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LIBRARY
of the
UNIVERSITY
of
TORONTO
STILLMAN DRAKE
ACL
Digitized by the Internet Archive
in 2010 with funding from
University of Ottawa
http:/Avww.archive.org/details/histoiredesscieno1 lior
HISTOIRE
ÜzS
SCIENCES MATHÉMATIQUES.
— "2 —————————
IMPRIMÉ CBEZ PAUL RENOUARD , RUE GARANCIÈRE , 5.
HISTOIRE
DES
SCIENCES MATHÉMATIQUES
EN ITALIE,
DEPUIS LA RENAISSANCE DES LETTRES
JUSQU'A LA FIN DU DIX*SEPTIÈME SIÈCLE,
PAR GUILLAUME LIBRBI.
TOME PREMIER.
A PARIS,
CHEZ JULES RENOUARD ET Ci, LIBRAIRES,
RUE DE TOURNON, N° 6.
1838,
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TABLE
DES MATIÈRES CONTENUES DANS LE PREMIER VOLUME.
AVERTISSEMENT. ....... A Sn rsto siéerale ee re IX
SOMMAIRE DU DISCOURS PRÉEIMINAIRE: « » ssooseoseosooee XII
DiscoURS PRÉLIMINAIRE. ..... AT DE DIR CCE STE L
NOTES ET ADDEPIONS 444 ses sins teste ses 191
Note rss. 2e russes ES DER 193
Note II...... A, 2 . 201
Note -III...... SR Se DST a etre A + 204
Note "IN... Re. PP PEU . es rules ; 206
Note. V.:.,%.:..:.:% AR Lara cté PAR 208
Note VI.........6.: sors so..ree +. 209
Notes VIE:....... ES 211
Note VIII... Me as us ee RS, CUT . 214
INGUOE D'ÉRCRRE FATE os 0 Re Sc PP PET 231
Note "XX nec : anses ee SR Me 248
Notes XI Es uesresescashe ns Re 2 ee 250
Note XL sis rene ete Sos se des 08 iuors
Note XIII Sera 0 CUS See A OL EE à 300
Noie XIV. 000 Sonore esse . 30
Note XV... M ce one RL c 1977
Note XVI 2. Sa. users oc 580
Note XVII... soc sets sie ose ee Disc 382
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AVERTISSEMENT.
Dès mes premiers pas dans l'étude des scien-
ces, attiré par le charme des recherches histo-
riques, je me suis attaché de préférence à suivre
à travers les siècles le développement de l’intel-
ligence humaine, et à rechercher, dans les écrits
des inventeurs, les idées premières qui avaient
présidé aux grandes découvertes. Je dois les plus
vives de mes émotions à ces hommes courageux
qui ont su transformer les cachots et les büchers
en tribunes de vérité; et j'ai toujours cherché
à connaitre toutes les particularités de leur vie.
Mais les historiens des sciences me laissaient
ignorer trop souvent ce que je desirais savoir.
Forcé, pour satisfaire ma curiosité, de recourir
*
xs)
aux ouvrages originaux, je fus bientôt frappé
de la multitude de faits curieux, d'observations
intéressantes, que contenaient des livres presque
entièrement oubliés de nos jours : et Je ne tar-
dai pas à découvrir une foule de documens pré-
cieux, gisant inédits dans la poussière des bi-
bliothèques, et menacés d’une destruction pro-
chaine. Les pertes immenses causées par lincurie
de nos pères me faisaient prévoir celles qui nous
menaçaient encore (1); et j'étais vivement affligé
de notre indifférence pour les écrits qui ont
contribué le plus aux progrès de la raison. Oc-
(x) Les personnes qui ne se sont pas spécialement occupées
de recherches historiques, ne sauraient s’imaginer combien
de manuscrits précieux ont été détruits même dans ces der-
niers temps. Pour me borner ici à l'indication d’un petit
nombre de faits, dont la vérité au reste sera démontrée dans
la suite de cet ouvrage , je rappellerai : Que l’on a laissé pé-
rir plusieurs des ouvrages les plus importans de Galilée, et
que le hasard seul a fait retrouver une partie de ses manus-
crits, dans la boutique d’un charcutier. — Qu'il y a à peine
soixante ans que l’on a perdu le traité de Léonard de Pise
sur les nombres carrés. — Que des écrits mathématiques de
Pascal, que Leibnitz avait examinés et jugés dignes d’un
grand intérêt, ont été égarés dans le siècle dernier.—Qu’en-
fin les écrits dans lesquels Fermat avait démontré ces propo-
sitions négatives, qui ont résisté jusqu’à présent aux efforts
de tous les analystes , n’ont pas été détruits immédiatement
après la mort de l’auteur, comme on se plait à le répéter,
mais qu'ils n’ont disparu que depuis le commencement du
( xt)
cupé spécialement de Ptalie, je voyais avec re-
gret que le manque d'un ouvrage propre à leur
faire connaitre les travaux scientifiques des
Italiens, avait porté souvent les étrangers à sup-
poser que les arts et la poésie seuls pouvaient
prospérer dans la patrie d’Archimède et de Ga-
lilée. A force de méditer sur ce sujet, je finis
par croire que peut-être il me serait possible
de remplir cette lacune, et dès-lors ma déter-
mination fut arrêtée. Ne consultant que mon
zèle, peu effrayé par les difficultés d’une telle
entreprise, je me décidai à préparer une histoire
scientifique de l'Italie.
siècle dernier. On accuse ordinairement des héritiers fana-
tiques ou ignorans d’avoir détruit les écrits que l’on ne sait
plus retrouver ; mais le plus souvent c’est à tort qu’on les in-
culpe de ce crime anti-littéraire. Ainsi, par exemple, on
croyait depuis long-temps, d’après le témoignage de Mont-
faucon, que plusieurs des plus précie“x manuscrits de
Peiresc avaient péri par l’incurie dé’ ses héritiers. Mais
ces manuscrits si regrettés existent encore: ils sont à la
bibliothèque royale de Paris! En présence de faits pareils,
après de si coupables négligences, comment ose-t - on
parler encore de la destruction des manuscrits au moyen
âge? Sous peine de passer pour des barbares aux yeux
de la postérité, il faut arrêter une telle dévastation. Jai tâ-
ché d’insérer dans cet ouvrage le plus qu’il m’a été possible
de documens scientifiques inédits; mais le nombre en est
encore très petit, relativement à celui des écrits qu'il serait
nécessaire de publier.
( xu
Voici le plan d'apres lequel j'ai travaillé. Re-
buté par l’aridité de ces écrits où le lecteur
voyage sans cesse d'une étoile à une autre, du
triangle au cercle, sans qu’on lui fasse jamais
apercevoir les hommes qui sont derriere la
science, J'ai senti d'abord la nécessité de mon-
trer que l’état intellectuel des peuples est tou-
jours lié à leur état moral et politique; et j'ai
dû m’appliquer à faire marcher de front l’'his-
toire des idées ‘et celle des hommes, pour les
éclairer lune par l'autre. Considérée sous ce nou-
veau point de vue, l'histoire de la science n’est
jamais interrompue. Quel que soit le rang qu'il
occupe dans l'échelle sociale, un peuple possede
toujours un ensemble de faits et d'observations
que l’on peut considérer comme constituant un
système scientifique. Les nations peu civilisées
n'ont pas, à la vérité, un corps explicite de doc.
trine; mais c’est dans les arts, dans la poésie,
et même dans les superstitions, qu'elles gravent
l'ensemble de leurs connaissances; et c’est là
que J'ai du chercher les matériaux de leur his-
toire scientifique. Les livres didactiques ne se
rencontrent que chez des peuples plus policés.
Enfin surgissent les applications et les sciences
populaires, qui contribuent sans doute à amé-
liorer la condition matérielle de lespèce hu-
maine, mais qui ne sont pas toujours un signe
certain du plus grand développement de l’intel-
( kin,)
ligence. L'expérience prouve en effet que les-
poir d’une utilité immédiate ne porte que trop
souvent les hommes à négliger la culture des
sciences abstraites, qui sont si propres cepen-
dant à conduire aux grandes applications, en
perfectionnant l'instrument intellectuel qui doit
les faire éclore. L’historien doit toujours faire
connaître ce que les sciences ont reçu de la so-
ciété et ce qu’elles lui ont donné. Il doit s’atta-
cher surtout à faire ressortir les méthodes et à
les tirer de chaque découverte particulière, pour
les présenter d’une manière abstraite à l'esprit,
comme autant d'instrumens logiques et de
moyens généraux d'invention.
Mais en écrivant cette histoire, mon but n’a
pas été purement scientifique. J'ai voulu tracer
aussi la vie des savans illustres, et peindre cet
élan noble et généreux qui les avait portés à
poursuivre sans relâche, et à travers mille dan-
gers, des vérités qu'ils ne devaient atteindre qu'à
force de privations et de misères. Cette lutte
persévérante, ce grand drame intellectuel, m'a
paru renfermer de hautes lecons de morale,
utiles surtout dans des temps où le décourage-
ment et le suicide suivent de si près le moindre
désappointement des jeunes gens. — Infortunés!
ils croient, et répètent sans cesse, que les grands
hommes de l'Italie ont été le fruit de la protec-
lion accordée aux lettres et aux arts par Îles
( xiv )
princes ; ils s'imaginent que les hommes céle-
bres des temps passés ont vécu au milieu de
ioutes les jouissances, de toutes les voluptés;
ils cherchent les plaisirs et les richesses, et ne
sachant pas supporter une noble indigence, ils
se fanent et meurent. Qu'ils lisent l'histoire ita-
lienne, et ils apprendront à vivre et à souffrir!
Est-ce Dante, condamné au bücher? est-ce Léo-
nard de Vinci, demi nu et grelotant en hiver?
est-ce Colomb revenant enchainé d'Amérique?
est-ce le Tasse à l'hôpital? est-ce Galilée à genoux
devant l’inquisition, qui attestent cette protec-
tion tant vantée? C’est une pauvre excuse que le
manque de protection et d'argent. L'argent n’est
tout que dans les siècles où les hommes ne sont
rien.
Certes, la société actuelle est travaillée par
de grands besoins; elle est rongée par des plaies
qu’il faut fermer, sous peine de sanglantes ca-
tastrophes. Le peuple à été trop long-temps né-
gligé, trop long-temps exploité pour le compte
de quelques hommes; il reste encore immensé-
ment à faire pour lui : il faut s’efforcer de l’in-
struire, de le rendre meilleur et plus heureux.
Mais en satisfaisant aux besoins des masses, on
doit se garder de détruire Pindividu : il ne faut
pas dire, comme les maitres de certaines écoles
modernes, que les grands hommes sont devenus
désormais impossibles. Au temps de la féodalité,
( ><: 0e)
on comptait pour rien le peuple qui constitue
la base de la société; maintenant on se révolte
contre les grands hommes qui en doivent for-
mer la sommité. Le premier système, c’est de la
tyrannie; le second, c’est de l'anarchie; tous les
deux menent à l’abrutissement. «Plus de grands
hommes!» c’est le cri de l'ignorance : avec ce
cri-là, une nation renonce à vivre dans l’histoire.
Le principe de représentation n'est pas appli-
cable à l’esprit. Cent hommes réunis auront tou-
jours plus de force qu'un seul; cent millions
d'hommes ensemble seront toujours plus riches
que ne le fut Crésus; mais des milliards même
d'hommes médiocres ne découvriront pas la Gra-
vitation universelle ; ils ne créeront pas la, Divina
Commedia : on n'aura jamais la monnaie d’un
homme de génie. Maintenant le grand problème
social est là : améliorer la condition des masses,
les instruire, les relever, sans diminuer la puis-
sance de l'individu. Il faut reprendre la société
et la rehausser tout entière. Mais l'égalité que
l’on ferait en détruisant les sommités ne serait
que de la barbarie.
À une époque où les hommes sont si portés
à vouloir tout expliquer par des considérations
politiques, l'historien doit savoir résister à ces
tendances exagérées, et prouver, par des faits,
qu'il ne faut pas toujours attribuer à l'influence
du gouvernement les vicissitudes littéraires des
( %vi }
nations; et que surtout il ne faut pas chercher
dans cette influence une excuse à la paresse d’es-
prit. Les républiques italiennes du moyen âge
ont prouvé, contrairement à ce que l’on prétend
de nos jours, que la démocratie et l'esprit com-
mercial d'un peuple pouvaient s’allier avec les
plus sublimes créations de l’imagination et de
l'esprit. Un brevet d’apothicaire n’empêcha pas
Dante d’être le plus grand poëte de l'Italie, et ce
fut un petit marchand de Pise qui donna l’al-
gébre aux Chrétiens. D'autre part, l'exemple du
Tasse, de Galilée et de Vico, nés dans des temps
d'oppression et d’'esclavage, montre que le des-
potisme est impuissant contre les hommes de
génie. à
Les gouvernemens peuvent, il est vrai, s’op-
poser aux progrès de l'instruction, et quand ils
le font ils sont bien coupables ; mais leur action
ne s'exerce que sur les esprits médiocres. Les
temps où lon a fait le plus d'efforts pour in-
struire le peuple n'ont presque Jamais été suivis
par une de ces grandes époques littéraires qui
jettent un si viféclat sur la vie d’une nation. Il
faut donc chercher ailleurs que dans laction
directe du gouvernement, la cause de ce désac-
cord fréquent entre l'instruction moyenne d’un
peuple et sa gloire littéraire. Ce fait pourrait
mieux s'expliquer peut-être par la diverse in-
fluence que les intérêts matériels ont exercée à
( xvur )
différentes époques sur la morale et l'éducation.
Lorsqu'ils ont eu trop d'empire, l'éducation a
du se proposer pour objet cette partie de l’in-
struction qui fait espérer des résultats utiles et
positifs, facilement transformables en argent, et
l’on a dü négliger la force dy caractere et la di-
gnité de l’homme; car cesqualités, indispensables
au développement du génie, ménent trop rare-
ment à la fortune. Sous le joug des intérêts maté-
riels, la poésie, qui est également nécessaire aux
grandes actions et aux grandes pensées, disparait.
L'homme est alors considéré comme une espece
d'animal de rapport, et lon s'occupe de former
des ingénieurs, des avocats, des législateurs, dans
un but d'intérêt privé. On veut surtout créer un
état aux jeunes gens; et comme l’état d'homme
indépendant est le moins lucratif de tous, c’est
celui que l'on embrasse le plus rarement. C’est
donc, à mon avis, dans les causes qui tendent
à augmenter ou à diminuer la force morale des
hommes, plutôt que dans celles qui font varier
le nombre des écoles et des professeurs, qu'il
faut chercher l'explication des phases de la gloire
littéraire des nations. Et il ne faut pas croire que
les vices des gouvernemens soient la cause unique
de la corruption des peuples, car les efforts que
fait le gouvernement pour énerver et démora-
liser la nation n'ont de chances de succes que
chez des peuples déjà amollis et corrompus.
*
F B
( xvur )
Ces considérations pourraient, dans notre
époque, s'appliquer à plus d’un pays : il en est
d’autres qui s'adressent plus particulièrement à
l'Italie. Là, souvent, des hommes plus généreux
qu'éclairés affirment qu'il faut quitter toute
autre occupation pour se consacrer uniquement
à la délivrance de la patrie. L'histoire doit mon-
trer, à ces esprits trop exclusifs, Michel-Ange
travaillant tantôt aux fortifications de Florence,
tantôt aux fresques du Jugement Dernier, et
Machiavel écrivant ses plus beaux ouvrages à
peine sorti d’une conspiration avortée. Elle doit
prouver, par l'exemple de Campanella, enseveli
vingt-sept ans dans un cachot, et plusieurs fois
torturé pour avoir tenté de chasser les Espa-
gnols de litalie, que l'amour de l'indépendance
n'exclut pas l'exercice des plus nobles facultés
de l'homme.
Ce n’est donc ni l'oppression ni amour de la
liberté qui devraient empêcher le génie de se
développer en Italie. Les séductions du plaisir,
le scepticisme du cœur, le manque d'une forte
volonté, et surtout le découragement qui suit
toujours d’infructueuses tentatives, seraient plus
propres à produire un effet si funeste. Si
l'Italie est malheureuse, les Italiens ‘doivent se
raidir contre l’adversité, et montrer qu'ils ne l'ont
pas méritée. Le vrai scepticisme, c'est la force
d'esprit; mais il faut accepter le doute comme
( sux )
une nécessité, sans se Jaisser maitriser par lui ni
entrainer à la mollesse. Dans toutes les circon-
stances, sous tous les souvernemens, les esprits
élevés doivent savoir honorer et illustrer leur
pays, car c'est encore là du patriotisme.
L'importance de l’histoire serait bien dimi-
nuée, si l'étude des temps passés ne devait pas
profiter aux nôtres. Si j'ai su rendre dans cet
ouvrage les impressions que j'avais éprouvées,
on sentira que rien nest plus injuste que ce
mépris que l’on affecte pour la science impar-
faite de nos aieux. Sans leurs essais nous serions
encore dans l'ignorance; et peut-être ce savoir,
dont nous sommes si fiers, est-il destiné à exciter
bientôt un sourire de pitié chez une postérité
injuste à son tour. Ni les hommes, ni les nations
ne sauraient mépriser leur propre enfance; et il
faut que les plus puissans et les plus glo-
rieuses n'oublient pas qu'ils auront aussi leur
vieillesse. Tous les siècles, comme tous les
peuples, contribuent aux destinées de l’huma-
nité:il y en a eu de plus obscurs, de plus mal-
heureux, mais c'est un motif pour les plaindre
et non pas pour les mépriser.
Et d’ailleurs, sommes-nous sûrs de valoir en
tout mieux que nos ancêtres? On le proclame
sans cesse, mais moi je n’oserais pas l’affirmer.
Tout ce qui est nouveau n’est pas un perfec-
tionnement : souvent ce n'est qu'un retour vers
B,
(«xx
N
)
des choses déjà oubliées; et puis, à présent,
nous changeons si vite en tout, nous passons si
brusquement d’un extrème à l’autre, que, par
cette continuelle mobilité, nous donnons un dé-
menti continuel à nos prétentions. Que dirait-on
si lon voyait les géomètres, les astronomes,
changer sans cesse toutes leurs méthodes, tous
leurs systèmes, et parcourir rapidement le cercle
des opinions les plus opposées? On dirait sans
doute que les sciences qu'ils cultivent sont dans
l'enfance. Que faut-il donc penser de ces peuples
qui se proclament maitres en science sociale, et
qui changent à chaque instant de constitution et
de tendance politique? On flatte les nations et les
siècles; mais malheureusement l'homme semble
avoir toujours eu les défauts inséparables d’une
grande et rude énergie, ou les qualités qui ac-
compagnent des mœurs plus douces, il est vrai,
mais plus molles; et ce million de Gaulois qui
surent mourir pour s'opposer à César avaient
des vertus que nous avons eues hier... et que
nous aurons peut-être encore demain. D'ailleurs,
dans des circonstances analogues, les mêmes
causes produisent encore les mêmes effets. Nous
avons vu, dans le Srécle des lumicres, au centre
des villes les plus policées, le peuple se ruer
(comme au moyen àge) sur les passans et les
déchirer en lambeaux, leur attribuant l’appari-
tion d’une terrible épidémie; et nous voyons
( xxr )
nos légions transportées au-delà des mers, lut-
ter de barbarie avec des peuplades qu'on disait
vouloir civiliser; tandis que, dans un autre con-
tinent, des nations qui prétendent servir de mo-
dèle à ja vieille Europe, traitent leurs semblables
comme des bestiaux, et transforment en système
la destruction graduelle des anciens maitres du
sol. N’insultons donc pas à la mémoire de nos
aieux!
Je sais bien que, dans un siècle d'applications
et tout positif, on ne peut faire aucun cas des
générations inutiles qui sont rentrées dans le
sein de la terre : mais, à mes yeux, ce mépris
pour les morts est loin d’être un signe de per-
fection. L'histoire dira un jour qu’au foyer de fa
civilisation, aux portes de nos capitales, on nous
enjoignait insolemment d’emporter d’un cime-
tière les ossemens de nos pères, pour abréger
le chemin aux charrettes des rouliers. Elle dira
aussi que dans cette Italie, qui se repose si vo-
lontiers sur d'anciens lauriers, et qu’on accuse
d’être la terre des morts, les hommes les plus
illustres attendent encore une pierre tumulaire,
tandis qu'il y a des villes opulentes où les mé-
dailles et les statues sont prodiguées aux chan-
teurs et aux danseurs. Elle dira surtout qu'apres
une lutte qui a soulevé tous les peuples de
l'Europe, les champs où gisaient nos soldats
furent livrés à des compagnies qui transfor-
(-xXR.)
merent en engrais animal les restes de ces
vaillantes cohortes.….. Le cœur bondit au sou-
venir de ces profanations! © Voilà où nous
mène le principe exagéré de l’utilité. Quelques
épis sacrilèges l’emportent sur le respect que
lon doit aux trépassés; et l’on compte pour
rien l’exemple, et Pinfluence des honneurs
rendus à la mémoire des grands citoyens. Je
lai déjà dit : trop souvent l’homme n’est con-
sidéré que comme un animal de rapport. Ce
principe peut être favorable à la production dans
les manufactures; mais, si on l’adopte, il ne fau-
dra plus demander ni grandes pensées, ni grands
sentimens, ni grandes actions à ceux que lon
traite comme des brutes. À Athènes, de vieux
animaux, qui ne pouvaient plus travailler, étaient
nourris aux frais de l’état : que faisons-nous, à
présent, pour des vieillards que nous appelons
inutiles ?
Mais me voilà bien loin de mon sujet, il est
temps d'y revenir.
Apres de longs travaux, je m'apprétais à pu-
blier mon ouvrage, lorsqu'un évènement im-
prévu vint renverser mes desseins. Forcé, en
1831, de quitter l'Italie, parce que j'avais desiré
contribuer à améliorer son sort, je perdis, dans
un voyage pénible, la plupart de mes manu-
scrits. Une telle perte, au moment où je venais
d’être arraché à tout ce que l'homme a de plus
( xxrit }
cher, faillit me faire abandonner mon projet.
Mais ensuite je me dis que peut-être la meil-
leure réponse à une proscription illégale était
un ouvrage destiné à célébrer la gloire du pays
d’où j'étais expulsé; et qu'il pouvait y avoir quel-
que avantage à montrer que les peines du cœur
ne font pas toujours courber la tête. je recom-
mençai mon travail.
L'ouvrage que je présente au public contient
l'histoire des sciences mathématiques (1) en Ita-
lie, depuis la renaissance des lettres jusqu’à la
fin du dix-septièeme siècle. Cette histoire com-
mence à l’introduction de l'algèbre parmiles Chré-
tiens, et s'arrête à la mort des derniers disciples
de Galilée. Afin de la rendre moins imparfaite, Je
me suis borné à un seul pays et aux sciences
qui ont fait l’occupation de toute ma vie : mais
les rapports qui lient entre elles les différentes
branches des connaissances humaines, et lin-
fluence mutuelle que tous les peuples ont exer-
cée les uns sur les autres, m'ont forcé souvent
à sortir d'Italie et à parler d'autre chose que des
(1) Je prends ici les sciences mathématiques dans leur ac-
ception la plus étendue. C’est ainsi qu’à l’Institut les sections
de mathématiques de l’Académie des Sciences comprennent
les mathématiques pures, avec toutes leurs applications à
l'astronomie , à la mécanique et à la physique.
( xxiv )
sciences abstraites. J’ai eu l'intention d'écrire
d’une manière non didactique le texte de mon
ouvrage, et d’en rendre la lecture facile à toute
personne médiocrement instruite, en réservant
pour les notes, au bas des pages, les cita-
tions et les développemens nécessaires. Lorsque
les circonstances me l’ont permis, j'ai toujours
consulté les sources originales, et je me suis im-
posé l'obligation de vérifier, avec le plus grand
soin, toutes les citations; car j'avais eu trop à
me plaindre moi-même des inexactitudes que
l'on rencontre si souvent dans les ouvrages d’é-
rudition, pour ne pas tàcher d’épargner ce désa-
grément à mes lecteurs (1). Les notes que j'ai
(1) Ne pouvant que rarement traiter avec toute l'étendue
nécessaire les questions qui surgissaient de mon sujet, j'ai
voulu au moins, par des citations multipliées, mettre le lec-
teur à mème de connaître les ouvrages les plus propres à le
guider dans ses recherches. Quelquefois, n'ayant pu me
procurer les ouvrages originaux dont j'avais besoin, j'ai été
forcé de recourir à des compilations plus modernes; mais
alors, pour ne pas induire en erreur, j'ai eu soin de citer
le nom de l’auteur à qui j'avais emprunté le fait que j'indi-
quais. On pourra remarquer que j'ai cité en latin les pas-
sages tirés des auteurs grecs. Cela est peu conforme à l’usage
communément adopté par les érudits; mais, comme cet
ouvrage ne s'adresse pas à des philologues , j'ai craint de
rebuter les lecteurs en leur présentant une trop grande
masse de passages grecs. Je n'ai reproduit le texte, que lors-
qu'il pouvait donner lieu à quelque discussion. J’ai suivi en
(-æxv')
placées à la fin de chaque volume contiennent
des discussions étendues et des documens iné-
dits (1), parmi lesquels il en est qui me paraissent
avoir beaucoup d'importance. Je me suis permis
en cela une grande latitude. Bien que traitant
l’histoire scientifique de FItalie, j'ai pensé qu'un
écrit inédit de Gassendi, d'Huyghens, de Des-
cartes, surtout lorsqu'il se rapportait d’une ma-
nière quelconque aux travaux des savans ita-
liens, pouvait trouver place dans mon ouvrage.
Les hommes éminens appartiennent à tous les
pays; leurs écrits servent à l’histoire de l’esprit
humain.
Le premier volume de cette histoire renferme
cela l’exemple de M. de Humboldt, qui, dans son Examen
critique de l’histoire de la géographie dans le nouveau conti-
nent , a cité en latin de longs passages d’Aristote. J'ai tou-
jours désigné le tome et la page de l’ouvrage cité, et dans
mes citations, j'ai indiqué , une fois pour chaque volume et
pour chaque ouvrage, l’édition dont je me suis servi. On
trouvera, dans le dernier volume de cette histoire, un cata-
logue général des éditions et des manuscrits que j'ai consul-
tés, avec des notes bibliographiques et critiques sur les ou-
vrages les plus importans.
(1) Ces documens ont toujours été reproduits tels que
je les ai trouvés dans les manuscrits, en conservant leur
orthographe spéciale. Ce mode de publication, qui a été
adopté par d’illustres érudits, a l'avantage à mes yeux d’em-
pêcher l'éditeur de corriger le texte dans le sens de ses pro-
pres idées. J’en ai usé de mème dans toutes les citations des
ouvrages imprimés.
( xxvI )
une introduction destinée à exposer la marche
des sciences chez les différens peuples de la terre,
à partir de la plus haute antiquité. Comme j'a-
vais l'Italie pour objet spécial, je n'ai parlé des
autres nations que lorsqu'elles - venaient se
mettre en contact avec les Italiens. J'ai tâché par
là, sans nuire à l'unité de mon plan, de pré-
senter un aperçu général propre à faire con-
naître au lecteur ce que les modernes avaient
ajouté aux travaux et aux découvertes de leurs
devanciers.
Malgré mes efforts, je sens combien je suis
resté au-dessous de mon sujet. Peut-être ceux à
qui j'offre cet ouvrage avaient-ils espéré davan-
tage de moi (1); mais qu'ils songent que, livré
aussi à d'autres travaux, j'ai été forcé, par la
perte de mes manuscrits , de recommencer toutes
mes recherches, et que je les ai terminées en
peu de temps, dans un pays où les ouvrages ita-
liens sont fort rares. Qu'ils songent surtout que
(1) Après avoir achevé de publier cette histoire, je compte
profiter des critiques qu’elle aura provoquées, et des nou-
velles recherches que j'aurai eu l’occasion de faire sur le
même sujet, pour en donner une traduction italienre. J’es-
père pouvoir faire alors disparaitre les imperfections de
langage, que le lecteur ne rencontrera que trop souvent dans
ce premier essai.
(xxvir )
J'ai travaillé dans l'exil, loin de tout ce que j'ai-
mais le plus, loin de tout ce qui avait animé
mes premières années; et que les distinctions si
flatteuses et les honneurs si peu mérités dont on
m'a comblé en France, n’ont pu qu’adoucir les
regrets qui me reportent si souvent vers le pays
où je suis né.
Paris, le 1° Août 1835.
GuizLaAUME Ligki.
POST-SCRIPTUM.
Le premier volume de cet ouvrage venait à peine d’être
imprimé, que toute l'édition, encore en feuilles , fut détruite
dans l’incendie qui, vers la fin de 1835, frappa si cruelle-
ment la librairie de Paris. Il n’en échappa qu’un petit nom-
bre d’exemplaires, qui avaient été distribués avant que
l'ouvrage fût mis en vente. Forcé de préparer une seconde
édition , j'aurais voulu qu’au moins une plus grande pu-
blicité m’eût permis de profiter des critiques que mon ou-
vrage aurait méritées; mais, si j'ai été privé de cet avantage,
j'en ai été dédommagé par les conseils de quelques savans
qu ont bien voulu me faire part des observations que la
lecture de mon ouvrage leur avait inspirées, et.qui par là
(xxvVIHT )
m'ont fourni les moyens d'améliorer quelques parties du
Discours préliminaire. Je les prie d’agréer l’expression de
ma vive reconnaissance.
Si une longue maladie ne m’en avait empêché, j'aurais
peut-être refondu en entier ce volume : cependant j'y ai
fait des corrections et des additions notables, et je l’ai en-
richi de nouveaux documens inédits. Il y a aussi un petit
nombre d’autres changemens faits d’après les conseils de
plusieurs personnes qui ont cru qu'il ne fallait pas, pour
quelques mots, fermer l'entrée de l'Italie à cet ouvrage. Mais
ce ne sont que quelques mots changés : mes opinions restent
les mèmes; elles ne changeront jamais.
Le 15 Avril 1858.
DISCOURS PRELIMINAIRE.
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: | 1
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f
Le lecteur est prie de vouloir bien consuller l'errata et les
édees LE ou à la fr, du second voiume.
SOMMAIRE.
Introduction, p. 1. — Migration des peuples orientaux,
p: 4. — Etat ancien de l'Italie, p. 11. — Origine et connais-
sances scientifiques des Etrusques , p. 11. — Colonies grec-
ques, p. 26. — Pythagore et son école, p. 28. — Archimède,
p. 34. — Les conquêtes des Romains amènent la décadence
des lettres, p. 40. — Ancienne ignorance des Romains , p.4r.
— La philosophie grecque s’introduit à Rome, p. 43. — Phy-
sique de Lucrèce, p. 47. — Protection d’Auguste, p. 50. —
Questionsnaturelles de Sénèque, p. 55.— Ouvrages de Pline,
p- 59. - Décadence, p. 61. — Etablissement du christia-
nisme, p. 64. -— Effets produits par la nouvelle religion sur
les sciences et les lettres, p. 66. — Invasions des barbares,
p.73. — Ignorance des Huns, p. 95. — Origine et connais-
sances des Goths, p. 75. — Théodoric protège d’abord et
persécute ensuite les savans, p. 79. — Lombards et leurs
écoles, p.83. — Après la mort de Charlemagne, l'ignorance
est à son comble en Europe, p. 89.—Orient, p. 92.—Anciens
rapports des Grecs avec les peuples orientaux, p. 93. —
Sciences des Grecs , p. 95: — Arabes et leurs conquêtes ,
p. 105. — Les Abbassides protègent les sciences et les lettres,
p. 107. — Nestoriens, p.113. — Influence grecque parmi les
Arabes, p. 113. — Influence indienne et origine de l'algèbre,
p.118. — Ouvrages des Hindous qui ont été connus au moyen
âge en Europe, p. 123. — Algèbre indienne, p. 126. — Astro-
nomie, p. 130. — Emprunts faits par les Arabes aux Chinois,
p. 155. — L’Occident doit à la Chine la boussole, la poudre
à canon et le papier, p. 136. — Influence des Arabes sur les
chrétiens, p. 148. — Travaux des Juifs, p. 153. — Etat dé-
plorable de l'Italie pendant les siècles qui ont précédé la re-
naissance des lettres, p. 156. — Croisades , p. :62. — Les
Arabes de Sicile contribuent avec ceux d’Espagne à faire re-
vivre les sciences en ftalie, p. 164. — Traducteurs italiens,
p. 1:68. — Influence germanique en Europe , p. 171. — In-
fluence latine et action réciproque de ces divers élémens,
p- 175. — Formation de la langue italienne , p. 195. — La
philosophie d’Aristote est condamnée par l'Eglise, p. 18r. —
Les Mongols menacent de replonger l’Occident dans la bar-
barie, p. 182. — Leurs conquêtes finissent par être favo-
rables au progrès des lumières, et la renaissance des lettres
se déclare, p. 184. — Récapitulation, p. 185.
2
Dr 122 1, 1151, LL RL 122, LL1, LL, EL LL 1: LAS LIT LR, D, 12 1,1
DISCOURS PRÉLIMINAIRE.
Les annales de l'humanité montrent chaque
nation sortant tour-à-tour des ténèbres, pour
venir briller un instant sür la scène du monde,
ct pour rentrer bientôt après dans l'obscurité.
Cette loi de destruction et de renouvellement
avait été constatée des la plus haute antiquité.
Les jours du monde des Étrusques, les dynasties
des Arabes, n'étaient que le symbole de la trans-
mission continuelle de la puissance des peuples.
Mais si le temps ronge les grandeurs et les em-
pires, deux principes, la vertu et le génie,
échappent à son action et leur ascendant se con-
serve à tout Jamais. Les monumens de la Grèce
tombent en ruine, vingt trônes se sont élevés
sur les débris du trône d'Alexandre; mais, en-
core de nos jours, on a invoqué à Saragosse et
à Varsovie les trois cents qui moururent aux
Thermopyles vour les saintes lois de la patrie.
J. Î
(2)
À la vérité le développement moral de lhuma-
nité ne semble pas indéfini, et les plus grands
efforts nous conduisent à peine à égaler les
exemples de l'antique vertu. Mais chaque géné-
ration profite des travaux intellectuels et des
découvertes des générations précédentes. Ce
progrès sans bornes est le caractère special des
sciences exactes : il en fait le plus grand charme
Si la nature parait avoir posé des limites à la
prodnction du beau dans les lettres et les arts,
les fruits de la raison s'accumulent toujours
d'âge en àge, sans qu'on puisse déterminer le
point où s'arrêtera cette marche ascendante.
Leur concours aux progrès de la civilisation
est pour les peuples un titre d'immortelle gloire
Lorsque le sceptre d'une nation s’est brisé, si
elle a payé sa dette à l'humanité, si la masse des
lumières a été augmentée par elle, $a mémoire
ne périt pas. Qui de nous songe maintenant
aux conquêtes de Crichna et de Téarcho? et
pourtant tout l'Occident veut savoir si les germes
de la raison se sont premièrement développés
en Asie, sur l'Himalaya, ou en Afrique , sur les
montagnes de la Lune. Au milieu des conti-
nuelles vicissitudes des nations, tandis que l'Inde,
l'Egypte et la Grece sont encore fatiguées par
(35
l’enfantement d’une première civilisation, l'Ttalie
seule semble avoir eu en partage une gloire
toujours renaissante. Là, d’abord, les Étrus-
ques disputent aux Orientaux une civilisation
primitive; puis, Archiméde éclipse les savans
de la Grèce. Sous la république, les Romains
couvrent de lauriers leur ignorance altiere ; plus
tard les écrits de Cicéron et de Virgile cachent
aux yeux de la postérité les proscriptions des
Triumvirs et la lâcheté du Sénat. Enfin l'Italie
s'élance à la tête de la civilisation moderne , ar-
mée du flambeau de la science et de l'épée
de la liberté. Si cet héritage de trente siè-
cles de gloire parait maintenant diminué, c’est
qu'une lutte permanente, entre les gouverne-
mens et les peuples, use, dans cette malheu-
reuse contrée, toutes les forces morales de la
nation. Mais ne désespérons pas; cette lutte aura
un terme , le génie reprendra son essor, et l’on
verra renaître les jours de Dante, de Michel-
Ange, de Galilée.
Toutes les phases de la civilisation sont telle-
ment liées entre elles, qu’à partir d’une époque
déterminée on essaierait en vain d'étudier une
branche quelconque de l'histoire sans jeter un
regard sur les temps et lesévènemens antérieurs.
Le.
( 4 }
Ainet ramené sans cesse en arriere, l'historien
est presque obligé de süppléer par des hypo-
theses au manque de faits, lorsqu'il se trouve
placé entre les temps historiques et les tradi-
tons fabuleuses; et, pour trouver un point de
départ, il est forcé de se rattacher aux cosmo-
gonies, titres de noblesse que chaque famille de
peuples s'est fabriqués pour satisfaire la vanité
nationale. Si lon introduisait dans l’histoire la
méthode à laquelle les sciences naturelles doi-
vent tant de progres, on commencerait par étu-
dier notre époque, et puis on pénétrerait peu-à-
peu dans le passé jusqu'au point où manque-
raient les documens positifs. En remontant ainsi
toujours des effets aux causes, et, en s’arrétant
où l'incertitude commence, on ne donnerait que
des notions exactes , et Fon substituerait le doute
a l'erreur dogmatique. Mais le temps n’est pas
encore venu d'abandonner le système adopté
depuis tant de siècles. Nous suivrons donc la
méthode ordinaire, en tächant d'éviter les con-
séquences forcées, auxquelles on s’est trop sou-
vent laissé entrainer.
Quel que soit le point de vue sous lequel on
considere lhumanité, en se plaçant à Porigine
des temps historiques, on est frappé d’un spec-
P [ ) P P
(+)
tacle extraordinaire. Alors toutes les nations pa-
raissent ébranlées à-la-fois, elles se mélent, elles
se séparent, elles changent sans cesse de de-
meure. De grandes migrations de peuples, sor-
tis presque tous de l'Orient, inondent l'Europe
et s’avancent jusqu'a lAtlantique. Souvent les
envahisseurs apportent avec eux une civilisation
plus avancée, les lettres et les arts. D'autres
fois, moins policés que les anciens habitans, ils
viennent, barbares et pirates, semer sur leurs
pas la désolation et l'abrutissement.
Il nest plus possible de savoir si ces grands
mouvemens des peuples ont été presque con-
temporains entre eux, comme parait lindi-
quer la tradition, ou bien si, par une espèce
d'illusion d'optique, la distance des temps nous
montre réunis des évenemens. arrivés à des épo-
ques différentesy et confondus ensemble dans
les souvenirs vagues et incertains de ces âges
éloignés. Mais les traditions les plus répandues
prouvent que ces migrations ont eu lieu; et ici
se présente un double problème : des circon-
stances et des besoins qu'il nous est impossible
d'assigner ont-ils, à une époque reculée, causé
de grandes migrations vers l'Occident, pareilles
aux invasions qui, long-temps après, ameneren!
(6)
la chute de l'empire de Rome? Ou bien, comme
d'autres traditions paraissent l’attester, la terre
aurait-elle souffert une inondation générale, ou
plusieurs inondations partielles (1); les plaines
auraient-elles été balayées par les eaux de la mer,
et ne serait-il resté que des débris du genre hu-
main sur le plateau central, et sur les plus
hautes montagnes de chaque continent? Cette
dernière hypothèse, quoique appuyée par de
nombreuses traditions et par des livres sacrés,
est encore loin d’être démontrée comme un fait
historique : toutefois en l’adoptant, on peut di-
minuer les difficultés de l’histoire primitive des
peuples. En effet, il est aisé de concevoir que les
provinces de l’Asie centrale et la partie intérieure
de l'Afrique, trop élevées pour être submergées
) Ï )
aient continué à être habitées par des peuples
STORES CRE OU ET : CNRC EL
(1) Voyez, pour les traditions qui se rapportent au déluge,
Cuvier , recherches sur les ossemens fossiles, Paris, 1821,
7 vol. in-4, tom. 1, p. 10.— Humboldt, vues des Cordillcres et
monumens des peuples d Amerique, Paris, 1816-24, 2 vol.in-8,
p-88et 115; tom. IL, p. 17,128, 195, 177,etc.— Schlosser, his-
toire universelle de l'antiquilé, Paris, 1828, 3 vol. in-8,
tom. I, p. 21, etc., etc.— M. Letronne, dans les savantes leçons
qu'il a données sur cette matière au collège de France, s’est
proposé d'établir que, depuis les temps historiques, ou mème
traditionnels, il n’y a pas eu de déluge universel, mais qu'il y
aeu seulement des inondations partielles,
(79)
considérables dont l’état social n'était que peu
altéré par la révolution physique qui anéantis-
sait les habitans des plaines. En Occident, l'ab-
sence d’un grand plateau n’a pas dû permettre à
des nations entières d'échapper au désastre;
mais les chaînes de montagnes et les pics isolés
ont pu servir de refuge à quelques PERPÈES
qui, livrées à elles-mêmes après la catastrophe,
ont dü se rapprocher graduellement de l’état de
barbarie, et d'autant plus qu’elles étaient moins
nombreuses et moins puissantes. Si l’on admet
cette dispersion d'habitans sur divers points de
la terre, les uns isolés et presque tombés dans
un état sauvage; d’autres réunis en plus grand
nombre, conservant encore des traces d’une ci-
vilisation antérieure; et enfin de grands peuples
établis dans les parties centrales de l'Asie et de
l’Afrique, il ne sera pas difficile d'expliquer com-
ment, lorsque les eaux eurent repris leur posi-
tion d'équilibre, des colonies asiatiques et afri-
caines venant apporter en Europe une civilisa-
uon nouvelle, modifièrent les élémens qui y
existaient déjà, et laissèrent dans les langues,
dans la religion, dans les arts, des traces pro-
fondes d’une influence étrangére.
On ne saurait d'aucune manière déterminer
(8)
le temps qu’il a fallu pour que ces colonies, se
répandant de proche en proche, aient découvert
les restes des autres peuples antédiluviens. Leur
marche a pu être influencée par des circon-
stances physiques, comme le cours des rivières
où la direction des chaînes de montagnes, et par
l'état social plus ou moins avancé des émigrans.
es peuples nomades et pasteurs ont dù mar-
cher les premiers; plus tard:seront partis les
cultivateurs ; puis enfin, les hordes de pirates
et de conquérans, qui ne pouvaient se met-
tre en marche avant que d’autres colonies eus-
sent préparé un aliment à leur rapacité. Ainsi,
les tribus sorties de l'Ethiopie et du plateau cen-
tral de l'Asie, s'éloignant peu-à-peu de leur point
de départ, ont du se rencontrer et se modifier
mutuellement. Elles ont dû subir de nouvelles
modifications, à mesure qu'elles se trouvaient en
contact avec les débris d’autres peuples primitifs.
Nous croyons que cette hypothèse satisfait assez
aux traditions historiques et aux recherches des
naturalistes, etexplique l'introduction des plantes
et des animaux domestiques en Occident, mieux
que ne le font ces cosmogonies qui prétendent for-
certoutela nature animée àdériver d'un pointuni-
que, où d’un très petit nombre de points primitifs.
(9)
Dans leur marche vers l'Occident, les peuples
orientaux trouvérent successivement des con-
trées inconnues auxquelles ils donnèrent tantôt
des noms génériques, tantôt des noms tirés des
pays qu'ils venaient de quitter. Ces nouvelles
contrées , découvertes alors comme plus tard on
découvrit l'Amérique, furent la Grèce, l'Italie,
l'Espagne qui, comme le reste de l'Europe, ne
commencent à compter dans l’histoire qu’apres
avoir été rattachées à l'Orient où alors était placé
le foyer de la civilisation. (1)
Arrivées en Grèce et en Italie, les nouvelles co-
lonies s'amalgamerent avec les restes des peuples
aborigènes(2):aussi est-il aisé de reconnaitre dans
l’état social, la religion et les arts des Hellenes et
des anciens Italiens, des traces nombreuses d’é-
lémens nationaux, que l'influence étrangère avait
modifiés sans pouvoir les détruire. En effet, on
voit d’abord en Grèce quelques petits peuples,
(1) Strabon parle, il est vrai, des Turdinains, peuples de
l'Espagne, qui avaient une histoire, une poésie et des lois en
vers très anciennes : mais tous les monumens littéraires de
cette nation ont péri. ( Strabo, rerum geographie. Amstelod.
1507, in-fol., p.204, lib. IIL. )
(2) Censorinus, de die natali, Cantabrigiæ , 1695, in-8°, p.
22,Cap.4.— Creuzer, religions de l'antiquité, Paris, 1825, 4 vol.
in-8, tom. IT, p. 390.
(10)
se regardant comme des aborigènes , vouloir re-
monter à une époque plus ancienne que la
lune(r), et avoir leurs dieux propres cachés dans
les montagnes du pays. Ensuite arrivent quel-
ques peuplades étrangères; puis vient la grande
invasion des Pélasges; enfin les colonies parties
de l’Asie-Mineure et de l'Egypte apportent suc-
cessivement leur alphabet, le culte du soleil,
la trinité et les douze grands dieux. (2)
(1) Nous avons suivi ici l’opinion vulgaire sur le nom de
r206ékme des Arcadiens ( Suëdæ Lexicon, Cantabrigiæ, 1705,
3 vol. in-fol., tom. I, p.428, Bexxsoénve). Censorinus ( De die
natali, p. 116, cap. 19) dit que ce nom leur venait d’une an-
cieune année de trois mois qu'ils s'étaient formée avant l’in-
troduction de l’année lunaire en Grèce. « [tem in Achaia Ar-
cades trimestrem annum primo habuisse dicuntur, et ob id
ro0cénva appellati; non, ut quidam putant, quod ante sint
uati quam lunæ astrum cœlo esset : sed quod prius habuerint
annum, quam is in Græcia ad lunæ cursum constitueretur.
Suntquitradant, huncannum trimestrem Horuminstituisse :
coque ver æstatem, autumnum , hyemem ü2as , et annum
og, dici, et Græcos annales ; 6zov; , eorumque scriptores
bpsyexguus. » — Nous rappelons ce passage, parce qu’il se
trouve d'accord avec les preuves que M. Arago a réunies con-
tre l'hypothèse d’une comète qui serait devenue (depuis
l'existence du genre humain) un satellite de la terre. (Voyez
Annuaire du bureau des longitudes pour l’année 1852; p.283).
Au reste, d’autres peuples aussi ont cru que le soleil et la
lune étaient moins anciens que les hômmes.
(2) Herodoti historia, Amstelod., 1763,in-fol., p. 105,155,
(11)
On pourrait faire des remarques semblables
sur l’état ancien de l'Italie ; mais, sans se livrer
ici à des discussions, qui probablement n'auraient
aucun résultat positif, sur l'antiquité relative des
différens peuples italiens qui ont précédé les
Romains; sans rechercher si les anciens Latins
(prisci Latini) ont précédé ces Umbriens, aux-
quels les Grecs, par un jeu de mots, ont voulu
attribuer une existence plus ancienne que le dé-
luge ; sans embrasser même aucune des hypo-
thèses qu’on a faites sur l’origine des Etrusques,
il est facile de se convaincre, par une multi-
tude de faits divers, qu’il existe à-la-fois plu-
sieurs origines italiennes. Ce sont ces différentes
origines qui ont donné naissance, parmi les éru-
dits, à tant de disputes, dans lesquelles chacun
avait de bonnes raisons en faveur deïson propre
système, et n'avait d'autre tort que celui de vou
loir le rendre trop exclusif.
Les Étrusques, sans être le plus ancien peuple
de l'Italie, paraissent en avoir été un des plus
399, lib. IL, 4, lib. 11,6 109, hb. V, $ 58. — Plutarchi opera,
Paris, 1624, 2 tom. in-fol., t. [, p. 385, Pyrrus, — Thucy-
didis historia, Amstelod., 1751, in-fol., p. 1-8, 6.1, 8 1-8.
— Rees, Cyclopædta, vol. XXX VI. Trinily.
f
(Fra )
puissans, et furent le plus ilinstre de tous par
les lumières (r). Étaient-ils des Tyrrhéniens,
comme les Grecs l'ont supposé? Venaient-ils
du nord de l'Italie, où était placée Felsine leur
ancienne Capitale? Sortaent-ils des contrées
plus septentrionales où Varron plaçait leurs
dieux (2)? Enfin étaient-ils originaires du sol
(1) Lampredi, filosofia degli antichi Etruschi, Firenze,
1726, in-4°, p. 9 etsuiv. — Lanzi, saggio di lingua etrusea,
Roma, 1789, 3 vol. in-8°, tom. IL, p. 567 et suiv. — Nowi
commentarii societatis Gottingensis, class. philol. tom. VIT,
p-17etseq.(Heyne).— Niebuhr , histoire romaine, Paris,
1856, 2 vol. in-8°, tom. I, p. 185etsuiv.— Miller, die Elrus-
ker, Breslau, 1828, 2 vol. in-8, liv. IV.— Micali, Sloria degli
antichi poyoli italiani, Firenze, 1852, 4 vol. in-8, avec atlas,
tom. IE, p.186 et suiv.
(1) AL. Verrir Flacci quæ extant , et Sext. Pompexr Festi de
verborum significatione. Lutet., 1576, in-8, p. 257.— Creu-
zer ER l’antiquile ,tom. IT, p. 409) remarque que
le mot Æsar, qui en étrusquesignifie Dieu, est le pluriel d’As,
qui,en islandais , a la même signification. D’autres savans
ont pensé que le nom de Rasena, que Îes Etrusques se don-
naient eux-mêmes , indiquait que ce peuple était sorti de la
Rétie. Voyez, sur l’origine des Etrusques, Durandi, Saggio
sulla storia degli antichi popoli d'Italia, Torino, 1769, in-4,
p- 116 etsuiv.—Curli, antichila italiche, Milano, 1788, 5 vol.
in-4, part. [, p. 1retsuiv. —Gnarnacci, origin? italiche,
Roma, 1785, 35 vol. in-4, tom.1I, p. 19 et suiv. — Nov com-
mentarii societatis Gottingensis , class. philol., tom. IL, p.
32 et il — Müller , die Etrusker, (introd.). —
Lanzi, saggio di lingua ctrusra, 1om. 1, p. 16 et suiv., et
(15)
où s'était caché leur dieu Tagès (1)? Nous ne
croyons pas possible de résoudre ces questions
avec le petit nombre de faits qui ont pu arriver
jusqu’à nous; d'autant plus que même les frag-
mens qui nous restent des anciens auteurs qui ont
écrit sur ce sujet, ont dü être souvent défigurés
par l'imagination des Grecs et par lorgueil na-
tional des Romains. Cependant, d'apres les té-
moignages réunis de ces Grecs, qui appelaient
barbares toutes les autres nations, et des Ra-
mains, qui ne connaissaient d’autres instrumens
scientifiques que l’épée et la charrue (2),on peut
affirmer qu'à une époque très ancienne les Etrus-
ques étaient parvenus à une civilisation fort
avancée. Il est donc nécessaire de commencer
tom. IE, p. 576 et suiv.— Histoire de lacademre des inscript.
et bell.-lett. (édition origin. in-4), tom. XVIII, p. 72. —
Micali, storia d'Italia avanti il dominio di Romani, Firenze,
1821, 4 vol. in-8, avec atlas, tom. IT, p. 185 et suiv.—Micul,
_ storia degli antichi popoli ataliani, tom. 1, p. 96 et suiv. —
Nichuhr, hist. rom., 1om. L, p. 155. — Opuscoli Lelterari di
Bologna, Bologne, 1818, 5 vol. in-4 , tom. III, p. 207. 292
{ Orioli). — etc:, etc.
(1) Lydus, de ostentis, Parisiis, 1823, in-8, p. 11.— Lanzi,
saggio di linqua etrusca, tom. IE, p. 239.
(2) Dionys. Halicarnas. opera, edent. Reiske. Lipsiæ, 1774,
6 vol.in-8, tvm. [,p. 296, lib. IE, cap. 28.
C4)
cette introduction à l’histoire des sciences en
Italie par un exposé succinct de l’ensemble de
leurs connaissances.
On sait que, dés la plus haute antiquité, les
Étrusques avaient des annales rédigées par les
prêtres et les Lucumons (1). Ces annales, qui se
conserverent dans les premiers temps de la do:
mination romaine, furent presque toutes dé-
truites dans la guerre sociale. Elles nous auraient
été d’un grand secours pour éclaircir la question
de l’origine des Étrusques, et pour déterminer ce
qu'il y avait de national et d’étranger dans leurs
arts. Car, bien que l’on possède un très grand
nombre d'anciens monumens toscans, il est tou-
jours difficile d'en déterminer l’âge, et plus dif.
ficile encore de les interpréter. Les inscriptions
nous apprennent, il est v at, que les Étrusques
écrivaient de droite à gauche, et qu'à l'exemple
des langues sémitiques, leur langue manquait des
voyelles brèves et des consonnes redoublées (2):
ces inscriptions ont pu nous conduire àretrouver
(1) Censorinus, de die natali, P. 92, cap. 17.—Niehuhr,
hist. rom.,1om. I, p. 173.
(2) Lanzi, saggio di linqua elrusra, tom. TL, p. 136 et suiv.
— Niebuhr, hist. rom., tom. 1, p.164.
(5)
l'alphabet étrusque, mais la langue est restée en-
core inconnue ; et il est presque certain que tant
que l’on n'aura pas découvert des inscriptions bi-
lingues de quelque étendue, on ne parviendra ja-
mais à avoir des connaissances approfondies sur
l’histoire et les langues des anciens peuples ita-
liens. D’apres une tradition fort répandue, les
Étrusques descendaient des Lydiens (1) Denys
d’'Halicarnasse combat cette opinion (2), et dit
que la langue étrusque, qui était parlée encore
de son temps, n'avait aucun rapport avec les
langues de lAsie-Mineure. Ici l’analogie nous
abandonne. On sait que le latin, qui dérive en
grande partie du grec et par là du sanscrit, con-
tient aussi plusieurs mots d’origine également
sanscrite, mais qui n'ont pas passé par la Grèce.
Ce fait peut s'expliquer par les différentes routes
qu'auraient suivies des colonies partant de lAsie
centrale pour arriver en Italie; mais l'existence
d'une langue sémitique en Étrurie, suppose une
influence exercée sur les Toscans par des nations
(1) Herodoti hist. P- 48, lib. I, $ 94. — Plutarchi operu ,
tom. L,p. 35, Romulus, et tom. IT, p. 273, Quæst. rom. —
Valerius Maximus, Leidæ, 1726,in-4, p- 150, hb. IE, c. 4.
— Strabo, rer. géog., p. 335, lib. V.
(2) Dionysii Halic. oper., tom. E, p. 78, lb. LE & 20.
( 16)
n'ayant pas la même origine que la famille san-
scrite. Cela au reste est fort probable; car, quelque
grande que soit la part que les peuples de l'Inde
ont eue à la civilisation de l'Europe, ils n’ont
pas, à eux seuls, policé l'Occident : apres avoir
long-temps méconnu les origines indiennes, il
faut se garder maintenant de les croire uniques.
On connaît bien peu larithmétique des Etrus-
ques; cependant les archéologues ont retrouvé
quelques-uns de leurs chiffres qui ressem-
blent beaucoup aux chiffres romains, excepté
qu'ils sont renversés (1. Il parait que chez les
peuples antérieures à nos temps historiques, il
existait plusieurs systèmes de numération qui
avaient tous des bases différentes (2). Cela est
démontré par le témoignage des historiens et
par une foule d'anciennes traditions qu’on ren-
contre à-la-fois chez les Orientaux et chez les
premiers habitans de l'Europe; parmi les sau-
vages d'Afrique, comme parmi ceux d'Amérique.
(1) Opuscoli lett. di Bologna, t.1, p. 208 (Orioli). — Mi-
cali, storia d'Italia. etc., HE, p. 251. — Znghèirami, monu-
menti etruschi, Firenze , 1825, 6 tom. en 9 vol. in-4, tom. I,
p-4ioet4tr.— Müller, die Etrusker, tom. If, p. 317 et suiv.
(2) Voyez la note I à la fin du volume.
RER
Vire
Les restes de cette ancienne arithmétique se sont
perpétués chez nous dans de grossières super-
stitions et dans un grand nombre d’habitudes
populaires. En vain la science a voulu faire pré-
valoir son système; en vain les lois ont prescrit
l'usage du système décimal. If se passera beau-
coup de temps avant que le peuple adopte l'a-
rithmétique des savans. Ces divers systèmes de
numération doivent être très anciens, car même
chez les Étrusques on retrouve les traces de deux
systèmes différens : l’un, comme celui des an-
ciens Grecs et des Romains , avait pour base le
nombre cinq; l’autre parait avoir procédé se-
lon les multiples de quatre. On doit rattacher
au second la semaine civile des Toscans, com-
posée de huit jours et correspondant à la
grande semaine cosmogonique, ou aux huit
jours du monde qui devaient borner lexis-
tence de l'espèce humaine actuelle. On ne con-
nait pas exactement la durée de cette grande
huitaine que quelques auteurs ont supposée de
huit mille huit cents ans. Selon les Etrusques la
fin de chaque jour était marquée par des phé-
nomenes extraordinaires dont les prêtres seuls
connaissaient la signification; et ces prodiges ac-
compagnaient le passage de la domination d'un
I. D À
(18)
peuple à l'autre, qui devait toujours arriver un
jour déterminé (r). C’est à ce système quaternaire
qu'il faut rapporter aussi la division du ciel en
quatre et en seize parties; division que Pline et
Cicéron nous ont conservée (2), et qui était rela-
tive à la science fulgurale.
On a beaucoup vanté le cycle des anciens
Toscans, et l’on a supposé qu'ils avaient déter-
miné la durée de l’année avec une très grande
précision (3); mais cette haute science astrono-
mique est si peu prouvée, l'incertitude est si
grande, que l’on ne sait même pas si ces peu-
ples se servaient de l'année solaire ou de l’année
lunaire. D'ailleurs il serait très difficile de dire
quelle était la durée de l’année chez les anciens
Italiens, puisque nous savons positivement que
d'une petite ville à l’autre les mois variaient quel-
(1) Censorinus , de die natali, P. 92, cap. 17.
(2) Ciceronis opera, Lugd. Batav., 1692, r1 vol. in-12, p.
3802, de divinatione, bb. 11, $42.—Pline (Historianaturalis,
Paris., 1723, 3 vol. in-fol. ,tom.1, p.101, lib. IT, cap. 54)
dit : « In sedecim partes cœlum in eo aspectu divisere Tusci.
Prima est a septemtrionibus ad æquinoctialem exortum ; se-
cunda ad meridiem ; tertia adæquinoctialem occasum ; quarta
obtinet, quod reliquum est ab occasu ad septemtriones. Has
iterum in quaternas divisere partes. »
(3) Nichuhr, hist. rom. , tom. L, p. 586.
(#9 )
quefois depuis seize jusqu’à trente-neuf jours (1).
Ainsi tout ce qu'on a dit sur les connaissances
astronomiques des Étrusques ne parait s'appuyer
sur aucun fondement solide. (2)
Outre lobservation des astres, les prêtres
étrusques s'étaient créé une science fulgurale, à
laquelle quelques modernes ont voulu attribuer
une grande étendue. Depuis qu'on a reconnu
l'influence exercée par les pointes sur les dé-
charges électriques, on a cru pouvoir retrouver
les paratonnerres chez les Toscans. En effet,
Pline et Tite-Live paraissent accorder aux pré-
tres de cette nation la faculté d’appeler le ton-
(1) « At civitatum menses vel magis numero dierum inter
se discrepant : sed dies ubique habent totos. Apud Albanos
Martius est sex et triginta, Majus viginti et duum , Sextilis
duodeviginti, September sedecim. Tusculanorum Quintilis
dies habet triginta sex, October triginta duos ; idem October
apud Âricinos triginta novem. » ( Censorinus , de die natali,
p- 134, cap. 22.)
(2) Gori, dans le Musœum etruscum (Florent., 1757, 3 vol.
in-fol. , tom. IT, p.405), parle d’un zodiaque étrusque pu-
blié par Ciatti; mais ce monument, pour tous ceux qui l’ob-
servent sans prévention, n’a aucune signification déterminée,
el nous n’y avons rien vu qui ressemblät à un zodiaque.
(Ciatti, memorie storiche di Perugia, Verug., 1638, in-4,
tom. I, p. 197).
( 26%)
nerre (1), et Zosime raconte que, lorsque Rome
fut assiégée pour la premiere fois par les Goths,
des Étrusques offrirent de faire descendre la
foudre sur les assiégeans (2). Mais à cette époque
la science sacrée des Étrusques avait disparu de-
puis long-temps (3) : c'étaient des charlatans qui
promettaient d'accomplir ces prodiges, dans ies-
quels il ne faut pas plus voir les paratonnerres
(1) « Extat annalium memoria, sacris quibusdam et pre-
cationibus vel cogi fulmina vel impetrari. Vetus fama Etruriæ
est, impetratum, Volsiniosurbem agris depopulatis subeunte
monstro, quod vocavere Voltam. Evocatum et a Porsenna
suo rege. Et ante eum a Numa sæpius hoc factitatum , in pri-
mo annalium suorum tradit L. Piso, gravis auctor; quod
imitatum parum rite Tuilum Hostilium ictum fulmine »
(Plinii hist. natur., tom. [, p. 101, lib. IL, cap. 53). —
Voyez aussi Tèti Livii hist., Amstelod., 1679, 5 vol.in-8,
tom. I, p.65, lib. I, 8 5r.
(2) « Dum hæc ipsi secum expendunt, Pompejanus præfec-
tus urbi, forte in quosdam incidit, qui Romam e Tuscia
venerant; etoppidum quoddam ajebant, cui nomen Neveia,
periculis urgentibus sese liberasse , perque preces ad numen
factas, et cultum patrio more præstitum, exortis ingentibus
tonitruis atque fulgetris, hostes sibi jam imminentes abe-
gisse. » (Zosimi historia, Basil. (S. D.), in-fol., p. 106.) .
(3) Dans ses savantes lecons sur l’histoire étrusque, M. Orioli
a prouvé que la connaissance des livres étrusques s'était
couservée jusqu'aux premiers siècles de l’ère chrétienne;
mais il ya loin de la conservation de quelques livres à l’en-
semble de la science d’un peuple.
à (589
que lon ne voit les aérostats dans le voyage
aérien de Dédale. Au reste la question se trouve
tout-à-fait résolue par la publication récente d’un
ouvrage de Lydus, où la science des éclairs de
Tages et de Labéon est exposée avec d’autres an-
ciennes croyances des Étrusques sur les tremble-
inens de terre et les comètes. Dans ce livreon ne
trouve aucune indication des paratonnerres. Les
éclairs y sont considérés comme des pronos-
tics des saisons et des récoltes, du bonheur des
peuples et des individus. Lorsque Lydus dit que,
pour garantir de la foudre les vaisseaux destinés
à porter les empereurs, on en faisait les voiles
äe peaux de phoques, il prouve évidemment
que les Etrusques, dont il avait étudié spéciale-
ment la science fulgurale, ne possédaient pas le
paratonnerre (1). Cet ouvrage annoncé par lPau-
(1) Lydus , de ostentis, p. 173. — Il est possible cependant
qu’on doive aux Étrusqéfés quelque observation semblable à
celle que les habitans du Frioul avaient faite long-temps
avant Franklin. Dans le château de Duëno, lorsque le ciel se
couvrait de nuages, un soldat était chargé d'examiner si une
pointe de fer tirait des étincelles d’une certaine barre de fer
placée verticalement. Si cela arrivait, il devait sonner une
cloche pour annoncer l’orage aux paysans et aux pècheurs
(Mémoires de l’academie royale des sciences pour l'annee
1764, édition origin. in-4, p. 445). Il paraît, d’après le pas-
(22)
teur comme contenant le résumé de toute la
science étrusque, parait destiné à fixer nos idées
d’une manière irrévocable sur les connaissances
météorologiques des anciens Toscans. La seule
observation électrique qui mérite d’être citée,
est celle de l’origine terrestre du tonnerre qui
monte quelquefois de bas en haut (1). Un pas-
sage que Lydus a extrait de Labéon, prouve que
ces peuples avaient sur le feu central des idées
analogues à celles qui sont presque généralement
adoptées aujourd'hui. (2)
sage suivant de Sénèque , que les Étrusques avaient observé
aussi les couleurs produites dans les corps par l’action de la
foudre. « Nunc ad id transeo genus fulminis quo icta fuscan-
tur. Hoc aut decolorat aut colorat. Utrique distinctionem
suam reddam. Decoloratur id cujus color vitiatur, non mu-
tatur; coloratur id cujus alia fit quam fuit facies; tanquam
cærulea , vel nigra, vel pallida. Hæc adhuc Etruscis et phi-
losophis communia sunt » (L. Annœi Senecæ opera, Amste-
lod., 1670, 2 vol. in-8, tom. II, p.689, Natur.quæst., lib. IT,
cap. 41). —Ilya, dans les ouvragés de Bède, un traité sur
la signification du tonnerre, qui paraît avoir quelque ana-
logie avec les livres des Étrusques cités par Lydus. (Bedæ
opera, Basil., 1565, 6 voi. in-fol., tom. I, fol. 459 et seq.)
(1) Lydus, de ostentis , p. 173.
(2) Voici le passage de Lydus. « De terræmotibus. Cum
nota sint quæ de causis affectuum terræ veteres memorave-
runt philosophi, unam ex omnibus hic admittens, ignem
subterraneum, quandoquidem in regionibus, ubi crebro
(23)
Les anciens ont attribué un grand savoir en
médecine aux Toscans , mais on ignore si cette
science aussi était dans leur système de théo-
cratie guerrière (1), un instrument de supersti-
tion, ou bien si elle avait fait chez eux des pro-
gres réels en s’aidant des sciences naturelles,
auxquelles ils n'étaient pas restés étrangers.
Les monumens étrusques révèlent un état so-
cial très avancé. Des routes qui s’étendaient jus-
qu’en Ibérie (2), des fortifications qui frappent
encore d’étonnement par leur inébranlable soli-
commotiones fiunt, versatum me memini, de iis quæ oculis
ipsis usurpavimus, pauca quædam exponemus, Îgnis, ter-
ram in profundo destruens ac resolvens , ea ut fiant eflicit.
Quare profecto loca propinqua evaporationibus scatebrisque
fontium calidorum quassantur crebrius : velut vicina Laodi-
ceæ Phrigiæ, Hierapoleos quæ juxta est, Philadelphiæ op-
pidi nostri , et omnino cum tractus illæ Asiæ , tum plurimus
Europæ occidentalis, Siciliam dico et Italiam. Nam concus-
sionum causa spiritus est sicCci per cavernosum prima ac
maxima extenuatio quæ fit per ignem subterraneum. Altera
causa est, maris in loca cavernosa irruptio. Facit quoque ad
rem pluvia, hyeme si cadit multa, æstate si nulla. Illa sti-
pans humum, pessumque detrudens spiritum, initium dat
compressionis : siccitas sursum trahendo eliciendoque item
movet. » ( Lydus , de ostentis , p. 186). ;
(1) Niebuhr, hist. rom. , tom. 1, p. 175. — Micali, storia
d'Italia, etc. , tom. IT, p. 224.
(2) Niebuhr, hist. rom. , tom. E. p.18.
(24)
dité, des statues en bronze de cinquante pieds
de hauteur (1), des peintures avec des couleurs
si durables qu’elles se conservent encore après
plus de vingt siècles d'existence , annoncent des
connaissances mécaniques et chimiques fort
étendues. Selon toute probabilité, on doit aux
Étrusques l'invention des voûtes : car les an-
ciens monumens de l'Égypte et de la Grèce n'of-
frent aucun exemple de la voute à voussoir, tan-
dis qu'on la trouve dans la plus ancienne des
portes de Volterra, et dans une des premières
constructions latines, la Cloaca Maxima, que
les Romains avaient imitée de leurs voisins à qui
ils empruntaient les Æquileges et tout ce qui a
rapport à l'hydraulique. Pline, qui fait honneur
aux Étrusques de l'invention des moulins à
bras (2), leur attribue aussi la découverte de la
méthode des attérissemens (ou des Colnate)
dont on se sert encore de nos joursavec tant de
succès en Toscane pour dessécher les marais, en
(1) Plinii, hist. natur., tom. IE, p. 647, lib. XXXIV,
Cap. 8. :
(2) Plinit, hist. natur., tom. II, p. 748, lib. XXX VI,
Cap. 18.
(29)
y faisant arriver les eaux troubles des rivières (1).
Un autre procédé suivi par ces peuples pour opé-
rer l'écoulement des eaux au moyen de canaux
souterrains, et dont il nous reste encore plusieurs
traces, mériterait d'autant plus notre attention
que nous ne savons plus limiter, et qu'il semble
avoir quelque rapport avec l'usage en grand des
puits forés aspirans.
Outre la difficulté, et je dirais presque lim-
possibilité, de faire connaitre, même d’une ma-
nière incomplete, l’état des sciences chez un
peuple dont la littérature et la langue ont dis-
paru, et qui par sa constitution politique et re-
ligieuse, était amené à présenter toutes ses
observations, toutes ses croyances sous la forme
d'allégories, il y a encore une autre difficulté
provenant du manque de chronologie. La civi-
lisation des Étrusques s’est développée de bonne
heure et ses progrès ont duré long-temps; mais
les auteurs qui nous ont conservé quelques frag-
mens de la science des Toscans, n’ont pas eu le
soin d'indiquer l’âge auquel se rapportaient les
citations qu'ils nous transmettaient. Apres avoir
(1) Plinii, hist. natur. tom. L, pag. 175, lib. ILE, cap. 16.
— Villani\Giov.) storia, Firenze , 1587 ,in-4, p. 31.
+
(26)
perdu son existence politique, l’Étrurie jouit
d'une assez grande tranquillité dans les deux
siècles qui précédèrent la guerre sociale; les
sciences et les arts y furent toujours cultivés.
C'est probablement à cette seconde époque qu'il
faut rapporter un grand nombre de monumens
et d'objets d'art dans lesquels on reconnait le
type grec, et c'est dans ces temps qu'il faut placer
les tragédies de Vibius, les fables atellanes et
les vers fescennins. Alors les arts, les sciences
et la philosophie avaient été envahis par l’élé-
ment helénique, et nous ne saurions avancer
désormais sans exposer le mouvement intellec-
tuel qui s'était manifesté dans la Grande-Grece
et dans toute l'Italie méridionale.
L'établissement des Grecs en Italie remonte
au-delà des temps historiques. Des traditions fa-
buleuses annoncent que les premiers navigateurs
s’avançant dans la mer Tyrrhénienne furent gui-
dés par une colombe mystérieuse et par une
harmonie céleste, qui leur indiquaient le but du
voyage (1). Ces allégories signifient que les côtes
de lItalie étaient inconnues aux premiers navi-
(3) Néehuhr, hist. rom. , tom. 1, p. 221.
(27)
gateurs arrivant de la Grèce. On à supposé que
presque tous les héros d'Homere avaient établi
des colonies italo-grecques, et l’on à cité parti-
culièrement Idoménée et Philoctète, comme les
plus anciens vainqueurs des Hibériens et des
Sicaniens qui dominaient en Sicile avant l’arri-
vée de ces nouveaux habitans (1). La colonie des
Chalcidiens à Cumes est la première à laquelle
on puisse assigner une date certaine (2). [Il n'entre
pas dans notre plan de parler en détail des nom-
breux établissemens formés par les Grecs dans
l'Italie méridionale, ni de rappeler les rapports
intimes qui existerent pendant long-temps entre
la Grèce et ses colonies; il est cependant à re-
marquer que, dès la plus haute antiquité, les
Étrusques et les peuples de la Grande-Grèce s’é-
taient acquis une grande réputation dans les
sciences et dans la philosophie. Sans adopter
l'opinion de quelques modernes qui ont supposé
(1) Voyez la lettre de Platon à Archytas, rapportée par
Diogène Laerce De vitis philosophorum , Golon.- Allobr.,
1616, in-8, p.618, lib. VIIT, Archytas). Voyez aussi Plu-
tarchi opera, tom. T, p.18, Romulus. — Thucydidis , hist.,
pe 378, lib. VI, S 2.
(2) Thucydidis hist., p. 379, lib. VI, 83. — Niehuhr, hist.
rom. , Lom. 1, p. 220.
(28).
que Pythagore était Italien (1), on peut regarder
le seul doute émis sur ce point par les anciens,
comme une preuve de la haute renommée phi-
losophique dont jouissait à cette époque la pé-
ninsule. Si Pythagore n'était pas né en Italie, on
sait du moins qu'il y vécut long-temps et qu'il
y forma de nombreux élèves. L'école itato-grec-
que à un caractere spécial : pendant: que les
Etrusques torturaient et défiguraient la nature
pour faire coincider les phénomènes qu'ils ob-
servaient, avecleurs idées mythologiques, et que
les Grecs tournaient leurs plus grands efforts
vers des problèmes métaphysiques qui surpas-
sent les forces humaines, les habitans du midi de
l'Italie cultivaient les sciences d'observation,
suivaient la méthode expérimentale (2), et con-
tribuaient aux progrès de la géométrie et de
l'arithmétique. (3) Les recherches des pythagori-
(1) Voyezdans Tiraboschi(Storia della letteratura italiana,
Venezia, 1795, 16 v. in-8,t. [, p. 28) par combien d'inexactes
citations on a voulu établir que Pythagore était Italien.
(2) Cuvier faisait beaucoup de cas des recherches anatomi-
ques des pythagoriciens, et il croyait qu’il fallait peut-être
restituer à Alcméon de Crotone l'invention des trompes at-
tribuées à Eustachi (Cuvier, cours d'histoire des sriences na -
turelles, Paris, 1851, 2 part. in-8 , L° partie, p. 96 et suiv.).
(3) Voyezla note IT à la fin du volume.
(29 )
ciens sur les vibrations des corps, sont les plus an-
ciennes expériences de physique qui soient parve-
nues jusqu'à nous. C’est de l’école sicilienne que
sont sorties les premières idées sur la sphéricité
et la rotation de la terre, et sur la nature du
soleil (1). C’est elle qui a dit pour la première
fois que le cours des comètes était régulier et
que leur apparition n'avait rien de menaçant (2).
Au reste, ces aperçus étaient mêlés à beaucoup
de réveries et d’'obscurités, et on doit les regar-
der seulement comme des conjectures, ingé-
nieuses sans doute, mais dénuées de toutepreuve.
Nous ne possédons que quelques fragmens des
(1) Aristotelis opera , Paris, 1659, 4 vol. in-fol., tom. I,
p- 658 et suiv., de cœlo, lib. Il, cap. 8. — Cicero, acade-
micarum quæstionum, Gantabrig., 1725, in-8, p. 100 et |
suiv., lib.I1,655.—Montucla, hist. des math.,lédit., tom. Ï,
p- 112 et suiv. — On peut voir dans Dutens (Origène des de-
couvertes, Paris, 1812, 2 vol. in-8, tom. [, p. 195 et suiv.)
un grand nombre de passages relatifs aux connaissances cos-
mographiques des pythagoriciens.
(2) Aristotelis opera, tom. L, p. 755, Meteor. lib. I, cap. 6.
— Suivant Apollonius Myndien les Chaldéens avaient déjà
considéré les comètes comme des planètes visibles seulement
pendant une partie de leur cours ; mais Épigène assurait
au contraire que les comètes étaient regardées à Babylone
comme des vapeurs atmosphériques (L. Annœi Senecæ opera,
LIT, p.820, Natur. quæst., Nb. VIL, cap. 5).
( 30 )
écrits des pythagoriciens, mais ils suffisent pour
nous faire apprécier leur système cosmologique
auquel on à attaché beaucoup trop d’impor-
tance. Empédocles supposait la distance de la
lune à la terre double de celle du soleil à la lune,
et il croyait à l'existence de deux soleils : Philo-
laus admettait un soleil de verre. Suivant les
philosophes siciliens, l'univers entier était réglé
par les lois de l'harmonie et de larithmétique.
Ils soumettaient à ces lois même les principes
moraux; et Aristote s’est moqué avec raison
de Pythagore qui définissait la justice « le pro-
duit de deux nombres pairs. » (1)
Non-seulement les pythagoriciens cultivérent
les sciences et la philosophie, mais ils formerent
une puissante institution politique , et les chefs
de cette école furent à-la-fois des savans illustres
et de grands citoyens (2). Empédocles refusa
(1) Stobæi , sentent., eclog., etc., Aurel.-Allobr., 1609, 2
part. en 1 vol. in-fol., 2° part., Eclog. phys., p. 51,53, 56.
6r, etc., hb. 1, cap. 25. — Macrobiiopera, Amstelod., 1670,
in-8, #n somn.Scipion., ib.1,c.6.— Aristoteiis opera, t. UT,
p. 192, Magnor. moral., lib. 1, cap. 1.—Voyez surtout le Pi-
Lolaus de Bæœckh (Berlin, 1819,in-8), où se trouvent réunies
toutes les opinions cosmographiques des pythagoriciens.
(2) Voyez sur l’école italique Opuscoli lett. di Bologna,
(31)
d’être le tyran d’Agrigente et alla mourir dans
l'exil. On croit qu'Archytas a appliqué le pre-
mier la géométrie à la mécanique (1). Il instruisit
Platon dans la doctrine de Pythagore (2) et l’ar-
racha à la colère mortelle de Denys (3). Sept fois
général, il conduisit toujours à la victoire ses
concitoyens. On lui doit un premier essai sur le
fameux problème de la duplication du cube (4),
et il passe pour un des plus anciens géomètres
, . . se , Fe n
qui se soient servis de l'analyse (5). Quelques-uns
tom.[,p. 115-130, et 175-193 (Bruni). — Scina , memorie
sulla vita d'Empedocle, Palermo, 1815, 2 tom. in-8. tom. I,
p. » et suiv.
(1) « Primus hic (Archytas) mechanica mechanicis princi-
piis usus exposuit. Primusque motum organicum descrip-
tioni geometricæ admovit, ex dimidii cylindri sectione duas
medias secundum proportionem sumere quærens, ad cubi
duplicationem. » (Diogenis Laertii, de vit. philos., p. 619,
Lib. VIIT, Archytas). — Voyez aussi Plutarchi opera, tom. I,
p. 505, Marcellus.
(2) Diogenis Laertii, de vit. philos., p.617, lib. VIIL, 4r-
chytas.— Fabricii, bibl. græca, Hamb., 1790 et seq., 12 vol.
in-4, tom.[, p. 851.
(3) «Hic (Archytas) Platonem, quum a Dionysio necandus
esset, per epistolam eripuit. (Diogenis Lacrtii, de vil. phi-
los., p. 617 et 619, lib. VIITL, Archytas). — Voyez aussi
Suidæ lexicon, tom. [, p. 347, Âgxbrus.
(4) Diogenis Laertii, de vit. philos., p. 620, lib. VIIL, Ar-
chylas.
(5) Montucla, hist. des math., Ltom. E, p. 143.
( 32 )
de ses fragmens philosophiques, que Stobée à
conservés (1), restent comme un modele de lo-
gique et de clarté , au milieu des écrits obscurs
et diffus de ses confrères. Archytas, à qui on at-
tribue des découvertes merveilleuses, avait fait,
dit-on, des oiseaux de bois qui volaient (2).
Horace, qui l’a chanté dans ses odes, nous ap-°
prend qu'il fit naufrage et mourut sur les côtes
de la Pouille. (3)
On ne connait pas bien les causes de la chute
des pythagoriciens qui fut accompagnée de lon-
gues guerres civiles. Il parait qu'imitant les
Orientaux en politique comme en philosophie (4),
les disciples de Pythagore avaient introduit en
Italie une aristocratie religieuse dont la raideur
finit par exaspérer le peuple. Long-temps apres
avoir perdu leur influence politique, ils conti-
nuerent à s'occuper de science ; mais attaqués
par des sectes rivales, et ne conservant de leur
(1) Stobæt Sent. eclog. , etc., 2° part., Eclog. phys., p. 82,
lib. [, cap. 25.
(2) Auli Gellii, noctes atticæ, Lugd.-Batav., 1666, in-8,
p. 524, lib. X, cap.
(5) Horatit carmina , 2kb; I, od. xxvrit.
(4) Diogenis Laertii, de vit. phlos., p. 568, lib. VII, Py-
thag. — Abul-Pharajit, hist. compend. dynast., Oxonix,
1663, in-4, p. 55.
(55)
systeme que quelques pratiques superstitieuses,
ils durent succomber, et furent livrés à la risée
publique (1). Cependant, même après leur chute,
les sciences furent encore cultivées en Sicile,
et les Grecs ne cesserent point d’y aller, à
l'exemple de Platon (2), chercher des livres et
des Inmieres. Malgré les longues «et terribles
guerres qui en furent la suite, l’arrivée des Car-
thaginois dans cette ile dut contribuer aussi à
agrandir le cercle des connaissances des Siciliens.
En effet, quoiqu'ilnenousreste qu’un seul monu-
ment écrit de la littérature de Carthage, et que cet
ouvrage (le Périple d'Hannon) ne nous soit ar-
rivé que probablement défiguré par les Grecs,
cette relation géographique, donne une idée
avantageuse du savoir des Carthaginois, et prouve
que les sciences pouvaient prospérer sous leur
domination. Le fover d’heilénisme qui existait
(1) Athenϕ deipnosophistarum , Lugd., 1612, in-fol.,
P. 16r et 163, lib. IV, cap. 17.
(2)« Memoriæ mandatum est Platonem philosophum tenui
admodum pecunia familiari fuisse : atque eum tamen tres
Philolai pythagorici libros, decem millibus denarium mer-
catum , id ei precium donasse quidam scripserunt amicum
ejus Dionem Syracusanum. » (Auli Gellii, noctles atticæ,
p:260, lib. IIT, cap. 17.)
Ke 3
19 25
("54 )
en Sicile, ne tarda pas à répandre son influence
dans l'Italie centrale. Les arts des Étrusques pri-
rent alors une forme nouvelle ; leurs écoles de-
venues plus savantes furent fréquentées par tout
ce qu'il y avait de plus illustre dans la Pénin-
sule (1); et tout porte à croire que, sans les vic-
toires des Romains, l'Italie, dès cette époque,
serait parvenue à l'apogée de la gloire littéraire.
Mais, quelle que soit l'admiration que lon ait
pour la grandeur des descendans de Romulus, il
faut reconnaitre que leurs conquêtes furent non
moins funestes aux lettres que les invasions
des Barbares au moyen àge. Rome n’imita chez
les peuples vaincus, que ce qui pouvait for-
tifier son système politique et rendre ses armes
plus redoutables ; mais, tant que la république
conserva son antique vigueur, les Romains mé-
prisérent toute instruction, et détruisirent les
monumens littéraires de vingt peuples divers.
La postérité leur reprochera à tout jamais la
mort d'Archimede.
Ce grand géomètre, de qui Leibnitz disait :
(4) Titi Livir hist.,tom.T, p. 807, lib. IX, 8 36. — Cice-
3
ronis opera, P. 5742, de divinatione, hb.T, 65.
( 55 )
« ceux quisont en état de le comprendre admirent
« moins les découvertes des plus grands hommes
« modernes» (1), naquit vers l’an 467 de Rome.
Selon Plutarque (2)il était parent du roi Hiéron;
mais un mot dédaigneux de Cicéron parait in-
diquer que le géomètre de Syracuse n’apparte-
nait pas à une famille illustre (3). Archimede
s'est placé, par ses découvertes, à la tête des
géometres de l’antiquité. Dans la quadrature de
la parabole, il a surmonté pour la première fois
l’obstacle qui s’opposait à la mesure des espaces
curvilignes ; et il a laissé dans ses écrits les germes
du calculdes limites, qui a eu tantd’influence sur
l'analyse moderne. Lerapport entre la sphère et le
cylindre forme encore de nos"jours le plus beau
théorème de la géométrie élémentaire. Après
vingt siècles de travaux et de découvertes, les
(4) «Qui Archimedem et Apollonium intelligit, recentio-
rum summorum virorum inventa parcius mirabitur. » (Leik-
nilii opera, Gen?væ, 1768, 6 vol. in-4, tom. V, p. 460.)
(2) Plutarchi opera, toi. T1, p. 305, Marcellus.
(3) On est bien choqué de trouver dans Cicéron ces paroles
à l'égard d’un des hommes les plus extraordinaires qui aient
jamais existé : « Humilem homunculum à pulvere, et radio
excitabo... Archimedem. » (Cicero, tusculanarum disputa-
tionum ; Cantabrig., 1709, in-8, p. 352, lib. V, 33.)
d
(36)
intelligences les plus puissantes viennent souvent
encore échouer contre la synthèse difficile du
Traité des Spirales. L'invention des centres de
gravité est la base de la statique, et Lagrange à
dit qu'on devait à Archimède la mécanique de
l'antiquité (1). Il est probabie qu'on lui doit la
première idée de la réfraction astronomique (2),
et les plus anciennes recherches sur les équa-
tions indéterminées (3). Mais ce n’est pas à ces
grandes découvertes qu’Archimède doit la popu-
larité dont il jouit depuis vingt siècles. On a ad-
miré surtout en lui l'inventeur de plusieurs ma-
chines (4) qui, encore de nos jours, sont appli-
quées avecsuccès aux arts et à l’industrie. Diodore
raconte qu'Archimede avait inventé une machine
pour diriger les eaux du Nil sur les terrains que
linondation ne pouvait pas atteindre (5); et
(à) Lagrange, mecanique analytique, tom. T, p.23.
(2) Voyez la note HIT, à la fin du volume.
(3) Voyez la note IV, à la fin du volume. |
(4) Cassiodort opera, Venet., 1729, 2 vol.in-fol., tom. I,
p. 20 et 105, Variar. lib. I, ep. 45, et lib. VIL, ep. 5. —
Fabricii, bibl. græca, tom. IV, p.182. — Montucla, hist.
des math., tom. T, p.25r.
(5) Diodori siculi, bibl. hist., Amstelod., 1546, 2 vol. in-
fol., tom. I, p. 4o et 360, lib. [, 634, etlib. V, 6 37.
(37)
comme par un autre passage du même auteur
on voit que les Espagnols se servaient d’une ma-
chine analogue pour chasser l'eau qui remplis-
sait les mines (1), on pourrait croire que non-
seulement Archimède a voyagé en Egypte (2),
mais qu'il a été aussi en Espagne; et cette sup-
position se trouve confirmée par l'autorité d’au-
tres écrivains (3). Archimède s’occupa d'hydrosta-
tique, etses ouvrages montrent qu'il avait trouvé
un principe fondamental à l'aide duquel il prouva
la fraude de lorfèvre d'Hiéron. On dit qu'ayant
fait cette découverte dans le bain, il en sortit tout
nu en criant : Je l’ai trouvé (4)! Cette anecdote,
qui n’a cependant aucun caractère d'authenticité,
prouve encore une fois que le vulgaire ne savait
admirer dans Archimede queles applications. Un
fait qui mérite beaucoup plus d'attention, et qui
a passé jusqu'à présent presque inaperçu, c’est
qu’Archiméde dut s’abaisser jusqu’à diriger (5)
(1) Diodorti siculi, bibl. hist., tom. I, p. 360, lib. V, $ 37.
(2) Cusèrt, bibliotheca arabico-hispana, Matriu, 1760, 2
vol. in-fol., tom. 1, p. 383.
(3) Voyez la note V, à la fin du volume.
(4) Vitruvii architectura, Napol., 1758, in-fol., p. 346.
(5) Le texte d’Athénée dit qu'Archimède fut le & ycouérpns
(38)
la construction d’un vaisseau , où étaitune cham-
bre destinée aux plaisirs honteux du roi (1).
Voilà à quel prix il fut protégé par Hiéron!
Lorsque les Romains tournerent leurs
armes contre Syracuse , Archimède en prit
la défense. Ses machines eurent un effet si
prodigieux et si inattendu, que les Romains
ne pouvaient, sans prendre la fuite, voir le
moindre objet s'élever sur les remparts de la
ville assiégée ; tant ils craignaient les inventions
du géomètre (2). Plutarque (3) et Polybe(4) nous
ont laissé une description fort détaillée de ces
machines, et surtout des moyens par lesquels
Archimède détruisit, presque, la flotte des
Romains. On a beaucoup parlé des miroirs
ardens avec lesquels il aurait incendié les vais-
seaux de Marcellus. Ce fait, qui ne se trouve
érinens de ce vaisseau ( A{henœti deipnosophistarum , p. 206,
bb: V;, cap. 9).
(1) «Post hæc ad Veneris voluptates aphrodisium extruc-
tum fuit, tribus lectis instructum.» (Athenœt deipnosophis-
tarum, p.207, bib. V, cap. 10).
(2) Plutarchi opera, tom. [, p. 307, Marcellus.
(3) Plutarchi opera, tom. T, p. 306, Marcellus.
(4) Polybii historia, Lipsiæ, 1790, 8 vol. in-8. tom. III,
p.22 et seq., hib. VIIE, 8 9.
( 39 )
pas dans les plus anciens auteurs, a été l’occa-
sion de disputes très animées parmi les mo-
dernes (1); mais quoique Dufay et Buffon aient
prouvé qu'il est possible, avec des miroirs, d’al-
lumer du bois à des distances considérables, ils
n'ont fait que diminuer la difficulté, car il est peu
probable que les vaisseaux des Romains restassent
dans limmobilité nécessaire à ce genre d’expé-
riences, et il parait fort difficile qu'Archimède
voulüt choisir un moyen si peu praticable, lors-
qu'il y avait tant d’autres manières de mettre le
feu à une flotte qui aurait été à la portée de ses
réflecteurs. Le génie d’Archimède ne parvint
pas à sauver la patrie. Les Romains s’emparerent
par surprise de Syracuse, et malgré les ordres de
Marcelius, le grand géomètre périt par la bruta-
lité d'un soldat (2). Si l'on en croitAbulfarage (3),
les Romains brülérent quatorze charges de ma-
nuscrits de ce grand homme. Mais cette anecdote
est très suspecte dans un auteur à qui l’on doit
(1 Voyez pour cette discussion, Montuela, hist. des math.,
tom. I, p.251. — Tiraboschi, storia della lett. ital., tom. f,
p- 65. — Dultens, origine des découvertes, tom. Il, p. 140
et Suiv. — Archimedis opera, Oxonii, 1792, in-fol., p. 369.
(2) Plutarchi opera, tom.T, p. 508, Marcellus.
(3) Histor. compend. dynast., p. 42.
(40)
le récit si connu, et si peu croyable, de l'incendie
de la bibliothèque d'Alexandrie parles Arabes(r).
Marcellus, selon les historiens d’occident, fit
élever à Archimède un tombeau sur lequel on
grava la figure qui sert à trouver le rapport entre
le cylindre et la sphère. Mais, sous la domination
romaine, les sciences dégénérérent si vite en Si-
cile, qu'à peine un siècle après, lorsque Cicéron y
lut envoyé comme questeur, on avaittotalement
perdu la mémoire de ce tombeau (2). La sou-
(x) Nous discuterons plus loin la vérité de ce fait. Quant
aux ouvrages d'Archimède, il est certain que nous ne les pos-
sédons pas tous (Fabricius, bibl. græca, tom. IV, p. 180).
Nous avons déjà cité le passage de Théon où il est fait men-
tion des livres de catoptrique d’Archimède, ouvrage qui
n'existe plus. Casiri (Bèbl. arab. hèsp., tom. 1, p. 3#4 et
Fabricius (Bébl, græca, tom. IV, p. 180) ont répété, d’après
Bertolocci, qu'un manuscrit hébreu des élémens d’Archi-
mède se trouvait à la bibliothèque du Vatican. Mais dans
ce manuscrit (qui est maintenant le n° 384 hebreu-palatin)
il n’y a que le feuillet 422 qui soit traduit d’Archimède :
dans le feuillet suivant il y a de l'astrologie. L’original
grec du traité de iis quæ vehuntur in humido existait au
xvi*siècle, lorsque Commandin en publia la traduction; il
a été perdu depuis. M. Mai en a retrouvé quelques passages
qu'il a insérés dans le premier volume des Classicorum auc-
torum e vaticanis codicibus editorum, p. 426 et suiv. Voyez
aussi Archimedis opera, p. XVII.
(2) Cicero , tuscul. disput., p. 552, lib. V,$ 25
(41)
mission des Étrusques, la conquête de la Grande-
Grèce, la prise de Syracuse et l’asservissement
de toute la Sicile, se succédèrent rapidement.
