournefort ? a fait quelques-unes de ces expé-
riences, par lefquelles il a reconnu que finfufion de plätras
contient du fel armoniach, (fon infufion étoit très-foible,
eu égard à celle que j'ai employée) mais je ne crois pas
qu’il ait eu raifon de dire que cette infufion ou imprégnation
contient un fel alkali fixe , parce que l’'infufion de noix de
galles fait un coagulum avec cette imprégnation, & qu'elle en
fait un avec l'huile de tartre par défaillance. Il n'a pas fait
attention que linfufion de noix de galles fe trouble avec la
folution de fel commun.
On devroit dire par la même raïfon, que l'imprégnation
contient de lalun , puifque l'huile de tartre par défaillance fe
coagule avec la diffolution d’alun , & que l'imprégnation fe
coagule avec lun & avec l’autre.
L’imprégnation fe coaguleavecla diffolution devitriol verd,
de vitriol bleu & de vitriol blanc, comme elle fait avec l'huile
de tartre par défaillance ; dira-t-on pour cela que cette impré-
gnation contient des efpeces de vitriol; ce qui eft d’ailleurs
uue preuve affés certaine que ces fortes de coagulations fe pro-
duifent par la quantité de fels qui fe trouvent dans les diflo-
lutions.
H dit que l'on fépare du fel marin de l'imprégnation ou in-
fafion de plätras, & que l’on y reconnoit le falpêtre par le
détonation.
+ Célebre par le nouveau fyfteme qu'il a donné fur la Botanique, & qui
aété de cette Académie.
P Dans la Préface de fon Hiftoire des Plantes des environs de Paris.
D'E s'rSrotEinN-cariSmeil 38
Je n’y ai trouvé ni falpêtre ni felmarin, par aucun procedé,
ä n’eft pas poflible d'en retirer des plâtras , à moins d'y ad-
joûter un fel fixe; lon voit feulement que le linge ou le
papier trempés dans limprégnation & féchés, ont fufé vive-
ment fur les charbons ardents , mais ce n’eft point du falpêtre,
c’eft du fel armoniac nitreux; on produit la même chofe avec
le mélange d’efprit de nitre & d’efprit volatil d'urine fermentés
enfemble; fi lon fait brûler du linge ou du papier trempés
dans cette liqueur, il fe fait une déflagration très-vive.
Si l'on fait évaporer jufqu'à pellicule le mélange d’efprit
de nitre-& de {el volatil d'urine, on en retire des criftaux
en longues aiguilles qui fe terminent en pointe; ils font quel-
quefois formés par des pieces articulées, principalement
dans les derniéres criftallifations : mais ces criftaux ne font
pas hexagones, on ne peut les avoir bien fecs, ils fe fondent
facilement à l'air, & encore plus facilement à la chaleur ; ils
fufent très- vivement fur les charbons ardents. J'en ai mis
fur une pelle que j'ai expofée au feu,les criftaux fe font fondus,
puis ils fe font enflammés avec détonation; ils ne fulminent
quelquefois pas fur la pelle, mais très-vivement fur les
charbons ardents.
I réfulte des expériences que je viens de rapporter, qu’il
y a dans les plâtras un efprit de nitre & un efprit de fel,
qui avec des fels volatils urineux forment un fel armoniac
nitreux, & un fel armoniac falin, & c’eft ce que nousallons
encore prouver par la diftillation de limprégnation de
plitras. |
Je me fuis porté d'autant plus volontiers à ce travail, que
je m'étois apperçu que cette imprégnation contientun bitume
qui fe fait fentir en faifant évaporer cette liqueur. Outre
cela, j'avois lieu de croire qu'elle contenoit quelqu'autre ma-
tiére avec le fel armoniac, & queje pourrois découvrir par La
diftilation. à
J'ai d’abord voulu voir quelle liqueur je retirerois en fai-
fant diftiller limprégnation dans une cucurbite des plus hau-
tes à un feu très-lent, mais il n'a diftillé que du flegme qui
Ceci
390 MEMOIRES DE L'ÂCADEMITE RoYALE
entoit le bitume; & après bien des effais, j'ai reconnu que
plus je retirois de flegme, plus il avoit l'odeur de bitume, çe
qui me faifoit préfumer que ce bitume étoit aufli volatil que
l'eau, ou bien fi adhérent à l’eau, qu'ilne pouvoit s'en féparer,
& ilm’a paru épal de diftiler cette imprégnation dansune
cucurbite ou dansune cornuë.
J'ai donc rempli une grande cornuë de verre d'impré-
gnation qui n'étoit point évaporée, je l'ai mife dans le fable,
jy ai joint un récipient fans le lutter, j'ai fait un feu lent,
Hadiftié une liqueur claire tranfparente, ayant l'odeur de
bitume & d'un goût très-defagréable. La liqueur quia diftillé
le fecond jour avoit uneodeur de bitume plus forte, ce qui
m'a obligé de lutter le récipient le troifréme jour. J'ai conti-
nué de la diftiller pendant deux jours, il diftioit peu de chofe
a nuit, car jy mettois feulement du charbon en me cow
chant; & enfin le quatriéme jour je me fuis apperçu qu'il ne
diftioitplus rien. Je voyois pourtant la matiére bouillir dans
la cornuë, comme une bouillietrès-épaifle. J'ai cefléle feu ; da
cornuë étant refroidie, je l'ai retirée du fable, & j'ai vä au
fond de cette cornuë une matiére qui paroïfloit dure &
jaunâtre. Je l'ai remife dans le fable, j'y ai lutté le même
récipient vuide de la liqueur qu’il contenoit. Elle fentoit très-
fort le bitume *, elle n'a fait aucun changement avec le
vinaigre ni l'efprit de vinaigre, elle avoit lamême pefanteur
ue l'eau commune.
J'ai mis le feu au fourneau, je l'ai pouffé par degrésle plus
fort que j'ai pu; les vapeurs fe font élevées fort rouges dans
la cornuë & dans le récipient, dans lequel’elles ont eu de
la peine à pafer. Ha diftillé peu de liqueur , les vapeurs ‘ont
fubfifté toute la journée dans la cornuë & danse récipient,de
maniére que je n’y découvrois ni {el ni liqueur. Ces vaifleaux
* II m'eft arrivé dans cette occa- ‘
fon, ce qui eft arrivé à ceux qui ont
voulu:adoucir l'eau de la mer, &la
rendre potable ; en la faifant diftiller :
mais ils n’ont pù empécher le bitume
que l’eau de la mer contient, de s’é-
lever avec l’eau, & c’eft ce bitume
qui la rend d’un très-mauvais gens
cæ qui ie fait foupçonner que le bi-
tume quielt dans notre imprégnation,
eft femblable à celui de l’eau de fa
mérs.
DES SCIENCES. 391
fe font éclaircis le foir; j'ai remarqué que le récipient s'e
éclairci le premier, & que les vapeurs ont fubfifté encore
quelque temps dans la cornuë, J'y ai vû un fl blanc, dont
une partie s'étoit rangée & comme fublimée fur les côtés de
la cornuë. Le tout étant refroidi le lendemain, j'ai retiré le
récipient dans lequel il y avoit feulement cinq gros de li-
queur, qui, à toute épreuve, s'eft trouvée de l'eau régale».
J'ai mis de l’eau chaude dans la cornuë pour difloudre le {el
blanc ; la diflolution étoit toute blanche comme du lait, ïl
s'eft précipité une terre blanche au fond de la liqueur, qui eft
reftée tranfparente. Je les ai féparés l'un de l'autre, j'ai bien
lavé la terre, & après l'avoir féchée, elle ne m'a paru être que
du plâtre b.
La diflolution de ce fel étoit tranfparente & fans couleur,
âcre & amere, avec une odeur aromatique. Si l'on frotte cette
liqueur entre les doigts, on lui trouveune onétuofité fembla-
ble à celle de F'huïle d’olive ou de l'huile detartre par défail-
lance; elle eft très-pefante, fa pefanteur fpecifique eff à l’eau
comme 1 1 à 6. "
J'ai répété cette diftillation deux fois, mais je n’en ai retiré
ue de l'efprit de nitre à toute épreuve, au lieu d'eau régale.
J'en donnerai {a raifon, lorfque je parlerai ci-après de la difti-
lation des plâtras dont je n'ai tiré que de l'efprit de nitre.
Au refte, j'ai retiré dans les deux derniéres diftillations de
l'imprégnation de plâtras, le même fel blanc, âcre & amer.
Je me fuis imaginé que l'odeur aromatique qu'il avoit, ne
lui venoit que d’un peu d’efprit de nitre ou d'eau régale
mêlée avec du bitume qui n’eft que la vapeur rouge que l’on
voyoit dans la cornuë, & qui n'ayant pû être pouflée dans lé
récipient , eft retombée fur le fel qui étoit dans la cornuë; &
voici des obfervations qui peuvent rendre cette idée vrai-
femblable.
1° Ayant expofé cette liqueur à l'air, elle a perdu peu à
peu fon odeur aromatique au bout de trois jours.
= 8 M. Lémery.en a auffi tiré de l’eau l » C’eft.ce qui produit la magnéle
régale. V. Mem.1717.p. 49« dans l’eau-mere. r
392 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
2.° Si l'on mouille du papier bleu avec cette liqueuravant
qu’elle ait perdu fon odeur, ellerougit ce papier, mais elle ne
le rougit plus lorfqu'elle a perdu fon odeur.
3° J'ai fait rougir un creufet entreles charbons ardents,
jy ai jetté peu à peu fix onces d’imprégnation de plâtras
évaporée autant qu'il a été poffible ; je l'ai calciné à blancheur,
j'ai diflout, filtré & évaporé cette diflolution, elle n'avoit
aucune odeur aromatique, parce qu'étant calcinée à l'air, le
bitume a enlevé avec lui toute l’eau forte qu’il a pu enlever,
& dont les acides ne font point bien unisavec les fels alkalis
volatils; ainfi cette liqueur ne rougit point le papier bleu,
& ne differe point de celle que j'ai retirée après la diftillation
de la même imprégnation, & qui expofée à l'air, a perdu fon
odeur aromatique *. L'une & autre de ces deux liqueurs
ont produit les mêmes effets que l’imprégnation de plâtras
avec les efprits de nitre & de fel qu'elles ont rendu capables
de difloudre l'or. Elles ont fait le même coagulum avec
Yhuile de vitriol, & la même fermentation. La chofe a été un
eu différénte avec l'huile de tartre par défaillance, & avec
l'efprit volatil d'urine; car quoiqu'il fe fafle le même coagu-
um, il arrive pourtant une fermentation après le coagulum
formé par le mélange de cette huile & de la diflolution de
{el de plâtras, qui n'arrive pas avec le mélange de cette huile
& de limprégnation de plâtras. L'efprit d'urine produit le
même effet que l'huile de tartre avec ces liqueurs ; le coagu-
um quieft très-blanc fe diflout par la fermentation, & le
mélange devient liquide comme de la crème de lait; & enfin
il fe fait un précipité blanc : cette fermentation n'arrive pour
lors, que parce que les acides nitreux & falins {ont plus à
*_J'airetiré du flegme de l’impré-
n’étoit pe exactement bouchée, qui
gnation de plâtras qui rougifloit bien
rougit bien le papier bleu ; mais il
le papier bleu, & qui avoit l’odeurde
bitume. J'en ai mis pendant quinze
jours à l'air dans un gobelet, ila perdu
cette odeur; il rougir encorele papier
bleu, mais pas fi bien. J’en ai, qui de-
puis deux ans étoit dans une fiole, qui
faut prendre garde que c’eft de l’efprit
de nitre qui eft dans le flegme , & qui
eft féparé des autres matiéres , au lieu
que dans la diffolution de ce fel il n'y
a plus d’efprit de nitre féparé , & que
ce qu’il y en a s’évapore.
découvert
ardt
DES SCIENCES, 393
découvert dans ce fef, que dans l'imprégnation qui contient
du bitume.
Cette diflolution de fel de plâtras a la même pefanteur que
Fimprégnation deplâtras. Nous-examinerons la caufe de cette
pefanteur en parlant de l'eau-mere. J’oubliois de dire que
la diffolution du fel de plâtras, mélée avec la diflolution de
fublimé corrofif, ne fait aucun changement; fi l'on y adjoûte
de l'huile de tartre, le mélange devient oranger ; mais à force
de le remuer il devient blinc, puis il fe fait un précipité
blanc. $
. Voilà donc encore une fois les fels armoniacs nitreux &
falins bien démontrés dans notre imprégnation de plâtras;
& en conféquence, j'ai voulu voir fi le fel de plâtras pourroit
fe fublimer comme le fel armoniac; j'en ai rempli la moitié
d'une fiole; je lai mis dans le fable, & j'ai poufié le feu par
degrés autant qu'il m'a été poffble; le fel s’eft fondu, & s’eft
affaiflé en fe féchant ; il s’y eft formé plufieurs trous, d’où
{ortoient des vapeurs qui avoient l’odeur d’eau forte, mais
il ne s’eft fait aucune fublimation.
: Après les expériences que je viens de rapporter fur l'impré-
gnation de plâtras, j'ai voulu voir fi je ne retirerois point de
l'eau régale de la diftillation de pareils plâtras. J'en ai mis
14 livres dans une grande cornuë de grès, que l'on à
placée dans un fourneau de reverbere; on y a adapté un balon,
on a mis le feu au fourneau à 8 heures du matin, que lon
a augmenté par degrés jufqu'à 1 1 heures, c’eft-à-dire, pen-
dant 3 heures: il y avoit déja beaucoup de liqueur diftillée,
mais qui n'avoit produit aucune vapeur apparente. On a
enfuite pouffé le feu le plus fort qu’on a pu, ce quia donné
des vapeurs rouges jufqu'à 4 heures après midi qu’elles ont
ceflé, & l’on n'a plus continué le feu ; on n'a retiré les
vaifleaux que le fendemain; la cornuë s’eft trouvée fêlée, ce
qui a caufé la perte de quantité de vapeurs, comme nous
Yallons voir.
Je caflai tout-à-fait la cornuë pour en retirer les plâtras,
il y en avoit 9 livres 8 onces, & il n’y avoit que 2 livres
Mem. 1734 . Ddd
394 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
14 onces de liqueur dans le balon, ce qui fait en tout 12
livres 6 onces; il y a donc eu 26 onces de perte, foit efprit,
foit flegme. x
Cette liqueur diftillée avoit l'odeur d'eau forte, mais foible,
elle étoit à l'eau, pour la pefanteur, comme 6 1 à 60, ce qui
m'a obligé de la déflegmer, & pour cela je lai fait diftiller
dans une cucurbite, j'en ai tiré 24 onces 4 gros de liqueur
qui n'avoit pas plus de pefanteur que de l'eau commune,
& qui avoit une très-légére odeur d'efprit de nitre, elle
n'a fait aucun changement au papier bleu, elle n’a caufé
aucun mouvement avec lhuile de tartre par défaillance; il
eft refté dans la cucurbite 2 1 onces 3 gros de liqueur qui
fentoit bien lefprit de nitre, & qui a fermenté foiblement
avec l'huile de tartre, elle a rougi le papier bleu, elle étoit
à l'eau comme 2 3 à 20, elle n'a diflout ni l'or, ni l'argent,
ni le cuivre. Je lai déflegmée encore une fois; j'en ai retiré
16 onces 2 gros ou environ, de flegme femblable au pré-
cédent, mais qui avoit pourtant l'odeur d'efprit de nitre
un peu plus forte, il eft refté $ onces de liqueur dans fa
eucurbite, dont la pefanteur fpécifique étoit à l’eau comme
3 à 4, & qui, à toute épreuve, étoit de bon elprit de
nitre*, il a bien diffout l'argent, mais il n’a point touché à
For, j'ai mis quelques gouttes d’efprit de {el dans un gros de
cet efprit, il a très-bien diflout l'or.
J'ai leffivé les plâtras reftés dans la cornuë avec de l’eau
bouillante, je l'ai filtrée, cette liqueur s'eft coagulée avec
l'huile de tartre par défaillance, en beurre aflés ferme, elle
n’a donné qu’une très-légére odeur d’efprit urineux.
Elle s’eft troublée très-fort avec l’efprit d'urine, mais elle
n'a pas pris la confiftance de beurre.
Mélée avec l'efprit de nitre, elle a diffout Tor bien plus
promptement que limprégnation de plâtras mêlée avec de
pareil efprit. |
Elle n’a point blanchi le mélange d'huile de tartre &
* M. Boulduc a tiré de l’efprit de nitre des plâtras. W. /'Hiff. de l' Acad,
de M. Duhamel, année 1696, pag. 416. à 417:
DES :$ CiE:N c'es. 9:
de fublimé, non plus que le mélange d’eau de chaux &
de fublimé. .
Enfin, j'ai fait évaporer jufqu'à pellicule, ce qui me reftoit
de cette liqueur. Deux jours après, j'ai trouvé au fond de
la liqueur une matiére qui n’avoit aucune figure déterminée,
elle reflembloit à du fel de chaux, fans aucun goût, quoi:
que la liqueur qui furnageoit füt d’un goût très-aner, falé,
un peu âcre, & de couleur jaune, fa pefanteur fpécifique
étoit à l'eau comme 7 à 6, la matiére terreufe n’a pû fe
diffoudre dans fefprit de nitre, & le fel de chaux s'y eft
diflout âvec fermentation. : |
J'ai encore fait évaporer ma liqueur jufqu'à pellicule ;
deux jours après, j'ai trouvé au fond de cette liqueur, de
vrai fel marin, bien figuré, mais très-petit, falé, & en petite
quantité, par rapport à d'autre fel qui y-étoit en bien plus
grande quantité, & qui n'étoit point figuré, ce dernier fel
n'étoit point fi falé, j'ai d’abord cru que c'étoit du falpêtre,
mais outre qu'il n'en avoit pas la figure, c’eft qu’il n’a point
fufé fur les charbons.
IL s'agit de fçavoir pourquoi je n'ai retiré que de l'éfprit
de nitre des plâtras, & de quelque diftillation d'imprégna-
tion de plâtras, & pourquoi le fel marin que je n'ai retiré
par aucun procedé de limprégnation de plâtras, qu'en y
adjoûtant un fel fixe ; comment, dis-je, ce fel marin fe
trouve tout formé dans la leffive des plâtras diftillée,
14° H faut obferver qu'il y a moins d’efprit de fel dans
les plâtras que d'efprit de nitre, tous les plâtras n'ont pas
la même quantité d’efprit de fel & d’efprit de nitre*,
J'ai fait voir dans un Mémoire, que dans une cuite qui
contenoit 350 livres de falpêtre, il fe trouvoit environ
‘150 livres de fel marin; preuve qu'il ÿ a beaucoup plus
d'efprit de nitre dans les plâtras que d’efprit de fel.
2.° Que les efprits acides ne peuvent fe retirer par la
diftillation des matiéres avec lefquelles ils font combinés,
* Nous vérrons dans un autre Mémoire, une Analyfe qui m'a donné
plus de fel marin que de falpêtre.
Ddd ïÿ
V. Mem. de
l'Acad. 1 729,
231. ©
232.
396 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
que par le moyen des matiéres fulphureufes & bitumineufes
que lon y mêle, on le voit dans la diftillation de l'efprit
de nitre & de l'efprit de fel, ou bien lorfqu'elles y font
naturellement mêlées, & c'eft ce que l’on voit dans la diftit-
lation du vitriol, & dans celle des plâtras & de l'imprégna-
tion de plâtras.
3° Qu'il n'y a qu'une certaine petite quantité de matiére
bitumineufe dans les plâtras & dans leur imprégnation, qui
étant confommée par la diftillation d'une certaine quantité
d'efprit, il ne peut plus s'élever d'efprit, quelque feu que
Von fafle. On fçait que l'efprit de nitre a plus de facilité à
s'élever que l’efprit de fel ; il y a apparence que la matiére
bitumineufe s'unit plus facilement à l'efprit de nitre qu'à
l'efprit de fel, & qu'elle s'éleve avec cet efprit ; ainfi s’il n’y a
qu'une fuffifante quantité de bitume capable d'enlever l'efprit
de nitre qui s’y trouve, il ne s’élevera point d’efprit de fel,
quelque feu que fon fafle. Voilà pourquoi nous n'avons eu
que de l'efprit de nitre dans la diftillation des plâtras, &
de fon imprégnation, & c'eft ce que nous verrons dans la
diftillation d’eau-mere & dans fa calcination. Il n'y a pas
même toûjours affés de matiére bitumineufe pour enlever
tout l'efprit de nitre, mais il s'en trouve aufli quelquefois
plus qu’il n’en faut pour la quantité d’efprit de nitre, & pour
lors äl s'éleve une portion d’efprit de fel, & produit de l’eau
régale; mais s’il ne s’en trouve pas pour enlever de l'efprit de
fel, cet efprit agité par un feu violent fe détache en partie
des efprits urineux, & comme il manque de véhicule pour
l'enlever, il fe mêle avec la terre du plâtre, il s’y unit, &
forme un fel concret, & pour dire en un mot, un vrai {el
“marin ; ainfi il peut fe faire que le fel marin que j'ai retiré
de la leffive des plâtras diftillés, ne fe foit formé que pendant
la diftillation. On ne manquera pas de me dire que fi lon
fait diftiller des efprits acides, ils s’élevent, fans que pour
cela on ait befoin d’une matiére fulphureufe pour les aider;
cela eft vrai, mais fi ces efprits font adhérents à des fels fixes,
à de a terre, à des fels volatils, ils ne s’éleveront point qu'il
DES SCTENCES. 7 397.
| n'y ait quelque matiére capable de les détacher de ces {els
& c’eft ce que produifent les matiéres fulphureufes.
Les vapeurs d'eau forte qui fe font élevées lorfque j'ai
mêlé de Fhuile de vitriol avec l'imprégnation de plâtras,
m'ont donné lieu d’efpérer que je tirerois de l’eau régale par
la diftillation de ce mélange, puifque lon retire de l'efprit
de fel du fel marin, en le mêlant avec l'huile de vitriol,
J'ai mis dans une cucurbite de verre 10 onces d’impré-
gnation de plâtras, évaporée autant qu'il a été poffible,
J'ai adjoûté à cette cucurbite, qui pefe 11 onc. 6 gros 36
grains, un chapiteau tubulé, auquel j'ai adapté un matras
pour récipient ; le tout accommodé fur un bain de fable, jai
fait un petit feu pour liquefier limprégnation, puis j'ai verfé
environ un gros d'huile de vitriol, ce qui a fait fermenter
la matiére, puis j'en ai adjoûté peu à peu autant, à mefure que
je voyois la fermentation cefler, jufqu'à 24 gros 3 6 grains,
& à chaque fois je bouchois l'entrée du tuyau avec un bon
bouchon de liege, mais peu à peu la matiére s'eft gonflée
de maniére qu'elle a entiérement rempli la cucurbite, j'ai
été obligé de retirer le peu de feu qu'il y avoit dans le
fourneau, fans quoi la matiére auroit paflé dans le récipient,
il s'eft élevé des vapeurs rouges qui ont rempli le chapiteau
& le récipient, il a diftillé une liqueur, Les vapeurs rouges
fe font prefque diffipées, la matiére s'eft affaiflée dans la
cucurbite, J'ai remis du feu dans le fourneau, je ai augmenté
aflés fort, les vapeurs rouges ont reparu, je l'ai continué
jufqu'au foir; lorfque je me fuis apperçû qu'il ne diftilloit
plus rien, j'ai ceffé le feu, les vaiffeaux font devenus froids,
les vapeurs rouges fubfiftoient dans la cucurbite, Le chapiteau
& le récipient, il y en avoit encore le lendemain matin;
j'ai retiré le récipient, il contenoit 4 onc. 4 gros de liqueur
qui, à toute épreuve, s'eft trouvée de leau régale, elle
diffolvoit une feuille d'or en un quart d'heure, elle réduifoit
‘une feuille d'argent en un fédiment noirâtre. L
J'ai déluté le chapiteau, j'ai trouvé encore des vapeurs
rouges dans la cucurbite, qui pefe avec la matiére blariche
Ddd
398 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
qui eft dedans, 7 onc. 2 gros, j'ai verfé de l'eau fur cette
matiére, elle set difloute en une liqueur blanche comme
du lait, je l'ai filtrée, la liqueur a paffé claire & tranfparente,
il eft refté dans le filtre 3 onces 1 gros de terre blanche,
j'ai fait évaporer la liqueur filtrée, je n'ai p la defécher,
mais en la laiffant refroidir, elle s’eft réduite en une matiére
gommeufe & dure, il y en avoit 33 gros, elle fe liquefioït
à l'air & à la chaleur, de même que l’imprégnation de plâtras
évaporée, peut-être que fi jy eufle mis une plus grande
quantité d'huile de vitriol, j'en aurois retiré davantage d'eau
régale.
J'ai donc recommencé cette opération dans le même vaif-
feau, avec des circonftances un peu différentes; j'ai d'abord
mis dans la cucurbite $ onces d'imprégnation de pltras*, &c
4 onc. d'huile de vitriol peu à peu & alternativement par
le tube du chapiteau, la matiére a fermenté, il s'eft élevé
des vapeurs rouges, mais qui n’ont point paflé dans le réci-
pient, je l'ai laiffé ainfi jufqu’au lendemain, fans faire de feu,
& je n'ai rien trouvé dans le récipient ; j'y ai adjoûté $ onc.
d'imprégnation, & j'ai mis le feu au fourneau à 7" du matin,
je l'ai augmenté par degrés, j'ai encore mis 2 onc. d'huile
de vitriol, les vapeurs fe font d’abord élevées, & ont paffé
dans le récipient, la matiére ne s'eft prefque point rarefñée,
comme il eft arrivé à l’opération précédente. Enfm lorfque
je voyois les vapeurs diminuer, j'y adjoütois de l'imprégna-
tion, de forte que j'ai employé dans cette opération 1 4 onc.
$ gros d’imprégnation, & 6 onces d'huile de vitriol; j'ai
continué le grand feu jufqu’à 8h du foir, parce que je voyois
toûjours des vapeurs rouges dans la cucurbite & dans fon
chapiteau ; j'ai trouvé le lendemain 10 onc. 6 gros d'eau
régale dans le récipient, elle diffolvoit une feuille d’or dans
une demi-minute, elle étoit à l'eau comme 6 + à $, ou
comme 13 à 10.
I eft reflé 8 onces 3 gros de matiére blanche dans la
* Elle pefe avec l’Aréometre 29 onc. 66 grains, elle eft à l'eau comme
49 à 30, c'eft à peu-près comme $ à 3+
DES -S:CI EN C‘E Suit 399
cucurbite, il s’eft donc perdu 1 2 gros de parties fpiritueufes
ii fe font diffipées; j'ai diffout cette matiére, je l'ai filtrée,
il eft refté dans le filtre de la terre blanche qui, étant bien
féchée, pefoit $ onc, 2 gros, il y avoit donc 3 onc. 1 gros
de fel qui s'eft diflout dans l'eau, cette diffolution eft aigre-
lette, elle eft à l'eau comme 10 + à 9 +, ou comme 24
à 19 ; elle rouyit le papier bleu, elle n'a point fermenté,
ni fait aucun changement avec l'huile de tartre par défaillance,
elle n'a point difiout For; étant évaporée jufqu’à pellicule,
elle n’a point donné de criftaux bien formés, maisune matiére
faline informe,
Voici de l’eau régale que j'ai retirée du fel de plâtras, j'a
pris 14 onces de forte diflolution de fel de plâtras, reftée
après la diftillation d'imprégnation de plâtras, dont j'avois
tiré de l'efprit de nitre, comme je l'ai dit ci-deflus ; j'ai mis
cette diflolution dans une cornuë pofée au bain de fable,
& y ayant mis un récipient fans le luter, je l'ai fait diftiler
jufqus ce que j'aye apperçû la matiére en confiflance de firop
épais & bien cuit ; j'ai ceflé le feu, il y avoit dans le réci-
pient 4 onc. 2 gros de flegme limpide & fans couleur, if
avoit l'odeur de bitume tirant fur celle d’eau forte, & qui
a bien rougi le papier bleu; elle n'a produit aucun mouve-
ment de fermentation avec l'huile de tartre; fa pefanteur
fpécifique étoit à l'eau comme 2 1 7 à 2 1 6, elle n’avoit point
de faveur *.
Lorfque la cornuë a été refroidie, j'y ai verfé $ onces
d'huile de vitriol qui, en la remuant, s'eft coagulée avec le
fel de plâtras, & a commencé à jetter des vapeurs rouges ;
je l'ai mis promptement dans le fable, j’y ai adapté un grand
matras pour récipient, je l'ai luté tout d’abord, les vapeurs
rouges ont rempli la cornuë & le récipient; quoiqu'il n'y
eût point de feu, la cornuë s’eft échauffée fort bien par le
mélange, je l'ai laiflée en cet état pendant deux heures : comme
* J'ai mis r grain d’eaurégaleque | papier bleu que le flegme dont je
Jairetiré dans F5 gros d'eau; ce | parle, je n’y ai apperçü aucune f:-
mélange a rougi aufli vivement le | veux {
400 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
j'ai vû qu'il ne fe formoit aucune liqueur dans le récipient,
j'ai mis le feu au fourneau que j'ai augmenté peu à peu;
demi-heure après, il s'eft formé des gouttes qui ont diftillé,
ce qui a continué pendant trois heures & demie, après quoi
les vaifleaux fe font éclaircis, principalement la cornuë; j'ai
augmenté le feu, mais malgré cela, il n’a plus rien diftillé;
le lendemain matin, j'ai retiré mes vaifleaux, il y avoit
encore des vapeurs rouges, je n'ai trouvé que $ onces de
liqueur dans mon récipient, elle a diflout lor dans l’'inftant,
cette eau régale eft à l'eau comme 4 à 3, elle eft couleur
de gris-de-lin jaune, toutes mes autres eaux régales font
verdâtres, tirant fur le jaune*.
Il eft refté dans la cornuë 9 onces 2 gros de matiére
blanche & dure, fur laquelle j'ai jetté 6 ou 7 onces d’eau
prefque bouillante, pour faire difloudre le fel, je l'ai filtrée,
& comme cette diflolution me paroiffoit très-pefante, car
elle étoit à l'eau comme 4 à à 3, je l'ai confervée à part ;
j'ai continué de verfer de l’eau prefque bouillante fur le refte
de la. matiére, que j'ai eu de la peine à difloudre, car il a
fallu beaucoup d'eau, & la rechauffer bien des fois; je l'ai
filtrée, il eft refté une terre blanche que j'ai fait fécher fur
le feu dans un creufet, il s’en eft trouvé $ onces, il y avoit
4 onces 2 gros de fel difiout dans l’eau, qui font 9 onces
2 gros qui, joint à 4 onces 2 gros de flegme, & $ onces
d’eau régale que J'ai retiré, font 1 8 onces 4 gros; il s’eft
donc perdu 4 gros de matiére volatile qui ne peut être que
de l'eau régale, ou de fefprit de vitriol.
Cette diffolution s'eft échauffée avec lhuile de wvitriol,
mais rien de plus.
* Lorfque l’on diltille l'imprégaa-
tion de plätras avec l’huile de vitriol,
Pinconvénient qu'il y a à craindre,
eft la grande rarefaétion de la matiére
contre laquelle on doit être en garde,
parce qu'elle pafleroit dans le réci-
pienr. Nous y avons remedié dans la
feconde diftillation de cette imprégna-
tion; nous n'avons point à craindre
de gonflement ou rarefaétion avec le
fel de plâtras dans cette derniére opé-
ration, mais il faut prendre garde
que la quantité des vapeurs qui ne
fe réfolvent que difhcilement en
liqueur, ne caflent les vaifleaux ,
c’elt pourquoi il faut bien ménager
le feu,
Elle
pDiesrSio ft en éreisims IT ei
- Elle n'a produit ni mouvement ni changement avee-
Tefprit de {el armoniac.
Elle a diflout une feuille d’or en ro minutes.
Si l'on méle cette liqueur avec la folution de fublimé, il
n'arrive aucun changement; fi l'on y adjoûte l'huile de tartre,
il fe fait une fermentation vive, mais le mélange ne jaunit
point, il fe trouble en blanc.
Si l'on mêle l'huile de tartre par défaillance avec partie
égale de diffolution de fublimé, l'on fçait que le mélange
devient couleur de fafran, mais fi on y adjoûte peu à peu
partie égale de notre diflolution, le précipité fe diflout, le
mêlange devient clair & tranfparent pendant la fermentation,
puis il fe fait un précipité blanc.
J'ai fait évaporer la diflolution du fel, à Jaquelle il a fallu
adjoûter beaucoup d'eau pour a difloudre, je l'ai fltrée, je
Yai fait évaporer jufqu'à pellicule, il s’eft formé des criftaux
longs d’une ligne jufqu'à une ligne & demie, fins comme
des cheveux, ils étoient les uns fur les autres, fans aucun
ordre, très-blancs, n'ayant prefque pas de faveur; ce {el
wa ni fufé, ni petillé, ni bouilli fur les charbons ardents;
j'ai fait difloudre ce fel, la diflolution a rougi vivement le
apier bleu. J'ai fait évaporer une feconde fois ce qui reftoit
de diflolution, elle a forméune efpece de gâteau de fel très-
blanc, fans aucune figure déterminée.
Voïlà notre Analyfe bien avancée, je puis même dire
qu'elle eft entiérement faite. Par la décompofition de toutes
les parties des plâtras, j'en ai tiré du flegme, du bitume,
de 'efprit de nitre, de l'eau régale, & de la terre plâtreufe.
Le bitume fe découvre par fon odeur, & par fa couleur
jaune gris-de-lin qu'il communique à toute la matiére, il
s'éleve avec le flegme, par un petit feu, & avec les efprits
acides, mais il faut pour ces derniers un feu plus violent.
YL femble parà qu'il y ait dans ce bitume une partie plus
volatile que l'autre, mais à dire le vrai, ils font tous deux
très-volatils, puifque fi on expole le flegme & les efprits
à l'ai, le bitume s'échappe, il ne laifle pas même de fe
Mem. 1734: Éd 7
402 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
difliper avec de temps dans des bouteilles bien bouchées.
J'ai tâché de le féparer par l’efprit de vin, en réduifant
l'imprégnation de pltras en une confiftance de beurre, mais
il entraine des fels avec lui, qui fe diflolvent dans l'efprit
de vin, en forte que je n'ai pü le féparer feul.
Nous avons fait voir par nos expériences, qu'il y a des
fels volatils urineux unis avec l'efprit de {el & l’efprit de mitre,
& qui fe font manifeftés par leur odeur urineufe, & par la
blancheur qu'ils ont produit dans le mélange de l’imprégna-
tion de plâtras, du fublimé eorrofif, & de d'huile de tartre
par défaillance ; il eft vrai que la blancheur ne paroït pas
Î promptement, & n'eft pas fi vive, que lorfqu'on fe {ert
de diffolution de fel armoniac à la place de limprégnation,,
mais il femble que cela n'arrive que parce que les fels volatils
font un peu embarraflés par le bitume, & ce qui le prouve
bien, c'eft que la difiolution du fel de plätras, débarrafiée
de ce bitume (car il y en refle très-peu) blanchit bien plus
promptement que limprégnation de plâtras avec la folution
de fublimé, & l'huile de tartre.
J'ai tenté de retirer des fels volatils de cette imprégnatiom
de plâtras, j'en ai pour cela mis 19 onces dans une cucurbite
de verre qui contenoït 2 pintes + d’eau, je l'ai fait diftiller
au bain de fable, j'en ai tiré 9 onces de fleyme couleur de
tifanne, il n’avoit point d'odeur; lorfqu'on pouffe la diftil-
lation un peu fort, le flegme qui diftille prend une odeur
d'empireume. I eft donc reflé 10 onc. d'imprégnation qui,
étant refroidie, étoit ferme, j'y ai adjoüté 10 onc. de diffo-
lution de fel fixe de tartre, j'ai remis ma cucurbite au baïr
de fable, & après avoir adapté un récipient, j'ai fait un
fort petit feu, il n'a rien diftillé pendant une heure, après
cela la matiére s'eft rarefiée, de maniére qu’il a fallu ôter
entiérement le feu, elle seft élevée jufqu'au deffus de 1a
cucurbite, mais elle ne s’eft point répanduë dehors, à caufe
de fa vifcofité; la matiére a enfuite baïflé peu à peu, & s’eft
tout-à- fait affaiffée, j'ai remis du few, elle s'eft encore rare-
fée, mais pas tant, elle s'eft encore affaiflée tout-à-fait, j'ai
ét un.
mD'iETS : Se r € NC E SONT 40
pouité le feu pendant 4 heures, après-quoi j'ai cefé le feu
voyant qu'il ne diftiloit plus rien. Le lendemain, j'ai trouvé
dans le récipient $ onc. $ gros de liqueur limpide, couleur
d'ambre, qui étoit à leau‘comme 18: à r 80, elle fentoit
fort l’empireume, elle n'avoit aucun goût, & laifloit feule-
ment une très -légére âcreté fur la langue.
Elle fait fur le papier bleu à peu-près le même rouge-
blafard, tel que le fait la diflolution de fel armoniac.
Elle à blanchi le mêlange d'huile de tartre & de fublimé
corrofif, de la même maniére que le fait limprégnation de
pltras.
La matiére qui eft reftée dans la cucurbite étoit blanche,
compacte, dure & féche, qui étant leflivée & évaporée, a
donné de beaux criftaux de nitre, & du fel commun, l'un
& l’autre très-blanc.
Je n'ai retiré aucun efprit volatil urineux, j'ai voulw voir
fi je pourrois en retirer avec la chaux.
J'ai mis une livre d’imprégnation de plâtras dans une
grande cucurbite, pofée fur ur bain.de fable, jy ai mis un
chapiteau & un récipient, fans les luter, j'ai fait diftiller cette
matiére, j'en ai tiré 6 onces de liqueur, cette liqueur m'avoit
aucune faveur, la derniére once qui a diftillé, a rougi le papier
bleu, comme la diflolution de fel armoniac; ce que les autres
n'ont pas fait; ce qui étoit dans la cucurbite avoit la con-
fiflance d'extrait, ÿ y ai mêlé dans le même temps.une livre
de chaux en poudre, il ne s’eft exhalé aucune odeur urineufe,
quoique la matiére füt très-chaude, j'y ai luté un chapiteau
& un récipient, j'ai pouflé le feu pendant $ heur. la matiére
a diftillé fort lentement, je n'ai pü retirer que 2 onces de
liqueur qui avoit une odeur d'empireume, mêlée d’efprit
volatil urineux.
Elle n’avoit aucun goût.
Elle n’a point fait de changement au papier bleu.
Elle n’a point fermenté avec l'efprit de nitre, mais elle
a jetté des fumées épaifles qui fentoient l'efprit urineux, &
ne s’eft point échauffée.
Ece ij
404 MEMOIRES DE L'ACADEMIYE RoyaLE
= Elle à fait de même avec l'huile de vitriol, mais elle s’eft
échauftée.
Elle a blanchi, comme de Îa crème, la folution de fublimé
corrofif, & l’a renduë auffi épaifle, j'ai jetté fur ce mélange,
de la diflolution de fel de tartre qui étant bien mêlée, le
tout eft devenu blanc. ‘
La matiére reftée dans la cucurbite, étoit dure & très-
blanche, elle peloit 23 onces, j'en ai retiré, par la lotion,
20 onces de terre très-blanche, il eft donc refté 3 onces
de matiére faline difloute dans l'eau. Cette liqueur évaporée
jufqu'à pellicule, & mêlée féparément avec l'efprit de nitre,
l'efprit de fel, l'huile de vitriol, Fhuile de tartre par défaillance,
& la folution de fublimé corrofif, a donné les mêmes chan-
gements que la diflolution de fel de plâtras, mêlée avec les.
mêmes liqueurs, & dont j'ai parlé ci-deflus.
Fout ce que la chaux a produit dans cette diflillation,
c’eft de donner une liqueur légérement urineufe, & point
d’efprit acide.
REMARQUE.
J'ai dit à la page 3 89, que je n'ai trouvé ( dans les Plâtras }
ni falpètre, ni fel marin par aucun procedé, & qu’il n’eft pas
poffble d'en retirer, à moins d'y adjoûter un fel fixe; je n'ai
pas prétendu qu'il n’y en avoit pas du tout, car il peut y en
avoir, L'on connoit affés le falpêtre de houffage, j'en ai retiré
moi-même de très-beau & detrès-vif, qui s’étoit formé fur
des murailles & fur des pierres particuliéres : c’eft une chofe
que j'expliqueraï dans fe Mémoire que je donnerai, en parlant
de la formation du falpètre. L'on y verra la raïfon pourquoi
Von ne retire point de falpêtre des Plätras, quoiqu'il puifie y
en avoir; & pourquoi le falpêtre qui fe forme fur certaines
pierres, eft beaucoup plus vif que tout autre falpêtre.
\ F Ÿ æ
or
Q
DES SCTENCES. 405$
PR OB LE M E.
Quatre points ou quatre objets étant donnés Jur un plan,
placés CONNUE O1 voudra , £TOuVEr un cinguiéme point
duquel ayant tiré des lignes aux quatre objets, les trois
angles formés par ces quatre lignes foient égaux, on
dans tel rapport donné qu'on voudra.
Par M. PITor.
Te n'entre point ici dans la queftion de fcavoir fi les
diftances vüës fous des angles égaux, paroiffent ou font
jugées égales, il me paroït feulement que notre jugement
R-deflus doit varier fuivant qu'il y à entre notre œil &
ces mêmes diftances, plus ou moins d'objets interpofés.
Pour réfoudre ce Probleme, il ne faut d’abord confidérer
que trois des objets, & chercher les points d’où l’on puifle
voir ces trois objets fous deux angles égaux. Ce Probleme
eft toüjours indéterminé, mais le lieu en eft différent,
fuivant les différentes fituations refpeétives des objets entre
eux ; ce lieu peut être une ligne droite, une fection conique,
une courbe du fecond genre, & plus généralement, une
courbe du troifiéme genre.
Lorfqu'il y a quatre objets, le Probleme eft déterminé,
mais fa folution dépend entiérement de celui de trois; car
ayant trouvé la courbe qui fatisfait à trois des objets quel-
conques, on en laiflera un à volonté pour prendre le qua-
triéme, & ayant trouvé, par fa même méthode, la nouvelle
courbe pour ces trois derniers, le point où ces deux courbes
fe couperont, réloudra le Probleme.
Le cas le plus fnnple eft lorfque les objets font placés fur
une ligne droite; ce cas me fut propolé par un de nos Mrs
je le réfolus fans calcul, par une méthode très- fimple,
bien différente, & moins compofée que les folutions que
ee iij
28 Juillee
1734
Fig. 1.
Fig. 2.
406 MEMOIRES DE L'ACADEMRE RoxALE
M.'s Guinée & Ozanam ont données de ce mêmecas,
Comme la folution générale que je donne ici, fuppofe
ma méthode pour le cas fimple dont je viens de parler,
j'ai befoin de commencer par cette méthode.
Trois objets À, 2, C, étant donnés fur une ligne droite:
pour trouver le point G, en. forte que les angles AG,
BGC foient égaux, on formera fur les intervalles AZ & BC
des triangles femblables & ifofceles ADB, BEC, ontirera
la ligne EDF, & du point F pour centre, & du rayon FB
on décrira le cercle BGH, qui fera le lieu de tous les
points G, Car du point Æ pour centre ayant décrit le cercle
CBG, & du point D le cercle À BG, ïl eft évident que
les angles ADB, BEC, étant égaux, les angles à la cir-
conférence AGB, BGC, font aufli égaux. Or, en faifant
différents triangles ifofceles ADB, BEC, on aura diffé-
rents points G, & la ligne BG fera toüjours divifée en deux
également & perpendiculairement par FDÆ. Donc cette
même ligne BG fera toüjours une corde du cercle BGH.
Donc le cercle BGH eft le lieu de tous les points G.
Si les angles AGB, BGEC, {ous lefquels on voudroit voir
les trois objets À, B, C, étoient donnés, le Probleme feroit
déterminé, on feroit fimplement les angles 4 DB, BEC,
doubles des angles donnés AGP, BGC,
Si on vouloit que les angles AGB, BGC, au lieu d’être
égaux, fuffent doubles ou triples Fun de l'autre, ou géné-
ralement dans tels rapports qu'on voudra, on feroit fimple-
ment les angles ADB, BEC dans ces mêmes rapports.
Ainfi on réfoudroit très-aifément cette queftion : 7rouver
Le point d'où l'on peut voir trois objets fur une ligne droite fous
deux angles donnés !
Pour réfoudre préfentement le cas général, ou dont les
trois objets font placés indifféremment fur le plan, on joindra
deux des objets quelconques par une ligne indéfinie, & on
rapportera le troifiéme objet fur cette ligne; ainfr ayant
joint À & C, par la ligne ZAC, il efb évident que fi l'on
tire du troifiéme objet 2, une ligne à volonté BE 47, qui
ÿ DES (SCIENCES 407
coupe AC en Æ, onpourra trouver fur cette ligne le point 4%
d'où ayant tiré MA, MC, elles feront avec AZEB, les
angles AMB, CMP égaux : Car il n'y a qu'à confidérer
que les trois objets {ont À, £, C, faire comme au premier
cas, les triangles femblables & ifofceles AGE, E FC, tirer
FGH, & du point Æ pourcentre, décrire le cercle EMI
qui fera tel, que de tous les points de fa circonférence, on
verra les trois points À, Æ, & C, fous deux angles égaux.
Mais entre tous les points de cette circonférence, il n'y a
évidemment que le point 47, d'où lon puïifle voir les trois
objets À, B, C, fous deux angles égaux. (On peut cepen-
dant trouver une infinité de points #7, en tirant différentes
lignes BEM, & opérant comme ci-deflus ; la fuite de tous
ces points #7 formera une ligne courbe. Voici la maniére
dont nous avons déterminé fon équation.
Par les points B & M, on tirera les perpendiculaires BD,
MP; foient nommées les données À D, a; D@b; BD, c;
& les indéterminées DP, x; PM, y; ED,7; AH, u.
APferaa—x; AË,a—7; EC,b+-7;: HE, a+u—7
Donc /E£—2u+2a— 27, & IP— 204 2a—7—x
Cela pofé, les triangles femblables CFH, EGA, donneront
CE, EH :: FG, GH, & les triangles femblables £FH,
AGH donnent £A, AH :: FG, GH. Donc CE, EH
:: EA, AH; ou, en termes analytiques, b+7.a+-u—7
1: 4— 7. u, ce qui donne une premiére équation
but2qu—au—aa—2a7 +7
Les triangles femblables EDB, EPM donnent ED, z
« DB, c:: EP, x—7. PM, y. D'où l'on tire une 2.4e
équation 7y—cx—c7 Enfin les triangles femblables
EPM, MP1 donnent EP, x—7. PM,3y:: PM, y
+ Pliu—2a—3y—x, ce qui donne une 3. équation
JYHAX— 7 —20X #2 IUX — 27
H faut préfentement avec la 1.7 & la 3.me équation, faire
évanouir l'indéterminée , & fubftituer dans la nouvelle
équation, la valeur de 7, tirée de la feconde; & lon aura
Fig. 1.
408 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
enfin, après les réduétions, l'équation de la courbe
ay —2cxÿ — bccyy —2bcxxy + 2accxx=0
— by + 2acy + accyy + zabcxy |
—2bcy}—2ccxyy 4-2acxxy
—Haxxÿy —20cxy
+ 2abxyy
—Dxxyy.
Comme nous avons donné Ja méthode de trouver, par
une opération très-fimple, tant de points 47 de Ia courbe
qu'on voudra, il feroit très-inutile de chercher à la décrire
par le moyen de fon équation.
Cette équation renferme tous les cas poflibles; car fr,
pour tomber dans le premier cas qui efl, comme nous avons
dit, le plus fimple, on fuppofe BD nulle, alors les points
B & E fe confondront avec le point D, & effaçant dans
l'équation, les termes où BD, c, fe trouve, elle fe réduira
2ab
x : x LS, rt 2abx 41%:
à celle-ci xx —=yy, UT — xx —=J}s,
fuivant que (a) eft moindre, ou plus grand que /b). Or il
eft très-aifé de voir que cette équation eft celle du cercle
BGH, ou du lieu de tousles points qui fatisfont au premier
cas; car ayant donné aux lignes du premier cas, les mêmes
dénominations qu'à celles du fecond, on aura A B— 4,
DCE AT EU, DEN (CET
Les triangles femblables CEF, BDF donnent CE, BD
«: CF, BF: Mais CE. BD :: CB. AB. Donc CF. BF
:: CB. AB ; ce qui donne en termes analytiques + 4-+-#
.au::b.a; d'où lon tire AFu—-, & BF
ab
qui eft le rayon du cercle — -—, & l'équation du cercle
2abx
fera 2 — xx —yy. Si À B avoit été plus grand que
BC, le point F feroit tombé de Fautre côté, & l'équation
2abx
du cercle feroit = — xx = y.
Si
SE à v né
%
L2
D'ESTÉETENCES 469
” Si les trois objets forment un triangle ifofcele & 4 BC,
alors les trois grandeurs 4, à & c feront égales, & l'on aura,
en mettant a pour à & r, cette équation y} xx y—aax—04
— a ay.
Nous pourrions faire plufieurs obfervations fur ce Pro-
bleme, & en tirer beaucoup de Corollaires.
METHODE NOUVELLE
DE. TR O UV ER
PAR OER AND T EC R-" DU POLE.
Par M. GopDIn.
T A hauteur de l'Equateur, ou, ce qui revient au même,
L la hauteur du Pole fur lhorifon, lorfqu'on ne la veut
connoître qu'à une minute près, n’eft pas difficile à déter-
miner. Dés Voyageurs qui ne font que Voyageurs, avec
des inftruments médiocres peuvent aller jufqu'à ce degré de
précifion ; mais cela ne füfhit pas aux Aftronomes, & cet
arc qui {e rencontre à chaque pas dans les calculs aftrono-
miques, auxquels il fert très-fouvent de bafe, s’il n'étoit
connu qu'à une minute près, répandroit un faux général,
& fouvent des abfurdités dans les Théories. Cependant on
ignore encore fi l'on peut s’aflürer, ou plütôt fi l’on connoît
la hauteur du Pole d'un lieu à 20” près, d’un lieu même
dans lequel on a la commodité de faire une longue fuite
d'obfervations. M.': Caffini & Maraldi ont toüjours retenu
la hauteur du Pole à 'Obfervatoire Royal, de 48° 50° 10",
M. de la Hire l'a toüjours prife de 10" moindre.
+ Fixer la hauteur du Pole par les hauteurs méridiennes
du Soleil & des Etoiles fixes, ou par la plus grande & la
plus petite hauteur d’une Etoile toüjours apparente, c’eft,
ans le premier cas, fuppofer entr'autres chofes, la hauteux
Mem. 1734 . FFF
28 Juillet
1734
10 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
du Pole déja bien connuë, & dans les deux enfemble, une
Table exacte des refraétions, fans compter des irrégularités
dans quelques Etoiles fixes, & peut-être dans toutes, dont
on s’eft apperçû fans les avoir encore limitées. Si j'oblerve,
par exemple, la Polaire dans fes deux médiations au-deflus
& au-deffous du Pole ( ce que l'on doit regarder comme
une des meilleures maniéres de trouver la hauteur du Pole)
quelle Table de refraétions choifirai-je? elles différent toutes
entrelles. De plus, cette Etoile a des variations fmguliéres ;
car au lieu de s'approcher réguliérement du Pole, elle femble
quelquefois s’en éloigner, en forte qu’en divers temps, les
obfervations donnent des hauteurs de Pole différentes, &
cette différence va à plus d’une demi-minute. Que cela
vienne du mouvement annuel de la Terre, ou fimplement
d'une nutation de fon axe, ou de la variation des refractions
en différents temps, c'eft ce qu'on ne fçauroit encore déci-
der, & les obfervations faites jufqu'à préfent ne s'y accor-
dent pas : ce qu'il y a de certain, c'eft que vers l'Equinoxe
du Printemps, cette Etoile paroït plus bafle qu'elle ne devroit;
que vers l'Equinoxe d'Automne, elle paroït plus haute; &
qu'en général en diverfes années, fes hauteurs varient indé-
pendamment de fa diftance au Pole, comme je le détaillerai
dans un autre Mémoire.
Ces réfléxions m'ont fait chercher une méthode de trou-
ver la hauteur du Pole, qui fût exempte de ces incertitudes,
& fur-tout qui ne fuppofit pas les refractions. Je n’en ai
pas trouvé de cette nature qui fût directe, mais celle que
Je vais donner en approche, & elle donnera la hauteur du
Pole à s” près, dans les mêmes circonftances que j'employe.
En voici une idée générale, en ne fuppofant point les ré-
fraétions.
Je choifis une des Etoiles circompolaires qui, dans fa
plus grande hauteur méridienne, pate aflés près du Zénith,
& foit par-là exempte des réfraétions, telle eft à mon égard
Ja Luifante du côté de Perfée /æ, Bayeri) qui vient à 7°
environ du Zénith.
DE S!'S"'C'r EN Er 8, AT
FTAvyant placé un Quart-de-cercle garni d'une Lunette en
alhidade, dans le plan du cercle de 6 heures, le centre tourné
vers le Pole, j'abferve l'Etoile dans fes plus grandesdigreffions
apparentes du Pole, c'eft-à-dire, lorfqu’en parcourant fon
parallele, elle vient à rencontrer le cercle de 6 heures; ce
temps {e connoît aifément, foit par l'heure à peu-près, foit
parce qu'elle paroît alors décrire le fl horifontal de la Lunette,
devenu vertical par la fituation de l'Inftrument. Ces deux
obfervations dans les deux digreffions donnent fur le limbe
du Quart-de-cercle, un arc égal au double de 1a diftance
de l'Etoile au Pole, dont la moitié étant Gtée de Ia plus
grande hauteur méridienne de l'Etoile qui eft hors des ré-
fiäétions, puifqu’elle pale à 7’ près du Zénith, donnera fa
hauteur du Pole, fans avoir égard à l'effet des réfractions,
Dans un lieu dont la latitude feroit moindre que 45°,
il faudroit un arc plus grand qu'un Quart-de-cercle, & il
faut auffi que l'inftrument dont on fe fervira, foit au moins
du double de deyrés que le complément de la déclinaifon
de l'Etoile dont on fe fert : par exemple, on ne pourroit
pas faire ufage d’un Quart-de-cercle pour une Etoile qui
n'auroit que 40 degrés de déclinaifon, parce que fà diftance
au Pole étant de so degrés, fa double diftance, ou Farc
compris entre fes deux digreffions, qui eft celui que l’on
obferve, fera de 100 degrés.
Mais parce que l'Etoile eft fujette aux réfraétions dans fes
diverfes hauteurs fur l'horifon, l'arc entre fes deux digreffions
‘apparentes & mefuré fur l'inftrument, n’eft pas le véritable,
Dans ces deux fituations, l'Etoile fouffre de part & d’autre
deux réfractions égales qui élevant fuivant un vertical, di-
minuënt l'arc total entre les deux digreffions véritables, &
par conféquent la diftance de l'Etoile au Pole, en forte que
“par cette méthode, la hauteur du Pole viendra plus grande
-av’elle ne doit être.
"Si Z eft le Zénith, P le Pole, AEC le parallele de
TEtoïle, £P qui eft une portion du cercle FE 6 heures,
Fff ij
412 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
fera la véritable diftance de l'Etoile au Pole; mais l'Etoile.
étant en Æ, par exemple, dans fa plus grande digreflion,
elle fera vûë à caufe de la ré- |
fraction en un point Sdu ver-
tical ESZ, & de même dans
Vautre digreflion, & la moitié
de l'arc obfervé fera SO, diffé-
rent de ÆP. Voici de quelle
maniére j'employe cet arc ob-
{ervé SO à trouver l'arc ZP,
& par conféquent la hauteur
du Pole.
SO eftune portion degrand
cercle, puifqu'il eft formé par
le plan prolongé du Quart-de-
cercle dont on fe fert dans l'obfervation : de plus, il ef
perpendiculaire à Z P, parce que fes poles font nécefaire-
ment fur le cercle ZP, c'eft pourquoi le triangle ZSO eft
rectangle en ©. Si, dans l'inftant que l'Etoile eft obfervée
en S dans fa plus grande digreflion apparente, on prend fa
hauteur aufli apparente fur l’horifon, le complément de cette
hauteur fera ZS. On connoît donc dans ce triangle les deux
côtés ZS, OS, outre l'angle droit, c’eft pourquoi l'on trou-
vera l'angle SZ O.
