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Histoire des Grecs
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HISTOIRE DES GRECS
V
dbyGoogk
A LA MÊME LIBRAIRIE
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gj;tr' ■fti^LiK^î' ■
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A^ V, 605027
' ^\ (RECAP) ......Google
VI AVERTISSEMENT.
\
cet ouvrage ne serviront donc pas de commentaire
texte, elles en seront le complément.
En mettant sous les yeux du lecteur un certain nombrj
élèbres, je suis obligé de leur laisser les nomï
^nent dans les musées où elles se trouvent^
loms leur ont été imposés, la science des reW
tait pas encore, et personne ne distinguait le£
recs de ceux des Romains. Aujourd'hui, tout
s distingue avec raison, mais on ne peut dé
atues que par les titres qui leur sont attribuée
logues. Ainsi, parmi les nombreuses statuei
, il y a la Vénus de Médicis, la Vénus de Milo
C apitoie, la Vénus genitrix, etc. De même, pout
e statue d'Artémis, on dit la Diane à la biche,
Herculanum, la Diane de Gabies, la Diam
te. On a beau savoir que Faunus est un Dieu
ne peut changer les noms du Faune à l'enfant
Silène, du Faune au repos, qui est un Satyre
qu'on croit, de celui de Praxitèle.
Lirs anciens confondent perpétuellement lei
> et les Dieux grecs. Il est vrai qu'on n'est pai
me pour les statues, de subir la tyrannie di
is il faut comprendre les motifs qui, dans l'ai
daient cette confusion possible et la faisaien
tre naturelle. Ce n'est pas une simple questio
aire, c'est une question plus grave, qui s
me branche importante des sciences histori
ire des religions. Il est facile de s'en convaincr»
nt, sous ce rapport, les auteurs grecs et latin
le. Les Juifs attachent aux noms divins un
taie ; ils ne cherchent pas si les noms de Baa!
représentent le même être ou la même idée
L, Baal et tous les Dieux autres que leur Die
it de faux Dieux» et les Maccabées se révolten
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T
AVERTISSEMENT, VII
mire les rois de Syrie plutôt que d'admettre Tidentité
feZeus et d'Iahweh. Les Grecs et les Romains, au con-
traire, ne distinguent pas de vrais Dieux et de faux Dieux,
Ils ne soupçonnent pas qu'il puisse exister une autre reli-
gion que la leur. Pour eux, les Dieux sont les mêmes chez
tous les peuples de la terre, et si on les adore sous diffé-
rents noms, c'est parce qu'il y a des langues différentes.
Quand Hérodote parle des Égyptiens, il donne à leurs
divinités des noms grecs ; s'il avait eu occasion de parler
des Juifs, il n'aurait pas manqué de dire qu'ils n'adoraient
que Zeus et ne connaissaient pas les autres Dieux. De
même, les auteurs latins traduisent invariablement Zeus
par Jupiter, Athènè par Minerva, Hère par Juno, Dèmèter
par Gérés, Poséidon par Neptunus, Aphrodite par Vénus,
Artémis par Diana, Hèphaistos par Vulcanus, Ares par
j Mamers, Mavors ou Mars, Corè ou Perséphonè par Pro-
serpifla, Dionysos par Liber, Aidôneus par Orcus.
Les assimilations de ce genre ne sont pas toujours cor-
rectes et sont quelquefois difficiles : le grand Dieu italique
Janus n'a pas de véritable équivalent chez les Grecs.
Hermès répond à la fois au Terminus et au Mercurius des
Latins. Mais Cupido est la traduction exacte d'Eros ; Pluto
est la forme latine de Ploutôn, épithète d'Aïdès; entre
Hisliè et Yesta, il n'y a qu'une différence dialectale, comme
entre Héraclès et Hercules, Polydeukès et PoUux. Le nom
^eBacchus vient du grec, et quoique moins usité que
Mi>er dans les auteurs latins, il a prévalu dans les traduc-
fions françaises. Apollon est le seul Dieu qui porte le
Nme nom en grec et en latin.
î la transcription des noms de lieux ou de personnages
feoriques est loin d'avoir la même importance ; cepen-
it, j'en ai quelquefois rectifié l'orthographe dans une
faible mesure. J'ai maintenu le k dans les mots où
aurait eu le son de Y s; j'ai rétabh les diphtongues oi
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VIII AVERTISSEMENT.
et m, que le latin remplace par oe et ae, et que nous rei
plaçons le plus souvent par é; j'ai conservé la finale ei
qu'on traduit, je ne sais pourquoi, par la désinence fé
nine ée; enfin, j'ai laissé à Odysseus son nom, parce qu^
ne comprend pas, si on lappelle Ulysse, pourquoi leréi
de ses aventures a pour titre l'Odyssée. Voilà toutes mi
audaces ; ce serait bien peu de chose en Angleterre et
Allemagne, mais chez nous il ne faut pas déranger li
habitudes. Le temps n'est pas venu où l'on cessera
faire rimer des noms qui n'ont en grec aucun rapport
désinence, par exemple Achille et Eschyle, Pallas et Mi
nélas, Hélène et Hellène, Dryade et Alcibiade, Pisistral
et Socrate, Hérodote et Aristote, Œdipe et Philippe, Caï
liope et Gyclope, Aulide et Euripide, Ajax et Astyanax
Athènes et Démosthènes, Xénophon et Bellérophon. Le
grands historiens anglais et allemands de la Grèce
Grote, Thirlwall, Gurtius, n'ont pas hésité à rétabhr toui
les noms grecs sans exception, mais en France leur auto
rite ne triompherait pas de la routine, puissance redou^
table, contre laquelle je n'ose pas m'insurger.
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)laines,
mrs.
I encens;
ts.
des,
es
;oires,
ires,
i
dbyGoogk
dbyGoogk
[ELLAS.
Tamour d'un peuple libre !
lutour de leur autel
chaque lyre vibre I
rès du ciel.
te était la joie humaine,
les vierges en chœur,
fit nus sur l'arène,
la santé du cœur
lorieux ancôtres,
ens de la cité,
id peuple sans maître,
e et Liberté.
3les, sacrés portiques,
îunes et si beaux,
républiques,
lustres tombeaux I
les formes sacrées
iversel,
js lyres inspirées
neil éternel.
nuit de l'histoire
s les vents déchaînés,
dans l'ombre noire,
LX abandonnés.
l§s bois prophétiques;
appellera
vertus antiques,
;ret ne nous rendra.
sublimes pensées,
chemin qui conduit
royances passées,
l'homme a détruit
dbyGoOgk
n
HELLAS)
Par de là deux -mille ans, loin des siècles serviles,
J'irais, je volerais sur les ailes des vents,
Vers les temples de marbre et vers les blanches villes,
Chez les grands peuples morts, meilleurs que les vivants.
Dieux heureux, qu*adorait la jeunesse du monde.
Que blasphème aujourd'hui la vieille humanité,
Laissez-moi me baigner dans la source féconde
Où la divine Hellas trouva la vérité.
Laissez-nous boire ençor, nous, vos derniers fidèles.
Dans l'urne du symbole où s'abreuvaient les forts.
Vos temples sont détruits, mais, 6 Lois éternelles^
Dans rOlympe idéal renaissent les Dieux morts.
Renaissez, jours bénis de la sainte jeunesse,
Échos d'airs oubliés, brises d'avril en fleur I
La menteuse espérance a-t-elle une promesse
Qui vaille un souvenir au plus profond du cœur?
ftrib
>Pon
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i
ES
IDITERRANÉE.
Olympe, sé-
leios. — Les
primitive. —
L'Épire. — Le bassin de l'Achélôos. Aitolie et Acarnanle. — Le
Pâmasses et rHélicon. Apolloa et les Muses. — La Boiolie. —
L'île d*Euboia. — L'Attique. — La Mégaris. — L'isthme de
Corinthe. — Le Péloponnèse et ses divisions. — L'Eurotas et
l'AIphéios. — Les jeux olympiques. — Légendes du Pélopon-
nèse. — L'Argos achaîque. — Mykènes et Tiryns. — Épidaure
et le temple d'Asclèpios. — L'île d'Aigine. — Groupement po-
litique des cantons péloponnésiens. — Iles de la mer Egée :
les Kyclades. — La Crète. — La Grèce d'Asie. -— Le nord de
la mer Egée. — La Propontis et le Pont-Euxin. — La Lykie.
— La Méditerranée orientale. — Kypros. — Les Philistins. —
La Kyrènalque. — Bassin occidental de la Méditerranée. La
Sicile et la Grande Grèce. — Les Étrusques. — Marseille. —
Défaut d'unité politique. — Les royaumes grecs 1
CHAPITRE II
LÀ RACE HELLÉNIQUE.
hremiers documents historiques. — Légendes des colonies orien-
tales. — Danaos. — Kékrops. — Cadmos. — Tantales et Pé-
lops. — Faible autorité de ces traditions. — Éléments géné-
rateurs de la race grecque. — Antithèse morale des Grecs et
des barbares. — Les Pélasges. — Le sanskrit, le grec et le
latin. — Degré de culture des Aryas primitifs. — Dispersion
des tribus aryanes. — Constructions kyclopôennes et pélas-
giques. — Murs de Tiryns et de Mykènes. — La porte des Lions.
— Le trésor d'Atreus. — Débris de l'industrie dés Pélasges.
.— Vases de Santorin. — Les fouilles d'IIissarlik. — Débris
^0 rindustrie desDanaens. — Les fouilles de Mykènes 47
CHAPITRE m
LA RELIGION.
espondance des religions et des formes sociales. — Les
Dieux, lois vivantes de l'univers. — Les Forces domptées par
Lois. — Expression humaine du divin. — Absence d'unité
L. M. •— HisT. DES Grecs. «
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TABLE DES 1
ase et de corps sacerdotal. -
des lois divines. — La prièi
le. — La divination. — Carac
(mortalité de 1 ame. — Le cul
CHAPITf
LES LÉ6I
ndes grecques n'appartienne
hysique des légendes grecq
s. — Héraclès. — Caractère
les éléments étrangers introc
— La chasse de Calydou. — l
et ses fils. — Les Kypria. -
[liade; la Destruction d'Ilios
gonie. — Développement suc(
ites sur le caractère historiq
CHAPITI
MOEURS DES GRECS AUX
e grecque. — Moralité des
le la femme dans la soci
1 de l'enfant ; éducation, pi
is héroïques : commandem<
emblées. — Hiérarchie pers
•e. — Caractère sacré du tra
de la piraterie. — Conditior
i d'Homère. — Violence des
le sentiment de l'honneur. -
lires; purifications religions
L'amitié. — L'hospitalité, fon
ique chez Nestor et chez Méi
— Fédération idéale des Grec
CHAPITf
INSTITUTIONS N
religieux du lien fédéral. —
: les prêtres, les poètes e1
!. — L'oracle de Delphes
. — Les Amphictionies. — '
ité des jeux. — Les Olympi
— La trêve sacrée. — Les ri
i la sculpture. —Célébrité et
CHAPITR
MIGRATIONS ET
de la légende à l'histoire. —
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TABLE DES MATIÈRES. XV
— Les AioUens en Boiotie. — Invasion des Aitolions et des
Doriens. — Soumission de TÉlis, de la Messénie et de la La-
conie. — Conquête d'Argos, d'Épidaure et de Troiien. — Con-
quête de Sikyone, de Corinthe, de Mégare, et d'Aigine. —
Migration aiolienne. — Les rérogiés en Attique. Méianthos.
Codros. — Migration des Ioniens. — Colonies ioniennes. — Éta-
blissement des Doriens en Messénie et en Liconie. Colonies do-
Tiennes. Thèra. Mèlos. La Crète. — Les Doriens on Crète, à Rhodes
et à Cos. La Doris. — Chronologie mythique. — Les poèmes
homériques. — Les poèmes d'Hésiode. — Les Travaux et Jours? 185
CHAPITRE VIII
LES CITÉS llILITAinBS.
Autonomie de la Cité. Aristog'atie et démocratie. -* Distinction
des classes attribuée à Minos. — Esclavage domestique et ser*
vitude de la glèbe. — État de la population en Thcssalie; —
en Lacooie; — en Crète. — Éducation militaire et institutions
politiques des Cretois. — Sparte, type de la cité militaire. —
Lycurgue. — Constitution politique de Sparte : les rois, le
sénat, les Éphores. — Légende du partage des terres. — Ten-
dances communistes. Les repas publics. — Éducation. Disci-
pline. Tactique militaire. — Soumission de la Laconie. —
Luttes contre les Argeiens. — Pheidon. — Le monnayage. —
Luttes des Spartiates contre les Arcadiens. — Première guerre
de Messénie. — Fondation de Tarente. — Seconde guerre de
f Messénie. Aristoménès. — Tyrtée. — Soumission de la Mes-
sénie. — Suzeraineté de Sparte sur tout le Péloponnèse 217
CHAPITRE IX
LES CITÉS COMIIEBÇANTES.
La royauté remplacée par Toligarchie. — Diffusion de la race
grecque sur les côtes de la Méditerranée. — Colonies eu-
boiennes et mégariennes en Thrace. — L'industrie à Corinthe.
— Les Bacchiades. — Kerkyra et Syracuse. — Colonies grec-
ques en Italie. — Colonies grecques en Sicile. — Comptoirs
milésicns sur le Pont-Euxin. — Factoreries grecques en Egypte.
— Kyrènè. — Voyages à Tartessos. — Fondation de Mar-
seille. — Progrès rapides des colonies grecques. — La mon-
naie, signe de l'autonomie des cités. — Types décoratifs
empruntés à l'Asie. — Développement de l'art grec. — Carac-
tère spontané de l'architecture grecque. — Origine indigène
de la sculpture grecque. — La peinture. — La poésie lyrique.
— Les premiers philosophes. — La géographie. — L'histoire. —
Les premiers prosateurs. — Répugnance des philosophes pour
la religion populaire et la démocratie. — Destruction de Sybaris.
— Dispersion de la confrérie de Pythagore 248
dbyGoOgk
XVI TABLE DES MATIÈRES.
CHAPITRE X
LA VIE POLITIQUE DANS LES CITÉS GRECQUES.
L'oligarchie. — Gratuité des fonctions publiques. — Les lois
écrites. — La tyrannie, ses caractères, son instabilité. — Les
tyrans de Sikyone : Orthagoras, Cleisthénès. — Les tyrans de
Corinthe : Kypsélos. — Périandros. — Discordes civiles à
Mégare. — Théognis. — Révolutions d'Athènes. — L'Archontat.
Les Eupatrides. — Dracon. Kylon. Épiménide. — Selon. — Prise
de Salamine. — Lutte des riches et des pauvres. — La ques-
tion sociale résolue par Selon. — Constitution politique de
Selon : Répartition de l'impôt. — Le Sénat. L'Aréiopage. —
Lois civiles. — Le lien social. Le travail. — Condition des
femmes à Athènes. — Éducation des enfants. — Serment mili-
taire. — Les tables de la loi. — Factions politiques. — Usur-
pation do Pisistrate. — Gouvernement de Pisistrate. Édition des
poèmes d'Homère. — Harmodios et Aristogeiton. — Tyrannie
d'Hippias. -— Sa chute. — Réformes de Cleisthénès. — Inter-
vention des Spartiates. — Luttes contre les Thébains, les
Chalkidiens, les Aiginètes 295
CHAPITRE XI
LUTTE DEa GRECS CONTRE LES BARBARES.
§ 1. Soumission des Grecs d'Asie.
Les rois de Lydie ; leurs attaques contre les Grecs. — Soumis-
sion de la Grèce d'Asie par Croïsos. — L'empire Médo-Persi-
que. Kyros. — Soumission des Grecs d'Asie par les Perses. —
Émigration des Phokaiens et des Téiens. — Soumission de la
Doris et de la Carie. — Héroïsme des Lykiens. — Polycratès
de Samos. Sa puissance; sa mort. — Maiandrios. — Syloson. —
Ruine de Samos. — Soumission de la Kyrènaique. — Le méde-
cin grec Démokédès à la cour de Perse. — Expédition de Dareios
en Scythie. — Conquête de la Thrace et de la Macédoine par les
Perses. — Révolte de l'Ionie. — Secours demandés aux Grecs
d'Europe. — Incendie de Sardes. — Les Carions et les Kypriotes
prennent part à l'insurrection. — Défaite de la flotte grecque
àLadè. — Prise de Milet. — Soumission de la Grèce d'Asie. 33o
§ 2. Résistance des Grecs dEurope. — Première guei^re médique^
Expédition de Mardonios. — Le roi demande aux Grecs la terre
et l'eau. — Expédition de Datis et d'Artapherne. — Ruine
d'Érétrie. — Miltiade. — Préparatifs des Athéniens, secours
demandés aux Spartiates. — Secours envoyés aux Athéniens
par les Plataiens. — Bataille de Marathon. — Trahison dé-
jouée. — Honneurs rendus aux morts, aux Héros et aux Dieux.
— Procès et mort de Miltiade 354
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nç"
TABLE DES MATIÈRES. XVII
Seconde guerre médique.
Xerxès; préparatifs d'invasion. — Canal du mont Athos ; ponts
sur THoUespont. — Dénombrement de l'armée des Perses.
— Les Grecs devant l'invasion. Espions et hérauts envoyés en
Asie. — Congrès à Tisthme de Corinthe. Réponses découra-
geantes de la Pythie. — Secours demandés à la Crète, h Argos,
à Kerkyra, à Syracuse. — La première ligne de défense aban-
donnée sans combat. — Détroit d'Artémision et défilé des
Thermopyles. — Tempêtes et combats dans l'Artémision. —
Combat des Thermopyles. — Mort de Léonidas. — Les Barbares
repoussés du temple de Delphes. — Incendie de Platée et de
Thespies. Embarquement des Athéniens. — Défense do l'Acro-
pole. Incendie d'Athènes. — La flotte grecque à Salamine. —
Conseil de guerre sur la flotte grecque. — Stratagème de Thé-
mistocle. — Bataille de Salamine. — Fuite de Xerxès. — Bataille
d'Himère. — L'armée perse laissée en Grèce. — La paix offerte aux
Athéniens. — Préparatifs de défense. — Les armées en présence.
— Bauille de Platée. — Bataille de Mycale. — Prise de Sestos. 36)
CHAPITRE XII
L*EMPIRE DE LA MER.
Droit des Athéniens à l'hégémonie. — Reconstruction des murs
d'Athènes. — Politique de Thémistocle. La flotte et le Pirée. —
Relâchement du lien fédéral. — Fédération de Dèlos. — Taxe
fixée par Aristide. — Réforme démocratique à Athènes. — Les
sculptures du temple d'Aigine. — Prise d'Eion et de Skyros. —
Le Thèseion. — La tragédie. — Exil de Thémistocle. Trahison
de Pausanias. — Fuite de Thémistocle ; sa mort chez les Perses.
— La fédération de Dèlos se change en empire athénien. —
Bataille de l'Eurymédon. — • Embellissements d'Athènes. —
Libéralité de Kimon. — Siège de Thasos. — Tremblement de
terre à Sparte. — Révolte des Messéniens. — Siège d'Ithômô.
— Renvoi des troupes athéniennes. — L'Areiopage amoindri.
Exil de Kimon. Assassinat d'Éphialtès. — Indemnité pour
l'exercice des devoirs civiques. — Essai de coalition contre
Sparte. — Expédition en Egypte. Siège et soumission d'Aigine.
— Les longs murs. Bataille de Tanagra. — Victoire des Oino-
pliytes. Revers en Egypte. — Mort de Kimon. Fiû do la guerre
médique. — Défection des Boiotes et des Mégarif ns. Soumission
de l'Ëuboia. — La trêve de trente ans 4H3
CHAPITRE Xin
l'art et la démocratie.
Démagogie de Périclès. — Les Clèrouchies. — Le droit au travail.
— Concurrence artistique. — Le problème social résolu par
Tart. — Le travail libre et le travail servile. — Le Partbénon.
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r^
TABLE DES MATIÈRES. XXI
CHAPITRE XVIIÏ
ANARCHIE MILITAIRE.
§ 1. Les successeurs d Alexandre.
L'héritage d*Alexandre. — Délibération des généraux macédo-
niens. — Régence de Perdiccas. — Soulèvement de la Grèce.
— Guerre Lamiaque. Défaite des Grecs à Cranon. — Condi-
tions imposées aux Athéniens. — Mort d'Hypéride et de Dé-
mosthènes. — Occupation d'Athènes. Abolition de la démocra-
tie. — Mort de Perdiccas. Ptolémée en Egypte. — Régence
de Polysperchon. — Intrigues de Phokion. — Procès et mort
de Phokion. — Cassandros et Polysperchon. — Eumènes et
Antigouos. — Mort d'Eumènes. — Querelles de famille. —
Ligue contre Antigonos. — Extinction de la famille royale. —
Dèmètrios, fils d'Antigonos, à Athènes. — Victoire de Dèmè-
trios sur Ptolémée. — Les généraux prennent le titre de rois.
— Les monnaies royales. — Les statues-portraits et les bustes.
— Progrès de Dèmètrios en Grèce. — Ligue contre Antigonos.
— Bataille d'Ipsos. — La fortune de Dèmètrios se relève. —
Occupation d'Athènes par Dèmètrios. — Dèmètrios, roi de Ma-
cédoine. — Anecdote de Stratonikè. — Pyrrhos roi de Macé-
doine. — Dernières aventures de Dèmètrios. — Lysimachos,
roi de Macédoine. Sa morr. — Mort de Séleucos. — Invasion
des Gaulois. — Défense du temple de Delphes 708
§ 2. AgalhoclèSf tyran de Syracuse.
Jeunesse d'Agathoclès. — Agathoclès s'empare de la tyrannie.
— Le Spartiate Acrotat^os à Agrigente. — Siège de Syracuse
par les Carthaginois. — Agathoclès en Afrique. — Effroi des
Carthaginois. Sacrifices humains. — Ophellas de Kyrène. —
Retour d'Agathoclès en Sicile. — Revers des Grecs en Afrique.
— Le Spartiate Cléonymos. — Dernières guerres d'Agathoclès.
Sa mort. — Les Mamertins à Messane 746
§ 3. Pyrrhos et les Romains.
Rome protectrice des Grecs d'Italie. — Les Tarentins provoquent
les Romains. — Pyrrhos appelé par les Tarentins. — Pyrrhos
en Italie. — Négociations avec les Romains. — Bataille d'As-
culum. — Pyrrhos en Sicile. — Retour de Pyrrhos en Italie. —
Victoire des Romains à liénévent. — La Grande-Grèce soumise
aux Romains. — Monnaies de la Grande-Grèce et de la Sicile. 756
CHAPITRE XIX
ROYAUMES ET IIÉPDBLIQUES.
§ 1. Prospérité de C Egypte.
L'Egypte sous les Lagides. — Alexandrie. Commerce, industrie,
religion. — La Bibliothèque et le Musée. — Poètes, grammai-
dbyGoogk
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TABLE DES MATIÈRES. XXIII
tinaent la guerre. — Les Romains en Asie. — Soumission
des Galates. — - Soumission de l'Aitolie. — Querelles des
Acbaiens et des Spartiates. — Violences de Philopoimèn à
Sparte. — Ajnbassade des Spartiates à Rome. — Mort de
Philopoimèn et d'Hannibal 857
§ 3. Perseus et les Romains.
Plaintes contre Philippe. — Rivalité des fils de Philippe. —
Mort de Philippe. — Préparatifs de guerre de Perseus. —
Guerre des Romains contre Perseus. — Offres de médiation. —
Soumission de rillyrie. — Bataille de Pydiia. — Fuite de
Perseus. — Soumission de la Macédoine. — Républiques de
Macédoine et d'IIljrrie. — Triomphe d'Aemilius Paulus 87 1
§ 4. L'Achaïe et les Romains.
Jaridiction des Romains en Orient. — Les rois de Syrie, de
Bithynie et de Pergame. — Ambassade des Rhodiens à Rome.
— Situation des partis en Grèce ; l'Aiiolie. — L'Achaïe sous le
protectorat des Romains. — Les exilés achaicns. — Retour des
exilés. — Troisième guerre de Macédoine. — Soulèvement de
l'Achaîe. — Bataille de Leucopétra. Prise de Gorinthe. — Les
Grecs s<nis les Romains : 881
CHAPITRE XXI
LES ROYAUMES GRÉCO-BARBARES.
§ 1. Les Maccabées,
Antinomie des Grecs et des Juifs. — La religion, forme idéale
du patriotisme juif. — La Judée sous les Achéménides et les
Lagides. — La Judée sous les Séleukides. — Apostasie du sa-
cerdoce juif. — Persécution religieuse. — Insurrection de Judas
Maccabée. -> Caractère national de l'insurrection. — Troubles
du royaume de Syrie. — Ambassade de Judas Maccabée, sa
mort. — Les Juifs profitent des querelles des Séleukides. —
Indépendance des Juifs. — Progrès du royaume des Parthes.
— Querelles de famille en Egypte et en Syrie. — Les sectes
juives. — Royaume de Judée > 893
§ 2. .Mithradate et les Romains,
Annexion du royaume de Pergame. — La province d'Asie. —
Mithradate, roi du Pont. — Massacre des Romains en Asie. —
Expédition de Sulla. — Prise d'Athènes. — Victoires de SuUa
en Grèce. — Tyrannie de Mithradate. — Sulla traite avec
Mithradate. — Exactions de Sulla en Asie. -- Progrès de Mi-
thradate. — Campagne de Lucullus en Asie. — Mutinerie des
soldats de Lucullus OU
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TABLE DES MATIÈRES.
§ 3. Les Triumvirs en Asie,
ce des pirates. — Guerre contre les pirates. — Clémeuce
»mpée. — Pompée en Arménie. — Soumission du Pont
la Syrie. — Les Romains en Judée. — Mort de Mithra-
— Soumission de Kyrëne et de Kypros. — Les Romains
rypte. — Expédition de Crassus contre les Parthes. —
te des Romains. — Mort de Crassus. — César et Pompée,
sar à Alexandrie. — Cléopâtre chez César. — Guerre
) Pharnakës. — Dictature de César; sa mort 938
§ 4. Cléopâtre.
►nd triumvirat. — Bataille de Philippes. — Antoine en
— Cléopâtre et Antoine. — Campagne de Ventidius
5 les Parthes. — Hérode, roi des Juifs. — Campagne
Lreuse d'Antoine contre les Parthes. — Octave et Antoine,
mpire de Cléopâtre. — Rupture d'Antoine et d'Octave. —
^re lutte de l'Orient contre l'Occident. — Bataille d'Actium.
rt d'Antoine. — Monde Cléopâtre. — L'empire romain., 956
CHAPITRE XXII
TRANSFORMATION DES CROTÀNCES.
§ 1. Prologue du Christianisme,
ice politique et religieuse. — La religion et la philoso-
— L'herméneutique stoïcienne. — L'évhémérisme. — La
lologie. — Transformations do la Maotique. — L'incarna-
es âmes. — Variété des fonctions religieuses. — La sym-
le du vin. — Progrès de la superstition. — La religion des
3S. — La religion des esclaves. — Initiation de l'Orient à
losophie grecque 973
§ 2. La synthèse chrétienne.
j d'Hérode. — La Judée sous les Romains. —Le Messie. —
pbe. — Le Diable. — La chute des anges. — La chute des
— La résurrection. — Bouddhisme et Christianisme. —
)s multiples du christianisme. -- L'Homme-Dieu. — Le
de la Passion. — Apothéose du Féminin. — La Rédemp-
— Le péché originel. — La fin du monde. — La Trinité,
glise. — La morale antique. — La morale chrétienne. —
monastique; -^ Apostasie du monde grec. — Ruine de la
ation 99 1
FIN OB LA TABLE DES MATIÈRES.
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TABLE BES GRAVCRES
Pages.
Tète de Zeus alyCoxo; (camée) .4 ix
Tête d'Athènè (camée d'Aspasios) xii
Buste d'Homère (musée du Louvre) 1
Tète colossale de Zeus (le Jupiter d'Otricoli, au musée du Vatican). 4
Monnaies (Épire, Thessalie, Aitolie, Acarnanie, lies Ioniennes)... 7
Apolloa du Belvédère (musée du Vatican) 9
Les Muses (sarcophage du musée du Louvre) II
Naissance de Dionysos (bas-relief du Vatican). — Dionysos et son
cortège (bas-relief du Vase Borghèse, au Louvre) 13
Monnaies (Phokis, Locris, Boiotie, Euboia) H
Monnaies d'Athènes 16
Promètheus, patron des sculpteurs. — Proraètheus, inventeur du
feu (lampes de terre cuite) 17
Athènè guerrière (statue d'Herculanum). — Dèmèter fpcinturc
d'Hercalanum). — Athènè pacifique (Pallas de Vellétri, au
Louvre) 18
Monnaies (Mi^gare, Corintho, Sikyone, Elis, Ar<2;olifi, Achaïc) 20
Pan (monnaie de Messanc en Sicile). — Sutue de Pan. — Tète de
Pan (monnaie de Panticapée). — Héraclès étouffant le lion de
Néméa (monnaie d'Hèraclée de Lucanie) Héraclès combattant
(monnaie de Stymphale) 22
Le Soleil (musée du Louvre). — Tôte d'Hère, d'après la statue de
Polyclète (monnaie d'Argos). — Tête d'Hèrô [la Junon de Prô-
neste). Le Soleil (monnaies de Rhodes et de Clazomène). Tête
de Poséidon (monnaie d'Antigonos). Poséidon Yan^oxo; (monnaie
de Dèmètrios) 23
Monnaies ( Arcadie» Messénie, Laconie) 25
Hermès présente un suppliant à Asclèpios et aux Chariics (bas-
relief), — Monnaies (Salamine, Aigine, Epidaure) 27
Monnaies des îles Kyclades : Dèlos, Naxos, Andros, etc 29
Triomphe dé Dionysos et d'Ariadnè (camée du Louvre) H
L. M. — HiST. DES Grecs. ^
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TABLE DES GRAVURES. XXVII
Pagei.
Combat des Grecs contre les Amazones (sarcophage de Vienne ;
peinture de vase) 106
Thèseus et Hippolytë (peinture de vase). — Amazone du Vatican.
— Amazone blessée, du Capitolo 107
Combat de Thèseus contre les Kentaures (peinture de vase) 108
Atalantè et Méléagros (mosaïque de Lyon). — Artémis (musée do
Dresde). — Méléagros (musée du Vatican) 109
Construction du navire Argo (bas relief du Louvre'. — Jason cl la
toison d*or (pierres gravées) 111
Jason et les Argonautes chez Aiètès (peinture de vase) 113
Œdipe et la Sphinx (pierres gravées) 115
Œdipe et ses fils (bas-relief) 1 16
Noces de Thétis et de Pèleus (sarcophage). — Éducation d'Achille
(peinture d'Hcrculîhium). — Jugement de Paris (bas-relief du
Louvre) , 118
Enlèvementd'Hélène(bas-relief de Florence). — Sacrifice d'Iphi-
génie (bas-relief du vase Médicis, à la galerie de Florence) 119
Achille irrité. — Achille jouant de la lyre. — Sacrifice de Polyxène.
— Diomède et le Palladion . — Cassandre et Aias (pierres gravées). 1 22
Épisodes du sac d'ilios (peinture d'un vase du musée de Naples). 123
La Table Iliaque (bas-relief en plusieurs parties). 126, 127, 128 et 129
Odysseus. — Les Sirènes. — Le chien Argos (buste et camées). —
Odysseus et ses compagnons chez Kirkè (fragment d'une table
odysséenne 131
Apothéose d'Bomcre (bas-relief d'un vase d'argent du musée do
Naples) 133
Priâmes aux pieds d'Achille (bas-relief du Capitole). — La rançon
d'Hector (bas relief du vase d'argent de Bernay, à la Bibliothèque
nationale) 138
Aias et Patroclos (groupe de Florence) 152
Achille et Patroclos (coupe de Sosias). — Achille pleurant Patro-
clos. — Combat autour du corps de Patroclos (pierres gravées). 153
Apothéose d'Homère (bas- relief du British Muséum) 159
Piédestal trilatéral du musée de Dresde (1'* et 2^ face) 1C6
Apollon et Héraclès (3® face du piédestal). —Apollon (monnaies de
Croton et de Chalkis; pierre gravée) 167
Statues d'Apollon (musées du Louvre, du Capitole, de Florence,
de Naples) 169
Dèmèter (peinture d'Herculanum). — Monnaie des Amphictions. 172
Statues d'Hermès (musées du Louvre, du Vatican, de Naples}. . . 177
Polydeukès, inventeur du pugilat (statue du Louvre) 178
Les lutteurs de Képhissodote (tribune de Florence) 179
Discobole de Mjrron (Vatican et British Muséum} 180
Discobole de Naukydès (musée du Louvre) 181
Apollon Masagète (musée du Vatican) 182
pas-relief choraçi()ue (musée du Louvre) 184
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XXVIII TABLE DES GRAVURES.
Pages.
Monnaies des villes d'AioIis : Kymè, Ténédos, Mitylène, Smyrne,etc. 194
Sthtuette d'Histiè 197
Monnaies des villes d'Ionie : Éphèse, Samos, Milet, Chios, etc. . . 199
Monnaies (Doris, Carie, Pisidie, Pamphylie) 203
Homère (buste du Louvre; monnaies de Cbios, d'Ios, d'Amastris). 207
Éros (statué du Vatican, pierre gravée) 210
Éros et Psyché (bas-relief du vase Chigi ; camée) 211
Symbolique de la vie humaine (sarcophage du Capitole). . . 212 et 213
Aréà enchaîné (l'Achille Borghèse, du Louvre) 233
Monnaies des villes grecques de Thrace 252
— (Chalkidique, Illyrie, Acarnanie) 253
— des villes de la Grande Grèce 259, 2C0, 261
— — grecques de la Sicile et de l'Ibérie 264, 265
— — de la Propontis et du Pont-Euxin 268, 269
— — de Kilikie, de Kypros, de KyW naique 273 i
Types de vases peints 278, 279
Cabanes en bois. — Les trois ordres d'architecture : Dorique,
Ionique, Corinthien 282
Sculptures archaïques : Stèle de Marathon (musée d'Athènes).
Métope de Sélinonte (musée de Talcrme). Bas-relief de Samo-
thrace (Louvre) * 2X7
Fragment d'une peinture murale de Paistum (musée de Naplos) . '289
Bas-relief d'Assos (musée du Louvre) 290
Danses de jeunes filles (bas-relief du muaée du Louvre) 318
Le vase de Dareios (musée de Naples). — Dariques 364, 365
Statues des frontons d'Aigiue (glyptotlièque de Munich) 406
Le temple d'Aigine ^ . . . 407
L'Athènè d'Aigine (glyptothèque de Munich) 408
Statuettes décoratives du temple d'Aigine (glyptothèque de
Munich) 409
Bas-relief du Thèséiou 412
Statues de Dionysos (le Bacchus de Richelieu, au Louvre. — Le
Sardanapale du Vatican). Bas-relief du théâtre de Dionysosi
(British Muséum). — Le théâtre de Dionysos (monnaie d'Athè-
nes). — Attributs dionysiaques (monnaie kistophore) 414
Satyre de Praxitèle (le Faune au repos, du Vatican). — Silène,
nourricier de Dionysos (le Faune à Tenfant, du Louvre). — Si-
lène, l'outre personnifiée (bi*onze d'Herculaoum). — Le taureau
dionysiaque (intaille d'Hyllos) 415
La Comédie. — La Tragédie (peintures d'Herculanum ; musée du
Louvre). — Répétition d'un drame satyrique. — Masques tragi-
ques. — Masque comique 416
Plan du Parthénon 442
Le Parthénon (état actuel) 443
Le Parthénon restauré, les Propylées, l'Athènè protectrice 444
Intérieur du grand temple de Paistum. • • 445
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TABLE DES GRAVURES XXIX
Pages,
Les Trontous du Parthénon avant 1687, d'après les dessins de
Carrey 44C
Principales statues des frontons du Parthénon (Britisb Muséum). 447
Fragments des bas-reliers de la frise du Parthénon 450, 451
Tète de rAthènè du Parthénon (camée d'Aspasios. — Tetra-
drachme d'Athènes). — L*acropole d'Athènes (monnaie de bronze
d'Athènes) ; 452
L'Athènè du Parthénon (statuette du musée de Turin) 453
Ruines des Propylées de l'acropole d'Athènes 454
L'Érechthéion , 456
Atbènè Polias (musée de Dresde). — Caryatides de rÉrochthélon. 457
Vase panathénaique (musée du Louvre) 459
Enlèvement de Corè. ~ Le printemps, rappel de Corè. — L'au-
tomne, retourdeCorè chez son époux (bas-reliefs de sarcophages). 463
Triptolème entre Corè et Dèmèter (bas-relief d'Eleusis). — Tripto-
lème sur le char ailé de Dèmèter (monnaie d'Eleusis ; au revers,
la Truie) 465
Mission de Triptolème (peinture de vase).. 466
Fjiçade restaurée du temple de Zeus à Olympie 476
Coupe longitudinale du temple de Zeus à Olympie 477
Temple d'Apollon secourable à Phlgalie 478
Bas-reliefs du temple de Phigalie (Britisb Muséum) 479
Temple d'Égeste 515
Monument choragique de Lysicrate à Athènes 644
Bas-reliefs du monument choragique de Lysicrate 645
Niobè et ses enfants (statues de la galerie de Florence) 646
Aphrodite (statues du Louvre, du Vatican, monnaies impériales). 647
BaUille d'Arbèle (mosaïque de Pompéi) 667
Le grand escalier de Tchil-minar 670
Bas-reliefs de Persépolis 67î, 673
Chapitaux et bas-reliefs persépolitains 675
Monnaies d'Alexandre et do ses successeurs 7Î6
Statues iconiques : Sophocle, Démosthènes, Aischine, Euripide,
Ménandre (musées du Vatican, du Louvre, de Naples). ... 728, 729
Bustes : Alexandre, Périclès, Alkibiade, Hippocrate, Thucydide,
Socrate 730
Alexandre combattant (statue équestre d'Herculanum) 731
Le bronze de Siris (Britisb Muséum) 759
Monnaie de Pyrrhos, roi d'Épire 761
Médaillons de Syracuse gravés par Kimon et par Evainetos 765
Les temples de Philai 768
Portique du grand temple de Philai 769
Temple d'Aroôris à Edfou 770
Zeus-Ammon, Isis, Sarapis (monnaies) 773
Ptolémée Soter et Bérénikè. — Ptolémée Philadelphe et Arsinoè
(monnaies) , , , , 797
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TABLE DES CARTES
Page».
Carte de la Grèce 1
Colonies grecques 48
Colonies grecques en Asie Mineure 193
Colonies grecques en Italie et en Sicile 257
Grèce au temps des guerres modiques. . . 363
Empire macédonien 653
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e. (Musée du Louvre.
lE PREMIER
\ÈCE ET DES CÔTES DE LA
TERRANÉE.
■tuatîoû de la Grèce ; incertitude de ses limites ; son extension pro-
gre
iiA^ ^Bgressive. — La Grèce d'Europe et ses subdivisions. — Les îles de la
Srèce d'Asie. — Kyrènaîque. — Grande Grèce et Sicile,
grecs.
)t limites de la Grèce. — Le pays que ses
ment Hellas, et que nous appelons Grèce d'après
, est la partie méridionale d'une des trois pres-
urope projette dans la Méditerranée. Du côté du
imite s'étend du mont Olympe au promontoire
I, un peu au de là du 40® degré de latitude nord ;
- HisT. DES Grecs. i
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2 LE PINDOS. — L'OLYMPE.
mais celle limite n'a jamais été bien définie ; les uns retran-
chent TÉpire de la péninsule hellénique, les autres y compren-
nent la Macédoine. Des trois autres côtés, la Grèce est entourée
et pénétrée en tous sens par la mer. Les îles nombreuses de
TArchipel, ou mer Egée, qui forme le bassin oriental, la ratta-
chent à la côte d'Asie. A l'occident, en face de l'Italie, la mer
Ionienne creuse un golfe profond entre la région continentale
et la côte du Péloponnèse. Les deux bassins se réunissent au
midi et baignent l'île de Crète, presque à égale distance de la
péninsule hellénique et du continent africain que les Grecs
nommaient Libye. Si on étend, comme le faisaient les anciens,
le nom d'Hellas à tous les pays habités par les Grecs, il faut
y comprendre, non seulement les îles de l'Archipel et de la
mer Ionienne, mais les côtes de la Macédoine, de la Thrace,
de l'Asie mineure, la portion de la Libye appelée Kyrènaïque,
la Sicile et la partie méridionale de l'Italie, qu'on nommait
Grande Grèce. La vraie patrie du peuple grec, c'est la mer.
Le Pindos. — l'Olympe, séjour des Dieux. ^ rOssa
et le Pélion. — La chaîne des Alpes orientales, après avoir
suivi la direction du sud-est le long de la mer Adriatique, se
partage en deux branches à partir du mont Scordos ; l'une, qui
va vers l'orient, sépare la Macédoine et la Thrace du bassin
du Danube; c'est la chaîne de l'Haimos. L'autre, qui descend
vers le. sud, forme la grande arête de la péninsule hellénique,
traverse l'isthme et aboutit à la pointe la plus méridionale du
Péloponnèse, partageant les eaux fluviales entre la mer
Ionienne et la mer Egée. Depuis le point où elle pénètre en
Grèce jusqu'à celui où elle s'incline vers l'est pour contourner
le golfe de Corinthe, cette arôte porte le nom de Pindos. Deux
rameaux détachés du Pindos se dirigent en sens inverses
vers les deux mers : à l'ouest les monts Acrokérauniens, qui
séparent l'Ëpire del'Illyrie, à l'est les monts Cambuniens, qui
séparent la Thessalie de la Macédoine. A l'extrémité de la
chaîne Cambunlenne, près des bords de la mer Egée, se
dresse à plus de 3,000 mètres, le massif colossal de l'Olympe,
la plus haute montagne de la Grèce. Sa cime neigeuse et
voisine du ciel semblait le séjour des Dieux. C'est là qu'ils
tenaient leurs assemblées, assis sur des nuages d'or. Du côté
dbyGoogk
LES DEUX DODONES. 3
da nord, l'Olympe forme une immense muraille (aillée à pic.
Au sud, l'élroile et fraîche vallée de Tempe, au fond de laquelle
coule le Pèneios, sépare l'Olympe de son rival TOssa, pic
escarpé en forme de dôme, et après l'Ossa s'étend, parallèle-
ment auPindos, le large plateau du Pèlion. Quand les nuages,
montant de la mer et de la vallée, s'amoncelaient comme des
montagnes, on disait que les géants entassaient Pèlion sur
Ossa pour escalader le ciel.
Le Pèneios. — Les deux Dodones. — L'oracle de
Zeus. — De la chaîne du Pindos, parallèlement aux monls
Cambuniens, s'étend la chaîne de l'Olhrys qui va rejoindre les
dernières ramifications du Pèlion. Tous les cours d'eau qui
descendent de ces quatre chaînes de montagnes se réunissent
dans le lit du Pèneios qui les porte à la mer. D'après les tradi-
tions grecques, la plaine qu'ils arrosent formait autrefois un
vaste lac jusqu'à ce qu'un tremblement de terre, séparant
l'Olympe de l'Ossa, ouvrit une issue aux eaux à travers les
rochers déchirés de Tempe. Les plus anciens souvenirs de la
Grèce se rattachent à cette contrée, qu'Homère appelle l'Argos
Pélasgique et le pays des Hellènes. C'est là qu'Hésiode place lu
lutte des Dieux contre les Titans. Pour les anciens Grecs,
comme pour leurs frères aînés les Aryas de l'Inde, l'orage
était une bataille qui se livrait dans le ciel; la victoire de Zeus (I)
sur les Titans, c'est la victoire de l'élher calme et lumineux
sur les vents terrestres. Zeus l'olympien, le Dieu qui lance la
foudre, était la principale divinité des Pélasges et son plus
ancien sanctuaire était à Dodone. Pour connaître d'avance les
changements de l'atmosphère, on interrogeait le Dieu du ciel,
réponse dans le mouvement des feuilles
t. C'est ainsi qu'on pouvait, selon l'expres-
)prendre les projets de Zeus d'après la haute
. L'oracle de Dodone était ce qu'on appel-
m observatoire météorologique. Deux villes
ins traduisent Zeus par Jupiter; mais il fiiut so
IX latins n'ont pas de mythologie; on ne doit donc
i les amours de Zeus ni sa lutte contre son père
Titans et les Géants. Les miroirs étrusques dési-
►m de Tina.
dbyGoogk
A» ^» 4.^
dbyGoogk
L'HELUS FUIMITIVE. 5
tiques. Pindare les nomme les Helles, et un fragment des
grandes Éoïées d'Hésiode donne le nom d'Hellopie au pays de
Dodone. Ces deux noms peuvent être rapprochés de ceux
d'Hellènes et d'Hellas. Arislole, en parlant du déluge de Deu-.
calîon, dit qu'il se fit sentir principalement dans l'Hellas pri-
mitive, « c'est-à-dire aux environs de Dodone et de l'Achélôos,
car ce fleuve a changé plusieurs fois de cours. C'est là qu'ha-
bitaient autrefrois les Selles et ceux qu'on nommait autrefois
les Grecs (rpaixci) et qu'on nomme aujourd'hui les Hellènes ».
C'est sur ce passage que s'appuient les auteurs qui placent la
première patrie des Hellènes en Épire ; mais Clavier a montré
que les expressions d'Âristote peuvent aussi bien convenir à la
Dodone Ihessalienne, malgré la mention du fleuve Achélôos,
car ce nom est quelquefois pris dans un sens générique, et
selon Strabon il y avait un Achélôos en Thessalie.
C'est dans la partie méridionale de cette contrée, sur les
deux versants du mont Othrys, qu'on faisait régner Deucalion,
fils de Promèlheus et père d'Hellen qui donna son nom à la
race hellénique. Le déluge arrivé sous le règne de Deucalion
sépara, selon Apollodore, les montagnes de Thessalie, c'est-
t rOssa. On racontait que Deucalion et sa
faut seuls échappé à l'inondation, avaient
!n lançant derrière eux des pierres que Zeus
mes et en femmes. Ces hommes nés du sol
iges dans un fragment des Éoïées, mais ce
ient pas une mention expresse du déluge.
ï pas non plus ; il fait de Deucalion un Cré-
) et père d'Idoméneus ; mais il désigne la
os comme la patrie des Hellènes : « Les
;os pélasgique, ceux qui occupaient Alos et
et ceux qui possédaient Phtiè et Hellas aux
se nommaient Myrmidons, Hellènes et
cinquante vaisseaux étaient commandés par
ienne s'étendait sur un des côtés du golfe de
ité est formé par une étroite langue de terre
lion et la mer Egée. Au fond du golfe était
ason et ses compagnons, portés sur le na-
dbyGoogk
6 L'ÉPIRE.
vire Argo, dont le gouvernail était un des hôlres prophétiques
de Dodone, partirent d'Iolcos pour conquérir la toison d'or.
Dans les gorges du Pèlion galopaient les Kentaures velus, aux
formes de chevaux. C'est là que les Dieux assistèrent aux
noces de Pèleus et de Thétis aux pieds d'argent, fille du vieil-
lard de la mer. Les Muses, égalant le banquet par leurs
ieurs danses, annoncèrent la guerre de Troie et la
d'Achille. Le fleuve Sperchios, auquel Pèleus voua
re de son fils, coule dans une étroite vallée entre
ficalions du Pindos, l'Othrys et l'Oita et se jette
Ife Maliaque. La chaîne abrupte et sauvage de TOila
nme la chaîne Cambunienne, une muraille défen-
ée de la mer par un étroit passage. C'est le défilé
lopyles, où Léonidas et ses compagnons se firent
arrêter l'invasion des Mèdes.
\ — La Grèce se compose d'une suite de presqu'îles
t les unes dans les autres. Un premier étrangle-
3rmé d'un côté par le golfe Maliaque, de l'autre par
'Ambrakia, ouvert à la même latitude sur la mer
. Entre le golfe d'Ambrakia et le cap Acrokérau-
idait l'Épire, c'est-à-dire le continent, ainsi appelé
tion aux îles Ioniennes. Séparé de la Thessalie par
iu Pindos, TÉpire élail habitée par des populations
à la race grecque, mais ses rois se disaient issus
Aiakides. Quoique, d'après l'Odyssée, Néoptoléhios,
lie, fût retourné dans la Phlhiè après la prise de
tradition le faisait s'établir en Épire, et c'est à lui
lis des Molosses rattachaient leur origine. Clavier
l y apporta le culte et l'oracle de Zeus Dodonéen.
é par Etienne de Byzance, dit en effet que la ville de
le hêtre sacré étaient en Thessalie, et que l'oracle
ransporté de là en Épire. Kinéas étant Thessalien
e de Pyrrhos, roi d'Épire, devait bien connaître
a Thessalie. La Dodone épirote, dont on a retrouvé
nent près de la ville moderne de Janina, ayant fait
Dodone tliessalienne, c'est en Épire qu'on a cher-
miière patrie des Hellènes. Mais aucune tradition
le se rapporte à ce pays qui, pour les Grecs primi-
dbyGoogk
dbyGoogk
lITOLIE et AGARNANIE.
lé occidentale de la terre. Là coulait le
'entrée du pays des morts. Le golfe d'Am-
es géographes anciens, la limite de la
la mer Adriatique. C'est seulement après
[>ire a commencé à jouer un rôle dans
Lchélôos. Aitplie et Acarnanie. — Sorti
'Épire, TActiélôos, le plus grand fleuve de
fils de rOcéan, se dirige vers le sud et se
onienne à l'entrée du golfe de Corinthe.
Tiée par ses alluvions a fini par réunir à la
>upe de petites îles voisines. Cette plaine
lit humain disputait aux inondations du
able ailolienne d'une lutte entre Héraclès
. main de Dèianeira. Cette lutte est repré-
peint du musée du Louvre. Le corps d'A-
» par des replis de dragon, image de la
irs. Sur les monnaies des Acarnanes, il est
s cornes de taureau, à cause de l'impé-
rée de TÉpire par le golfe d'Ambrakia, de
lôos, était bornée à l'ouest par la mer
a côte, à laquelle l'unissait autrefois une
3rre, était l'île de Leucas, ainsi appelée à
îs blanches, d'où Sappho se jeta, dit-on,
amour désespéré. Plus loin vers le sud
ikè, de Samè, appelé plus lard Képhallènia,
ss îles et la côte en face de Leucas for-
rOdysseus. Dans les montagnes escarpées
liions du Pindos et de l'Oita, les traditions
i grande chasse du sanglier de Calydon,
es rudes montagnards de l'Aitolie gardèrent
rs à demi sauvages, mais, vers la fin de la
me, ils jouèrent un rôle important dans
l courageusement contre les Romains,
i rHélicon. Apollon et les Muses. — A
ion avec l'Oita, la chaîne du Pindos se
iches. L'une se dirigeant vers le sud-ouest.
dbyGoogk
LE FAHiNASSOS ET L IlÉLIGON. 9
sépare l'Aitolie de la Locris Ozole et descend jusqu'au golfe
de Corinthe ; Taulre, allant vers le sud-est, forme le Par-
nassos, THélicon et le Kithairon. Aux pieds des deux rochers
du Parnassos était la ville sainte de Delphes, anciennement
i
ApoUoD du Belvédère. (Musée du Vatican.)
Pytho, siège d'un oracle d'Apollon, le plus célèbre de tous les
prophétiques de la Grèce. C'est là que le Dieu
îrrible dragon né des eaux du déluge. Après les
sr, quand les torrents inondaient la vallée, on
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10 LA BOIOTIE.
croyait voir un serpent déroulant ses anneaux. L'air s'emplis-
sait d'exhalaisons mortelles; mais bientôt les rayons du soleil
tombent comme des flèches d'or et dessèchent les marais in-
fininhp/»« In fameusc statue de l'Apollon du Belvédère, à Rome,
e Dieu dans l'orgueil de la victoire. Il vient de
îrnière flèche, et le monstre exhale sa vie : « Tu
s le fléau des hommes, dit l'hymne homérique,
rriras ici sous l'action de la terre noire et de l'in-
)érion. »
d'Apollon se rattachait par d'anciens souvenirs
septentrionales : c'était de la vallée de Tempe que
cré avait été transporté à Delphes. C'est aussi de
l'Olympe que sortit le culte des Muses. Homère
épithète d'Olympiennes; Hésiode les fait naître en
•â-dire au nord dé la Thessalie. Une tribu venue
1 s'établit à une époque très ancienne sur les con-
ôkis et de la Boiôtie et y porta le culte des Muses
lié aux premiers essais de la musique, de la poésie
nse. Les Muses personnifient les eaux douces,
Nymphes, mais avec un caractère particulier : ce
irces chantantes qui, dans les grottes et les forêts
Pindos, du Parnassos, de l'Hélicon, enseignent aux
divines cadences. C'est de leur nom que les Grecs
lusique l'ensemble des exercices de l'esprit,
le. — Le long des côtes de la mer d'Euboia, sur
'une chaîne de collines qui-«^ rattache à l'Oila,
ocris épicnémidienne et la Locris opuntienne, sé-
L Locris ozole par la Phôkis. Le Képhisos, rivière
)ntagnes de la Doris, descend vers les fertiles plaines
3 et y forme le lac Copaïs, qui ne communique
que par des conduits souterrains creusés sous le
L'obstruction de ces canaux changerait la Boiôtie
s, et c'est peut-être à quelque accident de ce genre
)rtela tradition du déluge d'Ogygès. On disait aussi
avait employé ce moyen pour ruiner la puissante
me d'Orchomène qui était en guerre avec les Thé-
3uits perpendiculaires ouverts dans la montagne
t de nettoyer les canaux. Un autre lac plus petit,
dbyGoogk
H
dbyGoogk
12 L'ILE D'ëUBOIA.
le lac d'Hylica, parait avoir aussi des communications souter-
raines avec la mer. Dans la Boiôlie méridionale, TAsôpos coule
lentement au milieu d'une longue et sinueuse vallée aussi
fertile que celle du Képhisos.
Les habitants de la stérile Attique prétendaient que Tabon-
dance des eaux qui fécondent le sol de la Boiôtie alourdissait
Tesprit de ses habitants. On a peut-être eu tort d'admettre,
sur la parole des Athéniens, la stupidité d'un peuple qui, le
premier, a rendu un culte aux Muses, qui a produit Hésiode et
Pindare et qui a modelé les charmantes statuettes de Tanagra.
Dans les temps héroïques, aucune ville n'a brillé d'un plus vif
éclat queThèbes,la patrie d'Héraclès et de Dionysos (1), la ville
sacrée dont les murs s'étaient élevés spontanément aux sons
de la lyre d'Amphion. La sombre légende thébaine, les crimes
involontaires d'CEdipe, la lutte fratricide de ses fils, le dévoue-
ment de sa fille Anligone ont fourni aux poètes d'Athènes les
sujets de leurs plus belles tragédies.
L^lle d'Euboia. — La Boiôtie a deux côtes maritimes, Tune
sur le canal d'Euboia, l'autre sur le golfe de Corinthe. La
grande île d'Euboia, qui semble un prolongement de la chaîne
du Pèlion à travers la mer, couvre la côte nord-est delà Locris,
de la Boiôtie et de l'Attique, mais elle dépend plus particulière-
ment de la Boiôtie, dont elle a peut-être été séparée par une
révolution géologique analogue à celle qui a ouvert le défilé
de Tempe. Devant le port d'Aulis, d'où partit la flotte d'Aga-
memnon, d'après les traditions épiques, l'Ile est si rapprochée
du continent qu'on a pu l'y réunir par un pont. Cette partie
étroite du canal euboïquese nomme Euripos; il s'y produit des
alternances irrégulières de flux et de reflux qui n'ont pas été
bien expliquées. Sur ce détroit, presque en face d'Aulis, s'éle-
vait la principale ville de l'Euboia, Chalkis, qui envoya de
nombreuses colonies en Sicile, en Italie et sur les côtes de
Thrace et de Macédoine, où une presqu'île prit de là le nom
de Ghalkidique. Sur la même côte, plus au sud, était la ville
(1) Sur les miroirs, Phuphluns; dans les auteurs latins. Liber Pater,
la Libation personnifiée. Le nom de Dncchus^ forme latine d^une épi-
thète grecque, est devenu synonyme de Liber, et les modernes l'ont
généralement adopté.
dbyGoOgk
dbyGoogk
dbyGoogk
L'ATTIQUE. 15
d'Érétrie, qui fut incendiée par les Perses dans la première
guerre médique. Dans la seconde guerre, les Érétriens et les
Ciialkidiens prirent part aux batailles navales d'Artémision et
de Salamine. Deux petites villes de Boiôtie, Thespies et Platée,
eurent un rôle glorieux dans ces luttes nationales : les Platéens
combattirent avec les Athéniens à Marathon^ les Thespiens
moururent avec les Spartiates aux Thermopyles, tandis que la
grande ville de Thëbes 8*était soumise à Xerxès. Mais les Thé-
bains lavèrent plus tard Thonneur de leur ville: seuls avec les
Athéniens, ils défendirent à Ghéronée la liberté de la Grèce, et
Thèbes fut détruite par Alexandre .
L^Attiqae. — L'Attique est une presqu'île triangulaire, bor-
née d'un côté par le Kithairon et le Par nés qui la séparent
de la Boiôtie, et baignée des deux autres côtés par la mer
Egée. Quelques montagnes peu élevées, le Pentélique avec ses
carrières de marbre, THymetle avec son miel, le Laurion aux
mines d*argent, séparent les principaux districts de ce petit
pays, « la région du globe, dit Thirlwall, dont l'étendue offre
la plus grande disproportion avec sa gloire çt son importance
historique. » Athènes était bâtie dans une plaine, près de la
côte méridionale, au pied d'un rocher isolé qu'on appelait l'A-
cropole, c'est-à-dire la haute ville, la citadelle. Les Athéniens
racontaient que deux puissantes divinités s'étaient disputé la
possession de leur cité et l'honneur de lui donner un nom. Ils
montraient la source d'eau salée qui avait jailli du trident de
Poséidon, etl'olivier sorti de terre à la voix d'Athènè (1). Il y eut
un vote et Athènè obtint la préférence; mais Poséidon ne re-
tira pas sa faveur aux Athéniens; il en fit un peuple de mate-
lots. Athènè leur donna les vertus guerrières, attestées par
deux témoins éternels, la plaine de Marathon et l'Ile de Sala-
mine. Elle leur donna aussi l'aclivilé créatrice et Fintelligence
politique. L'olivier qu'elle avait planté devint la principale ri-
chesse du pays. La vierge armée, fille de Zeus, l'éclair qui
jaillit du ciel, veillait sur son peuple, du haut des remparts bâ-
tis par les Pélasges. Sa grande statue de bronze, œuvre de Phi-
(l) Le nom de Pallas, associé par Homère au nom d'Athènè a été
conseryé par les Romains, mais ils traduisent Athènè par Minerva.
dbyGoOgk
16
L'ATTIQUE.
dias, dominait le Parlhénon et les Propylées; du cap Sounion,
on voyait briller Taigrette de son casque et la pointe de sa lance.
D'autres Dieux encore protégeaient l'Attique : Apollon, l'an-
g
is Ioniens; Hèphaistos(l),le forgeron, père du premier
Lhènes Érechtheus, qu'Athènè avait nourri de son lait
I ^?a, Iœtitq, celui qui allume le foyer. Les miroirs étrusques
ni Setklans; les auteurs latins l'identifient avec Vulcamif, Dieu
du feu.
dbyGoogk
L'ATTIQUE. 17
de vierge; le Titan Promèlheus, inventeur du feu, patron des sta-
tuaires et des potiers. Dèmèter(l), la législatrice, avait enseigné
aux Athéniens Tagriculture, et près de son sanctuaire d'Eleusis,
on montrait le premier champ où avait été semé le blé. L'Atlique
i» s
les vignes, et le théâtre était né aux fêtes de Diony-
plus grand bienfait des Dieux, c*est un gouverne-
me à la justice: Thèseus, le héros vainqueur des
e mère, yri (jlyjtvjp. Son culte passa de la Sicile chez les
l'appelèrent Cérès.
dbyGoOgk
dbyGoogk
L'ISIUME DK CORINTHE. 19
brigands, avait fondé la démocratie en proclamant le principe
de l'égalité des droits : «àji ta Tax rvai.
La Mégaris. — LUsthme de Gorinthe. — La Mégaris ap-
partient géographiquement à TAltique, mais elle en a été déta-
chée politiquement depuis l'invasion des Doriens dans le Pélo-
ponnèse. C'est une langue de terre formée par une branche du
Kilhairon entre le golfe de Gorinthe et le golfe Saronique. Au
sud-ouest du territoire de Mégare, les montagnes s'abaissent et
l'isthme, resserré entre deux baies, n'a guère que deux lieues
de largeur. Sur ce terrain étroit et presque plat, appelé Diol-
cos, on faisait glisser les navires qui voulaient éviter la circum-
navigation du Péloponnèse. Corinthe, appelée anciennement
Éphyra, avait un port sur chacune des deux mers et devint
malgré l'exiguïté de son territoire, la ville la plus riche de la
Grèce. Elle fonda de nombreuses colonies, entre autres Syracuse,
la ville la plus importante de la Sicile. A l'exemple des Athé-
niens, les Corinthiens disaient que deux divinités, Poséidon (1)
et le Soleil, s'étaient disputé leur ville. Ils ajoutaient que Bria-
reus, le géant à cent bras, ayant été pris pour arbitre, avait
adjugé la ville à Poséidon et le promontoire voisin au Soleil.
La forteresse de Corinthe était une citadelle inexpugnable
située à quelque distance de la ville, au sommet d'un rocher
escarpé qui dominait l'isthme et protégeait le Péloponnèse. Les
rois de Macédoine s'en emparèrent et furent maîtres de la
Grèce. Affranchie de la Macédoine, Corinthe se réunit à la con-
fédération achaienne et fut détruite par les Romains. César la
rebâtit et y établit une colonie. Néron voulait percer l'isthme,
mais on abandonna bientôt cette entreprise, regardée comme
une impiété. L'ouverture récente du canal de Suez engagera
peut-être le gouvernement hellénique à reprendre une opéra-
tion qui ne serait pas très difficile et dont le succès ferait de
Corinthe la véritable capitale de la Grèce.
Le Péloponnèse et ses divisions. — Le Péloponnèse,
l'Ile de Pélops, est un pentagone irrégulier, profondément
échancré de tous les côtés par la mer. Les anciens le compa-
raient à une feuille de platane, dont l'isthme de Corinthe for-
(!) Appelé parles Romains Neplunin,
dbyGoOgk
dbyGoogk
L*EUROTAS ET L'aLPIIEIOS. 21
meraille pétiole. On Ta aussi comparé à la feuille du mûrier,
et de là vient son nom moderne de Morée. Un cercle de hautes
montagnes entoure la partie centrale de la presqulle et pro-
jette dans tous les sens des ramiGcations vers la mer. Cette
région centrale était TArcadie, la seule partie du Péloponnèse
qui n'eût pas de côte maritime. Au nord, la chaîne qui ratta-
che le mont Kyllène au mont Érymanthe séparait TArcadie de
Tétroiie contrée qu*on nommait d'abord Aigialos, c'est-à-dire
le rivage, et qui prit le nom d'Achaïe quand les Achaiens,
chassés de la partie orientale du Péloponnèse, s'établirent le
long du golfe en expulsant les Ioniens. A l'ouest, l'Arcadie
était séparée de l'Élis par une branche de l'Érymanthe, le
mont Pholoè. A l'est, les montagnes de l'Argolis, rattachées au
mont Kyllène, se prolongent sous les noms de Parthénios,
d'Artémisios et de Parnon, le long de la côte de Laconie jus-
qu'au cap Maléc. Au sud, entre l'Arcadie et laMessénie, s*étend
la chaîne du Lykalos, qui va rejoindre à Test le mont Maina-
los, séjour préféré du grand Dieu des Arcadiens, Pan aux pieds
de chèvre. Partant du Lykaios, une autre chaîne de montagne,
le Tèygetès, séparait le golfe de Messénie du golfe de Laconie
et se prolongeait dans la mer jusqu'au cap Tainaros,la pointe
la plus méridionale de la Grèce.
UEurotas et l'Alphéios. — Les Jeux olympiques. —
Du cirque de montagnes qui entoure l'Arcadie, des rivières
descendent dans toutes les directions. Le Pamisos arrose la
fertile plaine de Messénie ; l'Eurotas coule entre le Parnon et
le Tèygetès, dans la vallée qu'Homère appelle la creuse Laké-
daimôn. Vers le milieu de son cours se trouvait Sparte, dont
les ruines, comme l'avait prévu Thucydide, sont si loin de ré-
pondre à l'importance du rôle qu'elle a joué dans 1 histoire,
que son emplacement a été longtemps douteux. L'Alphéios sort
des mêmes montagnes que l'Eurotas; on suppose que ces
deux fleuves, après s'être engouffrés dans les mômes canaux
souterrains, en sortent de nouveau par deux sources différen-
tes et dans deux directions opposées. Le lac Copaïs nous a
^éjà offert un exemple de ces disparitions de rivières dans les
profondeurs du sol; elles n'étaient pas rares en Arcadie; on
attribuait ces cavités souterraines au trident de Poséidon,
dbyGoogk
22 L'EUROTAS ET L'ALPHEIOS.
c'est-à-dire à des tremblements de terre produits par des infil-
trations marines. L*Alphéios est le plus grand fleuve du Pélo-
ponnèse ; après avoir traversé l'Arcadie où il reçoit les eaux du
Ladon et de TÉrymanthe, il pénètre en Élis et se jette dans la
' lienne. Les Grecs, habitués à voir des fleuves disparaî-
nnaie de Mes- Tète de Pan (monnaie
en Sicile). de Panticapée).
étouffant le lion Héraclès combattant (mon-
méa (monnaie naie de Slymphale).
liée de Lucanie).
Statue de Pan.
(paraître, ont prétendu que TAlphéios traversait la mer
'aissait en Sicile dans la fontaine Arélhousa. Cette opi-
ûi si généralement admise que Strabon croit nécessaire
ifuter.
une petite plaine de TÉlis, près de la vallée de Pisa,
ds de l'Alphéios, se célébraient les jeux olympiques, les
lèbres de la Grèce. Là, dans le bois sacré de TAltis, au
dbyGoogk
LES JEUX OLYMPIQUES. 23
milieu des statues des athlètes vainqueurs dans les luttes
Tète d'Hère, d'après Is
sUtae de Polyelète.
(Monnaie d'Argos).
Tète d'Bèrè (la Junon
de Prénette).
Le Soleil
[ Monnaie dé Rhodes).
Le Soleil (Monnaie
de Clazomène).
Le Soleil (musée du LouTre).
Tète de Poséidon (monnaie
d'Antigonos, roi d'Asie).
Poséidon -rati{oxo(, c'est-à-dire qui tient
la ^<frre (monnaie de Dèmètrios).
gymniques, était le temple de Zeus Olympien, dont le colosse
dbyGoogk
U LÉGENDES DU PÉLOPONNÈSE.
j» » l'ivoire élail regardé comme le chef-d'œuvre de Fii.
5 retour périodique des jeux après des intervalles c^
lUs qu*on nommait olympiades, est devenu la base d*
lologie grecque.
ides du Péloponnèse. — Le Péloponnèse passait pour
ière patrie de Pélasges, comme la Thessalie était celle
ènes. Les Arcadiens qui, dans leurs montagnes restc-
ijours en dehors du chemin des migrations, se van-
*é(re autochtones, et même plus anciens que la Lune,
ervèrent jusque dans l'époque historique l'habitude de
rir de glands. Quelques-unes de leurs légendes se rap-
à un état tout à fait sauvage, par exemple celle de
changé en loup pour avoir offert des sacrifices hu-
Les débuts de la civilisation dans ces contrées se ralfa-
au nom de Phoroneus, qui est une sorte de Promè-
gien, car on lui attribuait la découverte du feu et on
[t le premier des hommes. Son père, le fleuve Inachos,
31s de l'Océan, passait pour le plus ancien roi du pays,
deux divinités, Hère (1) et Poséidon, se disputaient TAr-
fut pris pour juge avec d'autres fleuves du voisinage, et
Duoncèrent en faveur d'Hère. Poséidon irrité dessécha
s et toutes le9 rivières du pays, h l'exception du marais
e. Plusieurs légendes locales se rapportent à celte sé-
i des plaines de l'Argolis : Danaè séduite par Zeus
en pluie d'or, c'est la terre sèche fécondée par les
u printemps. Les Danaïdes, c'est-à-dire les filles de la
che, qui remplissent incessamment un vase sans fond,
puits creusés dans la terre sablonneuse et toujours
it&Xu^i\|;iov ''Ap-^o;, comme dit Homère. Dans la basse
e Lerne, au contraire, les eaux manquaient d'écoule-
t les ruisseaux pestilentiels, quand on voulait les des-
'enaissaient ailleurs comme les tôtes d'un serpent veni-
a victoire d'Héraclès sur l'hydre est peut-être une fabi
omme la victoire d'Apollon sur Pytho; mais, par Ten-
de ses travaux, Héraclès représente surtout les pi -
luttes de la civilisation contre une nature toujoi -
I fondue par les Romains avec la Juno italique.
dbyGoOgk
L. M. — HisT. DES Grecs.
dbyGoOgk
I/ARGOS ACIIAÎQUE.
lis le Péloponnèse que la plupart de ses
ilisées.
le. — Mykénes et Tiryns. — Dans les
5 nonn d'Argos achaïque désigne ordinai-
d*Agamemnon, mais quelquefois il est
>ponnèse et môme à la Grèce en général,
fos, où règne Diomèdès, c*est une des trois
mais elle n'a pas Fimporfance de Mykènes
ces des rois Atréides. Après le retour des
isseméntdes Doriens à Argos, Mykènes, la
perdit sa prépondérance, et Argos devint
ante de la contrée. Lors de l'invasion de
luile à un 1res petit nombre d'habitants,
ux ïhermopyles et à Platées les quelques
, tandis qu'Argos gardait une neutralité
le trahison. Peu de temps après, les Ar-
ykènes dont les habitants furent recueillis
ville encore plus ancienne que Mykènes,
[e par les Argeiens, qui en transportèrent
;. Les ruines de Tiryns et de Mykènes, qui
ijourd'hui telles que les a décrites Pausa-
des constructions qu'on nomme pélasgi-
trouve d'analogues dans tous les pays où
es Pélasges, en Grèce, en Asie mineure
les récentes du docteur Schliemann à My-
Itats les plus importants pour l'histoire de
B héroïque. L'abondance des armes et
d'argent trouvés dans les tombeaux justi-
ichesse de Mykènes et des rois Pélopides.
smple d^Asclëpios. — L'Ile d'Aigine.
'gos et le golfe Saronique, l'Argolis forme
l'avance vers le sud dans la partie de la
ïme mer de Myrlo. A l'extrémité sont les
e et de Troizen, et, près de la côte, la pe-
où Démosthène s'empoisonna dans le
pour ne pas tomber vivant aux mains des
laine de collines désignée, dans sa partie
e nom d'Arachnaion, sépare le territoire
dbyGoogk
ÉPJDAURE. 27
d'Épidaure de celui d'Argos. La ville d*Épidaure devait son
imporlaiice au temple d'Asclèpios, Dieu de la médecine. De
dbyGoogk
"^ippl
l'île D'AlGhNE.
Bs de la Grèce les malades venaient consulter le
is parle de colonnes sur lesquelles ils inscri-
n, leur maladie et la manière dont ils avaient
y allait aussi, comme dans nos villes d'eaux,
des distractions, et le théâtre d'Épidaure, bâti
sacrée, passait pour le plus beau de la Grèce,
daure, au milieu du golfe Saronique, était lîle
es habitants, qui se prétendaient la souche des
ent les premiers, selon un fragment d'Hésiode,
3nt des vaisseaux à voiles pour parcourir les
par les Doriens d'Épidaure, Aigine passa avec
lination de Pheidon, roi d'Argos, auquel on rap-
n du monnayage. Les plus anciennes monnaies
on connaisse ont été frappées à Aigine au hui-
ant notre ère ; elles représentent une tortue,
ayant recouvré leur indépendance, devinrent
iVlhéniens sur mer et prirent comme eux une
à la bataille de Salamine. L'école aiginélique
écéda la grande école altique de Phidias; les
aient les deux frontons du temple d'Alhènè à
ont maintenant au musée de Munich, représen-
s des héros Aiakides, patrons des Aiginèles.
ï politique des cantons péloponnésiens. —
ions politiques du Péloponnèse ne répondirent
cactement à ses divisions géographiques. Les
taires de Sparte lui donnèrent de bonne heure
marquée sur les autres États doriens. La Mes-
is guerres successives, cessa d'exister comme
erritoire fut réuni à celui de la Laconie. Les
s de la presqu'île appelée Argolis par les géo-
li presque toujours indépendantes les unes des
a plus importante, après avoir longtemps lutté
ut renoncer à jouer un rôle politique et se con-
e des arts. Son école de sculpture fut la rivale
es. Sikyone, une des plus anciennes villes de
ont le territoire était resserré entre l'Achaïe et
dut sa célébrité qu'à son école de peinture,
ont le pays était un terrain neutre, à cause des
dbyGoogk
dbyGoogk
30 LES KYGLADES.
piques, n'avaient rien à redouter des Spartiate
3mme en Argolis il y avait des villes indépenc
les autres et qui se faisaient quelquefois la gi
it Tégéa et Mantinée. Ces deux villes eurent à
Spartiates et réussirent à garder leur indépencj
idas, en fondant Mégalopolis, donna aux Arcj
litique qui leur avait manqué jusque-là, en
I, par la fondation de Messène, il ruinait la puis
es de TAchaïe étaient unies entre elles par u
r le pied de l'égalité. Depuis que l'invasion doi
forcés à s'établir dans TAigialos, les Achaiens
iigers à toutes les affaires de la Grèce, môm
nédiques. Mais, pendant la période macédon
de l'affaiblissement de Sparte, ils voulurent él
ation à tout le Péloponnèse. Les Spartiates refu
înt d'y entrer. De là des luttes qui amenèrent 1
es Romains et la soumission de l'Achaïe.
la mer Egée : les Kyclades. — Les lies de 1'
tachent à la Grèce continentale par le plateau
i les porte et ne sont que des prolongements
le montagnes. Ainsi la longue arête dorsale de
fait suite à la chaîne du Pèlion, reparaît dans h
î des Kyclades, tandis que leur ligne intérieu
chaîne traversant l'Atlique jusqu'au cap Sounio
es forment un ovale très allongé plutôt qu'un <
ir les pèlerins qui venaient à Dèlos, les rochers
e tous les côtés de l'horizon semblaient une cou
3 rile sainte. Dèlos est la plus petite des Ky(
avait l'honneur, inappréciable aux yeux des Grec
berceau d'Apollon et d'Artémis (i). Quand Lèto,
t prise des douleurs de l'enfantement et poui
lousie d'Hère cherchait en vain un asile, Dèlc
)rs qu'une lie flottante, consentit à la recevoir
ise, Apollon y établit son sanctuaire où les lonic
ntitô de TArtémis grecque et de la Diafia italique, c
r les Romains est contestée aujourd'hui. Latona est h
lèto.
dbyGoOgk
LES KYGLAUES.
31
iébraient des concours de chant, de danse et de pugilat. Les
Perses eux-mêmes, lorsqu'ils ravageaient les îles grecques, res-
pectèrent celle où étaient nés les deux Dieux de la lumière. Mi-
thridate n'eut pas les mêmes scrupules : pour punir Dèlos de
sa fidélité aux Romains, il massacra les habitants, dévasta le
temple et jeta la statue du Dieu à la mer.
Près de l'île d'Apollon était l'île de Dionysos, Naxos, ancien-
nement Dia, la plus fertile des Kyclades. Les vignes qu'on y
cultivait expliquent le culte rendu au Dieu des libations. On ra-
contait qu'en revenant de la conquête de l'Inde, il avait abordé
dbyGoogk
dbyGoogk
L'ILE DE CKÈTE.
33
à Naxos avec son cortège de Mainades et de Satyres, y avait
rencontré Ariadnè, fille de Mi nos, abandonnée par Thèseus au
retour de Crète et en avait fait son épouse.
Au sud des Kyclades se développe, entre le Péloponnèse et la
côte d'Asie, une chaîne dites volcaniques dont les plus impor-
tantes sont Mèlos, qui ressemble à un vaste cratère, et Thèra,
aujourd'hui Santorin, intéressante par des révolutions géolo-
Zeus enfaot allaité par la chèvre Amaltheia. Sa mèie Rhéiè est assise près de
lui. Deux Courètes Trappent leurs boucliers de leurs épées pour empêcher Kronos
d'ectendre les cris de reufant. (Bas-relief d'un autel quadrangu!aire du Capitole.)
giques causées par des volcans sous-marins. Les vases trouvés
à Santorin sont antérieurs à l'effondrement de l'Ile et passent
pour les œuvres les plus anciennes de l'art industriel chez les
Grecs.
La Crète. — L'île de Crète, la plus grande des lies grec-
ques, située à peu près à égale dislance de l'Europe, de l'Asie
et de l'Afrique, semble destinée à servir de lien entre les trois
parties de l'ancien monde. La chaîne qui la traverse dans sa
dbyGoogk
L'ILE DE CHÈTE.
Test se rattache aux montagnes du Pé-
par la petite île de Kylhéra. La forme de
dbyGoogk
1 i.i^ipjpjJW^MM. ■ —
L\ GUÉGB D'ASIE. 35
la Crète reproduit à peu près celle de l'Euboia. Sa côte septen-
trionale est profondément échancrée par deux golfes qui la
partagent en trois régions en rapport avec trois groupes de
montagnes. Le plus important, celui du centre, l'énorme mas-
sif de rida, s*6lève à 2340 mètres au-dessus dé la mer. C'est là
que Zeus était né et qu'il avait été élevé par les Courètes. Ce
nom, comme celui des Selles de Dodone, désigne à la fois une
ancienne population de la Grèce et un ancien collège de pré-
Ires de Zens. Primitivement, il signifiait les jeunes gens. A
l'époque pélasgique, quand les Grecs célébraient Zeus, les jeu-
nes gens de la tribu, xoûpci, les Courètes, frappant leurs bou-
cliers de leurs épées, se livraient k des danses guerrières qui
ûguraient les tempêtes de l'air, la victoire de Zeus sur les Ti-
tans. Les Cretois montraient aussi chez eux, près de Gortyne,
le platane sous lequel Zeus avait déposé la fille de Phoinix,
Europe, qu'il avait enlevée en prenant la forme d'un taureau
et transportée à travers la mer dans la contrée appelée depuis
l'Europe. Le fils de Zeus et d'Europe, le sage roi Minos, après
avoir réprimé la piraterie dans l'Archipel et donné des lois à
la Crète, conserve son sceptre d'or dans le royaume d'Aidés et
rend la justice aux morts. 4 côté du premier législateur, les
légendes Cretoises placent le premier artiste, l'Athénien Daida-
los qui, chassé de son pays, est accueilli par Minos et construit
le labyrinthe pour loger le Minotaure.
La Grèce d'Asie. — L'Asie mineure forme un vaste pla-
teau entouré d'une ceinture de montagnes dont la plus consi-
dérable est la chaîne du Tauros. Du côté de la mer Egée,
lOlympe, rida, le Tmolos, qui sont comme les contreforts du
plateau central, enferment de vastes et fertiles vallées qu'habi-
taient autrefois des peuples plus ou moins apparentés à la race
hellénique, Phrygiens,- Lydiens, Cariens, Lykiens. Au nord-
ouest, dans la plaine arrosée par le Simoïs et le Scamandros,
les légendes placent le royaume de Troie, et plus au sud, aux
pieds du mont Sipyle, l'antique royaume de Tantalos, d'où
étaient sortis les rois Pélopides. Dans les temps historiques,
toute la région maritime était occupée par les Grecs et distin-
guée par les noms des principales tribus qui y avaient fondé
des colonies. L'Aiolis comprenait l'ancienne Troade et la grande
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36 LA GKÈGË D'ASIE.
tle de Lesbos. L'Ionie, dont le nom est quelquefois étendu à
toute la Grèce d'Asie, désignait plus spécialement la côte de
Lydie, entre l'embouchure de l'Hermos et celle du Maïandros,
avec les lies voisines, Chios et Samos. La Doris comprenait les
îles de Cos, de Rhodes et la côte carienne jusqu'à la Lykie.
D'après les auteurs grecs, la côte d'Asie mineure, habitée
anciennement par des Cariens et des Lélèges, n'aurait pris le
nom d'ionie que dans les temps historiques par suite d'une -
émigration partie d'Athènes et composée principalement d'Io* ■
niens. Cependant Casaubon a soutenu la haute antiquité des
Ioniens d'Asie, en s'appuyant sur la Bible, qui donne aux Grecs
en général le nom de Javanim et les fait descendre de Javan,
un des fils de Japhet. Dans le code de Manou, les Yavanas sont
nommés parmi les tribus de Kshattriyas qui ont perdu leur
caste pour avoir négligé les rites. L'antériorité des Ioniens
d'Asie sur les Ioniens d'Europe a été soutenue de nos jours
par M. Curlius.
Les lies de l'Archipel relient la Grèce d'Asie à la Grèce d'Eu- '
rope; les Sporades font suite aux Kyclades, les îles de Rhodes
et de Carpalhos sont un prolongement de la Crète. A l'orient
comme à l'occident, la mer Égée^ pénètre dans l'intérieur des
terres par des échancrures profondes qui triplent l'étendue
des côtes. Ainsi, en Asie comme en Europe, les Grecs étaient
prédestinés par la géographie à devenir marins. Les anciens
habitants de la Grèce d'Europe, qu'on désigne sous les noms
assez vagues de Pélasges et de Lélèges, habitaient aussi la
Grèce d'Asie avant les temps historiques. Il y a toujours eu
des échanges de population entre les deux côtes de la mer
Egée : on trouve en Mysie un mont Olympe comme en Thes-
salie, un mont Ida comme en Crète. Le développement de la
civilisation fut à peu près simultané chez les Grecs d'Asie et
chez les Grecs d'Europe. Deux des trois modes de la musique <
grecque, le mode phrygien et le mode lydien, appartiennent à
l'Asie : la fable de Marsyas écorché par Apollon après un
concours musical semble traduire une rivalité entre la lyre et
la flûte. C'est en Europe qu'on trouve les plus anciennes cons-
tructions grecques, les murs de Tiryns et de Mykènes, mais une
tradition les faisait bâtir par des ouvriers hkiens. Le vers hexa-
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L. M. — H18T. DES Grecs.
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KYPROS.
lations indigènes n'ont pas été absorbées et ont
trvé leurs langues. La côte de Carie, à la hauteur
(des, forme donc de ce côté la limite de la Grèce
lant la Lykie, petite presqu'île montagneuse à
e, était habitée par un peuple très proche parent
9 Lykiens sont nommés dans Tlliade parmi les
n. Leur roi Sarpèdon, fils de Zeus et d'Europe,
et de Rhadamanthys, paraît être un ancien Dieu
Hérodote, ayant disputé le trône à Minos, il fut
te avec tous ceux de son parti et s'établit dans
l'Asie habité par les Solymes. Hérodote ajoute
ppelé autrefois Milyas, reçut le nom de Lykie de
kos, fils de Pandion; mais il est plus probable
e Lykie dérive d'un vieux mot grec qui s'est
tin, et signifie le pays de la lumière, c'est-à-dire
ivant anglais Schmidt suppose, d'après l'étude
is, que les Lykiens sont un rameau détaché de
-européenne avant l'émigration pélasgique ; leur
aît tenir le milieu entre le grec et le bactrien. Il
cette langue était facilement comprise des Grecs,
Ifmnes du Lykien Olen en l'honneur d'Apollon
aux fêtes de Dèlos. La légende de Bellérophontès
[is rapports entre Argos et la Lykie ; c'est à Tocca-
égende qu'on trouve dans Homère la première
'iture. Les tombeaux de Xanthos, dont plusieurs
ïs au British Muséum, ont pour caractère parti-
ation systématique des constructions en bois ; le
t en ogive et a la forme d'une carène renversée,
s du petit édifice qu'on nomme monument des
nblent à quelques sculptures grecques archaï-
e bas-relief de Thasos, au Louvre. Mais ce qui
Dre plus les Lykiens des Grecs, c'est leur sens po-
ient pour gouvernement une république fédéra-
l'égalité des cantons, comme la ligue achaienne.
*ranée orientale. ~ Kypros. Les Philistins.
à quelle époque les Grecs s'établirent sur quel-
la région située à l'est de la Lykie, entre la mer
i Tauros. Il y étaient déjà au temps de la domi-
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ET GRANDE GRÈCE.
j les ancêtres des Grecs avaient pris
B pays ait été fermé pendant longtemps
'étaient fait cbnnaître que par des actes
les-uns de ces pirates grecs ayant con-
dynastie saïte reçurent des terres vers
5 mercenaires grecs formèrent depuis
Egypte, et les marchands grecs eurent
ir à Naucratis sous certaines conditions
u près comme les Européens sont admis
i Chine et du Japon. Enfin, à Touest de
lis d'Ammon, la ville de Kyrène, fondée
île de Delphes, devint le centre d'un
ts, et tout le littoral du pays, qui forme
ne, reçut le nom de Kyrènaïque.
e la Méditerranée. La Sicile et la
Grecs avaient pu enlever aux Tyriens,
contre l'empire assyro-chaldéeu, le
et de la mer Noire ; mais quand ils vou-
Méditerranée occidentale, ils eurent
ns, les Carthaginois. Carthage, colonie
tropole l'avantage de pouvoir soutenir
force militaire redoutable. Les Grecs
is colonies importantes sur les côtes
i de la Sicile, et môme sur une partie
aie, mais les Carthaginois se maintin-
entale de la Sicile, en face de l'Afrique,
de Corse et de Sardaigne, et n'en fu-
Romains.
s'établissaient en Sicile^ les Grecs fon-
Italie méridionale des colonies si nom-
le nom de Grande-Grèce. Les princi-
race hellénique, Achaiens, Dorions,
Vsie, fournirent des éléments à cette
leignit bientôt une grande prospérité,
t Athènes, aucune ville grecque n'égala
Sélinonte et Syracuse dans la Sicile,
fente dans la Grande-Grèce. Avec le
i, toutes les formes de la culture intel-
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3 ÉTHUSQUES.
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j
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jo.Riir Suufllof
Jmp Faùuymr Porur
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LES MURS DE TIBYNS. 61
construits sur le sol de la Grèce ne sont pas des temples comme
en Egypte^ ni des palais comme en Assyrie, ce sont des enceintes
de villes et des citadelles. Cette différence est importante, parce
que le caractère des peuples se traduit dans leur architecture.
L'Egypte est une théocratie, TAssyrie une monarchie : la Grèce
sera le pays de la cité républicaine. Sur des rochers escarpés et
d'un accès difficile, s'élevaient des forteresses où les habitants
de la plaine pouvaient se réfugier et se défendre contre une
descente de pirates ou contre Finvasion d'une tribu ennemie.
Mars de Tiryns etMykénes. — La porte des Uons. —
Les murs de Tiryns, élevés d'environ i2 mètres sur ^5 d'épais-
seur, sont formés de quartiers de rochers non taillés, dont un
seul, dit Pausanias, serait difficilement traîné par deux mulets.
Les interstices qu'ils laissent entre eux sont bouchés au moyen
de pierres. L'acropole de Tiryns n'a ni bastions ni tours comme
on en trouve dans les constructions pélasgiques moins ancien-
nes, mais de chaque côté de la principale entrée sont prati-
quées, dans l'épaisseur du mur, des galeries ogivales dont la
Toute est formée d'assises en encorbellement. Dans la gale-
rie extérieure du mur de l'est, il y a six ouvertures en ogive.
