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Full text of "Histoire de la persécution faite à l'église de Rouen sur la fin du dernier siècle, par Philippe Legendre ... Précédée d'une notice historique et bibliographique et suivie d'un appendice"

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BR    848    .R85    L5    1874 

Le  Gendre,  Philippe,  b. 

1636. 
Histoire  de  la  pers  ecution 

faite   a  1'  église  de  Rouer 


fCXr 

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Digitized  by  the  Internet  Archive 

in  2010  with  funding  from 

University  of  Ottawa 


http://www.archive.org/details/histoiredelapersOOIege 


HISTOIRE 


PERSÉCUTION 


HISTOIRE 


UK   LA 


PERSÉCUTION 

KAITK 

A  L'ÉGLISE  DE  ROUEN 

SUR  I.A  FIN  IH'  DE^iNIEU  SIKCI.K, 

Par  Philippe  LEGENDRE 

PASTEUR    DE    l'ÉGLISE    RÉFORMÉE    DE    (JUEVILLY , 
Précédée  d'aae  Notice  historique  et  bibliographique  et  suiiie  d'un  Appendice, 

Par  Emile  LESENS, 

MEMBRE   DE   LA  SOCIÉTÉ    DE  L'HISIOIHE    DU   PKOIE.STAN TISME   FRANÇAIS, 

(Keconiiue  clahlissemenl  d'utilité  piil)lic|iic) 

KT     MEMUr.E     DU     BUBEAU     DE     LA      SOCIETE    IIOUENNAISE     DE      BIBLIOPHILES; 

Avec  deux  plans  gravés  a  l'eaii-forte  en  fac-similc, 
P,u-  JiLKS  Al)ELIx\E. 


ROUEN 

IMPRIMERIE  DE  LÉON  DESHAYS, 

Rue  Saint-Nicolas,  28  et  30 
/^DCCCLXXTV 


JUM  -Jn  1912 


NOTICE. 


Philippe  Legendre  ,  auteur  de  «  La  Persécution 
faite  à  l'Eglise  de  Rouen  »  et  pasteur  de  l'Eglise  réfor- 
mée de  Quevilly,  est  né  à  Rouen,  sur  la  paroisse  de 
Saint-André-de-la-Ville  (4).  Il  était  le  deuxième 
enfant  de  Thomas  Legendre,  marchand  et  ancien 
du  Consistoire,  et  de  Françoise  de  Saint-Léger.  Il 
fut  baptisé  le  17  avril  1636;  ce  qui  fait  supposer 
qu'il  est  né  le  14  ou  le  15  du  même  mois,  les  pro- 
testants faisant,  à  cette  époque,  baptiser  leurs  en- 
fants deux  ou  trois  jours  après  leur  naissance.  — 
Il  eut  pour  parrain,  Lucas  Legendre,  son  oncle;  et, 
pour  marraine,  Anne  Legendre,  sa  tante,  femme  de 
Philippe  de  Saint-Léger. 

De  1634,  année  de  son  mariage,  à  4651,  Thomas 
eut  douze  enfants  :  sept  garçons  et  cinq  filles.  Il 

(1)  Sur  les  registres  des  Protestanls  de  Rouen  (temple  de  Que- 
villy) on  désignait  simplement  le  domicil  par  le  nom  de  la 
paroisse, 

1 


II  NOTICE. 

mourut  le  27  décembre  1682,  âgé  de  quatre-vingts 
ans.  C'était  un  commerçant  distingué,  qui  avait  des 
relations  au  loin;  mais  alors  on  désignait  ceux  qui 
faisaient  un  commerce  plus  ou  moins  étendu  sous 
le  nom  de  marchands. 

Il  avait  trois  frères  et  plusieurs  sœurs.  L'aîné, 
Lucas,  mourut  le  10  janvier  1678,  paroisse  Saint- 
Etienne-des-Tonneliers,  à  quatre-vingt-deux  ans; 
le  deuxième,  Jean-Baptiste,  sieur  de  Boisville, 
marchand  bourgeois,  mourut  le  24  mars  1660,  à 
soixante  ans;  le  plus  jeune,  Jacques,  alla  s'établir 
à  Gaen,  en  1640,  après  son  mariage  (1). 

Afin  de  donner  plus  de  suite  à  notre  récit,  nous 
commencerons,  avant  de  parler  de  notre  auteur, 
par  nous  occuper  des  renseignements  assez  étendus 
que  nous  avons  pu  recueillir  sur  sa  famille  : 

Sauf  son  acte  de  naissance,  du  23  novembre  1634, 
nous  n'avons  pas  trouvé  sur  les  registres  de  Que- 
villy  de  traces  de  François  Legendre,  l'aîné  des  en- 
fants de  Thomas  et  de  Françoise  de  Saint-Léger,  ce 
qui  fait  supposer  qu'il  a  dû  quitter  Rouen  dans  sa 
jeunesse.  Nous  lisons  dans  l'ouvrage  de  M.  Ernest 
Semichon  :  Histoire  d'Aumale,  tome  I,  pages  129  et 
suivantes,  qu'un  nommé  François  Legendre,  bour- 
geois de  Paris,  obtint,  le  21  octobre  1666,  des  lettres 

(1)  Lucas  Legendre,  père  de  Thomas,  était  aussi  ancien  de 
r  Eglise,  marié  à  Anne  Caulier. 


NOTICE.  iir 

patentes  pour  la  fabrication  des  serges,  façon  de 
Londres,  et  toutes  sortes  d'étoffes  d'Angleterre, 
excepté  les  draps,  et  qu'il  fonda  des  fabriques  au 
bourg  de  Moiiy,  à  Beauvais,  dans  les  élections 
d'Auxerre,  de  Chartres,  de  Dreux,  et  autres  lieux 
du  royaume;  tout  nous  porte  à  croire  que  ledit 
François  Legendre  n'est  autre  que  l'aîné  des  enfants 
de  Thomas  et  le  frère  de  Philippe. 

Le  troisième  enfant,  Thomas,  marchand,  paroisse 
Saint-Jean,  épousa,  en  avril  1671,  à  l'âge  de  trente- 
deux  ans,  demoiselle  Esther  Scott,  fille  de  Guil- 
laume Scott,  écuyer,  sieur  de  la  Mésangére  et  Bos- 
cherville,  secrétaire  du  roi,  et  de  Catherine  de  la 
Forterie;  de  1672  à  1683,  il  eut  onze  enfants. 

On  voit,  en  parcourant  les  registres  de  Quevilly, 
que  les  familles  protestantes  de  Rouen  étaient,  en 
général,  fort  nombreuses.  Celles  des  Legendre  ne 
font  pas  exception  :  signalons  seulement  Centurion 
Lucas,  libraire,  qui,  de  son  mariage  avec  Judith 
Mauclerc,  eut  dix-huit  enfants. 

Esther  Scott,  épouse  de  Thomas  Legendre  le 
jeune  (c'est  ainsi  qu'il  signait  du  vivant  de  son  père), 
et  belle-sœur  de  Philippe,  avait  pour  frère  Guil- 
laume Scott,  écuyer,  chevalier,  baronnet  de  la  Mé- 
sangére et  Boscherville,  Conseiller  au  Parlement 
de  Rouen,  qui  épousa,  en  1678,  Marguerite  de  Ram- 
bouillet, fille  d'Antoine  de  Rambouillet,  seigneur 


IV  NOTICE. 

de  la  Sablière,  et  de  Marguerite  Heissein,  On  con- 
naît les  relations  de  notre  fabuliste  Lafontaine  avec 
Madame  de  la  Sablière;  c'est  à  madame  de  la  Mé- 
sangère,  sa  fille,  qu'il  dédia  sa  fable  de  Daphnis  et 
Alcimadure.  Elle  fut  veuve  à  vingt-cinq  ans,  et  ha- 
bitait la  célèbre  maison  en  bois  et  terre  cuite  du 
XVI*  siècle,  que  l'on  voyait  encore,  il  y  a  quelques 
années,  avant  la  transformation  de  Rouen,  rue  de 
la  Grosse-Horloge,  aux  n°"  115  et  117  (1).  Il  est  ques- 
tion de  restaurer  la  façade  de  cette  maison  et  de  la 
placer  au  pied  de  la  tour  Saint-André,  à  côté  de  la 
belle  maison  en  bois,  construite  sous  Louis  XII,  à 
deux  pas  de  celle-là,  même  rue,  sous  les  n"'  129  et 
131.  Philippe  Legendre  était,  sans  doute,  ainsi  que 
Fontenelle,  un  des  habitués  de  cette  maison. 

Au  XVII®  siècle,  il  y  avait  un  prêche  au  château  de 
la  Mésangère  (2),  commune  de  Bosguerard-de-Mar- 
couville,  près  Bourgtheroulde  (3). 

Thomas  Legendre  le  jeune  fut,  comme  son  père, 

(1)  Voir  l'article  de  M.  F.  Bouquet.  —  Revue  de  Roue?i,  aunée 
1868,  pages  649  et  suivantes. 

(2)  Prêche  interdit  en  1682.  Voir  Arrêt  du  Conseil  d'Etat  du 
roy,  faisant  défense  au  sieur  de  la  Mezangère,  conseiller  du 
Parlement  de  Rouen,  de  faire  faille  dorénavant  aucun  exercice 
de  la  R.  P.  R.  sur  sa  terre  de  Mezangère,  petit  in-4o  ;  Toulouse, 
1682 

(3)  De  nos  jours,  les  descendants  de  cette  famille  habitent  le 
Danemark. 


NOTICE.  V 

un  négociant  distingué;  il  donna  une  grande  impul- 
sion au  commerce  de  Rouen.  Nous  trouvons  dans 
les  archives  départementales  des  lettres  de  noblesse 
de  Louis  XIV,  enregistrées  à  Rouen,  en  la  grande 
Chambre  du  Parlement,  le  9  juin  4685,  après  avoir 
été  données  à  Versailles  en  mars,  par  lesquelles  il 
est  élevé  à  la  dignité  de  noble.  Les  considérants  en 
sont  remarquables  ;  en  voici  un  extrait  : 

(c  Entre  tous  les  avantages  nécessaires  pour  le 
«  soutien  d'un  Etat  et  le  bien  des  peuples  qui  le 
«  composent,  le  commerce  étant  des  plus  considé- 
«  râbles  et  celui  qui  se  fait  en  mer,  par  les  richesses 
«  qu'il  y  apporte 

a  Pour  le  rendre  d'autant  plus  florissant  dans 
«  notre  royaume,  à  cause  de  l'appréhension  que  les 
«  gentilshommes  avaient,  en  le  faisant,  de  déroger 
«  à  leur  noblesse. 

o:  Etant  bien  informé  que  Thomas  Legendre, 
«  bourgeois  de  notre  ville  de  Rouen,  est  l'un  de 
«  ceux  de  notre  royaume  qui  fait  le  plus  grand 
«  commerce  de  mer,  et  qu'il  l'augmente  considé- 
«  rablement  en  notre  ville  de  Rouen,  par  son  intel- 
<^  ligence  et  la  connaissance  qu'il  en  a,  nous  vou- 
«  Ions  bien  lui  donner  une  marque  d'honneur,  qui 
«  puisse  passer  à  sa  postérité  et  le  rendre  égal  aux 
«  nobes,  etc.,  etc 

C'est  au  moment  de  la  révocation  de  l'Edit  de 


VI  NOTICE. 

Nantes,  qui  devait  avoir  pour  conséquence  inévi- 
table la  dispersion,  à  l'étranger,  de  nos  principaux 
commerçants  et  industriels,  que  Louis  XIV  accor- 
dait à  l'un  d'eux  une  marque  de  distinction.  On  sait 
comment  le  commerce  a  été  rendu  florissant  par  la 
suite. 

Thomas  Legendre  resta  à  Rouen,  et  tout  nous 
fait  supposer  qu'il  abjura. 

Il  ajouta  à  son  nom  celui  de  Gollandres,  fief  et 
paroisse  entre  Couches  et  Beaumont-le-Roger.  Il 
était  possesseur  d'une  fortune  de  quatre  à  cinq  mil- 
lions, —  chiffre  énorme  pour  l'époque,  —  et  avait 
des  correspondances  dans  tous  les  lieux  où  on  en 
pouvait  avoir.  En  1707,  il  acheta,  de  Marie-Anne- 
Henriette  d'Epinay  Saint-Luc,  la  terre  de  Gaille- 
fontaine,  Beausault,  Bezancourt,  la  somme  de 
408,000  livres.  Il  devint  aussi  seigneur  de  Romilly, 
d'Alge,  d'Elbeuf,  de  Maigrement. 

Il  conserva  des  relations  avec  quelques-uns  de 
ses  concitoyens  réfugiés.  Nous  voyons  une  lettre  de 
Jacques  Basnage  au  chevalier  Asselin  de  Frenelles, 
son  correspondant  à  Rouen,  et  datée  de  La  Haye, 
20  septembre  1713,  dans  laquelle  il  le  charge  de  ses 
amitiés  pour  M.  Legendre. 

Nous  ignorons  si  ce  dernier  continua  à  avoir  des 
rapports  avec  son  frère  Philippe,  réfugié  à  Rotter- 
dam; dans  tous  les  cas,  il  ne  lui  envoya  point  de 


NOTICE.  VII 

marques  de  sa  libéralité,  car  nous  verrons  plus  loin 
qu'il  était  en  Hollande  dans  une  position  de  fortune 
plus  que  modeste. 

Thomas  Legendre  (1),  en  1680,  fit  bâtir  une  fort 
belle  maison  de  plaisance  sur  la  paroisse  de  Saint- 
Paul  de  Rouen,  tout  proche  et  au-dessous  de  deux 
chemins  qui  se  partagent  :  l'un  pour  aller  à  Notre- 
Dame-de-Bonsecours,  et  l'autre  qui  conduit  au  Port- 
Saint-Ouen  (2). 

Cette  maison  fut  vendue,  il  y  a  peu  d'années,  au 
marquis  de  Marguerye,  par  M""*  de  Poilly,  petite-fille 
de  la  dernière  des  Legendre,  qui  avait  épousé  son 
grand-père,  le  marquis  du  Hallay-Cœtquen. 

Dans  un  rapport  dressé  par  Pierre  d'Hozier,  Con- 
seiller du  roi,  généalogiste  de  sa  maison,  en  juin 
1700,  à  M.  le  maréchal  de  Boufflers,  sur  la  naissance 
de  messieurs  les  officiers  du  régiment  des  gardes 
françoises,  —  rapport  copié  sur  l'original  par 
M.  Stéphane  de  Merval,  qui  veut  bien  nous  com- 
muniquer les  détails  qui  suivent,  —  on  lit  : 

«  M.  de  Collandre  (sic),  lieutenant,  originaire  do 


(1)  Voir  FariD,  édition  de  1738,  t.  I,  pages  500  et  ROI.  —  6  vol. 
in-12. 

(2)  Le  21  octobre  1714,  mourut,  à  Eauplet,  dans  la  maison  de 
M.  Legendre,  le  comte  de  Sézanne,  frère  du  maréchal  duc  d'Har- 
court,  lieutenant-général  des  armées  du  roi.  N,  Périanx;  Histoirr 
(le  Rouen. 


VIII  NOTICE. 

«  Rouen,  son  nom  est  Legendre,  lils  du  sieur  Le- 
«  gendre  l'un  des  plus  riches  marchands  du  royaume, 
«  anobli  par  lettres  patentes  de  mars  1685,  et 
«  d'Esther  Scott  delà  Mésangère;  d'une  famille 
«  d'ancienne  noblesse  d'Ecosse,  maintenant  dans 
«  ses  droits  en  France,  par  lettres  de  1644. 

«  L'aîné,  Guillaume Legendre,sieurdeRomilly(i), 
«  fut  reçu  Conseiller  au  Parlement  de  Rouen  en 
«  1695. 

«  Le  second,  Thomas,  sieur  de  Gollandres  de 
«  Gaillefontaine  (2),  d'abord  officier  aux  gardes 
«  françoises,  mourut  le  1"  mars  1738,  maréchal  de 
«  camp  des  armées  du  roi,  et  commandeur  de  Saint- 
«  Louis;  marié,  le  12  août  1715,  à  Marguerite-Ca- 
«  therine-Madelaine  Le  Voyer  d'Argenson  ;  il  en 
«  eut  trois  enfants  :  1°  Louis-Marie,  mort  sans  être 
«  marié  ;  2°  Alexandre- Jacques-Pierre,  dit  le  mar- 
«  quis  de  Gollaux,  mort  le  19  novembre  1752,  bri- 
a  gadier  des  armées  du  roi,  sans  enfants  de  Marie- 
«  Catherine  de  Gravelle,  et  3"  Marie-Catherine, 
«  mariée  à  Gabriel-Armand  de  Montmorin,  comte 
«  de  Saint-Hérem,  dont  le  comte  de  Montmorin, 
«  ministre  de  la  marine  sous  Louis  XVL 

a  Le  troisième  enfant  de  Thomas  Legendre  de 
«  Collandres,  anobli  en  1685,  Charles  de  Berville 

(1)  Né  en  1672.  —  Registres  de  Quevilly. 

(2)  Né  en  1673.  —  Registres  de  Quevilly. 


NOTICE.  IX 

o  de  Quincœnon  et  du  Tilleul,  dame  Agnès  (1), 
«  d'abord  officier  aux  gardes  françoises,  mort  le 
«  7  avril  J746,  lieutenant  des  armées  du  roi,  com- 
«■  mandeur  de  Saint-Louis,  marié,  le  16  mars  1708, 
et  à  Eléonore  d'Estang  de  Saillans,  dont  il  eut  un 
«  fils,  Pierre-Hyacinthe,  dit  le  marquis  de  Berville, 
«  colonel  du  régiment  de  Rouergue,  en  1735,  bri- 
«  gadier  des  armées  du  roi,  le  2  mars  1744,  maréchal 
«  de  camp,  le  1"  janvier  1748,  lieutenant  général, 
«  le  1"  mars  1758,  commandeur  de  Saint-Louis, 
«  mort  le  27  février  1762,  marié,  le  17  mars  1737,  à 
«  sa  cousine  germaine,  Marie-Adélaïde  Legendre  de 
«  Maigremont. 

«  Le  quatrième,  appelé  M.  de  Maigremont  (2), 
a  capitaine  aux  gardes  françoises,  fut  tué  à  la  ba- 
«  taille  de  Ramillies,  le  23  mai  1706,  et  ne  laissa 
«  qu'une  fille,  celle  mentionnée  ci-dessus.  » 

Le  quatrième  enfant  de  Thomas  Legendre,  ancien 
du  Consistoire  de  Quevilly,  et  sœur  de  notre  auteur, 
Judith,  épousa,  le  1"  juillet  1657,  à  dix-huit  ans, 
Pierre  Bar,  marchand  à  Londres,  fils  de  Pierre  Bar, 
marchand  de  Rouen.  —  Il  devait  faire  aussi  le  com- 
merce de  mer;  car  nous  voyons  qu'en  1681  un  jeune 
Maure,  du  Sénégal,  Pierre  Thomas  Banicq,  âgé  de 
quatorze  ans,  serviteur  de  Pierre  Bar,  de  Londres, 

(1)  Né  en  1679.  —  Registres  de  Quevilly. 
(i)  Né  en  1680.  —  Registres  de  Quevilly. 


X  NOTICE. 

lut  baptisé  en  l'église  de  Quevilly.  Il  eut  pour  par- 
rain Thomas  Legendre,  ancien,  et,  pour  marraine, 
Judith  Legendre,  épouse  dudit  Pierre  Bar. 

Le  cinquième  enfant,  frère  de  Philippe,  Lucas, 
mourut  à  Rouen,  en  1659,  à  l'âge  de  dix-huit  ans, 
ayant  été  noyé,  ainsi  que  le  constate  l'acte  de  décès 
du  registre  de  Quevilly. 

Le  sixième,  Pierre,  né  le  16  janvier  1642,  secré- 
taire du  roi,  se  convertit  au  catholicisme,  lors  de  la 
révocation  de  l'Edit  de  Nantes. 

Nous  n'avons  pas  de  traces  du  septième  enfant, 
Jean,  né  le  12  avril  1643,  non  plus  que  du  neuvième, 
Adam,  né  le  11  mai  1646. 

Le  huitième,  Marie,  épousa,  le  16  janvier  1675,  à 
trente  et  un  ans,  le  sieur  Michel  Heusch,  marchand 
à  Paris. 

Le  dixième,  Suzanne,  épousa,  en  décembre  1671, 
à  vingt-deux  ans,  Pierre  Ghappelier,  sieur  de  la 
Varenne,  fils  de  Philippe,  seigneur  de  Rames,  près 
Saint-Romain-de-Golbosc,  dans  le  pays  de  Gaux. 

Les  deux  derniers  enfants  d^  Thomas  Legendre 
et  de  Françoise  de  Saint-Léger,  Anne  et  Esther, 
moururent  en  très-bas  âge,  à  Rouen. 

On  comptait,  à  Rouen,  parmi  les  protestants,  plu- 
sieurs familles  du  nom  de  Legendre  ;  mais  les  re- 
gistres de  l'église,  antérieurs  à  1595,  ayant  été 
détruits,  nous  n'avons  pu  vérifier  si  elles  étaient 
alliées  à  celle  de  notre  auteur.  Voici  leurs  noms  : 


NOTICE.  XI 

1618.  Nicolas  Legendre,  maître  tellier  (loilier), 
paroisse  Saint-Vivien,  fils  de  Daniel  et  de  Marie 
Lhuillier,  marié  à  Madelaine  Lambert.  —  Dix  en- 
fants, de  1622  à  1642. 

1648.  Adam-Gabriel  Legendre,  marchand,  d'abord 
paroisse  Saint-Cande-le- Vieux,  puis  paroisse  Saint- 
Vincent,  fils  de  Denis  et  de  Marie  Lécuyer,  marié  à 
Madelaine  Ouvry.  —  Huit  enfants,  de  1649  à  1664. 

1658.  Pierre  Legendre,  marié  à  Martine  Gouel.  — 
Trois  enfants,  de  1659  à  1663. 

De  1621  à  1671,  un  nommé  Pierre  Legendre  fut 
curé  d'Aumale  et  principal  du  Collège,  docteur  en 
théologie  et  en  Sorbonne.  On  a  de  lui  YOraison 
funèbre  de  Jacques  Mahieu,  curé  de  Gaillefontaine, 
imprimé  en  1672.  On  pense  qu'il  était  parent  des 
Legendre,  de  Rouen.  On  ne  trouve,  à  cet  égard,  au- 
cuns renseignements  sur  les  registres  de  Quevilly. 

On  suppose  aussi,  comme  étant  de  la  même 
famille,  Louis  Legendre,  historiographe  de  France, 
chanoine  de  la  Cathédrale  de  Rouen,  abbé  de  Glaire- 
fontaine*,  auteur  de  la  Vie  du  cardinal  d'Amboise  et 
d'autres  ouvrages  assez  estimés.  Son  père  et  son 
grand-père,  originaires  de  la  Ferté-Fresnel,  au  pays 
d'Ouche,  étaient  catholiques,  ce  qui  nous  fait  douter 
de  sa  parenté  avec  la  famille  de  notre  auteur  : 
Louis  Legendre  naquit  à  Rouen,  en  1655,  et  mourut 
à  Paris,  en  1733. 


XII  NOTICE. 


Philippe  Legendre,  comme  la  plupart  des  pastetirs 
originaires  de  la  Normandie,  a  dû  faire  ses  études 
Ihéologiques  à  Saumur  ou  à  Sedan  ;  c'est  ce  qu'il  ne 
nous  a  pas  été  donné  de  vérifier;  mais,  grâce  à 
l'obligeance  de  M.  Jules  Bonnet,  secrétaire  du  Co- 
mité de  la  Société  de  l'Histoire  du  protestantisme 
français,  nous  savons  que  son  nom  ne  figure  pas 
sur  la  liste  des  élèves  de  la  Faculté  de  Genève.  On 
manque  de  renseignements  sur  sa  jeunesse.  On  sait, 
du  reste,  combien  les  recherches  sur  la  vie  des 
protestants  offrent  de  difficultés  :  les  documents  qui 
les  concernent,  ayant  été  dispersés  ou  détruits. 

On  voit,  d'après  les  registres  de  Quevilly,  qu'il 
commença  à  exercer  le  ministère  évangélique  dans 
sa  ville  natale,  en  1671,  et  qu'il  le  continua  jusqu'à 
la  révocation  de  l'Edit  de  Nantes.  Il  avait  pour  col- 
lègue le  célèbre  Jacques  Basnage,  beaucoup  plus 
jeune  que  lui.  On  verra,  dans  le  récit  de  la  Persécu- 
tion de  l'Eglise  de  Rouen,  la  part  qu'ils  prirent,  l'un  et 
l'autre,  aux  événements;  nous  ne  nous  étendrons 
donc  pas  sur  ce  sujet.  Ils  durent  s'exiler  en  Hol- 
lande, à  Rotterdam.  C'est  là  qu'ils  retrouvèrent  une 
l)artie  de  leur  troupeau.  Dumont  de  Bostaquet,  dans 
ses  mémoires,  nous  apprend  qu'une  des  auberges 
de  cette  ville,  après  l'arrivée  des  Rouennais,  avait 
pris  pour  enseigne  :  Hôtel  de  Hoiien;  nos  réfugiés  y 
abondèrent  en  effet. 


NOTICE.  XIII 

Les  commerçants  de  Rouen  étaient,  depuis  de 
longues  années,  en  rapport  avec  la  Hollande;  beau- 
coup de  marchands  hollandais  et  allemands  étaient 
venus,  vers  le  milieu  du  xvii^  siècle  surtout,  s'établir 
dans  nos  murs.  Nous  citerons  les  suivants  : 

André  Amsing,  Hams  Coq,  Herman  Welken,  de 
Hambourg;  Pierre  de  Gier,  de  Rotterdam;  Pierre 
Vandersprang,  de  Harlem;  Antoine  Vandershulsl, 
de  La  Haye;  Jean  de  la  Grave,  d'Amsterdam;  André 
Ficq,  de  Delft;  Henry  Ocghusen,  d'Utrecht.  Il  y 
avait  aussi  à  Rouen  des  marchands  venus  d'Angle- 
terre et  d'Ecosse.  En  se  dirigeant  dans  ces  contrées, 
lors  des  persécutions,  nos  Rouennais  y  rencontrèrent 
de  nombreux  amis;  car,  beaucoup  de  nos  conci- 
toyens, dans  le  courant  du  xv!!""  siècle,  étaient  allés 
volontairement  s'établir  en  Hollande  et  en  Angle- 
terre. Citons  seulement  :  Pierre  Lheureux,  à  Ams- 
terdam; André  Dumont,  à  Leyde;  David  Sarrazin, 
Pierre  Bar  et  David  Foulcaut,  à  Londres. 

Peu  de  temps  après  son  arrivée  à  Rotterdam,  Phi- 
lippe Legendre,  âgé  de  plus  de  cinquante  ans,  épousa 
la  tille  de  Pierre  Thomines,  sieur  du  Bosc,  pasteur 
de  Gaen,  issue  du  mariage  de  ce  dernier,  on  1657, 
avec  Anne  de  Cahaignes,  tille  de  maître  Estienne  de 
Gahaignes,  écuyer,  sieur  de  Verrières,  docteur,  pro- 
fesseur en  médecine  dans  l'Université  de  Gaen. 

En  1694,  il  avait  trois  enfants  :  Pierre.  Thomas  et 
Françoise. 


XIV  NOTICE 

A  son  arrivée  à  Rotterdam,  il  fut  nommé  pasteur 
de  l'Eglise  française  de  cette  ville,  ainsi  que  son 
collègue  Jacques  Basnage  ;  comme  lui  et  comme 
Ijeaucoup  d'autres  pasteurs,  il  fut  en  butte  aux  at- 
taques de  l'irascible  Jurieu,  beau-frère  de  ce  der- 
nier, qui,  sur  le  simple  soupçon  qu'il  était  l'auteur 
d'un  écrit  relatif  aux  petits  prophètes  duDauphiné, 
l'accusa  devant  le  Consistoire  d'entretenir  des  cor- 
respondances en  France,  et  de  nourrir  une  haine 
secrète  contre  l'Etat.  Legendre  lui  répondit  en  le 
traitant  de  calomniateur  et  de  malhonnête  homme, 
et  le  somma  de  lui  faire  réparation.  Le  Consistoire 
ordonna  que  l'accusation  fut  lacérée  en  présence  de 
l'accusateur  (1). 

Il  n'eut  pour  vivre  que  le  traitement  qui  lui  fut 
alloué  par  le  gouvernement  hollandais.  L'église  de 
Rouen  doit  un  souvenir  reconnaissant  à  cette  géné- 
reuse nation,  qui  se  montra  si  hospitalière  envers 
nos  réfugiés.  Elle  en  fut  récompensée,  car  ils  l'enri- 
chirent par  leur  industrie. 

On  n'avait,  jusqu'à  présent,  aucun  renseignement 
sur  les  dernières  années  de  la  vie  de  Philippe  Le- 
gendre ;  mais  nous  avons  découvert,  dans  les  lettres 
inédites  de  Pierre  Basnage  de  Bellemare,  frère  du 
pasteur  Jacq.  Basnage,  ancien  capitaine  de  cavalerie 

(1)  Haag.  —  France  prolestante,  article  Legendre. 


NOTICE.  XV 

au  service  de  la  Hollande,  et  ami  de  rhistorieii 
Rapin  Thoyras,  qui  sont  en  dépôt  aux  archives  de 
la  préfecture  de  la  Seine-Inférieure,  après  avoir 
été  découvertes  dans  celles  du  Palais-de-Justice 
de  Rouen,  par  son  honorable  greffier-archiviste, 
M.  Gosselin,  que  Ph.  Legendre  vivait  en  1725. 

Au  21  août  de  ladite  année,  ledit  Pierre  Basnage, 
époux  de  Julie  Brachon  de  Senitot-Bévilliers,  et 
demeurant  au  manoir  seigneurial  de  Bévilliers,  prés 
Harfleur,  écrivait  au  chevalier  Asselin  de  Frenelies, 
((ui  avait  été  employé  aux  conférences  d'Utrecht,  et 
qui  était  l'ami  de  son  frère  et  le  sien,  ce  qui  suit  : 

^<  Notre  jeune  homme  (Henry  Bauldry,  son  ne- 
«  veu)  (1),  a  grande  envie  de  se  défaire  d'Yberville, 
<(  ayant  un  mariage  en  tête  avec  une  fille  de  M.  Le- 
«  gendre,  qui  n'est  pas  trop  de  mon  goût.  L'alliance 
«  est  bonne  ;  mais  deux  gens  qui  n'ont  pas  un  grand 
«  fond  feront  un  triste  ménage.  Outre  qu'avec  les 
«  espérances  qu'il  peut  avoir,  il  aurait  pu  se  procu- 
«  rer  un  meilleur  établissement,  l'amour  ne  résonne 
«  point;  c'est  ce  qui  m'a  un  peu  refroidi  à  son 
«  égard.  » 

Les  espérances  de  Henry  Bauldry  ne  purent  se 
réaliser;  des  obstacles  empêchèrent  le  comte  de 

(1)  Henry  Bauldry,  fils  de  Paul  Bauldry,  sieur  d'Yberville  Hoc- 
quiguy  et  Thoureil,  et  de  Madelaiue  Basoage,  résidait  à  Uotter- 
dalii,  où  il  s'occupait  d'affaires  de  banque. 


XVI  NOTICE. 

Manneville,  gouverneur  de  Dieppe,  parent  d'Asselin 
de  Frenelles,  de  faire  l'acquisition  d'Yberville.  On 
sait  que  Paul  Bauldry,  gendre  de  Henry  Basnage 
de  Franquesnay,  commentateur  de  la  Coutume  de 
Normandie,  en  se  réfugiant  en  Hollande,  avait  aban- 
donné en  France  ses  biens,  qui  étaient  considé- 
rables. 

Henry  Bauldry,  après  avoir  épousé  la  lille  de  Ph. 
Legendre,  écrivait  à  de  Frenelles  : 

«  Si  vous  avez  été  à  Dieppe,  vous  y  aurez  trouvé 
«  mon  parent  marié  (1),  qui  y  garde  sa  femme  avec 
«  plus  d'assiduité  que  moi,  quoique  j'aie  lieu  d'en 
«  être  content,  Dieu  merci  !  Je  vous  remercie  bien 
«  des  souhaits  que  vous  avez  la  bonté  de  faire  pour 
»■  notre  bonheur.  » 

Quelques  années  auparavant,  après  la  mort  du 
roi,  il  écrivait  au  même  : 

«  Il  semble  qu'on  n'ait  en  vue  que  la  ruine  de  la 
«  nation.  Qui  aurait  jamais  cru  que  Louis  XIV  eût 
«  pu  être  regretté  et  être  admis,  dès  à  présent,  au 
«  rang  des  bons  princes?  » 

Les  réfugiés  de  Rouen  supportèrent  avec  calme 
les  douleurs  de  l'exil.  On  ne  trouve  ni  dans  leurs 
livres,  ni  dans  leurs  lettres,  d'imprécations  contre 
leurs  concitoyens  et  leur  pays.  |Jacq.  Basnage,  leur 

(i)  Morisse,  de  Dieppe. 


NOTICE  XVII 

chef,  lui,  va  jusqu'à  dire  (1)  :  «  On  dit  que  vous  avez 
«  vos  inquiétudes  que  cause  non-seulement  l'âge, 
«  mais  la  santé  du  roi.  Les  choses  sont  tellement 
«  changées  icy,  qu'on  y  prie  Dieu  pour  sa  conser- 
«  vation,  parce  qu'en  cessant  de  le  craindre,  on 
«  a  commencé  à  l'aimer.  » 

Nous  trouvons  dans  une  autre  lettre  de  Pierre 
Basnage  de  Bellemare,  de  la  fin  de  Tannée  1725,  le 
passage  suivant,  qui  a  trait  aux  derniers  jours  de 
notre  auteur  :  «  Mynheer  Bauldry  espère  toujours 
«  en  vos  bons  et  gracieux  soins  (la  vente  d'Yber- 
«  ville),  il  me  marque  que  le  bonhomme  M.  Le- 
«  gendre  prend  congé  de  ce  monde,  s'afFaiblissant 
«  tous  les  jours;  il  a,  je  crois,  quatre-vingt-neuf 
«  ans.  " 

Au  sujet  du  Temple  de  Quevilly,  voici  ce  que  rap- 
porte Farin  :  «  Les  mémoires  de  saint  Oiien  disent 
«  que  les  Huguenots,  le  samedi  2i  avril  1563,  eschel- 
«  lèrent  l'église  du  Grand-Quevilly,  où  ils  rompirent 
«  les  ornements  et  meubles  d'icelle  église,  et  offen- 
«  seront  plusieurs  des  paroissiens  ;  ce  fait,  ils  pas- 
«  seront  à  Dieppedalle,  vers  Croisset.  C'est  dans 
«  cette  paroisse  (2)  qu'ils  avaient  bâti  un  ouvrage 
«  des  plus  curieux  qui  fut  en  France  :  c'était  leur 

(1)  Lettres  à  Asselin  de  Frenelles,  rue  Saint-Godard,  à  Rouen, 
—  De  La  Haye,  août  1715. 
(2;  Grand-Quevilly, 

3 


XVIII  NOTICE, 

«  prêche.  Cek  édifice  était  en  dodécaèdre,  c'est-à- 
«  dire  de  douze  pans  égaux,  autour  duquei  régnait 
«  en  dedans  une  galerie  à  triple  étage.  Il  avait  270 
<^  pieds  de  tour,  90  de  diamètre,  66  de  hauteur.  Il 
^'  était  éclairé  de  60  fenêtres,  et  pouvait  contenir 
c'  10,700  personnes  (1).  Il  n'était  soutenu  d'aucun 
«  pillier,  quoiqu'il  fut  tout  de  charpente.  Une  clef 
«  de  hois,  à  laquelle  toutes  les  autres  venaient 
«  rendre,  en  fermait  le  comble.  Le  charpentier  qui 
«  l'entreprit  s'appelait  Gigouday  (2)  ;  il  le  commença 
«  en  1600;  il  fut  achevé  en  1601.  Cet  ouvrage  fut 
«  démoli  en  1684,  les  démolitions  données  aux  hô- 
«  pitaux,  et  la  cloche  à  Saint-Martin-du-Pont.  » 

M.  Auguste  Leprevost,  dans  sa  Notice  sur  les  deux 
Quevilly  (le  grand  et  le  petit),  lue  le  16  mars  1818  à 
la  Commission  départementale  des  Antiquités,  et, 
à  l'Académie  de  Rouen,  le  12  mars  1819,  après  avoir 
donné  les  détails  que  Farin  nous  a  laissés,  ajou- 
tait : 

a  Je  regrettais  qu'il  n'existât  ni  plan  ni  figure 
«  d'une  pièce  de  charpente  si  remarquable,  lors- 
«  qu'un  heureux  hazard  m'a  rendu  propriétaire  d'un 
«  livre  intitulé  :  Histoire  de  la  Persécution,  etc.  J'y  ai 
".  trouvé,  avec   beaucoup  de  joie,  deux  gravures 

(1)  Legeudre  dit  8,000;  mais  il  pouvait,  au  besoin,  contenir  le 
chiffre  indiqué  par  Farin. 

(2)  Gigouday  ou  Gigoudé  (Jeuffroy),  marié  à  Madelaine  Leblond. 


NOTICE.  XIX 

K  représentant  l'élévation,  le  profil  et  le  plan  de  ce 
«  curieux  monument.  Peut-être  TAcadémie  trou- 
ve vera-t-elle  quelqu'intérèt  à  les  voir.  » 

Il  disait,  de  plus,  qu'il  y  avait  à  Quevilly,  —  ce 
qui  est  bien  connu,  du  reste,  —  des  dépôts  de  li- 
brairie à  l'usage  des  protestants  ;  les  livres  portaient 
même  le  nom  de  Quevilly  au  lieu  de  celui  de 
Rouen  (t). 

On  évalue  à  180,000  le  nombre  des  protestants  de 
la  Normandie,  et  à  20,000  ceux  compris  dans  la  gé- 
néralité de  Rouen.  Le  premier  chifïre  peut  être  con- 
sidéré comme  à  peu  près  exact  ;  mais  le  dernier  est 
tout-à-fait  insuffisant  :  La  ville  de  Rouen,  avec  ses  fau- 
bourgs et  les  communes  voisines,  en  contenait  six 
à  sept  mille;  nous  nous  basons,  pour  établir  cette 
évaluation,  sur  les  registres  de  Quevilly.  A  Dieppe, 
il  y  avait  plus  de  10,000  protestants.  Elbeuf  avait  le 
cinquième  de  ses  habitants  qui  professaient  la  reli- 
gion réformée.  L'église  de  Lintot  (Bolbec)  était 
nombreuse.  Restaient  les  églises  assez  compactes 
de  Pont-Audemer,  Caudebec,  Sanvic  (le  Havre), 
Sénitot  (Harfleur),  Luneray,  Sancourt  et  beaucoup 
d'autres.  En  portant  à  40,000  le  chiffre  applicable  à 

(1)  Noms  des  principaux  libraires-imprimeurs  protestants  de 
Rouen  au  xviie  siècle  :  Claude  Levillain,  Centurion  Lucas  et  ses 
enfants,  Les  Callouë,  David  et  Pierre  Geuffroy,  Jean  et  David 
Berthelin,  Jacq.  Delamotle. 


XX  NOTICE. 

la  généralité  de  Rouen ,  nous  pensons  ne  pas  être 
au-dessus  de  la  vérité. 

L'espace  resserré  d'une  notice  nous  interdit  d'en- 
trer dans  aucun  commentaire  sur  le  récit  de  Le- 
gendre;  les  faits,  d'ailleurs,  parlent  d'eux-mêmes. 
L'acte  odieux ,  non  moins  qu'impolitique ,  de 
Louis  XIV  a  été  jugé  par  tous  les  historiens  im- 
partiaux; nous  ne  pourrions  rien  y  ajouter.  Nous 
nous  bornerons  à  faire  remarquer  qu'à  partir  de  la 
moitié  du  xvii'=  siècle,  les  haines  religieuses  étaient 
apaisées;  catholiques  et  protestants  vivaient  en 
paix.  On  laissait,  comme  le  ditBasnage  de  Beauval, 
en  partage  à  quelques  dévots  les  haines  que  la  diffé- 
rence des  religions,  les  guerres  civiles  et  les  mas- 
sacres avaient  allumées.  Nos  populations  normandes 
étaient  de  mœurs  douces.  Les  classes  éclairées, 
surtout,  n'avaient  plus  de  haine  contre  les  protes- 
tants, et  la  population  ne  s'associa  qu'à  contre- 
cœur aux  mesures  rigoureuses  dirigées  contre  eux 
par  les  ordres  de  la  cour.  Les  administrations  locales 
se  montrèrent  aussi  tolérantes  que  possible,  disons- 
le  bien  haut  à  leur  honneur;  car,  après  la  démolition 
du  temple  de  Quevilly,  les  autorités  de  Rouen  per- 
mirent aux  protestants  de  célébrer  leurs  baptêmes 
et  mariages  dans  une  des  salles  de  la  maison  de  ville, 
par  un  pasteur  venu  du  dehors  (1). 

(i;  Registres  de  Quevilly. 


NOTICE.  XXI 

Les  principaux  marchands  de  la  ville  ne  turent 
pas  trop  inquiétés,  et  purent  réaliser  leur  fortune 
dans  les  années  qui  suivirent  la  révocation  de  l'Edit 
de  Nantes.  Il  est  vrai  que  la  plupart  firent  simulacre 
de  se  convertir;  mais,  quoiqu'ils  ne  fissent  guère 
profession  de  leur  nouvelle  religion,  on  consentit  à 
fermer  les  yeux. 

Le  comte  d'Avaux,  en  1687,  écrivait  à  la  cour  : 

«  J'ose  prendre  la  liberté  de  dire  à  votre  Majesté 
«  que  si  on  traitait  les  nouveaux  convertis  dans 
«  toute  l'étendue  du  royaume  de  la  même  manière 
tt  qu'ils  le  sont  à  Paris  et  à  Rouen,  il  n'en  serait  pas 
a  sorti  la  moitié.  » 

En  1687-88,  il  sortit  encore  de  Rouen  250  mar- 
chands, y  compris  le  sieur  Cossart,  le  plus  opulent 
d'entre  eux;  ces  réfugiés  retardataires  rejoignirent 
leurs  concitoyens  en  Hollande,  en  Angleterre  et  en 
Allemagne. 

A  part  la  noblesse  qui  embrassait  exclusivement 
les  carrières  libérales,  comme  magistrats,  avocats, 
pasteurs,  militaires,  administrateurs,  les  protestants 
de  Rouen  s'occupaient  d'industrie  et  de  commerce  ; 
c'est  ce  qui  ressort  des  registres  de  Quevilly.  La 
ville  de  Rouen  ne  comptait  dans  son  sein,  parmi 
eux,  qu'un  nombre  fort  restreint  d'artisans;  mais  il 
s'en  trouvait  un  assez  grand  nombre  dans  les  petites 
villes  et  dans  les  campagnes.  Avec  l'aide  de  docu- 


XXII  NOTICE. 

ments  nombreux,  nous  avons  pu  constater  que,  sous 
le  rapport  de  l'instruction,  ils  ne  le  cédaient  guère 
à  la  noblesse  et  à  la  bourgeoisie.  Il  est  donc  permis 
de  dire,  avec  M.  Frédéric  Baudry,  que  si  Télément 
protestant  avait  pu  pencher  dans  la  balance,  lors  de 
la  Révolution  de  1793,  bien  des  malheurs  auraient 
été  conjurés  (1). 

Nous  ne  pouvons  terminer  cette  notice  sans  con- 
sacrer quelques  lignes  à  Jacques  Basnage,  le  col- 
lègue de  Philippe  Legendre,  né  à  Rouen,  le  8  août 
1653,  qui  s'exila  en  Hollande  en  même  temps  que 
lui. 
Jacques  Basnage  était  non-seulement  un  très- 
Ci)  N'est-il  pas  permis  de  penser  que  l'esprit  philosophique  du 
xvuie  siècle  se  sérail  moins  porté  aux  extrémités  si  le  protestan- 
tisme se  fut  trouvé  là  pour  ménager  la  transition  ?  On  peut  aussi 
regretter,  à  l'origine  de  la  Révolution,  l'absence  de  la  bourgeoisie 
prolestante  qui,  avec  son  sérieux  et  sa  solidité,  lui  eut  peut-être 
communiqué  l'élément  modérateur  et  pratique  qui  lui  manqua. 
Par  le  rôle,  à  la  fois  sage  et  ferme,  que  les  puritains  venaient  de 
jouer  dans  l'établissement  des  Etats-Unis  d'Amérique,  on  peut 
juger  de  ce  que  la  France  perdit  à  ne  plus  posséder  leurs  frères. 

La  vengeance  fut  plus  directe  aux  mauvais  jours  de  la  Révolu- 
tion. On  copia  les  lois  les  plus  furieuses  conlre  les  émigrés,  les 
suspects  et  les  prêtres  réfractaires,  là  où  on  les  trouvait  loutes 
faites,  c'est-à-dire  dans  les  édits  de  Louis  XIV  et  de  Louis  XV 
contre  les  protestants.  —  F.  Baudry.  Journal  de  Rouen,  20  oc- 
tobre 1864. 


NOTICE.  XXIII 

habile  homme;  mais,  —  ce  qai  vaut  mieux  encore, 
une  âme  droite  et  généreuse  (1);  il  fut  employé  aux 
conférences  d'Utrecht.  Chargé  d'une  négociation 
secrète  avec  le  maréchal  d'Uxelles,  il  s'en  acquitta 
avec  succès.  En  1716,  le  duc  d'Orléans,  régent,  en- 
voya l'abbé  Dubois  à  La  Haye,  en  qualité  d'embas' 
sadeur,  pour  négocier  un  traité  d'alliance  défensive 
entre  la  France,  l'Angleterre  et  la  Hollande;  il  lui 
prescrivit  de  s'adresser  à  Basnage,  et  de  se  gouver- 
ner en  tout  par  ses  avis.  L'amour  de  la  patrie  n'était 
pas  refroidi  dans  le  cœur  de  l'exilé  ;  il  s'employa 
avec  zèle  à  seconder  la  négociation,  et  l'alliance  fut 
conclue  en  1717. 

Basnage  avait  conservé  de  précieuses  amitiés 
dans  sa  ville  natale  (2);  il  resta  en  rapport  avec 
quelques  membres  du  Parlement,  principalement 
avec  M.  de  la  Ferté,  Claude-Emmanuel  Langlois  de 
Colmoulins,  le  premier  Président  Camus  de  Ponl- 
carré  (Nicolas-Pierre),  tous  fort  empressés  à  lui 
demander  de  leur  envoyer  les  ouvrages  de  Bayle, 
et  VHistoire  des  Ouvrages  des  savants,  de  son  frère 
Henry;  puis,  avec  le  duc  de  Luxembourg,  l'acadé- 
micien abbé  Gaspard  Abeille,  secrétaire  de  ce  der- 

(1)  Lettres  de  Bayle. 

(2)  Analyse  de  quelques  lettres  de  Jacq.  Basnage,  par  M.  Le- 
vesque,  conseiller  à  la  Cour  de  Rouen.  —  Bulletin  des  travaux 
de  V Académie  de  Rouen,  1859. 


XXIV  NOTICE. 

nier,  Nicolas  Mesnager,  le  diplomate;  le  baron  de 
Monville,  Besongne,  le  libraire. 

Au  dehors,  il  avait  pour  amis  :  le  savant  abbé 
Passionéi,  depuis  cardinal,  et  ennemi  des  Jésuites, 
le  marquis  de  Monteléon,  plénipotentiaire  d'Es- 
pagne, à  La  Haye,  MM.  de  Châteauneuf  et  de  Mor- 
ville,  ambassadeurs  de  France,  sans  compter  un 
nombre  infini  de  personnages  éminents  de  l'époque 
et  de  tous  les  pays. 

Le  cardinal  Dubois,  de  triste  mémoire,  avec  le- 
quel, comme  nous  le  disons  plus  haut,  Basnage 
avait  été  en  rapport  en  Hollande,  alors  qu'il  n'était 
que  simple  abbé,  ne  put  s'empêcher,  malgré  qu'il 
ne  fut  plus,  depuis  son  élévation,  en  correspondance 
avec  lui,  de  lui  garder  les  meilleurs  souvenirs. 

En  septembre  1719,  Pierre  Basnage  deBellemare 
écrivait  au  chevalier  de  Frenelles  (1)  : 

«  J'allai  à  Versailles  prendre  congé  de  son  émi- 
«  nence,  qui  me  reçut  fort  gracieusement,  me  serra 
«  la  main  et  me  chargea  de  ses  amitiés  pour  mon 
«  frère.  » 

En  juillet  1722,  le  même  écrivait  :  «  J'allai  à  Ver- 
«  sailles,  j'eus  l'honneur  d'y  saluer  son  Eminence 
«  Monseigneur  le  cardinal,  qui  me  reçut  gracieuse- 

{l)  Archives  de  la  Seine- Inférieure.  —  Lettres  inédites  de 
Pierre  Basnage, 


NOTICE.  XXV 

«  ment  et  m'assura  qu'il  n'oublierait  jamais  les 
«  honnêtetés  qu'il  avait  reçues  de  mon  frère.  » 

En  mai  1723,  Suzanne  Du  Moulin,  épouse  de  Jacq. 
Basnage,  en  annonçant  à  de  Frenelles  que  le  por- 
trait de  son  mari,  peint  par  le  célèbre  VanderwefT, 
qui  lui  était  destiné,  était  terminé,  lui  disait  :  «  Vous 
«  aurez  un  portrait  du  plus  grand  peintre  de  la 
<c  Hollande,  et,  les  connaisseurs  qui  ont  vu  votre 
«  portrait,  ont  conclu  qu'il  fallait  que  mon  mari 
«  vous  aime  bien  tendrement  pour  vous  l'envoyer; 
«  car  vous  savez  bien  qu'il  est  assez  fêté  dans  notre 
«  parti,  et  il  Test  aussi  dans  le  vôtre.  » 

Jacques  Basnage  mourut  à  La  Haye,  le  21  dé- 
cembre 1723.  Voici  la  lettre  que  Henry  Bauldry,  son 
neveu,  qui  devait,  deux  ans  plus  tard,  épouser  la 
fille  de  Ph.  Legendre,  écrivait,  le  23  décembre,  au 
chevalier  de  Frenelles  : 

«  C'est  avec  une  vive  douleur  que  je  vous  apprens, 
«  de  la  part  de  M""'  Basnage,  la  perte  qu'elle  a  fait 
«  de  son  cher  mary,  qui  a  rendu  son  âme  à  Dieu, 
«  le  21  de  ce  mois,  à  cinq  heures  du  matin,  ayant 
«■  conservé  sa  cognoissance  entière  et  la  parole 
K  libre  jusqu'à  environ  sept  heures  avant  sa  mort, 
«  qu'on  peut  dire  qu'il  s'est  endormi  au  Seigneur  et 
«  qu'il  se  repose  de  ses  travaux.  M™*  Basnage,  per- 
«  suadée  de  votre  chère  amitié,  ne  doute  nullement 
«  que  vous  ne  preniez  part  à  sa  grande  affliction. 

4 


XXVI  NOTICE. 