Suppofant maintenant la réfraétion Æ£S d’une certaine
quantité, on aura Z £, & dans le triangle Z EP, rectangle
en ?, connoiffant deux angles & un côté, on trouvera ÆP,
diftance véritable de l'Etoile au Pole, qui, étant adjoutée
à Z À, complément de la hauteur méridienne de l'Etoile,
donnera Z P, complément de la hauteur du Pole.
La folution exacte de ce Probleme, ne dépend donc que
de là valeur £S de la réfraction, c'eft en la fuppofant de
différente grandeur que l’on parviendra à une folution fort
approchée; car fi, donnant à £S différentes valeurs, aflés
différentes entr'elles, & beaucoup plus qu'elles ne doivent
: DES SCcIïtENCE:Ss. PRES
l'être, par tout ce que nous connoiffons des réfraétions, la
hauteur du Pole vient à très-peu près la même, ia folution
du Probleme fera aufli bonne que fr elle étoit directe. En .
voici un exemple appliqué à des obfervations.
Les 13, 15, 58 & 19 Novembre 1733, qui eft un
temps propre pour lobfervation de la Luifante du côté de
Perfée dans les circonftances que j'ai dites, j'obfervai cette
Etoile dans fes plus grandes digreflions apparentes du
Pole, auxquelles elle arrive vers les 6 heures du foir & du
matin. L'arc total entre fes deux digreflions, fut trouvé
de 82° 3° 19", fa hauteur apparente fur Fhorifon alors
étoit de 34° 37° 28", & fa hauteur méridienne de 89°
5 3 ! Oo’. À
* Dans le triangle rectangle Z SO, on connoït SO de 41°
1/39", & le côté ZS, complément de la hauteur obfervée
eft auffi connu de $ 5° 22° 32", c'eft pourquoi on trouvera
Jangle OZS de 52° 54° 39°.
A OR S": 22! Gal
5 SOA TE r39 19817183113r
D 0 0 UC PURE TAN
S OZS. 52 54 39 990018392012
241589
150423 f9+
143262 \; sg18
Lfm
Le
7161
Suppofons maintenant qu'à la hauteur de 34° 37’ 28",
où étoit l'Etoile dans le temps de fa plus grande digreffion,
la réfraction l'ait élevée de 1” 25”, qui eft celle que donne
… la Table de M. Caffini, on aura ZE de $5° 23° 57".
Cela polé, dans le triangle rectangle Z EP, on connoît £Z,
- & l'angle £ZP que l'on vient de trouver, c’eft pourquoi:
on trouvera £P par l'analogie fuivante de 41°,2' 30",
Fff ïj
4t4 MEMOIRES DE L'AGADEMIE Royaze
A 90° o’ o"
S. EZP.$2 $4 39 + 990183392012
101682
S ZE. $$ 23 57 299154572648
S EP. 41 2 30+ 498173066342 (£
59685 \24184
6657
Or EP eft égal à PA, c'eft pourquoi fi de la hauteur
méridienne de l'Etoile. . . . . . . . . . 89: 530!
nn ioie LA aheser eo dun et: AE Mn » 4I 2 30+
Hi reftera pour a hauteur du Pole. 21248 59 30
Voilà le Problemeréfolu, en fuppofant la réfraétion de 125",
à la hauteur de 34° 37° 28"; mais fi la réfraction étoit
moindre ou plus grande, qu’elle fût, par exemple, de 1° 3 8",
telle que M. de la Hire la donne à cette hauteur, voyons
quelle différence il viendroit dans Îa hauteur du Pole; ou
plütôt prenons deux réfraétions, telles que 1" $" & 145”,
lune plus petite, & l'autre plus grande que celle que j'ai
prife de 20°.
En prenant la plus petite, on aura cette nouvelle analogie
où £P vient de 41° 2° 18" +
SE 90° o’ o”
S EZP,$2 54 39 4 990183920112
101703
S ZE 55 23 37 909154282087
S EP. 41 2 184 r98172775802
PK:
199878 £E:
193512 \24189
6366
En prenant la plus grande réfration, on aura celle-ci
où £P vient de 41° 2° 42°:
z°
DES SciENCESs. 4TS
ST. pb 70 ic ! |
à à
ne A CU e E ETTE
S ZE $$ 24 17 991548633147
S EP. 41 2 42% 98173356820
01530
$ 5290 (
48364
6926
Ce qui donne 24" de différence dans la hauteur du Pole
pour 40” de différence dans la réfraétion, c'eft-à-dire, 6"
pour 10” de réfraction, qui eft touté la différence qu'il
peut y avoir dans les Tables de Réfractions, conftruites par
différents Aftronomes pour le! même lieu, à des hauteurs
d'environ 40°. Cette incertitude fera moindre encore à
des hauteurs plus grandes, & j'ai amené le Probleme à un
point, fi je ne me trompe, affés important, qui eft de
trouver la hauteur du Pole par le moyen d’une Etoile fixe,
fans connoître fa déclinaifon, & en telle forte que l'erreur
qui viendra des réfraétions mal connuës, foit diminuée de
fa moitié. L
Pour juger de ce que Fon gagne à éviter de fuppofer la
déclinaifon de l'Etoile, il n'y a qu'à remarquer que celle
de l'Etoile « de Perfée que j'ai choifie, & qui eft une belle
Etoile de la feconde grandeur, eft très-différente dans nos
meilleurs Catalogues. M. Maraldi donne cette déclinaifon
pour le commencement de l'année 1734, de 49° 1° 40",
& M. Flamfteed pour le même temps, de PH EEE Are
la différence entr’eux, eft de 8’ 22”.
I ne me refte qu'une remarque à faire, qui eft que Ia
hauteur de l'Etoile, Jorfqu'elle eft dans fes plus grandes
digreffions, n’eft pas fujette à erreur, comme on le pourroit
croire d'abord, à caufe que dans cette fituation fa hauteur
change très-promptement, au lieu que fon élongation refte
CES
La
24
24182
416 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYyALE
long-temps la même, de forte qu'il paroïtroit fort aifé de
bien déterminer l'angle de fon élongation, mais fort difficile
au contraire, de faifir fa hauteur dans le véritable inftant
qu’elle eft dans le cercle de 6 heures; cependant, il eff fort
facile d'y parvenir, il n'y a qu'à faire attention que de part
& d'autre du Pole, cette hauteur doit être la même, & que
les deux foient prifes dans des temps juftement éloignés
de 12-heures. Aiïnfi, lorfque l'Etoile, par exemple, eft
dans la digreffion orientale, il faut prendre fes hauteurs,
au moins de minute en minute, & marquer l'heure, &
faire la même chofe lorfqw'elle fe trouve à fa digreffion
occidentale. On verra enfuite quelles font Îes hauteurs égales
qui font éloignées lune de Fautre de 12 heures, & ces
hauteurs feront les véritables qu'il faudra employer. Si, de
toutes celles qu’on a prifes, il ne s'en trouvoit aucunes qui
fuflent dans ce cas, on les y fera venir par le rapport des
changements de hauteurs aux intervalles des temps, & cela
ne peut produire aucune erreur fenfible.
MEMOIRE
Di Sy CE EN CES 417
MES UE OL ERI CE
‘ SUR
EME RICTTEY D'E L'ANTIMOINE,
SUR LE TARTRE E METIQUE,
ET SUR LE KERMÉES MINERAL.
Par M. GEOFFROYÿY.
’UsaGE du Tartre émétique, introduit avec fuccès 13 Novemb,
dans la Médecine, lorfqu'il eft néceflaire de faire vomir 1734
les malades : celui du Kermès minéral, employé fagement
par les grands Praticiens, pour cuire les humeurs, & les
difpofer à une évacuation falutaire, feroient l'un & l'autre
hors de tout foupçon (quand ils font ordonnés à propos )|
fi ces deux remedes étoient préparés avec toutes les précau-
tions néceflaires, & fi l'on fuivoit par-tout le meilleur & Ie
même procedé; mais il arrive fouvent qu'un Tartre émétique
donné à 3 grains, fait de grands effets, pendant qu'un autre
émétique, préparé différemment, ne fera rien à 6 ou 7 grains;
& cela dans des difpofitions à peu-près femblables de 1a
part des malades.
. ILen eft de même du Kermès minéral, l'un n’excite que
très-peu de naufées à la dofe de 3 & 4 grains, l'autre fait
vomir à un grain où un grain & demi, fans qu'on puifle
attribuer cette différence d'effet au plus ou moins d'acide
féjournant ou introduit dans leftomac.
Une telle variété méritoit qu’on en examinât Ia caufe,
puifque le Public y eft intéreffé.
. J'airaffemblédeplufieursendroits douzeT'artres émétiques,
& un pareil nombre de préparations de Kermès minéral,
La maniére dont je les ai analifés, la différence de leurs
produits, font en partie le fujet de ce Mémoire, & cette
différence donnera une indication certaine, ou un moyen,
Mom, 173 4: . Géeg
418 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLe
de connoître l’eflet qu'on doit attendre de tel ou tel Erné..
tique, de tel ou tel Kermès, en fuppofant dans les malades
des difpofitions à peu-près égales. Je propolerai à la fm
du Mémoire, un autre remede bien fimple, qui peut être
fubftitué au Kermès dans plufieurs cas, & fouvent avec un
fuccès moins douteux. -
L’Antimoine, dont on fçait que le Tartre émétique &
le Kermès font deux préparations, eft un minéral compolé
d’un peu de terre métallique facile à vitrifier, d'une portion
affés confidérable d'acide vitriolique, & du bitume ou huile
de la terre.
Cet acide, joint au bitume, forme le foufre brûlant;
foufre qui eft quelquefois f abondant dans l’Antimoine
minéral, que fouvent il s’en trouve qui s'enflamme comme
le foufre commun. C'’eft ce foufre uni à la terre métallique
de l’Antimoine, qui fait voir dans ce minéral (lorfqu'il na
fubi que les premiéres fontes fervant à le purifier) cette
multiplicité d'aiguilles dont il eft compolé ; mais c’eft à l'acide
vitriolique, uni au bitume, & formant le foufre commun,
que ces aiguilles font düës, & non à la matiére huileufe
feule. Car fi l'on fond du verre d’Antimoine avec un fimple
phlogiftique qui n'ait point cet acide, comme le charbon
de bois pulvérifé, on reffufcite ce verre en régule, qui n’eft
pas aiguillé comme l’Antimoine, mais rempli de facettes ou
de lames brillantes. Si au contraire, on employe le foufre
commun pour reflufciter de femblable verre d’Antimoine,
on trouve dans le creufet un Antimoine aiguillé, comme
YAntimoine ordinaire, parce qu'on a rendu à ce minéral
vitrifié tout ce qu'il avoit perdu pendant fa calcination,
c'eft-à-dire, fon acide vitriolique, & cette graïffe de la terre,
formant enfemble le foufre commun qui lui eft effentie
pour être Antimoine.
La preuve de l'exiftence d’une terre vitrifiable dans lAn-
timoine, eft fa facilité à fe vitrifier, lorfque par la calci-
nation on en a fait évaporer l'excédent de l'acide vitriolique
& du phlogiftique qui interrompoient la continuité ow
Rs OEM BIO EN ENTER
Tattouchement des particules intégrantes de cette terre
métallique.
Ainfi il réfulte de ce que je viens de dire, que cette terre
défunie ou divifée par beaucoup de foufre brülant, fait de
J'Antimoine.
Que la matiére inflammable étant enlevée en partie, en
forte qu'il n’en refte que ce qu'il en faut pour conferver à
l’'Antimoine une forme métallique, on a du régule.
Que fi on enleve prefque totalement cette matiére in-
flammable par une calcimation moderée, la terre métallique
de FAntimoine prend la forme du verre lorfqu'on la met
à un feu de fufion.
+ Qu'enfin, fr Fon poufle cette calcmation par degrés à
un feu extrême, on a une chaux défanimée, ou une terre
qui, quant à l'éméticité, n'a plus les proprietés ni les vertus
de l'Antimoine, de fon régule, ou de fon verre.
Il y a quelques Auteurs, du nombre defquels eft Kunckel,
qui fuppofent dans l’Antimoine un principe mercuriel con-
courant avec le foufre & la terre vitrifrable pour la formation
de ce minéral. L’Auteur que je cite, indique même énig-
matiquement, plufieurs voyes pour découvrir ce mercure :-
mais je n'ofe admettre ce principe mercuriel, jufqu’à ce que
pa quelque procedé hors de tout foupçon, je puifle me
convaincre de l'exiftence d’un mercure coulant dans Y An-
timoine. J'ai déja commencé, fur la foi de Kunckel qui
étoit un excellent Artifte, quelques-unes des opérations par
lefquelles on prétend obtenir, & mes expériences, fi elles -
réuffiffent, me fourniront de quoi donner un autre Mémoire
à la Compagnie.
Quant à préfent, je ne reconnois que trois principes fe-
condaires qui foient fenfibles dans FAntimoine, un acide
vitriolique femblable à l'efprit de foufre , une matiére ful-
phureufe, bitumineufe, huïleufe, ( il nimporte, pourvû
qu'avec l'acide vitriolique elle puifle former un foufre com-
mun;) enfin une terre métallique vitrifiable.
+ Lefoufrecommun n’eft point émétique, l'acide vitriolique, -
L
Gggi
20 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
Ra plûpart des liqueurs huïleufes avec lefquelles ïl pourroit.
produire du foufre, ne le font pas non plus. La chaux
défanimée de l Antimoine n’excite aucune naufée : cependant
de toutes ces matiéres combinées il fe forme un minéral;
& de ce mineral, l'art extrait un régule, un verre, & d'autres
préparations qui font violemment émétiques.
Sid'on fait digerer du verre d’Antimoine pulvérifé dans
du vinaigre blanc, jufqu'à ce que le vinaigre n’en tire plus de
teinture ; fi l'on refond la poudre jufqu'à la vitrifier, qu’on la
pulvérife de nouveau, qu'on la faffe digérer dans de nouveau
vinaigre blanc, & qu'on répéte cela plufieurs fois; enfin,
à la quatriéme ou cinquiéme vitrification, le verre fe trouvera
noir, n'aura prefque plus de tranfparence , & ne fera plus du
tout émétique, quoique les deux ou trois premiers le fuffené
confidérablement.
Tous les vinaigres précédents font émétiques à différents
dégrés : les premiers font un peu plus falés que les derniers,
qui femblent avoir un goût aftringent. Ils ont pris tous une
teinture rouge en digérant fur ces verres pulvérifés ; ( mais
fur toute matiére purement fulphureufe ils prendroient une
femblable teinture, & ne feroient pas pour cela émétiques; )
il faut donc que l'huileux du vinaigre ait extrait la teinture
d'un refte de matiére fulphureufe ou du phlogiftique con-
centrée dans le verre d'Antimoine, & que Facide du même
vinaigre ait corrodé ou diflout une portion de la partie ré-
guline du verre, ou fi l'on veut, de cette partie aifée à régu-
lifer. Or on fçait déja, & je vais faire voir que c’eft la partie
réguline de Antimoine qui conftituë fon éméticité; c’eft-
ä-dire, que cette éméticité eft réfidente dans un combiné
quelconque de foufre compofé de très-peu d'acide vitrio-
lique & d'une portion de matiére inflammable, unis à unes
terre vitrifrable. Si cette terre a peu d’interftices remplis par
le foufre, elle fera très-émétique, tel eft le verre d’Antimoine,
qui eft une des plus émétiques de toutes les préparations
de ce mineral. Si ces interftices font plus grands où plus
multipliés, comme ils le font dans le régule qui contient plus
D'E st $ c'1E Nic Es 421.
de foufre que le verre, elle fera un peu moins émétique :
enfin fi ces interftices font fi larges qu'il yait plus de foufre
groffier que de cette terre vitrifiable, il n’y aura plus d'émé-
ticité que par accident; comme dans l'Antimoine, qui ne fait
vomir qu'à l’aide de quelque acide.
. La principale raifon pourquoi l'Antimoine brut n’eft pas’
“émétique, c’eft que l'acide vitriolique y eft uni à un phlo-
giftique onctueux avec lequel il forme un foufre groflier &
bitumineux, qui lie fi bien les particules de la terre métallique,
qu'elles ne peuvent agir dans l'eftomac fans un fecours
étranger. Mais quand la plus grande partie de cet acide &
de ce phlogiftique bitumineux eft enlevée par le feu ou par
tout autre moyen; alors il ne refte dans le régule qu'un
foufre capable d'expanfion, & par conféquent en état d’en-
lever avec lui des particules de la terre métallique vitrifiable,
qui par leur roideur peuvent irriter le genre nerveux, &
exciter des contractions violentes; car je fuppofe que cette
irritation eff la premiére caufe du vomifiement.
. On m'objeétera peut-être que tout ce que je viens de dire
fur l'éméticité de l’Antimoine, étoit en partie connu; cela
peut être: mais je ne pouvois me difpenfer, par rapport à la
fuite de ce Mémoire, de faire voir que le phlogiftique ou
principe inflammable de ’Antimoine, n'eft émétique qu'au-
tant qu'après avoir été dégagé de fon acide vitriolique, il eft
uni à faterre vitrifable, c'eft-ä-dire, autant qu'il approche
de la forme du verre, ou au moins de celle du régule: qu'ainfi
plus le Tartre émétique & le Kermès contiendront de régule
aifé à reflufciter, plus ils feront émétiques. Je vais pafler à
des expériences. qui Je prouveront.
J'ai employé une once de chacun des Tartres émétiques
que j'ai raflemblés: je les ai broyés féparément avec pareil
poids ou un peu plus de flux noir, compolé de deux parties
: de Tartre rouge, & d’une partie de nitre calcinés enfemble:
jai mis ces mélanges dans différents creufets faits en cone
renverfé; je les ai tenus au feu de fonte, jufqu'à ce que les:
fels fondus fe fuffent affaifiés & paruffent comme une huile
Gggi
422 MEMOIRES DE L'ACABDEMIE ROYALE
tranquille au fond du creufet. J'ai laifié éteindre le feu &
refroidir les creufets : je les ai caflés, & j'ai trouvé le régule
reflufcité, raflemblé au fond du creufet.
Des plus foibles T'artres émétiques, j'ai eu par once depuis
30 grains jufqu'à un gros 18 grains de régule.
De ceux d’une éméticité moyenne, un gros & demi: &
des plus violents dans leurs effets, jufqu'à 2 gros ro grains?
Les fcories de ces effais qui étoient jaunes d'abord, font
devenuës vertes enfuite, puis elles ont noirci, & enfin elles
{ font miles en deliquium.
L'action des plus forts Tartres émétiques dépend donc de
la quantité du régule d'Antimoine que la crème de Tartre a
difloute; & plus les préparations antimoniales fur lefquelles
on fait bouillir la folution de la crème de "Tartre, approchent
de la forme de régule ou de verre, plus le Tartre émétique
eft violent, parce qu'alors l'acide végétal du Tartre agit plus
immédiatement & diflout davantage de la partie émétique
de lAntimoine.
Si au contraire on met cette folution de Tartre bouillir
avec l'Antimoine crud dont les parties régulines font enve+
loppées & défenduës par le foufre groflier, à peine cet acide
agira-t-il deflus.
J'ai fait broyer deux onces de crème de Tartre avec une:
once d’Antimoine qui avoit été déja porphirilé : j'ai fait
bouillir ce mélange dans une grande quantité d’eau pendant
18 heures: la liqueur ayant pris. une couleur jaunâtre & un.
goût ftiptique approchant du vitriolique, je l'ai filtrée chaude
par un double papier. La mafle reftée au fond du matras ré.
pandoit une odeur fulphureufe. Cette imprégnation étant,
évaporée, j'ai eu un criflal de Tarire qui à 2 grains na
donné que quelques foiblesnaufées. ”
J'ai pris une once de ce criftal de Tartre légérement em-
preint de l’'éméticité de l'Antimoine, & je l'ai fondu comme
les autres Tartres émétiques avec le flux noir, j'ai trouvé
dans le creufet refroidi & café beaucoup de fcories jaunes:
avec quelques petits grains épars de régule, mais fi menus:
LA . .
paAvañ nm Sin rt E nt CAES à (VERS
& en fr petite quantité, qu'ils n’avoient pû par leur poids
{ raflembler au fond du creulet.
Quoiqu'il foit évident par cette expérience que l'acide du
Tartre agit fur l'Antimoine, & qu'il corrode un peu de fa
partie réguline, cependant cette corrofion eft fi foible, qu'il
n'eft pas poffble de raflembler par la réduétion les particules
du régule enlevé par cet acide végétal : aufli eft-il certain
que, quelque fine que foit la poudre de l Antimoine, cha-
eune de ces petites parties refle toüjours enveloppée de fon
foufre grofier, & ce foufre la défend & oppole un enduit
à l'action de l'acide du Tartre.
Heft donc prouvé que pour qu'un acide végétal devienne
fufffamment émétique par fon féjour fur FAntimoine, il
faut que ce minéral foit délivré, le plus qu'il eft poffible, de
{on foufre groffier; qu'il foit réduit en un régule très-pur;
& que plus il approchera de Ja forme du verre, fans addition
d'aucune matiére étrangere qui en facilite la vitrification,
plus lacide du Tartre enlevera, avec le foufre, de ces parties
roïdes de la terre métallique que j'ai dit ci-devant être la
caufe du vomifiement. Ainfr tout Tartre émétique qui aura
été préparé avec le verre d'Antimoine & le foye d’Anti:
moine lavé, qui eft une efpece de vitrification, fera beau-
coup plus émétique qu'aucun autre.
J'ai fait voir ci-devant par la quantité de régule contenu
dans les différents émétiques dont j'ai fait la réduétion, qu'il
n’eft pas indifférent de fçavoir à quel degré ce remede eft
émétique, & qu'il peut arriver dans les campagnes de grands
accidents de ces ordonnances de routine qui prefcrivent 4,
15 & 6 grains d'émétique pour faire vomir un malade. Si
donc on jugeoit à propos de fuivre ma méthode pour con-
noître à quelle quantité un émétique quelconque doit faire
vomir, fans que le vomifflement foit fuivi d'accidents; voici
une table tirée du produit de mes réduétions. J'ai choifi les
deux extrêmes, c’eft-à-dire, le plus foible & le plus fort
émétique, & j'y ai adjoûté celui qui m'a toüjours paru con-
tenir la proportion la plus convenable de régule.. :
424 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
Un Tartre émetique dont on réduit 3 2 gr&ins de régulé
par once, en contient 4 grains par gros, & un dix-hui-
tiéme de grain par grain; par conféquent il peut être regardé
comme trop foible.
Celui qui fournit deux gros de régule par once, en con-
tient 18 grains par gros: c'eft un quart de grain par grain.
H eft violent, à moins qu'on ne le donne en très-petite
dofe. j
Enfin, celui qui rend un gros & demi de régule par once,
en contient 13 grains & demi par gros; c’eft trois feiziémes
de grain par grain. Cette proportion eft bonne, & je fçais
que ce dernier fait vomir fuffifamment à la dofe de deux
grains ou deux grains & demi; c'efl-à-dire, en introduifant
fix ou fept feiziémes de grain de régule dans l'eftomac.
Quoique je fixe ici la quantité de régule contenuëé dans
chaque grain d'émétique, relativement au produit total d’une
fimple réduétion par le flux noir, je n'en prétends pas con-
clurre que chaque grain de Tartre émétique non réduit, ne
contienne précifément que la dofe de régule ci-devant mar-
quée : je fçais qu'il en contient un peu davantage. Mais ce
fürplus étant dans les fcories de la réduétion, il faudroit les
difloudre dans de l'eau, & en précipiter la poudre commu-
nément nommée foufre de l'Antimoine, puis réduire cette
poudre par le flux noir, on en retireroit encore un peu de
régule. J’abandonne cette réduétion pour rendre mon opé-
ration fervant d'épreuve, plus aifée & moins longue.
Examen du Kermeès minéral.
Cette préparation, publiée par ordre du Roy en 1720, fe
‘fait par une ébullition de l’Antimoine dans de l'eau de pluye
animée par la liqueur du nitre fixé par les charbons : c'eft
Yalkaeft de Glauber : il fe précipite, après la filtration de la
liqueur encore chaude, une poudre qui bien édulcorée eft
le remede en queftion.
Le Kermes a été regardé pendant un temps comme un
foufre de l'Antimoine. Suivant cette idée, je l'ai examiné
d'abord
113 DÛEs Sv SCIE NC À S 423$
d'abord par la déflagration, afin de fçavoir s’il ne brüloit pas
différemment de l'Antimoine en poudre & du foufre doré
d'Antimoine.
J'ai fait rougir trois morceaux de porcelaine épaifle à un
même feu; j'ai fait tomber fur l'un 10 grains d'Antimoine
porphirilé; fur l'autre 10 grains de foufre doré d’Antimoine
de la quatriéme précipitation, parce que c’eft le plus fin ;
fur le troifiéme autant de Kermès bien choifi & haut en cou-
leur. Le Kermès donne une flamme plus bleuâtre que les
deux autres, il fe confume plus vite que le foufre doré de
'Antimoine, qui bouillonne en brülant comme l’Antimoine
même ; ces deux derniers donnant des vapeurs ou une fumée
beaucoup plus groffiére. L'odeur du Kermès dans cette ex-
périence étoit moins fulphureufe & moins piquante que celle
des deux autres. En continuant le feu, ces trois matiéres fe
font évaporées, & ayant ceflé de fumer, l’Antimoine a laifé fux
fa porcelaine une tache d’un brun rouge, ou couleur de café.
Le foufre doré a laïflé une matiére rougeâtre parfemée de
quelques points blancs. t
: Quant au Kermès, il n’a laifé qu’une terre blanche, rare,
fpongieufe, avec quelques petits points jaunes.
J'ai dit que j'avois choiïfi un Kermès haut en couleur,
parce qu'il faut faire remarquer que fi cette poudre rouge n’a
pas été fuffifamment édulcorée par de fréquentes lotions
d'eau, & que s’il y refte trop de fel alkali, elle perd fa cou-
leur à l'air, & fe couvre d’une fleur ou couche blanche. J'ai
même une mafle de Kermès de cette efpece qui eft devenu
tout blanc, & qui en blanchiflant a perdu prefque toute fon
odeur fulphureufe, ce qui fuppofe beaucoup de volatilité
dans la partie fulphureufe de cette poudre; car le foufre de:
cette préparation n’eft plus de la nature du foufre grofier de
YAntimoine, parce que l'acide vitriolique en a été dénaturé
par l'alkali du nitre fixé. Pour le démontrer, j'ai pris du
Kermès très-édulcoré, une partie; avec cette poudre j'ai
éteint dans un mortier de verre deux parties de mercure très-
pur, que j'avois reflufcité fans diflilation du fublimé corxofif
Mem, 1734 . Hhh
426 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE ROYALE
par la limaille de fer. Il s’eft formé de ce mêlange une poudre
noire ou æthiops, comme quand on éteint le mercure avec
Je foufre commun : cependant voici la différence. L'æthiops
fait par le foufre commun eft une préparation qui donne toù-
jours le cinabre artificiel par la fublimation. Si le Kermès eût
été un foufre de même nature, c'eft-à-dire, s’il avoit eu un
acide vitriolique libre d'agir, j'aurois eu de mon æthiops de
Kermès un cinabre d'Antimoine. Cependant après l'avoir
pouffé au feu dans une cornuë prefque jufqu'à la fondre,
le mercure a paflé fans diminution de poids dans le réci-
pient : il y a eu feulement à la partie du col de la cornuë
fortant immédiatement du fourneau, un petit cercle rouge,
mais qui n'étoit qu'une teinte prefque fans confiftance. J'ai
trouvé au fond de la cornuë le Kermès fondu en plufieurs
petites mafles détachées les unes des autres, d'une couleur
plus obfcure que le foye d’Antimoine; quelques-unes étoient
pleines de bulles d'air, & toutes étoient caflantes. Aucune
de ces mafles n'avoit ni les aiguilles de l'Antimoine, ni les
facettes du régule. Je crois que ce quia facilité cette fonte
du Kermès, quoiqu'imparfaite, ou qu'on ne peut regarder
comme une réduétion, c’eft la portion de fel alkali néceffai-
rement exiflante dans cette poudre, mais qui n'eft pas
fufhfante pour faire la revivification complette du régule,
Toutes les mafles dont je viens de parler, étoient hériflées de
petites aiguilles tranfparentes, roides & caffantes ; la voute
de la cornuë étoit enduite d’une pouffiére blanche très-fine,
parfemée en quelques endroits de petits tas de femblables
aiguilles, prefque toutes rangées en étoile à plufieurs rayes;
elles étoient plus apparentes près du col de la cornuë, où
elles s'étoient arrêtées fur un enduit de pouffiére jaunâtre.
Les différences de couleur de cette poufliére, & ces tas
d’aiguilles fublimées n’ont été aifées à obferver que lorfque
j'ai fait cette opération avec peu de matiére; car, quand
j'en ai employé une plus grande quantité, le feu en fondant
le Kermès, a fait élever une matiére beaucoup plus confufe
& plus brune à la voute de la cornuë.
DES SCT EN ER a 0
* Si donc on veut avoir du cinabre par le Kermès & le
mercure, il faut ou y adjoüter un acide vitriolique, ou
dégager celui qui a été faifi par l'alkali du nitre fixé, afin
qu'avec la partie inflammable du Kermes, il puifle agircomme
un foufre commun reproduit.
Premier exemple. J'ai pris une once de Kermès, j'ai verfé
deflus, en triturant, jufqu'à 1 6 gouttes d'huile de vitriol
blanche & non fulphureufe; après une heure de trituration
la poudre ne m'a point paru acide, enfuite j'y ai éteint petit
à petit 4 gros de mercure purifié ; j'ai fait triturer pendant
15 à 16 heures, car le mélange a été très-long temps
à prendre la couleur noire de l'æthiops ; enfin j'ai mis cét
æthiops dans une cornuë, il a monté dans le col, du foufre
jaune en petite quantité, enfuite une matiére fort noire &
bitumineufe, le mercure a paflé coulant dans le récipient ;
voyant qu'il ne montoit plus rien, j'ai augmenté le feu &
fondu le fonds de la cornuë, & le lendemain j'ai trouvé à
la voute & fur la furface de la mafñie reftée dans le fond,
affés confidérablement d’un fort beau cinabre d’Antimoine,
mais il a fallu un feu de fonte pour le fublimer.
Secondexemple. Poux dégager l'acide vitriolique du Kermès
embarrafé dans le {el alkali du nitre fixé, j'ai pris 3 parties
ou 9 gros de Kermès, & 4 parties ou 12 gros de fublimé
corrofif ( ce font les proportions de feu M: Lémery qui a
fi bien analyfé l'Antimoine), j'ai mis ce mêlange dans une
cornuë, & je l'ai pouflé au feu de reverbere; la diftillation
m'a fourni du beurre d'Antimoine en liqueur, premiére
preuve de fexiftance d’un régule dans le Kermès, puis du
mercure reflufcité, & enfin du cinabre véritable d’Anti-
moine; j'ai trouvé auffi au fond de la cornuë une matiére
femblable à de l'Antimoine fondu qui auroïit un peu de
fcories, la voute de la cornuë étoit tapifiée d’une farine ou.
fleurs blanches d’Antimoine. ;
If paroît par cette expérience que l'acide du fel marin qui
étoit dans le fublimé corrofif, a abandonné fon mercure
pour attaquer la partie réguline du Kermès, la difloudre, &
Hhh ij
428 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
en faire du beurre d’Antimoine: il paroît aufli que ce régule
réduit en beurre, a laïffé libre {a portion d'acide vitriolique
qui étoit uni avant Fopération avec l'alkali du nitre fixé,
avec la partie fulphureufe & avec la terre métallique de
l'Antimoine, dans le Kermès ( car ce font-là les quatre ma-
tiéres qui entrent dans le compolé de cette poudre ) ; &
qu'alors cette portion d'acide vitriolique dégagée en partie
de ces liens, a repris la proportion de phlogiftique qui lui
convenoit pour fe régénérer en foufre.commun, & s'élever
en cinabre, en s’uniflant au mercure. J'ai pris la mafle du
fond de la cornuë, & 'ayantréduite par le flux noir, j'ai eu
42 grains de régule de mes 9 gros de Kermès employés
dans cette expérience; c'eft-à-dire, un grain un tiers par
gros de Kermès. Comme j'ai répété douze fois la précédente
opération toute entiére fur douze Kermès différents, les pro-
duits dela réduétion ont varié; car j'ai trouvé deux Kermès
qui n'ont rendu par le flux rédudtif jufqu'à deux grains un
huitiéme de régule par gros de poudre mife à l'épreuve.
Auffi ce Kermès dont le régule eft fi aifé à reflufciter, eft-il
le plus émetique de tous. A ces produits de régule reflufcité,
il faut adjoûter la portion de régule qui a pafé dans le beurre
d’Antimoine, & celle qui eft reftée dans les fcories de fa
xéduétion. |
Pour prouver encore qu'il ny a point de foufre commun
dans le Kermès, où du moins que s'il en refte encore fous
la forme de foufre commun, il eft en trop petite quantité
pour s'élever en cinabre avec le mercure; j'ai mis dans une
cornuë uné demi-once de Kermès bien lavé fans aucune
addition , j'ai conduit le feu par degrés, & à une chaleur
aflés douce, il s’'eft formé au col de la cornuë un cercle jaune;
c'étoit un véritable foufre; mais il étoit en auffi petite quan-
tité que le cercle rouge fans confiftance de ma premiére ex-
périence du Kermès trituré avec le mercure.
J'ai donc fait voir que le Kermès & le mercure joints en-
femble ne peuvent donner du cinabre qu'à laide d’un acide
vitriolique, ou par le fecours du fublimé corrofif. Voyogs
Dh SUIS CURE NC CES 429
ce qu'il produira avec l'acide vitriolique concentré dans Îe
mercure.
J'ai mis dans une cornuë un gros de turbit minéral broyé
avec autant de Kermès, la cornuë ayant été placée au feu
de reverbere, il eft forti d'abord un peu de flegme infipide,
enfuite il s'eft dépolé ou attaché au col de la cornuë une
vapeur d'abord blanche, puis jaune, enfuite rouge-pâle, &
enfin rouge-foncé, comme du cinabre. Ce rouge a bruni
dans la partie du col la plus expofée au feu. Les parois
intérieures de la cornuë fe font enduites d’une couche jaune
& rouge, & fur cette couche fe font fublimées des houppes
ou flocons d'aiguilles pareïlles à celles dont j'ai déja parlé.
En ôtant le récipient, il eft forti une odeur fulphureufe
très-pénétrante. J'ai retiré du récipient $ 2 grains de mercure
reflufcité, & la cornuë ayant été coupée, j'ai trouvé au fond
une mafle divifée en plufieurs parties, toutes paroïffant mé-
talliques, quant à la couleur, mais fpongieufes & hérifées
de petites aiguilles blanches & brillantes.
Ainfi dans cette expérience l'acide vitriolique du turbit
aabandonné fon mercure, pour fe faifir ou attaquer le phlo-
giftique, l’alkali & la partie métallique du Kermès, une partie
de cet acide s'étant unie au phlogiftique, s’'eft régénérée em
foufre brülant, ce font les cercles jaunes du col & de la voute
de la cornuë ; car en ayant un peu détaché, je l'ai vû brüler
comme du foufre. De ce foufre régénéré, une partie s’eft
jointe à quelque portion de mercure, & s’eft fublimée en
cinabre, du moins le cercle rouge m'a paru en être de véri-
table: enfm le refte de cet acide s’eft concentré avec la partie
réguline, & c'eft lui qui a fait végéter toutes ces aiguilles
dont les maffes du fond de la cornuë paroïfloient hérifiées.
Le mème acide vitriolique du turbit trouve dans 1e mer-
cure précipité rouge de quoi fublimer une autre matiére qui
n'eft niun cinabre, ni un fublimé corrofif. Quoique l'expé-
rience que je vais lire femble ne pas appartenir à ce Mémoire,
non plus que celle qui la fuivra, j'ai cru cependant qu'elles
méritoient d'y avoir place.
Hhh üj
430 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
J'ai mis dans une cornuë un mélange d'un gros de turbit
minéral & d'un gros de précipité rouge, ces deux matiéres
ont donné d’abord un acide qui étoit nitreux à l’odeur & au
goût, enfuite il eft venu une odeur fulphureufe très-forte,
qui ne peut avoir fa fource que dans le phlogiftique du mer-
cure , ou dans celui de l'efprit de nitre, il n'importe.
Il a paffé dans le récipient un gros & 24 grains de mer-
cure, le refte s’eft fublimé au col de la cornuë en un fel
mercuriel blanc, qui n’eft pas un fublimé corrofif, mais un
turbit fublimé, puifqu’il ne fe diflout pas dans l'eau, & qu'il
y jaunit comme le turbit minéral.
Le turbit minéral mis feul dans une cornuë, ne m'a rendu
par gros que 3 1 grains de mercure coulant , encore a-t-il
fallu pouffer le feu jufqu'à fondre la cornuë, au fond de la-
quelle il eft refté une tache blanche qui avoit pénétré la fub-
flance du verre; & dans le col j'ai trouvé fublimé un peu de
foufre jaune régénéré apparemment avec le phlogiftique du
mercure & une matiére blanche compacte que l’eau ne diflout
ni ne change point de couleur, non plus que la tache du
fond de la cornuë. Ce fublimé blanc indifioluble eft, felon
Kunckel, le fel qui étoit dans l'huile de vitriol, & que le mer-
cure a eu la force d'élever; ne feroit-ce pas auffi ce qu’il ap-
pelle en plufieurs endroits le Jel des métaux ! cax felon le
même Auteur, ce fel eft dans l'huile de vitriol.
Le précipité rouge pouffé à grand feu, fe reffufcite de lui-
même fans addition, cela eft connu : il rend par gros depuis
65 jufqu'à 66 grains de mercure : il refte dans le fond de la
cornuë une terre grife rougeître, & il paroït dans le col trois
cercles, rouge, jaune & blanc.
Le même précipité étant diftillé à un gros avec poids égal
de Kermès bien lavé, il en fort une liqueur acide fulphureufe;
il paroït à la voute & au col de la cornuë une très-petite
teinte rouge, & il fe refufcite 6 $ grains de mercure.
Le mème précipité rouge ayant été diftillé avec l'Anti-
moine crud porphirifé au poids d’un gros de chacun, le mer-
cure s'eft reflufcité moins vite que dans les deux expériences
D'E S :SC1IENCHES,: 437
précédentes, parce que les fleurs qui s'élevoient de l'Anti-
timoine étant très-abondantes, les parois intérieures de a
cornuë en devenoient moins lifles, & par conféquent les
vapeurs mercurielles glifloient deflus plus difficilement. Ce-
pendant ayant raflemblé tout le mercure, j'en ai eu 66 grains
bon poids. Ainfi il eft évident par ces trois expériences, que
dans un gros de précipité rouge il n'y a que 6 à 7 grains.
d'acide du nitre.
Revenons au Kermès; j'ai fait voir que cette poudre qu'on
a pû regardercomme un foufre, eft la partie métallique même
de l'Antimoine, puifqu’on en peut retirer un beurre d’Anti-
moine & un régule, mais le foufre brûlant de l’Antimoine a
changé de nature. L’alkali du nitre fixé a formé avec lui un
hépar fulphuris qui fe trouve divifé & fufpendu dans la di-
queur pendant ébullition qui doit extraire le Kermès. On
{çait que l'hépar fulphuris a la vertu de difloudre tous les
métaux, même l'or, lorfqu'on les fond avec lui. II eft vrai que
dans la préparation du Kermès par ébullition, ce n’eft pas un
hépar fulphuris en fufion; cependant rien n'empêche que
fimplement diflout dans l'eau, il ne puifle attaquer la partie
métallique de FAntimoine, & cela eft fi vrai que fi lon
charge l'eau de pluye de trop de fel alkali, s’en précipite
un Kermès dont on réduit par le flux noir beaucoup plus
de régule que lorfqu’il a été préparé par une liqueur moins
âcre. Donc le Kermès n'eft autre chofe qu'un hépar fulphuris
chargé de la partie métallique de lAntimoine, mais cette
putie métallique y eft divifée en particules extrêmement
déliées; plus ces particules feront fines, moins le Kermès
fera émétique. Ainfi après qu'on l'a préparé, en fuivant le
procedé publié par ordre du Roï, qui eft le meilleur de tous,
fi on veut avoir un Kermès qui n’agifle que comme fondant,
” fans exciter de naufées, il faut en prendre un gros, le mettre
dans un matras aflés grand, verfer deflus 4 livres + d'eau,
& y difloudre 2 gros + de nitre fixé qui ait été auparavant
diflout, filtré, évaporé, & réduit en forme féche, pour le
dépurer d'un fédiment affés confidérable qu'il laifle fur le filtre,
32 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
enfin le faire bouillir, il fe précipitera une terre grife avec
la portion du régule ka plus groffiére; & en furvuidant la
liqueur, & la laiflant refroidir, on aura un Kermès très-fin,
très-rouge, beaucoup plus für que celui de la premiére pré-
paration, quand on ne veut pas qu'il fafle vomir, car ce
Kermès corrigé ou rectifié ne peut jamais devenir émétique
que par accident. Il eft vrai que par cette rectification on
en perd près de fa moitié.
Quant au Kermès non-rectifié, comme il arrive fouvent
qu'on en trouve qui n'eft pas préparé avec toutes les précau-
tions néceffaires, pour que la partie réguline y foit fuffifam-
ment divifée & atténuée, je crois qu’on peut en toute füreté,
lui fubftituer l'Antimoine lui-même, préparé comme je vais
le dire. j
I faut prendre de f Antimoine de Hongrie en petits pains,
le choifir en belles aiguilles brillantes, le pulvérifer & le
tamifer, puis le faire broyer avec de l'eau fur un porphire,
jufqu'à ce qu'il ne craquette plus fous la dent ; enfuite on
le met dans une jatte pleine d’eau, on brouille l’eau avec
une fpatule de bois, & après avoir laiflé dépofer la poudre
la plus groffiére pendant 12 ou 1 $ fecondes, on furvuide
l'eau par inclination, en la verfant fur un ou plufieurs filtres,
on prend Ja poudre fubtile qui eft reftée fur ces filtres, &
on Îa fait fécher dans une étuve; quand elle eft bien féche,
on la broye de nouveau fur le porphire, en adjoûtant un
ros de fucre candi en poudre bien féche, fur une once
de poudre d’Antimoine, & l'on continuë de broyer jufqu’à
ce qu'en applatiflant un peu de a poudre avec un couteau,
on n'y apperçoive au grand jour aucun brillant, alors elle
eft préparée pour l'ufage.
H y a déja long-témps qu'on a vanté l'Antimoine en
poudre comme un excellent remede contre les maladies du
poumon, & comme un bon fondant dans l'afthme, & dans
plufieurs autres maladies.
En 1674, Kunckel reflentant des douleurs très-aiguës
dans le bras droit, confulta Sennert Médecin de Wirtemberg,
fils
C2
<
DESTBICTrTENCES
fils du fameux Sennert, qui lui confeilla l’ufage de lAnti-
moine, il en prit pendant un mois, & fut guéri.
En 1679, le même Kunckel eut encore recours à l'An
timoine porphirifé, pour de vives douleurs de goutte dans
les mains & dans les pieds. Il en fit faire des tablettes avec
e fucre rofat, & fut guéri. Ces tablettes antimoniales font
encore connuës dans quelques villes d'Allemagne, fous le
nom de Tablettes de Kunckel.
Si mon témoignage peut être ici de quelque poids, j'ofe
affürer que l'ufage de ce minéral en poudre fubtile, eft un
remede fouverain pour les enfans rachitiques ou noués, &
pour tous ceux qui ont des glandes obftruées. Il réuffit
aflés bien dans les enfants tourmentés par les vers, & j'ai
vû des femmes ayant des fleurs blanches, qui, après les
remedes généraux, ont été bien guéries par lufage de cette
poudre; mais on ne doit la donner dans le commencement
qu'en fort petite dofe, comme d’un grain, & quoique
TAntimoine ne foit point émétique par lui-même, ül eft
bon cependant de joindre à fa poudre 3 ou 4 parties de
uelque alkali, comme des yeux d'Ecrevifle ou autre. On
augmente les dofes par degrés, & lon peut aller ainfi juf-
qu'à 8 ou 10 grains par jour. Si l'on augmentoit les dofes
de ce minéral avec trop de précipitation, il exciteroit des
mouvements dans les entrailles, purgeroit ou donneroit des
naufées. If faut avoir auffi la précaution de deffendre aux
malades, lufage du vin, à moins qu'il ne foit très-mur, du
vinaigre, & de tout autre acide, même des potages où l’on
auroit mis des herbes acides, comme l'ofeille, &c.
I réfulte de tout ce que j'ai 1û dans ce Mémoire,
1.° Que l’'éméticité de l’Antimoine eft dans fa terre
métallique vitrifiable ( ce que les Chimiftes fçavoient déja).
Que le Tartre émétique ne fait vomir que parce qu'il eft
chargé de beaucoup de particules groffiéres de cette terre:
Qu'en le réduifant par le flux noir, on peut fçavoir à quel
degré il eft émétique.
2.° Que le Kermès eft un hépar fulphuris qui a diffout,
Mem. 173 4 s'Tii
434 MEMOIRES DEL'ACADEMIE ROYALE
mais plus fubtilement que ne fait l'acide du Tartre, me
portion de cette terre métallique : Qu'on peut rectifier Le
Kermès pour le rendre fimplement fondant & diaphoretique;
Enfin qu'on peut fubflituer au Kermès, une poudre fubtile
de l’Antimoine.
DE LA PERPENDICULAIRE ,.
A LA MERIDIENNE DE PARIS,
Prolongée vers l'Orient.
Pa M CAssiIn1
N° US avons rendu compte à l'Affemblée publique
d’après la Saint Martin de l’année derniére, des opéra-
tions que nousavions faites pour prolonger la Perpendiculaire
à la Méridienne de Paris du côté de l'Occident, & des avan-
tages qui en doivent réfulter, non-feulement pour la per-
fection de la Carte de la France, mais auf pour la navigation
en général, où il eft abfolument néceffaire de connoïtre le
rapport des degrés de longitude à ceux de latitude,
ÏL s’agifloit enfuite de prolonger cette même Perpendieu-
laire du côté de l'Orient jufqu’aux bords du Rhin, pouravoir
à l'égard de Paris, toute l'étenduë de la France de FOrient
vers l'Occident, de la même maniére que l'on avoit déja
déterminé par la Méridienne fa longueur du Nord vers le
Midi, depuis Dunkerque jufqu'aux Pyrenées. |
Cet ouvrage dont M. le Controlleur général avoit formé
le projet l’année derniére, conformement aux Mémoires qui
m'avoient été communiqués par M. Malet de l’Académie
Françoife, & dont l'exécution, fuivant ce qui avoit été .pra-
tiqué jufqu'alors, fembloit être réfervée pour les temps de
paix, n'a p être retardé par les guerres qui font furvenuës
depuis qu’on Favoit commencé, parce qu'il fuffit qu'une en-
treprife {oit agréable au Roy & utile à d'Etat, pour que le
DE S'S C8 EN CES Mt D
Miniflere concourre unanimement à la faire exécuter, fans
que d'autres affaires qui paroiflent plus preflantes puiflent
empêcher d'y donner toute l'attention qu'elle mérite,
Ainfi je reçûüs ordre du Roy de me difpofer à ce voyage
pour le printemps de cette année avec Mrs Maraldi, Abbé
de laGrive, Chevalier, le Roy, & deux dé mes fils.
Nous partimes de Paris le dernier du mois de May de cette
année. Comme M. Picard avoit dans fa mefure de la Terre,
déterminé du côté de lOrient deux bafes, l'une de Brie-
Comte-Robert à la Tour de Montjay, & Fautre de cette
Tour à Dammartin; nous jugeâmes devoir les employer tou-
tes les deux pour former nos triangles, afin que f1 les objets
nous manquoient d’un côté, nous puflions continuer de l’autre
fans aucune interruption, & fans être obligés de revenir fur
hos pas, comme il nous étoit arrivé l'année derniére aux envi-
rons de Verneuil. I devoit encore en réfulter deux avantages
confidérables; le premier de comprendre par ce moyen & dé-
terminer une plus grande étendué de pays. Le fecond, de véri-
fier lés mefures obiervées fur une bafe, par celles qui auroient
été déterminées fur l'autre, lorfqu'on viendroit à fe réunir,
Nos premiéres obfervations furent à Brie-Comte-Robeït,
qui eft le terme le plus méridional des deux bafes que nous
voulions employer : nous allâmes de-là à la tour de Montjay,
qui eft environnée par des ruines d'anciens bâtiments qui
émpèchent d’obférver au rés-de-chauffée. IL étoit donc à
fouhaiter de pouvoir monter fur cette tour, non-feulement
“pour y déterminer le troifiéme angle de plufieurs triangles qui
devoient s’y réunir, mais auffi parce que M. Picard n’avoit
pas marqué l'endroit où il y avoit fait élever un fignal en
forme d’une piéce de bois grofhe de paille, pour s'y diriger;
“ce qui laifloit quelque incertitude fur fa diftance précife au
“élocher de Brie-Comte-Robert. I ne refte plus préfentement
‘qu'environ la moitié de cette tour en forme de croiffant,
ê elle étoit dès l'année 1 669, en fr mauvais état, que M.
Picard ne jugea pas à propos que l'on s’exposât une feconde
fois au danger qu'il y avoit d'y monter. ;
iii
6 MEMOIRES DE L'ACADEMIE* ROYALE
Ces difficultés n’empêchérent pas plufieurs de nos M.rs
d'y faire leurs obfervations fur fon fommet, & même à deux
reprifes différentes, pour déterminer la pofition de divers
objets que l'on n’avoit pas apperçüs la premiére fois. Nous
continuâmes enfuite nos obfervations jufqu'à Meauxoù nous
commençâmes à nous partager pour former des triangles, les
uns vers le Midi, à l'égard de la Perpendiculaire, & les autres
vers le Nord.
On alla pour cet effet à Dammartin dont il étoit néceffaire
de connoître la diftance exacte à la tour de Montjay, qui étoit
la feconde bafe que nous devions employer. M. Picard y
avoit fait fes obfervations dans le pavillon ovale du Château
de cette ville. Mais il avoit reconnu par la fuite que le milieu
dé ce pavillon étoit difficile à diftinguer, lorfqu'on le regar-
doit de certains endroits, ce qui lui fit avouer qu'il avoit eu
raifon de tenir pour fufpeéts les triangles qui y aboutifient.
Pour éviter de pareils inconvénients, nous primes le parti
de faire nos obfervations dans le clocher de la Collégiale de
Dammartin, qui domine fur le Château , & fe voit de tous
les environs à une grande diflance, fans qu'on puifle s'y mé-
prendre.
C'eft fur cette nouvelle bafe du centre de fa tour de Mont-
jay au clocher de Dammartin, que nous commençâmes à
former nos triangles du côté du Nord. ;
Le pays paroifloit plus découvert que du côté du Midi où
fe trouvoit la forêt de Crefly qui couvroit une grande partie
de l’horifon ; cependant après y avoir formé quelques trian-
gles, ne s'étant plus trouvé d'objets remarquables vers le
Nord, nous fümes obligés de nous réunir à ceux que l’on
avoit prolongés du côté du Midi jufqu'au clocher de Doue à
la diftance de Paris de 3 131 5 toiles.
Le premier triangle que lon forma enfüuite, nous donna
deux bafes fur lefquelles nous continuâmes nos opérations, de
la mème maniére que nous les avions commencées, les unes
du côté du Midi, & les autres vers le Nord jufqu’aux confins
de la Brie avec la Champagne, où nous nous réunimes encore
une feconde fois.
DE sn rS CN EN ecsioma A3.
* Ce fut à où nous commençâmes à rencontrer des bois
qui s'étendoient du Midi vers le Nord, & nous couvroient
divers objets remarquables aux environs de la Perpendicu-
lire, tels que la tour du Mont- Aimé qui fe voit de divers
endroits de la Champagne à une très-grande diftance.
Après avoir donc fait diverfes tentatives inutiles fur les
clochers des environs qui paroifloient les plus éminents, nous
primes le parti d'aller dans ces bois chercher quelques arbres
du fommet defquels on püt découvrir le clocher de Cham-
paubert qui paroifloit le mieux difpofé, & la tour du Mont-
Aimé, & ayant choifi celui qui fe trouvoit le plus près de
la direction de ces deux objets, on fit placer un fignal en
forme de drapeau blanc qui fut obfervé en même temps de
Champaubert, Mont-Aimé & du clocher d’Allemant, &
qui nous donna la diftance entre ces objets avec à peu près la
même précifion que fi l'on avoit pü les obferver immédiate-
ment les uns des autres.
Nous étions alors à la diftance de Paris d'environ 60 mille
toifes, & comme Îe pays y étoit découvert, nous y pliçämes
un poteau fur la Perpendiculaire par la méthode qui avoit
déja été pratiquée en pareille occafion, en mettant un fignal
dans la direétion commune de endroit où l'on avoit calculé
qu'il devoit fe trouver fur cette Perpendiculaire. Ce lieu s’eft
rencontré un peu au-delà du village d'Onifeux à la diftance
de 3 3 34 toiles de la tour du Mont-Aimé.
Nous formâmes enfuite dans les plaines de Champagne
divers triangles d’une affés grande étenduë, qui fe vérifioient
lun l'autre, & nous trouvàmes encore le moyen de placer
une pyramide fur la Perpendiculaire à la diftance de 80 mille
toiles, par une méthode un peu différente de la premiére ;
car comme les objets que l'on découvroit des environs, tels
que Chälons, Nôtre-Dame de lEpine & l'arbre du Mont
de la Fourche, étoient à une trop grande diftance, pour qu'on
pütappercevoir du lieu où devoit être la pyramide, les diffé-
rents fignaux que l'on auroit dû faire de ces divers endroits
pour fe mettre dans la direction requife, on eut recours à la
Tii üj
8 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaALeE
méthode de déterminer la fituation d’un lieu mconnu, er
obfervant de ce lieu les angles de pofition entre trois objets
dont la diftance entreux eft connuë. Ayant ainfi établi la
pofition de deux lieux près la Perpendiculaire, il fut enfuite
fort aifé de déterminer le point qui étoit à la diftance cher:
chée de 80 mille toifes, qui fe trouva à l'Occident de la
riviére de Marne entre Châlons & Vitry-le-François, près
du chemin qui conduit de Cheppe à Vefigneux.
Nous continuâmes enfuite nos opérations jufqu’aux fron-
tiéres de la Lorraine, qui fe trouvent un peu en-deçà de 100
mille toifes mefurées fur la Perpendiculaire, & nous arrivä-
mes à Bar-le-Duc, d'où ayant informé Madame la Ducheffe
Regente du fujet de notre commiffion, Son Alteffe Royale
donna ordre à fes Officiers de nous y laïfler vaquer libre-
ment dans fes Etats, ce qu’elle renouvella enfuite par des
ordres plus précis, lorfqu'elle eût reçü des lettres que M. le
Garde des Sceaux lui en écrivit de la part du Roy.
Ce fut vers ces endroits que le pays commença à être
prefqu’entiérement dépourvû d'objets, ce qui nous obligea
de placer divers fignaux dans les lieux les plus éminents,
pour continuer nos triangles.
