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Full text of "Histoire des Grecs .."

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Histoire  des  Grecs 


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HISTOIRE  DES  GRECS 


V 


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A     LA     MÊME     LIBRAIRIE 


[istoire  des  Anciens  peuples  de  l'Orient,  avec  plus  de  500  illi 
trations  d'après  les  monuments,  par  Louis  Ménard,  docteur 

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lusée  de  peinture  et  de  sculpture,  par  Louis  et  René  Mes 
Avec  environ  onze  cents  gravures  par  Réveil.  10  vol.  in-l^« 


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A^  V,  605027 

'    ^\    (RECAP)  ......Google 


VI  AVERTISSEMENT. 


\ 


cet  ouvrage  ne  serviront  donc  pas  de  commentaire 

texte,  elles  en  seront  le  complément. 

En  mettant  sous  les  yeux  du  lecteur  un  certain  nombrj 
élèbres,  je  suis  obligé  de  leur  laisser  les  nomï 
^nent  dans  les  musées  où  elles  se  trouvent^ 
loms  leur  ont  été  imposés,  la  science  des  reW 
tait  pas  encore,  et  personne  ne  distinguait  le£ 
recs  de  ceux  des  Romains.  Aujourd'hui,  tout 
s  distingue  avec  raison,  mais  on  ne  peut  dé 
atues  que  par  les  titres  qui  leur  sont  attribuée 
logues.  Ainsi,  parmi  les  nombreuses  statuei 
,  il  y  a  la  Vénus  de  Médicis,  la  Vénus  de  Milo 
C apitoie,  la  Vénus  genitrix,  etc.  De  même,  pout 
e  statue  d'Artémis,  on  dit  la  Diane  à  la  biche, 
Herculanum,  la  Diane  de  Gabies,  la  Diam 
te.  On  a  beau  savoir  que  Faunus  est  un  Dieu 
ne  peut  changer  les  noms  du  Faune  à  l'enfant 
Silène,  du  Faune  au  repos,  qui  est  un  Satyre 
qu'on  croit,  de  celui  de  Praxitèle. 
Lirs  anciens  confondent  perpétuellement  lei 
>  et  les  Dieux  grecs.  Il  est  vrai  qu'on  n'est  pai 
me  pour  les  statues,  de  subir  la  tyrannie  di 
is  il  faut  comprendre  les  motifs  qui,  dans  l'ai 
daient  cette  confusion  possible  et  la  faisaien 
tre  naturelle.  Ce  n'est  pas  une  simple  questio 
aire,  c'est  une  question  plus  grave,  qui  s 
me  branche  importante  des  sciences  histori 
ire  des  religions.  Il  est  facile  de  s'en  convaincr» 
nt,  sous  ce  rapport,  les  auteurs  grecs  et  latin 
le.  Les  Juifs  attachent  aux  noms  divins  un 
taie  ;  ils  ne  cherchent  pas  si  les  noms  de  Baa! 
représentent  le  même  être  ou  la  même  idée 
L,  Baal  et  tous  les  Dieux  autres  que  leur  Die 
it  de  faux  Dieux»  et  les  Maccabées  se  révolten 


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T 


AVERTISSEMENT,  VII 


mire  les  rois  de  Syrie  plutôt  que  d'admettre  Tidentité 
feZeus  et  d'Iahweh.  Les  Grecs  et  les  Romains,  au  con- 
traire, ne  distinguent  pas  de  vrais  Dieux  et  de  faux  Dieux, 
Ils  ne  soupçonnent  pas  qu'il  puisse  exister  une  autre  reli- 
gion que  la  leur.  Pour  eux,  les  Dieux  sont  les  mêmes  chez 
tous  les  peuples  de  la  terre,  et  si  on  les  adore  sous  diffé- 
rents noms,  c'est  parce  qu'il  y  a  des  langues  différentes. 
Quand  Hérodote  parle  des  Égyptiens,  il  donne  à  leurs 
divinités  des  noms  grecs  ;  s'il  avait  eu  occasion  de  parler 
des  Juifs,  il  n'aurait  pas  manqué  de  dire  qu'ils  n'adoraient 
que  Zeus  et  ne  connaissaient  pas  les  autres  Dieux.  De 
même,  les  auteurs  latins  traduisent  invariablement  Zeus 
par  Jupiter,  Athènè  par  Minerva,  Hère  par  Juno,  Dèmèter 
par  Gérés,  Poséidon  par  Neptunus,  Aphrodite  par  Vénus, 
Artémis  par  Diana,  Hèphaistos  par  Vulcanus,  Ares  par 
j  Mamers,  Mavors  ou  Mars,  Corè  ou  Perséphonè  par  Pro- 
serpifla,  Dionysos  par  Liber,  Aidôneus  par  Orcus. 

Les  assimilations  de  ce  genre  ne  sont  pas  toujours  cor- 
rectes et  sont  quelquefois  difficiles  :  le  grand  Dieu  italique 
Janus  n'a  pas  de  véritable  équivalent  chez  les  Grecs. 
Hermès  répond  à  la  fois  au  Terminus  et  au  Mercurius  des 
Latins.  Mais  Cupido  est  la  traduction  exacte  d'Eros  ;  Pluto 
est  la  forme  latine  de  Ploutôn,  épithète  d'Aïdès;  entre 
Hisliè  et  Yesta,  il  n'y  a  qu'une  différence  dialectale,  comme 
entre  Héraclès  et  Hercules,  Polydeukès  et  PoUux.  Le  nom 
^eBacchus  vient  du  grec,  et  quoique  moins  usité  que 
Mi>er  dans  les  auteurs  latins,  il  a  prévalu  dans  les  traduc- 
fions  françaises.  Apollon  est  le  seul  Dieu  qui  porte  le 
Nme  nom  en  grec  et  en  latin. 

î  la  transcription  des  noms  de  lieux  ou  de  personnages 

feoriques  est  loin  d'avoir  la  même  importance  ;  cepen- 

it,  j'en  ai  quelquefois  rectifié  l'orthographe  dans  une 

faible  mesure.  J'ai  maintenu  le  k  dans  les  mots  où 

aurait  eu  le  son  de  Y  s;  j'ai  rétabh  les  diphtongues  oi 


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VIII  AVERTISSEMENT. 

et  m,  que  le  latin  remplace  par  oe  et  ae,  et  que  nous  rei 
plaçons  le  plus  souvent  par  é;  j'ai  conservé  la  finale  ei 
qu'on  traduit,  je  ne  sais  pourquoi,  par  la  désinence  fé 
nine  ée;  enfin,  j'ai  laissé  à  Odysseus  son  nom,  parce  qu^ 
ne  comprend  pas,  si  on  lappelle  Ulysse,  pourquoi  leréi 
de  ses  aventures  a  pour  titre  l'Odyssée.  Voilà  toutes  mi 
audaces  ;  ce  serait  bien  peu  de  chose  en  Angleterre  et 
Allemagne,  mais  chez  nous  il  ne  faut  pas  déranger  li 
habitudes.  Le  temps  n'est  pas  venu  où  l'on  cessera 
faire  rimer  des  noms  qui  n'ont  en  grec  aucun  rapport 
désinence,  par  exemple  Achille  et  Eschyle,  Pallas  et  Mi 
nélas,  Hélène  et  Hellène,  Dryade  et  Alcibiade,  Pisistral 
et  Socrate,  Hérodote  et  Aristote,  Œdipe  et  Philippe,  Caï 
liope  et  Gyclope,  Aulide  et  Euripide,  Ajax  et  Astyanax 
Athènes  et  Démosthènes,  Xénophon  et  Bellérophon.  Le 
grands  historiens  anglais  et  allemands  de  la  Grèce 
Grote,  Thirlwall,  Gurtius,  n'ont  pas  hésité  à  rétabhr  toui 
les  noms  grecs  sans  exception,  mais  en  France  leur  auto 
rite  ne  triompherait  pas  de  la  routine,  puissance  redou^ 
table,  contre  laquelle  je  n'ose  pas  m'insurger. 


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)laines, 
mrs. 


I  encens; 

ts. 

des, 

es 

;oires, 
ires, 


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[ELLAS. 

Tamour  d'un  peuple  libre  ! 
lutour  de  leur  autel 
chaque  lyre  vibre  I 
rès  du  ciel. 

te  était  la  joie  humaine, 
les  vierges  en  chœur, 
fit  nus  sur  l'arène, 
la  santé  du  cœur 

lorieux  ancôtres, 
ens  de  la  cité, 
id  peuple  sans  maître, 
e  et  Liberté. 

3les,  sacrés  portiques, 
îunes  et  si  beaux, 
républiques, 
lustres  tombeaux  I 

les  formes  sacrées 
iversel, 

js  lyres  inspirées 
neil  éternel. 

nuit  de  l'histoire 
s  les  vents  déchaînés, 
dans  l'ombre  noire, 
LX  abandonnés. 

l§s  bois  prophétiques; 
appellera 
vertus  antiques, 
;ret  ne  nous  rendra. 


sublimes  pensées, 
chemin  qui  conduit 
royances  passées, 
l'homme  a  détruit 


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HELLAS) 

Par  de  là  deux  -mille  ans,  loin  des  siècles  serviles, 
J'irais,  je  volerais  sur  les  ailes  des  vents, 
Vers  les  temples  de  marbre  et  vers  les  blanches  villes, 
Chez  les  grands  peuples  morts,  meilleurs  que  les  vivants. 

Dieux  heureux,  qu*adorait  la  jeunesse  du  monde. 
Que  blasphème  aujourd'hui  la  vieille  humanité, 
Laissez-moi  me  baigner  dans  la  source  féconde 
Où  la  divine  Hellas  trouva  la  vérité. 

Laissez-nous  boire  ençor,  nous,  vos  derniers  fidèles. 
Dans  l'urne  du  symbole  où  s'abreuvaient  les  forts. 
Vos  temples  sont  détruits,  mais,  6  Lois  éternelles^ 
Dans  rOlympe  idéal  renaissent  les  Dieux  morts. 

Renaissez,  jours  bénis  de  la  sainte  jeunesse, 
Échos  d'airs  oubliés,  brises  d'avril  en  fleur  I 
La  menteuse  espérance  a-t-elle  une  promesse 
Qui  vaille  un  souvenir  au  plus  profond  du  cœur? 


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>Pon 


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ES 


IDITERRANÉE. 

Olympe,  sé- 
leios.  —  Les 
primitive.  — 
L'Épire.  —  Le  bassin  de  l'Achélôos.  Aitolie  et  Acarnanle.  —  Le 
Pâmasses  et  rHélicon.  Apolloa  et  les  Muses.  —  La  Boiolie.  — 
L'île  d*Euboia.  —  L'Attique.  —  La  Mégaris.  —  L'isthme  de 
Corinthe.  —  Le  Péloponnèse  et  ses  divisions.  —  L'Eurotas  et 
l'AIphéios.  —  Les  jeux  olympiques.  —  Légendes  du  Pélopon- 
nèse. —  L'Argos  achaîque.  —  Mykènes  et  Tiryns.  —  Épidaure 
et  le  temple  d'Asclèpios.  —  L'île  d'Aigine.  —  Groupement  po- 
litique des  cantons  péloponnésiens.  —  Iles  de  la  mer  Egée  : 
les  Kyclades.  —  La  Crète.  —  La  Grèce  d'Asie.  -—  Le  nord  de 
la  mer  Egée.  —  La  Propontis  et  le  Pont-Euxin.  —  La  Lykie. 

—  La  Méditerranée  orientale.  —  Kypros.  —  Les  Philistins.  — 
La  Kyrènalque.  —  Bassin  occidental  de  la  Méditerranée.  La 
Sicile  et  la  Grande  Grèce.  —  Les  Étrusques.  —  Marseille.  — 
Défaut  d'unité  politique.  —  Les  royaumes  grecs 1 

CHAPITRE  II 

LÀ    RACE   HELLÉNIQUE. 

hremiers  documents  historiques.  —  Légendes  des  colonies  orien- 
tales. —  Danaos.  —  Kékrops.  —  Cadmos.  —  Tantales  et  Pé- 
lops.  —  Faible  autorité  de  ces  traditions.  —  Éléments  géné- 
rateurs de  la  race  grecque.  —  Antithèse  morale  des  Grecs  et 
des  barbares.  —  Les  Pélasges.  —  Le  sanskrit,  le  grec  et  le 
latin.  —  Degré  de  culture  des  Aryas  primitifs.  —  Dispersion 
des  tribus  aryanes.  —  Constructions  kyclopôennes  et  pélas- 
giques.  —  Murs  de  Tiryns  et  de  Mykènes.  —  La  porte  des  Lions. 

—  Le  trésor  d'Atreus.  —  Débris  de  l'industrie  dés  Pélasges. 
.—    Vases  de  Santorin.  —  Les  fouilles  d'IIissarlik.  —   Débris 

^0  rindustrie  desDanaens.  —  Les  fouilles  de  Mykènes 47 

CHAPITRE  m 

LA  RELIGION. 

espondance  des  religions  et   des  formes  sociales.  —  Les 

Dieux,  lois  vivantes  de  l'univers.  —  Les  Forces  domptées  par 

Lois.  —  Expression  humaine  du  divin.  —  Absence  d'unité 

L.  M.  •—  HisT.  DES  Grecs.  « 


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TABLE  DES  1 

ase  et  de  corps  sacerdotal.  - 
des  lois  divines.  —  La  prièi 
le.  —  La  divination.  —  Carac 
(mortalité  de  1  ame. —  Le  cul 

CHAPITf 

LES     LÉ6I 

ndes  grecques  n'appartienne 
hysique  des  légendes  grecq 
s.  —  Héraclès.  —  Caractère 
les  éléments  étrangers  introc 

—  La  chasse  de  Calydou.  —  l 
et  ses  fils.  —  Les  Kypria.  - 

[liade;  la  Destruction  d'Ilios 
gonie.  —  Développement  suc( 
ites  sur  le  caractère  historiq 

CHAPITI 

MOEURS  DES  GRECS  AUX 

e  grecque.  —  Moralité  des 
le  la  femme  dans  la  soci 
1  de  l'enfant  ;  éducation,  pi 
is  héroïques  :  commandem< 
emblées.  —  Hiérarchie  pers 
•e.  —  Caractère  sacré  du  tra 

de  la  piraterie.  —  Conditior 
i  d'Homère.  —  Violence  des 

le  sentiment  de  l'honneur.  - 
lires;  purifications  religions 
L'amitié.  —  L'hospitalité,  fon 
ique  chez  Nestor  et  chez  Méi 

—  Fédération  idéale  des  Grec 

CHAPITf 

INSTITUTIONS  N 

religieux  du  lien  fédéral.  — 
:  les  prêtres,  les  poètes  e1 
!.  —  L'oracle  de  Delphes 
.  —  Les  Amphictionies.  —  ' 
ité  des  jeux.  —  Les  Olympi 

—  La  trêve  sacrée.  —  Les  ri 
i  la  sculpture.  —Célébrité  et 

CHAPITR 

MIGRATIONS   ET 

de  la  légende  à  l'histoire.  — 


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TABLE  DES  MATIÈRES.  XV 

—  Les  AioUens  en  Boiotie.  —  Invasion  des  Aitolions  et  des 
Doriens.  —  Soumission  de  TÉlis,  de  la  Messénie  et  de  la  La- 
conie.  —  Conquête  d'Argos,  d'Épidaure  et  de  Troiien.  —  Con- 
quête de  Sikyone,  de  Corinthe,  de  Mégare,  et  d'Aigine.  — 
Migration  aiolienne.  —  Les  rérogiés  en  Attique.  Méianthos. 
Codros.  —  Migration  des  Ioniens.  —  Colonies  ioniennes.  —  Éta- 
blissement des  Doriens  en  Messénie  et  en  Liconie.  Colonies  do- 
Tiennes.  Thèra.  Mèlos.  La  Crète.  —  Les  Doriens  on  Crète,  à  Rhodes 
et  à  Cos.  La  Doris.  —  Chronologie  mythique.  —  Les  poèmes 
homériques.  —  Les  poèmes  d'Hésiode.  —  Les  Travaux  et  Jours?    185 

CHAPITRE  VIII 

LES    CITÉS   llILITAinBS. 

Autonomie  de  la  Cité.  Aristog'atie  et  démocratie.  -*  Distinction 
des  classes  attribuée  à  Minos.  —  Esclavage  domestique  et  ser* 
vitude  de  la  glèbe.  —  État  de  la  population  en  Thcssalie;  — 
en  Lacooie;  —  en  Crète.  —  Éducation  militaire  et  institutions 
politiques  des  Cretois.  —  Sparte,  type  de  la  cité  militaire.  — 
Lycurgue.  —  Constitution  politique  de  Sparte  :  les  rois,  le 
sénat,  les  Éphores.  —  Légende  du  partage  des  terres.  —  Ten- 
dances communistes.  Les  repas  publics.  —  Éducation.  Disci- 
pline. Tactique  militaire.  —  Soumission  de  la  Laconie.  — 
Luttes  contre  les  Argeiens.  —  Pheidon.  —  Le  monnayage.  — 
Luttes  des  Spartiates  contre  les  Arcadiens.  —  Première  guerre 
de  Messénie.  —  Fondation  de  Tarente.  —  Seconde  guerre  de 

f  Messénie.  Aristoménès.  —  Tyrtée.  —  Soumission  de  la  Mes- 
sénie. —  Suzeraineté  de  Sparte  sur  tout  le  Péloponnèse 217 

CHAPITRE  IX 

LES  CITÉS    COMIIEBÇANTES. 

La  royauté  remplacée  par  Toligarchie.  —  Diffusion  de  la  race 
grecque  sur  les  côtes  de  la  Méditerranée.  —  Colonies  eu- 
boiennes  et  mégariennes  en  Thrace.  —  L'industrie  à  Corinthe. 

—  Les  Bacchiades.  —  Kerkyra  et  Syracuse.  —  Colonies  grec- 
ques en  Italie.  —  Colonies  grecques  en  Sicile.  —  Comptoirs 
milésicns  sur  le  Pont-Euxin.  —  Factoreries  grecques  en  Egypte. 

—  Kyrènè.  —  Voyages  à  Tartessos.  —  Fondation  de  Mar- 
seille. —  Progrès  rapides  des  colonies  grecques.  —  La  mon- 
naie, signe  de  l'autonomie  des  cités.  —  Types  décoratifs 
empruntés  à  l'Asie.  —  Développement  de  l'art  grec.  —  Carac- 
tère spontané  de  l'architecture  grecque.  —  Origine  indigène 
de  la  sculpture  grecque.  —  La  peinture.  —  La  poésie  lyrique. 

—  Les  premiers  philosophes.  —  La  géographie.  —  L'histoire.  — 
Les  premiers  prosateurs.  —  Répugnance  des  philosophes  pour 
la  religion  populaire  et  la  démocratie.  —  Destruction  de  Sybaris. 

—  Dispersion  de  la  confrérie  de  Pythagore 248 


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XVI  TABLE  DES  MATIÈRES. 

CHAPITRE  X 

LA  VIE   POLITIQUE  DANS   LES  CITÉS  GRECQUES. 

L'oligarchie.  —  Gratuité  des  fonctions  publiques.  —  Les  lois 
écrites.  —  La  tyrannie,  ses  caractères,  son  instabilité.  —  Les 
tyrans  de  Sikyone  :  Orthagoras,  Cleisthénès.  —  Les  tyrans  de 
Corinthe  :  Kypsélos.  —  Périandros.  —  Discordes  civiles  à 
Mégare.  —  Théognis.  —  Révolutions  d'Athènes.  —  L'Archontat. 
Les  Eupatrides.  —  Dracon.  Kylon.  Épiménide.  —  Selon.  —  Prise 
de  Salamine.  —  Lutte  des  riches  et  des  pauvres.  —  La  ques- 
tion sociale  résolue  par  Selon.  —  Constitution  politique  de 
Selon  :  Répartition  de  l'impôt.  —  Le  Sénat.  L'Aréiopage.  — 
Lois  civiles.  —  Le  lien  social.  Le  travail.  —  Condition  des 
femmes  à  Athènes.  —  Éducation  des  enfants.  —  Serment  mili- 
taire. —  Les  tables  de  la  loi.  —  Factions  politiques.  —  Usur- 
pation do  Pisistrate.  —  Gouvernement  de  Pisistrate.  Édition  des 
poèmes  d'Homère.  —  Harmodios  et  Aristogeiton.  —  Tyrannie 
d'Hippias.  -—  Sa  chute.  —  Réformes  de  Cleisthénès.  —  Inter- 
vention des  Spartiates.  —  Luttes  contre  les  Thébains,  les 
Chalkidiens,  les  Aiginètes 295 

CHAPITRE  XI 

LUTTE  DEa  GRECS  CONTRE  LES  BARBARES. 

§  1.  Soumission  des  Grecs  d'Asie. 

Les  rois  de  Lydie  ;  leurs  attaques  contre  les  Grecs.  —  Soumis- 
sion de  la  Grèce  d'Asie  par  Croïsos.  —  L'empire  Médo-Persi- 
que.  Kyros.  —  Soumission  des  Grecs  d'Asie  par  les  Perses.  — 
Émigration  des  Phokaiens  et  des  Téiens.  —  Soumission  de  la 
Doris  et  de  la  Carie.  —  Héroïsme  des  Lykiens.  —  Polycratès 
de  Samos.  Sa  puissance;  sa  mort.  —  Maiandrios. —  Syloson.  — 
Ruine  de  Samos.  —  Soumission  de  la  Kyrènaique.  —  Le  méde- 
cin grec  Démokédès  à  la  cour  de  Perse.  —  Expédition  de  Dareios 
en  Scythie.  —  Conquête  de  la  Thrace  et  de  la  Macédoine  par  les 
Perses.  —  Révolte  de  l'Ionie.  —  Secours  demandés  aux  Grecs 
d'Europe.  —  Incendie  de  Sardes.  —  Les  Carions  et  les  Kypriotes 
prennent  part  à  l'insurrection.  —  Défaite  de  la  flotte  grecque 
àLadè.  —  Prise  de  Milet.  —  Soumission  de  la  Grèce  d'Asie.      33o 

§  2.  Résistance  des  Grecs  dEurope.  —  Première  guei^re  médique^ 

Expédition  de  Mardonios.  —  Le  roi  demande  aux  Grecs  la  terre 
et  l'eau.  —  Expédition  de  Datis  et  d'Artapherne.  —  Ruine 
d'Érétrie.  —  Miltiade.  —  Préparatifs  des  Athéniens,  secours 
demandés  aux  Spartiates.  —  Secours  envoyés  aux  Athéniens 
par  les  Plataiens.  —  Bataille  de  Marathon.  —  Trahison  dé- 
jouée. —  Honneurs  rendus  aux  morts,  aux  Héros  et  aux  Dieux. 
—  Procès  et  mort  de  Miltiade 354 


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TABLE  DES  MATIÈRES.  XVII 

Seconde  guerre  médique. 

Xerxès;  préparatifs  d'invasion.  —  Canal  du  mont  Athos  ;  ponts 
sur  THoUespont.   —  Dénombrement  de  l'armée  des   Perses. 

—  Les  Grecs  devant  l'invasion.  Espions  et  hérauts  envoyés  en 
Asie.  —  Congrès  à  Tisthme  de  Corinthe.  Réponses  découra- 
geantes de  la  Pythie.  —  Secours  demandés  à  la  Crète,  h  Argos, 
à  Kerkyra,  à  Syracuse.  —  La  première  ligne  de  défense  aban- 
donnée sans  combat.  —  Détroit  d'Artémision  et  défilé  des 
Thermopyles.  —  Tempêtes  et  combats  dans  l'Artémision.  — 
Combat  des  Thermopyles.  —  Mort  de  Léonidas.  —  Les  Barbares 
repoussés  du  temple  de  Delphes.  —  Incendie  de  Platée  et  de 
Thespies.  Embarquement  des  Athéniens.  —  Défense  do  l'Acro- 
pole. Incendie  d'Athènes.  —  La  flotte  grecque  à  Salamine.  — 
Conseil  de  guerre  sur  la  flotte  grecque.  —  Stratagème  de  Thé- 
mistocle.  —  Bataille  de  Salamine.  —  Fuite  de  Xerxès.  —  Bataille 
d'Himère.  —  L'armée  perse  laissée  en  Grèce.  —  La  paix  offerte  aux 
Athéniens.  —  Préparatifs  de  défense.  —  Les  armées  en  présence. 

—  Bauille  de  Platée.  —  Bataille  de  Mycale.  —  Prise  de  Sestos.     36) 

CHAPITRE  XII 

L*EMPIRE  DE  LA  MER. 

Droit  des  Athéniens  à  l'hégémonie.  —  Reconstruction  des  murs 
d'Athènes.  —  Politique  de  Thémistocle.  La  flotte  et  le  Pirée.  — 
Relâchement  du  lien  fédéral.  —  Fédération  de  Dèlos.  —  Taxe 
fixée  par  Aristide.  —  Réforme  démocratique  à  Athènes.  —  Les 
sculptures  du  temple  d'Aigine.  —  Prise  d'Eion  et  de  Skyros.  — 
Le  Thèseion.  —  La  tragédie.  —  Exil  de  Thémistocle.  Trahison 
de  Pausanias.  —  Fuite  de  Thémistocle  ;  sa  mort  chez  les  Perses. 

—  La  fédération  de  Dèlos  se  change  en  empire  athénien.  — 
Bataille  de  l'Eurymédon.  — •  Embellissements  d'Athènes.  — 
Libéralité  de  Kimon.  —  Siège  de  Thasos.  —  Tremblement  de 
terre  à  Sparte.  —  Révolte  des  Messéniens.  —  Siège  d'Ithômô. 

—  Renvoi  des  troupes  athéniennes.  —  L'Areiopage  amoindri. 
Exil  de  Kimon.  Assassinat  d'Éphialtès.  —  Indemnité  pour 
l'exercice  des  devoirs  civiques.  —  Essai  de  coalition  contre 
Sparte.  —  Expédition  en  Egypte.  Siège  et  soumission  d'Aigine. 

—  Les  longs  murs.  Bataille  de  Tanagra.  —  Victoire  des  Oino- 
pliytes.  Revers  en  Egypte.  —  Mort  de  Kimon.  Fiû  do  la  guerre 
médique.  —  Défection  des  Boiotes  et  des  Mégarif  ns.  Soumission 

de  l'Ëuboia.  —  La  trêve  de  trente  ans 4H3 

CHAPITRE  Xin 
l'art  et  la  démocratie. 

Démagogie  de  Périclès.  —  Les  Clèrouchies.  —  Le  droit  au  travail. 

—  Concurrence  artistique.  —  Le  problème  social  résolu  par 
Tart.  —  Le  travail  libre  et  le  travail  servile.  —  Le  Partbénon. 


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XX 


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TABLE  DES  MATIÈRES.  XXI 


CHAPITRE  XVIIÏ 

ANARCHIE   MILITAIRE. 

§  1.  Les  successeurs  d Alexandre. 

L'héritage  d*Alexandre.  —  Délibération  des  généraux  macédo- 
niens. —  Régence  de  Perdiccas.  —  Soulèvement  de  la  Grèce. 

—  Guerre  Lamiaque.  Défaite  des  Grecs  à  Cranon.  —  Condi- 
tions imposées  aux  Athéniens.  —  Mort  d'Hypéride  et  de  Dé- 
mosthènes.  —  Occupation  d'Athènes.  Abolition  de  la  démocra- 
tie. —  Mort  de  Perdiccas.  Ptolémée  en  Egypte.  —  Régence 
de  Polysperchon.  —  Intrigues  de  Phokion.  —  Procès  et  mort 
de  Phokion.  —  Cassandros  et  Polysperchon.  —  Eumènes  et 
Antigouos.  —  Mort  d'Eumènes.  —  Querelles  de  famille.  — 
Ligue  contre  Antigonos.  —  Extinction  de  la  famille  royale.  — 
Dèmètrios,  fils  d'Antigonos,  à  Athènes.  —  Victoire  de  Dèmè- 
trios  sur  Ptolémée.  —  Les  généraux  prennent  le  titre  de  rois. 

—  Les  monnaies  royales. —  Les  statues-portraits  et  les  bustes. 

—  Progrès  de  Dèmètrios  en  Grèce.  —  Ligue  contre  Antigonos. 

—  Bataille  d'Ipsos.  —  La  fortune  de  Dèmètrios  se  relève.  — 
Occupation  d'Athènes  par  Dèmètrios.  —  Dèmètrios,  roi  de  Ma- 
cédoine. —  Anecdote  de  Stratonikè.  —  Pyrrhos  roi  de  Macé- 
doine. —  Dernières  aventures  de  Dèmètrios.  —  Lysimachos, 
roi  de  Macédoine.  Sa  morr.  —  Mort  de  Séleucos.  —  Invasion 

des  Gaulois.  — Défense  du  temple  de  Delphes 708 

§  2.  AgalhoclèSf  tyran  de  Syracuse. 

Jeunesse  d'Agathoclès.  —  Agathoclès  s'empare  de  la  tyrannie. 

—  Le  Spartiate  Acrotat^os  à  Agrigente.  —  Siège  de  Syracuse 
par  les  Carthaginois.  —  Agathoclès  en  Afrique.  —  Effroi  des 
Carthaginois.  Sacrifices  humains.  —  Ophellas  de  Kyrène.  — 
Retour  d'Agathoclès  en  Sicile.  —  Revers  des  Grecs  en  Afrique. 

—  Le  Spartiate  Cléonymos.  —  Dernières  guerres  d'Agathoclès. 

Sa  mort.  —  Les  Mamertins  à  Messane 746 

§  3.  Pyrrhos  et  les  Romains. 

Rome  protectrice  des  Grecs  d'Italie.  —  Les  Tarentins  provoquent 
les  Romains.  —  Pyrrhos  appelé  par  les  Tarentins.  —  Pyrrhos 
en  Italie.  —  Négociations  avec  les  Romains.  —  Bataille  d'As- 
culum.  —  Pyrrhos  en  Sicile.  —  Retour  de  Pyrrhos  en  Italie.  — 
Victoire  des  Romains  à  liénévent.  —  La  Grande-Grèce  soumise 
aux  Romains.  —  Monnaies  de  la  Grande-Grèce  et  de  la  Sicile.    756 

CHAPITRE  XIX 

ROYAUMES  ET  IIÉPDBLIQUES. 

§  1.  Prospérité  de  C Egypte. 

L'Egypte  sous  les  Lagides.  —  Alexandrie.  Commerce,  industrie, 
religion.  —  La  Bibliothèque  et  le  Musée.  —  Poètes,  grammai- 


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TABLE  DES  MATIÈRES.  XXIII 

tinaent  la  guerre.  —  Les  Romains  en  Asie.  —  Soumission 
des  Galates.  — -  Soumission  de  l'Aitolie.  —  Querelles  des 
Acbaiens  et  des  Spartiates.  —  Violences  de  Philopoimèn  à 
Sparte.  —  Ajnbassade  des  Spartiates  à  Rome.  —  Mort  de 
Philopoimèn  et  d'Hannibal 857 

§  3.  Perseus  et  les  Romains. 

Plaintes  contre  Philippe.  —  Rivalité  des  fils  de  Philippe.  — 
Mort  de  Philippe.  —  Préparatifs  de  guerre  de  Perseus.  — 
Guerre  des  Romains  contre  Perseus.  —  Offres  de  médiation.  — 
Soumission  de  rillyrie.  —  Bataille  de  Pydiia.  —  Fuite  de 
Perseus.  —  Soumission  de  la  Macédoine.  —  Républiques  de 
Macédoine  et  d'IIljrrie.  —  Triomphe  d'Aemilius  Paulus 87 1 

§  4.  L'Achaïe  et  les  Romains. 

Jaridiction  des  Romains  en  Orient.  —  Les  rois  de  Syrie,  de 
Bithynie  et  de  Pergame.  —  Ambassade  des  Rhodiens  à  Rome. 

—  Situation  des  partis  en  Grèce  ;  l'Aiiolie.  —  L'Achaïe  sous  le 
protectorat  des  Romains.  —  Les  exilés  achaicns.  —  Retour  des 
exilés.  —  Troisième  guerre  de  Macédoine.  —  Soulèvement  de 
l'Achaîe.  —  Bataille  de  Leucopétra.  Prise  de  Gorinthe.  —  Les 
Grecs  s<nis  les  Romains : 881 

CHAPITRE  XXI 

LES   ROYAUMES  GRÉCO-BARBARES. 

§  1.  Les  Maccabées, 

Antinomie  des  Grecs  et  des  Juifs.  —  La  religion,  forme  idéale 
du  patriotisme  juif.  —  La  Judée  sous  les  Achéménides  et  les 
Lagides.  —  La  Judée  sous  les  Séleukides.  —  Apostasie  du  sa- 
cerdoce juif.  —  Persécution  religieuse.  — Insurrection  de  Judas 
Maccabée.  ->  Caractère  national  de  l'insurrection.  —  Troubles 
du  royaume  de  Syrie.  —  Ambassade  de  Judas  Maccabée,  sa 
mort.  —  Les  Juifs  profitent  des  querelles  des  Séleukides.  — 
Indépendance  des  Juifs.  —  Progrès  du  royaume  des  Parthes. 

—  Querelles  de  famille  en  Egypte  et  en  Syrie.  —  Les  sectes 
juives.  —  Royaume  de  Judée > 893 

§  2.  .Mithradate  et  les  Romains, 

Annexion  du  royaume  de  Pergame.  —  La  province  d'Asie.  — 
Mithradate,  roi  du  Pont.  —  Massacre  des  Romains  en  Asie.  — 
Expédition  de  Sulla.  —  Prise  d'Athènes.  —  Victoires  de  SuUa 
en  Grèce.  —  Tyrannie  de  Mithradate.  —  Sulla  traite  avec 
Mithradate.  —  Exactions  de  Sulla  en  Asie.  --  Progrès  de  Mi- 
thradate. —  Campagne  de  Lucullus  en  Asie.  —  Mutinerie  des 
soldats  de  Lucullus OU 


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TABLE  DES  MATIÈRES. 

§  3.  Les  Triumvirs  en  Asie, 

ce  des  pirates.  —  Guerre  contre  les  pirates.  —  Clémeuce 
»mpée.  —  Pompée  en  Arménie.  —  Soumission  du  Pont 
la  Syrie.  —  Les  Romains  en  Judée.  —  Mort  de  Mithra- 

—  Soumission  de  Kyrëne  et  de  Kypros.  —  Les  Romains 
rypte.  —  Expédition  de  Crassus  contre  les  Parthes.  — 
te  des  Romains.  —  Mort  de  Crassus.  —  César  et  Pompée, 
sar  à  Alexandrie.   —  Cléopâtre  chez  César.  —  Guerre 

)  Pharnakës.  —  Dictature  de  César;  sa  mort 938 

§  4.  Cléopâtre. 

►nd  triumvirat.  —  Bataille  de  Philippes.  —  Antoine  en 

—  Cléopâtre  et  Antoine.  —  Campagne  de  Ventidius 
5  les  Parthes.  —  Hérode,  roi  des  Juifs.  —  Campagne 
Lreuse  d'Antoine  contre  les  Parthes.  —  Octave  et  Antoine, 
mpire  de  Cléopâtre.  —  Rupture  d'Antoine  et  d'Octave.  — 
^re  lutte  de  l'Orient  contre  l'Occident.  —  Bataille  d'Actium. 

rt  d'Antoine.  —  Monde  Cléopâtre.  —  L'empire  romain.,     956 

CHAPITRE  XXII 

TRANSFORMATION    DES   CROTÀNCES. 

§    1.  Prologue  du  Christianisme, 

ice  politique  et  religieuse.  —  La  religion  et  la  philoso- 

—  L'herméneutique  stoïcienne.  —  L'évhémérisme.  —  La 
lologie.  —  Transformations  do  la  Maotique.  —  L'incarna- 
es  âmes.  —  Variété  des  fonctions  religieuses.  —  La  sym- 
le  du  vin.  —  Progrès  de  la  superstition.  —  La  religion  des 
3S.  —  La  religion  des  esclaves.  —  Initiation  de  l'Orient  à 
losophie  grecque 973 

§  2.  La  synthèse  chrétienne. 

j  d'Hérode.  —  La  Judée  sous  les  Romains.  —Le  Messie.  — 
pbe.  —  Le  Diable.  —  La  chute  des  anges.  —  La  chute  des 

—  La  résurrection.  —  Bouddhisme  et  Christianisme.  — 
)s  multiples  du  christianisme.  --  L'Homme-Dieu.  —  Le 

de  la  Passion.  —  Apothéose  du  Féminin.  —  La  Rédemp- 

—  Le  péché  originel.  —  La  fin  du  monde.  —  La  Trinité, 
glise.  —  La  morale  antique.  —  La  morale  chrétienne.  — 

monastique;  -^  Apostasie  du  monde  grec.  —  Ruine  de  la 
ation 99 1 


FIN  OB  LA  TABLE  DES  MATIÈRES. 


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TABLE  BES  GRAVCRES 


Pages. 

Tète  de  Zeus  alyCoxo;  (camée) .4 ix 

Tête  d'Athènè  (camée  d'Aspasios) xii 

Buste  d'Homère  (musée  du  Louvre) 1 

Tète  colossale  de  Zeus  (le  Jupiter  d'Otricoli,  au  musée  du  Vatican).        4 
Monnaies  (Épire,  Thessalie,  Aitolie,  Acarnanie,  lies  Ioniennes)...        7 

Apolloa  du  Belvédère  (musée  du  Vatican) 9 

Les  Muses  (sarcophage  du  musée  du  Louvre) II 

Naissance  de  Dionysos  (bas-relief  du  Vatican).  —  Dionysos  et  son 

cortège  (bas-relief  du  Vase  Borghèse,  au  Louvre) 13 

Monnaies  (Phokis,  Locris,  Boiotie,  Euboia) H 

Monnaies  d'Athènes 16 

Promètheus,  patron  des  sculpteurs.  —  Proraètheus,  inventeur  du 

feu  (lampes  de  terre  cuite) 17 

Athènè  guerrière  (statue  d'Herculanum).  —  Dèmèter  fpcinturc 
d'Hercalanum).  —  Athènè   pacifique   (Pallas   de  Vellétri,    au 

Louvre) 18 

Monnaies  (Mi^gare,  Corintho,  Sikyone,  Elis,  Ar<2;olifi,  Achaïc) 20 

Pan  (monnaie  de  Messanc  en  Sicile).  —  Sutue  de  Pan.  —  Tète  de 
Pan  (monnaie  de  Panticapée).  —  Héraclès  étouffant  le  lion  de 
Néméa  (monnaie  d'Hèraclée  de  Lucanie)  Héraclès  combattant 

(monnaie  de  Stymphale) 22 

Le  Soleil  (musée  du  Louvre).  —  Tôte  d'Hère,  d'après  la  statue  de 
Polyclète  (monnaie  d'Argos).  —  Tête  d'Hèrô  [la  Junon  de  Prô- 
neste).  Le  Soleil  (monnaies  de  Rhodes  et  de  Clazomène).  Tête 
de  Poséidon  (monnaie  d'Antigonos).  Poséidon  Yan^oxo;  (monnaie 

de  Dèmètrios) 23 

Monnaies  ( Arcadie»  Messénie,  Laconie) 25 

Hermès  présente  un  suppliant  à  Asclèpios  et  aux  Chariics  (bas- 
relief),  —  Monnaies  (Salamine,  Aigine,  Epidaure) 27 

Monnaies  des  îles  Kyclades  :  Dèlos,  Naxos,  Andros,  etc 29 

Triomphe  dé  Dionysos  et  d'Ariadnè  (camée  du  Louvre) H 

L.  M.  —  HiST.  DES  Grecs.  ^ 


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44 
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90 
91 


96 
97 
98 
01 


02 
04 
05 


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TABLE  DES  GRAVURES.  XXVII 

Pagei. 
Combat  des  Grecs  contre  les  Amazones  (sarcophage  de  Vienne  ; 

peinture  de  vase) 106 

Thèseus  et  Hippolytë  (peinture  de  vase).  —  Amazone  du  Vatican. 

—  Amazone  blessée,  du  Capitolo 107 

Combat  de  Thèseus  contre  les  Kentaures  (peinture  de  vase) 108 

Atalantè  et  Méléagros  (mosaïque  de  Lyon). —  Artémis  (musée  do 

Dresde).  —  Méléagros  (musée  du  Vatican) 109 

Construction  du  navire  Argo  (bas  relief  du  Louvre'.  —  Jason  cl  la 

toison  d*or  (pierres  gravées) 111 

Jason  et  les  Argonautes  chez  Aiètès  (peinture  de  vase) 113 

Œdipe  et  la  Sphinx  (pierres  gravées) 115 

Œdipe  et  ses  fils  (bas-relief) 1 16 

Noces  de  Thétis  et  de  Pèleus  (sarcophage).  —  Éducation  d'Achille 

(peinture  d'Hcrculîhium).  —  Jugement  de  Paris  (bas-relief  du 

Louvre) , 118 

Enlèvementd'Hélène(bas-relief  de  Florence).  —  Sacrifice  d'Iphi- 

génie  (bas-relief  du  vase  Médicis,  à  la  galerie  de  Florence) 119 

Achille  irrité.  —  Achille  jouant  de  la  lyre.  —  Sacrifice  de  Polyxène. 

—  Diomède  et  le  Palladion .  —  Cassandre  et  Aias  (pierres  gravées).  1 22 
Épisodes  du  sac  d'ilios  (peinture  d'un  vase  du  musée  de  Naples).  123 
La  Table  Iliaque  (bas-relief  en  plusieurs  parties).  126,  127, 128  et  129 
Odysseus.  —  Les  Sirènes.  —  Le  chien  Argos  (buste  et  camées).  — 

Odysseus  et  ses  compagnons  chez  Kirkè  (fragment  d'une  table 

odysséenne 131 

Apothéose  d'Bomcre  (bas-relief  d'un  vase  d'argent  du  musée  do 

Naples) 133 

Priâmes  aux  pieds  d'Achille  (bas-relief  du  Capitole).  —  La  rançon 
d'Hector  (bas  relief  du  vase  d'argent  de  Bernay,  à  la  Bibliothèque 

nationale) 138 

Aias  et  Patroclos  (groupe  de  Florence) 152 

Achille  et  Patroclos  (coupe  de  Sosias).  —  Achille  pleurant  Patro- 
clos. —  Combat  autour  du  corps  de  Patroclos  (pierres  gravées).  153 

Apothéose  d'Homère  (bas- relief  du  British  Muséum) 159 

Piédestal  trilatéral  du  musée  de  Dresde  (1'*  et  2^  face) 1C6 

Apollon  et  Héraclès  (3®  face  du  piédestal).  —Apollon  (monnaies  de 

Croton  et  de  Chalkis;  pierre  gravée) 167 

Statues  d'Apollon  (musées  du  Louvre,  du  Capitole,  de  Florence, 

de  Naples) 169 

Dèmèter  (peinture  d'Herculanum).  —  Monnaie  des  Amphictions.  172 

Statues  d'Hermès  (musées  du  Louvre,  du  Vatican,  de  Naples}. . .  177 

Polydeukès,  inventeur  du  pugilat  (statue  du  Louvre) 178 

Les  lutteurs  de  Képhissodote  (tribune  de  Florence) 179 

Discobole  de  Mjrron  (Vatican  et  British  Muséum} 180 

Discobole  de  Naukydès  (musée  du  Louvre) 181 

Apollon  Masagète  (musée  du  Vatican) 182 

pas-relief  choraçi()ue  (musée  du  Louvre) 184 


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XXVIII  TABLE  DES  GRAVURES. 

Pages. 

Monnaies  des  villes  d'AioIis  :  Kymè,  Ténédos,  Mitylène,  Smyrne,etc.  194 

Sthtuette  d'Histiè 197 

Monnaies  des  villes  d'Ionie  :  Éphèse,  Samos,  Milet,  Chios,  etc. . .  199 

Monnaies  (Doris,  Carie,  Pisidie,  Pamphylie) 203 

Homère  (buste  du  Louvre;  monnaies  de  Cbios,  d'Ios,  d'Amastris).  207 

Éros  (statué  du  Vatican,  pierre  gravée) 210 

Éros  et  Psyché  (bas-relief  du  vase  Chigi  ;  camée) 211 

Symbolique  de  la  vie  humaine  (sarcophage  du  Capitole). . .     212  et  213 

Aréà  enchaîné  (l'Achille  Borghèse,  du  Louvre) 233 

Monnaies  des  villes  grecques  de  Thrace 252 

—  (Chalkidique,  Illyrie,  Acarnanie) 253 

—  des  villes  de  la  Grande  Grèce 259,  2C0,  261 

—  —        grecques  de  la  Sicile  et  de  l'Ibérie 264,  265 

—  —        de  la  Propontis  et  du  Pont-Euxin 268,  269 

—  —        de  Kilikie,  de  Kypros,  de  KyW  naique 273          i 

Types  de  vases  peints 278,  279 

Cabanes  en  bois.  —  Les  trois  ordres  d'architecture  :  Dorique, 

Ionique,  Corinthien 282 

Sculptures  archaïques  :  Stèle  de  Marathon  (musée  d'Athènes). 
Métope  de  Sélinonte  (musée  de  Talcrme).  Bas-relief  de  Samo- 

thrace  (Louvre) * 2X7 

Fragment  d'une  peinture  murale  de  Paistum  (musée  de  Naplos) .  '289 

Bas-relief  d'Assos  (musée  du  Louvre) 290 

Danses  de  jeunes  filles  (bas-relief  du  muaée  du  Louvre) 318 

Le  vase  de  Dareios  (musée  de  Naples).  —  Dariques 364,  365 

Statues  des  frontons  d'Aigiue  (glyptotlièque  de  Munich) 406 

Le  temple  d'Aigine ^ . . .  407 

L'Athènè  d'Aigine  (glyptothèque  de  Munich) 408 

Statuettes  décoratives   du  temple    d'Aigine    (glyptothèque    de 

Munich) 409 

Bas-relief  du  Thèséiou 412 

Statues  de  Dionysos  (le  Bacchus  de  Richelieu,  au  Louvre.  —  Le 
Sardanapale  du  Vatican).  Bas-relief  du  théâtre  de  Dionysosi 
(British  Muséum).  —  Le  théâtre  de  Dionysos  (monnaie  d'Athè- 
nes). —  Attributs  dionysiaques  (monnaie  kistophore) 414 

Satyre  de  Praxitèle  (le  Faune  au  repos,  du  Vatican).  —  Silène, 
nourricier  de  Dionysos  (le  Faune  à  Tenfant,  du  Louvre).  —  Si- 
lène, l'outre  personnifiée  (bi*onze  d'Herculaoum).  —  Le  taureau 

dionysiaque  (intaille  d'Hyllos) 415 

La  Comédie.  —  La  Tragédie  (peintures  d'Herculanum  ;  musée  du 
Louvre).  —  Répétition  d'un  drame  satyrique.  —  Masques  tragi- 
ques. —  Masque  comique  416 

Plan  du  Parthénon 442 

Le  Parthénon  (état  actuel) 443 

Le  Parthénon  restauré,  les  Propylées,  l'Athènè  protectrice 444 

Intérieur  du  grand  temple  de  Paistum. •  • 445 


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TABLE  DES  GRAVURES  XXIX 

Pages, 
Les  Trontous  du  Parthénon  avant  1687,  d'après  les  dessins  de 

Carrey 44C 

Principales  statues  des  frontons  du  Parthénon  (Britisb  Muséum).  447 

Fragments  des  bas-reliers  de  la  frise  du  Parthénon 450,  451 

Tète   de   rAthènè  du  Parthénon  (camée  d'Aspasios.  —  Tetra- 
drachme  d'Athènes).  —  L*acropole  d'Athènes  (monnaie  de  bronze 

d'Athènes) ; 452 

L'Athènè  du  Parthénon  (statuette  du  musée  de  Turin) 453 

Ruines  des  Propylées  de  l'acropole  d'Athènes 454 

L'Érechthéion , 456 

Atbènè  Polias  (musée  de  Dresde).  —  Caryatides  de  rÉrochthélon.  457 

Vase  panathénaique  (musée  du  Louvre) 459 

Enlèvement  de  Corè.  ~  Le  printemps,  rappel  de  Corè.  —  L'au- 
tomne, retourdeCorè  chez  son  époux  (bas-reliefs  de  sarcophages).  463 
Triptolème  entre  Corè  et  Dèmèter  (bas-relief  d'Eleusis).  —  Tripto- 
lème  sur  le  char  ailé  de  Dèmèter  (monnaie  d'Eleusis  ;  au  revers, 

la  Truie) 465 

Mission  de  Triptolème  (peinture  de  vase).. 466 

Fjiçade  restaurée  du  temple  de  Zeus  à  Olympie 476 

Coupe  longitudinale  du  temple  de  Zeus  à  Olympie 477 

Temple  d'Apollon  secourable  à  Phlgalie 478 

Bas-reliefs  du  temple  de  Phigalie  (Britisb  Muséum) 479 

Temple  d'Égeste 515 

Monument  choragique  de  Lysicrate  à  Athènes 644 

Bas-reliefs  du  monument  choragique  de  Lysicrate 645 

Niobè  et  ses  enfants  (statues  de  la  galerie  de  Florence) 646 

Aphrodite  (statues  du  Louvre,  du  Vatican,  monnaies  impériales).  647 

BaUille  d'Arbèle  (mosaïque  de  Pompéi) 667 

Le  grand  escalier  de  Tchil-minar 670 

Bas-reliefs  de  Persépolis 67î,  673 

Chapitaux  et  bas-reliefs  persépolitains 675 

Monnaies  d'Alexandre  et  do  ses  successeurs 7Î6 

Statues  iconiques  :  Sophocle,  Démosthènes,  Aischine,  Euripide, 

Ménandre  (musées  du  Vatican,  du  Louvre,  de  Naples). ...     728,  729 
Bustes  :  Alexandre,  Périclès,  Alkibiade,  Hippocrate,  Thucydide, 

Socrate 730 

Alexandre  combattant  (statue  équestre  d'Herculanum) 731 

Le  bronze  de  Siris  (Britisb  Muséum) 759 

Monnaie  de  Pyrrhos,  roi  d'Épire 761 

Médaillons  de  Syracuse  gravés  par  Kimon  et  par  Evainetos 765 

Les  temples  de  Philai 768 

Portique  du  grand  temple  de  Philai 769 

Temple  d'Aroôris  à  Edfou 770 

Zeus-Ammon,  Isis,  Sarapis  (monnaies) 773 

Ptolémée  Soter  et  Bérénikè.  —  Ptolémée  Philadelphe  et  Arsinoè 

(monnaies) , , , ,  797 


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TABLE  DES  CARTES 


Page». 

Carte  de  la  Grèce 1 

Colonies  grecques 48 

Colonies  grecques  en  Asie  Mineure 193 

Colonies  grecques  en  Italie  et  en  Sicile 257 

Grèce  au  temps  des  guerres  modiques. . .  363 

Empire  macédonien 653 


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e.  (Musée  du  Louvre. 


lE  PREMIER 

\ÈCE  ET  DES  CÔTES  DE   LA 
TERRANÉE. 


■tuatîoû  de  la  Grèce  ;  incertitude  de  ses  limites  ;  son  extension  pro- 
gre 


iiA^  ^Bgressive.  —  La  Grèce  d'Europe  et  ses  subdivisions.  —  Les  îles  de  la 
Srèce  d'Asie.  —  Kyrènaîque.  —  Grande  Grèce  et  Sicile, 
grecs. 


)t  limites  de  la  Grèce.  —  Le  pays  que  ses 
ment  Hellas,  et  que  nous  appelons  Grèce  d'après 
,  est  la  partie  méridionale  d'une  des  trois  pres- 
urope  projette  dans  la  Méditerranée.  Du  côté  du 
imite  s'étend  du  mont  Olympe  au  promontoire 
I,  un  peu  au  de  là  du  40®  degré  de  latitude  nord  ; 
-  HisT.  DES  Grecs.  i 


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2  LE  PINDOS.  —  L'OLYMPE. 

mais  celle  limite  n'a  jamais  été  bien  définie  ;  les  uns  retran- 
chent TÉpire  de  la  péninsule  hellénique,  les  autres  y  compren- 
nent la  Macédoine.  Des  trois  autres  côtés,  la  Grèce  est  entourée 
et  pénétrée  en  tous  sens  par  la  mer.  Les  îles  nombreuses  de 
TArchipel,  ou  mer  Egée,  qui  forme  le  bassin  oriental,  la  ratta- 
chent à  la  côte  d'Asie.  A  l'occident,  en  face  de  l'Italie,  la  mer 
Ionienne  creuse  un  golfe  profond  entre  la  région  continentale 
et  la  côte  du  Péloponnèse.  Les  deux  bassins  se  réunissent  au 
midi  et  baignent  l'île  de  Crète,  presque  à  égale  distance  de  la 
péninsule  hellénique  et  du  continent  africain  que  les  Grecs 
nommaient  Libye.  Si  on  étend,  comme  le  faisaient  les  anciens, 
le  nom  d'Hellas  à  tous  les  pays  habités  par  les  Grecs,  il  faut 
y  comprendre,  non  seulement  les  îles  de  l'Archipel  et  de  la 
mer  Ionienne,  mais  les  côtes  de  la  Macédoine,  de  la  Thrace, 
de  l'Asie  mineure,  la  portion  de  la  Libye  appelée  Kyrènaïque, 
la  Sicile  et  la  partie  méridionale  de  l'Italie,  qu'on  nommait 
Grande  Grèce.  La  vraie  patrie  du  peuple  grec,  c'est  la  mer. 

Le  Pindos.  —  l'Olympe,  séjour  des  Dieux.  ^  rOssa 
et  le  Pélion.  —  La  chaîne  des  Alpes  orientales,  après  avoir 
suivi  la  direction  du  sud-est  le  long  de  la  mer  Adriatique,  se 
partage  en  deux  branches  à  partir  du  mont  Scordos  ;  l'une,  qui 
va  vers  l'orient,  sépare  la  Macédoine  et  la  Thrace  du  bassin 
du  Danube;  c'est  la  chaîne  de  l'Haimos.  L'autre,  qui  descend 
vers  le. sud,  forme  la  grande  arête  de  la  péninsule  hellénique, 
traverse  l'isthme  et  aboutit  à  la  pointe  la  plus  méridionale  du 
Péloponnèse,  partageant  les  eaux  fluviales  entre  la  mer 
Ionienne  et  la  mer  Egée.  Depuis  le  point  où  elle  pénètre  en 
Grèce  jusqu'à  celui  où  elle  s'incline  vers  l'est  pour  contourner 
le  golfe  de  Corinthe,  cette  arôte  porte  le  nom  de  Pindos.  Deux 
rameaux  détachés  du  Pindos  se  dirigent  en  sens  inverses 
vers  les  deux  mers  :  à  l'ouest  les  monts  Acrokérauniens,  qui 
séparent  l'Ëpire  del'Illyrie,  à  l'est  les  monts  Cambuniens,  qui 
séparent  la  Thessalie  de  la  Macédoine.  A  l'extrémité  de  la 
chaîne  Cambunlenne,  près  des  bords  de  la  mer  Egée,  se 
dresse  à  plus  de  3,000  mètres,  le  massif  colossal  de  l'Olympe, 
la  plus  haute  montagne  de  la  Grèce.  Sa  cime  neigeuse  et 
voisine  du  ciel  semblait  le  séjour  des  Dieux.  C'est  là  qu'ils 
tenaient  leurs  assemblées,  assis  sur  des  nuages  d'or.  Du  côté 


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LES  DEUX   DODONES.  3 

da  nord,  l'Olympe  forme  une  immense  muraille  (aillée  à  pic. 
Au  sud,  l'élroile  et  fraîche  vallée  de  Tempe,  au  fond  de  laquelle 
coule  le  Pèneios,  sépare  l'Olympe  de  son  rival  TOssa,  pic 
escarpé  en  forme  de  dôme,  et  après  l'Ossa  s'étend,  parallèle- 
ment auPindos,  le  large  plateau  du  Pèlion.  Quand  les  nuages, 
montant  de  la  mer  et  de  la  vallée,  s'amoncelaient  comme  des 
montagnes,  on  disait  que  les  géants  entassaient  Pèlion  sur 
Ossa  pour  escalader  le  ciel. 

Le  Pèneios.  —  Les  deux  Dodones.  —  L'oracle  de 
Zeus.  —  De  la  chaîne  du  Pindos,  parallèlement  aux  monls 
Cambuniens,  s'étend  la  chaîne  de  l'Olhrys  qui  va  rejoindre  les 
dernières  ramifications  du  Pèlion.  Tous  les  cours  d'eau  qui 
descendent  de  ces  quatre  chaînes  de  montagnes  se  réunissent 
dans  le  lit  du  Pèneios  qui  les  porte  à  la  mer.  D'après  les  tradi- 
tions grecques,  la  plaine  qu'ils  arrosent  formait  autrefois  un 
vaste  lac  jusqu'à  ce  qu'un  tremblement  de  terre,  séparant 
l'Olympe  de  l'Ossa,  ouvrit  une  issue  aux  eaux  à  travers  les 
rochers  déchirés  de  Tempe.  Les  plus  anciens  souvenirs  de  la 
Grèce  se  rattachent  à  cette  contrée,  qu'Homère  appelle  l'Argos 
Pélasgique  et  le  pays  des  Hellènes.  C'est  là  qu'Hésiode  place  lu 
lutte  des  Dieux  contre  les  Titans.  Pour  les  anciens  Grecs, 
comme  pour  leurs  frères  aînés  les  Aryas  de  l'Inde,  l'orage 
était  une  bataille  qui  se  livrait  dans  le  ciel;  la  victoire  de  Zeus  (I) 
sur  les  Titans,  c'est  la  victoire  de  l'élher  calme  et  lumineux 
sur  les  vents  terrestres.  Zeus  l'olympien,  le  Dieu  qui  lance  la 
foudre,  était  la  principale  divinité  des  Pélasges  et  son  plus 
ancien  sanctuaire  était  à  Dodone.  Pour  connaître  d'avance  les 
changements  de  l'atmosphère,  on  interrogeait  le  Dieu  du  ciel, 
réponse  dans  le  mouvement  des  feuilles 
t.  C'est  ainsi  qu'on  pouvait,  selon  l'expres- 
)prendre  les  projets  de  Zeus  d'après  la  haute 
.  L'oracle  de  Dodone  était  ce  qu'on  appel- 
m  observatoire  météorologique.  Deux  villes 

ins  traduisent  Zeus  par  Jupiter;  mais  il  fiiut  so 
IX  latins  n'ont  pas  de  mythologie;  on  ne  doit  donc 
i  les  amours  de  Zeus  ni  sa  lutte  contre  son  père 
Titans  et  les  Géants.  Les  miroirs  étrusques  dési- 
►m  de  Tina. 


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A»        ^»  4.^ 


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L'HELUS  FUIMITIVE.  5 

tiques.  Pindare  les  nomme  les  Helles,  et  un  fragment  des 
grandes  Éoïées  d'Hésiode  donne  le  nom  d'Hellopie  au  pays  de 
Dodone.  Ces  deux  noms  peuvent  être  rapprochés  de  ceux 
d'Hellènes  et  d'Hellas.  Arislole,  en  parlant  du  déluge  de  Deu-. 
calîon,  dit  qu'il  se  fit  sentir  principalement  dans  l'Hellas  pri- 
mitive, «  c'est-à-dire  aux  environs  de  Dodone  et  de  l'Achélôos, 
car  ce  fleuve  a  changé  plusieurs  fois  de  cours.  C'est  là  qu'ha- 
bitaient autrefrois  les  Selles  et  ceux  qu'on  nommait  autrefois 
les  Grecs  (rpaixci)  et  qu'on  nomme  aujourd'hui  les  Hellènes  ». 
C'est  sur  ce  passage  que  s'appuient  les  auteurs  qui  placent  la 
première  patrie  des  Hellènes  en  Épire  ;  mais  Clavier  a  montré 
que  les  expressions  d'Âristote  peuvent  aussi  bien  convenir  à  la 
Dodone  Ihessalienne,  malgré  la  mention  du  fleuve  Achélôos, 
car  ce  nom  est  quelquefois  pris  dans  un  sens  générique,  et 
selon  Strabon  il  y  avait  un  Achélôos  en  Thessalie. 

C'est  dans  la  partie  méridionale  de  cette  contrée,  sur  les 

deux  versants  du  mont  Othrys,  qu'on  faisait  régner  Deucalion, 

fils  de  Promèlheus  et  père  d'Hellen  qui  donna  son  nom  à  la 

race  hellénique.  Le  déluge  arrivé  sous  le  règne  de  Deucalion 

sépara,  selon  Apollodore,  les  montagnes  de  Thessalie,  c'est- 

t  rOssa.  On  racontait  que  Deucalion  et  sa 

faut  seuls  échappé  à  l'inondation,   avaient 

!n  lançant  derrière  eux  des  pierres  que  Zeus 

mes  et  en  femmes.  Ces  hommes  nés  du  sol 

iges  dans  un  fragment  des  Éoïées,  mais  ce 

ient  pas  une  mention  expresse  du  déluge. 

ï  pas  non  plus  ;  il  fait  de  Deucalion  un  Cré- 

)  et  père  d'Idoméneus  ;  mais  il  désigne  la 

os  comme  la  patrie  des  Hellènes  :  «  Les 

;os  pélasgique,  ceux  qui  occupaient  Alos  et 

et  ceux  qui  possédaient  Phtiè  et  Hellas  aux 

se    nommaient   Myrmidons,     Hellènes    et 

cinquante  vaisseaux  étaient  commandés  par 

ienne  s'étendait  sur  un  des  côtés  du  golfe  de 
ité  est  formé  par  une  étroite  langue  de  terre 
lion  et  la  mer  Egée.  Au  fond  du  golfe  était 
ason  et  ses  compagnons,  portés  sur  le  na- 


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6  L'ÉPIRE. 

vire  Argo,  dont  le  gouvernail  était  un  des  hôlres  prophétiques 
de  Dodone,  partirent  d'Iolcos  pour  conquérir  la  toison  d'or. 
Dans  les  gorges  du  Pèlion  galopaient  les  Kentaures  velus,  aux 
formes  de  chevaux.   C'est  là  que  les  Dieux  assistèrent   aux 
noces  de  Pèleus  et  de  Thétis  aux  pieds  d'argent,  fille  du  vieil- 
lard de  la   mer.    Les  Muses,  égalant  le  banquet  par  leurs 
ieurs  danses,  annoncèrent  la  guerre  de  Troie  et  la 
d'Achille.  Le  fleuve  Sperchios,  auquel  Pèleus  voua 
re  de  son  fils,  coule  dans  une  étroite  vallée  entre 
ficalions  du  Pindos,  l'Othrys  et  l'Oita  et  se  jette 
Ife  Maliaque.  La  chaîne  abrupte  et  sauvage  de  TOila 
nme  la  chaîne  Cambunienne,  une  muraille  défen- 
ée  de  la  mer  par  un  étroit  passage.  C'est  le  défilé 
lopyles,  où  Léonidas  et  ses  compagnons  se  firent 
arrêter  l'invasion  des  Mèdes. 
\  —  La  Grèce  se  compose  d'une  suite  de  presqu'îles 
t  les  unes  dans  les  autres.  Un  premier  étrangle- 
3rmé  d'un  côté  par  le  golfe  Maliaque,  de  l'autre  par 
'Ambrakia,  ouvert  à  la  même  latitude  sur  la  mer 
.  Entre  le  golfe  d'Ambrakia  et  le  cap  Acrokérau- 
idait  l'Épire,  c'est-à-dire  le  continent,  ainsi  appelé 
tion  aux  îles  Ioniennes.  Séparé  de  la  Thessalie  par 
iu  Pindos,  TÉpire  élail  habitée  par  des  populations 
à  la  race  grecque,  mais  ses  rois  se  disaient  issus 
Aiakides.  Quoique,  d'après  l'Odyssée,  Néoptoléhios, 
lie,  fût  retourné  dans  la  Phlhiè  après  la  prise  de 
tradition  le  faisait  s'établir  en  Épire,  et  c'est  à  lui 
lis  des  Molosses  rattachaient  leur  origine.   Clavier 
l  y  apporta  le  culte  et  l'oracle  de  Zeus  Dodonéen. 
é  par  Etienne  de  Byzance,  dit  en  effet  que  la  ville  de 
le  hêtre  sacré  étaient  en  Thessalie,  et  que  l'oracle 
ransporté  de  là  en   Épire.  Kinéas  étant  Thessalien 
e  de  Pyrrhos,  roi  d'Épire,  devait  bien   connaître 
a  Thessalie.  La  Dodone  épirote,  dont  on  a  retrouvé 
nent  près  de  la  ville  moderne  de  Janina,  ayant  fait 
Dodone  tliessalienne,  c'est  en  Épire  qu'on  a  cher- 
miière  patrie   des  Hellènes.   Mais  aucune  tradition 
le  se  rapporte  à  ce  pays  qui,  pour  les  Grecs  primi- 


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lITOLIE  et  AGARNANIE. 

lé  occidentale  de  la  terre.  Là  coulait  le 
'entrée  du  pays  des  morts.  Le  golfe  d'Am- 
es géographes  anciens,  la  limite  de  la 
la  mer  Adriatique.  C'est  seulement  après 
[>ire  a  commencé  à  jouer  un  rôle   dans 

Lchélôos.  Aitplie  et  Acarnanie.  —  Sorti 
'Épire,  TActiélôos,  le  plus  grand  fleuve  de 
fils  de  rOcéan,  se  dirige  vers  le  sud  et  se 
onienne  à  l'entrée  du  golfe  de  Corinthe. 
Tiée  par  ses  alluvions  a  fini  par  réunir  à  la 
>upe  de  petites  îles  voisines.  Cette  plaine 
lit  humain  disputait  aux  inondations  du 
able  ailolienne  d'une  lutte  entre  Héraclès 
.  main  de  Dèianeira.  Cette  lutte  est  repré- 
peint  du  musée  du  Louvre.  Le  corps  d'A- 
»  par  des  replis  de  dragon,  image  de  la 
irs.  Sur  les  monnaies  des  Acarnanes,  il  est 
s  cornes  de  taureau,  à  cause  de  l'impé- 

rée  de  TÉpire  par  le  golfe  d'Ambrakia,  de 
lôos,  était  bornée  à  l'ouest  par  la  mer 
a  côte,  à  laquelle  l'unissait  autrefois  une 
3rre,  était  l'île  de  Leucas,  ainsi  appelée  à 
îs  blanches,  d'où  Sappho  se  jeta,  dit-on, 
amour  désespéré.  Plus  loin  vers  le  sud 
ikè,  de  Samè,  appelé  plus  lard  Képhallènia, 
ss  îles  et  la  côte  en  face  de  Leucas  for- 
rOdysseus.  Dans  les  montagnes  escarpées 
liions  du  Pindos  et  de  l'Oita,  les  traditions 
i  grande  chasse  du  sanglier  de  Calydon, 
es  rudes  montagnards  de  l'Aitolie  gardèrent 
rs  à  demi  sauvages,  mais,  vers  la  fin  de  la 
me,  ils  jouèrent  un  rôle  important  dans 
l  courageusement  contre  les  Romains, 
i  rHélicon.  Apollon  et  les  Muses.  —  A 
ion  avec  l'Oita,  la  chaîne  du  Pindos  se 
iches.  L'une  se  dirigeant  vers  le  sud-ouest. 


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LE   FAHiNASSOS  ET  L  IlÉLIGON.  9 

sépare  l'Aitolie  de  la  Locris  Ozole  et  descend  jusqu'au  golfe 
de  Corinthe  ;  Taulre,  allant  vers  le  sud-est,  forme  le  Par- 
nassos,  THélicon  et  le  Kithairon.  Aux  pieds  des  deux  rochers 
du  Parnassos  était  la  ville  sainte  de  Delphes,  anciennement 


i 


ApoUoD  du  Belvédère.  (Musée  du  Vatican.) 

Pytho,  siège  d'un  oracle  d'Apollon,  le  plus  célèbre  de  tous  les 
prophétiques  de  la  Grèce.  C'est  là  que  le  Dieu 
îrrible  dragon  né  des  eaux  du  déluge.  Après  les 
sr,  quand  les  torrents  inondaient  la  vallée,  on 


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10  LA  BOIOTIE. 

croyait  voir  un  serpent  déroulant  ses  anneaux.  L'air  s'emplis- 
sait d'exhalaisons  mortelles;  mais  bientôt  les  rayons  du  soleil 
tombent  comme  des  flèches  d'or  et  dessèchent  les  marais  in- 
fininhp/»«  In  fameusc  statue  de  l'Apollon  du  Belvédère,  à  Rome, 
e  Dieu  dans  l'orgueil  de  la  victoire.  Il  vient  de 
îrnière  flèche,  et  le  monstre  exhale  sa  vie  :  «  Tu 
s  le  fléau  des  hommes,  dit  l'hymne  homérique, 
rriras  ici  sous  l'action  de  la  terre  noire  et  de  l'in- 
)érion.  » 

d'Apollon  se  rattachait  par  d'anciens  souvenirs 
septentrionales  :  c'était  de  la  vallée  de  Tempe  que 
cré  avait  été  transporté  à  Delphes.  C'est  aussi  de 
l'Olympe  que  sortit  le  culte  des  Muses.  Homère 
épithète  d'Olympiennes;  Hésiode  les  fait  naître  en 
•â-dire  au  nord  dé  la  Thessalie.  Une  tribu  venue 
1  s'établit  à  une  époque  très  ancienne  sur  les  con- 
ôkis  et  de  la  Boiôtie  et  y  porta  le  culte  des  Muses 
lié  aux  premiers  essais  de  la  musique,  de  la  poésie 
nse.  Les  Muses  personnifient  les  eaux  douces, 
Nymphes,  mais  avec  un  caractère  particulier  :  ce 
irces  chantantes  qui,  dans  les  grottes  et  les  forêts 
Pindos,  du  Parnassos,  de  l'Hélicon,  enseignent  aux 
divines  cadences.  C'est  de  leur  nom  que  les  Grecs 
lusique  l'ensemble  des  exercices  de  l'esprit, 
le.  —  Le  long  des  côtes  de  la  mer  d'Euboia,  sur 
'une  chaîne  de  collines  qui-«^  rattache  à  l'Oila, 
ocris  épicnémidienne  et  la  Locris  opuntienne,  sé- 
L  Locris  ozole  par  la  Phôkis.  Le  Képhisos,  rivière 
)ntagnes  de  la  Doris,  descend  vers  les  fertiles  plaines 
3  et  y  forme  le  lac  Copaïs,  qui  ne  communique 
que  par  des  conduits  souterrains  creusés  sous  le 
L'obstruction  de  ces  canaux  changerait  la  Boiôtie 
s,  et  c'est  peut-être  à  quelque  accident  de  ce  genre 
)rtela  tradition  du  déluge  d'Ogygès.  On  disait  aussi 
avait  employé  ce  moyen  pour  ruiner  la  puissante 
me  d'Orchomène  qui  était  en  guerre  avec  les  Thé- 
3uits  perpendiculaires  ouverts  dans  la  montagne 
t  de  nettoyer  les  canaux.  Un  autre  lac  plus  petit, 


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H 


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12  L'ILE   D'ëUBOIA. 

le  lac  d'Hylica,  parait  avoir  aussi  des  communications  souter- 
raines avec  la  mer.  Dans  la  Boiôlie  méridionale,  TAsôpos  coule 
lentement  au  milieu  d'une  longue  et  sinueuse  vallée  aussi 
fertile  que  celle  du  Képhisos. 

Les  habitants  de  la  stérile  Attique  prétendaient  que  Tabon- 
dance  des  eaux  qui  fécondent  le  sol  de  la  Boiôtie  alourdissait 
Tesprit  de  ses  habitants.  On  a  peut-être  eu  tort  d'admettre, 
sur  la  parole  des  Athéniens,  la  stupidité  d'un  peuple  qui,  le 
premier,  a  rendu  un  culte  aux  Muses,  qui  a  produit  Hésiode  et 
Pindare  et  qui  a  modelé  les  charmantes  statuettes  de  Tanagra. 
Dans  les  temps  héroïques,  aucune  ville  n'a  brillé  d'un  plus  vif 
éclat  queThèbes,la  patrie  d'Héraclès  et  de  Dionysos  (1), la  ville 
sacrée  dont  les  murs  s'étaient  élevés  spontanément  aux  sons 
de  la  lyre  d'Amphion.  La  sombre  légende  thébaine,  les  crimes 
involontaires  d'CEdipe,  la  lutte  fratricide  de  ses  fils,  le  dévoue- 
ment de  sa  fille  Anligone  ont  fourni  aux  poètes  d'Athènes  les 
sujets  de  leurs  plus  belles  tragédies. 

L^lle  d'Euboia.  —  La  Boiôtie  a  deux  côtes  maritimes,  Tune 
sur  le  canal  d'Euboia,  l'autre  sur  le  golfe  de  Corinthe.  La 
grande  île  d'Euboia,  qui  semble  un  prolongement  de  la  chaîne 
du  Pèlion  à  travers  la  mer,  couvre  la  côte  nord-est  delà  Locris, 
de  la  Boiôtie  et  de  l'Attique,  mais  elle  dépend  plus  particulière- 
ment de  la  Boiôtie,  dont  elle  a  peut-être  été  séparée  par  une 
révolution  géologique  analogue  à  celle  qui  a  ouvert  le  défilé 
de  Tempe.  Devant  le  port  d'Aulis,  d'où  partit  la  flotte  d'Aga- 
memnon,  d'après  les  traditions  épiques,  l'Ile  est  si  rapprochée 
du  continent  qu'on  a  pu  l'y  réunir  par  un  pont.  Cette  partie 
étroite  du  canal  euboïquese  nomme  Euripos;  il  s'y  produit  des 
alternances  irrégulières  de  flux  et  de  reflux  qui  n'ont  pas  été 
bien  expliquées.  Sur  ce  détroit,  presque  en  face  d'Aulis,  s'éle- 
vait la  principale  ville  de  l'Euboia,  Chalkis,  qui  envoya  de 
nombreuses  colonies  en  Sicile,  en  Italie  et  sur  les  côtes  de 
Thrace  et  de  Macédoine,  où  une  presqu'île  prit  de  là  le  nom 
de  Ghalkidique.  Sur  la  même  côte,  plus  au  sud,  était  la  ville 

(1)  Sur  les  miroirs,  Phuphluns;  dans  les  auteurs  latins.  Liber  Pater, 
la  Libation  personnifiée.  Le  nom  de  Dncchus^  forme  latine  d^une  épi- 
thète  grecque,  est  devenu  synonyme  de  Liber,  et  les  modernes  l'ont 
généralement  adopté. 


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L'ATTIQUE.  15 

d'Érétrie,  qui  fut  incendiée  par  les  Perses  dans  la  première 
guerre  médique.  Dans  la  seconde  guerre,  les  Érétriens  et  les 
Ciialkidiens  prirent  part  aux  batailles  navales  d'Artémision  et 
de  Salamine.  Deux  petites  villes  de  Boiôtie,  Thespies  et  Platée, 
eurent  un  rôle  glorieux  dans  ces  luttes  nationales  :  les  Platéens 
combattirent  avec  les  Athéniens  à  Marathon^  les  Thespiens 
moururent  avec  les  Spartiates  aux  Thermopyles,  tandis  que  la 
grande  ville  de  Thëbes  8*était  soumise  à  Xerxès.  Mais  les  Thé- 
bains  lavèrent  plus  tard  Thonneur  de  leur  ville:  seuls  avec  les 
Athéniens,  ils  défendirent  à  Ghéronée  la  liberté  de  la  Grèce,  et 
Thèbes  fut  détruite  par  Alexandre . 

L^Attiqae.  —  L'Attique  est  une  presqu'île  triangulaire,  bor- 
née d'un  côté  par  le  Kithairon  et  le  Par  nés  qui  la  séparent 
de  la  Boiôtie,  et  baignée  des  deux  autres  côtés  par  la  mer 
Egée.  Quelques  montagnes  peu  élevées,  le  Pentélique  avec  ses 
carrières  de  marbre,  THymetle  avec  son  miel,  le  Laurion  aux 
mines  d*argent,  séparent  les  principaux  districts  de  ce  petit 
pays,  «  la  région  du  globe,  dit  Thirlwall,  dont  l'étendue  offre 
la  plus  grande  disproportion  avec  sa  gloire  çt  son  importance 
historique.  »  Athènes  était  bâtie  dans  une  plaine,  près  de  la 
côte  méridionale,  au  pied  d'un  rocher  isolé  qu'on  appelait  l'A- 
cropole, c'est-à-dire  la  haute  ville,  la  citadelle.  Les  Athéniens 
racontaient  que  deux  puissantes  divinités  s'étaient  disputé  la 
possession  de  leur  cité  et  l'honneur  de  lui  donner  un  nom.  Ils 
montraient  la  source  d'eau  salée  qui  avait  jailli  du  trident  de 
Poséidon,  etl'olivier  sorti  de  terre  à  la  voix  d'Athènè  (1).  Il  y  eut 
un  vote  et  Athènè  obtint  la  préférence;  mais  Poséidon  ne  re- 
tira pas  sa  faveur  aux  Athéniens;  il  en  fit  un  peuple  de  mate- 
lots. Athènè  leur  donna  les  vertus  guerrières,  attestées  par 
deux  témoins  éternels,  la  plaine  de  Marathon  et  l'Ile  de  Sala- 
mine.  Elle  leur  donna  aussi  l'aclivilé  créatrice  et  Fintelligence 
politique.  L'olivier  qu'elle  avait  planté  devint  la  principale  ri- 
chesse du  pays.  La  vierge  armée,  fille  de  Zeus,  l'éclair  qui 
jaillit  du  ciel,  veillait  sur  son  peuple,  du  haut  des  remparts  bâ- 
tis par  les  Pélasges.  Sa  grande  statue  de  bronze,  œuvre  de  Phi- 

(l)  Le  nom  de  Pallas,  associé  par  Homère  au  nom  d'Athènè  a  été 
conseryé  par  les  Romains,  mais  ils  traduisent  Athènè  par  Minerva. 


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16 


L'ATTIQUE. 


dias,  dominait  le  Parlhénon  et  les  Propylées;  du  cap  Sounion, 

on  voyait  briller  Taigrette  de  son  casque  et  la  pointe  de  sa  lance. 

D'autres  Dieux  encore  protégeaient  l'Attique  :  Apollon,  l'an- 


g 


is  Ioniens;  Hèphaistos(l),le  forgeron,  père  du  premier 
Lhènes  Érechtheus,  qu'Athènè  avait  nourri  de  son  lait 

I  ^?a,  Iœtitq,  celui  qui  allume  le  foyer.  Les  miroirs  étrusques 
ni  Setklans;  les  auteurs  latins  l'identifient  avec  Vulcamif,  Dieu 
du  feu. 


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L'ATTIQUE.  17 

de  vierge;  le  Titan  Promèlheus, inventeur  du  feu, patron  des  sta- 
tuaires et  des  potiers.  Dèmèter(l),  la  législatrice,  avait  enseigné 
aux  Athéniens  Tagriculture,  et  près  de  son  sanctuaire  d'Eleusis, 
on  montrait  le  premier  champ  où  avait  été  semé  le  blé.  L'Atlique 


i»    s 


les  vignes,  et  le  théâtre  était  né  aux  fêtes  de  Diony- 
plus  grand  bienfait  des  Dieux,  c*est  un  gouverne- 
me  à  la  justice:  Thèseus,  le  héros  vainqueur  des 

e  mère,  yri  (jlyjtvjp.  Son  culte  passa  de  la  Sicile  chez  les 
l'appelèrent  Cérès. 


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L'ISIUME  DK  CORINTHE.  19 

brigands,  avait  fondé  la  démocratie  en  proclamant  le  principe 
de  l'égalité  des  droits  :  «àji  ta  Tax  rvai. 

La  Mégaris.  —  LUsthme  de  Gorinthe.  —  La  Mégaris  ap- 
partient géographiquement  à  TAltique,  mais  elle  en  a  été  déta- 
chée politiquement  depuis  l'invasion  des  Doriens  dans  le  Pélo- 
ponnèse. C'est  une  langue  de  terre  formée  par  une  branche  du 
Kilhairon  entre  le  golfe  de  Gorinthe  et  le  golfe  Saronique.  Au 
sud-ouest  du  territoire  de  Mégare,  les  montagnes  s'abaissent  et 
l'isthme,  resserré  entre  deux  baies,  n'a  guère  que  deux  lieues 
de  largeur.  Sur  ce  terrain  étroit  et  presque  plat,  appelé  Diol- 
cos,  on  faisait  glisser  les  navires  qui  voulaient  éviter  la  circum- 
navigation du  Péloponnèse.  Corinthe,  appelée  anciennement 
Éphyra,  avait  un  port  sur  chacune  des  deux  mers  et  devint 
malgré  l'exiguïté  de  son  territoire,  la  ville  la  plus  riche  de  la 
Grèce.  Elle  fonda  de  nombreuses  colonies,  entre  autres  Syracuse, 
la  ville  la  plus  importante  de  la  Sicile.  A  l'exemple  des  Athé- 
niens, les  Corinthiens  disaient  que  deux  divinités,  Poséidon  (1) 
et  le  Soleil,  s'étaient  disputé  leur  ville.  Ils  ajoutaient  que  Bria- 
reus,  le  géant  à  cent  bras,  ayant  été  pris  pour  arbitre,  avait 
adjugé  la  ville  à  Poséidon  et  le  promontoire  voisin  au  Soleil. 

La  forteresse  de  Corinthe  était  une  citadelle  inexpugnable 
située  à  quelque  distance  de  la  ville,  au  sommet  d'un  rocher 
escarpé  qui  dominait  l'isthme  et  protégeait  le  Péloponnèse.  Les 
rois  de  Macédoine  s'en  emparèrent  et  furent  maîtres  de  la 
Grèce.  Affranchie  de  la  Macédoine,  Corinthe  se  réunit  à  la  con- 
fédération achaienne  et  fut  détruite  par  les  Romains.  César  la 
rebâtit  et  y  établit  une  colonie.  Néron  voulait  percer  l'isthme, 
mais  on  abandonna  bientôt  cette  entreprise,  regardée  comme 
une  impiété.  L'ouverture  récente  du  canal  de  Suez  engagera 
peut-être  le  gouvernement  hellénique  à  reprendre  une  opéra- 
tion qui  ne  serait  pas  très  difficile  et  dont  le  succès  ferait  de 
Corinthe  la  véritable  capitale  de  la  Grèce. 

Le  Péloponnèse  et  ses  divisions.  —  Le  Péloponnèse, 
l'Ile  de  Pélops,  est  un  pentagone  irrégulier,  profondément 
échancré  de  tous  les  côtés  par  la  mer.  Les  anciens  le  compa- 
raient à  une  feuille  de  platane,  dont  l'isthme  de  Corinthe  for- 

(!)  Appelé  parles  Romains  Neplunin, 


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L*EUROTAS  ET  L'aLPIIEIOS.  21 

meraille  pétiole.  On  Ta  aussi  comparé  à  la  feuille  du  mûrier, 
et  de  là  vient  son  nom  moderne  de  Morée.  Un  cercle  de  hautes 
montagnes  entoure  la  partie  centrale  de  la  presqulle  et  pro- 
jette dans  tous  les  sens  des  ramiGcations  vers  la  mer.  Cette 
région  centrale  était  TArcadie,  la  seule  partie  du  Péloponnèse 
qui  n'eût  pas  de  côte  maritime.  Au  nord,  la  chaîne  qui  ratta- 
che le  mont  Kyllène  au  mont  Érymanthe  séparait  TArcadie  de 
Tétroiie  contrée  qu*on  nommait  d'abord  Aigialos,  c'est-à-dire 
le  rivage,  et  qui  prit  le  nom  d'Achaïe  quand  les  Achaiens, 
chassés  de  la  partie  orientale  du  Péloponnèse,  s'établirent  le 
long  du  golfe  en  expulsant  les  Ioniens.  A  l'ouest,  l'Arcadie 
était  séparée  de  l'Élis  par  une  branche  de  l'Érymanthe,  le 
mont  Pholoè.  A  l'est,  les  montagnes  de  l'Argolis,  rattachées  au 
mont  Kyllène,  se  prolongent  sous  les  noms  de  Parthénios, 
d'Artémisios  et  de  Parnon,  le  long  de  la  côte  de  Laconie  jus- 
qu'au cap  Maléc.  Au  sud,  entre  l'Arcadie  et  laMessénie,  s*étend 
la  chaîne  du  Lykalos,  qui  va  rejoindre  à  Test  le  mont  Maina- 
los,  séjour  préféré  du  grand  Dieu  des  Arcadiens,  Pan  aux  pieds 
de  chèvre.  Partant  du  Lykaios,  une  autre  chaîne  de  montagne, 
le  Tèygetès,  séparait  le  golfe  de  Messénie  du  golfe  de  Laconie 
et  se  prolongeait  dans  la  mer  jusqu'au  cap  Tainaros,la  pointe 
la  plus  méridionale  de  la  Grèce. 

UEurotas  et  l'Alphéios.  —  Les  Jeux  olympiques.  — 
Du  cirque  de  montagnes  qui  entoure  l'Arcadie,  des  rivières 
descendent  dans  toutes  les  directions.  Le  Pamisos  arrose  la 
fertile  plaine  de  Messénie  ;  l'Eurotas  coule  entre  le  Parnon  et 
le  Tèygetès,  dans  la  vallée  qu'Homère  appelle  la  creuse  Laké- 
daimôn.  Vers  le  milieu  de  son  cours  se  trouvait  Sparte,  dont 
les  ruines,  comme  l'avait  prévu  Thucydide,  sont  si  loin  de  ré- 
pondre à  l'importance  du  rôle  qu'elle  a  joué  dans  1  histoire, 
que  son  emplacement  a  été  longtemps  douteux.  L'Alphéios  sort 
des  mêmes  montagnes  que  l'Eurotas;  on  suppose  que  ces 
deux  fleuves,  après  s'être  engouffrés  dans  les  mômes  canaux 
souterrains,  en  sortent  de  nouveau  par  deux  sources  différen- 
tes et  dans  deux  directions  opposées.  Le  lac  Copaïs  nous  a 
^éjà  offert  un  exemple  de  ces  disparitions  de  rivières  dans  les 
profondeurs  du  sol;  elles  n'étaient  pas  rares  en  Arcadie;  on 
attribuait  ces  cavités  souterraines  au  trident  de  Poséidon, 


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22  L'EUROTAS  ET  L'ALPHEIOS. 

c'est-à-dire  à  des  tremblements  de  terre  produits  par  des  infil- 
trations marines.  L*Alphéios  est  le  plus  grand  fleuve  du  Pélo- 
ponnèse ;  après  avoir  traversé  l'Arcadie  où  il  reçoit  les  eaux  du 
Ladon  et  de  TÉrymanthe,  il  pénètre  en  Élis  et  se  jette  dans  la 
'    lienne.  Les  Grecs,  habitués  à  voir  des  fleuves  disparaî- 


nnaie  de  Mes-  Tète  de  Pan  (monnaie 

en  Sicile).  de  Panticapée). 


étouffant  le  lion  Héraclès  combattant  (mon- 

méa     (monnaie  naie  de  Slymphale). 

liée  de  Lucanie). 


Statue  de  Pan. 

(paraître,  ont  prétendu  que  TAlphéios  traversait  la  mer 
'aissait  en  Sicile  dans  la  fontaine  Arélhousa.  Cette  opi- 
ûi  si  généralement  admise  que  Strabon  croit  nécessaire 
ifuter. 
une  petite  plaine  de  TÉlis,  près  de  la  vallée  de  Pisa, 
ds  de  l'Alphéios,  se  célébraient  les  jeux  olympiques,  les 
lèbres  de  la  Grèce.  Là,  dans  le  bois  sacré  de  TAltis,  au 


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LES  JEUX  OLYMPIQUES.  23 

milieu  des  statues    des  athlètes   vainqueurs    dans  les  luttes 


Tète  d'Hère,  d'après  Is 
sUtae  de  Polyelète. 
(Monnaie  d'Argos). 


Tète  d'Bèrè  (la  Junon 
de  Prénette). 


Le  Soleil 
[ Monnaie   dé  Rhodes). 


Le  Soleil  (Monnaie 
de  Clazomène). 


Le  Soleil  (musée  du  LouTre). 


Tète  de  Poséidon  (monnaie 
d'Antigonos,  roi  d'Asie). 


Poséidon  -rati{oxo(,  c'est-à-dire  qui  tient 
la  ^<frre  (monnaie  de  Dèmètrios). 


gymniques,  était  le  temple  de  Zeus  Olympien,  dont  le  colosse 


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U  LÉGENDES   DU   PÉLOPONNÈSE. 

j» »  l'ivoire  élail  regardé  comme  le  chef-d'œuvre  de  Fii. 

5  retour  périodique  des  jeux  après  des  intervalles  c^ 
lUs  qu*on  nommait  olympiades,  est  devenu  la  base  d* 
lologie  grecque. 

ides  du  Péloponnèse.  —  Le  Péloponnèse  passait  pour 
ière  patrie  de  Pélasges,  comme  la  Thessalie  était  celle 
ènes.  Les  Arcadiens  qui,  dans  leurs  montagnes  restc- 
ijours  en  dehors  du  chemin  des  migrations,  se  van- 
*é(re  autochtones,  et  même  plus  anciens  que  la  Lune, 
ervèrent  jusque  dans  l'époque  historique  l'habitude  de 
rir  de  glands.  Quelques-unes  de  leurs  légendes  se  rap- 
à  un  état  tout  à  fait  sauvage,  par  exemple  celle  de 
changé  en  loup  pour  avoir  offert  des  sacrifices  hu- 
Les  débuts  de  la  civilisation  dans  ces  contrées  se  ralfa- 
au  nom  de  Phoroneus,  qui  est  une  sorte  de  Promè- 
gien,  car  on  lui  attribuait  la  découverte  du  feu  et  on 
[t  le  premier  des  hommes.  Son  père,  le  fleuve  Inachos, 
31s  de  l'Océan,  passait  pour  le  plus  ancien  roi  du  pays, 
deux  divinités,  Hère  (1)  et  Poséidon,  se  disputaient  TAr- 
fut  pris  pour  juge  avec  d'autres  fleuves  du  voisinage,  et 
Duoncèrent  en  faveur  d'Hère.  Poséidon  irrité  dessécha 
s  et  toutes  le9  rivières  du  pays,  h  l'exception  du  marais 
e.  Plusieurs  légendes  locales  se  rapportent  à  celte  sé- 
i  des  plaines  de  l'Argolis  :  Danaè  séduite  par  Zeus 
en  pluie  d'or,  c'est  la  terre  sèche  fécondée  par  les 
u  printemps.  Les  Danaïdes,  c'est-à-dire  les  filles  de  la 
che,  qui  remplissent  incessamment  un  vase  sans  fond, 
puits  creusés  dans  la  terre  sablonneuse  et  toujours 
it&Xu^i\|;iov  ''Ap-^o;,  comme  dit  Homère.  Dans  la  basse 
e  Lerne,  au  contraire,  les  eaux  manquaient  d'écoule- 
t  les  ruisseaux  pestilentiels,  quand  on  voulait  les  des- 
'enaissaient  ailleurs  comme  les  tôtes  d'un  serpent  veni- 
a  victoire  d'Héraclès  sur  l'hydre  est  peut-être  une  fabi 
omme  la  victoire  d'Apollon  sur  Pytho;  mais,  par  Ten- 
de ses  travaux,  Héraclès  représente  surtout  les  pi  - 
luttes  de  la  civilisation  contre  une  nature  toujoi    - 

I fondue  par  les  Romains  avec  la  Juno  italique. 


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L.  M.  —  HisT.  DES  Grecs. 


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I/ARGOS  ACIIAÎQUE. 

lis  le  Péloponnèse  que  la  plupart  de  ses 

ilisées. 

le.  —  Mykénes  et  Tiryns.  —  Dans  les 

5  nonn  d'Argos  achaïque  désigne  ordinai- 

d*Agamemnon,  mais  quelquefois  il  est 
>ponnèse  et  môme  à  la  Grèce  en  général, 
fos,  où  règne  Diomèdès,  c*est  une  des  trois 

mais  elle  n'a  pas  Fimporfance  de  Mykènes 
ces  des  rois  Atréides.  Après  le  retour  des 
isseméntdes  Doriens  à  Argos,  Mykènes,  la 
perdit  sa  prépondérance,  et  Argos  devint 
ante  de  la  contrée.  Lors  de  l'invasion  de 
luile  à  un  1res  petit  nombre  d'habitants, 
ux  ïhermopyles  et  à  Platées  les  quelques 
,  tandis  qu'Argos  gardait  une  neutralité 
le  trahison.  Peu  de  temps  après,  les  Ar- 
ykènes  dont  les  habitants  furent  recueillis 
ville  encore  plus  ancienne  que  Mykènes, 
[e  par  les  Argeiens,  qui  en  transportèrent 
;.  Les  ruines  de  Tiryns  et  de  Mykènes,  qui 
ijourd'hui  telles  que  les  a  décrites  Pausa- 
des  constructions  qu'on  nomme  pélasgi- 

trouve  d'analogues  dans  tous  les  pays  où 
es  Pélasges,  en  Grèce,  en  Asie  mineure 
les  récentes  du  docteur  Schliemann  à  My- 
Itats  les  plus  importants  pour  l'histoire  de 
B  héroïque.  L'abondance  des  armes  et 
d'argent  trouvés  dans  les  tombeaux  justi- 
ichesse  de  Mykènes  et  des  rois  Pélopides. 
smple  d^Asclëpios.  —  L'Ile  d'Aigine. 
'gos  et  le  golfe  Saronique,  l'Argolis  forme 
l'avance  vers  le  sud  dans  la  partie  de  la 
ïme  mer  de  Myrlo.  A  l'extrémité  sont  les 
e  et  de  Troizen,  et,  près  de  la  côte,  la  pe- 

où  Démosthène  s'empoisonna  dans  le 
pour  ne  pas  tomber  vivant  aux  mains  des 
laine  de  collines  désignée,  dans  sa  partie 
e  nom  d'Arachnaion,  sépare  le  territoire 


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ÉPJDAURE.  27 

d'Épidaure  de  celui  d'Argos.  La  ville  d*Épidaure  devait  son 


imporlaiice  au  temple  d'Asclèpios,  Dieu  de  la  médecine.  De 


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"^ippl 


l'île   D'AlGhNE. 

Bs  de  la  Grèce  les  malades  venaient  consulter  le 
is  parle  de  colonnes  sur  lesquelles  ils  inscri- 
n,  leur  maladie  et  la  manière  dont  ils  avaient 
y  allait  aussi,  comme  dans  nos  villes  d'eaux, 
des  distractions,  et  le  théâtre  d'Épidaure,  bâti 
sacrée,  passait  pour  le  plus  beau  de  la  Grèce, 
daure,  au  milieu  du  golfe  Saronique,  était  lîle 
es  habitants,  qui  se  prétendaient  la  souche  des 
ent  les  premiers,  selon  un  fragment  d'Hésiode, 
3nt  des  vaisseaux  à  voiles  pour  parcourir  les 
par  les  Doriens  d'Épidaure,  Aigine  passa  avec 
lination  de  Pheidon,  roi  d'Argos,  auquel  on  rap- 
n  du  monnayage.  Les  plus  anciennes  monnaies 
on  connaisse  ont  été  frappées  à  Aigine  au  hui- 
ant  notre  ère  ;  elles  représentent  une  tortue, 
ayant  recouvré  leur  indépendance,  devinrent 
iVlhéniens  sur  mer  et  prirent  comme  eux  une 
à  la  bataille  de  Salamine.  L'école  aiginélique 
écéda  la  grande  école  altique  de  Phidias;  les 
aient  les  deux  frontons  du  temple  d'Alhènè  à 
ont  maintenant  au  musée  de  Munich,  représen- 
s  des  héros  Aiakides,  patrons  des  Aiginèles. 
ï  politique  des  cantons  péloponnésiens.  — 
ions  politiques  du  Péloponnèse  ne  répondirent 
cactement  à  ses  divisions  géographiques.  Les 
taires  de  Sparte  lui  donnèrent  de  bonne  heure 
marquée  sur  les  autres  États  doriens.  La  Mes- 
is  guerres  successives,  cessa  d'exister  comme 
erritoire  fut  réuni  à  celui  de  la  Laconie.  Les 
s  de  la  presqu'île  appelée  Argolis  par  les  géo- 
li  presque  toujours  indépendantes  les  unes  des 
a  plus  importante,  après  avoir  longtemps  lutté 
ut  renoncer  à  jouer  un  rôle  politique  et  se  con- 
e  des  arts.  Son  école  de  sculpture  fut  la  rivale 
es.  Sikyone,  une  des  plus  anciennes  villes  de 
ont  le  territoire  était  resserré  entre  l'Achaïe  et 
dut  sa  célébrité  qu'à  son  école  de  peinture, 
ont  le  pays  était  un  terrain  neutre,  à  cause  des 


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30  LES  KYGLADES. 

piques,  n'avaient  rien  à  redouter  des  Spartiate 
3mme  en  Argolis  il  y  avait  des  villes  indépenc 
les  autres  et  qui  se  faisaient  quelquefois  la  gi 
it  Tégéa  et  Mantinée.  Ces  deux  villes  eurent  à 
Spartiates  et  réussirent  à  garder  leur  indépencj 
idas,  en  fondant  Mégalopolis,  donna  aux  Arcj 
litique  qui  leur  avait  manqué  jusque-là,  en 
I,  par  la  fondation  de  Messène,  il  ruinait  la  puis 

es  de  TAchaïe  étaient  unies  entre  elles  par  u 
r  le  pied  de  l'égalité.  Depuis  que  l'invasion  doi 
forcés  à  s'établir  dans  TAigialos,  les  Achaiens 
iigers  à  toutes  les  affaires  de  la  Grèce,  môm 
nédiques.  Mais,  pendant  la  période  macédon 
de  l'affaiblissement  de  Sparte,  ils  voulurent  él 
ation  à  tout  le  Péloponnèse.  Les  Spartiates  refu 
înt  d'y  entrer.  De  là  des  luttes  qui  amenèrent  1 
es  Romains  et  la  soumission  de  l'Achaïe. 
la  mer  Egée  :  les  Kyclades.  —  Les  lies  de  1' 
tachent  à  la  Grèce  continentale  par  le  plateau 
i  les  porte  et  ne  sont  que  des  prolongements 
le  montagnes.  Ainsi  la  longue  arête  dorsale  de 
fait  suite  à  la  chaîne  du  Pèlion,  reparaît  dans  h 
î  des  Kyclades,  tandis  que  leur  ligne  intérieu 
chaîne  traversant  l'Atlique  jusqu'au  cap  Sounio 
es  forment  un  ovale  très  allongé  plutôt  qu'un  < 
ir  les  pèlerins  qui  venaient  à  Dèlos,  les  rochers 
e  tous  les  côtés  de  l'horizon  semblaient  une  cou 
3  rile  sainte.  Dèlos  est  la  plus  petite  des  Ky( 
avait  l'honneur,  inappréciable  aux  yeux  des  Grec 
berceau  d'Apollon  et  d'Artémis (i).  Quand  Lèto, 
t  prise  des  douleurs  de  l'enfantement  et  poui 
lousie  d'Hère  cherchait  en  vain  un  asile,  Dèlc 
)rs  qu'une  lie  flottante,  consentit  à  la  recevoir 
ise,  Apollon  y  établit  son  sanctuaire  où  les  lonic 

ntitô  de  TArtémis  grecque  et  de  la  Diafia  italique,  c 
r  les  Romains  est  contestée  aujourd'hui.  Latona  est  h 
lèto. 


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LES  KYGLAUES. 


31 


iébraient  des  concours  de  chant,  de  danse  et  de  pugilat.  Les 
Perses  eux-mêmes,  lorsqu'ils  ravageaient  les  îles  grecques,  res- 
pectèrent celle  où  étaient  nés  les  deux  Dieux  de  la  lumière.  Mi- 
thridate  n'eut  pas  les  mêmes  scrupules  :  pour  punir  Dèlos  de 


sa  fidélité  aux  Romains,  il  massacra  les  habitants,  dévasta  le 
temple  et  jeta  la  statue  du  Dieu  à  la  mer. 

Près  de  l'île  d'Apollon  était  l'île  de  Dionysos,  Naxos,  ancien- 
nement Dia,  la  plus  fertile  des  Kyclades.  Les  vignes  qu'on  y 
cultivait  expliquent  le  culte  rendu  au  Dieu  des  libations.  On  ra- 
contait qu'en  revenant  de  la  conquête  de  l'Inde,  il  avait  abordé 


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L'ILE   DE  CKÈTE. 


33 


à  Naxos  avec  son  cortège  de  Mainades  et  de  Satyres,  y  avait 
rencontré  Ariadnè,  fille  de  Mi  nos,  abandonnée  par  Thèseus  au 
retour  de  Crète  et  en  avait  fait  son  épouse. 

Au  sud  des  Kyclades  se  développe,  entre  le  Péloponnèse  et  la 
côte  d'Asie,  une  chaîne  dites  volcaniques  dont  les  plus  impor- 
tantes sont  Mèlos,  qui  ressemble  à  un  vaste  cratère,  et  Thèra, 
aujourd'hui  Santorin,  intéressante  par  des  révolutions  géolo- 


Zeus  enfaot  allaité  par  la  chèvre  Amaltheia.  Sa  mèie  Rhéiè  est  assise  près  de 
lui.  Deux  Courètes  Trappent  leurs  boucliers  de  leurs  épées  pour  empêcher  Kronos 
d'ectendre  les  cris  de  reufant.  (Bas-relief  d'un  autel  quadrangu!aire  du  Capitole.) 

giques  causées  par  des  volcans  sous-marins.  Les  vases  trouvés 
à  Santorin  sont  antérieurs  à  l'effondrement  de  l'Ile  et  passent 
pour  les  œuvres  les  plus  anciennes  de  l'art  industriel  chez  les 
Grecs. 

La  Crète.  —  L'île  de  Crète,  la  plus  grande  des  lies  grec- 
ques, située  à  peu  près  à  égale  dislance  de  l'Europe,  de  l'Asie 
et  de  l'Afrique,  semble  destinée  à  servir  de  lien  entre  les  trois 
parties  de  l'ancien  monde.  La  chaîne  qui  la  traverse  dans  sa 


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L'ILE  DE  CHÈTE. 

Test  se  rattache  aux  montagnes  du  Pé- 


par  la  petite  île  de  Kylhéra.  La  forme  de 


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1    i.i^ipjpjJW^MM.  ■  — 

L\  GUÉGB  D'ASIE.  35 

la  Crète  reproduit  à  peu  près  celle  de  l'Euboia.  Sa  côte  septen- 
trionale est  profondément  échancrée  par  deux  golfes  qui  la 
partagent  en  trois  régions  en  rapport  avec  trois  groupes  de 
montagnes.  Le  plus  important,  celui  du  centre,  l'énorme  mas- 
sif de  rida,  s*6lève  à  2340  mètres  au-dessus  dé  la  mer.  C'est  là 
que  Zeus  était  né  et  qu'il  avait  été  élevé  par  les  Courètes.  Ce 
nom,  comme  celui  des  Selles  de  Dodone,  désigne  à  la  fois  une 
ancienne  population  de  la  Grèce  et  un  ancien  collège  de  pré- 
Ires  de  Zens.  Primitivement,  il  signifiait  les  jeunes  gens.  A 
l'époque  pélasgique,  quand  les  Grecs  célébraient  Zeus,  les  jeu- 
nes gens  de  la  tribu,  xoûpci,  les  Courètes,  frappant  leurs  bou- 
cliers de  leurs  épées,  se  livraient  k  des  danses  guerrières  qui 
ûguraient  les  tempêtes  de  l'air,  la  victoire  de  Zeus  sur  les  Ti- 
tans. Les  Cretois  montraient  aussi  chez  eux,  près  de  Gortyne, 
le  platane  sous  lequel  Zeus  avait  déposé  la  fille  de  Phoinix, 
Europe,  qu'il  avait  enlevée  en  prenant  la  forme  d'un  taureau 
et  transportée  à  travers  la  mer  dans  la  contrée  appelée  depuis 
l'Europe.  Le  fils  de  Zeus  et  d'Europe,  le  sage  roi  Minos,  après 
avoir  réprimé  la  piraterie  dans  l'Archipel  et  donné  des  lois  à 
la  Crète,  conserve  son  sceptre  d'or  dans  le  royaume  d'Aidés  et 
rend  la  justice  aux  morts.  4  côté  du  premier  législateur,  les 
légendes  Cretoises  placent  le  premier  artiste,  l'Athénien  Daida- 
los  qui,  chassé  de  son  pays,  est  accueilli  par  Minos  et  construit 
le  labyrinthe  pour  loger  le  Minotaure. 

La  Grèce  d'Asie.  —  L'Asie  mineure  forme  un  vaste  pla- 
teau entouré  d'une  ceinture  de  montagnes  dont  la  plus  consi- 
dérable est  la  chaîne  du  Tauros.  Du  côté  de  la  mer  Egée, 
lOlympe,  rida,  le  Tmolos,  qui  sont  comme  les  contreforts  du 
plateau  central,  enferment  de  vastes  et  fertiles  vallées  qu'habi- 
taient autrefois  des  peuples  plus  ou  moins  apparentés  à  la  race 
hellénique,  Phrygiens,- Lydiens,  Cariens,  Lykiens.  Au  nord- 
ouest,  dans  la  plaine  arrosée  par  le  Simoïs  et  le  Scamandros, 
les  légendes  placent  le  royaume  de  Troie,  et  plus  au  sud,  aux 
pieds  du  mont  Sipyle,  l'antique  royaume  de  Tantalos,  d'où 
étaient  sortis  les  rois  Pélopides.  Dans  les  temps  historiques, 
toute  la  région  maritime  était  occupée  par  les  Grecs  et  distin- 
guée par  les  noms  des  principales  tribus  qui  y  avaient  fondé 
des  colonies.  L'Aiolis  comprenait  l'ancienne  Troade  et  la  grande 


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36  LA  GKÈGË  D'ASIE. 

tle  de  Lesbos.  L'Ionie,  dont  le  nom  est  quelquefois  étendu  à 
toute  la  Grèce  d'Asie,  désignait  plus  spécialement  la  côte  de 
Lydie,  entre  l'embouchure  de  l'Hermos  et  celle  du  Maïandros, 
avec  les  lies  voisines,  Chios  et  Samos.  La  Doris  comprenait  les 
îles  de  Cos,  de  Rhodes  et  la  côte  carienne  jusqu'à  la  Lykie. 
D'après  les  auteurs  grecs,  la  côte  d'Asie  mineure,  habitée 
anciennement  par  des  Cariens  et  des  Lélèges,  n'aurait  pris  le 
nom  d'ionie  que  dans  les  temps  historiques  par  suite  d'une  - 
émigration  partie  d'Athènes  et  composée  principalement  d'Io*  ■ 
niens.  Cependant  Casaubon  a  soutenu  la  haute  antiquité  des 
Ioniens  d'Asie,  en  s'appuyant  sur  la  Bible,  qui  donne  aux  Grecs 
en  général  le  nom  de  Javanim  et  les  fait  descendre  de  Javan, 
un  des  fils  de  Japhet.  Dans  le  code  de  Manou,  les  Yavanas  sont 
nommés  parmi  les  tribus  de  Kshattriyas  qui  ont  perdu  leur 
caste  pour  avoir  négligé  les  rites.  L'antériorité  des  Ioniens 
d'Asie  sur  les  Ioniens  d'Europe  a  été  soutenue  de  nos  jours 
par  M.  Curlius. 

Les  lies  de  l'Archipel  relient  la  Grèce  d'Asie  à  la  Grèce  d'Eu-  ' 
rope;  les  Sporades  font  suite  aux  Kyclades,  les  îles  de  Rhodes 
et  de  Carpalhos  sont  un  prolongement  de  la  Crète.  A  l'orient 
comme  à  l'occident,  la  mer  Égée^ pénètre  dans  l'intérieur  des 
terres  par  des  échancrures  profondes  qui  triplent  l'étendue 
des  côtes.  Ainsi,  en  Asie  comme  en  Europe,  les  Grecs  étaient 
prédestinés  par  la  géographie  à  devenir  marins.  Les  anciens 
habitants  de  la  Grèce  d'Europe,  qu'on  désigne  sous  les  noms 
assez  vagues  de  Pélasges  et  de  Lélèges,  habitaient  aussi  la 
Grèce  d'Asie  avant  les  temps  historiques.  Il  y  a  toujours  eu 
des  échanges  de  population  entre  les  deux  côtes  de  la  mer 
Egée  :  on  trouve  en  Mysie  un  mont  Olympe  comme  en  Thes- 
salie,  un  mont  Ida  comme  en  Crète.  Le  développement  de  la 
civilisation  fut  à  peu  près  simultané  chez  les  Grecs  d'Asie  et 
chez  les  Grecs  d'Europe.  Deux  des  trois  modes  de  la  musique  < 
grecque,  le  mode  phrygien  et  le  mode  lydien,  appartiennent  à 
l'Asie  :  la  fable  de  Marsyas  écorché  par  Apollon  après  un 
concours  musical  semble  traduire  une  rivalité  entre  la  lyre  et 
la  flûte.  C'est  en  Europe  qu'on  trouve  les  plus  anciennes  cons- 
tructions grecques,  les  murs  de  Tiryns  et  de  Mykènes,  mais  une 
tradition  les  faisait  bâtir  par  des  ouvriers  hkiens.  Le  vers  hexa- 


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L.  M.  —  H18T.  DES  Grecs. 


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KYPROS. 

lations  indigènes  n'ont  pas  été  absorbées  et  ont 
trvé  leurs  langues.  La  côte  de  Carie,  à  la  hauteur 
(des,  forme  donc  de  ce  côté  la  limite  de  la  Grèce 
lant  la  Lykie,  petite  presqu'île  montagneuse  à 
e,  était  habitée  par  un  peuple  très  proche  parent 
9  Lykiens  sont  nommés  dans  Tlliade  parmi  les 
n.  Leur  roi  Sarpèdon,  fils  de  Zeus  et  d'Europe, 
et  de  Rhadamanthys,  paraît  être  un  ancien  Dieu 
Hérodote,  ayant  disputé  le  trône  à  Minos,  il  fut 
te  avec  tous  ceux  de  son  parti  et  s'établit  dans 
l'Asie  habité  par  les  Solymes.  Hérodote  ajoute 
ppelé  autrefois  Milyas,  reçut  le  nom  de  Lykie  de 
kos,  fils  de  Pandion;  mais  il  est  plus  probable 
e  Lykie  dérive  d'un  vieux  mot  grec  qui  s'est 
tin,  et  signifie  le  pays  de  la  lumière,  c'est-à-dire 
ivant  anglais  Schmidt  suppose,  d'après  l'étude 
is,  que  les  Lykiens  sont  un  rameau  détaché  de 
-européenne  avant  l'émigration  pélasgique  ;  leur 
aît  tenir  le  milieu  entre  le  grec  et  le  bactrien.  Il 
cette  langue  était  facilement  comprise  des  Grecs, 
Ifmnes  du  Lykien  Olen  en  l'honneur  d'Apollon 
aux  fêtes  de  Dèlos.  La  légende  de  Bellérophontès 
[is  rapports  entre  Argos  et  la  Lykie  ;  c'est  à  Tocca- 
égende  qu'on  trouve  dans  Homère  la  première 
'iture.  Les  tombeaux  de  Xanthos,  dont  plusieurs 
ïs  au  British  Muséum,  ont  pour  caractère  parti- 
ation  systématique  des  constructions  en  bois  ;  le 
t  en  ogive  et  a  la  forme  d'une  carène  renversée, 
s  du  petit  édifice  qu'on  nomme  monument  des 
nblent  à  quelques  sculptures  grecques  archaï- 
e  bas-relief  de  Thasos,  au  Louvre.  Mais  ce  qui 
Dre  plus  les  Lykiens  des  Grecs,  c'est  leur  sens  po- 
ient  pour  gouvernement  une  république  fédéra- 
l'égalité  des  cantons,  comme  la  ligue  achaienne. 
*ranée  orientale.  ~  Kypros.  Les  Philistins. 
à  quelle  époque  les  Grecs  s'établirent  sur  quel- 
la  région  située  à  l'est  de  la  Lykie,  entre  la  mer 
i  Tauros.  Il  y  étaient  déjà  au  temps  de  la  domi- 


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ET  GRANDE  GRÈCE. 

j  les  ancêtres  des  Grecs  avaient  pris 
B  pays  ait  été  fermé  pendant  longtemps 
'étaient  fait  cbnnaître  que  par  des  actes 
les-uns  de  ces  pirates  grecs  ayant  con- 

dynastie  saïte  reçurent  des  terres  vers 
5  mercenaires  grecs  formèrent  depuis 
Egypte,  et  les  marchands  grecs  eurent 
ir  à  Naucratis  sous  certaines  conditions 
u  près  comme  les  Européens  sont  admis 
i  Chine  et  du  Japon.  Enfin,  à  Touest  de 
lis  d'Ammon,  la  ville  de  Kyrène,  fondée 
île  de  Delphes,  devint  le  centre  d'un 
ts,  et  tout  le  littoral  du  pays,  qui  forme 
ne,  reçut  le  nom  de  Kyrènaïque. 
e  la  Méditerranée.  La  Sicile  et  la 
Grecs  avaient  pu  enlever  aux  Tyriens, 

contre  l'empire  assyro-chaldéeu,  le 
et  de  la  mer  Noire  ;  mais  quand  ils  vou- 

Méditerranée  occidentale,  ils  eurent 
ns,  les  Carthaginois.  Carthage,  colonie 
tropole  l'avantage  de  pouvoir  soutenir 

force  militaire  redoutable.  Les  Grecs 
is  colonies  importantes  sur  les  côtes 
i  de  la  Sicile,  et  môme  sur  une  partie 
aie,  mais  les  Carthaginois  se  maintin- 
entale  de  la  Sicile,  en  face  de  l'Afrique, 

de  Corse  et  de  Sardaigne,  et  n'en  fu- 
Romains. 

s'établissaient  en  Sicile^  les  Grecs  fon- 
Italie  méridionale  des  colonies  si  nom- 

le  nom  de  Grande-Grèce.  Les  princi- 
race  hellénique,  Achaiens,  Dorions, 
Vsie,  fournirent  des  éléments  à  cette 
leignit  bientôt  une  grande  prospérité, 
t  Athènes,  aucune  ville  grecque  n'égala 

Sélinonte  et  Syracuse  dans  la  Sicile, 
fente  dans  la  Grande-Grèce.  Avec  le 
i,  toutes  les  formes  de  la  culture  intel- 


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3   ÉTHUSQUES. 


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jo.Riir  Suufllof 


Jmp  Faùuymr  Porur 


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LES  MURS  DE  TIBYNS.  61 

construits  sur  le  sol  de  la  Grèce  ne  sont  pas  des  temples  comme 
en  Egypte^  ni  des  palais  comme  en  Assyrie,  ce  sont  des  enceintes 
de  villes  et  des  citadelles.  Cette  différence  est  importante,  parce 
que  le  caractère  des  peuples  se  traduit  dans  leur  architecture. 
L'Egypte  est  une  théocratie,  TAssyrie  une  monarchie  :  la  Grèce 
sera  le  pays  de  la  cité  républicaine.  Sur  des  rochers  escarpés  et 
d'un  accès  difficile,  s'élevaient  des  forteresses  où  les  habitants 
de  la  plaine  pouvaient  se  réfugier  et  se  défendre  contre  une 
descente  de  pirates  ou  contre  Finvasion  d'une  tribu  ennemie. 

Mars  de  Tiryns  etMykénes.  —  La  porte  des  Uons.  — 
Les  murs  de  Tiryns,  élevés  d'environ  i2  mètres  sur  ^5  d'épais- 
seur, sont  formés  de  quartiers  de  rochers  non  taillés,  dont  un 
seul,  dit  Pausanias,  serait  difficilement  traîné  par  deux  mulets. 
Les  interstices  qu'ils  laissent  entre  eux  sont  bouchés  au  moyen 
de  pierres.  L'acropole  de  Tiryns  n'a  ni  bastions  ni  tours  comme 
on  en  trouve  dans  les  constructions  pélasgiques  moins  ancien- 
nes, mais  de  chaque  côté  de  la  principale  entrée  sont  prati- 
quées, dans  l'épaisseur  du  mur,  des  galeries  ogivales  dont  la 
Toute  est  formée  d'assises  en  encorbellement.  Dans  la  gale- 
rie extérieure  du  mur  de  l'est,  il  y  a  six  ouvertures  en  ogive. 
La  ville  de  Mykènes  s'étageait  sur  le  versant  d'un  mamelon  es- 
carpé qui  commandait  la  plaine  d'Argos.  La  citadelle  qui  en 
occupe  le  sommet  est  entourée  de  remparts  formés  de  blocs 
polyédriques  irréguliers,  mais  s'adaptant  les  uns  aux  autres 
sans  le  secours  de  petites  pierres^  et  soigneusement  taillés  pour 
offrir  une  surface  unie.  Les  Pélasges  ne  connaissaient  pas  l'é- 
querre  ;il  semble  résulter  d'un  passage  d'Aristote  qu'ils  se  ser- 
vaient d'une  règle  flexible  en  plomb  pour  tracer  l'épure  des 
blocs  et  les  tailler.  Près  de  la  porte  des  Lions,  ces  blocs  sont 
quadrangulaires  et  rangés  par  assises  horizontales,  mais  les 
joints  verticaux  sont  encore  irrégulièrement  placés  et  plus  ou 
moins  obliques  dans  un  sens  ou  dans  l'autre  ;  c'est  une  transi- 
tion entre  l'appareil  pélasgique  polygonal  et  l'appareil  hellé- 
nique formé  de  parallélipipèdes  égaux  et  réguliers. 

La  porte  des  Lions,  placée  au  fond  d'une  avenue  entre  deux 
murailles,  est  formée,  de  deux  jambages  inclinés  portant  un 
Hnteau  de  i^y^O  de  longueur.  Au-dessus,  dans  un  vide  trian- 
gulaire de  la  muraille,  est  enchâssé  un  bas-relief  représentant 
L.  M.  —  HisT.  oBs  Grecs.  4 

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LA   PORTE  DES  LIONS.  03 

en  métal  et   devaient  se   présenter   de  face,    pour  effrayer 
l'ennemi,  conime  les  têtes  de  la  Gorgone  sur  les  boucliers. 


2 

s 

s 


Les  corps  et  les  pattes  sont  bien  proportionnés  et  largement 
exécutés.  La  colonne  qui  forme  le  milieu  du  bas-relief  est  un 
peu  plus  large  du  haut  que  du  bas  ;  elle  repose  sur  une  base 


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INDUSTRIE   DES  PÉLASGeS. 


67 


sur  la  céramique  et  le  travail  des  métaux  chez  les  ancienne^ 
populations  de  la  Grèce.  On  a  trouvé  à  Santorin  des  vases  de 


i 


terre  jaune  antérieurs  à  Téruption  volcanique  qui  bouleversa 
rîle  de  Théra  vers  le  seizième  siècle  avant  notre  ère.  Ces  pote- 


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Zeos  (Camée  de  la  bibliothèque  nationale.  La  monture  est  un  travail  du  quinzième 
siècle,  l/aigle  placé  près  de  Zeus  Tavait  fait  prendre  pour  saint  Jean  révangéliste). 