Elle  a  perdu  un  digne  mary  qu'y  l'aimait  tendre- 
ment et  qu'y  faisait  tout  l'agrément  de  sa  vie,  et 
vous,  Monsieur,  vous  y  avez  perdu  un  bon  amy, 
qu'y  vous  estimait  infmiment,  et  je  scay  que  vous 
n'étiez  pas  insensible  à  son  amitié,  laquelle,  cer- 
tainement, méritait  bien  d'être  cultivée.  Pardon- 
nez-moi cet  éloge  en  faveur  d'une  personne  à  qui 
j'ay  le  bonheur  d'appartenir,  et  dont  la  mémoire 
me  sera,  toute  ma  vie,  en  vénération.  Sa  veuve 
vous  demande  la  continuation  de  votre  amitié,  et 
que  celle  que  vous  aviez  pour  notre  cher  défunt 
lui  soye  réunie,  afin  quelle  en  puisse  avoir  une 
double  portion.  En  mon  particulier,  je  vous  prie 
de  me  croire  très-sincèrement  votre  très-humble 
et  très-obéissant  serviteur.  » 
Parmi  les  protestants  de  Rouen,  signalés  comme 
suspects  au  gouvernement  dans  un  mémoire  de 
1689,  figurent,  en  même  temps  que  Henry  Basnage 
de  Franquesnay,  avocat,  père  de  Jacq.  Basnage, 
Marguerite  Ghéradame,  âgée  de  cinquante-huit  ans 
(voir  à  l'appendice,  page  175),  veuve  de  Thomas 
Fulgent,  vendeur  de  planches  et  interprête  pour  la 
langue  anglaise,  paroisse  Saint- Vivien;  François 
Fulgent,  son  fils,  et  François  Lemercier,  son  gendre. 
L'imprimeur  de  ce  livre  et  l'auteur  do  cette  Notice 
sont  des  descendants  de  Thomas  Fulgent  et  de  Marie 
Ghéradame.  Ils  pensent  accomplir  un  devoir  filial 


NOTICE.  XXVIt 

en  revendiquant  et  en  mettant  en  évidence  les  noms 
oljscLirs  de  leurs  ancêtres  qui,  de  même  que  ceux 
mentionnés  dans  le  récit  de  Legendre,  ont  lutté  pour 
la  liberté  religieuse.  Les  enfants  de  Marie  Chéra- 
dame  ont  été,  jusqu'à  la  Révolution,  en  butte  à  des 
vexations  sans  nombre,  qu'il  est  inutile  d'énumérer 
ici.  Le  5  août  1786,  un  de  leurs  descendants  dut 
encore  être  baptisé  dans  l'église  catholique,  à  Sain- 
neville,  dans  le  pays  de  Gaux. 

Il  est  juste,  sans  dcule,  d'honorer  les  talents  qui 
se  produisent  dans  le  domaine  des  lettres  et  des 
sciences,  et  d'entourer  d'une  considération  méritée 
toute  vie  consacrée  au  bien  de  l'humanité;  mais  on 
ne  saurait,  sans  ingratitude,  laisser  dans  l'oubli  ceux 
qui,  en  observant  les  lois  de  leur  pays,  ont  combattu 
et  souffert  pour  la  liberté  de  conscience. 

L'ouvrage  de  Ph.  Legendre  a  été  mis  à  profit  par 
plusieurs  de  nos  écrivains  normands  :  M.  Floquef, 
dans  sa  remarquable  Histoire  du  Parlement  de  Nor- 
mandie, lui  a  fait  de  nombreux  emprunts;  M.  Francis 
Waddington,  notre  coreligionnaire,  enlevé  trop  tôt 
aux  lettres  et  aux  recherches  historiques  qu'il  aimait 
avec  passion,  le  cite  aussi  dans  son  histoire  Le 
Protestantisme  en  Normandie.  Il  est  devenu,  do  nos 
jours,  de  la  plus  grande  rareté;  peu  de  Bibliophiles 
normands  le  possèdent;  on  l'a  vu  bien  rarement 
passer  dans  les  salles  de  ventes  à  Paris  et  à  Rouen. 


XXVIII  NOTICE, 

En  mai  1850,  il  iigurait  sur  le  catalogue  de  la  biblio- 
thèque de  M.  G.  Fontaine,  courtier  à  Rouen,  et,  à 
Paris,  en  1863,  sur  celui  du  comte  d'Auffay,  où, 
faute  d'amateurs  sérieux,  il  fut  adjugé  pour  la  mo- 
dique somme  de  12  fr.;  depuis  lors,  il  a  disparu  des 
ventes  publiques.  A  part  la  Bibliothèque  de  la  ville 
de  Rouen,  qui  le  possède,  et  quelques  rares  biblio- 
philes, on  n'en  connaît  très-peu  d'exemplaires. 

Outre  le  volume  que  nous  faisons  réimprimer, 
Ph.  Legendre  est  auteur  des  ouvrages  suivants  : 

!"  La  défense  et  la  destruction  de  l'Antéchrist  ou  denx 
minons  sur  II  Thess.  II-8.  Rotterdam,  1688;  în-I2; 

2°  La  Vie  de  Pierre  Thomines,  sieur  du  Bosc,  ministre 
de  Caen,  imprimé  avec  les  lettres  de  du  Bosc.  Rotterdam, 
1694;  in-8,  et  Amsterdam,  Wetstein,  1716;  in-8. 

Sur  rédition  originale,  à  la  suite  de  VHistoire  de  la 
Persécution  faite  à  l'Eglise  de  Rouen,  ont  été  ajoutés 
cinq  sermons  du  même  auteur  : 

1"  Daniel  III,  18.  La  Désobéissance  légitime; 

2"  Luc  XVIII,  29-30.  La  Piété  dédommagée; 

3°  Esaïe  I,  21.  Le  Changement  déplorable; 

4°  Hébreux  XIII,  3.  Le  charitable  Souvenir; 

5°  Exode  XXXII,  11  à  13.  La  prière  de  Moïse. 

Ces  sermons  sont  écrits  avec  une  grande  modé- 
ration. Comme  le  style  en  a  vieilli  et  qu'ils  ne  se 
rattachent  pas  d'une  manière  directe  aux  faits  expo- 
sés dans  le  livre,  nous  ne  les  avons  pas  reproduits,  et 


NOTICE.  XXVIX 

les  avons  remplacés  par  un  appendice,  dans  lequel 
on  trouvera  : 

1°  Le  compte-rendu  du  livre  de  Ph.  Legendre, 
par  Henry  Basnage  de  Beauval,  inséré  dans  son 
Histoire  des  ouvrages  des  savans  ; 
.   2°  La  liste  des  nobles  protestants  au  xvir  siècle, 
dont  les  noms  ligurent  sur  les  registres  de  Quevilly; 

3"  La  liste  des  églises  de  la  Haute-Normandie  au 
xvii^  siècle  ; 

4"  Les  noms  des  protestants  restés  à  Rouen  en 
1689,  et  signalés  au  gouvernement  de  Louis  XIV; 

5°  Renseignements  sur  les  noms  des  personnages 
cités  dans  la  préface  du  livre  de  Legendre  ; 

6°  Notes  sur  quelques  noms  cités  dans  le  récit  de 
Tauteur. 

Nous  devons  au  talent  bien  connu  de  notre  col- 
lègue, M.  Jules  Adeline,  la  reproduction  fidèle  des 
deux  plans  qui  accompagnent  l'ouvrage. 

L'exemplaire  qui  nous  a  servi  pour  la  réimpres- 
sion, nous  a  été  confié  par  M.  Alfred  Canel,  de  Pont- 
Audemer,  notre  excellent  ami  et  collègue,  biblio- 
phile savant  et  bien  connu,  auteur  de  nombreux 
et  intéressants  ouvrages  sur  la  Normandie;  nous  lui 
adressons  ici  nos  remercîments.  On  ne  trouve  pas 
toujours,  il  faut  bien  le  dire,  chez  les  bibliophiles, 


XXX  NOTICE. 

son  esprit  libéral;  et  beaucoup  trop  d'ouvrages 
restent  immobiles  dans  les  rayons  de  leurs  biblio- 
thèques. Il  appartient  aux  hommes  de  savoir  et  de 
progrès  de  rendre  vraiment  utile  le  goût  des  livres 
en  faisant  servir  au  développement  de  la  science 
historique,  ceux  qui  se  trouvent  entre  leurs  mains. 
Nous  ne  saurions,  en  terminant,  passer  sous 
silence  les  précieuses  indications  qui  nous  ont  été 
données  par  M.  Gh,  de  Robillard  des  Beaurepaire, 
l'honorable  archiviste  de  notre  département,  et  par 
M.  Stéphane  de  Merval,  de  la  Société  des  Bibliophiles 
normands,  à  qui  nous  sommes  entièrement  rede- 
vable des  renseignements  concernant  les  descen- 
dants de  Thomas  Legendre  de  GoUandres,  anobli 
en  1685. 

Emile  LESENS. 


Rouen,  mai  1874. 


HISTOIRE 

DE    LA 

PERSECUTION 

Faite  a  l'Eglife  de 

ROUEN 

Sur  la  fin  du  dernier  fiecle. 


A     ROTTERDAM 


Chez    JEAN     MALHERBE 

dans  le  KcyJersftraat  1704. 


V       I 


A     U 


LECTEUR. 

Et  ouvrage  aiant  été  drelîé  fur 
les  mémoires  qui  fe  failbient  a 
mesure  que  les  choies  arrivoient, 
on  y  parle  de  diverfes  perfones,  qui  font 
mortes,  comme  fi  elles  étoient  encore  vi- 
vantes. Il  faut  mettre  en  ce  rang  le  Pro- 
cureur gênerai,  le  Raporteur,  &  la  plufpart 
des  juges  du  procès  qui  ont  déjà  rendu 
compte  a  Dieu  de  la  procédure  dont  on  fe 
plaint  dans  cette  Hiftoire.  On  y  a  joint  les 
Arets  qui  ont  ruiné  l'exercice  de  TEglife; 
les  Fadums  &  les  defenfes  que  les  Palleurs, 
qui  la  fervoient  firent  alors,  pour  détourner 

un 


AVIS  AU  LECTEUR. 

un  11  grand  malheur  :  comme  ne  lervant 
pas  peu  a  réclairciffement  de  la  matière. 
On  y  a  encore  ajouté  cinq  Sermons,  pour 
confoler  les  Fidèles  ;  pour  leur  faire  conoître 
de  plus  en  plus  leur  devoir  &  les  encourager 
a  s'en  aquiter,  genereufement,  jufqu'a  la  fin. 
Enfin  on  n'y  a  pas  oublié  le  plan  du  Temple 
démoli;  que  le  Sieur  Nicolas  Genevois  avoit 
laifle  a  fa  famille. 

Les  fraiz  de  l'Edition  ont  été  fournis  pour 
la  plufpart  par  les  Fidèles  de  Rouen  réfu- 
giés dans  ces  Provinces.  Ils  fe  font  fait  un 
devoir  de  laifTer  a  la  Pofterité  THiftoire  des 
malheurs  du  Troupeau,  dont  ils  étoient 
membres.  Meffieurs  Abraham  le  Cordier, 
Abraham  Thiens,  Pierre  Tranchepain,  Sa- 
muel Cognard,  Pierre  de  Caux  &  Jaques 
Coffart,  qui  étoient  de  fes  condudeurs  les  y 

ont 


AVIS  AU  LECTEUR. 

ont  portés  &  par  leurs  paroles,  &  par  leur 
exemple. 

Depuis  rimpreflîon  de  cet  Ecrit,  Von  a 
apris  que  l'Intendant  de  la  Bourdonnaye 
n'étoit  pas  perfecuteur  d'inclination;  qu'il 
ne  faifoit  du  mal,  que  lors  que  le  premier 
Préfident  qui  ne  Taimoit  pas,  &  qui  l'obfer- 
voit,  étoit  a  Rouen . 


HISTOIRE 

De  la  peii'ecution  l'aile  a  TEglife  de  Rouen 
fur  la  tin  du  dernier  fiecle. 

'Exercice,  que  les  Reformés  avo- 
ient  dans  le  voifinage  de  la  ville 
|>  de  Rouen  êtoit  fondé  sur  TEdit 
de  Nantes.  G'etoit  un  second 
lieu  de  Balliage;  qui  leur  avoit  été  premiè- 
rement marqué  a  Diepdale,  par  un  Brevet 
du  Roy  Henry  4" de  glorieule  mémoire,  don- 
né a  Blois  le  i-^"  Aoull  iSqq  :  il  fut  depuis 
transféré  au  grand  Quevilli,  a  caulé  de  Tin- 
commodité  du  lieu,  par  un  autre  Brevet  en 
datte  du  2^  Novembre  1599. 

Les  Fidèles  en  prirent  pôlfelOon,  du  con- 
fentement  du  Duc  de  Montpenfier  Gouver- 
neur de  la  Province,  qui  mit  son  Attache 
au  dernier  Brevet  donné  a  Saint  Germain  en 
La3'^e,  le  6"  dudit  mois  &  an.  Ils  en  joui- 
rent affés  paifiblement  jusqu'à  la  mort  du 
Roy  :  malgré  la  mauvaife  difpofition  du  Par- 
A  le- 


2  Hijioire  de  VEglifc 

lement,  qui  ne  put  se  relbudre  a  enre^îtrer 
TEdit  en  fa  forme  &  teneur;  qu'au  mois  de 
juillet  de  Tannée  1607  :  &  a  la  troifiême  juf- 
fion,  qui  lui  enfut  faite.  On  ne  les  troubla 
pas  même  dans  leur  poffeffion,  après  la  mort 
de  ce  grand  Prince.  Au  contraire  ils  y  furent 
confirmés  par  une  ordonnance  des  Commif- 
faires  envoyés  dans  la  Province  a  la  fin  de 
Tannée  1 6 1 1 .  Encore  faut  il  remarquer  qu'el- 
le ne  les  maintient  pas  feulement  dans  la  pof- 
feffion de  leur  exercice  a  Quevilli  :  mais  quel- 
le leur  permet  même  de  le  transférer  au  Bois 
guillaume,  en  cas  d'hoftilité;  d'inondation, 
de  pefte  et  d'autres  empeschemens. 

Le  Temple  que  TEglife  de  Rouen  avoit  a 
Quevilli  étant  bâti  fur  de  fi  bons  fondemens, 
il  y  avoit  lieu  de  croire  quel  dureroit  autant 
que  la  Monarchie  Françoife  :  veu  particuliè- 
rement le  soin  que  les  Princes,  ont  pris  de 
les  en  alfurer,  a  leur  avènement  a  la  Couron- 
ne, par  des  déclarations  authentiques  :  & 
celuy  qu'ils  ont  eu  de  leur  cofté  de  ne  rien 
faire,  qui  les  rendit  indignes  de  la  protecti- 
on des  Puiffances  que  Dieu  a  élevées  sur 
eux  Cependant  il  fut  fermé  le  trois  de  Janvier 
i685,  insulté  peu  de  temps  après,  par^  les 
Ecoliers  des  Jefuites  au  nombre  defquels  étoit 
un  Fils  du  Prefident  d'Amfreville,  faisant 
alors  la  fondion  de  Premier  Prefident  au  Par- 
le- 


de  Rouen.  3 

lement  :  &  enfin  condamné  a  être  rasé  par 
l'Areftdu  6*  Juin,  exécuté  un  mois  après  quil 
eut  été  rendu. 

On  avoit  eu  divers  présages  d'un  fi  grand 
malheur.  Il  avoit  paru  les  vingt  dernières 
années  qu'il  a  été  debout,  une  prodigieuse 
quantité  d'Arêts&  de  Déclarations  qui  avoient 
peu  a  peu  ruiné  tous  nos  Privilèges.  On  en 
avait  même  veu  où  Ton  abaiffoit  la  majefté 
Royale,  jufques  a  la  faire  intervenir  pour  re- 
trancher les  bras  &  les  dolîîers  de  tous  les  fie- 
ges;  ou  il  enpouvoit  avoir  dans  les  Tem- 
ples :  <&  dans  le  même  tems  que  Ton  abatoit 
ainfi  les  bancs  des  fidèles,  on  y  en  elevoit  pour 
les  moines  &  les  autres  efpions  qui  avoient 
ordre  de  nous  obferver.  Et  ce  fut  une  chofe 
allez  finguliere  que  toutes  les  mefures  que  Ton 
prit  pour  introduire  cette  abomination  dans  le  lieu 
faint.  Meflieurs  de  Bonnemare  jubert  & 
Brice  Doyens  du  Parlement  fe  tranfporterent 
a  Quevilli  avec  le  Procureur  General,  en  ver- 
tu d'un  Areft  publié  &  affiché  dans  la  ville; 
une  foule  incroyable  de  peuple  a  leur  fuite, 
qui  aura.it  fans  cloute  abatu  le  temple  des  ce 
jourla!  fi  Dieu  n'y  avoit  pourveu  par  fa  Bon- 
té. Car  pour  ces  Meiïieurs  ils  n'en  purent, 
ou  n'en  voulurent  pas  être  les  Maîtres.  Ils  kn 
trouvèrent  tellement  incommodés  qu'il  leur 
lut  m-ipoffible  dexecuter  leur  commifiîon  qu'- 
A  2  après 


4  Hijîoirc  de  VEirlifc 

après  avoir  fait  feinte  de  seretirer.  Ils  neu- 
rent  pas  moins  de  peine  a  s'accorder  qu'a  fe 
debaraller  de  la  populace.  Car  le  Procureur 
gênerai  vouloit  que  le  Banc  des  Millionnai- 
res fût  au  milieu  du  Temple,  devant  lâchai - 
re  &:  fous  les  yeux  des  mi  ni  lires  :  &  les  com- 
milfaires  fe  contentoient  du  Banc  que  Mef- 
(ieurs  les  Confeillers  de  la  Religion  avoient 
occupé  &  qui  étoit  en  effet  le  plus  honora- 
ble de  TEglife.  Il  étoit  pouffé  par  les  Bigots 
qui  cherchoient  un  lieu  propre  pour  troubler 
le  prédicateur  &  incommoder  Talfemblée.  La 
choie  ala  fi  loin  qu'ils  en  écrivirent  en  Cour, 
d'où  il  vint  un  ordre  a  l'Intendant  de  fe  tranf- 
porter  fur  les  lieux  &  d'achever  ce  grand  ou- 
vrage. 

Tantœ  molis  erat  Romanum  condere  fcamnum. 

On  reçut  a  peu  près  dans  le  même  tems 
une  playe  tout  autrement  importante,  de 
trois  confeillers  de  la  Religion  que  l'Edit  nous 
donnoit  dans  le  Parlement  de  Rouen  on  en- 
perdit  deux.  Car  Mr.  de  la  Mefangere  étant 
niort  on  mit  un  Catholique  en  fa  place,  «Se  Mr. 
de  Colleville  ayant  été  obligé  a  se  deffaire 
de  sa  charge  il  falut  aulîi  qu'il  vendit  a  un  Ca- 
tholique. 

Toutes  ces  démarches  de  la  Cour  étoient 
autant  d'avant  coureurs  de  la  ruine  de  nos 
Eglifes  &  les  arêts  donnés  autant  de  pièges 

ten- 


de  Rouen.  b 

tendus  exprés  pour  les  perdre.  Cependant 
les  Fidèles  de  Rouen  avoient  été  allés  heu- 
reux pour  n  y  pas  tomber.  Dans  ce  nombre 
iLirprenant  d'Edits  forgés  a  delfein  décrafer 
ceux  qui  avoient  echapé  a  Tinquifition  des 
Intendans;  on  nen  apu-trouver  aucun,  pour 
leruir  de  légitime  fondement  aux  jugemens 
que  le  Parlement  arendus  ;  ils  n'en  ont  point 
eu  d'autre  que  la  haine  Tinjultice  &:  la  vio- 
lence de  leurs  parties  &  de  leurs  juges. 

Les  parties  ont  été  de  deux  fortes;  les 
uns  ont  agi  fecretement;  &  les  autres  a  dé- 
couvert Ceux  qui  ont  le  plus  afleclé  de  pa- 
roître  dans  ce  procès  ont  été  les  Curés  de  laint 
Martin  du  bout  du  Pont,  &  de  St.Eloy.  Le 
dernier  fur  tout  a  été  le  principal  perfonage  de 
toute  la  Pièce.  Ce  Curé  de  St.  Eloy  s'apel- 
le  François  Liefle;  &  il  elT:  entré  dans  fa  Cu- 
re par  la  refignation  d'un  Confeiller  Eccle- 
lialtique  qui  entretenoit  les  seurs,  dont  il 
a  eu  plufieurs  enfans.  C'ell  une  chofe'  con- 
nue de  toute  la  ville  de  Rotien.  Un  hom- 
me de  cette  farine,  &  élevé  par  un  tel  Pa- 
tron n'avoit  garde  qu'il  ne  servît  la  grande 
Paillarde  dans  la  haine  quelle  porte  aux  Chré- 
tiens. Mais  le  miferable  a  eu  encore  d'au- 
tres raifons  de  les  perfecuter.  Ils  êtoient  en 
trop  grand  nombre,  dans  sa  Paroilfe.  C"e- 
toit  celle  de  la  Ville,  ou  il  y  en  avoit  le  plus, 
A  3  il  on 


6  Hijloire  de  l'Eglife 

li  on  en  excepte  peut  être  St.  Maclou,  ou 
loge  le  pauvre  peuple  II  n'y  trou  voit  pas  fon 
compte  &  c'êtoit  un  puilfant  motif  a  une  a- 
me  baffe  &  mercenaire,  qui  n'aimoit  pas 
moins  le  falaire  d'iniquité,  que  Balaam  :  pour 
le  porter  a  faire  toutes  les  chofes,  qui  luy 
pouvoient  aider  a  les  écarter.  Outre  tout 
cela,  il  avoit  de  fâcheufes  affaires  fur  les  bras  : 
il  êtoit  preffé  de  rendre  compte  d'une  tutel- 
le quil  n'avoit  pas  fort  bien  gérée.  Il  y  étoit 
condamné  par  divers  Arêts  du  Parlement  :  il 
cherchoit  a  évoquer,  pour  gagner  du  tems 
&  pour  éloigner  une  renditon  de  compte 
qui  Tabimoit  La  faveur  y  étoit  neceffaire  il 
ny  en  a  point  de  comparable  a  celle  du  Père 
de  la  Chaife;  &  pour  lameriter  il  faloit  per- 
fecuter  l'Eglife  cependant  on  dit  que  cela  ne 
luy  a  pas  trop  reuffi  &  qu'il  elt  déchu  de  fes 
prétentions;  auiïi  bien  que  de  fa  Cure.  L'au- 
tre Curé  ne  se  trouvoit,  gueres  moins,  em- 
baraffé.  Le  fieur  Coquel  l'un  de  fes  Paroif- 
fiens  luy  faifoit  un  grand  procès;  ou  il  s'agit 
de  soustractions  &  de  faits  énormes.  Et  il 
a  un  intérêt  particulier  a  paroitre  dévot,  pour 
tacher  de  reparer  les  breches-faites  a  sa  répu- 
tation. 

Deux  Parties  de  ce  caractère  pouffées  par 
leur  intérêt  a  faire  des  actions  déclat  étoient 
bien  propres  a  faire  du  mal.     Il  leur  auroit 

pour- 


de  Roiien.  7 

pourtant  été  difficile,  fi  la  conjoncture  eut 
été  moins  favorable,  <&  fi  les  parties  secrè- 
tes n'eulVent  pas  été  plus  redoutables. 

C'étoient  les  Jésuites  de  Rouen,  a  la  telle 
desquels  le  trouvoit  alors,  un  nommé  Bau- 
dran,  qui  joint,  a  Tesprit  de  la  Société  ven- 
due &  dévouée,  comme  chacun  fait  a  la 
ruine  de  la  Religion,  une  ame  fiere  &  hau- 
taine tout  cequi  se  peut.  Ce  Moyne  étoit 
un  de  ceux,  qui  avoient  été  nommés,  pour 
affilier  aux  Prêches  qui  fe  failbient  a  Quc\  il- 
li;  &  quoy  quil  ni  alât  que  très  rarement; 
il  ne  lailfait  pas  de  fouflrir  imp.itiemment  la 
lumière  qui  y  luisait.  Il  vo3^ait  bien  quelle 
éclaireroit,  au  moins,  quelques  uns  de  ceux 
de  sa  Communion,  qui  fe  donnoient  la  li- 
berté de  ly  fuivre.  Et  n'ayant  pu  les  en  em- 
pescher  par  l'Autorité  des  Arêts  du  Parle- 
ment, &  par  les  amendes  dont  on  mena- 
çoit  les  Curieux  :  il  embraffa  avec  joye  Toc- 
cafion  que  le  Curé  de  St.  Eloy  luy  prefenta 
pour  s'oter  cette  épine  du  pied. 

Il  ne  faloit  que  mettre  quelques  uns  des 
Membres  du  Parlement  de  la  partie,  pour 
sen  defifaire.  La  chose  êtoit  fort  aisée.  Car 
le  Prefident  d'Amfreville  qui  étoit  alors  le 
chef  de  la  Compagnie  dépend  abfolument  des 
Jefuites.  Il  n'elt  pas  feulement  deleur  con- 
grégation, i!  ne  void  que  par  leurs  yeux  &  il 
A  4  n'en- 


8  Hijloirc  de  lEi^iiJc 

n'entend  que  par  leurs  oreilles.  Il  suit  aveu- 
glement tous  les  mouvemens  quils  luy  infpi- 
rent  cela  ell;  encore  de  notoriété  publique. 
Et  quand  il  n'auroit  osé  auffi  attaché  a  la 
Société,  il  n'auroit  ofé  luy  rien  refuser  dans 
un  tems  que  son  crédit  luy  étoit,  neceffaire 
pour  le  maintenir  dans  le  porte  quil  occu- 
poit.  Le  Procureur  Général,  qui  eft  un  de 
leurs  Difciples,  &  qui  suit  aulTi  fort  exacte- 
ment leurs  maximes,  quoy  que  né  d'un  Père 
qui  a  vescu  &  qui  ell  mort  bon  Janfenifte; 
avoit  auffi  des  railbns  secrètes  de  leur  plaire; 
quand  il  auroit  été  moins  contraire,  quil  n'a 
tousjours  paru  a  ceux  de  la  Religion  :  car  il 
n'avoit,  point  encore  alors  obtenu,  de  Bre- 
vet de  retenue  pour  sa  charge.  Il  y  a  voit 
bien  d'autres  juges  a  leur  dévotion  dans  la 
Grande  Chambre,  ou  cette  affliire  devoit  être 
portée.  Les  Conseillers  Fauvel  de  Touvens, 
Collé  de  St.  fuplis,  de  Grainville  Clerc  &  Bus- 
quet  dont  les  trois  premiers  étoient  des  Bi- 
gots outrés  ;  &  le  dernier  un  homme  a  tout 
faire,  quand  il  y  va  de  son  intérêt. 

Quelque  forte  que  fut  la  cabale  des  Je- 
fuites  dans  le  Palais  :  ils  aprehenderent  de  ne 
pas  reuffir  dans  leur  projet  &  c'ell;  ce  qui 
servit  a  découvrir  leur  trame  car  dans  l'in- 
quiétude quils  avoient,  que  toutes  les  machi- 
nes miles  en  œuvre  pour  abattre  le  Temple 

ne 


de  Roiien.  q 

ne  le  trouvaiïent  trop  foibles;  ils  y  employè- 
rent leurs  écoliers.  Tellement  qu'on  les  vit 
Ibrtir  en  foule  de  la  ville,  un  jour  auquel  ils 
n'ont  pas  acoutumé  de  leur  donner  congé  : 
leurs  Balieurs  a  la  telle  pour  les  encourager 
&  leur  montrer  le  chemin  :  qui  mené  a  Que- 
vi.lli,  avec  quelques  miferables  qui  se  joigni- 
rent a  leur  Troupe  fur  La  route,  &  qui  leur 
aidèrent  a  enfoncer  les  portes  du  Temple  ils 
s'y  portèrent  avec  tant  de  fureur,  quils  né- 
pargnerent  ni  les  Armes  du  Roy,  que  Ion 
avoit  mis,  par  ordre  du  Procureur  Gene- 
ral, sur  le  Banc  delliné  pour  le  Clergé  :  ni 
même  les  commandements  de  Dieu,  qui 
étoient  fur  la  Chaire  ils  briferent  le  tout  en 
mille  pièces,  comme  aufli  les  Bancs,  la  chai- 
re ^  les  vitres.  Ils  étoient  parvenus  au  Clo- 
cher, &.  ils  avoient  enlevé  la  cloche  :  ils 
avoientmême  déjà  découvert  une  partie  du 
Toit  &  se  mettoient  en  devoir  d'achever  la 
démolition.  Lors  que  la  Garde  de  la  ville  ari- 
va,  qui  prit  quelques  ans  des  mutins;  mais- 
que  l  on  relâcha  tous  les  uns  après  les  au- 
tres, fans  que  l'on  en  put  avoir  julHce. 

Pour  en  ôter  les  mo3'ens,  le  Parlement 
empescha  que  le  Lieutenant  criminel,  qui 
en  vouloit  prendre  conoilfance  ne  pourfuivit 
fon  information;  &:  on  tourna  la  chose  de- 
manière,  quelle  fut  regardée  au  Confeil, 
A  5  mal- 


lo  Hi/loire  de  l'Eglise 

malgré  toutes  les  remontrances  des  intercf- 
Ics,  comme  un  jeu;  ou  tout  au  plus  comme 
Teffet  du  zèle  un  peu  trop  echaufé  de  quel- 
ques jeunes  écoliers.  Tant  il  ell  vray  que  les 
Jefuites  &  leurs  luppots  ne  manquent;  jamais 
de  couleurs,  pour  faire  paffer  les  crimes  les 
plus  noirs  pour  des  vertus. 

Ayant  affaire  a  de  fi  fortes  parties  &  a  des 
gens  capables  de  jullifier  toute  forte  d^atten- 
tats,  linnocence  des  Fidèles  &  la  juftice  de 
leur  caufe  étoit  un  remport  trop  foible  pour 
les  garentir.  Ce  qui  la  rendoit  encore  plus 
inutile,  cétoit  la  dispofition  des  juges  qui  en 
dévoient  conoître.  Ceux  que  nous  avons 
marqués  &  qui  tenoient  le  premier  rang 
etoient  incapables  de  rien  refuser  aux  Par- 
ties, &  les  autres  qui  auroient  été  plus  en  état 
de  faire  leur  devoir  étoient  retenus,  ou  par 
la  Gonfidération  de  leur  Cardere,  Comme 
les  Conseillers  Clers;  ou  par  la  crainte  de 
fe  faire  des  affaires;  en  fe  mettant  fur  les  bras 
les  Moynes,  qui  sont  de  dangereux  enne- 
mis. 

Auflî  n'y  a  til  point  eu  de  moien  quelque 
foin  que  Ton  ait  pris  ;  de  fe  mettre  a  couvert 
de  leurs  traits,  &  de  rompre  les  mesures 
quils  avoient  pris  pour  ruiner  nos  excerci- 
ces. 

La  premier  procédure  qui  parut  fut  une  in- 

for- 


de  Roïien.  1 1 

formation  du  2()''  Avril  1(384,  qui  fe  fit  a  la 
Requête  du  Procureur  Gérerai  pouifé  a  ce- 
la par  le  Curé  de  St.  Eloy  qui  luy  fournit  des 
mémoires,  des  contraventions  qui!  pretendoit 
que  les  Ministres  de  Quevilli  eulTent  fait  aux 
Edits.  Elle  fut  fuivie  d'un  Aretl  du  12'"  Juin 
qui  accorde  commilïïon  au  Procureur  Gene- 
ral, pour  faire  appcller  a  la  Cour  les  Minillres 
de  Quevilli,  afin  de  répondre  a  les  Conclu- 
lions.  Mais  parce  que  la  Mine  nétoit  pas 
encore  prête,  que  Ton  ne  fetrouvoit  pas  alors 
en  état  de  les  faire  fauter;  on  en  dillera  l'exé- 
cution jusqu'au  mois  de  Décembre.  Et  ce 
ne  fut  que  le  i  i''  jour  dudit  mois  quils  furent 
mandés  a  la  Cour  :  ou  le  Procureur  General  fit 
dabord  paroître  la  paffion  qu'il  avoit  de  les 
perdre.  Car  quoy  quil  échut  a  Monfieur 
Marguerite  de  Guibray  Commiffaire  en  fe- 
maine,  de  leur  faire  rendre  raifon  des  choies 
quon  leur  demandoit;  il  voulut  les  traduire 
devant  Mr.  deTouvens,  qui  efi:  le  plus  grand 
ennemi  que  nous  ayons,  un  homme  né  de- 
bas  lieu,  petit  fils  d'un  Records  de  Ser- 
geant  qui  ert  esclave  des  Jésuites,  a  qui  il 
doit  la  charge  de  son  Fils,  que  la  fuperfli- 
tion  &  la  Bigoterie  aveuglent  tellement,  que 
la  plus  part  du  tems,  il  ne  fait  ce  quil  dit  & 
ce  quil  fait.  La  chose  ne  put  reufiir  alors 
par  ce  que  mondit  S',  de  Touvens  avoit  un 

autre 


12  Hijîoire  de  l'Eglife 

autre  Bureau  ou  il  travailloit,  &  que  Mon- 
fieur  de  Marguerite  qui  fe  trouva  Ta  s'3'  op- 
posa.. Mais  il  n'echaperent  pas  pour  cela 
a  Ion  animofité.  Car  dans  la  fuite  on  le  leur 
donna  pour  Raporteur. 

Dans  TActe  qui  s'exerça  par  devant  Mon- 
iieur  de  Marguerite,  on  n'accula  lesdits  Mi- 
nillres  que  d'avoir  fouffert  au  Prefohe  Eller 
Hi-ie  petite  fille  ageé  de  dix  a  douze  ans,  qui 
le  trouvoit  entre  les  mains  des  Dames  le  Sei- 
gneur fes  Tantes  ;  la  Mère  de  ce  pauvre  en- 
fant a  changé  de  Religion  depuis  la  mort  de 
fon  Mari,  qui  a  vescu  &;  qui  eft  mort  dans  la 
nôtre.  Onétoit  autorifé  a  recevoir  cette  jeu-- 
ne  demoifelle  dans  nos  affemblées  par  la  décla- 
ration du  premier  de  Février  1(369.  vérifiée 
au  Parlement  le  29"  Juillet  audit  an  &  don- 
née pour  fervir  deLoy  a  l'Avenir;  confirmée 
par  divers  Arêts  du  Confeil  donnés  en  con- 
séquence &  nommément  par  celu}^  du  Mois 
de  Juin  167S;  en  cas  pareil,  pour  des  en- 
fans  de  Rouen,  lequel  nous  avions  en  main. 
Et  c'èll  ce  quils  représentèrent  a  la  Cour, 
pour  faire  voir  quils  ne  feroient  pas  coupa- 
bles quand  on  auroit  mené,  ladite  Hue  a 
Quevilli.  Mais  de  plus  ils  ajoutoient  quils  ne 
Ty  avoient  jamais  veuë,  &  qu'ils  ne  la  conno- 
i  noient  point  :  quils  savoient  même  de  scien- 
ce certaine  qu'elle  n'y  étoit  point  alée  depuis 

l'Ex- 


de  Roiien.  1 3 

rExploit  que  le  Curé  de  faint  Eloy  avoit  fait 
lignifier  a  lun  d'eux  pour  Ten  empêcher. 

Car  il  faut  lavoir  que  le  Curé  qui  souffroit 
impatiemment  des  gens  de  bien  dans  fa  Pa- 
roilfe  ayant  apris  que  les  Dames  le  Seigneur, 
qui  y  demeurent  avoient  Téducationdune  des 
Filles  du  Sr.^  Hiie  de  Montaigu,  qu'il  avoit 
fort  perfecuté  a  fa  mort;  fans  le  pouvoir  cor- 
rompre; &  dont  la  femme  avoit  changé  de 
religion  de  puis  fon  decés  il  se  mit  en  telle 
que  ladite  fille  devoit  fuivre  la  condition  de 
la  mère;  fous  prétexte  dune  Déclaration  du 
mois  de  Juin  de  Lan  i683.  qui  veut  que  les 
enfans  des  Pères  qui  ont  changé  foient  élevés 
jufqu  a  Tage  de  quatorze  ans  dans  la  Religion 
Romaine,  comme  fi  on  léùt  du  auffi  éten- 
dre aux  Mères,  contre  la  difpolîtion  exprelfe 
des  Edits  que  nous  avons  touchés.  Et  c'elt 
dans  cette  veue  quil  avoit  fait  fignifier  l'ex- 
ploit, dont  il  lagit  a  Monfieur  Basnage. 

Les  Minières  avoient  lieu  de  croire  que 
cette  affaire  n'auroit  pas  de  fuite.  Car  toutes 
les  contraventions  qu'on  leur  imputoit  abou- 
tilfoier.t  a  ce  seul  Article,  fur  lequel  ils  a- 
voient  fait  voir  fi  clairement  leur  innocen- 
ce, quil  ne  devoit  relier  aucun  fcrupule  dans 
l'esprit  des  juges.  Mais  ils  ne  furent  pas  long 
tems  dans  cette  penfeé.  Car  ils  aprirent, 
peu  de  Jours  après,  que  la  Cabale  avoit  trou- 


ve- 


14  Hijîoire  de  VEglife 

xi  fort  a  redire  quils  euffent  voulu  juftifier 
leur  Droit  :  prétendant  quils  dévoient  fe  con- 
tenter de  nier  le  Fait  :  comme  fi  des  sujets 
qui  vivent  sous  le  bénéfice  des  Edits  d'un 
Prince  avoient  tort  de  reclamer  Tautorité  de 
l'es  Loix  pour  disculper  leur  conduite.  Ne 
faut  il  pas  avoir  le  coeur  étrangement  di- 
spofé;  pour  juger  mal  d'un  procédé  fi  inno- 
cent Il  n'en  faut  pas  davantage  pour  faire 
voir  que  Ton  avoit  formé  le  deffein  de  les 
oprimer  &  de  les  perdre,  a  quelque  prix  que 
ce  fut;  que  la  manière  dont  on  empoison- 
noit  leurs  actions. 

En  eflet  peu  dejours  après  l'exercice  de 
cet  Ade  l'on  diftribua  le  procès  a  Monfieur 
de  Touvens,  fuivant  le  projet  déjà  fait.  Et 
quoy  quil  affedât  fort  de  donner  a  entendre 
aux  Minillres,  qu'ils  auroientfujetdese  louer 
de  fa  juftice  &  de  son  équité  :  qu'il  agiroit 
avec  eux  ouvertement,  franchement  &  sans 
furprife  ;  ils  s'aperçurent  bien  tôt  qu'ils  n'a- 
voient  rien  a  espérer.  Car  il  ne  leur  parla 
jamais  que  du  fait  de  la  petite  Hue,  toutes 
les  fois  quil  les  fit  venir  chés  luy  sous  pré- 
texte de  séclaircir  des  charges  qui  étoient 
contre  eux  :  quoy  que  l'on  débitât,  par  tou- 
te la  ville,  qu'il  y  en  avoit  d'autres  plus  im- 
portantes. La  feule  grâce  quil  leur  fit,  ceft 
qu'il  leur  montra  une  chofe  affés  particuliè- 
re, 


de  Roïien.  i  5 

re,  lavoir  que  les  Conclufions  du  Procureur 
General  avoient  été  changées;  &  qu''a3^ant 
fimplement  conclu,  a  ce  que  les  dits  Mini- 
Jlres  fujlcnt  ajjignes  a  la  Cour  pour  être  oilis  :  on 
Tavoit  obligé  a  rayer  ces  paroles,  qui  paroif- 
Ibient  encore  écrites  de  sa  propre  main, 
malgré  les  ratures  :  &  a  mettre  en  la  place, 
un  ajournement  a  cotnparoir  en  perfone.  C^eit 
la  jultification  de  ce  que  Ton  a  avancé  qu'il  y 
avoit  des  parties  secrètes  toute  puiflantes  fur 
refprit  des  juges  qui  les  faifoient  agir,  mê- 
me contre  leurs  lumières  &  leur  coni'cience. 

Il  ne  faut  pas  demander  fi  le  Raporteur  & 
les  autres  juges  fe  conformèrent  a  ces  conclu- 
ions. Car  ils  étoient  animés  pour  la  plus- 
part,  du  même  efprit  qui  les  avoit  produites 

eadeni 

Mens  agitât  molem  &  magnofe  corpore  mi/cet. 

Il  intervint  Areft  du  3"  Janvier  i685. 
par  lequel  il  eft  ordonné  que  les  Miniftres  le 
Gendre  &  Bafnage  seront  ajournés  a  compa 
roitre  en  perfone  pour  être  oCiis  &  interrogés 
par  devant  les  Confeillers  Commilfaires,  fur- 
ies charges  des  informations.  Et  cependant 
lesdits  Minirtres  interdits  des  fonctions  de 
leur  Miniltere,  a  la  reserve  du  Sacrement 
du  Baptême,  par  provifion  feulement,  jus- 
qu'à ce  qu'autrement  par  fa  Majeité  en  ait  été 
ordonné. 

Ce 


if)  Hijfoire  de  VEglife 

Ce  n'eft  pas  queles  Miniftres  se  fufient  en 
dormis.  Ils  avoient  prefenté  a  la  Cour  des 
defenfes  jointes  a  cette  hiftoire,  qui  ne  re 
gardoient  pas  feulement  Efter  Hue  :  Mais 
encore  les  autres  faits  quils  avoient  apris, 
par  lebruit  commun  quon  leur  imputoit.  Ces 
defenfes  faisoient  voir  quils  etoient  ou  faux 
&  suppofés  par  des  Témoins  apoilés  par  le 
Curé  de  St.  Eloy;  ou  arrivés  dans  des  tems 
qui  les  rendoient  innocens.  Mais  elles  furent 
inutiles.  On  n^  eut  aucun  égard.  Cepen- 
dant elles  finirent  par  une  considération  qui 
feule  devoit  suffire  pour  mettre  les  Miniftres 
a  couvert;  quand  il  y  auroit  eu  quelque  fon- 
dement aux  accufations  intentées  contréux. 
Car  on  y  remarque  expreffément,  que  Ton 
ne  peut  inquiéter  persone,  aux  ternies  des 
Déclarations  des  Années  167Q  &  i683,  & 
de  TArêt  de  la  Cour  donné  en  confequence, 
au  sujet  des  Relaps;  que  Ton  n'ait  fignïfié, 
auparavant,  leurs  noms,  &  les  Actes  de 
leur  abjuration  aux  confiftoires  :  ce  qui  ne 
s'eft  jamais  fait  a  Rouen. 

C'eft  ce  qui  montre  clairement  la  violence 
&  Finjufticede  cet  Arêt  qui  interdit  les  Mi- 
niftres pour  des  faits  que  Ton  ne  leur  devroit 
pas  imputer,  suivant  les  Déclarations  &  les 
Arêts  (quand  même  ils  en  feroient  coupables, 
qu'au  préalable  on  ne  leur  eût  fait  des  figni- 

fica- 


de  Rouen.  17 

fications,  dont  ils  n'ont  jamais  entendu  par- 
ler. Le  Raporteur  avoit  bien  fenti  qu'on 
pourroit  faire  ce  reproche.  Et  cefi;  pour  quoy 
il  a  tâché  de  faire  valoir  dans  le  procès,  la 
fignification  de  l'abjuration  de  la  Mère  d'Ef- 
ter  Hue  faite  a  Caën  le  21"  Juillet  1682, 
qui  porte  que  cette  femme  y  a  fait  profef- 
fion  de  la  Religion  Romaine  lo  14"  du  Mois  : 
&  l'exploit  fait  a  la  Requête  du  Curé  de  St. 
Eloy  du  I*  Avril  1684  Mais  outre  que  ce- 
la ne  regarde  qu'un  Fait  qui  ne  peut  jamais 
faire  de  charge  dans  le  procès,  pour  les  rai- 
fons  alléguées  ci  delfus;  y  a-t-il  de  la  juftice 
a  fe  fervir  d'une  fignification  faite  a  trente 
lieues  de  Rouen,  &  dont  on  n'a  jamais  eu  de 
communication;  pour  faire  le  procès  aux 
gens.  Le  Prince  qui  faifoit  écrire  fes  Loix 
en  des  Caractères  fi  petits,  qu'il  étoit  impof- 
fible  de  les  lire  &  qui  condamnoit  cependant 
ceux  qui  y  contrevenoient,  étoit  il  plus  de  rai- 
fonnable?  Pour  celle  qui  fut  faite  a  la  Re- 
quête du  Curé  de  St.  Eloy  on  y  défera,  quo}' 
qu'on  n'y  fut  pas  oblige,  en  forte  que  ces 
deux  pièces  même  ne  fervent  qu'a  décou- 
vrir de  plus  en  de  plus,  la  paffion  &  l'animo- 
fité  des  Juges. 

Elle  paroit  furtout,  en  ce  que  fans  aucu- 
ne charge  contre  les  Minftres.     Car  il  pa- 
roitra  encore  plus  clairement  dans  la  fuite, 
B  qu'il 


i8  Hijioire  de  l Eglise 

qu'il  n'y  enavoit  aucune,  on  les  met  en  a  jour 
nement  perfonel.  Mais  c'etoit  pour  avoir  un 
prétexte  de  les  interdire  de  leur  Miniftere  : 
a  (juoy  les  Moynes  &  leurs  adherens  ten- 
doient  principalement.  Ils  n'avoient  point 
d'autre  veiie,  quand  ils  engagèrent  le  Pro- 
cureur General  a  changer  les  Conclufîons. 
Cela  eft  fi  vray  que  Ton  entendit  Baudran 
Redeur  des  Jefuites  a  la  porte  de  la  Grand 
Chambre,  ou  il  fétoit  rendu,  pour  Iblliciter 
les  juges;  demander  avec  empreffement  fi 
les  Minillres  nétoient  pas  interdits.  Ce  n'eft 
pas  que  ce  ne  fut  un  prétexte  aifes  léger,  pour 
fraper  un  coup  de  cette  importance.  Car 
on  n'a  pas  accoutumé  d'interdire  les  Eclefias- 
tiques,  pour  un  fimple  ajournement  perfonel. 
Auffi.  les  Confeillers  Clercs  s'y  o.ppoferent- 
ils  pour  la  plus  part,  comme  le  trouvant  in- 
jufte;  «&  aprehendant  peut  être  que  ce  ne  fut 
une  planche  que  l'on  fit  aulfi  pour  eux. 

Il  faut  avouer  icy,  a  la  Louange  des  E- 
clefiaftiques,  que  de  tous  les  Juges  il  n'y  en  eût 
point  qui  ayent  paru  plus  équitables  quéux 
dans  ce  procès.  Ils  n'ont  presque  jamais  été 
des  avis  qui  ont  prévalu  tant  quil  a  duré;  a  la 
referve  de  Mr.  de  Grainville  bon  juge  dans 
les  affaires  où  la  Religion  n'a  point  de  part  : 
mais  le  plus  inique  du  monde  ou  elle  fe  trou- 
ve tant  ibit  peu  intereffée.  Sur  tout,  quand 

il 


de  Roïien.  19 

il  fut  queftion  du  dernier  jugement,  ou  Mr. 
de  Grainville  ne  put  afliller,  parce  qu'il  étoit 
indilpofé,  tous  les  Eclefialliques  en  Ge- 
neral ;  &  Monfieur  de  Gremonville  haut 
Doyen,  en  particulier,  ne  purent  s'empefcher 
de  ieplaindre  des  moyens  que  Ton  employoit, 
pour  oprimer  des  innocens  :  difant  haute- 
ment que  fi  le  Roy  ne  vouloit  plus  de  Tem- 
ples; qu'on  les  raîât,  sans  faire,  pour  ypar- 
venir,  des  procédures  &  des  injullices  dont 
leurs  Ancêtres  n'auroient  jamais  été  capables; 
quils  les  defavoueroient  s'ils  revenoient  au- 
monde  :  comme  indignes  de  la  Robe  qu'ils 
avoient  portée  avec  tant  d'honneur. 

Quelque  favorables  que  les  Eclefiaftiques 
ayent  paru;  jene  lailferay  pas  de  remarquer, 
comme  un  fécond  Grief  de  l'Arêt  du  3"  Jan- 
vier que  le  plus  ancien  des  Commiffaires  que 
l'on  donna  au  Miniftres  étoit  le  Doyen 
des  Conseillers  Clers.  Car  leur  Caractère 
les  rend  ennemis  des  Miniftres.  Ils  ont  tous- 
jours  été  regardés,  comme  leurs  parties  :  & 
dans  les  temps  les  plus  fâcheux  il  leur  a  tous- 
jours  été  permis  d'en  récuser  d'eux;  même 
dans  les  affaires  civiles,  à  leur  choix. 

Avantque  de  parler  des  procédures  qui  fe 
firent  devant  les  Commilfaires;  il  ne  faut 
pas  icy  omettre  deux  ou  trois  circonftanccs 

B  2  im- 


20  Hijioire  de  lEglife 

importantes  dans  cette  caufe,  &  qui  servent 
a  faire  voir  de  plus  en  plus  Tefprit  des  Juges. 
La  première  regarde  Efter  Hue,  Quoy- 
que  fon  Père  fût  né  dans  le  sein  de  TEglfe 
reformée;  qu'il  y  eut  vefcu,  &  qu'il  fût  mort 
dans  sa  communion  ;  au  veu  &  au  fceu  de  la 
juftice  que  le  Curé  de  St.  Eloy  avoit  appellée 
a  son  fecours,  qu'and  il  le  perlecuta  dans 
son  lit  mortel  :  qu'elle  dût  être  élevée  dans 
la  Religion  de  fon  Père  jusqu'à  douze  ans, 
par  les  Edits  :  quelle  n'eut  pas  encore  atteint 
cet  âge  ;  &  qu'elle  demandât  avec  des  cris  & 
des  larmes  capables  de  fendre  les  rochers, 
d'être  receùe,  au  moins  à  faire  déclaration 
de  la  Religion  qu'elle  vouloit  profeffer;  aux 
termes  des  dernières  Déclarations,  elle  fut  en- 
levée du  Palais,  d'ans  le  Caroffe  de  Mr.  de 
Touvens.  Les  efforts  qu'elle  fit  pour  se  iet- 
ter  par  la  Portière  furent  inutiles  on  la  trai- 
na  dans  la  maifon  des  nouvelles  Catholiques; 
ou  voyant  qu'on  ne  la  pouvoit  gagner  par 
promeffes,  ni  par  menaces;  on  fit  venir  sa 
Mère,  ou  plutôt  fa  Marâtre  qui  luy  fit  faire 
ce  qu'on  voulut.  Dieu  fait  les  moyens  qu'el- 
le y  employa.  Car  pour  les  hommes  ils  ne 
savent  gueres  ce  qui  fe  paffe  dans  les  Grot- 
tes profondes  ou  la  fuperftition  exerce  sa  ty- 
rannie, fi  on  en  croit  le  bruit  commun  il  n'y 
en  eut  point  de  ficruels  &  de  fiviolens  qui  ne 
fuffent  mis  en  ufage.  L'or 


de  Rouen.  21 

L'on  avoit  deia  bien  enlevé  des  cnfans 
qui  dévoient  être  élevés  dans  nôtre  Religion 
luivant  les  Edits  fans  parler  du  Fils  de  Da- 
niel Mondon  compagnon  chapelier,  qui 
difparut  a  Tage  de  neuf  ou  dix  ans  dont  on 
ne  çut  avoir  de  nouvelles,  que  plus  d'un  an 
après  qu'il  échapa  a  ceux  a  qui  Mr.  de  Gra- 
inville  qui  s'en  etoit  saifi,  l'avoit  donné  en 
garde  ce  qui  fut  suivy  d"une  longue  procé- 
dure devant  Mr.  le  Blanc  alors  Intendant 
en  Normandie;  qui  enfin  fit  jultice.  On 
avoit  enlevé  en  Janvier  1681  La  fille  de 
laques  Bredel  manoeuvre  &  de  Judith  Toc, 
nommée  Marie  âgée  dénviron  neuf  ans  : 
En  Aoull  fuirant  celle  de  Pierre  Fontenay 
&  de  judit  Bechet  de  sept  ans  &  demi  nom- 
mée Madeleine.  En  Janvier  1682  celle  de 
Jaques  Charles,  Menuifier,  &  de  Marthe 
Barette  d'environ  neuf  ans,  nommée  Mar- 
the. En  avril  de  la  même  Année  une  autre 
fille  du  dit  Charles  nommée  Anne.  Au  mois 
de  Mars  précèdent  le  fils  d'Abraham  Lau- 
rens  Dinand,  &  d'Elizabeth  Jefroy  d'onze 
ans  nommé  Abraham.  En  Septembre  ce- 
luy  de  Théodore  Brehu  Chirurgien  &  de 
Marie  Cognard  nommé  Jean  Salomon  n'ay- 
ant que  dix  ans  &  demi.  Dans  le  même 
tems  un  fils  de  feu  Jean  Flamar  chaufletier 
&  de  judit  Drouet  apellé  Jean  à  l'âge  de  dou- 
B  3  ze  ans 


•2  2  Hijîoire  de  VEglife 

ze  ans.  Au  commencement  d'06lobre  un 
fils  de  Gabriel  Queruel  &  de  Marie  Honfroy 
de  fîx  ans  nommé  Louis  &  une  fille  de  dix 
ans  nommée  Marie  :  ces  deux  enfans  enle- 
vés publiquement,  malgré  la  refiftance  de  la 
Mère  par  le  Curé  d'Elboeuf  ou  ledit  Queruel 
travaiiloit  dans  la  draperie,  sous  prétexte 
que  c'etoit  un  profelyte.  A  la  fin  du  même 
mois  la  fille  de  Jean  Hautot  Maffon,  &  d'E- 
lizabet  Mallet,  nommée  Elizabeth  &  âgée 
de  dix  ans.  Ex  Janvier  i683  le  fils  de  Pier- 
re Robert  Poitevin  de  dix  ans  nommé  Jo- 
uas. 