Nous parvinmes ainfi jufqu’à la Meufe, au bord de laquelle
il y a plufieurs chaînes de montagnes couvertes de bois dans
une étenduë de 7 à 8 lieuës du Nord au Sud, fur 2 à 3 de
largeur. Nous fûmes donc obligés de parcourir ces bois en
divers fens, faifant monter fur les arbres les plus élevés pour
découvrir fi l’on pouvoit appercevoir les objets à l'entour,
Enfin, après plufieurs jours de recherche, nous en trouvimes
un placé fur une petite butte, du fommet duquel un de nos
Meffieurs découvrit avec une Lunette du côté de l'Occident,
la butte d'Ifoncourt qui étoit un de nos points déja déter-
minés, & du côté de l'Orient divers objets propres à con-
tinuer nos triangles. Mais il lui fut impoffible d'appercevoir
un fignal que l’on avoit élevé fur la butte de Sorbé vers l'ex-
trémité méridionale de ces bois, ce qui paroifloit néceflairé
pour lier nos triangles. ;
DES SCIENCES. 439
. FH y avoit à la diftance d'environ $ oo toifes de cet arbre,
une ancienne Chapelle du Château de Trognon que l'on avoit
vûüë du fignal de Sorbé, & d'où lon appercevoit du côté
de l'Orient les mêmes objets que du fommet de l'arbre; mais
on ne pouvoit point découvrir de-là la butte d’Ifoncourt,
ce qui formoit la même difficulté pour da continuation des
triangles, qui demandent que d'un objet en avant, on en
puifle reconnoître deux dont la pofition eft déja déterminée,
Dans ces circonftances, nous examinâmes la fituation du
terrein, & nous reconnümes qu'entre notre arbre qui étoit
prefqu'à l'extrémité occidentale des bois, & la Chapelle, il y
avoit un terrein uni fur lequel on pouxroit mefurer une bafe
d’une dongueur fufhfante pour déterminer exaétement 1a
diftance de l'arbre à la Chapelle. Nous fimes donc élever
deux fignaux , un fur le fommet de arbre, & autre fur les
ruines dela Chapelle, afin d’avoir des points précis auxquels
on pût { diriger; & ayant mefuré par deux fois une bafe de
118toifes, &mis des piquets à fes extrémités, nous obfer-
vâmes de-là avec un Quart-de-cercle les angles entre ces
fignaux, par le moyen defquels on calcula leur diftance pré-
cife ; ce qui joint à la direction du fignal de Yarbre à l'égard
de celui de Sorbé obfervé de la Chapelle, nous donna 1x
diftance de cette Chapelle au fignal de Sorbé, avec une pré-
cifion à peu près de même que fi on avoit vû de-là la butte
d'Ifoncourt, ou du fommet de l'arbre 1e fignal de Sorbé,
puifqu'il eft aifé de faire voir qu'il ne peut pas y avoir eu
fur cette diftance qui eft de 1 $03 6 toifes, une erreur de plus
d'un pied, qui doit par conféquent être négligée.
Cette détermination étoit même préférable à celle que
Yonauroit eué, fi l'on avoit vü du fommet de l'arbre le fignal
de Sorbé, parce que n'étant pas poffible d'y obferver off
n'auroit pû déterminer que deux angles de chaeun des trois
triangles qui y aboutiflent; au lieu que par la méthode que
nous avons pratiquée, il n’y a eu à la Chapelle de Trognon
qu'un feul angle de conclu, & tous les autres ont été obfervés,
de même que ceux de tous les triangles que l’on avoit formés
430 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royaze
juiqu'alors, ce qui en rend la mefure beaucoup plus précife.
Nous allâmes du Château de Trognon au moulin du vil-
lage de Brulé près de Toul, qui eft dans une belle expoft-
tion. On voyoit de-là les montagnes des Vofges qui féparent
Ja Lorraine d'avec l’Alface, entre lefquelles les plus apparentes
font celles de Thaun qui fe reconnoiflent avec évidence, à
caufe qu’auprès de la plus élevée nommée X grand Thaun où
Donon, y en a une autre plus baffe qui fe termine en pointe.
Nous commençämes dès-lors à déterminer leur pofition
à l'égard des objets aux environs; & comme nous prévimes
que ces montagnes pourroient bien changer de figure, &
former différents afpe@s , fuivant les différents endroits d’où
on les obferveroit, nous envoyâmes pofer un fignal fur le
lieu le plus éminent, afin d’avoir un point fixe auquel on
pôt toüjours fe diriger fans craindre de s’y méprendre.
Nous continuâmes enfuite nos opérations par le moyen de
divers fignaux, jufqu’à Vic qui eft une ville de la dépendance
du Roy, enclavée dans la Lorraine. Nous étions alors à la di-
flance de près de 1 60 mille toiles de Paris, & ayant reconnu
que le terrein où devoit fe rencontrer la Perpendiculaire à
cette diflance, étoit dans la demi-lieuë qui a été cédée au
Roy de part & d’autre du grand chemin de Mets à Strafbourg,
nous profitämes de cettefituation pour y élever une pyramide
de pierre de taille furmontée d’une fleur de lis, & laifier au
milieu des Etats de la Lorraine un monument durable de
ouvrage que nous y avions executé par ordre du Roy. Nous
employâmes pour cet effet une méthode encore un peu diffé-
rente de la premiére, en mefurant fur le terrein une bafe de
186 toiles pour fuppléer au défaut d'un objet dont il auroit
été néceffaire de connoître la fituation, pour déterminer de-
f la direction du lieu où devoit être cette pyramide.
Nous allämes de Vic à Morhange où nous trouvâmes
l'horifon couvert de bois du côté où il auroit été néceffaire
de découvrir quelques objets pour continuer nos triangles.
Onauroit pù pratiquer une méthode femblable à celle qui
avoit réufli en pareilles occafions, qui étoit de pofer des
G fignaux
EE
D E S,S Ch1'E N CE S. 441
À fignaux fur les arbres les plus élevés de ces bois. Mais fur ce
que les habitans nous aflürérent que plus nous avancerions,
plus nous trouverions de bois à traverfer; nous primes le parti
d'aller faire nos obfervations fur la montagne de Thaun, après
avoir été reconnoître une tour que l’on avoit apperçüë des
fignaux de Delme & de Vic, & que nous jugeämes être près
de Phalfbourg. Cette tour fe trouva être la plus éminente
des trois que l'on appelle d Haut-Bar, près de Saverne, &
d'où l’on découvre Strafbourg & divers objets tant de l’Alface,
que dela Lorraine,
Avant que d'y faire nos obfervations, nous jugeâmes à
propos d'aller fur la montagne de'Thaun, & nous partimes
de Phalfbourg pour nous y rendre. Quoique cette montagne
n’en füt éloignée que de 1 $ à 1 6 mille toifes, nous employä-
mes un jour & demi à y arriver par des chemins ou plütôt
des fentiers au travers des bois prefqu'impraticables, & con-
pus feulement par des chafieurs qui en font les feuls guides.
- Nous parvinmes cependant, quoiqu'avec beaucoup de .
peine, à y faire tranfporter notre plus grand Quart-de-cercle,
parce qu'il étoit d'une grande importance d'apporter toute
la précifion poffible dans les obfervations que nous projet-
tions d'y faire. Nous ne pûmes d’abord reconnoïître du fom-
met de cette montagne, aucun des objets d’où nous Favions
apperçüë, ce qui nous fit prendre le parti d'y obferver le
foleil à fon pañlage par le Méridien, pour déterminer le point
du Midi fur Fhorifon, & nous diriger par ce moyen aux
objets dont la pofition étoit connuë par rapport au Méridien;
mais il nous fut impoffible ce jour-là d'en appercevoir aucun.
Nous primes fur cela la réfolution d'envoyer faire des feux
aux objets qu'il étoit néceflaire de diftinguer, de même qu'on
lavoit pratiqué autrefois dans la mefure de la terre, quoiqu'à
des diftances beaucoup moins grandes; & pouren retarder
le moins qu’il fût poffible l'exécution, nous fimes partir dès
le lendemain matin deux perfonnes en pofte, l'un pour le
moulin de Brulé, & l'autre pour le fignal de Delme, avec
ordre d'y faire des feux, dans le premier de ces endroits
Mem, 1734 +. KKK
442 MEMOIRES DE L'AÂCADEMIE ROYALE
pendant trois jours confécutifs, & dans le fecond pendant
quatre jours, afin de pouvoir les appercevoir des lieux où
nous jugions devoir faire nos obiervations,
Nous retournâmes le lendemain fur {a montagne par un
temps beaucoup plus ferein que le jour précédent, & nous
eùmes la fatisfaétion d'y voir aflés diftinétement le moulin
dé Brulé & le fignai de Delme. Le premier de ces objets
étoit à la diftance de $ 1300 toifes qui excede le quart de
celle de Strafbourg à Paris, & il parut un peu avant le cou-
cher du Soleil comme un fil très-délié.
H occupoit à peine $ fecondes dans la Lunette, quoique
fon diametre extérieur qui avoit été meluré de 20 pieds, eût
dû paroître à cette diftance au moins de 13 fecondes; mais
tel eft l'effet des objets qui ne font point éclairés, lefquels
vôs de loin, paroiffent plus petits qu'ils ne le devroient être,
tout au contraire des objets lumineux dont Île diametre ap-
parent paroït plus grand, comme on le verra dans la fuite.
Le fecond objet qui étoit formé par deux arbres qui fe
touchoient & avoient chacun 7 à 8 pieds de diametre, n'étoit
qu'à la diftance de 37 500 toifes, & on avoit plus de peine
à le diftinguer. A l'égard des autres objets d'où l'on avoit
apperçû cette montagñe, comme ils étoient moins élevés
e les précédents, il fut impoffible de les reconnoître, quoi-
qu'ils en fuffent plus proches, parce qu'ils étoient confondus
avec le terrein.
Nous obférvâmes ce jour-là le Soleil à fon coucher lorf-
qu'il touchoit l’horifon, & ayant déterminé en cet endroit
Fabaiflement de l'horifon qui étoit de 44’ 40", nous calcu-
lâmes fon amplitude occidentale & l'angle que le point de
Oueft devoit faire avec le moulin de Brulé que nous trou-
vâmes à peu près de même que par la fuite des triangles,
ce qui étoit une preuve que la Perpendiculaire à la Méri-
dienne que nous avions prolongée jufques-là, ne s’étoit pas
écartée fenfiblement de fa direction qu’elle devoit avoir.
Nous retournämes encore fur la même montagne le troi-
fiéme jour, qui étoit celui où les feux devoient commencer,
D'E 5/18 C1 æ NN CES 443
dans le deflein d'y pañler la nuit pour les obferver; car il
étoit très-eflentiel pour la précifion de nos opérations, de
reconnoître avec une entiére évidence fi c’étoïent les mêmes
objets que ceux que nous avions apperçüs le jour précédent.
Nous déterminämes en attendant, les angles de pofition en-
treun grand nombred’objets, d'un côté dans la Lorraine, &
de l'autre dans l'Alface, où l'on voyoit Strafbourg & plu-
fieurs villes ou villages jufqu’aux montagnes Noires qui font
au-delà du Rhin; & pour n'avoir rien qui nous cachit lho-
rifon, nous fimes abbattre tous les arbres qui nous en empé-
choient la découverte.
On obferva par ce moyen la pofition d’un fignal en forme
de drapeau blanc que quelques-uns de nos Meflieurs étoient
allé faire placer fur la montagne de Nole, que l’on nous dit
être à quatre lieuës de-là, & de laquelle on nous aflüra que
lon voyoit une partie de la Lorraine & de lAlface : car
comme il nous fut impoffible de découvrir du lieu où nous
étions, la tour du Haut-Bar qui étoit cachée par plufieurs
chaînes de montagnes , il nous paroifloit néceffaire de dé-
terminer la fituation de quelqu'autre objet pour continuer
nos triangles, au cas qu'on ne püt pas trouver quelqu'ex-
pédient pour nous lier avec cette tour.
Nous ne laïflämes pas de remarquer dans la direction où
elle devoit fe trouver, un autre château fort éloigné qui
dominoït au-deflus des montagnes qui nous la cachoïient ,
que nous jugeâmes pouvoir fervir à notre deffein, & dont
nous déterminämes pour cet effet l'angle de pofition à l'é-
gard de Strafbourg. Nous apperçümes encore ce jour-là
vers le coucher du Soleil aflés diftinétement, le moulin de
Brulé de même que le fignal de Delme, & y ayant dirigé
les Lunettes de deux de nos Quarts-de-cercle, nous attendi-
mes la nuit pour obferver les feux que l'on y devoit faire.
En effet, une heure après le coucher du Soleil, nous com-
mençämes à appercevoir celui de Delme, & quelques mi-
nutes après celui de Brulé, que nous eûmes la fatisfaétion de
trouver aflés exaétement au centre de la Lunette, faifant avec
Kkk
444 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE
celui de Delme le même angle que nous avions déterminé
pendant le jour.
Is paroifloient à la vüë fimple à peu-près de la grandeur
de Mars, lorfque cette Planete eft en oppolition avec le Soleil
où fon diametre apparent eft d'environ 4o fecondes, mais
dans la Lunette, ils occupoient à peine, à ce que nous pûmes
en juger, celle de 12 à r$ fecondes, faifant en cela l'effet
des Etoiles fixes qui ont leur lumiére en elles-mêmes, fans
l'emprunter d'aucun Aftre, & dont les Lunettes n'augmen-
tent pas la grandeur apparente dans la même proportion que
celle des Planetes.
La largeur du feu que l'on avoit fait au moulin de Brulé,
étoit d'environ 10 pieds, d’où il réfulte qu'il n’auroit dû
paroître à cette diftance que fous un angle de 6 à 7 fecondes,
au lieu qu'on Favoit vû de 1 2 à 1 $ fecondes, par la Lunette
qui augmentoit par conféquent deux fois fa grandeur.
H fit cette nuit, qui étoit entre le 30 & le 31 Août,
un très-grand froid par un vent de Nord, & nous obfer-
vâmes le matin le point de l'horifon où le Soleil fe leva dans
les montagnes Noires, de même que nous avions fait la
veille à fon coucher aux environs de T'oul.
La montagne de Thaun qui, comme nous l'avons dit
ci-deflus, fe diftingue des autres du côté de la Lorraine, eft
encore remarquable par des monuments anciens & bas-reliefs
qu'on y trouve en aflés grande quantité; ce qui a donné
lieu à la tradition populaire & fabuleufe du pays, que c’eft à
où Pharamond a été enterré.
IL étoit d’ailleurs important d'en connoître Ia fituation
exace, parce qu’elle fe trouve aux confins de trois Etats, qui
font l’Alface, da Lorraine, & la Principauté de Salms, dont
on nous affüra qu'on avoit marqué les limites par le moyen
d’une borne triangulaire qui a été placée au milieu des bois.
Comme cettemontagneeft une des plus élevées des Vofges,
nous y obfervâmes le 28 Août, fur les 2 heures après midi,
Ja hauteur du mercure dans le Barometre, que nous trouvimes
par deux fois de 24 pouces 6 lignes, moins grande de 3;
DES STCHÉ'E NS CHE SO AU Aa
pouces + que fa hauteur moyenne au niveau de la Mer; d’où
il réfute, füivant les regles que l’on a données dans les
Mémoires de l'Académie de 1703 & 1705, que fa hauteur
eft de 570 toifes au defius du niveau de la Mer. Nous fimes
auffi le même jour au foir, au village de Ravon-fur-plaine,
qui eft au pied de cette montagne, à la diftance d'environ
une lieuë de fon fommet, l’obfervation du Barometre, dont
nous trouvämes la hauteur de 2 $ pouc. 1 1 lig. ce qui donna
l'élevation de ce village fur le niveau de la Merde 304 toiles,
moindre de 266 toifes que fur le haut de la montagne.
Après avoir terminé nos obfervations fur la montagne
de Thaun, quelques-uns de nos Meffieurs retournérent à
Nole, pour y faire élever un fignal que l'on pût appercevoir
de loin, & y obferver pendant le jour & la nuit, les mêmes
objets qu'on avoit apperçüs fur le T'haun, & nous prîmes le
cheminde Saverne, où nous n'arrivâmes que le fur-lendemain,
ayant employé près de deux jours entiers à faire cette tra-
verfe qui n'eft que de 14 à 1 $ mille toiles en, droite ligne.
Nous allâmes le lendemain fur la tour du Haut-Bar, qui
n'en eft éloignée que de trois quarts de lieuë, dans le deffein
d'y obferver les fignaux de Delme & de Vic, d'où nous
lavions apperçüë, mais nous ne pûmes reconnoître que très-
foiblement celui de Delme, auquel nous dirigeimes le foir
la Lunette de notre Quart-de-cercle, pour y voir le feu que
lon y devoit faire exprès le quatriéme jour. Nous obfer-
vâmes, en attendant, la pofition de diverfes villes ou villages,
tant dans la Lorraine, que dans Alface, & nous reconnümes
le même objet que l'on avoit apperçü de Thaun, à peu-près
dans {a direétion de notre tour, & que nous apprimes étre
le château de Lichtemberg, qui en eft éloigné d’environ 6
lieuës. La nuit étant furvenuë, nous eûmes encore la fatisfi-
étion d'appercevoir le feu qu’on avoit fait au fignal de Delme,
qui rafoit le fil vertical de la Lunette un peu à gauche en
apparence, ce qui pouvoit faire une différence d'environ s
à 6 fecondes dans l'angle que l'on avoit obfervé pendant le
jour, ce que nous crûmes devoir négliger.
KKK i
446 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
On avoit cependant obfervé du fignal de Ja montagne
de Nole, la pofition de Strafbourg, mais la diftance de cette
montagne à celle de Thaun que l'on avoit employée pour
bafe, & que les gens du pays jugeoient être de 4 lieuës, à
caufe de la longueur des circuits qu’il falloit faire pour y
arriver, ne s’étoit trouvée que de 3423 toiles, & par
conféquent trop petite pour déterminer avec précifion la
fituation de Strafbourg.
I étoit donc à fouhaiter de trouver quelque expédient
pour pouvoir lier la tour du Haut-Bar avec le fignal de
Thaun, avec la même précifion que fr ces objets avoient pü
s'appercevoir lun de l'autre. Voici celui que l'on employa,
& qui eut tout le fuccès qu'on en pouvoit attendre.
Comme on avoit vü du fignal de Thaun, & de Ia tour
du Haut-Bar, le château de Lichtemberg, on alla à ce château
pour y obferver ces deux objets qui étoient, de même qu'on
les avoit jugé, à peu-près dans la mémedireétion dont on ne
les trouva éloignés que d’un angle de $ 4 minutes. On auroit
pô, par le moyen de a diftance de ce château à la tour du
Haut-Bar, trouver l'angle que l’on auroit dû obferver du
fignal de Thaun entre Strafbourg & cette tour, ff elle avoit
été vifible de ce fignal. Mais pour une plus grande précifion
on alla fe placer dans l'endroit où le fignal de Thaun & la
tour du Haut-Bar paroifloient dans la Lunette fous un même
vertical, & comme ce lieu étoit dans un fond, où on auroit
eu de la peine à appercevoir le fignal qu'on y auroit fait,
parce qu'il fe feroit confondu avec le terrein, comme on
Yavoit expérimenté en pareilles occafions, on donna ordre
d'y faire un feu qu'on alla obferver la nuit fuivante, de la
tour du Haut-Bar. On eut, par ce moyen, l'angle entre ce
feu & la tour de Strafbourg, dont le fupplément à deux droits
devoit être précifément égal à celui que le fignal de Thaun
auroit dû faire à l'égard de cette tour, s’il avoit été vifible.
Ainfr par le moyen de divers feux pendant la nuit, nous
fommes parvenus à déterminer fa fituation des objets les plus
importans de nos mefures, puifque les trois triangles où on
ESA
DES SCIENCES. 7
les a employés, comprennent eux feuls plus du tiers de la
diftance de Strafbourg à Paris.
Après avoir achevé nos obfervations à Lichtemberg & à
Haui-Bar, nous allimes à Strafbourg où nous obfervâmes fur
la tour de l2 Cathédrale , d’où la vüë s'éténd de côté & d'autre
le long du Rhin à une grande diftance, & n’eft bornée du
côté de la France que par les montagnes des Vofges, & du
côté de l'Allemagne que par les montagnes Noires.
Ceite tour eft fameufe par fa belle ftrudure, & fur-tout
par fa hauteur, qui furpañle toutes celles qui ontété conftruites
en Europe, & nous en mefurâmes géométriquement la hau-
teur qui fut trouvée de 440 pieds au-deflus du pavé de
TEglile, à peu-près de même que feu M. Einfenfchmid l'avoit
autrefois déterminée; ce qui, pour en donner une idée aflés
jufte, furpafle deux fois 1a hauteur des tours de Nôtre-Dame
de Paris.
On obferva de la plate-forme qui eft élevée für e rés-de-
chauffée d'environ 3 o toifes, la hauteur apparente du fommet
de la montagne de Thaun de 48’ au-defius de l'horifon, ce
qui, au moyen de fa diftance connuë de 22563 toiles,
donne la hauteur véritable de cette montagne au-deflus du
rés-de-chauflée de l'Eglife, de 438 toiles. Ainfi fuppofant
qu'elle füt élevée au-deffus du niveau de la Mer de s70 toiles,
comme on l'a trouvé par l'obfervation du Barometre, il fuit
que la pente des eaux du Rhin dont le niveau n’eft que de
quelques toifes plus bas que le rés-de-chauffée de l'Églife,
doit être de près de 1 30 toiles, ce qui eff à raifon d’une toife
par lieuë , eu égard aux divers contours que les eaux de cette
riviére font‘obligées de faire avant que d'arriver à la Mer.
Les triangles principaux que nous avons employés pour
“prolonger jufqu'à Strafbourg la Perpendiculaire à la Méri-
dienne de Paris, ne font qu'au nombre de 2 9, Ce qui vient
de la grande étenduë de la plüpart de ces triangles, dont il
n'y.en a pas un feul où les angles foient fort aigus & moindres
de 20 degrés, ce qui contribuë beaucoup à leur précifion.
Ayant calculé par la fuite de nos triangles la diftance de
48 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
Paris à Strafbourg, nous trouvons qu'elle eft de 205120
toiles en ligne droite, & de 20499 2 toifes mefurées fur da
Perpendiculaire à la Méridienne de Paris, dont Strafbourg eft
éloigné de 7326 toiles vers le Midi.
Cette Perpendiculaire traverfe le Rhin entre Strafbourg
& le Fort-Louis, dont l'on jugea à propos de déterminer la
fituation que l'on a trouvée à la diftance de 21 $ 600 toiles,
mefurée fur la Perpendiculaire à la Méridienne, dont le Fort-
Louis eft éloigné de 6000 toiles vers le Nord.
On détermina enfin de cette derniére ville, de même que
de la tour de Strafbourg, un grand nombre d'objets remar-
quables, tant en-deçà qu'au-delà du Rhin, tels que Offem-
bourg où étoit alors campée notre Armée, la tour de Bihel,
&c. Cette tour qui eft fur une montagne dans une belle
expofition, s’eft trouvée 2442 toiles au Nord de la Perpen-
diculaire à la diftance de Paris de 221312 toiles, & c'eft
le terme le plus oriental de nos mefures.
Nous les avions terminées l’année derniére du côté de
l'Occident à la tour de Frehel fur les côtes de Bretagne, qui
étoit éloignée de Paris de 175850 toifes. Ainfi la Perpen-
diculaire à la Méridienne de Paris occupe de l'Orient vers
l'Occident près de 400 mille toifes, que nous avons mefurées
dans l’efpace de deux campagnes.
H ne reftoit plus pour l'entiére perfeétion de nos opéra-
tions, que de trouver un terrein uni où lon püt mefurér
une bafe & comparer fon étenduë avec celle qui réfultoit de
la fuite de nos triangles.
Nous allâmes pour cet effet avec M. Herteinftein célébre
Mathématicien dans l'Univerfité de Strafbourg & Profefleur
royal de l'Ecole d’Artillerie, dans une plaine qu’il nous avoit
indiquée, où après l'avoir parcouruë en divers fens, nous
jugeâmes qu'on pouvoit mefurer une bafe depuis le clocher
de la Wantznaw jufqu'à la jonétion de deux grands chemins
qui vont de Strafbourg l’un à Haguenau, & l'autre au Fort-
Louis. À yant donc fait dreffer un fignal dans cedernier terme,
pour pouvoir le reconnoïtre du clocher, nous plaçimes
divers
+
| DES ScrEeNceEs. 449
| divers piquets dans la direction commune de ces deux objets,
& nous mefurämes de la maniére qui a été pratiquée en
pareille occafion, la diftance entre les deux termes de a
bafe , ayant fait la réduction néceflaire à caufe d’une maïfon
qui empêchoit de mefurer direéétement la diftance du clocher
de la Wantznaw au piquet qui en étoit le plus proche.
Cette bafe s’eft trouvée de 3 34r toifes 3 pieds, & ayant
obfervé à fes extrémités divers objets compris dans nos
triangles, tels que le clocher de Strafbourg, la tour du Haut-
Bar & le fignal de Thaun, elle fut déterminée de 3 342
toifes 2 pieds avec une différence feulement de $ pieds de
a melure actuelle.
Comme cette bafe peut être très-utile pour lever la Carte
‘de PAlface avec précifion, nous y fimes placer un poteau
de bois de chêne de 9 pieds de hauteur, avec les Armes du
Roy & une infcription au-deffous, où eft marquée fa diftance
au centre du clocher de la Wantznaw. Pour en conferver la
mémoire, M. le Maréchal du Bourg a bien voulu faire pofer
une borne de pierre de $ à 6 pieds auprès de ce poteau, &
donner les ordres néceflaires pour que les Communautés des
environs ayent foin de l'entretenir dans l'état où nous l'avons
placé.
Pendant que nous étions occupés aux opérations géomé-
_triques, nous ne perdions point de vüë les- obfervations
aftronomiques qu'ilétoit à fouhaiter de pouvoir faire vers les
“extrémités orientales de la France, pour les comparer aux
géométriques, & connoître le rapport des degrés de longi-
tude à ceux de latitude. | Mat |
Ce fut dans ce deffein que lorfque nous fûmes à Saverne,
je pris les devants pour aller à Strafbourg y obferver quel-
ques Eclipfes des Satellites de Jupiter qui devoient encore
arriver avant la conjonction de cette Planete avec le Soleil,
dont elle approchoït. Mais le temps qui depuis notre départ
avoit été le plus fouvent couvert & pluvieux, comme on
n'a euque trop d'occafions de le remarquer par l'intérêt que Le Siege de
Yon -prenoit aux affaîres publiques, ne nous permit pas de Philifbourg.
Mem. 1734 4
450 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
faire ces obfervations, du moins avec l'exactitude requife..
Au défaut de ces obfervations, nous avons celles que few
M. Einfenfchmid célébre Mathématicien de Strafbourg y a
faites, & que M. Herteinftein fon digne fuccefleur nous a com-
muniquées, telles qu’il les avoit déja envoyées à M. de Mairan
pendant notre voyage, pour en faire part à l'Académie.
Ces obfervations ont même l'avantage fur celles que nous
aurions pû faire, que l’on ne peut pas les foupçonner d'avoir
été accommodées à aucune hypothefe.
Entre ces obfervations, il y en a plufieurs d'Eclipfes du
Soleil, de la Lune & des Satellites de Jupiter. Nous nous
arréterons à ces derniéres, parce qu'on les juge plus propres
pour déterminer avec exactitude la différence des méridiens.
des lieux où elles ont été faites.
La premiére eft une émerfion du premier Satellite de Ju-
piter du 28 Août 1699, qui comparée à celle qui avoit
été faite par M. de la Hire & mon pere, donne fuivant
celle-ci, la différence des méridiens entre Strafbourg & Paris.
de 22° 18" d'heure, & fuivant l'autre de 21° 56”. |
La feconde eft auffi une émerfion du premier Satellite de:
Jupiter du 2 $ Septembre de l’année 1700, qui étant com-.
parée à celle qui avoit été faite à Paris par M. de la Hire,
donne cette différence de 22° 8". à
Quoique M. Einfenfchmid paroiffe préferer la différence
des méridiens qui réfulte de l'obfervation de mon pere, & la dé:
termine de 22° 20", ainfi qu'il s’en explique dans ces termes :
Cum differentia meridianorum inter Parilios à Argentoratum
mihi fere pro certo explorata fit 22° 2 0". Cependant pour ne pas
donner la préférenceaux obfervations qui femblent favorifer
le fentiment que j'ai fuivi jufqu'à préfent {ur la figure de la
Terre, j'ai cru devoir prendre un milieu entre ces différentes
déterminations, & établir cette différence de 2 2° 1 1” d'heure
ou 5 degrés 32° 45", ce qui s'accorde mieux à ce qui réfulte
d’une autre obfervation de l’émerfion du premier Satellite de
Jupiter obfervée à Strafbourg & à Nuremberg le 17 Août
de l'année 1700, de laquelle M. Einfenfchmid fe {ert poux
D ES SET IE IN C'EMS AST
conélurre la différence des méridiensentre Paris & Strafbourg
de 22° 10" d'heure, oude $4 32° 30"
Calculant la longueur du parallele de Strafbourg com-
prife eritre cette ville & la Méridienne de Paris, on la trouvé
de 205 roo toifes ayant égard à la réduction qu’il convient
de faire à caufe des montagnes fur lefquelles on a fait les
obfervations. Divifant cette diftance par SUN "OR
aura la longueur de chaque degré fur le parallele de Strafbourg
de 37066 toifes. Calculant dans l’hypothefe de 1 Terre
fphérique, le degré de longitude pour la latitude de 484 3 s'
qui eft à peu-près celle de Strafbourg, on le trouve de 37745
toifes, plus grand de 680 toifes qu’on ne l'a déterminé par
les opérations géométriques comparées aux aftronomiques.
Ainfi fuivant ces obfervations, la grandeur du degré de lon:
gitude eft plus petite que fi lon fuppofe la Terre fphérique.
… Onaurcit trouvé la grandeur du degré encore plus petite
de 300 toiles que par la comparaifon précédente, fi l'on
avoit fuppofé la différence des méridiens entre Strafbourg &
Paris, telle que l'a établie M. Einfenfchmid, ce qui s'accorde
avec aflés de précifion à celle que lon a trouvéé du côté de
Occident par les obfervations faites à Paris & à Saint-Malo:
mais nous nous arrétons à la détermination précédente, parce
que dans les obfervations qui paroiffent avoir été faites avec
üne égale précifion, il eft toûjouts plus für de prendre une
moyenne entrelles, que de donner la préférence à celles qui
s'accordent mieux à nos hypothefes.
Nous avons remarqué dans le Mémoire précédent que
fuppofant la Terre de figure elliptique, dont le plus grand
axe pañle par les Poles, telle qu’elle réfultoit des obfervations
de la Méridienne, les degrés de longitude doivent être plus
petits que dans l’hypothefe fphérique. Ainfi toutes ces obfer-
vations faites, tant du Midi vers le Nord, que de l'Orient
vers l'Occident de Paris, s'accordent à donner à a Terre Ia
figure d’une ellipfe allongée vers les Poles, ce qui, filon ne
le regarde pas comme une preuve complette, doit du moins
être un grand préjugé en faveur de cette M Car quand
Lili
452 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
même on voudroit choifir entre les obfervations que j'ai
rapportées, celle qui paroït lui être le moins favorable, &c
füivant laquelle la différence des méridiens n'eft que de 2 1"
56", ou 5429’, on aura toûjours la grandeur du degré
de longitude fur le parallele de Strafbourg, plus petite de
340 toifes que dans l'hypothele fphérique, ce qui doit être
très-fenfible fur toute la circonférence de ce parallele.
Nous avons auffi fait à Strafbourg un aflés grand nombre
d’obfervations de hauteurs méridiennes, du Soleil & d’'Etoiles.
fixes, qui toutes, à la réferve d'une feule, concourent à
donner la diftance entre le parallele de Paris & la Perpen-
diculaire à la Méridienne, plus grande qu'elle ne le devroit
être fuivant l'hypothefe fphérique, & femblent favorifer le
fentiment de la Terre allongée vers les Poles. Mais comme
ces obfervations ne s'accordent pas à la hauteur du Pole de
Strafbourg, déterminée par M. Einfenfchmid, nous n'avons
pas cru devoir afléoir aucun jugement fur nos propres obfer-
vations, jufqu'à ce que cette hauteur ait été déterminée plus
exactement dans l'Obfervatoire que les Magiftrats de Straf-
bourg font conftruire prefentement fur une tour de la ville
qui y avoit été déja deftinée.
Après avoir achevé nos obfervations à Strafbourg & aux
‘environs, nous avons pris la route de Metz pour établir la
pofition de cette ville & de diverfes autres qui étoient aw
Nord de la Perpendiculaire, & dont nous avions obfervé.
quelque direction, en formant nos triangles, & nous avons
terminé nos opérations à Reims, après avoir déterminé la
potion de cette ville & de la plus grande partie de celles
qui font de côté & d'autre de la Perpendiculaire, même à
une affés grande diftance, de même que des bourgs, villages
& autres objets qui peuvent fervir à lever avec précifion Îes:
Cartes particuliéres des Provinces de Brie, Champagne,
Lorraine & Alface, que nous avons traverfées dans le cours.
de notre voyage.
EL /Fe
DES, SCIENCE S 45%
RE duR. QU ES
DOC TA OUR INT S CT. KR "RENSS
SECONDE PARTIE.
Par M. WinsLow.
À Fu si la premiére Partie de ces Rétnard il je m'étois
borné aux Montres fimples, c’eft-à-dire, à ceux qui
le font fimplement par conformation extraordinaire, ou par
défaut. Je vais confidérer dans la feconde Partie les Monftres
compolés, c’eft-à-dire, ceux qui font doubles, triples, &c.
foit en total, foit par portions, comme par quelque organe
confidérable, vifcere, &c. Je commencerai par les deux
exemples qui ont donné occafion à ces Remarques, & dont
je n'ai pas achevé l’examen dans la ‘premiére Partie, pour
des raifons y alléguées, fçavoir, exemple du Faon à deux
têtes, & celui de la Fille à deux ventres & quatre extrémités
inférieures. Immédiatement après ces deux exemples, je pro-
duirai les deux, qui, dans les Mémoires de Académie ont
été fpécialement employés pour foûtenir les deux différents
_ fyftemes ; fçavoir celui de M. Duvernay de 1706, & celui :
de M. Lémery de 1724. Après quoi je rapporterai en
abbrégé, fuivant l'ordre de la premiére Partie, les autres
exemples qui fe trouvent dans l'Hiftoire & les Mémoires
de l'Académie, &c. -
1
Examen anatomique du Faon à deux Têtes, envoyé pay
, CES JU, 4 ” P
ordre du Roy, dont l'extérieur à été décrit dans la
* premiére Partie de mes Remarques fur les Monffres.
H fuffit ici de rapporter fuccinétement de la premiére
Partie de ces Remarques, que les deux têtes étoient pofées
LU ‘e
454 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RôyaLE
fur un feul col; que l'une des têtes étoit fituée prefque dans
l'attitude ordinaire en haut; que l'autre étoit placée latéra-
lement , étant jointe par la partie latérale inférieure du côté
droit de fon occiput, à la partie latérale inférieure du côté
gauche de Pocciput de la tête fupérieure; que le col étoit
plus court qu'à Fordinaire & un peu incliné à droite; que
les deux têtes étoient jointes par dehors, jufques vers le
milieu des jouës voifines; que les mâchoires inférieures des
deux têtes étoient également mobiles, & formoient avec
les fupérieures deux bouches, dont chacuné avoit
une langue à l'ordinaire.
J'ai averti dans la premiére partie, à la fin de [a defcrip-
tion de l'extérieur de cet animal, que je m'étois contenté
d'en examiner les têtes en particulier par l'anatomie, &
de m'attacher principalement dans cet examen à ce que les
parties communes aux deux têtes préfentoient de plus fingu-
lier. Je remis alors pour la feconde partie de ces Remarques
le détail de la diffection, parce que j'en avois deftiné la pre-
mire uniquement pour les Monfîres fimples, & la feconde
pour les Montres compolés.
Avant la diflection je fis d’abord deffiner le Faon entier,
& enfuite fes deux têtes à part dans des attitudes différentes,
comme onles voit dans les trois premiéres Figures.
PF GUUIR € "TE
Le Faon entier avec fes deux Têtes, vû du côté gauche
de Yanimal.
- a, la Tête fupérieure, ou droite.
b, la Tête latérale, ou gauche.
c, Oreille droite de la Tête fupérieure.
d, Oreille gauche de la Tête latérale.
e, l'Oreïlle commune aux deux Têtes.
ff. j, ha livrée du Faon.
EbaPe, 0 RUE TER
Le Col avec les deux Têtes, vü du côté droit,
a, b,c, d, e, comme dans la Fig. L
D HS, S GIE N CE s 455
cb D CH à La: bu ds ©
!
Les deux Têtes vüës en plein, pour montrer le fond dou-
ble de l'Oreille commune.
a, b, c, d,e, comme dans a Fig. I.
f; ligne faillante qui partage de creux de cette Oreille
en deux fonds. 7
8 8, la direction de chaque fond d'Oreilles vers Les
Têtes.
Après avoir fait deffiner Fextérieur du Faon, j'en ouvris
le bas-ventre où je ne trouvai rien de fingulier. Les efto-
macs que ces animaux ont de commun avec les ruminants
étoient vuides, de même que les inteftins grêles ; les gros
inteftins étoient très-remplis; le foye, la rate, les reins, la
veflie, & luterus ( car c’étoit une femelle) n'avoient rien
d'extraordinaire.
. La poitrine & les parties y renfermées étoient auf dans
l'état naturel d'un feul animal, même celles qui répondoient
aux deux têtes; fcavoir, la trachée artere & l'œfophage. Ces
deux tuyaux gardoient leur fimplicité & leur ftructure ordi-
naire tout le long du col. I n'y avoit qu'un Brynx & un
pharynx, placés l'un devant l'autre, comme on les trouve
communément dans un feul animal.
Le col étoit compolé de plufieurs vertebres, toutes fimples,
même la premiére, quoiqu'elle füt articulée avec les deux
têtes. J’avois fait obferver dans la premiére partie de ces
Remarques, que le col étoit court, plus courbé qu'à Pordi-
naïre, & un peu incliné; c’étoit à l'extérieur qu'il paroifloit
“ainfi : mais l'ayant difléqué, je trouvai que la difpofition
des vertebres en étoit la caufe, étant arrangées un peu en S
romain, par deux courbures en contre-fens, dont l’une dé-
pendoit en particulier de la quatriéme vertebre, qui étoit
comme écrafée entre la troifiéme & 1a cinquiéme, de forte
que les vertebres repréfentoient en cet endroit plütôt un pli
ou angle, qu'une courbüre en arc. |
La moëlle renfermée dans le canal de ces vertebres, depuis
456 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLe
la premiére inclufivement jufqu'à la derniére, n’étoit que
fimple comme à l'ordinaire, & fans aucune marque de com-
pofition extraordinaire.
FIGURE. LV.
Voulant profiter du temps ordonné pour la diffeétion,
je ne fis pas grande attention aux mufcles que les deux têtes
avoient communs avec le col unique ; & ayant trouvé à
peu-près dans l'état ordinaire les mufcles propres de ce col,
de même que les mufcles fterno-thyroïdiens &fterno-
hyoïdiens, comme auffi les petits mufcles propres du larynx,
& les différentes portions charnuës du pharynx; je détachai
de ces deux têtes les mâchoires inférieures avec les deux
langues, le larynx, & le pharynx, conjointement enfemble.
Je plaçaï enfuite ces parties de maniére que les mentons
(a, b) avec les langues /c, d,) étoient en haut, & que les
grofies branches des mâchoires inférieures /e, f, g, h,) de
même que la trachée-artere, avec l’œfophage, étoient en bas.
J'examinai en cette attitude l’un & l'autre côté des deux
mâchoires, & l'un & l’autre côté des parties qui y répon-
doient, en commençant par le côté qui regardoit le devant
du col, & qui eft repréfenté dans cette Figure IV, dont
(ac, ) marquent le menton & la langue de la tête droite,
(b,d,) le menton avec la langue de la tête gauche, /8,)
la trachée-artere, & / 9,) l'œfophage.
J'y découvris d'abord Ia bafe d’un feul os hyoïde /i,i),
fes deux cornes /4, 4); les deux grandes appendices qui fe
trouvent ordinairement dans ces fortes d'animaux , comme
dans le Mouton, &c. je découvris le devant d’un feul pha-
ryhx (1,2, 3,4, ); le devant d'un feul larynx / 5, $,);
dont je ne marque ici que les mufcles crico-thyroïdiens
(6,6), &les mufcles thyro-hyoïdiens /7, 7, ). |
Cette bafe de l'os hyoïde, dont la forme & Ia fituation
devant le larynx étoient comme à l'ordinaire, portoit deux
mufcles bafogloffes /p, 4,), lun /p) pour le côté gauche
de la langue fupérieure ou droite, & l'autre / 4) pour la
langue
4
{ D HS ISTICML EN CM rs 457
“angue latérale ou gauche. Je n'ai pas trouvé les deux autres
mufcles bafioglofies à l'oppofite de ceux-ci; mais j'y trouvai
entre les deux langues près de leurs bafes ou racinesun plan
de fibres! charnuës tranfverfalement courbes & fans aucune
apparence d'attache à d’autres parties. Ce plan mufculaire,
exprimé dans la Fig. IV. par / a) & dans la Fig. VI. par (4),
m'a paru ténir lieu des bafoglofles que je n'avois pas trou-
vés, & qui devoient répondre aux bafiogloffes /p, 4,) dela
Fig. IV.
. Attenant le milieu de la partie antérieure de la même bafe
de Fos hyoïde /5, i,) étoit pofée verticalement une petite cloi-
fon cartilagineufe /w) qui donnoit attache à quatre mufcles
genio-hyoïdiens /r, r,s, 5, ), deux pour chaque tête, & me
parut par conféquent tenir lieu d'un autre os hyoïde. Le
plan charnu où mufculaire / x), dont je viens de parler, y
étoit comme collé, mais fans apparence de vraye attache.
… On voit dans là Figure, au côté de cette cloïfon cartila-
gineufe, un petit vaifleau tronqué (A) pañler par le deflus de
la bafe de l'os hyoïde en fe recourbant. C’eft l'extrémité fupé:
rieure d'une artere carotide extraordinaire, dont il fera parlé
ci-après, & dont la continuation eft interrompuë dans a
Figure, pour ne pas dérober à la vüë ce qu’elle auroit caché
par fon trajet. kiwcbrtslotesb ob
Des deux grandes appendices hyoïdiennes //, m) chacune
portoit une efpéce de mufcle kerato-gloffe. L’appendice du
côté droit //) portoit le mufcle kerato-gloffe droit /4) de Ia
tête fupérieure, & lappendice du côté: gauche portoit le
mufcle kerato-glofie /o) de a tête latérale. SH)
fl 1(4 ; Z,) marquent ‘une petite portion antérieure : d'un
mufcle mylo-hyoïdien fort fingulier, dont'la plus grande
portion-a été eMmportée, pour ne/pas cacher au Deflinateur
les parties qui en auroient été couvertes. Ce mufcle mylo-
hyoïdien appartenoit au grand'os hyoïde5,i, 4,4), & fes
attaches latérales, au lieu d’être aux portions latérales ou
branches de la mâchoire inférieure d’une feule tête ; étoient
d'un côté à la branche droite de la mâchoire de la tête
Mem. 173 4 . Mmm
458 MEMoIRESs DE L'ACADEMIE Royare
fupérieure, & de l'autre côté à la branche gauche de Ja mâ-
choire inférieure de la tête latérale. Je n'ai pas trouvé le
mylo-hyoïdien des côtés oppofés ; mais au lieu de cela je
trouvai un plan large & mince de fibres charnuës qui alloïent
d'une mâchoire à l’autre, comme on verra ci-après dans la
Figure VI.
Les deux corps olivaires /x, y,) qui paroiflent immédiate-
ment au deffous de la portion du mufcle mylo-hyoïdien /z,7)
font les glandes fublinguales de lune & de fautre langue.
Elles fe touchoïent immédiatement par la moitié poftérieure
de leur volume, & même y paroïfoient en partie confon-
duës enfemble. Elles m'ont paru chacune tenir lieu de deux
pour chaque langue, n’en ayant pas trouvé d'autres ; & c'eft
peut-être de cela que dépendoit la grofleur extraordinaire de
ces deux-ci.
I y avoit quatre glandes maxillaires /£,r, u,u,) deux pour
chaque tête, comme à l'ordinaire. Deux de ces glandes,
fçavoir /r, #,) font ici repréfentées hors de fituation, & les
deux autres (4, u,) dans leur fituation naturelle.
ÉRIC U RIES LV.
I! n'y avoit que trois arteres carotides pour les deux têtes,
dont deux étoient latérales, & une étoit mitoyenne & anté-
rieure. Les deux latérales /r r, 1 2,) étoient placées à peu-
près à l'ordinaire le long de chaque côté du col. La-caro-
tide du côté droit alloit au côté droit de la tête fupérieure,
& la carotide du côté gauche alloit au côté gauche de la
tête latérale. La carotide mitoyenne ou antérieure r > )
montoit par une route extraordinaire direétement devant la
trachée artere & le larynx, & fe glifloit enfuite entre les
bafes ou racines des deux langues à côté de la petite cloifons
cartilagineufe /w) de la Figure IV. jufques fous la rencontre
ou union des deux têtes, où fon extrémité (A } fe divifoit
pour le côté gauche de la tête fupérieure, & pour le côté
droit de la tête latérale. Ces trois carotides partoient d'un
&onc commun fort court fr 0).
D E:8, : S\uÈL:EN CES A$9
FicuRrEe VL
Cette Figure marque les se. du côté oppolé au côté
repréfenté dans la Figure IV, ceft-à-dire, du côté de k
proximité des deux mâchoires inférieures. Les mentons
(a, b,) avec les langues /c, d,) font ici tournés en haut,
tomme dans la Fig. IV, & les branches /e, f; 3, 4) des deux
mâchoires inférieures font tournées en bas, mais à contre
fens de la Figure IV, par rapport à leurs parties latérales.
‘La branche ff) eft du côté gauche de la tête fupérieure ou
droite. La branche 4) eft du côté droit de la tête latérale
ou gauche. Ces deux branches /f, #,) étoient bien près lune
de l'autre, principalement en arriére, La branche /e) eft du
côté droit de la tête fupérieure ou droite, & la branche /2)
eft du côté gauche de la tête latérale ou gauche. J'avois
coupé & emporté la groffe portion où moitié poftérieure
«“ branches (f; h,) pour mettre à découvert les parties que
-jé vais décrire. ;
Les fibres tranfverfales, & en partie un peu courbes /i),
qu'on voit ici entre les portions des branches coupées /f, 4, )
& qui font attachées par leurs extrémités à lune & à l’autre
de ces branches, font celles que j'ai dit dans l'explication
de la Figure IV, avoir trouvées au lieu d'un mufcle mylo-
hyoïdien, qui devoit répondre au mylo-hyoïdien 7, 4)
de cette Figure IV.
Ces fibrés /i) avoient cela de particulier, qu’elles pa-
_xoïfloient être uniquement attachées aux mâchoires, & d’être
réciproquement d'une continuité entiére, fans la moindre
apparence de tendon mitoyen; elles étoient plus courtes
que celles du mylo-hyoïdien /7, ,) de a Fig. IV, & cela
à caufe de la proximité des deux mâchoires en cet endroit;
ce plan charnu n'étant attaché qu'aux feules mâchoires, ne
“pourroit pas être nommé mylo-hyoïdien , mais fimplement
myloïdien. F
Les fibres courbées en contre-fens /4) que l’on voit im-
médiatement au-deflous de celles-là, font les mêmes qui font
Mumnm ij
-
460 MEMOIRES DE L’ACADEMIE RoyALE
exprimées dans la Figure IV. par /& ), & dont j'ai dit dans
l'explication de cette Figure IV. qu'elles ne paroifloient pas
attachées à la petite cloifon cartilagineufe /w) qui paroïfloit
tenir lieu d'os hyoïde.
Sous la coupe des branches maxillaires coupées /, f,) entre
les racines ou bafes des deux langues, on voit defcendre deux
mufcles /7, m,) lun du côté gauche de la tête fupérieure, &
J'autre du côté droit de la tète latérale, & s'unir comme en
pointe à l'extrémité d’un os fort délié /, o,).
Cet os délié /», o,) m'a paru être une efpece d’appendice
hyoïdienne, & tenir lieu des deux grandes appendices qui
devoient être pareilles à celles de l'autre côté /p,p,). Les
deux mufcles //, m,) font pareils aux deux mufcles kerato-
glofles de ces grandes appendices, excepté qu'ils font joints
enfemble à une feule appendice.
I faut obferver que cet os délié qu'on peut ici appeller
l'appendice hyoïdienne commune, n'étoit pas collé ou attaché |
immédiatement au pharynx, comme la repréfentation op- >
tique de la Figure le pourroit faire penfer. Il en étoit écarté
à peu-près de fa même façon que les appendices /p, 4,), ou
appendicices hyoïdiennes ordinaires ; & par fa fituation fym-
métrique il répondoit à l'endroit de l'union des deux têtes.
À la racine ou bafe de chaque langue, on voit une fof-
fette (r, r,) qui eft le conduit de chaque bouche à un feul
pharynx commun. Les deux grands trous (5, 5,) font des
ouvertures, par lefquelles ce pharynx commun communique
avec le fond des narines de chaque tête. Le refte (444)
qui eft après ces ouvertures, eft le corps du pharynx vû
par derriére. L'œfophage /t) & la trachée /4) font auffi re-
préfentés ici par leurs faces poftérieures. Le tendon mitoyen
des fibres charnuës du pharynx eft, pour la plus grande partie,
caché dans cette Figure par l’appendice hyoïdienne com-
mune /#,0,). Le dedans de la cavité de ce pharynx étoit
tout fimple, & l'épiglotte, la glotte, &c. y étoient aufli
dans la conformation ordinaire d'un feul animal.
aa A 1 C0 Eu So ÉLO AE HN, CHRy Speo M si
FT GQUuIRE VILA PS1
Les deux crânes unis enfemblè, vüs de.front. en, plein,
dans la même attitude que j'ai donnée aux deux têtes entiéres
dans la Figure IL oo de x aD SA
Cesicrânes étoient unis PER de MAnICES que, le trot
auditif externe du côté gauche de la tête fupérieure touchoit
de pr ès le trou auditif externe du côté droit de la tête laté-
rale: les apophyfes pierreufes de ces côtés fe touchoient auffi
Fm l'autre tout au long. Les parties latérales de ces mêmes
côtés des deux os occipitaux y manquoient.
a, le Crâne fupérieur. 1. AT Vo a
b, le Crâne latéral.
c, YOs occipital fupérieur.
d, YOs occipital latéral. * Mines à
tas f l'union des deux Occiputs.
- gr gr Tunion des deux Os temporaux, & Laoene
ou la proximité des deux conduits auditifs ex-
ternes, auxquels répondoient les deux fonds de
loreille commune, repréfentés dans la Fi ig. IL
h, lOrbite gauche du Crâne fupérieur.
i, TOrbite droite du Crâne latéral. |
FIGURE VITE
Les mêmes deux crânes vüs par leurs ais, mais dans
wne attitude oppofée à celle de ka Fig. VIL |
: Les partiés latérales de-ces côtés des.os- De, c'eft-
à-dire, la partie latérale droite de Vos occipital de la tête
fupérieure, &. la partie latérale gauche de los occipital de la
tête latérale, formoient enfemble un feul grand trou occipi-
tal, comme à l'ordinaire; de forte qu'au bord'de ce grand
trou, il n'y avoit que deux apophyfes condyloïdes, comme
dans un fujet fimple. L’ apophyle condyloïde droite, appar-
tenoit à l'occiput de la tête fupérieure, & l'apophyfe con-
dyloïde gauche appartenoit à l'occiput de la tête latérale.
Ces deux apophyfes condyloïdes étoient articulées avec 1z
M mm ii
462 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royarr
premiére vertebre du col, de la même maniére & avec Ia
même fimplicité que les apophyfes condyles d’un feul os
occipital ordinaire font ‘articulées avec la feule premiére
vertébre d'un fimple fujet, )
Les deux os occipitaux n’avoient qu’une feule bafe, qui
fe terminoit en deux allongements bafilaires, dont fun ré-
pondoit à los fphénoïde d’une tête, & l'autre à l'os fphé-
noïdé de l'autre tête.
Explication de la FIGURE IX.
a, le Crâne fupérieur.
b, le Crâne latéral.
c, Os occipital du Crâne fapérieur,
d, Os occipital du Crâne inférieur.
e, f, Yunion des deux Occiputs.
8, 8, L'union des deux Os des Temples, & l’adoffément
des deux Os petreux, dont l’un eft le gauche
du Crâne fupérieur, & l'autre eft le droit du
Crâne latéral.
4, YOïbite gauche du Crâne fupérieur.
i, lOrbite droite du Crâne latéral.
4, lOrbité droite du Crâne fupérieur.
1, TOrbite gauche du Crane latéral.
m, l'Apophyfe pierreufe droite du Crâne fupérieur,
n, TApophyfe pierreufe gauche du Crânie latéral.
0, le grand trou occipital commun des deux Grânes
p, TApophyfe condyloïde droite de FOcciput fu-
rieur.
4, TApophyfe condyloïde gauche de l'Occiput latéral,
r,r, la Bafe commune des deux Occiputs, >
5, l'allongement occipital où bafilaire du Crâne fs
_périeur. ne
r, Yallongement occipital ou bafilaire du Crâne latéral.
2, Vos fphénoïde du Crâne fupérieur,
x, Os fphénoïde du Crâne latéral.
DES SCIENCES! 463
RÉFLÉXIONS. "AA
Pour juger que la formation de ce Faon à deuxtètes puifle
être rapportée au fyfteme des Monftres par accident ou
confufion, il faudroit s’imaginer, ou que deux germes en-
tiers {e fuffent trouvés directement l'un à côté de l'autre, &
réciproquement euflent été comprimés de maniére, qu'à
exception des têtes, les deux moitiés voifines du refte de
leurs corps euflent été tout-à-fait détruites; qu’à leur place
les deux moitiés oppofites fe fuflent unies pour compoler
enfemble de nouveau un feul tronc ou corps entier avec les
extrémités à l'ordinaire, & que les deux têtes qui feroient
reftées prefque entiéres, fe fuflent accommodées fur un feul
col; ou il faudroit s'imaginer que par une telle rencontre
-& par une telle compreflion, tout le corps de l’un, excepté
la tête, eût été détruit, & que cette tête échappée eût été
unie à la tête du corps entier.
Ni lune ni Fautre de ces deux idées me paroiffent s’ac-
corder avec les obfervations que je viens de rapporter fur 1a
diffetion de cet animal. La premiére idée, fçavoir celle de
la confufion des moitiés oppofées par la deftruétion des moi-
tiés voifmes , pourroit avoir quelque vraifemblance quant à
Yextérieur du corps, eu égard au rapport réciproque & fym-
métrique des deux côtés oppofés; mais pour peu qu'on en
: confidére bien, & avec une exacte connoïffance anatomique,
les parties internes , fur-tout celles qui {ont folitaires & fans
fymmétrie, celles qui font creufes & remplies de fluide, &
encore plus celles qui font mobiles &plus ou moins flottantes,
comme l’œfophage, le cœur, leftomac, les inteftins; cette
idée paroïtra par lesraifons détaillées dans la premiére Partie
de mes Remarques, non-feulement infoûtenable, mais elle
paroîtra outre cela capable d’induire à l'erreur, en ce qu'elle
pourroit donner lieu de s’imaginer qu’un tel ou tel corps en-
tier, foit d'homme, foit d'autre animal, quoiqu'un corps
fimple en apparence, 4 été origimairement compolé de deux ;
gar ce qu'on s'imagineroit être arrivé à la plus grande partie
26% MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
dé deux corps, comme dans ce Faon, pourroit de même
arriver à deux corps en total, puifqu'on trouve aufli des
Montres avee une feule tête fur deux troncs bien conformés
féparément l'in de l'autre, comme on en trouve avec deux
têtes fur un tronc. La feconde idée, felon laquelle, par la
rencontre & par la compreflion réciproque dedeux germes,
Jun en feroit refté tout-à-fait entier, pendant que autre
feroit détruit jufqu’à la feule tête qui feroit unie à la tête du
corps entier; cette idée, dis-je, eft auffi infoûtenable que
la précedente; car, par exemple, dans le cas préfent, elle ne
s'accorde nullement avec la difpofition & la diftribution par-
ticuliére des trois arteres carotides de ceFaon. Le col étoit.
fimple dans fa ftructure , comme left ordinairement celui
d'un feul animal ; des vertebres, la moëlle épiniére, la trachée,
Yofophage, la plus grande portion du larynx & du pharynx,
toutes ces parties y étoient dans leur fimple conformation
ordinaire. Cependant les deux carotides latérales : qui mon-
toient fur les côtés d’un feul col comme à l'ordinaire, ne
vont pas comme à l'ordinaire toutes deux à unie feule tête;
mais au ‘dieu de. cela, pendant que l'une pañle fur le côté
d'une tète qu'on fuppoferoit appartenir. originairement au
corps entier, l'autre pafle fur le côté oppofé de la tête qu'on
fappoleroit être le refte d'un autre corps détruit ; & au lieu
que la tête accefoire auroit quelques ramifications de Ja caro=
tide voifine de la tête du corps-entier, il fe trouve ici une
carotide mitoyenne, qui après un paflage extraordinaire par-
devant la trachée & le larynx , fe partage pour les deux têtes,
comme fi cette carotide mitoyenne & extraordinaire avoit
été formée par union ou confufion de la carotide droite
d'un col, & de la carotide gauche d'un autre col, ce que
dans le col de notre Faon la fimple ftructure des autrespar:
ties de ce même colexpolées ci-deflus, paroît démentir, für-
toutcelle des: vertebres, celle de Ja trachée, celle de l'œfo-
phage, & celle de leurs dépendances. mr :
Ces deux idées ne s'accordent pas non plus dans le cas
préfent avec la ftructure de la bafe commune des deux os
occipitaux,
DES F'SLCÎT ENN CRENS: 465
ccipitaux, ni avec la formation du grand trou occipital &
des apophyfes condyloïdes voifines, ni avec l'articulation de
ce double occiput fur une feule vertebre fimple. Le fyftème
general de confufion porteroit d’abord ceux qui ne font pas
affés au fait de la ftructure, à penfer & à dire que les os oc-
cipitaux des deux crânes s'étant rencontrés obliquement l'un
à côté de l'autre, les portions voifines de ces deux os ont
été détruites de maniére que la moitié du grand trou occi-
pital d'un crâne avec Fapophyfe condyloïde de {a même
moitié, & la moitié réciproque du grand trou occipital de
Yautre crâne avec fon apophyfe condyloïde, ont formé en-
femble par leur union accidentelle un feul grand trou occi-
pital avec deux apophyfes condyloïdes, comme à l'ordinaire
d'un feul os occipital & d’un crâne fimple.