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ABSENCE   D'UNITÉ   KELIG 

les  poètes  eux-mêmes  les  exposaient  di 
Homère  et  Hésiode  sont  en  désaccord  si 
Selon  Homère,  l'Océan  est  le  principe 
siode,  le  ciel,  Ouranos,  est  l'ancêtre  d€ 
et  les  Fleuves  ont  pour  père  Zeus  d'à 
d'après  Hésiode.  Dans  la  Théogonie,  les 
Ciel  et  de  la  Terre  et  personnifient  le 
foudre:  le  Kyclope  de  l'Odyssée  est  un  l 
fils  de  Poséidon.  Hésiode  parle  longuei 
particulier  de  Promètheus  ;  Homère  ne  ( 
et  parle  à  peine  des  autres  Titans.  1 
Apollon  fait  du  géant  Typhaon  un  fi 
nomme  Typhôeus  et  en  fait  un  fils  de 
Aphrodite  (1)  est  fille  de  Zeus  et  de  Dion 
Théogonie,  elle  naît  du  sang  d'Ouran( 
mer.  Hèphaistos  est  fils  de  Zeus  et  d'Hèi 
seule  dans  Hésiode.  11  a  pour  femm 
Aphrodite  dans  l'Odyssée,  tandis  que  dai 
dite  est  l'épouse  d'Ares  (2).  Le  même  p< 
deux  généalogies  dififérentes  :  elles  se 
parmi  les  enfanls  de  la  Nuit,  et  plus 
comme  filles  de  Zeus  et  de  Thémis. 

Le  mélange  ou  le  contact  prolongé  c 
pies  de  races  différentes  introduisit  de 
ments  étrangers  dans  l'Hellénisme.  Le 
se  répandit  en  Grèce  avec  la  culture  ( 
jours  une  physionomie  orientale.  VI 
ses  nombreuses  mamelles,  est  une  pei 
ture,  et  n'a  de  commun  que  le  nom  av€ 
des  forêts  d'Arcadie.  Les  Grecs  n'a 
étrangère  qu'en  l'assimilant  à  une  de 
nales.  La  phrygienne  Kybèlè,  dont  le 
les  montagnes  au  son  des  flûtes,  des 
bours,  fut  identifiée  avec  Bhéiè,  la  m 
dite,  fille  de  la  Diônè  pélasgique,  se  c 

(1)  Sur  les  miroirs  étrusques  Turan  ;  chez 

(2)  Le  Dieu  italique  M  amers,  Mavors,  A! 
Ares. 


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lORTALlTÉ  DE  L'AME- 

>e,  mais  ils  n'ont  plus  pour  nous  au- 
jieuse.  Les  repas  des  Grecs  étaient  tou- 
r  la  musique  et  les  hymnes  et  se  t,er- 
ices  de  force  et  d'adresse.  On  conviait 
oyeuses  où  les  poètes  chantaient  leurs 
flûtes  et  des  lyres,  et  quelquefois  aussi 
ens.  Mais  les  Dieux  ne  s'ofiFensaient  pas 
es,  leurs  véritables  prêtres,  et  la  gaieté 
me  un  concert  de  bénédictions. 
'àme.  —  Une  des  plus  anciennes  for- 

nous  soient  parvenues  est  celle  qu'on 
i  début  du  serment  prononcé  par  Aga- 
des  deux  armées  :  «  Père  Zeus,  très 
ui  règnes  du  haut  de  l'Ida;  Soleil  qui 
it  ;  Fleuves  et  Terre,  et  Vous  deux,  qui, 
5  après  la  mort  les  hommes  qui  ont 
ez  nos  témoins  et  les  gardiens  de  la  foi 
invoque  Zeus  avant  les  autres  Dieux 

se  jurent  à  la  face  du  ciel.  11  nomme 
Terre,  divinités  communes  à  tous  le« 
ïres,  Dieux  nationaux  de  chaque  peuple, 
rts,  Aïdès  {\)  etPerséphonè(2).l)ansun 
le,  la  môme  invocation  est  faite  à  peu 
rmes,  sauf  que  la  punition  des  parjures 
nnyes,  personnification  des  remords. 
tes  prières  des  Grecs  contiennent  un 
ptalité  de  l'âme  et  d'une  expiation  des 
e  vie.  Cette  croyance  à  la  perpétuité 
ine  après  la  mort,  très  différente  des 
3u  monothéistes  de  transmigration  ou 
uve  dans  toutes  les  branches  de  la  race 
s  c'est   l'Hellénisme  qui  a   donné  au 

ignifie  l'Invisible,  est  souvent  remplacé  par 
I  traduisent  par  Orcus;  le  mot  Pluto  n'est 
yxwv,  celui  qui  s'enrichit. 
Phéréphatta;  dans  les  auteurs  latins  Pro*er- 
icile  on  l'appelait  Korè^  la  jeune  fille,  en 
dire  Notre-Dame. 


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HÉBOS  ET  Les  ANCÊTRES. 
m  se  tradaisit  par  la  jalousie  d'Hère  contre 
e  Zeus,  el  à  mesure  que  le  sens  des  neux 
adl  à  s'oublier,  ou  ne  vil  plus  que  des 
s  ces  alliances  divines.  Pourtant,  la  poésie 
il  qu'exprimer  dans  sa  langue  naturelle 
e  et  fortifiante  :  les  grands  hommes  sont 
et  par  la  pratique  des  vertus  viriles  retour- 
iont  sortis. 

s  est  la  religion  de  la  cité,  le  culte  des 
ion  de  la  famille.  Chacun  de  nous  a  ses 
ses  Démons  bienfaisants,  les  bienheureux 
es  de  la  race  d*or,  qui  deviennent  après 
;ns  de  ceux  dont  ils  étaient  les  modèles 
Vêtus  de  brouillard,  dit  Hésiode,  ils  par- 
ous  sens,  observant  les  actions  justes  ou 
lant  les  bienfaits.  »  Les  Dieux  supérieurs, 
le  des  choses,  ne  peuvent  écouter  chaque 
iiateurs  sont  là,  qui  reconnaissent  des  voix 
mt  nos  misères,  parce  qu'ils  ont  souffert 
luront  bien  adoucir,  sans  les  violer,  les 
Bs.  Les  prières  montent,  les  secours  des- 

des  morts  conduit  les  vivants  par  le  rude 
n. 

ni- Dieux  humains  transforme  les  cultes 
sanction  nouvelle  à  l'amour  de  la  patrie, 
ent  le  fleuve  ou  le  ruisseau  natal,  ou  le 
les  de  sa  montagne  qui  attache  l'homnae 
I,  c'est  le  souvenir  toujours  présent  des 
peuple  les  invoque  le  matin  des  batailles, 
cours  de  leur  bras  dans  les  luttes  sacrées 
foyers  et  des  autels.  Si  une  jeune  géné- 

pour  des  migrations  lointaines,  ils  la 
mers  et  rattacheront  par  un  culte  com- 
métropole.  Tous  ces  illustres  morts,  de- 
république  des  Dieux,  veillent  sur  leurs 
s,  du  haut  de  l'Olympe  étoile, 
îouronnement  de  la  théologie  des  poètes 

divin  dans  l'humanité.   La  religion  de 


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109 

lie  de  Thcseus  il  y  a  quel- 
Irommyon  et  1( 
Erymanlhe  et  1( 


,  .js  Amazones;  01 

associés  dans  la  lutte  contre  les  Kentaures.  Hèrae 
aux  enfers  pour  délivrer  Thèseus,  qui  avait  vouli 
L.  M.  —  HisT.  DES  Grecs. 


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lsse  de  calydon. 

îr  la  reine  des  morls.  Il  n'est  pas  im- 
t  été,  comme  Héraclès,  un  Dieu  cosmi- 
)s,  mais  il  est  diflicile  de  retrouver  des 
dans  sa  légende,  où  le  caractère  poliii- 
signifie  le  fondateur  ou  le  législateur, 
lion  des  douze  villages  dont  s'était  for- 
II  en  avait  fait  un  asyle  pour  les  étran- 
îtablir.  On  allait  jusqu'à  lui  faire  bon- 
de la  démocratie,  car  il  avait  proclamé 
în  est  la  base,  l'égalité  des  droits:  nâdi 
oit  la  valeur  réelle  de  cette  légende,  elle 
oire  du  peuple  le  plus  libre  qui  ait  ja- 

don.  —  La  chasse  est  la  principale  oc- 
»rimitives.  On  trouve  dans  l'Iliade  un 
sanglier  envoyé  par  la  colère  d'Artémis 
lydon,  en  Aitolie.  Il  était  si  redoutable 
uer  une  troupe  nombreuse.  Méléagros, 
semble  des  chasseurs  aitoliens  et  cou- 
,  mais  une  querelle  s'étant  élevée  à  roc- 
le  l'animal,  Méléagros  tue  les  frères  de 
prononce  contre  lui  de  terribles  impré- 
rme  dans  sa  demeure  pendant  que  les 
ille,  et  malgré  les  prières  de  son  père, 
ère  elle-même,  il  refuse  de  combattre; 
ications  de  sa  femme  Cléopatra  et  ré- 
el est  le  récit  fait  par  Phoinix  à  Achille 
mgers  de  la  colère.  La  légende  fut  dé- 
i  postérieurs;  ils  donnèrent  pour  com- 
3  principaux  héros  de  la  Grèce,  et  parmi 
ntè,  la  belle  vierge  qui  déGait  ses  pré- 
tuait ceux  qu'elle  avait  vaincus.  Ce  fut 
première  blessure.  Méléagros  lui  en  cède 
i  oncles  qui  voulaient  se  les  attribuer, 
iconté  la  mort  de  Méléagros;  le  poème 
mourir  de  la  main  d'Apollon,  qui  avait 
êtes,  dans  la  guerre.  D'après  une  autre 
les  Moires  ou  Destinées  s'étant  présen- 


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. LES  ARGONAUTES. 

dents  de  cette  légende;  on  les  voit  représenlés 
ircophages. 

n  des  Argonautes.  —  La  légende  des  Argo- 
ontre  les  principaux  héros  de  la  Grèce  associés 
lition  marilime.  Il  y  a  dans  l'Odyssée  une  courle 
ièbre  navire  Argo,  qui,  en  revenant  de  chez 
!ul  passer  entre  les  deux  roches  errantes,  car 
•  à  Hère.  Les  Grandes  Éoïées,  et  plusieurs  poè- 
3Ù  la  légende  était  racontée  sous  sa  forme  pri- 
lalheureusement  perdus,  et  la  quairième  Py- 
are  est  le  plus  ancien  document  qui  nous  reslc 
le.  Le  souvenir  des  premiers  essais  de  naviga- 
ners  lointaines  se  rattachait  à  cette  expédition 
>rise  par  Jason  avec  le  concours  de  lous  les  héros, 
yage  était  d'aller  reprendre  chez  Aiètès,  JSls  du 
i  d'or  du  bélier  qui  avait  porté  Phryxos  et  sa 
ivers  la  mer  appelée  depuis  Hellespont,  du  nom 
tait  noyée  dans  le  passage.  Le  vaisseau,  parli 
s  côtes  du  golfe  de  Pagase,  avait  la  science 
r  son  mât  était  un  des  chênes  de  Dodone.  La 
cousue  par  Athènè,  comme  on  le  voit  dans  un 
)uvre.  Les  deux  écueils  mobiles  qui  formaient 
;rande  mer  inhospitalière  furent  franchis  pour 
,  et  fixés  dès  lors  à  jamais.  On  arrive  à  Colchos, 
t  livrer  la  toison  d'or  qu'à  une  condition:  Jason 
au  joug  deux' taureaux  d'airain  qui  soufflent 
lais  le  héros  a  dans  le  ciel  une  puissante  pro- 
pi  a  mis  sa  bonté  à  l'épreuve,  un  jour  qu'elle 
en  vieille  femme  et  qu'il  l'avait  portée  sur  ses 
îrs  un  torrent  gonflé  par  l'orage.  Elle  prie 
pirer  une  passion  pour  lui  à  Mèdeia,  fille  d'Aiè- 
ne  puissante.  Mèdeia  donne  à  Jason  un  onguent 
du  sang  de  Promèlheus;  il  devient  invulnérable 
taureaux  féroces.  Puis  elle  assoupit  par  un 
lue  le  dragon  qui  garde  la  toison  d'or,  et  s'em- 
avec  les  Argonautes,  car  Jason  a  promis  de  la 
emme.  Aiètès  les  poursuit,  mais  la  méchante 
morceaux  son  jeune  frère  Apsyrtos,  et  pendant 


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LES  AllGONAUTES. 


i!3 


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114  ŒDIPE  ET  U  SPHIiNX. 

que  le  pauvre  père  réunit  les  membres  dispersés  pour  les 
ensevelir,  le  vaisseau  s'éloigne.  En  remontant  le  fleuve  Plia- 
sis,  les  Argonaules  arrivent  à  TOcéan  dont  ils  suivent  le 
cours  jusqu'à  sa  jonction  avec  le  Nil,  et  reviennent  dnns  la 
Méditerranée  en  traversant  l'Egypte.  Les  détails  de  ce  retour 
fantastique  ont  été  modifiés  diversement,  à  mesure  que  les 
Grecs  ontacquis  des  connaissances  plus  précises  en  géographie. 

Œdipe  et  ses  fils.  —  La  légende  thébaine  appartient  à 
une  époque  plus  méditative  ;  au  lieu  des  caprices  d'une  ima- 
gination enfantine,  on  y  trouve  l'analyse  d'une  situation  mo- 
rale. Le  problème  est  celui-ci  :  la  conscience  nous  dit  que  tout 
crime  souille  son  auteur  et  appelle  sur  lui  la  juste  vengeance 
des  Dieux.  Mais  qu'arrivera-t-il  si  la  souillure  est  inconsciente 
et  le  crime  involontaire?  La  question  est  nettement  posée  dans 
la  légende  d'OEdipe,  dont  les  traits  principaux,  brièvement 
indiqués  dans  le  onzième  chant  de  l'Odyssée,  complétés  dans 
des  poèmes  postérieurs  aujourd'hui  perdus,  ont  été  mis  ea 
scène  sur  le  théâtre  athénien  avec  une  grandeur  idéale  qui  ne 
sera  jamais  dépassée. 

Œdipe  a  été  exposé  sur  le  Kithairon  aussitôt  après  sa  nais- 
sance, car  un  oracle  avait  annoncé  au  roi  Laïos,  son  père,  que 
cet  enfant,  s'il  vivait,  deviendrait  incestueux  et  parricide.  Re- 
cueilli par  des  bergers,  il  est  élevé  chez  Polybe,  roi  de  Corin- 
the,  et  il  s'en  croit  le  fils.  Mais  un  jour,  des  doutés  sont  élevés 
devant  lui  sur  sa  naissance.  U  interroge  l'oracle  de  Delphes 
qui  lui  conseille  de  ne  jamais  retourner  dans  son  pays.  Dé- 
cidé à  s'exiler  de  Corinthe,  il  prend  la  route  de  Thèbes,  mais 
un  char  lui  barre  le  passage,  une  dispute  s'élève,  il  tue  Laïos 
sans  le  connaître  et  poursuit  son  chemin.  Il  trouve  la  ville 
désolée  par  le  voisinage  d'un  monstre,  la  Sphinx,  lion  ailé  au 
visage  de  femme,  qui  pose  des  énigmes  aux  passants  et  dévore 
ceux  qui  n'y  peuvent  répondre.  (Edipe  devine  l'énigme,  tue 
la  Sphinx,  et  reçoit  en  récompense  le  titre  de  roi  et  la  main 
d'iocastè,  veuve  de  Laïos.  Cependant  la  vérité  se  découvre, 
locastè  se  pend  de  désespoir,  (Edipe  s'arrache  les  yeux, 
mais  il  se  proclame  innocent  devant  les  lois  divines,  qu'il  n*a 
jamais  violées  volontairement.  L'oracle  avait  prédit  qu'il  de- 
viendrait le  meurtrier  de  son  père  et  l'époux  de  sa  mère,  mais 


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>   FII.S.  il5 

*  <Tiino  ii'e^t  f|iio  (\nn<  l'iii- 
r  «l»'  Soplîocle  mjiiii:i(Mil,  à 
Lis  cauàL's,  le  jiriiicipe  murul 

he  la  guerre  de  Thèbes.  Il 


erres  gradées). 

smes  célèbres  :  la  Thébaîde, 
nt  à  Homère  et  qui,  selon 
Iliade  et  à  l'Odyssée  ;  VCEdi- 
e  plus  récente  d*Antimachos 


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LA  GUËRBË  de:  TIIÉBËS. 

phon.  Tout  cela  est  perdu,  et  les  détails  de  la  légende 
5  sont  connus  que  par  les  tragiques  athéniens,  qui 
maient  très  librement  les  récits  des  anciens  poètes  et 
fini  par  les  faire  oublier. 

lerre  de  Thèbes  a  pour  origine  la  querelle  des  deux  fils 
3  pour  la  succession  au  trône  de  leur  père.  PolyneiJtès, 
)ar  son  frère  Etéoclès,  revient  bientôt  assiéger  la  ville, 
ide  d'Adrastos,  roi  d'Argos,  dont  il  a  épousé  la  fille,  et 
autres  chefs  achaiens  qu'il  a  réussi  à  engager  dans  sa 


:Jipe  conduit  par  ses  fils  hors  des  porles  de  Tbèbes  (bas-relief}. 

.  Ce  premier  siège  forme  le  sujet  d'une  tragédie  d'Ais- 
3s  Sept  dtvant  ThèOeSy  toute  pleine,  dit  Aristophane, 
le  d'Ares. 

;loire  reste  aux  Thébains,  grâce  au  dévouement  du 
énoikeus,  fils  de  Créon,  qui  d'après  un  oracle  du  pro- 
îiresias,  s'était  offert  volontairement  à  la  mort.  Tous 
i  achaiens  périssent,  à  l'exception  d'Adrastos  qui  par- 
s'enfuir  à  Argos.  Quant  aux  deux  frères  ennemis,  ils 
tués  l'un  l'autre  dans  un  combat  singuher.  Créon, 
ocastè,  devenu  roi  de  Thèbes,  défend  de  rendre  les 
s  funèbres  à  Polyneikès,  ennemi  de  la  patrie  ;  mais  la 


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CYCLE  TROYEN. 

pieuse  Antigoiie,  qui  avait  servi  de  guide  à  son  \y 
brave  la  mort  pour  ensevelir  son  frère  proscril 
femme  par  ses  plaintes  et  ses  larmes,  elle  regreth 
jeunesse,  et  Tamour  d'Haimon,  elle  parle  avec  l( 
tombeau  qui  sera  son  lit  nuptial,  mais  elle  ne  S( 
plus  de  sou  sacriGcc  qu'elle  n*a  hésilô  à  l'accompli] 
de  Sophocle  forme  avec  VCEdipe  roi  cl, Y  Œdipe  à 
trilogie  qui  est  le  chef-d'œuvre  du  drame  antique 
siège  de  Thèbes  et  la  prise  de  la  ville  par  les  Epig( 
dire  les  successeurs  des  héros  tués  pendant  la  pren^ 
terminent  cette  grande  légende,  le  plus  célèbre 
conservés  par  la  tradition  épique  avec  la  guerre  di 


CYCLE  TROYEN. 

Les  Kypria.  —  L'Iliade.  —  La  légende  troyer 
immense  popularité  aux  poèmes  d'Homère;  cepend 
l'a  fait  remarquer  Dion  Chrysostome,  tous  les  gri 
ments  de  cette  légende  se  passent  en  dehors  d 
l'Iliade  et  de  l'Odyssée.  Les  préliminaires  et  les  i 
guerre  de  Troie  étaient  racontés  dans  d'autres  poèn 
perdus  pour  nous,  dont  la  réunion  s'appelait  le  C 
Proclos  en  avait  fait  un  résumé  dans  sa  Chrestom 
malicale,  mais  cette  Chrestomalhie  elle-même  i 
connue  que  par  l'abrégé  qu'en  a  donné  Photios  e 
ques  extraits  contenus  dans  un  manuscrit  d'Homi 
l'Escurial,  de  sorte  que  nous  n'avons  plus  guère  q 
de  cette  grande  collection  de  poèmes  de  différents 
comprenait  toutes  les  traditions  religieuses  et  hér( 
Grèce,  depuis  la  naissance  des  Dieux,  exposée  dam 
nie  d'Hésiode,  jusqu'à  la  mort  d'Odysseus,  le  demi 
des  héros  de  la  guerre  de  Troie. 

L'origine  de  celte  guerre  était  racontée  dans  lei 
vers  Kypriôns,  poème  en  onze  livres  attribué  à 
Kypros;  Le  poème  débutait  par  le  récit  des  noces 
de  Pèleus,  pendant  lesquelles  la  Discorde  jette 
d'or  entre  trois  Déesses.  Les  Dieux  refusent  de  d 


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LA  GUEllRE  DE  TUOIE. 

i'Agamemnon.  Ce  sacrifice  res 
ille  de  Jephlé  qu'on  peut  croire 
d'  l<pi76vgia  paraît  nôtre  qu'une 
le  de  Jephlé.  La  forme  homériq 
5  à  celle  explication,  mais  cette 
re,  elle  est  môme  contredite  ] 
\gamemnon  nomme  Iphianas 
L  laissées  dans  son  palais.  SU 
os,  habitée  par  les  Phéniciens 
istoire  tragique  d'un  général  o 
acrifice  de  sa  fille.  Dans  les  K^ 
t  de  son  drame  d'iphigénie,  le 

une  biche  est  substituée  à  la  j 
rte  en  Tauris  et  qu'on  retrouva 
restés.  Les  Kypria  contenaient 
de  Pbiloctcte,  abandonné  dan 
nort  de  Palamède,  le  Catalogu 

Troade,  à  la  suite  duquel  Achi 
i  Chrysèis  pour  leur  part  du 
ux  chefs  à  l'occasion  de  ces  d( 
le  l'Iliade,  qui  s'arrôte  à  la  mor 
>is  ;  la  Petite  Iliade  ;  la  De 
ria  servaient  de  prologue  à  1 
nq  livres  d'Arctinos  de  Milel,  eu 
rnier  vers  de  l'Iliade  s'adapte 
ocme  contenait  le  combat  de 

Achille,  qui  en  devient  amoi 
L  de  Memnon,fils  de  TAurore,  ti 
-môme,  tué  par  Paris  et  Apullo 
pleuré  par  les  Muses,  et  enfin 
as  et  Qdysseus  à  l'occasion  de  î 
rmina  cette  querelle  était  exf 
;hès  de  Mjlilène.  Le  poète  racon 
retour  de  Philoctète,  épisodes  d 
eux  tragédies,  puis  la  mort  de 
î  Deiphobos,  l'arrivée  de  Néoptol 
1  du  cheval  de  bois  par  Epéo! 
enfin  la  fausse  retraite  des  Ac 


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LA  GUERRE  D£  TROIE.  121 

pendant  que  les  Troyens  introduisent  le  cheval  dans  la  ville. 
La  Destruction  d'ilios,  poème  d'Arclinos  de  Milet,  contenait  le 
récit  de  Tarlifice  de  Sinon  et  celui  de  la  mort  de  Laocoon,  ren- 
dus populaires  par  Virgile,  puis  racontait  la  prise  de  la  ville 
avec  les  épisodes  qui  s'y  rattachent,  Cassandra  arrachée  de 
Fautel  d*Athènè,  Polyxène  immolée  sur  le  tombeau  d'Achille, 
Priamos  massacré  sur  l'autel  de  Zcus,  Astyanax  précipité  du 
haut  des  remparts. 

Les  Retours;  TOdyssée;  la'Télégonie.  —  Toutes  ces 
violences  devaient  ôlre  expiées  :les  Dieux  qui  avaient  protégé 
les  Achaiens  pendant  la  lutte  les  abandonnent  après  la  vic- 
toire. Les  malheurs  des  principaux  chefs  étaient  racontées 
dans  les  Retours,  poème  en  cinq  livres  d'Hagias  ou  Augias  de 
Troizen  ou  de  Colophou.  C'est  là  qu'était  exposée  la  tragique 
IcgeDde  formant  le  sujet  de  la  grande  trilogie  d'Aischyle,  le 
meurtre  d'Agamemnon  par  sa  femme  Clytaimnestra  et  la  pu- 
nition du  crime  par  son  fîls  Orestès.  On  y  trouvait  aussi  la  na- 
vigation de  Ménélaos  en  Egypte  et  le  retour  des  autres  héros, 
à  l'exception  d'Odysseus,  dont  les  aventures  jusqu'à  la  mort 
des  prétendants  de  Pénélope  forment  le  sujet  de  l'Odyssée. 
Enfin  la  Télégoniey  poème  en  cinq  livres  d  Eugammon  de  Ky- 
rônè,  racontait  la  mort  d'Odysseus  et  servait  d'épilogue  à  la 
légende  Iroyenne  et  à  tout  le  cycle  épique. 

Développement  successif  de  la  légende  troyenne.  — 
Les  traditions  qui  forment  la  matière  de  l'épopée  sont  l'œu- 
vre collective  et  anonyme  des  premiers  siècles  de  la  Grèce. 
Pendant  ces  siècles  sans  histoire,  l'imagination,  cet  attribut 
précieux  de  la  jeunesse  des  peuples  comme  de  celle  de 
1  hon)me,a  fait  éclore  ces  légendes  qui  alimentèrent  la  poésie 
des  âges  postérieurs  et  fournirent  à  la  sculpture  et  à  la  pein- 
ture d'innombrables  sujets  de  compositions.  Conçus  dans  la 
pensée  populaire,  tous  ces  récils  étaient  recueillis  par  des 
chanteurs  ambulants  qui  les  colportaient  de  village  en  village, 
une  lyre  ou  une  branche  de  laurier  à  la  main,  pour  marquer 
la  mesure  des  vers.  Il  n'y  avait  pas  d'écriture;  lerhythme  fi- 
xait les  détails  du  récit  dansia  mémoire  de  ces  chanteurs,  dont 
chacun  développait  ou  transformait  les  fables  imaginées  par 
ses  devanciers.  On  ne  soupçonnait  môme  pas  ce  que  nous  ap- 


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i  GUERRE  DE  TROIE. 

ittéraire  :  les  chanteurs  qu'on  estimait  le 

iTaieot  assez  de  mémoire  pour  retenir  les 


rimaginalion  pour  les  embellir.' On  van- 
eil  aveugle  qui  habitait  la  rocheuse  Chios. 


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LA  GUERRE  DE  TROIE. 

i  riliade,  le  plus  ancien  des  poèmes  du  cycle  Iroyen,  on 
le  germe  des  épisodes  ajoutés  par  les  poêles  postérieurs, 
m  exemple  de  la  manière  dont  la  légende  s'est  formée 
3s  additions  successives.  Homère  dit  au  dernier  chant 
è  et  Atliènè  avaient  pris  en  haine  la  sainte  ilios,  à  cause 
tige  d'Alexandre,  et  il  ajoute  ;  «  Car  il  offensa  les  Décs- 
ind  elles  allèrent  chez  lui,  et  loua  cclltj  qui  lui  donna 
însualilé  funeste.  »  Ce  passage  a  été  regardé  comme 
phe  par  Aristarque,  le  célèbre  grammairien  d'Alexan- 
cause  du  mot  sensualité,  p.axXcauvri,  mot  abstrait,  qui 
rtient  pas  à  la  langue  homérique.  Or  cette  interpola- 
sez  obscure  a  fourni  à  l'auteur  des  Kypria  la  première 
i  fameux  jugement  de  Paris.  11  est  probable  que  ceju- 
t  n'était  qu'une  allégorie  morale,  comme  celle  de  Pro- 
5ur  Héraclès;  seulement,  le  héros  grec,  placé  entre  la 
jl  la  volupté,  choisit  la  première  et  conquiert  une  gloire 
le,  tandis  que  le  berger  phrygien  préfère  le  plaisir  et 
ur  lui  et  sur  son  pays  la  colère  des  Dieux.  Mais  la  forme 
écise  donnée  à  la  pensée  finit  paren  dénaturer  le  carac- 
oral,  etdans  Virgile,  la  colère  de  Junon  n'a  plus  d'autre 
[u'une  blessure  faite  à  sa  vanité,  spretœ  injuria  fùrmx. 
istes  modernes  vont  encore  plus  loin  :  Rubens,  dans  un 
L  de  la  galerie  de  Londres,  Raphaël,  dans  une  composi- 
avée  par  Marc  Antoine,  et  de  nos  jours  M.  Baudry,  au 
le  l'Opéra,  ont  représenté  les  trois  Déesses  nues.  Un 
grec,  si  ce  n'est  à  l'époque  de  la  dernière  décadence,  ne 
lit  pas  permis  cette  impiété  :  Aphrodite,  symbole  de 
lion  universelle,  peut  être  représentée  telle  qu'elle  est 
le  l'écume  des  flots,  mais  Hère  et  Athènè,  la  chaste  épouse 
Lcrge  indomptée,  ne  se  dépouillent  jamais  l'une  de  sou 
autre  de  ses  armes. 

lissance  de  nouvelles  formes  poétiques  ne  fît  pas  aban-> 
'  l'épopée.  Le  drame  et  la  poésie  lyrique  étaient  déjà 
5  depuis  longtemps  quand  Panyasis  fît  un  poème  sur 
iloits  d'Héraclès,  Antimachos  sur  la  légende  thébaine, 
ros  de  Camira  sur  la  guerre  de  Troie.  Si  l'on  en  croit 
e,  tout  le  second  livre  de  l'Enéide  de  Virgile,  avec  Tépi- 
\  Sinon  et  le  cheval  de  bois,  serait  une  imitation,  et  pres- 


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LA  GUËRUE  DE  TltOIE.  i25 


que  une  traduction  littérale  {pêne  ad  verbum  iranstuUt)^  du 
poème  de  Pisandros.  On  ne  peut  vériOer  celle  assertion,  car 
il  ne  nous  reste  rien  des  anciens  imitateurs  ou  continuateurs 
d'Homère,  non  plus  que  des  lyriques  antérieurs  à  Pindare, 
quitoutenremplaçantl'bexamèlrepardes  rhyllimes  plus  courts 
et  mieux  appropriés  à  raccompagnement  musical,  emprun- 
taient aussi  les  sujets  de  leurs  chants  aux  traditions  liéroï- 
ques.  Le  poème  de  Stésichore  sur  la  destruction  d'ilios  devait 
ôlre  célèbre  dans  Tantiquité,  car  une  illustration  de  ce  poème 
occupe  la  partie  centrale  d'un  bas-relief  du  Capitole  connu 
sous  le  nom  de  Table  iliaque.  Sur  les  deux  parties  latérales 
claicnt  représentées  les  principales  scènes  deTlliade  d'Homère, 
et  dans  le  bas  les  événements  racontés  dans  TAilhiopis  d'Arc- 
tinos  de  Milet  et  dans  la  Petite  Iliade  de  Lescliès.  On  croit  que 
ce  curieux  monument  servait  aux  grammairiens  pour  Tins- 
truclion  de  la  jeunesse  dans  les  écoles,  où  on  lisait  les  poésies 
d*Homère  et  de  ses  continuateurs. 

Boutes  sur  le  caractère  historique  de  la  légende 
troyenne.  —  Les  Héros  diffèrent  si  peu  des  Dieux  qu'on  peut 
sans  invraisemblance  voir  dans  les  personnages  de  la  légende 
troyenne,  comme  dans  ceux  des  autres  légendes,  des  types 
divins  plus  ou  moins  transformés.  L'enlèvement  d'Hélène 
estuntbème  poétique  qui  parait  empruntée  la  mythologie. 
Avant  d'être  enlevée  par  Paris,  elle  avait  été  enlevée  par  Thè- 
seus.  Sa  mère  Lèda  est  une  forme  de  la  nuit,  ses  frères  les 
Dioscoures  sont  Tétoile  du  malin  et  l étoile  du  soir;  son  nom 
rappelle  celui  de  la  lune  (Exévtj,  SiÂr.^y.),  mais,  comme  ce 
nom  signiGe  la  brillante  (de  as'Xa;),  on  peut,  si  on  le  pré- 
fère, la  regarder  comme  une  Aurore.  C'est  l'éternelle  fugitive, 
la  fiancée  du  soleil  couchant  qui  se  laisse  enlever  par  le 
soleil  levant.  Pénélope,  si  différente  d'Hélène  comme 
type  moral,  est  peut-être  sortie  du  môme  type  mythologi- 
que; la  toile  qu'elle  fait  et  défait  sans  cesse  peut  figurer 
les  phases  croissantes  et  décroissantes  de  la  lune.  11  y  a  une 
légende  qui  l'associe  à  Hermès,  le  Dieu  crépusculaire,  l'infa- 
tigable messager.  Odysseus,  dont  le  nom  signifie  le  voyageur, 
pourrait  bien  être  une  forme  de  ce  Dieu  aux  ailes  rapides, 
à  l'esprit  subtil.  Achille  rappelle  l'Achélôos,  non  seulement 


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LA  GUERUE   DE  TROIE.  427 

par  son  nom,  mais  par  sa  naissance,  qui  le  rattache  aux  divi- 
uilés  des  eaux,  par  son  opposition  aux  Dieux  solaires,  par  ses 


exploits  aux  bords  d*un  fleuve.  Les  Aiantes,  souvent  en  lutte 
avec  les  Dieux  dans  les  légendes,  sont  peut-être  les  mêmes 


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130  Là  guerre  de  TROIE. 

que  les  Géants  fils  de  la  terre,  Aia.  Les  hén 
teiit  autant  que  les  héros  grecs  à  des  rapp 
genre.  Si  on  reconnaît  dans  Memnon  et  dai 
formes  de  ce  Dieu  solaire  dont  les  religions  d*Asie  célèbrent 
la  mort  par  des  fêtes  funèbres,    qui  empêche  d*altribuer  le 
môme    caractère  à  Hector,  qu'une  légende  post-homérique 
faisait  fils  d'Apollon?  Si  on  retrouve  dans  Paris  et  dans  An- 
chisès  le  Dieu  énervé  de  la  Lydie  et  de  la  Phrygie,  ne  peut-on 
pas  aussi  rapprocher  Priamos,  le  roi  aux  cinquante  fils,  du 
grand  Dieu  générateur  adoré  à  Lampsaque  sous  le  nom  pres- 
qu  identique  de  Priapos? 

Il  ne  faut  pas  cependant  prendre  ces  rapprochements  poui 
des  preuves,  car  il  serait  aussi  difficile  de  s'arrêter  dans  cette 
voie  que  dans  la  voie  opposée.  Si  Alexandre  de  Macédoine  avait 
vécu  avant  Tinvention  de  récriture,  on  le  prendrait  pour  une 
forme  de  Dionysos.  Quoique  la  fable  pénètre  fort  avant  dans  This- 
toire,  il  faut  bien  queThistoire  commence  quelque  part.  La  lé- 
gende troyenne  est  sur  la  limite  ;  il  se  peut  qu'elle  se  soit  gref- 
fée sur  d'anciennes  traditions  mythologiques,  et  qu'elle  résume 
en  même  temps  les  guerres  qui  ont  dû  se  produire  de  tout 
temps  entre  les  deux  rives  de  TArchipel.  M.  Ernest  Curtius 
refuse  toute  réalité  à  la  guerre  de  Troie  ;  selon  lui,  les  colons 
Aioliens  et  Achaiens  qui  se  sont  établis  en  Troade  après  l'in- 
vasion dorienne  dans  le  Péloponnèse  ont  transporté  à  leurâ 
uncôlres  les  exploits  qu'ils  accomplissaient  eux-mîiines.  Grole 
admet  qu'il  y  a  des  éléments  réels  d;ins  la  légende  troyenne, 
mais  il  ne  croit  pas  possible  de  les  discerner  au  milieu  des 
fables  poétiques  qui  les  enveloppent.  Ces  doutes,  que  les  fouilles 
de  M.  Schliemann  n'ont  pas  réussi  à  dissiper,  s'étaient  déjà 
produitsdans  l'antiquité.  Dion  Chrysostomea  écrit  une  disser 
lation  pour  prouver,  parTinvraisemblauce  du  récit  homérique 
que  Troie  n'a  jamais  élc  détruite,  qu'Achille  a  été  tué  pai 
Hector  et  que  les  Achaiens,  vaincus  par  les  Troyens,  ont  éii 
forcés  de  renoncer  à  leur  folle  entreprise. 

L'histoire  doit  se  résigner  au  doute  quand  elle  n'a  aucui 
moyen  de  vérification,  mais  elle  a  heureusement  d'autres 
sujet  d'études  que  les  événements  militaires,  qui  sont  toujoun 
à  peu  près  les  mêmes  dans  tous  les  pays  et  dans  tous  les  temps 


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iirs  et  l'état  social  d'un  peuple  et  d'une 
>rt,  les  poèmes  d'Homère  sont  une 
bsolument  sûres.  Il  a  pu  inventer  des 
mages,  mais  il  n'a  pu  les  placer  que 
lit  lui-môme,  cap  il  n'en  connaissait 
ictions  pélasgiques  et  les  Touilles  de 
is  ont  fait  entrevoir  la  civilisation  prè- 
les monuments  qui  ont  échappé  à  la 
Odyssée  nous  fournisent,  sur  le  côté 
I,  des  renseignements  plus  complets  et 
B  nous  pouvons  avoir  sur  les  mœurs 
istonqucs. 


HAPITRE  V 

:S  AUX  TEMPS  HÉROÏQUES  (l). 

é  des  poèmes  d'Horaôre.  —  Fonctions  de 
6  grecque.  —  Droits  et  devoirs  de  l'en- 
ale.  —  Caractère  des  royautés  héroïques  : 
et  présidence  des  assemblées.  —  Hiérar- 
atinctions  héréditaires.  —  Caractère  sacré 
5,  conséquence  de  la  piraterie.  —  Condition 
poèmes  d'Homère.  —  Violence  des  héros 
compensations  pécuniaires;  purifications 
;  des  vieillards.  L'amitié.  —  L'hospitalité, 
ité  :  Télémaque  chez  Nestor  et  chez  Méné- 
noos.  —  Fédération  idéale  des  Grecs  dans 


—  Moralité  des  poèmes  d'Homère* 

16  dont  Homère  nous  offre  le  tableau, 
ituée  sur  le  mariage  monogame,  et 

en  partie  de  ma  thèse  D« /a  Morale  avant 


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MOHALITÉ   DES  POÈMES  D'HOMÈRE. 


133 


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L,  M.  —  HiST.  DES  Grecs. 


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FAMILLE  GUECQUE. 

les  vieilles  traditions  mythologiques 
races  d'une  époque  plus  ancienne  où  la 
\e.  Comme  je  l'ai  fait  remarquer  plus 
ymens  de  Zeus  sont  un  souvenir  de  la 
lusie  d'Hère  contre  les  autres  épouses  de 
ifantSjSon  rôle  dans  la  légende  troyenne, 
1  de  la  polygamie  des  patriarches  à  la 
rec  et  l'épuration  de  la  famille,  qui  est 
^a  seule  différence  qu'on  remarque  dans 
?e  les  Grecs  et  lesTroyens,  c'est  la  poly- 
jst  vrai  que  le  poète,  entraîné  sans  doute 
un  grand  type  moral,  fait  d'Hector  et 
abîe  modèle  de  l'amour  dans  le  mariage  ; 
l  y  a  son  frère  Paris  qui  a  outragé  à  la 
et  riiospitalité.  C'est  pour  ce  crime  que 
ienne,  prolectrice  des  unions  chastes, 
î  peuple  dont  les  mœurs  sont  un  outrage 
-re  est  entreprise  par  les  chefs  conjurés 
le  pendant  dix  ans  pour  venger  l'injure 
Telle  est  la  donnée  profondément  morale 

B  l'est  pas  moins.  Le  poète  nous  montre 
deux  époux  pendant  vingt  ans  d'absence, 
t  à  un  souvenir  les  belles  années  de  sa 
e  son  mari  la  cherche  à  travers  tant  de 
mour  de  deux  Déesses  qui  veulent  le 
nalgré  la  bonté  hospitalière  d'Alklnoos 
de  sa  fille  Nausicaa.  El  lorsqu'il  est 
é  la  terre  de  sa  patrie,  et  que  son  vieux 
3ie  de  son  retour,  si  sa  femme  hésite  à 
[)arle  du  lit  qu'il  a  fabriqué  lui-mômc, 
8  bras,  car  lui  seul  pouvait  décrire  leur 
aucun  autre  n'était  jamais  entré. 
mme  dans  la  société  grecque.  —  Le 
3  à  la  civilisation  par  la  réforme  de  la 
it  l'œuvre  des  femmes,  car  on  n'obtient 
5  avoir  conquis,  et  les  conquérir  c'est  les 
e  comme  pour  l'homme  le  droit  s*appuîe 


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DIGNITÉ    DE  LA   FEMME.  135 

sur  le  devoir  et  se  confond  avec  lui  dans  la  conscience  de  la 
dignité  morale.  Mais  le  milieu  de  l'homme  est  la  cité,c*est  par 
les  Tertus  civiques,  le  courage  et  la  justice  qu'il  conquiert  et 
maintient  ses  droits  politiques,  la  liberté  et  l'égalité.  Le  milieu 
de  la  femme  est  la  famille  ;  ses  droits  sont  l'éducation  des 
enfants  et  Tadminislration  intérieure;  elle  ne  peut  les  obtenir 
que  par  deux  vertus  correspondantes,  la  chasteté  et  la  prudence. 
L'homme  ne  confiera  ses  enfants  et  ses  biens  à  sa  femme  que 
s*il  la  sait  digne  de  cette  conOance,  s'il  n'a  pas  à  craindre  que 
les  fits  d'un  étranger  s'introduisent  dans  sa  maison  et  volent 
le  pain  de  ses  enfants.  La  chasteté  est  la  base  de  la  famille,  la 
garantie  de  la  pureté  des  races.  La  prudence,  la  sagesse,  l'éco- 
nomie  sont  les  éléments  du  bien-être  intérieur.  La  langue 
grecque  résume  toutes  ces  qualités  dans  un  seul  mot,  au^podûvr, 
qui  exprime  une  modération  générale  de  tous  les  désirs,  une 
domination  constante  de  la  raison  sur  la  volonté.  C'est  en  pra- 
tiquant ces  vertus  de  son  sexe  que  la  femme  s'élève  à  la  dignité 
de  maîtresse  de  maison,  y»^yï  ^tsirolva. 

Cette  expression  est  employée  par  Homère  à  propos  d'Arètè, 
femme  du  roi  Alkinoos  et  mère  de  Nausicaa  :  n  Alkinoos  a  pris 
Arètè  pour  épouse,  et  l'honore  comme  aucune  autre  n'est  ho- 
norée sur  la  terre,  parmi  les  femmes  qui  possèdent  une  mai- 
son sous  un  mari.  C'est  ainsi  qu'elle  a  été  et  qu'elle  est  encore 
lionorée  du  fond  du  cœur  par  ses  chers  enfants  et  par  Alkinoos 
lui-même,  et  par  les  peuples  qui  la  contemplent  comme  une 
Déesse  et  la  saluent  par  des  paroles,  lorsqu'elle  s'avance  à 
travers  la  ville.  Car  il  ne  manque  rien  à  la  sagesse  de  son 
esprit,  et  par  sa  bienveillance  elle  termine  les  différends  des 
hommes.  »  Telle  est  la  mère  de  famille  dans  la  société  grec- 
que :  elle  règne  par  la  seule  puissance  de  la  vertu  ;  type  admi- 
rable de  grâce,  de  force  et  de  pureté  qu'Homère  a  reproduit 
sous  tant  de  formes  dans  ses  poèmes.  Si  on  pouvait  préférer 
quelque  chose  parmi  les  splendeurs  de  cette  poésie,  on  choi- 
sirait ces  suaves  et  saintes  Ogures  de  femmes,  Nausicaa,  Arètè, 
Andromaque,  Pénélope.  Au  milieu  des  sombres  batailles  de 
l'Iliade,  brille  comme  une  étoile  la  scène  de  l'entretien  d'Hector 
et  d'Andromaque,  le  petit  enfant  qui  s'effraye  du  casque  à 
Taigrette  étincelante,  et  le  sourire  à  travers  les  larmes,  et  la 


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DROITS  ET  DEVOIRS  DE 
du  héros  pour  son  fils  et 

)rient,  où  la  femme  est  escl 
is  gouvernés  par  des  femmes 
es,  parce  qu'un  excès  entrain 
En  Grèce,  où  les  véritables  dr 
,  elle  n'exerce  aucune  inûu( 
est  son  domaine,  elle  n'en  s 
t  que,  dans  les  États  où  la  se 
es  peuples  habitués  à  subir  h 
eu  que  cette  autorité  soit  re] 
une  femme;  mais  dans  une 
re  ses  droils  contre  Tagressic 
lérieure,  la  faiblesse  de  la  fer 
i  la  guerre  et  les  agitations  de 
dans  la  maison,  dit  Hector  à  . 
mux,  la  toile  et  la  quenouilh 
^s  qui  sont  nés  dans  Uios,  et  r 
i  môme  langage  à  Pénélope,  e 
du  respect  qu'il  doit  à  sa  mèr 
nme  qui  l'égale  dans  la  terre  d 
li  dans  Argos  et  Mykènes,  ni 
ûr.  »  11  lui  apprend  seulemei 
et  qu'elle  peut  désormais  se  j 
protection.  Cette  distinction 
st  l'expression  de  la  nature  n 
3  dune  société  entre  des  êtres, 
a  Platon  et  les  autres  philosop 
mction  leur  est  commune,  h 
èesses  dans  l'Olympe,  il  y  a  dej 
les  oracles  divins  sont  renc 
2s  à  Dodone,  à  Delphes  la  Pyt 
1  est  proclamée  par  la  religioi 
bs  et  devoirs  de  Tenfant  :  éi 
ranchissement  de  la  femme  ( 
.  Jamais  le  père  de  famille  n'fi 
qu'il  conserva  toujours  à  R( 
ce  entre  la  cité  romaine,  cor 


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PIÉTÉ   FILIALE.  137 

les  chefs  seuls  sont  de  véritables  citoyens,  et  la  cité  grecque, 
formée  par  une  réunion  d'égaux,  et  dont  on  fait  partie  dès 
qu'on  peut  la  défendre.  Jusque-là,  comme  citoyen  futur,  des- 
tiné à  des  devoirs  sociaux,  l'enfant  a  droit  à  l'éducation  qui  le 
prépare  à  la  vie  politique.  C'est  un  crédit  :  l'homme  acquil- 
lera  plus  tard  la  dette  de  l'enfant;  le  droit  à  l'éducation  im- 
plique le  devoir  envers  la  patrie.  Aucun  peuple  n'a  attaché 
autant  d'importance  que  les  Grecs  à  l'éducation  des  jeunes 
gens.  Ils  la  faisaient  consister  dans  un  développement  paral- 
lèle du  corps  ettie  l'esprit.  Une  jeunesse  robuste  préludait  par 
les  fatigues  de  la  palestre  aux  rudes  travaux  de  la  guerre,  et 
par  cette  gymnastique  de  l'esprit  qu'on  nommait  la  musique,  à 
l'exercice  du  droit  qui  est  la  liberté.  La  Grèce  entière  semble 
un  gymnase  et  un  lycée  ;  les  jeunes  gens  occupent  toujours  le 
premier  plan  sur  la  scène  de  l'histoire. 

Cela  n'empêchait  pas  le  culte  des  traditions  et  le  respect  des 
vieillards.  Le  lien  de  famille  est  d'autant  plus  étroit  que  l'au- 
lorité  des  parents  sur  Tenfant  est  purement  morale;  c'est  un 
lien  d'affection  et  de  reconnaissance  pour  ceux  qui  l'ont  guidé 
dans  les  premières  luttes  de  la  vie.  11  n'y  a  peut-être  pus 
d'autre  langue,  dit  Gillies,  qui  puisse  exprimer  sans  circonlo- 
cution ce  que  les  Grecs  entendent  par  ôpe'Trtpa,  cette  dette  que 
l'enfant  contracte  envers  ses  parents  dès  la  naissance,  et  qu  il 
doit  payer  plus  tard  en  les  nourrissant  et  les  soignant  à  son 
tour.  C'est  l'expression  qu'Homère  emploie  quand  il  parle  d'un 
liéros  mort  à  la  fleur  de  l'âge  :  «  11  ne  put  pas  payer  sa  dette  à 
ses  parents.  »  Achille,  Antilochos,  Hector,  Télémaque,  Odys- 
seus,  sont  des  modèles  de  piété  filiale.  Les  fils  de  Priâmes 
respectent  les  réprimandes,  môme  injustes,  de  leur  père.  Au 
moment  de  partir  pour  Troie,  Odysseus  recommande  son  père 
et  sa  mère  à  Pénélope  :  «  Prends  soin  d'eux  dans  ta  demeure 
comme  aujourd'hui,  et  môme  plus  encore  pendant  mon  ab- 
sence. »  La  scène  où  Priamos,  pour  se  faire  rendre  le  corps 
d'Hector,  invoque  le  souvenir  de  Pèleus,  est  une  des  plus 
belles  de  l'Iliade  : 

«  Souviens-loi  de  ton  père,  Achille  semblable  aux  Dieux  ;  il 
est  du  môme  âge  que  moi,  sur  le  triste  seuil  de  la  vieillesse,  et 
il  a  peut-être  autour  de  lui  des  voisins  qui  l'attaquent,  et  por- 


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PIÉTÉ  FILIALE. 

sonne  n'est  là  pour  le  défendre  contre  la  violence 
Cependant,  lui  du  moins,  apprenant  que  tu  es  v 
réjouit  dans  son  cœur,  et  il  espère  tous  les  jours 
sou  cher  fils  revenir  de  Troie.  Mais  moi,  inforl 
engendré  des  fils  très  braves  dans  la  large  Troie, 
dire  qu'il  ne  m'en  reste  pas  un.  J'en  avais  cinqu 
vinrent  les  fils  des  Achaiens....  De  la  plupart,  ] 
Ares  a  fait  ployer  les  genoux;  et  celui  qui  me  res 
qui  protégeait  la  ville  et  nous-mêmes,  tu  l'as  tué 
battant  pour  sa  patrie,  Hector.  C'est  pour  lui  que  j( 
les  vaisseaux  des  Achaiens,  et  pour  le  racheter  j 
une  immense^  rançon.  Ainsi  respecte  les  Dieux, 
prends  pitié  de  moi,  te  souvenant  de  ton  père.  Moi, 
misérable  encore  :  j'ai  osé  faire  ce  que  n'a  fait  s 
mortel  sur  la  terre,  porter  à  mes  lèvres  la  main  i 
qui  a  tué  mon  fils.  »  Il  parla  ainsi  et  lui  inspira 
pleurer  son  père;  et  Acbille  lui  prenant  la  main  re] 
cernent  le  vieillard.  Et  tous  deux  se  souvenaient; 
géant  à  Hector  tueur  dhommes,  pleurait  des  la 
dantes,  se  roulant  aux  pieds  d'Achille,  et  Achille  { 
son  père,  et  de  temps  en  temps  aussi  sur  Patrock 
gémissements  remplissaient  la  salle.  » 

Lorsqu'Odysseus,  par  le  conseil  de  Kirkè,  est  aU< 
dn  fleuve  Océan,  limite  du  monde  visible,  évoque 
prophète  Teirésias,  il  aperçoit,  parmi  les  autres  âm 
sa  mère  qu'il  avait  laissée  vivante  à  son  départ  d' 
pleure  en  la  reconnaissant,  et  lui  demande  commei 
domptée  par  la  Kère  de  la  mort,  si  elle  a  succo 
maladie  ou  à  une  mort  subite,  sous  les  douces  flèc 
mis;  il  l'interroge  aussi  sur  son  père,  sur  sa  fei 
sou  fils.  Anticleia  lui  apprend  que  Télémaque 
champs^  que  Pénélope  passe  ses  nuits  et  ses  joui 
regrets  :  «  Quant  à  ton  père,  lui  dit-elle,  il  rest 
champs  et  ne  va  pas  à  la  ville  ;  il  ne  couche  pas 
couvert  de  tapis  et  d'étoffes  brillantes,  mais  1  hiver, 
les  serviteurs  de  la  maison  dans  la  cendre  du  foj 
couvre  de  mauvais  habits  ;  et  quand  vient  1  été  et  la 
saison  d'automne,  dans  le  haut  du  jardin  planté  é 


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^^"HP 


COMMANDEMENT  MILITAIRE. 


t  un  lit  à  terre  avec  les  feuilles  tombées.  C'est  là  qu'il  se 
le  tristement,  et  il  nourrit  un  grand  deuil  dans  son  cœur, 
Jure  vieillesse  s'élend  sur  lui.  C'est  ainsi  que  moi  aussi 
s  morte  et  que  j'ai  accompli  ma  destinée.  Ce  n'est  pas 
•ite  ctiasseresse  Arlémis  qui  est  venue  dans  la  maison  me 
er  de  ses  douces  flèches;  ce  n'est  pas  une  maladie  qui  a 
Ime  de  mes  membres  par  un  épuisement  funeste,  mais 
Ion  regret  et  ton  souvenir,  illustre  Odysscus,  c'est  ta  bonté 
l'a  privée  de  la  vie.  » 

a  fin  du  poème,  quand  Odysseus  va  revoir  son  père,  il 
le  préparer  à  la  joie  qu'il  lui  apporte;  il  invente  une  bis- 
selon  sa  coutume,  il  dit  qu'il  a  élé  l'hôle  d'Odysseus, 
se  sont  quittés  il  y  a  cinq  ans,  croyant  bien  se  revoir, 
le  vieillard  espérait  une  meilleure  nouvelle;  il  sent  qu'il 
)p  vieux  pour  attendre  :  «  Le  nuage  noir  de  la  douleur  le 
it,  et  prenant  dans  ses  deux  mains  de  la  poussière  du 
il  lu  répandit  sur  sa  léle  blanche  en  gémissant  proton  • 
it.  El  le  cœur  d'Odysseus  était  secoué,  et  un  soupir  pro- 
jonflait  ses  narines,  tandis  qu'il  regardai!  son  père  chéri; 
lançant  et  le  prenant  dans  ses  bras,  il  l'embrassa  et  lui 
C'est  moi-même  qui  suis  Odysseus,  mon  père,  celui  que 
înds,  et  qui  rentre  après  vingt  ans  dans  ma  patrie.  »  le 
rd  hésite;  Odysseus  lui  montre  la  cicatrice  qui  l'avait 
ait  reconnaître  de  sa  vieille  nourrice;  il  désigne  dans  le 
les  arbres  fruitiers  que  Laertès  lui  avait  donnes  lorsqu'il 
înfant  :  «  Alors  le  vieillard  senlit  se  dissoudre  ses  ge- 
et  son  cœur,  et  il  jeta  ses  bras  autour  de  son  fils,  et 
re  Odysseus  aux  nombreuses  fatigues  le  reçut,  exhalant 
ne.  » 

actère  des  royautés  héroïques  :  cominandeinent 
lire  et  présidence  des  assembléeSé  —  La  famille  sert 
)dèle  au  gouvernement  des  sociétés  primitives.  Si  la  ^ 
é  estl'image  plus  ou  moins  exacte  de  l'autorité  paternelle, 
mille  de  frères  sans  droits  d'aînesse  et  à  peu  près  égaux 
ce  est  l'image  de  la  république.  On  retrouve  en  germe  ; 
Iliade  et  dans  l'Odyssée  toutes  les  institutions  des  siècles 
ts  :  une  assemblée  populaire  souveraine,  un  sénat  ou 
1  d'État  qui  prépare  les  délibérations,  et  des  généraux 


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J 


PRÉSIDENCE  DES  ASSEMBLÉES.  141 

ou  des  magistrats  qui  exécutent  les  décisions  du  peuple  et 
conduisent  les  expéditions.  Homère  les  nomme  indifféremment 
rois,  Juges,  conseillers,  chefs  ou  princes  :  les  uns  sont  plus 
rois  que  les  autres,  paaiXeuripct.  Le  mot  paoïXiû;,  que  nous  tra- 
duisons par  roi,  n'implique  pas  Tidée  d'une  monarchie  :  les 
Boiotes  sont  conduits  à  Troie  par  cinq  rois  ;  dans  l'île  de  Selle- 
rie, Alkinoos  déclare  qu'il  y  a  douze  rois  parmi  les  Phaièkes, 
et  qu'il  est  le  treizième.  Cette  royauté  était  une  sorte  d'aristo- 
cratie, dans  le  sens  étymologique  du  mot,  c'est-à-dire  le  gou- 
vernement des  meilleurs  :  ceux  qui  pratiquaient  le  mieux  les 
deux  grandes  vertus  sociales,  le  courage  et  la  justice,  étaient 
choisis  par  leurs  égaux  pour  servir  de  guides  pendant  la 
guerre,  de  conseillers  pendant  la  paix.  Aristote  distingue  soi- 
gneusement la  monarchie  absolue  en  usage  chez  les  barbares, 
qui  la  supportent  «  parce. qu'ils  ont  le  caractère  servile  »,  de 
celle  royauté  héroïque,  établie  sur  le  consentement  libre  et 
avec  des  fonctions  déterminées  :  le  roi  était  un  général,  un 
juge,  et  présidait  aux  cérémonies  religieuses.  Le  nom  de  roi, 
si  souvent  employé  par  Homère,  ne  doit  pas  faire  illusion  ; 
"ialgré  le  prestige  que  leur  donne  le  grand  style  de  l'épopée, 
ces  roitelets  ne  sont  que  des  chefs  de  clans,  ou  ce  qu'on 
appellerait  aujourd'hui  des  notabilités  influentes  dans  leurs 
communes. 

En  récompense  de  leurs  services,  les  chefs  recevaient  du 
peuple  un  champ  à  cultiver  ou,  dans  les  expéditions  lointaines, 
iineplus  forte  part  du  butin.  Ces  dons  faits  aux  plus  braves, 
c'est  par  le  courage  qu'ils  peuvent  être  conserves  :  «  Pourquoi, 
(iit  Sarpèdon  à  Glaucos,  avons-nous  reçu  en  Lykia  les  plus 
grands  honneurs,  un  siège  élevé,  des  viandes  et  des  coupes 
pleines?  Tous  nous  regardent  comme  des  Dieux,  et  nous  culti- 
vons, près  des  rives  du  Xanthos,  un  beau  champ  fertile  en 
vignes  et  en  blé.  C'est  pourquoi  il  nous  faut  rester  fermes  au 
piemier  rang  et  soutenir  la  lutte  ardente,  afin  que  chacun  des 
Lykiens  bien  cuirassés  puisse  dire  :  Ce  ne  sont  pas  des  hommes 
sans  gloire  qui  gouvernent  la  Lykia;  nos  rois  mangent  des 
•nouions  gras  et  boivent  un  vin  excellent  et  mielleux  ;  mais  ils 
ont  la  force  et  le  courage  el  combattent  au  premier  rang  des 
Mkiens.  » 


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DIRECTION  DES  SACRIFICES. 

le  leurs  exploits  à  la  guerre  donnait  aux  chefs, 
la  paix,  une  certaine  influence  dans  Tassem- 

S'ils  aTaient  de  l'éloquence  et  une  réputation 
s  justice,  ils  étaient  pris  pour  arbitres  dans  les 
Jn  des  prologues  de  la  Théogonie  trace  ainsi 

roi  aimé  des  Muses  :  «  Celui  qu'honorent  les 
i  Zeus,  celui  des  rois  nourrissons  de  Zeus 
^ardé  à  sa  naissance,  elles  lui  versent  sur  la 
ice  rosée,  et  de  sa  bouche  sortent  des  paroles 
s  les  peuples  regardent  vers  lui  lorsqu'il  dis- 
»ar  des  jugements  droits.  Parlant  avec  sûreté, 

temps  apaisé  une  grande  querelle  (car,  s'il 
udents,  c'est  afin  que,  dans  l'assemblée,  il  ré- 
cement  et  par  de  bienveillantes  paroles  les 
iples  embarrassés).  Et  lorsqu'il  s'avance  à  tra- 
)n  l'entoure  de  respect  et  d'affection  comme 
brille  au  milieu  des  peuples  réunis.  »  Ce  per- 
de l'époque  héroïque  pourrait  s'appliquer  à 
tout  autre  démagogue.  C'est  une  autorité  pu- 
\,  fondée  sur  la  confiance  du  peuple  et  sur  la 

des  cérémonies  religieuses  est  moins  une  atlri- 
i  de  la  royauté  qu'une  fonction  appartenant  au 
lille  ;  quand  il  s'agit  d'un  sacrifice  offert  par 
c'est  naturellement  le  chef  du  peuple  qui  y  pré- 
\\  qu'on  voit  Agamemnon  dans  l'Iliade,  Nestor 
offrir  des  sacrifices  au  milieu  du  peuple.  Quant 
n mandement  militaire,  elle  a  été  admise  même 
'atie  d'Athènes  ;  les  dix  généraux  de  l'armée  qui 
irathon  ne  commandaient  pas  ensemble,  mais 
Or,  c'est  seulement  de  cette  unité  dans  le  com- 
ilitaire,  qu'il  est  question  dans  le  vers  souvent 
*e  met  dans  la  bouche  d'Odysseus  au  second 
e.  Quand  les  Achaicns  quittent  l'assemblée  en 
lent  s'embarquer,  Odysseus  s'écrie  :  «  Ici  (dans 
ne  pouvons  pas  tous  commander,  le  comman- 
sieurs  n'est  pas  une  bonne  chose;  qu'il  n'y  ail 
,  qu'un  seul  roi.  »  Il  sait  cependant  qu'il  y  en  a 


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LES  ROYAUTÉS  IlÉUOIQUES, 

UD  grand  nombre  dans  Tarmée,  et  lui-mî^me  en  esl  un,  n 
il  parle  du  commandement  militaire,  et  il  veut  qu'on  re( 
naisse  Agamemnon  pour  chef  de  Texpédilion.  H  emploie 
persuasion  pour  engager  les  rois  et  ceux  qui  se  dislingi 
des  autres  à  reprendre  la  délibération,  et  Homère  ajoute  < 
frappe  de  son  sceptre  les  hommes  du  peuple  et  les  force 
rasseoir  pour  écouter  ceux  qui  valent  mieux  qu'eux,  mai 
mot  de  peuple  signifie  seulement  la  foule  de  ceux  qui  n 
distinguent  ni  par  leur  courage  ni  par  leur  sagesse, 
Odysseus  dit  à  chacun  d'eux  :  «  Tu  u'es  ni  fort  ni  brave,  ( 
ne  comptes  ni  à  la  guerre  ni  au  conseil.  »  11  ne  s'agit  m 
ment  d'une  distinction  de  naissance,  car  Thersite,  le  plus  i 
traité  de  tous,  était  de  très  bonne  famille  ;  il  était  cousi 
Méléagros  et  de  Tydeus,  père  de  Diomèdès.  Quand  le  tum 
est  apaisé,  Odysseus  engage  les  Achaiens  à  rester  devant  1 
et  il  ne  leur  parle  ni  de  discipline  ni  d'obéissance,  mai 
leurs  intérêts,  de  leur  honneur  et  de  leurs  serments.  S 
commencé  par  mettre  la  force  du  poignet  au  service  d< 
arguments,  pouvons- nous  dire  qu'il  ne  se  passe  rien  de  e 
biable  dans  les  assemblées  populaires  chez  de  grands  pei 
civilisés  ? 

L'hérédité  du  commandement  n'était  pas  une  règle  absc 
mais  un  fait  qui  devait  être  assez  fréquenU  Comme  les  cha 
cl  les  troupeaux  passaient  du  père  aux  enfants,  ceux-ci  ï 
talent  en  môme  temps  de  l'influence  que  donne  la  rich( 
mais  il  fallait  de  plus  que  le  fils  ou  un  des  fils  du  roi  fût 
même  assez  dislitigué  par  sa  force  et  son  courage  pour 
à  son  tour  chef  du  peuple.  Quelquefois  il  devenait  roi  du  vi 
de  son  père,  comme  on  le  voit  par  l'exemple  d'Achille  et 
celui  d'Odysseus.  Hector  est  le  véritable  roi  des  Troyens, 
la  reconnaissance  promet  déjà  la  royauté  à  son  fils  :  «  Us 
pellent  Astyanax  (prince  de  la  ville),  parce  qu'Hector  prc 
seul  la  ville  et  les  murs».  La  présence  d'Hector  conser 
Priamos  une  espèce  d'autorité  au  milieu  du  peuple,  i 
Achille  craint  qu'en  son  absence  Pèleus  ne  soit  lésé  pai 
voisins.  Laerlès,  depuis  le  départ  d'Odysseus,  est  rentré  t( 
fait  dans  une  condition  privée  ;  il  cultive  son  champ  et  n 
pas  môme  aux  assemblées.  On  ignore  si  Tclémaque  succè 


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Ii4  HIÉRARCHIE  PERSOiNNELLE. 

à  son  père.  Eurymachos,  un  des  prétendants,  lui  avoue  qu'il 
ne  le  souhaite  pas,  et  Télémaque  répond  :  «  il  n'est  pas  mau- 
vais pour  un  homme  d'être  roi  ;  sa  maison  devient  riche  et  lui- 
môme  est  plus  honoré,  mais  il  y  a  beaucoup  d'autres  rois  dans 
Ithaque  entourée  par  la  mer.  Que  quelqu'un  d'entre  eux 
prenne  la  place,  puisque  l'illustre  Odysseus  est  mort,  mais  je 
resterai  maître  de  notre  maison  et  des  caplifs  que  l'illustre 
Odysseus  a  pris  à  la  guerre.  »  Les  chefs  qui  revenaient  d'une 
expédition  risquaient  do  trouver  leur  place  prise,  comme  il 
arriva  à  plusieurs  rois  revenus  de  Troie.  Mais  ces  change- 
ments ou  ces  déplacements  de  dynastie  ne  sont  pas  de  vérita- 
bles révolutions.  La  cité  grecque,  dans  l'âge  héroïque,  res- 
semble bien  plus  à  une  commune  aristocratique  qu'à  une  mo- 
narchie. Il  importe  de  le  remarquer  dés  le  début,  pour  ne  pas 
attacher  à  l'abolition  des  royautés  l'importance  d'une  trans- 
formation sociale. 

Hiérarchie  personnelle  sans  distinction  héréditaire. 
—  Quoique  la  population  de  la  Grèce  paraisse  avoir  été  formée 
de  plusieurs  invasions  successives,  il  faut  croire  que  les  nou- 
veaux venus  s'établissaient  à  côté  des  anciens  habitants,  sans 
les  déposséder,  car  on  ne  trouve  dans  les  poèmes  d'Homère 
aucune  trace  d'une  caste  de  conquérants.  Ily  a  une  hiérarchie, 
ma:i»  elle  est  fondée  sur  les  aptitudes  naturelles  et  le  mérite 
particulier  de  chacun.  Les  Héros  ont  presque  toujours  quelque 
Dieu  pour  père  ou  pour  aïeul,  mais  c'est  par  leurs  qualités 
personnelles  qu'ils  établissent  leur  filiation.  Quand  Belléro- 
phontès  a  tué  la  Chimère  et  détruit  les  guerriers  envoyés 
contre  lui  par  le  roi  des  Ljkiens,  celui-ci  en  conclut  qu'il  est 
de  race  divine  et  lui  donne  sa  fille  avec  la  moitié  des  honneurs 
royaux  ;  les  Lykiens  «  séparent  pour  lui  une  portion  de  terre 
parmi  les  meilleures,  un  beau  champ  propre  à  la  culture  de 
la  vigne  et  au  labourage,  et  la  lui  donnent  pour  qu'il  la  cul- 
tive ».  L'exemple  de  Thersite  prouve  d'autre  part  que,  sans  la 
force  et  le  courage,  on  ne  gagnait  pas  beaucoup  à  avoir  des 
Dieux  dans  sa  famille.  Une  supériorité  personnelle  donnait 
seule  à  ceux  qui  la  possédaient  une  influence  naturelle  sur 
leurs  égaux,  mais  sans  constituer  une  différence  de  droits.  A 
la  guerre  comme  pendant   la  paix,  la  décision  souveraine 


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ÎCT  DU   TRAVAIL.  i45 

appartenait  à  rassemblée  du  peuple;  seulement  cette  décision 
était  facilement  entraînée  par  Téloquence  ou  la  sagesse  de 
quelques-uns.  C'est  bien  à  tort  que  des  auteurs  modernes  ont 
comparé  la  Grèce  héroïque  à  l'Europe  féodale  ;  il  n'y  a  pas  de 
noblesse  héréditaire  dans  la  société  homérique^  ni  rien  qui 
ressemble  à  une  distinction  fondée  sur  la  naissance,  tandis 
que  les  barons  du  moyen  âge  se  croyaient  d'une  autre  espèce 
que  le  reste  de  la  nation,  méprisaient  profondément  le  travail^ 
et  auraient  rougi  de  fabriquer  eux-mêmes  leurs  meubles 
comme  Odysseus,  ou  de  préparer  le  rôti  comme  Achille  quand 
il  invitait  ses  amis  à  dîner. 

Caractère  sacré  du  travail.  —  Pour  les  Grecs,  le  travail 
n'est  pas  une  punition,  mais  la  loi  même  de  l'homme,  le  légi- 
time emploi  de  la  force  et  de  la  liberté,  c*est  par  le  travail 
qu'il  se  rapproche  des  Dieux.  Le  soleil  est  le  type  du  travail- 
leur infatigable,  et  la  plupart  des  travaux  d'Héraclès  s'expli- 
quent par  son  caractère  primitif  de  Dieu  solaire.  La  forme  la 
plus  ancienne  et  la  plus  sainte  du  travail  humain,  l'agricul- 
ture, est  un  don  de  la  terre  elle-même,  Dèmèter  la  législa- 
trice (Ocaf^dçcpc;),  car  c'est  en  substituant  le  travail  pacifique  à 
la  rapine  et  à  la  violence  que  les  hommes  sortent  de  la  bar- 
barie et  se  constituent  en  société  policée.  La  propriété  fondée 
sur  le  travail  n'est  plus  un  privilège,  mais  un  droit,  elle  doit 
être  garantie  par  le  respect  de  chacun  pour  le  droit  de  ses 
cgaux,  qui  est  le  sien.  C'est  pourquoi  la  clôture  des  champs 
est  sous  la  protection  de  Zeus  esxei&ç,  et  la  vierge  Histiè  veille 
sur  la  pierre  du  foyer,  centre  de  la  famille  et  de  la  cité.  Avec 
l'agriculture  se  développent  toutes  les  formes  du  travail,  et 
toutes  ont  un  Dieu  pour  inventeur  et  pour  patron.  La  poésie, 
la  musique  et  la  danse,  inséparables  à  l'origine,  se  rattachent 
au  culte  d'Apollon  et  des  Muses;  Athènè  l'ouvrière  (ip^avu),  en- 
seigne aux  femmes  les  travaux  de  leur  sexe.  Les  deux  divinités 
du  feu,  le  Titan  Promètheus  et  le  forgeron  Hèphaistos,  prési- 
dent, l'un  à  la  céramique,  l'autre  à  l'industrie  des  métaux  ; 
c'est  Hèphaistos  qui  a  fabriqué  les  demeures  des  Dieux  dans 
l'Olympe  ;  il  forge  les  armes  d'Achille  et  celles  de  Memnon. 
Poséidon  enseigne  la  navigation,  Hermès  le  commerce,  Asclè- 
pios  la  médecine,  la  plus  ancienne  des  sciences,  quoiqu'elle 
L.  M.  —  HisT.  DES  Ghecs.  9 


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CONDITION   DES  SERVITEURS. 

nettement  des  mercenaires,  HtU,  qui  louent  leur 
ir  un  salaire.  11  y  aurait  une  différence  s'il  était 
î  Tesclavage  était  héréditaire,  mais  cela  semble 
;  douteux  que  l'hérédité  de  la  royauté.  La  punition 
;es  infidèles  qui  avaient  souillé  de  leurs  débauches 
rOdysseus  ne  prouve  pas  que  le  maître  eût  un  droit 
r  la  vie  de  ses  domestiques  :  c'est  une  vengeance, 
punition  des  prétendants  de  Pénélope,  sur  qui  on 
\  dire  qu'Odysseus  eût  droit  de  vie  et  de  mort.  Mais 
dysseus  parle  à  Eumaios  et  à  Philoitios  comme  à 
1  leur  promet  de  les  regarder  comme  des  frères  de 
,  de  leur  donner  une  maison,  un  champ,  une  épouse, 
d'ailleurs  l'habitude  de  tout  bon  maître,  d'après  ce 
naios  lui-même  dans  un  autre  passage.  Il  donne 
sur  sa  condition  depuis  qu'il  a  été  acheté  tout 
•  Laertès,  il  parle  de  la  bonté  d'Anticleia,  mère 

ii'elle  vivait,  dit-il,  j'aimais  à  l'interroger  et  à  lui 
car  elle  m'a  élevé  elle-même  avec  sa  noble  fllle, 
a  robe  tombante,  la  plus  jeune  de  ses  enfants;  elle 
t  ensemble  et  m'honorait  presque  autant  que  sa  fille, 
ae  nous  parvînmes  tous  deux  à  la  jeunesse  dési- 

donnèrent  en  mariage  à  un  homme  de  Samè  et 
B  nombreux  présents.  Quant  à  moi,  Anticleia  me 
rès  beaux  habits,  une  tunique  et  un  manteau,  et  des 
»ur  mes  pieds,  et  elle  m'envoya  dans  les  champs  ; 
iit  bien  du  fond  du  cœur.  Maintenant  tout  cela 
3;  mais  les  Dieux  heureux  ont  fait  fructifier  le  tra- 
je  me  livre,  et  par  lui  j'ai  pu  boire,  manger  et 

vénérables  indigents.  »  Non  seulement  Eumaios 
ire  l'aumône,  mais  il  a  lui-même  un  serviteur  qu'il 

ses  deniers  à  des  pirates  taphiens.  Le  nom  et  le 
Odysseus  reviennent  sans  cesse  dans  ses  discours  : 
st  mort,  et  il  ne  reste  que  des  regrets  à  ses  amis, 
'tout,  car  je  ne  trouverai  jamais  un  maître  si  doux, 
ù  j'irai  ;  pas  môme  si  je  retournais  dans  la  maison 
é,  auprès  de  mon  père  et  de  ma  mère  qui  m'ont 
ime,  ce  n'est  pas  tant  sur  eux  que  je  pleure,  quoique 


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CONDITION  DES  SERVITEURS.  i49 

je  désire  bien  les  revoir  de  mes  yeux  dans  la  terre  paternelle  ; 
mais  je  regrette  plus  encore  Odysseus  absent.  Je  n'ose  pas 
même,  ô  mon  hôte,  prononcer  son  nom  pendant  qu'il  n'est 
pas  là,  car  il  m'aimait  bien  et  s'intéressait  à  moi  dans  son 
cœur  ;  mais  je  l'appelle  mon  frère  aîné  qui  est  loin  de  moi.  » 

Philoitios,  bouvier  d'Odysseus,  parle  de  son  maître  avec  au- 
tant d'affection  et  de  reconnaissance  ;  à  la  vue  d'un  étranger 
pauvre  et  mal  velu,  la  sueur  le  couvre  et  ses  yeux  s'emplissent 
de  larmes,  parce  qu'il  pense  qu'Odysseus  est  peut-être  couvert 
de  pareils  haillons,  m  Mais,  s'il  est  mort  et  dans  les  demeures 
de  l'Invisible,  hélas,  l'illustre  Odysseus  qui  m'avait  envoyé 
encore  tout  petit  garder  les  vaches  chez  le  peuple  des  Képhal- 
lènes!....  Et  maintenant  elles  deviennent  innombrables,  et  il 
n'y  a  pas  d'homme  pour  qui  se  multiplie  davantage  la  race  des 
bœufs  au  large  front.  Mais  d'autres  se  les  font  amener  pour 
les  manger,  et  ils  ne  s'inquiètent  pas  de  l'enfant  qui  est  dans 
la  maison,  et  ils  ne  craignent  pas  la  vengeance  des  Dieux.  Us 
désirent  depuis  longtemps  partager  les  biens  du  prince  absent. 
Pour  moi,  mon  cœur  roule  ces  pensées  dans  ma  poitrine  : 
certes,  il  serait  très  mal,  lorsqu'il  est  vivant,  d'aller  chez  un 
autre  peuple,  emmenant  les  bœufs  chez  des  hommes  étrangers  ; 
mais  il  est  dur  de  rester  ici  à  souffrir  en  gardant  les  vaches 
d'autrui.  Et  déjà  depuis  longtemps  je  serais  allé  chez  quelque 
autre  des  rois  magnanimes,  parce  que  cela  n'est  plus  tolé- 
rable  ;  mais  j'attends  toujours  ce  malheureux,  s'il  pouvait  re- 
venir pour  chasser  les  prétendants  de  sa  maison.  »  Ainsi 
Philoitios  n'est  nullement  obligé  de  resfer  où  il  est;  il  irait 
offrir  ses  services  à  d'autres  s'il  n'était  retenu  par  un  lien 
moral. 

La  condition  d'Eurycleia,  nourrrice  d'Odysseus,  est  égale- 
ment très  douce.  «  Laertès  l'avait  achetée  autrefois  de  ses 
biens,  lorsqu'elle  était  dans  la  première  jeunesse,  et  il  avait 
donné  le  prix  de  vingt  bœufs.  Il  l'honorait  dans  sa  maison  à 
l'égal  de  sa  chaste  épouse;  il  ne  s'unit  jamais  à  elle,  et  il  évita 
d'offenser  sa  femme.  »  Ce  détail  marque  bien  la  supériorité 
morale  de  la  Grèce  héroïque  sur  la  société  patriarcale  dont  on 
trouve  le  tableau  dans  la  Genèse.  Devenue  vieille,  et  après 
avoir  élevé  successivement  Odysseus  et  Télémaque,  Eurycleia 


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LA  GUERUli:. 

la  maison  de  Pénélope  et  dirige  les  travaux  des  ser- 

lans  toule  maison  bien  ordonnée,  la  condition  des 

aes  était  exactement  celle  de  ces  serviteurs  comme 

}uve  dans  nos  campagnes,  qui  vieillissent  dans  une 

semblent  en  faire  partie.  Chez  les  Romains,  lacon- 

esclaves  fidèles  était  réglée  par  raffranchissement, 

là  une  formalité  légale  qui  ne  pouvait  exister  dans 

décrite  par  Homère,  puisqu'il  n'y  avait  pas  de  lois 

la  coutume  en  tenait  lieu.  Les  principes  d'égalité, 

nent  enracinés  dans  la  conscience  des  Grecs,  corri- 

s  vices  des  institutions  sociales  :  les  rois  étaient  fort 

3SSUS  des  autres  hommes,  et  les  serviteurs  ne  diffé- 

i  beaucoup  de  leurs  maîtres. 

ce  des  Héros  d*Homére.  —  Les  combats  derUiadc 
ractëre  sauvage  qui  contraste  avec  la  douceur  des 
I  dehors  du  champ  de  bataille.  Cependant,  on  voit 
conventions  s'établir  entre  les  peuples  ennemis,  et 
se  conclure  sous  l'invocation  des  Dieux,  pour  per- 
X  deux  partis  d'enlever  les  morts  el  de  leur  rendre 
ers  devoirs.  Lorsqu'Achille  traîne  dans  la  poussière 
'Hector,  Homère  raconte  ce  fait  avec  une  désappro- 
anifeste.  De  môme,  quand  Achille  immole  douze 
:  le  tombeau  de  Patroclos,  il  commence  par  éloigner 
ion  et  les  autres  chefs,  et  le  poète,  ordinairement 
e  réflexions,  ajoute  cette  fois  :  «  11  avait  résolu  dans 
une  méchante  action.  »  Les  mômes  expressions 
loyées  dans  l'Odyssée  à  propos  de  la  cruelle  ven- 
ercée  contre  Mélanlheus.  H  n'y  a  rien  là  d'ailleurs 
rliculier  à  l'antiquité  :  les  sociétés  vieillies  ont  aussi 
nces.  Avec  l'étranger,  on  garde  une  certaine  mesure, 
e  des  représailles,  mais  dans  la  guerre  civile,  les 
lenacés  sont  implacables  :  ni  justice  ni  pitié  pour  les 
as  môme  le  droit  de  pleurer  les  morts.  Cela  est  de 
ays  et  de  tous  les  temps.  Mais  il  faut  qu'il  s'élève 
une  voix  courageuse,  comme  celle  de  l'Antigone 
;le,  qui  seule  ose  protester  au  nom  de  l'infaillible 
B.  «  Tu  connaissais  les  décrets,  »  lui  dit  le  roi?  Et  elle 
t  Oui  certes,  mais  je  n'ai  pas  cru  que  les  décrets 


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LE  COUUAGE.  ISl 

d'un  homme  pussent  prévaloir  contre  les  lois  éternelles,  non 
écrites,  œuvre  immuable  des  Dieux.  » 

Le  courage  et  le  sentiment  de  Thonneur*  —  Le  cou- 
rage, dans  Homère,  n'est  pas  celte  fureur  aveugle  si  commune 
chez  les  barbares;  les Troyens  se  battent  pour  défendre  leur 
patrie,  les  Achaiens  pour  punir  une  injustice  et  tenir  leur 
serment,  mais  ni  les  uns  ni  les  autres  n'aiment  la  guerre 
pour  etie-méme.  Le  plus  fougueux  de  tous,  Achille,  sent  le 
prix  de  la  vie  et  du  repos;  on  le  voit  par  sa  réponse  à  Phoinix 
et  à  Odysseus.  Mais  lorsqu'il  a  son  ami  à  venger,  il  retourne 
dans  cette  mêlée  des  hommes  d'où  il  sait  qu'il  ne  doit  pas  re- 
venir. Presque  toujours  c'est  le  sentinxent  de  l'honneur  et  du 
devoir  qui  pousse  les  Héros  en  avant.  Hector,  quoique  sûr 
d'être  tué  par  Achille,  se  décide  à  l'attendre,  de  peur  d'avoir 
ù  rougir  devant  les  Troyens  et  les  Troyennes;  il  veut  mourir 
avec  gloire,  «  et  faire  quelque  grande  action,  digne  des  chants 
à  venir  «i. 

Ce  sentiment  de  l'honneur  n'a  jamais  eu  en  Grèce  les  mômes 
déviations  que  chez  les  modernes.  A  aucune  époque  de  leur 
histoire,  les  Grecs,  pas  plus  que  les  Romains,  n'ont  connu 
cette  coutume  du  duel  qui  fut  apportée  en  Europe  par  les  bar- 
bares germains  et  qui  s'y  est  toujours  maintenue.  Tout  en 
mettant  le  courage  au  premier  rang  des  vertus,  les  Grecs  ne 
confondaient  pas  le  droit  avec  la  force,  et  ne  croyaient  pas  que 
l'habileté  dans  le  maniement  des  armes  pût  prouver  la  justice 
d'une  cause  ou  y  suppléer.  Notre  point  d'honneur,  qui  permet 
d'insulter  un  adversaire  plus  faible  ou  moins  adroit,  à  la  con- 
dition de  le  tuer  ensuite,  ne  leur  eût  semblé  qu'une  forme  hy- 
pocrite de  l'assassinat.  Leur  caractère  sociable  rendait  d'ail- 
leurs les  querelles  privées  assez  rares.  Pendant  toute  la  durée 
de  la  guerre  de  Troie,  une  seule  dispute  s'élève  entre  deux 
chefs,  et  les  malheurs  qui  en  sont  la  suite  forment  le  nœud  et 
la  moralité  de  l'Iliade.  Agememnon  a  outragé  Acbille  ;  il  eu 
est  puni  par  les  malheurs  de  son  armée,  l'attaque  de  la  flotto 
et  la  victoire  d'Hector.  Alors  il  reconnaît  sa  faute  et  veut  la  ré- 
parer ;  mais  Achille  refuse  de  se  laisser  fléchir,  il  repousse 
les  conseils  de  ses  amis,  il  garde  sa  colère  :  il  en  est  puni  par 
la  mort  de  Patroclos  ;  il  a  écoulé  sa  haine,  il  est  frappé  dans 


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LA   JUSTICE.  lo3 

saienl  fléchir  quand  ils  avaient  été  offensés,  qu'ils  acceptaient 
môme  une  compensation  pour  la  mort  d'un  parent  ou  d'un 
ami.  Une  scène  représentée  sur  le  bouclier  d'Achille  fait  allu- 


Achille  panse  les  blessures  de  Patroclus  Achille  pleure  la  mort  de 

(peinture  de  la  coupe  de  Sosias).  patroclos  (pierre  gravée). 


Combat  autour  du  corps  de  Patroclos  (pierre  graTée). 

sion  à  cet  usage.  «  Les  citoyens  étaient  assemblés  sur  la  place 
publique,  et  une  discussion  s'était  élevée.  Deux  hommes  se 
disputaient  sur  la  rançon  pour  un  homme  tué.  L'un  affirmait 

0. 


HKg^:.^ 


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J54  RESPECT  DES  VIEILUKDS. 

avoir  tout  payé  et  le  déclarait  au  peuple  ;  Tautre  niait  avoir 
rien  reçu  ;  et  tous  deux  désiraient  terminer  Taifaire  par  un 
arbitrage.  Les  citoyens  criaient  des  deux  parts,  soutenant  l'un 
ou  Vautre,  et  des  crieurs  contenaient  le  peuple.  Les  vieillards 
étaient  assis  sur  des  pierres  polies,  dans  le  cercle  sacré,  et 
tenaient  dans  leurs  mains  les  sceptres  des  crieurs  à  la  voix 
éclatante.  Us  se  levaient  et  portaient  leurs  jugements  tour  à 
tour;  et  au  milieu  étaient  deux  talents  d'or  pour  donner  à  ce- 
lui qui  aurait  le  mieux  jugé.  •  L'exil  du  meurtrier  donnait 
aux  ressentiments  le  temps  de  se  calmer  et  disposait  les  pa- 
rents ou  les  amis  de  la  victime  à  accepter  une  réparation. 
Mais  cela  ne  suffisait  pas  pour  faire  taire  la  voi\  de  la  cons- 
cience. On  imagina  des  purifications  religieuses,  môme  pour 
un  meurtre  involontaire.  D'après  VAithiopis  d'Arctinos  de 
Miletqui  faisait  suite  à  l'Iliade,  Achille  ayant  tué  d*uu  coup  de 
poing  le  pauvre  Thersite,  qui  le  raillait  de  son  amour  pour 
l'amazone  Penthésileia,  il  y  eut  une  sédition  dans  le  camp,  et 
Achille  fut  obligé  d'aller  à  Lesbos  pour  se  soumettre  aux  cé- 
rémonies expiatoires.  Celte  légende  atteste  l'importance  qu'on 
attachait  à  la  vie  de  l'homme,  môme  le  plus  humble  et  le  plus 
généralement  méprisé. 

Le  respect  des  vieillards,  L^amitié.  —  Quand  les  insti^ 
tutions  de  Ja  Grèce  prirent  une  forme  plus  arrêtée,  la  libre  ac- 
tion du  peuple  dans  les  Républiques  fut  toujours  modérée  par 
un  conseil  de  vieillards  dont  on  peut  voir  la  première  ébauche 
dans  ces  vieillards  de  l'Iliade  qui  rendent  la  justice  au  milieu 
du  peuple  assemblé  sur  la  place  publique.  L'admiration 
qu'inspirait  la  force  physique  n'empochait  pas  de  reconnaître 
l'autorité  morale  de  l'âge,  de  la  sagesse  et  de  l'expérience.  Un 
des  plus  audacieux  parmi  les  chefs  Achaiens,  Diomèdès,  qui 
ne  craint  pas  de  lutter  contre  les  Dieux,  s'excuse  avec  mo- 
destie quand  il  donne  son  avis  au  milieu  des  autres  rois  plus 
âgés  que  lui  ;  il  reçoit  avec  douceur  les  reproches  injustes 
d'Agamemnon.  Paris  écoute  aussi  sans  se  plaindre  les  répri- 
mandes d  Hector,  son  aine.  Dans  les  jeux  funèbres  en  l'hon- 
neur de  Patroclos,  Antilochos  cède  le  prix  à  Ménélaos,  et 
Achille  se  lève  pour  en  offrir  un  au  vieux  Ne&lor  qui  n'a  pas 
concouru. 


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i 

\ 


l'amitié. 

Le  respect  de  la  vieillesse  n*est  qu'une 
piété  filiale  ;  c'est  aussi  la  famille  qui  four 
modèle  le  plus  parfait,  l'amour  fraternel 
pas  moins  qu'un  frère,  »  dit  Homère.  L'ami 
élément  d'une  société  au  delà  des  limites 
première  forme  du  lien  social  entre  égaux. 
Héros  marchent  par  couples  fraternels , 
deukès,  Héraclès  et  lolaos,  Thèseus  et  Peirilh 
reste  et  de  Pylade  repose  l'esprit  au  milieu  d 
gende  des  Atréides  ;  celle  d'Achille  et  c 
d'argument  à  la  seconde  moitié  de  l'Iliade,  l 
runts  que  fait  naître  dans  l'âme  d'Achille  la 
relèvent  ce  caractère  sauvage  et  justifient  1 
choisi  pour  son  héros  :  d'ahord  les  pressent 
quiétudes,  puis,  après  la  fatale  nouvelle,  le 
douleur,  les  sanglots  et  les  hurlements  ent 
des,  et  les  nuits  sans  sommeil  ou  peuplées 
passées  à  se  roukr  de  désespoir  sur  le  sable 
l'immense  carnage  au  bord  du  fleuve,  et 
geance  que  n'apaise  pas  môme  la  mort  d'un 
cède  que  devant  le  spectacle  d'une  douleur  é 
souvenir  d'un  vieux  père  absent 

L'hospitalité,  forme  pratique  de  la  cfa 
l'amour  fraternel  est  le  type  de  l'amitié,  l'i 
est  le  modèle  de  ce  sentiment  moins  ardent, 
que  Cicéron  appela  plus  tard  la  charité  du  g 
dunt  l'hospitalité  est  l'application  pratique. 
»  guerre,  tout  étranger  est  un  hôte,  et  il  n'y 
■  grec  pour  exprimer  ces  deux  idées.  Les  prii 
H  lanthropie  universelle  sont  résumés  dans  un 
V  propos  de  cet  Axylos,  qui  avait  bâti  sa  maisc 
B  la  route  pour  recevoir  les  voyageurs  :  «  Il  é 
K  très  aimé  des  hommes,  car  il  était  plein  de  cl 
B  Ce  mot,  dont  l'emploi  pourra  sembler  un  an 
B  seul  qui  rende  à  peu  près  la  force  de  l'expn 
B  ^iUiQAi,  La  bienfaisance  n'est  pas  le  privilège 
B  cun  la  pratique  en  proportion  de  ses  res! 
B      trouve  sa  condition  heureuse  parce  qu'il  a 

BL 


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L'HOSPITALITÉ. 

aux  vénérables  indigents  ;  il  reçoit  Odysseus 
à  sa  table,  «  car  c'est  de  Zeus  que  viennent 
les  pauvres,  et  les  faibles  dons  qu'on  leur 
ables.  »  L'horreur  des  Grecs  pour  les  mœurs 
le  certaines  peuplades  sauvages  se  traduit  par 
fantastiques  qu'Homère  fait  des  Kyclopës,  des 
le  ce  roi  Echétos  dont  les  prétendants  de  Pè- 
t  Iros  comme  d'un  épouvantail.  Les  préten- 
s  ne  sont  guère  mieux  traités  par  le  poète, 
^pendant  donnent  à  Odysseus  des  morceaux 
et  blâment  Antinoos  de  sa  dureté  pour  lui; 
I  dédaigneuse  suffirait  tout  au  plus  avec  ua 
Iros,  qui  fait  de  la  mendicité  une  profession  et 
suppliants.  Pour  quiconque  respecte  les  Dieux 
mme  frappé  par  le  malheur  est  revêtu  d'unca- 
Les  Dieux,  déguisés  en  mendiants,  parcourent 
}rouver  la  justice  ou  l'injustice  des  hommes.  » 
hez  Nestor  et  chez  Ménélaos.  —  Toujours 
par  accueillir  l'étranger  et  l'inviter  à  apaiser 
if  avant  de  lui  demander  qui  il  est,  d'où  il 
veut.  Le  roi  des  Lykiens  traite  Bellérophon 
irs  avant  de  l'interroger.  Lorsque  Mentor  et 
ent  àPyloSj  ils  trouvent  Nestor  et  ses  fils  oc- 
ir  les  viandes  pour  un  repas  en  l'honneur  de 
e  pressent  au-devant  des  hôtes,  et  Peisistralos, 
roij  les  fait  asseoir  à  côté  de  son  père  et  les 
part  au  festin  des  Dieux.  Nestor  dit  ensuite  : 
irenable,  maintenant  que  les  hôtes  sont  rassa- 
iire,  de  les  interroger  et  de  leur  demander 
eisistratos  accompagne  Télémaque  dans  son 
rivent  à  Lakédaimon  au  moment  où  Ménélaos 
is  le  mariage  de  son  fils  et  celui  de  sa  fiH^î 
nonce  l'arrivée  des  étrangers.  «  Dis-moi,  de- 
li,  si  nous  détellerons  leurs  chevaux  rapides, 
enverrons  vers  quelque  autre  qui  les  so- 
rs, très  indigné,  le  blond  Ménélaos  répondit  : 
i  dénué  de  sens  jusqu'ici^  Etéoneus,  fils  de 
maintenant,  tu  dis  des  sottises  comme  "'• 


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I 


5P1TALITÉ. 

enranL  Certes,  nous  avons  souvent  mangé  le  pain  de  Tho 
talUé  chez  d'autres  hommes,  avant  de  venir  ici;  que  2 
nous  préserve  désormais  de  TinTortune.  Dételle  donc  les  ( 
Taux  des  étrangers  et  conduis-les  ici  eux-mêmes,  afin  qi 
prennent  part  au  banquet.  >  A  son  départ  de  Lakédaimon,! 
maque  reçoit  de  Ménélaos  de  riches  présents.  Jamais  on  n 
sépare  d'un  hôte  sans  lui  Faire  les  présents  deThospitalité,  l 
Odyssens  chez  Alkinoos.  —  Lorsqu'Odysseus  a  été 
par  la  tempête  sur  le  rivage  de  Tile  de  Schériè,  il  est 
cueilli  et  traité  chez  les  Phaièkes  aussi  largement  que  T 
maque  à  Lakédaimon  et  à  Pylos  chez  les  anciens  amis  de 
père.  Ce  récit  s'ouvre  par  une  scène  charmante;  Nausi 
fille  du  roi  Alkinoos,  lave  le  linge  de  sa  famille  au  bord  d 
mer,  et  après  son  travail  joue  à  la  balle  avec  ses  amies.  L 
parition  d'Odysseus  interrompt  brusquement  les  jeux 
jeunes  filles  qui  se  sauvent  effrayées.  Nausicaa  reste  seule 
Odysseus^qui  connaitle  cœur  humain,  lui  Tait  un  petit  discc 
très  habile,  la  compare  à  une  Déesse  et  lui  souhaite  un 
mariage.  Elle  rappelle  ses  compagnes,  fait  donner  à  mar 
et  à  boire  au  pauvre  naufragé  et  rengage  à  demander  Thos] 
liléàson  père.  Elle  lui  recommande  surtout  de  s'adres 
d'abord  à  sa  mère.  Il  suit  ce  conseil,  et  arrivé  chez  Alkin 
au  milieu  d'un  banquet,  il  embrasse  les  genoux  d'Arètè  € 
s'asseoir  dans  la  cendre  du  foyer.  Alors  un  des  convives 
plus  vieux  des  Phaièkes,  parle  ainsi  à  Alkinoos  :  «  Alkin< 
il  n'est  pas  beau  pour  toi,  et  il  ne  convient  pas  qu'un  éti 
ger  soit  assis  par  terre,  dans  les  cendres  du  foyer.  Ceux-c 
taisent,  attendant  que  tu  parles.  Allons,  relève  l'hôte,  pli 
le  sur  un  siège  aux  clous  d'argent^  et  commande  aux  cri( 
de  verser  le  vin,  afin  que  nous  fassions  des  libations  à  Z 
roi  de  la  foudre,  qui  accompagne  les  vénérables  supplia 
et  que  l'intendante  donne  k  souper  à  l'étranger  avec  ce  qu 
a  ici.  —  Et  dès  que  la  force  sacrée  d' Alkinoos  l'eut  entei 
prenant  parla  main  le  prudent  Odysseus  à  l'esprit  subtil, 
fit  lever  du  foyer  et  le  conduisit  sur  un  siège  splendide, 
place  de  son  fils  Laodamas,  ami  des  hommes,  qui  était  a 
près  de  lui  et  qu'il  chérissait  vivement.  Et  une  servante  v( 
de  l'eau  d'une  belle  aiguière  d'or  dans   un    bassin  d'arg 


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1 


158  LIKN  FÉDÉKAL. 

pour  qu'il  se  lavàl,  et  elle  élendil  devaiil  lui  une  lable  polie.  Et 
la  vénérable  intendante  lui  apporta  du  pain  et  mit  devant  lui  des 
aliments  abondants,  lui  donnant  une  large  part  de  ce  qu'il  y 
avait.  Alors  la  force  d'Alkinoos  dit  au  crieur:  «  Ponlonoos,  mêle 
le  \  in  dans  le  cratère,  afin  que  nous  fassions  des  libalionsàZeus, 
roi  de  la  foudre,  qui  accompagne  les  vénérables  suppliants.  » 

Le  lendemain,  Alkinoos  offre  un  sacrifice  et  réunit  à  sa  lable 
tous  les  rois  des  Phaièkes.  Le  repas  est  simple,  comme  tous 
les  repas  homériques;  la  sobriété  est  un  trait  des  mœurs  grec- 
ques ;  le  vin  était  toujours  mélangé  d'eau.  L'ivrognerie,  si 
commune  chez  les  barbares  Germains,  étaient  regardée  en 
Grèce  comme  un  vice  des  peuplades  sauvages  telles  que  les 
Kentaures;  la  plus  violente  injure  qu'Achille  adresse  à  Aga- 
memnon  est  l'épilhèie  d'ivrogne.  Homère,  qui  ne  flatte  pas 
les  prétendants  de  Pénélope,  ne  les  accuse  pourtant  pas  de 
s'être  enivrés.  Les  repas  avaient  chez  les  Grecs  le  caraclèrc 
d'une  cérémonie  religieuse  ;  ils  commençaient  et  finissaient 
par  des  libations  en  l'honneur  des  Dieux  et  se  distinguaient 
moins  par  la  variété  des  mets  que  par  les  chants  et  les  danses. 
Un  chanteur  charme  par  ses  récits  les  convives  d'Alkinoos, 
qui  terminent  la  fôte  par  des  exercices  de  force  et  d'adresse  et 
surtout  par  des  danses,  «  car  il  n'y  a  rien  de  plus  noble  pou»' 
l'homme  que  l'exercice  des  pieds  et  des  mains.  »  Enfin,  Odys- 
seus  raconte  ses  aventures,  et  Alkinoos  fait  préparer  un  vais- 
seau pour  le  reconduire  dans  Ithaque,  «  car  dit-il,  jamais  pe»- 
sonne  venant  chez  moi  n'a  longtemps  attendu  dans  la  douleu» 
le  jour  du.  retour,  »  Mais  avant  de  quitter  son  hôte,  il  l"^ 
donne  lui-môme  et  engage  les  autres  rois  à  lui  donner  de 
riches  présents.  Comme  un  contraste  à  cette  île  hospitalière  ae 
Schériè,  où  les  chanteurs  sont  si  bien  traités  et  qui  P*'^^^ 
ûlre  sa  république  idéale,  Homère  oppose  les  farouches  Kyclop^^' 
qui  pratiquent  la  polygamie,  méprisent  les  Dieux  et  luen 
leurs  hôtes  pour  Içs  manger;  surtout,  ce  qui  est  pour  un  Gre^ 
le  comble  de  la  barbarie,  «  ils  n'ont  ni  lois  ni  assemblées 
libérantes.  Ils  habitent  des  cavernes  sur  la  crête  des  mon  a* 
gnes,  chacun  d'eux  gouverne  ses  enfants  et  ses  femmes,  et  i 
{le  s'inquiètent  pas  les  uns  des  autres.  » 

FéaéraUon  idéale  des  Grecs  dans  les  poèmes  d'Ho- 


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LlEiN   FÉDÉKAL.  159 

mère.  —  L'hospitalité  établit  entre  les  hommes  un  lien  sacré 


Apothéose  d'Homère  (bas-relief  du  Brilisl)  Muséum}.  Zeus  aui«  au  sommet  de 
l'Olympe;  au-dessous  de  lui  les  oeuf  Muses,  Apollon,  la  Pythie  et  un  personnage 
qu'on  croit  Olen  de  Lykie,  ou  Hésiode.  Dans  la  baude  iorérieure,  Homère,  cou- 
rouD^  par  le  Temps  et  la  Terre  habitée,  reçoit  les  sacrifices  et  les  acclamations  de 
divers  personoag^es  allégoriques  (l'Histoiie,  la  Poésie,  la  Tragédie, la  Cumédie,  etc.). 

qui  se  transmet  aux  enfants  comme  un  héritage.  La  guerre 
noôme  ne  peut  le  rompre  :  Glaucos  et  Diomèd^.s,  en  apprenant 


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i60  LI£N  FÉDÉRAL. 

qu'il  existait  entre  leurs  ancêtres,  échangent  leurs  armes  et 
déclarent  qu'ils  s'éviteront  dans  la  mêlée.  La  fraternité  des 
peuples  n'est  qu'une  extension  et  une  forme  plus  générale  de 
ces  amitiés  héréditaires.  C'est  là  ce  qui  explique  l'immense 
popularité  des  poèmes  d'Homère  en  Grèce.  Pour  nous,  leur 
élévation  morale,  plus  encore  que  leur  inimitable  beauté,  jus- 
tifie l'admiration  unanime  de  tous  les  siècles;  mais  pour  les 
Grecs  il  y  avait  dans  ces  poèmes  quelque  chose  de  plus; ils  y 
trouvaient  l'idéal  social  qu'ils  ont  poursuivi  pendant  toute  leur 
histoire  sans  jamais  l'atteindre,  l'union  de  toutes  les  cités 
grecques  dans  une  grande  patrie.  Les  traditions  héroïques,  et 
surtoutla  guerre  de  Troie,  leur  rappelaient  le  souvenir,  trop 
souvent  oublié  depuis,  d'ime  fédération  primitive.  Pendant 
cette  longue  guerre  entreprise  par  tous  pour  venger  l'injure 
d'un  seul,  il  n'y  avait  eu  qu'une  émulation  de  courage  entre 
tant  de  peuples  conjurés.  Cette  union,  scellée  par  la  commu- 
nauté des  dangers  et  de  la  victoire,  sous  les  regards  protec- 
teurs des  Dieux  de  la  patrie,  on  la  retrouvait  dans  les  chants 
d'Homère,  et  c'est  pour  cela  qu'au  milieu  des  guerres  impies 
qui  creusaient  le  tombeau  des  républiques,  cette  poésie  sacrée 
semblait  un  écho  de  l'âge  d'or. 


CHAPITRE  VI 

INSTITUTIONS  NATIONALES. 

Caractère  religieux  du  lien  fédéral,  —  Diversité  des  fonctions  reli- 
gieuses :  les  prêtres,  les  poètes  et  les  devins.  —  L'oracle  de 
Dodone.  —  L'oracle  de  Delphes,  —  Caractère  moral  des  oracles.  — 
Les  Amphictionies;  —  Origine  des  jeux  sacrés.  —  Antiquité  des  jeux. 
Les  Olympiades.  —  Conditions  du  concours.  —  La  trêve  sacrée.  — 
Les  récompenses.  —  La  gymnastique  et  la  sculpture.  —  Célébrité  et 
importance  des  jeux  sacrés. 

Caraotér6  religieux  du  lien  fédéral.  —  Les  Grecs  sont 
le  seul  peuple  qui  ait  essayé  de  fonder  la  société  politique  sur 


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t 


IS  RELIGIEUSES.  161 

le  principe  de  liberté.  Cest  leur  plus  beau  titre  de  gloire,  mais 
c'est  aussi  la  principale  cause  de  leur  faiblesse.  S'ils  n'ont  ja- 
mais réussi  à  former  une  nation»  c'est  parce  qu'ils  n'ont  jamais 
voulu  sacrifler  à  une  autorité  quelconque  la  moindre  parcelle 
de  leur  autonomie  communale.  La  religion  seule  pouvait  servir 
de  lien  entre  les  communes  ;  mais  la  diversité  des  croyances 
élait  aussi  une  conséquence  de  la  liberté.  Chaque  peuple  con- 
sacrait ses  légitimes  prétentions  à  l'indépendance  par  le  culte 
de  ses  Héros  et  de  ses  Dieux  protecteurs.  Chaque  Dieu,  dans 
les  principaux  sièges  de  son  culte,  avait  une  physionomie  à 
part  et  des  légendes  spéciales;  son  rang,  dans  la  hiérarchie 
indécise  de  TOlympe,  variait  d'une  commune  à  l'autre.  Pour- 
tant cette  variété  n'entraîna  jamais  ni  persécution  ni  guerre 
religieuse,  car  l'intolérance  est  contraire  à  la  nature  même  du 
polythéisme.  On  ne  pouvait  pas  plus  condamner  les  légendes 
de  l'Arcadie  ou  de  la  Boiotie  au  nom  de  celles  de  la  Thessalie 
ou  de  la  Crète,  qu'on  ne  pouvait  proscrire^  le  dialecte  aiolien 
ou  atlique,  au  nom  de  l'ionien  ou  du  dorien.  De  môme  que  la 
langue  grecque  conservait  son  unité  malgré  ses  différents  dia- 
lectes, ainsi  l'Hellénisme  enveloppait  toutes  les  traditions  lo- 
cales dans  sa  théologie  multiple,  et  sanctionnait  à  la  fois  l'au- 
tonomie des  communes  et  Tunion  fédérale.  Les  traités  conclus 
entre  les  villes  étaient  placés  sous  la  protection  de  leurs  divi- 
nités protectrices,  qu'on  voit  se  donnant  la  main  sur  les  mon- 
naies frappées  en  signe  d'alliance.  Chaque  république  envoyait 
des  représentants  appelés  Théores,  c'est-à-dire  spectateurs, 
aux  fêtes  de  ses  alliés,  et  demandait  pour  eux  comme  pour  elle 
la  protection  de  ses  Dieux.  Il  se  formait  des  ligues  appelées 
Amphiclionies,  dont  le  signe  était  la  participation  aux  mômes 
cérémonies  religieuses.  Certains  oracles  attiraient  les  habi- 
tants de  toutes  les  parties  de  la  Grèce,  et  leur  influence  restait 
indépendante  des  chances  diverses  de  la  guerre  et  de  la  poli- 
tique. Enfin  les  Jeux  sacrés  maintenaient  entre  les  Grecs  un 
lien  religieux  qui  leur  rappelait  leur  communauté  d'origine. 
Diversité  des  fonctions  religieuses  :  les  prêtres,  les 
poètes  et  les  devins.  —  Il  y  avait  autant  de  variété  dans  les 
fonctions  religieuses  que  dans  la  religion  elle-même.  Chez  les 
peuples  de  l'Orient  et  dans  FEurope  moderne,  toutes  ces  fonc- 


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ÊTHES,   LES  CHANTEURS,   LES  DEVINS. 

les  dans  la  main  des  praires.  Chez  les  Grecs, 
monle  dans  leur  histoire,  on  ne  trouve  rien 
t  que  nous  appelons  le  sacerdoce.  Chaque  père 
iniait  les  libations  et  les  offrandes  sur  le  foyer, 

domestique.  Quand  les  familles  réunies  en 
offrir  un  sacrifice  en  commun,  les  rois,  chefs 
*aient  en  présence  de  tout  le  peuple.  Lorsqu'on 
I  construire  des  temples,  il  y  eut  nécessaire- 
nes  chaînés  de  les  garder  et  d'entretenir  en 
îls  consacrés  au  culte  ;  on  leur  attribua  aussi 
s  victimes,  et  les  magistrats,  qui  avaient  suc- 
s  Tàge  héroïque,  se  bornèrent  à  présider  aux 
:s.  A  Athènes,  on  choisissait  pour  sacrificu- 
iers,  parce  qu'ils  avaient  l'habitude  de  prépa> 
Athénée,  qui  rapporte  ce  fait  d'après  Clidème, 
lettre  d'Olympias  recommandant  à  son  fils 
lisinier  très  instruit  dans  les  rites  sacrés  et  la 
crifices.  Ces  sacrificateurs  étaient  en  même 
ans  des  choses  saintes  ;  ils  balayaient  le  tem- 
our  attribut  un  balai,  comme  on  le  voit  sur  un 
ous  donnons  la  gravure  un  peu  plus  loin.  C'était 
ellerions  des  sacristains,  et  tel  est  le  vrai  sens 
mr  se  conformer  à  l'usage,  on  peut  leur  lais- 
jrêtres,  comme  on  laisse  celui  de  rois  aux 
e  héroïque,  qui  n'étaient  que  des  capitaines 
uges  de  paix  à  Tintérieur,  mais  il  faut  se  rap- 
)t  n'a  pas  le  sens  que  nous  lui  donnons  au* 

les  modernes  en  eifet,  le  prêtre  enseigne  la 
!  les  consciences  ;  rien  de  pareil  n'existait  chez 
int  apprenait  de  sa  nourrice  les  légendes  des 
os  du  pays.  Quand  il  y  eut  des  écoles,  il  étu- 
nes  d'Homère  et  d'Hésiode  les  traditions  na- 
ïuscs.  Quant  à  l'éducation  morale,  il  la  rece- 
ts  d'abord  et  ensuite  de  ses  égaux, 
lythologique  des  croyances  populaires  élail 
lètes,  ou  chanteurs,  àoi^ci,  l'explication  des 
ésages  aux  devins,  ou  prophètes,  [AâvTuc,  qui 
stingués  des  tipei;.  «  Les  devins,  dit  Platon, 


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DE  DODONE. 

lommes  ce  qui  vient 
^  Kres  est  de  savoir  ( 
convient  de  présenter  aux  Dieux  nos  oifrandes  et  ne 
et  de  leur  demander  par  nos  prières  les  biens  don 
sent.  »  On  sait  que,  môme  chez  les  Juifs,  où  il  y  av 
dans  tout  l'Orient,  une  caste  sacerdotale,  les  phoph 
distincts  des  prôtrcs,  et  n'appartenaient  pas  comi 
tribu  de  Lévi.  A  Rome,  la  science  traditionnelle  de 
el  des  augures  était  le  privilège  des  patriciens;  ma 
la  divination  était  Teffet  d'une  aptitude  particuliè 
tribuait  à  l'inspiration  directe  d'Apollon,  comme  o 
aux  Muses  l'inspiration  des  poètes.  Ceux  qui  senta 
le  génie  poétique  composaient  des  hymnes,  ce 
croyaient  le  don  de  prophétie  expliquaient  les  présaj 
risques  et  périls,  et  s'exposaient  à  perdre  la  confian 
nement  ne  jusliflait  pas  leurs  prédictions.  Leur 
comme  celle  des  médecins,  était  proportionnée  à 
dont  ils  avaient  fait  preuve.  Les  fonctions  des  poè 
celles  des  devins,  échappaient  par  leur  nature  m^ 
espèce  de  contrôle,  mais  personne  n'était  obligé 
mettre.  Aucune  autorité  ne  pouvait  fixer  un  dogme 
une  croyance.  L'existence  d'un  culte  public  n'im] 
ce  qu'on  nomme  aujourd'hui  une  religion  d'Étal 
avaient  la  direction  des  cérémonies  religieuses,  et 
pour  cette  tradition,  le  nom  de  roi  fut  conservé  < 
religieux  longtemps  après  avoir  disparu  dans  l'ordr 
ainsi  le  second  des  airchontes  d'Athènes  s'appelait  1 
aucun  magistrat  ne  pouvait  régler  ou  modifier  un 
ni  s'attribuer  le  rôle  d'un  poète  ou  d'un  devin.  Dt 
c'est  Agamemnon  qui  offre  les  sacrifices,  mais  quai 
veut  interroger  les  Dieux,  il  s'adresse  à  Calchas. 

L'oracle  de  Dodone.  —  Les  Grecs  faisaient  un 
linuel  de  la  divination.  On  admettait  bien  qu'un 
vait  se  tromper;  on  savait  qu'il  y  en  avait  de  pli 
habiles,  comme  parmi  les  médecins,  mais  le  pri 
divination  n'était  jamais  révoqué  en  doute.  Er 
guerre,  il  y  avait  toujours  des  devins  dans  chaque 
temps  ordinaire,  on  allait  consulter  les  Dieux  da 


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L*ORACLE  DR  DELPUES. 

dires  célèbres  auxquels  étaient  attachés  des  prophètes, 
î  généralement  des  prophétesses.  Tout  ce  qu'on  sait  de 
j  de  Dodone,  le  plus  ancien  des  oracles  de  la  Grèce, 
que  la  Man tique,  ou  science  divinatoire,  n'était  à  l'ori- 
u'une  météorologie  instinctive.  A  Tépoque  pélasgiquo, 
ccupation  continuelle  était  la  crainte  des  orages,  car 
ait  pas  la  ressource  de  faire  venir  du  blé  de  l'étranger, 
is  nerveux,  les  femmes  surtout,  sont  très  sensibles  aux 
ces  de  Tatmosphère:  on  les  consultait  comme  nous 
ions  un  baromètre.  Une  longue  expérience  pouvait 
5r  à  des  dispositions  organiques  spéciales.  Il  y  avait 
3mme  aujourd'hui  dans  toutes  les  campagnes  de  vieux 
B  qui  prédisaient  les  changements  du  temps.  Si  leurs 
ions  s'étaient  réalisées,  on  les  interrogeait  sur  autre 
et  ils  répondaient  avec  assurance,  car  les  vieillards  se 
infaillibles.  Mais  les  questions  d'agriculture  se  présen- 
)ien  plus  souvent  que  les  autres,  et  c'est  là-dessus  que 
ssait  la  réputation  des  devins.  La  foi  aux  présages  ré- 
un  besoin  si  naturel  qu'il  n'est  pas  nécessaire  d'attri- 
succès  des  oracles  à  la  superstition  et  à  la  fourberie. 
[)mprendre  les  mœurs  des  populations  primitives,  rap- 
nous  ce  qui  se  passe  dans  nos  campagnes^  pensons  au 
ies  almanachs  prophétiques,  et  nous  pardonnerons  auT 
i  de  n'avoir  pas  attendu  les  progrès  tardifs  de  la  Météo- 
.  Peu  à  peu,  les  tribus  agricoles  devinrent  des  sociétés 
les,  mais  le  pli  était  pris,  l'habitude  d'interroger  les 
lait  dans  les  mœurs,  on  ne  pouvait  supposer  qu'ils  s'in- 
ient  moins  à  une  expédition  militaire  ou  à  la  fondation 
olonie  qu'à  lavenir  d'une  récolte,  et  on  ne  faisait  rien 
j  consulter. 

icle  de  Delphes.  —  Les  procédés  de  divination  ne 
nt  plus  être  les  mêmes,  puisque  les  besoins  étaient 
ts.  Tant  qu'on  n'avait  eu  que  des  intérêts  agricoles,  on 
terrogé  Zeus,  c'est-à-dire  observé  l'atmosphère,  et  ces 
tions,  bien  imparfaites  sans  doute,  pouvaient  cepen- 
roir  un  caractère  scientifique.  Mais  quand  il  s'agit 
ts  politiques,  comme  le  succès  d'une  guerre,  l'établis- 
d'une  législation  ou  d'une  colonie,  la  conciliation  de 


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.E  DE  DELPUËS.  165 

lions  rivales,  ]a  Mantique,  au  lieu 
d'ôlre  une  science,  devinl  un  don  parliculier  des  Dieux,  un 
état  mystérieux  de  Tesprit  dominé  par  une  puissance  supé- 
rieure. La  faculté  de  divination,  que  Thomme  ne  possède  pas 
dans  l'état  normal,  on  croyait  pouvoir  la  développer  par  des 
moyens  artiûciels,  analogues  à  ceux  qui  produisent  l'ivresse. 
On  avait  remarqué  les  propriétés  médicales  de  certaines  eaux  ; 
d'autres,  en  agissant  sur  le  système  nerveux,  produisaient  une 
sorte  de  délire.  Sur  plusieurs  points  du  sol  de  la  Grèce,  sou- 
vent agité  par  des  révolutions  géologiques,  s*ouvraient  des 
gouffres  et  de.s  cavernes  d'où  sortaient  des  émanations  agis- 
sant fortement  sur  le  cerveau.  Selon  Justin,  il  y  avait  sur  le 
Parnasse,  au  milieu  d'une  petite  plaine  située  dans  une  anfrac- 
tuosité  de  rocher,  un  trou  profond  d'où  s^échappait  un  souffle 
froid,  communiquant  à  ceux  qui  s'en  approchaient  un  délire 
prophétique.   D'après   une    tradition   rapportée  par  Diodore, 
c'étaient  des  chèvres  qui  avaient  fait  découvrir  ce  dégagement 
de  gaz.  Le  berger  qui  les  conduisait,  étonné  de  leurs  bonds 
désordonnés  et  de  leurs  bêlements  étranges,  s'approcha  pour 
en  chercher  la  cause.  11  fut  pris  de  vertige  et  se  mit  à  prédire 
Tavenir.  Le  bruit  s'en  étant  répandu,  on  reconnut  qu'il  y  avait 
là  un  oracle  de  la  terre.  Dans  le  commencement,  ajoute  Dio- 
dore, chacun  le  consultait  pour  son  compte  ;  mais  plusieurs 
personnes,  sous  l'influence  du  délire  qui  les  agitait,  se  laissè- 
rent tomber  dans  le  goufl're  et  ne  reparurent  plus.  Pour  éviter 
ce  danger,  les  habitants  du  pays  placèrent  un  trépied  au-des- 
sus de  Touverture  et  chargèrent  une  femme  de  recevoir  les 
inspirations  de  la  Terre  et  de  les  transmettre  aux  consultants. 
La  réputation  qu'avait  eue  l'oracle  de  Dodone  aux  époques 
primitives,  passa  dans  la  période  historique  à  l'oracle  de  Del- 
phes. Déjà  dans  Homère  il  est  question  du  «  seuil  de  pierre  de 
l'archer  Apollon  dans  la  rocheuse  Pytho  ».  L'hymne  homéri- 
que à  Apollon  attribue  à  une  colonie  de  Cretois  l'établissement 
du  culte  de  ce  Dieu  à  Delphes.  Apollon  prit  possession  de  l'o- 
racle sans  toutefois  en  déposséder  la  Terre,  car  Plutarque,  en 
visitant  le  temple  de  Delphes,  parle  du  sanctuaire  de  la  Terre, 
et  lorsqu^l  veut  expliquer  pourquoi  l'oracle  est  commun  à  la 
Terre  et  à  Apollon,  il  dit  que  l'exhalaison  prophétique  de  la 


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L'ORACLE  DE   DELPHES. 

son  caractère  solaire  qu'Apollon  est  le  Di 
leil  dissipe  toutes  les  ombres  ;  c'est  l'œil  d 


Le  trépied  de  Delphes.  ApoUoo  tuant  Pylbo.  Au  revers,  A 
80D  arc  et  ses  flèches  près  lie  lui  (monnaie  > 


Apollou  reprend  le  trépieJ  enlevé  par  Héraclès  {3« 


Pierre  gravée. 