Tous  ces  enfans  &  beaucoup  d'autres 
dont  on  n'a  point  de  mémoires  avoient  été 
enlevés,  &  jettes;  les  masles  dans  le  Bu- 
reau, &  les  filles  dans  la  maifon  des  nouvelles 
Catholiques,  fans  pouvoir  en  avoir  raison. 
Mais  rien  ne  s'étoit  fait  avec  tant  d'éclat  & 
tant  de  violence  que  Tenlevement  d'Eder 
Hiie  qui  fut  conduite  par  les  juges  mêmes 
dans  la  prifon;  ou  elle  a  fait  naufrage.  Ce- 
luy  de  Madeleine  Maurie  née  dans  l'Eglise 
Reformée,  &  que  Pierre  Maurice  fon  Père, 
qui  s'elt  révolté  jetta  auffi  dans  un  Couvent, 
en  l'abfence  de  fa  femme  qui  l'avoit  afl'és  bien 
inftruite,  a  encore  quelque  chofe  de  particu- 
lier. Car  cette  pauvre  enfant  qui  avoit  à  peu- 
prés  douze  ans  se  debatit  furieusement  jus- 

ques 


de  Rouen.  i2> 

ques  a  rompre  toutes  les  Glaces  de  la  Chai- 
le  dans  laquelle  on  Tenlevoit.  Et  ce  n'a 
été  qu'avec  bien  de  la  peine  &  après  bien  du 
tems  qu'elle  s'eft  rendue. 

La  2"  Circonftance  que  Ton  remarque  à 
l'égard  de  l'arelt  du  3''  Janvier  cfl  qu'avant 
même  de  l'avoir  fignifié  ou  publié,  on  fe  mit 
en  devoir  de  l'exécuter  :  fi  bien  queles  Mini- 
itres  de  Quevilli  furent  empefchés  de  pre- 
fcher,  des  le  jour  qu'il  fut  donné  :  etans  bien 
avertis  qu'il  y  avoit  des  gens  fur  les  avenues 
du  Temple  qui  avoient  ordre  de  les  aréter 
s'ils  y  aloient.  Ce  ne  fut  pourtant  pas  de 
leur  m'ouvement  qu'ils  s'en  abflinrent  :  mais 
par  l'avis  &  le  conjfeil  des  Principaux  de  l'E- 
glife  qui  ne  voulurent  pas  qu'ils  fiffent  une 
démarche  qui  pût  faire  tort  a  une  caufe  qui 
étoit  fi  bonne,  que  l'on  ne  croyoit  pas  polïi- 
blé  de  la  perdre. 

La  troifiême  eft  que  dans  la  première  dis- 
pofition  de  l'Arell;,  c'etoit  aux  Anciens  & 
non  aux  Miniftres  que  l'on  d'onnoit  le  pou- 
voir de  baptifer  par  provifion  :  tellement  qu'il 
falut  encore  faire  bien  des  pas  pour  mettre 
les  choses  dans  l'état  ou  on  les  voit  aujourd- 
huy.  Ce  qu'il  3^  a  de  plus  furprenant,  c'eil 
que  le  Procureur  General  luy  même  eut  affés 
de  peyne  a  comprendre  que  les  Laïques  n'euf- 
fent  point  l'autorité  de  conférer  le  saint  Bapte- 
B  4  me  : 


24  Hijîoire  de  VEglife 

me  :  lors  quil  n'y  a  point  de  neceiïité  a  se 
servir  de  leur  Miniftere  :  il  n'y  en  avoit  au- 
cune puis  que  la  Province  n'étoit  pas  encore 
depourveiie  de  Pafteurs  qui  auroient  pu  fai- 
re cette  fonction  ;  fi  on  en  eut  oté  la  liberté 
a  ceux  de  Quevilli,  Enfin  ils  lepersuade- 
rent  de  prefenter  luy  même  leur  Requête  a 
la  Cour  mais  non  fans  avoir  effuyé  plufieurs 
insultes,  qui  ne  font  gueres  d'un  homme  de 
fa  Robe,  Car  dabord  qu'il  les  aperçut  dans 
la  cour  de  fa  maifon,  il  les  traitta  de  deffunts 
Curés  les  condamnant  déjà  dans  fon  coeur; 
avant  que  de  les  avoir  entendus.  Il  conti- 
nua toufiours  sur  le  même  ton;  faifant  de 
leur  malheur  le  fujet  de  mille  fades  railleries, 
que  l'on  ne  daigne  pas  relever. 

La  dernière  chofe  que  je  remarqueray  :  c'eft 
que  quoi  que  l'areft  eut  été  donné  dés  le  3 1 
Janvier,  on  ne  le  fignifia  que  le  lo  Février 
pour  comparoître  a  la  huitaine  :  &  les  Mini- 
îlres  s'etans  prefentés  le  1 7  jour  de  l'echean- 
ce,  ils  furent  remis  au  19  «&  le  iq  renvoyés 
encore  a  un  autre  jour,  en  forte  que  la  chofe 
traina  jufqu'au  23  &  les  jours  fuivans.  La 
raifon  de  tous  ces  délais,  comme  il  parut  dans 
la  fuite,  eft  que  l'on  ne  trouvoit  point  de  char- 
ges suffifantes,  pour  donner  feulement  quel- 
que couleur  a  l'areft  d'interdiétion  publié  con- 
tre les  Miniftres;  &  qu'il  faloit  du  tems  pour 

voir 


de  Rouen.  ■  .ib 

voir  le  fruit  des  nouvelles  informations,  que 
Ton  avoit  ordonnées,  tant  par  Témoins  de 
certain,  que  par  cenfures  Ecclefialtiques; 
pour  trouver  de  quoi  les  accabler. 

La  peyne  ou  la  Cour  le  trouvoit  à  cet  égard 
ne  fervit  pas  peu  a  un  miferablc  fcelerat  nom- 
mé Hellot  qui  a  fait  banqueroute  aux  hom- 
mes, aulîi  bien  qu'à  Dieu  pour  fe  tirer  de  la 
prifon  ou  il  etoit  détenu  pour  fesdebtes,  &  en 
danger  d  y  pourrir,  comme  il  Ta  voit  mérité. 
Car  il  s'avifa  de  dire  que  fi  on  luy  rendoit  fa 
liberté,  il  tireroit  la  Cour  hors  de  peyne; 
ayant  des  mo3'ens  infaillibles,  pour  perdre  les 
huguenots.  Les  portes  luy  furent  d'abord 
ouvertes.  Car  voila  les  mftrumens  dont 
TEglise  Romaine  fe  sert  dans  le  conquêtes. 
Quelle  perfecution  n'a-t-il  point  faite  a  ceux 
de  la  Religion,  depuis  sa  fortie  pour  mériter 
sa  grâce,  &  pour  s'inlinuer  dans  Telprit  des 
juges.  Il  y  a  fi  bien  reulîî,  qu'il  fe  paiToit, 
peude  jours  pendantque  le  Procès  a  duré  qu'il 
ne  se  trouvât  au  lever  du  Procureur  gênerai, 
ou  a  celuy  de  Monfieur  de  Marillac  qui  a  tous- 
jours  afleclé  de  se  diilinguer  dans  les  affaires 
de  la  Religion. 

Il  ne  leur  rendit  pourtant  pas  de  grands  fer- 
vices  :  il  ne  fit  pas  la  moindre  découverte  qui 
put  faire  de  la  peyne  aux  Minifires.  Mais 
il  fervit  au  moins  a  faire  perfecuter  bien  des 
B  5  pau- 


26  Hijîoire  de  VEglife 

pauvres  gens,  dont  les  uns  furent  aprehen- 
dés  au  corps,  &  les  autres  obligés  a  fuir  &  à 
abandonner  leur  Patrie,  Jean  Montier  &  Ja- 
ques Noblet  furent  du  nombre  de  ceux  que 
Ton  mit  en  priibn,  comme  Relaps.  Le  pre- 
mier y  fuccomba  &  fut  envoyé  a  Paris;  ou  il 
obtint  des  Lettres  d'abolition  qui  luy  rendi- 
rent la  liberté  :  On  aflure  qu'il  dit  dans  son 
Interrogatoire,  qu'il  n'avoit  point  été  a  Que- 
villi,  depuis  le  tems  quil  ne  Tauroit  pu  faire 
fans  mettre  les  Minillres  en  peyne,  fi  ce  n'eft 
en  cacheté,  &  fi  bien  deguifé  que  persone 
ne  Tauroit  reconnu.  On  n'en  parle  qu'avec  in 
certitude,  parce  que  Ton  n'a  jamais  rien  dit 
aux  Minillres  de  ce  Jean  Montier,  dans  tous 
les  Interrogatoires  qu'ils  ont  fubis,  foit  devant 
les  Commilîaires,  soit  en  face  de  la  Cour  :  & 
qu'il  ne  leur  fut  pas  confronté,  quoi  qu'ils 
l'euflent  demandé  &  de  vive  voix  a  leurRapor- 
teur,  &  par  une  requête  expreffe,  comme 
il  se  verra  ci  après.  La  Cour  l'évita  prudem- 
ment, depeur  qu'il  ne  reconnut  des  vérités, 
qui  feroient  allées  a  la  décharge  des  acculés. 
Pour  l'autre  qui  eft  Jaques  Noblet  il  a  com- 
batu  avec  un  courage  &  une  fermeté  qui  mé- 
ritent d'être  confervés  a  la  poiferité.  C'eft 
un  Tailleur  de  pierre  de  son  mêter  qui  ne 
fcaitni  lire,  ni  écrire,  qui  a  fervi  plus  de  dix  ans 
dans  l'Infanterie,  &  qui  depuis  a  été  long- 

tems 


de  Rouen.  27 

tems  efclave  a  Alger,  en  sorte  qu'il  n"'a  pres- 
que point  d'inllrudion.  (a)  Mais  Dieu  a  chofi 
les  choses  foibles  de  ce  monde  pour  confon- 
dre les  fortes,  &  celles  qui  ne  sont  point  pour 
abolir  celles  qui  sont,  (b)  Son  Efprit  souffle  ou 
il  veut  &  il  accomplit  sa  vertu  dans  les  plus 
grandes  infirmités,  (c)  L'esclauage  de  ce  pau- 
vre homme  a  donné  lieu  a  toutes  les  perfe- 
cutions  qu'il  a  foulTert,  un  abynie  apelle  un  au- 
tre abyme.  (d)  Il  en  a  voit  été  délivré  par  des 
Moj^nes  que  Ton  appelle  les  Pères  de  la  Ré- 
demption :  a  la  recommandation  du  Sr.  Prat 
marchand  a  Marseille.  Le  Sieur  Thomas  le 
Gendre  père  du  Miniilre,  qui  etoit  fon  cor- 
respondant Tavoit  prié,  par  Tordre  du  Con- 
fiftoire  dans  lequel  il  a  servi  quarante  ans,  & 
qui  avoit  acoutumé  de  le  charger  de  ces  soins, 
de  s'informer  de  ce  qui  pourroit  coûter  pour 
la  rançon  de  Noblet,  le  dit  Sr.  Prat  en  avoit 
donné  la  Commiffion  a  ces  moynes  qui  lo- 
geoient  ordinairement  chés  luy  :  &  comme 
lis  luy  avoient  encore  d'autres  obligations  ils 
luy  ramenèrent  l'esclave  qu'il  reclamoit  au 
lieu  de  luy  en  raporter  fimplement  des  nou- 
velles :  voyant  qu'il  etoit  taillé  a  peu  de  cho- 
se. Gomme  on  sut  qu'il  avoit  pafle  par  les 
mains  de  ces  gens  la  qui  ne  manquèrent  pas 

de 

(a)  I  Cor.  I.  27.  28.  (b)  Jean  3 18. 

(c)  2  Cor.  12.  9.  (d)  Pf.  19 


28  Hi/toire  de  l'Eglise 

de  le  promener  par  les  villes  ou  ils  palTerent 
avec  les  autres  Rachetés,  dont  ils  font  grand 
montre  :  on  fupposa  qu^ils  en  avoient  fait  un 
Profelyte;  et  Tonfit  o'Jir  un  Mathurin  que 
Ton  fit  venir  de  je  ne  Icay  ou,  pour  ce  sujet, 
qui  depofa  avoir  ouy  dire  au  Père  le  Vacher 
Millionnaire  a  Alger  quil  avoit  communié  le 
dit  Noblet  dans  une  maladie.  Il  déclara  de 
plus  qu'il  avoit  été  avec  eux  a  la  Meffe,  lors 
de  Ion  retour.  C'eit  le  seul  Témoin  que  Ton 
ait  pu  produire  pour  prouver  que  Noblet  avoit 
embrafle  la  Religion  Romaine.  Et  quoy 
qu'il  Tait  toufiours  nié  conftamment  :  qu'il 
ait  même  offert  de  vérifier  par  fes  Camarades 
revenus  avec  luy  qu'il  n'avoit  jamais  été  ma- 
lade a  Alger;  bien  loin  d'avoir  été  commu- 
nié par  le  Père  Vacher  dans  une  maladie  :  on 
la  condamné,  comme  Relaps  sur  ce  fonde- 
ment :  c'elf-à-dire  sur  le  témoignage  d'un 
feul  homme  :  d'un  Moyne,  qui  parloit  par 
oûy  dire,  d'une  chofe  qui  a  du  se  faire  sur 
les  bords  de  TAffrique.  Car  pour  ce  qu'il 
ajoutoit  qu'il  avoit  été  a  la  Meffe  pendant  le 
voyage  :  Noblet  Ta  encore  méconnu;  ajou- 
tant que  quand  la  chose  auroit  été  vraie, 
comme  non;  on  n'en  auroit  pu  conclure  qu'il 
eut  abjuré  sa  religion  :  puis  qu'il  y  a  bien  des 
Perfones  qui  y  vont  par  une  folle  curiofité, 
fans  que  pour  une  pareille  démarche  ils  soient 

repu- 


de  Rouen.  29 

reputes  avoir  renoncé  a  leur  profelïion.  Tout 
ce  qu'il  reconnoiffaitc'etoit  de  s'être  promené 
avec  eux,  par  les  villes,  ou  ils  avoient  paffé, 
croisé  comme  les  autres  Rachetés,  ce  qui 
conclut  encore  moins.  Et  ce  qui  donne  lieu 
de  croire  qu'il  n'avoit  jamais  eu  d'autre  com- 
munion avec  eux  que  cellelà,  c'ell  qu'ayant 
été  appelle  au  Confiftoire,  a  son  retour  : 
dans  un  tems  ou  les  Condudeurs  de  l'Eglile 
n'avoient  point  d'autre  intérêt  de  s'informer 
de  fa  conduite,  que  celuy  qui  regarde  le  fa- 
lut  des  pécheurs  :  il  dit  les  choies  precife- 
ment  comme  il  les  a  déclarées  en  juilice  : 
après  avoir  été  adjuré  plulîeurs  fois  au  nom 
de  Dieu  de  décharger  sa  confcience,  &  de 
dire  la  vérité. 

Il  n'efl:  point  befoin  de  remarquer,  com- 
me on  traita  ce  pauvre  homme  dans  la  pri- 
son, avant  de  le  condamner.  Car  on  fait 
comme  on  a  traité  tous  les  prétendus  Relaps 
dans  le  Royaume.  Il  y  languit  plufieurs 
mois,  les  fers  aux  pieds,  a3^ant  presque 
tousjours  a  ses  oreilles,  un  Miffionnaire,  ou 
quelque  autre  Oifeau  de  mauvais  augure  qui 
ne  luy  presageoit  que  des  chaînes  &"des  Ga- 
lères. Les  juges,  même  voulurent  bien  avoir 
aulîi  quelque  fois  la  charité  de  luy  faire  peur 
des  plus  cruels  fuplices,  pour  l'effrayer  :  & 
l'on  ne  s'auroit  afiez  admitcr.  comrne  Dieu 

le 


3o  Hijioire  de  l'Eglife 

le  soutint  dans  ces  épreuves.  Car  non  seule- 
ment il  ne  fut  jamais  ébranlé  :  mais  de  plus 
il  eut  le  courage  de  dire  en  face  a  fes  juges; 
que  fi  on  l'envoyait  aux  Galères,  il  y  fervi- 
roit  le  Roy  gaiement  &  auffi  fidèlement, 
qu'il  avoit  fait  dans  les  Troupes;  ou  il  avoit 
usé  fa  jeunefle;  quoy  qu'il  se  trouva  afféz 
mal  recompenfé  de  ses  services  :  que  les  Ga- 
lères le  pourroient  peut  être  porter  encore 
une  fois  fur  les  côtes  d'affrique  :  ou  il  avoit 
trouvé  plus  d'humanité  parmi  les  barbares  & 
les  ennemis  de  Jefus  Chrift,  qu'il  n'en  ren- 
controit  a  la  Cour  ayant  tous  jours  eu  la  li- 
berté de  prier  Dieu  suivant  les  mouvemens 
de  sa  Confcience,  &  la  pureté  de  l'Evangi- 
le. S'il  ne  leur  tint  pas  precifément  la  mê- 
me difcours;  ceux  qui  etoient  prefens  ont 
afiuré  qu'il  leur  dit  les  mêmes  chofes  en  fub- 
ftance.  Il  ne  faut  pas  icy  omettre  un  des 
moyens  dont  Dieu  se  fervit  pour  le  fortifier. 
Car  comme  il  eft  fort  extraordinaire,  il  sert 
davautage  a  faire  voir  la  bonté  de  Dieu,  qui 
nous  fait  fouvent  trouver  la  vie,  ou  nous  de- 
vrions rencontrer  la  mort.  Ce  fut  un  Her- 
mite,  qui  êtoit  prisonnier  &  qui  couchoit 
avec  luy.  Il  l'exortoit  inceflamment  a  ne  tra- 
hir jamais  sa  confcience  &  a  dire  tousjours 
la  vérité  :  luy  remontrant  que  s'il  n'avoit  en 
effet  jamais  fait  profeffion  de  la  Religion  Ro- 

mai- 


de  Roïœn.  3i 

mainc  comme  il  Ibutenoit,  il  ne  devoit  jamais 
dire  autre  chose. 

Si  on  Ta  voit  fatigué  avant  le  jugement; 
il  le  fut  encore  davantage  après  sa  condam- 
nation. Elle  porte  qu'il  fera  amende  hono- 
rable devant  le  Portail  de  TEglifc  Cathedra- 
drale;  la  torche  au  poin  &  nuds  pieds;  pour 
être  en  suite  banni  a  perpétuité  quén  outre 
il  payera  cent  livres  d'amende  pécuniaire, 
&  le  refte  de  ses  biens  confisqué.  On  n'ou- 
bha  rien  pour  luy  faire  horreur  de  ce  fuplice. 
Les  Prêtres  &  les  Miiïionnaires  y  perdirent 
leur  latin.  Il  y  eut  même  de  plus  honneltes 
gens  qu'eux  qui  s'y  epuiferent.  Car  quel- 
ques uns  des  Conïeillers  ne  dédaignèrent 
point  de  se  tranfporter  dans  la  prison,  pour 
l'obliger  a  avoir  recours  a  la  grâce  du  Prin- 
ce; qui  ne  luy  manqueroit  point  en  fe  faisant 
Cathohque  on  dit  même  qu'il  y  en  eut  un 
d'entre  les  Clercs,  qui  se  mit  a  genoux  de- 
rant  lui  pour  le  fléchir  &  qui  n'oubha  rien 
pour  le  gagner.  Mais  tout  cela  ne  le  toucha 
point.         Stat  Marpefia  Cautes. 

Les  Juges  avoient  quelque  efpece  de  hon- 
te de  fervir  en  public  contre  un  homme  qu'ils 
avoient  condamné  sans  fondement.  Ils  crai- 
gnoient  les  reproches  que  le  peuple,  qui  n'ig- 
noroit  point  fon  Hilloire,  auroit  pu  faire.  Mais 
de  plus  il  leur  fàchoit  de  le  voir  triompher 

d'eux 


32  Hijîoire  de  VEglife 

d'eux  en  public,  comme  il  avoit  fait  en  par- 
ticulier. Il  fa  voient  qu'il  faisoicnt  fi  peu  de 
cas  de  la  pe3^ne  a  laquelle  il  etoit  condamné 
qu'il  en  avoit  badiné  avec  les  prifonniers,  dis- 
ant qu'il  y  auroir  du  plaifir  a  crier  a  Dieu 
Noël  avec  une  fi  groffe  chandele,  &  qu'on 
eut  a  luy  préparer  une  belle  chemife  blanche 
pour  ce  sujet.  Il  faifoit  allufion  a  la  coutu- 
me qu'ont  les  enfans  de  RoLien  de  criera  Dieu 
Noël,  dans  les  Rues  la  veille  &  le  jour  de 
la  Feftedes  Roys  une  chandelle  a  la  main.  Sa 
Resolution  faifoit  conoitre  qu'il  regardoit 
son  fuplice  comme  une  chofe  qui  luy  étoit 
honorable,  fouffrant  pour  fa  Religion.  Sa 
femme  &  ses  foeurs  qui  l'ont  fort  bien  fécon- 
dé dans  ce  combat,  &  le  refte  de  ses  amis 
l'envisageans  de  même  œil  se  difposoient  a 
l'acompagner.  Ils  l'avoient  déclaré  au  Ra- 
porteur.  Cela  auroit  été  mortifiant  pour  la 
Cour  &  édifiant  pour  PEglife,  c'ertpour  quoy 
ils  faifoient  jouer  tant  de  reffors  pour  n'être 
pas  obligés  à  venir  a  l'exécution  de  leur  A- 
reil. 

Ils  ne  purent  jamais  fe  résoudre  a  l'exécu- 
ter, quelque  inftance  qu'il  en  fit.  Car  il  pré- 
senta plufieurs  Requêtes  pour  ce  sujet  pen- 
dant quil  fut  en  prifon;  &  sa  femme  &  ses 
soeurs  ne  ceffoient  de  la  demander  :  chofe 
inoiiie  dans  ces  occafions.     Les   juges  en 

ecri- 


de  Rouen.  33 

écrivirent  au  Conseil,  ils  en  reprefentercnt 
fans  doute  les  coniequences,  &  fur  les  respon- 
ces  qu'ils  en  recurent  ils  enlevèrent  ce  pau- 
vre patient  de  la  Conciergerie  du  Palais,  au 
Bureau  des  valides;  ou  pour  comble  d'inju- 
ftice  on  le  mit  entre  quatre  murailles,  ou  il 
ne  voyoit  persone,  que  les  MiiFionnaires  qui 
ne  luy  ont  jamais  donné  de  relâche;  &  un 
miferable  valet  qui  luy  portoit  du  pain  &  de 
Teau.  Dieu  permit  pourtant  qu'il  ny  de- 
meurât pas  tout  a  fait  fans  consolation.  Car 
il  fe  trouva  un  Prêtre  dans  le  Bureau  qui  étant 
touché  de  fa  misère  &  de  Tinjurtice  qu'on 
luy  faisoit,  avertit  fa  femme  du  lieu  oià  il 
étoit,  &  luy  aprit  que  fon  Cachot  avoit 
une  ouverture  fur  de  certaines  Prairies,  oîi 
elle  alloit  de  tems  en  tems  avec  fa  Mère  & 
fon  enfant  fe  faire  voir  a  luy.  Elles  n'y  ale- 
rent  point  qu'il  ne  leur  montrât  par  fignes, 
car  ils  ne  le  pouvoient  parler,  qu'il  mourroit 
plutôt  que  de  changer  de  religion.  Les  cho- 
ies demeurèrent  en  cet  état  jusqu'au  premier 
d'Octobre  que  Dieu  luy  ouvrit  les  portes  de 
fa  prison,  par  le  moyen  de  celuy,  qui  luy 
donnoit  a  manger,  qui  fut  l'Ange  dont  Dieu 
fe  fervit  pour  le  mettre  en  liberté.  Il  trou- 
va fa  femme  qui  l'attendoit  dans  un  lieu  qu'il 
luy  avoit  marqué;  avec  fa  fille  unique  âgée 
d'environ  deux  ans.  Et  il  s'eil  retiré  heureu- 
C  fe- 


34  Hijîoire  de  l'Eglife 

fement  avec  elles,  malgré  tous  les  obftacles 
qui  le  rencontrent  fur  la  Route;  en  Hollande 
où  il  ert  prefentement  rendant  grâces  a  Dieu 
de  fa  délivrance. 

On  ne  parla  jamais  aux  Minières  dans  tout 
le  procès,  de  ce  Noblet  non  plus  que  de  Tau- 
îre  prisonnier  dont  il  a  été  parlé,  quoy  que 
Ton  ne  s'en  pût  dispenfer;  puis  que  Ton  avoir 
deffein  de  les  enveloper  dans  fa  condamnati- 
on; à  moins  de  fouler  aux  pieds  toutes  les 
loix  &  toutes  les  formes  de  la  juftice.  Tous 
leurs  interrogatoires  roulèrent  fur  les  Faits 
qui  regardent  les  Persones  nommées  dans 
TArefl  du  3"  Janvier  &  on  ne  dit  pas  un  mot 
des  autres  qui  font  notées  dans  celuy  du 
5''  Mars. 

Les  Perfones  peuvent  être  feparées  en  trois 
clailes, la  première  contient  les  enfans  des  Pè- 
res morts  delà  Religion;  dont  les  mères  fe 
font  révoltées  depuis  le  decés  de  leurs  maris, 
la  féconde  ceux  des  Pères  révoltés  qui  ont 
laiffé  le  foin  de  leur  éducation  a  leurs  fem- 
mes :  la  3*  les  prétendus  Relaps.  Il  y  avoit 
deux  enfans  de  ce  premier  ordre  qu'on  les 
accuibit  d'avoir  fouiîerts  a  Quevilli  :  Efter 
H  Lie  dont  il  a  été  tant  parlé  :  &  un  autre,  ils 
déclarèrent  qu'ils  ne  les  y  avoient  jamais  veus, 
bien  loin  de  les  y  avoir  Ibufferts  :  &  firent 
connoitre  par  abondance  de  droit  ce  qu'ils 

avoient 


de  Roiien.  35 

avoient  déjà  rémontré  en  juftice,  qu'ils  au- 
roient  été  en  droit  de  les  y  admettre,  pour 
les  raifons  cy  devant  alléguées.  Il  y  en  avoit 
trois  du  fécond  rang,  la  fille  de  maître  Da- 
vid du  Mont,  celle  de  Pierre  Maurice  Braf- 
leur;  &  celle  d'un  nommé  Chauvel  de  Diep- 
pe. Ils  ne  conoiflbient  point  la  dernière  de 
ces  filles;  &  pour  les  deux  autres  ils  favoient 
de  fcience  certaine  que  leurs  Mères  ne  les 
avoient  point  menées  à  Quevilli  depuis  le 
mois  de  Juillet  r683  qui  fut  le  tems,  auquel 
TEdit  qui  le  défend  fut  enregîtré  <&  publié, 
c'ell  ce  qu'ils  repondirent.  Dans  la  Claffe  des 
Relaps,  qui  eil  la  dernière,  il  fe  trouvoit 
trois  hommes  &  une  femme,  dont  ils  n'a- 
voient  aucune  Idée,  tellement  qu'ils  ne  pou- 
voient  qu'ils  ne  méconnuffent  tout  ce  qu'on 
leur  imputoit  a  cet  égard.  Ils  ajoutèrent 
qu'on  ne  leur  avoit  jamais  fignifié  feulement 
le  nom  de  ces  gens  là;  bien  loin  de  leur 
avoir  délivré  les  acles  de  leur  abjuration  ;  aux 
termes  des  Déclarations  &  des  Arets  :  qu'ils 
nepouvoientpar  confequentêtre  en  rien  cou- 
pables, quand  ils  féroient  aies  a  Quevilli  de 
leur  participation;  puis  que  c'étoit  un  préa- 
lable :^bcaucoup  moins  puis  qu'ils  n'avoient 
pas  mêmes  de  conoiflance  de  leurs  perfones. 
Il  ne  faut  pas  icy  palfer  fous  filence;  que 
l'on  ne  fe  contenta"  pas  de  leur  faire  une  in- 
C  2  fini- 


36  HiJIoire  de  V Eglise 

finité  de  demandes  fur  tous  les  Chefs  qui  re- 
gardoient  le  procès.  On  leur  en  fit  encore 
beaucoup  d'autres  qui  étoient  hors  d'œuvre 
touchant  les  deniers  de  leur  Gonfiftoire,  la 
manière  dont  ils  les  adminirtroient  :  &  les 
Regiftres  qu'ils  en  pouvoient  avoir.  Je  ne 
Tattribuë  pourtant  pas  auxCommiflaires.  On 
auroit  tort  de  fe  plaindre  de  Monfieur  de 
Berniéres  Louvigni  celuy  des  Gonfeillers 
Gommiflaires,  qui  fit  prêter  Tinterrogatoire 
aux  Miniftres.  Gar  quoy  que  ce  foit  un  hom- 
me fort  attaché  a  fa  Religion;  &  que  Ton 
avoit  peut  être  choifi,  plutôt  qu'un  autre 
dans  cette  veiie,  il  s'aquita  de  fa  commiffion 
en  bon  juge  &  fans  aucune  forte  d'affeda- 
tion.  Il  le  faifoit  par  ordre  exprès  de  la  Gour, 
qui  ayant  déjà  condamné  TEglife  de  Roiien 
in  Petto,  avant  que  d'avoir  veu  le  procès,  êtoit 
fort  curieuse  de  favoir  s'il  y  avoit  des  deniers 
dans  la  bource  de  TEglife  pour  les  confifquer. 
En  faifant  juftice  au  Gonfeiller  Gommiiïaire, 
on  la  doit  rendre  auffi  au  Sr.  Vallée  Secré- 
taire Notaire  de  la  Gour,  qui  êtoit  le  gref- 
fier de  la  Gommiffion.  Gar  il  ne  voulut  ja- 
mais recevoir  aucune  marque  de  la  reconnoif- 
fance  des  Miniftres,  ni  petite,  ni  grande, 
pour  les  peines  qu'il  avoit  eues  dans  cette  af- 
faire &  pour  les  frais  de  fes  Ecritures;  quoy 
qu'il  n'en  efperât  aucune  recompenfe  d'ail- 
leurs. 


de  Rouen.  07 

leurs.  Il  s'en  excufa  tousjours  honneftcment, 
faifant  comprendre  qu'il  auroit  regardé  cela 
comme  un  interdit  dans  fa  maison  :  delica- 
telle  de  confcience  allés  rare  en  ce  fiecle. 
dans  un  homme  de  fa  profelTion. 

L'interrogatoire  étant  fini,  il  êtoit  de  la  ju- 
ftice  de  décharger  les  Miniltres  de  la  Com- 
parence  perfonelle  &  de  les  renvoyer  dans  les 
fondions  de  leurs  Charges;  où  de  parfaire 
leur  procès,  s'ils  fe  trou  voient  coupables.  Ce- 
pendant on  ne  fit  ni  l'un  ni  l'autre.  Ils  pa- 
roilfoient  fi  peu  coupables  que  les  Juges  ne 
purent  s'empefcher  de  faire  conoître  a  toute 
la  ville  qui  s'intereifoit  afles  dans  cette  affai- 
re, qu'il  n'y  avoit  point  de  charge  contr'eux, 
on  le  publia  partout.  Mais  comment  les 
renvoyer  prefcher  ?  cela  ne  s'accordoit  point 
avec  le  complot  que  l'on  avoit  fait.  En  fer- 
mant le  Temple  on  avoit  refolu  de  ne  le  rou- 
vrir jamais,  c'eft  dans  cette  veuë  qu'il  eft  dit 
dans  l'Arell  qui  le  ferme,  que  toutes  les  af- 
faires qu'il  embralfe  &  qui  pouvoient  aller  à 
l'infini  feroient  jugées  par  un  feul  &  un  mê- 
me Areft.  On  les  lailfa  morfondre  près  de  trois 
mois  fans  rien  faire.  Car  l'interrogatoire  du 
2"  minillre  finit  le  27"  Février  &  jufques  au 
19^  May  ils  n'entendirent  plus  parler  de  leur 
procès. 

Ce  jour  fatal  étant  venu,  on  leur  fignifia 
C  3  un 


38  Hijtoire  de  VEglife 

un  ArefI;  qui  les  alligne,  pour  être  confron- 
tés aux  Témoins  :  cet  Arell  du  i6^  du  mois, 
donné  a  la  requête  du  Procureur  gênerai,  a 
qui  le  Raporteur  avoit  reproché  en  plein  Par- 
quet que  fon  Zèle  êtoit  trop  lent  :  qu'il  devoit 
avoir  déjà  fait  raser  plus  de  fix  Temples,  dans 
la  Province  :  que  cependant  celuy  de  Que- 
villi,  qui  étoit  fous  fes  yeux  fe  trouvoit  en- 
core debout  :  fe  rendant  ainfi  folliciteur 
d'un  Procès,  dont  il  devoit  être  le  premier 
juge.  On  peut  bien  le  dire  hautement.  Car 
on  luy  en  fit  des  plaintes,  en  parlant  a  fa  per- 
sone,  après  le  jugement.  Il  eft  vray  qu'il 
le  méconnut,  mais  un  Procureur,  qui  fe 
trouva  alors  au  Parquet  l'entendit  diflinde- 
ment,  &  en  avertit  fur  le  champ.  Il  n'a  pas 
feulement  été  juge  &  folliciteur  de  ce  procès: 
il  a  été  même  un  des  exécuteurs  de  l'Are fl;  : 
chose  encore  plus  étonnante  Car  un  Con- 
seiller n'a  gueres  acoutumé  de  fe  charger  de 
l'exécution  d'un  procès  criminel  :  cela  ne  re- 
garde tout  au  pis  aler,  que  le  dernier  ferge- 
ant,  au  défaut  de  l'Exécuteur  ordinaire. 
Monfieur  de  Marillac  voulut  partager  cet 
honneur  avec  lu}-,  comme  auffi  le  Procureur 
gênerai.  Car  ils  fe  transportèrent  tous  trois 
aQuevilli  &  donnèrent  les  premiers  coups  de 
marteau  pour  la  démolition  du  Temple  :  bel 
employ  pour  un  Conseiller  d'Etat,  &  deux 

des 


de  Roiien.  1h) 

des  premiers  Officiers  d'une  Cour  ibuvc'- 
raine. 

Je  reviens  a  la  confrontation  des  Témoins. 
On  ne  produifit  que  ceux  qui  regardoient  les 
enfans  que  Ton  pretendoit  avoir  été  menés  a 
Quevilli,  dont  il  a  été  ci  devant  parlé.  Et 
il  parut  par  les  interpellations  que  leur  firent 
les  minières,  qu'il  n'y  avoit  pas  un  leul  de 
tous  ces  Témoins,  quoy  qu'ils  fuffent  au 
nombre  de  quatorze  ou  quinze,  dont  il  y  en 
avoit  même  plufieurs  a  qui  on  avoit  fait  la 
bouche  avec  grand  foin,  qui  eût  veu  aucun 
des  dits  enfans  en  quellion,  au  de  là  du  Pont 
par  lequel  on  fort  de  la  ville,  &  fur  le  chemin 
de  Quevilli,  bien  loin  de  les  avoir  veus  dans 
le  Temple.  Ceux  qui  en  difoient  le  plus, 
pretendoient  feulement  les  avoir  veus  descen- 
dre les  rues  qui  aboutiffent  fur  le  quay  de  la 
ville;  où  entrer  dans  un  battcau  les  jours 
d'exercice.  Et  prefles  de  marquer  le  tems 
auquel  ils  avoicnt  fait  ces  observations  ils 
étoient  obligés  de  le  taire,  en  disant  qu'ils 
ne  s'en  fouvenoient  point;  ou  de  reconoitre 
que  c'étoit  avant  la  Déclaration  de  Juin, 
enregîtreé  le  'ho"  Juillet  i()83,  de  forte  que 
leur  depofition  alloit  plutôt  a  la  décharge  des 
accusés,  qu'a  leur  convidion. 

Pour  les  témoins  qui  regardoient  les  pré- 
tendus Relaps,  tant  ceux  qui  etoient  ab- 
C  4  fens; 


40  Hijîoire  de  VEglife 

fens;  que  ceux  qui  avoient  été  conftitués 
prisonniers;  on  ne  leur  en  présenta  aucun. 
Si  on  avoit  fuivi  les  formes  ordinaires  de  la 
juftice;  &  qu'il  eut  paru  moins  de  paffior 
&  de  violence  dans  la  procédure  :  les  Mini- 
lires  ne  s'en  feroient  pas  embaraffés.  Car  fui- 
vant  rOrdonnance,  les  depofitions  de  perfo- 
nes  que  Ton  ne  confronte  point  font  nulles 
de  droit,  on  n'y  a  aucun  égard  en  juftice. 
Mais  il  ne  virent  que  trop  que  Ton  n'en  ufoit 
ainsy,  que  pour  les  oprimer  plus  facilement, 
ce  qui  les  obligea  a  prefenter  une  Requête 
au  Parlement  le  trentième  May,  en  ces  ter- 
mes. 

A  nos  Seimeurs  du  Parlement. 
Suplient  humblement  Philippe  le  Gendre 
&  Jaques  Basnage  Miniftres  a  Quevilli  & 
vous  remontrent  qu'ils  auroient  comparu  a  la 
Cour,  pour  être  confrontés  aux  Témoins 
faifans  charge  au  procès  qui  leur  a  été  fait  a 
la  Requête  de  Mr.  le  Procureur  gênerai, 
fuivant  l'Arêt  de  la  cour  du  16"  May  der- 
nier :  &  que  dans  les  diverfes  confrontations 
qui  leur  auroient  été  faites  ils  auroient  remar- 
qué que  Meffieurs  les  confeillers  Commiffai- 
res  faiibient  diftincftion  de  témoins,  «&  qu'ils 
ne  leur  auroient  point  confronté  jusqu'icy 
ceux  qui  chargent  les  perfones  prévenues  du 
crime  de  Relaps;  &  fur  tout  celles  qui  font 

ab- 


de  Roiien.  41 

absentes.  Et  comme  les  fuplians  en  ont  de- 
mandé la  raison  ;  ils  auroient  apris  que  les 
dits  Commiffaires  en  auroient  ainfi  usé;  par 
ce  que  les  dits  Témoins  ne  chargent  point  les 
personesdeslupliants  &que  leurs  depofitions 
ne  regardent  que  les  prévenus,  des  crimes 
contenus  dans  le  dit  Arell  :  lesquels  étant  ab- 
fens  pour  la  pluspart,  &  contumaces,  font 
censés  par  ce  moyen,  convaincus  des  fautes 
à  eux  imputées  fans  qu'il  foit  befoin  d'autre 
chose  que  du  recollement  des  Témoins  à  leur 
égard.  Les  fuplians  demeurent  bien  d'accord 
que  cette  réponse  ne  laifferoit  point  de  lieu 
a  leurs  remontrances;  s'il  ne  s'agiflbit  en  ce 
procès,  que  de  leurs  persones  &  de  celles  des 
prévenus.  Mais  comme  il  s'agit  principale- 
ment du  Temple  de  Quevilli,  dont  les  dits 
fuplians  font  les  Curateurs  naturels;  comme 
étant  les  conducteurs  du  Troupeau  qui  s'y 
eft  tousjours  recevelli,  fous  le  bénéfice  des 
Edits  de  fa  Majerté;  ils  peuvent  prétendre 
avec  julHce,  fous  le  bon  plaifir  de  la  Cour, 
qu'on  leur  donne  quelque  connoiffance  des 
faits,  dans  lesquels  le  Temple  de  Quevilli 
peut  être  interelfé  :  &  dont  la  liberté  que  le 
Roy  leur  a  donné  de  s'y  aflembler,  &;  d'y 
faire  les  Exercices  de  leur  Religion,  depenâ 
en  quelque  manière. 

Car  la  Cour  dillinguera  fans  doute  la  faute 
C  5  des 


42  Hijîoire  de  l'Eglife 

des  prévenus,  de  celle  du  Temple  &  des  per- 
Ibnes  qui  s'y  affemblent.  Quand  les  dits 
prévenus  auroient  été  bien  &  deuëment  con- 
vaincus des  crimes  a  eux  imputés  :  Il  ne  s'en 
luit  pas  neceffairement  que  le  Temple  de 
Quevilli  en  doive  fouffrir,  parce  qu'ils  peu- 
vent être  Relaps,  &  pour  cela  n'avoir  ja- 
mais été  fouffers  dans  le  Temple  de  Quevilli; 
n'y  être  pas  même  entrés.  Et  quand  il  y 
auroit  des  témoins  qui  le  diroient,  leur  de- 
pofition  ne  peut  pas  faire  de  préjudice  au 
Temple  des  fuplians  qu'ils  ne  leur  ayent  été 
confrontés  :  &  que  la  Cour  n'ait  veu  s'ils  n'ont 
point  de  Ibâns  &  de  reproches  a  alléguer 
contre  les  dits  Témoins  :  s'ils  pourront  Ibû- 
tenir  en  présence  des  fuplians  les  choses  qu'ils 
ont  avancées.  Les  fuplians  font  perfuadés 
qu'ils  n'ont  rien  pu  avancer  qui  foit  préjudi- 
ciable a  leur  Temple  qu'il  ne  leur  foit  facile 
de  détruire  dans  la  confrontation;  &  qu'ils 
julfifieroient  aisément  par  les  interpellations 
qu'ils  pourroient  faire  aux  dits  Témoins,  que 
toutes  les  perfones  prévenues  des  Crimes 
dont  il  s'agit  dans  le  procès  ne  font  point  du 
nombre  de  ceux  pour  lesquels  fa  Majeifé  in- 
terdit l'exercice  de  la  Religion  P.  R.  &  dé- 
molit leurs  Temples;  où  qu'ils  n'y  ont  point 
été  reçus  &  foufferts  depuis  les  déclarations 
du  Roy  qui  le  défendent. 

A 


de  Roiien.  43 

A  ces  causes  nos  leigneurs  il  vous  plaise  or- 
donner, que  tous  les  témoins  qui  font  char- 
ge contre  le  Temple  de  Quevilli  feront  con- 
tVontés  aux  fuplians;  où  que  leurs  depofi- 
tions  feront  confidereés  a  cet  égard,  comme 
nulles  fuivant  Tordonnance  :  &  vous  ferés 
julHce. 

Ils  portèrent  cette  Requête  au  Procureur 
gênerai,  après  qu'il  eût  été  ordonné  qu'elle 
lu}'  feroit  communiquée  pour  y  mettre  fes 
conclurions.  Il  ne  fit  que  badiner  a  Ion  or- 
dinaire de  toutes  leurs  remontrances.  Il  ad- 
miroit,  disoit  il,  leur  Zèle,  qui  les  pouffoit 
a  le  faire  Anathême  pour  leurs  frères  :  pré- 
tendant qu'ils  avoient  grand  tort  de  vouloir 
s'interelfer  dans  la  cause  de  leur  Temple,  & 
dans  la  conservation  de  leurs  Exercices.  Il 
foutenoit  qu'il  leur  fuffisoit  que  les  Relaps, 
ou  ceux  qui  temoignoient  contr'eux  ne  char- 
geaffent  point  leurs  persones;  «&  qu'ils  dé- 
voient laider  parler  le  Temple  pour  foy  mê- 
me. Ce  fut  en  vain  qu'ils  luy  remontrèrent 
que  des  pierres  ne  parloient  point,  qu"il  leur 
faloit  neceifairement  un  Advocat,  un  Cura- 
teur; comme  on  en  donnoit  aux  Cadavres, 
que  nul  n'avoit  plus  de  droit  de  prendre  en 
main  la  cause  du  Temple  que  ceux  qui  en 
étoient  les  propriétaires  :  il  ne  pou  voit,  où 
ne  vouloit  pas  comprendre  que  le  Temple 

leur 


44  Hifioire  de  l'Eglise 

leur  apartint,  &  il  falut  encor  de  long  rai- 
fonnemens  pour  jurtifier  qu^il  étoit  a  eux  puis 
qu''ils  en  avoient  acheté  le  fond  par  la  per- 
miliion  du  Roy,  qu'ils  Tavoient  bâti,  & 
que  le  R03'  les  avoit  autorisés  d'y  exercer  leur 
miniftere.  On  ajoûtoit  que  ces  pierres  n'a- 
voient  point  contrevenu  aux  Edits  qu'il  n'y 
avoit  que  les  Condutleurs  qui  Teulîent  pu 
faire;  &  que  pour  les  en  convaincre,  il  fa- 
loit  leur  confronter  ceux  qui  les  en  charge- 
oient.  Mais  le  Proverbe  elt  bien  véritable 
qu'il  n'y  a  point  de  fourds  pires  que  ceux  qui 
ne  veulent  point  entendre.  Il  fe  moqua  d'eux, 
comme  il  a  presque  tousjours  fait,  quand 
ils  l'ont  foUicité.  Ils  n'ont  pas  feulement  été 
exposés  a  fes  railleries  :  ils  l'ont  même  été 
quelquefois  a  des  duretés  qui  ne  font  pas  fort 
ordinaires  a  des  Juges.  Un  jour  entr'autres 
que  le  Miniltre  qui  etoit  chargé  des  Regiftres 
du  Gonfiftoire  alla  chés  luy  accompagné  du 
Sr.  le  Plâtrier  Ancien,  pour  luy  en  porter 
quelques  uns,  fuivant  l'Areil  du  3"  May,  il 
demanda  au  dit  Heur  le  Plâtrier  ce  qu'il 
cherchoit  chés  lu}^,  s'il  vouloit  qu'il  le  mit  en 
prison  comme  les  Miniftres;  qu'il  ne  favoit 
déjà  où  les  loger,  n'y  ayant  pas  affés  de  pri- 
fons  dans  la  ville  pour  tous  ceux  qu'il  vouloit 
arefter.  Le  Miniftre  ayant  répliqué  que  le 
Sr.  le  Plâtrier  n'étoit  la  que  par  accident; 

& 


de  Rouen.  45 

&  que  comme  c'étoit  luy  répondant,  qui 
avoit  les  Regillres  en  fa  garde,  c'etoit  a  luy 
leul  a  en  repondre.  En  effet  ajouta  le  Ma- 
giftrat  en  regardant  le  Miniilre  de  travers  il 
vaut  mieux  que  vous  entriés  en  prilbn  que  le 
Sr.  le  Plâtrier,  vous  êtes  plus  jeune  &  plus 
vigoureux.  Une  persone  plus  grave  &  moins 
emportée  auroit  fait  arêter  ce  Miniilre,  s'il 
avoit  eu  du  chagrin  contre  luy;  mais  il  n'au- 
roit  pas  eu  la  dureté  de  le  luy  dire  en  face. 
Quoy  qu'il  en  Ibit  le  Miniilre  qui  voyoit  qu'il 
prenoit  a  tâche  de  le  mortilier  &  de  luy  faire 
des  insultes  luy  marqua  qu'il  étoit  en  effet, 
ailes  fort  pour  endurer  tout  ce  qu'il  s'avife- 
roit  de  luy  faire  fouffrir.  De  ce  discours  il 
tomba  dans  un  autre  qui  ne  fera  peut-être  pas 
plus  au  goût  des  honnêtes  gens,  il  compara 
la  Religion  Reformée  a  un  chapeau  pointu  qui 
n'ell  plus  a  la  mode.  Ce  qui  obligea  le  Mi- 
niilre a  luy  dire  ailes  fièrement  en  fe  retirant 
que  les  Religions  les  plus  a  la  mode  n'étoient 
pas  les  meilleures.  Et  comme  il  le  prelfa  de 
s'expliquer  davantage,  il  repondit  en  gagnant 
tousjours  la  porte,  pour  couper  pied  a  tou- 
tes ces  infultes;  que  les  plus  anciennes  doi- 
vent être  les  meilleures.  En  effet  la  vérité 
efl  plus  ancienne  que  le  mensonge;  elle  ell 
dès  le  commencement  &  fc  trouve  dans  les 
faintes  Ecritures  d'où  la  Religion  doit  être 

puifeé 


40  Hijîoire  de  l'Eglife 

puifeé  pour  être  bonne  &  falutaire. 

Si  on  n'a  pas  eu  grande  fatisfaClion  de 
toutes  les  démarches  que  Ton  a  faites  chés  le 
Procureur  gênerai;  on  n'en  eut  pas  davan- 
tage des  Conclurions  qu'il  mit  a  la  Requête 
lusdite  car  elle  tendoient  a  la  rejetter.  Elles 
furent  fuivies  de  point  en  point.  Car  au  lieu 
de  faire  droit  fur  les  confrontations  deman- 
dées :  ils  furent  furpris  que  Ton  avoit  congé- 
dié deux  ou  trois  témoins  affignés  pour  le 
même  fujet  que  ceux  que  avoient  déjà  été 
confrontés  ;  &  que  le  Procureur  gênerai  avoit 
emporté  tout  le  procès  pour  mettre  fes  con- 
clurions. Les  Miniftres  etoient  préparés  a  les 
voir  bien  tôt.  Car  il  ne  leur  avoit  point  dis- 
fimulé  qu'il  les  y  mettoit  dans  un  moment, 
&  qu'il  n'avoit  que  faire  d'eux  pour  cela. 
C'étoit  leur  dire  en  bon  françois  qu'il  les  ju- 
geroit  fans  les  entendre,  &  même  fans  voir 
les  pièces.  Car  il  y  avoit  plus  d'une  main 
de  papier  :  peut-être  bien  davantage,  de  Re- 
collemens  &  de  confrontations,  dont  il 
n'avoit  pu  encore  avoir  la  communication. 
Mais  ce  n'étoit  pas  une  affaire.  On  faisoit 
gloire  dans  ce  procès  de  fouler  aux  pieds  tou- 
tes les  loix. 

Tous  ces  Griefs,  &  je  ne  fcay  combien 
d'autres  qu'il  feroit  trop  long  de  raporter 
avoient  obligé  le  Confiftoire  a  fe  tourner  du 

coflé 


de  Roiien.  47 

coité  du  Conseil  &  a  s'y  plaindre  de  tant  de 
vexations  &  de  violences.  Le  placet  que 
Ton  présenta  au  Roy  ètoit  conçu  en  .ces  ter- 
mes. 

Au  Roy 
Sire. 
V^os  fujets  de  la  Religion  Prêt.  Réf.  de  la 
Province  de  Normandie  Remontrent  tres- 
humblement  a  S.  M.  que  les  arreils  folem- 
nels  de  fon  confeil  ont  conservé  quelques  uns 
de  leurs  temples  de  ceux  qui  ont  elle  con- 
damnez, &  bien  qu'il  n'en  reliât  que  dix  ou 
douze  dans  les  généralités  de  Caè'n  &  d'Alen- 
çon  &  cinq  ou  fix  dans  celle  de  Rouen,  la 
plus  grande  partie  des  fiéfs  ne  pouvant  plus 
iubfilter  par  le  dernier  arreft  de  vôtre  Confeil. 
les  fupliansqui  fouffroient  beaucoup  dans  cet- 
te réduction  a  caufe  de  leur  nombre  &  de 
rétendue  de  la  Province,  n'ont  pas  laiffé  de 
la  recevoir  comme  une  grâce  de  vôtre  bonté 
Ro^^alle  dans  la  créance  que  ce  feroit  au 
moins  un  état  fixe  &  affuré  pour  eux,  & 
qu'en  continuant  defervir  Dieu  avec  liberté. 
&;  d'obéir  a  S.  M.  fuivant  leur  devoir  &  leur 
Inclination,  ils  pourroient  remplir  tous  les 
devoirs  de  fidelles  fujets,  &;  contribuer  a 
l'augmentation  du  commerce,  dont  ils  font 
une  grande  partie,  &  qui  ell  fi  neceffaire  a 
rétat  dans  cette  Province  maritime. 