Mais le détour extraordinaire qu'auroient fait, felon
cette idée, les portions latérales de lun & de l'autre crâne,
pour former un feul grand trou occipital femblable à celui
d'un feul crâne ordinaire, reftera toûjours extrémement
difficile à expliquer felon le fyfteme des accidents, fur-tout
la correfpondance exacte du grand trou occipital de ces deux
têtes avec le grand trou d’une fimple vertebre, & d'expliquer
la connexion articulaire des condyles oppofés de deux diffé-
-xents os occipitaux avec les cavités de cette feule vertebre.
Car il faudroit pour cela ou s’imaginer que toute 1a lon-
-gueur du corps de ce Faon eût été formée par les moitiés
latérales de deux corps, ce qui paroît tout-à-fait impoffible
pour les raifons expolées ci-devant; ou il faudroit s’imaginer
que, par exemple, le condyle droit de la tête fupérieure de ce
Faon eût refté comme à l'ordinaire articulé avec Ja cavité arti-
culaire droite de la feule premiére vertebre, & que la cavité
articulaire gauche de cette même vertebre eût refté vuide, .
fans être endommagée par la deftruétion du condyle gauche
-de la même tête fupérieure, fans l'être par celle du condyle
droit de la tête latérale, & par celle de leurs ligaments, &c.
& que le condyle gauche de la tête latérale ayant quitté fa
connexion avec la vertebre détruite du corps perdu, eût été
Men, 17 3 4 . Nnn
M
266 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
articulé de nouveau avec a cavité gauche de la même pre-
micre vertebre du corps reftant. Mais je répéte encore ici
que pour peu qu'on foit au fait de la vraye ftruéture de ces
parties, & qu’on fe donne la peine de bien comparer en.
détail l'extraordinaire avec l'ordinaire, on fentira une extrême
difficulté d'expliquer par le fyfleme des accidents la con-
nexion & Farticulation des deux têtes de ce Faon avec la.
premiére vertebre de fon col.
M. de Reaumur a confervé dans fon cabinet depuis plu-
fieurs années une double tête de Veau, dont il a vû lui-même
tout le corps en vie. Elle eft pour la plus grande partie
femblable à la tête double du Faon du Roy, principalement
par rapport à l’occiput commun, au grand trou, aux condyles,
à la bafe commune de l’occiput, & à la bifurcation de cette
bafe en deux allongements pour les os fphénoïdes des deux.
têtes, comme on le peut voir Fig. X, & XI.
Explication de la F1GURE X. qui repréfente les Crânes
de la double Tére de Veau, vié de fronr.
a, a, l'union des deux Crânes.
&, b, les Orbites voifines.
c, c, le bord des Orbites de l'autre côté.
d, d, l'endroit de l'union, où la partie latérale des
Os occipitaux, une grande partie des Os
temporaux voifins, avec leurs apophyfes pier-
reufes, &c. manquoient tout - à -fait.
e,e, les Zygoma.
Explication de la FicurE XI. qui repréfente la même
double Tête renverfée 7 vue par fes bafes.
a, le grand Trou occipital commun aux deux Crânes..
B,b, l'union des deux Os occipitaux.
€, c, les Apophyfes condyloïdes, dont lune eft la droite
k d'une Tête, & l'autre la gauche de l'autre Tête.
d, d, les Apophyfes pierreufes, lune d'an côté, &
l'autre de l'autre côté de chaque Tète..
| Di ES: SIC/TE.N C,E.Ss _ 467
æ, la bafe commune des deux Os occipitaux. .
f, l'allongement occipital commun de ces Crânes.
g, 8, les Orbites, &c. 5
4, 4,k,h, les fofles nafales. “1
i, l'union de deux Zygoma tronqués. ï
Je reviens aux autres parties des deux têtes du Faon.
La flruéture, arrangement & lufage des deux os hyoïdes,
de même que les attaches de leurs mufcles, ne me paroïfient
pas non plus s’accorder avec le fyfteme des accidents. L’os
hyoïde /i,i,k,k,) qui par f ftrudure & fon arrange-
ment, reffemble à un os hyoïde ordinaire d'un feul animaf,
fert ici à deux têtes, ayant deux différents mufcles bafo-
glofies /p,q4,), un pour la langue de chaque tête. La petite
cloïfon cartilagineufe {w.) quej'ai regardée comme un hyoïde
imparfait, foütenoit d’un côté les genio-hyoïdiens /r, r,) de
lune des têtes, & foûtenoit auffi de l'autre côté les genio=
hyoïdiens / s, s,) de l'autre tête. |
On pourroit, felon le fyfteme des accidents, s'imaginer
que los hyoïde /5, i,k,k,) a été formé parles moitiés de
deux différents os hyoïdes, & que la petite cloifon /w.,) a
été formée irréguliérement & imparfaitement par les autres
moitiés de ces mêmes os hyoïdes; mais outre que je ne vois
nullement comment pour cet effet ces quatre mufcles genio-
glofles fe feroient rencontrés, Ia feule attache des quatre
mufcles génio-hyoïdiens me paroît tout-à-fait contraire
au fyfteme des accidents, felon lequel cette cloïfon ou ce
faux hyoïde ne devoit {ervir d'attache qu'à deux genio-
hyoïdiens, & les deux autres genio-hyoïdiens devoient
être attachés à la bafe du grand os hyoïde (5, i, ) attenant
lattache des -bafo-ploffes /p, g,).
. La connexion fymmétrique d’un feul Jarynx & d’un feul
pharynx avec ces autres parties ft extraordinairement doubles
“& fi extraordinairement tranfpofées, fait encore plus paroïître
a difficulté de ce fyfteme dans le cas préfent. Car la diffi-
-culté me paroît ici plus grande que dans la connexion d'une
eule vertebre avec les moitiés de deux. os occipitaux. Mais
Nan ij
468 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
il faut être entiérement au fait de la ftructure & de la difpo-
fition de toutes ces parties, & avec cela fe donner la patience
de comparer en détail l'extraordinaire avec l'ordinaire.
A l'égard de Fos grêle /»,) Fig. VI. qui porte les deux
mufcles /m”,1,), on pourroit avec quelque vraifemblance ,
expliquer fon origine par la confufion de deux grandes
appendices hyoïdiennes qui, fans une telle confufion acci-
dentelle, auroient été pareilles à celles de la Fig. IV. //,m, ).
Le confrontement des mufcles de cet os grêle /,) Fig. VI.
avec ceux des grandes appendices / 7, m, ) Fig. IV. pouxroit
encore favorifer le fyfteme, quoique la diftribution de ces
quatre mufcles bien examinée, pourroit en rendre l'appli-
cation difficile.
Le mylo-hyoïdien commun /7,7,) dela Fig. IV. le faux
mylo-hyoïdien /i) de la Fig. VI. Le bafio-glofle unique &
imparfait (a ) de la Fig. IV.& /4) dela Fig. VI. ces trois
plans mufculaires bien examinés par rapport à leur ftructure
& à leur connexion extraordinaires confrontées felon toute
l'exactitude anatomique avec la ftruéture & la connexion
ordinaires des mufcles mylo-hyoïdiens & des mufcles bafro-
gloffes, me paroiflent prefqu'aufii incompatibles avec le
fyfteme des Monftres par accident, que la fituation renverfée
des vifceres du Soldat des Invalides, dont j'ai rapporté l'hi-
étoire dans la premiére Partie de ces Remarques.
LE
Réflexions far l'hifloire anatomique de la Fille à deux
ventres à quatre extrémités inférieures , rapportée
dans la premiére Partie de ces Remarques.
Voici une récapitulation très-courte des particularités de
cette hiftoire. Le bas du dos du demi-corps étoit au bas du
fternum de la grande Fille; de forte que le devant du ventre
& des extrémités du demi-corps regardoit directement le
devant du ventre & des extrémités de la grande Fille. L'efto-
mac, le duodenum, le jejunum & une partie de l'ileum de
DESNSCIENCES. : | 469
h grande Fille étoient fimples & d’une conformation natu-
relle. L'autre partie de l'ileum étoit bifurquée ou divifée
en deux branches, dont lune continuoit fa route ordinaire
dans la grande Fille, l'autre alloit au ventre du demi- corps,
Le lobe gauche du foye de la grande Fille n’étoit pas mince
comme à l'ordinaire, mais gros comme une efpece de Iobe
droit, & il y avoit à la face inférieure ou concave de ce
lobe gauche une véficule du fiel, outre la véficule ordinaire
du lobe droit. Ces deux véficules étoient à peu -près pareilles
en conformation & en fituation ; & alloient toutes deux au
duodenum à peu de diftance lune de autre. Il n’y avoit
dans le ventre du demi-corps, outre les vaifleaux & les nerfs,
que la branche de l'ileum bifurqué de la grande Fille, avec
le refte des inteftins, les reins, les ureteres & la veflie. Le
rectum s’ouvroit dans la vefie, & la veffie fe terminoit par
une efpece d’anus en maniére de fente, par où fortoient la
matiére fécale & l’urine mélées enfemble. [1 n’y avoit aucune
marque de fexe, ni en-dedans, ni en-dehors. Les hanches,
les fefles & les jambes de ce demi-corps étoient bien con-
formées & d’un embonpoint ordinaire par la feule graifle,
fans la moindre trace de mufcles ou de fibres charnuës. Les
os étoient dans leur état naturel, entre lefquels & la peau
il y avoit tout au long dans le corps graifieux une diftri-
bution de vaifleaux fanguins & de nerfs. Il eft encore à
propos de faire fouvenir que la grande Fille fentoit les im-
reffions faites extérieurement fur la peau du demi-corps.
Selon le fyfteme des Monftres par confufion, on diroit
pour expliquer tout ceci, que de deux fujets qui fe feroient
rencontrés de front dans leur premiére conformation, l'un
auroit, par quelque contrainte, compreffion ,. ou autxe acci-
dent, été détruit jufqu’à la moitié inférieure du-bas-ventre,
de forte qu'il n’y en auroit refté que la. moitié inférieure
de ce bas-ventre avec une portion de l'inteftin ileum, &c.
&t les extrémités inférieures après la deftruétion totale de
la tête, des extrémités fupérieures, de toute la poitrine,
du diaphragme, du petit lobe ou lobe gauche du foye, de
Nan iij
470 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
Veftomac, du duodenum, du jejunum, de la premiére por-
tion de l'ileum, & de la moitié fupérieure du bas-ventre,
pendant que l'autre fujet feroit demeuré dans fon entier,
excepté le petit lobe ou lobe gauche du foye, & la petite
portion de l'épigaftre, où étoit l'union du demi-corps avec
le corps entier.
Ceux qui ne font pas entiérement au fait de la ftruéture
& dela connexion des parties, ou qui ne fe donnent pas
la peine de tout examiner, pourront trouver cetteexplication
très-fatisfaifante & très-naturelle ; mais ceux qui font en état
d'examiner à fond les difficultés fuivantes, ne a trouveront
peut-être pas de même. (
1. Diffculté. M faudroit, felon le fyfteme de la confufion,
s'imaginer que le fobe gauche du foye du grand fujet ait été
originairément le lobe droit du petit fujet, & que par la
deftruétion du lobe gauche de un & de l'autre, leurs 1obes
droits avec leurs véficules biliaires auroïent été confondus,
& auroient formé enfemble un {eul corps de foye avec deux
véficules. |
Li-defflus on pourroit d'abord demander comment cette
portion du foye du petit fujet auroit échappé la violence de
l'accident que l'on fuppofe avoir détruit non-feulementtoutes
les parties qui étoient immédiatement au-deflus d'elle, mais
auffi plufieurs autres confidérables qui étoient immédiate-
ment au-deflous. Mais voici ce qui me paroît inexplicable
par le fyfleme. Les deux corps s'étant rencontrés de front,
les petits lobes des deux foyes fe feroient par cette rencontre
mutuellement détruits, & les gros lobes de ces mêmes deux
foyes fe feroient réunis latéralement enfemble & auroient
formé dans le grand fujet comme un feul foye, dont le
deflus & le deflous, de même que le droit & le gauche,
n'auroient pas d'abord paru beaucoup différents d’un foye
ordinaire, & dont l'extraordinaire auroit été d’avoir lelobe
gauche plus gros qu'à l'ordinaire, & d’avoir deux véficules.
Mais fans parler d’autres circonftances, la fituation & l'at-
titude de la véficule de ce lobe gauche étoient à l'égard du
25 ATDMEMSMEMENRE Ni: CE SMA I] 47%
grand fujet, pareilles à da fituation & à l'attitude de la vé-
ficule du lobe droit; c’eft-à-dire, le fond de la véficule
gauche ou extraordinaire étoit en devant, & le col de cette
véficule étoit en arriére, comme l’étoient le fond & le cof
de la véficule ordinaire du côté droit.
Pour expliquer ceci felon le fyfteme des accidents par
rencontre & par confufion de deux fujets originairement
féparés & entiers; il faudra s’imaginer, ou que la fule véfi»
cule extraordinaire ait été déplacée en contre-fens, en même
temps que le lobe eût refté comme il étoit avec le bord’an-
térieur placé vers le dos du grand fujet, & le bord poftérieur
vers le devant; ou il faudra s’imaginer que tout ce lobe avec
la véficule , ait été dans cette rencontre de front, tourné
en fens conforme au grand fujet, & à contre-fens à l'égard
du petit. Cette difhculté me paroît un vrai nœud gordien
dans le fyfteme des Monftres par confufion.
11. Difficulté. L'infertion du canal cholidoque gauche où
extraordinaire dans le duodenum du grand fujet, à peu de
diftance du canal cholidoque ordinaire, comment feroit-elle
arrivée felon le fyfteme des accidents? & fuppolé que ce
canal ait quitté le duodenum anéanti du petit fujet, comment
Vextrémité de cet inteftin auroit-elle pañlé jufqu'au duodenum
. du grand fujet par le grand intervalle que la rencontre de
front avoit laiflé entre le canal cholidoque du petit fujet,
& le duodenum du grand?
Pour répondre quelque chofe à cette difficulté, il faudra:
revenir ou à la tournure de la véfieule, ou à celle de toute.
a mafle du lobe avec la véficule, c’eft-à-dire, à la premiére
difficulté, à laquelle je ne vois pas ce qu'on pourra répondre
avec folidité.
111. Difhculré. Va bifurcation de l'inteftin ileum ne parott
gueres moins difficile à expliquer felon le fyfleme des acci:
dents. Auroit-elle été formée par la confufion des moitiés:
longitudinales de deux inteftins pareils qui, dans la füite,.
auroient été débarraflés de leur union ou confufion, &
auroient formé féparément deux inteflins ou deux branches:
C2
72 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoOyALE
d’inteftins pareils ? On pourroit même tenter d'étendre cette
idée jufqu'aux deux jejunums, & aux deux duodenums ,
& de trouver par-à un moyen d'expliquer comment s'eft
formée l'infertion de deux cholidoques dans un feul duo-
denum. Mais pour peu qu'on réfléchifle fur les circonvolu-
tions en contre-fens, fur les croifements vagues, & fur les
différents intervalles changeants des inteftins de deux fujets
qui fe rencontreroient directement de front, on verra qu'elle
ne peut pas avoir lieu.
I paroîtroit peut-être plus fimple, felon le fyfleme des
accidents, d'expliquer la bifurcation de l'inteftin ileum, par
l'application de embouchure du pareil inteftin tronqué du
petit fujet à une ouverture latérale arrivée à l'inteftin entier
du grand fujet. Mais alors il faudroit auffi expliquer comment
cette ouverture latérale feroit arrivée à l'inteftin entier, &
par quelle méchanique proportionnée à leur ftruélure, deux
ouvertures flaches de deux canaux, pareïllement flaches &c
flottans, auroient refté tenduës & fans fe plifler, pendant
qu'elles s’unifloient par leurs circonférences.
IV. Difficulté. Ces deux Sujets étant unis de front, &
vis-à-vis l’un de l'autre, les vaifleaux & les nerfs du côté droit
de lun communiquoient immédiatement avec les vaifleaux
& les nerfs du côté gauche de l'autre, quoique les troncs
de ces vaifleaux & de ces nerfs de l'un fufient auffi éloignés
de ceux de l'autre, que les vertebres de l’un étoient éloignées
des vertebres de l’autre. On aura de la peine à expliquer
par le fyfleme des accidents, ces communications en contre-
fens, fur-tout celles des grofies branches, d'autant plus que
dans le petit fujet, la moëlle épiniére, l'aorte, & a veine,
cave ont été, pour la plus grande partie, détruites & perduës,
V. Difficulté. Tousles organes internes du fexe manquoient
dans le petit fujet, nonobftant que l'endroit où ils devoient
fe trouver, fçavoir le baffin, ne paroïfloit pas avoir efluyé
la moindre compreffion, & avoit fon étendu£ naturelle, De
plus, il n’y avoit pas la moindre apparence de mufcles ou de
fibres charnuës dans toute l’étenduë des extrémités inférieures
| du
D #5: 49) C/IE: NC ES 473
du mème fujet, quoique la conformation externe en fét
très-naturelle, & tout-à-fait pareille à celle d’un fujét bien
charnu & bien nourri. Cette belle conformation externe
dépendoit uniquement d’une graifle qui, par la feule diffé-
rence d’épaifleur, foûlevoit différemment la peau, & faifoit
paroître les fefles, le pli des fefles, le gros des cuifles, &
le gras des jambes dans la forme ordinaire de l'embonpoint
de ces parties, & par conféquent il n’y avoit aucune mar-
que de deftruétion par compreffion. Ces deux défauts bien
-examinés & confrontés avec les circonftances qui les accom-
pagnoient, me paroiflent encore très-difficiles à expliquer
par le fyfteme des accidents, conformément à 1a vraye
ftruéture & à la connexion ordinaire des parties.
Je ne parlerai pas ici de l’'infertion extraordinaire du
rectum dans la veffie, ni de ouverture extraordinaire de
cette veflie par un anus informe, n'y trouvant pas tout-à-fait
les mêmes difhcultés de les expliquer par le fiffeme des accidents.
ECT
Remarques fur le Memoire de M. Duvernay, donné à
| l’Academie en 1706, au figet de deux
Enfants joints enfemble.
1. C'étoit deux mâles. Ils étoient joints ou unis par la
partie inférieure de leurs troncs, de maniére qu’étant couchés
tout au Îong fur leur dos, les têtes terminoient la longueur
du total, & les cuiffes de l'un croifoient avec les cuifles de
Yautre. L'union de ces deux corps étoit en devant marquée
fur la peau par une efpece de raphé ou coûture, qui alloit
tranfverfalement depuis un côté jufqu'à l’autre, & dans ce tra-
‘jet, où font pour l'ordinaire les os pubis, on ne fentoit aucune
-partie offeufe ni cartilagineufe. Leur union en arriére fe trou-
Yoit à la rencontre des quatre fefles par un pli tranfverfal, qui
diftinguoit les deux fefles de l’un d'avec les deux fefles del’au-
tre. IL y avoit au milieu de la couture un nombril commun à
tous deux , & au milieu du pli entreles quatrefeffes, à la place
Men. 1734. * Ooao
474 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE,
de l'anus qui y manquoit, étoient les parties naturelles de l'un
& de l’autre. Les deux cuiffes de chaque côté étoient rplus:re-
culées en arriére que de coûtume dans leur articulation avec
es os des hanches.
Réfléxion. Eu feulement égard à cette conformation .ex-
terne, iln’y auroit pas grande difficulté d'admettreicile fyfte-
me des accidens, & de s’imaginer que ces enfans avoient été
joints enfemble par une confufion accidentelle, &.que les os
pubis, qu'on ne fentoit pas dans leur place ordinaire, avoient
été détruits parleur rencontre dans cette confufion. (Cepen-
dant par la diffection tous les quatre os pubis, c'eft-à-dire, des
deux os pubis de chaque «enfant, ont été trouvés dans leur
entier, & unis à l'ordinaire avec les autresos dechaque baffin ;
mais les os pubis de chaque enfant, au lieu detenir fermement
enfemble fur le devant par une connexion cartilagineufe,
étoient extrémement écartés de côté & d'autre, d'une maniére
qui me paroît inexplicable par le fyfteme des accidents.
2. Ces deux enfans avoient été renfermés fous les mêmes
membranes, & n'avoient qu’un feul cordon ombilical & un
feul placenta. Les membranes de leur enveloppe commune
étoient plus fortes & plus épaifles qu'à l'ordinaire, le placenta
étoit plus grand & plus épais, & le cordon ombilical plus
gros. Ce cordon étoit compolé d'un ouraque, de deux veines
& deitrois arteres, l’un des enfants en ayant deux, & l'autre
n'en ayant qu'une.
Réfléxion. On conviendra fans peine que deux enfants
avoient befoin d’un placenta plus grand'& plus épaisqu'àl’or-
dinaire ; mais de penfer que ce-placenta a été formé para con-
fufron de deux placentas originairement féparés, la moindre
attention fur laftruéture d’un feul cordon qui en dépend , pour
ne pas parler de celle des membranes, m'en empêche. Caril
faudroit pour céla s'imaginer que ce cordon unique a été for-
mé par l'union de deux cordons flottans, dont chacun , com-
me on fcait, doit pareillement être compofé tout au long de
trois ou quatre vaifleaux contournés en maniére de rampe, &
pleins de fang. Il faudroït encore s’ imaginer que dans les deux
D'ES US CONE No Son iN 47g
placentas originaires, le cordon-de chaque n’a pas été dans le
milieu; car ce feroit par cette inépalité qu'on expliqueroit la!
largeur extraordinaire du placenta, fans néantmoins pouvoir
auflienexpliquer l'épaifleur par cette inégalité. En un mot, la
formation d’un tel cordon flottant para rencontre & l'union:
de deux pareils cordons flottans, me préfente à peu près: lai
même difficulté que j'ai expolée ci-devant fur la formation
d'un inteftin par la confufion de deuxinteftins.
. Les ospubis de chaque enfant étant extrémement écartés.
&c éloignés de leur fituation naturelle, comme j'ai dit ci-deflus,,
ceux deT’unétoient attachésà ceux de l’autre par des ligaments
extraordinaires, très -courts &très-forts, qui permettoient
aux deux baflins un mouvement en'maniére de charniére, de
forte que par ce moyen onpouvoit alternativement écarter &
un peu rapprocher ces deux enfans l'un de l'autre.
Réflésion. Je ne comprends pas comment on peut expli-
quer par le fyfteme des Monftres accidentels, 1e grand écarte:
ment des os pubis; pourquoi par la rencontre des deux germes
ces os n'ont pas plütôt été détruits, ou courbésen dedans, que
renver{ésen dehors fi extraordinairement; comment ces mé-
mes parties étant par ce détour prefque pofées de champ, fe
font f1 heureufement rencontrées par leurs bords naturelle-
ment très-minces, fans que les unes euffent gliffé fur les au«
tres, comme s'explique M. Duvernay, & enfin d’où font pro-
venus ces nouveaux ligaments.
4. La couture tranfverfale qui marquoit für la peau l'endroit
de la jonction des deux enfans, étoit au-dedans garnie tout au
long depuis une extrémité jufqu'à l’autre, de plufieurs fibres
tendineufes extraordinaires; & le pli qui diftinguoit les feffes
de l'un d'avec les fefles de l'autre, étoit au- dedans attaché à
une bande lisamenteufe extraordinaire, très-forte &:épaifle,
quipar fes extrémités étoit attachéeaux deux ligaments courts,
par lefquels les os pubis de l'un étoient attachés aux os pubis
de l'autre.
- Réfléxion. Le fyfteme de la confufion ne me paroît pas pou-
voir ‘expliquer dx fabrique de ces deux bandes particuliéres ;
Ooo ï
476 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
fur-tout en ce qu'elles font à contre-fens de toute matiére f-
breufe qui fe trouve pour lordinaie à ces endroits & aux
environs.
s- Les mufcles droits du bas-ventre de l’un & de l'autre en-
fant, au lieu de s'accompagner bien près, depuis la pointe du
fternum jufqu'au pubis, fe féparoient en leur trajet par un
détour vers les os pubis écartés, où ils étoient attachés; de
forte quel’écartement de ces quatre mufcles formoit une efpece
de lozange, dont l'intervalle étoit rempli par une expanfion
particuliere de l’aponevrofe des autres mufcles du bas-ventre.
Par ce dérangement les mufcles obliques étoient devenus
droits, ce que M. Duvernay avoit oublié dans fa defcription;
mais Îa figure l’exprime afés.
Réfiéxion. M n'y auroit pas grande difficulté d'adopter ici le
fyfteme des accidents, fi on ne faifoit pas une attention parti-
euliére à la ftruéture naturelle des gaines de ces mufcles droits,
& à la compofition de la ligne blanche.
6. Les inteftins grêles de l'un & de l'autre enfant fe joi-
gnoïent par leurs extrémités, & aboutifloient dans un inteftin
commun , qui par le dehors étoitcommeuneefpece de colon,
& avoit à un de fes côtés un petit cœcum avecun petit appen-
dice vermiforme, mais étoit au-dedans garni de valvules con-
niventes, comme un inteftin grêle. Cet inteftin commun après
avoir fait deux courbüres en contre-fens, s’ouvroit dans un
autre inteftin plus long, qui avoit deux coœcums & deux ap-
pendices, & qui après quelque trajet fous les inteftins grêles ,
s'ouvroit d’une maniétre fort bifarre dans une double veffie
très-charnuë, qui fervoit de cloaque commun aux matiéres
fécales & aux urines de l’un & l'autre enfant, dont les uretres
étoient extraordinairement larges. Il y avoit à l'endroit de
l'union de {a double veffie avec les deux urethres de côté &
d'autre, deux paires de mufcles extraordinaires, lefquels par
un double croifement oblique de leurs fibres, repréfentoient
deux X romains mis à côté l'un del’autre, & unis enfemble
par leurs extrémités voifines, de forte qu’il en réfultoit une
elpece de lozange, qui renfermoit dans fon intervalle le cof
1AYDIENSMMTCENLE NN: C'EIS z.
commun de la double veflie, & paroifloit pouvoir faire {1
fonction d’un fphinéter très-extraordinaire.
Réfléxion. Je répéte ici la difficulté que j'ai marquée ci-deflus
à l'article II. de cette feconde partie de mes remarques, à
Toccafion des inteftins de la fille à deux bas - ventres. Mais
je demande de plus ici, comment on pourroit expliquer par
le fyfteme des accidents, la formation d’un troifiéme coœcum
& d'un troifiéme appendice, & la formation de ces deux
paires de mufcles nouveaux fi extraordinairement fitués.
7- Les veines méfaraiques des deux inteftins communs,
dont je viens de parler, fe déchargeoient immédiatement
dans la veine-cave inférieure. On fçait que dans l'état ordi-
naire les veines méfaraiques compofent un tronc commun
fous le nom de veine-porte, & que ce tronc après une dilata-
tion -particuliére, fe ramifie de nouveau, & aboutit par fes
derniéres ramifications à de pareilles ramifications dont les
troncs appellés veines hépatiques, fe déchargent enfin dans
‘a veine-cave.
Réfléxion. Une tranfplantation, pour ainfi dire, fi étrange,
fi éloignée, & même fi contraire à l'état ordinaire de l’œco-
nomie animale , une telle tranfplantation de tronc en tronc,
tous deux remplis de fang, je ne vois aucun moyen d'en
fuivre les traces par le fyfteme des accidents, pour peu qu'on
foit au fait de Ja ftruéture naturelle, & qu’on veuille fe donner
la peine de la confronter ici avec la ftruéture extraordinaire.
8. Je laifle les autres particularités de f’hifloire de ces
deux Enfants, auxquelles j'applique les mêmes difficultés.
Car enfin parmi toutes fortes de dérangement , de tranfpof-
tion, de complication de parties, foit par accident, foit par
artifice, qu'on rencontre dans l’homme, dans les animaux,
dans les arbres, les plantes, &c. où il eft évident que ces païties
ont été dans un état ordinaire avant l'accident & avant Far-
tifice; on y trouve toûjours quelques traces de leur forma-
tion, comme je le ferai voir dans un autre lieu par des exem-
ples très-bifarres, tirés de la Chirurgie & du Jardinage. Je
remets pour le réfultat général la conclufion du Mémoire de
Oo ii
478 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
M. Duvernay, qui n’eft pas entré dans le détail de toutes ces
difficultés que je viens d’expofer.
L V.
Remarques fur le Mémoire de M. Lémery, donné &
l'Académie en 1724, au fier d'un Enfant
à deux têtes.
‘1. C'étoitun Enfant né à fept mois & demi de groffeffe. IF
avoit deux têtes bien conforméesen tout, placées l’une à côté
del'autre, & pofées chacune fur un col propre. Ces deux cols
particuliers paroïffoient à l'extérieur fe joindre endefcendant,
& ne former qu'un feul col'unique & commun. Le refte de
tout le corps ne paroifloit à l'extérieur que très-fimple &:
d’uné conformation ordinaire, excepté la poitrine qui étoit
fort large, & les parties naturelles de deux fexes fituées non
à côté l'une de l’autre, comme les têtes, mais dans un même
lan vertical.
Par la diffeétion on y découvrit plufieurs chofes extraor-
dinaires, comme on verra dans les articles fuivants.
Réfléxion. La conformation externe de cet Enfant à deux:
têtes porteroit très- naturellement ceux qui ne connoiffent:
pas à fond la ftruéture, la fituation & la connexion des parties:
internes dans leur état ordinaire, à juger qu'il a été formé
par deux germes originairement féparés qui, par quelque
compreflion accidentelle à leur rencontre latérale, auroient
erdu chacun depuis la partie inférieure du col, la moitié
collatérale de tout le refte du corps, & auroient été réunis en
un feul corps par les moitiés oppofites. Cette idée me paroît
devoir, même indépendamment de l'examen anatomique:
d'un tel fujet, faire peine à ceux qui confidérent le déran-
gement inexplicable que les parties devroient fubir par une:
telle confufion. Je vais fuivre pas à pas lexpofition anato-
mique de la ftruéture interne de ce foetus, & je marquerai fi
chaque article mes Réflexions.
2. Ï! y avoit deux épines ou colomnes vertébrales entiéres:
Re — À
Dr ESC .T EN. CE, S 47.
depuis fa bafe des crânes jufqu’à l'extrémité des coccyx fituées
à.côté l'une de l'autre, & bien près l'une de l'autre. Les douze
vertebres dorfales de chaque épine ou colomne portoient fur
les côtés oppofés douze côtes entiéres qui par le devant fe
joignoient à un flernum.commun, -& ces mêmes vertebres
portoient fur des -côtés les plus voifins douze fragments où
petites portions,de côtes qui,parla rencontre & l'aflemblace
de leurs-extrémités, formoient une tefpece de faufie épine
entre les deux vrayes-épines. I[ y avoit.en haut, comme à
l'ordinaire, deux-omoplates, deux clavicules deux bras avec
des reftes.des deux extrémités fupérieures. H y avoit en bas
un feul baffin commun avectoute la fuite ordinaire des deux
extrémitésinférieures. Au lieu des os facrum &.des COCCYX,
onne voit dans la Figure qu'unefuite uniforme.devertebres
toutes pareilles à celles .des lombes, avec.cette feule diffé-
rence qu'elles diminuent en volume, à mefure quelles ,de-
viennent inférieures. |
Réfléxion. La jonction artificielle de deux fquelettes ordi-
naires, qu'on auroit placés l’un à côté.de l’autre, après.en avoir
«emporté da plus -grande portion des.côtes des.côtés voifins
avec les:omoplates, les os des hanches, &tout le-refte desex-
trémités fupérieures &c inférieures de.ces mêmes côtés; .cette
jonction, dis-je, que M. Lémery a très-ingénieufement ex-
pofée, paroît d'abord le moyen le plus fimple & leplusnaturel
d'expliquerla formation de la charpente offeufe de ce fœtus,
par la confufion de deux charpentes offeufes originairement
toutes entiéres, & appartenantes chacune à un corps tout
entier.
Ce moyen pourroit fans grande difficulté favorifer le fyfte-
medes accidents par rapport à.cet article, fi par la mémevoye
les autres chofes extraordinaires quife rencontrent dans 4a
conformation de ce fœtus, pouvoient être expliquées avec
autant de facilité & avec autant de vraifemblance, que des
deux.épines, &c. comme M. Lémery:paroît le prétendre,.en
difant, que l'examen des parties internes we démentoit point les
idées que les parties externes lui ayoient fait naître.
480 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
3- I yavoit dans la poitrine de ce fœtus deux poulmons
entiers, c'eft-à-dire, quatre grands lobes, avec quatre troncs
de bronches & deux trachées, qui répondoient à l'ordinaire
aux deux cols, &c.oupour mieux dire, il y avoit dans chaque
côté de la poitrine un poulmon entier avec fes deux grands
lobes, deux troncs de bronches & une trachée.
Réfléxion. Cet article paroît encore pouvoir favorifer à peu
près aux mêmes conditions que celui des deux épines, le
fyfteme des accidents, ou des monftres par confufion. Mais
les difficultés qui y font contraires, me paroïflent encore plus
confidérables ici par rapport à la éonformation bifarre du cœur
monftrueux & unique, mais principalement par rapport à la
route extraordinaire des groflesartéres & veines entre ce cœur
& les poulmons, & par rapport à la diftribution des aortes &
des veines-caves, comme je vais faire voir dans les articles
fuivans.
4. Ce cœur étoit unique, placé au milieu de la poitrine, &
femblable à une gibeciere. I ne formoit qu'un feul ventricule,
qui avoit deux embouchures, une ä droite, & l’autre à gauche,
de chacune defquelles partoïent deux troncs d’artéres, qui fe
portoient un peu fur les côtés, & dont l’un étoit fupérieur à
l'autre. Le tronc fupérieur étoitun tronc d’aorte, & l'inférieur
étoit un tronc d’artére pulmonaire ; de forte que de ce ventri-
cule unique fortoient quatre troncs d’artéres, fçavoir deux
aortes & deux artéres pulmonaires; une aorte & une artére
pulmonaire du côtédroit; l'autre aorte & l'autre artére pulmo-
naire du côtégauche.
H n'y avoit pour toute oreillette qu'une poche membraneufe,
fituée à la partie poftérieure du ventricule, & qui fe continuant
fur la bafe du cœur, formoit une efpece de cul-de-fac entre les
quatre artéres. Elle ne faifoit avec le ventricule qu'une même
cavité, & recevoit par fa partie fupérieure, du côté droit, la
veine-cavefupérieure, qui feglifloit entre les deux troncs d’ar-
téres du côté droit. Elle recevoit auffi par fa partie inférieure
la veine-cave inférieure, & par fes deux côtés deux troncs
de veines pulmonaires. I y avoit au bas de la veine-cave
fupérieure,
+
5 EMA EN Cie S 48n
fupérieure, non feulement des valvules triglochines, mais
il y avoit encore fur les côtés de cette veine deux petites
cloifons qui la féparoient des deux artéres du côté droit, &:
qui paroifloient pouvoir faire l'office de valvules, quand le
fang étoit poufié de bas en haut.
Voilà le précis de lexpofé de M. Lémery. Il en conclut,
que ce cœur unique & monftrueux étoitun compofé de deux
cœurs confondus enfemble par une preffionaccidentelle, &c.
que chaque moitié de ce compolé étoit originairement le
cœur de celui des deux fœtus, qui étoit du même côté de
cette moitié; & que le cœur unique ainficompolé, faifoitici
“office de deux cœurs.
M. Lémery prend pour preuve convaincante de l'union de
deux cœurs, Îes deux troncs d’artéres qui partoient de cha-
que côté de ce cœur unique, en prétendant que la diftribu-
tion de deux troncs à droite, & de deux à gauche, défrgnoit
dans ce compofé la moitié qui en appartenoit à chaque fœtus.
- I finit ainfr fon Mémoire : Comment deux cœurs ori-
ginairement féparés auroient-ils pû n’en faire plus qu'un feul,
fi les cloifons qui les féparoient ne fe fuflent ouvertes, &
n'euflent permis à ces deux cœurs de s'appliquer immédia-
tement lun contre l’autre, & de s'unir intimement?
Réfléxion. M. de Fontenelle dans fon Hifloire au fujet de
Yunion de deux fquelettes, felon l'idée de M. Léméry, dit
que des yeux anatomifles y trouvoient fürement les traces
de ce qui étoit paflé. Mais j'avouë que jufqu’à prefent les
miens ne les ont pas pü troüver par rapport à ce cœur & à
fes dépendances, ni même par rapport aux vifceres du bas-
ventre. Voicideux difficultés qui entr'autres m'en empêchent.
Premiére diffculre. M faudroit, felon l'idée de M. Lémery,
s'imaginer que deux fœtus ori ginairement entiers, feferoient:
trouvés à côté l'un de l'autre, & qu'ayant été mutuellement:
comprimés par accident, les parties laterales voifines de l'un
& defautreauroient d'abord été détruites jufqu'’à la rencontre
des deux cœurs. Mais je ne vois pas comment les deux moi-
tiés, ou grands lobes de poulmon, qui dans la rencontre.
Men 17 34: + Ppp
482 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
d'une telle attitude latérale fe feroient trouvés entre les deux
cœurs, auroient plus réfifté à leur deftruction par leur com-
preffion mutuelle, que les autres parties naturellement plus
fermes qu'eux, comme les os, les mufcles, &c.
La difficulté me paroît d'autant plus grande, que, felon
l'expreffion du Mémoire de M. Lémery, les deux côtés de la
poitrine étoient occupés par deux poulmons entiers, ce qui
marque que les deux grands lobes voifins étoient auffr entiers
que les deux lobes éloignés. Je ne n''arrète pas ici à la figure
qui accompagne ce Mémoire, & dans laquelle les deux grands
lobes voifins font pour la plus grande partie cachés par les
deux autres grands lobes; ce qui a été apparemment fait ex-
près pour mieux faire voir ka diftribution des gros vaifieaux
du cœur.
Seconde difficulté. On fçait que dans l'état naturel ou ordi-
naire le cœur humain eft à peu-près d’une figure conique,
applatie par un côté, arrondie par la bafe & par la pointe.
On fçait qu'il eft couché à plat dans le péricarde fur le dia-
phragme, que fa pointe eft beaucoup plus tournée à gauche
qu'en devant, & fa bafe beaucoup plus à droite qu'en arriére ;
en un mot, que fa fituation eft prefque tranfverfale. On
fçait la difpofition de la cloifon des ventricules, celle des
deux ouvertures de chaque ventricule, celle des oreillettes,
& enfin celle des gros vaifleaux.
J'ai examiné autant qu'il m'a été poffible, toutes fortes de
coupes de deux cœurs femblables, & de leurs oreillettes, &c.
non pas tant en prétendant pouvoir trouver un affemblage
de différentes portions de deux cœurs qui imitât entiérement
la compofition du cœur monftrueux dont il s'agit, qu'en
efperant trouver au moins quelques petites traces de rapport
entre ces portions, à peu-près comme on en peut trouver
dans les combinaifons extraordinaires, foit artificielles, foit
notoirement accidentelles, de quelque partie d'animaux ou
de plantes, même dans les combinaifons les plus bifarres.
Mais il m'a été impoffble d'en trouver ici, & je n'entrevois
aucun moyen d'y parvenir, en examinant avec de vrais yeux
DES $S:CTEN C'E:s 483.
anatomiftes. Les tentatives par difleétion & par figures ex-
primeroient plus évidemment la difficulté, que la defcription,
H eft bon d’avertir que je parle ici des cœurs femblables
en conformation : car fi l’un des deux étoit conformé à
l'ordinaire, & l'autre conformé à contre-fens, comme
l'étoit celui du Soldat des Invalides, dont j'ai parlé dans la
premiére Partie de mon Mémoire, je n’y trouverois peut-
être pas tant de difficulté; mais auffi alors la conformation
originairement extraordinaire d’une partie, rendroit entié-
rement inutile tout ce qu'on pourroit avancer en faveur de
k conformation accidentelle du total.
Les deux petites cloifons qui, au bas dé la veine-cave fu+
périeure, outre les valvules triglochines ordinaires, étoient
fur les côtés de cette veine, & a féparoient des deux arteres
du côté droit, étoient certainement des parties furnumé-
raires, dont il ne fe trouve ni traces ni apparence dans
l'état ordinaire. Elles étoient même organifées, puifqu’elles
ont paru à M. Lémery pouvoir faire l'office de valvules,
Ainfi voilà dans un même fujet, parmi & outre les parties
dont la conformation extraordinaire eft cenfée être acciden.
telle, d’autres parties extraordinaires & furnuméraires, dont
on ne peut attribuer ou rapporter la formation à aucun acci-
dent, & qu'on eft par conféquent obligé de regarder comme
réellement originaires. :
. Les deux arteres pulmonaires, après avoir fait un peu
de chemin fur les côtés, fe partageoient chacune en deux,
pour les deux grands Jobes de chaque pouimon entier.
-: Les deux aortes formoient chacune deux arteres carotides,
une artere fouclaviere, un canal de communication avec
l'artere pulmonaire du même côté, une artere axillaire; &
enfin ces deux aortes formoient chacune de fon côté une
aorte defcendante, laquelle alloit fe loger avec la pareille
aorte defcendante de l’autre côté, dans une finuofité formée
par la fauffe épine, où les deux aortes defcendantes s’anafto-
mofoient enfemble, & ne formoient plus qu'un ul tronc
Pppi
484 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
commun qui fourniffoit les divifions & fubdivifions d'arteres
comme dans l’état naturel. {
Réflexion. Pour placer latéralement aux deux côtés de fa
bafe de ce cœur compolé, les deux gros troncs d'arteres, &
y placer chaque tronc d'aorte au-deflus de chaque tronc
d’artere pulmonaire, il faudroit s'imaginer dans le cœur ori-
ginaire du fœtus gauche une portion ou coupe, non-feule-
ment très-bifarre, mais encore très-défavantageufe par fe
tournüre, pour pouvoir en imaginer l'union avec le reftant
de l'autre cœur. Mais à l'égard des gros vaifleaux du cœur
droit, ou celui du fœtus qui étoit à droite, il me paroît
impoflible d'imaginer le tronc de l'aorte, le trone de l’artere
pulmonaire, & le canal de communication contournés &
diftribués, comme il le faudroit felon lexpofition de M.
Lémery, & flon la Figure qui les reprefente, à moins que
ce cœur droit ou du côté droit ne fût originairement formé
à contre-fens, comme j'ai dit ci-deflus, par rapport au côté
droit du cœur monftrueux.
6. Au-deffous de chaque tête, étoit un pharynx fuivi d'un
œfophage, qui defcendoit dans la poitrine commune le long
des parties latérales externes de l'épine particuliére qui ré-
pondoit au col d'où il venoit. Ces deux œfophages, lun à
gauche, & l'autre à droite, alloïent enfuite percer les parties
latérales du diaphragme, & fe terminoient par deux eftomacs,
un de chaque côté, qui occupoient auffi les parties latérales
de la région fupérieure du bas-ventre.
Chacun de ces eflomacs formoit un arc ou demi-cercle,
& ils entouroient par-R le foye, à l'exception de fa partie
fupérieure, de maniére que la petite courbüre de chacun re-
gardoit le foye, & la grande regardoit les fauffes côtes. Ils
fe terminoient chacun par un pylore au-deflous du foye, &
il partoit de chaque pylore un petit bout d’inteftin; de forte
qu'il y avoit deux pylores avec deux bouts d’inteflins. Ces
deux bouts ou portions fe réunifloient bien-tôt en un canal
commun, qui {e portoit de la région épigaftrique dans le
DES SCIE NC ris 485
flanc droit, & après avoir fait fes circonvolutions à l’ordiz
naire, aboutifloit entre les deux releveurs de l'anus.
Réfléxion. Si Von examine attentivement & avec toute
l'exactitude anatomique la difpofition de ces deux œfophages,
de ces deux eftomacs, & de ces deux bouts d'inteftin, qui
apparemment tenoient lieu de deux duodenums, on trouvera,
fi je ne me trompe, fur l'œfophage du côté droit, fur l’efto-
mac du même côté, &fur le bout d’'inteftin qui en dépend,
la même difficulté que j'ai fait remarquer ci-devant fur le
côté droit du cœur monftrueux, fur les gros vaifleaux, &
fur le canal arteriel de ce côté; fçavoir, 1.2 que fa fituation
extraordinaire de ces parties, telle qu'elle eft ici, n’eft pas
concevable, fans y fuppofer une organifation tout-à-fait à
contre-fens. 2.° qu'une telle organifation ne pouvant être
expliquée par aucun accident, paroît réellement originaire.
L’aboutifiement des deux petits bouts d'inteftin à un fimple
canal inteftinal très-long, & la formation de toute la fuite des
différentes circonvolutions flottantes d’un tel canal, par la
confufron accidentelle de deux pareils canaux ori ginairement
féparés, me paroïflent encore auffi peu favorables au fyfteme
des accidents, que l'inteftin bifurqué de a Fille à un corps
& demi, l'inteftin commun aux deux Enfants joints enfemble,
& le cordon ombilical unique des deux Enfants {éparés,
dont les hiftoires font rapportées ci-devant.
7- Le foye étoit au milieu de la partie fupérieure du bas-
ventre entre les deux eftomacs, & dans lefpece de cercle
qu'ils formoient autour ; il n’étoit point divifé en lobes, fa
partie fupérieure, au lieu d’être dans le bas-ventre, & au-
deflous du diaphragme, comme le refle de fon volume,
traverloit la portion tendineufe du diaphragme, & occupoit
la partie inférieure de la poitrine, où elle étoit fortement
attachée au péricarde; la veine ombilicale lui fervoit auffi de
igament comme à Fordinaire.
Réfléxion. S'H n'y a point d'inconvénient d’idmettre dans
un même fujet, deux fortes d'extraordinaires, lune par acci-
dent, & l'autre d’origine, on ne feroit pas grande difficulté
Pppii
486 MEMoIREs DE L'ACADEMIE Royare
de Jaiffer au fyfteme des accidents, la formation de ce Foye
extraordinaire, d'autant plus que dans l'expolé, il n'eft pas
fait mention de conduits biliaires, ni de veine-porte, qui
auroient peut-être donné lieu de juger autrement.
V.
Après ces quatre exemples détaillés des Monftrescompofés,
mon deflein étoit de donner un abrégé chronologique de
tous les autres, dont l’Académie a pris connoiflance, & dont
plufieurs font affés favorables au fyfleme des accidents,
d’autres y paroiflent contraires, & quelques-uns très-équi-
voques. Mais comme on peut, par le moyen des Tables de
M. Godin, de cette Académie, trouver affés facilement tous
ces autres exemples, je me contenterai d'en rapporter deux
que j'accompagnerai d’autres femblables, tirés de notre
célébre Riolan, & y joignant quelques-uns qui n'ont pas
encore été inférés dans les Mémoires de l’Académie.
1705. Par M. Littre. Une Matrice partagée intérieure-
ment en deux cavités latérales, par une cloifon mitoyenne,
auxquelles deux cavités répondoient extérieurement deux
convexités très-diftinétes ; le refte de l'extérieur du corps de
cette Matricé étoit fimple & uniforme comme à l'ordinaire;
chacun des deux fonds n’avoit qu'une trompe, &c. laquelle
étoit avec le refte de fes accompagnements, du côté oppofé
à l'autre fond, & il n'y avoit rien de tout cela aux côtés
voifins de ces deux fonds.
Réflexion. Ce n'eft pas le feul exemple d'une Matrice
double. Riolan, dans fon Anthropographie, en rapporte
deux exemples, l'un d’une femme difléquée dans les Ecoles
des Lombards en 1599, & l'autre qu'il avoit lui-même
difléquée en 1 61 5. En parlant de la premiére, il dit : Urerus
fepto medio divifus erat ; & de l'autre: Ab orificio externo ufque
ad fundum duplex erat Matrix , mediano pariete [ecreta; reliquæ
partes genitales fimplices erant, ac Ji fuiffet unicus uterus
Cela me paroît auffi difficile à expliquer par le fyfteme
des accidents, que le contre-fens des vifceres du Soldat des
Die s17S 10 AE M CHE rs 487
Invalides, & la formation des parties furnumeraires bien
organifées, dont il y a tant d'exemples bien averés, comme
de fix doigts, de huit vertebres du col, de treize côtes, de
différents mufcles, &c. tels que les mufcles peétoraux extra-
ordinaires, dont M. Dupuy, Médecin de Rochefort, a com-
muniqué lhiftoire à l Académie en 1726.
M. de Fontenelle dans fon Hiftoire, au fujet de l'obferva-
tion de M. Littre, dit avec grande raifon, que les difpofitions
extraordinaires des parties internes doivent faire naître aux
Médecins des cas imprévus, qui rompent toutes les mefures
de l'art. Il applique fa réflexion au cas de fuperfétation, & un
peuaprès : Comment, dit-il, cette matrice double at-elle pü
être l'effet d’un accident fortuit du développement! il eft diffi-
cile de fimaginer, répond-il. Seroit-ce, continue-t-il, qüe
deux œufs femelles fe feroient attachés enfemble, & que
toutes les parties de fun auroient péri, excepté fa matrice,
qui par conféquent fe feroit trouvée double dans le fœtus ré-
fultant de ce mélange? Cette fuppofition, répond encore M.
de Fontenelle, paroït un peu forcée.
- En 1723 M. Geoffroy communiqua une obfervation fur
deux enfants unis l'un à l’autre par un nombril commun, de
forte que le tout enfemble n’étoit que deux moitiés de deux
corps unies par le plan inférieur de chacun. Ces deux moitiés
étoient pofees du même fens, & les têtes qui terminoient le
tout, étoient tournées en même tems, ou vers le haut, ou
vers le bas, &c. On a vü ce monftre déja âgé de trois femaines
bien vivant. Ces deux enfans avoient deux nourrices; ils
tétoient & mangeoient de la bouillie avec beaucoup d'appetit
& un grand air de fanté : quelquefois lun tétoit, pendant que
Yautre dormoit; ils ont été tous deux baptifés, & nommés
Jeanne.
. Si des monftres à deux têtes, comme celui-ci, dit M. de
Fontenelle là-deflus, vivoient aflés longtemps, il feroit
curieux d’obferver la différence des penfées & des volontés
des deux têtes, & comment le monftre total fe prendroit à les
accorder , ou à les facrifier les unes aux autres,
a
488 MEMoOIREs DE L'ACADEMIE RoYyALE
Réfléxion. Je rapporte cet exemple en partie, à caufe defa -
reflemblance avec celui de M. Duvernay, en partie pour don
ner, en attendant mieux, quelque fatisfaction au fouhait de
M. de Fontenelle, par deux exemples tirés d’une diflertation
latine de Riolan, fur un monftre né à Paris en 1 60 5, laquelle
fe trouve à la fin de fon Anthropographie. Voici fes propres
paroles : /1 Anglia non procul ab Oxonia natum eff monftrum
biceps , quatuor manibus donatum , fed ventre unitum , à” partibus
inferioribus unicum. Ex iflis gemellis uno vigilante , alter dormiebat;
dum hic lætam faciem offenderet , ille triflis 7 mæflus apparebat;
quindecim dies vixére, Jed alter unico die alteri fuperviit.
Memorabilis ef? hifloria monftri cujufdam in Northumbria orti,
quod ventre cohærebat, gemino capite, quaternis manibus , fed infe-
riores partes communes habebat. Id Rex diligenter &° erudiendum
€ educandum curavit, ac maxime in muficis, qua inre mirabiliter
profecit, quin à varias inguas edidicit, 7 variis voluntatibus duo
corpora fecum difcordia diffentiebant , ac interdum litigabant , cum
aliud alteri non placeret ; interdum veluti in commune confulrabant.
Îllud etiam in illo memorabile fuit, quod cum inferné crura lumbive
_offenderentur, utrumque corpus communiter dolorem fentiret ; cum
vero fuperse pungeretur , aut alioqui læderetur , ad alterum corpus
tantüm doloris fenfus perveniret; quod difcrimen in morte fuit magis
perfpicuum. Naïn cum alrerum corpus complures ante alterum dies
extin@tum fuiffet, quod fuperfles fuit, dimidio fui computrefcente
paulatimcontabuit. Vixit id monffrum annos viginti odlo, ac deceffrr,
adminiffrante rem Scoticam Joanne Prorege.
» C'eftà-dire : En Angleterre, pas loin d'Oxford, naquit
» un Monftre à deux têtes, & ayant quatre mains. IL étoit
» joint par le ventre, & unique par rapport aux parties infé-
» rieures. Tandis que l'un de ces deux jumeaux veilloit, Fautre
» dormoit; & lorfque le vifage de lun montroit de la gayeté,
» l'autre paroifloit trifle & mélancholique. Ils vécurent quinze
» jours, l'un n'ayant furvécu l'autre que d'un feul jour.
» On raconte auffi une hiftoire mémorable d’un Monftre né
» dans le Northumberland, lequel étoit joint par le ventre,
» ayant deux têtes & quatre mains, mais il avoit les parties:
infcrieures
..
D'EZS@SACDT.E N!C ENS 489
inférieures communes. Le Roy le fit élever & inftruire avec
foin, & fur-tout il lui fit apprendre la mufique; non-feulement
il y fit des progrès merveilleux, mais il apprit encore plu-
fieurs langues. Ces deux corps ne s'accordant pas, àvoient
des volontés différentes, & fe querelloient quelquefois quand
ce qui plaifoit à l’un ne plaifoit pas à l'autre; quelquefois auffi
ils prenoient confeil un de Fautre. Ce qu'il y eut de plus
remarquable, fut que lorfqu’on leur faifoit mal aux cuifles où
aux reins, l'un & l'autre reffentoit de la douleur; mais lorf.
qu'on piquoit, ou qu’on faifoit autrement mal à l’un des deux
aux parties fupérieures, il,n’y avoit que l’un des deux qui
le fentoit. Cette différence fut encore plus évidente à la mort; .
car l’un des deux corps étant mort plufieurs jours avant l'autre,
le furvivant dépérit peu à peu, à mefure que l'autre moitié
de lui-même pourrifioit. Ce Monftre vécut 2 8 ans, & mourut
fous le gouvernement de Jean, Vice-Roy d'Ecofle. |
En 1733, M.ie Cardinal de Polignac a fait voir à la
Compagnie, deux petits Veaux joints enfemble par leurs
poitrines & par le derriére de leurs têtes; de forte que la
fituation des deux têtes par rapport à celle des deux troncs
étoit telle, qu'en regardant direétement le milieu du dos de
Tun, on voyoit tout-à-fait à plein & en même temps les
parties latérales, ou le profil des deux têtes, & en regardant
lune des deux têtes direétement de front, on voyoit tout à
la fois les deux côtés ou le profil des deux troncs & de toutes
leurs parties. Il n’y avoit aucun moyen de diftinguer exté-
rieurement auquel des deux troncs appartenoït chaque tête;
lune étoit plus difforme que l'autre, & avoit au haut du front
une efpece de cavité quadrangulaire, dans laquelle les deux
yeux étoient placés fort près l'un de l'autre, & en partie
cachés par les bords de la cavité /Woyés les Fig. X11. XIII.