La ville de Mykènes s'étageait sur le versant d'un mamelon es-
carpé qui commandait la plaine d'Argos. La citadelle qui en
occupe le sommet est entourée de remparts formés de blocs
polyédriques irréguliers, mais s'adaptant les uns aux autres
sans le secours de petites pierres^ et soigneusement taillés pour
offrir une surface unie. Les Pélasges ne connaissaient pas l'é-
querre ;il semble résulter d'un passage d'Aristote qu'ils se ser-
vaient d'une règle flexible en plomb pour tracer l'épure des
blocs et les tailler. Près de la porte des Lions, ces blocs sont
quadrangulaires et rangés par assises horizontales, mais les
joints verticaux sont encore irrégulièrement placés et plus ou
moins obliques dans un sens ou dans l'autre ; c'est une transi-
tion entre l'appareil pélasgique polygonal et l'appareil hellé-
nique formé de parallélipipèdes égaux et réguliers.
La porte des Lions, placée au fond d'une avenue entre deux
murailles, est formée, de deux jambages inclinés portant un
Hnteau de i^y^O de longueur. Au-dessus, dans un vide trian-
gulaire de la muraille, est enchâssé un bas-relief représentant
L. M. — HisT. oBs Grecs. 4
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LA PORTE DES LIONS. 03
en métal et devaient se présenter de face, pour effrayer
l'ennemi, conime les têtes de la Gorgone sur les boucliers.
2
s
s
Les corps et les pattes sont bien proportionnés et largement
exécutés. La colonne qui forme le milieu du bas-relief est un
peu plus large du haut que du bas ; elle repose sur une base
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INDUSTRIE DES PÉLASGeS.
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sur la céramique et le travail des métaux chez les ancienne^
populations de la Grèce. On a trouvé à Santorin des vases de
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terre jaune antérieurs à Téruption volcanique qui bouleversa
rîle de Théra vers le seizième siècle avant notre ère. Ces pote-
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Zeos (Camée de la bibliothèque nationale. La monture est un travail du quinzième
siècle, l/aigle placé près de Zeus Tavait fait prendre pour saint Jean révangéliste).
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ABSENCE D'UNITÉ KELIG
les poètes eux-mêmes les exposaient di
Homère et Hésiode sont en désaccord si
Selon Homère, l'Océan est le principe
siode, le ciel, Ouranos, est l'ancêtre d€
et les Fleuves ont pour père Zeus d'à
d'après Hésiode. Dans la Théogonie, les
Ciel et de la Terre et personnifient le
foudre: le Kyclope de l'Odyssée est un l
fils de Poséidon. Hésiode parle longuei
particulier de Promètheus ; Homère ne (
et parle à peine des autres Titans. 1
Apollon fait du géant Typhaon un fi
nomme Typhôeus et en fait un fils de
Aphrodite (1) est fille de Zeus et de Dion
Théogonie, elle naît du sang d'Ouran(
mer. Hèphaistos est fils de Zeus et d'Hèi
seule dans Hésiode. 11 a pour femm
Aphrodite dans l'Odyssée, tandis que dai
dite est l'épouse d'Ares (2). Le même p<
deux généalogies dififérentes : elles se
parmi les enfanls de la Nuit, et plus
comme filles de Zeus et de Thémis.
Le mélange ou le contact prolongé c
pies de races différentes introduisit de
ments étrangers dans l'Hellénisme. Le
se répandit en Grèce avec la culture (
jours une physionomie orientale. VI
ses nombreuses mamelles, est une pei
ture, et n'a de commun que le nom av€
des forêts d'Arcadie. Les Grecs n'a
étrangère qu'en l'assimilant à une de
nales. La phrygienne Kybèlè, dont le
les montagnes au son des flûtes, des
bours, fut identifiée avec Bhéiè, la m
dite, fille de la Diônè pélasgique, se c
(1) Sur les miroirs étrusques Turan ; chez
(2) Le Dieu italique M amers, Mavors, A!
Ares.
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lORTALlTÉ DE L'AME-
>e, mais ils n'ont plus pour nous au-
jieuse. Les repas des Grecs étaient tou-
r la musique et les hymnes et se t,er-
ices de force et d'adresse. On conviait
oyeuses où les poètes chantaient leurs
flûtes et des lyres, et quelquefois aussi
ens. Mais les Dieux ne s'ofiFensaient pas
es, leurs véritables prêtres, et la gaieté
me un concert de bénédictions.
'àme. — Une des plus anciennes for-
nous soient parvenues est celle qu'on
i début du serment prononcé par Aga-
des deux armées : « Père Zeus, très
ui règnes du haut de l'Ida; Soleil qui
it ; Fleuves et Terre, et Vous deux, qui,
5 après la mort les hommes qui ont
ez nos témoins et les gardiens de la foi
invoque Zeus avant les autres Dieux
se jurent à la face du ciel. 11 nomme
Terre, divinités communes à tous le«
ïres, Dieux nationaux de chaque peuple,
rts, Aïdès {\) etPerséphonè(2).l)ansun
le, la môme invocation est faite à peu
rmes, sauf que la punition des parjures
nnyes, personnification des remords.
tes prières des Grecs contiennent un
ptalité de l'âme et d'une expiation des
e vie. Cette croyance à la perpétuité
ine après la mort, très différente des
3u monothéistes de transmigration ou
uve dans toutes les branches de la race
s c'est l'Hellénisme qui a donné au
ignifie l'Invisible, est souvent remplacé par
I traduisent par Orcus; le mot Pluto n'est
yxwv, celui qui s'enrichit.
Phéréphatta; dans les auteurs latins Pro*er-
icile on l'appelait Korè^ la jeune fille, en
dire Notre-Dame.
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HÉBOS ET Les ANCÊTRES.
m se tradaisit par la jalousie d'Hère contre
e Zeus, el à mesure que le sens des neux
adl à s'oublier, ou ne vil plus que des
s ces alliances divines. Pourtant, la poésie
il qu'exprimer dans sa langue naturelle
e et fortifiante : les grands hommes sont
et par la pratique des vertus viriles retour-
iont sortis.
s est la religion de la cité, le culte des
ion de la famille. Chacun de nous a ses
ses Démons bienfaisants, les bienheureux
es de la race d*or, qui deviennent après
;ns de ceux dont ils étaient les modèles
Vêtus de brouillard, dit Hésiode, ils par-
ous sens, observant les actions justes ou
lant les bienfaits. » Les Dieux supérieurs,
le des choses, ne peuvent écouter chaque
iiateurs sont là, qui reconnaissent des voix
mt nos misères, parce qu'ils ont souffert
luront bien adoucir, sans les violer, les
Bs. Les prières montent, les secours des-
des morts conduit les vivants par le rude
n.
ni- Dieux humains transforme les cultes
sanction nouvelle à l'amour de la patrie,
ent le fleuve ou le ruisseau natal, ou le
les de sa montagne qui attache l'homnae
I, c'est le souvenir toujours présent des
peuple les invoque le matin des batailles,
cours de leur bras dans les luttes sacrées
foyers et des autels. Si une jeune géné-
pour des migrations lointaines, ils la
mers et rattacheront par un culte com-
métropole. Tous ces illustres morts, de-
république des Dieux, veillent sur leurs
s, du haut de l'Olympe étoile,
îouronnement de la théologie des poètes
divin dans l'humanité. La religion de
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109
lie de Thcseus il y a quel-
Irommyon et 1(
Erymanlhe et 1(
, .js Amazones; 01
associés dans la lutte contre les Kentaures. Hèrae
aux enfers pour délivrer Thèseus, qui avait vouli
L. M. — HisT. DES Grecs.
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lsse de calydon.
îr la reine des morls. Il n'est pas im-
t été, comme Héraclès, un Dieu cosmi-
)s, mais il est diflicile de retrouver des
dans sa légende, où le caractère poliii-
signifie le fondateur ou le législateur,
lion des douze villages dont s'était for-
II en avait fait un asyle pour les étran-
îtablir. On allait jusqu'à lui faire bon-
de la démocratie, car il avait proclamé
în est la base, l'égalité des droits: nâdi
oit la valeur réelle de cette légende, elle
oire du peuple le plus libre qui ait ja-
don. — La chasse est la principale oc-
»rimitives. On trouve dans l'Iliade un
sanglier envoyé par la colère d'Artémis
lydon, en Aitolie. Il était si redoutable
uer une troupe nombreuse. Méléagros,
semble des chasseurs aitoliens et cou-
, mais une querelle s'étant élevée à roc-
le l'animal, Méléagros tue les frères de
prononce contre lui de terribles impré-
rme dans sa demeure pendant que les
ille, et malgré les prières de son père,
ère elle-même, il refuse de combattre;
ications de sa femme Cléopatra et ré-
el est le récit fait par Phoinix à Achille
mgers de la colère. La légende fut dé-
i postérieurs; ils donnèrent pour com-
3 principaux héros de la Grèce, et parmi
ntè, la belle vierge qui déGait ses pré-
tuait ceux qu'elle avait vaincus. Ce fut
première blessure. Méléagros lui en cède
i oncles qui voulaient se les attribuer,
iconté la mort de Méléagros; le poème
mourir de la main d'Apollon, qui avait
êtes, dans la guerre. D'après une autre
les Moires ou Destinées s'étant présen-
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. LES ARGONAUTES.
dents de cette légende; on les voit représenlés
ircophages.
n des Argonautes. — La légende des Argo-
ontre les principaux héros de la Grèce associés
lition marilime. Il y a dans l'Odyssée une courle
ièbre navire Argo, qui, en revenant de chez
!ul passer entre les deux roches errantes, car
• à Hère. Les Grandes Éoïées, et plusieurs poè-
3Ù la légende était racontée sous sa forme pri-
lalheureusement perdus, et la quairième Py-
are est le plus ancien document qui nous reslc
le. Le souvenir des premiers essais de naviga-
ners lointaines se rattachait à cette expédition
>rise par Jason avec le concours de lous les héros,
yage était d'aller reprendre chez Aiètès, JSls du
i d'or du bélier qui avait porté Phryxos et sa
ivers la mer appelée depuis Hellespont, du nom
tait noyée dans le passage. Le vaisseau, parli
s côtes du golfe de Pagase, avait la science
r son mât était un des chênes de Dodone. La
cousue par Athènè, comme on le voit dans un
)uvre. Les deux écueils mobiles qui formaient
;rande mer inhospitalière furent franchis pour
, et fixés dès lors à jamais. On arrive à Colchos,
t livrer la toison d'or qu'à une condition: Jason
au joug deux' taureaux d'airain qui soufflent
lais le héros a dans le ciel une puissante pro-
pi a mis sa bonté à l'épreuve, un jour qu'elle
en vieille femme et qu'il l'avait portée sur ses
îrs un torrent gonflé par l'orage. Elle prie
pirer une passion pour lui à Mèdeia, fille d'Aiè-
ne puissante. Mèdeia donne à Jason un onguent
du sang de Promèlheus; il devient invulnérable
taureaux féroces. Puis elle assoupit par un
lue le dragon qui garde la toison d'or, et s'em-
avec les Argonautes, car Jason a promis de la
emme. Aiètès les poursuit, mais la méchante
morceaux son jeune frère Apsyrtos, et pendant
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LES AllGONAUTES.
i!3
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114 ŒDIPE ET U SPHIiNX.
que le pauvre père réunit les membres dispersés pour les
ensevelir, le vaisseau s'éloigne. En remontant le fleuve Plia-
sis, les Argonaules arrivent à TOcéan dont ils suivent le
cours jusqu'à sa jonction avec le Nil, et reviennent dnns la
Méditerranée en traversant l'Egypte. Les détails de ce retour
fantastique ont été modifiés diversement, à mesure que les
Grecs ontacquis des connaissances plus précises en géographie.
Œdipe et ses fils. — La légende thébaine appartient à
une époque plus méditative ; au lieu des caprices d'une ima-
gination enfantine, on y trouve l'analyse d'une situation mo-
rale. Le problème est celui-ci : la conscience nous dit que tout
crime souille son auteur et appelle sur lui la juste vengeance
des Dieux. Mais qu'arrivera-t-il si la souillure est inconsciente
et le crime involontaire? La question est nettement posée dans
la légende d'OEdipe, dont les traits principaux, brièvement
indiqués dans le onzième chant de l'Odyssée, complétés dans
des poèmes postérieurs aujourd'hui perdus, ont été mis ea
scène sur le théâtre athénien avec une grandeur idéale qui ne
sera jamais dépassée.
Œdipe a été exposé sur le Kithairon aussitôt après sa nais-
sance, car un oracle avait annoncé au roi Laïos, son père, que
cet enfant, s'il vivait, deviendrait incestueux et parricide. Re-
cueilli par des bergers, il est élevé chez Polybe, roi de Corin-
the, et il s'en croit le fils. Mais un jour, des doutés sont élevés
devant lui sur sa naissance. U interroge l'oracle de Delphes
qui lui conseille de ne jamais retourner dans son pays. Dé-
cidé à s'exiler de Corinthe, il prend la route de Thèbes, mais
un char lui barre le passage, une dispute s'élève, il tue Laïos
sans le connaître et poursuit son chemin. Il trouve la ville
désolée par le voisinage d'un monstre, la Sphinx, lion ailé au
visage de femme, qui pose des énigmes aux passants et dévore
ceux qui n'y peuvent répondre. (Edipe devine l'énigme, tue
la Sphinx, et reçoit en récompense le titre de roi et la main
d'iocastè, veuve de Laïos. Cependant la vérité se découvre,
locastè se pend de désespoir, (Edipe s'arrache les yeux,
mais il se proclame innocent devant les lois divines, qu'il n*a
jamais violées volontairement. L'oracle avait prédit qu'il de-
viendrait le meurtrier de son père et l'époux de sa mère, mais
dby Google
> FII.S. il5
* <Tiino ii'e^t f|iio (\nn< l'iii-
r «l»' Soplîocle mjiiii:i(Mil, à
Lis cauàL's, le jiriiicipe murul
he la guerre de Thèbes. Il
erres gradées).
smes célèbres : la Thébaîde,
nt à Homère et qui, selon
Iliade et à l'Odyssée ; VCEdi-
e plus récente d*Antimachos
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LA GUËRBË de: TIIÉBËS.
phon. Tout cela est perdu, et les détails de la légende
5 sont connus que par les tragiques athéniens, qui
maient très librement les récits des anciens poètes et
fini par les faire oublier.
lerre de Thèbes a pour origine la querelle des deux fils
3 pour la succession au trône de leur père. PolyneiJtès,
)ar son frère Etéoclès, revient bientôt assiéger la ville,
ide d'Adrastos, roi d'Argos, dont il a épousé la fille, et
autres chefs achaiens qu'il a réussi à engager dans sa
:Jipe conduit par ses fils hors des porles de Tbèbes (bas-relief}.
. Ce premier siège forme le sujet d'une tragédie d'Ais-
3s Sept dtvant ThèOeSy toute pleine, dit Aristophane,
le d'Ares.
;loire reste aux Thébains, grâce au dévouement du
énoikeus, fils de Créon, qui d'après un oracle du pro-
îiresias, s'était offert volontairement à la mort. Tous
i achaiens périssent, à l'exception d'Adrastos qui par-
s'enfuir à Argos. Quant aux deux frères ennemis, ils
tués l'un l'autre dans un combat singuher. Créon,
ocastè, devenu roi de Thèbes, défend de rendre les
s funèbres à Polyneikès, ennemi de la patrie ; mais la
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CYCLE TROYEN.
pieuse Antigoiie, qui avait servi de guide à son \y
brave la mort pour ensevelir son frère proscril
femme par ses plaintes et ses larmes, elle regreth
jeunesse, et Tamour d'Haimon, elle parle avec l(
tombeau qui sera son lit nuptial, mais elle ne S(
plus de sou sacriGcc qu'elle n*a hésilô à l'accompli]
de Sophocle forme avec VCEdipe roi cl, Y Œdipe à
trilogie qui est le chef-d'œuvre du drame antique
siège de Thèbes et la prise de la ville par les Epig(
dire les successeurs des héros tués pendant la pren^
terminent cette grande légende, le plus célèbre
conservés par la tradition épique avec la guerre di
CYCLE TROYEN.
Les Kypria. — L'Iliade. — La légende troyer
immense popularité aux poèmes d'Homère; cepend
l'a fait remarquer Dion Chrysostome, tous les gri
ments de cette légende se passent en dehors d
l'Iliade et de l'Odyssée. Les préliminaires et les i
guerre de Troie étaient racontés dans d'autres poèn
perdus pour nous, dont la réunion s'appelait le C
Proclos en avait fait un résumé dans sa Chrestom
malicale, mais cette Chrestomalhie elle-même i
connue que par l'abrégé qu'en a donné Photios e
ques extraits contenus dans un manuscrit d'Homi
l'Escurial, de sorte que nous n'avons plus guère q
de cette grande collection de poèmes de différents
comprenait toutes les traditions religieuses et hér(
Grèce, depuis la naissance des Dieux, exposée dam
nie d'Hésiode, jusqu'à la mort d'Odysseus, le demi
des héros de la guerre de Troie.
L'origine de celte guerre était racontée dans lei
vers Kypriôns, poème en onze livres attribué à
Kypros; Le poème débutait par le récit des noces
de Pèleus, pendant lesquelles la Discorde jette
d'or entre trois Déesses. Les Dieux refusent de d
dbyGoogk
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LA GUEllRE DE TUOIE.
i'Agamemnon. Ce sacrifice res
ille de Jephlé qu'on peut croire
d' l<pi76vgia paraît nôtre qu'une
le de Jephlé. La forme homériq
5 à celle explication, mais cette
re, elle est môme contredite ]
\gamemnon nomme Iphianas
L laissées dans son palais. SU
os, habitée par les Phéniciens
istoire tragique d'un général o
acrifice de sa fille. Dans les K^
t de son drame d'iphigénie, le
une biche est substituée à la j
rte en Tauris et qu'on retrouva
restés. Les Kypria contenaient
de Pbiloctcte, abandonné dan
nort de Palamède, le Catalogu
Troade, à la suite duquel Achi
i Chrysèis pour leur part du
ux chefs à l'occasion de ces d(
le l'Iliade, qui s'arrôte à la mor
>is ; la Petite Iliade ; la De
ria servaient de prologue à 1
nq livres d'Arctinos de Milel, eu
rnier vers de l'Iliade s'adapte
ocme contenait le combat de
Achille, qui en devient amoi
L de Memnon,fils de TAurore, ti
-môme, tué par Paris et Apullo
pleuré par les Muses, et enfin
as et Qdysseus à l'occasion de î
rmina cette querelle était exf
;hès de Mjlilène. Le poète racon
retour de Philoctète, épisodes d
eux tragédies, puis la mort de
î Deiphobos, l'arrivée de Néoptol
1 du cheval de bois par Epéo!
enfin la fausse retraite des Ac
dbyGoogk
LA GUERRE D£ TROIE. 121
pendant que les Troyens introduisent le cheval dans la ville.
La Destruction d'ilios, poème d'Arclinos de Milet, contenait le
récit de Tarlifice de Sinon et celui de la mort de Laocoon, ren-
dus populaires par Virgile, puis racontait la prise de la ville
avec les épisodes qui s'y rattachent, Cassandra arrachée de
Fautel d*Athènè, Polyxène immolée sur le tombeau d'Achille,
Priamos massacré sur l'autel de Zcus, Astyanax précipité du
haut des remparts.
Les Retours; TOdyssée; la'Télégonie. — Toutes ces
violences devaient ôlre expiées :les Dieux qui avaient protégé
les Achaiens pendant la lutte les abandonnent après la vic-
toire. Les malheurs des principaux chefs étaient racontées
dans les Retours, poème en cinq livres d'Hagias ou Augias de
Troizen ou de Colophou. C'est là qu'était exposée la tragique
IcgeDde formant le sujet de la grande trilogie d'Aischyle, le
meurtre d'Agamemnon par sa femme Clytaimnestra et la pu-
nition du crime par son fîls Orestès. On y trouvait aussi la na-
vigation de Ménélaos en Egypte et le retour des autres héros,
à l'exception d'Odysseus, dont les aventures jusqu'à la mort
des prétendants de Pénélope forment le sujet de l'Odyssée.
Enfin la Télégoniey poème en cinq livres d Eugammon de Ky-
rônè, racontait la mort d'Odysseus et servait d'épilogue à la
légende Iroyenne et à tout le cycle épique.
Développement successif de la légende troyenne. —
Les traditions qui forment la matière de l'épopée sont l'œu-
vre collective et anonyme des premiers siècles de la Grèce.
Pendant ces siècles sans histoire, l'imagination, cet attribut
précieux de la jeunesse des peuples comme de celle de
1 hon)me,a fait éclore ces légendes qui alimentèrent la poésie
des âges postérieurs et fournirent à la sculpture et à la pein-
ture d'innombrables sujets de compositions. Conçus dans la
pensée populaire, tous ces récils étaient recueillis par des
chanteurs ambulants qui les colportaient de village en village,
une lyre ou une branche de laurier à la main, pour marquer
la mesure des vers. Il n'y avait pas d'écriture; lerhythme fi-
xait les détails du récit dansia mémoire de ces chanteurs, dont
chacun développait ou transformait les fables imaginées par
ses devanciers. On ne soupçonnait môme pas ce que nous ap-
dbyGoogk
i GUERRE DE TROIE.
ittéraire : les chanteurs qu'on estimait le
iTaieot assez de mémoire pour retenir les
rimaginalion pour les embellir.' On van-
eil aveugle qui habitait la rocheuse Chios.
dbyGoogk
dbyGoogk
LA GUERRE DE TROIE.
i riliade, le plus ancien des poèmes du cycle Iroyen, on
le germe des épisodes ajoutés par les poêles postérieurs,
m exemple de la manière dont la légende s'est formée
3s additions successives. Homère dit au dernier chant
è et Atliènè avaient pris en haine la sainte ilios, à cause
tige d'Alexandre, et il ajoute ; « Car il offensa les Décs-
ind elles allèrent chez lui, et loua cclltj qui lui donna
însualilé funeste. » Ce passage a été regardé comme
phe par Aristarque, le célèbre grammairien d'Alexan-
cause du mot sensualité, p.axXcauvri, mot abstrait, qui
rtient pas à la langue homérique. Or cette interpola-
sez obscure a fourni à l'auteur des Kypria la première
i fameux jugement de Paris. 11 est probable que ceju-
t n'était qu'une allégorie morale, comme celle de Pro-
5ur Héraclès; seulement, le héros grec, placé entre la
jl la volupté, choisit la première et conquiert une gloire
le, tandis que le berger phrygien préfère le plaisir et
ur lui et sur son pays la colère des Dieux. Mais la forme
écise donnée à la pensée finit paren dénaturer le carac-
oral, etdans Virgile, la colère de Junon n'a plus d'autre
[u'une blessure faite à sa vanité, spretœ injuria fùrmx.
istes modernes vont encore plus loin : Rubens, dans un
L de la galerie de Londres, Raphaël, dans une composi-
avée par Marc Antoine, et de nos jours M. Baudry, au
le l'Opéra, ont représenté les trois Déesses nues. Un
grec, si ce n'est à l'époque de la dernière décadence, ne
lit pas permis cette impiété : Aphrodite, symbole de
lion universelle, peut être représentée telle qu'elle est
le l'écume des flots, mais Hère et Athènè, la chaste épouse
Lcrge indomptée, ne se dépouillent jamais l'une de sou
autre de ses armes.
lissance de nouvelles formes poétiques ne fît pas aban->
' l'épopée. Le drame et la poésie lyrique étaient déjà
5 depuis longtemps quand Panyasis fît un poème sur
iloits d'Héraclès, Antimachos sur la légende thébaine,
ros de Camira sur la guerre de Troie. Si l'on en croit
e, tout le second livre de l'Enéide de Virgile, avec Tépi-
\ Sinon et le cheval de bois, serait une imitation, et pres-
dbyGoogk
^
LA GUËRUE DE TltOIE. i25
que une traduction littérale {pêne ad verbum iranstuUt)^ du
poème de Pisandros. On ne peut vériOer celle assertion, car
il ne nous reste rien des anciens imitateurs ou continuateurs
d'Homère, non plus que des lyriques antérieurs à Pindare,
quitoutenremplaçantl'bexamèlrepardes rhyllimes plus courts
et mieux appropriés à raccompagnement musical, emprun-
taient aussi les sujets de leurs chants aux traditions liéroï-
ques. Le poème de Stésichore sur la destruction d'ilios devait
ôlre célèbre dans Tantiquité, car une illustration de ce poème
occupe la partie centrale d'un bas-relief du Capitole connu
sous le nom de Table iliaque. Sur les deux parties latérales
claicnt représentées les principales scènes deTlliade d'Homère,
et dans le bas les événements racontés dans TAilhiopis d'Arc-
tinos de Milet et dans la Petite Iliade de Lescliès. On croit que
ce curieux monument servait aux grammairiens pour Tins-
truclion de la jeunesse dans les écoles, où on lisait les poésies
d*Homère et de ses continuateurs.
Boutes sur le caractère historique de la légende
troyenne. — Les Héros diffèrent si peu des Dieux qu'on peut
sans invraisemblance voir dans les personnages de la légende
troyenne, comme dans ceux des autres légendes, des types
divins plus ou moins transformés. L'enlèvement d'Hélène
estuntbème poétique qui parait empruntée la mythologie.
Avant d'être enlevée par Paris, elle avait été enlevée par Thè-
seus. Sa mère Lèda est une forme de la nuit, ses frères les
Dioscoures sont Tétoile du malin et l étoile du soir; son nom
rappelle celui de la lune (Exévtj, SiÂr.^y.), mais, comme ce
nom signiGe la brillante (de as'Xa;), on peut, si on le pré-
fère, la regarder comme une Aurore. C'est l'éternelle fugitive,
la fiancée du soleil couchant qui se laisse enlever par le
soleil levant. Pénélope, si différente d'Hélène comme
type moral, est peut-être sortie du môme type mythologi-
que; la toile qu'elle fait et défait sans cesse peut figurer
les phases croissantes et décroissantes de la lune. 11 y a une
légende qui l'associe à Hermès, le Dieu crépusculaire, l'infa-
tigable messager. Odysseus, dont le nom signifie le voyageur,
pourrait bien être une forme de ce Dieu aux ailes rapides,
à l'esprit subtil. Achille rappelle l'Achélôos, non seulement
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LA GUERUE DE TROIE. 427
par son nom, mais par sa naissance, qui le rattache aux divi-
uilés des eaux, par son opposition aux Dieux solaires, par ses
exploits aux bords d*un fleuve. Les Aiantes, souvent en lutte
avec les Dieux dans les légendes, sont peut-être les mêmes
dbyGoogk
dbyGoogk
dbyGoogk
130 Là guerre de TROIE.
que les Géants fils de la terre, Aia. Les hén
teiit autant que les héros grecs à des rapp
genre. Si on reconnaît dans Memnon et dai
formes de ce Dieu solaire dont les religions d*Asie célèbrent
la mort par des fêtes funèbres, qui empêche d*altribuer le
môme caractère à Hector, qu'une légende post-homérique
faisait fils d'Apollon? Si on retrouve dans Paris et dans An-
chisès le Dieu énervé de la Lydie et de la Phrygie, ne peut-on
pas aussi rapprocher Priamos, le roi aux cinquante fils, du
grand Dieu générateur adoré à Lampsaque sous le nom pres-
qu identique de Priapos?
Il ne faut pas cependant prendre ces rapprochements poui
des preuves, car il serait aussi difficile de s'arrêter dans cette
voie que dans la voie opposée. Si Alexandre de Macédoine avait
vécu avant Tinvention de récriture, on le prendrait pour une
forme de Dionysos. Quoique la fable pénètre fort avant dans This-
toire, il faut bien queThistoire commence quelque part. La lé-
gende troyenne est sur la limite ; il se peut qu'elle se soit gref-
fée sur d'anciennes traditions mythologiques, et qu'elle résume
en même temps les guerres qui ont dû se produire de tout
temps entre les deux rives de TArchipel. M. Ernest Curtius
refuse toute réalité à la guerre de Troie ; selon lui, les colons
Aioliens et Achaiens qui se sont établis en Troade après l'in-
vasion dorienne dans le Péloponnèse ont transporté à leurâ
uncôlres les exploits qu'ils accomplissaient eux-mîiines. Grole
admet qu'il y a des éléments réels d;ins la légende troyenne,
mais il ne croit pas possible de les discerner au milieu des
fables poétiques qui les enveloppent. Ces doutes, que les fouilles
de M. Schliemann n'ont pas réussi à dissiper, s'étaient déjà
produitsdans l'antiquité. Dion Chrysostomea écrit une disser
lation pour prouver, parTinvraisemblauce du récit homérique
que Troie n'a jamais élc détruite, qu'Achille a été tué pai
Hector et que les Achaiens, vaincus par les Troyens, ont éii
forcés de renoncer à leur folle entreprise.
L'histoire doit se résigner au doute quand elle n'a aucui
moyen de vérification, mais elle a heureusement d'autres
sujet d'études que les événements militaires, qui sont toujoun
à peu près les mêmes dans tous les pays et dans tous les temps
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iirs et l'état social d'un peuple et d'une
>rt, les poèmes d'Homère sont une
bsolument sûres. Il a pu inventer des
mages, mais il n'a pu les placer que
lit lui-môme, cap il n'en connaissait
ictions pélasgiques et les Touilles de
is ont fait entrevoir la civilisation prè-
les monuments qui ont échappé à la
Odyssée nous fournisent, sur le côté
I, des renseignements plus complets et
B nous pouvons avoir sur les mœurs
istonqucs.
HAPITRE V
:S AUX TEMPS HÉROÏQUES (l).
é des poèmes d'Horaôre. — Fonctions de
6 grecque. — Droits et devoirs de l'en-
ale. — Caractère des royautés héroïques :
et présidence des assemblées. — Hiérar-
atinctions héréditaires. — Caractère sacré
5, conséquence de la piraterie. — Condition
poèmes d'Homère. — Violence des héros
compensations pécuniaires; purifications
; des vieillards. L'amitié. — L'hospitalité,
ité : Télémaque chez Nestor et chez Méné-
noos. — Fédération idéale des Grecs dans
— Moralité des poèmes d'Homère*
16 dont Homère nous offre le tableau,
ituée sur le mariage monogame, et
en partie de ma thèse D« /a Morale avant
dbyGoogk
MOHALITÉ DES POÈMES D'HOMÈRE.
133
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L, M. — HiST. DES Grecs.
dbyGoOgk
FAMILLE GUECQUE.
les vieilles traditions mythologiques
races d'une époque plus ancienne où la
\e. Comme je l'ai fait remarquer plus
ymens de Zeus sont un souvenir de la
lusie d'Hère contre les autres épouses de
ifantSjSon rôle dans la légende troyenne,
1 de la polygamie des patriarches à la
rec et l'épuration de la famille, qui est
^a seule différence qu'on remarque dans
?e les Grecs et lesTroyens, c'est la poly-
jst vrai que le poète, entraîné sans doute
un grand type moral, fait d'Hector et
abîe modèle de l'amour dans le mariage ;
l y a son frère Paris qui a outragé à la
et riiospitalité. C'est pour ce crime que
ienne, prolectrice des unions chastes,
î peuple dont les mœurs sont un outrage
-re est entreprise par les chefs conjurés
le pendant dix ans pour venger l'injure
Telle est la donnée profondément morale
B l'est pas moins. Le poète nous montre
deux époux pendant vingt ans d'absence,
t à un souvenir les belles années de sa
e son mari la cherche à travers tant de
mour de deux Déesses qui veulent le
nalgré la bonté hospitalière d'Alklnoos
de sa fille Nausicaa. El lorsqu'il est
é la terre de sa patrie, et que son vieux
3ie de son retour, si sa femme hésite à
[)arle du lit qu'il a fabriqué lui-mômc,
8 bras, car lui seul pouvait décrire leur
aucun autre n'était jamais entré.
mme dans la société grecque. — Le
3 à la civilisation par la réforme de la
it l'œuvre des femmes, car on n'obtient
5 avoir conquis, et les conquérir c'est les
e comme pour l'homme le droit s*appuîe
dbyGoogk
DIGNITÉ DE LA FEMME. 135
sur le devoir et se confond avec lui dans la conscience de la
dignité morale. Mais le milieu de l'homme est la cité,c*est par
les Tertus civiques, le courage et la justice qu'il conquiert et
maintient ses droits politiques, la liberté et l'égalité. Le milieu
de la femme est la famille ; ses droits sont l'éducation des
enfants et Tadminislration intérieure; elle ne peut les obtenir
que par deux vertus correspondantes, la chasteté et la prudence.
L'homme ne confiera ses enfants et ses biens à sa femme que
s*il la sait digne de cette conOance, s'il n'a pas à craindre que
les fits d'un étranger s'introduisent dans sa maison et volent
le pain de ses enfants. La chasteté est la base de la famille, la
garantie de la pureté des races. La prudence, la sagesse, l'éco-
nomie sont les éléments du bien-être intérieur. La langue
grecque résume toutes ces qualités dans un seul mot, au^podûvr,
qui exprime une modération générale de tous les désirs, une
domination constante de la raison sur la volonté. C'est en pra-
tiquant ces vertus de son sexe que la femme s'élève à la dignité
de maîtresse de maison, y»^yï ^tsirolva.
Cette expression est employée par Homère à propos d'Arètè,
femme du roi Alkinoos et mère de Nausicaa : n Alkinoos a pris
Arètè pour épouse, et l'honore comme aucune autre n'est ho-
norée sur la terre, parmi les femmes qui possèdent une mai-
son sous un mari. C'est ainsi qu'elle a été et qu'elle est encore
lionorée du fond du cœur par ses chers enfants et par Alkinoos
lui-même, et par les peuples qui la contemplent comme une
Déesse et la saluent par des paroles, lorsqu'elle s'avance à
travers la ville. Car il ne manque rien à la sagesse de son
esprit, et par sa bienveillance elle termine les différends des
hommes. » Telle est la mère de famille dans la société grec-
que : elle règne par la seule puissance de la vertu ; type admi-
rable de grâce, de force et de pureté qu'Homère a reproduit
sous tant de formes dans ses poèmes. Si on pouvait préférer
quelque chose parmi les splendeurs de cette poésie, on choi-
sirait ces suaves et saintes Ogures de femmes, Nausicaa, Arètè,
Andromaque, Pénélope. Au milieu des sombres batailles de
l'Iliade, brille comme une étoile la scène de l'entretien d'Hector
et d'Andromaque, le petit enfant qui s'effraye du casque à
Taigrette étincelante, et le sourire à travers les larmes, et la
dbyGoogk
DROITS ET DEVOIRS DE
du héros pour son fils et
)rient, où la femme est escl
is gouvernés par des femmes
es, parce qu'un excès entrain
En Grèce, où les véritables dr
, elle n'exerce aucune inûu(
est son domaine, elle n'en s
t que, dans les États où la se
es peuples habitués à subir h
eu que cette autorité soit re]
une femme; mais dans une
re ses droils contre Tagressic
lérieure, la faiblesse de la fer
i la guerre et les agitations de
dans la maison, dit Hector à .
mux, la toile et la quenouilh
^s qui sont nés dans Uios, et r
i môme langage à Pénélope, e
du respect qu'il doit à sa mèr
nme qui l'égale dans la terre d
li dans Argos et Mykènes, ni
ûr. » 11 lui apprend seulemei
et qu'elle peut désormais se j
protection. Cette distinction
st l'expression de la nature n
3 dune société entre des êtres,
a Platon et les autres philosop
mction leur est commune, h
èesses dans l'Olympe, il y a dej
les oracles divins sont renc
2s à Dodone, à Delphes la Pyt
1 est proclamée par la religioi
bs et devoirs de Tenfant : éi
ranchissement de la femme (
. Jamais le père de famille n'fi
qu'il conserva toujours à R(
ce entre la cité romaine, cor
dbyGoogk
PIÉTÉ FILIALE. 137
les chefs seuls sont de véritables citoyens, et la cité grecque,
formée par une réunion d'égaux, et dont on fait partie dès
qu'on peut la défendre. Jusque-là, comme citoyen futur, des-
tiné à des devoirs sociaux, l'enfant a droit à l'éducation qui le
prépare à la vie politique. C'est un crédit : l'homme acquil-
lera plus tard la dette de l'enfant; le droit à l'éducation im-
plique le devoir envers la patrie. Aucun peuple n'a attaché
autant d'importance que les Grecs à l'éducation des jeunes
gens. Ils la faisaient consister dans un développement paral-
lèle du corps ettie l'esprit. Une jeunesse robuste préludait par
les fatigues de la palestre aux rudes travaux de la guerre, et
par cette gymnastique de l'esprit qu'on nommait la musique, à
l'exercice du droit qui est la liberté. La Grèce entière semble
un gymnase et un lycée ; les jeunes gens occupent toujours le
premier plan sur la scène de l'histoire.
Cela n'empêchait pas le culte des traditions et le respect des
vieillards. Le lien de famille est d'autant plus étroit que l'au-
lorité des parents sur Tenfant est purement morale; c'est un
lien d'affection et de reconnaissance pour ceux qui l'ont guidé
dans les premières luttes de la vie. 11 n'y a peut-être pus
d'autre langue, dit Gillies, qui puisse exprimer sans circonlo-
cution ce que les Grecs entendent par ôpe'Trtpa, cette dette que
l'enfant contracte envers ses parents dès la naissance, et qu il
doit payer plus tard en les nourrissant et les soignant à son
tour. C'est l'expression qu'Homère emploie quand il parle d'un
liéros mort à la fleur de l'âge : « 11 ne put pas payer sa dette à
ses parents. » Achille, Antilochos, Hector, Télémaque, Odys-
seus, sont des modèles de piété filiale. Les fils de Priâmes
respectent les réprimandes, môme injustes, de leur père. Au
moment de partir pour Troie, Odysseus recommande son père
et sa mère à Pénélope : « Prends soin d'eux dans ta demeure
comme aujourd'hui, et môme plus encore pendant mon ab-
sence. » La scène où Priamos, pour se faire rendre le corps
d'Hector, invoque le souvenir de Pèleus, est une des plus
belles de l'Iliade :
« Souviens-loi de ton père, Achille semblable aux Dieux ; il
est du môme âge que moi, sur le triste seuil de la vieillesse, et
il a peut-être autour de lui des voisins qui l'attaquent, et por-
dbyGoogk
dbyGoogk
PIÉTÉ FILIALE.
sonne n'est là pour le défendre contre la violence
Cependant, lui du moins, apprenant que tu es v
réjouit dans son cœur, et il espère tous les jours
sou cher fils revenir de Troie. Mais moi, inforl
engendré des fils très braves dans la large Troie,
dire qu'il ne m'en reste pas un. J'en avais cinqu
vinrent les fils des Achaiens.... De la plupart, ]
Ares a fait ployer les genoux; et celui qui me res
qui protégeait la ville et nous-mêmes, tu l'as tué
battant pour sa patrie, Hector. C'est pour lui que j(
les vaisseaux des Achaiens, et pour le racheter j
une immense^ rançon. Ainsi respecte les Dieux,
prends pitié de moi, te souvenant de ton père. Moi,
misérable encore : j'ai osé faire ce que n'a fait s
mortel sur la terre, porter à mes lèvres la main i
qui a tué mon fils. » Il parla ainsi et lui inspira
pleurer son père; et Acbille lui prenant la main re]
cernent le vieillard. Et tous deux se souvenaient;
géant à Hector tueur dhommes, pleurait des la
dantes, se roulant aux pieds d'Achille, et Achille {
son père, et de temps en temps aussi sur Patrock
gémissements remplissaient la salle. »
Lorsqu'Odysseus, par le conseil de Kirkè, est aU<
dn fleuve Océan, limite du monde visible, évoque
prophète Teirésias, il aperçoit, parmi les autres âm
sa mère qu'il avait laissée vivante à son départ d'
pleure en la reconnaissant, et lui demande commei
domptée par la Kère de la mort, si elle a succo
maladie ou à une mort subite, sous les douces flèc
mis; il l'interroge aussi sur son père, sur sa fei
sou fils. Anticleia lui apprend que Télémaque
champs^ que Pénélope passe ses nuits et ses joui
regrets : « Quant à ton père, lui dit-elle, il rest
champs et ne va pas à la ville ; il ne couche pas
couvert de tapis et d'étoffes brillantes, mais 1 hiver,
les serviteurs de la maison dans la cendre du foj
couvre de mauvais habits ; et quand vient 1 été et la
saison d'automne, dans le haut du jardin planté é
dbyGoogk
^^"HP
COMMANDEMENT MILITAIRE.
t un lit à terre avec les feuilles tombées. C'est là qu'il se
le tristement, et il nourrit un grand deuil dans son cœur,
Jure vieillesse s'élend sur lui. C'est ainsi que moi aussi
s morte et que j'ai accompli ma destinée. Ce n'est pas
•ite ctiasseresse Arlémis qui est venue dans la maison me
er de ses douces flèches; ce n'est pas une maladie qui a
Ime de mes membres par un épuisement funeste, mais
Ion regret et ton souvenir, illustre Odysscus, c'est ta bonté
l'a privée de la vie. »
a fin du poème, quand Odysseus va revoir son père, il
le préparer à la joie qu'il lui apporte; il invente une bis-
selon sa coutume, il dit qu'il a élé l'hôle d'Odysseus,
se sont quittés il y a cinq ans, croyant bien se revoir,
le vieillard espérait une meilleure nouvelle; il sent qu'il
)p vieux pour attendre : « Le nuage noir de la douleur le
it, et prenant dans ses deux mains de la poussière du
il lu répandit sur sa léle blanche en gémissant proton •
it. El le cœur d'Odysseus était secoué, et un soupir pro-
jonflait ses narines, tandis qu'il regardai! son père chéri;
lançant et le prenant dans ses bras, il l'embrassa et lui
C'est moi-même qui suis Odysseus, mon père, celui que
înds, et qui rentre après vingt ans dans ma patrie. » le
rd hésite; Odysseus lui montre la cicatrice qui l'avait
ait reconnaître de sa vieille nourrice; il désigne dans le
les arbres fruitiers que Laertès lui avait donnes lorsqu'il
înfant : « Alors le vieillard senlit se dissoudre ses ge-
et son cœur, et il jeta ses bras autour de son fils, et
re Odysseus aux nombreuses fatigues le reçut, exhalant
ne. »
actère des royautés héroïques : cominandeinent
lire et présidence des assembléeSé — La famille sert
)dèle au gouvernement des sociétés primitives. Si la ^
é estl'image plus ou moins exacte de l'autorité paternelle,
mille de frères sans droits d'aînesse et à peu près égaux
ce est l'image de la république. On retrouve en germe ;
Iliade et dans l'Odyssée toutes les institutions des siècles
ts : une assemblée populaire souveraine, un sénat ou
1 d'État qui prépare les délibérations, et des généraux
dbyGoogk
J
PRÉSIDENCE DES ASSEMBLÉES. 141
ou des magistrats qui exécutent les décisions du peuple et
conduisent les expéditions. Homère les nomme indifféremment
rois, Juges, conseillers, chefs ou princes : les uns sont plus
rois que les autres, paaiXeuripct. Le mot paoïXiû;, que nous tra-
duisons par roi, n'implique pas Tidée d'une monarchie : les
Boiotes sont conduits à Troie par cinq rois ; dans l'île de Selle-
rie, Alkinoos déclare qu'il y a douze rois parmi les Phaièkes,
et qu'il est le treizième. Cette royauté était une sorte d'aristo-
cratie, dans le sens étymologique du mot, c'est-à-dire le gou-
vernement des meilleurs : ceux qui pratiquaient le mieux les
deux grandes vertus sociales, le courage et la justice, étaient
choisis par leurs égaux pour servir de guides pendant la
guerre, de conseillers pendant la paix. Aristote distingue soi-
gneusement la monarchie absolue en usage chez les barbares,
qui la supportent « parce. qu'ils ont le caractère servile », de
celle royauté héroïque, établie sur le consentement libre et
avec des fonctions déterminées : le roi était un général, un
juge, et présidait aux cérémonies religieuses. Le nom de roi,
si souvent employé par Homère, ne doit pas faire illusion ;
"ialgré le prestige que leur donne le grand style de l'épopée,
ces roitelets ne sont que des chefs de clans, ou ce qu'on
appellerait aujourd'hui des notabilités influentes dans leurs
communes.
En récompense de leurs services, les chefs recevaient du
peuple un champ à cultiver ou, dans les expéditions lointaines,
iineplus forte part du butin. Ces dons faits aux plus braves,
c'est par le courage qu'ils peuvent être conserves : « Pourquoi,
(iit Sarpèdon à Glaucos, avons-nous reçu en Lykia les plus
grands honneurs, un siège élevé, des viandes et des coupes
pleines? Tous nous regardent comme des Dieux, et nous culti-
vons, près des rives du Xanthos, un beau champ fertile en
vignes et en blé. C'est pourquoi il nous faut rester fermes au
piemier rang et soutenir la lutte ardente, afin que chacun des
Lykiens bien cuirassés puisse dire : Ce ne sont pas des hommes
sans gloire qui gouvernent la Lykia; nos rois mangent des
•nouions gras et boivent un vin excellent et mielleux ; mais ils
ont la force et le courage el combattent au premier rang des
Mkiens. »
dbyGoogk
DIRECTION DES SACRIFICES.
le leurs exploits à la guerre donnait aux chefs,
la paix, une certaine influence dans Tassem-
S'ils aTaient de l'éloquence et une réputation
s justice, ils étaient pris pour arbitres dans les
Jn des prologues de la Théogonie trace ainsi
roi aimé des Muses : « Celui qu'honorent les
i Zeus, celui des rois nourrissons de Zeus
^ardé à sa naissance, elles lui versent sur la
ice rosée, et de sa bouche sortent des paroles
s les peuples regardent vers lui lorsqu'il dis-
»ar des jugements droits. Parlant avec sûreté,
temps apaisé une grande querelle (car, s'il
udents, c'est afin que, dans l'assemblée, il ré-
cement et par de bienveillantes paroles les
iples embarrassés). Et lorsqu'il s'avance à tra-
)n l'entoure de respect et d'affection comme
brille au milieu des peuples réunis. » Ce per-
de l'époque héroïque pourrait s'appliquer à
tout autre démagogue. C'est une autorité pu-
\, fondée sur la confiance du peuple et sur la
des cérémonies religieuses est moins une atlri-
i de la royauté qu'une fonction appartenant au
lille ; quand il s'agit d'un sacrifice offert par
c'est naturellement le chef du peuple qui y pré-
\\ qu'on voit Agamemnon dans l'Iliade, Nestor
offrir des sacrifices au milieu du peuple. Quant
n mandement militaire, elle a été admise même
'atie d'Athènes ; les dix généraux de l'armée qui
irathon ne commandaient pas ensemble, mais
Or, c'est seulement de cette unité dans le com-
ilitaire, qu'il est question dans le vers souvent
*e met dans la bouche d'Odysseus au second
e. Quand les Achaicns quittent l'assemblée en
lent s'embarquer, Odysseus s'écrie : « Ici (dans
ne pouvons pas tous commander, le comman-
sieurs n'est pas une bonne chose; qu'il n'y ail
, qu'un seul roi. » Il sait cependant qu'il y en a
dbyGoogk
LES ROYAUTÉS IlÉUOIQUES,
UD grand nombre dans Tarmée, et lui-mî^me en esl un, n
il parle du commandement militaire, et il veut qu'on re(
naisse Agamemnon pour chef de Texpédilion. H emploie
persuasion pour engager les rois et ceux qui se dislingi
des autres à reprendre la délibération, et Homère ajoute <
frappe de son sceptre les hommes du peuple et les force
rasseoir pour écouter ceux qui valent mieux qu'eux, mai
mot de peuple signifie seulement la foule de ceux qui n
distinguent ni par leur courage ni par leur sagesse,
Odysseus dit à chacun d'eux : « Tu u'es ni fort ni brave, (
ne comptes ni à la guerre ni au conseil. » 11 ne s'agit m
ment d'une distinction de naissance, car Thersite, le plus i
traité de tous, était de très bonne famille ; il était cousi
Méléagros et de Tydeus, père de Diomèdès. Quand le tum
est apaisé, Odysseus engage les Achaiens à rester devant 1
et il ne leur parle ni de discipline ni d'obéissance, mai
leurs intérêts, de leur honneur et de leurs serments. S
commencé par mettre la force du poignet au service d<
arguments, pouvons- nous dire qu'il ne se passe rien de e
biable dans les assemblées populaires chez de grands pei
civilisés ?
L'hérédité du commandement n'était pas une règle absc
mais un fait qui devait être assez fréquenU Comme les cha
cl les troupeaux passaient du père aux enfants, ceux-ci ï
talent en môme temps de l'influence que donne la rich(
mais il fallait de plus que le fils ou un des fils du roi fût
même assez dislitigué par sa force et son courage pour
à son tour chef du peuple. Quelquefois il devenait roi du vi
de son père, comme on le voit par l'exemple d'Achille et
celui d'Odysseus. Hector est le véritable roi des Troyens,
la reconnaissance promet déjà la royauté à son fils : « Us
pellent Astyanax (prince de la ville), parce qu'Hector prc
seul la ville et les murs». La présence d'Hector conser
Priamos une espèce d'autorité au milieu du peuple, i
Achille craint qu'en son absence Pèleus ne soit lésé pai
voisins. Laerlès, depuis le départ d'Odysseus, est rentré t(
fait dans une condition privée ; il cultive son champ et n
pas môme aux assemblées. On ignore si Tclémaque succè
dbyGoogk
Ii4 HIÉRARCHIE PERSOiNNELLE.
à son père. Eurymachos, un des prétendants, lui avoue qu'il
ne le souhaite pas, et Télémaque répond : « il n'est pas mau-
vais pour un homme d'être roi ; sa maison devient riche et lui-
môme est plus honoré, mais il y a beaucoup d'autres rois dans
Ithaque entourée par la mer. Que quelqu'un d'entre eux
prenne la place, puisque l'illustre Odysseus est mort, mais je
resterai maître de notre maison et des caplifs que l'illustre
Odysseus a pris à la guerre. » Les chefs qui revenaient d'une
expédition risquaient do trouver leur place prise, comme il
arriva à plusieurs rois revenus de Troie. Mais ces change-
ments ou ces déplacements de dynastie ne sont pas de vérita-
bles révolutions. La cité grecque, dans l'âge héroïque, res-
semble bien plus à une commune aristocratique qu'à une mo-
narchie. Il importe de le remarquer dés le début, pour ne pas
attacher à l'abolition des royautés l'importance d'une trans-
formation sociale.
Hiérarchie personnelle sans distinction héréditaire.
— Quoique la population de la Grèce paraisse avoir été formée
de plusieurs invasions successives, il faut croire que les nou-
veaux venus s'établissaient à côté des anciens habitants, sans
les déposséder, car on ne trouve dans les poèmes d'Homère
aucune trace d'une caste de conquérants. Ily a une hiérarchie,
ma:i» elle est fondée sur les aptitudes naturelles et le mérite
particulier de chacun. Les Héros ont presque toujours quelque
Dieu pour père ou pour aïeul, mais c'est par leurs qualités
personnelles qu'ils établissent leur filiation. Quand Belléro-
phontès a tué la Chimère et détruit les guerriers envoyés
contre lui par le roi des Ljkiens, celui-ci en conclut qu'il est
de race divine et lui donne sa fille avec la moitié des honneurs
royaux ; les Lykiens « séparent pour lui une portion de terre
parmi les meilleures, un beau champ propre à la culture de
la vigne et au labourage, et la lui donnent pour qu'il la cul-
tive ». L'exemple de Thersite prouve d'autre part que, sans la
force et le courage, on ne gagnait pas beaucoup à avoir des
Dieux dans sa famille. Une supériorité personnelle donnait
seule à ceux qui la possédaient une influence naturelle sur
leurs égaux, mais sans constituer une différence de droits. A
la guerre comme pendant la paix, la décision souveraine
dbyGoogk
ÎCT DU TRAVAIL. i45
appartenait à rassemblée du peuple; seulement cette décision
était facilement entraînée par Téloquence ou la sagesse de
quelques-uns. C'est bien à tort que des auteurs modernes ont
comparé la Grèce héroïque à l'Europe féodale ; il n'y a pas de
noblesse héréditaire dans la société homérique^ ni rien qui
ressemble à une distinction fondée sur la naissance, tandis
que les barons du moyen âge se croyaient d'une autre espèce
que le reste de la nation, méprisaient profondément le travail^
et auraient rougi de fabriquer eux-mêmes leurs meubles
comme Odysseus, ou de préparer le rôti comme Achille quand
il invitait ses amis à dîner.
Caractère sacré du travail. — Pour les Grecs, le travail
n'est pas une punition, mais la loi même de l'homme, le légi-
time emploi de la force et de la liberté, c*est par le travail
qu'il se rapproche des Dieux. Le soleil est le type du travail-
leur infatigable, et la plupart des travaux d'Héraclès s'expli-
quent par son caractère primitif de Dieu solaire. La forme la
plus ancienne et la plus sainte du travail humain, l'agricul-
ture, est un don de la terre elle-même, Dèmèter la législa-
trice (Ocaf^dçcpc;), car c'est en substituant le travail pacifique à
la rapine et à la violence que les hommes sortent de la bar-
barie et se constituent en société policée. La propriété fondée
sur le travail n'est plus un privilège, mais un droit, elle doit
être garantie par le respect de chacun pour le droit de ses
cgaux, qui est le sien. C'est pourquoi la clôture des champs
est sous la protection de Zeus esxei&ç, et la vierge Histiè veille
sur la pierre du foyer, centre de la famille et de la cité. Avec
l'agriculture se développent toutes les formes du travail, et
toutes ont un Dieu pour inventeur et pour patron. La poésie,
la musique et la danse, inséparables à l'origine, se rattachent
au culte d'Apollon et des Muses; Athènè l'ouvrière (ip^avu), en-
seigne aux femmes les travaux de leur sexe. Les deux divinités
du feu, le Titan Promètheus et le forgeron Hèphaistos, prési-
dent, l'un à la céramique, l'autre à l'industrie des métaux ;
c'est Hèphaistos qui a fabriqué les demeures des Dieux dans
l'Olympe ; il forge les armes d'Achille et celles de Memnon.
Poséidon enseigne la navigation, Hermès le commerce, Asclè-
pios la médecine, la plus ancienne des sciences, quoiqu'elle
L. M. — HisT. DES Ghecs. 9
dbyGoogk
dbyGoogk
dbyGoogk
CONDITION DES SERVITEURS.
nettement des mercenaires, HtU, qui louent leur
ir un salaire. 11 y aurait une différence s'il était
î Tesclavage était héréditaire, mais cela semble
; douteux que l'hérédité de la royauté. La punition
;es infidèles qui avaient souillé de leurs débauches
rOdysseus ne prouve pas que le maître eût un droit
r la vie de ses domestiques : c'est une vengeance,
punition des prétendants de Pénélope, sur qui on
\ dire qu'Odysseus eût droit de vie et de mort. Mais
dysseus parle à Eumaios et à Philoitios comme à
1 leur promet de les regarder comme des frères de
, de leur donner une maison, un champ, une épouse,
d'ailleurs l'habitude de tout bon maître, d'après ce
naios lui-même dans un autre passage. Il donne
sur sa condition depuis qu'il a été acheté tout
• Laertès, il parle de la bonté d'Anticleia, mère
ii'elle vivait, dit-il, j'aimais à l'interroger et à lui
car elle m'a élevé elle-même avec sa noble fllle,
a robe tombante, la plus jeune de ses enfants; elle
t ensemble et m'honorait presque autant que sa fille,
ae nous parvînmes tous deux à la jeunesse dési-
donnèrent en mariage à un homme de Samè et
B nombreux présents. Quant à moi, Anticleia me
rès beaux habits, une tunique et un manteau, et des
»ur mes pieds, et elle m'envoya dans les champs ;
iit bien du fond du cœur. Maintenant tout cela
3; mais les Dieux heureux ont fait fructifier le tra-
je me livre, et par lui j'ai pu boire, manger et
vénérables indigents. » Non seulement Eumaios
ire l'aumône, mais il a lui-même un serviteur qu'il
ses deniers à des pirates taphiens. Le nom et le
Odysseus reviennent sans cesse dans ses discours :
st mort, et il ne reste que des regrets à ses amis,
'tout, car je ne trouverai jamais un maître si doux,
ù j'irai ; pas môme si je retournais dans la maison
é, auprès de mon père et de ma mère qui m'ont
ime, ce n'est pas tant sur eux que je pleure, quoique
dbyGoogk
CONDITION DES SERVITEURS. i49
je désire bien les revoir de mes yeux dans la terre paternelle ;
mais je regrette plus encore Odysseus absent. Je n'ose pas
même, ô mon hôte, prononcer son nom pendant qu'il n'est
pas là, car il m'aimait bien et s'intéressait à moi dans son
cœur ; mais je l'appelle mon frère aîné qui est loin de moi. »
Philoitios, bouvier d'Odysseus, parle de son maître avec au-
tant d'affection et de reconnaissance ; à la vue d'un étranger
pauvre et mal velu, la sueur le couvre et ses yeux s'emplissent
de larmes, parce qu'il pense qu'Odysseus est peut-être couvert
de pareils haillons, m Mais, s'il est mort et dans les demeures
de l'Invisible, hélas, l'illustre Odysseus qui m'avait envoyé
encore tout petit garder les vaches chez le peuple des Képhal-
lènes!.... Et maintenant elles deviennent innombrables, et il
n'y a pas d'homme pour qui se multiplie davantage la race des
bœufs au large front. Mais d'autres se les font amener pour
les manger, et ils ne s'inquiètent pas de l'enfant qui est dans
la maison, et ils ne craignent pas la vengeance des Dieux. Us
désirent depuis longtemps partager les biens du prince absent.
Pour moi, mon cœur roule ces pensées dans ma poitrine :
certes, il serait très mal, lorsqu'il est vivant, d'aller chez un
autre peuple, emmenant les bœufs chez des hommes étrangers ;
mais il est dur de rester ici à souffrir en gardant les vaches
d'autrui. Et déjà depuis longtemps je serais allé chez quelque
autre des rois magnanimes, parce que cela n'est plus tolé-
rable ; mais j'attends toujours ce malheureux, s'il pouvait re-
venir pour chasser les prétendants de sa maison. » Ainsi
Philoitios n'est nullement obligé de resfer où il est; il irait
offrir ses services à d'autres s'il n'était retenu par un lien
moral.
La condition d'Eurycleia, nourrrice d'Odysseus, est égale-
ment très douce. « Laertès l'avait achetée autrefois de ses
biens, lorsqu'elle était dans la première jeunesse, et il avait
donné le prix de vingt bœufs. Il l'honorait dans sa maison à
l'égal de sa chaste épouse; il ne s'unit jamais à elle, et il évita
d'offenser sa femme. » Ce détail marque bien la supériorité
morale de la Grèce héroïque sur la société patriarcale dont on
trouve le tableau dans la Genèse. Devenue vieille, et après
avoir élevé successivement Odysseus et Télémaque, Eurycleia
dbyGoogk
LA GUERUli:.
la maison de Pénélope et dirige les travaux des ser-
lans toule maison bien ordonnée, la condition des
aes était exactement celle de ces serviteurs comme
}uve dans nos campagnes, qui vieillissent dans une
semblent en faire partie. Chez les Romains, lacon-
esclaves fidèles était réglée par raffranchissement,
là une formalité légale qui ne pouvait exister dans
décrite par Homère, puisqu'il n'y avait pas de lois
la coutume en tenait lieu. Les principes d'égalité,
nent enracinés dans la conscience des Grecs, corri-
s vices des institutions sociales : les rois étaient fort
3SSUS des autres hommes, et les serviteurs ne diffé-
i beaucoup de leurs maîtres.
ce des Héros d*Homére. — Les combats derUiadc
ractëre sauvage qui contraste avec la douceur des
I dehors du champ de bataille. Cependant, on voit
conventions s'établir entre les peuples ennemis, et
se conclure sous l'invocation des Dieux, pour per-
X deux partis d'enlever les morts el de leur rendre
ers devoirs. Lorsqu'Achille traîne dans la poussière
'Hector, Homère raconte ce fait avec une désappro-
anifeste. De môme, quand Achille immole douze
: le tombeau de Patroclos, il commence par éloigner
ion et les autres chefs, et le poète, ordinairement
e réflexions, ajoute cette fois : « 11 avait résolu dans
une méchante action. » Les mômes expressions
loyées dans l'Odyssée à propos de la cruelle ven-
ercée contre Mélanlheus. H n'y a rien là d'ailleurs
rliculier à l'antiquité : les sociétés vieillies ont aussi
nces. Avec l'étranger, on garde une certaine mesure,
e des représailles, mais dans la guerre civile, les
lenacés sont implacables : ni justice ni pitié pour les
as môme le droit de pleurer les morts. Cela est de
ays et de tous les temps. Mais il faut qu'il s'élève
une voix courageuse, comme celle de l'Antigone
;le, qui seule ose protester au nom de l'infaillible
B. « Tu connaissais les décrets, » lui dit le roi? Et elle
t Oui certes, mais je n'ai pas cru que les décrets
dbyGoogk
LE COUUAGE. ISl
d'un homme pussent prévaloir contre les lois éternelles, non
écrites, œuvre immuable des Dieux. »
Le courage et le sentiment de Thonneur* — Le cou-
rage, dans Homère, n'est pas celte fureur aveugle si commune
chez les barbares; les Troyens se battent pour défendre leur
patrie, les Achaiens pour punir une injustice et tenir leur
serment, mais ni les uns ni les autres n'aiment la guerre
pour etie-méme. Le plus fougueux de tous, Achille, sent le
prix de la vie et du repos; on le voit par sa réponse à Phoinix
et à Odysseus. Mais lorsqu'il a son ami à venger, il retourne
dans cette mêlée des hommes d'où il sait qu'il ne doit pas re-
venir. Presque toujours c'est le sentinxent de l'honneur et du
devoir qui pousse les Héros en avant. Hector, quoique sûr
d'être tué par Achille, se décide à l'attendre, de peur d'avoir
ù rougir devant les Troyens et les Troyennes; il veut mourir
avec gloire, « et faire quelque grande action, digne des chants
à venir «i.
Ce sentiment de l'honneur n'a jamais eu en Grèce les mômes
déviations que chez les modernes. A aucune époque de leur
histoire, les Grecs, pas plus que les Romains, n'ont connu
cette coutume du duel qui fut apportée en Europe par les bar-
bares germains et qui s'y est toujours maintenue. Tout en
mettant le courage au premier rang des vertus, les Grecs ne
confondaient pas le droit avec la force, et ne croyaient pas que
l'habileté dans le maniement des armes pût prouver la justice
d'une cause ou y suppléer. Notre point d'honneur, qui permet
d'insulter un adversaire plus faible ou moins adroit, à la con-
dition de le tuer ensuite, ne leur eût semblé qu'une forme hy-
pocrite de l'assassinat. Leur caractère sociable rendait d'ail-
leurs les querelles privées assez rares. Pendant toute la durée
de la guerre de Troie, une seule dispute s'élève entre deux
chefs, et les malheurs qui en sont la suite forment le nœud et
la moralité de l'Iliade. Agememnon a outragé Acbille ; il eu
est puni par les malheurs de son armée, l'attaque de la flotto
et la victoire d'Hector. Alors il reconnaît sa faute et veut la ré-
parer ; mais Achille refuse de se laisser fléchir, il repousse
les conseils de ses amis, il garde sa colère : il en est puni par
la mort de Patroclos ; il a écoulé sa haine, il est frappé dans
dbyGoogk
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LA JUSTICE. lo3
saienl fléchir quand ils avaient été offensés, qu'ils acceptaient
môme une compensation pour la mort d'un parent ou d'un
ami. Une scène représentée sur le bouclier d'Achille fait allu-
Achille panse les blessures de Patroclus Achille pleure la mort de
(peinture de la coupe de Sosias). patroclos (pierre gravée).
Combat autour du corps de Patroclos (pierre graTée).
sion à cet usage. « Les citoyens étaient assemblés sur la place
publique, et une discussion s'était élevée. Deux hommes se
disputaient sur la rançon pour un homme tué. L'un affirmait
0.
HKg^:.^
dbyGoogk
J54 RESPECT DES VIEILUKDS.
avoir tout payé et le déclarait au peuple ; Tautre niait avoir
rien reçu ; et tous deux désiraient terminer Taifaire par un
arbitrage. Les citoyens criaient des deux parts, soutenant l'un
ou Vautre, et des crieurs contenaient le peuple. Les vieillards
étaient assis sur des pierres polies, dans le cercle sacré, et
tenaient dans leurs mains les sceptres des crieurs à la voix
éclatante. Us se levaient et portaient leurs jugements tour à
tour; et au milieu étaient deux talents d'or pour donner à ce-
lui qui aurait le mieux jugé. • L'exil du meurtrier donnait
aux ressentiments le temps de se calmer et disposait les pa-
rents ou les amis de la victime à accepter une réparation.
Mais cela ne suffisait pas pour faire taire la voi\ de la cons-
cience. On imagina des purifications religieuses, môme pour
un meurtre involontaire. D'après VAithiopis d'Arctinos de
Miletqui faisait suite à l'Iliade, Achille ayant tué d*uu coup de
poing le pauvre Thersite, qui le raillait de son amour pour
l'amazone Penthésileia, il y eut une sédition dans le camp, et
Achille fut obligé d'aller à Lesbos pour se soumettre aux cé-
rémonies expiatoires. Celte légende atteste l'importance qu'on
attachait à la vie de l'homme, môme le plus humble et le plus
généralement méprisé.
Le respect des vieillards, L^amitié. — Quand les insti^
tutions de Ja Grèce prirent une forme plus arrêtée, la libre ac-
tion du peuple dans les Républiques fut toujours modérée par
un conseil de vieillards dont on peut voir la première ébauche
dans ces vieillards de l'Iliade qui rendent la justice au milieu
du peuple assemblé sur la place publique. L'admiration
qu'inspirait la force physique n'empochait pas de reconnaître
l'autorité morale de l'âge, de la sagesse et de l'expérience. Un
des plus audacieux parmi les chefs Achaiens, Diomèdès, qui
ne craint pas de lutter contre les Dieux, s'excuse avec mo-
destie quand il donne son avis au milieu des autres rois plus
âgés que lui ; il reçoit avec douceur les reproches injustes
d'Agamemnon. Paris écoute aussi sans se plaindre les répri-
mandes d Hector, son aine. Dans les jeux funèbres en l'hon-
neur de Patroclos, Antilochos cède le prix à Ménélaos, et
Achille se lève pour en offrir un au vieux Ne&lor qui n'a pas
concouru.
dbyGoogk
i
\
l'amitié.
Le respect de la vieillesse n*est qu'une
piété filiale ; c'est aussi la famille qui four
modèle le plus parfait, l'amour fraternel
pas moins qu'un frère, » dit Homère. L'ami
élément d'une société au delà des limites
première forme du lien social entre égaux.
Héros marchent par couples fraternels ,
deukès, Héraclès et lolaos, Thèseus et Peirilh
reste et de Pylade repose l'esprit au milieu d
gende des Atréides ; celle d'Achille et c
d'argument à la seconde moitié de l'Iliade, l
runts que fait naître dans l'âme d'Achille la
relèvent ce caractère sauvage et justifient 1
choisi pour son héros : d'ahord les pressent
quiétudes, puis, après la fatale nouvelle, le
douleur, les sanglots et les hurlements ent
des, et les nuits sans sommeil ou peuplées
passées à se roukr de désespoir sur le sable
l'immense carnage au bord du fleuve, et
geance que n'apaise pas môme la mort d'un
cède que devant le spectacle d'une douleur é
souvenir d'un vieux père absent
L'hospitalité, forme pratique de la cfa
l'amour fraternel est le type de l'amitié, l'i
est le modèle de ce sentiment moins ardent,
que Cicéron appela plus tard la charité du g
dunt l'hospitalité est l'application pratique.
» guerre, tout étranger est un hôte, et il n'y
■ grec pour exprimer ces deux idées. Les prii
H lanthropie universelle sont résumés dans un
V propos de cet Axylos, qui avait bâti sa maisc
B la route pour recevoir les voyageurs : « Il é
K très aimé des hommes, car il était plein de cl
B Ce mot, dont l'emploi pourra sembler un an
B seul qui rende à peu près la force de l'expn
B ^iUiQAi, La bienfaisance n'est pas le privilège
B cun la pratique en proportion de ses res!
B trouve sa condition heureuse parce qu'il a
BL
dbyGoogk
L'HOSPITALITÉ.
aux vénérables indigents ; il reçoit Odysseus
à sa table, « car c'est de Zeus que viennent
les pauvres, et les faibles dons qu'on leur
ables. » L'horreur des Grecs pour les mœurs
le certaines peuplades sauvages se traduit par
fantastiques qu'Homère fait des Kyclopës, des
le ce roi Echétos dont les prétendants de Pè-
t Iros comme d'un épouvantail. Les préten-
s ne sont guère mieux traités par le poète,
^pendant donnent à Odysseus des morceaux
et blâment Antinoos de sa dureté pour lui;
I dédaigneuse suffirait tout au plus avec ua
Iros, qui fait de la mendicité une profession et
suppliants. Pour quiconque respecte les Dieux
mme frappé par le malheur est revêtu d'unca-
Les Dieux, déguisés en mendiants, parcourent
}rouver la justice ou l'injustice des hommes. »
hez Nestor et chez Ménélaos. — Toujours
par accueillir l'étranger et l'inviter à apaiser
if avant de lui demander qui il est, d'où il
veut. Le roi des Lykiens traite Bellérophon
irs avant de l'interroger. Lorsque Mentor et
ent àPyloSj ils trouvent Nestor et ses fils oc-
ir les viandes pour un repas en l'honneur de
e pressent au-devant des hôtes, et Peisistralos,
roij les fait asseoir à côté de son père et les
part au festin des Dieux. Nestor dit ensuite :
irenable, maintenant que les hôtes sont rassa-
iire, de les interroger et de leur demander
eisistratos accompagne Télémaque dans son
rivent à Lakédaimon au moment où Ménélaos
is le mariage de son fils et celui de sa fiH^î
nonce l'arrivée des étrangers. « Dis-moi, de-
li, si nous détellerons leurs chevaux rapides,
enverrons vers quelque autre qui les so-
rs, très indigné, le blond Ménélaos répondit :
i dénué de sens jusqu'ici^ Etéoneus, fils de
maintenant, tu dis des sottises comme "'•
dbyGoogk
I
5P1TALITÉ.
enranL Certes, nous avons souvent mangé le pain de Tho
talUé chez d'autres hommes, avant de venir ici; que 2
nous préserve désormais de TinTortune. Dételle donc les (
Taux des étrangers et conduis-les ici eux-mêmes, afin qi
prennent part au banquet. > A son départ de Lakédaimon,!
maque reçoit de Ménélaos de riches présents. Jamais on n
sépare d'un hôte sans lui Faire les présents deThospitalité, l
Odyssens chez Alkinoos. — Lorsqu'Odysseus a été
par la tempête sur le rivage de Tile de Schériè, il est
cueilli et traité chez les Phaièkes aussi largement que T
maque à Lakédaimon et à Pylos chez les anciens amis de
père. Ce récit s'ouvre par une scène charmante; Nausi
fille du roi Alkinoos, lave le linge de sa famille au bord d
mer, et après son travail joue à la balle avec ses amies. L
parition d'Odysseus interrompt brusquement les jeux
jeunes filles qui se sauvent effrayées. Nausicaa reste seule
Odysseus^qui connaitle cœur humain, lui Tait un petit discc
très habile, la compare à une Déesse et lui souhaite un
mariage. Elle rappelle ses compagnes, fait donner à mar
et à boire au pauvre naufragé et rengage à demander Thos]
liléàson père. Elle lui recommande surtout de s'adres
d'abord à sa mère. Il suit ce conseil, et arrivé chez Alkin
au milieu d'un banquet, il embrasse les genoux d'Arètè €
s'asseoir dans la cendre du foyer. Alors un des convives
plus vieux des Phaièkes, parle ainsi à Alkinoos : « Alkin<
il n'est pas beau pour toi, et il ne convient pas qu'un éti
ger soit assis par terre, dans les cendres du foyer. Ceux-c
taisent, attendant que tu parles. Allons, relève l'hôte, pli
le sur un siège aux clous d'argent^ et commande aux cri(
de verser le vin, afin que nous fassions des libations à Z
roi de la foudre, qui accompagne les vénérables supplia
et que l'intendante donne k souper à l'étranger avec ce qu
a ici. — Et dès que la force sacrée d' Alkinoos l'eut entei
prenant parla main le prudent Odysseus à l'esprit subtil,
fit lever du foyer et le conduisit sur un siège splendide,
place de son fils Laodamas, ami des hommes, qui était a
près de lui et qu'il chérissait vivement. Et une servante v(
de l'eau d'une belle aiguière d'or dans un bassin d'arg
dbyGoogk
1
158 LIKN FÉDÉKAL.
pour qu'il se lavàl, et elle élendil devaiil lui une lable polie. Et
la vénérable intendante lui apporta du pain et mit devant lui des
aliments abondants, lui donnant une large part de ce qu'il y
avait. Alors la force d'Alkinoos dit au crieur: « Ponlonoos, mêle
le \ in dans le cratère, afin que nous fassions des libalionsàZeus,
roi de la foudre, qui accompagne les vénérables suppliants. »
Le lendemain, Alkinoos offre un sacrifice et réunit à sa lable
tous les rois des Phaièkes. Le repas est simple, comme tous
les repas homériques; la sobriété est un trait des mœurs grec-
ques ; le vin était toujours mélangé d'eau. L'ivrognerie, si
commune chez les barbares Germains, étaient regardée en
Grèce comme un vice des peuplades sauvages telles que les
Kentaures; la plus violente injure qu'Achille adresse à Aga-
memnon est l'épilhèie d'ivrogne. Homère, qui ne flatte pas
les prétendants de Pénélope, ne les accuse pourtant pas de
s'être enivrés. Les repas avaient chez les Grecs le caraclèrc
d'une cérémonie religieuse ; ils commençaient et finissaient
par des libations en l'honneur des Dieux et se distinguaient
moins par la variété des mets que par les chants et les danses.
Un chanteur charme par ses récits les convives d'Alkinoos,
qui terminent la fôte par des exercices de force et d'adresse et
surtout par des danses, « car il n'y a rien de plus noble pou»'
l'homme que l'exercice des pieds et des mains. » Enfin, Odys-
seus raconte ses aventures, et Alkinoos fait préparer un vais-
seau pour le reconduire dans Ithaque, « car dit-il, jamais pe»-
sonne venant chez moi n'a longtemps attendu dans la douleu»
le jour du. retour, » Mais avant de quitter son hôte, il l"^
donne lui-môme et engage les autres rois à lui donner de
riches présents. Comme un contraste à cette île hospitalière ae
Schériè, où les chanteurs sont si bien traités et qui P*'^^^
ûlre sa république idéale, Homère oppose les farouches Kyclop^^'
qui pratiquent la polygamie, méprisent les Dieux et luen
leurs hôtes pour Içs manger; surtout, ce qui est pour un Gre^
le comble de la barbarie, « ils n'ont ni lois ni assemblées
libérantes. Ils habitent des cavernes sur la crête des mon a*
gnes, chacun d'eux gouverne ses enfants et ses femmes, et i
{le s'inquiètent pas les uns des autres. »
FéaéraUon idéale des Grecs dans les poèmes d'Ho-
dbyGoogk
LlEiN FÉDÉKAL. 159
mère. — L'hospitalité établit entre les hommes un lien sacré
Apothéose d'Homère (bas-relief du Brilisl) Muséum}. Zeus aui« au sommet de
l'Olympe; au-dessous de lui les oeuf Muses, Apollon, la Pythie et un personnage
qu'on croit Olen de Lykie, ou Hésiode. Dans la baude iorérieure, Homère, cou-
rouD^ par le Temps et la Terre habitée, reçoit les sacrifices et les acclamations de
divers personoag^es allégoriques (l'Histoiie, la Poésie, la Tragédie, la Cumédie, etc.).
qui se transmet aux enfants comme un héritage. La guerre
noôme ne peut le rompre : Glaucos et Diomèd^.s, en apprenant
dbyGoogk
i60 LI£N FÉDÉRAL.
qu'il existait entre leurs ancêtres, échangent leurs armes et
déclarent qu'ils s'éviteront dans la mêlée. La fraternité des
peuples n'est qu'une extension et une forme plus générale de
ces amitiés héréditaires. C'est là ce qui explique l'immense
popularité des poèmes d'Homère en Grèce. Pour nous, leur
élévation morale, plus encore que leur inimitable beauté, jus-
tifie l'admiration unanime de tous les siècles; mais pour les
Grecs il y avait dans ces poèmes quelque chose de plus; ils y
trouvaient l'idéal social qu'ils ont poursuivi pendant toute leur
histoire sans jamais l'atteindre, l'union de toutes les cités
grecques dans une grande patrie. Les traditions héroïques, et
surtoutla guerre de Troie, leur rappelaient le souvenir, trop
souvent oublié depuis, d'ime fédération primitive. Pendant
cette longue guerre entreprise par tous pour venger l'injure
d'un seul, il n'y avait eu qu'une émulation de courage entre
tant de peuples conjurés. Cette union, scellée par la commu-
nauté des dangers et de la victoire, sous les regards protec-
teurs des Dieux de la patrie, on la retrouvait dans les chants
d'Homère, et c'est pour cela qu'au milieu des guerres impies
qui creusaient le tombeau des républiques, cette poésie sacrée
semblait un écho de l'âge d'or.
CHAPITRE VI
INSTITUTIONS NATIONALES.
Caractère religieux du lien fédéral, — Diversité des fonctions reli-
gieuses : les prêtres, les poètes et les devins. — L'oracle de
Dodone. — L'oracle de Delphes, — Caractère moral des oracles. —
Les Amphictionies; — Origine des jeux sacrés. — Antiquité des jeux.
Les Olympiades. — Conditions du concours. — La trêve sacrée. —
Les récompenses. — La gymnastique et la sculpture. — Célébrité et
importance des jeux sacrés.
Caraotér6 religieux du lien fédéral. — Les Grecs sont
le seul peuple qui ait essayé de fonder la société politique sur
dbyGoogk
t
IS RELIGIEUSES. 161
le principe de liberté. Cest leur plus beau titre de gloire, mais
c'est aussi la principale cause de leur faiblesse. S'ils n'ont ja-
mais réussi à former une nation» c'est parce qu'ils n'ont jamais
voulu sacrifler à une autorité quelconque la moindre parcelle
de leur autonomie communale. La religion seule pouvait servir
de lien entre les communes ; mais la diversité des croyances
élait aussi une conséquence de la liberté. Chaque peuple con-
sacrait ses légitimes prétentions à l'indépendance par le culte
de ses Héros et de ses Dieux protecteurs. Chaque Dieu, dans
les principaux sièges de son culte, avait une physionomie à
part et des légendes spéciales; son rang, dans la hiérarchie
indécise de TOlympe, variait d'une commune à l'autre. Pour-
tant cette variété n'entraîna jamais ni persécution ni guerre
religieuse, car l'intolérance est contraire à la nature même du
polythéisme. On ne pouvait pas plus condamner les légendes
de l'Arcadie ou de la Boiotie au nom de celles de la Thessalie
ou de la Crète, qu'on ne pouvait proscrire^ le dialecte aiolien
ou atlique, au nom de l'ionien ou du dorien. De môme que la
langue grecque conservait son unité malgré ses différents dia-
lectes, ainsi l'Hellénisme enveloppait toutes les traditions lo-
cales dans sa théologie multiple, et sanctionnait à la fois l'au-
tonomie des communes et Tunion fédérale. Les traités conclus
entre les villes étaient placés sous la protection de leurs divi-
nités protectrices, qu'on voit se donnant la main sur les mon-
naies frappées en signe d'alliance. Chaque république envoyait
des représentants appelés Théores, c'est-à-dire spectateurs,
aux fêtes de ses alliés, et demandait pour eux comme pour elle
la protection de ses Dieux. Il se formait des ligues appelées
Amphiclionies, dont le signe était la participation aux mômes
cérémonies religieuses. Certains oracles attiraient les habi-
tants de toutes les parties de la Grèce, et leur influence restait
indépendante des chances diverses de la guerre et de la poli-
tique. Enfin les Jeux sacrés maintenaient entre les Grecs un
lien religieux qui leur rappelait leur communauté d'origine.
Diversité des fonctions religieuses : les prêtres, les
poètes et les devins. — Il y avait autant de variété dans les
fonctions religieuses que dans la religion elle-même. Chez les
peuples de l'Orient et dans FEurope moderne, toutes ces fonc-
er byGoogk
ÊTHES, LES CHANTEURS, LES DEVINS.
les dans la main des praires. Chez les Grecs,
monle dans leur histoire, on ne trouve rien
t que nous appelons le sacerdoce. Chaque père
iniait les libations et les offrandes sur le foyer,
domestique. Quand les familles réunies en
offrir un sacrifice en commun, les rois, chefs
*aient en présence de tout le peuple. Lorsqu'on
I construire des temples, il y eut nécessaire-
nes chaînés de les garder et d'entretenir en
îls consacrés au culte ; on leur attribua aussi
s victimes, et les magistrats, qui avaient suc-
s Tàge héroïque, se bornèrent à présider aux
:s. A Athènes, on choisissait pour sacrificu-
iers, parce qu'ils avaient l'habitude de prépa>
Athénée, qui rapporte ce fait d'après Clidème,
lettre d'Olympias recommandant à son fils
lisinier très instruit dans les rites sacrés et la
crifices. Ces sacrificateurs étaient en même
ans des choses saintes ; ils balayaient le tem-
our attribut un balai, comme on le voit sur un
ous donnons la gravure un peu plus loin. C'était
ellerions des sacristains, et tel est le vrai sens
mr se conformer à l'usage, on peut leur lais-
jrêtres, comme on laisse celui de rois aux
e héroïque, qui n'étaient que des capitaines
uges de paix à Tintérieur, mais il faut se rap-
)t n'a pas le sens que nous lui donnons au*
les modernes en eifet, le prêtre enseigne la
! les consciences ; rien de pareil n'existait chez
int apprenait de sa nourrice les légendes des
os du pays. Quand il y eut des écoles, il étu-
nes d'Homère et d'Hésiode les traditions na-
ïuscs. Quant à l'éducation morale, il la rece-
ts d'abord et ensuite de ses égaux,
lythologique des croyances populaires élail
lètes, ou chanteurs, àoi^ci, l'explication des
ésages aux devins, ou prophètes, [AâvTuc, qui
stingués des tipei;. « Les devins, dit Platon,
dbyGoogk
DE DODONE.
lommes ce qui vient
^ Kres est de savoir (
convient de présenter aux Dieux nos oifrandes et ne
et de leur demander par nos prières les biens don
sent. » On sait que, môme chez les Juifs, où il y av
dans tout l'Orient, une caste sacerdotale, les phoph
distincts des prôtrcs, et n'appartenaient pas comi
tribu de Lévi. A Rome, la science traditionnelle de
el des augures était le privilège des patriciens; ma
la divination était Teffet d'une aptitude particuliè
tribuait à l'inspiration directe d'Apollon, comme o
aux Muses l'inspiration des poètes. Ceux qui senta
le génie poétique composaient des hymnes, ce
croyaient le don de prophétie expliquaient les présaj
risques et périls, et s'exposaient à perdre la confian
nement ne jusliflait pas leurs prédictions. Leur
comme celle des médecins, était proportionnée à
dont ils avaient fait preuve. Les fonctions des poè
celles des devins, échappaient par leur nature m^
espèce de contrôle, mais personne n'était obligé
mettre. Aucune autorité ne pouvait fixer un dogme
une croyance. L'existence d'un culte public n'im]
ce qu'on nomme aujourd'hui une religion d'Étal
avaient la direction des cérémonies religieuses, et
pour cette tradition, le nom de roi fut conservé <
religieux longtemps après avoir disparu dans l'ordr
ainsi le second des airchontes d'Athènes s'appelait 1
aucun magistrat ne pouvait régler ou modifier un
ni s'attribuer le rôle d'un poète ou d'un devin. Dt
c'est Agamemnon qui offre les sacrifices, mais quai
veut interroger les Dieux, il s'adresse à Calchas.
L'oracle de Dodone. — Les Grecs faisaient un
linuel de la divination. On admettait bien qu'un
vait se tromper; on savait qu'il y en avait de pli
habiles, comme parmi les médecins, mais le pri
divination n'était jamais révoqué en doute. Er
guerre, il y avait toujours des devins dans chaque
temps ordinaire, on allait consulter les Dieux da
dbyGoogk
L*ORACLE DR DELPUES.
dires célèbres auxquels étaient attachés des prophètes,
î généralement des prophétesses. Tout ce qu'on sait de
j de Dodone, le plus ancien des oracles de la Grèce,
que la Man tique, ou science divinatoire, n'était à l'ori-
u'une météorologie instinctive. A Tépoque pélasgiquo,
ccupation continuelle était la crainte des orages, car
ait pas la ressource de faire venir du blé de l'étranger,
is nerveux, les femmes surtout, sont très sensibles aux
ces de Tatmosphère: on les consultait comme nous
ions un baromètre. Une longue expérience pouvait
5r à des dispositions organiques spéciales. Il y avait
3mme aujourd'hui dans toutes les campagnes de vieux
B qui prédisaient les changements du temps. Si leurs
ions s'étaient réalisées, on les interrogeait sur autre
et ils répondaient avec assurance, car les vieillards se
infaillibles. Mais les questions d'agriculture se présen-
)ien plus souvent que les autres, et c'est là-dessus que
ssait la réputation des devins. La foi aux présages ré-
un besoin si naturel qu'il n'est pas nécessaire d'attri-
succès des oracles à la superstition et à la fourberie.
[)mprendre les mœurs des populations primitives, rap-
nous ce qui se passe dans nos campagnes^ pensons au
ies almanachs prophétiques, et nous pardonnerons auT
i de n'avoir pas attendu les progrès tardifs de la Météo-
. Peu à peu, les tribus agricoles devinrent des sociétés
les, mais le pli était pris, l'habitude d'interroger les
lait dans les mœurs, on ne pouvait supposer qu'ils s'in-
ient moins à une expédition militaire ou à la fondation
olonie qu'à lavenir d'une récolte, et on ne faisait rien
j consulter.
icle de Delphes. — Les procédés de divination ne
nt plus être les mêmes, puisque les besoins étaient
ts. Tant qu'on n'avait eu que des intérêts agricoles, on
terrogé Zeus, c'est-à-dire observé l'atmosphère, et ces
tions, bien imparfaites sans doute, pouvaient cepen-
roir un caractère scientifique. Mais quand il s'agit
ts politiques, comme le succès d'une guerre, l'établis-
d'une législation ou d'une colonie, la conciliation de
dbyGoogk
.E DE DELPUËS. 165
lions rivales, ]a Mantique, au lieu
d'ôlre une science, devinl un don parliculier des Dieux, un
état mystérieux de Tesprit dominé par une puissance supé-
rieure. La faculté de divination, que Thomme ne possède pas
dans l'état normal, on croyait pouvoir la développer par des
moyens artiûciels, analogues à ceux qui produisent l'ivresse.
On avait remarqué les propriétés médicales de certaines eaux ;
d'autres, en agissant sur le système nerveux, produisaient une
sorte de délire. Sur plusieurs points du sol de la Grèce, sou-
vent agité par des révolutions géologiques, s*ouvraient des
gouffres et de.s cavernes d'où sortaient des émanations agis-
sant fortement sur le cerveau. Selon Justin, il y avait sur le
Parnasse, au milieu d'une petite plaine située dans une anfrac-
tuosité de rocher, un trou profond d'où s^échappait un souffle
froid, communiquant à ceux qui s'en approchaient un délire
prophétique. D'après une tradition rapportée par Diodore,
c'étaient des chèvres qui avaient fait découvrir ce dégagement
de gaz. Le berger qui les conduisait, étonné de leurs bonds
désordonnés et de leurs bêlements étranges, s'approcha pour
en chercher la cause. 11 fut pris de vertige et se mit à prédire
Tavenir. Le bruit s'en étant répandu, on reconnut qu'il y avait
là un oracle de la terre. Dans le commencement, ajoute Dio-
dore, chacun le consultait pour son compte ; mais plusieurs
personnes, sous l'influence du délire qui les agitait, se laissè-
rent tomber dans le goufl're et ne reparurent plus. Pour éviter
ce danger, les habitants du pays placèrent un trépied au-des-
sus de Touverture et chargèrent une femme de recevoir les
inspirations de la Terre et de les transmettre aux consultants.