Mais 


48  Hijîoire  de  l'Eglife 

Mais  les  fuplians  ont  veu  avec  la  dernière 
désolation  que  les  exercices  qui  leur  reftent, 
confirmés  par  le  Conseil  ont  été  attaqués  a 
même  temps  par  les  juges  des  lieux,  pour 
rentrée  de  prétendus  Relaps,  les  fonds  de 
leurs  pauvres  non  déclarés  &  d^autres  recher- 
ches ou  d'autres  prétextes,  c'eft  par  cette 
voye  qu'on  a  fermé  les  temples  de  Caën 
d'Alençon  de  S'.  Lo,  &  quantité  d'autres, 
de  forte  qu'il  n'y  en  a  que  deux  ou  trois  ou- 
verts dans  la  balle  Normandie,  peu  fréquen- 
tés, éloignés  des  grandes  villes  &  négligés 
par  cette  confideration.  Et  dans  la  haute 
Normandie  il  n'y  en  a  que  trois  ou  quatre  qui 
puiifent  fubfifter  depuis  la  fuppreffion  des 
lieux  de  polfellion  ou  il  ne  demure  pas  dix  fa- 
milles, &  on  a  attaqué  celuy  de  Quevilli  qui 
est  le  plus  confiderable,  votre  Parlement  de 
Normandie  ayant  interdit  les  fondions  des 
Miniifres,  décrété  contr'eux,  privé  vos  fujets 
de  la  R.  P.  R.  de  Rouen  de  leur  Exercice, 
fans  autre  fondement,  que  d'avoir  receu  dans 
leur  aflemblée  la  fille  d'un  gentil  homme  qui 
a  vescu  &  qui  est  mort  de  leur  Religion,  & 
dont  la  mère  efl;  Catholique,  ce  qui  ell  con- 
forme a  la  Déclaration  de  1669.  Et  de  ce 
qu'on  prétend  qu'il  eft  entré  dans  leur  tem- 
ple des  prétendus  Relaps  dont  ils  n'ont  eu  au- 
cune connoiffance,  &  dont  on  ne  leur  a  ja- 
mais 


de  Roïten.  49 

mais  fignific  Tabjuration  fuivant  les  Edits; 
dans  ce  trille  elhit,  les  suplians  fe  voyant  a 
la  veille  d'une  privation  universelle  de  toute 
Ibrte  d'exercice  de  leur  Religion,  font  obli- 
gés de  représenter  a  V.  M.  que  leur  ruine 
pourroit  devenir,  générale  &  causer  celle  de 
la  Province,  qu'il  y  a  parmy  eux  quantité 
de  matelots  &  de  gens  de  mer  ausquels  une 
lemblable  extrémité,   &    les  amorces  &  le 
^'oi^mage  des  étrangers  pourroient  inspirer  le 
deflein  de  quitter  leur  patrie,  qu'il  y  a  beau- 
coup d'ouvriers  engagés  dans  des  manufaclu- 
res  également  utiles  a  Tetat  &  enviées  des 
autres  nations  qui  feront  détruites  &  anéan- 
ties fi  on  leur  ode  leurs   exercices,  &  les 
moyens  de  les  faire  fubfifter,  &  qu'il  y  a  dans 
la  Province  &  fur  tout  à  Rouen  une  infinité 
de  marchands  &  de  negotians  qui  augmen- 
tent le  commerce  &  l'abondance,  &  qui  s'y 
font  avantageusement  diftin^ués  dans  une  an- 
née malheureuse  comme  celle  cy  par  la  quan- 
tité des  grains  qu'ils  ont  fait  venir  &  dillri- 
buer  pour  le  fecours  &  le  bien  du  Royaume. 
A  ces  Caufes,  Sire,  Plaise  a  voftre  Maje- 
llé  maintenir  &  garder  les  fuplians  dans  l'ex- 
ercice de  la  R.  P.  R.  en  Normandie  aux  lieux 
ou  il  a  été  confirmé  par  les  arreils  de  vôtre 
Confeil,  ordonner  que  le  temple  de  Quevilly 
&  les  autres  fermés  feront  ouverts,  faire  def- 
D  fen- 


5o  Hiftoire  de  VEglife 

fences  a  tous  Juges  de  les  troubler.  Et  leur 
permettre  de  continuer  leurs  foins  &  leurs 
efforts  pour  Tutilité  du  commerce  &  le  bien 
de  TEtat  dans  le  repos  de  leurs  confciences, 
&  les  fuplians  redoubleront  leurs  vœux  & 
leurs  prières  pour  la  fanté  &  la  prospérité  de 
V.  M.  &  pour  la  gloire  de  fon  Règne. 

On  joignit  au  Placet  une  Requête  pour 
Monlîeur  le  Marquis  de  Château  neuf  Se- 
creraire  d'Etat  où  Ton  s'exprimoit  ainfi. 

Monseigneur 
Les  habitans  de  la  Religion.  Prêt.  Réf.  de 
Normandie  &  de  la  ville  de  Rouen,  Re- 
montrent treshumblement  a  vôtre  Grandeur 
que  dans  le  temps  qu'ils  croyoient  jotiir  avec 
quelque  tranquilité  des  lieux  d'exercice  con- 
firmés par  les  arrells  du  conseil,  &  qui  etoient 
fi  fort  diminués  qu'il  ny  en  avoit  que  quinze 
ou  feize,  outre  les  fiefs  qui  ne  fubfiftent 
plus,  dans  toute  l'étendue  de  la  Province, 
ils  n'ont  pu  voir  fans  une  extrême  conderna- 
tion  que  les  juges  des  lieux  ont  attaqué  plu- 
fieurs  de  leurs  temples  tout  a  la  fois,  pour 
des  prétendus  Relaps,  non  déclarés,  d'autres 
contraventions  &  d'autres  prétextes,  qu'on 
a  fermé  ceux  d'Alençon,  de  Caen,  de  S'. 
Lo,  de  Quevilly,  &  plufieurs  autres,  qu'on 
a  décrété  contre  les  Minillres,  &  qu'ils  font 

prêts 


de  Rouen.  5i 

prêts  de  fe  voir  fans  exercice  de  leur  Reli- 
gion dans  toute  la  Normandie,  ce  qui  a  obli- 
gé les  luplians  de  présenter  leur  Placet  à  Sa 
Majelté  pour  la  lupplier  trcshumblement  de 
faire  ceffer  tous  ces  troubles  dilferens  &  de  les 
maintenir  dans  la  grâce  qu'elle  leur  avoit  ac- 
cordée. 

C/est  ce  qui  les  engage  encore  de  repre- 
fenter  a  votre  Grandeur,  les  fuittes  &  les 
conséquences  de  toutes  ces  recherches,  par 
le  grand  nombre  de  ceux  delà  R.  P.  R.  dans 
cette  Province,  qui  ne  peuvent  pas  fublilkr 
fans  exercice,  par  ie  grand  nombre  de  mate- 
lots &  de  gens  de  mer  dont  la  retraitte  est 
d'autant  plus  a  craindre  qu'elle  est  plus  facil- 
le* quand  ils  en  feront  privés,  par  le  grand 
nombre  d'artisans  &  d'ouvriers,  qui  feront 
contraints  d'abandonner  des  manufactures 
confiderables  &;  enviées  des  Etrangers  qui  ne 
fubfi lient  que  par  travail,  par  le  grand  nom- 
bre des  marchands  &  des  negotians,  principa- 
lement a  Roiien  qui  ont  des  liaisons  dans  tou- 
te l'Europe  &  dans  tout  le  monde,  qui  fou- 
tiennent  une  bonne  partie  du  Négoce,  qui 
ont  rendu  nouvellement  un  fervicc  confide- 
rable  a  l'état  dans  les  retours  de  quantité  de 
grains  &  le  débit  qu'ils  en  ont  fait  pour  le 
Ibulagement  du  Royaume,  par  l'utilité  de 
toute  forte  de  marchandises  qu'eux  &  leurs 
D  2  cor- 


52  Hijîoirc  de  VEglife 

correspondans  font  venir  tous  les  jours  dans 
le  même  deffein,  par  les  avantages  qu'ils  pro- 
curent a  leurs  pays  &  aux  fermes  de  fa  Ma- 
jelté,  &  les  Etablilfemens  confiderables  d'un 
grand  trafic,  qu'ils  feront  contraints  d'aban- 
donner, fi  l'exercice  de  leur  Religion  ne  leur 
est  plus  permis  dans  la  Province,  par  la 
confideration  du  bien  public,  qui  fouffrira 
extrêmement  dans  le  malheur  des  fuplians 
dont  la  ruine  entraifneroit  celle  d'une  infinité 
de  Catholiques,  enfin  par  les  veues  de  l'au- 
gmentation du  commerce  que  fa  Majefté  & 
ion  Conseil  veulent  procurer  par  toute  forte 
de  voyes,  &  qui  diminuera  &  peut  être  mê- 
me s'anéantira  dans  la  Normandie  fi  les  fu- 
plians font  réduits  a  cette  extrémité,  bien 
loin  de  s'augmenter  avec  les  Hollandois  fui- 
vant  les  ordres  du  Roy  a  Nimegue&  ailleurs, 
dont  on  ne  peut  attendre  que  du  refroidiffe- 
ment  quand  ils  feront  enrichis  de  nos  pertes 
&  qu'il  verront  que  la  Religion  qu'ils  pro- 
feiTent  n'a  presque  plus  de  liberté  dans  le  Roy- 
aume. A  ces  Gaufes,  Monseigneur,  il  vous 
plaife  accorder  aux  fuplians  l'honneur  de  vô- 
tre protecftion  dans  la  grâce  qu'ils  ont  deman- 
dée a  fa  Majefté  d'être  maintenus  dans  les  ex- 
ercices de  la  R.  P.  R.  confirmés  par  les  arrests 
de  fon  Confeil,  &  de  luy  représenter  ce  qui 
est  utile  a  fon  fervice,  au  bien  de  fon  état  a 

l'avan- 


de  Roïien.  53 

Tavantage  du  commerce  &  au  repos  des  fupli- 
ans,  &  ils  continueront  leurs  vœux  &  leurs 
prières  pour  la  fanté  &  profperité  de  vôtre 
Grandeur. 

Le  Placet  ne  produifit  rien  ;  on  laifla  fai- 
re le  Parlement.  Le  Procureur  gênerai  tint 
parole,  il  mit  fesconclufionsdansun  moment, 
&  envoya  le  procès  au  Raporteur,  qui  ne 
fut  ni  plus  fcrupuleux  ni  moins  diligent.  Car 
il  fe  donna  fi  peu  de  loifir  d'examiner  Taf- 
faire,  qu'il  dévora  en  deux  jours  tout  ce  nom- 
bre de  pièces  &  d'interrogatoires  qui  y  pa- 
roiflent,  &  fe  trouva  en  état  de  le  mettre 
fur  le  bureau  le  famedi  qui  fuivit  TAfcen- 
fion. 

Les  Minières  qui  aprirent  la  veille  de  cette 
Felle  que  les  conclufions  étoient  déjà  mifes, 
&  que  le  Raporteur  fe  disposoit  a  travailler, 
en  furent  frappés  comme  d'un  coup  de  foudre. 
Car  ne  fe  croyans  pas  à  la  moitié  des  confron- 
tations; ils  n'avoient  point  encore  fongé  ni 
a  travailler  a  leurs  deffenses,  ni  a  faire  un 
Faclum.  Nayant  pu  voir  les  pièces  ils  avoienr 
remis  le  tout  après  les  confrontations  qui  les 
devoientinftruiredesdepofitionsdestémoins; 
&  les  mettre  en  état  d'y  répondre.  Ils  paffe- 
rent  la  Felte  dans  cette  mquietude  &  tirent  un 
Ecrit  de  defenfes  avec  precipetation  a  qui  ils 
donnèrent  auiïi  la  forme  d'un  Fadum  ne  pou- 
D  3  vans 


54  Hijioire  de  rEglifc 

vans  mieux  faire,  veu  la  brièveté  dutems.  Ils 
coururent  le  vendredy  chés  le  Prefident  & 
chés  le  Raporteur,  pour  obtenir  au  moins 
un  jour  pour  le  faire  imprimer.  Mais  on  ne 
parloit  point  au  Prefident.  Il  luy  êtoit  arri- 
vé une  affaire  avec  les  Confeillers  de  la  grande 
Chambre  le  jour  de  TAfcenfion,  a  la'^Melfe 
pour  leurs  Carreaux  il  y  avoit  eu  des  coups 
donnés.  Cette  affaire  Foccupoit  tellement 
quUl  ne  pouvoit  penser  ailleurs.  Et  il 
avoit  raison  de  s'en  inquiéter.  Car  la  que- 
relle pouvoit  avoir  des  fuites;  &  fi  elle  ne 
luy  a  pas  fait  tout  le  tort  qu'il  aprehendoit  : 
au  moins  la-t-elle  obligé  a  être  plufieurs  mois 
a  la  fuite  du  Confeil,  où  il  a  reçu  des  mor- 
tifications qui  le  dévoient  faire  penfer  au 
traitement  fait  a  des  Minillres,  a  qui  Ton  ne 
peut  reprocher  autre  chofe  que  d'avoir  fait 
leur  devoir  :  &  a  Mr.  de  Colleville  Confeil- 
1er  au  Parlement,  a  qui  il  fit  des  avanies  en 
pareil  jour  qui  luy  ont  couflé  fa  charge,  pour 
avoir  ofé  dire  en  opinant  pour  la  délivrance 
du  Prisonnier  que  Ton  délivre  le  jeudi  de 
TAscenfion,  que  le  fondement  en  eil  fabu- 
leux. S'il  ne  fit  ces  réflexions  fes  Confrères 
les  firent  pour  luy.  Car  ils  regardèrent  le 
chagrin  qu'il  reçut  comme  une  rétribution  du 
mal  qu'il  avoit  fait  a  Mr.  de  Colleville;  &  ne 
le  dilïimuloient  point. 

Pour 


de  Roïicn.  55 

Pour  le  Raporteur  qui  n'avoit  point  eu  de 
part  au  desordre.  Car  il  étoit  en  retraite  dans 
la  Ipeculation  &  dans  Textase.  C'elt  un  Beat 
a  vifions  qui  ell  tiulïi  occupé  pendant  les  Fê- 
tes de  ce  qui  fe  fait  dans  le  ciel  où  dans  les 
Convens  que  le  Duc  d'Albe  Tetoit  de  ce  qui 
le  pallbit  fur  la  terre  un  jour  de  Bataille. 
Pour  luy,  dis  je,  on  le  trouva  enfin  Ibrtant 
de  TEglife.  Mais  on  n'en  fut  pas  plus  avan- 
cé. Car  on  eut  beau  luy  représenter  que  Ton 
n'avoit  point  encore  travaillé  aux  defenfes  ne- 
ceffaires,  parce  que  Ton  s'etoit  reposé  fur  la 
parole  qu'il  avoit  fouvent  donnée  de  ne  fur- 
prendre  point  les  gens  :  on  n'}'  gagna  rien, 
il  dit  tousjours  qu'il  mettroit,  le  lendemain 
fur  le  Bureau,  que  le  Roy  le  vouloit.  Car 
ces  Meilleurs  n'ont  jamais  hefité  a  couvrir 
toutes  leurs  injuftices  du  nom  du  Roy.  Cela 
eft  fi  vray  que  le  Raporteur  ayant  bien  voulu 
s'humaniser  après  le  jugement  du  procès  & 
entrer  en  quelque  forte  de  jultification  de 
l'on  procédé  avec  un  des  Minillres  condam- 
nés :  comme  il  fe  trouva  poulie  a  bout  &  con- 
traint d'avouer  que  l'Arefi;  êtoit  infoutena- 
ble,  il  fe  retrancha  a  dire,  que  le  Roy  le 
vouloit.  Le  Minilh'e  indigné  de  fafoibleffeluy 
reprefenta  que  le  Roy  n'avoit  pris  aucune 
connoiffancedu  Procès,  qu'il  s'en  étoit  repo- 
fé  fur  luy;  &  que  ce  ne  feroit  point  fa  Ma- 
D  4  je- 


56  Hijîoire  de  l'Eglife 

jefté  qui  en  rendroit  compte  devant  Dieu  : 
qu'il  en  repondroit  luy  feul;  luy  qui  étant 
convaincu,  en  fa  conscience  de  l'innocence 
des  accusés  n'avoit  par  laiffé  de  les  condam- 
ner &  de  les  flétrir.  Cette  remontrance  que  le 
Miniflire  le  Gendre  luy  fit  avec  quelque  cha- 
leur fit  tant  d'imprefllon  fur  fon  esprit  qu'il 
demanda  dans  le  même  moment  au  Miniftre 
s'il  voudroit  bien  luy  donner  fa  benedi6lion. 
On  peut  bien  juger  qu'il  ne  la  luy  refusa  point, 
il  y  ajouta  des  prières  a  Dieu  a  ce  qu'il  ne 
luy  imputât  point  la  persécution  injufte  qu'il 
luy  avoit  faite.  Mais  après  cela  il  ne  put 
s'empescher  de  rire  d'une  rencontre  fi  peu 
attendue,  car  il  ne  luy  feroit  jamais  entré  dans 
l'esprit  qu'un  Beat  du  premier  ordre  &  du 
carad:ere  de  Mr.  de  Tourvens  eut  recherché 
la  bénédiction  d'un  Miniftre.  Mais  il  y  a 
des  momens  ou  la  conscience  nous  force  a 
faire  les  démarches  les  plus  éloignées  de  nôtre 
esprit  &  de  nôtre  humeur.  Toute  la  ville 
qui  feut  cette  avanture  en  rit  comme  le  Mi- 
niltre. 

Au  fond  c'efl:  envain  que  le  Raporteur 
mettoit  le  Roy  en  jeu,  pour  précipiter  le  ju- 
gement contre  fa  promeffe.  La  vraye  raifon 
qui  le  faisoit  agir  eft  que  M.  de  la  Motte 
Angot  fon  confrère  etoit  fur  le  point  de  rap- 
porter l'affaire  de  St.   Lo,   &  qu'il  vouloit 

avoir 


de  Roilen.  67 

avoir  Thonneur  de  faire  fauter  le  premier 
Temple  de  la  Province  que  le  Parlement  de 
iruiroit.  La  parole  quil  avoit  donnée  nV  étoit 
pas  un  obllacle.  Car  il  ell  de  ceux  qui  ne 
croyent  pas  que  Ton  foit  obligé  a  garder  la 
foy  aux  Hérétiques. 

Il  ne  put  pourtant  venir  a  bout  de  fon  de^- 
fein,  car  le  Samedi  les  Miniftres  crièrent  (i 
haut,  aux  portes  de  la  Chambre  :  a  la  pré- 
cipitation &  a  rinjulfice,  qui  leur  otoit  les 
moyens  de  donner  leurs  defenfes,  &  d'in- 
ItruirelesJuges;  que  s'ils  nepurentempefcher 
que  le  Procès  ne  fût  mis  sur  le  Bureau;  ils 
eurent  au  moins  la  consolation  de  voir  que 
Ton  y  travailla  fort  peu  :  û  bien  que  leur  Fac- 
tum  fut  achevé  d'imprimer  &  diftribué  le 
Dimanche.  C'eft  une  pdece  qui  donne  une 
idée  fort  exa(5le  de  Tetat  des  choses,  &  qui 
fait  voir  nettement  Toprelfion  &  la  violence 
que  Ton  a  foufferte.  On  le  trouvera  a  la  fin 
de  cet  écrit  avec  Tarell  de  la  Cour  &  les  au- 
tres pièces  qui  font  dignes  de  la  curiofité  des 
Leclcurs.  On  porta  aulîî  au  Raporteur  les 
défenses  que  Ton  avoit  dreffées  qui  ne  diffe- 
roient  du  Faclum,  que  pour  la  forme  :  mais 
qu'il  ne  daigna  pas  feulement  lire  a  la  Cour; 
tant  il  êtoit  partial.  On  ne  peut  pas  disconve- 
nir qu'elles  n'ayent  été  fuprimêes  contre 
toute  forte  de  droit  &  de  julfice,  puis  que 
D  5  l'a- 


58  Hijîoire  de  lEglife 

Tarell  n'en  fait  aucune  mention  dans  le  veu 
des  pièces,  ou  Ton  n'omet  rien  de  tout  ce 
qui  a  paru  fur  le  Bureau. 

Les  Miniftres  qui  voyoient  la  dispofition 
des  esprits  &  qui  croyoient  bien  que  Ton 
n'auroit  pas  grand'  foin  de  faire  voir  toutes 
leurs  juftifîcations  demandèrent  a  entrer  le 
lundy,  dans  la  veiie  de  fuppléer  a  ce  défaut. 
On  le  leur  accorda,  le  mecredy  jour  de  Tareft, 
mais  feulement  pour  répondre  au  nouvel  In- 
terrogatoire qu'on  leur  fit  subir  a  la  face  de  la 
Cour.  Il  ne  fut  pas  fort  différent  de  celuy 
qu'ils  avoient  effuyé  devant  les  Gommiffaires. 
On  ne  leur  dit  rien  des  Relaps,  prisonniers, 
ou  absens.  On  leur  parla  fort  de  leurs  Regî- 
tres  &  de  leurs  deniers  qui  tenoient  encore 
plus  au  cœur  des  Moynes  qui  conduiibient 
toute  la  trame,  que  le  procès.  Car  tout  le 
monde  fait  combien  auri  facra  famés  a  de  pou- 
voir fur  ces  âmes  béates.  *  Il  y  a  voit  un  des 
juges,  bel  esprit  amateur  des  belles  lettres  & 
fort  indigné  de  tout  ce  qu'il  voyoit,  qui  ne  s'en 
pouvoit  taire.  Car  toutes  les  fois  qu'il  ren- 
controit  les  Miniftres  il  leur  crioit. 

Heiifuge  crudeles  terras,  &  littus  avarum. 

Pour  les  deniers  les  juges  eurent  dabord  la 
bouche  fermée.  Car  les  Miniftres  dirent  qu'ils 
en  avoient  rendu  raifon  a  Monfieur  de  Ma- 

rillac 

*  Mr.  du  Tôt  Fer  rare. 


de  Roïœn.  5c) 

rillac  par  devant  qui  les  Adminiftrateurs  du 
Bureau  les  avoient  fait  aiïigner  &  qu'ils  n'a- 
voient  rien  a  ajouter  a  ce  quils  avoient  dé- 
claré devant  le  Tribunal  a  qui  le  Ro}^  avoit 
attribué  la  conoilfance  de  ces  affaires.  Mais 
pour  les  Regîtres,  on  leur  fit  un  grand  cri- 
me, de  ce  qu'ils  n'en  avoient  produit  qu'un 
feul  qui  contient  les  Cenfures  faites  par  le 
Confilloire,  aux  particuliers  :  la  Cour  ne  pa- 
roilfoit  pas  moins  choquée  de  ce  qu'ils  n'a- 
voient  produit  que  la  Copie  d'un  Synode 
que  l'on  demandoit,  quoy  qu'il  demeurât 
coudant  par  les  Ades  que  l'on  avoit  exercés 
en  juftice  que  les  Miniltres  avoient  déclaré 
ou  êtoit  l'original  &  que  le  Procureur  Gene- 
ral reconnût  qu'il  avoit  promis  un  compulfoi- 
re,  qu'il  ne  donna  point  pour  le  faire  apor- 
ter  a  la  Cour.  A  l'égard  des  Regîtres  on  fit 
voir  par  les  Arêts  de  la  Cour  même  que  l'on 
avoit  en  main,  que  l'on  avoit  fait  entière- 
ment tout  ce  qu'ils  ordonnoient  fur  ce  fujet 
La  Cour  n'en  parut  pas  contente;  par  ce 
qu'on  vouloit,  a  quelque  prix  que  ce  fût 
que  les  Minières  fulfent  criminels. 

On  prétendit  qu'ils  l'etoient  extrêmement 
d'avoir  reçu  Efier  Hue  a  Quevilli,  &  il  falut 
repeter  tout  ce  que  l'on  avoit  dit  tant  de  fois 
a  la  Cour  pour  fe  jurtifer.  Et  comme  après 
avoir  fatisfait  a  tout  ce  qui  regarde  le  fait; 

le 


(3o  HiJIoire  de  l'Eglise 

le  Miniftre  le  Gendre  voulut  encore  main- 
tenir le  Droit,  il  fe  fervit  entr'autres  choses 
d'un  arest  du  mois  de  May  i683  produit  au 
procès,  qui  fe  raporte  a  ceux  que  l'on  a  dei 
a  cottes  &  qui  défend  de  forcer  dans  leur  con- 
fcience  deux  enfans  du  Havre  Tun  de  8  &: 
l'autre  de  14  ans.  Le  Raporteur  qui  ne  Ta- 
voit  pas  regardé,  quoy  qu'il  l'eût  dans  fon 
fac  jettant  les  yeux  deffus  dans  ce  moment 
fécria  Meffieurs  cet  arest  dont  le  Miniilre 
fait  tant  de  bruit  est  tout  a  fait  contre  luy. 
Car  tout  ce  qu'il  accorde  aux  Parens  de  ces 
enfans  c'est  qu'il  feront  reçus  a  opter  de  Re- 
ligion. Le  Miniftre  repondit  modestement 
qu'il  prendroit  volontiers  droit  par  cet  Arest 
quelque  contraire  qu'il  parût  a  Monfieur  le 
Raporteur,  qui  ne  l'avoit  pas  fans  doute  bien 
envisagé  :  &  qu'il  êtoit  prêt  à  montrer  in- 
vinciblement qu'il  étoit  decifif  en  fa  faveur. 
La  chose  n'etoit  pas  difficile  car  dans  le  tems 
qu'il  fut  donné  les  Cathohques  Romains  n'a- 
voient  plus  la  hberté  d'opter  de  Religion; 
il  n'y  avoit  que  les  Reformés  a  qui  on  la  don- 
noit  des  l'âge  de  Sept  ans.  Et  puis  que  l'A- 
rest  admettoit  ces  deux  enfans  du  Havre 
dont  le  Père  etoit  mort  de  la  Religion  a  op- 
ter, quoy  que  la  Mère  fut  Romaine,  c'est 
une  marque  certaine  que  le  Roy  les  regardoit 
comme  devant  être  élevés  dans  la  Religion 

de 


de  Roiieu.  6r 

de  leur  Pere.  Le  Raporteur  parut  un  peu 
étourdi  de  cet  Argument.  Car  les  Greffiers 
disoient  tout  haut,  derrière  luy;  que  cela 
ne  fouffroit  point  de  réplique.  Il  voulût 
parer  en  disant  qu'il  n'etoit  point  parlé  de 
Tage  des  enfans  dans  TArest.  On  luy  fit  voir 
qu  il^  ne  Tavoit  pas  lu,  bien  loin  d'avoir  exa- 
miné tout  le  procès,  &  <^u'il  en  est  fait  men- 
tion dés  la  2"  ou  la  3*  ligne  :  Mais  qu'il  ne 
faloit  point  chicaner  fur  Tage,  puis  que  les 
Romams  nétoient  plus  reçus  a  opter  a  quel- 
que âge  qu'ils  fuffent  :  que  cela  ne  regardoit 
que  les  Reformés  :  &  que  dés  là  que  l'on  avoit 
permis  a  ces  enfans  d'opter  il  faloit  de  ne- 
celfité  que  le  Roy  les  eût  confiderés  comme 
Reformés.  Il  voulut  fe  fauver  dans  un  au- 
tre retranchement,  difant  que  c'etoit  un  Arelt 
furpris  fur  Requête  :  Mais  on  l'y  força  tout  de 
même,  le  Miniftre  reconut  qu'il  avo'it  été  fur- 
pris  &  donné  fur  Requeste  :  Mais  par  qui  fur- 
pris  &  a  la  Requête  de  qui  :  de  la  mère  de  ces 
enfans  :  qui  toute  révoltée  qu'elle  êtoit,  ayant 
toute  la  faveur  &  point  de  parties,  n'avoit 
pu  cependant  obtenir  autre  chofe  :  finon 
qu'elle  auroit  fes  enfans  chés  elle  &  qu'il  fe- 
roit  en  leur  liberté  d'opter.  D'où  l'on  con- 
clut que  le  Roy  étoit  demeuré  ferme  jus- 
ques  là,  a  faire  exécuter  le  38"  Article  de 
la  Déclaration  de  1(369  <^^ns  fa  forme  &  dans 

fa 


62  Hijîoire  de  lEglife 

la  teneur.  Le  Prefident  voyant  le  Raporteur 
hors  de  garde  obligea  le  Ministre  qui  par- 
loit  a  touner  teste  de  fon  costé.  Car  il  re- 
leva ce  qu'il  avoit  dit  dans  fon  discours  qu'a- 
près tant  d'Edits  dans  lesquels  le  Roy  s'etoit 
expliqué  fi  pofitivement  fur  l'éducation  des 
enfans  des  Pères  morts  de  la  Religion  :  s'il 
avoit  eu  deffein  de  déroger  aux  Reglemens 
précedens,  par  la  Déclaration  de  Juin  i683 
qui  sâttribùe  les  enfans  des  Pères  convertis; 
il  n'auroit  pas  parlé  fimplement  des  Pères; 
il  auroit  auffi  nommé  expreffément  les  Mè- 
res :  Il  le  releva,  dis- je,  fièrement,  comme 
s'il  eût  voulu  corriger  les  Déclarations  du  Roy. 
Vous  n'auriés  donc  pas  fait,  dit-il,  la  Dé- 
claration comme  elle  est,  fi  vous  y  aviés  été 
apellé  ?  comment  l'auriés  vous  faite  ?  Mais  il 
ne  s'en  déconcerta  point,  il  répondit  avec 
le  resped  que  l'on  doit  aux  Loix  du  Souverain 
&  fit  comprendre  qu'il  les  regardoit  comme 
des  choses  fi  hautes  &  fi  élevés  au  deffus 
de  luy  qu'il  n'y  pouroit  atteindre;  qu'aulîi 
n'avoit  il  pas  eu  la  pensée  d'y  toucher,  qu'el- 
les luy  etoient  facreés  &  inviolables  :  qu'il 
les  executoit  dans  leur  forme  et  teneur.  Mais 
que  s'il  faloit  parler  de  chofes  fi  fort  élevées 
audeffus  de  fa  portée  comme  il  croyoit  y  être 
obligé  puis  que  Monfieur  le  Prefident  l'in- 
terpelloit  &  qu'il  luy  devoit  obeiffance  :  il 

ne 


de  Roiien.  63 

ne  feroit  pas  de  difficulté  de  dire  quUl  êtoit 
persuadé  que  fi  le  Roy  eut  voulu  que  les  en- 
fans  des  mères  converties  fuflent  élevés  dans 
TEglise  Romaine,  auffi  bien  que  ceux  dont 
les  Pères  en  ont  embraffé  la  profeffion  il  les 
auroit  nommées,  comme  les  Pères;  puis  que 
c'auroit  été  une  nouvelle  jurisprudence  qui 
auroit  aboli  les  Loix  anciennes,  confirmées 
tout  de  nouveau  par  un  Arest  donné  un  mois 
avant  la  Déclaration  dont  on  vouloit  fe  pré- 
valoir. 

Le  Roy  en  avoit  eu  fi  peu  le  deffein,  que  le 
juge  du  Havre  ayant  eu  des  veiies  qui  aloient 
a  éluder  l'Arefl;  de  May  i683,  &  en  ayant 
écrit  a  Monfieur  de  Chateauneuf  :  il  reçut 
une  Réponse  de  luy  produite  au  Procès,  ik 
dont  la  datte  est  postérieure  a  la  Déclaration 
dont  on  fe  fait  fort,  qui  porte  en  termes  ex- 
prés qu'il  en  a  informé  le  Roy,  qui  ne  veut 
point  que  Ton  contraigne  ces  Enfans  au  fait 
de  la  Religion. 

Et  il  est  bon  que  Ton  fâche  icy  que  ce  juge 
pour  avoir  fuivi  les  ordres  d'en  haut  &  laillé 
ces  enfans  en  liberté  fut  mis  en  veniat  dans 
le  même  tems,  &  fuspendu  de  fa  charge 
jusqu'à  la  fin  du  procès  que  Ton  a  fait  aux  Fi- 
dèles du  Havre,  pour  avoir  reçu  ces  enfans 
dans  leur  Temple  :  quoy  qu'il  représentât  & 
PArest  du  Conseil  &  l'ordre  du  Marquis  de 

Cha- 


64  Hijioire  de  rEi>-life 

Chateauneuf  Secrétaire  d'Etat  :  fans  pouvoir 
en  avoir  de  raifon.  Quand  il  s'en  plaignoit 
au  Procureur  General,  il  ne  luy  dilfimuloit 
point  qu'en  le  renvoyant  dans  l'exercice  de  fa 
Charge  il  justifioit  le  Miniftre  du  Havre  :  ce 
qu'il  vouloit  éviter.  0  Tempora  ô  Mores. 
Le  moyen  de  fémpescher  de  crier  a  l'opref' 
lion  &  a  l'injuftice. 

Ce  qui  la  fait  voir  plus  clair  que  le  jour, 
c'est  qu'il  a  paru  une  Déclaration,  dépuis 
lô  jugement  de  tous  ces  procès  par  laquelle 
le  Roy  ordonne  effectivement  que  les  Mères 
converties  élèveront  leurs  enfans  au  deffous 
de  14  ans  dans  leur  Religion,  pour  leur  con- 
folation.  Si  la  chose  avoit  été  réglée  par  celle 
de  Juin  i683  en  auroit  il  falu  une  nouvel- 
le, ou  fi  on  en  avoit  donné  une  nouvelle  ne 
l'auroit  on  pas  faite  par  raport  a  la  premiè- 
re &  par  voye  d'explication  de  la  précéden- 
te, cependant  il  n'y  en  a  pas  un  mot.  Ledit 
Minillre  le  Gendre  représentant  cela  au  Pro- 
cureur General  qui  sétoit  transporté  chés 
luy  pour  l'exécution  de  l'Arest  de  condam- 
nation; (fur  ce  qu'il  disoit  qu'il  avoit  reçu 
le  matin  cette  nouvelle  déclaration)  &  fe  pré- 
valant de  cet  Edit  comme  d'une  pièce  qui 
venoit  tout  a  propos  pour  faire  voir  de  plus 
en  plus,  l'iniquité  de  leur  Areft,  il  n'en  fit 
qui  rire  &  dire  quelle  étoit  déjà.  In  mente  Ré- 
gis 


de  Roiicii.  65 

^is  lur  quoy  le  Miniltre  s'écria  vous  donc, 
Melfieurs,  foges  comme  vous  êtes,  vous 
jugés  les  lujets  du  Roy  par  ce  qu'il  a  in  petto 
&  non  p)ar  la  dispofition  de  fes  loix  publiées 
&  enregitreés  dans  vos  Parlemens. 

Mais  cela  ne  vaut  pas  le  peine  d'en  parler 
le  relie  de  l'interrogatoire  le  palla  fans  qu'il 
y  eut  rien  qui  foit  digne  de  remarque.  On 
congédia  les  Miniltres  &  en  fortant  ils  furent 
areftés  a  la  porte  de  la  Chambre,  chacun  par 
un  Huiflier,  en  attendant  le  jugement  du  pro- 
cès. Cela  ne  leur  fit  pas  grand  mal.  S'ils 
en  furent  touchés,  ce  fut  pour  bénir  Dieu 
de  ce  qu'il  ne  les  jugeoit  pas  indignes  de  fouf- 
frir  oprobre  pour  fon  nom  :  comme  fit  auiïi 
Madame  le  Gendre  mère  de  l'un  d'eux  en 
l'embraffant  a  fon  retour  &  le  consolant  par 
ces  paroles.  Mais  en  recompense  cela  fit  un 
grand  fracas.  Car  la  chose  le  paffa  a  la  veuë 
de  plus  de  deux  mille  persones.  Reformés  & 
Romains,  qui  attendoient  le  jugement  dans 
les  fales  voifines  :  &  fi  le  menu  peuple  de 
l'Eglise  Romaine  s'en  réjouît,  les  honnefl:es 
gens  ne  purent  s'empescher  d'en  témoigner 
du  chagrin  :  trouvant  fur  tout  fort  étrange 
que  lont  eût  arefté  les  gens;  après  avoir  pu- 
blié par  tout,  comme  avoient  fait  le  Ra- 
porteur  &  les  Commifllnres  qu'il  n'y  avoir 
point  de  charge  contre  les  Miniftres. 

E  Le 


66  Hijioire  de  l'Eglife 

Le  Raporteur  en  eut  honte,  &  il  leur  en 
fit  quelque  espèce  d'excuse,  après  le  juge- 
ment :  disant  qu'ils  n'avoient  pas  été  areltés 
pour  les  charges  du  Procès  :  mais  pour  s'être 
opiniâtres  a  ne  pas  donner  les  Regîtres  de- 
mandés; pendant  que  la  Cour  en  deliberoit. 
Mais  cette  excuse  n'êtoit  pas  mieux  fondée 
que  l'Areft  :  puis  qu'ils  avoient  donné  tout 
ce  qu'on  leur  demandoit.  Ils  l'avoient  jufti- 
fié  en  mettant  les  pièces  fur  la  table  :  &  c'eit 
ce  qu'ils  prirent  la  liberté  de  luy  représenter. 

Nous  touchons  au  trifte  moment  qui  a  pri- 
vé les  Fidèles  de  Rouen  de  toute  la  douceur 
&  de  toute  la  consolation  de  leur  vie  :  &  qui 
les  a  exposés  a  des  peines  plus  dures  que  la 
mort  :  puis  que  toutes  ces  procédures  furent 
fuivies  de  l'Areft  du  6*  juin,  qui  rase  leur 
Temple;  interdit  leurs  Pasteurs,  &  les  fe- 
pare  pour  jamais  de  leur  cher  Troupeau.  On 
demanderoit  volontiers  aux  juges,  furquoy 
ils  ont  fondé  un  jugement  fi  terrible.  Ce  ne 
peut  être  fur  la  depofition  des  Témoins  qui 
regarde  les  deux  premiers  chefs  du  Procès. 
Car  on  a  fait  voir  qu'ils  ne  font  pas  la  moin- 
dre charge.  Ce  ne  peut  être  non  plus,  fur  le 
dernier,  qui  touche  les  Relaps  :  puis  qu'ils 
ont  tousjours  nié  d'en  avoir  fouffert  depuis  la 
Déclaration  qui  le  défend;  &  qu'on  ne  leur  a 
confronté  qui  que  ce  foit,  qui  les  en  ait  ac- 
cusés. 


de  Roîlen.  67 

cusés.  Les  Juges  n'en  peuvent  alléguer  d'au- 
tre cause  que  leur  paiïîon  &  leur  haine,  qu'ils 
ont  couverte  de  l'autorité  du  Roy. 

S'ils  avoicnt  quelque  ordre  de  fa  Majeilé, 
ils  Tauroient  produit;  il  paroîtroit  dans  le 
veu  des  Pièces.  Le  Préfident  «&  le  Rapor- 
teur  pouvoient  avoir  des  Lettres  du  Père  de 
la  Chaife;  ou  de  l'Archevesque  de  Paris;  au 
moins  voulurent  ils  le  persuadera  leurs  Con- 
frères pour  les  attirer  dans  leurs  fentimens. 
Car  l'on  a  dit  dans  la  ville,  que  comme  ils 
ne  donnoient  point  d'abord  dans  leur  fens; 
qu'au  contraire  les  premiers  opinans  paroif- 
foient  affés  disposés  a  faire  jurtice  :  M"  les 
Eclefiaftiques  fur  tout;  comme  il  a  été  re- 
marqué, le  Prefident  prit  la  parole  &  leur 
dit  que  c'etoit  laffaire  de  l'Archevesque  de 
Paris  &  du  Révérend  Père  de  la  Chaise. 
Mais  faut  il  que  le  facré  nom  du  Roy  ferve 
a  couvrir  lapaffiond'un  Prêtre  et  d'un  Moine 
ou  d'un  juge  cjui  abuse  de  fon  autorité.  C'est 
une  injure  faite  a  fa  Majefte  que  l'on  ne  fau- 
roit  fouffrir. 

S'ils  n'avoient  point  eu  d'autre  but,  que 
d'exécuter  la  volonté  du  Roy,  ils  n'auroient 
pas  aggravé  fes  Déclarations,  qui  n'éloignent 
les  Mmiftres  dont  les  Temples  ont  été  rasés, 
que  de  fix  lieues  de  leur  Exercice  :  Au  lieu 
qu'il  y  en  a  vingt  dans  l'Areft  &  qu'il  a  joute 
E  2  en- 


68  Hijîoire  de  lEglife 

encore  a  cette  peine  toute  cruelle  qu'elle  eft 
de  grofles  amandes  :  tout  cela  dans  le  tems 
qu'ils  reconoilTent  &  qu'ils  publient  que  les 
Miniftres  qu'ils  traitent  fi  durement  font  les 
moins  coupables  de  ceux  qu'ils  ont  jugés; 
&  qu'il  n'y  a  point  de  charge  contr'eux. 

Mais  l'Areft  n'eft  pas  feulement  injuste  en 
ce  qui  concerne  l'Eglise  &  les  Miniftres;  il 
l'est  encore  a  l'égard  des  particuliers.  On  ne 
parle  plus  de  Noblet;  on  peut  juger  de  ce 
qui  le  touche  par  le  récit  que  l'on  en  a  fait. 
Les  Dames,  le  Seigneur  &  Caron  y  font  con- 
damnées a  cinquante  livres  d'amende,  pour 
avoir  mené  au  Presche  des  enfans  dont  les 
Pères  êtoient  morts  de  la  Religion;  quoy 
qu'elles  y  fuffent  auffi  bien  fondées  qu'a  y 
aler  elles  mêmes  :  puisque  tous  les  Edits  le 
leur  permettoient;  les  Dames  Thorel  &  le 
Blanc  s'y  trouvent  auffi  foûmises  a  la  même 
peine,  pour  y  avoir  conduit  leurs  filles;  en- 
core qu'il  n'y  ait  pas  le  moindre  Témoin  qui 
raporte  les  y  avoir  veiies,  depuis  l'Edit  de 
Juin  qui  le  defendoit.  Ce  qu'il  y  a  encore 
de  fort  extraordinaire,  c'eft  que  les  Pérès  de 
ces  enfans  pour  l'avoir  fouffert  ont  été  inter- 
dits des  fondions  des  Charges  qu'ils  exer- 
coient  jusqu'à  ce  qu'ils  ayent  obtenu  desletres 
de  RemifTion  qu'ils  ont  été  obligés  d'aler 
chercher  a  Paris;  comme  fi  ç'avoient  été  des 

fce- 


de  Roïien.  69 

fcelerats  &  des  meurtriers.  Il  est  vray  qu'ils 
méritent  bien  la  mortification  qu'ils  en  ont 
receiie  pour  avoir  changé  de  Religion,  lé- 
gèrement &  pour  de  vils  &  de  misérables  in- 
térêts; dans  un  tems;  qu'ils  n'avoient  point 
encore  a  craindre  les  misères  qui  en  ont  fait 
tomber  un  fi  grand  nombre. 

La  rigueur  de  TArefl  ne  s'areste  pas  aux 
vivans,  il  intereffe  les  morts.  Car  il  leur  ôte 
les  cimetières,  ou  leurs  os  dévoient  reposer 
jufqu'au  jourde  la  Refurredion .  Elle  s'étend, 
même  a  ceux  qui  font  encore  a  venir;  puis 
qu'elle  les  prive  des  moyens  de  s'inftruire  en 
la  conoifTance  du  vray  Dieu,  en  leur  otant 
le  Miniftere  de  fa  Parole.  La  feule  grâce 
que  le  Parlement  fit  c'est  qu'il  permit  aux 
Miniltres  de  demeurer  trois  mois  a  Rouen, 
pour  donner  ordre  a  leurs  affaires.  Encore 
n'en  purent  ils  jouir.  Car  Monfieur  de  Ma- 
rillac  les  en  chafla  en  deux  fois  vingt  &  qua- 
tre heures,  fous  prétexte  de  la  désertion  de 
leur  Peuple,  qu'il  attribuôit  aux  Conseils 
qu'ils  pouvoient  donner.  Il  l'avoit  pensé  en 
mal,  contre  les  Miniftres  :  mais  la  chose  leur 
tourna  en  bien  par  la  grâce  de  Dieu.  Car  ils 
fe  trouvèrent  par  ce  moyen  en  feurcté,  lors 
qu'on  lâcha  les  foldats  fur  les  Brebis  du  Sei- 
gneur Jésus. 

Quelque  tems  auparavant,  le  Confistoire 
E  3  avoir 


yO  Hijîoire  de  l'Eglife 

avoit  fait  encore  une  tentative  pour  tâcher 
d'empescher  Texecution  de  TAreft.  Il  avoit 
député  Monlieur  Bafnage  a  Paris,  avec  un 
nouveau  Placet.  Mais  ses  peines  &  ses  foins 
furent  inutiles  :  il  revint  fans  rien  faire  :  &  il 
eut  la  douleur  auiïi  bien  que  fon  Collègue  de 
voir,  avant  fon  départ  le  Temple  rasé. 
G'étoit  non  feulement  un  chef  d'œuvre  d'Ar- 
chitedure  :  mais  le  Temple  du  monde  le  plus 
commode,  pour  le  Prédicateur  &  pour  fes 
Auditeurs.  Quoy  quïl  contint  bien  fept  a 
huit  mille  persones,  une  voix  médiocre,  s'y 
pouvoit  aisément  faire  entendre  par  tout  ; 
quand  elle  êtoit  un  peu  distincte.  Le  Sieur 
Nicolas  le  Genevois  célèbre  Architede  de  la 
ville  de  Rouen  eut  le  foin  d'en  prendre  les 
mesures  avant  qu'il  fut  abatu  pour  en  faire 
un  plan,  qui  pût  fervir  de  modèle  a  ceux  qui 
voudroient  bâtir  un  Edifice  commode  a  l'E- 
glise, par  tout  ou  elle  fe  pourra  raffembler. 
La  mort  l'ayant  empesché  d'y  mettre  la  der- 
nière main,  fon  travail  auroit  été  inutile, 
fans  le  fecours  de  fes  amis  qui  l'ont  achevé  & 
qui  nous  ont  donné  les  planches  que  l'on  ver- 
ra a  la  fin  de  cet  ouvrage. 

Les  Pafleurs  eurent  un  autre  afflidion  tout 
autrement  fenfible  :  celle  de  fe  voir  contraints 
d'abondonner  leur  Troupeau  a  la  gueule  des 
Loups  raviffans,  qui  fe  préparoient  a  le  dé- 
vorer. 


de  Roïicn.  ^\ 

vorer.  Ils  n'oublièrent  rien  pour  le  disposer 
a  combattre  le  bon  combat  de  la  foy.  Ils  y 
travaillèrent  en  particulier;  &  Tun  d'eux  fit 
imprimer  un  fermon,  pour  fupléer  au  deffaut 
des  exhortations  publiques,  fur  ces  paroles  de 
nôtre  Seigneur  dans  faint  Jean,  vous  aurés 
angoiffe  au  monde  :  mais  ayés  bon  courage 
j'ai  vaincu  le  monde.  Il  n'etoit  pas  hors  de 
deffous  la  Preffe,  que  Ton  ôta  aux  Libraires 
de  la  Religion  la  liberté  de  pouvoir  continuer 
a  ce  pauvre  peuple,  de  pareils  fecours  :  fi 
bien  que  Ton  fut  obligé  d'aler  jusqu'en  Hol- 
lande chercher  un  Imprimeur,  pour  une 
Prière  que  ce  même  Pafteur  composa,  pour 
aider  les  Brebis,  dans  les  exercices  qu'ils  fai- 
foient  tous  les  dimanches,  dans  leur  maison. 
Après  cela  il  falut  partir.  Les  Pafteurs 
ne  fe  retirèrent  point  fans  avoir  reçu  la  béné- 
diction de  leur  cher  Troupeau;  &  fans  luy 
avoir  donné  la  leur.  Ils  obtinrent  même  cha- 
cun un  congé  honorable  de  leur  Confiftoire, 
qui  les  pria  de  vive  voix  ;  comme  ils  témoignè- 
rent de  vouloir  dépendre  absolument  de  ses 
Conseils,  &  faire  aveuglement  tout  ce  qu'il 
croiroit  être  du  bien  de  l'Eglise;  de  fe  reti- 
rer dans  les  pays  étrangers,  pour  être  en  état 
de  tendre  la  main  a  ceux  qui  pourroient  trou- 
ver le  moyen  d'échapper.  Car  on  voyoit  bien 
qu'il  n'y  avoit  point  d'autre  parti  a  prendre; 
E  4  que 


72  Hijîoire  de  iEgiife 

que  de  le  lauver  au  plus  vite.  Ils  obéirent 
aux  ordres  de  leurs  luperieurs,  &  alerent  a 
Fontainebleau  o\x  la  Cour  etoit  alors,  pour 
demander  un  congé  a  deffein  de  fe  retirer  en 
Hollande.  Ils  l'obtinrent  le  i  l'Odobre  i685 
Monfieur  Janffe  eutauiïï  le  fien,  c'etoit  un  vé- 
nérable vieillard  qui  paffoit  quatrevingt  ans  : 
&  qui  eft  mort  a  Rotterdam.  Il  avoit  été 
déchargé  de  fon  Miniilere  après  avoir  fervi 
cinquante  ans  TEglise  de  Rouen  avec  une 
pieté  &  une  charité  exemplaires. 

A  peine  etoient  ils  hors  du  Royaume, 
qu'ils  aprirent  que  la  belle  Bibhoteque  de 
leur  Eglife  avoit  été  enlevée  par  les  Jésuites. 
L'Areft  du  6"  Juin  la  confîsquoit  comme  le 
reste  de  leurs  biens,  au  profit  des  Hôpitaux. 
Mais  ils  en  avoient  empesché  Texecution  par 
une  Requête  qui  demandoit  qu'elle  fut  con- 
fervée  pour  l'usage  des  gens  de  Letres,  com- 
me l'avoit  été  celle  de  Saumur,  par  l'ordre  du 
Roy.  La  Requête  ne  parut  pas  déraisonna- 
ble :  mais  pendant  que  le  Parlement  agiffoit 
au  Conseil  du  Roy  pour  la  faire  aprouver  : 
les  Jésuites  de  Rouen  par  le  crédit  du  Père  de 
la  Chaize  furprirent  un  Arêt  du  Conseil  qui 
la  leur  attribuoit.  Les  honnefles  gens  du 
Palais  l'aprirent  avec  chamn  :  &  ils  fe  fe- 
roient  peut  être  détermines  a  remontrer  au 
Roy  la  furprise.  Mais  le  Prefident  d'Amfre- 

ville 


de  Rouen.  y  3 

ville  avec  quelques  autres  de  fa  fadion  la  leur 
adjugea  a  la  fourdine  dans  la  petite  audience 
qui  le  tient  avant  le  jour.  Ils  n'eurent  pas 
plutôt  obtenu  la  permilOon  de  s'en  faifir  quils 
renvoyèrent  prendre  dès  fix  heures  du  matin, 
par  je  ne  fcay  combien  de  porteurs,  qui  l'en- 
levèrent, malgré  une  groiie  pluye,  dans  de 
grands  paniers.  Si  l'on  ètoit  jamais  en  état 
de  la  retirer  d'entre  leurs  pâtes,  le  Catalogue 
fe  trouyeroit  au  Grefle  du  Parlement  avec 
le  procès. 