Des-lors, les poëtes se turent, les sciences s'en-
fuirent, l'élément latin devint tout-à-fait pré-
pondérant, et’ il suffit de peu d'années pour
substituer la langue de Romulus à celle d'Ho-
mère, même dans les plus anciennes colonies
des Grecs en Italie. (1)
On a dit que Numa, instruit par les Étrusques,
avait déterminé, avec une grande précision,
l'année solaire (2), et que les anciens Romains
possédaient des connaissances astronomiques
fort étendues. Mais cela semble peu probable,
lorsqu'on considère que pendant long-temps ils
ne connurent ni les gnomons, ni aucun autre
instrument propre à la mesure du temps, et que
méme les noms des heures ne furent introduits
à Rome qu'apres la loi des douze tables {3). Dans
les premiers siècles de la république, on est
1) « Cumanis eo anno petentibus permissum, ut publice :
latine loquerentur.» (Titi Livii hist., tom. IIE, p. 602,
lib. XL , $ 42).
(2) Néebuhr, hist. rom. , tom. T, p. 386.
(5) Censorinus, de die natali, p. 140 et 141, cap. 23.
(42)
forcé de compter pour un titre littéraire na-
tional l’école où Virginie allait apprendre à lire,
pres du tribunal des décemvirs (1). La cérémonie
du clou, fiché dans le temple de Jupiter Capito-
lin pour indiquer les années au peuple , montre
combien il était rare que l’on sûtlire lorsque cet
usage fut établi (2). Il n'y avait même pas d’his-
toire, excepté les grandes annales rédigées par
les pontifes. Ces annales, quoique peu estimées
de Cicéron (3), auraient eu un grand intérêt
pour les sciences si, comme on lassure (4),
les éclipses avaient été la base de l’ancienne
chronologie latine. Les Romains n’eurent d’abord
d'autre poésie que des chansons héroiïques que
l'on chantait pendant le repas (5). Les premiers
poètes latins, Andronicus, Naevius, Ennius et
Plaute , étaient nés dans la Grande-Grèce ou dans
les provinces voisines; et tandis que les Étrus-
ques honoraient les auteurs des fables Atellanes,
le peuple romain était assez grossier pour laisser
(x) Tité Livii hist., tom. 1, p- 285, lib. IIL, S 44.
(2) Niebuhr, hist. rom., tom. [, p. 575.
(5) Ciceronis opera, p. 5858, de Legib., hb. E, S6.
(4) Nichuhr, hist. rom., tom. [, p. 553.
(3) Cicero, tuscul. disput., p.53, lib. I, $ 2.
(43)
l’auteur de l_Æsinaria, attaché plusieurs années
à la meule d’un moulin (1). En voyant les lettres
cultivées seulement par des étrangers et par des
esclaves, tels que Cœcilius et Térence, on est
tenté de croire que, selon l’ancienne institution
de Romulus , tout exercice littéraire était encore
considéré à Rome comme indigne des hommes
libres. (2)
Pendant plusieurs siècles, les Romains n'eu-
rent presque pas d'écoles chez eux. Il parait
même qu'ils n’eurent de maitres payés par le pu-
blic qu'au sixième siècle (3). Apres la guerre
contre Persée, un grand nombre de partisans de
ce roi furent mis à mort en Grèce ; d’autres fu-
rent trainés à Rome, pour que le Sénat statuàt
sur leur sort. Polybe, qui se trouvait parmi les
(1) «Et ob quærendum victum ad circumagendas molas,
quæ trusatiles appellantur, operam pistori locasset, » (Audi
Gellii, noctes atticæ, p. 219, lib. IIT, cap. 3).
(2) « Artes sedentariæ ac illiberales.. ut corpus et animum
hominum eas exercentium perdentes et labefactantes, servis
et exteris exercendas (Romulus) dedit ; et diu apud Romanos
hæc opera habita sunt ignominiosa, nec ullus indigena eas
exercuit. Duo vero sola studia ingenuis hominibus reliquit :
agriculturam et bellicam artem.» (Dionys. Halie. opera,
tom. TI, p. 296, lib. II, 6 28.)
(5) Plularchi opera, tom. NT, p- 275, Quæst. rom.
(44)
accusés, contribua, par son influence et par celle
de ses amis(r}), à introduire le goût de la litté-
rature grecque à Rome : Carnéades , pendant son
ambassade , continua l’œuvre de lhistorien.
Apres la prise de Carthage : les lettres furent de
plus en plus cultivées dans la capitale de POcci-
dent : on s’appropria d’abord l'agriculture de
Magon (2), et il est probable que d’autres ou-
vrages carthaginois furent traduits en latin; mais
on les oublia tous lorsque, suivant l'expression
d'Horace, Rome victorieuse fut subjuguée par
la Grèce.
Cicéron nous apprend (3) que ses concitoyens
cultivèrent peu la géométrie; et tous les fragmens
qui nous restent des écrits géométriques des
Romains viennent à l'appui de son témoignage.
Aünsi, on voit les jurisconsultes romains prendre
pour mesure de la surface d’un triangle équila-
téral la moitié d’un carré fait sur un des côtés (4),
(1) Polybii hist., tom. IV, p. 559, lib. XXXIT, cap. 0.
(2) Columella agricultura, b. I, cap. 1, Scriptores rei rus-
ticæ, Lipsiæ, 1773, 2 vol. in-4, tom. I, p. 429.
(3) Cicero, tuscul. disput., p. 5, lib. 1, 2.
(4) De agrorum conditionibus et constitutionibus limitum,
Paris, 1554,in-4,p. 147.—Eu traduisanten analyse la méthode
moins erronée que Columelle a employée pour déterminer
(45)
quoiqu'il fut bien facile d'obtenir une valeur plus
exacte. L’astronomie aussi fut négligée pendant
long-temps à Rome, et l’on y regarda comme
un prodige de science Sulpicius Gallus qui
prédisait les éclipses (1). À peine connaissait-
on le nom de la physique : les ouvrages des
physiciens latins contenaient plutôt la méta-
physique des atomes, que des observations
et des expériences directes (2). Il était d’ail-
leurs difficile que dans un pays où même les
hommes les plus illustres croyaient fermement à
la magie, on püt étudier avec fruit les phéno-
mènes naturels. (3)
la même surface, on voit qu’au lieu de faire, comme il l’au-
® A f A a LA A f
rait dû, cette surface égale à - V3 (en appelant a le côté du
4
4
triangle), il l’a supposée égale UE i ient à
8'€)» PP g go 5 Ce qui revient à pren-
— 26 es
dre V3 — + et par suite V675 — 26. ( Columella agricull.,
lib. V, cap. 11, Script. rei rust., tom. I, p. 571). Varron,
Vun des hommes les plus savans de son temps, avait écrit
sur la géométrie, sur l’astronomie et l’arithmétique ; mais ces
ouvrages ont péri.
(1) Titi Livii hist. ,tom. LIL, p. 918, lib. XLIV, $ 37.
(2) Cicero acad. quæst., p. 9, iv. IL, $ 2. — Cicero, tuscul.
disput., p. 230, lib. IV, 5.
(3) Voici une des formules magiques que Caton nous a
(46)
Rome n'ayant plus d’ennemis à combattre se
relàcha de plus en plus de son système de des-
truction, et accueillit les sciences et les lettres
des peuples vaincus. Les écrits d’Aristote , rap-
portés en Italie par Sylla (t), contribuerent aux
progrès de la philosophie. C'est bien à regret
que l'histoire des sciences accueille le nom de
cet homme sanguinaire; mais elle y est forcée.
Outre la conservation des écrits du maitre des
péripatéticiens, on lui doit la fondation d’une bi-
bliothèque qui fut peut-être la plus ancienne de
Rome (2), et il a probablement rapporté d'Orient
conservées : « Luxum si quod est, hac cantione sanum fiet ;
harundinem prende tibi viridem, p. 1111, aut v. longam.
Mediam diffinde, et duo homines teneant ad coxendices.
Incipe cantare, In alio s. f. motas vacla daries dardaries
astataries dissunapiler, usque dum coeant. Ferrum insuper
iactatos ubi coierint, et altera alteram tetigerit; id manu
prende, et dextra sinistra præcide. Ad luxum, aut ad frac-
turam alliga, sanum fiet, et tamen quotidie cantato in alio,
s. f. vel luxato. Vel hoc modo, Awat hanat huat ista pista
sisla, domiabho damnaustra , et luxato. Vel hoc modo, Auat
haut haut ista sis tar sis ardannabon dunnaustra.» (Cato,
de re rust., $ clx, Script. rei rust., tom. I, p.125).
(1) Strabo, rer. geog., p.906, bib. XIIT. — Plutarchi opera,
tom. I, p.468, Sylla. — $S. Isidori opera, Matrit., 1758, 2
vol. in-fol. , tom. I, p. 155, Etym., lib. VE, cap. 5.
(2) S. Isidortopera, tom. 1,p. 135, Etym., lib. VI, cap. r.
f
( 47.)
un de ces enduits, dont on s’est encore occupé
de nos jours, propres à garantir les corps de
l’action du feu et que les Romains ont ensuite
employés habituellement dans leurs guerres. (1)
Le poème de Lucrèce est à-la-fois fun des
plus beaux monumens de la poésie latine, et le
plus ancien dépôt de la philosophie des Romains ;
mais cet ouvrage, comme tous les autres écrits
scientifiques des Latins, manque d'originalité ;
car les sciences ne furent cultivées à Rome que
sous le rapport historique : on les considéra
comme des matières d'érudition, et non pas
comme pouvant offrir des sujets de recherche
et de découverte. Lucrèce, qui suivait la philoso-
phie d'Épicure, a traité dans son poème plusieurs
points importans de physique (2). On y trouve
(1) Auli Gellii, noctes atticæ, p. 792, lib. XV, cap. 1. —
Ammiani Marcellini quæ supersunt, Lipsiæ, 1808 ; 3 vol.
in-8 , tom. I, p. 227, lib. XX, $ 51.
(2) Il nous semble que Cuvier a traité un Peu sévèrement
Lucrèce, lorsqu'il a dit: « Sa physique est aussi défectueuse
que sa philosophie » (Cuvier, cours d'histoire, ete., l"° par-
tie, p. 220). Au moins, on ne trouve pas dans Lucrèce l’Aor-
reur du vide et la generation spontanée d’Aristote. M. Ideler
a cité d’autres anciens philosophes qui n’ont pas cru à la gé-
nération spontanée (Metcorologia vet. græc. et rom., Bero-
lin., 1832, in-8, p. 32). Les anciens rattachaient à la généra-
(48)
un passage remarquable sur ja chute des graves,
où l'auteur explique pourquoi certains corps
tombent dans l'air plus vite que d’autres, et
montre que ce phénomène, comme celui de la
légèreté positive, dépend des lois de lhydrosta-
tique (1). Lucrèce admet lexistence du vide(2),
et il dit que les couleurs sont dans la lumière (3).
Ces idées appartenaient à son maitre. Quant à la
vie de Lucrece, elle nous est presque inconnue :
le breuvage amoureux qui lui aurait donné la
mort, et les corrections faites par Cicéron au
poème de la nature, ne paraissent mériter aucune
confiance. Au reste, ce poème prouve que, du
temps de Lucrèce, la philosophie était assez gé-
tion spontanée les pluies merveilleuses d’êtres vivans, dont
les historiens font mention fréquemment, mais qu’il ne faut
pas adopter sans examen : témoin la pluie de veaux dont
parle Avicenne.
(1) « Nunc locus est (ut opinor) in his illud quoque rebus
Confirmare Tibi nullam rem posse sua vi
Corporéam sursum ferri, sursumque meare. »
(Lucrelii, de rerum natura, Oxonii, 1695,
in-8 , lib. IT, vers. 184, p.73.)
(2) Lucretii, de rer. nat., hb.T, versus 385 et 512, p. 22
et 29.
(3) « Præterea quoniam nequeunt sine luce colores
Esse , neque in lucem exi tunt Primordia rerum.» ,
(Lucretii, de rer. nat., lib. TL. vers. 794, p. 10b).
(49)
néralement répandue chez les Romains, pour
qu’on püt l'introduire dans la poésie.
Mais déjà nous touchons à une époque glo-
rieuse, illustrée par les écrits de Cicéron et de
César et par la naissance d’Horace et de Virgile.
Cicéron, l’un des esprits les plus féconds de lan-
tiquité, a renfermé dans une vaste encyclopédie
la littérature et la philosophie des anciens. Il ne
nous appartient pas de rendre compte ici de
l'ensemble de ses ouvrages où l’on trouve cepen-
dant des détails précieux sur l’histoire scienti-
fique des Grecs et des Italiens (1). César qui, par
une faculté étonnante, pouvait s'occuper à-la-fois
des choses les plus disparates, écrivait sur la
grammaire et sur l'astronomie, et nés coéé
historien l'admiration de Cicéron. Lucain nous
représente ce grand capitaine se livrant à l’obser-
vation des astres. La réforme du calendrier, à
laquelle il présida , témoigne assez de ses connais-
sances scientifiques (2). Sa gloire n'aurait pas
d’égale si, au lieu d'employer son génie à l’as-
(1) Delambre a observé qae Cicéron connaissait mieux que
César la durée de l’année (Delambre, hist. de l’'astron. an-
cienne , Paris, 1817, 2 vol.in-4 , tom. I, p.267).
(2) César réforma le cal-ndrier d’après les idées des Égyp-
tiens dont l’aunée avait 365 jourset un quart(Macrobii opera,
É 4
( 5o )
servissement de la patrie, il lavait consacré
à la défense de la liberté et de l’ancienne con-
stitution romaine.
Sous Auguste, il arriva ce qui a toujours lieu
lorsqu'une tyrannie s'élève sur les débris de Ja
liberté. Des hommes doués d’une grande énergie,
ne pouvant plus faire tourner au profit de la
patrie leurs forces individuelles, cherchèérent
dans la culture des lettres un moyen d'exercer
leur activité. Rome sous Auguste, Florence sous
les Médicis, la France sous Louis XIV, ont re-
produit le même spectacle; et la flatterie a attri-
bué à la protection d'Anguste, des Médicis et du
grand Louis, la gloire littéraire de leur époque
Mais te gloire convient-elle à celui qui, pour
s’affermir sur le trône, jeta à Antoine la tête de
Cicéron et voulut même étouffer la mémoire de
l’orateur ? Est-ce Tibulle, mort dans la misere,
qui à valu cette réputation à Auguste? Est-ce
Virgile, que Donat nous montre d’abord relégué
dans les écuries du palais impérial (1), et qui,
p: 178, Saturnal., bb. E, cap. x1v). On sait qu'Hipparque en
retranchait 1/300° de jour; mais cette correction avait été
presque oubliée depuis.
(r) « At Augustus in mercedem singulis diebus panes Vir-
( 1.)
au reste, payait assez cher par ses vers sur Mar-
cellus et par des généalogies supposées, la pro-
tection de l’empereur? On sait qu'Horace, pour
courtiser le tyran, dut se vanter de sa lächeté à
Philippes. On peut voir dans ses satires avec
quelle morgue et quelle froideur il avait été recu
d’abord par ce Mécène qui est resté dans l'histoire
comme le modele des bienfaiteurs des lettres.
A-t-on oublié Ovide, mort dans l'exil sans qu’on
sache pourquoi, et dont les ouvrages mêmes fu-
rent proscrits (1)? La censure impériale fit brüler
les écrits de Labienus et poussa l’auteur à se
laisser mourir de faim. Lorsque Cornelius Gallus,
exilé et réduit à la misère, se fut tué, Auguste
empécha Virgile d'en faire l'éloge (2). Ce qu’on
gilio, ut uni ex stabulariis dari jussit. » (Vérgibii vita, in
proleg. Virgilir oper., Varis., 1714, 3 vol. in-12, tom. I.)
(1) Ovidii Tristèum , lib. LIT, eleg. 1, vers. 65-70.
(2) « Hujus Pollionis filium C. Asinium Cornelium Gal-
lum, oratorem clarum, et poetam non mediocrem, miro
amore dilexit Virgilius. Is transtulit Euphorionem in lati-
num, et libris quatuor amores suos de Cytheride scripsit.
Hic primo in amicitia Cæsaris Augusti fuit, postea in suspi-
cionem conjurationis contra illum adductus, occisus est.
Vero usque adeo hunc Gallum Virgilius amarat, ut quartus
Georgicorum, à medio usque ad finem, ejus laudem conti-
neret : quem postea, jubente Augusto, in Aristæi fabulam
commutavit. » (Vérgilii vita, in proleg. Virgilit oper., tom. I.)
4.
(56)
a appelé protection, n'élait que l'argent jeté aux
flatteurs, et le silence que la proscription et la
mort imposaient aux écrivains indépendans. Au-
guste n’a fait que confisquer à son profit une gloire
qui était due à la liberté expirante et non pas au
despotisme naissant.
Les successeurs d'Auguste consoliderent, par
une horrible comparaison, la réputation de clé-
mence de leur devancier. Tibere, jaloux de toutes
les g'oires, depuis celle de Germanicus jusqu'à
la réputation d'un artiste, faisait périr dans les
tourmens les architectes trop habiles. Sous Ca-
ligula, un comédien expiait dans les flammes
quelques mots imprudens prononcés dans les
fables atellanes. Dans sa fureur insensée, lempe-
reur s'en prenait à Virgile et à Tite-Live, et ten-
tait même de détruire les noèmes d'Homère.
Claude, qui n’était point méchant, fut aussi ri-
dicule dans ses travaux littéraires qu’inepte dans
le gouvernement de l'état. Néron, se faisant un
jeu de brüler la moitié de Rome, ne devait
pas espérer de voir prospérer les exercices
académiques qu'il avait institués : ses trois suc-
cesseurs ne régnerent que le temps nécessaire
pour organiser la guerre civile. Cependant, sous
)
les premiers empereurs, les Romains surent en-
(55)
core s'illustrer par des travaux littéraires. Mais
avec un sénat qui vantait la clémence de Cali-
gula, avec une armée d’espions chargés de
faire tomber les plus illustres têtes, sous l'em-
pire de vilsaffranchis, distributeurs de toutes les
faveurs, il était impossible que ces restes d'é-
nergie républicaine, qui avaient fait la gloire du
siècle d’Auguste, pussent se conserver long-
temps. La littérature latine devint alors de plus
en plus provinciale, et finit par l'être presque
exclusivement. Les droits de citoyen ayant été
accordés successivement aux habitans de tous
les pays conquis, lorsqu'on vit que, même sans
être né sur le Tibre, il était possible de parvenir
aux plus hautes dignités, Rome devint le rendez-
vous de tous les ambitieux. Quoique les sciences
et les lettres eussent déjà été cultivées avec succes
dans différentes provinces, les empereurs seuls
créèrent cette centralisation qui contribua tant
à conserver les monumens littéraires des peuples
vaincus. Toutes les nations payèrent à Rome un
tribut de gloire. L'Espagne fournit à la capitale
les deux Sinèque, Lucain, Martial, Quintilien ,
Hygin : on dut à la France, Favorin et Domitius
Afer; à la Palestine, Philon et Joseph l'historien :
et à la Grèce, Élien, Plutarque , Épictète. L'Italie
(54)
donna naissance à Juvénal, à Tacite et aux deux
Pline. Mais il faut avouer que parmi ces écri-
vains illustres, il n’y en a pas un seul qui sesoit
élevé au rang des inventeurs. Après Ja mort
d’Archimede, les sciences exactes quittérent
l'Italie. À Rome, les astrologues (auxquels on
donnait alors le nom de mathématiciens )
étaient chassés et rappelés à chaque instant par
des empereurs cruellement superstitieux.Tibere
condamuait à mort les astrologues étrangers (1)
lorsqu'il était las d'employer leurs horoscopes
comme arrêts de proscription. L’arrogance de ces
imposteurs était telle que, lorsque Vitellius leur
ordonna desortir tous d'Italie un jour déterminé,
ils répondirent en assignant le jour où l’'empe-
reur devait être sorti de ce monde (2); et comme
il mourut avant le jour fixé, l'historien a soin
d'ajouter : « Telle était l'exactitude avec laquelle
ils prévoyaient les évenemens futurs!» Si les
mathématiques n'étaient connues à Rome que
comme un moyen de tirer des horoscopes, les
sciences naturelles n’y furent un peu cultivées
(1) Dionis Cassii, hist. rom. , Hanov., 1606, in-fol. , pag.
612et616, lib. LVII.
(a) Dionis Cassi, hist. rom. , p.734, lib. LXV.
( 56 )
que par suite du luxe effréné et de la cruauté
des Romains. Des pares et des volieres que la
gourmandise des descendans de Cineinnatus
peuplait des animaux les plus rares; des viviers
dont les poissons étaient nourris quélquefois
avec dela chair humaine; des cirques ou les bêtes
féroces des contrées les plus éloignées semblaient
se donner rendez-vous pour amuser une popu-
lace avide de sang, renfermaient des collections
vivantes extrémement précieuses pour quiconque
eût voulu s'occuper de zoologie. Sans pouvoir
signaler aucune découverte scientifique faite en
Italie sous les successeurs d'Auguste, on doit
citer l’ Histoire naturelle de Pline et les Questions
naturelles de Sénèque comme deux encyclopé-
dies qui renferment une multitude de faits cu-
rieux. Personne n’a connu mieux que Sénèque
l’art de prècher la vertu en pratiquant tous les
vices. Né à Cordoue, de Sénèque le rhéteur, il
arriva de bonne heure à la cour impériale.
Accusé par Messaline de complicité avecJulie (1),
il fut relégué dans l'ile de Corse : là, il parlait de
Claude, dontilinplorait laclémence, comme d'un
(1) Dionis Cussii, hist. rom., p. 670, lib. LX.
(56 )
Dieu nécessaire au salut de la république(:); et
l’on connait la sanglante satire qu'il publia plus
tard contre la mémoire de l’empereur. Instituteur
de Néron, il ne sut pas empêcher un parricide;
philosophe, il blâmait conime un luxe inutile la
bibliothèque d'Alexandrie (2), et possédait cinq
cents tables de cèdre à pieds d'ivoire (3). Sa belle
mort a pu seule diminuer l'horreur des crimes
dont il était souillé. Sénèque n’a pas cultivé les
sciences mar lui-même; il n'a été qu'un compi-
lateur, mais il nous a transmis avec fidélité
les idées qui dominaient de son temps. Ses
Questions naturelles renferment des obser-
vations intéressantes, Le grossissement que
produisent les globes de verre (4) par réfrac-
(1) L. Annœi Senecæ opera, tom. [, p. 217, 225,227; de
consolat. ad Polyh., cap. 26, 31, 32, etc.
(2) L. Annœæi Senecæ opera , tom. TI, p.362, de tranquill.
_anim., Cap. 9.
(3) «Nec in hac re solum , sed in plerisque aliis contra fa-
cere visus est quas philosophabatur. Quum tyrannidem im-
probaret , tyranni præceptor erat.…. quingentos tripodas.…. »
(Dionis Cussit, hist. rom. , p. 694, lib. LVL.)
(4) « Litteræ quamvis minutæ et obscuræ , per vitream pi-
lam aqua plenam majores clarioresque cernuntur. » (L. An-
nœi Senecæ opera,tom. IL, p 646, Natur. quest. lib . I,
cap. 6.) — Au reste, Ficoroni a trouvé une loupe dans un
(137)
tion et les miroirs par réflection (1); les cou-
leurs de l'iris qui se forment artificiellement
à l’aide d’une espèce de prisme de verre (2); la
diminution de la chaleur dans les hautes re-
ancien tombeau romain (Mannt, degli occhiali da naso,
Firenze, 1738,in-8, p. xv et xvi. — Nelli, vita di Galileo,
Losanna, 1793, 2 vol. in-4, tom. I, p. 150). Quelques
personnes ont cru que le « Nero princeps, gladiatorum
pugna spectabat smaragdo» de Pline se rapportait aussi
à quelque moyen employé par les Romains pour grossir ou
pour rapprocher les objets éloignés. Mais, en lisant avec at-
tention tout ce passage, et en le comparantavec ce qu Isidore
a ditsur le même sujet, on se persuadera facilement que les
Romains ne se servaient des émeraudes qu’à cause de leur
couleur verte, comme d’un préservatif pour les yeux. Elles
étaient pour eux des espèces de conserves à l’aide desquelles
ils regardaient les objets, soit par réflection, soit par trans-
mission (Plinii, hist. nat., tom. IL, p.774, lib. XXX VIF,
cap. 5. — S$. Isidori opera, tom. [, p. 405, Etym., lib. XVI,
cap. 7). On peut rapprocher ce passage de Pline d’un passage
de Galien que M. Letronne a interprété d’une manière fort
ingénieuse , et qui prouve que les personnes qui avaient la
vue fatiguée se servaient d’objets colorés en bleu pour repo-
ser leurs yeux (Letronne, lettres d'un antiquaire à un ar-
tiste, Paris, 1835 ,in-8 , p, 376).
(1) L. Annœi Senecæ opera ,tom. IE, p.654, Natur. queæst.,
lib. 1, cap. 15. — Voyez aussi Plutarchi opera, tom. Il,
p- 937, de facie in orbe Lunæ.
(2) « Virgula solet fieri vitrea, stricta, vel pluribus angu-
lis. hæc si ex transverso Solem accipit, colorem tamen qua-
lis in arcu videri solet, reddet » (L. Annœæi Senecæ opera,
tom. IE, p. 646, Natur. quæst., lib. I, cap. 7). — Voyez
(58)
gions de l'atmosphère (1); là formation des iles
par l’action des volcans (2); les différentes cou-
leurs des étoiles , des planètes et des cometes (3),
sont au nombre des faits les plus curieux con-
tenus dans cet ouvrage. Les cometes y sont con-
sidérées comme des astres ayant un cours régu-
lier, mais visibles seulement lorsqu'ils sont près
de la terre (4); et l'on y fait remarquer la diffé-
rence de densité qui existe entre les diverses
parties de la comète, l'opacité du noyau et la
transparence de la queue (5). Séneque semble
avoir connu la gravité de Pair (6), et il parait
attribuer à la chaleur centrale l’origine des trem-
aussi Plinii, hist. natur., tom. IL, p. 786, lib. XXXVII,
cap. 9. — $. Zsidori opera, tom.I, p.412, Etym., lib. XVI,
cap. 5.
(1) L. Annœi Senecæ opera, tom. IE, p. 759 et 760, Natur.
quæst., hb. IV, cap. 11. — Voyez aussi Aristotelis opera ,
tom. I, p.764, Meteor., lib I, cap. r2.
(2) L. Annœæi Senecæ opera, tom. IL, p. 803, Natur. quæst.,
lib. VI, cap.2r.
(3) L. Annœi Senecæ opera, tom. Il, p. 632, Natur. quæst.,
hb LE, cap. r.
(4) L. Annœi Senecæ opera, tom. Il, p. 85c et seq., Nalur.
quæst., lb. VIT, cap. 17 et seq.
(5) «Per stellas, inquit , ulteriora non cernimus ; per Co-
metas aciem transmittimus.» (L. Annœæï Senecæ opera , t. li,
p- 838, Natur. quæst., hb. V, cap. 5).
(6) « Ex his gravitatem aéris fieri. » (L. Annœæi Senecæ ope-
( 59)
blemens de terre (1). Enfin, rapportant une
opinion d'Empédocles sur la chaleur des eaux
thermales, il parle de la manière de chauffer les
appartemens par des courans d'air chaud , et fait
entendre qu’il connaissait le refroidissement pro-
duit par l’évaporation. (2)
Pour étudier avec fruit le grand ouvrage de
Pline, il faudrait commencer par établir une
synonymie complète des animaux, des plantes
et des minéraux décrits par l'auteur. T’Hs-
toire naturelle sert surtout à fure connaitre
le développement et les progres de toutes les
branches des connaissances chez les anciens.
Il nous est impossible d'en donner ici lPana-
lyse, et nous devons nous borner à indiquer
quelques-uns des faits les plus curieux que
Pline donne comme étant généralement connus
de son temps, et qui (bien qu’on les ait négli-
gés depuis) doivent exciter notre intérêt, parce
ra, tom. Il, p.767, Natur. quæst., Lib. VIT, cap. 22.) —
Ibid., p.759, Natur. quæst., lib. IV, cap. 10.
(1) L. Annœi Senecæ opera, tom. Il, p. 805, Natur. quæst.,
lib. VIE, cap. 21.
(2) L. Annœi Senecæ opera, tom. Il, p. 724 , Natur. quæst.,
lib. LIL, cap. 24. — Le texte latin dit trahit saporcm evapo-
ratio, mais il nous semble qu’il faut lire trahit calorem eva-
poralio.
( 60 )
qu'ils renferment les premiers germes de plu-
sieurs découvertes récentes. Ainsi, le développe-
ment de l'électricité par la chaleur (1), la diverse
conductibilité calorifique de l’eau douce et de
Veau de mer (2), l'action qu’exerce l'huile sur la
surface de l’eau pour en empècher l’agitation (3),
(1) «Ex eodem genere ardentium, lychnis appellata a lu-
cernarum accensu, tamen præcipuæ gratiæ. Nascitur cirea
Orthosiam , totaque Caria, ac vicinis locis : sed probatissi-
ma in Indis, quam quidam remissiorem carbunculum esse
dixerunt. Secunda bonitate similis est, Ionia appellata à
prælatis floribus. Et inter has invenio differentiam : unam
quæ purpura radiat : alteram quæ cocco : a Sole excalefactas,
aut digitorum attritu, paleas, et chartarum folia ad se ra-
pere » (Plinii, list. natur., tom. Il, p.780, lib. XXXVIF,
cap. 7. — Voyez aussi $. /sidori opera, tom. 1, p. 413,
Etym., lib. XVI, cap. 14). — On avait connu long-temps
avant Pline l’attraction électrique de l’ambre; mais serait-il
possible qu'il fût question de létincelle électrique là où
Pline dit: « Philemon ait flammaim ab electro reddi? » (Plinir,
hist. nat.,1om. Il, p.770, lib. XXXVIL, cap. 2.)
(2) « Marinas (aguas) tardius gelare, celerius accendi. Hye-
me mare calidius esse, autumno salsius. Omne oleo tran-
quillari. Et ob id urinantes ore spargere: quoniam mitiget
naturam asperam , lucemque deportet. » (Plinii, hist. nat.,
tom. I, p. 122, lib. IL, cap. 103). — Aristote avait déja re-
marqué la différente couductibilité de certains corps pour la
chaleur (Aristotelis opera, tom. IL, p. 489, de part. animal.,
lib. IT, cap. 2). — Voyez aussi L. Annœïi Senecæ opera,
tom. IL, p. 759, Natur. quæst., lib. 1V, cap. 9.
(3) Plénit, hist. nat., tom. f, p. 122, lib. IT, cap. 103. —
(61)
la variabilité des odeurs des fleurs à différentes
heures de la journée (1), et beaucoup d'autres
observations intéressantes, que lon attribue
communément à des savans modernes, sont con-
signées dans l’Histoire natureile (2). Outre cette
immense compilation, Pline, quoique chargé des
affaires les plus importantes de l'empire, avait
écrit d’autres ouvrages qui malheureusement
n'existent plus. On sait que, frappé par le spec-
tacle extraordinaire d’une grande éruption du
Vésuve, il voulut observer le volcan de trop près
etqu'ilpaya de sa vie sa curiosité scientifique. (3)
Les empereurs qui succédèrent à Vitellius es-
sayèrent en vain d'empécher la décadence des
lettres. Vespasien assigna des pensions aux rhé-
Plutarchi opera, tom. IT, p. 950, de prèm. frigid. — Fran-
klin’s, complete works, Lond., (S. D.), 3 vol. in-8, tom. II,
pag. 144 et suiv.
(x) Plinii, hist. nat., tom. IE, p. 239, lib. XXI, cap. 7.
(2) Le passage suivant, dans lequel on fait une distinction
entre la vitesse du son et celle de la lumière, nous paraît
digne d’être cité. «Fulgetrum prius cerni, quam tonitrum
audiri, cum simul fiant, certum est. Nec mirum : quoniam
lux sonitu velocior.» (Plinii, hist. nat., tom. I. p. roi,
lib. IL, cap. 54.)
(3) Plinii Cœcilii Secundi epistol., Lugd-Batav., 166,
in-8,p. 365, lib VI. ep. xvr.
#
( 62 )
teurs grecs et latins (1). Adrien accumula les
honneurs et les richesses sur les professeurs, et
fit bâtir l’Athénée , qui fut peut-être le premier
germe de l’université romaine (2). Tous les
empereurs, sans excepter Tibère et Domi-
tien (3), fonderént de nouvelles bibliothe-
ques. Mais ni les pensions, ni les Athénées,
ni les bibliothèques, ne pouvaient raviver
un corps qui avait perdu toute énergie (4). Les
Romains n'etaient plus qu'un peuple dégénéré :
ils avaient appris que ce n’était ni par des vertus,
ni par des travaux sérieux que l’on plaisait aux
acheteurs de l'empire. Si Rome était encore vi-
sitée par quelques étrangers illustres, pour un
Épictète où un Piutarque, il arrivait cinquante
charlatans; et il parait que des cordonniers et
des teinturiers pouvaient \ balancer la réputation
(1) Suelonëi opera, Trajecti ad Rhen., :690, 2 vol. in-8,
tom. 11, p. 499. Vespasian, cap. 18.
(2) Tiraboschi, storia della lett. ital., tom. IL. p. 229.
| (3) Auli Gellii, noctes atticæ , p. 603et883, lib. XI, Cap. 17,
et lib. XVI, cap. 8, — Tiraboschi, storia della lett. ital.,
tom. 1, p. 240-242. — Suetonii opera, tom. If, p. 614.
Domitian, cap. 20.
(4) Memoires de L’acad. des insoript. et beil.-lelt. | 2° série,
tom. IX, p. 42: et suiv. (Naudet).
D
(65)
médicale de Galien (1). Mème pour le petit nom-
bre de personnes qui les cultivaient encore, les
lettres n'étaient plus qu’une aride et sèche éru-
dition, et souvent le mérite principal d’un ou-
vrage consistait dans un titre bizarre (2); et
l'Italie restait étrangère aux progres que fai-
saient les sciences dans les provinces. Cent ans
aprés Ptolémée, Censorinus, qui était l’un des
savans de son temps, rapportait et semblait
adopter les idées des pythagoriciens, pour lesquels
l'univers était enharmonique, et quicroyaient que
la terre était éloignée du soleil de trois tons et
demi, la distance des étoiles à la terre étant de
six tons (3). Pendant que l'empire romain tombait
(1) «Atque hinc adeo fit, ut nunc etiam sutores, et tinc-
tores, et fabri, tum materiarii, tvm ferrarii, proprio ma-
gisterio relicto, in medicinæ artis opera insiliant.» (Ga-
leni opera, Venet., 1625, 5 vol. in-fol., vit class:, f. 2,
Method. Medend. Wib. I cap. 1.)
(2) Voyez dans la Préface des Nocies atticæ l'indication de
quelques ouvrages dont les titres n’ont rien à envier à tout
ce qu'a produit de plus extraordinaire la bizarrerie de quel-
ques érudits modernes.
(3) Censorinus , de die natali, p. 67 et 68, cap. 13. — Plus
tard cependant, Ptolémée fut connu en Italie : on le trouve
cité par Cassiodore (Cassiodori opera, tom, Il, p. 560, de
artib. et discipl. Liber. cap: 7).
(64)
sous son propre poids, il se préparait deux
grands évènemens, le christianisme et l'invasion
des barbares, qui, renversant tout ce qui existait
déjà, et remettant tout à neuf, menacerent d’a-
bord d’anéantir toute civilisation , mais qui fini-
rent , apres des siècles de ténèbres , par enfanter
la civilisation moderne.
La politique romaine qui accueillait toutes les
divinités des peuples vaincus, prépara la chute de
la sévere religion de Numa. La multiplicité des
dieux divisa et affaiblit la croyance. L’augmenta-
tion progressive du luxe et de la prospérité amollit
les mœurs et fraya la route aux ambitions. Les
guerres civiles, qui se succédèrent sansinterrup-
tion depuis Sylla jusqu'à Auguste, les proscrip-
tions, l'accroissement subit des fortunes et la
perte de fa liberté , avaient miné le principe mo-
ral de la société. Les intérêts matériels étaient
devenus les dieux exclusifs de ce peuple, qui
jadis avait été si rigide observateur du devoir et
de la religion du serment; et comme il arrive
toujours, le culte de la prospérité matérielle
avait rendu le scepticisme presque universel.
Mais il parait que les masses ogt besoin de croire
à une certaine classe de faits, dont on ne sau-
rait démontrer l'existence, et qui ont d'autant
(65 )
plus de charme pour le vulgaire qu'ils s’éloignent
davantage de la réalité. L'histoire est là pour
attester que lorsque #par des circonstances quel-
conques, la religion d’un peuple s’affaiblit, il
s'élève de tous côtés une multitude de supersti-
tions grossières qui se combattent entre elles, et
qui finissent par disparaitre devant la nouvelle
croyance destinée à satisfaire le besoin occulte
de l'humanité. Cette réaction du principe moral,
contre les intérêts matériels et contre le principe
physique de l’homme a remué profondément
plusieurs fois la société : elle agit même dans les
temps où nous vivons, et se manifeste par miile
effets bizarres : on peut prévoir qu’elle portera
tôt ou tard ses fruits.
Rome riche, sceptique, corrompue, indiffé-
rente à tout, embrassa avec ferveur une foi nou-
velle; et ces hommes qui ne savaient plus
mourir pour la gloire, coururent en foule au
martyre pour la religion de Jésus. Il ne faut pas
voir dans le christianisme un fait isolé, ni la
puissance d’un seul homme. Ce fut peut-être
une grande nécessité. Déjà, du temps de la ré-
publique, Rome ayait été ébranlée par des asso-
cations religieuses. Plus tard, lorsque des mons-
tres couronnés eurent répandu la désolation et
re
| 9]
( 66 )
l'effroi du Tage à l'Eüphrate, on embrassa avi-
dement une religion d'égalité, qui promettait le
paradis aux malheureux etmenaçait les Césars.
D'autres sectes tentérent en vain de lutter contre
le christianisme; ce n’était nila subtilité grecque,
ni les tours d’Apollonius de Tyane qui devaient
accomplir la grande révolution. Il n’était donné
qu'a des hommes non corrompus, accoutumés
par tradition au martyre, doués d’une immense
énergie €t d’une imagination puissante, de pou-
voir sortir d'une écurie de Nazareth pour aller
s'asseoir sur le trone impérial. Cette religion qui
devait remuer si fortement le monde fut, des
l’origine, ennemie de la science. Car elle voulait
régner seule sur les esprits, et être adoptée sans
discussion. Apres que les chrétiers , aidés par des
circonstances favorables et poussés par une vo-
lonté de fer, eurent envahi les plus belles pro-
vinces de l'empire; après que Constantin se füt
persuadé que l'ancien élément était trop affaibli
et qu'il fallait s'appuyer sur la nouvelle foi pour
ranimer le colosse romain; tout ce qu'il y avait
d'hommes énergiques se jeta dans le mysticisme.
Alors la lecture même des anciens auteurs fat
défendue aux chrétiens : elle ne fut permise qu’à
ceux qui voulaient combattre le paganisme, et à
(67 )
ceux qui cherchaient ( chose inconcevable!) dans
les écrivains grecs et romains des prédictions de
l'arrivée du messie (1). Aussi dans les premiers
siècles de l'Église, on ne rencontre pas un seul
chrétien qui ait laissé un nom dans les scien-
ces (2). Si la géométrie est encore cultivée à
Alexandrie, s'il nous reste un monument pré-
cieux de l’ancienne analyse indéterminée (3), ce
n'est pas aux chrétiens qu'on le doit. Sans l’ar-
(r) Voici ce que dit à ce sujet saint Jérôme : « Et si quando
cogimur litterarum sæcularium recordari, et aliqua ex his
dicere quæ olin omisimus, non nostræ est voluntatis, sed
utita dicam, gravissimæ necessitalis : ut probemus ea quæ
à sanctis Prophetis ante sæcula multa prædicta sunt, tam
Græcorum, quam Latinorum, et aliarum gentium litteris
contineri.» (S. Hieronymi opera, Paris., 1699-1700, 5 vol.
in-fol., tom. IIT, col. 1074.)
(2) Voyez dans la Revue des deux Mondes (15 mars 1834,
p- 6or) un article très intéressant de M. Letronne sur les er-
reurs des Pères de l'Eglise en fait de cosmographie.
(3) Diophante a été appelé le père de l’algèbre; mais, à
notre avis, il ne méritait pas ce titre. D'abord nous avons déjà
vu qu'outre les pythagoriciens, Platon et Archimède s’6-
taient déjà occupés de la théorie des nombres; et puis les
questions d'analyse indéterminée que Diophante traite d’une
manière très ingénieuse, mais sans notations spéciales, et
sans aucune généralité, ne constituent point l’algèbre propre-
ment dite. Nous montrerons plus loin que, selon toute pro-
babilité, cette science nous est venue de l'Inde.
n
( 68 )
rivée des barbares, on ne saurait concevoir
comment l’Europe serait sortie de l’état d’abru-
tissement où l'avaient plongée la corruption des
mœurs, une ignoble tyrannie, et l’action d’une
religion qui absorbait toutes les forces sociales.
La nullité des Byzantins qui, sans avoir subi au-
cune invasion, et malgré les trésors littéraires
hérités de leurs pères, dégénérerent sans cesse
sous l'influence du christianisme, nous fait
prévoir quel aurait été le sort de l'Occident, si la
sauvage énergie de ses nouveaux conquérans
n'y eüt pas retrempé le sang corrompu des Ro-
mains. {1)
Constantin, en embrassant la religion chré-
tienne et en transférant le siège de l'empire à
Constantinople, porta le dernier coup à la litté-
rature italienne. Rome alors n’attira plus l'am-
bition des savans, et livrée à la toute-puissance
ecclésiastique, elle vit disparaitre peu-à-peu ce
qu'on appelait les lettres profanes. Une religion
qui, étant encore au berceau, avait autorisé
(1) Ammien Marcellin nous a laissé un tableau effrayant
de la corruption et de l’ignorance romaines. (Ammiani Mar-
cellini quæ supers., tom. TL; p-13etseq., p. 481 et seq.,
lib. XIV $6,et lib. XX VII, 8 4.)
( 69 )
un auto-da-fé littéraire (1), et qui admettait le
dogme de la dégénération morale del'homme, ne
devait ni croire aux progrès de l'esprit humain,
ni les encourager. Elle devait au contraire craiti-
dre les idées nouvelles. D'ailleurs, les persécu-
tions dont les chrétiens avaient été si long-temps
l'objet, l'intolérance même de Julien qui leur
défendit l'étude des lettres(2), devaient les porter
à haïr également les paiens et leurs écrits. Les
successeurs du grand apostat se chargèrent d’as-
souvir cette haine. Sous Théodose, le fanatisme
de Théophile, patriarche d'Alexandrie, amena
(1) «Multi autem ex eis qui fuerant curiosa sectati, contulc-
runt libros et combusserunt coram omnibus » (Acta aposto-
lorum, cap. XIX, v. 19). — Quelques écrivains, parmi les-
quels on doit compter Tiraboschi (Storia della letteratura
tlaliana ; tom. IT, p.357 et 358), ont pensé que cet ancien
auto-da-fé n'avait aucune gravité, parce que, d’après leur
opinion, ces livres étaient des livres de magie. Mais doit-on
brûler mème des livres de magie? Nous répondrons sans hé-
siter : Non. D'ailleurs, les écrivains orthodoxes ont voulu
appuyer sur ce fait le droit de censure que s’attribue l'Église
romaine. (Zaccaria, sloria polemica delle proibiziont de’
librè, Roma, 1977, in-4 , p. 1-4, etc.)
(2) Theodoreti opera, Lut.-Paris. , 1642, 4 vol. in-fol.,
tom. IIT, p.648. — « Docere vetuit magistros rhetoricos et
grammaticos christianos, ni transissent ad numinum cul-
tum. » (Ammiani Marcellin quæ supers., tom. I, p. 584,
lib. XXV, 6 4.)
(70 )
la destruction du temple de Sérapis, dernier
asile de la science païenne, et Ïa perte des plus
précieux monumens littéraires (1). Les mathé-
matiques marchèrent alors à leur total dépé-
rissement. Après Diophante, dont l’âge est in-
certain , mais qui parait avoir vécu vers le milieu
du quatrième siècle (2), on ne peut guere citer
qu'Hypatia, plus célébre par sa beauté et par sa
fin tragique que par ses écrits sur l'analyse
indéterminée (3). Fille d’un philosophe que
les chrétiens abhorraient, une populace en fu-
reur l’assassina lâchement dans les rues d’A-
lexandrie. (4)
Les subtilités philosophiques avaient déjà di-
minué lardeur qui portait les Grecs aux études
sévères; mais lorsque Justinien eut fermé les
(1) Cassiodori opera , tom. I, p.318, Hist. eccles., lib. IX,
cap. 27. — Socratis scholastici historia, Paris, 1696, in-fol.,
p- 587 et 588.
(2) Abul-Pharajii, hist. compend. dynast., p.89. — Brah-
megupta and Bhascara, transtated by Colehrooke, London,
1817, in-4, p. XX. — Théon d'Alexandrie, qui écrivait avant
le règne de Justinien, fait mention de Diophante( Théon ,
commentaire, sur Plolemee, Paris, 1821-25, 5 vol. iu-4,
p.VIretirx). é
(3) Suidæ lexicon , tom. If, p. 533, Yrazia.
(4) Socratis scholastici hist., p. 287. — Suidæ lexicon,
loc. cit.
(71)
écoles d'Athènes (1), lorsqu'il eut forcé les néo-
platoniciens à chercher un asile à la cour de
Chosrou (2), la gloire d'Alexandrie fut éclip-
sée. Plus tard, les Persans victorieux impo-
sèrent aux chrétiens la liberté de conscience;
mais c'est à peine si, revenant de leur exil, les
philosophes proscrits rapporterent quelques ger-
mes des sciences de l'Asie (3°. Ils furent réduits
au silence, et l’école alexandrine ne se ranima
que sous les Arabes,
En Occident, tout annonçait une dissolution
prochaine. Les partages si fréquens de l'empire
romain; les guerres civiles et les divisions des
(1
et 6
Malala chronicon, Venet , 1733, in-fol., pars IE, p.63
PURE
k
(2) Gibbon, the history of the decline , etc., Basil., 1787-89,
15 vol. in-8, tom. IT, p. 185.— Agathias scholasticus hist.,
Paris., 1660, in-fol., p. 53.
(3) Gibbon, the history of the decline ,ete.,tom. VIE, p. 125.
—Damascii philosophi plat., quæstiones , Franc. ad Mœn ,
1826, in-8, p.1x.—Agathias scholastieus hist., p.66 et 67.—
Suidæ lexicon, tom. ILE, p. 171. Toécéers. — Voyez (sur les
études philosophiques de Chosrou, qui lisait Platon et Aris-
tote, et sur les écoles d'Orient) de Sary, antiquites de la
Perse , Paris, 1795,in-4, p. 568.—Agathias scholasticus hist,
p.25. — Assemanni, bibl. orient., xomæ, 1719-28, 4 vol.
in-fol., tom. IT, pars 11, p. 1-38, et p. 919. — Anciennes
relations des Indes et de La Chine, traduites de l'arabe (par
Renaudot), Varis, 1718, in-8, p.263.
(72)
chrétiens qui retardaient la chute du paganisme :
une dépravation de mœurs (1) et un avilissement
tels que le nom de Romain était devenu la plus
cruelle des injures (2); les lettres si peu en hon-
neur qu'aux approches d’une disette, on chas-
sait les gens de lettres et les artistes, tout en
gardant les danseuses et les charlatans (3); enfin
les canons de l’Église qui défendaient la lecture
des livres paiens (4); toutes ces causes réunies
préparerent les ténebres dans lesquelles se
(1) Ammiani Marcellini, quæ supers., tom.I, p. 480-488,
et 463-495, bib. XX VII, S£etr.
(2) « Hoc solo, id est Romanorum nomine, quidquid igno-
bilitatis. quidquid timiditatis, quidquid avaritiæ, quidquid
luxuriæ, quidquid mendacii, immo quidquid vitiorum est,
comprehendentes » (Muratori, scriptores rer. ital., Mediol.
1723 etseq., 25 tom. in fol. ,tom. IL, pars 1°, p.481).—Ainsi
parlaient les barbares. Voyez le parallèle que fait Salvien
entre les barbares et les chrétiens (Salviant opera, Paris.,
1684,inu-8 ,p. 85, 172, etc.).
(3) Tiraboschi, storia della leit. ilal., etc., tom. IT, p. 381.
(4) A la fin du quatrième siècle, l'Église ordonnait : « Ut
episcopus gentilium libros non legat : hæreticorum autem
pro necessitate temporis » (Acta conciliorum, Paris, 1715,
12 vol. in-fol., tom.1, col. 980, ad ann. Chr. 398, Concil.
Carthag. IV. cap. xvi). —Saint Jérôme dit : « Quid facit cum
Psalterio Horatius? cum Evangeliis Maro? cum Apostolo
Cicero ? Nonne scandalizatur frater, si te videritin idolio re-
cumbentem? » {S. Hicronymiopera, tom. 1V, pars 2?, col. 42.)
(75 )
trouvait plongée l'Italie lorsque arrivèrent les
Goths : ces Goths qui, selon l'expression d'un
illustre historien, furent moins nuisibles aux
lettres que ne le fut l'établissement du christia-
nisme (1).
L'Italie a toujours été exposée aux invasions
des peuples celtiques qui, même avant les temps
historiques, s'étaient établis dans le nord de la
Péninsule. Les Romains eurent souvent à com-
battre les nations qui escaladaient les Alpes pour
aller se fixer sur les rives du P6. Ces irruptions
sans ensemble vinrent toujours se briser contre
le colosse de Rome; mais vers la fin du premier
siècle de l'ère chrétienne, une grande révolution,
qui s’accomplissait à l'extrémité orientale de
JAsie (2), chassa vers l'Occident un essaim de
peuples qui, se pressant les uns sur les autres,
finirent par Pinonder. On sait, en effet, que les
Hioung-Nou septentrionaux, vaincus et pour-
suivis sans relâche par les Chinois, arriverent
(1) Gibbon, the history of the decline, etc., tom. VIE,
p- 113.
(2) Deguignes , histoire generale des Huns, Varis, 1756,
4 tom. in-4, tom.f, 2° part., p. 277. — Klaproth, tableaux
historiques de l'Asie. Paris, 1826, in-4 , avec atlas, p. 62.
(74)
aux frontières de l'Europe vers le commencement
du second siecle de l'ère chrétienne (1), pendant
que les Chinois établissaient le système fédératif
dans presque toute l’Asie centrale (2), et se pré-
paraient même à attaquer les Romains (3). Quel-
ques historiens ont cru, un peu légèrement peut-
être, à l'identité des Hioung- Nou avec les Huns,
mais on ne peut s'empêcher de reconnaitre que
ce sont les Chinois qui ont d’abord mis en mou-
vement ces peuples qui, se précipitant les uns
sur les autres, ont fini par renverser l'empire
romain. Sans les vues pacifiques du conseil im-
périal, qui fit rappeler les troupes et abandonna
des conquêtes immenses (4), il est certain que
les Chinois, chassant devant eux leurs ennemis,
seraient arrivés dans le Ta-Tsing (ou Grande-
Chine, comme ils appelaient l'empire romain),
et il est peu probable que les Romains, déjà
fatigués par les attaques des barbares, eussent
(1) Deguignes, hist. genér. des Huns, tom. 1, 2° part,
P: 278.
(2) Klaproth, tabl. hist. de l'Asie, p. 66.
(5) Deguignes, hist. gener. des Huns, tom. L; 2e part,
p.282. — Klaproth, tabl. hist. de l'Asie, p.67.
(4) Deguignes, hist. géner. des Huns, tom. E, 2° part,
p. 285.
(7)
pu résister aux armes victorieuses de ces nou-
veaux CGnquérans. On ne saurait calculer quels
auraient été les résultats de la civilisation chi-
noise succédant à cette époque au système ro-
main. Les invasions des Huns et des Goths pu-
rent bien renouveler toute l’organisation sociale,
mais n'apporterent dans le midi de l'Europe
aucun nouveau principe littéraire.
L'apparition des Huns en Italie ne fut signalée
que par des dévastations. Non-seulement ils
n'étaient pas initiés aux sciences de l'Asie, mais
ils étaient même étrangers à cette grossière astro-
nomie qui accompagne Ja superstition chez pres-
que tous les peuples de lagterre. Ce n'était pas
dans les étoiles que le Fléau de Dieu cherchait à
lire le sort futur dés batailles. F’astrologie elle-
même était une erreur trop savante pour Atüila;
il cherchait l’avenir dans les fissures de certains
os qu'il faisait calciner. (1)
L’invasion gothique eut d'autres résultats : elle
ranima pour uninstant la littérature latine, mais
sans en altérer le caractere. D'après le récit de
(1, Dequignes, hist. gener. des Huns, tom. L, 2° part.,
P: SH
(76)
Jornandes (1), les Goths avaient appris ta philo-
sophie, l'astronomie et la physique, d’un étranger
nommé Dicenée, qui vivait du temps de Sylla.
On voit dans l'Edda, qu'ils possédaient une poésie,
une cosmogonie (2) et un système complet de
connäissances. Leur mythologie, leur calendrier,
paraissent avoir une origine orientale (3). Mais
quoique la féodalité (4), qu'Odin et les Ases
avaient apportée dans le nord de l'Europe, se
soit répandue de là dans tout l'Occident, quoique
(1) Muratori, scréptores rer. ital., tom.T, pars 2*,p. 51r.
(2) Voyez dans l’Edda rhythmica , seu antiquior, Mauniae,
1787-1828, 5 vol. in-4, tom, IIT, p.23 et seq.), la cosmogonie
exposée au a ‘olo-Spa; et les idées des Scan-
dinaves sur la création, dans le petit Edda, traduit par
Mallet (Genève 1787, in-12), p.68, 77, elt.
(3) Voyez Edda rhythmica , seu antiquior, tom. IT , p. 999
et seq. — Edda, traduit par Mallet, p. 57, etc. — Richard-
son, persian, arabic and engtish Dictionary (prel. dissert.),
London, 1806, 2 vol. in-4, tom. I, p. Lx111, Lxxxv.
On a voulu pousser l’esprit de système jusqu'à considérer
Odin comme étant la mème chose que Bouddha. Klaproth
(Tableaux hist. de l'Asie , p.64} et Abel-Rémusat (Melanges
asiat., Paris, 1825, 2 vol. in-8 ,tom. I, p. 308) ont combattu
avec raison cette opinion; ce dernier pense, avec beaucoup de
probabilité, qu’il y a eu plusieurs Odin et plusieurs Bouddha :
les uns mythiques, les autres historiques. "Abel Rémusat, Me-
lang. asiat., tom. 1, p. 308.)
(4) Richardson, persian, arabic and english Diclionary,
(prel. dissert.) , tom. I, P-LXIL, LXXXV, LXXX VII.
(77)
la poésie scandinave ait eu plus tard beaucoup
d'influence sur la poésie des Allemands, aucun
fait n’annonce que, sous le rapport littéraire ou
scientifique, les lialiens aient rien emprunté
aux Goths à cette époque. Lorsque, au commen-
cement du cinquième siècle ces peuples arrive-
rent en Italie , ils y trouvèrent les lettres en pleine
décadence, etgependant, après de vains efforts
pour introduire leur langue parmi les vaincus (Tr),
ils finirent par adopter et cultiver le latin. Ce fait
est démontré par tous les monumens contempo-
rains : il prouve, malgré tout ce qu'on a pu dire
de contraire 2), qu’en arrivant dans le midi de
l'Europe les peuples septentrionaux ont été sub-
jugués par l'élément latin, et que leur influence
en Italie a été infiniment moindre que celle qu'y
exercerent plus tard les Arabes, dont les sciences,
la poésie et la langue, jetèrent de si profondes
racines dans la Péninsule. La célébrité du
royaume Goth-Italique passa les Alpes, et les mer-
veilles de la ville de Bern (Vérone) allèrent se
refléter dans les poésies scandinaves. Mais on
(0 Saxius apud Argelati, bibl. script. Mediolan., Mediol.
1745, 2 tom. in-fol. tom. [, part. 1, col. xvrr.
(2) Voyez la note VI, à la fin du volume.
( 78 )
chercherait vainement un seul document con-
temporain propre à démontrer que les traditions
de FEdda auraient pénétré en Italie (1). Bien
qu'affaibli et déchu, l'élément latin soutenu par
l'Église était encore assez puissant pour subjuguer
les envahisseurs. Le sac de Rome par les soldats
d’Alaric fut sans doute un grand désastre; mais
il fut bientôt réparé. Nous voyans du temps de
Théodoric, les lettres reprendre une nouvelle
(1) Muratori a publié (Script. rer, ilal. tom. IT, part. 2°,
Antiquit. ital., Mediol., 1740, 6 vol. in-fol.,
p- 700.
tom. IIT, col. 955) une espèce de roman historique où l’on
parle d’Attila et des héros du Nord. Mais cet ouvrage , d’une
époque bien postérieure à la chute de l'empire des Goihs,
ne constate en aucune manière l'influence de ces peuples en
lialie. Attila et ses compagnons avaient fait assez de mal
aux ltaliens pour que ceux-ci dussent avoir gardé le sou-
venir de leurs dévastations. Il existait en Italie d'anciennes
traditions sur Atula; elles étaient réunies dans des ouvrages
que Malespini avait vus au treizième siècle dans la biblio-
thèque de l'Abbaye de Florence et ailleurs, et qu’il appelle
anciens écrits. Ces traditions qui ont été la base du roman
intitulé Attila flagellum dei vulyar, publié plusieurs fois au
quinzième et au seizième siècle en Italie, appartenaient au
peuple vaincu et n’avaient rien de scandinave (Malespini,
storia fiorentina , Firenze, 1718 ,in-{, p.31, Cap. XXXVI1).
Ce qu'il peut y avoir de traditions septentrionales dans le
Chronicon Novaliciense, doit être plutôt le résultat des rap-
ports que les habitans des provinces subalpines eurent plus
tard avec les Francais, les Suisses et les Allemands.
( 79 )
vie en Italie, les écoles florissantes (1) et les sa-
vans honorés (2). Et certes les ouvrages de Boëce,
de Cassiodore; de Symmaque, surpassent de
beaucoup toutes les productions du siècle pré-
cédent. Sous le règne de Théodoric, l'Italie fut
plus forte, plus tranquille et plus heureuse
que sous les derniers empereurs d'Occident.
Les Goths, quoique ariens, ne persécute-
rent pas les catholiques (3); ils laisserent aux
Romains leurs propres lois et conserverent
jusqu'à un certain point l’ancienne forme du
gouvernement. Théodoric éleva plus de monu-
mens que n'en avaient fait construire tous les
empereurs depuis Constantin. Il fit réparer les
(1) Les Goths établirent des écoles dans plusieurs villes
italiennes. Milan, qui déjà sous les Antonins avait été ap-
pelée la nouvelle Athènes, continua pendant long-temps à
être un foyer d'instruction (Sarius, ap. Argelati, bibl.
script. Mediolan., tom.[, pars 1, col. xi1, XIV, etc. — An-
tichilà longobardico-milanesi, Milan, 1792, 4 vol. in-4,
tom. IT, p. 294 et suiv. — Téraboschi, storia della letter.
ital., etc. , tom. IIT, p.10 et 66).
(2) Cassiodort opera, tom. [, p. 19, Var., lib. I, ep. 45.
— Tamassia, storia del reyno de’ Goti, Bergamo, 1823, 3 vol.
in-8, tom. Il, p. 25et suiv. — Cochlaius, Vita Theodorici re-
gis, Ingolst,, 1544, in-4, cap. vit.
(5) Tiraboschi, storia della lett. ital., etc., tom. IE, p. 2.
— Tamassia, storia del regno de” Goti, tom. F, p. 196.
( 80 )
aqueducs et travailla au desséchement des ma-
rais qui déjà commençaient à infecter l'Italie (1).
Il appela aupres de lui les Italiens les plus illustres
par leurs talens et leurs vertus. On peut voir
dans les lettres de Cassiodore avec quel soin
Théodoric dirigeait toutes les branches de l’admi-
nistration. Boëce, qu'il nomma consul, fut lun
des hommes les plus remarquables de cette épo-
que. Il cultiva à-la-fois les lettres et les sciences,
et s’occupa de philosophie, d’arithmétique , de
géométrie. Pendant plusieurs siècles, on ne
connut d’Aristote que ce que Boëce en avait
conservé (2). Il n'avait pas d'invention dans les
sciences, mais les deux livres de géométrie qu'il
a tirés d'Euclide renferment tout ce que les
chrétiens surent en mathématique avant de
connaitre les écrits des Arabes (3). Dans les der-
ee
(x) Cassiodori opera, tom. T, p. 52, 33, 46, 47, 54, Var.,
Lib. I, ep. 32, 83, 34 ; lib. IL, ep. 53;*etc.
(2) Jourdain, recherches critiques sur les traductions La-
tines d’Aristote, Paris, 1819, in-8, p. 24 et 25. — Gibbon, the
history of the decline, etc., tom. VIL, p. 55.
(5) Lorsqu'on cite les deux livres de la géométrie de Boëce,
on veut parler des éditions connues de cet ouvrage ; mais il
existe à Florence, à la bibliothèque de Saint-Laurent, un
manuscrit qui contient une géométrie du mème auteur, en
(8r)
nières années de sa vie, Théodoric (soit qu'il
craignit une révolte de la part des Italiens,
soit qu'il voulut satisfaire les Goths, mécon-
tens de la préférence qu'il accordait aux vain-
cus) éloigna successivement de sa cour les Ro-
mains les plus illustres, et ternit sa gloire par
le supplice de Boëce et de Symmaque. Cas-
siodore, qui avait été secrétaire du roi goth, fut
plus heureux. Après la mort de Théodorie, lors-
que Amalasunte fut forcée, par les plaintes de
ses sujets, à faire interrompre les études d’Atha-
laric , Cassiodore se retira dans un couvent où il
vécut jusqu'a un âge très avancé, inspirant le
goût des lettres à ses disciples (1). Dans les diffé-
rens ouvrages qu'il nous à laissés, on aperçoit
une grande ardeur pour l'étude, mais on y voit
en même temps combien avaient dégénéré les
descendans de César et de Cicéron. Copier des
manuscrits, les faire copier à des moines, avoir
un grand soin de leur conservation ,voilà le but
cinq livres. Il faut remarquer que, dans ce manuscrit, il n’y
a que des chiffres romains (HSS. Bibl. Laurent., plut.XXIX,
cod. XIX, p: 1-40).
(1) Cassiodori opera, tom. IT, p. 514, 518, 525, 526, de
instit. divin. lilt., cap. 8, 15, 50, elc.
4 6
(82 )
des veilles du plus savant des Italiens. Il faut si
gnaler cependant un passage d'une de ses
lettres (1) qui prouve que Cassiodore avait connu
jes horloges mécaniques. Une espèce d’ency-
clopédie, qu'il avait écrite, montre que de son
temps les sciences étaient presque réduites à
rien (2). Les bienfaits du règne de Théodoric
disparurent rapidement. La lutte acharnée des
Grecs et des Goths désola Fftalie (3). La popula-
tion diminuait tous les jours; les terres restaient
en friche , et il en résuitait la plus cruelle disette.
Un historien contemporain affirme que, dans une
seule province, cinquante mille paysans mouru-
rent de faim (4). Alors l'Italie changea d'aspect :
de fertile et riante qu’elle était, elle devint peu-
à-peu inculte et sauvage, et ses belles campagnes
se couvrirent de iorêts et de marais Les Grecs
n'étaient pas les auxiliaires des Italiens, ils ne
venaient pas les délivrer : non moins barbares
on MIT SRN 7. DAMON MÉTIER PINS LUN SANTE TE SEC NN UE
(1) Cassiodorti opera, tom. I, p. r9 et 20, Var, lib. I, ep. 45.
(2) Cassiodori opera , tom. IE, p. 528.
(3) Muratori, scriptores rer. ital., tom. [, pars 1, p. 291e1
315. — Muratori dissertazionti, Napoli, 1783, 6 vol. in-8,
tom. If, p. 6 et suiv., diss, xxuL. — Bossi, storia d'Italia,
Milano, :819-23, 19 vol. in-£, tom. XIE, p. 165.
(4) Procopi historia , Paris, 1662, 2 vol. in-fol., tom. I,
p- 435, de Bello Gotthic., Lib. LE, cap. 20.
(85)
que les barbares qu'ils combattaient (1), ils brü-
laient et saccageaient les villes plus fréquemment
encore que les hommes du nord. L’obstination
avec laquelle ils revinrent sans cesse sur l'Italie
produisit un mal irremédiable, en empêchant
les Goths de s’y établir solidement et de former
avec les anciens habitans une masse compacte
qui, dès cette époque, aurait pu assurer l’indé-
pendance italienne.
Déjà vaincus par Bélisaire, les Goths furent
domptés par Narsés, et Justinien parut appelé à
être à-la-fois le législateur et le libérateur de l’em-
pire. Mais bientôt après, les Lombards, conduits
par Alboin, vinrent de nouveau arracher aux Grecs
lItalie. Cette nouvelle irruption diminua encore
les faibles restes de lancienne littérature. Les
Lombards, qui étaient idolâtres lorsqu'ils fran-
chirentles Alpes (2), reçurent avec une-extrême
lenteur les connaissances des Romains. Car, à
une époque où méme les notions les plus élé-
(x) «Itali universi acerbissime ab utroque vexabantur
exercitu : hinc agris a Gotthis, inde cuncta supellectili a
Cæsarianis exuti. € (Procopit opéra , 1tom.T, p. 485, de Bello
Gotth., bb. IIL, cap. 9).
(a) Antiqui chronologi quatuor, Neapoli, 1626, in-4, p.20.
— Vallani (Giov.) storia, P. 49.
GO.
( 34 )
mentaires semblaient réservées aux ecclésiasti-
ques, la différence de religion était un obstacle
de plus à la fusion des peuples, et empéchait es
vainqueurs de profiter des débris de la civilisa-
tion latine.
Théodoric avait rendu Fftalie forte et puis-
sante; il lui avait redonné une sorte d'unité;
mais les Lombards ne purent jamais la conquérir
tout entiere (1). Maîtres des provinces qui avoi-
sinaient le PÔ, de la Toscane et d’une grande
partie de la Romagne , ils s’avancerent à peine,
dans l'Italie méridionale, au-delà de Bénévent (2).
Rome formait une espèce de république dont le
pape était le premier magistrat populaire. Le
midi de l'Italie, soumis encore aux empereurs
d'Orient, commençait à être ravagé par les
Arabes (3), pendant que Childebert venait avec
(1) Muratori , scriptores rer. ital. ,tom. IT, pars 1, p. 484
et suiv.
(2) Machiavelli opere, Kalia, 1826, 10 vol. in-8 ; tom. I,
P- ar;
(3) D’après Paul Diacre, les Arabes partirent d'Alexandrie
etarrivèrent pour la première fois en Sicile vers l’an 669 (Mw-
ralori, scriplores rer. ilal., tom. 1: pars :,p. 481). D’autres
écrivains pensent que les Sarrazins étaient déjà venus en
Italie en 652 (Bossr', storia d'Italia, tom. XIT, p. 555-576).
Mongitore croit que les Mores sont arrivés pour la première
(85)
ses Francs saccager le nord de la Péninsule. Le
partage en duchés affaiblit beaucoup le royaume
des Lombards , et fut une des causes principales
qui empécherent cette nation d'achever la con-
quête de Fitalie. Quelques historiens ont pensé
que les Lombards étaient trop peu civilisés pour
pouvoir fonder un empire; et ils ont dit que leur
barbarie seule força plus tard l'Église à invo-
quer le secours des étrangers. Mais cette OPI-
nion est erronée; ils n'étaient ni aussi barbares,
niaussi cruels que ces Ætticoti que saiat Jérôme
avait vus dans les Gaules couper et manger les
mamelles des femmes (1); et lon ne voit pas que
litalie ait été plus tranquille et plus heureuse
après l'invasion des Francs, appelés par le pape
à combattre les Lombards, que sous la domina-
tion de ces derniers. Les dispositions en faveur des
serfs, que l’on trouve dans les capitulaires des rois
»q
fois en Sicile en 641 (Opuscoli d'autori siciliant, Palermo,
1960 et seq. 20 vol. in-4, tom. VIT, p. 127).
(1) « Quum ipse adolescentulus in Gallia viderim Attico-
tos, gentem Brilannicam , humanis vesci carnibus... el femi-
narum , et papillas solere abscindere, et has solas ciborum,
delicias arbitrari. » (S. Hieronymt opera, tom. IV, pars »,
col. 201). — Voyez aussi Muratori, annali d'Italia, Napoli,
1582, 17 vol. in-8 ,tom. V, p.218, ann. 590.
( 86 )
lombards, ne sont pas une preuve de cette grande
barbarie. Elles contrastent d’une manière frap-
pante avec les récits de Juvénal et de Galien qui
nous montrent les Romains (hommes et femines)
assistant avec délices à la torture de leurs esclaves,
et poussant la férocité jusqu’à les mutiler avec
leurs dents (1). Sous les Lombards les écoles
de Pavie eurent de la célébrité, et d'illustres
étrangers y allerent faire leurs études (2). II est
vrai qu'on ne saurait signaler dans cette époque
aucun homme comparable à Boëce, ou à Cassio-
dore; mais il faut remarquer encore une fois
que, du temps de Théodoric, les Goths domi-
uaient presque exclusivement en Walie, tandis
qu’à l'époque dont nous parlons, cette contrée
était déchirée par les guerres civiles (3), et dé-
vastée par les Grecs, dont la méchanceté, comme
dit Grégoire-le-Grand , était plus à craindre que
l'épée des Lombards. Certes les auxiliaires du
(:) Antichilt longobardico-milanesi, tom. 1, p. 328 et
suiv.— Juvenalis satyræ , Gb. IL, sat. 6, v. 475 et seq. —
Galeni opera , clas. 11, f. Br et 55, de dignosc. animi morbis,
cap. 3 et 4.
(2) Tiraboschi, storia della lett. ital,, tom. IT , p. 89. —
Muratori, scriptores rer. ital.. tom. IL, p. 185. — Mura-
toré disserlazionti, tom. Il, p, 278, diss. xl111.
(3) Muratori, annali d'Italia ; tom. V, p.257, 255, etc.
(87)
pape n'étaient pas plus policés que ses ennemis.
Dans leurs premières invasions les Francs ne fi-
rent qu’enlever des esclaves (1). Les guerres
continuelles, la dévastation du monastère du
Mont-Cassin et des autres grands dépôts litté-
raires (2), le desir qu’avaient les étrangers de se
procurer des livres (3), et l’animosité de saint
Grégoire contre les écrits des paiens (4j, avaient
(1) Tiraboschi, storia della lett. ital., tom. HE, p.84. —
Muratori, annali d'Italia, tom. V,p. 221, ann.590. — Au
reste , les [taliens étaient réduits à une telle misère qu'ils se
vendaient eux-mêmes pour ne pas mourir de faim. Plus tard
les Grecs allèrent en Toscane acheter des esclaves chrétiens,
et les Vénitiens se firent les pourvoyeurs des Sarrazins. Les
lois étaient impuissantes contre cet abominable trafic, que le
christianisme n'avait pas aboli (Muratori, annali d'Italie ,
tom. VIIT, p. 87, aun. 960. — Bouquet, rerum gallicarum
scriptores, Paris, 17938 et seq., 19 vol. in-fol., tom.V, p.588.—
Bossi, storia d'Italia, tom. XIE, p.25, tom.XILE, p. 27, 486).
Voyez aussi Reinaud, invasions des Sarrazins (Paris, 1856,
in-8, p.236 et suiv.), sur la grande manufacture d’eunuques
qu'on avait établie à Verdun, afin de pourvoir aux besoins
des infidèles, à qui on vendait ces malheureux.
(2) Muratori, scriplores rer. ital., tom. I, pars 1, p.458.
(3) Tiraboschi, sloria della lett. ital., etc., tom. ILE, p. 91.
(4) Voyez, sur ce point controversé d’intolérance religieuse,
S. Gregorii opera, Lut.-Par., 1675, 3 vol. in-fol., tom. 1,
col. 57 et 58. — Jounnis Saresheriensis, policraticus, Lugd.-
Batav., 1595, in-8 , p.104, 557. — Vossius, de historicis
latinis, Lugd.-Batav., 1627, in-4, p. 768. — Ginguene,
( 88 )
rendu si rares les manuscrits en Italie, que dans
ces temps calamiteux, même la bibliothèque de
l'église romaine ne contenait qu'un très petit
nombre de livres, pour la plupart insignifians (1).
Cependant, lorsque, après un règne de plus de
deux siècles, les Lombards, d’abord battus par
Pépin, furent domptés par Charlemagne, et que
les papes, en appelant pour la première fois les
étrangers, eurent donné un exemple funeste,
qui n’a été que trop suivi depuis, les Italiens se
trouverent encore plus avancésque les nouveaux
conquérans. Charlemagne ne fut pas, comme
on l’a prétendu, le restaurateur des lettres en
Italie. Ce furent, au contraire, les Italiens qui
lui inspirerent le goût de l'étude (2). C’est parmi
histoire litteraire d'Italie, Paris, 1824-33, 10 vol. in-8,
tom. I, p.52. — Tiraboschi, storia della lett. ital., etc.,
tom. IIL, p.103 et suiv. — Denina, vicende della letteratura,
Torin, 1792, 3 vol. in-12, tom. E, p. 152.
(1) Téraboschi, storia della Lett. ital., etc., tom. IT, p. 92
et 93.— La France, au reste, n’était pas mieux partagée: d’a-
près une lettre de Loup de Ferrières au pape Benoît IIT , il
paraît qu’au neuvième siècle il n’y avait pas dans toute la
France un Térence, un Cicéron ,un Quintilien (Gènguene,
hist. lilt.,tom.T, p. 79)
(2) Tiraboschi, storia della lett. ital., etc., tom. II, p. 144
etsuiv. — Ginguene , hist. lilt., tom. L,p 68 et suiv. — Histoire
( 89 )
eux qu'il choisit les hommes auxquels il confia
le soin d’instruire ses peuples : Paul Diacre,
George de Venise, Théodulphe, brillent au
premier rang de ceux qui secondèrent les vues
de l’empereur. Les historiens français nous mon-
trent à-la-fois dans Pierre de Pise le précepteur
de Charlemagne et le premier fondateur des
écoles françaises (r). Le célèbre Alcuin lui-même,
bien qu'Anglais, était sorti de l’école italienne (2).
Enfin tout annonce que les Francs étaient alors
moins policés que ces Lombards dont on a fait
un portrait si effrayant.
Charlemagne rêva le rétablissement de l'empire
romain, et ce projet seul suffirait pour prouver
que le vainqueur de Didier, convaissait bien les
nations dont il était le chef, et qu'il sentait le
besoin de se rattacher à la civilisation latine pour
litteraire de France par les Benedictins, Paris, 1733-1735,
18 vol.in-4, tom.IV, p. 7-11, etc. — Tiraboschi, surtout, a
mis hors de doute la supériorité qu’avaient les Italiens sur
les Francs dutemps de Charlemagne; on peut voir à l'endroit
cité un grand nombre de passages d’anciens auteurs français
qui démontrent la vérité de ce fait.
(1) Bulœus, historia universitatis parisiensis, Paris, 1665,
6 vol. in-fol., tom.I, p.626 et seq.
(2) Voyez la lettre xv d’Alcuin citée par Tiraboschi (Storia
della lett.ital., tom. WT, p. 147).
( 90 )
mettre un terme à la barbarie. Il imita Théodoric
et ne fut pas beaucoup plus heureux que lui. Ses
projets gigantesques étaient prématurés; il fut
impossible à ses successeurs de les exécuter : son
héritage passa en des mains étrangères, et la lu-
mière qu'il avait fait briller en Occident s’éteignit
rapidement (1). Après sa mort, l'Italie fut pen-
dant plus de deux siècles en proie à de nouvelles
invasions, et aux guerres civiles les plus achar-
nées. L'histoire de cette époque n'est qu'un tissu
de massacres et d’horreurs. Alors, les écoles fu-
rent fermées ou négligées : on oublia les sciences
et la philosophie des anciens sans ÿ rien substi-
tuer. L'ignorance dans les arts fut extrême: les
livres devinrent de plus en plus rares; on laissa
périr les plus importans sans Îes copier et on ne
s’attacha qu’à la conservation des ouvrages asce-
tiques, comme le prouvent les manuscrits de
cette époque qui nous sont restés. Un problème
remarquable, et qui mériterait toute l'attention
des historiens, c’est celui de rechercher pourquoi
(x) Lothaire protégea les lettres en Italie, mais ses eflorts
ne portèrent aucun fruit (Saxius , ap. Argelatr, bibl. script.
Mediolan., tom. 1, pars 1, col. xxvitr. — Muratori, disserla-
ziont , tom. IV, p.286, diss. xliur).
(91 )
les plus épaisses ténébres n’arriverent pas en
Europe avec la grande invasion des barbares,
et pourquoi elles n’en furent pas la suite immé-
diate. Ce fut seulement après que Charlemagne
eut dompté les Saxons, repoussé les Mores
d'Espagne, rendu l'éclat et la puissance à l'Église,
et rétabli l'empire d'Occident, que l'Europe tom-
ba dans le dernier degré de l’abrutissement (1).
Cette question est trop vaste pour que nous
puissions la traiter ici; mais on doit remarquer
qu'après Charlemagne, l'ignorance augmenta
avec l'agrandissement de la féodalité et du pou-
voir des pontifes. Charlemagne essaya de faire
servir le principe religieux à réorganiser lem-
pire d'Occident. Mais l'instrument qu'il vou-
lait plier à ses desseins fut plus fort que le
bras qui lemployait. Le pape maitrisa lempe-
reur, et pendant plusieurs siècles rien ne put
résister à l'ascendant de l'Eglise (1). D'ailleurs les
(1) L'Eglise fitmême subir aux sciences une transformation,
qui , au reste , leur fut utile. L’astronomie , par exemple, qui
aurait été proscrite comme étude profane, fut protégée et
cultivée dès qu’elle devint ecclésiastique. Les pénibles re-
cherches qu’il fallait faire pour déterminer le jour de Pâques
ont pu seules, dans ces siècles de ténèbres, conserver parmi
les chrétiens quelques notions du mouvement des astres. On
(92)
nations qui descendirent des Alpes, n’apportant
avec elles aucun nouvel élément de civilisation,
finirent par user les derniers restes de l'influence
latine, qui ne servit qu'à diminuer la barbarie
des envahisseurs.
Si les conquérans n'avaient pas donné à l'Italie
une nouvelle littérature, ils avaient fait plus en
lui donnant des hommes nouveaux et en retrem-
pant le caractère des habitans. Cependant les
Italiens, après les irruptions des Goths et des
Lombards, après même les victoires de Char-
lemagne, seraient restés long-temps plongés dans
l'ignorance, s'ils avaient dù recréer une nou-
velle civilisation d'eux-mêmes et sans aucun
secours étranger. Mais les sciences revinrent en
Europe, en suivant encore une fois le cours du
soleil, qui déjà anciennement les avait apportées
de l'Orient.
Les traditions de la Bible, que les chrétiens
avaient adoptées, aiderent l’orgueil des Européens
à croire, pendant une longue suite de siècles,que
peut voir dans les ouvrages de Bède combien cette détermi-
nation exigeait alors de travail : il faut remarquer que le cycle
le plus parfait des chrétiens était dù à un saint égyptien
(Bedæ opera , tom. I, col. 194).
(9)
toute l'histoire ancienne devait se grouper au-
tour de celle de trois peuples:les Juifs, les Grecs et
les Romains. Cependant les Grecs avaient déjà re-
connu la suprématie des Orientaux, et ils savaient
qu'il ne failait pas chercher l’origine des sciences
et de la civilisation dans les livres sacrés d’un
petit peuple qui avaittoutemprunté à ses voisins.
Les Grecs, des la plus haute antiquité, eurent
de fréquentes relations avec les Égyptiens, les
Phéniciens , les Medes et les Persans. Les voyages
que firent en Égypte les plus illustres philoso-
phes, prouvent la baute science des Égyptiens ;
de qui les Grecs paraissent avoir recu les pre-
miers élémens de la géométrie, l’obliquité de
lécliptique, la division du temps et les quatre
élémens; comme ils ont appris des Phéniciens à se
servir de la petite Ourse dans la navigation (1); et
des Babyloniens , l'usage du gnomon (2). 11 parait
méme que, dans les temps anté-historiques, ils
(x) Strab. , rer. geog., p. 6, bib. E.
(2) Herodoti hist., p.153, lib. IT, $ 109. — Au reste, il est
très difficile de bien déterminer ce que les Grecs ont em-
prunté à chacun de ces peuples qui devaient avoir un grand
nombre de notions communes. Hyde croit qu’ils ont pris aux
lersans les noms des mois (Hyde, hist. relig veter. Persar,
Londini, 1500 ,in-4, p. 191).
(9%)
eurent desrapports directs et peut-être même ure
extraction commune avec les peuples de l'Inde:
si dans la suite ils en perdirent le souvenir, l'in-
fluence indienne se perpétua dans la langue et la
religion des Hellènes. (1)
(r) Pour prouver cette influence, plusieurs orientalistes
sont revenus récemment sur les trois mots Ki, êu, ma, avec
lesquels on congédiait l'assemblée à Éleusis, lorsque la célé-
bration des mystères était terminée. Ces paroles sacrées, que
les Grecs prononcaient dans les cérémonies les plus impor-
tantes , étaient regardées jusqu’à ces dernières années comme
inexplicables; mais en les rapprochant de trois mots sans-
crits dont les prètres se servent encore aux Indes dans plu-
sieurs rites religieux, on a cru y reconnaître une parfaite
identité. Cependant cette opinion, émise d’abord par Wil-
ford, soutenue par Ouwaroff et par d’autres, et embrassée
avec enthousiasme par M. Creuzer, a trouvé de savans con-
tradicteurs. M. Ideler m'a indiqué plusieurs travaux publiés
en Allemagne sur ce sujet, et dont je n'avais pas eu connais-
sauce lorsque je publiai ce volume pour la première fois.
M. Lobeck, dans le premier volume de son Aglaophamus,
a voulu établir que ces trois mots se mettaient à la fin de quel-
que chose pour signifier simplement c’est assez,oucela suffit.
M. Ideler a donné, dans son Commentaire sur La météorologie
d’Aristote , un exemple de ëx employé comme signe tachygra-
phique pour ‘uciws, et il croit que cette abréviation a été la
source d’un grand nombre de méprises. Malgré tout cela, on
ne peut s’empècher d’être frappé de la similitude que ces trois
mots offrent avec des formules sacrées des Hindous Le mot à.
surtout semble être lié aux plus profonds mystères de la re-
ligion indienne (Hesychit lexicon, Lugd.-Batav., 1366, » vol.
C2
(9,
Les sciences des Grecs eurent une origine tout
orientale. On doit même remarquer que si le soi
de la Grèce a été fécond en poètes, en orateurs,
en philosophes et en historiens ; si les arts y ont
été portés au plus haut degré de perfection; si
l'histoire naturelle même y a été cultivée avec suc-
cès; c'est en revanche aux Grecs transportés hors
de leur sol natal (1), aux Siciliens et aux Grecs
orientaux (les Ioniens et les Alexandrins), que
sont dus les travaux les plus remarquables et les
découvertes les plus importantes en géométrie
et en astronomie: comme si le génie des Hel-
lènes n'avait pu cultiver avec succes les sciences
exactes que lorsqu'il se trouvait en contact avec
des élémens étrangers. D'ailleurs, quoique les
loniens aient rendu de grands services aux
sciences, on leur a attribué plusieurs décou-
vertes qu'ils avaient empruntées aux Chal-
.
in-fol., tom. If, p. 290, K545, et p. 855,114. — Asiatic rc-
searches, tom. V,p. 295-301.— Ouiwaroff, essai sur les mys-
tères d’'Eleusis, Saint-Pétersb. et Paris, 1815, in-8 , p. 24-30
el 108-116, — Aristotelis, Meteorolog. ab Idier, Lipsiæ, 1834,
tom. I, p. 399, lib. I, cap. 7, 83).
(x) Nous avons déjà vu combien les Siciliens avaient fait
pour les sciences ; mais cela rentre spécialement dans l’his-
toire scientifique de Pltalie,
(96 )
déens et aux Égyptiens, avec lesquels ils eu-
rent toujours des rapports plus directs que les
autres Grecs. C'est ainsi qu Anaximandre a été
proclamé linventeur des cartes géographiques
et des gnomons, qui, certainement, étaient
connus avant lui en Égypte et à Babylone (1);
et que l’on à fait honneur à un architecte du
temple d'Éphèse de l'invention de l’équerre et du
niveau, instrumens qu'il n'avait fait qu'em-
prunter aux Orientaux. On a’ dit, plus tard, que
Platon avait renfermé dans son école toute la
géométrie des Grecs. Mais bien que les platoni-
ciens aient cultivé les sciences avec succés,
on a tro» vanté l'importance de leurs travaux
géométriques (2). Platon était allé étudier les
mathématiques en Égypte, à Cyrène et en
Italie (3), et ses disciples les plus illustres appar-
(1) Strabo , rer. geog., p. 1, Gb. I. — Apollonii Rhodii ar-
gon. ; lib. IV, v.279 et seq. — Herodoti hist., p. 153, lib. IE,
$ 109.
(2) Presque tout ce que nous savons sur l’histoire des ma-
thématiques chez les Grecs, est tiré des écrits des néo-pla-
tonicieus ; et il n’est pas étonnant que ces écrivains aient un
peu exagéré le mérite de leur école.
(3) Diogenis Laertii, de vit. philos., p. 190, hb. IIL, PZato.
— Strabo , rer. geog., p. 1159, hb. XVIT.
(97)
tenaient à lIonie. La découverte des sections
coniques , que l’on avait attribuée au philosophe
d'Athènes, nous paraît plutôt devoir être par-
tagée entre Eudoxe de Cnyde et Archytas (1). Si
le fondateur de l’Académie avait possédé cet es-
prit éminemment géométrique, dont on lui a fait
honneur , il n'aurait pas blâmé Archytas d’avoir
soumis la mécanique à la géométrie (2), nicom-
mencé par repousser les idées cosmologiques des
pythagoriciens : surtout, il n'aurait pas dit que
la vision se fait par quelque chose qui sort
de l'œil (3). Malgré cela, on doit reconnaître
que de toutes les écoles philosophiques de la
Grèce proprement dite, l’école de Platon est
celle où l’on a cultivé la géométrie avec le plus de
succés. Les péripatéticiens s’occupèrent spécia-
lement des sciences naturelles ,et négligerent les
mathématiques. Maintenant qu'on na plus à
craindre son joug , on peut avoner que, malgré
(1) Diogenis Laertii, de vit. phèlos., p.620, lib. VIIL, 4r-
chytas. — Montucla, hist. des math., 1om.T, p. 179.
(2) Plutarch? opera, tom. IT, p. 718, Sympos., lib. VII,
quæst. 2.
(3) Euctidis opera , f.601-605.— Auli Gellii, noctes glticæ.
p.348, lib. V, cap. ro À
Len |
I. ]
#
( 98 )
ses erreurs, le philosophe de Stagire fut un des
esprits les plus vastes de l'antiquité. Cuvier a si-
gnalé, avec son talent accoutumé, les services
immenses qu'Aristote et Théophraste ont ren-
dus aux sciences naturelles (1). Les physiciens
aussi peuvent lire, non sans en retirer quelque
profit, les écrits du père des péripatéticiens. Ils y
trouveront la différente conducibilité que les
corps ont pour la chaleur (2), la gravité de
l'air (3), l'explication de la rondeur de limage
formée par des rayons solaires qui passent
par un trou de forme quelconque, la sphé-
ricité de la terre déduite de la rondeur de l’om-
bre que notre globe projette sur la lune dans les
éclipses lunaires (4), le refroidissement produit
par un ciel serein et la forntation de la rosée qui
en résulte(5). Un fait du plus haut intérêt, et qui
(1) Cuvier, cours d'histoire , etc., 1° part., p. 137-187.
(2) Aréstotelis opera, tom. IT, p. 488, de part. animat.,
lib. IL, cap.2.
(3) Aristotelis opera , tom. L, p. 692, de Cœlo, lib. IV,
cap. 4. — Humboldi, examen critique de L'histoire de La geo-
graphie dans Le nouveau continent, édit. in-fol., p. 44.
4) Aristotelis opera , tom. IV, p. 141, Probl., sect. XV,
quæst. 5.
(5) Agistotelis opera , tom. [, p. 660, de Cælo, lib. I,
Cap. 14. ee
( 99 )
a passé Jusqu à présent inaperçu, c’est l'emploi
que fait Aristote des lettres de l'alphabet pour
désigner les quantités indéterminées (r). Ce phi-
lasophe, qu'on a accusé à tort de ne pas tenir
compte des observations, était, au contraire
l’homme des faits. Mais ses observations, trop
souvent incomplètes, ue lui permettaient pas de
déterminer les diverses circonstances qui influent
sur la production d’un phénomène, et il se
trompait dans la recherche des causes. En restant
attaché au témoignage des sens, il a pu faire de
bonnes descriptions et avoir un grand succès en
histoire naturelle, mais il devait être moins heu-
(1) ne s’agit pas ici d’abréviations semblables à celles dont
plus tard fit usage Diophantepour exprimer les diverses puis-
sances des inconnues, en écrivant, par exemple, du au lieu
de Jivaure (carré), x au lieu de x5£cc (cube) , et ainsi de suite.
Aristote, dans sa Physique, exprime la force , la masse, l’es-
pace et le temps, par les lettres , 6, 7, à, etc. ; exactement
comme on le ferait aujourd’hui (Aréstotelis opera, tom. I,
p.575 et 660, Natur. auseult., lib. VIT, cap.6, et lib. VIII,
cap. 15). Cicéron aussi s’est servi des lettres de l'alphabet
pour indiquer des objets indéterminés (Ciceronis, épistolæ
ad Atticum , hb. IL, ep. 3). Au reste, nous prouverons dans
la suite de cet ouvrage que même chez les modernes on avait
employé les lettres pour indiquer les inconnues long-temps
avant Viete , à qui il faudrait cesser d'attribuer cette invention.
"
PE
( 100 )
reux en physique. Ses erreurs sur la légèreté
positive, sur la chute des graves, sur la nature
des forces (1), sur la génération spontanée, vien-
nent toutes de la même source. Mais il faut se
garder de lui attribuer les fausses opinions des
péripatéticiens modernes, qui avaient abandonné
sa méthode d'observation, tout en conservant ce
qu'il y avait d'erroné dans sa doctrine. C’est sur-
tout à cette universalité d'esprit qui lui permit
d'embrasser dans une vaste encyclopédie toutes
les connaissances humaines qu'Aristote (2) doit
(r) I n’est pas facile de croire qu'Aristote (comme quel-
ques auteurs l'ont affirmé) ait connu la composition des forces,
lorsqu'on examine ses idées siextraordinaires sur l'équilibre
du levier, qu’il fait dépendre des propriétés merveilleuses
du cercle ( Aristotelis opera , tom. Il, p. 759 et seq., Quest.
mech., cap. 1). Dans le sixième chapitre du septième livre
de la Physique, Aristote donne une règle pour mesurer les
forces d’après l’espace parcouru, le temps écoulé et la masse
du mobile. Mais, tandis qu’il dit avec raison qu’une force
double fera parcourir un espace double , iln’admet pas qu’en
diminuant la force, on puisse toujours imprimer au mobile
une vitesse proportionnelle (Aristotelis opera ,tom. L, p.555,
Natur. auseult., hb. VIE, cap. 6). Aristote s’est trompé en-
core ici, parce qu'il est resté trop allaché à ce qui a lieu ef-
fectivement dans la nature quand on ne fait pas abstraction
du frottement.
(2) On peut voir dans Diogène Laërce (De vit. philos.,
p. 314-518 , lib. V, Aristotelis) l'immense catalogue des ou-
(mo1.)
sa gloire. Gloire que les Grecs léguerent aux
Arabes, les Arabes aux Chrétiens.