La réputation qu'avait eue l'oracle de Dodone aux époques
primitives, passa dans la période historique à l'oracle de Del-
phes. Déjà dans Homère il est question du « seuil de pierre de
l'archer Apollon dans la rocheuse Pytho ». L'hymne homéri-
que à Apollon attribue à une colonie de Cretois l'établissement
du culte de ce Dieu à Delphes. Apollon prit possession de l'o-
racle sans toutefois en déposséder la Terre, car Plutarque, en
visitant le temple de Delphes, parle du sanctuaire de la Terre,
et lorsqu^l veut expliquer pourquoi l'oracle est commun à la
Terre et à Apollon, il dit que l'exhalaison prophétique de la
dbyGoogk
dbyGoogk
L'ORACLE DE DELPHES.
son caractère solaire qu'Apollon est le Di
leil dissipe toutes les ombres ; c'est l'œil d
Le trépied de Delphes. ApoUoo tuant Pylbo. Au revers, A
80D arc et ses flèches près lie lui (monnaie >
Apollou reprend le trépieJ enlevé par Héraclès {3«
Pierre gravée.
Monnaie di
il éclaire devant lui, \l prévoit, Ai^xyWon étal
teur des Muses ; on attribuait l'invention (
L^.-^.-
dbyGoogk
CARAGTÉllË DES ORACLES.
pythie nommée Phèmonoè. Quand la langue rhythmée
ivenue une langue savante, il y eut des poètes attachés
nple pour mettre en vers les réponses de la pythie. On
dait l'inspiration poétique et Tinspiralion prophétique
le des faits de môme nature. Quand on parle aujourd'hui
xtase des poètes, ce n'est plus qu*une métaphore usée :
îsie est une langue morte ; si on fait encore des vers,
3st plus qu*à tête reposée, en pesant les syllabes. Mais
les Grecs, Teitthousiasme poétique n'était pas un mot
le sens ; c'était un état exceptionnel de Tesprit qui aidait
iprendre l'état plus mystérieux, mais analogue, de la py-
ur son trépied : elle ne se possédait plus, elle était pos-
par le Dieu. Selon Plutarque, on choisissait pour pythies
îmmes simples et ignorantes, plus aptes par cela même
ir sans résistance l'influence divine. Les réponses de la
s étaient eu général des sentences concises, d'une forme
latique et d'une explication difficile. On a même vu dans
nom de Loxiès, donné à Apollon, une allusion à l'obs-
I des oracles, quoique cette épitbète rappelle simplement
rche oblique du soleil.
:*actére moral des oracles. — Les auteurs anciens
rdeot pour attester l'influence morale des oracles. C'est
le de Dodone qui avait dit : a Respecte les suppliants, car
it sacrés et purs. » Interrogée une fois sur le plus heu-
des hommes, la pythie nomma Phèmios qui venait de
ir pour sa patrie. A une question semblable adressée
ygès, roi de Lydie, le Dieu répondit en nommant Aglaos
ophis, un vieillard qui cultivait un petit champ en Arca-
jlien raconte l'histoire de trois jeunes gens qui avaient
laqués par des brigands en venant consulter l'oracle de
es ; l'un s'était sauvé, l'autre avait tué le troisième com-
n en voulant le défendre. La pythie répondit au premier:
is laissé mourir ton ami sans le secourir ; je ne te ré-
ai pas : sors de mon temple. » Et au second qui la con-
l à son tour : « Tu as tué ton ami en le défendant, mais
g ne t'a pas souillé : tes mains sont plus pures qu'aupa-
l. » Selon le même auteur, les Sybarites ayant tué un
cur près de l'autel d'tièrè, une fontaine de sang avait
dbyGoogk
CARACTÈRE DES ORACLES.
jailli dans le temple. Effrayés de ce prodige,
voyèrent consulter l'oracle de Delphes qui
L'Apollon sauroctone du
LouTre, imitation d'une
«tatue de Praxitèle.
Apollon Dieu de la lumière
(Musée de Florence).
Apollon prophète, les pieds
sur rOmphalos (Musée de
Naples).
Tète d'ApiUon de la
galerie Pourtalès.
Ycngeance des Dieux sur eux et sur leurs enfc
L. M. — HisT. DES Grecs.
dbyGoOgk
dbyGoogk
LES AMPUICTIONIES.
inspiraient et la pythie qui rendait les oracles, et ceu
recueillaient, et le démagogue qui les interprétait, et 1
tout entier qui y trouvait toujours un sens conforme i
rôts de la patrie. Lors de la seconde guerre médique,
tocle donna un sens raisonnable à un oracle ininti
les Athéniens adoptèrent son explication, et Tindépeni
la Grèce fut sauvée.
Les Amphictionies. — Le sanctuaire de Delpl
placé sous la protection collective de plusieurs peuf
sous le nom d'Amphiclions , c'est-à-dire circonvoisi
maient une fédération plutôt religieuse que politi
haute antiquité de l'alliance amphiclionique est attc
la tradition qui faisait de son prétendu fondateur Am]
un fils de Deucalion et un frère d*Hellen, et aussi par I
des douze tribus composant la ligue, dont plusieurs
perdu toute importance à Tépoque historique. Ces r
rient selon les auteurs; la liste la plus authentique r
les Boiotes, les Ioniens, les Doriens, les Perrhaibes,
gnètes, les Locriens, les Ainianes ou Oitaiens, les Ph
Achaiens du Nord, les Phokiens, les Maliens ou Mél
Dolopes, qui paraissent avoir été remplacés par les D<
et enfin les Thessaliens, admis dans la ligue après !
blissement en Thessalie, et peut-être en remplacei
quelque autre peuple. Les dépuiés se réunissaient chi
tomne aux Thermopyles, dans un temple de Dèmèt
d'Anthèla, et chaque printemps à Delphes. L'objet ]
de l'alliance était de protéger contre toute tentative i
le temple d'Apollon et les trésors qu'il renfermait. Le
dérés s'engageaient en outre par serment à ne jamais
une ville amphiclionique et à ne pas la priver d'eau n
lemps de guerre. Chacune des tribus associées disp
deux voix, et celte rèj^le ne fut pas changée, môme q
Doriens se furent emparés des deux tiers du Péloponè
Sparte devint la ville la plus puissante de la Grèce.
11 parait avoir existé, dans la plus ancienne période
loire grecque, un assez grand nombre d'associations de <
toujours fondées sur des rapports de voisinage et sur h
palion à certaines fôtes religieuses dans un temple c
dbyGoogk
LES AMPHIGTIONIES.
amphictionîe qui tenait ses assemblées
)seîdon à Calaurie et qui comprenait les
1
nëter (peinture d'HercuIaDum).
— D'un c6té la télé de Dëmèter, protectrice des Ther-
on, accoudé sur une lyre et tenant un laurier, est assis sur
mbril de la terre).
dbyGoOgk
LES JEUX SACRÉS. 173
lermione, et de Nauplie en Ârgolide, l'ile
Laconie, Orchomène de Boiotie et Athè-
i fut remplacée par Sparte et Nauplie par
de ramphictionie achaienne se réunis-
sction de Dèmèter Panachaia, ceux de
s sous celle d'Apollon. Ces ligues par-
autres qu'on pourrait citer, avaient un
ent religieux ; elles ne servirent jamais à
[ue, pas même une alliance entre les peu-
n faisaient partie ; elles ne les empêchaient
erre. L'amphictionie de Delphes, la seule
importance, est bien loin cependant de
onseil général de la Grèce que lui donne
seulement elle a joué un rôle dans This-
été funeste. Du temps de Solon, les Am-
[a première guerre sacrée, terminée au
la destruction de Kirrha. Environ deux
tard, ils provoquent une nouvelle guerre
lokiens, et, en appelant l'intervention de
L'asservissement de la Grèce à la monar-
c sacrés. — Les jeux sacrés, et en parti-
iqueSj les plus célèbres de tous, créaient,
mies, un lien religieux plutôt que politique,
le les amphictionies constituaient des fé-
es, mais restreintes à quelques tribus ou à
['ailleurs fictives en réahté et inefficaces
ux sacrés n'établissaient que des trêves
niverselles. C'était, avec la langue, le seul
; tous les peuples grecs les uns des autres
ement des étrangers. Les Grecs n'ont ja-
tution nationale. Cette institution remonte
js lointaines de leur histoire, et on en
l'âge héroïque. L'avant-dernier chant de
à la description des jeux funèbres céllé-
te Patroclos, et le poète rappelle à celte
nérailles fameuses de béros, OEdipe, Ama-
con lient un magniCque tableau de celles
10.
dbyGoogk
dbyGoogk
nous recueillîmes tes os blancs, avec du vin
el tu mère donna une urne d'or à deux ans
c'était un don de Dionysos el un ouvrage du U
C'est là que sont renfermés tes os blancs, ill
ceux de Patroclos, (ils de Ménoilios, et sépa
lilochos, que tu estimais le plus parmi tous
gnons, depuis la mort de Palroclos. Et e
l'armée sacrée des Argeiens guerriers, noi
grande et glorieuse tombe, près du large
qu'elle fût aperçue en mer par les hommes
nant et ceux qui naîtront dans l'avenir. Et 1
mandé aux Dieux des prix magnifiques, les
semblée aux plus braves des Achaiens. Je m
aux funérailles de bien des héros, quand les
lent leurs ceintures et concourent pour d
d'un roi; mais jamais je n'ai été saisi d'à
devant les prix magnifiques que proposa si
aux pieds d'argent, car tu étais bien cher
môme après ta mort, ton nom n'a pas pé
Achille, ta grande gloire sera célébrée parm
Ces chants des Muses en l'honneur d'Ac
concours de chant qui fut ouvert aux fur
damas et auquel Hésiode fuit allusion dans le
U musique et la poésie contribuaient auss
elles exercices du corps à ces cérémonies n
parle du trépied qui fut le prix de la victoire
aux Muses de l'Hélicon. Une légende très
Homère pour concurrent à Hésiode dans cei
mais Hésiode ne nomme pas ses rivaux. E
qui lui est attribué, il dit qu'Homère et li
hymnes en l'honneur d'Apollon aux fêtes d
homérique à Apollon parle de ces fêtes cél
»Jiens, et des concours de pugilat, de dans
les accompagnaient. Il y a là en germe tout
ïes fêtes religieuses aux époques suivante
formes de l'art, la poésie, la musique, la {
danse, caractérisent dès l'origine le culte de
des morts. L'oraison funèbre môme, qui 5
dbyGoogk
'f^^j\^-
dbyGoogk
LES OLYMPIADES. 177
des gloires de la Grèce, a son modèle dans les discours pro-
noncés autour du cadavre d'Hector dans la maison de Priamos.
Antiquité des Jeux. Les Olympiades. — Le culte qui
convenait aux Dieux de la Grèce, conçus sous les attributs de
l'homme, c'était l'expansion de toutes les facultés, le dévelop-
pement parallèle du corps et de l'esprit. Par une juste pondé-
ration de ses énergies, l'homme réalise en lui son idéal, il
imite les Dieux, car il établit l'ordre en lui-môme comme ils
l'ont établi dans le monde. Chacun des exercices de l'esprit
ci du corps a un Dieu pour modèle : Poséidon, Héraclès et
les Dioscoures enseignent l'équilation, la lutte, la course et le
pugilat ; Hermès Enagonios, père de Palaistra, préside aux
gymnases, et le chœur des Muses, conduit par Apollon, règle
les danses religieuses et modère par la mélodie les mouve-
ments violents de l'âme. On rapportait l'institution des jeux
Olympiques à Héraclès ou à Pélops ; on disait même que Zeus
avait lutté à Olympie avec Cronos pour l'empire du monde;
Apollon avait institué les jeux Pythiques, Poséidon ou Thèseus
les jeux Islhmiques, Héraclès les jeux Néméens. Ces légendes
prouvent la haute antiquité des jeux sacrés, qui ne firent que
transformer les institutions régulières des fêtes célébrées de
temps immémorial. Ces fêtes, purement locales à l'origine,
ne se distinguaient pas d'une foule d'autres qui n'ont pas
atteint la même célébrité. Les jeux Olympiques, les pre-
miers en date et en importance, ne devinrent périodiques
qu'après l'établissement des Aitoliens et des Doriens dans le
Péloponnèse. Les Ëleiens racontaient que leur roi Iphitos,
d*accord avec Lycurgue, législateur de Sparte, et sous la sanc-
tion de l'oracle de Delphes, avait réglé la célébration des jeux
olyfnpiqnes et proclamé la trêve sacrée pour permettre à tous
les Grecs d'assister à la fête, qui depuis lors revint tous les
quatre ans. Ces périodes de quatre ans se nommaient Olym-
piades. Au retour de chaque année olympique, ou cinquième
année, les Eleiens inscrivaient le nom de celui qui avait
gagné le prix de la course, et plus tard, la liste des vainqueurs
fournit une base fixe à la chronologie. L'ère des Olympiades
commence en 776 avant l'ère chrétienne. C'est la première
date certaine de l'histoire grecque.
dbyGoogk
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\SriQUE ET LA SCULPTURE.
_ ^^. ; la souplesse et la force des me
La lutte demande la vigueur des muscles de la poitrim
bras, et une grande solidité des extrémités inférieure!
le pugilat, il faut la force d'impulsion pour produire les
la force de résistance pour les supporter, la souplesse i
diriger et les éluder.
En élevant la gymnastique à la hauteur d'une institu
Discobole (statue du Louvre, imitée de Naukydès).
Ilgieuse et sociale, les jeux sacrés préparaient celte ap
de la beauté qui fut l'œuvre de la sculpture. Rien ne ce
plus aux progrès rapides de cet art que l'habitude qui
de consacrer les statues des athlètes vainqueurs à C
Quand un athlète avait remporté trois victoires, la stai
consacrait devait être son portrait, afin que les maître
lestres et les jeunes athlètes pussent comprendre di
sens ils devaient diriger leurs elTorts. La nécessité di
L. M. — HiST. DES Grecs. i\
dbyGoOgk
dbyGoogk
r^
IMPORTANCE DES JEUX SACRÉS.
courtisans solennels, les sculpteurs grecs étudiai
tères multiples de la beauté, et ils croyaient fai
religieuse en sculptant des athlètes.
Une interprétation savante, raisonnée, mctho
mes du corps humain, une application rigourei
de la géométrie dans les représentations graphiq
bases de l'enseignement du dessin dans les éco
d*Aigine, d'Argos, de Sikyone. Les artistes avai
un public parfaitement compétent, puisqu'il
d*athlètes aspirant à posséder les formes qu(
avait voulu représenter. L'art était astreinte Tii
de la nature, mais d'une nature de choix, et, par
la recherche constante de la perfection des form
que Polyclète, le plus illustre représentant de la
ricnnc, fit son Doryphore, ou porte-lance, pour se
c'est-à-dire do règle, aux artistes qui voudraiei
proportions parfaites du corps humain.
Célébrité et importance des jeux sacré
Pythiques étaient célébrés tous les quatre ans e
la victoire d'Apollon sur Pytho. Les Delphiens et
Ainpbictyons en avaient la direction ; celle des je
appartenait aux Corinthiens, celle des jeux Ném
taiils de Cléonai et plus tard à ceux d'Argos. Le
ques et Néméens se célébraient tous les deux
cours de musique et de poésie, qui tenaient le
aux jeux Pythiques, étaient admis également
Islhmiques et Néméens, avec les exercices gyr
courses de char. Les prix consistaient, comme
une couronne de feuillage. Les conditions pour
concours étaient les mêmes, et il y avait aussi ur
L'intérêt qui s'attachait à ces fêtes, et le nombr
des spectateurs y attirait des marchands de toi
môme qu'en Europe, au moyen âge, les foire
sance à l'occasion des solennités religieuses. Le
salent représenter par des députations qu'on i
ries. L'usage s'introduisit de réciter des p
l'assemblée; on y chantait des hymnes, par
d'Archiloque en l'honneur d'Héraclès. Les vai
dbyGoogk
1
184 IMPOHTANCS DES JEUX SACRÉS.
qu'ils étaient riches, chargeaient un poète fameux de chanter
B
leurs louanges et celles de leur famille et de leur patrie. Les
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MIGUATIONS ET COLONIES. «8o
poésies de Pindare qui nous sont parvenues sont des odes en
rbonneur des vainqueurs. Simonide avait aussi composé des
odes triomphales, Euripide avait chanté une victoire d*Alki-
biade. Les artistes, les savants, les orateurs profitaient de ces
solennités pour faire connaître leurs œuvres; Hérodote y lut,
<lit-on, sa magnifique histoire; le peintre Aétion y présenta un
de ses tableaux, Oinopidès de Chios ses tables astronomiques.
C'était aussi, pour les villes ou les peuples, une occasion de
promulguer des traités d'alliance. C*est aux jeux Isthmiqucs
que Flamininus, après sa victoire sur Philippe, roi de Macé-
doine, proclama l'affranchissement des Grecs au nom du Peu-
ple romain.
L'institution des jeux sacrés, étant plutôt religieuse que poli-
tique, put survivre àTIndépendance de la Grèce, et ne disparut
que dans le grand naufrage de THelléiiisme et de la civilisation.
Les jeux Olympiques avaient duré près de douze siècles.
Théodose les supprima en môme temps qu'il ferma les temples
et fit détruire les statues des anciens Dieux.
CHAPITRE VII
MIGRATIONS ET COLONIES
Passage de la Légende à THistoire. — La conquête Thessalienne. — Les
Aioliens en Boiotie. — Invasion des Aitoliens et des Doriens. —
Soumission de l'Étis, de la Messénie et de la Laconie. — Conquête
d'Argos, d'Épidaure et de Troizen. — Ck)nquête de Sikyone, do
Corinthe, de Mégare et d'Aigine. — Migration aiolienne. — Les
réfugiés en Attique. Mélanthos, Codros. — Migration des Ioniens. —
Colonies ioniennes. — Établissement des Doriens en Messénie et en
Laconie. — Colonies dorieunes : Thèra, Mèlos, la Crète. — Les Doriens
à Rhodes et à Cos. La Dorls. — Chronologie mythique. — Les poèmes
d'Bomère et d'Hésiode.
Passage de la légende à Thistoire. — L'existence d'une
civilisalion préhistorique en Grèce est attestée par les cons-
tructions kyclopéennes , par les objets d'art trouvés dans les
i DigitizedbyVjOOQK
186 LA CONQUÉTli: TllKSSALlENNE.
fouilles et par les descriptions contenues dans les poènnes d'Ho-
mère. Mais les événements cl les personnages qui remplissent
celte période appartiennent à la légende. Entre l'épopée et
l'histoire, il y a un intermède obscur, long et à peu près vide.
Quand la toile se relève, ce ne sont plus les mômes acteurs.
Les Danaens ont disparu, ou ils ont changé de nom et sont de-
venus les Hellènes. Les Achaiens sont rentrés dans la coulisse
et ne reparaîtront qu'au dernier acte. La scène est occupée
par deux grands peuples rivaux, les Doriens et les Ioniens; les
autres, groupés sous le nom d'Aioliens, fornfiant le fond du
tableau. Pour l'unité de Thisloire grecque, il faudrait un pont
entre Homère et Hérodote. Mais Homère invente, Hérodote ra-
conte, et on ne peut rattacher la poésie à la réalité qu'au moyen
d'interprétations et d'inductions plus ou moins arbitraires.
Thucydide trace au commencement de son ouvrage une peinture
de l'existence à demi nomade des anciennes populations de la
Grèce. 11 fait remarquer que les terres les plus fertiles, comme
la Thessalie, la Boiolie et les vallées du Péloponèse étaient ex-
posées aux invasions les plus fréquentes. Ces invasions par-
taient généralement des pays des montagnes, qui n'étaient
propres qu'à la vie pastorale et ne pouvaient nourrir une po-
pulation trop nombreuse. Ce tableau doit être vrai dans son
ensemble; il a dû se produire, avant la période historique, une
suite de déplacements et de révolutions, mais le détail nous
échappe, nous ne pouvons apprécier que les résultats. L'ouvrage
d'Éphore, qui racontait l'invasion dorienne,ne nous est pas par-
venu. Nous n'avons pour nous guider que de rares indications
éparses dans la Géographie de Strabon et dans le Voyage de
Pausanias. Ces récits très courts et souvent contradictoires rat-
tachent les migrations de peuples et les fondations de villes aux
aventures des héros de l'épopée ou de leurs successeurs im-
médiats. On sent que cette transition est artificielle ; c'est la
légende moins les ornements poétiques qui la faisaient passer.
La conquête Thessalienne. — Les migrations de tribus
par lesquelles s'ouvre l'histoire grecque paraissent avoir leur
point de départ dans un échange de population entre les deux
versants du Pindos. D'après le poème des RetourSy Néoptolé-
mos fils d'Achille, au lieu de revenir, après la guerre de Troie,
dbyGoogk
LA CONQUÊTE THESSALIENNE.
dans la Phliolis achaienne, où était le royaum
s'établit en Épire avec ses compagnons, d*aprè
Thétis. Réciproquement, c'est de la Thesprotis
sortaient, selon Hérodote, les Thessaliens qui
conquérants dans le pays appelé autrefois Haim<
d'eux le nom de Thessalie. Il semble naturel d
relation entre ces deux événements, quoiqu'on
Yoir lequel a été la cause ou l'occasion de l'aut
nomme pas les Thessaliens, mais dans le catalof
Anliphos et Pheidippos, qui conduisent les soldat
et de Cos, sont fils de Thessalos, prince Hèracléi<
qu'ils avaient été jetés par la tempête sur les c
et avaient donné aune tribu de Thesprotes le no
Thessalos. Il y avait d'autres légendes sur Torigi
mais on s'accordait à faire venir les Thessaliei
protis. C'était, dit Grote, une population à demi
rapprochée des Macédoniens ou des Épirotes que
Hellènes et formant une sorte de chaînon interi
les deux races. Leur habileté à dompter les ch
bablement la principale cause de leur succès,
ôtre de là qu'est venue la fable des Kentaures,
héroïque les Grecs n'avaient pas de véritable
héros d'Homère combattent toujours sur des chi
La conquête parait avoir été graduelle. Les A
tes, lesPerrhaibes, les Magnètes, après avoir opp(
une longue résistance, furent repoussés dans les
lagneuses et réduits à une condition qu'on a co
des Laconiens après la conquête dorienne; cepi
servèrent leurs noms de peuples et continuèren
de la ligue amphictionique. Les Thessaliens, de
tendit à tout le pays, s'établirent principalemen
qui formait la partie centrale et qui parait ré]
cienne Hellas et au royaume d'Achille ; le nom (
disparaît après la conquête Thessalienne. Pan
habitants du pays, les uns émigrërent, les autre
à la condition de serfs, et sous le nom de Pênes
le sol pour le compte des conquérants qui form
locralie dispersée dans quelques villes, Phères
dbyGoogk
488 LES AlOLlEiNS EN BOIOTIE.
toussa, Cran non, etc. Sauf quelques rares circonstances où
toute la contrée reconnut Fautorilé d'un chef nommé Tagos,
il n'y avait pas de lien politique entre les familles thessaliennes.
La plus puissante, celle des Aleuades, rattachait son origine à
Héraclès, comme les rois de Sparte.
Les Aioliens en Boiotie. — Le contre-coup de la con-
quête thessalienne se fit sentir en Boiotie. Strabon nous dit
qu'après la guerre des Épigones, les Gadméiens, chassés de
Thébes par les Thraces et les Pélasges, s'étaient retirés dans
l'Aiolis et s'étaient mêlés aux Arnéens assez longtemps pour
que l'établissement commun prit le nom de Boiotie; Strabon
ajoute qu'ils revinrent dans leur ancienne patrie à l'époque où
se préparait à Aulis l'émigration conduite en Asie par les fils
d'Orestès, et qu'ils annexèrent à la Boiotie le territoire d'Or-
chomène occupé par les Minyens. Les Pélasges se retirèrent à
Athènes, les Thraces dans le voisinage du Parnassos. Selon Pau-
sanias, les Boiotes fondaient leur droit à faire partie de la ligue
Amphictionique sur ce qu'autrefois ils avaient occupé, sous le
nom d'Aioliens, une partie de la Thessalie. Le catalogue de
l'Iliade^ qui nous montre les Boiotes établis en Boiotie à l'épo-
que de la guerre de Troie, nomme Arnè parmi les villes boio-
tienties sans faire mention d'une autre Arnè en Thessalie. Au
temps de Strabon, la position de l'Arnè boiotienne n*élait plus
connue, on savait seulement qu'elle se trouvait près du lac
Copaïs. C'est de là que les Boiotes étendirent peu à peu leur
domination sur toute la contrée à laquelle ils donnèrent leur
nom. Ils célébraient en commun des fôtes appelées Pamboio-
ties, sur les bords de la rivière Coralios, dans le voisinage du
temple d'Alhènè Itonia. La suprématie que Thébes s'attribuait
sur les autres villes de la Boiotie ne fut pas acceptée sans con-
testation, surtout dans la région de l'Asopos et du Kithairon,
qui faisait autrefois partie de l'Attique et qui avait probable-
ment la môme population. Les Plataiens, qui se vantaient d'être
autochthones, montrèrent en toute occasion leur répugnance
contre Thébes et leurs sympathies pour les Athéniens.
Invasion des Aitoliens et des Doriens. — L'invasion
des Aitoliens et des Doriens dans le Péloponnèse parait avoir
été une conséquence de la conquête thessalienne, mais tous
dbyGoogk
INVASION DES AITOLIENS ET DES DORIENS. 189
les auteurs anciens qui parlent de celte invasion la rattacher
aux légendes héroïques et l'appellent le relourdes Hèracléides
Après la mort d'Héraclès, ses enfants persécutés ou chassé
par Eurystheus trouvent un asile chez les Athéniens. Eurys
theus envahit TAltique, mais il est tué avec tous ses fils dan
une bataille, et les Mykèniens, par crainte des Hèracléideî
donnent la royauté à Alreus,fils de Pélops. Les Hèracléides, de
venus seuls représentants de la race de Perseus, rassembler
une armée pour rentrer en possession du royaume; mais
rentrée de lislhme, ils rencontrent les forces réunies de
Ioniens, des Arcadiens et des Achaiens. Hyllos fils d'flèraclè
propose de décider la querelle par un combat singulier entr
lui et un des chefs de Tarmée péloponnésienne. Ëchémos d
Tégéa, qui était allié aux Pélopides par sa femme, sœur d
Clytaimnestra, accepte le défi et lue Hyllos. Suivant une con
ventiou faite avant le combat, les Hèracléides se retirent pou
cent ans, dit Hérodote, pour cinquante ans, dit Diodore. Ils son
aceueillis par les Doriens en souvenir de l'appui qu'Hèraclè
avait prêté autrefois à leur roi Aigimios, fils de Dôros, dan
une guerre contre les Lapithes. La trêve étant expirée, le
Hèracléides unis aux Doriens se préparent à envahir le Pélc
ponnèse. L'oracle de Delphes leur promet le succès dans cetl
entreprise s'ils prennent un guide à trois yeux. Ils renconlren
l'Aitolien Oxylos monté sur un mulet. Le mulet avait deu
yeux, mais l'homme était borgne : ils reconnaissent en lui 1
guide indiqué par l'oracle. Oxylos était d'ailleurs leur parent
car il descendait d'Oineus, père de Dèiarieira. Il avait sur l'Éli
des droits analogues à ceux d'Héraclès sur le Péloponnèse. Un
alliance est conclue, et tandis que les Achaiens et leur roi Ti
saménos, fils d'Oreslès, rassemblent leurs forces à l'entrée d
l'isthme, les Aitoliens et les Doriens, commandés par Oxjlo
et les Hèracléides, traversent le golfe à son point le plus étroit
sur des vaisseaux fabriqués à Naupacle. Oxylos est mis en pos
session de l'Élis, les Hèracléides passent à travers l'Arcadi»
sans s'y établir, et après une victoire sur les Achaiens, se par
tagentle royaume des Pélopides par la voie du sort. Argo
échoit à Téménos, l'aîné des Hèracléides, Cresphonlès ob
tient par ruse la Messénie, et la Laconie, considérée comm
11.
dbyGoogk
dbyGoogk
ARGOS, ÉPIDAURE,
TÉlis : les habitants, de la race des L
chement pour leurs rois, les fîls de
nyens originaires d'Iolcos. Les Do
terres. Trois chefs Nèléides, Mélan
tos se retirèrent en Attique avec h
n'offrit pas plus de résistance. Les
attendus à être attaqués de ce côt^
ment étaient restés dans le pays. S
par Gonon et par Strabon, un Sp
leur persuada de se retirer chez
les Doriens, en récompense de c
ville d'Amyclai.
Conquête d^Argos, d^Epidau:
conquête du royaume d'Argos prés
Doriens, avec leurs longues lance
pouvaient culbuter leurs ennemis
Tart des sièges leur était étranger
a attaquer des citadelles comme c
v,i d'Argos. Leur tactique consista
nage des villes achaiennes dont i
par d'incessantes escarmouches. F
resse dorienne appelée Téménion,
était établi et faisait de là des incu
La résistance des*Achaiens parait b
quête d'Argos ne fut achevée vra
mort de Téménos, car Pausania
Téménion. Tiryns et Mykènes ne
datent encore une population acha
médiques.
Les querelles de famille qui av;
célèbres dans les légendes se reno
seurs les Téménides. Téménos ava
un Hèracléide nommé Deiphonlès
confiance qu'à ses fils. Ceux-ci coi
tuent et mettent sur le trône Taî
phontès entraîne avec lui une pari
Épidaure ; le roi Pilyreus se retir<
familles ioniennes. Alors deux Tén
dbyGoogk
dbyGoogk
dbyGoogk
dbyGoogk
MIGRATION AIOLIENNE.
lauleur voisine de la ville. Itfaître de Corinthe, Alètèa
Mégaris, qui jusque-là avait fait partie de l'Attiq
'es bandes doriennes, parties d'Épidaure, s*établir
lie d'Aigine.
Migration aiolienne. — Le déplacement des tribi
8 cherchant des demeures définitives, le choc de ta
ilationsrejelées les unes sur les autres devait s'éte
!8 de l'Archipel et aux côtes voisines. Ces mouver
Dontent au delà des temps historiques ; un grand n<
olonies rattachaient leur origine aux héros de la {
'roie, et les traditions nous représentent la migration
tmnie une conséquence et un prolongement de ceit
•es émigrants parlent du port d'Aulis où s'était rass(
lotte des Atréides et se dirigent vers la Troade, con
L les chefs de la race de Pélops qui revendiquent le pay
^ I lue conquête d'Agamemnon.
Le plus ancien témoignage qui nous soit parvenu si
ition se trouve dans Pindare, mais il n'en parle qu
nent, à propos d'une victoire néméenne d'Arista
énédos, descendant du Spartiate Peisandros, « (
i^^ TAmyclai avec Oreslès, conduisant à Ténédos ur
^ l'Aioliens. » Ce nom d'Aiolicns, qui ne se trouve
^ Bomère, paraît signifier des hommes de diverses rac
>arius). Il est probable que la plus grande partie des (
furent des Achaiens, chassés du Péloponnèse par
lorienne, mais il se peut que le mouvement d'émig
commencé plus lot. Rien n'empêche d'admettre que
mières bandes achaiennes se soient rencontrées en Bc
les Aioliens d'Arnè chassés par la conquête thessa
^qu'elles aient été grossies par une partie des anciens
du pays et des conquérants Boiotes. C'est ainsi que
tion conduite par des chefs Achaiens s'appela boic
aiolienne. Celte émigration fut très longue à s'a
D'après Strabon, Oreslès étant mort en Arcadie
Penlhilos se mit à la tôte des émigrants et les con(
qu'en Thrace ; Archélaos, fils de Pefnthilos^ passa l'H
et Grau», fils d'Archélaos, s'établit à Lesbos. D'aulrc
commandées par Cleuas et MaIao«, aussi de la ra(
dbyGoogk
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_^|j^
MÉLANTIIOS ET CODROS.
memnon, s'arrêtèrent longtemps près du monl Phrî
passant ensuite en Asie, fondèrent la ville de Kymè,
aussi Phriconis. Strabon rattache à Lesbos et à Kymè 1
dation des autres villes aioliennes répandues dans la r^
rida et dans l'ancienne Troade, qui porta depuis
d'Aiolis.
Les réfagiés en Attique. Mélanthos. Godros.
Athéniens se regardaient comme autochthones et se v
de n'avoir jamais subi d'invasion ni de conquête ; m
tique, placée en dehors du chemin des migrations^ avt
un asile aux fugitifs du Nord et du Midi. Les Pélasges
parles Boiotes étaient venus s'y réfugier, et les Athée
avaient employés à la construction des murs de TAcro
leur donnant pour prix de ce travail les champs vc
1 Hy mette. Mais un jour, ces étrangers insultèrent de
filles qui allaient puiser de l'eau aux Neuf-Fontaines, ca
époque, dit Hérodote, il n'y avait pas d'esclaves <
Athéniens, non plus que chez les autres Grecs. Les 1
furent expulsés de l'Attique et s'emparèrent de l'île de
en chassant les Minyens, qui se réfugièrent en Laconi
très Minyens établis à l'ouest du Péloponnèse et con
par les fils de Nestor se retirèrent en Attique après V
dorienne, ainsi que les Ioniens chassés de l'Aigialos
Achaiens. Le chef d'une de ces bandes de fugitifs f
pour roi par les Athéniens. Ce choix s'explique parui
lion qui n'a rien d'invraisemblable. Les Boiotes fai
guerre aux Athéniens pour la possession d'un territo
sur la limite des deux peuples. Le roi des Boiotes,
Xanthos, proposait de vider la querelle par un comb
lier avec Thymoitès, roi d'Athènes. 11 y avait à cette
beaucoup d'exemples de cet usage qui, s'il durait enc
drail les guerres bien plus rares. Thymoitès refusa (
sa vie, mais Mélanthos, chef des réfugiés de Pylos, voi
connaître l'hospitalité qu'il avait reçue, offrit de cor
sa place. Un stratagème, d'ailleurs peu loyal, lui doni
toire, et les Athéniens, furieux de la lâcheté de leur ro
pour chef l'étranger qui les avait délivrés de la guerre
Son fils Godros lui succéda et se dévoua égalem
I
dbyGoogk
196 MIGRATION DES IONIENS.
Athènes. Les Doriens, maîtres de l'Isthme et de la Mégaris,
avaient envahi TAttique. La Pythie leur annonça qu'ils seraient
rs s'ils épargnaient la vie du roi des Athéniens,
yant eu connaissance de cet oracle par un habitant de
pénétra, déguisé en bûcheron, dans le camp ennemi,
querelle à deux soldats et se fit tuer. Quand on ré-
m corps, les Doriens, désespérant de la victoire, se
t sans combat. Selon une tradition rapportée par
s, quelques-uns avaient déjà pénétré dans la ville
la nuit; se voyant abandonnés des leurs, ils se réfu-
ans l'Aréopage et embrassèrent les autels des Eumé-
l'on nommait les Graves Déesses. Les Athéniens, se
it de l'oracle de Zeus Dodonécn, qui avait proclamé les
s sacrés et purs, leur permirent de retourner sains et
is leur pays. 11 n'y a pas de raison pour rejeter cette
;nde du dévouement de Codros, quoiqu'une telle vertu
'oi soit bien extraordinaire. Les Athéniens, n'espérant
oir un second exemple, déclarèrent que nul n'était
succéder à Codros, et qu'ils n'auraient plus d'autre roi
Ltion des Ioniens. — Une querelle entre les fils de
près la mort de leur père fut probablement l'occasion
ètexte de l'abolition de la royauté à Athènes. L'aîné,
Hait boiteux, et Nèleus, son frère cadet, prétendait
it un vice rédhibitoire. Les droits de Médon furent
s par l'oracle de Delphes, mais son autorité fut limitée :
1 de rendre des comptes au peuple et reçut, au lieu du
'oi, celui d'Archonte, c'est-à-dire chef ou gouverneur;
ui fut attribué pour toute sa vie. Nèleus mécontent
la tôte d'une nombreuse troupe d'émigrants que le sol
ue ne pouvait nourrir et qui allèrent chercher fortune
les mers. Cette émigration, la plus considérable qui
ie de la Grèce, reçut le nom d'Ionienne, parce qu'elle
)8ait en partie des fugitifs du Péloponnèse; mais il s'y
ne foule d'aventuriers de divers pays et de diverses
s Abantes d'Euboia, des Minyens d'Orchoménos, des
ns, des Dryopes, une troupe considérable de Phokiens,
ises, des Arcadiens Pélasges, des Doriens d'Épidaure.
dbyGoogk
COLONIES IONIENNES.
Les colons partirent par bandes successives
des fils de Codros ; quelques-uns s'arrôlèrer
des, peuplées antérieurement par les Carie
d'autres s'établirent dans les îles de Chios e
la côte d'Asie au sud de l'Aiolis, entre Temb
mos et celle du Maiandros. Cetle région prit l
Colonies ioniennes. — Athènes fut con
Statuette d'Hisliè.
métropole de toutes les villes ioniennes, (
étaient partis d'Athènes, emportant avec eux
tiè allumé au Prylanée. Chez les Grecs, h
consacré à la vierge Hisliè, représentait Tui
le Prytanée était le foyer commun de toutes
niennes. La première troupe, conduite par
ville de Milet, habitée jusque-là par des Cari
Hérodote nous dit que les colons n'avaien
femmes avec eux, et qu'ils épousèrent des
dbyGoogk
dbyGoogk
COLONIES lONIENNKS. 190
admis pacifiqucmcnl au partage de la colonie. Une bande re-
crulée dans toutes les villes d'Ionie vint s'établir à Erythrai et
dbyGoogk
200 LES DORIENS EN MESSÉNIE ET EN LACONIE.
fut reçue arec amitié par les anciens habitants, Cretois, Lykiens
Cariens et Pamphyliens. A Clazomène, la plus grande partie
des colons étaient des fugitirs sortis de Cléonai et de Phlious
après rinrasion des Doriens. Fhokaia fut bâtie sur un terri-
toire cédé par les Kymaiens aux Phokiens qui avaient accom-
pagné la migration ionienne; mais la ville ne fut considérée
comme faisant partie deTIonie qu'après avoir accepté des chefs
de la race de Codros, venus de Téos et d'Erythrai. L'ile de
Chios reçut une colonie ionienne d'Erythrai située sur le ri-
vage opposé. Samos fut colonisée par des Ioniens d*Epidaure
qui entrèrent en partage avec les anciens habitants, de la race
des Lélèges. Smyrna, fondée, selon une tradition, par les
Aioliens, selon une autre par les Éphésiens, entra la dernière
dans là fédération ionienne. Celte fédération était plutôt reli-
gieuse que politique, comme TAmphictionie des Thermopyles.
Les douze villes d'ionie avaient un temple commun consacré à
Poséidon, le Paniooion, sur le promontoire de Mycale, mais
elles étaient tout à fait indépendantes les unes des autres et
sans lien politique.
Établissement des Boriens en Messénie et en La-
conie. — Pendant que des émigrés, venus principalement du
Péloponnèse, renouvelaient la population de la côte orientale
de TArchipel et en faisaient une Grèce asiatique, les États pé-
loponnésiens se constituaient de diverses manières, selon la
nature des rapports qui s^établissaient entre les anciens et les
nouveaux habitants. L'Arcadie, quoique traversée dans toute sa
longueur par la migration dorienne, avait gardé sa population
primitive. On disait qu'un des chefs hèracléîdcs, Cresphontès,
avait reçu en mariage Méropè, fille du roi arcadien Kypsélos.
Cresphontès, s'étant établi à Slényclèros, dans le pays qui fut
depuis la Messénie, voulait traiter avec égalité les anciens et les
nouveaux habitants. Les Doriens mécontents le mirent à mort
et prirent pour chef un autre Hèracléide nommé Polyphontès,
qui épousa sa veuve malgré elle. Mais, peu de temps après,
Aipytos, fils de Cresphontès et de Méropè, qui s'était réfugié en
Arcadie chez son aïeul maternel, fut remis en possession du
Irône. Cette légende, d'où Voltaire a tiré sa tragédie de Méropè
aurait été imaginée, selon E. Curtius, pour rattachera Héraclès
dbyGoogk
COLOMES DORIENNES. 201
la ramille des Aipytides, qui serait en réalité d'origine arca-
dienne. Ce qui paraît certain, c'est qu'il y eut en Messénie une
fusion entre les Doriens et l'ancienne population.
En Laconie, la conquête ne fut accomplie que peu à peu,
après une suite de luttes dont on ne connaît pas les détails.
D'après Ephore, les deux premiers rois héracléides de Sparte,
Eurysthènes et Proclès, avaient essayé, comme Cresphontès en
Messénie, d'attribuer aux anciens habitants du pays les mêmes
droits qu'aux Doriens ; mais Agis, fils d'Eurysthènes, soumit
toute laLaconie à l'exception d'Amyclai ; les habitants furent ré-
duits à la condition de sujets, et ceux de la ville d'Hélos s'étant
révoltés, en furent punis par la servitude. Selon Pausanias, Amy-
clai resta au pouvoir des Achaiens environ trois siècles après
l'invasion dorienne et ne fut conquise que par le roi Téléclos,
une génération avant les Olympiades. L'asservissement des
Hilotes n'eut lieu que sous le règne de son fils Alcaménès.
Colonies doriennes. Théra. Mélos. La Crète. — Avec
les bandes doriennes qui s'étaient établies en Laconie, il y
avait des Gadméiens chassés par les Boiotes. Les rois Eury-
sthènes et Proclès étaient alliés par leur mère à ces familles
cadméiennes. A peu près dans le même temps, des Minyens
chassés de Lemnos par les Pélasgcs vinrent en Laconie et allu-
mèrent leurs feux sur le Tèygétès. Gomme ils se disaient issus
des Argonautes, ils furent admis dans les tribus en mémoire
des Tyndarides, et ils épousèrent des filles Spartiates. Mais
bientôt, comme ils devenaient exigeants et voulaient être asso-
ciés à la royauté, on résolut de les faire mourir. Alors, selon
une légende racontée par Hérodote, leurs femmes, ayant ob-
tenu la permission d'aller les voir dans leur prison, changè-
rent d'habits avec eux. Us sortirent sous ce déguisement et
retournèrent sur le mont Tèygétès. Vers ce temps, le Cad-
méien Théras, oncle maternel des deux rois et qui avait été
leur tuteur, ennuyé de rentrer dans une condition privée, se
préparait à fonder une colonie. Il s'embarqua avec une partie
des Minyens, tandis que d'autres, en plus grand nombre, oc-
cupèrent la Triphylie, entre la Messénie et l'Elis. Ceux qui ac-
compagnèrent Théras, et avec eux des Lakédaimoniens tirés
des tribus, allèrent dans l'île Callistè habitée par les Phéni-
dbyGoogk
COLOiNIES DORIENNES.
juant sa parenté avec la race de Cadmos,
, et l'île prit de lui le nom de Théra. C'est
aconte la fondation de la première colonie
trouve dans Conon une autre forme de la
t que les fugitifs de Lemnos et d'imbros fu-
ai par le Spartiate Philonomos, qui avait
IX Doriens, et que plus tard, leurs fils, à la
1, furent envoyés en Crète avec des colons
enduite de Polis et de Delphos; une partie
'ôta dans File de Mèlos, le reste arriva en
ms obstacle à Gortyne. La ville Cretoise de
iment pour une colonie de Sparte.
L Crète, à Rhodes et à Cos. La Doris. —
iposée de Doriens auxquels, dit Conon, s*é-
les Pélasges, partit d'Argos sous la conduite
it-fils de Ténjénos, qui ne pouvait s'accor-
Les Ioniens qui allaient s'embarquer pour
, et d'autre part les émigrants de Sparte
et Delphos, engageaient Althaiménès à se
s un oracle lui avait ordonné de se rendre
ni serait donnée par Zeus et le Soleil. Rho-
)leil, qui l'avait donnée à ses enfants lors-
mer ; la Crète était le berceau de Zeus :
igea vers Rhodes et laissa en Crète une
gagnons qui s'établirent probablement dans
de de l'île. Rhodes avait appartenu succès-
ce autochthone, puis aux Phéniciens, en-
Selon une légende du pays, l'Hèracléide
fondé avant la guerre de Troie, les villes
et Cameiros. Une colonie dorienne partie
session de l'île de Cos et y porta le culte
e, sur la côte carienne, s'élevèrent les villes
e Cnide fondées, l'une par des émigrants de
r des émigrants de Laconic. Ces six villes,
à cinq par l'exclusion d'Halicarnasse, for-
tion religieuse analogue à celle des Ioniens,
ommun consacré à Apollon Triopien, et la
Ire l'Ionie et la Lykie prit le nom de Doris.
dbyGoogk
f^
dbyGoogk
204 CUHONOLOGIE MYTHIQUE.
Cependant les Doriens dépassèrent ces limites et s'établirent
assez avant dans les terres, puisque les villes de Selgè et de
Sagalassos en Pisidie passaient pour des colonies lakédaimo-
niennes. Quanl aux villes grecques disséminées sur la côte
méridionale de TAsie mineure et dans l'île de Kypros, toutes
les branches de la race hellénique contribuèrent à leur fonda-
tion. Quelques-unes faisaient remonter leur origine à l'époque
mythologique.
Chronologie mythique. — On ne peut fixer la date des
migrations et des colonies d'où est sortie la Grèce historique,
car il n'y a pas de chronologie certaine avant l'ère des Olym-
piades en 776. Mais les Grecs essayèrent de remonter plus haut
et de mettre en ordre les traditions qu'ils trouvaient au seuil
de leur histoire. « C'est dans la soixantième année après la
prise dllios, dit Thucydide, que les Boiotes chassés d'Arnè par
les Thessaliens s'établirent dans le pays appelé Boiolie et qu'on
nommait auparavant la Cadméis. 11 s'y trouvait dès long-
temps une portion de ce peuple, et elle avait envoyé des trou-
pes devant Uios. Ce fut dans la quatre-vingtième année après
la prise de celte ville que les Doriens occupèrent le Pélopon-
nèse avec les Hèracléides ». Suivant l'auteur d'une Vie d'Ho-
mère faussement attribuée à Hérodote, les villes de l'île de
Lesbos furent fondées cent trente ans après la guerre de Troie,
Kymè vingt ans après les villes lesbiennes, Smyrne dix-huit
ans plus tard par les Kymaiens, et l'auteur ajoute qu'Homère
naquit à cette époque.
La guerre de Troie, considérée comme un événement réel,
formait l'anneau rattachant la période historique à la période
légendaire; mais les Grecs n'avaient, pour en fixer la date, que
des listes généalogiques ne donnant pas toutes les mômes ré-
sultats. 11 y avait deux manières de compter, l'une à Sparte,
l'autre à Athènes. D'après le système attique,, suivi par la
Chronique de Paros, la prise de Troie répond à 1209 avant
J.-C. D'après le système adopté parla Chronologie Alexandrine
elle tombe en 1184. L'écart est encore plus considérable entre
la chronologie d'Hérodote et celle de CaUimaqne. On reportail
au delà de la guerre de Troie les plus vieilles tradition poéti-
ques, les deux guerres de Thèbes, l'expédition des Argonautes
dbyGoogk
LES POÈMES HOMÉRIQUES. 205
etparle compte des générations on atteignait le milieu du trei-
zième siècle avant notre ère. EnÛn, plus loin encore, on pla-
çait les colonies orientales. Voici les dates qu'on admet le plus
généralement, d'après les calculs d'Ëratoslhène :
Phoroneos, fils d*Ioachos 1 753
Danaos et Pélasgos 1469
Deucalion, pèred'Hellen 1433
Erectheus, premier roi d'Athènes;
Dardanos, père des Troyens . . 1 883
Cadmos, Toodateor de Thèbes ... 1813
Pélops 1283
Espédittoo des Argonautes 1 225
Première guerre de Thèbes.... 1213
Mort d'Hyllos 1 203
Seconde guerre de Thèbes U98
Expédition contre Troie 1192
Prise de Troie 1 183
Invasion des Thessaliens et des
Boiotei, migration de Pen-
thilos 1124
Retour des Hèracléides 1 104
Alétès à Corinthe 1 075
Migration de Tbéras 1074
Les Aioliens à Lesbos 1053
MortdeCodros 1045
Migration ionienne 1U44
Fondation de Kymè 1033
Fondation de Smyrne 1015
Olympiade d'iphitos. Lycurgne.. 884
Olympiade de Coroibos 776
Les poèmes homériques. — L'intervalle entre la fonda-
tion des colonies ioniennes et la première Olympiade est ab-
solument vide d'événements ; mais il est rempli par la plus
belle des créations de la poésie, l'épopée homérique. C'est
une œuvre collective, comme la plupart des grandes œuvres.
Le nom d'Homère représente la pensée d'une époque. A ce
nom se rattache la civilisation de la Grèce, c'est-à-dire du
monde, puisqu'il n'y a de civilisation véritable que là où le
souffle de la Grèce a passé. De nombreuses et savantes disser-
tations ont été faites sur la composition des poèmes homéri-
ques. On les a comparés aux épopées des autres peuples, et
on a reconnu qu'ils se rapprochaient bien plus d'une collection
de chants populaires que d'une conception individuelle. La
critique contemporaine admet en général les conclusions de
Wolf et regarde Homère comme la personnification d'une
grande école poétique, les Hotnèrides. C'étuit une confrérie de
chanteurs ambulants, se rattachant à un éponyme ou ancêtre
mythique, lui rendant un culte et lui attribuant les ouvrages
particuliers des membres de la corporation. On les appelait
rhapsodes, des mots pxirTetv ^^â;, parce qu'ils cousaient des
chants les uns aux autres, soit les leurs, soit ceux qu'ils
avaient reçus par tradition . Les mots Homère, Homèrides,
signifient aussi des rassembleurs de chants. Hésiode dit des
L. M. — HiST. DES Grecs. 12
dbyGoOgk
POÈMES HOMÉRIQUES.
formant un concert de voix. Pindare ap-
ics chanteurs de vers cousus. Le mot ana-
Mt est Samdsa, qui désigne chez les Hin-
de chants épiques. Les Homèrides ont
hios jusque dans Tépoque historique. Un
gle, parle ainsi de lui-môme à la fin de
« Salut' à vous tous, et souvenez- vous de
it quand un des hommes terrestres, un
enant ici vous demandera : Jeunes filles
our vous le plus agréable des chanteurs
I vous plaît le plus ? Alors répondez tout
il convient : C'est l'homme aveugle qui
hios ; ses chants sont à jamais les meil-
on possède sur Homère sont trop récents
confiance. On ne s'accorde ni sur Tépoque
ur sa pallie, et ces incertitudes n'ont rien
net qu'il y a eu plusieurs Homères. Outre
quelques hymnes ou préludes, on lui at-
lilé d'autres ouvrages perdus aujourd'hui,
lis et plusieurs des poèmes du Cycle. Les
ie ne reconnurent pour aulhenliques que
quelques-uns môme leur donnaient deux
.es rhapsodies dont se compose l'œuvre
îunies assez lard en deux grands poèmes :
emier, dit Cicéron, qui disposa les livres
}que là, dans l'ordre où nous les avons
he dit qu'Homère n'écrivit jamais ses poè-
3nservés par la mémoire des chanteurs et
e qui explique les dissonances qu'on y
ffirme également que les anciens chan-
Dmériques par fragments dont il nous a
II ajoute que Lycurgue apporta pour la
e en Grèce les poèmes d'Homère, et que
, de tous les friigments réunis, publia
Une scholie sur Piaule, Iraduiteà ce qu'il
mne les noms de plusieurs des personna-
avaiî,Onomacritc d'Alhènes, Zopyre d'Hè-
dbyGoogk
LES POÈMKS D'HÉSIODE.
raclée, Orpheus de Crotone. Qu'Homère soit le po
conçu la première idée de l'Iliade et de l'Odyssée ou
qui s'est approprié, en le développant, un sujet déjà p
il a dû, comme tous les rhapsodes, coudre ses prop
positions à des chants plus anciens ; ses successeurs, 1
rides, firent pour ses compositions ce qu'il avait faitpt
de ses devanciers, et lorsqu'enfin tous ces chants fure
Buste d'Hoaicie (musée du Louvre).
nomcre tenant un
manuscrit de l'I-
liade (monnaie
de Chios).
Tètj d'Homèie; au revers le flouvc Méics,
près duquel Ilomère était né.
(Monnaie d'Amastris, qui était probablement
une colonie de Smyrne.)
et fixés par récriture, il n'était plus possible de dislin
œuvre de ce qui avait été emprunté par lui ou ajouté i
Les poèmes d'Hésiode. — Les traditions sur H(
sont pas beaucoup plus certaines que celles sur Home
poèmes nous sont parvenus sous le nom d'Hésiode,
vaux et jours, la Théogonie et le Bouclier d'Hèraclè
quité possédait d'autres poèmes qui lui étaient i
dbyGoogk
208 LES POÈMES D'HÉSIODE.
comme les Catalogues ou grandes Eoiées, dont cinquante-cinq
vers ont été transportés au début du Bouclier d'Héraclès; la
Mélampodie, la Descente de Thèseus chez Aïdès, les Institu-
tions de Chiron, l'Astronomie, TAigimios ; mais les Boiotes de
l'Hélicon n'attribuaient à leur compatriote que les Travaux et
jours, dont ils retranchaient même Tinvocation aux Muses pla-
cée au début. Ils en montraient, du temps de Pausanias, un
exemplaire très ancien, gravé sur des lames de plomb. La plu-
part des auteurs grecs ont regardé la Théogonie comme authen-
tique et le Bouclier comme apocryphe. La différence de carac-
tère des trois poèmes hésiodiques que nous possédons peut
faire douter qu'ils soient du môme auteur. La Théogonie est un
poème mythologique, les Travaux et jours sont un poème didac-
tique et moral, le Bouclier se rattache aux épopées héroïques.
Quant au dialecte d'Hésiode, il est le môme que celui d'Homère ;
plusieurs vers se trouvent à la fois dans Homère et dans Hé-
siode; ainsi, vers le commencement de la Théogonie, il y a
quatre vers qui sont répétés dans l'hymne homérique aux
Muses. Dans quelques morceaux, comme les combats de Zeus
contre les Titans et contre Typhôeus, que j'ai cités plus haut,
Hésiode s'élève à la môme hauteur poétique qu'Homère.
Les noms de ces deux poètes furent souvent opposés dans
les légendes qui circulèrent plus tard en Grèce. On disait qu'ils
avaient chanté tour à tour dans des jeux funèbres, Homère une
bataille de l'Iliade, Hésiode des préceptes d'agriculture, et que
les juges de ce tournoi poétique, malgré l'avis du peuple qui
acclamait Homère, avaient donné le prix à Hésiode parce que
ses vers étaient plus utiles aux hommes. Dans l'aristocralie
militaire de Sparte, on disait qu'Homère était le poète des
héros, Hésiode celui des Hilotes. Les épopées d'Homère sont la
la plus éclatante manifestation du génie poétique de la Grèce,
et en môme temps la forme première de son histoire; les
poèmes d'Hésiode sont le point de départ de la philosophie et
de la science. Cela seul suffirait pour déterminer lâge relatif
des deux poètes ou, pour parler plus exactement, des œuvres
qui portent leurs noms. Ces noms représentent deux écoles de
poésie, dont la seconde semble plutôt réagir contre la première
que la continuer; la Théogonie paraît une réaction philosophi-
dbyGoogk
r
LA TDÉOGONIE. 209
que contre l'anthropomorphisme d'Homère, les Travaux et
jours une réaction des tendances agricoles et pacifiques contre
l'esprit militaire et le goût des aventures lointaines.
La Théogonie. — On peut rapprocher la Théogonie d'Hé-
siode de l'Introduction au Code de Manou et du prem
pitre de la Genèse. C'est une exposition méthodique
gine des choses, mais il n'y a pas de création ni (
première ; tout effet a une double cause, un père et ut
et le monde résulte d'une suite de générations prog
Au début, Hésiode place trois principes, Chaos, Gai
c'est-à-dire le Vide ou l'Espace; la Terre (nous dirions
d'hui la matière ou la substance), et le Désir ou l'Att
« 11 y eut d'abord le Vide, et ensuite la Terre à la poitrii
siège toujours sûr des Immortels, qui occupent les c
l'Olympe neigeux et les Tartares ténébreux, au fond di
larges routes, puis le Désir, qui l'emporte sur tous les
tels, le Désir énervant, qui, dans le sein de tous les
de tous les hommes, dompte la pensée et la volonté réf
De l'union de la Terre et du Ciel naissent les Titans, c
primordiales, qui sont les qualités génératrices, car 1
n'existent que par les différences qui les distinguent
des autres et permettent de les nommer. Les maris
Titans produisent une génération nouvelle, plus finie
sens grec du mot, c'est-à-dire plus parfaite. Nés de d<
pies jumeaux de la famille des Titans, les Dieux et les 1
ont la même origine. Déjà dans Homère les Titans
ancêtres des hommes et des Dieux. Le triomphe des E
les Titans, des Lois modératrices sur les Forces ave
déréglées, établit TharmoDie du monde parle balancei
mouvements célestes.
La Théogonie d'Hésiode forme une transition entre h
logie spontanée d'Homère et les fragments philosophi
nous restent d^Empédocle, d'Acousilaos et de Parméni
une œuvre individuelle, et le rôle attribué à Eros en est h
Eros, le Désir, n'est pas personnifié dans Homère, qui le
deux ou trois fois comme un sentiment humain, et noi
un Dieu. Mais Eros était la divinité locale de Thespj
voisine d'Ascra où habitait Hésiode. Voulant rattache
12
dbyGoogk
ONIE.
raie où il n'avait pas de place
pes du monde. Parmi les ma-
quelques-uns sonl peut-être
•mériques, mais il réunit ces
le sorte de ciment métaphy-
mie appartient à une époque
philosophie,
î Pandora, dont Homère ne
Erus. (Statue du Tatican. Il y en a
UD eiemplaire plus complet au
musée de Naples.)
ir Hésiode, dans la Théogonie
îs deux récits sont différents
complètent et s'éclairent l'un
ogique de la naissance de la
erle du feu, qui est la source
nètheus a ravi le feu du ciel
13 charge Hèphaistos de fabri-
itrempée. Pandora représente
•ée. Sans l'industrie, l'homme
I animaux^ mais la femme est
dbyGoogk
n
LA THÉOGONIE.
un produit artiGciel de la civilisation. Charmante et dang(
par6e de tous les dons des Dieux, la séductrice éternelle i
Nômési^.
Eros.
Elpis.
L'Ame, sous la form'i d'un papillon, est brûlée par le Désir, entre la Crs
l'Espérance (bas-relief du rase Ch gi).
Eros. Psyclic-Nikè.
Hermès.
L'Ame viclorieuse du Désir lui emprunte ses ailes pour voler vers l'Idéal
a rhomme la nécessité du travail, « parce qu'elle aime
et déteste la dure pauvreté ». Sa curiosité ouvre la fatî
phore d'où s'échappent tous les maux de la vie policée.
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214 PROMÈTllEUS ET PANDOUA.
nus aux peuples sauvages, et il n'y a pas de remèdes, l'espé- '"^
rance est restée au fond de Tamphore. C'est ainsi que Zeus
envoie aux hommes un mal pour un bien, car la naissance de
Pandora est une punition de la conquête du feu. La raison de
cette punition et du supplice de Promètheus, c'est que l'indus-
trie est une lutte contre les puissances cosmiques, et il n'y a pas
pour l'homme de lutte sans douleur. 11 doit conquérir par le
travail la nourriture que la terre fournit gratuitement aux
autres êtres, car les Dieux ont caché les sources de la vie de-
puis que Promètheus a dérobé le feu du ciel. Quand le senti-
ment mystique prévalut dans la religion, la fable de Promè-
theus devint une allégorie de la descente et de l'ascension des
âmes; aussi est-elle souvent représentée sur les sarcophages.
L'homme est une étincelle du feu céleste captive dans une
lampe d'argile, un Dieu exilé du ciel, cloué sur le Caucase de
la vie, dévoré de soucis toujours renaissants. Mais Héraclès,
symbole des vertus héroïques, brise les chaînes de Promètheus
et le délivre du bec et des griffes du vautour.
J'ai rapproché dans un autre ouvrage (i) la fable hésiodique
de Promètheus et de Pandora de la fable juive d'Adam et d'Eve.
On ne saurait dire laquelle des deux est la plus ancienne : dans
l'une comme dans l'autre, à côté de traits d'un caractère très
primitif, il y en a qui semblent appartenir à une époque de
réflexion philosophique. Quoique la pensée du symbole soit la
même, la forme est très différente, et un emprunt, d'un côté ou
de l'autre, est inadmissible. Pour les Grecs, le commencement
de la civilisation, c'est l'emploi du feu et le travail de l'argile
plastique; pour les Juifs c'est le labourage et l'industrie du
vêtement. Dès que l'homme et la femme ont mangé du fruit
défendu, ils s'aperçoivent de leur nudité et sont saisis de crainte,
car cette nudité est une faiblesse et un danger; peut-être est-ce
aussi une laideur, car la pudeur est une forme de la honte. Le
vêtement est pour l'homme une défense; pour la femme un
voile. Cela est bien loin des Grecs qui, dans leurs sculptures,
donnent aux Dieux et aux Héros la nudité des gymnases. Le
héros ne craint aucun ennemi et n'a pas besoin de se couvrir :
(1) Histoire des Israélites d'après l'exégèse biblique.
dbyGoOgk
LliS TRAVAUX ET JOURS
il laisse le vôtement aux femmes qui en font i
dire une amorce : le sentiment de l'art s(
comme chez les sauvages par le goût de la
ni étude ni effort.
Les travaux et jours. — Le poème de
tout en gardant le rhythme de l'épopée,
poésie sentencieuse et morale de Théognis c
est le précurseur des philosophes. Sa moi
rente de celle d'Homère, mais elle lacompU
autrement. Dans les sociétés comme dam
instincts apparaissent d'abord, puis les sen
idées. Le premier effort de la morale cons
miner les sentiments sur les instincts égc
soumettre les sentiments à la raison. De ce
vie morale, la poésie homérique représeï
poésie hésiodique répond à la seconde. I
vertus de famille, il oppose à l'adultère l
exalte l'amitié, le respect des suppliants et
gion du serment, et surtout le courage, cet
l'énergie humaine contre l'instinct inné (
Ces vertus sociales, ce n'est pas par des |
les enseigne, il nous les montre. Sa mora
exemples et des contrastes, car l'enfance c
celle des individus, conçoit les idées sous i
Hésiode s'attache de préférence aux ve
l'amour du travail, la prudence, la temp
justice. La nécessité du travail est établie
mythologiques, auxquelles Homère ne fait
fable de Promètheus et de Pandora et cel
des races d'or, d'argent, d'airain et de fer.
tout dans Ovide, cette succession est repr
marche régulière de l'humanité vers la"(
système d'évolution ne peut être attribué
la race d'airain et la race de fer il place u
meilleure, la race sacrée des Héros demi
qu'il a fondu en une seule deux traditions (
qu'en rapportant cette fable et la doctrine
s'y rattache, il n'a d'autre but que de me
dbyGoogk
dbyGoogk
LES CITÉS MILITAIRES. 217
CHAPITRE VlU
LES CITÉS MILITAIRES.
Autonomie de la Cité. Aristocratie et démocratie. — Distinction des
classes attribuée à Minos. — L'esclavage domestique et la servitude de
la glèbe. — État àa la population en Thessalie, en Laconie et en
Crète. — Éducation militaire et institutions politiques des Cretois.
Sparte, type do la cité militaire. — Lycurgue. Constitution politique de
Sparte. — Légende du partage des terres. — Tendances communistes:
les repas publics. — Éducation, discipline, tactique militaire.
Soumission de la Laconie ; les Hilotes. — Luttes contre les Argeiens ;
Pheidon et le monnayage. — Luttes contre les Arcadiens. — Première
guerre de Messénie. Fondation de Tarente. — Seconde guerre de
Mcssénie ; Aristoménès ; Tyrtée, — Soumission de la Messénie. Suze-
raineté de Sparte sur le Péloponnèse.
Autonomie de la Cité. Aristocratie et démocratie. —
L'établissement de la Cité représentait aux yeux des Grecs le
passage de l'état nomade et barbare à la vie politique et civi-
lisée. La Cité, ffoXi;, ce n'est pas seulement la ville, c'est le
corps politique, l'ensemble des citadins, ou citoyens, associés
pour la défense commune et l'exercice de leurs droits, tandis
que les ruraux vivent dispersés dans les champs sans former
un groupe politique. L'indépendance de la Cité est le caractère
fondamental de la société grecque. Il n'y a rien d'analogue
dans l'histoire : les communes du moyen âge relevaient tou-
jours du roi, du pape ou de l'empereur. En Grèce, personne
n'aurait pu admettre une autorité politique ou religieuse en
dehors et au-dessus des citoyens. Toutes les institutions des
législateurs, toutes les théories sociales des philosophes sont
dirigées vers un but unique, l'autonomie de la Cité. Indépen-
dantes de tout pouvoir extérieur, les Cités étaient en môme
temps indépendantes les unes des autres : « C'est une idée très
fausse, dit Heeren, que de s'imaginer qu'il y eût autant d'Étals
que de contrées. 11 est vrai qu'il y en a quelques-unes, comme
L. M. — HisT. DES Grecs. 13
dbyGoogk
248 AUTONOMIE DE LA. CITE.
TAttlque, la Mégaris, la Laconie, qui peuvent être considérées
chacune comme un État à part, parce que chacune déciles
formait le territoire d'une seule ville; d'autres au contraire,
telles que FArcadie, la Boiotie, etc., ne formaient pas chacune
un Ijtat ; elles renfermaient autant d'États isolés qu'elles avaient
de villes avec un territoire particulier. Cependant il subsistait
toujours entre elles un lien naturel de parenté, etles Arcadiens,
les Boiotes, etc., parlaient d'eux-mêmes comme d'un seul
peuple. Il existait des alliances volontaires entre plusieurs
villes ou même entre toutes les villes d'une môme contrée, par
exemple dans l'Achaïe, où toutes ensemble formaient une
fédération, chaque ville conservant néanmoins sa constitution
intérieure. Il arrivait quelquefois qu'une ville, à raison de sa
puissance prépondérante, s'arrogeait sur les autres une espèce
de suprématie, comme Thèbes, par exemple, sur les villes de
la Boiotie ; mais cette domination était toujours précaire et dé-
pendante des circonstances. »
Chaque Cité avait sa constitution, mais toutes ces constitu-
tions se ramènent à deux formes, l'aristocratie et la démo-
cratie. Sparte et Athènes, les deux villes sur lesquelles nous
avons le plus de renseignements et qui ont joué le rôle le plus
important dans l'histoire grecque, offrent les types les plus
complets, l'une de l'aristocratie, l'autre de la démocratie. On a
pris l'habitude, môaaa_chez nous, depuis Ottfried Millier,
d'expliquer l'histoire politique par des différences de races ;
comme les Spartiates étaient de race dorienne, et les Athéniens
de race ionienne, on oppose le génie aristocratique des
Doriens au génie démocratique des Ioniens. Rien de plus ar-
bitraire que cette antithèse ethnographique : il y a eu des
aristocraties ioniennes à Marseille et à Chalkis, des démocraties
doriennes à Tarente et à Syracuse. La plupart des Cités
grecques ont été tour à tour aristocratiques et démocratiques.
De ces deux formes sociales, c'est l'aristocratie qui s'est pro-
duite la première, parce qu'il est plus facile d'établir l'ordre
par l'autorité et la hiérarchie que par la liberté et l'égalité.
Distinction des classes attribuées à Mines. — L'esprit
mythologique de la Grèce résume toujours par quelques nonms
propres les grandes œuvres collectives de fondations de villes
dbyGoogk
ESCLAVAGE DOMESTIQUE ET SERVITUDE DE LA GLÈBE. 219
et de législations. Des trois principaux législateurs de l'anti-
quité, Minos en Crète, Lycurgue à Sparte, Solon à Athènes, le
dernier seul appartient réellement à Thistoire ; Lycurgue est
sur les confins de l'histoire et de la légende et Minos est un
personnage fabuleux. Par son nom, Minos rappelle à la fois
Menés, fondateur de la monarchie égyptienne, et Manou,
ancêtre et législateur des Aryas de l'Inde. Par sa généalogie,
il se rattache aux Phéniciens ; sa mère Europe est fille de
Phoinix. Homère parle de ses entretiens avec Zeus; c'est
pour cela probablement qu'il a passé pour le premier légis-
lateur. Aristole admet, comme tous les anciens, que la
législation des Cretois a été l'œuvre de Minos et a servi de
modèle à celle de Lycurgue, mais il croit que la division du
peuple en deux classes, celle des guerriers et celle des labou-
reurs, avait été empruntée aux Égyptiens. Comme Platon, il
trouve cette distinction excellente, « mais, dit-il, ce n'est pas
une nouveauté imaginée par les philosophes. Sésoslris l'établit
en Egypte, Minos en Crète, et elle se maintient encore dans ces
deux pays ». Lors môme qu'on admettrait cet emprunt, il
faudrait remarquer qu'en Egypte, il y avait, au-dessus de la
classe des guerriers, une classe sacerdotale qui n'a jamais
existé en Crète ni dans aucune autre partie de la Grèce.
Esclavage domestique et servitude de la glèbe. — La
première condition nécessaire à l'indépendance d'un État,
c'est une force militaire capable de le défendre. Dans l'âge
héroïque, « les villes aux fortes murailles » ont pour défen-
seurs des rois de race divine entourés d'une élite de braves
guerriers. Ces rois se font servir par des esclaves pris à la
guerre ou achetés à des pirates, mais ces captifs ne forment
pas une classe spéciale, aucune partie de la population n'est
réduite à la condition servile. Timée, cité par Athénée, affirme
qu'anciennement les Grecs vivaient sans esclaves : dans chaque
maison, les plus jeunes servaient les plus vieux. 11 ajoute que
chez les Phokiens et les Locriens, cet état dura jusqu'à l'époque
macédonienne. L'usage des serviteurs achetés à prix d'argent
s'étendit peu à peu, et inégalement, avec les progrès de la
richesse parle commerce et l'industrie. Mais cette servitude
individuelle, qui est la première forme de la domesticité, ne
dbyGoogk
220 DISTINCTION DES CLASSES EN THESSALIE,
doit pas être confondue avec la servitude de la glèbe qui, après
les invasions racontées au précédent chapitre, s'établit dans
quelques parties de la Grèce, comme elle s'établit plus tard
dans toute l'Europe féodale. Dès le début de la période histo-
rique, on trouve en Thessalie, en Crète et à Spartç une caste
militaire, analogue à la noblesse du moyen âge, possédant
seule des droits politiques et nourrie par une population de
serfs appelés, en Thessalie Pénestes, en Laconie Hilotes, en
Crète Clèrotes et Mnoïtes.
Ëtat de la population en Thessalie ; — en Ijaconie ; —
en Crète. — Les Pénestes de Thessalie étaient, selon Théo-
pompe, des Perrhaibes et des Magnètes réduits en servitude
par les conquérants Thesprotes, selon d'autres des Pélasges ;
d'après un fragment d'Arche macho s, c'étaient des Boiotes
Ârnéens dont l'asservissement avait été le résultat d'un con-
trat volontaire : « Ceux des Boiotes d'Arnè qui, par attache-
ment à la contrée où ils s'étaient établis, ne retournèrent pas
en Boiotie, se donnèrent comme serfs aux Thessaliens, à
condition qu'on ne pourrait ni les tuer ni les vendre. Ils
s'engagèrent de leur côté à cultiver les terres en payant un
tribut annuel. On les appela Ménestes (résidents), on les
nomme aujourd'hui Pénestes (pauvres); quelques-uns sont
plus riches que leurs maîtres. » Casaubon, dans ses notes sur
Athénée, compare leur condition à celle des gens de main-
morte dans la France monarchique. Les Pénestes accompa-
gnaient leurs maîtres à la guerre en qualité de servants
d'armes. Pendant la guerre de Péloponnèse, un noble thessa-
lien, Ménon de Pharsale, prêta trois cents cavaliers Pénestes
aux Athéniens contre Amphipolis.
En Laconie, la population composée anciennement de Lé-
lèges, devint achaienne sous les Pélopides, dorienne sous les
Hèracléides. Il ne s'ensuit pas qu'elle fut entièrement renou-
velée, mais les éléments anciens et nouveaux s'y mêlèrent de
telle sorte que la distinction des classes ne répondit pas à une
différence de races aussi exactement qu'en Thessalie où les
Magnètes et les Perrhaibes, quoique sujets des Thessaliens,
continuèrent à exister comme peuples distincts représentés
au conseil amphiclionique. L'assertion d'Ottfried Muller, que
dbyGoogk
J
EN LACONIE ET EN CRÈTE. 221
les races étaient strictement distinguées en Laconie, et que
les Périœkes, ou ruraux, furent toujours considérés comme
Achaiens, est combattue par Grote qui soutient, sur d'assez
fortes preuves, que toutes les distinctions de races avaient
disparu avant les temps historiques. Quand les Hèracléides
s'établirent dans la vallée de TEurotas, leurs auxiliaires, qui
n'étaient pas tous Doriens, campèrent sur les terres des Pélo-
pides et des Achaiens émigrés, à très peu de distance d'Amy-
clai, ancienne résidence de Tyndareus et de Ménélaos. Sui-
vant Éphore, qui admet la légende d'une conquête rapide,
0 Eurysthénès et Proclès divisèrent la Laconie en six lots,
donnèrent l'un, avec Amyclai pour chef-lieu, à Philonomos
qui leur avait livré le pays, puis choisirent Sparte pour leur
résidence et envoyèrent des lieutenants régner dans les autres
villes, leur permettant, vu l'état de dépopulation du pays, d'y
accueillir les étrangers qui voudraient s'y établir. » Il y a de
fortes raisons de croire que la conquête fut lente et succes-
sive. Les anciens habitants restèrent longtemps en posses-
sion du territoire; mais peu à peu, les Doriens, d'abord con-
centrés dans leur campement de Sparte, s'établirent à côté
d'eux ou à leur place. Quant aux Hilotes, on ne sait s'ils
étaient Achaiens ou Lélèges, mais les Messèniens, qui gros-
sirent plus tard le nombre des Hilotes, étaient de race do-
rienne. Cette race entrait donc comme élément, quoique
sans doute en proportions inégales, dans toutes les parties de
la population.
U y avait en Crète, comme en Thessalie et en Laconie, une
classe militaire possédant seule des droits pplitiques, et une
classe de serfs attachés à la culture du sol. Mais c'est seule-
ment par analogie qu'on attribue à la conquête dorienne celte
division que les Cretois eux-mêmes rapportaient à Minos.
Dans rOdyssée, Homère énumère les races qui habitent la
Crète, et à côté des Éléocrètes, ou vrais Cretois, il nomme les
Kydoniens, les Doriens et les illustres Pélasges, sans attribuer
à une de ces races une suprématie sur les autres. Il est pos-
sible que les colons venus de Sparte et d'Argos en Crète
après le retour des Hèracléides aient constitué une noblesse
militaire en soumettant l'ancienne population, mais aucun
dbyGoogk
222 LA POPULATION EN CRÈTE.
témoignage ne permet de Taffirmer, et rien ne prouve que la
hiérarchie des classes fût fondée sur une différence de races.
Cette hiérarchie, quelle qu'en fût l'origine, est crûment ex-
posée dans une chanson Cretoise, le scolion d'Hybrias : « J'ai
pour richesse ma grande lance et mon glaive et mon beau
bouclier, rempart de ma chair. C'est avec cela que je laboure,
que je moissonne, que j'exprime le doux jus de la vigne et
que je suis appelé le maître de la \fnoia. Et ceux qui n'osent
pas porter la lance et le beau bouclier, tous, à genoux devant
moi, m'honorent comme un maître et m'appellent le grand
roi. » La Mnoia était le domaine de l'État, cultivé par les
Mnoïtes, ou esclaves publics, pour l'entretien de l'armée. Les
serfs employés sur les terres des particuliers s'appelaient
Aphamiotes, mot dont la signification est douteuse, ou Clë-
poles, parce que les prisonniers de guerre étaient tirés au sort.
Il y avait en outre dans les villes Cretoises des domestiques
achetés à prix d'argent.
Thirlwall admet que les Périœkes, ou ruraux, formaient, en
Crète comme en Laconie, une classe de sujets dont les terres
étaient soumises à un tribut, mais dont les personnes étaient
libres. Il faut remarquer, cependant, qu'Aristote emploie tou-
jours le mot d'esclaves en parlant des paysans crétois. Grole
en conclut qu'il n'y avait pas en Crète comme en Laconie une
classe intermédiaire entre les citoyens et les serfs ; selon lui,
les Périœkes crétois sont les Clèrotes et les Mnoïtes, et répon-
dent, non pas aux Périœkes laconiens, mais aux Hilotes, si ce
n'est qu'ils étaient mieux traités. Il paraît qu'en effet leur
condition n'était pas mauvaise, car ils ne tentèrent jamais
d'insurrection, comme le firent souvent les Pénestes de Thes-
salie et les Hilotes de Sparte. Selon Aristote, les Crétois accor-
daient à leur serfs la jouissance de tous les autres droits et
leur interdisaient seulement la gymnastique et le port d'armes.
« Les Périœkes, dit-il, dans un autre passage, paient leurs
redevances en grains, bestiaux et argent. Une partie de ces
redevances sert au culte des Dieux et aux charges com-
munes, l'autre est employée aux dépenses des repas publics,
de manière qu'hommes, femmes et enfants, tous sont nourris
aux frais de l'État. »
dbyGoogk
ÉDUCATION MILITAIRE DES CRETOIS. 223
Éducation militaire et institutions politiques des
Cretois. — Les citoyens, c'est-à-dire les citadins, les habitants
des villes, débarrassés du souci de leur subsistance et de celle
de leur famille, s'exerçaient au maniement des armes et com-
posaient la force armée, la garde civique. De tout temps la
Crète fut renommée pour ses archers comme la Thessalie pour
ses cavaliers. Ephore, cité p*ar Strabon, nous donne des détails
sur Téducation toute militaire des Cretois, qui ressemblait
beaucoup à celle des Spartiates. Les enfants étaient de bonne
heure accoutumés aux exercices du gymnase, au tir de l'arc, à
la danse armée qu'on nommait pyrrhique ou Cretoise ; ils ap-
prenaient par cœur des chants nationaux. Le môme vêtement
leur servait pour l'été et pour l'hiver. Ils accompagnaient leurs
pères dans les réfectoires destinés aux repas communs, et les
plus jeunes faisaient le service des tables. A dix-huit ans, ils
étaient soumis à une discipline plus sévère ; ils formaient des
troupes qui, à des jours fixés, se livraient bataille au son des
flûtes et des lyres, non seulement à coups de poing, mais
avec des armes. Ils devaient se marier à l'âge fixé par la loi,
mais la femme ne suivait son mari que lorsqu'elle était en état
de diriger la maison. Aristote parle d'une loi de divorce et de
mesures pour arrêter Taccroissement de la population. L'in-
gérence de l'État dans les relations privées semble tyrannique,
mais les citoyens étant des soldats devaient être soumis à la
discipline d'une garnison. D'après Éphore, les Cretois avaient
élevé à la hauteur d'une institution ces amitiés passionnées,
inconnues d'Homère, glorifiées par Platon, et qui suffiraient
pour justifier les anathèmes des Pères de l'Eglise contre la ci-
vilisation grecque. Ennius accuse les gymnases : il faut sur-
tout accuser ce militarisme à outrance qui faisait de chaque
cité une caserne. La réputation des Cretois sous le rapport
moral était très mauvaise ; ils passaient pour menteurs et
avides de gain. Ils auraient pu s'enrichir par le commerce en
profitant de l'admirable situation de leur île. Selon Thucydide,
la Crète avait été, sous le règne de Minos, le siège d'un empire
maritime qui s'étendait sur les îles de la mer Egée ; mais du
temps d'Ephore, les Cretois n'avaient plus de marine. Comme
on ne leur apprenait que le métier des armes, ils prirent de
dbyGoogk
224 INSTITUTIONS POLITIQUES DE LA CRÈTE,
bonne heure l'habitude de s^engager comme mercenaires. A
Tépoque macédonienne, il y eut dans toutes les armées des
archers crétois.
Llnsignifiance de la Crète dans les temps historiques est
encore plus extraordinaire, dit Thirlwall, que Téclat passager
qu'elle avait jeté dans les temps héroïques. D'après le Cata-
logue de l'Iliade, la Crète aux cent villes avait envoyé au siège
de Troie quatre-vingt vaisseaux commandés par Idomèneus,
fils de Deucalion et petit-fils de Minos; mais Homère place à
côté d'Idomèneus, et presque sur le même rang, son com-
pagnon Mèrionès, qui, d'après Diodore, était son cousin. La
Crète semble n'avoir jamais eu d'unité politique, si ce n'est
peut-être à l'époque de Minos. On ne sait pas quand la royauté
y fut abolie, mais pendant toute la période historique on voit
chaque ville Cretoise gouvernée par dix magistrats appelés
Cosmes, c'est-à-dire ordonnateurs. Ils étaient élus pour un an
par tous les citadins, mais, d'après Aristote, l'éligibilité était le
privilège de certaines familles. Ils étaient assistés par un sénat
ou conseil de trente membres élus à vie parmi les Cosmes
sortis de charge. Il y avait des assemblées générales où tous
les citadins avaient droit de suffrage, mais sans initiative; ces
assemblées se bornaient à ratifier les résolutions combinées
des Cosmes et du sénat. Il n'existait aucun lien fédéral entre
les villes Cretoises, Cnossos, Gortyne^ Kydonia, Lyctos, qui
étaient à peu près de même importance et guerroyaient sou-
vent les unes contre les autres.
Sparte, type de la cité militaire. — L'unité politique
qui manqua toujours à la Crète fut la principale cause de la
puissance de Sparte. La monarchie, qui est la forme naturelle
de l'unité, répugnait à l'esprit d'indépendance des Grecs; les
Spartiates conservèrent la royauté des temps héroïques, mais
en la divisant. Ce n'était pas une monarchie, mais une diarchie
héréditaire dans deux familles hèràcléides que la tradition rat-
tachait aux frères jumeaux Ulurysthénès et Proclès. La rivalité
qui exista toujours entre les deux familles royales écartait le
danger du^despotisme. Les rois de Sparte se nommaient Archa-
gètes; leur seul privilège sérieux était le commandement mili-
taire. Le prestige attaché à la descendance d'Héraclès empêcha
dbyGoogk
SPARTE, TYPE DE LA CITÉ MILITAIRE. 225
des dynasties rivales de s'élever dans les villes lakédaimo-
niennes autres que Sparte qui devint, comme résidence des
rois hèracléides, la capitale de la Laconie. Les Spartiates for-
maient une classe dirigeante. Si les ruraux avaient eu des
droits politiques, ils seraient devenus les maîtres par la supé-
riorité du nombre, comme on le voit par notre système de dé-
légation représentative, où le vote des villes est noyé dans
celui des campagnes. Les Spartiates considéraient tout le ter-
ritoire laconien comme la Périœkie ou banlieue de Sparte.
Dans cette banlieue, il y avait des villages, môme des villes,
mais Sparte était la Cité, ses habitants étaient les citadins ou
citoyens.
Sparte offre le type le plus complet d'une république mili-
taire. Pendant toute la période historique, elle resta ce qu'elle
avait été à l'époque de l'établissement des Doriens, le camp
d'une armée -d'occupation en pays étranger. Dans un pays oc-
cupé militairement, tous les droits politiques des habitants
sont supprimés. L'armée est entretenue par le territoire qu'elle
occupe et qu'elle protège ; si les habitants se tiennent en repos
ils peuvent cultiver leurs propriétés et exercer leurs indus-
tries; s'ils se soulèvent, ils aggravent leur condition. Tel fut
l'état de la Laconie pendant près de cinq siècles. Les habitants,
qu'on nommait dans leur ensemble Lacones ou Lakédaimo-
niens, formaient trois classes : les Spartiates, composant la
force armée, la noblesse militaire; les Périœkes, propriétaires
libres établis dans les villes, et les Hilotes, dispersés dans les
champs et les fermes, et cultivant, comme serfs, paysans et
fermiers, les terres des Spartiates, probablement aussi celles
des Périœkes. Cette situation se rattachait originairement à la
conquête, et c'est pour cela sans doute qu'Hellanicos attribue
la constitution Spartiate aux deux premiers rois hèracléides
Eurysthénès et Proclès. Mais tous les autres auteurs, d'après la
tradition des Spartiates eux-mêmes, ont rattaché cette consti-
tution au nom de Lycurgue. D'après Hérodote, Sparte avait été
jusqu'à Lycurgue l'État le plus mal ordonné de toute la Grèce.
Thucydide, sans nommer Lycurgue, parle aussi d'une longue
période de désordre et de luttes intérieures, qui ne se termina
que par une énergique réglementation. Le véritable fondateur
Digitized by VjOOQIC
226 LYCURGUE.
de la grande cité militaire de Sparte, ce n'est pas le chef de
clan qui vint s'installer avec une troupe de bandits sur le do-
maine abandonné des Pélopides, c'est le réformateur assez
courageux pour imposer à ces bandits une discipline éga-
litaire, et assez habile pour leur faire comprendre qu'il était
de leur intérêt de s'y soumettre et de leur honneur d'y per-
sévérer.
Lycurgue. — Plutarque, au commencement de la biogra-
phie de Lycurgue, avoue qu'on ne sait absolument rien de cer-
tain sur sa vie ni sur son œuvre : « Il y a, dit-il, différents ré-
cits au sujet de sa naissance, de ses voyages, de sa mort, et
aussi de ses actes comme politique et comme législateur;
c'est sur l'époque où il vivait qu'on s'accorde le moins ». On
disait que Lycurgue appartenait à la race des Hèracléides, mais
les deux familles royales le revendiquaient également. D'après
Hérodote, il avait gouverné Sparte pendant la minorité de son
neveu Labotas, de la branche des Agides, tandis que les autres
récits lui donnent pour neveu et pour pupille Charilaos, d e
la branche des Eurypontides. La première tradition le pla-
cerait, selon la chronologie admise, vers 996 av. J.-C. ; la se-
conde, vers 880. Zeus passait pour avoir inspiré les lois de
Minos ; Lycurgue mit les siennes sous le patronage d'Apol-
lon. Quand il entra dans le sanctuaire de Delphes, la Pythie
hésita, disait-on, si elle devait l'appeler un homme ou un Dieu;
quelques-uns ajoutaient môme qu'elle lui avait dicté ses lois.
Cette opinion ne pouvait manquer d*ôtre admise par E. Cur-
tius, qui voitpartout l'influence occulte d'une prétendue théo-
cratie apollonienne. Hérodote s'en tient au témoignage des
Spartiates, qui disaient que Lycurgue avait introduit chez eux
des institutions empruntées à la Crète. Aristote regarde les
lois de Lycurgue comme un perfectionnement de celles des
Cretois. Il dit qu'ayant quitté latutelle du roi Charilaos, Lycur-
gue séjourna longtemps dans la ville de Lyctos, colonie laké-
daimonienne qui avait adopté la constitution établie en Crète
par Minos. Plus', tard on lui attribua d'autres voyages, en lonie,
d'où il avait rapporté les poèmes d'Homère, en Egypte, en
Libye et jusque dans l'Inde. On raconta des détails sur sa vie,
sur son désintéressement et sa modération, sur les difficultés
dbyGoogk
LES ROIS, LE SÉNAT, LES ÉPHORES. 227
qu'il eut à faire accepter ses réformes; on disait même qu'il
avait eu un œil crevé dans une émeute. Enfin le peuple accepta
ses lois en jurant de les observer jusqu'à son retour, et le sage,
pour enchaîner ses concitoyens par leur serment, se con-
damna à mourir en exil. Les Spartiates lui rendirent un culte
religieux et lui élevèrent uu temple, mais ils oublièrent de
bonne heure sa véritable histoire, et comme ses lois n'avaient
jamais été écrites, qu'elles consistaient en sentences, p^rpai,
confirmée par l'oracle de Delphes, on a dû, selon la remarque
d'Heeren, attribuer au législateur des instilutions plus ancien-
nes, et d'autres plus récentes qu'on mit sous son nom pour
leur donner force de lois.