Il  faudroit  tirer  le  rideau  fur  tout  ce  qui 
s'ert  paffé  depuis  leur  retraite.  Car  l'Edit 
de  Nantes  fut  révoqué  le  i8'=  du  dit  mois  & 
an.  Les  Temples  qui  fubfiiloient  encore  fu- 
rent renversés  dans  toute  la  France  :  &  les 
Chrétiens,  malgré  les  bonnes  paroles,  que 
leur  donnoit  l'Edit  de  revocation,  abandon- 
nés a  la  fureur  d'un  Soldat  brutal  &  impie  qui 
pilla  &  désola  les  maisons  &  les  familles  :  qui 
n'oublia  rien  en  un  mot,  pour  perdre  les 
corps  &  les  âmes. 

Qui  est  ce  qui  pouvoit  refiller  a  de  fi  rudes 
Aflauts.  Il  s'en  trouva  pourtant  un  alfés  bon 
nombre  qui  conservèrent  leur  conscience  pu- 
re; les  uns  en  fe  cachant  avec  ce  qu'ils  pu- 
rent emporter  dans  un  trouble  &  une  confu- 
fion  de  cette  nature  :  les  autres  en  fe  déro- 
bant aux  Cuirafliers,  dont  ils  avoient  été  fur- 


E  5  pris 


'^1 


74  Hijîoire  de  l'Eglife 

pris;  &  leur  abandonnant  leurs  biens,  leurs 
maisons  :  quelques  uns  même,  leurs  enfans. 
Car  tous  ceux  qui  fe  fauvérent  ne  furent  pas 
affês  heureux  pour  les  pouvoir  emmener  avec 
eux.  Mais  Dieu  en  a  rendus  quelques  uns 
comme  par  miracle.  Il  y  en  eut  plufieurs  de 
ceux  qui  ne  purent  échaper,  qui  refille- 
rent  courageusement  a  toute  forte  de  tenta- 
tions. Ils  fouffrirent,  avec  joye,  auffi  bien 
que  les  anciens  Hébreux,  le  ravilfement  de 
leurs  biens,  &  tous  les  autres  outrages  qu'on 
leur  put  faire.  Rien  ne  fut  capable  de  les 
ébranler  :  non  pas  même  les  Convens  &  la 
prison.  Car  après  cjue  le  Régiment  des  Cui- 
raffiers  eut  englouti  tout  ce  qui  fe  trouva  dans 
les  maisons,  on  jetta  ceux  qui  persévèrent 
dans  les  prisons  :  les  femmes  dans  les  Con- 
vens; &  les  hommes  dans  d'autres  lieux. 
Monfieur  de  la  Basoge  Conseiller  honoraire 
&  Doyen  du  Parlement  êtoit  a  la  tefte  des 
prisonniers;  fa  Dignité  ni  fes  cheveux  blancs 
ne  le  purent  garentir,  il  fut  mis  au  vieux  Pa- 
lais, avec  les  S"  Cardel  &  Jaques  Coffart 
membres  du  Confiftoire  ;  &  le  Sieur  la  neuville 
Dauffi  qui  s'en  fauva  peu  de  tems  après  &  fe 
retira  en  Hollande.  Le  Sieur  Isaac  le  Bou- 
langer eut  le  même  logis.  Le  Sieur  Isaac  le 
Fevre  fut  mis  dans  le  Couvent  des  Cordeliers 
&  fa  femme  dans  un  autre.     Celle  du  fieur 

Isaac 


de  Rouen.  j5 

Isaac  le  Boulanger  :  fœur  du  Sr.  Jaques  Cof- 
lart  eut  le  même  fort  :  toute  cette  famille  fit 
admirablement  fon  devoir  car  la  Dame  Torin 
femme  du  dit  Sr.  Jaques  Coifart  demeura  fer- 
me :  comme  fon  mari;  tellement  qu'elle  en- 
tra auiïi  dans  le  Gonvent  où  elle  gagna  une 
maladie,  dont  elle  mourut.  Ce  fut  dans  fa 
maifon  qu'elle  finit  fon  martyre,  on  Fy  avoit 
renvoyée  pour  fe  faire  traiter.  L'Aisnée  de 
trois  demoiselles  Vendales  que  Ton  avoit  jet- 
tées  dans  le  Convent  de  Bellefont  y  acheva 
fa  courfe  en  glorifiant  Dieu  &  prononçant  les 
premières  paroles  du  Pfeaune  40*.  Les  autres 
femmes  ou  filles  aretées  &  mifes  dans  les  Cou- 
vens  font  les  Dames  Gardel,  Amfmg,Wet- 
ken,  Pitreffon,  le  Cordier.  Guillebaut  la 
jeune  &  Simon  :  les  demoiselles  de  Martigni 
&  de  Lambervilie  :  &  les  deux  Jeunes  Fon- 
teine,  s'il  y  en  a  quelqu'autre  le  nom  nous  en 
eft  échape.  Il  y  en  auroit  eu  fans  doute  un 
beaucoup  plus  grand  nombre  :  fans  la  fuper- 
cherie  dont  on  fe  fervoit  pour  extorquer  des 
fignatures.  Car  on  presentoit  a  la  plus  part 
un  Billet  qui  ne  leur  paroiffoit  pas  intereffer 
leur  conscience  :  Il  étoit  conçu  en  ces  termes 
Je  N.  N.  croy  de  ferme  foy  toutes  les  vérités  ortho- 
doxes que  l'Eglife  Catholique  Ap.  Rom.  croit  & 
pro/ejfe.  Je  condamne  &  rejette  fmcerement  tou- 
tes les  herejies  &  opinions  erronées  que  la  même 

Eglife 


76  Hijtoire  de  l' Eglise 

Eglife  a  condamnées  &  rejettées  félon  la  parole  de 

Dieu  &  la  Doârine  des  faints  Apôtres. 

La  Dame  Vereul  femme  du  fieur  Abraham 
Simon  fe  fignala  entre  les  prisonnières.  Car 
paffant  par  les  rues  dans  le  CaroiTe  de  Mon- 
fieur  le  Marquis  de  Bevron,  pour  aler  au 
convent  elle  exhortoit,  avec  un  courage  ad- 
mirable, tous  fes  Frères  a  persévérer.  Elle 
s'ell  fouteniie  &  fe  soutient  avec  la  même  fer- 
meté. Son  mary  qui  a  voit  eu  la  foibleffe  de 
plier,  au  premier  affaut  ;  non  feulement  s'eft 
relevé  dans  le  moment  qu'il  eut  le  tems  de  fe 
reconoître.  Mais  il  a  soutenu  depuis  de 
grands  combats  dans  une  longue  &  dure  prifon 
qu'il  a  foufferte,  pour  fes  enfans  envoyés  hors 
du  Royaume,  de  peur  que  le  monde  ne  les 
luy  ravît. 

Car  les  ennemis  de  nôtre  fainte  Religion 
desesperans  de  pouvoir  triompher  des  Pérès 
&  des  Mères,  dont  il  y  en  a  peu  qui  ayent 
pu  s'accommoder  des  erreurs  &  des  fuperfti- 
tions,  auxquelles  on  les  a  forcés  de  fous- 
crire,  résolurent  de  s'aproprier  tous  les  en- 
fans.  Le  fieur  Simon  ayant  eu  le  malheur  en 
conséquence  de  cet  Arefté  de  fe  voir  enlever 
une  jeune  fille  que  Mr.  Yves-Marie  de  la 
Bourdonnaye  alors  Intendant  a  Rouen  avoit 
mandée,  avec  promeffe  pofitive  de  la  ren- 
voyer :  résolut  de  faire  palTer  dans  les  pays 

étran- 


de  Rouen.  77 

étrangers,  trois  ou  quatre  autre  filles  qui  luy 
reftoient.  Il  n'en  falut  pas  davantage  pour 
mettre  Tlntendant  en  fureur,  qui  jetta  ce  cha- 
ritable Père,  dans  une  prison.  Il  y  a  paffé 
plufieurs  années  fort  content  d'avoir  fauve  fes 
enfans  &  donnant  toutes  les  marques  polFi- 
bles  d'une  patience  véritablement  chrétienne, 
&  d'une  refignation  parfaite  a  la  volonté  de 
Dieu  :  les  lettres  qu'il  a  écrites  de  fa  prifon, 
&  qui  font  entre  nos  mains  en  font  foy.  Si 
fon  courage  s'y  efl:  tousjours  Ibutenu;  il  n'en 
cft  pas  de  même  de  fa  fanté,  elle  a  été  ruinée 
par  la  longueur  &  les  incommodités  de  fa  de- 
tenfion.  C'a  été  fa  délivrance  :  &  la  couron- 
ne de  fon  Martyre.  On  a  peut  être  cru  qu'elle 
luy  auroit  été  trop  honorable,  s'il  l'avoit  re- 
ceije  dans  fa  prison.  Car  on  luy  en  ouvrit 
les  portes  peu  de  jours  avant  fa  mort.  Quoy 
qu'il  en  foit,  comme  les  compaffions  même 
des  mechans  font  cruelles,  on  ne  luy  rendit 
pas  toute  fa  liberté,  il  ne  luy  fut  pas  permis 
d'achever  fes  jours  dans  fa  maison,  entre  les 
bras  de  fa  femme  :  il  falut  qu'il  choifit  la 
maison  d'un  Catholique  pour  y  finir  fa  fouf- 
france.  Il  ell  vra}^  qu'il  n'eut  pas  de  peine 
a  en  trouver  une.  Il  fe  présenta  un  ami  qui 
fut  affés  humain,  pour  ne  le  troubler  pas 
dans  fes  dernières  heures.  Le  fieur  Jean 
Damberbos,  qui  fe  trouvoit  dans  la  même 

pri- 


78  Hijloire  de  VEglife 

prifon  que  le  fieur  Simon  :  &  pour  le  même 
lujet  en  eft  forti  par  le  moien  de  fes  amis  après 
y  avoir  langui  affés  lon^  tems.  Mais  le  fieur 
"Pierre  le  Quefne  a  donne  tout  de  même  îa  vie, 
pour  le  falut  de  fes  enfans.  Car  ayant  auffi 
été  arrefté  pour  avoir  travaillé  a  les  mettre  a 
couvert  des  pièges  de  Fldolatrie  il  contrada 
une  maladie  dans  la  prison  dont  il  eft  mort. 
Toute  la  différence  qui  fe  trouve  entre  le  fieur 
Simon  &  luy.  C'eft  qu'il  a  rendu  paiffibie- 
ment  fon  ame  a  Dieu  dans  fa  maison.  Tln- 
tendant  avoit  extorqué  une  groffe  fomme 
d'argent  pour  le  laiffer  fortir  du  Royaume, 
fous  prétexte  dealer  quérir  fes  enfans.  Et 
comme  il  travailloit  a  exécuter  fon  deffein; 
il  pafla  de  ce  monde,  au  Père  :  Dieu  ayant 
voulu  parce  moyen  abréger  les  peines  &  fes 
travaux. 

Son  Agonie  fut  longue  :  elle  dura  cinq 
jours  entiers  :  de  forte  qu'il  paroiflbit  mani- 
feftement  que  c'étoit  un  homme,  qui  ne 
mouroit  que  des  fatiques  &  des  persécutions 
qu'il  avoit  effuyées.  Le  Curé  de  fa  Paroifle 
le  follicita  encore  fortement  jusqu'à  la  mort 
de  changer  de  Religion.  Mais  il  demeura 
ferme  dans  la  Profeftion  de  la  vérité,  &  don- 
na gloire  a  Dieu  jusqu'au  dernier  foupir.  La 
persécution  ne  finit  pas  avec  fa  vie.  Le  fieur 
leCavelier  Lieutenant  civil  &  criminel  annota 

tous 


de  Roïien.  79 

tous  fes  biens,  pour  les  confisquer.  C'elt  la 
quatrième  fois  qu'ils  ont  été  faifis,  &  fit  le 
procès  a  fon  cadavre.  Il  fut  condamné  a  être 
traîné  &  jette  a  la  voirie;  &  la  fentence  au- 
roit  été  exécutée,  fans  une  Persone  de  con- 
fideration  qui  interposa  fon  autorité  pour 
Tempescher.  Ce  bon  Chrétien,  avant  ces 
dernières  épreuves,  qui  le  conduifirent  au 
repos  éternel,  avoit  déjà  payé  une  Amende 
de  cinq  cens  livres  pour  avoir  refusé  la  charge 
de  Trésorier  Marguillier  dans  la  Paroiffe  où 
etoit  fituée  fa  maison.  Il  Tavoit  payée  gaye- 
ment  faisant  bien  conoître,  tant  par  ce  Sa- 
crifice que  par  celuy  qu'il  avoit  fait  pour  for- 
tir  du  Royaume,  que  fes  biens  ne  luy  étoient 
rien,  en  comparaison  de  fon  devoir. 

Il  y  eut  bien  des  membres  de  TEglise  de 
Roiien,  qui  facrifierent,  comme  ce  fidèle 
Confeffeur  leurs  biens  à  leur  liberté  :  qui  don- 
nèrent de  Targent  pour  obtenir  des  Paffeports 
des  Intendans.  Ces  Mefiieurs  ne  firent  pas 
grand  fcrupule  de  trahir  les  intentions  de  fa 
Majefté  pour  en  profiter.  Cela  n'eft  pas  fi 
furprenant,  que  ce  que  fit  le  Procureur  gê- 
nerai qui  mit  le  Sr.  Plâtrier  Ancien  de  l'Eglise 
&  parent  de  fa  femme,  a  couvert  des  insul- 
tes des  foldats  :  &  qui  après  l'avoir  tenu  quel- 
que tems  caché  dans  fa  maison  :  fi  ce  fut  gra- 
tis, on  le  laiiTe  a  juger  aux   Ledeurs,  luy 

don- 


8o  Hijioire  de  l'Eglife 

donna  les  moyens  de  fe  retirer  en  Angle- 
terre, où  il  eft  mort  en  paix. 

Si  ces  Fidèles  rachetèrent  leur  liberté,  il 
y  en  eut  encore  un  plus  grand  nombre,  qui 
pour  l'obtenir  s'exposèrent  a  toutes  les  ri- 
gueur des  Edits  qui  condamnoient  les  hom- 
mes aux  Galères,  &  les  femmes  a  être  rafées 
&  confinées  dans  les  Convens,  Ceux  qui  fe 
lauverent  ne  furent  pas  tous  également  heu- 
reux, on  en  reprit  d'un  &  d'autre  fexe  qui 
furent  tourmentés  en  diverses  manières.  La 
Dame  d'Etrimont  femme  du  fîeur  Harang 
fut  rasée  &  jetteé  dans  un  Convent  dont  elle 
eft  sortie  heureusement,  La  Veuve  de  Mr. 
de  L'Arroque  pafteur  de  l'Eglise  de  Rouen  & 
deux  de  ses  filles  furent  auffi  aretées,  &  après 
diverses  épreuves  mises  en  liberté.  La  Dame 
Gontier  &  fa  fille  aisneé,  les  Dames  Elizabeth 
&  Marie  Vandale,  confines  germaines  de  cel- 
les dont  il  a  été,  ci  devant  parlé.  Les  deux 
filles  du  Sr.  Cardel  Ancien.  Les  Dames  le 
Cornu  Mère  &  fille.  La  2"  fille  du  fieur  Gon- 
tier &  une  demoiselle  Camin  prises  dans  un 
Yacl  à  Dieppe,  comme  elles  paffoient  en 
Angleterre,  &  d'autres  encore  dont  les  noms 
ne  font  pas  venus  Jusqu'à  nous  tombèrent  en 
divers  tems  &  par  divers  accidens  entre  les 
mains  de  nos  ennemis.  Dieu  les  en  a  tirées 
la  plus  part  fans  avoir  plié.  Elles  en  font  tou- 
tes 


de  Roiicn.  Si 

tes  Ibrties,  les  unes  plutôt,  les  autres  plus 
tard,  a  la  reserve  de  quelques  unes  de  celles 
que  nous  n'avons  pu  nommer  qui  font  aduel- 
lement  dans  les  Bureaux. 

Entre  les  hommes  qui  voulurent  fe  lauver 
le  fieur  Jacob  Langlois,  Orfèvre  fut  arête 
deux  fois,  Tune  a  Lion  &  l'autre  en  Bour- 
gogne :  mais  il  trouva  les  moiens  de  fe  faire 
ouvrir  les  portes  des  prisons,  &  il  eft  mort 
en  Holande  entre  les  bras  de  fes  enfans  qui  s'y 
etoient  retirés.  Sa  femme  qui  y  etoit  arrivée 
avant  luy,  partit  auffi  la  première  de  ce  mi- 
sérable monde.  Les  autres  qui  comme  luy 
peuvent  avoir  été  repris  hors  de  la  Province 
ne  font  point  venus  a  nôtre  conoiffance.  On 
n'a  jamais  eu  de  nouvelles  non  plus  du  S'.  Si- 
mon le  Plâtrier  Orfèvre  &;  de  la  Dame  Marie 
Vereul  fa  femme  :  où  ils  font  péris  fur  la  Mer 
avec  leur  fille  aisnée  qui  étoit  avec  eux  :  ou 
le  Maître  du  Vaiffeau  dans  lequel  ils  s'étoient 
embarqués  leur  aura  coupé  la  gorge  &  fe  fera 
retiré  dans  quelque  Isle  du  nouveau  monde. 
Ce  ne  feroit  pas  le  feul  qui  auroit  fait  de  fem- 
blables  coups  :  puis  qu'on  a  exécuté  a  Caën 
un  fcelerat  qui  avoit  noyé  plufieurs  de  nos 
Frères  reçus  dans  fon  bord  en  divers  tems 
pour  les  paffer  en  Angleterre.  Si  Louis  de 
Meheren  fieur  de  la  Conseillère,  Gentil  hom- 
me de  balfe  Normandie,  &  célèbre  Advocat 
F  au 


82  Hijloire  de  l'Eglifc 

au  Parlement  de  Roiien  n'eut  pas  un  fi  trille 
sort,  il  fut  dépouillé  de  tout  ce  qu'il  avoit, 
comme  il  vouloit  se  retirer,  par  gerzé, 
&  remené  a  Rouen.  Il  a  fouffert  diver- 
ses épreuves  pendant  qu'il  y  a  demeuré.  Il 
s'y  eil  veu  même  en  danger  de  perdre  fes 
trois  filles  que  l'on  avoit  enlevées  &  mises 
dans  des  Convens.  Car  l'Aisnée  avoit  été  fe- 
duite  par  des  artifices  damnables  :  &  les  deux 
autres  étoient  trop  jeunes  pour  fe  foûtenir. 
Cette  dernière  épreuve  plus  rude  que  toutes 
les  autres  pour  un  Père  qui  aime  tendrement 
les  enfans  ayant  achevé  de  rompre  les  liens 
qui  l'attachoient  a  fon  employ  &  a  sa  Patrie, 
il  a  fi  bien  fait  qu'il  a  trouvé  les  moiens  de  fe 
fauver  avec  la  Dame  fa  femme  &  fes  trois  fil- 
les que  Dieu  a  rendues  aux  foins  infatigables 
qu'il  a  pris  de  les  retirer  du  piège  ou  elles 
etoient  tombées.  Les  letres  qu'il  ecrivoit  a 
la  Demoiselle  Marie  de  Meheren  fa  fille  Aif- 
née,  pour  difliper  les  Illufions  de  l'erreur 
font  imprimées  &  dignes  de  la  pieté  qui  les 
a  didées.  Il  n'eft  demeuré  persone  de  fa  fa- 
mille en  Babylon  :  fes  deux  fils  étans  auffi  en 
liberté.  Le  fieur  Jean  Congnard  avoit  eu  la 
même  intention  que  ces  Fugitifs  :  il  fut  dé- 
couvert comme  il  etoit  a  Paris  pour  y  pren- 
dre un  Guide,  qui  en  avoit  conduit  d'autres  : 
&  renvoie  a  Roiien.      Si  l'aprehenfion  de 

tom- 


de  Rouen.  83 

tomber  dans  de  semblables  disgrâces  en  a  dé- 
couragé plufieurs,  qui  a  voient  un  pareil  des- 
sein :  elle  n'a  pas  empesché  que  la  désertion 
n'ait  été  grande  :  de  sorte  que  les  Payeurs  de 
l'Eglise  de  Rouen  ont  la  consolation  de  voir 
a  peu  près  les  deux  tiers  de  leur  Troupeau 
a  î'abry  de  la  persécution.  Ils  ont  môme  la 
joye  d'en  voir  prospérer  un  grand  nombre 
dans  les  lieux  de  leur  disperfion.  On  voit 
de  belles  &  floridantes  familles  a  Amlterdam 
a  Leyden,  a  la  Ha3^e,  a  Berlin,  a  Londres, 
a  Dublin,  en  cette  ville,  &  ailleurs  jusques 
dans  le  fond  des  Indes  les  plus  reculées; 
qui  n'ont  pas  fujet  de  se  repentir  d'avoir  aban- 
donné leur  Patrie,  pour  suivre  le  flambeau 
de  l'Evangile. 

Ceux  qui  sont  le  moins  a  leur  aise,  dans 
tous  ces  lieux,  y  peuvent  au  moins  vivre  & 
mourir  en  paix  :  au  lieu  que  ceux  qui  sont 
demeurés  en  Babylon  n'ont  point  de  repos. 
Ils  y  vivent  dans  le  trouble  &  dans  l'inquié- 
tude :  ils  y  sont  persécutés  jusqu'après  leur 
mort.  On  en  a  trainé  sur  la  Claye  &  a  la 
voirie  pour  avoir  persévéré  condamrnent  dans 
la  protelFion  de  la  vérité  jusqu'au  dernier  fou- 
çir;  ou  pour  avoir  renoncé  hautement  a  leur 
fignature  &  dételle  leur  foiblelîe  au  lit  de  la 
mort.  On  commença  par  la  Cronier  femme 
de  Vivien,  &  par  Pierre  Hébert.  Il  avoit 
F  2  servy 


84  Hijîoire  de  lEglifc 

servy  le  minière  le  Gendre,  fon  corps  fut  mis 
en  pièces  en  haine  de  son  Maître,  par  les 
Ecoliers  des  Jésuites,  qui  se  jouèrent  long- 
tems  de  ce  pauvre  cadavre,  &  luy  firent  les 
dernières  indignités.  Leur  rage  n'etoit  pas 
encore  afFouvie.  Mais  ses  Parens  qui  en  re- 
cueillirent les  pièces  de  nuit,  &  qui  Tentere- 
rent  dans  la  campagne,  le  dérobèrent  a  leur 
fureur.  Le  Fils  du  neur  Vereul  Chapelier  & 
le  nommé  TAlotiette  qui  n'avoient  pas  figné 
ne  laifferent  pas  d'être  traînés,  comme  les 
autres.  Le  Père  du  dernier  pour  comble  d'in- 
humanité fut  condamné  a  aflîfter  a  ce  trifte 
spedacle.  Les  parens  du  premier  y  parurent 
en  habit  de  deliil,  pour  avoir  part  a  sa  gloi- 
re. Anne  de  la  Sale  menacée  du  même  su- 
plice  s'en  rejoiiit  disant  que  c'etoit  le  plus 
grand  honneur  qu'on  luy  pût  faire  :  qu'elle 
ne  pouvoit  faire  une  réparation  trop  autenti- 
que  de  sa  faute,  ni  donner  affés  de  marques  de 
sa  repentance.  Dans  les  campagnes  voifmes 
de  la  ville  de  Roiien  on  a  été  encore  plus  cruel 
&  plus  furieux.  On  y  écorcha  Pierre  le  Vas- 
seur  de  Bolbec,  après  sa  mort  ;  &  après  y 
avoir  trainé  le  nommé  Bennetot  plus  de  deux 
lieues,  on  l'abandonna  aux  bêtes  sauvages. 
Une  femme  de  Dreux  ayant  recraché  l'Ho- 
flie  qu'on  luy  avoit  fait  prendre  par  force  les 
derniers  jours  de  sa  vie  fut  bruslée  après  son 

de- 


de  Roiïen.  85 

decés.  Il  y  en  eut  une  a  Rouen  qui  étant 
preflee  par  le  Vicaire  de  faint  Maclou  sa  Pa- 
roiffe  de  consentir  a  de  pareilles  abominati- 
ons s'ala  jetter  dans  la  Rivière.  On  conclu- 
oit  a  Ty  laiifer  périr  mais  enfin  ayant  été  re- 
peschée  &  portée  a  la  Magdeleine  elle  y  ren- 
dit Tesprit.  On  ne  sçait  point  de  quelle  ma- 
nière on  a  traité  le  fieur  du  Mont  Orfèvre, 
vieillard  de  quatre  vingt  huit  ans  demeuré  pa- 
ralytique dans  un  lit.  Car  les  Bigots  s"etans 
emparés  de  sa  maison,  ses  enfans  n'y  purent 
jamais  rentrer,  &  il  ell  mort  entre  les  mains 
de  ses  ennemis. 

On  peut  juger  par  cet  échantillon  de  la  fu- 
reur barbare  des  Persécuteurs  :  &  combien 
on  e(l  obligé  a  prier  Dieu  pour  ceux  qui  font 
encore  exposés  a  leur  violence.  Celle  qu"'ils 
exercèrent  envers  Monfieur  le  Baron  d'Heu- 
queville,  fils  aisné  de  Monfieur  de  la  Baso- 
ge  :  qui  avoit  fuccedé  a  Monfieur  fon  Père 
dans  fa  Charge;  dont  il  s'ètoit  deffait  quel- 
que tems  après  acheva  de  le  déterminer  a  tout 
quitter.  Il  fut  obligé  a  faire  amende  hono- 
rable dans  la  chajnbre  des  Requêtes  du  Pa- 
lais on  il  fut  condamné  :  la  torche  au  poin, 
&  avec  les  autres  cérémonies  accoutumées 
en  pareil  cas.  Cela  après  avoir  été  bien  bat- 
tu; pour  n'avoir  pas  voulu  fléchir  le  genouil 
devant  Tldole  :  ayant  eu  le  malheur  de  s'être 
F  3  laiffé 


86  Hijioire  de  l  Eglife 

laiifé  iurprendre  dans  la  fale  du  Palais  où  on 
dit  la  Meffe,  comme  on  y  levoit  THoftie. 
Le  jufte  chagrin  quil  en  conçut  fut  un  des 
moyens  dont  Dieu  se  fervit  pour  mettre  tou- 
te sa  famille  en  liberté. 

De  pareils  accidens  &  d'autres  encore  plus 
fâcheux  qui  menacent  les  fidèles  n'ont  pas 
empêché  la  pluspart  de  ceux  qui  demeu- 
rent a  Rouen  de  se  relever  &  d'}^  faire  une 
profeffion  affés  ouverte  de  la  vérité.  Les  Pa- 
lleurs  qui  y  ont  paffé,  comme  Meiïieurs  Co- 
tin,  la  Gacherie  &  d'autres  ont  rendu  de  bons 
témoignages  a  leur  repentance  &  a  leur  pieté. 
Les  Galériens  &;  les  prisonniers  qui  y  ont  fait 
quelque  séjour  n'ont  pas  été  moins  édifiés  de 
leur  charité  :  généralement  tous  les  pauvres 
qui  ont  besoin  de  leur  fecours  ont  sujet  de 
s'en  louer. 

Ils  ont  eu  &  ont  encore  tous  les  jours  bien 
des  occafions  d'exercer  la  charité  mais  ils  n'en 
ont  point  eu  de  plus  agréable,  que  celle  que 
Dieu  leur  a  fournie  en  la  persone  de  Moniieur 
Jean  Tirel  Pafteur  de  l'Eglise  du  Chef  Fresne, 
&  de  celle  de  Gavray  ensuite  :  toutes  deux 
dans  la  baffe  Normandie.  Ce  fidèle  Miniftre 
du  Saint  Evangile  avoit  été  arefté  quelques 
mois  avant  la  revocation  de  l'Edit,  fous  pré- 
texte d'une  promenade  faite  a  gerzé  fans  con- 
gé du  Roy.  Je  ne  fcay  quel  Areft  du  Conseil 

don- 


de  Rouen.  87 

donné  plus  de  cinquante  ans  auparavant  & 
ignoré  presque  de  tout  le  monde  dans  les  Pro- 
vinces, obligeoit  a  en  prendre  un  quand  on 
ibrtoit  du  Royaume.  Le  juge  de  Coutances 
après  bien  des  longueurs  qu'il  luyfaluteiruyer, 
la  pluspart  dans  un  cachot,  fans  autre 
compagnie  que  celle  du  Cadavre  d'une  fem- 
me de  la  Religion  à  qui  on  faisoit  le  procès 
pour  y  avoir  persévère  jusqu'à  la  mort  ;  Tavoit 
condamné  aux  Galères.  L'Apel  qu'il  interjetta 
d'une  sentence  fi  inique  le  conduifit  a  Rouen. 
Il  fut  mis  dans  la  Conciergerie  du  Palais, 
avec  quelques  autres  apellans,  comnie  luy 
de  divers  jugemens  rendus  pour  des  fujets  de 
cette  nature.  Le  Sieur  Samson  de  Cahanel 
Ancien  de  l'Eglise  de  S'.  Lo,  entr'autres 
condamné  a  une  prison  perpétuelle  pour  s'être 
mis  en  devoir  de  fortir  du  Royaume.  Il  ne 
faut  pas  icy  oublier,  en  palfan't  que  cet  An- 
cien fut  fi  peu  abatu  de  son  jugement  qu'il  re- 
présenta, par  une  espèce  de  raillerie,  a  fes 
juges,  quand  on  luy  lut  sa  fentence  qu'il  etoit 
bien  plus  propre  pour  les  Galères;  luy  qui 
ctoit  fort  &  vigoureux;  en  effet  sa  comple- 
xion  repond  a  l'on  nom  :  que  Monlieur  Ti- 
rel  qui  etoit  d'un  tempérament  foible  &  dé- 
licat :  qu'il  s'etonnoit  qu'on  ne  l'avoit  mis  a 
la  chaîne,  &  Monfieur  Tirel  en  sa  place,  que 
cela  auroit  été  plus  avantageux  pour  le  fervice 
du  Roy  F  4  Le 


88  Hijioire  de  VEglife 

Le  Parlement  tout  ennemi  qu'il  efl:  de  no- 
tre Religion  ne  put  pas  se  résoudre,  pour  ce 
coup,  a  confirmer  une  procédure  fi  injufle 
&  fi  violente.  Mais  parce  que  Tirel  &  Ca- 
hanel  se  difiinguoient  entre  les  Prisonniers 
Ton  craignit  que  leur  courage  &  leur  fermeté 
ne  fervit  a  fortifier  leurs  Compagnons.  Les 
Bigots  pour  Tempescher  s'avisèrent  de  man- 
dier  une  lettre  de  cachet  pour  transférer  le 
fieur  de  Gahanel  a  la  Bafiille,  d'où  il  fut  mis 
dans  le  Château  de  Loches  en  Anjou.  Ce 
fut  sa  délivrance,  car  il  en  fortit,  lors  que 
le  Roy  bannit  du  Royaume  ceux  que  la  pri- 
son ni  leConventn'avoientpu  vaincre.  Pour 
Monfieur  Tirel,  comme  son  caradere  le  ren- 
doit  plus  odieux,  on  l'envoya  dans  la  prison 
dertinée  a  ceux  qui  font  condamnés  aux  Ga- 
lères; pour  y  attendre  la  chaîne.  Il  n'y  eut 
point  d'autre  lit  d'abord  que  celuy  d'un  mi- 
lerable  Prêtre  accusé  de  Magie;  &  qui  ne 
le  quitta  que  pour  monter  fur  le  Bûcher;  ou 
il  luy  falut  expier  un  crime  fi  abominable. 
Le  Miniflire  y  fut  exposé  a  toutes  les  indig- 
nités qu'un  bon  Chrétien  peut  fouffrir  d'une 
Canaille  maudite,  comme  ert  celle  que  l'on 
voit  ordinairement  a  la  Chaîne,  qui  insultoit 
en  mille  manières  a  sa  misère;  toutes  les  fois 
qu'elle  se  trouvoit  dans  ce  redoutable  gifte. 
La  chose  même  ala  fi  loin,  une  nuit  qu'elle 

êtoit 


de  Roiïcn.  89 

ètoit  de  plus  mauvaise  humeur  que  de  coutu- 
me, qu'il  en  auroit  été  étrangle,  fi  le  Geô- 
lier ne  fut  accouru  au  bruit.  Le  danger  ou 
il  se  trouva  obligea  ce  Geôlier  que  Dieu  ren- 
doit  de  jour  en  jour  moins  farouche  &  plus 
favorable  a  ce  digne  Palteur,  a  le  transférer 
dans  une  chambre  haute.  Il  y  trouva  un  em- 
poisonneur qui  par  le  moyen  de  fes  amis,  en 
avoit  été  quitte  pour  une  prison  perpétuelle. 
Gétoit  un  homme  d'esprit,  dont  la  conver- 
sation n'etoit  pas  désagréable.  Ce  ne  fut  pas 
■le  feul  foulagement  qu'il  reçut  dans  sa  prison. 
Son  Gardien  s'acoutuma  peu  a  peu  a  fouffrir 
qu'il  fut  vifité  par  les  fidèles  de  Roiien.  Il 
leur  donna  même  tant  de  liberté,  avec  le 
tems,  qu'il  y  en  avoit  tousjours  qui  paffoient 
les  Feltes  &  les  Dimanches  avec  luy  dans 
l'exercice  de  tous  les  A6tes  de  la  Religion. 
Ce  ne  fut  pas  une  petite  consolation  a  ce  bon 
ferviteur  de  Dieu  de  pouvoir  jouir  de  la  douce 
ibcieté  de  fes  Frères.  Mais  ce  fut  un  admi- 
rable moien,  dont  la  bonne  Providence  fe 
fervit,  pendant  pluficurs  années,  pour  for- 
tifier fes  enfans  dans  leurs  combats.  Ce  fidèle 
Pafteur  y  travailloit  par  fon  exemple,  par 
fes  exhortations,  &  par  fes  prières.  Car  il 
faisoit  librement  toutes  les  fondions  de  fon 
Miniftere  avec  ceux  qui  le  vifitoient.  Cetoit 
un  autre  Joseph  dans  fa  prison  :  il  avoit  telle- 
F  5  ment 


go  Hijtoire  de  l'EgliJe 

ment  gagné  le  cœur  du  Geôlier  qu'il  faisoit 
tout  ce  qu'il  vouloit,  il  ne  Tempeschoit  pas 
même  de  consoler  ceux  qui  êtoient  a  la  chaî- 
ne pour  la  profeffion  de  TEvangile.  Il  y  en 
eut  un  de  fon  pays  dont  on  n'a  point  feu  le 
nom;  c'etoit  un  vieillard  de  plus  de  feptante 
ans;  exempt  par  conséquent  d'un  pareil  lu- 
plice  par  les  loix  du  Royaume;  qui  mourut 
entre  fes  bras,  en  glorifiant  Dieu,  la  liberté 
étoit  fi  grande  fur  la  fin,  qu'il  fortoit  quand 
il  luy  plaisoit,  pour  prendre  l'air  fur  le  Rem- 
part qui  touche  a  cette  prison.  Ce  fut,  a 
parler  humainement,  ce  qui  abrégeai  fes  jours. 
Car  comme  il  êtoit  a  la  promenade  il  fe  trou- 
va, par  hazar  fur  fon  chemin  des  hardes  in- 
fetlées  que  l'on  avoit  étendues  pour  les  éven- 
ter :  &  il  gagna  une  fièvre  qui  l'emporta 
en  peu  de  jours.  Ce  fut  de  cette  manière 
que  ce  bon  Confeffeur  consomma  fon  Mar- 
tyre. Il  avoit  été  reçu  au  Saint  Miniilere  en 
l'année  1662  &  s'etoit  aquité  de  toutes  les 
fondions  qui  en  dependoient  avec  zèle,  pen- 
dant que  Dieu  luy  en  avoit  donné  la  liberté. 
Il  n'édifia  pas  moins  dans  fa  prison,  que  dans 
fa  Chaire,  après  l'avoir  perdue.  Aulfi  Dieu 
ne  l'a  s'il  jamais  laiffé  fans  quelque  conso- 
lation. Car  s'il  a  eu  la  douleur  de  fe  voir  en- 
lever deux  filles,  au  berceau,  l'ainée  n'ayant 
pas  cinq  ans,  lors  qu'elles  furent  mises  a  la 

pro- 


de  Rouen.  91 

propagation  par  Tordre  de  Madame  de  Ma- 
tignon, il  a  eu  la  consolation  de  favoir  le  relie 
de  l'es  enfans  en  liberté,  a  la  referve  de  l'on 
Fils  aisné.  Le  plus  petit  même  qui  n'avoit 
que  trois  ans  quand  fon  Père  fut  mis  en  pri- 
son eft  forti  du  feminaire  où  on  Tavoir  mis. 
Tous  les  foins  que  Ton  prit  pour  le  corrom- 
pre furent  inutiles  il  conserva,  auffi  bien  que 
plufieurs  autres  enfans  qui  gemiffoientdansle 
même  esclavage,  quelque  idée  de  fon  origine 
qui  fe  fortifiant  avec  Tage  le  mit  enfin  en  état 
d'echaper  aux  ennemis  de  fon  falut.  Il  pafta 
a  Rouen,  ou  il  reçut  la  bénédiction  de  fon 
Père  qui  rendit  grâces  a  Dieu  de  fa  délivran- 
ce, &  il  eft  mort  en  Angleterre  ou  le  Père  eut 
la  joye  de  le  favoir  arrivé  avant  que  d'aler  re- 
cevoir la  couronne  de  fes  travaux.  Ses  filles 
n'ayant  pu  s'empescher  de  donner  quelques 
larmes  a  la  mort  d'un  fi  excelent  Père,  la  Su- 
périeure de  la  propagation  les  obligea  a  en 
faire  une  pénitence  aulfi  extravagante  qu'elle 
eft  cruelle.  Car  il  leur  falut  palier  plufieurs 
fois,  le  jour,  je  ne  fcay  combien  de  tems 
par  deffous  leur  lit.  C'eit  le  propre  de  la  fu- 
perftition  de  n'être  pas  feulement  folle  &  in- 
sensée :  mais  encore  plus  dénaturée.  Dieu 
parla  bonté  veuille  rompre  les  liens  barbares 
qui  y  attachent  ces  pauvres  créatures. 
Une  grâce  aufli  extraordinaire  que  celle  que 

Dieu 


02  Hijloire  de  l'Eglise 

Dieu  fit  a  nôtre  Pafteur  de  luy  faire  recou- 
vrer, par  une  espèce  de  resurredion  ce  cher 
enfant  qu'il  avoit  perdu,  doit  consoler  les 
Pères  &  les  Mères,  dont  on  a  ravi,  &  dont 
on  ravit  encore  tous  les  jours  les  enfans  pour 
les  proftituer  a  Tldole.  Car  Dieu  eft  tousjours 
le  même,  tousjours  bon,  tousjours  miséri- 
cordieux, tousjours  en  état  de  furprendre 
les  fages  du  monde  en  leurs  ruses,  &  de  rom- 
pre toutes  les  mesures  qu'ils  prennent  pour 
leduire  fes  enfans.  Ils  n'ont  qu'a  imiter  la 
pieté  &  la  confiance  de  ce  fidèle  Berger  pour 
éprouver  la  même  faveur. 

Les  dernières  démarches  que  l'on  a  faites, 
pour  achever  de  détruire  l'Eglise,  ont  fait 
de  grands  desordres;  &  causé  une  horrible 
confternation  a  Rotien.  Car  tous  ceux  a  qui 
ils  reftoit  de  jeunes  enfans  s'en  font  vus  pri- 
vés en  un  même  jour.  Les  filles  ont  été  la 
proye  des  Convens;  &  les  garçons  celle  d'un 
Apoftat  apellé  Flamare,  du  pays  de  Caux. 
Ce  misérable  ayant  autrefois  fervi  de  valet  a 
Monfieur  de  L'Arroque  pendant  qu'il  exer- 
coit  fon  Miniftere  a  Rotien,  a  eu  l'impuden- 
ce de  répandre  dans  le  monde  qu'il  avoit  étu- 
dié en  Théologie;  par  ce  moyen  il  a  non 
feulement  escroqué  la  penfion  que  le  Roy  don- 
ne aux  Proposans  révoltés  :  mais  de  plus  il 
s'eft  fait  donner  les  Ordres.  Car  tout  efl:  bon 

au 


de  Rouen.  q'i 

au  Clergé  Romain.  Dabord  qu'il  s'eft  vu  prê- 
tre, il  a  enlevé  tout  ce  qu'il  y  a  d'enfans  de 
bonne  maison  a  Rouen,  dont  il  tire  de  grof- 
iespenfions.  Dieu  délivrera  Ton  Eglise  quand 
il  luy  plaira,  de  ce  Loup  raviffant,  par  les 
voyes  qu'il  fçait  être  dignes  de  fa  charité  & 
de  fa  fageffe. 

Deux  filles  de  Monfieur  de  Colleville  ci 
devant  Conseiller  au  Parlement  avoient  été 
du  nombre  de  celles  que  Ton  n'a  pu  dérober 
a  la  vigilance  des  Inquifiteurs  :  tellement 
qu'on  les  avoit  logées  dans  le  Couvent  des 
Ursulines  de  Caën  ou  la  Mère  les  avoit  me- 
nées, pensant  les  y  cacher  plus  facilement 
qu'à  Roiien.  Mais  quelque  hautes  que  foient 
les  murailles  de  cette  prison;  elles  n'ont  pu 
mettre  d'obftacle  a  leur  liberté.  Dieu  les  en 
a  tirées  par  fon  bras  puiffant,  le  Père  foupçon- 
né,  linon  d'avoir  eu  part  a  leur  evafion  ;  au 
moins  de  favoir  le  lieu  de  leur  retraite  que 
l'on  n'a  pu  découvrir  jusqu'icy,  avoit  été 
arefté.  Mais  après  l'avoir  gardé,  longtems 
dans  le  Château  de  Caën  fans  en  pouvoir  rien 
tirer;  foit  qu'il  ignorât  effedivement  ce  qu'on 
luy  demandoit;  foit  qu'il  aimât  mieux  fouf- 
frirque  de  contribuer  a  la  perte  de  fes  enfans: 
on  luy  a  encore  une  fois  ouvert  les  portes 
de  fa  prison.  Car  c'eft  la  troifiême  où  la  qua- 
trième fois  qu'il  a  été  emprisonné  depuis  la 

revo- 


94  Hijioire  de  VEgliJe 

revocation  de  l'Edit.  Bon  Dieu  quelle  ex- 
trémité. Que  Ton  a  grand  besoin  d'une  grâ- 
ce particulière  pous  fuporter,  patiemment 
des  épreuves  auffi  longues  &  aulîi  dures,  que 
celles  où  nos  chers  Frères  font  tous  les  jours 
exposés.  Ils  ont  grand  besoin  de  patience, 
afin  qu'ayant  fait  la  volonté  de  *  Dieu,  ils 
en  remportent  la  promeffe.  Encore  un  peu 
de  tems,  &  celuy  qui  doit  venir  viendra;  il 
ne  tardera  point.  Or  le  jufte  vivra  de  foy  : 
mais  fi  quelqu'un  fe  fouftrait  mon  ame  ne 
prend  point  de  plaifir  en  luy,  dit  le  Sei- 
gneur. 

L'Eglise  de  Roiien  gémit  encore  pour  un 
de  fes  chers  enfans.  G'eft  Monfieur  Paul 
Gardel,  reçu  au  Saint  Miniftere  fur  la  fin  de 
l'année  1681,  pour  fervir  une  Eglise  de  Fief 
qui  elloit  a  quatre  lieues  de  Roiien.  Ce  bon 
pafleur  étant  parti  de  Hollande  en  1688  avec 
Monfieur  Cottin  pour  aler  prescher  fous  la 
Croix  fut  areflé  a  Paris,  par  la  perfidie  d'une 
femme,  qui  le  conduifit  dans  une  maison  où 
il  devoit  y  avoir  un  malade.  Le  jugement 
qu'il  luy  falut  fubir  le  condamne  a  une  pri- 
fon  perpétuelle.  Il  y  a  tantôt  quinze  ans 
qu'il  eli  dans  un  fi  déplorable  état,  fans  que 
l'on  en  ait  entendu  parler,  non  plus  que  de 
Meilleurs   Mathurin,   Malzac   &  de  Salve; 

trois 

*  Hebr.   10,  35,  Sy,  38. 


de  Rouen.  96 

trois  autres  Pafteurs  Ibrtis  les  uns  après  les 
autres,  des  Provinces  unies,  pour  le  même 
lujei  :  qui  ont  eu  le  même  fort.  L'ignoran- 
ce ou  font  tous  leurs  amis,  de  ce  qui  peut 
leur  être  arrivé  durant  une  fi  longue  déten- 
tion ert  une  marque  certaine  de  leur  fermeté 
inébranlable.  Car  s'ils  avoient  eu  la  moin- 
dre foibleffe,  on  n'auroit  pas  manqué  a  le 
publier. 

Si  les  Fidèles  de  Roiien  ont  eu  devant  les 
yeux  l'exemple  édifiant  de  ces  deux  fidèles 
palleurs  dont  nous  avons  parlé,  d'ont  l'un  ell 
né  dans  leur  fein,  &  l'autre  y  est  mort  en 
glorifiant  Dieu  :  s'ils  font  témoins  de  la  fer- 
meté &  de  la  confiance  de  ces  deux  martyrs 
que  leur  foy  a  foutenus,  &  foutient  :  ils  ont 
au  contraire  la  mortification  de  voir  dans  leur 
ville  un  lâche  &  un  infidèle  ferviteur  qui  sejl 
foujîrait  a  fon  Maître,  pour  fe  rendre  esclave 
de  l'Antechrift;  &  qui  en  a  pris  non  feule- 
ment les  livrées  :  mais  même  les  Ordres  : 
tellement  qu'il  eft  aujourd'huy  Curé  d'une 
Paroilfe  de  Rouen  :  au  grand  fcandale  de 
l'Eglise  qui  ne  fauroit  affes  detefter  fon  Apo- 
ftalie.  Je  tairay  icy  fon  nom  en  faveur  de 
les  Parens,  qui  ayant  bien  fait  leur  devoir 
font  en  édification  dans  les  lieux  ou  ils  fe  font 
retirés.  Il  vaudroit  mieux  le  ramentevoir  a 
Dieu,  qu'aux  hommes  &.  faire  des  prières 

pour 


96  Hijioire  de  VEglife 

pour  la  converfion  s'il  n''etoit  a  craindre  qu'il 
ait  péché  contre  le  faint  Esprit.  Car  quoy 
qu'il  ait  moins  de  lumières,  que  celuy  des 
Miniftres  de  Dieppe,  qui  est  tombé  dans  le 
même  abyme  :  il  en  a  fufTisamment  pour  pé- 
cher, de  cet  horrible  péché  a  mort  pour  le- 
quel Saint  *  Jean  ne  veut  point  qu'on  prie. 
On  a  veu  tant  de  caraderes  de  ce  crime  affreux 
dans  la  mort  de  ce  mauvais  Ange  qui  avoit 
lervi  a  Dieppe  que  l'on  n'y  peut  penser  fans 
horreur.  Car  il  parut  les  derniers  jours  de  fa 
vie  dans  un  desordre  &  dans  un  accablement 
fi  extraordinaire  qu'on  ne  put  jamais  tirer 
une  parole  de  fa  bouche,  fon  esprit  êtoit  fans 
comparaison  plus  malade  que  fon  corps.  Il 
fembloit  même  que  l'afflidion  du  corps  ne 
vint  que  de  celle  de  l'esprit  :  &  que  fon  feul 
desespoir  le  mit  au  tombeau.  Deux  filles 
qu'il  avoit  auprès  de  luy  en  furent  fi  effrayées 
qu'elles  abandonnèrent  tout  pour  fe  rejoindre 
a  leur  Mère,  qui  est  en  Angleterre  avec  fon 
Fils,  qui  a  eu  le  courage  d'embraffer  le  Saint 
Miniftere  que  le  Père  avoit  fi  lâchement 
abandonné;  &  qui  fert  avec  édification.  Que 
celuy  qui  eft  debout  prenne  garde  qu'il  ne 
tombe  :  f  qu'il  ne  s'élève  point  par  orgueil  : 
que  fe  deffiant  au  contraire  de  fes  forces,  il 

s'hu- 

*!.£>.  5.  16. 

+  Rom. 


de  Rouen.  97 

s'humilie  fous  la  main  de  Dieu,  &  qu'il  im- 
plore inceffammem  fa  miséricorde  &  fa  grâce. 
Qu'il  lutte  conftamment  avec  Dieu,  com- 
me Jacob,  jusqu'à  ce  qu'il  luy  ait  accordé 
fa  benedidion.  Dieu  qui  a  commencé  fon 
bon  œuvre  en  nous  veuille  l'achever  jusqu'à 
la  journée  de  Christ.  Amen. 


"Philippe  le  Gendre  &  Jacques  Tiafnage 
oMiniftres  à  QuepiUj',  ayant  apris  que 
l'on  faifoit  Informer  contreux  fous  le 
nom  de  çMonfieur  le  'Procureur  General; 
ils  ejperent  faire  connoitre  à  la  Cour, 
que  leur  conduite  efi  fans  reproche,  & 
qu'ils  n'ont  point  contrevenu  en  aucu- 
ne manière  aux  'Déclarations  de  fa  oMa- 
jefié. 

IL  ne  leur  fera  pas  poffible  de  répondre  à 
toutes  les  choses  dont  on  les  accuse,  par- 
ce qu'elles  leur  font  inconnues,  &  fi  leur  en- 
nemy  fecret  &  les  Témoins  qui  luy  font  dé- 
vouez, ne  s'étoient  point  vantez  de  la  ma- 
nière odieuse  dont  ils  fe  font  fervis  pour  les 
perdre  :  ils  fçauroient  à  peine  qu'on  a  formé 
des  accusations  contr'eux. 

G  Ils 


()8  Hijloire  de  VEgliJe 

Ils  fçavent  feulement  de  certain  qu'il  y  a 
quelques  mois  qu'ils  furent  Allignez  à  la  Re- 
quefte  de  Monîieur  le  Procureur  General, 
fans  leur  déclarer  néanmoins  le  fujet  pour  le- 
quel il  les  faisoit  Affigner. 

Mais  ils  aprirent  par  les  demandes  qui  leur 
furent  faites  lors  qu'on  les  Interrogea,  qu'on 
leur  imputoit  d'avoir  fouffert  la  fille  du  feu 
fieur  de  Montaigu  dans  le  lieu  de  leur  Exer- 
cice, ils  ont  fumsamment  répondu  à  cette 
objediion,  par  leur  Interrogatoire,  &  ils 
ont  fait  voir  que  le  feu  fieur  de  Montaigu 
père  de  cette  fille,  étant  mort  en  la  Profef- 
fion  de  la  Religion  Prétendue  Réformée,  les 
enfans  y  dévoient  être  élevez,  fuivant  l'Ati- 
cle  39.  de  la  Déclation  de  l'année  1669.  non- 
obllant  que  leur  mère  euft  changé  de  Reli- 
gion; &  que  pour  cet  effet  les  Enfans  fe- 
roient  mis  entre  les  mains  des  Parens  de  la 
Religion  Prétendue  Réformée,  ce  qui  auroit 
été  confirmé  par  un  Arreft  du  Conseil  d'Etat, 
de  l'année  1678.  pour  les  Enfans  du  fieur  Ro- 
ger Marchand  en  cette  Ville,  quoy  que  la 
mère  qui  s'étoit  faite  Catholique  prétendit 
les  avoir,  &  par  la  Déclaration  de  l'année 
i683  il  eft  défendu  feulement  de  mener  aux 
Exercices  de  lad.  Religion  Prétendue  Réfor- 
mée, les  Enfans  dont  les  pères  le  font  faits 
Catholiques;  mais  il  n'y  eft  fait  aucune  men- 
tion des  mères.  Ce- 


de  Roïien.  ot) 

Cependant  les  Parens  de  lad.  fille,  aux- 
quels la  mère  Tavoit  confiée,  depuis  qu'ils 
furent  avertis  que  le  fieur  Curé  de  laint  Elov 
avoit  fait  fignifier  à  l'un  des  Deftendeurs', 
fans  toutefois  être  avertis  par  aucun  Magi- 
llrat,  que  la  dite  mère  avoit  changé  de  Reli- 
gion :  le  font  abstenus  de  la  mener  au  Tem- 
ple à  Quevilly,  &  en  effet  elle  n'y  a  point 
été,  bien  que  quand  cela  ne  feroit  pas  on 
n'en  pourroit  imputer  aucune  faute,  puisque 
non  feulement  ils  ne  pourroient  pas  remar- 
quer tous  ceux  qui  entrent  dans  leur  Temple; 
mais  même  qu'ils  ne  l'auroient  pu  reconnoî- 
tre,  ne  l'ayant  vûë  qu'une  feule  fois,  il  y  a 
plus  de  quatre  années. 