L'étude de l'astronomie déclinait tous les jours
en Grèce lorsque les observations astronomi-
ques des Chaldéens, rapportées par Callisthènes,
rañimerent l’ardeur des savans. Ces observations,
des matériaux pour l’histoire naturelle d’Aristote,
et quelques notions plus exactes sur la géogra-
phie de l'Asie (1), furent le résultat immédiat des
conquêtes d'Alexandre. Plus tard , le partage du
grand empire macédonien créa plusieurs centres
où les sciences furent cultivées avec ardeur; et
dans cette nouvelle ère scientifique les Grecs
orientaux eurent encore le dessus. Pergame et
vrages d’Aristote. La plupart de ces écrits ont péri. Le bio-
graphe grec cite un livre des prerres que l’on croyait perdu,
mais dont une traduction arabe, ou pour mieux dire un
abrégé, se trouve à la bibliothèque du roi (WMSS. arabes,
n° 402). Nous parlerons de ce manuscrit, lorsque nous dis-
cuterons l’opinion d’Albert-le-Grand, qui attribuait à Aris-
tote la découverte de la boussole.
(1) Delambre , hist. de l’astron. ancienne, tom. I, p- vil.
— Cuvier, cours d'histoire, etc., ['° partie, p. 137 et 170.
— Robertson, recherches sur l'Inde, Paris, 1792, in-8,
p: 269 , 282, 292. — Baldelli, storia delle relaziont vicen-
devoli dell Europa e dell Asia , Firenze, 1827, à vol. in-4
parteË, p. 18.
( 102 )
Alexandrie rivalisèrent pendant quelque temps;
mais bientôt la victoire resta à l'Égypte. On doit
rattacher à l’école alexandrine, Euclide (1),
Hipparque (2), Archimède, Eratosthène, Apol-
lonius de Perge, Ptolémée, Diophante, qui fi-
rent tous un séjour plus ou moins long à Alexan-
drie, et qui s'illustrerent tous par des découvertes
importantes. Un fait digne d’être remarqué, et
qui vient à l'appui de ce que nous avons dit pré-
cédemment, c’est que parmi ces géomètres cé-
lébres, il n’y en a pas un seul qui soit né sur le
(1) On a confondu pendant long-temps Euclide le géo-
mètre avec un philosophe de Mégare du mème nom. Proclus
nous apprend que l’illustre auteur des élémens de géométrie
vivait à Alexandrie du temps de Ptolémée, fils de Lagus,
tandis qu'Euclide de Mégare avait été élève de Socrate pres-
que cent ans auparavant (Diogenis Laertii, de vit. philos.,
p- 158; lib. IL, Euclides.— Auli Gellii, noctes atticæ , D. 91,
lib.I, cap. 20, not. 14. — Fabricèus, bibl. græca , tom. IV,
p- 44).
(2) Le commentaire sur Aratus est le seul ouvrage d'Hip-
parque que nous possédons. On trouve dans plusieurs bi-
bliothèques un manuscrit intitulé irréoyeu met roy d'odexx
Fo) tu ; mais il est facile de se convaincre que cet ouvrage est
apocryphe en observant , entre autres choses, que le mois de
Juillet y est appelé &ÿüses, nom qu’ii n’a pu prendre que
long-temps après Hipparque (MSS. grecs de La bibl. du roi,
n° 2426, f.s et 10).
( 103 )
sol de la Grece (1). Pendant plus de huit sie-
cles l’école d'Alexandrie brilla d'un éclat sans
égal (2). En vain les Romains asservirent la pa-
trie des Pharaons ; en vain la croix s’éleva sur les
ruines du temple de Sérapis : Rome demanda
encore à l'Egypte les moyens de réformer le ca-
lendrier, et plus tard les chrétiens apprirent d’un
saint égyptien à déterminer le jour de Päques (3).
(1) Il nous est impossible de parler avec détail des décou-
vertes scientifiques des Grecs dans ce Discours préliminuire,
qui a seulement pour objet d'exposer d’une manière rapide
la marche des sciences jusqu’à la renaissance des lettres.
Nous ne pouvons qu’indiquer les résultats généraux, en nous
bornant à citer les faits les plus importans et les moins con-
nus. L'histoire des sciences de la Grèce a été traitée par un
grand nombre d’auteurs ; mais on doit avouer que leurs ou-
vrages laissent encore beaucoup à desirer. M. Lacroix, qui a
déjà rendu tant de services aux mathématiques, prépare
maintenant une histoire de la géométrie chez les Grecs, dont
tous les amis des sciences desirent la publication. Les re-
cherches de M. Biot , sur l’année vague des Égyptiens ; in-
téressent vivement les personnes qui s’occupent des sources
de l’astronomie grecque. L'origine des signes du zodiaque,
qui a été le sujet d’un grand nombre de travaux, paraît de-
voir être beaucoup éclairée par les investigations de cet il-
lustre physicien (Mémoires de l’'acudemic des sciences de
l'Institut, tom. XIII, p. 773).
(2) Vers le milieu du cinquième siècle, Proclus forma une
nouvelle école géométrique à Athènes, mais elle ne pro-
duisit rien de bien remarquable.
(3) Bedæ opera , tom. IL , col. 194.
( 104 )
Enfin , après une longue série de guerres civiles
et de persécutions religieuses, apres que le joug
de l’Alcoran se fut appesanti sur l'Égypte, l’école
alexandrine osa lutter encore avec l’école de
Bagdad.
Parmi les royaumes formés par le partage de
l'empire d'Alexandre, il en est un, celui de Bac-
triane, qui parut destiné à ouvrir, des cette épo-
que, aux Européens les portes de l’Inde. Les mo-
numens, les médailles avec des légendes grecques,
que l’on découvre encore de nos jours dans le
Guzarate (1), prouvent que les Macédoniens s’é-
ta'ent avancés fort loin dans l'Orient. Mais bientôt
le royaume de Bactriane, qui était resté isolé pres-
que au milieu des Indiens, succomba à leurs atta-
ques. Et les Parthes ayant détruit la puissance grec-
que dans l’Asie centrale, tandis que les Romains
semparaient de l’Asie-Mineure, les longues guer-
res de ces deux peuples interrompirent encore
une fois les relations de l'Europe avec l'Asie
(1) Montfaucon, collectio nova script. Græcor., Paris, 1706,
2 vol., in-fol. tom. IT, p. xret 148. — Asiatic society of
Great Britain., vol. T, part. I, p. 313. — Journal asia-
tique, tom. I, p- 321-349. — Ibid., Mars 1852, p: 280. —
Journal des Savans, Février, Mars, Avril, etc., 1836.
( 105 )
orientale. Ces relations se rétablirent plus tard;
mais, sous l’influence des Romains, elles devin-
rent purement commerciales (1), et n'eurent
aucun résultat littéraire. .
On sait les rapports intimes qui hèrent an-
ciennement les Indiens aux Persans : la langue
et les systèmes astronomiques des deux peuples
l'attestent. Mais ces relations furent interrom-
pues dans les temps plus modernes, et les Grecs
ne paraissent avoir rien recu de l'Inde par la
Perse, lorsqu'ils renverserent le trône de Darius.
On a déjà vu les philosophes d'Alexandrie, forcés
par les persécutions des chrétiens à chercher
un asile auprès de Chosrou, revenir aprés plu-
sieurs années en Egypte, sans rien rapporter
des sciences orientales.
Plus tard, les Arabes marchant sur les débris
de vingt trônes, se trouvèrent à-la-fois en con-
tact avec les Grecs, les Goths, les Indiens et les
(1) Recherches asiatiques, Paris, 1805, 2 vol. in-4,tom. 1,
p.445. — Gibbon, the history of the decline, etc., tom. 1,
p. 7ret suiv. — Robertson, recherches sur l'Inde, p.75. —
On peut voir dans Cosmas les noms des marchandises qui
venaient de linde, du temps de Justinien (Montfaucon, Col-
lectio nova script. Græcor.,tom. IL, p. 536, et planche 1v).
( 106 )
Chinois (1), devinrent dépositaires de toute la
science connue, et la transporterent en Occident.
Excités par une religion qui commandait la va-
leur, ils ne devaient pas rencontrer de grands
obstacles de la part des Chrétiens. Les Grecs fu-
rent battus; la Perse , l'Égypte, l'Inde, l'Espagne
obéirent aux Arabes. On les a accusés d’avoir dé-
truit, dans leurs premières conquêtes, les monu-
mens littéraires des peuples vaincus (2); mais
lincendie de la bibliothèque d'Alexandrie et
le sauvage dilemme d'Omar sont des faits beau-
coup moins certaihs que la destruction des bi-
bliothèques à Constantinople, où Léon lisaurien
brülait à-la-fois les livres et les lecteurs (3). Ar-
rivant bientôt apres dans l'Italie mér.dionale (4),
appelés en Espagne par le comte Julien (5), les
(1) Dequignes , hist. des Huns tom. Il, p. 494. — Elma-
cin, hist. saracenica, Lugd.-Batav., 1625, in-4, p. 84 et 85.
— Anciennes relations des Indes et de La Chine, p- 52, 86,
148, 228,277, etc.
(2) Voyez la note VIT, à la fin du volume.
(3) « Eos demum dimisit (Leo) in ædes illas regias, multam-
que materiam aridam , cireum eos collocatam , noctu incendi
jussit ; atque ila ædes cum libris, et doctos illos ac venerabi-
les viros combussit. » (Zonaræ annales , Paris, 1686, 2 vol.
in-fol., tom. Il, p. 104.)
‘4) Muratorti, seriptores rer. ilal., loin. À, pars 1, p. 4381.
(5) Conde observe avec raison que les amours de Roderic
( 107 )
Arabes s’emparerent successivement de toutes
les îles de la Méditerranée. S'avancant victorieux
vers le Bosphore, ils furent sur le point de
soumettre l'Europe entière à leur joug. Après la
chute des Ommiades la soif des conquêtes sem-
bla s’apaiser chez les Arabes. Les Abbassides
protégerent les sciences, en s’aidant des savans
Nestoriens qu'ils avaient amenés de Perse et de
Mésopotamie (1). La munificence d'Haroun Al-
Réchyd et d'Al-Mamoun contribua puissamment
à répandre linstruction (2). Un grand nombre
avec la fille du comte Julien ne sont qu’une fable dont l’ori-
gine arabe est attestée mème par le nom de la Cuba; mais il
reste toujours le faitde l'alliance de quelques seigneurs goths
avec les Arabes (Conde, historia de La dominacion de Los
Arabes , etc. ; Madrid, 1820, 3 vol. in-4, tom. I, p. 25).
(1) Jourdain, recherches sur les traductions d'Aristote ,
p.84. — Notices des manuscrits de La bibl. du rot, Paris,
17987 et suiv., 12 vol. in-4, tom. [, p. 45. — Cusiri, bibl.
arab.-hisp., tom. TL, p. 1X.— Abulfeda , annales moslem.,
Hafniæ, 1789-94, 5 vol. in-4. tom. [, p. 481. et seq.
(2) La protection accordée par Al-Mamoun aux sciences et
aux lettres a été célébrée par les historiens (Golius , notæ ad
Alfragan., Amstelod., 1669, in-4, p. 66. — Assemanni, ca-
tal. cod. orient. bibl. Mediceæ, Florent., 1742, in-fol.,
p- 237, etc. — Notices des manuscrits de la bihl. du roi,
tom. VIT, 1° part., p.38. — Elmacin, hist. sarac., p.176).
On voit ; par Pintroduction à l’algèbre de Mohammed ben
Musa, qu'Al-Mamoun avait conseillé à ce géomètre d’écrire
( 108 )
d'ouvrages scientifiques furent traduits du grec
en arabe, par l'influence surtout des médecins
chrétiens (1), qui faisaient tourner au profit des
lettres la faveur dont ils jouissaient auprès des
califes. Dictant la paix à l'empereur de Constan-
tinople, lArabe victorieux demandait des ma-
nuscrits et des savans (2). Ici on élevait des
observatoires, munis d'instrumens plus parfaits
que ceux d’'Hipparque et de Ptolémée (5); là on
le traité d’algèbre populaire que nous possédons (Mohammed
ben Musa , Algebra , London , 1831, in-8 , p. 3 et 5).
(1) Les médecins chrétiens étaient tout puissans à la cour
des califes ; ils y brillaient à-la-fois par leurs talens et leurs
vertus. La fermeté d’'Honaïn ben Isaac, refusant de livrer le
poison que le calife Motawakkel lui demandait le glaive à la
main, mérite d’être signalée (Abul-Pharajit, hist. compend.
dynast., p.145, 148, 154, 166. — Elmacin, hist. sarac.,
De 155).
(2) Cedreni, compend. hist., Varis, 1647, 2 vol. in-fol.,
tom. IT, p.548. — Assemanni, globus cœlestis cufico-ara-
bicus , Patavü, 1790, in-4, p. XII. — Deguignes, hist. gen.
des Huns, tom. I, part. 1, p. 516. — Scriptores hist. bizan-
tinæ post Theophanem, Paris, 1685, in-fol., p. 118. — Abul-
Pharajit, hist. compend. dynast., p. 160.
(3) Abul-Pharajii, hist. compend. dynast., p. 161 et 217.
— Assemanni, catal. cod. orien!. bibl. Mediceæ , p. 4oï. —
Le Souf parle longuement, dans son traité d'astronomie ,
des sphères célestes et de la manière de les construire. Il
semble, d’après cet auteur, que les Arabes se contentaient
souvent de réduire les anciennes observations, sans observer
( 109 )
mesurait un degré du méridien (1). La curiosité
et le commerce poussaient des voyageurs mu-
sulmans jusqu'aux Indes et à la Chine (2), tandis
directement les astres. Circonstince importante, parce qu’elle
peut expliquer les anomalies qui résultent des réductions
opérées sur des obsei vations erronées (Notices des manuscrits
de La bibl. du rot, tom. XIT, p. 241-243). Il paraît certain
que les Arabes avaient observé les taches du soleil dès le
second siècle de l’hégire (Assemanni, globus cœlestis cufico-
arabicus, p. XXxXIX et seq.). Bernard a cru qu’ils avaient
appliqué le pendule à la mesure du temps ! Phïlosophical
transactions , vol. XIIT, n° 158 , p. 567); mais Jourdain, qui
s’est occupé spécialement de ce sujet, n’a jamais pu rien
trouver qui confirmät cette assertion (Magasin encyclepedique,
année 1809,tom. VI, p. 45.— Bailly, histoire de l'astronomie
moderne , Paris, 1585,5 vol. in-4,t. [, p. 246. — Assemanni,
globus cœlestis cufico-arabicus , p. xlvnr). Cet auteur a tiré
des écrivains arabes la description de plusieurs instrumens
d'astronomie , parmi lesquels il faut remarquer le cercle mu-
ral dont les Orientaux paraissent avoir fait usage long-temps
avant ‘Tycho-Brahé (Voyez le Memoire sur les instrumens
de Meragak, Pp. 43-95, inséré dans le Magasin encyclo-
pedique, année 1809, tom. VI. — Voyez aussi Delambre,
histoire de l'astronomie du moyen-äge, Paris, 1819, in-4,
p- 198). Jourdain parle (ibid., p. 64 et 65), d’après un écri-
vain arabe, des tubes que l’on adaptait aux instrumens d’as-
tronomie , et qui ont porté quelques modernes à supposer
que les Orientaux connaissaient le télescope.
Voyez la note VIIT, à la fin du volume.
(x) Notices des manuscrits de la bibl. du roi, tom. {, p. 48
et suiv.
(2) Baldelli, storia delle relaziont, etc., parte IL, p. 301.—
( tro )
que d’autres formaient des établissemens à So-
fala et à Madagascar (r) : et il s’opérait par les
Arabes, guerriers, marchands et missionnaires
à-la-fois (2), un échange continuel d'idées, de
produits et de croyances, depuis le Gange jus-
qu'au Tage, depuis l'extrémité de l'Afrique jus-
qu'aux Alpes (3). Bagdad, capitale de cet im-
mense empire, était alors le centre du monde
civilisé.
Anciennes relalions des Indes et de la Chine , p. XXXT, 52,
46;, etc.
(x) Baldelli, storia delle relaziont, etc. , parte 1, p. 304.—
Anciennes relations des Indes et de la Chine , p. 195 et 565. —
Les Arabes paraissent même avoir connu la communication
entre l'Océan atlantique et la mer des Indes (Anriennes rela-
tions des Indes et de la Chine , p.73. — Walckenacr, vies de
plusieurs personnages célèbres, Laon, 1830, 2 vol. in-8,
tom. Ï, p, 355. — Baldelli, storia delle relaziont, etc.,
parte I, p. 304. — Notices des manuscrits de La bibl. du roi,
tom. IL, p. 25). On croit que les Arabes ont fondé T#mhouctou
dans l’intérieur de l'Afrique ( Walckenacr, recherches sur
L'intérieur de L'Afrique, Paris, 1821, in-8, p, 14).
(2) Deguignes, hist. géner. des Huns, tom. [, part. 1,
p- 59. — Notices des manuscrits de la bibl. du roi, tom. E,
p- 10-15 ,ettom. IL, p.25.— Anciennes relations des Indes
et de la Chine, p. 9. — Walckenaer, recherches sur l’inte-
rieur de l'Afrique, p- 12.
(3) Les Arabes s'étaient établis en Piémont au neuvième
siècle; on sait qu'ils pillèrent Turin en 906 (Muratori, scrèp-
tores rer. ital., tom. I, pars ?, col 530. — Muratori, an-
[DRE )
L'observateur peut suivre la marche rapide
de la civilisation des Arabes, qui n’est pas, comme
celle de tant d’autres nations, cachée dans la
nuit des temps. Ce peuple, dont les mœurs et
les habitudes n'avaient pas changé depuis la plus
haute antiquité, semblait avoir été fixé pour tou-
jours dans l'Yemen. Mais soudain à la voix de
Mahomet il sortit du désert et se répandit comme
un torrent sur les pays environnans. Les con-
nali d'Italia ,tom. VIT, p. 363. — Tiraboschi, storia della
lett, ital., tom. TE, p.175), et qu’au milieu du dixième siècle
ils percevaient un droit de péage pour le passage des Alpes
(Muratori, annali d'Italia, tom. VIIT, p. 63, — Reinaud,
invasions des Sarrazins en France, p. 178). Au reste, s'ils
rançonnaient les pays qu’ils avaient conquis, ils les fécon-
daient aussi. On leur doit, par exemple, lintroduction
en Occident de la canne à sucre, qu’ils cultivèrent même
en Sicile (Heeren, Essai sur l'influence des croisades, Pa-
ris, 1808 ,in-8, p. 397. — Gibbon, the history of the de-
cline, etc., tom. XIE, p. 244). Makrisi dit, d’après Masoudi,
que le citron rond a été apporté de l'Inde en Arabie au qua-
trième siècle de l’hégire (44d-ullatif, relation de l'Egypte,
Paris, 1810, in-4, p.117). Les mots Zimon et orange sont venus
d'Orient avec les objets qu’ils désignent. En italien on disait
indifféremment autrefois arancio ou narancio. Cette seconde
manière, qui s’ rapproche davantage de la racine orientale,
n’est pas indiquée dans le Vocabolurio della Crusca ; on la
trouve plusieurs fois répétée dans les lettres de Navagero à
Ramusio (Lettere di Xi huomini illustri, Venezia, 1584,
in-$, f. 310, 316,315, elc.).
(12)
quêtes presque fabuleuses des Ommiades per-
mirent aux historiens de jeter négligemment
cette phrase sur la tombe d’un prince qui avait à
peine régné neuf ans. «Il conquit l'Inde, le Cash-
« gar et l'Espagne » : elles mirent les Arabes en
contact avec tous les peuples civilisés, et pré-
parèrent aux Abbassides les moyens de réunir
à Bagdad l'élite de tous les talens du monde.
L’Arabe, dans ses guerres, avait marché rapide-
ment de victoire en victoire; et il ne put pas
se vouer aux recherches lentes et pénibles qui
seules pouvaient lui donner des sciences natio-
nales. Le temps lui manqua : il les prit toutes
faites chez ses voisins, comme par droit de con-
quête, et porta dans la culture des lettres une
énergie égale à celle qu’il avait montrée dans les
camps. Cette activité dévorante lui fit parcourir
trop vite toutes les diverses périodes de la vie des
nations, usa ses forces morales et le rendit dé-
crépit avant le temps. Bientôt l'empire des califes
s’écroulait sous les coups des tribus sauvages
qu'avait vomies la Tartarie.
Les Grecs, les Persans, les Chinois et les Hin-
dous (1) ont tous contribué à policer les Arabes ;
(1) Ibn-Khaldoun dit que les Arabes brülèrent les livres
(cm9)
mais il est difficile de bien déterminer ce que
chacun de ces peuples a pu leur donner. Les
ouvrages scientifiques des Grecs ont passé de
bonne heure chez les Arabes, par les soins des
Abbassides et par l’entremise des Nestoriens,
qui exercérent pendant long-temps uné grande
influençe en Asie. Dès les premiers siècles de
l’ère chrétienne, ces hérétiques proscrits avaient
parcouru l'Inde, la Chine et la Tartarie , et avaient
acquis un grand pouvoir à la cour de Perse (1).
des Persans, et qu’ils n’eurent connaissance que des ouvrages
des Grecs (4bd-allatif, relation de l'Egypte, p. 24tet 243).
Mais il est prouvé par le témoignage d’un grand nombre d’é-
crivains que les Arabes profitèrent des lumières de tous les
peuples de l’Asie orientale. Masoudi, qui vivait vers le mi-
lieu du dixième siècle de l’ère chrétienne, affirme que les li-
vres des Mages existaient encore de son temps (Jourdain,
Recherches sur les traductions Aristote , p.84. — Abul-Pha-
rajit, hist. compend. dynast., p. 3. — Notices des manus-
crêts de la bibl. du roi, tom. I, p.38. — Assemannt, globus
cœlestis cufico-arabicus , p. XIV). ñ
(x) La Topographia cristiana de Cosimas lÉgyptien cou-
tient des renseignemens très curieux sur les voyages des
chrétiens en Orient. Les Nestoriens avaient traduit en persan,
pour Chosrou , les ouvrages des plus illustres philosophes
grecs; et l’on connaît encore plusieurs classiques grecs tra-
duits anciennement en syriaque, parmi lesquels, d’après
Abul-Farage, il faut compter Homère. (Voyez Jourdain , re-
cherches sur les traductions d'Aristote, p. 81-85. — Abul-
I. : fe)
114.)
Sans Mahomet, il est probable qu'ils auraient pro-
duit une grande révolution religieuse en Asie, et
rapproché dés-lors les Orientaux et les Occiden-
taux. Lorsque les Abbassides se réfugierent en
Mésopotamie el en Perse pour se soustraire aux
persécutions des Ommiades, ils y rencontrerent
des Nestoriens qui leur inspirerent le goût de
l'étude et qui, plus tard, les suivirent à Bagdad. La
gloire littéraire des règnes d'Haroun-al-Réchyd et
'Al-Mamoun est due spécialement aux travaux de
Pharajii, hist. compend. dynast., p- 61, 143,148, 172, 179,
223. — Montfaucon, collectio nova script. græe., tom. I,
præf. ad Topog. christ. — Assemanni, bibl. orient., tom. IT,
pars it, p. 1-58. — Anciennes relations des Indes et de la
Chine, p. 261-263. — Agathias scholasticus hist., p. 53).
Il faut remarquer que l'influence littéraire des moinesg recs
s'étendit plus tard jusqu’en Espagne. Lorsqu’en 948, Romain,
empereur de Constantinople, envoya à Naser Abd-alrahman
les ouvrages de Dioscoride, ce calife lui demanda un homme
capable delestraduire. Le moine Nicolas, chargé de cette mis-
sion, arr à Cordoue en 951, et ce fut lui surtoutquirépandit
parmi les Mores d'Espagne les se iencés des. Grecs (Abd-allatif,
«relation, de L'Egypte; p-406 et suiv.). Un manuscrit de la col-
lection de Peyrese, que l’on croyait perdu, mais qui se
trouve à la bibliothèque du roi (Supplément latin, n° 102),
prouve qu'au dix-septième siècle il existait encore un grand
nombre de livres scientifiquestraduits en syriaque, et tous
les ouvrages d’Aristote traduits en chaldéen.
Voyez la note IX, à la fin du volume.
(25 )
ces moines, qui traduisirent en syriaque et en
arabe les écrits des philosophesgrecs. Astrologues
et médecins à-la-fois, ils prirent un grand ascen-
dant sur les califes, et ils en usèrent dans l'intérêt
des sciences. D’après Ibn-Khaldoun, Euclide fut
le premier auteur grec traduit en arabe : l’on étu-
dia ensuite Ptolémée, Archimede, Apollonius,
Aristote et Diophante (1); et c’est par les Arabes
que ces restes précieux de la sciences des Hel-
lènes ont été rendus à l'Occident. Les écrits phi-
losophiques des Grecs devinrent aussi le sujet
d'études approfondies , et furent commentés par
des hommes supérieurs, tels qu'Avicenne, Nas-
sir-eddyn et Averroës. On composa des encyclo-
pédies presque calquées sur celle d’Aristote (2),
(1) Il paraît que Diophante n’a été traduit (ou du moins
commenté) par les Arabes que vers la fin du dixième ‘siècle
(Casiri, bibl. arab-hisp., tom. T, p.453. — Abul-Pharajii,
hist. comprend. dynast., p.222. — Mohammed ben Musa alt-
gehra, p. 1X. — Brahmegupta and Bhascara , Algebra .
p: LXXII. — Cossali, origine dell algebra, Parma 595-090 ,
2 vol: in-8, tom. I, p. 175). Cette date est très idibor tite
car elle concourt, avec d’autres argumens, à prouver que
Walgèbre, possédée par les Arabes dès le neuvième siècle,
ne leur était pas arrivée de Grèce.
nus PES | s d’Ibn-Sina etid’ Alfirouzabi ont été
Ni : ASUS | \
8.
;
4
LB
(: 6 }
et l'on créa en Asie, en Égypte et en Espagne,
des collèges de traducteurs et des universités, où
l’on enseignait surtout les sciences de la Grèce (1).
Mais siles Arabes paraissent avoir reçu des Grecs
la géométrie (2), s'ils ont appris en Égypte cette
alchimie dont on leur avait pendant long-temps
attribué l'invention (3), s'ils ont tiré de PAlma-
1) Jourdain, recherches sur les traductions d'Aristote,
p. 87. — Casiri, bibl. arab.-hisp., tom. [, p.1x. — 4bd-
allatif, relation de l'Egypte, p. 468 et 469 — Assemanni,
globus cœlestis cufico-arabiens, p. Xi. — Abul-Pharaji,
hist. compend. dynast., p. 217. — Beniaminis , à Tudela,
itinerarium, Lugd.-Batav., 1633,in-8,p.12r. - Léon l’Afri-
cain comptait deux centsécoles à Fez(Leonis Africani, Africæ
descriptio, Lugd.-Bat., 1632, 2 part. in-16,p. 88, 333 et seq.).
(2) Nous avons déjà dit que les Eleémens d’Euclide furent le
premier ouvrage grec traduit en arabe: Archinède et Apol-
lonius furent traduits bientôt après, et les anciens imanus-
crits prouvent que presque tous les ouvrages des géomètres
grecs nous ont été transmis par les Arabes (Jourdain , recher-
ches sur les traductions d'Aristote, p. 85. — Assemie à
catal. cod. orient. bibl. Medic., p. 38t et 392. — MSS, de la
bibl. du roi, supplèement latin , n° 49, etc., etc. ).
Voye? la note X, à la fin du volume. :
. (3) Quelques écrivains attribuant à tort une origine arabe
à tous les mots qui commencent par l’article &l, ont cru
u’alehimie étaii un nom arabe , et par suite ils ont faithon-
neur aux Mahométans de la création de cette science.
jauis. est un mot cophte, etc’était, dit Piutarque, le:
l'on donnait à l'Egypte (Plutareh opera A0 I
/ -
à
geste l’ensemble de leurs connaissances astrono-
miques (1), s'ils semblent avoir puisé dans les
de Iside et Osiride). Les Arabes n’y ont ajouté que l’article
al, comme ils l’ont fait pour alkali, almageste, ete. On sait
que Dioclétien fit brûler tous les anciens livres de chimie des
Egyptiens (Suièdæ lexicon, tom. [, p. 594, Atoximremvès). Il
faut consulter les recherches très intéressantes de M. de
Humboldt sur l'origine du mot awlchimie et sur la décou-
verte de la distillation ( Huwmboldt, examen critique, p.
219 et suiv.).
(1) Nonobstant l’Arjabhar indien cité par les Arabes ( Cu-
sir, bibl. arab.-hisp., tom. I, p. 426 et 428, et tom. IT,
p. 332. — Notices des manuscrits de la bibl. du roi, etc.,
tom. [, p. 7 et suiv.), il nous semble que lAlmageste de
Ptolémée a été la base de leur astronomie ; mais on ne sau-
rait méconnaître l'importance de leurs propres travaux.
Albategni rendit un service signalé à la trigonométrie, eu
substituant les sinus aux cordes : on lui doit, ainsi qu’à Ge-
ber et à Ebn-lounis, de beaux théorèmes de trigonoméirie
sphérique. Les Arabes introduisirent peu-à-peu l'usage des
taugentes en astronomie, et Aboul-Wefa en calcula des ta-
bles. L’astronomie, protégée spécialement et cultivée par
Al-Mamoun et par Adadeddaoulat, était devenue très po-
pulaire en Orient : il y avait au dixième siècle en Asie un
très grand nombre d'amateurs qui s’en occupaient (Asse-
manni,catal.cod. orient. bibl. Medic., p.4ot. — Notices des
manuscrits de La bibl. du roi, tom, XIL, 1° part., p. 257,
>4t, 244,251, etc.) Casiri (Bibl. arab.-hisp., tom. I, p. 410),
et d’après lui d’autres écrivains plus récens (Viardot, hès-
toire des Arabes d'Espagne , Paris 1835, 2 vol. in-8 , tom. IL,
p- 136), ont parlé d’un ouvrage arabe sur l'attraction. Mais
il est reconnu maintenant que le livre cité par Casiri, est un
( 116.)
ouvrages d'Aristote, de Théophraste et de Dios-
coride, leur philosophie (1), leur médecine, et
leurs connaissances en histoire naturelle (2);
leur littérature et leur poésie conserverent un
caractère oriental. Quant à l'algebre, tout con-
court à prouver que les Arabes l'ont recue des
Indiens.
On a appelé improprement 4{gébre, l'ouvrage
de Diophante sur l'analyse indéterminée. Des
questions difficiles, quoique traitées avec une
grande finesse, mais sans méthode générale et
sans notation spéciale, ne constituent point la
ouvrage qui n’a aucun rapport à l’attraction (De Sacy, chres-
tomatie arabe, Paris, 1827, 3 vol. in-8, tom. III, p. 442).
Au reste, Kazwini connaissait les idées des pythagoriciens
sur l’espèce d'attraction magnétique exercée par les astres
sur la terre (De Sacy, chrestom. arabe, tom. IT, p. 433).
On peut woir dans l'Histoire de l'astronomie du moyen-äge,
par Delambre (p. xxx1Ix et suiv., et p. 1-r91), un exposé
assez détaillé des travaux astronomiques des Arabes.
(1) Un jeune orientaliste piémontais, M. Pallia, qui a bien
voulu m’aider de ses lumièreset faciliter mes recherches dans
% les manuscrits arabes que j'ai dû consulter, s’occupe main-
Téfantde l’histoire de la philosophie chez les Arabes, et il
croit pouvoir établir qu'ils ont eu une grande influence sur
la renaissance de la philosophie parmi les chrétiens, et qu’ils
ont posé les bases de la philosophie scholastique.
(>) Voyez la note XI, à la fin du volume.
(119)
science algébrique. Chez les Arabes, il y a des
méthodes plus générales, leurs dénominations
different essentiellement de celles des Grecs (1),
et l'on y trouve le système d’arithmétique qui
est adopté maintenant par toutes les nations
de l'Europe. Or, cette arithmétique et cette
algébre existaient déjà chez les Indiens. Un pas-
sage de Masoudi (2) qui, bien qu’exagéré,
conserve encore du poids, nous apprend que
les Arabes avaient recu ces connaissances de
l'Inde. Une constante tradition a fait appe-
(1) Brahmegupta and Bhascara, Algebra , p. XLH-x1v.—
Wallis avait remarqué que les Arabes ne formaient pas les di-
verses puissances par multiplication, comme les Grecs, mais
qu'ils les déduisaient les unes des autres par des élévations
à puissance, comme les Hindous (Waülis opera, Oxoniæ,
1695-99, 3 vol. in- fol., tom. IT, p 5 et 104). De manière que
la sixième puissance, par exemple, appelée cwbo-cube par
Diophante, élait le carre-cube (ou carré du cube) des Arabes.
Mais Colebrooke a trouvé depuis , dans des ouvrages arabes
modernes , les puissances formées à la manière des Grecs
(Brahmegupta and Bhascara, Algebra, p. xx), et, plus ré-
cemment encore , l’on a observé le même mode de formation
dans un ouvrage arabe fort ancien (MSS arabes de la bibl.
du roi, n° 1104.— Journal asiatique, Mai 1834, p- 435).
(2) Notices des manuscrits de là bibl. du roi, tom. I, p. 7.
— Masoudi va jusqu’à supposer que l’Almageste est tiré d’un
livre indien appelé Abmagist.
f. 8*
{
( 120 )
ler par les Arabes et par les Grecs (1) calcul des
Indiens arithmétique décimale, et nous aurons
souvent occasion de signaler des faits qui prou-
vent que d’autres branches des mathématiques
sortirent aussi de la contrée qui fut appelée /a mi-
niére des sciences (2). D'ailleurs, supposer que les
Indiens aient pu recevoir une science tout entiere
de ces Yavanas, de ces Mlétchhas(35), qu'ils traitent
encore aujourd'hui avec tant de mépris; supposer
qu'un peuple chez qui les anciennes croyances
sont restées comme pétrifiées, qu'un peuple si
porté à repousser tout ce qui vient de létran-
ger (4), ait pu recevoir l’algébre des Grecs, c'est,
ce nous semble, peu conforme aux règles de la
critique : surtout lorsque aucun fait ne vient à
l'appui de cette hypothèse, et que la comparaison
(1) Abul-Pharajii hist. compend. dynast., p.250. — MSS
grecs de La bibl. du roi, n° 2428, f. 186.
(a) Abut-Pharajii hist. compend. dynast., p. 3.
(3) Recherches asiatiques, tom. IL, p. 542. — On sait que
les Hindous s’appelaient eux-mêmes Aryas (nobles), et dési-
gnaient tous les autres peuples par le nom de Mletchhas ,
qui équivaut au harbare des Grecs.
(4) Pour se convaincre de l’extrème lenteur avec laquelle
le peuple indien adopte les opinions des étrangers , on n’a
qu'à chercher ce qu’il a reçu des Européens depuis plus de
trois siècles qu'ils se sont établis sur les rives du Gange.
(127)
des notations et des méthodes se joint aux
témoignages les plus graves pour prouver le
contraire (1). Mohammed ben Musa, qui s'é-
tait déjà occupé de lastronomie indienne,
composa , sous le règne d'Al-Mamoun, un
traité d'algebre populaire (2), dans lequel cer-
(1) Notices des manuscrits de la bibl. du roi, tom. I, p. 7.
— Brahmequpta and Bhascara, Algebra, p. XX et LXxIX. —
Dans l'algèbre indienne, les inconnues sont désignées par
les initiales des noms des différentes couleurs; et les équa-
tions sont ordonnées par les puissances de la variable, On
y exprime les quantités irrationnelles par un signe spécial,
et l'infini par l'unité divisée par zéro. Ces notations qui,
avec beaucoup d’autres, se trouvent dans les ouvrages des
Hindous (Brahmegupta and Bhascara, Algebra, p. x1-x1v),
ont toujours manqué aux Grecs. Ces différences sont fon-
damentales, et portent sur des notions élémentaires ; elles
nous paraissent établir les deux origines tout-à-fait dis-
tinctes de l’ouvrage de Diophante et de l’algèbre des Indiens.
(2) Brahmegrpta and Bhascara, Algebra, p. XX, Lxvint,
LXIX, Lxx. — Mohammed ben Musa, Algebra, p. 3. — L’ou-
vrage de Mohammed ben Musa, cité par Cardan (Cardani
de subtilitate, Lugdun., 1559, in-8, p. 607, lib. XVI. —
Cardani ars magna, cap. 1), a été publié en arabe et en an-
glais par M. Rosen à Londres en 1831. La Bibliothèque du Roi
possède trois copies manuscrites d’une ancienne traduction
de l'algèbre de Mohammed ben Musa , traduction que même
Colebrooke croyait perdue depuis long-temps (Brahkmegupta
and Bhascara, Algebra, p.LxXxX111) ; mais elles ne contiennent
qu’une partie de cet ouvrage. La préface manque dans toutes
les trois, etelles se terminent par le chapitre Conventionum
( 122 )
taines questions étaient résolues par les me-
thodes indiennes (1); tandis que l'ouvrage de
Diophante, comme nous lavons déjà indiqué,
ne fut traduit en arabe que long-temps apres (2)
et parait avoir été inconnu aux premiers algé-
bristes mahométans. En effet, si Mohammed
ben Musa, par exemple, avait tiré son algèbre
des écrits de Diophante, il est certain qu’il se
serait appliqué à l'analyse indéterminée (seule
chose dont se soit occupé le géomètre d’Alexan-
drie), tandis qu'il n’a résolu que des équations
negociatorum. Le texte arabe, publié par M. Rosen ; contient
presque le double de matière que la traduction latine dont
nous parlons.
Voyez la note XIT, à la fin du volume.
(1) Lisez dans Mohammed ben Musa (Atgebra , page 51
du texte arabe) le passage où l’auteur expose une méthode
pour trouver le rapport de la circonférence au diamètre,
méthode qui paraît certainement d’origine indienne (Moham-
med ben Musa, Algebra, p. Vtt et 197). Les Arabes citent,
comme nous l’avons déjà remarqué, un astronome indien,
Argebahr ou Arjabahr, quinous semble n’être qu'Aryabhatta,
le plus ancien des géomètres indiens ( Brahmegupta and
Bhascara, Algebra, p. XL1, L, LXIV et LxIx. — Casiri,
bibl. arab.-hispan. , tom. 1, p. 426-428 , et tom. II, p.
332).
(2) Mohammed ben Musa, Algebra, p. 1X. — Brahkmegupta
and Bhascara, Algebra, p. CXxI1, etc.
(-ta98°
déterminées des deux premiers degrés (1) et
quelques problèmes d'élimination. Il ne faut pas
cesser de répéter que les Grecs n'auraient pu
donner aux Orientaux'que ce qu'ils possédaient :
et que lors mème que les Hindous auraient eu
connaissance de l'ouvrage de Diophante, ils n’en
seraient pas moins les inventeurs de Falgebre :
science bien autrement étendue que Panalyse in-
déterminée des Grecs. Mais il semble peu pro-
babJe que Diophante eût pu pénétrer aux Indes,
lorsqu'on voit qu'Euclide lui-même y était in-
connu avant la traduction qu'en fit faire Jaya
Sinha au commencement du dix-huitième sie-
cle (2). Au surplus, l'opinion qui attribue
une origine indienne à l'algebre n’est pas
moderne : elle remonte à l'époque de lin-
troduction de cette science en Europe. Des
ouvrages qui ont été traduits en latin au moyen
âge, et qui existent en manuscrit encore aujour-
(r) Voyez la note XIIT, à la fin du volume.
(2) Asiatic researches, tom. V, p. 177-194. — IL est vrai
qu’on a trouvé dans la bibliothèque de Tippoo-Saéb la géo-
métrie d'Euclide et l'éthique d’Aristote traduites en arabe ;
mais sans aucun doute ces ouvrages avaient été apportés ré-
cemment aux Indes (Stewart, catalogue of the Library of
Tippoo Sultan, Gambridge, 1809, in-i, p. 101 et 120).
( 124 )
d'hui, prouvent qu'à cette époque, où les rap-
ports littéraires avec l'Orient étaient si fréquens,
les Européens attribuaient linvention de lal-
gebre à ce même peuple auquel ils devaient le
Dolopatos et les fables de Bidpaï. (1)
(1) Non-seulement à la reuaissance des lettres, on savaitque
les chiffres arabes venaient de l'Inde (Targioni, Viaggi,Firen.,
1768, 12 vol. in-8, tom. IL, p. 59), mais on connaissait aussi
l’origine indienne de l’algèbre.Plusieurs manuscrits l’attestent
encore. Il existe, à la bibliothèque du roi, trois copies#’un
traité d’algèbre, compilé par un certain Abraham « d’après
les savans Indiens » (MSS. latins , n° 5335 A.— MSS. latins ,
n° 7266, Î. 124.— Supplement latin, n° 49, f. 126). Cetouvrage,
qui répand beaucoup de lumière sur la question de l’origine
de l'algèbre , nous a paru digne d’être publié; on le trouvera
dans les Notes et Additions à la fin du volume, avec un petit
traité de météorologie indienne, tiré aussi de la bibliothèque
royale (MSS. latins , n° 7316, f. 177). Au treiziéme siècle, Al-
bert-le-Grand connaissait les livres de philosophie et d’as-
tronomie qui nous étaient venus de l'Iude (Hwmboldt, examen
critique, p. 20). Quant au Dolopatos, où Roman des sept
Sages , on sait que des rives du Gange il fut transporté suc-
cessivement en Perse, en Arabie, en Grèce ; et que, traduit
au douzième siècle en langue romane par Dom Jean de
Hauteselve, il fut souvent nuité parles auteurs des Fabliaux.
Ce n’est pas une petite gloire pour ce livre d’avoir pu fournir
a Molière la première idée de son George Dandin (Le Grand,
fabliaux ou contes, Paris, 1781, 5 vol. in-12 ,tom. Il, p.150
et suiv. — Mémoires de l'academie des inscript. et bell.-lett.,
tom. XX, p. 355, et tom. XLI, p. 537, 546, 554, 556). Le livre
de Bidpaï aussi fut connu au moyen-äge en Europe (Notices
des manuscrits de La bibl. du rot, tom. X, 2° part, p:,.3,eL
(r2h:)
La chronologie indienne, cachée dans des pé-
riodes astronomiques dont nous avons perdu la
clef, et probablement défigurée par les prêtres,
permet à peine de déterminer même d'une ma-
niere approximative, l'époque à laquelle furent
composés les ouvrages algébriques qu'on a tra-
duits récemment du sanscrit (1). Quant aux chif-
fres indiens, on ne les voit adoptés parles chrétiens
que vers la fin du douzième siècle (2); mais il
suiv.). Dès le seizième siècle Firenzuola avait imité quelques-
unes des fables de Bidpaï, qui, à cette époque, furent plu-
sieurs fois reproduites en Italie (Férenzuola opere, Firenze,
1503,3 vol.in-8, tom. [, Discorsi degli animalr. — Peregri-
naggio di tre figliuoli del re di Serendippo, Venet., 1555,
in-$8. — Del gorerno de’ regni, tratto di linqua indiana in
agarena da Lelo Demno Saraceno, Ferrare, 1583, in-8. —
Dont, La moral filosofia , Venet.,1552 , in-4). Il est impossible
de ne pas reconnaître Calila et Damna dans le prétendu
Lelo Demno. La Fontaine ayouait plus tard, « par reconnais-
sance, qu'il devait la plus grande partie de ses fables à Bid-
paï » (Contes ct Fables indiennes de Bidpaï et de Lokman,
Paris, 1798, 2 vol. in-12, tom.[, p. 11. — Fables de Lafon-
taine, Paris, 1825, 2 vol. in-8, tom. IL, p. 61.)
Voyez la note XIV , à la fin du volume.
(1) Lisez, dans Brahmegupta and Bhascara, Algchra ,
p- XXXIH-1L1, la chronologie des astronomes indiens, et les
recherches de M. Colebrooke sur l’époque à laquelle vécu-
rent Aryabhatta, Brahmegupta et Varaha-Mihira.
(2) Andres , storia d'ogni letteratiura, tom. T, Paso, et
tom. X , p. 109. — Turgiont, viaggi, tom. Il, p. 63 et 68. —
(11265)
parait que les Arabes les employaient déjà quatre
siècles auparavant (1). Ce système de numération
marque à lui seul une révolution dans la science,
et il est fort douteux que, sans la valeur de po-
sition des chiffres, on eùüt jamais pu effectuer,
dans les temps modernes, les longs et pénibles
calculs que l'application de lanalyse à l’astro-
nomie a rendus nécessaires.
Deux monumens de lalgebre indienne, le
traité de Brahmegupta et celui de Bhascara Acha-
rya, ont été publiés, dans le siècle actuel, par
MM. Colebrooke, Taylor et Strachey {2); et lon
doitavouer, malgré tout notre orgueil occidental,
que si ces ouvrages eussent été apportés er Eu-
rope soixante ou quatre-vingts ans plus tôt,
leur apparition, même apres la mort de Newton
et du vivant d'Euler, aurait pu hâter parmi nous
les progres de l'analyse algébrique. Le Bija Ga-
Montucla, hist. des math.,tom.T, p.333, — Dans le second
volune nous traiterons, avecles développemens nécessaires,
ce point d'histoire scientifique, qui a donné lieu à tant de
discussions.
(1) Voyez la note XV, à la fin du volume.
(2) Brahmegupta and Bhascara, Algebra, translated by
H. Colebrooke, London, 1815, in-4. — Bhascara Acharya,
Lilawati, translated by J. Taylor, Bombay, 1316, in-4. —
Bija Ganita, translaled by Ed. Strachey, London, 1813, in-4.
Cora)
nita de Bhascara Acharya, qui fut traduit en
persan au dix-septièeme siècle, avait été composé
cinq cents ans auparavant (1). Brahmegupta, qui
vivait au septieme siècle de l'ère chrétienne (2),
cite souvent Aryabhatta, dont malheureusement
on n’a jamais pu retrouver les écrits (3). Mais,
quoique l'époque à laquelle vivait ce dernier
séomètre n'ait pas été déterminée avec préci-
sion, il parait n'avoir pas été postérieur à Dio-
phante (4), et il peut l'avoir précédé de plusieurs
siècles. Les commentateurs attribuent à Arya-
bhatta la résolution de Péquation du premier
degré à deux inconnues en nombres entiers :
cette équation, résolue par Diophante seulement
dans des cas particuliers, a été traitée par le
(x) Bhascara Acharya, Litawati, p.1.—Brahmegupta and
Bhascara , Algebra, p. 1 et XXXIT.
(>) Brahmegupta and Bhascara, Algebra, pag. XXXWi-
XXX VIT: ER à
(3) Brahmegupta and Bhascara, Algebra, p. v. — On à
dit récemment que le traité d'Aryabhatta venait d’être re-
trouvé (Journal asiatique, avril 1852, p. 577); mais la ci-
tation qui avait donné lieu à cette annonce semble se rapporter
plutôt à un commentateur qu'à l’auteur original. Il paraît
au reste que, dans la collection Mackenzie, il ÿ avait un ou-
vrage d’Aryabhatta (Welson, catalogue of Mackenzie collec.
tion, Calcutta, 1828, »wwol. in-8 , tom. I, p. 121).
(4) Brahmeguple and Bhascara, Algebra, p. XLI-XLNW.
( 128)
séomètre indien avec la généralité qui manqua
toujours aux Grecs (1). Les ouvrages de Brahme-
gupta et de Bhascara renferment des recherches
d’un ordre beaucoup plus élevé. Outre la résolu-
tion générale de l'équation à une seule inconnue
du second degré, et celle de quelques équations
dérivatives des degrés supérieurs (2), on y trouve
la manière de déduire, d’une seule solution,
toutes les autres solutions entières d'une équa-
tion indéterminée du second degré à deux in-
connues (3) : cette analyse, que nous devons
à Euler (4), était connue aux Indes depuis plus
de dix siècles. Un calcul qui a de la ressemblance
avec les logarithmes, des notations particulières
fort ingénieuses (5), et surtout une grande gé-
(x) La méthode d'Aryabhatta consiste dans la recherche du
plus grand commun diviseur ; elle coïncide avec celle que
Bachet de Meziriac a fait connaître le premier en Europe en
1624 (Brahmegupta and Bhascara, Algebra, p. xVW1, 112,
325-339. — Bachet, problèmes plaisans et delectables, Lyon,
1624, in-8, p- 18).
(2) Brahmcgupta and Bhascara , Algebra, p. XIV, XVI,
208, elc. .
(5) Brahmegupta and Bhascara, Algebra , p.XVNT, 152,
245 , 265, etc. -
(4) Euler, Algebre, Lyon, 1774, 2 vol. in-8, tom. Il, D.
(5) Brahmegupta and Bhascara, Algebra, p. X1-XIV. —
( 129 )
néralité dans l'énoncé des problemes, attestent
les progres de l'analyse indienne. Cette science,
que les Hindous appliquaient à la géométrie et
à l'astronomie (1), était pour eux un puissant
instrument de recherche; et l’on doit citer, avec
éloge, plusieurs problèmes géométriques dont
ils avaient trouvé d'élégantes solutions (2). Leurs
livres algébriques gont remarquables aussi par
leur forme particulière et tout orientale. Ils sont
en vers, et ne contiennent que l'énoncé et la
M. Whist a publié récemment (Asiatice society of Great Bri-
tain, tom. ILE, part. 5, p.309) un mémoire sur les méthodes
d’approximation et sur les séries des Hindous. Mais il nous
semble que Poriginalité des découvertes attribuées par
M. Whist aux Orientaux n’est pas suffisamment établie dans
son mémoire.
(1) Brahmeçgupta and Bhascara , Algebra , p. xv. — Pour
rendre sensible la résolution des équations, les Hindous ap-
pliquaient la géométrie à l'algèbre, et les Arabes les ont
imités aussi dans cette application (Mohammed ben Musa ,
Algebra , p. 8-15 du texte arabe).
(2) On peut citer spécialement une démonstration très sim-
ple du carre de l'hypothenuse , tirée de la similitude des
triangles que l’on forme en abaissant, du sommet de l’angle
droit d’un triangle rectangle, une perpendiculaire sur l’hy-
pothénuse (Brahmegupta and Bhascara , algebra , p. xvx et
xvI1). On trouve dans Brahmegupta le théorème sur la ma-
nière de déterminer l’aire d’un triangle quelconque en fonc-
tion destrois côtés (Brahmegupta and Bhascara, p.295 et 296).
l. (
( 130 )
solution de la question; leur Jlaconisme et les
expressions bizarres dont ils sont remplis (1)
empêchent souvent de découvrir la méthode
suivie par l'auteur. |
On a beaucoup disputé pour savoir jusqu'à
quel point s'étendaient les connaissances astro-
nomiques des Hindous, et l’on a cherché à re-
trouver leur système primitif dans les règles
pratiques dont ils se servent'encore de nos jours
pour effectuer leurs calculs (2). Mais, quoiqu'il
(1) Dans le Lilawati, l’auteur, après avoir invoqué La di-
vinile qui a une tête d'eléphant, propose un problème de
celle manière : « Dis-moi, chère et belle Lilawati, toi qui as
les yeux comme ceux du faon, dis-moi quel est le résultat de
la multiplication de 135 par 12? » (Brahmequpta and Bhas-
cara, Algebra, p.1 et 6).
(2) L'Histoire de l'astronomie ancienne de Delambre
(tom. [, p. 400-556) contient un exposé assez détaillé des
méthodes astronomiques des Hindous. Cependant, il faut
avouer que Delambre, plus occupé à combattre Bailly qu’à
suivre la marche des sciences, a toujours montré une
trop grande prévention contre les travaux des Orientaux.
Quoiqu'il eût eu connaissance des Mémoires de la société
asiatique de Calcutta , ainsi que du Liliwati et du Bija Ga-
nita, où se trouvent exposées tant de belles recherches ma-
thématiques , ilne craignit pas d'écrire le passage suivant :
« Après ce que nous avons annoncé des Chinois et des In-
diens, il seraït fort inutile d'exposer ici les travaux grossiers
ou tardifs de ces deux peuples, qui sont toujours restés
(ot#r))
soit malaisé de reconstruire maintenant ce Sys-
tème, l’on parvient cependant à y reconnaître
étrangers aux progrès de la science. Nous renverrons aux
deux chapitres que nous avons consacrés à leur histoire.
Qu’il nous suflise de rappeler qu’on ne leur connaît aucun
instrument, aucune science géométrique , aucune méthode
qui n’ait été tirée directement ou indirectement des écrits des
Grecs » (Delambre , histoire de l'astronomie ancienne, t. 1,
p. xvu1,.— Plus tard , lorsque Colebrooke eut publié le traité
de Brahmegupta , qu’il avait enrichi d’une introduction his-
torique si remarquable, Delambre ne daigna pas lire cet
ouvrage capital, il n’en parla que d’après les journaux (De-
lambre, histoire de l'astronomie du moyen-üge, p. xvin).
Cependant, forcé cette fois d’avouer que les Indiens avaient
une géométrie et une algèbre qui leur étaient propres, il
ajouta : &je n’ai jamais prétendu nier cette science ni son ori-
ginalité. » (Ibid., p. xxvin); ce qui était tout-à-fait opposé
à sa première assertion. Mais il s’efforca de prouver que ces
connaissances n'avaient aucun rapport avec le sujet dont il
s'était occupé. Si cela était vrai, l’on aurait de la peine à
comprendre pourquoi il s’est arrêté si long-temps à un ou-
vrage de Planude sur l’arithmétique indienne ; ouvrage dont
ildit «qu’il fera une transition naturelle entre l’astronomie
ancienneet l’astronomie des Européens » (Delambre, histoire
de l'astronomie ancienne , tom. 1, p.518), et que par une
distraction assez extraordinaire , il a placé avant l’arithmé-
tique d’Archimède. Il faut remarquer aussi que notre histo-
rien suppose que Planude, écrivain du quatorzième siècle ù
a été le premier à exposer le système arithmétique des In-
diens (ibid., p. 518), quoique l’on sache depuis long-temps
que ce moine grec avait été précédé en cela par Fibonacci,
par Sacrobosco et par plusieurs autres mathématiciens. On
9
(132?)
des analogies avec l'astronomie et l'astrologie
occidentales, sans qu'on puisse expliquer ces
analogies d’une maniere satisfaisante (1). On
sait que les astronomes indiens calculaient les
éclipses et la durée de lannée solaire par des
méthodes fort simples (2). Leurs tables des si-
nus étaient construites d’une maniere fort ingé-
doit bien regretter qu’un astronome tel que Delambre, écri-
vant un ouvrage très volumineux sur l’histoire de l’astrono-
mie , ait mis trop souvent peu de soin dans la recherche et
dans la discussion des matériaux qu’il employait, et peu
d'ordre dans leur distribution. Son ouvrage est plutôt un
assemblage de notes détachées qu'une histoire régulière.
Nous venons de voir que, dans l'Histoire de l'astronomie an-
cienne, Planude est placé avant Archimède. Les travaux de
La Hire et d’Ozanam sont exposés dans l'Histoire de l'astro-
nomie du moyen-âge, tandis que ceux de Copernic et de
Tycho-Brahé se trouvent dans l'Histoire de l'astronomie mo-
derne.
(1) Brahmcgqupta and Bhascara, Algebra, p. xx1v et Lxxx-
LXXXIV.
(2) Les vers mnémoniques qui contiennent des règles pour
effectuer les calculs astronomiques sont très anciens chez les
Hindous, qui possèdent des méthcdes très simples pour faire
les opérations arithmétiques les plus compliquées. Les fables
que l’on rencontre dans l’astronomie indienne (et il y en a
beaucoup) sont dues aux partisans des Pouranas, maisles vrais
astronomes ne les ont pas adoptées (Delambre, histoire de
l'astronomie ancienne, tom, 1, p.459-511.—Recherches astati-
ques , tom. IT. p. 333).
(e 19 ]
nieuse(1),etils connaissaient les théorèmes fon-
damentaux de la trigonométrie sphérique (2).
ils observaient les astres avec des instrumens en
maçonnerie dont les énormes dimensions pou-
vaient suppléer, jusqu'à un certain point, au
défaut d’exactitude (3) : ils mesuraient le temps
avec des clepsydres : ils connaissaient la sphère
armillaire, et se servaient du cercle de décli-
naison, du niveau à bulle d'air, et de gno-
mons auxquels ils adaptaient des tubes pour
observer les astres (4). Leur zodiaque lu-
paire, qui est déjà indiqué dans les lois de Me-
nou (5), paraît avoir été adopté, non sans quel-
(x) Royal society of Edinburgh, tom. IV, p. 83 et suiv.—
Leslie, elements of geometry and plain trigonometry. Edin-
burgh,1809,1in-8, p. 485.
(2) Delambre, histoire de l’astroncmie ancienne, tom. 1,
P: 47o.
(3) On voit dans Daniel] (Antiquities of India , planches,
n° x1x) des gnomons et des ares gradués, construits en ma-
connerie, et dont les dimensions colossales frappent l'ima-
gination. Les instrumens que Jaya-Sinha fitconstruire vers le
commencement du dix-huitième siècle sont probablement
d'origine européenne (Asialie researches, tom. Mpix 97
194).
(4) Astalic researches , tom. V, p87— Asiatic researches,
tom. IX, p: 326-328,
(5) Recherches astaliques, tom. I, p.346.
( 1 34 )
ques modifications cependant, par les Mongols,
les Chinois, les Persans et les Arabes (5). Leur
cycle aussi se retrouve avec les mêmes figures
d'animaux, dans des contrées septentrionales où
ces animaux ne vivent pas (2). Leur division du
temps en douze parties, et puis en trente et en
soixante subdivisions, rappelle les périodes des
Chaldéens (3). Les Hindous s'étaient beaucoup
occupés de philosophie spéculative, et avaient
imaginé la plupart des systèmes reproduits par
les métaphysiciens modernes. Leurs écrits philo-
sophiques nous intéressent surtout par de cu-
rieuses observations physiques qu'ils contien-
nent. Les philosophes de l'Inde connaissaient la
chaleur obscure de l’eau, le manque de chaleur
des rayons lunaires (que Plutarque connaissait
aussi) (4), et Fair vital nécessaire à la respira-
üon ; ils considéraient les atomes simples, et
admettaient l'existence d’un êter avant pour at-
,,
(1) Voyez la note XVE, à la fin du volume.
(2) Humboldt, vues des Cordilleres, tom. IL, p. 23. — De-
guignes , hist. genér. des Huns , lom.E, 1°° part. , p. xvur.
(3) Recherches asiatiques, \om. IE, p.275et 334. — Asiatie
researehes, tom. V,p. 81.
(1) Plutarchri opera, tom. EE; p, 979, de facie tn orbe lune.
( 195 )
iribut spécial le son qui, disaient-ils, se pro-
page en ondes (r). Ces vestiges de la civilisa-
tion indienne expliquent l'immense intérêt qui
s'attache à l’histoire d’un peuple dont la langue,
dans les temps les plus reculés, est venue se
méler à toutes les langues de l'Occident, dont
la poésie est plus riche en grandes compositions
épiques que celle d'aucune autre nation, dont
les arts avaient reçu un immense développement
des la plus haute antiquité, dont les sciences se
sont répandues depuis la mer Jaune jusqu'à lAt-
lantique, et qui, après tant de siècles d'oppression
étrangere, conserve encore, comme par instinct,
dans les sciences, dans la médecine et dans les
arts, des pratiques qui feraient honneur aux na-
tions occidentales.
Ce n’est pas seulement de l’Inde que les Arabes
ont tiré les connaissances qu’ils ont transmises à
l'Europe. Les Chinois, dont l'antique civilisation,
plus forte en cela que la civilisation romaine, a
pu policer plusieurs fois de si féroces conqué-
(1) Abel Remusat, nouveaux mélanges asiatiques, Paris,
1829, 2 vol. in-8, tom. Il, p. 375-377. — Asiatic society of
Great-Britain, tom. 1, part. 1, p. 103-105, etc.—Colebrooke,
philosophie des Hindous, avec notes par Pauttier, Paris, 1833,
p: 85.
( 136 )
rans, n’ont pas, il est vrai, comme les Hindous,
donné à l'Occident des sciences entières; ils n’ont
pas, comme les Arabes, rendu à l'Europe le savoir
de la Grèce, ni posé, comme eux, les bases de l'en-
seignement moderne {1). Mais la face de l'Occi-
dent a été changée par des découvertes qui lui ar-
rivaient, presque par hasard, de la Chine. Il paraît
démontré qu’on doit la boussole aux Chinois (2
q ;
(1) C’est probablement des universités moresques que l’on
a tiré nos anciens réglemens académiques. On trouve dans
Middeldorph (Commentatio de tnstitutis litlerariis in His-
pania , p. 11-54) une description très intéressante des uni-
versités arabo-espagnoles de Cordoue, de Grenade, de To-
lède, de Séville, de Murcie, etc. L’instruction publique y
était partagée en deux classes; les grades s’obtenaient au
moyen de thèses.
(2) Chou-King, traduit par Gaubil et publié par Dequi-
gnes , Paris, 1770, in-4, p. CXXVIT. — Mailla , histoire ge-
nérale de la Chine, Paris, 1797, 15 vol. in-4, tom. I, p. 316-
318. — Duhalde, description de l'empire de La Chine, Paris,
1770, 4 vol. in-fol., tom. [, p.350.— Mémoires de l’academ.
des inseript. et bell.-lett., 2° série, tom. VIE, p. 416-418. —
Abel Rémusat, mélang. asiat., tom. 1, p.408. — Voyez la
figure de la boussole chinoise dans Hyde, syntagma disser-
tationum (Oxonii, 1767, 2 vol., in-4), tom. IL, tab. I. —
La boussole est citée parmi les instrumens dont se servait
l’astronome Cheou-King (Souciet , observations math. tirees
des anciens livres chinois , Paris, 1729-52, 3 vol. in-4 , tom.
IF, p. 108).
Voyez la note X VIE, à la fin du volume.
( 137)
qui connaissaient la propriété directrice de
laimant plusieurs siècles avant l'ère chré-
tienne, et quiavaient observé déjà la décli-
naison (1), lorsqu'on commençait à peine, en
Occident, à se servir de laiguille flottante. Ils
employaient aussi fort anciennement la poudre
à canon, que les Mongols ont peut-être apportée
en Europe (2), et l’on a cru, non sans quelque
probabilité, que les premiers élémens de lim-
primerie et de la gravure nous étaient venus
de la Chine (3). Les annales de ce vaste empire
(x) Klaprotk , lettre sur l'invention de La boussole, Paris,
1854, in-8, p. 60.
(2) Mémoires de l’academie des ‘inscript. et bell.-lett.,
2° série, tom. VII, p.416 et 415. — Abel Remusat, melany.
asiat.,tom. I, p- 408.
(3) L'édition prénceps des livres classiques chinois gravée
en planches de bois est de 952 (Mémoires de l’acadenrie des
inscript.et bell.-lett., 2° série, tom. VIT, p. 417. — Journal
des savans, Septembre 1820, p. 557). Les Chinois eurent
aussi des caractères mobiles, mais ils les abandonnèrent
pour adopter l’usage des planches gravées sur bois, Les Mou-
gols recurent des Chinoisle papier-monnaie (Baldelli, viaggi
di Marco Polo , Firenze, 1527, 2 vol. in-4, tom. I, p- 89),et
il est possible, d’après ce qu’on lit dans Ramusio (Véaggi,
Venezia, 1563-59-65, 3 vol. in-fol., tom. IT, f. 29, 4o, 107),
que les marchands italiens aient appris en Asie l’usage des
lettres de change (Mémoires de l'académie des inscript. et
bell.-lett., 2° série, tom. VIL, p. 417). On peut consulter
un mémoire de M. Klaproth sur Porigine du papier-mon-
(1388 :)
ayant été liées de bonne heure aux phénomenes
célestes, nous ont conservé le souvenir d’an-
ciennes éclipses, qui ont été employées utile-
ment, de nos jours, à la discussion des élé-
mens de notre système planétaire. L’astrono-
mie chinoise a été l'objet d’un grand nombre
de travaux (1), mais elle présente encore de
grandes difficultés. Les recherches les plus ré-
centes et les plus approfondies semblent prouver
que les anciens astronomes chinois n’ont rien
emprunté aux peuples occidentaux. En effet, ils
ont constamment rapporté à l'équateur le mou-
vernent du soleil, de la lune et des planètes, par
naie (Journal asiatique, tom. 1, p. 257-261). Les cartes à
jouer, qui chez nous ont précédé limprimerie, furent
inventées à la Chine en 1120. Abel Rémusat à remarqué
que les plus anciennes cartes européennes ressemblent
beaucoup aux cartes chinoises ( Mémoires de l'académie
des inscript. et bell.-lett.,2 série, Lom. VIL, P: 418. — No-
tices des manuscrits de La bibl. du roi, tom. XI, Ir/part.,
p- 175). Marco Polo parle de la gravure chinoise (Baldelli,
viaggi di Marco Polo, tom. 1, p. xx, et tom. IT, p. 189-190).
(x) Outre tout ce qui a été publié sur ce sujet, il existe à la
bibliothèque de l'Observatoire de Paris la correspondance
inédite des missionnaires les plus distingués, avec Mairan,
Freret et De l'Isle. Ces importans manuscrits méritent d’être
étudiés par tous ceux qui veulent s'occuper avec fruit de
l'astronomie chinoise.
(159 )
ascension droite et distance polaire, au lieu de
les rapflprter à l’écliptique, comme semblent
l'avoir fait les Égyptiens et comme le firent les
Grecs. De plus, ils ont construit leur zodiaque
sur l'équateur, de manière que l'étendue angu-
laire et les limites des vingt huit constellations
du zodiaque lunaire ont dû varier successivement
avec la position du pôle de l'équateur par rapport
à celui de l’écliptique. Cette variabilité des con-
stellations est un caractère spécial de lastrono-
mie chinoise (1). Au reste si, à son origine, cette
astronomie parait exempte de toute influence
étrangère, plus tard elle a été modifiée par les
astronomes persans qui s'attachèrent à la for-
tune des Mongols, et plus récemment encore
par les missionnaires européens. Les Chinois ont
probablement recu des Hindous les élémens de
larithmétique et de l'algèbre (2), et ils semblent
avoir appris des Persans quelques procédés in-
dustriels (3). Mais ce qu'ils ont donné aux étrau-
gers est bien plus inportant que ce qu'ils en
(1) L'Institut, journal des societés scientifiques, I année,
n° 60, P- 218-219.
(2) Voyez la note XLIE, à la fin du volume.
5) De Sacy chrestom. arabe, tame HE, p. 452.
È
x
( 140 )
ont reçu; car si nous n'avons rien appris d'eux
dans les sciences abstraites, nous leg avons
emprunté des découvertes importantes dans les
arts et dans les manufactures (1); et, sans l’es-
pèce de dédain que nous avons eu trop long-
temps pour eux, nous pouvions leur en emprun-
ter un bien plus grand nombre. Leurs immen-
ses encyclopédies, contiennent plusieurs faits in-
téressans (2); elles sont encore peu connues
(x) Voyez un mémoire de M. Edouard Biot inséré dans le
Journal asiatique, Mai 1835.
(2) On peut voir dans le X[° volume des Notices des ma-
nuscrils de La bibl. du roi (F° part., p. 123) un mémoire
très intéressant d’Abel Rémusat sur l'Encyclopédie japo-
naise. Ce grand ouvrage renferme en So volumes le système
complet des connaïssances des Chinois sur Les trois rhoses
principales (le ciel, la terre et l’homme). Parmi les choses
curieuses qu'il contient il faut remarquer une notice sur
les aérolithes (Notices des manuscrits de la bibl. du roi,
tom XI, L° part, p. 150); l'indication des pierres de la
foudre (1bid., pag. 150.— Journal des savans, Avril 1819,
p.250. — Memoires sur l’hist. des sciences, elc., des Chinots,
Paris, 1776 et suiv., 16 vol. in-4, tom. IV, p.474); la divi-
sion de l’année en décades, doubles décades et demi-décades
(Notices des manuscrits de la bibl. du roi, tom. XI, I part,
p- 151 et 152) que l’on retrouve chez les Scandinaves (Edda
rhythmica , seu antiquior. vol. HT, p. 1042); la sphère ar-
millaire de l’empereur Chun (Notices des manuscrits de la
bibl. du roi, tom. XE, L'epart., p. 170); la boussole (ibid.,
p. 170); unc horloge qui sonne d'elle-même (ibid, p. 190 ;
ê
( 11 )
en Europe, mais plus on les étudiera, plus nos
connaissances sur l'Orient augmenteront; l’his-
toire naturelle surtout parait destinée à en pro-
fiter (1). Divisée en plusieurs états , exposée
aux incursions des Tartares, la Chine resta long-
temps sans influence au dehors : ce ne fut
qu'après avoir été réunie en un seul empire,
sous la dynastie de Thsing , qu’elle acquit une
les aiguilles chirurgicales pour l’acupuncture (ibid., p. 170.
— Abel Remusat, nouv. melang. asiat., tom. I, p. 358); le
feu follet né de la putréfaction des corps animaux (Notices
des manuscrits de la bibl. du roi, tom XI, Er part , p.250);
enfin la description du Me ou tapir oriental, connu des Chi-
nois dès la plus haute antiquité, et dont les Européens n’ont
appris l’existence que dans ces dern'ers temps (ibid., p. 198).
M. Edouard Biot, qui s'occupe de l'étude de la langue chi-
noise dans le but de rechercher, et de faire connaître chez
nous, les progrès industriels et technologiques des Chinois,
a signalé dans l'Encyclopédie japonaise un procédé qui
n'avait pas aitiré l’attention d’Abel Rémusat. C’est une mé-
thode employée depuis long-temps à la Chine, pour trans-
former la fécule de riz en sucre. Il faut consulter aussi un
mémoire de M. Klaproth sur l'Encyclopédie de Matouan-lin
Journal asiatique, Juillet et Août 1832, p. ret97). La sec-
tion xx1 de cette encyclopédie est relative à l'astronomie et
contient un catalogue d'anciennes éclipses qu'il faudrait
faire connaître aux astronomes européens.
(1) Voyez un mémoire d’Abel Rémusat inséré dans le
dixième volume des Nouveaux mémoires de l'Académie des
inscriptions cl belles-leltres.
(142)
prépondérance marquée sur les contrées en-
vironnantes. Dans les premiers siècles de l'ère
chrétienne, les Chinois, poursuivant des enne-
mis qui les avaient trop long-temps opprimés,
s'étaient avancés victorieux jusqu'à la mer
Caspienne; leurs colonies s’étendaient jusqu’en
Arménie, et les princes de la Transoxiane et
de la Bactriane relevaient des empereurs chi-
nois. (1)
Nous avons déja vu comment les guerres
contre les Hioung-nou, avaient servi à mettre en
contact les Chinois avec les nations de l'Asie occi-
dentale et même avec les Romains (2). Le culte de
Bouddha, introduit dans le Céleste Empire vers
la même époque, contribua à resserrer les rap-
ports qui existaient déjà entre les Indiens et les
(1) Abel Rémusat, nouv. mélang. asiat., tom.I, p.66 et 68.
— Klaproth, tabl. hist. de l'Asie, p. 58, 66, 72, 204, 207. —
Dequignes, hist. génér. des Huns, tom. L, part. L”°, p. 55.
— Saint-Martin, memoires sur l’Armenie, Paris, 1818,
2 vol.in-8 , tom. IT, p. 16 et suiv. — Ge n’est qu’en étudiant
les annales chinoises que l’on peut espérer de rétablir l’his-
toire de Hindous et des peuples de l'Asie centrale; histoire
qui nous est presque entièrement inconnue pour les temps
antérieurs à la couquête musulmane.
(2) Dequignes, hist. géncr. des Huns, tom. 1, part [°,
p- 217:
(143)
Chinois{1). Plus tard les Nestoriens arrivèrent à
la Chine (2), et y furent bientôt suivis par des
voyageurs arabes. Ce sont des marchands de soie
qui ont révélé à l'Occident l'existence de la
Chine (3. Ce précieux tissu était connu depuis
long-temps en Europe; mais ce ne fut que du
temps de Justinien que deux moines y rappor-
terent des œufs de vers-à-soie (4). Plus tard, les
(1) Il y a dans l’Hitopadesa un passage qui semble indiquer
que les Hindous ont eu très anciennement connaissance
d’une erreur fort répandue parmi les Chinois, qui s’imagi-
nent voir un lapin dans Ja lune (Wa kan, san saï tsoye,
tom. [,liv. I, f. 8), comme les Occidentaux ont cru de tout
temps y voir le contour d’une figure humaine ( W. Jones
Works , London, 1807, 13 vol. in-8, vol. XIIL, p. 123-125.
— Contes de Bidpaï et de Lokmann , Paris, 1778, 3 vol. in-12,
tom. [T, p. 338. — Plutarchè opera, tom. IL, p. 927, de facie
in orbe lun).
(2) Assemanni, bibliotheca oriental., tom. IT, pars 17,
p. 1-58. — Anciennes relations des Indes et de la Chine,
p- xxx1, 228, 261. — Klaproth, tabl. hist. de l'Asie, p. 208.
(3) C’est probablement de sér, nom de la soie en Coréen,
que les Grecs tirèrent leur so, d’où l’on a déduit le nom de
Serique ou Sericane, donné d abord à la Chine. On sait que
cette contrée a été appelée aussi Sir, Tchèna , etc., du nom
de la dynastie de Thsin ; et Cataï où Khitaï, du nom des Khi-
lans ; qui occupèrent plus tard les provinces septentrionales
de l'empire (Abel Remusat, melang. asiat., tom. 1, p. 290.—
Abel Rémusat, nouv. mélang. asiat. , tom. T, p. 67. — Saënt-
Martin, memoire sur l'Armenie, tom. Il, p. 49-6r).
(4) Muratori, scriplores rer. ital., tom. 1, pars F, p. 55,
(144)
Arabes, dans leur marche victorieuse vers lO-
rient , arracherent la Perse à la suzeraineté des
Chinois, les chassèrent de l'Asie «centrale et les
refoulèrent dans le Céleste Empire. Malgré ces
guerres, il s'établit bientôt des rapports intimes
entre ces deux peuples, et les Arabes eurent
même un cadi à Canton (1). Les voyageurs musul-
mans qui visitèrent la Chine, observerent des
faits curieux, et transportèrent jusqu’en Espagne
les produits de l’industrie chinoise (2). On a cru
que, dés le premier siecle de l'Hégire , les Arabes
avaient appris des Chinois la composition de la
poudre à canon; mais cette supposition était
— Procopiiopera, tom. 1 p.613, de bello gotth., hb. IV, cap. 17.
— Montfaucon, collectio nova script. græc., tom. IE, p. 337.
(1) Anciennes relations des Indes et de la Chine, p. 46, 86,
148. — Baldelli sloria, etc., part. L, p. 100. — Deguignes,
hist. gener. des Huns, tom. I, part. l°, p.58 et 59. — Abel
Rémusat , nouv. melang. asiat., tom. I, p- 252-254.
(2) Le Khar-sini (pierre de la Chine) et quelques autres
objets dont le nom est un composé du mot Sën: décèlent l’ori-
gine chinoise (De Sacy, chrestom. arabe, tom. IL, p-452). Les
Arabes connaissaient la porcelaine de la Chine dès le troi-
sième siècle de l’hégire, et l’on a retrouvé en Espagne des
vases de porcelaine fabriqués en Chine avec des inscriptions
arabes (Baldelli, storia, ele, parte 1, p. 324. — Laborde,
voyage rittoresque d'Espagne, Paris, 1806-20, 4 vol. in-fol.,
tom. Tf, p. 25, et planches 65 et 66;
,
( #45.)
erronée, Car on ne trouve la poudre chez les
Mahométans qu’au treizième siècle, et ils pa-
raissent lavoir recue des Mongols (1). Un fait
(1) Casiri et d’autres écrivains ont cru que les Arabes con-
naissaient anciennement la poudre à canon, et qu’ils l’a-
vaient introduite en Occident (Casèri, bibl. arab.-hisp.,
tom. IT, p. 6). Parmi les passages cités par cet auteur il y en
a un (celui qui est relatif à l’incendie de la Caba) qui ne pa-
raît pas se rapporter à la poudre; cependant il est certain
que les Arabes connaissaient la poudre au treizième siècle.
Dans un ouvrage écrit l’an 695 de l’hégire on trouve la com-
position d’une poudre formée de Baroud (salpètre), de Fahm
(charbon), et de Kibrit (soufre). (MSS. arabes de La bibl. du
roi, ancien fonds , n° 1125 ,f. 10.) Les Hindous et les Chi-
nois paraissent avoir connu de tout temps les poudres ex-
plosives, et Abel Rémusat pensait que les chars à foudre,
employés à la guerre par les Chinois au dixième siècle, étaient
peut-être des canons (Memoires de l’academie des inseript.
et bell.-lett., 2° série; tom. VIT, p. 416). Cependant il faut
observer que le feu a été employé à la guerre anciennement
par des peuples qui ne connaissaient pas la poudre. Le ma-
nuscrit français n° 2739, de la bibliothèque du roi, contient
la description d’un grand nombre d’instrumens et de ma-
chines propres à lancer le feu ordinaire: cette pratique se
conserva même après l’introduction de la poudre. Il paraît
certain qu'Houlagou, partant pour la Perse, avait à sa suiteun
corps d’artilleurs chinois (Mémoires de l'académie des inscript.
et hell.-lett., 2° série , tom. VIIT, p. 417). Gaubil assure que
la poudre est très ancienne à la Chine. Quant aux pao (ca-
nons), peut-être ne furent-ils d’abord que des balistes (Gau-
bil, hist. de Gentchiscan, Paris, 1739, in-4 , p.68, 69,71,
93); mais les pao à feu sont évidemment des canons (ibid.,
Lie 10
(146 )
beaucoup plus certain, c'est l'introduction du
papier en Espagne par les Arabes, à qui les Chi-
nois établis à Samarcande avaient appris à le
faire (1). Un pays auquel l'Europe doit la soie,
la porcelaine, le papier, les semoirs mécaniques,
la boussole, et probablement aussi la poudre à
canon et la premiere connaissance de la gravure,
un pays où il y a depuis si long-temps des ponts
suspendus, des puits forés et une espèce d’é-
P- 71: 93, 207. — Notices des manuscrits de la bibl. du roi,
tom. XI, L part., p. 197. — Abel Remusat, melang. asiat.,
tom. [, p. 408-410. —Tien-koug-kay-oue ,liv. LIL, f. 35, verso).
Ils furent connus en Europe dès l’arrivée des Mongols : on
trouve dans le volume VIII des Notices des manuscrits de La
bibl. du roi(X° partie, p. 25) l'indication d’un manuscrit
grec écrit au treizième siècle de la bibliothèque d’Iéna, où
l’on voit la figure du canon.
Voyez la note XVIIT, à la fin du volume.
(1) Par une bizarre antithèse on doit le papier à Moung-
thian, l’un des généraux de Thsin-chi-houang-ti, qui fut le
destructeur des anciens livres chinois. Les Chinois établirent
des papeteries à Samarcande où les Arabes apprirent cet art
qu’ils transportèrent plus tard en Europe (K/aproth, tabl.
hist. del’Asie, p.36. — Duhalde, descriplion de la Chine,
tom. I, p. 3580. — Baldelli, sloria, etc., parte [, p: 329. —
Casiri, bibl. arab.-hisp., tom. If, p. 9. — Abel Rémusat,
nouv. melang. asiat., tom. T, p. 218. — Koch, tabl. des re-
volutions de l'Europe, Paris, 1807, 3 vol. in-8, tom. IF, p. 18
et suiv.).
( 147 )
clairage par le gaz, est loin d’être épuisé; en
l’étudiant surtout sous le rapport des arts et de
l’industrie, on peut en retirer encore de grands
avantages. (1)
Enrichis des découvertes de tant de peuples
divers, les Arabes cultivérent les sciences avec
succès. S’ils n’eurent ni l'esprit d'invention qui
distingue les Grecs et les Hindous, ni la perfec-
tion dans les arts mécaniques et la persévérance
dans les observations qui caractérisent les Chi-
nois, ils eurent en revanche la force d’un peuple
nouveau et victorieux ; ils eurent ce desir de tout
apprendre et de tout expliquer, qui les portait
à s'occuper en même temps, et avec une égale
ardeur, d’algèbre et de poésie, de philosophie
et de grammaire. Ils méritent une reconnaissance
éternelle, pour avoir été les conservateurs des
sciences des Grecs et des Hindous, lorsque ces
peuples ne produisaient plus rien, et que l'Eu-
rope était encore trop ignorante pour se char-
ger de ce précieux dépôt (2). Si une imagination
(1) Journal asiatique, Mai 1835.— Universel, Avril 1829,
p.341,312, 315,324. — Voyez aussi la note X VIIL, à la fin du
volume.
(2) Quelques personnes ont même cru pouvoir attribuer à
10.
( 148 )
trop ardente les entraina dans les sciences oc-
cultes , il ne faut pas oublier que l’alchimie est
la source de la chimie moderne; que sans les
propriétés admirables des nombres, nous n’au-
rions peut-être pas eu d’algèbre ; et qu'il n'y a
pas trois siècles que les Européens ont com-
mencé à appliquer lastronomie à autre chose
qu'à tirer des horoscopes. Même par leurs guer-
res civiles et leurs dissensions, les Arabes ont con-
tribué à la renaissance des lettres en Occident.
Pendant que les Abbassides triomphaient en
Âsie, les califes Ommiades allèrent se réfugier
en Espagne (1), et c'est surtout à cette colonie
avancée des Mores que l'Europe doit les scien-
l'influence des Arabes les connaissances scientifiques des
Chinois et des Hindous. Mais les voyages des Musulmans sont
postérieurs de plusieurs siècles à la formation du zodiaque
chinois , et c’est seulement par les Mongols que l’astronomie
occidentale, celle des Persans surtout, a pu pénétrer à la
Chine. Quant à l'Inde, Aryabhatta et Brahmegupta ont pré-
cédé Mohammed ben Musa et les autres mathématiciens
arabes, comme les philosophes indiens ont précédé cet Ab-
biruni, qui, d’après Abul-Farage, était allé enseigner aux
Hindous la philosophie des Grecs (Abul-Pharajii, hist.
compend. dynast., p.229).
(x) Jourdain, recherches sur les traductions d'Aréstote,
p- 88 et suiv. — Herbelot, bibliothèque orientale, La Haye,
1997-79, 4 vol. in-4, à l’article Ommiah.
( 149 )
ces de la Grèce et de l'Orient. Déjà du temps de
Charlemagne, une ambassade du ealife avait
révélé aux Européens la supériorité des Orien-
taux (1): plus tard, les lettres protégées par
les Abdérames et par Almanzor brillèrent à
Cordoue, à Grenade, à Séville, d’un éclat
qui rejaillit sur toute l’Europe (2). Sous les
Arabes, l'Espagne fut riche, glorieuse, et
puissante comme peut-être elle ne la jamais
été depuis. La population était immense. L’'a-
griculture (3) et l’industrie avaient pris un dé-
veloppement prodigieux; les établissemens lit-
(1) Bouquet, scriptores rerum gallicarum, tom. V,p.Lxxu1,
24 53,'etc.
(2) Casiri, bibl. arab-hisp., tom. IT, p. 37, 38, 71, 201,
246. — Baldelli, sloria, etc., parte IL, p. 308-338. — Jour-
dain, recherches sur les traductions d'Aristote, p. 89. —
— Middeldorph, commentatio de institut. litter. in Hispaniu,
p. rretsuiv. — Conde, histor. de la dominacion de Los Ara-
bes , etc., tom. [, p. 265 et 508.
(3) L'ouvrage d'Ebn-el-Awam nous montre le grand savoir
des Arabes en agriculture, et nous fait connaître, quoique
d’une manière trop succincte, leur système d'irrigation
(Ebn-el-Awam, traducido por D. J. A. Banqueri, Madrid,
r802, 2 vol. in-fol., tom. I, p. 134 et suiv.. part. [, cap. 5).
Hérodote nous apprend que très anciennement les Arabes
faisaient des aqueducs avec des tuyaux en peau (Herodoti
hist.,p. 197, lib. IT, 8 o).
( 150 )
léraires et scientifiques étaient nombreux et
florissans. À Grenade, il y avait deux cent mille
maisons; à Séville, seize mille métiers à soie.
Les ruines de l’Alhambra sont le monument que
l'Espagnol montre encore avec le plus d’orgueil
aux étrangers. On comptait soixante-et-dix bi-
bliothèques en Espagne, et celle de Cordoue
contenait six cent mille volumes. De tous les
peuples qui n'ont point connu l'imprimerie,
l’Arabe est peut-être celui qui a laissé la litté-
rature la plus riche et la plus importante. Quoi-
que nous ne possédions que des débris échappés
a la persécution chrétienne et à la jalousie des
Mahométans eux-mêmes (1); quoique depuis
plusieurs siècles cette nation, refoulée et op-
primée par les Turcs, ne produise plus rien, il
existe encore dans nos bibliothèques une foule
de manuscrits arabes de la plus haute impor-
tance qui, à la vérité, sont peu lus aujourd’hui,
mais qui ont été traduits et longuement étudiés
(x) « De orden del cardinal Cisneros se abrasaron mas de
ochenta mil volumenes como si no tuvieran mas libros que
su Alcoran. » (A/edris, descripcion de Espana, Madrid, 1799,
in-8, prol., p.1v.— Voyez aussi Conde, histor. de lu domina-
rion de los Arabes, tom. FT, p. 1v et v.)
(. 155.)
au moyen âge, et qui ont alors porté leur
fruit. Effacez les Arabes de l'histoire, et la re-
naissance des lettres sera retardée de plusieurs
siècles en Europe.
Nonobstant les guerres continuelles des Chré-
tiens et des Mahométans, il existait de fréquen-
tes relations entre les peuples des deux croyan-
ces (1); relations d'autant plus remarquables,
que pendant long-temps il fut défendu aux Ita-
liens d'envoyer méme des lettres en Grèce (2).
Les habitans des villes maritimes de l'Italie s’é-
taient emparés presque exclusivement du com-
merce du Levant : ils avaient formé des éta-
blissemens jusqu’au fond de la Mer-Noire, et
dans tous les ports de la Méditerranée soumis
aux Infidèles (3). Les pélerins qui revenaient du
Sépulcre , frappés des merveilles de l'Orient (4),
(1) Hecren, essai sur l’influence des croisades, p. 308. —
Beniaminis, a Tudela, itinerarium, p. 5. — Muratori,
annali, tom. VIII, p. 133. — Bossi, storia, tom. XIII,
p- 287-
(2) Muratori, annali, tom. VIE, p. 87.
(3) Depping, histoire du commerce, etc., Paris, 1830, 2 vol.
in-8 , tom. [, p. 149 etsuiv., et 203-245.— Cantini, storia de!
commercio dei Pisani. Firenze, 1598, 2 vol. in-8, tom. Il,
p. 158 etsuiv.
(4) On peut voir dans Abou’lfeda la description de la ma-
( 152 )
excitaient, par leurs récits, la curiosité de leurs
concitoyens. Ces récits, l'attrait du merveil-
leux, le besoin d'instruction, attirerent dans les
universités moresques une foule d'illustres éle-
ves chrétiens, parmi lesquels brile d'abord
Gerbert. Fixés, malgré la victoire de Charles-
Martel, dans le midi de la France et de lIta-
lie (1), occupant toutes les grandes îles de la
Méditerranée, les Arabes exercèrent une haute
influence sur l'état social, les mœurs et la poésie
des Provencaux ; et cette influence, directement,
ou indirectement , s'étendit plus tard jusqu'à la
littérature italienne. (2)
gnificence et du faste presque fabuleux de Moctafer (4but-
fedæ, annales muslemici, tom. IL, p. 330;.
(1) Roderici Toletanti, hist. Arabum, p. 26 et 36, ad cale.
hist. Elmacini. — On sait que, du temps d’Al-Mamoun, les
Arabes pillèrent les faubourgs de Rome (Assemanni, catal.
cod. orient. bibl. Medic., p.225. — Muratori, annali, t. VUE,
p- 63,91, 187, etc. — Giambullari, storia d'Europa, Vene-
zia, 1566. in-4,f. 22).
(2) On reconnait l'influence orientale dans la plupart des
anciennes poésies des Provençaux et des Italiens. L’Arioste
même , quoique né à une époque beaucoup plus récente, en
offre plusieurs exemples. Le joli épisode d'Isabelle, et sa
mort si touchante se trouvent sous une autre forme dans El-
macin (Historia saracenica, p. 119). Plusieurs contes du
Bocace sont tirés des sources arabes: la générosité de Fede-
(“55 )
C’est surtout aux Juifs que la chrétienté est
redevable des premiers rapports littéraires qu’elle
a eus avec les Musulmans. Quoique toujours
hais et persécutés, ils s'étaient répandus à-la-
fois en Asie, en Afrique et en Europe; et les be-
soins du commerce faisaient partout valoir leur
patiente et infatigable activité. Les nombreuses
synagogues qu'ils avaient fondées en Egypte, en
Espagne, dans le midi de la France et en Ita-
lie (1), correspondaient entre elles par l’entre-
rigo degli Alberighi et celle de Natan, ne sont évidemment
qu'une imitation de Fhistoire d'Hatem-Taiï (Cardonne, me-
langes de littérature orientale, Paris, 1790, 2 vol.in-12, t.E,
p- 163 et suiv.). Le conte des Oies de frère Philippe est tiré évi-
dermment de la légende de saint Barlaam, qui n’est elle-mème
que le travestissement d’un roman oriental (S{oria di Barlaam
e Giosafatte, Roma, 1816, p. 104). Manni n’a pas connu cette
origine (Storia del Decamerone, Firenze, 1742,1in-4, p. 363
et552). L'influence arabe alla si loin, mème danslesarts,
qu'il existe encore des manuscrits du quinzième siècle, avec
des ornemens où l’on a si fidèlement imité les Orientaux,
que l’on y voit des miniatures exprimant la passion de Jésus-
Christ avec des inscriptions arabes tout autour. Ces inscrip-
lions que les peintres, sans les comprendre, avaient prises
pour des arabesques, ne sont autre chose que des versets de
l’Alcoran. (Voyez les miniatures LIL, VI,etc , du magnifique
Diurnal du roi Rene, MSS. de La bibl. du roi, supplement
latin , n° 54.)
{1) Beniaminis, a Tudela, ilinerarium , P: 18,121, elc.
( 154 )
mise de voyageurs chargés, en même temps,
des intérêts du commerce et de la propagation
des idées. Les manuscrits qui se conservent en-
core dans les bibliothèques prouvent, qu'avant
les Chrétiens, les Juifs avaient traduit un grand
nombre d'ouvrages arabes et grecs sur la philo-
sophie, l'astronomie et la médecine (1). Benja-
— Jourdain, recherches sur les traductions d’ Aristote, p.94,
143 et suiv. — Benjamin de Tudela dit que de son temps le
pape mème avait des ministres juifs (Ztinerarium , p. 10).
(1) Basnage, histoire des Juifs, La Haye, 1716, 15 vol.
in-12, vol. XIV, p. 541. — De Rossi, dizionario degli au-
tori Ebrei, Parma, 1802, 2 vol.in-8, tom. I, p. 14, 16, 30, etc.