Constitution politique de Sparte : les rois, le sénat,
les Éphores. — La première Rhètra confirmait la division du
peuple en tribus (9uXat) et districts (wêa^î), établissait, à côté
des rois («px^'ï^'^*')» u» sénat ou conseil de vieillards (-yepouaîa)
et fixait le lieu de réunion des assemblées populaires entre le
Babyke et le Gnakion, qui étaient deux branches de l'Eurolas.
Celte constitution très simple existait déjà dans les temps hé-
roïques, mais il est possible que Lycurgue lui ait donné une
forme plus régulière, soit en fixant à trente le nombre des
sénateurs, soit en déterminant leurs attributions. Ils devaient
avoir au moins soixante ans, et, comme en Crète, ils étaient
élus à vie par le peuple. Les deux rois faisaient partie du
sénat dont les fonctions étaient à la fois délibératives, judi-
ciaires et executives. L'assemblée du peuple, qui se réunissait
tous les mois àla nouvelle lune, approuvait ou rejetait les pro-
positions du sénat, mais sans discussions et sans amende-
ments. Hérodote attribue à Lycurgue l'établissement du Con-
seil des cinq Éphores, mais d'après tous les autres auteurs
cette magistrature ne fut instituée qu'un siècle plus tard, sous
les rois Théopompos et Polydôros. L'Éphorat était électif et
annuel ; peut-être avait-il existé à l'époque de Lycurgue et
môme antérieurement, avec des attributions purement judi-
ciaires, mais pendant les guerres de Messénie il prit une im-
portance qui alla toujours en augmentant. Les rois, réduits
au commandement militaire et à des privilèges honorifiques,
furent subordonnés aux Éphores qui formèrent peu à peu un
dbyGoogk
228 CONSTITUTION POLITIQUE DE SPARTE.
directoire exécutif. Le pouvoir des Éphores a été considéré
tantôt comme despotique, parce qu'il n'était soumis à aucun
contrôle, tantôt comme populaire parce qu'il était renouvelé
tous les ans et accessible à tous les citoyens. « Les Ephores,
dit Cicéron, servent de contre-poids à la puissance royale,
comme les Tribuns du peuple à l'autorité consulaire. » La
constitution de Sparte, quoiqu'elle fût une des moins libéra-
les, reposait cependant sur le principe républicain de la divi-
sion du pouvoir, et, comme dans toutes les cités grecques, les
fonctions publiques y étaient entièrement gratuites.
On a répété souvent, d'après Ottfried MuUer, que les institu-
tions attribuées à Lycurgue n'étaient que les ancienes coutu-
mes des Doriens conservées à Sparte et érigées en lois. Grote
a réfuté cette opinion par des arguments péremptoires. Sparte
diffère autant des autres cités dotiennes, Argos, Corinthe, Mé-
gare, Gnide, Rhodes, Kerkyra, Tarente, Syracuse, qu'elle dif-
fère de Thèbes ou d'Athènes. Si on veut trouver des traits
communs avec Sparte, il faut les chercher dans d'autres
républiques militaires, en Thessalie et surtout en Grète. Mais
la situation géographique de Sparte, les luttes qu'elle eut à sou-
tenir, d'abord contre les autres villes laconiennes, puis con-
tre Argos, contre Tégée, contre la Messénie, l'obligèrent à
s'imposer une discipline dont la nécessité ne s'était pas fait
sentir en Thessalie ; à maintenir des institutions qui, chez les
Cretois à qui elle les avait empruntées, tombèrent prompte-
ment en désuétude. Gette forte éducation fît de Sparte la pre-
mière puissance politique de la Grèce. Sa prépondérance après
la guerre du Péloponèse dut lui attirer de la part du peuple
d'Athènes les accusations qu'on accueille facilement contre un
rival heureux, et de la part des théoriciens l'admiration qui
s'attache toujours au succès . Les Spartiates n'ayant pas écrit
eux-mêmes leur histoire, des exagérations, en bien ou en
mal, ont été acceptées indifféremment à titre d'antithèses lit-
téraires, les jugements les plus contradictoires peuvent s'ap-
puyer sur des témoignages, et la critique historique n'a pas
toujours les moyens de discerner la vérité. La chronologie,
quoique bien indécise encore, nous vient quelquefois en aide :
ainsi on ne peut admettre que Lycurgue ait interdit la monnaie
dbyGoogk
LÉGENDE DU PARTAGE DES TERRES. 229
d'or et d'argent, puisque les premières monnaies d'argent ont
été frappées par Pheidon d'Argos, qui est postérieur à Lycur-
gue, et que les premières monnaies d'or ont commencé vers
la même époque à circuler dans la Grèce d'Asie. On ne peut
pas môme attribuer à Lycurgue la division du peuple en trois
classes et le partage des terres de la Laconie, si, comme l'af-
firme Pausanias, la soumission des villes laconienes ne re-
monte qu'au règne de Téléclos et l'asservissement des Hilotes
à celui de son fîls Alcaménès.
Légende du partage des terres. — A l'époque la plus
récente où on puisse placer Lycurgue, le territoire de Sparte
ne comprenait qu'une très petite banlieue, puisqu'Amyclai, qui
esta quelques stades, n'en faisait pas encore partie. C'est pour
les habitants de ce district si resserré que Lycurgue fit sa légis-
lation. Les maux auxquels il voulait porter remède étaient des
désordres intérieurs. Il y avait des luttes entre les rois et le
peuple, et dans le peuple môme entre les riches etles pauvres.
Il établit ou reconstitua le Sénat pour restreindre Paulorité
royale. Quanta l'inégalité des richesses, il n'est pas impossible
qu'il ait cru y remédier par un nouveau partage des terres,
non pas de toute la Laconie, que Sparte ne possédait pas
encore, mais du petit territoire formant la commune de Sparte.
Cependant, môme dans ces étroites limites, il est difficile
d'admettre qu'une mesure si radicale ait été prise sans qu'il y
soit fait aucune allusion par Hérodote, Thucydide, Xénophon
ou Aristole. Le premier auteur qui en parle est Plutarque, et
il étend le partage à toute la Laconie. Il donne des chiffres très
précis : 9000 lots pour les Spartiates, 30,000 pour les Périœkes.
Selon une conjecture de Grote, cette légende s'^^st formée à
Tépoque macédonienne, sous les règnes successifs des deux
rois socialistes Agis et Cléoménès; qui voulaient rétablir la dis-
cipline de Lycurgue, et probablement par l'influence du philo-
sophe Sphairos, leur maître et leur ami, qui rôvait une cité de
Stoïciens. La décadence de Sparte venait du luxe et de l'iné-
galité des richesses:. un partage égal de la propriété devait y
ramener les vertus antiques. On se persuada que Lycurgue
avait dû procéder ainsi. La tentative la plus hardie qui ait
jamais été faite fut mise à l'abri de ce nom vénéré et présentée
dbyGoogk
230 TENDANCES COMMUxNISTES.
par ses auteurs comme une œuvre de réaction. Il arriva quel-
que chose de semblable à Jérusalem quand le parti des
prophètes mit la réforme de Josiah sous le patronage de
Moïse (1).
Tendances communistes. Les repas publics. — Le
nivellement de la propriété, quePlutarque attribue à Lycurgue,
aurait été une mesure économique bien insuffisante k moins
d'être fréquemment renouvelée. Lycurgue fit mieux; en pros-
crivant le luxe sous toutes ses formes, il essaya de rendre la
richesse inutile et d'effacer la distinction entre les riches et
les pauvres, distinction dangereuse dans une société mili-
taire. Toutes ses institutions tendent au communisme : la
défense de fermer les portes, la permission accordée à chacun
de monter sur le premier cheval qu'il rencontrait, d'emprunter
pour son usage les domestiques de son voisin, ses chiens de
chasse, ses instruments de cuisine et de ménage, et môme, si
on revenait trop tard de la chasse, d'entrer chez le premier
venu en son absence et de manger ce qui s'y trouvait. Gela
fait comprendre comment un philosophe, grand admirateur
des Spartiates, a pu, sans étonner personne, admettre la
communauté des biens dans son plan de république militaire.
On ne saurait être surpris non plus que, dans un pays où la
propriété individuelle n'existe que par tolérance, on ait pu,
pour habituer les enfants aux nécessités de la vie militaire, les
forcer à se procurer par la maraude de quoi préparer leurs
repas. Si on les punissait lors qu'ils se laissaient surprendre,
c'était par mesure de discipline, et non par respect pour la
propriété. Sans admettre la communauté des femmes, les
Spartiates s'en rapprochaient beaucoup en permettant à
l'homme qui n'avait pas d'enfants de prêter sa femme ou
d'emprunter celle d'un autre. Cet usage, queXénophon rapporte
avec une approbation manifeste, explique comment Platon a
pu songer à absorber la famille dans la Cité parla communauté
des femmes et des enfants. Aristote, dont l'esprit est plus pra-
tique, trouve l'éducation des femmes à Sparte très vicieuse.
Les gymnases publics pour les jeunes filles formaient un
(1) Voir mon Histoire des Israélites d'après V exégèse biblique.
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LES REPAS PUBLICS. 231
étrange contraste avec la sévère retraite du gynécée à Athènes
et dans le reste de la Grèce. En général, les coutumes des
Spartiates différaient tellement de celles des autres Grecs,
qu'ils ont dû, pour les conserver, s'interdire les voyages et
éloigner les étrangers de leur pays.
Les repas communs sont une nécessité delà vie militaire. 11
n'y aurait pas de camaraderie possible entre les soldats d'une
garnison si les plus riches se faisaienî servir à part au lieu de
s'asseoir à la môme table que les pauvres et de se contenter
de la nourriture du réfectoire. Mais il y avait une différence
entre les repas publics des Spartiates et ceux des Cretois: en
Crète, les tables communes étaient entretenues par l'État; à
Sparte, elles étaient à la charge des particuliers. Aristotc
signale celte différence,^ qui n'était^ pas à l'avantage des
Spartiates et d'où résultèrent plus tard de graves inconvénients.
Sans admettre le remaniement général de la propriété attri-
bué à Lycurgue par Plularque, on peut croire que des terres
restées indivises furent partagées entre les citoyens pauvres
pour leur permettre de fournir aux repas publics une quote-
part spécifiée de farine d'orge, devin, de fromage, de figues,
.et une petite contribution en argent pour les assaisonnements.
Chacun pouvait de plus envoyer aux tables communes les pro-
duits de sa chasse dans les forôts de Tèygétès et la viande des
victimes qu'il offrait en sacrifice. On s'asseyait quinze à la
môme table, et les groupes se formaient comme dans nos
cercles d'officiers par le libre choix des convives, dont le con-
sentement unanime était requis pour l'admission d'un nouveau
membre. On ne pouvait se dispenser d'assister aux repas
communs, et longtemps après, le roi Agis fut réprimandé et
puni pour avoir voulu, au retour d'une expédition militaire,
dîner seul avec sa femme.
Éducation. Discipline. Tactique militaire. — Dans les
monastères chrétiens et bouddhistes, la propriété est commune
et la famille est supprimée par les vœux de célibat. Dans nos
armées modernes, on peut interdire le mariage aux soldats,
parce que le service militaire ne dure que peu d'années. Mais
à Sparte, chaque citoyen restait soldat tant qu'il était valide, et
la Cité militaire ne pouvait se recruter que par les enfants de
dbyGoogk
232 ÉDUCATION ET DISCIPLINE»
troupe. 11 fallait donc conserver la famille, et tout ce qu'on
pouvait faire c'était de la subordonner à TÉtat. Considéré
comme soldat futur, Tenfant appartenait à la République
plutôt qu'à ses parents. A sa naissance, s'il était difforme ou
trop chétif, on le portait sur le Tèygétès pour débarrasser l'État
d'une charge inutile, ou peut-être, comme le croit Curtius,
pour le faire élever avec les enfants des Périœkes, comme inca-
pable de supporter l'austère éducation imposée aux Spartiates,
éducation qui commençait presque dès le berceau et qui formait
la parlie la plus importante de l'œuvre de Lycurgue. Si on re-
garde le bien-ôtre matériel comme le but suprême de la vie et la
mesure de la civilisation, on peut à peine comprendre ce dédain
pour le plaisir, cette indifférence pour la douleur, cette héroïque
patience, cette obéissance volontaire à une règle despotique,
qui rendait la vie ducitoyenplus difficile quecelled'un esclave.
Dans nos sociétés énervées, où le luxe et la mollesse sont la
religion "du riche et l'ambition du pauvre, on préférerait la
condition, je ne dis pas seulement des Périœkes, mais des
Hiloles, à l'implacable discipline de leurs tyrans ascétiques.
Etrange aristocratie, qui avait pour privilège une perpétuelle
immolation de chacun à tous, une absorption complète de
toutes les volontés en une seule volonté, une soumission ab-
solue au plus impérieux de tous les maîtres, le devoir. Nulle
place pour l'intérêt privé; un seul amour, la patrie ; sacrifice
perpétuel de toutes les affections, de toutes les espérances,
dévouement sans bornes, dans la paix comme dans la guerre,
dans la vie comme dans la mort.
Ne craignons pas que Sparte ait jamais d'imitateurs : de tels
exemples ne sont pas contagieux. -Personne ne voudrait vivre
dans cette Cité d'athlètes, dans celte fraternelle communion
d'égaux, où toutes les pensées, tous les désirs se confondaient
dans la grande âme collective de la patrie. Personne ne voudrait
soumettre ses fils à la dure discipline de cette sobre et silen-
cieuse jeunesse, vêtue à la légère en toute saison, couchant
sur des roseaux, n'ayant pour se nourrir que les produits
hasardeux de la maraude, exercée par des chefs toujours
choisis par elle à toutes les luttes, à toutes les privations, à
toutes les fatigues, et déchirée sans pitié par le fouet sanglant
dbyGoogk
ÉDUCATION ET DISCIPLINE.
233
d*Artémis. C'est ainsi que se formaient ces générations d'ado-
lescents robustes, toujours en armes, fiers de leur sauvage
beauté, peignant leurs cheveux et se couronnant de fleurs le
matin des batailles, marchant à la mort comme à une fête.
statue d'Ares (l'Achille Borghëse du Louvre).
L'anneau qui entoure la jambe droite, au-dessus de la cheville, est percé d'un trou
dans lequel on voit la trace d'une chaîne de métal. Selon Pausanias, il y avait à
Sparte une statue d'Ares enchaîné. De même que les Athéniens représentaient la
Yictoire sans ailes, pour la fixer parmi eux, les Spartiates enchaînaient la statue du
dieu de la guerre, pour maintenir la paix.
avec des hymnes aux Muses, et vêtus de rouge, pour ne pas
donner à Tennemilajoie de voir couler leur sang. Au gymnase.
dbyGoogk
234 TACTIQUE MILITAIRE.
au champ de manœuvres, les citoyens qui ont passé l'âge de
porter les armes surveillent les exercices militaires de la géné-
ration nouvelle, et chaque soldat a tous les droits d*un père
sur chacun des enfants de la patrie. Quant aux femmes, on ne
leur demande que de faire des héros : au jour des luttes-
nationales, chaque mère armera fièrement son fils et lui
montrera la route du devoir, sans regrets et sans larmes :
« Rapporte ton bouclier ou qu*on te rapporte dessus. » Dans
cet immense concours d'abnégation, il faut qu'elles aient aussi
leur part de souffrances muettes, et qu'elles offrent le sang de
leur cœur en holocauste sur Tautel dévorant de la loi.
On s'étonne que tout un peuple ait pu se soumettre volon-
tairement et pendant des siècles à une discipline si tyrannique :
c'est que cette discipline assurait la suprématie des Spartiates
sur tous leurs rivaux. Quand les autres Grecs ne connaissaient
encore que de 'confuses mêlées, ou ces combats individuels
décrits dans l'Iliade, les Spartiates eurent les premiers une
tactique régulière. L'infanterie pesamment armée, le corps des
Hoplites, était leur force principale. Partagés en compagnies de
25, 32 bu 36 hommes appelées Enomoties, ils chargeaient en
rangs serrés, la lance en avant. On leur apprenait à observer
l'ensemble dans la marche à quitter rapidement la ligne pour
prendre la file, à faire conversion à droite ou à gauche. Leur
pas était réglé par le fifre, et si l'ordre était dérangé par quelque
accident imprévu, les soldats dispersés reprenaient leurs rangs,
chaque homme connaissant parfaitement sa place et son chef
de file. Les ordres donnés par le roi, commandant en chef,
étaient rapidement transmis par l'échelle des divisions et la
hiérarchie des officiers, et simultanément exécutés par toutes
les compagnies. L'habitude delà Pyrrhique, ou danse guerrière,
rendait les évolutions faciles et promptes. Les soldats, exercés
d'avance à toutes les manœuvres, y apportaient une précision
qui faisait regarder les Spartiates comme des artistes dans les
choses militaires. Mais il fallait pour cela n'avoir pas à s'oc-
cuper d'autre chose. Dans presque tous les autres pays grecs,
les mômes hommes étaient alternativement soldats en temps
de guerre, artisans ou laboureurs en temps de paix. Un
Spartiate ne pouvait avoir d'autre métier que celui de soldat.
dbyGoogk
SOUMISSION DE LA LACONIE. 235
Dans une Cité militaire, il faut que Tarmée soit nourrie par les
travailleurs, qui se trouvent par cela môme réduits à une con-
dition servile, car le signe distinctif de l'esclavage aux yeux
des Grecs, c'était de travailler pour autrui.
Soumission de la Laconie. — La discipline de Lycurgue,
en donnant aux Spartiates une force militaire supérieure à
celle de leurs voisins, eut pour conséquence la sujétion des
Périœkes et l'asservissement des Hilotes. Sauf quelques rares
indications éparses dans Pausanias, on ne sait rien des luttes
qui amenèrent la soumission de toute la Laconie. Pharis, Gé-
ronthrai et Amyclai étaient restées achaiennes jusqu*au temps
du roi Téléclos. Les habitants de Pharis et de Géronthnai n'es-
sayèrent pas de résister et quittèrent le Péloponnèse. La con-
quête d* Amyclai fut plus difficile, et les Spartiates ne s'en
emparèrent qu'après une résistance assez longue. Clavier croit
que les habitants se retirèrent en Italie, car il y avait entre
Gaëte etTerracine une ville d'Amyclai, qui, selon Servius, avait
été fondée par les Lacônes. On n'a aucun renseignement sur
la conquête des autres villes laconiennes, Gytheion, The-
rapnai, etc., ni sur celle de l'île de Kythéra et de la Kynourie,
qui formait la région maritime (^ l'est du mont Parnon. Les
territoires de Pharis, de Géronthrai et d'Amyclai furent par-
tagés entre les Spartiates pauvres. Il est probable qu'il en fut
de même dans d'autres parties du territoire laconien. Même
au temps de sa plus grande puissance, Sparte ne fut jamais
entourée de murailles; rien ne la séparait de sa banlieue. L'in-
fériorité politique des Périœkes n'était pas fondée sur une
différence de race ; elle résultait naturellement de leur éloi-
gnement de la capitale. Les Périœkes n'auraient pu prendre
part aux repas cortimuns ni aux assemblées périodiques, ni
aux élections d'Ephores et de sénateurs. Mais ils devaient être
exercés dans une certaine mesure à la tactique militaire,
puisqu'il^ étaient employés comme hoplites dans l'armée,
dont ils formaient la partie la plus considérable ; les Spartiates
considérés comme une troupe d'élite, passaient pour les plus
braves parmi les braves Lakédaimoniens.
Pausanias rapporte la prise d'Hélos au règne d'Alcaménès,
tils de Téleclos. La ville maritime d'Hélos était devenue un
dbyGoogk
236 LUTTES CONTRE LES ARGEIENS.
centre de résistance ou de révolte des populations rurales sou-
tenues par les Argeiens. Il n'y eut pas de capitulation, les
habitants furent réduits en servitude et le nom d*Hilotes fut
étendu dans la suite à tous les serfs de la Laconie. Telle est
du moins Texplication qu'on a généralement donnée de ce
nom, quoique, d'après une étymologie plus vraisemblable, il
ait le sens de captifs. Nous ne savons pas quelle avait été la
condition des paysans dans la période achaienne ; quand les
Doriens s'établirent sur le domaine des Pélopides, ceux qui le
cultivaient, probablement des Lélèges, payèrent aux nouveaux
propriétaires la redevance accoutumée. Mais le caractère des-
potique des Spartiates, en rendant la sujétion plus lourde,
provoqua des révoltes comme celle d'Hélos. et le servage passa,
comme le dit Pline, pour une invention des Lakédaimoniens.
Les Hilotes étaient attachés au sol et ne pouvaient être vendus
hors du pays. Ils payaient une partie du produit de leurs récoltes ;
mais ce fermage était fixe et modéré. Ils étaient esclaves de
l'État et n'avaient pas, comme les Pénestes de Thessalie, des
maîtres particuliers. 11 faut croire cependant que quelques-uns
étaient employés au service domestique, car Xénophon et
Aristote nous disent que les Spartiates se servaient des esclaves
les uns des autres. Les Hilotes combattaient comme troupes
légères dans les armées lakédaimoniennes ; ils pouvaient
môme obtenir la liberté en récompense de leurs services. Mais
l'orgueil irritant des Spartiates rappelait continuellement les
Hilotes au sentiment de leur dépendance. Les Argeiens, qui
n'avaient pas de serfs, poussaient les serfs de Sparte à la
révolte. Les Spartiates se sentaient détestés et redoublaient de
défiance. Leur faiblesse numérique les forçait à rester tyrans
sous peine de devenir esclaves, à prolonger indéfiniment une
sorte d'état de siège, à se tenir toujours en garde contre un
soulèvement.
Luttes contre les Arg^eiens. — Pheidon. — Le mon-
nayage — La conquête de la Laconie n'avait été accomplie
que par étapes successives, entremêlées de luttes contre les
Argeiens, les Messéniens et les Arcadiens. Au commencement
de la période historique, Argos paraît avoir été la puissance
prépondérante du Péloponnèse; Sparte ne venaitqu'en seconde
dbyGoogk
PHEIDON. — LE MONNAYAGE. 237
ligne ; dans la légende de la conquôte dorienne, Argos est le
lot de Téménos, Talné des Hèracléides. Argos était à la tête
d'un groupe important de cités doriennes, Sikyone, Cléonai,
Phlious, Troizen, Épidaure, Aigine. Le Dieu protecteur de
cette confédération, Apollon Pythaieus, avait son sanctuaire
8UP l'acropole d'Argos. Mais ce lien fédéral s'affaiblit de plus
en plus, tandis que Sparte, par la conquôte graduelle de la
Laconie, devenait le chef-lieu d'un État fortement centralisé.
La puissance d'Argos atteignit son apogée sous le règne de
Pheidon, qu'on nomme quelquefois tyran, non pas qu'il eût
usurpé le trône, car il appartenait à la dynastie Téménide,
mais parce qu'il s^était affranchi des restrictions apportées à
l'autorité royale sous ses prédécesseurs.
On n'est pas d'accord sur la date de Pheidon. Pausanias le
place à la huitième Olympiade (747 avant J.-C), mais quelques
auteurs croient le texte altéré et lisent la vingt-huitième Olym-
piade. Par suite de celte incertitude, on ne sait s'il faut attribuer
à Pheidon l'invention du monnayage ou seulement son intro-
duction en Grèce. Hérodote parle de Pheidon comme ayant
établi un système de poids et de mesures dans le Péloponnèse,
mais il ne parle pas de la monnaie, et dans un autre passage
il en attribue l'invention aux Lydiens. Les mesures pheido-
niennes, destinées à faciliter les transactions commerciales
avec l'Asie, étaient probablement empruntées aux Phéniciens,
qui les avaient reçues de Babylone ; mais ni les Phéniciens ni
les Chaldéens ne se servaient de monnaies, et on n'en a pas
trouvé de traces dans les ruines de Ninive. L'invention qu'Hé-
rodote attribue aux Lydiens consista probablement à mettre
en circulatiou des lingots de métal d'un poids déterminé, pour
éviter d'avoir continuellement recours à la balance. Mais la
garantie du poids, ce qui constitue la véritable monnaie, c'est
l'empreinte officielle, le poinçon de l'État. Cette innovation
capitale paraît due aux Grecs ; on peut donc laisser à Pheidon
l'honneur d'avoir inventé le monnayage. Les monnaies d'ar-
gent qu'il fit frapper à Aigine ont pour empreinte la tortue,
attribut d'Hermès, Dieu du commerce.
D'après le Grand Étymologiste, Pheidon consacra à Hère,
en mémoire de son invention, des échantillons des anciens
dbyGoogk
238 LUTTE CONTRE LES ARCADIENS.
lingots sans empreinte qui servaient autrefois aux échanges
et qu'on appelait obélisques ou petites barres, à cause de leur
forme allongée ; de là vient le nom d'oboles qui resta aux
petites pièces d'argent. L'usage de la monnaie se répandit
rapidement. Chaque cité eut son type monétaire, signe de son
autonomie ; Athènes choisit la chouette ou la tête de la Gor-
gone, Phokaia le phoque qui rappelait son nom, Corinthe prit
Pègasos, le cheval ailé de Bellérophonlès, Thèbes un bou-
clier échancré des deux côtés etc. L'empreinte, gravée en
creux sur le marteau qui servait à la frapper, se reproduisait
en relief sur la pièce. 11 y avait sur l'enclume des parties sail-
lantes pour empocher le métal de glisser ou de se déplacer
sous les coups de marteau : de là ces carrés creux plus ou
moins profonds qui se trouvent au revers des monnaies pri-
mitives; plus tard il y eut des empreintes en relief sur les
deux côtés de la pièce.
Pheidon rétablit la suzeraineté d'Argos sur toutes les villes
de la confédération argolique et prétendit môme étendre cette
suzeraineté sur tout le pays qui passait pour avoir été soumis
par Héraclès, c'est-à-dire la plus grande partie du Pélopon-
nèse. On dit qu'il attaqua Corinthe et réussit à s'en emparer.
Il aida son frère Caranos à fonder en Thrace un petit royaume
qui devint la Macédoine. Pheidon soumit la Kynourie, toute la
côte orientale du golfe argolique jusqu'au cap Malée et môme .
l'île de Kythéra. Comme chef de la branche aînée des Hèra-
cléides, il s'attribua la présidence des jeux olympiques, insti-
tués, disait-on, par son ancêtre, et en rendit la direction aux
Pisates qui en avaient été dépouillés par les Éléiens. Mais
ceux-ci appelèrent les Spartiates à leur secours, Pheidon fut
vaincu et les Argéiens perdirent l'hégémonie du Péloponnèse.
Luttes des Spartiates contre les Arcadiens. -— Les
querelles des Spartiates et des Arcadiens avaient commencé
avant l'époque de Lycurgue. L'Arcadie n'avait pas d'unité po-
litique ; les villes étaient indépendantes les unes des autres et
se faisaient quelquefois la guerre. La plus puissante de toutes,
Tégéa, eut de fréquents démêlés avec Sparte. Hérodote raconte
que les Spartiates ayant consulté l'oracle de Delphes sur la
conquête de l'Arcadie, la Pythie leur répondit : « Tu me de-
dbyGoogk
PREMIÈRE GUERRE DE MESSÉNIE. 239
mandes TArcadie; ta demande est excessive: je la refuse. L'Ar-
cadie a des guerriers nourris de glands qui repousseront ton
attaque. Je ne te porte pas envie, cependant : je te donne
Tégéa pour y danser et ses belles plaines pour les mesurer au
cordeau. » Sur celte réponse équivoque, les Spartiates, empor-
tant avec eux des chaînes, envahirent le territoire de Tégéa,
mais ils furent vaincus et tous ceux qui furent pris, chargés
des chaînes qu'ils avaient apportées, travaillèrent en cet état
aux terres des Tégéates et les mesurèrent aux cordeau. Du
temps d'Hérodote, on voyait ces chaînes suspendues autour du
temple d'Athènè Aléa. Cet échec se rattache probablement à
l'expédition conduite selon Pausanias par Charilaos, le pré-
tendu neveu et pupille de Lycurgue. Les femmes des Tégéates,
commandées par une veuve nommée Marpessa, s'étaient mises
en embuscade. Lorsque le combat fut engagé, elles prirent à
dos les Lakédaimoniens, qui furent mis en déroute. Charilaos
fut du nombre des prisonniers, mais on le relâcha en lui fai-
sant jurer de ne plus attaquer les Tégéates. En mémoire de
cette action des femmes, on éleva sur la place publique de
Tégéa une statue d'Ares surnommé le convive des femmes.
Première guerre de Messénie. — Quoique séparées par
la frontière naturelle du Tèygétès, la Laconie et la Messénie
avaient été jadis réunies sous le sceptre des Pélopides. Après
l'établissement des Doriens, il y eut, malgré la communauté
de race, des guerres longues et sanglantes qui eurent pour ré-
sultat de soumettre la Messénie à la domination de Sparle.
Ces luttes ont été racontées par Pausanias avec des détails in-
téressants et dramatiques, mais puisés à des sources qui ins-
pirent peu de confiance. Il tire le récit de la première guerre
d'un auteur de l'époque alexandrine, Myron dePriènè; celui
de la seconde d'un poème du Cretois Rhianos sur les exploits
du héros messénien Aristoménès. La date de ces deux guerres
ne peut être jBxée avec certitude; Pausanias place la première
entre 743 et 724, la seconde entre 685 et 666. Le poète Tyrtée,
qui combattit avec les Spartiates dans la seconde guerre, nous
fournit«seul quelques faits incontestables.
La Messénie était habitée par les mêmes races que la Laco-
nie, mais les Doriens s'étaient mêlés plus complètement aux
dbyGoogk
240 FONDATION DE TARENTE.
Achaiens et aux Lélèges. Tandis que les institutions de Lycur-
gue tournaient l'activité des Spartiates vers Tart militaire, les
Messéniens, profitant de la fertilité de leur sol, arrivèrent à la
richesse par l'agriculture. Cette prospérité excita la convoitise
de leurs voisins, qui trouvèrent facilement des prétextes de
guerre, ils occupèrent Ampheia, forte position sur les contre-
forts du Tèygétès ; de là, ils commencèrent leurs attaques,
coupant les récoltes, emportant le butin qu'ils pouvaient saisir,
mais sans abattre les arbres ni les maisons, ne voulant pas
ravager un pays qu'ils regardaient déjà comme leur propriété.
Cela dura quatre ans. L'issue de toutes les batailles était in-
décise, mais les laboureurs n'osaient plus cultiver leurs
champs. Les Messéniens se fortifièrent sur la montagne
d'Ithômè et envoyèrent consulter l'oracle de Delphes. D'après
le récit romanesque de. Pausanias, l'oracle demande le sacri-
fice d'une vierge de la race d'Aipytos ; un de leurs chefs, Aris-
todèmos, immole sa fille, et à celte nouvelle les Spartiates dé-
couragés quittent le pays. Au bout de quelques années, les rois
de Sparte Polydoros et Théopompos reviennent en Messénie
et la guerre recommence. Les Messéniens reçoivent des se-
cours de l'Arcadie, de Sikyone et d'Argos ; les Corinthiens
prennent le parti de Sparte. Il se livre une grande bataille où
les Messéniens ont l'avantage, mais ils sont découragés par la
famine, effrayés par une suite de prodiges menaçants : Aristo-
dèmos se tue sur le tombeau de sa fille. Ses compagnons
abandonnent la forteresse d'Ithômè, se retirent à Argos, à
Sikyone et en Arcadie. Le peuple se soumet au Spartiates, et
prête serment de ne jamais se révolter. « Comme des ânes
harassés par de pesants fardeaux, dit un fragment de Tyrtée,
ils sont forcés d'abandonner à leurs maîtres la moitié du pro-
duit de leurs champs, et de venir à Sparte, eux et leurs fem-
mes, suivre en costumes de deuil les funérailles des rois ».
Fondation de Tarente. — La guerre avait duré vingt
ans. Bien des désordres s'étaient produits à Sparte par l'ab-
sence prolongée des chefs defamilU. Les veuves et les jeunes
filles avaient épousé des Periœkes ou des Hilotes. Il répugnait
à l'orgueil Spartiate de traiter en citoyens les enfants nés de
ces mésaillances (irapôeviai). Ceux-ci conspirèrent avec les Hi-
dbyGoogk
SECONDE GUERRE DE MESSÉNIE. 241
lûtes. Le complot devait éclater à la grande fôte religieuse des
Hyakinthia, dans le temple d'Apollon Amyclaien. Le chef des
conjurés, Phalanthos, devait donner le signal en mettant son
casque. 11 recula devant la guerre civile et dénonça la cons-
piration sur une promesse d'impunité pour lui et tous ses
complices. Au commencement de la fôte, quand le peuple fut
rassemblé, on fit proclamer par un crieur que Phalanthos ne
mettrait pas son casque ce jour-là. Les conjurés virent qu'ils
étaient trahis ; on les retint en prison avec l'assurance de la
vie sauve, pendant que Phalanthos allait consulter Toracle de
Delphes au sujet d'une émigration. Il demanda s'il pouvait
s'approprier la fertile plaine de Sikyone ; mais la Pythie l'en
dissuada et lui enjoignit de conduire les émigrants dans la
région appelée lapygie, au sud-est de l'Italie. Il s'établit à Ta-
rente, où se trouvait une population issue d'un mélange de
colons Cretois et d'indigènes. Comme les troupes qu'il ame-
nait pouvaient être d'un grand secours, on les reçut d'une
manière amicale. Le port de Tarente était le plus spacieux et
le plus sûr de tout le golfe. 11 y avait sur cette côte une iné-
puisable variété de poissons et de coquillages. La pèche, sur-
tout celle du Murex d'où on tirait la pourpre, devint une source
de richesse pour la colonie, et les pécheurs formèrent l'élé-
ment prépondérant de la démocratie tarenline.
Seconde guerre de Messénie. Aristoménés. — La se-
conde guerre de Messéuie est séparée de la première par un
intervalle de quarante ans selon Pausanias, de quatre-vingts
ans selon Justin. Un fragment de Tyrtée indique vaguement
les dates relatives des deux guerres : « Les pères de nos pères
conquirent Messènè ». L'incertitude sur ces événements est si
complète qu'Aristoménès, le héros de la seconde, guerre dans
l'épopée de Rhianos, est placé dans la première par Myron et
Diodore. Dans le récit qui nous est parvenu, la bravoure d'A-
ristoménès prend des proportions fabuleuses. Il offre trois fois
. le sacrifice appelé Hécatomphonie, réservé à ceux qui avaient
tué cent ennemis. Il fait des excursions sur le territoire laco-
nien, pille Amyclai, entre la nuit à Sparte et, en signe de défi,
suspend son bouclier dans le temple d'Athènè Chalkioikos.
Un jour, il est blessé à la tôte, fait prisonnier avec cinquante
L. M. — HisT. DBS Grecs. 14
dbyGoOgk
242 ARISTOMÉNÈS.
de ses compagnons et précipité après eux dans la Kaiadas,
cavité profonde aux flancs du Tèygétès où on jetait les crimi-
nels. Mais les Dieux ne l'abandonnent pas. Son large bouclier
amortit le choc des rochers, il tombe sain et sauf sur les corps
de ses compagnons. Après trois jours, il renonçait à tout es-
poir et s'enveloppait la tète pour attendre la mort, quand ses
yeux habitués à l'obscurité aperçoivent un renard dévorant les
cadavres. Il le saisit par la queue, lui présentant de l'autre
main son manteau à mordre ; le renard, cherchant à s'échap-
per, le conduit vers une petite ouverture. Il l'élargit avec ses
mains, parvient à sortir et reparait au milieu de ses soldats.
Une autre fois, pendant une trêve, il est pris traîtreusement
par des archers crétois et doit sa délivrance à la pitié d'une
jeune fille qu'il récompense en la mariant à son fils Gorgos.
Tyrtée. — On dit que les Spartiates, effrayés des succès
d'Aristoménès, consultèrent l'oracle de Delphes qui leur dit de
demander un général aux Athéniens, et que ceux-ci, ne vou-
lant ni désobéir à Apollon ni contribuer à l'accroissement
de la puissance de Sparte, leur envoyèrent un maître d'école
nommé Tyrtée. Quoique présentée sous une forme peu vrai-
semblable, cette légende peut avoir un fondement réel.
Athènes, par ses relations avec l'ionie, pouvait être fréquentée
dès cette époque par les Homérides ; si Tyrtée était de Milet,
comme le dit Suidas, ce dut être quelque rhapsode chantant
les poèmes d'Homère et d'Arctinos, et il est très possible qu'il
ait ouvert une école pour les enseigner. Ce qui est certain,
c'est que ce vieux maître d'école était un grand poète, vrai-
ment de la race du vieux mendiant de Ghios. Les Spartiates
savaient quelle est la puissance d'une musique guerrière et
d'une mâle poésie pour exciter les jeunes gens au combat.
Plus d'une fois ils adoptèrent des musiciens et des poètes
étrangers, Terpandros de Lesbos, Alcman de Sardes, Thaletas
de Grète. Leur tactique militaire était en défaut dans une
guerre d'escarmouches. L'oracle avait raison, il leur fallait
un général d'une nouvelle espèce, un improvisateur guerrier,
sonnant le clairon des batailles. Tvrtée devint leur poète po-
pulaire ; ils lui donnèrent ce droit de cité dont ils étaient si
avares. Nous ne connaissons rien des anapestes de Tyrtée,
yGoogk
TYRTÉE. 2i3
destinés probablemenl à rhytbmer la marche des troupes,
mais Stobée nous a conservé quelques fragments de ses élé-
gies. Le distique éiégiaque, composé d'un hexamètre et d'un
pentamètre, n'avait pas encore le caractère mélancolique que
lui donna Mimnerme; c'était un rhythme guerrier, inventé
dit-on par Callinos d'Éphèse pour exciter l'ardeur des jeunes
gens au moment d'une invasion des Kimris en Asie-Mineure.
Ce qui nous reste de Tyrtée justifie l'admiration des Spartiates
et résume bien la pensée de cette dure cité militaire, qui
étonna la Grèce elle-même par sa toute-puissante énergie.
« 11 est beau de tomber au premier rang, comme un brave,
en combattant pour la patrie; mais il n'y a pas de destinée
plus triste que de fuir sa ville et ses grasses campagnes et
d'aller mendier, errant avec sa mère chérie, son vieux père,
ses petits enfants et sa jeune épouse Combattons bravement
pour cette terre, mourons pour nos enfants, n'épargnons pas
notre vie. Allons, jeunes gens, combattez, serrés les uns contre
les autres, ne commencez pas la fuite honteuse et la peur.
Faites dans vos cœurs un grand et fort courage, n'épargnez
pas votre vie dans la mêlée des hommes
« Allons, vous êtes la race de l'invincible Héraclès, courage,
Zeus ne s'est pas encore détourné de vous. Ne regardez pas le
nombre, n'ayez pas peur, que chacun marche droit, le boucher
en avant, méprisant sa vie et chérissant les noires Kères delà
mort comme les rayons du soleil Il est odieux à voir, l'homme
frappé par derrière en fuyant la terrible bataille; il est honteux
à voir, couché dans la poussière, le corps percé dans le dos
d'une pointe de lance. Allons, que chacun se tienne la jambe
en avant, les deux pieds solidement appuyés sur la terre, mor-
dant ses lèvres de ses dents et couvrant de son large bouclier
ses cuisses et ses jambes, sa poitrine et ses épaules, secouant
de sa main droite son fort javelot, agitant sa terrible aigrette
sur sa tête. Qu'il pratique l'art de la guerre en faisant de grandes
choses et ne se tienne pas loin des traits, derrière son bouclier.
Qu'il attaque corps à corps et frappe l'ennemi de sa longue
javeline, ou le perce de son glaive. Pied contre pied, bouclier
contre bouclier, aigrette contre aigrette, casque contre casque,
poitrine contre poitrine, combattez d'homme à homme, frappez
dbyGoogk
244 TYRTÉE.
de Tépée tranefeatite ou de la longue lance. Et vous, troupes
légères, de chaque côté, à Tabri des boucliers, lancez de
grandes pierres et des flèches aiguës, en vous tenant près des
hoplites.
« La vertu guerrière est ce qu'il y a de plus enviable
parmi les hommes, la plus belle couronne que puisse con-
quérir la jeunesse. C'est un bonheur public pour la ville et
pour tout le peuple qu'un homme qui s'élance au premier rang
des combattants et y demeure inébranlable, sans jamais songer
à la fuite honteuse, prodiguant sa vie et son cœur indomp-
table, et encourageant celui qui est à ses côtés à tomber brave-
ment. Voilà l'homme utile à la guerre ; il a bientôt fait tourner
les phalanges ennemies hérissées de pointes, et il s'entend à
diriger le flot de la bataille. Tombant au premier rang, il meurt
en illustrant sa ville et ses concitoyens et son père, frappé par
devant de coups nombreux à la poitrine et sur le bouclier ar-
rondi et sur la cuirasse. Et les jeunes et les vieux gémissent
à la fois, et la cité toute entière l'ensevelit avec d'amers re
grets. Et son tombeau et ses enfants çont honorés au loin
parmi les hommes, et les fils de ses fils et toute sa race dans
l'avenir. Et jamais sa grande gloire et son nom ne périssent;
môme sous la terre il est immortel, celui que le farouche Ares
a frappé lorsqu'il combattait^ brave, solide et hardi, pour sa
terre natale et ses enfants. Mais s'il évite la Kère du long
sommeil de la mort, et s'il remporte vainqueur le prix éclatant
de la lance, tous l'honorent également, les jeunes et les an-
ciens, et il descend comblé de joie chez Aïdès. Quand il vieillit,
il tient le premier rang dans la ville; il n'a à craindre ni vio-
lence ni outrage ; chacun se lève devant lui, les jeunes et ceux
de son âge, et les plus anciens. Ainsi, que chacun s'efforce d'at-
teindre la faite de la vertu, sans jamais céder dans le combat. »
Soumission de la Messénie. — Il y eut, selon Pausanias,
trois batailles rangées. Après la première, qui n'eut pas de
résultat décisif, les Messéniens, pour récompenser la valeur
d'Aristoménès, voulaient le nommer roi : il refusa et se con-
tenta du titre de général. La seconde, livrée à la Fosse du
sanglier, se termina par une victoire complète d'Aristoménès.
A son retour, les femmes jetèrent des fleurs et entonnèrent un
dbyGoogk
SOUMISSION DE LA MESSÉNIE. 245
chant de triomphe qui se répétait encore du temps de Pausa-
nias : « A travers les champs de Stényclèros et jusqu'au som-
met des montagnes, Aristoménès a chassé les Lakédaimo-
niens ». Les Messéniens perdirent la troisième bataille par la
trahison d'Aristocrates, roi des Arcadiens d'Orchomène, qui
fit retirer ses troupes dès que l'action fut engagée. Cette tra-
hison ne fut découverte qu'à la fin de la guerre, et les Arca-
diens indignés lapidèrent leur roi. Mais, à partir de cette dé-
faite, les Messéniens avaient été obligés de concentrer leurs
forces dans la citadelle d'Eira, comme leurs pères s'étaient
retirés à Ithômè pendant la première guerre. C'est de là qu'A-
ristoménès, assisté du devin Théoclos et d'une troupe d'élite,
faisait des incursions sur le territoire ennemi. Il se maintint
onze ans dans la forte position d'Eira. Mais, par une nuit
d'orage, la trahison d'une femme y introduisit l'ennemi. Pen-
dant deux jours, les Messéniens défendirent le terrain pied à
pied. Enfin, Aristoménès les forma en carré, plaçant au mi-
lieu les femmes, les enfants et les vieillards, et traversa avec
toutes ses troupes les rangs des Spartiates, qui les laissèrent
passer. Le devin Théoclos, voyant s'accomplir la ruine qu'il
avait prévue, se fit tuer en combattant. Les Messéniens furent
de nouveau réduits à la condition des Hilotes. Quelques-uns se
retirèrent en Arcadie. Ceux qui habitaient les villes maritimes
de Pylos et de Mothonè montèrent sur leurs vaisseaux, puis
passèrent à Kyllènè en Élis, et de là à Rhègion, colonie [chal-
kidienne sur la pointe méridionale de l'Italie, où quelques-
uns de leurs compatriotes s'étaient établis à la fin de la pre-
mière guerre. Aristoménès chercha inutilement à susciter
des ennemis à Sparte. Il mourut à Rhodes où il s'était retiré
près de son gendre Damagètos. La famille rhodienne des
Diagorades, célèbre par ses victoires olympiques, rattachait
son origine au grand héros messénien.
Suzeraineté de Sparte sur tout le Péloponnèse. — - Les
Arcadiens avaient prêté secours aux Messéniens dans les deux
guerres, mais on ne sait quelles sont les villes qui prirent part
à la lutte, l'Arcadie n'ayant jamais formé un corps politique
avant Épaminondas. Quelques districts du nord de la Laconie
étaient habités par des populations arcadiennes soumises à la
14.
dbyGoogk
246 SUZERAINETÉ DE SPARTE.
domination de Sparte depuis^ une époque très reculée, mais
celte domination ne s'étendit jamais bien loin. Vers la fin de
la seconde guerre messénienne, selon Pausanias, les Spar-
tiates s'étaient emparés de Phigalie. Les habitants se reti-
rèrent dans le voisinage et demandèrent à l'oracle de Delphes
comment ils pourraient rentrer dans leur pays. La Pythie
répondit que s'ils pouvaient obtenir d'Oresthasion un secours
de cent hommes, ces auxiliaires seraient tués, mais que Phi-
galie reprendrait son indépendance. Dès que cet oracle fut
connu à Oresthasion, les cent hommes se présentèrent; les
deux peuples attaquèrent la garnison lakédaimonienne, les
Oresthasiens furent tous tués et les Phigaliens rentrèrent en
possession de leur ville.
Après avoir longtemps lutté contre Tégéa, la plus puissante
des villes arcadiennes, les Spartiates, dit Hérodote, consultè-
rent à ce sujet l'oracle de Delphes. 11 leur fut répondu qu'ils
seraient vainqueurs s'ils rapportaient à Sparte les os d'Oreste^
ensevelis « là où soufflent deux vents contraires, où le type
frappe Tantitype, où le mal est sur le mal ». L'énigme sem-
blait indéchiffrable ; mais un Lakédaimonien nommée Lichas,
se trouvant à Tégéa pendant une trêve, entra dans l'atelier
d'un forgeron, qui lui dit qu'en creusant sa cour il avait trouvé
un cercueil gigantesque. Lichas se rappelle l'oracle et en com-
prend le sens : les deux soufflets sont bien les deux vents
contraires, le marteau et l'enclume sont le type et Tanti-
type, le fer qu'on forge sur le fer, c'est le mal sur le mal ;
le cercueil est donc celui d'Oreste. Lichas expose sa découverte
aux magistrats de Sparte ; on l'exile pour ne pas éveiller la dé-
fiance. 11 retourne à Tégéa, loue la cour du forgeron et rap-
porte les ossements. Les Spartiates déclarèrent la guerre aux
Tégéates et furent vainqueurs. Mais ils ne se crurent pas assez
forts pour ruiner la ville de Tégéa ou pour s'emparer de son
territoire; ils obligèrent seulement leurs rivaux à les accom-
pagner à la guerre, en leur laissant l'honneur de former une
des ailes de l'armée lakédaimonien ne.
Les Spartiates et les Argeiens se disputèrent longtemps la
Kynourie, surtout le territoire de Thyréa, dont la population était,
selon Hérodote, d'origine ionienne, et Tile de Kythéra, près du
dbyGoogk
SUZERAINETÉ DE SPARTE. 2i7
cap Malée. Les deux peuples convinrent de décider la querelle
par un combat entre trois cents champions choisis de part et
d'autre. Le combat dura jusqu'à la nuit. Il ne resta debout que
deuxArgéiens qui allèrent annoncer à Argos Tissuedu combat.
Mais le Spartiate Olhryadès, blessé grièvement et qu'on avait
cru mort, se releva, dressa un trophée, y plaça une inscription
avec son sang et se laissa tomber sur son épée pour ne pas
survivre à ses compatriotes. Comme des deux côtés on s'at-
tribuait la victoire, il s'ensuivit une bataille générale. Les
Spartiates furent vainqueurs et restèrent en possession du
pays contesté. Pendant longtemps les chants de la jeunesse de
Sparte célébrèrent le nom d'Otrhyadès.
La conquête de la Kynourie fut la dernière acquisition terri-
toriale de Sparte. Elle était maintenant en possession d'un
empire continu comprenant la Messénie et la Laconie, c'est-à-
dire les deux cinquièmes du Péloponnèse. Élis, délivrée par
elle de la rivalité de Pisa, ne pouvait lui porter ombrage, car
la neutralité du territoire d'Olympie empêchait les Eléiens
d'avoir une puissance militaire. Argos humiliée par ses ré-
centes défaites avait cessé d'être dangereuse, et les Achaiens
s'enfermaient dans une abstention inoflTensive. En dehors du
Péloponnèse, Athènes et Thèbes ne se doutaient pas encore du
rôle important qu'elles devaient jouer plus tard. Aucun État
grec n'avait un territoire aussi étendu et une population aussi
nombreuse ; aucun surtout, dit Grote, n'avait un gouverne-
ment plus complètement centralisé et plus rigoureusement
obéi. Excepté Sparte, il n'y avait pas sur le territoire lakédai-
monien une seule commune indépendante; aucune n'aurait
osé traiter avec un État étranger. A la vérité, le mécontente-
ment des Periœkes et des Hilotes était une source de fai-
blesse, mais ce n'est que par la suite que ce mécontentement
devait se manifester d'une façon menaçante. A l'époque des
guerres médiques, Sparte était, sans contestation, la première
puissance politique de la Grèce.
dbyGoogk
248 LES CITÉS COMMERÇANTES.
CHAPITRE IX
LES CITÉS COMMERÇANTES.
La royauté remplacée par l'oligarchie. — Diffusion de la race grecque
sur les côtes de la Méditerranée. — Colonies Euboiennes et Méga-
Tiennes en Tlirace. — - L'industrie à Coriuthe, les Bacchiades. Syra-
cuse et Kerkyra. — Colonies grecques en Italie et en Sicile. —
Comptoirs sur le Pont-Euxin. — Factoreries grecques en Egypte. —
Kyrène. — Voyages à Tartossos. — Fondation de Marseille. — Indé-
pendance des colonies. — La monnaie, signe visible de l'autonomie
communale. — Types décoratifs empruntés à TAsie. — Développe-
ment de l'art grec. Caractère spontané des trois ordres d'architecture.
— Origine indigène de la sculpture grecque. — La peinture. La poésie
lyrique. — Les premiers philosophes. La géographie. L'histoire. Les
premiers prosateurs. — Répugnance des philosophes contre la reli-
gion populaire et la démocratie. — Destruction de Sybaris. Disper-
sion de la confrérie de Pythagore.
La royauté remplacée par Toligarchie. — Le gouver-
nement des temps héroïques, une arislocratie militaire com-
mandée par un chef de clan, était la forme sociale la plus na-
turelle et môme la seule possible. Les tribus cherchent d'abord
un territoire pour s'y établir, et quand elles l'ont conquis,
bâtissent une citadelle pour s'y retirer en cas d'attaque. La
guerre, offensive ou défensive, est presque l'état normal. Les
plus forts et les plus braves sont chargés de protéger les en-
fants et les femmes ; il leur faut un capitaine dont la supério-
rité incontestée inspire la confiance et commande le respect.
Les vieillards rendent la justice et règlent les affaires de la
commune, le peuple confirme ou rejette les décisions du sénat
et du roL Mais quand la cité eut remplacé la tribu, l'unité du
commandement parut moins nécessaire et la royauté de Tàge
héroïque tomba partout en désuétude, excepté à Sparte où elle
subsista sous forme d'une diarchie héréditaire. En général,
elle disparut progressivement, sans révolution. Tantôt la fa-
mille royale venant à s'éteindre n'était pas remplacée, tantôt
ontSstreignait le pouvoir royal, on substituait au titre roi celui
dbyGoogk
ABOLITION DE LA ROYAUTÉ. 2>9
d'archonte ou de prytane, puis celle magistrature suprême de-
venait élective et temporaire. La monarchie était antipathique
aux mœurs des Grecs. ATépoque où la décadence des républi-
ques commençait déjà, Aristote résumait ainsi les opinions de
ses compatriotes : « Il ne parait pas conforme à la nature qu'un
homme soit le maître de tous les citoyens, puisque la cité est
une réunion d'égaux. Les citoyens étant égaux par nature, il
est nécessaire qu'ils aient les mêmes droits et la]même dignité.
Selon la justice, ils ne doivent pas plus obéir que commander,
ils doivent commander et obéir chacun pour sa part C'est ce
qui constitue la loi, et la loi c'est l'ordre. Le gouvernement
de la loi est donc préférable à celui d'un des citoyens. » Il ex-
plique ensuite le caractère abstrait et universel de la loi, qui
l'élève au-dessus des passions et des intérêts. Il est vrai que la
loi ne peut s'appliquer à chaque cas particulier que par le mi-
nistère d'une magistrature, mais celte magistrature doit être
remplie par plusieurs et non par un seul, fût-il supposé ver-
tueux, « parce que, dit Aristote, deux honnêtes gens valent
mieux qu'un honnête homme ».
Un fait que personne n'a remarqué, et qui peut seul expli-
quer l'histoire des républiques anciennes, c'est que dans tou-
tes et à toutes les époques les fonctions politiques furent entiè-
rement gratuites. Ces fonctions ne pouvaient donc être confiées
qu'à des citoyens assez riches pour y consacrer tout leur temps.
11 en résulté que les royautés héroïques ont été abolies au
profit d'une classe relativement fort restreinte. Il n'y a d'ail-
leurs aucune raison de croire que le peuple se soit opposé à ce
changement ; l'hérédité généralement attachée au pouvoir
royal offrait de grands dangers. L'oligarchie, ou gouvernement
d'un petit nombre, remplaça la monarchie un peu plus tôt
dans certaines villes, un peu plus tard dans d'autres, sans
qu'on sache en général à quelle occasion et à quelle date eut
lieu ce changement de forme qui n'eut pas, comme dans nos
sociétés modernes, le caractère d'une révolution violente.
Les principaux chefs qui, dans l'origine, servaient de conseil
au roi se partagèrent les fonctions du gouvernement. Il y eut
séparation du pouvoir législatif et exécutif, le premier dévolu
à un corps collectif délibérant sur les affaires générales, le
dbyGoogk
250^ L'OLIGARCHIE.
second confié à des magistrats temporaires rendant des comp-
tes à l'expiration de leur charge. Ce système offrait plus de
garanties que le gouvernement mal défini des temps héroïques,
mais ces garanties n'étaient réelles que pour la classe diri-
geante; c'était devant elle que les magistrats étaient respon-
sables plutôt que devant le peuple, et souvent cette classe pré-
férait ses intérêts à ceux de la cité.
L'aristocratie fut d'abord territoriale. La masse du peuple se
composait de petits propriétaires ruraux qui cultivaient eux-
mêmes leurs champs, et de travailleurs libres qui cultivaient
ceux des autres pour un salaire. Les grands propriétaires,
qu'on nommait Gamores ou Géomores, selon qu'on parlait le
dialecte dorien ou le dialecte ionien, résidaient dans les villes.
En temps de guerre, c'étaient eux qui formaient la cavalerie.
En Euboia, on les appelait Hippobotes, éleveurs de chevaux.
Dans les Etats doriens, les familles des grands propriétaires des-
cendaient en général des conquérants; mais la population rurale
de l'Argolis et de la Mégaris n'était pas réduite à une condition
servile comme les Hilotes de Laconie. En Attique, la classe des
Ëupatrides, ou fils de bons pères, se composait, comme
celle des Patriciens à Rome, de familles autochtones possédant
les terres les plus fertiles. Par suite du développement du
commerce et de l'industrie, il se forma une bourgeoisie et une
classe de plus en plus nombreuse de marins et d'artisans.
Quant aux esclaves domestiques 4ui servaient les riches, c'é-
taient des barbares de toute sorte de races, achetés à prix d'ar-
gent et ne faisant pas partie de la cité.
Diffusion de la race grecque sur les c6tes de la Mé-
diterranée. — L'exiguïté du territoire de la Grèce y ramenait
très souvent le problème d'un accroissement trop rapide de la
population. Pendant toute la période ascendante de l'histoire
grecque, ce problème fut résolu par d'innombrables colonies.
Les plus anciennes, fondées dans les lies de l'Archipel et sur
les côtes de l'Asie Mineure, ont été énumérées dans un précé-
dent chapitre. Du huitième au sixième siècle avant notre ère,
les discordes civiles qui agitaient les cités eurent pour résultat
de nouveaux courants d'émigration qui se portèrent vers le
nord, sur les côtes de la Macédoine et de la Thrace, et vers
dbyGoogk
COLONISATION. 251
Fouest, sur les côtes de TEpire, de la Sicile et de l'Italie méri-
dionale. Dans le môme temps, les Grecs d'Asie couvrirent de
leurs comptoirs les côtes de la Propontis, du Pont-Euxin et du
marais Maiolis. Il y eut aussi des colonies en Libye, en Ibérie
et en Gaule ; la Méditerranée devint un lac grec.
Toutes les branches de la race hellénique, Achaiens, Dorions
et Ioniens d'Europe et d'Asie concoururent à cette œuvre de
colonisation dirigée par les cités commerçantes, Corinthe et
Mégare, Chalkis et Érélrie, Milet et Phokaia. II n'est pas tou-
jours possible d'établir une dlslinction entre les colonies fon-
dées par des mécontents qui cherchaient de nouvelles patries
et les comptoirs établis par des marchands qui voulaient don-
ner plus d'activité à leur commerce. Il est encore plus difficile
de tenir compte des oppositions de races mises à la mode par
Otlfried Millier, et de classer les colonies d'après leur origine.
La ville d'où partait un groupe d'émigrants était considérée
comme la métropole de la colonie qu'ils allaient fonder ; mais
ces émigrants appartenaient presque toujours à des races dif-
férentes et dans des proportions qu'il est impossible de con-
naître. L'esprit d'initiative, qui nous manque si absolument,
suffisait pour rassembler de divers pays de la Grèce des bandes
d'aventuriers qui cherchaient fortune ou qui avaient eu le
dessous dans les luttes civiles. On partait sur la foi d*un oracle
et on allait vers les terres inconnues, sous la protection des
Dieux de la patrie. Les uns avaient emmené leurs familles, les
autres, partis seuls, épousaient des femmes du pays où ils
s'élabhssaient. Quelquefois un roi barbare accueillait en
amis ces enfants perdus de la civilisation. Il y en avait qui
revenaient avec des cargaisons magnifiques et disaient à leurs
compatriotes : La place est bonne, accourez.
Colonies euboiennes et mégariennes en Thrace, —
L^oligarchie des villes ioniennes de Chalkis et d'Erélrie, dans
l'île d'Euboia, favorisait volontiers l'émigration des citoyens
pauvres. Des colonies furent fondées sur les côtes septentrio-
nales de la mer Egée occupées par des populations thraces. A
cette époque, la Macédoine ne s'étendait pas encore jusqu'à la
mer. Chalkis, la ville de l'airain, qui devait sa richesse à
l'exploitation des mines de cuivre de l'île d'Euboia, fut attirée
dbyGoogk
252 COLONIES EN THRAGE.
par les gisements métalliques de la Thrace. La péninsule qui
s'avance dans la mer entre le golfe Thermaïque et le golfe
dbyGoogk
L. M. — HiST. DES Grecs.
15
dbyGoogk
254 LUNDUSTRIE A CORINTHE.
Strymonien se couvrit d'établissements chalkidiens et prit de
là le nom de Chalkidique. Les Érétriens, qui se livraient sur-
tout à la pêche de la pourpre et à l'industrie des transports
maritimes, s'associèrent souvent à leurs voisins de Chalkis.
Mais des deux villes qui devinrent les plus célèbres dans cette
région, l'une, Potidée, sur l'isthme de Pallène, était une colo-
nie de Corinthe, l'autre, Olynthe, avait été fondée par la tribu
Ihrace des Boltiaiens, et c'est seulement à l'époque de l'inva-
sion des Perses qu'elle fut occupée par les Grecs de la Chalki-
dique. Stagira et Acanthos furent fondées sur la côte nord-est
du golfe Strymonien par les habitants de l'île d'Andros, qui
elle-même avait été colonisée par les Érétriens. Au delà de
l'embouchure du Nestos, commencent les établissements des
Grecs d'Asie, Abdéra, colonie de Téos, Maroneia, colonie de
Chios, Ainos, fondée par les Lesbiens, Sestos, autre colonie
aioliennesurlalongue péninsule appelée Chersonnèse de Thrace
et Périnthe, colonie des Samiens sur la côte thrace de la
Propontis. Enfin, les Mégariens qui, }\ cette époque reculée,
étaient des marins entreprenants, se firent jour au milieu des
établissements des Grecs d'Asie et fondèrent Chalkédon sur
la côte asiatique du Bosphore, ce qui les fit appeler les aveu-
gles, parce qu'ils n'avaient pas su voir que la côte opposée
était beaucoup plus avantageuse. Quelques années plus tard,
en 657, ils réparèrent cette erreur et fondèrent Byzance, sur la
Corne-d'Or, bras de mer où les bancs de thons du Pont-Euxin,
poussés par le courant, venaient s'offrir d'eux-mêmes aux
pêcheurs.
liUndustrie à Corinthe. — Les Bacchiades. - Ker-
kyra et Syracuse. — Pendant que Sparte, la grande cité
militaire, étendait sa domination sur un tiers du Péloponnèse,
Corinthe, qui ne possédait qu'une étroite langue de terre,
essaya de fonder un empire colonial. Elle envoyait à Potidée-
des gouverneurs appelés «Tn^ïiiAioup^cî ; mais ce système, qui a
réussi dans les colonies de l'Europe moderne, était contraire
au caractère indépendant de la race grecque, et l'exemple de
Kerkyra, qui fut dès l'origine en lutte avec sa métropole, dut prou-
ver aux Corinthiens que leurs colonies ne subiraient pas une
tutelle onéreuse. La royauté des H èracléides de Corinthe avait
dbyGoogk
LES BACCHIADES. 2o5
été abolie, selon Pausanias, à la neuvième génération après
Alétès, et remplacée par une magistrature annuelle; mais ceux
qui Texerçaient, sous le titre de Pry tanes, étaient pris exclusi-
vement parmi les Bacchiades, puissante oligarchie qui dura
près de deux cents ans. Les Bacchiades appartenaient à une
môme famille ou à un certain nombre de familles unies par
des liensde parenté et ne contractant de'mariages qu'entre elles.
Ruines d'un ancien temple à Corinthe.
Au lieu de s'endormir et de décliner comme les aristocraties
qui n'ont pour base que la propriété foncière, l'oligarchie des
Bacchiades s'enrichit et enrichit Corinthe par le commerce
maritime et toutes les formes de l'industrie. On attribue aux
Corinthiens l'invention de la roue à potier et les premiers
progrès de la peinture sur les vases d'argile. Il reste sur l'em-
placement de Corinthe quelques colonnes d'un temple qu'on
regarde comme le plus ancien exemple encore subsistant de
l'architecture dorique. L'airain de Corinthe a été renommé
dbyGoogk
256 COLONIES CORINTHIENNES.
dans toute l'antiquité. C'est à Coriiithe que s'introduisirent les
premières améliorations dans l'art de construire les navires.
Hérodote nous apprend que le Corinthien Ameinoclès cons-
truisit au huitième siècle la première trière, ou galère à trois
rangs de rames; jusqu'au seizième siècle de notre ère, la trière
ou trirème, est restée le type du vaisseau de combat sur la
Méditerranée.
On pratiqua une route unie appelée Diolcos, par laquelle les
vaisseaux étaient traînés sur des rouleaux d'une mer à l'autre.
Le transport assurait aux Corinthiens des revenus considé-
rables et faisait de leur ville la principale station de commerce
entre l'Orient et l'Occident, Le retour périodique des jeux
isthmiques augmentait Taffluence des étrangers et l'activité
du commerce. Malheureusement, il parait que les progrès du
luxe et les relations avec l'Asie exercèrent une influence
fâcheuse sur les mœurs; un fragment de Pindare sur les
hiérodules de Corinthe atteste que le culte d'Aphrodilè avait
fait des emprunts à celui de l'Aslartè sidonienne. La classe
dirigeante donnait, comme toujours, le mauvais exemple. Une
affaire scandaleuse, qui avait entraîné la mort d'un enfant du
peuple, produisit un mécontentement général. Le père de la
victime s'était tué, ne pouvant obtenir justice. Les Baochiades
furent obligés d'éloigner le coupable» nommé Archias, qui était
un des leurs. On profita de l'occasion pour se débarrasser
d'une partie de la population ouvrière, et on mit Archias à la
tète d'une troupe d'émigrants qui partirent pour la Sicile, où ils
fondèrent Syracuse (750).
Les trajets maritimes se faisaient en suivant les côtes de
façon à ne perdre la terre de vue que le moins longtemps
possible. Archias et ses compagnons se dirigèrent d'abord vers
l'île de Kerkyra, le point le plus rapproché de la côte d'Italie.
Chersicratès, un Bacchiade qui accompagnait Archias, s'y
arrêta avec quelques-uns des émigrants. Kerkyra, aujourd'hui
Corfou, la plus septentrionale des îles ioniennes, était re-
gardée dans l'antiquité comme la même que la Schéria home-
rique, dont les habitants, les Phaièkes, sont représentés dans
l'Odyssée comme de hardis navigateurs, et c'est à ce fait que
Thucydide attribue la supériorité de la marine de Kerkyra,
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COLOiNIES GRECQUES EN ITALIE. 257
C'était probablement une population liburnienne, car les
Lihurnes continuèrent à habiter les lies de TAdriatique le long
de la côte de rillyrie. Il y avait aussi à Kerkyra des Euboiens
d'Erétrie qui furent expulsés ou absorbés par les Corinthiens.
Ceux-ci fondèrent une ville du m6me nom que l'Ile et Tancienne
population leur fournit des matelots exercés. La nouvelle
colonie eut bientôt une marine égale à celle de sa métropole.
Leur rivalité, qui fut plus tard Foccasion de la guerre du Pélo-
ponnèse, 8*était produite de très bonne heure. La première
bataille navale connue de Thucydide fut livrée en 664 entre les
Kerkyraiens et les Corinthiens. Le principal motif de leur
jalousie réciproque était une concurrence commerciale; les
Kerkyraiens pouvaient fournir le vin et l'huile aux Epirotes en
échange des peaux, de la laine et du bétail, plus facilement et
à meilleur compte que les Corinthiens» Dans Tintervalle de
leurs querelles, Corinlhe et Kerkyra formèrent de concert
plusieurs établissements : ApoUonia et Epidamne, appelée plus
tard Dyrrachion, sur la côte illyrienne, au nord du cap Acroké-
raunien ; Leucas, Anactorion et Ambrakia sur le territoire des
Acarnanes ; mais ces colonies sont rapportées à l'époque des
tyrans de Corinthe.
Golonies grecques en Italie. — Les anciennes popu-
lations de l Italie étaient en partie les mêmes que celles de la
Grèce et des côtes de l'Asie mineure. Les Oinotriens, qui
paraissent avoir beaucoup d'affinité avec les Epirotes, les
Sikels, qui avaient passé très anciennement d'Italie en Sicile,
semblent pouvoir se rattacher à lasouche pélasgique. L'Odyssée
nomme les Sikels sans désigner le pays qu'ils habitent, quoique
la Sicile y soit mentionnée sous le nom de Thrinakia. Mais les
connaissances géographiques d'Homère ne dépassent pas les
limites de la Grèce européenne et asiatique : au delà c'est le
pays des fables. Au commencement de la période historique,
la mer Adriatique, la mer de Sicile et la mer Tyrrhénienne
étaient aussi peu connues etaussi redoutées que lePont-Euxin.
Quand les Grecs surent qu'il y avait à l'Occident des pays plus
fertiles que le leur, et que les habitants n'étaient pas des
Kyclopes et des Laistrygons anthropophages, ils s'y établirent
en foule, et leurs colonies fut si nombreuses que le midi de la
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25S COLONIES GRECQUES EN ITALIE.
péninsule italique reçut le nom de Grande-Grèce. La plus
ancienne et longtenrips la seule ville grecque dans ces parages
futKymè, en Campanie, plus connue sous sa forme latine de
Cumae. Elle fut fondée, disait-on, un demi-siècle après le
retour des Hèracléides, par Mégasthénès de Chalkis et par
Hippoclès de Kymè en Aiolis, et ils convinrent, selon Strabon,
que la nouvelle ville prendrait le nom de Kymè, et que
Chalkis serait considérée comme sa métropole. Les colons
trouvèrent une source de richesse dans l'incomparable fertilité
des champs Phlégraiens, dans les poissons que le lac Lucrin
fournissait en abondance et surtout dans l'affluence des
pèlerins qui venaient consulter la Sibylle prophétique ou
évoquer les morts près du sombre lacdeFAverne. Les rapports
de la Kymè campanienne avec Rome, dès le temps des rois,
introduisirent chez les Romains les légendes de la guerre de
Troie et en particulier celle d*Enée.
Jusque vers le milieu du huitième siècle, la Kymè campa-
nienne, à laquelle on peut laisser son nom latin de Cumae, fut
la seule colonie grecque dans les régions occidentales. Après
avoir reçu de nouveaux colons de Chalkis, d'Erétria et .même
de Samos, elle devint la métropole de Néapolis (Naples). A une
époque incertaine, des pirates de Cumœ enlevèrent aux Sikels
le port de Zanclè, aujourd'hui Messine, sur le détroit qui
sépare la Sicile de l'Italie. Cette occupation fut régularisée par
l'arrivée de nouveaux colons venus de Chalkis et d'autres villes
d'Euboia. En face de Zanclè, de l'autre côté de ce détroit
où ils retrouvaient le flux et le reflux de TEuripe, les Euboiens
bâtirent une ville qu'ils appelèrent Rhègion, cassure, parce
que la Sicile leur semblait avoir été détachée du continent par
l'irruption des eaux (720). Selon Pausanias, des Messéniens
se joignirent aux colons Chalkidiens de Rhègion. C'était l'époque
des guerres de Messénie, et c'est peut-ôlre aux mouvements de
population qui en furent la suite qu'il faut rattacher la fonda-
lion des villes achaiennes de Sybaris et de Croton (710). Les
habitants de la Messénie et de la Laconie qui ne voulurent pas
subir la domination despotique de Sparte se retirèrent en
Achaie, et là, l'insuffisance du territoire provoqua un mouve-
ment de colonisation analogue à celui qui avait poussé vers
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COLONIES GHEGQUES EN ITALIE. 259
l'Asie Mineure les Ioniens réfugiés en Attique à Tépoque de
l'invasion dorienne. Les Spartiates prirent part à ce mouve-
ment par suite des divisions que se produisirent entre eux vers
la môme époque. En 707, trois ans après la fondation de
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260 COLONIES GRECQUES EN ITALIE.
Croton, lesParthénies conduits par Phalanthos vinrent s'établir
à Tarente comme on l'a vu au chapitre précédent. Aristote
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262 COLONIES GRECQUES EN SICILE.
explique par une cause semblable la fondation en 682 de la
Locres italique appelée Epizéphyrienne parce qu'elle était
voisine du cap Zéphyrion. Les Locriens avaient été auxiliaires
de Sparte pendantla première guerre de Messénie ; leur absence
prolongée amena des mésalliances entre les fem mes Locriennes
et des hommes de condition inférieure. De là des discordes
civiles qui se terminèrent par une émigration. Pausanias attribue
aux Spartiates la fondation de Locres et de Croton.
La plus importante de ces colonies était Sybaris. Des Treize-
niens s'étaient joints aux Achaiens qui la fondèrent; mais ils
furent expulsés par la suite» etcette injustice, disaient les Grecs,
attira plus tard la.colère des Dieux sur Sybaris qui fut détruite
par les Crotoniates. Le développement rapide et l'étonnante
prospérité de Sybaris et de Croton ontfait supposer qu'avant de
devenir rivales ces deux villes avaient longtemps vécu en paix.
Chacune d'elles étendit sa domination d'une mer à l'autre
dans la largeur de la péninsule de Calabre. Les Crotoniates y
fondèrent Térina, les Sybarites, Laos et Poseidonia, plus
connue sous son nom latin de Pœstum, dont les magnifiques
ruines attestent la grandeur de sa métropole. Les Locriens
s'étendirent aussi en travers de la péninsule et fondèrent
Hipponion. Les indigènes Sikels et Oinotriens formaient une
population de Periœkes ruraux sous la suzeraineté des Cités
grecques. Les villes de Siris, appelée plus tard Hèraclée, et de
Métapon te, entre le territoire de Sybaris et celui deTarente;
Kaulonia, Skylletion et Pétilla, sur le territoire de Croton, pré-
tendaient faire remonter leur origine aux temps de la guerre
de Troie. Probablement ces villes s'étaient formées par des
émigrations successives de colons grecs, principalement des
Achaiens. Une sorte de fédération commerciale paraît avoir
existé entre les villes grecques du golfe de Tarente, car, pendant
une période qui a duré au moins jusqu'à la ruine de Sybaris,
elles ont frappé des monnaies qu'on nomme incuses, c'est-à-
dire que l'empreinte est en relief d'un côté, en creux de l'autre.
Ce caractère ne se trouve dans aucune autre monnaie
grecque.
Colonies grecques en Sicile. — Des colonies grecques
s'établirent en Sicile à peu près à la môme époque que dans
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COLONIES GHECQUES EN SICILE. 263
l'Italie méridionale, et en Sicile, comme en Italie, ce furent les
Chalkidiens d'Euboia qui eurent Finitiative du mouvement
colonial. Un Athénien, nommé Théoclès, jeté par la tempête
sur les côtes de Sicile, constata les avantages du pays et la
faiblesse de ses habitants. À son retour, il engagea ses com-
patriotes à s'y établir, mais il ne put les y décider. Il eut plus
de succès à Chalkis, où il rassembla une troupe d'émigrants.
Des Naxiens s'y joignirent en si grand nombre, que la colonie
qui fut fondée sur la côte orientale de Sicile prit le nom de
Naxos (735). Ce fut Tannée suivante que les Corinthiens
conduits par Archias occupèrent sur la môme côte, mais plus
au sud, l'îlot d'Ortygie et y fondèrent Syracuse, qui étendit
plustard*ses limites, quand elle fut devenue riche et puissante ;
aujourd'hui, la ville moderne est réduite à la petite île qui avait
été son berceau. Quatre ans après la fondation de Syracuse, les
Chalkidiens de Naxos s'établirent dans la fertile plaine de
Léontini qu'ils enlevèrent aux Sikels indigènes, et à Catane,
au pied de l'Etna. Entre Syracuse et Léontini, des colons de
Mégare, conduits par Lamis, débarquèrent en Sicile et après
bien des vîscicitudes, firent alliance avec le roi d'une tribu de
Sikels, nommé Hyblon, qui les invita à s'établir sur son terri-
toire. Ils acceptèrent et fondèrent Mégara Hyblaia (728). Ainsi
toute la côte orientale avait été occupée en quelques années
par des colonies grecques. En 690, quarante-cinq ans après la
fondation de Naxos, des colons rhodiens et crètois fondèrent
Gela sur la côte méridionale. Puis il y eut des colonies de
colonies : Syracuse fonda Acrai (664), Casmenai (644), Cama-
rina (599). En 630 Megara Hyblaia avait fondé Sélinonte. Enfin
Agrigente, quePindare appelle la plus belle des cités mortelles,
fut fondée en 582 par des colons de Gela. Himéra qui fut
pendant longtemps la seule ville grecque de la côte septen-
trionale de lîle, fut fondée à une date incertaine par des
Chalkidiens de Zanclè et des Syracusains exilés.
A l'époque où les premiers colons grecs abordèrent en Si-
cile, la plus grande partie de l'île, à l'est des monts Hèraiens,
était occupée par les Sikels, qui furent graduellement repoussés
des côtes et refoulés dans l'intérieur des terres. Ils étaient très
inexpérimentés en fait de navigation, et môme dépourvus de
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266 COMPTOIBS SUR LE PONT-EUXIN.
vaisseaux. On dit que lorsqu'ils avaient été chassés du conti-
nent par les Osques ou Ausones, ils avaient profité d'un vent
favorable pour passer le détroit sur des radeaux. A l'ouest des
monts Héraiens, habitaient les Sicanes, peuple de race ibéri-
que qui occupait la Sicile entière avant l'arrivée des Sikels.
Agrigente et Sélinonte étaient sur le territoire des Sicanes. A
l'extrémité occidentale de l'île, les villes d'Eryx et de Ségeste
étaient habitées par les Élymes, population ayant avec les
Grecs beaucoup d'affinité et qu'on disait issue des fugitifs de
Troie mêlés à des Phokaiens et aux compagnons de Philoctète.
Quant aux Phéniciens ou Carthaginois, ils avaient autrefois,
dit Thucydide, occupée les hauteurs sur toutes les côtes de
Sicile et les petits îlots voisins, pour faire le commerce avec
les Sikels, mais l'arrivée des colons grecs, marins comme
eux, leur créait une concurrence redoutable, fis abandon-
nèrent les comptoirs qu'ils avaient à l'orient et au sud de l'île,
concentrèrent leurs forces dans la partie occidentale, la plus
rapprochée de Carthage, et s'établirent solidement dans les
trois ports de Motyè, de Soloeis et de Panormos, qui aujour-
d'hui, sous le nom de Palerme, est la capitale de la Sicile, Peu
à peu, les populations de l'intérieur, et même les Carthagi-
nois subirent l'influence de la civilisation hellénique ; ainsi
il y a des monnaies de Panormos qui, malgré leurs légendes
en caractères phéniciens, sont évidemment d'un travail grec
et ne le cèdent pas, sous le rapport de l'art, à celles des villes
grecques de la Sicile.
Comptoirs milésiens sur le Pont-Euxin. — Pendant
que les Grecs d'Europe répandaient leurs colonies sur les
côtes de l'Italie méridionale et de la Sicile, les Grecs d'Asie
s'ouvraient des voies nouvelles dans les régions septentrionales,
dont les habitants encore sauvages ignoraient la valeur des
produits de leur sol. Les villes d'ionie, dont le territoire res-
serré le long des côtes ne pouvait s'étendre dans l'intérieur du
pays occupé par les Lydiens, cherchèrent de très bonne heure
à s'enrichir par la pêche, l'industrie et le commerce maritime.
Malgré leurs rivalités, leurs dissensions et leurs luttes avec
les populations indigènes, elles enlevèrent aux Phéniciens le
commerce de la mer Egée, puis celui du Pont-Euxin. Milet, avec
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COMPTOIRS SUR LE PONT-EUXIN. 267
ses quatre ports et ses nombreux vaisseaux, devint, comme
cité marchande^ aussi importante que Tyr. Le tissage des
laines de Phrygie,la teinture des étoffes, la fabrication des tapis
occupaient ses ouvriers. La classe dirigeante se composait de
riches armateurs qui délibéraient sur les afTaires publiques à
bord de leurs vaisseaux. Les matelots se lançaient sur les mers
du Nord à la pêche du thon. Des stations navales furent
établies à Abydos sur THellespont, à Kyzikos sur Tisthme d'une
presqu'île de la Propontis. Au delà des rochers du Bosphore,
les marins de Milet voyaient s'ouvrir cette vaste mer inquié-
tante et brumeuse qu'ils appelaient hospitalière, eC^etvcç, par
politesse, pour se la concilier. Ils s'y engagèrent résolument et
furent bien payés de leur audace. 11 y avait là d'immenses
plaines arrosées par des fleuves navigables, des champs cou-
verts d'épis, des prairies pleines de moutons, et dans les forêts
vierges une provision inépuisable de bois de construction
pour les navires.
Il est vrai que ces trésors étaient gardés par des tribus fa-
rouches, immolant les étrangers à leur Déesse, disait la lé-
gende d'Iphigénie. Mais ils se laissèrent apprivoiser par les
vins de l'Archipel. Dans la région orientale, les eaux du Phase
roulaient des paillettes d'or qu'on arrêtait avec des toisons
étendues au fond de son lit; de là venait sans doute la légende
de la toison d'or ; les Grecs retrouvaient partout les souvenirs
de Jason et des Argonautes. Sur la côte méridionale on installa
des observatoires et des guetteurs pour épier le passage des
bancs de poissons qui venaient du Nord et contournaient la
côte. Sinope, la plus importante des pêcheries milésiennes
dans ces parages, était le point où aboutissait la grande roule
menée deNinive par-dessus l'Euphrate à travers l'Asie Mineure
Les Grecs y achetaient des métaux et des esclaves et y ven-
daient leurs poisons séchés sur place, qui formaient la
principale nourriture des gens du peuple dans les villes
syriennes de la Gappadokie.
11 est difficile d'assigner une date précise aux établisse-
ments des Milésiens. G'étaient plutôt des comptoirs commer-
ciaux que de véritable colonies. « On se contenta d'abord,
dit £• Gurtius, d'installer sur le rivage des marchés volants ;
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268
COMPTOIRS SUR LE POOT-ÉDXtN.
puis on 8*enteiidit avec les indigônei et on acquit aiil^i siii* cen
plages d'outre-mer des marchés à démenti avec des maga-
sins. Les maisons de commerce y eurent leuts agents qui
opéraient le débarquement et la vente, surveillaient led dépôts
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COMPTOIRS SUR LE PONT-El XIN.
269
de marchandises et restaient sur les lieux, même pendant la
morte saison. Bien des stations de cette espèce furent aban-
données après essai. D'autres, au contraire, leur situation
s'étant trouvée avantageuse au point de vue des bénéfices
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280 DÉVELOPPEMENT DE I/ART GREC.
bandes circulaires superposées, généralement dei cerfs et des
biches attaqués par des lionnes ou des panthères ; quelquerois
aussi des cygnes, des sangliers ou des types hybrides, Sphinx,
Griffons, Harpyes ou Sirènes, associant les formes d'un qua-
drupède à celles d'un oiseau ou à la forme humaine. Ces
types, qui se rattachent, les uns à la cosmogonie chaldéenne,
les autres à l'Egypte, n'étaient pour les Grecs que des formes
décoratives. Ne comprenant pas cette symbolique étrangère,
ils inventaient pour l'expliquer des contes qu'ils rattachaient
à leurs traditions. De là les légendes d'Œdipe et de la Sphinx,
d'Odysseus et des Sirènes. Ils commencèrent par copier ce
qu'ils voyaient sur les étoffes babyloniennes, mais peu à peu,
leur sentiment artistique transforma ces types de monstres en
créations idéales. Ainsi, dans les plus anciens monuments, le
Kentaure est lin homme au dos duquel s'attache le train de
derrière d'un cheval; dans la grande époque de l'art, c'est un
cheval dont l'encolure est remplacée par le haut du corps
d'un homme, association tout aussi impossible physîologique-
ment, mais admirable au point de vue esthétique. On aban-
donna les types qui ne se prêtaient pas à des transformations
aussi heureuses, par exemple celui des Sirènes, emprunté aux
Égyptiens, qui représentaient l'âme par un oiseau à tète hu-
maine. Les artistes modernes n'ont pas repris ce type disgra-
cieux de la femme-oiseau. Ils le remplacent, dans la représen-
tation des Sirènes, par le beau type de la Tritonide, ou femme-
poisson. C'est une erreur mythologique, mais ils ont raison
sous le rapport du goût. Remarquons aussi que l'art grec a su
associer d'une façon très heureuse les ailes de l'oiseau à la
figure humaine : les types admirables d'Ëros et de la Victoire
ont été adoptés par l'art chrétien dans la représentation des
Anges.
Développement de Tart grec. — Homère parle d'étoffes
et de vases venant de Sidon, des belles armes données à Aga-
memnon par Kinyras, roi de Kypros, mais il décrit aussi des
ouvrages exécutés par des Grecs, par exemple la tapisserie
d'Hélène représentant ses propres aventures, la toile de Péné-
lope, le costume d'Odysseus, etc. La description du bouclier
d'Achille, dans Tlliade, cello du bouclier d'Héraclès par Hé-
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L'ARCHITECTURE. 281
siode ne peuvent être prises que pour des œuvres d'imagina-
tion, mais les éléments de ces descriptions ont dû être, em-
pruntés à des ouvrages réels que les rhapsodes et leurs audi-
teurs avaient souvent sous les yeux. Les nombreux objets d'art
trouvés à Mylcènes et décrits dans un des précédents chapitres
ont un caractère parfaitement original, et si, comme on le
prétend, l'Orient a exercé une influence sur l'art grec à une
époque postérieure aux temps héroïques, il nous est difficile
d'en suivre les traces, car, à l'exception des monnaies et dés
vases peints, il ne reste qu'un très petit nombre d'échantillons
de Vart grec entre l'âge héroïque et les guerres médiques. Sur
les origines de la plastique et de l'industrie des métaux, nous
sommes réduits à des légendes mythologiques comme celle de
Dédale, à des contes puérils comme celui du potier Siicyonien
Dibutade couvrant de terre glaise une silhouette tracée par sa
fllle sur un mur, ou a quelques noms propres qu'on ne peut
pas toujours classer à des dates précises. On nous dit par
exemple que Glaucos de Chios découvrit l'art de souder le fer ;
Hhoicos et son fils Théodoros, celui de fondre le cuivre ou
l'airain et de le couler dans un moule. On place ces décou-
vertes un peu avant l'an 600 avant J.-G. Le temple d'Hère à
Samos, celui d'Artémis à Éphèse sont attribués, le premier à
Rhoicos et à Théodoros, le second à Métagénès et à son fils
Chersiphon de Gnossos en Grète. Parmi les temples dont il
subsiste encore des restes, on regarde comme les plus ancietls
celui de Gorinthe, dont quelques colonnes sont encore debout,
celui d'Assos en Aiolis, dont le Musée du Louvre possède des
fragments; trois temples assez bien conservés de Poseidonia
ou Pœstum, colonie de Sybaris, et le plus grand des temples de
Sélinonte. Ges monuments sont d'ordre dorique, le temple
d'Éphèse était d'ordre ionique, mais il ne faut pas attribuer un
sens géographique ou ethnographique à ces désignations em-
ployées par Vitruve, qui d'ailleurs fait preuve d'une ignorance
inexplicable. Les règles qu'il donne pour l'architecture dorique
ne répondent qu'à des monuments de l'époque romaine.
Caractère spontané de Parchitecture grecque « — Le
temple grec n'est que l'imitation en pierre d'une cabane de
bois. Les cabanes qu'habitent encore aujourd'hui les paysans
16.
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L'ARCHITECTURE. 283
de l'Asie Mineure, notamment de la Lykie, peuvent donner
ridée des premières habitations des Grecs. Les demeures des
rois et celles des Dieux ressemblaient aux autres maisons,
seulement elles étaient plus grandes et plus ornées. Des troncs
d'arbres posés sur un sol uni supportent un toit de charpente
qui abrite de la pluie; pour se garantir du vent et du froid, on
élève un mur derrière les piliers qui servent de support, ou
dans leurs intervalles, en y ménageant une porte pour entrer
et sortir : tels sont les éléments de la cabane qui a servi de
modèle au temple. La forme des temples était rectangulaire ;
de chaque côté, une poutre transversale, l'architrave, portée
par les colonnes, supportait à son tour les solives du plafond
maintenues par la corniche saillante, sur laquelle reposait
l'extrémité des chevrons du toit. La double inclinaison du toit
sur les deux grands côtés du rectangle, pour l'écoulement des
eaux pluviales, laissait au-dessus des colonnes, sur les deux
etits côtés, un vide triangulaire, le fronton, que les Grecs
comparaient à un aigle aux ailes éployées. Le chapiteau formant
la partie supérieure des colonnes en augmentait la portée et
ménageait la transition entre leurs ligues verticales et la ligne
horizontale de l'entablement.