Voilà  la  feule  accusation  dont  ils  ont  con- 
noiffance  &  dont  ils  le  jullifient,  &  par  des 
Déclarations  &  par  des  Arrells  authentiques, 
&  par  une  neance  du  fait,  &  par  une  im- 
polFibilité  qui  les  mettroit  à  couvert  quand 
même  le  fait  feroit  véritable. 

Ils  ont  encor  apris  par  un  bruit  commun 
qu  on  leur  impute  d'avoir  reçu  dans  leur 
Temple  une  petite  fille  de  Maître  David  du 
Mont  Procureur,  &  un  autre  du  fieur  Mau- 
rice, mais  outre  que  cela  n'ell  point  vérita- 
ble, &  même  que  cela  fe  feroit  fait  fans  leur 
participation  &  fans  qu'ils  puffent  l'empescher 
pour  n'en  avoir  connoiffance,  ils  ne  peuvent 
G  2  paf- 


100  Hijloire  de  VEglife 

pafler  fous  filence  ce  qui  eft  fi  connu  par  la 
Ville,  &  qui  a  fait  horreur  à  tous  les  gens 
de  bien,  que  le  fieur  Curé  de  faint  Eloy  ayant 
a  mené  luy  même  le  fieur  &  la  Dame  le 
Coq,  pour  rapporter  qu'ils  avoient  vu  la  fille 
dud.  du  Mont  dans  un  Carofl"e  qui  alloit  à 
Quevilly,  fur  ce  qu'on  reprocha  aud.  le  Coq 
qu'il  auroit  dû  expliquer  précisément,  fi  lors 
qu'ils  avoient  vu  aller  à  Quevilly  la  fille  dud. 
du  Mont,  c'étoit  avant  ou  depuis  la  Décla- 
ration, il  avoit  répondu  qu'il  s'étoit  bien 
consulté  &  qu'il  avoit  pu  parler  ambiguement 
pour  perdre  ceux  de  la  Religion  Prétendue 
Réformée.  Mais  l'artifice  desdits  le  Coq  se 
découvrira  par  la  diftindion  des  temps,  & 
l'on  trouvera  fans  doute  que  s'ils  l'ont  vûë 
dans  un  Carofle  avec  fa  mère  c'étoit  aupara- 
vant la  Déclaration,  &  en  un  tems  où  cela 
n'étoit  point  défendu,  &  cela  ne  peut  être 
autrement,  par  ce  qu'aufli-toft  que  les  Def- 
fendeurs  eurent  connoilTance  de  la  Déclara- 
tion du  Roy,  &  auparavant  même  qu'elle 
fut  Enregiftrée  a  la  Cour,  ils  firent  avertir 
les  Dames  du  Mont  &  Maurice,  de  ne  me- 
ner plus  leurs  filles  aud.  Temple  de  Que- 
villy. 

Pour  les  Relaps  les  Defîendeurs  ne  peu- 
vent deviner  ce  qu'on  leur  peut  imputer  à  cet 
égard,  n'en  connoiffant  aucun  qui  ait  été  en 

état 


de  Roiien.  loi 

état  de  les  furprendre,  &  d'ailleurs  ne  leur 
ayant  été  donné  aucune  connoiflance,  ny 
fignifié  aucune  Lifte  de  Relaps,  quoy  qu'aux 
termes  des  Déclarations  dés  années  1679.  ^ 
i683.  &  de  TArreft  de  la  Cour  cela  fuft  né- 
ceffaire,  on  ne  leur  peut  imputer  d'avoir 
fouffert  des  Relaps,  puis  qu'ils  n'étoient  pas 
à  leur  connoiflance. 


ARREST  DE  LA  COUR  DE 

Parlement,  rendu  le  dernier  Janvier 
i685.  contre  les  Relaps,  &  qui  ajourne 
les  Miniftres  de  la  R.  P.  R.  en  com- 
parence  personelle,  &  cependant  inter- 
dits des  fondions  de  leur  Miniftere,  à 
la  reserve  du  Sacrement  de  Baptême 
par  provifion  feulement. 

V EU  par  la  Cour  l'Arreft  d'icelle  du  dix- 
huitiéme  jour  d'Avril  dernier  donné  fur 
le  Requifitoire  du  Procureur  General  du  Roy, 
par  lequel  il  a  été  dit  qu'il  fera  informé  par 
devant  les  Conseillers  Commiflaires,  de  l'en- 
leyement  de  Damoiselle  Efter  Huë  de  Mon- 
taigu  âgée  feulement  de  douze  ans.  Infor- 
G  3  ma- 


I02  Hijîoire  de  VEgUJe 

mation  faite  en  conséquence  du  vingt-unième 
dudit  mois  &  an.  Conclufions  du  Procureur 
General  du  Roy  du  troifiéme  jour  de  Juin 
audit  an.  Arrest  de  la  dite  Cour  du  douziè- 
me jour  du  dit  mois  &  an,  qui  ordonne  que 
Damoiselles  Jeanne  &  Eiter  le  Seigneur  fe- 
ront affignées  pour  être  ouyes  &  interrogées 
fur  les  charges  du  Procès,  &  Commillion 
accordée  au  dit  Procureur  General  pour  faire 
appeler  en  la  Cour  les  Ministres  de  Quevilly 
pour  répondre  à  fes  Conclulions.  Interro- 
gatoires desdits  le  Seigneur  du  vingt-huitiè- 
me jour  de  Novembre  dernier.  Autre  Ar- 
reft  de  la  dite  Cour  du  feptiéme  Juillet  der- 
nier, donné  fur  un  autre  Requifitoire  dudit 
Procureur  General,  par  lequel  il  est  dit  que 
par  lesdits  Conseillers  Commiffaires  à  ce  com- 
mis il  fera  informé,  même  par  Monitoires, 
de  ce  qu'au  préjudice  de  la  Déclaration  du 
Roy  du  dix-feptiéme  Juin  i683.  &  de  l'abju- 
ration de  la  dite  R.  P.  R.  faite  par  M"'  Pierre 
Maurice  &  David  du  Mont,  leurs  filles, 
Tune  âgée  de  douze  ans,  &  Tautre  de  huit 
ou  neuf  ans  ont  été  menées  plufieurs  fois  par 
leurs  mères  au  Presche  de  Quevilly,  &  cepen- 
dant ordonne  que  lesdits  Maurice  &  du  Mont 
feront  tenus  de  représenter  inceflamment 
leursdites  filles  pour  les  faire  indruire  à  la  Re- 
ligion Catholique,  Apostolique  &  Romaine, 

le 


de  Rouen.  io3 

le  dit  Arrest  fignifié  le  huitième  du  dit  mois 

6  an  ausdits  Maurice  &  du  Mont,  avec  com- 
mandement d'y  fatisfaire.  Autre  Arrest  de 
la  dite  Cour  du  onzième  Juillet  auffi  dernier 
donné  en  exécution  du  précèdent  Arrest. 
Monitoire  obtenu  à  la  requeste  du  dit  Procu- 
reur General  du  Roy  du  vingt-unième  dudit 
mois  &  an.  Informations  faites  pardevant 
lesdits  Conseillers  Commiffaires  des  i.  3.  & 

7  Aoust,  &  1 1  Décembre  dernier.  Ade 
exercé  par  devant  lesdits  Conseillers  Com- 
millaires  contenant  la  déclaration  des  Sieurs 
Janse,  le  Gendre  &  Basnage  Miniftres  de 
Quevilly  du  dit  jour.  Extrait  du  Registre 
des  Abjurations  faites  en  TEglise  Paroilïiale 
de  Nôtre- Dame  de  Caën,  faisant  mention 
que  le  14  Janvier  1682.  Damoiselle  Marie 
Magdelaine  Samborne  veuve  de  Jacob  Huë 
fieur  de  Montaigu  de  la  Paroiffe  de  Thiefîé 
Vicomte  de  Bayeux  j  a  fait  abjuration  de  la 
R.  P.  R.  ce  qui  a  été  fignifié  aux  Ministres 
de  Caën  le  21  Juillet  au  dit  an.  Autre  ex- 
trait du  2  May  168  3.  des  regiftres  des  abju- 
rations faites  en  la  maison  des  nouvelles  Ca- 
tholiques de  Caën,  contenant  que  le  dit  jour 
Gabriel  Huë  de  Montaigu,  Damoiselles 
Marie  Magdelaine  &  Anne  Huë  Ibeurs  dudit 
Gabriel  enfans  du  dit  feu  Jacob  Huë  de  Mon- 
taigu &  de  la  dite  Damoiselle  Marie  Magde- 

G  4  lai- 


[04  Hijîoire  de  VEglife 

laine  Samborne  ont  Abjuré  la  R.  P.  R.  entre 
les  mains  du  Sieur  Evesque  de  Bayeux.  Ex- 
ploit fait  à  la  Requefte  de  Maître  François 
Lieffe  Prestre,  Curé  de  S.  Eloy,  contenant 
la  fignification  faite  à  M*  Jacques  Basnage 
Ministre  de  Quevilly  pour  luy  &  les  autres 
Ministres,  que  la  dite  Damoiselle  Veuve  du 
dit  Sieur  Hue  de  Montaigu  a  fait  abjuration 
de  la  R.  P.  R.  &  qu'elle  est  mère  de  la  dite 
Damoiselle  Ester  Hue,  laquelle  demeure  en 
lad.  Paroiffe  de  S.  Eloy  en  la  maison  de  la 
dite  Damoiselle  Ester  le  Seigneur  veuve  de 
Tobie  Moisant  &  tante  de  la  dite  de  Mon- 
taigu du  I .  d'Avril  dernier.  Arrest  du  Con- 
seil d'Estat  du  20  Juin  1678.  Déclaration  de 
Sa  Majefté  contre  les  Relaps  &  Apostats, 
&  pour  la  forme  des  abjurations  du  r  o  Octo- 
bre 1679.  registrée  en  lad.  Cour  le  21  No- 
vembre audit  an.  Autre  Déclaration  du  Ro}^ 
donnée  à  Compiegne  au  mois  de  Mars  i683. 
registre  en  la  Cour  le  9  Avril  aud.  an.  Lad. 
Déclaration  de  Sa  Majesté  du  17  Juin  i683. 
portant  que  les  enfans  âgez  de  14  ans  &  au 
deffous  dont  les  pères  auront  abjuré  la  R.  P.  R . 
feront  élevez  en  la  Religion  Catholique,  re- 
gistrée es  registres  de  la  Cour  le  3o.  Juillet 
au  dit  an.  Défenses  par  écrit  desdits  Mini- 
stres de  Quevilly,  non  lignées  ny  dattées. 
Requeste  présentée  à  la  Cour  par  le  dit  du 

Mont 


de  Roïien.  io5 

Mont  le  douzième  de  ce  mois  pour  luy  être 
accordé  a6te  qu'il  a  représenté  la  dite  fille  en 
la  dite  Cour.  Conclurions  du  Procureur  Ge- 
neral du  quinzième  de  ce  mois.  Requifitoire 
dudit  Procureur  General  de  ce  jour  à  ce  qu'il 
foit  informé  par  devant  les  Conseillers  Com- 
miflaires  contre  plufieurs  relaps  receus  au 
Presche  de  Quevill}^  autres  que  ceux  nom- 
mez dans  lesdites  Informations.  Tout  con- 
fideré,  &  oiiy  le  Rapport  du  Sieur  Fauvel 
de  Touvens  Conseiller  CommifTaire.  LA 
COUR,  veu  ce  qui  resuite  desdites  Informa- 
tions &  du  dit  Procès,  Ordonne  que  lesdits 
le  Gendre  &  Bafnage  Miniftres  de  la  R.P.R. 
feront  ajournez  à  comparoir  en  perfonne  pour 
être  oûys  &  interrogez  par  devant  les  Con- 
feillers  Commiflaires  fur  les  charges  desdites 
Informations,  lesquelles  à  cet  effet  feront 
jointes  pour  être  fait  droit  fur  le  tout  par  un 
leul  &  même  Arrefl,  après  rinftruétion  & 
perfeèlion  desdites  instances;  &  cependant 
a  fait  défenses  ausdits  Miniflres  de  faire  au- 
cune fondion  ny  exercice  de  leur  Minillere, 
à  la  reserve  du  Sacrement  de  Baptême  que  la 
Cour  leur  enjoint  d'adminiftrer  dans  les  mai- 
sons des  pères  &  mères  de  la  dite  R.P.R. 
parprovifion  feulement  &  jufques  à  ce  qu'au- 
trement par  Sa  Majeftè  il  y  ait  été  pourveu, 
en  présence  du  Lieutenant  General  Civil  ou 
G  5  run 


io6  Hijîoirc  de  l'Eglife 

Tun  des  Officiers  du  Bailliage  &  Siège  Pre- 
fidial  de  cette  Ville,  fans  y  apporter  aucun 
delay;  &  en  cas  d'urgente  neceffité  permet 
aux  Obtetrices  d'ondoyer  les  enfans,  luivant 
TArreil  de  la  Cour  du  22  Avril  1681 .  donné 
en  conséquence  de  la  Déclaration  du  Roy  du 
22  Février  1680.  Et  à  l'égard  des  Enfans 
desdits  de  la  R.  P.  R.  qui  naîtront  dans  les 
Paroiffes  &  Villages  de  la  campagne,  ils  y 
feront  pareillement  baptisez  en  la  forme  cy- 
deflus  ordonnée,  en  présence  de  l'un  des 
Marguillers  de  chacune  Paroiffe;  descjuels 
Baptêmes  feront  faits  bons  &  fidèles  registres 
par  lesdits  Miniftres  qui  feront  fignez  par  les- 
dits  Juges  &  Marguilliers,  avec  les  parrains 
&  marraines,  fuivant  &  conformément  aux 
Ordonnances  &  Déclarations  de  Sa  Majefté. 
Ordonne  auffi  la  dite  Cour  que  lesdits  Pierre 
Maurice  &  David  du  Mont  &  leurs  femmes 
feront  ajournées  àcomparoirpersonnellement 
en  la  Cour  pour  y  être  oiiis  &  interrogez  fur 
les  charges  du  Procès.  Accorde  compulfoire 
audit  Procureur  General  pour  faire  apporter 
les  extraits  des  Baptêmes  des  Filles  desdits 
Maurice  &  du  Mont.  Fait  inhibitions  & 
deffenses  à  toutes  personnes  de  la  R.  P.  R. 
de  retenir  les  enfans  des  personnes  qui  fe  fe- 
ront converties  à  la  Religion  Catholique, 
Apoftolique  &  Romaine  au  defTous  de  1  âge 

por- 


de  Rolien.  107 

porté  par  la  dite  Déclaration  du  17  Juin  i683. 
&  de  les  empescher  d'être  instruits  des  my- 
lleres  de  la  Religion  Catholique,  Apoftoli- 
que  &  Romaine,  fur  les  peines  contenues 
aux  Déclarations  de  Sa  Majefté.  Fait  pareil- 
lement deffenses  ausdits  Maurice  &  du  Mont, 
&  à  tous  autres  nouveaux  Catholiques  de 
fouflrir  que  leurs  enfans  au  deflbus  de  Page 
porté  par  la  dite  Déclaration  du  Roy  faffent 
autre  profeflîon  ny  exercice  que  de  la  dite  Re- 
ligion Catholique,  Apostolique  &  Romai- 
ne. Et  veu  ce  qui  resuite  de  la  dite  Infor- 
mation du  quatrième  Décembre  dernier. 
Ordonne  la  dite  Cour  que  le  nommé  Portrait 
prévenu  du  crime  de  Relaps,  &  Judith  le 
Prevoll  auffi  prévenue  du  dit  crime  feront  pris 
&  appréhendez  au  corps,  mis  &  conlfituez 
prisonniers  en  la  Conciergerie  de  la  Cour  pour 
être  ouis  &  interrogez  fur  les  charges  con- 
tr'eux  rapportées  par  la  dite  Information, 
&  en  cas  de  fuite  ou  absence  leurs  biens  fe- 
ront faifis  &  annotez,  &  leur  procès  fait  & 
parfait  félon  les  formes  prefcrites  par  TOr- 
donnance.  Sera  auflî  la  nommée  Caron  ad- 
journée  à  comparoir  en  personne  pour  être 
ouie  &  interrogée  fur  les  charges  contr'elle 
rapportées  par  la  dite  Information.  Con- 
darnne  la  dite  Caron  à  représenter  dans  le  mois 
du  jour  de  la  fignification  du  présent  Arrefl 

Fran- 


io8  Hijioire  de  l'Eglife 

François  Nez  fon  petit  fils,  autrement  & 
le  dit  temps  pafle  elle  y  fera  contrainte  mê- 
me par  corps.  Accorde  commiffion  au  dit 
Procureur  General  du  Roy  pour  faire  affig- 
ner  en  la  Cour  le  nommé  Chauvel  de  Dieppe, 
&:  les  nommez  Noblet  demeurants  à  Rouen 
rue  des  Charrettes,  David  Meriot,  &  Jac- 
ques Fabulet  demeurant  rue  Martainville  en 
la  maison  d'André  Fabulet  fon  frère,  pour 
répondre  à  fes  Conclufions.  Accorde  aufli 
compulfoire  au  dit  Procureur  General  du  Roy 
pour  faire  apporter  au  Greffe  de  la  Cour  les 
Livres  &  Regiftres  faifans  mention  des  chan- 
gemens  de  Religion  ;  enfemble  le  livre  ou  re- 
giilre  du  dernier  Synode  tenu  à  Quevilly  en 
prefence  du  Sieur  de  Tierceville  commis  par 
Sa  Majefté.  Et  faifant  droit  fur  le  Requifi- 
toire  de  ce  Jour  du  Procureur  General  du  Roy. 
Ordonne  qu'il  fera  informé  du  contenu  en 
iceluy,  même  par  Monitoire,  par  devant 
lefdits  Confeillers  Commiffaires,  pour  Tln- 
formation  faite  &  à  luy  communiquée  être 
fait  droit  ainfi  que  de  raifon  ;  «&  fera  paffé 
outre  aux  Aggraves  &  Reaggraves  tant  du 
premier  que  du  dernier  Monitoire  ordonné 
par  le  prefent  Arreft,  lequel  fera  imprimé, 
leu,  publié,  &  affiché  aux  lieux  ordinaires 
&  accoutumez.  Fait  à  Rouen  en  Parlement, 
le  dernier  jour  de  Janvier  mil  fix  cens  quatre- 
vingt-cinq.  Signé,  DE  BOURREY.  FAC- 


de  Rouen.  109 

FACTUM, 

POUR  Philippe  le  Gendre,  &  Jacques 
Bafnage,  Miniftres  de  la  Religion  Pré- 
tendue Reformée  à  Quevilly,  Défen- 
deurs. 

CONTRE 

Monfieur  le  Procureur  Général,  Demandeur. 

IL  y  a  bien  des  faits  dans  le  procez  dont  il 
s'agit  :  Mais  on  ne  craint  point  de  dire 
que  lors  que  la  Cour  les  aura  examinez  avec 
la  juftice  &  Téquité,  qui  paroît  dans  les  ju- 
gemens;  elle  n'en  trouvera  pas  un  feul  qui 
rende,  ou  le  peuple  qui  s'affembloit  à  Que- 
villy, ou  les  Miniftres  qui  le  fervoient,  in- 
dignes des  libertez  que  nôtre  incomparable 
Monarque  leur  a  voit  accordé  par  fes  Edits. 
Le  prernier  fait  pour  lequel  lefdits  Mini- 
lires  ont  été  aprochez,  &  le  feul  dont  Mon- 
fieur le  Procureur  General  leut  eût  demandé 
raifon,  lors  qu'ils  ont  été  interdits  des  fon- 
ctions de  leur  Charge,  par  Arreft  du  tren- 
tième Janvier  dernier;  regarde  Efter  Huë. 

nièce 


t  ro  Hijioire  de  VEglife 

nièce  des  Dames  le  Seigneur;  &  qui  doit 
avoir  été  élevée  par  elles  dans  la  Religion 
Prétendue  Reformée,  quoy  que  la  Mère  de 
ladite  Efter  Hue  foit  Catholique. 

Mais  lefdits  Miniftres  ont  iujet  d'efperer 
que  la  Cour  demeurera  entièrement  fatisfaite 
des  réponfes  qu'ils  ont  fait  fur  ce  premier 
Chef  dans  leur  interrogatoire,  &  dans  la  con- 
frontation des  témoins. 

Car  I .  ils  ont  reprefenté,  avec  tout  le  re- 
fped  qu'ils  doivent  à  la  Cour,  que  le  feu 
Sieur  de  Montaigu  père  de  ladite  Hue,  a 
vécu,  &  eft  mort  dans  la  Religion  Préten- 
due Reformée  &  la  chofe  n'eft  pas  conteftée. 
Cela  feul  pourroit  fuffire,  pour  juflifier  la 
conduite  de  ceux  qui  auroient  eu  part  à  Fédu- 
cation  que  les  Tantes  de  ladite  Efter  Huë 
peuvent  luy  avoir  donnée.  Car  la  Déclara- 
tion du  premier  de  Février  1669,  vérifiée  au 
Parlement  le  29.  Juillet  audit  an,  &  donnée 
pour /ervir  de  Loy  à  l avenir;  ordonne  au  89 
article,  que  les  enfans  des  pères  décédez  en 
la  R.  P.  R.  y  foient  élevez;  les  termes  en 
font  COnflderables.  Faifons  défenfes  conformé- 
ment à  ÏArreJl  de  nôtre  Confeiî  d'Etat  du  24. 
Avril  166 5.  à  toutes  perfonnes  d enlever  les  en- 
fans  de  ladite  R.  P.  R.  ni  les  induire^  ou  leur 
faire  faire  aucune  Déclaration  de  changement  de 
Religion  avant  l'âge  de  14.  ans  accomplis  pour  les 

mâles, 


de  Roïtcn.  1 1 1 

mâle:^  &  de  12.  ans  accomplis  pour  les  femelles. 
Et  en  attendant  qu'ils  ayent  atteint  ledit  âge.  Or- 
DONNONS  que  le/dits  enfaiis  ne^  d'un  père  de 
la  R.  P.  Re/onnée,  demeureront  aux  mains  de 
leurs  parens  de  ladite  Religion  Prétendue  Refor- 
mée. 

Cette  Déclaration  eft  conforme  aux  autres 
loix  du  Ro3'aume,  qui  veulent  que  ce  foit 
les  pères,  &  non  les  mères  qui  règlent  la 
condition  de  leurs  enfans.  D'où  vient  qu'un 
père  roturier  engendre  des  enfans  roturiers, 
encore  qu'il  ait  époufé  une  femme  noble  ? 
AulFi  ne  voit-on  point  que  le  temps  y  ait 
aporté  aucun  changement  que  celuy  qui  re- 
garde rage,  auquel  lefdits  enfans  pouvoient 
être  reçus  a  faire  leur  déclaration.  On  Ta 
juftifié  aux  procez  par  deux  Arrefts  rendus 
au  Confeil  d'Etat  ;  le  premier  au  mois  de  Juin 
1678.  pour  les  enfans  du  fieur  Roger  Mar- 
chand en  cette  ville,  dont  la  mère  etoit  Ca- 
tholique; &  le  fécond  au  mois  de  May  1680. 
pour  des  enfans  du  Havre,  dont  la  mère  avoit 
auflî  changé  de  Religion.  Et  fi  on  allègue 
la  Déclaration  du  mois  de  Juin  audit  an,  pu- 
bliée le  3o.  Juillet  fuivant,  la  Cour  ell  tres- 
humblement  fuppliée  de  remarquer  qu'elle 
ne  déroge  point  aux  loix  précédentes,  puis 
qu'elle  ne  parle  que  des  enfans  dont  les  pères 
auront  fait  abjuration.   Et  de  vouloir  l'étendre 

aux 


1 1 2  Hiftoire  de  l'Eglise 

aux  mères,  ce  feroit  non  feulement  contre  la 
difpofition  générale  des  loix  de  TEtat;  qui 
comme  il  a  été  déjà  remarqué,  veulent  que 
les  enfans  fuivent  la  condition  de  leurs  pères  ; 
mais  même  contre  la  nature  particulière  de 
celles  qui  font  accompagnées  de  quelques 
peines,  que  l'équité  ne  veut  point  que  Ton 
étende  au  delà  des  termes  aufquels  elles  font 
conçues. 

La  Cour  jugera  fans  doute,  fuivant  fa  pru- 
dence &  fa  fagefle,  qu'une  explication  de  la 
Déclaration  du  mois  de  Juin  i683.  violente 
&  forcée,  &  manifeftement  contraire  à  la 
difpofition  des  loix  &  à  Téquité,  ne  fuffit 
pomt  pour  ruiner  une  Déclaration  auffi  for- 
melle &  auffi  précife  qu'eft  celle  de  1669.  & 
qui  a  été  confirmée  par  plufieurs  Arrefts, 
donnez  dans  des  cas  tout  pareils  à  ceux  dont 
il  s'agit  au  procez. 

Mais  ce  qui  décide  entièrement  la  quefti- 
on,  c'eft  la  lettre  de  Monfieur  le  Marquis 
de  Château-neuf,  écrite  au  fieur  du  Hamel 
Lieutenant  en  la  Vicomte  du  Havre,  dont 
l'original  a  été  produit  à  la  Cour  par  le  dit 
fieur  du  Hamel,  &  dont  lefdits  Miniftres 
ont  joint  une  copie,  collationnée  aux  autres 
pièces  du  procez  :  Ladite  lettre  eft  dattée 
du  8.  Odobre  i683.  c'efl-à-dire  qu'elle  a 
été  écrite  trois  mois  après  la  Déclaration  dont 

il 


de  Rouen.  1 1 3 

il  s  agit.  Monfieur  de  Château-neuf  y  ré- 
pond aux  propofitions  qui  luy  avoient  été  fai- 
tes au  mois  d'Aouft  par  ledit  fieur  du  Hamel, 
pour  élever  les  enfans  du  Havre,  dont  il  a 
déjà  été  parlé  dans  la  Relimon  Catholique, 
qui  eft  celle  de  leur  mère.  Il  n'y  répond  pas 
de  fon  chef,    mais  après  avoir  informé  le  Roy 
des  expediens  propofe!(  par  ledit  fieiir  :  H  luy  dit 
en  terme  exprés,  que  le  Roy  na  pas  eftimé  à 
propos  de  rien  ordonner  fur  ce  fujet,  &  le  ren- 
voyé à  TArrell  du  Confeil  du  mois  de  May, 
qui  avoit  ordonné  qu'ils  feroient  mis  chez  la 
mère,  &  qu'elle  les  éleveroit,  mais  fans  les 
contraindre  en  aucune  manière  pour  le  fait  de  la 
Religion.    Monfieur  le  Marquis  de  Chàteau- 
neuf  auroit-il  parlé  de  cette  manière,  fi  les 
mères  avoient  les  mêmes  privilèges  que  les 
pères  ?  Si  la  dernière  Déclaration  fe  devoit 
étendre  |ufqu'à  elles,  n'auroit-il  pas  dit  à  ce 
Juge  qu  il  y  avoit  une  Ordonnance  qui  Tau- 
thorifoit  de  faire  ce  qu'il  prétendoit;  &  que 
c  etoit  l'intention  du  Roy  que  les  mères  prif- 
fent  la  place  des  pères  lors  qu'ils  venoient  à 
manauer  à  leurs  enfans.  II  dit  au  contraire, 
que  Sa  Majefté  ne  veut  point  que  la  mère' 
dont  le  mary  eft  mort  dans  la  Religion  P  R 
contraigne  les  enfans  qu'elle  a  eus  de  luy  à  faire 
aucun  exercice  de  la  Religion  Catholique.  Doit- 
on  donner  un  autre  fens  aux  Déclarations  du 
H  Roy 


1 14  Hijtoire  de  l'Eglife 

Roy,  que  celuy  que  Sa  Majelté  y  a  donné 
elle-même,  en  parlant  à  un  de  fes  premiers 
Minillres,  qui  luy  demande  l'explication  de 
fes  volontez. 

Le  droit  qu'avoient  les  parens  de  ladite 
Eller  Huë  de  relever  en  la  R.  P.  R.  étant  fi 
bien  juftifié;  lefdits  Miniftres  diront,  fous 
le  bon  plaifîr  de  la  Cour,  qu'ils  n'auroient 
pas  crû  manquer  au  refped  &  à  Tobeiffance 
qu'ils  doivent  aux  ordres  facrez  de  leur  Sou- 
verain, quand  ils  auroient  fouffert  ladite  Eller 
Huë  dans  leur  Temple  :  Mais  ils  ont  fait  con- 
noître  qu'ils  ne  l'y  ont  jamais  vûë;  &  qu'ils 
ne  croient  pas  la  connoître  :  ils  n'ont  pas 
même  été  bien  informez  du  changement  de 
fa  mère,  qui  demeure  à  plus  de  trente  lieues 
de  cette  Ville,  jufques  au  Samedy  de  Pâques 
de  l'année  1604.  que  le  fieur  Curé  de  faint 
Eloy  le  fit  fignifier  à  l'un  d'eux.  Et  ils  ont 
été  fi  délicats  fur  tout  ce  qui  pouvoit  donner 
la  moindre  atteinte  à  leurs  libertez,  ou  four- 
nir quelque  prétexte  à  ceux  qui  ne  cherchent 
qu'à  décrier  leur  conduite;  que  celuy  qui 
avoit  reçu  l'exploit  alla  fur  le  champ  avertir 
les  Tantes  de  ladite  Efter  Huë  de  ne  la  pas 
mener  à  Quevilly.  Et  en  effet,  de  tous  les 
témoins  qui  ont  été  confrontez  aufdits  Mi- 
nillres, il  n'y  en  a  pas  un  feul  qui  die  l'avoir 
feulement  vûë  tourner  la  tête  de  ce  côté-là 

de- 


de  Rouen.  1 1 5 

depuis  la  femaine  Sainte  de  ladite  année  :  il 
n'y  en  a  point  non  plus  qui  die  Pavoir  jamais 
vûë  auparavant  ledit  temps,  ny  dans  le  Tem- 
ple, ny  dans  le  village  de  Quevilly,  ny  mê- 
me fur  le  chemin  qui  y  conduit.  Ils  fe  font 
tous  réduits  dans  la  confrontation,  à  dire 
qu'ils  Font  conduite  de  vûë  de  puis  la  maifon 
de  fes  Tantes,  jufques  à  la  Porte  faint  Eloy 
les  jours  de  Dimanches  &  de  Fêtes,  aux 
heures  que  Ton  alloit  à  Quevilly,  &  qu'elle 
revenoit  avec  elles,  lors  qu'elles  en  retour- 
noient; ou  tout  au  plus,  qu'ils  l'ont  vûë  mon- 
ter en  bateau  ;  •  encore  n'y-a-t'il  qu'André 
Gueroult  qui  l'ai  dit,  &  avec  tant  de  varia- 
tion, que  Ton  ne  peut  faire  aucun  fond  fur 
fon  témoignage.  Pour  ce  qui  eft  des  Tantes 
de  ladite  Huë,  qui  ont  auffi  été  confrontées 
aufdits  Miniftres,  leur  interrogatoire  s'ac- 
corde parfaitement  avec  la  dépofition  des  té- 
moins; car  elles  ont  déclaré  qu'elles  n'ont 
point  contrevenu  aux  défenfes  faites  à  la  re- 
quête du  fieur  Curé  de  S.  Eloy.  La  Déclarati- 
on de  la  Dame  Jeanne  le  Seigneur  efl;  bien  for- 
melle &  bien  précife;  &  encor  que  celle  de 
la  Dame  Efter  fa  fœur  ne  foit  pas  fi  nette  en 
un  endroit  où  elle  a  voulu  marquer  le  temps 
par  les  mois,  dont  elle  s'eil  excufée  fur  fon 
grand  âge,  &  fur  la  perte  de  fa  mémoire  : 
elle  parle  pofitivement  dans  un  autre  lieu  du 
H  2  terme 


1 1 6  Hijîoire  de  VEglife 

terme  de  Pâques,  qui  fe  raporte  précifément 
au  temps  de  Texploit,  &  à  ce  que  difent 
tous  les  témoins. 

Quand  donc  on  s'attacheroit  au  fait,  fans 
confiderer  le  droit  de  ladite  Efter  Huë,  ce 
que  Ton  ne  doit  pas  préfumer,  la  Cour  étant 
trop  jufte  &  trop  équitable  pour  ôter  aux  ac- 
cufez  aucun  des  moiens  d'une  légitime  dé- 
fenfe;  ils  ofent  dire,  fous  le  bon  plaifir  de 
la  Cour,  qu'ils  ne  feroient  pas  condamna- 
bles, puis  qu'ils  n'ont  eu  aucune  part  dans  les 
mefures  que  lefdites  Dames  le  Seigneur  ont 
pu  prendre  pour  l'éducation  de  leur  nièce, 
qu'ils  n'en  ont  pas  même  eu  de  connoiffan- 
ce;  &  que  dans  le  moment  qu'on  leur  a  figni- 
fié  que  la  mère  de  ladite  Efter  Huë  avoit  chan- 
gé de  Religion,  ils  ont  empêché  qu'on  ne  la 
menât  à  Quevilly;  qui  eft  tout  ce  que  l'on 
auroit  pu  exiger  d'eux  aux  termes  des  Décla- 
rations les  plus  rigoureufes,  qui  veulent  que 
l'on  fignifie  aux  miniftres  les  changemens  de 
Religion,  &  les  Ades  d'abjuration  de  ceux 
qui  l'ont  fait,  avant  que  de  les  pouvoir  in- 
quiéter pour  ce  fujet. 

Le  fécond  fait  raporté  au  procez  eft  de 
même  nature  que  le  premier;  concernant 
François  Nées,  fils  d'Itaac,  petit  fils  du  fé- 
cond Mary  de  Catherine  Caron,  que  ladite 
Catherine  Caron  a  eu  entre  fes  mains  depuis 

la 


de  Roîien.  r  i  y 

la  mort  dudit  Ifaac  Nées  père  de  François, 
lequel  Ifaac  efl  decedé  à  rarmée  il  3^  a  neuf 
ou  dix  ans.  Car  il  paroît  par  Tinterrogatoire 
de  ladite  Caron,  confrontée  aufdits   Mini- 
ftres,  que  ledit  Ifaac  Nées  faifoit  profeffion 
de  la  R.  P.  R.  lors  qu'il  partit  pour  Tarmée, 
qu'il  n'eft  point  venu  à  fa  connoifleance  qu'il 
en  ait  changé^,  ny  en  mourant  ny  avant  fa 
mort.  Il  paroît  encore  que  ladite  Caron  n'a 
pu  mener  ledit  François  Nées  à  Quevilly  de- 
puis la  publication  dé  la  Déclaration  du  Roy, 
qui  regarde  les  enfans  des  convertis;  car  la- 
dite Déclaration  fut  publiée  le  3o.  de  Juillet, 
qui  êtoit  un  Vendredy  :  Et  le  premier  jour 
d'Aouft  fuivant  qui  écheoit  le  Dimanche,  la- 
dite Caron  envoia  ledit  François  Nées  à  Ge- 
neviève Mauger,  mère  dudit  enfant,  à  Paris, 
où  il  a  toujours  demeuré  depuis.    La  lettre 
de  ladite  Mauger,  produite  au  procez  par  la- 
dite Caron  en  datte  du  8.  Aouft  i683.  qui 
remercie  fa  mère  dudit  envoy,  en  fait  foy. 

Lefdits  Miniftres  prennent  droit  par  ledit 
mterrogatoire.  Il  s'agit  d'un  enfant  d'un  pè- 
re qui  a  vécu  dans  la  R.  P.  R.  &  que  l'on 
doit  fuppofer  y  être  mort,  puis  que  l'on  ne 
Içait  rien  au  contraire,  &  que  l'on  n'a  ja- 
mais fait  la  moindre  fignification  aufdits  Mi- 
niftres qui  leur  ait  pu  faire  naître  d'autres  pen- 
iées;  &  cet  enfant  n'eft  pas  même  allé  à  Que- 
H  3  villy 


1 1 8  Hijîoire  de  lEglife 

villy  de  puis  le  mois  de  Juillet  i683.  Telle- 
ment que  quand  fon  père  auroit  changé  de  Re- 
ligion, comme  non,  on  ne  leur  pourroit  pas 
imputer  la  moindre  contravention  aux  Edits. 
Il  y  a  plus,  car  lefdits  Minières  n'ont  pas 
même  fçu  avant  le  procez  que  la  mère  eût 
changé  de  Religion.  On  ne  leur  en  a  jamais 
rien  lignifié,  &  ils  ont  encore  ignoré  qu'elle 
eut  un  enfant;  bien  loin  de  fçavoir  que  la- 
dite Garon  l'eut  chez  elle,  &  qu'elle  l'éle- 
voit  dans  la  R.P.R.  comme  ladite  Caron  l'a 
reconnu  dans  les  interpellations  qu'ils  luy  en 
ont  fait.  Les  témoins  ne  difent  rien  au  con- 
traire; on  a  confronté  aufdits  Miniftres  Ca- 
therine Caron,  nièce  de  celle  dont  il  s'agit, 
reprochable  de  droit,  qui  s'eft  réduite  dans 
la  confrontation  à  des  ouy  dire. 

Il  y  a  trois  autres  faits  qui  touchent  les  fil- 
les mineures  des  Srs  Maurice,  du  Mont  & 
Chauvel  de  Dieppe,  qui  ont  embraffé  la  Re- 
ligion Catholique,  &  que  l'on  prétend  être 
allées  à  Quevilly  depuis  la  Déclaration  du 
mois  de  Juin  enregillrée  le  3o  Juillet,  qui 
défend  d'y  recevoir  les  enfans  des  pères  con- 
vertis qui  font  au  deffous  de  14  ans.  Pource 
qui  eft  de  celle  du  Sieur  Chauvel  de  Dieppe, 
lefdits  Miniftres  fe  contenteront,  fous  le  bon 
plaifir  de  la  Cour,  de  dire  comme  ils  ont  fait 
dans  leur  interrogatoire,  qu'ils  ne  la  connoif- 

fenî 


de  Roïien.  i  iq 

lent  point;  parce  qu'il  ne  leur  en  a  point  été 
parle  dans  la  confrontation,  ce  qui  leur  fait 
)uger  qu'il  n  y  a  point  de  charge  fur  ce  fait 
au  Procez.  Mais  pour  les  deux  autres  ils  ont 
répondu  trois  chofes;    La  première,  qu'on 
ne  leur  a  jamais  fignifié  ny  à  eux  ny  à  aucun 
du  Confilloire  TAde  d'abjuration  de  leurs 
pères,  &  qu'ainfi  ils  en  pourroient  préten- 
dre caufe  d'ignorance,  aux  termes  des  Dé- 
clarations du  Roy  &  des  Arrells  que  la  Cour 
a  donnez  en  les  vérifiant;  La  féconde,  qu'ils 
n'ont  jamais  vu  la  fille  dudit  Sr.  Dumont  à 
Quevilly  :  &  que  celle  dudit  Sieur  Maurice 
y  ayant  été  apperçûë  pendant  le  fon  de  la 
Cloche,  quelques  femaines  avant  la  Publica- 
tion de  la  Déclaration  du  mois  de  Juin  i683 
qui  le  deffend,   le  Confilloire  donna  ordre 
à  un  Ancien  de  l'en  faire  fortir,  ce  qui  fut 
exécuté   fur   le  champ;    La   troifiême  &  la 
dernière,  qu'il  eft  certain   qu'elles  n'y  font 
venues,    ny  l'une,  n}^  l'autre,  depuis  ladite 
Déclaration  qui  le  deffend.  Il  n'y  a  rien  dans 
les  dépofitions  des  Témoins  confrontez  auf- 
dits  Minirtres  qui  prouve  le  contraire;  Il  n'y 
en  a  pas  un  feul  qui  n'ait  été  obligé  de  recon- 
noître,  quand  ils  ont  été  interpellez,  qu'ils 
n'ont  vu  ny  l'une  ny  l'autre  de  ces  filles,  ny 
dans  le  Temple,  ny  dans  le  village  de  Que- 
villy, ny  mefme  fur  le  chemin  qui  y  conduit; 
H  4  & 


I20  Hijîoire  de  l'Eglife 

&  s'il  y  en  a  quelques  uns  qui  ont  dit  qu'ils 
avoient  vu  monter  la  fille  dudit  Sieur  Mau- 
rice dans  un  fouflet,  depuis  Tabjuration  de 
fon  père,  les  jours  du  Dimanche,  &  reve- 
nir de  même  avec  elle  aux  heures  que  Ton  va 
à  Quevilly,  &  que  Ton  en  revient,  interpel- 
lez de  marquer  le  temps,  &  de  dire  fi  c'étoit 
avant  ou  après  le  mois  de  Juillet  i683.  Ils 
ont  répondu  qu'ils  ne  le  pouvoient  dire,  à 
la  referve  de  Marguerite  du  Buiffon,  qui  a 
dit  qu'elle  croit  que  ça  été  plutôt  avant  qu  après 
ledit  mois  de  Juillet;  &  de  Jeanne  vaillant, 
qui  a  dit  quil  y  avoit  deux  ans  ou  deux  ans  & 
deiny  qu'elle  avoit  vu  ce  qu'elle  avoit  rapor- 
té.  Le  fieur  &  la  Dame  le  Coq  qui  ont  dé- 
pofé  fur  le  fait  de  ladite  du  Mont,  &  qui 
ont  été  reprochez  pour  des  caufes  que  la  Cour 
jugera  fans  doute  valables,  avec  toute  la  paf- 
fion  qu'ils  ont  fait  paroître  dans  cette  rencon- 
tre, n'ont  ofé  dire  autre  chofe  fmon  qu'ils 
l'avoient  vu  monter  dans  un  Caroffe  allant 
à  Quevilly,  &  n'ont  jamais^ voulu  répondre 
précifément  aux  interpellations  qui  leur  ont 
été  faites,  de  déclarer  fi  c'étoit  avant  ou 
apès  le  mois  de  Juillet  i683.  Ils  ont  dit  ne 
le  pouvoir  faire  ;  mais  pour  fuppléer,  par  leur 
artifice,  au  défaut  de  leur  réponfe  la  femme 
a  dit  que  c'étoit  tout  le  temps  que  ladite  du 
Mont   avoit  été   chez  fon  père   &  chez  fa 

gran- 


de  Rouen.  121 

grand  mère  :  &  le  mary,  que  la  remiflion 
obtenue  par  le  fieur  du  Mont  pouvoit  fervir 
d'explication  à  ces  interpellations. 

Catherine  Allais,  troifiême  témoin  pour 
le  même  fait,  ne  s'efi;  pas  voulu  mieux  ex- 
pliquer dans  rinterpellation  qui  luy  a  été 
faite;  elle  a  dit  ne  fe  fouvenir  du  temps, 
mais  que  Ton  difoit  par  bruit  commun  qu'il 
y  avoit  des  Déclarations  qui  le  défendoient. 

Mais  ce  que  ces  trois  témoins  ont  ignoré, 
ou  plûtort  qu'ils  ont  affedé,  de  cacher  Pierre 
Roûy  quatrième  témoin,  l'a  déclaré  d'une 
manière  qui  décide  la  queftion,  &  qui  dé- 
charge entièrement  lefdits  Minières .  Car  il 
a  dit  pofitivement  que  ladite  fille  du  Mont 
n'étoit  point  entrée  dans  le  Carofle  qui  me- 
noit  fa  mère  à  Quevilly  depuis  le  Houragan 
qui  arriva  la  veille  de  la  S.  Jean  de  l'an  i683. 
&  perfonne  ne  le  pouvoit  mieux  fçavoir  que 
luy,  puifque  le  Carofle  étoit  à  luy,  que 
c'ctoit  luy  qui  l'y  conduifoit,  &  que  depuis 
ce  tems-là,  comme  il  le  dit  encore  dans  fa 
dépofition,  il  avoit  perdu  une  pillole  qu'on 
luy  donnoit  tous  les  ans  pour  mener  ladite 
fille. 

Et  quand  à  ce  que  le  Sr.  le  Coq  a  dit  de  la 

RémilFion  obtenue  par  lefdits  Sieurs  Maurice 

&  du  Mont,  cela  ne  fert  qu'à  faire  voir  que 

ledit  le  Coq  agit  plûtoll  en  cette  Caufe  com- 

H  5  me 


122  Hijîoire  de  l'Eglife 

me  Partie  que  comme  témoin  ;  car  au  fond 
lefdits  Sieurs  ont  énoncé  ce  qu'ils  ont  voulu 
lors  qu'ils  fe  font  prefentez  au  Gonfeil,  & 
quand  ils  auroient  avancé  quelque  fait  où 
lefdits  Miniftres  fe  trouveroient  intéreffez,  il 
feroit  de  la  juftice  de  les  en  convaincre  avant 
que  de  leur  en  faire  porter  la  peine,  &  la 
Cour  n'auroit  pas  manqué  de  leur  en  donner 
communication  :  il  y  a  lieu  de  croire  que  fa 
Majefté  a  fait  grâce  aufdits  Sieurs,  non  pour 
avoir  laifle  mener  leurs  enfans  à  Quevilly  de- 
puis la  Déclaration,  qui  eft  une  faute  qu'ils 
n'ont  point  commife,  mais  pour  avoir  fouf- 
fert  que  leurs  mères  les  élevaffent  dans  leur 
Religion  depuis  leur  abjuration,  jusqu'à  ce 
que  le  Roy  y  ait  pourvu  par  fa  Déclaration 
de  Juin  1 685.  contre  &  au  préjudice  de  l'obli- 
gation où  font  les  pères  d'élever  leurs  enfans 
dans  leur  Religion. 

Il  y  a  encore  une  autre  chofe  dans  le  Pro- 
cez  qui  regarde  le  dit  Sr.  Maurice,  qui  eft 
qu'il  a  mené  marier  une  de  fes  filles  majeu- 
res à  Quevilly  en  May  1 68 1 .  On  ne  nie  point 
ce  fait,  que  ledit  Sieur,  un  Lundy  de  la 
Pentecofte,  entra  dans  le  Temple  après  le 
Prefche  &  les  Prières  faites  :  &  qu'il  y  pre- 
fenta  fadite  fille  pour  recevoir  la  Benedidion 
nuptiale,  mais  outre  que  ledit  Sr.  Maurice 
ne  doit  pas  être  regardé  comme  Relaps,  pour 

une 


de  Roîien.  i23 

une  chofe  que  les  meilleurs  Catholiques  ont 
fait  fans  fcrupule  en  mille  occafions;  La  Dé- 
claration qui  défend  aux  Minières  de  rece- 
voir les  Relaps  dans  leurs  Temples  n'étoit 
point  encore  donné,  «&  ne  Ta  été  que  prés 
de  deux  ans  après,  fcavoir  en  Mars  i683. 
il  n'y  avoit  encore  que  celle  du  mois  d'Odo- 
bre  1679.  qui  ne  regarde  que  ceux  qu'ils  re- 
cevroient  à  faire  r exercice  de  leur  Religion, 
après  qu'on  leur  a  fignifié  l'Aâe  de  leur  abjura- 
tion, chofe  qui  ne  regarde  point  ledit  Sieur 
Maurice,  dont  Tabjuration  ne  leur  a  jamais 
été  fignifiée,  &  qui  depuis  qu'il  l'a  faite  n'a 
pas  même  penfé  à  revenir  à  eux,  &  à  faire 
Profeflion  de  leur  Religion. 

Les  derniers  faits  qui  paroiflent  au  procez 
envelopent  diverfes  perfonnes  prévenues  du 
crime  de  Relaps  :  Mais  il  eft  bien  difficile 
de  comprendre  comment,  ou  le  Temple  de 
Quevilly,  ou  les  Miniftres  qui  y  fervent  peu- 
vent être  interelTez  dans  les  fautes  des  préve- 
nus, &  dans  les  peines  qui  en  dépendent. 
Car  la  Déclaration  du  mois  d'Odobre  1679. 
qui  eil  la  première  qui  défend  aux  Miniftres 
de  recevoir  des  Relaps,  à  faire  exercice  de 
leur  Religion;  &  qui  a  été  enregiftrée  au 
Parlement  le  21  Novembre  audit  an,  pour 
être  exécutée  en  fa  forme  &  teneur;  veut  qu'a- 
vant toutes   chofes   les   Aâes   des  Abjurations 

f oient 


124  Hijîoire  de  l'EgliJe 

Joient  Jignijie^  à  la  diligence  des  Procureurs  du 
Roy^  aux  Minijlres  &  aux  Conftjloires  des  lieux 
où  ceux  qui  auront  abjure'  ladite  Religion  faifoient 
leur  refidence.  C'ell  un  préalable  neceffaire- 
ment  requis,  auffi  bien  dans  Tintention  de 
Sa  Majefté  &  dans  fon  Ordonnance,  que 
dans  l'ordre  de  la  Juftice.  Et  ce  n'efi;  quen 
confequence  de  ces  diligences  quil  fait  défenfes 
aux  Minijlres  &  aux  Confijloires  de  les  recevoir  : 
Tellement  que  l'on  ne  peut  encourir  les  pei- 
nes portées  par  ladite  Déclaration,  à  moins 
que  les  diligences  n'ayent  été  faites  ;  car  tout 
le  monde  fçait  que  les  formalitez  font  eflen- 
tielles  dans  l'exécution  des  loix,  de  celles  fur 
tout  qui  font  accompagnées  de  peines,  lors 
même  qu'elles  ne  touchent  que  des  particu- 
liers. A  plus  forte  raifon,  lors  qu'elles  fra- 
pent  un  grand  corps,  qu'elles  tendent  à  ôter 
à  plufieurs  milliers  de  perfonnes,  la  liberté 
d'exercer  leur  Religion  dans  les  Temples  oià 
ils  fe  font  affemblez  de  temps  immémorial  ; 
fous  le  bénéfice  de  l'Edit  le  plus  folennel  qui 
ait  jamais  été  fait,  &  qui  a  été  confirmé  par 
plufieurs  Roy  s.  Si  les  formalitez  font  indif- 
penfables  en  ces  occafions,  celle  dont  il  s'agit 
l'étoit  encore  beaucoup  plus  que  les  autres  ; 
parce  qu'il  peut  arriver,  &  il  arrive  tous  les 
jours  en  effet,  que  les  abjurations  fe  font  en 
cachette,  ou  dans  des  Provinces  éloignées 

du 


de  Rouen.  12b 

du  lieu  du  domicile  de  ceux  qui  les  font,  qui 
d'ailleurs  font  fouvent  inconnus  aux  Mini- 
ftres,  fur  tout  dans  les  grands  troupeaux; 
en  forte  qu'ils  fe  peuvent  aifément  gliffer  dans 
leur  aflemblée,  à  moins  qu'on  ne  les  ait  mis 
en  état  par  la  fignification  de  leurs  noms  & 
de  leurs  qualitez,  de  les  diftinguer  du  refte 
du  peuple. 

La  féconde  Déclaration  donnée  en  Mars 
i683.  ajoute  à  la  première,  en  ce  qu'elle  ne 
veut  pas  que  l'on  reçoive  ê  foiiffre  dans  les  Tem- 
ples, ceux  qu'il  étoit  Amplement  deffendu 
auparavant  de  recevoir  a  faire  profeiïion  de 
la  R.  P.  R.  mais  elle  ne  touche  point  aux  for- 
malitez  prefcrites  par  la  première  ;  Elle  or- 
donne au  contraire  qu'elles  feront  obfervées  : 
Elle  vent  qu'au  furplus  le  contenu  dans  les  Décla- 
rations précédentes  foit  obfervé.  Et  la  Cour  en 
a  fi  bien  reconnu  la  necefîité,  que  dans  l'Ar- 
refl  de  l'enregiftrement  du  9.  Avril  audit  an. 
Elle  ordonne  que  les  noms  &  les  furnoms  des  con- 
vertis feront  envoyé^  tous  les  mois  par  les  Cure^, 
&  autres  qui  auront  reçu  les  abjurations,  aux 
mains  des  fubjlituts  de  Monfieur  le  Procureur  Gé- 
néral de  chacun  Siège;  le/quels  feront  tenus  pa- 
reillement de  les  faire  fignifier  aux  Minijlrcs  de 
la  R.  P.  R. 