— Dans le manuscrit n° 102 du supplément latin de la bi-
bliothèque du roi, qui faisait partie de la grande collection
de Peirese (sur laquelle nous donnerons une notice dans la
suite de cet ouvrage), on trouve un catalogue de manuscrits
orientaux. Nous y avons remarqué les Categories, V'Organon
et la Logique d’Aristote, traduits en hébreu, ainsi que les
commentaires d’Averroès, un traité de physique, et beau-
coup d’autres livres scientifiques traduits dans la mème
langue. Ce manuscrit, qui contient un grandnombre de pièces
originales et de notes de Peiresc, mérite l’attention des orien-
talistes. Assemanni cite mème des traités d’algèbre en hé-
breu (Assemanni, catal. cod. manus. bibl. ration, Rom,
2956-58, 2 tom. in-fol., tom. I, p. 371 et 373). On trou-
vera, dans le volume suivant, l’analyse d’un traité géomé-
trique fort important | composé vers le douzième siècle par
le juif Savosorda. C’est, à notre avis, de cet ouvrage que Fi-
bonacci a tiré l'expression de l’aire d’un triangle quelconque
en fonction des trois côtés, qu’il a donnée dans sa Pratique
(155)
min de Tudela, dont le voyage avait semblé d’a-
bord mériter peu d'attention, mais dont les asser-
tions se confirment à mesure que l’on avance
dans la connaissance de l’histoire orientale (1),
parle fréquemment des rapports qui liaient entre
eux les Juifs de tous les pays, et les montre tous
occupés sans relàche à propager l'étude des
sciences (>) dans leurs nombreuses académies.
de la géométrie (MSS. de La bibl. du roi, supplément latin,
n° 974, f. 13. — MSS. de La bibl. du rot, supplement latin,
n° 78,f. 32). L'auteur du traité d’algèbre « compilé d’après
les savans indiens » dont nous avons déjà parlé, était aussi
probablement un Juif. Les Juifs ont été les premiers à nous
faire connaître les fables de Bidpaï, qu'ils ont traduites d’a-
bord en hébreu et ensuite en latin (Notices des manuscrits
de La bibl. du roi, tom. IX, L'® part., p, 563-399.—De Rossë,
dizionario degli autori ebrei, tom. I, p. 135.— Directorium
vilæ humanæ, in-fol. S. D.).
Voyez la note IX, à la fin du volume.
(1) Voyez la note VILLE, à la fin du volume.
(2) Beniaminis, a Tudela, ilèncerarium, P. 118 el seq. —
Basnage, histoire des Juifs, tom. XILI, p. 265-272. — De
Rossi, dizionario degli autori ebrei, tom. 1, p. 63,ettom. Il,
p.22 et 118. — Benjamin de Tudela n’est pas le seul voya-
geur juif dont le nom soit parvenu jusqu’à nous. Sabtai Da-
telo (ou Dagolo Sabtai), Salomon Jarchi, Juda Coen, Moyse
de Kotzi, Petachie de Ratisbonne et plusieurs autres savans
juifs contribuèrent efficacement à répandre parmi les Chré-
tiens les connaissances des Orientaux (Journal asiati-
que, tom. VII, p. «59. — De Rossi, dizionarèo degli autor
(156)
On croit même qu'ils ont beaucoup contribué
à l’établissement de certaines universités en
Europe, comme ils avaient contribué à la
fondation de plusieurs observatoires en Orient.
Si l’on songe qu'a cette époque les méde-
cins et les précepteurs des princes les plus
puissans étaient des Juifs, et que les Juifs
possédérent pendant long-temps presque tout
l'or et largent de l'Occident, on sera moins
étonné de la grande influence que nous leur
attribuons.
Les successeurs de Charlemagne essayerent
de relever le royaume d'Italie; mais com-
ment rendre l'unité à cette agglomération de
Francs, d'Allemands, de Goths, de Lombards,
de Grecs et de Sarrasins (1), agités à-la-fois par
ebrei,tom.I,p.1,91, 97, 161; et tom. IL, p. 67 et gr. —.
Ugolini, thesaurus antiquilatum sacrarum, Venetiis , 1744
et seq., 34 vol. in-fol., tom. VI, col. mcr1x et seq.).
(1) Les restes de toutes ces nations se conservèrent long-
temps en ltalie, et la fusion ne s’opéra que très tard. Benja-
min de Tudela parle des Grecs qui habitaient la Calabre au
douzième siècle. Nonobstant les victoires de Charlemagne,
les Lombards conservèrent la principauté de Salerne jusqu’au
onzième siècle (Peregrinius, historia principum langobardo-
rum , Neapol., 1643, 3 vol. in-4, lib. I, p. 297), et les Nor-
mands les trouvèrent établis en Calabre (Haistoria della
(157 )
les discordes civiles et par l'ambition papale ?
Pendant que les débris de tous ces peuples se
déchiraient entre eux, les prêtres, voulant que
conquista del regno di Sicilia , cap. V, MSS. italiens de la
bibl. de l’'Arsenal, n° 68 , in-4. — Carusius, bibl. historica
regni Siciliæ, Panormi, 1523, 2 tom.in-fol., tom. II, p.grt).
Un auteur contemporain nous montre au douzième siècle les
Sarrasins, les Normands et les Lombards saccageant tour-à-
tour le Mont-Cassin (WMartene et Durand veterum scriptorum
amplissima collectio, Paris, 1724, 9 vol.in-fol., tom. IF, col.
286). C’est probablement à cause des établissemens formés par
les Lombards dans le midi de l’Italie, que la Pouille fut sou
vent appelée Lombardie parles Grecs et par les Arabes ( Pe-
regrinius, hist. prince. langob, vol. IL, Hb.1T, pars I, p.5r et 54.
— Gregorio, rer. arab. collectio, Panormi, 1790, in-fol., p. 46).
Lorsque vers la fin du douzième siècle Henri VI menaça lI-
talie méridionale, Falcand exhorta les Sarrasins de Sicile à faire
cause commune avec les Chrétiens pour empêcher l’entrée des
barbares du nord ( Muratori, seriptores rer. ital., tom. VII,
col. 254 et seq.). Plus tard, Manfred eut toujours des Sarra-
sins dans son armée, et c’est pour cela qu’il fut appelé Le
sultan de Nocere. Vers la fin du treizième siècle ces mêmes
Sarrasins étaient encore assez puissans pour faire révolter
des villes contre Charles d'Anjou (Villani , Giov., storia,
p- 180, 188, 189 et 205). La ville du royaume de Naples où
ils conservèrent le plus long-temps leur influence s’appelle
encore Nocera de’ Pagani. En général, tous ces peuples se
trouvent nommés par les historiens long-temps après que
l’Italie avait été subjuguée par de nouveaux maîtres (Gian-
none , storiacivile del regno di Napoli, Napoli, 1723, 4 vol.
in-4, tom. IL, p. 55. — Sigonit opera , Mediol., 1732-37,6 vol.
in-fol. , tom. IL, p. 918.— Antichi chronologi quatuor, Neap.,
1616, in-4, p. 115).
( 156)
toutes les facultés de l’homme fussent exclusive-
ment appliquées au triomphe de l'Église, s'oppo-
saient au libre développement de l'intelligence.
On sait que Gui d'Arezzo fut récompensé, par
une longue persécution , de la découverte qui fait
la base de la musique moderne (1). En ouvrant
les annales ecclésiatiques, on y voit les maux
qu’eurent à souffrir les Virgilistes, accusés surtout
d'être trop enthousiastes du grand poëete qui,
plus d’une fois, porta malheur à ses admira-
teurs (2). Il y avait sans doute au fond du cloitre
des hommes qui se vouaient à l'étude; inais leur
talent, consacré à des controverses religieuses et
à la lecture des pères de l'Église, était perdu pour
les sciences. On formait des bibliothèques, il est
vrai, mais elles se composaient presque unique-
ment de livres ascétiques (3). Non -seulement
(x) Angeloni, sopra Guido d'Arezzo, Parigi, 1811, in-8,
p.72, 217,218, etc.
(2) Baronii annales, Lucæ, 1737-65, 43 vol. in-fol.,
tom. XVI, p. 400. — Petrarchae, epist. senil., lib. I, ep. 5.
(3) Muratori, antig. ital., tom. HT, col. 8r7 et seq. — Les
écrivains qui ont voulu attribuer aux moines la conservation
des classiques dans le moyen-âge onteu plaségard au nombre
qu’au genre des ouvrages contenus dans les bibliothèques
monastiques. On connaît encore plusieurs catalogues de ces
bibliothèques, et ils montrent que, sauf quelques rares ex-
(159 )
les classiques grecs et latins restaient dans l'oubli,
mais la cherté du parchemin, et la difficulté de
se procurer du papyrus, dont la fabrication di-
minuait tous les jours (1), ne porterent que trop
ceptions , elles ne conténaient que des ouvrages de dévotion.
Ainsi la bibliothèque du Mont-Cassin ne contenait ancien-
nement presque aucun auteur classique (WMuratori, scriptores
rer. ital,, tom. IV, p. 352); et dans la bibliothèque de Bobio,
qui était si nombreuse, il n’y avait qu’une vingtaine d’ou-
vrages non ascétiques , et encore étaient-ils pour la plupart
mutilés (Muratori, antiquit. ital., tom. IT, col. 8r7 et seq.
— Voyez aussi Petit Radel, recherches sur les bibliothèques
anciennes , p.92. — MSS. de la bibl. mazarine, n° 150).
(1) Après linvasion des Arabes , le papyrus ne venait plus
d'Egypte, mais on en fabriquait encore en Europe(Comment.
R. societatis Gottingensis , classis philolog., tom. IV, p. 167
et 192-195. Cependant les chrétiens mettaient à profit tous
les morceaux de papyrus égyptien qu’ils pouvaient se pro-
curer. M. Champollion Figeac, conservateur des manuscrits
à la bibliothèque royale (à qui je dois une vive reconnais-
sance pour l’extrème bonté avec laquelle il a toujours voulu
favoriser et faciliter mes recherches) m'a montré une
bulle sur papyrus, de l’an 826, écrite en caractères lom-
bards, et adressée par Jean VIII à Charles- le - Chauve.
Dans cette bulle, le haut du papyrus contient quelques
lignes en caractères arabes cursifs, et tout prouve que
ces caractères ont été tracés avant la date de la bulle.
Ce document est très important pour les orientalistes.
Il prouve, contre l'opinion de plusieurs érudits, que le ca-
ractèreneskhi estantérieur au dixième siècle ; ce qui au reste
avait été déjà démontré par M. De Sacy (Mémoires de l’acu-
( 160 })
souvent des moines ignorans à gratter les plus
beaux ouvrages de l’ancienne littérature, pour y
substituer des sermonaires et des antipho-
naires (1). Plus on copiait de livres, plus on dé-
demie des inscript. et bell.-lett., 2° série, tom. IX, p. 66 et
suiv.)
(1) Muratori, antig. ital., tom.lITT, col. 834. — Les moines
continuèrent jusqu’au quatorzième siècle à détruire les li-
vres écrits sur parchemin. Le passage suivant, extrait d’un
auteur contemporain, prouve d’une manière incontestable
la vérité de ce fait : « Volo ad elariorem intelligentiam hujus
literæ referre illud, quod narrabat mihi jocose venerabilis
Præceptor meus Boccacius de Certaldo. Dicebat enim, quod
dum esset in Apulia, captus famä loci, accessit ad nobile
Monasterium Montis Gasini, de quo dictum est. Et avidus
videndi Librariam, quam audiverat ibi esse nobilissimam,
petivitab uno Monacho humiliter, velutille, qui suavissimus
erat, quod deberet ex gratia sibi aperire Bibliothecam. At
ille rigide respondit, ostendens sibi allam scalam : Ascende
quia aperta est. Ile lætus ascendens, invenit locum tanti
thesauri sine ostia vel clavi; ingressusque vidit herbam na-
tam per fenestras, et libros omnes cum bancis coopertis
pulvere alto. Et mirabundus cœpit aperire et volvere nunc
istum Librum, nunc illum, invenitque ibi multa et varia
volumina antiquorumet peregrinorum Librorum. Ex quo-
rum aliquibus erant detracti aliqui Quinterni, ex aliis recisi
margines chartarum , et sic multipliciter deformati. Tandem
miseratus, labores et studia tot inclytorum ingeniorum de-
venisse ad manus perditissimorum hominum , dolens et il-
lacrymans recessit. Etoccurrens in Claustro, petivit a Monaco
obvio, quare Libri illi pretiosissimi essent ita turpiter de-
( 161")
truisait de chefs-d'œuvre {1). Les classiques fu-
rent alors menacés d’une destruction totale. On
voudrait pouvoir nier ces faits : mais les palimp-
sestes sont la. Quoi qu'on en ait dit, les hommes
truncati. Qui respondit, quod aliqui Monachi volentes lu-
crari duos, vel quinque Solidos, radebant unum Quaternum
et faciebant Psalteriolos quos vendebant pueris; et ita de
marginibus faciebant Brevia, quæ vendebant mulieribus.
Nunc ergo, o vir studiose, frange tibi caput pro faciendo
Libros! « (Benvenuti Imolensis comment. in Dantis comæd.,
apud Muratori. antiquit. ital., tom. 1, col. 1296\.
(1) Ainsi la bibliothèque de Bobbio, qui était si riche en ou-
vrages ascétiques, est celle qui à fourni le plus grand nombre
de palimpsestes importans (Cécero, de republica , Romæ,
1822, in-8, præf., p. xx1n1). La bibliothèque royale de Paris
possède aussi un grand nombre de palimpsestes tirés des
anciennes bibliothèques des couvens : il faut espérer que le
public ne sera pas privé plus long-temps des trésors qu'ils
renferment. Au reste, le passage suivant prouve que les au-
teurs paiens furent proscrits avec plus de sévérité encore
chez les Grecs du Bas-Empire que parmi nous: « Audiebam
etiam puer ex Demetrio Chalconäyla græcarum rerum peri-
tüissimo Sacerdotes Græcos tanta floruisse auctoritate apud
Cæsares Byzantios, ut integra illorum gratia complura de
veteribus græcis Poëmata combusserint, in primisque ea ubi
amores, turpes lusus , et nequitiæ amantum continebantur ,
atque ita Menandri, Diphili, Apollodori, Philemonis, Alexis
fabellas, et Saphus, Erinnæ, Anacreontis, Minermni, Bionis,
Alcmanis, Alcæi carmina intercidisse. Tum pro his substi-
tuta Nazanzeni nostri poëmata. » (Alcyoni de exsilio, Vernet,
1522, in-4, signat. c. 111).
*
I. à
F1
( 162
qui avaient gratté le traité de la république de
Cicéron pour y substituer un commentaire sur
les psaumes (1), et qui ont osé détruire des ou-
vrages d’Archimède, peuvent, à ce qu’on dit,
avoir bien mérité de l’ordre social, mais certes
ils n’ont pas bien mérité des sciences et des
lettres. .
Les Croisades, qui eurent tant d'influence sur
l'état social et politique du reste de l’Europe, qui
accélérerent l’affranchissement des communes et
créèrent le pape généralissime de toutes les trou-
pes de la chrétienté, re produisirent que des
effets peu sensibles en Italie. Là les anciennes in-
stitutions municipales avaient résisté, plus qu’ail-
leurs, au choc des barbares; et l'Église, qui suc-
cédait volontiers aux droits des anciens seigneurs,
y avait de bonne heure réprimé la féodalité.
Les Italiens se contentèrent, en général, d’en-
voyer quelques légers secours aux croisés, profi-
tant de l’occasion pour fréter leurs vaisseaux aux
défenseurs de la croix (2), et surtout pour aug-
(1) Cicero, de republica, præf., p. XSV
(2) Robertson, the history of the reign of Charles v Basil.,
1703, 4 vol. in-8, vol. I, p. 32. — Muratori, antiquit. étal,
vol. IL, col. 906. — M. de Humboldt remarque même
que les Vénitiens ont quelquefois prèché la croisade pour
( 163)
menter leur influence dans le Levant.Les sciences
et les lettres n’y gagnerent presque rien. Mais si
peu d'Italiens allerent en Palestine, ils subirent
en revanche chez eux une espèce de croi-
sade dirigée contre les Arabes. Car, pendant
que dans tout le reste de l'Europe les colo-
nies des peuples septentrionaux étaient re-
poussées ou domptées par la civilisation renais-
sante, les invasions se renouvelaient sans cesse
en Italie (1). Les Hongrois y allérent plusieurs fois
manger des enfans rôtis (2); et une troupe d’a-
venturiers Normands, soudoyés d’abord par les
Grecs qui voulaient arracher la Sicile aux Sarra-
sins, firent bientôt la guerre pour leur compte,
et finirent par s'emparer de tout le midi de l’Ita-
lie (3). A peine installés dans ces nouvelles con-
détruire la prospérité de l'Égypte et s'emparer de tout le
commerce oriental (Humboldt, examen critique, etc., P- 109).
(1) Bettinelli, risorgimento d'Italia, Milano, 1819, 4 part.
in=2, tom. 1, p. 69-72. — On peut voir dans tous les histo-
riens contemporains, la description des horreurs commises
en ltalie, depuis le neuvième siècle jusqu’au douzième, par
les Hongrois , les Grecs, les Francs et les Sarrasins (Antiqui
chronologi quatuor, P: 93 et suiv. — Muratori, anna,
tom. VIII, p. 38, 49, etc.).
(2) Gèambullari, storia dell Europa, f, 44.
(3) Historia della conquista del regno di Sicilia, cap. [IT,
LE
( 164 )
trées , ils devinrent les auxiliaires de l'Église, et
l'aiderent dans ses querelles avec l'empire.
On sait peu l'histoire de la domination des
Arabes en Sicile; mais là, comme dans ies autres
parties de Europe soumises à leur empire, ils
contribuerent au développement des lumieres,
et les historiens contemporains nous les montrent
beaucoup plus avancés en civilisation (1) et plus
tolérans (2) que les nouveaux maîtres de la Sicile.
MSS. italiens de la bibl. de l'Arsenal, n° 68, in-4. — Les
Grecs du Bas-Empire ont été les plus cruels ennemis de
l’Italie; tantôt ils se liguaient avec les Mores pour combattre
les rois d'Italie (Muratori, annali, \om. VIIL, p. 163); tantôt
ils appelaient d’autres étrangers pour combattre les Arabes.
(1) Gregorto, rer. arab. collectio, p. 233 et seq. — Historia
della conquista del regno di Sicilia, cap. VI, VIE, etc.,
MSS. italiens de la bibl. de l'Arsenal; n° 68, in-4. — Dans
le couronnement des empereurs d'Autriche on se sert encore
aujourd’hui de quelques ornemens qui avaient été travaillés
par les Arabes de Sicile, et dont les Normands d’abord, et
puis les Allemands s'étaient servis. On a cru pendant long-
temps que ces ornemens avaient appartenu à Charlemagne
(Gregorio, rer. arab. collectio, p. 132 et seq. — Gregorio, dis-
corsi, Palermo, 1820, 2 vol. in-8, tom. IL, p.45. — Morso,
descrizione di Palermo antico, Palermo, 1827, in-8, p. 20.
—Assemanni, discorso inaugurale, Padova, 1808,in-4, p.11).
(2) Les Arabes avaient laissé aux Siciliens le libre exercice
de la religion chrétienne; ils leur permettaient mème de
faire des processions publiques (Johannes de Johanne, codex
diplomaticus Siciliæ, Panormi, 1743, in-fol., tom. 1, p.348).
106 )
Leur influence avait été si grande, le peuple
s'était tellement habitué à leur langue, que non-
seulement sous les premiers rois normands les
monumens publics portaient très souvent des in-
scriptions arabes (7), mais que même sous les
princes de la maison de Souabe, on continua à
frapper des monnaies avec des légendes arabes.
Où sait , au reste, qu'au dixième siècle il y avait des évèques
chrétiens à Cordoue, et que les peuples des deux croyances
vivaient ensemble paisiblement (Reënaud, invasions des
Sarrasins , p.190). Le‘gouvernement des Arabes, lorsqu'ils
étaient devenus possesseurs d’une province , ne ressemblait
guère à leurs premières invasions, qui ttaient faites ordinai-
rement par des bandes indisciplinées, avides de pillage , et
composées le plus souvent de Berbères idolâtres et même
quelquefois de Chrétiens ( Reëinaud, invasions des Sarru-
sins, p.160, 232, 238).
(1) Quelques-unes de ces inscriptions étaient en trois lan-
gues (en arabe, en grec et en latin); d’autres étaient bilingues;
d’autres enfin étaient seulement en arabe ou en grec (Grego-
rio, rer. arab. collectio, p. 176. — Morso, descrizione di Pa-
lermo antico, p. 20, 27, 31, 356, 382, etc.—Mortillaro , studio
bibliografico , Palermo, 1832, in-8, p. r15-r17). Les légendes
des monnaies des rois normands étaient tantôt en arabe et en
latin , tantôt en arabe seulement (Monete eufiche del Museo di
Milano, Milano, 18:9,in-4, p. 329-342. — Paruta ; la Sicilia
descritta collemedaglie, Lione, 1697, in-fol., tav. 115 etsuiv.).
Ileviste même des monnaies de Roger et de Guillaume, avec
la formule : Z{n’y a d'autre Dieu que Dieu, et Mahomet est
son prophète ! (Morso, descrizione di Palermo antico, p.77)
i À
100 )
Il existe de ces monnaies qui appartiennent au
regne de Frédéric IL. (1)
Les rois normands accueillirent avec empres-
sement les savans mahométans, dont les doctrines
acquirent à leur cour une prépondérance mar-
quée (2). Edrisi, géographe fameux, chassé d’Afri-
(1) Monete cufiche del Museo di Milano, p. 329-342. —
L’usage de la langue arabe cessa plus vite en Sicile qu’en
Espagne où , même au quatorzième siècle, on écrivait
quelquefois l'espagnol en caractères arabes (Notices des ma-
nuscrits dela bibl. du roi,tom. IV, p.626,et tom.XI, ['part.,
p- 311). Cependant, la langue italienne conserve encore an-
jourd’hui plusieurs mots qui dérivent de l’arabe ou du persan,
parmi lesquels il suflira de citer algebra,ambra,ammiragtlio,
baldacchino,candito,catrame , giulebbe, sapone, tarifla, etc.
En Provence aussi leschrétiens écrivirent un temps en arabe.
Dans un manuscrit de Peiresc, déjà cité plusieurs fois (MSS.
de La bibl. du roi, supplément latin, n° 102), on trouve la
copie de quelques inscriptions arabes appartenant aux chré-
tiens du midi de la France. Ces inscriptions sont d'autant
plus importantes, que les monumens d’où Peiresc les avait
tirées n’existent plus.
(2) Jourdain, recherches sur les traductions latines d'Aris-
tote, p- 95-99, — Sigonit opera, tom. Il, p. 506. — Morse,
descrizione di Palermo antico, p- 25. — L’optique de Ptolé-
mée, citée par Roger Bacon, mais dont l'original s’est perdu,
existe traduite de l’arabe en latin à la bibliothèque du roi
(MSS. latins, n° 5320). Selon M. Caussin cette traduction à
été faite au douzième siècle, par un certain Eugène, amiral
du royaume de Sicile. C’est dans cet ouvrage qu’on trouve
la preiniere exphication du preshy:isme des vieillards (Me-
( 167 )
que(1),chercha un asile en Sicile, où il écrivit en
arabe le traité de géographie qui fut appelé Ze ivre
de Roger (2). Pierre Diacre raconte qu'au com-
mencement du onzième siècle, un Africain, nom-
mé Constantin, parcourut une grande partie de
l'Afrique et de PAsie, et s’avança jusqu'aux Iûdes
pour s’instruire dans les sciences des Orientaux;
qu'après trente-neufans de travaux et de voyages,
arrivé à Salerne en habit de mendiant, il fnt re-
connu par le frère du roi de Babylone et comblé
d'honneurs par le duc Robert; mais que, s’arra-
chant de la cour, il alla se faire moine au Mont-
Cassin, et que là occupé à traduire de larabe di-
vers ouvrages d'Hippocrate et de Galien , il forma
de nombreux élèves qui marchèrent sur ses
traces, et contribuerent à la gloire de l’école
moires de l'académie des inser. et bell.-lett., 2° série, t. VI,
pr D 13129, 34-36).
(x) A cette époque les princes arabes commençaient à crain-
dre et à persécuter les savans; Edrisi, [bn-Sina, Averroës
en font foi. On connaît l’outrage sanglant fait à ce dernier
par un prince qui se vouait lui-même au mépris de la posté-
rité en croyant frapper le libre penseur. Les fils d’Averroës
trouvèrent un asile à la cour de Frédéric IL.
2) Opuscoli d'autori Siciliant, tom. VII, p. 233 et suiv.
— Gregorio, rer. arab. collectio, p. 107.
»:-
( 168 )
naissante de Salerne (1). Ce récit renferme trop
de merveilleux pour qu’on puisse l’adopter sans
restriction, mais Constantin nous parait être la
personnification de l'influence orientale parmiles
chrétiens.
Pendant que les germes d'instruction laissés
par les Arabes se développaient en Sicile, les
habitans du nord de ftalie, suivant exemple
des Provençcaux, se rendaient chez les Mores
d'Espagne. Le premier résultat de ces voya-
ges littéraires fut la connaissance d’un grand
nombre d'ouvrages grecs, que les Arabes avaient
fait passer dans leur langue. Platon de Tivoli et
Gérard de Crémone (2) sont les plus célèbres
parmi les traducteurs italiens du douzième siecle.
On doit à Gérard la premiere version de lAlma-
(1) Petré Diaconti, de viris illustribus casinensibus, Lut.-
Paris., 1666, in-8, p. 45. — Giannone, storia civile del regno
di Napoli, tom. Il, p. 121 et suiv.
(2)Jourdain (Recherches sur les traductions latines dAris-
tote, p. 125 et suiv.) a donné une liste assez détaillée des tra-
ductions que l’on doit à Gérard de Crémone; nous y ajou-
terons ici le « Liber Alpharabii, de scientiis, translatus à
magistro Gherardo Cremonensi in Toleto, de arabico in
latinum », qui commence au feuillet 143 du manuscrit n° 49
(Supplément latin), de la bibliothèque du roi, et dont Jour-
dain n’a pas eu connaissance.
( 169 )
geste, et à Platon de Tivoli la connaissance de
plusieurs ouvrages de géométrie (1). Bien qu'in-
correctes et incomplètes, ces traductions furent
les premieres sources où puisèrent les Chrétiens
pour s'initier à l'étude des sciences. Il est vrai
que les mathématiques, la médecine et la philo-
sophie ne pénétrèrent chez nous qu'accompa-
gnées des sciences occultes (2); mais peut-être
était-il nécessaire que la vérité füt mêlée à beau-
coup d'erreurs pour être accueillie par les Chré-
tiens, alors si peu versés dans les sciences. Il est
éertain (à en juger par Îes témoignages des his-
toriens contemporains et par les nombreuses
traductions manuscrites qui nous restent) qu'à
la renaissance des lettres, les ouvrages arabes
étaient beaucoup plus répandus en Europe qu'ils
ne le sont à présent. Cela tenait non-seulement
(1) MSS. latins de La bibl. du roi, n° 3316. — MSS. de La
bibl. du roi, supplement latin, n° 774.
(2) Encore que les sciences occultes fussent fort en vogue
chez les Arabes, et qu’Avicenne eût formé un grand nombre
d'élèves en alchimie, Abd-allatif, le Soufi et plusieurs au-
tres savans orientaux s'étaient fortement élevés contre ce
genre de recherches ( Notices des manuscrits de la bibl. du
roi, tom. XIE, I part. , p. 239 et suiv.— Abd-allatif, rela-
tion de l'Égypte, p. 461-464).
( 170 }
aux besoins de l'époque, à la facilité des com-
inunications et à la suprématie reconnue des
Orientaux (1), mais aussi à une espèce de mode
qui a passé depuis aux ouvrages des Grecs.
Sans le caprice de la mode, il serait difficile
de comprendre pourquoi lon s’est tant occupé
des moindres fragmens des auteurs grecs les
plus obscurs, tandis qu'on laissait, dans le
plus profond oubli, un système scientifique qui
a été la source de toutes les sciences modernes,
et une littérature qui a eu tant d’inflience sur
la littérature du midi de l'Europe. A cette époques
on sentait tellement le besoin d'aller s’instruire
en Orient, que des princes chrétiens, des papes
inéme se décidèrent à encourager l’étude de la
langue arabe. (2)
(1) Le long séjour que fit au douzième siècle Pierre-le-Vé-
aérable en Espagne, pour présider à une traduction de
l’Alcoran , est une preuve lumineuse de la grande influence
exercée alors par les Arabes sur les Chrétiens (Martene et
Durand, veter. scriptor. ampliss. collectio, tom. IX, col.
1119).
(2) Conde, histor. de La dominacion de Los Arabes, etc.,
tom. [, p. 1V. — Corpus juris canonici, Lugdunïi, 1651,
3 vol. in-fol., Clementinarum, lib. V, ut. I, cap. L — Ces
rapports de toute nature entre les peuples des deux croyan-
ces finirenit par produire une réaction sur les Orientaux,
NE
Les lettres commençaient à renaitre en Es-
pagne, en Provence et en Sicile par l'influence
lorsque les Chrétiens eurent commencé à s'occuper de
science. Il existe des preuves nombreuses de ce fait. On sait
que chez les Arabes, l’année étant exclusivement lunaire, le
premier jour de l’an parcourait toutes les saisons en rétro-
gradant pendant un espace de trente-trois de nos années.
Pour satisfaire aux besoins de l’agriculture; et en général
toutes les fois que la connaissance de la longueur de l'année
solaire était nécessaire, les écrivains arabes employaient or-
dinairement l’annéesolaire et les mois syriaques ou cophtes.
Mais sous les derniers califes on introduisit Les mois latins,
et de plus on indiqua dans les calendriers les fêtes des Chré-
tiens. On trouvera à la fin du volume un calendrier de ce
genre composé par Harib, fils de Zeid, et dédié à l’empereur
Mostansir (probablement l’avant-dernier calife, mort l’an
1243 de l’ère chrétienne). Ce calendrier est très important
pour la question des températures terrestres, à cause d’un
grand nombre de phénomènes de végétation qui y sont rap-
portés à des époques données. M. Arago a fait un si heureux
usage de quelques passages d'anciens auteurs, relatifs aux
travaux de l’agriculture, pour rechercher si la température
moyenne de la terre restant la mème, les maxima de froid
et de chaleur avaient diminué depuis quelques siècles, que
nous avous cru devoir publier un document où se trouvent
tant d’autres indications semblables. liest presque inutile d’a-
verlir les personnes qui voudraient discuter ce point impor-
tant de physique terrestre, qu'il faut tenir compte mainte-
nant de la réforme grégorienne du calendrier. La eoncor-
dance des mois arabes et chrétiens, dont nous venons de
parler, se retrouve dans une carte céleste gravée sur cuivre
à Séville, lan 615 de l’hégire. Ce monument précieux avait
été trouvé par M. Schultz, qui a péri en Orient victime de
(#92 )
des Orientaux, lorsqu'une nouvelle poésie, sor-
tie des régions polaires, vint s'emparer de l’ima-
gination des peuples germaniques. Les Goths,
dont la littérature tout asiatique avait semblé si
parfaite aux Romains de la décadence, qu’ils
n'avaient pas craint de la comparer à la littéra-
ture grecque (1), les Goths avaient essayé vai-
nement de ranimer l'instruction dans le midi de
l'Europe. Leurs tentatives furent interrompues
par l’arrivée de nouveaux envahisseurs. Leurnom,
jadis si fameux , fut presque effacé du continent,
et il ne resta que quelques débris de leur Sys-
tème dans une ile lointaine. La poésie primitive
de l'Edda se réfugia en Islande, d'ou, apres
plusieurs siecles d'isolement, elle revint sur le
continent. Pendant que ce système scandinavo-
asiatique pénétrait en Allemagne, les Arabes in-
son ardeur pour les lettres. Nous en devons la connaissance
à M. Reynaud, membre de l’Académie des Inscriptions, au-
teur du bel ouvrage sur les monumens musulmans du cabinet
de M. de Blacas.
Voyez la note XIX, à la fin du volume.
(1) « Unde et pene omnibus Barbaris Gothi sapientiores
exliterunt, Græcis pene consimiles, ut refert Dio : qui his-
{orias eorum annalesque Græcostilo composuit, » (Freculphi
chronicon, tom. 1, Hb. IF, cap. XVI, Maxima bibl. vet. pa-
trum, Lugduni, 1637, 23 vol. in-fol. , tom. XIV, p. 7079).
(17 )
troduisaient un système oriental dans le midi
de l'Europe. Se rattachant au nord au système
scandinave, soumise au midi à l'influence mo-
resque, et conservant encore quelques restes
de l'influence latine, la France fut la première
contrée de l'Europe où ces divers élémens vin-
rent se rencontrer : ils s'y modifièrent mutuelle-
ment, et de leur amalaame sortit la littérature
moderne. Déjà les langues romane et francique
avaient commencé à prendre une forme déter-
minée (1); le Brut d'Angleterre et le Guillaume
d'Orange étaient déja devenus populaires en
France(2),ct cependant l'Italie persévérait encore
E
.
(x) Sans parler des recherches grammaticales de Charle-
magne, les sermens que les princes carlovingiens se prèêtè-
rent réciproquement à Strasbourg en 842, en langue romane
et en langue francique, et que tout le inonde connaît, prou-
vent que ces deux langues avaient déjà commencé à se fixer.
(2) On sait que le Brut d'Angleterre fut traduit en français
par maître Eustache, en 1155. La rédaction que nous possé-
dons du Guillaume d'Orange est peut-être plus moderne,
mais elle contient certainement des passages tirés de poèmes
plus anciens où le mème sujet était traité. On trouve dans
ces deux romans des influences septentrionales et moresques;
et la généalogie troïenne du Brut d'Angleterre, généalogie
qui revient s: souvent dans les romans du moyen-âge, est une
nouvelle preuve de l'influence latine. Il y a dans le Guil-
laume d'Orange des morceaux de la plus grande beauté. La
(194)
dans les traditions classiques , et luttait contre le
nouveau principe qui devait la ranimer. Les Ita-
liens se sont placés de bonne heure à la tête du
mouvement intellectuel de l'Europe ; mais on
a été trop loin lorsqu'on a dit qu'ils avaient pré-
cédé tous les autres peuples modernes. En Espa-
gne et dans le nord de l'Europe, l’ancienne civi-
lisation ayant été domptée complètement par
les nouveaux conquérans, les nations rudes et
grossieres qui furent le fruit de tant d’invasions,
purent épancher leur mâle énergie dans des
langues nouvelles , sans que le génie füt entravé
par les traditions d’une littérature abâtardie.
Mais si plusieurs peuples avaient envahi l'Italie
et y avaient faissé des traces profondes de leur
séjour, aucun n'avait pu l’asservir complètement,
ni détruire tout-à-fait l'élément romain. Cet élé-
ment, soutenu par une religion victorieuse, s’é-
tait conservé là bien plus puissant que partout ail-
leurs ; et l'Italie paraissait surtout savante aux au-
tres nations, parce qu'elle se trouvait comme
description de la bataille d’Aleschans et de la fuite de Guil-
laume, mériterait d’être lue par tous ceux qui aiment lapoésie
noble et animée. (MSS. francais de La bibl. du roi, n° 73535,
Brut d'Angleterre. — MSS. francais de la bibl. du roi, fon
o
Laralliere, n° 23, Guillaume au court nez, tom. 1).
(175 )
emprisonnée dans les formes latines, et que sa
littérature n'avait pas encore subi la transfor-
mation qui devait recréer la gloire de ce pays.
Il est vrai qu'avant d’imiter les Provençaux, les
Italiens avaient écrit, en latin corrompu, des
poésies et des romans, d’après d'anciennes tra-
ditions (1), mais ces productions se rattachent
plutôt à la décadence de la littérature ancien-
ne, qu'à la renaissance des lettres, et les Ita-
liens n’eurent une littérature nationale et popu-
laire qu'après avoir subi l'influence provençale.
Quant à la langue italienne, d'illustres philolo-
gues ont cru, non sans quelque ‘aison peut-être,
qu'elle tirait son origine des anciens dialectes
italiens, dialectes que les invasions n'avaient pu
(1) Muratori, antiquit. ital., tom. IT, col. 509. — L’his-
toire de Catilina, de la reine Bellisea et de sa fille Teverina,
qui se trouve dans Malespini, est évidemment tirée d’un ro-
man d’origine latine (Malespini, storia fiorentina, p. 12 et
suiv., cap. 17 et 18). Voyez sur ces anciennes traditions flo-
rentines , Dante, paradiso , cant. XV. — Busone da Gubbio,
l’avventuroso Ciciliano, Milano, 1833, in-:6, p. 285 et 388.
— Voyez aussi la légende du géant Mugello, au commence-
ment de la Genealogia di casa Medici (Manuscrit inédit dont
je possède une copie du dix-septième siècle, et qui n’est pro-
bablement que l'ouvrage de C. Baroncelli, dont parle Moreni
dans la Bibliografia storica della Toscana, Firenze, 1805,
2 vol. in-4, tom. I, p. 87).
(176)
que modifier, sans les effacer. Mais bien que l’on
rencontre souvent, dans les anciens diplômes et
dans les inscriptions, des mots et des phrases
entières qui semblent indiquer l’existence de
cette langue (r),elle ne paraît avoir pris une forme
certaine, et ne s'être prêtée à la nouvelle poésie,
que vers le milieu du douzième siècle. A partir
de cette époque, il s'éleva des poëtes de tous
les points de la péninsule; mais, chose remar-
quable, les plus anciennes poésies italiennes que
l’on connaisse appartiennent à la Sicile, quoique
ce fut certainement en Toscane que la langue
parlée se rapprochait le plus de la langue écrite.
Les questions importantes, qui surgissent de
ce fait singulier, ne sauraient étre traitées ici ;
cependant, on ne peut s'empêcher de se de-
mander pourquoi les Siciliens ont choisi, pour
écrire, un dialecte qu'ils ne parlaient pas (2),
(1) L'italien était déjà considéré en 960 comme une langue
différente du latin (Voyez la lettre de Gunzone dans Mar-
tene et Durand, veter. scriptor. ampliss. collectio, tom. 1,
col. 294, 295 et 298. — Voyez aussi Gatterer, commentatio de
Gunzone Italo, Norimb., 1956,1in-4, p- 10 et suiv.)
(2) Non-seulement le dialecte sicilien est à présent fort
éloigné de l'italien, mais il y a six siècles qu'il l'était tout
autant. Richard de Saint-Germain nous a conservé un spé-
cimen du dialecte parlé en Sicile en 1233, d’après lequel on
f
( 177 )
et dans lequel il parait qu'il n'existait rien d’é-
soit que déjà à cette époque l’o était changé en & par les Si-
ciliens (Carusius,, bibl. hislorica, regnè Siciliæ, tom. IE,
p. 607). L’Historia, déjà citée, della conquista del regno di
Sicilia (MSS. italiens de La bibl. de L’'Arsenal, n° 68, in-4),
écrite en sicilien du temps du Bocace, s’éloigne de la langue
du Décameron, beaucoup plus que les poésies de Jacopo da
Lentino ne diffèrent de celles de Guittone d’Arezzo ou de
Bonagiunta Orbicciani (voyez pour cela un manuscrit pré-
cieux de la Bibliothèque du roi, intitulé Canzoni di Dante,
n° 5:67, qui est un recueil de poésies des plus anciens poètes
italiens). D'ailleurs Barbieri nous a conservé une chanson
écrite en pur sicilien vers l’an 1250, par Stefano Pronotario
da Messina , poète qui, comme on le sait, écrivait aussi en
italien (Barbiert, origine della poesia rimata , Moden., 1790,
in-4,p.142et 143.— Crescimbeni, storia della volgar poesie,
Venez. 1731,6 vol. in-4, vol. IL, p. 40). Cette chanson prouve,
que lorsque les anciens poètes siciliens écrivaient enitalien,
ils ne se servaient pas, comme on l’a prétendu, de la langue
qui était parlée alors en Sicile. Au reste, outrela Conqguista del
regno dè Sicilia , et la chanson de Stefano , il existe plusieurs
autres écrits en ancien dialecte sicilien (Opuscoli d'autori
siciliant, tom. IV, P- 97.— Busone da Gubhio, l’avventuroso
ciciliano, p. 36). Les dialectes des autres provinces italiennes
ne sont pas moins anciens. Indépendamment de ce que Dante
en dit dans l’Éloquence vulgaire, et des documens publiés par
Muratori et par d’autres en ancien dialecte sarde ({ Muratort
antiq.ital.,tom.IE, col. 1051 et seq.—Hastoriæ patriæmonu -
menta, Aug.-Taur., 1836, in-fol., Chartarum , tom. 1, col.
842,etc.), je possède quatre anciens manuscrits de poésies po-
pulaires italiennes, écrites en divers patois. L'un d'eux, qui
est de 1259, et qui est un ivre de confrérie, contient un grand
nombre de poésies en patois de Bergame et de Brescia : elles
I. 12
( 178)
crit (1). Les princes de la maison de Souabe cul-
tivérent la nouvelle poésie, et on leur doit la cé-
lébrité des poésies des Siciliens, tandis que peut-
être des poésies toscanes plus anciennes, mais
moins illustres, ont été oubliées. Du reste, il
est possible aussi que les écrits de Ciullo d’Al-
camo, de Ruggerone da Palermo, et des autres
montrent que ces dialectes n’ont pas sensiblement varié de-
puis six siècles. Dans un autre, qui est du quatorzième siè-
cle, et qui est également un Zivre de confrérie, il y a à-la-fois
des poésies en patois et en italien (Voyez aussi un petit
poème du treizième siècle en patois de Padoue, publié par
l’abbé Brunacci, dans la Lezione d'ingresso nel! Accademia
dei Ricovrati, Venezia, 1759, in-4).
(x) On voit que nous ne tenons pas compte ici de l’inscrip-
tion Ubaldini; mais était-elle contemporaine du fait dont
elle devait conserver la mémoire? C’est ce qu’il est très diffi-
cile d'affirmer : elle est d’ailleurs la plus barbare de toutes
les poésies de cette époque (Borghini, discorsi, Milano,
1809, 4 vol. in-8 , tom. LIT, p. 42-45. — Crescimbeni, storia
della volgar poesia, vol. IT, p. 6. — Voyez aussi Opusroli
letterarii di Bologna , t. IL, p. 337 et suiv.). Au reste, l’ita-
lien fut écrit en Provence un siècle avant le Dante : on con-
naît la chanson que Rambaud de Vaquieras écrivit en pro-
vencal, en italien, en français, en gascon et en espagnol
(MSS. francais de la Bibl. du roi, n° 7222. — Raynouard,
choix des poesies des Troubadours, Paris, 1816 et suiv.,
6 vol. in-8, tom. V, p. 416. — Nostradama, vile de’ poëti
provenzali tradotte dal Crescièmbeni, Roma, 1722, in-4,
P: 38).
( 179: )
auteurs siciliens, aient été arrangés et modifiés
plus tard par les copistes, lorsque la langue ita-
lienne fut plus répandue (1). Quoi qu'il en soit,
la formation d’une langue vulgaire, qui seule
pouvait faire participer le peuple italien au dé-
veloppement de la civilisation moderne, était
aussi nécessaire aux progrès des sciences qu’elle
le fut à la production des chefs-d’œuvre de la
littérature italienne.
Le douzième siècle prépara tous les élémens
nécessaires à la renaissance des lettres. Le
siècle suivant les développa. Les empereurs
de la maison de Souabe protégèrent les sa-
vans, fonderent de nouvelles universités, et
agrandirent celles qui existaient déjà. Leur
cour fut le rendez-vous de tous les hommes dis-
tingués de leur temps; et Frédéric II sembla ne
prendre les armes contre les infidèles que pour
(x) On peut voir dans les Poeti antichi d’Allacci combien
a étégrande l'influence des copistes sur les textes des anciens
poètes italiens. Les sonnets-de Folgore da san Giminiano,
par exemple, qui était né à quelques lieues seulement de Flo-
rence , paraissent écrits dans un patois barbare (AZacci, poete
antichi, Napoli, 166r,in-8, p. 314). Ceux de Lapo Zanni (ou
Gianni), de Florence, ont été encore plus défigurés (44/aseë,
ibid. , p. 401). .
12.
( 180 |)
rapporter d'Orient quelques nouveaux manu-
scrits (1). Pendant que l’Europe devait au zèle
de l'empereur la traduction de plusieurs ouvrages
intéressans, pendant qu’il en arrivait une foule
d'autres d'Espagne, la prise de Constantinople
par les Francs, bien qu’elle causât la perte d’une
infinité de manuscrits précieux (2), contribua
cependant à faire mieux connaitre des ouvrages
dont, auparavant, on ne possédait en Occident
que des traductions de traduction (3). La philo-
(1) On sait que Frédéric Il ne prit la croix qu'avec beau-
coup de répugnance. Les auteurs orientaux disent qu’il était
d’accord avec les Musulmans. Selon Makrisi, il avertit le
sultan de l'expédition que préparait contre lui saint Louis;
aussi les princes mahométans lui envoyèrent-ils des présens
magnifiques. Il reçut d’eux la première girafe que l’on ait vue
en Europe depuis les Romains (fait dont Cuvier ne paraît
pas avoir eu connaissance), et une tente où les mouvemens
des astres étaient représentés à l’aide de ressorts cacnés
Reinaud, extraits des historiens arabes, Paris, 1829, in-8,
P- 435).
(2) Heeren, essai sur l'influence des croisades, p+ 407
et 416.
(3) Jourdain, essai sur les traductions d’'Aristote, p- 50
et 56. — Au reste, les Grecs du Bas-Empire n’ont eu qu’une
influence tout-à-fait insensible sur la renaissance des scien-
ces en Occident. L’impulsion était donnée : Archimède, Eu-
clide, Ptolémée, étaient connus en Europe par les Arabes,
long-temps avant que leurs écrits n’arrivasséht de Grèce.
( 181 )
sophie d’Aristote, qui alors se propagea rapide-
ment en Europe, fut le signal d’un grand pro-
grès de l'esprit humain. Était-ce pour s'opposer
à ce progrès, pour tenir perpétuellement les
hommes sous le joug de la scolastique, que l'É-
glise frappait alors le péripatétisme d’anathème,
et faisait périr dans les flammes les disciples
du grand Stagirite (1)? Quelques siècles plus tard,
l'Église déclarait hérétiques ceux qui osaient
prononcer le nom d’Académie (2); et lorsque
les doctrines d’Aristote ne furent plus un pro-
grès, Giordano Bruno sur un bücher, Galilée à
genoux devant l’inquisition, expiaient à Rome le
crime d’avoir osé les combattre.
Avec la philosophie d’Aristote et les sciences
des Arabes, s’introduisaient en Europe les grandes
découvertes chinoises. Ces découvertes nous ont-
elles été données par les Mahométans qui les au-
raient recues des Indiens et des Chinois? ou bien,
*
(x) Duchesne, scriplores historiæ Francorum, Lut.-Paris.,
1736, 5 vol. in-fol., tom. V, p. 51. — Martene et Durand,
thesaurus novus anecdotorum, Lut.-Paris., 1736, 5 vol. in-fol.,
tom IV, col. 166.
(2) Paulus tamen hæreticos eos pronunciavit qui nomen
Academiæ , vel serio , vel joco, deinceps commemorarent. »
(Platina, de vitis pontificum, S.L., 1664, in-12, p. 666).
*
LR
(182 ).
comme quelques savans ontCru pouvoirl'avancer,
ont-elles été apportées en Europe par les Mon-
gols (1)? On sait que ces peuples, sortant tout-à-
coup du néant, asservirent en peu d'années l'Asie,
firent trembler l'Europe, et rapprochèrent, par
leurs prodigieuses conquêtes, deux systèmes de
civilisation qui s'étaient développés séparément
aux extrémités opposées de l’ancien continent.
Après avoir conçu le projet de faire de la
Chine entière un pâturage (2), après avoir me-
nacé l'Occident de le replonger dans la barba-
rie, ils finirent par favoriser le développement
des lumières, en introduisant en Europe Pélé-
‘
(1) Abel Remusat, melang. asiat.,tom.1, p.408-4r2.
Mémoires de l'academie des inscript. et bell.-lett., 2° série,
tom. VIT, p. 415-420. — Quant à la boussole, on verra dans
le volume suivant qu’elle était connue en Europe avant l’ir-
ruption des Mongols. Marco Polo parle, comme nous l'avons
déjà indiqué , du papier-monnaie des Mongols, et il avait vu
des gravures chinoises ( Baldelli, viaggi di Marco Polo,
tom. I, p. xx et 89, et tom. IE, p. 199 et suiv. — Ramusio,
viaggi, tom. IL, f. 29, 40, 10%). L'hypothèse qui fait dériver
l'imprimerie de la Chine n’est pas nouvelle : outre les mis-
sionnaires, Panciroli l’avait adoptée il y a déjà deux siècles
(Panciroli, raccolta breve, Venezia, 1612, in-4,p. 300, bib. IT,
cap. 12), et plus récemment elle a été reproduite par Toaldo
(Toaldo, saggio di studi veneti, Venezia, 1782,in-8, p. 19et 20).
(2) Gaubil, histoire de Gentchiscan, p. 51 et 58,
( 185 )
ment chinois (1). Les princes arméniens et rus-
ses (2), qui allaient prêter hommage au grand-
khan à Kara-koroum, les religieux chargés de
missions diplomatiques auprès des Mongols (3),
revenaient en Europe, épouvantés par ces
peuples sortis du Tartare (4), qui mena-
çaient d’enchainer le monde entier. Plus tard,
lorsque la puissance mongole marcha vers son
(1) Nous avons déja indiqué les principales inventions
chinoises apportées probablement par les Mongols en Occi-
dent. Le souan-pan, ou machine arithmétique des Chinois,
fut aussi introduit en Europe par les Tartares de Batou. En
Pologne et en Russie cette machine est encore d’un usage
populaire (Memoires de l’academie des inscript. et bell.-lett.,
2 série, tom. VIL, p. 418).
(2) Plan-Carpin raconte que Michel, duc de Russie, étant
allé prêter hommage au grand-khan, fut tué par les Mongols
à coups de pieds dans le ventre, parce qu'il n'avait pas voulu
adorer aussi l’image de Genghiskhan déjà mort ( Voyages
autour du monde, en Tartarie et en Chine, Paris, 1830,
in-8, p. 199). |
(3) Mémoires del'ac ademie des inscript. et bell.-lett.,
2° série, tom. VI, p. 405 et 460; ettom. VIT, p. 351, 412 et
suiv.— Petri de Vineis epistolæ, Basil , 1566, in-8, p. 201-209.
(4) Saint Louis disait à la reine Blanche, effrayée par l’ir-
rupüon des Mongols en Allemagne : « S'ils arrivent, ces Ta:-
tares, ou nous les ferons rentrer dans le Tartare d’ou ilssont
sortis, ou bien ils nous enverront nous-mèmes jouir dans le
ciel du bonheur promis aux élus. » (Wemoires de l'académie
des inscript. et bell.-lett., 2e série, tom. VI, p. 408).
1. -
( 184 )
déclin, des ambassadeurs du grand-khan s’effor-
cèrent de rarimer le zèle des Chrétiens, pour
les précipiter de nouveau sur les Mahométans (1).
Ces fréquentes relations eurent une influence
marquée sur l'Occident, en faisant concourir
à sa civilisation les germes qui se trouvaient
épars sur toute la surface de l’ancien conti-
nent (2). Ce fut alors qu'une famille de mar-
(1) Mémoires de lacademie des inscript. et bell.-lett.,
2° série, tom. VI, p.469; et tom. VII, p. 555, 359, 545, 363
et 412.
(2) Non-seulement les Mongols importèrent en Occident
les découvertes des Chinois, mais, sous leur domination ; la
Chine elle-même s'enrichit de nouvelles inventions. Les ba-
listes que fabriquèrent le père et l’oncle de Marco Polo pu-
rent seules mettre fin au siège de Siang-Yang (Baldelli,
viaggè dè Marco Polo, tom. I, p. 1x et 134; et tom. IT,
p- 311-313). Cublai appela des astronomes de l’Occi-
dent, et Tchamalouting, fit un cours d’astronomie à Ja
cour (Gaubil, histoire de Gentchiscan, p. 156, 153 et 192).
Des familles occidentales furent transportées à la Chine
pour cultiver la vigne (Abel Réemusat , nouv. mélang. asiat.,
tom. IE, p. 73). Rubruquis trouva chez les Mongols des mi-
ueurs allemands et un orfèvre parisien (Voyages autour du
monde, en Tartarie et en Chine, p. 318, 354, 555, etc.). Gen-
ghiskhan ramena de Perse un grand nombre de familles
mahométanes : des astronomes et des géomètres quittèrent
POccident pour s'attacher à la fortune des Mongols. L’astro-
nomie fit alors de notables progrès dans PAsie centrale, et
les Mongols élevèrent des ohservatoires sur tous les points de
(T6)
chauds vémitiens, après avoir suivi long-temps
les Mongols, dans leurs courses presque fabu-
leuses, vint révéler à l'Europe les merveilles de
la Chine, pendant qu’un jeune citoyen de Pise
rapportait dans sa patrie l’algèbre, qui était des-
tinée à devenir la base de toutes les sciences
modernes. Dans ce même siècle, les Italiens,
déployant des forces morales prodigieuses, su-
rent à-la-fois établir la liberté municipale, ac-
complir les merveilles de la ligue lombarde, faire
revivre les arts, se créer de nouveau une lan-
gue, une poésie, une patrie, et rapporter des ex-
trémités de la terre des découvertes qui devaient
changer la face du monde.
Si l’on veut maintenant résumer les faits ex-
posés dans ce Discours préliminaire, on verra
leur immense empire. Les instrumens dont ils se servaient
méritent d’être connus : il en est un surtout qui doit fixer
l'attention des astronomes : c'était « un tube appliqué à des
armilles mues par l’eau; pour suivre le cours des astres. »
(Souciet, observ. math., tom. Il, p. 25, 406, etc. — Gaubil,
histoire de Gentchiscan, p. 42, 141, 230, 244. — Magasin en-
cyclopedique , année 1809, tom. VI, p. 45). — Les sciences
firent de nouveaux progrès en Arabie et en Perse du temps
des Mongols. Il paraît, par exemple, que du temps d’'Ulugh-
Beig, les Arabes connaissaient le développement du binome
(Asialik researches, tom. XIIL , p. 556; et tom. IT, p. 487).
( 186 )
d'abord , à l'origine des temps historiques, la ci-
vilisation orientale venant s’amalgamer en Tos-
cane avec les élémens aborigènes que possédait
l’Htalie. A l’Étrurie succède la Sicile: là, mœurs,
langage, poésie, tout est grec; hors les sciences
marquées d’un caractère particulier à l'Italie,
l'observation. La physique expérimentale, la mé
canique, l'analyse indéterminée, ont pris nais-
sance dans la Grande-Grece. Rien ne paraissait
devoir borner leur développement: mais bientôt
le Romain arrive, il saisit la science personnifiée
dans Archimèede, et l’étouffe. Partout où il do-
mine, la science disparait : l'Étrurie, l'Espagne,
Carthage en font foi. Si plus tard Rome, n'ayant
plus d’ennemis à combattre, se laisse envahir
par les sciences de la Grèce, ce sont des livres
seulement qu'elle recevra : elle les lira et les
traduira sans y ajouter une seule découverte.
Guerriers, poètes, historiens, elle les a eus,
oui ; mais quelle observation astronomique ,
quel théorème de géométrie devons-nous aux
Romains? Chassées d'Occident, les sciences s’é-
taient réfugiées à Alexandrie. Le christianisme
apparaît, s’avance au milieu des tortures ; et finit
par escalader le trône. Au despotisme et à la
corruption des empereurs succèdent le despo-
(187)
tisme et la corruption des moines. Le Labarum,
qui a remplacé l'aigle romaine, ne sait plus avan-
cer. Au lieu d’assiéger des villes ennemies,
on monte à l'assaut des temples paiens, der-
nier refuge de l'antique savoir. A cette épo-
que, la science est ou paienne ou hérétique. La
cour des Sassanides sert d'asile aux philosophes
d'Alexandrie comme aux savans Nestoriens.
Un Barbare essaie vainement d'enseigner la to-
lérance aux Chrétiens.
Mais si les Romains et les Chrétiens n’ont pas
contribué directement aux progrès des sciences ;
si même, comprenant l'humanité d’une manière
imparfaite, et croyant qu'elle avait pour sym-
bole unique une épée ou une croix, ils ont brisé
tout autre symbole et opposé des barrières à
l'avancement de l’esprit humain, ils ont néan-
moins aidé efficacement à la marche de la civi-
lisation, en fondant l'unité européenne. Cette
unité, créée par les Romains, et retrouvée par
les Chrétiens sous les ruines où l'avaient ense-
velie les Barbares , a été la base de tous les pro-
gres des sociétés modernes.
Par la décadence de l'empire romain, lOcci-
dent tombait en dissolution : les Barbares arri-
vent. C’est un fléau pour les monumens, pour
( 188 )
les livres, pour les statues : leur choc brise
tout; mais une race dégénérée profite de lé-
nergie sauvage des envahisseurs. Convertis à
la foi du Christ, les Barbares recoivent d’a-
bord quelques débris de la civilisation latine ;
mais lorsque la féodalité et la suprématie uni-
verselle de l’Église.s'établissent , l'ignorance dé-
borde de toutes parts. L’Orient est plus heu-
reux. Des sables du désert, Mahomet fait jaillir
un peuple de guerriers. Les Arabes reçoivent,
par les Nestoriens, les sciences des Grecs ; ils
s'emparent du savoir des Hindous, des inven-
tons des Chinois, les fécondent et les trans-
portent en Occident. Trois foyers de lumière
s’'établissent alors en Europe. L'élément arabe , le
scandinave et le latin concourent à-la-fois, et par
des moyens divers, à la renaissance des lettres. Les
langues modernes et la poésie se développent:
bientôt la réaction se manifeste. Les Mores sont
chassés d'Italie et menacés en Espagne. Les croi-
sades conduisent à l’affranchissement des com-
_munes. La lutte entre le sacerdoce et l'empire
favorise la liberté municipale en Italie. Les arts,
les lettres, les sciences se relèvent. En vain de
nouveaux essaims de Barbares sortent des dé-
serts de la Tartarie. Les Mongols eux-mêmes sont
( 189 )
domptés par la civilisation renaissante, qui les
charge de colporter de grandes découvertes
d’une extrémité à l’autre de l’ancien continent.
Et après toutes ces révolutions, apres tant de
barbarie, on retrouve encore l'Italie. On la verra
désormais, placée à l'avant-garde de la civilisa-
tion, diriger, pendant plusieurs siècles, la marche
intellectuelle de toute l’Europe.
- —æ0—— —
NOTES ET ADDITIONS.
+
( 199 )
NOTE L
( PaG£g 16. )
Le système décimal ne nous est pas arrivé avec
les chiffres indiens , comme le croit le vulgaire. On le
retrouve dans presque (1) tous lesanciens systèmes d’a-
rithmétique littérale, dans lesquels les dix premières
lettres de alphabet exprimaient ordinairement les dix
premiers nombres,et où les autres lettres (2)désignaient
successivement les dizaines, les centaines, etc. : les nom-
bres intermédiaires se formaient par addition ou par
soustraction (3). Ce système décimal n’est autre chose
(x) Je dis presque , parce qu’il existe des peuples qui ne donnent aux
lettres qu’une valeur numérique déterminée par le rang qu’elles occu -
pent dans l’alphabet. Il y a aussi des peuples dans l'Inde qui, tout en
connaissant les chiffres que nous avons adoptés, et quoiqu’ils n'aient
pas d’alphabet syllabique , se servent, dans queiques cas, d’une numé-
ration syllabique, mais ceci tient peut-être à l’ancienne forme de leur
alphabet.
(2) Quelques peuples, les Grecs par exemple , ont intercalé d’autres
signes dans leur alphabet appliqué à la numération ; nous nous borne-
rons à signaler ce fait, sans en rechercher la cause, pour ne pas être en-
trainés trop loin.
(3) Les Latins disaient wrdeviginti, duodeviginti; undetriginta, et,
dans leurs chiffres mêmes, ils se servaient de la soustraction (IV, IX,
etc.). Ni les Grecs bi les Arabes ne paraissent avoir connu cette compo-
slion par soustraction, que l’on retrouve chez les Jugiens. En sanserit,
I. 13
( 194 )
que le redoublement du système par cinq des Romains,
des Grecs, des Wolofs (1), et de la plupart des peuples
les noms des nombres dix-neuf, vingt-neuf, trente-neuf, ete., se forment
respectivement des noms des nombres vingt, trente, quarante, ete., par
soustraction. Dans les langues de notre occident, les noms des nombres
sont évidemment d'origine orientale; mais il est assez remarquable
que ces noms aient passé en Occident chez les Grecs et les Latins, sans
que les chiffres indiens soient arrivés avec eux. Peut-être à cette époque
les Hindous n’avaien!'-ils pas encore le système de numération qu'ils ont
donné plus tard aux Arabes.
(x) En wolof, les mots benne, niare, niatte, nianette, dhiouroun, si-
gnifient ur, deux, trois, quatre, cing; puis les mots dhioroun benne ;
dhioroun niare, etc. (cinq et un, cinq et deux, etc.) , signifient six
sept, etc. (Voyez Dard, dictionnaire francais-wolof, Paris, 1824, in-8).
On a retrouvé le nombre cinq dans la mythologie des Américains. Les
Aztèques admettaient cinq äges du monde, et ils avaient une semaine
composée de cinq jours (Humboldt, vues des Cordillères, tom. I, p. 340,
et tom. II, p. 119) Les Scandinaves aussi avaient une semaine de cinq
jours, et divisaient comme les Perses le jour en cinq parties (Ædda
rhythmica seu antiquior., tom. LU, p. 1025 et 1042). Anquetil a décou-
vert en zend des traces du système pentenaire. Il est curieux de retrou-
ver à-la-fois en pehlvi et dans les langues de plusieurs peuples de l'A-
mérique une numération par vingt, à laquelle on pourrait rattacher le
quatre-vingt , Ve quinze-vingt ( Humboldt, vues des Cordillères , tom. T1,
p- 230 et suiv. — Mémoires de l'acad. des inscriptions et belles lettres,
tom. XXXI , p+ 403-405.— Hervas,aritmetica delle Nazioni, Cesena,
1784, in-4, p. 93 et seg.). Cette arithmétique par vingt est prise du
nombre des doigts des mains et des pieds, comme le prouvent les noms
des nombres compris entre un et vingt dans plusieurs langues améri-
eaines ( AHumboldt, vues des Cordillères, tom. II, p. 230). Les Aztè-
ques avaient des hiéroglyphes simples pour toutes les puissances du
[19 )
du Nouveau-Monde. Il a eu très probablement pour
origine le nombre des doigts de la main; et M. de
Humboldt à remarqué que non-seulement en Améri-
que le nombre cinq s’exprimait généralement par le
même mot qui signifie main, mais qu'on pouvait faire
un rapprochement analogue dans la langue persane.
(Humboldt, vues des Cordillères,t.W, p. 235). Danse
système pentenaire, qui précéda chez les Grecs le sys-
tème décimal, on écrivait la première lettre du mot
qui exprimait l’un des nombres 1, 5, 10, 50, 100; et
à l’aide de ces nombres on formait tous les autres {r..
Quant aux systèmes de numératon par quatre, par
trois et par sept, ils se sont conservés encore aujour-
d'hui (au moins sous une forme composée ) dans les
usages de la vie commune. Nous trouvons mille exem-
ples du système quaternaire dans des superstitions
grossières et dans des mythes donton a perdu la signi-
fication. La division de l’univers en quatre élémens,
les quatre âges du monde et les quatre tempéramens
de l’homme; les huit jours du monde des Étrus-
nombre vingt ( Humboldt, vues des Cordillères , tom. If, p. 23r); ainsi
non-seulement leur arithmétique était vigésimale, mais ils savaient que
tous les autres nombres pouvaient s'exprimer à l’aide de ces chiffres
élémentaires.
(1) Corsini, notæ Græcorum, Klorent., 1749, in-fol. prolegom.,
p- xx. — Raccolta d'opuscoli scientifici e filologici (del P. Calo
gerä), tom. XLVIIT, pe. 104. — Voyez les manuscrits autographes
de Saumaise, qui se conservent à la bibliothèque du roi ( Manuscrits
latins, n° 8309, p. 96, Autographus Salmasii).
1 3.
(196 )
ques (1) et leur semaine octonaire ; leur division du
ciel en seize parties et les quatre rois aborigènes de
l'âge d'or; le grand quaternaire des pythagoriciens , et
surtout le témoignage positif d’Aristote sur la nu-
mération quaternaire des Thraces (2), prouvent,
à noÿe avis, que le nombre quatre a été la base
d’un système de numération. Quant au système tri-
paire, on le retrouve sous sa forme la plus simple
dans l'énumération de faits qui ont dù être connus
ou inventés très ancienñement; comme dans les
trois parties de la terre et les trois fils de Noé qui
les ont peuplées, dans les trois fils du Scythe Tar-
gitaus , et dans la division de l'année chez quelques
anciens peuples (3). La triple foudre de Jupiter,
le trident de Neptune, Cerbère, Diane triforme,
(1) Plutarque (Opera, tom. 1, p. 456, Sylla) parle de huit périodes,
et ila été suivi par Niebuhr ( Histoire romaine, 1om. 1, p. 195).
Suidas (Lexicon, tom. III, p. 519, Tugsrviæ ) indique douze périodes
partagées en deux époques de six périodes chacune. Micali, qui adopte
cette division, croii qu’elle est d’origine orientale. Il se pourrait que la
division quaternaire füt indigène, et que la division par douze fût arri-
vée d'Orient ( Micali, storia d'Italia, etc., tom. II, p. 232).
(2) Aristotelis opera, tom. IV, p.140, Problemat., sect. XV, quest. 3.
—Censorinus (De die natali, p. 116, cap. 19) dit qu'anciennement
l'année des Égyplieus était de deux mois et qu’elle fut ensuite de
quatre. Les Muyscas en Amérique divisaient le temps en quatre parties.
Les Scandinaves aussi avaient une division octonaire (Edda rhythmica
seu antiquior, tom. II, p. 1042). Voyez sur le quaternaire les chapi-
tres v et vaux du premier livre de Macrobe ir somnium Scipionis.
(3) L'année des Arcadieps était, selon Censorinus ( De die natal,
à.
(197)
les Parques, le triangle sacré des Egyptens, les
trois principes d’Ophée et des Pythagoriciens (1).
et enfin les trinités qui, depuis la trinité indienne et
celle de l'Edda jusqu'aux grands Cabires de Samo-
thrace et des Etrusques (2), se reproduisent dans
presque toutes les religions, ne sont peut - être
que les restes d’une arithmétique trinaire (3). Les
composés du nombre trois se montrent dans les pé-
riodes astronomiques des Chaldéens et de plusieurs
autres peuples (4), dans les douze grands dieux que
les Grecs prirent aux Egyptiens et dans les signes du
zodiaque. Les douzes villes étrusques, la loi des
douze tables, les douze noms et les douze dieux que
Har apprend à Gangler dans lEdda, et les noms ger-
p- 146, cap. 19), Pline (ist. nat., tom.I, p. 403, lib. VII,
cap. 48), et Macrobe ( Opera, p. 242, Saturnalium , Gb. I, cap. 12),
divisée en trois mois.
(1) Rees cyclopædia, vol. XX XVI, Trinity. — Cancellieri, sette cose
fatali di Roma, Roma, 1812, in-12, p. 67-71.
(2) Creuzer, religions de l'antiquité, tom. IT, p. 408 et p. 487.
(3) Les Basques qui, comme on sait, conservent dans leur langue les
restes d’une langue très ancienne, ont encore une période de trois
jours qu'ils appellent aste, en désignant par aste-lehena le premier jour
de l’'aste, par aste-astea celui du milieu, et par aste-azquena le der-
nier, Les Muyscas en Amérique avaient une semaine de trois jours
(Humboldt, vues des Cordillères, tom. IL, p. 227).
(4) Voyez dans Censorinus ( De die natali, p. 116, cap. 19), et dans
Macrobe (Opera, p. 242, Saturnalium, Üib. 1, cap. 12) l'indication de
quelques peupies dont l’année était composée de six mois,
(198 )
maniques de onze et de douze(r}), paraissent se rat-
tacher au système duodécimal; et ce système par
douze se trouve existant encore, malgré les lois qui s’y
opposent, dans l’industrie, dans les arts et dans pres-
que touies les mesures usuelles (2).De nombreux témoi-
gnages semblent attester que le nombre sept aussi a été
Ja base d’un système numérique. Outre la semaine qui,
formée probablement par les Egyptiens d'après les
planètes (3), s’est étendue successivement chez la
(1) Outre les mots allemands ei/f et wolf (onze et douze), qui ne pa-
raissent pas formés d’eins, zwei et zehn (un, deux et dix) comme drei-
zenh (treize), est formé de drei (trois) et zehn (dix) ; outre les mots an-
glais élever et twelve, qui ont la même signification, et qui viennent de
la racine germanique, il est bon d'observer que, soit dans les nombres
ordinaux, soit dans les nombres cardinaux , il existe dans presque toutes
les langues d'Europe une certaine anomalie dans les noms de nombres
compris entre dix et vingt, anomalie qui paraitrait indiquer que la base
dix, à laquelle tous les autres nombres doivent se rapporter, n’a été in-
troduite que plus tard dans ces nombres. Ainsi en français on dit onze,
douze... seize, et puis dix-sept, dix-huit, dix-neuf. En italier le même
changement s’opere entre sedici el diciassette ; en espagnol entre quince
et diez y seis. Le grec et le latin présentent des anomalies de la même
uature. En arabe et en sanscrit cette anomalie ne parait pas avoir lieu.
(2) Les Bénédictins, auteurs du Nouveau Traité de Diplomatique (Pa
ris, 1950 , 6 vol. in-4, tom. IT, p. 515), indiquent un signe qui, dans
quelques anciens manuscrits, représente le nombre séx et qui sert, en y
ajoutant Punité, à former les nombres suivans. Cette numération, qui se
rapporte à une arithmétique dont le six serait la base, se retrouve dans
un manuscrit du neuvième siècle des archives capitulaires de Verceil,
dont je dois la connaissance à M. Peyron, célèbre philologue turinais:
(3) Herodoti hist, p. 141, ib. IL, 682. — Dionis Cassit, hist. rom.,
( 199 )
plupart des peuples policés, on pourrait retrouver le
nombre sept dans plusieurs des croyances vulgaires
qui remontent à la plus haute antiquité : dans les sept
choses fatales de Rome (1), dans les sept merveilles
du monde, dans les sept sages de la Grèce, dans les
sept lettres qui composent le nom de Minerve (2),
dans presque toutes les opérations cabalistiques (3),
dans les jours et les années climatériques , et enfin
jusque dans la généalogie de saint Mathieu, dans l’his-
toire de Joseph et dans l'Apocalypse. Au reste , sans
vouloir pousser trop loin l'hypothèse qui tendrait à
placer dans les différens systèmes de numération l’une
des origines de la mythologie , l'influence des consi-
dérations arithmétiques nous paraît attestée d’une ma-
nière positive par la cosmogonie arithmétique et le
p. 37 et 38, lib. xxxvrr. — En Amérique, la semaine de sept Jours était
inconnue (Humboldt, vues des Cordillères , tom.1T, p. 340).
(1) Cancellieri, sette cose fatali di Roma, p. 7-8, 73-78.
(2) On peut voir, sur les propriétés du nombre sept, les cha-
pitres v et vr du premier livre du commentaire de Macrobe ir som-
nium Scipionis, et le dixième chapitre du troisième livre des Aoctes
atticæ d'Aulu-Gelle.
(3) « Les Bohémiens.. ne connaissent de termes pour désigner les
« nombres que jusqu’à sept. Au-delà de ce taux, ils se servent d’équiva-
« lens pris dans d’autres langues pour calculer leurs comptes. » ( Pou-
queville, voyage de la Grèce, tom. I, p. 364, Paris, 1826, 6 vol. in-8).
— Ne pourrait-on pas déduire de ce fait eurieux, que peut-être les
Bobémiens (Zingari) avaient dans l’Inde, d’où ils paraissent être sortis,
une espèce d’arithmétique septénaire ?
( 200 )
grand quaternaire des Pythagoriciens (1), dont proba-
Llement ils avaient pris les élémens chez les peuples
orientaux. Il faut consulter, à ce sujet, un mémoire
de M. de Humboldt, rempli de vues ingénieuses et
d’une profonde érudition (2), et tout le chapitre que,
dans ses Vues des cordillières 11 a consacré aux calen-
driers américains.
(5) Montucla, hist, des mathém., tom. I, p. 124. — Fabriciü, bibl.
græca., tom. I, p. 875.
(2) Journal des mathématiques pures et appliquées, par M. Crelle,
tom. HI, p. 205 et suiv.
( 204:)
NOTE I.
(PAGE 28.)
Plusieurs écrivains, parmi lesquels nous citerons
Bayer et Villoison , ont cru , d'après un passage de
Boëce, que les anciens avaient connu les chiffres et le
système de numération des Indiens. Il est probable
que les pythagoriciens ont eu des abréviations pour
exprimer les nombres composés, comme en eurent
plus tard les Romains ( Gruteri, corpus inscriptionum ,
Amstelod., 1707, 2 vol. in-fol., tom. IF, pars 2, Votæ
Tironis ac Senecæ , fol. 11). Archimède aussi en avait
imaginé , et on en rencontre souvent dans les inscrip-
tions. Mais les plusanciens manuscrits de Boëce neren-
ferment pasles chiffres indiens, qui n’ont été introduits
par les copistes qu'après que les Arabes eurent apporté
en Occident la nouvelle arithmétique; d’ailleurs Fibo-
nacci assure que l’arithmétique des pythagoriciens
n’est pas celle qu’il introduisit en Ftañie, et qu’il attri-
bue aux Indiens : « Et algorismum atque Pycthagoræ
quasi errorem computavi respectu modi Yndorum. »
(Targioni viaggti, tom. IT, p.59). Quant au système dé-
cimal, le point important était la valeur de position
des chiffres . et il ne paraît pas que les anciens géomè-
tres occidentaux l’aient connue; car autrement com-
ment concevoir qu'Archimède par exemple, ne s’en
soit jamais servi, et qu'il ait pu écrire l’Arénaire?
( 203 )
( Boetii opera, Basil, , 1546 in-fol., p. 1209-1210. —
Beveregi, instit. chronol., Londin. 1705, in-4,
p- 203. — Bayeri, hist. regnt bactriani, Petropol. 1735,
in-4, p. 123 et 127. — Willoison, anecdota græca,
Venet., 1781, 2 vol. in-fol. , tom. IL, p. 152. —
Raccolta d'opuscoli, ete., tom. XLVIIT, p. 21 et
suiv. — Montucla, hist. des math., tom. 1, p. 123,
377 et suiv. — Baroni annales, vol. XIIT, p. 66
et 67. — Andres , storia d’ogni letteratura, Venez. ,
1783, 16 vol. in-8, tom. X, p.83 et suiv.). Il faut re-
marquer ici qu'outre les Hindous , dont nous avons
adopté le système arithmétique , les Chinois aussi s’é-
taient formés une arithmétique décimale avec une va-
leur de position. Ainsi leurs premiers dix chiffres étant
SE A OS CL
— ee
HSE UENELAET
us WE
2
ils écrivirent d’abord pour 20,10 pour 43,
10
£3
et ainsi de suite. Mais depuis ils ont laissé de côté
le + (10), lorsqu'il n’y avait pas à craindre d’équi-
voque (1), et maintenant ils écrivent presque tou-
(r) Pour écrire les nombres 11, 12, 13, 21,22, 32, 111. 122, etc.,
qu'en omettant le signe du ro on n'aurait pas désignés d’une manière
244 2.5
] AE L_r0 #25 Lo insi
Jours - pour : ; a et ainsi
Eu 2
des autres. Reste à savoir si cette simplification leur est
en,
venue des Hindous (1) ou des Européens, ou bien s’ils
y sont arrivés d’eux-mêmes. C’est seulement en Chine,
et d’après les examens des anciens monumens, que la
question peut être résolag convenablement. Voyez
dans Hyde (Syntagma dissertationum, t. YE, p. 409 et
suiv. et tabula L} les chiffres dent se servent les mar-
» ©
c (oh
chands chinois, …"@
0
bien déterminée , les Chinois employèrent plus tard des lignes droites ;
tantôt horizontales, tantôt verticales, suivant qu’ils es
m5. 2).
(1) Pour indiquer un trés grand nombre les Chinois disent sable du
ter des dizaines ou des unités ( Souan-fa-tong-tsong , liv.
Gange (Morrison, dictionary of the chinese language, Macao, 1815-
1822, 3 part, in-4, I part., p. 466); mais je ne crois pas que
l’on sache l'époque à laquelle cette expression a commencé à être
employée à la Chine.
( 204 )
NOTE III.
{PAGE 36. }
Voici ce que dit à ce sujet Théon d'Alexandrie :
« Et afin qu’on ne croie pas que nous les voyons ainsi,
parce que nous les voyons alors d’une moindre dis-
tance , Ptolémée veut montrer, par un exemple , que
c’est un effet non de la distance de la terre au soleil,
mais de l'exhalaisonétrés humide qui environne k
terre, notre vue étant plongée par là dans un air plys
épais, et de la ré fraction qu'éprouvent les rayons qui
entrent dans Pair et font angle à Pœil plus grand,
suivant ce que dé montreArchimèdé dans ses livres de
catoptrique , ou quand il dit qu il est en cela comme
des objets plongés dans l’eau qui y paraissent d'autant
plus gros qu'ils y sont plus profondément enfon-
cés » ( Tvon d'Alexandrie, commentaire , etc.,
tom. 1, p. 28.)— Dans sa météorologie des Grecs et
des Romains M. Ideler n'avait pas cité ce passage
de Théon et il semblait attribuer à Ptolémée la dé-
couverte de la réfraction astronomique ( /deler me-
teorologia veterum Græcorum et Romanorum, p. 183
et seq.). Mais depuis il s’en est servi dans son com-
mentaire sur la météorologie d’Aristote (t. IT, p. 95).
Comme je n’ai pas encore pu me procurer le second
volume de cet ouvrage, qui a dù paraître récem-
ment, je me borne à le citer d’après ce que M. Ideler
(208)
m'en a écrit, M. Ideler a résumé à cette occasion plu-
sieurs passages d'Olympiodore et d’Apulée où l’on
fait mention de la catopirique d’Archimède. Au reste
Archimède s’étaitoccupé aussi d'astronomie : la sphère
céleste dans laquelle il avait imité les mouvemens des
planètes , excita l'admiration des anciens (Ciceronis
opera, p. 3081, de Natura deorum, hb. IT, Ç 88 — Ci-
cero, de republicahb.T,$ 14, Classicorum auctorum se-
ries a Majo, t. 1, p. 43. — Cassiodori opera , tom. T,
p- 20, Var., lib. T, ep. 45. — Archimedis opera,
p- 365) ;et on montrait naguère encore à Syracuse
endroit d’où lon suppose que le célèbre géomètre
observait les astres (Lupi lettere, Arezzo, 1553,
in-8, p. 53). On lui doit une mesure du diamètre du
soleil et le calcul, sinon l'observation directe, de quel-
ques solstices pour en déduire la longueur de l’année
(Archimedis opera , p. 321.— Piolémée, composition
mathématique, Paris, 1816, 2 vol. in-4, t. I, p- 153.
— Macrobi opera, p. 128, in somn. Scipion. Gb. IL,
cap. 3).
{ 206 )
NILER LYS
( race 36, )
Lessing a publié une épigramme inédite de l'An-
thologie grecque , qui renferme un problème arith-
métique proposé par Archimède à Eratosthène ( Les-
Sing, zur geschichte und litteratur. Braunschw. , 1779,
> vol. in-8, tom.[ , p. 421). Quoique très proba-
blement cette pièce ne soit qu'une production de l#-
cole d'Alexandrie , cependant elle me paraît démon-
trer qu'Archimède s'était occupé d'analyse indé-
terminée. Autrement, à une époque où les travaux
d'Archimède étaient si connus, on n'aurait pas
choisi ce géomètre pour lui attribuer des recher-
ches sur un sujet qu’il n'avait jamais traité. M. Ideler,
à propos de cette note, m’a indiqué un mémoire de
MM. Struve père et fils, sur l’épigramme publiée par
Lessing. Je regrette bien de n’avoir pas pu me procurer
ce mémoire dans lequel j'aurais certainement puisé des
renseignemens utiles. M. Ideler pense que peut-être
l’épigramme en question est d’un poète nommé Archi-
mèle, et non pas Archimede. Au reste on trouve dans le
commentaire de Proclus sur la proposition quarante-
sepüième du premier livre d'Euclide, l'indication desre-
cherches faites par les Pythagoriciens sur les triangles
rectangles arithmetiques. La formule dont ils se ser-
f
( 207 )
vaient pour former une infinité de ces triangles peut
s’écrire en algèbre de la manière suivante :
#(RYCE)
Platon déterminait les triangles rectangles, en nom-
bres, à laide d’une méthode qui peut être exprimée
par l'équation
JE)
( 208 )
NOTE,
{
{ PAGE 37. )
Voici un passage, relatif au séjour d’Archimède en
Espagne , que j'ai tiré des manuscrits de Léonard de
Vinci (1) : KO ritrovato nelle storie delli Spagnioli
chome nelle guerre dalloro avute colli ingilesi fu d’Ar-
chimede siracusano il quale in quel tempo dimorava
in compagnia di Cliderides re de’ Cirodastri. Il quale
nella pugna marittima ordino che i navili fussino con
Junghi albori e sopra le lor gagie collochd una anten-
netta di lunghezza di 40 pié et 1/3 piè di grossezza.
Nell una stremità era una ancora picciola, nell altra
un contrappeso. AÏT ancora era appiccato 12 piedi di
catena, e dopo essa chatena tanta corda che perveniva
dalla catena al nascimento della gaggia, e da esso
nascimento n’andava in basso sino al nascimento dell
albore dove era collocato un albore argano fortissimo
e li era fermo il nascimento d° essa corda. Ma per tor-
nare all uflitio d’ essa macchina dico che sotto a detta
ancora era uno fuoco il quale con gran’ strepido get-
tava in basso e° sua razzi e pioggia di pegola infocata.
La quale piovendo sopra dla gaggia....... che v’ erano
abbandonare detta gaggia onde colata. » (MSS. de
Leonard de Vinci, vol. B, f. 96).
(1) Nous rappellerons ici ce que nous avons dit dans l’Avertissement ;
c'est-à-dire que nous donnons toujours la copie exacte des manuscrits que
nous publions, sans y faire aucun changement,
Les peuples du Nord n’ont pas contribué à la re-
naissance des lettres en Italie. Les Italiens sont les
héritiers des Latins et des Grecs; et ils doivent beau-
coup aux Arabes et aux Provencaux. Quant aux
nations germaniques, leur influence littéraire a été
presque nulle dans le midi de l’Europe. Quelques éru-
dits, qui ont voulu soutenir le contraire, ont formé,
pour appuyer leur opinion, une liste de plusieurs
centaines de mots italiens, qui n’ont pas une origine
latine , et dont létymologie parait se trouver en
allemand : mais, à mes yeux, cet argument n’a pas
une grande valeur. Car, mème en admettant que tou-
tes ces étymologies fussent parfaitement justes, il
faudreit remonter plus haut, et recourir à l’Inde et à
la Perse, où l’on trouve les origines de la langue aile-
mande. Ces mots ont pu arriver en Europe avec les
colonies orientales ; colonies qui, à une époque très re-
culée , ont servi à modifier presque toutes les langues
de l'Occident. Personne n’ignore d’ailleurs que le latin
n’était que la langue des conquérans, et qu’il exis-
tait anciennement en Îtalie une multitude de langues
et de dialectes, qui ont concouru puissamment à la
formation de la langue italienne moderne. Pour dé-
montrer donc la réalité de ces étymologies germa-
niques, il faudrait prouver que Îles peuples orien-
1. 14
( 256 5
taux n’ont jamais pénétré en Ttalie, et que les mots
dont il s’agit n’existaient pas dans les anciens dia-
lectes italiens. Or, je crois qu'il est impossible d’é-
tablir ces deux propositions négatives. Au reste,
même en admettant tout cela, je ne sais quelle in-
fluence les nations germaniques auraient pu exercer
sur les progrès de la littérature dans la péninsule, en
donnant aux Italiens un vocabulaire dont les mots les
plus significatifs se rapportent à la guerre et au sys-
tème féodal. Les Allemands qui voyagaient alors n’é-
taient ni des Niebuhr ni des Humboldt. Il serait mal-
heureusement possible que scklag devint un jour
un motitalien ; mais les érudits de Vienne des siècles
futurs auraient grand tort, s'ils voulaient conclure
de ce mot, et de quelques autres mots semblables
qui pourraient s’introduire dans la langue italienne,
que les Autrichiens eussent contribué au dix-neu-
vième siècle à répandre les lumières en Italie. — Un
mot qui, dans presque toutes les langues de l'Europe,
a une origine commune, et qui est sorti d'Italie avec
l'idée qu’il exprime , est le mot qui indique l’action
d’écrire (scribere ); et il en vaut à lui seul bien
d’autres.
Les Grecs, les Arabes, les Provençaux, sont par-
venus tour-à-tour à rendre leur iangue populaire en
Italie. Ce fait est attesté par un grand nombre de mo-
numens divers. Mais on voit Théodoric écrivant ses
lettres en latin, et les rois lombards dictant en latin
leurs capitulaires ; et l'on cherche en vain des traces de
l'influence germanique dans les lettres, les sciences
ou les arts des Italiens au moyen âge.
NOTE VII.
? : ;
( PAGE 106.)
Plusieurs orientahistes et philologues distingués ont
rejeté le récit de l'incendie de la bibliothèque d’A-
lexandrie par les Arabes (Gibbon, the history of the de-
cline, etc.,tom.IX, p.275.—Renaudot, historia patriar-
charum alexandrinorum, Paris. , 1713, in-4, p. 170.—
Assemanni, discorso inaugurale, p. 22.—Sainte- Croix,
dans le Magasin encyclopédique, v° année, tome 1v,
p. 433). Pendant long-temps, on n’avait que le témoi-
gnage d’un seul auteur pour attribuer à Omar le di-
lemme que tout le monde connaît { 4bul-Pharafjit,
hist. compend. dynast., p. 114) (1). L'autorité d’un
évèque chrétien, qui vivait plusieurs siècles après l’évè-
nement, ne paraissait pas assez forte pour balancer le
silence d'Eatychius (Æutychit annales, Oxon, 1659,
2vol.in-4, t.If, p.316 et 519), ni le témoignage d’'O-
rose (Orosii historiarum, Lugd.-Bat.,1767,in-4,p. 42r,
hb. VI, cap. 15), qui assurait que les chrétiens avaient
déjà détruit les livres, et qu’il ne restait de son temps
que des armoires vides. D'ailleurs si, comme on le
(1) On sait au reste que le passage relatif à l'incendie de la biblio -
theèqüe d'Alexandrie ne se trouve que dans la version arabe, et qu'il n’est
pas dans le texté syriaque d'Abul-Farage ( Gregorit Alulpharagi, sive
Bar-Hebræi, chronicon syriacum , Lips., 1789, in-4, p. ro7 et 108),
f
) 4:
.
(°2#2 )
croit, Jean Philoponus a été l’élève d’Ammonius au
cinquième siècle, il ne pouvait pas , en 642, deman-
der à Amrou la conservation des bibliothèques d’A-
lexandrie. Enfin, l’évêque Abul-Farage s'était déjà
montré trop disposé à parler d’incendies de livres, dans
son récit des manuscrits d’Archimède brülés par les
Romains. La question en était restée là , lorsque M. de
Sacy a rajeuni ce problème historique, en entrant dans
la lice avec son immense érudition. [la réuni plusieurs
passages d’Abd-allatif, de Makrizi, d'Hadji-Khalfa,
de Douletschah , qui paraissent confirmer le récit
d’Abul -Farage. Mais, nonobstant notre vénération
pour ce patriarche de la philologie orientale, nous
nous permettrons de faire remarquer qu'Abd-allatif et
Makrizi ont écrit trop long-temps après la prise d'A-
lexandrie , pour qu’on puisse leur accorder beaucoup
de confiance, et quede plus le récit d’Abd-allatif a tout-
à-fait l'air d’un conte populaire , surtout lorsqu'on y
voit Aristote enseignant la philosophie à Alexandrie,
où il n’alla jamais (4bd-allatif, relation de l'Egypte,
p+ 183). D’autre part, l'autorité d’Ibn - Kaldoun,
rapportée par Hadji-Khalfa, et le passage de Dou-
letschah ( 4bd-allatif, relation de l'Egypte, p. 242, ,
243, 528) combattent le récit d'Abul-Farage, puis-
qu’ils transportent en Perse l'incendie de la bibliothe-
que et même le dilemme d’Omar. Il est sans doute
probable que sous les califes Ommiades, les Arabes,
dans leurs premières conquêtes, aient brülé par fana-
tisme quelques livres; c’est ce ‘qu’avaient fait et ce
que continuèrent à faire, long-temps après, les chré-
tiens. Mais il y a loin de quelques livres de magie, ou
( 213 )
d’un roman , brülés par un émir fanatique (4bd-allatif,
relation de l'Egypte, p. 528), à une destruction systé-
matique telle qu’on la suppose communément. On
retrouve cette tradition, sous différentes formes, chez
beaucoup d’autres peuples, et elle sert toujours à ex-
primer la haine des vaincus contre des vainqueurs
moins policés. Mais si la perte d’un très grand nom-
bre de classiques latins a pu donner quelque poids
à l’accusation , lancée par Jean de Salisbury et par
d’autres écrivains contre saint Grégoire, d’avoir
brülé les chefs - d'œuvre de la littérature païenne
(Joannis Saresberiensis , policraticus , p. 104 et 557. —
Vossius, de historicis latinis, p. 768), les Arabes,
qui ont au contraire préservé la plus grande partie
des ouvrages grecs que nous possédons , devraient
être absous entièrement de laccusation portée con-
tre eux. Dans l’histoire de l’école alexandrine, on
a l’habitude de s’arrêter à la prise de cette ville par
Amrou (Matter, essai historique sur l'école d'Alexan-
drie, Paris, 1820, 2 vol. in-8, tom. IL, p. 308 et
suiv.); mais il serait très important de faire l'histoire
de l’école arabo - alexandrine , qui a eu tant d’in-
fluence sur la renaissance des sciences en Occident
( Beniaminis, a Tudela, itinerarium, p. 121. — Bas-
nage; histoire des Juifs , tom. XIHIT, p. 272).
(at)
NOTE VIIL
( PAGES 109 ET 155. )
Parmi les instrumens que les Arabes avaient per-
fectionnés le plus, on doit citer spécialement les
horloges mécaniques, dont plusieurs savans célèbres
s’étaicnt occupés en Orient {Golius, notæ ad Alfraga-
num, p. 2), et qui furent apportées en Europe du
temps de Charlemagne. Benjamin de Tudela ( /tine-
rarium ; p. 55) a décrit la grande horloge de Damas,
mais On avait supposé qu'il y avait beaucoup d’exagé-
ration dans sa description. Maintenant on possède la
description qu'Ebn-Djobeir a donnée de cette horloge :
nous la reproduisons ici pour montrer combien les
Arabes avaient perfectionné ces instrumens ( 44d-al-
{atif , relation de l'Egypte, p.577 et578). « Quand
on sort de Bab-Djiroun, on voit à droite, dans la
muraille de la galerie que l’on a en face de soi, une
sorte de salle ronde en forme de grande voûte, dans
laquelle il y a deux disques de cuivre percés de petites
portes, dont le nombre est égal à celui des heures
du jour, et deux poids de cuivre tombent du bec de
deux éperviers de cuivre (dans deux tasses) qui sont
percées. Vous voyez les deux éperviers étendre leur
cou, avec les poids, vers les deux tasses, et jeter les
poids avec promptitude : cela se fait d’une manière
si merveilleuse ; qu'on croirait que c’est de la magie.