La distinction entre les trois ordres de l'architecture grecque,
le Doriqiie, l'Ionique et le Corinthien, est fondée sur certaines
différences de proportions et d'ornementation dans rentable-
ment, les colonnes et surtout leurs chapiteaux. Dans l'ordre
Dorique, le plus simple et probablement le plus ancien des trois
ordres, les colonnes reposent immédiatement sur le dallage du
soubassement, comme des arbres sur le sol. Le fût, aminci
progressivement comme le tronc d'un arbre, est creusé,
parallèlement à sa hauteur, de cannelures concaves à arêtes
vives. Au-dessus d'une architrave unie, les triglyphes à
entailles perpendiculaires, représentent la saillie des solives;
leurs intervalles forment les métopes, c'est-à-dire les fenêtres.
Dans la colonne ionique, le fût, plus élancé qne celui de la
colonne dorique, repose sur une base formé de deux tores, ou
bourrelets circulaires séparés pair un intervalle concave.
L'arête des cannelures est légèrement aplatie; le chapiteau
forme de chaque côté du fût, dans le sens de l'architrave, une
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2«4 L'ARCHITECTURE.
duubl6 saillie qui semble Un enroulement d'étoffe étranglé au
milieu par ude corde « L'architrave, formée de trois poutres
superposées^ porte^ au lieu d'une alternatice de triglyphes et
de métopes, une frise unie, et fut plus tard décorée de bas-
reliefs.
L'ordre Corinthien, qui n'est qu'une forme plus récente de
rionique, est caractérisé par son magnifique chapiteau de
feuilles d'acanthe. On en attribue l'invention au sculpteur
Callimaque ; on a môme raconté une petite anecdote à ce
sujet : une corbeille d'offrandes sur le tombeau d'une jeune
fille, un chardon écrasé repoussant à l'entour, le sculpteur
passant par là et y trouvant un motif d'ornementation. En
réalité, l'architecture et la décoration sont l'œuvre collective et
anonyme des foules, comme les fables religieuses et les légendes
épiques. La volute ionique, le chapiteau corinthien, et toute
la décoration architecturale des Grecs sont des créations spon-
tanées. Les jours de fêle, on ornait^e draperies et de fleurs
les autels, les tombeaux^ les chapelles rustiques. Puis on
roulait les tapis de chaque côté de la stèle ou du cippe funé-
raire, et cela formait la volute ionique. Les chapiteaux des
temples étaient entourés de feuillages qu'on retenait avec des
cordes ou des fils de Ter; c'est ce qui explique les trois entailles
circulaires en haut du fût de la colonne dorique. Ces feuillages
imités en pierre devinrent le chapiteau corinthien. On accro-
chait aux frises les crânes des bœufs offerts en sacrifice, ou les
fioles qui servaient aux libations; on faisait courir le long de
la corniche des guirlandes de feuilles alternées; on entourait
les colonnes de joncs tressés, de colliers de graines, on
attachait des palmeltes aux angles des frontons. Tout cela fut
reproduit par la plastique et par la peinture dans les temples
de bois, puis par la sculpture dans les temples de pierre.
L'architecture polychrome remplaça cette décoration passagère,
qu'il fallait sans cesse renouveler, par une décoration perma-
nente, plus régulière, mais s'efforcent de reproduire des élé-
ments empruntés àla nature. Le travail de l'argile avait pré-
cédé le travail plus difficile de la pierre et du marbre. Les
acrotères des frontons, les antéfixes de la toiture et môme les
bas-reliefs des métopes et de la frise furent d'abord en terre
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LA SCULPTUBE. 285
cuite. Quand les cités enrichies par le commerce voulurent
élever des monuments plus durables avec des matériaux plus
précieux, les formes ornementales n'étaient plus à créer ; on
ne demandait aux artistes qu'une exécution plus parfaite, et
ils étaient préparés à ce travail par l'épuration du goût qui ré«
suite de la pratique du destin.
Origine indigène de la scnlpinre grecque, -r- Les
temples grecs n'étaient pas comme les temples égyptiens des
espèces de monastères habités par les prêtres, ou des lieux de
réunion pour la prière, comme les églises chrétiennes et les
mosquées musulmanes, c'étaient les demeures des Dieux,
6iMv {iowo{p«>v tipcl ii^kct. Il était donc naturel d'y établir des
signes permanents de leur présence. Ces signes matériels
n'étaient pas considérés comme les portraits des Dieux; ils
étaient simplement destinés à les rappeler à la pensée, ils
tenaient la place des maîtres invisibles de ces demeures sacrées»
Pausanias dit avoir vue à Pharai, en Achaie, une trentaine de
piliers de pierre, honorés comme statues des Dieux, et il
ajoute que dans l'origine, tous les Grecs représentaient les
Dieux de cette manière. Aux carrefours, à l'intersection des
routes, à la limite des champs, on élevait des piliers quadran«
gulaires consacrés h Hermès. Cet usage remontait à l'époque
pelasgique, et il y en avait un si grand nombre que le nom
d'Hermès, le Terminus des Latins, est devenue un mot géné-
rique pour désigner ces images primitives. 11 ne fallait pas
beaucoup d'efforts pour ajouter une tête et des bras grossière*
ment taillés à ces piliers de bois ou de pierre qu'on habillait
ensuite comme des poupées. Pour les revêtir des attributs dis-
tinctlfs de la divinité qu'ils devaient représenter, il fallait bien
leur donner une sorte de forme humaine, on en faisait des
mannequins, et peu à peu de véritables statues. La nécessité
de réparer ces vieux simulacres sans les détruire, de les imiter
quand il fallait les renouveler, donna l'idée d'ajouter, à des
corps en bois revêtus de riches étoffes, des têtes, des pieds et
des mains en marbre ou en ivoire, puis de remplacer les étoffes
elles-mêmes par des métaux précieux. Ainsi se développa à
côté de la sculpture, une branche importante de la Toreutique,
le statuaire chryséléphantine, qui devait se marier parfaite-
dbyGoogk
286 I A SCULPTURE.
ment avec rarchilecture polychrome des temples, et qui par-
vint, au siècle de Périclès, à son plus haut degré de perfection ;
mais on n'en peut parler que d'après les témoignages des an*
ciens, car il n'en reste malheureusement aucun vestige.
Les Grecs attribuaient à Dédale les statues de bois (Ço'av»),
d'un travail archaïque. Le nom de Dédale, qui signifie indus-
trieux, n'est* qu'une personnification des premières écoles
d'art. En Atlique, des familles de sculpteurs, celle de Socrale
entre autres, faisaient remonter leur généalogie à Dédale.
Les sculpteurs d'Aigine rattachaient la leur à Smilis. L'école
de Sikyone passait pour avoir été fondée par Dipoinos et
Skyllis de Crète, qu'on place vers 580 ei qui, selon Pline, se
firent les premiers une réputation par des statues de marbre.
On a aussi attribué à Boupalos de Chios la substiluiion du
marbre à la brique dans les sculptures des frontons. Mais quel-
ques noms d'artistes dont nous ne pouvons juger les œuvres
sont moins instructifs que les échantillons malheureusement
très rares qui nous sont parvenus de la sculpture archaïque.
Après les Lions de Mykènes, qui appartiennent à la période
préhistorique, les plus anciens monuments qu'on connaisse de
la sculpture grecque sont deux métopes du Musée de Palerme
trouvées dans les ruines de l'acropole de Sélinonte. Elles sont
ornées de bas-reliefs qui ont été peints et qui représentent,
Tun Perseus, coupant la tôte de la Gorgone en présence
d'Athènè, l'autre Héraclès, portant sur ses épaules lesKercopes
enchaînés. L'exagération des muscles, les formes dures et
trapues ont fait rapprocher ces bas-reliefs de ceux de Ninive,
mais il est bien difficile de croire à des communications entre
la Sicile et l'Assyrie. Les proportions des figures dans ces deux
métopes rappellent quelques monuments de l'art étrusque,
tandis que les proportions toutes différentes de l'Apollon de
Ténéa au Musée d'Athènes, l'ampleur des cuisses, la finesse de
la taille, la maigreur des jambes, se retrouvent dans les pein-
tures des vases grecs de vieux style, où les figures sont noires
sur fond rouge. On peut encore ranger parmi les sculptures
grecques les plus anciennes, les bas-reliefs du temple d'Assos
qui sont au Musée du Louvre, ainsi qu'un fragment de bas-relief
trouvé à Samothrace et représentant Agamemnon, Talthybios
dbyGoogk
LA SCULPTUUE.
287
et Epéios ; le bas-relief d'Aristoclès, connu sous le nom de
soldat de Marathon, au musée d'Alhènes; les statues assises
Héraclès et les Kcicopcs. Méiope d'un temple
de Sélinonle. (Musée de Paierie.)
Le soldat de Marathon.
(Musée d'Athènes)
Bas-relief trouvé à Samothrace.
(Muséj du Louvre.)
qui bordaient la voie sacrée des Branchides, près de Milet, et
qui sont au Brilish Muséum. Cette attitude, qui est aussi celle
de l'Athènè d'Endoios, devait être fréquente dans les statues
dbyGoogk
Î88 PEINTURE. — POÉSIE LYRIQUE.
primitives, puisque Homère parle du voile déposé par les
femmes Troyennes sur les genoux d'Athènè. Ainsi s'explique
rexpression homérique : « Gela est sur les genoux des
Dieux. »
La peintaré. — La poésie lyrique. — Outre les vases
peints, ce que nous connaissons de la peinture des Grecs
avant le temps de Pompéi et d'Herculanum, se borne à quelques
fragments d'ornementation polychrome trouvés dans les ruines
de Sélinonte et de Métaponte, et à deux ou trois peintures
murales provenant des tombeaux de Pœstum et de Nola* Ges
peintures ressemblent beaucoup à celles des nécropoles
étrusques qui sont au Louvre. Les figures sont toutesau même
plan et colorées à teintes plates, sans ombres ni lumières, et sur
fond uni. Sauf la diversité des tons, qui se réduisent d'ailleurs
à trois ou quatre, cela diffère peu de la peinture monochrome
des vases. Quant à Fart que les Grecs mettaient au-dessus de
tous les autres, la musique, nous sommes réduits à quelques
noms propres et à des renseignements techniques asses diffi-
ciles à comprendre. Nous ne sommes guère plus riches sous
le rapport de la poésie lyrique, genre très estimé des Grecs et
qui participait à la fois de la musique et de la poésie. De tous
les poètes lyriques antérieurs à Pindare, il ne nous est parvenu
qu'un petit nombre de fragments très courts et en général
insignifiants. Mais en eussions-nous davantage, nous ne
pourrions nous faire une idée de l'impression que pouvait
produire sur les Grecs une poésie où la métrique, fondée prin-
cipalement sur des combinaisons variées de syllabes lon-
gues et de syllabes brèves, avait plus d'importance que le
sens des paroles. Dans les compositions lyriques, la poésie
était inséparable de la musique et de la danse. Elles n'étaient
pas destinées à être lues, mais à être chantées en chœur avec
accompagnement d'instruments, soit, comme à Sparte, par le
peuple entier dans les fêtes publiques, soit par des musiciens
qu'exerçait et dirigeait le poète compositeur. Chaque poète
créait un rhythme qui gardait quelque fois son nom : Archiloque
de Paros inventa Fiambe et la poésie satyrique ; Arion, le di-
thyrambe, d'où sortit plus tard la tragédie ; Alcaios, la strophe
alcaïque, Sappho, la strophe sapphique; Stésichore d'Himère,
dbyGoogk
PEINTURE. — POÉSIE LYRIQUE. 289
â
^
1
L. M. — UisT. DES Grecs. 17
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290
LES PREMIERS PHILOSOPHES.
la division du chœur en strophe, antistrophe et épode. Les
rhythmes si riches et si variés que nous admirons dans les odes
d*Horace ont été empruntés par la poésie latine à la poésie
grecque.
Les premiers philosophes. — On place ordinairement
la naissance de la philosophie grecque dans le demi-siècle
qui précède les guerres médiques ; mais on pourrait la faire
remonter beaucoup plus haut, si on appelle philosophie
toute spéculation libre sur la nature et sur Tesprit humain ;
en Grèce, la pensée a toujours pu s'exercer librement sur tous
les sujets. Dans un des chapitres précédents, j'ai représenté
Hésiode comme le précurseur des philosophes. Les sentences
Lutte d'Héraclès centre Nèreus, ou de Ménélaos contre Tiôteus.
(Bas-relief d'Assos, au Musée du LouTre.)
morales qu'on attribue aux sept sages : « Connais-toi toi-
même », « Rien de trop », « Ne fais pas ce qui te déplaît
dans les autres », ressemblent par leur forme concise et dog-
matique aux préceptes répandus dans les Travaux et Jours.
Les systèmes de physique des premiers philosophes, leurs con-
jectures sur les principes du monde, avaient eu des modèles
dans la théogonie d'Hésiode et même dans la mythologie homé-
rique. La philosophie ionienne, qui regardait l'eau comme
l'élément générateur primordial, a emprunté cette doctrine à
la poésie ionienne î l'Océan est, d'après Homère, le principe de
toutes choses. La fable de Prôleus, dans TOdyssée, est un
symbole des transformations de l'élément fluide. Prôleus, dont
le nom signifie le primitif ou le principe, est la matière
première qui change de forme, et qu'on ne peut saisir. Il a
dbyGoogk
LA GÉOGRAPHIF, 29!
pour fille Eidolhéa, c'est-à-dire la Déesse des formes ; elle
explique à Ménélaos les déguisements de son père qui se
change tour à tour en feu, en arbre, en animaux de toute es-
pèce. Cette fable était sans doute populaire chez les Grecs
d'Asie, et Texier croit la reconnaître sur un lias-relief du temple
d'Assoft, Thaïes de Milet (640-650) pouvait donc puiser à des
sources grecques plutôt qu'à des cosmogonies orientales.
Mais il importe peu que l'idée fût 'nouvelle, si la méthode
l'était : selon Arislote, Thaïes fondait son syslèiFiC sur la né-
cessité de l'eau pour l'entretien de la vie des animaux et des
plantes. En appuyant ses conjectures sur l'observation , si im-
parfaite qu'elle fût à cette époque, il remplaçait la mythologie
par la science. S'il est difficile d'admettre qu'il ait annoncé
d'avance une éclipse de soleil, cette tradition montre du moins
l'opinion qu'on avait au temps d'Hérodote sur le caractère
scientifique de l'école ionienne. Ce mot d'école, quand on l'ap-
plique aux philosophes ioniens, signifie plutôt une commu-
nauté de méthode et de tendance qu'une transmission de
doctrines. Anaximandros de Milet, qui vécut de 610 à 549,
paraît plutôt le continuateur de Thaïes que son disciple.
La géographie. — L'histoire. — Les premiers prosa-
teurs. — On regarde Anaximandros comme le créateur de la
Géographie. 11 fut le premier qui traça une sphère et un ca-
dran solaire, et expliqua l'obliquité de Técliplique. L'Histoire
naquit en même temps que la Géographie. Cadmos de Milet,
le plus ancien historien grec, est contemporain d'Anaximan-
dros. 11 avait composé une histoire de Milet depuis sa fonda-
tion. Cet ouvrage, comme celui d'Anaximandros, était écrit en
prose. L'emploi de la prose implique l'écriture : depuis que les
relations commerciales avec l'Egypte avaient répandu l'usage
du papyrus, le rhythme n'était plus nécessaire pour fixer la
pensée, et l'écriture pouvait remplacer la mémoire et la trans-
mission orale. Phérékydès de Syros, qui fut, dit- on, un des
maîtres de Pythagore, passe pour le plus ancien écrivain en
prose; sa cosmogonie, comme les écrits composés sous le
nom d'Orpheus, tenait le milieu entre la mythologie et la
philosophie. La prose ne paraissait pas cependant l'in-
strument indispensable de la langue philosophique, car
dbyGoogk
292 IMPOPULARITÉ DES PHILOSOPHES.
Xénophanes, Parménides et Empédocle écrivireat en vers.
Répugnance des philosophes pour la religion popu-
laire et la démocratie. — C'est en 556, peu de temps après
la soumission de Tlonie par les Perses, que Xénophane de
Colophon vint s'établir à Elée ou Hyélè, colonie des Pho-
kaiens dans l'Italie méridionale, et y fonda l'école qui prit le
nom d'Éléalique. Au lieu de chercher le premier principe dans
la nature comme les philosophes ioniens, les Ëléates le cher-
chèrent dans les abstractions. Leur panthéisme absolu les ren-
dait 1res hostiles à la mythologie populaire. Xénophane repro-
che aux poètes d'attribuer aux Dieux tout ce qui est honteux
parmi les hommes, le vol, l'adultère, les tromperies récipro-
ques. 11 trouve ridicule et impie de les représenter sous des
formes humaines : « Si les bœufs et les chevaux savaient
peindre, ils donneraient aux Dieux des formes de chevaux et
de bœufs. » Pythagore de Samos, fondateur d'une troisième
école de philosophie, l'école italique, n'était pas plus bien-
veillant pour les poètes ; on racontait qu'il avait vu châtier
dans l'enfer l'âme d'Homère et ccUe d'Hésiode pour les fubles
qu'ils avaient racontées sur les Dieux. Le peuple, dout la reli-
gion était celle des poètes, renvoyait aux philosophes l'accu-
sation d'impiété. Mais la liberté de la pensée était absolue. Si
les Pythagoriciens n'avaient pas formé une association politique,
ils auraient pu sans danger croire à la métempsycose et à la
vertu des nombres, et s'abstenir de poissons et de fèves.
Mais ils formèrent dans les villes de la Grande-Grèce une con-
frérie qu'on a comparée à la Société de Jésus, et dont les allu-
res sacerdotales ont fait croire que Pythagore avait voyagé en
lïgyple, en Chaldée et en Inde. Môles à la lutte ardente des
partis politiques, ils en subirent les vicissitudes et furent ba-
layés par un ouragan populaire.
Hérodote ne parle pas du rôle des Pythagoriciens dans les
révolutions de la Grande-Grèce. Nous savons très peu de chose
sur Pythagore lui-môme, qui parait avoir combiné le carac-
tère d'un philosophe aVec celui d'un initiateur religieux. Il est
assez difficile de distinguer ses véritables doctrines de celles
qui lui ont été attribuées plus tard II quitta Samos, sa patrie,
vers j3'i, à l'époque ou l'Ionie fut soumise par les Perses, et vint
dbyGoogk
DESTRUCTION DE SYBARIS. 293
s'établir à Crolon où il fonda une congrégation de trois cents
membres liés entre eux et vis-à-vis du maître par un serment
solennel, un régime ascétique et des signes de ralliement
comme en ont chez nous les francs-maçons. Il ne semble pas
que Pythagore ait eu un système politique bien arrêté, mais
ses disciples appartenaient à la classe dirigeante et son idéal
social était ce qu'on nomme aujourd'hui une aristocratie d'in-
telligence. Ce système, réalisé dans les sociétés orientales
et dans l'Europe du moyen âge, a toujours été le rêve des phi-
losophes et des lettrés, (.a vanité, dont ils ne sont pas plus
exempts que les autres hommes, les porte à préférer, comme
forme politique, une oligarchie dont ils pourraient faire partie
ou prendre là direction, et au-dessous, à distance respectueuse,
un peuple silencieux et docile, une société calme et réglée
comme une école bien tenue. Les Grecs croyaient n'avoir pas
besoin d'être mis en tutelle, et l'ingérence de la philosophie
dans la politique produisit des effets désastreux.
Destruction de Sybaris . — La suppression de l'ordre de
Pythagore est liée à un événement considérable dans l'his-
toire de la Grande- Grèce, la ruine de Sybaris parles Croto-
niates. Sybaris était la plus grande et la plus riche des cités
grecques. Le luxe de ses habitants est devenu un thème de
déclamations littéraires ; on cite le mot d'un Sybarite à propos
des Spartiates : « Il n'est pas étonnant qu'ils soient braves;
leur vie est si désagréable qu'ils ont hâte d'en sortir. » L'oli-
garchie de Sybaris fut renversée en 510 par une insurrection
populaire, dont le chef, nommé Telys, s'empara du pouvoir.
Cinq cents des plus riches citoyens furent exilés et se retirè-
rent à Croton. Leur présence dans une ville si rapprochée
inspira des craintes à Télys qui demanda leur extradition. Il
est probable qu'il y avait parmi eux des Pythagoriciens, car la
secte avait des affiliés dans toute la Grande-Grèce* Le sénat
de Croton, d'après les conseils de Pythagore, refusa de livrer
les suppliants, et la guerre s'engagea entre les deux villes
achaiennes. On nous dit que l'armée des Sybarites était de
300,000 hommes, et celle des Crotoniates de 100,000, mais
ces chiffres sont sans doute fort exagérés. Les Crotoniates
étaient commandés par le pythagoricien Milon, le plus célèbre
dbyGoogk
294 DISPERSION DES PYTHAGORICIENS.
athlète de l'époque, qui marchait au combat dans le costume
et avec la massue d'Héraclès, ils avaient en outre pour alhé
Dorieus, frère du roi de Sparte Cléomènes, qui longeait le
golfe de Tarenle avec un corps de colons pour fonder un éta-
blissement en Sicile. Une bataille sanglante se livra près de la
rivière Traeis ou Trionto, et les Sybarites furent totalement
défaits malgré la supériorité du nombre. Les vainqueurs en
firent un massacre effroyable, puis pillèrent Sybaris, la démo-
lirent jusqu'aux fondations et, pour effacer tout vestige de sa
grandeur passée, détournèrent le cours du Crathis et le firent
passer sur l'emplacement de la ville.
Dispersion de la confrérie de Pythagore. — L'oligar-
chie de Croton, voulant s'attribuer tous les profits de la vic-
toire, refusa au peuple le partage des terres conquises, et pour
imposer silence à l'opposition, supprima les assemblées popu-
laires. Le peuple, à Tinstigalion d'un riche nommé Kylon,
qui avaft été rejeté par Pythagore, tourna sa colère contre
cette confrérie ambitieuse, qui formait un État dans l'État, et
mit le feu à la maison de Milon où les Pythagoriciens étaient
assemblés. La plupart périrent: selon les uns, Pythagore se
trouvait parmi eux ; selon d'autres, il mourut peu de temps
après à Métaponte, où on voyait son tombeau du temps de
Cicéron. 11 y eut des luttes civiles à Tarente, à Métaponte, à
Kaulonia. Les Pythagoriciens s'étaient rendus odieux au peuple
parleur esprit de domination; ils furent chassés des villes
d'Italie, mais les troubles continuèrent, et la tranquillité ne
put être rétablie que par la médiation des Achaiens delà mère
patrie. Soixante exilés purent revenir dans leurs foyers. 11 y
eut dans la suite des philosophes attachés à la secte de Pytha-
gore, mais la confrérie cessa d'exister. Les congrégations or-
phiques paraissent s'ôlre formées de ses débris, et Cicéron,
d'après l'autorité d'Aristote, attribue àun pythagoricien nommé
Kercopsles poésies qui circulaient en Grèce sous le nom d'Or-
pheus. Cependant, Oltfried Miiller fait remarquer que Pytha-
gore avait une dévotion particulière pour Apollon, tandis que
l'initiation orphique se rattachait au culte de Dionysos. Mais s'il
y a quelques différences de doctrine entre les Pythagoriciens
et les Orphiques, ils se confondent dans une opposition com*
dbyGoogk
L'OLIGARCHIE. 295
mune au génie libre et spontané de l'Hellénisme. Les thiases
ou collèges orphiques, comme l'institut de Pythagore, ont tous
les caractères d'un ordre religieux. C'est un clergé qui veut
s'établir, un essai de fusion entre la pensée philosophique de
la Grèce et l'esprit sacerdotal de l'OrienJ, un véritable prologue
du christianisme.
CHAPITRE X
LA VIE POLITIQUE DANS LES CITÉS GRECQUES.
L'oligarchie. —Gratuité des fonctions publiques. —Los lois écrites. —
La tyrannie. Ses caractères. Son instabilité. — Les tyrans de Sikyone.
Orthagoras, Cleisthénès. — Les tyrans de Corinthe. Kypsélos. Périan-
dros ; éclat de son règne. — Discordes civiles à Mégare. Théognis.
Révolutions d'Athènes. L'archontat. Les Eupatrides. — Dracon. —
Kylon. — Épiménide. — Solon. Conquête de Salamine. — Luttes
des riches et des pauvres. — La question sociale résolue par Solon.
— Constitution politique de Solon. Répartition de l'impôt. — Le
Sénat. L'Aroiopage. — Lois civiles. Le lien social. Le travail. — Con-
dition des femmes. — Éducation des enfants. Serment militaire. —
Les tables de la loi.
Factions politiques. Usurpation de Pisistrate. — Son gouvernement.
Édition des poèmes d'Homère. — Harmodios et Aristogeiton. —
Tyrannie et chute d'Hippias. — Reformes de Cleisthénès. — Inter-
vention des Spartiates. — Luttes contre les Thébains, les Chalkidienp
et les Aiginètes.
L'oligarchie. — L'autonomie communale produisait une
grande variété dans les formes de gouvernement. Dans un
ouvrage qui ne nous est pas parvenu, Aristote avait réuni des
renseignements sur la constitution de plus de cent cinquante
villes. Malgré celle diversité, les mômes révolutions se repro-
duisirent à peu près partout, et la plupart des cités grecques
passèrent successivement de l'oligarchie à la tyrannie et de lu
tyrannie à la démocratie. Par suite des progrès de l'industrie
et du commerce, il s'était formé dans toutes les villes une
dbyGoogk
206 GRATUITÉ DES FONCTIONS PUBLIQUES.
bourgeoisie riche, active et entreprenante, qui voulait avoir sa
part du gouvernement, et comme ses intérêts se confondaient
encore avec ceux du peuple, e\U réclamait Vlsonomie^ c'est-à-
dire l'égalité des droits. L'oligarchie refusait d'abandonner ses
privilèges, dont le plus important était le pouvoir judiciaire.
L'esprit de caste l'empêchait souvent d'exercer ce pouvoir
d'une manière impartiale. Si l'impunité semblait assurée aux
parents et aux amis des dépositaires de l'autorité, si un homme
du peuple, en cas de conflit avec l'un d'eux, ne pouvait obtenir
justice, il s'ensuivait un mécontentement général, et une lutte
s'engageait bientôt entre les gouvernés et les gouvernants, ou,
comme disaient les Grecs, entre le grand nombre et le petit
nombre. L'oligarchie finissait par ouvrir ses rangs aux bour-
geois; la classe dirigeante devenait plus nombreuse et plus
forte, mais le peuple y gagnait aussi quelque chose, car pour
admettre les bourgeois aux fonctions publiques, il fallait rendre
ces fonctions électives et temporaires. Le peuple pouvait choi-
sir ses magistrats; il prenait pour le gouverner ceux qu'il
croyait les meilleurs; le gouvernement devenait une aristo-
cratie, mot que nous prenons ordinairement comme synonyme
d'oligarchie, mais qui avait pour les Grecs un sens plus
favorable.
Gratuité des fonctions publiques. — La gratuité des
fonctions empêchait la politique d'être considérée comme
une carrière lucrative, et l'ambition ne pouvait jamais être
doublée d'intérêt. Indépendamment de toute restriction au
droit d'éligibilité, les suffrages du peuple ne se portaient que
sur des citoyens riches. Pour élever un citoyen pauvre aux
magistratures, il aurait fallu l'indemniser de la perte de son
temps ; or, on aurait trouvé dérisoire d'ajouter un salaire à
l'honneur de gouverner la cité. Un homme au-dessus du be-
soin inspirait plus de confiance qu'un autre et semblait moins
accessible à la corruption. Celui qui n'avait pas su diriger ses
affaires ne semblait pas capable de diriger celles du puWic.
Hérodote raconte que les Milésiens, après avoir longtemps
souffert de leurs divisions intestines, prièrent les Pariens de
rétablir l'union et la concorde. « Voici comment les Pariens
y parvinrent ; Leurs députés, gens de considération, ayant re-
dbyGoogk
LES LOIS ÉCRITES. 297
marqué à leur arrivée l'état déplorable de Milet, dirent qu'ils
voulaient parcourir le territoire. Ils le visitèrent, et quand ils
rencontraient dans ce pays dévasté un champ bien cultivé, ils
mettaient par écrit le nom du propriétaire. De retour à la ville,
ils convoquèrent rassemblée du peuple et nommèrent pour
gouverner l'Etat ceux dont ils avaient trouvé les terres bien
cultivées. Ils croyaient, dirent-ils, que ces gens prendraient le
même soin des affaires publiques que des leurs, et ils ordon-
nèrent à tous ceux qui avaient été auparavant de différents
partis de les reconnaître pour leurs magistrats et de leur obéir
en tout. » Un autre fait important à signaler dans les habitudes
politiques des Grecs c'est que, non seulement les serfs dans
les cités militaires, les domestiques dans les cités commer-
çantes, mais encore les étrangers domiciliés appelés Mélœkes,
étaient exclus du droit de suffrage, et que le litre de citoyen
était difficile à obtenir. Quant aux paysans, lors môme qu'ils
faisaient partie de la cité, comme à Athènes, ils ne pouvaient
guère prendre une part active à la vie politique, qui leur eût
imposé des déplacements gênants et coûteux.
Les lois écrites. — On cherchait quelquefois un remède
aux discordes civiles dans l'établissement d'une législation.
Les Locriens d'Italie ayant demandé à l'oracle de Delphes de
les tirer d'embarras, reçurent l'ordre de se donner des lois.
Ils acceptèrent celles que leur présenta le berger Zaleucos, qui
déclarait les avoir reçues d'Athènè dans un songe. La légis-
lation de Zaleucos fut le premier Code de lois écrites. On la
place en 664, environ quarante ans avant la législation de
Dracon à Athènes. On raconte que le fils de Zaleucos s'étant
rendu coupable du crime d'adultère qui devait être puni de la
perte des deux yeux, fut amené à son père qui lui arracha un
œil et s'en arracha un à lui-môme en disant : « Voilà les deux
yeux exigés par la loi. » 11 paraît que les lois de Zaleucos res-
tèrent longtemps en vigueur; une précaution avait été prise
contre le danger des réxisions trop fréquentes : celui qui pro-
posait une nouvelle loi devait se présenter à l'assemblée avec
une corde au cou; si sa proposition était rejetée on serrait la
corde. Cette coutume locrienne est citée par Démosthènes dans
son discours contre Timocrate. Diodore en fait une loi de
17.
dbyGoogk
298 LA TYRANNIE.
Charondas, législateur de Gatane et des villes chalkidiennes
de Sicile et d'Italie, qui paraît avoir été postérieur à Zaleucos
de près d'un siècle. Les textes de loi et les préambules attribués
à Zaleucos et à Charondas par Diodore et par Stobée sont gé-
néralement regardés comme des œuvres apocryphes' sorties
de l'école pythagoricienne. Parmi les lois citées par Diodore
comme étant de Charondas, il y en a une sur l'instruction gra-
tuite et obligatoire, avec des maîtres payés par l'État. Il avait
défendu, par une autre loi, d'assister en armes aux assemblées
populaires; un jour, il entend du tumulte et court armé sur la
place publique : On lui fait remarquer qu'il viole la loi ; il ré-
pond : w Je vais la venger ; » et il se perce de son épée. Ce fait
a été mis aussi sur le compte de Dioclès, législateur des
Syracusains.
Le législateur était quelquefois étranger à la cité ; ainsi Phi-
lolaos, un des Bacchiades de Corinthe, fit des lois pour les
Thébains, Dèmonax de Mantinée en fit pour les Kyrènaiens.
Les lois de Philolaos paraissent avoir eu pour objet d'affermir
les privilèges de l'oligarchie; celles de Dèmonax, de restreindre
le pouvoir royal qui s'était conservé dans la famille de Batlos,
fondateur de Kyrène. D'après la constitution de Dèmonax {o43),
le roi conserva seulement ses domaines territoriaux et les
fonctions religieuses qui avaient appartenu à ses prédé-
cesseurs.
La tyrannie, ses caractères, son instabilité. — On a
peu de renseignements sur l'histoire intérieure des cités
grecques pendant la période laborieuse de l'enfantement des
républiques, mais on peut deviner la violence des passions
politiques de cette époque par le serment que les aristocrates
prêtaient dans quelques villes, selon Aristote : « Je jure d'être
l'ennemi de la classe populaire et de lui faire tout le mal que
je pourrai. » La lutte avait souvent pour résultat, comme dans
les communes italiennes du moyen âge, l'expulsion générale
du parti vaincu ; les exilés rentraient avec le secours de quel-
que cité rivale ou fondaient ailleurs un établissement nouveau.
Dans les discordes civiles, chaque parti se croit seul dirigé par
la justice et ne voit chez ses adversaires que des passions. Il
pouvait arriver, cependant, que le droit fût des deux côtés. Les
dbyGoogk
LA TYRANNIE. 299
uns, préoccupés de l'égalité, combattaient des privilèges fon-
dés sur la tradition et Thabitude; les autres craignaient que la
faveur populaire ne sacriôât la liberté à quelque chef ambitieux
et adroit. C'est là l'excuse des aristocraties grecques devant
l'histoire. Contrairement à ce qui se voit aujourd'hui chez nous,
c'étaient surtout les aristocrates qui étaient républicains. Le
parti populaire se laissait facilement tromper par des intri-
gants, et sa victoire amenait souvent une usurpation. Les
luttes du grand nombre et du petit nombre eurent pour résul-
tat dans la plupart des cités grecques une renaissance de la
monarchie, mais avec un pouvoir absolu et arbitraire que
n'avaient jamais eu les rois de l'âge héroïque. C'est pourquoi,
au lieu de désigner ces monarques d'une nouvelle espèce par le
titre de rois, paaiXeîç, qui représentait une magistrature à au-
torité limitée, les Grecs leur donnèrent le nom de tyrans, em-
prunté probablement à la langue des Phrygiens ou des Lydiens,
et qui répondait à l'autorité despotique et sans contrôle des
souverains barbares. Selon la définition très exacte de Corné-
lius Népos, on appelait tyrans ceux qui avaient usurpé le pou-
voir dans une cilé libre. On a môme quelquefois donné ce
titre à des rois légitimes qui avaient étendu leur autorité au
delà des limites normales, comme Pheidon d'Argos et Chari-
laos de Sparte. Le mot de tyran n'avait pas à l'origine le sens
répulsif qui s'y est attaché plus tard, et on cite des tyrans,
comme Gélon et Hiéron de Syracuse, qui ont régné avec dou-
ceur. Mais, si un tyran n'était pas nécessairement mauvais,
rien ne l'empêchait de l'ôlre, et cela suffisait pour faire re-
garder la tyrannie comme une forme vicieuse de gouvernement.
Quelquefois on chargeait un citoyen qui possédait la con-
fiance générale de rétablir l'ordre, et on lui donnait un pou-
voir absolu avec le titre d'Aisymnète. C'était une sorte de
tyrannie élective. Parmi ceux qui en firent un bon emploi, on
cite Pittacos de Mitylène, un des sept sages de la Grèce. Mais
il pouvait arriver que l'homme à qui on avait confié une au-
torité temporaire refusât de s'en dessaisir. Aristote cite comme
s'étant élevés par ce moyen les tyrans de Milet et Phalaris
d'Agrigente, celui de tous les tyrans grecs qui laissa la plus
mauvaise réputation; on raconte qu'il faisait enfermer ceux
dbyGoogk
300 INSTABILITÉ DE LA TYRANNIE.
qui lui déplaisaient dans un taureau d'airain chauffé au
rouge, de façon que leurs cris d'agonie imitaient les mugisse-
ments d'un taureau. A Cumae, la tyrannie se présente comme
une usurpation militaire : un citoyen nommé Aristodèmos
s'était distingué dans une lutte contre les Étrusques; l'oligar-
chie, jalouse de ses succès, l'envoie avec des forces insuffi-
santes au secours de la cité latine d'Aricia; il revient vain-
queur, et avec l'aide de ses troupes s^empare du pouvoir.
Mais, le plus ordinairement, ceux qui voulaient usurper la
tyrannie commençaient par se rendre populaires en attaquant
les privilèges de la classe dirigeante. S'élever au pouvoir par
la ruse, s'y maintenir par la violence, proscrire ceux qu'on ne
peut corrompre, occuper le peuple par de grands travaux de
construction, distraire l'attention publique par des expéditions
militaires, telle a été la politique enseignée aux despotes de
tous les temps par les tyrans grecs les plus célèbres, Périan-
dros de Corinthe, Cleisthénès de Sikyone, Pisistrate d'Athènes,
Polycratès de Samos. Ce qui est plus difficile à imiter, et qu'on
ne retrouve que chez les tyrans de la Renaissance italienne,
c'est le goût éclairé de la littérature et des arts. II semble que
Pisistrate ait voulu acheter le pardon de l'histoire en conser-
vant à la postérité les poèmes d'Homère. Mais la Muse grecque
n'accepta pas le pacte d'alliance, et en général elle resta pure
de ces déférences serviles qui ont déshonoré la poésie latine.
On trouve môme des poètes à la tête des ennemis delà tyran-
nie, Solon, Théognis, Alcaios.
Tous les tyrans essayaient de fonder des dynasties hérédi-
taires, mais ces dynasties dépassaient rarement la seconde
génération. Il est vrai que leur chute était ordinairement pro-
voquée, comme le remarque Aristote, par quelque vengeance
personnelle; mais les révolutions politiques ont toujours des
causes générales sans lesquelles les complots ne serviraient à
rien. Chez les peuples qui ne savent pas ou ne veulent pas être
libres, le meurtre d'un tyran ne profite qu'à son successeur :
c'est ce qu'on a vu à Rome sous les Césars. Dans les cités
grecques, au contraire, la tyrannie n'était qu'un accident
passager. 11 y avait toujours un parti qui protestait contre
l'oppression, et quand l'expérience avait été assez longue et
dbyGoogk
LES TYRANS DE SIKYONE. 301
assez dure, les conspirateurs étaient sûrs de trouver un appui
dans la masse du peuple. Les factions se faisaient des con-
cessions mutuelles, car Tesprit politique s'était fortifié dans
ces épreuves, et la tyrannie avait servi de transition entre l'oli-
garchie et la démocratie.
Les tyrans de Sikyone : Orthagoras, Gleisthénés. —
La dynastie des tyrans de Sikyone, la plus ancienne sur la-
quelle nous ayons des renseignements, fut fondée en 076 par
Orthagoras et dura cent ans ; c'est la plus longue dynastie de
tyrans qui soit connue d'Aristote. Orthagoras, appelé aussi An-
dréas, qui était, dit-on, un cuisinier, s'appuya sur les habitants
de la côte, marins et pêcheurs, pour renverser l'oligarchie des
grands propriétaires, qui descendait en grande partie des con-
quérants doriens venus d'Argos. Il gouverna avec modéra-
tion, ainsi que ses successeurs, dont le dernier et le plus
célèbre fut Gleisthénés. Le but de la politique de Gleisthénés
fut d'abaisser l'élément dorien de la population. A Sikyone
comme dans leurs autres établissements, les Doriens for-
maient trois tribus, les Hylleis, les Pamphyles et les Dymanes.
Il changea ces noms antiques en trois noms ridicules qu'on
peut traduire par Sangliers, Anes et Petits porcs. Quant aux
hommes du rivage, dont il faisait partie, il les appela Archc-
laoi, les chefs du peuple. Argos, la grande cité dorienne, avait
eu jadis une suzeraineté sur Sikyone. Pour en effacer le sou-
venir, Gleisthénés résolut d'abolir le culte que les Sikyoniens
rendaient au héros argeien Adrastos. Il défendit aux rhap-
sodes de chanter à Sikyone les poèmes homériques ; probable-
ment il s'agissait surtout de la Thèbaïs cyclique, poème au-
jourd'hui perdu, mais que toute l'antiquité attribuait à
Homère, et dont Adrastos était le héros principal. Il consulta
l'oracle de Delphes pour savoir comment il pourrait chasser
Adrastos de Sikyone. La Pythie répondit : a Adrastos est roi
des Sikyoniens, et toi, tu n'es qu'un bandit- » 11 n'insista pas,
mais il voulut forcer l'âme d' Adrastos à s'éloigner, en lui im-
posant un voisinage désagréable. Il obtint des Thébains la
permission d'introduire à Sikyone le culte de leur héros Mé-
lanippos, qui avait tué le frère et le gendre d'Adrastos, dans la
guerre des Épigones. En môme temps, il essaya de se conci-
dbyGoogk
302 CLEISTHÉNÈS.
lier la bienveillance d'Apollon en prenant part à la guerre que
les Amphiclions avaient décrétée, sur la proposition de Solon,
contre les habitants de Crissa et de Kirrha, qui prélevaient un
impôt sur les pèlerins arrivant à Delphes. Cette guerre servait
en môme temps les intérêts de Sikyone, dont la prospé-
rité commerciale dépendait de la sécurité du golfe de Co-
rinthe (595).
La guerre dura dix ans; Crissa fut rasée, son port comblé,
ses habitants vendus comme esclaves et son territoire consa-
cré à Apollon. A l'occasion de ce triomphe, les jeux Pythiques,
qui n'avaient été jusqu'alors que des concours de musique et
de chant, reçurent un nouvel éclat : on y ajouta des luttes
gymniques et des courses de chars où Cleisthénès remporta le
prix. 11 fut aussi vainqueur aux jeux Olympiques. Sur le butin
fait à Crissa, il éleva un portique, célébra des fêtes où il dé-
ploya un grand luxe, et sa cour devint le rendez-vous des ta-
lents en tout genre. On ne sait dans quelle mesure il contribua
au développement des arts, mais l'école artistique de Sikyone
devint dès lors et resta toujours dans la suite une des plus
célèbres de la Grèce. Parmi les œuvres qui en sortirent on
peut citer l'Apollon de Canachos, qui ornait le Didymaion de
Milet; il en existe une copie au British Muséum et une autre
au Louvre, connue sous le nom de l'Apollon de Piombino, dans
la salle des Bronzes.
La puissance de Cleislhénès était solidement établie, mais
la dynastie des Orthagorades devait s'éteindre avec lui, car il
n'avait qu'une fille nommée Agaristè. Il attachait beaucoup
d'importance au choix de son gendre. 11 accueillit avec magni-
ficence les prétendants illustres qui vinrent de toutes les par-
lies de la Grèce et qui cherchaient à se faire valoir par leur
habileté dans tous les exercices. Un Athénien nommé Hippo-
cléidès semblait avoir les chances les plus favorables ; mais la
veille du jour où Cleislhénès devait déclarer son choix, Hip-
pocléidès, un peu excité par le vin, s'avisa de danser une
danse comique. « Tu viens de perdre ton mariage, » lui dit
Cleisthénès. Il répondit : « Qu'importe à Hippocléidès ? » ré-
ponse qui passa en proverbe. Celui qui fut choisi était aussi
un Athénien ; il s'appelait Mégaclès et appartenait à la famille
dbyGoogk
LES TYRANS DE CORINTOE. 303
des Alcmaionides. Il eut un fils nommé Cleisthénès comme
son grand-père, qui réforma la constitution de Solon dans un
sens très démocratique et qui fut Faïeul maternel de Périclès.
Les tyrans de Gorinthe : Kypsélos. — Périandros. —
La tyrannie s'établit à Gorinthe un peu plus tard qu'à Sikyone
et dura 74 ans. Kypsélos, qui renversa en 655 l'oligarchie des
Bacchiades, s'y rattachait par sa mère Labda. Comme elle
était boiteuse, aucun des Bacchiades n'avait voulu l'épouser,
et on l'avait donnée en mariage à un homme d'une autre
famille, d'ailleurs très illustre, qui prétendait remonter au
roi des Lapilhes Kaineus, célèbre dans les légendes du combat
des Lapithes contre les Kentaures. Les Bacchiades, avertis
par un oracle que l'enfant de Labda leur serait funeste, en-
voyèrent dix d'entre eux pour le faire mourir. Ils vinrent au
village où était élevé l'enfant et demandèrent à le voir. Ils
étaient convenus de l'écraser contre terre. Labda, sans dé-
fiance, le mit dans les bras de l'un d'eux, et l'enfant lui. sourit.
11 le passa à un autre, celui-ci à un troisième; tous se le pas-
sèrent ainsi de main en main, et aucun n'osa le tuer. Ils
sortirent, se reprochèrent mutuellement leur faiblesse, et ren-
trèrent, décidés à en finir. Mais la mère avait des soupçons ; ils
ne trouvèrent plus l'enfant; elle l'avait caché dans un coffre
qu'il consacra plus tard dans le temple d'Hère à Olympie. Ce
coffre était en bois de cèdre orné de sculptures en or et en
ivoire dont Pausanias donne la description. Devenu grand,
l'enfant reçut le nom de Kypsélos qui veut dire cofFre, à moins
que ce ne soit précisément le sens de ce nom qui ait fait ima-
giner la légende rapportée par Hérodote. On ne sait pas com-
ment Kypsélos s'empara du pouvoir, mais ce fut probablement
avec l'appui d'une partie de la population, car Aristote l'ap-
pelle démagogue et donne comme preuve de sa popularité qu'il
ne s'entoura jamais de gardes. D'un autre côté, Hérodote rap-
porte les paroles d'un orateur corinthien qui accuse Kypsélos
d'avoir banni un grand nombre de citoyens, d'en avoir dé-
pouillé beaucoup d'autres et d'en avoir fait mourir encore
davantage. 11 mourut après trente ans de règne et laissa le
trône à son fils Périandros.
On s'accorde à reconnaître la prudence et l'habileté politi-
dbyGoogk
304 PÉRUNDROS.
que de Périandros, on l'a même compté parmi les sept sages
de la Grèce. Corinthe atteignit sous son règne un degré de
puissance qu'elle ne retrouva pas plus tard. Elle fonda des
villes importantes sur les côtes d'Acarnanie et d'Épire et réalisa
ce rêve d'empire colonial que les Bacchiades avaient en vain
poursuivi. Sa suzeraineté s'étendit sur Kerkyra, Leucas, Am-
brakia, Anactorion et Apollonia, qui ne devinrent indépen-
dantes qu'à la mort de Périandros. L'installation du Diolcos,
pour transporter les navires sur des rouleaux à travers l'isthme,
fit affluer l'argent à Corinthe par les droits de transit entre la
mer Egée et la mer Ionienne. Des impôts indirects furent éta-
blis, des droits de douane furent perçus dans les ports, des
taxes prélevées sur les marchés.
Cet argent était surtout employé à faire travailler les ou-
vriers, et ce n'était pas pour lui que Périandros levait des im-
pôts, car l'idée de ce que nous appelons une liste civile n'en-
trait pas dans l'esprit d'un Grec, pas môme d'un tyran. Ses
exigences n'en paraissaient pas moins vexatoires, et elles
allaient toujours en augmentant. Comme le mécontentement
augmentait aussi, il s'entoura d'une garde barbare, et il fallut
la solder. Il s'attaqua aux fortunes particulières, jusqu'à se faire
livrer les bijoux des femmes pour en faire une statue d'or.qu'il
consacra à Olympie. Aristote insinue qu'il voulait empêcher
les particuliers de devenir trop riches. D'un autre côté, il fît
des lois somptuaires pour empêcher ses sujets de dépenser
au delà de leurs revenus. Il obligea chaque citoyen à rendre
compte de ses moyens d'existence, défendit aux étrangers de
s'établir à Corinthe sans permission, fit jeter les femmes de
mauvaise vie à la mer et contraignit les pauvres à émigrer.
D'après Hérodote, c'est par les conseils de Thrasyboulos, tyran
de Milet, que Périandros avait adopté cette politique de nivel-
lement. Il l'avait consulté sur le meilleur moyen à employer
pour se maintenir au pouvoir. Thrasyboulos, au lieu de ré-
pondre par écrit, conduisit le messager dans un champ de
blé et abattit les épis qui dépassaient les autres. Aristote ren-
verse les rôles et fait donner le conseil à Thrasyboulos par Pé-
riandros. Cette anecdote a été transportée à Tarquin le Su-
perbe, le dernier des rois de Rome.
dbyGoogk
PÉHIANDROS. 305
Un drame domestique assombrit de plus en plus le carac-
tère de Périandros. 11 avait tué, dans un moment de colère,
sa femme Mélissa, qu'il aimait pourtant avec passion. Elle
était fille de Proclès, tyran d'Épidaure. Un jour, ses deux fils
étant allés voir leur grand-père, celui-ci leur dit : u Mes
enfants, savez-vous qui a tué votre mère? » L'aîné, d'un esprit
obtus, ne fit pas attention à ces paroles, mais Lycophron, le
plus jeune, les comprit, et à son retour refusa de parler à son
père et môme de lui répondre. Périandros le chassa et défen-
dit, sous peine d'amende, de le recevoir et de lui parler. Le
jeune homme errait dans la ville, affamé, vivant comme il pou-
vait et couchant sous les portiques. Son père en eut pitié et
lui dit : « Ëh bien, mon fils, lequel vaut mieux, de cette vie
errante et vagabonde, ou de la souveraine puissance que tu
pourrais partager avec moi? Si un malheur est arrivé autrefois,
c'est sur moi qu'il retombe. Rentre à la maison, il vaut mieux
faire envie que pitié, s Le fils répondit : « Tu as encouru l'a-
mende, pour^ m'avoir adressé la parole. » Périandros l'envoya
à Kerkyra, puis il envahit Épidaure pour se venger de Proclès
et le fit prisonnier, mais sans lui faire de mal. Cependant, il
sentait l'âge s*appesantir; son fils aîné était stupide et ne pou-
vait lui succéder ; il chargea sa fille d'aller à Kerkyra et d'es-
sayer de ramener Lycophron. Celui-ci répondit à sa sœur qu'il
ne rentrerait pas à Corinthe tant que leur père y serait. Pé-
riandros céda et fit dire à Lycophron qu'il pouvait revenir et
régner, que lui-môme se retirerait à Kerkyra. Mais à cette nou-
velle, les Kerkyraîens, ne voulant pas avoir chez eux le terri-
ble vieillard, tuèrent son fils. 11 entra dans une violente co-
lère, prit trois cents jeunes Kerkyraîens et les embarqua pour
être vendus, comme eunuques, au roi de Lydie. Heureuse-
ment, le vaisseau ayant relâché à Samos, les Samiens les déli-
vrèrent et les renvoyèrent à Kerkyra. Périandros mourut peu
de temps après. Il avait régné quarante ans. Un de ses parents
lui succéda et fut renversé au bout de trois ans (oS2), peut-ôtre
avec l'aide des Spartiates.
Discordes civiles à Mégare. — Théogois. — C'est vers
le commencement du règne de Périandros à Corinthe qu'on
place l'usurpation de Théagénès à Mégare. Il avait gagné la
dbyGoogk
306 DISCOUDES CIVILES A MÉGARE.
faveur du peuple en attaquant les propriétés des riches et en
détruisant leurs troupeaux près de la rivière. Profitant de Ta-
nimosilé que cet acte de violence avait excitée contre lui, il
se fît donner une garde par un vote populaire. U s'en servit
pour renverser l'oligarchie à Mégare et s'empara du pouvoir.
11 encouragea son gendre*Kylon à en faire autant à Athènes,
mais cette tentative, comme on le verra plus loin, n'eut pas
de succès. A l'exemple des autres tyrans, Théagénès fît d'utiles
et importants travaux; il fit creuser un canal pour amener
l'eau des sources de la montagne dans la ville où il éleva une
fontaine sur la place publique. Ce fut probablement sous son
règne que les Mégariens enlevèrent aux Athéniens l'île de Sa-
lamine. Toutefois il ne réussit pas à établir solidement sa do-
mination; il fut détrôné et chassé par une révolution nouvelle
dont on ne connaît pas la date et qui fut suivie d'une longue
suite de luttes violentes entre les classes. Le parti populaire,
n'ayant plus de chef, dépassa dans ses colères les limites de la
prudence et abusa de sa victoire. Les pauvres entraient dans
les maisons des riches et se faisaient servir de somptueux
banquets. Non seulement on abolit les dettes, mais on força
les créanciers à rembourser les intérêts qu'ils avaient déjà
reçus. Une troupe de pèlerins, qui traversait le territoire de
Mégare pour se rendre à Delphes, fut attaquée et pillée, plu-
sieurs perdirent la vie, et le conseil des Amphictions fut obligé
d'intervenir pour faire punir les coupables. On bannit un
grand nombre d'aristocrates pour confisquer leurs biens, ce
qui amena, dit Aristote, la ruine de la démocratie, car les exi-
lés formèrent un corps si nombreux qu'ils rentrèrent par la
force, et la ville fut gouvernée par une oligarchie très étroite,
ne comprenant que les auteurs de la révolution.
Parmi les fragments élégiaques du poète Théognis, plu-
sieurs font allusion aux révolutions de Mégare. Malheureuse-
ment ces fragments nous sont parvenus dans un tel état de
désordre qu'ils ne peuvent nous éclairer sur les événements
auxquels ils se rapportent. Il est probable qu'ils ne sont pas
tous du même auteur ni de la môme époque; on y trouve des
morceaux qui sont cités aussi sous les noms de Selon ou de
Mimnernie, d'aulres sont l'œuvre de quelque femme poète, car
dbyGoogk
TI1É06NIS. 307
le féminin y est employé à la première personne. Tel passage
paraît écrit peu de temps avant les guerres médiques, tel autre
semble antérieur à l'établissement de la tyrannie à Mégare, car
le poète exprime la crainte d'une usurpation : « Lorsque des
hommes méchants cherchent leur intérêt dans le mal du peu-
ple, alors naissent la dissension et la guerre. Puisse cette cité ne
jamais accepter un maître !» — « Kyrnos, celte cité est enceinte,
je crains qu'elle n'enfante bientôt un homme violent, chef de
la funeste sédition. » Ces craintes n'étaient pas sans fonde-
ment, et le poète s'écrie ailleurs : a Les bons sont en exil, les
méchants gouvernent; que Zeus détruise la race des Kypsé-
lidesl » Les Kypsélides étaient tyrans de Corinlhe et non de
Mégare, mais le poète désigne ici par extension les tyrans en
général. Il excite les citoyens à renverser la tyrannie qu'ils
n'ont pas su prévenir : ■ Renverse, par tous les moyens que
tu voudras, le tyran mangeur de peuples, tu n'as rien à crain-
dre de la justice des Dieux. » D'autres vers sont adressés au
tyran lui-môme : « Écrase, foule sous tes pieds ce peuple slu-
pide, frappe-le d'un aiguillon aigu, mets-lui un dur joug sur
le cou; car, parmi tous les hommes que le soleil regarde, lu
ne trouveras pas un peuple qui aime autant la servitude. »
Quand Théognis oppose les bons aux méchants, il emploie
quelquefois ces mots dans leur sens propre, mais plus souvent
dans le sens arbitraire que leur donnait l'esprit de parti. En
Grèce comme à Rome, les classes dirigeantes s'intitulaient le
parti des honnêtes gens. Mais l'aristocratie de la naissance
était quelquefois en opposition avec l'aristocratie de la ri-
chesse ; c'est à la première qu'appartenait Théognis, car il se
plaint souvent que les bons soient pauvres et que les mé-
chants soient riches : « Chacun honore le riche et méprise le
pauvre; l'esprit des hommes est partout le même. » Il dit que
ceux qui, jadis, étaient vêtus de peaux de bêles et paissaient
comme des cerfs hors de la ville sont devenus les bons, et
que les bons sont devenus mauvais ; c'e.^t une allusion à la
victoire politique des ruraux. Quelques-uns de ses vers semblent
écrits sous l'impression de la colère que lui cause son exil et
la défaite de son parti : «... Et je ne vois pas la punition de
ceux qui m'ont ravi mes biens par la violence; j'ai passé le
dby Google
308 RÉVOLUTIONS D'âTHÈNES.
torrent comme un chien, dépouillé de tout dans les eaux gon-
flées du fleuve. Puissé-je boire leur sang noir, et voir enfin un
bon Démon accomplir mes vœux. » Celle soif de représailles
revient souvent dans ses vers : « Alors, puisse tomber sur moi
le grand ciel d'airain, la terreur des hommes d'autrefois, si je
ne fais du bien à ceux qui m'aiment et si je n'apporte à mes
ennemis le désespoir et la ruine. »
Aigri par le malheur, Théognîs voit la nature humaine sous
un jour assez défavorable : « L'exilé n'a pas d'ami ni de com -
pagnon fidèle; c'est là ce qu'il y a de plus dur dans l'exil. » Kt
ailleurs : « Les amis sont nombreux autour de la coupe pleine,
mais ils sont rares quand on a besoin d'eux. » On voit poindre
dans les vers de Théognis les premiers doutes de la raison hu-
maine devant le problème du mal. Comme Job, comme l'Ec-
clésiasle, il trouve difficile de concilier la justice divine avec le
bonheur des méchants et le malheur des justes : « Qui donc,
en voyant cela, peut encore vénérer les immortels? El que
peut- on penser lorsqu'un homme injuste et impie vit dans l'a-
bondance pendant que les justes sont écrasés sous le poids de
la dure pauvreté? » Pourtant il finit par reconnaître que l'ad-
versité n'est qu'une épreuve qui distingue le brave du lâche :
« 11 faut accepter ce que les Dieux donnent aux mortels et sup-
porter son sort quel qu'il soit, sans se désoler des maux et sans
se réjouir du bonheur avant d'avoir vu la fin. » — « Nul n'est
pleinement heureux ; mais le brave supporte ses maux et ne
laisse pas môme voir sa douleur: le lâche ne sait supporter ni
les maux ni les biens. » — «Je ne puis, ô mon cœur, te fournir
tout ce qui te convient. Sois fort; lu n'es pas seul à désirer
le bonheur, » — « Supporte tes maux, mon cœur, quoique les
souffrances soient inouïes; c'est le cœur des lâches qui se
rétrécit. Ne va pas augmenter la douleur de ta défaite par la
colère et les plaintes, et affliger tes amis et réjouir tes enne-
mis. » Ces fières paroles sont une expression anticipée de la
morale stoïcienne.
Révolutions d^Athënes. — L^Archontat. Les Eupa-
trides. — L'histoire intérieure d'Athènes n'est bien connue
qu'à partir du siècle qui précède les guerres médiques. Tout ce
qu'on sait de la période antérieure, c'est que le passage de la
dbyGoogk
LOIS DE DRAGON. 309
monarchie à la république avait été ménagé par une Iransilion
Ires lente. L'archontat à vie, qui, après la mort de Codros
(1045), avait remplacé la royauté, devint décennal en 752. Puis
en 714 il cessa d'être réservé aux descendants de Codros, pour
devenir accessible à tous les nobles ou Eupatrides, issus dos
anciennes familles autochlhones et de quelques familles venues
du Péloponnèse après la conquête dorienne. Entin, en 683,
l'Archontat fut partagé en Ire neuf citoyens nommés pour un
an. Ce partage permettait de satisfaire un plus grand nombre
d*ambitions, en même lemps qu'il appliquait le principe répu-
blicain de la division du pouvoir. Le premier des neuf archontes
se nommait Ëponyme, parce qu'il donnait son nom à Tannée.
Il représentait la majesté de TÉtat et exerçait une juridiction
qui avait appartenu au roi comme père du peuple : il était le
tuteur des orphelins, le prolecteur des veuves et réglait les
questions d'héritage. Le second archonte gardait le titré
de roi et les fonctions de grand prêtre, un des attributs de la
royauté. 11 présidait aux cérémonies du culte public et pro-
nonçait sur les causes qui concernaient la religion. Le troisième
archonte s'appelait Polémarque, ou ministre de la guerre, et
jusqu'à la réforme de Cleisthénès il eut le commandement de
l'armée. Les six autres archontes portaient lé titre commun de
Thesmothètes, qu'on traduit par législateurs, mais qui a plutôt
le sens de juges, car le mot ôiafAo';, analogue au mot homé-
rique 6gp.'.(jrg;, représente des règles idéales de justice, tandis
que le motvop.G;, qui est plus moderne, désigne les lois écrites.
Les Thesmothètes jugeaient les nombreuses causes qui n'étaient
pas du ressort des trois premiers archontes.
Dracon. Kylon. Epiménide. •— Les Eupatrides, seuls en
possession du pouvoir judiciaire, s'en servaient arbitrairement
et dans l'intérêt de leur classe. Les jugements étaient rendus
d'après des coutumes traditionnelles. Le peuple réclama une
règle fixe, un Code de lois écrites. Ce Code fut rédigé par
Dracon (614), quarante ans après le Code de Zaleucos à
Locres. Les lois de Dracon étaient d'une sévérité excessive et
probablement calculée pour maintenir l'obéissance par la
terreur. Le mécontentement du peuplenefll qu'augmenter. Un
riche Enpatride nommé Kylon, gendre de Théagénès lyran de
dbyGoogk
310 KYLON. ÉPIMÉNIDE.
Mégare, crut Toccasion favorable pour usurper le pouvoir.
Son beau-père l'y encourageait et promettait de l'aider. II
consulta l'oracle de Delphes sur Topportunité de rentreprîsc.
La Pythie lui conseilla de choisir le jour de la plus grande fêle
de Zeus. On ignore si cette réponse était accompagnée d'un
blâme, mais à cette époque, la tyrannie paraissait le seul
remède aux excès de l'oligarchie, et l'expérience n'avait pas
encore montré que ce remède était dangereux et pire que le
mal. Kylon, qui avait remporté une victoire à Olympie, crut que
le retour des jeux Olympiques était l'époque désignée par l'ora-
cle, sans se rappeler, dit Thucydide, qu'à Athènes, la plus grande
fête de Zeus était la fête des Diasia. Il s'empara de la citadelle
et s'y établit avec ses partisans et les auxiliaires que lui avait
fournis son beau-père. On les y bloqua et on les prit par la
famine. Kylon parvint à s'échapper, on ne sait pas ce qu'il
devint. Les autres demandèrent à capituler et s'assirent en
suppliants devant l'autel d'Àlhènè. On leur dit de se soumettre
au jugement du peuple. Pour ne pas perdre leur droit d'asile,
ils descendirent en tenant une corde attachée à la statue de la
Déesse. Lorsqu'ils furent près de l'autel des Euménides, la
corde se rompit. L'archonte Mégaclès s'écria qu'Athènè leur
refusait sa protection. On les massacra, méqfie ceux qui em-
brassaient l'autel des Graves Déesses.
Ce sacrilège produisit sur l'opinion publique une impression
sinistre. Toute la famille des Alcmaionides, dont Mégaclès était
le chef, fut considérée comme impure. Ils essayèrent de braver
cette réprobation, puis, sur le conseil de Solon, ils consentirent
à être jugés par un tribunal de trois cents Eupatrides qui les
condamnèrent à l'exil. Les ossements des membres de la
famille qui étaient morts depuis le sacrilège furent déterrés et
jetés hors du territoire. Cela ne suffit pas pour calmer les
terreurs religieuses. On fit venir le Cretois Epiménide, qui
avait la réputation d'un prophète et passait pour avoir été
nourri par les Nymphes ; ou racontait que, dans sa jeunesse,
il s'était endormi dans une caverne et y était resté cinquante-
sept ans sans se réveiller. Il connaissait les vertus des plantes
et passait pour un grand médecin; c'était surtout un médecin
des âmes. 11 fit partir de l'Aréiopage des brebis blanches et dos
dbyGoogk
SOLON. 311
brebis noires, ordonna de les suivre et d'immoler chacune
d'elles sur un autel élevé à la divinité du lieu. Quelques-unes
s'arrêtèrent dans des lieux dont on ne connaissait pas le Dieu
prolecteur ; les autels qu*on y éleva furent consacrés à un Dieu
inconnu. Plus de six cents ans après, un de ces autels qui sub-
sistait encore fournit à saint Paul un exorde ingénieux pour
prêcher une religion nouvelle. Epiniénide se mit en rapports
avec Solon, qui avait l'estime de tous les partis à cause de sa
prudence, et institua quelques cérémonies lustrales qui ren-
dirent la paix aux consciences troublées. On lui offrit un talent
d'or qu'il refusa, demandant seulement pour Cnossos, sa patrie,
l'amitié des Athéniens, et pour lui-même une branche de
l'olivier sacré qu'Athènè avait fait germer sur le rocher de
TAcropoIe.
Solon. — Prise de Salamine. — C'est sans doute pour
venger son gendre Kylon, peut-être même à son instigation,
que Théagénès de Mégare s'empara de Salamine. Après plu-
sieurs tentatives pour la reprendre, les Athéniens découragés
avaient défendu, sous peine de mort, d'en faire même la pro-
position. Solon, indigné de ce décret, contrefit la folie, se
présenta sur la place publique en bonnet de malade, et monté
sur la pierre où se faisaient les proclamations, déclama devant
le peuple une élégie de cent vers commençant ainsi : « J'ar-
rive en messager de la belle Salamine, et je vais vous dire les
vers harmonieux que m'a inspirés Apollon. Que ne puis-je
changer de patrie, que ne suis-je né dans l'ile la plus humble,
à Sikinos ou à Pholégandros, plutôt que d'entendre dire :
« Celui-ci est un Athénien, un de ceux qui ont renoncé à Sala-
mine »... Combattons pour cette île désirable, écartons de nous
la honte et le déshonneur. » Quand il eut achevé, tout le
monde était de son avis; le décret fut annulé, Solon fut nommé
général et s'empara de Salamine par surprise. Mais les Méga-
riens ne voulaient pas y renoncer; il fallait soutenir une
guerre qui pouvait devenir désastreuse, car à cette époque,
Mégare, malgré l'exiguité de son territoire, était plus riche et
plus puissante qu'Athènes. On convint de s'en remettre à
l'arbitrage de Sparte. Solon, pour établir les droits de ses con-
citoyens à la possession de l'île, invoqua l'autorité du Cala-
dbyGoogk
312 LUTTE DES RICHES ET DES PAUVRES.
logue de l'Iliade, et'usant d'une fraude patriotique, supposa un
vers où Aias était représenté comme rangeant les vaisseaux de
Salamine à la suite de ceux d'Alh«ncs. Les vers d'Homère
n'étant pas encore écrits à cette époque, on ne pouvait pas
prouver que la citation était fausse; les Spartiates trouvèrent
l'argument péremptoire et adjugèrent Salamine aux Athéniens.
Solon devint très populaire. Il accrut encore sa réputation en
épousant la cause du temple de Delphes contre les extorsions
des habitants de Kirrha. Quoique Cleisthénès de Sikyone eût
le principal rôle dans la guerre sacrée décrétée par les A m -
phictions, il n'était pas inutile aux Athéniens -de se poser en
protecteurs de Delphes, et Solon, qui peut-être pensait déjà à
faire une constitution pour Athènes, ne pouvait pas ignorer
combien l'appui d'Apollon avait été utile à Lycurgue.
Lutte des riches et des pauvres. — Solon se rattachait
aux Eupatrides par sa naissance ; on dit même qu'il descendait
de Codros. En réalité il appartenait à labourgeoisie et s'était
enrichi par le commerce. Le peuple l'aimait à cause de sa
droiture et de son patriotisme. C'était l'homme désigné pour
rétablir la paix entre les classes. Le législateur d'Athènes et
celui de Sparte apparaissent dans des circonstances à peu près
semblables; à Athènes comme à Sparte, la loi est appelée
comme un remède suprême aux maux du peuple. Les empié-
tements successifs de l'oligarchie, peut-être aussi une suite de
mauvaises récoltes, avaient réduit les Thèles ou travailleurs
à une condition que Denys d'Halicarnasse rapproche de celle
des plébéiens de Rome. 11 reste un fragment de Solon qui se
rapporte à l'oppression exercée par les riches sur les pauvres :
« Notre république ne sera pas détruite par la destinée de Zeus
(aiaa) et la volouté des immortels Dieux heureux, car une ma-
gnanime gardienne, fille d'un père puissant, Pallas Athènaiè,
la protège. Mais ce sont des citoyens qui, fiers de leur richesse,
veulent perdre la grande cité par leur folie; c'est l'injustice
des chefs du peuple, qui se préparent bien des malheurs par
leur grande violence, car ils ne savent pas modérer leur avidité
et user du bonheur présent dans le repos et l'abondance... (ici
une lacune).... et ils s'enrichissent par des actions injustes
(autre lacune).... et, n'épargnant ni les biens sacrés ni les
dbyGoogk
LA QUESTION SOCIALE. 313
biens du peuple, ils pillenl el volent de tous les côtés et ne
respectent pas les saintes lois de la Justice. Mais elle, silencieuse,
sachant le passé et l'avenir, vient tout venger en son temps.
C'est pourquoi un ulcère incurable envahit toute la cité, elle
tombe tout à coup dans la dure servitude qui réveille la dis-
sension endormie... » Solon énumère ensuite les maux de la
guerre et conseille aux Athéniens de les éviter par de bonnes
lois qui mettent un terme à la satiété, c'est-à-dire à l'excès des
richesses, source de l'injustice et de la violence.
Lia question sociale résolae par Solon. — La crise qui
se termina par rétablissement de la démocratie fut provoquée
par ce qu'on appellerait aujourd'hui une question sociale. Les
citoyens pauvres étaient obligés d'engager leurs champs, puis
de se mettre au service de leurs créanciers el même de vendre
leurs femmes et leurs enfants. « Le plus grand nombre et les
plus animés d'entre eux, dit Plutarque, s'excitèrent les uns les
autres à ne plus souffrir ces indignités. Ils résolurent de se
donner pour chef un homme digne de leur confiance, d'aller
sous sa conduite délivrer les débiteurs qui n'avaient pu payer
aux termes convenus, de faire un nouveau partage des terres
et de changer toute la forme du gouvernement. Dans cette
i'ùcheuse conjoncture, les plus sages des Athéniens eurent
recours à Solon, comme le seul qui ne fût suspect à aucun des
partis, parce qu'il n'avait ni partagé l'injustice des riches, ni
approuvé le soulèvement des pauvres; ils le prièrent de pren-
dre en main les affaires et de mettre fin à leurs dissensions. »
Solon fut investi d'une sorte de dictature, comme Piltacos à
Mitylène, mais on ne créa pas pour lui un titre spécial, il fut
seulement nommé archonte, avec une autorité indéfinie.
Il commença par rendre à la liberté les débiteurs réduits en
esclavage par les usuriers, et força ceux-ci à dégager à leurs
frais ceux qu'ils avaient vendus dans des contrées étrangères.
Il prévint le retour d'un pareil abus en empêchant par une
loi que le débiteur pût être vendu ou contraint de vendre
ses enfants. La hberté individuelle fut garantie; personne
ne put être mis en prison avant d'avoir été condamué
par un jugement, excepté pcTur les crimes de péculat, de
trahison ou de conspiration contre la république. Solon au-
L. M. — HisT. DES GttËCs. 18
Digitized by VjOOQIC
314 LOI DE SOULAGEMENT.
nula aussi les hypothèques et fit arracher des champs les
pierres sur lesquelles on les inscrivait. Sans abolir les dettes
comme les révolutionnaires de Mégare, il les réduisit considé-
rablement, au moyen d'une combinaison financière qu'on
nomme atiaàx^"*» c'est-à-dire soulagement. Elle consistait en
un changement dans la division monétaire : la mine, qui était
partagée en 73 drachmes, fut partagée en 100, de façon à libé-
rer en partie les débiteurs sans frustrer entièrement les créan-
ciers. Celte mesure, qui préservait la ville d'une révolution,
était sans danger pour le commerce, dans un temps où il n'y
avait pas de marchés à terme avec le dehors, et le crédit
d'Athènes n'eut pas à en souffrir.
Un compromis fait toujours des mécontents; Solon en prit
son parti : « Dans les grandes aff'aires, dit-il, il est difficile de
plaire à tout le monde. » Les riches trouvaient qu'en donnant
à ses mesures un efi'et rétroactif il violait des droits acquis;
les pauvres avaient espéré qu'il détruirait le mal dans sa racine
par une distribution égale de la propriété. Plutarque l'excuse
de n'avoir pas tenté cette entreprise; Lycurgue, qui, selon lui,
l'avait réalisée à Sparte, exerçait l'autorité royale et agissait sur
une société non encore constituée; Solon n'avait qu'une in-
fluence morale. S'il est vrai, comme on l'a dit, qu'il ait obtenu
celte influence en promettant aux riches de consacrer les dettes,
aux pauvres départager les terres, du moins cette ruse n'avait
pas eu pour motif une ambition personnelle. Sous le rapport
de rhonnéteté, Solon peut être rapproché de Néhémiah qui, un
siècle et demi plus tard, joue un rôle analogue dans l'histoire
des Juifs {{}. Néhémiah atteste son désintéressement dans ses
mémoires et off're l'exemple, presque incroyable pour nous, d'un
fonctionnaire renonçant à son traitement. Solon, dans les vers
qui nous restent de lui, raille ceux qui l'accusaient de sottise
parce qu'il avait renoncé au pouvoir qu'il pouvait facilement
garder : « Solon n'est pas né avec un esprit profond et avisé :
un Dieu lui offre des biens, il ne les prend pas. Lorsqu'il lient
le poisson, il ne sait pas ramener le filet; il manque d'au-
dace et de bon sens. » Il se félicite avec un légitime orgueil de
(I) Voir mou Histoire des israélites d'après Vexégèse biblique.
dbyGoogk
RÉPARTITION DE LMMPOT. 315
ne s'être pas fait tyran d'Athènes : « Si j'ai respecté ma terre
paternelle, si je n*ai pas flétri et souillé ma gloire en m*empa-
rantde la tyrannie par violence, loin d'en rougir, je crois plutôt
que je l'emporterai par là sur tous les hommes. » Dans des
ïambes qui ont été conservés, il invoque le témoignage de la
grande mère des Démons olympiens, de la Terre noire, esclave
auparavant^ libre désormais. IL déclare qu'il a rendu à la
patrie bien des exilés, à la liberté bien des citoyens réduits en
servitude, et il ajoute que, s'il n'avait pas su garder de juste
mesure, s'il avait voulu satisfaire un parti ou l'autre, la répu-
blique aurait été veuve de bien des citoyens. On finit par le
reconnaître, et Solon, possédant la confiance générale, apporta
le même esprit de conciliation dans la rédaction des lois qu'il
fut chargé de présenter au peuple.
Constitution politique de Solon : Répartition de
rimpôt. — La base de la constitution politique de Solon est un
impôt progressif établi sur les revenus. Le groupement des
familles en phratries ou clans, et des phratries en quatre
tribus, se rattachait à des cultes privés et à des traditions lo-
cales : Solon n'essaya ni de le changer ni de s'en servir ; il
créa de nouveaux cadres pour la répartition de l'impôt. Les
citoyens furent partagés en quatre classes. La dernière, la
classe des Thètes comprit à la fois les prolétaires vivant uni-
quement de leur travail et les petits propriétaires, dont les
champs rapportaient moins de deux cents médimnes de grain
(le médimne valait à peu près une drachme, un peu moins
d'un franc). Cette classe ne fut pas soumise à l'impôt, et Solon
fit preuve d'un grand sens politique en unissant, par la com-
munauté d'intérêts, les ouvriers et la petite bourgeoisie. Il ne se
montra pas moins habile en répartissant l'impôt d'une manière
progressive entre les trois classes de censitaires; cela empo-
chait le groupement des citoyens en riches et pauvres. La
première classe comprenait ceux qui avaient 500 médimnes de
revenu, on les appelait Pentacosiomédimnes. Ceux qui avaient
un revenu de 300 à 500 médimnes formaient la seconde classe;
ils s'appelaient Cavaliers, parce qu'ils pouvaient entretenir un
chevalet servir dans la cavalerie. La troisième classe, celle des
Zeugiles, à qui leur revenu de 300 à 200 médimnes permettait
dbyGoogk
316 LE SÉNAT ET L'ARÉIOPAGË.
d'avoir une paire de bœufs, formait l'infanterie pesamment
armée ; chacun devait servir avec une armure complète ac-
quise à ses frais, landis que les Thètes ne servaient que comme
troupes légères ou avec une armure fournie par l'État.
Les fonctions publiques n'étaient accessibles qu'aux cen-
Mtaires, puisqu'elles étaient gratuites; quelques-unes même,
comme celle de Triérarques, de Gymnasiarques, de Chorèges,
entraînaient des dépenses et des embarras considérables ; on
les appelait des Liturgies. L'archontat et les charges les plus
onéreuses étaient réservées à la première classe. Toutes les
fonctions étaient électives, et comme les Thètes étaient les
plus nombreux, c'étaient eux qui faisaient les élections. Ce qui
était encore plus important, c'est que toutes les magistratures
étaient annuelles, et qu'après leur année de charge, les ma-
gistrats étaient soumis à une reddition de comptes devant
l'assemblée générale du peuple, et punis en cas de mauvaise
gestion.
Le Sénat. L^Aréiopage. — Le Sénat, que G rote regarde
comme la création la plus importante de Solon, n'avait pas
pour but de contenir la puissance populaire, mais d'en rendre
l'exercice plus facile et plus régulier. Il était chargé de con-
voquer l'assemblée publique, de préparer ses délibérations et
d'assurer l'exécution de ses décrets. Les sénateurs, au nombre
de quatre cents, étaient élus -chaque année, en proportions
égales, non dans les quatre classes, mais dans les quatre
tribus athéniennes ; dans une période plus avancée de la dé-
mocratie, ils furent désignés parle sort. Quanta l'Aréiopage,
qui était le tribunal suprême, c'était la seule fonction à vie.
On en faisait remonter l'origine à l'époque mythologique.
Solon lui attribua, outre les fonctions politiques et judiciaires
qu'il avait déjà, la surveillance des mœurs et le devoir de punir
les oisifs. Les Archontes entraient dans le Sénat de l'Aréiopage
après avoir rendu leurs comptes devant le peuple. Solon con-
sidérait ces deux Sénats comme deux ancres pour mettre la
république en état de résister à toutes les tempêtes. Sans
croire sa constitution parfaite, il la regardait comme la meilleure
possible dans les circonstances où on se trouvait. « J'ai donné
au peuple autant de pouvoir qu'il était nécessaire, sans res-
dby Google
LE LIEN SOCIAL. LE TRAVAIL. 317
treindre ses droits et sans les étendre au delà des bornes. A
ceux qui avaient la force et qui se glorifiaient de leurs richesses,
j'ai interdit toute usurpation. J'ai étendu sur les deux partis
un bouclier solide, et je n'ai permis ni aux uns ni aux autres
de vaincre injustement. » II est de toute nécessité, en effet, de
reconnaître au peuple le droit de choisir les magistrats et
de leur faire rendre des comptes ; « sans cela, dit Aristote.
le peuple n'est dans l'État qu'un esclave et un ennemi »,
Lois civiles. — Le lien social. Le travail. -- On ne pos-
sède malheureusement pas le recueil des lois de Solon. II y
avait des prescriptions détaillées sur la propriété, les relations
de voisinage, et en général sur les devoirs réciproques des
citoyens. La loi qui défendait de rester neutre dans les dis-
sensions politiques avait pour but de flétrir cette prudence
égoïsle qui attend l'issue de la lutte pour se ranger du parti
xictorieux. Il est à remarquer que cette loi ne condamne pas
la sédition en elle-même et ne suppose pas que le droit soit
nécessairement du côté du pouvoir ; elle veut seulement que le
peuple fasse connaître sa volonté. La loi, la justice et la liberté
sont sous la sauvegarde de tous. Solon disait que la meilleure
république étaitcelle où toute injustice est poursuivie par ceux
qui n'en souffrent pas comme par celui qui en est victime.
Il encouragea chaque citoyen, dit Plutarque, à entamer des
poursuites pour tout acte de violence exercé contre un autre.
La loi athénienne punissait toute espèce de mauvais traite-
ment, de sévicc ou d'outrage contre un enfant, une femme,
un homme, libre ou esclave. Démosthène, qui cite cette loi,
en fait* remarquer l'humanité, çiXavôpwïria, et ajoute que plu-
sieurs ont été punis de mort pour l'avoir violée. La condition
des esclaves à Athènes fut toujours très douce. Quand ils
avaient à se plaindre de leur maître, ils pouvaient l'obliger à
les vendre à un autre. A Sparte, l'agriculture, le commerce et
l'industrie étaient abandonnés aux Lacones et aux Hilotes;
Athènes, fidèle aux anciennes traditions, honora le travail sous
toutes ses formes, l'agriculture, le commerce, l'industrie etl'arl.
11 était défendu de reprocher à qui que ce fût l'état qu'il
exerçait ; le plus habile dans chaque métier était nourri au
Prytanée et occupait une place d'honneur dans les fêtes publi-
18.
dbyGoogk
318 CONDITION DKS FEMMES.
ques. Celui qui avait été trois fois condamné pour oisiveté était
noté d'infamie ; les étrangers mêmes ne pouvaient s'établir à
Athènes que pour y exercer un état. C'est l'application du mot
d'Hésiode : « Aucun travail n'est honteux, il n'y a de honteux
que la paresse. »
Gonditioii des femmes à Athènes. — Les règlements sur
le mariage des riches héritières empêchaient, par des moyens
peut-être un peu étranges, que le mariage ne devînt une af-
faire d'intérêt. Quant aux orphelines pauvres, leur plus proche
Danse de jeuues filles (Musée du Louvre).
parent était obligé de les épouser ou de leur constituer uiïe
dot, dont le chiffre était fixé selon la classe à4aquelle il apparte-
nait. La condition de mère de famille étant la seule honorable
pour une citoyenne, il fallait que ce fût aussi la seule possible.
En retenant les femmes dans un état de minorité, la loi sem-
blait leur faire payer les avantages qu'elle leur accordait,
mais l'honneur étant le bien le plus précieux pour elles, valait
bien le sacrifice d'une partie de leur indépendance. Une limite
était imposée au luxe de leur parure quand elles allaient au
marché ; il leur était interdit de sortir la nuit autrement qu'en
voiture et avec une torche. On croit aujourd'hui que la liberté
de conversation entre les deux sexes est un moyen d'aiguiser
l'esprit: les Athéniens ne passaient pas pour des sots; mais
l'honneur des familles était à leurs yeux une plante précieuse
et délicate. La danse était un art et non un prétexte à conver-
sation ; sur les bas-reliefs, les femmes ne dansent qu'entre
elles, excepté dans les scènes dionysiaques, qui sont mytholo-
giques et ne répondent à aucune réalité. La femme grecque
dbyGoogk
ÉDUCATION. SERMENT MILITAIKE. 319
n'est pas soumise à une réclusion forcée, comme en Orient ;
elle garde une retraite volontaire. Elle n'est pas captive sous les
grilles d'un harem, mais elle n'étale pas son esprit et ses
charmes devant une foule d'oisifs, prodiguant à tous ses sou-
rires excepté à celui qu'elle a juré d'aimer. Ignorée de la
foule, nul ne parle d'elle, ni en bien ni en mal, selon le mot
de Périclès dans Thucydide. Elle n'admet pas môme les amis
de son mari à sa table. L'étranger baisse les yeux devant sa
chasteté voilée, et celui qui seul peut la connaître l'honore
comme la divinité tutélaire du foyer domestique. 11 l'aime d'un
amour grave et profond, comme on aime la patrie.
Éducation des enfants. •— Serment militaire. — Solon
obligea les parents à enseigner à leurs enfants la lecture, la
natation et un état. Les enfants à leur tour devaient nourrir
leurs parents, les loger et leur fournir toutes les nécessités de
la vie. Ceux qui manquaient à ce devoir étaient notés d'infamie,
peine qui répond à peu près à la mort civile. Mais ceux à qui
leur père n'avait pas appris d'état ne lui devaient que la sépul-
ture. Jusqu'à seize ans, l'enfant était laissé aux soins de ses
parents ; alors il était inscrit sur le registre des Phratries, et
pendant les deux années suivantes, il fréquentait les gymnases
publics, sous la surveillance de maîtres nommés par l'État. A
dix-huit ans, les Éphèbes gardaient les places de l'Attique et
veillaient à la défense du territoire. Après cet apprentissage
du service militaire, ils prêtaient le serment suivant dans
le temple d'Agraulos (la champêtre] : « Je ne déshonorerai
pas ces armes sacrées. Je n'abandonnerai pas mon chef de file
et mon rang. Je combattrai pour les autels et les foyers, soit
seul, soit avec d'autres. Je ne laisserai pas ma patrie plus faible
que je ne l'ai reçue, mais plus grande et plus forte. J'obéirai à
ceux qui jugeront selon la justice. Je serai soumis aux lois éta-
bUes et à celles que le peuple portera d'un consentement una-
nime. Je ne permettrai pas que personne renverse les lois ou
leur désobéisse, mais je les défendrai, soit seul, soit avec
d'autres. Et j'honorerai la religion de mes pères. Soient té-
moins les Dieux champêtres, Enyalios, Zeus, Thallô, Auxô,
Hègémonè. »
Les tables de la loi. — Les lois politiques et religieuses
dbyGoogk
320 FACTIONS POLITIQUES.
furent gravées sur des tables de pierre (wp^giç), les lois civiles
sur des pyramides de bois tournant sur un axe (âÇovsç). Les
lignes étaient tracées alternativement de gauche à droite et de
droite à gauche. Ce procédé primilif, qui montre que Tusage
de l'écriture était encore peu répandu, s'appelait Boustrophé-
don, parce qu'il rappelait la marche d'un attelage de bœufs
traçant des sillons dans un champ. Tout le monde pouvait
consulter les lois au milieu de la place publique. Solon fit ju-
rer aux Athéniens d'observer ses lois pendant dix ans, puis il
leur demanda la permission de voyager. Il visita l'Egypte, où
les prêtres lui racontèrent la submersion de la grande île
d'Allantis et la guerre soutenue neuf cents ans auparavant
par les ancêtres des Athéniens contre les Atlantes; il com-
mença un poème sur ce sujet. Il alla ensuite dans l'île de
Kypros et fut reçu par Philokypros, roi de la ville d'Aipeia,
fondée jadis par un fils de Thèseus. Il persuada au roi de
quitter cette ville, dont la position était peu avantageuse, et
d'en bâtir une un peu plus loin. Il fit des règlements pour la
nouvelle cité qui prospéra très rapidement et prit le nom de
Soloi en l'honneur de Solon. On place ensuite une entrevue
entre Solon et Croisos, roi de Lydie, racontée d'une façon très
intéressante au début de l'histoire d'Hérodote (1), uiais qui,
d'après la chronologie, est inadmissible, car Croïsos était né
en 595, un an avant la législation de Solon, et ne succéda à
son père qu'à l'âge de trente-cinq ans, en 560.
Factions politiques. — Usurpation de Pisistrate. —
Les meilleures lois ne suffisent pas pour donner à un peuple
le sens politique ; il faut les leçons de l'expérience. Ce que
Solon vit à son retour dut le jeter dans un découragement
profond. Il avait cru que les Alliéniens étaient mûrs pour la
liberté, il s'était trompé. Les discordes civiles avaient recom-
mencé après son départ; non pas entre les riches et les pau-
vres, la loi de soulagement et l'impôt progressif y avaient mis
bon ordre, et la question sociale était résolue : mais il y avait
des divergences d'intérêts locaux, et les grandes familles les
exploitaient au profit de leurs ambitions. 11 y avait trois partis,
(1) J'ai résumé cette légende dans VHistoire des anciens peuples de
l'Orient.
dbyGoogk
USURPATION DE PISISTRATE. 321
dont chacun avait son chef, recrutant des clients dans les di-
verses classes de la population. Lycurgue s'était mis à la tôle
des Pédiaiens, ou habitants de la plaine aux environs
d'Athènes. Les Diacriens, qui cultivaient le sol plus pauvre de
la région nnontagneuse au nord de TAttique, se groupaient
autour de Pisistrate. Les Paraliens, ou habitants des côtes,
avaient pour chef l'Alcmaionide Mégaclès, petit-fils de celui
qui avait réprimé la tentative de Kylon, car après l'établisse-
ment de la constitution de Solon, les Alcmaionides étaient
rentrés à Athènes. Le vieux législateur essaya de mettre la paix
entre les factions rivales et ne fut pas écouté. L'issue de la
querelle dépendait maintenant de l'habileté ou de l'auddce des
chefs. Pisistrate employa le moyen qui avait réussi à Théagé-
nès de Mégare; il se fit quelques égratignures, déclara qu'on
avait voulu l'assassiner parce qu'il aimait le peuple, et aussitôt
le Sénat, où il avait beaucoup d'amis, lui fit donner une
garde. Solon avait inutilement averti ses concitoyens du dan-
ger. Quand le mal fut consommé par l'occupation de l'Acropole
il essaya d'exciter url soulèvement général : « Il eut mieux
valu, disait-il, prévenir l'usurpation ; mais il sera plus glorieux
de la détruire après qu'elle s'est établie. » Personne ne l'é-
couta ; la faction oligarchique de la plaine se tint à l'écart; les
Alcmaionides, chefs du parti moyen, s'exilèrent, et les monta-
gnards virent une victoire pour eux dans l'usurpation de leur
chef. Solon mit ses armes devant sa porte : « Si vous portez la
peine de vos fautes, dit-il aux Athéniens, n'en accusez pas la
destinée des Dieux ; vous-mêmes, par vos dons, avez grandi
ceux qui vous oppriment, et voilà pourquoi vous subissez la
dure servitude. »
Pisistrate ne fit pas de mal à Solon, sachant bien qu'il n'y
avait aucun danger à laisser ce vieillard mourir en paix. Par
une tactique habile, qui fut imilée à Rome par Auguste, il con-
serva les formes extérieures de la république, seulement il fit
élire ses amis aux fonctions importantes. On s'accorde à dire
que sa tyrannie ne fut pas oppressive. Cependant, avant d'avoir
pu asseoir solidement son usurpation, il fut chassé d'Athènes
par la coalition de ses deux rivaux Lycurgue et Mégaclès. Mais
leur alliance ne dura pas longtemps. Mégaclès, qui était gendre
dbyGoogk
322 ÉDITION DES POÈMES D'HOMÈRE.
du tyran de Sikyone, voulut devenir, faute de mieux, beau-
père du tyran d'Alhènes et offrit sa fille à Pisistrale qui s'em-
pressa d'accepter. Ils employèrent pour restaurer la tyrannie un
stratagème dont le succès, comme le remarque Hérodote, fait
peu d'honneur au bon sens du peuple athénien. Ils revêtirent
du costume d'Athènè une femme superbe, haute de six pieds,
la firent monter sur un char, Pisistrate se tenant à côté d'elle,
et le char entra dans la ville, précédé d'un crieur annonçant
que la Déesse protectrice d'Alhènes ramenait son cher Pisis-
trate et mvitait les citoyens aie bien recevoir. Le peuple obéit,
et ne se serait jamais douté de l'imposture si le beau-^pèrene
s'était querellé avec son gendre pour un outrage fait à sa fille.