© XIV). La difpofition de ces deux Veaux étoit en cela
à peu-près comme celle du Fœtus humain, dont M. de
la Condamine à donné la defcription & la figure dans les
Mémoires de cette année. ,
Son Eminence à encore fait voir à la Compagnie deux
Men. 17 34 . Qgqgq
490 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
petits Pigeons, dont chacun avoit deux têtes unies enfemble
par les parties latérales de leurs crânes. Ces deux Monftres
étoient tous deux d'une même mere, l'un étoit né un mois
après l'autre. Dans l'un de ces petits Pigeons, les deux têtes
étoient chacune articulées avec un petit col particulier, & ces
deux petits cols formoient enfuite un feul col commun pofé
fur un ful tronc, dont toutes les autres parties étoient fimples
&à l'ordinaire, comme celles d’un feul & unique tronc. Les
deux têtes de l'autre petit Pigeon étoient articulées fur un
feul col comme les têtes du Faon du Roy, & du petit Veau
de M. de Reaumur, dont il eft parlé au commencement de
cette Partie. Woyés les Fig. XV. XVL XVI. à XVI.
Réfléxion. La difficulté me paroïît ici en général fembla-
ble à celle que j'ai marquée dans l’examen du Faon du Roy,
& du Veau de M. de Reaumur; mais en particulier elleme
paroït beaucoup plus grande par rapport à la difpofition
atérale des têtes des petits Veaux ide M. le ‘Cardinal, & de
celles du fœtus humain de M. de la Condamine.
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Mem. de ltead 1784 pl. 27.pag.#90.
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DES SCIENCES . 491
_ QUE L'OBLIQUITE DE L'ECLIPTIQUE
diminuë, àr de quelle maniére ;
ET QUE LES NOEUDS DES PLANETES
font immobiles.
Par M. GopDi.
E traiterai ici ces queftions aftronomiquement, & fans Affmblée
m'embarrafler d'aucune Théorie phyfique, foit en dé- pie é
duifant immédiatement des obfervations ce que j'aurai à 3 :. À 4
établir, foit en faifant des hypothefes dont on verra l'accord
avec les obfervations. ,
Quelque précifion que feu M. de Louville ait apportée
dans fon Mémoire fur la diminution d’obliquité de 'Eclip- 444 Erdir.
tique, qu'il détermine d'une minute en 100 ans, il y a Z#/. 1719:
toüjours deux raifons de douter de la certitude de cette dé-
termination : la premiére, à caufe qu’il employe les mêmes
réfractions, telles que nous les avons ici, pour corriger les
obfervations des anciens Aftronomes, faites en différents
temps & en différents lieux. La feconde eft que fa hauteur
du Pole à Marfeille, qui eft le principal fondement de fon
“examen, ne paroît pas bien certaine, elle a été donnée encore
par d’autres Aftronomes, M.r's Gaflendi, Caffini, de la Hire,
& il y a entre eux environ 4 minutes de différence.
Pour éclaircir ces difficultés, j'ai crü qu'il étoit mieux
d'employer des obfervations récentes, faites avec l'exactitude 0
de l’Aftronomie moderne, & dans les mêmes lieux, ou dans
différents, mais dont les réfractions fuflent connuës.
Celles que je choifis pour fondamentales, furent faites,
en 1655, à Bologne, par feu M. Caflini, au gnomon de
S.t Pétrone qu’il venoit de conftruire; l'obliquité de l'Eclip- .
tique qui en réfulte, eft de 23° 29° 15". è
* Oril eft certain, par toutes les obfervations faites à Paris :
Qqq ij
492 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
& en d’autres parties du monde, ces derniéres années, depuis
1730, que cette obliquité eft à préfent de 23° 28’ 20",
fans qu'il y ait peut-être $ fecondes d'erreur. Elle a donc
diminué de $ $ fecondes en 80 ans, ou, à très-peu près,
d'une minute en 90 ans. Par-à on repréfentera les obfer-
vations des Aftronomes modernes, M.'s Richer, de la Hire,
Roemer, Bianchini, de Louville, à $ fecondes près. On
trouvera, par exemple, pour n'en citer que deux dont les
conditions font connuës, & que M. de Louville n'a point
citées, que cette obliquité a dù être en 1681 de23°29',
telle que M. de la Hire l'a trouvée alors à Paris. Qu'en 1706,
elle a été de 23° 28’ 41”, comme elle réfulte des obferva-
tions de M. Roemer, faites à Coppenhague.
Puifque l'angle de l'Ecliptique & de l'Equateur diminué,
il faut que l'un de ces deux cercles s'approche de l'autre. Si
Yon fuppole que ce foit Equateur qui s'approche de l'Eclip-
tique, ou que dans le fyfteme de Copernic, l'axe de Ia ré-
volution diurne de fa Terre devienne peu à peu perpendi-
culaire au plan de fon orbite, en ne confidérant que ce qui
doit arriver jufqu'à la confufion des deux cercles, ou, ce qui
eft la même chofe, jufqu’au parallelifme exaét des deux axes
de la révolution diurne & du mouvement annuel; il eft
évident que les Etoiles fixes, indépendamment de ce qui
doit réfulter de leur mouvement en longitude, changeront
leur déclinaifon par les loix fuivantes.
1.° Les Etoiles dont la latitude & fa déclinaifon font de
même dénomination, toutes deux boréales, ou toutes deux
auftrales, augmenteront en déclinaifon, fi leur latitude eft
plus grande que leur déclinaifon, & au contraire, frelle eft
plus petite, leur déclinaifon diminuëra.
2.° Si la latitude & la déclinaifon font de différente
dénomination, les Etoiles diminuëront de dédclinaifon juf-
qu'à devenir nulle; après quoi cette déclinaifon prendra a
même dénomination que la latitude, & fera fujette à la
premiére loy.
Or on peut fçavoir fort exaétement quel doit être le
DAME SLCA EAN een is 1 M das
changement d'une Etoile fixe en déclinaifon, en vertu de
fon mouvement en longitude qui eft connu, & de fa décli-
naifon une fois obfervée : Donc en prenant une telle ob-
fervation pour époque, on aura dans la fuite un fort bon
moyen de reconnoitre fi a déclinaifon des Etoiles fixes
fubit d’autres changements que ceux qui leur arrivent par
eur mouvement en longitude; & par conféquent fi l'Equa-
teur s'approche de l'Ecliptique, ou celui-ci de l'autre. Dans
ce fecond cas, la déclinaifon des Etoiles fera telle que le
mouvement en longitude la doit donner, mais leur latitude
changera, au lieu que dans le premier cas elle eft toüjours
la même, & la déclinaifon obéit à deux caufes de variation.
Je fuppofe ici que l'axe de ce mouvement, foit de lEclip-
tique, foit del'Equateur, paffe par les points des E quinoxes,
parce que je ne vois rien encore qui m'oblige de le fuppoler
autrement fitué. On voit bien d'abord qu'il ne paffe pas par
les points qui répondent aux Solftices, puifque l'obliquité
diminuë, & que celle de ces points que nous prenons pour la
plus grande, devroit toüjours êtrela même. D'où il fuit, que
s'il eft vrai, comme plufieurs Sçavans l'ont cru, qu'Herodote*
ait voulu dire d'après les Egyptiens , que l'Ecliptique eût été
autrefois perpendiculaire à Equateur, fon obliquité pré-
fente de 23° 28' nous prouve que ce mouvement ne fe
fait pas fur des points plus éloignés des Equinoxes, que de
23° 28’; mais fans faire aucune attention à cette prétenduë
tradition, je fuppofe Faxe de ce mouvement placé comme
j'ai dit, & je vois que toutes les obfervations & les raifonne-
ments aftronomiques concourent à l'y fixer : on én va voir
une partie dans la fuite.
Si les Anciens nous avoient laiffé des obfervations exactes
de la pofition des Etoiles fixes, & fur-tout en déclinaifon,
Teur comparaifon avec les nôtres décideroit aujourd’hui lequel
des deux cercles s'approche de l'autre : mais celles que rap-
porte Ptolémée * les feules qui nous reftent de l'antiquité, ne
font pas propres à nous éclaircir fà-deflus. Tantôt elles favo-
rifent une opinion ; elles font, par exemple, approcher
Qqqi
* Hifi. Ub. 24
ed hac non
videtur dixife.
Vid. Pompon.
Melam lib.
2 eum Vadiant
omment. page
mir SS. RE
caflorii Homo-
centr. Ject. .
cap. 8. Riccrol,
Almag. novum,
1. 1.Pe 10 Sa
* LD Na
Almagefl,
494 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLe
J'Équateur de FEcliptique immobile, & tantôt l'opinion
contraire : pour plus de précifion, j'ai corrigé ces déclinai-
fons rapportées par Ptolémée, en cette forte. Il eft vraifem-
blable que cet Aftronome les a déduites de leur hauteur
méridienne adjoûtée ou fouftraite de la hauteur del’E‘quateur
à Alexandrie, qu'il a toüjours fuppofée dans fon Almagefte
de 59° 2'; mais M. de Chazelles la trouva en 1692 de
$ 8° 49: Par-là les déclinaifons boréales de Ptolémée font
trop petites de 13’, & les auftrales trop grandes de la même
quantité ; mais comme cela ne me donnoit aucun éclaircifie-
ment, j'ai pris un autre chemin. Suppofant & corrigeant
les déclinaifons que Ptolémée rapporte, dont lobfervation
Jui a été plus facile que toute autre, & fuppofant auffi l’obli-
quité de l'Ecliptique de fon temps, telle qu'elle rélulte de
celle d’aujourd’huy augmentée de 1’ en 90 ans, & prenant
enfin le lieu des Étoiles, comme il réfulte auffi des obferva-
tions modernes, j'ai cherché quelle devoit être {a latitude de
ces Etoiles fixes; & comparant cette latitude avec celle
qu'elles ont aujourd'hui, j'ai reconnu que la plüpart s'ac-
cordent à donner à l'Ecliptique le mème mouvement que
demande la diminution de fon obliquité depuis Ptolémée
jufqu'à nous.
Ce même argument qui eft très-fort, a été employé par
Progymnafn. T ycho le premier pour le même fujet : mais parce qu'il
5. 1.7-233- prend les déclinaifons des Etoiles telles que Ptolémée les
Œubms. donne, & qu'il fuppofe l'obliquité de l'Ecliptique trop
grande de plus de $”, la même qui a été donnée par Era-
tofthenes, mais deux fiécles avant J. C. & trois & demi avant
Ptolemée; & enfin queles latitudes qu'il donne à ces Etoiles,
tirées de fes propres obfervations, n'ont pas la précifion des
nôtres, il étoit néceflaire de rénouveller cet argument, &
de lerevêtir de toutes fes circonftances les plus conformes
aux faits que nous connoiffons.
En voici un exemple fur l'Etoile appellée /4 claire de
Almag. nv. lAïgle, qui eft une de celles que Riccioli regarde comme
#27.#42: peu favorables à cètte hypothele,
D ES:N9 CLEAN CES 9
Sa déclinaïfon, fuivant Ptolémée, eft de s” 50’boréale;
yadjoûtant 13", elle viendra de 6°. 3’. Par mes obferva-
tions de la longitude de cette Etoile faites en 1732 &
1733, & le mouvement connu des Etoiles fixes, elle étoit
du tems de Ptolémée en 5° 33° %, & par conféquent fort
proche du colure des Solftices, ou du lieu de la plus grande
variation en latitude; l'obliquité étoit alors de 2 3° 46', d'où
l’on trouvera la latitude decette Etoile de 29° 43’ & environ
10"; mais cette latitude eft aujourd'hui de 29° 24' 30",
elle a donc diminué depuis Ptolémée jufqu'à nous, de 18’
40"; & fi lon a égard à l'effet de la réfraction fur la déclinai-
fon de l'Etoile, cette diminution fera encore un peu moin-
dré : mais la diminution de l'obliquité de l'Edliptique eft
pour le même temps de 17' 40", d'où lon voit que cette
Etoile, prefque placée fur le colure des Solftices , a diminué
fa latitude de Ia même quantité à peu-près que l'obiiquité de
lEdcliptique, commeil a dû arriver, f1.ce.cercle s’eft efledi-
vement approché de l’'Equateur.
Jufqu'ici ce fentiment me paroït très - probable, étant
confirmé de la même maniére par leplus grand nombre
des Etoiles dont la déclinaifon a été obfervée par Ptolémée :
mais il en réfulte deux conféquences remarquables, qui fer-
viront de preuves completes de ce fentiment, fi ces confé-
uences fe trouvent conformes aux obfervations.
Lapremiéreeft,queles plus grandes latitudes des Planetes,
ou l'inclinaifon de leurs orbites doit changer; la fecondeeft,
que leurs Nœuds afcendans étant tous dans les fix premiers
Signes du Zodiaque, ils doivent indépendamment de toute
autre caufe, rétrograder parrapportaux F'quinoxes confiderés
comme fixes, plus ou moins les uns que les autres, fuivant
leur fituation particuliére .& l'angle des orbites. Un feul
driangle que l’on réfoudra pour chaque Planete en fera la
preuve, & l'on trouvera, en fuppofant les Nœuds des Planetes
& leur inclinaifon à lEcliptique pour la fin de cette année,
comme les. donne da Table fuivante /4), & que ces Nœuds
font fixes par rapport aux Etoiles; que 100 ansavant, c'eft-
496 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
à-dire, au premier Janvier 1 63 $ , ces Nœuds & ces Inclinai-
{ons étoient comme les donne la feconde Table /2).
Nœuds en 1734 Inclinaifon en 1734.
Tab. (A). Sp ic2 tr. Ts Èbe
Cheat 120 ©, H Fit 423
A EE .:36: 3% EL GS
pr TÉL 7 PO 1. 20
RU 2Z LES UE
Nœuds en 1634. Inclinaïfon en 1634.
Th: (B). ci RSR o" ÿ 7° 10! 48"
9, 1436 30.H 21, 28
@ 17 47 0 V I ,SOÛT.S
L PRE AE VIA PRE 120
D'2202 10 CIEL SAME NO
D'où l'on voit que les Nœuds ont retrogradé en 100 ans
depuis 1634 jufqu'en 1734. .
Celui de %$ 64e
CAT 1 TIERS 1)
AGE 0.
LATE LADA
b:.:20 o
a
Mais ce mouvement rétrograde n’eft tel, qu’en fuppofant
les Nœuds fixes par eux-mêmes, & que les points Equinoc-
tiaux foient immopiles aufi : cette derniére fuppofition qui
eft faufie, étant rectifiée, change le mouvement relatif des-
Nœuds, & les fait avancer fuivant l’ordre des Signes, à caufe
que le mouvement de préceffion des Equinoxes fe faifant
contre l’ordre des Signes, ïl fait parcourir en apparence en
100 ans à chaque point du Cielun arc de 1° 24° 3 5" beau-
coup plus grand qu'aucun de ceux que nous venons de trouver,
que les Nœuds devoient parcourir en rétrogradant. Par là on
trouvera que les Nœuds afcendans des Planetes étoient au
commencement de l'année 1 63 $ comme il fuit, Tab, /C). -
Nœuds
Re
Di-ES4 SAC AE CAES 497
Noœuds en 1634. = Mouvement en 100 ans depuis 16344
Lo E à 55 40" v 1’ 235" 20"!
CRE 6120 2 7102 48
a 16 28 30 $ I 7.24
% 6 44 20 S 42 40
D 21 S 20 % I S 40
Ces Nœuds comparés à ceux de 1734, de la Table /4),
donnent le mouvement pour 100 ans, comme il paroït par
la même Table /C), d'où le mouvement annuel fe déduit
| par les Tables modernes. Différence.
pour S y 12"! Fi 22 O0 A 438"—
Q 44 20 de 40, 0 I 40 —
go 40730 ST Te AO LR
10 AE OU TA 9 9 36 +
D 39 24 pm ONE 32 36 —
Parmi ces mouvements annuels déduits de hypothefe des
Nœuds fixes, & de la diminution d’obliquité del'Ecliptique,
. ceux de Venus & de Mars s'accordent à ce qui en a été déter-
miné ci-devant par les Aftronomes, en conféquence des ob-
fervations immédiates : je puis donc fuppofer qu’à l'égard de
Tab. (C):
ces deux Planetes cette théorie de leurs Nœuds eft vraie, puif-
que ce que j'en déduis s'accorde avec les obfervations. Il ne
paroît pas qu'il en foit de même des Nœuds de Mercure,
Jupiter & Saturne.
LesT ables aflronomiquesles pluseftimées donnent de mou-
vement annuel au Nœudde Mercure 1°2 $", & je ne le trouve
-que de ; 1" 12°"; la différence eft prefque de 34", ce qui eft
fort confidérable. Mais ileft certain que l'on a pris jufqu’à pre-
fentce mouvement beaucoup plus prompt qu'il n'eft en effet ;
le moyen de s’en convaincreeftde comparer la Conjonction
écliptique de cette Planete avec Je Soleil, obfervéeen 172 3»
avec une femblable obfervée en 1 63 1 par Gaffendi : il en
réfulte un mouvement annuel de 1° 1 6", déja plus petit de
9" que celui des Tables aflronomiques. Mais fi, au lieu de
Mem. 1734 RTE
f
Page 259.
Memoires de
l’Acad. 1 70 6.
?. 61.
Mem. Acad.
4704.p.3 06
Alnageff.
8 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
lobfervation de Gaflendi qui ne fut pas complette, on
compare celle de 1723 à celle qui fut faite en 1 690, l'une
& l’autre avec exactitude & par les Aftronomes de l’Aca-
démie, on trouvera, comme M. Caffini la rapporté dans
nos Mémoires de 1723, que ce mouvement annuel n'eft
que de 53", à moins de 2° près du mien.
De même je donne au Nœud de Jupiter un mouvement
annuel de 25" 36", les Aflronomes modernes ne lui en
donnent que 14”, je nefçais fur quel fondement ; car finous
employons à cette recherche la méthode ordinaire, qui eft
de comparer deux lieux du même Nœud dans des temps fort
éloignés, nous trouverons le mouvement que je lui attribue
confirmé. La conjonétion de Jupiter avec une Etoile fixe
de la conftellation du Cancer, obfervée 241 ans avant J.C.
& rapportée par Ptolémée, eff la plus célébre & la plus pro-
pre pour ce deflein. Feu M. Maraldi qui a calculé lui-mème
cette obfervation, en a conclu que le Nœud de Jupiter étoit
alors en 24° 43° H: mais le même M. Maraldi trouva ce
Nœud en 1693 en 7° 20° %.Doncen 19 34 ans le Nœud
avoit avancé fuivant d'ordre des Signes, de 12° 37',ce qui
donne pour le mouvement annuel 2 3" 30"",à 2" 6" prèsde
ce que j'ai déterminé.
Enfin, j'ai donné au Nœud de Saturneun mouvement an-
nuel de 39" 24", au lieu qu'on le croit communément de
1° 12”, près de 33" plus grand. Je me fers encore ici d’un
examen fait par M. Maraldi des obfervations anciennes. Par
celles de Tycho faites en 1 s 9 2, lorfque Saturne étoit proche
de fon Nœud, ce Nœud fe trouveen 21° 5. M. Maraldi le
trouva en 1 696 en 22° 10° du même Signe. Donc en 104
années il avoit eu un mouvement direct de 1° 8’, ce qui
donne pour le mouvement annuel 39" 1 $'", à r0"" près de
ce que j'aitrouvé.
Si l'on compare de même ce qu’en dit Ptolémée en des
termes fort generaux,avecl'obfervation de 1 696, on trouvera
ce mouvement annuel feulement de 1 2" plus grand que par
les obfervations de Tycho; mais comme il n'y a aucune
D'ES S CLENCESs 499.
précifion dans ce qu'en dit Ptolémée, on ne doit pas Sy
arrêter.
Oril faut remarquer, & cela eft vifible, que ce mouve-
ment des Nœuds des Planètes ne doit pas être récherché
par les obfervations anciennes comparées aux modernes, car
comme il n'eft que relatif & occafionné par le mouvement
del'Ecliptique en déclinaifon, qui va couper l'orbite des Pla-
netes en différents points, il fuit que ce mouvement nedoit pas
être le même en différents intervalles de temps. Il n’y a que
Jupiter & Saturne, mais le premier principalement, pour
lefquels cette méthode puifle être d’ufage, à caufe de la fi-
tuation particuliere de leur Nœud proche du commencement
del'Ecrevifle, & à caufe de leur peu d’inclinaifon. Mercure,
par exemple, dont l'inclinaifon eft fort grande, n’a fon Nœud
qu'au 1 5 .° degré du Taureau; c'eft pourquoi les obfervations
les moins éloignées font des plus propres pour trouver les
mouvements de fes Nœuds.
En général on voit bien que ces mouvements feront
inégaux en différents temps, & par conféquent plus les ob-
fervations feront éloignées, plus elles donneront d’inégalités,
à moins que le mouvement annuel ne foit fi petit que ces
inégalités deviennent en quelque façon infenfibles, & c’eft
ce qui arrive particuliérement dans le Nœud de Jupiter, dont
le mouvement annuel eft le moindre.
Cette théorie au contraire eft fort commode & fort exacte
pour reprélenter la pofition des Nœuds dans les temps les
plus reculés. Par exemple, elle donne très-bien le lieu du
Nœud de Jupiter pour l'année 241 avant J. C. tel qu'il a
été calculé par M. Maraldi fur l’obfervation rapportée par
Ptolémée. L'intervalle entre ce temps-là & le nôtre, étant
de 1975 ans, le mouvement de préceflion des Equinoxes
a été de 27° 50’ 31": c'eft pourquoi fi l'Ecliptique eût
toûjours eu la même obliquité qu'aujourd'hui, le Nœud de
Jupiter fuppolé fixe & à préfent en 7° 27' 5, eût été alors
en 20° 23° 31" H ;maisäcaufe du changement d'obliquité
de 1°en 90 ans, fon obliquité étoit alors de 23° 50° 17",
a]
oo MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
d’où l’on conclut que le Nœud de Jupiter étoit aufiralors en
25° 28° 30" H. L'obfervation calculée le donne en 24°
3’ du même Signe; la différence n’eft que de 45' + dont
la théorie le donne trop avancé.
Si l'obliquité ne diminuë que d’une minute en 100 ans,
comme M. de Louville l'a penfé, le Nœud fe trouvera en
23° 48 38"H, moins avancé de 54 22° que par le
calcul tiré de Fobfervation; d’où lon voit qu’afm de repré-
fenter parfaitement cette oblervation, telle qu'elle a été
calculée par M. Maraldi, il fufhiroit de fuppofer que l'obliquité
de l'Ecliptique change d’une minute en 94 ans.
Si l'on examine maintenant de quelle maniére la théorie
communément reçüë du mouvement des Nœuds de Jupiter,
& les Tables aftronomiques les plus exactes, repréfentent
cette obfervation, on verra que celles de M. de la Hire,
par exemple, mettent alors ce Nœud en 29° 3515",
à prefque 5° de l'obfervation, tandis que felon les mêmes
Tables, le Nœud de Jupiter ne parcourt ces cinq degrés
à l'égard des points équinoétiaux qu'en près de 12$0 ans.
Cet accord fi fingulier entre les conféquences tirées de
la diminution d’obliquité de l'Ecliptique pour la théorie des
Noœuds des Planetes, & celles qui ont été déduites des ob-
fervations, fans égard à cette vüë, prouve qu'en effet l'Eclip-
tique s'approche, & non pas l'Equateur; car en fuppofant
d'abord, comme j'ai fait, les Nœuds fixes, & que ce foit
TE quateur qui s'approche de l'Edliptique, ces Nœuds n’au-
ront d'autre mouvement que celui que nous remarquons dans
les Etoiles fixes. Ils avanceront donc tous également, &
de 1° 24° 35" en 100 ans; mais les obfervations & les
Tables aftronomiques leur donnent un mouvement fort
différent dans le même temps, par rapport aux Equinoxes,
plus grand aux uns, & moindre aux autres. I s’enfuivroit
donc que les Nœuds feroient mobiles, retrogrades dans
certaines Planetes, comme Venus, Mars & Jupiter, & directs.
dans les deux autres, Mercure & Saturne ; ce que je ne crois
pas devoir être admis fans de bonnes preuves, La maniére
D'EXS MST CURE INT CEE: soi
dont je conçois ces mouvements fournit peut-être encore
Texplication d'un phénomene qui a paru mériter attention:
M. de Fontenelle l'expofe ainfi dans l'Hiftoire de l’Académie
de 1706. « Le mouvement des Nœuds des Phinetes pour-
roit bien n'avoir pas toüjours la même direétion, mais re-
trograder quelquefois, & avoir des efpeces de vibrations
irréguliéres. A l'égard de la Lune (continuë M. de Fontenelle)
cela eft conftmt, M. de la Hire croit en être für pour
Saturne; peut-être dans les autres Planetes, les irrégularités
du mouvement des Nœuds font-elles moins fenfibles.
On à cru remarquer à peu-près la même chofe dans les
Noœuds de Venus, mais cela ne vient que de ce qu'on à
trouvé le mouvement annuel, par des obfervations fort
proches, plus petit que celui qu'on trouvoit par d’autres ob-
fervations plus éloignées, comme il a dû arriver en effet
fuivant ma théorie. ;
A l'égard des inclinaifons des Orbites, elles varieront
aufi un peu, mais je ne trouve pas de différence fenfible
entre l'inclinaifon de 1734; & celle de 1 634; i n'y a que
Mercure où cette différence va à r' 12”. I faudra toüjours
y faire attention dans la fuite.
.)
Memoires de -
l’Acad. tome X,
Pe 213:
Puifque les hypothefes que j'ai faites ci-deflus, & que
les calculs que j'en ai déduits, s'accordent fi bien avec les
obfervations, je crois pouvoir en tirer les quatre conféquences
fuivantes.
1.” Que l'obliquité de l'Ecliptique diminué.
- 2.° Que ce mouvement fe fait fur les deux points des
Equinoxes.
3. Que c'eft l'Ecliptique qui s'approche de f'Equateur.
4. Enfin, Que les Nœuds des Planetes ont aucun
mouvement propre, mais qu'ils paroiïfient avancer fuivant
la fuite des Signes, mégalement en différents temps.
Quelques Aftronomes avoient déja foupçonné ces Nœcuds
fixes, mais fans autre fondement, du moins que je fçache,
ue le peu de différence du mouvement de ces Nœuds à
celui des Etoiles fixes, ou de la préceflion des Equinoxes.
Rrr ii
: Srreer. Affron,
Carolin. p. 34%
Ü ad Le, edit,
Noribere.
Whifion Pret.
Affron.p.1 94
502 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE
Ici ces quatre points {e lient naturellement enfemble, &
paroifent auffi bien prouvés que le comporte la nature des
connoiflances aftronomiques. On verra une autre fois l'effet
qui réfuite de ces mêmes hypothefes pour le mouvement
des Aphélies. Je n’ai voulu examiner ici que les Nœuds,
& même le Nœud afcendant feulement; car le Nœud def.
cendant pourroit bien, en fuivant la même loi, n'avoir pas
les mêmes nombres, & il n'eft pas für que les Nœuds d’une
Planete foient oppofés l'un à l'autre. Dans Saturne & dans
Venus, il femble par quelques obfervations faites depuis un
fiécle & demi, que la ligne des Nœuds ne pafle pas par le
Soleil; mais c'eft une chofe à examiner dans la fuite, &
ce que j'ai dit ici des Nœuds en général, fera fort utile à
cet examen.
Dies Si 1$ C1 EN CES 503
SIXIEME MEMOIRE
SORTE C TIICITE"
Où l'on examine quel rapport il y a entre l'E ‘ledricié,
7 la faculté de rendre de la Lumiére, qui eff commune
à la plipart des corps éleétriques, à ce qu'on peur
tnférer de ce rapport.
Par M. pu Far.
ï be ne parlerai point dans ce Mémoire de tout ce qui fe
trouve dans un grand nombre d’Auteurs fur la Lumiére
des corps électriques, il me faudroit pour cela remonter à
ces temps où la Phyfique remplie de fables admettoit des
pierres précieufes qui rendoient dans lobfcurité une lumiére
égale à celle d’un flambeau allumé; beaucoup d'exagération,
des faits véritables, mais mal rédigés, & quelques circon-
flances obmifes dans le récit de ces faits, ont vraifemblable-
ment donné lieu à ces récits merveilleux, dont on a embelli
4 defcription de l'efcarboucle & des autres pierres de fem-
blable nature.
Nous nous en tiendrons à des expériences plus récentes,
& à des faits plus pofitifs, & nous n’examinerons la Lumiére
qu'en tant qu'elle fera liée à l'Electricité, fans parler des
autres phofphores qui n’y ont point de rapport, ou du moîns
dans lefquels nous n'y en connoïflons point. Otto de
Guerike que nous avons cité fort au long dans le premier
Mémoire, a remarqué que la boule de foufre fur laquelle il a
fait un f grand nombre d'expériences fnguliéres par rapport
à l'Electricité, étoit lumineufe lorfqu'elle étoit frottée dans
Tobfcurité.
Boylea fait un petit ouvrage intitulé Adamas lucens , dans
lequel il y a plufieurs faits finguliers, mais celui de tous qui a
traité cette matiére avec le plus d'exaclitude, eft Haukfbée,
Page 5 49
Efper. Fifico-
mecan.in Firent.
4716.p.19:
504 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE |
& comme fon objet principal étoit de confidérer la lumiére
des corps par rapport à leur électricité, nous allons donner
une idée des principales expériences qu'il a faites à ce fujet.
J'ai eu tant d'attention à citer dans mes Mémoires précé-
dents fur l'Electricité, & principalement dans le premier de
tous, les Auteurs defquels j'ai tiré quelques expériences,
que jecroyois être à l'abri de tout reproche à cet égard; ce-
pendant j'ai appris que quelques perfonnes, fur les leétures
que j'ai faites dans les Aflemblées publiques, ont jugé que
j'avois eu deflein de m'attribuer les découvertes de plufieurs
Auteurs; je réitére donc aujourd'hui les proteftations que
j'ai faites à ce fujet dans mon troifiéme Mémoire. Comme
j'ai entrepris de traiter avec quelque détail une matiére qui
jufqu'à préfent ne l'avoit été qu'imparfaitement, & pour ainff
dire, en paffant, par divers Auteurs, j'ai été forcé d'employer
les expériences de ceux qui m'ont précédé ; mais ce n’a jamais
été dans la vüë de me parer de ce qu'elles ont de neuf & de
fingulier, puifque j'ai toûjours cité les Auteurs d’où je les ai
tirées; s'il y en a d’autres que j'aye cru m'être propres, & qui
{e trouvent dans quelques Auteurs dont je n'aye pas eu con-
noiflance, on me feroit injuftice de croire que j'ai voulu
cacher la fource d'où je les ai tirées, & je puis affürer que
mon filence ne viendra que de ce que je les aurai ignorés; car
je n'ai pas même négligé de rendre la juftice qui étoit dûë aux
perfonnes qui m'ont donné verbalement quelques avis dont
j'ai profité, & je fuis perfuadé que cette juftice que l’on rend
fait infiniment plus d'honneur que n’en pourroit faire la
découverte même. Après cette courte apologie que j'ai cru
nécefaire, je reviendrai aux expériences d'Haukfbée.
H a frotté dans le vuide fur une étoffe de laine une boule
de verre creufe, elle a donné d'abord une belle lumiére pour-
pre, qui a blanchi & diminué d'éclat à mefurequ'ila laïffé ren-
trer l'air dans le récipient; ce qu'il y a de très-fingulier, c’eft
que refaifant la même expérience une feconde fois avec la
même boule de verre, cette lumiére pourpre n'a pas paru,
mais ayant repris une autre boule, elle donna pour la agé
ois
HD! ESS /CAEIN cris sos:
fois feulement, une femblable lumire, après quoi elle {fut
toûjours blanche comme il étoit arrivé avec la premiére
boule; en forte qu'il paroît que le verre peut s’'épuifer de la
matiére propre à produire cette lumiére purpurine, au lieu
que toutes les autres expériences concourent à prouver que
le verre, ainfi que tous les autres corps électriques, ne dimi-
nuent point de vertu, quelque nombre de fois & quelque
temps qu'ils ayent été frottés.
Ia imbibé enfuite, premiérement d’efprit de vin & en-
fuite de diflolution de nitre Ja laine fur laquelle fe faifoit le
frottement, pour voir fi cela apporteroit quelque change-
ment à l'expérience; mais cela n’a pas empêché la lumiére de
paroître en forme d'éclairs; il eft vrai que le mouvement qu'il
imprimoit à la boule de verre, étoit fi rapide, que la laine en.
étoit échauftée au point d’être brülée.
Le globe dont nous avons parlé dans les Mémoires précé-
Page jo
dents, étant ‘vuide d'air & tourné rapidement fur fon axe, /tivanres.
devient très-lumineux dans tout fon intérieur, lorfqu'on
appuye légérement la main fur fa furface extérieure, & la:
lumiére n'en eft ni plus confidérable ni plus vive lorfqu'on
appuye la main beaucoup davantage, & que par conféquent
le frottement devient plus fort; cette lumiére eft dans le
même cas que nous avons déja remarqué à l'égard du tuyau;.
il n'en fort point de ces parties brillantes qui s’attachent aux
corps voifins, comme il arrive lorfque f'intérieur du globe:
ou du tube eft rempli d'air dans fon état naturel, & ce qui
eft aflés fmgulier, c’eft que dans un ni dans l'autre cas, {a
chaleur du tube n’augmente pas fenfiblement fa lumiére.
. M. Haukfbée a ajufté Fun dans l'autre deux récipients Cy-:
lindriques, en forte qu'au moyen de deux différentes rouës,
femblables à celle que nous avons décrite dans le premier!
Mémoire, on pouvoit les faire tourner féparément ou en
femble, foit du même fens, foit en fens contraire: il y avoit:
auffi un robinet ajufté à chacun de ces récipients, pour:pou-
voir pomper l'air de un indépendamment de l’autre, & il
asremarqué que fi l’on pofe la main fur le récipient extérieur,
Mem. 1734 S {1
Page 46
Page js:
Page » 6.
Page 100.
Page 9 6.
LL
506 MEMOoIRESs DE L'ÂACADEMIE ROYALE
tandis qu'il eft tourné rapidement, la lumiére qui en fort va
s'appliquer fur la furface du récipient intérieur, mais que cette
lumiére eft beaucoup plus vive fi les deux récipients tournent
à la fois, foit que ce foit du même fens ou en fens contraire.
La même chofe arrive quoique le récipient intérieur foit vuide
d'air. On peut voir dans l’auteur mème tout le détail de cette
expérience, fi l’on n'en a pas une idée affés claire par la de-
{cription abrégée que je viens d’en faire, mais je n’aurois pas
pà l'expliquer plus nettement fans copier tout ce qui eft dans
le livre même. Ce font-là les principales expériences qu'a
fait M. Haukfbée fur la lumiére des corps dont l'électricité
eft celle que nous avons appellée vitrée; voici maintenant
celles qu'il a faites fur ceux de l'électricité réfineufe, ou fur
les uns & les autres compris &, pour ainfi dire, confondus
dans la même expérience.
H à frotté très-rapidement dans le vuideune bouled’ambre
fur de la laine, elle a donné une belle lumiére & beaucoup
plus vive & plus abondante qu'elle n'avoit fait étant frottée
dans l'air libre auffr fortement & avec la même viteffe. Le
foufre frotté dans l'air libre lui a donné très-peu de lumiére,,
& dans le vuide il n'y en a eu aucune.
Un cylindre de gomme lacque tournant rapidement fur
fon axe dans l'air libre, a donné beaucoup de lumiére lorf
qu'il a appliqué deflus un morceau de flanelle, mais ilen a
donné beaucoup davantage lorfque ç'a été la main; cette
lumiére partoit de l'endroit où fe faifoit le frottement, & fe
répandoit fur tout le cylindre; elle difparoifoit dans l'inftant
que le mouvement cefloit, & il ne fe détachoit point de ces
parties brillantes, qui dans les expériences faites aveele verre,
vont s'appliquer fur les corps voifins. La lumiére produite:
par le frottement du même cylindre fur la laine danse vuide,
étoit beaucoup plus vive que dans l'air libre; em forte qu'il
a remarqué dans l: gomme lacque prefque tous les pheno-
menes qu'il avoit obfervés dans l'ambre.
Voicimaintenant une expérience qui tientaux deux éleétri-
cités combinées enfemble, & qui, fuivant qu'elle eft décrite
DES \SiCIEN CE 6. 507
par M. Haukfbée, paroit un des plus étranges paradoxés
qui fe puifle imaginer en phyfique. I a pris un globe de
verre de fix pouces de diametre qu'il a enduit intérieurement
de cire d'Epagne, à l'exception des Poles où il avoit réfervé
un efpace de 3 ou 4 pouces fans y mettre de cire; en ayant
enfuite pompé l'air, & f’ayant ajufté fur la machine ou tour
dont nous avons parlé, il fit les obfervations fuivantes: à
peine y eût-il appliqué la main pour occafionner le frotte-
ment, qu'il apperçût, malgré l'obicurité, d'image & la figure
diftinéte de toutes les parties de fa nain peinte fur la furface
concave & intérieure de la cire d'Efpagne, en forte que cette
cire fembloit être devenuë tranfparente, & qu'on peut même
dire qu'elle l'étoit réellement ; car il voyoit fà main précifé-
ment comme s’il ny eût eu que le verre feul fans aucun enduit
de cire d'Efpagne ; il a obfervé de plus que la cire n'étoit
pas moins tranfparente dans les endroits où l’enduit étoit plus
épais, que dans Îes autres; elle 'étoit pareïlement dans quel-
ques parties qui s’'étoient un peu écartées du verre en fe re-
froidifiant, mais la lumiére étoit moins vive en ces endroits
que dans le refte du globe. Cette tranfparence qui faïfoit
que la main appliquée extérieurement fur le glebe paroifloit
peinte en-dedans, étoit d’une efpece finguliére, car on ne
voyoit pas cette image de la main en regardant fur les en-
droits du globe enduits de cire, ïl falloit regarder dans l'in-
térieur du globe par les deux endroits où il n’y avoit point
de cire, & alors on voyoit diftinétement l’image de da main
peinte fur la cire de la maniére que nous venons dede décrire.
La couleur de cette lumiére étoit la même que s’il n'y eût
eu que le verre feul, maïs ayant daïffé rentrer dans le globe un
peu d'air, la lumiére cefla de paroître dans les parties enduites
de cire, & continua dans celles où ül n’y avoit que le verre
feul. | Ù
Voilà les principales expériences que j'ai trouvées dans
les Auteurs fur la lumiére des corps éleétriques, car je ne parle
point des phofphores qui font en très-grand nombre, mais qui
n'ont aucun rapport à l'éleétricité; je piste": Tdi
1j
Page 107:
508 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE ROYALE
la liaifon que peuvent avoir entr'elles ces deux propriétés
finguliéres, & pour fuivre dans cet examen le même ordre
que dans les autres Mémoires, je confidérerai féparément
les deux efpeces d'électricité dont j'ai reconnu & démontré
Yexiftence, & je vais commencer par rapporter quelques
obfervations fur la lumiére des corps électriques réfineux.
Si l'on prend un morceau d’ambre, de gomme copal, de
cire d'Efpagne, ou de foufre, & qu'on le frotte dans lobf
curité, ilen fort de la lumiére, & ces quatre matiéres m'ont
paru en donner prefque également & de la même maniére,
lorfque les morceaux dont je me fervois étoient à peu -près
de la même forme & de la même grofleur. Si donc on prend
une boule, ou, pour plus de commodité, une pomme de
canne d’ambre, & qu'on la frotte par deffus avec la main,
on apperçoit entre l'ambre & la main une lumiére continuë
pendant le frottement; mais fi après l'avoir légérement frottée
deux ou trois fois, on enleve fubitement la main de deffus
fans la gliffer, & qu'enfuite on approche le doigt du bord
de cette pomme, fans même la toucher, on voit un petit
cylindre d'une lumiére très - vive qui fort de lambre, va
frapper le doigt, & retournant du doigt à l’ambre, fe fépare
fur la furface en rayons brillants difpofés en forme d’éventail,
& difparoït dans l'inftant. Si, au lieu d'appliquer le doigt
au bord de la pomme d'ambre, on le pofe au milieu en-
deflus, la lumiére fait le même mouvement; mais en retour:
nant du doigt fur lambre , les rayons fe difpofent en foleïl
qui a pour centre l'endroit où le doigt a été appliqué.
Lorfque j'ai répété cette expérience plufeurs fois de fuite,
il eft fouvent arrivé qu'il n'étoit pas néceffaire de frotter
F'ambre pour exciter cette lumiére, & qu’il fufifoit de frapper
deflus un peu fortement avec la main, & de la relever bruf
quement fans la glifler fur ambre. Quelquefois, au contraire,
la lumiére ne paroïfloit que difficilement en frottant avec
la main, & en ce cas je me fervois d'un morceau d'étoffe de
laine, & l'expérience réuffifloit de la même maniére lorfque
j'approchois le doigt: il ya toute apparence que ces variétés
s D'EIS4S: CL EUN: CES \ . Séÿ
dépendent de quelque humidité ou graifle qui fe rencontre
dans la main, car j'ai fouvent vû que je ne pouvois exciter
de à lumiére avec le creux de la main, tandis qu'avec la
paume ou le bout des doigts, cela réufffloit parfaitement,
Lorfqu'on trouve de ces fortes de difficultés, le plus court
eft de fe fervir d’une étoffe de laine ou de foye, car en s’ob-
ftinant à frotter avec la main on s’échauffe, & cela nuit d’au-
tant à la réuflite de l'expérience.
Voici maintenant quelques circonftances qui accOMpPa-
gnent cette expérience, qui n'ont point encore été obfervées,
& qui méritent attention. Lorfque la pomme d’ambre a été
frottée, j'ai quelquefois attendu jufqu'à deux minutes pour
en approcher le doigt, & l'éclat de lumiére s'eft fait à l'or-
dinaire, mais il a été moins vif, & lorfque j'ai attendu plus
long-temps, il ne s’en eft point fait du tout. Si au lieu
d'approcher de l'ambre frotté le doigt ou la main, je me fer-
vois d'un morceau de laine, de foye, de papier, ou de quel-
que autre corps femblable, il ne fortoit de ambre aucune
lumiére, ou s’il en paroïfloit quelquefois, elle étoit fi foible
qu'on avoit peine à lappercevoir. La même chofe arrivoit
dorfque j'approchois de ambre un autre morceau d’ambre,
de copal, de foufre, &c. Ce font donc les corps électriques
ou plutôt ceux qui ont le plus de difpofition à le devenir,
qui ne font point fortir de l'ambre frotté cette lumiére qui
paroït fi l'on en approche le doigt; on voit combien ce fait
a de rapport avec la plüpart des expériences que nous avons
décrites dans les Mémoires précédents. Nous y avons vû
que les corps les plus propres à devenir électriques par eux-
mêmes, étoient ceux qui le devenoient le moins par com-
munication, ici ces mêmes corps ne font point fortir la Iu-
miére des corps électriques réfineux, tandis que les autres
le font, même fans y être appliqués immédiatement.
Pour que le rapport füt exact, il falloit que la foye, la
laine, l'ambre & les autres corps femblables étant mouillés,
c'eft-à-dire, étant dans la difpofition la plus contraire à
l'électricité, il falloit, dis-je, qu'ils fiflent le même effet que
SfT ü
10 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
le doigt; c'eft effectivement ce qui arrive, & lorfqu'après
avoir frotté de l'ambre, de la copal, du foufre, &c. j'em ai
approché quelqu'un de ces mêmes corps, ou quelque corps
que ce foit mouillé, il en eft forti l'éclat de lumiére de même
que fi j'en avois approché le doigt ou la main ; enfin les métaux
rendent d’analogie entiérement complette. Nous avons vüû
par les Mémoires précédents, que les métaux font les corps
les moins propres à devenir électriques par eux-mêmes, &
qu'en même temps ce font ceux qui le deviennent le plus
facilement par communication , ils doivent donc par cette
même raifon faire fortir la lumiére des corps électriques; c'eft
en effet ce qui arrive, & il n1'a paru que le choix des métaux
étoit à peu-près indifférent, mais l'expérience la plus frap-
pante en ce genre, eft de frotter un morceau de copal ou
autre corps femblable, & d'en approcher enfuite une canne
à pomme d’ambre, on voit que fi l’on applique ambre fur
la copal, il n’en fort point de lumiére, & qu'elle paroît en-
fuite fi Von en approche la virolle d'or ou d'autre métal qui
joint la pomme à la canne; car il eft à remarquer que lorfque
le corps électrique eft frotté de maniére à pouvoir donner
de la lumiére, fr on le touche avec une de ces matiéres que
nous avons reconnu n'être point propres à la faire paroître,
cela ne le dépouille pas de la faculté de donner de la lumiére,
& qu’elle paroît auffi-tôt qu'on vient à en approcher le doigt,
un métal, &c. en forte que l'on peut encore adjoûtér aux
principes que nous avons établis, celui-ci: que les corps
réfineux ayant été rendus éleétriques par le frottement, f
Yon en approche les corps les moins propres à devenir élec-
triques, ils en font fortir de la lumiére, & qu'au contraire
les électriques réfineux ne le font point.
Quoique j'aye parlé en général de tous les corps dont
l'électricité eft réfineufe, il s’en faut beaucoup néantmoins
que la lumiére qu'ils rendent foit accompagnée des mêmes
circonftances, & il y a fur ce fujet plufieurs obfervations
curieufes à faire, mais ce détail qui feroït immenfe, &
qui paroïtroit aujourd'hui de*peu d'importance, deviendra
| DA Es Suiv 9, CTIENN €: EI & sit
vraifemblablement un jour plus facile, & peut-être fort inté:
reffant lorfque cette matiére fera connuë plus parfaitement.
On peut dire la même chofe des corps, dont l'électricité eft
celle que nous avons appellée virée; quoiqu'ils faffent tous à
‘ peu-près les mêmes effets par rapport à l'électricité, & qu'il
n'y ait prefque de différence que par le plus ou le moins de
force de cette vertu, les phénomenes qui les accompagnent
par rapport à lalumiére font très-différents; ceux dontla vertu
électrique eft foible, ne rendent point de lumiére, ou du
moins elle eft fi peu confidérable, qu'elle ne fubfifte que dans
le frottement, & en ce cas la matiére dont on { fert pour
frotter, empêche qu’on ne l'apperçoive, maïs comme nous
fçavons que la faculté de rendre de la lumiére eftunefuiteañtés
ordinaire de l'éleétricité, & que nous avons vû dans le pre-
mier Mémoire que tous les corps folides, ou qui peuvent être
frottés, font capables d'éleétricité, on peut conjecturer qu'ils
le font auffi de rendre de la lumiére ; mais ce fait n'eft pas affés
important en lui-même, pour qu'on fe donne toute la peine
i feroit néceflaire pour le vérifier; il nous refte un aflés
grand nombre de faits curieux à obferver dans les corps dont
B lumiére peut ètre très-fenfiblement excitée, pour quenous
puiffions négliger ceux-là , ou du moins les remettre à un autre
temps.
Nous avons parlé dans les Mémoires précédents de 11 In:
miére que rend le verre dans différentesexpériences, nous en
dirons encore quelque chofe dans la fuite; mais je dois com
mencer par les pierres précieufes qui me paroiflent, à pro-
portion de leur volume, être plus lumineufes que toutes les
autresmatiéres que j'ai eflayées. Je n’en ai trouvé aucune qui
ue rendit de la lumiére étant frottée, maïs avec des varietés
dont il n'a été impoflible de déméler la caufe, parce que fou-
vent elles fe rencontrent dans des pierres de même nature &
de même efpece. J'ai, par exemple, trouvé des diamants, qui
idant qu'on les frotioit fur une étoffe de laine, ou autre
matiére femblable, paroificient entourés d’une lumiére tran-
_ quille qui les fuivoit dans tout le niouvement qu'on leur
Pré;
512 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
donnoit, & qui difparoïffoit fi-tôt qu’on cefloit de les frotter.
D'autres ne font pas fenfiblement lumineux tandis qu’on les
frotte, mais fi, après les avoir frottez, on vient à glifier le
doigt ou longle deflus, on en voit fortir de petites étincelles
brillantes ; il y en a fur lefquels il fufht de pafler le bout du
doigt, & qui à chaque fois qu'on le pañle, donnent une lu-
miére douce &tranquille, fans éclats ou étincelles, qui fem-
ble fuivre le doigt, & s'évanouit fitôt qu'il ne touche plus la
pierre; d'autres en les frottant de la même maniére, confer-
venf cette lumiére 4 ou $ fecondes; en forte querecommen-
çant à paffer le doigt deflus, lorfque leur lumiére s'affoiblit;
ils paroiflent donner une lumiére prefque continué & unifor-
me. Enfin il y en a qui frottez fur {a laine, la foye, &c.
s'impreignent d'une lumiére qu'ils confervent pendant plu-
fieurs minutes. On trouve dans l'Hiftoire de Ÿ Académie de
l'année 1707, diverfes expériences. faites par M. Bernoulli,
& M. Caflini, fur plufieurs corps durs frottés contre le verre
& les diamants; mais ces obfervations n'ont aucun rapport
à l'électricité, ainfi nous n'en parlerons point préfentement.
Si lon examinoit un plus grand nombre de diamants,
peut-être y trouveroit -on encore d’autres variétés ; mais
comme on ne finiroit point fi on vouloit s'arrêter à toutes
les circonftances qui méritent attention, je vais feulement
rendre compte de quelques faits que Boyle rapporte dans
le Traité intitulé Adamas lucens, dont nous avons parlé plus
haut, & qu'il a obfervés fur un diamant qu'il croyoit alors
être le {eul qui eût cette propriété; il en a cependanttrouvé
d'autres depuis qui faifoient à peu-près le même effet, mais
ildit en avoir eflayé plufieurs inutilement, ainfr quelescriftal
de roche; cependant j'ai obfervé que le criftal de roche, &c:
tous les diamants & autres pierres précieufes tranfparentes:
ont donné de la lumiére de quelqu'une des maniéres dont je
viens de parler à l'égard des diamants. _: |
Le diamant dont s'eft fervi M. Boyle étoit long de 4 lignes:
& un peu moins large, il avoit une table aflés grande, il étojt:
d'ailleurs d'une vilaine eau, & avoit un nuage blanchâtre
qui
}
DES SD CM EN CES 1 ué
qui occupoit environ le tiers de la pierre, il l'examina aù
microfcope, & n'y trouva rien de fingulier.
Ce diamant confervoit fa lumiére après avoir été frotté,
en forte que l’agitant dans l’obfcurité avec vitefle, on voyoit
une traînée de lumiére continué ; étant expolé de fort près à
la flamme d’une bougie, & enfuite tranfporté dans l’obfcurité,
il confervoit une lumiére fenfible,: mais plus foible que celle
qui étoit excitée par le frottement : j'ai tenté cette expérience
fr un grand nombre de diamants, & j'en ai trouvé plufieurs
qui faifoient le même effet, & dont quelques uns ont con-
ervé dans l'obfcurité une lumiére fenfible pendant plufieurs
minutes. |
M. Boyle a obfervé de plus, qu’appliquant ce diamant fur
un fer chaud, ou letenant quelque temps preflé fur fa main,
ou quelqu’autre partie de fon corps échauffée, il rendoit un
peu de lumiére, mais très-foible. A yant eflayé fi le diamant,
après avoir été rendu lumineux par quelqu'un de ces moyens
différents du frottement, avoit contraété quelque vertu élec-
trique, ila trouvé qu'il n'en avoit aucune, ce qui femble
prouver que cette lumiére eft d’une autre nature que celle qui
accompagne l'électricité que nous avons appellée vitrée.
_ Ha auffi cru remarquer quelque différence dans la vivacité
de la lumiére de ce diamant, fuivant la couleur de l’étoffe fur
laquelle il étoit frotté, en forte qu'elle étoit plus brillante fur
une étoffe blanche que fur une noire. La lumriére étoit pareit-
Iement excitée en le frottant fur divers autres corps, comme
du bois, de la fayence, de la corne, &c. ï
. Ayant rendu ce diamant lumineux par Je frottement,
il la plongé dans l’eau, & enfuite dans diverfes autres
Jiqueurs, comme f’efprit de vin, les efprits acides, Les liqueurs
alkalines, &c. & il y a confervé fa lumiére; mais ayant
tenté de l’'exciter fous l’eau même, en y plongeant un mor-
ceau de bois, & frottant le diamant deflus, il n'a pas pu y
réuffr; il a auffi obfervé que lorfqu'il avoit été mouillé, ül
… falloit le frotter beaucoup plus long-temps pour exciter f&
lumiére; cependant il lui eft quelquefois arrivé de le rendre
Men 1734: Ttt
si4 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE ROYALE
ün péu lumineux en le tenant quelque temps plongé daris
Yeau chaude.
I a éprouvé qu'on pouvoit exciter fa lumiére fans le chauf
fer, hi le frotter, en le preflant fortement fur un morceau
dé fayence, où en appuyant brufquémient un poinçon d'acier
cotre Ja table du diamant; mais il eft aifé de juger que toutes
ces maniéres de le rendre luraineux, ne le faifoient point de-
venir électrique, ce qui prouve de plus en plus la différence
que nous avons déja fuppofée entre là matiére de l'éleétricité
& celle de cetteefpece de lumiére. |
J'ai fait avec foin la plüpaït de ces expériences, & elles
m'ont toutes réuffl à peu-près de la même maniére qu'à M.
Boyle, avec cette différence, que jé nai jufqu'à prefent
trouvé aucun diamant qui ne rendit de la umiére étant frotté;
toutes les autres pierres précieufes qué j'ai eflayées en ont
rendu aufli, ainfr que jé l'ai déja dit; maïs le plus ou moins
de lumiére ne dépend ni de la beauté, ni de la groffeur de fa
pierre : j'ai frotté pendant affés long-témps deux très - gros
diamants de l’eau la plus belle & à plus féche, ils n’ont pris
qu'une lumiére affés foible qu'ils ont confervée pendant très-
peu de temps, mais qu'ils n'ont pas perduë en paflant deffus
un linge mouillé; ils n'avoient l'un & l'autre qu'une très-
médiocre éleétricité : un troifiéme diamant d'une auffi belle
eau, mais taillé d'une façon extraordinaire, qu'on nomme à
Y/ndienne, où en puits, étoit très-lumineux pour peu qu'on
le frottit, il étoit auffi très - électrique; cependant je ne con-
nois entre ces diamants d'autre différence que celle de Ja
taille, fes deux premiers ayant une très-grande table, & le
dernier layant fort petite, mais étant très- élevé & très-
profond. Je n'ai pas ofé chauffer les deux premiers à la flam-
me, craignant de ne les pas chauffer aflés également à caufe
de feur grande étenduë, & qu’il ne leur arrivät quelque ac-
cident; mais je juge par lanalogie dès autrés expériences
quie j'ai faites, qu'ils n’auroient contracté que très -difficile-
ment de Ja lumiére, & qu’en ce cas même elle auroït été
très-foible, mais j'ai chauffé fe troifiéme à à flamme d'une
DITES AS CAE IN CHEB Mr DES
bougie, & l'ayant tranfporté dans l'obfcurité, il a paru en-
touré d'une lumiére très-vive & à peu-près femblable à
celle des vers luifants. La même chofe eft arrivée à un petit
diamant bleu, & à un diamant jaune d'une groffeur aflés
confidérable : mais cette forte de lumiére n'ayant aucun rap-
port à l'électricité, puifque tous ces diamants dans le temps
qu'ils rendoient le plus de fumiére ; n'avoient aucuné at-
traction fenfble, je me contenterai de dire préfentement que
plufieurs diamants, quelques pierres précieufes, le criftal de
roche, & plufieurs autres corps qu'on ne s’'aviferoit pas de
foupçonner, étant expofez à la Hamme, ou à la chaleur, ou au
Soleil, ou même à la feule lumiére du jour, quoiqu'à l'ombre
du Soleil, ainfi que je l'ai éprouvé, y acquierent une lumiére
qu'ils confervent dans lobfcurité pendant un temps affés con-
fidérable; ce Phénoméne nouveau mérite une attention par-
ticuliére, & peutfaire le fujet d'un travail très-curieux, mais
qui né paroît pas avoir de rapport à l'objet aétuel de nos
recherches. Les Auteurs qui.ont dit que certaines pierres
précieufes , & en particulier le diamant ; éclairoient-dans l’obf
curité, étoient peut-être beaucoup mieux fondés qu'on ne
Ya cru jufqu'à préfent. Qu'une perfonne ayant demeuré
quelque temps dans un lieu obfcur, & ayant par:conféquent
k prunelle fort dilatée, y ait vü apporter un diamant qui
auroit été expolé pendant quelques minutes au Soleit, ou à
quelqu'autre chaleur équivalente ;ou fimplement à la lumiére
du jour, elle aura certainement vü ce diamant lumineux; &
comme ç’aura été fans deflein que ce diamant aura été ex-
. pofé au Soleil, ou à la lumiére, on n'aura pas imaginé d'at-
æribuer ce fait fingulier à une caufe aufli legere, & on aura
pénfé, ou que les diamants font lumineux par eux-mêmes,
“ou que c'en eft une efpece;particuliére à laquelle on a donné
Aenom d’efcarboucle, dont par la fuite on a embelli a defcrip-
tion & exageré les propriétés. | aibiau
J'adjoûterai encore que fi: quelqu'un veut tenter ces:expé-
riences fur le peu que j'en ai dit, 1 y trouvera des variétés
‘furprenantes, dont iln’eft pas temps de de maintenant
£ Jtti
16 MEMGIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
l'éclairciflement ; j'ai voulu feulement indiquer les principaux
faits fur lefquels je compte fonder quelque jour un nouveau
travail, & tàcher en même temps de faire naître à quelqu'un
l'envie d'y travailler auffr de fon côté, perfuadé que rien
neft plus propre à augmenter les connoiflances que nous
avons en Phyfique, que le concours du travail de plufieurs
rfonnes fur une même matiére, mais il eft temps derevenir
à l'électricité vitrée. :
J'ai effayé un grand nombre de diamants, & quoique tous
ayent été rendus éleétriques par le frottement, & qu'ils ayent
tous donné de la lumiére, il y a eu des différences très =
confidérables dans leurs effets, dont il eft difficile de pouvoir
affigner la caufe; ce que je puis feulement dire en général,
c'eft que les plus gros diamants, comme du poids de 70 à
80 grains, ne font ni plus élefriques, ni plus lumineux que
les petits; que même la beauté & la netteté du diamant ne
paroîït pas y rien faire, mais la façon dont il eft taillé n’eft pas
auffi indifférente : j'ai toüjours trouvé que ceux qui font plats
& ont une grande table, font moins électriques & moins
lumineux que les brillants élevés.