Il  paroit  manifeftement  par  les  Déclara- 
tions fufdites,  &  par  les  Arrefls  donnez  en 

con- 


126  Hijioire  de  V Eglise 

confequence;  que  Ton  ne  peut  imputer  aux 
Minillres  d'avoir  reçu  des  Relaps  dans  leurs 
Temples  depuis  la  publication  des  Edits  qui 
le  leur  deffendent,  ny  leur  ôter  leurs  Tem- 
ples &  leurs  exercices  pour  ce  fujet,  à  moins 
qu'on  ne  leur  ait  fignifié  les  Ades  d'abjura- 
tion defdits  Relaps  ;  ou  au  moins  leurs  noms 
&  leurs  furnoms.  Or  il  eft  de  notoriété  pu- 
blique qu'on  ne  leur  en  a  jamais  fignifié  au- 
cun, &  c'eft  ce  que  lefdits  Minillres  ont  ré- 
pondu dans  leurs  interrogatoires,  au  fujet 
des  nommez  Portrait,  Metiotte,  Fabulet 
&  Judith  Prevofl,  accufez  de  crime  de  Re- 
laps. Ils  ont  dit  de  plus,  qu'ils  leurs  étoient 
inconnus;  &  que  bien  loin  de  les  avoir  fouf- 
ferts  a  Quevilly,  depuis  les  Déclarations  du 
Roy  qui  le  deffendent,  ils  ne  croyoient  pas 
les  avoir  jamais  vus. 

On  ne  leur  a  confronté  aucun  des  témoins 
qui  dépofent  contre  lefdits  Relaps,  quoy  que 
lefdits  Miniftres  ayent  prefenté  Requête  à  la 
Cour,  en  datte  du  3o.  May  pour  ce  fujet; 
&  ainfi  ils  proteftent  de  nullité,  fous  le  bon 
plaifir  de  la  Cour,  de  tout  ce  que  lefdits  té- 
moins pourroient  avoir  dit,  contre  &  au  pré- 
judice defdits  Miniftres  &  de  leur  Temple, 
conformément  à  l'Ordonnance. 

Et  pour  faire  voir  la  juftice  de  cette  pro- 
teftation,  la  Cour  eft  tres-humblement  fu- 

pliée 


de  Roilen.  127 

pliée  de  confiderer  que  les  dénommez  au  pro- 
cez  peuvent  être  Relaps,  fans  être  entrez 
au  Temple  de  Quevilly  depuis  leur  abjurati- 
on. Combien  y-a-t'il  d'autres  Temples  dans 
le  monde,  dedans  &  dehors  le  Royaume, 
où  ils  pourroient  être  entrez  ?  &  leur  eou- 
tumace  ne  doit  regarder  que  leurs  perfonnes, 
&  ne  peut  faire  préjudice  au  Temple  de  Que- 
villy, à  moins  que  les  Miniflres,  à  qui  le 
Roy  Ta  donné  par  fes  Edits  pour  y  exercer  le 
Miniftere,  ne  les  y  a3'^ent  reçus  &  foufferts, 
contre  &  au  préjudice  des  Déclarations  de  Sa 
Majefté;  &  s'il  y  a  quelques  témoins  qui  le 
difent,  ce  que  lefdits  Miniflres  ignorent, 
parce  qu'ils  ne  leur  ont  pas  été  confrontez, 
ils  ont  parlé  contre  la  vérité,  &  lefdits  Mi- 
niftres  font  perfuadez  qu'il  leur  auroit  été  fa- 
cile de  le  faire  voir,  &  de  détruire  lefdites 
dépofitions  par  les  interpellations  qu'ils  leurs 
auroient  pu  faire  à  l'égard  des  temps  &  des 
lieux  oia  ils  auroient  vu  lefdits  Relaps,  & 
des  autres  circonftances  qui  peuvent  fervir  à 
éclaircir  de  femblablcs  faits;  comme  ils  ont 
pris  la  liberté  de  remontrer  à  la  Cour  dans  lad . 
Requerte.  Le  Roy  n'a  jamais  refufé  dans  fon 
Confeil  aux  Miniftres  la  liberté  de  deffendre 
la  Caufe  de  leurs  Temples,  lors  qu'il  a  été 
qiieilion  de  juftifier  leurs  établiffemens.  Et 
en  effet,  un  Temple  eft  une  chofe  morte, 

qui 


128  Hijîoire  de  VEgliJe 

qui  n'a  pas  moins  befoin  d'un  curateur  qu'un 

cadavre,  dont  on  veut  faire  le  procez. 

Et  les  Miniftres  qui  en  font  en  pofTeffion, 
&  qui  font  outre  cela  les  Chefs  du  Confiftoi- 
re,  qui  repréfente  le  peuple  qui  s'y  affem- 
ble,  &  qui  a  la  diredion  de  toutes  fes  affai- 
res, n'en  font-ils  pas  les  Curateurs  naturels  : 
La  moindre  de  ces  qualitez  fuffit  pour  leur 
donner  un  droit  inconteftable  de  foûtenir  fes 
interefts.  On  n'a  jamais  rafé  la  maifon  d'un 
homme  pour  rébellion,  qu'on  ne  luy  ait  con- 
fronté les  témoins  qui  le  chargent  de  ce  cri- 
me :  Et  on  ne  peut  pas  dire  que  ce  foit  la 
maifon  de  ces  Relaps,  &  que  c'eft  pourquoy 
on  la  condamné;  car  quand  ils  y  auroient  eu 
quelque  part,  ils  y  ont  renoncé  en  embraf- 
fant  la  Religion  Catholique,  &  Sa  Majefté 
les  en  a  exclus  pour  jamais  par  les  Arrefts 
qui  les  banniffent  de  fon  Royaume,  &  elle 
demeure  entièrement  &  abfolument  à  ceux 
qui  font  demeurez  fermes  dans  leur  profeffi- 
on  :  Et  quand  on  accorderoit,  comme  non, 
qu'ils  y  pourroient  encore  prétendre  quelque 
petite  part,  ce  ne  feroit  pas  un  centième, 
ce  ne  feroit  pas  même  un  millième.  Et  tout 
ce  grand  peuple  qui  s'y  aflembloit  y  a  des 
droits,  fans  comparaifon  plus  grands  &  plus 
confidérables  que  ne  feroit  le  leur  :  &  ainfi 
on  ne  pourroit  toujours  l'abbattre  fans  les  y 

ap- 


de  Roilen.  129 

appeller  &  fans  entendre  leurs  conducleurs 
dans  les  faons  &  les  reproches  qu'ils  pour- 
roient  alléguer  contre  les  Témoins  &  en  leurs 
autres  delfences. 

Les  deux  derniers  Arreils  de  la  Cour  don- 
nez au  fujetdefdits  Miniltres  &  de  leur  Tem- 
ple; Tun  du  5  Mars,  &  l'autre  du  iG  May, 
font  encore  mention  de  quelqu'autres  perfon- 
nes  prévenues  du  mefme  crime  de  Relaps. 
Mais  comme  on  n'en  a  parlé  en  aucune  ma- 
nière aufdits  Miniftres  quand  ils  ont  prefté 
r Interrogatoire;  qu'on  ne  leur  a  confronté 
aucuns  des  Témoins  qui  dépofent  contre 
ceux-cy,  non  plus  que  contre  les  autres  qui 
ont  été  coutumacez,  quoy  qu'ils  l'ayent  de- 
mandé par  la  Requelfe  dont  il  a  déjà  été  par- 
lé; qu'on  ne  les  a  pas  mefme  confrontez  aux 
prévenus  qui  font  prefens,  comme  l'Arreft 
de  la  Cour  du  16  May  dernier  l'Ordonne; 
lefdits  Minillres  ne  peuvent  fe  perfuader  que 
la  Cour  }'■  ait  aucun  égard  dans  le  Procez, 
en  ce  qui  peut  regarder  leur  Temple  &  leurs 
perfonnes,  puifque  ce  feroit,  comme  il  a 
déjà  été  reprefenté,  une  chofe  directement 
contraire  à  TOrdonnance  :  &  un  grief  dans 
une  Caufe  d'une  fi  grande  importance,  & 
qui  intérelfe  plufieurs  millers  de  perfonnes; 
qu'une  Cour  auffi  Augulie  &  aulïï  éclairée 
qu'ell  le  Parlement,  ell  incapable  de  faire. 
I  Lef- 


i3o  Hijîoire  de  l'Eglife 

Lefdits  Miniftres  auroient  i'atisfait  à  tout 
ce  qui  regarde  leur  Procez,  s'ils  ne  fe  croy- 
oient  obligez  de  dire  un  mot  de  la  Déclara- 
tion du  mois  de  Février  i685.     Quelques- 
uns  prétendent  qu'elle   leur  eft  contraire, 
mais  quand  on  ne  confidéreroit  point  qu'elle 
a  été  donnée  depuis  que  lefdits  Miniftres  font 
interdits  :  &  qu'ainfi  ils  ne  peuvent  l'avoir 
violée,  puifqu'elle  n'est  venue  qu'après  que 
le  Temple  a  été  fermé  :  &  qu'ils  ne  peuvent 
avoir  prévu  en  i683.  ou  1684.  ce  que  le  Roy 
Ordonneroit  en  i685.  Il  faut  convenir  qu'elle 
ne  regarde  que  ceux  qui  au  mépris  des  Edits 
précédens  auroient /ow^er/  dans  les  Temples, 
ou  des  Relaps,  ou  des  enfans  des  pères  con- 
vertis depuis  les  Déclarations  de  l'année  r  683 . 
qui  les  concernent,  ou  bien  mefme  les  Ca- 
tholiques que  la  Déclaration  du  mois  de  Juin 
1680.  en  bannit  depuis  ledit  an;  affedans 
de  ne  vouloir  pas  connoître  ny  les  uns  ny  les 
autres,  lors  mefme  qu'ils  n'ont  pas  lieu  de 
prétendre  caufe  d'ignorance  de  leurs  qualitez, 
&  cela  ne  regarde  point  encore  lefdits  Mi- 
niftres.    Car  premièrement,   pour  les  Ca- 
tholiques, dont  il  s'agit  dans  la  Déclaration, 
il  ne  s'en  trouve  point  de  tels  au  Procez; 
pour  les  enfans  des  pères  convertis,  ils  ont 
fait  voir  qu'ils  ne  font  point  coupables,  & 
qu'il  n'en  eft  point  entré  dans  leur  Temple 

de- 


de  Roiïcn.  \'h\ 

depuis  le  mois  de  Juillet  i683.  Ils  ont  détruit 
tout  ce  qu'on  leur  avoit  oppofé  fur  cet  Arti- 
cle; Et  pour  les  Relaps,  on  ne  leur  peut 
rien  non  plus  impoferà  leur  égard  puis  qu'ils 
ont  méconnu  dans  leur  Interrogatoire  d'en 
avoir  fouffert,  &  qu'on  ne  leur  a  confronté 
aucun  Témoin  qui  les  en  chargeât,  &  que 
toutes  les  dépofitions  des  perfonnes  qui  ne 
leur  ont  point  été  confrontées  font  nulles  de 
Droit,  &  ne  peuvent  faire  de  charge,  ny 
contr'eux  ny  contre  le  Temple.  Ils  ofent 
dire,  fous  le  bon  plaifir  de  la  Cour,  que 
Ton  ne  prouvera  jamais  que  les  prévenus  du 
crime  de  Relaps  foient  allez  à  Quevilly  de- 
puis les  Déclarations  du  Roy;  ou  s'il  y  en  eft 
allé  quelqu'un,  qu'il  y  ait  été  connu  comme 
Relaps,  &  qu'il  y  ait  été  fouffert  en  cette 
qualité;  lefdits  Miniftres  ont  été  fi  éloignez 
d'affeder  de  ne  les  pas  connoître,  pour  avoir 
lieu  de  les  fouffrir  dans  leurs  Affemblées,  que 
voyans  qu'on  ne  leur  fi^nifioit  point  les  Ades 
d'abjuration  de  ceux  quipouvoientavoir  chan- 
gé, ny  mefme  leurs  noms,  comme  on  avoit 
fait  par  tout  ailleurs  :  ce  qui  étoit  néceffaire 
pour  leur  en  donner  la  connoiflance;  qui  fait 
la  fouffrance,  &  fans  laquelle  il  n'y  en  peut 
avoir;  Ils  auroient  fait  des  exhortations  a 
leur  Peuple  pour  tâcher  de  les  découvrir,  & 
être  enfuite  en  état  de  les  éloigner  de  leur 
I  2  Tem- 


i32  Hijîoire  de  l'Eglise 

Temple  s'ils  en  approchoient,  cela  paroîtra 
par  le  Regiftre  des  Cenfures  produit  au  Gref- 
fe fuivant  rArreft  de  la  Cour. 

Il  réfulte  de  tout  ce  qui  a  été  dit  jufqu'icy, 
&  particulièrement  de  ce  qu'il  n'y  a  pas  un 
Témoin  de  ceux  qui  ont  été  confrontez  aux 
Défendeurs  qui  die  avoir  vu  dans  le  Temple 
aucun  des  dénommez  au  Procez  :  qu'on  ne 
leur  a  fignifié  ny  les  Ades  d'abjuration,  ny 
même  les  noms  des  Relaps,  &  qu'ils  n'ont 
point  été  confrontez  aux  témoins  qui  peuvent 
avoir  depofé  contre  ces  Relaps,  qu'il  n'y  a 
point  de  charges  au  procez,  ni  contre  le 
Temple,  ni  contre  les  Minières. 

G'ell  pourquoy  les  Défendeurs  fuplient 
tres-humblement  la  Cour  de  leur  faire  Jufti- 
ce,  en  les  rétabliffant  dans  les  fonctions  de 
leur  Miniftere  ;  &  de  leur  redonner  le  Tem- 
ple qu'ils  ont  poffedé  depuis  l'Edit,  pour  y 
continuer  à  y  fervir  Dieu,  &  à  le  prier  pour 
la  Perfonne  facrée  de  Sa  Majefté;  pour  la 
Maifon  Royale,  &  généralement  pour  tous 
leurs  Supérieurs. 

Monfteur   FAUVEL   DE   TOVVENS. 
Confeiller  Rapporteur. 


Arrejl 


de  Rouen.  i33 

Arrejî  du  Parlement  de  Roilen,  qui  or- 
donne la  Démolition  du  T^rêche  de 
Quevilly. 

VEU  par  la  Cour  le  Procès  extraordinai- 
rement  fait  pardevant  les  Confeillers 
Commiffaires  de  ladite  Cour  en  confequence 
de  TArreft  d'icelle  du  i8.  d'Avril  1G84.  don- 
né fur  le  Requifitoire  du  Procureur  General 
du  Roy,  par  lequel  il  a  été  dit  qu'il  fera  in- 
formé pardevant  les  Confeillers  Commilfai- 
res  de  Tenlevcment  de  Demoifelle  Efther 
Hue  de  Montaigu  âgée  feulement  de  douze 
ans.  Information  faite  en  confequence  du 
9  dudit  mois  &  an.  Conclufions  du  Procu- 
reur General  du  Roy.  Arrel!;  de  ladite  Cour 
du  12"  Juin  audit  an,  qui  ordonne  que  De- 
moifelles  Jeanne  &  Ellher  le  Seigneur  feront 
affignées  pour  être  oiiyes  &  interrogées  fur 
les  charges  du  Procès,  &  commilTion  accor- 
dée audit  Procureur  General  pour  faire  ap- 
peler en  la  Cour  les  Minillres  de  Quevilly 
pour  répondre  à  fes  Conclufions.  Interro- 
gatoires defdites  le  Seigneur  du  28  jour  de 
Novembre  dernier.  Autre  Arrell  de  ladite 
Cour  du  7*"  Juillet  aulli  dernier,  donné  fur 
un  autre  Requifitoire  dudit  Procureur  Gene- 
I  3  rai. 


i34  Hijioire  de  VEglife 

rai,  par  lequel  il  eft  dit  que  par  lefdits  Con- 
leillers  Commiffaires  à  ce  commis  il  fera  in- 
formé, même  par  Monitoires,  de  ce  qu'au 
préjudice  de  la  Déclaration  du  Roy  du  17. 
Juin  i683.  &  de  Tabjuration  de  ladite  R.  P. 
R.  faite  par  M"  Pierre  Maurice  &  David 
Dumond,  leurs  filles,  Tune  âgée  de  douze 
ans,  &  l'autre  de  huit  ou  neuf  ans  ont  été 
menées  plufieurs  fois  par  leurs  Mères  au  Prê- 
che de  Quevilly,  &  cependant  ordonne  que 
lefdits  Maurice  &  Dumont  feront  tenus  de 
reprefenter  inceffamment  leurfdites  filles  pour 
les  faire  inilruire  à  la  Religion  G.  A.  R.  Le- 
dit Arreft  fignifié  le  huitième  dudit  mois  & 
an  aufdits  Maurice  &  Dumont,  avec  com- 
mandement d'y  fatisfaire.  Autre  Arreft  de 
ladite  Cour  du  onzième  Juillet  auflî  dernier, 
donné  en  exécution  du  précèdent  Arreft. 
Monitoire  obtenu  à  la  requefte  dudit  Procu- 
reur General  du  Roy  du  2 1 .  dudit  mois  & 
an.  Informations  faites  pardevant  lefdits 
Gonfeillers Gommiffaires  des  i .  S.&y.  Aouft, 
&  1 1  Décembre  dernier.  Ade  exercé  ledit 
jour  pardevant  lefdits  Gonfeillers  Gommiffai- 
res contenant  la  déclaration  des  Sieurs  Janffe, 
le  Gendre  &  Bafnage  Miniftres  de  Quevilly. 
Extrait  du  regiftre  des  Abjurations  faites  en 
l'Eglife  Paroilîîale  de  Nôtre-Dame  de  Gaën, 
faifant  mention  que  le  14  Juillet  1682.  De- 
moi- 


de  Rouen.  i35 

moifelle  Marie  Magdelaine  Samborne  veuve 
de  Jacob  Huè"  Sieur  de  Montaigu  de  la  Pa- 
roifle  de  Thieffé  Vicomte  de  Bayeux  y  a  fait 
abjuration  de  la  R.  P.  R.  ce  qui  a  été  fignifié 
aux  Miniftres  de  Caën  le  21  Juillet  audit  an. 
Autre  extrait  du  2  May  i683.  des  Regiftres 
des  abjurations  faites  en  la  Maifon  des  nou- 
velles Catholiques  de  Caën,  contenant  que 
ledit  jour  Gabriel  Hue  de  Montaigu,  De- 
moilelles  Marie  Magdelaine  &  Anne  Hue 
fœurs  dudit  Gabriel  enfans  dudit  feu  Jacob 
Hue  de  Montaigu  &  de  ladite  Damoifelle 
Marie  Magdelaine  Samborne  ont  abjuré  la 
R.  P.  R.  entre  les  mains  du  Sieur  Evefque 
de  Bayeux.  Exploit  fait  à  la  requelle  de 
M"  François  Liefle  Preftre  Curé  de  S.  Eloy, 
contenant  la  fignification  faite  à  M"  Jacques 
Bafnage  Miniltre  de  Quevïlly,  pour  luy  & 
les  autres  Miniftres  que  ladite  Demoiîelle 
veuve  dudit  Sieur  Hue  de  Montaigu  a  fait  ab- 
juration de  la  R.  P.  R.  &  qu'elle  eft  mère  de 
ladite  Demoifelle  Eiler  Huë,  laquelle  de- 
meure en  ladide  Paroilfe  de  S.  Eloy  en  la  mai- 
Ion  de  ladite  Demoifelle  Efter  le  Seigneur 
veuve  de  Tobie  Moifant,  &  tante  de  ladite 
de  Montaigu  du  i  Avril  1684  Arreft  du  Con- 
feil  d'Eftat  du  20  Juin  1678.  Déclaration  de 
Sa  Majefté  contre  les  Relaps  &  Apofttats  & 
pour  la  forme  des  Abjurations,  du  10  Odo- 
I  4  bre 


i36  Hijtoire  de  lEglife 

bre  1679.  regiitrée  en  ladite  Cour  le  21  No- 
vembre audit  an.  Autre  Déclaration  du  Roy 
donnée  à  Compiegne  au  mois  de  Mars  i683. 
regiitrée  en  la  Cour  le  9.  Avril  audit  an.  La 
dite  Déclaration  de  Sa  Majellé  du  17  Juin 
i683.  portant  que  les  enfans  âgez  de  14  ans 
et  au  deffous,  dont  les  pères  auront  abjuré 
la  R.  P.  R.  feront  élevez  en  la  Religion  Ca- 
tholique Apoftolique  &  Romaine,  regiftrée 
es  regiftres  de  la  Cour  le  3o  Juillet  dernier. 
Deffenfes  par  écrit  defdits  Miniltres  de  Que- 
villy  non  fignées  ny  dattées.  Requelle  pre- 
lentée  à  la  Cour  par  ledit  Dumont  le  12  de 
Janvier  dernier  pour  luy  être  accordé  acte 
qu'il  a  reprefenté  ladite  fille  en  ladite  Cour  : 
Conclurions  du  Procureur  General  du  Roy. 
Requifitoire  dudit  Procureur  General  du  3 1 
dudit  mois,  à  ce  qu'il  Ibit  informé  pardevant 
les  Confeillers  Commiflaires  contre  plufieurs 
Relaps  receus  au  Prêche  de  Quevilly  autres 
que  ceux  nommez  dans  lefdites  Informations. 
Arreft  de  la  Cour  dudit  jour  3 1  Janvier  der- 
nier, par  lequel  entr'autres  chofes  il  eft  or- 
donne que  lefdits  le  Gendre  &  Bafnage  feront 
adjournez  à  comparoir  en  perfonne  pour  être 
oùys  &  interrogez  pardevant  les  Confeillers 
Commiffaires  fur  les  charges  defdites  Infor- 
mations, &  cependant  lefdits  Minillres  in- 
terdits des  fondions  de  leur  miniflere,  à  la 

re- 


de  Roïten.  107 

relerve  du  Sacrement  de  Baptême  par  pro- 
vifion  feulement  jul'ques  à  ce  qu'autrement 
par  fa  Majefté  en  ait  été  ordonné.  Décrets 
de  prifes  de  corps  décernez  par  ledit  Arreft 
contre  les  nommez  Portrait  &  Judith  le  Pre- 
voli  prévenus  du  crime  de  Relaps;  &  ajour- 
nement perfonnel  décerné  contre  la  nommée 
Caron.  Autres  Informations  faites  en  confe- 
quence  dudit  Arrelt  des  22.  26.  28.  Février, 
I.  19.  22.  &  24  Mars  dernier.  Certificat 
du  18  Février  dernier  de  Frère  Bernardin  de 
Rouen  Religieux  Capucin  &  Prédicateur  or- 
dinaire des  Controverfes  en  TEglife  de  S. 
OiJen  de  ladite  Ville  faifant  mention  que 
Pierre  Vaflel  a  fait  abjuration  de  la  R.  P.  R. 
entre  les  mains  du  Père  Seraphim  le  19  Aouft 
16G8.  dont  TAde  eft  gardé  au  Convent  des 
Capucins  de  ladite  Ville.  Lettres  de  Remif- 
fion  données  à  Verfailles  le  22  Février  der- 
nier en  faveur  defdits  Maurice  &  Dumont. 
Arreft  de  la  Cour  du  cinquième  Mars  aufli 
dernier,  qui  accorde  Teffet  defdites  Lettres 
de  Remillion  aufdits  Maurice  &  Dumont. 
Autre  Arreft  de  la  Cour  dudit  jour  cinquiè- 
me Mars  i685.  par  lequel  ce  requérant  le 
Procureur  General  du  Rojnl  eft  ordonné  que 
Jean  Montier,  Jacques  Noblet,  &  Pierre 
Vaftel  prévenus  du  crime  de  Relaps  feront 
pris  &  appréhendez  au  corps,  mis  &  confti- 
I  5  tuez 


i38  Hijîoire  de  l'Eglife 

tuez  prifonniers  en  la  Goncierger  ie  de  la  Cour. 
&  en  cas  de  fuite  ou  abfence  iceux  être  ap- 
pelez à  ban,  leurs  biens  faifis  &  annotez  l'ui- 
vant  rOrdonnance,  &  que  Loiiis  de  Civile 
lîeur  de  Bertrimont  &  Marie  Patriarche  veu- 
ve de  Michel  Defchamps  feront  ajournez  à 
comparoir  en  perfonne  à  la  Cour  pardevant 
lefdits  Confeillers  Commiffaires  pour  être 
tous  oiiis  &  interrogez  fur  les  charges  con- 
tr'eux  rapportées  par  ladite  Information  : 
Enjoint  aux  Miniftres  &  Anciens  de  la  R.P. 
R.  dudit  Prêche  de  Quevilly  de  reprefenter 
inceffamment  es  mains  du  Procureur  Gene- 
ral le  regiltre  dans  lequel  Nicolas  Coufin 
Vitrier  &  Marie  Viel  fa  femme  nez  dans  la 
R.  C-  A.  R.  ont  figné  leur  perverfion  il  y  a 
vingt  ans  ou  environ  en  prefence  des  Mini- 
ftres le  Moine,  Janffe,  &  de  Langle,  & 
des  vingt-quatre  Anciens;  comme  auffi  le 
regiftre  des  Baptêmes  des  années  1676. 1677. 
&  1678.  &  au  furplus  ordonné  qu'à  la  re- 
quefte  dudit  Procureur  General  il  fera  infor- 
mé du  lieu  où  s'eft  retiré  Tenfant  dudit  Pier- 
re Vaftel  baptifé  dans  ledit  Temple  de  Que- 
villy en  Tannée  1676.  ou  aux  années  1677. 
&  1678.  Enjoint  à  tous  détenteurs  dudit  en- 
fant de  le  reprefenter  inceffamment  :  Fait 
défenfes  à  toutes  perfonnes  de  la  R.P.R.  de 
le  retirer  à  peine  d'être  procédé  extraordinai- 

rement 


de  Roiien.  iSq 

rement  contre  les  contrevenans  &  defobeir- 
fans  aux  Déclarations  du  Roy  &  exécution 
dudit  Arrcft.  Significations  defdits  Arrells 
des  5  &  28  Mars  dernier  à  Charles  Heurtant 
8l  Jacob  Noblet,  Portrait,  Valtel  &  ladite 
le  Prevort.  Procès  Verbal  de  M*"  Mathieu 
Frefnel  Huiffier  en  la  Cour,  de  perquifition 
du  lieu  où  fe  retiroit  le  fieur  Cardel  Minillre 
du  18  Mars  dernier.  Arred  de  la  Cour  du 
28  Mars  i685.  d^ijournementperfonnel  con- 
tre Charles  Heurtant  fils  de  Charles,  &  Ja- 
cob Noblet  :  Atteflation  de  M^  Remy  Bau- 
che  Prertre  de  la  Paroiffe  de  S.  Maclou  de 
Rouen.  Profefleur  defdites  Controverfes  du 
premier  jour  d'Avril  aulli  dernier,  faifant 
mention  que  Jacob  Noblet  a  fait  abjuration 
en  ladite  Eglife,  de  ladite  R.  P.  R.  Reque- 
lle du  deuxième  dudit  mois  &  an  prefentée  à 
la  Cour  par  ledit  Jacob  Noblet  pour  être  in- 
terrogé &  avoir  aéle  de  Ion  abjuration,  fur 
laquelle  il  elt  dit  ce  requérant  le  Procureur 
General  du  Roy  par  Arrell  dudit  jour  qu'il 
fera  interrogé.  Interrogatoire  dudit  Jaques 
Noblet  du  5"  dudit  mois  &  an.  Requerte  en 
la  Cour,  dudit  Noblet  du  10  Mars  i(385. 
pour  être  déchargé  du  décret  de  prife  de  corps 
décerné  contre  luy,  fur  laquelle  requefte, 
du  confentement  du  Procureur  General,  il 
eit  dit  qu'il  fera  interrogé.    Interrogatoire 

du- 


140  Hijloire  de  l'Eglife 

dudit  Montier  du  1 2  dudit  mois  &  an  ayant 
obtenu  des  Lettres  de  remiffion  de  Sa  Ma- 
jeité  au  mois  de  Mars  dernier  dudit  crime  de 
relaps  entérinées  par  Arrelt  de  la  Cour  du 
troifiéme  Avril  dernier.  Autre  Arrefl;  de  la 
Cour  dudit  jour  28  Mars  i685.  donné  fur  le 
requifitoire  dudit  Procureur  General  du  Roy, 
par  lequel  il  efl  dit  que  Frère  Claude  Feron 
Religieux  de  TOrdre  de  la  Trinité  Rédemp- 
tion des  Captifs  ayant  racheté  en  1675.  Jac- 
ques Noblet  prévenu  du  crime  de  Relaps, 
&  Adrien  Poltel  &  Jean  Vaftel  du  Havre  de 
Grâce  ayant  connoiflance  que  ledit  Jacques 
Noblet  avoit  été  racheté  avec  lefdits  Poftel 
&  Vaftel  en  la  ville  d'Alger  feront  oiiis,  & 
à  cet  effet  accorde  commiffion  aux  Juges 
d'Orbec&  du  Havre  pour  entendre  ledit  Frè- 
re Feron,  lefdits  Vaftel  &  Poftel  pour  ce  fait 
être  leurs  dépofitions  inceflamment  apportées 
au  Greffe  de  la  Cour.  Information  du  deux- 
ième Avril  dernier  faite  par  ledit  Juge  du  Ha- 
vre. Autre  Information  faite  par  ledit  Juge 
d'Orbec  du  cinquième  dudit  mois.  Lettre 
dudit  Frère  Feron  dudit  jour  adrelfée  audit 
Procureur  General  du  Roy  par  laquelle  il  cer- 
tifie que  le  fieur  le  Vacher  Miflionnaire  de 
S.  Lazare  avoit  été  tué  depuis  deux  ans  par 
la  populace  d'Alger.  Interrogatoires  defdits 
Maurice  ,     Dumont  ,     Benjamin    Noblet , 

Baf- 


de  Roïien.  141 

Bafnage  &  le  Gendre  Miniilres  de  Quevilly, 
de  David  Chauvel  Marchand  demeurant  à 
Dieppe  ayant  abjuré  ladite  R.  P.  R.  dés  le 
mois  d'Avril  i  (38 1 .  entre  les  mains  du  Sieur 
Coadjuteur  de  Rouen  des  7.  (S.  12.  i3.  &  26 
Février  dernier.  Autres  Interrogatoires  de 
Catherine  Caron  veuve  de  François  Née, 
de  Jean  Montier,  de  Demoifelle  Marie  le 
Blanc  femme  dudit  Maurice,  de  Jacques 
Noblet,  de  Marie  Thorel  femme  dudit  Du- 
mont,  de  Louis  de  Civile  fieur  de  Bertri- 
mont,  Marie  Patriarche  veuve  de  Michel 
Defchamps,  &  de  Jacob  Noblet  des  28  Fé- 
vrier, 10.  12.  16.  22.  &  26.  Mars,  &  5 
Avril  i685  Arreft  de  la  Cour  en  la  Cham- 
bre de  la  Tournelle  du  7  Avril  1672.  qui  dé- 
cerne décret  de  prife  de  corps  contre  les  nom- 
mez Havy  &  Bourget,  &  ajournement  per- 
fonel  contre  les  nommez  du  Mefnil,  Ravet, 
Quevremont,  du  BuilTon,  Porteret,  Va- 
rin,  Jean  du  Pont,  Abraham  Loquet,  Guil- 
Icbaut,  de  la  Balle,  Margas ,  Mauduit, 
Raffi,  Boftaquet,  de  Langle,  le  Moyne  & 
Janlfe  Miniftres,  &  la  nommée  Cezarde, 
pour  être  tous  oiiys  &:  interrogez  fur  les  char- 
ges contr'eux  rapportées  parles  Informations 
faites  fur  le  Requifitoire  audit  Procureur  Ge- 
neral. Interrogatoires  defdits  le  Moine,  Guil- 
lebaud,  &  Jean  Caron  des  27.   28.  &  3o 

Avril 


142^  Hijioire  de  lEglife 

Avril  1672.  Requelte  preientee  au  Bailliage 
de  Rouen  le  3i  Odobre  1676.  par  Gene- 
viève Mauger  veuve  de  feu  Ifaac  Neez, 
pour  faire  appeler  audit  Siège  Catherine  Ga- 
ron  femme  de  François  Neez  pour  Fobliger 
à  reprefenter  fon  fils'que  ladite  Garon  ou  au- 
tres perlbnnes  de  la  R.  P.  R.  retiennent  fous 
prétexte  que  ladite  Mauger  a  abjuré  la  R.  P. 
R.  &  qu'il  luy  fera  permis  de  retirer  fon  en- 
fant par  tout  où  elle  le  trouvera;  en  confe- 
quence  de  laquelle  requefte,  commilïïon  eft 
accordée  à  ladite  Mauger.  Arreft  de  la  Gour 
du  16  May  dernier,  qui  ordonne  fur  les  Gon- 
clufions  du  Procureur  General,  que  les  Té- 
moins rapportans  charge  feront  recollez  fur 
leurs  dépofitions,  &  confrontez  aufdits  Mi- 
niftres  de  Quevilly  &  audit  Jacques  Noblet, 
&  que  les  Défauts  &  Goutumaces  feront  ac- 
quifes  contre  lefdits  Porteret,  Vaftel,  & 
Judith  le  Prevoft,  lefquels  Miniftres  &  No- 
blet reconnoîtront  les  ades  du  mariage  dudit 
Noblet,  &  les  Baptiftaires  de  fes  enfans  étant 
dans  le  regiftre  des  Baptêmes,  Mariages, 
&  Sépultures,  dépofé  au  Greffe  de  ladite 
Gour;  &  Ordonné  que  le  Regiffre  faifant 
mention  du  Baptiftaire  de  Tenfant  dudit  Ja- 
ques Noblet  au  Prêche  de  Quevilly,  pour  y 
être  baptifé,  fera  auffi  reprefenté  à  Teffet  de 
reconnoître  par  lefdits  Miniftres  ledit  Bapti- 
ftaire, 


de  Rouen.  143 

Itaire,  &  par  ledit  Montier  fa  fignature  : 
Enjoint  auidits  Minières  de  rapporter  incef- 
famment  au  Greffe  de  la  Cour  le  regirtre  ori- 
ginal du  dernier  S3'node  tenu  à  Quevilly  en 
prelence  du  Sieur  de  Tierceville  commis  par 
Sa  Majefté,  avec  le  Livre  des  Cenfures; 
un  Livre  in  folio,  dans  lequel  font  les  figna- 
tures  des  Relaps  faites  en  prefence  des  Mi- 
nillres  &  des  24  Anciens  de  Quevilly;  le 
Livre  des  Donations  entre  vifs  foit  par  legs 
tertamentaires  des  particuliers,  foit  par  au- 
tres voyes  convenables;  le  Livre  d'06troy 
ou  de  la  libéralité  du  Roy;  &  le  Livre  des 
diftributions  ordinaires  &  de  la  reddition  des 
comptes  dont  le  peuple  fera  averty;  pour  le 
tout  fait  &  communiqué  au  Procureur  Ge- 
neral du  Roy  être  fait  droit  ainfi  que  de  rai- 
fon  :  &  qu'il  fera  paflé  outre  aux  Aggraves 
&  Reaggraves  tant  du  premier  que  du  dernier 
Monitoire,  fi  fait  n'a  été.  Recollemens  & 
confrontations  des  Témoins  des  21.  22.  24. 
26.  26.  28.  &  29  Ma}'^  dernier.  Défauts  à 
ban  acquis  par  le  Procureur  General  des  20. 
&  2 1 .  Avril,  2.  4.  &  12.  May  auffi  dernier  : 
Conclurions  d'iceluy.  Arreil  de  la  Cour  du 
26  May  dernier,  par  lequel  ce  requérant  le 
Procureur  General  du  Roy  les  défauts  font 
déclarez  bien  pris  &  obtenus  contre  lefdits 
Porteret,  Vaftel,   &  le   Prevoft,  &  pour  le 

profit 


r44  Hiftoire  de  lEglife 

profit  ordonné  que  les  Témoins  rapportans 
charge  feront  recollez  fur  leurs  dépofitions, 
pour  ledit  recollement  valoir  confrontation: 
Et  à  regard  de  Charles  Heurtant  le  défaut 
déclaré  valablement  obtenu  contre  luy,  & 
pour  le  profit  ordonné  que  ledit  Heurtant  fe- 
ra pris  &  appréhendé  au  corps,  mis  &  con- 
iHtué  pour  être  oûy  &  interrogé  fur  les  char- 
ges contre  luy  rapportées,  &  en  cas  de  fuite 
ledit  Heurtant  fera  appelé  à  ban,  fes  biens 
faifis  &  annotez  fuivant  l'Ordonnance,  & 
au  furplus  feront  les  accufez  audit  Procès 
concernant  le  Prêche  de  Quevilly  confrontez 
les  uns  aux  autres,  pour  ce  fait  &  commu- 
niqué au  Procureur  General  du  Roy  être  or- 
donné ce  que  de  raifon.  Requeite  defdits 
le  Gendre  &  Bafnage  du  3o  May  dernier 
pour  faire  ordonner  que  tous  les  Témoins  qui 
font  charge  contre  le  Prêche  de  Quevilly  leur 
feront  confrontez.  Edits  &  Déclarations  du 
Roy  des  20  Juin  &  24  0(5tobre  i665.  treize 
Décembre  1666  premier  Février  1669  treize 
Mars  &  21  Novembre  1679.  "^^  Février, 
Juin  &  19  Novembre  1680.  dix-fept  Juin 
1681.  quatorze  Juillet  &  20  Aouft  1682. 
vingt-quatre  Juillet,  &  11  Septembre  1684. 
vingt-neuf  Janvier  &  1 3  Février  dernier. 
Arrelt  du  Confeil  d'Ellat  fur  la  demeure  des 
Minières  &  Propofans  de  ladite  R.  P.  R. 

du 


de  Roiien.  145 

du  3o  Avril  aufîi  dernier.  Livre  prétendu 
des  Cenfures  du  Confiftoire  de  Quevilii  com- 
mençant au  Dimanche  18  May  r68i.  &  fi- 
nilTant  au  Dimanche  28.  Janvier  i685.  Go- 
pie  collationnée  par  ledit  le  Gendre  Miniftre, 
du  Synode  tenu  à  Quevilly  le  Mardy  2  Sep- 
tembre 1682.  &  autres  jours.  Regiftres  des 
Baptêmes,  Mariages,  &  Sépultures  defdits 
de  la  R.  P.  R.  à  Quevilly  commençant  au 
premier  jour  de  Janvier  1 674.  jufques  &  com- 
pris le  29  de  Juin  1679.  Un  petit  regiflre 
contenant  les  noms  de  ceux  qui  fe  font  per- 
vertis depuis  le  2  3  Septembre  1623  jufques 
au  24  Mars  1680.  Pluneurs  feuilles  volantes 
depuis  le  premier  Aoufl;  1666.  jufques  &  com- 
pris Ponziéme  de  Mars  1(574.  Tables  Alpha- 
bétiques en  feuilles  volantes  contenant  les 
Mariages  &  Baptêmes  depuis  le  mois  de  Jan- 
vier 1674.  &  finiffant  au  29  Juin  1679.  A6les 
exercez  le  24  Mars  &  premier  Juin  i685. 
pardevant  leidits  Gonfeillers  Gommiffaires 
en  forme  de  procès  verbaux  des  fufdites  pie- 
ces  reprefentées  par  ledit  le  Gendre,  dont 
ade  luy  ell  accordé,  &  ordonné  que  lefdits 
Regiftres  &  feuilles  volantes  feront  dépofées 
au  Greife  de  la  Cour  pour  fervir  au  jugement 
du  Procès  ainfi  qu'il  appartiendra.  Requefte 
prefentée  le  3o  Septcmore  dernier  au  Sieur 
de  Marillac  Gonfeiller  d'Eltat  &  Commiffaire 
K  dé- 


146  Hijioire  de  l'Egli/e 

départy  en  la  Province  de  Normandie  Gé- 
néralité de  Rouen  par  les  Adminiftrateurs  de 
l'Hôpital  gênerai  de  Roiien  pour  enjoindre 
aux  Minillrés  du  Prêche  de  Quevilly  de  re- 
préfenter  &  délivrer  aufdits  Adminiltrateurs 
les  Regirtres  faifans  mention  de  leurs  biens 
immeubles,  rentes,  &  penfions  données  & 
léguées  par  difpofitions  faites  entre  vifs  ou 
dernière  volonté  aux  Pauvres  de  la  R.  P.  R. 
ou  au  Confilloire  depuis  le  mois  de  Juin 
1662.  Comme  auffi  les  Contrats  des  acqui- 
fitions  des  biens  provenans  du  revenu  defdits 
Pauvres,  ou  un  état  du  prix  de  la  vente  des 
biens  qui  leur  ont  été  donnez,  quand  même 
ils  auroient  été  aliénez  depuis  ledit  mois  de 
Juin  1662.  les  fins  de  laquelle  requefte  font 
accordées  aufdits  Adminiftrateurs  ;  &  à  cet 
effet  le  S'  Aveline  Confeiller  au  Bailliage  & 
Prefidial  de  Roiien  Subdelegué  dudit  Sieur 
de  Marillac  efl  commis  pour  Texecution  de 
fon  Ordonnance.  Certificat  imprimé  figné 
par  Frère  Pierre  Mercier  General  de  l'Ordre 
de  la  fainte  Trinité  &  Rédemption  des  Cap- 
tifs contenant  que  ledit  Jacques  Noblet  a  été 
l'un  des  quatre-vingt-onze  Captifs  rachetez 
en  la  ville  d'Alger  par  les  Frères  Benoift, 
Feron  &  Dacier  Religieux  Preltres  profés 
dudit  Ordre  en  l'année  lôyS.  &  receus  au 
Convent  de  Paris  le  26  Octobre  de  ladite  an- 
née. 


de  Rouen.  147 

née.  Conclurions  du  Procureur  General  du 
Roy,  &  veu  tout  ce  qui  a  été  fait  &  pro- 
duit audit  Procès.  Ledit  Jacques  Noblet 
oùy  fur  la  fellete,  lequel  a  reconnu  la  vérité 
de  ladite  Pancarte  fignée  par  ledit  General, 
&  le  Scapulaire  dudit  Ordre  qu'il  a  confeffé 
avoir  porté.  Et  oLiys  auffi  derrière  les  Bancs 
leidits  le  Gendre  &  Bafnage  Minillres,  & 
lefdites  Damoilelles  Jeanne  &  Efther  le  Sei- 
gneur en  leurs  confeflions  &  dénégations  :  & 
oiiy  le  Rapport  du  Sieur  Fauvel  de  Touvens 
Confeiller  Commiffaire,  Tout  confideré. 

LA  COUR,  veu  les  défauts  bien  obte- 
nus contre  lefdits  Pierre  Vaflel,  le  nommé 
Portrait  &  ladite  Judith  le  Prevoft,  &  pour 
le  profit  de  la  contumace  les  a  déclarez  ainfi 
que  ledit  Jacques  Noblet  prifonnier  en  la 
Conciergerie  du  Palais,  deuëment  attaints 
&  convaincus  d'avoir  profeffé  la  R.  P.  R. 
après  en  avoir  fait  Abjuration;  ce  faifant, 
lefdits  Accufez  avoir  encouru  la  peine  des  Re- 
laps portée  p£ir  les  Edits  &  Déclarations  du 
Roy,  &  lefdites  le  Seigneur  d'avoir  mené 
audit  Prêche  de  Quevilly  depuis  la  fin  de  Tan- 
née 1682.  jufques  au  premier  jour  d'Avril 
1684.  ladite  Efther  Huë  n'ayant  pour  lors 
que  douze  ans,  contre  les  défenfes  contenues 
aufdites  Déclarations  &  au  préjudice  de  l'Ab- 
juration de  ladite  Samborne  niere  &  tutrice 
K  2  de 


148  Hijloire  de  VEglife 

de  ladite  Hue,  prononcée  publiquement  dés 
ledit  jour  14  de  Juillet  1682.  Comme  auffi 
d'avoir  tenu  cachée  ladite  Efther  Huë  depuis 
ledit  jour  premier  Avril  1684.  jufqu'au  mois 
de  Novembre  audit  an.  Ladite  Catherine 
Caron  d'avoir  pareillement  conduit  François 
Née  fon  petit  fils  n'ayant  encore  l'âge  de 
quatorze  ans  audit  Prêche,  bien  que  la  mère 
dudit  François  Née  euft  abjuré  ladite  R.P.R. 
dés  l'année  1677.  lefdites  le  Blanc  &  Thorel 
d'avoir  auffi  mené  audit  Prêche  de  Quevilly 
leurs  filles  âgées  de  neuf  ou  dix  ans  depuis  la 
converfion  defdits  Maurice  &  Dumont  leurs 
maris,  pour  punition  &  réparation  defquels 
crimes  ladite  Cour  a  condamné  &  condamne 
lefdits  Noblet,  Portrait,  Vaftel,  &  le  Pre- 
voft  chacun  en  cent  livres  d'amende  envers 
le  Roy,  à  faire  amande  honorable  telle  & 
pieds  nuds  &  en  chemife  en  la  forme  ordi- 
naire, l'Audience  de  la  Cour  feante,  &  de- 
vant la  principale  porte  de  l'Eglife  Cathé- 
drale de  Cette  Ville,  &  les  a  bannis  à  per- 
pétuité du  Royaume,  leurs  biens  déclarez  ac- 
quis &  confifquez  au  Roy  ou  à  qui  il  appar- 
tiendra; Lefdites  le  Seigneur,  le  Blanc,  Tho- 
rel, &  Caron  condamnées  chacune  en  cin- 
quante livres  d'amande  envers  le  Roy.  Def- 
fenfes  à  elles  faites  de  tomber  en  pareilles 
fautes  fur  plus  grandes  peines  :  &  en  ce  qui 

touche 


de  Roiien.  149 

touche  lefdits  le  Gendre  &  Bafnage  Miniftres 
dudit  Prêche  de  Quevilly,  fans  s'arrêter  à  leur 
Requefte  du  3o  May  dernier,  les  a  condam- 
nez chacun  en  cent  livres  d'amande  envers  le 
Roy,  les  a  interdits  pour  toujours  de  faire 
ny  exercer  aucunes  fondions  de  Miniftres  di- 
reétement  ou  indireélement.  Leur  a  enjoint 
de  fe  retirer  à  vingt  lieues  de  cette  Ville; 
leur  a  fait  inhibitions  &  défenfes  d'y  rentrer, 
ny  de  demeurer  dans  l'étendue  defdites  vingt 
lieues  en  aucune  Ville  de  cette  Province  où 
l'on  ait  fait  &  ou  l'on  faffe  encore  exercice 
de  ladite  R.  P.  R.  ny  à  trois  lieues  de  diltan- 
ce  defdits  lieux  fur  plus  grandes  peines.   A 
ordonné  que  fuivant  ledit  Arreft  du  Confeil 
d'Eftat  du  3  Avril  dernier  les  autres  Minillres 
&  Propofans  qui  fe  trouveront  en  cette  Ville 
feront  tenus  de  s'en  éloigner  au  moins  de 
trois  lieues  quinzaine  après  la  publication  du 
prefent  Arreft.  Fait  très  exprefles  inhibitions 
&  défenfes  à  tous  Miniftres  &  Propofans  de 
quelque  Province  qu'ils  foient  de  faire  leur 
demeure  plus  prés  defdits  lieux  que  de  cette 
diftance,  jufques  à  ce  que  fur  les  contraven- 
tions faites  aux  Edits  &  Déclarations  de  Sa 
Majefté  il  en  ait  été  autrement  ordonné,  â 
peine  de  defobeiflance,  trois  mil  livres  d'a- 
mende,  d'être  privez  pour  toujours  de  la 
fonction  de  leur  Miniftere  dans  tout  le  Roy- 
K  3  aume, 


i5o  Hijtoire  de  l'Eglise 

aume;  &  d'être  procédé  contr'eux  extraor- 
dinairement.  Ordonne  pareillement  ladite 
Cour  que  ledit  Prêche  de  Quevilly  fera  dé- 
moly  &  rafé  jufqu'aux  fondemens.  Fait  def- 
fenfes  aufdits  de  la  R.  P.  R.  de  faire  à  Tave- 
nir  aucun  exercice  de  ladite  Religion  audit 
lieu,  ny  de  faire  aucunes  Affemblées  publi- 
ques ny  particulières  pour  l'Exercice  de  ladi- 
te Religion.  A  adjugé  &  adjuge  les  deux 
tiers  des  Matériaux  &  des  Démolitions  dudit 
Prêche  à  THôtel-Dieu  &  à  THôpital  gênerai 
de  cette  Ville  par  moitié,  &  Tautre  tiers  à  la 
Maifon  des  Nouvelles  Catholiques  de  Rouen, 
fi  mieux  n'aiment  les  Diredeurs  &  Admini- 
Itrateurs  dudit  Hôtel-Dieu  &  Hôpital  gêne- 
rai payer  la  fomme  de  quinze  cens  livres  à  la- 
dite Maifon  des  Nouvelles  Catholiques,  fur 
lefquels  matériaux  &  démolitions  feront  pré- 
alablement pris  les  frais  des  Ouvriers  qui  y  fe- 
ront prépofez,  &  ce  qui  fera  neceflaire  pour 
planter  au  miheu  dudit  Prêche  une  Croix  de 
pierre  de  vin^t  pieds  de  hauteur,  aux  armes 
du  Roy.  Fait  deffenfes  à  toutes  perfonnes 
de  quelque  qualité,  condition  &  Religion 
qu'elles  foient  de  s'atrouper  pour  être  pre- 
fens  &  troubler  ladite  démolition,  à  peine 
de  punition  corporelle.  A  pareillement  ad- 
jugé audit  Hôtel-Dieu  &  Hôpital  gênerai  par 
moitié  tous  les  Biens,  Fonds,  Revenus,  Ren- 
tes, 


de  Roiien.  t5i 

tes,  Arrérages,  Meubles,  &  généralement 
tous  autres  biens  de  quelque  nature  qu'ils  fo- 
ient,  appartenans  audit  Prêche  &  Confiftoi- 
re  de  Quevilly,  tant  en  principal,  interefts, 
que  tous  autres  revenus,  à  la  referve  néan- 
moins de  leur  Cimetière  ordinaire.  Enjoint 
aufdits  Minières,  Anciens,  &  à  tous  autres 
de  ladite  R.P.R.  étans  faifis  des  Titres,  Con- 
trats, Papiers  &  écritures  concernans  tous  lef- 
dits  biens  &  revenus,  de  les  mettre  inceffa- 
ment  entre  les  mains  defdits  Diredeurs  Si. 
Adminiflrateurs  defdits  Hollel-Dieu  &  Hô- 
pital gênerai,  &  les  a  condamnez  de  leur 
rendre  compte  de  Tadminirtration  qu'ils  en 
ont  eu  julques  à  prefent;  lequel  compte  ils 
feront  tenus  de  conimuniquer  au  Procureur 
General  du  Roy  avec  lefdits  Titres  &  Con- 
trats, pour  ce  fait  être  procédé  à  Texamen 
dudit  compte  pardevant  les  Confeillers  Com- 
miflaires  gratuitement  &  fans  frais,  à  ce  faire 
lefdits  de  la  R.  P.  R.  feront  contraints  par 
toutes  voyes  deuës  &  raifonnables;  Com- 
me auffi  à  reprefenter  fous  les  mêmes  peines 
les  Livres  dont  ils  font  encore  faifis,  autres 
que  ceux  qu'ils  ont  apportez  au  Grefle  de 
la  Cour;  Et  à  cet  effet  feront  lefdits  Mi- 
niftres.  Anciens  &  tous  autres  qui  auront 
eu  TAdminirtration;  communication  &:  con- 
noilfance  defdits  biens  obligez  de  fe  purger 
K  4  par 


102  Hiftoire  de  VEglife 

par  ferment  pardevant  lefdits  Gommiflaires, 
&  affirmer  la  vérité  fur  les  autres  Livres  & 
Regiftres  qu'ils  ont  vus,  lus,  &  tenus  :  Com- 
me auffi  de  déclarer  la  qualité,  quantité  & 
confiftance  defdits  biens  &  revenus  Et  au  cas 
que  cy-aprés  il  fe  trouve  des  biens  &  reve- 
nus par  eux  recelez  autres  que  ceux  qu'ils 
auront  déclarez,  les  a  dés  a  prefent  con- 
damnez en  leur  nom  privé  :  même  par  corps 
envers  lefdits  Hôtel- Dieu  &  Hôpital  gêne- 
rai au  quadruple  de  la  valeur  defdits  biens 
&  revenus  qu'ils  auront  cachez  &  recelez 
appartenans  audit  Prêche  &  Confiftoire, 
fans  qu'il  foit  befoin  d'autre  Arreft,  fauf  au 
Procureur  General  à  requérir  plus  grande 
peine  fur  les  delinquans  félon  l'exigence  du 
cas,  &  y  être  fait  droit  par  ladite  Cour. 
Et  à  legard  des  Baptêmes,  il  eft  dit  que  par 
provifion  feulement,  &  jufqu'à  ce  qu'autre- 
ment par  fa  Majefté  en  ait  été  ordonné,  les 
enfans  defdits  de  la  R.  P.  R.  feront  baptifez 
par  le  Miniftre,  qui  fous  le  bon  plaifir  du 
Roy  fera  commis  par  la  Cour;  lefquels  Bap- 
têmes feront  faits  par  ledit  Miniftre  dans  les 
24  heures  de  la  naiflance  lefdits  enfants  dans 
la  maifon  de  leurs  pères  &  mères,  on  au 
lieu  qui  fera  defigné  par  le  Lieutenant  Ge- 
neral Civil  ou  l'un  des  Officiers  du  Baillia- 
ge &  Siège  Prefidial  de  cette  Ville  fans  y 

ap- 


de  Rouen.  i53 

apporter  aucun  delay,  fous  quelque  caufe  & 
prétexte  que  ce  foit;  &  en  cas  de  necefïité 
preffante,    permet    aux   Maiilrefles   Sages- 
Femmes  d  ondo3^er  lefdits  enfans,  fuivans 
TAreft  de  la  Cour  du  22  Avril  1681.  donné 
en  confe^uence  de  la  Déclaration   du  Roy 
du  22  Fevrir  1680.  Et  à  l'égard  des  enfans 
defdits  de  la  R.P.R.  qui  naîtront  dans  les  Pa- 
roifles  &  Villages  de  la  Campagne,  ils  y  fe- 
ront pareillement  baptifez  par  ledit  Miniflre 
commis  en  la  forme  cy-delfus  ordonnée,  en 
preience  de  Tun  des  Marguilliers  de  chacu- 
ne Paroilfe;  lefdites  Maîtreffes  Sages- Fem- 
mes auffi  autorifées  d'ondoyer,  en  cas  de  ne- 
ceffité,   les  enfans  dans   lefdits  lieux  de  la 
Campagne.  Seront  faits  bons  &  fidèles  Re- 
giltres  defdits  Baptêmes  par  ledit  Miniftre, 
lefquels   feront  fignez   par  lefdits  Juges  & 
Marguilliers,  avec  les  parrains  &  maraines, 
iuivant  &  conformément  aux  Ordonnances 
&  Déclarations  de  fa  Majefté.    A  fait  inhi- 
bitions Si.  défenfcs  audit  Minilh^e  de  faire 
aucune  autre  fondion  de  Miniftre  que  celle 
de    baptifer  lefdits    enfans,  à   peine   d'être 
procédé  contre  luy  extraordinairement.  Au 
iurplus  lefdits  de  Civile,  &  Benjamin   No- 
blet  envoyez  quant  à  prefent  hors  de  Cour 
&  de    procès  :  Et   à   l'égard  defdits  David 
Chauvel  &  Jacob  Noblet  les  a   déchargez 
K  5  diffi- 


i54  Hijîoire  de  l'Eglife  de  Roïlen. 
deffinitivement.  Et  veu  que  le  prefent  Ar- 
reft  ne  peut  être  exécuté  en  la  perfonne  def- 
dits  Portrait,  Vallel,  &  Judith  le  Prevoft 
à  caufe  de  leur  fuite,  Ordonné  qu'il  le  fera 
par  effigie  en  un  Tableau  fuivant  TOrdon- 
nance.  Et  fera  le  prefent  Arreft  leu,  pu- 
blié &  affiché  aux  lieux  ordinaires  &  accou- 
tumez. Fait  à  Roiien,  en  Parlement,  le 
fixiéme  jour  de  Juin  mil  fix  cen  quatre-vingt- 
cinq.  Signé,  DE  BOURREY. 


atian  tl 


Srojd  ail  Je/rrime  cU  Ltqlùt 
QJdliùe  daynj  It   y  un  où  dei^ 


'ormiô  eu.  d  ioaen 


J^; 


APPENDICE 


I. 