Pisistrate apprit que Mégaclès s'était rapproché des Pédiaiens;
ne se sentant pas en état de soutenir la lutte, il se retira à
Erétrie et il aurait abandonné tout espoir de retour sans l'in-
sistance d'Hippias, l'aîné de ses fils, qui l'engageait à préparer
sa revanche. Ses biens, à ce qu'il semble, n'avaient pas été
confisqués ; bien des aventuriers avaient confiance dans sa for-
tune, il trouva des ressources pour lever des troupes. Lygda-
mis, tyran de Naxos, lui fournit de l'argent et des auxiliaires.
Il s'empare de Marathon où ses partisans viennent le rejoindre;
l'armée envoyée contre lui se laisse surprendre à Timprovisle
et se défend si mal qu'on pourrait croire à une trahison, et
après dix ans d'exil il rentre à Athènes dont il se trouve maître
pour la troisième fois.
Gouvernement de Pisistrate. Édition des poèmes
d^Homère. — Il prit ses dispositions pour y rester. « Il affer-
mit sa tyrannie, dit Hérodote, au moyen de troupes auxiliaires
et de fortes sommes d'argent qu'il tirait, celles-ci du pays,
celles-là du fleuve Strymon (I). Il l'affermit encore par sa con-
duite avec ceux des Athéniens qui avaient tenu ferme dans la
dernière action et qui n'avaient pas sur-le-champ pris la fuite :
il s'assura de leurs enfants qu'il envoya à Naxos, car il avait
conquis cette île et en avait donné le gouvernement à Lygda-
mis. m'affermit enfin en purifiant l'île de Dèlos suivant l'ordre
des oracles. Voici comment se fit cette purification : de tous
(1) Le texte est ambigu; j'ai adopté l'interprétation de Grote.
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HARMODIOS ET ARISTOGEITON. 323
les lieux d'où Ton voyait le temple, il fit exhumer les cada-
vres et les fit transporter dans un autre canton de l'île. Pisis-
trate eut d'autant moins de peine à établir sa tyrannie sur les
Athéniens, que les uns avaient été tués dans le combat, et que
les autres avaient quitté leur patrie et s'étaient sauvés avec
Mégaclès. » Lorsqu'il se crut solidement établi au pouvoir, il
gouverna avec modération et intelligence. Il ouvrit ses jardins
aux citoyens pauvres, mit à la charge de l'Etat les soldats
mutilés à la guerre et fit exécuter de grands travaux publics
pour donner de l'emploi à tous les ouvriers. Il construisit les
conduites de la fontaine Callirhoè, et commença sur une très
vaste échelle un temple de Zeus Olympien qui ne fut achevé
que sept siècles plus tard par l'empereur Hadrien. 11 établit la
grande fête des Panalhénées célébrée tous les quatre ans.
Mais la postérité lui doit un service bien supérieur à ceux
qu'il rendit à ses contemporains : il fit écrire et mettre en
ordre pour la première fois les poèmes d'Homère, que les
rhapsodes récitaient jusque-là par morceaux détachés. Le
commerce du papyrus commençait à peine à se répandre;
en dehors de quelques textes gravés sur pierre ou sur bois,
comme les lois de Solon, on se servait très peu de l'écriture,
et la littérature en prose n'existait pas encore. Outre les
chants d'Homère. Pisistrate fit écrire ceux de quelques autres
poètes. Il fut le premier qui eut une bibliothèque et il com-
muniqua libéralement au public les trésors qu'elle renfer-
mait.
Harmodios et Aristogeiton. — Pisistrate mourut en 527,
trente-trois ans après sa première usurpation. Ses trois fils,
Hippias, Hipparchos et Thessalos lui succédèrent, et, suivant
Thucydide, qui leur est très favorable, ils gouvernèrent avec
douceur. Mais ce qui empêche d'admettre ce témoignage, qui
s'explique par des relations de famille, c'est le meurtre de
Kimon, père de Milliade, qu'ils firent tuer de nuit, selon Héro-
dote, par des assassins soudoyés. Hipparchos avait hérité des
goûts littéraires de Pisistrate; il invita les poètes Anacréon et
Simonide à sa cour, et fit placer sur les roules des Hermès
avec des sentences morales en vers, dont il était probable-
ment l'auteur. Mais, par suite d'une injure personnelle, un
dbyGoogk
324 TYRANNIE D'HIPPIAS.
complot fut tramé par deux jeunes gens, Harmodios et Aris-
logeiton, aidés de quelques amis. Ils avaient choisi le jour des
Panathénées, parce qu'à l'occasion de la fêle ils pouvaient
être armés sans exciter les soupçons. Ils avaient (în outre des
poignards cachés sous des branches de myrte. Au moment
d^agir, les conspirateurs virent un d'entre eux s'entretenir
familièrement avec Hippias ; ils se crurent trahis, et pour se
venger au moins d'Hipparchos, auteur de l'insulte qu'ils vou-
laient punir, ils le frappèrent de leurs poignards. Harmodios
fut tué sur-le-champ par les gens de l'escorte. Aristogeiton
s'échappa. La nouvelle parvint à Hippias qui passait une revue
dans le quartier du Céramique. Avec un rare sang-froid, il
dit aux citoyens de déposer leurs armes et de s'assembler sur
un point qu'il leur désigna ; alors il fit saisir les armes par
ses gardes. On s'empara des gens suspects et on mit à mort
ceux sur lesquels on trouva des poignards. Aristogeiton fut mis
à la torture. On essaya de lui faire nommer ses complices, il
désigna successivement les meilleurs amis du tyran qui furenl
aussitôt exécutés. « En reste- t-il d'autres? » demanda Hippias.
Il répondit : « Il n'y a plus que toi. »
Tyrannie d*Hippias. Sa chute. — A partir de ce moment,
Hippias régna par la terreur. Pour se ménager un refuge et
une alliance, il donna sa fille au fils d'Hippoclos, tyran de
Lampsaque, qui était en faveur auprès du grand roi de Perse.
Mais ses exactions et ses violences le rendaient de plus en plus
impopulaire et relevaient les espérances de ses ennemis les
Alcmaionides. Ils s'armèrent dans l'exil et tentèrent une inva-
sion en Attique. On a conservé une sorte de chant funèbre sur
leur défaite à Leipsydrion : « Ah! Leipsydrion, traître aux
amis! Quels hommes tu as détruits, braves au combat et de
bonne race, et qui ont montré alors de quels pères ils étaient
nés! » Pour se ménager l'appui d'Apollon, ils rebâtirent à
leurs frais le temple de Delphes détruit par un incendie, et la
Pythie leur procura l'appui de Sparte ; chaque fois qu'un Spar-
tiate venait la consulter, elle terminait sa réponse par ces
mots : « Il faut délivrer Athènes. » Les Spartiates, malgré les
liens d'amitié qui les unissaient aux Pisistratides, finirent par
céder aux injonctions réitérées de l'oracle. Ils envoyèrent des
dbyGoogk
RÉFORMES DE CLEISTHÉNÉS. 3255
troupes qui furent battues par les cavaliers thes^alieus, alliés
d'Hippias. Ils revinrent avec des forces plus considérables
commandées par leur roi Cléoménès. La cavalerie thessa-
lienne lâcha pied, et Hippias s'enferma dans la citadelle qu'il
avait approvisionnée pour soutenir un long siège. Mais ses
enfants, qu'il avait voulu envoyer en lieu sûr, tombèrent en-
tre les mains de ses adversaires, et pour se les faire rendre
il fut obligé de quitter l'A tlique dans cinq jours.
Il se retira avec ses partisans dans la ville de Sigeion en
Troas, possession athénienne qu'il considérait comme un
fief de sa famille. Un décret condamna les Pisislratides à un
bannissement perpétuel. Le peuple, oubliant qu'il ne devait
sa délivrance qu'à l'intervention de Sparte, en reporta l'hon-
neur sur les meurtriers d'Hipparchos, quoiqu'ils n'eussent
obéi qu'à une vengeance particulière ; on a conservé un chant
populaire en leur honneur : « Dans la branche de myrte je
cacherai le glaive, comme Harmodios et Aristogeiton, lors-
qu'ils tuèrent le tyran et rétablirent l'égalité dans Athènes.
Cher Harmodios, non, tu n'es pas mort; tu es dans les îles des .
heureux, où sont, dit-on, Achille aux pieds légers et Diomèdès
fils de Tydeus. Dans la branche de myrte, je cacherai le
glaive, comme Harmodios et Aristogeiton, lorsqu'aux fêtes
d'Alhènè , ils tuèrent le tyran Hipparchos. Toujours votre
gloire vivra sur la terre, chers Harmodios et Aristogeiton,
parce que vous avez tué le tyran et rétabli l'égalité dans
Athènes. »
Réformes de Gleisthénés. — La famille des Alcmaioni-
des avait alors pour chef Gleisthénès, fils de Mégaciès et petit-
fils, par sa mère, de Gleisthénès, tyran de Sikyone. Pour lutter
avec avantage contre Isagoras, chef de la noblesse, il se
tourna vers le peuple et entreprit de le fondre avec la bour-
geoisie. 11 n'y avait rien à changer à la constitution de Selon,
mais ce n'était qu'une lettre morte, et elle n'avait pas gêné les
Pisistralides. Le suffrage universel est une arme inutile entre
les mains du peuple, s'il laisse diriger ses votes par le gou-
vernement ou par les grandes familles. Il fallait changer les
cadres de la population, pour l'empêcher de se partager en
factions locales. Gleisthénès remplaça les quatre tribus ionien-
L. M. — HisT. DES Grecs. 19
dbyGoOgk
CKEISTHÉNÈS.
l chacune dix,Dèmes, c*est-à-
mr mêler les habitants de la
ans l'unité de la Cité, pour en
aine, de la montagne et du ri-
nt répartis dans des tribus dif-
Altique une foule d'étrangers,
Tses industries, les uns riches,
elait Métœkes, c'est-à-dire do^
que Cleisthénès en incorpora
s dix tribus. Cela introduisait
>uveaux, cela le soulageait du
Nulle part les races n'étaient
ciment de la démocratie leur
l'y a pas d'autre exemple en
porté à 500 ; chaque tribu en
en remettre l'élection au peu-
lencer par des intrigants, on
ididats soumis à un examen
endit'peu à peu à la plupart
Itribue à Cleisthénès l'institu-
par coquilles, qui servait de
its populaires en imposant un
it la présence paraissait dan-
11 fallait au moins six mille
que la sentence d'exil fût va-
désuétude environ un siècle
Bs. — Les Spartiates avaient
3rlé ; ils la dispensèrent de la
ui imposer le joug de la fac-
' Isagoras. Le roi Cléoménès,
!>agoras, fit sommer les Âthé-
lite des Alcmaionides. Aussi-
ent d'Athènes, soit pour épar-
ens, soit pour leur fournir
le ses adversaires. £n effet,
a ce qu'il demandait, envahit
dbyGoogk
INTERVENTION DES SPARTIATES. 327
TAllique, entra dans la ville, chassa sept cents familles, pro-
nonça la dissolution du sénat des cinq cents, et remit Fauto-
rité enlre les mains de trois cents partisans d'Isagoras. Mais le
sénat, qui n'était plus le même qu au temps de la tyrannie,
refusa de se laisser dissoudre ; le peuple se souleva, Cléomé-
nès, ses soldats et les partisans d'Isagoras furent assiégés
dans la citadelle et forcés de capituler au bout de trois jours.
Cléoménès, Isagoras et les Spartiates eurent la permission de
se retirer en laissant leurs adhérents au pouvoir du peuple
qui les punit de mort. Cleisthénès rentra avec les sept cents fa-
milles exilées.
En se retirant, Cléoménès trouva moyen de susciter aux
Athéniens de graves embarras. Les Plataiens, ne voulant pas
se soumettre à la suzeraineté que Thèbes s'attribuait sur toute
la Boiotie, avaient profité du passage des Spartiates pour leur
demander protection , offrant de leur livrer sans réserve la
ville de Platée et son territoire. Cléoménès répondit que Sparte
était trop éloignée, et que la protection d'Athènes serait plus
efficace. Ils envoyèrent à Athènes des députés qui s'assirent en
suppliants priés de l'autel un jour de sacrifice public, et le
peuple accueillit leur demande. Les Thébains envahirent le ter-
ritoire de Platée, une armée athénienne marcha pour le dé-
fendre, mais, avant la bataille, les Corinthiens offrirent leur
médiation qui fut acceptée. Ils se prononcèrent contre les Thé-
bains et ne leur reconnurent pas le droit de retenir Platée
malgré elle dans la confédération boiotienne. Les Thébains
refusèrent d'accepter cette décision, mais ils furent battus par
les Athéniens qui, pour punir ce manque de foi, réunirent au
territoire de Platée la portion du territoire thébain située à
l'est de l'Asopos.
Luttes contre les Thébains, les Ghalkidiens, les Ai-
ginétes. — Athènes avait désormais des ennemis à ses portes.
Il était certain aussi que les Spartiates ne tarderaient pas à
venger l'affront qu'ils avaient reçu. 11 fallait chercher un appui
au dehors ; une ambassade fut envoyée à Sardes pour obtenir
l'alliance du roi de Perse. Le satrape Artaphernès, après avoir
demandé ce que c'était qu'Athènes, et où elle se trouvait, dit
aux ambassadeurs que, pour obtenir un secours du roi, il
dbyGoogk
328 COALITION CONTRE ATBÈNES.
fallait lui donner la terre et Teau : c'était chez les Perses la
formule de la soumission. Les députés athéniens acceptèrent,
mais à leur retour ils furent désavoués avec indignation par le
peuple. Gurtius suppose qu'on appliqua alors à Gléisthénès,
comme promoteur de cette ambassade, la loi d'Ostrakisme
dont il était l'auteur ; celte conjecture repose sur une assertion
d'Ailien, qui dit que Gléisthénès fut le premier exilé par un vote
d'Ostrakisme, mais sans nous apprendre à quelle occasion.
Ainsi qu'on l'avait prévu, Gléoménès revint en Aitique avec
des troupes réunies dans les parties di| Péloponnèse qui recon-
naissaient la suzeraineté de Sparte. En môme temps, selon un
plan concerté d'avance, les Thébains envahissaient l'Atlique
parla frontière du nord, les Ghalkidiens par la côte. Les Athé-
niens marchèrent d'abord contre l'armée pélpponnésienne.
Mais les Gorinthiens, qui probablement avaient ignoré le but
de l'expédition, refusèrent de servir les rancunes de Gléo-
ménès. Son collègue Dèmaratos, qui partageait avec lui le com-
mandement de l'armée, lui relira son concours; ce fut à cette
occasion que les Spartiates firent une loi défendant aux deux
rois d'aller ensemble et la guerre. Les autres alliés, voyant ce
dissentiment, suivirent l'exemple des Gorinthiens, et l'armée se
dispersa. Les Athéniens se retournèrent alors contre leurs
voisins de Thèbes et de Ghalkis. Ils battirent les Thébains et
leur firent sept cents prisonniers. Le même jour ils traversent
l'Euripe et battent les Ghalkidiens. Les terres des oligarques de
Ghalkis, qu'on nommait Hippobotes ou éleveurs de chevaux, fu-
rent distribuées par le sort entre quatre mille citoyens d'Athènes,
qui demeurèrent néanmoins attachés à la métropole; c'est le
premier exemple d'une colonie militaire comme celles que les
Romains établirent plus tard sur leurs frontières. Les prison-
niers thébains et chalkidiens furent enchaînés ; on les re-
lâcha pour une rançon de deux mines par tête, et le dixième
de cette rançon fut consacré aux Dieux ; on eu fit un quadrige
de bronze. Les chaînes furent suspendues aux murs de l'Acro-
pole où Hérodote les vit après 1 incendie d'Athènes par les
Mèdes. Les Thébains, irrités de leur défaite, demandèreni
l'aide des Aiginètes, en alléguant une fraternité légendaire :
Aigina et Thèbè étaient sœurs, filles toutes deux du (leuve
dbyGoogk
COALITION CONTRE ATHÈNES. 329
Asôpos. Les Aîginètes répondirent en envoyarit aux Thêbains
les statues des héros Aiakides, Télamon et Pêleus. Gela n'em-
pêcha pas les Thêbains d'être battus; ils renvoyèrent les héros
à Aigine en demandant un secours moins mythologique. Les
Aiginètes avaient eu d'anciens démêlés avec les Athéniens h
Toccasion d'Ëpidaure ; ils expédièrent sans déclaration préa-
lable des galères armées pour ravager les côtes de TAtlique,
causant partout de grands dommages. Quoique les Athéniens
n'eussent pas encore de flotte, ils se préparaient à user de re-
présailles, mais un danger nouveau sollicita leur attention.
Les Spartiates commençaient à soupçonner qu'en aidant à
renverser les Pisistratides ils avaient été dupes d'une ma-
nœuvre ; Cléoménès disait avoir trouvé dans l'Acropole d'A-
thènes des oracles annonçant que Sparte aurait un jour à
soulTrir de la puissance des Athéniens. Ils firent venir Hippias
de Sigeion, décidés à le rétablir. Pour n'être pas exposés à une
défection de leurs alliés péloponnésiens, ils les convoquèrent à
un congrès où Hippias était présent. Us exprimèrent le regret
de l'avoir détrôné, et engagèrent leurs alliés à une restauration
de la tyrannie pour réprimer l'insolence des Athéniens. Mais
cette proposition souleva une réprobation unanime parmi les
alliés : « Sûrement, ditSosiclès, député deCorinthe, le ciel et
la terre vont changer de place, puisque les Spartiates propo-
sent d'imposer aux villes libres le gouvernement injuste et
sanguinaire d'un tyran. Nous savons ce que c'est, nous qui
avons été soumis aux Kypsélides. Essayez-en d'abord avant
de l'établir chei les autres, et si vous persistez, sachez que les
Corinthiens ne vous aideront pas. » Tout le monde applaudit;
les Spartiates durent renoncer à leur projet, et Hippias, après
avoir prédit aux Corinthiens les maux que leur causerait la
démocratie d'Athènes, retourna en Asie pour essayer d'inté-
resser le grand roi à sa cause et l'exciter à faire la guerre aux
Athéniens.
Après avoir raconté les luttes de la démocratie naissante
contre tant d'ennemis conjurés, Hérodote fait cette réflexion :
« On pourrait prouver de mille manières que Tégalité entre
les citoyens est le gouvernement le plus avantageux : cet
exemple seul le démontre. Tant que les Athéniens restèrent
dbyGoogk
LUTTES CONTRE LES BARBARES.
nce de leurs tyrans, ils ne furent supérieurs à
s voisins, mais lorsqu'ils eurent secoué le joug,
le beaucoup les premiers de tous. Cela prouve
îlavage ils étaient volontairement lâches, parce
lient pour un maître, mais quand ils eurent re-
pté, chacun fit des efforts, sachant qu'il travaillait
CHAPITRE XI
ES DES GRECS CONTRE LES BARBARES.
I. — SoumissioJi des grecs d'Asie,
die ; leurs attaques contre les Grecs. — Invasion des
ie-Mineupe. — Soumission des Grecs d'Asie par Groisos.
LÔdo-persique ; Kyros. — Soumission des Grecs d'Asie par
- Émigration des Phokaiens. — Héroïsme des Lykiens.
} de Samos; sa puissance, sa mort. — Maiandrios.
Vuine de Samos. — Expédition de Dareios en Scythîe.
le la Thrace et de la Macédoine par les Perses. — Re-
lie. Secours demandés aux Grecs d'Europe. — Incendie
Les Carions et les Kypriotes prennent part à la révolte.
la flotte grecque h Ladè. — Prise de Milet. Soumission
\.sie.
vaient réalisé la Cité, qui est la molécule sociale :
pas s'élever à l'idée de nation. Leur patriotisme
is les murs de la Cité ; môme devant un ennemi
ne s'aperçurent pas qu'ils étaient un peuple. L'i-
cités autonomes les rendit impuissantes contre
es inférieurs sous tous les autres rapports, mais
supériorité du nombre la force que donne l'u-
s. La Grèce d'Asie fut soumise d'abord par les
deux fois par les Perses, et la Grèce d'Europe
î'émouvoir à cette triple conquête qui forme la
uerres Médiques,
le Lydie ; leurs attaques contre les Grecs»
dbyGoogk
LA MONARCHIE LYDIENNK. 331
— La Lydie semble avoir été habitée anciennement par une
population pélasgique à laquelle se mêlèrent des éléments
sémitiques. Homère donne aux habitants de cette contrée le
nom de Maiones, et ne parle pas des Lydiens ; tandis que le ca-
talogue de la Genèse Tait de Lud un fils de Sem. Les traditions
recueillies par Hérodote reportaient l'origine de la monarchie
lydienne à une antiquité fabuleuse au moyen de deux dynas-
ties, Tune commençant par Manès, Âttys et Lydos, Tautre par
Héraclès. Les noms de Ninos et de Bélos qui figurent dans la
dynastie hèraciéide donnent à penser que la Lydie a fait partie
de l'empire assyrien, comme Taffirme Ctésias. Le rôle histo-
rique de la Lydie ne commence qu'avec la dynastie des Merm-
nades, dont le fondateur, Gygès, parait un personnage réel,
quoique son nom, éponyme d'un lac dans le voisinage de
Sardes, rappelle celui d'Ogygès, et que sa légende, telle qu'elle
est racontée dans Platon, semble rattachée à la fable du dé-
luge. D'après cette légende, Gygès n'était qu'un berger du roi
de Lydie ; après un violent orage, il voit une crevasse dans le
sol, y descend et y trouve un grand cheval d'airain creux et
ouvert, dans lequel était couché un géant mort avec un an-
neau d'or au doigt. Il prend cet anneau, découvre qu'il a la
propriété de le rendre invisible, et s'en sert pour s'emparer de
la couronne en tuant le roi avec l'aide de la reine. Hérodote
raconte l'avènement de Gygès sous une forme moins merveil-
leuse, mais en l'attribuant aussi à une trahison et à la com-
plicité de la reine.
Les Lydiens nous sont représentés comme un peuple infé-
rieur aux Grecs sous le rapport moral, mais riche et indus-
trieux. Le Pactole qui coulait du mont Tmolos dans le fleuve
Hermos, roulait des sables d'or. Selon Hérodote, c'est en Lydie
que furent frappées les premières monnaies. L'influence de la
Lydie sur la musique des Grecs a été admise dans toute l'anti-
quité. Le commerce avec les Lydiens, dont le territoire ne s'é-
tendait pas originairement jusqu'à la mer, fut une source de
richesse pour les villes maritimes de l'Ionie, mais ce fut
aussi la principale cause des attaques des rois lydiens contre
leur indépendance. Ces tentatives commencèrent dès le règne
de Gygès, qu'on place vers 715. Il attaqua Milet et Smyrne, dit
dbyGoogk
332 CALLINOS D*ÉPHÈ.SE.
Hérodote, et s'empara de Colophon. On dit aussi qu'il prit
Magnésie du Sipyle. En même temps qu'il faisait la guerre
aux Grecs, il envoyait à leur Dieu Apollon des offrandes ma-
gnifiques. Hérodote vit à Delphes des vases d'or et d'argent
offerts par Gygès, ainsi que le trône sur lequel il rendait la
justice. Son fils Ardys (678) attaqua Milet et s'empara de
Priènè ; mais la soumission de l'Ionie fut retardée par des in-
vasions de hordes nomades. Les Trères détruisirent Magnésie
du Maiandros, les Kimris prirent Sardes, capitale de la Lydie.
Il nous reste un fragment de Callinos d'Éphése, inventeur du
distique élégiaque, sur l'invasion des tribus barbares :
« Jusqu'à quand resterez-vous couchés, jeunes gens? quand
aurez-vous du courage ? Ne rougissez-vous pas de montrer
tant de faiblesse ? Vous croyez vivre dans la paix, mais la
guerre tient tout le pays (lacune) Et qu'en mourant
chacun frappe un dernier coup. Car il est honorable et beau
pour un homme de combattre pour sa patrie, ses enfants et
sa jeune épouse. La mort, elle viendra quand les Moires l'au-
ront filée. Ainsi, que chacun marche droit, la lance en arrêt,
couvrant du bouclier un cœur vaillant, dès le commencement
delà mêlée. Il n'est pas dans la destinée d'un homme d'éviter
la mort, fût-il de la race des immortels. Souvent, celui qui a
fui la bataille et le tumulte des lances trouve la mort en ren-
trant dans sa maison, et personne dans le peuple ne l'aime et
ne le regrette. L'autre, petits et grands gémissent s'il lui arrive
malheur. Tout le monde regrette l'homme au cœur brave,
quand il meurt ; vivant, on l'honore comme les demi-Dieux.
Tous les regards se tournent vers lui comme vers une forte-
resse, car il fait à lui seul l'œuvre de plusieurs. »
Les ravages des Trères et des Kimris se prolongèrent pen-
dant les règnes d'Ardys et de son fils Sadyattès ; mais Alyatlès
parvint à en délivrer l'Asie Mineure, et aussitôt après, les at-
taques contre les villes ionniennes recommencèrent. Alyatlès
s'empara de Smyrne, essaya inutilement de prendre Clazo-
mène, et ravagea pendant douze années successives le terri-
toire de Milet. Mais il tomba malade, et l'oracle de Delphes
attribua cette maladie à l'incendie d'un temple d'Athènè. Il
demanda une trêve aux Milésiens, qu'il croyait réduits à la
dbyGoogk
GROISOS. 333
dernière extrémité. Thrasyboulon, tyran de Milet, prit ses me-
sures pour que l'ambassadeur rencontrât partout la joie et l'a-
bondancot et le roi de Lydie, désespérant de soumetire une
ville à qui la mer fournissait des vivres, conclut un traité
d'alliance avec Milet, rebâtit deux temples en remplacement
de celui qu'il avait brûlé, et envoya à Delphes, en actions de
grâce pour sa santé rétablie, un grand cratère d'argent avec
une soucoupe damasquinée, ouvrage de Glaucos de Chios qui
avait inventé Fart de la damasquinure.
Soumission de la Grèce d^Asie par Grofsos. — Le der-
nier et le plus puissant des rois de Lydie, Croïsos, fils d'Alyat-
tès (560), accomplit la conquête de l'Ionie tentée plusieurs fois
par ses prédécesseurs* Il attaqua d'abord Ephèse, gouvernée
alors par le tyran Pindaros, dont la mère était fille d'Alyattès,
et qui était par conséquent neveu de Croïsos. Les Ephésiens
consacrèrent leur ville à Artémis en joignant avec une corde
leurs murailles au temple de la Déesse éloigné de sept stades .
Cela n'empêcha pas la ville d'être soumise à un tribut, et Pin-
daros fut déposé. <f Croïsos fit la guerre aux Ioniens et aux
Aioliens, mais successivement, dit Hérodote, employant des
raisons légitimes quand il en pouvait trouver, ou des prétextes
frivoles à défaut de raisons. » Hérodote ne nous donne aucun
détail sur cette conquête, dont il apprécie cependant la grande
importance, car il la considère comme le commencement de
la lutte entre les Grecs et les Barbares : « Avant le règne de
Croïsos, dit-il, tous les Grecs étaient libres ; ce fut par lui pour
la première fois que les Grecs furent soumis et contraints h
payer tribut. » L'absencç de lien fédéral entre les cités futia
seule cause de la soumission des Grecs d'Asie à une domina-
tion étrangère. Hérodote semble l'avoir reconnu, car il loue
chaudement l'avis donné aux Ioniens par Thaïes de Milet avant
que leur pays eût été subjugué : « C'était d'établir à Téos, au
centre de l'Ionie, un conseil général pour toute la nation, sans
préjudice au gouvernement des autres villes, qui n'en auraient
pas moins suivi leurs usages particuliers que si elles eussent
été autant de cantons différents. » Thaïes de Milet est le plus
ancien des philosophes grecs ; il est très curieux de trouver
chez le père de la philosophie une conception politique supé-
19.
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ROISOS.
l'Aristote qui ont essayé de régler,
gouvernement inlérieur de la cité,
3 entre elles. La pensée de Thaïes,
î de cités libres, n'a été appliquée
temps d'Aristide et par la ligue
e d'Asie ne produisit aucune émo-
i. Croïsos ne semblait pas plus un
lis Pélopides, venus du môme pays
onsullait l'oracle de Delphes et lui
ïs. Il aimait les Grecs, les accueil-
d'une façon très libérale. On ra-
naion, fils de Mégaclès, ayant eu
3 aux envoyés lydiens venus à Dél-
ie prendre dans son trésor autant
er. Il en remplit ses vêlements, sa
\ la bouche, et s'en poudra les che-
se mit à rire et doubla la somme ;
à Athènes la richesse des Alcmaio-
te sur l'entretien de Solon avec
des raisons chronologiques, mais
de Mylylène passaient aussi pour
près avoir soumis les Grecs du con-
à attaquer les îles ; on dit que Bias
ngénieuse en lui disant que les in-
hevaux pour porter la guerre en
K leur inspirer la pensée de m'atta-
, dit Croïsos. — Je crois, répondit
moins charmés d'apprendre que tu
, et leur fournir ainsi l'occasion de
int que tu as réduits en esclavage. »
3 attribuent à Pittacos de Mitylène,
qu'il abandonna son projet et fit
des îles. Il tourna ses armes d'un
uples de l'Asie Mineure à l'ouest du
des Lykiens et des Kilikiens. La mo-
rivée à l'apogée de sa puissance,
fleuve Halys, la monarchie Médo-
dbyGoogk
L'EMPIHB MÉOO-FERSIQUE. 335
Persique avait grandi plus rapidement encore. Dans la pré-
vision d'une lutte prochaine, Croïsos, sur l*avis de l'oracle de
Delphes, demanda l'alliance des Spartiates, considérés alors
comme le plus puissant des peuples grecs. Ils étaient bien dis-
posés pour lui, car peu de temps auparavant ils avaient
envoyé acheter de l'or à Sardes pour dorer une statue d'Apollon,
et Croïsos leur avait fait présent de cet or. Ils conclurent avec
le roi de Lydie un traité d'alliance offensive et défensive.
L'empire Médo-Persiqae. Kyros. — Les Mëdes s'étaient
détachés de l'empire d'Assyrie à peu près à l'époque où se
fondait en Lydie la dynastie des Mermnades. Sous le règne de
Croïsos, il y eut une nouvelle révolution dans la Haute-Asie :
la domination passa, sans démembrement, des Mèdes aux
Perses. Le dernier roi des Mèdes, Astyagès, était beau-frère
de Croïsos, et celui-ci, soit pour le venger, soit pour prendre
une part de ses dépouilles, déclara la guerre à Kyros, roi des
Perses. Il avait commencé par consulter l'oracle de Delphes
dont la réponse, ambiguë, comme toujours, lui avait paru
encourager ses espérances. Il croyait pouvoir compter sur ses
alliés, le roi de Babylone, le roi d'Egypte, les Spartiates, et
sans doute aussi sur les Mèdes, irrités d'une récente défaite :
11 passa l'Halys et détruisit la ville de Ptérion en Cappadokie.
Mais Kyros marcha rapidement contre lui avec des forces
supérieures. Après une bataille sanglante dont le résultat fut
indécis, Croïsos crut prudent de s'enfermer dans les murs de
Sardes, sa capitale, et d'y attendre les secours de ses alliés.
Si ces secours étaient arrivés à temps, la guerre aurait pu
être poursuivie avec succès. De la part des Spartiates, il n'y
eut pas de retard ; quoique engagés alors dans une guerre
contre les Argéiens, ils firent diligence; leurs vaisseaux
étaient prêts et leurs troupes presque embarquées quand ils
reçurent la nouvelle inattendue de la prise de Sardes et de
la ruine de Croïsos. Sardes, bâtie sur un escarpement du
Tmolos, adossée à un rocher à pic, passait pour imprenable.
Déjà un assaut avait été repoussé et les Perses étaient réduits
à la longue opération d'un blocus. Mais, le quatorzième jour
du siège, un accident imprévu fit pour les assiégeants ce que
n'avaient pu faire ni la force, ni la ruse. Une sentinelle qui
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SOUMISSION DES GRECS D'aSIE.
ir le point le plus inaccessible des remparts laisse
)n casque, descend pour le ramasser par les anfrac-
iu rocher, et remonte de môme. Un soldat perse
, prévient Kyros et conduit ses compagnons par le
u'il a découvert. La ville est prise et Croises amené
vant le vainqueur qui, d*après la tradition lydienne
par Hérodote, le condamne d'abord à être brûlé vif,
îchissant aux coups imprévus de la fortune, lui fait
la vie (546)- (i).
Bsion des Grecs d'Asie par les Perses. — Au
;ement de la guerre, Kyros avait engagé les cités
; à se révolter contre Croîsos, et elles avaient refusé,
i& chances favorables aux Lydiens. Après la prise de
lies demandèrent à Kyros de les recevoir aux condi-
leur avaient été imposées par Croîsos. Il leur fit une
lédaigneuse et ne voulut traiter qu'avec les Milésiens,
nent parce que, d'après leurs conventions avec
ils étaient les alliés el non les sujets du royaume de
s Ioniens se mirent en état de défense et, dans un
mu au Panionion, leur sanctuaire commun, décidè-
^royer demander du secours à Sparte. Cette demande
as accueillie. Cependant, les Spartiates envoyèrent
commissaires à Phokaia pour examiner l'état des
it croyant sans doute que leur nom suffirait pour
[yros, lui firent dire de ne faire de tort à aucune ville
parce que les Lakédaimoniens ne le permettraient
)s n'avait jamais entendu parler de Sparte; il crut
it un marché de commerce comme les villes d'Jonie,
'il craignait peu des gens passant leur vie sur une
)lique à se tromper les uns les autres. « Si les Dieux
îrvent la santé, ajouta-t-il, ils auront assez de leurs
I sans s'occuper des Ioniens. » 11 quitta Sardes pour
à la conquête de Babylone. Aussitôt après son départ,
ne tentative de soulèvement en Lydie, et les Ioniens
ièrent. Mazarès, un des lieutenants de Kyros, après
irimé la révolte des Lydiens, s'empara de Priènè et
les détails, voir mon Histoire des anciens peuples de F Orient,
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ÉMIGRATION DES PHOKAIENS. 337
de Magnésie et ravagea la vallée du Maiandros. A sa mort,
Harpagos prit le commandement et assiégea Phokaia. Il paraît
que les machines de siège représentées sur les bas-reliefs
assyriens n'étaient pas connues des Perses, car ils se bornaient
à amonceler de la terre autour des murailles pour prendre la
ville d'assaut.
« Harpagos fit dire aux Phokaiens qu'il serait satisfait s'ils
voulaient seulement abattre une tour de la ville et consacrer
une maison. Comme ils ne pouvaient souffrir l'esclavage, ils
lui demandèrent de leur laisser un jour pour réfléchir, et de
retirer ses troupes pendant qu'ils tiendraient conseil. 11 y con-
sentit, quoiqu'il n'ignorât pas leurs projets. Alors, ils mirent
sur leurs vaisseaux leurs femmes, leurs enfants, leurs meu-
bles, et de plus les statues et offrandes des temples, excepté
les peintures et les statues de bronze et de pierre. Quand tout
fut à bord, ils s'embarquèrent et firent voile pour Chios. Les
Perses ayant trouvé la ville abandonnée, s'en emparèrent. »
Émigration des Phokaiens et des Téiens. — Les Pho-
kaiens demandèrent à acheter les Iles Oinusses; mais les habi-
tants de Chios ne voulant pas les vendre, de peur de compro-
nDetlre leur commerce, les Phokaiens mirent à la voile pour
Kyrnè (l'Ile de Corse) où, vingt ans auparavant, ils avaient bâti
la ville d'Alalia pour obéir à un oracle. Ils retournèrent d'abord
à Phokaia, et surprenant la garnison laissée par Harpagos, la
massacrèrent. Faisant ensuite les plus terribles imprécations
contre ceux qui abandonneraient la flotte, ils jetèrent dans
la mer une masse de fer rouge et firent serment de ne jamais
revenir à Phokaia que cette masse ne remontât sur l'eau. Tandis
qu'ils étaient en route pour aller en Kyrnè, plus de la moitié
furent pris de pitié en pensant au pays et aux chers souve-
nirs, et violant leur serment retournèrent à Phokaia. Les autres,
plus religieux, continuèrent leur route. Arrivés en Kyrnè, ils
élevèrent des temples et demeurèrent cinq ans avec les colons
qui les avaient précédés. Mais comme ils ravageaient et pil-
laient tous leurs voisins, les Tyrrhènes et les Carthaginois
leur livrèrent bataille et détruisirent la plus grande partie de
leur flotte; les prisonniers furent assommés à coup de pierre.
Ceux qui restaient s'embarquèrent avec leurs femmes et leurs
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héroïsme des lykiens.
»our Rhègion ; puis ils bâtirent au sud de Poseidonia,
erritoire appartenant aux Sybarites, la ville d'Hyèlè
qui garda longtemps son indépendance quand le voi-
it soumis aux barbares. Ils furent rejoints par d'au-
!s ioniens, entre autres par Xénophane do Colophon,
L à Élée une célèbre école de philosophie. 11 est proba-
)u'Hérodote ne le dise pas, qu'une partie des Phokaiens
à Marseille.
impie des Phokaiens, les habitants de Téos préférè-
berté à la patrie. Quand le terrassement élevé autour
murs par Harpagos eut rendu la résistance impossi-
lontèrent sur leurs vaisseaux et se dirigèrent, les uns
rhrace, où ils bâtirent la ville d'Abdère, les autres
jsphore Kimmerien où ils fondèrent Phanagoria. Les
niens, à l'exception de ceux de Milet qui avaient prêté
de fidélité à Kyros, donnèrent des preuves de leur
t Hérodote, en défendant chacun sa patrie, mais ayant
us, ils furent contraints de se soumettre.
ssion de la Doris et de la Carie. Héroïsme des
. — Enrôlés dans l'armée perse, les Ioniens et les
aidèrent Harpagos à soumettre la Doris, la Carie et
Les habitants de Gniide avaient d'abord songé à cou-
me qui les rattachait à la terre ferme; en ayant été
s par un oracle, ils se soumirent sans résistance; il
sbablement de môme d'Halicarnasse, car, si elle avait
ne défense vigoureuse à Pétranger, Hérodote n'aurait
ç[ué de nous en parler. La soumission facile de la
mparée à la résistance de l'Ionie, s'accorde mal avec
B qu'on a coutume d'établir entre l'énergie des
(t la mollesse des Ioniens. Seuls des peuples de la
Pédasiens, résistèrent longtemps à Harpagos ; mais
furent subjugués. Les Lykiens, malgré leur petit
voulurent tenir tête à l'ennemi. Mais ayant perdu
e, ils se rassemblèrent avec leurs femmes et leurs
tans la citadelle dé Xanthos, y mirent le feu et se
is tuer en combattant. Quelques familles, absentes
int du siège, rentrèrent plus tard dans le pays. Les
suivirent l'exemple des Lykiens. Ainsi toute l'Asie
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POLYCRATÈS DE SAMOS. 339
Mineure fut soumise au roi de Perse. « Quoique accablés de
maux, dit Hérodote, les Ioniens continuèrent à s'assembler au
Panionion; Bias de Priènè leur donna un conseil qui les aurait
rendus les plus heureux de tous les Grecs s'ils avaient voulu
le suivre : il les exhorta à s'embarquer tous ensemble sur
une même flotte, à se rendre en Sardaigne et à y fonder une
seule ville pour tous les Ioniens. 11 leur fit voir que par ce
moyen ils sortiraient d'esclavage, au lieu que s'ils restaient en
lonie, ils n'auraient aucun moyen de recouvrer leur liberté. »
L'exécution d'un tel projet aurait sans doute hâté la civilisation
de l'Europe occidentale.
Polycratés de Samos. Sa puissance ; sa mort. — Héro-
dote nous dit que les Ioniens qui habitaient les îles, craignant
le sort de ceux du continent, se soumirent d'eux-mêmes à
Kyros; mais il est probable que cette soumission fut purement
nonfiinale, car les Perses, qui n'avaient pas encore de marine,
ne pouvaient les réduire à une obéissance effective. Samos s'é-
leva même, sous le gouvernement du tyran Polycratés, à un
degré de puissance qu'elle n'atteignit à aucune autre époque ,
Les discordes civiles qui avaient agité Samos comme la plupart
des cités grecques semblaient terminées par la victoire du parti
populaire sur l'oligarchie, quand Polycratés s'empara du pou-
voir avec l'aide de Lygdamis, tyran de Naxos. Il s'était d'a-
bord associé ses deux frères, mais bientôt, il fit mourir l'un,
exila l'autre et resta seul maître de la tyrannie. Il prit à sa solde
un millier d'archers, équipa une flotte de cent galères et s'en-
richit par la piraterie, pillant tout le monde sans distinction,
car, disait-il, on fait plus de plaisir à un ami en lui restituant
ce qu*on lui a pris que si on ne lui avait rien enlevé du tout. 11
subjugua d'autres îles, s'empara de plusieurs villes sur le con-
tinent, fit la guerre aux Milésiens.et vainquit dans un combat
naval la flotte de Lesbos qui était venue à leur secours. 11 em-
ploya les prisonniers à creuser un fossé autour des murs de
Samos. Il éleva aussi un aqueduc et un môle qu'Hérodote re-
garde comme une des merveilles de la Grèce. Il importa dans
son île des chiens d'Épire, des chèvres de Skyros, des brebis
de Milet, des porcs de Sicile, protégea l'industrie et les arts et
attira à sa cour les poètes Anacréon et Ibycos. Comme il réus-
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PUISSANCE DE POLYCRATÈS.
Ins toutes ses entreprises, le roi d'Egypte Amasis, son
ngagea à se défier de celte prospérité constante et à
quelque chose à la jalousie des Dieux. H jeta à la mer
^nifique érneraude montée en or et gravée par le grand
e Samos, Théodoros, fils de Téléclès. Quelques jours
1 pécheur ayant pris un énorme poisson, le lui apporte.
le remercie et Tinvite à souper: on ouvre le poisson
rouve l'anneau d'or. Polycratès écrit le récit de celte
^e aventure à son ami Amasis, et celui-ci, persuadé que
Bur inquiétant serait expié tôt ou tard, renonce à son
de peur d'élre enveloppé dans sa ruine.
de Perse Cambysès, qui venait de succéder à son père
réparait en ce moment une expédition contre l'Egypte,
es avait la plus puissante marine de la Grèce; il saisit
n de se venger d'Amasis en offrant à Cambysès le se-
nne de ses escadres. 11 y fit embarquer ceux des Sa-
ont Topposilion le gênait et écrivit au roi de Perse de
sorte qu'ils ne revinssent jamais à Samos. Mais ils n'al-
is jusqu'en Egypte ; résolus à retourner contre le tyran
qu'il avait mise entre leurs mains, ils revinrent l'alta-
►lycralès avait pris la précaution d'enfermer dans Tar-
s femmes et les enfants des citoyens, menaçant d'y
3 feu si le peuple favorisait les insurgés. Ceux-ci, battus
sieurs combats, allèrent demander du secours à Sparte,
ièrentleur situation, un peu trop longuement, à ce qu'il
^es Spartiates répondirent : « Nous avons oublié le corn-
lent de votre discours, cela nous empoche de com-
la On. » Ils revinrent avec un sac vide, en disant : « Notre
plus de farine. » Les Spartiates accordèrent le secours
ê, et les Corinthiens se joignirent à l'expédition. L'armée
e essaya inutilement de prendre Samos et se retira
tarante jours de siège. Les exilés Samiens, réduits à
piraterie, attaquèrent Siphnos, petite île très riche par
îs d'or et d'argent, dont les habitants se partageaient
it. Ils lui imposèrent un tribut de cent talents, et après
rcouru quelque temps le mer Egée, s'établirent à Kjdo-
is lilc de Crète. Mais au bout de cinq ans, les Cretois
it un secours naval des Aiginèies, qui réduisirent les
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MAIANDRIOS ET SYLOSON. 341
Samiens en esclavage. Quant à Polycratès, sa puissance pa-
raissait plus solide que jamais et il songeait à étendre sa domi-
nation sur toute la Grèce d'Asie. Mais le satrape de Lydie,
Oroitès, qui le haïssait pour une raison inconnue, Tattira dans
un piège. Il se disait disgracié par Cambysès et demandait &
Pôlycratès de le protéger, en lui promettante moitié de ses tré-
sors. Malgré les conseils de ses amis et les pressentiments fu-
nestes de sa fille, Pôlycratès se rendit en Lydie. Oroitès le fit
mettre en croix, dans Tunique but de satisfaire une vengeance
personnelle, car il n'essaya même pas de s'emparer de Samos.
« Ce fut là, dit Hérodote, qu'aboutirent les prospérités de Pô-
lycratès, comme lui avait prédit Amasis. »
Maiandrios.— Syloson. — Ruine deSamos. — Avant de
quitter Samos, Pôlycratès avait laissé le gouvernement à son se-
crétaire Maiandrios. Â la nouvelle de sa mort, Maiandrios éleva
un autel à Zeus libérateur, assembla les citoyens et leur dit :
« Pôlycratès m*a confié son autorité et je pourrais la conser-
ver. Mais je ne ferai Jamais ce que je condamne dans un autre ;
je Tai blâmé de s'être rendu maître de ses égaux, je ne l'imi-
terai pas. Je me démets de la puissance souveraine et je réta-
blis l'égalité. Je demande seulement, comme cela est juste, six
talents du trésor de Pôlycratès et le sacerdoce de Zeus libéra-
teur. » Alors un Samien se leva et lui dit : • Tu n'es pas digne
de nous commander, car tu n'es qu'un homme de peu et un
misérable. Songe plutôt à rendre compte de l'argent que tu as
eu entre les mains. )> 11 vit qu'il y avait du danger à être hon-
nête; il rentra dans la citadelle en disant qu'il allait préparer
ses comptes, puis il fit appeler, pour les vérifier, celui qui l'avait
interpellé, et ensuite, l'un après l'autre, ceux qui lui parais-
saient hostiles, et les retint prisonniers. Quelque temps après il
tomba malade et son frère Lycaretos les fit mourir. 11 semble,
dit Hérodote, que les Samiens ne voulaient pas être libres.
Syloson, frère de Pôlycratès, qui l'avait d'abord associé à la
tyrannie, puis exilé de Samos^ s'était engagé, comme bien
d'autres Grecs, dans l'armée de Cambysès pour y chercher for-
tune. Comme il se promenait un jour sur la place de Memphis
avec un manteau d'écarlate, un soldat de la garde royale
admire ce manteau et le prie de le lui vendre. « Je ne le ven-
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342 UUIiNE DE SAMOS.
drais à aucun prix, répond Syloson, mais je te le donne. »
Quelques années après il apprend que, par suite d'une révolu-
tion, ce soldat, nommé Dareios, fils d'Hystaspès, est devenu
roi des Perses. Il se présente à la cour et demande une au-
dience en disant qu'il a jadis obligé le roi. 11 est introduit, rap-
pelle l'histoire du manteau et le roi voulant reconnaître le ser-
vice rendu au simple soldat, lui offre de l'or et de l'argent à
profusion. « Je ne demande ni or ni argent, dit Syloson, je de-
mande que ma patrie me soit rendue. Depuis qu'Oroitès a fait
mourir mon frère Polycratès, un de nos esclaves s'est emparé
de Samos. Rends-la-moi sans effusion de^sang et ne permets
pas qu'elle soit réduite en servitude. » Le roi fait droit à cette
demande et charge Otanès, un de ceux qui l'avaient aidé à
monter sur le trône, de partir pour Samos avec une armée et
de faire tout ce que Syloson lui demanderait.
En voyant arriver cette armée, Maiandrios jugea toute résis-
tance inutile et déclara qu'il était prêt à capituler et à sortir de
l'île. Mais il avait un frère nommé Gharilaos, homme violent
et un peu fou, qu'il avait fait enfermer pour quelque faute. De
la fenêtre de sa prison, Gharilaos vit des officiers perses tran-
quillement assis devant le cidadelle ; alors, s'emporlant contre
son frère: • 0 lâche, luidit il, tu me retiens enchaîné, moi qui
n'ai rien fait, et tu n'oses pas le venger de ceux qui te chassent
de chez toi. Donne-moi tes troupes auxiliaires, et les Perses se
repentiront d'être venus ici. » Maiandrios, qui n'était pas fâché
d'attirer des embarras à Syloson et aux Samiens, permit à son
frère de faire ce qu'il voudrait. Puis il sortit de la forteresse
par un passage souterrain et s'embarqua pour Sparte. Là, il fit
voir au roi Gléoménès les vases d'or et d'argent qu'il avait em-
portés et l'invita à faire un choix. Mais Gléoménès alla trouver
les Éphores : « 11 est de l'intérêt de la république, leur dit-il,
de chasser cet étranger, de peur qu'il ne me corrompe et d'au-
tres citoyens aussi. » Maiandrios reçut l'ordre de sortir du Pé-
loponnèse. Quant à Gharilaos, aussitôt après le départ de son
frère, il avait égorgé les officiers perses qui s'étaient installés
dans la ville sur la foi de la capitulation. A la vue de ce carnage,
Otanès oublia l'ordre qu'il avait reçu de prendre Samos sans
effusion de sang : il commanda à ses soldats de faire main
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SOUMISSION DE LA KYRÈNAIQUE. 343
basse sur toute la population, hommes, femmes et enfants,
même dans les temples. « Quand les Perses eurent pris les
Samiens comme dans un Blet, dit Hérodote, ils remirent la ville
à Syloson, mais déserte et sans aucun habitant. »
Soumission de la Kyrënaïque. — Après la conquête de
FÉgypte par Cambysès, les habitants des villes grecques de
Kyrène et de Barkè, craignant le même sort que les Égyptiens,
s'étaient soumis sans combat à la domination des Perses. Le
pays était alors en révolution, par suite des intrigues du roi
Arkésilaos, qui avait voulu renverser la constitution républi-
caine de Dèmonax et ressaisir l'autorité exercée autrefois par
les Battiades, ses ancêtres. Chassé de Kyrène, il y était rentré
avec une armée levée à Samos. Mais les cruautés qui avaient
suivi sa victoire lui faisaient craindre des représailles; il se re-
tira à Barkè chez son beau -père Âlazir et y fut assassiné avec
lui. Sa mère Phérélimè alla demander vengeance au satrape
d*Égypte Aryandès, sous prétexte que son fils n'avait été tué
que parce qu'il favorisait le parti des Perses. Il fit sommer les
Barkaiens de livrer le meurtrier d'Arkésilaos, mais ils prirent
tous le meurtre sur eux. Alors il envoya une armée devant
Barkè. Pendant neuf mois que dura le siège, les Perses pous-
sèrent des mines jusqu'aux murailles, et attaquèrent vigoureu-
sement la place. Un ouvrier en cuivre découvrit leurs mines
parle moyen d'un bouclier d'airain qui résonnait là où la terre
était minée. On creusa des contre-mines et on tua les ouvriers
persans. Quant aux attaques ouvertes, les Barkaiens purent les
repousser. Les Perses proposèrent un accommodement; on
jura d'observer le traité tant que le terrain où on était resterait
à sa place. Mais ce terrain était formé de pièces de bois cou-
vertes de terre et placées au-dessus d'un trou : les Perses ayant
enfoncé les planches, le terrain était détruit et le traité n'exis-
tait plus. Ils entrèrent en foule par les portes ouvertes, mirent
la ville au pillage et livrèrent à Phérétimè ceux qu'elle désigna.
Elle les fit mettre en croix, et ayant fait couper les seins h leurs
femmes, elle en fit border le mur. Le reste des habitants furent
réduits en servitude et envoyés à Dareios qui les transporta en
Bactriune ; ils y bâtirent un village auquel ils donnèrent le nom
de Barkè»
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344 LE MÉDECIN GREC DÈMORËDÈS.
I«e médecin grec Dèmokédès à la cour de Perse. — La
conquête de l'Ionie et celle de la Kyrènaïque avaient réuni à
l'empire des Perses une grande partie du territoire grec. Un
conflit entre ce grand empire et la Grèce d'Europe seniblait
inévitable; une circonstance accidentelle faillit la précipiter.
Après l'assassinat de Polycralès parle satrape de Lydie Oroilès,
les Samiens formant son escorte avaient été laissés libres,
mais les étrangers et les esclaves avaient été mis en prison.
Plus tard, Droites ayant été tué par ordre de Dareios qui le
soupçonnait de vouloir se rendre indépendant, ces captifs fu-
rent transportés à Suse. Parmi eux se trouvait un médecin
habile, Dèmokédès de Groton. Un jour, Dareios se trouvant à
la chasse, se donna une entorse; ses médecins égyptiens ne
firent qu'aggraver son mal; quelqu'un lui parla d'un médecin
grec amené de Sardes parmi les esclaves d'Oroilès. Dareios
l'envoya chercher; on l'amena les fers aux pieds, couvert dé
haillons. Il voulut d'abord dissimuler son talent, de peur de
prolonger son exil. A la fin il céda, et guérit le roi qui lui fit
de riches présents, le fit manger à sa table et lui promit tout
ce qu'il voudrait, excepté de le laisser retourner en Grèce. Il
lui accorda même la grâce des médecins égyptiens qui allaient
être mis en croix pour leur maladresse. Peu de temps après il
guérit d'une maladie dangereuse la sultane favorite Atossa, qui
voulut^ par reconnaissance, lui procurer une occasion de re-
voir sa patrie. Elle persuada au roi, qui dès lors méditait la
conquête de la Grèce, d'envoyer quelques Perses reconnaître
le pays, et de charger Dèmokédès de les conduire, tout en le
faisant surveiller avec soin. Us levèrent le plan des côtes, visi-
tèrent les places et firent voile pour l'Italie. Mais, quand le
vaisseau arriva à Tarcnte, le tyran Antiphilidès en fit enlever la
gouvernail et arrêta les Perses comme espions, pour donner
à Dèmokédès le temps d'aller à Groton. Il les relâcha ensuite,
et ils poursuivirent Dèmokédès, mais il refusa de les suivre et
les chargea de dire à Dareios qu'il allait épouser la fille de
Milon dé Groton ; il croyait que le nom du fameux athlète im-
poserait au grand roi. Les Perses se rembarquèrent, mais le
vent les poussa sur les côtes d'Iapygle où on les fit prisonniers.
Un Tarentin nommé Gilles les délivra et les ramena à Dareios,
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DAREIOS EN SCYTIIIE. 345
en le priant de le faire rentrer à Tarente d'où il était exilé. Il
ne demandait pas d'être rétabli par la force ; il suffirait» croyait-
il, que son rappel fût sollicité par les Gnidiens, amis des
Tarentins. Sur Tordre du roi, les Gnidiens en firent la de-
mande, mais ne purent rien obtenir.
Expédition de Dareios en Scytliie. — Si Dareios avait
attaqué la Grèce à cette époque, elle serait probablement de-
venue une satrapie de Fempire médo-persique : Athènes, qui
fut plus tard Tâme de la résistance §iux barbares, était alors
soumise aux Pisistratides, qui n'auraient pas hésité à recon-
naître la suzeraineté du grand roi. Heureusement pour la li-
berté grecque et pour la civilisation du monde, Dareios avait
d'autres projets ; ajournant, malgré les conseils d'Atossa, la
conquête de la Grèce, il voulut commencer par soumettre la
Scythie. Une immense armée, rassemblée de toutes les par-
ties de l'empire et commandée par le roi en personne, traversa
la Bosphore de Thrace sur un pont de bateaux. L'ingénieur
Samien Mandroclès, qui l'avait construit, fut généreusement
récompensé pour ce travail et consacra dans le temple d'Hérè
un tableau représentant le passage de l'armée Perse sur le
Bosphore.
Parvenu en Europe, Dareios traverse la Thrace et soumet les
Gèles, pendant que sa flotte, composée de six cents vaisseaux
fournis par les Grecs d'Asie, suivait la côte au nord et remon-
tait Tlstros (Danube), jusqu'au point où il se sépare en plusieurs
branches. Les Ioniens avaient reçu ordre d'y jeter un pont;
Dareios le trouva prêt à son arrivée, et, après l'avoir traversé
avec ses troupes, donna ordre de le détruire. Mais Goès de
Mitylène lui fit comprendre le danger de se priver d'un pas-
sage qui pouvait devenir nécessaire, en cas de retraite. Il en
confia la garde aux Ioniens, et comme il se proposait de revenir
par une autre route, il fixa un terme de soixante jours pour
son absence, fit soixante nœuds à une courroie, et dit aux
Ioniens, d'en défaire un chaque jour et de retourner ensuite
chez eux . Les soixante jours s'écoulèrent, et l'on vit arriver,
au lieu de l'armée perse,'' une troupe de Scythes : « Ioniens,
dirent-ils, le terme qui vous a été prescrit est passé : rompez
le pont, et remerciez les Dieux et les Scythes de vous avoir
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346 LES PERSES EN THRACE ET EN MACÉDOINE.
rendu la liberté. Quant à celui qui était votre maître, nous
allons le traiter de manière qu'il ne fasse plus la guerre à per-
sonne. » Les chefs délibérèrent: TAthénien Miltiade, tyran de
la Ghersonnèse de THellespont, fut d*avis de saisir cette occa-
sion pour rendre la liberté à Tlonie: mais Histiaios, tyran de
Milel, s'y opposa. Il représenta aux autres tyrans que, si la
puissance de Dareios était détruite, eux- mômes perdraient leur
autorité, les villes préférant toutes la démocratie à la tyrannie.
Cette opinion prévalut et on prit la résolution de sauver
Dareios, ce qui fit dire aux Scythes que les Ioniens étaient les
plus lâches des hommes libres, mais les plus fidèles des
esclaves.
Conquête de la Thrace et de la Macédoine par les
Perses. — Les Scythes avaient opposé à Dareios la tactique
employée plus tard par les Russes contre Napoléon : ils dévas-
taient les campagnes et se reliraient avec leurs familles et
leurs troupeaux vers les régions du Nord, en évitant de livrer
bataille à l'ennemi. Quand il eut repassé l'Islros après une re-
traite désastreuse, Dareios avait cependant encore une armée
considérable ; il la laissa en Europe sous le commandement de
Mégabaze et retourna en Asie. 11 voulut alors récompenser
Goès de Mitylène et Histiaios de Milet auxquels il devait son
salut. Goès demanda et obtint la tyrannie de Mitylène, Histiaios
le territoire de Myrkine, dans le pays des Thraces Édoniens,
où il voulait fonder une ville. Mégabaze acheva la conquête de
la Thrace et des cités grecques de l'Hellespont en commençant
par Périnthe, puis, traversant le Slrymon,il soumit les Paiônes,
dont une partie fut transportée en Asie. Au sud de la Paionie
était la Macédoine, qui devait avoir plus tard tant d'importance
dans l'histoire grecque. La famille royale de ce pays se pré-
tendait issue des rois Hèracléides d'Argos. Mégabaze envoya
sept Perses de distinction au roi Amyntas pour lui demander
la terre et l'eau. Amyntas consentit à devenir vassal de Dareios
et offrit un banquet aux ambassadeurs. Ceux-ci, échaufi*és par
le vin, exigèrent que le roi, contrairement aux usages grecs,
introduisît les femmes de sa famille dans la salle du festin, et
les traitèrent grossièrement. Le roi n'osa rien dire, mais son
fils Alexandre prit un prétexte pour éloigner les femmes et
dbyGoogk
RÉVOLTE DE L'IONIE.
faire entrer quelques jeunes gens armés qui se ,
ambassadeurs el les massacrèrent. Un Perse ne
ayanl été envoyé pour faire une enquête, Alexa
présents considérables, lui donna sa sœur en i
vint ainsi à étouffer l'affaire. Mégabaze étan
Asie, son successeur Olanès, distinct du person
nom dont il a été question plus haut, acheva l'œ
commencée, prit Byzance, Chalkédon, et les il
de Lemnos.
Révolte de rionie. — Au commencement
siècle, l'empire des Perses s'étendait depuis
rindos jusqu'au mont Olympe. Les peuples qu
partie payaient des impôts pour l'entretien du i
et des satrapes, fournissaient des soldats àl'arm
gardaient leurs coutumes locales et leur admir
rieure. Dans les villes grecques, les Perses favoi
vernement des tyrans, trouvant plus comme
affaire qu'à un seul homme pour le payement <
tyrannie et la domination étrangère se trouvai
ciées dans une même réprobation. Une miserai
une ambition particulière suscitèrent une révoll
à toute la Grèce d'Asie. Les oligarques de Naxos,
parti populaire, demandaient l'appui d'Aristagc
cousin d'Histiaios qui lui avait cédé la tyrai
Arislagoras était disposé à les aider pour mettre
dépendance. Il alla trouver Artapherne, frère <
satrape d'Asie Mineure, et l'engagea à saisir
d'annexer Naxos et toutes les Kyclades à l'empi
Artapherne lui donna deux cents vaisseaux et de
le commandement de Mégabase, son cousin et c<
but de cette expédition devait être tenu secret, n
s'étant élevé, à propos d'une question de dis
Aristagoras et Mégabase, celui-ci fit prévenir le
se mirent en défense. L'entreprise échoua, Arii
gnit d'avoir à en rembourser les frais et d'êti
pouillé de la tyrannie de Milet. Sa position était
ne trouva rien de mieux, pour se tirer d'embarras
ses concitoyens à la révolte. Un message d'Histia
dbyGoogk
348 SECOURS DEMANDÉS AUX GRECS D'EUROPE.
Histiaios était alors k Suze,à la cour de Dareios qui, par crainte
de ses projets ambilieux, l'avait rappelé et le retenait, disant
qu'il ne pouvait pas se passer de lui. Persuadé que, si Milet se
révoltait, le roi le chargerait d'y aller et de lui amener Arista-
goras, il fit raser la tête d'un esclave, y imprima des caractères,
et quand les cheveux furent repoussés, envoya l'esclave à Mi-
let. Aristagoras fit raser la tête de l'esclave et lut le message ;
c'était un ordre de* se révolter.
Secours demandés aux Grecs d^Europe. — Aristagoras
délibéra avec quelques citoyens notables, et IMnaurrection fut
résolue malgré les avis prudents de l'historien Ilécatée qui
connaissait la force de l'empire des Perses. Pour soulever les
masses populaires, Aristagoras abdiqua la tyrannie à Milet. En
même temps il fit enlever les autres tyrans qui étaient encore
réunis sur la flotte revenue de Naxos, et les livra aux villes.
Les Mitylèniens lapidèrent Coès qui s'était fait donner la
tyrannie par Dareios ; les autres tyrans furent seulement
bannis. La démocratie s'établit dans toutes les cités, et l'insur-
rection devient générale. Aristagoras, qui avait besoin d'une
forte alliance, s'embarqua pour Sparte. Il montra au roi
Cléoménès une plaque de cuivre « sur laquelle était gravée, dit
Hérodote» la circonférence entière de la terre, avec toutes les
mers et les rivières dont elle est arrosée. » Après avoir présenté
à Cléoménès la délivrance de l'Ionie comme un devoir pour les
Spartiates, il lui fit voir sur sa carte les pays situés entre
rionie et la Perse, lui en vanta la richesse et la fertilité, et
parla surtout des immenses trésors de Suze, Selon lui, la su-
périorité militaire des Spartiates sur les Asiatiques rendait
cette conquête facile. « Pour reculer un peu les bornes de votre
territoire, vous vous battez contre vos voisins de Messénie,
d'Arcadie et d'Argos ; il se présente une occasion de vous em-
parer de l'Asie entière, que pourriez-vous souhaiter de plus? »
Cléoménès promit de rendre réponse dans trois jours. Quand
Aristagoras revint, il lui demanda en combien de temps on
pouvait aller d lonie à Suze. Cette fois, l'Ionien manqua d'a-
dresse; il répondit qu'il fallait trois mois. « Mon ami, dit
Cléoménès, en proposant aux Spartiates un voyage de trois
mois, tu leur tiens un langage désagréable; sors de Sparte
dbyGoogk
INCENDIE DE SARDES. 349
avant le coucher du soleil. » 11 essaya de la séduction : il offrit
dix talents, augmenta la somme et vint peu à peu jusqu'à
cinquante (270,000 fr.)> La petite Gorgo, fille de Gléoménès,
âgée de huit à neuf ans, assistait à Tentretien : « Père, dit-elle,
va-t'en, ou cet étranger te corrompra. » Cléoménès se leva,
et Aristagoras dut quitter Sparte.
Incendie de Sardes. — - 11 se rendit k Athènes où il eut
plus de succès. Il rappela les liens qui unissaient Athènes aux
villes d'ionie. Les Athéniens étaient d'ailleurs très irrités con-
tre Artapherne qui avait accueilli Hippias avec faveur et ré-
pondu à leurs réclamations en les sommant de i'ecevoir leur
ancien tyran. Ils envoyèrent vingt vaisseaux, auxquels les Ëré-
triens en Joignirent cinq, en souvenir de l'appui que les Mi-
lésiens leur avaient prêté autrefois dans la guerre contre
Chalkis. Cette flotte fut le commencement des maux pour les
Grecs et les barbares, dit Hérodote, rappelant l'expression
d'Homère à propos des vaisseaux qui transportèrent Paris sur
la mer Egée. Les troupes débarquèrent sur le territoire d'É-
phèse cù elles reçurent un puissant renfort d'Ioniens ; puis
elles remontèrent la vallée du Caystros, franchirent le mont
Tmôlos et s'emparèrent de Sardes, dont la garnison se retira
dans la citadelle. Les maisons de Sardes étaient construites en
bois ou en briques avec des toitures de roseaux, à cause des
tremblements de terre. Un soldat ayant mis le feu à une de
ces maisons, l'incendie se communiqua à toute la ville. Le
temple de Kybèlè, Déesse du pays, fut réduit en cendres, et
cet incendie servit plus tard de prétexte aux Perses pour brûler
les temples de la Grèce. La population rassemblée sur la place
publique, aux bords du Pactole, se disposait à une vigoureuse
défense; les Ioniens et leurs alliés se retirèrent. Ils venaient
de quitter Sardes quand toutes les forces de la province, ras-
semblées à la nouvelle de l'invasion, les poursuivirent dans
leur retraite et les battirent près d'Éphèse. Évalkis, chef des
Érétriens, fut tué en combattant. Les Ioniens se dispersèrent
dans les villes; leurs alliés se rembarquèrent. En apprenant
l'incendie de Sardes, Dareios, moins irrité contre ses sujets
rebelles que contre les étrangers qui étaient venus l'attaquer
sans provocation de sa part, lança une flèche contre le ciel en
L. M. — HisT. DES Grecs. 20
dbyGoOgk
RÉVOLTE DE KYPROS.
t : « 0 Ormuzd, accorde-moi de me venger des Alhé-
i. >) Il ordonna à un de ses serviteurs de lui répéter, cha-
fois qu'il se mettrait à table : « Maître, souviens-toi des
liens. »
s Gariens et les Kypriotes prennent part à Tinsur-
ion. — Malgré les prières d'Aristagoras, les Athéniens
èrent de nouveaux secours. Réduits à eux-mêmes, les
ns se préparèrent à continuer la lutte. Ils firent voile vers
esponl, s*emparèrent de Byzance et de toutes les autres
voisines; puis, revenant vers le sud, décidèrent les Ca-
à s'allier avec eux. Les Cauniens, qui avaient refusé au-
tant leur appui, entrèrent dans Talliance aussitôt après
indie de Sardes. Toutes les villes de Kypros, excepté Ama-
:e, prirent parti pour les Ioniens, à l'instigation d'Onc-
de Salamine, qui enleva la tyrannie à son frère Gorgos,
san des Mèdes. La révolte prenait des proportions redou-
s; les Grecs d'Asie auraient pu conquérir leur indépen-
B s'ils avaient eu la discipline et l'unilé d'action qui sau-
it quelques années plus tard la Grèce d'Europe. Les Perses
yèrent la flotte phénicienne à Kypros avec une armée
fptiens et de Kilikiens. Onésilos demanda l'aide de la
ionienne qui arriva aussitôt. Les Ioniens, surtout ceux
amos, montrèrent boucoup de courage et battirent les
iciens sur mer ; mais le combat de terre qui se livra en
e temps prit une autre tournure. Déjà Onésilos avait tué
L main le général persan, quand Stésènor, tyran de Ku-
qui commandait un corps considérable de troupes, passa
)té de l'ennemi. Les chars de guerre des Salaminiens sui-
t cet exemple, Onésilos fut tué, ainsi que le roi des
ns, Aristokypros, fils de Philokypros, l'ami de Selon. La
de Soloi fut prise après cinq mois de siège; Gorgos re-
it tyran de Salamine, et l'île de Kypros fut de nouveau
te en esclavage après avoir joui de la liberté pendant un
En même temps, les armées rassemblées en Lydie et
nandées par les gendres du roi soumettaient les villes de
espont, de la Troas et de l'Aiolis. Après la prise de Gla-
nes et de Kymè, Aristagoras, l'auteur du soulèvement,
donnant ceux qu'il avait entraînés dans le danger, s'em-
dbyGoogk
BATAILLE DE LADÈ.
barqua pour Myrkine et fut tué au si^
Thrace.
Défaite de la flotte grecque à Ladë.
posèrent aux Perses une résistance énergi
supériorité du nombre, dans une batailli
Marsyas où ils perdirent dix mille homme
quitter TAsie. Un renfort de Milésiens les
nouveau combat où ils furent plus malb
succès d'une embuscade où ils tuèrent le
fit que retarder leur soumission. En môm
assiégée par terre et par mer. Les Ioniens
en rase campagne contre Tarmée entier
augmentée des Egyptiens et des Kilikiens q
mettre Kypros; mais ils pouvaient espér<
mer, quoique la flotte phénicienne fût de
dis que les Ioniens n'en avaient que 3b0. £
au Panionion, on décida qu'on laisserait
remparts et que toutes les forces de la coi
concentrées sur la flotte, qui se réunit à
il n'y avait pas d'unité dans le commande
lingent avait son chef. Dionysios de Phoka
ses collègues la nécessité d'une forte dise
du commandement suprême, et pendant fa
d'exercer aux manœuvres les rameurs et 1
liguèrent de ces durs travaux : « Pourquo
à ce Phokaien, qui n'a amené que trois vai
sous les Perses ne serait pas plus in toléra
d'obéir, dressèrent des tentes sur le rivag
l'ombre. Les anciens tyrans des villes, no
Samos, fils de Syloson, leur promettaie
grand roi s'ils voulaient se soumettre et L
châtiment terrible s'ils persévéraient dan
de la bataille, tous les vaisseaux Samîens
glèrent vers le large. Les Lesbieus et be
niens suivirent cet exemple. Les cent vais
tèrent presque seuls le poids de la lutte
désemparés et durent céder à la supéi
Dionysios de Pbokaia combattit jusqu*ai
dbyGoogk
852 PRISE DE MILET.
quand tout fut perdu, il se dirigea vers la Phénicie, coula des
bâtiments marchands et, chargé de leurs dépouilles, fit voile
vers la Sicile. De là, il faisait une guerre de pirates contre les
Tyrrhènes et les Carthaginois, en s'abstenant de nuire aux
Grecs.
Prise de Milet. — Après la défaite de la flotte ionienne^
les Perses assiégèrent Milet par terre et par mer. Ils battirent
cette place avec toutes sortes de machines de guerre, et ayant
poussé des mines sous ses murs^ ils la prirent d'assaut, la
sixième année de la révolte d*Arislagoras (495). Des défenseurs
de la ville, les uns furent passés au fil de Tépée, les autres fu-
rent envoyés à Suse avec les femmes et les enfants, et Dareios
les fit transporter à Ampè, près de l'embouchure du Tigre. Il
ne resta plus de Milésiens à Milet; les Perses se réservèrent la
ville et la plaine et donnèrent les montagnes aux Cariens de
Pédasa. Le temple d'Apollon Didymaien, où était l'oracle des
Branchides, fut brûlé et ses trésors pillés. Les Athéniens déplo-
rèrent comme un malheur public la ruine de leur colonie ; le
poète Phrynichos ayant fttit représenter une tragédie sur la
prise de Milet, fut mis à l'amende, pour avoir ravivé un sou-
venir de deuil, souvenir qui ressemblait à un remords, car TIo-
nie aurait pu être sauvée si sa métropole avait pris la direction
de la guerre^ au lieu de se borner à l'incendie de Sardes, bra-
vade inutile, qui fut cruellement expiée plus tard par l'incen-
die d'Athènes.
Soumission de la Grèce d^Asie. — La prise de Milet en-
traîna la soumission de toute la Grèce d'Asie et des lies voi-
sines de la côte. A Ghios, à Lesbos, à Ténédos, les Perses for-
maient une chaîne d'un rivage à l'autre, balayant le territoire
du nord au sud et enveloppant les habitants commie dans un
filet. Les Samiens seuls, dont les vaisseaux s'étaient retirés du
combat livré àLadè, ne furent pas punis de leur révolte par la
ruine de leur ville et l'incendie de leurs temples. L'île fut ren-
due à son tyran Aiakès, fils de Syloson. Ceux des Samiens qui
avaient refusé de s'associer à la trahison de leurs chefs émi-
grèrent vers la Sicile et occupèrent Zanclè ; mais ils en furent
chassés peu de temps après par Anaxilaos, tyran de Rhègion,
qui y établit des Messéniens et donna à la ville le nom de Mes-
dbyGoogk
*j
SUITES DE LA CONQUÊTE. 353
sana (Messine). La flotte phénicienne passa des côtes d'Ionie à
celles de THellespont et de la Propontis. Toutes furent prises et
saccagées. Les habitants de Byzance et de Chalkédon s'enfuirent
à Mesembria, sur le PontEuxin, sans môme attendre l'arrivée
des Perses. Les Phéniciens ayant parcouru le pays le fer et la
flamme à la main, se tournèrent du côté de Procoûnèse et
d'Astakë et les brûlèrent aussi. Ils revinrent ensuite dans la
Ghersonnëse pour détruire toutes les villes. L'Athénien Mil-
tiade n'échappa à la captivité qu'en se sauvant à Athènes, où il
devait s'illustrer plus tard par la victoire de Marathon. Les gé-
néraux perses réalisèrent, dit Hérodote, les menaces qu'ils
avaient faites aux Ioniens avant la bataille de Ladè : « A me-
sure qu'ils se rendaient nialtres des villes, ils choisissaient les
plus beaux enfants pour en faire des eunuques, arrachaient les
filles des bras de leurs mères pour les envoyer au roi, et non
contents de cela, ils mettaient le feu aux villes et aux temples.
Les Ioniens furent ainsi subjugués pour la troisième fois. »
Après avoir écrasé la révolte avec une impitoyable sévérité,
le gouvernement perse voulut en prévenir le retour en détrui-
sant l'autonomie communale. « Arlapherne, gouverneur de
Sardes, manda les députés des villes ioniennes et les obligea
à s'engager par un traité à recourir réciproquement à la jus-
lice quand ils se croiraient lésés, sans user désormais de voies
de fait. 11 tit ensuite mesurer leurs terres par parasanges, me-
sure usitée en Perse, qui équivaut à trente stades, et régla en
conséquence les impôts que chaque ville devait payer. » Par
ce tribut qui leur était imposé et dont elles ne pouvaient ni
fixer ni discuter le chiffre, les villes grecques entraient dans
l'unité de l'empire. En les privant du droit de paix et de guerre,
qui est l'attribut principal de la souveraineté politique, on pou-
vait sans danglr leur laisser une sorte d'indépendance admi-
nistrative : Mardonios, gendre du roi, qui succéda à Arla-
pherne, déposa les tyrans des Ioniens et établit dans les villes
la démocratie. Hérodote ne nous donne pas les motifs de
cette mesure qui paraît surprenante au premier abord. Les
Perses s'étaient peut-être aperçus que les intrigues d'un am-
bitieux comme Histiaios ou Aristogoras étaient plus dange-
reuses pour leur autorité que des rivalités dans les élections
20.
Digitized by VjOOQIC
354 PRIilMlÈRE GUiîHRË MÉOIQUE.
municipales. « Cet acte, dit Thirlwall, démontre plus de con-
naissance des hommes, des vues plus larges, des principes
plus équitables qu'on n'aurait pu les attendre d'une cour bar-
bare et despotique. C'est une mesure qui fait honneur à l'in-
telligence de Mardonios ou de Dareios. » Avec nos idées mo-
dernes, la condition des cités grecques sous la domination des
Perses peut sembler préférable aux discordes civiles et à l'hos-
tilité réciproque des cités autonomes ; mais l'énergie intellec-
tuelle s'éteignit avec l'activité sociale; toute initiative disparut
avec les agitations de la vie politique, et cette brillante civili-
sation de la Grèce d'Asie, qui avait grandi si vite et s'était élevée
si haut dans la période précédente, s'évanouit eu môme temps
que la liberté.
II. — Résistance des Grecs d'Europe,
PREMIÈRE GUERRE MÉDIQUE.
Expédition de Mardonios. — Le roi demande aux cités grecques la
terre et l'eau. — Expédition de Datis et d'Artapherne ; ruine d'Éré-
trie. — Miltiade; préparatifs des Athéniens; secours demandés aux
Spartiates. — Secours envoyés aux Athéniens par Platée. — Bataille
de Marathon. — Trahison déjouée. — Honneurs rendus aux morts,
aux héros et aux Dieux. — Procès et mort de Miltiade.
Expédition de Mardonios. ~ Dareios, qui n'avait pas
oublié son vœu de venger l'incendie de Sardes, pouvait désor-
mais employer toutes les forces de son empire à la conquête
de la Grèce d'Europe. Une armée nombreuse, commandée par
Mardonios, traversa l'Hellespont avec ordre de s'emparer
d'Athènes et d'Érétrie, en môme temps qu'une flotte considé-
rable suivait la côte. L'armée de terre traversa la Thrace, déjà
soumise par Mégabaze et qui semble n'avoir pas pris, part à la
révolte ionienne. La flotte se dirigea d'abord vers l'île de
Thasos, qui tirait un grand profit de ses mines d'or et de celles
de Scaplè-Hylè sur la côte voisine. Ces mines, découvertes autre-
fois par les Phéniciens, fournissaient un revenu de deux à trois
cents talents. Les Thasiens se soumirent sans résistance à la
flotte des Perses, pendant que Mardonios subjuguait ce qui res-
dbyGoogk
MEURTRE DES ENVOYÉS DU BOL 355
tait encore de tribus indépendantes en Macédoine. Mais en dou-
blant le mont Athos, la flotte fut assaillie par une effroyable
tempête qui détruisit trois cents vaisseaux; vingt mille hommes
furent noyés ou broyés contre les rochersr En même temps,
l'armée de terre, attaquée la nuit par les ThracesBryges, perdit
beaucoup de monde, et Mardonios lui-même fut blessé. Il put
tirer vengeance de cette agression en soumettant les Bryges,
mais ses deux armées étaient trop affaiblies pour aller plus
loin : il fallut retourner en Asie.
Le roi demande aux Grecs la terre et Tean. — Ces dé-
sastres ne changèrent pas la détermination de Dareios ; pen-
dant qu'il préparait de nouveaux armements, il envoya des
hérauts dans toutes les parties de la Grèce pour demander la
terre et Teau. La terreur qu'inspiraient les Perses depuis la
récente conquête de l'Ionie, fit accueillir cette demande par
plusieurs peuples du continent qu'Hérodote ne désigne pas,
probablement les Thessaliens et les Thébains, et par tous les
habitants des îles, même les Aiginètes, qui avaient, à cette
époque, la plus puissante marine de la Grèce. Mais à Athènes
et à Sparte, les envoyés du roi de Perse furent mis à mort.
Selon Pausanias, les Athéniens avaient été poussés à cette vio-
lation du droit des gens par Miltiada. Les Lakédaimoniens,
joignant la raillerie à la violence, jetèrent les ambassadeurs
dans un puits, en leur disant qu'ils y trouveraient la terre et
Teau. Un pareil acte, dont les Spartiates se repentirent plus
tard, les mettait, à l'égard du roi des Perses, dans le même
état d'hostilité implacable qu'Athènes et Érétrie. Les Athéniens
portèrent plainte à Sparte contre les Aiginètes pour avoir donné
la terre et l'eau, les accusant d'avoir agi ainsi par inimitié
contre Athènes, pour envahir l'Attique avec l'aide des Perses,
et représentant celte conduite comme une trahison envers la
Grèce. On voit se produire alors pour la première fois l'idée
d'une nation hellénique, et, en même temps, la suzeraineté de
Sparte est reconnue par les Athéniens, qui, plus tard, devaient
la lui disputer. Les Spartiates forcèrent les Aiginètes à livrer
dix de leurs citoyens comme otages aux Athéniens. 11 en ré-
sulta une suite d'hostilités entre Athènes et Aigine, pendant que
les Perses préparaient une expédition contre la Grèce d'Europe
dbyGoogk
356 RUINE D'ÉRÉTRIE.
Expédition de Datii dt d*At*taphefne . — Httiiie â'ÉSré-
trie. — Celle expédilion fui conduite par le mède Datis et par
Arlaphetne, neveu de Dareios et fils d'Artapherne, satrape de
Lydie. Une flotte de 600 trirèmes avec des vaisseaux de trans-
port pour les chevaux, embarqua sur les côtes de Kilikie une
armée de il 0,000 hommes, fil voile de là vers l'Ionie, et, pour
n'avoir pas à doubler le mont Atlios, qui avait été si funeste h
la flotte de Mardonios, prit à travers les lies par la mer Ica-
rienne. Il fallait d'abord punir Naxos de FalTront infligé à la
flotte perse conduite par Aristagoras. Les Naxiens s'enfuirent
dans les montagnes. Les Perses réduisirent en esclavage tous
ceux qui leur tombèrent entre les mains et mirent le feu à la
ville et aux temples. Les Dèliens s'étaient réfugiés à Ténos ;
Datis leur fit dire qu'il avait ordre de respecter l'tle sainte où
étaient nés Apollon et Artémis. Il est probable qu'il agit ainsi
par égard pour les Ioniens qui étaient dans son armée. Il pour-
suivit sa course sans résistance à travers les îles, demandant
à chacune des renforts et prenant les enfants comme otages.
Il aborda enfin à Garystos, sur la pointe septentrionale de Tile
d'Euboia. Les Carystiens, refusant de marcher contre leurs
frères d'Érétrie et d'Athènes, leur territoire fut ravagé et ils
furent obligés de se soumettre. Les quatre mille Athéniens ré-
cemment établis sur les terres des Hippobotes de Chalkis se
disposaient à secourir les Érétriens, niais ceux-ci étaient di-
visés et irrésolus ; les uns voulaient se retirer dans les monta-
gnes, les autres, ne considérant que leur avantage particulier
et les récompenses qu'ils espéraient des Perses, se préparaient
à trahir la patrie. Les Athéniens, avertis de ces dispositions par
un citoyen de la ville, se retirèrent à Oropos. Érétrie essaya de
se défendre, mais, au bout de six jours, deux des principaux
citoyens la livrèrent à l'ennemi. Les Perses la pillèrent, mirent
le feu aux temples pour venger l'incendie de Sardes, et rédui-
sirent le» habitants en esclavage, selon les ordres de Dareios.
Ensuite ils remirent à la voile. Le vieux tyran Hippias, qui les
accompagnait, les fit débarquer à Marathon, le lie^de l'Atlique
le plus commode pour la cavalerie.
MUtiade. — Préparatifs des Athéniens, secours de-
mandés anx Spartiates. — A la nouvelle de ce débarque-
dbyGoogk
PRÉPARATIFS DES ATHÉNIENS. 357
ment, les Alhénieas armèrent tous les citoyens en état de servir,
et ceux des esclaves qui se montrèrent disposés à gagner la
liberté par leur courage. L*armée athénienne était commandée
par dix généraux, élus pour Tannée, un par tribu, à la tète des*
quels était le polémarque ou ministre de la guerre, dont la
voix assurait Tunité des résolutions. Parmi les généraux était
Miltiade ; à son retour de la Chersonnèse de Thrace, il avait
été mis en accusation pour y avoir exercé la tyrannie. Mais on
se rappela que, dans Texpédition de Dareios contre les Scythes,
il avait proposé de détruire le pont de Flstros. De plus, pendant
la révolte de Tlonie, il avait chassé les Pélasges et la garnison
persane des lies d'Imbros et de Lemnos. Enfin, il était parti-
culièrement détesté des f erses: le peuple l'acquitta et fit preuve
de sagesse en le mettant au nombre des généraux, car nul
ne connaissait mieux que lui l'ennemi qu'on avait à combattre.
Avant de sortir de la ville, les généraux envoyèrent à Sparte le
coureur Pheidippidès ; il y arriva le lendemain, ayant fait
242 kilomètres en 48 heures. « Lakédaimoniens, dit-il, les Athé-
niens vous prient de les secourir et de ne pas permettre qu'une
des villes les plus anciennes de la Grèce soit réduite en escla-
vage par les barbares. >> Ils promirent un secours ; mais une
loi ou un ancien usage leur défendait de se mettre en marche
avant la pleine lune, et on n'était qu'au neuvième jour du mois.
Quand cette réponse fut rapportée à Athènes, il y eut une dis-
cussion entre les généraux : cinq d'entre eux voulaient attendre
les secours promis par les Spartiates. Miltiade et les quatre
autres voulaient une action immédiate, pour profiler de l'en-
thousiasme du peuple, et surtout pour se mettre en garde
contre les trahisons, les intrigues des partisans d'Hippias et
Tor des Perses. La décision dépendait du vote de Callimachos,
le polémarque; frappé de la force des arguments de Miltiade,
il vota pour la bataille, et elle fut décidée. Aristide, un des dix
généraux, engagea ses collègues à céder à Miltiade leur tour
de commandement ; mais il voulut attendre que son tour fût
venu.
Secours envoyés aux Athéniens par les Platalens. —
La plaine de Marathon, longue de deux lieues et demie, large
d'une demi-lieue, est resserrée entre la mer et la chaîne du
dbyGoogk
358 BATAILLE DE MARATHON
Pentélique, et bornée à ses deux extrémités par des marais.