Les diamants de couleur méritent une attention particu-
liére; de tous les jaunes que j'ai eflayés, je n'en ai trouvé
qu'un qui ne füt que médiocrement électrique ; tous ont été
très-lumineux : un très-beau diamant fleur de pêcher ren-
doit une lumiére confidérable dès le premier frottement, 8
étoit électrique, mais moins que les jaunes; un verd n’a pris
que difficilement de la lumiére, & cependant il étoit plus
électrique que le précédent ; un diamant bleu d'une afés
ande étenduë, mais rempli de points & de glaces, n’a point
donné de lumiére fenfible étant frotté, il en fortoit feule-
ment quelques étincelles, lorfqu'après l'avoir frotté on en
approchoit le doigt, cependant il étoit très-électrique; enfm
un diamant couleur d’amethyfte faifoit les mêmes effets, tant
par rapport à la lumiére, que par rapport à l'électricité;
Jadjoüterai que tous les diamants dont je viens de parler
étoient brillantés : je les ai frottés fur différents corps, fans y
DES SCIENCES. S17
avoir remarqué de différence bien fenfible, non plus que par
rapport à la couleur de l’'étoffe fur laquelle je les frottois,
quoique M. Boyledife y en avoir remarqué.
Lesexemples quenous venons de rapporter fuffifent pour
faire voir que la-faculté de rendre de la lumiére n’eft pas:
tellement dépendante de la vertu éle@trique, qu'il n’y ait
des corps de même nature & de même efpece, dontles uns
font plus lumineux & moins électriques, & les autres au
contraire plus électriques & moins lumineux; d’où il réfulte
que quoique ces deux propriétés paroiflent extrémement
hées l'une à l’autre, elles ne tiennent pas cependant à la
même caufe; & on peut apporter une preuve bien fimple
& bien décifive de cette différence, qui eft que, fi l’on frotte
un diamant capable de devenir électrique & lumineux, &
qu'après l'avoir frotté on le mouille, ou que fimplement on
Thumecte avec l'haleine, fa vertu électrique fe trouve anéan-
tie fur le champ, mais fa lumiére fubfifte auffi long-temps
e s'il n'avoit point étémouiilé.
7 J'ai fait les mêmes expériences fur toutes les efpeces de
pierres précieufes, mais les varietés qui en réfultent n'ont rien
d’aflés déterminé, pour qu'on puifle fçavoir s’il les faut at-
tribuer à la couleur, à la taille ; à la dureté, ou à quelque
autre caufe moins connuë ; ainfi je n’entrerai dans aucun dé-
tail à ce fujet, & je me contenterai d'adjoûter aux autres
principes découverts dans les Mémoires précédents, celui-ci:
que la lumiére excitée par le frottement n’eft pas tellement
liée à l'électricité, qu'elle ne puiffe fubfifter lorfque cette
derniére propriété eft anéantie par le moyen de l'humidité.
: Je ne rappellerai point ici les expériences dont nousavons
parlé dans les Mémoires précédents par rappoït à la lumiére
qui accompagne toûjours l'électricité du verre, mais jobfer-
verai que ce Phofphore fi connu qui fe fait en vuidant d'air
un matras dans lequel il y a du Mercure, eft une nouvelle
preuve de la différence réelle qu'il y a entre la matiére qui
fert à l'électricité, & celle qui occafionne la lumiére; car fi
Yon frotte ce matras dans l'obfcurité, il devient tout à la fois
Ftt ii
518 MEMOIREs DE L'ACADEMIE Royare
électrique & lumineux ; fr au contraire on fe contente d'agi-
ter fortement le Mercure, il devient lumineux, comme l’on.
fçait, mais il ne contracte pas la moindre électricité.
La lumiére qui accompagne électricité n'eft pas toüjours
une fimple lumiére, elle eft quelquefois un: feu réel & fenfi-
ble, comme nous l'avons vü dans l'expérience que j'ai rap-
portée à la fin de mon troifiéme Mémoire; il eft bon de la
remettre fous les yeux en peu de mots, parce qu'elle tient à
d’autres faits avec lefquels elle concourt pour l'établifiement
d’un autre nouveau principe. |
On fufpend une perfonne fur des cordes de foye, ou, ce
qui revient au même, on la fait monter fur une planche qui
eft fupportée par des pieds de verre, de cire, de foufre, dé
gomme lacque, &c. aflés élevés pour que les écoulements
éleétriques foient trop éloignés du plancher & des autres
corps {olides, pour pouvoir être détournés; on approche
de cette perfonne le tube rendu éleétrique, fans néantmoins
qu'il foit néceflaire de la toucher, cela fuffit pourl'environ-
nér d’un tourbillon de matiére éleétrique qui fe manifefte
par tous les effets rapportés dans mon troifiéme Mémoire;
mais celui de tous qui me paroît le plus furprenant, eft que
lorfqu'une autre perfonne approche la main de celle qui eft
ain fufpenduë, il fort de la partie du corps de cette der-
nicre, la plus proche de la main qu'on en approche, une
étincelle de feu accompagnée d'un bruit très-fenfible, &
d'une lumiére plus vive de beaucoup que celle qui paroït
dans toutes les autres expériences de l'électricité; cette lumiére
eft même, comme nous l'avons dit dans le Mémoire déja
cité, accompagnée d'une douleur femblable à une picqueure
ou à une brülure, dont les deux perfonnes font également
affectées; & j'ai fait une obfervation qui eft conforme à ce
que nous avons vû plus haut, c'eft qu'un morceau d'ambre,
de verre, ou de tout autre corps naturellement électrique;
ne fait point paroître cétte étincelle, il faut que ce foit une
matiéré fa plus contraire qu'il eft poffible à l'éleétricité, com-
me un corps vivant, un morceau de métal, de glace, toute
forte de matiére mouillée, &c, à
BE iSL TS, CLIEUN. CES. s19
: : Un animal vivant fufpendu de a même maniére, fait pré-
‘cifément les mêmes effets; mais fi c’eft un animal mort, il
me paroît plus d’étincelles, on ne voit qu’une lumiére pile &
uniforme qui paroît fortir de ce corps lorfqu’on en approche
a main. je
Le corps vivant d’un homme, ou d’un animal, eft donc
entouré d'une Atmofphére, dont la matiére eft capable d’al-
Jumer, pour ainfi dire, & de réduire en feu actuel la lumiére
‘qui accompagne l'électricité vitrée. Je n’ai pas eu la com-
modité de faire la même expérience fur l'électricité réfineufe,
parce qu'elle eften général plus foible, & que d'ambre, qui
eft le corps en qui elle eft la plus forte, fe trouve rarement
en aflés gros morceaux pour pouvoir faire un effet auffi con-
fidérable que cela feroit néceffaire pour réuflir danscette ex-
“périence; mais je fuis perfuadé que cela arriveroit de même
“qu'avec le tube, fr-on fe fervoit de quelque corps ‘qui eût à
eu-près autant de vertu électrique.
J'ai fait depuis peu une autre expérience, qui prouve qu'il
faffit pour produire ces étincelles brûlantes, de rendre élec-
trique un corps vivant, foit que ce foit par lui-même qu'il le
“devienne, où par la communication du tube, ‘oude quelque
autre corps éleétrique. J'ai pris un Chat, dont j'ai rendu de
h- poil fort électrique, en lui pañlant à plufieursreprifes la main
fur le dos; lorfqu'eñfuite j'approchoiïs mon autre main de fes
pattes, de fon nés, ou‘deifes ‘oreilles, il en fortoit de pa-
reilles étincelles accompagnées de bruit &de douleur que 1e
Chat paroïloitreflentir très -vivement, par l’impatience qu'il
marquoit de s'enfuir , &'queje fentoisauffi de mon côté dans
‘le doigt ou dans la main.
_ Cette expérience, quoique très-fimple, ne laïfle pas de:
réuffir aflés difficilement; tous les Chatsme deviennent pas
auffi électriques les uns que les autres, :céla dépend de la ru-
_déffe, ou de la douceur de leur poil, ifaut:choïfir'ceuxdont
le poileft le plus'rude ; il faut deplas qu'il faffe froid &fec,
. “& pour mieux réuflir, il faut pofér HetChat für du taffetas,
“ou quelque autre étoffe de foye, ou fur quelque matiére
520 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
réfineufe, afin que le tourbillon électrique demeure plus
abondant autour de fon corps, & ne foit point détourné par
les corps voifins. Je ne doute point que la même expérience
ne puifle fe faire de beaucoup d’autres façons, & peut-être
que l'effet en feroit encore plus fenfible; peut-être même
pourroit-on porter ce feu jufqu'à embrafer les corps com-
buftibles. Dans un fujet auffi rempli de faits nouveaux &
finguliers, il eft permis de hafarder des conjefures; je crois
-donc que c’eft un feu réel, ou une matiére très-propre à le
devenir, qui fort des corps électriques ; que cette matiére
fortant d'un corps entouré d’une Atmofphére trop peu denfe,
ou à laquelle il manque peut-être des parties grafles ou ful-
hureufes, elle ne produit qu'une lumiére tranquille; que
fortant du verre dont Atmofphére, Iorfqu’il eft rendu élec-
trique, eft chargée de parties fulphureufes que l'on fent très-
diftinétement à l'odorat, elle produit des étincelles qui frap-
pent le vifage ou la main très-fenfiblement, mais ne font
pas affés embrafées pour qu'on en fente La chaleur ; & qu'en-
fin lorfque cette matiére environne un corps vivant, foit
qu'elle en forte par le frottement, foit qu'elle y vienne par
la communication & l'appproche du tube, ou de quelque
autre corps électrique, elle trouve dans PAtmofphére de
ce corps un aliment convenable qui l'embrafe, & Ia fait
devenir un feu aétuel capable de brüler & de caufer de fa
douleur. Ainfi il eft très-poflible qu'on trouve quelque
moyen de le réduire à un point d'activité capable d'allumer
des corps combuftibles, foit en enveloppant le corps animé
de quelque matiére fort féche & combuftible, & en raffem-
blant quelques-unes des circonftances les plus propres à
augmenter l'action de ce feu, foit de quelque autre maniére
que l'on peut imaginer, fi l'on trouve que ce fait mérite
qu'on fe donne la peine de le fuivre & de s’y arrêter,
H nous refte à éxaminer l'effet des deux éleétricités jointes
enfemble; nous avons rapporté au commencement de ce
Mémoire une expérience finguliére de M. Haukfbée dans ce
genre, qui confifte à faire tourner fur fon axe un globe de
VeITe
TD ESS CAVE NC: Es: dégr
-verre enduit intérieurement de cire d'Efpagne, & dont l'air
eft exaétement pompé. J'ai fait cette expérience avec grand
foin, & elle eft effectivement une des plus bellesde celles qui
concernent la lumiéré des corps électriques.
Pour enduire de cire d'Efpagne l'intérieur de ce globe, il
ne faut que la pulvérifer, & après l'avoir introduite dans le
globe, le tourner fur fon axe au-deflus d’un réchaut plein de
feu; on fait par ce moyen appliquer la cire aux endroits que
Ton juge à propos. À mefure qu'elle fe refroidi, elle fe dé-
tache du verre en plufieurs endroits, ce que l'on voit par
les lames d'air qui s'y introduifent, & les couleurs d'Iris qui
en réfultent, & même elle s'éclatte & fe fend en divers
fens, mais tout cela ne nuit en rien à l'expérience. Ayant
ainfi préparé ce globe, j'en pompai l'air le plus exactement
qu'il me fut poffible, & je le fis tourner fur fon axe avec
beaucoup de rapidité.par.le moyen du tour décrit dans mon
premier Mémoire ; à peine eus-je appliqué la main deflus,
qu'il parut beaucoup de lumiére dans l'intérieur du globe,
elle étoit plus vive dans la partie où ma main étoit appliquée,
que dans toute autre, & elle y étoit continué ; il fe formoit
outre cela des éclats de lumiére qui paroifloient partir de cet
endroit, & s’élançoient de toutes parts dans l'intérieur du
globe. Jufques-à ces phénomenes font très-peu différents
de ceux qui arrivent avec le globe vuide d'air fans étre
enduit de cire d'Efpagne, mais voici ce qu’il y avoit de plus
fngulier, & que M. Haukfbée avoit regardé comme un des
plus furprenants paradoxes qu'il y eût en phyfique ; c'eft
qu'en regardant dans le globe par un endroit qu'à deffein je
n'avois point enduit de cire d'Efpagne, on y voyoit une
image de la main que je tenois appliquée fur le globe, & que
cela faifoit le même effet que fi ma main eût été lumineufe,
& la cire d'Efpagne aflés tranfparente pour qu'on la vit à
travers.
Un peu de réflexion me fit connoître la raifon de ce phe-
momene;. j’obfervai que lorfque j'appliquois le bout de mon
doigt fur la furface du globe, cela excitoit en-dedans une
Mem. 17 34 , Vuu
522 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
lumiére qui fortoit de la cire d'Efpagne dans le feul endroit
où mon doigt étoit appliqué: lorfque j'appliquois ma main
toute entiére, la lumiére fortoit pareïllement de tous les en-
droits où ma main touchoit le globé, mais comme dans
Yintervalle de mes doigts le globe n’étoit point frotté, (car
je le fappofe toûjours tournant fur fon axe) ; il s'enfuit qu'il
ne paroifloit point de iumiére vis-à-vis cet intervalle, non
plus qu'au-delà du contour extérieur de ma main, & par
conféquent l'image de la main & des doigts étoit exaéte-
ment figurée par la fumiére qui, partant de tous fes points
d'attouchement & traverfant la cire, fe faifoit voir au-dedans
du globe.
Lorfque j'appuyois médiocrement la paume de Ia main
fur le globe, les plis naturels qui y font & les principaux
traits ne portoient point fur le globe, ce qui caufoit une
ombre vis-à-vis ces traits, & par conféquent les deffmoit
aflés correctement fur cette image lumineufe de la main;
mais lorfque j'appuyois plus fortement fur le globe, ces
ombres difparoifloient, toute la paume de là main étoit
lumineufe, & il n’y avoit plus de fenfible que le contour
extérieur qui demeurant oblcur, formoit toüjours une image
lumineufe de la maïn; ainfi ce fait fe réduit à prouver qu'un
globe enduit de cire d'Efpagne intérieurement & vuidé d'air
tournant fur fon axe, fi l'on vient à le toucher extérieure-
ment, il part de tous les points d'attouchement une Jumiére
qui pale à travers la cire d’Efpagne & paroît dans l'intérieur
du globe. J'ai déja rapporté dans mon troifiéme Mémoire
qu'une plaque de cire d'Efpagne n'empêche point l'action
des corps électriques, & que le tube attire & repoufle des
feuilles d’or à travers cette plaque; on voit que c'eft ici le
même fait, & que, quoique les pores de la cire d'Efpagne
ne foient point permeables à la lumiére ordinaire, ils le font
néantmoins à la matiére de l'électricité, & lorfque cette ma-
tiére eft lumineufe, comme dans l'expérience préfente, il
en réfulte les faits que nous venons de décrire.
J'ai appuyé fur le globe pendant fà rotation, dek laine,
D'Es/S ce NC Es s23
du papier, du linge, de la foye ; la laine & le papier n’ont
donné aucune lumiére, le linge très-peu, & la foye da-
vantage, mais aucune de ces matiéres n'a fait, à beaucoup
près, aufli bien que la main; les corps durs comme Îe bois,
les métaux, &c. n'ont rien fait non plus, il faut une matiére
fouple, & qui occafionne un frottement, tel que celui qui
cft néceflaire dans les autres expériences de l'électricité,
J'ai enduit un pareil glôbe de gomme lacque pure, & les
effets n’en ont point été différents, quoique cette gomme
füt tranfparente; j'en ai enduit un autre de foufre, mais le
foufre diminuë de volume en refroïdiflant, ce qui fait déta-
cher l’enduit entiérement, & ïl fe brife orfque l’on vient à
faire tourner le globe. J'ai fait les mêmes expériences avec
des tuyaux de verre, mais les différences font peu confidé-
rables, & ne m'ont pas paru pouvoir nous rien apprendre
de plus fur le fait de la lumiére, ni de l'électricité, ainfi je
n’en rapporterai ici aucune. : el
Je fnirai donc ici ce Mémoire qui eft le dernier des fix
que je n''étois propofé de faire dès le commencement de
mon travail fur cette matiére, & dans chacun defquels j'avois
formé le plan d’examiner quelques-unes des principales pro-
priétés de l'électricité; quoique cet examen ne nous ait pas
donné la connoiffance des caufes phyfiques & primordiales
de l'électricité, il nous à néantmoins conduit à découvrir
plufieurs principes inconnus jufqu’à préfent, qui fimplifient
confidérablement la théorie de électricité, & qui {erviront
à avenir de bafe & de fondement à ceux qui voudront faire
de nouvelles recherches fur une matiére f1 féconde, & fur
laquelle il y a, flon toutes les apparences, encore un grand
nombre de découvertes à faire. Voici en peu de mots quels
font ces principes dont on trouve le détail & les preuves,
tant dans ce Mémoire que dans les précédents.
1.9 Tous les corps qui font dans fa Nature font fufceptibles 2.° Mémoire
- d'éleétricité, à l'exception des métaux & des matiéres qui eus
ne font pas de confiftence à pouvoir être frottées.
Vuui
3. Mémoire
fur lElectri-
cité,
© Mémoire
fur l'Electri-
cité,
524 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
2 Tous, fans exception, même les liquides, deviennent
éleétriques par communication, la flamme feule ne le devient
point, & n'eft point attirée par les corps életriques.
3-° Les corps naturellement éleériques font les feuls qui
le puiflent devenir par communication étant polés fur un
appui où bafe de métal, de bois, ou d'autre matiére qui n'eft
que peu ou point électrique; & aycontraire, ils le deviennent
moins que tout autre fur une bafe difpofée à l'électricité.
4° Les matiéres naturellement éleétriques interpofées
entre le tube & les feuilles d’or, ou autres corps legers, laiffent
pañler les écoulements électriques, au lieu que toutes les autres
matiéres les interceptent.
5° Les électriques font les moins propres de tous à tranf
mettre au loin l'électricité, & les corps mouillés font les
plus propres.
6.° Le plus grand vent ne détourne point les écoulements
électriques, que l'on fait communiquer au-delà de 1 2 50 pieds
au moyen d'une corde ou de quelqu'autre corps continu.
7. Les corps de même nature s’impreignent de l'éleGri-
cité, ou l'interceptent à peu-près en raifon de leur volume.
8. Il fort des étincelles brülantes d'un corps vivant
rendu éleétrique par la communication du tube, & cette
lumiére ne caufe aucune fenfation de douleur, f elle {ort
d'un corps inanimé.
9. IT y a deux électricités différentes & diftinétes l’une
de l'autre, fçavoir, la vitrée & Ia réfineufe, dont l'une attire
les corps repoulfés par l’autre.
ps rep P
10. Les corps éleétriques attirent toûjours &indiftinéte-
ment tous ceux qui ne le font point, & repouffent au con-
traire tous ceux qui font doués de celle des deux éledricités
qui eft de même efpece que la leur.
Des /o4' Enr eisuiN Ga
: 131.0 L'air humide & chargé de vapeurs, nuit à l'eétri- 5° Mémoire
cité, de quelque nature qu'elle foit, & diminue confidéra- As
- blement fes effets. -
12.0 Les corps électriques placés dans le vuide, y exer-
cent leur action, mais la matiére de l'électricité fe porte
plûtôt dans le vuide que dans le plein, en forte qu'un tube
où un globe vuidé d'air, ne fait d'effet fenfiblé que dans fon
intérieur. Ces deux derniéres obfervations avoient déja été
faites par M.rs Boyle, Haukfbée & Gray, mais avec quelque
différence, comme on le peut voir dans le Mémoire cité
ci-deflus.
13.° L'air condenfé dans l'intérieur du tube paroît nuire
autant que l'air rarefié aux effets extérieurs de l'électricité,
14.° Tousles corps dont l'éleétricité eft un peu confidé- 6.° Mémoirs
rable, foit qu'elle foit vitrée ou réfineufe, font lumineux, fur l'Eleéti-
avec quelques différences néantmoins dans la lumiére qui ‘A
eft excitée par le frottement. |
15-° La matiére de cette efpece de fumiére n’eft pas 1a
même que celle de l'éleétricité, l'une de ces deux propriétés
pouvant fubfifter mdépendamment de l'autre.
1 6.° Enfin les corps réfineux , quoiqu’opaques, donnent
un libre pafage à la lumiére, lorfqu'elle émane de la matiére
électrique, ou du moins qu'elle en eft accompagnée, ainff
qu'on vient de le voir dans la derniére expérience de M.
Haukfbée.
Voilà les principes, ou, fi l'on veut, les faits fimples &
primitifs auxquels fe peuvent réduire toutes les expériences
fur P'Ele@ricité, qui font connuës ;le nombre de ces principes
diminuera vraifemblablement à mefure que lon parviendra
à une connoiflance plus exacte de cette merveilleufe pro-
priété de la matiére, qui jufqu'à préfent n’étoit indiquée que
par quelques expériences très-compliquées qui Favoient fait
Vuu ii
$26 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
juger particuliére à certaines matiéres, & dépendante de
circonftances bifarres, & dans lefquelles il ne fe trouvoit
prefque rien d'aflüré ni de pofitif. Aujourd'hui c’eft peut-
être une qualité de la matiére en général dépendante de prin-
cipes invariables, aflujettie à des loix exactes, & qui peut
influer beaucoup plus que nous ne penfons, fur l’œconomie
du globe ; mais faute d'avoir été confidérée dans ce point de
vüé, nous n'en avons que des connoïffances fuperficielles ;
j'efpere que nous n’en demeurerons pas R, & je fuis perfuadé
e les Amateurs de la Phyfique ne négligeront pas un champ
fi fertile, & pour ainfi dire, un nouveau monde, dans lequel
il ce vraïfemblablement tant de découvertes intéreflantes
à faire.
DES, S GIEIN CES, | Sax.
| PROBLEME.
Une Courbe érant donnée, trouver celle qui [eroit décrire par
le fommer d'un Angle dont les côtés roucheroient conri-
nuellement la Courbe donnée; & réciproquement la Courbe
. 2° A 12 2 /
qui dois être décrite par le fommer de l'Angle, étans
donnée, trouver celle qui fera touchée par les côtés.
Par M. FONTAINE.
E Probleme direct n’a aucune difficulté, aufi n’eft-ce
1 1
que de l'inverfe dont ül fera ici queftion. Nous aurons
befoin, pour le réfoudre, de fçavoir trouver des Courbes
dont les points pris deux à deux ayent une relation donnée ;
& comme M. Newton donna en 1 697, dans les Journaux
de Leypfick, une méthode pour cela, nous commencerons
par la rappeller ici en forme de Lemme.
LEMME L
Suppofons qu'on demande une Courbe BAZN qui ait fa
propriété qu'exprime l'équation y°+y—4* (Ap—x,
PM=y,pN=y) puifqu'à chaque point p de labcifie
ordonnée a deux valeurs, équation à la courbe BMN
aura cette forme y*+Qy+R=—=o (Q & R font des quan-
tités compofées de x & de conftantes) ; & en réfolvant
cette équation, on aura ÿ=—7Q — Ke Q—RE
=—1Q+VIQRj —IQ—R+QVIO—R
& y°—1:Q—R—Q v£ Q°—R, donc par la condi-
Q°—42°
tion donnée Q°—2R=—=a, & par conféquent R— î
ainfi toutes les courbes exprimées par l'équation y* + Qy
| ru
0 dans hiquelle on pourra donner à Q telle
Fig. 2.
528 MEMOIRES DE L'AGADEMIE ROYALE
valeur qu'on voudra en x, auront la propriété demandée,
& on ne fçauroit avoir de ces courbes une équation plus
générale; fi la relation donnée étoit entre trois ordonnées,
alors on prendroit une équation du 3 ®<degré; fientre quatre
une du 4me, &c. Si on veut qu'il y ait des ordonnées poli-
tives, & d’autres négatives, on prendra une équation dans
laquelle cette condition foit remplie. Enfin on voit bien
que cette méthode ne laïfle rien à defirer, mais on doit
obferver, comme l'a fait M. Newton, que pour que le Pro-
bleme foit pofüble, il faut néceffairement que la relation à
laquelle on veut fitisfaire foit exprimée, par une équation
dans laquelle les ordonnées entrent toutes de la même ma-
niére ; car fi on propoloit, par exemple, comme le faïfoit
M. Jean Bernoulli, de trouver une Courbe dont la propriété
fût que le quarré de l’une des ordonnées par l'ordonnée cor-
refpondante fit toûjours un même produit, alors je deman-
derois de laquelle des deux ordonnées on veut que je prenne
le quarré, pour le multiplier par l'autre ordonnée, étant bien
évident qu'à moins que toutes les ordonnées fuflent égales,
il ne fçauroit être indifiérent de prendre le quarré de l’une
des deux, & de le multiplier par l'autre pour avoir un pro-
duit déterminé. Si on me dit que c'eft le quarré de la plus
grande qui doit être multiplié par la plus petite, alors il n’y
aura plus une loi uniforme dans toute la courbe, ce qui eft
impoflible, l’ordonnée à l'une des branches qui eft d'abord
plus grande devenant à fon tour plus petite,
LEMME TT.
La bi de l'Angle T MP étant donnée, trouver la Courbe
touchée par la ligne Mp.
Soit prife fur Mp une ligne Ma égale au parametre p
de la courbe AMN; & du point a foit menée fur 744
l1 perpendiculaire ab, & foit 118 —9 ( par & j'entends une
fonction des coordonnées 7 & de la courbe A4), la diffé-
rence de 416 étant dy, celle de l'angle 7Ap fera — EE.
Vp—et
di di
DES SeErIENCES. 529
du point 47 qu'on mene fur 7°A4 la perpendiculaire 414,
& du point N la ligne Ng qui fafle fur la tangente 7 N un
angle V4 qui differe autant d'un droit que l'angle : Np
differe de l'angle 7 Mp ; enfuite qu'on imagine que ve
T'Nr s'ouvre jufqu'à ce que l'angle sg foit droit, &le
nouvel angle de contingence fera — -{t44_ 2
& comme Îe rayon de la développée eft toûjours égal au
côté de la courbe divifé par l'angle de contingence, on aura
Mg — Vaé + du
did, de? & Pa Emoyÿendes
dé dif Var =
triangles femblables ANL, Mba, & MpL, MN,
Va +de. Vp° —
__ »pdzddu LA) __pd®
dé + du? = 3
sb Va —9
maintenant x & y les coordonnées au point p de a courbe
touchée, fi on fait le calcul comme pour les développées
Vr— 9. (du Vp— 9 — par)
2 dr ddu 4 TT
P:(— FIRE ——)
& au V?°—?;
RUE — V?—9. (dz Va? —g+ pds)
D— dyddu 49
Jerry =)
ê —+ du Vr—$*
on aura À p =. ._ Nommant
ordinaires, on trouvera x —=
— ll,
SOLUTION.
Que AM B foit la courbe donnée, & concevons que les
côtés de l'angle C/D ont dansla figure la pofition qu'ils
doivent avoir, lorfque fon fommet eft parvenu au point 44
je nomme © le cofinus de l'angle CAT, & + celui de
Yangle D MT’; & fuppofant le rayon = p, le finus de
l'angle donné CMD —», fon cofinus — m, je trouve entre
ep &p cette équation CL 2 p'+p —=un, qui a,
comme on le voit, les conditions que nous avons dit être
Mem, 173 4 e D XX
dé +du° Vr—® Car
Fig. 3,
530 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE ROYALE
néceflaires pour pouvoir appartenir à une feule courbe dont
l'abfcifle fera celle de la courbe A/1B & — 7, & les deux
ordonnées feront 9 &g’. Suppofons done que l'équation à
cette courbe foit p+—Qe+R=—o (on fe fouvient que
Q & R font des quantités qui dépendent de 7 & dep), &
nous aurons g——+(Q + v£ Q—R, &p——+
— Le Q°—R. Subitituons ces valeurs & leurs quarrés
dans l'équation à laquelle nous devons fatisfaire, & nous
2171
trouverons Q° — 2 R — Rio n 1,8 per
conféquent RE jé es CTI , don = — + Q
2")
D SOLE RE" CRETE
a srrie V/m—p)Q + 2pnr & g —=—+
2 Vo+m
Faite, rs PAR € V{/m—p) @Q*—+-2pnn. Mais nous avons
2Vp+m
appris dans le Lemme fecond à trouver Ia courbe touchée,
la loi de l'angle TMC où TMD étant donnée, & nous
venons de déterminer cette loi en trouvant le finus de cet
angle convenable aux conditions de notre Probleme, donc
il eft réfolu.
Men de Licad. 2784 - PL35. pag. 834
Fr 2
Ver de Urrad 3733. pL3S pag 530
LE Et 1
VS
/
f
(
DAT
A P LA
DAY
Le fa \
AN \
ET X \
# Nr :
+ aÿ Fra 2
Ï / ; ”
4
vs
/
D'eS""S/CNEIN CES 531
REMARQUES
SYESR
LA METHODE DE M FONTAINE,
Pour réfoudre le Probleme où il s'agit de trouver une
Courbe qui touche les côtés d'un Angle conflant done
le femmer glffe dans une Courbe donnée.
Par M. CLAIRAUT.
A Méthode de M. Fontaine confifte en ceci:
Soit AM la courbe donnée, CMD les côtés de
l'angle conftant dans une pofition quelconque, @ le cofinus
de l'angle TMC, @' celui de angle TD, m le cofinus
de l'angle conftant CMN, n le fmus, p étant le rayon, on
trouvera entre @ & ?' cette équation p? — ci pe—+p
x
— nn. Pour fatisfaire à cette équation, on prendra
10 + —"— Vin Q-rapan &
2 Vo+m
g=—1Q — —— V/{m—p) Q°+-2pun | par Q
2 Vp+m
on entend une fonction quelconque de Fabfcifle 7 de Ia
courbe donnée |. Cette valeur de @ qui ne differe de celle
de o’ que par le figne du radical, fait que l'équation générale
e——1:Q+ 7 V{n— p)Q°+-2pnn déterminé
2Vp+m
la courbe cherchée, puifque le Probleme fe réduit à trouver
la courbe qui touche les côtés AC placés par l'équation
précédente. On peut parvenir de différentes façons à achever
le Probleme alors. M. Fontaine avoit commencé par un
Lemme qui, en fuppofant que 9 füt donné, donnoit les
coordonnées de la courbe cherchée. , . . . + . . . . «
Xxx i)
Fig. 10
532 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
Vip (du Vp —® —pdr)
A pp FRE 40 SZ
dé + du Vo —@*
È ee. à 2 d EE 2 d ,
& y g(drVP—g" +oqdu)
Ce, VP pi
Ainfi cela termine fa Solution.
Voici préfentement ce qu’on peut, ce me femble, objecter
à cette Solution. Lorfque l’on a trouvé la valeur de 9 =
QE == V{m—p) Q'—+2pnn, & que l'on
2 Vp+m
veut employer cette valeur pour la fubftituer dans les valeurs
générales de x & de y, on eft obligé d’avoir Vpp—99
qui eff alors Vpp—1QQ +1 2 np Q
Vp+m
+2pnn)— ee — (m— p Q + 2pnn)].
4 PHMm
Mais il eft à remarquer dans cette grande expreffion que
tout ce qui eft fous le figne radical eft un quarré, en forte
qu'elle fe réduit à NE tn de DCS ON CN COR
+ PO EER LE —V{m—p Q+2pun)].
Vp+m 2 Vp— m
Dans ce cas les valeurs de x & de y, au lieu d'exprimer une
feule & même courbe, en expriment deux, Fune en prenant
le figne +, & l'autre en prenant le figne — , & il me
femble que M. Fontaine doit démontrer que chacune de
ces courbes a la propriété demandée, & non pas que ces
deux courbes enfemble font touchées par les côtés de l'angle
conflant. Car il eft très-naturel de penfer qu'il fe pourroit
bien faire que pour avoir les deux branches touchées par les
deux côtés de l'angle, if faut prendre la quantité précédente
de ces deux maniéres
DES SCIENCES, 1. is88
Or pre — —— V{m—p@ + 2pnr)
Vp+m 2 Vp—m
& + iQ — ——— V{m—pQ@ + 2pnr),
Vp+m 2 Vp—m
ce qui ne donneroit pas la même courbe, car il faudroit au
contraire fe fervir des deux expreffions
— 2 QT — — {mp Q°+-2pnn)
‘ V?+m 2 Vp—m
& HIQ ET + 0 Vin —pO+2pnn).
Vp + 7m 2 V? — nm
En fe fervant de ces deux expreffions, on auroit bien 1a
même courbe, mais ne fe peut-il pas faire que les tangentes,
au lieu d’être placées de maniére que TMD TMC, où
Y'angle CMD, foit conftant, ce foit l'angle 7A1D-+- TMC
qui foit conftant , de forte qu’en fuppofant une autre courbe
qui touche les côtés Aa”, Ma”, des angles a" A14, a'""M14,
égaux à aMb, a’ Mb, on a un aflemblage de deux courbes
touchées par Fangle conftant 4" Ma ou 4'"Ma. Cette
autre courbe c D feroit en ce cas celle qui viendroit par
l'expreffion + + Q Ven Æ —— V(n—p Q'+2pnr)
Vp+m 2 Vp—m ;
qui eft renfermée dans l'exprefion générale quis'eft trouvée
un quarré. Îl me femble que fon eft en droit de penfer
qué cela peut arriver ainfi dans la Solution dé M. Fontaine,
jufqu'à ce qu'on voye une démonftration du contraire, car
il n'y a rien dans fa Solution qui réponde à cette objection.
Car quoique par la conftruction de M. Fontaine, pour un
mème z qui répond au point A, on ait deux cofinus 478
& A6" qui ont enfemble la relation exprimée par léqua-
m
tion gp — —
rence des angles à Ma, b'Ma', eft conftante, & qui a les
conditions néceflaires pour être poffible.:
Xxx iij
po+p eo —unn qui fait que la diffé
534 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE RoYALr
“IH eft à remarquer que les fnus 424 & /44'. donnent
auffi-bien la pofition des lignes A7 4", M a”, que celle des
lignes Ma & Ma', un cofinus ou un finus peut être pofitif,
quoique la tangente A/C, Mc; foit en deffus ou en defous.
Ï n’en feroit pas de même fi l'expreffion de la tangente
de l'angle a Mb fatisfailoit à la relation requife, pour que
l'angle 4/15 furpañle l'angle 4 AZ& d'un angle conftant. Car
fuppofons que a M—p pris fur la touchante A2T de a
courbe donnée AT, foit le rayon pendant que la perpendi-
culaire aff" donne les tangentes af & af” à l'angle aMf",
Si l'on avoit une équation de la courbe cherchée entre
l'abfcifle 7 de la courbe donnée au point 4, & la tangente
de l'angle af où a Mf, de façon que pour unz on eût
deux valeurs pour af & af, qui fuffent telles que a A1f",
— a Mf fût conftant, il n'y auroit pas à choïfir à pofer
ces tangentes en deflus ou en deflous.
Mais comme de l'expreffion que M. Fontaine trouve pour
les cofinus 474, ©, & Mb’, +, on peut tirer celle des tan-
gentes af & af” des angles L Ma & b Ma’, nous allons
vérifier fi elles font telles que a A1f — a Mf foit conftant.
IL eft clair que CUTERT & 2Vrr
Er
LT En feront les
tangentes a f & af”. Comme ces tangentes, ainfi que les
cofinus, ne different que par les fignes des radicaux qui
entrent dans leurs expreffions, il fuffira de réduire l'expreffion
)— , . —9/
rvr - 2%, & l'on en tirera auffi-tôt celle de PATE TER
Pour cela on reprendra Fexpreflion que nous avons
trouvée de V2 p—çe, & Von aura af ou LUI —88.
ion ———— Vim—pQQ+apnn)
Vr+m 2 Vp—m
— + Q+——V(m—pQQ+2pur)
2 Vp+m
ALT
donnera af D'RPATENTE e Qi ee 0. ,e ee le =
Ci ] qui
DIE: e8 1 CULIE Ny GES 535
Da gr Vol RUE)
= p [ Vp+m 2 Vp—m ]
“HT me 1Q— "7 V(m—pQQ+2prn)
2 Vy+m
On peut démontrer préfentement que ces deux valeurs
de a f & de af” font telles que la fomme des angles 4 1f
& a Mf' eft conftante, au lieu de la différence. Pour avoir
l'angle conftant ff; foit + & + les tangentes de deux
angles dont on veut trouver la fomme, le rayon étant p,
He fera la cotangente de la fomme des deux angles,
C'eft un Lemme facile qu’on peut fuppofer, f l'on fubftituë
#
dans cette valeur Rp pour # & r' les valeurs précé-
dentes de af & de a f, on aura, après les réduétions,
pVpp=mm. qui eft la cotangente de l'angle dont le finus
mt
eft », c'eft-à-dire, de l'angle CAD, en forte que les courbes
de M. Fontaine ne touchent que les côtés de deux angles
aMf', a Mf, qui fe furpaflent d’un angle conftant, &
qu'il faut une feconde courbe qui touche les côtés des deux
angles a" Mb, a""Mb, pour faire l'aflemblage de deux
courbes qui foient touchées par l'angle 4" Ma’ ou a" Ma.
Ce qui n'eft pas le Probleme propoté.
On peut rendre tout ce que je viens de dire plus clair,
en prenant un cas particulier, par exemple, celui où l'angle
conftant eft droit, dont j'ai donné une Solution dans ce
Volume, p. 206. Examinons fi la Solution de M. Fontaine
donne ce cas-là.
Les tangentes a f & af” des angles TMC, TMD, de-
r(10+:Virr= 00) p(+Q@—:V2pp—Q0)
1Q—+V:rr—QQ +Q0+:V2rr—00
Je dis que ces tangentes font celles de deux angles 2/C,
aMD, dont les côtés AC & MD, qui touchent la courbe
cherchée, ne font pas à angles droits comme le Probleme
viendront
ME
Fig. 1,
y V4
536 Memorres DE L'ACADEMIE Royazr
le demande, mais placées de façon que a Mf +aMf eft
un angle droit. Car 1.” ces deux valeurs ne peuvent être
que toutes deux pofitives, ou toutes deux négatives; par
\ conféquent les côtés AC, MD, ne peuvent être diftants
Tun de autre d'un angle droit. 2.° Le produit de ces
deux quantités eft pp, ce qui rend les triangles a M1f, a Mf',
femblables ; par conféquent l'angle a M f + a M f'
vaut un droit.
Pour que les deux côtés 4 AZ fuflent à angles droits, if
auroit fallu que le produit des quantités précédentes eût été
— pp, c'eft-à-dire, qu'une des tangentes af ou af” eût été
négative, & eût porté le côté 41f° de l'autre côté de MT,
ainfi que cela fe trouve dans ma Solution.
Selon les principes que j'ai donnés, il faudroit prendre,
au lieu des quantités précédentes, des valeurs, comme
R+VRR—+pp &R=—VRR —-pp (par À on entend
une fonétion quelconque de 7) dont le produit eft — pp,
& l’on auroit des tangentes af & af” oppofées Yune à
l'autre, qui donneroient des droites A1f, Mf", à angles
droits, ce qui n’arrivera point de la façon de M. Fontaine,
c'eft-à-dire, en prenant pour af & a f” des valeurs dont le
produit foit + pp. ;
Nous finirons ces remarques par un exemple très-fimple,
où les valeurs des tangentes des angles af, a MAf",
donnent +-pp par leur produit, au lieu de — pp. Que
ces valeurs foient 7 + Vz2 — pp &7— V%z —pp, &
Fig.3. que la courbe AM ne foit qu'une ligne droite exprimée par
l'équation 4 — 0. Pour trouver l'équation entre AB, x, &
BD, y, AM étant 7, a M, p, & af, 7 + V22 — pp,
on peut fe fervir des formules de M. Fontaine, ou de la
8me Section des Infiniment-petits, en faifant cette équation
SET
}
= 1 ou x—7 {+ Ver — pp =py,
t+ Var |
& en prenant enfuite fa différence, en fuppofant x & y
conflants,
em. de Uird 3734 pl 36. pag 536.
I
Fay. 2
DES SCIENCES. . $37
conftants, ce qui donne x — 7 ({d7 + Vera LS as Te
tt — PP
D fr Mono RP) Op) on ee *
(Ne 4 D
x d7 tam Var—rr)=dt (x +Vrr — pp}
ou x —= 7 + Var — pp, qui étant fubflituée dans
X— 7 ave z—ppr)=p}, donne, après l'évanouiffe-
ment de 7, 2py—pp—=Xxx; équation à une parabole DC
dont BA eft une perpendiculaire à l'axe pañlant par le foyer
qui eft À, le parametre étant 2p. On voit aifément que
cette parabole ne peut pas être touchée par un angle droit
dont le fommet f mouvroit dans A//B, mais que l'angle
CMD qui la touche eft la différence, ou plütôt le complé-
ment à deux droits de la différence de deux angles BA1f,
BMf', dont la fomme eft un angle droit, ce qui n'eft pas
la folution du Probleme propofé.
Si l'on avoit pris, fuivant ce que j'ai enfeigné dans mon
Mémoire, pour a je + Ve z+-pp, dont le produit par Fig. 4
a fs z Ver, donne — pp, on auroit EU 2py—-pp
— x x qui exprime une parabole dont BA eft la directrice
avec le mème parametre que la précédente, & cette para-
bole dans tous fes points peut être touchée par les deux
côtés de l'angle droit DAC, dont le fommet 47 eft dans
la droite AZ.
Mem. 1734 - Yyy
Fig. 3°
538 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE
R) E P\O"NMN S E
AUX REMARQUES PRÉCÉDENTES.
Par M. FONTAINE.
ps" Si vous prenés pen —= 2 14 —— 1Q+:
ide yapeies fin }Q
per
1 faudra prendre PRE PT VE Jo A
— Vapnn (pm) Q.
aVr=n |
Et fi vous prenés Pre Cu ee VE OS
= V2pnn— (p —m) 0”
2 Vp—m
IL faudra prendre VD — 9° —. vs, | 4 JE
=. V2pnn — (p—m) tnt
2 Vp—m
Car à caufe de l'angle conftant 4 fa’ ïl y a un même
rapport entre les finus 4 &, a'b', qu'entre les cofinus 478,
M b'; or ce rapport détermine les fignes de la maniére,
précédente.
2.° Puifque pour chaque 7 ïl doit y avoir deux finus,
deux cofinus, deux tangentes , deux, &c. il eft évident par
le Lemme premier, que Q doit être un radical, parce que .
c’eft fur fon coëfficient que tombe la différence des fignes.
3° Enfin on aura la même courbe, foit qu'on fubftituë
dans les formules du Lemme fecond les valeurs de A1b &
de ab, ou celles de 474' & de a’ 4’, Donc, &c.
LOT
Dr UMSLCATIENN c'ets: | 639
SU Rés Bi ME: R-CU R°E,
Par M BOERRHAVE.
] ’Ecrivis l'année paflée quelques Obfervations fur le
Vif-Argent, par lefquelles il paroifloit que, quoiqu'il
femblât fe transformer continuellement en d’autres corps, il
confervoit pourtant d’une maniére furprenante la propriété
d'être immuable. J’offris ces Obfervations à cette Aflemblée
fçavante qui orne l'Angleterre fous les aufpices de Sa Majefté
Britannique. Elles y ont été goûtées au-delà de mes efpé-
rances ; de forte qu'on les a jugé dignes d’être imprimées
parmi les Mémoires de ce Corps illuftre. Mon unique but
dans cet écrit étoit de rapporter fidellement & précifément
les opérations que j'ai faites fur le Vif-Argent, & le produit
de ces opérations, & d’exempter par-là mes leéteurs du foin
& de la dépenfe néceflaires pour les répéter. J'ai à préfent
le même deflein, & j'offre ici à cette Académie fi floriffante
par les bienfaits de Sa Majefté Très-Chrétienne, quelques
expériences que j'ai faites fur le même fujet. En joignant ces
deux Differtations, on pourra juger de la fidélité & de l’exa-
titude des anciens & vrais Alchymiftes dans ce qu'ils ont
dit touchant le Mercure; & on verra en même temps qu'il
faut bien de l'application & de Ja prudence pour être en état
d'expliquer leur fentiment, ou les critiquer avec fondement.
J'efpere auffi mettre ceux qui s’attachent à la Chimie en état
de n'être pas facilement les duppes du fçavoir extravagant des
Alchymiftes modernes, gens qui dans le fond ne fçavent
rien de bon & de folide, & qui n'ont que Fart d'attrapper
par leurs fourberies Vor très-réel de ceux à qui ils font
croire qu'ils leur apprendront à en faire. Enfin je confir-
merai ce que j'ai déja prouvé de l'immutabilité, de {a fim-
plicité & des propriétés finguliéres du Vif-Argent. C'eft à
une Aflemblée aufli fçavante que la vôtre, Meffieurs, qu'il
Yyyi
s4o MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE
convient de juger de l'utilité & de la vérité de cet écrit, à
examen duquel je vous prie de donner quelques moments
de relâche de vos occupations plus importantes. Je fçais
que ces moments font rares, auffi j'aurai foin d'être auff
concis qu'il me fera poflible. J'entre en matiére.
I.
Le vif-argent pur, tel qu’on le trouve ordinairement chés
les marchands en compagnie à Amfterdam, mis long-temps
en digeftion fur le feu, ne fe change point en métal.
É' XP 'É RE NuGE
Ce vif-argent étant diftillé, n’a laiffé aucune fece. Après
cela mêlé avec le vinaigre diftillé & le fel marin, & agité
pendant long-temps, il eft refté pur. Je l'ai fait pafier par une
peau de Chamois, & j'en ai mis enfuite une livre dans un
matras bien net à long col, dont j'ai bouché l'ouverture avec
un cornet de papier & par-deflüs recouvert d'un autre papier
bien lié au col du matras, de maniére qu'aucune pouffiére
n’y pouvoit entrer, & que cependant l'air avoit le paffage
libre pour y entrer & en reflortir : je l'ai placé fur un four-
neau à une chaleur continuelle, qui au Thermometre de M.
Fahrenlhreyt, a toüjours été entretenuë au-deflus de cent
degrés depuis le 1 $ de Novembre 1718, jufqu'au 23 de
Mai 1734. J'ai trouvé alors le Mercure fluide dans ce ma-
tras avec un peu de pouffiére noire fur la furface. Cette
poufliére fe revivifioit en Mercure en le frottant dans un
mortier. J'ai mis tout ce vif-argent en diftilation dans une
cornuë de verre bien nette, en augmentant le feu vers la
fin au point que la retorte étoit prefque rouge. II n'eftrefté
quoi que ce foit dans la retorte, & le Mercure en eft forti
fans aucun changement fenfible.
COROLLAIRES.
1. Le feu au degré & pendant le temps fufdits, ne
change rien à la fluidité, à la volatilité, ni à la nature du
vif-argent mis dans un vafe où l'air a le paffage libre, il ne
s'eft fait aufli aucune féparation du pur d'avec Fimpur.
De ES ANS CAMEMNT CNET AN I
2. H ne s’eft fait non plus aucune génération fenfible d
la moindre quantité de métal.
. Bien moins encore d'argent ou d’or.
4. I ne s’eft rien fixé du Mercure dans cette opération
continuée pendant 15 ans +, il n'a pas paru le moindre
commencement de fixation métallique, non pas même du
plomb , qui cependant, au dire de ceux qui fe vantent de le
bien fçavoir, eft le métal qui doit fe former le premier par
cette opération.
s- Cette expérience n'eft nullement favorable au fenti-
ment de ceux qui afhirment que les métaux fe forment du
vif-argent comme matiére, & du feu comme foufre fixant,
unis par la digeftion. :
6. I y a toute apparence que toutes les opérations fem-
blables faites avec le Mercure commun pur, ne répondent
nullement à ce qu'on en promet, puifque le peu de poufiére
noire dont j'ai parlé, eft plus légére que le Mercure Êe la fur-
face duquel elle flotte, & qu'elle redevient Mercure très-
facilement. Voyés dans les Tranfaétions Philofophiques ce
que j'ai dit d'une poufliére femblable produite du Mercure
par le feul mouvement.
7. H ne paroît pas que le vif-argent puifle fe changer dans
Jes mines en quelque chofe de métallique que ce foit, par la
{eule ation de la chaleur foûterraine agiflante pendant un
Tong temps, & dans un lieu où l'air ait un accèslibre: car
Ja chaleur ne monte guéres au-delà de 70 degrés dans les
lieux où fe trouvent les veines des métaux. On dit à la vérité
qu'il faut mille ans pour produire cet effet; mais comment
les hommes qui vivent fi peu ont-ils pü s'en aflürer?
8. Le foufre que les Alchymiftes ont cru être un des
principes des métaux , & dont ils difent qu'il unit enfemble
les éléments du vif-argent pour faire un corps folide, fixe à
un degré de feu capable de le mettreen fufron & malléable: ce
_ foufre, dis-je, paroît être toute autre chofe que la matiére de la
lumiére ou du feu, quoique le feu feul foit l'unique moyen de
produire cette union admirable de ce foufre & du Mercure,
Yyy i
l
542 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaAzr
Cependant dans cette expérience l'air avoit un accès libre
au Mercure, & Ton pourroit dire peut-être que c'eft ce qui
empèche cette aétion du feu, d'autant plus que les Alchymi-
tes difent que Fair crud empêche la coction philofophique:
c’eft ce qui n'a porté à faire l'expérience fuivante que je vais
rapporter.
a LE
Le vif-argent mis en digeftion dans des vaiffeaux bien
fermés, pendant le temps exprimé ci-deflous, ne produit
aucun métal.
OPÉRATI O.N.
J'ai mis du vif-argent pur dans un vafe de verre conique
à fond plat, tel que les Eflayeurs s'en fervent pour la fépara-
tion de l'argent & de Vor, je l'ai expofé à une chaleur dé
100 degrés depuis le 6 Décembre 173 2, jufqu'au 8 Juillet
1733. Le vafe étant toüjours bouché, le Mercure n’a fouffert
aucun changement notable; j'en aï pris 6 onces que j'ai mis
dans un vafe femblable au précédent, dans l'ouverture duquel
j'ai fait entrer le col d’une phiole renverfée, fans luter les deux
vafes enfemble, je l'ai expofé pendant 4 jours au feu de fable
affés ardent pour que le Mercure commençät à monter, &
cela dans la vüë d'en chafler toute l'humidité qu'il pouvoit
yavoir. Lorfqu'il m'a paru qu'il n’y avoit plus le moindre
figne d'humidité, j'ai luté exactement l'endroit où ces deux
vafes fe joignoient ; j'ai expofé le Mercure au feu de fable
aflés violent pour le faire doucement monter & defcendre;
j'ai continué ce degré de chaleur jufqu’au 29 Janvier 173 4.
Je n'ai trouvé au fond du vafe que du Mercure fluide légé.
rement couvert d'une poufliére noire, légére & fine, rien
de fixe, point de précipité, quoique le degré de chaleur ait
toüjours été fort approchant de celui de l’eau bouillante,
Alors j'ai fait pafler ce Mercure par un entonnoir de papier
bien net & bien fec, dont l'ouverture par embas étoit à peine
grande à laïffer pafler un cheveu. Le Mercure bien net a
pafñlé par ce petit trou, & il eft reflé dans l'entonnoir, à fes
»
ETS C/TENN CT Er Evo M dus
parois, & autour du petit trou un peu de noir qui, en Î
broyant dans un mortier, eft redevenu Mercure. J'ai mis
diftller ce Mercure ainfi épuré dans une retorte de verre
bien nette à feu de fable, & à la fin à feu de fuppreffion:; ül
n'eft rien du tout refté de fixe au fond de la retorte. Le vif
argent a paru peut-être un peu plus fluide qu'auparavant, mais
d'ailleurs nullement changé.
CE; O0 RO L LANTA EE
De ceci on peut à peu-près tirer les mêmes conclufrons
que de l'expérience précédente, & en les joignant à ce que
J'ai écrit fur ce fujet dans les Tranfa&tions Philofophiques, il
paroïîtra clairement que le vif-argent eft immuable de fa
nature par les mouvements méchaniques, par les diftillations,
& par les digeftions décrites. Je conclus de tout ceci, que
les Chimiftes peuvent fe difpenfer du travail inutile de ré-
éter toutes ces opérations, dans la vüë de fixer le Mercure,
ou de le changer en quelqu'autre corps que ce foit; je leur
confeille de plus, de fe défier de ces ignorants, abondants en
vaines promefles, dont la moins mauvaile efpece ef de ceux
qui tâchent d'hafarder des expériences aux dépens d'autrui.
Je vais rapporter le réfultat de quelques autres expérien-
ces que j'ai faites fur les métaux, & qui ne n'ont pas moins
coûté de travail que les précédentes. Il y a long-temps que
je travaille à fçavoir au jufte, s’il eft vrai que les métaux
_puifient fe réfoudre par art en vif-argent & en un autre
principe; plufeurs Auteurs l'affirment fi nettement & en
tant d'endroits, qu'il ne me paroifloit pas même permis de
douter du fait : je le croyois fur la foi de ces Auteurs; mais
pour en être convaincu par mes propres yeux, Je mme mis
à operer fur le plomb. Le fameux Van Helmont dit que
plomb, à caufe de la crudité de fa nature métallique, telle que
quelquefois le feu feul peut le détruire , peut auffi par la partie
graffe des fels fixes être divilé dans les principes qui le compofent ,
de forte qu'il laiffe \couler le vif- argent crud. (poteft. medicam,
$: 40.) Son fils François-Mercure Van Hélmont dit,
544 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
(difcours paradox. part, 2. $. 21.) que /e plomb peut fe re-
foudre par des fels fixes, ou autres, ou par des huiles qui en
féparent le Joufre, en forte que ce métal fe transforme en vif-
argent volatil, fluide, &r qui ne peut fouffrir le feu. Joachim
Becherus aflure la même chofe, & répond du fuccès de
plufieurs opérations qu’il décrit pour cet effet. ( dans les
Collettanca quingentorum experimentorum à pag. 3 10. ad page
333) Voici clairement &en peu de mots ce que j'ai appris
fur ce fujet, au prix d’un travail très-long & très-ennuyeux.