Quand les poids tombent, on en entend le bruit; puis
\
( &19 )
ils rentrent par les trous ( des tasses) dans l'intérieur
du mur et retournent dans la salle. Aussitôt la porte
se referme avec une petite tablette de cuivre : cela se
continue ainsi jusqu'à ce que, toutes les heures du
jour étant passées, toutes les portes soient fermées, et
que tout soit revenu à son état primitif. Pour la nuit,
c’est un autre mécanisme. Dans l'arcade qui enveloppe
les deux disques de cuivre, il y a douze cercles de
cuivre percés, et dans chacun de ces cercles est un
vitrage. Derrière le vitrage est une lampe que l’eau
fait tourner par un mouvement proportionné à Îa
division des heures; quand une heure est finie, la
lyeur de la lampe illumine le verre , et les rayons se
projettent sur le cercle de cuivre, qui paraît éclairé
et rouge ; ensuite la même chose a lieu pour le cerele
suivant, jusqu’à la fin des heures de la nuit. Il y à
un homme chargé de diriger cette mécanique et de
remettre les poids à leur place. On nomme cette ma-
chine l'horloge. Voilà ce que dit Ebn-Djobeir : Dieu
seul est parfaitement savant. »
Il nous reste maintenant à discuter un point fort
intéressant dans l’histoire de l’astronomie, savoir, si
les Orientaux ont connu quelque instrument propre à
faire mieux voir les objets éloignés. D’après une tra-
dition musulmane très répandue, il y aurait eu, sur le
phare d'Alexandrie, un grand miroir au moyen du-
quel on aurait vu les vaisseaux sortir des ports de la
Grèce. Ce miroir, cité par Hafèz, décrit par Abd-
allatif ( Relation de l'Egypte, p. 240), par Masoudi
(Notices des manuscrits de la bibl. du roi,1.1,p.25-26),
et par Benjamin de Fudela (/ténerarium, p.121), d'une
( 216 )
manière assez détaillée, se retrouve dans l'Adja:b-
Alboldan de Kazwini, qui existe en manuscrit dans
la bibliothèque du roi (MSS. arabes, n° 19, p.89). Plus
récemment Schott (Wagia universalis, Bamb., 1677,
in-4, p. 443), Kircher (4rs magna lucis et umbræ,
Amstelod. 1671 , in-fol., p.790), Montfaucon ( Me-
moires de l’academie des inscript. et bell.-lett., t. VI,
p- 575), et Buffon (Histoire naturelle, supplément,
édit. orig. in-4, tom. [, p. 478-483) en ont parlé,
et d’'Herbelot a réuni divers passages relatifs à PAïneh-
Iskanderi dans sa Bibliothèque orientale , à Varuüele
Menar. Plus récemment encore, Langlès (dans ses notes
au Voyage de Norden, Paris, 1795-98, 3 vol. in-4,
tom. [IT , p. 163-166), et M. Reinaud ( Monumens
arabes du cabinet du duc de Blacas, Paris, 1828, 2 vol.
in-8, tom. IT, p. 118), se sont occupés du même
sujet; mais ces écrivains n’ont vu, en général, dans
ce talisman, qu’une fable digne des Mille et une
Nuits. Maintenant, un document original , que nous
avons découvert dans la correspondance de Boulliau , :
paraît démontrer que plusieurs siècles avant Newton et
Zucchi connaissaient une espèce de télescope à ré-
flexion dont ils se servaient pour voir les vaisseaux
de loin. Ce document est une lettre inédite de Bu-
rattini (auteur de /« Mesure universelle et mécanicien
très habile), écrite en 1672, et adressée par lui à
Boulliau. Burattini, répondant à l’astronome francais,
qui venait de lui annoncer la découverte du télescope
à réflexion de Newton, lui dit qu'il existait à Raguse,
sur une tour, un instrument du même genre , à l’aide
duquel les habitans de cette ville voyaient les vais-
(217)
seaux à la distance de 25 à 30 milles, et qu’il y avait
un gardien {1) de cet instrument, dont on attri-
buait la construction à Archimède. Ce fait, attesté par
plusieurs personnes (entre autres par Gisgoni, premier
médecin de limpératrice Éléonore), à Burattini, et à
Paul del Buono, membre de l’Académie del Cimento,
prouve, à notre avis, d'une manière incontestable, l’an-
cienne existence d’instrumens destinés à rapprocher les
objets. On sait qu'il ya plusieurs traditions romanesques
distinctes sur la vie d'Alexandre : les traditions orien-
tales parlent du miroir, mais les traditions grecques
et latines n’en parlent pas. (Historia Alexandri Magni,
MSS. latins de la bibl. du roi, n° 8501, in-4, cap. 17.
—Juli Valerii, res gestæ Alexandri Magni, Mediol.
1017,in-8 , p. 33 — Jtinerarium Alexandri Magni,
Mediol. 1817, in-8, p. 30. — Strabo , rer. geog.,
p. 1140, lib. XVIT). Cela nous paraît démontrer que
le miroir d'Alexandre était oriental et de beaucoup
postérieur au siècle de ce conquérant. Des recherches
qu’un de nos amis a eu la bonté de faire faire à Raguse
ne nous ont rien appris sur le sort de ce précieux in-
strument. Voici la lettre de Burattini, dont l'original
se conserve à la bibliothèque du roi ( Correspondance
de Boulliau, tom. XXVI, supplèement francais,
n° 987), et que nous reproduisons avec la traduction.
(1) Burattini dit même que l’on av créé un magistrat chargé de
veiller à la conservation de cet instrument,
( 218 )
Varsavia, li 7 di octobre 1672.
Monsieur, (sic)
Dalla gentilezza di V. S. mio signore ho ottenuto
non solo il disegno ma ancora la dichiaratione del
‘tubo catoptrico inventato dal Sig. Newton di che gli
ne rendo vivissime gratie. L’inventione è bellissima
é di gran gloria a quello che lha trovata. In Ragusa
che anticamente era Epidauro antichissima et famo-
sissima cità dell Hlirio patria d’Esculapio conservavo
sino al giorno d’oggi una tale machina (se perd l’ultimo
terremoto non ha ruinata) con la quale vedono in
distanza di 25 in 30 miglia italiani il vaselli che tran-
sitano nel mare Adriatico con la quale li approsimano
tanto che pare aponto che siano nel porto di Ragusi.
L’anno 1656, mi trovavo in Vienna, ove da un Ra-
guseo mi fu parlato di questa machina in presenza di
Sig. Paolo del Buono conosciuto da V. $S., il quale
diceva che era fatta come una misura da misurare il
Varsovie, le 7 octobre 1672.
Monsieur ,
J'ai reçu le dessin que vous avez eu la bonté de m'envoyer avec l’ex-
plication du tube cetoptrique inventé par M. Newton, et je vous en
remercie infiniment. L'invention est très belle et honore beaucoup son
auteur. À Raguse (qui était l’ancienne Épidaure }! ville très célèbre d'Il-
lyrie et patrie d’Esculape }, on conserve encore, s’il n’a pas péri dans le
dernier tremblement de terre, un instrument du même genre, avec le-
quel on aperçoit les navires dr la mer Adriatique, à la distance de
25 à 30 milles d'Italie, comme s'ils étaient dans le port même de Ra-
guse. Lorsque j'étais à Vienne, en 1656, j'entendis parler de cet instru-
ment par une personne de Raguse : M. Paul del Buono que vous con-
; . es , : . sa: ;
naissez, Monsieur, €tait présent à la conversation : d apres ce que l'on
(2259 \)
grano , ma perchè detto Raguseo non sapeva rendere
ragione come era fatta, il Sig. Paolo, et io giudi-
cassimo , che fusse una favola, et io mai più ni pen-
sai. Doi anni sono fu qui in Varsavia il Sig. Dottore
Aurelio Gisgoni, primero medico della magestà dell
imperatrice Leonora ; che otto o dieci anni continui
ha fatto et essercitato la sua professione nella città di
Ragusa, il quale discorrendo meco del tremendo
terremoto seguito in detta città, mi soggionse poi
doppo un lunso discorso queste formali parolle. « Dio
sa se fra tante rarità che erano in Ragusa, non si sia
persa a maravigliosa machina, che per traditione
havevano che fusse fatta d’Archimede , con la quale
vedevano li vaselli in mare in distanza di 25 in 30
miglia, e cou tanta esattezza come se fussero nel
porto ». To li demandai come era falta, et esso mi
rispose che era fatta come un tamburo senza un fondo,
nella quale si guardava da un lato , e mi soggionse che
m'en disait alors, l'instrument avait la forme d’un boisseau à mesurer
le blé; mais comme cette personne-là ne sut pas nous en dire davantage,
nous crûmes alors, M. Paul et moi, que c’était un conte, et je n’y son-
geai plus. Il y a maintenant deux ans, que M. le docteur Aurele Gis-
goni, premier médecin de $. M. l'impératrice Éléonore , vint ici à Var-
sovie : ce médecin avait exercé sa profession à Raguse pendant huit ou
dix ans. Un jour qu’il causait avec moi du terrible tremblement de terre
arrivé dans cette ville, il ajouta , après une longue conversation , ces pro-
pres paroies : « Dieu sait si parmi tant de curiosités qu'il y avait à Raguse
« on n'aura pas perdu cet admirable instrument, que la tradition attri-
« buait à Archimède, et à l’aide duquel on voyait les navires à la distance
« de 25 à 30 milles aussi distinctement que s'ils avaient été daus port. »
Je lui demandai comment cet instrument était fait ; il me répondit que
sa forme était celle d’un tambour qui n'aurait qu'un seul fond : que l’on
(220 )
per traditione havevano che fu esse stata fatta d’Archi-
mede. À me venne in memoria il discorso fattomi in
Vienna dal Raguseo lanno 56; perchè da una misura
da grano et un tamburo senza un fondo non ni è dife-
renza se non nelli nomf. Vive ancora il Sig”. Dottore,
et è come in passato al servitio della Maestà dell Im-
peratrice; ma quello di che io mi maraviglio &, che
una machina cosi maravigliosa non sia stata propalata
sino al giorno d’oggi; e pure di Ragusa sono usciti
mathematici illustri, come in passato & stato Marino
Ghettaldo, e molti aliri, et à tempi nostri Mons’.
Gio-Battà Hodierna (1), che credo vivi cor: €
dimora in Sicilia nella città di Palermo, e pure niuno
di questi in fatto mentione di detta machina per quanto
è a mia nolitia, e pure Mons" Hodierna ha scritto
sopra Archimede , et sopra li Telescopij, et Micros-
y regardait de côté , et que l'on croyait, par tradition, que cet instru-
ment avait été fait par Archimède. Je me souvins de ce que l’on m'avait
dit à Vienne en 56, car entre un boisseau à mesurer le blé et un tam-
bour à un seul fond la différence n’est que dans les mots. M. Gisgoni
est encore en vie et il est toujours au service de $S. M. l'Impératrice.
Ce dont je m'étonne beaucoup, c’est que l'on n’ait jamais songé à faire
connaître un instrument aussi prodigieux, tandis que Raguse n'a pas
manqué d'illustres mathématiciens : il y a eu autrefois Marino Ghettaldo
et plusieurs autres géométres, et de nos jours M. Jean-Baptiste Hodierda
qui, à ce que je crois, est encore vivant, et établi à Palerme, en Sicile,
Aucun d'eux, que je sache, n'a fait mention d'un tel instrument; ce-
pendant M, Hodierna a écrit sur Archimède, et sur les télescopes et
(x) Burattini se trompe ici ; car Hodierna était de Raguse en Sicile,
el non pas de Raguse en Iyrie.
( ak)
cepij. Jo non faccio questo racconto per levare la
gloria al Sig". Newton, ma mi maraviglio somma-
mente come una Mnventione cosi maravigliosa sia stata
occulta tanti anni, et io credo ancora, che una tale
machina fusse quella , che si legge in diversi autori,
havevano il Re Tolomei sopra la torre del faro posta
sopra il porto d’Alessandria , con la quale vedevano li
vaselli in mare, in distanza di cinquanta e sessanta
miglia, persa poi nella declinatione dell” Fmperio ro-
mano, ma mantenuta et occultata nella città di Ra-
gusa, havendomi detto il Sig". Dottore Gisgoni che
era custodita da un tale magistrato sopra una torre.
Questa d’Inghilterra ha la proportione più stretta
che non è od era quella di Ragus», e perchè per prova
vediamo che li specchi ustorij fatti di metallo sono
tanto migliori, quanto più sono larghi, come per prova
si vede di quello fatto da M. Villette in Lione, che
sento hora essere nelle mani del Re Christianissimo,
les microscopes. Je ne vous fais pas ce récit pour diminuer la gloire
de M. Newton, mais je suis fort étonné qu’une iavention si admirable
ait pu rester si long-temps inconnue. Quant à moi, je persiste à croire
que c'était le même instrument dont ilest question dans plusieurs auteurs,
et qui était sur le phare d'Alexandrie du temps des Ptolémées qui
s’en servaient pour voir les navires à la distance de 5o ou 60 milles,
Egaré peut - être à la décadence de l'empire romain, il fut caché et
conservé dans la ville de Raguse , où M. le docteur Gisgoni m'a dit qu'il
était placé sur une tour, et gardé par un magistrat.
L'instrument fait en Angleterre a une proportion plus étroite que celui
qui est ou qui était à Raguse, et comme nous savons par expérience que les
miroirs ardens métalliques sont d'autant meilleurs qu’ils sont plus grands
(comme on vient de le voir par celui qu'a fait M. Villette, à Lyon, et
qui est maintenant, à ce que lon m’a dit, entre les mains de S. M, très
( 522)
cost 10 credo, che quanto lo specchio obiectivo rice-
verà più raggi tanto sarà più eccellente. Ho scritto
questo mio pensiero al Sigr. Heyelio che ne fabrica
presentemente uno, et esso ancora stima che hi più
larghi siano li migliori. Pensa di farne d’hyperbolici
e de’ parabolici, ma io credo che li sferici saranno mi-
gliori de’ tutti. Fa ancora il signor Hevelio la tromba
sonora inventata similmente in Inghilterra, e di questa
ancora ne attenderà la riuscita , sapendo io bene che
il signor Hevelio la farà esquisitamente.
Consegnai al Sig”. Des Noyers il vetro obiectivo di
braccia 35, che sono a punto 50 piedi romani capito-
lini. Li oculari sons riuseiti imperfetti; cioë con tor-
üiglioni, e perd ne convengo fare delli altri, come fard
subito, che 10 sia un poco libero dalli affari presenti,
havendonn la Maestà Ser"* del Re mio Sig dato in
questi tempi cosi calamitosi la cariea eommandante di
Varsavia, molto à me grave, ma bisogna obedire al Pa-
chrétienne }, je crois de mème qu’un miroir objectif est d'autant meil-
leur qu'il reçoit plus de rayons. J'ai communiqué cette idée à M. Hévé-
lius qui est maintenant occupé à en faire un; et il partage mon épinion.
11 veut en faire d'hyperboliques et de paraboliques ; maïs je crois que
les sphériques seront toujours les meilleurs. M. Hévélius a encore en-
trepris de faire la trompette sonore qui est aussi une invention an-
glaise : j'en attends les résultats, car je sais bien que M. Hévélius fera
une chose excellente.
J'ai remis à M. Des Noyers l'objectif de 35 brasses, qui équivalent
précisément à 70 pieds romains capitolins. Les oculaires n’ont pas bien
réussi : il y a des stries; mais dès que j'aurai un peu de temps je les
referai. S. M. a voulu me confier dans ces temps si critiques le com-
mandement de Varsovie ; ce sont des fonctions qui me pèsent beaucoup,
mais il faut obéir au maitre, Soyez donc sûr qu'au premier instant de
(-225.)
trone. Quando dunque sar6 un poco più libero non
mancaré di servirla ancora delli oculari , benchè di
questi se ne trova da per tutto, non essendo difhcili
da farsi quando si ha buon vetro, ma & una cosa molto
desgustevole doppo che si & fatto un lavoro con somma
diligenza trovarlo poi tutto difettoso come a me suc-
cede molte volte, perchè molte vetri piani paiono belli,
ma poi quando sono ridotti alla convessità fanno ve-
bere di loro difetti , che prima tenevano occulti. Ha-
vevo li anni passati un bellissimo pezzo di christallo
de monte , largo in diametro tre oncie, o siano polsi,
e grosso jino; di questo mi venne voluntà di fare une
lente convessa da tutte doi le parti, e doppo haver la
perfettionata con non poca fatica vi trovai dentro un’
infinità de tortighioni tanto per il lungo, quanto per
lo traverso come a punto un graticola, et havendolo
applicato ad un obiectivo fatto di vetro comune di
Venetia vedevo li oggietti tutti graticolati, e cosi la
liberté que j'aurai, je vous ferai aussi les oculaires. Il est vrai que l’on
en trouve partout, parce qu'il est aisé de les faire lorsqu'on a du bon
verre ; mais c’est ur désagrément qui m'arrive bien souvent à moi, de faire
un ouvrage avec le plus grand soin, et de le trouverfnsuite plein d’im-
perfections; car il y a plusieurs verres pleins de belle apparence qui,
étant travaillés, montrent bien des défauts que l’on n’apercevait pas
auparavant. Il y a quelques années que j'avais un superbe morceau de
cristal de roche, de trois onces ou pouces de diamètre , et d’un pouce
d’épaisseur. Il me prit fantaisie d'en tirer une lentille bi-convexe : après
bien de la peine j'avais parfaitement réussi dans mon travail ; lorsque
j'aperçus dans mon verre une infinité de stries qui se croisaien!, comme
une grille ;: dans tous les sens. Ayant adapté ma lentille à un objectif
ordinaire de Venise, je voyais tous les objets comme à travers une grille;
mon travail fut donc perdu. 1l en est de mème des verres ordinaires :
E —
/ ;
(224)
mia fatica fu fatta in vano; cosi segue ancora nelli ve-
tri comuni, bi quali quando sono piani non mostrano li
difetti, ma poi quando sono lavorati convessi li scuo-
prono tutti, e di questi io ne hù una gran quantità.
Circa poi il discorso da me fatto a V. S. della su-
perficie piana, che mi persuade di dare in luce, li
dird haverlo già scritto in una mia operette della
Dioptrica, cinque in sei anni sono, nella quale mostro
il modo di fare, tanto le forme piane, quanto le sfe-
riche senza l'aiuto di qual si voglia stromento ; dico
tanto le piane quanto le concave e convesse, e sassi
ancora che per fare una superfitie piana ngn si pué
perfettionare se non se ne fa tre nel medesimo tempo,
e tutte perfettissime, e questo basta d’accenare ad un
gran mathematico come è V. S. Le sferiche, tanto
concave, quanto convesse sono infinitamente più facil
a farsi, ma le piane sono assai più diflcili, ma perd
non impossibile a farsi, ma già che siamo entrati in
tant qu'ils sont plans l'on n'y trouve aucune imperfection ; dès qu'ils
sont travaillés, ils en sont remplis; et j'en possède un grand nombre
de ce genre.
Quant au disedhrs que je vous ai communiqué , Monsieur, relative-
ment à la surface plane, et que vous voulez que j'imprime, je vous dirai
qu'il se trouve déjà faire partie d’un petit ouvrage sur la dioptrique,
que j'ai écrit il y a cinq ou six ans el où je montre la maniere de faire
les verres à surface plane ou sphérique sans le secours d'aucun instru-
ment ; c'est-à-dire à surface plane, concave ou convexe. Et il est bou
de remarquer que, pour bien faire une surface plane, il faut en faire
trois en mème temps, toutes également parfaites : c’est ce que je me
contente d'indiquer en parlant à un grand mathématicien comme vous.
Les surfaces sphériques, qu’elles soient concaves ou convexes ; réussis-
sent bien plus facilement que les surfaces planes ; il n'est pourtant pas
1202)
questo discorso delle superfitie mi perdonerà se sard
un poco longo in significarli qualche accidente da me
osservato in materia delle superfitie, et è che qual si
voglia superfitie fatta con la maggior diligenza del
mondo & ad ogni modo sottoposta a guastarsi da se
medesima, o per causa d’un calore troppo grande,
overo per causa d’un troppo gran freddo. Li vetriancora
quando si lavorano con troppa velccità, riscaldandosi
perdono la figura, e sopra questi accidenti potrei
componere un grosso libro. Concluderd questa mi
langa lettera con darli notitia d’una machina che fa
in Vilna il Sig', Colonello Fridiani benissimo conos-
ciuto da V. S. che stava meco in Jazdowa quando lei
era in Polonia. Questo Signore per la sua peritia nell
Arüglieria, è stato fatto Colonello di questa nel Gran-
ducato in Lithuania ove ha buon stipendio et ivi fa
la sua dimora. Vicino a Vilna passa un fiume molto
rapido e profundo che si chiama Wila, il quale ha
impossible de bien faire aussi ces dernières. Mais puisque nous parlons
de surfaces, vous voudrez bien me pardonner, monsieur, si je vous
rends compte avec quelque détail de certaines particularités que j'ai
remarquées à ce sujet. Toute surface, quel que soit le soin avec lequel
elle a eté travaiilée, peut se détériorer naturellement, soit à cause d’une
grande chaleur , soit à cause d’un froid excessif. Les verres se déforment
lorsqu'en les travaillant ils se chauifent. Je pourrais faire un gros livre sur
ces choses-là. Je terminerai cette longue lettre en vous faisant connaître
une construction dont s'occupe maintenant à Wilna M. le colonel Fri-
diani que vous connaissez parfaitement : c'est le même qui æ trouvait avec
moi à Jardowa lorsque vous étiez en Pologne. Il est si habile dans lar-
tillerie qu'il a été fait colonel de cet arme dans le grand-duché de Li-
thuanie, où il a un bon traitement, et où ül s'est établi, I y a près de
Wilna une rivière d’un courant très rapide et profond : on l'appelle
[. 1
f
( 226 )
le sponde assai alte, et à Jargo quattrocento piedi. So-
pra questo quasi ogni anno facevano un punte di
legno sostentato da grossissimi palli fitti nel letto di
detto fiume, ima della Primavera e per l’escrescenza
dell acque, e per la violenza del giaccio, quasi ogn’
anno era portalo via, e la spesa era di circa cinquanta
milla florini annui. Frovandosi esso in Vilna l’anno
passato et havendo considerato la larghezza del fume
con altre circostanse, propose al Magistrato di quella
città di farne uno con la medesima spesa , e che sa-
rebbe durato cento e più anni; cioè quanto potesse
durare il legname. Fu accettato il partito, et havendo
fatto condurre materia l’ha fatto fare tutto in un arco,
senza niun sostegno nel mezzo, non regendosi che s0-
pra le doi estremità , la qual machina rende maravi-
glia a tutti quelli che la vedono, cosi per la sur smisu-
rata longhezza , come ancora per essere lastricato di
pietra e tutto coperto. E solo un gran danno che non
Wilia, Ses bords sont fort escarpés et elle a quatre cents pieds de lar-
geur. Presque tous les ans on faisait sur cette rivière, un pont en bois
sur pilotis; mais au printemps les crues et la débâcle l’emportaient
presque toujours, et les frais de cette construction s’élevaient chaque
fois à-peu-près à 50,000 florins. M. Fridiani, qui était à Wilna l’année
dernière , ayant examiné la largeur de la rivière et d’autres circonstances
proposa aux autorités locales de construire un pont qui ne coûterait pas
plus que les autres, et qui durerait cent ans et plus : c’est-à-dire aussi
long-temps que le bois même durerait. La proposition fut acceptée. II fit
préparer ses matériaux, et il a construit un port d’une seule arche, qui
n’a aucun soutien au milieu, et qui ne s'appuie que sur les deux extré-
mités, C’est un monument qui fait l'admiration de taut le monde, et
par ses énormes dimensions,et parce qu'il est pavé et tout couvert, C’est
bien dommage que ce pont ne se trouve pas dans une ville où il y ait
(227.
sia in qualche città, neila quale siano huomini ingegnosi
che possino ammirare l’ingegno dell inventore. Io non
credo che in tutto il mondo ve ne sia un simile d’un
sol arco, nè che mai vi sia stato. Lo lo consiglio di farne
il disegno, e di farlo stampare, accid tutte le nationi
possino godere di urra cosi bella e facilissimainventione,
Non costarà che venti cinque in trinta mille fiorini ,che
prima ogn” anno ne spendevano quaranta cinque in
cinquanta milla.
Il Sig”. Gran Thesoriere del regno Morstin fa 1ab-
bricare qui in Varsavia un bellissimo palazzn , et ap-
presso a questo ha un giardino con piante molto rare,
ma non ha acqua. Jo per mio passatempo ho fatto un
modeletto d’una machina hydraulitica per solevare l’ac-
qua a forza di vento, vinti cinque in trenta braccia , et
havendola veduta S. E. mi ha pregato, che gli la facci
fare :n grande come ho fatto. Questa machinasta chiusa
inuna torre etècoperta ,etsi volta sempre per un verso
?
des hommes capables d'apprécier le talent de l'inventeur. Je ne crois pas
qu'il en existe, ou qu'il en ait jamais existé au monde, un semblable.
Je ne cesse d'engager M. Fridiani à en faire le dessin et à le publier, afin
que l’on puisse profiter partout d’une invention si belle et si simple, 1
n’a coûté que vingt-cinq à trente mille florins, tandis qu'auparavant on
eu dépensait lous les ans quarante-einq à cinquante mille,
Le grand-trésorier du royaume, M. Morstin, fait bâtir maintenant ,
ici à Varsovie, un palais maguifique, avec un jardin orné de plantes
fort rares, mais qui manque d'eau. Je me suis amusé à faire un petit
modele d’une machine hydraulique pour élever l’eau à une hauteur de
vingt-cinq à trente brasses à l’aide du vent. Son Excellence ayant vu ce
wodèle m'a prié de le faire exécuter en grand. C'est une machine cou
verte, enfermée dans une tour, et qui tourne toujours du même côté.
quelle que soût la direction du vent : car la girouette est le rc gulateur de
5:
( 228 }
sia il vento o da settentrione, o da mezzo giorno, 0 da
levènte overo da ponente, perchè la girandola o sia
banderolla è quella che regola tutta la machina. L’ac-
qua non viene condotta alla sommità della torre con
le Pompe ma con secchielli, perchè quelle facilmente
si guastano, € questi durano molti anni, e se qualche
d’uno si guasta, li altri no mancano di fare l’ofhitio
loro. Con questa machina con pochissimo vento si
conduce di sopra nel recetacolo nel tempo di 24 hore
quattro in cinque milla botte d’acqua, e la superflua
cade nel pozzo. Non occorre che niuno vi assisti, per-
chè da se fa tutte l'operationi necessarie e farsi, la
qual cosa sopra tutte Paltre viene stimata. Prego la
bontà di V. S. di pérdonarmi, se la trattengo in cose
di cosi lieve materia, ma la sua humanità me ne da
l’ardire.
Finisco con pregarli de Dio il colmo d’ogni mag-
giore fehicità, e me confermo.
Di V.S. mio Sig. Dev” et Obbr"° Serv'°.
Tito Livio Burattini.
la machine. Il n'y a pas de pompes du tout : l’eau est élevée par des
seaux, car les pompes se dérangent facilement, et les seaux durent plu-
sieurs années; et s’il y en a parfois qui se dérangent, les autres ne lais-
sent pas de produire leur action. Il suffit d’un vent très modéré pour
élever, au sorumet de la tour, quatre où cinq mille tonneaux d'eau er
24 heures : l'eau qu'il y a de trop tombe dans le puits. Cette machine
ne demande l'assistance de personne, car elle fait elle-même toutes les
opérations nécessaires; ce qui la fait estimer beaucoup. Je vous prie,
monsieur, de m'excuser si je vous ai entretenu de ces petites choses ;
mais c'est votre bonte qui m'y a engagé.
Je finis en priant Dieu de vous accorder toutes les félicités possibles,
et je suis, Monsieur, Votre très dévoué et très obligé serviteur ,
Trre-Live BURATTINr.
{ 239; )
Nous ajouterons ici un fait qui, peut-être, pourrait
faire croire que les Chinois aussi ont connu ancienne-
ment quelque moyen pour voir de loin. Dans la grande
Encyclopédie Japonaise( Wa-kan-san-saë-tsou-ye, Niv.
1, f. 16 recto), on voit la figure de Jupiter accom-
pagné de deux petits corps, de la manière suivante.
‘
O O
Ce fait extrêmement curieux (et dont je ne crois pas
qu'il ait été fait mention nulle part) prouverait-il que
lesChinois aussi ont eu autrefois des espèces de télesco-
pes (1)? ou bien ce peuple aurait-il reçu cette notion des
Européens? Mais dans l’une et dans l’aatre hypothèse,
comment n’aurait-on connu à la Chine que deux des
quatre satellites de Jupiter? Peut-être est-il possible,
dans les régions tropicales d’apercevoir quelquefois à la
vue simple les satellites de Jupiter. Au reste on peut
voir par le texte chinois. qui accompagne la figure, et
que nous reproduisons ici avecune traduction littérale,
que rien n'indique l’origine européenne des deux
satellites représentés dans l'Encyclopédie Japonaise.
La partie astronomique de cette encyclopédie (où lon
voit le lapin qui pile du riz dans la lune, les neuf
routes que suit cet astre, et les neuf cieux au milieu
desquels est située la terre) ne donne aucun indice
d'influence européeñne. l’édition de PEncyclopédie
.
(x) Il est à remarquer, à ce sujet, qu'Abulféda, parlant du miroir
d'Alexandrie, dit qu'il était fait de métal chinois (4bulfedæ , descriptio
Acgypti, Goett. 1776, in-4, p. 7 du texe arabe. )
( 230 })
Japonaise , que nous citons, est postérieure à l’anrtée
1713 de l'ère chrétienne. Dans une édition de Ja
mème encyclopédie, qui paraît avoir été publiée à la
Chine en 1609, nous n’avons rien trouvé sur les sa-
tellites de Jupiter (voyez San thsar thou hoeï, Liv. T).
Toute la partie astronomique paraît avoir été entière-
ment refondue dans l'édition japonaise. Voici le pas-
sage original sur les satellites de Jupiter qui se trouve
dans l'Encyclopédie Japonaise (r).
LR 2
HI. comme Æj ètre
ff dépendans NEA
H seulement JL petits
Æ astres
C'est-à-dire
« Il y a près (de Jupiter) deux petits astres qui sont
« comme dépendans de la planète. »
(r) Ce n’est qu’au moment de mettre sous presse cette feuille que
j'ai appris qu'un habile graveur, M. Marcellin Legrand, avait entrepris
la gravure sur poinçons d’acier et la fonte en types mobiles d’un corps
complet de caractère chinois. Les caractères chinois qui se trouvent dans
cette page font partie de ceux que M. Legrand a déjà gravés. Si j’eusse
appris plus tôt l'existence de ce caractèrefen aurais profité pour repro-
duire dans cet ouvrage un plus grand nombre de passages originaux ,
extraits des auteurs chinois, que j'avais dû omettre arrêté par les
lenteurs et les difficultés sansgombre que je rencontrais ailleurs.
-
NOTE IX.
( PAGES 114 ET 155. )
Le manuscrit n° 102 du Supplément latin de la biblio-
thèque du roi(intitulé Peiresc, diverses langues, M 162)
appartenait à la grande collection de Peiresc, dont une
partie se conserve encore à Carpentras, et dont on
supposait que le reste avait été perdu. Nous avons re-
trouvé presque tous les volumes de cette collection ,
qui sont à présent dispersés dans différentes biblio-
thèques. Lorsque nous parlerons de Peiresc, de lin-
fluence qu’il a exercée au commencement du dix-sep-
tième siècle, et de ses efforts généreux pour arracher
Galilée à l’inquisition, nous donnerons une notice sur
ses manuscrits. Maintenant nous avons pensé qu'il
était utile de faire connaître le catalogue suivant, ex-
trait du volume déjà cité, à cause des faits curieux
s. : : : Lé
qu’il renferme relativement aux traductions de livfes
scientifiques. Ces diverses traductions nous montrent
la route qu'ont suivie les sciences et les lettres pour
arriver jusqu’à nous. Outre les ouvrages d’Aristote
traduits en chaldéen, en syriaque, en arabe, en persan
et en hébreu; outre les traductions d'Hippocrate, de
Ptolémée, etc. , il faut remarquer Homère en persan,
et les Dogmata philosophorum indorum traduits dans
la même langue. On verra par ce catalogue com-
bien d'ouvrages importans auraient été publiés par
( 295%
l'imprimerie orientale des Médicis à Rome, si des
circonstances malheureuses n’avaient pas arrêté les
travaux de ce bel établissement.
Bibliothecæ arabicæ manuscripla Scaligeri
Mediceæ Rome.
Illustrissini J osephi Scaligeri, libri arabici MSS.
Novum testamentum integrum scriptum in deserto
Thebaïdis, egregio charactere, in magno 4° oblongo:
Lectiones in Genesim , charactere africano, in-folio.
More hannaboc in Rabum, charactere judaico, folio
- parvo. |
Nomocanon seu praxis legalis, charactere africano,
in magno 4° oblongo.
Quattuor Evangelia descripta in monte Libano lucu-
lentissimo charactere, quæ sunt paraphrastæ alius
ab illo superiore testamenti integri, in-4° oblongo.
Rursus quattuor Evangelia alius paraphrastæ a supe-
rioribus , vetustissimus liber in-4°.
Dictionarium arabicum crassum, Juculentissimo cha-
ractere cum explicatione turcica, in-8° magno aut
folio parvo.
Astrologia Abdallæ de sphæra , cum egregio et locu-
pletissimo commentario, charactere africano, in-4°.
Targum pentateuchi anonymon , charactere judaico ,
in parvo 4°.
Lectionarium græco-arabicum, in-4.
Evangelia secundum Lucam et Johannem cum apici-
bus vocalibus, est alius paraphrastæ ab omnibus
superioribus.
39)
Chronicum samaritanum ab excessu Mosis seu ducatu
Josuæ ad tempora Antoninorum.
Apocalipsis manu Ignatii Patriarchæ descripta : est
alius paraphrastæ ab eo qui totum novum testa-
mentum convertit.
Alcoranus elegantissimo charactere, in-8° parvo.
Alcoranus turcico charactere.
Psalterium.
Liturgiæ tres Ignatii, Cyrilli, Gregorii, cum interpræ-
tatione, Ægyptiaca e regione.
Libellus Samaritanus in quo breve chrouicon ab Adam
ad annum Christi 1584. Item typus anni samari-
tani communiter anno 1584.
Commentarius in quattuor Evangelia ex Chrisostomo
excerptus. -
Duæ epistoke longissimæ , instar duorum librorum,
Igratiü Patriarchæ ad Jos. Scaligerum.
Multi hbri ac taeniæ precum Mahomedicarum.
Kalendarium Elkupti.
Thesaurus arabicus complectens plusquam xxiij millia
vocum a Josepho Scaligero digestus.
Libri hebræi et alii scripti.
Lexicon persico turcicum, luculentissimum volumen,
in-/4°.
Calendarium syriacum Ecclesiæ Antiochenæ.
Apocalypsis syriaca.
Psalterium æthiopicum cum precibus, id est breviarum
Abyssinum.
Ingens volumen commentariorum D. R. Salomomis in
Biblia, ubi mülta sunt quæ aliter vulgo edita.
(234)
Baal Aruch integrum, ante ducentos annos scripium ;
nam vulgo editum est castratum, una cum egregio
dictionario hebraico anonimo , ingens et crassum
volumen.
Duo ingentia volumina talmud Hierusalem ante CC
annos scripta.
Rabi Mose de Caio di Riete, discorsi di philosophia ;
liber italicus totus charactere judaico.
Meditationes excellentissimi Kalonymi filii Kalonymi,
scribebat anno judaico 5083 , Christi 1323.
Epistola longissima magistri Bonet Benioris Avenio-
nensis ad amicum, de abjurando judaismo apolo-
getica pro cristianissimo adversus Judæos : scribe-
bat Papa Avenione sedente.
Rabbi Levi egregii philosophi de metheoris, in-4° ob-
longo.
Liber medicinæ anonymi, in-4°.
Commentarius brevis Aben Ezræ in Danielem, qui
nihil habet commune cum eo qui editus est.
Excerpta ex rituali de funerationibus et exequiis.
Liber Aminæ, aliter liber ponderis.
Secreta nominum mekaba R. Ismaëlis.
Visio rotarum. Îta vocatur sphæra Johannis de
Sacrobosco conversa in hebraismum a R. Salo-
mone f, R. Abraham Abigedu Bononiense , ante
annos CC.
Aben Ezra initium sapientiæ de astrologia judiciaria.
Ejusdem liber numinum. Liber astrologicus.
Ejusdem de mundo, alius liber astrologicus.
Albumazar de electionibus.
Centiloquium Ptolemæi cum commentario Abugafar
q 5
(| 23%)
arabis, non autem, Haly, ut est excussum, quæ
ediuo in multis differt ab hebraico.…
Categoriæ Aristotelis cum egregio commentario Rabbi
Levi ben Geson.
Lectionarium rutenicum sine moscoviticum.
Libri imprimendi in linqua arabica,
Rome in typograplua Serenissimt Magni Ducis
Hetruriæ cui præest Jo. Baptista Raymundus.
Grammatica arabica et latina collecta ex variis aucto-
ribus.
Liber secretorum arts grammaticæ Abilfati ottimani
fil Eranni.
Liber grammaticalis absque nomine auctoris.
Liber de qualitate nominis declinati omnibus modis.
Expositiosuperlibrum Caphiæ, qui est de grammatica.
Liber de verbo cum expositione sua, quæ est Saadini.
Liber de grammatica Mahmed filii Sadec peregrini.
Liber Senis filii Alphasani filii Ahmed , filii Basiad ,
de grammatica.
Liber Abu Mahmed Alcasan filii Abi, filii Mahmed,
fili"Alharini Bafrani de grammatica.
Liber vocatus salimentum arabicum.
Liber Abu Mensur de doctrina linguæ arabicæ.
Liber paradigmatum verborum arabicorum , cum ex-
positione turcica.
Lexicon arabicum per classes verborum ordinatum
cum expositione persica.
Lexicon arabicum secundum materias ordinatum, cum
expositione latina.
( 236 )
Lexicon arabicum magnum vocatum ramus (1).
Historiæ.
Liber historiarum. Liber de imperio translato ad di-
versas nationes. Ke,
Logice.
Liber logicæ cum versione syriaca.
Liber logicæ dictus Sciamsia.
35
ie
Li
Setentie naturalis.
Liber de Japidibus pretiosis, doctissimi Almed fihi
Joseph Tiphasii Ausir.
Liber de fodinis metallorum.
Liber deutilitate membrorum animalium.
Liber de proprietatibus hominis.
Liber de vita animalium.
Geometriæ.
Euclidis clementorum geometricorum libri 15, ex tra-
ditione Thebit.
Ejusdem liber datorum.
Libri tres Theodosii, de sphæra.
Liber Menelai, de figuris sphæricis.
Apollonii Pergei libri 8, de Conis.
Ejusdem liber de sectionibus.
Archimedis hbri duo de sphæra et cylindro, tradi-
uone Thebit.
(a) Il est évident qu'il faut lire ici Xamous, mais nous n'avons rien
voulu changer au manuscrit,
+
( 237 )
Ejusdem de fractione cireuh.
£jusdem liber lemmatum, ex Thebit traditione.
Commentaria Eutochii Ascalonitatæ in libros Archi-
medis de sphæra et cylindro.
Arithmeticæ.
Tractatus de scientia numercrum ét arte numerandi
Tudæorum, auctore Ismele.
Liber algebræ, absque nomine auctoris.
Liber Alvali filii Alkateni, de computo.
Liber de scientia computationis absque nomine auc-
toris.
Sibee Mahamed fil Aladi, filii Fahari, filii Halad-
dini Abhagiand de scientia æquationis.
Astronomiæ.
Commentaria sapientissimi Muhamed filii Masud,
super librum Tapphatis Sciahiah de astronomia.
Liber matematicalis Thoaricis de pertinentibus ad
cœlum.
Liber Autolici de sphæra quæ movetur, ex traditione
Thebit.
Theodosii de habitationibus, liber.
Ejusdem de diebus et noctibus, liber.
Phænomena Euclidis.
Aristarchi fiber de duobus corporibus luminosis.
Liber de ascentione ex traditione Costa filii Lucæ
Baalbachij.
Liber Sciamsiddin el grammarii de corporibus et mo-
tibus cœlestibus.
(“258 :)
Almagestum CI. Ptolemei ex traditione Mohamedis
fil Mohamedis, fil Alhasani Tuscini.
Liber de astrolabio absque nomine.
Liber insignis Cothid-dini sciarazeni , de astronomia.
Liber ejusdem de cognitione orbium et secretorum
stellarum. :
Liber Mascendini Tusini, qui vocatur decem capitula
de scientia astrolabi.
Perspectivæ.
Perspectiva Euclidis.
Perspectiva Alpharabii.
Metaphysicæ.
Liber Domini Sciariphi de divinitate et essentia Dei
et simplicitate , et trinitate ejus , et de nominibus
ejus.
Medicine.
Commentaria Senis Aladdini fili Atharam Corasmi,
medici peritissim', super libros canonum medicinæ
Avicennæ.
Commentaria per interrogationes et responsiones super
librum canonum medicinæ Avicennæ, Floriani filii
Isaac.
Liber vocatus suflicientia de conferentiis medicamer-
torum simplicium et nocumentis eorumdem secon-
dum membra, excellentis Abdalla filu Ahmed fil
Mohamed Malachini, qui vocatur Ahenelgiatal.
Tractatus Naphus fil Anfed sapientissimi mediei de
divisione membrorum ex Hippocrate.
( 239 )
Liber maahava Carmanii, de caussis et signis me-
dicinæ.
Liber medicinæ sapientis Ali.
Liber Said fili Abelaziz, in commentaria Galeni.
Commentaria in librum Ebri Naphis vocata solutiones
difficultatum ex hbro canonum, ex libro Camel,et
ex Alhaino, et ex compositione Nangibbidini Sa-
marcadini.
Liber de præparandis medicinis ab aromatariis, ex
libro canonum Avicennæ, ex libro horror Mosclach,
ex libro Minhaot Docan , ex libro Rasii, et ex libro
Acanii Samarkadini.
Omnia Hippocratis opera.
Theologiæ.
Le,
Acta apostolorum.
Epistolæ Pauli omnes.
Commentarius in epistolas Paul, Joannis Chrisostomi.
Apocalypsis Joannis.
Pentateuchon Moysis.
Sermones Joannis Chrisostomi in festivitates sancto-
rum per totum anrum.
Argumenta in 14 epistolas Pauli, incerto aucthore:
Disputatio habita inter christianum quandam et ma-
humedianum.
Libri imprimendi in linqua persica.
Grammatica persica latina, collecta ex pluribus autho-
ribus.
Grammatica persica cum expositione arabica.
Grammatica persica, cum expositione turcCica.
( 240 )
Danistan liber , qui est lexicon parvum vocum persi-
carum, cum expositione turcica.
Lexicon magnum persieum , cum expositione turcica
et latina.
Lexicon persicum juxta ordinem Camus arabici lexici.
Quattuor evangelia cum expositione latina.
Arithmetica incerto aucthore.
Almagestum Claudii Ptolemei.
Liber de cireuli quadrante.
Libri imprimendi in linqua syriaca.
Basilii opera theologica.
Dyonisii opera.
Mariæ Jacobi Seagi opera thcologica.
Petrus Antiochenus et Cyrillus Alexandrinus contra
Arium et Ennomium.
Theologiæ naturalis tractatus omnes juxta ordinem
Aristotelis.
Logicæ tractatus omnes eodem modo.
Metaphysicæ tractatus omnes eodem modo.
Quattuor concilia magna.
Cerimoniale Basili.
Anton Ritus de musica.
Norat Cocii f. sex dies Basilir.
Ignatius de titulis epistolarum ad diversas personas.
Chronica patriarcharum Eusebii Cæsariensis.
Baptisterium Dionisu.
Abul Pharag Ben Ebri poeta.
Joannes Ben Madoni poeta.
Abul Pharag liber de astronomia.
(oi)
Libri imprimendi in linqua œgiptiaca.
Rudimenta grammaticæ cum expositione arabica et
latina.
Lexicon vocum ecclesiasticarum cum expositione ara-
bica et latina.
Aliud lexicon vocum ecclesiasticarum cum exposi-
tone arabica, græca et latina.
Quattuor evangelistæ.
Acta apostolorum.
Epistolæ Pauli et aliorum.
Apocalipsis.
Vetus testamentum.
Pentateuchum Moysis ægiptiacè cum interprætatione
arabica.
Quattuor evangelia ægiptiaca cum interprætatione
arabica.
Epistolæ Pauli et aliorum cum interprætatione arabica.
Acta apostolorum cum eadem interprætatione ara-
bica.
Apocalipsis ægiptiaca cum eadem interprætalione
arabica.
Biblia sacra tota hisce linguis :
Latina Vulgata.
Græca cum interprætatione latina, propria e regione.
Hebraica cum interprætatione latina.
Chaldaica targum cum interprætatione latina e re
gione.
Syriaca cum interprætatione latina ne regione.
Arabica cum interprætatione Latina.
1. 16
(242)
Persica cum inteprætatione latina.
Ægiptiaca et latina.
Ætiopica et latina.
Armena et latina.
Cum apparatu grammaticarum et lexicorum omnium
prædictarum linguarum.
In linqua syriaca.
Grammatica magna cum interprætatione latina.
Grammatica metro conscripta cum interprætatione
latina.
Grammatica alia parva cum expositione latina.
Grammatica alia cum expositione arabica et latina.
Lexicon aliud per materiis dispositum cum exposi-
tione arabica et latina.
Dioscorides cum commentariis et sine commentariis.
Fabularum liber.
Lexicon parvum persicum cum turcica interpræta-
tione.
Lexicum parvum arabicum cum turcica interpræta-
tione.
Poeta persicus quidam.
Alia quinque lexica hujusmodi.
Chronicum magnum persieum ab exordio mundi.
Alia multa opuscula et præsertim poetæ in variis lin-
guis extant qui brevitatis causa omittuntur.
Libri syro-chaldæi manu-scripti.
Vetus estamentum in syro-chaldæo.
Novum testamentum.
( 243 )
Basilii opera theologica.
Gregorii Avanti opera theologica.
Gregorii ben Elebri poeta.
Aristotelis opera omnia.
Ceremouiale Basihi.
Dionisii opera theologica.
D. Ephrem opera omnia.
Mariæ Jacobi opera omnia.
Canones omnium synodorum.
Autor ritus de musica.
Tagias Tagiato Sekis Kaslain continet logica et me-
taphysica.
Novas Cocii sex dies Basilu.
Ignatius de titulis personarum secundum diversas per-
sonas.
Chronica patriarcharum Eusebii Cæsarien:is.
Orationes diurnales per totum annum.
Orationes dierum festivitarum. *
Missale.
Baptisterium Dyonisii.
Abulpharag ben Ebri poeta.
Libri arabici ranu-scriptr.
Costa ben Luca pocta.
Cadi Abul Asan Anefri de titulis personarum secun-
dum qualitates et gradus personarum.
Chronica pharofodio … Andronici.
Chronica Michaelis patriarchæ Antiochiæ.
Canones omnium synodorum.
Josephus , qui ante conversionem dicebatur Cayphas,
de vita Christi.
16.
( 244 )
Quattuor Evangelia : Apocalypsis: Vetus Testamen-
tum.
Artaxerxis regis de admirabilibus civitatum.
Aristotelis opera omnia.
Achaïd hoc est matematica cum expositione Averois.
Avicennæ metaphisica.
Prochiridion Rasi super metaphysica Saleti Altendi.
Andronogi metaphysica.
Abdal Abulphyarag metaphysica.
Porphyrii scensia hoc est logica.
Alpbharabii commentaria super logicam Porphyrii.
Hosen Sphaahanii de animalibus.
Phoron Chaldæus de animalibus.
Aile: de gemmis.
Adselam Egili de gemmis.
Geber de alchymia.
Rases de alchymia.
Avicennæ opera medicinalia.
Hippocratis .…... de metahaba.
Hippocratis aphorismi.
Hippocratis prognostica.
Maser Gemia Bosri medicina.
Saleh Benabel Indi medicina.
Abusal meseni magistri Avicennæ medicira.
Crammi medicina.
Magiddini Semarcandi medicina.
Aben Beclam expositio in medicinarum Crammi.
Ali ben Abas medicina.
Expositio multorum doctorum super medicinam
ben Abbas roman.
Patriarchæ Alexandrini medicina.
( 245 )
&
Abul Parcal Angli medicina.
Saed ben Thoma medicina.
Casbinus de simplicibus.
Razes de ære mutando.
Costa ben Luca de Venenis.
Euclides geometricorum elementorum lhibri sex.
Ejusdem geometricorum elementorum lbri quatuor-
decim ex R. Casiridin { Sie) Tusi.
Apolloni Pergæi de Conis liber.
Theodosius de sphæris.
Archimedis opera geometrica in compendium redacta
per Albettam.
Allen Naptah Anglieus de aritmetica. ;
Autolicus de sphæra qui movctur.
Élphed Caca correctiones in almagestum Ptolemæi.
Elsceraze super almagestum Ptolemæi.
Alborpharag super astronomiam Alchindi.
Agatadinan, id est Hermetis astronomia.
Mosis Bacchi pha astronomica.
Astronomia elaborata a compluribus doctoribus.
Ptolemæi liber Astrologicus dictus fractus.
Nicolai Babilonici astrologia.
Hermets astrologia.
Ennomicus de præstigiis.
Theomis Alexandrini astronomicæ tabulæ.
Mohame Hoarzinai correctiones in tabulas.
Nembrot tabulæ arabicæ.
Ptolomæus de astrolobio.
Theonisfnstrumentum astronomicum.
Dorothæus de quadratis Almicantaræ,
Habesc Shases de quadrante.
( 246 )
Alphraganus de finibus rectis.
Semre Sehoth de finibus.
Andronici perspectiva.
Cheot Alheus musica.
Libri persicé manu-scripié.
Gulstan poetæ Sagdedin.
Liber de superficiebus.
Theon de astrolabio.
Aristarchi astrologia.
Razes de modo comedendi fructus.
Razes de aqua hordeacea.
T'elecsimos de sphæra.
CL. Ptolemæi almagestum.
Alchindi astronomica.
Theodosuü astronomica.
Mehedin astrologia.
Mandata regis Mamon.
Giamasab astrologia.
Zoroastis astrologia.
Enoch de domibus stellarum.
Proch tabulæ.
Theoria Alexandrini.
Ulog beg Catai tabulæ.
Timocares de astrolabio.
Cleopatria de astrolabio.
EI Scerasi de quadrante.
Jo. filius Masima de finibus.
Avicennæ perspectia.
Abbas Abulpharag perspectiva.
(247)
Congliscam regis Cataij geographia.
Costa ben Luca.
Homerus.
Cleopatra de astrolabio.
Dogmata philosophorum Indorum.
Quattuor evangelia.
Hosiani poeta.
NOTE X.
( PAGE 116 )
On à assuré récemment (Journal Asiatique, Mai
1836, p. 436) que les Arabes avaient connu la
géométrie de position ; mais c'est une erreur. L'ouvrage
de Hassan ben Haithem (ou pour mieux dire de Has-
san ben Hassan ben Haithem, car Vauteur de l’article
inséré dans le Journal Asiatique n'a pas bien lu le nom
de cet écrivain arabe, quoique ce nom se trouvât même
imprimé dans le Catalogus codicum manuscript. biblio-
thecæ regiæ , Paris., 1739-44, 4 vol. in fol., tom.I,
p+ 218-219, MSS. arab., n° 1104) sur les connues
géométriques, cité comme exemple des recherches
faites par les Arabes dans cette branche des mathéma-
tiques, ne contient pas un seul mot sur ce que les
géomètres appellent géométrie de position. En effet,
déterminer d’après de certaines conditions , comme le
fait Hassan ben Hassan, les propriétés et la position
d’une courbe, c’est chercher un lieu géométrique, et
non pas faire de la géométrie de position, telle que
d’Alembert et Carnot l’ont entendue. D'ailleurs, le
mot waza (position) n'appartient pas exclusivement
à Hassan ben Hassan ; il se trouve employé par d’au-
tres géomètres arabes, et n’a aucune signification spé-
ciale. Les Grecs aussi s'étaient servis du mot posi-
ton en géométrie : l'expression donne en grandeur et
( 249 )
en posilion, ou simplement donne de position, se
trouve très fréquemment dans Pappus (Papp
Alexandrini math, collect. Pis., 1588, in-fol., bib. IV,
th. 8, prop. 8; lib. IV, pr. 8, prop. 31; lib. IV, th. 25,
prop. 42; lib. IV, th. 26, prop. 43; lib. VIT, prop.5,
prop. 85; lib. VII, p. 7, prop. 105, etc., etc.) à qui
cependant personne n’a jamais songé à attribuer la
découverte de la géométrie de position. Ces mots :
donné de position, donne de grandeur et de position,
ne servaient chez les Grecs qu’à éviter les circonlo-
cutions et à abréger les démonstrations. Les Arabes
s’en sont servis exactement dans le même but.
ù
{ 250.)
NOTE QC,
lAGE 118 })
Les Arabes ont traduit les ouvrages d’Aristote de
Théophraste et de Dioscoride : peut-être aussi ont-
ils connu le grand ouvrage de Pline (4bul-Pharayir,
hist. compend. dynast., p. 61. — De Sacy, chrestom.
arabe, tom. IT, p. 483.— 4bd-allatif, relation de l'E-
grpte, p.496.—Middeldorphii commentatio,etc., p.68).
Mais outre ce qu’ils avaient appris des Grecs sur lhis-
toire naturelle, ils nous ont laissé un grand nombre
d'observations curieuses qui leur sont propres. Ainsi
Abd-allatif, par exemple, parle de la tumeur qui se
trouve sous le ventre du crocodile, et dont Sonnini a
depuis constaté l'existence ( 4bd-allatif, relation de
l'Egypte, p. 141), et il assure que Paction du silure
électrique du Nil se transmet même par le contact
médiat (A4bd-allatif, relation de l'Egypte, p. 167).
L'Adjaïb almakhloukat de Kazwini (dont Chézy à
donné un extrait très détaillé dans le troisième vo-
lume de la Chrestomatie arabe de M. de Sacy) con-
tient plusieurs faits intéressans : nous en citerons
quelques-uns. D'abord tous les êtres y sont disposés
dans un ordre progressif depuis les minéraux jus-
qu'aux anges, C’est ce que l’auteur appelle chaîne des
êtres (De Sacy, chrestom. arabe, tom. NT, p. 390).
291 )
Selon Kazwini, la chaleur intérieure de la terre est
le principe qui produit le développement des plantes
et des animaux (ibid. , p. 389), et cette chaleur, com-
bince avec le soufre et le mercure, forme les métaux
(Gibid., p. 391). On trouve dans cet ouvrage un apo-
logue sur le passage successif de l'Océan sur la terre
(ibid. , P- 419.— Annales des sciences naturelles, tom.
XXV, p. 380), lesexe des palmiers (de Sacy, chrestom.
arabe, tom. TE, p. 396) et leur fécondation artificielle
(ibid. p. 481); la conservation des fleurs pendant
l'hiver (ibid. , p. 484) et les diverses couleurs qu’on
peut faire prendre aux pétales en arrosant les plantes
avec des solutions de différentes substances (ibid. ,
p- 484); la remarque (un peu trop généralisée cepen-
dant) que les plantes herbacées et les animaux sans os
meurent en hiver (ibid., p. 397), et ce fait curieux que
les oiseaux qui boivent sans s’interrompre, comme les
pigeons, donnent Ja becquée aux petits, tandis que les
poules et les oiseaux qui boivent à plusieurs reprises ,
ne la donnent pas (ibid., p. 412). On trouve aussi
chez les Arabes l'usage de l’aconit en médecine contre
les maladies cutanées (ibid. , p. 398), et même quel-
ques idées sur le lithotritie (Civiale, lettre a M. de Kern,
Paris, 1827, in-8, p. 13). Ils connaissaient l’attrac-
tion qu’exerce Pambre (appelé: en persan La, de
e paille, et de L,, voler, d’où l’on a fait carabé) sur
les petits corps (de Sacy, chrestom. arabe, tom. WW,
p- 468), et la chute des aérolithes (ibid., p. 437-441,
— Abulfedæ, annales muslem. tom. HT, p. 55 et 95.—
Abul-Pharajii, hist. compend. dynast., p. 95.—Elma-
cin, hist. saracen., p. 151.— Annales des sciences na-
(. 25100 )
turelles, tom. XXV, p. 379, et tom. XXVI, p. 365-
367). On peut voir dans le Synopsis sapientiæ Arabum,
publié par Abraham Ecchellensis en 1641, un exposé
succinct des connaissances scientifiques et philosophi-
ques des Arabes.
NOTE XII.
( 3 DL \
( PAGE 122 )
Afin qu’on puisse comparer le texte de Mohammed
ben Musa que M. Rosen a publié , avec les anciennes
traductions latines qui se trouvent parmi les manus-
crits de la bibliothèque du roi ( Supplément latin ,
no 40, f. 110. — MSS. latins, n° 7357 À. — Résidu
Saint-Germain, recueil de physique, astronomie et geo-
métrie, paq. 11, n 7,in-fol.), nous publions ici la
partie de Pouvrage du géomètre arabe qui est con-
tenue dans ces manuscrits.
Liber Maumeti filii Moysi alchozrismi de
algebra et almuchabala incipit.
Hic post laudem dei et ipsius exaltationem inquit :
postquam illud quod ad computationem est necessa-
“ium consideravi, repperi totum illud numerum fore.
Omnemque numerum ab uno compositum esse in-
veni. Unus itaque inter omnes consistit numerum. Et
inveni omne quod ex numeris verbis exprimitur esse
quod unus usque ad decem pertransit. Decem quoque
ab uno progreditur, qui postea duplicatus et triplicatus
et cetera quemadmodum fit de uno, fiunt ex co vi-
genti et trigenta et ceteri usque quo compleatur cen-
tum. Deinde duplicatur centum et triplicatur quem-
( 254 )
admodum ex decem, et fiunt ex eo ducenta et trecenta,
et sic usque ad mille. Post hoc similiter reiteratur
mille apud unumquemque articulum usque ad id
quod comprehendi potest de numeris ultime : deinde
repperi numeros qui sunt necessarii in computatione
algebre etalmuchabale secundum tres modos fore. Qui
sunt radicum et census, et numeri simplicis non
relati ad radicem nec ad censum. Radix vero que est
unus corurm, est quicquid in se multiplicatur ab uno,
etquod est super ipsum ex numeris, et quod est preter
eum ex fractionibus. Census autem est quicquid ag-
gregatur ex radice in se multiplicata. Sie numerus
simplex est quicquid ex numeris verbis exprimitur
absque proportione ejus ad radicem et ad censum,
Ex his igitur tribus modis, sunt qui se ad invicem
equantur. Quod est sicut si dicas : census equatur
radicibus, et census equatur numero, et radices
equantur numero. Census autem qui radicibus equa-
tur est ac si dicas : census equatur quinque radicibus.
Radix ergo census est quinque. Et census est viginti
quinque. [pse namque quinque suis radicibus equalis
existit, Et sicut si dicas : tercia census equatur quat-
tuor radicibus. Totus igitur census est duodecim ra-
dices qui est centum quadraginta quattuor. Et sicut
si dicas, quinque census equantur decem radicibus.
Unus igitur census duabus equatur radicibus. Ergo
radix census est duo, et census est quattuor : similiter
quoque quod fuerit majus censu aut minus ad unum
reducetur censum. Et eodem modo fit ex eo quod
ipsi equatur ex radicibus, Census autem qui numero
equatur, est sicut Cum dicitur : census equatur novem.
Ia: }
lpse igitur est census et radix ejus est tres. Et sicut si
dicas : quinque census equanturoctoginta. Unusigitur
census est quirta octoginta qui est sedecim. Et sicut
si dicas : medietas census equatur decem octo. Ergo
census equatur triginta sex et similiter omnis census
augmentatus et diminutus ad unum reducitur cen-
sum. Eteodem modo fit de eo, quod ei e-uatur ex
numeris. Radices vero que numeris equantur sunt
sicut si dicas, radix equatur tribus , radix est tres. Et
census qui est ex ea est novem. Et sicut si dicas quat-
tuvr radices equantur viginti. Una igitur radix equa-
tur quinque : et similiter si dicas, medietas radicis
equatur decem. Ergo radix est viginti. Et census qui
est ex ea est quadraginta, hos pretcrea tres modos qui
sunt radices et census et numerus inveni componi. Et
sicut ex eis tria genera composita. Que sunt hec : cen-
sus namque et radices equantur numero, et census et
numerus equantur radicibus, et radices et numerus
equantur censui. Gensus autem et radices que numero
equantur sunt sicut si dicas : census et decem radices
equantur triginta novem dragmis, cujus hec est signi-
ficatio, ex quo censu cui additur equale decem radi-
cum ejus aggregatur totum quod est trigenta novem.
Cujus regula est ut medies radices que in hac ques-
tione sunt quinque. Multiplica igitur eas in se et fiunt
ex els viginti quinque : quos triginta novem adde, et
erunt sexaginta quattuor. Cujus radicem accipias que
est octo. Deinde minue ex ea medietatem radicum
que est quinque. Remanet igitur tres qui est radix
census. Et census est novem. Et si duo census aut
tres aut plures aut pauciores nominentur , similiter
( 2502
reduce eos ad censum unum. Et quod ex radicibus aut
numeris et cum eis reduc ad similitudinem ejus ad
quod reduxisti censum. Quod est ut dicas: duo census
et decem radices equantur quadraginta octo. Cujus
est significatio quod cum quibuslibet duobus censibus
additur equale decem radicum unius eorum , aggre-
gantur inter quadraginta octo. Oportet itaque ut duo
census ad unum reducantur censum. Novimus autem
jam quod unus census duorum censuum est medietas.
Reduc itaque quicquid est in questione ad medieta-
tem sui. Et est sicut si dicatur census et quinque ra-
dices equales sunt viginti quattuor. Cujus est intentio
quod cum cuilibet censui quinque ipsius radices ad-
duntur, aggregantur in viginti quattuor. Media igitur
rdices et sunt duo et semis. Multiplica ergo eas in se
et fient sex et quarta, adde his viginti quattuor et
erunt trigenta et quarta. Cujus accipias radicem que
est quinque et semis, ex qua minue radicum medie-
tatem que est duo et semis. Remanet ergo tres qui est
radix census etcensus est novem. Et si dicatur medietas
census ct quinque radices equantur viginti octo. Cujus
quidem intentio est quod cum cujuslibet census medie-
tati additur equale quinque radicibus ipsius , perve-
uiunt inde viginti octo. Tu autem vis ut rem tuam
reintegres donec ex ea unus perveniat census. Quod
est ut ipsam duplices. Duplica ergo ipsam et duplica
quod est cum ea ex eo quod equatur ei. Erit itaque ,
quod census et decem radices equantur quinquaginta
sex. Media ergo radices , et erunt quinque, et multi-
plica eas in se et pervenient viginti quinque. Adde
autem eas quinquaginta sex et fient octoginta unum.
a
Dore)
Cujus accipias radicem que est novem, el minuas ex
ea mediatem radicum que est quinque, et remanent
quattuor qui est radix census quem voluisti. Et cen-
sus est sedecim cujus medietas est octo. Et similiter
facias de unoquoque censuum, et de eo quod equat ip-
sum ex radicibus et numeris. Census vero ct nume-
rus qui radicibus equantur, sunt sicut si dicas : census
et viginti una dragma equantur decem radicibus, cujus
significatio est quod cum cuilhibet censui addideris vi-
ginti unum, erit quod aggregabitur equale decemradi-
cibus illius census. Cujus regula est ut medies radices ;
et erunt quinque. Quas in se multiplica et perveniet
viginti quinque: ex eo itaque minue viginti unum
quem cum censu nominasli et remanebit quattuor,
cujus accipies radicem, que est duo, quem ex radi-
cum medietate, que est quinque, minue. Remanebit
ergo tres qui est radix census quem voluisti, et census
est novem. Quod si volueris addes ipsam medietati
radicum et erit septem qui est radix census, et census
estquadragenta novem. Cum ergo questio evenerit tibi
deducens te ad hoc capitulum, ipsius veritatem cum
additione experire. Quod si non fuerit, tune procul
dubio erit cum diminutione. Et hoc quidem unum
trium capitulorum in quibus radicum mediatio est
necessaria progreditur cum additione et dimiñutione.
Scias autem quod cum medias radices in hoc Capi-
tulo et multiplicas eas in se, et fit illud quod aggrega-
tur minus dragmis que sunt cum censu, tunc questio
est impossibilis. Quod si fucriteisdem dragmis equalis,
tunc radix census est equalis medietati radicum abs-
que augmento et diminutione. Et omue quod tibi
I. ur
{ 258
eveniet ex duobus censibus aut pluribus aut paucio-
ribus uno censu, reduc ipsum ad censum unum sicut est
illud quod in primo ostendimus capitulo. Radices vero
et numerus que censui equuantur, sunt sicut si dicas :
tres radices et quattuor ex numeris eqantur censui uni.
Cujus regula est ut medies radices que erant unus et
semis. Multiplica ergo ipsas in se, et perventent ex eis
duo et quarta. Ipsum itaque quattuor dragmis adde et
fiunt sex et quarta. Cujus radicem que est duo et se-
mis assume : quam medietati radicum que est unus et
semis adde; et erit quattuor qui est radix census. Et
census est sedecim. Omne autem quod fuerit majus
ceusu uno aut minus reduce ad censum unum. Hi ergo
sunt sex modi, quos in hujus nostri libri principio
nominavimus. Et nos quidem jam explanavimus eos
et diximus quod eorum tres modi sunt in quibus ra-
dices non mediantur ; quorum regulas et necessitates
in precedentibus ostendimus. Ilud vero quod ex me-
diatione radicum in tribus als capitulis est necessa-
rium cum capitulis verificatis posuimus. Deinceps vero
unicuique capitulo formam faciemus, per quam perve-
nitur ad causam mediationis. Causa autem est ut hic
census et decem radices equantur triginta novem
dragmis. Fit ergo illi superficies quadrata ignotorum
laterunt que est census quem et cujus radices scire
volumus : que sit superficies a. b. unumquodque au-
tem laterum ipsius est radix ejus. Et unumquodque
latus ejus cum in aliquo numerorum multiplicatur ,
tuncnumerus quiindeaggregatur est numerusradicum
quarum queque est sicut radix illius superficie. Post-
quam igitur dictum est quod cum censu sunt decem
( 259.)
radices, acCipiam quartam decem, que est duo et semis.
Et faciam unicuique quarte cum uno laterum super-
ficiei superficies: fuerintergo cum superficie prima que
est superficies &. b. quattuor superficies equales cujus-
que quarum longitudo est equalis radicia. 4. etlatitudo
est duo et semis. Que sunt superficies g. k. t.k. Ra-
dici igitur superficiei equalium laterum est ignotorum,
deest quod ex angulis quattuor est diminutum. Scilicet
unicuique angulorum deest multiplicatio duorumetse-
mis in duo et semis. Quod igitur ex numeris necessa-
rium est adhuc ut superficiei quadratura compleatur,
est multüiplicatio duorum et semisin se quattuor. Et ag-
gregatur ex summa illius totius viginti quinque. Jamau-
tem scisimus quod prima superficies que estsuperficies
census, et quattuor superficies que*ipsam circumdant,
que sunt decem radices, sunt ex numeris triginta no-
vem. Cum ergo addiderimus ei vigimti quinque , qui
sunt ex quattuor quadratis qui suntsuper angulos super-
ficiei 4. b. complebitur quadratura majoris superficiei
que est superficies d. e. Nos autem jam novimus quod
totum illud est sexaginta quattuor. Unum igitur late-
rum ejus est ipsius radix que est octo. Minuas itaque
quod est equale quarte decem bis ab extremitatibus
duabus lateris superficiei majoris que est superfi-
cies d. e. Et remanebit latus ejus tres : qui est equalis
lateri superficiei prime que est à. b. et est radix illius
census. Nos autem mediamus radices decem; et multi-
plicamus eas in se; et addimus eas numero qui est tri-
ginta novem; nisi ut compleatur nobis figure majoris
quadratura cum eo quod deest quattuor angulis. Cum
eo cujusque numeri quarta in se multiplicatur; et de-
17:
200
inceps quod inde pervenit in quattuor, erit quod
perveniet multiplicationi medietati ejus in se equale.
Sufficit igitur nobis multiplicatio medietatis radicum
in se, loco multiplicandi quartam in se quattuor.
t Census g
Est ejus preterea" forma altera ad hoc idem perdu-
cens : que est superficies a. b. que est census. Volumus
autem ut addamus ei equale decem radicibus ejus.
Mediabimus igitur decem et erunt quinque. Et facie-
mus eas duas superficies super duñs partes a. 4. que
sint due superficies g. et d. quarum cujusque longi-
tudo sit equalis lateri superficiei à. 4. , et latitudo ejus
sit quinque, qui est medietas decem. Remanebit ergo
vobis super superficiem a. b. quadratura quod fit ex
quinque in quinque, qui est medietas decem radicum
quas addidimus super duas partes superficiei prime.
Scimus autem quod superficies prima est census et
quod due superficies que sunt super duas ipsius partes,
sunt decem radices ejus. Et hoc totum est triginta no-
vem. Adbuc igitur ut majoris superficiei quadratura
compleatur crit totum illud quod aggregatur sexaginta
quat{tuor. Accipe ergo radicem ejus que est quattuor.
( 26F >)
unum laterum superficiei majoris quod est octo. Cum
ergo minuerimus ex ea equale ei quod super ipsam
addidimus quod est quinque , remanebit tres qui est
latus*superficiei 4. b. que est census. Tpse namque est
radix ejus, et census est novem. Census autem et vi-
ginti unum equantur decem radicibus.
a
g census
b
quinçque
snbninb
Ponam itaque censum superficiem quadratam ignoto-
rum laterum que sit superficies a. b, deinde adjungam
ei superficiem equidistantium laterum cujus latitudo
sit equalis uni lateri superficie a. b. quod sit latus 9. d.
et superficies sit g. a. et ponamipsamesse viginti unum;
ergo longitudo duarum superficierum simul latus e. d.
Nos autem jam novimus quod longitudo ejus est de-
cem ex numeris. Omnis namque superficiei quadrate
equalium laterum et angulorum, si unum latus mul-
üplicatur in unum, est radix ilius superficiei, et si in
duo est due radices ejus, Postquam igitur jam dictunrest
(202)
quod census et viginti una dragma equantur decem ra-
dicibus, etscimusquodlongitudolateris e, d.estdecem,
quoniam latus b. e. est radix census, ergo dividam latus
e. d. in duo media super punctum 4., et erigam $uper
ipsum Jineam À. 1. Manifestum est itaque quod h. d.
est equalis 4. e. sic jam fuit nobis manifestum quod
linea À. 1. est equalis 4. e;addam itaque linee L. £. quod
sit equale superfluo 4. 4. super 4. t. ut quadretur su-
perficies quod sit linea . 4. Fit ergo #. £. equalis £. g.
quoniam d.h. fuit equalis £. g. et pervenit superficies
quadrata que est superficies /. £. Et ipsa est quod ag-
gregatur ex multiplhicatione medietatis radicum in se,
que est quinque in quinque. Et illud est viginti quin-
que. Superficies vero a. g. fuit jam viginti unum qui
jam fuit adjunctum ad censum. Post hoc faciamus su-
per k. k. superficiem quadratam equalium laterum et
angulorun, que sit superficies m. h. Et jam scivimus
quod 4. t. est equalis e. L: sic e. b. est equalis «. e. Ergo
h. t. est equalis a. e. Sic £. À. jam fuit equalis 2, e. Ergo
h. a. reliqua estequalis reliqu k. k.Sic. L. k. estequalis
m. n. ergo m. n. est equalis 2, a. Sic. k. a. fuit equalis
k. Let k. est equalis ». £. Ergo ». L. reliqua est
equalis k. £. relique. Ergo superficies Z. n. est equalis
superficiel £. a. Jam autem novimus quod superficies
L, &. est viginti quinque. Nobis itaque patet quod su-
perficies g. k. addita sibi superficie Z. #7. est equalis
superficie g. a. que est viginti unum. Postquam ergo
minuerimus ex superficiei /. {. superficiem g. 4. et su-
perficiem 7. /. que est viginti unum, remancbit nobis
superficies parva que est superficies x. 4. Et ipsa est
superfluum quod est inter viginti unum et viginti
( 263 )
quinque. Et ipsa est quattuor, cujus radix est 4.4, Sic
ipsa est equalis 4. a. et illud est duo. Sic 4. e, est me-
dietas radicum que est quinque. Cum ergo minueri-
mus ex ea . a. que est duo remanebit tres qui est li-
nea «a. e. que est radix census. Et census est novem.
Et illud est quod demonstrare voluimus.
à z t ÿ
census
nn
e « À d
|
% ri L
« m b
e nn L
Æ
h
i L
q d
Dictufh est autem tres radices et quattuor dragme
equantur censui. Ponam ergo censum superficiem qua-
( 264 )
dratam ignotorum laterum scilicet equalium, et equa-
lium angulorum que sit superficies a. 4. Tota igitar
hec superficies congregat tres radices et quattuor quos
übi nominavi. Omnis autem quadrate superficie unum
latus in unum multiplicatum est radix ejus. Ex super -
ficie igitur a. d. secabo superficiem e. d. et ponam
unum latus ejus quod est e. g. tres, qui est numerus
radicum. Fpsum vero est equale z. d. Nobis itaque pa-
tet quod superficies e. b. est quattuor qui radicibus
est additus. Dividam ergo latus e. ?. quod est tres ra-
dices in duo media super punctum 4. Deinde faciam
ex eo superficiem quadratam que sit superficies e. z.
Et ipsa est quod fit ex multiplicatione medietatis ra :
dicum; que estunum et semisinse,et est duoet quarta.
Post hoc addam linee 2. 1. quod fit equale a. e. que
sit linea £. /. Fit ergo linea L. /. equalis a. . et per-
venit superficies quadrata que est superficies 2. #2. Jam
autem manifestum fuit nobis quod linea 4. 9. est
equalise. z. et 4. L. est equalis e. ». Remanet ergo g. A.
equalis n. z. Sic g. À. est equalis Æ. £. Ergo 4. #. est
equalis ». z. Sicm. n. est equalis #. /. Superficies igi-
tur »* z. fit equalis superficiei £. Z. Jam autem scivi-
mus quod superficies a. z. est quattuor qui est additus
tribus radicibus. Fiunt ergo superficies a. x. et super-
ficies k. Z. simul equal superficiei a. z. que est quat-
tuor. Manifestum est igitur quod superficies A. m2. est
medietas radicum que est unum et semis in se, quod
est duo et quarta, et quattuor additi qui sunt super-
ficies a. n. et superficies 4. £ Quod vero ex eo aggrega-
tur est sex et quarta, cujus radix est duo et semif, que
est Jatus . a. Jam autem remansit nobis ex latere qua-
(265)
drati ‘primi quod est superficies a. d. que est totus
census, medietas radicum que est unum et semis, et
est linea 9. L. Cum addiderimus super lineam a. A.
que est radix superficiei 4. m. quod est duo et semis
lineam À. g. que est medietas radicum trium que est
unum et semis, pervenit illud totum quattuor, quod
est linea &. g. Et ipsa est radix census qui est superfi-
cies a. d. Et ipse est sedecim. Et illud est quod demon-
strare voluimus. Inveni autem omne quod fit ex com-
putatione in algebra et almuchabala impossibile esse
quin perveniat ad unum sex capitulorum que retuli
übi in principio hujus lbri.
Capitulum multiplicationis.
Nunc quidem refferam tibi qualiter res multiplicen-
tur que sunt radices alie sunt in alias cum fuerint sin-
gulares, et cum numerus fuerit cum eis, aut fuerit
exceptus ex eis numerus, aut ipse fuerint excepte
ex numero, ét qualiter alie aliis aggregentur, et
qualiter alie ex aliis minuantur. Scias itaque im-
possibile esse quin unus omnium duorum nume-
rorum quorum unus in alterum multiplicatur, du-
plicetur secundum quantitatem unitatum que est in
altero. Si ergo fuerit articulus, et cum eo fuerint uni-
tates, aut fuerint unitates excepte ex eo, impossibile
erit quin cjus multiplicatio quattuor fiat. Videlicet
arücuh in articulum et unitatum in unitates, et uni-
tatum in articulum, et articuli in unitates. Quod si
omnes unitates que sunt cum articulo fuerint addite
aut diminute omnes, tune quarta multiplieatio erit ad-
( 266 )
dita. Sin autem une earum fuerint addite et alie dimi-
nuie, tunc quarta multiplicatio minuetur. Quod est
sicut decem et unum in decem et duo. Ex multiplica-
tione ergo decem in decem fiunt centum. Et ex mul-
üplicatione unius in decem fiunt decem addita. Et ex
multiplicatione duorum in decem fiunt viginti addita.
Etex multiplicatione duorum in unum fiunt duo ad-
dita. Totum ergo illud est centum et triginta duo.
Et cum fuerint decem uno diminuto in decem uno
diminuto multiplicabis decem in decem et fient
centum , et unum diminutum in decem et fient de-
cem diminuta. Et unum diminutum iterum in
decem , et fient decem diminuta. Unum quoque di-
minutum multiplicabis in unum diminutum , et fiet
unum additum. Erit ergo totum illud octoginta
unum. Quod si fuerint decem et duo in decem uno di-
minuto , multiplicabis decem in decem et fient cen-
tum, et nnum diminutum in decem et erunt decem
diminuta. Et duo addita in decem et erunt viginti ad-
dita, quod erit centum et decem. Et duo addita in
uoum diminutum, et erunt duo diminuta.Totum ergo
illud erit centum et octo. Hoc autem non ostendi tibi,
nisi ut per ipsum perducaris ad multiplicationem
rerum aliarum scilicet in alias, quin cum eis fuerit
numerus aut cum ipse excipiuntur ex numero, aut
cum numerus excipitur ex eis. Gumque übi dictum
fuerit, decem dragme re diminuta , est enim rei sig-
nificatio radix multiplicate in decem, multiplicabis
decem in decem et fient centum , et rem diminutam
in decem, et erunt decem res diminute, dico ergo
quod sunt centum, decem rebus diminutis. Si autem
( 269 )
dixeritaliquis, decem et res in decem, multiplica de-
cem in decem et erunt centum, et rem addite in de-
cem , et erunt decem res addite. Erit ergo totum cen-
tum et decem res. Quod si dixerit, decem et res in
decem et rem : dicdecem in decem faciunt centum. Et
res addita in decem facit decem res additas, et res
addita in rem additam, facit censum additum. Erit
ergo totum centum et viginti res et census additus.
Quod si quis dixerit decem re diminuta in decem re
diminuta, dices decem in decem fiunt centum. Et
res diminuta in rem diminutam fit census additus.
Est ergo iilud centum et census additus diminutis vi-
ginti rebus. Et similiter si dixerit dragma minus sexta
in dragmam minus sexta, erit illud quinque sexte
multiplicate in se, quod est viginti quinque partes tri-
ginta sex partium unius dragme. Regula vero ejus est
ut ruultiplices dragmam in dragmam, et erit dragma,
et sextam dragme diminutam in dragmam , et erit
sexta dragme dimivuta : et sextam diminutam in drag-
mam , res erit sexta diminuta. Fit ergo illud tertia
dragme diminuta , et sextam diminutam in sextam di-
minutam, et erit sexta sexte addita. Totum ergo illud
erit due tertie et sexta sexte. Si vero aliquis dixerit,
decem , re diminuta, in decem et rem : dices decem in
decem centum fiunt , et res diminuta in decem fit de-
cem res diminute, etresin decem fit decem res addite.
Et res diminuta in rem fit census diminutus. Est ergo
illud centum dragme , censu diminuto. Si autem dixe-
rit, decem re diminuta in rem, dices decem in rem,
fiunt decemres. Et res diminuta in rem, fit census di-
minutus. Sunt ergo decem res, censu diminuto. Et si
( 266.)
dixerit decem et res in rem decem diminutis, dicés.
Res in decem fit decem res, et res in rem fit census, et
decem diminuta in decem, fiunt centum dragme di-
minute. Dico igitur quod est census centum diminutis,
postquam cum eo oppositum fuerit. Quod ideo est
quem projiciemus decem res diminutas cum decem
rebus additis, et remanebit census centum dragmis
diminutis. Siautem dixeritquis, decem dragme et me-
dietas rei in medietatem dragme quinque rebus dimi-
nutis, dices : medietas dragme in decem dragmas facit
dragmas quinque : et medietas dragme in medietatem
rei facit quartam rei addite , et quinque res diminute
in decem dragmas , fiunt quinquaginta res diminute.
Et quinque res diminute in medietatem rei fiunt duo
census et semis diminuti. Est ergo illud quinque
dragme dimivutis duobus censibus et semis, et dimi-
nutis quadraginta novem radicibus et tribus quartis
radicis. Quod si aliquis dixerit, tibi decem et res in
rem diminutis decem et est quasi dicat : res et decem
in rem decem diminutis, dic ergo res in rem facit
censum , et decem in rem fiunt decem res addite, et
decem diminuta in rem fiunt decem res diminute,
pretermittantur itaque, addita cum diminutis, et re-
manebit census. Et decem diminuta in decem fiunt
centum diminu ex censu. Totum ergo illud est census
diminutis centum dragmis. Et omne quod est ex mul-
tiplicatione additi et diminuti, sunt res diminute in
additam rem, in postrema multiplicatione semper mi
nuitur.
( 260 )
Capitulum aggregationis el diminutionis.
Radix ducentotum diminutis decem adjuncta ad
viginti diminuta radice ducentorum est decem equa-
liter. Et radix ducentorum exceptis decem diminuta
ex viginti excepta radice ducentorum, est triginta di-
minutis duobus radicibus ducentorum. Et due radices
ducentorum sunt radix octingintorum : sic centum et
census diminutis viginti radicibus, ad quem adjuncta
sunt quinquaginta et decem radices diminutis duobus
censibus, sunt centum etquinquaginta diminutis censu
et decem radicibus. Ego vero illius causam in forma
ostendam, si Deus voluerit. Scias itaque quod cum
quamlibet census radicem notam sive surdam dupii-
care volueris , cujus duplicationis significatio est ut
multiplices eam in duo, oportet ut multplices duo in
duo, et deinde quod inde pervenerit, in censum. Ra-
dix igitur ejus quod aggregatur est duplum radicis
illius census. Et cum volueris triplum ejus, multipli-
cabis tres in tres, et postea quod inde pervenerit in
censum. Erit ergo radix ejus quod aggregatur triplum
radicis census primi. Et similiter quod additur ex du-
plicationibus, aut minuitur erit secundum hoc exem-
plum. Scias ergo ipsum quod si radicis census me-
dietatem accipere volueris, oportet ut, multiplices
medietatem in medietatem, deinde quod pervenerit in
censum. Erit ergo radix ejus quod aggregatur medie-
tas radicis census. Et similiter si volueris tertiam aut
quartam ejus aut minus aut plus, usquequo possibile
est consequi , secundum diminutionem et duplicatio-
(270 )
vem, verbi gratia : si enim volueris ut duplices radi-
cem novem, multiplica duo in duo, postea in novem,
est aggrega triginta sex , cujus radix est sex , qui est
duplum radicis novem. Quod si ipsam volueris tri-
plicare, multiplica tres in tres , postea in novem , et
erunt octoginta unum, cujus radix est novem, qai est
radix novem triplicata. Sin autem radicis novem me-
dietatem accipere volueris, multiplicabis medietatem
in medietatem et perveniet quarta, quam postea
multiplicabis in novem, et erunt duo et quarta , cujus
radixest unus et semis, quiest medietas radiecis novem.
Et similiter quod additur aut minuitur ex noto et
surdo erit, et hic est ejus modus. Quod si volueris
dividere radicem novem per radicem quattucr, divides
novem, per quattuor, el duo et quarta, cujus radix est
id quod pervenit uni. Quod est unus est semis. Quod
si radicem quattuor per radicem novem volueris di-
videre , divide quattuor per novem et erunt quattuor
none, cujus radix est id quod pervenit uni, que est
due tertie unius. Sin vero duas radices novem per
radicem quattuor dividere volueris, et absque hoc
aliorum censuum , dupla ergo radicem novem secun-
dum quod te feci noscere in operatione multiplicium,
et quod aggregatur deinde per quattuor aut per quod
volueris. Et quod ex censibus fuerit minus aut majus,
secundum hoc exemplum operaberis per ipsum, si
Deus voluerit. Quod si radicem novem in radicem
quattuor multiplicare volueris, mult'plica novem in
quattuor, et erunt triginta sex. Accipe igitur radicem
ejus que est sex, ipse namque est radix novem in ra-
dicem quatuor. Et similiter si velles multiplicare
(271 )
radicem quinque in radicem decem, multiplica
quinque in decem, et acciperes radicem ejus, et quod
inde aggregaretur esset radix quinque in radicem de-
cem. Quod si volueris multiplicare radicem tertie in
radicem medietatis, multiplica tertiam in medieta-
tem, et erit sexta. Radix ergo sexte est radix tertie in
medietatem. Sin autem duas radices novem in tres
radices quattuor multiplicare volueris, perducas duas
radices novem secundum quod tibi retuli, donec scias
cujus census sit. Et similiter facias de tribus radicibus
quattuor , donec scias cujus census sit. Deinde multi-
plica unum duorum censuum in alterum et accipe ra-
dicem ejus quod aggregatur. Ipsa namque est due
radices novem in tres radices quattuor. Et similiter
de eo quod ex radicibus additur aut minuitur secun-
dum hoc exemplum facias. Cause autem radicis ducen-
torum diminutis decem, adjuncte ad viginti dimi-
nuta radice ducentorum, forma est linea «a. b.
Tpsa namque est radix ducentorum. Ab «&. ergo ad
punctum g. est decem, et residuum radicis incento-
rum ést residuum linee a. b. quod est linea g. b. De-
inde protrahas a puncto 4. ad punetum d. lineam que
sit linea vigenti. [psa namque est dupla linee 4. g.
que est decem. À puncto b. usque ad punetum e. quod
sit equale linee a. 4. que-est radix ducentorum. Et
residuum de vigenti sit a puncto e. usque ad punc-
tum d. Et quia volumus aggregare quod remanet ex
radice ducentorum post projectionem decem, quod est
linea g. b. ad lineam e. d. que est vigenti diminuta
radice ducentorum, et jam fuit nobis manifestum
quod linea a. b. que est radix ducentorum est equalis
( 272.)
linee D. e.; et quod linea a. g. que est decem est
equalis linee 2. z. et residuum linee à. 4. que est
linea g. b. est equale residuo linee b. e. quod est z. e.
et addidimus super lineam e. 4. lineam z. e. ergo
manifestum est nobis quod jam minuitur ex linea b. d.
que est viginui, equale linee g. a. qui est decem que
est linea 2. z, et remanet n obis linea z. d. que est de-
cem. Etillud est quod demonstrare voluimus.
Causa vero radicis ducentorum exceptis decem
diminute ex viginti excepta radice ducentorum, estalia
cujus forma est linea a. 4. que est radix ducentorum.
Sic ab a. usque ad punctum g. sit decem, qui est no-
tus. Protraham autem a puncto 2 lineam usque ad
punctum 4. quam ponam viginti, et ponam ut quod
est a. b. usque ad punctum e. sit equale radici du-
centorum, que est equalis linee a. b. Nobis vero jam
a
20
e
1
d
NN
fuit manifestum quod linea g. 4. est id quod rema-
net ex radice ducentorum post projgctionem decem,
| (273)
et linea e. d. est id quod remanet ex viginti post re-
jectionem radicis ducentorum. Volumus itaque ut
linea g. b. minuatur ex linea e. d. protraham ergo
à puncto d. b. lineam ad punctum 3. que sit equalis
linee a. g. que est decem, fit ergo linea z. 4. equalis
linee x. b. et linee D. d. Sic jam fuit nobis manifes-
tum totum illud fore triginta. Secabo itaque ex linea +
e. d. quod sit equale linee g. &. quod est linea . e.
Patet igitur nobis quod linea L. d. est id quod rema-
net ex tota linea z. d. que est triginta. Ostensum vero
est quod linea 2. e. est radix ducentorum et linca z. d.
et b. 9. est radix ducentorum. Et quia linea e. k. est
equalis linee g. ?. ergo manifestum est quod illud
quod minuitur ex linea z. d. quod est triginta et due
œ
LEO
ù
S
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A
10 b 20
radices ducentorum. Et due radices ducentorum sunt
radix octingintorum, Et illud est quod demonstrare
voluimus.
Centum ergo atque census exceptis viginti radicibus,
quibus conjunguntur quinquaginta et decem radices
exceptis duobus censibus non convenienti subjicitur
forma , tribus generibus divisis, scilicet censibus radi-
cibus etnumero, neque cum eis quod eis equetur uf
formentur. Nos tamen fecimus eis formam suam non
ï 18
GRR)
sensibilem. Eorum vero necessitas verbis manifesta
est, quod est quod jam scivimus quod apud te sunt
centum et census excepts viginti radicibus. Postquam
ergo addidisti eis quinquaginta et decem radices
facta sunt centum et quinquaginta et census exceptis
decem radicibus; hac namque decem radices addite
restaurant viginti radicum diminutarum decem ra-
dices. Remanent ergo centum et quinquaginta et cen-
sus , exceptis decem radicibus. Sic cum centum fuit
jam census. Postquam ergo minueris duos census ex-
ceptos de quinquaginta , preteribit census cum cen-
su, et remanebit tibi census, fiet ergo centum et quin-
quaginta excepto censu, et excepto decem radicibus.
Et illud est quod demonstrare voluimus.
Capitulum questionum.
LA
Jam processerunt antea capitula numerationis et
eovrum modos sex questiones quas posui exempla sex
capitulis precedentibus in principio hujus libri de
quibus tibi dixi , quoniam impossibile est quin com-
putatio algebre et almuchabale eveniat tibi ad aliquod
capitulum eorum. Postea secutus sum illud ex ques-
üonibus cum eo quod intellectui propinquius fuit,
per quod diflicultas alleviabitur, et significatio facilior
fiet si Deus voluerit.
Questio earum prima est : sicut si diceres , divide
decem in duas partes, et multiplica unam duarum
partium in alteram, deinde multiplica unam earum
in se et sit multiplicatio ejus in se equalis, multiplica-
tioni uni duarum sectionum in alteram quattuor.
(275)
Ejus vero regula est ut ponas unam duarum sectio-
num rem , et alteram sectionem ponas decem excepta
re. Multiplica igitur rem in decem excepta re, et
erunt decem res excepto censu. Deinde multiplicabis
totum in quattuor quem dixisti. Erit ergo quod per-
veniet quadruplum multiplicationis unius duarum
sectionum in alteram , erunt itaque quadraginta res ,
exceptis quattuor censibus. Postea multiplica rem in
rem que est una duarum sectionum in se, et erit census
qui est equelis quadraginta rebus exceptis quattuor
censibus; deinde restaurabis quadraginta per quat-
tuor census. Post hoc addes census censui, et erit
quod quadraginta res erunt equales quinque censibus.
Ergo unus census erit octo radices qui est sexaginta
quattuor. Radix ergo sexaginta quattuor est una dua-
rum sectionum multiplicata :n se, et resi dtfim ex
decem est duo, qui est sectio altera. Jam ergo pro-
duxi hanc questionem ad unum sex capitulorum,
quod est quod census equatur radicibus.
Questio secunda : divide decem in duas partes et
multiplica decem in se, et sit quod aggregatur ex mul-
tiplicatione decem in se equale uni duarum sectionum
multiplicate in se bis, et septem nonis vicis unius.
Computationis vero hec regula est ut ponas unam
duarum sectionum rem. Multiplica ergo eam in se,
et fiet census, deinde in duo et septem nonas. Erunt
ergo duo census et septém none census unius , deinde
multiplica decem in se, et erunt centum. Est ergo ut
centum sit equale duobus censibus , et septem nonis
census unius. Reduc ergo totum illud ad censum uni-
cum , qui est novem partes viginti quinque , quod est
10.
326 )
quinta et qualtuor quintas quinte unius, Accipe ergo
quintas cenlum et quaituor quintas quinte ipsius,
que sunt triginta sex. Et ipse equantur censui, cujus
radix est sex, qui est una duarum sectionum. Jam
ergo produximus hanc questionem ad unum sex ca-
pitulorum. Quod est quod census equatur numero.
Questio tertia : divide decem in duas sectiones et
divide unam duarum partium per alteram et perve-
nient quattuor. Cujus regula est ut ponas unam dua-
rum sectionum rem, et alteram decem excepla re.
Deinde dividas decem excepta re per rem ut perve-
niant quattuor. Jai autem scivisti quod cum multi-
plicaveris quod pervenit ex divisione in idem per
quod divisum fuit, redibit census tuus quem divisisti.
Sic perveniens ex divisione in hac questione, fuit
quatui@r , ét id per quod divisum fuit, fuit res. Mul-
tiplica igitur quattuor in rem, et erunt quattuor res.
Ergo quattuor res equantur censui quem divisisti,
qui est decem excepta re. Restaura itaque decem per
rem, et adde ipsam quattuor. £rit ergo quod decem
equatur quinque rebus. Ergo res est duo. Jam ergo
produxi banc questionem ad unum sex capitulorum ,
qnod est quod radices equantur numero.