En face des barbares qu'Hippias avait fait ranger le long du
rivage, les Athéniens se postèrent dans un champ consacré à
Héraclès, aux pieds de Tamphithéâtre de montagnes qui borde
la plaine. Pendant qu'ils étaient là en ordre de bataille, il
virent venir à eux un renfort d'environ mille soldats. La petite
ville de Platée, qu'ils avaient délivrée de la suzeraineté de
Thèbes, envoyait spontanément à leur secours toutes les forces
dont elle disposait. C'était bien peu de chose devant Tinnom-
brable armée qu'on avait à combattre, mais l'eifet moral fut
immense: on n'était pas abandonné de tout le monde, on avait
des amis qui venaient, sans être appelés, partager le péril.
Athènes n'oublia jamais ce secours inattendu; dans les prières
publiques, le nom des Plataiens fut toujours associé à celui des
Athéniens. Tous les récits portent l'armée athénienne à dix
mille hoplites, mais on ne sait pas si les Plataiens sont com-
pris dans ce chiffre. Le nombre des barbares n'est pas donné
par Hérodote ; les historiens postérieurs l'ont sans doute exa-
géré. Tout ce qu'on peut dire, c'est qu'ils étaient beaucoup
plus nombreux que les Grecs. Miltiade développa sa petite
armée sur un front égal à celui de l'ennemi en donnant peu de
profondeur au centre. L'aile droite était commandée, suivant
l'usage, parle polémarque Callimachos; les Plataiens furent
placés à l'aile gauche. Selon Cornélius Népos, Miltiade avait fait
abattre des arbres pour gêner les manœuvres de la cavalerie
des Perses. Les présages étant favorables, les Grecs entonnè-
rent le Paian, ou hymne à Apollon, qui était leur chant de
guerre, et la bataille commença.
Bataille de Marathon. — « Un intervalle de huit stades
séparait les deux armées. Au premier signal, les Athéniens
franchirent en courant cet espace. Les Perses les voyant ac-
courir se disposaient à les recevoir; mais remarquant que,
malgré leur petit nombre et l'absence de cavaliers et de gens
de traits, ils pressaient leur marche, ils les prirent pour des
insensés qui courent à une mort certaine. Les barbares s'en
faisaient cette idée ; mais les Athéniens les ayant joints, leurs
rangs serrés, firent des actions mémorables. Ce sont, autant
que nous avons pu le savoir, les premiers de tous les Grecs
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BATAILLK DE MAHATMON. 3o0
qui aient élé à Tennemi en courant, qui aient envisagé sans
effroi rhabillement des Mèdes, et qui aient soutenu la vue de
leurs soldats, quoique jusqu'alors le seul nom des Mèdes eût
inspiré de la terreur aux Grecs. Après un combat long et opi-
niâtre, les Perses et les Sakas, qui composaient le centre de
l'armée ennemie, enfoncèrent celui des Athéniens, et, profi-
lant de leur avantage, poursuivirent les vaincus du côté des
terres. Cependant les Athéniens et les Plataiens remportèrent
la victoire aux deux ailes, mais laissant fuir les barbares, ils
réunirent en un seul corps l'une et l'autre aile, attaquèrent les
Perses et les Sakas qui avaient rompu le centre de leur armée
et les battirent. Les Perses ayant pris la fuite, les Athéniens
les poursuivirent, tuant et taillant en pièces tous ceux qu'ils
rencontraient, jusqu'à ce qu'étant arrivés aux bords de la mer
ils demandèrent du feu et s'emparèrent de quelques vaisseaux.
Il périt à la journée de Marathon environ 6,400 hommes du
côté des barbares et 192 de celui des Athéniens. Le polémar-
que Galli machos fut tué à cette .bataille, après avoir fait des
prodiges de valeur : Stésilaos, fils de Thrasylaos, un des gé-
néraux, y périt aussi; Kynègeiros, fils d'Euphorion, ayant saisi
un vaisseau par la partie élevée de la poupe, eut la main coupée
d'un coup de hache. » Ce Kynègeiros était frère d'Aischyle, le
grand poète tragique, qui fut lui-même un des combattants de
Marathon. L'épitaphe d'Aischyle ne parle pas de ses tragédies,
mais rappelle son rôle de patriote et de soldat : « S'il fut brave,
la plaine de Marathon peut le dire, et le Mède à l'épaisse cheve-
lure le sait bien. »
Trahison déjouée. — « Ce fut ainsi, continue Hérodote,
que les Athéniens s'emparèrent de six vaisseaux ennemis. Les
barbares se retirèrent avec le reste de leur flotte, sans revirer
de bord; et ayant repris] les captifs d'Érétrie dans l'île d'Ai-
gilia où ils les avaient laissés, ils doublèrent le cap Sounion,
dans le dessein d'arriver avant eux. On prétend à Athènes
qu'ils conçurent ce projet par l'artifice des Alcmaionides qui,
selon les conventions faites avec eux, leur montrèrent un bou-
clier. » Hérodote trouve peu vraisemblable cette accusation
contre les Alcmaionides, qui n'avaient pas à se plaindre du
peuple et n'auraient rien gagné au rétablissement de la tyran-
dbyGooglç
HONNEURS RENDUS AUX MORTS.
)endant, ajoule-l-il, un bouclier servit de signal, c'est
l'on ne peut révoquer en doute ; mais par qui ce signal
iné? je n'en puis rien dire de certain. » On ne sut
lels étaient ceux qui avaient essayé de livrer leur pa-
ant que d'autres mouraient pour la défendre. Heu-
it la trahison fut déjouée : ce signal adressé aux
liltiade et les Athéniens l'avaient aperçu aussi. De
à Athènes, il y avait sept heures de marche dansles
3s. L'armée, quoique épuisée de fatigue, ne perdit
istant et arriva le môme jour. Sans cette marche
L victoire de Marathon aurait été inutile : Athènes qui
lus de défenseurs, serait tombée au pouvoir de l'en-
and'Hes Perses arrivèrent devant le port de Phalère,
, campée à Kynosarge, l'armée qui les avait battus le
L flotte reprit la route d'Asie, emmenant les Érétriens
1 esclavage. On les présenta à Dareios. Bien qu'il eût
rrité contre eux à cause de l'incendie de Sardes,
les vit en son pouvoir, il ne leur fit pas de mal. 11 les
ms un endroit appelé Ardénica, à 24 kilomètres de
il y avait un puits qui fournissait du bitume, du sel et
\, Us y étaient encore du temps d'Hérodote, et ils
onservé l'usage de la langue grecque.
ars rendus aux mortf, aux héros et aux
— Qeux mille Lakédaimoniens arrivèrent après la
le. La dislance de Sparte à Athènes est de 140 kilo-
Is l'avaient franchio en trois jours de marche. On
it que la bataille était livrée, mais ils voulurent voir
les Perses, qui avaient conquis l'Egypte et l'Asie, et
ent d^étre vaincus pour la première fois. Ils se trans-
à Marathon pour les contempler, félicitèrent les
i de leur victoire et retournèrent à Sparte. Les der-
oirs furent rendus aux morts; on éleva un tombeau
mp de bataille, et les noms de deux cent quatre-vingt-
léniens qui avaient été tués furent inscrits sur dix
une pour chaque tribu. Il existe encore aujourd'hui,
res du rivage, un tumulus que le colonel Leake croit
nbeau des vainqueurs de Marathon. Un second tom-
élevé pour les Plataiens, un troisième pour les escla-
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PROCÈS ET MORT DE MILTIADE.
esclaves. Plularque, dans la vie de Kimon, raconte qu
ayant demandé aux Athéniens le droit de porter une
d'olivier, un citoyen lui répondit : « Quand tu re]
seul les Barbares, tu seras seul récompensé. »
Il semblait qu'un tel succès n'avait pu être obt
une assistance divine. Le coureur Pheidippidès rac
lorsqu'il traversait l'Arcadie pour aller demande]
cours aux Spartiates, le Dieu Pan lui était apparu,
lant par son nom, lui avait dit : « Pourquoi les Ath
me rendent-ils aucun culte? Je suis plein de bienveilh
eux, je leur ai déjà été utile en plusieurs occasions,
aiderai encore. » Pan ayant tenu sa promesse, on lui
une grotte sur le rocher de l'Acropole, et on l'honor
sacriflces annuels et des courses aux flambeaux. On
certain que Thèseus avait énergiquement aidé les i
dans la bataille ; on avait vu aussi un guerrier en
rustique frappant les Perses avec le soc d'une chi
demanda à Delphes quel était ce héros inconnu qu'(
pu retrouver, et la Pythie ordonna d'adorer le héros
Au temps de Pausanias, le champ de bataille de
retentissait encore, la nuit, du bruit des armes et du
ment des chevaux.
Procès et mort de Miltiade. — 11 aurait ét^
pour Miltiade de mourir comme le polémarque Cal
dans l'ivresse de la victoire. Profilant de l'influe
avait sur le peuple, il demanda soixante-dix vaiss
troupes et de l'argent, sans faire connaître ses p
en promettant seulement d'enrichir sa patrie. L'a
ayant été accordé, il fit voile vers l'île de Paros, sou
que les Pariens avaient fourni une trirème aux Pen
son motif réel, dit Hérodote, était sa haine contre u
de Paros qui avait voulu le rendre odieux au gêné
Hy darnes. Les Pariens, auxquels il demandait cen
se mirent en défense et il les assiégea inutilement
vingt-six jours. Ils racontèrent depuis que, sur l'a
prêtresse qui promettait de lui livrer la ville, il ava-
la nuit dans l'enceinte sacrée des divinités souterrain
là, pris d'une terreur religieuse, il s'était mis à fuii
L. M. -> HisT. DES Grecs.
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PRÉPARATIFS DMNVASlOiN. 363
expédition. Ces ordres ayanl été portés de tous les côtés, TAsie
entière fut dans une agitation continuelle pendant trois ans.
Mais tandis qu'on était occupé de ces préparatifs, on apprit la
quatrième année que les Égyptiens, qui ataient été subjugués
par Cambysès, venaient de se révolter. Dareios s'apprêtait à
marcher contre eux lorsqu'il mourut en 485, après un règne de
trente-six ans. Xerxès, qui lui succéda, n'était pas l'aîné de ses
enfants, mais il avait pour mère Atossa, fille de Kyros et se
rattachait ainsi au fondateur de la monarchie dès Perses. Le
premier soin de Xerxès fut de ramener l'Egypte sous son obéis-
sance, mais il parait qu'il n'avait pas hérité de l'animosité de
son père contre les Grecs, et peut-être les aurait-il laissés
tranquilles, sans les conseils de Mardonios qui avait un échec
à réparer et qui espérait obtenir le gouvernement de la Grèce.
A ces conseils s'ajoutaient les instances non moins intéressées
de quelques Grecs exilés ou mécontents, les Aleuades de Thés-
salie, les Pisislratides d'Athènes, Dèmaratos de Sparte, récem-
ment dépouillé du trône par les intrigues de son collègue
Cléoménès, qui l'avait fait déclarer illégitime en corrompant
la Pythie. Les Pisistratides avaient avec eux un charlatan
littéraire nommé Onomacritos. Il avait travaillé dans sa jeu-
nesse à la récension des poèmes d'Homère; cela lui avait
donné une grande habitude de l'hexamètre et il s'en servait pour
fabriquer des prophéties. 11 en avait pour tous les goûts : il fit
vok à Xerxès qu'il était écrit dans les destinées qu'un Perse
passerait sur un pont d'Asie en Europe. Ces obsessions conti-
nuelles troublaient l'esprit du roi ; il ne pouvait plus penser
qu'à cette expédition en Grèce, et malgré les sages conseils de
son oncle Artaban qui essayait de l'en détourner, il en rêvait
la nuit. Hérodote rapporte un de ces rêves, qui rappelle le
songe trompeur envoyé parZeus à Agamemnon,au deuxième
livre* de Y Iliade.
Canal du mont Athos ; ponts sar rHellespont. — Le roi
voulait conduire lui-même l'expédition ; on mit quatre ans à la
préparer. Pendant qu'on demandait à chaque province tout ce
qu'elle pouvait fournir de soldats et qu'on établissait des dépôts
de vivres sur le chemin à parcourir, on perçait l'isthme du .
mont Athos pour éviter les tempêtes qui avaient détruit la
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DÉNOMBREMENT DE L'ARMÉE PERSE. 367
de fouet. Le passage dura sept jours et sept nuits. Dans la
grande plaine de Doriscos, sur les bords de FHebros, on essaya
de faire le dénombrement des troupes. Hérodote donne le
chiffre incroyable de 1,700,000 fantassins, outre 80,000 cavaliers
et 20,000 Arabes et Libyens conduisant les chameaux et les
chars. Gtésias s'en tient à 800,000 hommes. La flotte compre-
nait, selon Hérodote, 1207 bâtiments de guerre, dont chacun
portait, outre les équipages indigènes, trente soldats perses,
mèdes ou sakas. La flotte et Tarmée reçurent plus tard, en
traversant la Thrace et les lies, un renfort qu'Hérodote évalue
à 300,000 hommes d'infanterie et à 120 trirèmes montées par
24,000 hommes. « Ce nombre, ajouté à cehii des troupes asia-
tiques, faisait en tout 2,641,610 hommes. » Il ajoute que les
valets formaient un nombre égal à celui des gens de guerre.
Quant aux cuisiniers, aux femmes qui faisaient le pain, aux
esclaves et aux bêtes de somme qui portaient les bagages, il
renonce à en dire le nombre et s'étonne avec raison qu'on ait
pu nourrir une telle multitude. Heeren suppose qu'Hérodote
a copié des documents officiels; ce n'est pas une garantie
d'exactitude, car ceux qui ont fait le recensement devaient
grossir les chiffres pour flatter la vanité du grand roi ; mais en
réduisant ces chiffres de moitié uu même des deux tiers, il
est certain qu'on n'avait pas vu encore et qu'on n'a pas vu
depuis une si prodigieuse armée.
La variété des races, des costumes et des armes était aussi
étonnante que le nombre. Hérodote énumère et dépeint cin-
quante-six nations qui servaient dans l'armée de terre, à pied
ou à cheval et sur la flotte. On voyait des Sakas armés de
haches, des Indiens vêtus d'étoffes de coton, des Assyriens
coiffés de casques d'airain, couverts de cuirasses delin, armés
de massues de bois, des Ethiopiens crépus du Haut Nil, cou-
verts de peaux de lions et de léopards et teignant leur peau
noire moitié en blanc, moitié en vermillon ; des Éthiopiens de
Gédrosie coiffés d'une tête de cheval aux oreilles droites, à la
crinière pendante ; des Thraces avec de larges robes bariolées
et des bonnets en peaux de renards ; des Chalybes dont les
casques étaient ornés de cornes de bœufs; des cavaliers
Sargates, armés d'une corde qu'ils lançaient sur les hommes
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CONGRES DE LU8THME.
aussitôt par ordre de Xerxës,qui comptait sur l'effroi (
rapports ne pouvaient manquer de produire. Il envoyt
der la terre et l'eau dans toutes les villes, excepté à A
à Sparte, où lô droit sacré des ambassadeurs avait
une première fois. Les Spartiates, il est vrai, en avai(
remords; quelques présages funestes leur faisaient ci
colère de Talthybios, héraut d*Agamemnon. Ils demar
quelques citoyens voulaient mourir pour Sparte. Deun
estimés et des plus riches de la ville, Spertbiès et Bo
friront spontanément et furent envoyés à Suse. Ils fure
à Taudience du roi, mais les gardes leur ordonnère
prosterner selon la coutume. Us déclarèrent qu'ils n'er
rien, quand même on les pousserait de force contre te
n'était pas dans leurs mœurs d'adorer un homme <
n'était pas pour cela qu'ils étaient venus; puis, s'ad
Xerxès : « Hoi des Mèdes, dirent ils, les Lakédaimoni
ont envoyés pour expier par notre mort celle dei
sadeurs qui ont péri à Sparte. » Le roi répondit : « 1
daimoniens ont violé le droit des gens ; je ne les imil
ce serait les justifier. » Il les renvoya, et ils revinreni
Tallhybios leur tint compte de l'intention et sa colère
Congrès à l'isthme de Gorinthe. Réponses i
géantes de la Pythie. — Les Spartiates et les A
se sentant particulièrement menacés, auraient voulu
une résistance générale. Ils convoquèrent un congrès j
de Gorinthe. On déclara qu'il fallait suspendre les
particulières; les Athéniens se réconcilièrent avec les I
On consulta, comme toujours, l'oracle de Delphes ;
réponses pleines d'épouvante décourageaient les effoi
vaientde prétexte à toutes les défaillances. AuxArgéie
Cretois, la Pythie conseilla la neutralité, aux Athénieni
« Malheureux, quittez vos demeures, fuyez aux extn
la terre. Athènes sera détruite par les flammes ; le terri
monté sur un char syrien, ruinera votre ville et bien
Les Dieux suent et tremblent d'effroi, des gouttes de s
lent de leurs temples. Sortez de mon sanctuaire, sul
maux. A D'après l'avis d'un citoyen de Delphes, le
d'Athènes prirent des rameaux d'olivier, et allèrent uni
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OFFRES DE GÉLON DE SYRACUSE. 371
étaient alors très affaiblis par suite de leurs luttes contre Sparte.
Tout récemment encore, le roi Cléoménès avait brûlé dans un
bois sacré environ six mille hommes de Tarmée d*Argos,
l'élite de la nation. Humiliés par les Spartiates, les Argéiens
refusèrent de prendre part à une guerre dont le succès devait
augmenter la gloire de leurs rivaux. C'est à une cause sem-
blable qu'il faut attribuer l'abstention des Achaiens : môme en
présence des barbares, ils ne pouvaient oublier leurs vieilles
rancunes contre les Doriens. La jalousie de Kerkyra contre
Corinthe, sa métropole, priva les Grecs de l'appui d'une flotte
qui était la plus importante après celle d'Athènes. Sollicités de
se joindre aux Grecs, les Kerkyraiens promirent leur concours
et équipèrent soixante vaisseaux, mais l'événement prouva
qu'ils voulaient attendre l'issue de la lutte pour prendre le parti
du vainqueur. Ils dirent plus tard que les vents contraires les
avaient empêchés de doubler le cap Malée, mais ils n'avaient pas
essayé de transporter leur escadre par le Diolcos.
Il ne semble pas qu'aucune demande de secours ait été
adressée aux villes de la Grande-Grèce, pas môme à Tarente,
colonie de Sparte. Les députés se rendirent directement en
Sicile où presque toutes les cités étaient alors gouvernées par
des tyrans. Le plus puissant était Gélon de Syracuse. Par une
suite de ruses et de perfidies, il s'était emparé du pouvoir,
d'abord à Gela, puis à Syracuse et, contrairement à la plupart
des tyrans grecs, il favorisait l'aristocratie aux dépens du peu-
ple. Inaugurant une politique de centralisation qui fut reprise
plus tard par Denys, il voulut faire de Syracuse la capitale de
toute la Sicile ; il l'agrandit en y transportant les habitants de
Gamarine et une partie de ceux de Gela et de Mégare
Hyblaienne. Aucun État de la Grèce ne pouvait mettre sur
pied une force égale à la sienne. Quand les Grecs lui deman-
dèrent son asistance contre les barbares, il crut voir s'ouvrir
pour son ambition une nouvelle et immense carrière. Il fit
des offres magnifiques : deux cents trirèmes, vingt mille
hoplites, deux mille hommes de cavalerie pesante et autant de
cavalerie légère, avec un pareil nombre d'archers et de fron-
deurs. Il promettait en outre d'approvisionner l'armée entière
pendant toute la campagne. Seulement, il mettait pour condi-
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lNDON de la THESSAIIE.
lommandement des troupes alliées, ce qui
re de la Grèce. Un des ambassadeurs, le
répondit : « Celte demande indignerait
ion. » Gélon se rabattit sur le comman-
ce fut alors l'Athénien qui protesta : « La
ioldats, et non de généraux. » Les ambas-
t; s'ils avaient cédé, Gélon n'aurait pas pu
» car en même temps que Xerxès pénétrait
aginois attaquèrent la Sicile, et il est pro-
ble invasion avait été concertée d'avance.
ae de défense abandonnée sans combat.
L fédéral était pour les Grecs, devant Ten-
danger bien plus grand que leur infé-
Slls avaient été unis, ils auraient pu
e défense et profiler de leurs excellentes
lies. La Grèce d'Europe, bien plus facile à
èce d'Asie, est une forteresse à triple en-
la Thessalie, l'Olympe et la chaîne Gam-
in premier rempart, ouvert seulement par
smpé. Les Thessaliens, qui désapprouvaient
Lleuades, étaient disposés à défendre ce
e pouvaient le défendre seuls contre l'in-
de Xerxès. Ils envoyèrent des députés au
, pour demander que le reste de la Grèce
iforts, sans lesquels ils seraient obligés de
. Un corps de 10,000 hommes fut envoyé
la conduite du Spartiate Ëuainetos et de
>cle. Mais quelques jours après l'arrivée de
e défilé de Tempe, le roi de Macédoine
i Perses, conseilla aux généraux de se re-
! écrasés par l'armée ennemie. « Les Grecs
l, dit Hérodote, parce que le roi de Macé-
lit bien intentionné, et aussi parce qu'il y
âge par le pays des Perrhaibes, du côté de
, et ce fut en effet par cet endroit que pé-
[erxès. Les Thessaliens, abandonnés par
ncèrent plus à prendre le parti des Perses,
môme avec zèle et rendirent au roi des
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L'ARTÉMISION ET LES THERMOPYLES. 373
services importants. » C'est ainsi que la prenriière des trois
enceintes qui protégeaient la Grèce fut abandonnée sans com-
bat ; il n'en restait plus que deux, le défilé des Thermopyles et
l'isthme de Corinthe.
Détroit d'Artémision et défilé des Tliermopyles. — Le
congrès décida à la pluralité des voix de garder le passage des
Thermopyles. C'était un défilé resserré entre le golfe Maliaque
et le mont Cita et séparant la Thessalie de la Locris et de la
Phokis. Son nom lui venait de quelques sources d'eau chaude.
II est devenu aujourd'hui, par suite des alluvions du Sperchios,
une plaine d'une demi-lieue de largeur, mais autrefois il n'y
avait de passage que pour une voiture entre la mer et les es-
carpements inaccessibles de l'Oita. La mer voisine resserrée
entre la terre ferme et Tile d'Euboia forme un double détroit,
l'Artémision et l'Euripe. La flotte grecque postée dans l'Artemi-
sion pouvait communiquer avec l'armée de terre postée aux
Thermopyles. Les deux armées partirent simultanément,
pendant que les troupes de Xerxès arrivaient en Piérie et sa
flolte dans le golfe de Therma. Mais c'était précisément à cette
époque qu'on allait célébrer les jeux Olympiques et la fête
d'Apollon Carnéen qui n'était guerre moins solennelle pour les
Spartiates. Ils se contentèrent d'envoyer un petit détachement
de troupes sous la conduite d'un de leurs rois, Léonidas, pour
rassurer les Grecs du Nord et les empêcher de passer à l'en-
nemi. Cette armée se composait de trois cents Spartiates, ac-
compagnés d'un corps d'Hilotes dont on ne sait pas le nombre,
de cinq cents hommes de Tégée, autant de Mantinée, cent
vingt d'Orchomène arcadienne, mille des autres contrées de
l'Arcadie, quatre cents de Corinthe, deux cents de Phlious,
et quatre-vingts de Mykènes. Les trois cents Spartiates for-
maient un corps d'élite, choisi parmi les citoyens qui avaient
des enfants, pour ne pas laisser éteindre les familles. Sept
cents Thespiens vinrent se joindre à Léonidas dès qu'il entra
en Boiûtie. Les Thébains, gouvernés par une oligarchie très
favorable aux Perses, ne purent cependant refuser leur con-
cours; ils fournirent quatre cents hommes. Les Phokiens,
d'autant plus ardents pour la cause nationale que leurs enne-
mis, les Thessaliens, s'étaient soumis aux Perses, donnèrent
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MBATS SUR L'ARTÉMISION.
is, quoiqu'ils eussent donné la terre
nt à Léonidas tout ce qu'ils purent
t dans rArtémision. — La flotte
cent soixante et onze trirèmes. Les
li cent vingt-sept, montées en partie
Plataiens, dont le zèle et le courage
'ience sur mer. Les Corinthiens en
iégariens vingt, les Ghalkidiens en
Llhéniens leur avaient prêtées. Les
iix-huit, les Sikyoniens douze, les
Cpidauriens huit, les Érétriens sept,
Styréens deux, et les Keiens deux,
e rames furent fournis par les Lo-
)ar les Keiens. Il semblait naturel de
le la flotte aux Athéniens, qui avaient
, mais les alliés s'y opposèrent, dé-
snt s'ils n'avaient pas à leur tôte un
landement fut donc confié au Spar-
\ loue avec raison les Athéniens d'à-
m promettre la cause commune.
en observation près de la petite île
par six vaisseaux perses* Les Grecs
de cet échec qu'ils abandonnèrent
ît à Chalkis. Heureusement pour eux
aide : un terrible ouragan qui dura
3ents vaisseaux ennemis contre les
le qui avait conseillé aux Grecs d'in-
t pas trompé, et ils eurent raison de
nouvelle du désastre de l'ennemi, ils
5t surprirent quinze vaisseaux égarés
ind ils virent que cette flotte, malgré
ien plus nombreuse que la leur, ils
fois se retirer sans combat. Les
d'attendre quelque temps encore,
; mis en sûreté leurs femmes, leurs
Hérodote ajoute que pour appuyer
is donnèrent trente talents ( i 60,000 fr.)
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COMBAT DES THERMOPYLES. 375
à Thémistocle, chef des Athéniens. Sur cette somme, Thémis-
tocle donna cinq talents à Eurybiade qui commandait en chef,
trois au Corinthien Adimante, qui semblait le plus pressé de
partir, et garda le reste pour lui. La flotte grecque resta sur
les côtes d'Ëuboia. Les Perses, voulant lui couper la retraite,
détachèrent une escadre de deux cents vaisseaux qui devait
tourner Tile et prendre les Grecs à dos par le midi de TEu-
ripe, tandis que le gros de la flotte les attaquerait au nord.
Des combats se livrèrent sans résultat décisif, mais pour la
seconde fois les éléments vinrent au secours des Grecs. Les
flots et les vents poussèrent les vaisseaux perses contre la côte
des Aphètes. L'escadre qui tournait TEuboia fut brisée par la
tempête contre les écueils. En même temps il vint aux Grecs
un renfort de cinquante-trois vaisseaux athéniens. La lutte
recommença avec de grandes pertes de part et d'autre. Les
vaisseaux Kilikiens furent détruits, mais la moitié de ceux des
Grecs étaient désemparés. Bientôt, on apprit que le passage
des Thermopyles avait été forcé par les Barbares ; il n'y avait
plus d'intérêt à défendre le détroit : la flotte grecque se retira
jusqu'à Salamine. Pendant les derniers combats, un vaisseau
de Lemnos avait passé du côté des Grecs. Thémistocle, avant
de quitter l'Artémision, grava sur des rochers un appel aux
Ioniens, pour les détacher du parti des Barbares; mais celte
invitation eut peu de succès.
Combat des Thermopyles. — L'armée de terre en arri-
vant aux Thermopyles fut prise du même effroi qui avait saisi
l'armée navale à son arrivée dans l'Artémision. « Les Pélo-
ponnesiens étaient d'avis de retourner dans le Péloponnèse
pour garder le passage de l'Isthme. Mais Léonidas, voyant que
les Phokiens en étaient indignés, opina qu'il fallait rester, et
il fut résolu de dépêcher des courriers à toutes les villes al-
liées, parce qu'on était en trop petit nombre pour repousser
l'ennemi. On releva une muraille que les Phokiens avaient
bâtie dans la partie la plus étroite du défilé, pour se défendre
contre les Thessaliens, et qui était tombée en ruines. Léoni-
das, ayant appris qu'il y avait dans la montagne un sentier
pour tourner le défilé des Thermopyles, en confia la défense
aux Phokiens. Xerxès, ayant traversé la Thessalie, campa à
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MORT DE LÉONIDAS. 377
déclara qu'il n'était ni de son honneur ni de celui des Spar-
tiates d'abandonner le poste qu'ils étaient chargés de garder.
D'ailleurs la Pythie avait déclaré, au commencement de la
guerre, qu'il fallait que Sparte fût détruite, ou qu'il pérît un
roi de la race d'Héraclès. Voulant conserver le reste des trou-
pes à la Grèce, il leur ordonna de partir, à l'exception des
Thébains, dont la fidélité lui était suspecte, et qu'il retint
malgré eux. Les sept cents Thespiens, commandés par Démo-
phile, déclarèrent qu'ils voulaient partager le sort des Spar-
tiates.
Mort de Léonidas. — Xerxès se mit en marche le matin,
comme le lui avait recommandé Ephialtès. « Léonidas et les
Grecs, dit Hérodote, marchant comme à une mort certaine,
s'avancèrent beaucoup plus loin qu'ils n'avaient fait dans le
commencement, et jusqu'à l'endroit le plus large du défilé ;
car jusqu'alors le mur leur avait tenu lieu de défense. Les
jours précédents, ils n'avaient pas passé les lieux étroits,
mais ce jour-là le combat s'engagea sur un espace plus
étendu, et il y périt un grand nombre de Barbares. Leurs offi-
ciers, postés derrière les rangs, le fouet à la main, frappaient
les soldats et les animaient à marcher. 11 en tombait beaucoup
dans la mer, il en périssait un plus grand nombre sous les
pieds de leurs propres troupes, mais on n'y avait aucun égard.
Les Grecs, s'attendant à une mort certaine de la part de ceux
qui avaient fait le tour de la montagne, se battaient en gens
désespérés qui ne font aucun cas de la vie. Déjà la plupart
avaient leurs piques brisées et ne se servaient plus que de
leurs épées.
« Léonidas fut tué dans celte action après s'être conduit en
homme de cœur, et avec lui d'autres Spartiates illustres ; je me
suis informé de leurs noms, et même de ceux des trois cents.
Deux frères de Xerxès périrent les armes à la main. Le combat
fut très violent autour du corps de Léonidas ; les Perses et les
Lakédaimoniens se repoussèrent alternativement, mais enfin,
les Grecs ayant repoussé quatre fois l'ennemi, enlevèrent le
corps de leur roi, et ils conservèrent l'avantage jusqu'à l'arri-
vée des troupes conduites par Ephialtès. Alors la victoire chan-
gea de parti. Les Grecs regagnèrent l'endroit le plus étroit du
dbyGoogk
378 DÉFENSE DU TEMPLE Dl
puis, ayant passé la muraille, et leurs rangs toujours
ils se tinrent tous, excepté les Thébains, sur la colline
k rentrée du passage, et où se voit aujourd'hui le lion
e élevé en l'honneur de Léonidas. Ceux à qui il restait
des épées s'en servirent pour se défendre, les autres
[irent avec les mains et avec les dents. Mais les Barba-
attaquant, les uns de front, après avoir renversé la
B, les autres de toutes parts, les environnèrent et les
3nt sous un monceau de traits. »
lole cite quelques faits particuliers : le devin Mégis tias
anie refuse d'abandonner les Spartiates, quoiqu'il fût
arles entrailles des victimes du sort qui les attendait;
îs répond à un paysan qui disait que les flèches des
s obscurciraient le soleil : « Tant mieux, nous com-
s à l'ombre. » Eurytos, malade d'une ophtalmie, se fait
e sur le champ de bataille pour mourir les armes à la
andis qu'un autre, également malade, étant resté à
personne ne voulut lui parler ni lui donner du feu : il
ja faute en se faisant tuer à la bataille de Platée. Aux
3 moments de la lutte, pendant que les Spartiates et
>piens se rassemblaient sur la colline, les Thébains se
nt aux Perses. Xerxès passa au milieu des morts, et fit
în croix le corps de Léonidas après lui avoir fait couper
les Perses ne traitaient ainsi que les révoltés. Plus
5 Grecs enterrèrent leurs morts à la place où ils
ombés; une inscription rappela que quatre mille Pélo-
ens avaient combattu contre trois millions de Barba-
is on ne peut admettre l'exactitude de ces chiffres. Une
iscription se rapportÉÛI spécialement aux Spartiates :
it, va dire à Sparte que nous sommes morts en obéis-
es lois. »
Barbares repousses du temple de Delphes. —
lur était sauvé, mais l'indépendance de la Grèce sem-
trdue. Les Barbares ayant forcé la seconde ligne de
» tonte la région en dehors de l'Isthme tombait en leur
. Les Thessaliens, qui s'étaient soumis à Xerxès, saisi-
;casion de se venger de leurs ennemis les Phokiens;
demandèrent cinquante talents pour détourner l'inva-
dbyGoogk
INCENDIE DE PLATÉE ET DE THESPIES. 379
sion de la Phokis; « il ne tiendrait qu'à nous, répondirent les
Phokiens, de nous soumettre comme vous l*avez fait, mais
jamais nous ne trahirons la Grèce. » Les Barbares traversè-
rent la Doris sans y faire de dégâts, car les Doriens s'étaient
soumis, puis, guidés par les Thessaliens, ils parcoururent
toute la Phokis, coupant les arbres et mettant le feu à toutes
les villes le long du Kephisos. Le temple d'Apollon à Abai,
célèbre par son oracle et ses trésors, fut pillé et brûlé. Xerxès,
enti é en Boiotie, détacha jxn corps de troupes pour piller aussi
le temple de Delphes, car on lui avait souvent parlé des ri-
chesses qu'il contenait, et surtout des offrandes de Groïsos.
Les Delphiens demandèrent à l'oracle s'il fallait enfouir les
trésors sacrés ou les emporter ailleurs. Le Dieu répondit qu'il
protégerait lui-môme son temple; alors ils ne s'occupèrent
que de leur propre sûreté ; ils envoyèrent leurs femmes et
leurs enfants au delà du golfe de Gorinthe, en Achaïe, et se
réfugièrent sur les sommets du Parnasse ou dans la Locris. Il
ne resta dans la ville que l'interprète des prophéties avec
soixante hommes. Mais quand les' Barbares venus pour piller
le temple furent arrivés à l'enceinte d'Athènè Pronaia, la
foudre tomba sur eux et des quartiers de rochers détachés de
la montagne roulèrent avec un bruit horrible et en écrasèrent
un grand nombre. Quelques-uns seulement s'échappèrent et
s'enfuirent en Boiotie où ils racontèrent qu'outre ce prodige
ils avaient vu deux guerriers d'une taille merveilleuse qui les
poursuivaient et les massacraient. Les rochers tombés du Par-
nasse furent laissés à la place où ils s'étaient arrêtés, en témoi-
gnage de la vengeance des Dieux.
Incendie de Platée et de Thespies. Embarquement
des Athéniens. — La flotte grecque avait quitté la station
d'Artémision à la nouvelle du désastre des Thermopyles. A
Chalkis, les Plataiens débarquèrent pour aller mettre en sû-
reté leurs femmes et leurs enfants ; la flotte n'attendit pas
leur retour et continua sa route. On avait cru qu'une armée
serait envoyée du Péloponnèse en Boiotie pour protéger l'At-
tique, mais on apprit que les Péloponnesiens travaillaient à
fermer risthme par une muraille, sans s'inquiéter du reste de
la Grèce. La flotte s'arrêta à Salamine à la prière des Athé-
es byGoogk
EMBARQUEMENT DES AT
n voulaient faire sortir leurs familles de TAttique.
[ était maintenant en Boiotie; toutes les villes de
trée s'étaient soumises aux Perses, à rexception de
de Thespies, qui furent réduits en cendres. Ce qui
habitants à Thespies s'étaient réfugiés dans le Pélo-
Les Barbares approchaient d'Athènes, dont la ruine
ritable. Pendant que la flotte se tenait à l'ancre de-
imine, les Athéniens descendirent dans leur ville ; il
a que tout citoyen en âge de porter les armes s'ém-
it, et que chacun aurait à pourvoir à la sûreté de sa
it de ses enfants. Mais le peuple ne pouvait se résou-
itter les temples des Dieux et les tombeaux des ancô-
imistocle fit intervenir un miracle : la prêtresse an-
le le dragon sacré, gardien de la citadelle, avait disparu
is gâteaux de miel destinés à sa nourriture étaient
la Déesse donnait ainsi le signal du départ. La plu-
jyèrent leurs familles à Troîzen, quelques-uns à Ai-
Salamine. « Les Troizeniens, dit Plutarque, ordonné-
ces émigrés seraient nourris aux dépens du public;
issignèrent à chacun deux oboles par jour, permirent
ints de cueillir des fruits dans tous les jardins, et
: les maîtres chargés de les instruire. Les Athéniens
t pas alors de trésor public, mais l'Areiopage fit dis-
ux soldats dix drachmes par jour, et fut par cette dis-
\ le véritable auteur de l'armement des galères. Mais,
Clidème, on dut cet argent à un stratagème de Thé-
. Il raconte que, lorsque les Athéniens furent descen-
Mrée, l'égide de la statue d'Athènè se trouva perdue,
mistocle, fouillant partout, sous prétexte de la retrou-
louvrit beaucoup d'argent caché dans les bagages, et
argent, mis en commun, procura aux soldats les pro-
lécessaires. »
Lse de r Acropole. Incendie d^ Athènes. — Xerxès
Athènes, quatre mois après avoir quitté l'Asie. La
it déserte, mais une petite troupe désespérée s'était
lée dans l'Acropole, décidée à s'y défendre. C'étaient,
i trésoriers du temple, quelques malheureux, trop
i trop pauvres pour courir les chances de l'exil, ou qui
dbyGoogk
INCENDIE D'ATnÈNES. 381
aimaient mieux mourir avec la pairie que de vivre sans elle.
L'éloquence de Thémistocle ne les avait pas convaincus, ni la
disparition du serpent sacré, et ils avaient barricadé avec du
bois les portes et les avenues de la citadelle ; c'était là, sui-
vant eux, et non sur les vaisseaux, qu'était la muraille de bois,
Tasile imprenable indiqué par la Pythie.
« Les Perses, dit Hérodote, assirent leur camp sur la colline
qui est vis-à-vis de la citadelle et que les Athéniens appellent
Areiopage, et firent le siège de cette manière. Ils liraient con-
tre les barricades des flèches garnies d'étoupes auxquelles ils
avaient mis le feu. Les assiégés, quoique réduits à la dernière
extrémité et trahis par leurs barricades, continuèrent à se dé-
fendre, et ne voulurent pas accepter les conditions d'accom-
modement que leur offraient les Pisistratides. Ils repoussèrent
toujours l'ennemi, et lorsqu'il s'approcha des portes, entre
autres moyens de défense, ils jetèrent sur lui des pierres énor-
mes. De sorte queXerxès, ne pouvant les forcer, fut longtemps
ennbarrassé sur ce qu'il devait faire. Enfin, au milieu de ces
difficultés, les Barbares s'aperçurent d'un passage, car il fal-
lait, comme l'avait prédit l'oracle, que les Perses se rendissent
maîtres de tout ce que les Athéniens possédaient sur le con-
tinent. Sur le devant de l'Acropole, derrière les portes et le
chemin par où on y monte, est un lieu escarpé qui n'était pas
gardé ; personne ne se serait jamais attendu qu'on pût y gra-
vir. Quelques Barbares le firent cependant, près de la chapelle
d'Agraulos, fille de Kekrops. Lorsque les Athéniens les virent
dans la citadelle, les uns se tuèrent en se précipitant du haut
des murs, les autres se réfugièrent dans le temple. Ceux des
Perses qui étaient montés allèrent d'abord aux portes, et les
ayant ouvertes ils tuèrent les suppliants de la Déesse. Quand
ils les eurent massacrés, ils pillèrent le temple et mirent le
feu à la citadelle. Lorsque Xerxès fut entièrement maître d'A*
ihènes, il dépêcha à Suse un courrier à cheval pour appren-
dre à Artaban cet heureux succès. »
La flotte grecque à Salamine. — En même temps uue
l'armée de Xerxès prenait possession de l'Attique, sa flotte arri-
vait dans la baie de Phalère. On n*en connaît pas exactement
la force, mais, selon l'estimation la plus modérée, il y avait
dbyGoogk
L\ FLOTTE GRECQUE A SALAMINE.
lille vaisseaux. Les pertes subies à TArtémision avaient
tensées par des renforts venus de TEuboia et des
La flotte grecque rassemblée à Salamine avait aussi
ques renforts ; quatre vaisseaux de Naxos équipés pour
! des Barbares allèrent trouver les Grecs sur Tavis de
e qui commandait une trirème et qui jouissait d'une
>nsidération à Naxos. Il vint aussi quelques vaisseaux
ite rames des lies de Sériplios, de Siphnos et de Mélos
ient pas donné la terre et Teau aux Barbares. Les co-
rinthiennes de Leucas et d'Ambrakia envoyèrent, Tune
seaux, Tautre sept. A l'ouest de l'Adriatique, Crolon
oya aux Grecs un vaisseau commandé par Phayllos,
été trois fois vainqueur aux jeux Pythiques, et qui
^bablement équipé ce vaisseau à ses frais. La flotte
encore très inférieure en nombre à celle des Perses,
lit à trois cent quatre-vingts vaisseaux, dont deux
ient été fournis par les Athéniens.
1 de guerre sur la flotte grecque. — Eurybiade as-
n conseil de guerre pour déterminer le lieu où il fal-
bataille. La plupart des chefs furent d'avis de faire
\ risthme pour se mettre au besoin en communica-
l'armée de terre. Si on était vaincu à Salamine, on
liégé dans cette île où on n'avait pas de secours à es-
idis que si on combattait vers l'Isthme, chacun pour-
insporter dans son pays. Pendant qu'on délibérait, on
louvelle de la prise et de l'incendie d'Athènes. La
ition fut générale ; plusieurs des capitaines sortirent
nment du conseil, se jetèrent sur leurs vaisseaux, firent
ïs voiles dans le dessein de partir, et ceux qui étaient
conseil décrétèrent qu'il fallait combattre devant
L'approche de la nuit les obligea à remettre le départ
lain matin.
nant à son bord, Thémistocle rencontra un Athénien
nèsiphile, qui lui demanda quel avait été le résultat
ibération. Thémistocle lui fait connaître la décision
l. a Si on lève l'ancre, répond Mnésiphile, si on quitte
, il ne se donnera pas sur mer de combat pour la
ersonne ne retiendra les alliés, Eurybiade lui-môme
dbyGoogk
CONSEIL DE GUERRE SUR U FLOTTE. 383
î le pourra pas; ils s'en retourneront chacun dans leurs \il-
8, la flotte se séparera, et la Grèce périra faute d'un bon avis.
3tourne, tâche de faire casser le décret, s'il en est encore
mps, et engage par tous les moyens possibles Eurybiade à
anger de sentiment et à rester ici. » Cet avis judicieux d'un
connu allait changer la destinée de la Grèce. Thémistocle,
ns rien répondre, court au vaisseau d'Eurybîade, lui expose
pinion de Mnèsiphile comme la sienne propre et obtient à
rce d'insistance que le conseil soit convoqué de nouveau
indant la nuit. Devant les généraux assemblés, Thémistocle
garda bien de parler de la dispersion de la flotte si on quit-
t Salamine, c'eût été suspecter leur fidélité à la cause com-
une; il fit valoir d'autres arguments : « A l'Isthme, nous
mbattrons dans une mer ouverte, et nos vaisseaux sont plus
irds et moins nombreux que ceux de l'ennemi. Môme vain-
eurs, nous aurons perdu Mégare, Aigine et Salamine. L'ar-
ie des Barbares suivra leur flotte, et nous les aurons attirés
us-mômes dans le Péloponnèse. Ici, dans un détroit, les en-
mis perdent l'avantage du nombre, et si nous sommes vain-
surs, comme un oracle nous le promet, ils s'enfuiront en
lordre, sans dépasser l'Attique. » La séance fut très ora-
ase; la plus violente opposition venait du Corinthien Adi-
.nte, qui voulait avant tout protéger Corînthe : on ne devait
j s'occuper d'Athènes, puisqu'elle était détruite, et on n'avait
s à tenir compte de l'opinion d'un homme qui n'avait plus
patrie. « Notre patrie, dit Thémistocle, elle est dans nos
IX cents vaisseaux. Avec cela, nous fondrons où nous vou-
as une ville qui vaudra bien Corinthe. Si vous nous aban-
mez, nous irons avec nos femmes et nos enfants à Siris, en
ie, et vous verrez ce que deviendra votre flotte sans le con-
];ent athénien. » Devant cette menace, Eurybiade décida
)n resterait à Salamine. Plutarque raconte qu'au plus fort
la discussion, il avait levé sa canne sur Thémistocle, et
celui-ci, sans s'émouvoir, lui avait dit : « Frappe, mais
ate. »
n délibérait aussi sur la flotte des Perses, où Xerxès était
jendu avec Mardonios pour prendre l'avis des principaux
Haines. Les rois de Sidon et de Tyr, confiants dans la supé-
dbyGoogk
dbyGoogk
BATAILLE DE SALAMINE. 385
tenlionné pour le roi, et qui préfère le succès de vos armes à
celui des Grecs, m'a dépêché vers vous à leur insu, avec or-
dre de vous dire que les Grecs effrayés délibèrent s'ils ne pren-
dront pas la fuite. L'occasion d'un éclatant succès vous est
offerte, ne la laissez pas échapper par négligence. 11 ne sont
pas d'acord entre eux, et au lieu de résister, vous verrez les
deux partis aux prises l'un contre l'autre et se détruire réci-
proquement. > Cet avis donné, Sikinnos se retira. Aussitôt les
Perses firent occuper à l'est et à l'ouest les deux issues du
détroit qui sépare Salamine de l'Attique. En môme temps ils
firent passer un corps de troupes dans la petite lie de Psytta-
lie située à l'entrée du côté oriental, où devait se livrer la ba-
taille, pour recueillir leurs blessés et tuer ceux des Grecs qui
viendraient s'y réfugier. Ces dispositions furent prises la nuit,
pendant que les chefs de la flotte grecque délibéraient encore.
Thémistocle était rentré au conseil ; un homme le fit appe-
ler. C'était Aristide, son ancien rival, qui avait été banni par
une sentence d'ostrakisme, quoiqu'il fût, dit Hérodote, un
homme de bien et très juste. « Thémistocle, lui dit-il, re-
mettons nos querelles à un autre temps et disputons à qui
servira le mieux la patrie. 11 n'est plus temps de discuter si
ou quittera ou non Salamine, nous sommes cernés, j'en suis
témoin oculaire. » — « Je le sais, dit Thémistocle, et les
Perses n'ont agi qu'à mon instigation. » Aristide introduit
dans le conseil dit aux capitaines qu'il arrive d'Aigine, qu'il a
eu grand'peine à traverser la flotte des Perses, et leur con-
seille de se mettre en défense. On ne voulait pas le croire,
mais la nouvelle fut confirmée par un vaisseau de Téoos
qui avait quitté la flotte du roi pour se joindre à celle des
Grecs.
Bataille de Salamine. — La bataille commença aux pre-
mières lueurs du matin. Un trône avait été dressé pour Xerxès
sur une éminence aux pieds du mont Aigaleos. La veille, un vais-
seau grec avait été chercher les statues des héros Aiakides,
protecteurs d'Aigine et de Salamine ; ce fut ce vaisseau qui, à
son retour, engagea le combat, au dire des Aiginètes ; selon
les Athéniens, ce fut un de leurs vaisseaux commandé par
Ameinias, frère de Kynègeiros et du poète Aischy le. « Les Phé-
L. M. — HiST. DU Grecs. 23
Digitized by VjOOQIC
BATAILLE DE SALAMINE.
it rangés vis-à-vis des Athéniens, à Taile qui re-
; et Toccident, les Ioniens en face des Lakédai-
ile opposée, vers Torient et le Pirée. La flotte des
grande partie mise en pièces et détruite par les
les Aiginètes. Les Barbares, combattant avec
ns règle, sans jugement, contre des troupes qui
vec ordre et en gardant leurs rangs, se compor-
ant beaucoup mieux qu'ils ne Tavaient fait de-
et se surpassèrent eux-mêmes, chacun faisant
s par la crainte de Xerxès, dont il croyait être
ibignès, fils de Dareios et frère de Xerxès, gê-
née navale, périt à cette bataille ainsi qu'un
) d'hommes de distinction, tant Perses que Mè-
lliés. La perte des Grecs ne fut pas considérable,
valent nager, ceux qui ne périssaient pas de la
smis quand leur vaisseau était détruit, gagnaient
nage. Mais la plupart des Barbares se noyaient
faute de savoir nager. Les vaisseaux qui étaient
ng ayant été mis en fuite, les autres furent alors
la plupart. Car ceux qui étaient derrière le pre-
forçant de gagner le devant afin de donner au
3 de leur valeur, se brisaient contre les vaisseaux
qui fuyaient... Dans le trouble et la confusion
ennemis, les Athéniens détruisaient les vais-
Paient. Les Barbares mis en fuite tâchaient de
l de Phalère, sous la protection de Farmée de
Aiginètes placés dans le détroit ne maltraitaient
[ qui cherchaient à s'échapper. En même temps,
mblant une troupe d'hoplites Athéniens sur le
mine, les fit passer dans la petite ile de Psytta-
d'élite que les Perses y avaient postés avant la
cernés et massacrés jusqu'au dernier. »
ait justifié les prévisions de Thémistocle: dans
i mer qu'il avait choisi pour livrer bataille, la
aisseaux n'était qu'un embarras pour l'ennemi,
icîens, dont les galères avaient souffert du choc
oniennes, allèrent se plaindre a Xerxès de ce
it la trahison des Ioniens. Mais à ce moment
dbyGoogk
BATAILLE DE SALAM
môme,Xerxè8 fut témoin d'un exploit a<
de Samolhrace, qui venait de coulei
quand il fut coulé lui-môme par un
Samothraces, excellents hommes de tri
de javelots les soldats du vaisseau qui
s'étant jetés dessus, s'en rendirent r
Ioniens : Xerxès traita les Phéniciens d(
fît couper la tête. Hérodote donne un a
d'unité de la llolte perse, composée de
autre lien que l'obéissance au môme
le désordre était général, Artémisia, re
poursuivie par Ameinias d'Athènes, i
jour entre les vaisseaux perses, coula <
roi de Calyndos. L'Athénien, croyant
contre les Perses, abandonna sa poursi
Les divisions qui s'étaient produites
la bataille ne justifièrent pas les espén
l'action fut engagée. Il est vrai que pli
Athènes que l'amiral des Corinthiens
vaisseaux le long des côtes de Salami
et n'était revenu qu'après la victoire
soutenaient qu'ils s'étaient signalés dès
le reste des Grecs leur rendait ce tém(
et les Athéniens, qui étaient les meillei
avaient un intérêt égal dans la lutte, et
devint une émulation salutaire à la eau
que Polycritès d'Aigine attaquait vigoui
sidonien, il aperçut le vaisseau amiral
ironiquement à Thémistocle si les Athé
core les Aiginètes de favoriser le parti c
vaisseau sidonien, et put ainsi rendre
compatriotes qui avait été fait prisonnie
Fuite de Xerxôs. — Hérodote ne m
respectives des deux flottes. Diodore doi
vires pour les Perses et de 40 pour les i
duré toute la journée. Xerxès était dé<
il ne songeait plus qu'à la fuite, et crai
la rendissent impossible en allant se
dbyGoogk
FUITE DE XERXÈS.
S, qui avait conseillé la guerre, s'aperçut de ces
ns, et comme il en redoutait les effets pour lui-môme,
a le roi à ne pas s'occuper de la perte de quelques
; si les Egyptiens, les Phéniciens, les Kypriotes et
BUS avaient mal fait leur devoir, la faute n'en devait
mputée aux Perses, et l'armée de terre était toujours
\, Le but principal de l^expédition ayant été atteint
se d'Athènes, le roi pouvait retourner en Asie avec la
ide partie de l'armée. Mardonios s'offrait à choisir
ommes pour achever la conquête de la Grèce. Cet
ayé par Artémisia, répondait au désir de Xerxès. La
tta Phalère pendant la nuit et fit voile vers l'Helles-
r garder les ponts par lesquels le roi devait passer.
jour* parut, les Grecs, s'apercevant du départ de la
se, voulurent la poursuivre. Arrivés à Andros sans
ncontrée, ils tinrent conseil. Thémistocle proposa
oit à l'Hellcspont pour couper la retraite à Xerxès ;
î représenta qu'il y aurait du danger à retenir et à
LU désespoir un ennemi redoutable, et qu'il valait
i laisser le champ libre. Alors Thémistocle adopta
e fit partager aux Athéniens et s'en attribua le mérite
i roi par un message secret qu'il lui fit porter. Il est
B douter que Thémistocle ne jouât dans cette occasion
i jeu. La cause des Perses était loin d'être déses-
îme en cas d'une victoire des Grecs, il pouvait être
les circonstances de chercher une retraite en Asie,
des événements fit voir que ce calcul était conforme
érêts, qu'il ne négligeait pas, même en servant ceux
y s. Sous prétexte de punir les insulaires qui avaient
•urs aux barbares, il leur extorqua de grandes sommes
h rinsu des autres généraux.
le d'Himére. — Le jour de la bataille de Salamine,
Qdote, ou de la bataille desThermopyles selon Diodore,
de Sicile remportèrent une grande victoire sur
carthaginoise commandée par Amilcar. L'invasion
aginois, quoique probablement concertée avec celle
, avait emprunté un prétexte aux affaires intérieures
le. Térillos, tyran d'Himére, chassé par Théron, tyran
dbyGoogk
BATAILLE D'HIMÊRE. 389
d'Agrigente, avait demandé le secours de Garthage, Pour
appuyer cette demande, Anaxilaos, tyran deRhègionet gendre
de Térillos, envoya ses enfants comme otages au suffète Amilcar.
Les Carthaginois avaient un parti dans Tlle ; Amilcar y con-
duisit une armée de 300,000 hommes tirés de li
ribérie et des îles de la mer Tyrrhénienne. C'est
exemple historique de ces armées de mercenaires (\
un si grand rôle dans l'histoire de Carthage. I
Panormos , Amilcar assiégea Himère. Théron d<
secours à son gendre Gélon, tyran de Syracuse, qi
aussitôt avec 50,000 fantassins et 5000 cavaliers. Un
lui procura une éclatante victoire: il avait intercept
des Sélinontins promettant à Amilcar le secours
de cavalerie ; il envoya des cavaliers de son armé
d'Amilcar où on les prit pour des alliés qu'on a
ils y répandirent aussitôt le désordre. Gélon arriva
toutes ses forces, et la moitié de l'armée cartha
détruite. Ceux qui échappèrent au carnage se réfugi
une position où le manque d'eau les obligea de :
l'ennemi. Presque toute la flotte abritée sur le ri
fermée dans les fortifications fut incendiée, et poui
le désastre, le reste des vaisseaux périt dans une
retournant à Carthage. Le corps d'Amilcar ne fut pe
Les Carthaginois racontèrent qu'il offrait un holocau
la bataille et qu'en apercevant la déroute de ses trou
jeté dans les flammes. Les vainqueurs employèrei
nombrables prisonniers à construire des temples e
de grands travaux d'utilité publique. S'il faut en c
phraste, la paix fut accordée par Gélon aux Car
condition qu'il renonceraient à la coutume des
humains.
L'armée perse laissée en Grèce. — La bataill
avait délivré la Sicile, la bataille de Sala mine ne d
la Grèce, puisque l'armée des Barbares était intacte
avait quitté l'Attique ; cette retraite faisait croire qu
était finie et qu'il n'y avait plus qu'à décerner des
Quand les prémices du butin eurent été envoyés
on attribua le premier prix aux Aiginètes, le seconc
dbyGoogk
390 LA PAIX OFFERTE AUX ATHÉNIENS.
niens. Parmi les généraux, chacun s'attribua le premier prix
et donna le second à Thémislocle. 11 alla à Sparte où il fut
traité avec les plus grands honneurs. Les Spartiates lui donnè-
rent une couronne d'olivier pour son habileté, comme ils en
donnèrent une à Eurybiade pour son courage. Il reçut le plus
beau char qu'il y eût à Sparte, et trois cents cavaliers le re-
conduisirent jusqu'à Tégéa, distinction qui n'avait jamais été
accordée à personne. Xerxès arriva en Thessalie quelques
jours après la bataille de Salamine, et y laissa Mardonios avec
300,000 hommes choisis parmi les Perses, les Mèdes, les Sakas,
les Bactriens et les Indiens. Un corps de 60,000 hommes, sous
le commandemant d'Ârtabaze, escorta Xerxès jusqu'à THelles-
pont. L'armée eut beaucoup à souffrir dans sa retraite, les
vivres manquaient, il fallait se nourrir d'herbes, de feuilles
et d'écorces d'arbres. La peste et la dyssenterie firent de grands
ravages parmi les troupes. Xerxès confia les malades aux villes
placées sur sa route, puis il passa l'Hellespont sur des vais-
seaux, car les ponts avaient été brisés par la tempête , et
arriva enfin à Sardes avec les débris de son armée.
La paix offerte aux Athéniens. — Mardonios avait pris
ses quartiers d'hiver en Thessalie. La flotte perse stationnait
sur les côtes de l'Asie Mineure, car on craignait une défection
des Ioniens. Ils avaient envoyé des ambassadeurs à Aigine,
pour engager la flotte grecque, commandée par le roi de
Sparte Léotychidès et par l'Athénien Xanthippos, à faire voile
vers l'Ionie. Les alliés n'y consentirent qu'avec répugnance et
n'osèrent pas s'avancer plus loin que Dèlos. Les Athéniens
étaient rentrés dans leurs maisons incendiées. Mardonios es-
saya de les détacher de l'alliance des Grecs. Le roi de Macé-
doine Alexandre, dont la sœur était mariée à un Perse, et qui
était allié aux Athéniens par les liens de l'hospitalité, se char-
gea de leur demander, non pas une soumission, mais une
alliance avec le roi, qui s'engageait, non seulement à leur
laisser leur territoire, mais à l'agrandir, et offrait de rebâtir
les temples qu'il avait brûlés. Alexandre ajoutait qu'il n'avait
apporté ces propositions que parce qu'il était persuadé que les
Athéniens ne pouvaient soutenir la lutte contre la Perse. Les
Spartiates, inquiets de cette négociation, envoyèrent une
dbyGoogk
PRÉPARATIFS DE DÉFENSE,
ambassade aux Athéniens : « Ne vous fiez pas ai
des Barbares et n'écoutez pas un tyran qui sert ui
Vous, protecteurs de la liberté des peuples, vou
accepter d'asservir la Grèce. Nous savons ce q
souffert, mais les Lakédaimoniens et les alliés
nourrir vos femmes et vos enfants pendant tout
la guerre. » Les Athéniens répondirent : « Tant
suivra sa carrière, nous ne ferons pas alliance
mais nous lui résisterons, confiants dans la pi
Dieux et des Héros dont il a brûlé les temples et 1
Ils engagèrent Alexandre à ne plus leur apporte
sitions qui pourraient les irriter contre lui, quoi(
hôte et leur ami. Quant aux Spartiates, ils conna
mal les Athéniens s'ils les croyaient capables de
prix quelconque la cause de la Grèce. « Nous re
alliés de l'offre qu'ils font de nourrir nos familles
ne voulons pas leur être à charge ; nous leur demc
ment de nnetlre leur armée en campagne pour pré
que d'une seconde invasion.
Préparatifs de défense. — Dès que Mardoni
que les Athéniens avaient rejeté ses offres, il se m
Les Athéniens quittèrent encore une fois la vil
rèrent sur leurs vaisseaux et firent passer leurs fai
mine. Mardonios prit possession de la ville c
renouveler par un Grec Hellesponlien ses offres
d'alliance. Un seul sénateur proposa de les su
lapidé par le peuple avec sa femme et ses enfar
bassade, à laquelle se joignirent des députés <
de Mégare, fut envoyée aux Spartiates pour s(
leur abandon et leur rappeler leurs promesses,
alors à Sparte la fête des Hyakinthies; les Epho
leur réponse au lendemain, puis au jour suivant
suite pendant dix jours. En même temps les Pél
travaillaient avec ardeur à fermer l'isthme d'une
était presque achevée. Un Tégéate nommé Chiléos,
à Sparte d'un plus grand crédit que tous les autres
remarquer aux Ephores que si les Athéniens faiss
avec les Barbares, la muraille de l'Isthme n'emj
dbyGoogk
LES ARMÉES EN PRÉSENCE.
de Paire entrer des troupes dans le Péloponnèse. Il
ajouter que la complicité secrète des Argeiens aug-
danger d'une descente de Tennemi par mer. La
lur où on devait rendre réponse aux ambassadeurs,
3 firent partir pendant la nuit cinq mille Spartiates
es chacun de sept Hilotes, sous la conduite de Pau-
eur et cousin du jeune roi PleistarchoSy fils de
Quand les députés Athéniens se présentèrent, on
a par serment que les troupes de Sparte étaient
iche. Très étonnés, ils partirent en diligence. Cinq
les Périœkes, avec un môme nombre d'Hilotes, les
èrent. Ils furent rejoints à l'Isthme par les contin-
illes alliées du Péloponnèse et par 3000 Mégariens
i réunirent, dans la plaine d'Eleusis, 8000 Athéniens
duite d'Aristide et 000 Plataiens. Le total des troupes
élevait à i 10,000 hommes.
ôes en présence. — Averti par les Argeiens du
armée grecque, Mardonios quitta l'Attique après
t tout ce qui subsistait encore et retourna en Boiotie
litre dans un allié et pays commode pour sa cava-
quelle il comptait d'autant plus que les Grecs n'en
. Il établit son camp sur les bords de l'Asopos; les
stèrent vis-à-vis de lui, au pied du mont Kithairon.
ne descendaient pas dans la plaine, Mardonios
tre eux toute sa cavalerie commandée parMasistios.
ins se trouvaient les plus exposés. Tout en résistant
;e, ils envoyèrent demander à être relevés de ce
cents Athéniens se présentèrent spontanément et
e combat. La mort de Masistiosjeta la consternation
erses ; une lutte acharnée s'engagea autour de son
nitpar rester aux mains des Grecs. Ils le mirent sur
ils firent passer de rang en rang, pendant que les
issaient des cris lugubres dont retentit toute la
losition que les Grecs occupaient, il leur était dif-
)rocurer de l'eau; l'ennemi écartait à force de traits
approchaient de l'Asopos. Ils résolurent de s'a-
\ la fontaine Gargaphia, sur le territoire de Platée.
dbyGoogk
LES ARMÉES EN PRÉSENCE. 393
Ils allèrent s'y ranger par nations, Pausanias occupant l'aile
droite avec les Spartiates. Les Tégéatos et les Athéniens se
disputaient l'honneur d'occuper l'aile gauche; on rappelait de
part et d'autre les exploits des aïeux : Tégéa ceux du héros
Echémos qui avait vaincu Hyllos fils d'Héraclès, Athènes la
victoire de Théseus sur les Amazones. « Laissons là ces ques-
tions de préséance, dit Aristide; que les Spartiates décident, et
en quelque lieu que nous soyons placés, nous en ferons un
poste d'honneur. » Les Spartiates ^e prononcèrent par accla-
mation en faveur des Athéniens. Mardonios, s'apercevant du
mouvement des Grecs, fit avancer ses troupes le long de
l'Asopos. Il se plaça avec les Perses et les Mëdes à l'aile gauche,
en face des Lakédaimoniens, et opposa aux Athéniens ses
auxiliaires Grecs. Pendant huit jours les armées restèrent en
présence ; de part et d'autre les devins menaçaient d'une défaite
le parti qui engagerait l'action. Les Grecs étaient harcelés par
la cavalerie ennemie, mais ils recevaient tous les jours des
renforts et des vivres, tandis que les provisions des Perses s'é-
puisaient. Sur l'avis du Thébain Timagenidas, un détachement
de cavaliers perses garda pendant la nuit les passages du
Kithairon et surprit un convoi de 500 bêtes de charge venant du
Péloponnèse. Artabaze, le premier des Perses après Mardonios,
était d'avis de se rapprocher de Thèbes où on avait fait porter
des vivres et des fourrages, et de semer la division entre les
Grecs en corrompant les principaux chefs. Plutarque rapporte
qu'en ce moment même il y avait parmi les hoplites Athéniens
des jeunes gens de grandes familles qui conspiraient pour
établir, avec l'appui de l'étranger, une oligarchie comme celle
de Thèbes. Aristide découvrit le complot, mais il étouffa l'affaire,
craignant un éclat en présence de l'ennemi. Les Thébains,
zélés partisans des Perses, appuyaientl'avis d'Artabaze et sou-
tenaient qu'en ne ménageant pas l'argent on pourrait terminer
la guerre sans combat. Mais Mardonios, confiant dans la supé-
riorité de ses troupes, était impatient d'en finir; au-dessus des
augures, il y avait, disait-il, la vieille coutume des Perses, qui
ordonnait de combattre l'ennemi. Il décida que la bataille serait
livrée le lendemain.
Pendant la nuit^ Alexandre de Macédoine vint avertir les
dbyGoogk
dbyGoogk
BATAILLE DE PLATÉE. 395
Ils ne le cédaient aux Grecs ni en force, ni en courage, mais
ils étaient armés à la légère, et n'avaient ni l'habileté ni la
tactique de leur ennemis. Ils se jetaient en avant, tantôt iso-
lément, tantôt par troupes de dix, plus ou moins, toujours
sans ordre, et tombaient sous les coups des Spartiates. Mar-
donios, monté sur un cheval blanc, combattait entouré de
mille hommes choisis parmi les Perses les plus braves. Tant
qu'il vécut, ils soutinrent les efforts des Lakédaimoniens, mais
quand il tomba et que ce corps d'élite fut détruit, le reste des
Barbares tourna le dos. » Ils repassèrent l'Asopos, poursuivis
par les Spartiates et les Tégéates, et s'enfermèrent dans leur
camp retranché.
Artabaze, qui dès le commencement avait été en rivalité avec
Mardonios, ne prit aucune part à la bataille qui s'était engagée
contre son avis. Dès qu'il s'aperçut de la déroute des Perses, il
s'enfuit vers la Phokis avec les 40,000 hommes qu'il comman-
dait, traversa rapidement la Thessalie et la Macédoine, répan-
dant partout le bruit d'une victoire de Mardonios, et après avoir
perdu une partie de ses troupes en Thrace, ramena le reste en
Asie par l'Hellespont. Parmi les Grecs auxiliaires du roi, les
Thébains seuls combattirent avec acharnement contre les
Athéniens, qui leur tuèrent trois cents hommes ; le reste s'en-
fuit à Thébes ; au lieu de les poursuivre, les Athéniens se hâ-
tèrent de joindre les Lakédaimoniens et les Tégéates qui ne
parvenaient pas à forcer le camp des Perses. L'attaque fut
rude et longue ; enfin les Athéniens a]fant abattu une partie du
mur de bois, les Barbares effrayés se laissèrent tuer sans résis-
tance, et, selon Hérodote, 3,000 seulement échappèrent au
carnage. Les Lakédaimoniens de Sparte ne perdirent que 91
dès leurs, les Tégéates 16 et les Athéniens 52. Le combat avait
duré si peu de temps que les autres Grecs, campés près de
Platée, n'arrivèrent que pour aider à la poursuite des vaincus.
Les Corinthiens suivirent le chemin des collines ; les Méga-
riens et les Phliasiens, marchant sans ordre à travers la plaine,
furent rencontrés par la cavalerie thébaine qui leur tua six
cents hommes et chassa le reste sur les hauteurs du Kithairon.
LesMântinéens et les Eléiens, arrivés après la bataille, voulaient
se mettre à la poursuite des Mèdes commandés par Artabaze ;
dbyGoogk
dbyGoogk
BATAILLE DE MYGALE. 397
rinthe après avoir congédié les troupes alliées^ et les fit mettre
à mort sans procès.
Bataille de Mycale. — Le même jour où se livrait la
bataille de Platée, la flotte grecque commandée par Léoty-
chidas et Xanthippos remportait une victoire sur la flotte perse
à Mycale en lonie. On a vu plus haut qu'après la bataille de
Salamine les Ioniens avaient envoyé une députation aux alliés
pour leur demander de délivrer la Grèce d'Asie du joug des
Perses ; cette tentative n'avait pas réussi, et la flotte grecque
s'était arrêtée à Dèlos. Une seconde ambassade eut plus de
succès. Elle était envoyée par les Samiens à Tinsu du tyran
Théomeslor qui leur avait été imposé par les Perses. L'Ionie,
disaient les députés, n'attendait que l'arrivée de la flotte grec-
que pour se révolter, et les Barbares deviendraient pour les
Grecs une proie facile. L'orateur des Samiens s'appelait Hègé-
sistratos; ce nom, qui signifie guide de l'armée, parut d'un bon
présage à Léotychidas, qui mit aussitôt à la voile pour Samos.
Mais les Perses, découragés par leur défaite à Salamine, étaient
décidés à ne plus livrer bataille sur mer. Ils permirent aux
Phéniciens de se retirer et naviguèrent vers le continent pour
se mettre sous la protection d'une armée campée à Mycale, où
eUe avait été envoyée par Xerxès pour garder l'Ionie. Cette
armée, commandée par Tigrane, se montait à 60,000 hommes.
Les vaisseaux furent tirés sur le rivage et entourés d'un rem-
part en pierre et en bois pour soutenir un siège. Les Grecs les
avaient suivis, et, voyant que l'ennemi voulait livrer bataille sur
terre , ils débarquèrent à leur tour, après avoir engagé les
Ioniens par un héraut à se souvenir que c'était pour leur li-
berté qu'on allait combattre. Ce stratagème avait été inuti-
lement employé en Ëuboia par Thémistocle, mais cette fois
les Perses s'en inquiétèrent davantage : ils désarmèrent les
Samiens et éloignèrent les Milésiens en les chargeant de garder
les chemins qui conduisaient au sommet du mont Mycale. Puis
ils mirent leurs boucliers les uns sur les autres pour s'en faire
un rempart.
Quand les Grecs eurent débarqué, ils trouvèrent un caducée
sur le rivage, et le bruit d'une victoire remportée sur Mardonios
en Boiotie se répandit aussitôt dans toute l'armée: on ne
L. M. — llisr. uEî GuECS. 23
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398 PRISE DE SESTOS.
douta pas que ce ne fût un message envoyé par les Dieux
pour rassurer les Grecs inquiets du sort de la patrie, et
ils marchèrent au combat avec d'autant plus d'ardeur. Les
Athéniens, les Corinthiens, les Sikyonîens et les Troizénîens,
formant environ la moitié de l'armée, prirent le long du rivage
et attaquèrent aussitôt les Perses, pendant que les Lakédaimo-
niens et le reste des troupes prenaient par les ravins et les
montagnes pour tourner l'ennemi. Tant que le rempart de
boucliers subsista, les Perses se défendirent et ne montrèrent
pas moins de courage que les Grecs ; quand ce rempart fut
renversé, ils s'enfuirent dans le retranchement où étaient les
vaisseaux. Les Grecs les poursuivirent et entrèrent en foule
avec eux. La lutte durait encore quand les Lakédaimoniens
arrivèrent. Alors la déroute des Barbares devint complète* Ti-
grane et un autre général perse étaient morts les armes à la
main. Les Samiens, quoique désarmés, secondèrent les vain-
queurs de toutes leurs forces, et le reste des Ioniens les imita.
Les Milésiens qui gardaient les sentiers de la montagne condui-
saient les fuyards par des chemins qui les ramenaient à l'en*
nemi. Ce fut ainsi que l'Ionie se révolta pour la seconde fois
contre les Perses. Les Grecs ayant tué la plupart des ennemis,
ou dans le combat ou dans la fuite, portèrent tout le' butin sur
le rivage et brûlèrent les vaisseaux et les retranchements des
Barbares.
Prise dé Sestos. — Après la victoire de Mycale, on délibéra
sur le sort des Ioniens, qu'on ne pouvait abandonner à la ven-
geance du roi de Perse. Les Péloponnésiens proposaient de
chasser de la Grèce d'Europe les peuples qui avaient pris le
parti des barbares et de donner leur territoire aux Ioniens ; mais
ce projet fut abandonné, les Athéniens soutenant que personne
n'avait le droit de disposer de leurs colonies. En attendant qu'on
pût achever la délivrance de l'Ionie, on reçut dans l'alliance des
Grecs les lies de Samos, de Chîos et de Lesbos. Puis on fit voile
vers l'Hellespont, pour rompre les ponts de Xerxès, qu'on
croyait encore entiers. Comme on les trouva rompus, Léotychi-
das et les Péloponnésiens retournèrent en Grèce, tandis que
Xanlhîppos et les Athéniens résolurent de reprendre la Cherson-
nèse de Thrace qui leur avait appartenu avant la guerre. Le
dbyGoogk
L'EMPIRE DE LA MER. 399
Perse Arlayctès, qui gouvernait cette province, était détesté pour
sa dureté et son impiété; on lui reprochait surtout d'avoir pillé
et profané une chapelle de Protésilaos, héros de la guerre de
Troie. Les Athéniens Fassiégèrent dans Sestos et restèrent de-
vant la place pendant tout Tautomne. La famine réduisit les
assiégés à se nourrir des courroies de cuir qui soutenaient leurs
lits. Enûn, la garnison perse parvint à s'échapper la nuit, et les
Chersonnésiens ouvrirent leurs portes aux Athéniens, dont une
partie prit possession de la ville pendant que le reste poursuivit
les Perses et les atteignit près d'Aigos-Potamos. Artayctès, fait
prisonnier, offrait, pour se racheter, cent talents à la chapelle
qu'il avait pillée, et deux cents aux Athéniens ; mais lès habi-
tants d'Eléonte demandèrent sa mort pour venger Protésilaos,
et il fut mis en croix avec son fils. Xanlhippos et les Athéniens
se retirèrent, emportant comme trophées les câbles des ponts
de Xerxès. La guerre médique semblait terminée ou bien près
de l'être : la Grèce d'Europe était délivrée de l'invasion, et on
pouvait prévoir l'affranchissement prochain de la Grèce d'A-
sie. Un tel succès n'aurait pas été possible sans les efforts com-
binés des Athéniens et des Spartiates. Il dépendait maintenant
de ces deux peuples d'assurer par leur union l'indépendance du
corps hellénique, ou de la compromettre par leur rivalité.
CHAPITRE XII
L'EMPIRE DE LA MER.
Droit des Athéniens à l'hégémonie. — Reconstruction des murs d'Athè-
nes. — Politique de Thémistocle. Le Pirée et la flotte. — Fédération
de Dèlos ; taxe fixée par Aristide. — Une réforme démocratique à
Athènes. — Les sculptures du temple d'Aigine. — Le Thèséion. — -
La Tragédie. — Exil de Thémistocle. Trahison de Pausanias. —
Fuite de Thémistocle ; sa mort chez les Perses. — La ligue de Dèlos
se transforme eu empire athénien. — Double victoire de l'Eurymè-
don. Embellissements d'Athènes. Libéralité de Kimon. — Siège de
Thasos. Tremblement de terre à Sparte ; révolte des Hilotes et des
MessénienSi — Siège d'Ithômè; renvoi du contingent athénien. —
dbyGoOgk
^
400 DROIT DES ATHÉNIENS A L'HÉGÉMONIE.
L'Aréiopage amoindri. Exil de Kirnon. Meurtre d*Ephialtès. — Ré-
tribution des devoirs civiques. — Coalition contre Sparte. Expédition
d'Egypte. Siège et soumission d'Aigine. — Les longs murs. Bataille
de Tanagra. — Victoire des Oinophytes. Revers en Egypte. — Fin de
la guerre médique. Mort de Kimon. — Défection des Boiotes et des
Mégariens. Soumission de TEuboia. — Trêve de trente ans.
Droit des Athéniens à Thégémonie. — Athèaes avait
porté seule tout le poids de la première guerre médique, et plus
que toute autre ville elle avait contribué au succès de la seconde.
Hérodote a dit avec raison qu'après les Dieux c'étaient les Athé-
niens qui avaient sauvé la Grèce de l'invasion des Barbares. Il
était juste qu'ils recueillissent les fruits de la victoire. L'éner-
gie qu'ils avaient déployée dans cette grande lutte nationale
leur donnait des droits à l'hégémonie de la Grèce. Ils acquirent
bientôt une supériorité encore plus éclatante dans la sphère de
l'intelligence. Le siècle qui suit les guerres médiques a vu se
produire le plus magnifique mouvement artistique et littéraire
qu'il ait été donné au monde de contempler. Au point culmi-
nant de l'histoire rayonne cette glorieuse démocratie qui, en
appliquant les grands principes de la morale grecque, la liberté
et l'égalité, réalisa un idéal social que les plus hardis utopistes
n'oseraient pas rêver. Cependant cette grande époque est rem-
plie par des luttes presque incessantes. Chez d'autres peuples,
les arts et les lettres sont des plantes de serre chaude qui ne
peuvent fleurir que sous quelque abri protecteur ; en Grèce,
sur leur rocher natal, elles s'épanouissaient dans une atmo-
sphère de tempêtes.
Pour la courte et brillante période qui répond à la démago-
gie de Périclèç, entre la guerre médique racontée par Hérodote
et la guerre du Péloponnèse racontée par Thucydide, notre prin-
cipal guide est Plutarque, et malheureusement il donne toujours
à l'histoire une couleur biographique; le peuple est relégué au
second plan et forme le fond du tableau. Si on ne se tenait en
garde contre cette tendance, on méconnaîtrait le caractère ré-
publicain de la société grecque. Il ne faut pas, à cette époque
qui est l'apogée de la civilisation, que les grands hommes nous
cachent le grand peuple.
dbyGoogk
LES MURS D»ATHÈNES. — LE PIRÉE. 401
Reconstruction des murs d'Athènes. — Les Athéniens,
rentrés dans leur ville après la bataille de Platée, commencè-
rent à rebâtir leurs maisons et le mur d'enceinte. Mais Sparte
et les alliés, surtout Aigine et Corinthe, les rivales maritimes
d'Athènes, auraient voulu empêcher ce travail de fortifications.
Une ambassade fut envoyée aux Athéniens ; on prenait pour
prétexte l'intérêt commun de la Grèce. « Si les barbares reve-
naient, il ne fallait pas qu'ils pussent trouver une place forte
pour s'y établir, comme ils avaient faitàThèbes ; le Péloponnèse
était une forteresse naturelle où la défense devait -se concen-
trer. » Les Athéniens comprenaient que la jalousie avait dicté
ce conseil, mais il était dangereux de le rejeter ouvertement, il
fallait employer la ruse. Thémistocle se fit envoyer k Sparte
pour traiter l'afl'aire. Une fois arrivé, il ne se pressa pas de voir
les Ëphores, « il attendait ses collègues, sans doute quelque af-
faire urgente les avait retenus ». Pendant ce temps, toute la
population d'Athènes, hommes, femmes, enfants; ^vieillards,
travaillait jour et nuit à élever les murailles ; on y employait
les pierres des édifices publics, les colonnes, les marbres sculp-
tés. Le travail avançait rapidement; les Spartiates en furent
avertis, ils interrogèrent Thémistocle : « N'en croyez pas de
vagues rumeurs, envoyez des gens sûrs, qui vous renseigneront
exactement. » On les envoya, mais Thémistocle fit dire secrète-
ment aux Athéniens de les garder comme otages jusqu'à son
retour. Quand il apprit que les murs étaient presque achevés, il
le déclara ouvertement aux Spartiates : « Lorsque nous avons
cru nécessaire d'abandonner notre ville et de monter sur nos
vaisseaux, nous n'avons pas attendu vos conseils; nous croyons
utile de fortifier Athènes, et nous connaissons aussi bien nos
intérêts que l'intérêt commun de la Grèce. » Les Spartiates, dis-
simulant leur dépit, protestèrent ds leurs bonnes intentions, et
les députés se retirèrent de part et d'autre.
Politique de Thémistocle. La flotte et le Pirée. — La
politique de Thémistocle avait toujours été de tourner l'activité
des Athéniens du côté de la mer. C'est d'après ses avis qu'ils
avaient équipé leur flotte, ce rempart de bois qui les avait sau-
vés. Il leur fallait maintenant un port militaire. La rade de Pha-
lère, dont ils s'étaient contentés jusqu'alors, n'était ni assez vaste
dbyGoogk
402 RELACHEMENT DU LIEN FÉDÉRAL.
ni assez sûre. Thémistocle leur conseilla de continuer les ou-
vrages du Pirée commencés trois ans auparavant lorsqu'il était
archonte. La victoire de Salamine lui donnait un tel ascendant
sur les Athéniens qu'aussitôt que Tenceinte de la ville fut ache-
vée, et avant de s'occuper de leurs champs dévastés, ils com-
mencèrent à entourer le Pirée d'une forte muraille. Thémistocle
regardait le Pirée comme plus important que l'Acropole même;
il en fit tracer le plan par l'architecte Hippodamos deMilet ; des
, immunités furent promises aux étrangers et surtout au* ou-
vriers qui viendraient s'y établir. Thémistocle engagea aussi les
Athéniens à construire tous les ans un certain nombre de tri-
rèmes. Il osa dire le premier qu'ils devaient s'emparer de la
mer. Plutarque raconte même que pour leur assurer la supré-
matie maritime, il avait formé le projet, après la bataille de
Platée, de brûler la flotte des alliés rassemblée à Pagase, ou,
selon une version adoptée par Gicéron, la flotte lakédaimo-
nienne abritée à Gytheion : il annonce au peuple qu'il a quel-
que chose de très utile à proposer, mais qu'il ne doit pas divul-
guer son secret; Aristide, chargé de prendre connaissance du
projet , déclare que rien ne serait plus utile ni plus injuste, et
le peuple, tout d'une voix, rejette la proposition sans demander
de quoi il s'agit. Cette anecdote ne peut, selon Grote, être con-
sidérée comme de l'histoire ; c'est un thème philosophique
montrant sous une forme ingénieuse la supériorité du juste sur
l'utile. L'inventeur devait être un Athénien, car le peuple d'A-
thènes y joue un très beau rôle ; quant à l'antithèse morale de
Thémistocle et d'Aristide, c'était un lieu commun littéraire dans
les écoles.
Relâchement du lien fédéral. ~- Le congrès qui, dès le
commencement de l'invasion des Barbares, s'était réuni spon-
tanément àl'isthme de Gorinthe, pour donner une direction à la
lutte contre l'ennemi, ne survécut pas aux circonstances excep-
tionnelles qui l'avaient fait naître. Selon Plutarque, Aristide es-
saya, après la bataille de Platée, d'établir entre les cités hellé-
niques une ligue permanente, mais cette tentative ne parait pas
avoir eu de suite. Le conseil des Amphictions, qui n'avait rien
fait pour la résistance, se réunit après la victoire et mit à prix
la tête d'Ephialtès dont la trahison avait livré à Xerxès le pas-
dbyGoogk
FÉDÉRATION DE DÈLOS, 403
sage des Thermopyles. Les Lakédaimoniens proposèrent, selon
Plutarque, d'exclure de la confédération amphictionique les
peuples qui n'avaient pas pris part k la défense nationale; mais
Thémistocle fit rejeter celte proposition, craignant que l'exclu-
sion des Thessaliens, des Argeiens et des Thét
aux Spartiates une influence prépondérante (
« Dès cet instant, ajoute Plutarque, il fut en 1
vaise volonté des Lakédaimoniens, qui lui sus(
dans la personne de Kimon. » Si on avait voul
peuples infidèles ou traîtres, on aurait mis la m(
aux prises avec l'autre moitié. On voulut du r
hommes qui avaient provoqué ces défections £
Déjà Pausanias avait frappé les chefs de Toliga
Léotychidas, le vainqueur de Mycale, fut envo
contre les Aleuades et se laissa gagner par d(
lui était ai9éf dit Hérodote, de se rendre maître
mais il accepta une grande somme et fut pris
le camp môme, assis sur un sac d'argent. Aya
justice, il fut banni de Sparte et sa maison ras<
Tégéa où il mourut. » Hérodote accuse aussi 1
voir extorqué de grandes sommes d'argent aux
Pariens, aux habitants d'Andros, sous prétexli
qui avaient prêté secours aux Barbares.
Fédération de Délos. — Dans Tannée qui
les de Platée et de Mycale, la flotte grecque rep
achever la délivrance des villes grecques encoi
Perses. On ne connaît pas la force de cet arr
seulement que les Péloponnésiens avaient éq
seaux et les Athéniens trente, auxquels se joigi
nombre d'Ioniens. Pausanias, qui commandait
vers Kypros dont il soumit la plus grande par
siège devant Byzance et s'en empara. « Mais sor
dureté, dit Thucydide, le rendirent odieux au:
aux Ioniens et à ceux qui s'étaient soustraits i
puissance du roi. Ils allèrent trouver les Athén
rent de les recevoir sous leur commandement,
la môme origine, et de ne pas céder àPausanif
venir à la violence. Les Athéniens reçurent c<
dbyGoogk
404 TAXE FIXÉE PAR ARISTIDE.
ils leur promirent de ne pas les abandonner et de tenir d'ail-
leurs la conduite qui semblerait s'accorder le mieux avec les
intérêts des alliés. Dans ces conjonctures, les Lakédaimoniens
rappelèrent Pausanias pour le juger, d'après les dénonciations
portées contre lui. Les Grecs qui venaient à Lakédaimon se
plaignaient beaucoup de ses injustices et de sa conduite, qui
semblait plutôt d*un tyran que d'un général. Il fut rappelé pré-
cisément à l'époque où, par la haine qu'il inspirait, les alliés,
excepté les troupes du Péloponnèse, se rangeaient sous les or-
dres des Athéniens. Arrivé à Lakédaimon, il fut convaincu d'a-
bus de pouvoir contre les particuliers, mais il échappa aux ac-
cusations capitales. On lui reprochait surtout son penchant pour
les Mèdes, qui paraissait évident. Aussi le commandement ne
lui fut-il pas rendu, mais on fit partir Dorkis et quelques au-
tres avec peu de troupes. Comme les alliés ne se mirent pas
sous leur autorité, ils revinrent, et les Lakédaimoniens n'en-
voyèrent pas dans la suite d'autres généraux. Après ce qu'ils
avaient vu de Pausanias, ils craignaient qu'ils ne se corrompis-
sent de môme. D'ailleurs ils voulaient se débarrasser de la
guerre des* Mèdes, ils croyaient les Athéniens capables de la
conduire, et alors ils étaient amis. Les Athéniens ayant ainsi
pris le commandent suivant le désir des alliés, par la haine
qu'ils portaient à Pausanias, réglèrent quelles villes devaient
donner de l'argent pour faire la guerre aux Barbares, et
quelles devaient fournir des vaisseaux. Alors fut établie chez les
Athéniens la magistrature des Hellanotames qui recevaient le
tribut. Le premier tribut fut fixé à quatre cent soixante talents
(2,485,000 fr.). Le trésor fut déposé àDèlos, et les assemblées se
faisaient dans le temple. »
Taxe fixée par Aristide. — Selon Plutarque, le caractère
personnel d'Aristide, qui commandait avec Kimon, fils de Mil-
tiade, le contingent athénien de la flotte grecque, fut la princi-
pale cause de l'établissement de cette ligue qui prit le nom de
Fédération de Dèlos. En comparant la modération et la douceur
d'Aristide à l'insolence de Pausanias, les alliés furent amenés
à préférer la suzeraineté des Athéniens à celle des Spartiates.
Comme puissance maritime et comme métropole des cités
ioniennes, Athènes devait avoir la direction d'une ligue dont le
dbyGoogk
RÉFORME DÉMOCRATIQUE A ATHÈNES. 405
but était de protéger les Grecs d'Asie contre les Barbares. Il
était juste quechacunedes villesconfédéréescont]"
de la guerre, et Aristide avait une telle réputation
les alliés s'en rapportèrent à lui pour la réparti tio
de guerre. « Ils demandèrent aux Athéniens, dit
leur donner Aristide pour visiter le territoire d(
examiner ses revenus et fixer ce que chacune
proportion de ses facultés. Arfetide, investi d'un
voir qui le rendait en quelque sorte arbitre des ir
la Grèce, entré pauvre dans cette administration,
pauvre encore. Il imposa cette taxe, non seuleme
de désintéressement que de justice, mais avec ui
qui le rendit agréable à tout le monde. Les anci
coup vanté le siècle de Cronos : les alliés des A
brèrent celteimposition d'Aristide comme l'âge d'
surtout lorsqu'ils se virent^ peu de temps apr<
double et au triple. » Aristide ayant fait jurer i
l'observation de l'alliance, la jura lui-môme au
niens, et, prononçant des malédictions contre les
jeta dans la mer des masses de fer ardentes.