OP SESR TAC TETE ON:
-
J'ai fait diffoudre de la cérufe pure, autant qu'elle a pû fe
difloudre, dans l’efprit de nitre affoibli par fix fois fon poids
d’eau; j'ai fltré cette diflolution qui s’eft trouvée extréme-
ment claire; cette liqueur mife dans un vaiffeau de verre
bien net, épaifie à une chaleur douce, enfuite laiffée en
repos dans un lieu froid, il s'y eft formé des criftaux, dont
j'ai pris 14 onces, que j'ai réduits en poudre dans un mortier
de verre, & avec un pilon de verre: j'ai fait difloudre cette
poudre dans de l'eau de pluie bien pure, & j'ai affoibli cette
diflolution par trois fois autant d'eau de pluie, enfuite j'ai
verfé lentement & avec précaution une autre diffolution fil-
trée & bien claire, faite de fel armoniac, dans de l'eau de
pluie; le mélange devient blanc comme lait, & le plomb fe
précipite d’abord, comme il arrive à l'argent diflous dans
leau-forte, dès qu'on y mêle le {el armoniac; la poudre
précipitée au fond, & qui étoit blanche comme neige, étant
lavée dans beaucoup d’eau, puis féchée, s’eft trouvée fort
infipide, & peloit 18 onces+ : j'ai mis 6 onces de cette
poudre blanche & féche dans un urinal de verre bien net,
& j'y ai verfé jufqu’à la hauteur de deux doigts, en deffous de
cette poudre, d’une lefive très-forte, compofée de chaux
vive & de cendres gravelées, & que j'ai gardées plufieurs -
années dans une bouteille bien bouchée; enfuite j'ai couvert
Turinal d'un papier brouillard bien lié tout au tour de fon
col, & je lai placé dans un fourneau de putréfaétion à une
chaleur
FD St SS CLIN ES s4s
chaleur de 9 6 degrés, où je l'ai laiffé depuis le 6 de Fevrier
1732, jufqu'au 1 3 d’Août de la même année, pour effayer
fi ce mêlange expofé à Fair, feroit changé par cette chaleur
de putréfaétion; je n'ai trouvé qu'une mafle blanche que j'ai
réduite en poudre, & qui avoit le goût de fel ; je l'ai mife
-dans une retorte de verre enduite d'un lut compofé d’argille
& de fable; je l'ai pouflée à feu ouvert jufqu'à la faire rougir,
& la tenir pendant trois heures en cet état : il eft monté un
peu de fuye blanche dans le col de la retorte, mais point du
tout de Mercure, & il eft refté dans le fond une matiére
fragile à demi vitrifiée, de couleur de cendres; je l'ai réduite
en poudre de même couleur, que j'ai fait long-temps broyer
dans un mortier avecuneleflivede fel alkali fixe & de chaux
vive; je l'ai fait fécher à feu lent, j'y ai verfé de nouvel alkali,
& je l'ai expofée à la chaleur de 96 degrés, depuis le 1 8
Août 1732, jufqu'au 1 5 Oétobre 173 3, la broyant tous
les jours dans le mortier de verre où elle étoit, qui n'étoit
couvert que d'un papier, de forte que l'air y avoit un libre
accès; c’étoit alors une poudre blanche, féche & âcre: j’
ai de nouveau verfé de la mêmeleffive, & je l'ai fait broyer
jufqu'à ce qu'elle füt réduite en pâte; je l'ai mife en putré-
faction comme ci-deflus, en continuant à la broyer fouvent,
depuis le fufdit jour, jufqu'au 2 1 Février 17 34; C'étoit alors
une mafle faline, blanche, & d’un goût fort approchant du fel
-marin : après lavoir broyée & lavée avec de l’eau, & fait bien
fécher très-lentement, j'ai eu une poudre blanche très-infipide;
je l'ai mife dans une cornuë où je l'ai tenuë pendant quelques
heures au plus grand feu que le verre luté peut fu porter; le
20 Mai 1734, il n'en eft venu aucun Min ME col de la
retorte étoit peint de diverfes couleurs, & la mafle friable qui
refloit dans le fond, jettoit aufli diverfes couleurs difpofées
‘par couches, & pefoit s onc. 6 gros +; la poudre où elle fut
réduite, en la broyant, étoit de couleur de cendres rouflâtres.
SC HOT ILE.
Dans cette opération, le plomb étoit d’abord de Ia cérufe,
Were 1724 7 LZz2z
46 MEMOIRES DE L'AÂCADEMIE ROYALE
c'eft-à-dire, qu'il étoit pénétré & diflous par la vapeur du
vinaigre, & réduit en chaux blanche, enfuite réduit en pou-
dre fine. I a été diflous dans l'efprit de nitre affoibli, &
eft par-là devenu une liqueur très-claire, fans couleur, d’un
goût doux, dans laquelle le plomb étoit réduit & divifé en
parties extrémement petites. En troifiéme lieu, le fel armo-
niac diflous qu'on y a verfé, en chaffant l'efprit de nitre, y
a fubilitué l’efprit de fel marin, & s'uniflant intimement à
la partie métallique du plomb, l'a difpofé, autant qu'il fe peut,
à faciliter la féparation du Mercure d'avec la partie métalli-
que, fuivant l'opinion de tous ceux qu'on croit avoir le
mieux écrit fur ces matiéres; car ils attribuent fur-tout au {el
armoniac & au {el marin, la propriété de féparer le Mercure
des métaux. En quatriéme lieu, la chaux ainfi préparée &
mife en digeftion pendant fept mois avec un alkali très-
violent, fembloit devoir faire reparoître le Mercure, en ab-
forbant le foufre du plomb : cependant, quoique poufiée à
grand feu, elle n’a pas donné 1e moindre Mercure. En cin-
quiéme lieu, cette maffe broyée long-temps & fortement,
& puis mêlée d'un nouvel alkali très-fort, & mile en di-
geftion pendant quatorze mois, n'a donné aucune apparence
de Mercure. En fixiéme lieu, elle a été encore broyée avec
de nouvel alkali, & mife en digeftion pendant cinq mois,
de forte qu'après toutes ces opérations, elle a été aflés ex-
pofée à l’action de lalkali, pour qu'il eût le temps de féparer
la partie fulphureufe du plomb, & que le Mercure dégagé
de ce foufre, pût être exprimé de cette male par la force du
feu. Cependant, après tout ce travail, le plus grand feu n'a
fait paroîtré aucun Mercure.
H eft donc clair, que ce que les Auteurs avancent hardi-
ment touchant la facilité qu'il y a de tirer le Mercure du
plomb, n'eft pas confirmé par l'expérience. Or le plomb
eft, difent ces Auteurs, le métal qui contient le plus de
Mercure, & qui fe réfout le plus facilement en Mercure par
les fels refflufcitants. La chofe'eft donc plus difficile dans
des autres métaux. Les Auteurs aflürent cependant que cela
DES SCIENCES $ÿ4y
peut fe faire aflés aifément, & ils prefcrivent des méthodes
peu différentes de celle que je viens de rapporter, & qui,
après toute la peine qu'elle m'a caufée, m'a fait voir que ce
qu'ils m'avoient promis, ne me réuflifloit point du tout. Je
doute que ces Auteurs ayent été fondés en obfervation dans
leurs aflertions fur ce fujet; & je panche beaucoup à croire
qu'ils fe font plütôt livrés à leur opinion en cette matiére,
qu'ils n'ont confulté l'expérience. Tout ce que je viens de
rapporter, fervira au moins à exempter Île lecteur, de la peine
& de la dépenfe de répéter ces obfervations, & à 'empé-
cher d'admettre facilement ces prétendus principes de la
fcience des métaux. Il froit bien à fouhaiter que ces Chi-
miftes habiles & laborieux nous euflent raconté fidellement
Je réfultat des expériences qui ont trompé leur attente, &
qu'ils ne nous euflent jamais prefcrit d'opérations avant
de les avoir faites eux-mêmes, cela nous épargneroit du
temps, de la dépenfe & du travail, & la Chimie pourroit
en peu de temps prendre fon rang entre les fciences. Par
toute autre voye, fi je ne me trompe fort, on ne parviendra
jamais à la vérité qui eft le but de nos recherches.
, TITI
Tfacus Hollandus a écrit que le vif-argent pouvoit
facilement fe tirer du fl de plomb fait par le moyen du
vinaigre diftillé : pour en faire l'épreuve, j'ai préparé avec
la meilleure litharge & le vinaigre du vin diftillé, ce fuc
concret qu'on appelle fuc de Saturne; j'en aï calciné 2 onces
dans un vaifleau de verre ouvert par un feu doux continué
depuis le 6 Juin 1734 jufqu'aur 9 Juillet fuivant. La poudre
blanche qui en eft provenuë a été pilée fort fine dans-un
mortier de verre avec un pilon de verre. Je l'ai fait broyer
fort vite & fort long-temps, en y adjoûtant une leffive autant
chargée du plus: violent fel alkali fixe, que Peau en a pü
difloudre. Je l'ai gardée dans le même mortier couvert de
papier, dans une chaleur continuée depuis le 2 1 Juillet juf-
qu'au 27 Novembre. Pendant tout ce temps j'ai toûjours
eu foin, dès que cette poudre étoit féche, de la rebroyer,
Zzz ij
548 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE
en y adjoûtant de nouvelle leffive. Je l'ai tenuë, couverte
d'un papier, à une chaleur de 90 degrés, la féchant, lhu-
mectant & la broyant ainfi alternativement pendant tout ce
temps-là. Le dernier jour je pilai cette matiére féche &
blanche en poudre impalpable, & l'ayant mife dans une cornuë.
de verre lutée, j'ai poufié le feu par degrés avec précaution,
jufqu'à ce que la cornuë füt rougie, & je l'ai tenuë en cet état
pendant 4 heures. Il ne parut pas le moindre petit globule
de Mercure ni dans le récipient, ni dans le col de la cornuë,
dans le fond de laquelle il s'eft trouvé une mafletrès-noire,
légére, en forme de poudre d’un goût d’alkali brûlant. Je l'ai
mile le 28 Novembre dans un plat de verre à la cave, où
elle eft d'abord devenuë humide, & je l'y ai laifiée jufqu’au
8 Janvier 173 5. Cette matiére avoit alors augmenté de
volume, toute {a partie faline s'étant tournée en liquide
d'elle-même par le fecours de l’humidité de l'air, &c la partie.
métallique étant au fond en forme de pouffiére noire. J'ai
fait fécher le tout enfemble, tant ce qui s'étoit fondu que
ce qui ne l'étoit pas, & ce mélange s’eft trouvé irès-noir. Je
J'ai remis encore dans une retorte de verre, & je l'ai pouffé
à la fin à un feu qui a tenu le tout rouge pendant 4 heures.
I ne parut cette fois non plus que l'autre, pas la moindre
marque de Mercure, ni dans le récipient, ni dans la cornuë,
dans le fond de laquelle il refta une matiére de couleur de
cendre d’un goût brülant comme du feu, qui immédiatement
fetournoit en liquide étant expofée à l'air.
Dans cette opération le plomb diflous & ouvert par le
vinaigre pur, & difpofé de forte qu'il pütêtre intimement
pénétré par le fel; mêlé & broyé avec un alkali fixe, cauftique
& liquide; mis en digeftion, mis en putréfaétion, expolé à
un feu violent ; diffous par l'humidité de l'air pendant un
mois philofophique ; derechef pilé, féché, pouffé à grand
feu, n'a pas produit de Mercure le moins du monde.
Que penfer donc de cette matiére & de ce qu'en avancent
fi hardiment des gens crédules, parefleux, ou attachés à la
fpéculation feule? Ils engagent ceux qui ont plus d'application
D ES :$ c Y E-N C:E:s. \ 549
au travail que de connoiffances, à des travaux inutiles &
à des dépenfes exceflives, & rendent par-là odieux un des
plus beaux arts. Les autres peuvent profiter de mes peines
& de la dépenfe que j'ai faite, & s’en fervix à épargner les
leurs.
I V.
Après m'être aflüré par ma propre expérience, que les
fels appelés reffufcitants, ne peuvent pas tirer, à la maniére
décrite, le Mercure du plomb; j'ai voulu eflayer ce que le
vifargent lui-même pouvoit produire en ce cas; vû fur-tout
que les Chimiftes appellent ce fluide V'Æau des métaux, dans
laquelle, difent-ils, ceux-ci meurent, renaiffent & fortent
plus beaux qu'ils n'étoient auparavant. J'ai fait donc fondre
une once de plomb dans une cuilliere de fer bien nette. J'ai
fait en même temps chaufler dans une autre cuilliere fem-
blable trois onces de vif-argent pur. J’ai verfé enfuite le Mer-
cure chaud fur le plomb fondu ; ïf s'y eft mêlé d'abord, &
ils fe font formés en mafe folide, de couleur d'argent. Je Fai
pilée, & après lavoir ramollie, je l'ai mife dans un petit ma-
tras que j'ai fait chauffer, & l'ayant enfuite bouché d'un bou-
chon de liege, je l'ai pofée dans un fourneau de digeftion à
une chaleur toûjours égale de 84 degrés, depuis le 1 1 Fé
vrier 173 2, jufqu'au 1 0 Janvier 1773 5; c'étoit un amalgame
mol, coulant comme du beurre fous le pilon, noirciffant
d’abord quand on le fecouoit, pefant quatre onces juftes. Je
Tai mis le même jour dans une cornuë de verre, bien nette,
à un feu de fable, & à la fin au feu de fuppreffion , au point
que le fable étoit tout rouge, & cela pendant quatre heures;
il pafla 2 onces 6 gros + de Mercure dans le recipient. Il
y avoit au fond & au col de la cornuë une poudre rouge
formée par le Mercure dans la diftillation, il y avoit un peu
de vif-argent au col, & il y avoit quelques petits globules
de plomb tout pur en forme de pouffiére, tout cela pefoit
enfemble $2 grains. Enfin il y avoit au fond une mafle
folide de plomb pefant 1 once moins $ grains, lefquels
faifoient la valeur de ces petits globules de plomb en forme
Z 22 ii
Lsso MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royae
de poufliére dont je viens de parler, de forte qu'il paroïtque
‘tout le plomb y refloit, & qu'il s'étoit diflipé 43 grains de
Mercure. Ceux qui ont quelque connoiflance de ces matiéres,
trouveront facilement la caufe de cette diffipation dans les
caufes mentionnées ci-deflus, fur-tout s'ils confiderent que
dans les diftillations une partie de ce Mercure refte attachée
à la fuperficie fort étenduë d’un grand récipient, & qu'une
autre partie demeure en forme de petits nuages fur la fuper-
ficie de l'eau qu’on doit toûjours mettre dans le récipient.
J'ai appris par cette opération que par une digeftion du
Mercure avec le plomb, continuée pendant près de 3 ans, &
par une diftillation des plus violentes, on ne peut tirer aucun
Mercure du plomb, & qu'on ne peut non plus, par ce moyen,
fixer le Mercure en plomb, parce que dans la difillation du
Mercure, il y en a toûjours une petite quantité qui fe change
en poudre rouge qui eft fixe dans le feu en cette application;
mais le poids du plomb ef toüjours refté le même.
J'ai fait la même opération fur un amalgame fait de
3 onces de vif-argent & 1 once de bon étain, je l'ai mis
au même degré de chaleur pendant autant de temps, enfuite
je l'ai mis diftiller de la même maniére dans une cornuë de
verre par le même feu : voici quel en fut le fuccès. J'ai retiré
du récipient 2 onces 4 gros de Mercure ; dans le fond de
la retorte il y avoit une poudre dont une partie étoit fine &
compofée d'une petite quantité de Mercure fixé, & l’autre
patie plus grofliére étoit noire, compofe de très-petits
morceaux d’une confiftence telle qu'eft celle de l'étain. H
avoit encore un peu de Mercure au bas du col de la retorte:
tout cela pefoit enfemble 2 gros $ grains. Au fond étoit une
male folide d'étain, pefant 1 once 1 gros 9 grains. Le déchet
étoit de 46 grains: j'ai déja donné les raifons de ce déchet.
Il paroît que par cette opération on ne peut point tirer
de Mercure de l'étain ; mais il yaeu 3 gros 14 grains, c'eft-
à-dire, plus de la feptiéme partie du Mercure qui s'eft uni
avec l'étain, & fr bien fixé, qu'il n’a pû en être féparé par
Die suaS CA EAN cUE:s age.
un feu qui failoit rougir le fable, continué pendant 4 heures,
Il y a grande liaifon entre Jupiter & Mercure, & le Soleil
eft au milieu des deux. Nov, Lum. Rem. Trattat. 9.
| V I.
J'ai verfé 10 onces de Mercure, après les avoir bien
chauffées, fur 2 onces de très-bon étain mis en fufion dans
une cuilliere de fer bien nette. Je l'ai broyé, le tout en un
amalgame uniforme que j'ai mis bien chaud & bien fec dans
une bouteille de verre nette & chaude, que j'ai enfuite bien
bouchée; je lai placé dans une boîte de bois, que j'ai attachée
au martinet ( pilon) d’un moulin à foulon travaillant conti-
nuellement, & là elle a été dans un mouvement prefque
continuel jour & nuit depuis le 30 Novembre 1732, juf-
qu'au 9 Janvier 173 5. J'ai Ôté alors la bouteille qui étoit
entire, au fond de laquelle fe trouvoit du Mercure coulant,
& après un repos de quelques jours, il s'eft trouvé au-deffus
un amalgame affés dur; le tout pefoit exaétement r 2 onces.
J'ai fait diftiller dans la cornuë de verre lutée 11 onces 7
gros de cet amalgame, & cela à feu ouvert pouffé vers la fin
au point d'entretenir la cornuë toute rouge pendant deux
heures. 11 n’en eft forti précifément que la même quantité
de Mercure qui y avoit été mife, & elle en fortit très-fluide,
& ül reftoit au fond une maffe d'étain attachée au verre avec
un peu de matiére jaune qui étoit comme feuilletée. Cette
mafie étoit fufible à feu médiocre comme l’étain, & alors la
fuperficie expofée à l'air fe peignoit de diverfes couleurs. La
mafle d’étain pefoit r once 6 gros+, & il y avoit encore
une petite quantité de la matiére jaune dont ïl vient d'être
fait mention.
Heft donc certain qu’à l’aide d'un mouvement continué
pendant un auffi long temps, le Mercure ne peut pas difloudre
létain, de maniére qu'on en puifle tirer du Mercure par une
diftillation faite à très-grand feu,
SCHOLIE.
Une chofe finguliére que j'ai remarquée dans ces trois
$52 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE RoYALE
derniéres opérations, c'eft que le Mercure féparé du plomb
ou de l'étain par la diflillation, étoit extrêmement liquide, &
qu'en le remuant dans un pot de fayence blanche bien net,
il pâlifloit en fort peu de temps la fuperficie de cette fayence,
& y laïfloit une petite tache noire fort adhérente. Dès que
j'avois nettoyé cette tache en leffuyant avec du papier bien
net & bien fec, il s’en reformoit d'abord une autre, & cela
plufieurs fois de fuite. Cela m'a fait penfer que cela devoit
s'attribuer à une partie du métal grafle qui dans la diftilla-
tion s’élevoit avec le Mercure, & refloit attachée à fa fuper-
ficie & s’en féparoit alors. Pour m'éclaircir fur ce fait, j'ai
répandu ce Mercure fur du papier blanc très-net & très-fec,
& il y a laiffé une légére trace noire par tout où il a pañlé;
d’ailleurs la fuperficie de ce Mercure étoit toüjours couverte
d’une pellicule extrémement mince & qui paroifloit comme
un peu de graifle. Aïinfi quoique par des diftillations de
Mercure fouvent réïtérées, quelques parties des autresmétaux
puifient bien s'unir avec le Mercure, il ne s’enfuivroit pas
que quelques-unes fufient changées en Mercure.
_ J’avois eu foin de faire la même expérience avec le plomb,
& ilavoit été expofé au même mouvement pendant le même
temps; mais dans le temps que je voulois le faire détacher
de ce martinet du moulin, la bouteille fut caffée par mal-
heur, & la matiére étant perduë, je ne pûs pouffer l'opéra-
tion à la fin.
Ces expériences peuvent répandre plus de Jumiére für la
nature du Vif- Argent. J'en ai fait plufieurs autres fur le
Mercure & fur les métaux, fort différentes de celles-ci, &
qui m'ont coûté beaucoup plus de travail. Je les donnerai
au public dès que j'en aurai trouvé le temps.
SUITE
D'EHS NS CHENC ES 552
SUITE DES OBSERVATIONS
DU THERMOMETRE,
Faites à l’Ifle de Bourbon par M. COSSIGNY,
Correfpondant de l Académie ;
Et le Réfulrar de celles de chaque mois, faites à Paris
pendant l'année 1734, avec un Thermomerre pareil
à celui de M. Coffigny.
Pa M DE REAUMUR.
CossiGnYy partit de la rade de l'Orient pour fIfle
. de Bourbon le re Janvier 1732, bien pourvü de
Thermometres conftruits fur nos principes. Pendant fa route
il fut attentif à obferver chaque jour la hauteur où fe trou-
voit la liqueur du Thermometre aux heures les plus chau-
des de l'après-midi. Après fon arrivée à FIfle de Bourbon,
il continua fes obfervations, & il les continua de même à
TIfle de France & à la Baye d’Antongil de l'Ifle de Mada-
gafcar où il fut obligé d'aller. Il nous envoya en 1733.
toutes celles qu'il avoit faites pendant plus de quatorze mois
confécutifs; nous les avons rapportées dans les Mémoires de
173 3. Le réfultat de ces obfervations eft aflürement curieux.
{ fait voir qu'on peut paffer la Ligne, & habiter conftam-
ment dans les lieux fitués entre les Tropiques, fans avoir à
craindre de fouffrir des chaleurs plus grandes que celles
auxquelles nous fommes expofés à Paris dans certains jours
d'été. M. Coffigny a continué fes obfervations, & nous a
envoyé celles qu'il a faites pendant près de douze autres
mois à l'Ifle de Bourbon, c'eft-à-dire, celles qu'il y a faites
pendant le mois d'Avril, & tous les autres mois fuivants
de 1733, & pendant les mois de Janvier, & Février
de 1734. Nous croyons faire plaifir au Public en les lui
Men 1734 , AAaa
554 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
communiquant ; il verra que le réfultat des premiéres obfer-
vations n’a point été démenti par les fuivantes. Afin même
qu'on ait ici une fuite d'obfervations faites pendant douze
mois préfque complets, nous reprendrons celles de quelques
jours de Mars 1733, quoiqu’elles ayent déja été imprimées.
Obfervarions des degrés auxquels s'eff trouvée la liqueur
du Thermometre à l’Mle de Bourbon, à deux ou trois
© heures après midi, depuis le 4 Mars 1733 Jufqu'au
1 de Mars 1774.
MARS 1733.
4 Degrés.
Asie s-ghidgier Portiolrer lag BCE
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Lai S Salt dense el 2e
Ici finifioit la Table des obfervations du mois de Mars;
& dans une lettre écrite à la fin du même mois, M. Cofligny
me marquoit que depuis le 13 jufqu'au 26, la hauteur
de la liqueur du Thermometre avoit été entre 26, 27 &
28 degrés, ÿ
DES SCIENCES BUS LSS
AVRIL M A I. JUIN.
1733°
JU LL L'EIT:
Thermom. Thermom, Thermom. Thérmon.
SE EPS
Jours. Deprés. Jours. : Degrés
I 2e 1 22
2 26 2 22
3 25 3 3 23
+ 25 4 22
LE: 25 + $s 22
EE [264 21+
7 7 215
8 8 22
4 9 23 3
10 10 22 +
11 11 LENS
12 12 ! 23
15 2 23% 22 2
14 14 23% 22
15 MS 1$ 25% 22
es 16 23 23
17 17 | 225 23%
18 3 18 22 ? 23 À
19 2 19 225 23
20 POS 20 22 + 21
21 23 Fi à 22 + 2r 21+
22 24% 22 23 23 3
23 235 | 23 23 22%
24 24% 24 21 22
25. 25 25 21 À 22
26 2$ 26 21 20
27 25 27 21 + 22
28 2) 25 28 21+ 22
29 25 à 29 2 29 215 22 2
30 ÊE 30 24 39 225 22 +
31 24% us
556 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALe
A O U ST |SEPTEMBRE. }OCTOBRE.
LAS
NOVEMBRE.
Thermom. Thermom. Thermom. Thermom.
» Degrés. | Jours. Degrés. Jours. Degrés. Degrés.
I 293 Nr. 214 Na FE Let |
2 21 + 2 21 + 2 23 2 25
3 21 + 3 22 3 23 3 25
4 20 + 4 21 X 4 22 + 4 25
15 5 : s EST #44
F6. 202 | 6 | 2: 6 21 6 24, He
FA 22% 7 2E 24 22 7 24 À
8 20 8 22 83 21 à 8 24
9 21 9 22 9 22 9 24
10 21 10 21 + 10 22 à 10 24.
11 HOT PRES (8 MTS ÉETT ©
12 12 24
13 21 13 21 13 21 13 2424
14 20 14 2 14 25
15 : 22 Mrs + IS 23
16 23 16 24
17 23 17 25 +
18 18 22 18 22 18 25
19 19 22 19 22 19 23 +
b
bb
ble bib bin
CO)
D'EISTIS © 1 EN CE ST $6y
DECEMBRE JANVIER |FEVRIER.
1733 dé bi
Thermom. Thermom. Thermom.
Jours. | Degrés. Jours. | Degrés. | Jours. | Deprés.
23 25 2
24% 26
25 26
244 DE
24 + 26
25
2%
247
22
27
27
A
22
271
27
W25
24%
244
26
26.2°
23
26
26
26
58 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
Si nous prenons dans les Tables précédentes de chaque .
mois les jours où la liqueur du Thermometre à monté le
plus haut, & ceux où elle s'eft tenuë le plus bas après midi,
nous trouverons ce qui fuit.
Moindre
chaleur.
MARS
Les derniers jours du mois à 2 84, HEC M PAERCAEEE 24,
Plus: grande
chaleur.
AVR.
eine Ras it. COME VE LES CC OR NI DA
M A I.
Lef2r a er. Li FINEGT fers. à... 2e
JU TIPN"
LÉ AE RS LUCE .. 44 5487. ÎLes 24 & 26: 2.4," Hp LA
ON MERE ES EE 254 Les 14.22. & 23. à... 204,
SEPTEMBRE.
Les 16.17. 25.&:29. à 234. Les 677: Eire cle ent
O’C'T:O'BR'E-
LebEraT se er 20 Îles 6: rr.&rsà.... nt.
NOVEMBRE.
Le 17.à 0. 4 24 2513. [Lez2r. à .:.....7 201E
DECEMBRE.
R 1734
+ 12 13) af./ sidte 2244
FE VRE ER:
Depuis le 9. jufqu’au 16.à 271. [Le CN PRE MNT cle 234
La plus grande chaleur qui fe foit fait reffentir à l'Ifle de.
Bourbon, pendant douze mois confécutifs, a donc été mar
quée par 2.8 degrés de hauteur de la liqueur du Thermometre,
e
D'E:s: S Ci E NC ES 9
& la liqueur n’eft montée à ce terme que le 28 Janvier &
les derniers jours de Mars. Dans les après-midi les moins
chaudes, qui ont été celles des 14, 22 & 23 Août, la
liqueur s’eft tenuë à 20 degrés. La différence entre la cha-
leur de l'après-midi la plus chaude de ces douze mois, &
celle de l'après-midi la moins chaude n’a donc été que de 8
degrés. Nous fommes fujets dans nos climats à des inéga=
lités bien plus confidérables. Pour en être convaincu, on n’a
qu'à confulter la Table des plus grands chauds & des plus
grands froids de chaque mois de l'année 1734, qu'on
trouvera ci-après. Quoique cette année ne nous ait fuit
reflentir ni froid ni chaud exceflif, on verra que le 24 Juin
la liqueur du Thermometre s’eft élevée à 2 7 degrés + à 3
heures après-midi, & que le 22 Janvier à pareille heure, elle
étoit à 2 degrés au-deflous de la congélation : ainfi, à Paris,
la différence entre la chaleur de l'air de deux après-midi a
été exprimée par plus de 29 degrés. Dans d’autres années on
trouvera cette différence de 3 2 degrés & plus, & elle n'eft x
TIfle de Bourbon que de 8 degrés. Les voyageurs {e réuniflent
pour vanter la falubrité de l'air de cetteIfle. I la doit peut
être en grande partie à ce que fa température ne varie pas
auffi confidérablement que celle du nôtre.
La différence qui eft entre notre pofition & celle de l'Ifle
de Bourbon, nous montre aflés que d'un Solftice à l'autre,
nous devons être fujets à des variétés de chaud & de froid
qu'on n'éprouve pas dans cette Ifle. On ne voit pas de
même pourquoi nous fommes fujets à des inégalités de cha-
leur beaucoup plus grandes dans le même mois, & dans les
mois même où le Soleil eft prefque flationnaire, où nous
fommes fujets à des variétés auxquelles l'éloignement. ou
Fapproche du Soleil n’ont aucune part. Nous trouverons,
par exemple, dans la Table fuivante, que dès le 18 Mai a
liqueur s'eft élevée à 3 heures après-midi à 26 degrés, &
que le 26 du même mois à 2 heures après-midi la liqueur
n'étoit qu'à ro degrés; ainfi le 26 la liqueur étoit à 16
degrés plus bas qu'elle n'avoit été le 18 à pareille-heure,
560 MEMOTRES DE L'ACADEMIE ROYALE.
Dans 8 jours de temps on aune différence de chaleur exprimée
par un nombre de degrés, double de celui qui exprime la va
riation de chaleur trouvée dans fIfle de Bourbon pendant le !
cours de 1 2 mois, à de pareilles heures, & triple ou quadruple
de la variation d’un mois dans la même lfle. Les mois de Juin,
de Juillet & d’Août nous fournifient dans d’autres années de
ces variétés & de plus grandes. On trouvera celles que nous
avons eüës en 17 34 dans la Table fuivante. On y marque le
jour de chaque mois où la Jiqueur eft defcenduë le plus bas le
matin; le jour de chaque mois où la liqueur a été le plus
bas l'après-midi; le jour de chaque mois où la liqueur a été
le plus haut le matin ; & le jour de chaque mois où la liqueur
s'eft le plus élevée après midi. Pendant les mois de Septembre
& d'Oétobre j'ai été en Poitou, ou en route pour y aller &
pour en revenir, & j'ai marqué les endroits où les obferva-
tions ont été faites; les autres obfervations ont été faites, ruë
S.t Thomas du Louvre, à l'hôtel d'Uzès, avec un Thermo-
metre expolé au Nord à Fair extérieur, où à Charenton.
Les degrés qui fe trouvent au-deflus de ce trait —, font au-
deflus de la congélation, & ceux qui font au-deflous, font
au-deffous de la congélation.
Obfervarions des plus grands Froids à des plus grands
Chauds de chaque mois, pendant l'année 1734,
aux heures marquées dans les Tables.
Plus grand froid | Plus grand froid | Plus grand chaud | Plus grand chaud
du matin. de l'après-midi. du matin. de l'après-midi.
JANVIER 1734.
4 a6% à 101
FE VR:RE R:
ct
+ à" à 144)28: à7h à ydilré.
MARS.
agh à 6dil18. à6hà vi |rs.
D ES, S C LE NC ES S6x
Plus grand froid
Plus grand froid | Plus grand chaud | Plus grand chaud
du matin.
de l'après-midi. du matin. de l’après-midi.
En
AVRIL 1734
28. à3hlàroû | 3, à6hiàrrd
M A I.
26. à2h àrod ro. à 6h ar
18. à3h à264
ra
JUIN.
11. à2h à164 |26. à shlàaryda
4 à 2132741
JUILLET.
18. 38 à 12 8. à6n à 1612
16. à68 àridr
—————————_————
a65 à rot
SEPTEMBRE.
A Reaumur, A Amboife.
A Reaumur, À Saïint-Dié,
; NE APE RETe à <hZàr6dz à .
àérlà s + 43 4 2°3)10. àshran6l;| 8. à3n à 2742
EE a —
À E'tampes. A Reaumur,
a6h à
29. à2h?à jar
DECEMBRE,
11. à2h1à pd | $- àa6h1à Ga
Cette Table nous apprend que le 4 Janvier à 6 heures du
matin, la liqueur du Thermometre étoit à ro deg. + au-deflus
de la congélation, & que le 26 du mois de Mai à 2 heures
après midi, elle n'étoit qu'à 10 degrés. Il faifoit donc plus
Mem. 1734 + BBbb
562 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
chaud le 4 Janvier à 6 heures du matin que le 26 Mai à
2 heures après midi; cependant dès 1e 18 Mai, la liqueur
s'étoit élevée après-midi à 26 degrés, ce qui marque un
degré de chaleur de nos jours d'été très-chauds.
Le 24 Juin eft de tous les jours de cette année celui où
nous avons obfervé la liqueur plus haut, après midi elle
s'éléva à 27 degrés 3. Les obfervations rapportées par M.
Maraldi donnent le 8 Septembre pour le jour le plus chaud,
& nous leuflions apparemment trouvé tel f1 nous euflions
été à Paris. La liqueur de Fancien Thermometre de l'Obfer-
vatoire y monta à 7 5 degrés; j'étois ce jour-là à Saint-Dié
près de Blois. La liqueur de notre Thermometre polfé en
dehors d’une fenêtre tournée vers le Nord, ne monta qu'à
27 degrés; mais la différence des pofitions d'un Thermo-
metre, peut donner de plus grandes différences que celles d’un
demi-degré, ou même d’un degré. J'ai fouvent obfervé que
dans une chambre d'une grandeur médiocre, la liqueur du
Thermometre placé à côté de la cheminée, étoit conftam-
ment élevée de 3 degrés de plus que celle du T'hermometre
ui étoit placé vers le milieu de cette chambre.
Notre Table nous donne le plus grand froid le 23
Janvier à 7 heures + à 6 degrés À au-deflous de la congé-
lation. Le 10 Décembre à pareille heure à peu-près, nous
avons eu la liqueur à 6 degrés au-deflous de la congélation,
& ce dernier jour eft celui qui a été trouvé le plus froid
à l'Obfervatoire.
Le $ Septembre j'étois en route vers les cinq heuresaprès
midi, la liqueur de deux Thermometres qui étoient dans
ma Breline, étoit à 25 degrés; nous étions quatre dans la
même Breline à qui ce degré de chaleur étoit très-incom-
mode. Je voulus voir quel étoit alors le degré de chaleur de
ma peau, & deux autres perfonnes eurent la même curiofité
pour avoir celui de la leur. Nous appliquâmes les boules des
Thermometres immédiatement contre notre peau au-deffous
de la poitrine, nous les recouvrimes autant qu'il étoit poffi-
ble, pour que l'air extérieur fit fur elles peu d'imprefion,
DES SCrENcyEs, 3
La chaleur de nos peaux f trouva à peu-près la même; elle
ne put faire monter fa liqueur à plus de 3 2 degrés, & celle
d'un de nous trois ne la fit monter qu'à 3 1 4, J'ai rapporté
ailleurs que j'avois fait une épreuve femblable pendant l'hiver
étant auprès de mon feu où l'air étoit tempéré. La chaleur
de ma peau fit alors monter la liqueur du Thermometre à
3 2 degrés comme dans l'expérience précédente. Nous pou-
vons donc être dans un air dont nous avons peine à fuppor-
ter la chaleur, & dans un air dont nous aimons la tempé-
rature, fans que notre peau ait réellement un plus grand
degré de chaleur dans une que dans l'autre de ces circon-
ftances,
BBbb 1j |
564 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
OBSERVATIONS METEOROLOGIQUES
PACE SA où DIT RE CAETAT. ne.
PENDANT L'ANNEE M. DCCXXXIV,
ÆExtraites d'une Lettre de M. MuUSSCHEMBROEK.
}
Par M pu Fay.
M MussCHEMBROEK Profefleur de Mathématiques
. à Utrecht, & Correfpondant de F Académie, qui fait
depuis plufieurs années les obfervations Météorologiques en
cette ville, avec toute l'attention & toute l'exactitude qu'on
peut attendre d'un homme auffr verfé qu'il left dans toutes
les parties de Phyfique & de Mathématique, m'a envoyé
celles de Fannée 1734; M. de Mairan à qui j'ai commu-
niqué cette Lettre, en a extrait ce qui concernoit les Aurores
Boréales, & en a rendu compte à l'Académie ; j'ai fait la
même chofe pour ce qui regarde les Parhélies, Halos, ou
Paraflénes, & on trouvera dans les Mémoires de l'année
prochaine, plufieurs obfervations que j'ai faites ou recueillies
fur cette matiére, parmi lefquelles font celles de M. Muñ-
chembroek. Je vais maintenant faire un extrait de fes autres
obfervations qui n'ont pü trouver place dans ces deux
Mémoires.
La plus grande hauteur du Barometre fut à Utrecht le 2 2;
Janvier, elle fut de 29 pouces 10 lignes +, mefure du Rhin,
ce qui revient à 28 pouces 10 lignes + ou environ, de notre
mefure. M. Mufichembroek n’avoit point encore vü le mer-
cure monter aufli haut, le vent étoit au Nord, & ce qu'il y
eut de fingulier, c'eft que le lendemain le Ciel fut couvert,
& il dégeloit un peu; cependant le mercure ne baïffa que
d'une demiigne, & demeura encore le jour fuivant à la
mème hauteur. Ce fut le 25 Décembre à midi qu’il fut le
D'EUSUNST CR mr NICNETS 565
plus bas, il n’étoit qu'à 27 pouces 8 lignes, ou 26 pouces 8
lignes + de notre mefure. Ce jour-R fut mémorable: par une
tempête qui fit périr un très-grand nombre de Bâtimens, tant
fur les côtes de Hollande que fur celles d'Angleterre. Le plus
grand froid a été le 2 2 Janvier fur le foir, le même jour au-
quel le Barometre avoit auffi été le plus élevé; le T'hermo-
metre de Fahrenlhreyt étoit à 2 2 deg. cequirépond à s degrés
au-deflous du terme de la congélation du Thermometre
de M. de Reaumur; & le plus grand chaud 2 été le 19 Mai
& le 9 Juillet, le Thermometre de Fahrenihreyt ayant
monté ces deux jours-là au 82. degré, ce qui revient au
23 + de celui de M. de Reaumur. I y eut le $ Juillet une
pluye prodigieufe; car depuis 1 1 heures du matin jufqu’à
minuit il tomba 47 lignes + d'eau, & cependant il y eut une
interruption aflés confidérable depuis le commencement
jufqu'à 2 heures après midi; cette pluye fut accompagnée
d'un tonnerre peu confidérable qui dura depuis 3 heures £
jufqu’au foir. £ ÿ
La quantité d'eau de pluye tombée à Utrecht en 1734,
a été de 3 5 pouces 1 1 lignes 7, ou 34 pouces 0 lignes de
notre mefure, ce qui feroit beaucoup plus pour Paris que
ce n'eft pour Utrecht, car on y compte l'année moyenne
de 24 pouces du Rhin , ou de 23 pouces 10 lignes du pied
de Roi. La fomme de l'évaporation pendant toute l'année a
été de 2 5 pouces 3 lignes, ce qui fait 24 pouces 2 lignes,
melure de France.
M. Mufichembroek fait avec un foin très-particulier les
obfervations de l'inclinaifon & dela déclinaifon de l'aiguille
aimantée, & il a trouvé qu'il y avoit quelquefois d'un jour
à l’autre des changements affés confidérables; es aiguilles dont
il fe fert, font très-grandes, & elles demeurent toûjours dans
la même pofition fur des appuis très-folides, & defquels i
a eu foin d’éloigner tous les corps métalliques qui pouvoient
apporter quelque dérangement aux obfervations; la décli-
maillon à varié dans le cours de cette année depuis 124 s 5!
BBbb ii
566 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
jufqu'à 144, & en général les plus grandes déclinaifons ont
été pendant les mois de Juillet, Août & Septembre, mais
cette regle n’a pas été fans exception : l'inclinaifon de Lai-
guille aimantée a varié depuis 714 10’ jufqu'à 774 3 0', elle
a demeuré pendant plufieurs jours à cette déclinaifon au mois
de Novembre pendant une gelée aflés forte, mais les autres
changements font arrivés dans toutes les températures indif-
féremment, fr ce n’eft qu'après avoir été prefque toûjours
croiflante depuis le milieu de Juillet jufqu'au milieu de No-
vembre, elle a décrû enfuite jufqu’à la fin de Fannée, où elle
nétoit que de 734 35°.
DES SC LL TE NC EE 1 '$6z
JOURNAL D'OBSERVATIONS
DES AURORES BOREF ALES,
Qui ont éré vüës à Paris ou aux environs, à Utrecht,
d'à Peterfbourg, dans le cours de l’année 1 7 34:
Avec quelques Obférvations de la Lumiére Zodiacale,
Par M DE MAIRAN.
E remarquai l'année derniére, en finiffant un pareil Jour-
nal, qu'elle avoit été moins féconde en grandes Aurores
Boréales que la précédente 1 732; & 1732 moins encore
que l'année 173 1. Ü n’en étoït pas tout-à-fait de même à
‘égard de la fréquence abfOIuE du” Phénomene pris indiffé-
remment dans toutes fes apparitions plus où moins mar-
quées; car il avoit paru plus fouvent en 173 2 qu’en 1 731.
Mais fa diminution tant de fréquence, que de grandeur &
de régularité, a été beaucoup plus fenfible cette année 17 34»
que dans aucune de celles dont je viens de parler. Ce qui
doit fans doute être attribué en partie au mauvais temps,
& à plufieurs nuits fombres qu'il a fait cette Automne,
c'eft-à-dire, dans la faïfon de l'année où les Aurores Boréales
font communément les plus fréquentes , les plus grandes, &
les plus réguliéres.
Janvier, Je n'ai obfervé le Phénomene dans tout cé mois,
que le 8, quoiqu'il s'y foit pañlé peu de foirées fans que j'y
aye fait attention ; il étoit informe, & répandu par gros flocons
de matiére lumineufe en divers endroits du Ciel, le Nord
en étant cependant beaucoup plus chargé que tout le refte,
Je avois apperçu dès 6 heures 2 du foir, malgré le temps
fombre qu’il avoit fait toute la journée, & qui duroit encore.
H eft vraï que la Lune qui avoit 4 jours, & qui étoit fur
Yhorifon, pouvoit rendre ces apparences équivoques; mais
10 Decemb,
1734.
68 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
à 8h À, & après le coucher de la Lune, Aurore Boréale
w’étoit plus douteufe; elle me fut bientôt dérobée par quan-
tité de nuages obfcurs, | Wan. ”
J'ai appris par des perfonnes qui étoient fur pied à 4
heures du matin, le jour des Rois, qu'ils avoient vü vers le
Nord, & le Nord-Oueft, une grande clarté, comme fr
le jour alloit paroître. C'étoit, felon toute apparence, un
refte de l’Aurore Boréale de la veille (le $), laquelle n'avoit
u fe montrer à caufe du temps fombre; car ce n’étoit ni
l'heure, ni le lieu de la Lumiére Zodiacale, & il n’y avoit
oint de Lune.
J'ai appris aufft par deux Lettres de M. Bouillet, que le
9, après le coucher du Soleil, on avoit vü à Servian, gros
village à 2 ou 3 lieuës de Béziers, une bande de lumiére
rougeitre qui s'élevoit au-deffus de l’horifon, à peu-près à
l'endroit du coucher. C’étoit, fans doute, la Lumiére Zodia-
cale; mais comme cëtté Tumiére ne {€ términoit nullement
en pointe, qu'elle montoit fort haut, & qu'elle dura aflés
avant dans la nuit fous cette forme, il y a grande apparence
auffi que la matiére de l'Aurore Boréale s'y mêla, comme
il arrive fouvent, & fous l'apparence d’une de ces bandes
Zodiacales dont nous avons parlé plufieurs fois dans les
obfervations des années précédentes.
Du refte, je n'ai vû la Lumiére Zodiacale qu’une ou deux
fois dans tout ce mois, quoique j'y aye été attentif, & qu'il
ait fait plufieurs belles foirées très- propres à la faire paroître.
Février. Le 3, le temps ayant été couvert après le coucher
du Soleil, & long-temps après, j'ai été averti à 1 r heures
qu'il paroifloit une Aurore Boréale, & je l'ai trouvée en
effet très-bien formée, clair-céladon, horifontale, & décli-
nant beaucoup vers l'Occident : elle s’étendoit depuis lOueft
jufqu'au Nord-Eft; le Ciel étoit ferein dans toute cette
partie, & les Etoiles y brilloient. La plus grande clarté du
Phénomiene, &, comme je le préfume, fon milieu répondoit
au-deflous & entre le triangle de Caffiopée & les Etoiles
du Dragon, dont plufieurs fe trouvoient alors difpofées
verticalement.
DES SCIENCES. 569
verticalement. Quelques minutes après elle a été coupée par
une bande noire horifontale, de 2 ou 3 degrés de largeur,
élevée de s à 6, & le Ciel s'eft bientôt couvert de brouillards
ou de matiére fumeufe & opaque; j'ai cru y appercevoir quel-
ques rayons à Îa jambe orientale de Farc vers les 111,
mais tout cela a difparu, ou a été obfcurci dans un inftant,
Le 18, j'ai vû dans le Ciel, peu de temps après le cou-
cher du Soleil, de ces bandes blancheîtres, concourantes vers
les deux points oppofés, en forme de côtes de melon, dont
J'ai parlé plus d’une fois dans les obfervations des deux années
précédentes, & qui m'ont paru tenir quelque chofe de la ma-
tiére dél'Aurore Boréale, ou Fannoncer comme prochaine,
Le 21, la Lumiére Zodiacale a paru fort grande vers les
7V 2 du foir.
Le 22, il y a eu une Aurore Boréale, tranquille, bañle,
mais aflés bien terminée. Je ne lai obfervée que fur fes fins L
ou pendant que des nuages l’offufquoient, vers les 8h 1 du
foir; mais M. Godin qui l'a vûë à 7h 2, m'en a donné une
note, d'où je recueille qu’il y avoit un fegment obfcur, &
par-deffus un arc lumineux très-brillant; que la corde de
cet arc mefurée fur l’horifon étoit de 104 degrés, & que
fon milieu, qui s’élevoit à plus de 10 degrés, déclinoit du
Nord vers l'Oueft de 14 degrés. La luifante de la queuë
du Cigne étoit à cette heure fur le bord de l'arc lumineux,
dont la largeur étoit d'environ 141; mais cette Etoi!: dé-
clinoit vers l'Oueft par rapport au fommet de l'arc. Le
même Phénomene a été obfervé à Bayeux par M. l'Abbé
Ourhier, avec quelques différences que la fituation, l'heure &
d'autres circonftances peuvent avoir occafionnées.
Le 26, malgré un Ciel fort couvert, & par un vent de
Sud qui tenoit de la tempête, il y a eu vers les 8h À du foir,
des fignes fort marqués de l’Aurore Boréale, des traînées de
umiére blanches, des nuages rougeîtres que je ne fçaurois
attribuer à aucune autre caufe.
Mars. Le 8 de ce mois, par un temps fort femblable à
celui du 26 Février, & le Barometre fe trouvant plus bas
Men. 1734 "CCcc
\
570 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE RoyALE
que je ne f'avois vü depuis long-temps, fçavoir à 26 pouces
9 lignes, j'ai vü l'Aurore Boréale, qui a été auffi remarquée
à 9" par M. Grand-Jean, & quelque temps après par M.
Godin.
Le 28, le 30 & le 31, la Lumiére Zodiacale, ou l'Au-
rore Boréale, ou peut-être les deux enfemble ont paru; car
il m'a été difficile de les bien diftinguer : cependant je pré-
fume qu'il y a eu certainement beatcoup de matiére Bo-
réale le 3 1.
Le 11 & le 14, la Lune a été environnée d’une cou-
ronne où Æ/alo, que je juge avoir été du nombre de celles
qui ont 44 à 45 degrés de diametre.
Avril. L'Aurore Boréale s'eft fouvent montrée dans ce
mois : elle a été bien décidée le 5, le 7 &le 8; douteufe
ou peu marquée le 2, le 4, le 9 & le 10 : mais cette der-
niére n'a pas été peu marquée en Italie.
Celle du 8 a été ici la plus forte: elle avoit des jets de
lumiére, & paroifloit avec la Lune qui avoit quatre jours.
Je juge qu'elle pouvoit avoir commencé vers les 8 heures.
La journée avoit été froide; le Soleil y avoit fouvent été
caché par les nuages, avec de la pluye & de la grêle. A 8h 4
il y avoit fous l'Etoile Polaire une fi grande clarté rougeûtre,
& fi femblable à l'effet d’un grand feu allumé derriére des murs
qui le cacheroient, que me trouvant alors dans les ruës, j'ai
été obligé de monter chés moï, & de voir cette partie du
Ciel à découvert, pour me convaincre que c’étoient les
approches d’une grande Aurore Boréale, dont je voyois
déja çà & là divers rayons qui partoient de plufieurs nuages
fumeux répandus du côté du Nord. A 9h Farc étoit formé,
mais aflés mal terminé, fort large, d'environ 4 à $ degrés,
de couleur céladon fort beau & fort vif. Je n'ai pü bien
diftinguer le pied occidental de cet arc, ni l'extrémité du
fegment obfeur qu'il bordoit, à caufe de la clarté de la Lune
qui étoit au-deflus, & de plufieurs nuages vrais ou apparents
qui s'y méloient; mais l’extrémité oppofée de ce fegment
vers l'Eft, pañloit 2 ou 3 degrés au-delà du vertical de
DES SCIENCES. | sys
l'Etoile « de la Lyre vers le Midi, c'eft-à-dire, 47 ou 48
degrés d'amplitude orientale; de forte que comptant l'occi-
dentale à environ 8$ ou 86, à peu-près fous le vertical
de a Lune, on aura r 32 ou 133 degrés pour la corde ho-
rifontale du fegment, & fa déclinaifon de 18 à 20 degrés.
Comme il étoit mal terminé, je mai pû juger dela hauteur
de fon fommet qu'imparfaitement, de 1 2 à 1 $ degrés. H y
a eu encore quelques jets après 9h on 9b+, prefque toûjours
mêlés de matiére fumeufe, la clarté dominante tirant vers
le citrin céladon. Le Phénomene a toûjours été enfuite en
diminuant de vivacité & de hauteur, & à 1 r heuresonne
voyoit plus qu'une petite clarté blancheâtre vers cette partie .
du Ciel.
Les circonftances du temps ne m'ont pas permis d’obferver
le Phénomene du 10. Je vis feulement du côté de lEf
vers les 9 heures, une aflés grande clarté dont la préfence
de la Lune me rendoit la caufe douteufe, parce que du côté
oppoié où elle étoit, & où le Ciel fe trouvoit plus décou-
vert, cet Aflre dardoit fa lumiére fur la plüpart des nuages,
ou fur des pelotons de matiére fumeufe & boréale qui étoient
parfemés dans tout le refte du Ciel. Mais j'ai été bien dé:
dommagé de ces obflacles par fexaéte defcription que M.
Manfredi m'a ‘envoyée de .ce qu’il avoit vû à Bologne le
même jour & à la même heure. A1 obferva, fans doute, par
un temps très-favorable, puifqu’à compter depuis 8h à
qu'il commença d'appercevoir le Phénomene, jufqu'àminuit,
ilen remarqua toutes les apparencesiprefqu'à chaque minute,
Je garde précieufement ce détail pour m'en fervir dans
Poccafion, & je me contente d’en tranfcrire iciice qu'il con-
tient de plus effentiel par rapport au plan que je me fuis fait
dans ce Journal. L nil
Le Phénomene confiftoit d’abord, à 8h£ du foir, en
une lumiére couchée fur l'horifon à l'Orient équinoétial :
elle étoit fi vive, qu'on eût dit que le Soleil alloit fe lever.
Au-deflus de cette lumiére, ‘en tirant vers la droite, on
voyoit une matiére fumeufe, de couleur cendrée, quis’élevoit
CCcci
572 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
ar pelotons; & un peu plus haut, à environ $ à 6 degrés
au-deffus de horifon, & perpendiculairement fur le milieu
du Phénomene, paroifloit un petit nuage lumineux &
rougeâtre, qui sy maintint fans changer de place jufqu’à
ou 10 minutes après 9 heures. Tout cet amas de lumiére.
& de fumée fembla enfuite avoir un mouvement qui le rap-
prochoit du Nord, confervant toüjours cependant une
pofition fort orientale. Il y eut quelques rayons, dont les
plus grands ne montoient guéres au-delà de 8 degrés +.
Vers les ro heures, c'étoit la partie feptentrionale du Phé-
«nomene qui étoit la plus brillante. Enfin fa lumiére s’afloi-
blit de vivacité & d'étenduë, & il n’en reftoit à minuit que
quelques traces, fous une forme ronde, & de fa grandeur
de la Lune naïflante. Ces fortes d'Aurores Boréales, ou
plûtôt Orientales, font très -rares.
Les Aurores Boréales du $ &c du 7 dans le même mois,
& dont j'ai déja fait mention, étoient du nombre de celles
que j'appelle informes. Celles du 2, du 4 & du 9 m'ont paru
douteufes en ce qu'elles étoient foibles & mêlées de Ia Lu-
miére Zodiacale, fi ce n’étoit la Lumiére Zodiacale toute
feule qui paroifloit, & mal terminée, comme je juge qu'elle
a paru encore le 29 du même mois.
May. J'apprends de M. Maraldi qu'il y a eu une petite
Aurore Boréale le 24. Le 2, la Lumiére Zodiacale s’étendoit
jufqu'aux Etoiles des Gemeaux, mais mal terminée. Je ne
donne aucun détail du Parhélie qui fut obfervé le jour pré-
cédent, & que M. du Fay a décrit. Il me fuffit d'en faire
mention, pour remplir mon objet, dans l'ignorance où je.
fuis de la liaifon que tous ces Phénomenes pourroient avoir
enfemble.
Juin. Je n'ai rien apperçû dans ce mois, ni de l’Aurore
Boréale, ni de la Lumiére Zodiacale.
Juillet. Le 2, je juge par une lumiére qu’il y a vers le Nord
à 11b, & qui furpañle celle du Crépufcule, de même que
par plufieurs autres circonftances, qu'il y a affürément une
Aurore Boréale, ;
do rD ES SCLENCES 573
Août. L'Aurore Boréale paroît le 23 à 1 1* parune fimple
clarté, mais bien marquée fur Fhorifon, prefque direétement
au-deflous de l'Etoile Polaire, ayant feulement une décli-
naifon occidentale de 2 ou 3 degrés. ne
Le 24, le 25, le 26 & le 30, iln'y a eu que des apparences
équivoques du Phénomene, tant par elles-mêmes, que par
les circonflances extérieures du temps. Mais le 31 il ya
eu une de ces Aurores Boréales qui occupent prefque tout
lhorifon, & qu'on peut par- appeller horifontales. Celle-ci
. confiftoit en un nuage fumeux furmonté de blanc, à 5» 6,
10 & 12 degrés de hauteur; un peu plus haut on voyoit
les Etoiles ternies, fans doute par fa continuation de ia
même matiére autrement diftribuée ou modifiée; ce que j'ai
obfervé avec divers changements peu remarquables depuis
9" du foir jufqu'à 11. r
Septembre. Le 19 de ce mois, étant à Nointel près de
Beaumont, j'ai obfervé lAurore Boréale à rayons & jets de
lumiere, maïs fans arc lumineux, ni fegment ob[cur, ce qui eft afés
rare, & qui pourroit même être douteux en cette occafion ;
parce que je nai commencé de l'obferver qu'à 10 heures, &
que j'ai fçù qu'elle paroïfloit avec beaucoup d'éclat tout au
moins à 9. Or comme je l'ai remarqué dans mon Traité fur
cette matiére, l'arc ou le limbe lumineux, & le fegment obfcur
venant à ne plus former qu'un amas confus de lumiére fur
la fin du Phénomene, lorfque, felon ma conjeure, toutes
fes parties ont eu le temps de s’enflammer, il y a grande ap-
parence que je n'ai vû celui-ci qu’en cet état; & en effet il a
toûjours diminué jufqu'à 1 1 heures, où il n’en reftoit aucun
veftige.
Le 20, il y a eu fürement une Aurore Boréale, mais fr
obfcurcie & f1 interrompuë par les nuages, que je n'ai rien
à en dire de pofitif. L'on m'a appris depuis qu'elle avoit été
beaucoup mieux vüë à Paris, & les mêmes perfonnes m'affü-
rent qu'un femblable Phénomene y avoit paru le 13.