Monnaie  di 


il  éclaire  devant  lui,  \l  prévoit,  Ai^xyWon  étal 
teur  des  Muses  ;  on  attribuait  l'invention  ( 


L^.-^.- 


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CARAGTÉllË  DES  ORACLES. 

pythie  nommée  Phèmonoè.  Quand  la  langue  rhythmée 
ivenue  une  langue  savante,  il  y  eut  des  poètes  attachés 
nple  pour  mettre  en  vers  les  réponses  de  la  pythie.  On 
dait  l'inspiration  poétique  et  Tinspiralion  prophétique 
le  des  faits  de  môme  nature.  Quand  on  parle  aujourd'hui 
xtase  des  poètes,  ce  n'est  plus  qu*une  métaphore  usée  : 
îsie  est  une  langue  morte  ;  si  on  fait  encore  des  vers, 
3st  plus  qu*à  tête  reposée,  en  pesant  les  syllabes.  Mais 
les  Grecs,  Teitthousiasme  poétique  n'était  pas  un  mot 
le  sens  ;  c'était  un  état  exceptionnel  de  Tesprit  qui  aidait 
iprendre  l'état  plus  mystérieux,  mais  analogue,  de  la  py- 
ur  son  trépied  :  elle  ne  se  possédait  plus,  elle  était  pos- 

par  le  Dieu.  Selon  Plutarque,  on  choisissait  pour  pythies 
îmmes  simples  et  ignorantes,  plus  aptes  par  cela  même 
ir  sans  résistance  l'influence  divine.  Les  réponses  de  la 
s  étaient  eu  général  des  sentences  concises,  d'une  forme 
latique  et  d'une  explication  difficile.  On  a  même  vu  dans 
nom  de  Loxiès,  donné  à  Apollon,  une  allusion  à  l'obs- 
I  des  oracles,  quoique  cette  épitbète  rappelle  simplement 
rche  oblique  du  soleil. 

:*actére  moral  des  oracles.  —  Les  auteurs  anciens 
rdeot  pour  attester  l'influence  morale  des  oracles.  C'est 
le  de  Dodone  qui  avait  dit  :  a  Respecte  les  suppliants,  car 
it  sacrés  et  purs.  »  Interrogée  une  fois  sur  le  plus  heu- 
des  hommes,  la  pythie  nomma  Phèmios  qui  venait  de 
ir  pour  sa  patrie.  A  une  question  semblable  adressée 
ygès,  roi  de  Lydie,  le  Dieu  répondit  en  nommant  Aglaos 
ophis,  un  vieillard  qui  cultivait  un  petit  champ  en  Arca- 
jlien  raconte  l'histoire  de  trois  jeunes  gens  qui  avaient 
laqués  par  des  brigands  en  venant  consulter  l'oracle  de 
es  ;  l'un  s'était  sauvé,  l'autre  avait  tué  le  troisième  com- 
n  en  voulant  le  défendre.  La  pythie  répondit  au  premier: 
is  laissé  mourir  ton  ami  sans  le  secourir  ;  je  ne  te  ré- 
ai  pas  :  sors  de  mon  temple.  »  Et  au  second  qui  la  con- 
l  à  son  tour  :  «  Tu  as  tué  ton  ami  en  le  défendant,  mais 
g  ne  t'a  pas  souillé  :  tes  mains  sont  plus  pures  qu'aupa- 
l.  »  Selon  le  même  auteur,  les  Sybarites  ayant  tué  un 
cur  près  de  l'autel  d'tièrè,  une  fontaine  de  sang  avait 


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CARACTÈRE   DES  ORACLES. 

jailli  dans  le  temple.  Effrayés  de  ce  prodige, 
voyèrent  consulter  l'oracle  de  Delphes  qui 


L'Apollon  sauroctone  du 
LouTre,  imitation  d'une 
«tatue  de  Praxitèle. 


Apollon  Dieu  de  la  lumière 
(Musée  de  Florence). 


Apollon  prophète,  les  pieds 
sur  rOmphalos  (Musée  de 
Naples). 


Tète  d'ApiUon  de  la 
galerie  Pourtalès. 


Ycngeance  des  Dieux  sur  eux  et  sur  leurs  enfc 
L.  M.  —  HisT.  DES  Grecs. 


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LES  AMPUICTIONIES. 

inspiraient  et  la  pythie  qui  rendait  les  oracles,  et  ceu 
recueillaient,  et  le  démagogue  qui  les  interprétait,  et  1 
tout  entier  qui  y  trouvait  toujours  un  sens  conforme  i 
rôts  de  la  patrie.  Lors  de  la  seconde  guerre  médique, 
tocle  donna  un  sens  raisonnable  à  un  oracle  ininti 
les  Athéniens  adoptèrent  son  explication,  et  Tindépeni 
la  Grèce  fut  sauvée. 

Les  Amphictionies.  —  Le  sanctuaire  de  Delpl 
placé  sous  la  protection  collective  de  plusieurs  peuf 
sous  le  nom  d'Amphiclions  ,  c'est-à-dire  circonvoisi 
maient  une  fédération  plutôt  religieuse  que  politi 
haute  antiquité  de  l'alliance  amphiclionique  est  attc 
la  tradition  qui  faisait  de  son  prétendu  fondateur  Am] 
un  fils  de  Deucalion  et  un  frère  d*Hellen,  et  aussi  par  I 
des  douze  tribus  composant  la  ligue,  dont  plusieurs 
perdu  toute  importance  à  Tépoque  historique.  Ces  r 
rient  selon  les  auteurs;  la  liste  la  plus  authentique  r 
les  Boiotes,  les  Ioniens,  les  Doriens,  les  Perrhaibes, 
gnètes,  les  Locriens,  les  Ainianes  ou  Oitaiens,  les  Ph 
Achaiens  du  Nord,  les  Phokiens,  les  Maliens  ou  Mél 
Dolopes,  qui  paraissent  avoir  été  remplacés  par  les  D< 
et  enfin  les  Thessaliens,  admis  dans  la  ligue  après  ! 
blissement  en  Thessalie,  et  peut-être  en  remplacei 
quelque  autre  peuple.  Les  dépuiés  se  réunissaient  chi 
tomne  aux  Thermopyles,  dans  un  temple  de  Dèmèt 
d'Anthèla,  et  chaque  printemps  à  Delphes.  L'objet  ] 
de  l'alliance  était  de  protéger  contre  toute  tentative  i 
le  temple  d'Apollon  et  les  trésors  qu'il  renfermait.  Le 
dérés  s'engageaient  en  outre  par  serment  à  ne  jamais 
une  ville  amphiclionique  et  à  ne  pas  la  priver  d'eau  n 
lemps  de  guerre.  Chacune  des  tribus  associées  disp 
deux  voix,  et  celte  rèj^le  ne  fut  pas  changée,  môme  q 
Doriens  se  furent  emparés  des  deux  tiers  du  Péloponè 
Sparte  devint  la  ville  la  plus  puissante  de  la  Grèce. 

11  parait  avoir  existé,  dans  la  plus  ancienne  période 
loire  grecque,  un  assez  grand  nombre  d'associations  de  < 
toujours  fondées  sur  des  rapports  de  voisinage  et  sur  h 
palion  à  certaines  fôtes  religieuses  dans  un  temple  c 


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LES  AMPHIGTIONIES. 

amphictionîe  qui  tenait  ses  assemblées 
)seîdon  à  Calaurie  et  qui  comprenait  les 


1 


nëter  (peinture  d'HercuIaDum). 


—  D'un  c6té  la  télé  de  Dëmèter,  protectrice  des  Ther- 
on,  accoudé  sur  une  lyre  et  tenant  un  laurier,  est  assis  sur 
mbril  de  la  terre). 


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LES  JEUX  SACRÉS.  173 

lermione,  et  de  Nauplie  en  Ârgolide,  l'ile 
Laconie,  Orchomène  de  Boiotie  et  Athè- 
i  fut  remplacée  par  Sparte  et  Nauplie  par 
de  ramphictionie  achaienne  se  réunis- 
sction  de  Dèmèter  Panachaia,  ceux  de 
s  sous  celle  d'Apollon.  Ces  ligues  par- 
autres  qu'on  pourrait  citer,  avaient  un 
ent  religieux  ;  elles  ne  servirent  jamais  à 
[ue,  pas  même  une  alliance  entre  les  peu- 
n  faisaient  partie  ;  elles  ne  les  empêchaient 
erre.  L'amphictionie  de  Delphes,  la  seule 
importance,  est  bien  loin  cependant  de 
onseil  général  de  la  Grèce  que  lui  donne 
seulement  elle  a  joué  un  rôle  dans  This- 

été  funeste.  Du  temps  de  Solon,  les  Am- 
[a  première  guerre  sacrée,  terminée  au 

la  destruction  de  Kirrha.  Environ  deux 
tard,  ils  provoquent  une  nouvelle  guerre 
lokiens,  et,  en  appelant  l'intervention  de 
L'asservissement  de  la  Grèce  à  la  monar- 

c  sacrés.  —  Les  jeux  sacrés,  et  en  parti- 
iqueSj  les  plus  célèbres  de  tous,  créaient, 
mies,  un  lien  religieux  plutôt  que  politique, 
le  les  amphictionies  constituaient  des  fé- 
es, mais  restreintes  à  quelques  tribus  ou  à 
['ailleurs  fictives  en  réahté  et  inefficaces 
ux  sacrés  n'établissaient  que  des  trêves 
niverselles.  C'était,  avec  la  langue,  le  seul 
;  tous  les  peuples  grecs  les  uns  des  autres 
ement  des  étrangers.  Les  Grecs  n'ont  ja- 
tution  nationale.  Cette  institution  remonte 
js  lointaines  de  leur  histoire,  et  on  en 
l'âge  héroïque.  L'avant-dernier  chant  de 
à  la  description  des  jeux  funèbres  céllé- 
te  Patroclos,  et  le  poète  rappelle  à  celte 
nérailles  fameuses  de  béros,  OEdipe,  Ama- 
con lient  un  magniCque  tableau  de  celles 

10. 


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nous  recueillîmes  tes  os  blancs,  avec  du  vin 
el  tu  mère  donna  une  urne  d'or  à  deux  ans 
c'était  un  don  de  Dionysos  el  un  ouvrage  du  U 
C'est  là  que  sont  renfermés  tes  os  blancs,  ill 
ceux  de  Patroclos,  (ils  de  Ménoilios,  et  sépa 
lilochos,  que  tu  estimais  le  plus  parmi  tous 
gnons,  depuis  la  mort  de  Palroclos.  Et  e 
l'armée  sacrée  des  Argeiens  guerriers,  noi 
grande  et  glorieuse  tombe,  près  du  large 
qu'elle  fût  aperçue  en  mer  par  les  hommes 
nant  et  ceux  qui  naîtront  dans  l'avenir.  Et  1 
mandé  aux  Dieux  des  prix  magnifiques,  les 
semblée  aux  plus  braves  des  Achaiens.  Je  m 
aux  funérailles  de  bien  des  héros,  quand  les 
lent  leurs  ceintures  et  concourent  pour  d 
d'un  roi;  mais  jamais  je  n'ai  été  saisi  d'à 
devant  les  prix  magnifiques  que  proposa  si 
aux  pieds  d'argent,  car  tu  étais  bien  cher 
môme  après  ta  mort,  ton  nom  n'a  pas  pé 
Achille,  ta  grande  gloire  sera  célébrée  parm 
Ces  chants  des  Muses  en  l'honneur  d'Ac 
concours  de  chant  qui  fut  ouvert  aux  fur 
damas  et  auquel  Hésiode  fuit  allusion  dans  le 
U  musique  et  la  poésie  contribuaient  auss 
elles  exercices  du  corps  à  ces  cérémonies  n 
parle  du  trépied  qui  fut  le  prix  de  la  victoire 
aux  Muses  de  l'Hélicon.  Une  légende  très 
Homère  pour  concurrent  à  Hésiode  dans  cei 
mais  Hésiode  ne  nomme  pas  ses  rivaux.  E 
qui  lui  est  attribué,  il  dit  qu'Homère  et  li 
hymnes  en  l'honneur  d'Apollon  aux  fêtes  d 
homérique  à  Apollon  parle  de  ces  fêtes  cél 
»Jiens,  et  des  concours  de  pugilat,  de  dans 
les  accompagnaient.  Il  y  a  là  en  germe  tout 
ïes  fêtes  religieuses  aux  époques  suivante 
formes  de  l'art,  la  poésie,  la  musique,  la  { 
danse,  caractérisent  dès  l'origine  le  culte  de 
des  morts.  L'oraison  funèbre  môme,  qui  5 


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'f^^j\^- 


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LES  OLYMPIADES.  177 

des  gloires  de  la  Grèce,  a  son  modèle  dans  les  discours  pro- 
noncés autour  du  cadavre  d'Hector  dans  la  maison  de  Priamos. 
Antiquité  des  Jeux.  Les  Olympiades.  —  Le  culte  qui 
convenait  aux  Dieux  de  la  Grèce,  conçus  sous  les  attributs  de 
l'homme,  c'était  l'expansion  de  toutes  les  facultés,  le  dévelop- 
pement parallèle  du  corps  et  de  l'esprit.  Par  une  juste  pondé- 
ration de  ses  énergies,  l'homme  réalise  en  lui  son  idéal,  il 
imite  les  Dieux,  car  il  établit  l'ordre  en  lui-môme  comme  ils 
l'ont  établi  dans  le  monde.  Chacun  des  exercices  de  l'esprit 
ci  du  corps  a  un  Dieu  pour  modèle  :  Poséidon,  Héraclès  et 
les  Dioscoures  enseignent  l'équilation,  la  lutte,  la  course  et  le 
pugilat  ;  Hermès  Enagonios,  père  de  Palaistra,  préside  aux 
gymnases,  et  le  chœur  des  Muses,  conduit  par  Apollon,  règle 
les  danses  religieuses  et  modère  par  la  mélodie  les  mouve- 
ments violents  de  l'âme.  On  rapportait  l'institution  des  jeux 
Olympiques  à  Héraclès  ou  à  Pélops  ;  on  disait  même  que  Zeus 
avait  lutté  à  Olympie  avec  Cronos  pour  l'empire  du  monde; 
Apollon  avait  institué  les  jeux  Pythiques,  Poséidon  ou  Thèseus 
les  jeux  Islhmiques,  Héraclès  les  jeux  Néméens.  Ces  légendes 
prouvent  la  haute  antiquité  des  jeux  sacrés,  qui  ne  firent  que 
transformer  les  institutions  régulières  des  fêtes  célébrées  de 
temps  immémorial.  Ces  fêtes,  purement  locales  à  l'origine, 
ne  se  distinguaient  pas  d'une  foule  d'autres  qui  n'ont  pas 
atteint  la  même  célébrité.   Les  jeux  Olympiques,  les   pre- 
miers en  date  et  en  importance,  ne  devinrent  périodiques 
qu'après  l'établissement  des  Aitoliens  et  des  Doriens  dans  le 
Péloponnèse.  Les  Ëleiens  racontaient  que  leur  roi  Iphitos, 
d*accord  avec  Lycurgue,  législateur  de  Sparte,  et  sous  la  sanc- 
tion de  l'oracle  de  Delphes,  avait  réglé  la  célébration  des  jeux 
olyfnpiqnes  et  proclamé  la  trêve  sacrée  pour  permettre  à  tous 
les  Grecs  d'assister  à  la  fête,  qui  depuis  lors  revint  tous  les 
quatre  ans.  Ces  périodes  de  quatre  ans  se  nommaient  Olym- 
piades. Au  retour  de  chaque  année  olympique,  ou  cinquième 
année,  les  Eleiens  inscrivaient  le  nom  de    celui  qui  avait 
gagné  le  prix  de  la  course,  et  plus  tard,  la  liste  des  vainqueurs 
fournit  une  base  fixe  à  la  chronologie.  L'ère  des  Olympiades 
commence  en  776  avant  l'ère  chrétienne.  C'est  la  première 
date  certaine  de  l'histoire  grecque. 


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\SriQUE   ET   LA  SCULPTURE. 

_  ^^.  ;  la  souplesse  et  la  force  des  me 
La  lutte  demande  la  vigueur  des  muscles  de  la  poitrim 
bras,  et  une  grande  solidité  des  extrémités  inférieure! 
le  pugilat,  il  faut  la  force  d'impulsion  pour  produire  les 
la  force  de  résistance  pour  les  supporter,  la  souplesse  i 
diriger  et  les  éluder. 
En  élevant  la  gymnastique  à  la  hauteur  d'une  institu 


Discobole  (statue  du  Louvre,  imitée  de  Naukydès). 

Ilgieuse  et  sociale,  les  jeux  sacrés  préparaient  celte  ap 
de  la  beauté  qui  fut  l'œuvre  de  la  sculpture.  Rien  ne  ce 
plus  aux  progrès  rapides  de  cet  art  que  l'habitude  qui 
de  consacrer  les  statues  des  athlètes  vainqueurs  à  C 
Quand  un  athlète  avait  remporté  trois  victoires,  la  stai 
consacrait  devait  être  son  portrait,  afin  que  les  maître 
lestres  et  les  jeunes  athlètes  pussent  comprendre  di 
sens  ils  devaient  diriger  leurs  elTorts.  La  nécessité  di 
L.  M.  —  HiST.  DES  Grecs.  i\ 


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r^ 


IMPORTANCE   DES  JEUX  SACRÉS. 


courtisans  solennels,  les  sculpteurs  grecs  étudiai 
tères  multiples  de  la  beauté,  et  ils  croyaient  fai 
religieuse  en  sculptant  des  athlètes. 

Une  interprétation  savante,  raisonnée,  mctho 
mes  du  corps  humain,  une  application  rigourei 
de  la  géométrie  dans  les  représentations  graphiq 
bases  de  l'enseignement  du  dessin  dans  les  éco 
d*Aigine,  d'Argos,  de  Sikyone.  Les  artistes  avai 
un  public  parfaitement  compétent, puisqu'il 
d*athlètes  aspirant  à  posséder  les  formes  qu( 
avait  voulu  représenter.  L'art  était  astreinte  Tii 
de  la  nature,  mais  d'une  nature  de  choix,  et,  par 
la  recherche  constante  de  la  perfection  des  form 
que  Polyclète,  le  plus  illustre  représentant  de  la 
ricnnc,  fit  son  Doryphore,  ou  porte-lance,  pour  se 
c'est-à-dire  do  règle,  aux  artistes  qui  voudraiei 
proportions  parfaites  du  corps  humain. 

Célébrité  et  importance  des  jeux  sacré 
Pythiques  étaient  célébrés  tous  les  quatre  ans  e 
la  victoire  d'Apollon  sur  Pytho.  Les  Delphiens  et 
Ainpbictyons  en  avaient  la  direction  ;  celle  des  je 
appartenait  aux  Corinthiens,  celle  des  jeux  Ném 
taiils  de  Cléonai  et  plus  tard  à  ceux  d'Argos.  Le 
ques  et  Néméens  se  célébraient  tous  les  deux 
cours  de  musique  et  de  poésie,  qui  tenaient  le 
aux  jeux  Pythiques,  étaient  admis  également 
Islhmiques  et  Néméens,  avec  les  exercices  gyr 
courses  de  char.  Les  prix  consistaient,  comme 
une  couronne  de  feuillage.  Les  conditions  pour 
concours  étaient  les  mêmes,  et  il  y  avait  aussi  ur 
L'intérêt  qui  s'attachait  à  ces  fêtes,  et  le  nombr 
des  spectateurs  y  attirait  des  marchands  de  toi 
môme  qu'en  Europe,  au  moyen  âge,  les  foire 
sance  à  l'occasion  des  solennités  religieuses.  Le 
salent  représenter  par  des  députations  qu'on  i 
ries.  L'usage  s'introduisit  de  réciter  des  p 
l'assemblée;  on  y  chantait  des  hymnes,  par 
d'Archiloque  en  l'honneur  d'Héraclès.  Les  vai 


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1 


184  IMPOHTANCS   DES  JEUX  SACRÉS. 

qu'ils  étaient  riches,  chargeaient  un  poète  fameux  de  chanter 


B 


leurs  louanges  et  celles  de  leur  famille  et  de  leur  patrie.  Les 

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MIGUATIONS  ET  COLONIES.  «8o 

poésies  de  Pindare  qui  nous  sont  parvenues  sont  des  odes  en 
rbonneur  des  vainqueurs.  Simonide  avait  aussi  composé  des 
odes  triomphales,  Euripide  avait  chanté  une  victoire  d*Alki- 
biade.  Les  artistes,  les  savants,  les  orateurs  profitaient  de  ces 
solennités  pour  faire  connaître  leurs  œuvres;  Hérodote  y  lut, 
<lit-on,  sa  magnifique  histoire;  le  peintre  Aétion  y  présenta  un 
de  ses  tableaux,  Oinopidès  de  Chios  ses  tables  astronomiques. 
C'était  aussi,  pour  les  villes  ou  les  peuples,  une  occasion  de 
promulguer  des  traités  d'alliance.  C*est  aux  jeux  Isthmiqucs 
que  Flamininus,  après  sa  victoire  sur  Philippe,  roi  de  Macé- 
doine, proclama  l'affranchissement  des  Grecs  au  nom  du  Peu- 
ple romain. 

L'institution  des  jeux  sacrés,  étant  plutôt  religieuse  que  poli- 
tique, put  survivre  àTIndépendance  de  la  Grèce,  et  ne  disparut 
que  dans  le  grand  naufrage  de  THelléiiisme  et  de  la  civilisation. 
Les  jeux  Olympiques  avaient  duré  près  de  douze  siècles. 
Théodose  les  supprima  en  môme  temps  qu'il  ferma  les  temples 
et  fit  détruire  les  statues  des  anciens  Dieux. 


CHAPITRE  VII 

MIGRATIONS  ET  COLONIES 

Passage  de  la  Légende  à  THistoire.  —  La  conquête  Thessalienne.  —  Les 
Aioliens  en  Boiotie.  —  Invasion  des  Aitoliens  et  des  Doriens.  — 
Soumission  de  l'Étis,  de  la  Messénie  et  de  la  Laconie.  —  Conquête 
d'Argos,  d'Épidaure  et  de  Troizen.  —  Ck)nquête  de  Sikyone,  do 
Corinthe,  de  Mégare  et  d'Aigine.  —  Migration  aiolienne.  —  Les 
réfugiés  en  Attique.  Mélanthos,  Codros.  —  Migration  des  Ioniens.  — 
Colonies  ioniennes.  —  Établissement  des  Doriens  en  Messénie  et  en 
Laconie.  —  Colonies  dorieunes  :  Thèra,  Mèlos,  la  Crète.  —  Les  Doriens 
à  Rhodes  et  à  Cos.  La  Dorls.  —  Chronologie  mythique.  —  Les  poèmes 
d'Bomère  et  d'Hésiode. 

Passage  de  la  légende  à  Thistoire.  —  L'existence  d'une 
civilisalion  préhistorique  en  Grèce  est  attestée  par  les  cons- 
tructions kyclopéennes ,  par  les  objets  d'art  trouvés  dans  les 


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186  LA  CONQUÉTli:  TllKSSALlENNE. 

fouilles  et  par  les  descriptions  contenues  dans  les  poènnes  d'Ho- 
mère. Mais  les  événements  cl  les  personnages  qui  remplissent 
celte  période  appartiennent  à  la  légende.  Entre  l'épopée  et 
l'histoire,  il  y  a  un  intermède  obscur,  long  et  à  peu  près  vide. 
Quand  la  toile  se  relève,  ce  ne  sont  plus  les  mômes  acteurs. 
Les  Danaens  ont  disparu,  ou  ils  ont  changé  de  nom  et  sont  de- 
venus les  Hellènes.  Les  Achaiens  sont  rentrés  dans  la  coulisse 
et  ne  reparaîtront  qu'au  dernier  acte.  La  scène  est  occupée 
par  deux  grands  peuples  rivaux,  les  Doriens  et  les  Ioniens;  les 
autres,  groupés  sous  le  nom  d'Aioliens,  fornfiant  le  fond  du 
tableau.  Pour  l'unité  de  Thisloire  grecque,  il  faudrait  un  pont 
entre  Homère  et  Hérodote.  Mais  Homère  invente,  Hérodote  ra- 
conte, et  on  ne  peut  rattacher  la  poésie  à  la  réalité  qu'au  moyen 
d'interprétations  et  d'inductions  plus  ou  moins  arbitraires. 
Thucydide  trace  au  commencement  de  son  ouvrage  une  peinture 
de  l'existence  à  demi  nomade  des  anciennes  populations  de  la 
Grèce.  11  fait  remarquer  que  les  terres  les  plus  fertiles,  comme 
la  Thessalie,  la  Boiolie  et  les  vallées  du  Péloponèse  étaient  ex- 
posées aux  invasions  les  plus  fréquentes.  Ces  invasions  par- 
taient généralement  des  pays  des  montagnes,  qui  n'étaient 
propres  qu'à  la  vie  pastorale  et  ne  pouvaient  nourrir  une  po- 
pulation trop  nombreuse.  Ce  tableau  doit  être  vrai  dans  son 
ensemble;  il  a  dû  se  produire,  avant  la  période  historique,  une 
suite  de  déplacements  et  de  révolutions,  mais  le  détail  nous 
échappe,  nous  ne  pouvons  apprécier  que  les  résultats.  L'ouvrage 
d'Éphore,  qui  racontait  l'invasion  dorienne,ne  nous  est  pas  par- 
venu. Nous  n'avons  pour  nous  guider  que  de  rares  indications 
éparses  dans  la  Géographie  de  Strabon  et  dans  le  Voyage  de 
Pausanias.  Ces  récits  très  courts  et  souvent  contradictoires  rat- 
tachent les  migrations  de  peuples  et  les  fondations  de  villes  aux 
aventures  des  héros  de  l'épopée  ou  de  leurs  successeurs  im- 
médiats. On  sent  que  cette  transition  est  artificielle  ;  c'est  la 
légende  moins  les  ornements  poétiques  qui  la  faisaient  passer. 
La  conquête  Thessalienne.  —  Les  migrations  de  tribus 
par  lesquelles  s'ouvre  l'histoire  grecque  paraissent  avoir  leur 
point  de  départ  dans  un  échange  de  population  entre  les  deux 
versants  du  Pindos.  D'après  le  poème  des  RetourSy  Néoptolé- 
mos  fils  d'Achille,  au  lieu  de  revenir,  après  la  guerre  de  Troie, 


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LA  CONQUÊTE  THESSALIENNE. 

dans  la  Phliolis  achaienne,  où  était  le  royaum 
s'établit  en  Épire  avec  ses  compagnons,  d*aprè 
Thétis.  Réciproquement,  c'est  de  la  Thesprotis 
sortaient,  selon  Hérodote,  les  Thessaliens  qui 
conquérants  dans  le  pays  appelé  autrefois  Haim< 
d'eux  le  nom  de  Thessalie.  Il  semble  naturel  d 
relation  entre  ces  deux  événements,  quoiqu'on 
Yoir  lequel  a  été  la  cause  ou  l'occasion  de  l'aut 
nomme  pas  les  Thessaliens,  mais  dans  le  catalof 
Anliphos  et  Pheidippos,  qui  conduisent  les  soldat 
et  de  Cos,  sont  fils  de  Thessalos,  prince  Hèracléi< 
qu'ils  avaient  été  jetés  par  la  tempête  sur  les  c 
et  avaient  donné  aune  tribu  de  Thesprotes  le  no 
Thessalos.  Il  y  avait  d'autres  légendes  sur  Torigi 
mais  on  s'accordait  à  faire  venir  les  Thessaliei 
protis.  C'était,  dit  Grote,  une  population  à  demi 
rapprochée  des  Macédoniens  ou  des  Épirotes  que 
Hellènes  et  formant  une  sorte  de  chaînon  interi 
les  deux  races.  Leur  habileté  à  dompter  les  ch 
bablement  la  principale  cause  de  leur  succès, 
ôtre  de  là  qu'est  venue  la  fable  des  Kentaures, 
héroïque  les  Grecs  n'avaient  pas  de  véritable 
héros  d'Homère  combattent  toujours  sur  des  chi 
La  conquête  parait  avoir  été  graduelle.  Les  A 
tes,  lesPerrhaibes,  les  Magnètes,  après  avoir  opp( 
une  longue  résistance,  furent  repoussés  dans  les 
lagneuses  et  réduits  à  une  condition  qu'on  a  co 
des  Laconiens  après  la  conquête  dorienne;  cepi 
servèrent  leurs  noms  de  peuples  et  continuèren 
de  la  ligue  amphictionique.  Les  Thessaliens,  de 
tendit  à  tout  le  pays,  s'établirent  principalemen 
qui  formait  la  partie  centrale  et  qui  parait  ré] 
cienne  Hellas  et  au  royaume  d'Achille  ;  le  nom  ( 
disparaît  après  la  conquête  Thessalienne.  Pan 
habitants  du  pays,  les  uns  émigrërent,  les  autre 
à  la  condition  de  serfs,  et  sous  le  nom  de  Pênes 
le  sol  pour  le  compte  des  conquérants  qui  form 
locralie  dispersée  dans  quelques  villes,  Phères 


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488  LES  AlOLlEiNS  EN   BOIOTIE. 

toussa,  Cran  non,  etc.  Sauf  quelques  rares  circonstances  où 
toute  la  contrée  reconnut  Fautorilé  d'un  chef  nommé  Tagos, 
il  n'y  avait  pas  de  lien  politique  entre  les  familles  thessaliennes. 
La  plus  puissante,  celle  des  Aleuades,  rattachait  son  origine  à 
Héraclès,  comme  les  rois  de  Sparte. 

Les  Aioliens  en  Boiotie.  —  Le  contre-coup  de  la  con- 
quête thessalienne  se  fit  sentir  en  Boiotie.  Strabon  nous  dit 
qu'après  la  guerre  des  Épigones,  les  Gadméiens,  chassés  de 
Thébes  par  les  Thraces  et  les  Pélasges,  s'étaient  retirés  dans 
l'Aiolis  et  s'étaient  mêlés  aux  Arnéens  assez  longtemps  pour 
que  l'établissement  commun  prit  le  nom  de  Boiotie;  Strabon 
ajoute  qu'ils  revinrent  dans  leur  ancienne  patrie  à  l'époque  où 
se  préparait  à  Aulis  l'émigration  conduite  en  Asie  par  les  fils 
d'Orestès,  et  qu'ils  annexèrent  à  la  Boiotie  le  territoire  d'Or- 
chomène  occupé  par  les  Minyens.  Les  Pélasges  se  retirèrent  à 
Athènes,  les  Thraces  dans  le  voisinage  du  Parnassos.  Selon  Pau- 
sanias,  les  Boiotes  fondaient  leur  droit  à  faire  partie  de  la  ligue 
Amphictionique  sur  ce  qu'autrefois  ils  avaient  occupé,  sous  le 
nom  d'Aioliens,  une  partie  de  la  Thessalie.  Le  catalogue  de 
l'Iliade^  qui  nous  montre  les  Boiotes  établis  en  Boiotie  à  l'épo- 
que de  la  guerre  de  Troie,  nomme  Arnè  parmi  les  villes  boio- 
tienties  sans  faire  mention  d'une  autre  Arnè  en  Thessalie.  Au 
temps  de  Strabon,  la  position  de  l'Arnè  boiotienne  n*élait  plus 
connue,  on  savait  seulement  qu'elle  se  trouvait  près  du  lac 
Copaïs.  C'est  de  là  que  les  Boiotes  étendirent  peu  à  peu  leur 
domination  sur  toute  la  contrée  à  laquelle  ils  donnèrent  leur 
nom.  Ils  célébraient  en  commun  des  fôtes  appelées  Pamboio- 
ties,  sur  les  bords  de  la  rivière  Coralios,  dans  le  voisinage  du 
temple  d'Alhènè  Itonia.  La  suprématie  que  Thébes  s'attribuait 
sur  les  autres  villes  de  la  Boiotie  ne  fut  pas  acceptée  sans  con- 
testation, surtout  dans  la  région  de  l'Asopos  et  du  Kithairon, 
qui  faisait  autrefois  partie  de  l'Attique  et  qui  avait  probable- 
ment la  môme  population.  Les  Plataiens,  qui  se  vantaient  d'être 
autochthones,  montrèrent  en  toute  occasion  leur  répugnance 
contre  Thébes  et  leurs  sympathies  pour  les  Athéniens. 

Invasion  des  Aitoliens  et  des  Doriens.  —  L'invasion 
des  Aitoliens  et  des  Doriens  dans  le  Péloponnèse  parait  avoir 
été  une  conséquence  de  la  conquête  thessalienne,  mais  tous 


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INVASION  DES  AITOLIENS  ET  DES  DORIENS.  189 

les  auteurs  anciens  qui  parlent  de  celte  invasion  la  rattacher 
aux  légendes  héroïques  et  l'appellent  le  relourdes  Hèracléides 
Après  la  mort  d'Héraclès,  ses  enfants  persécutés  ou  chassé 
par  Eurystheus  trouvent  un  asile  chez  les  Athéniens.  Eurys 
theus  envahit  TAltique,  mais  il  est  tué  avec  tous  ses  fils  dan 
une  bataille,  et  les  Mykèniens,  par  crainte  des  Hèracléideî 
donnent  la  royauté  à  Alreus,fils  de  Pélops.  Les  Hèracléides,  de 
venus  seuls  représentants  de  la  race  de  Perseus,  rassembler 
une  armée  pour  rentrer  en  possession  du  royaume;  mais 
rentrée  de  lislhme,  ils  rencontrent  les  forces  réunies  de 
Ioniens,  des  Arcadiens  et  des  Achaiens.  Hyllos  fils  d'flèraclè 
propose  de  décider  la  querelle  par  un  combat  singulier  entr 
lui  et  un  des  chefs  de  Tarmée  péloponnésienne.  Ëchémos  d 
Tégéa,  qui  était  allié  aux  Pélopides  par  sa  femme,  sœur  d 
Clytaimnestra,  accepte  le  défi  et  lue  Hyllos.  Suivant  une  con 
ventiou  faite  avant  le  combat,  les  Hèracléides  se  retirent  pou 
cent  ans,  dit  Hérodote,  pour  cinquante  ans,  dit  Diodore.  Ils  son 
aceueillis  par  les  Doriens  en  souvenir  de  l'appui  qu'Hèraclè 
avait  prêté  autrefois  à  leur  roi  Aigimios,  fils  de  Dôros,  dan 
une  guerre  contre  les  Lapithes.  La  trêve  étant  expirée,  le 
Hèracléides  unis  aux  Doriens  se  préparent  à  envahir  le  Pélc 
ponnèse.  L'oracle  de  Delphes  leur  promet  le  succès  dans  cetl 
entreprise  s'ils  prennent  un  guide  à  trois  yeux.  Ils  renconlren 
l'Aitolien  Oxylos  monté  sur  un  mulet.  Le  mulet  avait  deu 
yeux,  mais  l'homme  était  borgne  :  ils  reconnaissent  en  lui  1 
guide  indiqué  par  l'oracle.  Oxylos  était  d'ailleurs  leur  parent 
car  il  descendait  d'Oineus,  père  de  Dèiarieira.  Il  avait  sur  l'Éli 
des  droits  analogues  à  ceux  d'Héraclès  sur  le  Péloponnèse.  Un 
alliance  est  conclue,  et  tandis  que  les  Achaiens  et  leur  roi  Ti 
saménos,  fils  d'Oreslès,  rassemblent  leurs  forces  à  l'entrée  d 
l'isthme,  les  Aitoliens  et  les  Doriens,  commandés  par  Oxjlo 
et  les  Hèracléides,  traversent  le  golfe  à  son  point  le  plus  étroit 
sur  des  vaisseaux  fabriqués  à  Naupacle.  Oxylos  est  mis  en  pos 
session  de  l'Élis,  les  Hèracléides  passent  à  travers  l'Arcadi» 
sans  s'y  établir,  et  après  une  victoire  sur  les  Achaiens,  se  par 
tagentle  royaume  des  Pélopides  par  la  voie  du  sort.  Argo 
échoit  à  Téménos,  l'aîné  des  Hèracléides,  Cresphonlès  ob 
tient  par  ruse  la  Messénie,  et  la  Laconie,  considérée  comm 

11. 


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ARGOS,    ÉPIDAURE, 

TÉlis  :  les  habitants,  de  la  race  des  L 
chement  pour  leurs  rois,  les  fîls  de 
nyens  originaires  d'Iolcos.  Les  Do 
terres.  Trois  chefs  Nèléides,  Mélan 
tos  se  retirèrent  en  Attique  avec  h 
n'offrit  pas  plus  de  résistance.  Les 
attendus  à  être  attaqués  de  ce  côt^ 
ment  étaient  restés  dans  le  pays.  S 
par  Gonon  et  par  Strabon,  un  Sp 
leur  persuada  de  se  retirer  chez 
les  Doriens,  en  récompense  de  c 
ville  d'Amyclai. 

Conquête  d^Argos,  d^Epidau: 
conquête  du  royaume  d'Argos  prés 
Doriens,  avec  leurs  longues  lance 
pouvaient  culbuter  leurs  ennemis 
Tart  des  sièges  leur  était  étranger 
a  attaquer  des  citadelles  comme  c 
v,i  d'Argos.  Leur  tactique  consista 
nage  des  villes  achaiennes  dont  i 
par  d'incessantes  escarmouches.  F 
resse  dorienne  appelée  Téménion, 
était  établi  et  faisait  de  là  des  incu 
La  résistance  des*Achaiens  parait  b 
quête  d'Argos  ne  fut  achevée  vra 
mort  de  Téménos,  car  Pausania 
Téménion.  Tiryns  et  Mykènes  ne 
datent  encore  une  population  acha 
médiques. 

Les  querelles  de  famille  qui  av; 
célèbres  dans  les  légendes  se  reno 
seurs  les  Téménides.  Téménos  ava 
un  Hèracléide  nommé  Deiphonlès 
confiance  qu'à  ses  fils.  Ceux-ci  coi 
tuent  et  mettent  sur  le  trône  Taî 
phontès  entraîne  avec  lui  une  pari 
Épidaure  ;  le  roi  Pilyreus  se  retir< 
familles  ioniennes.  Alors  deux  Tén 


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MIGRATION   AIOLIENNE. 


lauleur  voisine  de  la  ville.  Itfaître  de  Corinthe,  Alètèa 
Mégaris,  qui  jusque-là  avait  fait  partie  de  l'Attiq 
'es  bandes  doriennes,  parties  d'Épidaure,  s*établir 
lie  d'Aigine. 

Migration  aiolienne.  —  Le  déplacement  des  tribi 

8  cherchant  des  demeures  définitives,  le  choc  de  ta 

ilationsrejelées  les  unes  sur  les  autres  devait  s'éte 

!8  de  l'Archipel  et  aux  côtes  voisines.  Ces  mouver 

Dontent  au  delà  des  temps  historiques  ;  un  grand  n< 

olonies  rattachaient  leur  origine  aux  héros  de  la  { 

'roie,  et  les  traditions  nous  représentent  la  migration 

tmnie  une  conséquence  et  un  prolongement  de  ceit 

•es  émigrants  parlent  du  port  d'Aulis  où  s'était  rass( 

lotte  des  Atréides  et  se  dirigent  vers  la  Troade,  con 

L   les  chefs  de  la  race  de  Pélops  qui  revendiquent  le  pay 

^    I   lue  conquête  d'Agamemnon. 

Le  plus  ancien  témoignage  qui  nous  soit  parvenu  si 

ition  se  trouve  dans  Pindare,  mais  il  n'en  parle  qu 

nent,  à  propos  d'une   victoire  néméenne    d'Arista 

énédos,  descendant    du  Spartiate  Peisandros,  «  ( 

i^^    TAmyclai  avec  Oreslès,  conduisant   à  Ténédos  ur 

^    l'Aioliens.  »  Ce  nom  d'Aiolicns,  qui  ne  se  trouve 

^    Bomère,  paraît  signifier  des  hommes  de  diverses  rac 

>arius).  Il  est  probable  que  la  plus  grande  partie  des  ( 

furent  des  Achaiens,  chassés  du  Péloponnèse  par 

lorienne,  mais  il  se  peut  que  le  mouvement  d'émig 

commencé  plus  lot.  Rien  n'empêche  d'admettre  que 

mières  bandes  achaiennes  se  soient  rencontrées  en  Bc 

les  Aioliens  d'Arnè  chassés  par  la  conquête   thessa 

^qu'elles  aient  été  grossies  par  une  partie  des  anciens 

du  pays  et  des  conquérants  Boiotes.  C'est  ainsi  que 

tion  conduite  par  des  chefs  Achaiens  s'appela  boic 

aiolienne.   Celte  émigration  fut  très   longue  à   s'a 

D'après  Strabon,  Oreslès   étant    mort  en  Arcadie 

Penlhilos  se  mit  à  la  tôte  des  émigrants  et  les  con( 

qu'en  Thrace  ;  Archélaos,  fils  de  Pefnthilos^  passa  l'H 

et  Grau»,  fils  d'Archélaos,  s'établit  à  Lesbos.  D'aulrc 

commandées  par  Cleuas  et  MaIao«,  aussi  de  la   ra( 


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MÉLANTIIOS  ET   CODROS. 

memnon,  s'arrêtèrent  longtemps  près  du  monl  Phrî 
passant  ensuite  en  Asie,  fondèrent  la  ville  de  Kymè, 
aussi  Phriconis.  Strabon  rattache  à  Lesbos  et  à  Kymè  1 
dation  des  autres  villes  aioliennes  répandues  dans  la  r^ 
rida  et  dans  l'ancienne  Troade,  qui  porta  depuis 
d'Aiolis. 

Les  réfagiés  en  Attique.  Mélanthos.  Godros. 

Athéniens  se  regardaient  comme  autochthones  et  se  v 

de  n'avoir  jamais  subi  d'invasion  ni  de   conquête  ;  m 

tique,  placée  en  dehors  du  chemin  des  migrations^  avt 

un  asile  aux  fugitifs  du  Nord  et  du  Midi.  Les  Pélasges 

parles  Boiotes  étaient  venus  s'y  réfugier,  et  les  Athée 

avaient  employés  à  la  construction  des  murs  de  TAcro 

leur  donnant  pour  prix  de  ce  travail  les  champs  vc 

1  Hy mette.  Mais  un  jour,  ces  étrangers  insultèrent  de 

filles  qui  allaient  puiser  de  l'eau  aux  Neuf-Fontaines,  ca 

époque,  dit  Hérodote,  il  n'y   avait  pas    d'esclaves  < 

Athéniens,  non  plus  que  chez  les  autres  Grecs.  Les  1 

furent  expulsés  de  l'Attique  et  s'emparèrent  de  l'île  de 

en  chassant  les  Minyens,  qui  se  réfugièrent  en  Laconi 

très  Minyens  établis  à  l'ouest  du  Péloponnèse  et  con 

par  les  fils  de  Nestor  se  retirèrent  en  Attique  après  V 

dorienne,  ainsi  que  les  Ioniens  chassés  de  l'Aigialos 

Achaiens.  Le  chef  d'une  de  ces  bandes  de  fugitifs  f 

pour  roi  par  les  Athéniens.  Ce  choix  s'explique  parui 

lion  qui  n'a  rien  d'invraisemblable.  Les  Boiotes  fai 

guerre  aux  Athéniens  pour  la  possession  d'un  territo 

sur  la  limite  des  deux  peuples.  Le  roi  des  Boiotes, 

Xanthos,  proposait  de   vider  la  querelle  par  un  comb 

lier  avec  Thymoitès,  roi  d'Athènes.  11  y  avait  à  cette 

beaucoup  d'exemples  de  cet  usage  qui,  s'il  durait  enc 

drail  les  guerres  bien  plus  rares.  Thymoitès  refusa  ( 

sa  vie,  mais  Mélanthos,  chef  des  réfugiés  de  Pylos,  voi 

connaître  l'hospitalité  qu'il  avait  reçue,  offrit  de    cor 

sa  place.  Un  stratagème,  d'ailleurs  peu  loyal,  lui  doni 

toire,  et  les  Athéniens,  furieux  de  la  lâcheté  de  leur  ro 

pour  chef  l'étranger  qui  les  avait  délivrés  de  la  guerre 
Son  fils  Godros  lui  succéda  et  se  dévoua  égalem 


I 


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196  MIGRATION   DES  IONIENS. 

Athènes.  Les  Doriens,  maîtres  de  l'Isthme  et  de  la  Mégaris, 
avaient  envahi  TAttique.  La  Pythie  leur  annonça  qu'ils  seraient 
rs  s'ils  épargnaient  la  vie  du  roi  des  Athéniens, 
yant  eu  connaissance  de  cet  oracle  par  un  habitant  de 
pénétra,  déguisé  en  bûcheron,  dans  le  camp  ennemi, 
querelle  à  deux  soldats  et  se  fit  tuer.  Quand  on  ré- 
m  corps,  les  Doriens,  désespérant  de  la  victoire,  se 
t  sans  combat.  Selon  une  tradition  rapportée  par 
s,  quelques-uns  avaient  déjà  pénétré  dans  la  ville 
la  nuit;  se  voyant  abandonnés  des  leurs,  ils  se  réfu- 
ans  l'Aréopage  et  embrassèrent  les  autels  des  Eumé- 
l'on  nommait  les  Graves  Déesses.  Les  Athéniens,  se 
it  de  l'oracle  de  Zeus  Dodonécn,  qui  avait  proclamé  les 
s  sacrés  et  purs,  leur  permirent  de  retourner  sains  et 
is  leur  pays.  11  n'y  a  pas  de  raison  pour  rejeter  cette 
;nde  du  dévouement  de  Codros,  quoiqu'une  telle  vertu 
'oi  soit  bien  extraordinaire.  Les  Athéniens,  n'espérant 
oir  un  second  exemple,  déclarèrent  que  nul  n'était 
succéder  à  Codros,  et  qu'ils  n'auraient  plus  d'autre  roi 

Ltion  des  Ioniens.  —  Une  querelle  entre  les  fils  de 
près  la  mort  de  leur  père  fut  probablement  l'occasion 
ètexte  de  l'abolition  de  la  royauté  à  Athènes.  L'aîné, 
Hait  boiteux,  et  Nèleus,  son  frère  cadet,  prétendait 
it  un  vice  rédhibitoire.  Les  droits  de  Médon  furent 
s  par  l'oracle  de  Delphes,  mais  son  autorité  fut  limitée  : 
1  de  rendre  des  comptes  au  peuple  et  reçut,  au  lieu  du 
'oi,  celui  d'Archonte,  c'est-à-dire  chef  ou  gouverneur; 
ui  fut  attribué  pour  toute  sa  vie.  Nèleus  mécontent 
la  tôte  d'une  nombreuse  troupe  d'émigrants  que  le  sol 
ue  ne  pouvait  nourrir  et  qui  allèrent  chercher  fortune 
les  mers.  Cette  émigration,  la  plus  considérable  qui 
ie  de  la  Grèce,  reçut  le  nom  d'Ionienne,  parce  qu'elle 
)8ait  en  partie  des  fugitifs  du  Péloponnèse;  mais  il  s'y 
ne  foule  d'aventuriers  de  divers  pays  et  de  diverses 
s  Abantes  d'Euboia,  des  Minyens  d'Orchoménos,  des 
ns,  des  Dryopes,  une  troupe  considérable  de  Phokiens, 
ises,  des  Arcadiens  Pélasges,  des  Doriens  d'Épidaure. 


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COLONIES  IONIENNES. 

Les  colons  partirent  par  bandes  successives 
des  fils  de  Codros  ;  quelques-uns  s'arrôlèrer 
des,  peuplées  antérieurement  par  les  Carie 
d'autres  s'établirent  dans  les  îles  de  Chios  e 
la  côte  d'Asie  au  sud  de  l'Aiolis,  entre  Temb 
mos  et  celle  du  Maiandros.  Cetle  région  prit  l 
Colonies  ioniennes.  —  Athènes  fut  con 


Statuette  d'Hisliè. 

métropole  de  toutes  les  villes  ioniennes,  ( 
étaient  partis  d'Athènes,  emportant  avec  eux 
tiè  allumé  au  Prylanée.  Chez  les  Grecs,  h 
consacré  à  la  vierge  Hisliè,  représentait  Tui 
le  Prytanée  était  le  foyer  commun  de  toutes 
niennes.  La  première  troupe,  conduite  par 
ville  de  Milet,  habitée  jusque-là  par  des  Cari 
Hérodote  nous  dit  que  les  colons  n'avaien 
femmes  avec  eux,  et  qu'ils  épousèrent  des 


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COLONIES  lONIENNKS.  190 

admis  pacifiqucmcnl  au  partage  de  la  colonie.  Une  bande  re- 


crulée  dans  toutes  les  villes  d'Ionie  vint  s'établir  à  Erythrai  et 


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200         LES  DORIENS  EN  MESSÉNIE  ET  EN  LACONIE. 

fut  reçue  arec  amitié  par  les  anciens  habitants,  Cretois,  Lykiens 
Cariens  et  Pamphyliens.  A  Clazomène,  la  plus  grande  partie 
des  colons  étaient  des  fugitirs  sortis  de  Cléonai  et  de  Phlious 
après  rinrasion  des  Doriens.  Fhokaia  fut  bâtie  sur  un  terri- 
toire cédé  par  les  Kymaiens  aux  Phokiens  qui  avaient  accom- 
pagné la  migration  ionienne;  mais  la  ville  ne  fut  considérée 
comme  faisant  partie  deTIonie  qu'après  avoir  accepté  des  chefs 
de  la  race  de  Codros,  venus  de  Téos  et  d'Erythrai.  L'ile  de 
Chios  reçut  une  colonie  ionienne  d'Erythrai  située  sur  le  ri- 
vage opposé.  Samos  fut  colonisée  par  des  Ioniens  d*Epidaure 
qui  entrèrent  en  partage  avec  les  anciens  habitants,  de  la  race 
des  Lélèges.  Smyrna,  fondée,  selon  une  tradition,  par  les 
Aioliens,  selon  une  autre  par  les  Éphésiens,  entra  la  dernière 
dans  là  fédération  ionienne.  Celte  fédération  était  plutôt  reli- 
gieuse que  politique,  comme  TAmphictionie  des  Thermopyles. 
Les  douze  villes  d'ionie  avaient  un  temple  commun  consacré  à 
Poséidon,  le  Paniooion,  sur  le  promontoire  de  Mycale,  mais 
elles  étaient  tout  à  fait  indépendantes  les  unes  des  autres  et 
sans  lien  politique. 

Établissement  des  Boriens  en  Messénie  et  en  La- 
conie.  —  Pendant  que  des  émigrés,  venus  principalement  du 
Péloponnèse,  renouvelaient  la  population  de  la  côte  orientale 
de  TArchipel  et  en  faisaient  une  Grèce  asiatique,  les  États  pé- 
loponnésiens  se  constituaient  de  diverses  manières,  selon  la 
nature  des  rapports  qui  s^établissaient  entre  les  anciens  et  les 
nouveaux  habitants.  L'Arcadie,  quoique  traversée  dans  toute  sa 
longueur  par  la  migration  dorienne,  avait  gardé  sa  population 
primitive.  On  disait  qu'un  des  chefs  hèracléîdcs,  Cresphontès, 
avait  reçu  en  mariage  Méropè,  fille  du  roi  arcadien  Kypsélos. 
Cresphontès,  s'étant  établi  à  Slényclèros,  dans  le  pays  qui  fut 
depuis  la  Messénie,  voulait  traiter  avec  égalité  les  anciens  et  les 
nouveaux  habitants.  Les  Doriens  mécontents  le  mirent  à  mort 
et  prirent  pour  chef  un  autre  Hèracléide  nommé  Polyphontès, 
qui  épousa  sa  veuve  malgré  elle.  Mais,  peu  de  temps  après, 
Aipytos,  fils  de  Cresphontès  et  de  Méropè,  qui  s'était  réfugié  en 
Arcadie  chez  son  aïeul  maternel,  fut  remis  en  possession  du 
Irône.  Cette  légende,  d'où  Voltaire  a  tiré  sa  tragédie  de  Méropè 
aurait  été  imaginée,  selon  E.  Curtius,  pour  rattachera  Héraclès 


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COLOMES  DORIENNES.  201 

la  ramille  des  Aipytides,  qui  serait  en  réalité  d'origine  arca- 
dienne.  Ce  qui  paraît  certain,  c'est  qu'il  y  eut  en  Messénie  une 
fusion  entre  les  Doriens  et  l'ancienne  population. 

En  Laconie,  la  conquête  ne  fut  accomplie  que  peu  à  peu, 
après  une  suite  de  luttes  dont  on  ne  connaît  pas  les  détails. 
D'après  Ephore,  les  deux  premiers  rois  héracléides  de  Sparte, 
Eurysthènes  et  Proclès,  avaient  essayé,  comme  Cresphontès  en 
Messénie,  d'attribuer  aux  anciens  habitants  du  pays  les  mêmes 
droits  qu'aux  Doriens  ;  mais  Agis,  fils  d'Eurysthènes,  soumit 
toute  laLaconie  à  l'exception  d'Amyclai  ;  les  habitants  furent  ré- 
duits à  la  condition  de  sujets,  et  ceux  de  la  ville  d'Hélos  s'étant 
révoltés,  en  furent  punis  par  la  servitude.  Selon  Pausanias,  Amy- 
clai  resta  au  pouvoir  des  Achaiens  environ  trois  siècles  après 
l'invasion  dorienne  et  ne  fut  conquise  que  par  le  roi  Téléclos, 
une  génération  avant  les  Olympiades.  L'asservissement  des 
Hilotes  n'eut  lieu  que  sous  le  règne  de  son  fils  Alcaménès. 

Colonies  doriennes.  Théra.  Mélos.  La  Crète.  —  Avec 
les  bandes  doriennes  qui  s'étaient  établies  en  Laconie,  il  y 
avait  des  Gadméiens  chassés  par  les  Boiotes.  Les  rois  Eury- 
sthènes  et  Proclès  étaient  alliés  par  leur  mère  à  ces  familles 
cadméiennes.  A  peu  près  dans  le  même  temps,  des  Minyens 
chassés  de  Lemnos  par  les  Pélasgcs  vinrent  en  Laconie  et  allu- 
mèrent leurs  feux  sur  le  Tèygétès.  Gomme  ils  se  disaient  issus 
des  Argonautes,  ils  furent  admis  dans  les  tribus  en  mémoire 
des  Tyndarides,  et  ils  épousèrent  des  filles  Spartiates.  Mais 
bientôt,  comme  ils  devenaient  exigeants  et  voulaient  être  asso- 
ciés à  la  royauté,  on  résolut  de  les  faire  mourir.  Alors,  selon 
une  légende  racontée  par  Hérodote,  leurs  femmes,  ayant  ob- 
tenu la  permission  d'aller  les  voir  dans  leur  prison,  changè- 
rent d'habits  avec  eux.  Us  sortirent  sous  ce  déguisement  et 
retournèrent  sur  le  mont  Tèygétès.  Vers  ce  temps,  le  Cad- 
méien  Théras,  oncle  maternel  des  deux  rois  et  qui  avait  été 
leur  tuteur,  ennuyé  de  rentrer  dans  une  condition  privée,  se 
préparait  à  fonder  une  colonie.  Il  s'embarqua  avec  une  partie 
des  Minyens,  tandis  que  d'autres,  en  plus  grand  nombre,  oc- 
cupèrent la  Triphylie,  entre  la  Messénie  et  l'Elis.  Ceux  qui  ac- 
compagnèrent Théras,  et  avec  eux  des  Lakédaimoniens  tirés 
des  tribus,  allèrent  dans  l'île  Callistè  habitée  par  les  Phéni- 


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COLOiNIES  DORIENNES. 

juant  sa  parenté  avec  la  race  de  Cadmos, 
,  et  l'île  prit  de  lui  le  nom  de  Théra.  C'est 
aconte  la  fondation  de  la  première  colonie 
trouve  dans  Conon  une  autre  forme  de  la 
t  que  les  fugitifs  de  Lemnos  et  d'imbros  fu- 
ai  par  le  Spartiate  Philonomos,  qui  avait 
IX  Doriens,  et  que  plus  tard,  leurs  fils,  à  la 
1,  furent  envoyés  en  Crète  avec  des  colons 
enduite  de  Polis  et  de  Delphos;  une  partie 
'ôta  dans  File  de  Mèlos,  le  reste  arriva  en 
ms  obstacle  à  Gortyne.  La  ville  Cretoise  de 
iment  pour  une  colonie  de  Sparte. 
L  Crète,  à  Rhodes  et  à  Cos.  La  Doris.  — 
iposée  de  Doriens  auxquels,  dit  Conon,  s*é- 
les  Pélasges,  partit  d'Argos  sous  la  conduite 
it-fils  de  Ténjénos,  qui  ne  pouvait  s'accor- 
Les  Ioniens  qui  allaient  s'embarquer  pour 
,  et  d'autre  part  les  émigrants  de  Sparte 
et  Delphos,  engageaient  Althaiménès  à  se 
s  un  oracle  lui  avait  ordonné  de  se  rendre 
ni  serait  donnée  par  Zeus  et  le  Soleil.  Rho- 
)leil,  qui  l'avait  donnée  à  ses  enfants  lors- 
mer  ;  la  Crète  était  le  berceau  de  Zeus  : 
igea  vers  Rhodes  et  laissa  en  Crète  une 
gagnons  qui  s'établirent  probablement  dans 
de  de  l'île.  Rhodes  avait  appartenu  succès- 
ce  autochthone,  puis  aux  Phéniciens,  en- 
Selon  une  légende  du  pays,  l'Hèracléide 
fondé  avant  la  guerre  de  Troie,  les  villes 
et  Cameiros.  Une  colonie  dorienne  partie 
session  de  l'île  de  Cos  et  y  porta  le  culte 
e,  sur  la  côte  carienne,  s'élevèrent  les  villes 
e  Cnide  fondées,  l'une  par  des  émigrants  de 
r  des  émigrants  de  Laconic.  Ces  six  villes, 
à  cinq  par  l'exclusion  d'Halicarnasse,  for- 
tion  religieuse  analogue  à  celle  des  Ioniens, 
ommun  consacré  à  Apollon  Triopien,  et  la 
Ire  l'Ionie  et  la  Lykie  prit  le  nom  de  Doris. 


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f^ 


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204  CUHONOLOGIE   MYTHIQUE. 

Cependant  les  Doriens  dépassèrent  ces  limites  et  s'établirent 
assez  avant  dans  les  terres,  puisque  les  villes  de  Selgè  et  de 
Sagalassos  en  Pisidie  passaient  pour  des  colonies  lakédaimo- 
niennes.  Quanl  aux  villes  grecques  disséminées  sur  la  côte 
méridionale  de  TAsie  mineure  et  dans  l'île  de  Kypros,  toutes 
les  branches  de  la  race  hellénique  contribuèrent  à  leur  fonda- 
tion. Quelques-unes  faisaient  remonter  leur  origine  à  l'époque 
mythologique. 

Chronologie  mythique.  —  On  ne  peut  fixer  la  date  des 
migrations  et  des  colonies  d'où  est  sortie  la  Grèce  historique, 
car  il  n'y  a  pas  de  chronologie  certaine  avant  l'ère  des  Olym- 
piades en  776.  Mais  les  Grecs  essayèrent  de  remonter  plus  haut 
et  de  mettre  en  ordre  les  traditions  qu'ils  trouvaient  au  seuil 
de  leur  histoire.  «  C'est  dans  la  soixantième  année  après  la 
prise  dllios,  dit  Thucydide,  que  les  Boiotes  chassés  d'Arnè  par 
les  Thessaliens  s'établirent  dans  le  pays  appelé  Boiolie  et  qu'on 
nommait  auparavant  la  Cadméis.  11  s'y  trouvait  dès  long- 
temps une  portion  de  ce  peuple,  et  elle  avait  envoyé  des  trou- 
pes devant  Uios.  Ce  fut  dans  la  quatre-vingtième  année  après 
la  prise  de  celte  ville  que  les  Doriens  occupèrent  le  Pélopon- 
nèse avec  les  Hèracléides  ».  Suivant  l'auteur  d'une  Vie  d'Ho- 
mère faussement  attribuée  à  Hérodote,  les  villes  de  l'île  de 
Lesbos  furent  fondées  cent  trente  ans  après  la  guerre  de  Troie, 
Kymè  vingt  ans  après  les  villes  lesbiennes,  Smyrne  dix-huit 
ans  plus  tard  par  les  Kymaiens,  et  l'auteur  ajoute  qu'Homère 
naquit  à  cette  époque. 

La  guerre  de  Troie,  considérée  comme  un  événement  réel, 
formait  l'anneau  rattachant  la  période  historique  à  la  période 
légendaire;  mais  les  Grecs  n'avaient,  pour  en  fixer  la  date,  que 
des  listes  généalogiques  ne  donnant  pas  toutes  les  mômes  ré- 
sultats. 11  y  avait  deux  manières  de  compter,  l'une  à  Sparte, 
l'autre  à  Athènes.  D'après  le  système  attique,,  suivi  par  la 
Chronique  de  Paros,  la  prise  de  Troie  répond  à  1209  avant 
J.-C.  D'après  le  système  adopté  parla  Chronologie  Alexandrine 
elle  tombe  en  1184.  L'écart  est  encore  plus  considérable  entre 
la  chronologie  d'Hérodote  et  celle  de  CaUimaqne.  On  reportail 
au  delà  de  la  guerre  de  Troie  les  plus  vieilles  tradition  poéti- 
ques, les  deux  guerres  de  Thèbes,  l'expédition  des  Argonautes 


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LES  POÈMES  HOMÉRIQUES.  205 

etparle  compte  des  générations  on  atteignait  le  milieu  du  trei- 
zième siècle  avant  notre  ère.  EnÛn,  plus  loin  encore,  on  pla- 
çait les  colonies  orientales.  Voici  les  dates  qu'on  admet  le  plus 
généralement,  d'après  les  calculs  d'Ëratoslhène  : 


Phoroneos,  fils  d*Ioachos 1 753 

Danaos  et  Pélasgos 1469 

Deucalion,  pèred'Hellen 1433 

Erectheus,  premier  roi  d'Athènes; 

Dardanos,  père  des  Troyens . .  1 883 

Cadmos,  Toodateor  de  Thèbes ...  1813 

Pélops 1283 

Espédittoo  des  Argonautes 1 225 

Première  guerre  de  Thèbes....  1213 

Mort  d'Hyllos 1 203 

Seconde  guerre  de  Thèbes U98 

Expédition  contre  Troie 1192 

Prise  de  Troie 1 183 


Invasion  des  Thessaliens  et  des 
Boiotei,    migration    de    Pen- 

thilos 1124 

Retour  des  Hèracléides 1 104 

Alétès  à  Corinthe 1 075 

Migration  de  Tbéras 1074 

Les  Aioliens  à  Lesbos 1053 

MortdeCodros 1045 

Migration  ionienne 1U44 

Fondation  de  Kymè  1033 

Fondation  de  Smyrne 1015 

Olympiade  d'iphitos.  Lycurgne..  884 

Olympiade  de  Coroibos 776 


Les  poèmes  homériques.  —  L'intervalle  entre  la  fonda- 
tion des  colonies  ioniennes  et  la  première  Olympiade  est  ab- 
solument vide  d'événements  ;  mais  il  est  rempli  par  la  plus 
belle  des  créations  de  la  poésie,  l'épopée  homérique.  C'est 
une  œuvre  collective,  comme  la  plupart  des  grandes  œuvres. 
Le  nom  d'Homère  représente  la  pensée  d'une  époque.  A  ce 
nom  se  rattache  la  civilisation  de  la  Grèce,  c'est-à-dire  du 
monde,  puisqu'il  n'y  a  de  civilisation  véritable  que  là  où  le 
souffle  de  la  Grèce  a  passé.  De  nombreuses  et  savantes  disser- 
tations ont  été  faites  sur  la  composition  des  poèmes  homéri- 
ques. On  les  a  comparés  aux  épopées  des  autres  peuples,  et 
on  a  reconnu  qu'ils  se  rapprochaient  bien  plus  d'une  collection 
de  chants  populaires  que  d'une  conception  individuelle.  La 
critique  contemporaine  admet  en  général  les  conclusions  de 
Wolf  et  regarde  Homère  comme  la  personnification  d'une 
grande  école  poétique,  les  Hotnèrides.  C'étuit  une  confrérie  de 
chanteurs  ambulants,  se  rattachant  à  un  éponyme  ou  ancêtre 
mythique,  lui  rendant  un  culte  et  lui  attribuant  les  ouvrages 
particuliers  des  membres  de  la  corporation.  On  les  appelait 
rhapsodes,  des  mots  pxirTetv  ^^â;,  parce  qu'ils  cousaient  des 
chants  les  uns  aux  autres,  soit  les  leurs,  soit  ceux  qu'ils 
avaient  reçus  par  tradition .  Les  mots  Homère,  Homèrides, 
signifient  aussi  des  rassembleurs  de  chants.  Hésiode  dit  des 
L.  M.  —  HiST.  DES  Grecs.  12 


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POÈMES  HOMÉRIQUES. 

formant  un  concert  de  voix.  Pindare  ap- 
ics  chanteurs  de  vers  cousus.  Le  mot  ana- 
Mt  est  Samdsa,  qui  désigne  chez  les  Hin- 

de  chants  épiques.  Les  Homèrides  ont 
hios  jusque  dans  Tépoque  historique.  Un 
gle,  parle  ainsi  de  lui-môme  à  la  fin  de 
«  Salut' à  vous  tous,  et  souvenez- vous  de 
it  quand  un  des  hommes  terrestres,  un 
enant  ici  vous  demandera  :  Jeunes  filles 
our  vous  le  plus  agréable  des  chanteurs 

I  vous  plaît  le  plus  ?  Alors  répondez  tout 
il  convient  :  C'est  l'homme  aveugle  qui 
hios  ;  ses  chants  sont  à  jamais  les  meil- 

on  possède  sur  Homère  sont  trop  récents 
confiance.  On  ne  s'accorde  ni  sur  Tépoque 
ur  sa  pallie,  et  ces  incertitudes  n'ont  rien 
net  qu'il  y  a  eu  plusieurs  Homères.  Outre 
quelques  hymnes  ou  préludes,  on  lui  at- 
lilé  d'autres  ouvrages  perdus  aujourd'hui, 
lis  et  plusieurs  des  poèmes  du  Cycle.  Les 
ie  ne  reconnurent  pour  aulhenliques  que 
quelques-uns  môme  leur  donnaient  deux 
.es  rhapsodies  dont  se  compose  l'œuvre 
îunies  assez  lard  en  deux  grands  poèmes  : 
emier,  dit  Cicéron,  qui  disposa  les  livres 
}que  là,  dans  l'ordre  où  nous  les  avons 
he  dit  qu'Homère  n'écrivit  jamais  ses  poè- 
3nservés  par  la  mémoire  des  chanteurs  et 
e  qui  explique  les  dissonances  qu'on  y 
ffirme  également  que  les  anciens  chan- 
Dmériques  par  fragments  dont  il  nous  a 

II  ajoute  que  Lycurgue  apporta  pour  la 
e  en  Grèce  les  poèmes  d'Homère,  et  que 
,  de  tous  les  friigments  réunis,  publia 
Une  scholie  sur  Piaule,  Iraduiteà  ce  qu'il 
mne  les  noms  de  plusieurs  des  personna- 
avaiî,Onomacritc  d'Alhènes,  Zopyre  d'Hè- 


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LES  POÈMKS  D'HÉSIODE. 

raclée,  Orpheus  de  Crotone.  Qu'Homère  soit  le  po 
conçu  la  première  idée  de  l'Iliade  et  de  l'Odyssée  ou 
qui  s'est  approprié,  en  le  développant,  un  sujet  déjà  p 
il  a  dû,  comme  tous  les  rhapsodes,  coudre  ses  prop 
positions  à  des  chants  plus  anciens  ;  ses  successeurs,  1 
rides,  firent  pour  ses  compositions  ce  qu'il  avait  faitpt 
de  ses  devanciers,  et  lorsqu'enfin  tous  ces  chants  fure 


Buste  d'Hoaicie  (musée  du  Louvre). 


nomcre  tenant  un 
manuscrit  de  l'I- 
liade (monnaie 
de  Chios). 


Tètj  d'Homèie;   au  revers  le  flouvc  Méics, 

près  duquel  Ilomère  était  né. 

(Monnaie  d'Amastris,  qui  était  probablement 

une  colonie  de  Smyrne.) 

et  fixés  par  récriture,  il  n'était  plus  possible  de  dislin 
œuvre  de  ce  qui  avait  été  emprunté  par  lui  ou  ajouté  i 
Les  poèmes  d'Hésiode.  —  Les  traditions  sur  H( 
sont  pas  beaucoup  plus  certaines  que  celles  sur  Home 
poèmes  nous  sont  parvenus  sous  le  nom  d'Hésiode, 
vaux  et  jours,  la  Théogonie  et  le  Bouclier  d'Hèraclè 
quité    possédait  d'autres  poèmes    qui  lui  étaient  i 


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208  LES  POÈMES  D'HÉSIODE. 

comme  les  Catalogues  ou  grandes  Eoiées,  dont  cinquante-cinq 
vers  ont  été  transportés  au  début  du  Bouclier  d'Héraclès; la 
Mélampodie,  la  Descente  de  Thèseus  chez  Aïdès,  les  Institu- 
tions de  Chiron,  l'Astronomie,  TAigimios  ;  mais  les  Boiotes  de 
l'Hélicon  n'attribuaient  à  leur  compatriote  que  les  Travaux  et 
jours,  dont  ils  retranchaient  même  Tinvocation  aux  Muses  pla- 
cée au  début.  Ils  en  montraient,  du  temps  de  Pausanias,  un 
exemplaire  très  ancien,  gravé  sur  des  lames  de  plomb.  La  plu- 
part des  auteurs  grecs  ont  regardé  la  Théogonie  comme  authen- 
tique et  le  Bouclier  comme  apocryphe.  La  différence  de  carac- 
tère des  trois  poèmes  hésiodiques  que  nous  possédons  peut 
faire  douter  qu'ils  soient  du  môme  auteur.  La  Théogonie  est  un 
poème  mythologique,  les  Travaux  et  jours  sont  un  poème  didac- 
tique et  moral,  le  Bouclier  se  rattache  aux  épopées  héroïques. 
Quant  au  dialecte  d'Hésiode,  il  est  le  môme  que  celui  d'Homère  ; 
plusieurs  vers  se  trouvent  à  la  fois  dans  Homère  et  dans  Hé- 
siode; ainsi,  vers  le  commencement  de  la  Théogonie,  il  y  a 
quatre  vers  qui  sont  répétés  dans  l'hymne  homérique  aux 
Muses.  Dans  quelques  morceaux,  comme  les  combats  de  Zeus 
contre  les  Titans  et  contre  Typhôeus,  que  j'ai  cités  plus  haut, 
Hésiode  s'élève  à  la  môme  hauteur  poétique  qu'Homère. 

Les  noms  de  ces  deux  poètes  furent  souvent  opposés  dans 
les  légendes  qui  circulèrent  plus  tard  en  Grèce.  On  disait  qu'ils 
avaient  chanté  tour  à  tour  dans  des  jeux  funèbres,  Homère  une 
bataille  de  l'Iliade,  Hésiode  des  préceptes  d'agriculture,  et  que 
les  juges  de  ce  tournoi  poétique,  malgré  l'avis  du  peuple  qui 
acclamait  Homère,  avaient  donné  le  prix  à  Hésiode  parce  que 
ses  vers  étaient  plus  utiles  aux  hommes.  Dans  l'aristocralie 
militaire  de  Sparte,  on  disait  qu'Homère  était  le  poète  des 
héros,  Hésiode  celui  des  Hilotes.  Les  épopées  d'Homère  sont  la 
la  plus  éclatante  manifestation  du  génie  poétique  de  la  Grèce, 
et  en  môme  temps  la  forme  première  de  son  histoire;  les 
poèmes  d'Hésiode  sont  le  point  de  départ  de  la  philosophie  et 
de  la  science.  Cela  seul  suffirait  pour  déterminer  lâge  relatif 
des  deux  poètes  ou,  pour  parler  plus  exactement,  des  œuvres 
qui  portent  leurs  noms.  Ces  noms  représentent  deux  écoles  de 
poésie,  dont  la  seconde  semble  plutôt  réagir  contre  la  première 
que  la  continuer;  la  Théogonie  paraît  une  réaction  philosophi- 


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LA  TDÉOGONIE.  209 


que  contre  l'anthropomorphisme  d'Homère,  les  Travaux  et 
jours  une  réaction  des  tendances  agricoles  et  pacifiques  contre 
l'esprit  militaire  et  le  goût  des  aventures  lointaines. 

La  Théogonie.  —  On  peut  rapprocher  la  Théogonie  d'Hé- 
siode de  l'Introduction  au  Code  de  Manou  et  du  prem 
pitre  de  la  Genèse.  C'est  une  exposition  méthodique 
gine  des  choses,  mais  il  n'y  a  pas  de  création  ni  ( 
première  ;  tout  effet  a  une  double  cause,  un  père  et  ut 
et  le  monde  résulte  d'une  suite  de  générations  prog 
Au  début,  Hésiode  place  trois  principes,  Chaos,  Gai 
c'est-à-dire  le  Vide  ou  l'Espace;  la  Terre  (nous  dirions 
d'hui  la  matière  ou  la  substance),  et  le  Désir  ou  l'Att 
«  11  y  eut  d'abord  le  Vide,  et  ensuite  la  Terre  à  la  poitrii 
siège  toujours  sûr  des  Immortels,  qui  occupent  les  c 
l'Olympe  neigeux  et  les  Tartares  ténébreux,  au  fond  di 
larges  routes,  puis  le  Désir,  qui  l'emporte  sur  tous  les 
tels,  le  Désir  énervant,  qui,  dans  le  sein  de  tous  les 
de  tous  les  hommes,  dompte  la  pensée  et  la  volonté  réf 
De  l'union  de  la  Terre  et  du  Ciel  naissent  les  Titans,  c 
primordiales,  qui  sont  les  qualités  génératrices,  car  1 
n'existent  que  par  les  différences  qui  les  distinguent 
des  autres  et  permettent  de  les  nommer.  Les  maris 
Titans  produisent  une  génération  nouvelle,  plus  finie 
sens  grec  du  mot,  c'est-à-dire  plus  parfaite.  Nés  de  d< 
pies  jumeaux  de  la  famille  des  Titans,  les  Dieux  et  les  1 
ont  la  même  origine.  Déjà  dans  Homère  les  Titans 
ancêtres  des  hommes  et  des  Dieux.  Le  triomphe  des  E 
les  Titans,  des  Lois  modératrices  sur  les  Forces  ave 
déréglées,  établit  TharmoDie  du  monde  parle  balancei 
mouvements  célestes. 

La  Théogonie  d'Hésiode  forme  une  transition  entre  h 
logie  spontanée  d'Homère  et  les  fragments  philosophi 
nous  restent  d^Empédocle,  d'Acousilaos  et  de  Parméni 
une  œuvre  individuelle,  et  le  rôle  attribué  à  Eros  en  est  h 
Eros,  le  Désir,  n'est  pas  personnifié  dans  Homère,  qui  le 
deux  ou  trois  fois  comme  un  sentiment  humain,  et  noi 
un  Dieu.  Mais  Eros  était  la  divinité  locale  de  Thespj 
voisine  d'Ascra  où  habitait  Hésiode.  Voulant  rattache 

12 


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ONIE. 

raie  où  il  n'avait  pas  de  place 
pes  du  monde.  Parmi  les  ma- 
quelques-uns  sonl  peut-être 
•mériques,  mais  il  réunit  ces 
le  sorte  de  ciment  métaphy- 
mie  appartient  à  une  époque 
philosophie, 
î  Pandora,  dont  Homère  ne 


Erus.  (Statue  du  Tatican.  Il  y  en  a 
UD  eiemplaire  plus  complet  au 
musée  de  Naples.) 

ir  Hésiode,  dans  la  Théogonie 
îs  deux  récits  sont  différents 
complètent  et  s'éclairent  l'un 
ogique  de  la  naissance  de  la 
erle  du  feu,  qui  est  la  source 
nètheus  a  ravi  le  feu  du  ciel 
13  charge  Hèphaistos  de  fabri- 
itrempée.  Pandora  représente 
•ée.  Sans  l'industrie,  l'homme 
I  animaux^  mais  la  femme  est 


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LA  THÉOGONIE. 


un  produit  artiGciel  de  la  civilisation.  Charmante  et  dang( 
par6e  de  tous  les  dons  des  Dieux,  la  séductrice  éternelle  i 


Nômési^. 


Eros. 


Elpis. 


L'Ame,  sous  la  form'i  d'un  papillon,  est  brûlée  par  le  Désir,  entre  la  Crs 
l'Espérance  (bas-relief  du  rase  Ch  gi). 


Eros.  Psyclic-Nikè. 


Hermès. 


L'Ame  viclorieuse  du  Désir  lui  emprunte  ses  ailes  pour  voler  vers  l'Idéal 

a  rhomme  la  nécessité  du  travail,  «  parce  qu'elle  aime 
et  déteste  la  dure  pauvreté  ».  Sa  curiosité  ouvre  la  fatî 
phore  d'où  s'échappent  tous  les  maux  de  la  vie  policée. 


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214  PROMÈTllEUS  ET  PANDOUA. 

nus  aux  peuples  sauvages,  et  il  n'y  a  pas  de  remèdes,  l'espé-  '"^ 
rance  est  restée  au  fond  de  Tamphore.  C'est  ainsi  que  Zeus 
envoie  aux  hommes  un  mal  pour  un  bien,  car  la  naissance  de 
Pandora  est  une  punition  de  la  conquête  du  feu.  La  raison  de 
cette  punition  et  du  supplice  de  Promètheus,  c'est  que  l'indus- 
trie est  une  lutte  contre  les  puissances  cosmiques,  et  il  n'y  a  pas 
pour  l'homme  de  lutte  sans  douleur.  11  doit  conquérir  par  le 
travail  la  nourriture  que  la  terre  fournit  gratuitement  aux 
autres  êtres,  car  les  Dieux  ont  caché  les  sources  de  la  vie  de- 
puis que  Promètheus  a  dérobé  le  feu  du  ciel.  Quand  le  senti- 
ment mystique  prévalut  dans  la  religion,  la  fable  de  Promè- 
theus devint  une  allégorie  de  la  descente  et  de  l'ascension  des 
âmes;  aussi  est-elle  souvent  représentée  sur  les  sarcophages. 
L'homme  est  une  étincelle  du  feu  céleste  captive  dans  une 
lampe  d'argile,  un  Dieu  exilé  du  ciel,  cloué  sur  le  Caucase  de 
la  vie,  dévoré  de  soucis  toujours  renaissants.  Mais  Héraclès, 
symbole  des  vertus  héroïques,  brise  les  chaînes  de  Promètheus 
et  le  délivre  du  bec  et  des  griffes  du  vautour. 

J'ai  rapproché  dans  un  autre  ouvrage  (i)  la  fable  hésiodique 
de  Promètheus  et  de  Pandora  de  la  fable  juive  d'Adam  et  d'Eve. 
On  ne  saurait  dire  laquelle  des  deux  est  la  plus  ancienne  :  dans 
l'une  comme  dans  l'autre,  à  côté  de  traits  d'un  caractère  très 
primitif,  il  y  en  a  qui  semblent  appartenir  à  une  époque  de 
réflexion  philosophique.  Quoique  la  pensée  du  symbole  soit  la 
même,  la  forme  est  très  différente,  et  un  emprunt,  d'un  côté  ou 
de  l'autre,  est  inadmissible.  Pour  les  Grecs,  le  commencement 
de  la  civilisation,  c'est  l'emploi  du  feu  et  le  travail  de  l'argile 
plastique;  pour  les  Juifs  c'est  le  labourage  et  l'industrie  du 
vêtement.  Dès  que  l'homme  et  la  femme  ont  mangé  du  fruit 
défendu,  ils  s'aperçoivent  de  leur  nudité  et  sont  saisis  de  crainte, 
car  cette  nudité  est  une  faiblesse  et  un  danger;  peut-être  est-ce 
aussi  une  laideur,  car  la  pudeur  est  une  forme  de  la  honte.  Le 
vêtement  est  pour  l'homme  une  défense;  pour  la  femme  un 
voile.  Cela  est  bien  loin  des  Grecs  qui,  dans  leurs  sculptures, 
donnent  aux  Dieux  et  aux  Héros  la  nudité  des  gymnases.  Le 
héros  ne  craint  aucun  ennemi  et  n'a  pas  besoin  de  se  couvrir  : 

(1)  Histoire  des  Israélites  d'après  l'exégèse  biblique. 


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LliS  TRAVAUX  ET  JOURS 

il  laisse  le  vôtement  aux  femmes  qui  en  font  i 
dire  une  amorce  :  le  sentiment  de  l'art  s( 
comme  chez  les  sauvages  par  le  goût  de  la 
ni  étude  ni  effort. 

Les  travaux  et  jours.  —  Le  poème  de 

tout  en  gardant  le  rhythme  de  l'épopée, 

poésie  sentencieuse  et  morale  de  Théognis  c 

est  le  précurseur  des  philosophes.  Sa  moi 

rente  de  celle  d'Homère,  mais  elle  lacompU 

autrement.  Dans  les  sociétés  comme  dam 

instincts  apparaissent  d'abord,  puis  les  sen 

idées.  Le  premier  effort  de  la  morale  cons 

miner  les  sentiments  sur  les  instincts  égc 

soumettre  les  sentiments  à  la  raison.  De  ce 

vie  morale,  la  poésie  homérique  représeï 

poésie  hésiodique  répond  à  la  seconde.  I 

vertus  de  famille,  il  oppose  à  l'adultère  l 

exalte  l'amitié,  le  respect  des  suppliants  et 

gion  du  serment,  et  surtout  le  courage,  cet 

l'énergie  humaine  contre  l'instinct  inné  ( 

Ces  vertus  sociales,  ce  n'est  pas  par  des  | 

les  enseigne,  il  nous  les  montre.  Sa  mora 

exemples  et  des  contrastes,  car  l'enfance  c 

celle  des  individus,  conçoit  les  idées  sous  i 

Hésiode  s'attache   de  préférence  aux  ve 

l'amour  du  travail,  la  prudence,  la  temp 

justice.  La  nécessité  du  travail  est  établie 

mythologiques,  auxquelles  Homère  ne  fait 

fable  de  Promètheus  et  de  Pandora  et  cel 

des  races  d'or,  d'argent,  d'airain  et  de  fer. 

tout  dans  Ovide,  cette  succession  est  repr 

marche  régulière  de  l'humanité  vers  la"( 

système  d'évolution  ne  peut  être  attribué 

la  race  d'airain  et  la  race  de  fer  il  place  u 

meilleure,  la  race  sacrée  des  Héros  demi 

qu'il  a  fondu  en  une  seule  deux  traditions  ( 

qu'en  rapportant  cette  fable  et  la  doctrine 

s'y  rattache,  il  n'a  d'autre  but  que  de  me 


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LES  CITÉS  MILITAIRES.  217 

CHAPITRE  VlU 

LES    CITÉS    MILITAIRES. 

Autonomie  de  la  Cité.  Aristocratie  et  démocratie.  —  Distinction  des 
classes  attribuée  à  Minos.  —  L'esclavage  domestique  et  la  servitude  de 
la  glèbe.  —  État  àa  la  population  en  Thessalie,  en  Laconie  et  en 
Crète.  —  Éducation  militaire  et  institutions  politiques  des  Cretois. 

Sparte,  type  do  la  cité  militaire.  —  Lycurgue.  Constitution  politique  de 
Sparte.  —  Légende  du  partage  des  terres.  —  Tendances  communistes: 
les  repas  publics.  —  Éducation,  discipline,  tactique  militaire. 

Soumission  de  la  Laconie  ;  les  Hilotes.  —  Luttes  contre  les  Argeiens  ; 
Pheidon  et  le  monnayage.  —  Luttes  contre  les  Arcadiens.  —  Première 
guerre  de  Messénie.  Fondation  de  Tarente.  —  Seconde  guerre  de 
Mcssénie  ;  Aristoménès  ;  Tyrtée,  —  Soumission  de  la  Messénie.  Suze- 
raineté de  Sparte  sur  le  Péloponnèse. 

Autonomie  de  la  Cité.  Aristocratie  et  démocratie.  — 

L'établissement  de  la  Cité  représentait  aux  yeux  des  Grecs  le 
passage  de  l'état  nomade  et  barbare  à  la  vie  politique  et  civi- 
lisée. La  Cité,  ffoXi;,  ce  n'est  pas  seulement  la  ville,  c'est  le 
corps  politique,  l'ensemble  des  citadins,  ou  citoyens,  associés 
pour  la  défense  commune  et  l'exercice  de  leurs  droits,  tandis 
que  les  ruraux  vivent  dispersés  dans  les  champs  sans  former 
un  groupe  politique.  L'indépendance  de  la  Cité  est  le  caractère 
fondamental  de  la  société  grecque.  Il  n'y  a  rien  d'analogue 
dans  l'histoire  :  les  communes  du  moyen  âge  relevaient  tou- 
jours du  roi,  du  pape  ou  de  l'empereur.  En  Grèce,  personne 
n'aurait  pu  admettre  une  autorité  politique  ou  religieuse  en 
dehors  et  au-dessus  des  citoyens.  Toutes  les  institutions  des 
législateurs,  toutes  les  théories  sociales  des  philosophes  sont 
dirigées  vers  un  but  unique,  l'autonomie  de  la  Cité.  Indépen- 
dantes de  tout  pouvoir  extérieur,  les  Cités  étaient  en  môme 
temps  indépendantes  les  unes  des  autres  :  «  C'est  une  idée  très 
fausse,  dit  Heeren,  que  de  s'imaginer  qu'il  y  eût  autant  d'Étals 
que  de  contrées.  11  est  vrai  qu'il  y  en  a  quelques-unes,  comme 
L.  M.  —  HisT.  DES  Grecs.  13 


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248  AUTONOMIE  DE  LA.  CITE. 

TAttlque,  la  Mégaris,  la  Laconie,  qui  peuvent  être  considérées 
chacune  comme  un  État  à  part,  parce  que  chacune  déciles 
formait  le  territoire  d'une  seule  ville;  d'autres  au  contraire, 
telles  que  FArcadie,  la  Boiotie,  etc.,  ne  formaient  pas  chacune 
un  Ijtat  ;  elles  renfermaient  autant  d'États  isolés  qu'elles  avaient 
de  villes  avec  un  territoire  particulier.  Cependant  il  subsistait 
toujours  entre  elles  un  lien  naturel  de  parenté,  etles  Arcadiens, 
les  Boiotes,  etc.,  parlaient  d'eux-mêmes  comme  d'un  seul 
peuple.  Il  existait  des  alliances  volontaires  entre  plusieurs 
villes  ou  même  entre  toutes  les  villes  d'une  môme  contrée,  par 
exemple  dans  l'Achaïe,  où  toutes  ensemble  formaient  une 
fédération,  chaque  ville  conservant  néanmoins  sa  constitution 
intérieure.  Il  arrivait  quelquefois  qu'une  ville,  à  raison  de  sa 
puissance  prépondérante,  s'arrogeait  sur  les  autres  une  espèce 
de  suprématie,  comme  Thèbes,  par  exemple,  sur  les  villes  de 
la  Boiotie  ;  mais  cette  domination  était  toujours  précaire  et  dé- 
pendante des  circonstances.  » 

Chaque  Cité  avait  sa  constitution,  mais  toutes  ces  constitu- 
tions se  ramènent  à  deux  formes,  l'aristocratie  et  la  démo- 
cratie. Sparte  et  Athènes,  les  deux  villes  sur  lesquelles  nous 
avons  le  plus  de  renseignements  et  qui  ont  joué  le  rôle  le  plus 
important  dans  l'histoire  grecque,  offrent  les  types  les  plus 
complets,  l'une  de  l'aristocratie,  l'autre  de  la  démocratie.  On  a 
pris  l'habitude,  môaaa_chez  nous,  depuis  Ottfried  Millier, 
d'expliquer  l'histoire  politique  par  des  différences  de  races  ; 
comme  les  Spartiates  étaient  de  race  dorienne,  et  les  Athéniens 
de  race  ionienne,  on  oppose  le  génie  aristocratique  des 
Doriens  au  génie  démocratique  des  Ioniens.  Rien  de  plus  ar- 
bitraire que  cette  antithèse  ethnographique  :  il  y  a  eu  des 
aristocraties  ioniennes  à  Marseille  et  à  Chalkis,  des  démocraties 
doriennes  à  Tarente  et  à  Syracuse.  La  plupart  des  Cités 
grecques  ont  été  tour  à  tour  aristocratiques  et  démocratiques. 
De  ces  deux  formes  sociales,  c'est  l'aristocratie  qui  s'est  pro- 
duite la  première,  parce  qu'il  est  plus  facile  d'établir  l'ordre 
par  l'autorité  et  la  hiérarchie  que  par  la  liberté  et  l'égalité. 

Distinction  des  classes  attribuées  à  Mines.  —  L'esprit 
mythologique  de  la  Grèce  résume  toujours  par  quelques  nonms 
propres  les  grandes  œuvres  collectives  de  fondations  de  villes 


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ESCLAVAGE  DOMESTIQUE  ET  SERVITUDE  DE  LA  GLÈBE.      219 

et  de  législations.  Des  trois  principaux  législateurs  de  l'anti- 
quité, Minos  en  Crète,  Lycurgue  à  Sparte,  Solon  à  Athènes,  le 
dernier  seul  appartient  réellement  à  Thistoire  ;  Lycurgue  est 
sur  les  confins  de  l'histoire  et  de  la  légende  et  Minos  est  un 
personnage  fabuleux.  Par  son  nom,  Minos  rappelle  à  la  fois 
Menés,  fondateur  de  la  monarchie  égyptienne,  et  Manou, 
ancêtre  et  législateur  des  Aryas  de  l'Inde.  Par  sa  généalogie, 
il  se  rattache  aux  Phéniciens  ;  sa  mère  Europe  est  fille  de 
Phoinix.  Homère  parle  de  ses  entretiens  avec  Zeus;  c'est 
pour  cela  probablement  qu'il  a  passé  pour  le  premier  légis- 
lateur. Aristole  admet,  comme  tous  les  anciens,  que  la 
législation  des  Cretois  a  été  l'œuvre  de  Minos  et  a  servi  de 
modèle  à  celle  de  Lycurgue,  mais  il  croit  que  la  division  du 
peuple  en  deux  classes,  celle  des  guerriers  et  celle  des  labou- 
reurs, avait  été  empruntée  aux  Égyptiens.  Comme  Platon,  il 
trouve  cette  distinction  excellente,  «  mais,  dit-il,  ce  n'est  pas 
une  nouveauté  imaginée  par  les  philosophes.  Sésoslris l'établit 
en  Egypte,  Minos  en  Crète,  et  elle  se  maintient  encore  dans  ces 
deux  pays  ».  Lors  môme  qu'on  admettrait  cet  emprunt,  il 
faudrait  remarquer  qu'en  Egypte,  il  y  avait,  au-dessus  de  la 
classe  des  guerriers,  une  classe  sacerdotale  qui  n'a  jamais 
existé  en  Crète  ni  dans  aucune  autre  partie  de  la  Grèce. 

Esclavage  domestique  et  servitude  de  la  glèbe.  —  La 
première  condition  nécessaire  à  l'indépendance  d'un  État, 
c'est  une  force  militaire  capable  de  le  défendre.  Dans  l'âge 
héroïque,  «  les  villes  aux  fortes  murailles  »  ont  pour  défen- 
seurs des  rois  de  race  divine  entourés  d'une  élite  de  braves 
guerriers.  Ces  rois  se  font  servir  par  des  esclaves  pris  à  la 
guerre  ou  achetés  à  des  pirates,  mais  ces  captifs  ne  forment 
pas  une  classe  spéciale,  aucune  partie  de  la  population  n'est 
réduite  à  la  condition  servile.  Timée,  cité  par  Athénée,  affirme 
qu'anciennement  les  Grecs  vivaient  sans  esclaves  :  dans  chaque 
maison,  les  plus  jeunes  servaient  les  plus  vieux.  11  ajoute  que 
chez  les  Phokiens  et  les  Locriens,  cet  état  dura  jusqu'à  l'époque 
macédonienne.  L'usage  des  serviteurs  achetés  à  prix  d'argent 
s'étendit  peu  à  peu,  et  inégalement,  avec  les  progrès  de  la 
richesse  parle  commerce  et  l'industrie.  Mais  cette  servitude 
individuelle,  qui   est  la  première  forme  de  la  domesticité,  ne 


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220  DISTINCTION  DES  CLASSES  EN  THESSALIE, 

doit  pas  être  confondue  avec  la  servitude  de  la  glèbe  qui,  après 
les  invasions  racontées  au  précédent  chapitre,  s'établit  dans 
quelques  parties  de  la  Grèce,  comme  elle  s'établit  plus  tard 
dans  toute  l'Europe  féodale.  Dès  le  début  de  la  période  histo- 
rique, on  trouve  en  Thessalie,  en  Crète  et  à  Spartç  une  caste 
militaire,  analogue  à  la  noblesse  du  moyen  âge,  possédant 
seule  des  droits  politiques  et  nourrie  par  une  population  de 
serfs  appelés,  en  Thessalie  Pénestes,  en  Laconie  Hilotes,  en 
Crète  Clèrotes  et  Mnoïtes. 

Ëtat  de  la  population  en  Thessalie  ;  —  en  Ijaconie  ;  — 
en  Crète.  —  Les  Pénestes  de  Thessalie  étaient,  selon  Théo- 
pompe, des  Perrhaibes  et  des  Magnètes  réduits  en  servitude 
par  les  conquérants  Thesprotes,  selon  d'autres  des  Pélasges  ; 
d'après  un  fragment  d'Arche  macho  s,  c'étaient  des  Boiotes 
Ârnéens  dont  l'asservissement  avait  été  le  résultat  d'un  con- 
trat volontaire  :  «  Ceux  des  Boiotes  d'Arnè  qui,  par  attache- 
ment à  la  contrée  où  ils  s'étaient  établis,  ne  retournèrent  pas 
en  Boiotie,  se  donnèrent  comme  serfs  aux  Thessaliens,  à 
condition  qu'on  ne  pourrait  ni  les  tuer  ni  les  vendre.  Ils 
s'engagèrent  de  leur  côté  à  cultiver  les  terres  en  payant  un 
tribut  annuel.  On  les  appela  Ménestes  (résidents),  on  les 
nomme  aujourd'hui  Pénestes  (pauvres);  quelques-uns  sont 
plus  riches  que  leurs  maîtres.  »  Casaubon,  dans  ses  notes  sur 
Athénée,  compare  leur  condition  à  celle  des  gens  de  main- 
morte dans  la  France  monarchique.  Les  Pénestes  accompa- 
gnaient leurs  maîtres  à  la  guerre  en  qualité  de  servants 
d'armes.  Pendant  la  guerre  de  Péloponnèse,  un  noble  thessa- 
lien,  Ménon  de  Pharsale,  prêta  trois  cents  cavaliers  Pénestes 
aux  Athéniens  contre  Amphipolis. 

En  Laconie,  la  population  composée  anciennement  de  Lé- 
lèges,  devint  achaienne  sous  les  Pélopides,  dorienne  sous  les 
Hèracléides.  Il  ne  s'ensuit  pas  qu'elle  fut  entièrement  renou- 
velée, mais  les  éléments  anciens  et  nouveaux  s'y  mêlèrent  de 
telle  sorte  que  la  distinction  des  classes  ne  répondit  pas  à  une 
différence  de  races  aussi  exactement  qu'en  Thessalie  où  les 
Magnètes  et  les  Perrhaibes,  quoique  sujets  des  Thessaliens, 
continuèrent  à  exister  comme  peuples  distincts  représentés 
au  conseil  amphiclionique.  L'assertion  d'Ottfried  Muller,  que 


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EN   LACONIE  ET  EN  CRÈTE.  221 

les  races  étaient  strictement  distinguées  en  Laconie,  et  que 
les  Périœkes,  ou  ruraux,  furent  toujours  considérés  comme 
Achaiens,  est  combattue  par  Grote  qui  soutient,  sur  d'assez 
fortes  preuves,  que  toutes  les  distinctions  de  races  avaient 
disparu  avant  les  temps  historiques.  Quand  les  Hèracléides 
s'établirent  dans  la  vallée  de  TEurotas,  leurs  auxiliaires,  qui 
n'étaient  pas  tous  Doriens,  campèrent  sur  les  terres  des  Pélo- 
pides  et  des  Achaiens  émigrés,  à  très  peu  de  distance  d'Amy- 
clai,  ancienne  résidence  de  Tyndareus  et  de  Ménélaos.  Sui- 
vant Éphore,  qui  admet  la  légende  d'une  conquête  rapide, 
0  Eurysthénès  et  Proclès  divisèrent  la  Laconie  en  six  lots, 
donnèrent  l'un,  avec  Amyclai  pour  chef-lieu,  à  Philonomos 
qui  leur  avait  livré  le  pays,  puis  choisirent  Sparte  pour  leur 
résidence  et  envoyèrent  des  lieutenants  régner  dans  les  autres 
villes,  leur  permettant,  vu  l'état  de  dépopulation  du  pays,  d'y 
accueillir  les  étrangers  qui  voudraient  s'y  établir.  »  Il  y  a  de 
fortes  raisons  de  croire  que  la  conquête  fut  lente  et  succes- 
sive. Les  anciens  habitants  restèrent  longtemps  en  posses- 
sion du  territoire;  mais  peu  à  peu,  les  Doriens,  d'abord  con- 
centrés dans  leur  campement  de  Sparte,  s'établirent  à  côté 
d'eux  ou  à  leur  place.  Quant  aux  Hilotes,  on  ne  sait  s'ils 
étaient  Achaiens  ou  Lélèges,  mais  les  Messèniens,  qui  gros- 
sirent plus  tard  le  nombre  des  Hilotes,  étaient  de  race  do- 
rienne.  Cette  race  entrait  donc  comme  élément,  quoique 
sans  doute  en  proportions  inégales,  dans  toutes  les  parties  de 
la  population. 

U  y  avait  en  Crète,  comme  en  Thessalie  et  en  Laconie,  une 
classe  militaire  possédant  seule  des  droits  pplitiques,  et  une 
classe  de  serfs  attachés  à  la  culture  du  sol.  Mais  c'est  seule- 
ment par  analogie  qu'on  attribue  à  la  conquête  dorienne  celte 
division  que  les  Cretois  eux-mêmes  rapportaient  à  Minos. 
Dans  rOdyssée,  Homère  énumère  les  races  qui  habitent  la 
Crète,  et  à  côté  des  Éléocrètes,  ou  vrais  Cretois,  il  nomme  les 
Kydoniens,  les  Doriens  et  les  illustres  Pélasges,  sans  attribuer 
à  une  de  ces  races  une  suprématie  sur  les  autres.  Il  est  pos- 
sible que  les  colons  venus  de  Sparte  et  d'Argos  en  Crète 
après  le  retour  des  Hèracléides  aient  constitué  une  noblesse 
militaire  en  soumettant  l'ancienne  population,   mais  aucun 


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222  LA  POPULATION  EN  CRÈTE. 

témoignage  ne  permet  de  Taffirmer,  et  rien  ne  prouve  que  la 
hiérarchie  des  classes  fût  fondée  sur  une  différence  de  races. 
Cette  hiérarchie,  quelle  qu'en  fût  l'origine,  est  crûment  ex- 
posée dans  une  chanson  Cretoise,  le  scolion  d'Hybrias  :  «  J'ai 
pour  richesse  ma  grande  lance  et  mon  glaive  et  mon  beau 
bouclier,  rempart  de  ma  chair.  C'est  avec  cela  que  je  laboure, 
que  je  moissonne,  que  j'exprime  le  doux  jus  de  la  vigne  et 
que  je  suis  appelé  le  maître  de  la  \fnoia.  Et  ceux  qui  n'osent 
pas  porter  la  lance  et  le  beau  bouclier,  tous,  à  genoux  devant 
moi,  m'honorent  comme  un  maître  et  m'appellent  le  grand 
roi.  »  La  Mnoia  était  le  domaine  de  l'État,  cultivé  par  les 
Mnoïtes,  ou  esclaves  publics,  pour  l'entretien  de  l'armée.  Les 
serfs  employés  sur  les  terres  des  particuliers  s'appelaient 
Aphamiotes,  mot  dont  la  signification  est  douteuse,  ou  Clë- 
poles,  parce  que  les  prisonniers  de  guerre  étaient  tirés  au  sort. 
Il  y  avait  en  outre  dans  les  villes  Cretoises  des  domestiques 
achetés  à  prix  d'argent. 

Thirlwall  admet  que  les  Périœkes,  ou  ruraux,  formaient,  en 
Crète  comme  en  Laconie,  une  classe  de  sujets  dont  les  terres 
étaient  soumises  à  un  tribut,  mais  dont  les  personnes  étaient 
libres.  Il  faut  remarquer,  cependant,  qu'Aristote  emploie  tou- 
jours le  mot  d'esclaves  en  parlant  des  paysans  crétois.  Grole 
en  conclut  qu'il  n'y  avait  pas  en  Crète  comme  en  Laconie  une 
classe  intermédiaire  entre  les  citoyens  et  les  serfs  ;  selon  lui, 
les  Périœkes  crétois  sont  les  Clèrotes  et  les  Mnoïtes,  et  répon- 
dent, non  pas  aux  Périœkes  laconiens,  mais  aux  Hilotes,  si  ce 
n'est  qu'ils  étaient  mieux  traités.  Il  paraît  qu'en  effet  leur 
condition  n'était  pas  mauvaise,  car  ils  ne  tentèrent  jamais 
d'insurrection,  comme  le  firent  souvent  les  Pénestes  de  Thes- 
salie  et  les  Hilotes  de  Sparte.  Selon  Aristote,  les  Crétois  accor- 
daient à  leur  serfs  la  jouissance  de  tous  les  autres  droits  et 
leur  interdisaient  seulement  la  gymnastique  et  le  port  d'armes. 
«  Les  Périœkes,  dit-il,  dans  un  autre  passage,  paient  leurs 
redevances  en  grains,  bestiaux  et  argent.  Une  partie  de  ces 
redevances  sert  au  culte  des  Dieux  et  aux  charges  com- 
munes, l'autre  est  employée  aux  dépenses  des  repas  publics, 
de  manière  qu'hommes,  femmes  et  enfants,  tous  sont  nourris 
aux  frais  de  l'État.  » 


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ÉDUCATION  MILITAIRE  DES  CRETOIS.  223 

Éducation  militaire  et  institutions  politiques  des 
Cretois.  —  Les  citoyens,  c'est-à-dire  les  citadins,  les  habitants 
des  villes,  débarrassés  du  souci  de  leur  subsistance  et  de  celle 
de  leur  famille,  s'exerçaient  au  maniement  des  armes  et  com- 
posaient la  force  armée,  la  garde  civique.  De  tout  temps  la 
Crète  fut  renommée  pour  ses  archers  comme  la  Thessalie  pour 
ses  cavaliers.  Ephore,  cité  p*ar  Strabon,  nous  donne  des  détails 
sur  Téducation  toute  militaire  des  Cretois,  qui  ressemblait 
beaucoup  à  celle  des  Spartiates.  Les  enfants  étaient  de  bonne 
heure  accoutumés  aux  exercices  du  gymnase,  au  tir  de  l'arc,  à 
la  danse  armée  qu'on  nommait  pyrrhique  ou  Cretoise  ;  ils  ap- 
prenaient par  cœur  des  chants  nationaux.  Le  môme  vêtement 
leur  servait  pour  l'été  et  pour  l'hiver.  Ils  accompagnaient  leurs 
pères  dans  les  réfectoires  destinés  aux  repas  communs,  et  les 
plus  jeunes  faisaient  le  service  des  tables.  A  dix-huit  ans,  ils 
étaient  soumis  à  une  discipline  plus  sévère  ;  ils  formaient  des 
troupes  qui,  à  des  jours  fixés,  se  livraient  bataille  au  son  des 
flûtes  et  des  lyres,  non  seulement  à  coups  de  poing,  mais 
avec  des  armes.  Ils  devaient  se  marier  à  l'âge  fixé  par  la  loi, 
mais  la  femme  ne  suivait  son  mari  que  lorsqu'elle  était  en  état 
de  diriger  la  maison.  Aristote  parle  d'une  loi  de  divorce  et  de 
mesures  pour  arrêter  Taccroissement  de  la  population.  L'in- 
gérence de  l'État  dans  les  relations  privées  semble  tyrannique, 
mais  les  citoyens  étant  des  soldats  devaient  être  soumis  à  la 
discipline  d'une  garnison.  D'après  Éphore,  les  Cretois  avaient 
élevé  à  la  hauteur  d'une  institution  ces  amitiés  passionnées, 
inconnues  d'Homère,  glorifiées  par  Platon,  et  qui  suffiraient 
pour  justifier  les  anathèmes  des  Pères  de  l'Eglise  contre  la  ci- 
vilisation grecque.  Ennius  accuse  les  gymnases  :  il  faut  sur- 
tout accuser  ce  militarisme  à  outrance  qui  faisait  de  chaque 
cité  une  caserne.  La  réputation  des  Cretois  sous  le  rapport 
moral  était  très  mauvaise  ;  ils  passaient  pour  menteurs  et 
avides  de  gain.  Ils  auraient  pu  s'enrichir  par  le  commerce  en 
profitant  de  l'admirable  situation  de  leur  île.  Selon  Thucydide, 
la  Crète  avait  été,  sous  le  règne  de  Minos,  le  siège  d'un  empire 
maritime  qui  s'étendait  sur  les  îles  de  la  mer  Egée  ;  mais  du 
temps  d'Ephore,  les  Cretois  n'avaient  plus  de  marine.  Comme 
on  ne  leur  apprenait  que  le  métier  des  armes,  ils  prirent  de 


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224  INSTITUTIONS  POLITIQUES  DE  LA  CRÈTE, 

bonne  heure  l'habitude  de  s^engager  comme  mercenaires.  A 
Tépoque  macédonienne,  il  y  eut  dans  toutes  les  armées  des 
archers  crétois. 

Llnsignifiance  de  la  Crète  dans  les  temps  historiques  est 
encore  plus  extraordinaire,  dit  Thirlwall,  que  Téclat  passager 
qu'elle  avait  jeté  dans  les  temps  héroïques.  D'après  le  Cata- 
logue de  l'Iliade,  la  Crète  aux  cent  villes  avait  envoyé  au  siège 
de  Troie  quatre-vingt  vaisseaux  commandés  par  Idomèneus, 
fils  de  Deucalion  et  petit-fils  de  Minos;  mais  Homère  place  à 
côté  d'Idomèneus,  et  presque  sur  le  même  rang,  son  com- 
pagnon Mèrionès,  qui,  d'après  Diodore,  était  son  cousin.  La 
Crète  semble  n'avoir  jamais  eu  d'unité  politique,  si  ce  n'est 
peut-être  à  l'époque  de  Minos.  On  ne  sait  pas  quand  la  royauté 
y  fut  abolie,  mais  pendant  toute  la  période  historique  on  voit 
chaque  ville  Cretoise  gouvernée  par  dix  magistrats  appelés 
Cosmes,  c'est-à-dire  ordonnateurs.  Ils  étaient  élus  pour  un  an 
par  tous  les  citadins,  mais,  d'après  Aristote,  l'éligibilité  était  le 
privilège  de  certaines  familles.  Ils  étaient  assistés  par  un  sénat 
ou  conseil  de  trente  membres  élus  à  vie  parmi  les  Cosmes 
sortis  de  charge.  Il  y  avait  des  assemblées  générales  où  tous 
les  citadins  avaient  droit  de  suffrage,  mais  sans  initiative;  ces 
assemblées  se  bornaient  à  ratifier  les  résolutions  combinées 
des  Cosmes  et  du  sénat.  Il  n'existait  aucun  lien  fédéral  entre 
les  villes  Cretoises,  Cnossos,  Gortyne^  Kydonia,  Lyctos,  qui 
étaient  à  peu  près  de  même  importance  et  guerroyaient  sou- 
vent les  unes  contre  les  autres. 

Sparte,  type  de  la  cité  militaire.  —  L'unité  politique 
qui  manqua  toujours  à  la  Crète  fut  la  principale  cause  de  la 
puissance  de  Sparte.  La  monarchie,  qui  est  la  forme  naturelle 
de  l'unité,  répugnait  à  l'esprit  d'indépendance  des  Grecs;  les 
Spartiates  conservèrent  la  royauté  des  temps  héroïques,  mais 
en  la  divisant.  Ce  n'était  pas  une  monarchie,  mais  une  diarchie 
héréditaire  dans  deux  familles  hèràcléides  que  la  tradition  rat- 
tachait aux  frères  jumeaux  Ulurysthénès  et  Proclès.  La  rivalité 
qui  exista  toujours  entre  les  deux  familles  royales  écartait  le 
danger  du^despotisme.  Les  rois  de  Sparte  se  nommaient  Archa- 
gètes;  leur  seul  privilège  sérieux  était  le  commandement  mili- 
taire. Le  prestige  attaché  à  la  descendance  d'Héraclès  empêcha 


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SPARTE,   TYPE  DE  LA  CITÉ  MILITAIRE.  225 

des  dynasties  rivales  de  s'élever  dans  les  villes  lakédaimo- 
niennes  autres  que  Sparte  qui  devint,  comme  résidence  des 
rois  hèracléides,  la  capitale  de  la  Laconie.  Les  Spartiates  for- 
maient une  classe  dirigeante.  Si  les  ruraux  avaient  eu  des 
droits  politiques,  ils  seraient  devenus  les  maîtres  par  la  supé- 
riorité du  nombre,  comme  on  le  voit  par  notre  système  de  dé- 
légation représentative,  où  le  vote  des  villes  est  noyé  dans 
celui  des  campagnes.  Les  Spartiates  considéraient  tout  le  ter- 
ritoire laconien  comme  la  Périœkie  ou  banlieue  de  Sparte. 
Dans  cette  banlieue,  il  y  avait  des  villages,  môme  des  villes, 
mais  Sparte  était  la  Cité,  ses  habitants  étaient  les  citadins  ou 
citoyens. 

Sparte  offre  le  type  le  plus  complet  d'une  république  mili- 
taire. Pendant  toute  la  période  historique,  elle  resta  ce  qu'elle 
avait  été  à  l'époque  de  l'établissement  des  Doriens,  le  camp 
d'une  armée  -d'occupation  en  pays  étranger.  Dans  un  pays  oc- 
cupé militairement,  tous  les  droits  politiques  des  habitants 
sont  supprimés.  L'armée  est  entretenue  par  le  territoire  qu'elle 
occupe  et  qu'elle  protège  ;  si  les  habitants  se  tiennent  en  repos 
ils  peuvent  cultiver  leurs  propriétés  et  exercer  leurs  indus- 
tries; s'ils  se  soulèvent,  ils  aggravent  leur  condition.  Tel  fut 
l'état  de  la  Laconie  pendant  près  de  cinq  siècles.  Les  habitants, 
qu'on  nommait  dans  leur  ensemble  Lacones  ou  Lakédaimo- 
niens,  formaient  trois  classes  :  les  Spartiates,  composant  la 
force  armée,  la  noblesse  militaire;  les  Périœkes,  propriétaires 
libres  établis  dans  les  villes,  et  les  Hilotes,  dispersés  dans  les 
champs  et  les  fermes,  et  cultivant,  comme  serfs,  paysans  et 
fermiers,  les  terres  des  Spartiates,  probablement  aussi  celles 
des  Périœkes.  Cette  situation  se  rattachait  originairement  à  la 
conquête,  et  c'est  pour  cela  sans  doute  qu'Hellanicos  attribue 
la  constitution  Spartiate  aux  deux  premiers  rois  hèracléides 
Eurysthénès  et  Proclès.  Mais  tous  les  autres  auteurs,  d'après  la 
tradition  des  Spartiates  eux-mêmes,  ont  rattaché  cette  consti- 
tution au  nom  de  Lycurgue.  D'après  Hérodote,  Sparte  avait  été 
jusqu'à  Lycurgue  l'État  le  plus  mal  ordonné  de  toute  la  Grèce. 
Thucydide,  sans  nommer  Lycurgue,  parle  aussi  d'une  longue 
période  de  désordre  et  de  luttes  intérieures,  qui  ne  se  termina 
que  par  une  énergique  réglementation.  Le  véritable  fondateur 

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226  LYCURGUE. 

de  la  grande  cité  militaire  de  Sparte,  ce  n'est  pas  le  chef  de 
clan  qui  vint  s'installer  avec  une  troupe  de  bandits  sur  le  do- 
maine abandonné  des  Pélopides,  c'est  le  réformateur  assez 
courageux  pour  imposer  à  ces  bandits  une  discipline  éga- 
litaire,  et  assez  habile  pour  leur  faire  comprendre  qu'il  était 
de  leur  intérêt  de  s'y  soumettre  et  de  leur  honneur  d'y  per- 
sévérer. 

Lycurgue.  —  Plutarque,  au  commencement  de  la  biogra- 
phie de  Lycurgue,  avoue  qu'on  ne  sait  absolument  rien  de  cer- 
tain sur  sa  vie  ni  sur  son  œuvre  :  «  Il  y  a,  dit-il,  différents  ré- 
cits au  sujet  de  sa  naissance,  de  ses  voyages,  de  sa  mort,  et 
aussi  de  ses  actes  comme  politique  et  comme  législateur; 
c'est  sur  l'époque  où  il  vivait  qu'on  s'accorde  le  moins  ».  On 
disait  que  Lycurgue  appartenait  à  la  race  des  Hèracléides,  mais 
les  deux  familles  royales  le  revendiquaient  également.  D'après 
Hérodote,  il  avait  gouverné  Sparte  pendant  la  minorité  de  son 
neveu  Labotas,  de  la  branche  des  Agides,  tandis  que  les  autres 
récits  lui  donnent  pour  neveu  et  pour  pupille  Charilaos,  d  e 
la  branche  des  Eurypontides.  La  première  tradition  le  pla- 
cerait, selon  la  chronologie  admise,  vers  996  av.  J.-C.  ;  la  se- 
conde, vers  880.  Zeus  passait  pour  avoir  inspiré  les  lois  de 
Minos  ;  Lycurgue  mit  les  siennes  sous  le  patronage  d'Apol- 
lon. Quand  il  entra  dans  le  sanctuaire  de  Delphes,  la  Pythie 
hésita,  disait-on,  si  elle  devait  l'appeler  un  homme  ou  un  Dieu; 
quelques-uns  ajoutaient  môme  qu'elle  lui  avait  dicté  ses  lois. 
Cette  opinion  ne  pouvait  manquer  d*ôtre  admise  par  E.  Cur- 
tius,  qui  voitpartout  l'influence  occulte  d'une  prétendue  théo- 
cratie apollonienne.  Hérodote  s'en  tient  au  témoignage  des 
Spartiates,  qui  disaient  que  Lycurgue  avait  introduit  chez  eux 
des  institutions  empruntées  à  la  Crète.  Aristote  regarde  les 
lois  de  Lycurgue  comme  un  perfectionnement  de  celles  des 
Cretois.  Il  dit  qu'ayant  quitté  latutelle  du  roi  Charilaos,  Lycur- 
gue séjourna  longtemps  dans  la  ville  de  Lyctos,  colonie  laké- 
daimonienne  qui  avait  adopté  la  constitution  établie  en  Crète 
par  Minos.  Plus',  tard  on  lui  attribua  d'autres  voyages,  en  lonie, 
d'où  il  avait  rapporté  les  poèmes  d'Homère,  en  Egypte,  en 
Libye  et  jusque  dans  l'Inde.  On  raconta  des  détails  sur  sa  vie, 
sur  son  désintéressement  et  sa  modération,  sur  les  difficultés 


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LES  ROIS,   LE  SÉNAT,   LES  ÉPHORES.  227 

qu'il  eut  à  faire  accepter  ses  réformes;  on  disait  même  qu'il 
avait  eu  un  œil  crevé  dans  une  émeute.  Enfin  le  peuple  accepta 
ses  lois  en  jurant  de  les  observer  jusqu'à  son  retour,  et  le  sage, 
pour  enchaîner  ses  concitoyens  par  leur  serment,  se  con- 
damna à  mourir  en  exil.  Les  Spartiates  lui  rendirent  un  culte 
religieux  et  lui  élevèrent  uu  temple,  mais  ils  oublièrent  de 
bonne  heure  sa  véritable  histoire,  et  comme  ses  lois  n'avaient 
jamais  été  écrites,  qu'elles  consistaient  en  sentences,  p^rpai, 
confirmée  par  l'oracle  de  Delphes,  on  a  dû,  selon  la  remarque 
d'Heeren,  attribuer  au  législateur  des  instilutions  plus  ancien- 
nes, et  d'autres  plus  récentes  qu'on  mit  sous  son  nom  pour 
leur  donner  force  de  lois. 

Constitution  politique  de  Sparte  :  les  rois,  le  sénat, 
les  Éphores.  —  La  première  Rhètra  confirmait  la  division  du 
peuple  en  tribus  (9uXat)  et  districts  (wêa^î),  établissait,  à  côté 
des  rois  («px^'ï^'^*')»  u»  sénat  ou  conseil  de  vieillards  (-yepouaîa) 
et  fixait  le  lieu  de  réunion  des  assemblées  populaires  entre  le 
Babyke  et  le  Gnakion,  qui  étaient  deux  branches  de  l'Eurolas. 
Celte  constitution  très  simple  existait  déjà  dans  les  temps  hé- 
roïques, mais  il  est  possible  que  Lycurgue  lui  ait  donné  une 
forme  plus  régulière,  soit  en  fixant  à  trente  le  nombre  des 
sénateurs,  soit  en  déterminant  leurs  attributions.  Ils  devaient 
avoir  au  moins  soixante  ans,  et,  comme  en  Crète,  ils  étaient 
élus  à  vie  par  le  peuple.  Les  deux  rois  faisaient  partie  du 
sénat  dont  les  fonctions  étaient  à  la  fois  délibératives,  judi- 
ciaires et  executives.  L'assemblée  du  peuple,  qui  se  réunissait 
tous  les  mois  àla  nouvelle  lune,  approuvait  ou  rejetait  les  pro- 
positions du  sénat,  mais  sans  discussions  et  sans  amende- 
ments. Hérodote  attribue  à  Lycurgue  l'établissement  du  Con- 
seil des  cinq  Éphores,  mais  d'après  tous  les  autres  auteurs 
cette  magistrature  ne  fut  instituée  qu'un  siècle  plus  tard,  sous 
les  rois  Théopompos  et  Polydôros.  L'Éphorat  était  électif  et 
annuel  ;  peut-être  avait-il  existé  à  l'époque  de  Lycurgue  et 
môme  antérieurement,  avec  des  attributions  purement  judi- 
ciaires, mais  pendant  les  guerres  de  Messénie  il  prit  une  im- 
portance qui  alla  toujours  en  augmentant.  Les  rois,  réduits 
au  commandement  militaire  et  à  des  privilèges  honorifiques, 
furent  subordonnés  aux  Éphores  qui  formèrent  peu  à  peu  un 


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228  CONSTITUTION  POLITIQUE  DE  SPARTE. 

directoire  exécutif.  Le  pouvoir  des  Éphores  a  été  considéré 
tantôt  comme  despotique,  parce  qu'il  n'était  soumis  à  aucun 
contrôle,  tantôt  comme  populaire  parce  qu'il  était  renouvelé 
tous  les  ans  et  accessible  à  tous  les  citoyens.  «  Les  Ephores, 
dit  Cicéron,  servent  de  contre-poids  à  la  puissance  royale, 
comme  les  Tribuns  du  peuple  à  l'autorité  consulaire.  »  La 
constitution  de  Sparte,  quoiqu'elle  fût  une  des  moins  libéra- 
les, reposait  cependant  sur  le  principe  républicain  de  la  divi- 
sion du  pouvoir,  et,  comme  dans  toutes  les  cités  grecques,  les 
fonctions  publiques  y  étaient  entièrement  gratuites. 