Dèlos, centre religieux des Ioniens, avait été c
siège delà fédération, mais les lies doriennes de
des, les îles aioliennes de Lesbos et de Ténédos (
ainsi que Byzance et les villes de la Chalkidique.
fondée, non sur des affinités de race, mais sur
nauté d'intérêts.
Réforme démocratique à Athènes. — L
de la confédération de Dèlos avait augmenté la ]
ristide ; Plutarque lui attribue une mesure de
rieure qui dut aussi lui concilier la faveur du p
tide s'apercevant que le peuple cherchait à rendi
ment démocratique, sentit que d'un côté il mér
égards après avoir montré tant de valeur dans 1
que de l'autre il ne serait pas facile, lorsqu'il av
la main et qu'il était enflé par ses victoires, de
la force. 11 fit donc rendre un décret qui portait
ment serait commun à tous les citoyens et qu'oi
distinctement les archontes parmi tous les Ail
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ÉLIGIBILITÉ UNIVERSELLE. 407
avait peut-être une autre raison pour rendre l'archontat, et
et par suite l'Areiopage, accessible à tous les citoyens sans dis-
tinction de classes : l'occupation de l'Atlique par Xerxès, et en-
suite par Mardonios, avait ruiné tout le monde; bien des famil-
dbyGoogk
408 ÉLIGIBILITÉ UNIVERSELLE.
les riches avaient été réduites k la pauvreté par la guerre et
souvent aussi par des sacrifices patriotiques. Il aurait été in-
juste de leur enlever les droits qu'elles avaient eus autrefois. Il
faut se souvenir d'ailleurs que les fonctions publiques étaient
entièrement gratuites. Celles qui exigeaient une responsabilité
pécuniaire, comme les fonctions de stratèges, continuèrent à
L'Athcoè da temple d'Aigine.
être réservées aux citoyens riches. Mais Tarchontat était une
fonction judiciaire qui n'exigeait pas le maniement des deniers
publics. Un ouvrier vivant de son travail de chaque jour n'au-
rait pas pu s'en charger, mais si le peuple confiait une pareille
fonction à un citoyen d'une fortune très modeste, comme Aris-
tide lui-môme, c'est qu'on le croyait trop honnête pour vendre
la justice. Au reste Aristide, en proposant ce décret, ne pouvait
avoir en vue sa situation personnelle, car il avait été archonte
dbyGoogk
LES SCULPTURES D'AIGINE. 409
avant la guerre, et c'est une fonction qu'on ne pouvait remplir
qu'une fois. Celle de stratège, dont il fut plusieurs fois chargé,
empêche de croire qu'il fût absolument pauvre ; si l'État lui fit
construire un tombeau, c'était sans doute pour honorer ses
services, et non, comme le dit Plutarque, parce qu'il n'avait
pas laissé de quoi se faire enterrer.
Les sculptures du temple d'Aigine. — La situation des
Athéniens à la tête de la fédération de Dèlos dut exciter la
jalousie de Sparte, mais les expéditions lointaines n'étaient ni
dans ses traditions ni dans ses goûts, et le refus d'obéissance
statuettes décoratives du temple d'Aigiae.
des Grecs d'Asie lui permettait de se retirer sans honte d'une
guerre qui devenait exclusivement maritime. Elle gardait son
rang et son prestige dans la Grèce d'Europe, car en se retirant
de la lutte elle avait été suivie par ses alliés péloponnésiens et
par les Corinthiens ei les Aiginètes, qui n'acceptaient pas plus
qu'au commencement de la guerre la suzeraineté de leurs
rivaux les Athéniens] Aigine avait partagé avec Athènes la
gloire du combat de Salamine, sans avoir eu à souffrir comme
elle de l'invasion. Après la bataille de Platée, les Aiginètes
avaient attiré chez eux, en habiles marchands, une bonne
partie du butin. On rapporte généralement à celte époque, qui
fut celle de la plus grande prospérité d'Aigine, les fameuses
dbyGoogk
410 LES SCULPTURES D'AIGINE.
statues de la Glyptothèque de Munich. Ces statues, qui or-
naient les deux frontons du temple de Zeus Panhellénien ou d'A*
thènè, sont le principal monument de Técole aiginétique, dont
le représentant le plus fameux est Onatas, un des précurseurs de
Phidias. Elles représentent les exploits des héros Aiakides, an-
cêtres et protecteurs des Aiginètes. Dans le fronton occidental,
on reconnaît le combat des Grecs et des Troyens en présence
d'Athènè, autour du corps de Patroclos ou d'Achille; dans le
fronton oriental, dont il reste seulement quatre figures, on
croit voir, d'après la ressemblance de l'archer coifiTé d'une peau
de lion avec l'Héraclès des monnaies de Thasos, un combat
autour du corps d'Oiclès, tué par les Troyens dans la guerre
contre Laomédon. Ainsi deux légendes parallèles, figurées dans
les deux frontons, traduisent une môme pensée, la lutte des
héros d'Aigine, Télamon d'un côté, ses fils Aias etTeucros de
l'autre, contre les Troyens, et rappellent sous une forme my-
thique la part glorieuse que prirent les Aiginètes à la lutte
contre les barbares, rapprochement indiqué par le costume
donné à une des figures, celle qu'on désigne sous le nom
de Paris.
Le caractère général de ces statues répond bien aux indi-
cations qu'on trouve dans les auteurs sur le style de l'école
d'Aigine : des lignes dures, des attitudes anguleuses, des
mouvements heurtés, une étude très consciencieuse des formes
du corps et une absence complète d'expression dans les têtes ;
on reconnaît l'habitude de sculpter des athlètes. Les cheveux
sont régulièrement bouclés et les barbes pointues. Il reste des
traces de couleur sur les lèvres, les pomettes des joues, les
vêtements et les armes ; des trous en assez grand nombre in-
diquent qu'il y avait des ornements métalliques. La statue
d'Athènè, qui occupait le milieu du fronton, est vêtue d'une
robe à plis nombreux et symétriques, caractère que présen-
tent aussi deux statuettes trouvées au même endroit et qu'on
désigne assez arbitrairement sous les noms de Damia et
Auxesia, la Dèmèter et la Corè d'Aigine ; on suppose qu'elles
ornaient le sommet ou les acrotères du fronton.
Prise d'Eion et de Skyros. — La Thèseion. — La prise
de Sestos et celle de Byzance permettaient aux Grecs de com-
dbyGoogk
LA THÈSEION. 411
muniquer par THelIespont et le Bosphore avec les stations
commerciales du Pont-Euxin ; mais la guerre n*était pas finie
tant que les Perses conservaient des positions sur les côtes de
Thrace et dans les lies au nord de la mer Egée. Les Athéniens
et leurs alliés assiégèrent la forteresse d'Eion sur le Strymon.
Kimon, qui commandait l'expédition, offrit aux assiégés de
sortir librement et de se retirer en Asie, mais le gouverneur
perse, appelé pRT Bogès Hérodote, Butés par Plularque, refusa
de capituler; quand il n'eut plus de vivres, il jeta toutes ses
richesses par-dessus les murs, et ayant élevé un grand bûcher,
il s'y brûla avec ses femmes, ses enfants et ses esclaves. La
garnison fut réduite en servitude. Eion devint plus tard le port
de la colonie athénienne d'Amphipolis. Kimon s'empara en-
La ThèseloD .
suite de l'île de Skyros, habitée par des pirates dolopes, et
rétablit la sécurité du commerce dans la mer Egée. L'île fut
repeuplée de colons athéniens (470).
D'après une ancienne tradition, Thèseus était mort dans
l'île de Skyros. Kimon fit rechercher ses ossements et les rap-
porta en grande pompe à Athènes. Les cendres du héros na-
tional furent déposées dans un temple bâti et décoré par Micon,
qui, comme tous les artistes de ce temps-là, était à la fois
peintre, sculpteur et architecte. Ce temple, consacré à la fois
à Thèseus et à son ami Héraclès, était un lieu d'asile où sq
réfugiaient les esclaves qui avaient à se plaindre de leur
maître. Si la plainte était fondée, le maître était obligé de les
vendre à un autre. Comme le temple d'Aîgine, auquel il res-
dbyGoogk
412 LA THÈSEION.
semble beaucoup, le Thèseion est d'ordre dorique, hexastyle
périptère, c'est-à-dire entourée de colonnes dont six de face.
C'est le monument le mieux conservé de l'architecture grecque.
Les sculptures des frontons ont disparu, probablement à l'é-
dbyGoogk
j
LA TRAGÉDIE. 4i3
poque où le temple fut changé en église et consacré à saint
Georges ; mais il reste des fragments très mutilés des métopes
et de la frise de la cella ; lord Elgin n*osa pas les enlever, de
peur d'offenser les chrétiens d*Alhènes, qui ont transporté à
saint Georges la dévotion de leurs ancêtres pour Thèseus. Le
Thèseion est aujourd'hui un musée de sculptures antiques; les
murs ont gardé quelques traces du stuc et des peintures dont
Micon les avait décorés.
La tragédie. — Pendant les fêtes célébrées à l'époque de
la translation des cendres de Thèseus k Athènes, il y eut uii
concours dramatique dans lequel Sophocle, encore jeune,
l'emporta sur Aischyle qui était alors à l'apogée de sa réputa-
tion et qui avait fait jouer deux ans auparavant sa tragédie des
Perses, La poésie dramatique était sortie de la poésie lyrique
et chorale dans les fêtes de Dionysos, célébrées au retour du
printemps et à l'époque des vendantes. La tragédie, ou chant
du bouc, ne fut d'abord qu'un développement du dithyrambe,
et le dialecte dorien resta toujours employé pour les chœurs.
Dès le temps de Solon et de Peisistrate, Thespis d'Icaros avait
coupé les chants et les danses des choristes au moyen de récits
faits par le poète ou par un acteur (OiroxpiTiQç, celui qui répond).
Ces récits étaient en vers iambiques, rhythme approprié au ton
de la conversation. L'acteur représentait successivement
plusieurs personnages, grâce aux masques de toile dont l'in-
vention est attribuée à Thespis. Les récits alternant avec les
chœurs devinrent des dialogues quand Aischyle introduisit un
second acteur pour répondre au premier, et prirent aux dépens
du chœur une importance toujours croissante, ce qui faisait
dire aux partisans de la tradition : « Qu'y a-t-il là pour Dio-
nysos?» Pour satisfaire ces scrupules religieux, Pratinas de
Phlious imagina le drame satyrique où le chœur était composé
de Satyres, compagnons de Dionysos. Le drame satyrique for-
mait le complément d'une trilogie comprenant trois tragédies
qui se rattachaient ordinairement au même sujet. En général
ce sujet était emprunté aux traditions mythologiques, surtout
aux poèmes cycliques. 11 y eut cependant des tragédies se rap-
portant à des événements contemporains, par exemple la, prise
de Milet, qui fit condamner Phrynichos à l'amende, comme
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THÉÂTRE DE DIONYSOS. 417
Epicharme de Cos, 30us les règnes de Gélon et d'Hiéron de
Syracuse.
Le théâtre d'Athènes fut d'ahord en hoîs ; mais les gradins
s'étant écroulés pendant une représentation, on construisit,
sur le côté méridional de l'Acropole, un théâtre en pierre dont
les restes ont été récemment retrouvés. Ce théâtre servit de
modèle à ceux qui s'élevèrent successivement dans les prin-
cipales villes de la Grèce. Il comprenait trois parties ; l'am-
phithéâtre composé de gradins en demi-cercle, creusés dans le
roc, avec des escaliers et des couloirs, pouvait contenir plus de
vingt mille speclaleurs. L'orchestre, c'est-à-dire la place des
danses, était un espace circulaire entourant l'autel des parfums
(euf*«Xr,), et servant aux évolutions des choristes, qui chantaient
et dansaient par groupes sous la direction du coryphée. Les
acteurs se tenaient sur une estrade appelée avant-scène (n^ooxi-
vtcv) et plus élevée que l'orchestre. La scène proprement dite
consistait en un mur destiné à recevoir les décors et terminé
par deux ailes (icapaaxTivi*), que nous appellerions les coulisses.
Les théâtres n'avaient pas de toit ; les représentations avaient
lieu en plein jour, à des époques fixes, sous la direction de l'ar-
chonte éponyme, car elles faisaient partie du culte public. Le
poète instruisait les acteurs et les choristes. Les frais étaient à
la charge du chorège ou conducteur des chœurs ; la chorégie
était une de ces fonctions onéreuses que le peuple imposait aux
plus riches citoyens et qu'on nommait Liturgies. Un jury tiré
au sort choisissait entre les pièces présentées. Contrairement
à cet usage, dans le concours qui eut lieu après la prise de
Skyros, l'archonte désigna comme juges Kimon et les autres
généraux, que leurs succès récents rendaient très popu-
laires (469).
Exil de Thémistocle. Trahison de Pausanias. — A me-
sure que la popularité de Kimon avait grandi, celle de Thémis-
tocle avait baissé. Thémistocle s'en affligeait et rappelait ses
services avec une insistance que ses adversaires retournaient
contre lui. Ces revirements ne sont pas particuliers à la démo-
cratie: les rois, les présidents, les assemblées souveraines
changent de ministres selon les circonstances sans qu'on les
accuse d'ingratitude. A Athènes, l'ostrakisme était une soupape
dbyGoogk
418 TRAHISON DE PAÙSANÎAS.
de sûreté contre le danger qui pouvait résulter du conflit des
ambitions personnelles. Thémistocle s'en était servi contre
Aristide, Kimon s'en servit contre Thémistocle, et on vit plus
tard Périclès s'en servir contre Kimon. Le peuple accordait ou
retirait sa confiance selon Tidée qu'il se faisait de l'intérêt pu-
blic, et pouvait, comme tout autre souverain, se tromper dans
ses choix. Thémistocle se retira à Argos, et il y vivait tranquille-
ment, avec les richesses qu'il s'était procurées par des moyens
souvent équivoques, lorsqu'il fut accusé par les Spartiates d'a-
voir participé à la trahison de Pausanias.
Les Spartiates n'avaient pas la ressource de l'ostrakîsme, et
Pausanias les embarrassait beaucoup. On le soupçonnait d'en-
trelenir des intelligences avec les Barbares, et quoiqu'on l'eût
absous faute de preuves, on ne lui rendit pas le commande-
ment. Mais il ne pouvait se résoudre à redevenir citoyen et à
s'asseoir aux tables communes. Il s'embarqua sans permission ;
forcé par les Athéniens de sortir de Byzance, il s'arrêta en Troas
et renoua ses intrigues. Il écrivit à Xerxès pour lui demander sa
fille en mariage, promettant de lui soumettre Sparte et toute la
Grèce. Thucydide cite cette lettre et la réponse de Xerxès qui,
sans rien dire du mariage proposé, l'engage à s'entendre avec
Artabaze, offre de l'argent tant qu'il en faudra, et des troupes
au besoin. Pausanias se voyait déjà satrape, il en prenait le cos-
tume, il s'entourait d'une garde barbare. Le luxe asiatique lui
tournait la tête, comme plus tard à Alexandre. Les Ëphores lui
envoyèrent l'ordre de revenir, et il revint, confiant dans la puis-
sance de l'or. 11 ne se trompait pas tout à fait, à en juger par
les ménagements qu'on eut pour lui. 11 essaya de soulever les
Hilotes, fut dénoncé, et on le laissa libre, sous prétexte qu'on
ne pouvait pas poursuivre un Hèracléide sur la déposition d'un
esclave. Il put continuer à correspondre avec Artabaze ; mais le
domestique chargé de porter la lettre, remarquant que les mes-
sagers précédents n'étaient jamais revenus, conçut des craintes,
ouvrit la lettre et la porta aux Ephores. Cela ne suffit pas encore,
on voulut avoir l'aveu du crime ; on dit à l'esclave de se réfu-
gier au Ténare, comme s'il redoutait la colère de son maître.
C'était avertir Pausanias de se tenir sur ses gardes : il ne com-
prit pas, il vint au Ténare et pressa son domestique d'accom-
dbyGoogk
j
FUITE ET MORT DE THÉMISTOCLE. 419
plir sa mission. Les Ephores, cachés dans le temple^ avaient
entendu Tentretien, la trahison était avouée, il fallait bien ar-
rêter le coupable; mais sur un signe que lui fit un des Ephores,
il courut vers le temple d'Athènè à la maison d'airain et s*y
enferma. La porte fut murée pour le laisser mourir dé faim.
Cornélius Népos ajoute au récit de Thucydide un détail em-
phatique : la mère de Pausanias apportant une pierre devant
la porte.
Fuite de Thémistocle; sa mort chez les Perses. —- Les
Spartiates prétendirent avoir trouvé chez Pausanias des lettres
prouvant la complicité de Thémistocle et envoyèrent une dépu-
tation à Athènes, pour demander qu'il fût mis en jugement.
Thémistocle, alors retiré à Argos, se justifia par lettres, mon-
trant l'invraisemblance de l'accusation, mais le parti aristocra-
tique, qui lui était hostile, dominait alors à Athènes, et les amis
de Thémistocle ne pouvaient guère s'opposer à un jugement
qui devait faire éclater son innocence. Pour lui, sachant qu'on
ne doit pas compter sur l'impartialité des juges dans un procès
politique, il s'enfuit à Kerkyra, puis en Epire, et, échappant
aux émissaires qui le poursuivaient, il alla demander asile à
Admèlos, roi des Molosses, qui avait eu à se plaindre de lui
autrefois. Il s'assit devant le foyer, tenant l'enfant du roi dans
ses bras. Admètos oublia ses griefs, refusa de livrer le suppliant
et le fit conduire à Pydna où il s'embarqua pour l'Asie. Xerxès
venait de mourir assassiné par un de ses courtisans, et son
fils Artaxerxès lui avait succédé. Thémistocle écrivit au roi la
lettre suivante : « Moi, Thémistocle, je^ens à toi. Plus qu'au-
cun des Grecs, j'ai fait du mal à ta maison quand j'ai été forcé
de me défendre contre l'invasion de ton père, mais je lui ai
fait encore plus de bien quand je n'ai plus rien eu à craindre
et que lui-même, à son retour, courait de grands dangers. Au-
jourd'hui, ayant d'importants services à le rendre, je viens chez
toi, poursuivi par les Grecs comme étant ton ami. Je veux at-
tendre un an pour te rendre compte moi-môme des motifs de
ma venue ». Cette lettre, citée par Thucydide, prouve que Thé-
mistocle n'avait pas eu jusqu'alors de relations avec la Perse,
comme le prétendaient les Spartiates. La promesse vague de
grands services à rendre était un prétexte pour obtenir un asile,
dbyGoogk
420 EMPIRE MARITIME D^ATHÈNES.
et le délai d'un an qu'il demandait laissait place à rimpréTu.
Selon Tusage des Perses, le roi lui donna le revenu de trois
villes, Magnésie, Lampsakos et Myous. Thucydide ne parle pas
de son séjour à la cour de Perse, ni des détails donnés par
Plutarque sur la fin de sa vie; il dit seulement que Thémistocle
mourut de maladie, et que le bruit courut qu'il s'était empoi-
sonné parce qu'il lui était impossible de tenir les promesses
qu'il avait faites au roi.
La fédération de Délos se change en empire athé-
nien. — La prolongation de la lutte contre les Barbares com-
mençait à fatiguer les confédérés de Dèlos, et malgré les ser-
ments prêtés sur les masses de fer, plusieurs auraient voulu se
retirer de la ligue. Mais les Athéniens, qui en étaient les chefs,
regardaient comme un devoir de la maintenir dans sonintégrité
et s'attribuaient le droit de punir les défections. L'île de Naxos,
la plus importante des Kyclades, essaya de se détacher de l'al-
liance. Après un siège dirigé par Kimon, la ville fut prise, ses
fortifications rasées, et les Naxiens cessèrent d'être considérés
comme alliés pour devenir sujets et tributaires d'Athènes. « Ce
fut, dit Thucyjiide, la première ville alliée qui fut réduite à la
condition de sujette. D'autres eurent ensuite le même sort,
suivant les circonstances. Les défections des alliés eurent dif-
férentes causes. Les principales furent le refus de contributions
en argent ou en vaisseaux, et pour quelques-unes le refus de
servir dans les armées ; car les Athéniens exigeaient ces tributs
à la rigueur, et ils faisaient ainsi des mécontents en obligeant
aux fatigues des gens qui n'avaient ni l'habitude ni la volonté de
les supporter. En outre, ils ne commandaient plus avec la même
douceur, ils ne se montraient plus les égaux de leurs compa-
gnons d'armes, et ils avaient moins de peine à réduire ceux qui
les abandonnaient. On pouvait en accuser les alliés eux-
mêmes : paresseux à faire la guerre et à s'éloigner de leurs
foyers, la plupart, au lieu de fournir leur contingent en vais-
seaux et de les monter eux-mêmes, s'étaient imposé des taxes
proportionnées à la dépense. Comme ils contribuaient aux frais,
les Athéniens augmentaient leur marine, et les alliés, quand il
leur arrivait de tenter une défection, se trouvaient sans prépa-
ratifs et sans ressources pour la soutenir. » C'est ainsi que la
dbyGoogk
BATAILLE DE L'EURYMÉDON. 421
fédération de Dèlos se transforma peu à peu en un empire
athénien. Selon Plutarque, ce changement fut Tœuvre de
Kimon. Au lieu d'irriter les alliés en exigeant le service mili-
taire, comme le faisaient les autres généraux, il en acceptait
Téquivalent sous forme d'impôt, et c'est ce qui explique l'aug-
mentation successive du tribut fixé d'abord par Aristide. Si
l'union fédérale n'eut qu'une existence éphémère, ce n'est
pas l'ambition d'Athènes qu'il en faut accuser, c'est le défaut
d'esprit militaire et de discipline nautique chez les alliés.
Us seraient restés les égaux d'Athènes s'ils avaient eu son
énergie.
Bataille de l'Eurymédon. — Embellissements d'Athè-
nes. — Les Athéniens justifièrent leur hégémonie, ou com-
mandement militaire, par une suite de victoires sur les Bar-
bares. Kimon, à la tète de deux cents galères athéniennes et
de cent fournies par les alliés, chassa ce qui restait encore de
garnisons persanes en Carie et en Lykie. Les Perses avaient
rassemblé leur flotte et leur armée à l'embouchure de l'Eury-
médon, en Pamphylie. La flotte, composée de deux cents
vaisseaux, se tenait à l'ancre en attendant un renfort de quatre-
vingts vaisseaux phéniciens qui devaient venir de Kypros. Mais
Kimon, prévenant leur arrivée, prend ou détruit toute la flotte
ennemie, et le môme jour fait débarquer ses troupes et livre
bataille à l'armée de terre, qui est battue et dispersée malgré
une énergique résistance. Les Grecs firent un nombre consi-
dérable de prisonniers et s'emparèrent d'ui\ immense butin.
Pour compléter cette double victoire, Kimon coule ou saisit
les quatre-vingts vaisseaux phéniciens qui n'avaient pu prendre
part au combat (466).
« Les dépouilles des vaincus, dit Plutarque, furent vendues
à l'encan, et l'argent que le peuple en retira fut employé, entre
autres dépenses, à construire la muraille méridionale de la
citadelle. On jeta aussi les premiers fondements des longues
murailles qui furent élevées plus tard et qu'on nomme les
jambes, et comme le sol était marécageux, Kimon le fit raffer-
mir et consolider à ses frais. Le premier il embellit la ville de
ces promenades et lieux de conversation qui furent si recher^
chés depuis. 11 entoura de platanes la place publique, et du
L. M. — HiST. DES GUBGS. 2i-
Digitized by VjOOQIC
422 EMBELLISSEMENTS D'ATHÈNES.
terrain nu et aride de l'Académie, il fit un parc arrosé de
fontaines, avec des champs de courses et de frais ombrages. )»
Parmi ces promenades publiques il faut citer le Portique des
peintures, irctxtXr. oroà, décoré de peintures par Polygnote de
Thasos, Micon, Farcbitecte du temple deThèseus, etPanainos,
frère de Phidias. Polygnote représenta la ruine de Troie, sujet
qu'il traita plus tard dans la Leschè de Delphes. Micon peignit
les combats des Athéniens contre les Amazones, et Panainos
la bataille de Marathon. Selon Pline, on reconnaissait, parmi
les Athéniens, Callimachos, Miltiade, et Kynègeiros, frère
d'Aiscbyle; parmi les Barbares, Datis et Artapberne. Le petit
temple ionique de la Victoire sans ailes, dont les ruines subsis*
tent encore, parait avoir été élevé à Toccasion des victoires de
Kimonsurles Perses. Les sculptures delà frise, dont une
partie est au British Muséum, se rapprochent par le style de
celles du Thèseion. Sur la balustrade qui entourait le temple,
il reste quelques débris de bas-reliefs d'un autre caractère,
une Victoire montant sur un char, une autre ôtant ses sandales;
on les croit de l'époque de Praxitèle.
Libéralité de Kimon. — Les temples, les portiques, les
gymnases, les jardins publics^ qui formaient le patrimoine
commun du peuple^ contrastaient par leur élégance avec la
simplicité des demeures particulières. 11 y avait peu de luxe
dans la vie privée. La disproportion des fortunes n'était pas
très grande, surtout dans les premiers temps qui suivirent
l'invasion des Mèdes. Les riches consacraient leur argent aux
embellissements de la ville, aux besoins du peuple, à son édu*
cation, à ses fêles nationales, et n'avaient garde de mépriser le
peuple, qui disposait des fonctions publiques ; ces fonctions,
quoique purement honorifiques, n'en étaient pas moins recher-
chées. Toute misère était bientôt soulagée, car la bienfaisance,
qui corrige les inégalités sociales, est la vertu des hommes
libres, comme l'indiqué le mot môme de libéralité. Kimon,
qui s'était enrichi par ses victoires sur les Perses, où il avait
reçu, comme général, une part de butin, faisait de ses biens
un noble usage. Il avait abattu la clôture de ses champs et de
ses vergers pour permettre à tout le monde d'en cueillir les
fruits. Il y avait tous les jours chez lui un souper simple mais
dbyGoogk
SIÈGE DE THâSOB. 423
suffisant pour un grand nombre de convives, et tous ceux qui
se présentaient étaient admis. Quand il sortait, des domestiques
le suivaient, portant de bons manteaux qu'ils déposaient en
silence sur les épaules des vieillards indigents. Cette géné-
rosité n'était pas dangereuse pour la.morale publique, car nul
ne peut songer à corrompre tout une nation ; cependant elle
augmentait le crédit du parti dont Kimon était le chef. Ses
adversaires politiques, Ephialtès et le jeune Périclès, fils de
Xanthipposi n'étant pas assez riches pour lutter de popularité
sur ce terrain-là, cherchaient des moyens d'augmenter la puis-
sance du peuple, ce qui n'était pas facile, car elle était à peu
près illimitée. Ces rivalités tournaient au profit de la démocra-
tie. Les dignités étant gratuites, l'ambition n'était que le désir
légitime de servir la patrie. Les plus illustres familles se dispu-
taient la faveur du peuple. Il la leur accordait sans jalousie ;
quelle gloire ne se perdait dans la sienne? Le soleil n'est pas
jaloux d'un de ses rayons. La démocratie avait ses nobles pour
la servir, comme Louis XIV a eu les siens ; mais la dignité des
Eupatrides n'avait pas à souffrir de cette déférence, car le peuple
pouvait dire sans métaphore : « L^État, c'est moi. »
Sié§pe de Thasos. — Tremblement de terre à Sparte.
— Révolte des Messéniens. — Les victoires des Athéniens
les avaient rendus maîtres de la mer Egée ; ils voulurent assu-
rer leur domination maritime par des colonies. Dix mille
hommes, recrutés tant parmi eux que parmi leurs alliés, s'éta-
blirent aux Neuf- Voies, entre les deux branches du Strymon,
au-dessus d'Eion. Mais la nouvelle colonie eut à lutter à la fois
contre les Thraces Ëdoniens, qui habitaient le pays, et contre
les Thasiens qui revendiquaient la propriété des mines d'or de
Scaptè Hylè. Les colons s'étant avancés dans l'intérieur de la
Thrace, furent en grande partie exterminés pas les Ëdoniens.
Pendant ce temps, les Thasiens, battus par une flotte athénienne
et assiégés dans leur lie, demandèrent aux Spartiates de faire
une diversion en leur faveur en se jetant sur l'Attique. L'al-
liance qui avait été contractée entre Sparte et Athènes au
temps de l'invasion de Xerxës subsistait encore ; cependant,
suivant l'assertion de Thucydide qui n'est peut-être que l'écho
d'un bruit répandu à Athènes de son temps, les Spartiates,
dbyGoogk
424 RÉVOLTE DES MESSÉNIENS.
jaloux des progrès de la puissance athénienne, promirent secrè-
tement leur assistance aux Thasiens, mais un tremblement de
terre qui survint à cette époque les empêcha de tenir cette
promesse. Vingt mille personnes périrent, selon Dîodore, et il
ne resta que cinq maisons debout à Sparte (464). Les Hilotes,
les Messéniens et quelques-uns des Périœkes profitèrent de ce
désastre pour se soulever. Ils ne purent s'emparer de la ville,
grâce à Ténergie du roi Archidamos qui avait mis tout le peu-
ple en armes, mais ils se retirèrent dans la forteresse d'Ithômè
où ils se défendirent pendant dix ans : c'est ce qu'on a nommé
la troisième guerre de Messénie. Quant aux Thasiens, après
trois ans de siège, ils se rendirent aux Athéniens qui les obli-
gèrent à détruire leurs murailles, à livrer leurs vaisseaux, leurs
possessions sur le continent avec leurs mines d'or, et à payer ,
une forte amende et un tribut annuel (463).
Siège d^Ithômè. — Renvoi des troupes athéniennes.
— Le peuple ne fut pas satisfait delà conduite de Kimon dans
la campagne de Thrace ; on disait qu'il aurait pu s'emparer de la
Macédoine et on l'accusa de s'être laissé gagné par les présents
du roi Alexandre. Cependant Périclès, touché, dit-on, par les
prières d'Elpinikè, sœur de Kimon, soutint mollement l'accu-
sation, et il fut absous. Mais son crédit baissa. On lui repro-
chait surtout son attachement pour les Spartiates ; il les pro-
posait souvent pour modèle ; il admirait leur discipline militaire
et leurs institutions aristocratiques, et il croyait en outre que
l'alliance avec Sparte était nécessaire pour continuer énergi-
quement la guerre contre les Perses. Mais d'autre part, ceux
qui rêvaient pour Athènes le commandement général de la
Grèce ne voyaient dans les Spartiates que des rivaux à supplan-
ter. La question ne tarda pas à se poser devant le 'peuple. Les
Spartiates, ne pouvant venir à bout de réduire les Messéniens
retranchés dansUhômè, demandèrent du secours à leurs alliés,
et en particulier aux Athéniens qui passaient pour plus habiles
qu'eux dans l'art des sièges. Éphialtès protesta énergiquement
contre cette demande ; il fallait, disait-il, fouler aux pieds l'or-
gueil de Sparte et la laisser enseveUe sous ses ruines. Kimon fit
appel au sentiment panhellénique : « On ne peut pas,s*écria-t-il,
laisser la Grèce boiteuse. » Son opinion prévalut et le secours fut
dbyGoogk
L»AREIOPAGE AMOINDRI. 425
envoyé. Mais quand les Athéniens furent arrivés devant Ithômè,
les Spartiates conçurent des craintes qui n'étaient peut-être pas
sans fondement. « Voyant, dit Thucydide, que la place n'était
pas enlevée de vive force, ils craignirent l'humeur audacieuse
des Athéniens et leur caractère remuant. Ils ne les regardaient
pas comme un peuple de leur race, et ils appréhendaient que,
pendant leur séjour devant Ithômè, ils ne se laissassent gagner
par ceux qui y étaient renfermés et ne causassent quelque
révolution. Ce furent les seuls des alliés qu'ils renvoyèrent,
sans manifester cependant leurs soupçons, mais en déclarant
qu'ils n'avaient plus besoin de leur secours.»
L'Areiopage amoindri. Exil de Kimon. Assassinat
d*Ëphialtès. — C'était un aflFront pour Athènes et un grave
échec pour le parti conservateur dont Kimon était le chef. Il y
eut un revirement dans l'opinion publique. Éphialtès, soutenu
par Périclès, attaqua résolument l'Areiopage, la plus ancienne
des institutions d'Athènes et le dernier rempart de l'aristocra-
tie. Tandis que toutes les autres fonctions étaient temporaires,
l'Areiopage, composé d'anciens archontes, formait un corps ina-
movible et par conséquent irresponsable et hostile à toutes les
innovations. Les Athéniens étaient trop attachés à leurs tradi-
tions pour supprimer une magistrature antérieure à la consti-
tution de Solon et qu'avaient respectée les réformes de Cleis-
thénès. La lutte fut très vive. Dans les EuménideSy qui forment
la dernière partie de sa magnifique trilogie d'Ore^tèSf le vieil
Aischyle rappela au peuple l'origine sacrée de l'Areiopage, ce
tribunal auguste, institué jadis par Athènè pour juger un cas
de conscience si difficile qu'elle-même, la Sagesse divine, n'o-
sait pas se prononcer. Mais, sans détruire l'Areiopage, on
pouvait annuler son influence. Éphialtès et Périclès lui enlevè-
rent quelques-unes de ses attributions administratives et judi-
ciaires, on ne sait pas exactement lesquelles. Kimon, qui
s'opposait à ce changement, fut banni par un vote d'ostrakisme.
Quelque temps après, Éphialtès fut assassiné par un homme de
Tanagra soudoyé par les aristocrates. Il s'était fait beaucoup
d'ennemis par son ardeur à poursuivre les magistrats corrompus
ou injustes. Son honnêteté est attestée par Plutarque, en géné-
ral peu favorable au parti populaire. Éphialtès offre un de^
2i.
Digitized by VjOOQIC
426 INDEMNITÉ DES JURÉS.
premiers exemples d'une direction politique exercée sans titre
officiel par des citoyens qu'on nommait démagogues, c'est-à-
dire chefs du peuple.
Indemnité pour rezercice des devoirs civiques. —
Périclès, qui s'était associé à la réforme constitutionnelle
d'Ëpbialtès, la compléta par l'établissement d'un jury rétribué.
Ce jury était formée de cinq mille citoyens tirés au sort chaque
année et partagés en dix tribunaux (iixaariipta). Il y avait une
réserve de mille jurés supplémentaires. L'ensemble du Jury
formait THèliée, et les jurés s'appelaient Hèliastes parce qu'ils
jugeaient en plein soleil. Ils votaient au scrutin secret, sous la
présidence de l'archonte qui avait instruit l'affaire. Des pré-
cautions furent prises contre les tentatives de corruption ou
d'intimidation. Les plaideurs ne savaient pas d'avance quelle
fraction de l'Hèliée aurait à juger leur procès. Le nombre des
jurés n'était pas toujours le môme, mais il était toujours très
considérable. Il fallait les indemniser de la perte de leur temps.
 l'origine l'indemnité fut fixée à une obole, environ 15 cen-
times ; plus tard cette somme parut insuffisante, et Gléon la fit
porter à trois oboles ; c'était ce que recevaient les mateloté^sur
les galères de l'État; les soldats recevaient une solde de deux
oboles et deux pour la nourriture. On trouva naturel d'attribuer
aux citoyens siégeant à l'assemblée politique, qui se tenait trois
fois par mois, la môme indemnité qu'aux jurés siégeant dans
les tribunaux, mais il n'est pas certain que cette rétribution,
qu'on nommait ecclésiastique pour la distinguer de la rétri-
bution judiciaire, ait été instituée dès le temps de Périclès.
11 semble au premier abord qu'en attachant un salaire, si
modique qu'il fût, à l'exercice des droits politiques, on s'écar-
tait du grand principe du gouvernement gratuit, universelle-
ment admis dans toutes les cités grecques ; mais cette dévia-
tion n'est qu'apparente. L'indemnité du citoyen d'Athènes,
môme lorsqu'elle fut élevée au triobole, ne représentait que le
prix de la journée de travail d'un ouvrier ordinaire. Sans cette
indemnité, les Thètes, c'est-à-dire les prolétaires, auraient été
écartés en fait, sinon en droit, de l'assemblée délibérante, du
jury et de toutes les fonctions tirées au sort. Mais les fonctions
répondant à ce que nous appelons le pouvoir exécutif restèrent
dbyGoogk
COALITION CONTRE SPARTE. 427
toujours électives et gratuites, notamment la plus importante,
celle des Stratèges ou généraux, et quelques charges très oné-
reuses qu'on imposait aux riches et qu'on nommait Liturgies,
par exemple celle des Triérarques, qui équipaient à leurs frais
les navires de TÉtat, celles des Chorèges qui payaient les re-
présentations dramatiques et musicales. Nous disons souvent
que nos institutions sont démocratiques : cela ferait rire les
Athéniens, qui ont inventé le mot et la chose. Leur système
d'impôts sur les hauts fonctionnaires et de rétribution égali-
taire pour l'exercice des devoirs civiques est exactement le
contre-pied de cette échelle hiérarchique de traitements que
nous avons empruntée au bas-empire romain sous prétexte de
démocratie.
Essai de coalition contre Sparte. — En même temps qu'ils
introduisaient de graves changements dans leur constitution
intérieure, les Athéniens inauguraient dans leurs relations ex-
térieures une politique nouvelle. Tant qu'avait duré la guerre
contre les Barbares, il avait fallu sacrifier l'intérêt particulier
d'Athènes à l'intérêt général de la Grèce, et pour cela ménager
les Spartiates, chefs reconnus du corps hellénique. Maintenant
les Perses n'étaient plus à craindre, les Grecs d'Asie étaient
délivrés, et Athènes, déjà à la tête d'une grande fédération
maritime, pouvait aspirer à prendre, dans la Grèce d'Europe,
une prépondérance que les Spartiates, occupés de leur guerre de
Messénie, n'étaient pas en état de lui disputer. Telle était l'am-
bition du parti démocratique dirigé parPériclès. L'impertinence
avec laquelle les Spartiates venaient de refuser un secours qu'eux-
mômes avaient demandé fournit une occasion d'abjurer leur
alliance et d'en contracter une avec leurs ennemis héréditaires
les Argeiens. On fit entrer les Thessaliens dans cette nouvelle
ligue. Les Mégariens, qui se trouvaient alors en querelle avec
les Corinthiens pour leurs limites réciproques, s'adressèrent
aux Athéniens, qui les reçurent avec empressement dans leur
alliance. Le territoire de Mégare, quoique très exigu, avait,
au point de vue stratégique, une importance capitale. Les dé-
filés de Gérania étaient l'entrée et la sortie du Péloponnèse ;
la Mégaris était donc la clef de l'Attique, et géographiquement elle
en faisait partie. Le port de Pègai ouvrait aux Athéniens le golfe
dbyGoogk
428 EXPÉDITION EN EGYPTE.
de Corinlhe. Pour s'attacher Mégare aussi étroitement que pos-
sible et la rendre inaccessible aux attaques des Péloponnésiens,
ils construisirent deux murs de huit stades entre la ville et le
port de Nisaia, sur le golfe Saronique. Mégare reçut une gar-
nison athénienne et devint un poste avancé d'Athènes. Sparte,
qui n'était pas encore débarrassée du siège d'Ithômè, n'essa\a
pas de s'y opposer, mais les Corinthiens, les Épidauriens et les
Aiginètes formèrent une coalition contre les progrès menaçants
de la puissance athénienne.
Expédition en Egypte. Siège et soumission d'Aigine.-
II était dangereux pour Athènes d'avoir des ennemis à ses
portes, car sa lutte contre les Perses n'était pas terminée.
L'Egypte, s'étant révoltée en 462 sous la conduite du Libyen
Inaros, avait demandé le secours des Athéniens. Deux cenls
vaisseaux, tant d'Athènes que des alliés, partirent de Kypros,
remontèrent le Nil, s'emparèrent de deux quartiers de Memphis
et assiégèrent le troisième, appelé le Mur-Blanc, où s'était ré-
fugiée la garnison perse. Pendant que la plus grande partie de
leurs forces était engagée dans celte expédition, les Athéniens
avaient à se défendre contre tous leurs voisins. Après une
grande bataille navale où les Aiginètes et leurs alliés perdirent
soixante-dix vaisseaux, les Athéniens, commandés par Léocra-
tes, mirent le siège devant Aigine. Les Corinthiens, pour opé-
rer une diversion, envahirent le territoire de Mégare. 11 n'y
avait plus à Athènes que des vieillards et des enfants. Myroni-
dès les rassemble à la hâte, et avec cette armée improvisée
remporte successivement deux victoires (457). Après un siège
de neuf mois, Aigine, que Périclès appelait une taie sur l'œil
du Pirée, devint sujette et tributaire d'Athènes, dont elle avait
été si longtemps la rivale. Ses murs furent démolis, et elle fut
obligée de livrer le reste de sa flotte, qui avait partagé avec
celle des Athéniens la victoire de Salamine.
Iie*s longs murs. Bataille de Tanagra. — Pour se dé-
fendre contre les attaques du dehors en gardant toujours leurs
communications avec la mer, les Athéniens réunirent la
ville aux ports de Phalère et du Pirée par deux longs murs,
l'un de six kilomètres, l'autre de huit et demi. Entre ces deux
murs, à une petite distance de celui qui conduisait au Pirée,
dbyGoogk
LES LONGS MURS. 429
et dans une direction parallèle, on en éleva un troisième.
« L'objet de cette construction, dit Letronne, était de rendre
plus assurée la communication des ports et d'Athènes, car
l'espace qui les séparait se trouvait alors coupé en deux zones
parallèles, de sorte que, si l'ennemi venait à s'emparer d'un
des longs murs, et conséquemment à se rendre maître de
Tune des deux zones, la seconde restait encore pour la commu-
nication ». Les longs murs, qui complétaient l'œuvre de dé-
fense de Tliémistocle , furent achevés par Périclès malgré
l'opposition du parti aristocratique. Cette opposition peut
surprendre, s'il est vrai, comme le dit Plutarque, que les pre-
mières assises de cette construction importante avaient été
posées par Kimon. Mais il n'était plus là pour diriger et mo-
dérer ses partisans; ceux-ci ne voyaient de salut que dans
l'alliance de Sparte, et Sparte qui avait considéré le mur de
Thémîstocle comme une menace pour son hégémonie, devait
s'inquiéter bien davantage des longs murs de Périclès. Comme
la guerre de Messénie durait encore, les Spartiates n'osèrent
pas rompre ouvertement avec Athènes ; mais une attaque des
Phokiens contre la Doris offrait un prétexte pour faire sortir
une armée du Péloponnèse. En apparence , il ne s'agissait
que de porter secours aux Doriens, dont les Spartiates tiraient
leur origine. En réalité, on voulait provoquer une révolution
à Athènes avec l'appui du parti oligarchique. En môme temps,
pour opposer une digue permanente aux ambitions athénien-
nes, les Spartiates rendirent à Thèbes, déconsidérée par son
rôle dans la guerre médique, la suprématie qu'elle avait
autrefois possédée sur la Boiotie. Une armée athénienne,
renforcée par mille Argéiens et par des cavaliers thessaliens,
vint à la rencontre des Spartiates sous les murs de Tanagra.
Avant la bataille, Kimon se présenta, demandant à combattre
dans les rangs de sa tribu. Le sénat des cinq cents lui en
refusa la permission; cette défiance était injuste : ses amis
le prouvèrent en se faisant tuer autour de son armure. La
bataille n'en fut pas moins perdue, par la trahison de la cava-
lerie thessalienne. Les Spartiates s'en retournèrent en rava-
geant la Mégaris. Périclès demanda et obtint du peuple le
rappel de Kimon (456).
dbyGoogk
430 VICTOIRE DES OliNOPHYTES, ^
Victoire des Oinophytes. Revers en Egypte. ^ Les
Athéniens ne furent pas longtemps à réparer leur défaite.
Soixante-deux jours après la bataille de Tanagra, ils marchaient
contre les Boiotes sous la conduite de Myronidès et rempoF
taient près des Oinophytes une éclatante victoire. Les murs
de Tanagra furent rasés, les Opuntiens durent livrer cent de
leurs plus riches citoyens comme otages, et pour assurer l'io-
tluence d'Athènes sur la Boiotie, la Locris et la Phokis, des
gouvernements populaires furent établis dans toutes les villes^
Pendant Tannée 455, qui vit l'achèvement des longs mura^
d'Athènes et la capitulation d'Aigine, la flotte athénienno
commandée par Tolmidès fit le tour de Péloponnèse, brûla
les chantiers des Lakédaimoniens à G^theion et à Mothonè,
enleva Ghalkis d'Acarnanie. aux Corinthiens, Naupactos aux "|
Locriens Ozoles et attira dans Talliance d'Athènes les Achaieos |
et les lies de Zakynthos et de Képhallènia. Les Messèniens
assiégés depuis dix ans dans Ithômè ayant été obligés de capi-
tuler, Tolmidès les établit à^Naupactos, où leur présence devait
être pour Sparte une perpétuelle menace. Athènes était arri?ée |
à un degré de puissance qu'elle ne dépassa plus et qu'elle ne
garda pas longtemps.
Gomme un avertissement de l'instabilité des choses, elle
apprit l'issue désastreuse de son expédition en Egypte. Artaxerxès
y avait envoyé Mégabaze avec une puissante armée. Les par-
tisans d'Inaros et ses auxiliaires athéniens furent assiégés
dix-huit mois dans l'Ile de Prosopitis. Les Perses détournèrent
un des bras du Nil, mirent à sec la flotte athénienne et péné-
trèrent dans l'île. Les Athéniens incendièrent leurs vaisseaux et
se rangèrent en bataille ; la plupart périrent, quelques-uns seule-
ment se sauvèrent à Kyrènè en passant par la Libye. Cinquante
trirèmes athéniennes qui venaient renforcer l'expédition furgnt
détruites dès leur arrivée. L'Egypte, dont Tinsurrection avait
duré six ans, rentra sous le joug des Perses. Inaros, pris par
trahison, fut mis en croix. Un autre chef, nommé Amyrlaios
par les Grecs, parvint à se maintenir dans les marais du
Delta.
Mort de Kimon. Fin de la guerre médique. — Kimon,
rappelé de son exil, resta fidèle à sa politique : paix entre les
dbyGoogk
FIN DE LA GUERRE MÉDIQUE. 431
Grecs, guerre à outrance contre les Perses. Ils ménagea une
trêve de cinq ans avec Sparte, et aussitôt qu'elle fut conclue,
il partit pour Kypros avec deux cents galères, comptant passer
de là en Egypte, où les Athéniens avaient une défaite à venger.
Il y a un désaccord complet entre Thucydide, Diodore et
Plutarque, au sujet de cette expédition qui forme le dernier
épisode des guerres médiques. Selon Plutarque, Kimon mou-
rut d'une blessure ou d'une maladie pendant le siège de Kition;
sa mort fut tenue secrète par les autres généraux, et la flotte
revint en Attique sans être inquiétée. Selon Thucydide, les
Athéniens ayant abandonné le siège de Kition à cause de
la famine, livrèrent devant Salamine de Kypros un combat
de terre et un de mer contre les Phéniciens, les Kypriotes
et les Kilikiens, et furent vainqueurs dans ces deux combats.
Diodore place cette double victoire avant la mort de Kimon»
Il ajoute qu'Artaxerxès effrayé envoya une ambassade aux
Athéniens pour demander la paix, qui fut conclue aux condi-
tions suivantes : le roi reconnaissait l'indépendance des villes
grecques de l'Asie mineure et s'engageait à ne pas envoyer de
troupes à une distance de trois jours de la côte, ni de vaisseaux
au delà de Phasélis et des îles Chélidoniennes ; les Athéniens
de leur côté promettaient de ne plus troubler le roi dans ses
domaines. Thucydide ne dit rien de ce traité. Plutarque en
parle, mais il le place après la bataille de l'Eurymédon. Grote
adniet, malgré le silence de Thucydide, l'existence de ce traité j
auquel on n'aurait pas dû attacher le nom de Kimon, et qui
ne peut sembler glorieux pour les Grecs que si on le compare
à celui qui fut conclu plus tard par Antalkidas. Kimon n'aurait
pas consenti à l'abandon de l'Egypte et des villes grecques dé
Kypros ; c'eût été renoncer à la politique panhellénique qu'il
avait toujours défendue. Cette politique n'eut pas de représentant
après lui ; elle avait pour condition nécessaire l'alliance de
Sparte et d'Athènes, et cette alliance avait contre elle le parti
démocratique, w Après la mort de Kimon, dit Plutarque, rien
de grand ne se fit ou ne fut tenté contre les Barbares. Les
Grecs, animés les uns contre les autres par les démagogues,
sans que personne se mit entre eux pour les séparer, en vinrent
enfin à ces guerres impies qui ont relevé la puissance des
dbyGoogk
432 DÉFECTION DES BOIOTES ET DES MÉGARIENS.
Perses. » Ajoutons, ce qui est plus triste encore, que les
rivalités des cités grecques ont préparé la domination des rois
de Macédoine.
Défection des Boiotes et des Mégariens. Soumission
de TËuboia. — L'alliance des Athéniens avec les Boiotes
n'avait d'autre garantie que les gouvernements populaires
établis dans les villes après la bataille des Oinophytes. Mais
la démocratie ne s'impose pas, et les peuples qui n'ont pas
su la conquérir savent encore moins la conserver. Les aristo»
crates exilés s'emparèrent d'Orchomène, de Chéronée et de
quelques autres villes. Les Athéniens voulurent comprimer
la révolte avant qu'elle eût pu s'étendre, et malgré les avis de
Périclès qui les engageait à faire des préparatifs sérieux, mille
volontaires appartenant pour la plupart à de riches familles
se mirent en campagne sous la conduite de Tolmidès. La petite
troupe reprit Chéronée, mais aux environs de Coroneia, elle
fut investie par des exilés d'Orchomène auxquels s'étaient
joints des Locriens et des exilés de l'Ëuboia. Tolmidès fut tué
avec une partie de ses soldats, les autres furent emmenés en
captivité. Pour ravoir les prisonniers, les Athéniens abandon-
nèrent la Boiotie. L'Euboia se souleva à son tour, Périclès partit
pour la réduire avec cinq mille hoplites ; mais pendant qu'il
était en marche, on apprit que les Mégariens venaient de
massacrer la garnison athénienne qu'eux-mêmes avaient
demandée. En même temps, la trêve de cinq ans étant expirée,
une armée Spartiate, commandée par le jeune roi Pleistoanax,
que les Éphores avaient placé sous la direction de Gléandridas,
envahit l'Attique par les défilés de Gérania et ravagea le terri-
toire d'Eleusis. Cependant elle se retira presque aussitôt sans
avoir combattu, et Périclès reprit sa marche vers l'Euboia.
Il la soumit et reçut les habitants à composition, excepté ceux
d'Histiaia qui avaient massacré l'équipage d'un vaisseau athé-
nien ; il les chassa de leur territoire, qui fut partagé entre
les pauvres d'Athènes. Les Lakédaimoniens, étonnés de la
brusque retraite de leur armée, accusèrent Gléandridas et Pleis-
toanax de s'être laissé corrompre et les exilèrent. Quand
Périclès rendit ses comptes au peuple, il porta une somme de
dix talents sous ce titre : dépenses nécessaires ; c'est ce qu'on
dbyGoogk
LA TRÊVE DE TRENTE ANS. 433
nomme aujourd'hui les fonds secrets. Le peuple comprit et ra-
tifia sans demander d'explications.
La trêve de trente ans. — La défaite des Athéniens
à Coronée leur fit perdre tout le fruit de la victoire, des
Oinophytes. Par le traité conclu pour trente ans en 445,
ils durent abandonner Troizen et les points qu'ils occu-
paient en Achaïe, ainsi que les ports de Pègai et de Nisaia
qu'ils ne pouvaient plus garder depuis la défection de Mé-
gare, mais ils conservèrent les îles d'Aigine et d'Euboia.
En limitant leur influence sur la Grèce continentale, ce
traité les obligeait à concentrer toute leur activité sur leur
empire maritime. La guerre contre les barbares étant ter-
minée, il n'était pas facile de maintenir ce groupement hié-
rarchique de vassaux et de tributaires qu'on nommait l'al-
liance athénienne. L'hégémonie, ou suzeraineté militaire de
Sparte semblait moins onéreuse, car Sparte n'avait pas de
flotte à entretenir ; ses alliés lui fournissaient des soldais
en temps de guerre, mais en temps de paix ils ne payaient
pas de tribut et gardaient toutes les apparences de l'auto-
nomie. Parmi les alliés d'Athènes, les îles de Chios, de
Lesbos, de Samos, qui fournissaient des vaisseaux et des trou-
pes, étaient à peu près dans la situation des Tégéates ou des
Oorinlhiens parmi les alliés de Sparte ; mais ceux des confé-
dérés qui, dès le temps d'Aristide et de Kimon, avaient préféré
s'imposer un tribut, les Naxiens et les Thasiens qui avaient
essayé de se séparer de la ligue athénienne, les Aiginèles qui
n'y étaient entrés que par force, étaient moins des alliés que
des sujets ; leur condition peut se comparer, non pas à celle
des Hilotes et des Messéniens, car ils conservaient leur liberté
individuelle, mais à celle des Périœkes laconiens. Pour les
Grecs d'Asie, l'autonomie communale n'était plus qu'un sou-
venir ; le tribut qu'ils ne payaient plus au roi de Perse, il
fallait le payer à la République d'Athènes. Ce système, qui
faisait de la démocratie athénienne une aristocratie à l'égard
de ses alliés, ne pouvait manquer d'exciter bien des colères.
Si Paris, qui n'a que le privilège inutile d'être le siège du gou-
vernement, soulève par cela seul la jalousie des provinces, on
peut se figurer quelle irritation devait produire l'idée d'uno
L. M. <- HisT« DBS GftSGS. 25
dbyGoogk
dbyGoogk
DÉMAGOGIE DE PÉRICLÉS. 435
jours, un Athénien n'avait au-dessus de lui que rassemblée
de ses égaux, parce que le tout est supérieur à chacune de ses
parties. Le peuple délibérait sur les mesures proposées par le
Sénat, ou conseil des Cinq-cents, volait les dépenses et ratifiait
les comptes, recevait les ambassadeurs, nommait des fonc-
tionnaires toujours révocables, comptables et responsables,
soutenait les guerres qu'il avait décrétées et obéissait aux lois
qu'il avait faites. Pour le diriger, il fallait commencer par le
convaincre, et si Périclès fut un puissant ministre, c'est parce
qu'il était un grand orateur. Sa puissance, comme autrefois
celle de Solon, était purement morale. Solon avait été le père
de la dénriocratie : Périclès en fut l'amant ; il voulut en faire
une idole parfaite, pour l'offrir à l'admiralion du monde, et il
y réussit ; l'Athènes de Périclès, qui a mérité d'être appelée la
Grèce de la Grèce, occupe le zénith de la civilisation. On
pourrait sans doute rêver quelque chose de plus, une large
extension du système démocratique à toutes les parties d'un
vaste territoire; on pourrait préférer à cette cité reine une fé-
dération égalitaire de cités libres. Mais Périclès n'était pas un
rêveur: la Ligue de Dèlos n'existait plus, il n'essaya pas de la
ressusciter. Ce qu'il voulait, c'est que le peuple-roi fût digne de
commander à des hommes libres, qu'il fût l'arbitre de leurs
différends, le prolecteur de leur commerce, assez fort pour les
défendre par ses vaisseaux et ses armées. Dans une monar-
chie, on trouve naturel que le roi ait une liste civile, et de
magnifiques palais pour y donner des fêles brillanles : Péri-
clès, qui prenait au sérieux la souveraineté du peuple, voulait,
par un emploi large mais judicieux des revenus publics, attri-
buer à ce souverain collectif tous les privilèges de la royauté.
Les Clèrouchies. — Le développement rapide de l'empire
maritime d'Athènes surexcitait les espérances ; on parlait de
conquérir la Sicile, l'Étrurie, Carthage. Périclès combattait
ces ambitions téméraires, trouvant que les Athéniens n'avaient
pas trop de toutes leurs forces pour conserver ce qu'ils possé-
daient. 11 envoyait chaque année en course soixante galères,
montées par un. grand nombre de citoyens qui, soudoyés huit
mois de Tannée, se formaient à toutes les connaissances de la
marine. Ces expéditions maritimes montraient la puissance
dbyGoogk
dbyGoogk
LE DROIT AU TRAVAIL. 437
plus ferliles avaient été partagées entre des citoyens d'Athènes,
devint le grenier de l'Atlique. D'autres furent établis à Naxos
etàAndros. Les Clèrouques restaient citoyens d'Athènes et
inscrits sur les registres de leurs dèmes. Ils étaient soumis aux
lois et aux décrets votés par le peuple et ils pouvaient prendre
part aux délibérations. Rien ne les obligeait à résider sur leurs
terres ; l'absence pour un voyage dans les Clèrouchies était
acceptée comme excuse valable par les tribunaux, et quand
une taxe foncière était établie à Athènes, les Clèrouques la
payaient également. Lytton Bulwer compare la situation des
Clèrouques athéniens dans les lies de la mer Egée à celle des
propriétaires anglais en Irlande. Les Clèrouchies étaient
comme des garnisons qu'Athènes établissait dans les provinces
de son empire maritime pour protéger son commerce et as-
surer ses approvisionnements, dans le cas d'une invasion de
l'Attique par les Péloponnésiens.
Le droit au travail. — Une démocratie ne doit pas laisser
à des particuliers le soin de nourrir les pauvres. Les larges
aumônes de Kimon faisaient honneur à sa charité, mais l'au-
mône humilie celui qui la reçoit, môme s'il ne l'a pas deman-
dée: elle entretient la paresse sans détruire la misère et peut
devenir pour un ambitieux un moyen de corruption. Le travail
seul affranchit l'homme sans l'humilier. Dans une société bien
constituée, il ne doit pas y avoir de forces perdues, et les Athé-
niens avaient fait une loi contre l'oisiveté. « Chez nous, dit Pé-
riclès, dans Thucydide, il n'est honteux à personne d'avouer
qu'il est pauvre, mais ne pas chasser la pauvreté par le travail,
voilà ce qui est honteux. Les mêmes hommes se livrent à leurs
affaires particulières et à celles du gouvernement, et ceux qui
font profession du travail manuel ne sont pas étrangers à la
politique. » La question économique qui, sous le nom de pau-
périsme, épcîuvante nos vieilles sociétés, Périclès l'avait résolue
il y a plus de deux mille ans par le travaiL Le peuple l'ayant
chargé de diriger les finances de la république, il trouva dans
la reconstruction des temples un moyen de faire travailler une
foule d'ouvriers de toutes professions. Comme il prévoyait que
les dépenses qu'il aurait à faire soulèveraient une opposition
violente, il essaya de présenter l'œuvre qu'il méditait comme
dbyGoogk
438 CONCURRENCE ART
une manifestation panhellénique. C
les Grecs dans l'invasion de Xerxès
temples. Rien de pareil n'était arrive uau» ica guoAi^^o h**" '^"
Grecs se faisaient entre eux ; la religion étant la môme pour
tous, les lieux sacrés étaient toujours respectés de part et
d'autre. Les Perses n'avaient pas eu les mêmes scrupules;
leur religion était iconoclaste, comme celle des Ju
rapproche beaucoup. L'acharnement déployé contre
et les statues des Dieux avait donné à la guerre Méd
ractère d'une guerre religieuse. Les Grecs avaient <
solu de ne pas relever les temples détruits et d'en l
sister les ruines comme témoignage de la fureur se
barbares. Périclès, bien décidé à ne pas tenir com]
résolution, essaya de la faire annuler par un vot
« Un décret, dit Plutarque, invita tous les peuples
rope et d'Asie, toutes les villes, grandes et petites,
des députés à Athènes, pour y délibérer sur la reconsl
temples brûlés par les barbares, sur les sacrifices
voués aux Dieux pour le salut de la Grèce pendani
enfin sur les moyens de rendre la navigation sûre
la paix entre tous les Grecs. » Les Spartiates, qui n
souffert de l'invasion, ne voulurent pas jouer le rôle
ses dans un congrès qui aurait été tenu à Athènes et
les Athéniens; ils firent rejeter la proposition de P
Concurrence artistique. — Puisqu'on ne voula
action commune, il fallait se préparer au concoi
dans les jeux Olympiques. Une lutte pacifique alla
sur le terrain de l'art, et la palme allait être viveme
caries grands artistes ne manquaient pas. Dans s£
sance pour les Dieux qui l'avaient délivrée, la Grê
vait partout des temples et multipliait leurs imag
temple d'Aigine, dont j'ai parlé au chapitre précé
grands temples d'Agrigente et de Sélinonle qui n
terminés, il faut citer le temple d'Olympie, bâli
Libon et déjà en partie orné de sculptures. Le peinl
style, Polygnote de ïhasos, qui, pendant la stratégi
avait décoré le Thèseion et le Portique d'Athèn
probablement à cette époque les^ peintures de 1
dbyGoogk
SOLUTION DU PROBLÈME SOCIAL. 4:^9
Delphes représentant, d'un côté la prise de Troie, de Vautre le
séjour des morts. Pour assurer Tunité artistique des travaux
qu'il voulait faire exécuter à Athènes, Périclès en fit donner la
direction générale à son ami Phidias, qui était à la fois peintre,
fondeur, sculpteur et toreuticien. Ce choix n'était pas une fa-
veur ; il était justifié par la réputation de Phidias, dont on citait
plusieurs ouvrages célèbres : une statue d'Athènè faite pour
les Lemniens et qu'on surnommait la Belle; une Athènè guer-
rière en bois doré, avec la tête, les pieds et les mains en mar-
bre; c'est ce qu'on appelait un acrolithe. Cette statue avait été
commandée par les Plataiens pour le temple qu'ils élevèrent
avec le butin de la bataille de Platée. Phidias avait en dehors
d'Athènes des rivaux dignes de lui: les plus fameux étaient My-
ron d'Eleuthère et l'Argeien Polyclète ; tous deux avaient eu
comme lui pour maître Agéladas d'Argos. Myron s'attachait
surtout à rendre le mouvement et la vie ; il devait sa réputation
à ses statues d'animaux et à ses athlètes en bronze, comme le
Coureur et le Discobole. Polyclète, qui fit plus tard pour Argos,
sa patrie, une statue colossale d'Hère en or et en ivoire, était
célèbre, comme Myron, par ses figures d'athlètes. Son Dory-
phore, ou lancier, devint le canon, c'est-à-dire la règle et le
type des plus belles proportions du corps humain. C'est à lui
que Pline attribue ce principe qui donne tant de vie aux statues
grecques, de faire porter le corps principalement sur une
jambe. On disait communément qu'il était supérieur à Phidias
dans la représentation des hommes, mais que Phidias savait
mieux faire les Dieux.
Le problème social résola par Part. — Thémistocle avait
entouré la ville d'un rempart et créé le port du Plrée; Kimon
avait embelli Athènes de jardins, de portiques et de gymnases ;
il avait élevé le Thèseion et le temple de la Victoire. Mais les édi-
fices construits sous l'administration de Périclès surpassèrent
tout le reste par leur inimitable beauté. Son nom et celui de
son ami Phidias sont restés attachés à l'histoire du plus grand
siècle de l'ait. Le triple monument des divinités protectrices de
l'Altique, sur l'emplacement du vieux sanctuaire d'Erechlheus ;
le Parlhénon, ou temple de la Vierge, construit par Ictinos et
Callicratès pour remplacer celui qu'avaient brûlé les barbares :
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ION PU PR
ule des Pr _ _
sacré de l'Acropole, justifient encore par
Uion unanime de l'antiquité. Dans la ville
théâtre de Dionysos et on bâtit pour les
s un Odéon, rappelant par la forme la tente
^riclès lui-même qui en avait dessiné le
)n intérieure et extérieure de tant de mo-
une foule innombrable d'ouvriers et d'ar-
e marbre, le bois, les métaux, pour exécu-
i sculptures, les tapisseries. Tous les arts
it à Tarchitecture pour exprimer la pensée
e du peuple, l'élevant au bien-ôtre par le
ence du vrai et du juste, par le spectacle
^ait trouvé dans Tart, qui est la forme la
1, la solution du problème de la misère,
ndément l'équilibre de l'Europe moderne.
il au peuple, abondamment pourvue de
défense, doit employer ses richesses à des
mnent le bien-ôtre pendant leur exécution
venir une gloire immortelle. Des ateliers
nt en œuvre toutes, sortes de matériaux,
ï industrielle et artistique, occupent tous
n salaire à presque toute la ville, quipour-
à sa subsistance et à son embellissement,
et leur force rendent propres au service
une paie suffisante. Quant aux ouvriers, à
5 dans les rangs de l'armée, il fallait qu'ils
• revenus publics sans l'attendre de la pa-
En engageant le peuple dans ces grandes
peront longtemps toutes les industries, on
ion sédentaire les moyens de profiter des
d'y participer comme ceux qui sont sur la
lisons et en campagne. Pour mettre en
rain, l'ébène, le cyprès, il faut des char-
\y des sculpteurs, des fondeurs, des teintu-
ies ivoiristes, des tisserands, des peintres,
ransportcr ces matériaux, il faut des corn-
lots, des pilotes, des charrons, des voitu-
dbyGoogk
LE TRAVAIL LIBRE ET LE TRAVAIL SERVILE. 441
riers, des charretiers, des cordiers, des paveurs, des mineurs.
Et chaque industrie, comme un général, enrégimente toute une
armée de manœuvres qui sont comme des instruments et un
corps de réserve. Ainsi le travail répand et distribue Tabon-
dance parmi tous les âges et tontes les conditions. »
Le travail libre et le travail servile. •— Ce discours de
Péridès, rapporté par Plularque, est le plus précieux des rares
documents qui nous restent sur l'histoire du travail dans
l'antiquité. Il prouve d'une manière incontestable qu'à Athènes,
dans la plus grande période de la civilisation, toutes les pro-
fessions industrielles étaient exercées par des citoyens. Il y
avait cependant , à cette époque et même antérieurement ,
des esclaves à Athènes. lis étaient employés au travail des
mines par les fermiers de l'État, à la culture des terres par les
grands propriétaires ruraux; ils ramaient sur les vaisseaux
marchands, ils remplissaient chez les riches citoyens ces fonc-
tions domestiques qui gardent encore aujourd'hui le titre de
fonctions serviles, et que les citoyens les plus pauvres auraient
rougi d'exercer. Mais ce n'était pas à leur entretien que Péri-
clès consacrait les fonds de l'État. A Athènes, les grands tra-
vaux d'art n'étaient pas exécutés par une population servile
comme les monuments de l'Egypte, de l'Assyrie et de la Perse,
ni par des prisonniers de guerre comme la piscine d'Agrigente
et les carrières de Syracuse; ils étaient réservés aux citoyens,
et c'est ce qui explique leur perfection. Ce n'étaient pas non
plus des esclaves qui, à la môme époque, gravaient lès coins
des admirables monnaies de la grande Grèce et de la Sicile,
qui modelaient les figurines de terre cuite trouvées dans le
cimetière de Tanagra, qui peignaient les vases dits du beau
style, à figures rouges sur fonds noir, d'un dessin si libre et si
pur, et ces fioles blanches qu'on nommait Lékylhia et qui ne
se fabriquaient qu'à Athènes, dans le quartier du Céramique.
Plus tard, quand la continuité des guerres eut fait déserter les
ateliers, quand à Athènes et dans le reste de la Grèce il n'y
eut plus pour les citoyens d'autre métier que celui des armes,,
comme cela était arrivé à Sparte dès l'origine, quand on
trouva plus commode de s'enrichir par le pillage et le butin
que par l'industrie, alors le travail servile remplaça le travail
25.
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444 LES FRONTONS ET LES MÉTOPES.
La religion et la patrie associées dans Tart (1). -— Les
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fragments qui nous restent des sculptures du Parthénon nous
(1) De la sculpture antique et moderne^ par Louis et René Méuard,
ouvrage couronné par l'Académie des beaux-arts, 1867.
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FRISE DU PARTHÉNON. 44î>
montrent comment les Grecs comprenaient Talliance des arts
et traduisaient par la décoration d'un monument la pensée
dont il était le signe visible. Le plan conçu par Phidias, en
exprimant les rapports mutuels d'Athènè et de la ville qui
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ALLIANCE DU RÉEL ET DE L'IDÉAL. 44<>
optiques de la décoration monumentale, les figures des fron-
tons et des métopes, destinées à recevoir directement la
lumière, sont en ronde-bosse ou en haut-relief, tandis que
celles de la frise, éclairées seulement par le reflet du sol, n'ont
qu'une très faible saillie. Il faut remarquer aussi la symétrique
alternance des lignes verticales dans les triglyphes et des lignes
diagonales dans la composition des métopes.
Alliance du réel et de Tidéal. — Le comte de Ghoiseul-
Gouffier, ambassadeur de France en Turquie, ayant rapporté
au Louvre une des métopes du Parthénon et une tablette de la
frise, lord Elgin, ambassadeur d'Angleterre, s'autorisa de ce
mauvais exemple et enleva tout ce qui restait des deux frontons^
les métopes et plus de deux cents pieds de la frise, pour le.*^
vendre au Musée britannique. Le gouvernement hésitait à
donner la modique somme demandée, et l'auteur du sacrilège
flétri par Byron ne serait peut-être pas rentré dans ses frais
sans une consultation archéologique de Visconti. L'art tient
une si petite place dans l'éducation moderne que bien peu,
môme parmi les lettrés, sont en état de comprendre la beau 16
incomparable de ces marbres mutilés; on les admire sur la
foi des artistes. Mais chez ceux-ci, du moins, l'admiration est
sincère et unanime. Les écoles les plus opposées sont d'accord
sur ce point. Bien des théories exclusives se sont produites de
nos jours, le but de l'art est la vérité pour les uns, la beauté
pour les autres; mais devant ces marbres sacrés, toutes les
oppositions disparaissent, chacun y reconnaît son rêve, car
là comme dans les poèmes d'Homère, le réel se confond avec
l'idéal ; c'est l'hymen de la terre et du ciel. Les sculpteurs ne
se lassent pas d'admirer le modelé sobre et libre à la fois de
ces figures nues où les plans sont accusés avec tant de fermeté,
où se joignent à la rude fierté de lallure toutes les délicatesses
de la forme, tous les frémissements de la vie. On n'est pas
moins frappé par la souplesse et la légèreté des draperies,
dont les plis abondants suivent les formes et les font valoir, en
les accompagnant de moelleuses ondulations; par la grâce et
l'abandon des figures de femmes, par la simplicité des attitudes,
la pureté des lignes, l'harmonie des proportions. On retrouve
ce sentiment intime et profond de la vie dans toutes les parties
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454 LES PROPYLÉES.
ment fut détruit ea 1656 par une explosion; il n'en reste que
quelques débris de colonnes. On ne sait pas si .les Propylées
'^
étaient décorées de sculptures; mais sur la plate-forme, de-
vant le portique intérieur et dans l'axe de la porte principale,
dbyGoogk
L'fiHECHTHEION. 455
comme pour protéger la citadelle, se dressait, étendant son
bouclier sur la \ille, la colossale statue de bronze d'Alhènè
protectrice, ouvrage de Phidias. Sur une monnaie athénienne
on la voit représentée au sommet de l'Acropole, entre les Pro-
pylées et le Parthénon qu'elle dépasse de la tôle et des épaules.
On l'apercevait en mer depuis le cap Sounion. Quand Alaric
et ses Goths arrivèrent devant Athènes, cette grande statue
armée leur fît peur, et ils n'osèrent pas attaquer la ville. Athènè,
reniée par son peuple, le protégeait encore .
L'Erechtheion. — On ignore quel fut l'architecte de l'Erech-
theion et à quelle époque il fut construit ; ou sait seulement
qu'il ne fut achevé qu'après l'année 409. Malgré le silence dé
Plutarque, il est probable que les premiers travaux furent en-
trepris pendant l'administration de Périclès, car c'était le sanc-
tuaire antique et vénéré de la religion des Athéniens. D'après
l'Odyssée, la maison d'Erechtheus était le séjour préféré
d'Alhènè. L'olivier spontané et le puits d'eau marine, témoins
de la contestation d'Alhènè et de Poséidon au sujet de l'Atti-
que, se trouvaient, selon Hérodote, dans le temple d'iilrechtheus
brûlé par les barbares. On disait que le lendemain de l'in-
cendie, la souche de l'olivier planté par la Déesse avait
poussé un rejeton d'une coudée. Le monument d'ordre ioni-
que élevé sur l'emplacement de cet ancien temple était con-
sacré, selon Pausanias, k Athènè Polias, ou patronne de la
ville, et à Pandrose, une des filles de Kekrops et la première
prêtresse d'Alhènè ; Poséidon y avait un aulel sur lequel on
sacrifiait aussi à Érechlheus. La nécessité de respecter des
choses saintes qui se rattachaient aux plus anciens souvenirs
delà religion nationale, l'olivier sacré, la source d'eau salée,
l'empreinte du trident de Poséidon, explique la disposition
irrégulière et toute spéciale de l'Erechtheion, l'inégalité du sol
sur lequel il est bâti, les portiques latéraux appuyés sur l'édi-
fice principal et dans l'un desquels des statues de jeunes
filles, au lieu de colonnes, supportent l'entablement.
Ces jeunes filles, que Pausanias appelle Canéphores, ou
porte-corbeilles, et qu'on nomme aussi Arrhéphores ou Errhé-
phores, avaient un rôle important dans la fête des Panalhé-
«ées;on les voit représentées sur la frise orientale du Par-
dbyGoogk
456 EMl'LOl DU TRÉSOR FÉDÉRAL.
thénon, au-dessus de la porte d'enlrée. Les Canéphores de
l'Erechlbeion sont le plus bel exemple de ces statues servant do
colonnes qu*on nomme Caryatides. La corbeille qu'elles por-
tent sur la tôte tient lieu de chapiteau. Les autres parties de
rédifice offrent le modèle le plus pur etle plus élégant de l'ar-
<îhitecture ionique. On y a trouvé des traces nombreuses^'una
riche ornementation polychrome. Dans le sanctuaire principal
était l'antiqne statue de bois d'Athènè Polias, qu'on disait
tombée du ciel, et dont le voile, brodé par les jeunes filles
d'Athènes, était renouvelé périodiquement à la fête des Pana-
L'£rechtbeion.
thénées. Une lampe d'or à mèche d'amiante brûlait perpétuel-
lement devant ce vieux simulacre, dont on croit voir une
imitation dans l'Aihènè du musée de Dresde ; les petits carrés
où sont sculptés en bas-relief les combats des Dieux et des
Géants reproduisent les broderies du péplos.
Emploi du trésor fédéral. — Les revenus d'.
sistaient dans le fermage des domaines publics
des^mines de Laurion, dans les taxes sur les étrar
liés et sur les esclaves, dans le produit des (
amendes et confiscations. Ces revenus n'auraiei
payer les grands travaux d'art entrepris par Péricl
dbyGoogk
EMPLOI DU TRÉSOR
dant les dernières guerres, sur la
trésor commun des alliés, qui ne
Dèlos, avait été transporté à Athèn
en employait une partie aux édifie
des principaux sujets de plainte des
se dissimuler, disaient-ils, que Tar
Canéphore
de l'Ërechlbetoo.
AthënèPolias(Mu
guerre est employé à orner notre
coquette que l'on couvre de bijou:
Périclès répondit par un argum(
pas opposer aux provinciaux, s*ils
subvention des théâtres de Paris
les chaires du Collège de France, i
^as compte aux aUiés de l'emploi
L. M. — HisT. DES Grecs.
dbyGoogk
LES PANAT]
pour eux : « Ne
X nous éloignoni
ni soldats, ils i
;ent n'appartient
i le reçoivent,
Le peuple n*é
n^ et allant dr
i j'aie trop dép
, et beaucoup 1
le sera pas à vc
ml. Mais mon
ptions des édifie
oulaitpas lui lais
itorisa à prendi
sans rien épargi
réponse ; si on
se, car sa fortun
ivait avec une si
, était au-dessus
es sommes immi
noine ne s'était j
Lbliques : Pane
Depuis la mort
hef Thucydide, 1
vec l'historien d
;)ler Périclès, pi
fut contre Thuc]
l'appui du peu
poète comique
ju'il avait entre]
assez d assurer
avait ; il faut qu
Drale, car la dén
justice. Les fôl
les, coupent le t
i même temps p<
silion. Les Athéi
3 les peuples, el
dbyGoogk
ELEUSINIES.
breuses à Athènes que partout ailleurs. La plus cél
des Panathénées, rappelait la fusion primitive des
l'Attique dans l'unité de la Cité. Après la process
sentée dans la frise du Parthénon, il y avait des
chars, des exercices équestres où les cavaliers poi
flambeaux, des luttes gymniques, des récitations
homériques et des concours de musique pour lesqu
avait fait construire l'Odéon. Les athlètes vainqi
vaient pour récorppense un vase d'huile tirée c
sacré. ïl y a au Louvre plusieurs de ces vases p
Vase panathénaïque (Musée du Louvre).
ques, avec la figure d'Athènè, un coq en signe de
l'inscription ton A0ENE0EN A0AON, car les voyell
H et n n'étaient pas encore employées.
Après les Panathénées, les fêtes les plus importai
les Thesmophories et les Eleusinies, célébrées en l'I
Dèmèter et de Corè qu'on nommait les Grandes D
mèier, la terre productrice, mère de la vie organ
môme temps la législatrice des hommes, car le trav
est le principe de toute civilisation. Sa fille Corè, la
qui revient tous les ans du royaume souterrain (
lumière du ciel, est le symbole éclatant de l'imn
dbyGoogk
460 L'INITIATIOI
l'âme. A Athènes, les Thesmop
gislatrice, destinées à solenn
étaient célébrées exclusivemei
lar une comédie d'Ar
)endant les cérémonie
Les Eleusinies élaie
le où le canton d'E
i. D'après une traditio
Thucydide fait allusio
!t Athènes, les Eleusi
e, à la condition de c
i Eumolpides et des Ki
avec les cérémonies 1
ncienne autonomie. L
la démocratie d'Athèn
n de cultes privés en
es tribus en corps de i
s fut combiné avec le
prêtres d'Eleusis étai
js par les femmes d'i
éleusiniennes. Il n'y s
ii'il n'y en aurait che;
I sacristain ou de su
le s'inquiétait pas de c
rien d'incompatible ei
it républicain.
iation mystique. —
ibré par les Eumolpid
t un culte privé, Qi
is la situation d'un é
sous la condition toui
Ues et de n'en pas div
ire, dérivé de [xûeiv, fei
ervé d'abord aux fête
lies accomplies dans h
s traduisons par Initia
perfectionnement, ex
es visibles du mystère
y Google
LE DRAME D'ELEUSIS. 461
participaient. Un mystère n'était pas pour les Grecs un dogme
incompréhensible à la raison et imposé par l'autorité ou ac-
cepté par la foi : cette idée est tout à fait étrangère au poly-
théisme; c'était une chose ineffable , àwoppYiTov, qu'
vait pas révéler. Violer le secret des mystères, c'étai
une propriété privée, et en môme temps commettre i
car ceux qui demandaient l'initiation s'engageaient p
à un silence absolu. Toute profanation était poursu
Eumolpides devant les tribunaux. Par l'admission (
nicns dans la cité athénienne, la religion des mystèr
venue un privilège des citoyens d'Athènes, entouré
restrictions que le droit de cité et protégé par autan
ties. La violation du secret devenait ainsi une sort
d'État. Mais il n'existe aucun motif d'imaginer une
quelconque entre ce culte et les formes publiques de
Les initiés ne formaient pas une aristocratie intc
rien, absolument rien ne justifie l'opinion qui les
comme une classe de mandarins lettrés, méprisant leî
du peuple. Le mystère éleusinien n'était pas une nég
mythologie populaire; il était comme elle entière
bolique, sans aucune espèce d'enseigement ni d'exp
chacun pouvait le comprendre à sa manière. Lessym
démontrent pas, ils s'exposent, et la conviction descei
âmes préparées à recevoir. Ce caractère se retrouve r
les religions modernes: Jésus-Christ ne parle qu'en
Le drame d'Eleusis. — Comme toutes les autre
l'Hellénisme, le drame d'Eleusis avait sa source dan
tions de l'époque pélasgique et a reçu sa première
Tépopée. Nous n'avons plus l'hymne de Pamphôs i
mais un hymne homérique, retrouvé en Russie à la fi
dernier, expose en détailla légende éleusinienne. Les
la végétation, confondues dans un môme symbole a
tinée humaine, les alternatives de la vie, de la mi
résurrection, sont exposées dans ce petit poème,
composé entre l'époque de la Théogonie d'Hésiode <
ras médiques. La nature y est représentée sous les I
mère (Tii p/ôrr^p, Ay.p.y.TYip),la vie sous ceux d'une jeum
vée par l'Invisible, Aidés, roi des profondeurs so
dbyGoogk
I
462 LE SANCTUAIRE DES GRANDE
pendant qu'elle cueillait le narcisse, I,. ^ — ^-
. mortelle, dans les champs de Nysa, au milieu des Okéanides.
. La Déesse irritée contre Zeus, qui a donné sa fille pour épouse
. au roi des morts, s'éloigne de l'assemblée des Dieux. Vêtue de
noir, cachée sous les traits d'une vieille femme, elle est accueil-
lie à Eleusis par les filles de Kéléos qui la conduisent à leur
lire. Mais rien ne peut distraire sa douleur, elle
te nourriture, jusqu'au moment où une vieille
[ambè, par ses propos joyeux, parvi
ors la Déesse accepte le Kykéon, le bi
lême enseigne la préparation. L'insliti
nsi rattachée à la légende religieuse,
l'expression extérieure du dogme, rej
ises de celte légende, dont les pcrsoi
3 par les hiérophantes et par les mys
mt de Gorè, le grand deuil de la natu
rs, Av:(xiQ7y)p à/.atà, puisTallégresse du ci(
'eclion du printemps, formaient un v
) ses alternatives de tristesse et de joie
e. Toute proportion gardée entre les s
\ époque barbare et les magnificences
it quelque chose d'analogue aux myst
^présentaient aussi la mort et la rés
îtnaire des Grandes Déesses. — 1
, où le blé avait été semé et récolté po
aient les temples d'Eleusis, précédés
*ement semblables à celles de l'acroi
es. il y avait un temple d'Artémis Pro
re, un autre consacré à Triptolème, u
idon. Quant au grand sanctuaire d'in
lu Anactoron, c'était un édifice couve
esliné à contenir la foule des mystes,
leurs et acteurs du drame d'Eleusis. «
[ue, fut commencé par Coroibos qui é
tonnes et y posa les architraves. ApH
lu bourg de Xypete, plaça le cordon et
es. Xénoclès, du bourg de Choleague
dbyGoogk
1»^
LE SANCTUAIRE DES GRANDES DÉESSES.
faîte du sanctuaire avec son ouverture, iwalov tcu iva
puçwae. » Cette dernière phrase, très obscure, a donné
foule de conjectures sur la façon dont Tédifice étal
I.e comble, quelle qu'en fût la forme, était supporte
-colonnade intérieure. Au-dessous de l'immense cell
inait comme un théâtre, était une crypte, ou salle soi
Jl y avait des processions symboliques figurant les c
Démêler et d'Hécate, et des effets de théâtre auxquels
lion de la scénographie grecque donnait un caractère
dbyGoogk
464 CULTE MYSTIQUE DE DIONYSOS.
et grandiose. Des clartés splendides, succédant tout à coup
aux ténèbres, faisaient passer les âmes d'une religieuse hor-
reur aux extases de l'espérance. L'idée de la vie éternelle jail-
lissait spontanément de cet enseignement muet, qui pénétrait
Tâme par les sens et la persuadait bien mieux qu'une démons-
tration philosophique L'enlèvement de Corè et son retour, ce
n'est pas seulement la graine jetée en terre et renaissant dans
la plante, c'est le réveil de l'âme au. delà du tombeau. Au der-
nier acte de l'initiation, le suprême objet de contemplation
mystique, offert par l'hiérophante à l'adoration des initiés, c'é-
tait l'épi de blé moissonné en silence, gage certain des promes-
ses divines, symbole rassurant de renaissance et d'immortalité.
Le Kykéon, ce breuvage sacré de la communion primitive, était,
comme le saint sacrement des chrétiens, un signe sensible des-
tiné à sanctifier l'homme. Quand les mystes avaient reçu la
nourriture divine et traversé tous les degrés de l'initiation,
leur bonheur était assuré môme dans la mort, car ils avaient
le secret de la vie éternelle (1).
Triptolème et Iakchos. Culte mystique de Dionysos ; les
Orphiques. — Triptolème, qui est seulement nommé dans
l'hymne homérique parmi les rois d'Eleusis, joua plus tard un
rôle plus important. Les monnaies éleusiennes et plusieurs
vases peints nous le montrent assis sur le char ailé de Dèmèter,
traîné par des serpents ; il fut même substitué à Minos comme
juge des morts, dans les légendes athéniennes. Un autre
personnage dont l'importance devint encore plus considérable,
Iakchos, n'est pas nommé dans l'hymne hon
dation avec les Grandes Déesses est donc pc
par un passage d'Hérodote qu'à l'époque des
la clameur des mystes (îay,vi), le long de la voi
était personnifiée sous le nom d'iakchos. Dt
d'Aristophane, Iakchos est invoqué dans l'e
des initiés, comme conducteur des mystères
des personnages de la pièce, s'associe à ce
qui prouve qu'on ne confondait pas encore
nysos. Il est difficile de savoir quand et con
(1) Pour les développements, voir mon ouvrage D
nique.
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468 LE FONDS THÉORIQUE.
Niobides ou au Laocoon. Quant à la mise en scène des tra-
gédies grecques, il est très difficile de s'en faire une idée. On
sait seulement que la scénographie était devenue de bonne
heure une branche spéciale de la peinture. Dès le temps d'Ais-
chyle, le peintre Agatharchos avait appliqué la perspective à la
décoration scénique, de façon à faire illusion aux yeux par
l'apparence de la réalité. L'invention de la perspective linéaire
est aussi attribuée à Démocrite et à Anaxagore. On fait honneur
de la découverte de la perspective aérienne à ApoUodore qui
trouva, dit Plularque, la dégradation et la décoloration de
l'ombre, çôopàv xal à7Ç0X?<«>«v oxtâ;.
Le fonds théorique. — A l'époque où le théâtre était en
bois, la sécurité publique avait paru exiger qu'on restreignit
le nombre des spectateurs en imposant une modique rétribu-
tion à l'entrée. Cette rétribution avait été maintenue après la
construction d'un théâtre en pierres, probablement en raison
des frais toujours croissants de la mise en scène. Rétablir les
entrées gratuites, c'eût été augmenter les charges, déjà bien
lourdes, de la chorégie. D'un autre côlé, il eût été contraire
aux principes de la démocratie d'écarter les citoyens pauvres
de ces représentations dramatiques qui étaient des fêtes
nationales et religieuses. 11 n'était pas admissible qu'un des
combattants de Salamine ne pût assister à la représentation
des Perses d* Aischyle, faute d'avoir de quoi payer sa place .
Sur la proposition de Périclès, une somme de deux oboles,
l'équivalent de la solde d'un matelot, fut allouée aux citoyens
pauvres pour leur permettre d'assister au théâtre. On créa à
cet effet une caisse spéciale qu'on appela le fonds théorique,
c'est-à-dire le fonds des spectacles. Aucun article du budget
de la république athénienne n'a autant offusqué les modernes;
pourtant nous trouvons tout naturel de subventionner l'Opéra,
pour permettre aux riches de payer leur place un peu moins
cher^ tandis que les pauvres, qui contribuent à cette subven-
tion par les impôts indirects, n'en peuvent pas profiter. Mais la
démocratie est tellement éloignée de nos mœurs qu'il nous
est difficile de comprendre la raison et le but des institutions
athéniennes. Le fonds théorique répondait au budget de l'ensei-
gnement supérieur; seulement, il faut tenir compte de la
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