Questio quarta : multiplica tertiam census et drag-
mam in quartam ejus et dragmam , et sit quod per-
venit viginti. Cujus regula est ut tu multiplices tertiam
in quartam, et erit quod perveniet medietas sexte
census et dragmam in dragmam , et erit dragma ad-
dita, et tertiam rei in dragmam, et erit tertia radicis,
et quartam reiin dragmam, et erit quarta radicis, Erit
ergo illud medietas sexte census et tertia rei, et quarta
K"277 9
rei, et dragma que equatur viginti dragmis. Projice
ergo dragmam unam ex viginti dragmis et remane-
bunt decem et novem dragme , que equantur medie-.
tati sexte census et tertie et quarte radices. Reintegra
ergo censum tuum. Ejus vero reintegratio est ut mul-
tiplices totum quod habes in duodecim, et pervenient
tibi census et septem radices , que erunt equales du-
centis et viginti octo. Media ergo radices et muliüi-
plica eas in se, que erunt duodecim et quarta et
adde eas ducentis ét viginti octo. Erit ergo illud du-
centa et quadraginta et quarta. Deinde accipe radi-
cem ejus que est quindecim et semis, ex qua minue
medietatem radicum que est tres et semis, Remanet
ergo duodecim qui est census. Jam ergo produximus
hanc questionem ad unum sex capitulorum, LE est
quod census et radices equantur numero.
Questio quinta : divide decem in duas partes, et
multiplica unamquamque earum in se et aggrega eas,
et perveniat in quinquaginta octo. Cujus regula est ut
multüplices decem excepta re in se , et pervenient cen-
tum et census exceptis viginti rebus. Deinde multiplica
rem in se et erit census. Postea aggrega ea et erunt
centum nota et duo census exceptis viginti rebus,
que equantur quinquaginta octo. Restaura ergo cen-
tum et duos census per res que fuerunt diminute,
et adde eas quinquaginta octo, et dices centum et duo
census equantur quinquagin{a octo et viginti rebus.
Reduc ergo ea ad censum unum , dices ergo quinqua-
ginta et census equantur viginti novem et decem
rebus. Oppone ergo per ea. Quod est ut tu projicias
ex quinquaginta viginti novem. Remanet ergo viginti
( 278 )
unum et census , que equantur decem rebus. Media
ergo radices, et pervenient quinque, eas igitur in se
multiplica, et erunt viginti quinque, projice itaque
ex eis viginti unum, et remanebunt quattuor. Cujus
radicem accipias que est duo. Minue ergo ipsam ex
quinque rebus que sunt medietas radicum et remanet
tres, qui est una duarum sectionum. Jam ergo pro-
duximus hanc questionem ad unum sex capitulorum,
quod est census et numerus equantur radicibuüs.
Questio sexta : tertia census multiplicetur in quar-
tan ejus et perveniat inde census , et sitaugmentum
ejus viginti quattuor. Cujus regula est quam tu nosti
quod cum tu multiplicas tertiam rei in quartam rei
pervenit medietas sexte census que est equalis rei et
viginti quattuor dragmis. Maltiplica ergo medieta-
tem sexte census in duodecim ut census reintegretur
et fiat census perfectus. Et multiplica et rem et viginti
quattuor in duodecim et pervenient tibi ducenta et
octoginta octo, et duodecim radices que sunt equales
censui. Media ergo radices, et multiplica eas in se,
quas adde ducentis et octoginta octo , et erunt omnia
trecenta et viginti quattuor. Deinde accipe radicem
ejus que est decem et octo, cui adde medietatem
radicum, et fiet census viginti quattuor. Jam igitur
produximus hanc questionem- ad unum sex capitu-
lorum , quod est numerus et radices equantur censui.
Quod si aliquis interrogans quesiverit et dixerit :
divisi decem in duas partes, deinde multiplicavi
unam earum in alteram et pervenerunt viginti unum.
Tu ergo jam scivisti quod una duarum sectionum
decem est res. [psam igitur in decem, re excepta,
( 279)
multiplica, et dicas : decem excepta re in rem sunt
decem res, censu diminuto, que equantur viginti uno.
Restaura igitur decem excepta re per censum, et
adde censum viginti uni , et dic : decem res equantur
viginti uni et censui. Radices ergo mediabis ; eterunt
quinque , quos in se multiplicabis, et perveniet vi-
ginti quinque. Ex eo itaque projice viginti unum,
et remanet quattuor. Gujus accipe radicem que est
duo, et minue eam ex medietate rerum. Remanet
tres qui est una duarum partium.
Quod si dixerit : divisi decem in duas partes et
multüplicavi unamquamque earum in se, et minui
minorem ex majore, €t remanserunt quadraginta;
erit ejus regula ut multiplices decem excepta re in
se, et pervenient centum et census , viginti rebus di-
minutis. Et multiplica rem in rem, et erit census.
[psum ergo minue ex centum et censu exceptis vi-
genti rebus, que equantur quadraginta. Restaura
ergo centum per viginti, et adde ipsum quadraginta.
Habebis ergo quadraginta et viginti res que erunt
equales, censui. Appone ergo per eas centum , pro-
jice quadraginta ex centum , remanent se Kaginta que
equantur viginti rebus, Ergo res equatur tribus, qui
est una duarum partium.
Si autem dixerit : divisi decem in duas partes, et
multiplicavi unamquamque partem in se , et aggregavi
eas, et insuper addidi eis superfluum quod fuit inter
utrasque sectiones antequam in se nultiplicarentur s
et pervenit illud totum quinquaginta quattuor. Re-
gula itaque ejus est ut multiplices decem excepta re
in se, et erit quod perveniet centum et census excep.
(.:280!")
üs viginti rebus. Ex decem vero remansit res. Multi-
plica ergo ipsam in se, et erit quod perveniet census,
deinde aggrega ea, et erit illud quod perveniet cen-
tum et duo census exceptis viginti rebus. Adde igitur
superfluum quod fuit inter eas aggregato, quod est
decem exceptis duabus rebus. Totum ergo illud est
centum et decem et duo census exceptis Guabus re-
bus, et exceptis viginti rebus que equantur quinqua-
ginta quattuor dragmis. Cum ergo restaurabis, dices :
centum et decem dragme et duo census equantur
quinquaginta quattuor et viginti duabus rebus. Reduc
ergo ad censum suum. Et dic : census et quinquaginta
quinque equantur viginti septem dragmis et undecim
rebus. Projice ergo viginti septem et remanebunt cen-
sus et viginti octo qui equantur undecim rebus. Media
igitur res et erunt quinque et semis. Et multiplica
cas in se, et erunt triginta et quarta. Ex eis igitur
minue viginti octo , et residui radicem sume, quod
est duo et quarta. Est ergo unum et semis. Et minue
cam ex medietate radicum, et remanebunt quattuor,
qui est una duarum partium.
Quod si dixerit : divisi decem in duas partes et
divisi hanc per illam, et illam per istam, et pervene-
runt due dragme et sexta, hujus autem regula est,
quam cum tu multiplicabis unamquamque partem in
se, et postea aggregabis eas erit sicut cum una
duarum partium multiplicatur in alteram, et deinde
quod pervenit, multiplicatur in id, quod aggregatur
ex divisione , quod est duo et sexta. Multiplica igitur
decem excepta re in se et erunt centum et census ,
exceplis viginti rebus, et multiplica rem in rem et
(
C(UAOIE. )
erit census. Aggrega ergo illud, et habebis centum et
duo census exceptis viginti rebus, que equantur rei
multiplicate in decem minus re, que est decem res
excepto censu multiplicato in id quod pervenit ex
duabus divisionibus que est duo et sexta. Erit ergo
illud viginti et una res, et due tertie radicis , ex-
ceptis duobus censibus et sexta que equantur centum
et duobus censibus , exceptis viginti rebus. Restaura
ergo illud et adde duos census et sextam centum et
duobus censibus, exceptis viginti rebus. Et adde
viginti res diminutas ex centum, viginti uni, et dua-
bus tertiis radicis. Habebis ergo centum et quattuor
census et sextam census qui equantur quadraginta
uni rei et duabus tertiis rei. Rebus ergo illud ad cen-
sém unum. Tu autem eam scivisti quod unus census
quattuor censuum et sexte est quinta quinte. Totius
igitur quod habes accipe quintam et quinta quinte ,
et habebis censum et viginti quattuor dragmas que
equantur decem radicibus. Media ergo radices et
multiplica ‘eas in se, et erunt viginti quinque ex qui-
bus minue viginti quattuor qui sunt cum censu, et
remanebunt unum.,Cujus assume radicem que est
unus. Îpsam ergo minue ex medielate radicem que
est quinque , et remanet quattuonr, qui est una dua-
rum sectionum. Et pervenit ex hoc ut cum illud
quod pervenit ex divisione quarumlibet duorum re-
rum, quarum una per alteram dividitur, multi-
plicatur inde quod pervenit ex divisione alterius per
primum, erit semper quod perveniet Gnum.
Sin vero dixerit : divisi decem in äuas partes et
mulüphcavi unani duarum partium in quinque ct
(383 7
divisi quod aggregatum fuit per alteram, deinde
projexi medietatem ejus quod pervenit, et addidi
ipsam multiplicato in quinque, et fuit quod aggre-
gatum est quinquaginta dragme. Erit hec regula ut
ex decem accipias rem, et multiplices eam in quin-
que. Erunt ergo quinque res divise per secundam que
est decem excepta re, accepta ejus medietate. Cum
ergo acceperis medietatem quinque rerum que est
duo et semis, erit illud quod vis dividere per decem
excepta re. He ergo due res et semis divise per de-
cem, excepla re, equantur quinquaginta exceptis
quinque rebus, quoniam dixit adde ipsam uni dua-
rum sectionum multiplicate in quinque. Est ergo
totum illud quinquaginta. Jam autem scivisti quod
cum multiplicas quod pervenit tibi ex divisioffe
in id per quod dividitur redit census tuus. Tuus au-
tem census est due res et semis. Multiplica ergo de-
cem , excepta re, in quinquaginta exceptis quinque
rebus , erit itaque auod perveniet quinquaginta et
quinque census exceptis centum rebus, que equantur
duabus rebus et semis. Reduc ergo illud ad censum
unum. Erit ergo quod centum dragme et census ex-
cepüs viginti rebus equantur medietati rei. Restaura
ergo centum et adde vigint res medietati rei, habebis
ergo centum dragmas et censum que equantur viginti
rebus et medietati rei. Ergo media radices et multi-
plica eas in se, et minue ex eis centum, et accipe
residui radicem, et minue eam ex medietate radicem
que est decemêet quarta. Et remanebit octo que est
una duarum sectionum.
Quod si aliquis dixenit tibhi : divisi decem in duas
( 283 )
partes et multiplicavi unam duarum partium in se, et
fuit auod pervenit equale alteri parti octuagies et
semel, erit hec regula ut dicas decem : excepta re in
se fiunt centum et census exceptis viginti rebus, que
equantur octoginta uni rei. Restaura ergo centum ,
et adde viginti radices octoginta uni. Erit ergo quod
centum et census erunt equales centum radicibus et
uni radici. Media ergo radices et erunt quinquaginta
et semis. Muitiplica eas in se et erunt bis mille et
quingente et quinquaginta et quarta. Ex eïs itaque
minue centum et remanebunt bis mille et quadrin-
gente et quinquaginta et quarta. Accipe igitur ejus
radicem que est quadraginta novem et semis et minue
eam ex medietate radicum que est quinquaginta et
semis, et remanebit unus qui est una duarum sectio-
num.
Et si aliquis dixerit : duo census sunt inter quos
sunt due dragme, quorum minorem per majorem
divisi, et pervenit ex divisione medietas, dic ergo
res. Et due dragme in medietatem que est id quod
pervenit ex divisione, est medietas rei et dragme,
que sunt equales rei. Projice ergo medietatem rei
cum medietaté et remanet dragma que est equalis
medietati rei. Dupla ergo et die ergo quod res est due
dragme , et altera est quattuor.
Quod si dixerit tibi : divisi decem in duas partes ,
deinde multiplicavi unam earum in alteram et post
divisi quod aggregatum fuit ex multiplicatione per
superfluum quod fuit inter duas sectiones antequam
una in alteram multiplicaretur , et pervenerunt quin-
que et quarta. Erit ejus regula ut accipias ex decem
: ( 284 )
rem, et remanebunt decem , excepta re. Unum igitur
multiplica in alterum et erunt decem radices excepto
censu. Et hoc est quod pervenit ex multiplicatione
unius eorum in alterum, deinde divide illud per su-
perfluum, quod est inter ea, quod est decem exceptis
duabus rebus. Pervenit ergo quinque et quarta. Cum
ergo multiplicaveris quinque, et quartam in decem,
exceptis duabus rebus, perveniet inde census multi-
plicatus qui est decem res excepto censu. Multiplica
ergo quinque et quartam in decem exceptis duabus
rebus, et erit quod perveniet quinquaginta due
dragme et semis exceptis decem radicibus et semis, que
equantur decem radicibus, excepto censu. Restaura
ergo quinquaginta duo et semis per decem radices et
semis, et adde eas decem radicibus excepto censu ,
deinde restaura eas per censum et adde censum quin-
quaginta duobus et semis, et habebis vigintüi radices et
semis que equantur quinquaginta duabus dragmis et
semis et censui. Operaberis ergo per eas secundum
quod posuimus in principio hbri, si Deus voluerit.
Si quis vero tibi dixerit , est census cujus quattuor
radices multiplicate in quinque radices ipsius, red-
dunt duplum census, et augent super hoc triginta
sex dragmas; hec regula est, quoniam cum tu mul-
tiphicas quattuor radices, fiunt viginti census qui
equantur duobus censibus et triginta sex dragmis.
Projice ergo ex viginti censibus duos census cum duo-
bus censibus , ergo remanent decem et octo cénsus
qui équantur triginta sex. Divide igitur triginta sex
per decem et octo, et perveniet duo qui est census.
Quod si dixerit : est census cujus tertia et tres
(265 :)
dragme si auferantur, et postea multiplicetur, quod
remanet in se, redibit census ; erit ejus regula quo-
niam cum tu projeceris tertiam et tres dragmas , re-
manebunt ejus due tertie exceptis tribus dragmis,
que est radix. Multiplica igitur duas tertias rei (id
est census) exceptis tribus dragmis in se, due ergo
tertie multiplicate in duas tertias fiunt quattuor none
census. Et tres dragme dinunute in duas tertias rei
due radices sunt. Et tres diminute in duas tertias
faciunt duas radices, et tres in tres fiunt novem
dragme. Sunt ergo quattuor none census et novem
dragme exceptis quattuor radicibus que equantur ra-
dici. Adde ergo quattuor radices radici et erunt quin-
que radices que erunt equales quattuor nonis census
et novem dragmis. Cum ergo vis ut multiplices quat-
tuor nonas donec reintegres censum tuum, multi-
plica igitur omne quattuor in duo et quartam et mul-
tiplica novem in duo et quartam, et erunt viginti
dragme et quarta. Et multiplica quinque radices in
duo et quartam ;! et erunt undecim res et quarta. Fac
ergo per ea sicut est illud quod retuli tibi de media-
üione radicum , si Deus voluerit.
Et si dixerit : dragma et semis fuit divisa per ho-
minem et partem hominis, et evenit homini duplum
ejus quod accedit parti; erit ejus regula ut dicas :
homo et pars est unum et res. Est ergo quasi dicat
dragma et semis dividitur per dragmam et rem, et
perveniunt dragme due res. Multiplica ergo duas res
in dragmam et rem, et pervenient duo census et due
res que equantur dragme et semis, Reduc ea ad cen-
sum unum. Quod est ut accipias ex unaquaque re
( 286 )
ipsius medietatem , et dicas census : et res equantur
tribus quartis dragme. Appone ergo per ea secundum
quod ostendi tibi.
Quod si dixerit tibi : divisi dragmam per homines,
et pervenit eis res, deinde addidi eis hominem, et
postea divisi dragmam per eos, et pervenit eis minus
quam ex divisione prima secundum quantitem sexte
dragme unius. Erit ejus consideratio, ut multiplices
homines primos in diminutum quod est inter eos,
deinde multiplices quod aggregatur per illud quod
et inter homines primos et postremos, perveniet ego
census tuus. Multiplica igitur numerum primorum
hominum qui est res in sextam que est inter eos, et
erit sexta radicis. Deinde multiplica illud in nume-
rum hominum posteriorum qui est res et unum. Erit
ergo quod sexta census et sexta radicis divisa per
dragmam equatur dragme. Ergo reintegra illud , mul-
tiplica ipsum in sex, et erit quod habebis census et
radix, et multiplica dragmam in sex, et erunt sex
dragme. Census ergo et radix equantur sex dragmis.
Media ergo radices, et multiplica eas in se, et adde
cas super sex , et accipe radicem ejus quod aggregatur
et minue ex ea medietatem radicis. Quod ergo re-
manet est numerus hominum primorum , qui sunt
duo homines. -
Capitulum conventionum negociatorum .
Scias quod conventiones negotiationis hominum ,
que sunt de emptione et venditione et cambitione et
conductione et ceteris rebus, sunt secundum duos
(e 287 )
modos, cum quattuor numeris quibus interrogator
loquitur. Qui sunt pretium et appretiatum secundum
positionem , et pretium et appretiatum secundum
querentem. Numerus vero qui est appretiatum se-
cundum positionem , oppomitur numero qui est pre-
tium secun dum querente
t numerus qui est pre-
tium secundum positionem opponitur numero qui
est appretiatum ; secundum querentem. Horum vero
quattuor numerorum tres semper manifesti et noti,
et unus est ignotus, qui est ille qui verbo loquentis
notatur per quartum, et de quo interrogator querit.
Regula ergo hec est ut consideres tres numeros mani-
festos. Impossibile est enim quin duo eorum sint
quorum unusquisque suo com'pari est oppositus.
Multiplica ergo unumquemque duorum numerorum
apparentium oppositorum in alterum et quod perve-
niet divide per alterum numerum, cui numerus igno-
tus opponitur. Quod ergo perveniet est numerus
ignotus pro quo querens interrogat, qui etiam est
oppositus numero pes quem dividitur. Cujus exem-
plum secundum primum modum eorum, est ut que-
rens interroget et dicat : decem caflicii sunt pro sex
dragmis : quot ergo perveniet tibi pro quattuor
dragmis ? Sermo itaque ejus qui est decem caflicii , est
numerus appreciati secundum positionem, et ejus
sermo qui est sex dragnie, est numerus ejus quod est
pretium secundum positionem. Et ipsius sermo quo
dicitur quantum te contigit, est numerus ignotus
appretiati secundum querentem. Et ipsius sermo qui
est per quattuor dragmas et numerus qui est pretium
secundum querentem. Numerus ergo appretiati qui
( 288 )
est decem caflicii opponitur numero qui est pretium
secundum querentem, quod est quattuor dragme.
Multiplica ergo decem in quattuor qui sunt oppositi
et manifesti, et erunt quadraginta ; ipsum itaque per
album numerum mani m divide, qui est pretium
secundum Un. + est sex dragme. Erit
ergo sex et due tertie qui est numerus ignotus , qui
est sermo dicentis quantum. Îpse namque est appre-
tiatum secundum querentem , et opponitur sex qui
est pretium secundum positionem.
Modus autem secundus est sermo dicentis : decem
sunt pro octo; quantum est pretium quattuor ? aut
forsitan dic , quattuor eorum quanti pretii sunt. De-
cem ergo est numerfus appretiati secundum positio-
nem. Et ipse opponitur numero qui est pretii ignoti ,
qui notatur per verbum illius quantum , et octo est
numerus qui est pretium secundum positionem. Ipse
namque opponitur numero manifesto qui est appre-
tiati qui est quattuor. Multiplica ergo duorum nu-
merorum manifestorum et @ppositorum unum in
alterum, sic quattuor in octo, et erunt triginta duo.
Et divide quod perveuiet per alium numerum mani-
festum , qui est apppretiati et est decem. Erit ergo
quod perveniet tres et quinta, qui est numerus qui
est appretiatum. Et ipse est oppositus decem per
quem divisus fuit, et similiter erunt omnes conven-
tiones negotiationis et earum regule.
Quod si aliquis querens interrogaverit et dixerit
quemdam operarium conduxi in mense pro decem
dragmis, qui sex diebus operatus est. Quantum ergo
contigit eum? Tu autem jam scivisti quod sex dies
( 289 )
sunt quinta mensis, et quod illud quod ipsum con-
tingit ex dragmis est secundum quantitatem ejus quod
operatus est ex mense. Ejus vero regula est, quod
mensis est triginta dies quod est appretiatum secun-
dum positionem, et sermo ejus qui est decem est
pretium secundum positionem. Ejus vero sermo qui
est sex dies, est appretiatum secundum querentem,
Et sermo ejus quantum contigit, est pretium secun-
dum querentem. Multiplica ergo pretium secundum
positionem, quod est decem, in appretiatum secun-
dum querentem, quod est ei oppositum et est sex, et
pervenient sexaginta. [psum ergo divide per triginta,
qui est numerus qui est appretiatum secundum posi-
tionem. Erit ergo illud dragme, quod est pretium
secundum querentem. Et similiter sunt omnia quibus
homines inter se conveniunt in negotiatione , secun-
dum cambium et mensurationem et ponderationem.
Liber hic finitur. In alio tamen repperi hec interposita.
suprascriplis.
Quod si quis dixerit tibi : divisi decem in duas
partes, et multiplicavi unam duarum sectionum in
se, et fuit quod pervenit equale alteri octuagies et
semel , erit ejus regula ut dicas : decem excepta in se
fiunt centum et census exceptis viginti rebus que
equantur octoginta uni rei. Restaura ergo centum et
adde viginti radices octuaginta uni et erunt centum
et census , que erunt equales centum et uni radici.
Radices ergo mediabis et erunt quinquaginta et se-
I. 19
(290 )
mis. Multiplica ergo eas in se, et erunt bis mille et
quingente et quinquaginta et quarta. Ex quibus minue
centum , et remanebunt bis mille et quadringinta et
et quarta. Hujus itaque accipe radicem , que est qua-
draginta novem et semis, quam minuas ex medietate
radicum, que est quinquaginta et semis, et remanebit
unum, qui est una duarum sectionum.
Si autem aliquis dixerit : divisi decem in duas
partes et multiplicavi unam duarum partium in de-
cem et alteram in se, et fuerunt equales, erit hec
regula ut multiplices rem in decem, et erunt decem
radices, deinde multiplica decem excepta rein se, et
erunt centum et census exceptis viginti rebus que
equantur decem radicibus. Oppone ergo per eas.
Quod si dixerit : due tertie quinte census septime
radicis ipsius sunt equales, tota radix equatur quat-
tuor quintis census et duabus tertiis quinte ipsius ,
qua est quattuordecim partes de quindecim , erit
hujus regula ut multiplices duas tertias quinte in
septem ut radix compleatur, due vero tertie quinte
sunt due partes de quindecim. Multiplica igitur quin-
decim in se et erunt ducenta et vigimti quinque,
et quattuordecim in se et erunt centum et nona-
ginta sex. Minue igitur ex ducentis viginti quinque
duas tertias quinte ipsius que est triginta , et erit
pars de quindecim , quam dividas per septimam di-
minutam ex centum nonaginta sex que est viginti
octo, et perveniet unum et quarta decima unius
que est media septima, si est radix census.
Si autem dixerit : multiplicavi censum in quadru-
plum ipsius, et pervenerunt viginti : erit ejus regula
(2g1 )
ut multiplices ipsum in se pervenit quinque. lpse
namque est radix quinque.
Quod si dixerit : est census quem in sui tertiam
multiplicavi, et pervenit decem; erit ejus conside-
rauo, quoniam cum tu multiplicas ipsum in se per-
venit triginta : dic ergo quod census est radix tri-
ginta.
Si dixerit : est census quem in quadruplum ipsius
multiplicavi, et pervenit tertia census primi, erit ejus
regula, quoniam si tu multiplicaveris ipsum in duo-
decuplum ipsius, perveniet quod erit equale censui :
quod est medietas sexte in tertiam.
Quod si dixerit : est census quem maultiplicavi in
radicem ipsius, et pervenit triplum census primi, erit
ejus consideratio , quoniam cum tu multiplicas radi-
cem census in tertiam ipsius, pervenit census : dic
igitur quod istius census tertia est radix ejus. Et ipse
est novem. Si vero dixerit : est census cujus tres ra-
dices in ipsius quattuor radices multiplicavi et per-
venit census et augmentum quadraginta quattuor, erit
regula hujus : quoniam cum tu multiplicas quattuor
radices in tres radices fiunt duodecim census, qui
sunt equales censui, et quadraginta quattuor drag-
mis. Ex duodecim igitur censibns, projice censum
unum; remanet ergo undecim census equales qua-
draginta quattuor : divide itaque quadraginta quat-
tuor per undecim, et perveniet unus census qui est
quattuor.
Et similiter si dixerit : est census cujus radix in
quattuor radices ejus multiplicata reddit triplum cen-
sus et augmentum quinquaginta dragmarum ; erit ejus
+
le 19
(‘-a9a: }
regula, quoniam radix una in quattuor radices mul-
tiplicata facit quattuor census qui equantur triplo
censui illius radicis, et quinquaginta dragmas. Ergo
projice tres census ex quattuor censibus, et remane-
bit census qui erit equalis quinquaginta dragmis. [pse
enim est census; cum ergo multiplicabis radices quin-
quaginta in radices quattuor, quinquaginta perveniet
triplum census, et augmentum quinquaginta dragma-
rum.
Quod si dixerit : bi est census cui addidi viginti
dragmas , et fuit quod pervenit equale duodecim ra-
dicibus census, erit ejus regula, quoniam dicis quod
census et viginti equantur duodecim radicibus : ergo
media radices et multiplica eas in se, et minue ex eis
viginti dragmas, et assume radicem ejus quod rema-
net. Îpsam ergo ex medietate radicum que est sex
minue. Quod igitur remanet est radix census, quod
est duo , et census et quattuor.
Si vero dixerit : multiplicavi tertiam census in quar-
tam ipsius, et rediit census : erit ejus regula : quo-
niam cum multiplicas tertiam rei in quartam rei,
pervenit medietas sexte census que equatur rei. Ergo
census est duodecim res, et ipse et census.
Quod si tibi dixerit : est census cujus tertiam et
dragmam multiplicavi in quartam ipsius et duas drag-
mas , el rediit census, et augmentum tredecim drag-
marum erit ejus consideratio ut muluüiplices tertiam
rei in quartam rei, et perveniet medietas sexte census,
et dragmam in quartam rei, et perveniel quarta rei,
et duas dragmas terliam rei, et pervenient due ter-
tic rei, et dragmam in duas dragmas et erant due
(293 )
dragme. Erit ergo totum illud medietas sexte census
et due dragme; et undecim partes duodecim ex ra-
dice, que equantur radici et tredecim dragmis. Pro-
jice ergo duas dragmas ex tredecim et remanebunt
undecim. Et projice undecim partes ex radice, et re-
manebit medietas sexte radicis, et undecim dragme
qui equantur medietati sexte census. Îpsum ergo
reintegra quod est ut ipsum in duodecim multiplices
et multiplices omne quod est cum eo in duodecim. Per-
veniet ergo quod census equatur centum et triginta
duabus dragmis et radici. Oppone ergo per ea.
Quod si dixerit est census cujus tertiam et quartam
projeci , et insuper quattuor dragmas , et multiplicavi
quod remassit in se, et quod pervenit fuit equale
censui, et augmento duodecim dragmarum. Hujus
regula erit, ut accipias rem et auferas tertiam et
quartam ex eo, et remanebunt quinque duodecim
partes rei. Er minue ex eis quattuor dragmas , et re-
manebunt quinque duodecime partes rei exceptis
quattuor dragmis. Eas igitur in se multiplica ; erunt
ergo quinque partes in se multiplicate , viginti
quinque partes centesime quadragesime quarte cen-
sus. Postea multiplica quattuor dragmas exceptas in
quinque partes duodecimas rei duabus vicibus, et
erunt quadraginta partes, quarum queque duodecim
sunt res una, et quattuor dragme diminute in quat-
tuor fiunt sedecim dragme addite , fiunt ergo quadra-
ginta partes tres radices et tertia radicis diminute.
Pervenient ergo tibi viginti quinque partes centesime
quadragesime quarte census , et sedecim dragme, ex-
ceptis tribus radicibus, et tertiam que equantur ra-
( 294 )
diai, et duodecim dragmis. Per eas ergo oppone,
projice igitur duodecim ex sedecim, et remanent
quattuor dragme, et adde tres radiceset tertiam radicis,
et pervenient tibi quattuor radices et tertia radicis ,
que equantur viginti quinque partibus centesimis
quadragesimis quartis census, et quattuor dragmis.
Oportet igitur ut censum tuum reintegres. Ipsum
ergo multiplica in quinque et decem, et novem
partes vigesimas quintas donec reintegretur, et mul-
tüiplica quattuor dragmas tres in quinque et decem et
novem partes. Erunt ergo viginti dragme et per una
vigesima quinta. Et multiplica quattuor radices et
tertiam in quinque et decem et novem partes vigesi-
mas quintas. Erunt ergo viginti quattuor radices et
viginti quattuopartes vigesimas quintas radicis. Me-
dia ergo radices. Erunt ergo duodecim radices , et
duodecim partes vigesime quinte. Multiplica ergo eas
in se, et erunt centum et quinquaginta quinque et
quadringente et sexaginta novem partes sexcentesime
et vigesime quinte. Minue ergo ex eis viginti tres et
partem vigesimam quintam que est cum censu , et
remanebunt centum et triginta duo et quadraginte
ct quadringinta quattuor partes sexcentesime et vige-
sime quinte. Ejus itaque accipe radicem que est un-
decim et tredecim partes vigesime et quinte. Ipsam
ergo medietati radicum que est duodecim et duode-
cim partes vigesime quinte adde. Erit ergo illud vi-
ginti quattuor, qui est census quem queris.
Si vero dixerit : est census quem in duas tertias
multiplicavi et pervenit quinque : erit ejus conside-
ratio ut multiplices rem aliquam in duas tertias rei
(295)
et sint due tertie census equales quinque. Ipsam ergo
reintegra per equalitatem medietatis ipsius, et adde
supra quinque ipsius medietatem , et habebis censum
equalem septem et semis. Radix ergo ejus est res
quam multiplicabis in duas tertias et perveniet quin-
que.
Quod si dixerit tibi : duo census sunt inter quos
sunt due dragme , quorum minorem per majorem di-
visi , et evenit ex divisione medietas. Erit ejus regula
ut multiplices rem et duas dragmas in id quod ex di-
visione pervenit quod est medietas , et erit quod per-
veniet medietas rei et dragma que equantur rei.
Projice ergo medietatem cum medictate, remanet
dragma que equantur medietati rei. Duplica eas. Ergo
habebis rem que equatur duabus dragmis, et ipsa
est unus duorum censuum. Et alter census est quat-
tuor.
Si autem dixerit : multiplicavi censum in tres ra-
dices , et pervenit quintuplum census ; quod est quasi
dixisset multiplicavi censum in radicem suam, et
multiplicavi censum in radicem suam, et fuit quod
pervenit equale censui et duabus tertiis. Ergo radix
et census est due dragme et septem none.
Quod si dixerit tibi : est census cujus projeci ter-
tiam , deinde multiplica residuum in tres radices cen-
sus primi, et rediit census primus. Erit ejus regula :
quoniam cum tu multiplices totum censum ante pro-
jecionem sue tertie in tres radices cjus , pervenit cen-
sus et semis , quoniam due tertie cjus multiplicate in
tres radices ejus faciunt censum. Ergo ipse totus mul-
tiplicatus in tres radices ejus, est census et semis.
(296 )
Ipse ergo totus multiplicatus in radicem unam redit
census medietatem. Ergo radix census est medietas.
Et census est quarta. Tertie ergo census due sunt
sexta. Et tres radices census est dragmam et semis.
Quotiescumque igitur multiplicas sextam in drag-
mam et semis, pervenit quarta que est census tuus.
Sin autem dixerit, est census cui abstuli quattuor
radices , deinde accepi tertiam residui, que fuit equa-
lis quattuor radicibus : census igitur est ducenta et
quinquaginta sex : erit ejus regula. Quia enim scis
quod tertia ejus quod remanet est equale quattuor
radicibus ejus, et sic illud quod remanet est equale
duodecim radicibus. Ergo adde quattuor radices quas
prius abstulisti, et erit sedecim radices. Ipse enim
est radix census.
Quod si dixerit est census de quo radicem suam
projeci et addidi radici , radicem ejus quod remansit,
et quod pervenit fuit due dragme. Ergo hec radix
census et radix ejus quod remansit , fuit equale dua-
bus dragmis, Projice ergo ex duabus dragmis radicem
census. Erunt itaque due dragme , excepta radice, in
se multiplicate. Quattuor dragme et census , exceptis
quattuor radicibus , que equantur censui radice dimi-
nuta. Oppone ergo per eas. Et ergo census et quattuor
dragme que equantur censui et tribus radicibus. Pro-
jice ita censum cum censu, et remanebunt tres radi-
ces equales quattuor dragmis. Ergo radix equatur
dragme et tertie, et census est dragma et septem none
dragme unias.
Et si dixerit : est census ex quo project tres radices
suas , deinde residuum in se multiplicavi et pervenit
( 297 )
census. Jam ergo scis quod illud quod remanet est et
radix, et quod census est quattuor radices, et ipse est
sedecim dragme.
Si quis autem tibi dixerit : multiplicavi censum in
duas tertias ipsius et pervenit quinque : erit ejus re-
gula, quoniam cum multiplicas ipsum in se, pervenit
septem et semis. Multiplica igitur duas tertias radicis
septem et semis, quod est ut multiplices duas tertias
in duas tertias , perveniet ergo quattuor none. Quat-
tuor ergo none multiplicate in septem et semis sunt
tres et tertia. Ergo radix trium et tertia, est due
tertie radicis septem et semis. Multiplica igitur tres
et tertiam in septem et semis, et pervenient viginti-
quinque dragme , cujus radix est quinque.
Parmi les manuscrits de la bibliothèque royale,
qui contiennent l'ouvrage précédent et que nous
avons cités au commencement de cette note, il en est
un (Supplement latin, n° 49 in-folio) intitulé Mathe-
matica, qui mérite une attention particulière. Ce
manuscrit, sur lequel nous aurons l’occasion de re-
venir souvent, a appartenu à Boulliau et contient un
grand nombre de pièces scientifiques intéressantes.
Voici le catalogue de ces pièces tel qu’il se trouve au
commencement de ce volume.
In isto volumine sunt ifrascripti Bbri, imprimis :
Liber Theodosii de speris , et habet partes tres, .
1 Ce RS TA 6
Liber Autoloci de spera mota, f. 19.
Liber Esculei de ascensionibus, f. 22.
( 298 )
Cordam per archum et archum per cordam inve-
nire, f. 23.
Liber quem edidit Thebit, filius Chore, de his quæ
indigent expositione antequam legatur ei
tus , f. 24.
Liber Theodosii de locis in quibus morantur homi-
nes , f. 2).
Liber Arsamitis de mensure"circuli, f. 29.
Epistola Abuiafar, Ameti fihi Josephy, de arcubus
similibus, f. 30.
Liber de quinque essentiis quem Jacob Alchildus,
filius Ysaac , compilavit ex dictis Aristotelis, f. 32.
Liber Miley de figuris spericis : sunt tres tractatus ,
f. 33, 46, 49.
Verba filiorum Moysi, filii Sechir, 1. Maumeti Ha-
meti Hasen, f. 55. |
Epistola Ameti, filii Josephy, de proportione et pro-
portionalitate , f. 64.
Liber Jacob Alkindi de causis diversitatum aspectus
et dandis demonstrationibus geometricis super eas,
f..99.
Tractatus Euclidis (immo Ptolemæi) de speculis,
f.. 8a,
De exitu radiorum et conversione eorum, f. 83.
Sermo de speculis, editus a Tideo, filio Theodor ,
f. 84.
Principia Apollonii de pÿramidibus, f. 86.
«+ Liber de aspectibus Euclidis, f. 89.
Liber Abaci super decimum Euclidis, f. 03.
Liber Maumeti, filii Moysi Alchoarismi, de algebra
et almuchabala, f. 111.
(299 )
Liber Abhabuchri qui dicebatur Deus, de mensura-
tione terrarum, translatus a magistro Ghirardo de
Cremona , f. 117.
Liber Asaidi Abuochmi, f. 126.
Liber Aderameti, f. 126.
Liber augmenti et diminutionis, vocatus numeratio
divinationis (id est positione falsa), quem Abraham
composuit, f. 127.
Liber Jacob Alkindi philosophi, de gradibus, f. 135.
Tractatus Thebit, fil Chore , in motu accessionis et
recessionis, f. 141.
Liber Alpharabii de scientiis, translatus a magistro
Ghirardo predicto, f. 144.
Liber Noe de hortis et plantationibus, f. 152.
Forma tabularum et ordinis earum et nominationis
mensuum in Capitibus suis et nominationis mansio-
num in els , f. 153.
(Sen) +
NOTE XIIL.
( PAGES 123 et 139.)
Dans la première édition de ce volume, j'avais
annoncé (p. 129 et 268), sur la foi d’un article in-
séré dans le Journal Asiatique (Mai 1834), qu'il pa-
raissait certain que les Arabes avaient connu et traité
les équations du troisième degré, et j'avais exprimé
le regret que le manuscrit de la bibliothèque du roi,
que l’on assurait contenir cette découverte, füt,
toujours resté entre les mains de la personne qui
l’avait annoncée (1). Depuis lors ce manuscrit a été
rendu à la bibliothèque, et j’ai pu l’étudier. Le frag-
ment que l’on avait annoncé dans le Journal Asia-
tique se trouve à la fin du manuscrit arabe n° 1104
(Ancien fonds) de la bibliothèque royale, et (comme
on l'avait déjà dit) ne contient pas de nom d’auteur.
Mais j’ai reconnu que le manuscrit arabe n° 1136
(Ancien fonds) de la même bibliothèque contenait
tout l'ouvrage dont on n’avait fait connaître qu’un
fragment, et que cet ouvrage est un traité d’algèbre
(1) 11 résulte des régistres de la bibliothèque royale que l’auteur de
l’article inséré dans le Journal Asiatique a emprunté le manuscrit dont
il s’agit le 27 Février 1834, et ne l’a rendu que le 27 Octobre 1836;
c'est-à-dire lorsque tout mon premier volume était imprimé.
( 301 }
dont l’auteur (Omar Alkheyamy (1) de Nisapour) est
indiqué sur le titre. Dans cet ouvrage, Omar classe
les équations en équations à deux, à trois et à quatre
termes, faisant autant de cas qu’il a de manières
de les partager en deux parties (ou en deux mem-
bres) égales entre elles, lorsqu'on suppose tous les
termes positifs, et qu'on exclut le cas du second
membre égal à zéro. Les équations ne sont pas même
ordonnées suivant les puissances de la variable; et
une équation complète du second degré se trouve
dans la même classe qu’une équation à trois termes du
troisième degré. Cette classification inexacte aurait
seule suffi pour empêcher au géomètre arabe de ré-
soudre les équations du troisième degré. En effet,
il n'y a dans ce manuscrit que la construction
géométrique de ces équations, et l’on y montre seule-
(1) Cet ouvrage se trouse indiqué dans le catalogue imprimé des
manuscrits de la bibliothèque du roi, sous le titre de « Tractatus brevis
de algebra sive de is ad quæ arithmeticæ ope pervenire nequit, Auc—
tore Jiaddino Nisaburensi » (Catalogus manuscript. bibl, reg., tom. I,
p. 222). Comme le premier feuillet de ce manuscrit est rempli
d'écriture presque effacée (ce qui en rend la lecture très difficile) , et
qu’il porte plusieurs noms, j'ai consulté à ce sujet M. Reinaud , qui avec
son obligeance accoutumée m'a répondu qu’il croyait que le mot jiaddin
était une altération d’un des titres qu'après le dixième siècle prenaient
les docteurs musulmans en recevant leurs derniers grades, et que le
nom de l’auteur était celui que j'ai donné ci-dessus. Hadji-Khalfa, dans
son dictionnaire bibliographique, parle de cet Omar au mot #/gèbre.
Abou’lfeda cite Omar Alkheyamy parmi les astronomes attachés à
Fobservatoire fondé par Malek-Schah dans la seconde moitié du on-
( 302 )
ment comment, pour l'effectuer, il faut employer les
propriétés connues des sections coniques. On peut
donc croireque les Arabes n’ont pas connu la résclu-
üon des équations du troisième degré (1), et qu'ils
n’en ont traitéaucune algébriquement : ilsse sont bor-
nés à les représenter par des courbes, comme les
Grecs l'avaient fait dans plusieurs cas. Mais construire
une équation d'après les propriétés de certaines courbes,
ce n’est pas la résoudre. Cela est si vrai, qu’on sait
construire les équations de tous les degrés, et qu’on
ne peut les résoudre généralement que lorsqu'elles
ne surpassent pas le quatrième degré. L'auteur de
l’article déjà cité a annoncé plus récemment que les
Arabes avaient connu la variation (2). Mais comme,
malgré les doutes qui ont été émis publiquement à ce
zième siècle, Il est vrai que dans l'édition d’Adler il y a Zbrahym
Alkheyamy (Abulfedae annales muslémici, tom. III, p. 236-238).
mais le manuscrit autographe d’Abou’ffeda , qui est à la Bibliothèque
Royale, porte Omar Alkheyamy. M
(1) Le manuscrit de la bibliothèque de Leyde, cité par Montucla
(Histoire des Mathématiques, tom. I, p. 383.— Catalogus bibl. publicæ
univers. Lugd.-Batav., 1726, in-fol., p. 454), ne saurait contenir que
l'ouvrage d'Omar Alkheyamy dont je viens de parler : le sujet est le
même , et la différence entre Omar, et Omar ben 1brahym est trop peu
de chose pour qu’elle doive nous arrêter. Au reste, je tächerai de me
procurer une copie du manuscrit de Leyde, et je ferai connaitre le ré-
Sultat de mes recherches sur ce sujet daus l'édition de l'ouvrage d’Omar
Alkhéyamy . que je compte publier dès que mes occupations me le
permettront.
(2) Journal Asiatique, Novembre 1835, p. 429.
(305: )
sujet, il a coutinué à garder (1) le manuscrit qu'il dits
contenir cette découverte (ce qui m’a empêché de
pouvoir la vérifier ); et comme le même auteur a déjà
annoncé que les Arabes avaient inventé la géométrie
de position et traité les équations du troisième degré,
ce qui après un plus mür examen, a été trouvé
inexact, il est prudent de suspendre au moins tout
jugement sur la découverte de la variation, jusqu’à ce
que d’autres personnes aient pu en constater l’exis-
tence.
(1) Ce manuscrit, qui est le n° 1138 de la bibliothèque royale
(MSS. arabes, ancien fonds), a été prêté à la même personne le 27
Octobre 1835, et aujourd’hui (3 Avril 1837) il n’a pas encore été
rendu à la bibliothèque royale, Il serait d'autant plus utile qu’on püt
le consulter et l'étudier, qu'il se trouve porté comme une traduction
de l’Ælmageste de Ptolémée dans le catalogue imprimé des manuscrits
de la bibliothèque du roi (t. 1, p. 222), et non pas comme un #/ma-
geste d’Aboul Wefa, à qui on l’a attribué dans le Journal Asiatique
(Novembre 1835, p. 431).
( 304 )
NOTE XV.
( PAGE 125. )
Liber augmenti et diminutionis vocätus nume-
ratio divinationis, ex eo quod sapientes Indi
posuérunt, quem Abraham (1) compilavit et
secundum librum qui Indorum dictus est
composuit. (2)
In ipso est capitulum de censibus. Deinde de ne-
gotiatione; postea de donationibus ; deinde de pomis;
(x) On pourrait croire que cet Abraham est le fameux Abraham
Aben Ezra qui a écrit le traité De nativitalibus et d'autres ouvrages de
aciences. Effectivement, l'ouvrage que nous publions ici lui est attribué
dans l'index authorum qui se trouve à la fin du quatrième volume du
catalogue imprimé des manuscrits de la bibliothèque du roi (à l’article
Abraham Aben Ezræ); mais il nous reste encore quelques doutes sur le
véritable auteur de ce traité.
(2) Nous ajoutons ici, en bas de chaque page, la traduction en lan-
gage algébrique des opérations indiquées dans le texte. Nous n'avons pas
ajouté cette traduction au traité de Mohammed ben Musa, parce
qu'elle se trouvait déjà dans l'édition de cet ouvrage donnée par M.Rosen.
On sait qu'anciennement le mot census signifiait l’inconnue à la seconde
puissance, et que la res, c'était l’incornue elle-même. On verra quel-
quefois ici ces deux dénominations confondues dans des équations qui ,
ne contenant que la seconde puissance de l'inconnue et point de pre-
mières puissances, peuvent ètre considérées comme étant du premier
ou du second degré, lorsqu'on ne tient pas compte du nombre des
racines.
(: 365.)
postea de obviatione; deinde de cambitione; postea
de decenis et frumento et ordeo; deinde de mercatis,
et ad ultimum de anulis.
Hic post laudem Dei inquit. Compilavi hunc li-
brum secundum quod sapientes Indorum adinvene-
runt de numeratione divinationis, utilem in ipso
consideranti et studenti, et perseveranti in eo, et
intelligenti ejus intentionem. Ex eo igitur est : est
census de quo ejus tertia dempta, et quarta, fuit octo
quod remansit (1). Quantus est census? Capitulum
numerationis ejus est (2) ut ex duodecim assumas
lancem; et tertia et quarta ex eo consurgunt, et de-
mas ejus tertia et quarta, que sunt septem, et remane-
bit quinque. Per ipsum igitur oppone octo, residuum
scilicet census et apparebit te jam errasse per tria
diminuta : serva ea, deinde assume lancem secundam
a prima divisam, que sit ex viginti quattuor, et deme
ejus tertiam et quartam que sunt quattuordecim, et
I I
(r) 23 — — 2? —
3 4
LP 8.
(a) Si l’on suppose x* = r2, on aura
12—4— 3—5);
8 — 5— 3 —e— I" erreur.
Si l’on suppose x? — 24, on aura
24 — 8 —6— 10;
10 — 8 — 2 — d — II erreur.
20
( 306 )
remanebit decem. Oppone ergo per eum octo resi-
duum scilicet census. Apparet itaque te jam errasse
per duo addita. Multiplica igitur errorem lancis pos-
treme qui est duo in lancem primam, que est duode-
cim, et perveniet 24. Et muluiplica errorem lancis
prime, qui est tria, in lancem postremam, que est 24,
eterit 72. Aggrega ergo 24 et 72, eo quod unus error
est diminutus et alter additus, Si enim utrique essent
diminuti aut additi demeres minus ex majore. Post-
quam ergo aggregasti viginti quattuor et septuaginta
duo, fuerit quod aggregatum est nonaginta sex, deinde
aggrega duos errores qui sunt tria et duo, et perve-
niet quinque; deinde igitur nonaginta sex per quin-
que qui est ille ex quo pervenit, et perveniet übi
decem et novem dragme et quinta dragme.
Hec propterea regula est (1) ut ponas duodecim ,
rem ignotam, et demas ejus tertiam et quartam, et
remanebit quinque, dic ergo in quam rem multipli-
catur quinque donec redeat duodecim ? Ipse enim est
res ignota. Illud autem est duo et due quinte : mul-
üplica igitur duo et duas quintas in octo, et erit
decem et novem et quinta.
12 12
121=—=—=6,
3 4
2
5x (2+F)= 2.
(2 + 2) 8 — 19 += =
307 )
Capitulum aliud de eodem.
Quod si dixerit aliquis : est census de quo dempte
fuerunt ejus tertia et quattuor dragme , et quarta ejus
quod remansit, et residuum fuit viginti dragme (1).
Assume (2) ergo lancem ex duodecim, ipse est ex
quo consurgit tertia et quarta, et deme ejus tertiam
et remanebunt octo dragme; deinde perfice ex eis
quattuor dragmas, et remanebunt qualtnor; post
deme quartam ejus quod remanebit, et remanebunt
tria. Per ea igitur oppone viginti que excensu reman-
serunt. Tunc jam errasti per decem et septem dimi-
nuta. Postea accipe lancem secundam divisam a pri-
ma que sit ex viginti quattuor, et perfice tertiam ejus
que est oËto, remanebit sedecim; post minue quat-
\ + æ°? , I 2 : 2
(x) 2 ——— 4 —— | 2 ——2 — 4 | = 20.
/ n / mn
» 4 3
(2) Si l'on suppose +? — 12, on aura
2 — RS )=5s,
20 — 3 — 179 —= e = Îre erreur,
Si l’on suppose 2* — 24, on aura
14 .
4 —— = a — #4 | =—=19;
3 ;
— 9 = 11 =e = JIe erreur.
24e—ic __ 408 — 132 : ,
LEGS 0 27
e— c! 19 — It
20.
(308 )
tuor dragmas, et remanebit duodecim; deinde deme
quartam ejus quod remanet, que est tria, et remanebit
novem. Oppone ergo per ipsum viginti : tunc jam
errasti per undecim diminuta. Multiplica igitur erro-
rem postreme lancis, qui est undecim, in lancem
primam, que est duodecim, et erit quod perveniet
centum et triginta duo. Deinde multiplica errorem
lancis prime, qui est decem et septem, in lancem
postremam, que est viginti quattuor, et quod perve-
niet erit quadringinta et octo; deinde minue mino-
rem duorum numerorum ex majore eorum quorum
utrique errores sunt diminuti. Quod est ut minuas
centum et triginta duo ex quadragintis et octo, et
remanebunt ducenta et septuaginta sex; deinde mi-
norem duorum numerorum ex majore ipsorum mi-
nue ; quod est ut minuas undecim ex decem êt septem,
et remanebit sex ; divide ergo ducenta et septuaginta
sex per sex, et perveniet tibi quadraginta sex, qui est
numerus census quem vis scire.
Hujus quoque est regula. Que est (1) ut accipias
rem et demas ejus tertiam , et remanebunt due tertie
rei exceptis quattuor dragmis. Minue ergo quartam
duarum tertiarum exceptis quattuor dragmis que est
309 )
sexta rei et dragma , et remanebit medietas rei excep-
tis tribus dragmis , que equantur viginti. Tria igitur
adjunge viginti, et erunt viginti tria; habebis ergo
mediatem rei, que equatur viginti tribus. Ergo res
equatur quadraginta sex.
Questio secunda. Quod si dixerit : est census ex
quo dempte fuerunt quattuor dragme et quarta ejus
quod remansit et quod remansit fuit duodecim (1).
Accipe ergo ren et minue ex ea quattuor dragmas,
habes ergo rem exceptis quattuor dragmis. Tunc mi-
nue quartam ejus, et remanebunt tres quarte rel
exceptis tribus dragmis, que equantur duodecim. Ad-
juuge igitur tria duodecim et erunt quindecim. Ergo
habes tres quartas rei, que equantur quindecim.
Ergo res equatur viginti.
Capitulum aliud in eodem.
Quod si dixerit : est census ex quo dempte fuerunt
quattuor dragme et quarta ejus quod remansit, et
quinque dragme et quarta ejus quod remansit, et
residuum fuit decem dragme, quantus (2) est census ?
3 pe
Y—=19, 7 —= 20.
& J
(2) 1°— &— "(#? —k4) )— 5 — (2 ls) = 10,
{ 310 )
Capitulum numerationis ejus est (1) ut accipias lan-
cem ex sedecim qui est numerus a quo denominatur
quarta et quarta. Minue ergo ex eo quattuor dragmas,
et remanebit duodecim ; et quartam residui, et re-
manebit novem; et quinque dragmas, et remanebit
quattuor; et quartam residui, et remanebunt tria.
Oppone ergo per ea postea decem, residuum sit
census. Tune jam errasti cum septem diminutis ,
serva ea; deinde assume lancem secundam a prima
divisam que sit ex triginta duobus, et perfice ex ea
quattuor dragmas, et remanebunt viginti octo; et
quartas ejus quod remanet , scilicet septem , et rema-
nebit viginti unum. Et minue quinque dragmas, et
remanebit sedecim. Et minue quartam ejus quod
remansit, et remanebit duodecim. Ergo oppone per
ipsum decem qui remanserunt ex censu, tune jam
errasti cum duobus additis. Multiplica autem duo in
lancem primam que est sedecim, et erunt triginta duo;
(u) Si l’on suppose 2° — 16, on aura 16 — 4 — 12,
12 4
12———=9,9—5—=4,4—- —= 3;
4 4
10— 3—= 7 —e—=l"" erreur.
| | . 28
Si l'on suppose x*— 32, on aura 32—4—28, 28— ——1
;
4
»
. x 16
21—9—= 16, 10———= 19;
4
12 — 10 —=2 = —= Il erreur.
32eHi6e 224 + 32 256 :
ms ul —_— Li — 28 + - —»?,
s
e + 27 7 9
(ME)
et multiplica errorem lancis prime qui est septem in
lancem secundam que est triginta duo et erit quod
perveniet ducenta et viginti quattuor; duos itaque
numeros ad invicem junge , et erunt ducenta et quin-
quaginta sex ; deinde adjunge unum duorum errorum
alteri quorum ipsi sunt diminuti et additi, et per-
venient novem ; divide ergo ducenta et quinquaginta
sex per novem et pervenient tibi viginti octo dragme
et quattuor none unius dragme.
Hujus quoque regula invenitur. Que est (1) ut po-
nas sedecim rem ignolam, et minuas ex ea quattuor
dragmas , et habebis rem exceptis quattuor dragmis.
Et deme residu quartam et remanebunt übi tres
quarte rei exceptis tribus dragmis. Et minue quinque
dragmas et habebis tres quartas rei exceptis octo
dragmis. Minue ergo quartam residui. Quarta vero
trium quartarum est octava et medietas octave. Et
quarta octo dragmarum est due dragme. Remanent
1 f3y 1 I
(es J=-rL- sp,
4 4 8 2 8
n 2
=Yÿ+— Y—/6—= 1:10, = — Y 16,
at Faso Sttron? 16
8 a) n (, 4
— — — y = 16 =16—= ÿ—'28 2) —
eue PS et does 3 2 LS
( 354)
ergo tibi quattuor octaye rei et medietas octave rei
exceptis sex dragmis, que equantur decem. Adde igi-
tur sex decem et erunt sedecim ; habes itaque quat-
tuor octavas rei et mediatem octave rei, que equan-
tur sedecim. Dic ergo quantum adjungetur quattuor
octavis rei et medietati octave rei donec redeat res ?
Hoc autem est novem partes sexte deeime, quibus
adjunges quantum est ejus septem none. Super se-
decim igitur adjunge quantum sunt septem ejus none
et erit quod perveniet viginti octo et quatluor none.
Quedam vero harum questionum investigantur se-
cundum regulam que vocatur infusa. Et ipsa est re-
gula Job, filii Salomonis divisoris (1). Non tamen
omnes per ipsam perducuntur. Ex eis vero est ejus
sermo qui dixit : Est (2) census cujus tertia et quat-
tuor ipsius dragme et quarta ejus quod remansit
sunt dempte, er residuum fuit viginti. Incipe igitur
cum questione ab ejus postremitate, et dic : cum ex
re minuitur quarta ejus, remanent tres quarte. Quan-
(x) Dicitur divisor qui res a defuncto relicta parütur, et hoc apud
Arabes ( Note marginale dumanuscrit ).
(319 )
tum ergo adjungitur tribus quartis donec redeat res ?
Invenies ergo illud esse quantum ejus tertia. Ergo
adjunge. viginti quantum est ejus tertia, et erit quod
perveniet viginti sex et due tertie, deinde adjunge
quattuor dragmas, et erunt triginta et due tertie.
Postea die : cum minuitur tertia rei remanent due
ejus tertie. Quantum ergo adjungitur duabus tertiis
donec redeat res? Invenies autem illud esse quantum
eorum est medietas. Adjunge ergo triginta et duabus
tertiis quantum est et eorum'medietas, et perveniet
quadraginta sex.
Et modus regule sermonis ejus est. Est{1i) census
ex quo dempta fuit ejus quarta et quinque dragme
et quarta ejus quod remansit, et residuum fuit de-
cem; diminue ergo ex re quartam sui et remanebunt
tres quarte. Quantum ergo adjungitur tribus quartis
donec redeat res? Invenies autem illud quantum est
ejus tertia. Adjunge igitur decem quantum est ejus
tertia, et erit quod perveniet tredecim et tertia.
Deinde adjunge quinque dragmas, et erit quod
perveniet decem et octo et tertia. Post deme quartam
a L.- :, I Le: = À d
(1) u? — r u — 5 ME dés
4
I 3 3
V—- #10; ME 7 rt Le 10434 13 0
4
| 1 23 : f
— sd =vLs—18 + -9 0 — 18 +=
4 gl 3
+ | = en D =
(314)
rei, et remanebunt tres quarte rei. Quantum ergo
adjungitur tribus quartis donec redeat res ? Invenies
autem illud quantu est ejus tertia. Adjunge ergo de-
cem et octo et tertie. Quantum est ejus tertia, et
erunt viginti quattuor et quattuor none.
Capitulum de eodem aliud.
Quod si dixerit : est census cui adjunxi tertia ejus
et quarta ejus quod aggfegatur , et fuit triginta. Quan-
tus est census (1)? Capitulum numerationis ejus
est ut assumas Jlancem que sit ex sex. Ei igitur ad-
junge ipsius tertiam, et perveniet octo; et adjunge
quartam ejus quod aggregatur (2) que est duo et erit
decem. Oppone ergo per ipsum triginta, et tunc jam
errasti cum viginti diminutis. Ergo hic vocatur error
primus. Deinde accipe lancem secundam divisam a
I I LI
(x) #+int (a+ — 30.
3 4 5
(2) Si l'on suppose 2° — 6, on aura
6 6 8
smart = = 10; 30 — 10 — 20 — e — Jr erreur:
4
Si l’on suppose z? — 12, on aura
1 12 6 12 Te 16
12 — = 16,12 + - — — 20;
3 sut 4
30 — 20 = 16 —e —= Il" erreur.
126— 6e 180
= = 1m#—z
e— 0! 10
( 3r9 )
prima que sit ex duodecim. Adjunge ergo ei tertiam
ejus et erit sedecim. Et quartam ejus quod aggregatur,
et erit viginti. Oppone ergo per ipsum triginta. Et
tunc jam errasti per decem diminuta. Hic ergo vo-
catur jam error secundus. Multiplica igitur hunc er-
rorem postremum in lancem primam , quod est decem
in sex, et erit quod perveniet sexaginta. Et multi-
plica errorem primum, qui est viginti, in lancem
postremam , quod est duodecim in viginti, et erunt
ducenta et quadraginta. Minue ergo minorem duo-
rum numerorum ex majore eorum quorum duo er-
rores sunt diminuti. Quod est ut minuas sexaginta ex
ducentis et quadraginta , et remanebunt centum et
octoginta. Deinde minue minorem duorum errorum
ex majore eorum, quod est ut minuas decem ex vi-
ginti, et remanebunt decem. Deinde ergo centum et
octoginta per decem, et pervenient tibi decem et
octo. Hic ergo est census quem VIs sCIre. |
Et est ejus regula hec (1) : ut assumas rem et ad-
jungas ei tertiam ejus, et habebis rem et tertiam rei
Et adjungas ei quartam ejus quod aggregatur que est
tertia rei, et habebis rem et duas tertias rei que
equantur triginta. Denomina ergo rem a re et duabus
tertis rei. Et illud est tres quinte. Accipe tres quintas
ex triginta que sunt decem et octo.
(36)
Capitulum de eodem aliud.
Quod si dixerit : est census cui adjunxisti tertiam
ejus et quattuor dragmas et quartam ejus quod aggre-
gatur, et quod pervenit fuit quadraginta dragme (1).
Capitulum numerationis ejus secundum augmentum
et diminutionem est (2) ut assumas lancem ex sex, et
adjungas ei tertiam ejus et quattuor dragmas, et quod
perveniet erit duodecim. Et adjunge quartam ejus
quod aggregatur, que est tria, et erit quindecim.
Per ipsum ergo oppone quadraginta. Et tunc jam er-
rasti cum viginti quinque diminutis. Deinde accipe
lancem secundam divisam a prima que sit ex duode-
cim. Adjunge ergo ei ejus tertiam que est quattuor,
et erit sedecim; et adjunge ei quattuor dragmas, et
perveniet viginti. Et adde quartam ejus quod aggre-
G) Rate i(r pit) do.
(2) Si l'on suppose x? — 6, on aura
.
6 12
— — . À un me Ire va A
6+s+a=n,12+ — = 18; 40—15=—=25—=e— 1" erreur.
#
Si l'on suppose x? = 12, on aura
12
12 + n + 4 — 20,
20
20 + = 25; 40— 25 = 15 = ce! = |] erreur.
4
12Cc— Ge! 210
—————— or,
e— 0! 10
(er)
gatur , que est quinque , et quod pervenit erit viginti
quinque. Ergo oppone per ipsum quadraginta. Et
tunc jam errasti per quindecim diminuta. Multiplica
ergo hec quindecim , que sunt error lancis postreme
in lancem primam, que est sex, eterit quod perve-
niet nonaginta; deinde multiplica errorem lancis
prime qui est viginti quinque , in lancem postremam
que est duodecim, ct quod perveniet erit trecenta.
Deme ergo minorem duorum numerorum ex majore
corum quorum duo errores sunt diminuti. Quod est
ut minuas nonaginta ex trecentis, et remanebunt du-
centa et decem. Deinde minue minorem duorum er-
rorum majore eorum. Quod est ut minuas quindecim
ex viginti quinque, et remanebunt decem; divide
ergo ducenta et decem per decem, et perveniet tibi
viginti et una dragma. Hic ergo est census quem vis
scire.
Et est ejus regula , que est (r) ut accipias rem et
adjungas el quantum est ejus tertia et quattuor drag-
mas, et habebis rem et tertiam rei et quattuor drag-
mas. Et adjunge quartam ejus quod aggregatur , et
( 318 )
habebis rem et duas tertias rei et quinque dragmas,
que equantur quadraginta , minue ergo quinque
dragmas ex quadraginta et remanebunt triginta
quinque. Habebis ergo rem et duas tertias rei, que
equantur triginta quinque. Quantum ergo est quod
equatur rei? Denomina rem ex re et duabus tertiis
rei. Illud ergo est tres quinte. Accipe ergo tres qnin-
tas ex triginta quinque, que sunt viginti unum.
Capitulum ejus aliud.
Quod si dixerit : est census cui adjunxisti quattuor
dragmas et medietatem ejus quod aggregatum fuit,
et qu'nque dragmas et quartam ejus quod aggregatum
fuit et fuit septuaginta dragme (1). Capitulum nume-
Q) 2444" +045 (04044045)
— "70.
Si l’on suppose 2? — 6, on aura
I
GA 5H SH (CHA +5 +5) 05,
4
70 — 29 = 45 —=e—]}f"erreur.
Si l'on suppose z* — 12, on aura
144484544364;
1 3
70— 36— -— 35 + _— e! —Il° erreur.
VA
( 319)
rationis ejus est ut assumas lancem que sit ex sex, et
adjungas ei quattuor dragmas , et erunt decem, et
medietatem ejus quod aggregatum quod est quinque,
et erunt quindecim; et quinque dragmas, et erunt
viginti; et quartam ejus quod aggregatur que est
quinque , et erunt viginti quinque. Per ea ergo oppo-
ne septuaginta. Et tunc jam errasti per qu'fdraginta
quinque diminuta. Et vocatur hic error primus.
Deinde accipe lancem secundam divisam a prima que
sit ex duodecim et adjunge ei quattuor dragmas , et
erunt sedecim , et medietatem ejus quod aggregatur ,
que est octo, et erunt viginti quattuor; et quinque
dragmas, et erunt viginti novem; et quartam ejus
quod aggregatur, que est septem et quarta et erunt
triginta sex et quarta. Oppone ergo per ea septuaginta
et tunc invenies te jam errasse per triginta tria et tres
quartas diminuta. Et vocetur hic error secundus.
Maultiplica igitur errorem lancis secunde , qui est tri-
ginta tria et tres quarte, in sex , qui est lans prima ,
et erit quod perveniet ducenta et duo et dimidium.
Deinde multiplica errorem lancis prime qui est qua-
draginta quinque , in lancem secundam , que est duo-
decim , et quod perveniet erit quingenta et quadra-
‘ginta. Minorem ergo duorum numerorum ex majore
minue. Quod est ut demas ducenta et duo et dimi-
dium ex quingentis et quadraginta, et remanebuni
trecenta et triginta septem et dimidium. Deinde mi-
nue minorem duorum errorum ex majore eorum,
quod est ut minuas triginta tria et tres quartas ex
quadraginta’ quinque , et remanebunt undecim et
quarta. Deinde ergo trecenta et triginta septem et di-
\
(.520:)
midium per undecim et quartam , et pervenient tibi
triginta dragme : hic igitur est numerus census quem
querebas.
Ejus quoque regula est (1) ut assumas rem et ad-
jungas quattuor dragmas , et habebis rem et quattuor
dragmas. Deinde adjunge ei medietatem ejus quod
aggregatür et habebis rem et medietatem rei et sex
dragmas. Post adde quinque dragmas et erunt res et
medietas rei et undecim dragme. Et adjunge quar-
tam ejus quod aggregalur que est tres octave rei et
due dragme et tres quarte, habebis ergo rem et sep-
tem -octavas rei et tredecim dragmas et tres quartas
dragme , que equantur septuaginta. Minue igitur tre-
decim dragmas et tres quartas ex septuaginta , et re-
manebunt quinquaginta sex et quarta. Deinde deno-
mina rem ex re et septem octavis rel. Invenies” ergo
illud duas quintas et duas tertias quinte. Assume ergo
ex quinquaginta sex et quarta, duas quintas ejus et
duas tertias quinte ipsius , et erit illud triginta.
Modus inveniendi per regulam que vocatur infusa
I 3"
(1) r+itirte=ir+6,
3 3
RP ET ir
3 3 3 7 3
TT TR ge AS RE
7 56 - = + (56 ")=3
LR TEEN EM ES
{ 3ar )
quod in sermone ejus est qui dixit : est (1) census
cui adjunxisti tertiam sui et quartam ejus quod aggre-
gatur, et fuit triginta. Capitulum numerationis ejus
est ut incipias a questionis postremitate. Deinde assu-
inas rem et adjungas ei quartam sui, et habebis rem
et quartam rei. Quantum ergo minuitur ex re et
quarta rei donec sit res ? Invenies autem illud quan-
tum est quinta ejus. Minue ergo ex triginta quintam
ejus , et remanebunt viginti quattuor. Deinde assume
rem secundam et adjunge ei tertiam sui, et habebis
rem et tertiam rei. Quantum ergo minuitur ex re et
tertia rei donec sit res ? Invenies vero illud quantum
est ejus quarta. Ergo deme ex viginti quattuor quar-
tam ejus, et remanebunt decem et octo.
Modus inveniendi quod est in sermone ejus qui di-
xit: est (2) census cui adjunxisti tertiam ejus et quat-
F I 7 re
i) a? + 0 + : (= —- : T0) 130;
l 1 5 1 30
LL ==2,2- 230; -27—-+-27— 30 = —04,
+ 4 4 2 4 )
I 4 I 4 24
La — 924, 2? — ( mes 5 ts
+) J 4 3 ” 4
(-332 7)
tuor dragmas et quartam ejus quod aggresatur, et
quod pervenit fuit quadraginta. Assume igitur rem et
adjunge ei quartam ipsius , et habebis rem et quar-
tam. Quantum ergo demitur ex re et quarta, donec
res redeat? Illud autem reperies quantum est ejus
quinta. Deme ergo quintam ex quadraginta , et re-
manebunt triginta duo. Deinde deme ex eis quattuor
dragmas, et remanebunt viginti octo. Post assume
rem secundam et adjunge ei tertiam ipsius , et habe-
bis rem et tertiam rei. Quantum ergo demitur ex re
et tertia rei donec redeat res? Illud autem invenies
equale quarte ipsius. Deme ergo ex viginti octo quan-
tum est quarta ipsius , et remanebit viginti unum.
Modus inveniendi quod est in sermone dicentis :
est (1) census cui adjunxisti quattuor dragmas et me-
dietatem ejus quod aggregatur, et quinque dragmas
ejus quod aggregatur , et quod pervenit fuit septua-
ginta, Assume (2) ergo rem et adjunge ei quartam
I t o] \ r.
(a+ + (+ o+5+5 (++: +4) + ;) 70.
2
I
) 2 , 2-1 Es RER
} RE | eut + 5 2
v* + = v, 2 + RAS T4) — y
(1925:)
ipsius, et habebis rem et quartam rei. Quantum ergo
demitur ex re et quarta rei donec sit res. Invenies
aytem illud equale quinte ipsius. Minue ergo ex
septuaginta quantum est quinta ejus, que est quat-
tuordecim, et remanebunt quinquaginta sex: deme
ex eis quinque dragmas, et remanebunt quinqua-
ginta unum. Deinde sume rem secundam et adjunge
ei medietatem sui, et habebis rem et medietatem
rei. Quantum ergo demitur ex re et medietate rei
donec sit res? Invenies autem illud equale terti ip-
sius. Minue ergo ex quinquaginta uno quantum est
ejus tertia, et remanebunt triginta quattuor. Deinde
minue quattuor dragmas, et remanebunt triginta.
Capitulum ejus de negociatione.
Quod si dixerit quidam : cum censu negociatus
est et duplatus est census ex quo donavit dragmam
unam. Deinde negociatus est cum residuo et duplatus
est. Et donavit ex eo duas dragmas. Postea negociatus
est cum residuo et duplatus est. Et donavit ex eo tres
dragmas. Et quod remansit fuit decem. Quantus ergo
( 324 )
fuit primus (1) census? Capitulum numerationis
ejus secundum augmentum et diminutionem est (2)
ut assumas lancem ex quattuor et duples eam, et
quod perveniet erit octo. Da igitur ex eo dragmam
unam et remanent septem. Ea ergo dupla et erunt
quattuordecim. Ex quibus dona duas dragmas et
remanebunt duodecim. Deinde dupla ea, et erunt
viginti quattuor. Ex quibus dona tres dragmas , et
remanebunt viginti unum. Oppone ergo per ea de-
cem que ex censu remanserunt. Tunc jam errasti
cum undecim additis. Deinde assume lancem secun-
dam que sit ex quinque, et dupla eam , et erit de-
cem; et da ex eis dragmam unam , et remanebunt
novem ; dupla ea et erunt decem et octo. Da ergo ex
eis duas dragmas , et remanebunt sedecim ; deinde
dupla ea; et erunt triginta duo. Da itaque ex eis tres
dragmas, et remanebunt viginti novem. Postea igi-
tur oppone decem residuo videlicet census. Tunc
jam errasti cum decem et novem additis. Multiplica
igitur lancem primam ; que est quattuor, in errorem
lancis secunde, qui est decem et novem, et erunt
(1) 2 (2{2 x? — 1) — 2) — 3 = :0.
, Si l'on suppose x? = 4, on aura
2(2(2.4—1)—2)—3—ar;21—10—= 11 =e—=]l"*crréur.
Si l'on suppose 1? — 5, on aura
2(2(2.5— 1)2)— 3 = 29; 29 — 10 = 19 —e! — Il erreur.
Ace —5e 26 — 55 21 5
a es A ee = EL
e —e 149 — 11 s 8
( 329 )
septuaginta sex. Deinde multiplica lancis prime er-
_ rorem, qui est undecim , in lancem secundam , que
est quinque, et quod perveniet erit quinquaginta
quinque. Minuç ergo duorum numerorum minorem
ex majore eorum. Quod est ut minuas quinquaginta
quinque et septuaginta sex, et remanebit viginti
unum. Deinde minue minorem duorum errorum ex
majore :eorum quod est ut minuas undecim ex de-
cem et novem, et remanebunt octo. Deinde ergo vi-
ginti unum per octo , et pervenient tibi due dragme
et quinque octave dragme unius. Hic ergo est census
quem vis scire.
Est hec regula ejus. Que est (1) ut ponas rem igno-
tam et duples eam, et erit due res excepta dragma ;
deinde duples eam, et erunt quattuor res exceptis
duabus dragmis. Post dones ex eis duas dragmas , et
habebis quattuor res, exceptis quattuor dragmis ;
deinde duples ea, et habebis octo res exceptis octo
dragmis. Ex eis ergo dona tres dragmas, et ha-
bebis octo res exceptis undecim dragmis , que equan-
tur decem. Adjunge ergo ea super decem qui ex
censu remansit, et habebis octo res que equantur vi-
ginti et uni dragmis. Divide ergo viginti et unam
dragmas per octo res, et pervenient tibi duo et quin-
que octave,
( 326 )
Capitulum de eodem aliud.
Quod si tibi dixerit : Mercatus est quidam cum
censu et duplatus est ei census, ex quo donavit duas
dragmas, et mercatus est cum residuo et duplatus
est. Ex quo donavit quattuor dragmas, deinde ne-
gociatus est cum residuo et duplatus est ei. Donavit
autem ex eo sex dragmas , et nil remansitei. Nume-
rus ergo primi census quantus (1) est ? Capitulum
numerationis ejus secundum augmentum et diminu-
tionem est ut assumas lancem ex tribus et duples eam,
et eritsex; deinde dones ex eo duas dragme. Et rema-
nebunt quattuor. Ipsum ergo dupla et erit octo.Ex quo
dona quattuor dragmas; etremanebunt quattuor drag-
Dupla ergo ipsum, et erunt octo. Ex eo itaque dona
sex dragmas, et remanebunt due. Oppone ergo per
ea non rem. Îpse vero jam dixit : non remansit ei res.
Jam igitur errasti cum duobus additis. Deinde accipe
lancem secundam divisam a prima , que sit ex quat-
tuor , et dupla eam, et erit octo , ex quo dona duas,
(1) 2(2(22 —2)—"4)—6— 0,
Si l'on suppose x? — 5 , on aura
2(2(6— 2)— 4)— 6— 2 —=e—= I" erreur
Si l'on suppose 2° — 4, on aura
2(2(8— 2) — 4) — 6 = 10 = el = II erreur.
Ce — het 30 — 0
22 5 ”
———— = —— =——=2+-—=x.
. #
( 325.)
et remanebunt sex. Ea igitur dupla , et erunt duode-
cim. Et dona ex eis quattuor; remanebunt ergo octo.
Ea vero dupla , et erunt sedecim. Et dona ex eis sex;
et remanebunt decem. Jam autem dixit quod nichil
ei remansit. Jam ergo errasti cum decem additis.
Maltiplica igitur lancem primam in errorem lancis
secunde, quod est ut multiplices tria in decem, et
fiunt triginta. Deinde multiplica lancem secundam in
errorem lancis prime. Quod est ut multiplices quat-
tuor in duo, et erit octo. Minue ergo minorem duo-
rum numerorum ex majore eorum. Quod est ut de-
mas octo ex triginta , et remanent viginti duo; deinde
minue minorem duorum errorum ex majore eorum.
Quod est ut demas duo ex decem, et remanebunt
octo. Deinde ergo viginti duo per octo et pervenient
bi duo ettres quarte. Hic igitur est numerus quem
vis scire.
Regula quoque ejus est. Que est (1) ut assumas
rem et duples eam , et erunt due res ex quibus dona
duas dragmas , et habebis duas res exceptis duabus
dragmis ; deinde dupla eam , et habebis quattuor res
exceptis quattuor dragmis. Post dona ex eis quattuor,
et habebis quattuor res exceptis octo dragmis. Deinde
dupla ea. Et crunt octo res exceptis sedecim drag-
mis, ex quibus dona sex dragmas. Et erunt octo res,
exceptis viginti duabus dragmis. Deinde ergo viginl
(z) 2(2(27—2)—4)—6—=8y7—22—0;
nr — _— +
Le
ss 1
( 328 )
duo per octo, et pervenient tibi duo et tres quarte.
Intellige.
Est preterea modus inveniendi hoc secundum re-
gulam qua numeratur ex quod continetur in sermone
dicentis. Negociatus (1) fuit cum censu et duplatus
est census, et donavit ex eo dragmam ; deinde ne-
gociatus est cum residuo et duplatus est ei et donavit
ex eo duas dragmas. Et post negociatus est cum resi-
duo et duplatus est ei; et donavit ex e0 tres dragmas.
Pervenit ergo ei decem. Capitulum numerationis ejus
est ut aggreges ei decem et tria, et erunt tredecim.
Deinde sumas eorum medietatem, que est sex et di-
midium. Postea adiungas duas dragmas et erunt octo
et dimidium. Eorum ergo sume medietatem que est
quattuor et quarta , deinde adiunge eis unam drag-
mam, et erunt quinque et quarta. Horum igitur
sume medietatem. Et est duo et quinque octave.
Regula questionis secunde. Que est ut (2) assumas
(x) 2 (a (x? — 1) — 2) — 3 — 10,
. ; | 13 ï
2(2(2a22—1)—92)—=13,2(22?—1)—2—=—- —=6+
2 2
| ) AN MA 2 : :
—— Q y — ——
2(227 — 1) 8 + a—iit+-,az =5+-
2 + 4
5 5 I »
D —-+-—9:+-
PE D 8
( 329 )
medietatem sex quam donavit postremo. Adjunge er-
go ei quattuor dragmas, et erunt septem. Quorum
assume medietatem , que est tria et dimidium. Dein-
de adiunge duas dragmas , et erunt quinque et semis.
Harum igitur sume medietatem , que est duo et tres
quarte. Intellige.
Capitulum donationum.
Quod si dixerit : quedam mulier nupsit tribus viris
quam primus uno censu dotavit, secundus vero dotavit
eam triplo quo primus eam dotaverat , tertius autem
dotavit eam quadruplo quo a secundo fuerat dotata.
Et fuit summa que mulieri pervenit sexaginta quat-
tuor dragme. Quanto dotavit eam primus et quanto
secundus et quanto tertius (1)? Capitulum numera-
sionis ejus es ut accipias lancem , que sit ex uno ac
si primus dotasset eam dragma una, et secundus tri-
bus dragmis, que sunt triplum ejus quo primus eam
dotavit, et terçcius duodecim dragmis , que sunt qua-
druplum ejus quo dotavit eam secundus. Aggrega
(1) x? +3 x? + 12 2° — 64.
Si l’on suppose æ° — 1, on aura
[Hi ra — 16; 64 — 16 — 48 —e — I" erreur.
Si l'on suppose #° = 2, on aura
2 —- 6 + 24 = 32; 64 — 32 = 32 —=e —=]II vreur,
2e —e! 96 39
( 330 )
ergo totum illud et erit sedecim. Oppone ergo per ea
sexaginta quattuor : tunc jam errasti cum quadra-
ginta octo diminutis. Et hoc vocatur error primus.
Deinde accipe lancem secundam que sit ex duabus,
ac si primus dotasset eam duabus, et secundus sex,
que sunt triplum ejus quo dotavit eam primus, et
tertius viginti quattuor, que sunt quadruplum ejus
quod dotavit eam secundus. Summa igitur illius to-
tius est triginta duo. Oppone ergo per ea sexaginta
quattuor : tunc jam errasti cumtriginta duobus dimi-
nutis. Et hoc vocatur error secundus. Maltiplica ergo
hunc secundum errorem in lancem primam. Quod
est ut multiplices unum in triginta duo. Deinde
multiplica errorem lancis prime qui est quadraginta
octo, in lancem secundam, que est duo, et quod
perveniet erit nonaginta sex. Minue ergo minorem
duorum numerorum ex majore eorum. Quod est ut
minuas triginta duo ex nonaginta sex, et remane-
bunt sexaginta quattuor. Deinde minue minorem duo-
rum errorum ex majOre eOruIm. Quod est ut demas
triginta duo ex quadraginta octo , et remanebunt se-
decim. Hic ergo est per quem dividitur. Postea di-
vide sexaginta quattuor per sedecim, et perveniet tibi
quattuor dragme. Hoc igitur est quo primus eam do-
tavit. Et secundus duodecim. Et tercius quadraginta
octo. Quod si scire vis quo dotavit eam.secundus et
tercius , secundum regulam multiplica errorem lancis
prime, qui est quadraginta et octo , in lancem secun-
dam, que est sex, in quadraginta octo, et erunt
ducenta et octoginta octo. Deinde multiplica errorem
lancis secunde, qui est triginta duo, in lancem pri-
(331)
mam ex eo quo secundus dotavit eam, quod est tria
in triginta duo, et erunt nonaginta sex. Deinde mi-
norem duorum numerorum ex majore eorum dimi-
nue. Quod est ut demas nonaginta sex ex ducentis et
octoginta octo, et remanebunt centum et nonaginta
duo. Ea ergo divide per sedecim , et pervenient tibi
duodecim. Hoc est igitur quo secundus dotavit eam.
Si autem scire vis quo tertius eam dotaverat, multi-
plica errorem lancis prime, qui est quadraginta
octo, in lancem tertiam, ex eo quod tertius ei de-
dit, quod est viginti quattuor , et erunt mille et cen-
tum et quinquaginta duo. Deinde multiplica errorem
secundum, qui est triginta duo , in lancem primam
ex eo quod dedit ei tercius, quod est duodecim, et
erunt trecenta et quadraginta octo. Postea minue
minorem duorum numerorum ex majore eorum,
quod est ut diminuas trecenta et octoginta quattuor
ex mille et quinquaginta duobus , et remanebunt sep-
tingenta et sexaginta octo. Ea igitur per sedecim di-
vide et pervenient tibi quadraginta octo dragme, Et
hoc est quo tertius eam dotavit.
Hujus quoque est regula. Que est (1) ut accipias
illud quo primus eam dotavit, rem; et illud quo
secundus dotavit eam, tres res; et illud quo tertius
cam dotavit; duodecim res. Est ergo summa illius
sedecim res, que equantur sexaginta quattuor drag-
mis. Divide igitur sexaginta quattuor per sedecim ,
(1) 2h32 raz —%162—64,2:—
+
( 332 )
et pervement übi quattuor. Hoc igitur est quo pri-
mus eam dotavit. Multiplica igitur secundum et ter-
tium , secundum quod supra dictum est multiplicare
debere.
Capitulum aliud de eodem.
Et si dixerit : primus donavit ei censum , et secun-
dus donavit ei quadruplum ejus quod primus dona-
navit ei et dragmam unam , et tertius donavit ei tri-
plum ejus quod donaverat secundus et insuper tres
dragmas, et fuit tota summa trium quinquaginia sex.
Quantum ergo donavit ei primus , et quantum secun-
dus, et quantum tertius (1)? Capitulum numeratio-
nis ejus secundum augmentum et diminutionem est
ut assumas Jlancem, que sit primo ex uno, et se-
cundo ex quattuor et dragma , et erit quinque; et
tertio ex quindecim et tribus dragmis et fuerit decem
et octo. Totum autem illud aggregatum est viginti
quattuor. Per ipsum igitur oppone quinquaginta sex ,
que ei aggregata fuerunt. Et tune jam errasti cum
triginta duobus diminutis. Hoc igitur vocatur error
primus. Deinde sume lancem secundam , primo sex
(1) La Hits + 6 — 56.
Si l'on suppose 2* — 1, on aura
1HgLitraH 6 024; 56—024 — 32 — e = Ir erreur:
Si l'on suppose x* — 2, on aura
2H+8 Lio +641; 56— 41 — 15—e"—=]Il erreur.
19 rD
— — =— 2 +—
1
2e— 0! G4 — 15
' 2 F
EE — t( 22 — 19 ro
(35 )
duobus, et secundo ex octo et dragma, et erunt no-
vem et teriio ex viginti septem et tribus dragmis, et
erunt triginta. Totum vero illud ergo est quadraginta
unum. Oppone ergo per ipsum quinquaginta sex,
et tunc jam errasti cum quindecim diminutis. Hoc
ergo vocatur error secundus. Minue igitur minorem
duorum errorum ex majore ipsorum , et remanebunt
decem et septem; serva ea , deinde multiplica erro-
rem primum in lancem secundam, quod est ut mul-
tiplices triginta duo in duo , et erunt sexaginta quat-
tuor. Postea multiplica errorem postremum qui est
quindecim, in lancem primam, que est unum , et
erunt quindecim. Deinde deme minorem duorum
numerorum ex majore eorum, quod est ut minuas
quindecim ex sexaginta quattuor, et remanebunt
quadraginta novem. Deinde ergo quadraginta novem
per decem et septem, et pervenient tibi due dragme
et quindecim septime decime partes unius dragme.
Et hoc est quod primus donavit ei. Et secundus do-
navit ei duodecim dragmas et novem septimas deci-
mas partes dragme unius. Êt tertius donavit ei qua-
draginta dragmas et decem septimas partes dragme
unius. Totum vero illud est quinquaginta sex. Quod
si per lances operari vis, fac quemadmodum monstravi
üibi in questione prima, et invenies si Deus voluerit.
Hoc quoque per regulam invenitur que est (1) ut
( 554 )
pouas illud quod primus ei donavit rem, et illud
quod secundus donavit ei, quattuor res et dragmam ,
quod est quadruplum ejus quod primus donaverat et
dragma. Et ponas iilud quod tertius donavit ei, duo-
decim res et sex dragmas , quod est triplum ejus quod
secundus ei donaverat et tres dragmas. Totum vero
illud est decem et septem res et septem dragme que
equantur quinquaginta sex. Minue ergo septem drag-
mas ex quinquaginta sex , et remanebunt quadraginta
novem. Ea igitur divide per decem et septem, et per-
veniet tibi duo et quindecim septime decime partes
unius. Et hoc est quod primus donavit ei. Et secun-
dus donavit duodecim et novem partes septimas de-
cimas quod est quadruplum ejus quod primus donavit
ei. Et tertius donavit ei quadraginta et decem septi-
mas decimas partes , quod est triplum ejus quod se-
cundus ei donaverat. Intellige.
Aliud capitulum de eodem.
Quod si aliquis dixerit : primus donavit ei censum,
et secundus donavit ei triplum ejus quod primus do-
naverat, excepta dragma. Et tertius donavit ei qua-
druplum ejus quod secundus donaverat, exceptis
quattuor dragmis, et fuit summa que ei pervenit
septuaginta unum (1). Erit capitulum numerationis
(1) DH —r1+4(3r—-1n—4—= 71.
Si l’on suppose x — 1, on aura
1+3—1+8— k=9;71—9=64 —=e—= l'erreur,
(335 )
ejus secunduim augmentum et diminutionem ut sumas
lancem , que sit ex uno , ag si unus donasset ei drag-
mam unam , et secundus donasset ei duas dragmas.
Quidam dixeritsecundus donavit ei triplum ejus quod
primus donaverat excepta dragma , et tercius donasset
ei quattuor dragmas. Quidam dixerit tercius donavit
ei quadruplum ejus quod secundus donaverat, exceptis
quattuor dragmis, Totüm autgm illud est septem.
Oppone ergo per ea septuaginta uni. Tunc jam errasti
cum sexaginta quattuor diminutis ; hoc ergo vocatur
error primus. Deinde sume lancem secundam, que
sit ex duobus, ac si primus donasset ei duo et secun-
dus quinque. Quidam dixit donavit ei triplum ejus
quod primus donaverat , excepta dragma , et tercius
donasset ei sedecim : quidam dixit donavit ei quadru-
plum ejus quod seeundus donaverat exceptis quattuor
dragmis. Totum autem illud est viginti tria. Oppone
ergo per ea septuaginta uni. Tum jam errasti cum
quadraginta octo diminulis. Et hoc vocatur error
secundus. Unum ergo duorum errorum minue ex al-
tero , et remanebunt sedecim. Serva ea; deinde mul-
tiplica errorem primum , qui est sexaginta quattuor,
in lancem secundam, que est duo , et erunt centum
et viginti octo. Post multiplica lancem primam , que
L
Si l’on suppose z° — 2, on aura 2 6 — 1 + 20 — 4 — 25;
71 — 23 — 28 —e — Il erreur.
2e— € 125 — 48
— — — y2
== = 5 — 2.
( 3356:
est unum, in errorem secundum, qui est quadra-
ginta octo eterunt quadraginta octo. Minue ergo mino-
rem duorum numerorum ex majore eorum, quod est
diminuas quadraginta octo ex centum et viginti octo,
et remanebunt octoginta. Fa igitur divide per sede-
cim, et pervenient tibi quinque dragme. Hoc igitur
est quod primus ei donavit; et secundus donavit ei
quattuordecim; et tertius dônavit ei quinquaginta
duo. Totum ergo illud est septuaginta unum. Intellige
et invenies.
Hoc quoque per regulam invenitur. Que est (1) ut
ponas illud quod primus ei donavit rem; et illud
quod secundus donavit ei tres res excepta dragma;
et illud quod ei tertius donavit duodecim res, excep-
üs octo dragmis, sunt ergo novem dragme. Et sic
habes sedecim res exceptis novem dragmis, que
equantur septuaginta uni. Adjunge ergo novem sep-
tuaginta uni, et erunt octoginta. Ea igitur per sede-
cim divide, et pervenient tibi quinque dragme. Hoc
ergo est quod primus ei donavit; et secundus donavit
quattuordecim , et tertius quinquaginta duo. Totum
ergo illud est septuaginta unum.
Capitulum de pois.
Quod si quis dixerit : quidam vir intravit virida-
rium, et collegit in eo poma ; viridarium vero habe-
('337.)
bat tres portas, quarum quamque hostiarius custo-
diebat. Vir ergo ille partitus est poma cum primo,
et insuper donavit ei duo, et partitus est cum secundo
et donavit ei duo, et partitus est cum tertio et dona-
vit ei duo, et egressus est habens unum : quantus
ergo fuit numerus (1) pomorum que collegit? Capitu-
lum numerationis ejus est ut sumas lancem ex cen-
tum, et partiaris cum primo et dones ei duo, et
remanebunt tibi quadraginta octo; et partiaris cum
secundo et dones ei duo, et remanebunt tibi viginti
duo; et partiaris cum {ertio et dones ei duo , et re-
manebunt tibi novem. Oppone ergo per ea unum
quod remansit. Tunc jam errasti cum octo additis ,
hoc ergo vocatur error primus; deinde accipe lancem
secundam , que sit ex ducentis, et partire cum primo
et insuper dona ei duo, et remanebunt tibi nonaginta
=, Xe
ES Gers
Si l’on suppose z — 100, on aura
100 — 50—2—94—-2—11—2—=09; y—I1—=8— 6e —]J" erreur.
Si l'on suppose x — 200, on aura
e ï I
200 —, 100 — 2 — 49 — 2— 28 —'02 pr + ;
2 2
ï I
21 -— 1 —20 + -—e!—= II erreur.
2 2
100 €! — 200 € 2050 —1600
——%—— — —— =36.= 3.
el" —"'e 20 ++ —3
(858)
octo ; et partire cum secundo, et dona ei duo, et re-
manebunt tibi quadraginta septem; et partire cum
tertio et dona ei duo, et remanebunt Gbi viginti
unum et dimidium. Oppone ergo per ea unum quod
remansit tibi, tune jam errasti cum viginti et dimi-
dio additis. Hoc ergosvacatur error secundus. Multi-
plica igitur lancem primam , que est centum: in er-
rorem lancis secunde qui est viginti et dimidium, et
pervenient duo millia et quinquaginta ; deinde mul-
üplica lancem secundam in errorem lancis prime ,
quod est ut multiplices ducenta in octo, et erunt
mille et sexcenta. Deme ergo minorem duorum nu-
merorum ex majore eorum , quod est ut minuas mille
et sexcenta ex duobus millibus et quinquaginta , et
remanebunt quadringinta et quinquaginta ; deinde di-
mimue unum duorum errorum ex altero, quod est ut
demas octo ex viginti et dimidio , et remanebunt duo-
decim et dimidium. Per ea igitur divide quadraginta
et quinquaginta , et pervenient tib1 triginta sex, Hoc
ergo est numerus pomorum que collegit. Hoc etenim
per regulam invenitur, que est (1) ut aggreges rem,
et parliaris eam. Habebis ergo rei medietatem exceptis
duobus ; deinde assumas ejus medietatem , et habebis
quartam rei excepla dragma; cui adjunge duo dimi-
nula et habebis quartam rei exceptis tribus dragmis ;
deinde sume illius medietatem et habebis octavam rei
excepta dragma et dimidia: Postea adjunge duas
»
( 339 )
dragmas diminutas, et habebis octavam rei exceptis
tribus dragmis et dimidia, que equantur uni. Adjunge
ergo tria et dimidium, et erunt quattuor dimidium.