On  a  répété  souvent,  d'après  Ottfried  MuUer,  que  les  institu- 
tions attribuées  à  Lycurgue  n'étaient  que  les  ancienes  coutu- 
mes des  Doriens  conservées  à  Sparte  et  érigées  en  lois.  Grote 
a  réfuté  cette  opinion  par  des  arguments  péremptoires.  Sparte 
diffère  autant  des  autres  cités  dotiennes,  Argos,  Corinthe,  Mé- 
gare,  Gnide,  Rhodes,  Kerkyra,  Tarente,  Syracuse,  qu'elle  dif- 
fère de  Thèbes  ou  d'Athènes.  Si  on  veut  trouver  des  traits 
communs  avec  Sparte,  il  faut  les  chercher  dans  d'autres 
républiques  militaires,  en  Thessalie  et  surtout  en  Grète.  Mais 
la  situation  géographique  de  Sparte,  les  luttes  qu'elle  eut  à  sou- 
tenir, d'abord  contre  les  autres  villes  laconiennes,  puis  con- 
tre Argos,  contre  Tégée,  contre  la  Messénie,  l'obligèrent  à 
s'imposer  une  discipline  dont  la  nécessité  ne  s'était  pas  fait 
sentir  en  Thessalie  ;  à  maintenir  des  institutions  qui,  chez  les 
Cretois  à  qui  elle  les  avait  empruntées,  tombèrent  prompte- 
ment  en  désuétude.  Gette  forte  éducation  fît  de  Sparte  la  pre- 
mière puissance  politique  de  la  Grèce.  Sa  prépondérance  après 
la  guerre  du  Péloponèse  dut  lui  attirer  de  la  part  du  peuple 
d'Athènes  les  accusations  qu'on  accueille  facilement  contre  un 
rival  heureux,  et  de  la  part  des  théoriciens  l'admiration  qui 
s'attache  toujours  au  succès .  Les  Spartiates  n'ayant  pas  écrit 
eux-mêmes  leur  histoire,  des  exagérations,  en  bien  ou  en 
mal,  ont  été  acceptées  indifféremment  à  titre  d'antithèses  lit- 
téraires, les  jugements  les  plus  contradictoires  peuvent  s'ap- 
puyer sur  des  témoignages,  et  la  critique  historique  n'a  pas 
toujours  les  moyens  de  discerner  la  vérité.  La  chronologie, 
quoique  bien  indécise  encore,  nous  vient  quelquefois  en  aide  : 
ainsi  on  ne  peut  admettre  que  Lycurgue  ait  interdit  la  monnaie 


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LÉGENDE  DU  PARTAGE  DES  TERRES.  229 

d'or  et  d'argent,  puisque  les  premières  monnaies  d'argent  ont 
été  frappées  par  Pheidon  d'Argos,  qui  est  postérieur  à  Lycur- 
gue,  et  que  les  premières  monnaies  d'or  ont  commencé  vers 
la  même  époque  à  circuler  dans  la  Grèce  d'Asie.  On  ne  peut 
pas  môme  attribuer  à  Lycurgue  la  division  du  peuple  en  trois 
classes  et  le  partage  des  terres  de  la  Laconie,  si,  comme  l'af- 
firme Pausanias,  la  soumission  des  villes  laconienes  ne  re- 
monte qu'au  règne  de  Téléclos  et  l'asservissement  des  Hilotes 
à  celui  de  son  fîls  Alcaménès. 

Légende  du  partage  des  terres.  —  A  l'époque  la  plus 
récente  où  on  puisse  placer  Lycurgue,  le  territoire  de  Sparte 
ne  comprenait  qu'une  très  petite  banlieue,  puisqu'Amyclai,  qui 
esta  quelques  stades,  n'en  faisait  pas  encore  partie.  C'est  pour 
les  habitants  de  ce  district  si  resserré  que  Lycurgue  fit  sa  légis- 
lation. Les  maux  auxquels  il  voulait  porter  remède  étaient  des 
désordres  intérieurs.  Il  y  avait  des  luttes  entre  les  rois  et  le 
peuple,  et  dans  le  peuple  môme  entre  les  riches  etles  pauvres. 
Il  établit  ou  reconstitua  le  Sénat  pour  restreindre  Paulorité 
royale.  Quanta  l'inégalité  des  richesses,  il  n'est  pas  impossible 
qu'il  ait  cru  y  remédier  par  un  nouveau  partage  des  terres, 
non  pas  de  toute  la  Laconie,  que  Sparte  ne  possédait  pas 
encore,  mais  du  petit  territoire  formant  la  commune  de  Sparte. 
Cependant,  môme  dans  ces  étroites  limites,  il  est  difficile 
d'admettre  qu'une  mesure  si  radicale  ait  été  prise  sans  qu'il  y 
soit  fait  aucune  allusion  par  Hérodote,  Thucydide,  Xénophon 
ou  Aristole.  Le  premier  auteur  qui  en  parle  est  Plutarque,  et 
il  étend  le  partage  à  toute  la  Laconie.  Il  donne  des  chiffres  très 
précis  :  9000  lots  pour  les  Spartiates,  30,000  pour  les  Périœkes. 
Selon  une  conjecture  de  Grote,  cette  légende  s'^^st  formée  à 
Tépoque  macédonienne,  sous  les  règnes  successifs  des  deux 
rois  socialistes  Agis  et  Cléoménès;  qui  voulaient  rétablir  la  dis- 
cipline de  Lycurgue,  et  probablement  par  l'influence  du  philo- 
sophe Sphairos,  leur  maître  et  leur  ami,  qui  rôvait  une  cité  de 
Stoïciens.  La  décadence  de  Sparte  venait  du  luxe  et  de  l'iné- 
galité des  richesses:. un  partage  égal  de  la  propriété  devait  y 
ramener  les  vertus  antiques.  On  se  persuada  que  Lycurgue 
avait  dû  procéder  ainsi.  La  tentative  la  plus  hardie  qui  ait 
jamais  été  faite  fut  mise  à  l'abri  de  ce  nom  vénéré  et  présentée 


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230  TENDANCES  COMMUxNISTES. 

par  ses  auteurs  comme  une  œuvre  de  réaction.  Il  arriva  quel- 
que chose  de  semblable  à  Jérusalem  quand  le  parti  des 
prophètes  mit  la  réforme  de  Josiah  sous  le  patronage  de 
Moïse  (1). 

Tendances  communistes.  Les  repas  publics.  —  Le 
nivellement  de  la  propriété,  quePlutarque  attribue  à  Lycurgue, 
aurait  été  une  mesure  économique  bien  insuffisante  k  moins 
d'être  fréquemment  renouvelée.  Lycurgue  fit  mieux;  en  pros- 
crivant le  luxe  sous  toutes  ses  formes,  il  essaya  de  rendre  la 
richesse  inutile  et  d'effacer  la  distinction  entre  les  riches  et 
les  pauvres,  distinction  dangereuse  dans  une  société  mili- 
taire. Toutes  ses  institutions  tendent  au  communisme  :  la 
défense  de  fermer  les  portes,  la  permission  accordée  à  chacun 
de  monter  sur  le  premier  cheval  qu'il  rencontrait,  d'emprunter 
pour  son  usage  les  domestiques  de  son  voisin,  ses  chiens  de 
chasse,  ses  instruments  de  cuisine  et  de  ménage,  et  môme,  si 
on  revenait  trop  tard  de  la  chasse,  d'entrer  chez  le  premier 
venu  en  son  absence  et  de  manger  ce  qui  s'y  trouvait.  Gela 
fait  comprendre  comment  un  philosophe,  grand  admirateur 
des  Spartiates,  a  pu,  sans  étonner  personne,  admettre  la 
communauté  des  biens  dans  son  plan  de  république  militaire. 
On  ne  saurait  être  surpris  non  plus  que,  dans  un  pays  où  la 
propriété  individuelle  n'existe  que  par  tolérance,  on  ait  pu, 
pour  habituer  les  enfants  aux  nécessités  de  la  vie  militaire,  les 
forcer  à  se  procurer  par  la  maraude  de  quoi  préparer  leurs 
repas.  Si  on  les  punissait  lors  qu'ils  se  laissaient  surprendre, 
c'était  par  mesure  de  discipline,  et  non  par  respect  pour  la 
propriété.  Sans  admettre  la  communauté  des  femmes,  les 
Spartiates  s'en  rapprochaient  beaucoup  en  permettant  à 
l'homme  qui  n'avait  pas  d'enfants  de  prêter  sa  femme  ou 
d'emprunter  celle  d'un  autre.  Cet  usage,  queXénophon  rapporte 
avec  une  approbation  manifeste,  explique  comment  Platon  a 
pu  songer  à  absorber  la  famille  dans  la  Cité  parla  communauté 
des  femmes  et  des  enfants.  Aristote,  dont  l'esprit  est  plus  pra- 
tique, trouve  l'éducation  des  femmes  à  Sparte  très  vicieuse. 
Les  gymnases  publics  pour  les  jeunes  filles  formaient  un 

(1)  Voir  mon  Histoire  des  Israélites  d'après  V exégèse  biblique. 


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LES  REPAS  PUBLICS.  231 

étrange  contraste  avec  la  sévère  retraite  du  gynécée  à  Athènes 
et  dans  le  reste  de  la  Grèce.  En  général,  les  coutumes  des 
Spartiates  différaient  tellement  de  celles  des  autres  Grecs, 
qu'ils  ont  dû,  pour  les  conserver,  s'interdire  les  voyages  et 
éloigner  les  étrangers  de  leur  pays. 

Les  repas  communs  sont  une  nécessité  delà  vie  militaire.  11 
n'y  aurait  pas  de  camaraderie  possible  entre  les  soldats  d'une 
garnison  si  les  plus  riches  se  faisaienî  servir  à  part  au  lieu  de 
s'asseoir  à  la  môme  table  que  les  pauvres  et  de  se  contenter 
de  la  nourriture  du  réfectoire.  Mais  il  y  avait  une  différence 
entre  les  repas  publics  des  Spartiates  et  ceux  des  Cretois:  en 
Crète,  les  tables  communes  étaient  entretenues  par  l'État;  à 
Sparte,  elles  étaient  à  la  charge  des  particuliers.  Aristotc 
signale  celte  différence,^  qui  n'était^  pas  à  l'avantage  des 
Spartiates  et  d'où  résultèrent  plus  tard  de  graves  inconvénients. 
Sans  admettre  le  remaniement  général  de  la  propriété  attri- 
bué à  Lycurgue  par  Plularque,  on  peut  croire  que  des  terres 
restées  indivises  furent  partagées  entre  les  citoyens  pauvres 
pour  leur  permettre  de  fournir  aux  repas  publics  une  quote- 
part  spécifiée  de  farine  d'orge,  devin,  de  fromage,  de  figues, 
.et  une  petite  contribution  en  argent  pour  les  assaisonnements. 
Chacun  pouvait  de  plus  envoyer  aux  tables  communes  les  pro- 
duits de  sa  chasse  dans  les  forôts  de  Tèygétès  et  la  viande  des 
victimes  qu'il  offrait  en  sacrifice.  On  s'asseyait  quinze  à  la 
môme  table,  et  les  groupes  se  formaient  comme  dans  nos 
cercles  d'officiers  par  le  libre  choix  des  convives,  dont  le  con- 
sentement unanime  était  requis  pour  l'admission  d'un  nouveau 
membre.  On  ne  pouvait  se  dispenser  d'assister  aux  repas 
communs,  et  longtemps  après,  le  roi  Agis  fut  réprimandé  et 
puni  pour  avoir  voulu,  au  retour  d'une  expédition  militaire, 
dîner  seul  avec  sa  femme. 

Éducation.  Discipline.  Tactique  militaire.  —  Dans  les 
monastères  chrétiens  et  bouddhistes,  la  propriété  est  commune 
et  la  famille  est  supprimée  par  les  vœux  de  célibat.  Dans  nos 
armées  modernes,  on  peut  interdire  le  mariage  aux  soldats, 
parce  que  le  service  militaire  ne  dure  que  peu  d'années.  Mais 
à  Sparte,  chaque  citoyen  restait  soldat  tant  qu'il  était  valide,  et 
la  Cité  militaire  ne  pouvait  se  recruter  que  par  les  enfants  de 


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232  ÉDUCATION  ET  DISCIPLINE» 

troupe.  11  fallait  donc  conserver  la  famille,  et  tout  ce  qu'on 
pouvait  faire  c'était  de  la  subordonner  à  TÉtat.  Considéré 
comme  soldat  futur,  Tenfant  appartenait  à  la  République 
plutôt  qu'à  ses  parents.  A  sa  naissance,  s'il  était  difforme  ou 
trop  chétif,  on  le  portait  sur  le  Tèygétès  pour  débarrasser  l'État 
d'une  charge  inutile,  ou  peut-être,  comme  le  croit  Curtius, 
pour  le  faire  élever  avec  les  enfants  des  Périœkes,  comme  inca- 
pable de  supporter  l'austère  éducation  imposée  aux  Spartiates, 
éducation  qui  commençait  presque  dès  le  berceau  et  qui  formait 
la  parlie  la  plus  importante  de  l'œuvre  de  Lycurgue.  Si  on  re- 
garde le  bien-ôtre  matériel  comme  le  but  suprême  de  la  vie  et  la 
mesure  de  la  civilisation,  on  peut  à  peine  comprendre  ce  dédain 
pour  le  plaisir,  cette  indifférence  pour  la  douleur,  cette  héroïque 
patience,  cette  obéissance  volontaire  à  une  règle  despotique, 
qui  rendait  la  vie  ducitoyenplus  difficile  quecelled'un  esclave. 
Dans  nos  sociétés  énervées,  où  le  luxe  et  la  mollesse  sont  la 
religion  "du  riche  et  l'ambition  du  pauvre,  on  préférerait  la 
condition,  je  ne  dis  pas  seulement  des  Périœkes,  mais  des 
Hiloles,  à  l'implacable  discipline  de  leurs  tyrans  ascétiques. 
Etrange  aristocratie,  qui  avait  pour  privilège  une  perpétuelle 
immolation  de  chacun  à  tous,  une  absorption  complète  de 
toutes  les  volontés  en  une  seule  volonté,  une  soumission  ab- 
solue au  plus  impérieux  de  tous  les  maîtres,  le  devoir.  Nulle 
place  pour  l'intérêt  privé;  un  seul  amour,  la  patrie  ;  sacrifice 
perpétuel  de  toutes  les  affections,  de  toutes  les  espérances, 
dévouement  sans  bornes,  dans  la  paix  comme  dans  la  guerre, 
dans  la  vie  comme  dans  la  mort. 

Ne  craignons  pas  que  Sparte  ait  jamais  d'imitateurs  :  de  tels 
exemples  ne  sont  pas  contagieux. -Personne  ne  voudrait  vivre 
dans  cette  Cité  d'athlètes,  dans  celte  fraternelle  communion 
d'égaux,  où  toutes  les  pensées,  tous  les  désirs  se  confondaient 
dans  la  grande  âme  collective  de  la  patrie.  Personne  ne  voudrait 
soumettre  ses  fils  à  la  dure  discipline  de  cette  sobre  et  silen- 
cieuse jeunesse,  vêtue  à  la  légère  en  toute  saison,  couchant 
sur  des  roseaux,  n'ayant  pour  se  nourrir  que  les  produits 
hasardeux  de  la  maraude,  exercée  par  des  chefs  toujours 
choisis  par  elle  à  toutes  les  luttes,  à  toutes  les  privations,  à 
toutes  les  fatigues,  et  déchirée  sans  pitié  par  le  fouet  sanglant 


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ÉDUCATION   ET  DISCIPLINE. 


233 


d*Artémis.  C'est  ainsi  que  se  formaient  ces  générations  d'ado- 
lescents robustes,  toujours  en  armes,  fiers  de  leur  sauvage 
beauté,  peignant  leurs  cheveux  et  se  couronnant  de  fleurs  le 
matin  des  batailles,   marchant  à  la  mort  comme  à  une  fête. 


statue  d'Ares  (l'Achille  Borghëse  du  Louvre). 

L'anneau  qui  entoure  la  jambe  droite,  au-dessus  de  la  cheville,  est  percé  d'un  trou 
dans  lequel  on  voit  la  trace  d'une  chaîne  de  métal.  Selon  Pausanias,  il  y  avait  à 
Sparte  une  statue  d'Ares  enchaîné.  De  même  que  les  Athéniens  représentaient  la 
Yictoire  sans  ailes,  pour  la  fixer  parmi  eux,  les  Spartiates  enchaînaient  la  statue  du 
dieu  de  la  guerre,  pour  maintenir  la  paix. 

avec  des  hymnes  aux  Muses,  et  vêtus  de  rouge,  pour  ne  pas 
donner  à  Tennemilajoie  de  voir  couler  leur  sang.  Au  gymnase. 


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234  TACTIQUE  MILITAIRE. 

au  champ  de  manœuvres,  les  citoyens  qui  ont  passé  l'âge  de 
porter  les  armes  surveillent  les  exercices  militaires  de  la  géné- 
ration nouvelle,  et  chaque  soldat  a  tous  les  droits  d*un  père 
sur  chacun  des  enfants  de  la  patrie.  Quant  aux  femmes,  on  ne 
leur  demande  que  de  faire  des  héros  :  au  jour  des  luttes- 
nationales,  chaque  mère  armera  fièrement  son  fils  et  lui 
montrera  la  route  du  devoir,  sans  regrets  et  sans  larmes  : 
«  Rapporte  ton  bouclier  ou  qu*on  te  rapporte  dessus.  »  Dans 
cet  immense  concours  d'abnégation,  il  faut  qu'elles  aient  aussi 
leur  part  de  souffrances  muettes,  et  qu'elles  offrent  le  sang  de 
leur  cœur  en  holocauste  sur  Tautel  dévorant  de  la  loi. 

On  s'étonne  que  tout  un  peuple  ait  pu  se  soumettre  volon- 
tairement et  pendant  des  siècles  à  une  discipline  si  tyrannique  : 
c'est  que  cette  discipline  assurait  la  suprématie  des  Spartiates 
sur  tous  leurs  rivaux.  Quand  les  autres  Grecs  ne  connaissaient 
encore  que  de  'confuses  mêlées,  ou  ces  combats  individuels 
décrits  dans  l'Iliade,  les  Spartiates  eurent  les  premiers  une 
tactique  régulière.  L'infanterie  pesamment  armée,  le  corps  des 
Hoplites,  était  leur  force  principale.  Partagés  en  compagnies  de 
25,  32  bu  36  hommes  appelées  Enomoties,  ils  chargeaient  en 
rangs  serrés,  la  lance  en  avant.  On  leur  apprenait  à  observer 
l'ensemble  dans  la  marche  à  quitter  rapidement  la  ligne  pour 
prendre  la  file,  à  faire  conversion  à  droite  ou  à  gauche.  Leur 
pas  était  réglé  par  le  fifre,  et  si  l'ordre  était  dérangé  par  quelque 
accident  imprévu,  les  soldats  dispersés  reprenaient  leurs  rangs, 
chaque  homme  connaissant  parfaitement  sa  place  et  son  chef 
de  file.  Les  ordres  donnés  par  le  roi,  commandant  en  chef, 
étaient  rapidement  transmis  par  l'échelle  des  divisions  et  la 
hiérarchie  des  officiers,  et  simultanément  exécutés  par  toutes 
les  compagnies.  L'habitude  delà  Pyrrhique,  ou  danse  guerrière, 
rendait  les  évolutions  faciles  et  promptes.  Les  soldats,  exercés 
d'avance  à  toutes  les  manœuvres,  y  apportaient  une  précision 
qui  faisait  regarder  les  Spartiates  comme  des  artistes  dans  les 
choses  militaires.  Mais  il  fallait  pour  cela  n'avoir  pas  à  s'oc- 
cuper d'autre  chose.  Dans  presque  tous  les  autres  pays  grecs, 
les  mômes  hommes  étaient  alternativement  soldats  en  temps 
de  guerre,  artisans  ou  laboureurs  en  temps  de  paix.  Un 
Spartiate  ne  pouvait  avoir  d'autre  métier  que  celui  de  soldat. 


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SOUMISSION  DE  LA  LACONIE.  235 

Dans  une  Cité  militaire,  il  faut  que  Tarmée  soit  nourrie  par  les 
travailleurs,  qui  se  trouvent  par  cela  môme  réduits  à  une  con- 
dition servile,  car  le  signe  distinctif  de  l'esclavage  aux  yeux 
des  Grecs,  c'était  de  travailler  pour  autrui. 

Soumission  de  la  Laconie.  —  La  discipline  de  Lycurgue, 
en  donnant  aux  Spartiates  une  force  militaire  supérieure  à 
celle  de  leurs  voisins,  eut  pour  conséquence  la  sujétion  des 
Périœkes  et  l'asservissement  des  Hilotes.  Sauf  quelques  rares 
indications  éparses  dans  Pausanias,  on  ne  sait  rien  des  luttes 
qui  amenèrent  la  soumission  de  toute  la  Laconie.  Pharis,  Gé- 
ronthrai  et  Amyclai  étaient  restées  achaiennes  jusqu*au  temps 
du  roi  Téléclos.  Les  habitants  de  Pharis  et  de  Géronthnai  n'es- 
sayèrent pas  de  résister  et  quittèrent  le  Péloponnèse.  La  con- 
quête d* Amyclai  fut  plus  difficile,  et  les  Spartiates  ne  s'en 
emparèrent  qu'après  une  résistance  assez  longue.  Clavier  croit 
que  les  habitants  se  retirèrent  en  Italie,  car  il  y  avait  entre 
Gaëte  etTerracine  une  ville  d'Amyclai,  qui,  selon  Servius,  avait 
été  fondée  par  les  Lacônes.  On  n'a  aucun  renseignement  sur 
la  conquête  des  autres  villes  laconiennes,  Gytheion,  The- 
rapnai,  etc.,  ni  sur  celle  de  l'île  de  Kythéra  et  de  la  Kynourie, 
qui  formait  la  région  maritime  (^  l'est  du  mont  Parnon.  Les 
territoires  de  Pharis,  de  Géronthrai  et  d'Amyclai  furent  par- 
tagés entre  les  Spartiates  pauvres.  Il  est  probable  qu'il  en  fut 
de  même  dans  d'autres  parties  du  territoire  laconien.  Même 
au  temps  de  sa  plus  grande  puissance,  Sparte  ne  fut  jamais 
entourée  de  murailles;  rien  ne  la  séparait  de  sa  banlieue.  L'in- 
fériorité politique  des  Périœkes  n'était  pas  fondée  sur  une 
différence  de  race  ;  elle  résultait  naturellement  de  leur  éloi- 
gnement  de  la  capitale.  Les  Périœkes  n'auraient  pu  prendre 
part  aux  repas  cortimuns  ni  aux  assemblées  périodiques,  ni 
aux  élections  d'Ephores  et  de  sénateurs.  Mais  ils  devaient  être 
exercés  dans  une  certaine  mesure  à  la  tactique  militaire, 
puisqu'il^  étaient  employés  comme  hoplites  dans  l'armée, 
dont  ils  formaient  la  partie  la  plus  considérable  ;  les  Spartiates 
considérés  comme  une  troupe  d'élite,  passaient  pour  les  plus 
braves  parmi  les  braves  Lakédaimoniens. 

Pausanias  rapporte  la  prise  d'Hélos  au  règne  d'Alcaménès, 
tils  de  Téleclos.  La  ville  maritime  d'Hélos  était  devenue  un 


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236  LUTTES  CONTRE  LES  ARGEIENS. 

centre  de  résistance  ou  de  révolte  des  populations  rurales  sou- 
tenues par  les  Argeiens.  Il  n'y  eut  pas  de  capitulation,  les 
habitants  furent  réduits  en  servitude  et  le  nom  d*Hilotes  fut 
étendu  dans  la  suite  à  tous  les  serfs  de  la  Laconie.  Telle  est 
du  moins  Texplication  qu'on  a  généralement  donnée  de  ce 
nom,  quoique,  d'après  une  étymologie  plus  vraisemblable,  il 
ait  le  sens  de  captifs.  Nous  ne  savons  pas  quelle  avait  été  la 
condition  des  paysans  dans  la  période  achaienne  ;  quand  les 
Doriens  s'établirent  sur  le  domaine  des  Pélopides,  ceux  qui  le 
cultivaient,  probablement  des  Lélèges,  payèrent  aux  nouveaux 
propriétaires  la  redevance  accoutumée.  Mais  le  caractère  des- 
potique des  Spartiates,  en  rendant  la  sujétion  plus  lourde, 
provoqua  des  révoltes  comme  celle  d'Hélos.  et  le  servage  passa, 
comme  le  dit  Pline,  pour  une  invention  des  Lakédaimoniens. 
Les  Hilotes  étaient  attachés  au  sol  et  ne  pouvaient  être  vendus 
hors  du  pays.  Ils  payaient  une  partie  du  produit  de  leurs  récoltes  ; 
mais  ce  fermage  était  fixe  et  modéré.  Ils  étaient  esclaves  de 
l'État  et  n'avaient  pas,  comme  les  Pénestes  de  Thessalie,  des 
maîtres  particuliers.  11  faut  croire  cependant  que  quelques-uns 
étaient  employés  au  service  domestique,  car  Xénophon  et 
Aristote  nous  disent  que  les  Spartiates  se  servaient  des  esclaves 
les  uns  des  autres.  Les  Hilotes  combattaient  comme  troupes 
légères  dans  les  armées  lakédaimoniennes  ;  ils  pouvaient 
môme  obtenir  la  liberté  en  récompense  de  leurs  services.  Mais 
l'orgueil  irritant  des  Spartiates  rappelait  continuellement  les 
Hilotes  au  sentiment  de  leur  dépendance.  Les  Argeiens,  qui 
n'avaient  pas  de  serfs,  poussaient  les  serfs  de  Sparte  à  la 
révolte.  Les  Spartiates  se  sentaient  détestés  et  redoublaient  de 
défiance.  Leur  faiblesse  numérique  les  forçait  à  rester  tyrans 
sous  peine  de  devenir  esclaves,  à  prolonger  indéfiniment  une 
sorte  d'état  de  siège,  à  se  tenir  toujours  en  garde  contre  un 
soulèvement. 

Luttes  contre  les  Arg^eiens.  —  Pheidon.  —  Le  mon- 
nayage —  La  conquête  de  la  Laconie  n'avait  été  accomplie 
que  par  étapes  successives,  entremêlées  de  luttes  contre  les 
Argeiens,  les  Messéniens  et  les  Arcadiens.  Au  commencement 
de  la  période  historique,  Argos  paraît  avoir  été  la  puissance 
prépondérante  du  Péloponnèse;  Sparte  ne  venaitqu'en  seconde 


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PHEIDON.   —  LE  MONNAYAGE.  237 

ligne  ;  dans  la  légende  de  la  conquôte  dorienne,  Argos  est  le 
lot  de  Téménos,  Talné  des  Hèracléides.  Argos  était  à  la  tête 
d'un  groupe  important  de  cités  doriennes,  Sikyone,  Cléonai, 
Phlious,  Troizen,  Épidaure,  Aigine.  Le  Dieu  protecteur  de 
cette  confédération,  Apollon  Pythaieus,  avait  son  sanctuaire 
8UP  l'acropole  d'Argos.  Mais  ce  lien  fédéral  s'affaiblit  de  plus 
en  plus,  tandis  que  Sparte,  par  la  conquôte  graduelle  de  la 
Laconie,  devenait  le  chef-lieu  d'un  État  fortement  centralisé. 
La  puissance  d'Argos  atteignit  son  apogée  sous  le  règne  de 
Pheidon,  qu'on  nomme  quelquefois  tyran,  non  pas  qu'il  eût 
usurpé  le  trône,  car  il  appartenait  à  la  dynastie  Téménide, 
mais  parce  qu'il  s^était  affranchi  des  restrictions  apportées  à 
l'autorité  royale  sous  ses  prédécesseurs. 

On  n'est  pas  d'accord  sur  la  date  de  Pheidon.  Pausanias  le 
place  à  la  huitième  Olympiade  (747  avant  J.-C),  mais  quelques 
auteurs  croient  le  texte  altéré  et  lisent  la  vingt-huitième  Olym- 
piade. Par  suite  de  celte  incertitude,  on  ne  sait  s'il  faut  attribuer 
à  Pheidon  l'invention  du  monnayage  ou  seulement  son  intro- 
duction en  Grèce.  Hérodote  parle  de  Pheidon  comme  ayant 
établi  un  système  de  poids  et  de  mesures  dans  le  Péloponnèse, 
mais  il  ne  parle  pas  de  la  monnaie,  et  dans  un  autre  passage 
il  en  attribue  l'invention  aux  Lydiens.  Les  mesures  pheido- 
niennes,  destinées  à  faciliter  les  transactions  commerciales 
avec  l'Asie,  étaient  probablement  empruntées  aux  Phéniciens, 
qui  les  avaient  reçues  de  Babylone  ;  mais  ni  les  Phéniciens  ni 
les  Chaldéens  ne  se  servaient  de  monnaies,  et  on  n'en  a  pas 
trouvé  de  traces  dans  les  ruines  de  Ninive.  L'invention  qu'Hé- 
rodote attribue  aux  Lydiens  consista  probablement  à  mettre 
en  circulatiou  des  lingots  de  métal  d'un  poids  déterminé,  pour 
éviter  d'avoir  continuellement  recours  à  la  balance.  Mais  la 
garantie  du  poids,  ce  qui  constitue  la  véritable  monnaie,  c'est 
l'empreinte  officielle,  le  poinçon  de  l'État.  Cette  innovation 
capitale  paraît  due  aux  Grecs  ;  on  peut  donc  laisser  à  Pheidon 
l'honneur  d'avoir  inventé  le  monnayage.  Les  monnaies  d'ar- 
gent qu'il  fit  frapper  à  Aigine  ont  pour  empreinte  la  tortue, 
attribut  d'Hermès,  Dieu  du  commerce. 

D'après  le  Grand  Étymologiste,  Pheidon  consacra  à  Hère, 
en  mémoire  de  son  invention,  des  échantillons  des  anciens 


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238  LUTTE  CONTRE  LES  ARCADIENS. 

lingots  sans  empreinte  qui  servaient  autrefois  aux  échanges 
et  qu'on  appelait  obélisques  ou  petites  barres,  à  cause  de  leur 
forme  allongée  ;  de  là  vient  le  nom  d'oboles  qui  resta  aux 
petites  pièces  d'argent.  L'usage  de  la  monnaie  se  répandit 
rapidement.  Chaque  cité  eut  son  type  monétaire,  signe  de  son 
autonomie  ;  Athènes  choisit  la  chouette  ou  la  tête  de  la  Gor- 
gone, Phokaia  le  phoque  qui  rappelait  son  nom,  Corinthe  prit 
Pègasos,  le  cheval  ailé  de  Bellérophonlès,  Thèbes  un  bou- 
clier échancré  des  deux  côtés  etc.  L'empreinte,  gravée  en 
creux  sur  le  marteau  qui  servait  à  la  frapper,  se  reproduisait 
en  relief  sur  la  pièce.  11  y  avait  sur  l'enclume  des  parties  sail- 
lantes pour  empocher  le  métal  de  glisser  ou  de  se  déplacer 
sous  les  coups  de  marteau  :  de  là  ces  carrés  creux  plus  ou 
moins  profonds  qui  se  trouvent  au  revers  des  monnaies  pri- 
mitives; plus  tard  il  y  eut  des  empreintes  en  relief  sur  les 
deux  côtés  de  la  pièce. 

Pheidon  rétablit  la  suzeraineté  d'Argos  sur  toutes  les  villes 
de  la  confédération  argolique  et  prétendit  môme  étendre  cette 
suzeraineté  sur  tout  le  pays  qui  passait  pour  avoir  été  soumis 
par  Héraclès,  c'est-à-dire  la  plus  grande  partie  du  Pélopon- 
nèse. On  dit  qu'il  attaqua  Corinthe  et  réussit  à  s'en  emparer. 
Il  aida  son  frère  Caranos  à  fonder  en  Thrace  un  petit  royaume 
qui  devint  la  Macédoine.  Pheidon  soumit  la  Kynourie,  toute  la 
côte  orientale  du  golfe  argolique  jusqu'au  cap  Malée  et  môme  . 
l'île  de  Kythéra.  Comme  chef  de  la  branche  aînée  des  Hèra- 
cléides,  il  s'attribua  la  présidence  des  jeux  olympiques,  insti- 
tués, disait-on,  par  son  ancêtre,  et  en  rendit  la  direction  aux 
Pisates  qui  en  avaient  été  dépouillés  par  les  Éléiens.  Mais 
ceux-ci  appelèrent  les  Spartiates  à  leur  secours,  Pheidon  fut 
vaincu  et  les  Argéiens  perdirent  l'hégémonie  du  Péloponnèse. 

Luttes  des  Spartiates  contre  les  Arcadiens.  -—  Les 
querelles  des  Spartiates  et  des  Arcadiens  avaient  commencé 
avant  l'époque  de  Lycurgue.  L'Arcadie  n'avait  pas  d'unité  po- 
litique ;  les  villes  étaient  indépendantes  les  unes  des  autres  et 
se  faisaient  quelquefois  la  guerre.  La  plus  puissante  de  toutes, 
Tégéa,  eut  de  fréquents  démêlés  avec  Sparte.  Hérodote  raconte 
que  les  Spartiates  ayant  consulté  l'oracle  de  Delphes  sur  la 
conquête  de  l'Arcadie,  la  Pythie  leur  répondit  :  «  Tu  me  de- 


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PREMIÈRE  GUERRE  DE  MESSÉNIE.  239 

mandes  TArcadie;  ta  demande  est  excessive:  je  la  refuse.  L'Ar- 
cadie  a  des  guerriers  nourris  de  glands  qui  repousseront  ton 
attaque.  Je  ne  te  porte  pas  envie,  cependant  :  je  te  donne 
Tégéa  pour  y  danser  et  ses  belles  plaines  pour  les  mesurer  au 
cordeau.  »  Sur  celte  réponse  équivoque,  les  Spartiates,  empor- 
tant avec  eux  des  chaînes,  envahirent  le  territoire  de  Tégéa, 
mais  ils  furent  vaincus  et  tous  ceux  qui  furent  pris,  chargés 
des  chaînes  qu'ils  avaient  apportées,  travaillèrent  en  cet  état 
aux  terres  des  Tégéates  et  les  mesurèrent  aux  cordeau.  Du 
temps  d'Hérodote,  on  voyait  ces  chaînes  suspendues  autour  du 
temple  d'Athènè  Aléa.  Cet  échec  se  rattache  probablement  à 
l'expédition  conduite  selon  Pausanias  par  Charilaos,  le  pré- 
tendu neveu  et  pupille  de  Lycurgue.  Les  femmes  des  Tégéates, 
commandées  par  une  veuve  nommée  Marpessa,  s'étaient  mises 
en  embuscade.  Lorsque  le  combat  fut  engagé,  elles  prirent  à 
dos  les  Lakédaimoniens,  qui  furent  mis  en  déroute.  Charilaos 
fut  du  nombre  des  prisonniers,  mais  on  le  relâcha  en  lui  fai- 
sant jurer  de  ne  plus  attaquer  les  Tégéates.  En  mémoire  de 
cette  action  des  femmes,  on  éleva  sur  la  place  publique  de 
Tégéa  une  statue  d'Ares  surnommé  le  convive  des  femmes. 

Première  guerre  de  Messénie.  —  Quoique  séparées  par 
la  frontière  naturelle  du  Tèygétès,  la  Laconie  et  la  Messénie 
avaient  été  jadis  réunies  sous  le  sceptre  des  Pélopides.  Après 
l'établissement  des  Doriens,  il  y  eut,  malgré  la  communauté 
de  race,  des  guerres  longues  et  sanglantes  qui  eurent  pour  ré- 
sultat de  soumettre  la  Messénie  à  la  domination  de  Sparle. 
Ces  luttes  ont  été  racontées  par  Pausanias  avec  des  détails  in- 
téressants et  dramatiques,  mais  puisés  à  des  sources  qui  ins- 
pirent peu  de  confiance.  Il  tire  le  récit  de  la  première  guerre 
d'un  auteur  de  l'époque  alexandrine,  Myron  dePriènè;  celui 
de  la  seconde  d'un  poème  du  Cretois  Rhianos  sur  les  exploits 
du  héros  messénien  Aristoménès.  La  date  de  ces  deux  guerres 
ne  peut  être  jBxée  avec  certitude;  Pausanias  place  la  première 
entre  743  et  724,  la  seconde  entre  685  et  666.  Le  poète  Tyrtée, 
qui  combattit  avec  les  Spartiates  dans  la  seconde  guerre,  nous 
fournit«seul  quelques  faits  incontestables. 

La  Messénie  était  habitée  par  les  mêmes  races  que  la  Laco- 
nie, mais  les  Doriens  s'étaient  mêlés  plus  complètement  aux 


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240  FONDATION  DE  TARENTE. 

Achaiens  et  aux  Lélèges.  Tandis  que  les  institutions  de  Lycur- 
gue  tournaient  l'activité  des  Spartiates  vers  Tart  militaire,  les 
Messéniens,  profitant  de  la  fertilité  de  leur  sol,  arrivèrent  à  la 
richesse  par  l'agriculture.  Cette  prospérité  excita  la  convoitise 
de  leurs  voisins,  qui  trouvèrent  facilement  des  prétextes  de 
guerre,  ils  occupèrent  Ampheia,  forte  position  sur  les  contre- 
forts du  Tèygétès  ;  de  là,  ils  commencèrent  leurs  attaques, 
coupant  les  récoltes,  emportant  le  butin  qu'ils  pouvaient  saisir, 
mais  sans  abattre  les  arbres  ni  les  maisons,  ne  voulant  pas 
ravager  un  pays  qu'ils  regardaient  déjà  comme  leur  propriété. 
Cela  dura  quatre  ans.  L'issue  de  toutes  les  batailles  était  in- 
décise, mais  les  laboureurs  n'osaient  plus  cultiver  leurs 
champs.  Les  Messéniens  se  fortifièrent  sur  la  montagne 
d'Ithômè  et  envoyèrent  consulter  l'oracle  de  Delphes.  D'après 
le  récit  romanesque  de.  Pausanias,  l'oracle  demande  le  sacri- 
fice d'une  vierge  de  la  race  d'Aipytos  ;  un  de  leurs  chefs,  Aris- 
todèmos,  immole  sa  fille,  et  à  celte  nouvelle  les  Spartiates  dé- 
couragés quittent  le  pays.  Au  bout  de  quelques  années,  les  rois 
de  Sparte  Polydoros  et  Théopompos  reviennent  en  Messénie 
et  la  guerre  recommence.  Les  Messéniens  reçoivent  des  se- 
cours de  l'Arcadie,  de  Sikyone  et  d'Argos  ;  les  Corinthiens 
prennent  le  parti  de  Sparte.  Il  se  livre  une  grande  bataille  où 
les  Messéniens  ont  l'avantage,  mais  ils  sont  découragés  par  la 
famine,  effrayés  par  une  suite  de  prodiges  menaçants  :  Aristo- 
dèmos  se  tue  sur  le  tombeau  de  sa  fille.  Ses  compagnons 
abandonnent  la  forteresse  d'Ithômè,  se  retirent  à  Argos,  à 
Sikyone  et  en  Arcadie.  Le  peuple  se  soumet  au  Spartiates,  et 
prête  serment  de  ne  jamais  se  révolter.  «  Comme  des  ânes 
harassés  par  de  pesants  fardeaux,  dit  un  fragment  de  Tyrtée, 
ils  sont  forcés  d'abandonner  à  leurs  maîtres  la  moitié  du  pro- 
duit de  leurs  champs,  et  de  venir  à  Sparte,  eux  et  leurs  fem- 
mes, suivre  en  costumes  de  deuil  les  funérailles  des  rois  ». 

Fondation  de  Tarente.  —  La  guerre  avait  duré  vingt 
ans.  Bien  des  désordres  s'étaient  produits  à  Sparte  par  l'ab- 
sence prolongée  des  chefs  defamilU.  Les  veuves  et  les  jeunes 
filles  avaient  épousé  des  Periœkes  ou  des  Hilotes.  Il  répugnait 
à  l'orgueil  Spartiate  de  traiter  en  citoyens  les  enfants  nés  de 
ces  mésaillances  (irapôeviai).  Ceux-ci  conspirèrent  avec  les  Hi- 


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SECONDE  GUERRE  DE  MESSÉNIE.  241 

lûtes.  Le  complot  devait  éclater  à  la  grande  fôte  religieuse  des 
Hyakinthia,  dans  le  temple  d'Apollon  Amyclaien.  Le  chef  des 
conjurés,  Phalanthos,  devait  donner  le  signal  en  mettant  son 
casque.  11  recula  devant  la  guerre  civile  et  dénonça  la  cons- 
piration sur  une  promesse  d'impunité  pour  lui  et  tous  ses 
complices.  Au  commencement  de  la  fôte,  quand  le  peuple  fut 
rassemblé,  on  fit  proclamer  par  un  crieur  que  Phalanthos  ne 
mettrait  pas  son  casque  ce  jour-là.  Les  conjurés  virent  qu'ils 
étaient  trahis  ;  on  les  retint  en  prison  avec  l'assurance  de  la 
vie  sauve,  pendant  que  Phalanthos  allait  consulter  Toracle  de 
Delphes  au  sujet  d'une  émigration.  Il  demanda  s'il  pouvait 
s'approprier  la  fertile  plaine  de  Sikyone  ;  mais  la  Pythie  l'en 
dissuada  et  lui  enjoignit  de  conduire  les  émigrants  dans  la 
région  appelée  lapygie,  au  sud-est  de  l'Italie.  Il  s'établit  à  Ta- 
rente,  où  se  trouvait  une  population  issue  d'un  mélange  de 
colons  Cretois  et  d'indigènes.  Comme  les  troupes  qu'il  ame- 
nait pouvaient  être  d'un  grand  secours,  on  les  reçut  d'une 
manière  amicale.  Le  port  de  Tarente  était  le  plus  spacieux  et 
le  plus  sûr  de  tout  le  golfe.  11  y  avait  sur  cette  côte  une  iné- 
puisable variété  de  poissons  et  de  coquillages.  La  pèche,  sur- 
tout celle  du  Murex  d'où  on  tirait  la  pourpre,  devint  une  source 
de  richesse  pour  la  colonie,  et  les  pécheurs  formèrent  l'élé- 
ment prépondérant  de  la  démocratie  tarenline. 

Seconde  guerre  de  Messénie.  Aristoménés.  —  La  se- 
conde guerre  de  Messéuie  est  séparée  de  la  première  par  un 
intervalle  de  quarante  ans  selon  Pausanias,  de  quatre-vingts 
ans  selon  Justin.  Un  fragment  de  Tyrtée  indique  vaguement 
les  dates  relatives  des  deux  guerres  :  «  Les  pères  de  nos  pères 
conquirent  Messènè  ».  L'incertitude  sur  ces  événements  est  si 
complète  qu'Aristoménès,  le  héros  de  la  seconde,  guerre  dans 
l'épopée  de  Rhianos,  est  placé  dans  la  première  par  Myron  et 
Diodore.  Dans  le  récit  qui  nous  est  parvenu,  la  bravoure  d'A- 
ristoménès  prend  des  proportions  fabuleuses.  Il  offre  trois  fois 
.  le  sacrifice  appelé  Hécatomphonie,  réservé  à  ceux  qui  avaient 
tué  cent  ennemis.  Il  fait  des  excursions  sur  le  territoire  laco- 
nien,  pille  Amyclai,  entre  la  nuit  à  Sparte  et,  en  signe  de  défi, 
suspend  son  bouclier  dans  le  temple  d'Athènè  Chalkioikos. 
Un  jour,  il  est  blessé  à  la  tôte,  fait  prisonnier  avec  cinquante 
L.  M.  —  HisT.  DBS  Grecs.  14 


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242  ARISTOMÉNÈS. 

de  ses  compagnons  et  précipité  après  eux  dans  la  Kaiadas, 
cavité  profonde  aux  flancs  du  Tèygétès  où  on  jetait  les  crimi- 
nels. Mais  les  Dieux  ne  l'abandonnent  pas.  Son  large  bouclier 
amortit  le  choc  des  rochers,  il  tombe  sain  et  sauf  sur  les  corps 
de  ses  compagnons.  Après  trois  jours,  il  renonçait  à  tout  es- 
poir et  s'enveloppait  la  tète  pour  attendre  la  mort,  quand  ses 
yeux  habitués  à  l'obscurité  aperçoivent  un  renard  dévorant  les 
cadavres.  Il  le  saisit  par  la  queue,  lui  présentant  de  l'autre 
main  son  manteau  à  mordre  ;  le  renard,  cherchant  à  s'échap- 
per, le  conduit  vers  une  petite  ouverture.  Il  l'élargit  avec  ses 
mains,  parvient  à  sortir  et  reparait  au  milieu  de  ses  soldats. 
Une  autre  fois,  pendant  une  trêve,  il  est  pris  traîtreusement 
par  des  archers  crétois  et  doit  sa  délivrance  à  la  pitié  d'une 
jeune  fille  qu'il  récompense  en  la  mariant  à  son  fils  Gorgos. 
Tyrtée.  —  On  dit  que  les  Spartiates,  effrayés  des  succès 
d'Aristoménès,  consultèrent  l'oracle  de  Delphes  qui  leur  dit  de 
demander  un  général  aux  Athéniens,  et  que  ceux-ci,  ne  vou- 
lant ni  désobéir  à  Apollon  ni  contribuer  à  l'accroissement 
de  la  puissance  de  Sparte,  leur  envoyèrent  un  maître  d'école 
nommé  Tyrtée.  Quoique  présentée  sous  une  forme  peu  vrai- 
semblable, cette  légende  peut  avoir  un  fondement  réel. 
Athènes,  par  ses  relations  avec  l'ionie,  pouvait  être  fréquentée 
dès  cette  époque  par  les  Homérides  ;  si  Tyrtée  était  de  Milet, 
comme  le  dit  Suidas,  ce  dut  être  quelque  rhapsode  chantant 
les  poèmes  d'Homère  et  d'Arctinos,  et  il  est  très  possible  qu'il 
ait  ouvert  une  école  pour  les  enseigner.  Ce  qui  est  certain, 
c'est  que  ce  vieux  maître  d'école  était  un  grand  poète,  vrai- 
ment de  la  race  du  vieux  mendiant  de  Ghios.  Les  Spartiates 
savaient  quelle  est  la  puissance  d'une  musique  guerrière  et 
d'une  mâle  poésie  pour  exciter  les  jeunes  gens  au  combat. 
Plus  d'une  fois  ils  adoptèrent  des  musiciens  et  des  poètes 
étrangers,  Terpandros  de  Lesbos,  Alcman  de  Sardes,  Thaletas 
de  Grète.  Leur  tactique  militaire  était  en  défaut  dans  une 
guerre  d'escarmouches.  L'oracle  avait  raison,  il  leur  fallait 
un  général  d'une  nouvelle  espèce,  un  improvisateur  guerrier, 
sonnant  le  clairon  des  batailles.  Tvrtée  devint  leur  poète  po- 
pulaire ;  ils  lui  donnèrent  ce  droit  de  cité  dont  ils  étaient  si 
avares.  Nous  ne  connaissons  rien  des  anapestes  de  Tyrtée, 


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TYRTÉE.  2i3 

destinés  probablemenl  à  rhytbmer  la  marche  des  troupes, 
mais  Stobée  nous  a  conservé  quelques  fragments  de  ses  élé- 
gies. Le  distique  éiégiaque,  composé  d'un  hexamètre  et  d'un 
pentamètre,  n'avait  pas  encore  le  caractère  mélancolique  que 
lui  donna  Mimnerme;  c'était  un  rhythme  guerrier,  inventé 
dit-on  par  Callinos  d'Éphèse  pour  exciter  l'ardeur  des  jeunes 
gens  au  moment  d'une  invasion  des  Kimris  en  Asie-Mineure. 
Ce  qui  nous  reste  de  Tyrtée  justifie  l'admiration  des  Spartiates 
et  résume  bien  la  pensée  de  cette  dure  cité  militaire,  qui 
étonna  la  Grèce  elle-même  par  sa  toute-puissante  énergie. 

«  11  est  beau  de  tomber  au  premier  rang,  comme  un  brave, 
en  combattant  pour  la  patrie;  mais  il  n'y  a  pas  de  destinée 
plus  triste  que  de  fuir  sa  ville  et  ses  grasses  campagnes  et 
d'aller  mendier,  errant  avec  sa  mère  chérie,  son  vieux  père, 

ses  petits  enfants  et  sa  jeune  épouse Combattons  bravement 

pour  cette  terre,  mourons  pour  nos  enfants,  n'épargnons  pas 
notre  vie.  Allons,  jeunes  gens,  combattez,  serrés  les  uns  contre 
les  autres,  ne  commencez  pas  la  fuite  honteuse  et  la  peur. 
Faites  dans  vos  cœurs  un  grand  et  fort  courage,  n'épargnez 
pas  votre  vie  dans  la  mêlée  des  hommes 

«  Allons,  vous  êtes  la  race  de  l'invincible  Héraclès,  courage, 
Zeus  ne  s'est  pas  encore  détourné  de  vous.  Ne  regardez  pas  le 
nombre,  n'ayez  pas  peur,  que  chacun  marche  droit,  le  boucher 
en  avant,  méprisant  sa  vie  et  chérissant  les  noires  Kères  delà 

mort  comme  les  rayons  du  soleil Il  est  odieux  à  voir,  l'homme 

frappé  par  derrière  en  fuyant  la  terrible  bataille;  il  est  honteux 
à  voir,  couché  dans  la  poussière,  le  corps  percé  dans  le  dos 
d'une  pointe  de  lance.  Allons,  que  chacun  se  tienne  la  jambe 
en  avant,  les  deux  pieds  solidement  appuyés  sur  la  terre,  mor- 
dant ses  lèvres  de  ses  dents  et  couvrant  de  son  large  bouclier 
ses  cuisses  et  ses  jambes,  sa  poitrine  et  ses  épaules,  secouant 
de  sa  main  droite  son  fort  javelot,  agitant  sa  terrible  aigrette 
sur  sa  tête.  Qu'il  pratique  l'art  de  la  guerre  en  faisant  de  grandes 
choses  et  ne  se  tienne  pas  loin  des  traits,  derrière  son  bouclier. 
Qu'il  attaque  corps  à  corps  et  frappe  l'ennemi  de  sa  longue 
javeline,  ou  le  perce  de  son  glaive.  Pied  contre  pied,  bouclier 
contre  bouclier,  aigrette  contre  aigrette,  casque  contre  casque, 
poitrine  contre  poitrine,  combattez  d'homme  à  homme,  frappez 


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244  TYRTÉE. 

de  Tépée  tranefeatite  ou  de  la  longue  lance.  Et  vous,  troupes 
légères,  de  chaque  côté,  à  Tabri  des  boucliers,  lancez  de 
grandes  pierres  et  des  flèches  aiguës,  en  vous  tenant  près  des 
hoplites. 

«  La  vertu  guerrière  est  ce  qu'il  y  a  de  plus  enviable 
parmi  les  hommes,  la  plus  belle  couronne  que  puisse  con- 
quérir la  jeunesse.  C'est  un  bonheur  public  pour  la  ville  et 
pour  tout  le  peuple  qu'un  homme  qui  s'élance  au  premier  rang 
des  combattants  et  y  demeure  inébranlable,  sans  jamais  songer 
à  la  fuite  honteuse,  prodiguant  sa  vie  et  son  cœur  indomp- 
table, et  encourageant  celui  qui  est  à  ses  côtés  à  tomber  brave- 
ment. Voilà  l'homme  utile  à  la  guerre  ;  il  a  bientôt  fait  tourner 
les  phalanges  ennemies  hérissées  de  pointes,  et  il  s'entend  à 
diriger  le  flot  de  la  bataille.  Tombant  au  premier  rang,  il  meurt 
en  illustrant  sa  ville  et  ses  concitoyens  et  son  père,  frappé  par 
devant  de  coups  nombreux  à  la  poitrine  et  sur  le  bouclier  ar- 
rondi et  sur  la  cuirasse.  Et  les  jeunes  et  les  vieux  gémissent 
à  la  fois,  et  la  cité  toute  entière  l'ensevelit  avec  d'amers  re 
grets.  Et  son  tombeau  et  ses  enfants  çont  honorés  au  loin 
parmi  les  hommes,  et  les  fils  de  ses  fils  et  toute  sa  race  dans 
l'avenir.  Et  jamais  sa  grande  gloire  et  son  nom  ne  périssent; 
môme  sous  la  terre  il  est  immortel,  celui  que  le  farouche  Ares 
a  frappé  lorsqu'il  combattait^  brave,  solide  et  hardi,  pour  sa 
terre  natale  et  ses  enfants.  Mais  s'il  évite  la  Kère  du  long 
sommeil  de  la  mort,  et  s'il  remporte  vainqueur  le  prix  éclatant 
de  la  lance,  tous  l'honorent  également,  les  jeunes  et  les  an- 
ciens, et  il  descend  comblé  de  joie  chez  Aïdès.  Quand  il  vieillit, 
il  tient  le  premier  rang  dans  la  ville;  il  n'a  à  craindre  ni  vio- 
lence ni  outrage  ;  chacun  se  lève  devant  lui,  les  jeunes  et  ceux 
de  son  âge,  et  les  plus  anciens.  Ainsi,  que  chacun  s'efforce  d'at- 
teindre la  faite  de  la  vertu,  sans  jamais  céder  dans  le  combat.  » 

Soumission  de  la  Messénie.  —  Il  y  eut,  selon  Pausanias, 
trois  batailles  rangées.  Après  la  première,  qui  n'eut  pas  de 
résultat  décisif,  les  Messéniens,  pour  récompenser  la  valeur 
d'Aristoménès,  voulaient  le  nommer  roi  :  il  refusa  et  se  con- 
tenta du  titre  de  général.  La  seconde,  livrée  à  la  Fosse  du 
sanglier,  se  termina  par  une  victoire  complète  d'Aristoménès. 
A  son  retour,  les  femmes  jetèrent  des  fleurs  et  entonnèrent  un 


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SOUMISSION  DE  LA   MESSÉNIE.  245 

chant  de  triomphe  qui  se  répétait  encore  du  temps  de  Pausa- 
nias  :  «  A  travers  les  champs  de  Stényclèros  et  jusqu'au  som- 
met des  montagnes,  Aristoménès  a  chassé  les  Lakédaimo- 
niens  ».  Les  Messéniens  perdirent  la  troisième  bataille  par  la 
trahison  d'Aristocrates,  roi  des  Arcadiens  d'Orchomène,  qui 
fit  retirer  ses  troupes  dès  que  l'action  fut  engagée.  Cette  tra- 
hison ne  fut  découverte  qu'à  la  fin  de  la  guerre,  et  les  Arca- 
diens indignés  lapidèrent  leur  roi.  Mais,  à  partir  de  cette  dé- 
faite, les  Messéniens  avaient  été  obligés  de  concentrer  leurs 
forces  dans  la  citadelle  d'Eira,  comme  leurs  pères  s'étaient 
retirés  à  Ithômè  pendant  la  première  guerre.  C'est  de  là  qu'A- 
ristoménès,  assisté  du  devin  Théoclos  et  d'une  troupe  d'élite, 
faisait  des  incursions  sur  le  territoire  ennemi.  Il  se  maintint 
onze  ans  dans  la  forte  position  d'Eira.  Mais,  par  une  nuit 
d'orage,  la  trahison  d'une  femme  y  introduisit  l'ennemi.  Pen- 
dant deux  jours,  les  Messéniens  défendirent  le  terrain  pied  à 
pied.  Enfin,  Aristoménès  les  forma  en  carré,  plaçant  au  mi- 
lieu les  femmes,  les  enfants  et  les  vieillards,  et  traversa  avec 
toutes  ses  troupes  les  rangs  des  Spartiates,  qui  les  laissèrent 
passer.  Le  devin  Théoclos,  voyant  s'accomplir  la  ruine  qu'il 
avait  prévue,  se  fit  tuer  en  combattant.  Les  Messéniens  furent 
de  nouveau  réduits  à  la  condition  des  Hilotes.  Quelques-uns  se 
retirèrent  en  Arcadie.  Ceux  qui  habitaient  les  villes  maritimes 
de  Pylos  et  de  Mothonè  montèrent  sur  leurs  vaisseaux,  puis 
passèrent  à  Kyllènè  en  Élis,  et  de  là  à  Rhègion,  colonie  [chal- 
kidienne  sur  la  pointe  méridionale  de  l'Italie,  où  quelques- 
uns  de  leurs  compatriotes  s'étaient  établis  à  la  fin  de  la  pre- 
mière guerre.  Aristoménès  chercha  inutilement  à  susciter 
des  ennemis  à  Sparte.  Il  mourut  à  Rhodes  où  il  s'était  retiré 
près  de  son  gendre  Damagètos.  La  famille  rhodienne  des 
Diagorades,  célèbre  par  ses  victoires  olympiques,  rattachait 
son  origine  au  grand  héros  messénien. 

Suzeraineté  de  Sparte  sur  tout  le  Péloponnèse.  — -  Les 
Arcadiens  avaient  prêté  secours  aux  Messéniens  dans  les  deux 
guerres,  mais  on  ne  sait  quelles  sont  les  villes  qui  prirent  part 
à  la  lutte,  l'Arcadie  n'ayant  jamais  formé  un  corps  politique 
avant  Épaminondas.  Quelques  districts  du  nord  de  la  Laconie 
étaient  habités  par  des  populations  arcadiennes  soumises  à  la 

14. 


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246  SUZERAINETÉ  DE  SPARTE. 

domination  de  Sparte  depuis^  une  époque  très  reculée,  mais 
celte  domination  ne  s'étendit  jamais  bien  loin.  Vers  la  fin  de 
la  seconde  guerre  messénienne,  selon  Pausanias,  les  Spar- 
tiates s'étaient  emparés  de  Phigalie.  Les  habitants  se  reti- 
rèrent dans  le  voisinage  et  demandèrent  à  l'oracle  de  Delphes 
comment  ils  pourraient  rentrer  dans  leur  pays.  La  Pythie 
répondit  que  s'ils  pouvaient  obtenir  d'Oresthasion  un  secours 
de  cent  hommes,  ces  auxiliaires  seraient  tués,  mais  que  Phi- 
galie reprendrait  son  indépendance.  Dès  que  cet  oracle  fut 
connu  à  Oresthasion,  les  cent  hommes  se  présentèrent;  les 
deux  peuples  attaquèrent  la  garnison  lakédaimonienne,  les 
Oresthasiens  furent  tous  tués  et  les  Phigaliens  rentrèrent  en 
possession  de  leur  ville. 

Après  avoir  longtemps  lutté  contre  Tégéa,  la  plus  puissante 
des  villes  arcadiennes,  les  Spartiates,  dit  Hérodote,  consultè- 
rent à  ce  sujet  l'oracle  de  Delphes.  11  leur  fut  répondu  qu'ils 
seraient  vainqueurs  s'ils  rapportaient  à  Sparte  les  os  d'Oreste^ 
ensevelis  «  là  où  soufflent  deux  vents  contraires,  où  le  type 
frappe  Tantitype,  où  le  mal  est  sur  le  mal  ».  L'énigme  sem- 
blait indéchiffrable  ;  mais  un  Lakédaimonien  nommée  Lichas, 
se  trouvant  à  Tégéa  pendant  une  trêve,  entra  dans  l'atelier 
d'un  forgeron,  qui  lui  dit  qu'en  creusant  sa  cour  il  avait  trouvé 
un  cercueil  gigantesque.  Lichas  se  rappelle  l'oracle  et  en  com- 
prend le  sens  :  les  deux  soufflets  sont  bien  les  deux  vents 
contraires,  le  marteau  et  l'enclume  sont  le  type  et  Tanti- 
type,  le  fer  qu'on  forge  sur  le  fer,  c'est  le  mal  sur  le  mal  ; 
le  cercueil  est  donc  celui  d'Oreste.  Lichas  expose  sa  découverte 
aux  magistrats  de  Sparte  ;  on  l'exile  pour  ne  pas  éveiller  la  dé- 
fiance. 11  retourne  à  Tégéa,  loue  la  cour  du  forgeron  et  rap- 
porte les  ossements.  Les  Spartiates  déclarèrent  la  guerre  aux 
Tégéates  et  furent  vainqueurs.  Mais  ils  ne  se  crurent  pas  assez 
forts  pour  ruiner  la  ville  de  Tégéa  ou  pour  s'emparer  de  son 
territoire;  ils  obligèrent  seulement  leurs  rivaux  à  les  accom- 
pagner à  la  guerre,  en  leur  laissant  l'honneur  de  former  une 
des  ailes  de  l'armée  lakédaimonien  ne. 

Les  Spartiates  et  les  Argeiens  se  disputèrent  longtemps  la 
Kynourie,  surtout  le  territoire  de  Thyréa,  dont  la  population  était, 
selon  Hérodote,  d'origine  ionienne,  et  Tile  de  Kythéra,  près  du 


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SUZERAINETÉ  DE  SPARTE.  2i7 

cap  Malée.  Les  deux  peuples  convinrent  de  décider  la  querelle 
par  un  combat  entre  trois  cents  champions  choisis  de  part  et 
d'autre.  Le  combat  dura  jusqu'à  la  nuit.  Il  ne  resta  debout  que 
deuxArgéiens  qui  allèrent  annoncer  à  Argos  Tissuedu  combat. 
Mais  le  Spartiate  Olhryadès,  blessé  grièvement  et  qu'on  avait 
cru  mort,  se  releva,  dressa  un  trophée,  y  plaça  une  inscription 
avec  son  sang  et  se  laissa  tomber  sur  son  épée  pour  ne  pas 
survivre  à  ses  compatriotes.  Comme  des  deux  côtés  on  s'at- 
tribuait la  victoire,  il  s'ensuivit  une  bataille  générale.  Les 
Spartiates  furent  vainqueurs  et  restèrent  en  possession  du 
pays  contesté.  Pendant  longtemps  les  chants  de  la  jeunesse  de 
Sparte  célébrèrent  le  nom  d'Otrhyadès. 

La  conquête  de  la  Kynourie  fut  la  dernière  acquisition  terri- 
toriale de  Sparte.  Elle  était  maintenant  en  possession  d'un 
empire  continu  comprenant  la  Messénie  et  la  Laconie,  c'est-à- 
dire  les  deux  cinquièmes  du  Péloponnèse.  Élis,  délivrée  par 
elle  de  la  rivalité  de  Pisa,  ne  pouvait  lui  porter  ombrage,  car 
la  neutralité  du  territoire  d'Olympie  empêchait  les  Eléiens 
d'avoir  une  puissance  militaire.  Argos  humiliée  par  ses  ré- 
centes défaites  avait  cessé  d'être  dangereuse,  et  les  Achaiens 
s'enfermaient  dans  une  abstention  inoflTensive.  En  dehors  du 
Péloponnèse,  Athènes  et  Thèbes  ne  se  doutaient  pas  encore  du 
rôle  important  qu'elles  devaient  jouer  plus  tard.  Aucun  État 
grec  n'avait  un  territoire  aussi  étendu  et  une  population  aussi 
nombreuse  ;  aucun  surtout,  dit  Grote,  n'avait  un  gouverne- 
ment plus  complètement  centralisé  et  plus  rigoureusement 
obéi.  Excepté  Sparte,  il  n'y  avait  pas  sur  le  territoire  lakédai- 
monien  une  seule  commune  indépendante;  aucune  n'aurait 
osé  traiter  avec  un  État  étranger.  A  la  vérité,  le  mécontente- 
ment des  Periœkes  et  des  Hilotes  était  une  source  de  fai- 
blesse, mais  ce  n'est  que  par  la  suite  que  ce  mécontentement 
devait  se  manifester  d'une  façon  menaçante.  A  l'époque  des 
guerres  médiques,  Sparte  était,  sans  contestation,  la  première 
puissance  politique  de  la  Grèce. 


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248  LES  CITÉS  COMMERÇANTES. 

CHAPITRE  IX 

LES  CITÉS  COMMERÇANTES. 

La  royauté  remplacée  par  l'oligarchie.  —  Diffusion  de  la  race  grecque 
sur  les  côtes  de  la  Méditerranée.  —  Colonies  Euboiennes  et  Méga- 
Tiennes  en  Tlirace.  — -  L'industrie  à  Coriuthe,  les  Bacchiades.  Syra- 
cuse et  Kerkyra.  —  Colonies  grecques  en  Italie  et  en  Sicile.  — 
Comptoirs  sur  le  Pont-Euxin.  —  Factoreries  grecques  en  Egypte.  — 
Kyrène.  —  Voyages  à  Tartossos.  —  Fondation  de  Marseille.  —  Indé- 
pendance des  colonies.  —  La  monnaie,  signe  visible  de  l'autonomie 
communale.  —  Types  décoratifs  empruntés  à  TAsie.  —  Développe- 
ment de  l'art  grec.  Caractère  spontané  des  trois  ordres  d'architecture. 
—  Origine  indigène  de  la  sculpture  grecque.  —  La  peinture.  La  poésie 
lyrique.  —  Les  premiers  philosophes.  La  géographie.  L'histoire.  Les 
premiers  prosateurs.  —  Répugnance  des  philosophes  contre  la  reli- 
gion populaire  et  la  démocratie.  —  Destruction  de  Sybaris.  Disper- 
sion de  la  confrérie  de  Pythagore. 

La  royauté  remplacée  par  Toligarchie.  —  Le  gouver- 
nement des  temps  héroïques,  une  arislocratie  militaire  com- 
mandée par  un  chef  de  clan,  était  la  forme  sociale  la  plus  na- 
turelle et  môme  la  seule  possible.  Les  tribus  cherchent  d'abord 
un  territoire  pour  s'y  établir,  et  quand  elles  l'ont  conquis, 
bâtissent  une  citadelle  pour  s'y  retirer  en  cas  d'attaque.  La 
guerre,  offensive  ou  défensive,  est  presque  l'état  normal.  Les 
plus  forts  et  les  plus  braves  sont  chargés  de  protéger  les  en- 
fants et  les  femmes  ;  il  leur  faut  un  capitaine  dont  la  supério- 
rité incontestée  inspire  la  confiance  et  commande  le  respect. 
Les  vieillards  rendent  la  justice  et  règlent  les  affaires  de  la 
commune,  le  peuple  confirme  ou  rejette  les  décisions  du  sénat 
et  du  roL  Mais  quand  la  cité  eut  remplacé  la  tribu,  l'unité  du 
commandement  parut  moins  nécessaire  et  la  royauté  de  Tàge 
héroïque  tomba  partout  en  désuétude,  excepté  à  Sparte  où  elle 
subsista  sous  forme  d'une  diarchie  héréditaire.  En  général, 
elle  disparut  progressivement,  sans  révolution.  Tantôt  la  fa- 
mille royale  venant  à  s'éteindre  n'était  pas  remplacée,  tantôt 
ontSstreignait  le  pouvoir  royal,  on  substituait  au  titre  roi  celui 


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ABOLITION  DE   LA  ROYAUTÉ.  2>9 

d'archonte  ou  de  prytane,  puis  celle  magistrature  suprême  de- 
venait élective  et  temporaire.  La  monarchie  était  antipathique 
aux  mœurs  des  Grecs.  ATépoque  où  la  décadence  des  républi- 
ques commençait  déjà,  Aristote  résumait  ainsi  les  opinions  de 
ses  compatriotes  :  «  Il  ne  parait  pas  conforme  à  la  nature  qu'un 
homme  soit  le  maître  de  tous  les  citoyens,  puisque  la  cité  est 
une  réunion  d'égaux.  Les  citoyens  étant  égaux  par  nature,  il 
est  nécessaire  qu'ils  aient  les  mêmes  droits  et  la]même  dignité. 
Selon  la  justice,  ils  ne  doivent  pas  plus  obéir  que  commander, 
ils  doivent  commander  et  obéir  chacun  pour  sa  part  C'est  ce 
qui  constitue  la  loi,  et  la  loi  c'est  l'ordre.  Le  gouvernement 
de  la  loi  est  donc  préférable  à  celui  d'un  des  citoyens.  »  Il  ex- 
plique ensuite  le  caractère  abstrait  et  universel  de  la  loi,  qui 
l'élève  au-dessus  des  passions  et  des  intérêts.  Il  est  vrai  que  la 
loi  ne  peut  s'appliquer  à  chaque  cas  particulier  que  par  le  mi- 
nistère d'une  magistrature,  mais  celte  magistrature  doit  être 
remplie  par  plusieurs  et  non  par  un  seul,  fût-il  supposé  ver- 
tueux, «  parce  que,  dit  Aristote,  deux  honnêtes  gens  valent 
mieux  qu'un  honnête  homme  ». 

Un  fait  que  personne  n'a  remarqué,  et  qui  peut  seul  expli- 
quer l'histoire  des  républiques  anciennes,  c'est  que  dans  tou- 
tes et  à  toutes  les  époques  les  fonctions  politiques  furent  entiè- 
rement gratuites.  Ces  fonctions  ne  pouvaient  donc  être  confiées 
qu'à  des  citoyens  assez  riches  pour  y  consacrer  tout  leur  temps. 
11  en  résulté  que  les  royautés  héroïques  ont  été  abolies  au 
profit  d'une  classe  relativement  fort  restreinte.  Il  n'y  a  d'ail- 
leurs aucune  raison  de  croire  que  le  peuple  se  soit  opposé  à  ce 
changement  ;  l'hérédité  généralement  attachée  au  pouvoir 
royal  offrait  de  grands  dangers.  L'oligarchie,  ou  gouvernement 
d'un  petit  nombre,  remplaça  la  monarchie  un  peu  plus  tôt 
dans  certaines  villes,  un  peu  plus  tard  dans  d'autres,  sans 
qu'on  sache  en  général  à  quelle  occasion  et  à  quelle  date  eut 
lieu  ce  changement  de  forme  qui  n'eut  pas,  comme  dans  nos 
sociétés  modernes,  le  caractère  d'une  révolution  violente. 
Les  principaux  chefs  qui,  dans  l'origine,  servaient  de  conseil 
au  roi  se  partagèrent  les  fonctions  du  gouvernement.  Il  y  eut 
séparation  du  pouvoir  législatif  et  exécutif,  le  premier  dévolu 
à  un  corps  collectif  délibérant  sur  les  affaires  générales,  le 


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250^  L'OLIGARCHIE. 

second  confié  à  des  magistrats  temporaires  rendant  des  comp- 
tes à  l'expiration  de  leur  charge.  Ce  système  offrait  plus  de 
garanties  que  le  gouvernement  mal  défini  des  temps  héroïques, 
mais  ces  garanties  n'étaient  réelles  que  pour  la  classe  diri- 
geante; c'était  devant  elle  que  les  magistrats  étaient  respon- 
sables plutôt  que  devant  le  peuple,  et  souvent  cette  classe  pré- 
férait ses  intérêts  à  ceux  de  la  cité. 

L'aristocratie  fut  d'abord  territoriale.  La  masse  du  peuple  se 
composait  de  petits  propriétaires  ruraux  qui  cultivaient  eux- 
mêmes  leurs  champs,  et  de  travailleurs  libres  qui  cultivaient 
ceux  des  autres  pour  un  salaire.  Les  grands  propriétaires, 
qu'on  nommait  Gamores  ou  Géomores,  selon  qu'on  parlait  le 
dialecte  dorien  ou  le  dialecte  ionien,  résidaient  dans  les  villes. 
En  temps  de  guerre,  c'étaient  eux  qui  formaient  la  cavalerie. 
En  Euboia,  on  les  appelait  Hippobotes,  éleveurs  de  chevaux. 
Dans  les  Etats  doriens,  les  familles  des  grands  propriétaires  des- 
cendaient en  général  des  conquérants;  mais  la  population  rurale 
de  l'Argolis  et  de  la  Mégaris  n'était  pas  réduite  à  une  condition 
servile  comme  les  Hilotes  de  Laconie.  En  Attique,  la  classe  des 
Ëupatrides,  ou  fils  de  bons  pères,  se  composait,  comme 
celle  des  Patriciens  à  Rome,  de  familles  autochtones  possédant 
les  terres  les  plus  fertiles.  Par  suite  du  développement  du 
commerce  et  de  l'industrie,  il  se  forma  une  bourgeoisie  et  une 
classe  de  plus  en  plus  nombreuse  de  marins  et  d'artisans. 
Quant  aux  esclaves  domestiques  4ui  servaient  les  riches,  c'é- 
taient des  barbares  de  toute  sorte  de  races,  achetés  à  prix  d'ar- 
gent et  ne  faisant  pas  partie  de  la  cité. 

Diffusion  de  la  race  grecque  sur  les  c6tes  de  la  Mé- 
diterranée. —  L'exiguïté  du  territoire  de  la  Grèce  y  ramenait 
très  souvent  le  problème  d'un  accroissement  trop  rapide  de  la 
population.  Pendant  toute  la  période  ascendante  de  l'histoire 
grecque,  ce  problème  fut  résolu  par  d'innombrables  colonies. 
Les  plus  anciennes,  fondées  dans  les  lies  de  l'Archipel  et  sur 
les  côtes  de  l'Asie  Mineure,  ont  été  énumérées  dans  un  précé- 
dent chapitre.  Du  huitième  au  sixième  siècle  avant  notre  ère, 
les  discordes  civiles  qui  agitaient  les  cités  eurent  pour  résultat 
de  nouveaux  courants  d'émigration  qui  se  portèrent  vers  le 
nord,  sur  les  côtes  de  la  Macédoine  et  de  la  Thrace,  et  vers 


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COLONISATION.  251 

Fouest,  sur  les  côtes  de  TEpire,  de  la  Sicile  et  de  l'Italie  méri- 
dionale. Dans  le  môme  temps,  les  Grecs  d'Asie  couvrirent  de 
leurs  comptoirs  les  côtes  de  la  Propontis,  du  Pont-Euxin  et  du 
marais  Maiolis.  Il  y  eut  aussi  des  colonies  en  Libye,  en  Ibérie 
et  en  Gaule  ;  la  Méditerranée  devint  un  lac  grec. 

Toutes  les  branches  de  la  race  hellénique,  Achaiens,  Dorions 
et  Ioniens  d'Europe  et  d'Asie  concoururent  à  cette  œuvre  de 
colonisation  dirigée  par  les  cités  commerçantes,  Corinthe  et 
Mégare,  Chalkis  et  Érélrie,  Milet  et  Phokaia.  II  n'est  pas  tou- 
jours possible  d'établir  une  dlslinction  entre  les  colonies  fon- 
dées par  des  mécontents  qui  cherchaient  de  nouvelles  patries 
et  les  comptoirs  établis  par  des  marchands  qui  voulaient  don- 
ner plus  d'activité  à  leur  commerce.  Il  est  encore  plus  difficile 
de  tenir  compte  des  oppositions  de  races  mises  à  la  mode  par 
Otlfried  Millier,  et  de  classer  les  colonies  d'après  leur  origine. 
La  ville  d'où  partait  un  groupe  d'émigrants  était  considérée 
comme  la  métropole  de  la  colonie  qu'ils  allaient  fonder  ;  mais 
ces  émigrants  appartenaient  presque  toujours  à  des  races  dif- 
férentes et  dans  des  proportions  qu'il  est  impossible  de  con- 
naître. L'esprit  d'initiative,  qui  nous  manque  si  absolument, 
suffisait  pour  rassembler  de  divers  pays  de  la  Grèce  des  bandes 
d'aventuriers  qui  cherchaient  fortune  ou  qui  avaient  eu  le 
dessous  dans  les  luttes  civiles.  On  partait  sur  la  foi  d*un  oracle 
et  on  allait  vers  les  terres  inconnues,  sous  la  protection  des 
Dieux  de  la  patrie.  Les  uns  avaient  emmené  leurs  familles,  les 
autres,  partis  seuls,  épousaient  des  femmes  du  pays  où  ils 
s'élabhssaient.  Quelquefois  un  roi  barbare  accueillait  en 
amis  ces  enfants  perdus  de  la  civilisation.  Il  y  en  avait  qui 
revenaient  avec  des  cargaisons  magnifiques  et  disaient  à  leurs 
compatriotes  :  La  place  est  bonne,  accourez. 
Colonies  euboiennes  et  mégariennes  en  Thrace,  — 
L^oligarchie  des  villes  ioniennes  de  Chalkis  et  d'Erélrie,  dans 
l'île  d'Euboia,  favorisait  volontiers  l'émigration  des  citoyens 
pauvres.  Des  colonies  furent  fondées  sur  les  côtes  septentrio- 
nales de  la  mer  Egée  occupées  par  des  populations  thraces.  A 
cette  époque,  la  Macédoine  ne  s'étendait  pas  encore  jusqu'à  la 
mer.  Chalkis,  la  ville  de  l'airain,  qui  devait  sa  richesse  à 
l'exploitation  des  mines  de  cuivre  de  l'île  d'Euboia,  fut  attirée 


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252  COLONIES  EN  THRAGE. 

par  les  gisements  métalliques  de  la  Thrace.  La  péninsule  qui 


s'avance  dans  la  mer  entre  le  golfe  Thermaïque  et  le  golfe 


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L.  M.  —  HiST.  DES  Grecs. 


15 


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254  LUNDUSTRIE  A   CORINTHE. 

Strymonien  se  couvrit  d'établissements  chalkidiens  et  prit  de 
là  le  nom  de  Chalkidique.  Les  Érétriens,  qui  se  livraient  sur- 
tout à  la  pêche  de  la  pourpre  et  à  l'industrie  des  transports 
maritimes,  s'associèrent  souvent  à  leurs  voisins  de  Chalkis. 
Mais  des  deux  villes  qui  devinrent  les  plus  célèbres  dans  cette 
région,  l'une,  Potidée,  sur  l'isthme  de  Pallène,  était  une  colo- 
nie de  Corinthe,  l'autre,  Olynthe,  avait  été  fondée  par  la  tribu 
Ihrace  des  Boltiaiens,  et  c'est  seulement  à  l'époque  de  l'inva- 
sion des  Perses  qu'elle  fut  occupée  par  les  Grecs  de  la  Chalki- 
dique. Stagira  et  Acanthos  furent  fondées  sur  la  côte  nord-est 
du  golfe  Strymonien  par  les  habitants  de  l'île  d'Andros,  qui 
elle-même  avait  été  colonisée  par  les  Érétriens.  Au  delà  de 
l'embouchure  du  Nestos,  commencent  les  établissements  des 
Grecs  d'Asie,  Abdéra,  colonie  de  Téos,  Maroneia,  colonie  de 
Chios,  Ainos,  fondée  par  les  Lesbiens,  Sestos,  autre  colonie 
aioliennesurlalongue  péninsule  appelée  Chersonnèse  de  Thrace 
et  Périnthe,  colonie  des  Samiens  sur  la  côte  thrace  de  la 
Propontis.  Enfin,  les  Mégariens  qui,  }\  cette  époque  reculée, 
étaient  des  marins  entreprenants,  se  firent  jour  au  milieu  des 
établissements  des  Grecs  d'Asie  et  fondèrent  Chalkédon  sur 
la  côte  asiatique  du  Bosphore,  ce  qui  les  fit  appeler  les  aveu- 
gles, parce  qu'ils  n'avaient  pas  su  voir  que  la  côte  opposée 
était  beaucoup  plus  avantageuse.  Quelques  années  plus  tard, 
en  657,  ils  réparèrent  cette  erreur  et  fondèrent  Byzance,  sur  la 
Corne-d'Or,  bras  de  mer  où  les  bancs  de  thons  du  Pont-Euxin, 
poussés  par  le  courant,  venaient  s'offrir  d'eux-mêmes  aux 
pêcheurs. 

liUndustrie  à  Corinthe.  —  Les  Bacchiades.  -  Ker- 
kyra  et  Syracuse.  —  Pendant  que  Sparte,  la  grande  cité 
militaire,  étendait  sa  domination  sur  un  tiers  du  Péloponnèse, 
Corinthe,  qui  ne  possédait  qu'une  étroite  langue  de  terre, 
essaya  de  fonder  un  empire  colonial.  Elle  envoyait  à  Potidée- 
des  gouverneurs  appelés  «Tn^ïiiAioup^cî ;  mais  ce  système,  qui  a 
réussi  dans  les  colonies  de  l'Europe  moderne,  était  contraire 
au  caractère  indépendant  de  la  race  grecque,  et  l'exemple  de 
Kerkyra,  qui  fut  dès  l'origine  en  lutte  avec  sa  métropole,  dut  prou- 
ver aux  Corinthiens  que  leurs  colonies  ne  subiraient  pas  une 
tutelle  onéreuse.  La  royauté  des  H èracléides  de  Corinthe  avait 


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LES  BACCHIADES.  2o5 

été  abolie,  selon  Pausanias,  à  la  neuvième  génération  après 
Alétès,  et  remplacée  par  une  magistrature  annuelle;  mais  ceux 
qui  Texerçaient,  sous  le  titre  de  Pry tanes,  étaient  pris  exclusi- 
vement parmi  les  Bacchiades,  puissante  oligarchie  qui  dura 
près  de  deux  cents  ans.  Les  Bacchiades  appartenaient  à  une 
môme  famille  ou  à  un  certain  nombre  de  familles  unies  par 
des  liensde  parenté  et  ne  contractant  de'mariages qu'entre  elles. 


Ruines  d'un  ancien  temple  à  Corinthe. 

Au  lieu  de  s'endormir  et  de  décliner  comme  les  aristocraties 
qui  n'ont  pour  base  que  la  propriété  foncière,  l'oligarchie  des 
Bacchiades  s'enrichit  et  enrichit  Corinthe  par  le  commerce 
maritime  et  toutes  les  formes  de  l'industrie.  On  attribue  aux 
Corinthiens  l'invention  de  la  roue  à  potier  et  les  premiers 
progrès  de  la  peinture  sur  les  vases  d'argile.  Il  reste  sur  l'em- 
placement de  Corinthe  quelques  colonnes  d'un  temple  qu'on 
regarde  comme  le  plus  ancien  exemple  encore  subsistant  de 
l'architecture  dorique.  L'airain  de  Corinthe  a  été  renommé 


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256  COLONIES  CORINTHIENNES. 

dans  toute  l'antiquité.  C'est  à  Coriiithe  que  s'introduisirent  les 
premières  améliorations  dans  l'art  de  construire  les  navires. 
Hérodote  nous  apprend  que  le  Corinthien  Ameinoclès  cons- 
truisit au  huitième  siècle  la  première  trière,  ou  galère  à  trois 
rangs  de  rames;  jusqu'au  seizième  siècle  de  notre  ère,  la  trière 
ou  trirème,  est  restée  le  type  du  vaisseau  de  combat  sur  la 
Méditerranée. 

On  pratiqua  une  route  unie  appelée  Diolcos,  par  laquelle  les 
vaisseaux  étaient  traînés  sur  des  rouleaux  d'une  mer  à  l'autre. 
Le  transport  assurait  aux  Corinthiens  des  revenus  considé- 
rables et  faisait  de  leur  ville  la  principale  station  de  commerce 
entre  l'Orient  et  l'Occident,  Le  retour  périodique  des  jeux 
isthmiques  augmentait  Taffluence  des  étrangers  et  l'activité 
du  commerce.  Malheureusement,  il  parait  que  les  progrès  du 
luxe  et  les  relations  avec  l'Asie  exercèrent  une  influence 
fâcheuse  sur  les  mœurs;  un  fragment  de  Pindare  sur  les 
hiérodules  de  Corinthe  atteste  que  le  culte  d'Aphrodilè  avait 
fait  des  emprunts  à  celui  de  l'Aslartè  sidonienne.  La  classe 
dirigeante  donnait,  comme  toujours,  le  mauvais  exemple.  Une 
affaire  scandaleuse,  qui  avait  entraîné  la  mort  d'un  enfant  du 
peuple,  produisit  un  mécontentement  général.  Le  père  de  la 
victime  s'était  tué,  ne  pouvant  obtenir  justice.  Les  Baochiades 
furent  obligés  d'éloigner  le  coupable»  nommé  Archias,  qui  était 
un  des  leurs.  On  profita  de  l'occasion  pour  se  débarrasser 
d'une  partie  de  la  population  ouvrière,  et  on  mit  Archias  à  la 
tète  d'une  troupe  d'émigrants  qui  partirent  pour  la  Sicile,  où  ils 
fondèrent  Syracuse  (750). 

Les  trajets  maritimes  se  faisaient  en  suivant  les  côtes  de 
façon  à  ne  perdre  la  terre  de  vue  que  le  moins  longtemps 
possible.  Archias  et  ses  compagnons  se  dirigèrent  d'abord  vers 
l'île  de  Kerkyra,  le  point  le  plus  rapproché  de  la  côte  d'Italie. 
Chersicratès,  un  Bacchiade  qui  accompagnait  Archias,  s'y 
arrêta  avec  quelques-uns  des  émigrants.  Kerkyra,  aujourd'hui 
Corfou,  la  plus  septentrionale  des  îles  ioniennes,  était  re- 
gardée dans  l'antiquité  comme  la  même  que  la  Schéria  home- 
rique,  dont  les  habitants,  les  Phaièkes,  sont  représentés  dans 
l'Odyssée  comme  de  hardis  navigateurs,  et  c'est  à  ce  fait  que 
Thucydide  attribue  la  supériorité  de  la  marine  de  Kerkyra, 


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COLOiNIES  GRECQUES  EN  ITALIE.  257 

C'était  probablement  une  population  liburnienne,  car  les 
Lihurnes  continuèrent  à  habiter  les  lies  de  TAdriatique  le  long 
de  la  côte  de  rillyrie.  Il  y  avait  aussi  à  Kerkyra  des  Euboiens 
d'Erétrie  qui  furent  expulsés  ou  absorbés  par  les  Corinthiens. 
Ceux-ci  fondèrent  une  ville  du  m6me  nom  que  l'Ile  et  Tancienne 
population  leur  fournit  des  matelots  exercés.  La  nouvelle 
colonie  eut  bientôt  une  marine  égale  à  celle  de  sa  métropole. 
Leur  rivalité,  qui  fut  plus  tard  Foccasion  de  la  guerre  du  Pélo- 
ponnèse, 8*était  produite  de  très  bonne  heure.  La  première 
bataille  navale  connue  de  Thucydide  fut  livrée  en  664  entre  les 
Kerkyraiens  et  les  Corinthiens.  Le  principal  motif  de  leur 
jalousie  réciproque  était  une  concurrence  commerciale;  les 
Kerkyraiens  pouvaient  fournir  le  vin  et  l'huile  aux  Epirotes  en 
échange  des  peaux,  de  la  laine  et  du  bétail,  plus  facilement  et 
à  meilleur  compte  que  les  Corinthiens»  Dans  Tintervalle  de 
leurs  querelles,  Corinlhe  et  Kerkyra  formèrent  de  concert 
plusieurs  établissements  :  ApoUonia  et  Epidamne,  appelée  plus 
tard  Dyrrachion,  sur  la  côte  illyrienne,  au  nord  du  cap  Acroké- 
raunien  ;  Leucas,  Anactorion  et  Ambrakia  sur  le  territoire  des 
Acarnanes  ;  mais  ces  colonies  sont  rapportées  à  l'époque  des 
tyrans  de  Corinthe. 

Golonies  grecques  en  Italie.  —  Les  anciennes  popu- 
lations de  l  Italie  étaient  en  partie  les  mêmes  que  celles  de  la 
Grèce  et  des  côtes  de  l'Asie  mineure.  Les  Oinotriens,  qui 
paraissent  avoir  beaucoup  d'affinité  avec  les  Epirotes,  les 
Sikels,  qui  avaient  passé  très  anciennement  d'Italie  en  Sicile, 
semblent  pouvoir  se  rattacher  à  lasouche  pélasgique.  L'Odyssée 
nomme  les  Sikels  sans  désigner  le  pays  qu'ils  habitent,  quoique 
la  Sicile  y  soit  mentionnée  sous  le  nom  de  Thrinakia.  Mais  les 
connaissances  géographiques  d'Homère  ne  dépassent  pas  les 
limites  de  la  Grèce  européenne  et  asiatique  :  au  delà  c'est  le 
pays  des  fables.  Au  commencement  de  la  période  historique, 
la  mer  Adriatique,  la  mer  de  Sicile  et  la  mer  Tyrrhénienne 
étaient  aussi  peu  connues  etaussi  redoutées  que  lePont-Euxin. 
Quand  les  Grecs  surent  qu'il  y  avait  à  l'Occident  des  pays  plus 
fertiles  que  le  leur,  et  que  les  habitants  n'étaient  pas  des 
Kyclopes  et  des  Laistrygons  anthropophages,  ils  s'y  établirent 
en  foule,  et  leurs  colonies  fut  si  nombreuses  que  le  midi  de  la 


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25S  COLONIES  GRECQUES   EN    ITALIE. 

péninsule  italique  reçut  le  nom  de  Grande-Grèce.  La  plus 
ancienne  et  longtenrips  la  seule  ville  grecque  dans  ces  parages 
futKymè,  en  Campanie,  plus  connue  sous  sa  forme  latine  de 
Cumae.  Elle  fut  fondée,  disait-on,  un  demi-siècle  après  le 
retour  des  Hèracléides,  par  Mégasthénès  de  Chalkis  et  par 
Hippoclès  de  Kymè  en  Aiolis,  et  ils  convinrent,  selon  Strabon, 
que  la  nouvelle  ville  prendrait  le  nom  de  Kymè,  et  que 
Chalkis  serait  considérée  comme  sa  métropole.  Les  colons 
trouvèrent  une  source  de  richesse  dans  l'incomparable  fertilité 
des  champs  Phlégraiens,  dans  les  poissons  que  le  lac  Lucrin 
fournissait  en  abondance  et  surtout  dans  l'affluence  des 
pèlerins  qui  venaient  consulter  la  Sibylle  prophétique  ou 
évoquer  les  morts  près  du  sombre  lacdeFAverne.  Les  rapports 
de  la  Kymè  campanienne  avec  Rome,  dès  le  temps  des  rois, 
introduisirent  chez  les  Romains  les  légendes  de  la  guerre  de 
Troie  et  en  particulier  celle  d*Enée. 

Jusque  vers  le  milieu  du  huitième  siècle,  la  Kymè  campa- 
nienne, à  laquelle  on  peut  laisser  son  nom  latin  de  Cumae,  fut 
la  seule  colonie  grecque  dans  les  régions  occidentales.  Après 
avoir  reçu  de  nouveaux  colons  de  Chalkis,  d'Erétria  et  .même 
de  Samos,  elle  devint  la  métropole  de  Néapolis  (Naples).  A  une 
époque  incertaine,  des  pirates  de  Cumœ  enlevèrent  aux  Sikels 
le  port  de  Zanclè,  aujourd'hui  Messine,  sur  le  détroit  qui 
sépare  la  Sicile  de  l'Italie.  Cette  occupation  fut  régularisée  par 
l'arrivée  de  nouveaux  colons  venus  de  Chalkis  et  d'autres  villes 
d'Euboia.  En  face  de  Zanclè,  de  l'autre  côté  de  ce  détroit 
où  ils  retrouvaient  le  flux  et  le  reflux  de  TEuripe,  les  Euboiens 
bâtirent  une  ville  qu'ils  appelèrent  Rhègion,  cassure,  parce 
que  la  Sicile  leur  semblait  avoir  été  détachée  du  continent  par 
l'irruption  des  eaux  (720).  Selon  Pausanias,  des  Messéniens 
se  joignirent  aux  colons  Chalkidiens  de  Rhègion.  C'était  l'époque 
des  guerres  de  Messénie,  et  c'est  peut-ôlre  aux  mouvements  de 
population  qui  en  furent  la  suite  qu'il  faut  rattacher  la  fonda- 
lion  des  villes  achaiennes  de  Sybaris  et  de  Croton  (710).  Les 
habitants  de  la  Messénie  et  de  la  Laconie  qui  ne  voulurent  pas 
subir  la  domination  despotique  de  Sparte  se  retirèrent  en 
Achaie,  et  là,  l'insuffisance  du  territoire  provoqua  un  mouve- 
ment de  colonisation  analogue  à  celui  qui  avait  poussé   vers 


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COLONIES   GHEGQUES   EN   ITALIE.  259 

l'Asie  Mineure  les   Ioniens  réfugiés  en  Attique  à  Tépoque  de 
l'invasion  dorienne.  Les  Spartiates  prirent  part  à  ce  mouve- 


ment par  suite  des  divisions  que  se  produisirent  entre  eux  vers 
la   môme  époque.    En   707,   trois  ans  après  la  fondation  de 


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260  COLONIES  GRECQUES  EN  ITALIE. 

Croton,  lesParthénies  conduits  par  Phalanthos  vinrent  s'établir 


à  Tarente  comme  on    l'a  vu  au  chapitre  précédent.  Aristote 


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262  COLONIES  GRECQUES  EN  SICILE. 

explique  par  une  cause  semblable  la  fondation  en  682  de  la 
Locres  italique  appelée  Epizéphyrienne  parce  qu'elle  était 
voisine  du  cap  Zéphyrion.  Les  Locriens  avaient  été  auxiliaires 
de  Sparte  pendantla  première  guerre  de  Messénie  ;  leur  absence 
prolongée  amena  des  mésalliances  entre  les  fem  mes  Locriennes 
et  des  hommes  de  condition  inférieure.  De  là  des  discordes 
civiles  qui  se  terminèrent  par  une  émigration.  Pausanias  attribue 
aux  Spartiates  la  fondation  de  Locres  et  de  Croton. 

La  plus  importante  de  ces  colonies  était  Sybaris.  Des  Treize- 
niens  s'étaient  joints  aux  Achaiens  qui  la  fondèrent;  mais  ils 
furent  expulsés  par  la  suite»  etcette  injustice,  disaient  les  Grecs, 
attira  plus  tard  la.colère  des  Dieux  sur  Sybaris  qui  fut  détruite 
par  les  Crotoniates.  Le  développement  rapide  et  l'étonnante 
prospérité  de  Sybaris  et  de  Croton  ontfait  supposer  qu'avant  de 
devenir  rivales  ces  deux  villes  avaient  longtemps  vécu  en  paix. 
Chacune  d'elles  étendit  sa  domination  d'une  mer  à  l'autre 
dans  la  largeur  de  la  péninsule  de  Calabre.  Les  Crotoniates  y 
fondèrent  Térina,  les  Sybarites,  Laos  et  Poseidonia,  plus 
connue  sous  son  nom  latin  de  Pœstum,  dont  les  magnifiques 
ruines  attestent  la  grandeur  de  sa  métropole.  Les  Locriens 
s'étendirent  aussi  en  travers  de  la  péninsule  et  fondèrent 
Hipponion.  Les  indigènes  Sikels  et  Oinotriens  formaient  une 
population  de  Periœkes  ruraux  sous  la  suzeraineté  des  Cités 
grecques.  Les  villes  de  Siris,  appelée  plus  tard  Hèraclée,  et  de 
Métapon te,  entre  le  territoire  de  Sybaris  et  celui  deTarente; 
Kaulonia,  Skylletion  et  Pétilla,  sur  le  territoire  de  Croton,  pré- 
tendaient faire  remonter  leur  origine  aux  temps  de  la  guerre 
de  Troie.  Probablement  ces  villes  s'étaient  formées  par  des 
émigrations  successives  de  colons  grecs,  principalement  des 
Achaiens.  Une  sorte  de  fédération  commerciale  paraît  avoir 
existé  entre  les  villes  grecques  du  golfe  de  Tarente,  car,  pendant 
une  période  qui  a  duré  au  moins  jusqu'à  la  ruine  de  Sybaris, 
elles  ont  frappé  des  monnaies  qu'on  nomme  incuses,  c'est-à- 
dire  que  l'empreinte  est  en  relief  d'un  côté,  en  creux  de  l'autre. 
Ce  caractère  ne  se  trouve  dans  aucune  autre  monnaie 
grecque. 

Colonies  grecques  en  Sicile.  —  Des  colonies  grecques 
s'établirent  en  Sicile  à  peu  près  à  la  môme  époque  que  dans 


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COLONIES  GHECQUES  EN  SICILE.  263 

l'Italie  méridionale,  et  en  Sicile,  comme  en  Italie,  ce  furent  les 
Chalkidiens  d'Euboia  qui  eurent  Finitiative  du  mouvement 
colonial.  Un  Athénien,  nommé  Théoclès,  jeté  par  la  tempête 
sur  les  côtes  de  Sicile,  constata  les  avantages  du  pays  et  la 
faiblesse  de  ses  habitants.  À  son  retour,  il  engagea  ses  com- 
patriotes à  s'y  établir,  mais  il  ne  put  les  y  décider.  Il  eut  plus 
de  succès  à  Chalkis,  où  il  rassembla  une  troupe  d'émigrants. 
Des  Naxiens  s'y  joignirent  en  si  grand  nombre,  que  la  colonie 
qui  fut  fondée  sur  la  côte  orientale  de  Sicile  prit  le  nom  de 
Naxos  (735).  Ce  fut  Tannée  suivante  que  les  Corinthiens 
conduits  par  Archias  occupèrent  sur  la  môme  côte,  mais  plus 
au  sud,  l'îlot  d'Ortygie  et  y  fondèrent  Syracuse,  qui  étendit 
plustard*ses  limites,  quand  elle  fut  devenue  riche  et  puissante  ; 
aujourd'hui,  la  ville  moderne  est  réduite  à  la  petite  île  qui  avait 
été  son  berceau.  Quatre  ans  après  la  fondation  de  Syracuse,  les 
Chalkidiens  de  Naxos  s'établirent  dans  la  fertile  plaine  de 
Léontini  qu'ils  enlevèrent  aux  Sikels  indigènes,  et  à  Catane, 
au  pied  de  l'Etna.  Entre  Syracuse  et  Léontini,  des  colons  de 
Mégare,  conduits  par  Lamis,  débarquèrent  en  Sicile  et  après 
bien  des  vîscicitudes,  firent  alliance  avec  le  roi  d'une  tribu  de 
Sikels,  nommé  Hyblon,  qui  les  invita  à  s'établir  sur  son  terri- 
toire. Ils  acceptèrent  et  fondèrent  Mégara  Hyblaia  (728).  Ainsi 
toute  la  côte  orientale  avait  été  occupée  en  quelques  années 
par  des  colonies  grecques.  En  690,  quarante-cinq  ans  après  la 
fondation  de  Naxos,  des  colons  rhodiens  et  crètois  fondèrent 
Gela  sur  la  côte  méridionale.  Puis  il  y  eut  des  colonies  de 
colonies  :  Syracuse  fonda  Acrai  (664),  Casmenai  (644),  Cama- 
rina  (599).  En  630  Megara  Hyblaia  avait  fondé  Sélinonte.  Enfin 
Agrigente,  quePindare  appelle  la  plus  belle  des  cités  mortelles, 
fut  fondée  en  582  par  des  colons  de  Gela.  Himéra  qui  fut 
pendant  longtemps  la  seule  ville  grecque  de  la  côte  septen- 
trionale de  lîle,  fut  fondée  à  une  date  incertaine  par  des 
Chalkidiens  de  Zanclè  et  des  Syracusains  exilés. 

A  l'époque  où  les  premiers  colons  grecs  abordèrent  en  Si- 
cile, la  plus  grande  partie  de  l'île,  à  l'est  des  monts  Hèraiens, 
était  occupée  par  les  Sikels,  qui  furent  graduellement  repoussés 
des  côtes  et  refoulés  dans  l'intérieur  des  terres.  Ils  étaient  très 
inexpérimentés  en  fait  de   navigation,  et  môme  dépourvus  de 


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266  COMPTOIBS  SUR  LE  PONT-EUXIN. 

vaisseaux.  On  dit  que  lorsqu'ils  avaient  été  chassés  du  conti- 
nent par  les  Osques  ou  Ausones,  ils  avaient  profité  d'un  vent 
favorable  pour  passer  le  détroit  sur  des  radeaux.  A  l'ouest  des 
monts  Héraiens,  habitaient  les  Sicanes,  peuple  de  race  ibéri- 
que qui  occupait  la  Sicile  entière  avant  l'arrivée   des  Sikels. 
Agrigente  et  Sélinonte  étaient  sur  le  territoire  des  Sicanes.  A 
l'extrémité  occidentale  de  l'île,  les  villes  d'Eryx  et  de  Ségeste 
étaient  habitées  par  les  Élymes,  population  ayant  avec  les 
Grecs  beaucoup  d'affinité  et  qu'on  disait  issue  des  fugitifs  de 
Troie  mêlés  à  des  Phokaiens  et  aux  compagnons  de  Philoctète. 
Quant  aux  Phéniciens  ou  Carthaginois,  ils  avaient  autrefois, 
dit  Thucydide,  occupée  les  hauteurs  sur  toutes  les  côtes  de 
Sicile  et  les  petits  îlots  voisins,  pour  faire  le  commerce  avec 
les  Sikels,  mais  l'arrivée  des  colons  grecs,  marins  comme 
eux,  leur  créait  une  concurrence  redoutable,  fis  abandon- 
nèrent les  comptoirs  qu'ils  avaient  à  l'orient  et  au  sud  de  l'île, 
concentrèrent  leurs  forces  dans  la  partie  occidentale,  la  plus 
rapprochée  de  Carthage,  et  s'établirent  solidement  dans  les 
trois  ports  de  Motyè,  de  Soloeis  et  de  Panormos,  qui  aujour- 
d'hui, sous  le  nom  de  Palerme,  est  la  capitale  de  la  Sicile,  Peu 
à  peu,  les  populations  de  l'intérieur,  et  même  les  Carthagi- 
nois subirent  l'influence  de  la  civilisation  hellénique  ;  ainsi 
il  y  a  des  monnaies  de  Panormos  qui,  malgré  leurs  légendes 
en  caractères  phéniciens,  sont  évidemment  d'un  travail  grec 
et  ne  le  cèdent  pas,  sous  le  rapport  de  l'art,  à  celles  des  villes 
grecques  de  la  Sicile. 

Comptoirs  milésiens  sur  le  Pont-Euxin.  —  Pendant 
que  les  Grecs  d'Europe  répandaient  leurs  colonies  sur  les 
côtes  de  l'Italie  méridionale  et  de  la  Sicile,  les  Grecs  d'Asie 
s'ouvraient  des  voies  nouvelles  dans  les  régions  septentrionales, 
dont  les  habitants  encore  sauvages  ignoraient  la  valeur  des 
produits  de  leur  sol.  Les  villes  d'ionie,  dont  le  territoire  res- 
serré le  long  des  côtes  ne  pouvait  s'étendre  dans  l'intérieur  du 
pays  occupé  par  les  Lydiens,  cherchèrent  de  très  bonne  heure 
à  s'enrichir  par  la  pêche,  l'industrie  et  le  commerce  maritime. 
Malgré  leurs  rivalités,  leurs  dissensions  et  leurs  luttes  avec 
les  populations  indigènes,  elles  enlevèrent  aux  Phéniciens  le 
commerce  de  la  mer  Egée, puis  celui  du  Pont-Euxin.  Milet,  avec 


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COMPTOIRS  SUR   LE   PONT-EUXIN.  267 

ses  quatre  ports  et  ses  nombreux  vaisseaux,  devint,  comme 
cité  marchande^  aussi  importante  que  Tyr.  Le  tissage  des 
laines  de  Phrygie,la  teinture  des  étoffes,  la  fabrication  des  tapis 
occupaient  ses  ouvriers.  La  classe  dirigeante  se  composait  de 
riches  armateurs  qui  délibéraient  sur  les  afTaires  publiques  à 
bord  de  leurs  vaisseaux.  Les  matelots  se  lançaient  sur  les  mers 
du  Nord  à  la  pêche  du  thon.  Des  stations  navales  furent 
établies  à  Abydos  sur  THellespont,  à  Kyzikos  sur  Tisthme  d'une 
presqu'île  de  la  Propontis.  Au  delà  des  rochers  du  Bosphore, 
les  marins  de  Milet  voyaient  s'ouvrir  cette  vaste  mer  inquié- 
tante et  brumeuse  qu'ils  appelaient  hospitalière,  eC^etvcç,  par 
politesse,  pour  se  la  concilier.  Ils  s'y  engagèrent  résolument  et 
furent  bien  payés  de  leur  audace.  11  y  avait  là  d'immenses 
plaines  arrosées  par  des  fleuves  navigables,  des  champs  cou- 
verts d'épis,  des  prairies  pleines  de  moutons,  et  dans  les  forêts 
vierges  une  provision  inépuisable  de  bois  de  construction 
pour  les  navires. 

Il  est  vrai  que  ces  trésors  étaient  gardés  par  des  tribus  fa- 
rouches, immolant  les  étrangers  à  leur  Déesse,  disait  la  lé- 
gende d'Iphigénie.  Mais  ils  se  laissèrent  apprivoiser  par  les 
vins  de  l'Archipel.  Dans  la  région  orientale,  les  eaux  du  Phase 
roulaient  des  paillettes  d'or  qu'on  arrêtait  avec  des  toisons 
étendues  au  fond  de  son  lit;  de  là  venait  sans  doute  la  légende 
de  la  toison  d'or  ;  les  Grecs  retrouvaient  partout  les  souvenirs 
de  Jason  et  des  Argonautes.  Sur  la  côte  méridionale  on  installa 
des  observatoires  et  des  guetteurs  pour  épier  le  passage  des 
bancs  de  poissons  qui  venaient  du  Nord  et  contournaient  la 
côte.  Sinope,  la  plus  importante  des  pêcheries  milésiennes 
dans  ces  parages,  était  le  point  où  aboutissait  la  grande  roule 
menée  deNinive  par-dessus  l'Euphrate  à  travers  l'Asie  Mineure 
Les  Grecs  y  achetaient  des  métaux  et  des  esclaves  et  y  ven- 
daient leurs  poisons  séchés  sur  place,  qui  formaient  la 
principale  nourriture  des  gens  du  peuple  dans  les  villes 
syriennes  de  la  Gappadokie. 

11  est  difficile  d'assigner  une  date  précise  aux  établisse- 
ments des  Milésiens.  G'étaient  plutôt  des  comptoirs  commer- 
ciaux que  de  véritable  colonies.  «  On  se  contenta  d'abord, 
dit  £•  Gurtius,  d'installer  sur  le  rivage  des  marchés  volants  ; 


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268 


COMPTOIRS   SUR  LE  POOT-ÉDXtN. 


puis  on  8*enteiidit  avec  les  indigônei  et  on  acquit  aiil^i  siii*  cen 
plages  d'outre-mer  des  marchés  à  démenti  avec  des  maga- 


sins. Les  maisons  de  commerce  y  eurent  leuts  agents  qui 
opéraient  le  débarquement  et  la  vente,  surveillaient  led  dépôts 


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COMPTOIRS  SUR  LE  PONT-El  XIN. 


269 


de  marchandises  et  restaient  sur  les  lieux,  même  pendant  la 
morte  saison.  Bien  des  stations  de  cette  espèce  furent  aban- 


données  après  essai.  D'autres,  au  contraire,  leur  situation 
s'étant  trouvée  avantageuse  au  point  de  vue  des  bénéfices 


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280  DÉVELOPPEMENT  DE   I/ART  GREC. 

bandes  circulaires  superposées,  généralement  dei  cerfs  et  des 
biches  attaqués  par  des  lionnes  ou  des  panthères  ;  quelquerois 
aussi  des  cygnes,  des  sangliers  ou  des  types  hybrides,  Sphinx, 
Griffons,  Harpyes  ou  Sirènes,  associant  les  formes  d'un  qua- 
drupède à  celles  d'un  oiseau  ou  à  la  forme  humaine.  Ces 
types,  qui  se  rattachent,  les  uns  à  la  cosmogonie  chaldéenne, 
les  autres  à  l'Egypte,  n'étaient  pour  les  Grecs  que  des  formes 
décoratives.  Ne  comprenant  pas  cette  symbolique  étrangère, 
ils  inventaient  pour  l'expliquer  des  contes  qu'ils  rattachaient 
à  leurs  traditions.  De  là  les  légendes  d'Œdipe  et  de  la  Sphinx, 
d'Odysseus  et  des  Sirènes.  Ils  commencèrent  par  copier  ce 
qu'ils  voyaient  sur  les  étoffes  babyloniennes,  mais  peu  à  peu, 
leur  sentiment  artistique  transforma  ces  types  de  monstres  en 
créations  idéales.  Ainsi,  dans  les  plus  anciens  monuments,  le 
Kentaure  est  lin  homme  au  dos  duquel  s'attache  le  train  de 
derrière  d'un  cheval;  dans  la  grande  époque  de  l'art,  c'est  un 
cheval  dont  l'encolure  est  remplacée  par  le  haut  du  corps 
d'un  homme,  association  tout  aussi  impossible  physîologique- 
ment,  mais  admirable  au  point  de  vue  esthétique.  On  aban- 
donna les  types  qui  ne  se  prêtaient  pas  à  des  transformations 
aussi  heureuses,  par  exemple  celui  des  Sirènes,  emprunté  aux 
Égyptiens,  qui  représentaient  l'âme  par  un  oiseau  à  tète  hu- 
maine. Les  artistes  modernes  n'ont  pas  repris  ce  type  disgra- 
cieux de  la  femme-oiseau.  Ils  le  remplacent,  dans  la  représen- 
tation des  Sirènes,  par  le  beau  type  de  la  Tritonide,  ou  femme- 
poisson.  C'est  une  erreur  mythologique,  mais  ils  ont  raison 
sous  le  rapport  du  goût.  Remarquons  aussi  que  l'art  grec  a  su 
associer  d'une  façon  très  heureuse  les  ailes  de  l'oiseau  à  la 
figure  humaine  :  les  types  admirables  d'Ëros  et  de  la  Victoire 
ont  été  adoptés  par  l'art  chrétien  dans  la  représentation  des 
Anges. 

Développement  de  Tart  grec.  —  Homère  parle  d'étoffes 
et  de  vases  venant  de  Sidon,  des  belles  armes  données  à  Aga- 
memnon  par  Kinyras,  roi  de  Kypros,  mais  il  décrit  aussi  des 
ouvrages  exécutés  par  des  Grecs,  par  exemple  la  tapisserie 
d'Hélène  représentant  ses  propres  aventures,  la  toile  de  Péné- 
lope, le  costume  d'Odysseus,  etc.  La  description  du  bouclier 
d'Achille,  dans  Tlliade,  cello  du  bouclier  d'Héraclès  par  Hé- 


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L'ARCHITECTURE.  281 

siode  ne  peuvent  être  prises  que  pour  des  œuvres  d'imagina- 
tion, mais  les  éléments  de  ces  descriptions  ont  dû  être,  em- 
pruntés à  des  ouvrages  réels  que  les  rhapsodes  et  leurs  audi- 
teurs avaient  souvent  sous  les  yeux.  Les  nombreux  objets  d'art 
trouvés  à  Mylcènes  et  décrits  dans  un  des  précédents  chapitres 
ont  un  caractère  parfaitement  original,  et  si,  comme  on  le 
prétend,  l'Orient  a  exercé  une  influence  sur  l'art  grec  à  une 
époque  postérieure  aux  temps  héroïques,  il  nous  est  difficile 
d'en  suivre  les  traces,  car,  à  l'exception  des  monnaies  et  dés 
vases  peints,  il  ne  reste  qu'un  très  petit  nombre  d'échantillons 
de  Vart  grec  entre  l'âge  héroïque  et  les  guerres  médiques.  Sur 
les  origines  de  la  plastique  et  de  l'industrie  des  métaux,  nous 
sommes  réduits  à  des  légendes  mythologiques  comme  celle  de 
Dédale,  à  des  contes  puérils  comme  celui  du  potier  Siicyonien 
Dibutade  couvrant  de  terre  glaise  une  silhouette  tracée  par  sa 
fllle  sur  un  mur,  ou  a  quelques  noms  propres  qu'on  ne  peut 
pas  toujours  classer  à  des  dates  précises.  On  nous  dit  par 
exemple  que  Glaucos  de  Chios  découvrit  l'art  de  souder  le  fer  ; 
Hhoicos  et  son  fils  Théodoros,  celui  de  fondre  le  cuivre  ou 
l'airain  et  de  le  couler  dans  un  moule.  On  place  ces  décou- 
vertes un  peu  avant  l'an  600  avant  J.-G.  Le  temple  d'Hère  à 
Samos,  celui  d'Artémis  à  Éphèse  sont  attribués,  le  premier  à 
Rhoicos  et  à  Théodoros,  le  second  à  Métagénès  et  à  son  fils 
Chersiphon  de  Gnossos  en  Grète.  Parmi  les  temples  dont  il 
subsiste  encore  des  restes,  on  regarde  comme  les  plus  ancietls 
celui  de  Gorinthe,  dont  quelques  colonnes  sont  encore  debout, 
celui  d'Assos  en  Aiolis,  dont  le  Musée  du  Louvre  possède  des 
fragments;  trois  temples  assez  bien  conservés  de  Poseidonia 
ou  Pœstum,  colonie  de  Sybaris,  et  le  plus  grand  des  temples  de 
Sélinonte.  Ges  monuments  sont  d'ordre  dorique,  le  temple 
d'Éphèse  était  d'ordre  ionique,  mais  il  ne  faut  pas  attribuer  un 
sens  géographique  ou  ethnographique  à  ces  désignations  em- 
ployées par  Vitruve,  qui  d'ailleurs  fait  preuve  d'une  ignorance 
inexplicable.  Les  règles  qu'il  donne  pour  l'architecture  dorique 
ne  répondent  qu'à  des  monuments  de  l'époque  romaine. 

Caractère  spontané  de  Parchitecture  grecque  «  —  Le 
temple  grec  n'est  que  l'imitation  en  pierre  d'une  cabane  de 
bois.  Les  cabanes  qu'habitent  encore  aujourd'hui  les  paysans 

16. 


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L'ARCHITECTURE.  283 

de  l'Asie  Mineure,  notamment  de  la  Lykie,  peuvent  donner 
ridée  des  premières  habitations  des  Grecs.  Les  demeures  des 
rois  et  celles  des  Dieux  ressemblaient  aux  autres  maisons, 
seulement  elles  étaient  plus  grandes  et  plus  ornées.  Des  troncs 
d'arbres  posés  sur  un  sol  uni  supportent  un  toit  de  charpente 
qui  abrite  de  la  pluie;  pour  se  garantir  du  vent  et  du  froid,  on 
élève  un  mur  derrière  les  piliers  qui  servent  de  support,  ou 
dans  leurs  intervalles,  en  y  ménageant  une  porte  pour  entrer 
et  sortir  :  tels  sont  les  éléments  de  la  cabane  qui  a  servi  de 
modèle  au  temple.  La  forme  des  temples  était  rectangulaire  ; 
de  chaque  côté,  une  poutre  transversale,  l'architrave,  portée 
par  les  colonnes,  supportait  à  son  tour  les  solives  du  plafond 
maintenues  par  la  corniche  saillante,  sur  laquelle  reposait 
l'extrémité  des  chevrons  du  toit.  La  double  inclinaison  du  toit 
sur  les  deux  grands  côtés  du  rectangle,  pour  l'écoulement  des 
eaux  pluviales,  laissait  au-dessus  des  colonnes,  sur  les  deux 
etits  côtés,  un  vide  triangulaire,  le  fronton,  que  les  Grecs 
comparaient  à  un  aigle  aux  ailes  éployées.  Le  chapiteau  formant 
la  partie  supérieure  des  colonnes  en  augmentait  la  portée  et 
ménageait  la  transition  entre  leurs  ligues  verticales  et  la  ligne 
horizontale  de  l'entablement. 

La  distinction  entre  les  trois  ordres  de  l'architecture  grecque, 
le  Doriqiie,  l'Ionique  et  le  Corinthien,  est  fondée  sur  certaines 
différences  de  proportions  et  d'ornementation  dans  rentable- 
ment,  les  colonnes  et  surtout  leurs  chapiteaux.  Dans  l'ordre 
Dorique,  le  plus  simple  et  probablement  le  plus  ancien  des  trois 
ordres,  les  colonnes  reposent  immédiatement  sur  le  dallage  du 
soubassement,  comme  des  arbres  sur  le  sol.  Le  fût,  aminci 
progressivement  comme  le  tronc  d'un  arbre,  est  creusé, 
parallèlement  à  sa  hauteur,  de  cannelures  concaves  à  arêtes 
vives.  Au-dessus  d'une  architrave  unie,  les  triglyphes  à 
entailles  perpendiculaires,  représentent  la  saillie  des  solives; 
leurs  intervalles  forment  les  métopes,  c'est-à-dire  les  fenêtres. 
Dans  la  colonne  ionique,  le  fût,  plus  élancé  qne  celui  de  la 
colonne  dorique,  repose  sur  une  base  formé  de  deux  tores,  ou 
bourrelets  circulaires  séparés  pair  un  intervalle  concave. 
L'arête  des  cannelures  est  légèrement  aplatie;  le  chapiteau 
forme  de  chaque  côté  du  fût,  dans  le  sens  de  l'architrave,  une 


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2«4  L'ARCHITECTURE. 

duubl6  saillie  qui  semble  Un  enroulement  d'étoffe  étranglé  au 
milieu  par  ude  corde  «  L'architrave,  formée  de  trois  poutres 
superposées^  porte^  au  lieu  d'une  alternatice  de  triglyphes  et 
de  métopes,  une  frise  unie,  et  fut  plus  tard  décorée  de  bas- 
reliefs. 