Le 23 & le 27, Aurores Boréales bien marquées &
tès-fumineufes, mais dont on ne peut déterminer les
CCcc üj
74 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALe
limites, à caufe du temps fombre, nébuleux, & changeant,
Le 28, autre Aurore Boréale à peu-près dans les mêmes
circonftances de temps que les deux précédentes; mais qui a
eu cela de particulier, qu'elle a été d’abord Lumiére Boréale
& Méridionale tout enfemble, le refte du Ciel étant parfemé .
çà & là dans fes autres parties, & fur-tout vers le Zénith, de la
même matiére. C’eft l’état où étoit le Phénomene lorfque
je l'ai apperçü à 8h 2, après quoi il m'a été fouvent caché
en tout ou en partie. À 1 1", toute cette matiére fumeufe ou
éclairée s'étoit entiérement jettée vers le Nord, l'Oueft &
YEft, du moins n’en ai-je rien pü difcerner vers le Midi.
Le 29, à Paris, après une belle journée & un beau coucher,
n'ayant rien vü dans le Ciel qui m’annonçit l’Aurore Boréale,
javois négligé d'y être attentif; mais ayant éfé averti à
11h qu’elle paroifloit, je l'ai trouvée «en effet très-bien for-
mée, à fegent, avec un arc lumineux, foible-&-blancheître ;
ce qui joint à quelques autres circonftances, me fait juger
u'elle dévoit avoir commencé depuis quelque temps &tirer
{ur {à fin. Le limbe de l'arc étoit comme entrelacé avec les
Etoiles de la grande Ourfe, paffant à gauche ‘ou du côté de
l'Occident entre les Etoiles 2 & y de cette Conftellation, &
à droite entre celles qui font marquées e, Ë, & n, de maniére
que B, €, 6, fembloient rafer le bord fupérieur de ce limbe,
& y; », l'inférieur, lemilieu ou le fommet fe trouvant entre
ces deux derniéres, mais un peu plus près de # que de +. Ce
qui donne une détermination de fa hauteur de 13 à 14 de-
grés au bord fupérieur, & de 1 2 à 1 3 à l'inférieur, falargeur
demeurant par-là d'environ un degré. J'ai auffi déterminé fon
amplitude occidentale de $ 9 ou 60 , par le moyen du vertica
de l'Etoile de la Lyre, où fe trouvoit aflés exactement le
pied de cet arc; mais je n'ai pù voir fon pied oriental, à
caufe de la face du vieux Louvre qui répond à cette partie
du Ciel, & qui me la cachoït. A 1 1h+ il ne reftoit prefque
plus rien du Phénomene. ;
Odobre. Le 10, à 9h il y avoit autour de la Lune une
couronne dont la partie comprife entre foncentre&-l'Etoile
D'LINYNSIOATIENN cYEss,, 2 S7$
de la Lyre, m'a paru partager cet intervalle, en raifon de
2à 5 ,les $ demeurant entre l'arc dela couronne & l'Etoile.
Ce qui par le lieu aétuel de la Lune (à environ 2 34310806,
latitude feptentrionale 3° 20’) & fa diftance à cette Etoile
(environ 78° ), donne un peu plus de 22 degrés de rayon
à la couronne: c’eft à peu-près la mefure ordinaire de ces
Phénomenes felon M. Huguens.
Dans la plüpart des jours de ce mois e temps a été fombre,
pluvieux, & accompagné quelquefois d’un vent de tempête ;
par exemple, le 1 $ & le 1 6, le Barometre qu'on a à Nointel
où j'étois, s’eft trouvé fort bas, & 3 ou 4 lignes au-deflous
de 27 pouces. C'eft un Barometre à gros tuyau, où j'ai
vérifié que le Mercure peut aller jufqu'au bout. L'Aurore
Boréale aura donc pû être bien des fois dans 'Atmof.
phere, fans paroître : mais j'ai jugé qu'elle y étoit fürement
le 19, par la grande clarté que jai vüë du côté du Nord,
depuis l'entrée de la nuit jufqu'à 11h21, & de même à peu-
près le 21 &le 23. :
Le 2 5, le Ciel étant beaucoup plus ferein, le Phénomene
a paru après 7 heures du foir, il étoit tranquille, & à fimple
Lumiére feptentrionale, déclinant vers le couchant. Cette lu-
miére, ou, fi l'on veut, cette efpece de nuage blanc &
lumineux, formoit au-deffous dela grande Ourfe un fegment
bien terminé, dont le fommet, autant que j'en ai pû juger,
répondoit à l'intervalle des deux Etoiles À, €, de cette
Conftellation, & il déclinoit par-là vers le couchant, d’une
vingtaine de degrés. Il faut remarquer cependant que dans
les Aurores Boréales fort bafes, il eft mal aifé de diftinguer
le fommet du fegment par lui-même. Telle étoit celle-ci où
la hauteur de ce fommet ou de la partie que j'ai prife pour
le milieu, m'a paru un peu moindre que la diftaince de la
premiére & de la derniére Etoile (€, », } de la queuë de
l'Ourfe, à laquelle je pouvois aifément la comparer. Et je
n'ai pà déduire ce milieu de l'amplitude du fegment für l’'ho-
rifon, parce que du lieu où j'étois il nr'étoit caché à l'Orient,
& qu'au couchant il y avoit une efpece de gros nuage qui
576 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
couvroit la lumiére. Le Phénomene s’eft foûtenu à la même
hauteur jufqu'à 1 1 heures, après quoi il a diminué fenfi-
blement d’étenduë, & de clarté. L
Le 26, le 27,le 28 & le 29, j'ai apperçü des marques
certaines que Aurore Boréale étoit dans l’Atmofphere &
au-deflus des gros nuages qui m'ont permis d’en voir la clarté
par intervalles, malgré le temps obfcur & couvert de toutes
ces nuits.
Novembre. Le 14 & le 15, Aurores Boréales informes.
Le 19, à 8h + du foir, tout le Ciel étant couvert d'une
efpece de brouillard, j'ai apperçü vers le Nord-Eft une clarté
fort haute, & fort large, qui avoit toutes les apparences d’un
grand rayon de l’Aurore Boréale, & qui ne pouvoit en effet
être attribué qu'à ce Phénomene, fice n’eft qu'au lieu d’un
rayon, ce pouvoit n'être que la lumiére de l’Aurore Boréale
en général : vÜE à travers une ouverture ou un intervalle que
.{e brouillard laiffoit en ce moment dans cette partie du Ciel.
Elle a été effacée dans quelques minutes.
Le 22, l'Aurore Boréale fe montre à diverfes fois derriére
des nuages depuis 8h jufqu'à rob.
Décembre. Je n'ai vü l’Aurore Boréale que le 17, & par
un temps auffi peu favorable à l'obfervation que dans le mois
précédent. Mais il y en a eu de fimples apparences qui fe
compliquent, à mon avis, avec ia Lumiére Zodiacale les 1 9,
22; 24, 25 & 30.
Où je dois cependant remarquer que le 2 1, le Ciel étant
beau & fans nuages, & ayant fait attention à l'un & à l'autre
de ces Phénomenes aux heures les plus convenables, je n’en
ai pü appercevoir le moindre veftige. A l'égard du 25, j'ai
appris par M. Bouguer, que les apparences que j'y avois re-
marquées, {e font trouvé à Roüen & fur le chemin du Havre
à cette ville, où ilalloit ce jour-là, des fignes non équivoques
d'une Aurore Boréale fort claire, & fort étenduë,.
Le Barometre a été encore fort bas dans ce mois, fçavoir,
le 26, étant defcendu à 26 pouces 8 lignes, ou 7 lign.+.
On peut même préfumer qu'il avoit été plus bas ap
a nuit,
DAEMSAS) CAE NRC ELS 577
la nuit, parce qu'à 8 heures du matin le mercure montoit,
comme Je l'ai reconnu à fa furface convexe dans le tube*,
& comnie la fuite l'a juftifié une heure après. Nous avons
vü ci-deflus qu'il avoit été au même point dans le mois
d'O&tobre; ce qui eft aflés rare, y ayant bien des années
où il n'en approche pas.
Je ne fçaurois mieux terminer ce Journal d'Obfervations
de l'Aurore Boréale, que par des marques publiques de recon-
noiflance pour tout ce que je dois fur cette matiére à M.
Celfius Profefleur en Aftronomie à Upfal, & aujourd'hui
très-connu perfonnellement, & par fon fçavoir, de {a plüpart
des Membres de cette Compagnie. Vers le commencement
de cette année, j'appris qu'il avoit donné dans la précédente
1733, & à peu-près au même temps que mon Traité de
Aurore Boréale parut, un Recueil d’obfervations de ce Phé-
nomene, au nombre de 3 16. faites dans toute la Suede, &
jufques fous le Cercle Polaire, foit par lui-même, foit par fes
correfpondants, depuis 17 1 6 jufqu'en 1 73 2 inclufivement.
Parmi ces obfervations qui roulent fur 224 Aurores Bo-
réales différentes, il y en a 1 88, c'eft-à-dire, environ s de 6,
qui n'ont point paru ici, ou qui mavoient été inconnués.
On peut juger de l'empreffement que j'eus pour recouvrer un
livre fi intéreflant pour moi, & que je ne regardois pas moins
comme un trélor, en ce qu'il pouvoit contenir de peu favo-
rable à mes idées, & me donner lieu par-là de les rectifier,
qu'en tant qu'il étoit capable de les favorifer. L'ouvrage
n'étoit guéres répandu encore qu'en Îtalie, où M. Ceffius étoit
alors depuis plufieurs mois, & où il l'avoit apporté d’abord
après limpreflion. M. le Marquis Poleni à qui il en avoit fait
: * Le frottement ou la vifcofité du
mercure fur la paroi intérieure du
tube, fait qu’il y devient plus convexe,
Jorfqu'il monte, & beaucoup moins,
ou méméconcave, lorfqu'’il defcend:
Ce que lonreconnofîtra en frappant
doucement fur la planche du Baro-
metre ; car on y verra fur le champ
Men. 1734:
le mercure monter ou defcendre d’une
demi-ligne plus ou moins, felon qu'il
eft en montée, ou en defcence. J'écris
ici cetre remarque, route fimple qu’elle
eft, für ce que l’on m'a dit qu’elle
pouvoit être utile, pour voir tout
d’un coup, fi le Barometre monte,
defcend, ‘ou eft fixe & /?arionnaires!
. DDdd
73 MEMOIRES DE L'ACADEMTE ROYALE
* Lettre du 1 5 préfent, n'en donna le premier connoiflance*, & däns ui
411734 Gétail qui eft trop important fur la matiére dont il s'agit,
& qui fait trop d'honneur à mon hypothele, pour être pañfé
fous filence. M. Poleni venoit de recevoir mon Traité, &
comme il avoit fait beaucoup d'attention aux Tables que
j'y ai données, pour comparer par voye de dénombrement
ka fréquence ou la rareté des apparitions du Phénomene, fe-
lon les différentes fituations de la Terre fur l'Edliptique, où
{lon fes différentes diftances au Soleil, il {es avoit appliquées
aux obfervations de M. Célfius ; en un mot, il en avoit drefé
des Tables toutes pareilles aux miennes, & ce font ces Ta-
bles d’obfervations faites dans des vüës, en des temps, & en
des lieux fi différents de ceux qui font marqués dans celles
que j'avois recueillies, qui ont fourni à M. Poleni des réfultats
tout femblables aux miens; la plus grande fréquence du Phé-
nomene, par exemple, aux Périhélies de la Terre, à fes temps
d’afcendance; où lorfqu’elle eft dans les Signes feptentrionaux
afcendants, & ainfi du refte. Mais j'ai encore des obligations
plus directes à M: Celfius ; car depuis qu'il eft à Paris, il n'a
fait part de fon livre, & d'une infinité d’obfervations ou de
matériaux qu’il a raffemblés depuis fur le même fujet, tant
par rapport aux années renfermées dans fon ouvrage, que
pour des temps plus reculés, où pour les années fuivantes
1733 & 1734, & cela avec une générofité & une politeffe
peu communes. Par le moyen des Phénomenes que m'a
fournis M. Celfius, & de tous ceux que j'ai recueillis d’ailleurs,
ou obfervés moi-même depuis la publication-de mon Traité,
je puis appliquer la méthode & les principes que j'y ai adop-
tés, à plus de 600 apparitions de l'Aurore Boréale, au lieu
de 229 feulement, que j'y avois employées. C'eft auffi ce
que je compte faire dans un fupplément que je ferai par-là
en état de donner bien plûtôt que je n’eufle ofé Fefpérer.
J'y rendrai juftice aux autres perfonnes qui m'ont fourni, où
qui me fourniront à l'avenir leurs obfervations, & entre
lefquels le fçavant M. Xirch éft un de ceux à qui je fuis le
plus redevable, ayant reçû de lui fur ce fujet une lettre
DoETSMIS CT E CE 579
remplie de réflexions & de recherches curieufes, où remonte
jufqu'aux Aurores Boréales qui ont paru depuis deux fiecles.
Cependant les obfervations de ce Phénomene que M. Muff-
chembroek Profeffeur de Mathématique à Utrecht & Corref
pondant de l Académie, nous a envoyées depuis peu pour
la préfente année, trouvent naturellement ici leur place. Elles
font contenuës dans une lettre datine du 3 Janvier 17 a 5
adreflée à M. dy Fay, & avec toutes les autres obfervations
météorologiques de l'année 1734. Je ne toucherai qu'aux
Aurores Boréales, & je me contenterai d'en donner un
extrait abrégé. Du refle l'exactitude & de fçavoir de M.
Muffchembroek font trop connus par fes excellents ouvrages,
pour qu'il foit néceffaire d'en faire mention.
Aurores Boréales obfèrvées à Utrecht, pendant tout
de cours de l’année 1724.
Le 3 Février, à 7" + du foir, l'Aurore Boréale parutentre
le Nord & le Nord-Oueft; elle jetta quelques rayons parmf
lefquels on en vit qui atteignoient jufqu'au Zénith. Cesrayons
s'élevoient du bord fupérieur & éclairé d'un nuage d'ailleurs
très-obfcur, qui étoit comme fufpendu un peu au-deffus de
lhorifon. Cette Aurore Boréale ef? marquée & décrite ci-deffus.
Le 22 Mars, il y eut une petite Aurore Boréale à 8h du
{oir, laquelle s'étendoit depuis le Nord jufqu'à l'EÂt, & qui
s'élevoit d'environ 10 degrés au-déflus de l'horifon.
Dans le mois d’Arri/, on a vû l'Aurore Boréale trois nuits
confécutives, fcavoir, le 7, le 8 & le 9; celles du 7 & du 9
furent peu confidérables, mais celle du 8 fut très-grande,
Elle brilloit déja à oh du foir, s'étendant de d'Orient au
‘Couchant, au -deflus d’un nuage éclairé; elle avoit des jets
de lumiére qui montoient jufqu’au Zénith, & qui à mefure
qu'ils approchoient de ce point, fembloient s’y confondre
& s'y allumer. Il fouffoit pendant ce temps-là un petit
vent de Nord-Eft, le Ciel étoit ferein, & le Phénomene dura
prefque toute da nuit.On peut voir ce que j'en ai dit ci-deffus,
: DDdd ij
‘
-
580 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
é7 comparer avec ceci la manière dont il parut à Paris.v
Le mois de Mai a été un des plus féconds en Aurores
Boréales à Utrecht, M. Muffchembroek en a compté jufqu'à 1 23
fçavoir, le 1, le 4, le s, le 6, & les 8 derniers jours de ce
mois. 11 faut que des circonftances de temps ayent été con-
traires à ce Phénomene à Paris ; car je ne fçache pas qu’on l'y
ait obfervéaucun de ces jours, excepté le 24.
L’Aurore Boréale du premier Mai étoit tranquille, fa lu-
micre comme fufpenduë au haut de lAtmofphere, fur-tout
vers le Nord & vers l'Occident, laifloit voir toutes les Etoiles
fi diftinétement, que M. Muffchembroek ne fe fouvient pas
d'en avoir obfervé de pareille à cet égard.
Celle du 4, n'étoit pas de la même tranfparence vers
cette partie du Ciel, elle n’y laifloit appercevoir que les
Etoiles de la premiére & de la feconde grandeur; mais du
côté du Midi où elle s’étendoit auffi jufqu’à la hauteur de 1 $
degrés, on en voyoit de la troifiéme & de la quatriéme
grandeur. M. Muffchembroek dit avoir remarqué dans le cours
de ce Phénomene, que la mmatiére qui le compoloit, fe por-
toit fouvent du Septentrion au Midi: & comme il y a re-
marqué la plüpart des mêmes apparences, quoïque fans jets
de lumiére, qu'on a coutume de voir du côté du Nord, il
croit qu'on peut l'appeller méridional. W y avoit auffi un
femblable mouvement, foit vrai ou apparent du Septentrion
vers le Midi, à lAurore Boréale du $, qui parut à 9 heures
du foir après un peu de pluye. On juge d'ordinaire ce mou-
vement à l'infpection de quelques flocons ou nuages de ma-
tiére lumineufe; mais on voit combien il faut être réfervé
à l'établir de la part de la matiére Boréale proprement dite,
Car comme des nuages & des amas de vapeurs qui n'appar-
tiennent pas au Phénomene, peuvent fort bien en avoir les
apparences , étant éclairés par fa lumiére, rien n'eft plus aifé
que de s'y méprendre. On doit auf fe tenir beaucoup fur
fes gardes dans les jugements que l'on porte des apparitions
de l’Aurore Boréale dans tous ces mois qui avoifinent fe
Solflice d'Eté; car le Soleil ne s’y trouvant jamais pendant
DES ASC À E NI C'PIvo MM ‘Ste
k nuit que fort près de l’horifon, les Crépufcules ÿ font
Tongs & forts, & s’y compliquent fouvent avec la Lumiére
Zodiacale, dont les apparences dans ces rencontres ne différent
prefque point de l'Aurore Boréale tranquille & horifontale >
& c'eft de quoi M. Mufchembrock nous avertit lui-même,
comme nous allons voir.
L’Aurore Boréale du 6 donna encore une lumiére méri-
dionale toute femblable à la lumiére feptentrionale.
Avant que de parler de l'Aurore Boréale du 24, & de
celles qui l'ont fuivie prefque fans interruption jufqu'au 7
Juin, » Me voilà parvenu, dit M. Muffchembroek, à une
Aurore Boréale la plus longue, &, pour aïnfi dire, la plus
opiniâtre que j'aye jamais vuë, ayant vraifemblablement duré
pendant l'efpace de 1 5 jours, quoiqu'il y ait eu deux jours
dans cet intervalle (fçavoir le 3 & le 6 Juin) où elle n'a pas
été vifible. Ce n'eft, adjoûte-t-il, qu'avec beaucoup de cir:
confpection qu'il faut obferver l'Aurore Boréale dans ces
temps-ci, à caufe de la Lumiére Zodiacale, qui pourroit fort
aifément tromper ceux même qui y font les plus exercés,
s'ils n'avoient pas d’ailleurs des indices #anifeffes de l Aurore
Boréale. Depuis quelques années» continuë le fçavant
Profefleur « que j'obferve ce Phénomene avec attention, j'ai
appris à le difcerner & à le prévoir pendant le jour, &
le préfaige ne men a pas trompé jufqu'ici; non que je
puifle connoître la matiere Boréale pendant que le Soleil
eft encore fort élevé, mais feulement lorfqu'il commence à
. s'approcher du couchant, & qu'il n'eft tout au plus qu'à une
quinzaine de degrés fur l'horifon; car fi l'on voit alors vers
le Septentrion des nuages bleuâtres, comme s’il alloit tonner,
on peut s'aflurer qu'ils contiennent de la matiére Boréale,
Mais je connois encore mieux cette efpece de nuages, que
Je ne les puis décrire, &c. |
I pafle enfuite à la defcription de l'Aurore Boréale du
24 Mai, dont la lumiére s’étendoit à 40 degrés au-deflus
de l'horifon, & qui a continué fous différentes formes,
juiqu'au 7 Juin inclufivement.
DDdd ii
2 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
Dans le mois de Juin, M. Muffchembroek n'a vû Ÿ Aurore
Boréae que le 24. Elle étoit rranquille, mais fa lumiére
s'étendoit jufqu'au Zénith, entre le Septentrion & le Levant:
c'étoient des nuages très-legers & fort interrompus.
En Juiller, le Phénomene a paru le $, le 7, & peut-être
le 8. Ce dernier eft douteux, à caufe de la lumiére de Ja
Lune qui entroit dans fon premier quartier. Celui du $ fe
montra vers les heures du foir, parmi fa pluye & le
tonnerre.
Le 6 Août, il y eut, felon toute apparence, une Aurore
Boréale tranquille, qui fe manifefta fur tout l'horifon par
des nuages lumineux difperfés çà & là. Maïs le 7 de ce
mois elle ne fut pas équivoque, & elle confiftoit de même
en des nuages interrompus & difperfés vers la partie occi-
dentale du Ciel, ce qui rend d’autant plus vraifemblable
l'apparition du jour précédent. Elle parut auffi le 0.
M. Muffchembroek a vü 4 Aurores Boréales dans le mois
de Septembre à Utrecht, fçavoir, le 21, le 25, le 27 &
le 29; jai aufii obfervé les deux derniéres auprès de Paris,
comme il a été rapporté ci-deflus. Celle du 2x étoit méri-
dionale, n'ayant prefque vers cette partie du Ciel où elle
étoit fort lumineufe, & où elle s'étendoit, qu'environ 20
degrés d'amplitude, avec la même hauteur fur l'horifon.
Celle du 25 étoit au Nord, au Couchant, & au Midi: l'une
& l'autre ont été mêlées de pluye. Dans celle du 27, M.
Muffchembroek remarqua des colomnes ou verges qui s’éten-
doient du Septentrion au Midi, paralleles entr'elles, & à
Yhorifon, virgæ parum ducentes , copiofæ, breves; exporrelæ
omnes à Septentrione ad Auflrum, érc. & il n'avoit, adjoûte-t-il,
jamais vû un femblable Phénomene. Je fuis bien trompé fi
ce n’eft là ce que j'ai obfervé quelquefois, & que j'ai défigné
par des bandes, ou grandes traïnées blancheâtres difpolées
en côte de melon, &qui s'étendent depuis un côté du Ciel
jufqu'au côté oppofé fur l'horifon, où.elles femblent concourir.
Voyés-en des exemples ci-defius au 18 Février, p. 569,
& dans les Mémoires de l'année derniére, pp. 486 & 49 1;
DIE S SER EN CES ” s8z
éar ce qui eft dit ici de leur parallélifme pourroit bien
tomber fur leur partie fupérieuré vers le Zénith, ou à quek
que diftance de leurs points de concours vüs ou préfumés
fur lhorifon, lorfqu'il eft affés découvert pour. cela; & il
peut faire que Fhorifon d'Utrecht ne l'étoit pas. L’Aurore
Boréale du 29, que je n'ai obfervée à Paris que fur fà fin,
depuis 1 1h jufqu'à environ 11h24, fut vûë un peu après
xoh à Utrecht; elle y parut occuper la plus grande partie
du Cüiel: cependant M. Auffchembroek ne Xa met qu’au nom-
bre des rranquilles, n'Y ayant remarqué aucune émiffion de
jets de lumiére. Ce n'eft pas ce que j'en aurois jugé, en la
voyant encore fr marquée à {on dernier quart d'heure, M,
Muffchembroek adjoûte qu'il fembloit y avoir dans ce Phé-
homene un mouvement aflés lent de l'Eft à l'Oueft. Mais
J'ai fait obferver ailleurs combien cette apparence peut être
trompeufe, foit par la matiére qui s’flemblé d'un côté,
tandis qu'elle fe diffipe de l'autre, foit par celle qui s'allume,
ou qui vient à être éclairée, & qui ne Vétoit pas aupara-
vant, &c.
H n’y a prefque pas eu un jour ferein dans le mois d'O&o-
bre. M. Muffchembrock wa pas laïflé d'y obferver $ Aurores
Boréales, le 1, le 2, le $, avec une très-grande pluye, le
6 & le 14. Pendant cette derniére, qui étoit foible, & qui
paroifloit entre le Nord & l'EfF, il vit une couronne autour
de la Lune, qu'il trouva avoir exaétement 44 degrés par
fon diametre intérieur.
Le refte de l'année ne lui à fourni que 2 Aurores Bo-
téales; fçavoir le 19, & le 25 Décembre,
Aurores Boréales obfervées à Peterfbourg, pendans
les mois de Septembre, OGobre, &7 Novembre,
par M. Delife.
Entre plufiéurs Aurores Boréales obfervées à Peterfbourg
par M. Dclife, & dont il a bien voulu me faire part, il y
éna 18 des mois dé Seprembre, Oltobre & Noyembre de cetie
584 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Royare
année. Je les adjoùte ici avec leurs defcriptions, telles qu'elles
m'ont été envoyées, & fur lefquelles on peut d'autant plus
compter, que, comme M. Delifle me Vapprend dans une
de fes Lettres, il a fait placer une efpece de Quart-de-cercle
azimuthal fur le haut de fon Obfervatoire, dans le feul
deflein de bien déterminer la grandeur, les pofitions, &
toutes les apparences de ces Phénomenes. IL rapporte une
de ces apparences bien finguliére, du $ Oétobre à 3 heures
du matin, après une Aurore Boréale qu’il y avoit eu lé foi
de la veille. C’étoit une lumiére très-vive qui avoit Fair de
la queuë d’une Comete obliquement couchée au-deffus de
Yhorifon, & qui, felon la figure qu'il m'en a envoyée, & la
comparaifon que j'en ai faite avec l'état actuel du Ciel fur le
Globe, devoit fe trouver précifément dans le plan de l'E-
quateur Solaire par le milieu de fa longueur. Si cette bande
de lumiére avoit été placée à l'Orient, on ne douteroit point
que ce ne fût la Lumiére Zodiacale, qu'on fçait devoir pa-
roître le matin en Automne; mais elle étoit à l'Occident,
Du refte, il paroït par les Phénomenes qui ont été vûs à
Peterfbourg en Oétobre, que le Ciel y a été pendant çe
mois beaucoup plus ferein qu'à Paris.
Ler à 2 Septembre 1734, à Peterfhourg.
Le 1 & 2 Septembre 1734, il a paru de foibles Aürores
Boréales indécifes, depuis 10 heures environ du foir, avec
quelques traits ou jets de lumiére verticaux au Nord-Oueff,
fans arc lumineux, ni forte lumiére dans ces Aurores. Celle
du 1 a duré prefque toute la nuit; au moins le 2 au matin elle
étoit encore vifible avant la lumiére du Soleil. Celle du 2
au foir a été plus foible, & n'a pas duré fi long-temps.
Le 3 Septembre 1734.
Le 3 Septembre, il a encore paru une Aurore Boréale,
depuis le foir après le crepufcule, mais fans traits de lumiére.
H n’y avoit qu’un arc lumineux femblable au crepufcule élevé
de quelques degrés, & ayant un fegment obfeur à l'ordinaire
qui
’
a 18
DES SCI:E'N CES
qui lui fervoit de bafe; mais ce fegment & la fumicre qui le
bordoit ne paroifloient pas parfaitement circulaires. Is étoient
défigurés un peu au Nord-Eft. Le tout étoit élevé de peu de
degrés, & s’eft abbaiffé vers le milieu de a nuit, de forte qu'il
a difparu peu après une heure du matin, le 4 Septembre.
Le 8 Séprembre 1734.
Après quelques jours de temps couverts, il paroifloit le 8
Septembre au matin, un peu devant le crépufcule, vers les
3 & 4 heures, un refte d’Aurore Boréale indécife qui s’élevoit
encore de 8 à 9 degrés.
Le 18 Septembre 1734.
La nuit du 18 au 19 Septembre, äl y 2 eu une affés
grande Aurore Boréale, dont les nuées n’ont laiflé voir Le 18
au foir jufqu’à 8° 2 qu'une fumiére aflés élevée indécife ; mais
vers les 1 1 heures du foir, il y avoit dés jets de lumicre fort
hauts, & le matin du 19, à 4P L environ, on n’en voyoit
plus rien, autant qu'on Îe pouvoit difcerner au travers des
nuées dont prefque tout le Ciel étoit couvert.
Le 23 Septembre 1734.
Le 23 Septembre au foir à 8h s', il paroifloit comme
un faifceau de Lumiére Boréale au deffous des Pléïades, ayant
2 à 3 degrés de largeur, & 5 à 6 degrés d'étenduë, en fe
perdant infenfiblement depuis la bafe qui étoit la plus Jumi-
neufe, & qui n'étoit élevée que de 2 ou 3 degrés fur l'ho-
rifon. Il paroifloit en même temps une autre grande bande
Jumineufe qui commencoit à droite de la tête du Bélier, &
qui pañloit au deffous de la luifante de l'Aigle. Cette lumicre
n'avoit que 2 degrés environ de largeur dans fes extrémités,
& 10 où 12 dans fon milieu.
À 8h 20' la premiére lumiére s’élargit beaucoup en forme
de gerbe, & eft dirigée vers l'Etoile Polaire. Elle a si6
degrés de largeur, & eft longue de 10 à 12 degrés. Les
Mem. 17 34 . EEee
A À
86 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
Pléiades font fur fon bord vers le Midi. L'autre bande s'efface
prefqu'à 8h 22°. y
La lumiére au deflous des Pléiades eft reftée la même
jufqu'à 8h 33" prefqu'aufl brillante qu'aucune Lumiére Bo-
réale. Le Ciel étoit ferein par-tout, & il n’y avoit aucune
autre lumiére, pas même au Nord : lhorifon étoit un peu
fombre au deflous de cette lumiére jufqu'à la hauteur de 2
ou 3 degrés.
À 8h 35’ la lumiére a commencé à s'affoiblir en s'éloi-
gnant des Pléïades, & reftant dans une même fituation à
Végard de l'horifon. A 8h 3 8' elle eft très-foible. A 8h 40°
elle n'eft pas encore diffipée.
Depuis, jufqu'à 8° 43’, au lieu de fe diffiper, elle s'eft un
peu rallumée par deux reprifes différentes.
A 8 47’ cette lumiére ne paroït plus, mais immédia-
tement après, il paroifloit au Nord plufieurs rayons fans
fegment, peu élevés, & en petit nombre. Il en parut encore
quelques-uns de même à 10P, & puis le tout s'eft réduit à
une Lumiére Boréale indécife, qui fe perdoit infenfiblement
depuis l'horifon jufqu'à la hauteur de 8 ou 10 degrés, &
cela jufqu'à 1 r heures du foir.
Le fegment boréal s'eft enfuite élevé peu après jufqu'à Ja
hauteur de 8 ou 10 degrés qu'il avoit atteints à minuit &
demi, mais il déclinoit confidérablement, c'eft-à-dire,
‘d'environ ro degrés du Nord vers l'Oueit, ce dont on n'a
pô s'affürer exactement, n'ayant fait cette eftime qu’à la vüë
fans inftruments. Le 24 Septembre, à 4 heures du matin, il
ne paroifloit plus rien au Nord ni ailleurs que le crépufcule
ordinaire au Nord-Eft. :
Le 24 Septembre 1734.
Le 24 Septembre, dès les 8 heures du foir, il a paru au
Nord de confidérables jets de lumiére fort étroits, & qui
montoient fort haut : il n’y avoit point de fegment obfcur
ni d'arc lumineux. Le lendemain à 4h du matin, le Ciel
Dirishn$ioAuEIN erB;anaM 687
étant très-ferein, comme il l'a été toute la nuit, il n’y avoit
plus aucune Lumiére Boréale. La fatigue des obfervations de
la veille précédente m'a fait coucher ce foir-là de bonne
heure, ce qui m'a empêché d’obferver tout le progrès de
cette lumiére boréale de la nuit du 24 au 2 $ Septembre.
Le 29 Septembre 1734.
Le 29 Septembre au foir, entre 7 & 8 heures, il pa-
roifloit un rayon de lumiére étroit en forme de lance. La
tête de cette lumiére, qui étoit fous les nuées, étoit dans
le Taureau vers les Plérades : de-là cette lumiére alloit un
eu en s'élargiflant. Sa fituation étoit oblique à l'égard de
lhorifon. Elle laifloit les plus bafles Etoiles de Perfée au
deflus d'elle, & les touchoit prefque. Sa longueur étoit d'en-
viron 3 o degrés, & fa largeur d’un degré au plus. Cette lu- ”
mire étoit fort foible, fur-tout à fon extrémité la plus
élevée: L'on a vû le même foir & {a nuit une Aurore Bo-
réale indécife dont je n’ai pas obfervé la durée ; mais les
nuées dont le Ciel a fouvent été couvert en auroient bien
troublé lobfervation.
Le 30 Septembre 1734.
La nuit du 30 Septembre au premier Oétobre il y a eu
une Aurore Boreale que je n’ai pas obfervée.
Le x Oétobre 1734.
La nuit du r au 2 OGobre, le Ciel étant extrêmement
ferein, il a paru une petite Aurore Boréale fort peu élevée, &
indéterminée pendant la plus grande partie de la nuit.
Le 4 Odobre 1734.
© Le 4 OGtobre au foir, il paroifloit une petite Aurore Bo- :
réale vers les 9 heures fans fegment , avec des raÿons. Le 5:
à 3 heures du matin elle étoit fans rayons & mêlée de nuées;
* mais il y avoit à lOueft une lumiéré très-vive, qui avoit
Yair de la queuë d'une Comete dirigée vers le point du Ciel
EEee ïij
* Cette de-
fcription a été
ajoûtée d’après
une figure qu’il
yavoitici, &
conformément
acequien aété
dit ci-deffus,
P. 584.
588 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE RoyaALE
qu'occupoit alors la Planete de Saturne, à obliquement à l'ho-
rifon dans le même Jens, &7 à peu-près felon la même inclinaifon
que le plan de l'Ecliptique auquel elle étoit prefque parallele du
côté du Sud *, ë
Le 6 O&obre 1734.
Le 6 O&obre, à 3 & 4 heures du matin, il paroifoit une
Aurore Boréale avec un fegment obfcur élevé feulement de
quelques degrés. Le fommet de ce fegment déclinoit aufli de
quelques degrés à l'Oueft. E
Le 14 Oüobre 17314.
Le 14 O&obre au foir, il y a eu de 7 à 8 heures de fort
belles apparences d’une Aurore Boréale, remarquable par des
portions d'arcs fort lumineux & fort étroits, mais fort in-
terrompus, & fort changeants par leur fituation. Il y en
avoit des portions élevées jnfqu'à la hauteur de 30 à 40
degrés. IH n'y a point eu de fegment obfcur, mais feulement
quelques traits verticaux de lumiére, qui s'élevoient jufqu'à
15 à 20 degrés de diftance du Zénith.
Le 16 Odobre 1734 au marin.
Le 16 O&tobre, à 2 heures du matin, il paroïfloit une
grande Aurore Boréale compolée d'un fegment obfcur. élevé
d'environ 20 degrés par fon fommet, qui déclinoit confi-
dérablement vers lOueft. Ce fegment étoit bordé par un arc
Jumineux de plufieurs degrés de largeur, qui fe perdoit infen-
fiblement. Cet arc s’eft enfuite élevé confidérablement, &
s'eft divifé, & il a paru des traits de lumiére avec des ondu-
lations. Les parties de Farc lumineux qui s’élevoient & fe
détachoient, avoient la figure de petits cintres furbaiflés, &
aux extrémités la lumiére étoit plus vive & plus large. Ces
arcs pouvoient avoir 40 degrés dans leur plus grande étenduë
pofée horifontalement. Il ne paroifloit plus rien à 3 heures
du matin.
DES Sciences: |! 589
Le 16 O&tobre 1734 au forr.
Le 1 6 Oftobre au foir après le Crépufcule, il a paru un
grand arc circulaire fort large, & fe perdant infenfiblement,
fon fommet pafloit par les Etoiles de la tête de la grande
Ourfe ; il fe terminoit du côté de l'Occident environ fous le
vertical d'Arcturus, & du côté de l'Orient fous le vertical de
la Lune qui fe levoit alors; c'étoit vers 8 heures. I] y avoit
au-deflous de cet arc un fegment obfcur, mais qui n’étoit pas
fort fombre. Le tout n'a pas duré long-temps; une heure
après, toute cette apparence étoit fort diminuée, & à 9° du
{oir environ il n’y avoit plus rien.
Le 17 O&tobre 1734.
Le 17 Oétobre au foir, il y a eu une fort grande Aurore
Boréale qui, à 6h+, étoit élevée jufqu'aux Etoiles les plus
baffes du quarré de la grande Ourfe. H y avoit un grand feg-
ment obfcur & deux arcs lumineux fort larges, principalement
le fupérieur. Le tout a duré plufieurs heüres.
Le 20 Olobre 1734.
Le 20 Oétobre au foir, il paroïfloit une Aurore Boréale
plus baffe que celle du 1 7, elle avoit auffi un fegment obfcur
qui n'étoit pas bien terminé. Sie
Le 26 Novembre 1734.
=
La nuit du 26 au 27 Novembre, il a paru une petite Au-
rore Boréale élevée de quelques degrés; elle me paroifloit
un peu décliner vers l'Oueft; elle étoit tranquille, formée
par une fimple lumiére au-deflus d'un fegment obfcur, mal
terminé,
ic EEec ii
3 Février
1734
so MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE
Mi ET HT Où DAME
D'OBSERVER LA VARIATION
DE L'AIGUILLE AIMANTEE
EN MER.
Par M. Gopin.
S' étoit toujours poffible d'obferver les Aftres à l’horifôn
toutes les fois qu'ils y arrivent, je ne crois pas qu'il y
eût de meilleure méthode d’obferver la variation de l'Aivuille
aimantée en Mer, que la méthode ordinaire desPilotes, reéti-
fiée fur les remarques de M. Bouguer, & dans laquelle on fe
ferviroit d’une Bouflole qui, fuivant M. de la Condamine,
porteroit un Cercle divifé, pofé de chan fur le bord de
la Rofe, enforte qu'il y en eût une moitié en deflus, l'autre
moitié en deflous, ce qui me paroît adjoûter à cet inftru-
ment une perfection confidérable. Dans ce cas, les pinnules
ou filets verticaux doivent être d'une telle étenduë, qu'on
puifle par leur moyen vifer à lhorifon, tant en deflus de la
Role pour un des côtés du Ciel, pour l'Eft par exemple,
qu'en deflous pour l'Oueft. Dans les deux cas, le même filet
vertical dirigé à l’Aftre, marquera fur l'un des demi-cercles :
gradués, le degré de la Rofe auquel répond l'aftre à fon
lever ou à fon coucher, à compter depuis la pointe de la
Fleur-de-Lys; & fçachant l'amplitude de cet aftre, on aura
la variation à la maniére ordimaire, ce qui ne demande qu'un
feul obfervateur. Mais cette méthode, la meilleure de toutes
fans contredit, eft prefque toûjours impraticable, faute de
pouvoir obferver les Aftres à lhorifon, & même fort fou-
vent le Soleil qui y eft enveloppé de vapeurs. I feroit donc
utile de pouvoir fe fervir des Aftres dans d’autres fituations,
& d'en dédüire commodément la variation. Voici pour cet
effet un moyen qui ne dépend que d'une Addition fort fumple
faite au Compas ordinaire de Variation.
_
DES SCIENCES | $ot
Je fuppofe qu'on fçache ’heuré en Mer. On peut la
connoitre par le lever, & le coucher du Soleil, même avec
aflés de précifion ; on peut encore prendre des hauteurs cor-
refpondantes, en fe fervant du Quartier Anglois ; enfin on
la peut avoir par une fimple obfervation de quatre Etoiles,
dont deux foient dans un-même vertical vers Orient, &
les deux autres dans un même vertical vers l'Occident : car
cette obfervation qui ne demande qu'un à-plomb & des
Tables d'Afcenfion droite & de Déclinaïfon des Etoiles, f
elle fe peut faire en Mer, donnera en même temps la hauteur
du Pole & l'heure de l'obfervation. Le calcul en eft effedti-
vement un peu long ; mais comme l’obfervation fe peut faire
à terre avec précifion, qu'elle ne demande aucun appareil
d'Inftruments, & qu’elle peut être répétée autant de fois que
Ton voudra, & être fort utile en bien des occafions, lorfque
les autres moyens manqueroient, j'ai cru la devoir adjoûter
ici à la fuite de la Méthode d’obferver la Variation.
Mais fi l’on connoït l'heure par le lever ou 1e coucher du .
” Soleil, on pourra auffralors obferver a variation : cela eft vrai,
mais la méthode de l’obferver à toutes les heures du jour ou
de la nuit n’en fera pas moins utile.
Je fais une Bouflole où Compas de Variation dont la
Rofe foit évidée intérieurement, autant qu'il eft poffible, &
dont la circonférence foit divifée en degrés. M. de la Conda-
mine s’en {ert auffi dans fa Méthode, du moins dans certains
cas, & il remarque que la Bouflole en devient plus légere,
& peut être plus agile. Je tends un fil un peu au defius, qui
pafle par le milieu de la chape. Dans la Boîte je mets une
Glace de Miroir qui en occupe tout le fond.
Je dis qu'avec une telle Bouflole, & connoiffant l'heure,
on obfervera aifément la variation toutes les fois qu'il y aura
quelque Aftre vifible fur l'horifon, à quelque hauteur & en
quelque azimuth qu'il foit. Mais il eft plus facile de le
prendre lorfqu'il eft au Méridien : or on fçait, par des Tables
ou toutes calculées, ou très-aifées à calculer, à quelle heure
chaque Afîre, chaque Etoile doit pañler par le Méridien;
s92 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE
donc puifqu'on connoît l'heure, on fçaura le moment auquel
cette Étoile fera effectivement dans ce cercle. Alors tournant
la Bouflole à l'Etoile, de maniére que fon image peinte fur
le Miroir du fond foit coupée par l’image du fl, ce fil
repréfentera exactement la Méridienne du lieu, & dans cet
inflant on remarquera à quel degré du cercle de la Rofe le
même fil répond , ce qui donnera tout d’un coup la varia-
tion par la différence de ce degré à r 80 , dont la dénomi-
nation fera aifée à reconnoître par le fens de la divifion de
la Rofe.
Cette méthode, comme on voit, ne demande que l'heure
par quelque moyen qu'on la connoiffe ; elle n'a pas befoin de
la hauteur du Pole fi heure eft donnée indépendamment,
elle n’eft point fujette aux refractions, elle peut être répétée
un très-grand nombre de fois de fuite, enfin un feul obfer-
vateur lui fuffit.
Elle fe peut encore pratiquer dans tous les autres Azimuths,
mais alors ül faut connoître la Latitude du lieu & l Azimuth
de l’Aftre, ou l'angle qu'il fait avec le Méridien. On peut
Favoir par un calcul fort court, en connoiflant l'heure de
fon paflage par le Méridien & fa déclinaifon, ce que les
Ephémérides donnent & l’heure de lobfervation, mais il
feroit très-aifé de faire une Table qui évitât ce calcul.
On peut auffi fe pafler de connoître l'heure, & cepen-
dant trouver affés précifément le temps auquel une Etoile
pafle par le Méridien, & en conclure enfuite tous les Azi:
muths dans lefquels on voudra prendre l'Etoile pour obferver
la variation. : ‘
Voici maintenant la méthode de trouver la Latitude &
l'heure fans autre inftrument qu’un à-plomb.
Soit P le Pole, Z le Zénith, ZP, Z D, deux verticaux
quelconques ; foïent CD deux Etoiles dans un même ver
tical du côté de l'Orient, & AB deux autres Etoiles dans
un autre vertical vers l'Occident dans le même inftant.
Dans le Triangle PAC étant donnés PA, PC, & l'angle
compris CPA, on connoîtra AC & les angles fur AC; De
même
| Dir Se rrNCErS $93
fnème dans le Triangle PBC on connoît PB, PC, & l'angle
compris CPB, donc on connoîtra BC &r les angles fur BC,
Dans le Triangle BAC on connoït donc AC, BC, &
l'angle compris ACZ, qui eft la différence entre les angles
PCB, PCA, donc on connoîtra BAC, dont le fupplément
fera l'angle ZAC, Or Otant cet angle de l'angle PAC, ïf
reflera l'angle PAZ. <
Dans le Triangle PBD on connoît PB, PD, & Yangle
compris BPD, on connoïtra donc BD & l'angle CBD ;
c'eft pourquoi dans le Triangle CBD, connoiflant les deux
côtés CB, BD, & angle compris, on aura l'angle BCD,
dont le fupplément ZC£, diminué de l'angle ACP, donnera
angle Z AC.
Or dans le Triangle ZC À, on connoît le côté AC, &
les angles faits fur le côté en C & en À, donc on connoîtra
les côtés ZA, ZC, & l'angle CZA.
Enfin dans le Triangle PAZ, on connoît AZ, PA, &
Yangle PAZ, donc on connoîtra PZ, complément de 1a
latitude du lieu. f
Maïs dans ce même Triangle on connoîtra auffi l'angle’
APZ, qui eft l'azimuth de l'Etoile 4. Or par-là on con-
noîtra l'heure en connoiffant lafcenfion droite de l'Etoile à
l'égard du Soleil, & par conféquent à quelle heure elle doit
paffer par le Méridien. Suppofons, par exemple, qu'à l'heure
de lobfervation une Horloge quelconque, une Montre, par
exemple, ait marqué 6h 3 0° après-midi; que l'angle APZ,
réduit en heures, ait été trouvé de 2h 5 s', & que l'Etoile
foit à l'Occident ; donc l'Etoilé#4 à paffé par le Méridien
2h $ $” avant l'heure de lobfervation, c’eft-à-dire, à 335
après-midi. Mais fi par le calcul des Afcenfions droites, cette
Etoile à dû pañler par le Méridien à 3P 45’, il fuit que la
Montre de laquelle on s'eft fervi, retarde fur le temps vrai
de 10". Donc le temps vrai de lobfervation étoit à 6h 40°
après-midi.
: J'ai obmis ici plufieurs attentions ou corrections dont
jaurois pû groflir cet Ecrit, & dont on feroit un très-bon
Men. 173 4 à FFfF
12 Janvier
3735:
MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyArE
ufage dans lobfervation de la Variation en Mer, parce que
je fuppofe qu'on les remarquera, en y faifant la moindre
attention.
OBSERVATIONS ME TEOROLOGIQUES
FAITES
PENDANT L’'ANNE'E M DCCXXXIV.
Pa M MARALODTI.
Obférvations fur la quantité de Pluye.
FE: y a long-temps qu'il n'y a eu d'année auffi pluvieufe
que l'année 1734 ; elle eft Ia plus pluvieufe qu'il y ait
eû depuis 1720, cependant la pluye n'a pas été aufii abon<
dante qu'aux années où on.a commencé. à faire les Obfer-
vations Météorologiques , & où on avoit déterminé une
année commune à 1 9 pouces. La quantité de la pluye tombée
en 1734 a été de 17 pouces 6 lignes +, ce qui approche
de l'année commune, qu'on a été obligé de réduire der-
niérement à 17 pouces+. Voici le détail de la pluye tombée
chaque mois. l
pouc.._ lign: pone: Jignz
En Janvier... 1 22] EnJuilet,...... 31€
Février. à se O9 AOÛt....e.se © 10%
Mars... 1 5* Septembre ... © 2%
Avril...) 5 : 1 O&tobre..... r 11
Mai. ........ L 114 Novembre ... o 8
Jui ee dune 1 T | 2% Décembre... 2 9+
7_10$ «9 8%
_ Donc Ia fomme totale de la pluye eft de 17 pouces
6 lignes +.
La pluye tombée dans les fix premiers mois a été de 7
Mem . de Cacad.1734 . pl. 37 pag.
DES SCIENCES
pouces 10 lign. +, moindre de 1 pouce o lign. £ que celle
ui eft tombée dans les fix derniers mois, qui eft de 9 pouces
8 lignes +. Elle a été diftribuée fort inégalement dans les
fix derniers mois ; le feul mois de Juillet en a fourni autant
e les trois mois fuivants, Août, Septembre & OGobre,
J'ai vü plufeurs Riviéres qui ont débordé au commence-
ment de ce mois, comme la Marne, 1a Meufe & la Mofelle,
aux bords defquelles la plus grande partie des fourages a été
perduë. Le vent a toüjours été pendant ce mois au Sud,
tirant tantôt veiïs l'E, tantôt vers l'Oueft. La pluye du
mois de Décembre à été auffi très-abondante, elle a été de
22 pouces o lignes ?, IL y a eu fur {a fin de ce mois des vents
de Sud-Oueft très-violents, &le 25 de ce mois il y a eu
un grand orage avec des éclairs & tonnerres.
Obfervarions Jur le Thermometre.
L'hiver a été très-modéré, le plus grand froid na fait
‘defcendre la liqueur du Thermometre ordinaire qu'à 23 de-
grés +, & celle du Thermometre de M. de Reaumur à 9.9 6
degrés, le 23 & le 24 de Janvier, par un temps couvert &
un grand vent de Nord-Eff; mais le vent s'étant calmé le 25,
la liqueur de lun monta à 24 degrés +, & celle de l'autre à
6 +, &le 28 du même mois elle étoit dans le premier
à 28 degrés, & dans le fecond à 999. I paroît que le plus
grand froid de l'année 1734 efl arrivé, fuivant les Thermo-
metres, le 30 de Novembre. La liqueur du Thermometre
ordinaire eft defcenduë ce jour-là à 22 degrés +, & dans
celui de M. de Reaumur à 094+ ; elle avoit été le 29 à
24 degrés + dans le premier, à 997 dans le fecond. La
chaleur de l'Eté n’a pas été fort grande, les mêmes Ther-
mometres ont marqué la plus grande chaleur au commen-
cement de Septembre. Le 6 de ce mois, à 3 heures après
midi, la liqueur de l’un eft montée à 76 degrés, & celle de
Fautre à 102$ + par un vent d'Oueft. Le 7 elle étoit à 72
degrés dans le plemier, & à 1024 dans le fecond, mais
FFff ÿj
96 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE
le 8 elle étoit montée à 75 degrés dans lun, & à 10251
dans l'autre. ;
Jur le Barometre.
Le Barometre a marqué la plus grande élévation du Mer-
cure le 9 de Février à 28 pouces 6 lignes, le 1 6 du même
mois à 28 pouces 6 lignes + par un temps couvert & un vent
de Nord-Eff ; il a été plufieurs jours avant & après à 28,
pouces 5 lignes +, enfin ils’eft foûtenu à une grande hauteur
pendant fes mois de Janvier & de Février.
Le même Barometre a marqué la plus petite hauteur Je
26 & le 27 de Décembre à 26 pouces 1 r lignes par un
temps couvert & pluvieux, & un très-grand vent de Sud-
Oueft qui a regné pendant la plus grande partie de ce mois.
Déclinaifon de l’Aïguille aimantée.
J'ai obfervé le 13 de Mai 1734, avec une Aiguille de
4 pouces, la Déclinaifon de l Aiman de 1 $° 3 5’ au Nord-
Ouett. M. Buache l'a obfervée le r .er de Décembre avec une
Aiguille de 6 pouces de 1 $° 40”.
Dir So SCALE N.CE $0?.
ADDITION au Mémoire qui à pour titre
Nouvelle Maniére d'obferver en Mer la Décli-
naifon de l’Aiguille aimantée.
ÆExtrair d'une Lettre de M. DE LA CONDAMINÉ,
de Saint-Domingue, le r$ Juilles 1735.
P ENDANT notre traverfée de France à la Martinique
& à Saint-Domingue, nous avons eu le loifir de faire
Texpérience de mon nouveau Compas de Variation. M's
Godin & Bouguer, mes compagnons de voyage, en ont
paru fort contents, & le préférent à tous ceux dont on fe
fert Mer, particuliérement pour lebfervation des Am-
plitudes horifontales, ce qui eft fon ufage principal & le
plus ordinaire. MH fait très-bien fon effet, & eft d’une grande
commodité, en ce qu’il ne demande qu'un obfervateur, &
qu'il n’a pas befoin comme les autres d'être continuellement
dirigé vers le Soleil, auquel il fuffit de l’expofer. Les Pilotes, :
qui n’approuvent gueres ce qui a un air de nouveauté, lui
donnent unanimement la préférence fur leur Compas de Va-
ration, & ont trouvé celui-ci d'un ufage facile & commode,
Si leur fuffrage eft de quelque poids, c’eft fur-tout dans les
choles de pratique ; vous pouvés voir de quelle maniére
s'exprime dans fon Certificat le S.' Auroy, ancien Pilote,
Vice-Amiral des Vaifleaux du Roy, qui étoit embarqué avec
nous.
J'avois craint que lorfque le Soleil ne feroit pas bien net
à l'horifon, ce qui arrive affés fréquemment, on ne pût pas
obferver faute de pouvoir diftinguer ombre du Stile, &
javois fongé à me fervir en ce cas d’un Verre convexe pour
raflembler les rayons, & former une ombre fenfible. Mais
l'expérience m'a fait connoître qu'en fe plaçant à l’oppofite
du Soleil, on peut toñjours & fort aifément remarquer à
quel degré du rebord vertical répond le Stile ou le Pivot,
FFÉ£f ii
898 MEMOIRES DE L’'ÂACADEMIE ROYALE
en leur faifant couper en deux également Îe difque du Soleil
levant ou couchant. Lorfque le Soleil eft brillant, on a de
choix d'obferver ou de cette maniére ou par ombre, on
des deux maniéres tout à la fois.
L’expérience-m'a encore appris qu’on peut auffi obferver
directement la variation avec ce Compas par le moyen des
Etoiles fixes, en les prenant au Méridien, & remarquant
alors à quel degré du rebord vertical répond le Stile ou le
Pivot. La feule difficulté en ce cas confifte à bien éclairer
les degrés de la Rofe ou du rebord fans préfenter la lumiére
aux yeux de lobfervateur qui bornoye l'Etoile par le Stile
vertical ou par le pivot, felon que le rebord vertical gradué
eft fupérieur ou inférieur au plan de la Rofe : on comprend
bien que les Etoiles les plus proches de lhorifon font les
plus commodes & les plus propres pour cette obférvation.
On trouve des Boufloles toutes faites de cette nouvelle
conftruétion à Paris, Quai de l’'Horloge, chés le Sr le Maire
fils, au Quartier Anglois; il les met en état d'être tranfportées
par terre.
Corrections 7 Additions pour le Mémoire inrirulé Nou-
velle Maniére d’obferver en Mer la déclinaifon de
VAiguille aimantée, 14. Novembre 1733.
Page 446. ligne €. après ces mots , tout le fecours qu'on
en doit attendre, Adjoätes, peut-être n'eft-ce qu'à limper-
fection de l'Inftrument dont on fe fert en Mer pour obferver
la Variation, qu'il faut s'en prendre, fi on n’a encore pü
tirer aucun avantage, pour la connoiflance des longitudes
en Mer, de l'ingénieux Sifteme des Courbes de Variation
de M. Halley.
Ligne ro. Ce n'eft probablement pas. Lifés, & ce n'eft
probablement pas.
Ligne 19. Le mérite de ce. qui a paru d’excellent fur
cette matiére. Lifes, le mérite de tout ce qui a paru fur cette
imatiére, S è
NN DEN" S € JEUNE. 599.
Page 447, ligue 3 3. On peut voir ce qu'en ont dit M.
de Radouay, &c. Lifés, On peut voir ce qu'en ont dit le
P. Feuillée dans fon Journal d'Obfervations, Îe P. Laval
dans fon Voyage de a Louifiane, M. de Radouay, &c.
Page 448, ligne r. Je me contenterai d’obferver qu'outre
les défauts auxquels on peut remédier, &c. Lifés, Je me
contenterai de rapporter ici les termes dont fe fert l'illuftre
M. de la Hire, en parlant des Boufloles de Vaifleau en
général, celles de Mer font fi groffiéres qu'on ne peut allés s'étonner
comment on s'y fe poursla conduite d'un Vaiffeau, mais on n'a rien
de meilleur ni de plus commode. Mem. de l' Acad. 171 6. p. 6.
Ouire les défauts auxquels on peut remédier, &c.
Ligne 4. après ces mots, dans fon état prefent. Adjoïtés,
tel à peu-près que le font les Compas de Variation de con-
ftruction Angloife.
Ligne 14. M ne fuffit pas que chaque obftivation inftan-
tanée foit jufte en elle-même, fi elles ne font pas exaétement
contemporaines. Lifés, il ne fuffit pas que les deux obfer-
vations foient juftes en elles-mêmes, fi elles ne font pas
fimultanées,
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FIN. ©
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