Habes ergo octavam rei, que equantur quattuor et
dimidio. Ergo res equatur triginta sex. Intellige.
Capitulum de eodem aliur.
Quod si dixerit : Partitus est cum primo, et dona-
vit ei quattuor, et partitus est cum secundo , et do-
navit ei sex, et partitus est cum ertio, et donavit ei
octo, et nichil remansit ei (1). Erit capitulum nume-
rationis ejus ut assumas lancem , que sit ex centum,
et partiaris cum primo, et remanebunt tibi quinqua-
ginta, ex quibus dona ei quaituor, et remanebunt
tibi quadraginta sex; deinde partiaris cum secundo,
et remanebunt tibi viginti tria, ex quibus dona ei
sex, et remanebunt tibi decem et septem; deinde
partire cum tertio , et remanebunt tibi octo ei dimi-
; TZ J T
(1) PRET Sr NT
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Si l’on suppose x — 200, on aura
200 — 100 — 4 — 48 — 6 — 218— 8 — 13 —e — Il erreur,
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100 € — 200 € 1300 — 100 k
——— = 907,
& — e 13 — = à
22.
L 1
( 540 )
dium, ex quibus dona ei octo, et remanebunt tibi
dimidium. Per ipsum igitur oppone nichilo; tunc
jam errasti cum dimidio addito. Hoc ergo vocatur er-
ror primus. Deinde assume lancem secundam , que
sit ex ducentis , et partire cum primo, et remanebunt
tibi centum, ex quibus dona ei quattuor, et rema-
nebunt tibi nonaginta sex ; post partire cum secundo,
et remauebunt tibi quadraginta octo, ex quibus dona
ei sex, et remanebunt tibi quadraginta duo; et par-
üre cum tercio, et remanebunt übi viginti unum , ex
quibus dona ei octo, et remanebunt tibi tredecim.
Oppone ergo per ea michilo; tune jam errasti cum
tredecim additis. Multiplica igitur errorem secun-
dum , qui est tredecim , in lancem primam , que est
centum, et erit quod perveniet mille et trecenta.
Deinde multiplica errorem primum, qui est dimi-
dium , in lancem secundam , que est ducenta , et erit
centum. Postea minue minorem duorum numerorum
ex majore eorum , quod est ut demas centum ex mille
et trecentis , et remanebunt mille et ducenta ; deinde
minue minorem duorum errorum ex majore eorum ,
quod est ut demas dimidium ex tredecim, et rema-
nebunt duodecim et dimidium. Divide ergo mille et
ducenta per duodecim et dimidium, et pervenient
übi nonaginta sex. Hic igitur est numerus pomorum
que ipse collegit.
Hoc quoque per regulam invenitur (1). Que est ut
{/
( 54r )
sumas rem ignotam, et partiaris eam Cum primo, et
insuper dones ei quattuor , et remanebit tibi medietas
rei exceplis quattuor dragmis; et partiaris cum se-
cundo, et dones ei sex , et habebis quartam rei, ex-
ceptis octo dragmis ; et partiaris cum tertio, et dones
ei octo, et habebis octavam rei, exceptis duodecim
dragmis. Ergo octava rei equatur duodecim ; ergo res
equatur nonaginta sex.
Capitulum aliud de eodem.
Quod si dixerit : Partitus est cum primo, et reddi-
dit hostiarius duo ; et partitus est cum secundo, hos-
tiarius reddidit ei quattuor ; et partitus est cum tertio,
et reddidit ei hostiarius sex. Exivit autem habens de-
cem : quantus (1) ergo fuit numerus pomorum que
œ 1 Le
(1) p—-La—-|x— + 2? +
‘ 2 2 2
Si l'on suppose x — 80, on aura
j te
80 — Go à — at + 4 — 19 — SN 18 + +
2 2
I Le
18 -—10—<+8 + -—e— TI" erreur.
2 2
Si l’on suppose x = 40, on aura
‘ L
/ . + {
40 — 200 — ra —s —-+6 13 +-,
2 a
cs
ve
( 342)
collegit? Capitulum numerationis ejus est ut assumas
lancem, que sit octoginta, et partire cum primo et
reddat tibi duo, et habebis quadraginta duo; et par-
tire cum secundo , et reddat tibi quattuor, et habe-
bis viginti quinque, et partire cum tertio, et reddat
übi sex ,et habebis decem et octo et dimidium. Ergo
oppone per ea decem , que remanserunt tibi , et tunc
jam errasti cum octo et dimidio additis. Deinde sume
lancem secundam, que sit ex quadraginta , et partire
cum primo et reddat tibi duo, et habebis viginti duo,
et partire cum secundo et reddat tibi quattuor; et
habebis quindecim: et partire cum tertio et reddat
übi sex, at habebis tredecim et dimidium. Oppone
ergo per ea decem, que tibi remanserunt, et tunc
jam errasti eum tribus et dimidio additis. Multiplica
igitur errorem primum , qui est octo et dimidium , in.
lancem secundam, que est quadraginta , et erunt tre-
centa et quadraginta. Deinde multiplica errorem se-
cundum , qui est tria et dimidium, in lancem pri-
mam, que est octoginta, et erunt ducenta et octoginta.
Minue ergo minorem duorum numerorum ex majore
eorum, quod est ut demas ducenta et octoginta ex
. trecentis et quadraginta, et remamebunt sexaginta.
Postea minorem duorum errorum ex majore ipsorum
deme, quod est ut demas tria et dimidium ex octo
I I
13 +L-— 10— 3 +-—e! — II erreur.
2 2
» Cr »
40 e — 80 ce! 240 — 200
ee = J2 — 4
e — ce! 8 = de |
i 1
(8549:)
et dimidio, et remanebunt quinque. Divide ergo
sexaginta per quinque , et pervenient duodecim.
Hoc quoque per regulam invenitur , que est (1) ut
assumas rem ignotam, et partire cum primo , et üibi
reddas ostiarius duo , et habebis medietatem rei et
duas dragmas ; et partire cum secundo , et reddat tibi
quattuor , et habebis quartem rei et quinque drag-
mas ; et partire cum tertio , et reddat tibi sex, et ha-
bebis octavam rei , et octo dragmas et dimidium , que
equantur decem. Minue ergo octo et dimidium ex
decem, et remanebit unum et dimidium ; habebis
ergo octavam rei, que equatur uni et dimidio. Ergo
res equatur duodecim.
Est preterea modus inveniendi per regulam quod
in sermone continetur dicentis. Divisit cum primo, et
donavit ei duo, et partitus est cum secundo, et dona-
vit ei duo, et partitus est cum tertio, et donavit et
duo , et egressus est habens unum (2). Capitulum nu-
merationis ejus est ut aggreges unum et duo, et erunt
tria; dupla ergo ea , et erunt sex, quoniam dixit par-
titus est cum tertio; deinde adjunge duo, et erunt
( 544 )
octo: dupla igitur ea, et erunt sedecim , quoniam
dixit partitus est cum secundo ; postea adjunge duo,
et erunt decem et octo. Ergo dupla ea, quoniam
dixit partitus est cum primo, et erunt triginta sex.
Intellige.
Modus quoque est inveniendi quod continetur in
sermone dicentis (1) : Partitus est cum primo, et do-
navil ei quattuor, et partitus est cum secundo, et
donavit ei sex, et partitus est cum tertio, et donavit
ei octo, et michil ei remansit. Ejus numerationis ca-
pitulum est ut duples octo , quoniam dixit partitus est
cum tertio, et erunt sedecim; deinde adjunge eis
sex, et erunt viginti duo. Ea igitur dupla, quoniam
dixit partitus est cum secundo , et erunt quadraginta
quattuor ; postea adjunge eis quattuor , et erunt qua-
draginta octo; deinde duplica ea propter hoc quod
dixit partitus est cum primo, et erunt nonaginta sex.
Intellige.
Est item modus inveniendi quod in sermone di-
cents continetur : partitus est cum primo; et reddi-
dit ei ostiarius duo , et partitus est cum secundo, et
reddidit ei ostiarius quattuor, et partitus est cum
tertio, et redidit ei sex, et egressus est habens de-
1 345 )
cem (1); cujus numerationis capitulum est ut minuas
sex ex decem, et remanebunt quattuor. Ea ergo du-
plica quoniam dixit partitus est cum secundo, et
erunt octo; deinde minue quattuor, et remanebunt
quattuor; duplica ea, et minue duo , et remanebunt
sex; dupla igilur ea , quoniam dixit partitus est cum
primo, et erunt duodecim.
Capitulum obviationis.
Quod si quis dixerit : Duo viri obviaverunt sibi
quorum quisque censum habebat, et dixit unus eo-
rum alteri. Da mihi ex hoc quod habes dragmam , et
habebo quantum tibi remanebit; respondit alter, tu
vero da mihi ex eo quod habes quattuor dragmas, et
habebo duplum ejus quod tibi remanebit : quantum
ergo fuit quod quisque eorum habebat (2)? Capitulum
T I 2 à
(1) CEE |
2 2 2
== 10
£
Z 15/4 æ
LA pie (at) 5e)
2 2 DEN 2 t
2(2 (2{(10—6) —4)—2)=ur122=17%
(2) z—i=T+i;z+4—=n3(y —4).
Si l'on suppose x = y — 5, on aura
7—1=b+r, +4 —2(5—4)—=9—=e—= TI" erreur.
Si l'on suppose x — 8,7 == 6. on aura
8—1—=6L1,8+ 4 —2(6— 4)—=8—e — I erreur,
ge—5e
é —— €
(346)
numerationis ejus secundum augmentum et diminu-
üionem est ut assumas duas lances, unam ex quinque
et alteram ex septem, ac si dixisset : unus habebai
quinque et alter septem et accepit habens quinque ab
eo qui habebat septem, unum ; et factum est ut quis-
que eorum habeat sex. Cum ergo habens septem ac-
ceperit quattuor ab eo , qui habebat quinque , habe-
bit undecim, et habenti quinque remanebit unum
additum. Jam autem dixerat habens septem : habebo
duplum ujus quod tibi remanebit. Sic contigit ut ha-
beat undecim; et fuit conveniens ut haberet duo.
Oppone igitur per undecim, tunc jam errasti cum
novem additis, et hoc vocatur error primus. Deinde
sume duas lances a primis divisas, quod est ut acci-
pias uni ex sex et secundo ex octo semper addens
unum super primam que est quinque. Cum ergo ha-
bens octo dederit unum habenti sex, equabuntur
omnia. Sic cum habens octo acceperit quattuor ab eo
qui habebat sex, habebit duodecim, et habenti se:
remanebunt duo. Jam autem dixerat: habebo duplum
ejus quod tibi remanebit; opportuit itaque ut habe-
ret quattuor. Oppone ergo per ea duodecim, tunc
jam errasti cum octo additis, et hoc vocatur error
secundus. Multiplica ergo errorem secundum, qui
est octo, in lancem primam, que est quinque, et
erunt quadraginta ; et multiplica crrorem primum ;
qui est novem, in lancem secundam , que est sex, €
pervenient quinquaginta quattuor; deinde deme mi-
norem duorum numerorum ex inajore Corum , quod
est ut diminuas quadraginta ex quinquaginta quat-
tuor , et remanebunt quattuordecim. Postea munuc
(347)
minorem duorum errorum ex majore eorum , quod
est ut diminuas octo ex novem, et remanebunt unum.
Per ipsum ergo divide quattuordecim , et pervenient
tüibi quattuordecim. Hoc est igitur quod unus habuit.
Deinde redi ad investigandum quod secundus habuit,
quod est ut multiplices lancem primam, que est sep-
tem, in errorem lancis secunde , qui est octo , et per-
venient quinquaginta sex; deinde multiplica lancem
postremam, que est octo, in errorem lancis prime,
qui est novem, et erunt septuaginta duo. Postea mi-
nue minorem duorum numerorum ex majore €orum ,
quod est ut diminuas quinquaginta sex ex septua-
ginta duobus, et remanebunt sedecim. Ea ergo di-
vide per id quod divisisti primum, scilicet per unum,
et pervenient tibi sedecim : hoc est quod secundus
habuit. Intellige.
Hoc quoque per regulam invenitur, que est (1) ut
assumas rem ignotam excepta dragma primo, et assu-
mas secundo rem et dragmam. Cum ergo primus,
scilicet habens rem excepta dragma acceperit a se-
cundo, scilicet ab habente rem et dragmam , unam
dragmam , erit ut primus habeat rem etsecundus ha-
beat rem; habebit ergo primus quantum et secundus
scilicet cum secundus acceperit a primo quattuo:
dragmas, remanebit primo res exceptis quinque
( 548 )
dragmis , et habebit secundus rem et quinque drag-
mas. Et jam quidem dixerat secundus : habebo du-
plum ejus quod tibi remanebit. Dupla ergo quod ha-
bet primus , ut equetur ei quod habet secundus, quot
est ut duples rem exceptis quinque dragmis, et erunt
due res exceptis decem dragmis , que equantur rei et
quinque dragmis. Restaura ergo duas res per decem
dragmas, et adjunge eas rei et quinque dragmis, et
habebis duas res que equantur rei et quindecim
dragmis. Diminue ergo rem ex duabus rebus, et re-
manebit res que equatur quindecim. Ergo res est
quindecim. Minue igitur ex ea unum , quoniam dixit
excepta dragma, et erit quattuordecim; et hoc est
quod primus habuit, Et adjunge ei dragmam , quo-
niam dixit rem et dragmam , et eritsedecim; et ip-
sud est quod secundus habuit. Intellige.
Aliud capitulum de eodem.
Quod si dixerit : Da mihi ex eo quod habes drag-
mam , et habebo dimidium ejus quod tibi remanebit.
Et alter dixerit sic : tu, da mihi ex eo quod habes
quinque dragmas, et habebo triplum ejus quod tibi
remanebit (1), erit capitulum numerationis ejus se-
L r F re p
I —_(Zz—1)=y+H1,3(7—5)=zx +5.
2
Si l'on arr 15,7 — 6, on aura
te LE 5 —,3 (y — 5) —= 17 Seal erreur
( 349 )
cundum augmentum et diminutionem , ut primo as-
sumas lancem , que sit sex, et secundo assumas lan-
cem, que sit quindecim, et accipiat unus eorum;
scilicet habens sex ab altero, scilicet habente quin-
decim dragmam unam, habebit ergo septem , et re-
manebunt secundo quattuordecim. Et illud est dimi-
dium ejus quod ei remansit. Deinde accipiat habens
quindecim ab eo qui habet sex, quinque , et habebit
viginti; et babenti sex, remanebit unum. Fuit au-
tem conveniens ut habenti viginti remanerent tria.
Quoniam dixit triplum ejus quod übi remanebit :
scilicet ei remansit unum. Oppone ergo per ipsum
viginti, tunc jam errasti cum decem et septem addi-
us; et hic vocatur error primus. Deinde assume duas
lances a primis divisas, quod est ut assumas uni sep-
tem ex secundo decem et septem. Cum ergo habens
septem acceperit unum ab eo qui habebat decem et
septem, habebit octo, et remanebunt sedecim ha-
benti decem et septem; et est dimidium ejus quod ei
remansit. Deinde vero cum habens decem et septem
acceperit ab eo quinque qui habebat septem , habebit
viginti duo , et habenti septem remanebunt duo. Ha-
bens autem decem et septem , jam dixerat :'habebo
triplum ejus quod tibi remanebit : oportuit ergo ut
Si l'on suppose x — 17, y — 7, on aura
+5 —3(y—5)—=16—e = IL erreur.
-e— 6e!
= 29 —=VYÈRE= 49
e— 0
{
( 350 )
haberet sex. Oppone ergo per ea vignti duo; jam
igitur errasti cum sedecim additis; et hoc vocatur
error secundus. Multiplica ergo hec sedecim, que
sunt error ; in lancem primam , que est sex, et erunt
nonaginta sex. Deinde multiplica lancem secundam ,
que est septem, in errorem lancis prime, qui est
decem et septem, et erunt centum et décem et no-
vem. Postea deme minorem duorum numerorum ex
majore eorum, et remanebunt viginti tria. Deinde
minue minorem duorum errorum ex majore eorum,
quod est ut demas sedecim ex decem et septem, et
remanebit unum. Divide ergo viginti tria per unum,
et perveniet illud scilicet viginti tria : hoc igitur est
quod primus habuit. Post hoc multiplica lancem pri-
mam, que fuit secundi, scilicet quirdecim in erro-
rem lancis secunde qui est sedecim, et erant ducenta
et quadraginta. Deinde multiplica lancem secundam ,
que fuit sedecim , scilicet decem et septem, in erro-
rem lancis prime , qui est decem et septem, et per-
venient ducenta et octoginta novem. Post diminue
minorem duorum numerorum ex majore eorum , et
remanebunt quadraginta et novem. Divide ergo qua-
draginta eorum per unum, et perveniet tibi qua-
draginta novem. Hoc igitur ‘est quod secundus ha-
buit.
Et hoc secundum regulam invenitur, que est (1)
(r) Y=u—1,z—=au—+i:;
3 (u—--6)—=2u+6,
HU, TL 40, == 20:
(381)
ut ponas primum habere rem excepta dragma, et se-
cundum habere duas res et dragmam. Cum ergo ha-
bens rem excepta dragma acceperit dragmam ab eo
qui habet duas res et dragmam, habebit ipse rem
integram , et secundus habebit duas res. Ergo habebit
primus medietatem ejus quod habet secundus, sci-
licet rem duarum rerum. Et cum ille qui habet duas
res et dragmam acceperit ab eo qui habet rem, ex-
cepta dragma, quinque dragmas, remanebit primo
res exceptis sex dragmis, et habebit secundus duas
res et sex dragmas. Jam autem dixerat : habebo tri-
plum ejus quod tibi remanebit. Oportet ergo ut quod
primus habet triplicetur, ut sit equale ei quod habet
secundus , quod est ut triplicetur res exceptis sex
dragmis, et erunt tres res exceptis decem et octo
dragmis , que equantur duabus rebus et sex dragmis.
Resiaura ergo tres res cum decem et octo dragmis,
ét adjunge eis duas res et sex dragmas, et habebis
tres res que equantur duabus rebus et viginti quat-
tuor dragmis. Deme ergo duas res ex tribus rebus et
remanebit res que equatur viginti quattuor. Érgo res
equatur viginti quattuor. Eis igitur adjunge eorum
equale , quia dixit : habebo ejus dimidium quod tbi
remanebit, et adjunge dragmam ; et est illud quod
habet secundus. Et minue dragmam ex viginti quat-
tuor , et erit illud quod habet primus.
Aliud capitulum de eodem.
Quod si dixerit : Duo viri sibi obviaverunt, quo-
rum quisque habebat censum , et invenerunt censum.
© (352)
Tunc unus eorum dixit alteri : da mihi ex eo quod
habes dragmam et hunc censum, et habebo quantum
tu. Respondit alter sic : tu, ex eo quod habes da
mihi quattuor dragmas et hunc censum, et habebo
triplum ejus quod tibi remanebit. Quantum ergo
habuit quisque eorum (1)? Capitulum numerationis
ejus, secundum augmentum et diminutionem , est ut
assumas primo lancem que sit ex quinque , et ponas
censum repertum dragmam , et secundo lancem que
sit ex octo. Cum ergo habens quinque acceperit ab
eo qui habet octo, dragmam, et acceperit dragmam
repertam , habebit quisque eorum septem; et cum
habens octo acceperit ab eo qui habet quinque quat-
tuor et dragmam inventam, habebit tredecim , et
habenti quinque remanebit unum. Alter vero jam
dixerat : habebo triplum ejus quod tibi remanebit.
Oportuit ergo ut haberet tria. Per ea igitur oppone
tredecim, tunc jam errasti cum decem additis; et
hic vocatur error primus. Deinde assume primo Jan-
cem secundam que sit ex sex, et secundo lancem se-
I gHzti=y—-1,3(—4)=y+z+es.
Si l'on suppose x — 5, z — 1,7 — 8, on aura
35. (x —4)=S;
y +2 + 4&—3(z— 4) —= 10 —e—T""* erreur.
Si l’on suppose x —=6,2—1,7—9, on aura
y+ai+z—3 (x — &)=38—=e —=]Il erreur.
Ge—5e! 60 — ,0
RE —N0= 9 — 17-10
== 10 —S
(355 )
cundam que sit ex novem. Cum ergo habens sex acce-
perit ab eo qui habet novem , dragmam et dragmam
repertam, habebit octo, et remanebit habenti novem.
Jam ergo equalia habuerunt, scilicet cum habens novem
acceperit ab eo qui habet sex, quattuor et dragmam
repertam , habebit quattuordecim, et habenti sex
remanebunt duo. Jam autem dixerat : habebo tri-
plum ejus quod tibi remanebit. Oportuit ergo ut cum
habenti sex remanserunt duo, haberet ipse sex. Op-
pone ergo per sex quattuordecim , et tunc jam errasti
cum octo additis; et hoc vocatur error secundus.
Multiplica igitur hunc secundum errorem, qui est
octo, in lancem primam, que est primi et est quin-
que , et pervenient quadraginta; et multiplica lancem
secundam , que est primi et est sex , in errorem lancis
prime, qui est decem, et pervenient sexaginta. Mi-
nue ergo minorem duorum numerorum ex majore
eorum , quod est ut diminuas quadraginta ex sexa-
ginta, et remanebunt viginti; deinde diminue mino-
rem duorum errorum ex majore eorum , quod est ut
minuas octo ex decem, et remanebunt duo. Divide
ergo viginti per duo, et pervenient tibi decem : hoc
igitur est quod primus habuit. Quod si scire volueris
quid habuit secundus, facies quemadmodum fecisti
in primo, et perveniet tibi quod secundus habuit
tredecim.
Hoc quoque secundum regulam invenitur , est (1)
(r) T=U—2,Y=Uu+H 1,221,
[. 23
( 554 )
ut ponas primum habere rem exceptis duabus drag-
mis, etsecundum habere rem et dragmam , et ponas
censum et repertum dragmam. Cum ergo habens rem
exceptis duabus dragmis acceperit dragmam et cen-
sum repertum ab eo qui habet rem et dragmam , ha-
bebit quisque eorum rem; et cum habens rem drag-
mam acceperit a primo quattuor dragmas et censum
repertum , remanebit primo res exceptis sex dragmis,
et habebit secundus rem et sex dragmas. Jam autem
dixerat : habebo triplurm ejus quod tibi remanebit.
Triplica igitur illud quod primus habet , ut sit equale
ei quod habet secundus , quod est ut triplices rem
exceptis sex dragmis, et habebis tres res exceptis
decem et octo ; que equantur rei et sex dragmis. Op-
pone ergo per ça quod est ut restaures tres res per de-
cem.et octo et addas ea ret et sex dragmis, et habebis
tres. res que equantur rei et viginü quattuor. Minue
ergo rem ex tribus rebus, et remanebunt due res
que equantur vigint quattuor. Ergo res una equatur
duodeeim. Minue ergo duo , et remanebunt decem ,
quoniam dixit rem duabus dragmis, et adjunge duo-
decim unum, quoniam dixit rem et dragmam , et
hoc est quod secundus habuit.
Capitulum de eodem aliud.
Quod si dixerit unus : Da mihi ex eo quod habes
2(x—4)=7+5;3(r7—2—4)=u+6,
2UZ24,U—I2,X2 10, = (3.
(355 }
dragmam et hunc censum inventum , et habebo ter-
tiam ejus quod tibi remanebit; et alter dixerit sic , tu,
da mihi quinque dragmas et hunc censum , et habebo
quincuplum (sic) ejus quod tibi remanebit (1). Enit
capitulum numerationis ejus , secundum augmentum
et diminutionem ; ut assumas lancem primo , que sit
ex sex, et ponas censum repertum duas dragmas, et
secundo assumas lancem que sit ex viginti octo. Cum
ergo habens sex acceperit ab eo qui habet viginti oc-
to, dragmam et duas dragmas repertas , habebit no-
vem, et remanebunt secundo viginti septem. Jam
ergo fuit hunc novem tertia viginti septem, scilicet
cum habens viginti octo acceperit quinque et duas
dragmas ab eo qui habet sex, habebit triginta quin-
que, et habenti sex remanebit unum. Habens autem
viginti octo jam dixerat : habebo quincuplum ejus
quod tibi remanebit. Oportuit ergo ut ipse haberet
quinque cum iste habeat unum. Jam igitur errasti
cum triginta additis; et hoc vocatur error primus.
Deinde accipe primo lancem secundam, que sit ex.
septem , et secundo lancem secundam , que sit ex tri-
G) LG D=y Est 8425 (5.
Si l’on suppose y —6,2z— 2,x— 28, on aura
zH5Ez— 5(y —5] = 30 —e—T" erreur.
Si l’on suppose ÿ = 9, z2= 2.2 = 371, on aura
Hz —5(y —5) — 28 —e — II erreur.
7e—6e! 210 — 168
er ne le = 2 ==), LE 7e
2 Let 30 — 28.
23.
(356: 1)
ginta uno. Cum ergo habens septem acceperit ab eo
qui habet triginta unum, dragmam et duas dragmas,
habebit ipse decem , et remanebunt triginta habenti
triginta unum; et jam manifestum est quod decem est
tertia triginta. Et cum habens triginta unum accepe-
rit quinque dragmas et duas dragmas repertas ab eo
qui habet septem, habebit triginta et octo, et ha-
benti septem remanebunt duo. Fpse vero jam dixerat :
habebo quincuplum ejus quod tibi remanebit. Cum
ergo huic remanserint duo , oportuit ipsum habere,
decem , scilicet ipse habet triginta octo. Jam ergo er-
rasti cum viginti octo additis, et hoc vocatur error
secundus. Multiplica igitur hune viginti octo in lan-
cem primam , que est primi et-est'sexs "et quod per-
veniet erit centum et sexaginta octo ; deinde multi-
plica lancem secundam , que est primi et est septem ,
in errorem primum, qui est triginta, et pervenient
ducenta et decem. Minue ergo minorem duorum nu-
merorum ex majore eorum , quod est ut demas cen-
_tum et sexaginta octo ex ducentis et decem , et rema-
nebunt quadraginta duo; deinde minue minorem
duorum errorum ex majore eorum, quod est ut demas
viginti octo ex triginta, et remanebunt duo. Per ea
igitur divide quadraginta duo, et pervenient tibi vi-
ginti unum : hoc est quod habuiït primus. Cum au-
tem volueris scire quod habuit secundus , facies que-
inadmodum fecisti in primo, et invenies si Deus
voluerit. Quod est ut multiplices errorem primum ,
qui est triginta , in lancem quan posuisti secundo ,
secunda vice, scilicet triginta unum; et multiplices
errorem lancis secunde , qui est viginti octo , in lan-
( 357 )
cein quam secundo prius posuisti, scilicet viginti
octo, et deme minorem ex majore , CE quod remanet
divide per superfluum quod est inter duos errores,
et pervenient tibi septuaginta tria. Et hoc est quod
secundus habebat,
Capitulum cambitionis..
Quod si aliquis dixerit : Vir quidam ivit ad cambi-
torem qui habebat dragmas duorum generum, ex uno
quorum cambiebantur viginti pro aureo et ex altero
triginta. Dedit autem aureum tali tenore ut reciperet
dragmas ex duobus generibus cambitionis et accepit
viginti septem dragmas, quantas ergo accepit ex eis
viginti quarum cambiebantur pro aureo et quantas ex
eis quarum cambiebantur triginta (1)? Capitulum nu-
merationis ejus, secundum augmentum et diminutic-
nem , est ut sumes ex viginti quartam , que est quin-
PS LAN PE QUEE
(1) BH PES A7 AS
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By 25; 27 #25 —'3 — e —"II{° errêur.
6 = xM—= 24
( 356, )
que, et ponas eam lancem et sumas ex triginta lan-
cem secundam , que sit tres quarte ipsorum ; et erit
viginti duo et dimidium. Aggrega ergo quinque que
accepisti ex viginti, viginti duobus et dimidio que
accepisti ex triginta , et erunt viginti septem et dimi-
dium. Oppone ergo per ea viginti septem que dixit
se accepisse ex duobus cambüis, et tunc jam errasti
cum dimidio addito; et hoc vocatur error primus.
Deinde assume lancem secundam ex viginti, que sit
decem et est medietas viginti, et assume ex trigiuta
lancem secundam que sit ejus medietas que est quin-
decim. Eis igitur adjunge decem, et erunt viginti
quinque. Oppone ergo per ea viginti septem, et tunc
jam errasti cum duobus diminutis, et hoc vocatur
error secundus. Multiplica igitur errorem secundum,
qui est duo , in lancem primam , que est quinque, et
pervenient decem; deinde multiplica errorem pri-
mum, qui est medietas , in lancem secundam, que
est decem, et pervenient quinque. Postea conjunge
simul duos numeros eo quod unus eorum est diminu-
tus et alter additus, et erunt quindecim; deinde
aggrega simul duos errores, qui sunt dimidium et
duo , et erunt duo et dimidium. Divide ergo quinde-
cim per duo et dimidium, et pervenient tibi sex
dragme. Hoc ergo est quod ipse accepit ex cambio
viginti, et hoc est tres ipsius decime. Oportet igitur
ut ipse acceperit ex triginta septem decimas ipsius ,
que sunt viginti unum. Quod si scire volueris quan-
tum acceperit ex eis quarum triginta cambiuntur fa-
cies quemadmodum fecisti in questione prima et
invenies. Et hoc secundum regulam invenitur, que
( 359 )
est ut ex aureo assumas rem etmultiplices cam in vi-
ginti, et erunt viginti res; remanet aulem aureus
excepta re. Ipsum igitur multiplica in triginta, et
erunt triginta aurei exceptis triginta rebus, Eis igitur
adjunge viginti res, et erunt triginta aurei excebtis
decem rebus, qui equantur viginti septem. Minue
ergo viginti septem ex triginta, et remanebunt tria
que equantur decem rebus. Ergo res equatur tribus
decimis. Oportet ergo ut ex triginta assumas septem
decimas.
Capitulum tritici et order.
Quod si dixerit : Fuerunt decem cafe tritier.et
ordeï , et fuit caficius tritici venditus per octo drag--
mis, et duo caficii ordei fuerunt venditi per drag-
mam unam , et adjunctum fuit precium , et fuit qun-
quaginta dragme. Quantum ergo fuit triticum -et
quantum ordeum (1)? Erit capitulum numeratio-
nis ejus secundum augmentum et diminutionem ut
assumas lancem ex uno, ac si triticum esset unum
(1) 2 Ly—= 10,82 EL y— 50.
2
Si l’on suppose z = 1,7 = 84, on aura
24 y = 85; 85 «10 —75—eZ= l'erreur.
Si l’on suppose z = 2, y — 68, on aura
2 y = 70; 790 — 10 = 60 —e! = Il erreur.
2e—c! 150 — Go
=— VEN 4.
é=/0là 75 — 60
( 360.)
venditum esset octo dragmis; deinde deme hune oc-
to ex quinquaginta dragmis, et remanebunt quadra-
ginta duo. Cum eis igitur vende ordeum dando duos
caficios pro dragma , et erunt octoginta quattuor ca-
ici , quibus adde caficium cujus precium fuit octo ,
et erunt octoginta quinque caficü. Per eos igitur op-
pone decem caficios , et tunc jam errasti cum septua-
ginta quinque additis; et hoc vocatur error primus.
Deinde assume lancem secundam ex duobus, quasi
triticum esset duo, et venditus esset quisque caficius
octo dragmis, et erunt sedecim dragme. Minue igitur
ex quinquaginta, et remanebunt triginta quattuor
dragme. Cum eis igitur vendatur ordeum dando duos
caficios pro dragma, et erunt sexaginta et octo; dein-
de adjunge eis duos caficios, et erunt septuaginta.
Oppone ergo per eos decem, et tunc jam errasti cum
sexaginta additis, et hoc vocatur error secundus.
Multiplica igitur errorem secundum , qui est sexa-
ginta , in lancem primam , que est unum , et perve-
nient sexaginta ; deinde multiplica lancem secundam,
que est duo , in errorem primum , qui est septuaginta
quinque, et erunt centum et quinquaginta. Postea
deme minorem duorum numerorum ex majore eorum,
quod est ut diminuas sexaginta ex centum quinqua-
ginta, et remanebunt nonaginta ; deinde minorem
duorum errorum ex majore eorunm , quod est ut mi-
nuas sexaginta ex septuaginta quinque , et remane-
bunt quindecim. Divide ergo nonaginta per quinde-
cim, et pervenient sex caficii. Hic ergo est numerus
tritici; et quod ex decem est residuum est ordeum ,
quod est quattuor caficii.
( 366)
Et hoc secundam regulam invenitur , que est (1)
ut assumas rem ex decem. [psam igitur vende pro
octo rebus ; deinde medietatem decem excepta re,
propter hoc quod dixit vendatur ordeum duo pro
dragma una , et invenies illud quinque medietate rei
excepta. Adjungantur ergo quinque excepta rei me-
dietate octo rebus. Restaura ergo medietatem rei ex
octo rebus , et remanebunt septem res et dimidium
et quinque ex numeris, qui equantur quinquaginta.
Minue ergo quinque ex quinquaginta, et remanebunt
quadraginta quinque. Habes igitur septem et dimi-
dium rei , que equantur quadraginta quinque. Divide
ergo quadraginta quinque per septem res et dimi-
dium , et pervenient tibi sex. Hic igitur est numerus
tritici, et ordeum est illud quod remanet ex decem
quod est quattuor. Intellige et invenies.
Aliud capitulum de eodem.
Quod si dixerit : Divisisti decem in duas partes,
et multiplicasti unam in unum et secundam in sex,
et aggregasti utramque multiplicationem , et quod
pervenit fuit quadraginta : quantus ergo fuit nume-
(1) 10 — 2,
83" (10 — 2) = 50,
2
1 2 .
ES mr CON ET À
2
( 362 )
rus (1) cujusque partis? Capitulüum numerationis
ejus, secundum augmentum et diminutionem , est ut
assumas lancem , que sit ex uno , et eam in unum
muluiplices, et erit unum; deinde multiplica resi-
duum ex decem, quod est novem, in sex et. erunt
quinquaginta quattuor , quibus adjunge unum ; quo-
niam dixit aggregasti utramque multiplicationem, et
erunt quinquaginta quinque. Oppone ergo per ea
quadraginta, et tune jam errasti cum quindecim ad-
ditis, et hoc vocatur error primus. Deinde accipe
lancem secundam, que sit ex duobus, et multüiplica
eam in unum , et erunt duo et residuum ex decem,
quod est octo; multiplica in sex , et erunt 48. Ad-
Jjunge ea duobus, eterunt 50. Per ea igitur oppone 40,
et tunc jam errasti cum decem additis , et hoc vocatur
error secundus. Multiplica igitur errorem secundum,
qui est decem, in lancem primam, que est unum,
et erit decem; et multiplica errorem primum, qui
est quindecim , in lancem secundam, que est duo,
et pervenient triginta. Deme igitur minorem duorum
numerorum ex majore corum , quod est ut minuas
(1) z+y—=10,2+67—40.
Si l’on suppose z=— 1,7 —9, on aura
3 67 = 55,55 — 40 — 15 —e — Ir erreur.
Si l'on suppose 2 21,7 = 8, on aura z +67 —5%0;:
50 — 40 = 10 — cl = II erreur,
( 365 )
decem ex triginta et remanebunt viginti : deinde
minue minorem duorum errorum ex majore eorum
quod est ut diminuas decem ex quindecim, et rema-
nebunt quinque. Divide igitur viginti per quinque et
pervenient tibi quattuor. Et est una duarum par-
tium , et pars secunda est sex. Intellige. |
Et hoc secundum regulam invenitur , que est ut(1)
ex decem sumas rem , et eam in unum multiplices , et
erit res. Residuum vero est decem excepta re, et est
pars secunda. Eam igitur in sex multiplica , et habe-
bis sexaginta exceptis sex rebus. Quibus adjunge rem,
et erunt sexaginta exceptis quinque rebus , que equan-
tur quadraginta. Restaura igitur sexaginta per quin-
que res, et adjunge eas quadraginta. Minue ergo qua-
draginta ex sexaginta, et remanebunt viginti que
equantur quinque rebus. Ergo res una equatur quat-
tuor , et est una duarum partium.
Capitulum de cambio.
Quod si dixerit : Fuerunt centum aurei quorum
quidam fuerunt melichini, et quidam revelati; et
quisque melichinus in cambio fuit venditus per quin-
que solidis, et quisque revelatus fuit in cambio ven-
ditus per tribus solidis, et quod ex cambio aggregatum
est fuit quadraginta et sexgate solidi. Quot ergo
(1) Y—=10— 2,2+ 6(10 — 2) — 40.
6002 — 40; 20 =D2; 44,16;
( 364 )
corum fuerunt melichini et quot revelatis (1)? Erit
capitulum numerationis ejus secundum augmentum
et diminutionem ut dicas : divisisti centum in duas
partes , et multiplicasti unam in quinque et secuudam
in tria , et aggregasti utramque multiplicationem , et
quod pervenit fuit quadraginta et sexaginta. Assume
igitur lancem primam, que sit ex uno, et multiplica
eum in quinque, et erunt quinque, et remanebunt
ex centum nonaginta novem. Ea igitur in tria multi-
plica ; et erunt ducenta et nonaginta septem, quibus
adjunge quinque, et ertnt trecenta et duo, per ea
igitur oppone quadringintis et sexaginta , et tunc jam
errasti cum centum et quinquaginta octo diminutis ;
deinde accipe lancem secundam a prima divisam,
que sit duo , et multiplica duo in quinque , et erunt
decem ; postea multiplica residuum ex centum , quod
est nonaginta octa in tria, et erunt ducenta et nona-
ginta quattuor , quibus adjunge decem , et erunt tre-
centa et quattuor. Per eo igitur oppone quadringentis
et sexaginta , et tunc jam errasti cum centum et quin-
ginta sex diminutis; postea multiplica lancem pri-
mam , que est unum , in errorem secundum, qui est
(1) 5xz+3y—=460, x + 7y—100
Si l’on suppos = 1,7 — 93, où aura
5x 3 y = 302; 460 — 302 = 158 — e — I" erreur.
Si l’on suppose x = 2, y = 98, on aura
5 & + 3 y = 304; 460 — 304 = 156 = ce! — II erreur.
2e—e" 3236 — 156
—— = POST = 90,.Y =20.
e Le 158 — 156 —
( 365 )
centum et quinquaginta sex , et erunt centum et quin-
quaginta sex; deinde multiplica lancem secundam ,
que est duo, in errorem primum, qui est centum et
quinquaginta octo, et erunt trecenta et sedecim.
Postea minue minorem duorum numerorum ex ma -
jore eorum, quod est ut minuas centum et quinqua -
ginta sex ex trecentis et tredecim, et remanebunt
centum et sexaginta ; deinde deme minorem duorum
errorum ex majore eorum, quod est ut diminuas
centum et quinquaginta et sex ex centum et quin-
auaginta octo, et remanebunt duo. Divide ergo cen-
tum et sexaginta per duo, et pervenient tibi octo-
ginta aurei. Hic ergo est numerus aureorum meli-
chinorum, et revelati sunt viginti; et hoc quoque
secundum regulam invenitur, que est utex centum
assumas rem et multiplices eam in quinque , et erit
quinque res. Remanebit centum excepta re ; deinde
multiplica centum excepta in tria , et erunt trecenta
exceptis tribus rebus; deinde adjunge eis quinque
res, et erunt trecenta et due res que equantur qua-
dringentis et sexaginta. Minue ergo trecenta ex qua-
dringentis et sexaginta , et remanebunt due res que
equantur centum et sexaginta. Ergo una res equatur
octoginta , et ipsi sunt melichini et reliqui ex centum
sunt revelati.
Capitulum de foris rerum venalium (r}.
Quod si dixerit : Duo viri intraverunt forum re-
(1) Quod in bac questione dicitur nimis est obcurum eo quod dicun-
{ 366. )
rum venalium , quorum unus habebat decem caficios,
et alter viginti et vendiderunt cum una misura et uno
precio , et recedentes habuit quisque eorum triginta
dragmas. Erit capitulum numerationis ejus secundum
et diminutionem ut dicas : divisisti decem in duas
partes et multiplicasti unam partem in unum et alte-
ram in quattuor, et aggregasti utramque multiplica-
tionem , et quod pervenit fuit triginta. Partem tamen
secundam non ob aliud multiplicas in quattuor, nisi
ut quod pervenit sit plus triginta, non enim oportet
ut sit minus. Assume igitur lancem ex uno , et mul-
tiplica eam in unum; deinde multiplica residuum,
quod est novem, in quatluor, et triginta sex; postea
adjunge eis unum , et erunt triginta septem. Per ea
igitur oppone triginta, et tunc jam errasti Cum sep-
tem additis; deinde accipe lancem secundam
divisam a prima, que sit ex duobus , et eam in unum
multiplica, et perveniet duo; deinde multiplica re-
siduum ex decem, quod est octo in quattuor, et
erunt triginta duo. Postea adjunge eis duo , et erunt
triginta quattuor. Oppone ergo per ea triginta, et
tunc jam errasti cum quattuor additis. Multiplica
igitur lancem primam, que est unum, in errorèm
lancis secunde, que est quattuor , et erunt quattuor.
tur uno precio vendidisse. Ideoque sic intelligendum est nullus eorum
accepit pretium alterius generis quam.... quisque tamen eorum duobus
preciis vendidit ( Note marginale du manuscrit), — C'est à cause de
cette obscurité du texte qu’il nous a été impossible de donner la tra-
duction algébrique de ce qui suit.
( 307 )
Postea muluplica lancem secundam in errorem lancis
prime, que est septem , et erunt qualtuordecim. Mi-
nue ergo ex eis quattuor, et remanebunt decem ;
deinde minue minorem duorum: errorum ex majore
eorum , quod est ut demas quattuor ex septem, et
remanebunt tria. Per ea igitur divide decem , et per-
venient tibi tria et tercia. Hoc igitur est quod habens
decem vendidit in primo foro , scilicet tres caficios et
tercia dando unumquemque caficium pro dragma, et
sic habuit tres dragmas et tercia ; deinde minue tria
et tercia ex decem , et remanebunt sex et due tertie.
Vendat igitur unusquemque caficium pro quattuor
dragmis , et habebit viginti sex et duas tercias, qui-
bus adjunge tria et tertiam, et erunt triginta. De vi-
ginti quoque facias (1) quemadmodum fecisti de
decem et invenies. [ntellige. Est propterea regula in-
veniendi hoc, sicut regula decem que dividitur in
duas partes.
Capitulum aliud de eodem.
Quod si dixerit : Est census cujus quartam abstu-
listi et quinta ejus quod remansit, et accepisti quar-
tam ejus quod abstuleras et quintam ejus quod re-
mansit, et quod pervenit fuit septem. Erit capi-
tulum numerationis ejus secundum augmentum et
diminutionem , ut assumas lancem, que sit ex vi-
(x) Et per viginti fac duas lances, unam ex duobus et alteram ex
quatuor, et invenies, (Vote marginale du manuscrit.)
( 368 )
ent, et auferas quartam ejus, et remanebunt quin-
decim; deinde aufer quintam ejus, et remanebunt
duodecim. Postea accipe quartam octo que abstulisti,
que est duo, serva eam ; deinde assume quintam duo-
decim , que est duo et due quinte; ea igitur adjunge
duobus, et erunt quattuor et due quinte. Per ea
igitur oppone septem , et tunc jam errasti cum duo-
bus et tribus quintis diminutis , et hoc vocatur error
primus ; deinde accipe lancem secundam divisam a
prima , que sit ex quadraginta, et aufer ejus quar-
tam, et remanebunt triginta, et quintam residui,
que est sex, et adjunge eam decem ablatis, et erunt
sedecim, eorum ita sume quartam , que est quattuor.
Deinde accipe quintam ejus quod remansit , quod est
viginti quattuor, et est quattuor et quatuor quinte,
et adjunge eam quattuor, et erunt octo et quattuor
quinte. Oppone igitur per ea septem ; tunc jam errasti
cum uno et quattuor quintis additis. Multiplica ergo
unum et quattuor quintas in lancem primam, et
pervenient triginta sex; deinde multiplica duo et tres
quintas in lancem secundam, et erunt centum et
quattuor. Postea aggrega duos numeros pervenientes,
et quod perveniet erit centum et quadraginta ; deinde
aggrega duos errores, qui sunt unum et quattuor
quinte et duo et tres quinte ; éterunt quattuor et due
quinte. Divide ergo per ea centum et quadraginta,
et quod perveniet erit census, qui est triginta unum
et novem partes undecime. Hoc quoque secundum
regulam invenitur , que est ut ponas principium ex
quo consurgit quarta et quinta viginti, et auferas ei
quar tam suam, et remanebunt quindecim et quintam
( 369 )
residui , et remanebunt duodecim. Sume ergo quar-
tam octo quam abstulisti et quintam duodecim re-
manentium, et quod perveniet erit quattuor et due
quinte. Ergo dic : in quem numerum multiplicantur
quattuor et due quinte donec perveniant viginti? Il-
lud vero invenies quattuor et sex undecimas. Multi-
plica igitur hec quattuor et sex undecimas partes in
septem que dixisti remansisse ex censu, et quod ex
multiplicatione perveniet erit illud quod voluisti,
quod est triginta unum et novem undecime partes ,
el est census,
Capitulum de anulrs.
Quod est ut dicas viro : Sume quod est inter te et
anulum ; deinde dic ei dupla quod habes. Postea dic
ei : adjunge ei quinque ; deinde dic : multiplica ip-
sum in quinque. Postea dic ei, adde eis decem;
deimde dic : multiplica quod habes in decem. Postea
dic : minue ex eo quod habes quadraginta. Cum ergo
minuerit ea, accipe pro quadragentis unum, el ip-
sum serva. Deinde dic ei : minue ex eo quod habes
centum. Cum ergo diminuerit ea, assume tu et pro
eis unum. Deinde precipe ei ut ex eo quod habet,
diminuat centunt quoties poterit, et tu pro unoquo-
que centenario diminuto assume unum. Postquam
ergo non remanserit ei centum, considera illud quod
habes , fiet enim ut illud ad quod pervenerit numerus
sit ille qui sumpsit anulum. Alio quoque modo inve-
nitur hoc, qui est ut dicas viro : Sume quod est in-
ter te et anulum in una manuum tuarum , el assume
1. 24
(570 )
in alterm tandem; deinde assume tu in manu tua
unum; postea dic ei : multiplica quod habes in una
manuum tuarum, in quemcumque numerum volueris.
Postea multiplica unum quem tenuisti in mauu tua in
ilum numerum in quem precipisti illum multiplicare,
et postea dic ei : divide quod exivit ex multiplicatione
per illud quod habet in alia manu, perveniet ergo
unicuique quantum fuit quod pervenit ex multiplica-
tione ejus quod habebas in manu tua. Postea dic ei :
divide quod exivit ex multiplicatione per illud quod
habet in alia manu tua. Postei dic ei : eice quod atti-
net uni de eo quod accepisti. (Dubia est regula de
anulo). Et postea dic mihi quod remansit. Et tu,
minue illud de eo quod tenuisti in manu tua aggre-
gatum, et quod remanebit erit illud. Et hoc alio
modo invenitur, qui est ut dicas viro : sume quod
est inter te et anulum, postea dic ei, adjunge ei du-
plum ipsius ; deinde dic : adde ei quantum est medie-
tas ejus quod aggregatum est. Deinde dic ei : minue
ex co quod habes novem. Cum ergo minuerit ea,
sume tu per novem duo ; deinde precipe ei ut ex eo
quod habet minuat novem, et assume pro unoquoque
novenario diminuto duo. Cum ergo remanseris ei nu-
merus novem, sume pro eo unum , deinde considera
lud quod habes. Ipsum namque est ille qui sump-
sit anulum. Et hoc item alio reperitur modo, qui est
ut dicas viro : sume quod est inter te et anulum
deinde dic, multiplica quod habes in tria, postea
dic ei; sume medietatem ejus quod tibi pervenit.
Deinde quere ab co si est in eo fractio. Quod si dixe-
ritest : assume tu pro fraclione unum ; deinde dic ei,
(371)
serva fractionem, donec sit unum integrum, Dein-
de dic ei : multiplica quod habes in tria; et postea
dic ei: minue ex eo quod habes novem. Et tu, as-
sume pro unoquoque novenario diminuto duo , et
aggrega que habes, et tuum eritillud. Quod si dixerit,
non est in eo fractio, et cum dicis, minue ex eo quod
habes novem, dixerit non est in novem, tune dic ei
quod nichil accepit. — Expletus est liber.
Si tres viri tenuerinttres res diversi generis, et vo-
lueris scire quam illarum quisque eorum teneat ; nos-
cas primus unamquamque earum, et in corde tuo
pone unam primam, et alteram secundam , et aliam
tertiam, et voca similiter in corde tuo primam duo et
secundam novem et terciam decem. Deinde unum
trium hominum non duo, et alium voca tres, et ter-
cium voca quinque , et precipe uni eorum qui sciat
quid quisque eorum teneat, ut multiplicet nomen te-
nentis rem primam in duo , et tenentis rem secundam
in novem, et nomen tenentis rem terciam in decem,
et aggreget ea que ex multiplicationibus pervenerint,
et summam inde pervenientem tibi dicat. Quam tu
assumens minue ex centum et residuum partire per
octo, et quod ex divisione pervenerit erit nomen te-
‘nentis rem primam, et quod remanserit erit nomen
tenentis rem secundam, et alius tenebit terciam rem.
Nous avons déjà indiqué les manuscrits d’où nous
avons tiré l’ouvrage précédent. Le texte de ces ma-
nuscrits n'offre pas beaucoup de variantes : quand il
y en avait d'importantes nous avons choisi la lecon qui
nous paraissait la meilleure. En général, cependant,
24.
(372 )
nous avons suivi le texte du manuscrit n° 49, du
Supplement latin de la bibliothèque du roi.
Voici maintenant le Liber de mutatione temporis
secundum Indos , dont nous avons déjà parlé , tiré du
manuscrit latin n° 7326, de la bibliothèque du roi.
Liber de mutatione temporum secundum Indos.
Sapientes Indi de pluviis judicant secundum Lu-
nam considerantes ipsius mansiones el conjunctiones
vel aspectus planetarum ad ipsam : alii sapientum
majorem partem judiciorum de pluviis ad Lunam
referunt. Indi totum judicium Soli Lune attribuunt,
asserentes ipsam significatricem hujus mundi universi
et mediatricem inter res terrenas et planetas; recipit
enim a superioribus planetis et stellis fixis vim que
dat terris, quia circulus ejus proximus et puncto
terre quod quidem sensu visus comprehendimus li-
quido quia ipsius multiplices effectus apparent in op-
positionibus et conjunctionibus et quadratis, et appa-
rent commutationes gencrationis et corruptionis se-
cundum augmentum vel diminutionem lucis illius et
notitie secundum elevationem vel descensum ipsius
tam in cireulo egresse cuspidis quam in circulo brevi
et secundum complexionem ipsius ad aliquem pla-
netam. Asserunt etiam Indi Jovem et Venerem pla-
netas esse fortunas , ceteros omnes infortunas. Subti-
lissimi tamen eorum asserunt solos Saturnum et
Martem infortunas esse, reliquos omnes temperatos,
quod veritati aflinius videtur. Cum vero Luna habet
conjunctionem vel aspectum cum planeta infortuna ,
inde pluviam pervenire in conjunctione vel aspectu
( 373 }
fortune, nisi eadem fortuna cum infortuna conjunc-
tionem habeat vel aspectum ; quia fortune solventes
subtiliant aera, et dissipant crassitudinem aeris ex
fumo a terra ascendente tractam , infortune vero se-
cundum proportionem circulorum ad terram crassi-
tudinem augmentant, quia operalio eorum in terra
fumo similis est et attrahunt humorem ac fumum a
terra habundancius et densant crassitudinem pro-
priorem, et ligant pluviam et ventos, licet sit fortuna
qui humiditatem operatur Lune conjuncta pluvias
eficit, non tamen id efhicit nisi habeat conjunctionem
vel aspectum in fortune.
Mansionum autem Lune quedam sunt humide,
quedam sicce, alie temperate, quedarm evenit ex op-
positione stellarum fixarum que suni in eis et secun-
dum mutationem loci ex parte circuli et secundum
radios aspecius trini sextilis quadrati oppositioni pla-
netarum , quos prospiciunt in mansiones predictas el
secundum quod planetas ascendentis sit, vel in an-
gulis vel in postangulis vel in domibus lapsis, et
secundum naturam locorum in quibus Luna a planete
stat videlicet signa masculina, vel feminina , vel mo-
bilia, vel fixa, vel communia, vel ignea , vel terrea ,
vel aeria , vel aquatica, ete. Preterea secundum con-
junctionem completam vel incompletam cum planetis
ex latitudine et longitudine consideratam , et aspec-
tum similiter nisi sit completa non ostendet rem
completam. Indi vero considerant conjunetionem
Solis et Lune et oppositionem et quadrata : ali plu-
rimi preter hec considerant quadratorum medias et
portas que sunt in XIT gradus, ante conjunctionis
(374)
locum et totidem post et totidem ante, et post locum.
Indi etiam asserunt... XX VIII mansiones Lune vero
XXIX , unde secundum divisionem Indorum totius
cireuli in XXVIIT, contingunt singulis mansionibus
XIIT gradus et tercio unius : rationem quidam hujus
partitionis ignoramus, sed a quibasdam eorum qui
ad nos perveniunt (1) hoc accepimus mansionem
illam , alii vocant adavenen , non esse ab Indis in nu-°
mero mansionum computatam quia hec proxima est
mansioni virginis que est una mansionum Cujus man-
sionis est illa pars. Ali hanc pretendunt rationem
quia etsi sunt XXIX, Indi illam non numerant in
qua junguntur Sol et Luna, quia Luna in ea tunc
nullam vim habet cum conjungitur Soli, nec vim
habet donec in alia mansione appareat a Sole separata
et habeat conjunctionem vel aspectum cum altero
planeta. Mansiones itaque que multam humiditatem
moustrant sunt X , et vocantur vapor circuli : Alde-
baran quod est medium tauri , Algebathan, Algerpha,
Algaphata , Abgebenen , Algard, Allebra, Alnathan,
Alesthadebe, Alpharga, et postea si fuerit separata
a conjunctione Solis et habeat conjunctionem vel as-
pectum cum planeta infortuna, inducit pluvias vide-
licet ad Saturnum vel Martem, vel etiam Venerem.
Aldirahaam vero quod est medium Cancri, multam
significat pluviam et omnes relique pauciorem : sex
awtem mansionum sunt sicce, que sunt Albotharia,
Almuster, Althaif, Altherp, Alesadadabia , Algar-
(x) I faut remarquer ce passage qui atteste derechef les rapports
scientifiques des Hindous avec les peuples occidentaux au moyen äge,
(37)
phalaul. Relique sunt temperate , quarum tres pau-
cam humiditatem habent, que sunt Altoraia, Althi-
meth, Aleschadebe in quibus cum Luna fuerit con-
juncta cum planeta pluviali, interdum pluvias officit.
Comperietur causam pluviarum et ventorum et nubi-
lorum et aeris mutationis , et si futura sit vel non, et
inquo tempore anni mutatio futuri sit, hoc modo :
inquires horam et locum cum gradibus et minutis
diligentissime in quo futura est conjunetio Solis et
Lune, sive oppositio, utrum proprior fuerit in gressu
Solis in arietem, preter hoc comperiunt Indi hôoram
qua Sol intrat XX, gradum scorpionis, aflirmant et
etiam ab eo tempore aquas in puteis augmentari.
Comperies etiam diligentissime per quot gradus et mi-
nuta diflerunt singuli planete a capite arietis in hora
prefate conjunctionis et oppositionis , et in qua man-
sione sunt planete singuli gradus et tertiam unius
pro una mansione inquirendo ab ipso caput arietis.
Inquires vero ad quem planetam Luna aspectum ha-
beat, recedens a cuncto gradu in quo fuerit coujunc-
io el oppositio. Quod si aspexerit Saturnum , et
utrumque fuerit in mansione humida, et non sit
impeditus Saturnus ab aspectu Jovis, erunt nubes
nigre et pluvia lenta et durabilis, et si planete infe-
riores aspexerint Saturnum , sive Venerem et Mercu-
rium , erit pluvia major et durabilior, et hec quidem
est consideratio ad dinoscendum pluvias anni : simi-
liter considerabis conjunctiones et oppositiones ,
et quadrata mensibus singulis ad comperiendas plu-
vias mensium et ad inveniendum diem in quo pluvie
imcipient. Require ergo distantiam gradus in quu
( 376 )
fuerit coniunctio vel oppositio vel quadrata ad gra-
dum planete pluvialis, et si fuerit Luna insigno mo-
bili, da cuique gradui horam unam, et si in fixo da
cuique gradui diem unum, et si in communi et im-
mediate prima singulis gradibus dies singulos, et
insero cuique gradui horam unam ,et ubi terminabi-
tur distributio in eadem die vel hora , erit pluviarum
initium. Subtilissimi Indorum consideraut velocita-
tem et tarditatem pluviarum secundum velocitatem
et tarditatem cursus Lune et secundum aumentum
luminis ipsius, dicentes velocitatem et aumentum
ejus pluvias sequi, si planeta eui Lune vim dat simi-
lis sit Lune in predictis accidentibus, et pro gradibus
interiacentibus Lunam et planetam, totidem horas
supputabis in velocitate et tarditate et in minutione
totidem dies, ut veniat pluvia. Verum si cum pre-
dictis Mercurius aspexerit Saturnum, fit tardatio,
donec Luna ad locum Saturni perveniet, vel opposi-
tum vel quadratum; et si Saturnus fuerit in mansione,
sicca et Luna ei vim dat, et neuter inferiorum pla-
netarum ipsum aspiciat, est nebula sine pluvia. Et si
Luna det vim Jovi utroque exeunte in mansione hu-
mida et inferiore, alteruter Jovem aspiciat, ros erit
vel nubila tantum : quod si Luna et Jove sint positis,
neuter inferiorem Jovem aspiciat, et ipse imprimis
aspiciat Saturnum , erit pluvia : et si Luna et Mars
sintin mansionibus humidis et alteruter inferiorem,
Martem aspiciat, sequentur nubila terribilia et toni-
trua ét lampades et grando et non pluet nisi Mars
aspexerit Jovem et Saturnum ; si dispositor temporum
Deus gloriosus et sublimis voluerit finiri. — Explicit.
NOTE XV.
( PAGE 126 )
On trouve les chiffres indiens dans l'algèbre de
Mohammed ben Musa qui vivait sous Al-Mamoun ,
au commencement du neuvième siècle de lère chré-
tienne ( Mohammed ben Musa, algebra, p. 11 et 55-
64 du texte arabe}; mais, comme le manuscrit d’a-
près lequel M. Rosen a publié cet ouvrage est du qua-
torzième siècle, on ne sait pas si c’est l’auteur ou le
copiste qui a introduit ces chiffres. Les trois m rus-
crits de la bibliothèque du roi (Supnrlement .atin,
n° 49, f. 110. — MSS. latins n° 79377 À. — esidu
Saint-Germain, recueil de physique, astronomie et géo-
métrie, paq. 11, n° 7,in-fol) qui contiennent la tra-
duction que nous avons insérée dans ce volume (voyez
précédemment note XIT, p. 253), traduction qui
probablement est antérieure au manuscrit de la bi-
bliothèque d'Oxford publié par M. Rosen ( Moham-
med ben Musa, algebra, p. xx), ont les mêmes
lettres dans les figures, mais ne contiennent pas de
chiffres; ce qui pourrait faire soupconner que ces
chiffres manquaient aussi dans le texte arabe dont
l’ancien traducteur s'était servi. Un passage du Souñ
prouve que les traducteurs arabes de Ptolémée em-
ployaient les lettres de Palphabet pour exprimer les
nombres. /Votices des manuscrits de la Libliotheque
(378
du roi, tom. XIT, [I part., p. 242. — Voyez aussi
de Sacy, grammaire arabe, Paris, 1827, 2 vol. in-8,
tom. Î, p. 54). Bayer et quelques autres érudits
ont cru que les Arabes et les Indiens avaient recu les
chiffres numériques des Grecs (Bayeri, hist. regni
Bactriani, p. 123 et 127.— Villoison , anecd. græca ,
tom. Il, p. 152. — Raccolta d'opuscoli, scientifia e
Jilologia , tom. XLVIIT, p. 21). Mais cette opinion a
été généralement abandonnée dès que l’on a bien
connu un passage où ‘Fibonacci fait l’énumération
et la critique des divers systèmes de numération qui
étaient en usage avant lui ( Targiont viaggi, tom. IT,
p. 59). Théophanes dit que lorsque Walid défendit
d'écrire en caractères grecs, il en excepta les chiffres à
cause des diflicultés qu’offrait l’ancienne arithmétique
arabe (Theophanes chronicon, Paris, 1655, in-fol.,
p- 914. — Abul-Pharajii, hist. compend. dynast.,
p- 127). Ce passage prouve que du temps de ce calife les
Arabes ne connaissaient pas encore les chiffres Indiens.
Mais ils les connaissaient certainement au neuvième
siècle, lorsque Alkindi écrivait un traité sur larithmé-
tique des Hindous. Il est vrai qu'au douzième siècle
Avicenne , comme il le raconte lui-même , fut envoyé
par son père chez un marchand d'huile pour ap-
prendre l’arithmétique indienne (4bul- Pharajii, hist.
compend. dynast., p. 229). Mais ce fait, d’où certains
auteurs ont cru pouvoir conclure que cette arithmé-
tique n'était arrivée que fort tard chez les Arabes,
prouve seulement qu’à Bokhara, patrie d’Avicenne,
on pouvait à-la-fois être marchand d’huile et ensei-
gner arithmétique. Et peut-être l’on pourrait déduire
GR
de là que cette science était plus connue alors en
Orient que ne l’est à présent chez nous ( 4bul-Pha-
raji, hist. compend. dynast., p. 230.— Brahmegupta
and Bhascara, algebra, p. LXX.— Mohammed ben
Musa, algebra, p. 197. — Andres storia d'ogni litte-
ratura , tom X, p. 108.— Montucla, hist. des math.,
tom. 1, p. 375. — Bhascara Acharya, Lilamwuti,
p. 35. — Targioni viaggi, t. XIL, p. 211.)
(“380”)
NOTE:X VI,
( PAGE 134 )
Abel Rémusat a publié dans ses Mélanges asiati-
ques (tom. TL, p. 212 et suiv.) les noms mongols de
la série des 28 constellations du zodiaque lunaire,
constellations qui forment la base de toute l’urano-
graphie des peuples de lAsie orientale (Hyde,
syntag. dissertat, , tom. T, p. 7. — Scaligeri, notæ
in Spheram barbaricam Manilii, ad calcem Manilii as-
tron., Lugd.-Batav. 1600 , in-4°, p. 368 et seq.. —
[Votices des manuscrits de la bibl. du roi, tom. XI,
L part., p. 246 et suiv.). En rapprochant ces noms,
des noms sanscrits, on y apercoit l’origine indienne.
Ils sont si anciens chez les Hindous qu’ils se trouvent
déjà dans les lois de Menou { Recherches asiatiques ,
tom. [T, p. 346). Les Chinois, les Persans et les
Arabes ont adopté la mème division du ciel, qui
paraît avoir une origine distincte de Ja division
égyptienne ou chaldéenne en douze parties; mais
la comparaison des divers zodiaques prouve que ces
peuples ont souvent changé la position des con-
stellations ( Notices des manuscrits de la bibl. du
rot, t. XIT, 1° part., p. 246. — Asiatic researches ,
tom. ITT, p. 257.— Souciet, observations math. tirees
des anciens livres chinois, tom. f, p. 243). W. Jones et
Colebrooke ne sont pas d’accord sur l'origine de
( 381)
l'astronomie indienne : le premier veut que cette
astronomie soit toute nationale , le second y trouve
des traces de l’influence grecque. Peut-être le zodiaque
grec a-t-il pénétré chez les Hindous par le premier
de Bactriane ( Brahmegupta and Bhascara, algebra,
p. xx11-xxIV) : peut-être aussi le zodiaque a-t-il eu
une double origine ; car la mythologie indienne nous
montre le dieu Soma épousant douze constellations,
et procréant les douze mois ( Recherches asiatiques ,
tom. IT, p. 337 et 344.— Asiatic researches , vol. IX,
p. 323 et 347). On sait que les Hindous, comme les
Arabes, les Egyptiens et les Chaldéens, divisaient
chaque signe en trois parties ( Asialic researches,
vol. IX, p. 367 et 373); et il faut remarquer que la
connaissance de Pétoile polaire est commune à la
sphère indienne et à la sphère grecque ( Asiatic re-
searches, vol. IX, p. 329). Dans les Vues des Cor-
dillères, M. de Humboldt a fait ressortir les nom-
breux rapports qui existent entre les zodiaques mexi-
cains et thibétains, et en général entre le système
astronomique des Aztèques et celui des peuples de
l'Asie centrale.
( 382.)
NOTE: XVIL
( PAGE 136 )
Comme les Missionnaires n'avaient jamais cité
exactement les auteurs chinois qui parlent de la bous-
sole, nous nous proposions de publier dans cette
note le texte chinois des grandes annales de la Chine,
intitulées Zong-kian-kang-mou, où il est parlé
des chars magnétiques, où chars qui indiquent
le midi: chars qui sont mentionnés sous le règne
de Hoang-ti (presque vingt-sept siècles avant l’ère
chrétienne), et sous le règne de 7ching-wang (au
douzième siècle avant l'ère chrétienne), et qui suppo-
sent la connaissance de la polarité de Paimant. Mais,
depuis l'impression du passage auquel se rapporte
cette note, M. Klaproth ayant publié un ouvrage
très intéressant sur l'invention de la boussole, où se
trouvent les passages originaux du 7ong-kian-kang-
mou que nous voulions publier, nous avons pensé
qu'il était inutile de les reproduire ici. M. Klaproth
a cité aussi plusieurs autres passages plus modernes,
qui prouvent d’une manière incontestable que les
Chinois ont connu la polarité de l’aiguille aimantée
long- temps avant les Européens ( Xlaproth, lettre
sur l'invention de la boussole, p. 64-07). Il faut
lire tous ces passages dans l’ouvrage même de
M. Klaproth, où l’on verra aussi qu'au commence-
( 385 )
ment du douzième siècle les Chinois connaissaient
la déclinaison de l’aiguille aimantée( A/aproth, lettre
sur l'invention de la boussole, p. 68), déclinaison
qui n’a été connue que long-temps après en Europe.
Dans le volume suivant, nous aurons l'occasion de
revenir sur ce point, et nous discuterons les droits
que le prétendu Adsigerius (1) et Colomb peu-
vent avoir parmi nous à cette découverte. M. Kla-
proth pense que les mots italiens bussola (bous-
sole) et Dossolo (boîte) sont deux mots entière-
ment distincts ; et il fait dériver bussola du mot arabe
mouassala (dard, flèche) ( Xlaproth, lettre sur l’in-
(1) Nous disons le prétendu Adsigerius, parce qu’il nous semble que
V’Epistola Petri Adsigerii in signationibus naturæ magnetis, qui se
trouve indiquée dans le catalogue des manuscrits de la bibliothèque de
Leyden ( Catalogus bibl. publicæ univers. Lugd.- Batav., p. 365),
et qui a été si souvent citée par les physiciens modernes, n’est pas du
tout d'Adsigerius. En effet, dans le manuscrit intitulé Geometria de la
bibliothèque du roi (55. latins, n° 7378 A, in-40, f. 67), il ya
un petit traité qui a pour titre Epistola Petri Peregrini de Maricourt
ad Sygerium de Fontancourt militem de magnete, et il est clair que
le titre de l'Epistola du manuscrit de Leyden n’est qu’une corruption,
ou une copie tronquée et défigurée, du titre qui est dans le manuscrit
de la bibliothèque du roi, et que des mots Petri ad Sigerium (où il y
avait peut-être quelque abréviation), un copiste maladroit a fait Petri
Adsigeri. Dans le catalogue imprimé des manuscrits de la bibliothèque
du roi, on trouve ad Sigermum de Fauconcourt; mais nous croyons
qu’il faut lire dans le manuscrit ad Sigerium de Fontancourt, Kn tout
cas l’auteur de la lettre en question serait toujours Petrus Peregrinus,
et non pas Adsigerius. (Catalogus codicum manuscrip. bibl regie,
tom. IV,p. 351.)
( 384 )
vention de la boussole, p. 26 et 27). Mais si bous-
sole avait pour racine un mot exprimant che, et
en général tout ce qui est pointu, ce mot boussole
aurait dù être employé par les premiers navigateurs
européens qui se sont servis de l'aiguille aimantée ,
tandis qu'il n'a été employé qu’à une époque posté-
rieure, après la suspension de l'aiguille et après
l'usage de la boîte (bossolo), D'ailleurs les deux
mots bussola et bossolo ne sont pas aussi différens que
le croit M. Klaproth. La langue italienne admet
fréquemment ce changement de lu en o et #ice versa.
On dit indifléremment cultello et coltello, coltura
et cultura , ete. De plus on trouve dans les anciens
manuscrits bussulo pour bossolo (comme par exemple
dans un passage du commentaire sur Dante, écrit par
Francesco de Buti vers 1385, passage que nous avons
fait connaître (1) il y a déjà plusieurs années dans un
journal qui se publiait à Florence), et M. Klaproth
lui-même a cité un passage où la bussola est appelée
bozzolo ( Klaproth, lettre sur l'invention de la boussole,
p. 62) (2). Dans le même ouvrage, M. Klaproth
(x) Antologia, Giornale, Novembre 1831, p. 12.
(2) Voyez Ferro, teatro delle imprese, Venet., 1623, 2 part. en
r vol, in-fol., part. II°,p. 139, 149, 188, etc. — Ruscelli imprese,
Yenet., 1580, in-4°. — Pomodoro, Geometria prattica, Roma, 1624,
in-fol., tom. I et XL. — Gimma, Italia letterata, Napol., 1723,
> vol. in-4°, tom. II, p. 535 et seg. — Voyez aussi l’Itinéraire de
zarthema, et la relation du voyage de Vasco de Gama, écrite par un
gentilhuomo Fiorentino ( Ramusio, navigationi, Venet. 1563, 1583 et
1606, 3 vol. in-fol., tom.I, f. 121 et 156). — Dans tous ces ou-
( 385 )
a cité d’autres passages qui attestent que les Chinois
connaissaient anciennement la force attractive du
succin (r) et l'influence que la lune exerce sur les ma-
rées (Klaproth, leitre sur l'invention de la boussole,
p. 125-128). Ces faits étaient connus , depuis très
lons-temps, des Européens, et on les trouve dans Théo-
phraste et dans Pline; mais il y a bien loin de ces
observations isolées. à la théorie du tonnerre de Fran-
klin, ou à la théorie des marées telle que Newton nous
l'a donnée.
vrages les mots Bossodo, bossola . bussolo et Eussola, ont été employés
indifféremment. — Nous ajouierons en passant, que le sentilhomme
Florentin , dont il s'agit ici, n'a pas accompagné Vasco de Gama aux
Indes, comme le suppose M. Klaproth (Leïtre sur l'invention de la
Boussole, p. 63); mais qu'il s'est trouvé à Lisbonne au retour de Gama,
et qu'il n'a fait qu'écrire une courte relation de ce grand voyage (Ramz-
sio, nevigañoni, tom. I, £ 119-121).
(x) AL Klaproth fait dire à Kouo-phe : - Le surcin attüre les grains
= de moutarde = { Alaproth, lettre sur l'invention de la boussole,
p- 125.) Il nous semble que, dans le passage cité par cet illustre sino-
losue , le mot kier sisnife plutôt festwce que grœns de moutarde. C'est
la signification que lui a attribuée M. Julien, dans sa traduction de
Mens-Tseu {pars postersor, p. 88 ): et elle se trouve indiquée dans le
dictiongaire de Kang-hi, au mot Æiaï, à la clef 140. D’ailieurs on a tou-
jours parlé, mème en Occident, de l'action que le succin exerce sur
les brins de paille.
*,
( 386 )
NOTE ÆWTIT.
( PAGES 146 et 147)
M. Julien, membre de l’Institut et professeur de
chinois au collège de France, avait eu la bonté dé réu-
nir, à notre prière, un grand nombre de passages ori-
ginaux relatifs aux différentes découvertes chinoises
que nous avons citées dans le Discours préliminaire :
mais ne pouvant pas, sans dépasser les bornes que nous
nous sommes prescrites, publier ici tous ces textes chi-
nois, nous nous bornerons à indiquer, quant à l’inven-
tion des Pao, l'Histoire des trois royaumes (liv. II,
f. 41), le Dictionnaire le Kang-hx et le Dictionnaire
Pin=tseu=tsin au mot Pao. On trouve la description
des ponts suspendus, en chaînes de fer, dans la rela-
tion d’un voyage au Tibet, entrepris en 518 de l’êre
chrétienne par trois religieux chinois (Tsn-tai-pi-
chou, X° collection, tom. [, part. V, f. 8). Dans le
même ouvrage (Xe collection, tom. VIT, part. IT,
f. 8) on voit les secours contre l'incendie établis pu-
bliquement en Chine au onzième siècle. On sait d’ail-
leurs que les Arabes y trouvèrent, au neuvième siècle,
l'usage des passe-ports(r) et des postes ( Anciennes re-
(1) Les Arabes du reste se servaient déjà des passe-ports l'an 133
( 387 )
lations des Indes et de la Chine, p. 32 et96). Au com-
mencement du quatorzième siècle, un historien persan
faisait connaître, avec beaucoup de détail, le procédé
de l'impression chinoise (Xlaproth, lettre sur l’'inven-
tion de la boussole, p. 131).
Forcé d’omettre ces passages intéressans, nous nous
arrêterons cependant un instant sur le Souan-fa-
tong-tsong, traité de mathématiques partagé en: six ca-
hiers et en douze livres, qui se trouve à la bibliothèque
du roi (1). Ce traité (qui est le seul ouvrage chinois de
mathématiques, connu en Europe, auquel n’aient
pas contribué les Missionnaires) porte une date qui
correspond à lan 1593 de l'ère chrétienne, et il
contient à-la-fois de l’arithmétique , de la géomé-
trie et un peu d’algèbre. Ne pouvant pas en donner
ici un extrait détaillé, nous nous contenterons d’en in-
diquer quelques-uns des points les plus curieux.
Dans le premier livre on trouve l'explication du
système de numération, et l’on y voit une valeur de
position attribuée aux chiffres, comme nous l’avons
déjà indiqué (2). Ces chiffres ont différentes formes,
de l'Hégire ( Mémoires de l'acad. des inscript. et belles-lettres, 2° série,
tom. IX ,:p. 66 et suiv.).
(x) Depuis la première édition de ce volume, M. Edouard Biot a
publié une note fort intéressante sur le Souan-fatong-tsong, où il
s'applique spécialement à faire connaître le triangle arithmétique des
Chinois, et les notations qu'ils emploient pour indiquer les puissances
(Journal des Savans , Mai 1835, p. 270).
(2) Voyez ci-dessus, p. 202.
25.
( 386 )
et il faut remarquer que, pour éviter toute ambiguïté,
les barres parallèles qui représentent, en Chine, les
trois premiers chiffres, sont placées dans une position
verticale lorsqu'elles servent à exprimer des dizaines,
et dans une position horizontale lorsqu'elles représen-
tent des unités. Ainsi, par exemple, 22 s'écrit de cette
manière — || (Souan-fa-ton-tsong, Niv. IT, f. 3).
Dans le troisième livre on décrit d'abord quelques
instrumens d’arpentage (ibid. liv. HE, f. 2), et lon y
traite de la quadrature des figures. Le rapport de
la circonférence au diamètre y est supposé tantôt
égal à :#, tantôt égal à == (ibid., liv. TIE, f. 18). Les
6 33
deux livres suivans contiennent des problèmes numé-
riques de différentes espèces. Nous en citerons un seul,
dans lequel on propose de diviser une ssmme donnée
en trois parties qui soient entre elles comme 3 est à 7.
Dans la résolution de ce problème on rencontre une
espèce de notation algébrique : les inconnues sont
désignées par les premiers caractères du cycle chinois,
ibid., liv. V,f. 9).
Dans le sixième livre on trouve une figure qui res-
semble au triangle arithmétique de Pascal, et qui sert
à la détermination successive des divers coefficiens du
développement du binome. Les dénominations des
puissances ont quelque chose de particulier. La pre-
mière puissance est la racine; la seconde puissance est
appelée Fang (carré); la troisième puissance est ap-
pelée Ping-fang (carré solidifié), ou carré où l’on
multiplie deux fois. La quatrième puissance est ap-
pelée carré où l’on multiplie trois fois, et ainsi de suite
(Gibid., liv. VI, f. 3). On trouve aussi dans ce
( 389 )
sixième livre lindication , un peu vague à la ve-
rité, des deux racines d’une équation du second de-
gré (1). En effet, ayant donné le contour et l'aire d’un
rectangle, l’auteur chinois détermine les côtés par une
équation du second degré, et il tire de la mème équa-
tion les valeurs de la base et de la hauteur du rectar-
gle, qui sont les deux racines de l'équation proposée
(ibid., liv. VI, f. 10-13). Enfin, on trouve dans ce
même livre des recherches sur les nombres triangu-
laires (ibid., liv. VI, f. 20); la résotution de toute
équation du second degré (ibid. liv. VE, f. 24 et 25);
l'extraction des racines cubiques (ibid. liv, VE, £. 28),
et la résolution numérique de quelques équations du
troisième degré (ibid., iv. VI, f. 35 et 36).
Dans le neuvième livre, il y a quelques exemples
d'élimination entre deux équations à deux inconnues
(ibid., liv. IX, f. 8 et 9). Le dernier livre contient
un exemple de multiplication selon la méthode in-
dienne (2), par laquelle on écrit séparément, dans les
deux triangles d’une même case rectangulaire, les di-
(1) Mohammed ben Musa avait constate l'existence des deux racines
des équations du second degré, mais seulement quand elles étaient
toutes deux positives ; car il ne considérait jamais les racines négatives,
et à plus forte raison négligeait-il les racines imaginaires (Voyez ci-
dessus p. 257). On ne conçoit pas comment cette remarque du géo-
mètre arabe est restée si long-temps stérile en Europe.
(2) Nous avons déjà vu que depuis long-temps les Occidentaux em-
ployaient des lettres pour désigner les inconnues ei les quantités indé-
terminées (Voyez ci-dessus, p. 99 ).
{ 390 )
zaines ct les unités (ibid., liv. XII, £. 4). Cette mé-
thode, qui se trouve exposée dans les traités d’algèbre
indienne (Brahmegupta and Bhascara, algebra, p. 7),
avait aussi pénétré très anciennement en Europe, et
nous l’avons vu employée dans des manuscrits latins
fortanciens ( MSS. latins de la bibl. du roi, n° 7378 À,
in-4° , Geometria, f. 54). Elle concourt, avec les au-
tres preuves que nous avons rassemblées dans le Dis-
cours préliminaire, à démontrer l’influence que les
sciences des Indiens ont exercée au moyen âge en
Occident (r). Enfin, on trouve aussi dans le douzième
livre du Souan-fa-tong-tsong, des recherches sur la
manière de former (2) les carrés magiques (ibid.,
liv. XIT, f. 13 et suiv. ), et sur la sommation des pro-
gressions arithmétiques.
Afin que l’on puisse mieux juger les méthodes et le
style algébriques des Chinois, nous allons donner ici
la traduction littérale de la solution d’un problème du
second degré qui est résolu dans le Souan-fa-tong-
tsong (liv. VI, f. 10, verso), par une méthode
propre à donner avec facilité les racines entières de
(1) Cette forme de multiplication s'est conservée en Italie jusqu'au
seizième siècle. On la trouve encore dans les ouvrages de Pellos et de
Luc Paciolo (Pellos, compendion de lo Abaco , Thaurin., 1492, in#%°,
f. 3.— Lucas de Burgo, summa de arithmetica , geometria, Tusculan.,
1523, in-fol, Î. 28 ).
(2) A la mème époque, les Européens s’occupaieut beaucoup des car-
rés magiques, dont les Arabes leur avaient probablement appris les
propriétés numériques.
( 591 )
Péquation proposée. C’est surtout au concours bien-
veillant de M. Julien que nous devons de pouvoir
publier ici ce passage intéressant.
« Maintenant ii y a un champ qui a 1750 pas en sur-
face; on dit seulement que la largeur comparée à la
longueur est de 1 pas : on demande combien la lar-
geur et la longueur :
La réponse dit : la longueur, est 50; la largeur 35.
La règle dit, supposez la surface connue :
La différence en plus, qui est 15 pas, se place en
bas. D’après la règle qui tend à réduire en carré les
surfaces longues ou multiples :
D’abord on place 30 au côté gauche par la seconde
règle. On pose aussi 30, et on ajoute à l’excédant en
longueur, il en obtient He et alors on multiplie en-
semble avec ce qu’on a posé en haut.
Les 3 dizaines correspondent aux 4 dizaines de
droite; multipliez 3 par 4 et vous aurez 1200.
En outre les 3 (dizaines) de gauche correspondent
au 5; multipliez 3 par à et vous aurez 150.
En outre (par la seconde règle) on a placé 30 à
l’origine; or, on prend le double et on a 6o; on y
ajoute 15 qui est l’excédant en longueur et on ob-
tient 75. ?
Ensuite on met 5 à gauche par la seconde règle;
on place aussi 5 en bas du carré doublé; ensem-
ble 80. et tous se multiplient ensemble avec les 5
posés en second lieu.
Les 5 de gauche correspondent aux 8 de droite;
multipliez 5 par 8 et vous aurez 400. Précisément, c’est
ce qui fait qu’on obtiendra en largeur 35 pas; ajoutez
( 392 )
l’excédant 15, on obtiendra la longueur qui répond à
la question. (1)
(1) Il est facile de traduire en langage algébrique la solution chi-
noise ; on a d’abord :
2Y7 =17950, t—Y—=15;
7H :15)= 17507 +15 7.
Si l’on pose BL 15b—=a,
b étant un nombre entier quelconque, on aura toujours
PHi5y— BP — 15 b— 1750 — a;
et par suite
P— BP +i:5(7—8)=7—6) (748415) — 1750 — a,
Si l’on fait D=50; on aura &=—= +350,
et par suite (7 — 30) (730 + 15)— 400;
d’où l’on tire aisément , d’après les facteurs du second membre,
TR 7 90!
Afin que celte méthode (qui ne sert au reste qu’à trouver les
racines entières), soit de quelque utilité, il faut que le nombre a, qui
dépend de à, soit tel, que le nombre 1750 — a soit plus facilement
décomposable en facteurs que 1750 , ou qu'il en ait un moins grand
#
nombre.
( 395 )
NOTE XIX.
( PAGE 172 ).
Liber anoe hicincipit. In hoc libro est rememo-
ratio anni, et horarum ejus, et reditionum
anoe in horis suis, et temporis plantationum,
et modorum agriculturarum, et rectificalio-
num corporum, et repositionum fructuum. (1)
© Harib filii Zeid episcopi : quem composuit Mustan-
sir imperatori. Iste liber positus est rememoratio ho-
rarum anni, et temporum ejus, et numeri mensium
ipsius , et dierum ejus, et cursuum solis in signis suis
et suis mansionibus, et terminorum ascensionum ejus
et quantitatis declinationis ejus, et elevationis ipsius,
et diversitatis umbre apud equalitalem ejus, et con-
versionis temporum, et successionis dierum cum ad-
ditione et diminutione, et temporum caloris et frigo-
ris, et ejus quod est inter utraque ex mediatione et
equalitate et horarum omnis temporis, et numeri die-
rum ejus secundum intentionem equatorum æt calcu-
(1) Le traducteur a conservé presque toujours les noms arabes des
étoiles. Pour savoir ce qu'ils signifient, on peut consulter Zdeler, unter-
suchungen über den ursprung und die bedeutung der sternammen ,
Berlin, 1809, in-8.
( 394 )
latorum, et intentionem primorum medicorum qui
determinaverunt tempora et naturas, cum sit apud eos
interpretibus anni diversitas super quam veniet ver-
borum allatio et cadet in loco suo ex libro. Et reme-
moratur ejus a quo non est hominibus excusatio ex
cognitione hore seminandi, et temporis plantandi, et
redditionum multarum earum agriculture et possibi-
litatis colligendi fructus, et colligendi reponenda et
recondenda, et inceptionis maturationis fructuum, et
horarum concipiendi et reliquorum ex sustentaeulis
hominum, et rectificationibus eorum et temporum que
conveniunt mundificationi corporum eorum cum me-
dicina et flebothomia, et horarum aggregandi species,
et semina, et faciendi medicinas et sirupos simul et
condita in temporibus suis, et temporis possibilitatis
eorum et scientie conversionis ventorum et intentio-
num Arabum in anoe et pluviis cum ipsi solliciti sint
de eis et indigeant ascensionibus stellarum et occasibus
earum et pluviosis et vacuis ex eis propter studium
eorum in inquisitione yictus et permutatione ipsorum
ad loca aquarum. Ipsi ergo cum longitudine inquisi-
tionum etconsiderationum et multitudine variationum
et mediationum expert fuerunt horas alanoe et pluvia-
rum apud permutationem stellarum ab eleyatione
usque ad casum. Et estimayerunt quod ad noe omnis
stelle nuncia est pluvia, aut ventus aut frigus aut calor
et proportionaverunt illud ad occasum non ad ascen-
dens. Et posuerunt quod ex eis est expertum per fre-
quentiam et non vacuum ex anoe, et pluvia feminam
habentem conceptionem. Et cui non est noe nec plu-
via venit cum eo masculum non concipientem et infor-
( 395 )
tunatum quod non vival. Cum ergo non est in noe
stelle pluvia dixerit vacuatur stella talis et talis, et di-
citur venit sine pluvia vernali. Et propter illud dixit
Leile Alakiaclia ad Alahazez propterea quod dixit ei:
Quid fecit te venire ad nos? Inquit vacuitas stellarum
et paucitas nubium. Et determinaverunt unicuique
mansionum lune terminum in quo erit anoe et dies et
attribuerunt ei horas; et nominaverunt pluvias illarum
anoe nominibus quibus cognoscuntur, Et diviserunt
mansiones lune secundum tempora anni ut scirent
horas anni et anoe earum. Et intentio quidem arou
est casus unius mansionum id occidente cum crepus-
culo. Dicitur ergo ne illa stella scilicet declinat ad oc-
cidentem. Mansiones igitur lune sunt viginti octo
mansiones ex quibus apparent aspicienti quattuorde-
cim mansiones, et occultantur ei quattuordecim man-
siones. Quotiens ergo occidit ex istis mansionibus ap-
parentibus, una in occidente, oritur il illa hora com-
par ipsius ab oriente. Casus autem cujusque mansionis
carum est usque ad tredecim dies excepta Algebati (24
est fronte) (1). Kpsa namque cadit usque ad quattuor-
decim dies. Et per illud consumatur numerus dierum
anni et cadunt cum consumatione eorum omnes viginti
octo mansiones, et redit res ad primam mansionum in
principio anni sequentis eum per mensurationem Do-
mini gloriosi et sapientis. Dixerunt ergo Arabes quod
(1) Dans toute cette noie les mots imprimés en italique, et reu-
fermés entre parenthèses, ne sont que des notes marginales du ma-
nuscrit,
( 396 )
casus harum mansionum in occidente est anoe quas
intraverunt mensibus eorum et ipsorum pusbis et
posuérunt eas signa pluviarum eorum et ventorum
suorum, et conversionis (emporum 20rum, sicut posue-
runt ventos fructiferos et nubes (pluviosas immagina-
üvas) et splendores meridianos significationes pluvia-
rum. Bene ergo enunciaverunt de vento meridiano et
optaverunt eum et laudaverunt nubes ex quibus pro-
creatur et abhorruerunt ventum septentrionalem et
nominaverunt eum delentem quoniam ipse deletnubes.
Et quando viderunt splendorem corruscantem ex parte
meridiei et quod est circa ipsam, enunciaverunt bene
de ipso, et confixi sunt de imbibitione cum eo, el
qüando corruscat ex parte septentrionis nominaverunt
eum vacuum. Et quando viderunt rubedinem in ori-
zontibus apud ortum Solis aut occasum ejus cum nu-
bibus spissis, enunciaverunt bene ex eo ad humidita-
tem et herbarum procreationem. Et quando viderunt
rubedinem absque nubibus, aut cum re parva ex eis,
expectaverunt ex eis ariditatem. Et res est Domini
unius potentis, propterea quod non est dies.
Rememoratio temporum anni, et horarum ejus ,
et numeri dierum ipsius, et intentionum sa-
pientum in distinctione eorum et ipsorum de-
terminatione.
Annus solaris dividitur apud Arabes et calculato-
res secundum quattuor fempora equatorum termino-
rum equalium divisionum. Primum ergo eorum est
ver quod habet ex anno quartam ejus, et illud est
( 397 )
tres menses et ex diebus nonaginta unum diem et
duas octavas et medietatem octave. Et terminus ejus
est ab hora descensus solis in principium Arietis us-
que ad exitum ejus ex Geminis. Et habet ex mansio-
nibus lune septem. Et nominatur plävia ejus estas.
Et nominatur postremum ejus calidum et fervens.
Deinde est Cauma et habet ex anno quartam ejus.
Etiüllud est tres menses. Et ex diebus nonaginta unum
diem et duas octavas et medietatem octave. Et termi-
nus ejus est ab bora descensus solis in principium
Cancri usque ad exitum ejus ex signo Virginis. Et
habet ex mansionibus lune septem et nominatur plu-
via ejus ignita et nominatur cinericia ignita et solaris.
Et huic tempori sunt calores subito venientes, et
sunt caliditates, et fiunt fortes in horis ejus apud
ortum T'horaie et ortum Adebaran et ortum Assahare
et ortum Orionis et ortum Sueil. Cum ergo oritur
Asimek lanceator delentur calores cito venientes
deinde est autumnus qui habet ex anno quartam
ejus. Et illa est tres menses. Et ex diebus nonaginta
unum diem et duas octavas et medietatem octave. Et
ejus terminus est a primo descensus solis ir princi-
pium Libre, usque ad exitum ejus de signo Sagitta-
ri. Et habet ex mansionibus lune septem; et pluvia
ejus nominatur aperitiva quoniam ipsa aperit terram
cum plantis. Et vocatur postremum ejus sequens.
Postea est hyems et habet ex anno quartam ejus , et
illud est tres menses. Et ex diebus nonaginta unum
diem et duas octavas et medietatem octave. Et termi-
nus ejus est ab hora descensus solis in principium
Capricorni usque ad exitum ejus de signo Piscis. Et
( 598 )
habet ex mansionibus lune septem. Et pluvia ejus
nominatur vernalis. Et Arabes nominant pluviam,
quacumque hora cadat in eo, vernalem. Et in hoc
tempore sunt tres Scorpiones in quibus frigus sit forte.
Primus ergo Storpio est in complemento mensis ( sci-
licet lune) quod apparet in novembri. Et secundus
est in complemento mensis quod apparet in decem-
bri. Et tertius est in complemento mensis quod appa-
ret in januario. Antiqui autem ex sapientibus me-
dicine et philosophie diviserunt annum secundum
quattuor tempora inequalia et indicaverunt quod
cauma et hyems sunt longioris temporis et additioris
spatii quam ver et autumpnus. Et terminaverunt
cauma quattuor mensibus et hyemen quattuor men-
sibus , et ver duobus mensibus, et autumnum duobus
mensibus, quia sunt medii inter calorem et frigus.