L'ordre  Corinthien,  qui  n'est  qu'une  forme  plus  récente  de 
rionique,  est  caractérisé  par  son  magnifique  chapiteau  de 
feuilles  d'acanthe.  On  en  attribue  l'invention  au  sculpteur 
Callimaque  ;  on  a  môme  raconté  une  petite  anecdote  à  ce 
sujet  :  une  corbeille  d'offrandes  sur  le  tombeau  d'une  jeune 
fille,  un  chardon  écrasé  repoussant  à  l'entour,  le  sculpteur 
passant  par  là  et  y  trouvant  un  motif  d'ornementation.  En 
réalité,  l'architecture  et  la  décoration  sont  l'œuvre  collective  et 
anonyme  des  foules,  comme  les  fables  religieuses  et  les  légendes 
épiques.  La  volute  ionique,  le  chapiteau  corinthien,  et  toute 
la  décoration  architecturale  des  Grecs  sont  des  créations  spon- 
tanées. Les  jours  de  fêle,  on  ornait^e  draperies  et  de  fleurs 
les  autels,  les  tombeaux^  les  chapelles  rustiques.  Puis  on 
roulait  les  tapis  de  chaque  côté  de  la  stèle  ou  du  cippe  funé- 
raire, et  cela  formait  la  volute  ionique.  Les  chapiteaux  des 
temples  étaient  entourés  de  feuillages  qu'on  retenait  avec  des 
cordes  ou  des  fils  de  Ter;  c'est  ce  qui  explique  les  trois  entailles 
circulaires  en  haut  du  fût  de  la  colonne  dorique.  Ces  feuillages 
imités  en  pierre  devinrent  le  chapiteau  corinthien.  On  accro- 
chait aux  frises  les  crânes  des  bœufs  offerts  en  sacrifice,  ou  les 
fioles  qui  servaient  aux  libations;  on  faisait  courir  le  long  de 
la  corniche  des  guirlandes  de  feuilles  alternées;  on  entourait 
les  colonnes  de  joncs  tressés,  de  colliers  de  graines,  on 
attachait  des  palmeltes  aux  angles  des  frontons.  Tout  cela  fut 
reproduit  par  la  plastique  et  par  la  peinture  dans  les  temples 
de  bois,  puis  par  la  sculpture  dans  les  temples  de  pierre. 
L'architecture  polychrome  remplaça  cette  décoration  passagère, 
qu'il  fallait  sans  cesse  renouveler,  par  une  décoration  perma- 
nente, plus  régulière,  mais  s'efforcent  de  reproduire  des  élé- 
ments empruntés  àla  nature.  Le  travail  de  l'argile  avait  pré- 
cédé le  travail  plus  difficile  de  la  pierre  et  du  marbre.  Les 
acrotères  des  frontons,  les  antéfixes  de  la  toiture  et  môme  les 
bas-reliefs  des  métopes  et  de  la  frise  furent  d'abord  en  terre 


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LA  SCULPTUBE.  285 

cuite.  Quand  les  cités  enrichies  par  le  commerce  voulurent 
élever  des  monuments  plus  durables  avec  des  matériaux  plus 
précieux,  les  formes  ornementales  n'étaient  plus  à  créer  ;  on 
ne  demandait  aux  artistes  qu'une  exécution  plus  parfaite,  et 
ils  étaient  préparés  à  ce  travail  par  l'épuration  du  goût  qui  ré« 
suite  de  la  pratique  du  destin. 

Origine  indigène  de  la  scnlpinre  grecque,  -r-  Les 
temples  grecs  n'étaient  pas  comme  les  temples  égyptiens  des 
espèces  de  monastères  habités  par  les  prêtres,  ou  des  lieux  de 
réunion  pour  la  prière,  comme  les  églises  chrétiennes  et  les 
mosquées  musulmanes,  c'étaient  les  demeures  des  Dieux, 
6iMv  {iowo{p«>v  tipcl  ii^kct.  Il  était  donc  naturel  d'y  établir  des 
signes  permanents  de  leur  présence.  Ces  signes  matériels 
n'étaient  pas  considérés  comme  les  portraits  des  Dieux;  ils 
étaient  simplement  destinés  à  les  rappeler  à  la  pensée,  ils 
tenaient  la  place  des  maîtres  invisibles  de  ces  demeures  sacrées» 
Pausanias  dit  avoir  vue  à  Pharai,  en  Achaie,  une  trentaine  de 
piliers  de  pierre,  honorés  comme  statues  des  Dieux,  et  il 
ajoute  que  dans  l'origine,  tous  les  Grecs  représentaient  les 
Dieux  de  cette  manière.  Aux  carrefours,  à  l'intersection  des 
routes,  à  la  limite  des  champs,  on  élevait  des  piliers  quadran« 
gulaires  consacrés  h  Hermès.  Cet  usage  remontait  à  l'époque 
pelasgique,  et  il  y  en  avait  un  si  grand  nombre  que  le  nom 
d'Hermès,  le  Terminus  des  Latins,  est  devenue  un  mot  géné- 
rique pour  désigner  ces  images  primitives.  11  ne  fallait  pas 
beaucoup  d'efforts  pour  ajouter  une  tête  et  des  bras  grossière* 
ment  taillés  à  ces  piliers  de  bois  ou  de  pierre  qu'on  habillait 
ensuite  comme  des  poupées.  Pour  les  revêtir  des  attributs  dis- 
tinctlfs  de  la  divinité  qu'ils  devaient  représenter,  il  fallait  bien 
leur  donner  une  sorte  de  forme  humaine,  on  en  faisait  des 
mannequins,  et  peu  à  peu  de  véritables  statues.  La  nécessité 
de  réparer  ces  vieux  simulacres  sans  les  détruire,  de  les  imiter 
quand  il  fallait  les  renouveler,  donna  l'idée  d'ajouter,  à  des 
corps  en  bois  revêtus  de  riches  étoffes,  des  têtes,  des  pieds  et 
des  mains  en  marbre  ou  en  ivoire,  puis  de  remplacer  les  étoffes 
elles-mêmes  par  des  métaux  précieux.  Ainsi  se  développa  à 
côté  de  la  sculpture,  une  branche  importante  de  la  Toreutique, 
le  statuaire  chryséléphantine,  qui  devait  se  marier  parfaite- 


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286  I  A  SCULPTURE. 

ment  avec  rarchilecture  polychrome  des  temples,  et  qui  par- 
vint, au  siècle  de  Périclès,  à  son  plus  haut  degré  de  perfection  ; 
mais  on  n'en  peut  parler  que  d'après  les  témoignages  des  an* 
ciens,  car  il  n'en  reste  malheureusement  aucun  vestige. 

Les  Grecs  attribuaient  à  Dédale  les  statues  de  bois  (Ço'av»), 
d'un  travail  archaïque.  Le  nom  de  Dédale,  qui  signifie  indus- 
trieux, n'est*  qu'une  personnification  des  premières  écoles 
d'art.  En  Atlique,  des  familles  de  sculpteurs,  celle  de  Socrale 
entre  autres,  faisaient  remonter  leur  généalogie  à  Dédale. 
Les  sculpteurs  d'Aigine  rattachaient  la  leur  à  Smilis.  L'école 
de  Sikyone  passait  pour  avoir  été  fondée  par  Dipoinos  et 
Skyllis  de  Crète,  qu'on  place  vers  580  ei  qui,  selon  Pline,  se 
firent  les  premiers  une  réputation  par  des  statues  de  marbre. 
On  a  aussi  attribué  à  Boupalos  de  Chios  la  substiluiion  du 
marbre  à  la  brique  dans  les  sculptures  des  frontons.  Mais  quel- 
ques noms  d'artistes  dont  nous  ne  pouvons  juger  les  œuvres 
sont  moins  instructifs  que  les  échantillons  malheureusement 
très  rares  qui  nous  sont  parvenus  de  la  sculpture  archaïque. 
Après  les  Lions  de  Mykènes,  qui  appartiennent  à  la  période 
préhistorique,  les  plus  anciens  monuments  qu'on  connaisse  de 
la  sculpture  grecque  sont  deux  métopes  du  Musée  de  Palerme 
trouvées  dans  les  ruines  de  l'acropole  de  Sélinonte.  Elles  sont 
ornées  de  bas-reliefs  qui  ont  été  peints  et  qui  représentent, 
Tun  Perseus,  coupant  la  tôte  de  la  Gorgone  en  présence 
d'Athènè,  l'autre  Héraclès,  portant  sur  ses  épaules  lesKercopes 
enchaînés.  L'exagération  des  muscles,  les  formes  dures  et 
trapues  ont  fait  rapprocher  ces  bas-reliefs  de  ceux  de  Ninive, 
mais  il  est  bien  difficile  de  croire  à  des  communications  entre 
la  Sicile  et  l'Assyrie.  Les  proportions  des  figures  dans  ces  deux 
métopes  rappellent  quelques  monuments  de  l'art  étrusque, 
tandis  que  les  proportions  toutes  différentes  de  l'Apollon  de 
Ténéa  au  Musée  d'Athènes,  l'ampleur  des  cuisses,  la  finesse  de 
la  taille,  la  maigreur  des  jambes,  se  retrouvent  dans  les  pein- 
tures des  vases  grecs  de  vieux  style,  où  les  figures  sont  noires 
sur  fond  rouge.  On  peut  encore  ranger  parmi  les  sculptures 
grecques  les  plus  anciennes,  les  bas-reliefs  du  temple  d'Assos 
qui  sont  au  Musée  du  Louvre,  ainsi  qu'un  fragment  de  bas-relief 
trouvé  à  Samothrace  et  représentant  Agamemnon,  Talthybios 


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LA  SCULPTUUE. 


287 


et  Epéios  ;  le  bas-relief  d'Aristoclès,  connu  sous  le  nom  de 
soldat  de  Marathon,  au  musée  d'Alhènes;  les  statues  assises 


Héraclès  et   les  Kcicopcs.  Méiope  d'un  temple 
de  Sélinonle.  (Musée  de  Paierie.) 


Le   soldat  de  Marathon. 
(Musée  d'Athènes) 


Bas-relief  trouvé  à  Samothrace. 
(Muséj  du  Louvre.) 


qui  bordaient  la  voie  sacrée  des  Branchides,  près  de  Milet,  et 
qui  sont  au  Brilish  Muséum.  Cette  attitude,  qui  est  aussi  celle 
de  l'Athènè  d'Endoios,  devait  être  fréquente  dans  les  statues 


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Î88  PEINTURE.  —   POÉSIE  LYRIQUE. 

primitives,  puisque  Homère  parle  du  voile  déposé  par  les 
femmes  Troyennes  sur  les  genoux  d'Athènè.  Ainsi  s'explique 
rexpression  homérique  :  «  Gela  est  sur  les  genoux  des 
Dieux.  » 

La  peintaré.  —  La  poésie  lyrique.  —  Outre  les  vases 
peints,  ce  que  nous  connaissons  de  la  peinture  des  Grecs 
avant  le  temps  de  Pompéi  et  d'Herculanum,  se  borne  à  quelques 
fragments  d'ornementation  polychrome  trouvés  dans  les  ruines 
de  Sélinonte  et  de  Métaponte,  et  à  deux  ou  trois  peintures 
murales  provenant  des  tombeaux  de  Pœstum  et  de  Nola*  Ges 
peintures    ressemblent  beaucoup  à   celles   des   nécropoles 
étrusques  qui  sont  au  Louvre.  Les  figures  sont  toutesau  même 
plan  et  colorées  à  teintes  plates,  sans  ombres  ni  lumières,  et  sur 
fond  uni.  Sauf  la  diversité  des  tons,  qui  se  réduisent  d'ailleurs 
à  trois  ou  quatre,  cela  diffère  peu  de  la  peinture  monochrome 
des  vases.  Quant  à  Fart  que  les  Grecs  mettaient  au-dessus  de 
tous  les  autres,  la  musique,  nous  sommes  réduits  à  quelques 
noms  propres  et  à  des  renseignements  techniques  asses  diffi- 
ciles à  comprendre.  Nous  ne  sommes  guère  plus  riches  sous 
le  rapport  de  la  poésie  lyrique,  genre  très  estimé  des  Grecs  et 
qui  participait  à  la  fois  de  la  musique  et  de  la  poésie.  De  tous 
les  poètes  lyriques  antérieurs  à  Pindare,  il  ne  nous  est  parvenu 
qu'un  petit  nombre  de  fragments  très  courts  et  en  général 
insignifiants.  Mais  en   eussions-nous  davantage,    nous   ne 
pourrions  nous  faire  une  idée  de  l'impression  que  pouvait 
produire  sur  les  Grecs  une  poésie  où  la  métrique,  fondée  prin- 
cipalement sur  des  combinaisons  variées   de  syllabes   lon- 
gues et  de  syllabes  brèves,  avait  plus   d'importance  que  le 
sens  des  paroles.  Dans  les  compositions  lyriques,  la  poésie 
était  inséparable  de  la  musique  et  de  la  danse.  Elles  n'étaient 
pas  destinées  à  être  lues,  mais  à  être  chantées  en  chœur  avec 
accompagnement  d'instruments,  soit,  comme  à  Sparte,  par  le 
peuple  entier  dans  les  fêtes  publiques,  soit  par  des  musiciens 
qu'exerçait  et  dirigeait  le  poète  compositeur.  Chaque  poète 
créait  un  rhythme  qui  gardait  quelque  fois  son  nom  :  Archiloque 
de  Paros  inventa  Fiambe  et  la  poésie  satyrique  ;  Arion,  le  di- 
thyrambe, d'où  sortit  plus  tard  la  tragédie  ;  Alcaios,  la  strophe 
alcaïque,  Sappho,  la  strophe  sapphique;  Stésichore  d'Himère, 


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PEINTURE.  —  POÉSIE   LYRIQUE.  289 


â 

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1 


L.  M.  —  UisT.  DES  Grecs.  17 

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290 


LES  PREMIERS  PHILOSOPHES. 


la  division  du  chœur  en  strophe,  antistrophe  et  épode.  Les 
rhythmes  si  riches  et  si  variés  que  nous  admirons  dans  les  odes 
d*Horace  ont  été  empruntés  par  la  poésie  latine  à  la  poésie 
grecque. 

Les  premiers  philosophes.  —  On  place  ordinairement 
la  naissance  de  la  philosophie  grecque  dans  le  demi-siècle 
qui  précède  les  guerres  médiques  ;  mais  on  pourrait  la  faire 
remonter  beaucoup  plus  haut,  si  on  appelle  philosophie 
toute  spéculation  libre  sur  la  nature  et  sur  Tesprit  humain  ; 
en  Grèce,  la  pensée  a  toujours  pu  s'exercer  librement  sur  tous 
les  sujets.  Dans  un  des  chapitres  précédents,  j'ai  représenté 
Hésiode  comme  le  précurseur  des  philosophes.  Les  sentences 


Lutte  d'Héraclès  centre  Nèreus,  ou  de  Ménélaos  contre  Tiôteus. 
(Bas-relief  d'Assos,  au  Musée  du  LouTre.) 


morales  qu'on  attribue  aux  sept  sages  :  «  Connais-toi  toi- 
même  »,  «  Rien  de  trop  »,  «  Ne  fais  pas  ce  qui  te  déplaît 
dans  les  autres  »,  ressemblent  par  leur  forme  concise  et  dog- 
matique aux  préceptes  répandus  dans  les  Travaux  et  Jours. 
Les  systèmes  de  physique  des  premiers  philosophes,  leurs  con- 
jectures sur  les  principes  du  monde,  avaient  eu  des  modèles 
dans  la  théogonie  d'Hésiode  et  même  dans  la  mythologie  homé- 
rique. La  philosophie  ionienne,  qui  regardait  l'eau  comme 
l'élément  générateur  primordial,  a  emprunté  cette  doctrine  à 
la  poésie  ionienne  î  l'Océan  est,  d'après  Homère,  le  principe  de 
toutes  choses.  La  fable  de  Prôleus,  dans  TOdyssée,  est  un 
symbole  des  transformations  de  l'élément  fluide.  Prôleus,  dont 
le  nom  signifie  le  primitif  ou  le  principe,  est  la  matière 
première  qui  change  de  forme,  et  qu'on  ne  peut  saisir.  Il  a 


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LA  GÉOGRAPHIF,  29! 

pour  fille  Eidolhéa,  c'est-à-dire  la  Déesse  des  formes  ;  elle 
explique  à  Ménélaos  les  déguisements  de  son  père  qui  se 
change  tour  à  tour  en  feu,  en  arbre,  en  animaux  de  toute  es- 
pèce. Cette  fable  était  sans  doute  populaire  chez  les  Grecs 
d'Asie,  et  Texier  croit  la  reconnaître  sur  un  lias-relief  du  temple 
d'Assoft,  Thaïes  de  Milet  (640-650)  pouvait  donc  puiser  à  des 
sources  grecques  plutôt  qu'à  des  cosmogonies  orientales. 

Mais  il  importe  peu  que  l'idée  fût  'nouvelle,  si  la  méthode 
l'était  :  selon  Arislote,  Thaïes  fondait  son  syslèiFiC  sur  la  né- 
cessité de  l'eau  pour  l'entretien  de  la  vie  des  animaux  et  des 
plantes.  En  appuyant  ses  conjectures  sur  l'observation ,  si  im- 
parfaite qu'elle  fût  à  cette  époque,  il  remplaçait  la  mythologie 
par  la  science.  S'il  est  difficile  d'admettre  qu'il  ait  annoncé 
d'avance  une  éclipse  de  soleil,  cette  tradition  montre  du  moins 
l'opinion  qu'on  avait  au  temps  d'Hérodote  sur  le  caractère 
scientifique  de  l'école  ionienne.  Ce  mot  d'école,  quand  on  l'ap- 
plique aux  philosophes  ioniens,  signifie  plutôt  une  commu- 
nauté de  méthode  et  de  tendance  qu'une  transmission  de 
doctrines.  Anaximandros  de  Milet,  qui  vécut  de  610  à  549, 
paraît  plutôt  le  continuateur  de  Thaïes  que  son  disciple. 

La  géographie.  —  L'histoire.  —  Les  premiers  prosa- 
teurs. —  On  regarde  Anaximandros  comme  le  créateur  de  la 
Géographie.  11  fut  le  premier  qui  traça  une  sphère  et  un  ca- 
dran solaire,  et  expliqua  l'obliquité  de  Técliplique.  L'Histoire 
naquit  en  même  temps  que  la  Géographie.  Cadmos  de  Milet, 
le  plus  ancien  historien  grec,  est  contemporain  d'Anaximan- 
dros.  11  avait  composé  une  histoire  de  Milet  depuis  sa  fonda- 
tion. Cet  ouvrage,  comme  celui  d'Anaximandros,  était  écrit  en 
prose.  L'emploi  de  la  prose  implique  l'écriture  :  depuis  que  les 
relations  commerciales  avec  l'Egypte  avaient  répandu  l'usage 
du  papyrus,  le  rhythme  n'était  plus  nécessaire  pour  fixer  la 
pensée,  et  l'écriture  pouvait  remplacer  la  mémoire  et  la  trans- 
mission orale.  Phérékydès  de  Syros,  qui  fut,  dit- on,  un  des 
maîtres  de  Pythagore,  passe  pour  le  plus  ancien  écrivain  en 
prose;  sa  cosmogonie,  comme  les  écrits  composés  sous  le 
nom  d'Orpheus,  tenait  le  milieu  entre  la  mythologie  et  la 
philosophie.  La  prose  ne  paraissait  pas  cependant  l'in- 
strument   indispensable    de  la  langue   philosophique,    car 


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292  IMPOPULARITÉ   DES  PHILOSOPHES. 

Xénophanes,  Parménides  et  Empédocle  écrivireat  en  vers. 

Répugnance  des  philosophes  pour  la  religion  popu- 
laire et  la  démocratie.  —  C'est  en  556,  peu  de  temps  après 
la  soumission  de  Tlonie  par  les  Perses,  que  Xénophane  de 
Colophon  vint  s'établir  à  Elée  ou  Hyélè,  colonie  des  Pho- 
kaiens  dans  l'Italie  méridionale,  et  y  fonda  l'école  qui  prit  le 
nom  d'Éléalique.  Au  lieu  de  chercher  le  premier  principe  dans 
la  nature  comme  les  philosophes  ioniens,  les  Ëléates  le  cher- 
chèrent dans  les  abstractions.  Leur  panthéisme  absolu  les  ren- 
dait 1res  hostiles  à  la  mythologie  populaire.  Xénophane  repro- 
che aux  poètes  d'attribuer  aux  Dieux  tout  ce  qui  est  honteux 
parmi  les  hommes,  le  vol,  l'adultère,  les  tromperies  récipro- 
ques. 11  trouve  ridicule  et  impie  de  les  représenter  sous  des 
formes  humaines  :  «  Si  les  bœufs  et  les  chevaux  savaient 
peindre,  ils  donneraient  aux  Dieux  des  formes  de  chevaux  et 
de  bœufs.  »  Pythagore  de  Samos,  fondateur  d'une  troisième 
école  de  philosophie,  l'école  italique,  n'était  pas  plus  bien- 
veillant pour  les  poètes  ;  on  racontait  qu'il  avait  vu  châtier 
dans  l'enfer  l'âme  d'Homère  et  ccUe  d'Hésiode  pour  les  fubles 
qu'ils  avaient  racontées  sur  les  Dieux.  Le  peuple,  dout  la  reli- 
gion était  celle  des  poètes,  renvoyait  aux  philosophes  l'accu- 
sation d'impiété.  Mais  la  liberté  de  la  pensée  était  absolue.  Si 
les  Pythagoriciens  n'avaient  pas  formé  une  association  politique, 
ils  auraient  pu  sans  danger  croire  à  la  métempsycose  et  à  la 
vertu  des  nombres,  et  s'abstenir  de  poissons  et  de  fèves. 
Mais  ils  formèrent  dans  les  villes  de  la  Grande-Grèce  une  con- 
frérie qu'on  a  comparée  à  la  Société  de  Jésus,  et  dont  les  allu- 
res sacerdotales  ont  fait  croire  que  Pythagore  avait  voyagé  en 
lïgyple,  en  Chaldée  et  en  Inde.  Môles  à  la  lutte  ardente  des 
partis  politiques,  ils  en  subirent  les  vicissitudes  et  furent  ba- 
layés par  un  ouragan  populaire. 

Hérodote  ne  parle  pas  du  rôle  des  Pythagoriciens  dans  les 
révolutions  de  la  Grande-Grèce.  Nous  savons  très  peu  de  chose 
sur  Pythagore  lui-môme,  qui  parait  avoir  combiné  le  carac- 
tère d'un  philosophe  aVec  celui  d'un  initiateur  religieux.  Il  est 
assez  difficile  de  distinguer  ses  véritables  doctrines  de  celles 
qui  lui  ont  été  attribuées  plus  tard  II  quitta  Samos,  sa  patrie, 
vers  j3'i,  à  l'époque  ou  l'Ionie  fut  soumise  par  les  Perses,  et  vint 


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DESTRUCTION  DE  SYBARIS.  293 

s'établir  à  Crolon  où  il  fonda  une  congrégation  de  trois  cents 
membres  liés  entre  eux  et  vis-à-vis  du  maître  par  un  serment 
solennel,  un  régime  ascétique  et  des  signes  de  ralliement 
comme  en  ont  chez  nous  les  francs-maçons.  Il  ne  semble  pas 
que  Pythagore  ait  eu  un  système  politique  bien  arrêté,  mais 
ses  disciples  appartenaient  à  la  classe  dirigeante  et  son  idéal 
social  était  ce  qu'on  nomme  aujourd'hui  une  aristocratie  d'in- 
telligence. Ce  système,  réalisé  dans  les  sociétés  orientales 
et  dans  l'Europe  du  moyen  âge,  a  toujours  été  le  rêve  des  phi- 
losophes et  des  lettrés,  (.a  vanité,  dont  ils  ne  sont  pas  plus 
exempts  que  les  autres  hommes,  les  porte  à  préférer,  comme 
forme  politique,  une  oligarchie  dont  ils  pourraient  faire  partie 
ou  prendre  là  direction,  et  au-dessous,  à  distance  respectueuse, 
un  peuple  silencieux  et  docile,  une  société  calme  et  réglée 
comme  une  école  bien  tenue.  Les  Grecs  croyaient  n'avoir  pas 
besoin  d'être  mis  en  tutelle,  et  l'ingérence  de  la  philosophie 
dans  la  politique  produisit  des  effets  désastreux. 

Destruction  de  Sybaris .  —  La  suppression  de  l'ordre  de 
Pythagore  est  liée  à  un  événement  considérable  dans  l'his- 
toire de  la  Grande- Grèce,  la  ruine  de  Sybaris  parles  Croto- 
niates.  Sybaris  était  la  plus  grande  et  la  plus  riche  des  cités 
grecques.  Le  luxe  de  ses  habitants  est  devenu  un  thème  de 
déclamations  littéraires  ;  on  cite  le  mot  d'un  Sybarite  à  propos 
des  Spartiates  :  «  Il  n'est  pas  étonnant  qu'ils   soient  braves; 
leur  vie  est  si  désagréable  qu'ils  ont  hâte  d'en  sortir.  »  L'oli- 
garchie de  Sybaris  fut  renversée  en  510  par  une  insurrection 
populaire,  dont  le  chef,  nommé  Telys,  s'empara  du  pouvoir. 
Cinq  cents  des  plus  riches  citoyens  furent  exilés  et  se  retirè- 
rent à  Croton.  Leur  présence  dans  une  ville  si  rapprochée 
inspira  des  craintes  à  Télys  qui  demanda  leur  extradition.  Il 
est  probable  qu'il  y  avait  parmi  eux  des  Pythagoriciens,  car  la 
secte  avait  des  affiliés  dans  toute  la  Grande-Grèce*  Le  sénat 
de  Croton,  d'après  les  conseils  de  Pythagore,  refusa  de  livrer 
les  suppliants,  et  la  guerre   s'engagea  entre  les  deux  villes 
achaiennes.  On  nous  dit  que  l'armée  des  Sybarites  était  de 
300,000  hommes,  et  celle  des  Crotoniates  de  100,000,   mais 
ces  chiffres  sont  sans  doute  fort  exagérés.  Les  Crotoniates 
étaient  commandés  par  le  pythagoricien  Milon,  le  plus  célèbre 


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294  DISPERSION   DES  PYTHAGORICIENS. 

athlète  de  l'époque,  qui  marchait  au  combat  dans  le  costume 
et  avec  la  massue  d'Héraclès,  ils  avaient  en  outre  pour  alhé 
Dorieus,  frère  du  roi  de  Sparte  Cléomènes,  qui  longeait  le 
golfe  de  Tarenle  avec  un  corps  de  colons  pour  fonder  un  éta- 
blissement en  Sicile.  Une  bataille  sanglante  se  livra  près  de  la 
rivière  Traeis  ou  Trionto,  et  les  Sybarites  furent  totalement 
défaits  malgré  la  supériorité  du  nombre.  Les  vainqueurs  en 
firent  un  massacre  effroyable,  puis  pillèrent  Sybaris,  la  démo- 
lirent jusqu'aux  fondations  et,  pour  effacer  tout  vestige  de  sa 
grandeur  passée,  détournèrent  le  cours  du  Crathis  et  le  firent 
passer  sur  l'emplacement  de  la  ville. 

Dispersion  de  la  confrérie  de  Pythagore.  —  L'oligar- 
chie de  Croton,  voulant  s'attribuer  tous  les  profits  de  la  vic- 
toire, refusa  au  peuple  le  partage  des  terres  conquises,  et  pour 
imposer  silence  à  l'opposition,  supprima  les  assemblées  popu- 
laires. Le  peuple,  à  Tinstigalion  d'un  riche  nommé  Kylon, 
qui  avaft  été  rejeté   par  Pythagore,  tourna  sa  colère  contre 
cette  confrérie  ambitieuse,  qui  formait  un  État  dans  l'État,  et 
mit  le  feu  à  la  maison  de  Milon  où  les  Pythagoriciens  étaient 
assemblés.  La  plupart  périrent:  selon  les  uns,  Pythagore  se 
trouvait  parmi  eux  ;  selon  d'autres,  il  mourut  peu  de   temps 
après  à  Métaponte,  où  on  voyait  son  tombeau  du  temps  de 
Cicéron.  11  y  eut  des  luttes  civiles  à  Tarente,  à  Métaponte,  à 
Kaulonia.  Les  Pythagoriciens  s'étaient  rendus  odieux  au  peuple 
parleur  esprit  de  domination;  ils  furent  chassés  des  villes 
d'Italie,  mais  les  troubles  continuèrent,  et  la  tranquillité  ne 
put  être  rétablie  que  par  la  médiation  des  Achaiens  delà  mère 
patrie.  Soixante  exilés  purent  revenir  dans  leurs  foyers.  11  y 
eut  dans  la  suite  des  philosophes  attachés  à  la  secte  de  Pytha- 
gore, mais  la  confrérie  cessa  d'exister.  Les  congrégations  or- 
phiques paraissent  s'ôlre  formées  de  ses  débris,  et  Cicéron, 
d'après  l'autorité  d'Aristote,  attribue  àun  pythagoricien  nommé 
Kercopsles  poésies  qui  circulaient  en  Grèce  sous  le  nom  d'Or- 
pheus.  Cependant,  Oltfried  Miiller  fait  remarquer  que  Pytha- 
gore avait  une  dévotion  particulière  pour  Apollon,  tandis  que 
l'initiation  orphique  se  rattachait  au  culte  de  Dionysos.  Mais  s'il 
y  a  quelques  différences  de  doctrine  entre  les  Pythagoriciens 
et  les  Orphiques,  ils  se  confondent  dans  une  opposition  com* 


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L'OLIGARCHIE.  295 

mune  au  génie  libre  et  spontané  de  l'Hellénisme.  Les  thiases 
ou  collèges  orphiques,  comme  l'institut  de  Pythagore,  ont  tous 
les  caractères  d'un  ordre  religieux.  C'est  un  clergé  qui  veut 
s'établir,  un  essai  de  fusion  entre  la  pensée  philosophique  de 
la  Grèce  et  l'esprit  sacerdotal  de  l'OrienJ,  un  véritable  prologue 
du  christianisme. 


CHAPITRE  X 

LA  VIE  POLITIQUE  DANS  LES  CITÉS  GRECQUES. 

L'oligarchie.  —Gratuité  des  fonctions  publiques.  —Los  lois  écrites.  — 
La  tyrannie.  Ses  caractères.  Son  instabilité.  —  Les  tyrans  de  Sikyone. 
Orthagoras,  Cleisthénès.  —  Les  tyrans  de  Corinthe.  Kypsélos.  Périan- 
dros  ;  éclat  de  son  règne.  —  Discordes  civiles  à  Mégare.  Théognis. 

Révolutions  d'Athènes.  L'archontat.  Les  Eupatrides.  —  Dracon.  — 
Kylon.  —  Épiménide.  —  Solon.  Conquête  de  Salamine.  —  Luttes 
des  riches  et  des  pauvres.  —  La  question  sociale  résolue  par  Solon. 
—  Constitution  politique  de  Solon.  Répartition  de  l'impôt.  —  Le 
Sénat.  L'Aroiopage.  —  Lois  civiles.  Le  lien  social.  Le  travail.  —  Con- 
dition des  femmes.  —  Éducation  des  enfants.  Serment  militaire.  — 
Les  tables  de  la  loi. 

Factions  politiques.  Usurpation  de  Pisistrate.  —  Son  gouvernement. 
Édition  des  poèmes  d'Homère.  —  Harmodios  et  Aristogeiton.  — 
Tyrannie  et  chute  d'Hippias.  —  Reformes  de  Cleisthénès.  —  Inter- 
vention des  Spartiates.  —  Luttes  contre  les  Thébains,  les  Chalkidienp 
et  les  Aiginètes. 


L'oligarchie.  —  L'autonomie  communale  produisait  une 
grande  variété  dans  les  formes  de  gouvernement.  Dans  un 
ouvrage  qui  ne  nous  est  pas  parvenu,  Aristote  avait  réuni  des 
renseignements  sur  la  constitution  de  plus  de  cent  cinquante 
villes.  Malgré  celle  diversité,  les  mômes  révolutions  se  repro- 
duisirent à  peu  près  partout,  et  la  plupart  des  cités  grecques 
passèrent  successivement  de  l'oligarchie  à  la  tyrannie  et  de  lu 
tyrannie  à  la  démocratie.  Par  suite  des  progrès  de  l'industrie 
et  du  commerce,  il  s'était  formé  dans  toutes  les  villes  une 


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206  GRATUITÉ  DES  FONCTIONS  PUBLIQUES. 

bourgeoisie  riche,  active  et  entreprenante,  qui  voulait  avoir  sa 
part  du  gouvernement,  et  comme  ses  intérêts  se  confondaient 
encore  avec  ceux  du  peuple,  e\U  réclamait  Vlsonomie^  c'est-à- 
dire  l'égalité  des  droits.  L'oligarchie  refusait  d'abandonner  ses 
privilèges,  dont  le  plus  important  était  le  pouvoir  judiciaire. 
L'esprit  de  caste  l'empêchait  souvent  d'exercer  ce  pouvoir 
d'une  manière  impartiale.  Si  l'impunité  semblait  assurée  aux 
parents  et  aux  amis  des  dépositaires  de  l'autorité,  si  un  homme 
du  peuple,  en  cas  de  conflit  avec  l'un  d'eux,  ne  pouvait  obtenir 
justice,  il  s'ensuivait  un  mécontentement  général,  et  une  lutte 
s'engageait  bientôt  entre  les  gouvernés  et  les  gouvernants,  ou, 
comme  disaient  les  Grecs,  entre  le  grand  nombre  et  le  petit 
nombre.  L'oligarchie  finissait  par  ouvrir  ses  rangs  aux  bour- 
geois; la  classe  dirigeante  devenait  plus  nombreuse  et  plus 
forte,  mais  le  peuple  y  gagnait  aussi  quelque  chose,  car  pour 
admettre  les  bourgeois  aux  fonctions  publiques,  il  fallait  rendre 
ces  fonctions  électives  et  temporaires.  Le  peuple  pouvait  choi- 
sir ses  magistrats;  il  prenait  pour  le  gouverner  ceux  qu'il 
croyait  les  meilleurs;  le  gouvernement  devenait  une  aristo- 
cratie, mot  que  nous  prenons  ordinairement  comme  synonyme 
d'oligarchie,  mais  qui  avait  pour  les  Grecs  un  sens  plus 
favorable. 

Gratuité  des  fonctions  publiques.  —  La  gratuité  des 
fonctions  empêchait  la  politique  d'être  considérée  comme 
une  carrière  lucrative,  et  l'ambition  ne  pouvait  jamais  être 
doublée  d'intérêt.  Indépendamment  de  toute  restriction  au 
droit  d'éligibilité,  les  suffrages  du  peuple  ne  se  portaient  que 
sur  des  citoyens  riches.  Pour  élever  un  citoyen  pauvre  aux 
magistratures,  il  aurait  fallu  l'indemniser  de  la  perte  de  son 
temps  ;  or,  on  aurait  trouvé  dérisoire  d'ajouter  un  salaire  à 
l'honneur  de  gouverner  la  cité.  Un  homme  au-dessus  du  be- 
soin inspirait  plus  de  confiance  qu'un  autre  et  semblait  moins 
accessible  à  la  corruption.  Celui  qui  n'avait  pas  su  diriger  ses 
affaires  ne  semblait  pas  capable  de  diriger  celles  du  puWic. 
Hérodote  raconte  que  les  Milésiens,  après  avoir  longtemps 
souffert  de  leurs  divisions  intestines,  prièrent  les  Pariens  de 
rétablir  l'union  et  la  concorde.  «  Voici  comment  les  Pariens 
y  parvinrent  ;  Leurs  députés,  gens  de  considération,  ayant  re- 


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LES  LOIS  ÉCRITES.  297 

marqué  à  leur  arrivée  l'état  déplorable  de  Milet,  dirent  qu'ils 
voulaient  parcourir  le  territoire.  Ils  le  visitèrent,  et  quand  ils 
rencontraient  dans  ce  pays  dévasté  un  champ  bien  cultivé,  ils 
mettaient  par  écrit  le  nom  du  propriétaire.  De  retour  à  la  ville, 
ils  convoquèrent  rassemblée  du  peuple  et  nommèrent  pour 
gouverner  l'Etat  ceux  dont  ils  avaient  trouvé  les  terres  bien 
cultivées.  Ils  croyaient,  dirent-ils,  que  ces  gens  prendraient  le 
même  soin  des  affaires  publiques  que  des  leurs,  et  ils  ordon- 
nèrent à  tous  ceux  qui  avaient  été  auparavant  de  différents 
partis  de  les  reconnaître  pour  leurs  magistrats  et  de  leur  obéir 
en  tout.  »  Un  autre  fait  important  à  signaler  dans  les  habitudes 
politiques  des  Grecs  c'est  que,  non  seulement  les  serfs  dans 
les  cités  militaires,  les  domestiques  dans  les  cités  commer- 
çantes, mais  encore  les  étrangers  domiciliés  appelés  Mélœkes, 
étaient  exclus  du  droit  de  suffrage,  et  que  le  litre  de  citoyen 
était  difficile  à  obtenir.  Quant  aux  paysans,  lors  môme  qu'ils 
faisaient  partie  de  la  cité,  comme  à  Athènes,  ils  ne  pouvaient 
guère  prendre  une  part  active  à  la  vie  politique,  qui  leur  eût 
imposé  des  déplacements  gênants  et  coûteux. 

Les  lois  écrites.  —  On  cherchait  quelquefois  un  remède 
aux  discordes  civiles  dans  l'établissement  d'une  législation. 
Les  Locriens  d'Italie  ayant  demandé  à  l'oracle  de  Delphes  de 
les  tirer  d'embarras,  reçurent  l'ordre  de  se  donner  des  lois. 
Ils  acceptèrent  celles  que  leur  présenta  le  berger  Zaleucos,  qui 
déclarait  les  avoir  reçues  d'Athènè  dans  un  songe.  La  légis- 
lation de  Zaleucos  fut  le  premier  Code  de  lois  écrites.  On  la 
place  en  664,  environ  quarante  ans  avant  la  législation  de 
Dracon  à  Athènes.  On  raconte  que  le  fils  de  Zaleucos  s'étant 
rendu  coupable  du  crime  d'adultère  qui  devait  être  puni  de  la 
perte  des  deux  yeux,  fut  amené  à  son  père  qui  lui  arracha  un 
œil  et  s'en  arracha  un  à  lui-môme  en  disant  :  «  Voilà  les  deux 
yeux  exigés  par  la  loi.  »  11  paraît  que  les  lois  de  Zaleucos  res- 
tèrent longtemps  en  vigueur;  une  précaution  avait  été  prise 
contre  le  danger  des  réxisions  trop  fréquentes  :  celui  qui  pro- 
posait une  nouvelle  loi  devait  se  présenter  à  l'assemblée  avec 
une  corde  au  cou;  si  sa  proposition  était  rejetée  on  serrait  la 
corde.  Cette  coutume  locrienne  est  citée  par  Démosthènes  dans 
son  discours  contre  Timocrate.  Diodore  en  fait  une  loi  de 

17. 


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298  LA  TYRANNIE. 

Charondas,  législateur  de  Gatane  et  des  villes  chalkidiennes 
de  Sicile  et  d'Italie,  qui  paraît  avoir  été  postérieur  à  Zaleucos 
de  près  d'un  siècle.  Les  textes  de  loi  et  les  préambules  attribués 
à  Zaleucos  et  à  Charondas  par  Diodore  et  par  Stobée  sont  gé- 
néralement regardés  comme  des  œuvres  apocryphes' sorties 
de  l'école  pythagoricienne.  Parmi  les  lois  citées  par  Diodore 
comme  étant  de  Charondas,  il  y  en  a  une  sur  l'instruction  gra- 
tuite et  obligatoire,  avec  des  maîtres  payés  par  l'État.  Il  avait 
défendu,  par  une  autre  loi,  d'assister  en  armes  aux  assemblées 
populaires;  un  jour,  il  entend  du  tumulte  et  court  armé  sur  la 
place  publique  :  On  lui  fait  remarquer  qu'il  viole  la  loi  ;  il  ré- 
pond :  w  Je  vais  la  venger  ;  »  et  il  se  perce  de  son  épée.  Ce  fait 
a  été  mis  aussi  sur  le  compte  de  Dioclès,  législateur  des 
Syracusains. 

Le  législateur  était  quelquefois  étranger  à  la  cité  ;  ainsi  Phi- 
lolaos,  un  des  Bacchiades  de  Corinthe,  fit  des  lois  pour  les 
Thébains,  Dèmonax  de  Mantinée  en  fit  pour  les  Kyrènaiens. 
Les  lois  de  Philolaos  paraissent  avoir  eu  pour  objet  d'affermir 
les  privilèges  de  l'oligarchie;  celles  de  Dèmonax,  de  restreindre 
le  pouvoir  royal  qui  s'était  conservé  dans  la  famille  de  Batlos, 
fondateur  de  Kyrène.  D'après  la  constitution  de  Dèmonax  {o43), 
le  roi  conserva  seulement  ses  domaines  territoriaux  et  les 
fonctions  religieuses  qui  avaient  appartenu  à  ses  prédé- 
cesseurs. 

La  tyrannie,  ses  caractères,  son  instabilité.  —  On  a 
peu  de  renseignements  sur  l'histoire  intérieure  des  cités 
grecques  pendant  la  période  laborieuse  de  l'enfantement  des 
républiques,  mais  on  peut  deviner  la  violence  des  passions 
politiques  de  cette  époque  par  le  serment  que  les  aristocrates 
prêtaient  dans  quelques  villes,  selon  Aristote  :  «  Je  jure  d'être 
l'ennemi  de  la  classe  populaire  et  de  lui  faire  tout  le  mal  que 
je  pourrai.  »  La  lutte  avait  souvent  pour  résultat,  comme  dans 
les  communes  italiennes  du  moyen  âge,  l'expulsion  générale 
du  parti  vaincu  ;  les  exilés  rentraient  avec  le  secours  de  quel- 
que cité  rivale  ou  fondaient  ailleurs  un  établissement  nouveau. 
Dans  les  discordes  civiles,  chaque  parti  se  croit  seul  dirigé  par 
la  justice  et  ne  voit  chez  ses  adversaires  que  des  passions.  Il 
pouvait  arriver,  cependant,  que  le  droit  fût  des  deux  côtés.  Les 


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LA  TYRANNIE.  299 

uns,  préoccupés  de  l'égalité,  combattaient  des  privilèges  fon- 
dés sur  la  tradition  et  Thabitude;  les  autres  craignaient  que  la 
faveur  populaire  ne  sacriôât  la  liberté  à  quelque  chef  ambitieux 
et  adroit.  C'est  là  l'excuse  des  aristocraties  grecques  devant 
l'histoire.  Contrairement  à  ce  qui  se  voit  aujourd'hui  chez  nous, 
c'étaient  surtout  les  aristocrates  qui  étaient  républicains.  Le 
parti  populaire  se  laissait  facilement  tromper  par  des  intri- 
gants, et  sa  victoire  amenait  souvent  une  usurpation.  Les 
luttes  du  grand  nombre  et  du  petit  nombre  eurent  pour  résul- 
tat dans  la  plupart  des  cités  grecques  une  renaissance  de  la 
monarchie,  mais  avec  un  pouvoir  absolu  et  arbitraire  que 
n'avaient  jamais  eu  les  rois  de  l'âge  héroïque.  C'est  pourquoi, 
au  lieu  de  désigner  ces  monarques  d'une  nouvelle  espèce  par  le 
titre  de  rois,  paaiXeîç,  qui  représentait  une  magistrature  à  au- 
torité limitée,  les  Grecs  leur  donnèrent  le  nom  de  tyrans,  em- 
prunté probablement  à  la  langue  des  Phrygiens  ou  des  Lydiens, 
et  qui  répondait  à  l'autorité  despotique  et  sans  contrôle  des 
souverains  barbares.  Selon  la  définition  très  exacte  de  Corné- 
lius Népos,  on  appelait  tyrans  ceux  qui  avaient  usurpé  le  pou- 
voir dans  une  cilé  libre.  On  a  môme  quelquefois  donné  ce 
titre  à  des  rois  légitimes  qui  avaient  étendu  leur  autorité  au 
delà  des  limites  normales,  comme  Pheidon  d'Argos  et  Chari- 
laos  de  Sparte.  Le  mot  de  tyran  n'avait  pas  à  l'origine  le  sens 
répulsif  qui  s'y  est  attaché  plus  tard,  et  on  cite  des  tyrans, 
comme  Gélon  et  Hiéron  de  Syracuse,  qui  ont  régné  avec  dou- 
ceur. Mais,  si  un  tyran  n'était  pas  nécessairement  mauvais, 
rien  ne  l'empêchait  de  l'ôlre,  et  cela  suffisait  pour  faire  re- 
garder la  tyrannie  comme  une  forme  vicieuse  de  gouvernement. 
Quelquefois  on  chargeait  un  citoyen  qui  possédait  la  con- 
fiance générale  de  rétablir  l'ordre,  et  on  lui  donnait  un  pou- 
voir absolu  avec  le  titre  d'Aisymnète.  C'était  une  sorte  de 
tyrannie  élective.  Parmi  ceux  qui  en  firent  un  bon  emploi,  on 
cite  Pittacos  de  Mitylène,  un  des  sept  sages  de  la  Grèce.  Mais 
il  pouvait  arriver  que  l'homme  à  qui  on  avait  confié  une  au- 
torité temporaire  refusât  de  s'en  dessaisir.  Aristote  cite  comme 
s'étant  élevés  par  ce  moyen  les  tyrans  de  Milet  et  Phalaris 
d'Agrigente,  celui  de  tous  les  tyrans  grecs  qui  laissa  la  plus 
mauvaise  réputation;  on  raconte  qu'il  faisait  enfermer  ceux 


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300  INSTABILITÉ  DE  LA  TYRANNIE. 

qui  lui  déplaisaient  dans  un  taureau  d'airain  chauffé  au 
rouge,  de  façon  que  leurs  cris  d'agonie  imitaient  les  mugisse- 
ments d'un  taureau.  A  Cumae,  la  tyrannie  se  présente  comme 
une  usurpation  militaire  :  un  citoyen  nommé  Aristodèmos 
s'était  distingué  dans  une  lutte  contre  les  Étrusques;  l'oligar- 
chie, jalouse  de  ses  succès,  l'envoie  avec  des  forces  insuffi- 
santes au  secours  de  la  cité  latine  d'Aricia;  il  revient  vain- 
queur, et  avec  l'aide  de  ses  troupes  s^empare  du  pouvoir. 
Mais,  le  plus  ordinairement,  ceux  qui  voulaient  usurper  la 
tyrannie  commençaient  par  se  rendre  populaires  en  attaquant 
les  privilèges  de  la  classe  dirigeante.  S'élever  au  pouvoir  par 
la  ruse,  s'y  maintenir  par  la  violence,  proscrire  ceux  qu'on  ne 
peut  corrompre,  occuper  le  peuple  par  de  grands  travaux  de 
construction,  distraire  l'attention  publique  par  des  expéditions 
militaires,  telle  a  été  la  politique  enseignée  aux  despotes  de 
tous  les  temps  par  les  tyrans  grecs  les  plus  célèbres,  Périan- 
dros  de  Corinthe,  Cleisthénès  de  Sikyone,  Pisistrate  d'Athènes, 
Polycratès  de  Samos.  Ce  qui  est  plus  difficile  à  imiter,  et  qu'on 
ne  retrouve  que  chez  les  tyrans  de  la  Renaissance  italienne, 
c'est  le  goût  éclairé  de  la  littérature  et  des  arts.  II  semble  que 
Pisistrate  ait  voulu  acheter  le  pardon  de  l'histoire  en  conser- 
vant à  la  postérité  les  poèmes  d'Homère.  Mais  la  Muse  grecque 
n'accepta  pas  le  pacte  d'alliance,  et  en  général  elle  resta  pure 
de  ces  déférences  serviles  qui  ont  déshonoré  la  poésie  latine. 
On  trouve  môme  des  poètes  à  la  tête  des  ennemis  delà  tyran- 
nie, Solon,  Théognis,  Alcaios. 

Tous  les  tyrans  essayaient  de  fonder  des  dynasties  hérédi- 
taires, mais  ces  dynasties  dépassaient  rarement  la  seconde 
génération.  Il  est  vrai  que  leur  chute  était  ordinairement  pro- 
voquée, comme  le  remarque  Aristote,  par  quelque  vengeance 
personnelle;  mais  les  révolutions  politiques  ont  toujours  des 
causes  générales  sans  lesquelles  les  complots  ne  serviraient  à 
rien.  Chez  les  peuples  qui  ne  savent  pas  ou  ne  veulent  pas  être 
libres,  le  meurtre  d'un  tyran  ne  profite  qu'à  son  successeur  : 
c'est  ce  qu'on  a  vu  à  Rome  sous  les  Césars.  Dans  les  cités 
grecques,  au  contraire,  la  tyrannie  n'était  qu'un  accident 
passager.  11  y  avait  toujours  un  parti  qui  protestait  contre 
l'oppression,  et  quand  l'expérience  avait  été  assez  longue  et 


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LES  TYRANS  DE  SIKYONE.  301 

assez  dure,  les  conspirateurs  étaient  sûrs  de  trouver  un  appui 
dans  la  masse  du  peuple.  Les  factions  se  faisaient  des  con- 
cessions mutuelles,  car  Tesprit  politique  s'était  fortifié  dans 
ces  épreuves,  et  la  tyrannie  avait  servi  de  transition  entre  l'oli- 
garchie et  la  démocratie. 

Les  tyrans  de  Sikyone  :  Orthagoras,  Gleisthénés.  — 
La  dynastie  des  tyrans  de  Sikyone,  la  plus  ancienne  sur  la- 
quelle nous  ayons  des  renseignements,  fut  fondée  en  076  par 
Orthagoras  et  dura  cent  ans  ;  c'est  la  plus  longue  dynastie  de 
tyrans  qui  soit  connue  d'Aristote.  Orthagoras,  appelé  aussi  An- 
dréas, qui  était,  dit-on,  un  cuisinier,  s'appuya  sur  les  habitants 
de  la  côte,  marins  et  pêcheurs,  pour  renverser  l'oligarchie  des 
grands  propriétaires,  qui  descendait  en  grande  partie  des  con- 
quérants doriens  venus  d'Argos.  Il  gouverna  avec  modéra- 
tion, ainsi  que  ses  successeurs,  dont  le  dernier  et  le  plus 
célèbre  fut  Gleisthénés.  Le  but  de  la  politique  de  Gleisthénés 
fut  d'abaisser  l'élément  dorien  de  la  population.  A  Sikyone 
comme  dans  leurs  autres  établissements,  les  Doriens  for- 
maient trois  tribus,  les  Hylleis,  les  Pamphyles  et  les  Dymanes. 
Il  changea  ces  noms  antiques  en  trois  noms  ridicules  qu'on 
peut  traduire  par  Sangliers,  Anes  et  Petits  porcs.  Quant  aux 
hommes  du  rivage,  dont  il  faisait  partie,  il  les  appela  Archc- 
laoi,  les  chefs  du  peuple.  Argos,  la  grande  cité  dorienne,  avait 
eu  jadis  une  suzeraineté  sur  Sikyone.  Pour  en  effacer  le  sou- 
venir, Gleisthénés  résolut  d'abolir  le  culte  que  les  Sikyoniens 
rendaient  au  héros  argeien  Adrastos.  Il  défendit  aux  rhap- 
sodes de  chanter  à  Sikyone  les  poèmes  homériques  ;  probable- 
ment il  s'agissait  surtout  de  la  Thèbaïs  cyclique,  poème  au- 
jourd'hui perdu,  mais  que  toute  l'antiquité  attribuait  à 
Homère,  et  dont  Adrastos  était  le  héros  principal.  Il  consulta 
l'oracle  de  Delphes  pour  savoir  comment  il  pourrait  chasser 
Adrastos  de  Sikyone.  La  Pythie  répondit  :  a  Adrastos  est  roi 
des  Sikyoniens,  et  toi,  tu  n'es  qu'un  bandit-  »  11  n'insista  pas, 
mais  il  voulut  forcer  l'âme  d' Adrastos  à  s'éloigner,  en  lui  im- 
posant un  voisinage  désagréable.  Il  obtint  des  Thébains  la 
permission  d'introduire  à  Sikyone  le  culte  de  leur  héros  Mé- 
lanippos,  qui  avait  tué  le  frère  et  le  gendre  d'Adrastos,  dans  la 
guerre  des  Épigones.  En  môme  temps,  il  essaya  de  se  conci- 


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302  CLEISTHÉNÈS. 

lier  la  bienveillance  d'Apollon  en  prenant  part  à  la  guerre  que 
les  Amphiclions  avaient  décrétée,  sur  la  proposition  de  Solon, 
contre  les  habitants  de  Crissa  et  de  Kirrha,  qui  prélevaient  un 
impôt  sur  les  pèlerins  arrivant  à  Delphes.  Cette  guerre  servait 
en  môme  temps  les  intérêts  de  Sikyone,  dont  la  prospé- 
rité commerciale  dépendait  de  la  sécurité  du  golfe  de  Co- 
rinthe  (595). 

La  guerre  dura  dix  ans;  Crissa  fut  rasée,  son  port  comblé, 
ses  habitants  vendus  comme  esclaves  et  son  territoire  consa- 
cré à  Apollon.  A  l'occasion  de  ce  triomphe,  les  jeux  Pythiques, 
qui  n'avaient  été  jusqu'alors  que  des  concours  de  musique  et 
de  chant,  reçurent  un  nouvel  éclat  :  on  y  ajouta  des  luttes 
gymniques  et  des  courses  de  chars  où  Cleisthénès  remporta  le 
prix.  11  fut  aussi  vainqueur  aux  jeux  Olympiques.  Sur  le  butin 
fait  à  Crissa,  il  éleva  un  portique,  célébra  des  fêtes  où  il  dé- 
ploya un  grand  luxe,  et  sa  cour  devint  le  rendez-vous  des  ta- 
lents en  tout  genre.  On  ne  sait  dans  quelle  mesure  il  contribua 
au  développement  des  arts,  mais  l'école  artistique  de  Sikyone 
devint  dès  lors  et  resta  toujours  dans  la  suite  une  des  plus 
célèbres  de  la  Grèce.  Parmi  les  œuvres  qui  en  sortirent  on 
peut  citer  l'Apollon  de  Canachos,  qui  ornait  le  Didymaion  de 
Milet;  il  en  existe  une  copie  au  British  Muséum  et  une  autre 
au  Louvre,  connue  sous  le  nom  de  l'Apollon  de  Piombino,  dans 
la  salle  des  Bronzes. 

La  puissance  de  Cleislhénès  était  solidement  établie,  mais 
la  dynastie  des  Orthagorades  devait  s'éteindre  avec  lui,  car  il 
n'avait  qu'une  fille  nommée  Agaristè.  Il  attachait  beaucoup 
d'importance  au  choix  de  son  gendre.  11  accueillit  avec  magni- 
ficence les  prétendants  illustres  qui  vinrent  de  toutes  les  par- 
lies  de  la  Grèce  et  qui  cherchaient  à  se  faire  valoir  par  leur 
habileté  dans  tous  les  exercices.  Un  Athénien  nommé  Hippo- 
cléidès  semblait  avoir  les  chances  les  plus  favorables  ;  mais  la 
veille  du  jour  où  Cleislhénès  devait  déclarer  son  choix,  Hip- 
pocléidès,  un  peu  excité  par  le  vin,  s'avisa  de  danser  une 
danse  comique.  «  Tu  viens  de  perdre  ton  mariage,  »  lui  dit 
Cleisthénès.  Il  répondit  :  «  Qu'importe  à  Hippocléidès ?  »  ré- 
ponse qui  passa  en  proverbe.  Celui  qui  fut  choisi  était  aussi 
un  Athénien  ;  il  s'appelait  Mégaclès  et  appartenait  à  la  famille 


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LES  TYRANS  DE  CORINTOE.  303 

des  Alcmaionides.  Il  eut  un  fils  nommé  Cleisthénès  comme 
son  grand-père,  qui  réforma  la  constitution  de  Solon  dans  un 
sens  très  démocratique  et  qui  fut  Faïeul  maternel  de  Périclès. 

Les  tyrans  de  Gorinthe  :  Kypsélos.  —  Périandros.  — 
La  tyrannie  s'établit  à  Gorinthe  un  peu  plus  tard  qu'à  Sikyone 
et  dura  74  ans.  Kypsélos,  qui  renversa  en  655  l'oligarchie  des 
Bacchiades,  s'y  rattachait  par  sa  mère  Labda.  Comme  elle 
était  boiteuse,  aucun  des  Bacchiades  n'avait  voulu  l'épouser, 
et  on  l'avait  donnée  en  mariage  à  un  homme  d'une  autre 
famille,  d'ailleurs  très  illustre,  qui  prétendait  remonter  au 
roi  des  Lapilhes  Kaineus,  célèbre  dans  les  légendes  du  combat 
des  Lapithes  contre  les  Kentaures.  Les  Bacchiades,  avertis 
par  un  oracle  que  l'enfant  de  Labda  leur  serait  funeste,  en- 
voyèrent dix  d'entre  eux  pour  le  faire  mourir.  Ils  vinrent  au 
village  où  était  élevé  l'enfant  et  demandèrent  à  le  voir.  Ils 
étaient  convenus  de  l'écraser  contre  terre.  Labda,  sans  dé- 
fiance, le  mit  dans  les  bras  de  l'un  d'eux,  et  l'enfant  lui. sourit. 
11  le  passa  à  un  autre,  celui-ci  à  un  troisième;  tous  se  le  pas- 
sèrent ainsi  de  main  en  main,  et  aucun  n'osa  le  tuer.  Ils 
sortirent,  se  reprochèrent  mutuellement  leur  faiblesse,  et  ren- 
trèrent, décidés  à  en  finir.  Mais  la  mère  avait  des  soupçons  ;  ils 
ne  trouvèrent  plus  l'enfant;  elle  l'avait  caché  dans  un  coffre 
qu'il  consacra  plus  tard  dans  le  temple  d'Hère  à  Olympie.  Ce 
coffre  était  en  bois  de  cèdre  orné  de  sculptures  en  or  et  en 
ivoire  dont  Pausanias  donne  la  description.  Devenu  grand, 
l'enfant  reçut  le  nom  de  Kypsélos  qui  veut  dire  cofFre,  à  moins 
que  ce  ne  soit  précisément  le  sens  de  ce  nom  qui  ait  fait  ima- 
giner la  légende  rapportée  par  Hérodote.  On  ne  sait  pas  com- 
ment Kypsélos  s'empara  du  pouvoir,  mais  ce  fut  probablement 
avec  l'appui  d'une  partie  de  la  population,  car  Aristote  l'ap- 
pelle démagogue  et  donne  comme  preuve  de  sa  popularité  qu'il 
ne  s'entoura  jamais  de  gardes.  D'un  autre  côté,  Hérodote  rap- 
porte les  paroles  d'un  orateur  corinthien  qui  accuse  Kypsélos 
d'avoir  banni  un  grand  nombre  de  citoyens,  d'en  avoir  dé- 
pouillé beaucoup  d'autres  et  d'en  avoir  fait  mourir  encore 
davantage.  11  mourut  après  trente  ans  de  règne  et  laissa  le 
trône  à  son  fils  Périandros. 

On  s'accorde  à  reconnaître  la  prudence  et  l'habileté  politi- 


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304  PÉRUNDROS. 

que  de  Périandros,  on  l'a  même  compté  parmi  les  sept  sages 
de  la  Grèce.  Corinthe  atteignit  sous  son  règne  un  degré  de 
puissance  qu'elle  ne  retrouva  pas  plus  tard.  Elle  fonda  des 
villes  importantes  sur  les  côtes  d'Acarnanie  et  d'Épire  et  réalisa 
ce  rêve  d'empire  colonial  que  les  Bacchiades  avaient  en  vain 
poursuivi.  Sa  suzeraineté  s'étendit  sur  Kerkyra,  Leucas,  Am- 
brakia,  Anactorion  et  Apollonia,  qui  ne  devinrent  indépen- 
dantes qu'à  la  mort  de  Périandros.  L'installation  du  Diolcos, 
pour  transporter  les  navires  sur  des  rouleaux  à  travers  l'isthme, 
fit  affluer  l'argent  à  Corinthe  par  les  droits  de  transit  entre  la 
mer  Egée  et  la  mer  Ionienne.  Des  impôts  indirects  furent  éta- 
blis, des  droits  de  douane  furent  perçus  dans  les  ports,  des 
taxes  prélevées  sur  les  marchés. 

Cet  argent  était  surtout  employé  à  faire  travailler  les  ou- 
vriers, et  ce  n'était  pas  pour  lui  que  Périandros  levait  des  im- 
pôts, car  l'idée  de  ce  que  nous  appelons  une  liste  civile  n'en- 
trait pas  dans  l'esprit  d'un  Grec,  pas  môme  d'un  tyran.  Ses 
exigences  n'en  paraissaient  pas  moins  vexatoires,  et  elles 
allaient  toujours  en  augmentant.  Comme  le  mécontentement 
augmentait  aussi,  il  s'entoura  d'une  garde  barbare,  et  il  fallut 
la  solder.  Il  s'attaqua  aux  fortunes  particulières,  jusqu'à  se  faire 
livrer  les  bijoux  des  femmes  pour  en  faire  une  statue  d'or.qu'il 
consacra  à  Olympie.  Aristote  insinue  qu'il  voulait  empêcher 
les  particuliers  de  devenir  trop  riches.  D'un  autre  côté,  il  fît 
des  lois  somptuaires  pour  empêcher  ses  sujets  de  dépenser 
au  delà  de  leurs  revenus.  Il  obligea  chaque  citoyen  à  rendre 
compte  de  ses  moyens  d'existence,  défendit  aux  étrangers  de 
s'établir  à  Corinthe  sans  permission,  fit  jeter  les  femmes  de 
mauvaise  vie  à  la  mer  et  contraignit  les  pauvres  à  émigrer. 
D'après  Hérodote,  c'est  par  les  conseils  de  Thrasyboulos,  tyran 
de  Milet,  que  Périandros  avait  adopté  cette  politique  de  nivel- 
lement. Il  l'avait  consulté  sur  le  meilleur  moyen  à  employer 
pour  se  maintenir  au  pouvoir.  Thrasyboulos,  au  lieu  de  ré- 
pondre par  écrit,  conduisit  le  messager  dans  un  champ  de 
blé  et  abattit  les  épis  qui  dépassaient  les  autres.  Aristote  ren- 
verse les  rôles  et  fait  donner  le  conseil  à  Thrasyboulos  par  Pé- 
riandros. Cette  anecdote  a  été  transportée  à  Tarquin  le  Su- 
perbe, le  dernier  des  rois  de  Rome. 


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PÉHIANDROS.  305 

Un  drame  domestique  assombrit  de  plus  en  plus  le  carac- 
tère de  Périandros.  11  avait  tué,  dans  un  moment  de  colère, 
sa   femme  Mélissa,  qu'il  aimait  pourtant  avec  passion.  Elle 
était  fille  de  Proclès,  tyran  d'Épidaure.  Un  jour,  ses  deux  fils 
étant  allés  voir  leur  grand-père,   celui-ci  leur  dit  :  u  Mes 
enfants,  savez-vous  qui  a  tué  votre  mère?  »  L'aîné,  d'un  esprit 
obtus,  ne  fit  pas  attention  à  ces  paroles,  mais  Lycophron,  le 
plus  jeune,  les  comprit,  et  à  son  retour  refusa  de  parler  à  son 
père  et  môme  de  lui  répondre.  Périandros  le  chassa  et  défen- 
dit, sous  peine  d'amende,  de  le  recevoir  et  de  lui  parler.  Le 
jeune  homme  errait  dans  la  ville,  affamé,  vivant  comme  il  pou- 
vait et  couchant  sous  les  portiques.  Son  père  en  eut  pitié  et 
lui  dit  :  «  Ëh  bien,  mon  fils,  lequel  vaut  mieux,  de  cette  vie 
errante  et  vagabonde,  ou  de  la  souveraine  puissance  que  tu 
pourrais  partager  avec  moi?  Si  un  malheur  est  arrivé  autrefois, 
c'est  sur  moi  qu'il  retombe.  Rentre  à  la  maison,  il  vaut  mieux 
faire  envie  que  pitié,  s  Le  fils  répondit  :  «  Tu  as  encouru  l'a- 
mende, pour^  m'avoir  adressé  la  parole.  »  Périandros  l'envoya 
à  Kerkyra,  puis  il  envahit  Épidaure  pour  se  venger  de  Proclès 
et  le  fit  prisonnier,  mais  sans  lui  faire  de  mal.  Cependant,  il 
sentait  l'âge  s*appesantir;  son  fils  aîné  était  stupide  et  ne  pou- 
vait lui  succéder  ;  il  chargea  sa  fille  d'aller  à  Kerkyra  et  d'es- 
sayer de  ramener  Lycophron.  Celui-ci  répondit  à  sa  sœur  qu'il 
ne  rentrerait  pas  à  Corinthe  tant  que  leur  père  y  serait.  Pé- 
riandros céda  et  fit  dire  à  Lycophron  qu'il  pouvait  revenir  et 
régner,  que  lui-môme  se  retirerait  à  Kerkyra.  Mais  à  cette  nou- 
velle, les  Kerkyraîens,  ne  voulant  pas  avoir  chez  eux  le  terri- 
ble vieillard,  tuèrent  son  fils.  11  entra  dans  une  violente  co- 
lère, prit  trois  cents  jeunes  Kerkyraîens  et  les  embarqua  pour 
être  vendus,  comme  eunuques,  au  roi  de  Lydie.   Heureuse- 
ment, le  vaisseau  ayant  relâché  à  Samos,  les  Samiens  les  déli- 
vrèrent et  les  renvoyèrent  à  Kerkyra.  Périandros  mourut  peu 
de  temps  après.  Il  avait  régné  quarante  ans.  Un  de  ses  parents 
lui  succéda  et  fut  renversé  au  bout  de  trois  ans  (oS2),  peut-ôtre 
avec  l'aide  des  Spartiates. 

Discordes  civiles  à  Mégare.  —  Théogois.  —  C'est  vers 
le  commencement  du  règne  de  Périandros  à  Corinthe  qu'on 
place  l'usurpation  de  Théagénès  à  Mégare.  Il  avait  gagné  la 


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306  DISCOUDES  CIVILES  A  MÉGARE. 

faveur  du  peuple  en  attaquant  les  propriétés  des  riches  et  en 
détruisant  leurs  troupeaux  près  de  la  rivière.  Profitant  de  Ta- 
nimosilé  que  cet  acte  de  violence  avait  excitée  contre  lui,  il 
se  fît  donner  une  garde  par  un  vote  populaire.  U  s'en  servit 
pour  renverser  l'oligarchie  à  Mégare  et  s'empara  du  pouvoir. 
11  encouragea  son  gendre*Kylon  à  en  faire  autant  à  Athènes, 
mais  cette  tentative,  comme  on  le  verra  plus  loin,  n'eut  pas 
de  succès.  A  l'exemple  des  autres  tyrans,  Théagénès  fît  d'utiles 
et  importants  travaux;  il  fit  creuser  un  canal  pour  amener 
l'eau  des  sources  de  la  montagne  dans  la  ville  où  il  éleva  une 
fontaine  sur  la  place  publique.  Ce  fut  probablement  sous  son 
règne  que  les  Mégariens  enlevèrent  aux  Athéniens  l'île  de  Sa- 
lamine.  Toutefois  il  ne  réussit  pas  à  établir  solidement  sa  do- 
mination; il  fut  détrôné  et  chassé  par  une  révolution  nouvelle 
dont  on  ne  connaît  pas  la  date  et  qui  fut  suivie  d'une  longue 
suite  de  luttes  violentes  entre  les  classes.  Le  parti  populaire, 
n'ayant  plus  de  chef,  dépassa  dans  ses  colères  les  limites  de  la 
prudence  et  abusa  de  sa  victoire.  Les  pauvres  entraient  dans 
les  maisons  des  riches  et  se  faisaient  servir  de  somptueux 
banquets.  Non  seulement  on  abolit  les  dettes,  mais  on  força 
les  créanciers  à  rembourser  les  intérêts  qu'ils  avaient  déjà 
reçus.  Une  troupe  de  pèlerins,  qui  traversait  le  territoire  de 
Mégare  pour  se  rendre  à  Delphes,  fut  attaquée  et  pillée,  plu- 
sieurs perdirent  la  vie,  et  le  conseil  des  Amphictions  fut  obligé 
d'intervenir  pour  faire  punir  les  coupables.  On  bannit  un 
grand  nombre  d'aristocrates  pour  confisquer  leurs  biens,  ce 
qui  amena,  dit  Aristote,  la  ruine  de  la  démocratie,  car  les  exi- 
lés formèrent  un  corps  si  nombreux  qu'ils  rentrèrent  par  la 
force,  et  la  ville  fut  gouvernée  par  une  oligarchie  très  étroite, 
ne  comprenant  que  les  auteurs  de  la  révolution. 

Parmi  les  fragments  élégiaques  du  poète  Théognis,  plu- 
sieurs font  allusion  aux  révolutions  de  Mégare.  Malheureuse- 
ment ces  fragments  nous  sont  parvenus  dans  un  tel  état  de 
désordre  qu'ils  ne  peuvent  nous  éclairer  sur  les  événements 
auxquels  ils  se  rapportent.  Il  est  probable  qu'ils  ne  sont  pas 
tous  du  même  auteur  ni  de  la  môme  époque;  on  y  trouve  des 
morceaux  qui  sont  cités  aussi  sous  les  noms  de  Selon  ou  de 
Mimnernie,  d'aulres  sont  l'œuvre  de  quelque  femme  poète,  car 


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TI1É06NIS.  307 

le  féminin  y  est  employé  à  la  première  personne.  Tel  passage 
paraît  écrit  peu  de  temps  avant  les  guerres  médiques,  tel  autre 
semble  antérieur  à  l'établissement  de  la  tyrannie  à  Mégare,  car 
le  poète  exprime  la  crainte  d'une  usurpation  :  «  Lorsque  des 
hommes  méchants  cherchent  leur  intérêt  dans  le  mal  du  peu- 
ple, alors  naissent  la  dissension  et  la  guerre.  Puisse  cette  cité  ne 
jamais  accepter  un  maître  !»  —  «  Kyrnos,  celte  cité  est  enceinte, 
je  crains  qu'elle  n'enfante  bientôt  un  homme  violent,  chef  de 
la  funeste  sédition.  »  Ces  craintes  n'étaient  pas  sans  fonde- 
ment, et  le  poète  s'écrie  ailleurs  :  a  Les  bons  sont  en  exil,  les 
méchants  gouvernent;  que  Zeus  détruise  la  race  des  Kypsé- 
lidesl  »  Les  Kypsélides  étaient  tyrans  de  Corinlhe  et  non  de 
Mégare,  mais  le  poète  désigne  ici  par  extension  les  tyrans  en 
général.  Il  excite  les  citoyens  à  renverser  la  tyrannie  qu'ils 
n'ont  pas  su  prévenir  :  ■  Renverse,  par  tous  les  moyens  que 
tu  voudras, le  tyran  mangeur  de  peuples,  tu  n'as  rien  à  crain- 
dre de  la  justice  des  Dieux.  »  D'autres  vers  sont  adressés  au 
tyran  lui-môme  :  «  Écrase,  foule  sous  tes  pieds  ce  peuple  slu- 
pide,  frappe-le  d'un  aiguillon  aigu,  mets-lui  un  dur  joug  sur 
le  cou;  car,  parmi  tous  les  hommes  que  le  soleil  regarde,  lu 
ne  trouveras  pas  un  peuple  qui  aime  autant  la  servitude.  » 

Quand  Théognis  oppose  les  bons  aux  méchants,  il  emploie 
quelquefois  ces  mots  dans  leur  sens  propre,  mais  plus  souvent 
dans  le  sens  arbitraire  que  leur  donnait  l'esprit  de  parti.  En 
Grèce  comme  à  Rome,  les  classes  dirigeantes  s'intitulaient  le 
parti  des  honnêtes  gens.  Mais  l'aristocratie  de  la  naissance 
était  quelquefois  en  opposition  avec  l'aristocratie  de  la  ri- 
chesse ;  c'est  à  la  première  qu'appartenait  Théognis,  car  il  se 
plaint  souvent  que  les  bons  soient  pauvres  et  que  les  mé- 
chants soient  riches  :  «  Chacun  honore  le  riche  et  méprise  le 
pauvre;  l'esprit  des  hommes  est  partout  le  même.  »  Il  dit  que 
ceux  qui,  jadis,  étaient  vêtus  de  peaux  de  bêles  et  paissaient 
comme  des  cerfs  hors  de  la  ville  sont  devenus  les  bons,  et 
que  les  bons  sont  devenus  mauvais  ;  c'e.^t  une  allusion  à  la 
victoire  politique  des  ruraux.  Quelques-uns  de  ses  vers  semblent 
écrits  sous  l'impression  de  la  colère  que  lui  cause  son  exil  et 
la  défaite  de  son  parti  :  «...  Et  je  ne  vois  pas  la  punition  de 
ceux  qui  m'ont  ravi  mes  biens  par  la  violence;  j'ai  passé  le 


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308  RÉVOLUTIONS  D'âTHÈNES. 

torrent  comme  un  chien,  dépouillé  de  tout  dans  les  eaux  gon- 
flées du  fleuve.  Puissé-je  boire  leur  sang  noir,  et  voir  enfin  un 
bon  Démon  accomplir  mes  vœux.  »  Celle  soif  de  représailles 
revient  souvent  dans  ses  vers  :  «  Alors,  puisse  tomber  sur  moi 
le  grand  ciel  d'airain,  la  terreur  des  hommes  d'autrefois,  si  je 
ne  fais  du  bien  à  ceux  qui  m'aiment  et  si  je  n'apporte  à  mes 
ennemis  le  désespoir  et  la  ruine.  » 

Aigri  par  le  malheur,  Théognîs  voit  la  nature  humaine  sous 
un  jour  assez  défavorable  :  «  L'exilé  n'a  pas  d'ami  ni  de  com  - 
pagnon  fidèle;  c'est  là  ce  qu'il  y  a  de  plus  dur  dans  l'exil.  »  Kt 
ailleurs  :  «  Les  amis  sont  nombreux  autour  de  la  coupe  pleine, 
mais  ils  sont  rares  quand  on  a  besoin  d'eux.  »  On  voit  poindre 
dans  les  vers  de  Théognis  les  premiers  doutes  de  la  raison  hu- 
maine devant  le  problème  du  mal.  Comme  Job,  comme  l'Ec- 
clésiasle,  il  trouve  difficile  de  concilier  la  justice  divine  avec  le 
bonheur  des  méchants  et  le  malheur  des  justes  :  «  Qui  donc, 
en  voyant  cela,  peut  encore  vénérer  les  immortels?  El  que 
peut- on  penser  lorsqu'un  homme  injuste  et  impie  vit  dans  l'a- 
bondance pendant  que  les  justes  sont  écrasés  sous  le  poids  de 
la  dure  pauvreté?  »  Pourtant  il  finit  par  reconnaître  que  l'ad- 
versité n'est  qu'une  épreuve  qui  distingue  le  brave  du  lâche  : 
«  11  faut  accepter  ce  que  les  Dieux  donnent  aux  mortels  et  sup- 
porter son  sort  quel  qu'il  soit,  sans  se  désoler  des  maux  et  sans 
se  réjouir  du  bonheur  avant  d'avoir  vu  la  fin.  »  —  «  Nul  n'est 
pleinement  heureux  ;  mais  le  brave  supporte  ses  maux  et  ne 
laisse  pas  môme  voir  sa  douleur:  le  lâche  ne  sait  supporter  ni 
les  maux  ni  les  biens.  »  —  «Je  ne  puis,  ô  mon  cœur,  te  fournir 
tout  ce  qui  te  convient.  Sois  fort;  lu  n'es  pas  seul  à  désirer 
le  bonheur,  »  —  «  Supporte  tes  maux,  mon  cœur,  quoique  les 
souffrances  soient  inouïes;  c'est  le  cœur  des  lâches  qui  se 
rétrécit.  Ne  va  pas  augmenter  la  douleur  de  ta  défaite  par  la 
colère  et  les  plaintes,  et  affliger  tes  amis  et  réjouir  tes  enne- 
mis. »  Ces  fières  paroles  sont  une  expression  anticipée  de  la 
morale  stoïcienne. 

Révolutions  d^Athënes.  —  L^Archontat.  Les  Eupa- 
trides.  —  L'histoire  intérieure  d'Athènes  n'est  bien  connue 
qu'à  partir  du  siècle  qui  précède  les  guerres  médiques.  Tout  ce 
qu'on  sait  de  la  période  antérieure,  c'est  que  le  passage  de  la 


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LOIS  DE   DRAGON.  309 

monarchie  à  la  république  avait  été  ménagé  par  une  Iransilion 
Ires  lente.  L'archontat  à  vie,  qui,  après  la  mort  de  Codros 
(1045),  avait  remplacé  la  royauté,  devint  décennal  en  752.  Puis 
en  714  il  cessa  d'être  réservé  aux  descendants  de  Codros,  pour 
devenir  accessible  à  tous  les  nobles  ou  Eupatrides,  issus  dos 
anciennes  familles  autochlhones  et  de  quelques  familles  venues 
du  Péloponnèse  après  la  conquête  dorienne.  Entin,  en  683, 
l'Archontat  fut  partagé  en  Ire  neuf  citoyens  nommés  pour  un 
an.  Ce  partage  permettait  de  satisfaire  un  plus  grand  nombre 
d*ambitions,  en  même  lemps  qu'il  appliquait  le  principe  répu- 
blicain de  la  division  du  pouvoir.  Le  premier  des  neuf  archontes 
se  nommait  Ëponyme,  parce  qu'il  donnait  son  nom  à  Tannée. 
Il  représentait  la  majesté  de  TÉtat  et  exerçait  une  juridiction 
qui  avait  appartenu  au  roi  comme  père  du  peuple  :  il  était  le 
tuteur  des  orphelins,  le  prolecteur  des  veuves  et  réglait  les 
questions  d'héritage.  Le  second  archonte  gardait  le  titré 
de  roi  et  les  fonctions  de  grand  prêtre,  un  des  attributs  de  la 
royauté.  11  présidait  aux  cérémonies  du  culte  public  et  pro- 
nonçait sur  les  causes  qui  concernaient  la  religion.  Le  troisième 
archonte  s'appelait  Polémarque,  ou  ministre  de  la  guerre,  et 
jusqu'à  la  réforme  de  Cleisthénès  il  eut  le  commandement  de 
l'armée.  Les  six  autres  archontes  portaient  lé  titre  commun  de 
Thesmothètes,  qu'on  traduit  par  législateurs,  mais  qui  a  plutôt 
le  sens  de  juges,  car  le  mot  ôiafAo';,  analogue  au  mot  homé- 
rique 6gp.'.(jrg;,  représente  des  règles  idéales  de  justice,  tandis 
que  le  motvop.G;,  qui  est  plus  moderne,  désigne  les  lois  écrites. 
Les  Thesmothètes  jugeaient  les  nombreuses  causes  qui  n'étaient 
pas  du  ressort  des  trois  premiers  archontes. 

Dracon.  Kylon.  Epiménide.  •—  Les  Eupatrides,  seuls  en 
possession  du  pouvoir  judiciaire,  s'en  servaient  arbitrairement 
et  dans  l'intérêt  de  leur  classe.  Les  jugements  étaient  rendus 
d'après  des  coutumes  traditionnelles.  Le  peuple  réclama  une 
règle  fixe,  un  Code  de  lois  écrites.  Ce  Code  fut  rédigé  par 
Dracon  (614),  quarante  ans  après  le  Code  de  Zaleucos  à 
Locres.  Les  lois  de  Dracon  étaient  d'une  sévérité  excessive  et 
probablement  calculée  pour  maintenir  l'obéissance  par  la 
terreur.  Le  mécontentement  du  peuplenefll  qu'augmenter.  Un 
riche  Enpatride  nommé  Kylon,  gendre  de  Théagénès  lyran  de 


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310  KYLON.    ÉPIMÉNIDE. 

Mégare,  crut  Toccasion  favorable  pour  usurper  le  pouvoir. 
Son  beau-père  l'y  encourageait  et  promettait  de  l'aider.  II 
consulta  l'oracle  de  Delphes  sur  Topportunité  de  rentreprîsc. 
La  Pythie  lui  conseilla  de  choisir  le  jour  de  la  plus  grande  fêle 
de  Zeus.  On  ignore  si  cette  réponse  était  accompagnée  d'un 
blâme,  mais  à  cette  époque,  la  tyrannie  paraissait  le  seul 
remède  aux  excès  de  l'oligarchie,  et  l'expérience  n'avait  pas 
encore  montré  que  ce  remède  était  dangereux  et  pire  que  le 
mal.  Kylon,  qui  avait  remporté  une  victoire  à  Olympie,  crut  que 
le  retour  des  jeux  Olympiques  était  l'époque  désignée  par  l'ora- 
cle, sans  se  rappeler,  dit  Thucydide,  qu'à  Athènes,  la  plus  grande 
fête  de  Zeus  était  la  fête  des  Diasia.  Il  s'empara  de  la  citadelle 
et  s'y  établit  avec  ses  partisans  et  les  auxiliaires  que  lui  avait 
fournis  son  beau-père.  On  les  y  bloqua  et  on  les  prit  par  la 
famine.  Kylon  parvint  à  s'échapper,  on  ne  sait  pas  ce  qu'il 
devint.  Les  autres  demandèrent  à  capituler  et  s'assirent  en 
suppliants  devant  l'autel  d'Àlhènè.  On  leur  dit  de  se  soumettre 
au  jugement  du  peuple.  Pour  ne  pas  perdre  leur  droit  d'asile, 
ils  descendirent  en  tenant  une  corde  attachée  à  la  statue  de  la 
Déesse.  Lorsqu'ils  furent  près  de  l'autel  des  Euménides,  la 
corde  se  rompit.  L'archonte  Mégaclès  s'écria  qu'Athènè  leur 
refusait  sa  protection.  On  les  massacra,  méqfie  ceux  qui  em- 
brassaient l'autel  des  Graves  Déesses. 

Ce  sacrilège  produisit  sur  l'opinion  publique  une  impression 
sinistre.  Toute  la  famille  des  Alcmaionides,  dont  Mégaclès  était 
le  chef,  fut  considérée  comme  impure.  Ils  essayèrent  de  braver 
cette  réprobation,  puis,  sur  le  conseil  de  Solon,  ils  consentirent 
à  être  jugés  par  un  tribunal  de  trois  cents  Eupatrides  qui  les 
condamnèrent  à  l'exil.  Les  ossements  des  membres  de  la 
famille  qui  étaient  morts  depuis  le  sacrilège  furent  déterrés  et 
jetés  hors  du  territoire.  Cela  ne  suffit  pas  pour  calmer  les 
terreurs  religieuses.  On  fit  venir  le  Cretois  Epiménide,  qui 
avait  la  réputation  d'un  prophète  et  passait  pour  avoir  été 
nourri  par  les  Nymphes  ;  ou  racontait  que,  dans  sa  jeunesse, 
il  s'était  endormi  dans  une  caverne  et  y  était  resté  cinquante- 
sept  ans  sans  se  réveiller.  Il  connaissait  les  vertus  des  plantes 
et  passait  pour  un  grand  médecin;  c'était  surtout  un  médecin 
des  âmes.  11  fit  partir  de  l'Aréiopage  des  brebis  blanches  et  dos 


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SOLON.  311 

brebis  noires,  ordonna  de  les  suivre  et  d'immoler  chacune 
d'elles  sur  un  autel  élevé  à  la  divinité  du  lieu.  Quelques-unes 
s'arrêtèrent  dans  des  lieux  dont  on  ne  connaissait  pas  le  Dieu 
prolecteur  ;  les  autels  qu*on  y  éleva  furent  consacrés  à  un  Dieu 
inconnu.  Plus  de  six  cents  ans  après,  un  de  ces  autels  qui  sub- 
sistait encore  fournit  à  saint  Paul  un  exorde  ingénieux  pour 
prêcher  une  religion  nouvelle.  Epiniénide  se  mit  en  rapports 
avec  Solon,  qui  avait  l'estime  de  tous  les  partis  à  cause  de  sa 
prudence,  et  institua  quelques  cérémonies  lustrales  qui  ren- 
dirent la  paix  aux  consciences  troublées.  On  lui  offrit  un  talent 
d'or  qu'il  refusa,  demandant  seulement  pour  Cnossos,  sa  patrie, 
l'amitié  des  Athéniens,  et  pour  lui-même  une  branche  de 
l'olivier  sacré  qu'Athènè  avait  fait  germer  sur  le  rocher  de 
TAcropoIe. 

Solon.  —  Prise  de  Salamine.  —  C'est  sans  doute  pour 
venger  son  gendre  Kylon,  peut-être  même  à  son  instigation, 
que  Théagénès  de  Mégare  s'empara  de  Salamine.  Après  plu- 
sieurs tentatives  pour  la  reprendre,  les  Athéniens  découragés 
avaient  défendu,  sous  peine  de  mort,  d'en  faire  même  la  pro- 
position. Solon,  indigné  de  ce  décret,  contrefit  la  folie,  se 
présenta  sur  la  place  publique  en  bonnet  de  malade,  et  monté 
sur  la  pierre  où  se  faisaient  les  proclamations,  déclama  devant 
le  peuple  une  élégie  de  cent  vers  commençant  ainsi  :  «  J'ar- 
rive en  messager  de  la  belle  Salamine,  et  je  vais  vous  dire  les 
vers  harmonieux  que  m'a  inspirés  Apollon.  Que  ne  puis-je 
changer  de  patrie,  que  ne  suis-je  né  dans  l'ile  la  plus  humble, 
à  Sikinos  ou  à  Pholégandros,  plutôt  que  d'entendre  dire  : 
«  Celui-ci  est  un  Athénien,  un  de  ceux  qui  ont  renoncé  à  Sala- 
mine »...  Combattons  pour  cette  île  désirable,  écartons  de  nous 
la  honte  et  le  déshonneur.  »  Quand  il  eut  achevé,  tout  le 
monde  était  de  son  avis;  le  décret  fut  annulé,  Solon  fut  nommé 
général  et  s'empara  de  Salamine  par  surprise.  Mais  les  Méga- 
riens ne  voulaient  pas  y  renoncer;  il  fallait  soutenir  une 
guerre  qui  pouvait  devenir  désastreuse,  car  à  cette  époque, 
Mégare,  malgré  l'exiguité  de  son  territoire,  était  plus  riche  et 
plus  puissante  qu'Athènes.  On  convint  de  s'en  remettre  à 
l'arbitrage  de  Sparte.  Solon,  pour  établir  les  droits  de  ses  con- 
citoyens à  la  possession  de  l'île,  invoqua  l'autorité  du  Cala- 


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312  LUTTE  DES  RICHES   ET  DES  PAUVRES. 

logue  de  l'Iliade,  et'usant d'une  fraude  patriotique,  supposa  un 
vers  où  Aias  était  représenté  comme  rangeant  les  vaisseaux  de 
Salamine  à  la  suite  de  ceux  d'Alh«ncs.  Les  vers  d'Homère 
n'étant  pas  encore  écrits  à  cette  époque,  on  ne  pouvait  pas 
prouver  que  la  citation  était  fausse;  les  Spartiates  trouvèrent 
l'argument péremptoire  et  adjugèrent  Salamine  aux  Athéniens. 
Solon  devint  très  populaire.  Il  accrut  encore  sa  réputation  en 
épousant  la  cause  du  temple  de  Delphes  contre  les  extorsions 
des  habitants  de  Kirrha.  Quoique  Cleisthénès  de  Sikyone  eût 
le  principal  rôle  dans  la  guerre  sacrée  décrétée  par  les  A  m - 
phictions,  il  n'était  pas  inutile  aux  Athéniens  -de  se  poser  en 
protecteurs  de  Delphes,  et  Solon,  qui  peut-être  pensait  déjà  à 
faire  une  constitution  pour  Athènes,  ne  pouvait  pas  ignorer 
combien  l'appui  d'Apollon  avait  été  utile  à  Lycurgue. 

Lutte  des  riches  et  des  pauvres.  —  Solon  se  rattachait 
aux  Eupatrides  par  sa  naissance  ;  on  dit  même  qu'il  descendait 
de  Codros.  En  réalité  il  appartenait  à  labourgeoisie  et  s'était 
enrichi  par  le  commerce.  Le  peuple  l'aimait  à  cause  de  sa 
droiture  et  de  son  patriotisme.  C'était  l'homme  désigné  pour 
rétablir  la  paix  entre  les  classes.  Le  législateur  d'Athènes  et 
celui  de  Sparte  apparaissent  dans  des  circonstances  à  peu  près 
semblables;  à  Athènes  comme  à  Sparte,  la  loi  est  appelée 
comme  un  remède  suprême  aux  maux  du  peuple.  Les  empié- 
tements successifs  de  l'oligarchie,  peut-être  aussi  une  suite  de 
mauvaises  récoltes,  avaient  réduit  les  Thèles  ou  travailleurs 
à  une  condition  que  Denys  d'Halicarnasse  rapproche  de  celle 
des  plébéiens  de  Rome.  11  reste  un  fragment  de  Solon  qui  se 
rapporte  à  l'oppression  exercée  par  les  riches  sur  les  pauvres  : 
«  Notre  république  ne  sera  pas  détruite  par  la  destinée  de  Zeus 
(aiaa)  et  la  volouté  des  immortels  Dieux  heureux,  car  une  ma- 
gnanime gardienne,  fille  d'un  père  puissant,  Pallas  Athènaiè, 
la  protège.  Mais  ce  sont  des  citoyens  qui,  fiers  de  leur  richesse, 
veulent  perdre  la  grande  cité  par  leur  folie;  c'est  l'injustice 
des  chefs  du  peuple,  qui  se  préparent  bien  des  malheurs  par 
leur  grande  violence,  car  ils  ne  savent  pas  modérer  leur  avidité 
et  user  du  bonheur  présent  dans  le  repos  et  l'abondance...  (ici 
une  lacune)....  et  ils  s'enrichissent  par  des  actions  injustes 
(autre  lacune)....  et,  n'épargnant  ni  les  biens  sacrés  ni  les 


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LA  QUESTION   SOCIALE.  313 

biens  du  peuple,  ils  pillenl  el  volent  de  tous  les  côtés  et  ne 
respectent  pas  les  saintes  lois  de  la  Justice.  Mais  elle,  silencieuse, 
sachant  le  passé  et  l'avenir,  vient  tout  venger  en  son  temps. 
C'est  pourquoi  un  ulcère  incurable  envahit  toute  la  cité,  elle 
tombe  tout  à  coup  dans  la  dure  servitude  qui  réveille  la  dis- 
sension endormie...  »  Solon  énumère  ensuite  les  maux  de  la 
guerre  et  conseille  aux  Athéniens  de  les  éviter  par  de  bonnes 
lois  qui  mettent  un  terme  à  la  satiété,  c'est-à-dire  à  l'excès  des 
richesses,  source  de  l'injustice  et  de  la  violence. 

Lia  question  sociale  résolae  par  Solon.  —  La  crise  qui 
se  termina  par  rétablissement  de  la  démocratie  fut  provoquée 
par  ce  qu'on  appellerait  aujourd'hui  une  question  sociale.  Les 
citoyens  pauvres  étaient  obligés  d'engager  leurs  champs,  puis 
de  se  mettre  au  service  de  leurs  créanciers  el  même  de  vendre 
leurs  femmes  et  leurs  enfants.  «  Le  plus  grand  nombre  et  les 
plus  animés  d'entre  eux,  dit  Plutarque,  s'excitèrent  les  uns  les 
autres  à  ne  plus  souffrir  ces  indignités.  Ils  résolurent  de  se 
donner  pour  chef  un  homme  digne  de  leur  confiance,  d'aller 
sous  sa  conduite  délivrer  les  débiteurs  qui  n'avaient  pu  payer 
aux  termes  convenus,  de  faire  un  nouveau  partage  des  terres 
et  de  changer  toute  la  forme  du  gouvernement.  Dans  cette 
i'ùcheuse  conjoncture,  les  plus  sages  des  Athéniens  eurent 
recours  à  Solon,  comme  le  seul  qui  ne  fût  suspect  à  aucun  des 
partis,  parce  qu'il  n'avait  ni  partagé  l'injustice  des  riches,  ni 
approuvé  le  soulèvement  des  pauvres;  ils  le  prièrent  de  pren- 
dre en  main  les  affaires  et  de  mettre  fin  à  leurs  dissensions.  » 
Solon  fut  investi  d'une  sorte  de  dictature,  comme  Piltacos  à 
Mitylène,  mais  on  ne  créa  pas  pour  lui  un  titre  spécial,  il  fut 
seulement  nommé  archonte,  avec  une  autorité  indéfinie. 

Il  commença  par  rendre  à  la  liberté  les  débiteurs  réduits  en 
esclavage  par  les  usuriers,  et  força  ceux-ci  à  dégager  à  leurs 
frais  ceux  qu'ils  avaient  vendus  dans  des  contrées  étrangères. 
Il  prévint  le  retour  d'un  pareil  abus  en  empêchant  par  une 
loi  que  le  débiteur  pût  être  vendu  ou  contraint  de  vendre 
ses  enfants.  La  hberté  individuelle  fut  garantie;  personne 
ne  put  être  mis  en  prison  avant  d'avoir  été  condamué 
par  un  jugement,  excepté  pcTur  les  crimes  de  péculat,  de 
trahison  ou  de  conspiration  contre  la  république.  Solon  au- 
L.  M.  —  HisT.  DES  GttËCs.  18 

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314  LOI   DE  SOULAGEMENT. 

nula  aussi  les  hypothèques  et  fit  arracher  des  champs  les 
pierres  sur  lesquelles  on  les  inscrivait.  Sans  abolir  les  dettes 
comme  les  révolutionnaires  de  Mégare,  il  les  réduisit  considé- 
rablement, au  moyen  d'une  combinaison  financière  qu'on 
nomme  atiaàx^"*»  c'est-à-dire  soulagement.  Elle  consistait  en 
un  changement  dans  la  division  monétaire  :  la  mine,  qui  était 
partagée  en  73  drachmes,  fut  partagée  en  100,  de  façon  à  libé- 
rer en  partie  les  débiteurs  sans  frustrer  entièrement  les  créan- 
ciers. Celte  mesure,  qui  préservait  la  ville  d'une  révolution, 
était  sans  danger  pour  le  commerce,  dans  un  temps  où  il  n'y 
avait  pas  de  marchés  à  terme  avec  le  dehors,  et  le  crédit 
d'Athènes  n'eut  pas  à  en  souffrir. 

Un  compromis  fait  toujours  des  mécontents;  Solon  en  prit 
son  parti  :  «  Dans  les  grandes  aff'aires,  dit-il,  il  est  difficile  de 
plaire  à  tout  le  monde.  »  Les  riches  trouvaient  qu'en  donnant 
à  ses  mesures  un  efi'et  rétroactif  il  violait  des  droits  acquis; 
les  pauvres  avaient  espéré  qu'il  détruirait  le  mal  dans  sa  racine 
par  une  distribution  égale  de  la  propriété.  Plutarque  l'excuse 
de  n'avoir  pas  tenté  cette  entreprise;  Lycurgue,  qui,  selon  lui, 
l'avait  réalisée  à  Sparte,  exerçait  l'autorité  royale  et  agissait  sur 
une  société  non  encore  constituée;  Solon  n'avait  qu'une  in- 
fluence morale.  S'il  est  vrai,  comme  on  l'a  dit,  qu'il  ait  obtenu 
celte  influence  en  promettant  aux  riches  de  consacrer  les  dettes, 
aux  pauvres  départager  les  terres,  du  moins  cette  ruse  n'avait 
pas  eu  pour  motif  une  ambition  personnelle.  Sous  le  rapport 
de  rhonnéteté,  Solon  peut  être  rapproché  de  Néhémiah  qui,  un 
siècle  et  demi  plus  tard,  joue  un  rôle  analogue  dans  l'histoire 
des  Juifs  {{}.  Néhémiah  atteste  son  désintéressement  dans  ses 
mémoires  et  off're  l'exemple,  presque  incroyable  pour  nous,  d'un 
fonctionnaire  renonçant  à  son  traitement.  Solon,  dans  les  vers 
qui  nous  restent  de  lui,  raille  ceux  qui  l'accusaient  de  sottise 
parce  qu'il  avait  renoncé  au  pouvoir  qu'il  pouvait  facilement 
garder  :  «  Solon  n'est  pas  né  avec  un  esprit  profond  et  avisé  : 
un  Dieu  lui  offre  des  biens,  il  ne  les  prend  pas.  Lorsqu'il  lient 
le  poisson,  il  ne  sait  pas  ramener  le  filet;  il  manque  d'au- 
dace et  de  bon  sens.  »  Il  se  félicite  avec  un  légitime  orgueil  de 

(I)  Voir  mou  Histoire  des  israélites  d'après  Vexégèse  biblique. 


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RÉPARTITION   DE   LMMPOT.  315 

ne  s'être  pas  fait  tyran  d'Athènes  :  «  Si  j'ai  respecté  ma  terre 
paternelle,  si  je  n*ai  pas  flétri  et  souillé  ma  gloire  en  m*empa- 
rantde  la  tyrannie  par  violence,  loin  d'en  rougir,  je  crois  plutôt 
que  je  l'emporterai  par  là  sur  tous  les  hommes.  »  Dans  des 
ïambes  qui  ont  été  conservés,  il  invoque  le  témoignage  de  la 
grande  mère  des  Démons  olympiens,  de  la  Terre  noire,  esclave 
auparavant^  libre  désormais.  IL  déclare  qu'il  a  rendu  à  la 
patrie  bien  des  exilés,  à  la  liberté  bien  des  citoyens  réduits  en 
servitude,  et  il  ajoute  que,  s'il  n'avait  pas  su  garder  de  juste 
mesure,  s'il  avait  voulu  satisfaire  un  parti  ou  l'autre,  la  répu- 
blique aurait  été  veuve  de  bien  des  citoyens.  On  finit  par  le 
reconnaître,  et  Solon,  possédant  la  confiance  générale,  apporta 
le  même  esprit  de  conciliation  dans  la  rédaction  des  lois  qu'il 
fut  chargé  de  présenter  au  peuple. 

Constitution  politique  de  Solon  :  Répartition  de 
rimpôt.  —  La  base  de  la  constitution  politique  de  Solon  est  un 
impôt  progressif  établi  sur  les  revenus.  Le  groupement  des 
familles  en  phratries  ou  clans,  et  des  phratries  en  quatre 
tribus,  se  rattachait  à  des  cultes  privés  et  à  des  traditions  lo- 
cales :  Solon  n'essaya  ni  de  le  changer  ni  de  s'en  servir  ;  il 
créa  de  nouveaux  cadres  pour  la  répartition  de  l'impôt.  Les 
citoyens  furent  partagés  en  quatre  classes.  La  dernière,  la 
classe  des  Thètes  comprit  à  la  fois  les  prolétaires  vivant  uni- 
quement de  leur  travail  et  les  petits  propriétaires,  dont  les 
champs  rapportaient  moins  de  deux  cents  médimnes  de  grain 
(le  médimne  valait  à  peu  près  une  drachme,  un  peu  moins 
d'un  franc).  Cette  classe  ne  fut  pas  soumise  à  l'impôt,  et  Solon 
fit  preuve  d'un  grand  sens  politique  en  unissant,  par  la  com- 
munauté d'intérêts,  les  ouvriers  et  la  petite  bourgeoisie.  Il  ne  se 
montra  pas  moins  habile  en  répartissant  l'impôt  d'une  manière 
progressive  entre  les  trois  classes  de  censitaires;  cela  empo- 
chait le  groupement  des  citoyens  en  riches  et  pauvres.  La 
première  classe  comprenait  ceux  qui  avaient  500  médimnes  de 
revenu,  on  les  appelait  Pentacosiomédimnes.  Ceux  qui  avaient 
un  revenu  de  300  à  500  médimnes  formaient  la  seconde  classe; 
ils  s'appelaient  Cavaliers,  parce  qu'ils  pouvaient  entretenir  un 
chevalet  servir  dans  la  cavalerie.  La  troisième  classe,  celle  des 
Zeugiles,  à  qui  leur  revenu  de  300  à  200  médimnes  permettait 


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316  LE  SÉNAT   ET  L'ARÉIOPAGË. 

d'avoir  une  paire  de  bœufs,  formait  l'infanterie  pesamment 
armée  ;  chacun  devait  servir  avec  une  armure  complète  ac- 
quise à  ses  frais,  landis  que  les  Thètes  ne  servaient  que  comme 
troupes  légères  ou  avec  une  armure  fournie  par  l'État. 

Les  fonctions  publiques  n'étaient  accessibles  qu'aux  cen- 
Mtaires,  puisqu'elles  étaient  gratuites;  quelques-unes  même, 
comme  celle  de  Triérarques,  de  Gymnasiarques,  de  Chorèges, 
entraînaient  des  dépenses  et  des  embarras  considérables  ;  on 
les  appelait  des  Liturgies.  L'archontat  et  les  charges  les  plus 
onéreuses  étaient  réservées  à  la  première  classe.  Toutes  les 
fonctions  étaient  électives,  et  comme  les  Thètes  étaient  les 
plus  nombreux,  c'étaient  eux  qui  faisaient  les  élections.  Ce  qui 
était  encore  plus  important,  c'est  que  toutes  les  magistratures 
étaient  annuelles,  et  qu'après  leur  année  de  charge,  les  ma- 
gistrats étaient  soumis  à  une  reddition  de  comptes  devant 
l'assemblée  générale  du  peuple,  et  punis  en  cas  de  mauvaise 
gestion. 

Le  Sénat.  L^Aréiopage.  —  Le  Sénat,  que  G  rote  regarde 
comme  la  création  la  plus  importante  de  Solon,  n'avait  pas 
pour  but  de  contenir  la  puissance  populaire,  mais  d'en  rendre 
l'exercice  plus  facile  et  plus  régulier.  Il  était  chargé  de  con- 
voquer l'assemblée  publique,  de  préparer  ses  délibérations  et 
d'assurer  l'exécution  de  ses  décrets.  Les  sénateurs,  au  nombre 
de  quatre  cents,  étaient  élus  -chaque  année,  en  proportions 
égales,  non  dans  les  quatre  classes,  mais  dans  les  quatre 
tribus  athéniennes  ;  dans  une  période  plus  avancée  de  la  dé- 
mocratie, ils  furent  désignés  parle  sort.  Quanta  l'Aréiopage, 
qui  était  le  tribunal  suprême,  c'était  la  seule  fonction  à  vie. 
On  en  faisait  remonter  l'origine  à  l'époque  mythologique. 
Solon  lui  attribua,  outre  les  fonctions  politiques  et  judiciaires 
qu'il  avait  déjà,  la  surveillance  des  mœurs  et  le  devoir  de  punir 
les  oisifs.  Les  Archontes  entraient  dans  le  Sénat  de  l'Aréiopage 
après  avoir  rendu  leurs  comptes  devant  le  peuple.  Solon  con- 
sidérait ces  deux  Sénats  comme  deux  ancres  pour  mettre  la 
république  en  état  de  résister  à  toutes  les  tempêtes.  Sans 
croire  sa  constitution  parfaite,  il  la  regardait  comme  la  meilleure 
possible  dans  les  circonstances  où  on  se  trouvait.  «  J'ai  donné 
au  peuple  autant  de  pouvoir  qu'il  était  nécessaire,  sans  res- 


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LE  LIEN  SOCIAL.   LE  TRAVAIL.  317 

treindre  ses  droits  et  sans  les  étendre  au  delà  des  bornes.  A 
ceux  qui  avaient  la  force  et  qui  se  glorifiaient  de  leurs  richesses, 
j'ai  interdit  toute  usurpation.  J'ai  étendu  sur  les  deux  partis 
un  bouclier  solide,  et  je  n'ai  permis  ni  aux  uns  ni  aux  autres 
de  vaincre  injustement.  »  II  est  de  toute  nécessité,  en  effet,  de 
reconnaître  au  peuple  le  droit  de  choisir  les  magistrats  et 
de  leur  faire  rendre  des  comptes  ;  «  sans  cela,  dit  Aristote. 
le  peuple  n'est  dans  l'État  qu'un  esclave  et  un  ennemi  », 

Lois  civiles.  —  Le  lien  social.  Le  travail.  --  On  ne  pos- 
sède malheureusement  pas  le  recueil  des  lois  de  Solon.  II  y 
avait  des  prescriptions  détaillées  sur  la  propriété,  les  relations 
de  voisinage,  et  en  général  sur  les  devoirs  réciproques  des 
citoyens.  La  loi  qui  défendait  de  rester  neutre  dans  les  dis- 
sensions politiques  avait  pour  but  de  flétrir  cette  prudence 
égoïsle  qui  attend  l'issue  de  la  lutte  pour  se  ranger  du  parti 
xictorieux.  Il  est  à  remarquer  que  cette  loi  ne  condamne  pas 
la  sédition  en  elle-même  et  ne  suppose  pas  que  le  droit  soit 
nécessairement  du  côté  du  pouvoir  ;  elle  veut  seulement  que  le 
peuple  fasse  connaître  sa  volonté.  La  loi,  la  justice  et  la  liberté 
sont  sous  la  sauvegarde  de  tous.  Solon  disait  que  la  meilleure 
république  étaitcelle  où  toute  injustice  est  poursuivie  par  ceux 
qui  n'en  souffrent  pas  comme  par  celui  qui  en  est  victime. 
Il  encouragea  chaque  citoyen,  dit  Plutarque,  à  entamer  des 
poursuites  pour  tout  acte  de  violence  exercé  contre  un  autre. 
La  loi  athénienne  punissait  toute  espèce  de  mauvais  traite- 
ment, de  sévicc  ou  d'outrage  contre  un  enfant,  une  femme, 
un  homme,  libre  ou  esclave.  Démosthène,  qui  cite  cette  loi, 
en  fait* remarquer  l'humanité,  çiXavôpwïria,  et  ajoute  que  plu- 
sieurs ont  été  punis  de  mort  pour  l'avoir  violée.  La  condition 
des  esclaves  à  Athènes  fut  toujours  très  douce.  Quand  ils 
avaient  à  se  plaindre  de  leur  maître,  ils  pouvaient  l'obliger  à 
les  vendre  à  un  autre.  A  Sparte,  l'agriculture,  le  commerce  et 
l'industrie  étaient  abandonnés  aux  Lacones  et  aux  Hilotes; 
Athènes,  fidèle  aux  anciennes  traditions,  honora  le  travail  sous 
toutes  ses  formes,  l'agriculture,  le  commerce,  l'industrie  etl'arl. 
11  était  défendu  de  reprocher  à  qui  que  ce  fût  l'état  qu'il 
exerçait  ;  le  plus  habile  dans  chaque  métier  était  nourri  au 
Prytanée  et  occupait  une  place  d'honneur  dans  les  fêtes  publi- 

18. 


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318  CONDITION  DKS  FEMMES. 

ques.  Celui  qui  avait  été  trois  fois  condamné  pour  oisiveté  était 
noté  d'infamie  ;  les  étrangers  mêmes  ne  pouvaient  s'établir  à 
Athènes  que  pour  y  exercer  un  état.  C'est  l'application  du  mot 
d'Hésiode  :  «  Aucun  travail  n'est  honteux,  il  n'y  a  de  honteux 
que  la  paresse.  » 

Gonditioii  des  femmes  à  Athènes.  —  Les  règlements  sur 
le  mariage  des  riches  héritières  empêchaient,  par  des  moyens 
peut-être  un  peu  étranges,  que  le  mariage  ne  devînt  une  af- 
faire d'intérêt.  Quant  aux  orphelines  pauvres,  leur  plus  proche 


Danse  de  jeuues  filles  (Musée  du  Louvre). 

parent  était  obligé  de  les  épouser  ou  de  leur  constituer  uiïe 
dot,  dont  le  chiffre  était  fixé  selon  la  classe  à4aquelle  il  apparte- 
nait. La  condition  de  mère  de  famille  étant  la  seule  honorable 
pour  une  citoyenne,  il  fallait  que  ce  fût  aussi  la  seule  possible. 
En  retenant  les  femmes  dans  un  état  de  minorité,  la  loi  sem- 
blait leur  faire  payer  les  avantages  qu'elle  leur  accordait, 
mais  l'honneur  étant  le  bien  le  plus  précieux  pour  elles,  valait 
bien  le  sacrifice  d'une  partie  de  leur  indépendance.  Une  limite 
était  imposée  au  luxe  de  leur  parure  quand  elles  allaient  au 
marché  ;  il  leur  était  interdit  de  sortir  la  nuit  autrement  qu'en 
voiture  et  avec  une  torche.  On  croit  aujourd'hui  que  la  liberté 
de  conversation  entre  les  deux  sexes  est  un  moyen  d'aiguiser 
l'esprit:  les  Athéniens  ne  passaient  pas  pour  des  sots;  mais 
l'honneur  des  familles  était  à  leurs  yeux  une  plante  précieuse 
et  délicate.  La  danse  était  un  art  et  non  un  prétexte  à  conver- 
sation ;  sur  les  bas-reliefs,  les  femmes  ne  dansent  qu'entre 
elles,  excepté  dans  les  scènes  dionysiaques,  qui  sont  mytholo- 
giques et  ne  répondent  à  aucune  réalité.  La  femme  grecque 


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ÉDUCATION.  SERMENT  MILITAIKE.  319 

n'est  pas  soumise  à  une  réclusion  forcée,  comme  en  Orient  ; 
elle  garde  une  retraite  volontaire.  Elle  n'est  pas  captive  sous  les 
grilles  d'un  harem,  mais  elle  n'étale  pas  son  esprit  et  ses 
charmes  devant  une  foule  d'oisifs,  prodiguant  à  tous  ses  sou- 
rires excepté  à  celui  qu'elle  a  juré  d'aimer.  Ignorée  de  la 
foule,  nul  ne  parle  d'elle,  ni  en  bien  ni  en  mal,  selon  le  mot 
de  Périclès  dans  Thucydide.  Elle  n'admet  pas  môme  les  amis 
de  son  mari  à  sa  table.  L'étranger  baisse  les  yeux  devant  sa 
chasteté  voilée,  et  celui  qui  seul  peut  la  connaître  l'honore 
comme  la  divinité  tutélaire  du  foyer  domestique.  11  l'aime  d'un 
amour  grave  et  profond,  comme  on  aime  la  patrie. 

Éducation  des  enfants.  •—  Serment  militaire.  —  Solon 
obligea  les  parents  à  enseigner  à  leurs  enfants  la  lecture,  la 
natation  et  un  état.  Les  enfants  à  leur  tour  devaient  nourrir 
leurs  parents,  les  loger  et  leur  fournir  toutes  les  nécessités  de 
la  vie.  Ceux  qui  manquaient  à  ce  devoir  étaient  notés  d'infamie, 
peine  qui  répond  à  peu  près  à  la  mort  civile.  Mais  ceux  à  qui 
leur  père  n'avait  pas  appris  d'état  ne  lui  devaient  que  la  sépul- 
ture. Jusqu'à  seize  ans,  l'enfant  était  laissé  aux  soins  de  ses 
parents  ;  alors  il  était  inscrit  sur  le  registre  des  Phratries,  et 
pendant  les  deux  années  suivantes,  il  fréquentait  les  gymnases 
publics,  sous  la  surveillance  de  maîtres  nommés  par  l'État.  A 
dix-huit  ans,  les  Éphèbes  gardaient  les  places  de  l'Attique  et 
veillaient  à  la  défense  du  territoire.  Après  cet  apprentissage 
du  service  militaire,  ils  prêtaient  le  serment  suivant  dans 
le  temple  d'Agraulos  (la  champêtre]  :  «  Je  ne  déshonorerai 
pas  ces  armes  sacrées.  Je  n'abandonnerai  pas  mon  chef  de  file 
et  mon  rang.  Je  combattrai  pour  les  autels  et  les  foyers,  soit 
seul,  soit  avec  d'autres.  Je  ne  laisserai  pas  ma  patrie  plus  faible 
que  je  ne  l'ai  reçue,  mais  plus  grande  et  plus  forte.  J'obéirai  à 
ceux  qui  jugeront  selon  la  justice.  Je  serai  soumis  aux  lois  éta- 
bUes  et  à  celles  que  le  peuple  portera  d'un  consentement  una- 
nime. Je  ne  permettrai  pas  que  personne  renverse  les  lois  ou 
leur  désobéisse,  mais  je  les  défendrai,  soit  seul,  soit  avec 
d'autres.  Et  j'honorerai  la  religion  de  mes  pères.  Soient  té- 
moins les  Dieux  champêtres,  Enyalios,  Zeus,  Thallô,  Auxô, 
Hègémonè.  » 

Les  tables  de  la  loi.  —  Les  lois  politiques  et  religieuses 


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320  FACTIONS  POLITIQUES. 

furent  gravées  sur  des  tables  de  pierre  (wp^giç),  les  lois  civiles 
sur  des  pyramides  de  bois  tournant  sur  un  axe  (âÇovsç).  Les 
lignes  étaient  tracées  alternativement  de  gauche  à  droite  et  de 
droite  à  gauche.  Ce  procédé  primilif,  qui  montre  que  Tusage 
de  l'écriture  était  encore  peu  répandu,  s'appelait  Boustrophé- 
don,  parce  qu'il  rappelait  la  marche  d'un  attelage  de  bœufs 
traçant  des  sillons  dans  un  champ.  Tout  le  monde  pouvait 
consulter  les  lois  au  milieu  de  la  place  publique.  Solon  fit  ju- 
rer aux  Athéniens  d'observer  ses  lois  pendant  dix  ans,  puis  il 
leur  demanda  la  permission  de  voyager.  Il  visita  l'Egypte,  où 
les  prêtres  lui  racontèrent  la  submersion  de  la  grande  île 
d'Allantis  et  la  guerre  soutenue  neuf  cents  ans  auparavant 
par  les  ancêtres  des  Athéniens  contre  les  Atlantes;  il  com- 
mença un  poème  sur  ce  sujet.  Il  alla  ensuite  dans  l'île  de 
Kypros  et  fut  reçu  par  Philokypros,  roi  de  la  ville  d'Aipeia, 
fondée  jadis  par  un  fils  de  Thèseus.  Il  persuada  au  roi  de 
quitter  cette  ville,  dont  la  position  était  peu  avantageuse,  et 
d'en  bâtir  une  un  peu  plus  loin.  Il  fit  des  règlements  pour  la 
nouvelle  cité  qui  prospéra  très  rapidement  et  prit  le  nom  de 
Soloi  en  l'honneur  de  Solon.  On  place  ensuite  une  entrevue 
entre  Solon  et  Croisos,  roi  de  Lydie,  racontée  d'une  façon  très 
intéressante  au  début  de  l'histoire  d'Hérodote  (1),  uiais  qui, 
d'après  la  chronologie,  est  inadmissible,  car  Croïsos  était  né 
en  595,  un  an  avant  la  législation  de  Solon,  et  ne  succéda  à 
son  père  qu'à  l'âge  de  trente-cinq  ans,  en  560. 

Factions  politiques.  —  Usurpation  de  Pisistrate.  — 
Les  meilleures  lois  ne  suffisent  pas  pour  donner  à  un  peuple 
le  sens  politique  ;  il  faut  les  leçons  de  l'expérience.  Ce  que 
Solon  vit  à  son  retour  dut  le  jeter  dans  un  découragement 
profond.  Il  avait  cru  que  les  Alliéniens  étaient  mûrs  pour  la 
liberté,  il  s'était  trompé.  Les  discordes  civiles  avaient  recom- 
mencé après  son  départ;  non  pas  entre  les  riches  et  les  pau- 
vres, la  loi  de  soulagement  et  l'impôt  progressif  y  avaient  mis 
bon  ordre,  et  la  question  sociale  était  résolue  :  mais  il  y  avait 
des  divergences  d'intérêts  locaux,  et  les  grandes  familles  les 
exploitaient  au  profit  de  leurs  ambitions.  11  y  avait  trois  partis, 

(1)  J'ai  résumé  cette  légende  dans  VHistoire  des  anciens  peuples  de 
l'Orient. 


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USURPATION  DE  PISISTRATE.  321 

dont  chacun  avait  son  chef,  recrutant  des  clients  dans  les  di- 
verses classes  de  la  population.  Lycurgue  s'était  mis  à  la  tôle 
des  Pédiaiens,  ou  habitants  de  la  plaine  aux  environs 
d'Athènes.  Les  Diacriens,  qui  cultivaient  le  sol  plus  pauvre  de 
la  région  nnontagneuse  au  nord  de  TAttique,  se  groupaient 
autour  de  Pisistrate.  Les  Paraliens,  ou  habitants  des  côtes, 
avaient  pour  chef  l'Alcmaionide  Mégaclès,  petit-fils  de  celui 
qui  avait  réprimé  la  tentative  de  Kylon,  car  après  l'établisse- 
ment de  la  constitution  de  Solon,  les  Alcmaionides  étaient 
rentrés  à  Athènes.  Le  vieux  législateur  essaya  de  mettre  la  paix 
entre  les  factions  rivales  et  ne  fut  pas  écouté.  L'issue  de  la 
querelle  dépendait  maintenant  de  l'habileté  ou  de  l'auddce  des 
chefs.  Pisistrate  employa  le  moyen  qui  avait  réussi  à  Théagé- 
nès  de  Mégare;  il  se  fit  quelques  égratignures,  déclara  qu'on 
avait  voulu  l'assassiner  parce  qu'il  aimait  le  peuple,  et  aussitôt 
le  Sénat,  où  il  avait  beaucoup  d'amis,  lui  fit  donner  une 
garde.  Solon  avait  inutilement  averti  ses  concitoyens  du  dan- 
ger. Quand  le  mal  fut  consommé  par  l'occupation  de  l'Acropole 
il  essaya  d'exciter  url  soulèvement  général  :  «  Il  eut  mieux 
valu,  disait-il,  prévenir  l'usurpation  ;  mais  il  sera  plus  glorieux 
de  la  détruire  après  qu'elle  s'est  établie.  »  Personne  ne  l'é- 
couta  ;  la  faction  oligarchique  de  la  plaine  se  tint  à  l'écart;  les 
Alcmaionides,  chefs  du  parti  moyen,  s'exilèrent,  et  les  monta- 
gnards virent  une  victoire  pour  eux  dans  l'usurpation  de  leur 
chef.  Solon  mit  ses  armes  devant  sa  porte  :  «  Si  vous  portez  la 
peine  de  vos  fautes,  dit-il  aux  Athéniens,  n'en  accusez  pas  la 
destinée  des  Dieux  ;  vous-mêmes,  par  vos  dons,  avez  grandi 
ceux  qui  vous  oppriment,  et  voilà  pourquoi  vous  subissez  la 
dure  servitude.  » 

Pisistrate  ne  fit  pas  de  mal  à  Solon,  sachant  bien  qu'il  n'y 
avait  aucun  danger  à  laisser  ce  vieillard  mourir  en  paix.  Par 
une  tactique  habile,  qui  fut  imilée  à  Rome  par  Auguste,  il  con- 
serva les  formes  extérieures  de  la  république,  seulement  il  fit 
élire  ses  amis  aux  fonctions  importantes.  On  s'accorde  à  dire 
que  sa  tyrannie  ne  fut  pas  oppressive.  Cependant,  avant  d'avoir 
pu  asseoir  solidement  son  usurpation,  il  fut  chassé  d'Athènes 
par  la  coalition  de  ses  deux  rivaux  Lycurgue  et  Mégaclès.  Mais 
leur  alliance  ne  dura  pas  longtemps.  Mégaclès,  qui  était  gendre 


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322  ÉDITION    DES   POÈMES  D'HOMÈRE. 

du  tyran  de  Sikyone,  voulut  devenir,  faute  de  mieux,  beau- 
père  du  tyran  d'Alhènes  et  offrit  sa  fille  à  Pisistrale  qui  s'em- 
pressa d'accepter.  Ils  employèrent  pour  restaurer  la  tyrannie  un 
stratagème  dont  le  succès,  comme  le  remarque  Hérodote,  fait 
peu  d'honneur  au  bon  sens  du  peuple  athénien.  Ils  revêtirent 
du  costume  d'Athènè  une  femme  superbe,  haute  de  six  pieds, 
la  firent  monter  sur  un  char,  Pisistrate  se  tenant  à  côté  d'elle, 
et  le  char  entra  dans  la  ville,  précédé  d'un  crieur  annonçant 
que  la  Déesse  protectrice  d'Alhènes  ramenait  son  cher  Pisis- 
trate et  mvitait  les  citoyens  aie  bien  recevoir.  Le  peuple  obéit, 
et  ne  se  serait  jamais  douté  de  l'imposture  si  le  beau-^pèrene 
s'était  querellé  avec  son  gendre  pour  un  outrage  fait  à  sa  fille. 
Pisistrate  apprit  que  Mégaclès  s'était  rapproché  des  Pédiaiens; 
ne  se  sentant  pas  en  état  de  soutenir  la  lutte,  il  se  retira  à 
Erétrie  et  il  aurait  abandonné  tout  espoir  de  retour  sans  l'in- 
sistance d'Hippias,  l'aîné  de  ses  fils,  qui  l'engageait  à  préparer 
sa  revanche.  Ses  biens,  à  ce  qu'il  semble,  n'avaient  pas  été 
confisqués  ;  bien  des  aventuriers  avaient  confiance  dans  sa  for- 
tune, il  trouva  des  ressources  pour  lever  des  troupes.  Lygda- 
mis,  tyran  de  Naxos,  lui  fournit  de  l'argent  et  des  auxiliaires. 
Il  s'empare  de  Marathon  où  ses  partisans  viennent  le  rejoindre; 
l'armée  envoyée  contre  lui  se  laisse  surprendre  à  Timprovisle 
et  se  défend  si  mal  qu'on  pourrait  croire  à  une  trahison,  et 
après  dix  ans  d'exil  il  rentre  à  Athènes  dont  il  se  trouve  maître 
pour  la  troisième  fois. 