EXTRAIT 

de  IHiJîoire  des  ouvrages  des  Savans, 

par  Henry  'Bafnage  de  'Beauval,  doâeiir  en  droit 

tome  XX,  Juin  i  joS,  page  28S, 

ARTICLE  XIII. 

Hijîoire  de  la  perféciition  faite  à  VEglife  de  Roîlen ,  fur  la 
fin  du  dernier  siècle  &  Sermons  fur  divers  textes  qui  ont 
du  rapport  à  la  matière  contenue  dans  cet  ouvrage,  à 
liotterdam^  citej  Jean  éMalherbe,  17041  i^'8-,  page  3y3. 

L'églife  réformée  de  Rouen  était  tranquille,  on 
laiffait  en  partage  à  quelques  dévots  les  haines  que 
la  différence  des  religions,  les  guerres  civiles,  les 
maffacres,  avaient  allumées  lors  que  la  réfolution 
d'anéantir  la  liberté  de  confcience  &  de  renverfer 
tous  les  temples  du  roiaume  ayant  été  prife,  celui 
de  Queviliy  effuya  le  même  fort  que  les  autres. 
On  ne  pût  déterrer  de  crime  pour  le  condamner 
&  de  tant  de  déclarations  données  contre  les  enfants 
&  les  relaps  auxquelles  la  ruine  des  églifes  était 
attachée,  il  ne  s'en  trouva  pas  une  feiile  qu'on  eut 
violée;  on  fut  obligé  d'aller  en  Afrique  mandier  la 


1 58  (^Appendice. 

converfion  d'un  captif.  Le  fait  était  faux  ;  Taccufé  le 
niait  dans  les  prifons  et  fur  la  fellette.  Le  seul  té- 
moin qui  aurait  pu  dépofër  ne  vivait  plus  ;  un 
autre  ne  parlait  que  fur  un  oiài  dire.  Il  était  seul, 
on  ne  le  confronta  pas. 

Cependant  le  Temple  &  les  Miniftres  furent  con- 
damnez, plufieurs  perfonnes  réfiftèrent  à  la  violence 
des  cuiraffiers  &  un  grand  nombre  fe  retirant  dans 
les  pays  étrangers,  emporta  avec  eux  les  manufa- 
ctures &  les  arts.  M.  Legendre  en  donne  ici  une 
hiftoire  fort  circonflanciée,  il  peint  rinjuftice  de 
toutes  fes  couleurs,  il  n'épargne  point  aux  persé- 
cuteurs les  noms  qu'ils  fe  font  attirez;  il  a  joint  à 
fa  narration  quelques  fermons  propres  à  confoler 
ceux  qui  font  privez  de  cette  nourriture. 


II. 
LISTt 

DES 

NOBLES    PROTESTANTS 

AU  XVir  SIECLE 

dont  il  eji  fait  mention  fur  les  regijires  de  Véglije 
de  Quevilly. 


i632.  Alençon  (Pierre  d'),  escuyer,  au  Havre. 
1620.  Auber  (Antoine),  escuyer,  fieur  de  Chaumont. 
i63o.  Auber  (Jacques),  escuyer,  fieur  de  Beaumoncel. 
1644.  Auber  (Jacques),  escuyer,  fieur  de  Longueil. 
1678.  Azémar  (Philippe  d'),  escuyer,  fieur  de  Juillé,  capi- 
taine au  régiment  de  la  reine. 

1672.  Azémar  (Pierre  d')  escuyer. 

1677.  Basnage  (Henry), avocat, escuyer,  fieur  de  Franquesna^- 
1660.  Baflbnnière  (Joseph  de  la),  escuyer. 

1673.  Baflbnnière  (Thomas  de  la),  escuyer,  fieur  de  Pre 

marefl. 
i653.  Baudoin  (Jacques),  noble  home,  époux  de  Marthe  de 
Salisbury. 


1 60  "•  oAppendice. 

i6i5.  Baudoin  (Noël),  escuyer,  fieur  de  Bosc-Alieaumc. 

i63i.  Bazire  (Jean),  escuyer,  fieur  de  Préaumont,  avocat. 

1661.  Bazoche  (Adam  de  la),  chevalier  d'Heuqueville  et 
Heudicourt,  premier  baron  de  Normandie,  con- 
seiller au  Parlement. 

i636.  Bazoche  (Eftienne  de  la),  escuyer,  feigneur  de  la 
Bazoche,  de  Chevreville. 

1645.  Beleau  (Charles  de),  escuyer,  fieur  de  Courtonne. 

i638.  Bellozane  (Jacques  de),  escuyer,  fieur  de  Bellozane. 

1640.  Bérauldin  (Jean  de),  escuyer,  feigneur  de  grand  caye 
à  la  Rochelle. 

161  5.   Berry  (Polydamas),  escuyer,  au  Havre. 

1601.  Bethencourt  (Louis  de),  escuyer,  fieur  du  Bosc-Affe- 

lin. 

i63o.  Biart  (Jacques),  noble  home. 

1666.  Blachière  (Jacques  de  la),  escuyer,  fieur  des  Marais. 

i663.  Blanchard  (David),  escuyer,  fieur  de  la  Servanière, 

/  miniftre  en  l'église  de  Fécamp. 

161 5.  Bocquet  (Mathieu),  escuyer,  feigneur  de  Jaumont  la 

Poterie,  Bosc-Aflelin  et  de  Bettencourt. 
lôSj.  Bonnel  (Jean),  escuyer,  fieur  du  Fresnoy. 
1657.  Bonnel  (Louis),  escuyer,  fieur  de  Cantebrun,  à  Caen 
i6ot.  Boutillac  (Jean  de),  escuyer. 
1647.  Brachon  (Jean  de),  chevalier,  feigneur  de  Bevilliers, 

Senitot,  Ambricourt. 

1616.  Brière  (Nicolas),  escuyer,  fieur  de  Janevelt. 

1682.  Brihon  (Jean),  escuyer,  fieur  de  Flinquemarre,  de  la 
paroiffe  de  Gravençon. 

J662.  Broffart  (Louis  de),  escuyer,  fieur  de  Montluc,  Prou- 
ville,  capitaine  de  cavalerie. 


oAppendicc.  1 5  j 

16 16.  Bryhon  (Jean),  escuyer. 

i658.  Bures  (Charles  de),  escuyer,  fieur  Béthencourt,  gen- 
tilhomme fervant  du  roy  et  capitaine  de  marine. 

1646.  Gaillard  (Abraham),  escuyer,  fieur  des  Hais. 

1646.  Gaillard  (Mathieu),  escuyer,  fieur  de  la  Judière,  ca- 
pitaine des  chafles  de  fa  majelté. 

1641.  Cajet  (Adrien),  escuyer. 

i63i.  Gajet  (Daniel),  escuyer,  fieur  de  La  Vallée. 

1660.  Ghalange  (Gédéon  de),  chevaHer,  feigneur  du  Mesnil- 
Enseaume. 

1672.  Ghauvin  (Jean),  chevaher,  feigneur  de  Varangeville- 
fur-Mer,  fecrétaire  du  roy. 

i65o.  Ghauvin  (Jean),  escuyer,  fieur  de  La  Neuville,  fecré- 
taire du  roy. 

1670.  GiviUe  (Isaac  de),  feigneur  de  Saint-Mars,  Anglesque- 

ville,  La  Ferté,  commiffaire  des  guerres. 

1671.  Giville  (Nicolas  de),  escuyer,  fieur  du  Pavillon. 
1670.  Giville  (Pierre  de),  escuyer,  fieur  du  Quesnay. 

16 14.  Glémence  (Richard),  noble  home,  dodeur  en  méde- 
cine. 

i63o.  GoUas  (Jean),  escuyer. 

1662.  GoUas  (Marc-Antoine),  escuyer,  fieur  du  Die,  avocat. 

i683.  Gollombel  (Jean-Baptifle),  escuyer. 

1639.  GoUombel  (Pierre),  escuyer,  conseiller  au  baiUage  de 
Rouen. 

1669.  Congnard  (David),  escuyer,  fieur  du  Goudray. 

1673.  Gongnard  (David),  escuyer,  fieur  du  Rombosq. 

1660.  Gongnard  (Eftienne),  escuyer,  fieur  de  Tournebucq, 
fecrétaire  du  roy,  audiencier  en  la  chancellerie,  à 
Rouen. 


1 62  Q/lppendice. 

1671.  Congnard  (Eftienne),  escuyer,  fieur  du  Fofle. 

1669.  Connain  (Jean  de),  chevalier,  feigneur  de  La  Doua- 
fière,  du  Val,  de  Sienne,  de  la  Gifîardière,  paroifle 
de  Connain,  vicomte  de  Thorigny. 

1672.  Collard  (Thomas),  escuyer,  fieur  de  Monteaudin. 
1680.  Daniel  (Guillaume),  escuyer. 

1679.  Daniel  (Henry),  feigneur  de  Martigny. 

1669.  Daufly  (Pierre),  escuyer,  fieur  de  Fraisne,  capitaine 

au  régiment  de  Piedmont. 
1676.  DaufFy  (Thomas),  escuyer,  fieur  de  la  Garenne. 
i652.  Dericq  (Abraham),  escuyer,  avocat  au  Parlement. 

1676.  Dericq  (Abraham),  escuyer,  fieur  de  Saint-Aubin  de 

Crétot. 

1670.  Dericq  (Eftienne),  escuyer,  fieur  de  Saint-Efhenne. 

1673.  Dericq  (Guillaume),  escuyer. 
i65o.  Dericq  (Nicolas),  escuyer. 
1641.  Desmareft  (Isaac),  noble  home. 

1677.  Du  Bousquet  (Jacques- Louis),  escuyer,  fieur  de  la 

Mutte,  de  Vienne,  d'Eclon,  capitaine  au  fervice  de 
fa  majefté,  gendre  de  Henry  Basnage,  fieur  de 
Franquesnay. 

1668.  Dufour  (Jean),  escuyer,  fieur  de  Cothymont,  maître 
de  la  garde-robe  de  la  ducheffe  d'Orléans. 

i63i.  Du  Fresne  (Jacques),  escuyer,  avocat. 

161 5.  Dumont  (Abraham),  escuyer,  l'un  des  cent  gentils- 
hommes de  la  maison  du  roy,  paroifTe  d'Epinay, 
vicomte  de  Roiien. 

1679.  Dumont  (Charles),  escuyer,  fieur  d'Epinay. 

1640.  Dumont  (Daniel),  noble  home,  avocat. 

l632.  Dumont  (Eftienne),  escuyer. 


oAppendice.  i63 

i656.  Dumont  (Isaac),  chevalier,  feigneur  de  Boltaquet  de 

la  Fontelaye. 
1646.  Dupuys  (Antoine),  escuyer,  fieur  de  Royville. 
1646.  Dupuys   (Charles),  chevalier,  fieur  de  Sandouville, 

Biville-la- Rivière,  de  Safletot,  d'Eglemesnil. 
1679.  Dupuys  (Pierre),  escuyer,  fieur  de  Bruneval,  de  Bi- 

ville,  vicomte  d'Arqués. 
1666.  Farcy  (Jacques  de),  feigneur  de  Paisnel,  à  Rennes,  en 

Bretagne. 
1666.  Farcy  (Michel  de),  feigneur  de  Paisnel,  conseiller  au 

Parlement  de  Rouen. 
161 5.  Feugueray  (Charles  de),  escuyer,  conseiller  aux  eaux 

&  forets  de  Normandie. 
i658.  Feugueray  (Jean  de),  escuyer,  fieur  de  la  Haye. 
1617.  Fleury    (Charles    de),   escuyer,   capitaine  ordinaire 

pour  le  roy. 
1654.  Fourré  (Charles  de),  escuyer,  fieur  des  Pillières,  avocat. 

16 14.  GaufTent  (Nicolas),  noble  home,  miniltre  de  l'église 

de  Pont-Audemer. 
1654.  Goffelin  (Gabriel  de),  chevalier,  feigneur  de  Martigny 

Compamville  et  baron  de  Caulle. 
1677.  Goffelin  (David  de),  chevaher,  fieur  de  Luffé. 

161 5.  Graindor  (Nicolas),   escuyer,   fieur  de  Lisle,  de  la 

paroiffe  de  Touffreville-la-Cable. 
161 5.  Gruel  (Nicolas  de),  escuyer. 

1639.  Gruel  (Jacques  de),  chevaher,  feigneur  de  la  Grue. 
1641.  Guilhen  (Charles  de),  escuyer,  fieur  de  la  Roche-du- 

Pouffm,  en  Vivarais. 
1674.  Guillain  (Aimé  de),  escuyer,  fieur  de  Breffac. 
1674.  Guillain  (Jean-Antoine   de),  chevaher,  feigneur  de 

Corbion  à  la  Barre,  paroiffe  de  Crulé,  près  Laigle. 


104  oAppendice. 

i63o.  Harle  (Louis),  escuyer,  fieur  de  la  Bucaille. 

1677.  Heuly  (Benjamin-Robert  d'),   chevalier  &   vicomte 

de  Nouvion  &  Laval,  gouverneur  de  la  citadelle 

de  Courtray,  commiflaire  pour  l'exécution  de  l'édit 

de  Nantes. 
1668.  Hue  (Guillaume),  escuyer,  fieur  de  Carpiquet. 
1668.  Hue  (Arthur)  escuyer. 
i658.  Lallouel  (David    de),   escuyer,   fieur  de  Beuvreuil, 

avocat  au  Parlement  de  Rouen. 
i638.  Langlois    (Baptilte),    escuyer,   feigneur,    patron    du 

Bourguay  à  Auguerne,  vicomte  de  Caudebec. 
1664.  Lanternier  (Jean  de),  escuyer,  fieur  de  Saint-Amand. 
1681.  Larcher  (Eftienne),   escuyer,   fieur  de  La   Londe  à 

Saint-Clément,  vicomte  de  Bayeux. 
i635.  Larray  (Jean  de),  escuyer,  avocat  au  bailliage  de  Caux 

à  Montivilliers. 

161 5.  La  Voye  (Samuel  de),  noble  home. 

i63i.  Lefebvre  (Pierre),  chevalier,  feigneur  de  Longueil  & 

du  Bosc-Regnault. 
1642.  Lefebvre  (Laurent),  escuyer,  avocat. 
1642.  Lefebvre  (Paul),  escuyer,  avocat,  fils  de  Laurent. 
1647.  Lefebvre  (Pierre),  escuyer,  feigneur  d'Heugleville. 
i653.  Lefebvre  (Pierre),  chevalier,  feigneur  de  Theuville. 
i655.  Lefebvre  (Samuel),  escuyer,  miniftre  de  l'église  du 

Havre. 

16 16.  Leforeftier  (Nicolas),  escuyer. 
1646.  Legrand  (Alexandre),  noble  home. 

161 5.  Legras  (Pierre),  escuyer,  fieur  de  la  Croix,  paroifle 

de  Collemare. 
1670.  Lenoble  (Jacques),  escuyer,  fieur  de  Feugueray. 


oAppendice.  i65 

1642.  Le  Pelletier  (Jean),  maître  des  requêtes  en  la  maison 
&  couronne  de  Navarre. 

1642.  Le  Pelletier  (Jean),  noble  home,  avocat. 

.1646.  Le  Pigné  (Nicolas),  escuyer,  fieur  d'Arqués,  conseil- 
ler au  Parlement  de  Normandie. 

1646.  Le  Pigné  (Israël),  escuyer,  fieur  de  Lardinières,  con- 
seiller au  Parlement  de  Normandie. 

1681.  Le  Poigneur  (Charles),  escuyer,  fieur  d'Epreville. 

1654.  Lefauvage  (Eftienne),  noble  home. 

i63o.  Lefeigneur  (Jacques),  feigneur  de  Vicquemare  &  du 
Mesnil,  conseiller  au  Parlement  de  Normandie. 

i63i.  Lefeigneur  (Nicolas),  escuyer,  fieur  de  Bautot. 

1641.  Lefeigneur  (Jacques),  escuyer,  fieur  du  Mesnil  Lieu- 
bray,  conseiller  au  Parlement  de  Rouen. 

1648.  Le  Sens  (Jacques),  chevalier. 

1659.  Le  Sens  (Isaac),  escuyer,  fieur  de  Mons. 

i663.  Le  Sens  (Jacques),  chevalier,  feigneur  de  Lion,  Mafle- 
ron  &  Valigny. 

1634.  Lefueur  (Philippe),  fieur  de  Petit-Ville,  conseiller  du 
roy. 

1634.  Lefueur  (Jean),  fieur  de  Corneville. 

i68o.  Lefueur  (Pierre),  fieur  de  CoUeville,  conseiller  au 
Parlement. 

1667.  Levavafleur  (Guillaume),  escuyer,  fieur  de  Beauplan 
&  des  Rocques,  ci-devant  ingénieur  &  capitaine  de 
l'artillerie  du  roy  de  Pologne,  à  présent  ingénieur 
de  fa  majefté. 

1601.  Levavalfeur  (Jean),  escuyer,  fieur  de  Calange,  gou- 
verneur de  la  ville  &  du  château  d'Evreux. 

16 18.  Levavaflisur  (Tanneguy),  escuyer. 


1 6ô  oAppendice. 

1626.  Lofles  (Charles  de),  escuyer,  palteur  de  Berthichères 

&  Sancourt. 
1 638.  Lofles  (Dominique  de), escuyer,  fieur  d'Arquainvilliers 
i633.  Lucas  (Pierre),  escuyer,  fieur  de  la  Pierre,  commif- 

faire  de  l'artillerie  de  France. 
1601.  Magneville  (Artus  de),  chevalier,  baron  de  La  Haye 

du  Puits. 
i635.  Maflis  (Jean  de),  chevalier,  feigneur  de  Tilly. 
1680.  Maurice   (Pierre),    feigneur  de  la  Motte,  directeur 

général  des  notaires  garde-notes  de  Normandie. 

1618.  Maynet  (Daniel),  escuyer,  fieur  de  la  Vallée. 

1664.  Mazure  (Samuel  de  la),  escuyer,  fieur  de  la  Mazure. 

1679.  Méhérenc  (Louis  de),  escuyer,  avocat,  fieur  de   la 

Conseillère. 
1669.  Mel  (Michel),  escuyer,  fieur  d'Etnmont,  paroifle  St. 
Clément,  vicomte  de  Bayeux. 

1680.  Milleville  (Daniel-Louis  de),  chevalier,  fieur  de  Bois- 

sey-Betancourt,  Gaillarbois. 
1 660.  M  iflant  (Claude  de) ,  feigneur  des  Hameaux,  Rocquigny 
1672.  Miflant  (Charles),  escuyer,  fieur  de  Quiberville-s-Mer. 

1616.  Monet  (Claude),  escuyer,  receveur  des  domaines  de 

Calais. 
1601.  Moynet  (Jacques),  escuyer,  conseiller  au  Parlement. 

1617.  Moynet  (Louis),  escuyer,  fieur  de  Tancourt. 

1619.  Moynet  (Louis),  escuyer,  fieur  de  Cleuville,  capitaine 

es-régiment  entretenu  par  le  roy,  es-pays  de  Bar. 
1619.  Muiflbn  (Henri),  escuyer,  fieur  de  Toillon,  conseiller, 

fecrétaire  du  roy. 
161 5.  Multel  (Louis),  feigneur  de  Panilleuse,  Francques. 
i65o.  Neufville  (Marin  de),  escuyer,  fieur  de  Cléran. 


oAppendice.  167 

1676.  Neufville  (Gabriel  de),  escuyer,  fieur  de  Maizet. 

1664.  Nollet  (François  de),  escuyer,  fieur  de  la  Roumière. 

i63i .  Nouant  Le  Conte  (Jonas  de),  chevalier,  feigneur  d'A- 
premont,  capitaine  au  régiment  de  Châtillon,  pour 
le  fervice  da  fa  majefté,  en  Hollande. 

i63o.  Orival  (Daniel  d'),  escuyer,  fieur  des  Bergers. 

i633.  Peigné  (Jacques),  escuyer. 

1634.  Peigné  (Israël),  escuyer,  fieur  de  Lardières,  conseil- 
ler au  Parlement  de  Normandie. 

1625.  Petit  (Zacharie),  noble  home,  fieur  de  La  Guilloude, 
à  Dieppe. 

i633.  Pierredon  (Pierre),  escuyer,  fieur  de  la  Rouvière,  de 
Montezon,  pays  de  Gévaudan. 

161 5.  Pigny  (Michel),  escuyer,  fieur  de  Grosmesnil. 

1672.  Pillaftre  (Pierre),  escuyer,  fieur  du  Manoir. 

1645.  Pinel  (Jean),  escuyer,  fieur  de  Launay. 

1662.  Pouyer  (Charles),  escuyer,  fieur  de  Drumare,  &  de 
Saint-Sère. 

i638.   Prefteval  (Isaac  de),  escuyer,  fieur  de  Rocquemont. 

1647.  Prieur  (Jean),  noble  home,  huiffier  de  la  chambre  du 
roy,  fecrétaire  de  monfieur  le  prince. 

1644.  Puchot  (Samuel),  chevalier,  feigneur  de  Bertreville, 
conseiller  du  roy  en  fon  conseil  d'état  &  privé, 
gentilhomme  ordinaire  de  la  chambre. 

1644.  Puchot  (Hiérosme),  feigneur  de  Bertreville,  d'Oin- 
ville  &  de  Lisle. 

i65i.  Quièvremont  (François  de),  chevaher,  marquis  d'Eu- 
dreville,  baron  de  Boutteville. 

1678.   Rambouillet  (Antoine  de),  escuyer,  fecrétaire  du  roy, 

1614.  Remy  (Adrien  de),  escuyer. 


1 68  QAppendice. 

1614.  Remy  (Antoine  de),  escuyer. 

i663.  Richier  (Jean),  chevalier,  feigneur  de  Cerisy,  Annou- 

ville,  gentilhomme  ordinaire  de  la  chambre  du  roy. 
i663.  Richier  (Gédéon),  chevalier^  feigneur  de  Bray. 
1620.  Rive  (Jacques  de  la),  noble  home. 
1616.  Roeffe  (Nicolas  de),  escuyer,  fieur  de  Beuzevillette, 

de  l'église  de  Lintot  &  Fremontier. 
1669.  Roefle  (Jean  de),  chevalier,  feigneur  de  Beuzevillette, 

Bolleville-en-Caux,  de  la  Barre. 
1669.  Roefle  (Jean  de),  chevalier,  feigneur  de  Beuzevillette, 

du  Feugueray,  patron  du  Mesnil-Pieu. 
1640.  Saint-Germain  {Jacques  de),  chevalier,  feigneur  de 

Melleran. 
1669.  Saint-Germain  (Jacques  de),  chevalier,  feigneur  de 

Fontenay,  capitaine  d'une  compagnie  de  chevau- 

légers. 
1640.  Sareviller  (Pierre  de),  chevalier,  feigneur  de  Brun- 
côté,  de  Saint- Vaft,  du  Bohaterél,  de  Torcy,  etc. 
1620.  Sarrau  (Jean),  fieur  de  Boguet,  escuyer,  fecrétaire  du 

roy. 
1662.  Scelles  (Louis  de),  escuyer,  fieur  Deleftanville. 
1678.  Scott  (Guillaume),   escuyer,   feigneur  de  la  Mesan- 

gère,  Bofcherville,  etc.,  conseiller  au  Parlement. 
1642.  Thierry  (Isaac),  escuyer,  fieur  de  La  Motte. 
i638.  Tyndal  (Thomas),  escuyer,  fieur  de  Quinton,  Sainte- 
Marie. 
i658.  Varignon  (Pierre  de),  escuyer,  fieur  de  Languerfy. 

de  Putot,  près  Caen. 
1620.  Vafly  (Jacques),  chevaher,  feigneur  de  la  Forell-Au- 

bert,  de  Mesnil-Imbert,  marié  à  Louise  de  Mont- 

gomery. 


oAppendice.  169 

i653.  Vafly  (Jacques  de),  chevalier,  marquis  de  la  Foreft, 
baron  de  Saint-Aubert,  feigneur  du  Mesnil-Imbert. 

1684.  Vattemare  (Jean  de),  escuyer,  fieur  de  Vasouy. 

i633.  Vaumesle  (Nicolas),  escuyer,  pafteur  de  l'église  de 
Berthichères  &  de  Saucourt. 

1645.  Véron  (Jacques),  escuyer,  porte  manteau  du  roy. 

i685.  Viels-Maisons  (Jean-Jacques  de),  chevalier,  feigneur 
de  Sapponnay. 

1620.  Viger  (Jean),  escuyer,  fieur  de  Maréfoflè. 

16 16.  Vivefay  (Jean  de),  escuyer. 


III. 
EGLISES  RÉFORMÉES 

DE  LA 

HAUTE     NORMANDIE 

AU  XVIP  SIECLE. 

Bacqueville,  éleiîlion  d'Arqués. 

Boiflay  (Mr  de),  éledion  de  Neufchatel,  fief,  à  Londinières. 

Bofcroger,  éledion  de  Pont-de-l'Arche,  pour  Elbeuf. 

Caudebec-en-Caux ,  éledlion  de  Caudebec-en-Caux. 

Gaule-Sainte-Beuve,  éledion  d'Eu. 

Griquetot-l'Efrieval,  éledion  de  Montivilliers. 

Dieppe,  élection  d'Arqués. 

Fécamp,  éledion  de  Montivilliers. 

Gifors,  éleélion  de  Gifors. 

Grofmefnil,éledion  de  Rouen,  fief,  à  Cottévrard,  près  Cailly. 

Lindebeuf,  éledion  d'Arqués. 

Lintot  &  Frémontier,  éledion  de  Gaudebec-en-Caux,  pour 

Bolbec. 
Longueville,  éledion  d'Arqués. 
Luneray,  éledion  d'Arqués. 
Lyons-la-Forêt,  éledion  de  Gifors. 
Maupertuis,  éledion  de  Montivilliers,  fief,  à  Gerville. 
Méfangère  (château  de  la),  éledion  de  Pont-Audemer,  fief 

à  Bofguérard  de  Marcouville. 


1 72  oAppendice. 

Ougerville,  éledion  de  Montiviiliers,  fief,  à  CoUeville. 
Pont-Audemer,  éledion  de  Pont-Audemer. 
Quevilly  (Grand-),  éledion  de  Rouen. 
Quillebœuf,  éledion  de  Pont-Audemer. 
Sancourt  &  Berthichères,  éledion  de  Gifors. 
Sanvic,  éledion  de  Montiviiliers,  pour  le  Havre. 
Sénitot-BeiviUiers,  éledion  de  Montiviiliers,  à  Gonfreville- 
rOrcher,  pour  Harfleux. 

Nota.  —  Cette  lifte  eft  incomplète,  il  y  avait  au  1 7*^  fiècle 
beaucoup  d'églilis  de  fief  dont  il  est  difficile  de  découvrir 
les  traces. 


IV. 

NOMS 

des  T^rotejlants  rejîés  à  'T(ouen  en  i68g 

et  fignolés  dans  un  mémoire  exijtant  aux  archives 

de  l'Etat,  TT,  26 1. 

oMémoire  reproduit  dans  l'ouvrage  de  M.  F'^  Waddington  : 
Le  Proteftantifme  en  Normandie,  page  25. 

(Nous  y  ajoutons  des  notes  en  redifiant  les  noms  d'après 
les  regiftres  de  Quevilly.) 

1 .  Le  fieur  Corbion  ,  qui  eflait  presque  toujours 
à  la  Boulaye,  je  le  croirais  mieux  hors  du  royaume 
qu'en  France;  c'eft  un  homme  fort  dangereux  & 
fort  occupé  de  fa  religion  (en  interligne  et  d'une 
autre  main,  on  lit  :  Ordre,  en  prifon  exilé  à 
Andelys,  le  23  Juillet  168 g). 

2 .  La  dame  Guillotin,  hoftefle  du  Quadi^am-de- 
Mer,  rue  du  Gros'horloge,  chez  elle  fe  retirent  les 
gens  de  la  religion,  on  croit  même  que  Ton  y  a 
fait  plufieurs  fois  des  affemblées,  ce  feroit  un  grand 
bien  qu'elle  fuft  hors  de  la  ville  de  Rouen  (d'une 


r  74  cAppendîce. 

autre    main    :    En   prifon    au    Pont-de-l' Arche, 
mesme  ordre.) 

Anne  AUix,  mariée  le  25  juin  i656,  à  Abraham  Guillotin. 
paroifl'e  Saint- Jean. 

3.  Le  fieur  Guillotin,  fon  beau-frère. 

Jacob  Guillotin,  marie,  le  17  avril  i653,  à  Marthe  de 
TEfpine,  fille  de  feu  Jean  de  l'Efpine,  avocat,  &  de  Marie 
Lefebvre,  paroifle  Saint-Nicolas. 

4.  Le  fieur  Depeister,  hollandais,  depuis  long- 
temps ertabli  à  Roiien,  c'eft  un  marchand  naturalisé. 

Samuel  Defpeifter,  fils  de  Jacques  Defpeilter  &  de  Cathe- 
rine Delavoye,  marié,  le  6  décembre  1676,  à  Catherine  Le- 
quefne,  fille  de  Jacques  Lequefne,  avocat,  &  d'Elifabeth 
Delavoye. 

5.  Le  fieur  Chapron,  marchand. 

Ifaac  Chapperon,  marchand,  marié,  le  i3  mai  1675,  à 
Marie  Hermann,  paroifle  de  la  Ronde. 

6.  Le  fieur  Lecour,  orphèvre. 

Jean  Lecourt,  orphèvre,  fils  de  Pierre  Lecourt  &  de  Ma- 
delaine  Leblanc,  paroifle  Saint-Herbland,  marié,  le  16  juin 
i658,  à  Marie  Darré,  fille  de  feu  Robert  Darré,  &  de  Su- 
zanne Boos. 


oAppendice.  i  jS 

7.  La  veuve  Folgend  &  fon  fils,  marchands. 

Marie  Chéradame,  fille  de  Guillaume  Chéradame,  ton- 
nelier, paroifle  Saint-Vincent,  &  d'Elifabeth  Gaffe,  née  le 
12  décembre  i632,  mariée,  le  8  avril  lôSy,  à  Thomas  Ful- 
gent,  marchand  de  planches  &  interprête  pour  la  langue 
anglaife,  paroiffe  Saint- Vmcent,  décédé  le  18  mai  1680. 

François  Fulgent,  fon  fils,  né  le  i3  janvier  1669. 

8.  Le  fieur  Mercier,  marchand,  gendre  de  la 
dite  Folgend. 

François  Lemercier,  fils  de  feu  Jean  Lemercier  &  de 
Madelaine  de  l'Efpine,  marié,  le  i5  mai  1678,^1  Marie  Ful- 
gent, fille  de  Thomas  Fulgent  &  de  Marie  Chéradame. 

9.  Le  fieur  Cordier,  marchand,  qui  a  fait  paffer 
fa  femme  &  fes  enfants  en  Hollande. 

Abraham  Lecordier,  fils  de  Jean  Lecordier  &  d'Elifabeth 
Lebreton,  marié,  le  14  février  1666,  à  Sara  Vrouhng,  fille 
de  Simon  Vrouling  &  de  Marie  Vandalle. 

10.  Le  fieur  Caron,  beau-père  du  nommé  Pa- 
pavoine,  que  fa  majefté  a  desja  exilé. 

Pierre  Caron,  vinaigrier,  marié  à  Anne  Caron,  paroiffe 
Saint-Vivien. 

Jacques  Papavoine,  marié,  le  28  mai  1673,  à  Anne  Ca- 
ron, fille  de  Pierre  Caron  &  d'Anne  Caron. 


1 76  oAppendice. 

1 1 .  Le  fieur  Gholvishe,  marchand  écoflais. 

12.  Le  fieur  Desjardins  &  fa  femme  qui  om  fait 
pafler  leurs  enfants  en  Hollande. 

Pierre  Dujardin,  yvoirier,  fils  de  feu  Pierre  Dujardin, 
tabellion  à  la  Fontaine-Jacob,  &  d'Anne  Lecornu,  marié,  le 
i5  juin  1670,  à  Suzanne  Lion,  fille  de  Jean  lAon,  Peignère 
(Peigneur)  &  de  Marthe  Seigneuré,  avait  4  garçons  i  fille; 
le  dernier  enfant  né  en  1684. 

i3.  Les  fleurs  Ernault  père  et  fils,  marchands, 
&  le  nommé  Ervechamp,  qui  demeure  avec  eux, 
lequel  eft  écoflais. 

Eftienne  Ernault  père,  marié  à  Marie  Taflon,  Eltienne 
Ernault  fils,  marié,  le  18  juillet  1677,  à  Marie  Lefebvre, 
fille  de  Guillaume  Lefebvre,  marchand.  &  de  Marie  Teltard. 
paroilTe  Saint-Vincent. 

14.   Le  fieur  Guillaume  Fontaine,  marchand. 

Fils  de  feu  Guillaume  Fontaine,  bourgeois  de  Paris  & 
d'Elfabeth  Collas,  il  était  venu  s'établir  à  Rouen,  avec  sa 
fœur  qu'il  perdit  le  3  mars  1678,  âgée  de  33  ans. 

i5.  Le  fieur  Banache  (fie  pour  Bafnage),  illuftre 
advocat,  qui  a  commenté  la  coutume  de  Normandie, 
il  eft  d'un  très-grand  fecours  pour  les  confultations; 


oAppendice.  177 

il  y  avait  un  miniftre  de  fa  famille,  &:  fon  fils  ell 
forti  du  royaume  pour  la  religion. 

Henry  Bafnage,  fieur  de  Franquefnay,  marié,  le  i"  mai 
i65o,  à  Marie  Coignard,  fille  d'Etienne  Coignard  &  d'Eli- 
fabeth  de  la  Rive. 

Henry  Bafnage,  avocat,  était  fils  de  Benjamin  Bafnage, 
miniftre  en  l'églife  de  Sainte-Mère-Eglife  &  de  Marie  Du- 
vivier. 

ENFANTS    NÉS    DE    CE    MARIAGE    : 

Baptêmes 

16  avril    i65i.  Marie,  mariée  au  fieur  de  Vienne,  décédée 

le  12  décembre  1721  ; 
7  juillet  i652.  Elifabeth,  décédée  le  2  décembre  1662; 
10  août    i653.  Jacques,  décédé  le  21  décembre  1723; 

17  mai      i655.  Madelaine,  mariée  à   Paul  Bauldry,  vivait 

en  1 72  5  ; 
i3  avril    i656.  Henry,  décédé  le  29  mars  1710; 
24  mars  "  i658.  Marc  Antoine,  décédé  le  14  décembre  1671  ; 

18  mai      1659.  Pierre,  décédé  en  1732; 

i5  juin     1664.  Elifabeth  Léonore,  décédée  le  17  juin  i665. 
Henry  Bafnage,  habitait  la  paroiflTe  Saint- Patrice,  de  i65i 
à  1664. 

16.  Le  fieur  Vanderhults,  marchand,  hollandais 
de  nation,  bon  négociant,  duquel  M.  Louvois  fe 
fert  très-fouvent,  il  ne  fe  trouve  a  aucune  aflemblée, 
eft  le  folliciteur  de  ceux  de  la  religion  qui  ont  des 
affaires. 


1 7^  Q/ippendice. 

Antoine  Vanderhulit,  fils  d'Antoine  Vanderhullt  &  de 
iMadelaine  Everalt,  de  la  Haye,  en  Hollande,  marié,  le  9 
juillet  1662,  à  Sara  Vanderfchalque  (5  enfants). 

17.  Le  lieur  Hubert,  horlogueur  (Jic)^  dans  la 
rue  des  Charettes. 

Robert  Hubert,  horloger,  marié,  le  26  avril  1666,  à  Su- 
zanne Lemire,  paroifle  Saint-Etienne-des-Tonneliers;  il 
avait  deux  frères,  Jean  &  Eftienne,  également  horlogers. 


^fiigiés  Trotejtants,  cités  dans  la  "Préface. 

1.  Lecordier  (Abraham),  fils  d\m  marchand 
d'Honfleur,  marié,  le  7  février  1666,  à  Sara  Wrou- 
ling. 

2.  Thiens  (Abraham),  marchand,  marié  à  Ville- 
mine  Wanburgh. 

3.  Tranchepain  (Pierre),  marchand  mercier,  ma- 
rié, le  24  janvier  r666,  à  Marie  Abhn. 

4.  Cognard  (Samuel),  né  le  12  feptembre  1647, 
fils  de  David  Cognard  &  d'Elifabeth  Mazuré. 

5.  Gaux  (Pierre  de),  fils  de  David  de  Caux,  mi- 
niftre  à  Orbec,  &  de  Jeanne  Crucifix,  marié,  le  1 5 
janvier  1668,  à  Marie  Simon. 

6.  Coffart  (Jacques),  né  le  12  janvier  1648,  fils 
de  Jacques  Coffart  &  de  Judith  Cognard,  membre 
du  confiftoire  de  Quevilly. 


VI. 

NOTES 

fur  quelques  noms  cités  dans  le  r^écit  de  l'hijioire 
de  la  T^erfécution  de  l^ouen. 

Page  4-  De  CoUeville,  Samuel  Lefueur,  fils  de  Pierre 
Lesueur,  efcuyer,  fieur  de  CoUeville,  confeiller  au  Parle- 
ment, &  de  feue  Efther  Bochard. 

Page  21.  Daniel  Mondon,  compagnon  chapelier,  marié  à 
Judith  Fleuriot. 

—  Son  fils  Jérémie  Mondon,  âgé  de  lo  ans,  né  le  22  fep- 
-tembre  1675. 

—  Jacques  Bredel,  manœuvre;  en  1679,  étant  veuf,  époufa 
Judith  Jacques,  fille  de  Jacques  Jacques  &  de  Marie  Cave- 
lier  de  Lintot  en  Caux. 

—  Marie  Bredel,  leur  fille,  âgée  de  9  ans. 

—  Jacques  Charles,  menuifier,  marié  à  Marthe  Barette. 

—  Anne  Charles,  leur  fille,  née  en  1670. 

—  Marthe  Charles,  leur  fille,  née  en  1672. 

—  Théodore  Bréhu,  chirurgien,  marié,  le  14  décembre 
.1659,  à  Marie  Cognard,  fille  de  Pierre  Cognard  &  de  Marie 
Cathelin. 

—  Jean  Salomon  Bréhu,  leur  fils,  né  le  3  février  1675. 

—  Jean  Plamar,  tailleur,  marié,  le  5  janvier  1670,  à  Ju- 
dith Drouet,  paroifle  Saint-Herbland. 

—  Jean  Plamar,  fon  fils,  né  le  2  5  décembre  1670. 


1 82  Q/lppendice. 

Page  22.  Gabriel  Quériiel,  compagnon  drapier,  marié  à 
Marie  Onfroy. 

—  Louis  Gabriel  Quériiel,  leur  fils,  né  le  i6  janvier  1678. 

—  Marie  Suzanne  Quériiel,  leur  fille,  née  le  3i  odobre 
1679. 

—  Jean  Hautot,  maçon,  fils  de  Thomas  &  de  Marie  Heuzé, 
de  la  paroiffe  de  Gruchet,  près  BoUebec,  marié,  le  18  octobre 
1671,  à  Elifabeth  Mallet,  fille  de  Jean,  &  d'Elter  Bellet,  de 
BoUebec. 

—  Elifabeth  Hautot,  leur  fille,  née  le  26  juillet  1672. 

—  Pierre  Robert  Poitevin,  tapiflier  à  Elbeuf,  marié,  le  6 
juillet  1673,  à  Suzanne  Bénard,  veuve  d'Abraham  Robelot, 
tapiflier  à  Elbeuf. 

—  Pierre  Mavirice,  brafleur,  marié  à  Marie  Leblanc. 

—  Madelaine  Efther  Maurice,  leur  fille,  née  le  26  mars 
1673. 

Page  35.  David  du  Mont,  avocat  au  Parlement  de  Paris, 
fils  de  feu  Jean  &  de  Marie  Plajin,  marié,  le  1 5  juillet  1674, 
à  Marie  Thorel,  fille  de  feu  Jean,  fieur  de  Charlemont  & 
d'Anne  Bauldry. 

—  Sa  fille  Marie,  née  en  1677. 

Page  44.  Le  Plâtrier  (Jean),  ancien  de  l'églife  de  Quevilly, 
marié,  le  6  février  1684,  à  Charlotte  Vaillant,  fille  de  Jean 
&  de  Catherine  Duval. 

—  Femme  Lefeigneur  Jeanne,  veuve  de  Tobie  Moifant. 
Tobie  Moifant,  efl  décédé  le  25  janvier  1681,  à  46  ans,  à 

fa  maifon  de  campagne,  à  Bocafle. 


^Appendice.  i83 

Page  68.  Femme  Caron,  Anne  Caron.  femme  de  Pierre 
Caron,  vinaigrier,  paroifle  Saint- Vivien. 

—  Femme  Thorel,  Anne  Antoine,  femme  de  Samuel 
Thorel. 

—  Femme  Leblanc,  Marguerite  Vereul,  femme  d'Abraham 
Leblanc,  drapier. 

Page  74.  Adam  de  la  Bazoche,  chevalier  d'Heuqueville 
&  Heudicourt,  premier  baron  de  Normandie. 

—  Jean  Cardel,  ancien  avocat,  paroifle  Sainte-Croix-des- 
Pelletiers,  marié  à  Madelaine  Houffemaine. 

—  Ifaac  Leboulanger,  marchand,  marié,  le  7  février  1672, 
à  Judith  CofTart,  fille  de  Jacques  Marchand  &  de  Judith 
Congnard. 

Page  75.  Demoifelles  Vandale  :  Sara  Vandale,  née  le  16 
février  1670.  Catherine  Vandale,  née  le  20  février  1671, 
filles  de  Samuel  Vandale,  marchand,  &  de  Sara  Ochufe. 

—  Femme  Amfing,  Marie  Durqueur,  femme  d'André 
Amfing,  mariée  le  11  novembre  1657. —André  Amfing, 
était  fils  d'un  marchand  de  Hambourg. 

—  Femme  Wetken,  Anne  Dierquens,  fille  de  feu  Tobie, 
marchand  à  Rouen,  &  de  Jeanne  Pitrefon,  mariée,  le  i^' 
décembre  1673,  à  Hermann  Wetken,  marchand  à  Rouen, 
natif  de  Hambourg. 

—  Femme  Simon,  Elifabeth  Vereul,  mariée  à  Abraham 
Simon,  6  enfants. 

Page  77.  Jean  Damberbos,  marié,  le  9  juin  i652,  à  Su- 
zanne Margas. 


i  84  oAppendice. 

Page  80.  D'Etrimont,  Michel  Niel,  efcuyer,  fieur  d'Eilri- 
mont,  fils  de  Michel  &  de  feue  dame  Elifabeth  Delarlie. 
marié,  le  21  août  1667,  à  Marie  Haranc,  fille  de  feu  Nicolas 
&  de  Marie  Leblanc. 

—  Demoifelle  Gamin,  Rachel  Camyn,  née  le  22  juillet 
1672,  fille  de  Noë,  drapier  à  Elbeuf,  &  de  Rachel  Lecointe. 

Page  81.  Simon  Leplatrier,  fils  de  Simon  &  de  Catherine 
Dugard,  marié,  le  9  mai  1669,  à  Marie  Vereul,  fille  de  Jean 
<Sc  de  feue  Marie  Leblanc. 

Page  82.  Jean  Congnard,  confifeur,  époux  de  Suzanne 
Roger. 

Page  83.  Suzanne  Crofnier,  fille  de  feu  Guillaume  & 
d'Anne  Périer,  mariée,  le  4  juillet  1677,  à  Abraham  Vivien, 
chaudronnier. 

Page  84.  Le  fils  Vereul,  chapelier,  Abraham  Vereul,  né 
le  8  mars  1674,  fils  d'Abraham,  chapelier,  &  d'Efter  Simon. 

—  Jean  L'Alouette,  menuifier,  époux  de  Madelaine  Bar- 
joUe. 

Page  85.  Dumont  (Abraham),  orfèvre,  né  le  28  avril  1602, 
fils  de  Daniel  &  de  Madelame  Bigot. 

Page  94.  Paul  Gardel,  miniftre  de  l'églife  de  Grofmesnil, 
commune  de  Gottévrard,  près  Gailly.  Paul  Gardel,  né  le  18 
juin  1654,  fils  de  Jean,  avocat,  &  de  Madelaine  HoufTe- 
maine.  En  1688,  il  revint  en  France,  fut  enfermé  dans  les 
cachots  de  la  Baftille,  pour  caufe  de  religion,  le  2  mars  1689, 
il  y  mourut  le  i3  juin  171 5.  après  de  longues  fouffrances. 


oAppendice.  i85 

Page  1 16.  François  Neel,  né  le  8  décembre  1672,  fils  d'I- 
faac  Neel,  vinaigrier,  &  de  Geneviève  Mauger. 

Page  120.  Sieur  &  dame  Lecoq,  Jacques  Lecoq,  fils  de 
feu  Eftienne,  marchand  à  Caen,  &  de  Madelaine  de  Mau- 
rice, marié  à  Anne  Aubourg,  fille  de  feu  Jacques  &  de  Ca- 
therine Varin. 

Page  126.  Portrait.  Jacques  Porteret,  vinaigrier,  marie, 
le  2  5  mai  1681,  à  Efther  Auber. 

—  Métiotte.  David  Métiotte,  cordonnier,  marié,  le  26 
mai  1670,  à  Efther  Blondel,  fille  de  Michel  Blondel,  maçon. 

Page  141.  Bourget.  Jean  Bourget,  du  Grand-Quevilly, 
époux  d'Anne  Marc. 

—  Jean  Dupont,  fils  de  Jean  &  de  Marie  Dubucq,  paroifle 
Saint-Pierre-l' Honoré. 


FIN    DE   L'APPENDICE. 


TABLE  DES  MATIÈRES 


Pages. 

Notice j 

Avis  au  lecteur xxxvii 

Histoire  de  la  Persécution 1 

APPENDICE. 

I.  Extrait  de  YHisloire  des  Ouvrages  des  Savans,  de 

H.  Basnage  de  Beauval 157 

II.  Liste  des  Nobles  Protestants  au  xvii"  siècle,  men- 

tionnés sur  les  registres  de  Quevilly 159 

III.  Eglises  réformées  de  la  Normandie  au  xvii*  siècle .     471 

IV.  Noms  des  Protestants  restés  à  Rouen  en  1689. .     473 

V.  Réfugiés  protestants  cités  dans  l'avis  au  lecteur. .     179 

VI.  Notes  sur  quelques  noms  cités  dans  le  récit  de  la 
Persécution  de  l'Eglise  de  Rouen 181 


Achevé  d'imprivi^r 
PAR  LÉON  DESHAYS,  A  ROUEN, 

LB  VINGT-NEUF  AOUT  MIL  HUIT  CENT  SOIXANTE-QUATORZE. 


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DATE  DUE 

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GAYLORD 

PRINTED  IN  US    A. 

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Histoire  de  la  persécution  faite  a 

Princeton  Theological  Seminary-Speer  Library 


1    1012  00039  1179 


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