Et non est in spatio amborum longitudo , nec incipit
ipsorum amplitudo, et veniet totum illud expositum
in locis suis et in hora ad terminum suum. Sol ergo
abscidit celum in anno et stat in omni signo mense
uno, et in omni mansione ex mansionibus lune tre-
decim diebus. Luna vero abscidit celum in mense et
stat in omni signo duabus noctibus et tertia noctis, et
in omni mansione nocte una. Et abscidit mansiones
in occultatione sua sicut abscidit eas in sua appari-
tione. Numerus ergo dierum anni secundum quod
sol abscidit orbem est trecenti et sexagimta quinque
dies et quarta diei. Restauratur ergo ex his quartis
dies additus in omnibus quattuor annis quem addunt
Latini in decembri. Ergo est ex triginta duobus die-
bus. Nomianatur ergo annus tunc bissextilis. Siri vero
( 399 )
addunt ipsum insubat qui est februarius. Quare est
ex viginti novem diebus. Numerus vero dierum anni
secundum lunationem est trecenti et quiquaginta
quattuor dies et tres decime et due tertie decime. Ad-
dit ergo annus solaris super lunarem decem dies et
octo decimas et quinque sextas decime dieï. Luna au-
tem nominatur in prima nocte sui ortus et in secunda
et tertia Eillel (id est apparens), deinde nominatur
luna usque ad finem mensis , et nominatur apud com-
plementum sui bederen , et illud est propterea quod
precedit solem ortu suo. Et dicitur quod non nomi-
natur bederen nisi propter impletionem suam et com-
plementum sui, sicut nominatur complementum cen-
sus bederetum propter complementum ejus. Arabes
autem nominant tres noctes mensis nomine uno, se-
cundum operationem Lune et descensum noctium ex
numero. Dicunt ergo in primis earum tres garar ( #d
est macule albe, sicut macula alba qua est in fronte equi)
et tres nufel (id est additiuncule ) et tres novene (quia
ultima earum est nona) ét tres decime ( quia prima
earum est decima) et tres albe (quia albior videtur
luna) et tres duravii ( éd est lorice quia licet exterius
videantur nigre, tamen quod subtus est album est ), et
tres dhulam ( id est tenebre) et tres denidis (id est ni-
gre) et tres deinde (dest reliquis) et tres mahac (id est
delentes). Et Arabes quidem laudant pluviam hore
occultationis et complementi lunationis, et hore me-
diationis mensium. Deinde dicam menses Latinorum
et quid conveniat eis ex mansionibus et signis, et
quid unicuique mensi ex diebus , locum ejus ex tem-
poribus , et naturam ipsius, et quid sit et cujus conve-
( 400. )
niat in 1ps0, et quid sit illud a cujus cognitione non est
excusatio alicui et consideratione hore ejus, et quid
sit in eo ex sustentationibus hominum et rectificatio-
nibus eorum in corporibus ipsorum et repositis suis.
Principium ergo anni Latinorum est januarius. Et
ipsi faciunt eram secundum eram eris. Et principium
anni Sirorum est tisirim primus. Et ipsi faciunt eram
secundum annos Alexandri habentis duo cornua.
Cristiani vero non posuerunt januarium principium
ere sue, nisi quia dies ejus primus secundum morem
eorum est septimus post nativitatem Jesu, et est dies
cireuncisionis ejus. Et ego quidem jam dixi in hoe li-
bro omnes festivitates cristianorum quarum hore non
sunt diverse, nec permutantur tempora earum, et
attuli illud festum post festum in omni mense ex
mensibus eorum, ut sit illud addens in cognitione
ejus et adjuvans super significationem illius. Latinis
autem est festum pasce, et nominant ipsum resur-
rectionem Jesu et precedit ipsum jejunium eorum , et
quedam festivitates eorum et ipse permutantur in ho-
ris, et non stant secundum terminationem, et omnes
pendent ex pascha et sunt sequentes ipsum. Et prin-
cipium horarum evenientie pasce apud eos est dies
vigessimus secundus martii : non antecedit ante illud
per diem. Et ullima horarum evenientie pasce apud
eos est dies vicissimus quartus aprilis, et non postpo-
nitur post illud per diem. Et est jejunium eorum sem-
per ante pasca per quadraginta ( duos) dies. Et pasca
quidem est eorum azimatio et major festivitas eorum,
et non fit nisi in die dominico. Et ego quidem fabri-
cavi mensibus anni tabulas super numerum dierum
( 4or )
omnis mensis eorum, et applicui omni diei eorum
quod fit in co , et non fugit ab eo ex rebus , quarum
promisi rememorationem, et narravi cum allatione
mea horas earum ut allevietur extractio illius , et ap-
proximet cognitio ejus, et videatur in loco suo. Et ad-
didi principiis mensium et finibus eorum illud quod
non applicatur ad diem eumdem , nec ingreditur in
canone tabularum ejus ex eo quod venit in summa
illius , et pervenit secundum momenta in horis di-
versis ejus.
Hec est autem forma tabularum et ordinis
earum et numerationis mensium in capitibus
suis, et nominationts mansionum ?n ets.
Mensis Januaris latine, et est sciriace K enum postremus,
et egyptiace Tubi, et habet ex epacta unum et est
LeTreUSe
Numerus dierum est triginta uuus dius , et signum
ejus est Capricornus. Et habet ex mansionibus for-
tunam decollantis, et fortunam deglucientis, et ter-
tiam fortune fortunarum. Et est ex tempore hyenus.
Et ejus complexio est frigus et humiditas. Et conve-
nientia ejus est nature aque. Et dominium ejus est
flegma. Et melius quod in eo administratur ex ciba-
ris et potibus et motibus et locis, illud in quo est
virtus calefaciendi et resolvendi et subtiliandi super-
fluitates. Et confert hoc tempus ei qui est calidus et
complexionis receptor adolescentie , et est fusiendum
dominium complexionum frigidarum humidarum et
habentibus etates finitas.
I 20
( 4o2 )
1. Dies in eo est novem hore et medietas, et nox est
quattuordecime hore et medietas hore. Et occidit
crepusculum vespertinum quando preterit de nocte
hora et septima. Et oritur crepusculum matutinum
quando remanet de nocte equale ei. Et in 1ps0 est
Latinis festum circuncisionis Jesu secundum ysto-
rie legem.
I. Alutudo Solis in eo in meridie est viginti no-
vem graduum, et duarum tertiarum et umbra cu-
jusque rei in meridie est equalis ei, et equalis tri-
bus quartis ejus.
IIT, (1)
[V. Ortus albedatu cum crepuseulo matutino, et hec
est forma ejus © Ô
Occasus adiraha (id est brachium) hora crepuscul
matutini, et hec est forma ejus © O*
In ipso est inceptio noe adiraha uinque noc-
übus et dicitur tribus noctibus. Et est prima anoe
leonis , et nominatur pluvia ejus vernalis. Et Ara-
bes laudant hanc anoe, et dicunt quod raro eva-
cuatur pluvia ejus, et si non fuerit in anno pluvia.
Et oritur occasu adiraba. Albelda (albelda est forma
superliciliorum armatorum) cum crepusculo ma{u-
* tino, et virescit terra in hac hora in regione Ara-
bum , ex planta poli.
.
(x) Les jours que nous avons laissés en blanc ne portent aucune
note dans le manuscrit,
(403 )
VI. In eo est Latinis festum baptismi in quod bap-
uzatus est Christus. Et dicunt quod apparuit super
eum in hac nocte stella et festum ejus est in mo-
nasterio Pinamellar.
VIT. In eo est Latinis festum Juliani et sociorum ejus
interfectorum sepultorum in Antochia et nomi-
nant eos martyres , et est monasterium Jelinas co-
snominatum monasterium Album in monte Cor-
dube, et est quod aggregatum est in eo.
VIII. In eo est Latinis festum sanctorum infantum.
IX. In eo est christianis festum quadraginta marty-
rum interfectorum in Armenia per manum Marcelli
presidis ejus a rege Romanorum.
X. In co est inceptio putationis vitium planiciei in
occidente Cordube. Et eligitur ad componendum
vites in monte et planicie usque ad finem mensis.
XI.
XIL. Eligitur in eo et in eis qui sunt usque ad finem
mensis seminatio ceparum electarum acceplarum ad
seminandum.
bei LH
XITTL. In eo permutatur Sol de Capricorno ad signum
Âquarii secundum intentionem experimentatoris ,
etest equatio Albeteni.
XV. Dies in eo est novem horarum et quattuor quin-
tarum hore. Et nox est quattuordecim horarum
et quinte; et occidit crepusculum vespertinum
quando preterit ex nocte hora et sexta. Et oritur
26.
( 404 )
crepusculum matutinum quando preterit ex nocte
equale ei.
XVI. Altitude Solis in eo in meridie est triginta duo-
rum graduum et medietatis. Et umbra omnis rei in
eo in meridie est equalis ei et equalis tribus quintis
ejus.
XVIT. Ortus decollantis cum crepuseulo matutino. Et
O
hec est forma ejus oo
©
Occasus anatra hora crepusculi matutini. Ethec
0." O
est forma ejus
+...
..e
Inceptio anoe anathra septem noctibus, et dicitur
quod ipsa est nasus leonis. Et noe ejus apud Arabes
est bona, laudabilis. Et oritur cum casu ejus cum
crepusculo matutino fortuna decollantis. Et hec
hora est media parturitionis camelorum apud Ara-
bes, et est temperantius temporum ejus illi. Et
nominatur pluvia hujus anoe vernalis.
X VIEIL. Ab hoc die permutantur parve palme. Et no-
minant ipsam Arabes extirpationem.
XIX. In eo videtur sueil cum occasu , deinde occul-
tatur et non videtur usque ad mensem eb. Ipsa
enim oritur ante crepusculum matutinum. Et illud
est meraclia et alhaizez. Et in eo est Latinis festum
Sebastiant et sociorum ejus, et eorum sepultura
est Rome.
XX, In eo ingreditur Sol signum Aquarii secundum
( 405 )
intentionem Asind Indi. Et in eo est Latinis festum
Agnetis et socie ejus.
XXI, In eo est exitus noctium nigrarum in quibus est
venenum hyemis et caniculatio ejus et superfluitas
frigoris ejus. Et in eo est Latinis festum trium
sanctorum interfectorum in Taracona.
XXII. In eo est Latinis festum Vicentii diaconi in-
terfecti in civitate Valencia, et festum ejus in
quinque.
XXII. In eo est obitus Yldefonsi archiepiscopi T'o-
letani.
XXIV. In eo est festum Babile episcopi et discipu-
lorum ejus trium interfectorum in Antiochia et
nominant eos testes (id est martyres ).
XXV,. Dies apparitionis Christi in via Damasci Paulo
apostulo , et dixit : Quare persequeris me, Saule ?
Et dixit e1 : Qui est Domine? Dixit ei : Jesus Na-
zarenus.
XX VI.
XXVIT.
XX VIITI. In eo est christianis festum Tyrsi et socio-
rum ejus interfectorum in Grecia et nominapt eos
L
mar Lyres.
XXIX. In eo occidit crepusculum vespertinum quan-
do preterit de nocte hora et quinta. Et oritur cre-
pusculum matutinum quando remanet de nocte
equale illius.
XXX. Ortus fortune deglucientis cum crepusculo
matutino, et hec est forma ejus €
( 406 )
Occasus atarf hora crepusculi matutini, et hec est
1 O
forma ejus
In eo est noe atarf, et est extremntas leonis sex
noctibus, et est anoe laudabilis. Et est Jac et dactili
in ea multum apud Arabes. Et nominatur pluvia
hujus anoe vernalis, Et oritur fortuna deglucien-
tis Opposita atarf cum crepusculo matutino.
XXXI.
Et in summa hujus mensis, ex eis que non applican-
tur ad tabulas et non ingrediuntur in canone dierum,
sunt ista : Invenitur calor (el tepor) aque in flumini-
bus, et egrediuntur vapores ex terra, et currit aqua
in ligno, et combinantur volucres, et faciunt falcones
Valentie nidos suos, et incipiunt coire, el pascunt
equi segetes, et pariunt vacce, et multiplicatür lac, et
inveniuntur pulli anserum et anatrum. Et plantantur
nuclei omnes, et plantantur arbores facientes fructus
cum nucleis. Et figuntur paxilh olivarum et granato-
rum, et que sunt eis similia, et florent primitive nar-
cisci, et putantur vites primitive pergularum, et vites
que non dant fructum qui comedatur, et seminatur
portulaca primitiva. Et colliguntur canne zuccari ad
peraios, et fit conditum citrorum et conditum ex
bauciis, et sirupus acetositatis citri.
#
Ê
Mensis Februariu latine, et est siriace Subat, et egyp-
tiace Emsir. Et habet ex epacta quattuor, et est
ventosus.
Numerus dierum ejus est viginti octo dies, et si-
407 )
gnum cjus est Aquarius. Et habet ex mansionibus
duas tercias fortune fortunarum et fortunam tentorio-
rum, et duas tercias evacuatorii precedentis. Et ejus
complexio est frigus et humiditas, et convenientia ejus
est nature aque, et dominium ejus est flegma. Et me-
lius quod in co administratur, ex cibariis et potibus et
motibus, est in quo est virius calefaciegdi et subti-
liandi superfluitates. Et convenit hoc tempus haben-
tibus complexiones calidas et etates crescentes. Et est
fugiendum decrepitis et habentubus naturas frigidas
humidas. Et absolvitur in fine ejus potus medicine et
flebothomia.
[. Diesin eo est decem horarum et tértie, et nox est
ex tredecim horis et duabus tereus. Et occidit in eo
crepusculum vespertinum quando preterit de nocte
hora et quinta. Et oritur crepusculum malutuinum
quando remanet de nocte equale es.
I. Altitudo Solis in eo in meridie est triginta sex gra-
duum ét quinque sextarum. Et umbra omnis rei in
méridie est equalis ei, et equalis tercie ejus.
EEE:
AR
V. In eo est christianis festum Agathe interfecte in
civitate Catane etibi martirizata est.
VI. (
VII. In eo est festum Dorothee interfecte in eivitate
Cesariae.
VILL. In co est incepüo prunarum cum casu prune
prime ; et egreditur tepor ex lerra.
( 408 )
IX. In eo finiuntur dies alboloe (id est cujus medietas
est alba, et medietas nigra. )
X. +
XL.
XIT. In eo est christianis festum Eulalie interfecte in
civitate Barchinona. Et ibi martirizata est, et est
ejus monasterium inhabitatum in Sehelati, et in
co est congregatio.
XIII. Ortus fortune fortunarum cum crepusculo ma-
tutino.
©
Et hec est forma ejus € Fa
C
Occasus frontis cum crepusculo matutino. Et hec
G O
forma ejus
ce
C ë
In eo permutatio Solis de Aquario ad Pisces per
experientiam , et in eo est inceptio noe frontis sep-
tem noctibus. Et est noe laudabilis in quo flant
venti fructiferi, et multiplicantur partus camela-
rum. Et dicunt Arabes non impletur fluvium ex
noe frontis nisi habundet herba. Et oritur fortuna
fortunarum et dicit rismator arabicus quando ori-
tur fortuna fortunarum movetur lignum et leniun-
tur coria et abhorretur in Sole statio.
XIV. Dies in eo est ex decem horis et tribus quartis
et nox ex tredecim horis et quarta. Et occidit cre-
pusculum vespertinum quando preterit de nocte
hora et quarta. Et oritur crepusculum wnatutinum
( 409 )
quando remanet ex nocte equale illius, Et in eo oc-
cidit pruna secunda et additur tepor ( vel calor ).
XV. Altitudo Solis in eo meridie est quadraginta
graduum et medietatis. Et umbra omnis rei in eo
est equalis ei, et equalis sexte ejus.
XVI. In ipso egrediuntur equi a pastura, et come-
dunt alcasel super presepia sua in pluribus annis.
XVII.
XVIIT.
XIX. In ipso permutatur Sol de Aquario ad Pisces ,
secundum intentionem Sindi Indi.
XX.
XXI. In ipso cadit pruna tercia et frangitur hyems
et recedit caniculatio ( éd est rabies ) ejus.
XXIL. In ipso est prepositura cathedre Symonis apos-
toli qui dictus est Petrus Rome.
XXIIT. In hoc die, et in eo qui est ante eum et qui
est post ipsum, est umbra omnis rei in meridie
equalis ei equaliter.
XXIV. In ipso est festum sancti Mathie.
XXV.
XXVL. Ortus fortune temptoriorum cum crepusculo
O
matutino. Et hec est forma ejus Oo
o O
Occasus azubrati hora crepusculi matutini. Et
hec est forma ejus (e) ©
In eo est noe azubrati et est alcaraten quattuor,
noctibus. Et alzubrati est ancha leoms. Et dicitur
( 410)
quod non est hora moe sine pluvia vehementi aut
frigore , et nominatur pluvia ejus vernalis, etoritur
fortuna tentoriorum nisi quam omnis res que esi
occultata ex vermibus (ve/ reptilibus) egreditur
apud ortum ejus, et est si non ex primis diebus
anus. |
XXVIT. Secundus ex diebus anus, et est sinabron :
dies autem anus sunt quinque. Et dicitur quod
sunt septem ; tres hujus mensis, et quattuor cjus
qui sequitur ipsum et est Marcius. |
XX VIII. Tercius ex diebus vetule, et est fortior co-
rum, et nominatur gnabron.
Et in summa hujusmensis, ex eis que non appli-
cantur ad tabulas et non ingrediuntur in canone die-
rum , sunt isla :
Frangunt ova aves , et pullos faciunt apes, et mo-
ventur bestie maris. Et incipiunt mulieres ova ver
mium sete donec consumantur. Et convertuntur
grues ed insulas , et plantatur cepe eroci et seminan-
tur holera estatis, et multe ex arboribus producunt
folia, et inveniuntur tubera, et multiplicantur spa-
ragi campestres, êt inveniuntur turiones fenuculi , et
inseruntur piri et mali, et plantantur rami evulsi à fi-
culnea, et permutantur plantata, et absolvitur ex-
tractio sanguinis el polio medicine, cum utriusque
est necessitas, sine labore. Et in eo mittuntur carte ad
gentes propter exercitus ( vel messes ). Et in ipso ve-
niunt ciconie et yrrundines ad habitationes.
a
Mensis Marcü latine, et est syriace Adar , et egyptiace
Parmehet. Et habet ex epacta quattuor, et est
aquosus.
Numerus dierum ejus et triginta unus dies. Et si-
gnum ejus est Piscis. Et habet ex mansionibus tertia
evacuatori precedentis et evacuatorium postremum
in ventrem piscis. Et principium ejus est ex tempore
hiemis. Et indicium ejus est sicut indicium ejus qui
est ancipiter. Etin ipso ingreditur tempus veris. Quarc
est complexio ejus caliditas et humiditas. Etest con-
venientia ejus nature aeris. Et dominium ejus est san
guini. Et melius quod in ipso admimistratur , ex ciba-
riis et potibus et habitationibus et motibus, est cujus
calectio temperatur, et resolutio ipsius, et subtiliatur
caliditas ejus, et minuitur ejus humiditas. Et confert
hoc tempus habentibus complexiones temjeratas prop-
ter convenientiam (2e similitudinem ) ejus et habenti-
bus naturas frigidas siccas propter contrarietatem , et
est temperatius temporum et magis conferens corpo-
ribus , et convenit medicine et flebothomie.
F. Iste est quartus ex diebus anus, et nominatur ex-
tinctor prune. Et est primus dierum almaguetiset.
In quo dies est ex undecim horis et tribus quintis.
Et in eo occidit crepusculum vespertinum quando
preterit de nocte hora et tercia. Et oritur crepus-
culum matutinum quando remanet de nocte equa-
le ei.
IL. Est quintus ex diebus vetule , et nominatur prehi-
bens egressionem. In quo est altitudo Solis in me-
(ces
ridie , quadraginta sex graduum et quinque sexta-
rum. Et umbra omnis rei in eo est minor longitu-
dine ejus per medietatem octave sui status.
LIL. In ipso est christianis festum Emeterii et Celido-
nu. Et sepulcra eorum sunt in civitate Caläguri.
IV.
V. Quod flat in eo ex ventis est forte vehemens secun-
dum plurimum.
VE
VIL. Magnetis secundus, et est secundum intentionem
Romanorum quadraginta novem dierum in quibus
non ingressio fit in mare, et sunt septem sepli-
mane.
VITE.
IX. In ipso est Egyptiis festum almagre , qui liniunt
cum ea portas eorum et cornua Vaccarum suarum.
Et nominatur festum cere et est introitus Christi
ad altare.
0
XI. Ortus evacuatorii precedentis cum crepusculo ma-
: . O
tutino. Et hec est forma ejus
Oo
Occasus asarfati hora crepusculi matutini. Et
hec est forma ejus O
In ipso est principium noe asarfati tribus noctibus,
et est laudabilis. Et nominatur asarfati propter con-
vertionem frigoris apud casum ejus, et conversionem
caloris apud ortum ejus. Et dicitur quod ipsa est porta
( 413 )
temporis, quoniam ridet a duabus differentiis tempo-
ris. Et quando lactatur infans in ea non forsitan que-
rit lac. Et est postrema anoe hiemis. Et pluvia ejus
nominatur vernalis. Et casu ejus oritur evacuatorium
precedens.
XIT. In ipso est christianis festum Gregorñ domini
Rome.
XIIT. [n ipso est festum sancti Leandri archiepiscopi
hyspalensis.
XIV. Magnetis tercia.
XV. In ipso incipit partus equarum in maritimis us-
que ad medietatem Aprilis.
XVI. In ipso permutatur Sol de Piscibus ad Arie-
tem secundum plurimum, et in ipso equantur nox
et dies equalitate vernali.
XVIT. Postremum tempus hiemis et principium tem-
poris veris secundum intentionem calculatorum et
equatorum, et intentionem Ypocratis et Galieni, et
sapientum medicorum.
XVIII. Altitudo Solis in eo in meridie est quadra-
ginta duorum graduum et medietatis, et umbra
omnis rei est equalis tribus quartis sui status.
XIX. In eo occidit crepusculum vespertinum quando
preterit de nocte hora et due quinte, et oritur cre-
pusculum matutinum quando remanet de nocte
equale eï, et est temperatius horarum crepusculi
vespertini.
XX. In ipso descendit sol in ariete secundum inten-
tionem Sindi Indi, et est equalitas apud eos.
( 414)
XXI. Magnetis quarla, et in ipso est christianis fes-
tum.
XXIT. In ipso est christianis festum revolutionis anni
mundi solaris, et est inceptio temporis apud eos,
et principrum horarum Pasche eorum, non enim
precedit ante illud per diem.
XXIIT.
XXIV. Ortus evacuatorn postremi cum crepusculo
; . O
matutino. Et hec est forma ejus
Occasus alangue hora crepusculi matutini. Et hec
O
est forma ejus O L2
Oo © ©
In eo est inceptio noe alangue tribus noctibus.
Et similatur canibus sequentibus leonem. Et dicitur
quod ipse est due anche leonis, et est noe in reme-
morata. Et oritur evacuatorium postremum oppo-
situm ei. Et hec quidem anoe est prima anoe verna-
lium. Et nominatur pluvia ejus estas.
XXV. Quod flatin eis ex ventis nocet albacoris (id est
primis ficubus), et coagulation: fructuum propter
procellositatem suam.
XXVIH.
XXVIL.
XXVIII, Magnetis quinta.
XXIX. Quod flat in eo ex ventis aut in duobus die-
bus post ipsum, est forte procellosum secundum
plurimum ;
ue
XXX.
XXXI.
Et in samma hujus mensis, ex eis que non appli-
cantur ad tabulas et non ingrediuntur in canone die-
runt, sunt ista :
Inseruntur ficus insitione quam nominat vulgus ali-
ter achoa; et eriguntur primitive segetes super crus,
et plures arbores frondescunt. Et in ipso ponunt ova
falcones Valentie in insula, et incubant super ova
triginta diebus usque ad principium Aprilis. Et in ipso
plantantur canne zuccari et apparent prime rose et
lilia primitiva. Et incipit coagulatio fabarum in ortis,
et apparent coturnices, et generantur vermes sete.
Et egrediuntur pisces sturiones et savali ex mari ad
fluvios, et plantantur cucumeres, et seminantur cotun
et crocus ortulani, et in ipso mittuntur epistole ad
bajulos in emptione equorum ut ducantur regibus.
Et apparet ambulatio locustarum, et precipitur ut
interficiantur. Et seminantur melissa et maiorana,
et coeunt pavones, et ciconie , et turtures , et multe
avium.
Mensis Aprilis latine, et est syriace Nisan, et egyp-
tiace Parmudhi. Et habet ex epactis V'IL, et est aerius.
Numerus dierum est triginta dies. Et signum ejus
est Âries. Et habet & mansiombus alnataha et albu-
tam et tertiam althoraie, et est ex temporis veris. Et
complexio ejus est calor et humiditas. Et similitudo
ejus est nature aeris, et dominium ejus est sanguis.
Et melius quod administratur in eo, ex cibus et poti-
( 416)
bus et motibus et habitaculis, est cujus calefactio
equatur et resolutio, et minorantur superfluitatesejus.
Et assiduatur minutio sanguinis per flebothomiam
et medicinam. Et convenit hoc tempus habentibus
complexiones equales per similitudinem , et haben-
tibus naturas frigidas et siccas per contrarietatem. Et
est temperatius temporum, et magis conveniens om-
nibus etatibus , et in omnibus regionibus.
I. Dies in eo est duodecim horarum et duarum ter-
tiarum, et nox undecim horarum et tercie. Et
occidit crepusculum vespertinum quando pre-
terit ex nocte hora et media. Et oritur crepus-
culum matutinum quando remanet ex nocte equa-
le ei.
IT. Altitudo Solis in eo in meridie est quinquaginta
octo graduum et quinque sextarum. Et umbra om-
nis rei in eo est equalis tribus sextis ejus et medie-
tati sexte ejus. |
LIT. Festum Theodosie virgiris.
IV. Magnetis sexia. Et festum sancü Ysidori archie-
piscopi yspalensis.
V:
VI. Ortus ventris piscis cum crepusculo matutino. Et
0200!
O
o 0
Occasus asimek hora crepusculi matutini. Et hec
hec est forma ejus o o
est forma ejus ©
In eo est noe asimek alahazel quinque nocti-
bus. Et Arabes ponunt ipsam crus leonis, et asi-
(417)
mek arami crus aliud , et est noe exuberans, raro
fallit. Et oritur venter piscis opposilus ei cum cre-
pusculo matutino. Et dicunt Arabes quod pluvia
ejus continuat alcharait; et est terra que non com-
pluitur existens inter duas terras complutas , et ejus
noe est ex ano vernalibus. Et nominatur pluvia
ejus estas. .
VII.
VII.
IX.
X°
XI. Magnetis septima ; et est poslrema earum secun-
din intentionem Romanorum.
XI. | |
XIIT. In eo et in tribus post ipsum flat ventus qui
cognoscitur orientalis esuflatio, ex quo tümetur
super: fructus. Quod si erraverit “ab eis salvantur
auxilio Dei. Et timetur ex 0 supra naves quod
pereant.
XIV. In eo occidit crepusculum vespertinum quando
preterit ex mocte hôra et tres sexte. Et oritur cre-
puseulum mätutinum quando refnanet ex nocte
equale ei.
XV. In ipso permutatur Soi de Âriete ad TFaurum
per experimentatorem. Et in ipso absolvuntur
masculi equi super equas in maritimis ut conci-
piant post complementum partus earum. Et spa-
cium portationis earum ab hora conceptionis ea-
rum usque ad partum ipsarum est undecim menses.
X, 27
( 418 )
XVI. Dies in eo est tredecim horarum et sexte, et
nox decem horarum, et quinque sextarum hore.
X VIT, Alttudo Solis in eo im meridie sexaginta trium
graduum et quattuor quinque. Et umbra omnis rei
in ipso in meridie est equalis medietati ejus.
XVII.
XIX. Ortus anathaha cum crepusculo matutino. Et
O
hec est forma ejus ©
Oo
Occasus algasr cum hora crepusculi matutini. Et
ù O
hec est forma ejus ©
? “
In eo est noe algasr tribus noctibus et dicitur
nocte una, et non rememoratur in pluvia , et ori-
tur opposila ejus , et est anatcha. Et estimant Ara-
bes quod illud quod nascitur ex camelis post anoe
algasr est male nativitatis, quoniam speratur in eo
calor et festinat ipsum hiems a virtute, et nominatur
quod nascitur in eo ubaon , et quartum est majus
eo, et est fortius, et est ex vestigio vernali.
XX. In eo descendit Sol in signum Tauri secun-
L2
dum intentionem Asind Indi , et in ipso est festum
Secundini martyris in Corduba in vico Uraceorum.
XXI. .
XXIL In ipso est christianis festum Filippi apostoli
in domo almegdis (24 est Jerusalem ).
XXII, In ipso occidit crepusculum vespertinum
quando preterit ex nocte hora et sex decime et
ARE
(#19)
tertia decime , et oritur crepusculum matutinum,
quando remanet ex nocte equale ei.
XXIV. In ipso est festum sancti Gregorii in civitate
Granata.
XXV. Est postremus horarum pasce christiamis, et
est major festivitatum eorum , et in eo est festum
Marchi evangeliste discipuli Petri, in Alexandria.
à 1 D
XX VIT. In ipso incipit pluvia anisan que dicitur
fermentare massam sine fermento. Et christiani
nominant hanc diem usque ad septem, septem
missos , T'orquatum et socios ejus , et dicunt ipsos
septem nuncios ; et per eam complentur semina
auxilio Dei. Et in ipso est festum Bislo ( Basilii?)
martiris.
XXVIIT.
XXIX.
XXX. In ipso occidit crepusculum vespertinum
quando preterit ex nocte hora et septem decime, et
oritur crepusculum matutinum quando remanet de
nocte equale ei. Et in ipso est festum sancti Perfi-
cui, et sepulerum ejus est in civitate Corduba.
Est in summa hujus mensis, ex eis que non appli-
cantur ad tabulas et non ingrediuntur in canone die-
rum, ista :
Fit aqua rosata et sirupus ejus, ét conditum ejus,
et oleum ipsius. Et in ipso colsitar flos viclarum, et
fit sirupus ejus, et conditum ipsius, et oleum ejus. Et
in ipso fit sirupus de fumo terre, et in eo apparent cu-
4 . 27.
( 420.)
cumeres, et.palme adhibentur masculi, et abscindun-
tur rami ejus, et incipit uva primitiva coagulari, et
florent olive, et coagulantur ficus, et in ipso egrediun-
tur pulli falcorum valentinorum ex ovis suis. Deinde
vesliuntur pennis usque ad triginta dies, et apparent
canuli cervorum. Et in ipso figuntur paxilli citri, et
plantantur rami sambaci, et extrahuntu# radices
squille, et fit conditum ejus, et colliguntur flores pa-
paveris rufi, et balaustie et buglosse, et flores eupa-
torii, et herba ejus, et arte fit succus ejus, et seminan-
tur alchana et ozimus et alcanavet, et seminantur ri-
zus et faseoli ortulani, et permutantur cucurbite tem-
pestive ex locis stercorosis qui sunt juxta parietes, et
melongie, et seminantnr mandragora et eitroli, et pa-
riunt ova pavones, et ciconie, et multe aves, et inci-
piunt incubare ovis.
Mensis Maÿji latine, et est syriace Aiar, et egyptiace
Jesnus. Et habet ex epacta duo, et est igneus.
Numerus dierum ejus est triginta unus dies et si-
gaum ejus est Taurus. Et habet ex mansionibus duas
tércias althoraie et aldeberan, et duas tercias alhaca.
Et principium ejus est ex tempore veris. Et judicium
ejus est sicut judiciunx ejus quod est ante ipsum. Et
pestremum ejus est ex tempore estatis secundum in-
tentionem sapientum. Et complexio ejus est caliditas
et:siccitas. Et ejus similitudo est nature ignis, et do-
minium ejus est coler® rubee; Et melius quod admi-
nistratur in 60, ex Gibaris ct potibus et motibus et
habitacuus, quod declinat ad infrigidationem et hu-
.
45 )
mectaüonem el equat corpora. Et convenit hoc tempus
habentibus complexiones frigidas et humidas, et ha-
bentibus etates que sunt in statu. Et est inconveniens
habentibus complexiones calidas et siccas, et etates
que sunt in augmento.
I. Dies in eo est tredecim horarum et quattuor quin-
tarum, et nox est decem horarum et quinte. Et oc-
cidit crepusculum vespertinum quando preterit ex
nocte hora et septem decime, et oritur crepusculum
matutinum quando remanet ex nocte equale ei. Et
in eo est christianis festum Torquati et sociorum
ejus, et sunt septem nunci, et festivitas ejus est m
monasterio Gerisset, et locus ejus Keburiene.
IT. Ortus albotain cum crepuscuio matutino. Et hec
O
est forma ejus . $
Occasus azubene hora crepusculi matutini. Ethee
est forma ejus OO ©
In ipso est noe azubene tribus noctibus, et est
multorum ventorum septemtrionalium calidorum,
et oritur albutain oppositus ei cum crepusculo ma-
tutino. Et in eo est latimis festum Felicis diaconi
interfecti in civitate Yspali.
LIL. In eo est postremus pluvie nisan, quem nominant
christiani septem nuncios. El in ipso est christianis
festum crucis, quia in ipso fuit inventa crux Christi
sepulta Jérusalem. Et festum ejus est in monasterio
Pinnameiïlar et monasterio Catinas.
JV. In co est latinis festum Treptecis virginis in, ci-
vitate Estnia.
(422 )
V. In ipso incipiunt illi qui sunt in maritimis Cor-
dube et Malache et Suduna et Mursie, metere or-
deum. |
VI.
VIT. In eo est latinis festum Esperende et interfectio
ejus et est in Corduba. Et sepulchrum ejus est in
ecclesia vici Atirez.
VTT:
IX.
X. In ipso occidit crepusculum vespertinum quando
preterit ex nocte hora et quattuor quinte, et oritur
crepusculum matutinum quando remanet ex nocte
equale ei.
XI. .
XII. In eo est festum Victoris et Basilii in Yspali.
XIE.
XIV. Dies in eo est quattuordecim horarum et sexte
et nox est novem horarum et quinque sextarum. Et
altitudo Solis in eo in meridie est septuaginta duo-
rum graduum et quattuor quintarum. Et umbra
omnis rei in ipso est equalis tercie ejus.
XV. Orius althorne cum crepusculo matutino. Et hec
o O
est forma ejus
Occasus corone hora crepusculi matutini, Et hee
©
est forma ejus ©
O
ê
(429)
In ipso est noe corone, et est caput stOrpiomus
quattuor noctibus, et est illaudabile propterea quod
fortis fit calor, et propter timorem occasionum et
egritudinum, et oritur opposita ei illa que est altho-
@ raie. Et hoc est principium guaiarat (id est caloris
subito venientis) calidarum, et albuherei, et sunt
venti estatis calidi hyantes estuationem, et tunc sti-
mulantur plante, et exsiccantur, et est ex anoce
scorpionis, et nominatur pluvia ejus fervens.
XVI. In ipso permutatur Sol de Tauro ad Gemiuos
per experimentatorem.
XVII, In ipso directe descendit ( vel ibat) Sol super
medium puteorum Meche in meridie, et videtur
rotunditas ejus in fundis puteorum in Mecha, et
non est omni individuo erecto umbra apud media-
tionem dieï.
XVII, In ipso est umbra omnis rei in Mecba con-
versa ad partem meridiei, ab hoc usque ad quinde-
cim dies transactos ex junio.
XIX.
XX. In ipso est festum Banduli martiris in civitate
Nemesete.
XXI. In ipso est festum Mantu in Yspania in Elbore.
XXIT. In ipso descendit Sol in signum Geminorum
secundum intentionem Sindi Indi.
XXIIT.
XXIV.
XXV. In ipso incipiunt secare ordeum in campestri-
bus Cordube et aliüis: secundum res comitatis.
A#
a
( 424 )
XX VI. F
XXWVII. Æ ”
XX VIIL. Ortus Aldebaran cum crepusculo matutino.
O
o bi ie: @
Et hec est forma ejus CS
O r x
. O
Occasus cordis hora crepusculi matutini. Et hec
est forma ejus*. © © O
In ipso est noe cordis Scorpionis nocte una, et
est illaudabilis, et Arabes quidem subsannant eam
* et abhorrent ; item quando descendit Luna in
Scorpionem et oritur cum casu , scilicet casu cordis
aldebaran opposita ei. Et hec anoe Scorpionis, et
nominatur pluvia ejus calida et fervens. Et hec
hora est ex horis caloris,
XXIX.
XXX. u
LE : ee APE
XXAL.-: 6 1pso occidit crepusculum vespertinum
quando pretercunt de nocte due hore, et ofitur
crepusculum matutinum quando remanet ex nocte
equale ei.
Etain summa hujus mensis, ex eis que non appli-
cantur ad tabulas et non ingrediuntur in £anone die-
rum , sunt 1sta :
Inveniuntur alfardi (éd est spice tritici cum ustulan-
tur), et coagulantur olive et uve , et faciunt mel apes,
et apparent primitiva malorum et pirorum et pruno-
rum, et crisomila et cucumeres et cerasa. Et fit con-
ditum de nucibus, et sirupus de malis sabiis, et col-
LS
( 435 >
)
ligitur sémen papaveris, et fit sirupus ejus; et fiunt
bone aliumetzin oriente, et colligitur semen fumi terre
etsemenapii el semen ancti etsemen séempervive et pa-
paveris nigri et sinapis et nasturcü et tarathit, et fit suc-
cus ejus; et flos camomille, et fit oleum ejus. Et in
ipso mittuntur epistole bajubis ad colligendas granas et
ablutiones, et sericum adtiracia; et fiunt pergamena ex
innulis cervorum et gazelorum usque ad finem mensis
Junii. Et ponuntur in muta ancipitres et falcones et
remanent in muta usque ad principium Augusti aut
ad finem ejus, secundum quantilatem virtutis eorum
et sanitates ipsorum , et egrediuntur pulli asipheti (id
est cristarelle ) et accipitrum ex ovis suis , et vestiun-
tur pennis usque ad triginta dies. Et. veniunt grues
estive ex insulis. Et pavones faciunt fikos , et galline
marine, et ciconie, et turtures, et passeres , et multe
avIum.
Mensis Junius latine, et est syriace Hazizaran, et egyp-
tiace Buni. Et habetezx epacta quinque, et est ventosus.
Numerns dierum ejus est triginta dies, et signum
ejus est Gemini, et habet ex mansionibus terciam
alhaca etalhana et adiraha, et est ex tempore estus, et
natura ejus est caliditas et siccitas, et ejus convenien-
tia est nature ignis, et ealhiditati ejus, et dominium
ejus est colera citrina. Et melius quod administratur
in eo est quod infrigidat et humectat et temperat cor-
pora, et minorat ex resolutione humiditatum eorum.
Et convenit hoc tempus habentibus complexiones fri-
gidas, humidas , et etates que sunt in statu , et est in-
( 426 )
conveniens ei cujus complexio est calida et sicca, et
cujus etas est crescens , exceptis infantibus. Ipsi enim
tolerant calorem propter humiditatem corporum suo-
rum, et frigus propter vehementiam caloris eorum.
I. Dies in eo est quattuordecim horis et media , et
nox ex novem et media. Et occidit crepusculum
vespertinum quando pretereunt ex nocte due hore,
et oritur crepusculum matutinum quando remanet
ex nocte equale ei.
IT. Altitudo Solis in eo in meridie est septuaginta
quinque gradus , et umbra omnis rei in eo est equa-
lis quarte ejus et decime quarte ipsius.
IT. In ipso est christianis festum translationis corpori
Thome apostoli, ex sepulchro ejus in India in ci-
vitate CalaMmina ad civitatem Edessam , que est ex
civitatibus Sirorum.
IV: "
V. In ipso et in eo quod est ante ipsum ex mense con -
venit venari viperas et facere trociscos earum in-
trantes in tirlacha.
VL. ,
VIL
VIII.
IX.
X. Ortus alhaca cum crepusculo matutino. Et hec est
O
forma ejus o o
Occasus axula (axevalati) hora crepusculi matu-
tin. Et hec est forma ejus © O
( 427)
In ipso est noe axulati Scorpionis, et est aculeus
ejus tribus noctibus, et non rememorantur Arabes
noe ejus cum pluvia neque cum alio, et oritur casu
ejus Alhacha, et in hac hora sunt fervores gemi-
norum. Et redeunt exerciti Arabum ex villis suis
ad domos suas et aquas suas, et est ex anoe Scorpio-
nis, et nominatur pluvia ejus calida et fervens. è
Ar
XII. Inipso occidit crepusculum vespertinum quando
pretereunt de nocte due hore et medietas sexte
hore, et oritur crepusculum quando remanet de
nocte equale ei.
XIII. In eo est christianis festum Julitte.
XIV.
XV. In eo separantur emisarii equi ab equabus post
complementum conceptionis earum, et comple-
mentum impregnationis earum, et remanent eque
singulares ab emisariis usque ab horam partus
earum. Et illud est usque ad medietatem Aprilis.
XVI. Dies in eo est quattuordecim horarum et dua-
rum terciarum, et est longior dies in anno, et nox
est novem horarum, et tercia et est brevior nox in
anno. Et aititudo Solis in eo est septuaginta sex
gradus et tercia. Et umbra omnis et in ipso in me-
ridie est equalis quarte ejus, Et in ipso est latinis
festum Adriani et socionum ejus, in civitate Nico-
media.
XVIL In ipso permutatur Sol de signo Geminorum
ad signunf Cancri per experimentatorem, et consu-
(ab)
matur in eo tempus veris, et ingrediiur tempus es-
tatis secundum intentionem Arabum. Etin ipso est
festum in monasterio Lanitus. 1
XVIIT. In ipso est festum Quiriaci et Paule mterfec-
torum in civitate Cartagena, et festum utriusque in
montanis sancti Paul in vifi Cordube.
x. In ipso est christianis festum Gervasii et Pro-
tasii interfectorum in civitate Mediolani.
XX. In ipso incipiunt metere triticum in pluribus
locis et in pluribus annis.
XXI. In ipso occidit crepusculum vespertinum quando
pretereunt de nocte due hore et octava. Et oritur
erepusculum matutinum quando remanet de nocte
equale eï, et est ultimus status ejus, deinde conver-
ütur redeundo.
XXIT.
XXIIT. Ortus alhacha cum crepusculo matutino. Et
hec est forma ejus O O
Occasus alnaim hora crepuscul matutümi. Et hec
0 00
est forma ejus 0000
O ©
In eo descendit Sol in signum Cancri secundum
intentionem Sindi Indi, et in ipso est noe alnaim
nocte una, et est non rememorata cum pluvia, et
est ex ignitis, et in ipso sunt fervores, et opposita ei
est alhaca.
XXIV. Est dies alhansora. Et in ipso retentus fuit
Sol super Josuc filio Nini prophete. Et in ipso est
( 429 )
festum nativitatis Johannis filu Zaccharie. Et exti-
mant experimentatores quod illud quod metitur in
eo ex messibus non comeditur a tinea.
XXV. In eo et in illo quod est post ipsum ex mense
incipit fieri arte tiriacha major et quod est simile ei
ex confectionibus thesaurizatis propter possibilita- |
tem herbarum et florum in hac hora, et propter
virtutem caloris super commixtionem humorum in
ills confectionibus. *,
XXVT. In ipso est festum Pelagi, etsepultura ejus est
in ecclesia T'arsil.
XXVII. In ipso est festum sancti Zoii, et sepultura
ejus est in ecclesia vici Tiraceorum.
XXVIIT.
XXI: In ipso est christianis festum duorum apos-
tolorum interfectorum in civitate Roma, et sunt Pe-
trus et Paulus, et sepulture eorum sunt illie. Et
festum amborum est in monasterio Nubiras.
XXX. Inipso occidit crepusculum vespertinum quando
pretereunt de nocte duë& hore et decima et oritur
crepusculum matutinum quando remanet de nocte
equale el.
Et in summa hujus mensis, ex eis que non appli-
cautur ad tabulas et non ingrediuntur in canone die-
rum, sunt isla :
Mensurantur fruges in aréis et accipiuntur custodes
horreorum ad capiendas fruges quas rustici reddunt,
etinveniuntur primitive uve, et incipiunt ficus in qui-
» 4 . . *
busdam maritimis, et coagulantur nüces et panee, et
( 43e )
apparent albateke, et fit sirupus de agresta et sirupus
de moris, et sirupus de prunis, et accipiuntur pull
turturis, et inveniuntur pinguedines cervorum, et fa-
ciunt pullos anates campestres in insulis et in mensi-
bus. Et quando volant pulli earum permutantur ad
flumina et cursus aquarum, et in ipso mittuntur carte
ad colligenda cornua cervorum et hyrcorum silves-
trium ad arcus. Et in ipso colliguntur ex medicinis
psillium et flos absinthüi, et fit suceus ejus, et melli-
lotum et alhacoen et semen epithimi et cuscuthe et
poltum et calamentum, et flos cartami. Et in ipso se-
minantur caules, deinde permutantur in Augusto, et
conceditur in principüs ejus flebothomia, et potare
medicinas.
Mensis Julius latine , et est siriace Cemuz, et egyptiace
Eïib (eineb). Et habet ex epacta septem , et est igneus.
Numerus dierum ejus est triginta unus dies. Et
sigoum ejus est Cancer. Et habet ex mansionibus
anathra et atarf et tertiam frontis, et est ex tempore
estus. Et natura ejus est caler et siccitas. Et dominium
ejus est colera citrina et convenientia ejus est nature
iguis. Et melius quod administratur in eo, ex ciba-
riis et potibus et motu et aere, est quod infrigidat et
humectat , et elongat ab evacuatione et motu addito,
et convenit hoc tempus decrepitis et complexionibus
frigidis et humidis, et est inconveniens habentibus
complexiones calidas et siccas. Et illis qui crescunt et
adholescentibus.
E. Dies in vo est ex quattuordecim horis et quinque
(431)
decimis et medictate decime, et nox ex novem horis
et quattuor decimus et medietate decime. Et alti-
tudo Solis in eo in meridie est septuaginta quin-
que gradus et tres quarte. Et umbra omnis reï in eo
est equalis quarte ejus. Et christianis in eo est fes-
tum Symonis et Jude apostolorum interfectorum
in terra Persie.
IL.
IT
IV. In ipso Dies asuba te , algomisa , et est assemia ;
et fortasse flat in eo ventus turbidus, cum quo fit
vehemens dolor oculorum. Et dicitur quod in hac
hora pereuñtulices.
V:
VI. Ortus adira cum crepusculo matutino. Et hec est
forma ejus
O
Occasus albelda hora crepusculi MONS hec
est forma ejus © oO
In eo est noe albelda nocte una, et dicitur tribus
noctibus, que est similis arcui, et oritur adiraha
opposita ei, et est ex anoe estus qua non rememo-
ratur cum pluvia, et nominatur pluvia ejus quando
venit ignita et cinericia.
VIT, In ipso occidit crepusculum vespertinum quando
pretereunt de nocte due hore et media, et oritur
crepusculum matutinum quando remanet de nocte
equale eï.
VITE. In ipso fit prohibitio à potu medicinarumt s0-
(432 )
lutivarum , et illud est ante ortum stelle canis per
decem dies, secundum intentionem Ypocrats, et
est assara alhahabor. #
IX. à : a
X. In ipso est christianis festum Christofori , et se-
pulchrum ejus est in Antiochia. Et festum ejus est
in orto mirabili qui est in alia parte Cordube, ultra
fluvium ubi sunt infirmi.
XE. In ipso est inceptio venenosorum estivorum et
sunt quadraginda dies, quorun@viginti sun in fine
hujus mensis, et viginti in principio mensis Au-
gusti. Et in ipsa est christianis festum Marciane in-
terfecte , et sépultura ejus est in qu te Cesarea.
XIL.
KREs dé 5 |
XIV. REC
RE ipso recte stat Sol super medium putei zem-
ze
et omntui putcorum Meke, et ingreditur lu
men ejus in foramina eorum , et videtur ex imferio-
ribus eorum , et non est alicujus réi umbra in me-
ridie : deinde redit umbra ab hoc die a parte
meridiei ad partem septentrionis.
XVI. Diesin eo est quattuordecim horarum et quarte,
etaltitudo Solis in eo in meridie estsepluaginta trium
graduum et duarum quintarum , et umbra ommis
rei in eo est cqualis .sexte ejus, et quinque sextis
sexte ejus. Et nox est ex novem horis et tribus
h
quartis.
XVIE, Jnipso permutatur Sol de Cancro ad Leonem
per experimentatorem; et in 1p#9 oritur assare
alhahabor aliemenia, et cum ortu ejus fiunt fervo-
res ventorum venenosorum exsiccantium haber-
tium estuationem. Et dicunt Arabes quod hec est
hora vehementioris estus subito venientium calo-
rum, et quod vir sitit intra locum in quem fundi-
tur aqua et puteum. Et in eo est latinis festum
Juste et Rufine interfectarum in Yspali. Et festum
ambarum est in monasterio Auliati.
XVIIE. In ipso est christianis festum Esparati, et
sepultura ejus est in Cartagine magna.
57
XIX. Ortus anathra cum crepusculo matutino. Et
9 © nm
»
9 ete
hec est forma ejus A =
Ocvasus fortune decollantis hora crepusculi ma-
O oo
(@)
tutumi. Et hec est forma ejus
In ipso est noe fortune decollantis similis viro
decollanti ovem. Et non rememoratur in pluvia
neque in vento, et oritur opposita ejus, et est ana-
thra. Et hec anoe est ex anoe estus. Et nominatur
pluvia ejus quando venit ignita et cinericia.
XX
XXI. In ipso occidit crepusculum vespertinum quando
pretereunt de nocte due hore. Et oritur crepuscu-
lum matutinur: quando remanet de nocte equale er.
NXIT. In ipso est festum sancte Marie Magdalene.
XXIHIT.
Le 20
(454)
XXIV. In ipso imgreditur Sol signum Leonis secun-
dum intentionem Sindi Indi. Et in ipso est chris-
tianis festum Bartholomei apostoli, et sepultura
ejus est in India.
XXV. In ipso est christianis festum cucufatis sepulti
in civitate Barcinona. Et in ipso est festum sancti
Jacobi et sancti Christofori.
XXVI. In ipso est christianis festum Christine virgi-
nis et sepultura ejus est in civitate Sur. Et festum
ejus est in ecclesia sancti Cipriani in Corduba.
XX VII.
XXVIII. In eo occidit vultur volans, et est, cor es-
tatis.
XXIX.
XXX. In ipso occidit crepusculum vespertinum
quando pretereunt de nocte hora et quinque sexte
hore unius, et medietas sexte hore. Et oritur cre-
pusculum matutinum quando remanet de nocte
equale ei.
XXXE. In ipso est christianis festum Favu , et sepul-
tura ejus est in civitate Cesarea.
Et in summa hujus mensis, ex eis que non appli-
cantur ad tabulas et non ingrediuntur in canone die-
rum , sunt ista :
Fit messio tritici comumis et maturantur uve, et
coagulantur fistici, et maturantur pira zuccarina et
mala muzu, et in eo fit conditum de cucurbita, et
sirupus pirorum et sirupus malorum, et in eo matu-
ratur summa uve, et custoditur in vineis suis. Et in
435 )
co colliguntur, ex speciebus, semina sinapis et ni-
selle, et origanum , et semen alcataini, et semen si-
seleos , et est semen ferule. Et in ipso multiplicantur
aves aquatice sicut assacassik et similes eis. Et in ipso
apparent pulli perdicum et venantur. Et in ipso inci-
piunt dessiccari ficus in planicie Cordube. Et in ipso
fiunt bone mukita (id est senestes).
Mensis Augustus latine , et est siriace Eb, et egyptiace
Mesire. Et habet ex expactis tres, et est igneus.
Numerus dierum ejus est triginta unus dies. Et sig-
num ejus est Leo. Et habet ex mansionibus duas ter-
cias frontis et alcoraten et terciam asarfati, et est ex
tempore estus. Êt natura ejus est caïor et siccitas , et
convenientia ejus est nature ignis, et dominium ejus
est colere citrine. Et melius quod administratur in
eo , ex cibis et potibus et aere et motibus, est illud
quod equatur et declinat ad infrigidationem et hu-
mectationem. Et elongaitur ab evacuatione, et con-
venit hoc tempus decrepitis et habentibus complexio-
nes frigidas et humidas , et est inconveniens juveni-
bus et habentibus complexiones calidas et siccas.
I. Ortus atarfati cum crepusculo matutino. Et hec
est forma ejus © ©
Occasus fortune deglucientis hora crepuseuli ma-
tuuni. Et hec est forma ejus o O
Dies in eo est tredecim horarum et quinque sex-
tarum , et nox ex decem horis et sexta, et altitudo
Solis in eo in meridie septuaginta novem graduum
20,
436 )
et due tercie. Et umbra omnis rei in eo est equalis
tribus octavis ejus. Et in ipso est latinis festum
Felicis martyris sepulti in civitate Gurinda , et fes-
tum ejus est in villa Jenisen in monte Cordube. Et
in ipso est noe fortune deglucientis nocte una, et
oritur atarf opposita ei, et nominatur degluciens
quasi degluciat socium suum. Et in ipso est fes-
tum sancti Petri cum misit Dominus angelum suum.
EE,
IT. Dicunt experimentores quod illud quod abscidi-
tur in his tribus diebus ex lignis non comeditur a
vermibus. Et in ipso separantur parvi cameli a ma-
tribus suis, et multiplicatur lac et colliguntur pri-
mitivi dactili, et in ipso est vindemia Egyptiorum.
Lv:
V. In ipso occidit crepusculum vespertinum quando
preteriunt de nocte due hore excepta quinta , et
oritur crepusculum matutinum quando remanet de
nocte equale ei.
VE. In ipso est christianis festum Justi et Pastoris in-
terfectorum in civitate Compluti. Et festum utrius-
que est in monasterio in mote Cordube.
VIE. In ipso est christianis festum Mames sepulti in
civitate Cesarea.
VIII.
+. 4
X. In ipso est christianis festum Syxu episcopi et
Laurentu archidiaconi et Ypoliti milius, interfec-
/ Rd \
(437 )
torum in civitite Roma, ct agsregatum in ea est in
monasterio Anubraris.
XI:
XIT.
XAIT.
XIV. Ortus frontis cum crepusculo matuuni. Et hec
2) | O
est forma ejus
O O
Occasus fortune fortunarum hore crepuscnli na-
O
tutini, Et hec est forma ejus
O
In eo est noe fortune fortunarum nocte una, et
non est rememorata in pluviis, et oritur frons oppo-
sita ei, et nominatur fortuna propter serenitater
corum per ortum ejus. Et dixit rismator eorum :
quando oritur fortuna fortunarum movetur bgnum
et leniuntur coria et abhorretur in Sole statio, et
ilud est in Februario iterum et in ipso videtur
sueil inalaizegi. Et hora ejus apud Arabes est lau-
dabilis, et est ex subitis adventibus caloris.
XV. In ipso christianis est festum assumptionis Marie
virginis per quam sit salus.
XVI. Dies in eo est ex tredecim horis et tercia et nox
ex decem horis et duabus tercias. Et altitudo Solis
in eo in meridie est sexaginta quinque graduum ei
quarte. Et umbra omnis rei in eo est equalis medie-
tai ejus.
XVII.
(438 )
X VIIL. In ipso permutatur Sol de Leone ad Virginem
per experimentatorem.
XIX.
XX. In ipso occidit vultur cadens, etconsumatur dies
venenosi estatis.
XXI.
XXII. In ipso occidit crepus culum vespertinum quan-
do pretereunt de nocte hora et tres quinte hore et
oritur crepusculum matutinum quando remanet de
nocte equale ei.
XXII. In ipso ingreditur Sol signum Virginis secun-
dum intentionem Sindi Indi.
XXIV. {n ipso est christianis festum sancti Bartholo-
mei sepulti in civitate Esturis.
XXV. In ipso est christianis festum Genesii sepulti in
civitate Arelatensi. Et festum ejus in tercis plani-
ciel.
XXVT. In ipso est festum Geruncn episcopi in Talica.
XXVIT. Ortus Alcoraten cum crepusculo matutino.
Et hec est forma ejus o O
Occasus fortune tentoriorum hora crepusculi ma-
O
tuüni. Et hec est forma ejus Oo
O o
In ipso est noe fortune tentoriorum nocte una et
est similis pedis anatis et est non narrata in pluviis
et oritur Oopposita ei alcoraten. Et est noe ex anoe
estus. Êt nominatur pluvia ejus quando venit ignita
et cinericia,
( 459 )
XXVIIE. In eo oritur sueil in Eraclia cum crepusculo
matutino et non cessat postponi ortus ejus usquequo
oriatur cum occasu Solis in kenum postremo, deinde
tegitur. Et in ipso est festum obitus Augustini phi-
losophi.
XXIX. Primus dies extub. Et est inceptio ere Egyp-
tiorum, et in eo est alburoz in Egypto, etaccendunt
homines ignes et efflundunt aquas,
XXX. In ipso est christianis festum Felicis episcopi
sepulti in civitate Nola,
XXXIH, In ipso occidit crepusculum vespertinum quan-
do pretereunt de nocte hora et quinque decime. Et
oritur crepusculum matutinum quando remanet de
nocte equale eï.
Et in summa hujus mensis ex eis que non appli-
cantur ad tabulas et non ingrediuntur in canone die-
rum sunt ista :
Fit succus duorum granatorum cum aqua feniculi et
fitex eo ssief conferens albedini oculorum et aliis. Et
in ipso incipiunt arotab et jujube, et maturantur per-
sica lenia, et coagulantur glandes, et fitbona adulaha,
et est sandia, et inveniuntur in eo pira zuccarina pos-
trema et cucumerus saracenicus et in ipso fit conditum,
pirorum et in ipso egrediuntur pisces muli ex Mare ad
flumina, et multiplicantur venatio eorum, et multipli-
cantur in eo pisces sardine, et colliguntur in eo ex
speciebus , sumach et semina papaveris albi, et fit
sirupus ejus, et semen rute et albedeguart et stafisagria
et turungen, et in ipso mittuntur carte in serico et
uinctura celesti ad tiracios, et in eo seminantur fabe
4
{ 440 }
autumnales in ortis, et in ipso seminantur alkem ccles-
us et napi et baucie et sicla, et in ipso stimulantur
struciones ad coitum, et auditur vox masculi a longe.
Mensis September latine et est sirace Æilul, et egyptiace
Jub. Et habet ex epacta sex, et est terreus.
Numerus dierum ejus est triginta dies. Et signum
ejus est Virgo. Et habet ex mansionibus terciam Asar-
facti et Alangue et Asimek. Et principium ejus est ex
tempore estus. Et indicium ejus est sicut indicium ejus
quod est ante ipsum. Et in ipso ingreditur tempus au-
tumni. Etest natura ejus frigus et siccitas. Et conve-
nientia ejus est nature terre. Et dominium ejus est co-
lere nigre. Et melius quod administratur in eo ex ci-
bariis et potibus et motibus et habitaculis est quod
humectat corpora et declinat ad calefactionem et non
ipsissat superfluitates. Et hoc tempus est contrarium
omnibus etatibus et naturis et regionibus, et minoris
nocumenti in eo sunt que ex eis sunt calide in natura
sua et humide. Et ipse convenit imfantibus et crescen-
übus et humidis natura.
E. Dies in eo est ex duodecim horis et duabus terciis,
et nox ex undecim horis et tercia, Et altitudo Solis
in eo in meridie çst quinquaginta quinque gradus
et quarta. Et umbra omnis rei in ipso est equalis tri-
bus sextis ejus, et medietati sexte ipsius. Et in ipso
est christianis festum Reetiniani episcopi et socio :
rum ejus martyrum. Et estimant quod in 60 est as-
sumptio Josue filii Nini prophete.
[LE
es
ns
—
ÉFF.
FY.
Ÿ. En ipso occidit crepusculum vespertinum quande
preterit de nocte hora et media, et oritur cre-
pusculum matutinum quando remanet de nocte
equale ei.
VI.
VII.
NET. In ipso est nativitas Marie virginis.
IX. Ortus atarf cum crepusculo matutino. Et hee est
forma ejus ©
Occasus evacuatorii precedentis hora ercpuseuli
matutini. Et hec est forma ejus O O
In ipso est noe evacuatorii precedentis aquari
tribus noctibus. Et est noe laudabilis. Et oritur
asarfali opposita ei. EU in ipso additur Nilus et fran-
gitur calor. Et hec est postrema noe estus, et no-
minatur pluvia ejus ignita et cimericia.
p, &
XI.
XII.
XIII.
XIV. In ipso est christianis festum Cipriani, sa-
pientis episcopi Tasie interfecti in Affrica. Et fes-
tum ejus est in ecclesia sancti Cipriani in Corduba.
XV. Dies in co est ex duodecim horis et quinta, et
nox in €0 est ex undecim horis et quattuor quintis.
EU alüitudo Solis in co in meridie est quinquaginta
{ 1
442 )
quattuor gradus et medietas. Et umbra omnis rei
in eo est equalis duabus terciis ejus. Et in ipso est
festum Emiliaui.
XVI. In ipso oritur asimek arami. Et est principium
temporis autumni , secundum intentionem YŸ pocra-
üs et Galieni, et aliorum sapientum medicorum.
Et in ipso est christianis festum Eufemie virginis,
interfecte in civitate Calcidona.
XVII.
XVHIT. In ipso descendit Sol in Libram per experi-
mentatorem. Et est equalitas autumnalis.
XIX.
XX. In ipso usque ad finem mensis fit sirupus de
duobus granatis, et sirupus miva et albumetegi, et
est rob uve.
XXE. In ipso est christianis festum Matheï apostoli et
evangeliste, quem interfecit Aglinus rex Ethiopie.
XXII. Ortus alaugue cum crepusculo matutino. Et
O
hec est forma ejus O
OO‘ ©
Occasus evacuatorii postremi hora crepusculi ma-
tutini. Et hec est forma ejus O œ
In ipso est noe evacuatorii postremi ex Aquario,
quattuor noctibus, et oritur alaugue opposita ei, et
est noe laudabilis exuberantis pluvie , et est illa
que nominatur aperiliva, quoniam aperit terram
cum plantis. Et hec anoe est prima anoe autumni.
XXJIL. In ipso permutatur sol de Virgine ad Libram
secundum intentionem Sindi Indi.
7
AXIV. In ipso est Latinis festum decollationis Jo-
hannis , fils Zaccharie.
XXV. In ipso incipiunt struciones parere ova. Et di-
citur quod unus parit in quadraginta noctibus ova
que sunt inter quadraginta ova usque ad triginta,
et dimittit que sunt inter septem ova usque ad
sex, et nominantur dimissa, et reliqua franguntur
a pullis.
XX VI.
XXVIT. In ipso est festum Adulsi et Johannis in
Corduba.
XXVIIE In ipsO occidit crepusculum vespertinum
quando preterit de nocte hore et due quinte, et
oritur crepusculum matutinum quando remanet de
nocte equale ei.
XXIX, In ipso est festum Michaelis Arcangeli.
XXX. In ipso est obitus Yeronimi presbiteri in Beth-
leem, et festum Luce evangeliste.
Et in summa hujus mensis, ex illis que non appli-
cantur ad tabulas et non ingrediuntur in canone die-
rum, sunt Isla :
Maturantur persica et granata et jujube , et appa-
rent ciconia, et incipiunt arundines zuccari , et musa
et denigrantur quedam olive , et apparet oleum no-
vum et glandes et castanee, et maturantur almustee,
et incipiunt arare et seminare in montibus Cordube,
et incipiunt sparagi primitivi in montibus , et in ipso
egrediuntur falcones allebliati ex mari Oceano, et ve-
nantur usque ad principium veris. Et in ipso conver-
( 444.)
tuntur irundines ad ripam maris, etin ipso albificantur
capita algaguab, et sunt ex avibus aquaticis , deinde
redeunt capita earum nigra in principio veris. Et in
ipso mittuntur carte in rubeal, et in ipso colliguntur
nuces et pinee, et eradicatur alcanna et alkudhari. Et
colliguntur ex speciebus grana lauri, et fit oleum ejus,
et colloquintida et semen jusquiami , Et in ipso Coagu-
latur sal.
Mensis Octuber latine , et est siriace Tisirin primus, et
egyptiace Baba. Et habet ex epacta octo, et est
rentosus.
Numerus dierum ejus est triginta unus dies, et sig-
num ejus est Libra. Et habet ex mansionibus algafar
et zubene , €t terciam corone. Et est ex tempore au-
tumni. Et complexio ejus est frigus et siccitas, et
convenientia ejus est nature terree. Et dominium ejus,
est colere nigre. Et melius quod administratur in eo,
ex cibis et potibus et motibus et habitaculis , est il-
lud quod humectat corpora et calefacit ea quadam
calefactione et resolvit superfluitates factie. Et hoc
tempus est nocivum omnibus etatibus et naturis et
regionibus. Verumtamen minus leduntur eo et incon-
veniens eis sunt ea, in quibus est calor et humiditas
per naturam , et equalitas in complexione.
TI. Dies in eo est ex undecim horis et media. Et nox
est ex duodecim horis et ntedia. Et altitudo Solis
in eo in meridie est quadraginta septem graduum
et due tercie. Et umbra omnis rei in eo est equalis
quinque sextis ejus el medietate sexte ei, Etin 1pso
“ne
(t 449
est christianis festum Julie et sociarum ejus inter
fectarum in Ulixis Bona super mare Oceanum
IL. Inipso convertitur Nilus , et incipiunt Egypti se-
minare alfasfasa (id est alcocorti), et est casel eo-
rum. Et in ipso seminant illi de Curgello et Campo
Glandium , et monte Cordube.
1 à |
IV.
V,. Ortus asinck cum crepusculo matutino. Et hec est
forma ejus O
Occasus ventris piscis hora crepusculi matutini.
Et hec est forma eius ©
In eo est noe ventris piscis et nominatur ros; et
pluvia ejus est extemporaneis , et est laudabilis. Et
oritur asimek alhazel cum crepusculo matutino op-
posita ei, et tune pervenit ad statum profunditas
aquarum.
VI
VIE. In ipso occidit crepusculum vespertinum quando
preterit de nocte hora et tercia, et oritur crepuscu-
lum matutinum quando rema net de nocte equale el.
VIIL. In ipso est umbra omnis rei equalis ei apud me-
ridiem.
IX.
X..
XI
XIE:
446 )
XIEL. In ipso est christianis festum trium martyruin
interfectorum in civitate Corduba. Et sepultura
eorum est in vico turris, et festum eorum est in
Sanctis Tribus.
XEV:
XV.
X VE, Dies in eo est ex decem horis et quinque sextis,
et medietate sexte. Et nox est ex tredecim horis et
medietate sexte. Et umbra omnis rei in ipso est
equalis ei et octave ejus. Et altitudo Solis in ipso in
meridie est quadraginta unus gradus et quinque
sexte et medietas sexte.
X VIE. In ipso permutatur Sol de Libra ad Scorpio-
nem per experimentatorem.
XVIIT. Ortus algafra cum crepuseulo matutino. E{
)
hec est forma ejus
(©) O
Occasus anatha hora crepusculi matutini. Et hec
| O
est forma ejus
© O
In ipso est noe anatha, et est cancer, et dicitur
quia est cornu, Ârietis, et est exuberantis pluvie,
laudabilis ex pluviis temporaneis, et oritur algafra
opposita ei , algafra autem apud Arabes est ex stellis
fortunatis. Nam quando descendit in ea Luna est
melior horarum ad expansionem aquarum, et di-
citur quod nativitas prophetarum fuit in algafra.
XIX.
/
/ lé Fy \
U 44) /
XX. In ipso incipiunt ill qui sunt in campestribus
Cordube et ali seminare communiter.
XXE.
XXIL. In ipso descendit Sol in Scorpionem secundum
intentionem Sindi Indi. Et in ipso est christianis
festum Cosme et Damiani medicorum interfectorum
in civitate Egea, per manus Lisie prefecti a Ce-
Sartre
XXIIT. In ipso est christianis festum Servandi et
Germani monacorum interfectorum martyrum, per
manus viatoris euntis ex Emerita ad terram barba-
rorum. Et sepulchra eorum suntin littoribus Cadis,
et festum eorum est in villa Quartus ex villis Cor-
dube.
XXIV. In ipso occidit crepusculum vespertinum
quando preteriit de nocte hora et quarta. Et ori-
tur crepusculum matutinum quando remanet de
nocte equale ei.
XXV.
XX VI.
XXVIT.
XX VITE. In ipso est christianis festum Vincentii et Sa-
vine et Cristete interfectorum in civitate Abule , per
manus Daciani prefecti Yspaniarum.
XXIX. In ipso est festum Symonis cananei et Tadei
apostolorum.
XXX. In ipso est Latinis festum Marcel, interfecti
per manus Daciani in civitate Tange,
f r )
440
\
\
XXXE Ortus azubene cum crepusculo matulino. Et
hec est forma ejus O O
Uccasus albotain hora crepusculi matutini. Et
ON
hec est forma ejus n e— .
In ipso est noe albotain. Et est ventus arietis tri-
bus noctibus, Et est temporanea. Et est nocivior
quam anoe alie, et pauciores pluvie, et raro videtur
in ea pluvia quin deficiat eis noe althoraie cum plu-
via ejus, et noe ejus est nobilior quam anoe alie, et
magis exuberans quam ipse, Arabes vero vitupe-
rant n0e albotain. Deinde oritur opposita ejus, et
est azubene, et estuat mare, et non currit in eo cur-
rens, et vadunt milvi, et frangens ossa et irundines
ad profandum, et occultantur formices.
Et in summa hujus mensis, ex eis que non applican-
tur ad tabulas et non ingrediuntur in canone dierum,
sunt 15la :
Mensurantur olive in arbore sua et incipiunt colli-
gere eas, et figitur frigus; et permutantur homines ex
vestimentis albis ad vestimentum tincta facta ex seta
crossa, et lana, et aliis. Et in eo pariuntur oves et mul-
tiplicatur lac, et inveniuntur agui, et apparent turdi
albi et nigri, et veniunt grues hyemales ex insulis. Et
in ipso extrahitur oleum balsami ex arbore sua in
Esypto. Et in ipso fit sirupus de malis muzis et con-
ditum eorum. Et in ipso fit sirupus de citoniis, et fit
cerusa el zimar et asarcon. Et in ipso colhigitur semen
fenuenti et anisum, et semen lactuce, et seminan-
Cr
{ /
( 449 )
Lur cepe ex hoc mense usque ad finem mensis Ja-
nuari.
Mensis November latine, et est siriace Tisirin postre-
mus, et egyptiace Ejub. Et habet ex epacta quattuor,
el est aquosus.
Numerus dierum ejus est triginta dies, et signum
ejus est Scorpio. Et habet ex mansionibus duas ter-
cias corone et cor, et duas tercias axule. Et principium
hujus mensis est ex tempore autumni. Et indicium
ejus est sicut indicium ejus quod est ante ipsum. Et
postremum ejus est ex tempore hyemis, et natura ejus
est frigus et humiditas. Et assimilatur nature aque.
Et dominatur in ipso flegma. Et melius quod admi-
nistratur in eo, ex cibariis et potibus et motibus et
habitaculis, est illud quod calefacit et resolvit et sub-
üiliat superfluitates. Et hoc tempus est conveniens ha-
bentibus complexiones calidas et etatibus crescenti-
bus, et est inconveniens habentibus complexiones
humidas frigidas, et etatibus in statu existentibus.
1. Dies in eo est ex decem horis et quarta, et nox ex
tredecim horis et tribus quartis. Et altitudo Solis in
eo in meridie est triginta sex gradus et quarta. Et
umbra omnis rei est equalis ei ettercie ejus. Et in
ipso est christianis festum translationis corporis Sa-
turnini episcopi martyris, in £ivitate Tolosa.
il.
TE.
IV. In ipso est Latinis festum translationis Zoili ex
I. 2Q
\ 450 \
sepulcro ejus in vico Cris (sic), ad sepulerum ip-
sius in ecclesia vici tiraciorum in Corduba.
v:
VI. In ipso occidit crepusculum quando preterit de
nocte hora et quinta. Et oritur crepusculum matu-
tüinum quando remanet de nocte equale ei. Et in
ipso est festum Luce apostoli et evangiliste, discipuli
Jesu.
VIT. In ipso est festum Albari in Corduba.
VIII.
+28
*.
XT. In ipso est festum alatus Martini episcopi magni-
fici. Et sepultura ejus est in Francia, in civitate Tu-
roni. Et festum ejus est in Tarsil Alcanpanie.
XIT. In ipso est festum obitus Emiliani sacerdotis.
XIIT. Ortus corone cum crepusculo matutino. Et hec
O
est forma ejus O
O
Occasus athoraie hora crepusculi matutini. Et
6:10
hec est forma ejus 6 Lo
oO
o
In ipso est noe athoraie, et nominatur alnasinu.
Et dicitur quia sunt nates arietis. Et noe earum est
quinque noctibus, et dicitur septem noctibus. Et
est postrema ex temporalibus. Et noe earum est lau-
( 40E )
dabilis exuberans. Et est melior pluviarum que sunt
temporare, quoniam terra retinet cum hac pluvia
temperiem anni sui. Et in ipso quando bene venit
eis est successio ejus quod est ante ipsam et non
est successio nisi ex ea. Et dicunt quod non aggre-
gantur noe athoraie in temporaneis, et pluvia noe
fortis in vere quin sit ubertas. Et oritur opposita ei
corona.
XIV. In ipso consumatur tempus autumni secundum
intentionem Ypocratis et Galieni, et ingreditur tem-
pus hyemis.
XV. Dies in eo estex novem horis et quinque sextis,
et nox est ex quattuordecim horis et sexta. Et alti-
tudo Solis in meridie est triginta duo gradus et due
quinte. Et umbra omnis rei est equalis ei et tribus
sextis ejus, et medietati sexte ipsius.
XVI. In ipso permutatur Sol ex signo Scorpionis ad
signum Sagittarii per experimentatorem.
XVIT. In ipso, secundum intentionem ambulantium
per mare, est noe caudis. Quare clauditur mare et
removentur naves. Et in 1pso est Latinis festum.
XVIIE. In ipso est christianis festum Asicli, interfecti
per manus Divium prefecti Cordube. Et sepultura
ejus est in ecclesia carccratorum, et per illud no-
minatur ecclesia. Et festum ejus est in ecclesia fa-
cientium j °rgamena in Corduba, et in monasterio
Armilat.
XIX. In ipso descendit Sol in signum Sagittarii se-
cundum intentionem Sindi Indi, Etin ipso est chris-
20.
( 452.)
tianis festum Romani monachi interfecti in civitate
Antiochia.
XX. In ipso est christianis festum Crispini sepulti
in monasterio quod est in sinistro civitatis Astige.
XXI. In ipso oritur vultur cadens, et cadit principium
pruine. Et ante hoc cooperiuntur ab ea arbores et
viridia que adhurit pruina.
XXHT, In eo ingrediuntur dies albulk, et sunt quadra-
ginta dies, ex quibus viginti sunt ante noctes ni-
gras, et viginti post noctes nigras. Noctes igitur ni-
gre sunt in eo quod est inter noctes albuloe. Et in
ipso est festum Cecilie et sociorum ejus interfecto -
rum in civitate Roma. Et festum eorum est in mo-
nasterio sancti Cipriani in Corduba.
XXIIT, In ipso est christianis festum Clementis, epis-
copi romani tercii post apostolum Petrum, quem
interfecit Trajanus Cesar. Et festum ejus est in villa
Ibtülibes.
XXIV. In ipso occidit crepusculum vespertinum
quando preterit de nocte hora et sexta. Et oritur
crepusculum matutinum quando remanet de nocte
equale ei.
XXV. In ipso est festum Innucericie martyris.
XX VI. Ortus cordis cum crepusculo matutino. Et hec
est forma ejus © © O©
Occasus aldebaran hora crepusculi matutini. Et
00
hec est forma ejus o :
®)
(453 )
In ipso est noe aldebaran tribus noctibus. Et no-
minatur aldebaran propterea quod est post atho-
raie, et est principium pluvia tardantis. Et noe ejus
est illaudabilis. Et Arabes quidem vituperant eam.
Et oritur cor oppositum ei. Et oritur cum ea vultur
cadens. Et hec hora apud Arabes est principium
partus camelarum, et partus earum est illaudabilis
propter paucitatem lactis et plantarum. Et quod
nascitur in eo nominatur robahan.
XXVIL In ipso Latinis est festum Facundi et Pri-
mitivi sepultorum in eo quod est circa Legionem,
XX VIII.
XXIX. In ipso christianis est festum Saturnini mar-
tyris. Et festum ejus est in Candis in villa Cassas
Albas, prope villam Berillas.
XXX. Et in ipso est Latinis festum apostoli Andree
martyris interfecti in civitate Patras, ex regione
Achagie, de terra Romanorum. Et festum ejus est
in villa Tarsil filii Mughisa.
Et in summa hujus mensis, ex eis que non appli-
cantur ab tabulas et non ingrediuntur in canone die-
rum, sunt ista :
In ipso est cor seminandi et comitatis ejus. Et in
ipso colliguntur glandes et castante et grana mirti. Et
fit sirupus ejus. Et in ipso cadunt folia arborum, et
absciduntur holera estatis, sicut cucurbita et melongia
et faseoli et portulaca, et holus {id est bilti) alia me-
niu, et ozimum, et multiplicantur holera hyemis, si-
cut caules et sicla et napi et baucieet porri et rafanus.
(454 )
Et in ipso colliguntur arundines, et coagulantur fabe
autumnales, et plantantur in Augusto. Et in ipso coo-
periuntur viridia, et citrus et musa, et sambacus,
ut non noceat eis pruina. Et in ipso colliguntur flores
croci.
Mensis December latine, et est siriace Kenun primus,
et egyptiace Keiek. Et habet ex epacta sex, et est
aquosus.
Numerus dierum ejus est triginta unus dies et
quarta diei. Et signum ejus est Sagittarius. Et habet
‘ex mansionibus terciam axule et anaim et albelda. Et
est ex tempore hyemis, et complexio ejus est frigus et
humiditas. Et similitudo ejus est nature aque. Et do-
minium ejus est flegma. Et melius quod administratur
in eo, ex cibariis et potibus et motibus et habitaculis,
est quod est calefaciens et resolvens superfluitates. Et
hoc tempus est conveniens habentibus complexiones
calidas et siccas et etatibus crescentibus, et est incon-
veniens habentibus complexiones frigidas et humidi-
tas, et etatibus que sunt in statu; et non est aliqua
hora conveniens medicine, nec extractioni sanguinis.
I. Dies in eo est ex novem horis et medietate, et nox
ex quattuordecim horis et medietate. Et occidit cre-
pusculum vespertinum quando preterit de nocte
hora et sexta, et oritur crepusculum matutinum,
quando remanet de nocte equale ei.
IT. Altitudo Solis in eo in meridie est viginti novem
gradus et due tercie. Et umbra omnis reiin meridie
est equalis ei, et tribus quartis ejus.
VE
VIT.
VITE.
IX. Ortus axula ( xeula) cum crepusculo matutino.
Et hec est forma ejus © ©
Occasus alhacha hora crepusculi matutimi. Ethec
O
est forma ejus © O
In ipso est noe almeiïsen et est alhahaca super ca-
put geminorum. Et noe ejus est sex noctibus, et
est postremus pluvie tardantis, et est noe laudabilis
exuberans, et oritur axula opposita ei cum casu
alhahaca apud crepusculum matutinum, et est cor
hyemis et vehementia canicularitatis ejus. Et in
ipso est Latinis festum Leocadie sepulte in Toleto.
Et festum ejus est in ecclesia sancti Cipriani in
Corduba.
X. In ipso est christianis festum Eulalie interfecte,
et sepulchrum ejus est in Emerita. Etnominanteam
martyrem. Et festum ejus est in villa Careilas prope
Cordubam.
XI.
XIL. Principium venenosorum hyemis, et sunt qua-
draginta dies, viginti hujus mensis, et viginti ejus
qui est post ipsum.
(456)
XIE.
XIV. In ipso est Latinis festum Justi et Habundi
martyrum interfectorum in Jerusalem.
XV. Dies in eo est ex novem horis et tercia et est bre-
vior dies in anno, et nox est ex quattuordecim horis
et duabus tercus, et est longior nox in anno. Et oc-
cidit crepusculam vespertinum quando preterit
hora et decima et medietas decime. Et oritur cre-
puseulum matutinum quando remanet de nocte
equale ei.
XVE. Alutudo Solis eo in meridie est viginti duo gra-
dus et due tercie. Et umbra omnis rei in eo est
equabis ei et quinque sextis ejus.
XVIL. In ipso permutatur Sol de Sagittario ad Capri-
cornum per experimentatorem.
XVIII. In ipso est festum apparitionis Marie matris
Jesu super quam sit salus. Et festum ejus est in
Catluira.
X EX.
XX.
XXI. In ipso descendit Sol in signum Capricorm se-
cundum intentionem Sindi Indi. Et in ipso est
festum Thome apostoli. Et interfectio ejus in
India.
XXIE, Ortus anaim cum crepusculo matutino. Et hec
OO0OO
est forma ejus. BOOC
Q O
(457: )
Occasus alnahati hora crepusculi matutini. Et
O ©
hec est forma ejus O
O
O
In ipso est noe alheanahati, et nominatur al-
teiati, et dicitur quia est arcus geminorum quo sa-
gittat brachium leonis. Et noe ejus est tribus noc-
tibus, et est laudabilis. Et oritur alnaun cum cre-
pusculo matutino opposita ei. Et est principium
anoe hyemis, et nominatur pluvia ejus vernalis,
XXII.
XXIV.
XXV. In ipso est Latinis festum nativitatis Christi
super quem sit salus. Et est ex majoribus festivita-
tibus eorum.
XX VI. In ipso est festum Stephani diaconi et est pri-
mus martyr. Et sepulchrum ejus est in Jerusalem,
et festum ejus est in ecclesia Alseclati (id est pla-
niciet ).
XX VIT. Tn ipso est festum assumptionis ejus Johannis
apostoli et evangeliste.
XXVIIT. In eo est Latinis festum Jacobi apostoli qui
dictus est frater Christi. Et sepulchrum ejus est in
Jerusalem.
XXIX. In ipso est Latinis festum interfectionis infan-
tium in civitate Betleem per manus Herodis regis,
cum pervenit ad eum de nativitate Christi Domini.
Cogitavit ergo per interfectionem corum interficere
eum inter 605,
(458 )
XXX. In ipso est Latinis festum Eugenie interfecte.
Et sepulchrum ejus est Rome.
XXXI. In ipso est christianis festum Columbe inter-
fecte in civitate Rubucus (éx alio Senona), et est
martyr et festum ejus est in casis Albis , prope Ke-
rilas in monte Cordube.
Et in summa hujus mensis, ex eis que non applican-
tur ad tabulas neque ingrediuntur in canone dierum,
sunt ista :
Floret albear, et incipit narcissus in quibusdam
montibus Cordube, et quibusdam ortis, et florent
amigdale primitive et bona fiunt prima citra, et in
ipso reponuntur aqua pluvie in cisternis, et in mense
qui sequitur eum, et non mutatur nec corrumpitur,
et plantantur cucurbite primitive et melongie super
podia fimi, et seminantur porri, et operantur per an-
num. Deinde permutantur iu Augusto. Et in ipso se-
minatur papaver albus et eradicantur alliumar ( éd est
radices palme silvestris ).
pp
( 49 )
Il aurait peut-être été nécessaire d’ajouter ici un
commentaire historique, astronomique et philolo-
gique, propre à expliquer les différentes parties du
calendrier que nous venons de publier. Mais ce com-
mentaire, trop considérable pour pouvoir trouver
place dans une note, ne pourrait qu’être l’objet d’un
ouvrage spécial. Nous nous bornerons donc à ajou-
ter ici quelques observations sur des points parti-
culiers , et à indiquer quels sont les ouvrages qu’il
faudrait consulter pour résoudre les difficultés que la
lecture de ce calendrier pourrait faire naître.
On a pu remarquer d’abord qu'ici, comme dans
tous les autres documens que nous avons publiés, nous
avons toujours conservé scrupuleusement le texte et
l'orthographe des manuscrits. Outre les motifs qui
nous ont déterminé à agir ainsi dans tous les cas, nous
avions des raisons spéciales pour ne rien changer en
publiant des traductions faites, au moyen âge, de Pa-
rabe en latin. Ces traductions ne se faisaient pres-
que jamais immédiatement sur les textes arabes. Les
chrétiens , qui allaient dans les villes moresques d’'Es-
pague pour s’instruire dans les sciences des Arabes ,
se servaient ordinairement d’interprètes mores ou
juifs qui leur traduisaient en langue vulgaire les
ouvrages arabes; et c’est d’après cette première tra-
duction, nécessaire ment fort imparfaite, que ces ou-
vrages étaient ensuite traduits en latin par les chré-
tiens. I] résultait très souvent de cette double traduc-
tion, faite par l'entremise d’hommes peu versés dans
les sciences, que les mots techniques n’étaient point
traduits; et que, faute d’en pouvoir trouver les équi-
( 460 )
valens, on tächait d’en rendre uniquement le son. Les
personnes qui se sont occupées des ouvrages traduits
de l'arabe à cette époque, ont dù rencontrer fréquem-
ment de ces mots arabes, latinisés et estropiés par des
traducteurs qui, parfois, ne savaient pas même lire
matériellement le mot qu’ils voulaient rendre. Plu-
sieurs de ces mots arabes non traduits sont restés dans
nos langues modernes, et il est même arrivé, dans
quelques cas, que l’on a adopté des mots estropiés, ou
mal lus et mal transcrits, par ceux qui les avaient d’a-
bord employés (1). On voit maintenant pourquoi, dans
l'intérêt, des étymologistes, nous avons dû publier le
texte des manuscrits, sans le corriger, même lors-
qu'il présentait des fautes évidentes. D'ailleurs , les
orientalistes pourront aisément corriger ces fautes ; et
il sera facile à tout le monde de rétablir les noms
arabes, syriaques et égyptiens des constellations et
des mois, noms si souvent estropiés dans notre calen-
drier, à l’aide des ouvrages qui ont été écrits sur l'as-
tronomie et la chronologie orientales (voyez 4/fragani
elementa astronomica, cum notis Golii, p. 1-6 du texte
arabe, etc. — Alfragani arabis chronologica et as-
tronomica elementa, Francof. 1618, in-8, p. 193,
(1) On sait que le mot zénith, par exemple, a été introduit chez
nous par des gens qui ont mal lu le mot arabe semt, qu’ils ne savaient
pas traduire et dont ils voulaient rendre le son. Le mot diodarro , em-
ployé par l’Arioste, offre probablement un second exemple de cette
transcription erronée,
( 461 )
204,222, ete.—Scaligeri notæ in sphæram barbaricam
Manilii, p. 473 et suiv. — Aboul Hhassan, traité des
instrumens astronomiques, Paris, 1834-35, 2 vol. in-4,
tom. I, p. 80, 140, 191, etc. — Notices des manuscrits
de la bibl. du roi, tom. VII, 1° part., p. 246 et suiv.
— Ideler, untersuchungen uber den Ursprung und die
bedeutung der sternnamen). Le traducteur du calen-
drier précédent a commencé par ne pas savoir tra-
duire le titre même de l’ouvrage , et il s’est contenté
de le transcrire en caractères latins. Liber anoe (ou
anu, car, comme on a pu le remarquer, ces deux mots
sont employés tour-à-tour dans le calendrier } signifie
Livre du temps et de ses divisions. Telle est, comme
on le sait, la signification du mot arabe anu.
Nous avons supposé dans le Discours préliminaire
(p: 171) que ce calendrier avait été écrit au treizième
siècle et dédié à Mostansir IT, cinquante-cinquième
calife. Il est vrai qu’il y a eu deux califes du nom de
Mostansir, mais nous croyons qu’il s’agit ici du second.
En effet, le premier Mostansir, qui, après avoir régné
moins de six mois, mourut le 29 Mai de l’année 862
de lère chrétienne, ne pouvait recevoir la dédicace
d’un calendrier dans lequel l’épacte du premier
Janvier était égale à un (voyez ci-dessus p. 401),
puisque l’épacte de l'année 861 est égale à 6, et l’é-
pacte de l’année 862 est égale à 17. Tandis que sous
le règne du second Mostansir (depuis 1226 jusqu’à
1243 de l'ère chrétienne), on trouve pour l’année 1227,
l’épacte égale à un. D'ailleurs, du temps de Mostan-
sir [*, les Arabes n'auraient certainement pas intro-
duit dans leur calendrier les fêtes et les mois des chré-
( 462 )
üens (1). On aurait pu aussi chercher à déterminer
l’époque à laquelle se rapporte ce calendrier per
les jours où l’on a marqué l'entrée du Soleil dans
les divers signes du zodiaque. Mais la différence
entre le jour observé (per experientiam, où secundum
intentionem experimentatoris, etc.) et le jour donné
par la théorie des Hindous (2) (secundum intentionem
Sindi Indi) n'est pas constante; de manière que l’on
ne peut rien conclure de là pour une détermination
chronologique. Cette différence se rapporte probable-
ment à une période astronomique des Hindous, que
les Arabes avaient adoptée, mais qui nous est incon-
nue. Ainsi, par exemple, il y a quatre jours de diffé-
rence ( du 16 au 20 Mars), entre l’équinoxe observé
et l'équinoxe déterminé par les Hindous, tandis qu'il
y a sept jours (du 16 au 23 Juin), entre leur solstice
et le solstice observé. D'ailleurs, au neuvième siècle
les Arabes étaient trop savans en astronomie pour dire
(comme le fait l’auteur de ce calendrier ) que le jour
(r) Dans quelques anciens astronomes arabes, dans Alfragan, par
exemple, on trouve à la vérité les noms des mois latins; mais Alfragan
ne parle que des Romains, et ne cite nullement les chrétiens (4/fragani
elementa astronomica , cum notis Golii, p. 3 du texte arabe , etc.).
Voyez aussi Ebn-el-Awam, tom. II, p. 488 etsuiv.
(2) Cet emprunt, fait à l'astronomie indienne, vient confirmer ce
que nous avons dit plusieurs fois sur l'influence que les Hindous ont
exercée sur les sciences des Arabes. (Voyez aussi une note de M. Rei-
naud , insérée dans la préface du second volume du Traité des instru-
mens astronomiques, par Aboul-Hhassan, et un passage d'Édrisi cité
par M. de Humboldt, Examen crilique, p. 19, note à).
465 )
de l’équinoxe était le 16 Mars chez les Arabes et le
20 Mars, chez les Hindous (et est equalitas apud eos).
Tout, dans ce calendrier, annonce la décadence et
tout s’y rapporte au treizième siècle. Il n’en est pas
moins précieux pour les savans à cause des données
astronomiques, géographiques et historiques qu’il ren-
ferme. Les physiciens ÿ trouveront surtout, comme
nous l’avons déjà indiqué, une foule de faits propres
à la discussion historique des températures terrestres.
Les historiens de l’agriculture y puiseront des connais-
sances nouvelles sur les travaux agricoles des Arabes.
Des indications fréquentes, qui se rapportent à Cor-
doue et à Valence, semblent indiquer que ce calen-
drier aurait été fait en Espagne ; et les données astrono-
miques paraissent confirmer cette opinion. Les hau-
teurs du Soleil aux équinoxes sont différentes entre
elles, et sont par conséquent erronées. Cependant,
en cherchant à corriger les erreurs les plus gros-
sières, qui dépendent probablement des copistes ,
ou du traducteur qui n'aura pas su bien lire les
chiffres arabes, on pourrait en déduire une latitude
d'environ 36° pour la ville dans laquelle on a dû
faire les observations. Si l’on cherchait maintenant
à déterminer cette latitude par la longueur du plus
grand et du plus petitjour de l’année (le 16 Juin et le
15 Décembre) on trouverait à-peu-près 37° 172 pour
la latitude du lieu de Pobservation, dans lequel, d’a-
près le calendrier précédent, la durée du plus grand
jour était égale à quatorze heures et deux tiers; et cette
latitude conviendrait assez à Grenade ( 37°, 20°), ou à
Cordoue (37°, 40’). En adoptant les latitudes déter-
le] œ*
404 )
minées par les Arabes, telles qu’elles se trouvent dans
Aboul Hhassan , il faudrait exclure Cordoue, et l'in -
détermination s’étendrait depuis Séville jusqu’à Va-
lence. Mais il faut toujours se rappeler que les erreurs
possibles, dans l'observation de la durée du jour,
sont trop grandes pour que l’on en puisse déduire,
avec précision, la valeur de la latitude.
FIN DU PREMIER VOLUMT,;
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