Gouvernement  de  Pisistrate.  Édition  des  poèmes 
d^Homère.  —  Il  prit  ses  dispositions  pour  y  rester.  «  Il  affer- 
mit sa  tyrannie,  dit  Hérodote,  au  moyen  de  troupes  auxiliaires 
et  de  fortes  sommes  d'argent  qu'il  tirait,  celles-ci  du  pays, 
celles-là  du  fleuve  Strymon  (I).  Il  l'affermit  encore  par  sa  con- 
duite avec  ceux  des  Athéniens  qui  avaient  tenu  ferme  dans  la 
dernière  action  et  qui  n'avaient  pas  sur-le-champ  pris  la  fuite  : 
il  s'assura  de  leurs  enfants  qu'il  envoya  à  Naxos,  car  il  avait 
conquis  cette  île  et  en  avait  donné  le  gouvernement  à  Lygda- 
mis.  m'affermit  enfin  en  purifiant  l'île  de  Dèlos  suivant  l'ordre 
des  oracles.  Voici  comment  se  fit  cette  purification  :  de  tous 

(1)  Le  texte  est  ambigu;  j'ai  adopté  l'interprétation  de  Grote. 

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HARMODIOS  ET  ARISTOGEITON.  323 

les  lieux  d'où  Ton  voyait  le  temple,  il  fit  exhumer  les  cada- 
vres et  les  fit  transporter  dans  un  autre  canton  de  l'île.  Pisis- 
trate  eut  d'autant  moins  de  peine  à  établir  sa  tyrannie  sur  les 
Athéniens,  que  les  uns  avaient  été  tués  dans  le  combat,  et  que 
les  autres  avaient  quitté  leur  patrie  et  s'étaient  sauvés  avec 
Mégaclès.  »  Lorsqu'il  se  crut  solidement  établi  au  pouvoir,  il 
gouverna  avec  modération  et  intelligence.  Il  ouvrit  ses  jardins 
aux  citoyens  pauvres,  mit  à  la  charge  de  l'Etat  les  soldats 
mutilés  à  la  guerre  et  fit  exécuter  de  grands  travaux  publics 
pour  donner  de  l'emploi  à  tous  les  ouvriers.  Il  construisit  les 
conduites  de  la  fontaine  Callirhoè,  et  commença  sur  une  très 
vaste  échelle  un  temple  de  Zeus  Olympien  qui  ne  fut  achevé 
que  sept  siècles  plus  tard  par  l'empereur  Hadrien.  11  établit  la 
grande  fête  des  Panalhénées  célébrée  tous  les  quatre  ans. 
Mais  la  postérité  lui  doit  un  service  bien  supérieur  à  ceux 
qu'il  rendit  à  ses  contemporains  :  il  fit  écrire  et  mettre  en 
ordre  pour  la  première  fois  les  poèmes  d'Homère,  que  les 
rhapsodes  récitaient  jusque-là  par  morceaux  détachés.  Le 
commerce  du  papyrus  commençait  à  peine  à  se  répandre; 
en  dehors  de  quelques  textes  gravés  sur  pierre  ou  sur  bois, 
comme  les  lois  de  Solon,  on  se  servait  très  peu  de  l'écriture, 
et  la  littérature  en  prose  n'existait  pas  encore.  Outre  les 
chants  d'Homère.  Pisistrate  fit  écrire  ceux  de  quelques  autres 
poètes.  Il  fut  le  premier  qui  eut  une  bibliothèque  et  il  com- 
muniqua libéralement  au  public  les  trésors  qu'elle  renfer- 
mait. 

Harmodios  et  Aristogeiton.  —  Pisistrate  mourut  en  527, 
trente-trois  ans  après  sa  première  usurpation.  Ses  trois  fils, 
Hippias,  Hipparchos  et  Thessalos  lui  succédèrent,  et,  suivant 
Thucydide,  qui  leur  est  très  favorable,  ils  gouvernèrent  avec 
douceur.  Mais  ce  qui  empêche  d'admettre  ce  témoignage,  qui 
s'explique  par  des  relations  de  famille,  c'est  le  meurtre  de 
Kimon,  père  de  Milliade,  qu'ils  firent  tuer  de  nuit,  selon  Héro- 
dote, par  des  assassins  soudoyés.  Hipparchos  avait  hérité  des 
goûts  littéraires  de  Pisistrate;  il  invita  les  poètes  Anacréon  et 
Simonide  à  sa  cour,  et  fit  placer  sur  les  roules  des  Hermès 
avec  des  sentences  morales  en  vers,  dont  il  était  probable- 
ment l'auteur.  Mais,  par  suite  d'une  injure  personnelle,  un 


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324  TYRANNIE  D'HIPPIAS. 

complot  fut  tramé  par  deux  jeunes  gens,  Harmodios  et  Aris- 
logeiton,  aidés  de  quelques  amis.  Ils  avaient  choisi  le  jour  des 
Panathénées,  parce  qu'à  l'occasion  de  la  fêle  ils  pouvaient 
être  armés  sans  exciter  les  soupçons.  Ils  avaient  (în  outre  des 
poignards  cachés  sous  des  branches  de  myrte.  Au  moment 
d^agir,  les  conspirateurs  virent  un  d'entre  eux  s'entretenir 
familièrement  avec  Hippias  ;  ils  se  crurent  trahis,  et  pour  se 
venger  au  moins  d'Hipparchos,  auteur  de  l'insulte  qu'ils  vou- 
laient punir,  ils  le  frappèrent  de  leurs  poignards.  Harmodios 
fut  tué  sur-le-champ  par  les  gens  de  l'escorte.  Aristogeiton 
s'échappa.  La  nouvelle  parvint  à  Hippias  qui  passait  une  revue 
dans  le  quartier  du  Céramique.  Avec  un  rare  sang-froid,  il 
dit  aux  citoyens  de  déposer  leurs  armes  et  de  s'assembler  sur 
un  point  qu'il  leur  désigna  ;  alors  il  fit  saisir  les  armes  par 
ses  gardes.  On  s'empara  des  gens  suspects  et  on  mit  à  mort 
ceux  sur  lesquels  on  trouva  des  poignards.  Aristogeiton  fut  mis 
à  la  torture.  On  essaya  de  lui  faire  nommer  ses  complices,  il 
désigna  successivement  les  meilleurs  amis  du  tyran  qui  furenl 
aussitôt  exécutés.  «  En  reste- t-il  d'autres?  »  demanda  Hippias. 
Il  répondit  :  «  Il  n'y  a  plus  que  toi.  » 

Tyrannie  d*Hippias.  Sa  chute.  —  A  partir  de  ce  moment, 
Hippias  régna  par  la  terreur.  Pour  se  ménager  un  refuge  et 
une  alliance,  il  donna  sa  fille  au  fils  d'Hippoclos,  tyran  de 
Lampsaque,  qui  était  en  faveur  auprès  du  grand  roi  de  Perse. 
Mais  ses  exactions  et  ses  violences  le  rendaient  de  plus  en  plus 
impopulaire  et  relevaient  les  espérances  de  ses  ennemis  les 
Alcmaionides.  Ils  s'armèrent  dans  l'exil  et  tentèrent  une  inva- 
sion en  Attique.  On  a  conservé  une  sorte  de  chant  funèbre  sur 
leur  défaite  à  Leipsydrion  :  «  Ah!  Leipsydrion,  traître  aux 
amis!  Quels  hommes  tu  as  détruits,  braves  au  combat  et  de 
bonne  race,  et  qui  ont  montré  alors  de  quels  pères  ils  étaient 
nés!  »  Pour  se  ménager  l'appui  d'Apollon,  ils  rebâtirent  à 
leurs  frais  le  temple  de  Delphes  détruit  par  un  incendie,  et  la 
Pythie  leur  procura  l'appui  de  Sparte  ;  chaque  fois  qu'un  Spar- 
tiate venait  la  consulter,  elle  terminait  sa  réponse  par  ces 
mots  :  «  Il  faut  délivrer  Athènes.  »  Les  Spartiates,  malgré  les 
liens  d'amitié  qui  les  unissaient  aux  Pisistratides,  finirent  par 
céder  aux  injonctions  réitérées  de  l'oracle.  Ils  envoyèrent  des 


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RÉFORMES  DE  CLEISTHÉNÉS.  3255 

troupes  qui  furent  battues  par  les  cavaliers  thes^alieus,  alliés 
d'Hippias.  Ils  revinrent  avec  des  forces  plus  considérables 
commandées  par  leur  roi  Cléoménès.  La  cavalerie  thessa- 
lienne  lâcha  pied,  et  Hippias  s'enferma  dans  la  citadelle  qu'il 
avait  approvisionnée  pour  soutenir  un  long  siège.  Mais  ses 
enfants,  qu'il  avait  voulu  envoyer  en  lieu  sûr,  tombèrent  en- 
tre les  mains  de  ses  adversaires,  et  pour  se  les  faire  rendre 
il  fut  obligé  de  quitter  l'A  tlique  dans  cinq  jours. 

Il  se  retira  avec  ses  partisans  dans  la  ville  de  Sigeion  en 
Troas,  possession  athénienne  qu'il  considérait  comme  un 
fief  de  sa  famille.  Un  décret  condamna  les  Pisislratides  à  un 
bannissement  perpétuel.  Le  peuple,  oubliant  qu'il  ne  devait 
sa  délivrance  qu'à  l'intervention  de  Sparte,  en  reporta  l'hon- 
neur sur  les  meurtriers  d'Hipparchos,  quoiqu'ils  n'eussent 
obéi  qu'à  une  vengeance  particulière  ;  on  a  conservé  un  chant 
populaire  en  leur  honneur  :  «  Dans  la  branche  de  myrte  je 
cacherai  le  glaive,  comme  Harmodios  et  Aristogeiton,  lors- 
qu'ils tuèrent  le  tyran  et  rétablirent  l'égalité  dans  Athènes. 
Cher  Harmodios,  non,  tu  n'es  pas  mort;  tu  es  dans  les  îles  des  . 
heureux,  où  sont,  dit-on,  Achille  aux  pieds  légers  et  Diomèdès 
fils  de  Tydeus.  Dans  la  branche  de  myrte,  je  cacherai  le 
glaive,  comme  Harmodios  et  Aristogeiton,  lorsqu'aux  fêtes 
d'Alhènè ,  ils  tuèrent  le  tyran  Hipparchos.  Toujours  votre 
gloire  vivra  sur  la  terre,  chers  Harmodios  et  Aristogeiton, 
parce  que  vous  avez  tué  le  tyran  et  rétabli  l'égalité  dans 
Athènes.  » 

Réformes  de  Gleisthénés.  —  La  famille  des  Alcmaioni- 
des  avait  alors  pour  chef  Gleisthénès,  fils  de  Mégaciès  et  petit- 
fils,  par  sa  mère,  de  Gleisthénès,  tyran  de  Sikyone.  Pour  lutter 
avec  avantage  contre  Isagoras,  chef  de  la  noblesse,  il  se 
tourna  vers  le  peuple  et  entreprit  de  le  fondre  avec  la  bour- 
geoisie. 11  n'y  avait  rien  à  changer  à  la  constitution  de  Selon, 
mais  ce  n'était  qu'une  lettre  morte,  et  elle  n'avait  pas  gêné  les 
Pisistralides.  Le  suffrage  universel  est  une  arme  inutile  entre 
les  mains  du  peuple,  s'il  laisse  diriger  ses  votes  par  le  gou- 
vernement ou  par  les  grandes  familles.  Il  fallait  changer  les 
cadres  de  la  population,  pour  l'empêcher  de  se  partager  en 
factions  locales.  Gleisthénès  remplaça  les  quatre  tribus  ionien- 
L.  M.  —  HisT.  DES  Grecs.  19 


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CKEISTHÉNÈS. 

l  chacune  dix,Dèmes,  c*est-à- 
mr  mêler  les  habitants  de  la 
ans  l'unité  de  la  Cité,  pour  en 
aine,  de  la  montagne  et  du  ri- 
nt  répartis  dans  des  tribus  dif- 
Altique  une  foule  d'étrangers, 
Tses  industries,  les  uns  riches, 
elait  Métœkes,  c'est-à-dire  do^ 

que  Cleisthénès  en  incorpora 
s  dix  tribus.  Cela  introduisait 
>uveaux,  cela  le  soulageait  du 

Nulle  part  les  races  n'étaient 
ciment  de  la  démocratie  leur 
l'y  a  pas  d'autre  exemple  en 

porté  à  500  ;  chaque  tribu  en 
en  remettre  l'élection  au  peu- 
lencer  par  des  intrigants,  on 
ididats  soumis  à  un  examen 
endit'peu  à  peu  à  la  plupart 
Itribue  à  Cleisthénès  l'institu- 
par  coquilles,  qui  servait  de 
its  populaires  en  imposant  un 
it  la  présence  paraissait  dan- 
11  fallait  au  moins  six  mille 
que  la  sentence  d'exil  fût  va- 
désuétude  environ  un  siècle 

Bs.  —  Les  Spartiates  avaient 
3rlé  ;  ils  la  dispensèrent  de  la 
ui  imposer  le  joug  de  la  fac- 
'  Isagoras.  Le  roi  Cléoménès, 
!>agoras,  fit  sommer  les  Âthé- 
lite  des  Alcmaionides.  Aussi- 
ent  d'Athènes,  soit  pour  épar- 
ens,  soit  pour  leur  fournir 
le  ses  adversaires.  £n  effet, 
a  ce  qu'il  demandait,  envahit 


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INTERVENTION   DES  SPARTIATES.  327 

TAllique,  entra  dans  la  ville,  chassa  sept  cents  familles,  pro- 
nonça la  dissolution  du  sénat  des  cinq  cents,  et  remit  Fauto- 
rité  enlre  les  mains  de  trois  cents  partisans  d'Isagoras.  Mais  le 
sénat,  qui  n'était  plus  le  même  qu  au  temps  de  la  tyrannie, 
refusa  de  se  laisser  dissoudre  ;  le  peuple  se  souleva,  Cléomé- 
nès,  ses  soldats  et  les  partisans  d'Isagoras  furent  assiégés 
dans  la  citadelle  et  forcés  de  capituler  au  bout  de  trois  jours. 
Cléoménès,  Isagoras  et  les  Spartiates  eurent  la  permission  de 
se  retirer  en  laissant  leurs  adhérents  au  pouvoir  du  peuple 
qui  les  punit  de  mort.  Cleisthénès  rentra  avec  les  sept  cents  fa- 
milles exilées. 

En  se  retirant,  Cléoménès  trouva  moyen  de  susciter  aux 
Athéniens  de  graves  embarras.  Les  Plataiens,  ne  voulant  pas 
se  soumettre  à  la  suzeraineté  que  Thèbes  s'attribuait  sur  toute 
la  Boiotie,  avaient  profité  du  passage  des  Spartiates  pour  leur 
demander  protection ,  offrant  de  leur  livrer  sans  réserve  la 
ville  de  Platée  et  son  territoire.  Cléoménès  répondit  que  Sparte 
était  trop  éloignée,  et  que  la  protection  d'Athènes  serait  plus 
efficace.  Ils  envoyèrent  à  Athènes  des  députés  qui  s'assirent  en 
suppliants  priés  de  l'autel  un  jour  de  sacrifice  public,  et  le 
peuple  accueillit  leur  demande.  Les  Thébains  envahirent  le  ter- 
ritoire de  Platée,  une  armée  athénienne  marcha  pour  le  dé- 
fendre, mais,  avant  la  bataille,  les  Corinthiens  offrirent  leur 
médiation  qui  fut  acceptée.  Ils  se  prononcèrent  contre  les  Thé- 
bains  et  ne  leur  reconnurent  pas  le  droit  de  retenir  Platée 
malgré  elle  dans  la  confédération  boiotienne.  Les  Thébains 
refusèrent  d'accepter  cette  décision,  mais  ils  furent  battus  par 
les  Athéniens  qui,  pour  punir  ce  manque  de  foi,  réunirent  au 
territoire  de  Platée  la  portion  du  territoire  thébain  située  à 
l'est  de  l'Asopos. 

Luttes  contre  les  Thébains,  les  Ghalkidiens,  les  Ai- 
ginétes.  —  Athènes  avait  désormais  des  ennemis  à  ses  portes. 
Il  était  certain  aussi  que  les  Spartiates  ne  tarderaient  pas  à 
venger  l'affront  qu'ils  avaient  reçu.  11  fallait  chercher  un  appui 
au  dehors  ;  une  ambassade  fut  envoyée  à  Sardes  pour  obtenir 
l'alliance  du  roi  de  Perse.  Le  satrape  Artaphernès,  après  avoir 
demandé  ce  que  c'était  qu'Athènes,  et  où  elle  se  trouvait,  dit 
aux  ambassadeurs  que,  pour  obtenir  un  secours  du  roi,  il 


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328  COALITION  CONTRE  ATBÈNES. 

fallait  lui  donner  la  terre  et  Teau  :  c'était  chez  les  Perses  la 
formule  de  la  soumission.  Les  députés  athéniens  acceptèrent, 
mais  à  leur  retour  ils  furent  désavoués  avec  indignation  par  le 
peuple.  Gurtius  suppose  qu'on  appliqua  alors  à  Gléisthénès, 
comme  promoteur  de  cette  ambassade,  la  loi  d'Ostrakisme 
dont  il  était  l'auteur  ;  celte  conjecture  repose  sur  une  assertion 
d'Ailien,  qui  dit  que  Gléisthénès  fut  le  premier  exilé  par  un  vote 
d'Ostrakisme,  mais  sans  nous  apprendre  à  quelle  occasion. 

Ainsi  qu'on  l'avait  prévu,  Gléoménès  revint  en  Aitique  avec 
des  troupes  réunies  dans  les  parties  di|  Péloponnèse  qui  recon- 
naissaient la  suzeraineté  de  Sparte.  En  môme  temps,  selon  un 
plan  concerté  d'avance,  les  Thébains  envahissaient  l'Atlique 
parla  frontière  du  nord,  les  Ghalkidiens  par  la  côte.  Les  Athé- 
niens marchèrent  d'abord  contre  l'armée  pélpponnésienne. 
Mais  les  Gorinthiens,  qui  probablement  avaient  ignoré  le  but 
de  l'expédition,  refusèrent  de  servir  les  rancunes  de  Gléo- 
ménès. Son  collègue  Dèmaratos,  qui  partageait  avec  lui  le  com- 
mandement de  l'armée,  lui  relira  son  concours;  ce  fut  à  cette 
occasion  que  les  Spartiates  firent  une  loi  défendant  aux  deux 
rois  d'aller  ensemble  et  la  guerre.  Les  autres  alliés,  voyant  ce 
dissentiment,  suivirent  l'exemple  des  Gorinthiens,  et  l'armée  se 
dispersa.  Les  Athéniens  se  retournèrent  alors  contre  leurs 
voisins  de  Thèbes  et  de  Ghalkis.  Ils  battirent  les  Thébains  et 
leur  firent  sept  cents  prisonniers.  Le  même  jour  ils  traversent 
l'Euripe  et  battent  les  Ghalkidiens.  Les  terres  des  oligarques  de 
Ghalkis,  qu'on  nommait  Hippobotes  ou  éleveurs  de  chevaux,  fu- 
rent distribuées  par  le  sort  entre  quatre  mille  citoyens  d'Athènes, 
qui  demeurèrent  néanmoins  attachés  à  la  métropole;  c'est  le 
premier  exemple  d'une  colonie  militaire  comme  celles  que  les 
Romains  établirent  plus  tard  sur  leurs  frontières.  Les  prison- 
niers thébains  et  chalkidiens  furent  enchaînés  ;  on  les  re- 
lâcha pour  une  rançon  de  deux  mines  par  tête,  et  le  dixième 
de  cette  rançon  fut  consacré  aux  Dieux  ;  on  eu  fit  un  quadrige 
de  bronze.  Les  chaînes  furent  suspendues  aux  murs  de  l'Acro- 
pole où  Hérodote  les  vit  après  1  incendie  d'Athènes  par  les 
Mèdes.  Les  Thébains,  irrités  de  leur  défaite,  demandèreni 
l'aide  des  Aiginètes,  en  alléguant  une  fraternité  légendaire  : 
Aigina  et  Thèbè  étaient  sœurs,  filles  toutes  deux  du  (leuve 


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COALITION  CONTRE  ATHÈNES.  329 

Asôpos.  Les  Aîginètes  répondirent  en  envoyarit  aux  Thêbains 
les  statues  des  héros  Aiakides,  Télamon  et  Pêleus.  Gela  n'em- 
pêcha pas  les  Thêbains  d'être  battus;  ils  renvoyèrent  les  héros 
à  Aigine  en  demandant  un  secours  moins  mythologique.  Les 
Aiginètes  avaient  eu  d'anciens  démêlés  avec  les  Athéniens  h 
Toccasion  d'Ëpidaure  ;  ils  expédièrent  sans  déclaration  préa- 
lable des  galères  armées  pour  ravager  les  côtes  de  TAtlique, 
causant  partout  de  grands  dommages.  Quoique  les  Athéniens 
n'eussent  pas  encore  de  flotte,  ils  se  préparaient  à  user  de  re- 
présailles,  mais  un  danger  nouveau  sollicita  leur  attention. 

Les  Spartiates  commençaient  à  soupçonner  qu'en  aidant  à 
renverser  les  Pisistratides  ils  avaient  été  dupes  d'une  ma- 
nœuvre ;  Cléoménès  disait  avoir  trouvé  dans  l'Acropole  d'A- 
thènes des  oracles  annonçant  que  Sparte  aurait  un  jour  à 
soulTrir  de  la  puissance  des  Athéniens.  Ils  firent  venir  Hippias 
de  Sigeion,  décidés  à  le  rétablir.  Pour  n'être  pas  exposés  à  une 
défection  de  leurs  alliés  péloponnésiens,  ils  les  convoquèrent  à 
un  congrès  où  Hippias  était  présent.  Us  exprimèrent  le  regret 
de  l'avoir  détrôné,  et  engagèrent  leurs  alliés  à  une  restauration 
de  la  tyrannie  pour  réprimer  l'insolence  des  Athéniens.  Mais 
cette  proposition  souleva  une  réprobation  unanime  parmi  les 
alliés  :  «  Sûrement,  ditSosiclès,  député  deCorinthe,  le  ciel  et 
la  terre  vont  changer  de  place,  puisque  les  Spartiates  propo- 
sent d'imposer  aux  villes  libres  le  gouvernement  injuste  et 
sanguinaire  d'un  tyran.  Nous  savons  ce  que  c'est,  nous  qui 
avons  été  soumis  aux  Kypsélides.  Essayez-en  d'abord  avant 
de  l'établir  chei  les  autres,  et  si  vous  persistez,  sachez  que  les 
Corinthiens  ne  vous  aideront  pas.  »  Tout  le  monde  applaudit; 
les  Spartiates  durent  renoncer  à  leur  projet,  et  Hippias,  après 
avoir  prédit  aux  Corinthiens  les  maux  que  leur  causerait  la 
démocratie  d'Athènes,  retourna  en  Asie  pour  essayer  d'inté- 
resser le  grand  roi  à  sa  cause  et  l'exciter  à  faire  la  guerre  aux 
Athéniens. 

Après  avoir  raconté  les  luttes  de  la  démocratie  naissante 
contre  tant  d'ennemis  conjurés,  Hérodote  fait  cette  réflexion  : 
«  On  pourrait  prouver  de  mille  manières  que  Tégalité  entre 
les  citoyens  est  le  gouvernement  le  plus  avantageux  :  cet 
exemple  seul  le  démontre.  Tant  que  les  Athéniens  restèrent 


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LUTTES  CONTRE  LES  BARBARES. 

nce  de  leurs  tyrans,  ils  ne  furent  supérieurs  à 
s  voisins,  mais  lorsqu'ils  eurent  secoué  le  joug, 
le  beaucoup  les  premiers  de  tous.  Cela  prouve 
îlavage  ils  étaient  volontairement  lâches,  parce 
lient  pour  un  maître,  mais  quand  ils  eurent  re- 
pté,  chacun  fit  des  efforts,  sachant  qu'il  travaillait 


CHAPITRE  XI 

ES  DES  GRECS  CONTRE  LES  BARBARES. 

I.  —  SoumissioJi  des  grecs  d'Asie, 

die  ;  leurs  attaques  contre  les  Grecs.  —  Invasion  des 
ie-Mineupe.  —  Soumission  des  Grecs  d'Asie  par  Groisos. 
LÔdo-persique  ;  Kyros.  — Soumission  des  Grecs  d'Asie  par 
-  Émigration  des  Phokaiens.  —  Héroïsme  des  Lykiens. 
}  de  Samos;  sa  puissance,  sa  mort.  —  Maiandrios. 
Vuine  de  Samos.  —  Expédition  de  Dareios  en  Scythîe. 
le  la  Thrace  et  de  la  Macédoine  par  les  Perses.  —  Re- 
lie. Secours  demandés  aux  Grecs  d'Europe.  —  Incendie 

Les  Carions  et  les  Kypriotes  prennent  part  à  la  révolte. 

la  flotte  grecque  h  Ladè.  —  Prise  de  Milet.  Soumission 
\.sie. 

vaient  réalisé  la  Cité,  qui  est  la  molécule  sociale  : 
pas  s'élever  à  l'idée  de  nation.  Leur  patriotisme 
is  les  murs  de  la  Cité  ;  môme  devant  un  ennemi 
ne  s'aperçurent  pas  qu'ils  étaient  un  peuple.  L'i- 
cités  autonomes  les  rendit  impuissantes  contre 
es  inférieurs  sous  tous  les  autres  rapports,  mais 
supériorité  du  nombre  la  force  que  donne  l'u- 
s.  La  Grèce  d'Asie  fut  soumise  d'abord  par  les 
deux  fois  par  les  Perses,  et  la  Grèce  d'Europe 
î'émouvoir  à  cette  triple  conquête  qui  forme  la 
uerres  Médiques, 
le  Lydie  ;  leurs  attaques  contre  les  Grecs» 


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LA  MONARCHIE   LYDIENNK.  331 

—  La  Lydie  semble  avoir  été  habitée  anciennement  par  une 
population  pélasgique  à  laquelle  se  mêlèrent  des  éléments 
sémitiques.  Homère  donne  aux  habitants  de  cette  contrée  le 
nom  de  Maiones,  et  ne  parle  pas  des  Lydiens  ;  tandis  que  le  ca- 
talogue de  la  Genèse  Tait  de  Lud  un  fils  de  Sem.  Les  traditions 
recueillies  par  Hérodote  reportaient  l'origine  de  la  monarchie 
lydienne  à  une  antiquité  fabuleuse  au  moyen  de  deux  dynas- 
ties, Tune  commençant  par  Manès,  Âttys  et  Lydos,  Tautre  par 
Héraclès.  Les  noms  de  Ninos  et  de  Bélos  qui  figurent  dans  la 
dynastie  hèraciéide  donnent  à  penser  que  la  Lydie  a  fait  partie 
de  l'empire  assyrien,  comme  Taffirme  Ctésias.  Le  rôle  histo- 
rique de  la  Lydie  ne  commence  qu'avec  la  dynastie  des  Merm- 
nades,  dont  le  fondateur,  Gygès,  parait  un  personnage  réel, 
quoique  son  nom,  éponyme  d'un  lac  dans  le  voisinage  de 
Sardes,  rappelle  celui  d'Ogygès,  et  que  sa  légende,  telle  qu'elle 
est  racontée  dans  Platon,  semble  rattachée  à  la  fable  du  dé- 
luge. D'après  cette  légende,  Gygès  n'était  qu'un  berger  du  roi 
de  Lydie  ;  après  un  violent  orage,  il  voit  une  crevasse  dans  le 
sol,  y  descend  et  y  trouve  un  grand  cheval  d'airain  creux  et 
ouvert,  dans  lequel  était  couché  un  géant  mort  avec  un  an- 
neau d'or  au  doigt.  Il  prend  cet  anneau,  découvre  qu'il  a  la 
propriété  de  le  rendre  invisible,  et  s'en  sert  pour  s'emparer  de 
la  couronne  en  tuant  le  roi  avec  l'aide  de  la  reine.  Hérodote 
raconte  l'avènement  de  Gygès  sous  une  forme  moins  merveil- 
leuse, mais  en  l'attribuant  aussi  à  une  trahison  et  à  la  com- 
plicité de  la  reine. 

Les  Lydiens  nous  sont  représentés  comme  un  peuple  infé- 
rieur aux  Grecs  sous  le  rapport  moral,  mais  riche  et  indus- 
trieux. Le  Pactole  qui  coulait  du  mont  Tmolos  dans  le  fleuve 
Hermos,  roulait  des  sables  d'or.  Selon  Hérodote,  c'est  en  Lydie 
que  furent  frappées  les  premières  monnaies.  L'influence  de  la 
Lydie  sur  la  musique  des  Grecs  a  été  admise  dans  toute  l'anti- 
quité. Le  commerce  avec  les  Lydiens,  dont  le  territoire  ne  s'é- 
tendait pas  originairement  jusqu'à  la  mer,  fut  une  source  de 
richesse  pour  les  villes  maritimes  de  l'Ionie,  mais  ce  fut 
aussi  la  principale  cause  des  attaques  des  rois  lydiens  contre 
leur  indépendance.  Ces  tentatives  commencèrent  dès  le  règne 
de  Gygès,  qu'on  place  vers  715.  Il  attaqua  Milet  et  Smyrne,  dit 


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332  CALLINOS  D*ÉPHÈ.SE. 

Hérodote,  et  s'empara  de  Colophon.  On  dit  aussi  qu'il  prit 
Magnésie  du  Sipyle.  En  même  temps  qu'il  faisait  la  guerre 
aux  Grecs,  il  envoyait  à  leur  Dieu  Apollon  des  offrandes  ma- 
gnifiques. Hérodote  vit  à  Delphes  des  vases  d'or  et  d'argent 
offerts  par  Gygès,  ainsi  que  le  trône  sur  lequel  il  rendait  la 
justice.  Son  fils  Ardys  (678)  attaqua  Milet  et  s'empara  de 
Priènè  ;  mais  la  soumission  de  l'Ionie  fut  retardée  par  des  in- 
vasions de  hordes  nomades.  Les  Trères  détruisirent  Magnésie 
du  Maiandros,  les  Kimris  prirent  Sardes,  capitale  de  la  Lydie. 
Il  nous  reste  un  fragment  de  Callinos  d'Éphése,  inventeur  du 
distique  élégiaque,  sur  l'invasion  des  tribus  barbares  : 

«  Jusqu'à  quand  resterez-vous  couchés,  jeunes  gens? quand 
aurez-vous  du  courage  ?  Ne  rougissez-vous  pas  de  montrer 
tant  de  faiblesse  ?  Vous  croyez  vivre  dans  la  paix,  mais  la 

guerre  tient  tout  le  pays (lacune) Et  qu'en  mourant 

chacun  frappe  un  dernier  coup.  Car  il  est  honorable  et  beau 
pour  un  homme  de  combattre  pour  sa  patrie,  ses  enfants  et 
sa  jeune  épouse.  La  mort,  elle  viendra  quand  les  Moires  l'au- 
ront filée.  Ainsi,  que  chacun  marche  droit,  la  lance  en  arrêt, 
couvrant  du  bouclier  un  cœur  vaillant,  dès  le  commencement 
delà  mêlée.  Il  n'est  pas  dans  la  destinée  d'un  homme  d'éviter 
la  mort,  fût-il  de  la  race  des  immortels.  Souvent,  celui  qui  a 
fui  la  bataille  et  le  tumulte  des  lances  trouve  la  mort  en  ren- 
trant dans  sa  maison,  et  personne  dans  le  peuple  ne  l'aime  et 
ne  le  regrette.  L'autre,  petits  et  grands  gémissent  s'il  lui  arrive 
malheur.  Tout  le  monde  regrette  l'homme  au  cœur  brave, 
quand  il  meurt  ;  vivant,  on  l'honore  comme  les  demi-Dieux. 
Tous  les  regards  se  tournent  vers  lui  comme  vers  une  forte- 
resse, car  il  fait  à  lui  seul  l'œuvre  de  plusieurs.  » 

Les  ravages  des  Trères  et  des  Kimris  se  prolongèrent  pen- 
dant les  règnes  d'Ardys  et  de  son  fils  Sadyattès  ;  mais  Alyatlès 
parvint  à  en  délivrer  l'Asie  Mineure,  et  aussitôt  après,  les  at- 
taques contre  les  villes  ionniennes  recommencèrent.  Alyatlès 
s'empara  de  Smyrne,  essaya  inutilement  de  prendre  Clazo- 
mène,  et  ravagea  pendant  douze  années  successives  le  terri- 
toire de  Milet.  Mais  il  tomba  malade,  et  l'oracle  de  Delphes 
attribua  cette  maladie  à  l'incendie  d'un  temple  d'Athènè.  Il 
demanda  une  trêve  aux  Milésiens,  qu'il  croyait  réduits  à  la 


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GROISOS.  333 

dernière  extrémité.  Thrasyboulon,  tyran  de  Milet,  prit  ses  me- 
sures pour  que  l'ambassadeur  rencontrât  partout  la  joie  et  l'a- 
bondancot  et  le  roi  de  Lydie,  désespérant  de  soumetire  une 
ville  à  qui  la  mer  fournissait  des  vivres,  conclut  un  traité 
d'alliance  avec  Milet,  rebâtit  deux  temples  en  remplacement 
de  celui  qu'il  avait  brûlé,  et  envoya  à  Delphes,  en  actions  de 
grâce  pour  sa  santé  rétablie,  un  grand  cratère  d'argent  avec 
une  soucoupe  damasquinée,  ouvrage  de  Glaucos  de  Chios  qui 
avait  inventé  Fart  de  la  damasquinure. 

Soumission  de  la  Grèce  d^Asie  par  Grofsos.  —  Le  der- 
nier et  le  plus  puissant  des  rois  de  Lydie,  Croïsos,  fils  d'Alyat- 
tès  (560),  accomplit  la  conquête  de  l'Ionie  tentée  plusieurs  fois 
par  ses  prédécesseurs*  Il  attaqua  d'abord  Ephèse,  gouvernée 
alors  par  le  tyran  Pindaros,  dont  la  mère  était  fille  d'Alyattès, 
et  qui  était  par  conséquent  neveu  de  Croïsos.  Les  Ephésiens 
consacrèrent  leur  ville  à  Artémis  en  joignant  avec  une  corde 
leurs  murailles  au  temple  de  la  Déesse  éloigné  de  sept  stades . 
Cela  n'empêcha  pas  la  ville  d'être  soumise  à  un  tribut,  et  Pin- 
daros fut  déposé.  <f  Croïsos  fit  la  guerre  aux  Ioniens  et  aux 
Aioliens,  mais  successivement,  dit  Hérodote,  employant  des 
raisons  légitimes  quand  il  en  pouvait  trouver,  ou  des  prétextes 
frivoles  à  défaut  de  raisons.  »  Hérodote  ne  nous  donne  aucun 
détail  sur  cette  conquête,  dont  il  apprécie  cependant  la  grande 
importance,  car  il  la  considère  comme  le  commencement  de 
la  lutte  entre  les  Grecs  et  les  Barbares  :  «  Avant  le  règne  de 
Croïsos,  dit-il,  tous  les  Grecs  étaient  libres  ;  ce  fut  par  lui  pour 
la  première  fois  que  les  Grecs  furent  soumis  et  contraints  h 
payer  tribut.  »  L'absencç  de  lien  fédéral  entre  les  cités  futia 
seule  cause  de  la  soumission  des  Grecs  d'Asie  à  une  domina- 
tion étrangère.  Hérodote  semble  l'avoir  reconnu,  car  il  loue 
chaudement  l'avis  donné  aux  Ioniens  par  Thaïes  de  Milet  avant 
que  leur  pays  eût  été  subjugué  :  «  C'était  d'établir  à  Téos,  au 
centre  de  l'Ionie,  un  conseil  général  pour  toute  la  nation,  sans 
préjudice  au  gouvernement  des  autres  villes,  qui  n'en  auraient 
pas  moins  suivi  leurs  usages  particuliers  que  si  elles  eussent 
été  autant  de  cantons  différents.  »  Thaïes  de  Milet  est  le  plus 
ancien  des  philosophes  grecs  ;  il  est  très  curieux  de  trouver 
chez  le  père  de  la  philosophie  une  conception  politique  supé- 

19. 

Digitized  by  VjOOQIC 


ROISOS. 

l'Aristote  qui  ont  essayé  de  régler, 
gouvernement  inlérieur  de  la  cité, 
3  entre  elles.  La  pensée  de  Thaïes, 
î  de  cités  libres,  n'a  été  appliquée 
temps  d'Aristide  et  par  la  ligue 

e  d'Asie  ne  produisit  aucune  émo- 
i.  Croïsos  ne  semblait  pas  plus  un 
lis  Pélopides,  venus  du  môme  pays 
onsullait  l'oracle  de  Delphes  et  lui 
ïs.  Il  aimait  les  Grecs,  les  accueil- 

d'une  façon  très  libérale.  On  ra- 
naion,  fils  de  Mégaclès,  ayant  eu 
3  aux  envoyés  lydiens  venus  à  Dél- 
ie prendre  dans  son  trésor  autant 
er.  Il  en  remplit  ses  vêlements,  sa 
\  la  bouche,  et  s'en  poudra  les  che- 

se  mit  à  rire  et  doubla  la  somme  ; 
à  Athènes  la  richesse  des  Alcmaio- 
te  sur  l'entretien  de  Solon  avec 
des  raisons  chronologiques,  mais 
de  Mylylène  passaient  aussi  pour 
près  avoir  soumis  les  Grecs  du  con- 
à  attaquer  les  îles  ;  on  dit  que  Bias 
ngénieuse  en  lui  disant  que  les  in- 
hevaux  pour  porter  la  guerre  en 
K  leur  inspirer  la  pensée  de  m'atta- 
,  dit  Croïsos.  —  Je  crois,  répondit 
moins  charmés  d'apprendre  que  tu 
,  et  leur  fournir  ainsi  l'occasion  de 
int  que  tu  as  réduits  en  esclavage.  » 
3  attribuent  à  Pittacos  de  Mitylène, 
qu'il  abandonna  son  projet  et  fit 
des  îles.  Il  tourna  ses  armes  d'un 
uples  de  l'Asie  Mineure  à  l'ouest  du 
des  Lykiens  et  des  Kilikiens.  La  mo- 
rivée  à  l'apogée  de  sa  puissance, 
fleuve  Halys,  la  monarchie  Médo- 


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L'EMPIHB   MÉOO-FERSIQUE.  335 

Persique  avait  grandi  plus  rapidement  encore.  Dans  la  pré- 
vision d'une  lutte  prochaine,  Croïsos,  sur  l*avis  de  l'oracle  de 
Delphes,  demanda  l'alliance  des  Spartiates,  considérés  alors 
comme  le  plus  puissant  des  peuples  grecs.  Ils  étaient  bien  dis- 
posés pour  lui,  car  peu  de  temps  auparavant  ils  avaient 
envoyé  acheter  de  l'or  à  Sardes  pour  dorer  une  statue  d'Apollon, 
et  Croïsos  leur  avait  fait  présent  de  cet  or.  Ils  conclurent  avec 
le  roi  de  Lydie  un  traité  d'alliance  offensive  et  défensive. 

L'empire  Médo-Persiqae.  Kyros.  —  Les  Mëdes  s'étaient 
détachés  de  l'empire  d'Assyrie  à  peu  près  à  l'époque  où  se 
fondait  en  Lydie  la  dynastie  des  Mermnades.  Sous  le  règne  de 
Croïsos,  il  y  eut  une  nouvelle  révolution  dans  la  Haute-Asie  : 
la  domination  passa,  sans  démembrement,  des  Mèdes  aux 
Perses.  Le  dernier  roi  des  Mèdes,  Astyagès,  était  beau-frère 
de  Croïsos,  et  celui-ci,  soit  pour  le  venger,  soit  pour  prendre 
une  part  de  ses  dépouilles,  déclara  la  guerre  à  Kyros,  roi  des 
Perses.  Il  avait  commencé  par  consulter  l'oracle  de  Delphes 
dont  la  réponse,  ambiguë,  comme  toujours,  lui  avait  paru 
encourager  ses  espérances.  Il  croyait  pouvoir  compter  sur  ses 
alliés,  le  roi  de  Babylone,  le  roi  d'Egypte,  les  Spartiates,  et 
sans  doute  aussi  sur  les  Mèdes,  irrités  d'une  récente  défaite  : 
11  passa  l'Halys  et  détruisit  la  ville  de  Ptérion  en  Cappadokie. 
Mais  Kyros  marcha  rapidement  contre  lui  avec  des  forces 
supérieures.  Après  une  bataille  sanglante  dont  le  résultat  fut 
indécis,  Croïsos  crut  prudent  de  s'enfermer  dans  les  murs  de 
Sardes,  sa  capitale,  et  d'y  attendre  les  secours  de  ses  alliés. 
Si  ces  secours  étaient  arrivés  à  temps,  la  guerre  aurait  pu 
être  poursuivie  avec  succès.  De  la  part  des  Spartiates,  il  n'y 
eut  pas  de  retard  ;  quoique  engagés  alors  dans  une  guerre 
contre  les  Argéiens,  ils  firent  diligence;  leurs  vaisseaux 
étaient  prêts  et  leurs  troupes  presque  embarquées  quand  ils 
reçurent  la  nouvelle  inattendue  de  la  prise  de  Sardes  et  de 
la  ruine  de  Croïsos.  Sardes,  bâtie  sur  un  escarpement  du 
Tmolos,  adossée  à  un  rocher  à  pic,  passait  pour  imprenable. 
Déjà  un  assaut  avait  été  repoussé  et  les  Perses  étaient  réduits 
à  la  longue  opération  d'un  blocus.  Mais,  le  quatorzième  jour 
du  siège,  un  accident  imprévu  fit  pour  les  assiégeants  ce  que 
n'avaient  pu  faire  ni  la  force,  ni  la  ruse.  Une  sentinelle  qui 


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SOUMISSION  DES  GRECS  D'aSIE. 

ir  le  point  le  plus  inaccessible  des  remparts  laisse 
)n  casque,  descend  pour  le  ramasser  par  les  anfrac- 
iu  rocher,  et  remonte  de  môme.  Un  soldat  perse 
,  prévient  Kyros  et  conduit  ses  compagnons  par  le 
u'il  a  découvert.  La  ville  est  prise  et  Croises  amené 
vant  le  vainqueur  qui,  d*après  la  tradition  lydienne 
par  Hérodote,  le  condamne  d'abord  à  être  brûlé  vif, 
îchissant  aux  coups  imprévus  de  la  fortune,  lui  fait 
la  vie  (546)- (i). 

Bsion  des  Grecs  d'Asie  par  les  Perses.  —  Au 
;ement  de  la  guerre,  Kyros  avait  engagé  les  cités 
;  à  se  révolter  contre  Croîsos,  et  elles  avaient  refusé, 
i&  chances  favorables  aux  Lydiens.  Après  la  prise  de 
lies  demandèrent  à  Kyros  de  les  recevoir  aux  condi- 
leur  avaient  été  imposées  par  Croîsos.  Il  leur  fit  une 
lédaigneuse  et  ne  voulut  traiter  qu'avec  les  Milésiens, 
nent  parce  que,  d'après  leurs  conventions  avec 
ils  étaient  les  alliés  el  non  les  sujets  du  royaume  de 
s  Ioniens  se  mirent  en  état  de  défense  et,  dans  un 
mu  au  Panionion,  leur  sanctuaire  commun,  décidè- 
^royer  demander  du  secours  à  Sparte.  Cette  demande 
as  accueillie.  Cependant,  les  Spartiates  envoyèrent 
commissaires  à  Phokaia  pour  examiner  l'état  des 
it  croyant  sans  doute  que  leur  nom  suffirait  pour 
[yros,  lui  firent  dire  de  ne  faire  de  tort  à  aucune  ville 
parce  que  les  Lakédaimoniens  ne  le  permettraient 
)s  n'avait  jamais  entendu  parler  de  Sparte;  il  crut 
it  un  marché  de  commerce  comme  les  villes  d'Jonie, 
'il  craignait  peu  des  gens  passant  leur  vie  sur  une 
)lique  à  se  tromper  les  uns  les  autres.  «  Si  les  Dieux 
îrvent  la  santé,  ajouta-t-il,  ils  auront  assez  de  leurs 
I  sans  s'occuper  des  Ioniens.  »  11  quitta  Sardes  pour 
à  la  conquête  de  Babylone.  Aussitôt  après  son  départ, 
ne  tentative  de  soulèvement  en  Lydie,  et  les  Ioniens 
ièrent.  Mazarès,  un  des  lieutenants  de  Kyros,  après 
irimé  la  révolte  des  Lydiens,  s'empara  de  Priènè  et 

les  détails,  voir  mon  Histoire  des  anciens  peuples  de  F  Orient, 

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ÉMIGRATION  DES  PHOKAIENS.  337 

de  Magnésie  et  ravagea  la  vallée  du  Maiandros.  A  sa  mort, 
Harpagos  prit  le  commandement  et  assiégea  Phokaia.  Il  paraît 
que  les  machines  de  siège  représentées  sur  les  bas-reliefs 
assyriens  n'étaient  pas  connues  des  Perses,  car  ils  se  bornaient 
à  amonceler  de  la  terre  autour  des  murailles  pour  prendre  la 
ville  d'assaut. 

«  Harpagos  fit  dire  aux  Phokaiens  qu'il  serait  satisfait  s'ils 
voulaient  seulement  abattre  une  tour  de  la  ville  et  consacrer 
une  maison.  Comme  ils  ne  pouvaient  souffrir  l'esclavage,  ils 
lui  demandèrent  de  leur  laisser  un  jour  pour  réfléchir,  et  de 
retirer  ses  troupes  pendant  qu'ils  tiendraient  conseil.  11  y  con- 
sentit, quoiqu'il  n'ignorât  pas  leurs  projets.  Alors,  ils  mirent 
sur  leurs  vaisseaux  leurs  femmes,  leurs  enfants,  leurs  meu- 
bles, et  de  plus  les  statues  et  offrandes  des  temples,  excepté 
les  peintures  et  les  statues  de  bronze  et  de  pierre.  Quand  tout 
fut  à  bord,  ils  s'embarquèrent  et  firent  voile  pour  Chios.  Les 
Perses  ayant  trouvé  la  ville  abandonnée,  s'en  emparèrent.  » 

Émigration  des  Phokaiens  et  des  Téiens.  —  Les  Pho- 
kaiens demandèrent  à  acheter  les  Iles  Oinusses;  mais  les  habi- 
tants de  Chios  ne  voulant  pas  les  vendre,  de  peur  de  compro- 
nDetlre  leur  commerce,  les  Phokaiens  mirent  à  la  voile  pour 
Kyrnè  (l'Ile  de  Corse)  où,  vingt  ans  auparavant,  ils  avaient  bâti 
la  ville  d'Alalia  pour  obéir  à  un  oracle.  Ils  retournèrent  d'abord 
à  Phokaia,  et  surprenant  la  garnison  laissée  par  Harpagos,  la 
massacrèrent.  Faisant  ensuite  les  plus  terribles  imprécations 
contre  ceux  qui  abandonneraient  la  flotte,  ils  jetèrent  dans 
la  mer  une  masse  de  fer  rouge  et  firent  serment  de  ne  jamais 
revenir  à  Phokaia  que  cette  masse  ne  remontât  sur  l'eau.  Tandis 
qu'ils  étaient  en  route  pour  aller  en  Kyrnè,  plus  de  la  moitié 
furent  pris  de  pitié  en  pensant  au  pays  et  aux  chers  souve- 
nirs, et  violant  leur  serment  retournèrent  à  Phokaia.  Les  autres, 
plus  religieux,  continuèrent  leur  route.  Arrivés  en  Kyrnè,  ils 
élevèrent  des  temples  et  demeurèrent  cinq  ans  avec  les  colons 
qui  les  avaient  précédés.  Mais  comme  ils  ravageaient  et  pil- 
laient tous  leurs  voisins,  les  Tyrrhènes  et  les  Carthaginois 
leur  livrèrent  bataille  et  détruisirent  la  plus  grande  partie  de 
leur  flotte;  les  prisonniers  furent  assommés  à  coup  de  pierre. 
Ceux  qui  restaient  s'embarquèrent  avec  leurs  femmes  et  leurs 


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héroïsme  des  lykiens. 

»our  Rhègion  ;  puis  ils  bâtirent  au  sud  de  Poseidonia, 
erritoire  appartenant  aux  Sybarites,  la  ville  d'Hyèlè 
qui  garda  longtemps  son  indépendance  quand  le  voi- 
it  soumis  aux  barbares.  Ils  furent  rejoints  par  d'au- 
!s  ioniens,  entre  autres  par  Xénophane  do  Colophon, 
L  à  Élée  une  célèbre  école  de  philosophie.  11  est  proba- 
)u'Hérodote  ne  le  dise  pas,  qu'une  partie  des  Phokaiens 
à  Marseille. 

impie  des  Phokaiens,  les  habitants  de  Téos  préférè- 
berté  à  la  patrie.  Quand  le  terrassement  élevé  autour 
murs  par  Harpagos  eut  rendu  la  résistance  impossi- 
lontèrent  sur  leurs  vaisseaux  et  se  dirigèrent,  les  uns 
rhrace,  où  ils  bâtirent  la  ville  d'Abdère,  les  autres 
jsphore  Kimmerien  où  ils  fondèrent  Phanagoria.  Les 
niens,  à  l'exception  de  ceux  de  Milet  qui  avaient  prêté 
de  fidélité  à  Kyros,  donnèrent  des  preuves  de  leur 
t  Hérodote,  en  défendant  chacun  sa  patrie,  mais  ayant 
us,  ils  furent  contraints  de  se  soumettre. 
ssion  de  la  Doris  et  de  la  Carie.  Héroïsme  des 
.  —  Enrôlés  dans  l'armée  perse,  les  Ioniens  et  les 
aidèrent  Harpagos  à  soumettre  la  Doris,  la  Carie  et 
Les  habitants  de  Gniide  avaient  d'abord  songé  à  cou- 
me  qui  les  rattachait  à  la  terre  ferme;  en  ayant  été 
s  par  un  oracle,  ils  se  soumirent  sans  résistance;  il 
sbablement  de  môme  d'Halicarnasse,  car,  si  elle  avait 
ne  défense  vigoureuse  à  Pétranger,  Hérodote  n'aurait 
ç[ué  de  nous  en  parler.  La  soumission  facile  de  la 
mparée  à  la  résistance  de  l'Ionie,  s'accorde  mal  avec 
B  qu'on  a  coutume  d'établir  entre  l'énergie  des 
(t  la  mollesse  des  Ioniens.  Seuls  des  peuples  de  la 
Pédasiens,  résistèrent  longtemps  à  Harpagos  ;  mais 
furent  subjugués.  Les  Lykiens,  malgré  leur  petit 
voulurent  tenir  tête  à  l'ennemi.  Mais  ayant  perdu 
e,  ils  se  rassemblèrent  avec  leurs  femmes  et  leurs 
tans  la  citadelle  dé  Xanthos,  y  mirent  le  feu  et  se 
is  tuer  en  combattant.  Quelques  familles,  absentes 
int  du  siège,  rentrèrent  plus  tard  dans  le  pays.  Les 
suivirent  l'exemple  des  Lykiens.  Ainsi  toute  l'Asie 


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POLYCRATÈS  DE  SAMOS.  339 

Mineure  fut  soumise  au  roi  de  Perse.  «  Quoique  accablés  de 
maux,  dit  Hérodote,  les  Ioniens  continuèrent  à  s'assembler  au 
Panionion;  Bias  de  Priènè  leur  donna  un  conseil  qui  les  aurait 
rendus  les  plus  heureux  de  tous  les  Grecs  s'ils  avaient  voulu 
le  suivre  :  il  les  exhorta  à  s'embarquer  tous  ensemble  sur 
une  même  flotte,  à  se  rendre  en  Sardaigne  et  à  y  fonder  une 
seule  ville  pour  tous  les  Ioniens.  11  leur  fit  voir  que  par  ce 
moyen  ils  sortiraient  d'esclavage,  au  lieu  que  s'ils  restaient  en 
lonie,  ils  n'auraient  aucun  moyen  de  recouvrer  leur  liberté.  » 
L'exécution  d'un  tel  projet  aurait  sans  doute  hâté  la  civilisation 
de  l'Europe  occidentale. 

Polycratés  de  Samos.  Sa  puissance  ;  sa  mort.  —  Héro- 
dote nous  dit  que  les  Ioniens  qui  habitaient  les  îles,  craignant 
le  sort  de  ceux  du  continent,  se  soumirent  d'eux-mêmes  à 
Kyros;  mais  il  est  probable  que  cette  soumission  fut  purement 
nonfiinale,  car  les  Perses,  qui  n'avaient  pas  encore  de  marine, 
ne  pouvaient  les  réduire  à  une  obéissance  effective.  Samos  s'é- 
leva même,  sous  le  gouvernement  du  tyran  Polycratés,  à  un 
degré  de  puissance  qu'elle  n'atteignit  à  aucune  autre  époque , 
Les  discordes  civiles  qui  avaient  agité  Samos  comme  la  plupart 
des  cités  grecques  semblaient  terminées  par  la  victoire  du  parti 
populaire  sur  l'oligarchie,  quand  Polycratés  s'empara  du  pou- 
voir avec  l'aide  de  Lygdamis,  tyran  de  Naxos.  Il  s'était  d'a- 
bord associé  ses  deux  frères,  mais  bientôt,  il  fit  mourir  l'un, 
exila  l'autre  et  resta  seul  maître  de  la  tyrannie.  Il  prit  à  sa  solde 
un  millier  d'archers,  équipa  une  flotte  de  cent  galères  et  s'en- 
richit par  la  piraterie,  pillant  tout  le  monde  sans  distinction, 
car,  disait-il,  on  fait  plus  de  plaisir  à  un  ami  en  lui  restituant 
ce  qu*on  lui  a  pris  que  si  on  ne  lui  avait  rien  enlevé  du  tout.  11 
subjugua  d'autres  îles,  s'empara  de  plusieurs  villes  sur  le  con- 
tinent, fit  la  guerre  aux  Milésiens.et  vainquit  dans  un  combat 
naval  la  flotte  de  Lesbos  qui  était  venue  à  leur  secours.  11  em- 
ploya les  prisonniers  à  creuser  un  fossé  autour  des  murs  de 
Samos.  Il  éleva  aussi  un  aqueduc  et  un  môle  qu'Hérodote  re- 
garde comme  une  des  merveilles  de  la  Grèce.  Il  importa  dans 
son  île  des  chiens  d'Épire,  des  chèvres  de  Skyros,  des  brebis 
de  Milet,  des  porcs  de  Sicile,  protégea  l'industrie  et  les  arts  et 
attira  à  sa  cour  les  poètes  Anacréon  et  Ibycos.  Comme  il  réus- 


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PUISSANCE  DE  POLYCRATÈS. 

Ins  toutes  ses  entreprises,  le  roi  d'Egypte  Amasis,  son 
ngagea  à  se  défier  de  celte  prospérité  constante  et  à 
quelque  chose  à  la  jalousie  des  Dieux.  H  jeta  à  la  mer 
^nifique  érneraude  montée  en  or  et  gravée  par  le  grand 
e  Samos,  Théodoros,  fils  de  Téléclès.  Quelques  jours 
1  pécheur  ayant  pris  un  énorme  poisson,  le  lui  apporte. 

le  remercie  et  Tinvite  à  souper:  on  ouvre  le  poisson 
rouve  l'anneau  d'or.  Polycratès  écrit  le  récit  de  celte 
^e  aventure  à  son  ami  Amasis,  et  celui-ci,  persuadé  que 
Bur  inquiétant  serait  expié  tôt  ou  tard,  renonce  à  son 
de  peur  d'élre  enveloppé  dans  sa  ruine. 

de  Perse  Cambysès,  qui  venait  de  succéder  à  son  père 
réparait  en  ce  moment  une  expédition  contre  l'Egypte, 
es  avait  la  plus  puissante  marine  de  la  Grèce;  il  saisit 
n  de  se  venger  d'Amasis  en  offrant  à  Cambysès  le  se- 
nne de  ses  escadres.  11  y  fit  embarquer  ceux  des  Sa- 
ont  Topposilion  le  gênait  et  écrivit  au  roi  de  Perse  de 
sorte  qu'ils  ne  revinssent  jamais  à  Samos.  Mais  ils  n'al- 
is  jusqu'en  Egypte  ;  résolus  à  retourner  contre  le  tyran 
qu'il  avait  mise  entre  leurs  mains,  ils  revinrent  l'alta- 
►lycralès  avait  pris  la  précaution  d'enfermer  dans  Tar- 
s  femmes  et  les  enfants  des  citoyens,  menaçant  d'y 
3  feu  si  le  peuple  favorisait  les  insurgés.  Ceux-ci,  battus 
sieurs  combats,  allèrent  demander  du  secours  à  Sparte, 
ièrentleur  situation,  un  peu  trop  longuement,  à  ce  qu'il 
^es  Spartiates  répondirent  :  «  Nous  avons  oublié  le  corn- 
lent  de  votre  discours,  cela  nous  empoche  de  com- 
la  On.  »  Ils  revinrent  avec  un  sac  vide,  en  disant  :  «  Notre 
plus  de  farine.  »  Les  Spartiates  accordèrent  le  secours 
ê,  et  les  Corinthiens  se  joignirent  à  l'expédition.  L'armée 
e  essaya  inutilement  de  prendre  Samos  et  se  retira 
tarante  jours  de  siège.  Les  exilés  Samiens,  réduits  à 
piraterie,  attaquèrent  Siphnos,  petite  île  très  riche  par 
îs  d'or  et  d'argent,  dont  les  habitants  se  partageaient 
it.  Ils  lui  imposèrent  un  tribut  de  cent  talents,  et  après 
rcouru  quelque  temps  le  mer  Egée,  s'établirent  à  Kjdo- 
is  lilc  de  Crète.  Mais  au  bout  de  cinq  ans,  les  Cretois 
it  un  secours  naval  des  Aiginèies,  qui  réduisirent  les 


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MAIANDRIOS  ET  SYLOSON.  341 

Samiens  en  esclavage.  Quant  à  Polycratès,  sa  puissance  pa- 
raissait plus  solide  que  jamais  et  il  songeait  à  étendre  sa  domi- 
nation sur  toute  la  Grèce  d'Asie.  Mais  le  satrape  de  Lydie, 
Oroitès,  qui  le  haïssait  pour  une  raison  inconnue,  Tattira  dans 
un  piège.  Il  se  disait  disgracié  par  Cambysès  et  demandait  & 
Pôlycratès  de  le  protéger,  en  lui  promettante  moitié  de  ses  tré- 
sors. Malgré  les  conseils  de  ses  amis  et  les  pressentiments  fu- 
nestes de  sa  fille,  Pôlycratès  se  rendit  en  Lydie.  Oroitès  le  fit 
mettre  en  croix,  dans  Tunique  but  de  satisfaire  une  vengeance 
personnelle,  car  il  n'essaya  même  pas  de  s'emparer  de  Samos. 
«  Ce  fut  là,  dit  Hérodote,  qu'aboutirent  les  prospérités  de  Pô- 
lycratès, comme  lui  avait  prédit  Amasis.  » 

Maiandrios.—  Syloson.  —  Ruine  deSamos.  —  Avant  de 
quitter  Samos,  Pôlycratès  avait  laissé  le  gouvernement  à  son  se- 
crétaire Maiandrios.  Â  la  nouvelle  de  sa  mort,  Maiandrios  éleva 
un  autel  à  Zeus  libérateur,  assembla  les  citoyens  et  leur  dit  : 
«  Pôlycratès  m*a  confié  son  autorité  et  je  pourrais  la  conser- 
ver. Mais  je  ne  ferai  Jamais  ce  que  je  condamne  dans  un  autre  ; 
je  Tai  blâmé  de  s'être  rendu  maître  de  ses  égaux,  je  ne  l'imi- 
terai pas.  Je  me  démets  de  la  puissance  souveraine  et  je  réta- 
blis l'égalité.  Je  demande  seulement,  comme  cela  est  juste,  six 
talents  du  trésor  de  Pôlycratès  et  le  sacerdoce  de  Zeus  libéra- 
teur. »  Alors  un  Samien  se  leva  et  lui  dit  :  •  Tu  n'es  pas  digne 
de  nous  commander,  car  tu  n'es  qu'un  homme  de  peu  et  un 
misérable.  Songe  plutôt  à  rendre  compte  de  l'argent  que  tu  as 
eu  entre  les  mains.  )>  11  vit  qu'il  y  avait  du  danger  à  être  hon- 
nête; il  rentra  dans  la  citadelle  en  disant  qu'il  allait  préparer 
ses  comptes,  puis  il  fit  appeler,  pour  les  vérifier,  celui  qui  l'avait 
interpellé,  et  ensuite,  l'un  après  l'autre,  ceux  qui  lui  parais- 
saient hostiles,  et  les  retint  prisonniers.  Quelque  temps  après  il 
tomba  malade  et  son  frère  Lycaretos  les  fit  mourir.  11  semble, 
dit  Hérodote,  que  les  Samiens  ne  voulaient  pas  être  libres. 

Syloson,  frère  de  Pôlycratès,  qui  l'avait  d'abord  associé  à  la 
tyrannie,  puis  exilé  de  Samos^  s'était  engagé,  comme  bien 
d'autres  Grecs,  dans  l'armée  de  Cambysès  pour  y  chercher  for- 
tune. Comme  il  se  promenait  un  jour  sur  la  place  de  Memphis 
avec  un  manteau  d'écarlate,  un  soldat  de  la  garde  royale 
admire  ce  manteau  et  le  prie  de  le  lui  vendre.  «  Je  ne  le  ven- 


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342  UUIiNE  DE  SAMOS. 

drais  à  aucun  prix,  répond  Syloson,  mais  je  te  le  donne.  » 
Quelques  années  après  il  apprend  que,  par  suite  d'une  révolu- 
tion, ce  soldat,  nommé  Dareios,  fils  d'Hystaspès,  est  devenu 
roi  des  Perses.  Il  se  présente  à  la  cour  et  demande  une  au- 
dience en  disant  qu'il  a  jadis  obligé  le  roi.  11  est  introduit,  rap- 
pelle l'histoire  du  manteau  et  le  roi  voulant  reconnaître  le  ser- 
vice rendu  au  simple  soldat,  lui  offre  de  l'or  et  de  l'argent  à 
profusion.  «  Je  ne  demande  ni  or  ni  argent,  dit  Syloson,  je  de- 
mande que  ma  patrie  me  soit  rendue.  Depuis  qu'Oroitès  a  fait 
mourir  mon  frère  Polycratès,  un  de  nos  esclaves  s'est  emparé 
de  Samos.  Rends-la-moi  sans  effusion  de^sang  et  ne  permets 
pas  qu'elle  soit  réduite  en  servitude.  »  Le  roi  fait  droit  à  cette 
demande  et  charge  Otanès,  un  de  ceux  qui  l'avaient  aidé  à 
monter  sur  le  trône,  de  partir  pour  Samos  avec  une  armée  et 
de  faire  tout  ce  que  Syloson  lui  demanderait. 

En  voyant  arriver  cette  armée,  Maiandrios  jugea  toute  résis- 
tance inutile  et  déclara  qu'il  était  prêt  à  capituler  et  à  sortir  de 
l'île.  Mais  il  avait  un  frère  nommé  Gharilaos,  homme  violent 
et  un  peu  fou,  qu'il  avait  fait  enfermer  pour  quelque  faute.  De 
la  fenêtre  de  sa  prison,  Gharilaos  vit  des  officiers  perses  tran- 
quillement assis  devant  le  cidadelle  ;  alors,  s'emporlant  contre 
son  frère:  •  0  lâche, luidit  il,  tu  me  retiens  enchaîné,  moi  qui 
n'ai  rien  fait,  et  tu  n'oses  pas  le  venger  de  ceux  qui  te  chassent 
de  chez  toi.  Donne-moi  tes  troupes  auxiliaires,  et  les  Perses  se 
repentiront  d'être  venus  ici.  »  Maiandrios,  qui  n'était  pas  fâché 
d'attirer  des  embarras  à  Syloson  et  aux  Samiens,  permit  à  son 
frère  de  faire  ce  qu'il  voudrait.  Puis  il  sortit  de  la  forteresse 
par  un  passage  souterrain  et  s'embarqua  pour  Sparte.  Là,  il  fit 
voir  au  roi  Gléoménès  les  vases  d'or  et  d'argent  qu'il  avait  em- 
portés et  l'invita  à  faire  un  choix.  Mais  Gléoménès  alla  trouver 
les  Éphores  :  «  11  est  de  l'intérêt  de  la  république,  leur  dit-il, 
de  chasser  cet  étranger,  de  peur  qu'il  ne  me  corrompe  et  d'au- 
tres citoyens  aussi.  »  Maiandrios  reçut  l'ordre  de  sortir  du  Pé- 
loponnèse. Quant  à  Gharilaos,  aussitôt  après  le  départ  de  son 
frère,  il  avait  égorgé  les  officiers  perses  qui  s'étaient  installés 
dans  la  ville  sur  la  foi  de  la  capitulation.  A  la  vue  de  ce  carnage, 
Otanès  oublia  l'ordre  qu'il  avait  reçu  de  prendre  Samos  sans 
effusion  de  sang  :  il  commanda  à  ses  soldats  de  faire  main 


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SOUMISSION  DE  LA  KYRÈNAIQUE.  343 

basse  sur  toute  la  population,  hommes,  femmes  et  enfants, 
même  dans  les  temples.  «  Quand  les  Perses  eurent  pris  les 
Samiens  comme  dans  un  Blet,  dit  Hérodote,  ils  remirent  la  ville 
à  Syloson,  mais  déserte  et  sans  aucun  habitant.  » 

Soumission  de  la  Kyrënaïque.  —  Après  la  conquête  de 
FÉgypte  par  Cambysès,  les  habitants  des  villes  grecques  de 
Kyrène  et  de  Barkè,  craignant  le  même  sort  que  les  Égyptiens, 
s'étaient  soumis  sans  combat  à  la  domination  des  Perses.  Le 
pays  était  alors  en  révolution,  par  suite  des  intrigues  du  roi 
Arkésilaos,  qui  avait  voulu  renverser  la  constitution  républi- 
caine de  Dèmonax  et  ressaisir  l'autorité  exercée  autrefois  par 
les  Battiades,  ses  ancêtres.  Chassé  de  Kyrène,  il  y  était  rentré 
avec  une  armée  levée  à  Samos.  Mais  les  cruautés  qui  avaient 
suivi  sa  victoire  lui  faisaient  craindre  des  représailles;  il  se  re- 
tira à  Barkè  chez  son  beau -père  Âlazir  et  y  fut  assassiné  avec 
lui.  Sa  mère  Phérélimè  alla  demander  vengeance  au  satrape 
d*Égypte  Aryandès,  sous  prétexte  que  son  fils  n'avait  été  tué 
que  parce  qu'il  favorisait  le  parti  des  Perses.  Il  fit  sommer  les 
Barkaiens  de  livrer  le  meurtrier  d'Arkésilaos,  mais  ils  prirent 
tous  le  meurtre  sur  eux.  Alors  il  envoya  une  armée  devant 
Barkè.  Pendant  neuf  mois  que  dura  le  siège,  les  Perses  pous- 
sèrent des  mines  jusqu'aux  murailles,  et  attaquèrent  vigoureu- 
sement la  place.  Un  ouvrier  en  cuivre  découvrit  leurs  mines 
parle  moyen  d'un  bouclier  d'airain  qui  résonnait  là  où  la  terre 
était  minée.  On  creusa  des  contre-mines  et  on  tua  les  ouvriers 
persans.  Quant  aux  attaques  ouvertes,  les  Barkaiens  purent  les 
repousser.  Les  Perses  proposèrent  un  accommodement;  on 
jura  d'observer  le  traité  tant  que  le  terrain  où  on  était  resterait 
à  sa  place.  Mais  ce  terrain  était  formé  de  pièces  de  bois  cou- 
vertes de  terre  et  placées  au-dessus  d'un  trou  :  les  Perses  ayant 
enfoncé  les  planches,  le  terrain  était  détruit  et  le  traité  n'exis- 
tait plus.  Ils  entrèrent  en  foule  par  les  portes  ouvertes,  mirent 
la  ville  au  pillage  et  livrèrent  à  Phérétimè  ceux  qu'elle  désigna. 
Elle  les  fit  mettre  en  croix,  et  ayant  fait  couper  les  seins  h  leurs 
femmes,  elle  en  fit  border  le  mur.  Le  reste  des  habitants  furent 
réduits  en  servitude  et  envoyés  à  Dareios  qui  les  transporta  en 
Bactriune  ;  ils  y  bâtirent  un  village  auquel  ils  donnèrent  le  nom 
de  Barkè» 


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344  LE  MÉDECIN  GREC  DÈMORËDÈS. 

I«e  médecin  grec  Dèmokédès  à  la  cour  de  Perse.  —  La 

conquête  de  l'Ionie  et  celle  de  la  Kyrènaïque  avaient  réuni  à 
l'empire  des  Perses  une  grande  partie  du  territoire  grec.  Un 
conflit  entre  ce  grand  empire  et  la  Grèce  d'Europe  seniblait 
inévitable;  une  circonstance  accidentelle  faillit  la  précipiter. 
Après  l'assassinat  de  Polycralès  parle  satrape  de  Lydie  Oroilès, 
les  Samiens  formant  son  escorte  avaient  été  laissés  libres, 
mais  les  étrangers  et  les  esclaves  avaient  été  mis  en  prison. 
Plus  tard,  Droites  ayant  été  tué  par  ordre  de  Dareios  qui  le 
soupçonnait  de  vouloir  se  rendre  indépendant,  ces  captifs  fu- 
rent transportés  à  Suse.  Parmi  eux  se  trouvait  un  médecin 
habile,  Dèmokédès  de  Groton.  Un  jour,  Dareios  se  trouvant  à 
la  chasse,  se  donna  une  entorse;  ses  médecins  égyptiens  ne 
firent  qu'aggraver  son  mal;  quelqu'un  lui  parla  d'un  médecin 
grec  amené  de  Sardes  parmi  les  esclaves  d'Oroilès.  Dareios 
l'envoya  chercher;  on  l'amena  les  fers  aux  pieds,  couvert  dé 
haillons.  Il  voulut  d'abord  dissimuler  son  talent,  de  peur  de 
prolonger  son  exil.  A  la  fin  il  céda,  et  guérit  le  roi  qui  lui  fit 
de  riches  présents,  le  fit  manger  à  sa  table  et  lui  promit  tout 
ce  qu'il  voudrait,  excepté  de  le  laisser  retourner  en  Grèce.  Il 
lui  accorda  même  la  grâce  des  médecins  égyptiens  qui  allaient 
être  mis  en  croix  pour  leur  maladresse.  Peu  de  temps  après  il 
guérit  d'une  maladie  dangereuse  la  sultane  favorite  Atossa,  qui 
voulut^  par  reconnaissance,  lui  procurer  une  occasion  de  re- 
voir sa  patrie.  Elle  persuada  au  roi,  qui  dès  lors  méditait  la 
conquête  de  la  Grèce,  d'envoyer  quelques  Perses  reconnaître 
le  pays,  et  de  charger  Dèmokédès  de  les  conduire,  tout  en  le 
faisant  surveiller  avec  soin.  Us  levèrent  le  plan  des  côtes,  visi- 
tèrent les  places  et  firent  voile  pour  l'Italie.  Mais,  quand  le 
vaisseau  arriva  à  Tarcnte,  le  tyran  Antiphilidès  en  fit  enlever  la 
gouvernail  et  arrêta  les  Perses  comme  espions,  pour  donner 
à  Dèmokédès  le  temps  d'aller  à  Groton.  Il  les  relâcha  ensuite, 
et  ils  poursuivirent  Dèmokédès,  mais  il  refusa  de  les  suivre  et 
les  chargea  de  dire  à  Dareios  qu'il  allait  épouser  la  fille  de 
Milon  dé  Groton  ;  il  croyait  que  le  nom  du  fameux  athlète  im- 
poserait au  grand  roi.  Les  Perses  se  rembarquèrent,  mais  le 
vent  les  poussa  sur  les  côtes  d'Iapygle  où  on  les  fit  prisonniers. 
Un  Tarentin  nommé  Gilles  les  délivra  et  les  ramena  à  Dareios, 


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DAREIOS  EN  SCYTIIIE.  345 

en  le  priant  de  le  faire  rentrer  à  Tarente  d'où  il  était  exilé.  Il 
ne  demandait  pas  d'être  rétabli  par  la  force  ;  il  suffirait»  croyait- 
il,  que  son  rappel  fût  sollicité  par  les  Gnidiens,  amis  des 
Tarentins.  Sur  Tordre  du  roi,  les  Gnidiens  en  firent  la  de- 
mande, mais  ne  purent  rien  obtenir. 

Expédition  de  Dareios  en  Scytliie.  —  Si  Dareios  avait 
attaqué  la  Grèce  à  cette  époque,  elle  serait  probablement  de- 
venue une  satrapie  de  Fempire  médo-persique  :  Athènes,  qui 
fut  plus  tard  Tâme  de  la  résistance  §iux  barbares,  était  alors 
soumise  aux  Pisistratides,  qui  n'auraient  pas  hésité  à  recon- 
naître la  suzeraineté  du  grand  roi.  Heureusement  pour  la  li- 
berté grecque  et  pour  la  civilisation  du  monde,  Dareios  avait 
d'autres  projets  ;  ajournant,  malgré  les  conseils  d'Atossa,  la 
conquête  de  la  Grèce,  il  voulut  commencer  par  soumettre  la 
Scythie.  Une  immense  armée,  rassemblée  de  toutes  les  par- 
ties de  l'empire  et  commandée  par  le  roi  en  personne,  traversa 
la  Bosphore  de  Thrace  sur  un  pont  de  bateaux.  L'ingénieur 
Samien  Mandroclès,  qui  l'avait  construit,  fut  généreusement 
récompensé  pour  ce  travail  et  consacra  dans  le  temple  d'Hérè 
un  tableau  représentant  le  passage  de  l'armée  Perse  sur  le 
Bosphore. 

Parvenu  en  Europe,  Dareios  traverse  la  Thrace  et  soumet  les 
Gèles,  pendant  que  sa  flotte,  composée  de  six  cents  vaisseaux 
fournis  par  les  Grecs  d'Asie,  suivait  la  côte  au  nord  et  remon- 
tait Tlstros  (Danube),  jusqu'au  point  où  il  se  sépare  en  plusieurs 
branches.  Les  Ioniens  avaient  reçu  ordre  d'y  jeter  un  pont; 
Dareios  le  trouva  prêt  à  son  arrivée,  et,  après  l'avoir  traversé 
avec  ses  troupes,  donna  ordre  de  le  détruire.  Mais  Goès  de 
Mitylène  lui  fit  comprendre  le  danger  de  se  priver  d'un  pas- 
sage qui  pouvait  devenir  nécessaire,  en  cas  de  retraite.  Il  en 
confia  la  garde  aux  Ioniens,  et  comme  il  se  proposait  de  revenir 
par  une  autre  route,  il  fixa  un  terme  de  soixante  jours  pour 
son  absence,  fit  soixante  nœuds  à  une  courroie,  et  dit  aux 
Ioniens,  d'en  défaire  un  chaque  jour  et  de  retourner  ensuite 
chez  eux .  Les  soixante  jours  s'écoulèrent,  et  l'on  vit  arriver, 
au  lieu  de  l'armée  perse,'' une  troupe  de  Scythes  :  «  Ioniens, 
dirent-ils,  le  terme  qui  vous  a  été  prescrit  est  passé  :  rompez 
le  pont,  et  remerciez  les  Dieux  et  les  Scythes  de  vous  avoir 


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346  LES  PERSES  EN  THRACE  ET  EN  MACÉDOINE. 

rendu  la  liberté.  Quant  à  celui  qui  était  votre  maître,  nous 
allons  le  traiter  de  manière  qu'il  ne  fasse  plus  la  guerre  à  per- 
sonne. »  Les  chefs  délibérèrent:  TAthénien  Miltiade,  tyran  de 
la  Ghersonnèse  de  THellespont,  fut  d*avis  de  saisir  cette  occa- 
sion pour  rendre  la  liberté  à  Tlonie:  mais  Histiaios,  tyran  de 
Milel,  s'y  opposa.  Il  représenta  aux  autres  tyrans  que,  si  la 
puissance  de  Dareios  était  détruite,  eux- mômes  perdraient  leur 
autorité,  les  villes  préférant  toutes  la  démocratie  à  la  tyrannie. 
Cette  opinion  prévalut  et  on  prit  la  résolution  de  sauver 
Dareios,  ce  qui  fit  dire  aux  Scythes  que  les  Ioniens  étaient  les 
plus  lâches  des  hommes  libres,  mais  les  plus  fidèles  des 
esclaves. 

Conquête  de  la  Thrace  et  de  la  Macédoine  par  les 
Perses.  —  Les  Scythes  avaient  opposé  à  Dareios  la  tactique 
employée  plus  tard  par  les  Russes  contre  Napoléon  :  ils  dévas- 
taient les  campagnes  et  se  reliraient  avec  leurs  familles  et 
leurs  troupeaux  vers  les  régions  du  Nord,  en  évitant  de  livrer 
bataille  à  l'ennemi.  Quand  il  eut  repassé  l'Islros  après  une  re- 
traite désastreuse,  Dareios  avait  cependant  encore  une  armée 
considérable  ;  il  la  laissa  en  Europe  sous  le  commandement  de 
Mégabaze  et  retourna  en  Asie.  11  voulut  alors  récompenser 
Goès  de  Mitylène  et  Histiaios  de  Milet  auxquels  il  devait  son 
salut.  Goès  demanda  et  obtint  la  tyrannie  de  Mitylène,  Histiaios 
le  territoire  de  Myrkine,  dans  le  pays  des  Thraces  Édoniens, 
où  il  voulait  fonder  une  ville.  Mégabaze  acheva  la  conquête  de 
la  Thrace  et  des  cités  grecques  de  l'Hellespont  en  commençant 
par  Périnthe,  puis,  traversant  le  Slrymon,il  soumit  les  Paiônes, 
dont  une  partie  fut  transportée  en  Asie.  Au  sud  de  la  Paionie 
était  la  Macédoine,  qui  devait  avoir  plus  tard  tant  d'importance 
dans  l'histoire  grecque.  La  famille  royale  de  ce  pays  se  pré- 
tendait issue  des  rois  Hèracléides  d'Argos.  Mégabaze  envoya 
sept  Perses  de  distinction  au  roi  Amyntas  pour  lui  demander 
la  terre  et  l'eau.  Amyntas  consentit  à  devenir  vassal  de  Dareios 
et  offrit  un  banquet  aux  ambassadeurs.  Ceux-ci,  échaufi*és  par 
le  vin,  exigèrent  que  le  roi,  contrairement  aux  usages  grecs, 
introduisît  les  femmes  de  sa  famille  dans  la  salle  du  festin,  et 
les  traitèrent  grossièrement.  Le  roi  n'osa  rien  dire,  mais  son 
fils  Alexandre  prit  un  prétexte  pour  éloigner  les  femmes  et 


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RÉVOLTE  DE  L'IONIE. 

faire  entrer  quelques  jeunes  gens  armés  qui  se , 
ambassadeurs  el  les  massacrèrent.  Un  Perse  ne 
ayanl  été  envoyé  pour  faire  une  enquête,  Alexa 
présents  considérables,  lui  donna  sa  sœur  en  i 
vint  ainsi  à  étouffer  l'affaire.  Mégabaze  étan 
Asie,  son  successeur  Olanès,  distinct  du  person 
nom  dont  il  a  été  question  plus  haut,  acheva  l'œ 
commencée,  prit  Byzance,  Chalkédon,  et  les  il 
de  Lemnos. 

Révolte  de  rionie.  —  Au  commencement 
siècle,  l'empire  des  Perses  s'étendait  depuis 
rindos  jusqu'au  mont  Olympe.  Les  peuples  qu 
partie  payaient  des  impôts  pour  l'entretien  du  i 
et  des  satrapes,  fournissaient  des  soldats  àl'arm 
gardaient  leurs  coutumes  locales  et  leur  admir 
rieure.  Dans  les  villes  grecques,  les  Perses  favoi 
vernement  des  tyrans,  trouvant  plus  comme 
affaire  qu'à  un  seul  homme  pour  le  payement  < 
tyrannie  et  la  domination  étrangère  se  trouvai 
ciées  dans  une  même  réprobation.  Une  miserai 
une  ambition  particulière  suscitèrent  une  révoll 
à  toute  la  Grèce  d'Asie.  Les  oligarques  de  Naxos, 
parti  populaire,  demandaient  l'appui  d'Aristagc 
cousin  d'Histiaios  qui  lui  avait  cédé  la  tyrai 
Arislagoras  était  disposé  à  les  aider  pour  mettre 
dépendance.  Il  alla  trouver  Artapherne,  frère  < 
satrape  d'Asie  Mineure,  et  l'engagea  à  saisir 
d'annexer  Naxos  et  toutes  les  Kyclades  à  l'empi 
Artapherne  lui  donna  deux  cents  vaisseaux  et  de 
le  commandement  de  Mégabase,  son  cousin  et  c< 
but  de  cette  expédition  devait  être  tenu  secret,  n 
s'étant  élevé,  à  propos  d'une  question  de  dis 
Aristagoras  et  Mégabase,  celui-ci  fit  prévenir  le 
se  mirent  en  défense.  L'entreprise  échoua,  Arii 
gnit  d'avoir  à  en  rembourser  les  frais  et  d'êti 
pouillé  de  la  tyrannie  de  Milet.  Sa  position  était 
ne  trouva  rien  de  mieux,  pour  se  tirer  d'embarras 
ses  concitoyens  à  la  révolte.  Un  message  d'Histia 


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348  SECOURS  DEMANDÉS  AUX  GRECS  D'EUROPE. 

Histiaios  était  alors  k  Suze,à  la  cour  de  Dareios  qui,  par  crainte 
de  ses  projets  ambilieux,  l'avait  rappelé  et  le  retenait,  disant 
qu'il  ne  pouvait  pas  se  passer  de  lui.  Persuadé  que,  si  Milet  se 
révoltait,  le  roi  le  chargerait  d'y  aller  et  de  lui  amener  Arista- 
goras,  il  fit  raser  la  tête  d'un  esclave,  y  imprima  des  caractères, 
et  quand  les  cheveux  furent  repoussés,  envoya  l'esclave  à  Mi- 
let. Aristagoras  fit  raser  la  tête  de  l'esclave  et  lut  le  message  ; 
c'était  un  ordre  de*  se  révolter. 

Secours  demandés  aux  Grecs  d^Europe.  —  Aristagoras 
délibéra  avec  quelques  citoyens  notables,  et  IMnaurrection  fut 
résolue  malgré  les  avis  prudents  de  l'historien  Ilécatée  qui 
connaissait  la  force  de  l'empire  des  Perses.  Pour  soulever  les 
masses  populaires,  Aristagoras  abdiqua  la  tyrannie  à  Milet.  En 
même  temps  il  fit  enlever  les  autres  tyrans  qui  étaient  encore 
réunis  sur  la  flotte  revenue  de  Naxos,  et  les  livra  aux  villes. 
Les  Mitylèniens    lapidèrent  Coès  qui  s'était  fait  donner  la 
tyrannie  par  Dareios  ;  les  autres   tyrans  furent  seulement 
bannis.  La  démocratie  s'établit  dans  toutes  les  cités,  et  l'insur- 
rection devient  générale.  Aristagoras,  qui  avait  besoin  d'une 
forte  alliance,  s'embarqua  pour  Sparte.  Il  montra  au  roi 
Cléoménès  une  plaque  de  cuivre  «  sur  laquelle  était  gravée,  dit 
Hérodote»  la  circonférence  entière  de  la  terre,  avec  toutes  les 
mers  et  les  rivières  dont  elle  est  arrosée.  »  Après  avoir  présenté 
à  Cléoménès  la  délivrance  de  l'Ionie  comme  un  devoir  pour  les 
Spartiates,  il  lui  fit  voir  sur  sa  carte  les  pays  situés  entre 
rionie  et  la  Perse,  lui  en  vanta   la  richesse  et  la  fertilité,  et 
parla  surtout  des  immenses  trésors  de  Suze,   Selon  lui,  la  su- 
périorité militaire  des  Spartiates  sur  les  Asiatiques  rendait 
cette  conquête  facile.  «  Pour  reculer  un  peu  les  bornes  de  votre 
territoire,  vous  vous  battez  contre  vos  voisins  de  Messénie, 
d'Arcadie  et  d'Argos  ;  il  se  présente  une  occasion  de  vous  em- 
parer de  l'Asie  entière,  que  pourriez-vous  souhaiter  de  plus?  » 
Cléoménès  promit  de  rendre  réponse  dans  trois  jours.  Quand 
Aristagoras  revint,  il  lui  demanda  en  combien  de  temps  on 
pouvait  aller  d  lonie  à  Suze.  Cette  fois,  l'Ionien  manqua  d'a- 
dresse; il  répondit  qu'il  fallait  trois   mois.  «  Mon  ami,  dit 
Cléoménès,  en  proposant  aux  Spartiates  un  voyage  de  trois 
mois,  tu  leur  tiens  un  langage  désagréable;  sors  de  Sparte 


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INCENDIE  DE  SARDES.  349 

avant  le  coucher  du  soleil.  »  11  essaya  de  la  séduction  :  il  offrit 
dix  talents,  augmenta  la  somme  et  vint  peu  à  peu  jusqu'à 
cinquante  (270,000  fr.)>  La  petite  Gorgo,  fille  de  Gléoménès, 
âgée  de  huit  à  neuf  ans,  assistait  à  Tentretien  :  «  Père,  dit-elle, 
va-t'en,  ou  cet  étranger  te  corrompra.  »  Cléoménès  se  leva, 
et  Aristagoras  dut  quitter  Sparte. 

Incendie  de  Sardes.  — -  11  se  rendit  k  Athènes  où  il  eut 
plus  de  succès.  Il  rappela  les  liens  qui  unissaient  Athènes  aux 
villes  d'ionie.  Les  Athéniens  étaient  d'ailleurs  très  irrités  con- 
tre Artapherne  qui  avait  accueilli  Hippias  avec  faveur  et  ré- 
pondu à  leurs  réclamations  en  les  sommant  de  i'ecevoir  leur 
ancien  tyran.  Ils  envoyèrent  vingt  vaisseaux,  auxquels  les  Ëré- 
triens  en  Joignirent  cinq,  en  souvenir  de  l'appui  que  les  Mi- 
lésiens  leur  avaient  prêté  autrefois  dans  la  guerre  contre 
Chalkis.  Cette  flotte  fut  le  commencement  des  maux  pour  les 
Grecs  et  les  barbares,  dit  Hérodote,  rappelant  l'expression 
d'Homère  à  propos  des  vaisseaux  qui  transportèrent  Paris  sur 
la  mer  Egée.  Les  troupes  débarquèrent  sur  le  territoire  d'É- 
phèse  cù  elles  reçurent  un  puissant  renfort  d'Ioniens  ;  puis 
elles  remontèrent  la  vallée  du  Caystros,  franchirent  le  mont 
Tmôlos  et  s'emparèrent  de  Sardes,  dont  la  garnison  se  retira 
dans  la  citadelle.  Les  maisons  de  Sardes  étaient  construites  en 
bois  ou  en  briques  avec  des  toitures  de  roseaux,  à  cause  des 
tremblements  de  terre.  Un  soldat  ayant  mis  le  feu  à  une  de 
ces  maisons,  l'incendie  se  communiqua  à  toute  la  ville.  Le 
temple  de  Kybèlè,  Déesse  du  pays,  fut  réduit  en  cendres,  et 
cet  incendie  servit  plus  tard  de  prétexte  aux  Perses  pour  brûler 
les  temples  de  la  Grèce.  La  population  rassemblée  sur  la  place 
publique,  aux  bords  du  Pactole,  se  disposait  à  une  vigoureuse 
défense;  les  Ioniens  et  leurs  alliés  se  retirèrent.  Ils  venaient 
de  quitter  Sardes  quand  toutes  les  forces  de  la  province,  ras- 
semblées à  la  nouvelle  de  l'invasion,  les  poursuivirent  dans 
leur  retraite  et  les  battirent  près  d'Éphèse.  Évalkis,  chef  des 
Érétriens,  fut  tué  en  combattant.  Les  Ioniens  se  dispersèrent 
dans  les  villes;  leurs  alliés  se  rembarquèrent.  En  apprenant 
l'incendie  de  Sardes,  Dareios,  moins  irrité  contre  ses  sujets 
rebelles  que  contre  les  étrangers  qui  étaient  venus  l'attaquer 
sans  provocation  de  sa  part,  lança  une  flèche  contre  le  ciel  en 
L.  M.  —  HisT.  DES  Grecs.  20 


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RÉVOLTE  DE   KYPROS. 

t  :  «  0  Ormuzd,  accorde-moi  de  me  venger  des  Alhé- 
i.  >)  Il  ordonna  à  un  de  ses  serviteurs  de  lui  répéter,  cha- 
fois  qu'il  se  mettrait  à  table  :  «  Maître,  souviens-toi  des 
liens.  » 

s  Gariens  et  les  Kypriotes  prennent  part  à  Tinsur- 
ion.  —  Malgré  les  prières  d'Aristagoras,  les  Athéniens 
èrent  de  nouveaux  secours.  Réduits  à  eux-mêmes,  les 
ns  se  préparèrent  à  continuer  la  lutte.  Ils  firent  voile  vers 
esponl,  s*emparèrent  de  Byzance  et  de  toutes  les  autres 
voisines;  puis,  revenant  vers  le  sud,  décidèrent  les  Ca- 
à  s'allier  avec  eux.  Les  Cauniens,  qui  avaient  refusé  au- 
tant leur  appui,  entrèrent  dans  Talliance  aussitôt  après 
indie  de  Sardes.  Toutes  les  villes  de  Kypros,  excepté  Ama- 
:e,  prirent  parti  pour  les  Ioniens,  à  l'instigation  d'Onc- 
de  Salamine,  qui  enleva  la  tyrannie  à  son  frère  Gorgos, 
san  des  Mèdes.  La  révolte  prenait  des  proportions  redou- 
s;  les  Grecs  d'Asie  auraient  pu  conquérir  leur  indépen- 
B  s'ils  avaient  eu  la  discipline  et  l'unilé  d'action  qui  sau- 
it  quelques  années  plus  tard  la  Grèce  d'Europe.  Les  Perses 
yèrent  la  flotte  phénicienne  à  Kypros  avec  une  armée 
fptiens  et  de  Kilikiens.  Onésilos  demanda  l'aide  de  la 
ionienne  qui  arriva  aussitôt.  Les  Ioniens,  surtout  ceux 
amos,  montrèrent  boucoup  de  courage  et  battirent  les 
iciens  sur  mer  ;  mais  le  combat  de  terre  qui  se  livra  en 
e  temps  prit  une  autre  tournure.  Déjà  Onésilos  avait  tué 
L  main  le  général  persan,  quand  Stésènor,  tyran  de  Ku- 
qui  commandait  un  corps  considérable  de  troupes,  passa 
)té  de  l'ennemi.  Les  chars  de  guerre  des  Salaminiens  sui- 
t  cet  exemple,  Onésilos  fut  tué,  ainsi  que  le  roi  des 
ns,  Aristokypros,  fils  de  Philokypros,  l'ami  de  Selon.  La 
de  Soloi  fut  prise  après  cinq  mois  de  siège;  Gorgos  re- 
it  tyran  de  Salamine,  et  l'île  de  Kypros  fut  de  nouveau 
te  en  esclavage  après  avoir  joui  de  la  liberté  pendant  un 
En  même  temps,  les  armées  rassemblées  en  Lydie  et 
nandées  par  les  gendres  du  roi  soumettaient  les  villes  de 
espont,  de  la  Troas  et  de  l'Aiolis.  Après  la  prise  de  Gla- 
nes et  de  Kymè,  Aristagoras,  l'auteur  du  soulèvement, 
donnant  ceux  qu'il  avait  entraînés  dans  le  danger,  s'em- 


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BATAILLE  DE  LADÈ. 

barqua  pour  Myrkine   et   fut  tué    au  si^ 
Thrace. 

Défaite  de  la  flotte  grecque  à  Ladë. 
posèrent  aux  Perses  une  résistance  énergi 
supériorité  du  nombre,  dans  une  batailli 
Marsyas  où  ils  perdirent  dix  mille  homme 
quitter  TAsie.  Un  renfort  de  Milésiens  les 
nouveau  combat  où  ils  furent  plus  malb 
succès  d'une  embuscade  où  ils  tuèrent  le 
fit  que  retarder  leur  soumission.  En  môm 
assiégée  par  terre  et  par  mer.  Les  Ioniens 
en  rase  campagne  contre  Tarmée  entier 
augmentée  des  Egyptiens  et  des  Kilikiens  q 
mettre  Kypros;  mais  ils  pouvaient  espér< 
mer,  quoique  la  flotte  phénicienne  fût  de 
dis  que  les  Ioniens  n'en  avaient  que  3b0.  £ 
au  Panionion,  on  décida  qu'on  laisserait 
remparts  et  que  toutes  les  forces  de  la  coi 
concentrées  sur  la  flotte,  qui  se  réunit  à 
il  n'y  avait  pas  d'unité  dans  le  commande 
lingent  avait  son  chef.  Dionysios  de  Phoka 
ses  collègues  la  nécessité  d'une  forte  dise 
du  commandement  suprême,  et  pendant  fa 
d'exercer  aux  manœuvres  les  rameurs  et  1 
liguèrent  de  ces  durs  travaux  :  «  Pourquo 
à  ce  Phokaien,  qui  n'a  amené  que  trois  vai 
sous  les  Perses  ne  serait  pas  plus  in  toléra 
d'obéir,  dressèrent  des  tentes  sur  le  rivag 
l'ombre.  Les  anciens  tyrans  des  villes,  no 
Samos,  fils  de  Syloson,  leur  promettaie 
grand  roi  s'ils  voulaient  se  soumettre  et  L 
châtiment  terrible  s'ils  persévéraient  dan 
de  la  bataille,  tous  les  vaisseaux  Samîens 
glèrent  vers  le  large.  Les  Lesbieus  et  be 
niens  suivirent  cet  exemple.  Les  cent  vais 
tèrent  presque  seuls  le  poids  de  la  lutte 
désemparés  et  durent  céder  à  la  supéi 
Dionysios    de  Pbokaia  combattit  jusqu*ai 


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852  PRISE   DE  MILET. 

quand  tout  fut  perdu,  il  se  dirigea  vers  la  Phénicie,  coula  des 
bâtiments  marchands  et,  chargé  de  leurs  dépouilles,  fit  voile 
vers  la  Sicile.  De  là,  il  faisait  une  guerre  de  pirates  contre  les 
Tyrrhènes  et  les  Carthaginois,  en  s'abstenant  de  nuire  aux 
Grecs. 

Prise  de  Milet.  —  Après  la  défaite  de  la  flotte  ionienne^ 
les  Perses  assiégèrent  Milet  par  terre  et  par  mer.  Ils  battirent 
cette  place  avec  toutes  sortes  de  machines  de  guerre,  et  ayant 
poussé  des  mines  sous  ses  murs^  ils  la  prirent  d'assaut,  la 
sixième  année  de  la  révolte  d*Arislagoras  (495).  Des  défenseurs 
de  la  ville,  les  uns  furent  passés  au  fil  de  Tépée,  les  autres  fu- 
rent envoyés  à  Suse  avec  les  femmes  et  les  enfants,  et  Dareios 
les  fit  transporter  à  Ampè,  près  de  l'embouchure  du  Tigre.  Il 
ne  resta  plus  de  Milésiens  à  Milet;  les  Perses  se  réservèrent  la 
ville  et  la  plaine  et  donnèrent  les  montagnes  aux  Cariens  de 
Pédasa.  Le  temple  d'Apollon  Didymaien,  où  était  l'oracle  des 
Branchides,  fut  brûlé  et  ses  trésors  pillés.  Les  Athéniens  déplo- 
rèrent comme  un  malheur  public  la  ruine  de  leur  colonie  ;  le 
poète  Phrynichos  ayant  fttit  représenter  une  tragédie  sur  la 
prise  de  Milet,  fut  mis  à  l'amende,  pour  avoir  ravivé  un  sou- 
venir de  deuil,  souvenir  qui  ressemblait  à  un  remords,  car  TIo- 
nie  aurait  pu  être  sauvée  si  sa  métropole  avait  pris  la  direction 
de  la  guerre^  au  lieu  de  se  borner  à  l'incendie  de  Sardes,  bra- 
vade inutile,  qui  fut  cruellement  expiée  plus  tard  par  l'incen- 
die d'Athènes. 

Soumission  de  la  Grèce  d^Asie.  —  La  prise  de  Milet  en- 
traîna la  soumission  de  toute  la  Grèce  d'Asie  et  des  lies  voi- 
sines de  la  côte.  A  Ghios,  à  Lesbos,  à  Ténédos,  les  Perses  for- 
maient une  chaîne  d'un  rivage  à  l'autre,  balayant  le  territoire 
du  nord  au  sud  et  enveloppant  les  habitants  commie  dans  un 
filet.  Les  Samiens  seuls,  dont  les  vaisseaux  s'étaient  retirés  du 
combat  livré  àLadè,  ne  furent  pas  punis  de  leur  révolte  par  la 
ruine  de  leur  ville  et  l'incendie  de  leurs  temples.  L'île  fut  ren- 
due à  son  tyran  Aiakès,  fils  de  Syloson.  Ceux  des  Samiens  qui 
avaient  refusé  de  s'associer  à  la  trahison  de  leurs  chefs  émi- 
grèrent  vers  la  Sicile  et  occupèrent  Zanclè  ;  mais  ils  en  furent 
chassés  peu  de  temps  après  par  Anaxilaos,  tyran  de  Rhègion, 
qui  y  établit  des  Messéniens  et  donna  à  la  ville  le  nom  de  Mes- 


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SUITES  DE  LA  CONQUÊTE.  353 

sana  (Messine).  La  flotte  phénicienne  passa  des  côtes  d'Ionie  à 
celles  de  THellespont  et  de  la  Propontis.  Toutes  furent  prises  et 
saccagées.  Les  habitants  de  Byzance  et  de  Chalkédon  s'enfuirent 
à  Mesembria,  sur  le  PontEuxin,  sans  môme  attendre  l'arrivée 
des  Perses.  Les  Phéniciens  ayant  parcouru  le  pays  le  fer  et  la 
flamme  à  la  main,  se  tournèrent  du  côté  de  Procoûnèse  et 
d'Astakë  et  les  brûlèrent  aussi.  Ils  revinrent  ensuite  dans  la 
Ghersonnëse  pour  détruire  toutes  les  villes.  L'Athénien  Mil- 
tiade  n'échappa  à  la  captivité  qu'en  se  sauvant  à  Athènes,  où  il 
devait  s'illustrer  plus  tard  par  la  victoire  de  Marathon.  Les  gé- 
néraux perses  réalisèrent,  dit  Hérodote,  les  menaces  qu'ils 
avaient  faites  aux  Ioniens  avant  la  bataille  de  Ladè  :  «  A  me- 
sure qu'ils  se  rendaient  nialtres  des  villes,  ils  choisissaient  les 
plus  beaux  enfants  pour  en  faire  des  eunuques,  arrachaient  les 
filles  des  bras  de  leurs  mères  pour  les  envoyer  au  roi,  et  non 
contents  de  cela,  ils  mettaient  le  feu  aux  villes  et  aux  temples. 
Les  Ioniens  furent  ainsi  subjugués  pour  la  troisième  fois.  » 

Après  avoir  écrasé  la  révolte  avec  une  impitoyable  sévérité, 
le  gouvernement  perse  voulut  en  prévenir  le  retour  en  détrui- 
sant l'autonomie  communale.  «  Arlapherne,  gouverneur  de 
Sardes,  manda  les  députés  des  villes  ioniennes  et  les  obligea 
à  s'engager  par  un  traité  à  recourir  réciproquement  à  la  jus- 
lice  quand  ils  se  croiraient  lésés,  sans  user  désormais  de  voies 
de  fait.  11  tit  ensuite  mesurer  leurs  terres  par  parasanges,  me- 
sure usitée  en  Perse,  qui  équivaut  à  trente  stades,  et  régla  en 
conséquence  les  impôts  que  chaque  ville  devait  payer.  »  Par 
ce  tribut  qui  leur  était  imposé  et  dont  elles  ne  pouvaient  ni 
fixer  ni  discuter  le  chiffre,  les  villes  grecques  entraient  dans 
l'unité  de  l'empire.  En  les  privant  du  droit  de  paix  et  de  guerre, 
qui  est  l'attribut  principal  de  la  souveraineté  politique,  on  pou- 
vait sans  danglr  leur  laisser  une  sorte  d'indépendance  admi- 
nistrative :  Mardonios,  gendre  du  roi,  qui  succéda  à  Arla- 
pherne, déposa  les  tyrans  des  Ioniens  et  établit  dans  les  villes 
la  démocratie.  Hérodote  ne  nous  donne  pas  les  motifs  de 
cette  mesure  qui  paraît  surprenante  au  premier  abord.  Les 
Perses  s'étaient  peut-être  aperçus  que  les  intrigues  d'un  am- 
bitieux comme  Histiaios  ou  Aristogoras  étaient  plus  dange- 
reuses pour  leur  autorité  que  des  rivalités  dans  les  élections 

20. 

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354  PRIilMlÈRE  GUiîHRË  MÉOIQUE. 

municipales.  «  Cet  acte,  dit  Thirlwall,  démontre  plus  de  con- 
naissance des  hommes,  des  vues  plus  larges,  des  principes 
plus  équitables  qu'on  n'aurait  pu  les  attendre  d'une  cour  bar- 
bare et  despotique.  C'est  une  mesure  qui  fait  honneur  à  l'in- 
telligence de  Mardonios  ou  de  Dareios.  »  Avec  nos  idées  mo- 
dernes, la  condition  des  cités  grecques  sous  la  domination  des 
Perses  peut  sembler  préférable  aux  discordes  civiles  et  à  l'hos- 
tilité réciproque  des  cités  autonomes  ;  mais  l'énergie  intellec- 
tuelle s'éteignit  avec  l'activité  sociale;  toute  initiative  disparut 
avec  les  agitations  de  la  vie  politique,  et  cette  brillante  civili- 
sation de  la  Grèce  d'Asie,  qui  avait  grandi  si  vite  et  s'était  élevée 
si  haut  dans  la  période  précédente,  s'évanouit  eu  môme  temps 
que  la  liberté. 

II.  —  Résistance  des  Grecs  d'Europe, 

PREMIÈRE    GUERRE  MÉDIQUE. 

Expédition  de  Mardonios.  —  Le  roi  demande  aux  cités  grecques  la 
terre  et  l'eau.  —  Expédition  de  Datis  et  d'Artapherne  ;  ruine  d'Éré- 
trie.  —  Miltiade;  préparatifs  des  Athéniens;  secours  demandés  aux 
Spartiates.  —  Secours  envoyés  aux  Athéniens  par  Platée.  —  Bataille 
de  Marathon.  —  Trahison  déjouée.  —  Honneurs  rendus  aux  morts, 
aux  héros  et  aux  Dieux.  —  Procès  et  mort  de  Miltiade. 

Expédition  de  Mardonios.  ~  Dareios,  qui  n'avait  pas 
oublié  son  vœu  de  venger  l'incendie  de  Sardes,  pouvait  désor- 
mais employer  toutes  les  forces  de  son  empire  à  la  conquête 
de  la  Grèce  d'Europe.  Une  armée  nombreuse,  commandée  par 
Mardonios,  traversa  l'Hellespont  avec  ordre  de  s'emparer 
d'Athènes  et  d'Érétrie,  en  môme  temps  qu'une  flotte  considé- 
rable suivait  la  côte.  L'armée  de  terre  traversa  la  Thrace,  déjà 
soumise  par  Mégabaze  et  qui  semble  n'avoir  pas  pris,  part  à  la 
révolte  ionienne.  La  flotte  se  dirigea  d'abord  vers  l'île  de 
Thasos,  qui  tirait  un  grand  profit  de  ses  mines  d'or  et  de  celles 
de  Scaplè-Hylè  sur  la  côte  voisine.  Ces  mines,  découvertes  autre- 
fois par  les  Phéniciens,  fournissaient  un  revenu  de  deux  à  trois 
cents  talents.  Les  Thasiens  se  soumirent  sans  résistance  à  la 
flotte  des  Perses,  pendant  que  Mardonios  subjuguait  ce  qui  res- 


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MEURTRE  DES  ENVOYÉS  DU  BOL  355 

tait  encore  de  tribus  indépendantes  en  Macédoine.  Mais  en  dou- 
blant le  mont  Athos,  la  flotte  fut  assaillie  par  une  effroyable 
tempête  qui  détruisit  trois  cents  vaisseaux;  vingt  mille  hommes 
furent  noyés  ou  broyés  contre  les  rochersr  En  même  temps, 
l'armée  de  terre,  attaquée  la  nuit  par  les  ThracesBryges,  perdit 
beaucoup  de  monde,  et  Mardonios  lui-même  fut  blessé.  Il  put 
tirer  vengeance  de  cette  agression  en  soumettant  les  Bryges, 
mais  ses  deux  armées  étaient  trop  affaiblies  pour  aller  plus 
loin  :  il  fallut  retourner  en  Asie. 

Le  roi  demande  aux  Grecs  la  terre  et  Tean.  —  Ces  dé- 
sastres ne  changèrent  pas  la  détermination  de  Dareios  ;  pen- 
dant qu'il  préparait  de  nouveaux  armements,  il  envoya  des 
hérauts  dans  toutes  les  parties  de  la  Grèce  pour  demander  la 
terre  et  Teau.  La  terreur  qu'inspiraient  les  Perses  depuis  la 
récente  conquête  de  l'Ionie,  fit  accueillir  cette  demande  par 
plusieurs  peuples  du  continent  qu'Hérodote  ne  désigne  pas, 
probablement  les  Thessaliens  et  les  Thébains,  et  par  tous  les 
habitants  des  îles,  même  les  Aiginètes,  qui  avaient,  à  cette 
époque,  la  plus  puissante  marine  de  la  Grèce.  Mais  à  Athènes 
et  à  Sparte,  les  envoyés  du  roi  de  Perse  furent  mis  à  mort. 
Selon  Pausanias,  les  Athéniens  avaient  été  poussés  à  cette  vio- 
lation du  droit  des  gens  par  Miltiada.  Les  Lakédaimoniens, 
joignant  la  raillerie  à  la  violence,  jetèrent  les  ambassadeurs 
dans  un  puits,  en  leur  disant  qu'ils  y  trouveraient  la  terre  et 
Teau.  Un  pareil  acte,  dont  les  Spartiates  se  repentirent  plus 
tard,  les  mettait,  à  l'égard  du  roi  des  Perses,  dans  le  même 
état  d'hostilité  implacable  qu'Athènes  et  Érétrie.  Les  Athéniens 
portèrent  plainte  à  Sparte  contre  les  Aiginètes  pour  avoir  donné 
la  terre  et  l'eau,  les  accusant  d'avoir  agi  ainsi  par  inimitié 
contre  Athènes,  pour  envahir  l'Attique  avec  l'aide  des  Perses, 
et  représentant  celte  conduite  comme  une  trahison  envers  la 
Grèce.  On  voit  se  produire  alors  pour  la  première  fois  l'idée 
d'une  nation  hellénique,  et,  en  même  temps,  la  suzeraineté  de 
Sparte  est  reconnue  par  les  Athéniens,  qui,  plus  tard,  devaient 
la  lui  disputer.  Les  Spartiates  forcèrent  les  Aiginètes  à  livrer 
dix  de  leurs  citoyens  comme  otages  aux  Athéniens.  11  en  ré- 
sulta une  suite  d'hostilités  entre  Athènes  et  Aigine,  pendant  que 
les  Perses  préparaient  une  expédition  contre  la  Grèce  d'Europe 


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356  RUINE  D'ÉRÉTRIE. 

Expédition  de  Datii  dt  d*At*taphefne .  —  Httiiie  â'ÉSré- 
trie.  —  Celle  expédilion  fui  conduite  par  le  mède  Datis  et  par 
Arlaphetne,  neveu  de  Dareios  et  fils  d'Artapherne,  satrape  de 
Lydie.  Une  flotte  de  600  trirèmes  avec  des  vaisseaux  de  trans- 
port pour  les  chevaux,  embarqua  sur  les  côtes  de  Kilikie  une 
armée  de  il 0,000  hommes,  fil  voile  de  là  vers  l'Ionie,  et,  pour 
n'avoir  pas  à  doubler  le  mont  Atlios,  qui  avait  été  si  funeste  h 
la  flotte  de  Mardonios,  prit  à  travers  les  lies  par  la  mer  Ica- 
rienne.  Il  fallait  d'abord  punir  Naxos  de  FalTront  infligé  à  la 
flotte  perse  conduite  par  Aristagoras.  Les  Naxiens  s'enfuirent 
dans  les  montagnes.  Les  Perses  réduisirent  en  esclavage  tous 
ceux  qui  leur  tombèrent  entre  les  mains  et  mirent  le  feu  à  la 
ville  et  aux  temples.  Les  Dèliens  s'étaient  réfugiés  à  Ténos  ; 
Datis  leur  fit  dire  qu'il  avait  ordre  de  respecter  l'tle  sainte  où 
étaient  nés  Apollon  et  Artémis.  Il  est  probable  qu'il  agit  ainsi 
par  égard  pour  les  Ioniens  qui  étaient  dans  son  armée.  Il  pour- 
suivit sa  course  sans  résistance  à  travers  les  îles,  demandant 
à  chacune  des  renforts  et  prenant  les  enfants  comme  otages. 
Il  aborda  enfin  à  Garystos,  sur  la  pointe  septentrionale  de  Tile 
d'Euboia.  Les  Carystiens,  refusant  de  marcher  contre  leurs 
frères  d'Érétrie  et  d'Athènes,  leur  territoire  fut  ravagé  et  ils 
furent  obligés  de  se  soumettre.  Les  quatre  mille  Athéniens  ré- 
cemment établis  sur  les  terres  des  Hippobotes  de  Chalkis  se 
disposaient  à  secourir  les  Érétriens,  niais  ceux-ci  étaient  di- 
visés et  irrésolus  ;  les  uns  voulaient  se  retirer  dans  les  monta- 
gnes, les  autres,  ne  considérant  que  leur  avantage  particulier 
et  les  récompenses  qu'ils  espéraient  des  Perses,  se  préparaient 
à  trahir  la  patrie.  Les  Athéniens,  avertis  de  ces  dispositions  par 
un  citoyen  de  la  ville,  se  retirèrent  à  Oropos.  Érétrie  essaya  de 
se  défendre,  mais,  au  bout  de  six  jours,  deux  des  principaux 
citoyens  la  livrèrent  à  l'ennemi.  Les  Perses  la  pillèrent,  mirent 
le  feu  aux  temples  pour  venger  l'incendie  de  Sardes,  et  rédui- 
sirent le»  habitants  en  esclavage,  selon  les  ordres  de  Dareios. 
Ensuite  ils  remirent  à  la  voile.  Le  vieux  tyran  Hippias,  qui  les 
accompagnait,  les  fit  débarquer  à  Marathon,  le  lie^de  l'Atlique 
le  plus  commode  pour  la  cavalerie. 

MUtiade.  —  Préparatifs  des  Athéniens,  secours  de- 
mandés anx  Spartiates.  —  A  la  nouvelle  de  ce  débarque- 


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PRÉPARATIFS  DES  ATHÉNIENS.  357 

ment,  les  Alhénieas  armèrent  tous  les  citoyens  en  état  de  servir, 
et  ceux  des  esclaves  qui  se  montrèrent  disposés  à  gagner  la 
liberté  par  leur  courage.  L*armée  athénienne  était  commandée 
par  dix  généraux,  élus  pour  Tannée,  un  par  tribu,  à  la  tète  des* 
quels  était  le  polémarque  ou  ministre  de  la  guerre,  dont  la 
voix  assurait  Tunité  des  résolutions.  Parmi  les  généraux  était 
Miltiade  ;  à  son  retour  de  la  Chersonnèse  de  Thrace,  il  avait 
été  mis  en  accusation  pour  y  avoir  exercé  la  tyrannie.  Mais  on 
se  rappela  que,  dans  Texpédition  de  Dareios  contre  les  Scythes, 
il  avait  proposé  de  détruire  le  pont  de  Flstros.  De  plus,  pendant 
la  révolte  de  Tlonie,  il  avait  chassé  les  Pélasges  et  la  garnison 
persane  des  lies  d'Imbros  et  de  Lemnos.  Enfin,  il  était  parti- 
culièrement détesté  des  f  erses:  le  peuple  l'acquitta  et  fit  preuve 
de  sagesse  en  le  mettant  au  nombre  des  généraux,  car  nul 
ne  connaissait  mieux  que  lui  l'ennemi  qu'on  avait  à  combattre. 
Avant  de  sortir  de  la  ville,  les  généraux  envoyèrent  à  Sparte  le 
coureur  Pheidippidès  ;  il  y  arriva  le   lendemain,  ayant  fait 
242  kilomètres  en  48  heures.  «  Lakédaimoniens,  dit-il,  les  Athé- 
niens vous  prient  de  les  secourir  et  de  ne  pas  permettre  qu'une 
des  villes  les  plus  anciennes  de  la  Grèce  soit  réduite  en  escla- 
vage par  les  barbares.  >>  Ils  promirent  un  secours  ;  mais  une 
loi  ou  un  ancien  usage  leur  défendait  de  se  mettre  en  marche 
avant  la  pleine  lune,  et  on  n'était  qu'au  neuvième  jour  du  mois. 
Quand  cette  réponse  fut  rapportée  à  Athènes,  il  y  eut  une  dis- 
cussion entre  les  généraux  :  cinq  d'entre  eux  voulaient  attendre 
les  secours  promis  par  les  Spartiates.  Miltiade  et  les  quatre 
autres  voulaient  une  action  immédiate,  pour  profiler  de  l'en- 
thousiasme du  peuple,  et  surtout  pour  se  mettre  en  garde 
contre  les  trahisons,  les  intrigues  des  partisans  d'Hippias  et 
Tor  des  Perses.  La  décision  dépendait  du  vote  de  Callimachos, 
le  polémarque;  frappé  de  la  force  des  arguments  de  Miltiade, 
il  vota  pour  la  bataille,  et  elle  fut  décidée.  Aristide,  un  des  dix 
généraux,  engagea  ses  collègues  à  céder  à  Miltiade  leur  tour 
de  commandement  ;  mais  il  voulut  attendre  que  son  tour  fût 
venu. 

Secours  envoyés  aux  Athéniens  par  les  Platalens.  — 
La  plaine  de  Marathon,  longue  de  deux  lieues  et  demie,  large 
d'une  demi-lieue,  est  resserrée  entre  la  mer  et  la  chaîne  du 


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358  BATAILLE   DE   MARATHON 

Pentélique,  et  bornée  à  ses  deux  extrémités  par  des  marais. 
En  face  des  barbares  qu'Hippias  avait  fait  ranger  le  long  du 
rivage,  les  Athéniens  se  postèrent  dans  un  champ  consacré  à 
Héraclès,  aux  pieds  de  Tamphithéâtre  de  montagnes  qui  borde 
la  plaine.  Pendant  qu'ils  étaient  là  en  ordre  de  bataille,  il 
virent  venir  à  eux  un  renfort  d'environ  mille  soldats.  La  petite 
ville  de  Platée,  qu'ils  avaient  délivrée  de  la  suzeraineté  de 
Thèbes,  envoyait  spontanément  à  leur  secours  toutes  les  forces 
dont  elle  disposait.  C'était  bien  peu  de  chose  devant  Tinnom- 
brable  armée  qu'on  avait  à  combattre,  mais  l'eifet  moral  fut 
immense:  on  n'était  pas  abandonné  de  tout  le  monde, on  avait 
des  amis  qui  venaient,  sans  être  appelés,  partager  le  péril. 
Athènes  n'oublia  jamais  ce  secours  inattendu;  dans  les  prières 
publiques,  le  nom  des  Plataiens  fut  toujours  associé  à  celui  des 
Athéniens.  Tous  les  récits  portent  l'armée  athénienne  à  dix 
mille  hoplites,  mais  on  ne  sait  pas  si  les  Plataiens  sont  com- 
pris dans  ce  chiffre.  Le  nombre  des  barbares  n'est  pas  donné 
par  Hérodote  ;  les  historiens  postérieurs  l'ont  sans  doute  exa- 
géré. Tout  ce  qu'on  peut  dire,  c'est  qu'ils  étaient  beaucoup 
plus  nombreux  que  les  Grecs.  Miltiade  développa  sa  petite 
armée  sur  un  front  égal  à  celui  de  l'ennemi  en  donnant  peu  de 
profondeur  au  centre.  L'aile  droite  était  commandée,  suivant 
l'usage, parle  polémarque  Callimachos;  les  Plataiens  furent 
placés  à  l'aile  gauche.  Selon  Cornélius  Népos,  Miltiade  avait  fait 
abattre  des  arbres  pour  gêner  les  manœuvres  de  la  cavalerie 
des  Perses.  Les  présages  étant  favorables,  les  Grecs  entonnè- 
rent le  Paian,  ou  hymne  à  Apollon,  qui  était  leur  chant  de 
guerre,  et  la  bataille  commença. 

Bataille  de  Marathon.  —  «  Un  intervalle  de  huit  stades 
séparait  les  deux  armées.  Au  premier  signal,  les  Athéniens 
franchirent  en  courant  cet  espace.  Les  Perses  les  voyant  ac- 
courir se  disposaient  à  les  recevoir;  mais  remarquant  que, 
malgré  leur  petit  nombre  et  l'absence  de  cavaliers  et  de  gens 
de  traits,  ils  pressaient  leur  marche,  ils  les  prirent  pour  des 
insensés  qui  courent  à  une  mort  certaine.  Les  barbares  s'en 
faisaient  cette  idée  ;  mais  les  Athéniens  les  ayant  joints,  leurs 
rangs  serrés,  firent  des  actions  mémorables.  Ce  sont,  autant 
que  nous  avons  pu   le  savoir,  les  premiers  de  tous  les  Grecs 


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BATAILLK   DE   MAHATMON.  3o0 

qui  aient  élé  à  Tennemi  en  courant,  qui  aient  envisagé  sans 
effroi  rhabillement  des  Mèdes,  et  qui  aient  soutenu  la  vue  de 
leurs  soldats,  quoique  jusqu'alors  le  seul  nom  des  Mèdes  eût 
inspiré  de  la  terreur  aux  Grecs.  Après  un  combat  long  et  opi- 
niâtre, les  Perses  et  les  Sakas,  qui  composaient  le  centre  de 
l'armée  ennemie,  enfoncèrent  celui  des  Athéniens,  et,  profi- 
lant de  leur  avantage,  poursuivirent  les  vaincus  du  côté  des 
terres.  Cependant  les  Athéniens  et  les  Plataiens  remportèrent 
la  victoire  aux  deux  ailes,  mais  laissant  fuir  les  barbares,  ils 
réunirent  en  un  seul  corps  l'une  et  l'autre  aile,  attaquèrent  les 
Perses  et  les  Sakas  qui  avaient  rompu  le  centre  de  leur  armée 
et  les  battirent.  Les  Perses  ayant  pris  la  fuite,  les  Athéniens 
les  poursuivirent,  tuant  et  taillant  en  pièces  tous  ceux  qu'ils 
rencontraient,  jusqu'à  ce  qu'étant  arrivés  aux  bords  de  la  mer 
ils  demandèrent  du  feu  et  s'emparèrent  de  quelques  vaisseaux. 
Il  périt  à  la  journée  de  Marathon  environ  6,400  hommes  du 
côté  des  barbares  et  192  de  celui  des  Athéniens.  Le  polémar- 
que  Galli machos  fut  tué  à  cette  .bataille,  après  avoir  fait  des 
prodiges  de  valeur  :  Stésilaos,  fils  de  Thrasylaos,  un  des  gé- 
néraux, y  périt  aussi;  Kynègeiros,  fils  d'Euphorion,  ayant  saisi 
un  vaisseau  par  la  partie  élevée  de  la  poupe,  eut  la  main  coupée 
d'un  coup  de  hache.  »  Ce  Kynègeiros  était  frère  d'Aischyle,  le 
grand  poète  tragique,  qui  fut  lui-même  un  des  combattants  de 
Marathon.  L'épitaphe  d'Aischyle  ne  parle  pas  de  ses  tragédies, 
mais  rappelle  son  rôle  de  patriote  et  de  soldat  :  «  S'il  fut  brave, 
la  plaine  de  Marathon  peut  le  dire,  et  le  Mède  à  l'épaisse  cheve- 
lure le  sait  bien.  » 

Trahison  déjouée.  —  «  Ce  fut  ainsi,  continue  Hérodote, 
que  les  Athéniens  s'emparèrent  de  six  vaisseaux  ennemis.  Les 
barbares  se  retirèrent  avec  le  reste  de  leur  flotte,  sans  revirer 
de  bord;  et  ayant  repris]  les  captifs  d'Érétrie  dans  l'île  d'Ai- 
gilia  où  ils  les  avaient  laissés,  ils  doublèrent  le  cap  Sounion, 
dans  le  dessein  d'arriver  avant  eux.  On  prétend  à  Athènes 
qu'ils  conçurent  ce  projet  par  l'artifice  des  Alcmaionides  qui, 
selon  les  conventions  faites  avec  eux,  leur  montrèrent  un  bou- 
clier. »  Hérodote  trouve  peu  vraisemblable  cette  accusation 
contre  les  Alcmaionides,  qui  n'avaient  pas  à  se  plaindre  du 
peuple  et  n'auraient  rien  gagné  au  rétablissement  de  la  tyran- 


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HONNEURS  RENDUS  AUX  MORTS. 

)endant,  ajoule-l-il,  un  bouclier  servit  de  signal,  c'est 
l'on  ne  peut  révoquer  en  doute  ;  mais  par  qui  ce  signal 
iné?  je  n'en  puis  rien  dire  de  certain.  »  On  ne  sut 
lels  étaient  ceux  qui  avaient  essayé  de  livrer  leur  pa- 
ant  que  d'autres  mouraient  pour  la  défendre.  Heu- 
it  la  trahison  fut  déjouée  :  ce  signal  adressé  aux 
liltiade  et  les  Athéniens  l'avaient  aperçu  aussi.  De 

à  Athènes,  il  y  avait  sept  heures  de  marche  dansles 
3s.  L'armée,  quoique  épuisée  de  fatigue,  ne  perdit 
istant  et  arriva  le  môme  jour.  Sans  cette  marche 
L  victoire  de  Marathon  aurait  été  inutile  :  Athènes  qui 
lus  de  défenseurs,  serait  tombée  au  pouvoir  de  l'en- 
and'Hes  Perses  arrivèrent  devant  le  port  de  Phalère, 
,  campée  à  Kynosarge,  l'armée  qui  les  avait  battus  le 
L  flotte  reprit  la  route  d'Asie,  emmenant  les  Érétriens 
1  esclavage.  On  les  présenta  à  Dareios.  Bien  qu'il  eût 
rrité  contre  eux  à  cause  de  l'incendie  de  Sardes, 
les  vit  en  son  pouvoir,  il  ne  leur  fit  pas  de  mal.  11  les 
ms  un  endroit  appelé  Ardénica,  à  24  kilomètres  de 
il  y  avait  un  puits  qui  fournissait  du  bitume,  du  sel  et 
\,  Us  y  étaient  encore  du  temps  d'Hérodote,  et  ils 
onservé  l'usage  de  la  langue  grecque. 
ars  rendus  aux  mortf,  aux  héros  et  aux 
—  Qeux  mille  Lakédaimoniens  arrivèrent  après  la 
le.  La  dislance  de  Sparte  à  Athènes  est  de  140  kilo- 
Is  l'avaient  franchio  en  trois  jours  de  marche.  On 
it  que  la  bataille  était  livrée,  mais  ils  voulurent  voir 
les  Perses,  qui  avaient  conquis  l'Egypte  et  l'Asie,  et 
ent  d^étre  vaincus  pour  la  première  fois.  Ils  se  trans- 

à  Marathon  pour  les  contempler,  félicitèrent  les 
i  de  leur  victoire  et  retournèrent  à  Sparte.  Les  der- 
oirs  furent  rendus  aux  morts;  on  éleva  un  tombeau 
mp  de  bataille,  et  les  noms  de  deux  cent  quatre-vingt- 
léniens  qui  avaient  été  tués   furent  inscrits  sur  dix 

une  pour  chaque  tribu.  Il  existe  encore  aujourd'hui, 
res  du  rivage,  un  tumulus  que  le  colonel  Leake  croit 
nbeau  des  vainqueurs  de  Marathon.  Un  second  tom- 
élevé  pour  les  Plataiens,  un  troisième  pour  les  escla- 


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PROCÈS  ET  MORT  DE  MILTIADE. 

esclaves.  Plularque,  dans  la  vie  de  Kimon,  raconte  qu 
ayant  demandé  aux  Athéniens  le  droit  de  porter  une 
d'olivier,  un  citoyen  lui  répondit  :  «  Quand  tu  re] 
seul  les  Barbares,  tu  seras  seul  récompensé.  » 

Il  semblait  qu'un  tel  succès  n'avait  pu  être  obt 
une  assistance  divine.  Le  coureur  Pheidippidès  rac 
lorsqu'il  traversait  l'Arcadie  pour  aller  demande] 
cours  aux  Spartiates,  le  Dieu  Pan  lui  était  apparu, 
lant  par  son  nom,  lui  avait  dit  :  «  Pourquoi  les  Ath 
me  rendent-ils  aucun  culte?  Je  suis  plein  de  bienveilh 
eux,  je  leur  ai  déjà  été  utile  en  plusieurs  occasions, 
aiderai  encore.  »  Pan  ayant  tenu  sa  promesse,  on  lui 
une  grotte  sur  le  rocher  de  l'Acropole,  et  on  l'honor 
sacriflces  annuels  et  des  courses  aux  flambeaux.  On 
certain  que  Thèseus  avait  énergiquement  aidé  les  i 
dans  la  bataille  ;  on  avait  vu  aussi  un  guerrier  en 
rustique  frappant  les  Perses  avec  le  soc  d'une  chi 
demanda  à  Delphes  quel  était  ce  héros  inconnu  qu'( 
pu  retrouver,  et  la  Pythie  ordonna  d'adorer  le  héros 
Au  temps  de  Pausanias,  le  champ  de  bataille  de 
retentissait  encore,  la  nuit,  du  bruit  des  armes  et  du 
ment  des  chevaux. 

Procès  et  mort  de  Miltiade.  —  11  aurait  ét^ 
pour  Miltiade  de  mourir  comme  le  polémarque  Cal 
dans  l'ivresse  de  la  victoire.  Profilant  de  l'influe 
avait  sur  le  peuple,  il  demanda  soixante-dix  vaiss 
troupes  et  de  l'argent,  sans  faire  connaître  ses  p 
en  promettant  seulement  d'enrichir  sa  patrie.  L'a 
ayant  été  accordé,  il  fit  voile  vers  l'île  de  Paros,  sou 
que  les  Pariens  avaient  fourni  une  trirème  aux  Pen 
son  motif  réel,  dit  Hérodote,  était  sa  haine  contre  u 
de  Paros  qui  avait  voulu  le  rendre  odieux  au  gêné 
Hy darnes.  Les  Pariens,  auxquels  il  demandait  cen 
se  mirent  en  défense  et  il  les  assiégea  inutilement 
vingt-six  jours.  Ils  racontèrent  depuis  que,  sur  l'a 
prêtresse  qui  promettait  de  lui  livrer  la  ville,  il  ava- 
la nuit  dans  l'enceinte  sacrée  des  divinités  souterrain 
là,  pris  d'une  terreur  religieuse,  il  s'était  mis  à  fuii 
L.  M.  ->  HisT.  DES  Grecs. 


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PRÉPARATIFS  DMNVASlOiN.  363 

expédition.  Ces  ordres  ayanl  été  portés  de  tous  les  côtés,  TAsie 
entière  fut  dans  une  agitation  continuelle  pendant  trois  ans. 
Mais  tandis  qu'on  était  occupé  de  ces  préparatifs,  on  apprit  la 
quatrième  année  que  les  Égyptiens,  qui  ataient  été  subjugués 
par  Cambysès,  venaient  de  se  révolter.  Dareios  s'apprêtait  à 
marcher  contre  eux  lorsqu'il  mourut  en  485,  après  un  règne  de 
trente-six  ans.  Xerxès,  qui  lui  succéda,  n'était  pas  l'aîné  de  ses 
enfants,  mais  il  avait  pour  mère  Atossa,  fille  de  Kyros  et  se 
rattachait  ainsi  au  fondateur  de  la  monarchie  dès  Perses.  Le 
premier  soin  de  Xerxès  fut  de  ramener  l'Egypte  sous  son  obéis- 
sance, mais  il  parait  qu'il  n'avait  pas  hérité  de  l'animosité  de 
son  père  contre  les  Grecs,  et  peut-être  les  aurait-il  laissés 
tranquilles,  sans  les  conseils  de  Mardonios  qui  avait  un  échec 
à  réparer  et  qui  espérait  obtenir  le  gouvernement  de  la  Grèce. 
A  ces  conseils  s'ajoutaient  les  instances  non  moins  intéressées 
de  quelques  Grecs  exilés  ou  mécontents,  les  Aleuades  de  Thés- 
salie,  les  Pisislratides  d'Athènes,  Dèmaratos  de  Sparte,  récem- 
ment dépouillé  du  trône  par  les  intrigues  de  son  collègue 
Cléoménès,  qui  l'avait  fait  déclarer  illégitime  en  corrompant 
la  Pythie.  Les  Pisistratides  avaient  avec  eux  un  charlatan 
littéraire  nommé  Onomacritos.  Il  avait  travaillé  dans  sa  jeu- 
nesse à  la  récension  des  poèmes  d'Homère;  cela  lui  avait 
donné  une  grande  habitude  de  l'hexamètre  et  il  s'en  servait  pour 
fabriquer  des  prophéties.  11  en  avait  pour  tous  les  goûts  :  il  fit 
vok  à  Xerxès  qu'il  était  écrit  dans  les  destinées  qu'un  Perse 
passerait  sur  un  pont  d'Asie  en  Europe.  Ces  obsessions  conti- 
nuelles troublaient  l'esprit  du  roi  ;  il  ne  pouvait  plus  penser 
qu'à  cette  expédition  en  Grèce,  et  malgré  les  sages  conseils  de 
son  oncle  Artaban  qui  essayait  de  l'en  détourner,  il  en  rêvait 
la  nuit.  Hérodote  rapporte  un  de  ces  rêves,  qui  rappelle  le 
songe  trompeur  envoyé  parZeus  à  Agamemnon,au  deuxième 
livre*  de  Y  Iliade. 

Canal  du  mont  Athos  ;  ponts  sar  rHellespont.  —  Le  roi 
voulait  conduire  lui-même  l'expédition  ;  on  mit  quatre  ans  à  la 
préparer.  Pendant  qu'on  demandait  à  chaque  province  tout  ce 
qu'elle  pouvait  fournir  de  soldats  et  qu'on  établissait  des  dépôts 
de  vivres  sur  le  chemin  à  parcourir,  on  perçait  l'isthme  du  . 
mont  Athos  pour  éviter  les  tempêtes  qui  avaient  détruit  la 


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DÉNOMBREMENT  DE  L'ARMÉE  PERSE.  367 

de  fouet.  Le  passage  dura  sept  jours  et  sept  nuits.  Dans  la 
grande  plaine  de  Doriscos,  sur  les  bords  de  FHebros,  on  essaya 
de  faire  le  dénombrement  des  troupes.  Hérodote  donne  le 
chiffre  incroyable  de  1,700,000  fantassins,  outre  80,000  cavaliers 
et  20,000  Arabes  et  Libyens  conduisant  les  chameaux  et  les 
chars.  Gtésias  s'en  tient  à  800,000  hommes.  La  flotte  compre- 
nait, selon  Hérodote,  1207  bâtiments  de  guerre,  dont  chacun 
portait,  outre  les  équipages  indigènes,  trente  soldats  perses, 
mèdes  ou  sakas.  La  flotte  et  Tarmée  reçurent  plus  tard,  en 
traversant  la  Thrace  et  les  lies,  un  renfort  qu'Hérodote  évalue 
à  300,000  hommes  d'infanterie  et  à  120  trirèmes  montées  par 
24,000  hommes.  «  Ce  nombre,  ajouté  à  cehii  des  troupes  asia- 
tiques, faisait  en  tout  2,641,610  hommes.  »  Il  ajoute  que  les 
valets  formaient  un  nombre  égal  à  celui  des  gens  de  guerre. 
Quant  aux  cuisiniers,  aux  femmes  qui  faisaient  le  pain,  aux 
esclaves  et  aux  bêtes  de  somme  qui  portaient  les  bagages,  il 
renonce  à  en  dire  le  nombre  et  s'étonne  avec  raison  qu'on  ait 
pu  nourrir  une  telle  multitude.  Heeren  suppose  qu'Hérodote 
a  copié  des  documents  officiels;  ce  n'est  pas  une  garantie 
d'exactitude,  car  ceux  qui  ont  fait  le  recensement  devaient 
grossir  les  chiffres  pour  flatter  la  vanité  du  grand  roi  ;  mais  en 
réduisant  ces  chiffres  de  moitié  uu  même  des  deux  tiers,  il 
est  certain  qu'on  n'avait  pas  vu  encore  et  qu'on  n'a  pas  vu 
depuis  une  si  prodigieuse  armée. 

La  variété  des  races,  des  costumes  et  des  armes  était  aussi 
étonnante  que  le  nombre.  Hérodote  énumère  et  dépeint  cin- 
quante-six nations  qui  servaient  dans  l'armée  de  terre,  à  pied 
ou  à  cheval  et  sur  la  flotte.  On  voyait  des  Sakas  armés  de 
haches,  des  Indiens  vêtus  d'étoffes  de  coton,  des  Assyriens 
coiffés  de  casques  d'airain,  couverts  de  cuirasses  delin,  armés 
de  massues  de  bois,  des  Ethiopiens  crépus  du  Haut  Nil,  cou- 
verts de  peaux  de  lions  et  de  léopards  et  teignant  leur  peau 
noire  moitié  en  blanc,  moitié  en  vermillon  ;  des  Éthiopiens  de 
Gédrosie  coiffés  d'une  tête  de  cheval  aux  oreilles  droites,  à  la 
crinière  pendante  ;  des  Thraces  avec  de  larges  robes  bariolées 
et  des  bonnets  en  peaux  de  renards  ;  des  Chalybes  dont  les 
casques  étaient  ornés  de  cornes  de  bœufs;  des  cavaliers 
Sargates,  armés  d'une  corde  qu'ils  lançaient  sur  les  hommes 


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CONGRES  DE  LU8THME. 

aussitôt  par  ordre  de  Xerxës,qui  comptait  sur  l'effroi  ( 
rapports  ne  pouvaient  manquer  de  produire.  Il  envoyt 
der  la  terre  et  l'eau  dans  toutes  les  villes,  excepté  à  A 
à  Sparte,  où  lô  droit  sacré  des  ambassadeurs  avait 
une  première  fois.  Les  Spartiates,  il  est  vrai,  en  avai( 
remords;  quelques  présages  funestes  leur  faisaient  ci 
colère  de  Talthybios,  héraut  d*Agamemnon.  Ils  demar 
quelques  citoyens  voulaient  mourir  pour  Sparte.  Deun 
estimés  et  des  plus  riches  de  la  ville,  Spertbiès  et  Bo 
friront  spontanément  et  furent  envoyés  à  Suse.  Ils  fure 
à  Taudience  du  roi,  mais  les  gardes  leur  ordonnère 
prosterner  selon  la  coutume.  Us  déclarèrent  qu'ils  n'er 
rien,  quand  même  on  les  pousserait  de  force  contre  te 
n'était  pas  dans  leurs  mœurs  d'adorer  un  homme  < 
n'était  pas  pour  cela  qu'ils  étaient  venus;  puis,  s'ad 
Xerxès  :  «  Hoi  des  Mèdes,  dirent  ils,  les  Lakédaimoni 
ont  envoyés  pour  expier  par  notre  mort  celle  dei 
sadeurs  qui  ont  péri  à  Sparte.  »  Le  roi  répondit  :  «  1 
daimoniens  ont  violé  le  droit  des  gens  ;  je  ne  les  imil 
ce  serait  les  justifier.  »  Il  les  renvoya,  et  ils  revinreni 
Tallhybios  leur  tint  compte  de  l'intention  et  sa  colère 
Congrès  à  l'isthme  de  Gorinthe.  Réponses  i 
géantes  de  la  Pythie.  —  Les  Spartiates  et  les  A 
se  sentant  particulièrement  menacés,  auraient  voulu 
une  résistance  générale.  Ils  convoquèrent  un  congrès  j 
de  Gorinthe.  On  déclara  qu'il  fallait  suspendre  les 
particulières;  les  Athéniens  se  réconcilièrent  avec  les  I 
On  consulta,  comme  toujours,  l'oracle  de  Delphes  ; 
réponses  pleines  d'épouvante  décourageaient  les  effoi 
vaientde  prétexte  à  toutes  les  défaillances.  AuxArgéie 
Cretois,  la  Pythie  conseilla  la  neutralité,  aux  Athénieni 
«  Malheureux,  quittez  vos  demeures,  fuyez  aux  extn 
la  terre.  Athènes  sera  détruite  par  les  flammes  ;  le  terri 
monté  sur  un  char  syrien,  ruinera  votre  ville  et  bien 
Les  Dieux  suent  et  tremblent  d'effroi,  des  gouttes  de  s 
lent  de  leurs  temples.  Sortez  de  mon  sanctuaire,  sul 
maux.  A  D'après  l'avis  d'un  citoyen  de  Delphes,  le 
d'Athènes  prirent  des  rameaux  d'olivier,  et  allèrent  uni 

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OFFRES  DE  GÉLON  DE  SYRACUSE.  371 

étaient  alors  très  affaiblis  par  suite  de  leurs  luttes  contre  Sparte. 
Tout  récemment  encore,  le  roi  Cléoménès  avait  brûlé  dans  un 
bois  sacré  environ  six  mille  hommes  de  Tarmée  d*Argos, 
l'élite  de  la  nation.  Humiliés  par  les  Spartiates,  les  Argéiens 
refusèrent  de  prendre  part  à  une  guerre  dont  le  succès  devait 
augmenter  la  gloire  de  leurs  rivaux.  C'est  à  une  cause  sem- 
blable qu'il  faut  attribuer  l'abstention  des  Achaiens  :  môme  en 
présence  des  barbares,  ils  ne  pouvaient  oublier  leurs  vieilles 
rancunes  contre  les  Doriens.  La  jalousie  de  Kerkyra  contre 
Corinthe,  sa  métropole,  priva  les  Grecs  de  l'appui  d'une  flotte 
qui  était  la  plus  importante  après  celle  d'Athènes.  Sollicités  de 
se  joindre  aux  Grecs,  les  Kerkyraiens  promirent  leur  concours 
et  équipèrent  soixante  vaisseaux,  mais  l'événement  prouva 
qu'ils  voulaient  attendre  l'issue  de  la  lutte  pour  prendre  le  parti 
du  vainqueur.  Ils  dirent  plus  tard  que  les  vents  contraires  les 
avaient  empêchés  de  doubler  le  cap  Malée,  mais  ils  n'avaient  pas 
essayé  de  transporter  leur  escadre  par  le  Diolcos. 

Il  ne  semble  pas  qu'aucune  demande  de  secours  ait  été 
adressée  aux  villes  de  la  Grande-Grèce,  pas  môme  à  Tarente, 
colonie  de  Sparte.  Les  députés  se  rendirent  directement  en 
Sicile  où  presque  toutes  les  cités  étaient  alors  gouvernées  par 
des  tyrans.  Le  plus  puissant  était  Gélon  de  Syracuse.  Par  une 
suite  de  ruses  et  de  perfidies,  il  s'était  emparé  du  pouvoir, 
d'abord  à  Gela,  puis  à  Syracuse  et,  contrairement  à  la  plupart 
des  tyrans  grecs,  il  favorisait  l'aristocratie  aux  dépens  du  peu- 
ple. Inaugurant  une  politique  de  centralisation  qui  fut  reprise 
plus  tard  par  Denys,  il  voulut  faire  de  Syracuse  la  capitale  de 
toute  la  Sicile  ;  il  l'agrandit  en  y  transportant  les  habitants  de 
Gamarine  et  une  partie  de  ceux  de  Gela  et  de  Mégare 
Hyblaienne.  Aucun  État  de  la  Grèce  ne  pouvait  mettre  sur 
pied  une  force  égale  à  la  sienne.  Quand  les  Grecs  lui  deman- 
dèrent son  asistance  contre  les  barbares,  il  crut  voir  s'ouvrir 
pour  son  ambition  une  nouvelle  et  immense  carrière.  Il  fit 
des  offres  magnifiques  :  deux  cents  trirèmes,  vingt  mille 
hoplites,  deux  mille  hommes  de  cavalerie  pesante  et  autant  de 
cavalerie  légère,  avec  un  pareil  nombre  d'archers  et  de  fron- 
deurs. Il  promettait  en  outre  d'approvisionner  l'armée  entière 
pendant  toute  la  campagne.  Seulement,  il  mettait  pour  condi- 


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lNDON  de  la  THESSAIIE. 

lommandement  des  troupes  alliées,  ce  qui 
re  de  la  Grèce.  Un  des  ambassadeurs,  le 
répondit  :  «  Celte  demande  indignerait 
ion.  »  Gélon  se  rabattit  sur  le  comman- 
ce  fut  alors  l'Athénien  qui  protesta  :  «  La 
ioldats,  et  non  de  généraux.  »  Les  ambas- 
t;  s'ils  avaient  cédé,  Gélon  n'aurait  pas  pu 
»  car  en  même  temps  que  Xerxès  pénétrait 
aginois  attaquèrent  la  Sicile,  et  il  est  pro- 
ble  invasion  avait  été  concertée  d'avance. 
ae  de  défense  abandonnée  sans  combat. 
L  fédéral  était  pour  les  Grecs,  devant  Ten- 
danger  bien  plus  grand  que  leur  infé- 
Slls  avaient  été  unis,  ils  auraient  pu 
e  défense  et  profiler  de  leurs  excellentes 
lies.  La  Grèce  d'Europe,  bien  plus  facile  à 
èce  d'Asie,  est  une  forteresse  à  triple  en- 
la  Thessalie,  l'Olympe  et  la  chaîne  Gam- 
in premier  rempart,  ouvert  seulement  par 
smpé.  Les  Thessaliens,  qui  désapprouvaient 
Lleuades,  étaient  disposés  à  défendre  ce 
e  pouvaient  le  défendre  seuls  contre  l'in- 
de  Xerxès.  Ils  envoyèrent  des  députés  au 
,  pour  demander  que  le  reste  de  la  Grèce 
iforts,  sans  lesquels  ils  seraient  obligés  de 
.  Un  corps  de  10,000  hommes  fut  envoyé 
la  conduite  du  Spartiate  Ëuainetos  et  de 
>cle.  Mais  quelques  jours  après  l'arrivée  de 
e  défilé  de  Tempe,  le  roi  de  Macédoine 
i  Perses,  conseilla  aux  généraux  de  se  re- 
!  écrasés  par  l'armée  ennemie.  «  Les  Grecs 
l,  dit  Hérodote,  parce  que  le  roi  de  Macé- 
lit  bien  intentionné,  et  aussi  parce  qu'il  y 
âge  par  le  pays  des  Perrhaibes,  du  côté  de 
,  et  ce  fut  en  effet  par  cet  endroit  que  pé- 
[erxès.  Les  Thessaliens,  abandonnés  par 
ncèrent  plus  à  prendre  le  parti  des  Perses, 
môme  avec  zèle  et  rendirent  au  roi  des 


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L'ARTÉMISION  ET  LES  THERMOPYLES.  373 

services  importants.  »  C'est  ainsi  que  la  prenriière  des  trois 
enceintes  qui  protégeaient  la  Grèce  fut  abandonnée  sans  com- 
bat ;  il  n'en  restait  plus  que  deux,  le  défilé  des  Thermopyles  et 
l'isthme  de  Corinthe. 

Détroit  d'Artémision  et  défilé  des  Tliermopyles.  —  Le 
congrès  décida  à  la  pluralité  des  voix  de  garder  le  passage  des 
Thermopyles.  C'était  un  défilé  resserré  entre  le  golfe  Maliaque 
et  le  mont  Cita  et  séparant  la  Thessalie  de  la  Locris  et  de  la 
Phokis.  Son  nom  lui  venait  de  quelques  sources  d'eau  chaude. 
II  est  devenu  aujourd'hui,  par  suite  des  alluvions  du  Sperchios, 
une  plaine  d'une  demi-lieue  de  largeur,  mais  autrefois  il  n'y 
avait  de  passage  que  pour  une  voiture  entre  la  mer  et  les  es- 
carpements inaccessibles  de  l'Oita.  La  mer  voisine  resserrée 
entre  la  terre  ferme  et  Tile  d'Euboia  forme  un  double  détroit, 
l'Artémision  et  l'Euripe.  La  flotte  grecque  postée  dans  l'Artemi- 
sion  pouvait  communiquer  avec  l'armée  de  terre  postée  aux 
Thermopyles.  Les    deux    armées    partirent  simultanément, 
pendant  que  les  troupes  de  Xerxès  arrivaient  en  Piérie  et  sa 
flolte  dans  le  golfe  de  Therma.  Mais  c'était  précisément  à  cette 
époque  qu'on  allait  célébrer  les  jeux  Olympiques  et  la  fête 
d'Apollon  Carnéen  qui  n'était  guerre  moins  solennelle  pour  les 
Spartiates.  Ils  se  contentèrent  d'envoyer  un  petit  détachement 
de  troupes  sous  la  conduite  d'un  de  leurs  rois,  Léonidas,  pour 
rassurer  les  Grecs  du  Nord  et  les  empêcher  de  passer  à  l'en- 
nemi. Cette  armée  se  composait  de  trois  cents  Spartiates,  ac- 
compagnés d'un  corps  d'Hilotes  dont  on  ne  sait  pas  le  nombre, 
de  cinq  cents  hommes  de  Tégée,  autant  de  Mantinée,  cent 
vingt  d'Orchomène  arcadienne,  mille  des  autres  contrées  de 
l'Arcadie,  quatre  cents  de  Corinthe,  deux  cents  de  Phlious, 
et  quatre-vingts  de  Mykènes.  Les  trois  cents  Spartiates  for- 
maient un  corps  d'élite,  choisi  parmi  les  citoyens  qui  avaient 
des  enfants,  pour  ne  pas  laisser  éteindre  les  familles.  Sept 
cents  Thespiens  vinrent  se  joindre  à  Léonidas  dès  qu'il  entra 
en  Boiûtie.  Les  Thébains,  gouvernés  par  une  oligarchie  très 
favorable  aux  Perses,  ne  purent  cependant  refuser  leur  con- 
cours; ils  fournirent  quatre  cents  hommes.  Les  Phokiens, 
d'autant  plus  ardents  pour  la  cause  nationale  que  leurs  enne- 
mis, les  Thessaliens,  s'étaient  soumis  aux  Perses,  donnèrent 


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MBATS  SUR  L'ARTÉMISION. 

is,  quoiqu'ils  eussent  donné  la  terre 
nt  à  Léonidas  tout  ce  qu'ils  purent 

t  dans  rArtémision.  —  La  flotte 
cent  soixante  et  onze  trirèmes.  Les 
li  cent  vingt-sept,  montées  en  partie 
Plataiens,  dont  le  zèle  et  le  courage 
'ience  sur  mer.  Les  Corinthiens  en 
iégariens  vingt,  les  Ghalkidiens  en 
Llhéniens  leur  avaient  prêtées.  Les 
iix-huit,  les  Sikyoniens  douze,  les 
Cpidauriens  huit,  les  Érétriens  sept, 
Styréens  deux,  et  les  Keiens  deux, 
e  rames  furent  fournis  par  les  Lo- 
)ar  les  Keiens.  Il  semblait  naturel  de 
le  la  flotte  aux  Athéniens,  qui  avaient 
,  mais  les  alliés  s'y  opposèrent,  dé- 
snt  s'ils  n'avaient  pas  à  leur  tôte  un 
landement  fut  donc  confié  au  Spar- 
\  loue  avec  raison  les  Athéniens  d'à- 
m  promettre  la  cause  commune. 

en  observation  près  de  la  petite  île 
par  six  vaisseaux  perses*  Les  Grecs 
de  cet  échec  qu'ils  abandonnèrent 
ît  à  Chalkis.  Heureusement  pour  eux 
aide  :  un  terrible  ouragan  qui  dura 
3ents  vaisseaux  ennemis  contre  les 
le  qui  avait  conseillé  aux  Grecs  d'in- 
t  pas  trompé,  et  ils  eurent  raison  de 
nouvelle  du  désastre  de  l'ennemi,  ils 
5t  surprirent  quinze  vaisseaux  égarés 
ind  ils  virent  que  cette  flotte,  malgré 
ien  plus  nombreuse  que  la  leur,  ils 
fois    se   retirer  sans   combat.    Les 

d'attendre  quelque  temps  encore, 
;  mis  en  sûreté  leurs  femmes,  leurs 

Hérodote  ajoute  que  pour  appuyer 
is  donnèrent  trente  talents  (  i  60,000 fr.) 


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COMBAT  DES  THERMOPYLES.  375 

à  Thémistocle,  chef  des  Athéniens.  Sur  cette  somme,  Thémis- 
tocle  donna  cinq  talents  à  Eurybiade  qui  commandait  en  chef, 
trois  au  Corinthien  Adimante,  qui  semblait  le  plus  pressé  de 
partir,  et  garda  le  reste  pour  lui.  La  flotte  grecque  resta  sur 
les  côtes  d'Ëuboia.  Les  Perses,  voulant  lui  couper  la  retraite, 
détachèrent  une  escadre  de  deux  cents  vaisseaux  qui  devait 
tourner  Tile  et  prendre  les  Grecs  à  dos  par  le  midi  de  TEu- 
ripe,  tandis  que  le  gros  de  la  flotte  les  attaquerait  au  nord. 
Des  combats  se  livrèrent  sans  résultat  décisif,  mais  pour  la 
seconde  fois  les  éléments  vinrent  au  secours  des  Grecs.  Les 
flots  et  les  vents  poussèrent  les  vaisseaux  perses  contre  la  côte 
des  Aphètes.  L'escadre  qui  tournait  TEuboia  fut  brisée  par  la 
tempête  contre  les  écueils.  En  même  temps  il  vint  aux  Grecs 
un  renfort  de  cinquante-trois  vaisseaux  athéniens.  La  lutte 
recommença  avec  de  grandes  pertes  de  part  et  d'autre.  Les 
vaisseaux  Kilikiens  furent  détruits,  mais  la  moitié  de  ceux  des 
Grecs  étaient  désemparés.  Bientôt,  on  apprit  que  le  passage 
des  Thermopyles  avait  été  forcé  par  les  Barbares  ;  il  n'y  avait 
plus  d'intérêt  à  défendre  le  détroit  :  la  flotte  grecque  se  retira 
jusqu'à  Salamine.  Pendant  les  derniers  combats,  un  vaisseau 
de  Lemnos  avait  passé  du  côté  des  Grecs.  Thémistocle,  avant 
de  quitter  l'Artémision,  grava  sur  des  rochers  un  appel  aux 
Ioniens,  pour  les  détacher  du  parti  des  Barbares;  mais  celte 
invitation  eut  peu  de  succès. 

Combat  des  Thermopyles.  —  L'armée  de  terre  en  arri- 
vant aux  Thermopyles  fut  prise  du  même  effroi  qui  avait  saisi 
l'armée  navale  à  son  arrivée  dans  l'Artémision.  «  Les  Pélo- 
ponnesiens  étaient  d'avis  de  retourner  dans  le  Péloponnèse 
pour  garder  le  passage  de  l'Isthme.  Mais  Léonidas,  voyant  que 
les  Phokiens  en  étaient  indignés,  opina  qu'il  fallait  rester,  et 
il  fut  résolu  de  dépêcher  des  courriers  à  toutes  les  villes  al- 
liées, parce  qu'on  était  en  trop  petit  nombre  pour  repousser 
l'ennemi.  On  releva  une  muraille  que  les  Phokiens  avaient 
bâtie  dans  la  partie  la  plus  étroite  du  défilé,  pour  se  défendre 
contre  les  Thessaliens,  et  qui  était  tombée  en  ruines.  Léoni- 
das, ayant  appris  qu'il  y  avait  dans  la  montagne  un  sentier 
pour  tourner  le  défilé  des  Thermopyles,  en  confia  la  défense 
aux  Phokiens.  Xerxès,  ayant  traversé  la  Thessalie,  campa  à 


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MORT  DE  LÉONIDAS.  377 

déclara  qu'il  n'était  ni  de  son  honneur  ni  de  celui  des  Spar- 
tiates d'abandonner  le  poste  qu'ils  étaient  chargés  de  garder. 
D'ailleurs  la  Pythie  avait  déclaré,  au  commencement  de  la 
guerre,  qu'il  fallait  que  Sparte  fût  détruite,  ou  qu'il  pérît  un 
roi  de  la  race  d'Héraclès.  Voulant  conserver  le  reste  des  trou- 
pes à  la  Grèce,  il  leur  ordonna  de  partir,  à  l'exception  des 
Thébains,  dont  la  fidélité  lui  était  suspecte,  et  qu'il  retint 
malgré  eux.  Les  sept  cents  Thespiens,  commandés  par  Démo- 
phile,  déclarèrent  qu'ils  voulaient  partager  le  sort  des  Spar- 
tiates. 

Mort  de  Léonidas.  —  Xerxès  se  mit  en  marche  le  matin, 
comme  le  lui  avait  recommandé  Ephialtès.  «  Léonidas  et  les 
Grecs,  dit  Hérodote,  marchant  comme  à  une  mort  certaine, 
s'avancèrent  beaucoup  plus  loin  qu'ils  n'avaient  fait  dans  le 
commencement,  et  jusqu'à  l'endroit  le  plus  large  du  défilé  ; 
car  jusqu'alors  le  mur  leur  avait  tenu  lieu  de  défense.  Les 
jours  précédents,  ils  n'avaient  pas  passé  les  lieux  étroits, 
mais   ce  jour-là  le    combat  s'engagea  sur  un  espace  plus 
étendu,  et  il  y  périt  un  grand  nombre  de  Barbares.  Leurs  offi- 
ciers, postés  derrière  les  rangs,  le  fouet  à  la  main,  frappaient 
les  soldats  et  les  animaient  à  marcher.  11  en  tombait  beaucoup 
dans  la  mer,  il  en  périssait  un  plus  grand  nombre  sous  les 
pieds  de  leurs  propres  troupes,  mais  on  n'y  avait  aucun  égard. 
Les  Grecs,  s'attendant  à  une  mort  certaine  de  la  part  de  ceux 
qui  avaient  fait  le  tour  de  la  montagne,  se  battaient  en  gens 
désespérés  qui  ne  font  aucun  cas  de  la  vie.  Déjà  la  plupart 
avaient  leurs  piques  brisées  et  ne  se  servaient  plus  que  de 
leurs  épées. 

«  Léonidas  fut  tué  dans  celte  action  après  s'être  conduit  en 
homme  de  cœur,  et  avec  lui  d'autres  Spartiates  illustres  ;  je  me 
suis  informé  de  leurs  noms,  et  même  de  ceux  des  trois  cents. 
Deux  frères  de  Xerxès  périrent  les  armes  à  la  main.  Le  combat 
fut  très  violent  autour  du  corps  de  Léonidas  ;  les  Perses  et  les 
Lakédaimoniens  se  repoussèrent  alternativement,  mais  enfin, 
les  Grecs  ayant  repoussé  quatre  fois  l'ennemi,  enlevèrent  le 
corps  de  leur  roi,  et  ils  conservèrent  l'avantage  jusqu'à  l'arri- 
vée des  troupes  conduites  par  Ephialtès.  Alors  la  victoire  chan- 
gea de  parti.  Les  Grecs  regagnèrent  l'endroit  le  plus  étroit  du 


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378  DÉFENSE  DU  TEMPLE  Dl 

puis,  ayant  passé  la  muraille,  et  leurs  rangs  toujours 
ils  se  tinrent  tous,  excepté  les  Thébains,  sur  la  colline 
k  rentrée  du  passage,  et  où  se  voit  aujourd'hui  le  lion 
e  élevé  en  l'honneur  de  Léonidas.  Ceux  à  qui  il  restait 
des  épées  s'en  servirent  pour  se  défendre,  les  autres 
[irent  avec  les  mains  et  avec  les  dents.  Mais  les  Barba- 
attaquant,  les  uns  de  front,  après  avoir  renversé  la 
B,  les  autres  de  toutes  parts,  les  environnèrent  et  les 
3nt  sous  un  monceau  de  traits.  » 
lole  cite  quelques  faits  particuliers  :  le  devin  Mégis tias 
anie  refuse  d'abandonner  les  Spartiates,  quoiqu'il  fût 
arles  entrailles  des  victimes  du  sort  qui  les  attendait; 
îs  répond  à  un  paysan  qui  disait  que  les  flèches  des 
s  obscurciraient  le  soleil  :  «  Tant  mieux,  nous  com- 
s  à  l'ombre.  »  Eurytos,  malade  d'une  ophtalmie,  se  fait 
e  sur  le  champ  de  bataille  pour  mourir  les  armes  à  la 
andis  qu'un  autre,  également  malade,  étant  resté  à 
personne  ne  voulut  lui  parler  ni  lui  donner  du  feu  :  il 
ja  faute  en  se  faisant  tuer  à  la  bataille  de  Platée.  Aux 
3  moments  de  la  lutte,  pendant  que  les  Spartiates  et 
>piens  se  rassemblaient  sur  la  colline,  les  Thébains  se 
nt  aux  Perses.  Xerxès  passa  au  milieu  des  morts,  et  fit 
în  croix  le  corps  de  Léonidas  après  lui  avoir  fait  couper 
les  Perses  ne  traitaient  ainsi  que  les  révoltés.  Plus 
5  Grecs  enterrèrent  leurs  morts  à  la  place  où  ils 
ombés;  une  inscription  rappela  que  quatre  mille  Pélo- 
ens  avaient  combattu  contre  trois  millions  de  Barba- 
is on  ne  peut  admettre  l'exactitude  de  ces  chiffres.  Une 
iscription  se  rapportÉÛI  spécialement  aux  Spartiates  : 
it,  va  dire  à  Sparte  que  nous  sommes  morts  en  obéis- 
es  lois.  » 

Barbares  repousses  du  temple  de  Delphes.  — 
lur  était  sauvé,  mais  l'indépendance  de  la  Grèce  sem- 
trdue.  Les  Barbares  ayant  forcé  la  seconde  ligne  de 
»  tonte  la  région  en  dehors  de  l'Isthme  tombait  en  leur 
.  Les  Thessaliens,  qui  s'étaient  soumis  à  Xerxès,  saisi- 
;casion  de  se  venger  de  leurs  ennemis  les  Phokiens; 
demandèrent  cinquante  talents  pour  détourner  l'inva- 


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INCENDIE  DE   PLATÉE   ET  DE  THESPIES.  379 

sion  de  la  Phokis;  «  il  ne  tiendrait  qu'à  nous,  répondirent  les 
Phokiens,  de  nous  soumettre  comme  vous  l*avez  fait,  mais 
jamais  nous  ne  trahirons  la  Grèce.  »  Les  Barbares  traversè- 
rent la  Doris  sans  y  faire  de  dégâts,  car  les  Doriens  s'étaient 
soumis,  puis,  guidés  par  les  Thessaliens,  ils  parcoururent 
toute  la  Phokis,  coupant  les  arbres  et  mettant  le  feu  à  toutes 
les  villes  le  long  du  Kephisos.  Le  temple  d'Apollon  à  Abai, 
célèbre  par  son  oracle  et  ses  trésors,  fut  pillé  et  brûlé.  Xerxès, 
enti  é  en  Boiotie,  détacha  jxn  corps  de  troupes  pour  piller  aussi 
le  temple  de  Delphes,  car  on  lui  avait  souvent  parlé  des  ri- 
chesses qu'il  contenait,  et  surtout  des  offrandes  de  Groïsos. 
Les  Delphiens  demandèrent  à  l'oracle  s'il  fallait  enfouir  les 
trésors  sacrés  ou  les  emporter  ailleurs.  Le  Dieu  répondit  qu'il 
protégerait  lui-môme  son  temple;  alors  ils  ne  s'occupèrent 
que  de  leur  propre  sûreté  ;  ils  envoyèrent  leurs  femmes  et 
leurs  enfants  au  delà  du  golfe  de  Gorinthe,  en  Achaïe,  et  se 
réfugièrent  sur  les  sommets  du  Parnasse  ou  dans  la  Locris.  Il 
ne  resta  dans  la  ville  que  l'interprète  des  prophéties  avec 
soixante  hommes.  Mais  quand  les' Barbares  venus  pour  piller 
le  temple  furent  arrivés  à  l'enceinte  d'Athènè  Pronaia,  la 
foudre  tomba  sur  eux  et  des  quartiers  de  rochers  détachés  de 
la  montagne  roulèrent  avec  un  bruit  horrible  et  en  écrasèrent 
un  grand  nombre.  Quelques-uns  seulement  s'échappèrent  et 
s'enfuirent  en  Boiotie  où  ils  racontèrent  qu'outre  ce  prodige 
ils  avaient  vu  deux  guerriers  d'une  taille  merveilleuse  qui  les 
poursuivaient  et  les  massacraient.  Les  rochers  tombés  du  Par- 
nasse furent  laissés  à  la  place  où  ils  s'étaient  arrêtés,  en  témoi- 
gnage de  la  vengeance  des  Dieux. 

Incendie  de  Platée  et  de  Thespies.  Embarquement 
des  Athéniens.  —  La  flotte  grecque  avait  quitté  la  station 
d'Artémision  à  la  nouvelle  du  désastre  des  Thermopyles.  A 
Chalkis,  les  Plataiens  débarquèrent  pour  aller  mettre  en  sû- 
reté leurs  femmes  et  leurs  enfants  ;  la  flotte  n'attendit  pas 
leur  retour  et  continua  sa  route.  On  avait  cru  qu'une  armée 
serait  envoyée  du  Péloponnèse  en  Boiotie  pour  protéger  l'At- 
tique,  mais  on  apprit  que  les  Péloponnesiens  travaillaient  à 
fermer  risthme  par  une  muraille,  sans  s'inquiéter  du  reste  de 
la  Grèce.  La  flotte  s'arrêta  à  Salamine  à  la  prière  des  Athé- 


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EMBARQUEMENT  DES  AT 

n  voulaient  faire  sortir  leurs  familles  de  TAttique. 
[  était  maintenant  en  Boiotie;  toutes  les  villes  de 
trée  s'étaient  soumises  aux  Perses,  à  rexception  de 
de  Thespies,  qui  furent  réduits  en  cendres.  Ce  qui 
habitants  à  Thespies  s'étaient  réfugiés  dans  le  Pélo- 
Les  Barbares  approchaient  d'Athènes,  dont  la  ruine 
ritable.  Pendant  que  la  flotte  se  tenait  à  l'ancre  de- 
imine,  les  Athéniens  descendirent  dans  leur  ville  ;  il 
a  que  tout  citoyen  en  âge  de  porter  les  armes  s'ém- 
it, et  que  chacun  aurait  à  pourvoir  à  la  sûreté  de  sa 
it  de  ses  enfants.  Mais  le  peuple  ne  pouvait  se  résou- 
itter  les  temples  des  Dieux  et  les  tombeaux  des  ancô- 
imistocle  fit  intervenir  un  miracle  :  la  prêtresse  an- 
le  le  dragon  sacré,  gardien  de  la  citadelle,  avait  disparu 
is  gâteaux  de  miel  destinés  à  sa  nourriture  étaient 
la  Déesse  donnait  ainsi  le  signal  du  départ.  La  plu- 
jyèrent  leurs  familles  à  Troîzen,  quelques-uns  à  Ai- 
Salamine.  «  Les  Troizeniens,  dit  Plutarque,  ordonné- 
ces  émigrés  seraient  nourris  aux  dépens  du  public; 
issignèrent  à  chacun  deux  oboles  par  jour,  permirent 
ints  de  cueillir  des  fruits  dans  tous  les  jardins,  et 
:  les  maîtres  chargés  de  les  instruire.  Les  Athéniens 
t  pas  alors  de  trésor  public,  mais  l'Areiopage  fit  dis- 
ux  soldats  dix  drachmes  par  jour,  et  fut  par  cette  dis- 
\  le  véritable  auteur  de  l'armement  des  galères.  Mais, 
Clidème,  on  dut  cet  argent  à  un  stratagème  de  Thé- 
.  Il  raconte  que,  lorsque  les  Athéniens  furent  descen- 
Mrée,  l'égide  de  la  statue  d'Athènè  se  trouva  perdue, 
mistocle,  fouillant  partout,  sous  prétexte  de  la  retrou- 
louvrit  beaucoup  d'argent  caché  dans  les  bagages,  et 
argent,  mis  en  commun,  procura  aux  soldats  les  pro- 
lécessaires.  » 

Lse  de  r Acropole.  Incendie  d^ Athènes.  —  Xerxès 
Athènes,  quatre  mois  après  avoir  quitté  l'Asie.  La 
it  déserte,  mais  une  petite  troupe  désespérée  s'était 
lée  dans  l'Acropole,  décidée  à  s'y  défendre.  C'étaient, 
i  trésoriers  du  temple,  quelques  malheureux,  trop 
i  trop  pauvres  pour  courir  les  chances  de  l'exil,  ou  qui 


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INCENDIE  D'ATnÈNES.  381 

aimaient  mieux  mourir  avec  la  pairie  que  de  vivre  sans  elle. 
L'éloquence  de  Thémistocle  ne  les  avait  pas  convaincus,  ni  la 
disparition  du  serpent  sacré,  et  ils  avaient  barricadé  avec  du 
bois  les  portes  et  les  avenues  de  la  citadelle  ;  c'était  là,  sui- 
vant eux,  et  non  sur  les  vaisseaux,  qu'était  la  muraille  de  bois, 
Tasile  imprenable  indiqué  par  la  Pythie. 

«  Les  Perses,  dit  Hérodote,  assirent  leur  camp  sur  la  colline 
qui  est  vis-à-vis  de  la  citadelle  et  que  les  Athéniens  appellent 
Areiopage,  et  firent  le  siège  de  cette  manière.  Ils  liraient  con- 
tre les  barricades  des  flèches  garnies  d'étoupes  auxquelles  ils 
avaient  mis  le  feu.  Les  assiégés,  quoique  réduits  à  la  dernière 
extrémité  et  trahis  par  leurs  barricades,  continuèrent  à  se  dé- 
fendre, et  ne  voulurent  pas  accepter  les  conditions  d'accom- 
modement que  leur  offraient  les  Pisistratides.  Ils  repoussèrent 
toujours  l'ennemi,  et  lorsqu'il  s'approcha  des  portes,  entre 
autres  moyens  de  défense,  ils  jetèrent  sur  lui  des  pierres  énor- 
mes. De  sorte  queXerxès,  ne  pouvant  les  forcer,  fut  longtemps 
ennbarrassé  sur  ce  qu'il  devait  faire.  Enfin,  au  milieu  de  ces 
difficultés,  les  Barbares  s'aperçurent  d'un  passage,  car  il  fal- 
lait, comme  l'avait  prédit  l'oracle,  que  les  Perses  se  rendissent 
maîtres  de  tout  ce  que  les  Athéniens  possédaient  sur  le  con- 
tinent. Sur  le  devant  de  l'Acropole,  derrière  les  portes  et  le 
chemin  par  où  on  y  monte,  est  un  lieu  escarpé  qui  n'était  pas 
gardé  ;  personne  ne  se  serait  jamais  attendu  qu'on  pût  y  gra- 
vir. Quelques  Barbares  le  firent  cependant,  près  de  la  chapelle 
d'Agraulos,  fille  de  Kekrops.  Lorsque  les  Athéniens  les  virent 
dans  la  citadelle,  les  uns  se  tuèrent  en  se  précipitant  du  haut 
des  murs,  les  autres  se  réfugièrent  dans  le  temple.  Ceux  des 
Perses  qui  étaient  montés  allèrent  d'abord  aux  portes,  et  les 
ayant  ouvertes  ils  tuèrent  les  suppliants  de  la  Déesse.  Quand 
ils  les  eurent  massacrés,  ils  pillèrent  le  temple  et  mirent  le 
feu  à  la  citadelle.  Lorsque  Xerxès  fut  entièrement  maître  d'A* 
ihènes,  il  dépêcha  à  Suse  un  courrier  à  cheval  pour  appren- 
dre à  Artaban  cet  heureux  succès.  » 

La  flotte  grecque  à  Salamine.  —  En  même  temps  uue 
l'armée  de  Xerxès  prenait  possession  de  l'Attique,  sa  flotte  arri- 
vait dans  la  baie  de  Phalère.  On  n*en  connaît  pas  exactement 
la  force,  mais,  selon  l'estimation  la  plus  modérée,  il  y  avait 


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L\  FLOTTE  GRECQUE  A  SALAMINE. 

lille  vaisseaux.  Les  pertes  subies  à  TArtémision  avaient 
tensées  par  des  renforts  venus  de  TEuboia  et  des 

La  flotte  grecque  rassemblée  à  Salamine  avait  aussi 
ques  renforts  ;  quatre  vaisseaux  de  Naxos  équipés  pour 
!  des  Barbares  allèrent  trouver  les  Grecs  sur  Tavis  de 
e  qui  commandait  une  trirème  et  qui  jouissait  d'une 
>nsidération  à  Naxos.  Il  vint  aussi  quelques  vaisseaux 
ite  rames  des  lies  de  Sériplios,  de  Siphnos  et  de  Mélos 
ient  pas  donné  la  terre  et  Teau  aux  Barbares.  Les  co- 
rinthiennes de  Leucas  et  d'Ambrakia  envoyèrent,  Tune 
seaux,  Tautre  sept.  A  l'ouest  de  l'Adriatique,  Crolon 
oya  aux  Grecs  un  vaisseau  commandé  par  Phayllos, 
été  trois  fois  vainqueur  aux  jeux  Pythiques,  et  qui 
^bablement  équipé  ce  vaisseau  à  ses  frais.  La  flotte 
encore  très  inférieure  en  nombre  à  celle  des  Perses, 
lit  à  trois  cent  quatre-vingts  vaisseaux,  dont  deux 
ient  été  fournis  par  les  Athéniens. 
1  de  guerre  sur  la  flotte  grecque.  —  Eurybiade  as- 
n  conseil  de  guerre  pour  déterminer  le  lieu  où  il  fal- 

bataille.  La  plupart  des  chefs  furent  d'avis  de  faire 
\  risthme  pour  se  mettre  au  besoin  en  communica- 
l'armée  de  terre.  Si  on  était  vaincu  à  Salamine,  on 
liégé  dans  cette  île  où  on  n'avait  pas  de  secours  à  es- 
idis  que  si  on  combattait  vers  l'Isthme,  chacun  pour- 
insporter  dans  son  pays.  Pendant  qu'on  délibérait,  on 
louvelle  de  la  prise  et  de  l'incendie  d'Athènes.  La 
ition  fut  générale  ;  plusieurs  des  capitaines  sortirent 
nment  du  conseil,  se  jetèrent  sur  leurs  vaisseaux,  firent 
ïs  voiles  dans  le  dessein  de  partir,  et  ceux  qui  étaient 

conseil  décrétèrent  qu'il  fallait  combattre  devant 
L'approche  de  la  nuit  les  obligea  à  remettre  le  départ 
lain  matin. 

nant  à  son  bord,  Thémistocle  rencontra  un  Athénien 
nèsiphile,  qui  lui  demanda  quel  avait  été  le  résultat 
ibération.  Thémistocle  lui  fait  connaître  la  décision 
l.  a  Si  on  lève  l'ancre,  répond  Mnésiphile,  si  on  quitte 
,  il  ne  se  donnera  pas  sur  mer  de  combat  pour  la 
ersonne  ne  retiendra  les  alliés,  Eurybiade  lui-môme 


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CONSEIL  DE  GUERRE  SUR  U  FLOTTE.  383 

î  le  pourra  pas;  ils  s'en  retourneront  chacun  dans  leurs  \il- 
8,  la  flotte  se  séparera,  et  la  Grèce  périra  faute  d'un  bon  avis. 
3tourne,  tâche  de  faire  casser  le  décret,  s'il  en  est  encore 
mps,  et  engage  par  tous  les  moyens  possibles  Eurybiade  à 
anger  de  sentiment  et  à  rester  ici.  »  Cet  avis  judicieux  d'un 
connu  allait  changer  la  destinée  de  la  Grèce.  Thémistocle, 
ns  rien  répondre,  court  au  vaisseau  d'Eurybîade,  lui  expose 
pinion  de  Mnèsiphile  comme  la  sienne  propre  et  obtient  à 
rce  d'insistance  que  le  conseil  soit  convoqué  de  nouveau 
indant  la  nuit.  Devant  les  généraux  assemblés,  Thémistocle 
garda  bien  de  parler  de  la  dispersion  de  la  flotte  si  on  quit- 
t  Salamine,  c'eût  été  suspecter  leur  fidélité  à  la  cause  com- 
une;  il  fit  valoir  d'autres  arguments  :  «  A  l'Isthme,  nous 
mbattrons  dans  une  mer  ouverte,  et  nos  vaisseaux  sont  plus 
irds  et  moins  nombreux  que  ceux  de  l'ennemi.  Môme  vain- 
eurs,  nous  aurons  perdu  Mégare,  Aigine  et  Salamine.  L'ar- 
ie  des  Barbares  suivra  leur  flotte,  et  nous  les  aurons  attirés 
us-mômes  dans  le  Péloponnèse.  Ici,  dans  un  détroit,  les  en- 
mis  perdent  l'avantage  du  nombre,  et  si  nous  sommes  vain- 
surs,  comme  un  oracle  nous  le  promet,  ils  s'enfuiront  en 
lordre,  sans  dépasser  l'Attique.  »  La  séance  fut  très  ora- 
ase;  la  plus  violente  opposition  venait  du  Corinthien  Adi- 
.nte,  qui  voulait  avant  tout  protéger  Corînthe  :  on  ne  devait 
j  s'occuper  d'Athènes,  puisqu'elle  était  détruite,  et  on  n'avait 
s  à  tenir  compte  de  l'opinion  d'un  homme  qui  n'avait  plus 
patrie.  «  Notre  patrie,  dit  Thémistocle,  elle  est  dans  nos 
IX  cents  vaisseaux.  Avec  cela,  nous  fondrons  où  nous  vou- 
as une  ville  qui  vaudra  bien  Corinthe.  Si  vous  nous  aban- 
mez,  nous  irons  avec  nos  femmes  et  nos  enfants  à  Siris,  en 
ie,  et  vous  verrez  ce  que  deviendra  votre  flotte  sans  le  con- 
];ent  athénien.  »  Devant  cette  menace,  Eurybiade  décida 
)n  resterait  à  Salamine.  Plutarque  raconte  qu'au  plus  fort 
la  discussion,  il  avait  levé  sa  canne  sur  Thémistocle,  et 
celui-ci,   sans   s'émouvoir,  lui  avait  dit  :  «  Frappe,  mais 
ate.  » 

n  délibérait  aussi  sur  la  flotte  des  Perses,  où  Xerxès  était 
jendu  avec  Mardonios  pour  prendre  l'avis  des  principaux 
Haines.  Les  rois  de  Sidon  et  de  Tyr,  confiants  dans  la  supé- 


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BATAILLE  DE  SALAMINE.  385 

tenlionné  pour  le  roi,  et  qui  préfère  le  succès  de  vos  armes  à 
celui  des  Grecs,  m'a  dépêché  vers  vous  à  leur  insu,  avec  or- 
dre de  vous  dire  que  les  Grecs  effrayés  délibèrent  s'ils  ne  pren- 
dront pas  la  fuite.  L'occasion  d'un  éclatant  succès  vous  est 
offerte,  ne  la  laissez  pas  échapper  par  négligence.  11  ne  sont 
pas  d'acord  entre  eux,  et  au  lieu  de  résister,  vous  verrez  les 
deux  partis  aux  prises  l'un  contre  l'autre  et  se  détruire  réci- 
proquement. >  Cet  avis  donné,  Sikinnos  se  retira.  Aussitôt  les 
Perses  firent  occuper  à  l'est  et  à  l'ouest  les  deux  issues  du 
détroit  qui  sépare  Salamine  de  l'Attique.  En  môme  temps  ils 
firent  passer  un  corps  de  troupes  dans  la  petite  lie  de  Psytta- 
lie  située  à  l'entrée  du  côté  oriental,  où  devait  se  livrer  la  ba- 
taille, pour  recueillir  leurs  blessés  et  tuer  ceux  des  Grecs  qui 
viendraient  s'y  réfugier.  Ces  dispositions  furent  prises  la  nuit, 
pendant  que  les  chefs  de  la  flotte  grecque  délibéraient  encore. 
Thémistocle  était  rentré  au  conseil  ;  un  homme  le  fit  appe- 
ler. C'était  Aristide,  son  ancien  rival,  qui  avait  été  banni  par 
une  sentence  d'ostrakisme,  quoiqu'il  fût,  dit  Hérodote,  un 
homme  de  bien  et  très  juste.  «  Thémistocle,  lui  dit-il,  re- 
mettons nos  querelles  à  un  autre  temps  et  disputons  à  qui 
servira  le  mieux  la  patrie.  11  n'est  plus  temps  de  discuter  si 
ou  quittera  ou  non  Salamine,  nous  sommes  cernés,  j'en  suis 
témoin  oculaire.  »  —  «  Je  le  sais,  dit  Thémistocle,  et  les 
Perses  n'ont  agi  qu'à  mon  instigation.  »  Aristide  introduit 
dans  le  conseil  dit  aux  capitaines  qu'il  arrive  d'Aigine,  qu'il  a 
eu  grand'peine  à  traverser  la  flotte  des  Perses,  et  leur  con- 
seille de  se  mettre  en  défense.  On  ne  voulait  pas  le  croire, 
mais  la  nouvelle  fut  confirmée  par  un  vaisseau  de  Téoos 
qui  avait  quitté  la  flotte  du  roi  pour  se  joindre  à  celle  des 
Grecs. 

Bataille  de  Salamine.  —  La  bataille  commença  aux  pre- 
mières lueurs  du  matin.  Un  trône  avait  été  dressé  pour  Xerxès 
sur  une  éminence  aux  pieds  du  mont  Aigaleos.  La  veille,  un  vais- 
seau grec  avait  été  chercher  les  statues  des  héros  Aiakides, 
protecteurs  d'Aigine  et  de  Salamine  ;  ce  fut  ce  vaisseau  qui,  à 
son  retour,  engagea  le  combat,  au  dire  des  Aiginètes  ;  selon 
les  Athéniens,  ce  fut  un  de  leurs  vaisseaux  commandé  par 
Ameinias,  frère  de  Kynègeiros  et  du  poète  Aischy le.  «  Les  Phé- 
L.  M.  —  HiST.  DU  Grecs.  23 

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BATAILLE  DE  SALAMINE. 

it  rangés  vis-à-vis  des  Athéniens,  à  Taile  qui  re- 
;  et  Toccident,  les  Ioniens  en  face  des  Lakédai- 
ile  opposée,  vers  Torient  et  le  Pirée.  La  flotte  des 
grande  partie  mise  en  pièces  et  détruite  par  les 
les  Aiginètes.  Les  Barbares,  combattant  avec 
ns  règle,  sans  jugement,  contre  des  troupes  qui 
vec  ordre  et  en  gardant  leurs  rangs,  se  compor- 
ant  beaucoup  mieux  qu'ils  ne  Tavaient  fait  de- 
et  se  surpassèrent  eux-mêmes,  chacun  faisant 
s  par  la  crainte  de  Xerxès,  dont  il  croyait  être 
ibignès,  fils  de  Dareios  et  frère  de  Xerxès,  gê- 
née navale,    périt  à  cette  bataille  ainsi  qu'un 
)  d'hommes  de  distinction,  tant  Perses  que  Mè- 
lliés.  La  perte  des  Grecs  ne  fut  pas  considérable, 
valent  nager,  ceux  qui  ne  périssaient  pas  de  la 
smis  quand  leur  vaisseau  était  détruit,  gagnaient 
nage.  Mais  la  plupart  des  Barbares  se  noyaient 
faute  de  savoir  nager.  Les  vaisseaux  qui  étaient 
ng  ayant  été  mis  en  fuite,  les  autres  furent  alors 
la  plupart.  Car  ceux  qui  étaient  derrière  le  pre- 
forçant  de  gagner  le  devant  afin  de  donner  au 
3  de  leur  valeur,  se  brisaient  contre  les  vaisseaux 
qui  fuyaient...  Dans  le  trouble  et  la  confusion 
ennemis,  les  Athéniens  détruisaient  les  vais- 
Paient.  Les  Barbares  mis  en  fuite  tâchaient  de 
l  de  Phalère,  sous  la  protection  de  Farmée  de 
Aiginètes  placés  dans  le  détroit  ne  maltraitaient 
[  qui  cherchaient  à  s'échapper.  En  même  temps, 
mblant  une  troupe  d'hoplites  Athéniens  sur  le 
mine,  les  fit  passer  dans  la  petite  ile  de  Psytta- 
d'élite  que  les  Perses  y  avaient  postés  avant  la 
cernés  et  massacrés  jusqu'au  dernier.  » 
ait  justifié  les  prévisions  de  Thémistocle:  dans 
i  mer  qu'il  avait  choisi  pour  livrer  bataille,  la 
aisseaux  n'était  qu'un  embarras  pour  l'ennemi, 
icîens,  dont  les  galères  avaient  souffert  du  choc 
oniennes,  allèrent  se  plaindre  a  Xerxès  de  ce 
it  la  trahison  des  Ioniens.  Mais  à  ce  moment 


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BATAILLE  DE  SALAM 

môme,Xerxè8  fut  témoin  d'un  exploit  a< 
de  Samolhrace,  qui  venait  de  coulei 
quand  il  fut  coulé  lui-môme  par  un 
Samothraces,  excellents  hommes  de  tri 
de  javelots  les  soldats  du  vaisseau  qui 
s'étant  jetés  dessus,  s'en  rendirent  r 
Ioniens  :  Xerxès  traita  les  Phéniciens  d( 
fît  couper  la  tête.  Hérodote  donne  un  a 
d'unité  de  la  llolte  perse,  composée  de 
autre  lien  que  l'obéissance  au  môme 
le  désordre  était  général,  Artémisia,  re 
poursuivie  par  Ameinias  d'Athènes,  i 
jour  entre  les  vaisseaux  perses,  coula  < 
roi  de  Calyndos.  L'Athénien,  croyant 
contre  les  Perses,  abandonna  sa  poursi 

Les  divisions  qui  s'étaient  produites 
la  bataille  ne  justifièrent  pas  les  espén 
l'action  fut  engagée.  Il  est  vrai  que  pli 
Athènes  que  l'amiral  des  Corinthiens 
vaisseaux  le  long  des  côtes  de  Salami 
et  n'était  revenu  qu'après  la  victoire 
soutenaient  qu'ils  s'étaient  signalés  dès 
le  reste  des  Grecs  leur  rendait  ce  tém( 
et  les  Athéniens,  qui  étaient  les  meillei 
avaient  un  intérêt  égal  dans  la  lutte,  et 
devint  une  émulation  salutaire  à  la  eau 
que  Polycritès  d'Aigine  attaquait  vigoui 
sidonien,  il  aperçut  le  vaisseau  amiral 
ironiquement  à  Thémistocle  si  les  Athé 
core  les  Aiginètes  de  favoriser  le  parti  c 
vaisseau  sidonien,  et  put  ainsi  rendre 
compatriotes  qui  avait  été  fait  prisonnie 

Fuite  de  Xerxôs.  —  Hérodote  ne  m 
respectives  des  deux  flottes.  Diodore  doi 
vires  pour  les  Perses  et  de  40  pour  les  i 
duré  toute  la  journée.  Xerxès  était  dé< 
il  ne  songeait  plus  qu'à  la  fuite,  et  crai 
la  rendissent  impossible  en  allant  se 


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FUITE  DE  XERXÈS. 

S,  qui  avait  conseillé  la  guerre,  s'aperçut  de  ces 
ns,  et  comme  il  en  redoutait  les  effets  pour  lui-môme, 
a  le  roi  à  ne  pas  s'occuper  de  la  perte  de  quelques 
;  si  les  Egyptiens,  les  Phéniciens,  les  Kypriotes  et 
BUS  avaient  mal  fait  leur  devoir,  la  faute  n'en  devait 
mputée  aux  Perses,  et  l'armée  de  terre  était  toujours 
\,  Le  but  principal  de  l^expédition  ayant  été  atteint 
se  d'Athènes,  le  roi  pouvait  retourner  en  Asie  avec  la 
ide  partie  de  l'armée.  Mardonios  s'offrait  à  choisir 
ommes  pour  achever  la  conquête  de  la  Grèce.  Cet 
ayé  par  Artémisia,  répondait  au  désir  de  Xerxès.  La 
tta  Phalère  pendant  la  nuit  et  fit  voile  vers  l'Helles- 
r  garder  les  ponts  par  lesquels  le  roi  devait  passer. 

jour*  parut,  les  Grecs,  s'apercevant  du  départ  de  la 
se,  voulurent  la  poursuivre.  Arrivés  à  Andros  sans 
ncontrée,  ils  tinrent  conseil.  Thémistocle  proposa 
oit  à  l'Hellcspont  pour  couper  la  retraite  à  Xerxès  ; 
î  représenta  qu'il  y  aurait  du  danger  à  retenir  et  à 
LU  désespoir  un  ennemi  redoutable,  et  qu'il  valait 
i  laisser  le  champ  libre.  Alors  Thémistocle  adopta 
e  fit  partager  aux  Athéniens  et  s'en  attribua  le  mérite 
i  roi  par  un  message  secret  qu'il  lui  fit  porter.  Il  est 
B  douter  que  Thémistocle  ne  jouât  dans  cette  occasion 
i  jeu.  La  cause  des  Perses  était  loin  d'être  déses- 
îme  en  cas  d'une  victoire  des  Grecs,  il  pouvait  être 
les  circonstances  de  chercher  une  retraite  en  Asie, 

des  événements  fit  voir  que  ce  calcul  était  conforme 
érêts,  qu'il  ne  négligeait  pas,  même  en  servant  ceux 
y  s.  Sous  prétexte  de  punir  les  insulaires  qui  avaient 
•urs  aux  barbares,  il  leur  extorqua  de  grandes  sommes 
h  rinsu  des  autres  généraux. 
le  d'Himére.  —  Le  jour  de  la  bataille  de  Salamine, 
Qdote,  ou  de  la  bataille  desThermopyles  selon  Diodore, 

de  Sicile  remportèrent  une  grande  victoire  sur 
carthaginoise  commandée  par  Amilcar.  L'invasion 
aginois,  quoique  probablement  concertée  avec  celle 
,  avait  emprunté  un  prétexte  aux  affaires  intérieures 
le.  Térillos,  tyran  d'Himére,  chassé  par  Théron,  tyran 


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BATAILLE  D'HIMÊRE.  389 

d'Agrigente,  avait  demandé  le  secours  de  Garthage,  Pour 
appuyer  cette  demande,  Anaxilaos,  tyran  deRhègionet  gendre 
de  Térillos,  envoya  ses  enfants  comme  otages  au  suffète  Amilcar. 
Les   Carthaginois  avaient  un  parti  dans  Tlle  ;  Amilcar  y  con- 
duisit une  armée  de   300,000  hommes  tirés  de  li 
ribérie  et  des  îles  de  la  mer  Tyrrhénienne.  C'est 
exemple  historique  de  ces  armées  de  mercenaires  (\ 
un  si  grand  rôle  dans  l'histoire  de  Carthage.  I 
Panormos ,  Amilcar   assiégea  Himère.  Théron  d< 
secours  à  son  gendre  Gélon,  tyran  de  Syracuse,  qi 
aussitôt  avec  50,000  fantassins  et  5000  cavaliers.  Un 
lui  procura  une  éclatante  victoire:  il  avait  intercept 
des  Sélinontins  promettant  à  Amilcar  le  secours 
de  cavalerie  ;  il  envoya  des  cavaliers  de  son  armé 
d'Amilcar  où  on  les  prit  pour  des  alliés  qu'on  a 
ils  y  répandirent  aussitôt  le  désordre.  Gélon  arriva 
toutes  ses  forces,  et  la  moitié  de  l'armée  cartha 
détruite.  Ceux  qui  échappèrent  au  carnage  se  réfugi 
une  position  où  le  manque  d'eau  les  obligea  de  : 
l'ennemi.  Presque  toute  la  flotte  abritée  sur  le  ri 
fermée  dans  les  fortifications  fut  incendiée,  et  poui 
le  désastre,  le  reste  des  vaisseaux  périt  dans  une 
retournant  à  Carthage.  Le  corps  d'Amilcar  ne  fut  pe 
Les  Carthaginois  racontèrent  qu'il  offrait  un  holocau 
la  bataille  et  qu'en  apercevant  la  déroute  de  ses  trou 
jeté  dans  les  flammes.  Les  vainqueurs  employèrei 
nombrables  prisonniers  à  construire  des  temples  e 
de  grands  travaux  d'utilité  publique.  S'il  faut  en  c 
phraste,   la  paix  fut  accordée  par  Gélon  aux  Car 
condition  qu'il  renonceraient  à  la  coutume  des 
humains. 

L'armée  perse  laissée  en  Grèce.  —  La  bataill 
avait  délivré  la  Sicile,  la  bataille  de  Sala  mine  ne  d 
la  Grèce,  puisque  l'armée  des  Barbares  était  intacte 
avait  quitté  l'Attique  ;  cette  retraite  faisait  croire  qu 
était  finie  et  qu'il  n'y  avait  plus  qu'à  décerner  des 
Quand  les  prémices  du  butin  eurent  été  envoyés 
on  attribua  le  premier  prix  aux  Aiginètes,  le  seconc 


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390  LA  PAIX  OFFERTE  AUX  ATHÉNIENS. 

niens.  Parmi  les  généraux,  chacun  s'attribua  le  premier  prix 
et  donna  le  second  à  Thémislocle.  11  alla  à  Sparte  où  il  fut 
traité  avec  les  plus  grands  honneurs.  Les  Spartiates  lui  donnè- 
rent une  couronne  d'olivier  pour  son  habileté,  comme  ils  en 
donnèrent  une  à  Eurybiade  pour  son  courage.  Il  reçut  le  plus 
beau  char  qu'il  y  eût  à  Sparte,  et  trois  cents  cavaliers  le  re- 
conduisirent jusqu'à  Tégéa,  distinction  qui  n'avait  jamais  été 
accordée  à  personne.  Xerxès  arriva  en  Thessalie  quelques 
jours  après  la  bataille  de  Salamine,  et  y  laissa  Mardonios  avec 
300,000  hommes  choisis  parmi  les  Perses,  les  Mèdes,  les  Sakas, 
les  Bactriens  et  les  Indiens.  Un  corps  de  60,000  hommes,  sous 
le  commandemant  d'Ârtabaze,  escorta  Xerxès  jusqu'à  THelles- 
pont.  L'armée  eut  beaucoup  à  souffrir  dans  sa  retraite,  les 
vivres  manquaient,  il  fallait  se  nourrir  d'herbes,  de  feuilles 
et  d'écorces  d'arbres.  La  peste  et  la  dyssenterie  firent  de  grands 
ravages  parmi  les  troupes.  Xerxès  confia  les  malades  aux  villes 
placées  sur  sa  route,  puis  il  passa  l'Hellespont  sur  des  vais- 
seaux, car  les  ponts  avaient  été  brisés  par  la  tempête  ,  et 
arriva  enfin  à  Sardes  avec  les  débris  de  son  armée. 

La  paix  offerte  aux  Athéniens.  —  Mardonios  avait  pris 
ses  quartiers  d'hiver  en  Thessalie.  La  flotte  perse  stationnait 
sur  les  côtes  de  l'Asie  Mineure,  car  on  craignait  une  défection 
des  Ioniens.  Ils  avaient  envoyé  des  ambassadeurs  à  Aigine, 
pour  engager  la  flotte  grecque,  commandée  par  le  roi  de 
Sparte  Léotychidès  et  par  l'Athénien  Xanthippos,  à  faire  voile 
vers  l'Ionie.  Les  alliés  n'y  consentirent  qu'avec  répugnance  et 
n'osèrent  pas  s'avancer  plus  loin  que  Dèlos.  Les  Athéniens 
étaient  rentrés  dans  leurs  maisons  incendiées.  Mardonios  es- 
saya de  les  détacher  de  l'alliance  des  Grecs.  Le  roi  de  Macé- 
doine Alexandre,  dont  la  sœur  était  mariée  à  un  Perse,  et  qui 
était  allié  aux  Athéniens  par  les  liens  de  l'hospitalité,  se  char- 
gea de  leur  demander,  non  pas  une  soumission,  mais  une 
alliance  avec  le  roi,  qui  s'engageait,  non  seulement  à  leur 
laisser  leur  territoire,  mais  à  l'agrandir,  et  offrait  de  rebâtir 
les  temples  qu'il  avait  brûlés.  Alexandre  ajoutait  qu'il  n'avait 
apporté  ces  propositions  que  parce  qu'il  était  persuadé  que  les 
Athéniens  ne  pouvaient  soutenir  la  lutte  contre  la  Perse.  Les 
Spartiates,  inquiets  de  cette    négociation,   envoyèrent  une 


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PRÉPARATIFS  DE   DÉFENSE, 
ambassade  aux  Athéniens  :  «  Ne  vous  fiez  pas  ai 
des  Barbares  et  n'écoutez  pas  un  tyran  qui  sert  ui 
Vous,  protecteurs  de  la  liberté  des  peuples,  vou 
accepter  d'asservir  la  Grèce.  Nous  savons  ce  q 
souffert,  mais  les  Lakédaimoniens  et  les  alliés 
nourrir   vos  femmes  et  vos  enfants  pendant  tout 
la  guerre.  »  Les  Athéniens  répondirent  :  «  Tant 
suivra  sa  carrière,  nous  ne  ferons  pas  alliance 
mais  nous  lui  résisterons,   confiants  dans  la  pi 
Dieux  et  des  Héros  dont  il  a  brûlé  les  temples  et  1 
Ils  engagèrent  Alexandre  à  ne  plus  leur  apporte 
sitions  qui  pourraient  les  irriter  contre  lui,  quoi( 
hôte  et  leur  ami.  Quant  aux  Spartiates,  ils  conna 
mal  les  Athéniens  s'ils  les  croyaient  capables  de 
prix  quelconque  la  cause  de  la  Grèce.  «  Nous  re 
alliés  de  l'offre  qu'ils  font  de  nourrir  nos  familles 
ne  voulons  pas  leur  être  à  charge  ;  nous  leur  demc 
ment  de  nnetlre  leur  armée  en  campagne  pour  pré 
que  d'une  seconde  invasion. 

Préparatifs  de  défense.  —  Dès  que  Mardoni 
que  les  Athéniens  avaient  rejeté  ses  offres,  il  se  m 
Les  Athéniens  quittèrent  encore  une  fois  la  vil 
rèrent  sur  leurs  vaisseaux  et  firent  passer  leurs  fai 
mine.  Mardonios  prit  possession  de  la  ville  c 
renouveler  par  un  Grec  Hellesponlien  ses  offres 
d'alliance.  Un  seul  sénateur  proposa  de  les  su 
lapidé  par  le  peuple  avec  sa  femme  et  ses  enfar 
bassade,  à  laquelle  se  joignirent  des  députés  < 
de  Mégare,  fut  envoyée  aux  Spartiates  pour  s( 
leur  abandon  et  leur  rappeler  leurs  promesses, 
alors  à  Sparte  la  fête  des  Hyakinthies;  les  Epho 
leur  réponse  au  lendemain,  puis  au  jour  suivant 
suite  pendant  dix  jours.  En  même  temps  les  Pél 
travaillaient  avec  ardeur  à  fermer  l'isthme  d'une 
était  presque  achevée.  Un  Tégéate  nommé  Chiléos, 
à  Sparte  d'un  plus  grand  crédit  que  tous  les  autres 
remarquer  aux  Ephores  que  si  les  Athéniens  faiss 
avec  les  Barbares,  la  muraille  de  l'Isthme  n'emj 


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LES  ARMÉES  EN  PRÉSENCE. 

de  Paire  entrer  des  troupes  dans  le  Péloponnèse.  Il 
ajouter  que  la  complicité  secrète  des  Argeiens  aug- 
danger  d'une  descente  de  Tennemi  par  mer.  La 
lur  où  on  devait  rendre  réponse  aux  ambassadeurs, 
3  firent  partir  pendant  la  nuit  cinq  mille  Spartiates 
es  chacun  de  sept  Hilotes,  sous  la  conduite  de  Pau- 
eur  et  cousin  du  jeune  roi  PleistarchoSy  fils  de 
Quand  les  députés  Athéniens  se  présentèrent,  on 
a  par  serment  que  les  troupes  de  Sparte  étaient 
iche.  Très  étonnés,  ils  partirent  en  diligence.  Cinq 
les  Périœkes,  avec  un  môme  nombre  d'Hilotes,  les 
èrent.  Ils  furent  rejoints  à  l'Isthme  par  les  contin- 
illes  alliées  du  Péloponnèse  et  par  3000  Mégariens 
i  réunirent,  dans  la  plaine  d'Eleusis,  8000  Athéniens 
duite  d'Aristide  et  000  Plataiens.  Le  total  des  troupes 
élevait  à  i  10,000  hommes. 

ôes  en  présence.  —  Averti  par  les  Argeiens  du 
armée  grecque,  Mardonios  quitta  l'Attique  après 
t  tout  ce  qui  subsistait  encore  et  retourna  en  Boiotie 
litre  dans  un  allié  et  pays  commode  pour  sa  cava- 
quelle  il  comptait  d'autant  plus  que  les  Grecs  n'en 
.  Il  établit  son  camp  sur  les  bords  de  l'Asopos;  les 
stèrent  vis-à-vis  de  lui,  au  pied  du  mont  Kithairon. 

ne  descendaient  pas  dans  la  plaine,  Mardonios 
tre  eux  toute  sa  cavalerie  commandée  parMasistios. 
ins  se  trouvaient  les  plus  exposés.  Tout  en  résistant 
;e,  ils  envoyèrent  demander  à  être  relevés  de  ce 

cents  Athéniens  se  présentèrent  spontanément  et 
e  combat.  La  mort  de  Masistiosjeta  la  consternation 
erses  ;  une  lutte  acharnée  s'engagea  autour  de  son 
nitpar  rester  aux  mains  des  Grecs.  Ils  le  mirent  sur 
ils  firent  passer  de  rang  en  rang,  pendant  que  les 
issaient  des   cris  lugubres  dont  retentit  toute  la 

losition  que  les  Grecs  occupaient,  il  leur  était  dif- 
)rocurer  de  l'eau;  l'ennemi  écartait  à  force  de  traits 
approchaient  de  l'Asopos.  Ils  résolurent  de  s'a- 
\  la  fontaine  Gargaphia,  sur  le  territoire  de  Platée. 


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LES  ARMÉES  EN  PRÉSENCE.  393 

Ils  allèrent  s'y  ranger  par  nations,  Pausanias  occupant  l'aile 
droite  avec  les  Spartiates.  Les  Tégéatos  et  les  Athéniens  se 
disputaient  l'honneur  d'occuper  l'aile  gauche;  on  rappelait  de 
part  et  d'autre  les  exploits  des  aïeux  :  Tégéa  ceux  du  héros 
Echémos  qui  avait  vaincu  Hyllos  fils  d'Héraclès,  Athènes  la 
victoire  de  Théseus  sur  les  Amazones.  «  Laissons  là  ces  ques- 
tions de  préséance,  dit  Aristide;  que  les  Spartiates  décident,  et 
en  quelque  lieu  que  nous  soyons  placés,  nous  en  ferons  un 
poste  d'honneur.  »  Les  Spartiates  ^e  prononcèrent  par  accla- 
mation en  faveur  des  Athéniens.  Mardonios,  s'apercevant  du 
mouvement  des  Grecs,  fit  avancer  ses  troupes  le  long  de 
l'Asopos.  Il  se  plaça  avec  les  Perses  et  les  Mëdes  à  l'aile  gauche, 
en  face  des  Lakédaimoniens,  et  opposa  aux  Athéniens  ses 
auxiliaires  Grecs.  Pendant  huit  jours  les  armées  restèrent  en 
présence  ;  de  part  et  d'autre  les  devins  menaçaient  d'une  défaite 
le  parti  qui  engagerait  l'action.  Les  Grecs  étaient  harcelés  par 
la  cavalerie  ennemie,  mais  ils  recevaient  tous  les  jours  des 
renforts  et  des  vivres,  tandis  que  les  provisions  des  Perses  s'é- 
puisaient. Sur  l'avis  du  Thébain  Timagenidas,  un  détachement 
de  cavaliers  perses  garda  pendant  la  nuit  les  passages  du 
Kithairon  et  surprit  un  convoi  de  500  bêtes  de  charge  venant  du 
Péloponnèse.  Artabaze,  le  premier  des  Perses  après  Mardonios, 
était  d'avis  de  se  rapprocher  de  Thèbes  où  on  avait  fait  porter 
des  vivres  et  des  fourrages,  et  de  semer  la  division  entre  les 
Grecs  en  corrompant  les  principaux  chefs.  Plutarque  rapporte 
qu'en  ce  moment  même  il  y  avait  parmi  les  hoplites  Athéniens 
des  jeunes  gens  de  grandes  familles  qui  conspiraient  pour 
établir,  avec  l'appui  de  l'étranger,  une  oligarchie  comme  celle 
de  Thèbes.  Aristide  découvrit  le  complot,  mais  il  étouffa  l'affaire, 
craignant  un  éclat  en  présence  de  l'ennemi.  Les  Thébains, 
zélés  partisans  des  Perses,  appuyaientl'avis  d'Artabaze  et  sou- 
tenaient qu'en  ne  ménageant  pas  l'argent  on  pourrait  terminer 
la  guerre  sans  combat.  Mais  Mardonios,  confiant  dans  la  supé- 
riorité de  ses  troupes,  était  impatient  d'en  finir;  au-dessus  des 
augures,  il  y  avait,  disait-il,  la  vieille  coutume  des  Perses,  qui 
ordonnait  de  combattre  l'ennemi.  Il  décida  que  la  bataille  serait 
livrée  le  lendemain. 

Pendant  la  nuit^  Alexandre  de  Macédoine   vint  avertir  les 


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BATAILLE   DE  PLATÉE.  395 

Ils  ne  le  cédaient  aux  Grecs  ni  en  force,  ni  en  courage,  mais 
ils  étaient  armés  à  la  légère,  et  n'avaient  ni  l'habileté  ni  la 
tactique  de  leur  ennemis.  Ils  se  jetaient  en  avant,  tantôt  iso- 
lément, tantôt  par  troupes  de  dix,  plus  ou  moins,  toujours 
sans  ordre,  et  tombaient  sous  les  coups  des  Spartiates.  Mar- 
donios,  monté  sur  un  cheval  blanc,  combattait  entouré  de 
mille  hommes  choisis  parmi  les  Perses  les  plus  braves.  Tant 
qu'il  vécut,  ils  soutinrent  les  efforts  des  Lakédaimoniens,  mais 
quand  il  tomba  et  que  ce  corps  d'élite  fut  détruit,  le  reste  des 
Barbares  tourna  le  dos.  »  Ils  repassèrent  l'Asopos,  poursuivis 
par  les  Spartiates  et  les  Tégéates,  et  s'enfermèrent  dans  leur 
camp  retranché. 

Artabaze,  qui  dès  le  commencement  avait  été  en  rivalité  avec 
Mardonios,  ne  prit  aucune  part  à  la  bataille  qui  s'était  engagée 
contre  son  avis.  Dès  qu'il  s'aperçut  de  la  déroute  des  Perses,  il 
s'enfuit  vers  la  Phokis  avec  les  40,000  hommes  qu'il  comman- 
dait, traversa  rapidement  la  Thessalie  et  la  Macédoine,  répan- 
dant partout  le  bruit  d'une  victoire  de  Mardonios,  et  après  avoir 
perdu  une  partie  de  ses  troupes  en  Thrace,  ramena  le  reste  en 
Asie  par  l'Hellespont.  Parmi  les  Grecs  auxiliaires  du  roi,  les 
Thébains  seuls  combattirent  avec   acharnement  contre  les 
Athéniens,  qui  leur  tuèrent  trois  cents  hommes  ;  le  reste  s'en- 
fuit à  Thébes  ;  au  lieu  de  les  poursuivre,  les  Athéniens  se  hâ- 
tèrent de  joindre  les  Lakédaimoniens  et  les  Tégéates  qui  ne 
parvenaient  pas  à  forcer  le  camp  des  Perses.  L'attaque  fut 
rude  et  longue  ;  enfin  les  Athéniens  a]fant  abattu  une  partie  du 
mur  de  bois,  les  Barbares  effrayés  se  laissèrent  tuer  sans  résis- 
tance, et,  selon  Hérodote,  3,000  seulement  échappèrent  au 
carnage.  Les  Lakédaimoniens  de  Sparte  ne  perdirent  que  91 
dès  leurs,  les  Tégéates  16  et  les  Athéniens  52.  Le  combat  avait 
duré  si  peu  de  temps  que  les  autres  Grecs,  campés  près  de 
Platée,  n'arrivèrent  que  pour  aider  à  la  poursuite  des  vaincus. 
Les  Corinthiens  suivirent  le  chemin  des  collines  ;  les  Méga- 
riens et  les  Phliasiens,  marchant  sans  ordre  à  travers  la  plaine, 
furent  rencontrés  par  la  cavalerie  thébaine  qui  leur  tua  six 
cents  hommes  et  chassa  le  reste  sur  les  hauteurs  du  Kithairon. 
LesMântinéens  et  les  Eléiens,  arrivés  après  la  bataille,  voulaient 
se  mettre  à  la  poursuite  des  Mèdes  commandés  par  Artabaze  ; 


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BATAILLE  DE  MYGALE.  397 

rinthe  après  avoir  congédié  les  troupes  alliées^  et  les  fit  mettre 
à  mort  sans  procès. 

Bataille  de  Mycale.  —  Le  même  jour  où  se  livrait  la 
bataille  de  Platée,  la  flotte  grecque  commandée  par  Léoty- 
chidas  et  Xanthippos  remportait  une  victoire  sur  la  flotte  perse 
à  Mycale  en  lonie.  On  a  vu  plus  haut  qu'après  la  bataille  de 
Salamine  les  Ioniens  avaient  envoyé  une  députation  aux  alliés 
pour  leur  demander  de  délivrer  la  Grèce  d'Asie  du  joug  des 
Perses  ;  cette  tentative  n'avait  pas  réussi,  et  la  flotte  grecque 
s'était  arrêtée  à  Dèlos.  Une  seconde  ambassade  eut  plus  de 
succès.  Elle  était  envoyée  par  les  Samiens  à  Tinsu  du  tyran 
Théomeslor  qui  leur  avait  été  imposé  par  les  Perses.  L'Ionie, 
disaient  les  députés,  n'attendait  que  l'arrivée  de  la  flotte  grec- 
que pour  se  révolter,  et  les  Barbares  deviendraient  pour  les 
Grecs  une  proie  facile.  L'orateur  des  Samiens  s'appelait  Hègé- 
sistratos;  ce  nom,  qui  signifie  guide  de  l'armée,  parut  d'un  bon 
présage  à  Léotychidas,  qui  mit  aussitôt  à  la  voile  pour  Samos. 
Mais  les  Perses,  découragés  par  leur  défaite  à  Salamine,  étaient 
décidés  à  ne  plus  livrer  bataille  sur  mer.  Ils  permirent  aux 
Phéniciens  de  se  retirer  et  naviguèrent  vers  le  continent  pour 
se  mettre  sous  la  protection  d'une  armée  campée  à  Mycale,  où 
eUe  avait  été  envoyée  par  Xerxès  pour  garder  l'Ionie.  Cette 
armée,  commandée  par  Tigrane,  se  montait  à  60,000  hommes. 
Les  vaisseaux  furent  tirés  sur  le  rivage  et  entourés  d'un  rem- 
part en  pierre  et  en  bois  pour  soutenir  un  siège.  Les  Grecs  les 
avaient  suivis,  et,  voyant  que  l'ennemi  voulait  livrer  bataille  sur 
terre ,  ils  débarquèrent  à  leur  tour,  après  avoir  engagé  les 
Ioniens  par  un  héraut  à  se  souvenir  que  c'était  pour  leur  li- 
berté qu'on  allait  combattre.  Ce  stratagème  avait  été  inuti- 
lement employé  en  Ëuboia  par  Thémistocle,  mais  cette  fois 
les  Perses  s'en  inquiétèrent  davantage  :  ils  désarmèrent  les 
Samiens  et  éloignèrent  les  Milésiens  en  les  chargeant  de  garder 
les  chemins  qui  conduisaient  au  sommet  du  mont  Mycale.  Puis 
ils  mirent  leurs  boucliers  les  uns  sur  les  autres  pour  s'en  faire 
un  rempart. 

Quand  les  Grecs  eurent  débarqué,  ils  trouvèrent  un  caducée 
sur  le  rivage,  et  le  bruit  d'une  victoire  remportée  sur  Mardonios 
en  Boiotie  se  répandit  aussitôt  dans  toute  l'armée:  on  ne 
L.  M.  —  llisr.  uEî  GuECS.  23 

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398  PRISE  DE  SESTOS. 

douta  pas  que  ce  ne  fût  un  message  envoyé  par  les  Dieux 
pour  rassurer  les  Grecs  inquiets  du  sort  de  la  patrie,  et 
ils  marchèrent  au  combat  avec  d'autant  plus  d'ardeur.  Les 
Athéniens,  les  Corinthiens,  les  Sikyonîens  et  les  Troizénîens, 
formant  environ  la  moitié  de  l'armée,  prirent  le  long  du  rivage 
et  attaquèrent  aussitôt  les  Perses,  pendant  que  les  Lakédaimo- 
niens  et  le  reste  des  troupes  prenaient  par  les  ravins  et  les 
montagnes  pour  tourner  l'ennemi.  Tant  que  le  rempart  de 
boucliers  subsista,  les  Perses  se  défendirent  et  ne  montrèrent 
pas  moins  de  courage  que  les  Grecs  ;  quand  ce  rempart  fut 
renversé,  ils  s'enfuirent  dans  le  retranchement  où  étaient  les 
vaisseaux.  Les  Grecs  les  poursuivirent  et  entrèrent  en  foule 
avec  eux.  La  lutte  durait  encore  quand  les  Lakédaimoniens 
arrivèrent.  Alors  la  déroute  des  Barbares  devint  complète*  Ti- 
grane  et  un  autre  général  perse  étaient  morts  les  armes  à  la 
main.  Les  Samiens,  quoique  désarmés,  secondèrent  les  vain- 
queurs de  toutes  leurs  forces,  et  le  reste  des  Ioniens  les  imita. 
Les  Milésiens  qui  gardaient  les  sentiers  de  la  montagne  condui- 
saient les  fuyards  par  des  chemins  qui  les  ramenaient  à  l'en* 
nemi.  Ce  fut  ainsi  que  l'Ionie  se  révolta  pour  la  seconde  fois 
contre  les  Perses.  Les  Grecs  ayant  tué  la  plupart  des  ennemis, 
ou  dans  le  combat  ou  dans  la  fuite,  portèrent  tout  le' butin  sur 
le  rivage  et  brûlèrent  les  vaisseaux  et  les  retranchements  des 
Barbares. 

Prise  dé  Sestos.  —  Après  la  victoire  de  Mycale,  on  délibéra 
sur  le  sort  des  Ioniens,  qu'on  ne  pouvait  abandonner  à  la  ven- 
geance du  roi  de  Perse.  Les  Péloponnésiens  proposaient  de 
chasser  de  la  Grèce  d'Europe  les  peuples  qui  avaient  pris  le 
parti  des  barbares  et  de  donner  leur  territoire  aux  Ioniens  ;  mais 
ce  projet  fut  abandonné,  les  Athéniens  soutenant  que  personne 
n'avait  le  droit  de  disposer  de  leurs  colonies.  En  attendant  qu'on 
pût  achever  la  délivrance  de  l'Ionie,  on  reçut  dans  l'alliance  des 
Grecs  les  lies  de  Samos,  de  Chîos  et  de  Lesbos.  Puis  on  fit  voile 
vers  l'Hellespont,  pour  rompre  les  ponts  de  Xerxès,  qu'on 
croyait  encore  entiers.  Comme  on  les  trouva  rompus,  Léotychi- 
das  et  les  Péloponnésiens  retournèrent  en  Grèce,  tandis  que 
Xanlhîppos  et  les  Athéniens  résolurent  de  reprendre  la  Cherson- 
nèse  de  Thrace  qui  leur  avait  appartenu  avant  la  guerre.  Le 


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L'EMPIRE  DE  LA  MER.  399 

Perse  Arlayctès,  qui  gouvernait  cette  province,  était  détesté  pour 
sa  dureté  et  son  impiété;  on  lui  reprochait  surtout  d'avoir  pillé 
et  profané  une  chapelle  de  Protésilaos,  héros  de  la  guerre  de 
Troie.  Les  Athéniens  Fassiégèrent  dans  Sestos  et  restèrent  de- 
vant la  place  pendant  tout  Tautomne.  La  famine  réduisit  les 
assiégés  à  se  nourrir  des  courroies  de  cuir  qui  soutenaient  leurs 
lits.  Enûn,  la  garnison  perse  parvint  à  s'échapper  la  nuit,  et  les 
Chersonnésiens  ouvrirent  leurs  portes  aux  Athéniens,  dont  une 
partie  prit  possession  de  la  ville  pendant  que  le  reste  poursuivit 
les  Perses  et  les  atteignit  près  d'Aigos-Potamos.  Artayctès,  fait 
prisonnier,  offrait,  pour  se  racheter,  cent  talents  à  la  chapelle 
qu'il  avait  pillée,  et  deux  cents  aux  Athéniens  ;  mais  lès  habi- 
tants d'Eléonte  demandèrent  sa  mort  pour  venger  Protésilaos, 
et  il  fut  mis  en  croix  avec  son  fils.  Xanlhippos  et  les  Athéniens 
se  retirèrent,  emportant  comme  trophées  les  câbles  des  ponts 
de  Xerxès.  La  guerre  médique  semblait  terminée  ou  bien  près 
de  l'être  :  la  Grèce  d'Europe  était  délivrée  de  l'invasion,  et  on 
pouvait  prévoir  l'affranchissement  prochain  de  la  Grèce  d'A- 
sie. Un  tel  succès  n'aurait  pas  été  possible  sans  les  efforts  com- 
binés des  Athéniens  et  des  Spartiates.  Il  dépendait  maintenant 
de  ces  deux  peuples  d'assurer  par  leur  union  l'indépendance  du 
corps  hellénique,  ou  de  la  compromettre  par  leur  rivalité. 


CHAPITRE  XII 

L'EMPIRE  DE  LA   MER. 

Droit  des  Athéniens  à  l'hégémonie.  —  Reconstruction  des  murs  d'Athè- 
nes. —  Politique  de  Thémistocle.  Le  Pirée  et  la  flotte.  —  Fédération 
de  Dèlos  ;  taxe  fixée  par  Aristide.  —  Une  réforme  démocratique  à 
Athènes.  —  Les  sculptures  du  temple  d'Aigine.  —  Le  Thèséion.  — - 
La  Tragédie.  —  Exil  de  Thémistocle.  Trahison  de  Pausanias.  — 
Fuite  de  Thémistocle  ;  sa  mort  chez  les  Perses.  —  La  ligue  de  Dèlos 
se  transforme  eu  empire  athénien.  —  Double  victoire  de  l'Eurymè- 
don.  Embellissements  d'Athènes.  Libéralité  de  Kimon.  —  Siège  de 
Thasos.  Tremblement  de  terre  à  Sparte  ;  révolte  des  Hilotes  et  des 
MessénienSi  —  Siège  d'Ithômè;  renvoi  du  contingent  athénien.  — 


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400  DROIT  DES  ATHÉNIENS  A  L'HÉGÉMONIE. 

L'Aréiopage  amoindri.  Exil  de  Kirnon.  Meurtre  d*Ephialtès.  —  Ré- 
tribution des  devoirs  civiques.  —  Coalition  contre  Sparte.  Expédition 
d'Egypte.  Siège  et  soumission  d'Aigine.  —  Les  longs  murs.  Bataille 
de  Tanagra.  —  Victoire  des  Oinophytes.  Revers  en  Egypte.  —  Fin  de 
la  guerre  médique.  Mort  de  Kimon.  —  Défection  des  Boiotes  et  des 
Mégariens.  Soumission  de  TEuboia.  —  Trêve  de  trente  ans. 


Droit  des  Athéniens  à  Thégémonie.  —  Athèaes  avait 
porté  seule  tout  le  poids  de  la  première  guerre  médique,  et  plus 
que  toute  autre  ville  elle  avait  contribué  au  succès  de  la  seconde. 
Hérodote  a  dit  avec  raison  qu'après  les  Dieux  c'étaient  les  Athé- 
niens qui  avaient  sauvé  la  Grèce  de  l'invasion  des  Barbares.  Il 
était  juste  qu'ils  recueillissent  les  fruits  de  la  victoire.  L'éner- 
gie qu'ils  avaient  déployée  dans  cette  grande  lutte  nationale 
leur  donnait  des  droits  à  l'hégémonie  de  la  Grèce.  Ils  acquirent 
bientôt  une  supériorité  encore  plus  éclatante  dans  la  sphère  de 
l'intelligence.  Le  siècle  qui  suit  les  guerres  médiques  a  vu  se 
produire  le  plus  magnifique  mouvement  artistique  et  littéraire 
qu'il  ait  été  donné  au  monde  de  contempler.  Au  point  culmi- 
nant de  l'histoire  rayonne  cette  glorieuse  démocratie  qui,  en 
appliquant  les  grands  principes  de  la  morale  grecque,  la  liberté 
et  l'égalité,  réalisa  un  idéal  social  que  les  plus  hardis  utopistes 
n'oseraient  pas  rêver.  Cependant  cette  grande  époque  est  rem- 
plie par  des  luttes  presque  incessantes.  Chez  d'autres  peuples, 
les  arts  et  les  lettres  sont  des  plantes  de  serre  chaude  qui  ne 
peuvent  fleurir  que  sous  quelque  abri  protecteur  ;  en  Grèce, 
sur  leur  rocher  natal,  elles  s'épanouissaient  dans  une  atmo- 
sphère de  tempêtes. 

Pour  la  courte  et  brillante  période  qui  répond  à  la  démago- 
gie de  Périclèç,  entre  la  guerre  médique  racontée  par  Hérodote 
et  la  guerre  du  Péloponnèse  racontée  par  Thucydide,  notre  prin- 
cipal guide  est  Plutarque,  et  malheureusement  il  donne  toujours 
à  l'histoire  une  couleur  biographique;  le  peuple  est  relégué  au 
second  plan  et  forme  le  fond  du  tableau.  Si  on  ne  se  tenait  en 
garde  contre  cette  tendance,  on  méconnaîtrait  le  caractère  ré- 
publicain de  la  société  grecque.  Il  ne  faut  pas,  à  cette  époque 
qui  est  l'apogée  de  la  civilisation,  que  les  grands  hommes  nous 
cachent  le  grand  peuple. 


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LES  MURS  D»ATHÈNES.  —  LE  PIRÉE.  401 

Reconstruction  des  murs  d'Athènes.  —  Les  Athéniens, 
rentrés  dans  leur  ville  après  la  bataille  de  Platée,  commencè- 
rent à  rebâtir  leurs  maisons  et  le  mur  d'enceinte.  Mais  Sparte 
et  les  alliés,  surtout  Aigine  et  Corinthe,  les  rivales  maritimes 
d'Athènes,  auraient  voulu  empêcher  ce  travail  de  fortifications. 
Une  ambassade  fut  envoyée  aux  Athéniens  ;  on  prenait  pour 
prétexte  l'intérêt  commun  de  la  Grèce.  «  Si  les  barbares  reve- 
naient, il  ne  fallait  pas  qu'ils  pussent  trouver  une  place  forte 
pour  s'y  établir,  comme  ils  avaient  faitàThèbes  ;  le  Péloponnèse 
était  une  forteresse  naturelle  où  la  défense  devait  -se  concen- 
trer. »  Les  Athéniens  comprenaient  que  la  jalousie  avait  dicté 
ce  conseil,  mais  il  était  dangereux  de  le  rejeter  ouvertement,  il 
fallait  employer  la  ruse.  Thémistocle  se  fit  envoyer  k  Sparte 
pour  traiter  l'afl'aire.  Une  fois  arrivé,  il  ne  se  pressa  pas  de  voir 
les  Ëphores,  «  il  attendait  ses  collègues,  sans  doute  quelque  af- 
faire urgente  les  avait  retenus  ».  Pendant  ce  temps,  toute  la 
population  d'Athènes,  hommes,  femmes,  enfants;  ^vieillards, 
travaillait  jour  et  nuit  à  élever  les  murailles  ;  on  y  employait 
les  pierres  des  édifices  publics,  les  colonnes,  les  marbres  sculp- 
tés. Le  travail  avançait  rapidement;  les  Spartiates  en  furent 
avertis,  ils  interrogèrent  Thémistocle  :  «  N'en  croyez  pas  de 
vagues  rumeurs,  envoyez  des  gens  sûrs,  qui  vous  renseigneront 
exactement.  »  On  les  envoya,  mais  Thémistocle  fit  dire  secrète- 
ment aux  Athéniens  de  les  garder  comme  otages  jusqu'à  son 
retour.  Quand  il  apprit  que  les  murs  étaient  presque  achevés,  il 
le  déclara  ouvertement  aux  Spartiates  :  «  Lorsque  nous  avons 
cru  nécessaire  d'abandonner  notre  ville  et  de  monter  sur  nos 
vaisseaux,  nous  n'avons  pas  attendu  vos  conseils;  nous  croyons 
utile  de  fortifier  Athènes,  et  nous  connaissons  aussi  bien  nos 
intérêts  que  l'intérêt  commun  de  la  Grèce.  »  Les  Spartiates,  dis- 
simulant leur  dépit,  protestèrent  ds  leurs  bonnes  intentions,  et 
les  députés  se  retirèrent  de  part  et  d'autre. 

Politique  de  Thémistocle.  La  flotte  et  le  Pirée.  —  La 
politique  de  Thémistocle  avait  toujours  été  de  tourner  l'activité 
des  Athéniens  du  côté  de  la  mer.  C'est  d'après  ses  avis  qu'ils 
avaient  équipé  leur  flotte,  ce  rempart  de  bois  qui  les  avait  sau- 
vés. Il  leur  fallait  maintenant  un  port  militaire.  La  rade  de  Pha- 
lère,  dont  ils  s'étaient  contentés  jusqu'alors,  n'était  ni  assez  vaste 


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402  RELACHEMENT  DU  LIEN  FÉDÉRAL. 

ni  assez  sûre.  Thémistocle  leur  conseilla  de  continuer  les  ou- 
vrages du  Pirée  commencés  trois  ans  auparavant  lorsqu'il  était 
archonte.  La  victoire  de  Salamine  lui  donnait  un  tel  ascendant 
sur  les  Athéniens  qu'aussitôt  que  Tenceinte  de  la  ville  fut  ache- 
vée, et  avant  de  s'occuper  de  leurs  champs  dévastés,  ils  com- 
mencèrent à  entourer  le  Pirée  d'une  forte  muraille.  Thémistocle 
regardait  le  Pirée  comme  plus  important  que  l'Acropole  même; 
il  en  fit  tracer  le  plan  par  l'architecte  Hippodamos  deMilet  ;  des 
, immunités  furent  promises  aux  étrangers  et  surtout  au*  ou- 
vriers qui  viendraient  s'y  établir.  Thémistocle  engagea  aussi  les 
Athéniens  à  construire  tous  les  ans  un  certain  nombre  de  tri- 
rèmes. Il  osa  dire  le  premier  qu'ils  devaient  s'emparer  de  la 
mer.  Plutarque  raconte  même  que  pour  leur  assurer  la  supré- 
matie maritime,  il  avait  formé  le  projet,  après  la  bataille  de 
Platée,  de  brûler  la  flotte  des  alliés  rassemblée  à  Pagase,  ou, 
selon  une  version  adoptée  par  Gicéron,  la  flotte  lakédaimo- 
nienne  abritée  à  Gytheion  :  il  annonce  au  peuple  qu'il  a  quel- 
que chose  de  très  utile  à  proposer,  mais  qu'il  ne  doit  pas  divul- 
guer son  secret;  Aristide,  chargé  de  prendre  connaissance  du 
projet ,  déclare  que  rien  ne  serait  plus  utile  ni  plus  injuste,  et 
le  peuple,  tout  d'une  voix,  rejette  la  proposition  sans  demander 
de  quoi  il  s'agit.  Cette  anecdote  ne  peut,  selon  Grote,  être  con- 
sidérée comme  de  l'histoire  ;  c'est  un  thème  philosophique 
montrant  sous  une  forme  ingénieuse  la  supériorité  du  juste  sur 
l'utile.  L'inventeur  devait  être  un  Athénien,  car  le  peuple  d'A- 
thènes y  joue  un  très  beau  rôle  ;  quant  à  l'antithèse  morale  de 
Thémistocle  et  d'Aristide,  c'était  un  lieu  commun  littéraire  dans 
les  écoles. 

Relâchement  du  lien  fédéral.  ~-  Le  congrès  qui,  dès  le 
commencement  de  l'invasion  des  Barbares,  s'était  réuni  spon- 
tanément àl'isthme  de  Gorinthe,  pour  donner  une  direction  à  la 
lutte  contre  l'ennemi,  ne  survécut  pas  aux  circonstances  excep- 
tionnelles qui  l'avaient  fait  naître.  Selon  Plutarque,  Aristide  es- 
saya, après  la  bataille  de  Platée,  d'établir  entre  les  cités  hellé- 
niques une  ligue  permanente,  mais  cette  tentative  ne  parait  pas 
avoir  eu  de  suite.  Le  conseil  des  Amphictions,  qui  n'avait  rien 
fait  pour  la  résistance,  se  réunit  après  la  victoire  et  mit  à  prix 
la  tête  d'Ephialtès  dont  la  trahison  avait  livré  à  Xerxès  le  pas- 


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FÉDÉRATION  DE  DÈLOS,  403 

sage  des  Thermopyles.  Les  Lakédaimoniens  proposèrent,  selon 
Plutarque,  d'exclure  de  la  confédération  amphictionique  les 
peuples  qui  n'avaient  pas  pris  part  k  la  défense  nationale;  mais 
Thémistocle  fit  rejeter  celte  proposition,  craignant  que  l'exclu- 
sion des  Thessaliens,  des  Argeiens  et  des  Thét 
aux  Spartiates  une  influence  prépondérante  ( 
«  Dès  cet  instant,  ajoute  Plutarque,  il  fut  en  1 
vaise  volonté  des  Lakédaimoniens,  qui  lui  sus( 
dans  la  personne  de  Kimon.  »  Si  on  avait  voul 
peuples  infidèles  ou  traîtres,  on  aurait  mis  la  m( 
aux  prises  avec  l'autre  moitié.  On  voulut  du  r 
hommes  qui  avaient  provoqué  ces  défections  £ 
Déjà  Pausanias  avait  frappé  les  chefs  de  Toliga 
Léotychidas,  le  vainqueur  de  Mycale,  fut  envo 
contre  les  Aleuades  et  se  laissa  gagner  par  d( 
lui  était  ai9éf  dit  Hérodote,  de  se  rendre  maître 
mais  il  accepta  une  grande  somme  et  fut  pris 
le  camp  môme,  assis  sur  un  sac  d'argent.  Aya 
justice,  il  fut  banni  de  Sparte  et  sa  maison  ras< 
Tégéa  où  il  mourut.  »  Hérodote  accuse  aussi  1 
voir  extorqué  de  grandes  sommes  d'argent  aux 
Pariens,  aux  habitants  d'Andros,  sous  prétexli 
qui  avaient  prêté  secours  aux  Barbares. 

Fédération  de  Délos.  —  Dans  Tannée  qui 
les  de  Platée  et  de  Mycale,  la  flotte  grecque  rep 
achever  la  délivrance  des  villes  grecques  encoi 
Perses.  On  ne  connaît  pas  la  force  de  cet  arr 
seulement  que  les  Péloponnésiens  avaient  éq 
seaux  et  les  Athéniens  trente,  auxquels  se  joigi 
nombre  d'Ioniens.  Pausanias,  qui  commandait 
vers  Kypros  dont  il  soumit  la  plus  grande  par 
siège  devant  Byzance  et  s'en  empara.  «  Mais  sor 
dureté,  dit  Thucydide,  le  rendirent  odieux  au: 
aux  Ioniens  et  à  ceux  qui  s'étaient  soustraits  i 
puissance  du  roi.  Ils  allèrent  trouver  les  Athén 
rent  de  les  recevoir  sous  leur  commandement, 
la  môme  origine,  et  de  ne  pas  céder  àPausanif 
venir  à  la  violence.  Les  Athéniens  reçurent  c< 


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404  TAXE  FIXÉE  PAR  ARISTIDE. 

ils  leur  promirent  de  ne  pas  les  abandonner  et  de  tenir  d'ail- 
leurs la  conduite  qui  semblerait  s'accorder  le  mieux  avec  les 
intérêts  des  alliés.  Dans  ces  conjonctures,  les  Lakédaimoniens 
rappelèrent  Pausanias  pour  le  juger,  d'après  les  dénonciations 
portées  contre  lui.  Les  Grecs  qui  venaient  à  Lakédaimon  se 
plaignaient  beaucoup  de  ses  injustices  et  de  sa  conduite,  qui 
semblait  plutôt  d*un  tyran  que  d'un  général.  Il  fut  rappelé  pré- 
cisément à  l'époque  où,  par  la  haine  qu'il  inspirait,  les  alliés, 
excepté  les  troupes  du  Péloponnèse,  se  rangeaient  sous  les  or- 
dres des  Athéniens.  Arrivé  à  Lakédaimon,  il  fut  convaincu  d'a- 
bus de  pouvoir  contre  les  particuliers,  mais  il  échappa  aux  ac- 
cusations capitales.  On  lui  reprochait  surtout  son  penchant  pour 
les  Mèdes,  qui  paraissait  évident.  Aussi  le  commandement  ne 
lui  fut-il  pas  rendu,  mais  on  fit  partir  Dorkis  et  quelques  au- 
tres avec  peu  de  troupes.  Comme  les  alliés  ne  se  mirent  pas 
sous  leur  autorité,  ils  revinrent,  et  les  Lakédaimoniens  n'en- 
voyèrent pas  dans  la  suite  d'autres  généraux.  Après  ce  qu'ils 
avaient  vu  de  Pausanias,  ils  craignaient  qu'ils  ne  se  corrompis- 
sent de  môme.  D'ailleurs  ils  voulaient  se  débarrasser  de  la 
guerre  des* Mèdes,  ils  croyaient  les  Athéniens  capables  de  la 
conduire,  et  alors  ils  étaient  amis.  Les  Athéniens  ayant  ainsi 
pris  le  commandent  suivant  le  désir  des  alliés,  par  la  haine 
qu'ils  portaient  à  Pausanias,  réglèrent  quelles  villes  devaient 
donner  de  l'argent  pour  faire  la  guerre  aux  Barbares,  et 
quelles  devaient  fournir  des  vaisseaux.  Alors  fut  établie  chez  les 
Athéniens  la  magistrature  des  Hellanotames  qui  recevaient  le 
tribut.  Le  premier  tribut  fut  fixé  à  quatre  cent  soixante  talents 
(2,485,000  fr.).  Le  trésor  fut  déposé  àDèlos,  et  les  assemblées  se 
faisaient  dans  le  temple.  » 

Taxe  fixée  par  Aristide.  —  Selon  Plutarque,  le  caractère 
personnel  d'Aristide,  qui  commandait  avec  Kimon,  fils  de  Mil- 
tiade,  le  contingent  athénien  de  la  flotte  grecque,  fut  la  princi- 
pale cause  de  l'établissement  de  cette  ligue  qui  prit  le  nom  de 
Fédération  de  Dèlos.  En  comparant  la  modération  et  la  douceur 
d'Aristide  à  l'insolence  de  Pausanias,  les  alliés  furent  amenés 
à  préférer  la  suzeraineté  des  Athéniens  à  celle  des  Spartiates. 
Comme  puissance  maritime  et  comme  métropole  des  cités 
ioniennes,  Athènes  devait  avoir  la  direction  d'une  ligue  dont  le 


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RÉFORME  DÉMOCRATIQUE  A  ATHÈNES.  405 

but  était  de  protéger  les  Grecs  d'Asie  contre  les  Barbares.  Il 

était  juste  quechacunedes  villesconfédéréescont]" 

de  la  guerre,  et  Aristide  avait  une  telle  réputation 

les  alliés  s'en  rapportèrent  à  lui  pour  la  réparti  tio 

de  guerre.  «  Ils  demandèrent  aux  Athéniens,  dit 

leur  donner  Aristide  pour  visiter  le  territoire  d( 

examiner  ses  revenus  et  fixer  ce  que  chacune 

proportion  de  ses  facultés.  Arfetide,  investi  d'un 

voir  qui  le  rendait  en  quelque  sorte  arbitre  des  ir 

la  Grèce,  entré  pauvre  dans  cette  administration, 

pauvre  encore.  Il  imposa  cette  taxe,  non  seuleme 

de  désintéressement  que  de  justice,  mais  avec  ui 

qui  le  rendit  agréable  à  tout  le  monde.  Les  anci 

coup  vanté  le  siècle  de  Cronos  :  les  alliés  des  A 

brèrent  celteimposition  d'Aristide  comme  l'âge  d' 

surtout  lorsqu'ils  se  virent^  peu  de  temps  apr< 

double  et  au  triple.  »  Aristide  ayant  fait  jurer  i 

l'observation  de  l'alliance,  la  jura  lui-môme  au 

niens,  et,  prononçant  des  malédictions  contre  les 

jeta  dans  la  mer  des  masses  de  fer  ardentes. 

Dèlos,  centre  religieux  des  Ioniens,  avait  été  c 

siège  delà  fédération,  mais  les  lies  doriennes  de 

des,  les  îles  aioliennes  de  Lesbos  et  de  Ténédos  ( 

ainsi  que  Byzance  et  les  villes  de  la  Chalkidique. 

fondée,  non  sur  des  affinités  de  race,  mais  sur 

nauté  d'intérêts. 

Réforme  démocratique  à  Athènes.  —  L 
de  la  confédération  de  Dèlos  avait  augmenté  la  ] 
ristide  ;  Plutarque  lui  attribue  une  mesure  de 
rieure  qui  dut  aussi  lui  concilier  la  faveur  du  p 
tide  s'apercevant  que  le  peuple  cherchait  à  rendi 
ment  démocratique,  sentit  que  d'un  côté  il  mér 
égards  après  avoir  montré  tant  de  valeur  dans  1 
que  de  l'autre  il  ne  serait  pas  facile,  lorsqu'il  av 
la  main  et  qu'il  était  enflé  par  ses  victoires,  de 
la  force.  11  fit  donc  rendre  un  décret  qui  portait 
ment  serait  commun  à  tous  les  citoyens  et  qu'oi 
distinctement  les  archontes  parmi  tous  les  Ail 


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ÉLIGIBILITÉ   UNIVERSELLE.  407 

avait  peut-être  une  autre  raison  pour  rendre  l'archontat,  et 
et  par  suite  l'Areiopage,  accessible  à  tous  les  citoyens  sans  dis- 


tinction de  classes  :  l'occupation  de  l'Atlique  par  Xerxès,  et  en- 
suite par  Mardonios,  avait  ruiné  tout  le  monde;  bien  des  famil- 


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408  ÉLIGIBILITÉ  UNIVERSELLE. 

les  riches  avaient  été  réduites  k  la  pauvreté  par  la  guerre  et 
souvent  aussi  par  des  sacrifices  patriotiques.  Il  aurait  été  in- 
juste de  leur  enlever  les  droits  qu'elles  avaient  eus  autrefois.  Il 
faut  se  souvenir  d'ailleurs  que  les  fonctions  publiques  étaient 
entièrement  gratuites.  Celles  qui  exigeaient  une  responsabilité 
pécuniaire,  comme  les  fonctions  de  stratèges,  continuèrent  à 


L'Athcoè  da  temple  d'Aigine. 


être  réservées  aux  citoyens  riches.  Mais  Tarchontat  était  une 
fonction  judiciaire  qui  n'exigeait  pas  le  maniement  des  deniers 
publics.  Un  ouvrier  vivant  de  son  travail  de  chaque  jour  n'au- 
rait pas  pu  s'en  charger,  mais  si  le  peuple  confiait  une  pareille 
fonction  à  un  citoyen  d'une  fortune  très  modeste,  comme  Aris- 
tide lui-môme,  c'est  qu'on  le  croyait  trop  honnête  pour  vendre 
la  justice.  Au  reste  Aristide,  en  proposant  ce  décret,  ne  pouvait 
avoir  en  vue  sa  situation  personnelle,  car  il  avait  été  archonte 


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LES  SCULPTURES  D'AIGINE.  409 

avant  la  guerre,  et  c'est  une  fonction  qu'on  ne  pouvait  remplir 
qu'une  fois.  Celle  de  stratège,  dont  il  fut  plusieurs  fois  chargé, 
empêche  de  croire  qu'il  fût  absolument  pauvre  ;  si  l'État  lui  fit 
construire  un  tombeau,  c'était  sans  doute  pour  honorer  ses 
services,  et  non,  comme  le  dit  Plutarque,  parce  qu'il  n'avait 
pas  laissé  de  quoi  se  faire  enterrer. 

Les  sculptures  du  temple  d'Aigine.  —  La  situation  des 
Athéniens  à  la  tête  de  la  fédération  de  Dèlos  dut  exciter  la 
jalousie  de  Sparte,  mais  les  expéditions  lointaines  n'étaient  ni 
dans  ses  traditions  ni  dans  ses  goûts,  et  le  refus  d'obéissance 


statuettes  décoratives  du  temple  d'Aigiae. 

des  Grecs  d'Asie  lui  permettait  de  se  retirer  sans  honte  d'une 
guerre  qui  devenait  exclusivement  maritime.  Elle  gardait  son 
rang  et  son  prestige  dans  la  Grèce  d'Europe,  car  en  se  retirant 
de  la  lutte  elle  avait  été  suivie  par  ses  alliés  péloponnésiens  et 
par  les  Corinthiens  ei  les  Aiginètes,  qui  n'acceptaient  pas  plus 
qu'au  commencement  de  la  guerre  la  suzeraineté  de  leurs 
rivaux  les  Athéniens]  Aigine  avait  partagé  avec  Athènes  la 
gloire  du  combat  de  Salamine,  sans  avoir  eu  à  souffrir  comme 
elle  de  l'invasion.  Après  la  bataille  de  Platée,  les  Aiginètes 
avaient  attiré  chez  eux,  en  habiles  marchands,  une  bonne 
partie  du  butin.  On  rapporte  généralement  à  celte  époque,  qui 
fut  celle  de  la  plus  grande  prospérité  d'Aigine,  les  fameuses 


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410  LES  SCULPTURES  D'AIGINE. 

statues  de  la  Glyptothèque  de  Munich.  Ces  statues,  qui  or- 
naient les  deux  frontons  du  temple  de  Zeus  Panhellénien  ou  d'A* 
thènè,  sont  le  principal  monument  de  Técole  aiginétique,  dont 
le  représentant  le  plus  fameux  est  Onatas,  un  des  précurseurs  de 
Phidias.  Elles  représentent  les  exploits  des  héros  Aiakides,  an- 
cêtres et  protecteurs  des  Aiginètes.  Dans  le  fronton  occidental, 
on  reconnaît  le  combat  des  Grecs  et  des  Troyens  en  présence 
d'Athènè,  autour  du  corps  de  Patroclos  ou  d'Achille;  dans  le 
fronton  oriental,  dont  il  reste  seulement  quatre  figures,  on 
croit  voir,  d'après  la  ressemblance  de  l'archer  coifiTé  d'une  peau 
de  lion  avec  l'Héraclès  des  monnaies  de  Thasos,  un  combat 
autour  du  corps  d'Oiclès,  tué  par  les  Troyens  dans  la  guerre 
contre  Laomédon.  Ainsi  deux  légendes  parallèles,  figurées  dans 
les  deux  frontons,  traduisent  une  môme  pensée,  la  lutte  des 
héros  d'Aigine,  Télamon  d'un  côté,  ses  fils  Aias  etTeucros  de 
l'autre,  contre  les  Troyens,  et  rappellent  sous  une  forme  my- 
thique la  part  glorieuse  que  prirent  les  Aiginètes  à  la  lutte 
contre  les  barbares,  rapprochement  indiqué  par  le  costume 
donné  à  une  des  figures,  celle  qu'on  désigne  sous  le  nom 
de  Paris. 

Le  caractère  général  de  ces  statues  répond  bien  aux  indi- 
cations qu'on  trouve  dans  les  auteurs  sur  le  style  de  l'école 
d'Aigine  :  des  lignes  dures,  des  attitudes  anguleuses,  des 
mouvements  heurtés,  une  étude  très  consciencieuse  des  formes 
du  corps  et  une  absence  complète  d'expression  dans  les  têtes  ; 
on  reconnaît  l'habitude  de  sculpter  des  athlètes.  Les  cheveux 
sont  régulièrement  bouclés  et  les  barbes  pointues.  Il  reste  des 
traces  de  couleur  sur  les  lèvres,  les  pomettes  des  joues,  les 
vêtements  et  les  armes  ;  des  trous  en  assez  grand  nombre  in- 
diquent qu'il  y  avait  des  ornements  métalliques.  La  statue 
d'Athènè,  qui  occupait  le  milieu  du  fronton,  est  vêtue  d'une 
robe  à  plis  nombreux  et  symétriques,  caractère  que  présen- 
tent aussi  deux  statuettes  trouvées  au  même  endroit  et  qu'on 
désigne  assez  arbitrairement  sous  les  noms  de  Damia  et 
Auxesia,  la  Dèmèter  et  la  Corè  d'Aigine  ;  on  suppose  qu'elles 
ornaient  le  sommet  ou  les  acrotères  du  fronton. 

Prise  d'Eion  et  de  Skyros.  —  La  Thèseion.  —  La  prise 
de  Sestos  et  celle  de  Byzance  permettaient  aux  Grecs  de  com- 


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LA  THÈSEION.  411 

muniquer  par  THelIespont  et  le  Bosphore  avec  les  stations 
commerciales  du  Pont-Euxin  ;  mais  la  guerre  n*était  pas  finie 
tant  que  les  Perses  conservaient  des  positions  sur  les  côtes  de 
Thrace  et  dans  les  lies  au  nord  de  la  mer  Egée.  Les  Athéniens 
et  leurs  alliés  assiégèrent  la  forteresse  d'Eion  sur  le  Strymon. 
Kimon,  qui  commandait  l'expédition,  offrit  aux  assiégés  de 
sortir  librement  et  de  se  retirer  en  Asie,  mais  le  gouverneur 
perse,  appelé  pRT  Bogès  Hérodote,  Butés  par  Plularque,  refusa 
de  capituler;  quand  il  n'eut  plus  de  vivres,  il  jeta  toutes  ses 
richesses  par-dessus  les  murs,  et  ayant  élevé  un  grand  bûcher, 
il  s'y  brûla  avec  ses  femmes,  ses  enfants  et  ses  esclaves.  La 
garnison  fut  réduite  en  servitude.  Eion  devint  plus  tard  le  port 
de  la  colonie  athénienne  d'Amphipolis.  Kimon  s'empara  en- 


La  ThèseloD . 

suite  de  l'île  de  Skyros,  habitée  par  des  pirates  dolopes,  et 
rétablit  la  sécurité  du  commerce  dans  la  mer  Egée.  L'île  fut 
repeuplée  de  colons  athéniens  (470). 

D'après  une  ancienne  tradition,  Thèseus  était  mort  dans 
l'île  de  Skyros.  Kimon  fit  rechercher  ses  ossements  et  les  rap- 
porta en  grande  pompe  à  Athènes.  Les  cendres  du  héros  na- 
tional furent  déposées  dans  un  temple  bâti  et  décoré  par  Micon, 
qui,  comme  tous  les  artistes  de  ce  temps-là,  était  à  la  fois 
peintre,  sculpteur  et  architecte.  Ce  temple,  consacré  à  la  fois 
à  Thèseus  et  à  son  ami  Héraclès,  était  un  lieu  d'asile  où  sq 
réfugiaient  les  esclaves  qui  avaient  à  se  plaindre  de  leur 
maître.  Si  la  plainte  était  fondée,  le  maître  était  obligé  de  les 
vendre  à  un  autre.  Comme  le  temple  d'Aîgine,  auquel  il  res- 


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412  LA  THÈSEION. 

semble  beaucoup,  le  Thèseion  est  d'ordre  dorique,  hexastyle 
périptère,  c'est-à-dire  entourée  de  colonnes  dont  six  de  face. 


C'est  le  monument  le  mieux  conservé  de  l'architecture  grecque. 
Les  sculptures  des  frontons  ont  disparu,  probablement  à  l'é- 


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LA  TRAGÉDIE.  4i3 

poque  où  le  temple  fut  changé  en  église  et  consacré  à  saint 
Georges  ;  mais  il  reste  des  fragments  très  mutilés  des  métopes 
et  de  la  frise  de  la  cella  ;  lord  Elgin  n*osa  pas  les  enlever,  de 
peur  d'offenser  les  chrétiens  d*Alhènes,  qui  ont  transporté  à 
saint  Georges  la  dévotion  de  leurs  ancêtres  pour  Thèseus.  Le 
Thèseion  est  aujourd'hui  un  musée  de  sculptures  antiques;  les 
murs  ont  gardé  quelques  traces  du  stuc  et  des  peintures  dont 
Micon  les  avait  décorés. 

La  tragédie.  —  Pendant  les  fêtes  célébrées  à  l'époque  de 
la  translation  des  cendres  de  Thèseus  k  Athènes,  il  y  eut  uii 
concours  dramatique  dans  lequel  Sophocle,  encore  jeune, 
l'emporta  sur  Aischyle  qui  était  alors  à  l'apogée  de  sa  réputa- 
tion et  qui  avait  fait  jouer  deux  ans  auparavant  sa  tragédie  des 
Perses,  La  poésie  dramatique  était  sortie  de  la  poésie  lyrique 
et  chorale  dans  les  fêtes  de  Dionysos,  célébrées  au  retour  du 
printemps  et  à  l'époque  des  vendantes.  La  tragédie,  ou  chant 
du  bouc,  ne  fut  d'abord  qu'un  développement  du  dithyrambe, 
et  le  dialecte  dorien  resta  toujours  employé  pour  les  chœurs. 
Dès  le  temps  de  Solon  et  de  Peisistrate,  Thespis  d'Icaros  avait 
coupé  les  chants  et  les  danses  des  choristes  au  moyen  de  récits 
faits  par  le  poète  ou  par  un  acteur  (OiroxpiTiQç,  celui  qui  répond). 
Ces  récits  étaient  en  vers  iambiques,  rhythme  approprié  au  ton 
de  la  conversation.  L'acteur  représentait  successivement 
plusieurs  personnages,  grâce  aux  masques  de  toile  dont  l'in- 
vention est  attribuée  à  Thespis.  Les  récits  alternant  avec  les 
chœurs  devinrent  des  dialogues  quand  Aischyle  introduisit  un 
second  acteur  pour  répondre  au  premier,  et  prirent  aux  dépens 
du  chœur  une  importance  toujours  croissante,  ce  qui  faisait 
dire  aux  partisans  de  la  tradition  :  «  Qu'y  a-t-il  là  pour  Dio- 
nysos?» Pour  satisfaire  ces  scrupules  religieux,  Pratinas  de 
Phlious  imagina  le  drame  satyrique  où  le  chœur  était  composé 
de  Satyres,  compagnons  de  Dionysos.  Le  drame  satyrique  for- 
mait le  complément  d'une  trilogie  comprenant  trois  tragédies 
qui  se  rattachaient  ordinairement  au  même  sujet.  En  général 
ce  sujet  était  emprunté  aux  traditions  mythologiques,  surtout 
aux  poèmes  cycliques.  11  y  eut  cependant  des  tragédies  se  rap- 
portant à  des  événements  contemporains,  par  exemple  la,  prise 
de  Milet,  qui  fit  condamner  Phrynichos  à  l'amende,  comme 


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THÉÂTRE  DE  DIONYSOS.  417 

Epicharme  de  Cos,  30us  les  règnes  de  Gélon  et  d'Hiéron  de 
Syracuse. 

Le  théâtre  d'Athènes  fut  d'ahord  en  hoîs  ;  mais  les  gradins 
s'étant  écroulés  pendant  une  représentation,  on  construisit, 
sur  le  côté  méridional  de  l'Acropole,  un  théâtre  en  pierre  dont 
les  restes  ont  été  récemment  retrouvés.  Ce  théâtre  servit  de 
modèle  à  ceux  qui  s'élevèrent  successivement  dans  les  prin- 
cipales villes  de  la  Grèce.  Il  comprenait  trois  parties  ;  l'am- 
phithéâtre composé  de  gradins  en  demi-cercle,  creusés  dans  le 
roc,  avec  des  escaliers  et  des  couloirs,  pouvait  contenir  plus  de 
vingt  mille  speclaleurs.  L'orchestre,  c'est-à-dire  la  place  des 
danses,  était  un  espace  circulaire  entourant  l'autel  des  parfums 
(euf*«Xr,),  et  servant  aux  évolutions  des  choristes,  qui  chantaient 
et  dansaient  par  groupes  sous  la  direction  du  coryphée.  Les 
acteurs  se  tenaient  sur  une  estrade  appelée  avant-scène  (n^ooxi- 
vtcv)  et  plus  élevée  que  l'orchestre.  La  scène  proprement  dite 
consistait  en  un  mur  destiné  à  recevoir  les  décors  et  terminé 
par  deux  ailes  (icapaaxTivi*),  que  nous  appellerions  les  coulisses. 
Les  théâtres  n'avaient  pas  de  toit  ;  les  représentations  avaient 
lieu  en  plein  jour,  à  des  époques  fixes,  sous  la  direction  de  l'ar- 
chonte éponyme,  car  elles  faisaient  partie  du  culte  public.  Le 
poète  instruisait  les  acteurs  et  les  choristes.  Les  frais  étaient  à 
la  charge  du  chorège  ou  conducteur  des  chœurs  ;  la  chorégie 
était  une  de  ces  fonctions  onéreuses  que  le  peuple  imposait  aux 
plus  riches  citoyens  et  qu'on  nommait  Liturgies.  Un  jury  tiré 
au  sort  choisissait  entre  les  pièces  présentées.  Contrairement 
à  cet  usage,  dans  le  concours  qui  eut  lieu  après  la  prise  de 
Skyros,  l'archonte  désigna  comme  juges  Kimon  et  les  autres 
généraux,  que  leurs  succès  récents  rendaient  très  popu- 
laires (469). 

Exil  de  Thémistocle.  Trahison  de  Pausanias.  —  A  me- 
sure que  la  popularité  de  Kimon  avait  grandi,  celle  de  Thémis- 
tocle avait  baissé.  Thémistocle  s'en  affligeait  et  rappelait  ses 
services  avec  une  insistance  que  ses  adversaires  retournaient 
contre  lui.  Ces  revirements  ne  sont  pas  particuliers  à  la  démo- 
cratie: les  rois,  les  présidents,  les  assemblées  souveraines 
changent  de  ministres  selon  les  circonstances  sans  qu'on  les 
accuse  d'ingratitude.  A  Athènes,  l'ostrakisme  était  une  soupape 


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418  TRAHISON  DE   PAÙSANÎAS. 

de  sûreté  contre  le  danger  qui  pouvait  résulter  du  conflit  des 
ambitions  personnelles.  Thémistocle  s'en  était  servi  contre 
Aristide,  Kimon  s'en  servit  contre  Thémistocle,  et  on  vit  plus 
tard  Périclès  s'en  servir  contre  Kimon.  Le  peuple  accordait  ou 
retirait  sa  confiance  selon  Tidée  qu'il  se  faisait  de  l'intérêt  pu- 
blic, et  pouvait,  comme  tout  autre  souverain,  se  tromper  dans 
ses  choix.  Thémistocle  se  retira  à  Argos,  et  il  y  vivait  tranquille- 
ment, avec  les  richesses  qu'il  s'était  procurées  par  des  moyens 
souvent  équivoques,  lorsqu'il  fut  accusé  par  les  Spartiates  d'a- 
voir participé  à  la  trahison  de  Pausanias. 

Les  Spartiates  n'avaient  pas  la  ressource  de  l'ostrakîsme,  et 
Pausanias  les  embarrassait  beaucoup.  On  le  soupçonnait  d'en- 
trelenir  des  intelligences  avec  les  Barbares,  et  quoiqu'on  l'eût 
absous  faute  de  preuves,  on  ne  lui  rendit  pas  le  commande- 
ment. Mais  il  ne  pouvait  se  résoudre  à  redevenir  citoyen  et  à 
s'asseoir  aux  tables  communes.  Il  s'embarqua  sans  permission  ; 
forcé  par  les  Athéniens  de  sortir  de  Byzance,  il  s'arrêta  en  Troas 
et  renoua  ses  intrigues.  Il  écrivit  à  Xerxès  pour  lui  demander  sa 
fille  en  mariage,  promettant  de  lui  soumettre  Sparte  et  toute  la 
Grèce.  Thucydide  cite  cette  lettre  et  la  réponse  de  Xerxès  qui, 
sans  rien  dire  du  mariage  proposé,  l'engage  à  s'entendre  avec 
Artabaze,  offre  de  l'argent  tant  qu'il  en  faudra,  et  des  troupes 
au  besoin.  Pausanias  se  voyait  déjà  satrape,  il  en  prenait  le  cos- 
tume, il  s'entourait  d'une  garde  barbare.  Le  luxe  asiatique  lui 
tournait  la  tête,  comme  plus  tard  à  Alexandre.  Les  Ëphores  lui 
envoyèrent  l'ordre  de  revenir,  et  il  revint,  confiant  dans  la  puis- 
sance de  l'or.  11  ne  se  trompait  pas  tout  à  fait,  à  en  juger  par 
les  ménagements  qu'on  eut  pour  lui.  11  essaya  de  soulever  les 
Hilotes,  fut  dénoncé,  et  on  le  laissa  libre,  sous  prétexte  qu'on 
ne  pouvait  pas  poursuivre  un  Hèracléide  sur  la  déposition  d'un 
esclave.  Il  put  continuer  à  correspondre  avec  Artabaze  ;  mais  le 
domestique  chargé  de  porter  la  lettre,  remarquant  que  les  mes- 
sagers précédents  n'étaient  jamais  revenus,  conçut  des  craintes, 
ouvrit  la  lettre  et  la  porta  aux  Ephores.  Cela  ne  suffit  pas  encore, 
on  voulut  avoir  l'aveu  du  crime  ;  on  dit  à  l'esclave  de  se  réfu- 
gier au  Ténare,  comme  s'il  redoutait  la  colère  de  son  maître. 
C'était  avertir  Pausanias  de  se  tenir  sur  ses  gardes  :  il  ne  com- 
prit pas,  il  vint  au  Ténare  et  pressa  son  domestique  d'accom- 


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FUITE  ET  MORT  DE  THÉMISTOCLE.  419 

plir  sa  mission.  Les  Ephores,  cachés  dans  le  temple^  avaient 
entendu  Tentretien,  la  trahison  était  avouée,  il  fallait  bien  ar- 
rêter le  coupable;  mais  sur  un  signe  que  lui  fit  un  des  Ephores, 
il  courut  vers  le  temple  d'Athènè  à  la  maison  d'airain  et  s*y 
enferma.  La  porte  fut  murée  pour  le  laisser  mourir  dé  faim. 
Cornélius  Népos  ajoute  au  récit  de  Thucydide  un  détail  em- 
phatique :  la  mère  de  Pausanias  apportant  une  pierre  devant 
la  porte. 

Fuite  de  Thémistocle;  sa  mort  chez  les  Perses.  —-  Les 
Spartiates  prétendirent  avoir  trouvé  chez  Pausanias  des  lettres 
prouvant  la  complicité  de  Thémistocle  et  envoyèrent  une  dépu- 
tation  à  Athènes,  pour  demander  qu'il  fût  mis  en  jugement. 
Thémistocle,  alors  retiré  à  Argos,  se  justifia  par  lettres,  mon- 
trant l'invraisemblance  de  l'accusation,  mais  le  parti  aristocra- 
tique, qui  lui  était  hostile,  dominait  alors  à  Athènes,  et  les  amis 
de  Thémistocle  ne  pouvaient  guère  s'opposer  à  un  jugement 
qui  devait  faire  éclater  son  innocence.  Pour  lui,  sachant  qu'on 
ne  doit  pas  compter  sur  l'impartialité  des  juges  dans  un  procès 
politique,  il  s'enfuit  à  Kerkyra,  puis  en  Epire,  et,  échappant 
aux  émissaires  qui  le  poursuivaient,  il  alla  demander  asile  à 
Admèlos,  roi  des  Molosses,  qui  avait  eu  à  se  plaindre  de  lui 
autrefois.  Il  s'assit  devant  le  foyer,  tenant  l'enfant  du  roi  dans 
ses  bras.  Admètos  oublia  ses  griefs,  refusa  de  livrer  le  suppliant 
et  le  fit  conduire  à  Pydna  où  il  s'embarqua  pour  l'Asie.  Xerxès 
venait  de  mourir  assassiné  par  un  de  ses  courtisans,  et  son 
fils  Artaxerxès  lui  avait  succédé.  Thémistocle  écrivit  au  roi  la 
lettre  suivante  :  «  Moi,  Thémistocle,  je^ens  à  toi.  Plus  qu'au- 
cun des  Grecs,  j'ai  fait  du  mal  à  ta  maison  quand  j'ai  été  forcé 
de  me  défendre  contre  l'invasion  de  ton  père,  mais  je  lui  ai 
fait  encore  plus  de  bien  quand  je  n'ai  plus  rien  eu  à  craindre 
et  que  lui-même,  à  son  retour,  courait  de  grands  dangers.  Au- 
jourd'hui, ayant  d'importants  services  à  le  rendre,  je  viens  chez 
toi,  poursuivi  par  les  Grecs  comme  étant  ton  ami.  Je  veux  at- 
tendre un  an  pour  te  rendre  compte  moi-môme  des  motifs  de 
ma  venue  ».  Cette  lettre,  citée  par  Thucydide,  prouve  que  Thé- 
mistocle n'avait  pas  eu  jusqu'alors  de  relations  avec  la  Perse, 
comme  le  prétendaient  les  Spartiates.  La  promesse  vague  de 
grands  services  à  rendre  était  un  prétexte  pour  obtenir  un  asile, 


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420  EMPIRE  MARITIME  D^ATHÈNES. 

et  le  délai  d'un  an  qu'il  demandait  laissait  place  à  rimpréTu. 
Selon  Tusage  des  Perses,  le  roi  lui  donna  le  revenu  de  trois 
villes,  Magnésie,  Lampsakos  et  Myous.  Thucydide  ne  parle  pas 
de  son  séjour  à  la  cour  de  Perse,  ni  des  détails  donnés  par 
Plutarque  sur  la  fin  de  sa  vie;  il  dit  seulement  que  Thémistocle 
mourut  de  maladie,  et  que  le  bruit  courut  qu'il  s'était  empoi- 
sonné parce  qu'il  lui  était  impossible  de  tenir  les  promesses 
qu'il  avait  faites  au  roi. 

La  fédération  de  Délos  se  change  en  empire  athé- 
nien. —  La  prolongation  de  la  lutte  contre  les  Barbares  com- 
mençait à  fatiguer  les  confédérés  de  Dèlos,  et  malgré  les  ser- 
ments prêtés  sur  les  masses  de  fer,  plusieurs  auraient  voulu  se 
retirer  de  la  ligue.  Mais  les  Athéniens,  qui  en  étaient  les  chefs, 
regardaient  comme  un  devoir  de  la  maintenir  dans  sonintégrité 
et  s'attribuaient  le  droit  de  punir  les  défections.  L'île  de  Naxos, 
la  plus  importante  des  Kyclades,  essaya  de  se  détacher  de  l'al- 
liance. Après  un  siège  dirigé  par  Kimon,  la  ville  fut  prise,  ses 
fortifications  rasées,  et  les  Naxiens  cessèrent  d'être  considérés 
comme  alliés  pour  devenir  sujets  et  tributaires  d'Athènes.  «  Ce 
fut,  dit  Thucyjiide,  la  première  ville  alliée  qui  fut  réduite  à  la 
condition  de  sujette.  D'autres  eurent  ensuite  le  même  sort, 
suivant  les  circonstances.  Les  défections  des  alliés  eurent  dif- 
férentes causes.  Les  principales  furent  le  refus  de  contributions 
en  argent  ou  en  vaisseaux,  et  pour  quelques-unes  le  refus  de 
servir  dans  les  armées  ;  car  les  Athéniens  exigeaient  ces  tributs 
à  la  rigueur,  et  ils  faisaient  ainsi  des  mécontents  en  obligeant 
aux  fatigues  des  gens  qui  n'avaient  ni  l'habitude  ni  la  volonté  de 
les  supporter.  En  outre,  ils  ne  commandaient  plus  avec  la  même 
douceur,  ils  ne  se  montraient  plus  les  égaux  de  leurs  compa- 
gnons d'armes,  et  ils  avaient  moins  de  peine  à  réduire  ceux  qui 
les  abandonnaient.  On  pouvait  en  accuser  les  alliés  eux- 
mêmes  :  paresseux  à  faire  la  guerre  et  à  s'éloigner  de  leurs 
foyers,  la  plupart,  au  lieu  de  fournir  leur  contingent  en  vais- 
seaux et  de  les  monter  eux-mêmes,  s'étaient  imposé  des  taxes 
proportionnées  à  la  dépense.  Comme  ils  contribuaient  aux  frais, 
les  Athéniens  augmentaient  leur  marine,  et  les  alliés,  quand  il 
leur  arrivait  de  tenter  une  défection,  se  trouvaient  sans  prépa- 
ratifs et  sans  ressources  pour  la  soutenir.  »  C'est  ainsi  que  la 


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BATAILLE  DE  L'EURYMÉDON.  421 

fédération  de  Dèlos  se  transforma  peu  à  peu  en  un  empire 
athénien.  Selon  Plutarque,  ce  changement  fut  Tœuvre  de 
Kimon.  Au  lieu  d'irriter  les  alliés  en  exigeant  le  service  mili- 
taire, comme  le  faisaient  les  autres  généraux,  il  en  acceptait 
Téquivalent  sous  forme  d'impôt,  et  c'est  ce  qui  explique  l'aug- 
mentation successive  du  tribut  fixé  d'abord  par  Aristide.  Si 
l'union  fédérale  n'eut  qu'une  existence  éphémère,  ce  n'est 
pas  l'ambition  d'Athènes  qu'il  en  faut  accuser,  c'est  le  défaut 
d'esprit  militaire  et  de  discipline  nautique  chez  les  alliés. 
Us  seraient  restés  les  égaux  d'Athènes  s'ils  avaient  eu  son 
énergie. 

Bataille  de  l'Eurymédon.  —  Embellissements  d'Athè- 
nes. —  Les  Athéniens  justifièrent  leur  hégémonie,  ou  com- 
mandement militaire,  par  une  suite  de  victoires  sur  les  Bar- 
bares. Kimon,  à  la  tète  de  deux  cents  galères  athéniennes  et 
de  cent  fournies  par  les  alliés,  chassa  ce  qui  restait  encore  de 
garnisons  persanes  en  Carie  et  en  Lykie.  Les  Perses  avaient 
rassemblé  leur  flotte  et  leur  armée  à  l'embouchure  de  l'Eury- 
médon, en  Pamphylie.  La  flotte,  composée  de  deux  cents 
vaisseaux,  se  tenait  à  l'ancre  en  attendant  un  renfort  de  quatre- 
vingts  vaisseaux  phéniciens  qui  devaient  venir  de  Kypros.  Mais 
Kimon,  prévenant  leur  arrivée,  prend  ou  détruit  toute  la  flotte 
ennemie,  et  le  môme  jour  fait  débarquer  ses  troupes  et  livre 
bataille  à  l'armée  de  terre,  qui  est  battue  et  dispersée  malgré 
une  énergique  résistance.  Les  Grecs  firent  un  nombre  consi- 
dérable de  prisonniers  et  s'emparèrent  d'ui\  immense  butin. 
Pour  compléter  cette  double  victoire,  Kimon  coule  ou  saisit 
les  quatre-vingts  vaisseaux  phéniciens  qui  n'avaient  pu  prendre 
part  au  combat  (466). 

«  Les  dépouilles  des  vaincus,  dit  Plutarque,  furent  vendues 
à  l'encan,  et  l'argent  que  le  peuple  en  retira  fut  employé,  entre 
autres  dépenses,  à  construire  la  muraille  méridionale  de  la 
citadelle.  On  jeta  aussi  les  premiers  fondements  des  longues 
murailles  qui  furent  élevées  plus  tard  et  qu'on  nomme  les 
jambes,  et  comme  le  sol  était  marécageux,  Kimon  le  fit  raffer- 
mir et  consolider  à  ses  frais.  Le  premier  il  embellit  la  ville  de 
ces  promenades  et  lieux  de  conversation  qui  furent  si  recher^ 
chés  depuis.  11  entoura  de  platanes  la  place  publique,  et  du 

L.  M.  —  HiST.  DES  GUBGS.  2i- 

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422  EMBELLISSEMENTS  D'ATHÈNES. 

terrain  nu  et  aride  de  l'Académie,  il  fit  un  parc  arrosé  de 
fontaines,  avec  des  champs  de  courses  et  de  frais  ombrages.  )» 
Parmi  ces  promenades  publiques  il  faut  citer  le  Portique  des 
peintures,  irctxtXr.  oroà,  décoré  de  peintures  par  Polygnote  de 
Thasos,  Micon,  Farcbitecte  du  temple  deThèseus,  etPanainos, 
frère  de  Phidias.  Polygnote  représenta  la  ruine  de  Troie,  sujet 
qu'il  traita  plus  tard  dans  la  Leschè  de  Delphes.  Micon  peignit 
les  combats  des  Athéniens  contre  les  Amazones,  et  Panainos 
la  bataille  de  Marathon.  Selon  Pline,  on  reconnaissait,  parmi 
les  Athéniens,  Callimachos,  Miltiade,  et  Kynègeiros,  frère 
d'Aiscbyle;  parmi  les  Barbares,  Datis  et  Artapberne.  Le  petit 
temple  ionique  de  la  Victoire  sans  ailes,  dont  les  ruines  subsis* 
tent  encore,  parait  avoir  été  élevé  à  Toccasion  des  victoires  de 
Kimonsurles  Perses.  Les  sculptures  delà  frise,  dont  une 
partie  est  au  British  Muséum,  se  rapprochent  par  le  style  de 
celles  du  Thèseion.  Sur  la  balustrade  qui  entourait  le  temple, 
il  reste  quelques  débris  de  bas-reliefs  d'un  autre  caractère, 
une  Victoire  montant  sur  un  char,  une  autre  ôtant  ses  sandales; 
on  les  croit  de  l'époque  de  Praxitèle. 

Libéralité  de  Kimon.  —  Les  temples,  les  portiques,  les 
gymnases,  les  jardins  publics^  qui  formaient  le  patrimoine 
commun  du  peuple^  contrastaient  par  leur  élégance  avec  la 
simplicité  des  demeures  particulières.  11  y  avait  peu  de  luxe 
dans  la  vie  privée.  La  disproportion  des  fortunes  n'était  pas 
très  grande,  surtout  dans  les  premiers  temps  qui  suivirent 
l'invasion  des  Mèdes.  Les  riches  consacraient  leur  argent  aux 
embellissements  de  la  ville,  aux  besoins  du  peuple,  à  son  édu* 
cation,  à  ses  fêles  nationales,  et  n'avaient  garde  de  mépriser  le 
peuple,  qui  disposait  des  fonctions  publiques  ;  ces  fonctions, 
quoique  purement  honorifiques,  n'en  étaient  pas  moins  recher- 
chées. Toute  misère  était  bientôt  soulagée,  car  la  bienfaisance, 
qui  corrige  les  inégalités  sociales,  est  la  vertu  des  hommes 
libres,  comme  l'indiqué  le  mot  môme  de  libéralité.  Kimon, 
qui  s'était  enrichi  par  ses  victoires  sur  les  Perses,  où  il  avait 
reçu,  comme  général,  une  part  de  butin,  faisait  de  ses  biens 
un  noble  usage.  Il  avait  abattu  la  clôture  de  ses  champs  et  de 
ses  vergers  pour  permettre  à  tout  le  monde  d'en  cueillir  les 
fruits.  Il  y  avait  tous  les  jours  chez  lui  un  souper  simple  mais 


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SIÈGE  DE  THâSOB.  423 

suffisant  pour  un  grand  nombre  de  convives,  et  tous  ceux  qui 
se  présentaient  étaient  admis.  Quand  il  sortait,  des  domestiques 
le  suivaient,  portant  de  bons  manteaux  qu'ils  déposaient  en 
silence  sur  les  épaules  des  vieillards  indigents.  Cette  géné- 
rosité n'était  pas  dangereuse  pour  la.morale  publique,  car  nul 
ne  peut  songer  à  corrompre  tout  une  nation  ;  cependant  elle 
augmentait  le  crédit  du  parti  dont  Kimon  était  le  chef.  Ses 
adversaires  politiques,  Ephialtès  et  le  jeune  Périclès,  fils  de 
Xanthipposi  n'étant  pas  assez  riches  pour  lutter  de  popularité 
sur  ce  terrain-là,  cherchaient  des  moyens  d'augmenter  la  puis- 
sance du  peuple,  ce  qui  n'était  pas  facile,  car  elle  était  à  peu 
près  illimitée.  Ces  rivalités  tournaient  au  profit  de  la  démocra- 
tie. Les  dignités  étant  gratuites,  l'ambition  n'était  que  le  désir 
légitime  de  servir  la  patrie.  Les  plus  illustres  familles  se  dispu- 
taient la  faveur  du  peuple.  Il  la  leur  accordait  sans  jalousie  ; 
quelle  gloire  ne  se  perdait  dans  la  sienne?  Le  soleil  n'est  pas 
jaloux  d'un  de  ses  rayons.  La  démocratie  avait  ses  nobles  pour 
la  servir,  comme  Louis  XIV  a  eu  les  siens  ;  mais  la  dignité  des 
Eupatrides  n'avait  pas  à  souffrir  de  cette  déférence,  car  le  peuple 
pouvait  dire  sans  métaphore  :  «  L^État,  c'est  moi.  » 

Sié§pe  de  Thasos.  — Tremblement  de  terre  à  Sparte. 
—  Révolte  des  Messéniens.  —  Les  victoires  des  Athéniens 
les  avaient  rendus  maîtres  de  la  mer  Egée  ;  ils  voulurent  assu- 
rer leur  domination  maritime  par  des  colonies.  Dix  mille 
hommes,  recrutés  tant  parmi  eux  que  parmi  leurs  alliés,  s'éta- 
blirent aux  Neuf- Voies,  entre  les  deux  branches  du  Strymon, 
au-dessus  d'Eion.  Mais  la  nouvelle  colonie  eut  à  lutter  à  la  fois 
contre  les  Thraces  Ëdoniens,  qui  habitaient  le  pays,  et  contre 
les  Thasiens  qui  revendiquaient  la  propriété  des  mines  d'or  de 
Scaptè  Hylè.  Les  colons  s'étant  avancés  dans  l'intérieur  de  la 
Thrace,  furent  en  grande  partie  exterminés  pas  les  Ëdoniens. 
Pendant  ce  temps,  les  Thasiens,  battus  par  une  flotte  athénienne 
et  assiégés  dans  leur  lie,  demandèrent  aux  Spartiates  de  faire 
une  diversion  en  leur  faveur  en  se  jetant  sur  l'Attique.  L'al- 
liance qui  avait  été  contractée  entre  Sparte  et  Athènes  au 
temps  de  l'invasion  de  Xerxës  subsistait  encore  ;  cependant, 
suivant  l'assertion  de  Thucydide  qui  n'est  peut-être  que  l'écho 
d'un  bruit  répandu  à  Athènes  de  son  temps,  les  Spartiates, 


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424  RÉVOLTE  DES  MESSÉNIENS. 

jaloux  des  progrès  de  la  puissance  athénienne,  promirent  secrè- 
tement leur  assistance  aux  Thasiens,  mais  un  tremblement  de 
terre  qui  survint  à  cette  époque  les  empêcha  de  tenir  cette 
promesse.  Vingt  mille  personnes  périrent,  selon  Dîodore,  et  il 
ne  resta  que  cinq  maisons  debout  à  Sparte  (464).  Les  Hilotes, 
les  Messéniens  et  quelques-uns  des  Périœkes  profitèrent  de  ce 
désastre  pour  se  soulever.  Ils  ne  purent  s'emparer  de  la  ville, 
grâce  à  Ténergie  du  roi  Archidamos  qui  avait  mis  tout  le  peu- 
ple en  armes,  mais  ils  se  retirèrent  dans  la  forteresse  d'Ithômè 
où  ils  se  défendirent  pendant  dix  ans  :  c'est  ce  qu'on  a  nommé 
la  troisième  guerre  de  Messénie.  Quant  aux  Thasiens,  après 
trois  ans  de  siège,  ils  se  rendirent  aux  Athéniens  qui  les  obli- 
gèrent à  détruire  leurs  murailles,  à  livrer  leurs  vaisseaux,  leurs 
possessions  sur  le  continent  avec  leurs  mines  d'or,  et  à  payer  , 
une  forte  amende  et  un  tribut  annuel  (463). 

Siège  d^Ithômè.  —  Renvoi  des  troupes  athéniennes. 
—  Le  peuple  ne  fut  pas  satisfait  delà  conduite  de  Kimon  dans 
la  campagne  de  Thrace  ;  on  disait  qu'il  aurait  pu  s'emparer  de  la 
Macédoine  et  on  l'accusa  de  s'être  laissé  gagné  par  les  présents 
du  roi  Alexandre.  Cependant  Périclès,  touché,  dit-on,  par  les 
prières  d'Elpinikè,  sœur  de  Kimon,  soutint  mollement  l'accu- 
sation, et  il  fut  absous.  Mais  son  crédit  baissa.  On  lui  repro- 
chait surtout  son  attachement  pour  les  Spartiates  ;  il  les  pro- 
posait souvent  pour  modèle  ;  il  admirait  leur  discipline  militaire 
et  leurs  institutions  aristocratiques,  et  il  croyait  en  outre  que 
l'alliance  avec  Sparte  était  nécessaire  pour  continuer  énergi- 
quement  la  guerre  contre  les  Perses.  Mais  d'autre  part,  ceux 
qui  rêvaient  pour  Athènes  le  commandement  général  de  la 
Grèce  ne  voyaient  dans  les  Spartiates  que  des  rivaux  à  supplan- 
ter. La  question  ne  tarda  pas  à  se  poser  devant  le 'peuple.  Les 
Spartiates,  ne  pouvant  venir  à  bout  de  réduire  les  Messéniens 
retranchés  dansUhômè,  demandèrent  du  secours  à  leurs  alliés, 
et  en  particulier  aux  Athéniens  qui  passaient  pour  plus  habiles 
qu'eux  dans  l'art  des  sièges.  Éphialtès  protesta  énergiquement 
contre  cette  demande  ;  il  fallait,  disait-il,  fouler  aux  pieds  l'or- 
gueil de  Sparte  et  la  laisser  enseveUe  sous  ses  ruines.  Kimon  fit 
appel  au  sentiment  panhellénique  :  «  On  ne  peut  pas,s*écria-t-il, 
laisser  la  Grèce  boiteuse.  »  Son  opinion  prévalut  et  le  secours  fut 


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L»AREIOPAGE  AMOINDRI.  425 

envoyé.  Mais  quand  les  Athéniens  furent  arrivés  devant  Ithômè, 
les  Spartiates  conçurent  des  craintes  qui  n'étaient  peut-être  pas 
sans  fondement.  «  Voyant,  dit  Thucydide,  que  la  place  n'était 
pas  enlevée  de  vive  force,  ils  craignirent  l'humeur  audacieuse 
des  Athéniens  et  leur  caractère  remuant.  Ils  ne  les  regardaient 
pas  comme  un  peuple  de  leur  race,  et  ils  appréhendaient  que, 
pendant  leur  séjour  devant  Ithômè,  ils  ne  se  laissassent  gagner 
par  ceux  qui  y  étaient  renfermés  et  ne  causassent  quelque 
révolution.  Ce  furent  les  seuls  des  alliés  qu'ils  renvoyèrent, 
sans  manifester  cependant  leurs  soupçons,  mais  en  déclarant 
qu'ils  n'avaient  plus  besoin  de  leur  secours.» 

L'Areiopage  amoindri.  Exil  de  Kimon.  Assassinat 
d*Ëphialtès.  —  C'était  un  aflFront  pour  Athènes  et  un  grave 
échec  pour  le  parti  conservateur  dont  Kimon  était  le  chef.  Il  y 
eut  un  revirement  dans  l'opinion  publique.  Éphialtès,  soutenu 
par  Périclès,  attaqua  résolument  l'Areiopage,  la  plus  ancienne 
des  institutions  d'Athènes  et  le  dernier  rempart  de  l'aristocra- 
tie. Tandis  que  toutes  les  autres  fonctions  étaient  temporaires, 
l'Areiopage,  composé  d'anciens  archontes,  formait  un  corps  ina- 
movible et  par  conséquent  irresponsable  et  hostile  à  toutes  les 
innovations.  Les  Athéniens  étaient  trop  attachés  à  leurs  tradi- 
tions pour  supprimer  une  magistrature  antérieure  à  la  consti- 
tution de  Solon  et  qu'avaient  respectée  les  réformes  de  Cleis- 
thénès.  La  lutte  fut  très  vive.  Dans  les  EuménideSy  qui  forment 
la  dernière  partie  de  sa  magnifique  trilogie  d'Ore^tèSf  le  vieil 
Aischyle  rappela  au  peuple  l'origine  sacrée  de  l'Areiopage,  ce 
tribunal  auguste,  institué  jadis  par  Athènè  pour  juger  un  cas 
de  conscience  si  difficile  qu'elle-même,  la  Sagesse  divine,  n'o- 
sait pas  se  prononcer.  Mais,  sans  détruire  l'Areiopage,  on 
pouvait  annuler  son  influence.  Éphialtès  et  Périclès  lui  enlevè- 
rent quelques-unes  de  ses  attributions  administratives  et  judi- 
ciaires, on  ne  sait  pas  exactement  lesquelles.  Kimon,  qui 
s'opposait  à  ce  changement,  fut  banni  par  un  vote  d'ostrakisme. 
Quelque  temps  après,  Éphialtès  fut  assassiné  par  un  homme  de 
Tanagra  soudoyé  par  les  aristocrates.  Il  s'était  fait  beaucoup 
d'ennemis  par  son  ardeur  à  poursuivre  les  magistrats  corrompus 
ou  injustes.  Son  honnêteté  est  attestée  par  Plutarque,  en  géné- 
ral peu  favorable  au  parti  populaire.  Éphialtès  offre  un  de^ 

2i. 

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426  INDEMNITÉ  DES  JURÉS. 

premiers  exemples  d'une  direction  politique  exercée  sans  titre 
officiel  par  des  citoyens  qu'on  nommait  démagogues,  c'est-à- 
dire  chefs  du  peuple. 

Indemnité  pour  rezercice  des  devoirs  civiques.  — 
Périclès,  qui  s'était  associé  à  la  réforme  constitutionnelle 
d'Ëpbialtès,  la  compléta  par  l'établissement  d'un  jury  rétribué. 
Ce  jury  était  formée  de  cinq  mille  citoyens  tirés  au  sort  chaque 
année  et  partagés  en  dix  tribunaux  (iixaariipta).  Il  y  avait  une 
réserve  de  mille  jurés  supplémentaires.  L'ensemble  du  Jury 
formait  THèliée,  et  les  jurés  s'appelaient  Hèliastes  parce  qu'ils 
jugeaient  en  plein  soleil.  Ils  votaient  au  scrutin  secret,  sous  la 
présidence  de  l'archonte  qui  avait  instruit  l'affaire.  Des  pré- 
cautions furent  prises  contre  les  tentatives  de  corruption  ou 
d'intimidation.  Les  plaideurs  ne  savaient  pas  d'avance  quelle 
fraction  de  l'Hèliée  aurait  à  juger  leur  procès.  Le  nombre  des 
jurés  n'était  pas  toujours  le  môme,  mais  il  était  toujours  très 
considérable.  Il  fallait  les  indemniser  de  la  perte  de  leur  temps. 
  l'origine  l'indemnité  fut  fixée  à  une  obole,  environ  15  cen- 
times ;  plus  tard  cette  somme  parut  insuffisante,  et  Gléon  la  fit 
porter  à  trois  oboles  ;  c'était  ce  que  recevaient  les  mateloté^sur 
les  galères  de  l'État;  les  soldats  recevaient  une  solde  de  deux 
oboles  et  deux  pour  la  nourriture.  On  trouva  naturel  d'attribuer 
aux  citoyens  siégeant  à  l'assemblée  politique,  qui  se  tenait  trois 
fois  par  mois,  la  môme  indemnité  qu'aux  jurés  siégeant  dans 
les  tribunaux,  mais  il  n'est  pas  certain  que  cette  rétribution, 
qu'on  nommait  ecclésiastique  pour  la  distinguer  de  la  rétri- 
bution judiciaire,  ait  été  instituée  dès  le  temps  de  Périclès. 

11  semble  au  premier  abord  qu'en  attachant  un  salaire,  si 
modique  qu'il  fût,  à  l'exercice  des  droits  politiques,  on  s'écar- 
tait du  grand  principe  du  gouvernement  gratuit,  universelle- 
ment admis  dans  toutes  les  cités  grecques  ;  mais  cette  dévia- 
tion n'est  qu'apparente.  L'indemnité  du  citoyen  d'Athènes, 
môme  lorsqu'elle  fut  élevée  au  triobole,  ne  représentait  que  le 
prix  de  la  journée  de  travail  d'un  ouvrier  ordinaire.  Sans  cette 
indemnité,  les  Thètes,  c'est-à-dire  les  prolétaires,  auraient  été 
écartés  en  fait,  sinon  en  droit,  de  l'assemblée  délibérante,  du 
jury  et  de  toutes  les  fonctions  tirées  au  sort.  Mais  les  fonctions 
répondant  à  ce  que  nous  appelons  le  pouvoir  exécutif  restèrent 


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COALITION  CONTRE  SPARTE.  427 

toujours  électives  et  gratuites,  notamment  la  plus  importante, 
celle  des  Stratèges  ou  généraux,  et  quelques  charges  très  oné- 
reuses qu'on  imposait  aux  riches  et  qu'on  nommait  Liturgies, 
par  exemple  celle  des  Triérarques,  qui  équipaient  à  leurs  frais 
les  navires  de  TÉtat,  celles  des  Chorèges  qui  payaient  les  re- 
présentations dramatiques  et  musicales.  Nous  disons  souvent 
que  nos  institutions  sont  démocratiques  :  cela  ferait  rire  les 
Athéniens,  qui  ont  inventé  le  mot  et  la  chose.  Leur  système 
d'impôts  sur  les  hauts  fonctionnaires  et  de  rétribution  égali- 
taire  pour  l'exercice  des  devoirs  civiques  est  exactement  le 
contre-pied  de  cette  échelle  hiérarchique  de  traitements  que 
nous  avons  empruntée  au  bas-empire  romain  sous  prétexte  de 
démocratie. 

Essai  de  coalition  contre  Sparte.  —  En  même  temps  qu'ils 
introduisaient  de  graves  changements  dans  leur  constitution 
intérieure,  les  Athéniens  inauguraient  dans  leurs  relations  ex- 
térieures une  politique  nouvelle.  Tant  qu'avait  duré  la  guerre 
contre  les  Barbares,  il  avait  fallu  sacrifier  l'intérêt  particulier 
d'Athènes  à  l'intérêt  général  de  la  Grèce,  et  pour  cela  ménager 
les  Spartiates,  chefs  reconnus  du  corps  hellénique.  Maintenant 
les  Perses  n'étaient  plus  à  craindre,  les  Grecs  d'Asie  étaient 
délivrés,  et  Athènes,  déjà  à  la  tête  d'une  grande  fédération 
maritime,  pouvait  aspirer  à  prendre,  dans  la  Grèce  d'Europe, 
une  prépondérance  que  les  Spartiates,  occupés  de  leur  guerre  de 
Messénie,  n'étaient  pas  en  état  de  lui  disputer.  Telle  était  l'am- 
bition du  parti  démocratique  dirigé  parPériclès.  L'impertinence 
avec  laquelle  les  Spartiates  venaient  de  refuser  un  secours  qu'eux- 
mômes  avaient  demandé  fournit  une  occasion  d'abjurer  leur 
alliance  et  d'en  contracter  une  avec  leurs  ennemis  héréditaires 
les  Argeiens.  On  fit  entrer  les  Thessaliens  dans  cette  nouvelle 
ligue.  Les  Mégariens,  qui  se  trouvaient  alors  en  querelle  avec 
les  Corinthiens  pour  leurs  limites  réciproques,  s'adressèrent 
aux  Athéniens,  qui  les  reçurent  avec  empressement  dans  leur 
alliance.  Le  territoire  de  Mégare,  quoique  très  exigu,  avait, 
au  point  de  vue  stratégique,  une  importance  capitale.  Les  dé- 
filés de  Gérania  étaient  l'entrée  et  la  sortie  du  Péloponnèse  ; 
la  Mégaris  était  donc  la  clef  de  l'Attique,  et  géographiquement  elle 
en  faisait  partie.  Le  port  de  Pègai  ouvrait  aux  Athéniens  le  golfe 


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428  EXPÉDITION  EN  EGYPTE. 

de  Corinlhe.  Pour  s'attacher  Mégare  aussi  étroitement  que  pos- 
sible et  la  rendre  inaccessible  aux  attaques  des  Péloponnésiens, 
ils  construisirent  deux  murs  de  huit  stades  entre  la  ville  et  le 
port  de  Nisaia,  sur  le  golfe  Saronique.  Mégare  reçut  une  gar- 
nison athénienne  et  devint  un  poste  avancé  d'Athènes.  Sparte, 
qui  n'était  pas  encore  débarrassée  du  siège  d'Ithômè,  n'essa\a 
pas  de  s'y  opposer,  mais  les  Corinthiens,  les  Épidauriens  et  les 
Aiginètes  formèrent  une  coalition  contre  les  progrès  menaçants 
de  la  puissance  athénienne. 

Expédition  en  Egypte.  Siège  et  soumission  d'Aigine.- 
II  était  dangereux  pour  Athènes  d'avoir  des  ennemis  à  ses 
portes,  car  sa  lutte  contre  les  Perses  n'était  pas  terminée. 
L'Egypte,  s'étant  révoltée  en  462  sous  la  conduite  du  Libyen 
Inaros,  avait  demandé  le  secours  des  Athéniens.  Deux  cenls 
vaisseaux,  tant  d'Athènes  que  des  alliés,  partirent  de  Kypros, 
remontèrent  le  Nil,  s'emparèrent  de  deux  quartiers  de  Memphis 
et  assiégèrent  le  troisième,  appelé  le  Mur-Blanc,  où  s'était  ré- 
fugiée la  garnison  perse.  Pendant  que  la  plus  grande  partie  de 
leurs  forces  était  engagée  dans  celte  expédition,  les  Athéniens 
avaient  à  se  défendre  contre  tous  leurs  voisins.  Après  une 
grande  bataille  navale  où  les  Aiginètes  et  leurs  alliés  perdirent 
soixante-dix  vaisseaux,  les  Athéniens,  commandés  par  Léocra- 
tes,  mirent  le  siège  devant  Aigine.  Les  Corinthiens,  pour  opé- 
rer une  diversion,  envahirent  le  territoire  de  Mégare.  11  n'y 
avait  plus  à  Athènes  que  des  vieillards  et  des  enfants.  Myroni- 
dès  les  rassemble  à  la  hâte,  et  avec  cette  armée  improvisée 
remporte  successivement  deux  victoires  (457).  Après  un  siège 
de  neuf  mois,  Aigine,  que  Périclès  appelait  une  taie  sur  l'œil 
du  Pirée,  devint  sujette  et  tributaire  d'Athènes,  dont  elle  avait 
été  si  longtemps  la  rivale.  Ses  murs  furent  démolis,  et  elle  fut 
obligée  de  livrer  le  reste  de  sa  flotte,  qui  avait  partagé  avec 
celle  des  Athéniens  la  victoire  de  Salamine. 

Iie*s  longs  murs.  Bataille  de  Tanagra.  —  Pour  se  dé- 
fendre contre  les  attaques  du  dehors  en  gardant  toujours  leurs 
communications  avec  la  mer,  les  Athéniens  réunirent  la 
ville  aux  ports  de  Phalère  et  du  Pirée  par  deux  longs  murs, 
l'un  de  six  kilomètres,  l'autre  de  huit  et  demi.  Entre  ces  deux 
murs,  à  une  petite  distance  de  celui  qui  conduisait  au  Pirée, 


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LES  LONGS  MURS.  429 

et  dans  une  direction  parallèle,  on  en  éleva  un  troisième. 
«  L'objet  de  cette  construction,  dit  Letronne,  était  de  rendre 
plus  assurée  la  communication  des  ports  et  d'Athènes,  car 
l'espace  qui  les  séparait  se  trouvait  alors  coupé  en  deux  zones 
parallèles,  de  sorte  que,  si  l'ennemi  venait  à  s'emparer  d'un 
des  longs  murs,  et  conséquemment  à  se  rendre  maître  de 
Tune  des  deux  zones,  la  seconde  restait  encore  pour  la  commu- 
nication ».  Les  longs  murs,  qui  complétaient  l'œuvre  de  dé- 
fense de  Tliémistocle ,  furent  achevés  par  Périclès  malgré 
l'opposition  du  parti  aristocratique.  Cette  opposition  peut 
surprendre,  s'il  est  vrai,  comme  le  dit  Plutarque,  que  les  pre- 
mières assises  de  cette  construction  importante  avaient  été 
posées  par  Kimon.  Mais  il  n'était  plus  là  pour  diriger  et  mo- 
dérer ses  partisans;  ceux-ci  ne  voyaient  de  salut  que  dans 
l'alliance  de  Sparte,  et  Sparte  qui  avait  considéré  le  mur  de 
Thémîstocle  comme  une  menace  pour  son  hégémonie,  devait 
s'inquiéter  bien  davantage  des  longs  murs  de  Périclès.  Comme 
la  guerre  de  Messénie  durait  encore,  les  Spartiates  n'osèrent 
pas  rompre  ouvertement  avec  Athènes  ;  mais  une  attaque  des 
Phokiens  contre  la  Doris  offrait  un  prétexte  pour  faire  sortir 
une  armée  du  Péloponnèse.  En  apparence ,  il  ne  s'agissait 
que  de  porter  secours  aux  Doriens,  dont  les  Spartiates  tiraient 
leur  origine.  En  réalité,  on  voulait  provoquer  une  révolution 
à  Athènes  avec  l'appui  du  parti  oligarchique.  En  môme  temps, 
pour  opposer  une  digue  permanente  aux  ambitions  athénien- 
nes, les  Spartiates  rendirent  à  Thèbes,  déconsidérée  par  son 
rôle  dans  la  guerre  médique,  la  suprématie  qu'elle  avait 
autrefois  possédée  sur  la  Boiotie.  Une  armée  athénienne, 
renforcée  par  mille  Argéiens  et  par  des  cavaliers  thessaliens, 
vint  à  la  rencontre  des  Spartiates  sous  les  murs  de  Tanagra. 
Avant  la  bataille,  Kimon  se  présenta,  demandant  à  combattre 
dans  les  rangs  de  sa  tribu.  Le  sénat  des  cinq  cents  lui  en 
refusa  la  permission;  cette  défiance  était  injuste  :  ses  amis 
le  prouvèrent  en  se  faisant  tuer  autour  de  son  armure.  La 
bataille  n'en  fut  pas  moins  perdue,  par  la  trahison  de  la  cava- 
lerie thessalienne.  Les  Spartiates  s'en  retournèrent  en  rava- 
geant la  Mégaris.  Périclès  demanda  et  obtint  du  peuple  le 
rappel  de  Kimon  (456). 


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430  VICTOIRE  DES  OliNOPHYTES,  ^ 

Victoire  des  Oinophytes.  Revers  en  Egypte.  ^  Les 

Athéniens  ne  furent  pas  longtemps  à  réparer  leur  défaite. 
Soixante-deux  jours  après  la  bataille  de  Tanagra,  ils  marchaient 
contre  les  Boiotes  sous  la  conduite  de  Myronidès  et  rempoF 
taient  près  des  Oinophytes  une  éclatante  victoire.  Les  murs 
de  Tanagra  furent  rasés,  les  Opuntiens  durent  livrer  cent  de 
leurs  plus  riches  citoyens  comme  otages,  et  pour  assurer  l'io- 
tluence  d'Athènes  sur  la  Boiotie,  la  Locris  et  la  Phokis,  des 
gouvernements  populaires  furent  établis  dans  toutes  les  villes^ 
Pendant  Tannée  455,  qui  vit  l'achèvement  des  longs  mura^ 
d'Athènes  et  la  capitulation  d'Aigine,  la  flotte   athénienno 
commandée  par  Tolmidès  fit  le  tour  de  Péloponnèse,  brûla 
les  chantiers  des  Lakédaimoniens  à  G^theion  et  à  Mothonè, 
enleva  Ghalkis  d'Acarnanie.  aux  Corinthiens,  Naupactos  aux  "| 
Locriens  Ozoles  et  attira  dans  Talliance  d'Athènes  les  Achaieos  | 
et  les  lies  de  Zakynthos  et  de  Képhallènia.  Les  Messèniens 
assiégés  depuis  dix  ans  dans  Ithômè  ayant  été  obligés  de  capi- 
tuler, Tolmidès  les  établit  à^Naupactos,  où  leur  présence  devait 
être  pour  Sparte  une  perpétuelle  menace.  Athènes  était  arri?ée  | 
à  un  degré  de  puissance  qu'elle  ne  dépassa  plus  et  qu'elle  ne 
garda  pas  longtemps. 

Gomme  un  avertissement  de  l'instabilité  des  choses,  elle 
apprit  l'issue  désastreuse  de  son  expédition  en  Egypte.  Artaxerxès 
y  avait  envoyé  Mégabaze  avec  une  puissante  armée.  Les  par- 
tisans d'Inaros  et  ses  auxiliaires  athéniens  furent  assiégés 
dix-huit  mois  dans  l'Ile  de  Prosopitis.  Les  Perses  détournèrent 
un  des  bras  du  Nil,  mirent  à  sec  la  flotte  athénienne  et  péné- 
trèrent dans  l'île.  Les  Athéniens  incendièrent  leurs  vaisseaux  et 
se  rangèrent  en  bataille  ;  la  plupart  périrent,  quelques-uns  seule- 
ment se  sauvèrent  à  Kyrènè  en  passant  par  la  Libye.  Cinquante 
trirèmes  athéniennes  qui  venaient  renforcer  l'expédition  furgnt 
détruites  dès  leur  arrivée.  L'Egypte,  dont  Tinsurrection  avait 
duré  six  ans,  rentra  sous  le  joug  des  Perses.  Inaros,  pris  par 
trahison,  fut  mis  en  croix.  Un  autre  chef,  nommé  Amyrlaios 
par  les  Grecs,  parvint  à  se  maintenir  dans  les  marais  du 
Delta. 

Mort  de  Kimon.  Fin  de  la  guerre  médique.  —  Kimon, 
rappelé  de  son  exil,  resta  fidèle  à  sa  politique  :  paix  entre  les 


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FIN  DE  LA  GUERRE  MÉDIQUE.  431 

Grecs,  guerre  à  outrance  contre  les  Perses.  Ils  ménagea  une 
trêve  de  cinq  ans  avec  Sparte,  et  aussitôt  qu'elle  fut  conclue, 
il  partit  pour  Kypros  avec  deux  cents  galères,  comptant  passer 
de  là  en  Egypte,  où  les  Athéniens  avaient  une  défaite  à  venger. 
Il  y   a  un  désaccord  complet  entre  Thucydide,  Diodore  et 
Plutarque,  au  sujet  de  cette  expédition  qui  forme  le  dernier 
épisode  des  guerres  médiques.  Selon  Plutarque,  Kimon  mou- 
rut d'une  blessure  ou  d'une  maladie  pendant  le  siège  de  Kition; 
sa  mort  fut  tenue  secrète  par  les  autres  généraux,  et  la  flotte 
revint  en  Attique  sans  être  inquiétée.  Selon  Thucydide,  les 
Athéniens  ayant  abandonné  le  siège  de  Kition  à  cause  de 
la   famine,  livrèrent  devant  Salamine  de  Kypros  un  combat 
de  terre  et  un  de  mer  contre  les  Phéniciens,  les  Kypriotes 
et  les  Kilikiens,  et  furent  vainqueurs  dans  ces  deux  combats. 
Diodore  place  cette  double  victoire  avant  la  mort  de  Kimon» 
Il  ajoute  qu'Artaxerxès  effrayé  envoya  une  ambassade  aux 
Athéniens  pour  demander  la  paix,  qui  fut  conclue  aux  condi- 
tions suivantes  :  le  roi  reconnaissait  l'indépendance  des  villes 
grecques  de  l'Asie  mineure  et  s'engageait  à  ne  pas  envoyer  de 
troupes  à  une  distance  de  trois  jours  de  la  côte,  ni  de  vaisseaux 
au  delà  de  Phasélis  et  des  îles  Chélidoniennes  ;  les  Athéniens 
de  leur  côté  promettaient  de  ne  plus  troubler  le  roi  dans  ses 
domaines.  Thucydide  ne  dit  rien  de  ce  traité.  Plutarque  en 
parle,  mais  il  le  place  après  la  bataille  de  l'Eurymédon.  Grote 
adniet,  malgré  le  silence  de  Thucydide,  l'existence  de  ce  traité  j 
auquel  on  n'aurait  pas  dû  attacher  le  nom  de  Kimon,  et  qui 
ne  peut  sembler  glorieux  pour  les  Grecs  que  si  on  le  compare 
à  celui  qui  fut  conclu  plus  tard  par  Antalkidas.  Kimon  n'aurait 
pas  consenti  à  l'abandon  de  l'Egypte  et  des  villes  grecques  dé 
Kypros  ;  c'eût  été  renoncer  à  la  politique  panhellénique  qu'il 
avait  toujours  défendue.  Cette  politique  n'eut  pas  de  représentant 
après  lui  ;  elle  avait  pour  condition  nécessaire  l'alliance  de 
Sparte  et  d'Athènes,  et  cette  alliance  avait  contre  elle  le  parti 
démocratique,  w  Après  la  mort  de  Kimon,  dit  Plutarque,  rien 
de  grand  ne  se  fit  ou  ne  fut  tenté  contre  les  Barbares.  Les 
Grecs,  animés  les  uns  contre  les  autres  par  les  démagogues, 
sans  que  personne  se  mit  entre  eux  pour  les  séparer,  en  vinrent 
enfin  à  ces  guerres  impies  qui  ont  relevé  la  puissance  des 


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432        DÉFECTION   DES  BOIOTES  ET  DES  MÉGARIENS. 

Perses.  »  Ajoutons,  ce  qui  est  plus  triste  encore,  que  les 
rivalités  des  cités  grecques  ont  préparé  la  domination  des  rois 
de  Macédoine. 

Défection  des  Boiotes  et  des  Mégariens.  Soumission 
de  TËuboia.  —  L'alliance  des  Athéniens  avec  les  Boiotes 
n'avait  d'autre  garantie  que  les  gouvernements  populaires 
établis  dans  les  villes  après  la  bataille  des  Oinophytes.  Mais 
la  démocratie  ne  s'impose  pas,  et  les  peuples  qui  n'ont  pas 
su  la  conquérir  savent  encore  moins  la  conserver.  Les  aristo» 
crates  exilés  s'emparèrent  d'Orchomène,  de  Chéronée  et  de 
quelques  autres  villes.  Les  Athéniens  voulurent  comprimer 
la  révolte  avant  qu'elle  eût  pu  s'étendre,  et  malgré  les  avis  de 
Périclès  qui  les  engageait  à  faire  des  préparatifs  sérieux,  mille 
volontaires  appartenant  pour  la  plupart  à  de  riches  familles 
se  mirent  en  campagne  sous  la  conduite  de  Tolmidès.  La  petite 
troupe  reprit  Chéronée,  mais  aux  environs  de  Coroneia,  elle 
fut  investie  par  des  exilés  d'Orchomène  auxquels  s'étaient 
joints  des  Locriens  et  des  exilés  de  l'Ëuboia.  Tolmidès  fut  tué 
avec  une  partie  de  ses  soldats,  les  autres  furent  emmenés  en 
captivité.  Pour  ravoir  les  prisonniers,  les  Athéniens  abandon- 
nèrent la  Boiotie.  L'Euboia  se  souleva  à  son  tour,  Périclès  partit 
pour  la  réduire  avec  cinq  mille  hoplites  ;  mais  pendant  qu'il 
était  en  marche,  on  apprit  que  les  Mégariens  venaient  de 
massacrer  la  garnison  athénienne  qu'eux-mêmes  avaient 
demandée.  En  même  temps,  la  trêve  de  cinq  ans  étant  expirée, 
une  armée  Spartiate,  commandée  par  le  jeune  roi  Pleistoanax, 
que  les  Éphores  avaient  placé  sous  la  direction  de  Gléandridas, 
envahit  l'Attique  par  les  défilés  de  Gérania  et  ravagea  le  terri- 
toire d'Eleusis.  Cependant  elle  se  retira  presque  aussitôt  sans 
avoir  combattu,  et  Périclès  reprit  sa  marche  vers  l'Euboia. 
Il  la  soumit  et  reçut  les  habitants  à  composition,  excepté  ceux 
d'Histiaia  qui  avaient  massacré  l'équipage  d'un  vaisseau  athé- 
nien ;  il  les  chassa  de  leur  territoire,  qui  fut  partagé  entre 
les  pauvres  d'Athènes.  Les  Lakédaimoniens,  étonnés  de  la 
brusque  retraite  de  leur  armée,  accusèrent  Gléandridas  et  Pleis- 
toanax de  s'être  laissé  corrompre  et  les  exilèrent.  Quand 
Périclès  rendit  ses  comptes  au  peuple,  il  porta  une  somme  de 
dix  talents  sous  ce  titre  :  dépenses  nécessaires  ;  c'est  ce  qu'on 


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LA  TRÊVE  DE  TRENTE  ANS.  433 

nomme  aujourd'hui  les  fonds  secrets.  Le  peuple  comprit  et  ra- 
tifia sans  demander  d'explications. 

La  trêve  de  trente  ans.  —  La  défaite  des  Athéniens 
à  Coronée  leur  fit  perdre  tout  le  fruit  de  la  victoire,  des 
Oinophytes.  Par  le  traité  conclu  pour  trente  ans  en  445, 
ils  durent  abandonner  Troizen  et  les  points  qu'ils  occu- 
paient en  Achaïe,  ainsi  que  les  ports  de  Pègai  et  de  Nisaia 
qu'ils  ne  pouvaient  plus  garder  depuis  la  défection  de  Mé- 
gare,  mais  ils  conservèrent  les  îles  d'Aigine  et  d'Euboia. 
En  limitant  leur  influence  sur  la  Grèce  continentale,  ce 
traité  les  obligeait  à  concentrer  toute  leur  activité  sur  leur 
empire  maritime.  La  guerre  contre  les  barbares  étant  ter- 
minée, il  n'était  pas  facile  de  maintenir  ce  groupement  hié- 
rarchique de  vassaux  et  de  tributaires  qu'on  nommait  l'al- 
liance athénienne.  L'hégémonie,  ou  suzeraineté  militaire  de 
Sparte  semblait  moins  onéreuse,  car  Sparte  n'avait  pas  de 
flotte  à  entretenir  ;  ses  alliés  lui  fournissaient  des  soldais 
en  temps  de  guerre,  mais  en  temps  de  paix  ils  ne  payaient 
pas  de  tribut  et  gardaient  toutes  les  apparences  de  l'auto- 
nomie. Parmi  les  alliés  d'Athènes,  les  îles  de  Chios,  de 
Lesbos,  de  Samos,  qui  fournissaient  des  vaisseaux  et  des  trou- 
pes, étaient  à  peu  près  dans  la  situation  des  Tégéates  ou  des 
Oorinlhiens  parmi  les  alliés  de  Sparte  ;  mais  ceux  des  confé- 
dérés qui,  dès  le  temps  d'Aristide  et  de  Kimon,  avaient  préféré 
s'imposer  un  tribut,  les  Naxiens  et  les  Thasiens  qui  avaient 
essayé  de  se  séparer  de  la  ligue  athénienne,  les  Aiginèles  qui 
n'y  étaient  entrés  que  par  force,  étaient  moins  des  alliés  que 
des  sujets  ;  leur  condition  peut  se  comparer,  non  pas  à  celle 
des  Hilotes  et  des  Messéniens,  car  ils  conservaient  leur  liberté 
individuelle,  mais  à  celle  des  Périœkes  laconiens.  Pour  les 
Grecs  d'Asie,  l'autonomie  communale  n'était  plus  qu'un  sou- 
venir ;  le  tribut  qu'ils  ne  payaient  plus  au  roi  de  Perse,  il 
fallait  le  payer  à  la  République  d'Athènes.  Ce  système,  qui 
faisait  de  la  démocratie  athénienne  une  aristocratie  à  l'égard 
de  ses  alliés,  ne  pouvait  manquer  d'exciter  bien  des  colères. 
Si  Paris,  qui  n'a  que  le  privilège  inutile  d'être  le  siège  du  gou- 
vernement, soulève  par  cela  seul  la  jalousie  des  provinces,  on 
peut  se  figurer  quelle  irritation  devait  produire  l'idée  d'uno 
L.  M.  <-  HisT«  DBS  GftSGS.  25 


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DÉMAGOGIE  DE  PÉRICLÉS.  435 

jours,  un  Athénien  n'avait  au-dessus  de  lui  que  rassemblée 
de  ses  égaux,  parce  que  le  tout  est  supérieur  à  chacune  de  ses 
parties.  Le  peuple  délibérait  sur  les  mesures  proposées  par  le 
Sénat,  ou  conseil  des  Cinq-cents,  volait  les  dépenses  et  ratifiait 
les  comptes,  recevait  les  ambassadeurs,  nommait  des  fonc- 
tionnaires toujours  révocables,  comptables  et  responsables, 
soutenait  les  guerres  qu'il  avait  décrétées  et  obéissait  aux  lois 
qu'il  avait  faites.  Pour  le  diriger,  il  fallait  commencer  par  le 
convaincre,  et  si  Périclès  fut  un  puissant  ministre,  c'est  parce 
qu'il  était  un  grand  orateur.  Sa  puissance,  comme  autrefois 
celle  de  Solon,  était  purement  morale.  Solon  avait  été  le  père 
de  la  dénriocratie  :  Périclès  en  fut  l'amant  ;  il  voulut  en  faire 
une  idole  parfaite,  pour  l'offrir  à  l'admiralion  du  monde,  et  il 
y  réussit  ;  l'Athènes  de  Périclès,  qui  a  mérité  d'être  appelée  la 
Grèce   de  la  Grèce,  occupe  le  zénith  de  la  civilisation.  On 
pourrait  sans  doute  rêver  quelque  chose  de  plus,  une  large 
extension  du  système  démocratique  à  toutes  les  parties  d'un 
vaste  territoire;  on  pourrait  préférer  à  cette  cité  reine  une  fé- 
dération égalitaire  de  cités  libres.  Mais  Périclès  n'était  pas  un 
rêveur:  la  Ligue  de  Dèlos  n'existait  plus,  il  n'essaya  pas  de  la 
ressusciter.  Ce  qu'il  voulait,  c'est  que  le  peuple-roi  fût  digne  de 
commander  à  des  hommes  libres,  qu'il  fût  l'arbitre  de  leurs 
différends,  le  prolecteur  de  leur  commerce,  assez  fort  pour  les 
défendre  par  ses  vaisseaux  et  ses  armées.  Dans  une  monar- 
chie, on  trouve  naturel  que  le  roi  ait  une  liste  civile,  et  de 
magnifiques  palais  pour  y  donner  des  fêles  brillanles  :  Péri- 
clès, qui  prenait  au  sérieux  la  souveraineté  du  peuple,  voulait, 
par  un  emploi  large  mais  judicieux  des  revenus  publics,  attri- 
buer à  ce  souverain  collectif  tous  les  privilèges  de  la  royauté. 
Les  Clèrouchies.  —  Le  développement  rapide  de  l'empire 
maritime  d'Athènes  surexcitait  les  espérances  ;  on  parlait  de 
conquérir  la  Sicile,  l'Étrurie,  Carthage.   Périclès  combattait 
ces  ambitions  téméraires,  trouvant  que  les  Athéniens  n'avaient 
pas  trop  de  toutes  leurs  forces  pour  conserver  ce  qu'ils  possé- 
daient. 11  envoyait  chaque  année  en  course  soixante  galères, 
montées  par  un. grand  nombre  de  citoyens  qui,  soudoyés  huit 
mois  de  Tannée,  se  formaient  à  toutes  les  connaissances  de  la 
marine.  Ces  expéditions  maritimes  montraient  la  puissance 


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LE   DROIT  AU   TRAVAIL.  437 

plus  ferliles  avaient  été  partagées  entre  des  citoyens  d'Athènes, 
devint  le  grenier  de  l'Atlique.  D'autres  furent  établis  à  Naxos 
etàAndros.  Les  Clèrouques  restaient  citoyens  d'Athènes  et 
inscrits  sur  les  registres  de  leurs  dèmes.  Ils  étaient  soumis  aux 
lois  et  aux  décrets  votés  par  le  peuple  et  ils  pouvaient  prendre 
part  aux  délibérations.  Rien  ne  les  obligeait  à  résider  sur  leurs 
terres  ;  l'absence  pour  un  voyage  dans  les  Clèrouchies  était 
acceptée  comme  excuse  valable  par  les  tribunaux,  et  quand 
une  taxe  foncière  était  établie  à  Athènes,  les  Clèrouques  la 
payaient  également.  Lytton  Bulwer  compare  la  situation  des 
Clèrouques  athéniens  dans  les  lies  de  la  mer  Egée  à  celle  des 
propriétaires  anglais  en  Irlande.  Les  Clèrouchies  étaient 
comme  des  garnisons  qu'Athènes  établissait  dans  les  provinces 
de  son  empire  maritime  pour  protéger  son  commerce  et  as- 
surer ses  approvisionnements,  dans  le  cas  d'une  invasion  de 
l'Attique  par  les  Péloponnésiens. 

Le  droit  au  travail.  —  Une  démocratie  ne  doit  pas  laisser 
à  des  particuliers  le  soin  de  nourrir  les  pauvres.  Les  larges 
aumônes  de  Kimon  faisaient  honneur  à  sa  charité,  mais  l'au- 
mône humilie  celui  qui  la  reçoit,  môme  s'il  ne  l'a  pas  deman- 
dée: elle  entretient  la  paresse  sans  détruire  la  misère  et  peut 
devenir  pour  un  ambitieux  un  moyen  de  corruption.  Le  travail 
seul  affranchit  l'homme  sans  l'humilier.  Dans  une  société  bien 
constituée,  il  ne  doit  pas  y  avoir  de  forces  perdues,  et  les  Athé- 
niens avaient  fait  une  loi  contre  l'oisiveté.  «  Chez  nous,  dit  Pé- 
riclès,  dans  Thucydide,  il  n'est  honteux  à  personne  d'avouer 
qu'il  est  pauvre,  mais  ne  pas  chasser  la  pauvreté  par  le  travail, 
voilà  ce  qui  est  honteux.  Les  mêmes  hommes  se  livrent  à  leurs 
affaires  particulières  et  à  celles  du  gouvernement,  et  ceux  qui 
font  profession  du  travail  manuel  ne  sont  pas  étrangers  à  la 
politique.  »  La  question  économique  qui,  sous  le  nom  de  pau- 
périsme, épcîuvante  nos  vieilles  sociétés,  Périclès  l'avait  résolue 
il  y  a  plus  de  deux  mille  ans  par  le  travaiL  Le  peuple  l'ayant 
chargé  de  diriger  les  finances  de  la  république,  il  trouva  dans 
la  reconstruction  des  temples  un  moyen  de  faire  travailler  une 
foule  d'ouvriers  de  toutes  professions.  Comme  il  prévoyait  que 
les  dépenses  qu'il  aurait  à  faire  soulèveraient  une  opposition 
violente,  il  essaya  de  présenter  l'œuvre  qu'il  méditait  comme 


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438  CONCURRENCE  ART 

une  manifestation  panhellénique.  C 
les  Grecs  dans  l'invasion  de  Xerxès 

temples.  Rien  de  pareil  n'était  arrive  uau»  ica  guoAi^^o  h**"  '^" 

Grecs  se  faisaient  entre  eux  ;  la  religion  étant  la  môme  pour 

tous,  les  lieux  sacrés  étaient  toujours  respectés  de  part  et 

d'autre.  Les  Perses  n'avaient  pas  eu  les  mêmes  scrupules; 

leur  religion  était  iconoclaste,  comme  celle  des  Ju 

rapproche  beaucoup.  L'acharnement  déployé  contre 

et  les  statues  des  Dieux  avait  donné  à  la  guerre  Méd 

ractère  d'une  guerre  religieuse.  Les  Grecs  avaient  < 

solu  de  ne  pas  relever  les  temples  détruits  et  d'en  l 

sister  les  ruines  comme  témoignage  de  la  fureur  se 

barbares.  Périclès,  bien  décidé  à  ne  pas  tenir  com] 

résolution,  essaya  de  la  faire  annuler  par  un  vot 

«  Un  décret,  dit  Plutarque,  invita  tous  les  peuples 

rope  et  d'Asie,  toutes  les  villes,  grandes  et  petites, 

des  députés  à  Athènes,  pour  y  délibérer  sur  la  reconsl 

temples  brûlés  par  les  barbares,  sur  les  sacrifices 

voués  aux  Dieux  pour  le  salut  de  la  Grèce  pendani 

enfin  sur  les  moyens  de  rendre  la  navigation  sûre 

la  paix  entre  tous  les  Grecs.  »  Les  Spartiates,  qui  n 

souffert  de  l'invasion,  ne  voulurent  pas  jouer  le  rôle 

ses  dans  un  congrès  qui  aurait  été  tenu  à  Athènes  et 

les  Athéniens;  ils  firent  rejeter  la  proposition  de  P 

Concurrence  artistique.  —  Puisqu'on  ne  voula 

action  commune,  il  fallait  se  préparer  au  concoi 

dans  les  jeux  Olympiques.  Une  lutte  pacifique  alla 

sur  le  terrain  de  l'art,  et  la  palme  allait  être  viveme 

caries  grands  artistes  ne  manquaient  pas.  Dans  s£ 

sance  pour  les  Dieux  qui  l'avaient  délivrée,  la  Grê 

vait  partout  des  temples  et  multipliait  leurs  imag 

temple  d'Aigine,  dont  j'ai  parlé  au  chapitre  précé 

grands  temples  d'Agrigente  et  de  Sélinonle  qui  n 

terminés,  il  faut  citer  le  temple  d'Olympie,  bâli 

Libon  et  déjà  en  partie  orné  de  sculptures.  Le  peinl 

style,  Polygnote  de  ïhasos,  qui,  pendant  la  stratégi 

avait  décoré  le  Thèseion  et  le  Portique  d'Athèn 

probablement  à  cette  époque  les^  peintures  de  1 


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SOLUTION  DU   PROBLÈME  SOCIAL.  4:^9 

Delphes  représentant,  d'un  côté  la  prise  de  Troie,  de  Vautre  le 
séjour  des  morts.  Pour  assurer  Tunité  artistique  des  travaux 
qu'il  voulait  faire  exécuter  à  Athènes,  Périclès  en  fit  donner  la 
direction  générale  à  son  ami  Phidias,  qui  était  à  la  fois  peintre, 
fondeur,  sculpteur  et  toreuticien.  Ce  choix  n'était  pas  une  fa- 
veur ;  il  était  justifié  par  la  réputation  de  Phidias,  dont  on  citait 
plusieurs  ouvrages  célèbres  :  une  statue  d'Athènè  faite  pour 
les  Lemniens  et  qu'on  surnommait  la  Belle;  une  Athènè  guer- 
rière en  bois  doré,  avec  la  tête,  les  pieds  et  les  mains  en  mar- 
bre; c'est  ce  qu'on  appelait  un  acrolithe.  Cette  statue  avait  été 
commandée  par  les  Plataiens  pour  le  temple  qu'ils  élevèrent 
avec  le  butin  de  la  bataille  de  Platée.  Phidias  avait  en  dehors 
d'Athènes  des  rivaux  dignes  de  lui:  les  plus  fameux  étaient  My- 
ron  d'Eleuthère  et  l'Argeien  Polyclète  ;  tous  deux  avaient  eu 
comme  lui  pour  maître  Agéladas  d'Argos.  Myron  s'attachait 
surtout  à  rendre  le  mouvement  et  la  vie  ;  il  devait  sa  réputation 
à  ses  statues  d'animaux  et  à  ses  athlètes  en  bronze,  comme  le 
Coureur  et  le  Discobole.  Polyclète,  qui  fit  plus  tard  pour  Argos, 
sa  patrie,  une  statue  colossale  d'Hère  en  or  et  en  ivoire,  était 
célèbre,  comme  Myron,  par  ses  figures  d'athlètes.  Son  Dory- 
phore, ou  lancier,  devint  le  canon,  c'est-à-dire  la  règle  et  le 
type  des  plus  belles  proportions  du  corps  humain.  C'est  à  lui 
que  Pline  attribue  ce  principe  qui  donne  tant  de  vie  aux  statues 
grecques,  de  faire  porter  le  corps  principalement  sur  une 
jambe.  On  disait  communément  qu'il  était  supérieur  à  Phidias 
dans  la  représentation  des  hommes,  mais  que  Phidias  savait 
mieux  faire  les  Dieux. 

Le  problème  social  résola  par  Part.  — Thémistocle  avait 
entouré  la  ville  d'un  rempart  et  créé  le  port  du  Plrée;  Kimon 
avait  embelli  Athènes  de  jardins,  de  portiques  et  de  gymnases  ; 
il  avait  élevé  le  Thèseion  et  le  temple  de  la  Victoire.  Mais  les  édi- 
fices construits  sous  l'administration  de  Périclès  surpassèrent 
tout  le  reste  par  leur  inimitable  beauté.  Son  nom  et  celui  de 
son  ami  Phidias  sont  restés  attachés  à  l'histoire  du  plus  grand 
siècle  de  l'ait.  Le  triple  monument  des  divinités  protectrices  de 
l'Altique,  sur  l'emplacement  du  vieux  sanctuaire  d'Erechlheus  ; 
le  Parlhénon,  ou  temple  de  la  Vierge,  construit  par  Ictinos  et 
Callicratès  pour  remplacer  celui  qu'avaient  brûlé  les  barbares  : 


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ION  PU  PR 

ule  des  Pr  _  _ 

sacré  de  l'Acropole,  justifient  encore  par 
Uion  unanime  de  l'antiquité.  Dans  la  ville 
théâtre  de  Dionysos  et  on  bâtit  pour  les 
s  un  Odéon,  rappelant  par  la  forme  la  tente 
^riclès  lui-même  qui  en  avait  dessiné  le 
)n  intérieure  et  extérieure  de  tant  de  mo- 
une  foule  innombrable  d'ouvriers  et  d'ar- 
e  marbre,  le  bois,  les  métaux,  pour  exécu- 
i  sculptures,  les  tapisseries.  Tous  les  arts 
it  à  Tarchitecture  pour  exprimer  la  pensée 
e  du  peuple,  l'élevant  au  bien-ôtre  par  le 
ence  du  vrai  et  du  juste,  par  le  spectacle 
^ait  trouvé  dans  Tart,  qui  est  la  forme  la 
1,  la  solution  du  problème  de  la  misère, 
ndément  l'équilibre  de  l'Europe  moderne. 
il  au  peuple,  abondamment  pourvue  de 
défense,  doit  employer  ses  richesses  à  des 
mnent  le  bien-ôtre  pendant  leur  exécution 
venir  une  gloire  immortelle.  Des  ateliers 
nt  en  œuvre  toutes,  sortes  de  matériaux, 
ï  industrielle  et  artistique,  occupent  tous 
n  salaire  à  presque  toute  la  ville,  quipour- 
à  sa  subsistance  et  à  son  embellissement, 
et  leur  force  rendent  propres  au  service 
une  paie  suffisante.  Quant  aux  ouvriers,  à 
5  dans  les  rangs  de  l'armée,  il  fallait  qu'ils 
•  revenus  publics  sans  l'attendre  de  la  pa- 
En  engageant  le  peuple  dans  ces  grandes 
peront  longtemps  toutes  les  industries,  on 
ion  sédentaire  les  moyens  de  profiter  des 
d'y  participer  comme  ceux  qui  sont  sur  la 
lisons  et  en  campagne.  Pour  mettre  en 
rain,  l'ébène,  le  cyprès,  il  faut  des  char- 
\y  des  sculpteurs,  des  fondeurs,  des  teintu- 
ies  ivoiristes,  des  tisserands,  des  peintres, 
ransportcr  ces  matériaux,  il  faut  des  corn- 
lots,  des  pilotes,  des  charrons,  des  voitu- 


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LE  TRAVAIL  LIBRE  ET  LE  TRAVAIL  SERVILE.         441 

riers,  des  charretiers,  des  cordiers,  des  paveurs,  des  mineurs. 
Et  chaque  industrie,  comme  un  général,  enrégimente  toute  une 
armée  de  manœuvres  qui  sont  comme  des  instruments  et  un 
corps  de  réserve.  Ainsi  le  travail  répand  et  distribue  Tabon- 
dance  parmi  tous  les  âges  et  tontes  les  conditions.  » 

Le  travail  libre  et  le  travail  servile.  •—  Ce  discours  de 
Péridès,  rapporté  par  Plularque,  est  le  plus  précieux  des  rares 
documents  qui  nous  restent  sur  l'histoire  du  travail  dans 
l'antiquité.  Il  prouve  d'une  manière  incontestable  qu'à  Athènes, 
dans  la  plus  grande  période  de  la  civilisation,  toutes  les  pro- 
fessions industrielles  étaient  exercées  par  des  citoyens.  Il  y 
avait  cependant ,  à  cette  époque  et  même  antérieurement , 
des  esclaves  à  Athènes.  lis  étaient  employés  au  travail  des 
mines  par  les  fermiers  de  l'État,  à  la  culture  des  terres  par  les 
grands  propriétaires  ruraux;  ils  ramaient  sur  les  vaisseaux 
marchands,  ils  remplissaient  chez  les  riches  citoyens  ces  fonc- 
tions domestiques  qui  gardent  encore  aujourd'hui  le  titre  de 
fonctions  serviles,  et  que  les  citoyens  les  plus  pauvres  auraient 
rougi  d'exercer.  Mais  ce  n'était  pas  à  leur  entretien  que  Péri- 
clès  consacrait  les  fonds  de  l'État.  A  Athènes,  les  grands  tra- 
vaux d'art  n'étaient  pas  exécutés  par  une  population  servile 
comme  les  monuments  de  l'Egypte,  de  l'Assyrie  et  de  la  Perse, 
ni  par  des  prisonniers  de  guerre  comme  la  piscine  d'Agrigente 
et  les  carrières  de  Syracuse;  ils  étaient  réservés  aux  citoyens, 
et  c'est  ce  qui  explique  leur  perfection.  Ce  n'étaient  pas  non 
plus  des  esclaves  qui,  à  la  môme  époque,  gravaient  lès  coins 
des  admirables  monnaies  de  la  grande  Grèce  et  de  la  Sicile, 
qui  modelaient  les  figurines  de  terre  cuite  trouvées  dans  le 
cimetière  de  Tanagra,  qui  peignaient  les  vases  dits  du  beau 
style,  à  figures  rouges  sur  fonds  noir,  d'un  dessin  si  libre  et  si 
pur,  et  ces  fioles  blanches  qu'on  nommait  Lékylhia  et  qui  ne 
se  fabriquaient  qu'à  Athènes,  dans  le  quartier  du  Céramique. 
Plus  tard,  quand  la  continuité  des  guerres  eut  fait  déserter  les 
ateliers,  quand  à  Athènes  et  dans  le  reste  de  la  Grèce  il  n'y 
eut  plus  pour  les  citoyens  d'autre  métier  que  celui  des  armes,, 
comme  cela  était  arrivé  à  Sparte  dès  l'origine,  quand  on 
trouva  plus  commode  de  s'enrichir  par  le  pillage  et  le  butin 
que  par  l'industrie,  alors  le  travail  servile  remplaça  le  travail 

25. 


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444  LES  FRONTONS  ET   LES  MÉTOPES. 

La  religion  et  la  patrie  associées  dans  Tart  (1).  -—  Les 


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hs 


s 

* 


fragments  qui  nous  restent  des  sculptures  du  Parthénon  nous 

(1)  De  la  sculpture  antique  et  moderne^  par  Louis  et  René  Méuard, 
ouvrage  couronné  par  l'Académie  des  beaux-arts,  1867. 


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FRISE  DU   PARTHÉNON.  44î> 

montrent  comment  les  Grecs  comprenaient  Talliance  des  arts 
et  traduisaient  par  la  décoration  d'un  monument  la  pensée 


dont  il  était  le  signe  visible.  Le  plan  conçu  par  Phidias,  en 
exprimant  les  rapports  mutuels  d'Athènè  et  de  la  ville  qui 


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IBRES  DU 

lait  la  glc 
rthénon  u 
}le  \isib! 
xécutèrer 
elqu  es-un 
ïs  élèves. 
Bndant  qi 
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en  Turq 

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Le  fror 
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locales  d 
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la  Gella, 
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occident 
n  des  I 
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moutons 
Ues  et  de 
ts  d'Athè 
^oile  de  la 
t  sous  la 
laque  côti 

Ainsi,  a 
e  célébra 
^ar  une 


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ALLIANCE  DU  RÉEL  ET   DE  L'IDÉAL.  44<> 

optiques  de  la  décoration  monumentale,  les  figures  des  fron- 
tons et  des  métopes,  destinées  à  recevoir  directement  la 
lumière,  sont  en  ronde-bosse  ou  en  haut-relief,  tandis  que 
celles  de  la  frise,  éclairées  seulement  par  le  reflet  du  sol,  n'ont 
qu'une  très  faible  saillie.  Il  faut  remarquer  aussi  la  symétrique 
alternance  des  lignes  verticales  dans  les  triglyphes  et  des  lignes 
diagonales  dans  la  composition  des  métopes. 

Alliance  du  réel  et  de  Tidéal.  —  Le  comte  de  Ghoiseul- 
Gouffier,  ambassadeur  de  France  en  Turquie,  ayant  rapporté 
au  Louvre  une  des  métopes  du  Parthénon  et  une  tablette  de  la 
frise,  lord  Elgin,  ambassadeur  d'Angleterre,  s'autorisa  de  ce 
mauvais  exemple  et  enleva  tout  ce  qui  restait  des  deux  frontons^ 
les  métopes  et  plus  de  deux  cents  pieds  de  la  frise,  pour  le.*^ 
vendre  au  Musée  britannique.  Le  gouvernement  hésitait  à 
donner  la  modique  somme  demandée,  et  l'auteur  du  sacrilège 
flétri  par  Byron  ne  serait  peut-être  pas  rentré  dans  ses  frais 
sans  une  consultation  archéologique  de  Visconti.  L'art  tient 
une  si  petite  place  dans  l'éducation  moderne  que  bien  peu, 
môme  parmi  les  lettrés,  sont  en  état  de  comprendre  la  beau  16 
incomparable  de  ces  marbres  mutilés;  on  les  admire  sur  la 
foi  des  artistes.  Mais  chez  ceux-ci,  du  moins,  l'admiration  est 
sincère  et  unanime.  Les  écoles  les  plus  opposées  sont  d'accord 
sur  ce  point.  Bien  des  théories  exclusives  se  sont  produites  de 
nos  jours,  le  but  de  l'art  est  la  vérité  pour  les  uns,  la  beauté 
pour  les  autres;  mais  devant  ces  marbres  sacrés,  toutes  les 
oppositions  disparaissent,  chacun  y  reconnaît  son  rêve,  car 
là  comme  dans  les  poèmes  d'Homère,  le  réel  se  confond  avec 
l'idéal  ;  c'est  l'hymen  de  la  terre  et  du  ciel.  Les  sculpteurs  ne 
se  lassent  pas  d'admirer  le  modelé  sobre  et  libre  à  la  fois  de 
ces  figures  nues  où  les  plans  sont  accusés  avec  tant  de  fermeté, 
où  se  joignent  à  la  rude  fierté  de  lallure  toutes  les  délicatesses 
de  la  forme,  tous  les  frémissements  de  la  vie.  On  n'est  pas 
moins  frappé  par  la  souplesse  et  la  légèreté  des  draperies, 
dont  les  plis  abondants  suivent  les  formes  et  les  font  valoir,  en 
les  accompagnant  de  moelleuses  ondulations;  par  la  grâce  et 
l'abandon  des  figures  de  femmes,  par  la  simplicité  des  attitudes, 
la  pureté  des  lignes,  l'harmonie  des  proportions.  On  retrouve 
ce  sentiment  intime  et  profond  de  la  vie  dans  toutes  les  parties 


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454  LES  PROPYLÉES. 

ment  fut  détruit  ea  1656  par  une  explosion;  il  n'en  reste  que 
quelques  débris  de  colonnes.  On  ne  sait  pas  si  .les  Propylées 


'^ 


étaient  décorées  de  sculptures;  mais  sur  la  plate-forme,  de- 
vant le  portique  intérieur  et  dans  l'axe  de  la  porte  principale, 


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L'fiHECHTHEION.  455 

comme  pour  protéger  la  citadelle,  se  dressait,  étendant  son 
bouclier  sur  la  \ille,  la  colossale  statue  de  bronze  d'Alhènè 
protectrice,  ouvrage  de  Phidias.  Sur  une  monnaie  athénienne 
on  la  voit  représentée  au  sommet  de  l'Acropole,  entre  les  Pro- 
pylées et  le  Parthénon  qu'elle  dépasse  de  la  tôle  et  des  épaules. 
On  l'apercevait  en  mer  depuis  le  cap  Sounion.  Quand  Alaric 
et  ses  Goths  arrivèrent  devant  Athènes,  cette  grande  statue 
armée  leur  fît  peur,  et  ils  n'osèrent  pas  attaquer  la  ville.  Athènè, 
reniée  par  son  peuple,  le  protégeait  encore . 

L'Erechtheion.  —  On  ignore  quel  fut  l'architecte  de  l'Erech- 
theion  et  à  quelle  époque  il  fut  construit  ;  ou  sait  seulement 
qu'il  ne  fut  achevé  qu'après  l'année  409.  Malgré  le  silence  dé 
Plutarque,  il  est  probable  que  les  premiers  travaux  furent  en- 
trepris pendant  l'administration  de  Périclès,  car  c'était  le  sanc- 
tuaire antique  et  vénéré  de  la  religion  des  Athéniens.  D'après 
l'Odyssée,  la  maison  d'Erechtheus  était  le  séjour  préféré 
d'Alhènè.  L'olivier  spontané  et  le  puits  d'eau  marine,  témoins 
de  la  contestation  d'Alhènè  et  de  Poséidon  au  sujet  de  l'Atti- 
que,  se  trouvaient,  selon  Hérodote,  dans  le  temple  d'iilrechtheus 
brûlé  par  les  barbares.  On  disait  que  le  lendemain  de  l'in- 
cendie, la  souche  de  l'olivier  planté  par  la  Déesse  avait 
poussé  un  rejeton  d'une  coudée.  Le  monument  d'ordre  ioni- 
que élevé  sur  l'emplacement  de  cet  ancien  temple  était  con- 
sacré, selon  Pausanias,  k  Athènè  Polias,  ou  patronne  de  la 
ville,  et  à  Pandrose,  une  des  filles  de  Kekrops  et  la  première 
prêtresse  d'Alhènè  ;  Poséidon  y  avait  un  aulel  sur  lequel  on 
sacrifiait  aussi  à  Érechlheus.  La  nécessité  de  respecter  des 
choses  saintes  qui  se  rattachaient  aux  plus  anciens  souvenirs 
delà  religion  nationale,  l'olivier  sacré,  la  source  d'eau  salée, 
l'empreinte  du  trident  de  Poséidon,  explique  la  disposition 
irrégulière  et  toute  spéciale  de  l'Erechtheion,  l'inégalité  du  sol 
sur  lequel  il  est  bâti,  les  portiques  latéraux  appuyés  sur  l'édi- 
fice principal  et  dans  l'un  desquels  des  statues  de  jeunes 
filles,  au  lieu  de  colonnes,  supportent  l'entablement. 

Ces  jeunes  filles,  que  Pausanias  appelle  Canéphores,  ou 
porte-corbeilles,  et  qu'on  nomme  aussi  Arrhéphores  ou  Errhé- 
phores,  avaient  un  rôle  important  dans  la  fête  des  Panalhé- 
«ées;on  les  voit  représentées  sur  la  frise  orientale    du  Par- 


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456  EMl'LOl  DU   TRÉSOR  FÉDÉRAL. 

thénon,  au-dessus  de  la  porte  d'enlrée.  Les  Canéphores  de 
l'Erechlbeion  sont  le  plus  bel  exemple  de  ces  statues  servant  do 
colonnes  qu*on  nomme  Caryatides.  La  corbeille  qu'elles  por- 
tent  sur  la  tôte  tient  lieu  de  chapiteau.  Les  autres  parties  de 
rédifice  offrent  le  modèle  le  plus  pur  etle  plus  élégant  de  l'ar- 
<îhitecture  ionique.  On  y  a  trouvé  des  traces  nombreuses^'una 
riche  ornementation  polychrome.  Dans  le  sanctuaire  principal 
était  l'antiqne  statue  de  bois  d'Athènè  Polias,  qu'on  disait 
tombée  du  ciel,  et  dont  le  voile,  brodé  par  les  jeunes  filles 
d'Athènes,  était  renouvelé  périodiquement  à  la  fête  des  Pana- 


L'£rechtbeion. 

thénées.  Une  lampe  d'or  à  mèche  d'amiante  brûlait  perpétuel- 
lement devant  ce  vieux  simulacre,  dont  on  croit  voir  une 
imitation  dans  l'Aihènè  du  musée  de  Dresde  ;  les  petits  carrés 
où  sont  sculptés  en  bas-relief  les  combats  des  Dieux  et  des 
Géants  reproduisent  les  broderies  du  péplos. 

Emploi  du  trésor  fédéral.  —  Les  revenus  d'. 
sistaient  dans  le  fermage  des  domaines  publics 
des^mines  de  Laurion,  dans  les  taxes  sur  les  étrar 
liés  et  sur  les  esclaves,  dans  le  produit  des  ( 
amendes  et  confiscations.  Ces  revenus  n'auraiei 
payer  les  grands  travaux  d'art  entrepris  par  Péricl 


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EMPLOI  DU   TRÉSOR 

dant  les  dernières  guerres,  sur  la 
trésor  commun  des  alliés,  qui  ne 
Dèlos,  avait  été  transporté  à  Athèn 
en  employait  une  partie  aux  édifie 
des  principaux  sujets  de  plainte  des 
se  dissimuler,  disaient-ils,  que  Tar 


Canéphore 
de  l'Ërechlbetoo. 


AthënèPolias(Mu 


guerre  est  employé  à  orner  notre 
coquette  que  l'on  couvre  de  bijou: 
Périclès  répondit  par  un  argum( 
pas  opposer  aux  provinciaux,  s*ils 
subvention  des  théâtres  de  Paris 
les  chaires  du  Collège  de  France,  i 
^as  compte  aux  aUiés  de  l'emploi 
L.  M.  —  HisT.  DES  Grecs. 


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LES  PANAT] 

pour  eux  :  «  Ne 
X  nous  éloignoni 

ni  soldats,  ils  i 
;ent  n'appartient 
i  le  reçoivent, 

Le  peuple  n*é 
n^  et  allant  dr 
i  j'aie  trop  dép 
,  et  beaucoup  1 
le  sera  pas  à  vc 
ml.  Mais  mon 
ptions  des  édifie 
oulaitpas  lui  lais 
itorisa  à  prendi 

sans  rien  épargi 

réponse  ;  si  on 
se,  car  sa  fortun 
ivait  avec  une  si 
,  était  au-dessus 
es  sommes  immi 
noine  ne  s'était  j 
Lbliques  :  Pane 
Depuis  la  mort 
hef  Thucydide,  1 
vec  l'historien  d 
;)ler  Périclès,  pi 
fut  contre  Thuc] 

l'appui   du  peu 

poète  comique 
ju'il  avait  entre] 

assez  d  assurer 
avait  ;  il  faut  qu 
Drale,  car  la  dén 
justice.  Les  fôl 
les,  coupent  le  t 
i  même  temps  p< 
silion.  Les  Athéi 
3  les  peuples,  el 


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ELEUSINIES. 

breuses  à  Athènes  que  partout  ailleurs.  La  plus  cél 
des  Panathénées,  rappelait  la  fusion  primitive  des 
l'Attique  dans  l'unité  de  la  Cité.  Après  la  process 
sentée  dans  la  frise  du  Parthénon,  il  y  avait  des 
chars,  des  exercices  équestres  où  les  cavaliers  poi 
flambeaux,  des  luttes  gymniques,  des  récitations 
homériques  et  des  concours  de  musique  pour  lesqu 
avait  fait  construire  l'Odéon.  Les  athlètes  vainqi 
vaient  pour  récorppense  un  vase  d'huile  tirée  c 
sacré.  ïl  y  a  au  Louvre  plusieurs  de   ces  vases  p 


Vase  panathénaïque  (Musée  du  Louvre). 

ques,  avec  la  figure  d'Athènè,  un  coq  en  signe  de 
l'inscription  ton  A0ENE0EN  A0AON,  car  les  voyell 
H  et  n  n'étaient  pas  encore  employées. 

Après  les  Panathénées,  les  fêtes  les  plus  importai 
les  Thesmophories  et  les  Eleusinies,  célébrées  en  l'I 
Dèmèter  et  de  Corè  qu'on  nommait  les  Grandes  D 
mèier,  la  terre  productrice,  mère  de  la  vie  organ 
môme  temps  la  législatrice  des  hommes,  car  le  trav 
est  le  principe  de  toute  civilisation.  Sa  fille  Corè,  la 
qui  revient  tous  les  ans  du  royaume  souterrain  ( 
lumière  du  ciel,  est  le  symbole  éclatant  de  l'imn 


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460  L'INITIATIOI 

l'âme.  A  Athènes,  les  Thesmop 
gislatrice,  destinées  à  solenn 
étaient  célébrées  exclusivemei 
lar  une  comédie  d'Ar 
)endant  les  cérémonie 
Les  Eleusinies  élaie 
le  où  le  canton  d'E 
i.  D'après  une  traditio 
Thucydide  fait  allusio 
!t  Athènes,  les  Eleusi 
e,  à  la  condition  de  c 
i  Eumolpides  et  des  Ki 
avec  les  cérémonies  1 
ncienne  autonomie.  L 
la  démocratie  d'Athèn 
n  de  cultes  privés  en 
es  tribus  en  corps  de  i 
s  fut  combiné  avec  le 
prêtres  d'Eleusis  étai 
js  par  les  femmes  d'i 
éleusiniennes.  Il  n'y  s 
ii'il  n'y  en  aurait  che; 
I  sacristain  ou  de  su 
le  s'inquiétait  pas  de  c 
rien  d'incompatible  ei 
it  républicain. 
iation  mystique.  — 
ibré  par  les  Eumolpid 
t  un  culte  privé,  Qi 
is  la  situation  d'un  é 
sous  la  condition  toui 
Ues  et  de  n'en  pas  div 
ire,  dérivé  de  [xûeiv,  fei 
ervé  d'abord  aux  fête 
lies  accomplies  dans  h 
s  traduisons  par  Initia 
perfectionnement,  ex 
es  visibles  du  mystère 


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LE  DRAME   D'ELEUSIS.  461 

participaient.  Un  mystère  n'était  pas  pour  les  Grecs  un  dogme 
incompréhensible  à  la  raison  et  imposé  par  l'autorité  ou  ac- 
cepté par  la  foi  :  cette  idée  est  tout  à  fait  étrangère  au  poly- 
théisme; c'était  une  chose  ineffable ,  àwoppYiTov,  qu' 
vait  pas  révéler.  Violer  le  secret  des  mystères,  c'étai 
une  propriété  privée,  et  en  môme  temps  commettre  i 
car  ceux  qui  demandaient  l'initiation  s'engageaient  p 
à  un  silence  absolu.  Toute  profanation  était  poursu 
Eumolpides  devant  les  tribunaux.  Par  l'admission  ( 
nicns  dans  la  cité  athénienne,  la  religion  des  mystèr 
venue  un  privilège  des  citoyens  d'Athènes,  entouré 
restrictions  que  le  droit  de  cité  et  protégé  par  autan 
ties.  La  violation  du  secret  devenait  ainsi  une  sort 
d'État.  Mais  il  n'existe  aucun  motif  d'imaginer  une 
quelconque  entre  ce  culte  et  les  formes  publiques  de 
Les  initiés  ne  formaient  pas  une  aristocratie  intc 
rien,  absolument  rien  ne  justifie  l'opinion  qui  les 
comme  une  classe  de  mandarins  lettrés,  méprisant  leî 
du  peuple.  Le  mystère  éleusinien  n'était  pas  une  nég 
mythologie  populaire;  il  était  comme  elle  entière 
bolique,  sans  aucune  espèce  d'enseigement  ni  d'exp 
chacun  pouvait  le  comprendre  à  sa  manière.  Lessym 
démontrent  pas,  ils  s'exposent,  et  la  conviction  descei 
âmes  préparées  à  recevoir.  Ce  caractère  se  retrouve  r 
les  religions  modernes:  Jésus-Christ  ne  parle  qu'en 
Le  drame  d'Eleusis.  —  Comme  toutes  les  autre 
l'Hellénisme,  le  drame  d'Eleusis  avait  sa  source  dan 
tions  de  l'époque  pélasgique  et  a  reçu  sa  première 
Tépopée.  Nous  n'avons  plus  l'hymne  de  Pamphôs  i 
mais  un  hymne  homérique,  retrouvé  en  Russie  à  la  fi 
dernier,  expose  en  détailla  légende  éleusinienne.  Les 
la  végétation,  confondues  dans  un  môme  symbole  a 
tinée  humaine,  les  alternatives  de  la  vie,  de  la  mi 
résurrection,  sont  exposées  dans  ce  petit  poème, 
composé  entre  l'époque  de  la  Théogonie  d'Hésiode  < 
ras  médiques.  La  nature  y  est  représentée  sous  les  I 
mère  (Tii  p/ôrr^p,  Ay.p.y.TYip),la  vie  sous  ceux  d'une  jeum 
vée  par  l'Invisible,  Aidés,  roi  des  profondeurs  so 


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I 


462  LE  SANCTUAIRE  DES  GRANDE 

pendant  qu'elle  cueillait  le  narcisse,  I,. ^ —  ^- 

.  mortelle,  dans  les  champs  de  Nysa,  au  milieu  des  Okéanides. 
.  La  Déesse  irritée  contre  Zeus,  qui  a  donné  sa  fille  pour  épouse 
.  au  roi  des  morts,  s'éloigne  de  l'assemblée  des  Dieux.  Vêtue  de 
noir,  cachée  sous  les  traits  d'une  vieille  femme,  elle  est  accueil- 
lie à  Eleusis  par  les  filles  de  Kéléos  qui  la  conduisent  à  leur 
lire.  Mais  rien  ne  peut  distraire  sa  douleur,  elle 
te  nourriture,  jusqu'au  moment   où    une  vieille 
[ambè,  par  ses  propos  joyeux,  parvi 
ors  la  Déesse  accepte  le  Kykéon,  le  bi 
lême  enseigne  la  préparation.  L'insliti 
nsi  rattachée  à  la  légende  religieuse, 
l'expression  extérieure  du  dogme,  rej 
ises  de  celte  légende,  dont  les  pcrsoi 
3  par  les  hiérophantes  et  par  les  mys 
mt  de  Gorè,  le  grand  deuil  de  la  natu 
rs,  Av:(xiQ7y)p  à/.atà,  puisTallégresse  du  ci( 
'eclion  du  printemps,  formaient  un  v 
)  ses  alternatives  de  tristesse  et  de  joie 
e.  Toute  proportion  gardée  entre  les  s 
\  époque  barbare  et  les  magnificences 
it  quelque  chose  d'analogue  aux  myst 
^présentaient  aussi  la  mort  et  la  rés 

îtnaire  des  Grandes  Déesses.  —  1 

,  où  le  blé  avait  été  semé  et  récolté  po 
aient  les  temples  d'Eleusis,  précédés 
*ement  semblables  à  celles  de  l'acroi 
es.  il  y  avait  un  temple  d'Artémis  Pro 
re,  un  autre  consacré  à  Triptolème,  u 
idon.  Quant  au  grand  sanctuaire  d'in 
lu  Anactoron,  c'était  un  édifice  couve 
esliné  à  contenir  la  foule  des  mystes, 
leurs  et  acteurs  du  drame  d'Eleusis.  « 
[ue,  fut  commencé  par  Coroibos  qui  é 
tonnes  et  y  posa  les  architraves.  ApH 
lu  bourg  de Xypete,  plaça  le  cordon  et 
es.  Xénoclès,  du  bourg  de  Choleague 


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1»^ 


LE  SANCTUAIRE  DES  GRANDES  DÉESSES. 

faîte  du  sanctuaire  avec  son  ouverture,  iwalov  tcu  iva 
puçwae.  »  Cette  dernière  phrase,  très  obscure,  a  donné 
foule  de  conjectures  sur  la  façon  dont  Tédifice  étal 
I.e  comble,  quelle  qu'en  fût  la  forme,  était  supporte 


-colonnade  intérieure.  Au-dessous  de  l'immense  cell 
inait  comme  un  théâtre,  était  une  crypte,  ou  salle  soi 
Jl  y  avait  des  processions  symboliques  figurant  les  c 
Démêler  et  d'Hécate,  et  des  effets  de  théâtre  auxquels 
lion  de  la  scénographie  grecque  donnait  un  caractère 


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464  CULTE  MYSTIQUE  DE  DIONYSOS. 

et  grandiose.  Des  clartés  splendides,  succédant  tout  à  coup 
aux  ténèbres,  faisaient  passer  les  âmes  d'une  religieuse  hor- 
reur aux  extases  de  l'espérance.  L'idée  de  la  vie  éternelle  jail- 
lissait spontanément  de  cet  enseignement  muet,  qui  pénétrait 
Tâme  par  les  sens  et  la  persuadait  bien  mieux  qu'une  démons- 
tration philosophique  L'enlèvement  de  Corè  et  son  retour,  ce 
n'est  pas  seulement  la  graine  jetée  en  terre  et  renaissant  dans 
la  plante,  c'est  le  réveil  de  l'âme  au.  delà  du  tombeau.  Au  der- 
nier acte  de  l'initiation,  le  suprême  objet  de  contemplation 
mystique,  offert  par  l'hiérophante  à  l'adoration  des  initiés,  c'é- 
tait l'épi  de  blé  moissonné  en  silence,  gage  certain  des  promes- 
ses divines,  symbole  rassurant  de  renaissance  et  d'immortalité. 
Le  Kykéon,  ce  breuvage  sacré  de  la  communion  primitive,  était, 
comme  le  saint  sacrement  des  chrétiens,  un  signe  sensible  des- 
tiné à  sanctifier  l'homme.  Quand  les  mystes  avaient  reçu  la 
nourriture  divine  et  traversé  tous  les  degrés  de  l'initiation, 
leur  bonheur  était  assuré  môme  dans  la  mort,  car  ils  avaient 
le  secret  de  la  vie  éternelle  (1). 

Triptolème  et  Iakchos.  Culte  mystique  de  Dionysos  ;  les 
Orphiques.  —  Triptolème,  qui  est  seulement  nommé  dans 
l'hymne  homérique  parmi  les  rois  d'Eleusis,  joua  plus  tard  un 
rôle  plus  important.  Les  monnaies  éleusiennes  et  plusieurs 
vases  peints  nous  le  montrent  assis  sur  le  char  ailé  de  Dèmèter, 
traîné  par  des  serpents  ;  il  fut  même  substitué  à  Minos  comme 
juge   des  morts,  dans  les  légendes  athéniennes.  Un  autre 
personnage  dont  l'importance  devint  encore  plus  considérable, 
Iakchos,  n'est  pas  nommé  dans  l'hymne  hon 
dation  avec  les  Grandes  Déesses  est  donc  pc 
par  un  passage  d'Hérodote  qu'à  l'époque  des 
la  clameur  des  mystes  (îay,vi),  le  long  de  la  voi 
était  personnifiée  sous  le  nom  d'iakchos.  Dt 
d'Aristophane,  Iakchos  est  invoqué  dans  l'e 
des  initiés,  comme  conducteur  des  mystères 
des  personnages  de  la  pièce,  s'associe  à  ce 
qui  prouve  qu'on  ne  confondait  pas  encore 
nysos.  Il  est  difficile  de  savoir  quand  et  con 

(1)  Pour  les  développements,  voir  mon  ouvrage  D 
nique. 


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Cl 

confusion.  Rien 
culte  les  principe 
et  de  la  mort.  L'i 
en  épi  se  représe 
Aicvuao;,  tombant 
sacrée  des  libali 
pour  symbole  d( 


La  truie,  sym- 
bole t'ie  fé- 
condité (mon- 
naie d'Ëleu- 


Triptolè 

sait  pas  exacten 
nysos  dans  les  n 
Dionysos  avai 
attribuait  l'instii 
d'Orpheus  un  g 

I  autres  un  poèm 
vécu  à  la  cour  c 

\  résurrection  de 
avait  aussi  une  ( 


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468  LE  FONDS  THÉORIQUE. 

Niobides  ou  au  Laocoon.  Quant  à  la  mise  en  scène  des  tra- 
gédies grecques,  il  est  très  difficile  de  s'en  faire  une  idée.  On 
sait  seulement  que  la  scénographie  était  devenue  de  bonne 
heure  une  branche  spéciale  de  la  peinture.  Dès  le  temps  d'Ais- 
chyle,  le  peintre  Agatharchos  avait  appliqué  la  perspective  à  la 
décoration  scénique,  de  façon  à  faire  illusion  aux  yeux  par 
l'apparence  de  la  réalité.  L'invention  de  la  perspective  linéaire 
est  aussi  attribuée  à  Démocrite  et  à  Anaxagore.  On  fait  honneur 
de  la  découverte  de  la  perspective  aérienne  à  ApoUodore  qui 
trouva,  dit  Plularque,  la  dégradation  et  la  décoloration  de 

l'ombre,  çôopàv  xal  à7Ç0X?<«>«v  oxtâ;. 

Le  fonds  théorique.  —  A  l'époque  où  le  théâtre  était  en 
bois,  la  sécurité  publique  avait  paru  exiger  qu'on  restreignit 
le  nombre  des  spectateurs  en  imposant  une  modique  rétribu- 
tion à  l'entrée.  Cette  rétribution  avait  été  maintenue  après  la 
construction  d'un  théâtre  en  pierres,  probablement  en  raison 
des  frais  toujours  croissants  de  la  mise  en  scène.  Rétablir  les 
entrées  gratuites,  c'eût  été  augmenter  les  charges,  déjà  bien 
lourdes,  de  la  chorégie.  D'un  autre  côlé,  il  eût  été  contraire 
aux  principes  de  la  démocratie  d'écarter  les  citoyens  pauvres 
de  ces  représentations  dramatiques  qui  étaient  des  fêtes 
nationales  et  religieuses.  11  n'était  pas  admissible  qu'un  des 
combattants  de  Salamine  ne  pût  assister  à  la  représentation 
des  Perses  d* Aischyle,  faute  d'avoir  de  quoi  payer  sa  place . 
Sur  la  proposition  de  Périclès,  une  somme  de  deux  oboles, 
l'équivalent  de  la  solde  d'un  matelot,  fut  allouée  aux  citoyens 
pauvres  pour  leur  permettre  d'assister  au  théâtre.  On  créa  à 
cet  effet  une  caisse  spéciale  qu'on  appela  le  fonds  théorique, 
c'est-à-dire  le  fonds  des  spectacles.  Aucun  article  du  budget 
de  la  république  athénienne  n'a  autant  offusqué  les  modernes; 
pourtant  nous  trouvons  tout  naturel  de  subventionner  l'Opéra, 
pour  permettre  aux  riches  de  payer  leur  place  un  peu  moins 
cher^  tandis  que  les  pauvres,  qui  contribuent  à  cette  subven- 
tion par  les  impôts  indirects,  n'en  peuvent  pas  profiter.  Mais  la 
démocratie  est  tellement  éloignée  de  nos  mœurs  qu'il  nous 
est  difficile  de  comprendre  la  raison  et  le  but  des  institutions 
athéniennes.  Le  fonds  théorique  répondait  au  budget  de  l'ensei- 
gnement supérieur;  seulement,  il  faut  tenir  compte  de  la 


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